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Version finale

36th Legislature, 1st Session
(March 2, 1999 au March 9, 2001)

Wednesday, April 28, 1999 - Vol. 36 N° 9

Étude des crédits du ministère de la Solidarité sociale


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Table des matières

Remarques préliminaires

Discussion générale


Autres intervenants
Mme Monique Gagnon-Tremblay, présidente
Mme Lyse Leduc
M. Gilles Labbé
M. Geoffrey Kelley
* M. Roger Giasson, ministère de la Solidarité sociale
* M. Laurent Boucher, idem
* M. Alain Deroy, idem
* M. Yvon Boudreau, idem
*Témoins interrogés par les membres de la commission
    Note de l'éditeur: La commission a aussi siégé plus tard en matinée pour l'étude des crédits de la ministre responsable de la Condition féminine. Le compte rendu en est publié dans un fascicule distinct.

Journal des débats


(Neuf heures trente-cinq minutes)

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Je vous souhaite la bienvenue, M. le ministre, et à toutes les personnes qui vous accompagnent, aux membres de la commission.

Mme la secrétaire, nous allons commencer immédiatement. Est-ce qu'il y a des remplacements ce matin?

La Secrétaire: Oui, Mme la Présidente. Mme Lamquin-Éthier (Bourassa) sera remplacée par M. Kelley (Jacques-Cartier).

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Merci. Alors, nous étudions ce matin les programmes 2 et 3. Avant de débuter nos travaux, j'aimerais savoir de quelle façon vous voulez procéder. Est-ce que vous voulez procéder par programme ou, tout simplement, discussion générale et adoption à la toute fin?

Mme Loiselle: Discussion générale.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Discussion générale, ça vous convient? Oui. Alors, sans plus tarder, je vais céder la parole...

Une voix: ...

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Oui.

M. Boisclair: Je comprends que nous avons convenu de réserver une heure pour la Régie des rentes du Québec. C'est bien ça. J'ai reçu une demande, je pense, d'un député de l'opposition qui demandait qu'on puisse, sur le temps imparti à l'étude des crédits, prendre une heure pour la Régie des rentes, qui est un organisme qui est extrabudgétaire, qui ne nécessite pas l'adoption de crédits, mais il y a un certain nombre de précédents. Et on nous a demandé de consacrer une heure pour la Régie des rentes. Ce serait demain, la dernière heure, si j'ai bien compris, demain.


Remarques préliminaires

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): D'accord, je prends bonne note. Alors, M. le ministre, vous avez des remarques préliminaires?

M. Boisclair: Oui, effectivement.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Je vous cède la parole pour une vingtaine de minutes.


M. André Boisclair

M. Boisclair: Alors, Mme la Présidente, Mmes et MM. les membres de la commission, je voudrais peut-être commencer par vous présenter un certain nombre de personnes qui m'accompagnent. À ma gauche, M. Alain Deroy, sous-ministre en titre au ministère de la Solidarité sociale; à ses côtés, M. Boudreau, sous-ministre associé des politiques et programmes au ministère; M. Martin, qui est sous-ministre responsable de la sécurité du revenu, au ministère, accompagné de quelques personnes, dont M. Sarrazin que je connais bien, notre personnel des finances; M. Giasson... M. Giasson, vous êtes au...

M. Giasson (Roger): À la Direction générale de la sécurité du revenu.

M. Boisclair: Monsieur...

M. Boucher (Laurent): Laurent Boucher, budget.

M. Boisclair: M. Boucher, au budget, avec cinq ou six de ses hommes qui sont venus répondre aux questions de l'opposition; M. Bzdera, qui est à mon cabinet; M. Duplessis, au budget; Mme Royer, qui est à mon cabinet; et Mme Hébert, aussi qui y est. Donc, nous sommes disponibles pour répondre à vos questions.

Donc, l'année qui vient de s'achever a été marquée par une réorientation majeure de tous les services publics d'emploi et du régime de la sécurité du revenu. Pour poser des échanges que nous aurons aujourd'hui dans le cadre de l'étude des crédits du ministère de la Solidarité sociale, il convient de se rappeler l'objectif premier de la démarche qui a été entreprise en 1998-1999 et qui entre en phase d'accélération cette année.

Cet objectif, quel est-il? Il se décline en trois défis. Premier défi: tenir compte de l'évolution du profil et des besoins des prestataires de la sécurité du revenu. Au Québec, comme ailleurs, la lutte à la pauvreté doit plus que jamais être assortie d'une gamme diversifiée de moyens. Deuxième défi: mieux appuyer les prestataires de la sécurité du revenu qui veulent se trouver un emploi, notamment les personnes qui doivent faire appel au régime public suite au resserrement, par le fédéral, des critères d'octroi de l'aide aux chômeurs. Troisième défi: offrir à ces personnes des services en matière de soutien du revenu et d'aide à l'emploi qui soient cohérents. Offrir ce coup de pouce personnalisé dont a besoin un nouveau prestataire apte à l'emploi pour réintégrer, dans les meilleurs délais, le marché du travail, ce coup important pour la personne plus éloignée de l'emploi et qui veut progressivement acquérir des habiletés pour prendre sa place sur le marché du travail.

Trois défis pour un même grand objectif, celui de doter le Québec de services d'aide à l'emploi les plus performants et d'un régime de sécurité du revenu le plus équitable possible. Nous savons qu'il s'agit là d'une entreprise colossale. Il suffit de se rappeler qu'il nous a fallu 30 ans de revendications et de négociations avec le fédéral pour enfin faire en sorte que le Québec possède les leviers nécessaires pour lutter contre le chômage et l'exclusion.

La signature de l'Entente Canada-Québec a pavé la voie à l'élimination des chevauchements, à la coordination des services publics, à l'harmonisation des mesures et au décloisonnement des clientèles. Nous commençons à en voir les retombées.

Depuis un an, cette entreprise colossale, c'est celle de toute la société québécoise, par la voix des élus, par la voix des gens engagés dans le développement de l'emploi et de la lutte à la pauvreté, par la voix des citoyens et des citoyennes qui veulent accéder au marché du travail, améliorer leurs possibilités et leurs conditions de vie. Une grande priorité s'est imposée, celle de faire du ménage dans l'organisation des services publics d'aide à l'emploi et dans le régime de sécurité du revenu. Oui, un grand ménage s'imposait, et nous achevons de le faire. Une entreprise colossale soit, mais comment mesurer la progression et, surtout, comment s'assurer de la pertinence des moyens choisis pour y parvenir.

D'entrée de jeu, permettez-moi d'attirer votre attention sur quatre priorités au coeur de cette vaste entreprise: d'abord, aider les prestataires de la sécurité du revenu qui sont aptes à travailler à se qualifier pour un emploi; deuxièmement, se doter d'un réseau de centres locaux d'emploi digne de ce nom; troisièmement, mieux répondre aux besoins et attentes de la clientèle par des services plus personnalisés et modernes; quatrièmement, travailler de concert avec le milieu selon une approche globale des besoins de la clientèle.

(9 h 40)

Je reviens sur la première priorité: aider les prestataires de la sécurité du revenu qui sont aptes à travailler à se qualifier pour un emploi. L'exercice qui vient de se terminer a été marqué par une réduction importante du nombre de ménages inscrits à la sécurité du revenu. Le nombre est passé de 456 700 en moyenne par mois en 1997-1998 à 423 600 en 1998-1999. Cette réduction de 33 100 ménages, soit 7,2 %, est attribuable à différents facteurs: un contexte économique favorable, la participation des prestataires aux mesures actives d'Emploi-Québec et une meilleure attribution de l'aide de dernier recours. Il s'agit de progrès significatifs, et ce, malgré un nombre plus élevé de jeunes, de femmes et de travailleurs saisonniers qui, ne se qualifiant pas à l'assurance-emploi, doivent dorénavant faire appel à la sécurité du revenu.

En 1999-2000, nous visons à passer sous la barre des 400 000 ménages à la sécurité du revenu. Une telle diminution de clientèle, ce sera une première en huit ans. La baisse remarquable du nombre de ménages à la sécurité du revenu démontre que la lutte que le gouvernement du Québec mène contre la pauvreté, que l'appui que le gouvernement du Québec donne à l'emploi et à la prospérité portent des fruits et des résultats tangibles.

Deuxième priorité: se doter d'un réseau de centres locaux d'emploi digne de ce nom. Le déploiement des centres locaux pour l'emploi permanents incarne bien la destination. L'élément de changement qui saute aux yeux, c'est le nouveau rapport que nous voulons établir avec la clientèle. Bientôt, il en sera fait du temps où les prestataires de la sécurité du revenu sont reçus dans des locaux délabrés et mal équipés. D'ici peu, tous, chômeurs et prestataires de la sécurité du revenu, chercheurs d'emploi, auront droit à la même qualité d'accueil. En offrant à la clientèle un environnement confortable où elle a accès à des personnes ressources et à des équipements, on donne un premier signal de considération et d'appui. Quiconque a déjà visité certains bureaux de la sécurité du revenu sait qu'il s'agit d'un changement déterminant. Bien sûr, tout ne s'est pas fait en un an. Mais, d'ici juin, nous aurons complété 75 % de notre réseau des 151 CLE permanents; d'ici juin.

J'arrive à la troisième priorité: mieux répondre aux besoins et aux attentes des clientèles par des services plus personnalisés et modernes. À travers le développement des CLE se peaufine le véritable défi: faire en sorte que les services publics d'emploi et de sécurité du revenu soient en continuité les uns avec les autres, qu'ils collent davantage aux besoins des différents groupes de clients.

Pour commencer, les citoyens et citoyennes n'ont plus à s'adresser à trois endroits différents selon leur statut et leurs besoins. Dans leur CLE, ils ont accès à toute la gamme des services publics disponibles. Ma collègue Diane Lemieux l'a bien démontré hier lors de l'étude des crédits concernant plus spécifiquement l'emploi. Ces services ont été entièrement repensés. Il en est de même pour le volet sécurité du revenu. Redessiner la carte des services offerts à la population, en simplifier l'accès, augmenter le soutien aux personnes en démarche vers l'emploi, améliorer la qualité de nos relations avec la clientèle, voilà à quoi nous travaillons. Pour la sécurité du revenu, l'implantation des CLE marque un tournant vers l'innovation et l'amélioration de la qualité du service à la clientèle. Notre mission, qui consiste à venir en aide aux personnes dans le besoin, de façon diligente et équitable, nous voulons la réaliser avec la plus grande empathie possible, mais également avec rigueur et équité.

C'est pourquoi les deux formes d'aide que nous apportons, le soutien financier et le soutien à l'insertion sociale, feront l'objet d'ajustements importants. Au chapitre du soutien financier, malgré le contexte extrêmement difficile que l'on a connu, nous avons introduit plusieurs assouplissements en priorité. Ces assouplissements ont eu pour effet de bonifier de 49 900 000 $, sur une base annuelle, les sommes versées aux prestataires de la sécurité du revenu. Pour ce qui est du soutien à l'insertion sociale, nous voulons, en 1999-2000, marquer un tournant dans le soutien offert aux prestataires qui désirent s'impliquer socialement ou acquérir des habiletés et des connaissances pour rencontrer les exigences du marché du travail.

Dans cet ordre d'idées, je travaille actuellement à faire en sorte que les prestataires de la sécurité du revenu qui entreprennent une formation intensive menant à un emploi aient droit au même soutien financier qu'un chômeur qui fait la même démarche. Il s'agit non seulement d'une importante amélioration pour les personnes concernées, mais aussi d'un effort bien tangible pour se débarrasser des étiquettes et pour lutter contre l'exclusion sociale.

Pratico-pratique, cela veut dire que ces personnes recevront une aide substantiellement plus importante, puisqu'elle correspondra au salaire de base de l'emploi vers lequel ces personnes se destinent. De plus, l'aide sera versée aux deux semaines, un signe indéniable que les prestataires se rapprochent de leur objectif: retourner sur le marché du travail. Et, quand je dis que nous travaillons à doter le Québec de services d'aide à l'emploi plus performants, je pense que des mesures comme celle-là donnent le ton.

Enfin, sur le plan des relations avec la clientèle, des gestes bien concrets ont aussi commencé à être posés. D'ici le début de l'été, nous aurons réduit du tiers le nombre de dossiers sous la responsabilité d'un agent, une réduction moyenne de 400 à 268 dossiers. C'est le début d'une grande opération visant à mieux centrer le travail de l'agent sur la relation avec la clientèle.

Je souligne par ailleurs que nous prévoyons une hausse des effectifs de la sécurité du revenu de l'ordre de quelque 400 postes. Pour avancer sur cette voie, nous visons à ce qu'un CLE par région soit doté de moyens lui permettant d'innover et d'expérimenter de nouvelles façons de faire, et ce, d'ici l'automne. Les processus de travail seront revus. S'il nous est possible d'éviter des tracasseries administratives aux clientèles, nous le ferons.

En travaillant étroitement avec Emploi-Québec, de concert avec le milieu, nous sommes à même de mieux épauler les personnes qui désirent se mettre en mouvement. Déjà, ce rapprochement des services d'emploi et de sécurité du revenu porte fruit. Les prestataires de la sécurité du revenu y gagnent, comme l'indiquent les résultats suivants. En 1998-1999, le ministère de la Solidarité sociale a consacré plus de 59 000 000 $ de plus que l'année précédente pour la participation des prestataires de la sécurité du revenu aux mesures d'insertion en emploi. Sur les 157 000 adultes ayant participé aux mesures d'emploi, 57 % étaient des prestataires de la sécurité du revenu. Pour la période comprise entre le 1er avril 1998 et le 22 janvier 1999, c'est 78 507 prestataires de la sécurité du revenu qui se sont prévalus d'une mesure active.

Les projets issus du Fonds de lutte contre la pauvreté par la réinsertion au travail sont d'autres pistes que nous avons expérimentées qui donnent des résultats prometteurs. Le Fonds de lutte représente une expérience inédite de collaboration entre le secteur public, le secteur privé et le secteur communautaire. Moins de deux ans après sa création, soit du 22 juin 1997 au 19 février 1999, le fonds a déjà investi dans la réinsertion sociale 164 000 000 $. À l'actif du Fonds de lutte, on compte plus de 2 000 projets qui permettent à quelque 17 000 personnes de cheminer vers un emploi durable. J'indique que 40 % de ces personnes ont passé plus de quatre ans à la sécurité du revenu. Pour elles, le Fonds de lutte constitue indéniablement une étape importante dans leur vie.

Ces résultats m'amènent à la quatrième priorité de changement en cours: la mise en place d'une nouvelle façon de travailler avec le milieu, l'arrimage des CLE avec le milieu. Les ententes de collaboration avec la sécurité du revenu et des partenaires institutionnels, tels les CLSC et les organismes communautaires, permettent d'agir en complémentarité, avec plus de complémentarité. Je tiens ici à souligner le rôle primordial que jouent les organismes communautaires autonomes auprès de la clientèle de la sécurité du revenu et, plus globalement, le rapport au développement social du Québec.

Au cours des quatre dernières années, le gouvernement a investi plus de 40 000 000 $ d'argent neuf, portant à plus de 300 000 000 $ son soutien au milieu communautaire. Par l'entremise du Secrétariat à l'action communautaire autonome du Québec et du Fonds d'aide à l'action communautaire qui est constitué de 5 % des bénéfices nets des casinos d'État, 600 organismes dans les 17 régions du Québec ont eu accès à plus de 14 000 000 $ en 1998-1999. Cette année, le fonds disposera de plus de 12 000 000 $. Cette baisse par rapport à l'an passé est attribuable à la grève du Casino de Montréal. Ce fonds étant extrabudgétaire, il n'est pas touché par des compressions budgétaires.

Nous avons amorcé, l'an dernier, l'élaboration de politiques de reconnaissance et de financement de l'action communautaire autonome en collaboration avec le comité aviseur du SACA, formé des représentants d'organismes provenant de 20 secteurs d'intervention en action communautaire. Ces travaux impliquent également des représentants des ministères. J'ai espoir que nous franchirons bientôt une nouvelle étape dans la reconnaissance de l'apport essentiel des organismes communautaires. À cet effet, je compte soumettre à la consultation publique un projet de politiques d'ici, je l'espère, la fin juin. C'est un objectif, ce n'est pas une annonce, mais j'espère être capable de rendre public un document d'ici la fin juin. C'est un objectif, ce n'est pas une annonce.

Cette entrée en matière étant faite, permettez-moi, Mme la Présidente, de vous introduire rapidement les crédits du ministère de la Solidarité sociale. Je vais me concentrer sur les mesures d'aide financière, soit le programme 2. Nous prévoyons consacrer 2 871 200 000 $ au titre des mesures d'aide financière. Il s'agit d'une baisse de 342 200 000 $ par rapport aux crédits accordés en 1998-1999. Cette diminution s'explique par la baisse du nombre prévu de ménages à la sécurité du revenu, dont j'ai fait mention. Nous estimons qu'environ 21 700 ménages en moyenne quitteront la sécurité du revenu chaque mois, d'où une diminution de 227 900 000 $. Elle s'explique également par la mise en place de mesures d'aide à l'intégration en milieu de travail, qui se traduiront par la sortie de la sécurité du revenu de 12 700 autres ménages, pour une économie de 90 900 000 $.

Avec ces deux baisses, nous estimons à 389 200 ménages, sur une base mensuelle, le besoin d'aide de dernier recours pour 1999-2000. 70 %, soit 272 300 ménages, sont considérés aptes au travail, tandis que les 116 900 autres présentent des contraintes sévères à l'emploi. Il va sans dire que ces prévisions de clientèles et de coûts sont dépendantes des facteurs externes importants, dont la réforme fédérale des programmes sociaux, l'état de l'économie et celui du marché du travail.

J'attire maintenant votre attention sur certaines spécificités, en commençant par le transfert de la gestion du remboursement de la taxe de vente. Pour comprendre la baisse du budget du ministère, il faut noter que le transfert de la gestion du remboursement de la taxe de vente fait en sorte qu'un montant de 52 000 000 $ n'est plus inscrit aux crédits du ministère de la Solidarité sociale. Cet argent sera néanmoins versé en totalité aux prestataires de la sécurité du revenu. L'indexation du programme de soutien financier et l'ajustement de la prestation du programme APTE, à 0,9 % pour le soutien financier au 1er janvier 1999, qui ne s'était pas faite depuis quatre ans, et l'ajustement des prestations du programme APTE, totalisent 28 600 000 $.

(9 h 50)

Aussi, depuis juillet dernier, l'entrée en vigueur de la prestation nationale pour enfants soulève un autre enjeu important, cette prestation qui visait à remplacer une partie de l'aide sociale versée aux familles, calculée chaque année sur la base d'un revenu familial de l'année d'imposition précédente. En conséquence, les familles prestataires de l'aide sociale ne reçoivent pas nécessairement le montant maximal auquel leur situation présente leur donnerait droit. Cela nous a forcés à instaurer une clause dite de dénuement afin de nous assurer de la pleine couverture des besoins essentiels des familles prestataires de l'aide sociale. Ainsi, non seulement la mise en place de la prestation nationale pour enfants représente-t-elle une intrusion importante du gouvernement fédéral dans un champ de compétence réservé aux provinces, mais, en plus, elle nous impose des ajustements coûteux. En complément de l'aide financière de base, nous prévoyons allouer 35 000 000 $ à ce qu'il est convenu d'appeler la «gestion du dénuement».

Le programme Aide aux parents pour leurs revenus de travail, APPORT, permet à des familles à faibles revenus de recevoir une aide financière, que le revenu disponible dépasse toujours le montant des prestations de la sécurité du revenu et des mesures de soutien aux familles. Ce programme justifie des crédits de 49 900 000 $.

Malgré les nombreuses modifications apportées au fil des ans, le programme APPORT demeure un programme complexe à administrer et continue à donner lieu à de nombreux trop-payés qu'il est impératif de réduire, voire d'éliminer. À court terme, j'indique que des améliorations seront apportées à ce programme le 1er janvier de l'an 2000. Il s'agit d'une première étape, car j'entends bien faire en sorte de bonifier dans la mesure du possible l'aide apportée aux familles à bas revenus.

Toujours au chapitre des mesures d'aide financière pour les familles, nous accordons une attention particulière aux femmes qui quittent temporairement leur travail pour donner naissance à un enfant ou pour en adopter un. Ces travailleuses doivent subir un délai de carence de deux semaines avant d'avoir droit aux prestations d'assurance-emploi maternité. Encore là, par le Programme d'allocations de maternité, le Québec vient suppléer au manque à gagner relevant d'une carence du Fédéral. C'est une somme de 7 300 000 $ que nous prévoyons consacrer à ce titre. Voilà pour l'essentiel.

Vous le constatez avec ces remarques préliminaires, le personnel de la Sécurité du revenu a connu une année bien remplie. Nous avons revu les fondations de notre régime et mis en place les conditions pour nous concentrer sur les quatre priorités suivantes en 1999-2000.

D'abord, l'entrée en vigueur de la Loi sur la sécurité du revenu et favorisant l'emploi et la solidarité sociale. La mise en place du Programme d'assistance-emploi prévu à la loi ouvre la porte à un régime mieux centré sur l'objectif d'insertion à l'emploi que poursuit un pourcentage, bien sûr, très, très, très élevé de notre clientèle. Du même souffle, il nous sera possible pour la clientèle plus vulnérable en raison de problèmes de santé physique ou mentale, ou celle qui est âgée de 55 ans et plus, d'apporter un soutien mieux adapté à leur situation.

Dans un effort sans précédent pour lutter contre l'exclusion, nous expérimenterons des nouvelles mesures axées sur la participation à la vie collective, l'insertion en milieu de travail non traditionnel ou des démarches visant à mettre à profit le potentiel de chaque prestataire qui le désire. Devant l'intérêt que les jeunes prestataires de la sécurité du revenu ont manifesté l'année dernière pour les mesures actives, nous travaillons à accélérer le déploiement de mesures leur permettant de recevoir dans les meilleurs délais l'aide possible dans leur cheminement vers l'emploi ou la poursuite de leurs études.

Deuxièmement, l'intensification de l'effort d'amélioration continue des services. En cette année d'entrée en vigueur de l'article 36 de la nouvelle loi voulant que le ministère porte assistance à toute personne qui le requière pour lui faciliter la compréhension du programme et, le cas échéant, l'accès à celui-ci, j'entends veiller à ce que le réseau de la sécurité du revenu soit des plus alertes en ce qui concerne l'information sur les droits et obligations réciproques de la clientèle et du ministère ou des partenaires engagés dans la prestation de services. Cette réciprocité, je tiens à ce qu'elle soit examinée sous l'angle de la compassion, de l'accompagnement et de la rigueur.

Dans ce cadre, j'ai donné instruction de porter une attention minutieuse à toutes les études de communication avec la clientèle, dont les avis de décision et divers formulaires. Une attention particulière sera aussi accordée aux activités de révision des décisions rendues, toujours dans le but d'assurer la meilleure prestation de services possible. Le Bureau des renseignements et plaintes du ministère sera de plus en plus associé au processus d'amélioration continue.

Troisièmement, action concentrée sur Montréal. Dès mon entrée en fonction, j'ai demandé aux autorités du ministère d'accélérer l'implantation des CLE permanents à Montréal. Au fur et à mesure que les baux des locaux inappropriés viennent à échéance, soit d'ici un an et demi, nous procéderons avec célérité. Dans l'attente d'une relocalisation permanente, une opération spécifique dotée d'un budget de 1 000 000 $ a été mise en branle dès janvier pour assurer une amélioration significative de l'aménagement et des installations de certains bureaux.

Toujours au sujet de Montréal, je porte à votre attention que le ministère est associé au plan conjoint que le gouvernement du Québec et la ville de Montréal viennent de signer. Le ministère de la Solidarité sociale est responsable du volet développement social de ce plan d'action. À ce titre, des interventions stratégiques seront développées en concertation avec les instances locale et régionale.

Quatrièmement, intensifier la lutte à l'exclusion et à la pauvreté. En matière de lutte à la pauvreté, le maintien de la clause de l'appauvrissement zéro pour les bénéficiaires de la sécurité du revenu qui ont des contraintes sévères à l'emploi demeure une priorité, le maintien de cette clause, dis-je, demeure une priorité pour le ministère. Conformément à l'engagement pris par le premier ministre lors du discours inaugural, le ministère est à élaborer une stratégie intersectorielle pour affirmer la lutte à la pauvreté et à l'exclusion sociale dans laquelle le gouvernement est clairement engagé. C'est à cette enseigne que le ministère entend collaborer activement aux préparatifs qui entoureront le Sommet du Québec et de la jeunesse, notamment sous l'angle de l'équité entre les générations, du développement social et de la pleine participation des jeunes.

En conclusion, Mme la Présidente, voilà rapidement esquissées les grandes lignes des crédits et des priorités du ministère de la Solidarité sociale 1999-2000. Grâce à l'engagement et à la détermination de tous les acteurs en présence, la mise en place de toute une nouvelle approche de services en matière de sécurité du revenu et d'emploi va bon train. Cela exige énormément de toutes les personnes impliquées. Les gens du réseau, les directeurs et le personnel de la Sécurité du revenu et d'Emploi-Québec, la Commission des partenaires, les différents partenaires aux niveaux local et régional, tous sont particulièrement dédiés à la mission du ministère.

La tournée sur le terrain, que j'ai entreprise depuis janvier, me permet de mesurer les qualités des équipes en poste à la grandeur du Québec. Aujourd'hui, j'aimerais souligner leur travail et leur dire qu'elles peuvent être fières de présenter à la population les résultats obtenus à ce jour.

Mes remerciements également aux professionnels et personnels du soutien du ministère qui ont préparé, avec la minutie qui les caractérise, les documents préparatoires à l'étude des crédits. Plusieurs d'entre eux m'accompagneront tout au long de cet exercice. Je leur saurai gré de leur disponibilité, de leur compétence et de leur loyauté.

Mme la Présidente, je veux aussi rendre hommage à mes collègues députés qui prennent une part active à nos travaux, manifestant en cela l'intérêt qu'ils portent aux enjeux sociaux de notre époque. Enfin, je tiens à saluer les membres de l'opposition officielle, qui, bien sûr, à leur façon alimentent les débats qui orientent les politiques sociales de notre gouvernement. Je vous remercie.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Merci, M. le ministre. Alors, je cède maintenant la parole à la députée de Saint-Henri-Sainte-Anne pour ses remarques préliminaires. Vous disposez d'une période de 20 minutes, Mme la députée.


Mme Nicole Loiselle

Mme Loiselle: Merci, Mme la Présidente. On sait que, depuis maintenant trois ans, le Québec a le taux le plus élevé au Canada au niveau de la pauvreté. Depuis trois ans, le Québec dépasse Terre-Neuve quant à son taux de pauvreté. Montréal remporte malheureusement la palme de la métropole de la pauvreté au Canada.

Mais, au-delà des statistiques, Mme la Présidente, il y a des visages, il y a des enfants, il y a des hommes, il y a des femmes. J'avais une discussion avec des professeurs de l'Alliance des professeurs de Montréal, et les professeurs, les enseignants dans les écoles, à tous les jours, particulièrement à Montréal, sont témoins de la misère des enfants, des enfants qui arrivent à l'école, qui, en fin de mois arrivent l'estomac creux, n'ont pas mangé; des enfants qui, pendant la période d'hiver, n'ont pas les vêtements suffisants à porter pendant les périodes froides de l'hiver.

On remarque aussi, à Moisson Montréal, Mme la Présidente, le président nous déclarait que, seulement pour le mois de mars, il y a eu une augmentation de 50 % de la distribution de provisions en un an - 50 % en un an - comparativement à l'année passée. Et, pour Moisson Québec, M. Mignault nous disait que, pour la région de Québec, c'est une tragédie qui se vit actuellement, la situation est sérieuse, le tissu social se désagrège. Et je cite M. Mignault: «Il ne faudrait pas que cela dure trop longtemps, sinon la pauvreté va coûter des milliards en coûts sociaux. On est tellement myopes face à tout cela», dit M. Mignault de Moisson Québec, Mme la Présidente.

Et, pendant qu'on échange ici, ce matin, il y a des gens qui sont devant le parlement, des gens qui représentent des personnes du Québec qui sont, comme le dit le manifeste, affamées, des gens qui invitent les parlementaires, particulièrement les élus ministériels, Mme la Présidente, à aller cet après-midi, à l'heure du lunch, manger une soupe et connaître leurs revendications.

J'aimerais lire quelques passages du Manifeste des affamés qui représente une trentaine d'organismes d'entraide de la région de Québec. Quand on parle que la pauvreté, la poche d'appauvrissement, au Québec, est rendue dans la ville de Québec de façon sérieuse... On dit: «L'action de cet après-midi a pour objectif de montrer aux élus, particulièrement au gouvernement en place, la pauvreté et la détresse grandissantes des gens que les organismes communautaires tentent d'aider. Ces organismes croulent sous la tâche, impuissants à contrer des politiques de l'État, du gouvernement péquiste - les quatre dernières années, Mme la Présidente - qui humilient et affament des hommes, des femmes et des enfants qui méritent pourtant un bien meilleur sort.» Cette trentaine d'organismes de la région de Québec dit aussi: «Le geste est destiné à rappeler aux élus et au gouvernement péquiste que les pauvres ont faim de pain et ont soif de justice.»

(10 heures)

Ça porte à réfléchir, Mme la Présidente. Ça porte à réfléchir également quand on a entendu l'allocution du ministre, tantôt, où on semble dire par la bouche du ministre de la Solidarité sociale que tout va bien, que le gouvernement du Parti québécois, au cours des quatre dernières années, a fait des mesures, a lutté contre la pauvreté, quand c'est exactement le contraire, ce qui s'est passé. Le gouvernement du Parti québécois a été le gouvernement qui s'est le plus acharné, au cours des quatre dernières années, sur les plus démunis, qui a fait la lutte aux pauvres, qui a fait la lutte aux vulnérables du Québec avec des mesures et des coupures sans précédents, coupures inhumaines à certains égards, durant leur mandat, parce qu'ils se sont servi des sans-voix, des sans-défense pour arriver, en quelque sorte, à faire des économies pour leur obsession du déficit zéro.

Des coupures, Mme la Présidente, que je me dois de rappeler, parce que c'est trop facile d'arriver et d'être un nouveau ministre de la Solidarité sociale et de laisser sous-entendre qu'ils ont fait des bons gestes, parce qu'ils n'ont pas fait des bons gestes. On a eu droit, c'est vrai, pendant quatre ans, à des envolées oratoires, à des discours mielleux, à des discours de demi-vérité. Et le premier geste du ministre à l'époque, en 1994, le ministre M. Parizeau, après avoir dépensé tout près de 100 000 000 $ pour la campagne référendaire, le premier geste qu'ils ont posé en arrivant à l'Assemblée nationale après le référendum: ils ont mis en place la loi n° 115 qui coupait à peu près, de mémoire, 150 000 000 $ sur le dos des plus démunis de notre société à l'aide sociale. Ça, ça a été le premier geste.

Quand M. Parizeau a quitté, on a eu la venue du chef actuel du Parti québécois et premier ministre du Québec. Et, lui - il faut le rappeler parce que ça, c'est les vérités, c'est noir sur blanc, c'est dans les débats - dans son discours d'assermentation, il disait: «Il n'y aura donc pas au Québec de massacre à la tronçonneuse. Nous ne tournerons pas le dos à la solidarité et à la compassion.» Ça, c'est en janvier 1996, dans son discours d'assermentation. Il continue, toujours dans ce même discours-là, il nous dit: «Nous voulons que notre État ne soit pas appauvri; ce serait un comble si, pour y arriver, nous appauvrissions les Québécois.» Un peu plus loin, deux mois plus tard, le même premier ministre, celui qui a coupé dans l'aide sociale comme jamais un gouvernement n'a coupé, disait, dans son discours inaugural: «Je tiens à rassurer nos citoyens, il n'est pas question de réduire les prestations de base des bénéficiaires de l'aide sociale.»

Alors, comme il n'était pas question de réduire les prestations de base des bénéficiaires de l'aide sociale, on va faire une énumération de ce qu'ils ont fait dans différents projets de loi, Mme la Présidente. Ils ont aboli le barème de disponibilité. Quand on abolit un barème, ça veut dire que les prestations d'aide sociale sont réduites, réduites de 50 $. La réduction du barème de participant: ils ont coupé 30 $ dans le barème de participant, 30 $ de moins dans les poches des plus démunis. Et je refais toujours référence au discours inaugural du premier ministre actuel: Il n'est pas question de réduire les prestations de base du ministère de l'aide sociale. Ce sont ses paroles.

En plus de ça, Mme la Présidente, on se souvient de l'ex-ministre des Affaires municipales, qui a annoncé - une grosse conférence de presse, tambours, trompettes, allez-y donc - qu'il mettait en place l'allocation-logement unifiée. Ça devait être une bonne nouvelle, ça, Mme la Présidente, pour les plus démunis. Quand on regarde ce qui se passe avec l'allocation-logement, Mme la Présidente, c'est que les gens qui recevaient reçoivent moins; d'autres qui recevaient ne reçoivent plus rien. On a distribué les miettes à plusieurs personnes au lieu d'un moins grand nombre.

Et aussi il ne faut pas oublier la gifle aux familles monoparentales, parce que, Mme la Présidente, actuellement, depuis le 1er septembre 1998, une famille monoparentale avec deux enfants de moins de six ans qui entre à l'aide sociale reçoit environ 800 $ de moins par année qu'une famille monoparentale avec les deux enfants de moins de six ans qui est déjà à l'aide sociale. Moi, j'appelle ça de la discrimination; moi, j'appelle ça de l'iniquité, face à une même famille avec deux enfants. Et je leur ai dit, je l'ai dit souvent, mais je vais le répéter, puis ça va finir par rentrer, que les familles monoparentales à l'aide sociale avec enfants, ce sont les familles les plus pauvres parmi les pauvres au Québec, Mme la Présidente.

Il y a aussi l'autre gifle dont Michel Girard a parlé en fin de semaine dans le quotidien La Presse , et encore ce matin à la télévision, la gifle du ministre des Finances aux assistés sociaux. Mme la Présidente, c'est comme... Des fois, je me demande sur quelle planète vivent ces gens-là. On dit aux bénéficiaires de l'aide sociale: Faites tous les efforts pour intégrer le marché du travail. Un assisté social se trouve un emploi, quand il arrive pour faire son rapport d'impôts, Mme la Présidente, on impose ses prestations d'aide sociale. Ça, c'est le coup de pouce!

Mais l'autre coup de pouce, Mme la Présidente, c'est qu'on lui dit: Bien, c'est ça, va te trouver un travail, je vais te donner un 500 $, un supplément, pour t'aider pour tes vêtements, des choses comme ça. Et puis là la personne se trouve le travail, on impose les prestations d'aide sociale puis on impose également le 500 $ quand arrive le rapport d'impôts. Moi, j'appelle ça un couteau, pas un cadeau, mais un couteau à double tranchant. Est-ce que c'est imposable, oui ou non, M. le ministre? C'est imposable.

M. Boisclair: Le seuil est à 21 000 $, ils ne paient pas d'impôts.

Mme Loiselle: C'est imposable, le 500 $.

M. Boisclair: Des gains de travail qui vont à 21 000 $.

Mme Loiselle: C'est imposable, le 500 $, que même l'ex-ministre de l'Emploi et de la Solidarité a tout fait au Conseil des ministres pour que ça ne soit pas imposable puis elle a perdu devant le ministre des Finances. Et que même, Mme la Présidente, il y a encore une démarche qui est faite auprès du ministère du Revenu pour que ce 500 $ là ne soit pas imposable. Puis, à date, je n'ai pas entendu le ministre nous dire qu'il essayait, lui aussi, à ce que ce 500 $ là ne soit pas imposable.

Il y a aussi, Mme la Présidente - il ne faut pas l'oublier, on ne semble pas le mentionner souvent - l'augmentation des pénalités qui sont parties de 100 $ à 150 $, le désengagement au niveau des soins dentaires et optométriques et finalement le plus odieux dans tout ça, qui avait été décrié en commission parlementaire, qui avait été décrié par les personnes âgées, décrié par les organismes communautaires qui oeuvrent auprès des plus démunis, la fin de la gratuité des médicaments pour les personnes démunies au Québec, pour les personnes assistées sociales. Et on voit, dans le rapport des chercheurs de l'Université McGill, que finalement tout le monde avait raison sur les conséquences et les effets pervers de ce régime-là sur les plus démunis, et l'ex-ministre de la Santé avait fait la sourde oreille.

On nous avait promis plein de belles choses durant la campagne électorale, mais on reviendra un peu plus tard au cours de notre échange sur les orientations que la ministre actuelle de la Santé entend prendre envers les plus démunis pour cesser que ces gens-là, Mme la Présidente, aggravent leur état de santé à cause qu'ils ne sont pas capables de donner la contribution financière qui est exigée par le gouvernement. Alors, Mme la Présidente, j'ai fait l'énumération de toutes les coupures qui ont été faites par ce gouvernement-là durant leur dernier mandat.

J'aimerais peut-être aborder la fusion, la fusion du ministère de l'Emploi et de la Solidarité, la loi n° 150. Rappelez-vous, Mme la Présidente, les discours en Chambre, en commissions parlementaires, la ministre de l'époque, la députée de Hochelaga-Maisonneuve, comment elle nous a convaincu, comment c'était essentiel, primordial, important que l'emploi, la solidarité soient sous le même ministère avec le même ministre, Mme la Présidente.

Les discours de M. Michel Vézina, qui est président du Syndicat des professionnels municipaux de Montréal, qui a osé questionner certains aspects de la loi 150 qui créait le ministère de l'Emploi et de la Solidarité. Il s'est retrouvé, ce monsieur-là, avec une réplique publique de la ministre de l'époque, qui a passé dans les quotidiens, et la ministre le disait, comment il fallait que, pour éliminer l'exclusion sociale, pour éliminer le fait qu'un assisté social soit identifié, qui est à la recherche d'un emploi comparativement à un chômeur... qu'il ne fallait pas que ça existe, comment c'était primordial qu'une personne qui est à la recherche d'un emploi se retrouve sous le même ministère, se retrouve avec le même ministre et que tout ça, les mesures actives et passives, là, soit coordonné par le même ministère.

Il a eu droit à une lettre ouverte de la ministre de l'époque, Mme la Présidente, qui disait - j'ai relevé quelques points: «Le ministère de l'Emploi et de la Solidarité favorise une meilleure coordination entre les activités de placement et d'aide-conseil et celles liées à l'octroi des indemnités, dont une meilleure coordination avec les mesures actives et passives. Cette orientation s'appuie sur les travaux de l'Organisation de coopération et de développement économique, l'OCDE, ainsi que ceux du Forum pour l'emploi de Québec, dont la position est la suivante: des services publics d'emploi efficaces devraient pouvoir intégrer à la fois les services de placement, le versement des prestations et l'accès à des mesures actives, respecter une des orientations fondamentales qui consiste à permettre à l'ensemble de la main-d'oeuvre du Québec, qu'elle soit en emploi, chômage, prestataire ou non de l'assurance-emploi ou de la sécurité du revenu, d'avoir accès à des services publics d'emploi.»

Alors, Mme la Présidente, pendant une année et demie, on s'est fait convaincre que c'est ce qu'il fallait faire, qu'on avait toujours été dans la mauvaise direction, que dorénavant il fallait que le ministère de l'Emploi et de la Solidarité soit sous la gouverne d'un seul ministre pour que ça fonctionne et qu'on élimine vraiment l'exclusion sociale dans notre système.

Alors, qu'est-ce qui arrive? Campagne électorale. Le premier ministre, lui, il forme son nouveau cabinet, oups! On scinde le ministère en deux, on se retrouve avec deux ministres, Mme la Présidente: un ministre de la Solidarité sociale et un ministre d'État au Travail et à l'Emploi puis, d'après ce qu'on sait, là, il y en a un qui est pas mal plus important que l'autre. Et, moi, j'espère une chose, que les rumeurs qu'on connaît quant aux frustrations qui se vivent ou qui se vivaient dans le caucus de l'est de Montréal, que finalement la décision du premier ministre de rescinder en deux ministères, Mme la Présidente, avec l'arrivée de la députée de Bourget dans l'est de Montréal, ne fait pas que c'est les prestataires de l'aide sociale qui vont payer les frais de cette décision politique là, partisane, de remettre deux ministères quand on nous avait convaincus que ce qu'il fallait faire, c'était un ministère et tout le monde sous le même chapeau.

(10 h 10)

Alors, Mme la Présidente, on se retrouve aujourd'hui avec deux ministres, dont un devient gestionnaire, gestionnaire de mesures passives, émissions de chèques, tout ça, et l'autre ministre, la ministre de l'Emploi et du Travail, elle, a le rôle de déterminer les programmes, les mesures d'employabilité, les mesures en emploi et les mesures de formation. Que le ministre le veuille ou pas, Mme la Présidente, même avec l'organigramme qu'on nous a remis, on essaie de nous faire accroire que ça semble légal, mais, dans la réalité, sur le plancher, ce n'est pas ça qui se vit.

En parlant des mesures actives en emploi, j'ai relevé quelques notes. Quand le ministre a parlé des CLE puis des centres d'emploi, il a dit: Les centres d'emploi dignes de ce nom. Je ne veux pas lui faire de peine, mais, dans les bilans régionaux, quand on parle de l'implantation des CLE, on parle d'un fouillis administratif incompréhensible, on parle de cafouillage, on parle de fiasco. Alors, j'espère que le temps va donner raison au ministre quand il parle des CLE dignes de ce nom, parce que, actuellement, ce n'est pas sous cette appellation qu'on appelle les CLE quand on parle des centres d'emploi du Québec, du cafouillage et de la mauvaise organisation du gouvernement quant à l'implantation des CLE. Et qui paie pour cette précipitation puis ce travail mal fait, Mme la Présidente? Bien, c'est les gens qui sont à la recherche d'emplois.

Puis tantôt le ministre a même dit que les gens avaient accès à tous les services. Quand on sait, Mme la Présidente, que la problématique d'appels d'offres pour le système d'informatique n'est même pas réglée, quand, dans les bilans régionaux, on dit qu'il n'y a même pas de libre-service, qu'il n'y a pas de multiservices, qu'il n'y a pas de guichet d'emplois, qu'il n'y a pas d'information sur le système du marché du travail et qu'il n'y a pas de système informatique - puis on sait ce qui arrive avec le système informatique, c'est partout dans les journaux ce matin - alors je pense qu'il y a du travail à faire, et le ministre a besoin de parler de façon peut-être plus sérieuse avec la ministre responsable de l'implantation des CLE pour que finalement...

Parce que, à un moment donné, souvenez-vous, tout devait être prêt pour décembre. Après ça, en Chambre, la ministre de l'Emploi responsable de l'implantation des centres d'emploi nous dit: Tout va être prêt fin mars. Le premier ministre, lui, nous a donné une autre date dans son discours inaugural, puis tantôt le ministre de la Solidarité sociale parlait de fin juin. Alors, il va falloir que quelqu'un se parle dans ce gouvernement-là parce qu'ils n'ont pas la même chanson.

Et, en terminant, le ministre a parlé de quelques bonifications qui ont été apportées, on doit le dire, tout près de la campagne électorale parce que ça aussi, c'est une réalité. Et, moi, ce qui m'a frappée sur les bonifications qui ont été apportées, c'est que ce n'est jamais pour l'ensemble des prestataires. C'est toujours pour un petit nombre de prestataires. Je prends un document qui m'a été transmis par le ministère même. Alors, le ministre ne pourra pas dire que je sors ça des boules à mites. Quand on parle de comptabiliser le premier 100 $ des pensions alimentaires pour les familles monoparentales, ça touche seulement 10 000 familles, ça, Mme la Présidente. Et puis il faut se poser la question: Pourquoi seulement les enfants de moins de cinq ans? Comme si un adolescent ne coûtait pas cher à des parents. Alors, je pense qu'il y a une réflexion à faire sur ça.

Quand on parle d'abolir la réduction pour le partage du logement pour les familles monoparentales, ça, c'est une promesse électorale de 1994 et ça touche seulement 14 500 personnes. Il y a au moins, quoi, 78 000 familles monoparentales à l'aide sociale, si ce n'est pas plus.

Quand on parle d'exempter, pour fins de comptabilisation de l'avoir liquide pour le mois de la demande, une somme équivalant à la nouvelle allocation familiale ou à la prestation fiscale, je n'appelle pas ça une bonification. Ça serait bien indécent qu'on commence à comptabiliser l'allocation familiale ou la prestation fiscale quand une femme va faire une demande pour obtenir de l'aide sociale. Alors, pour moi, ce n'est même pas une bonification, ça, c'est un ajustement dans la gestion.

Prévoir un montant de 500 $ du supplément pour un retour au travail, bien je reviens à tantôt. Étant donné que c'est imposable, Mme la Présidente, puis étant donné qu'on impose les prestations d'aide sociale pour ceux qui se trouvent un emploi, je n'appelle pas ça une bonne nouvelle.

Alors, il y a plein de choses comme ça. Le seul bon geste que je peux dire que le gouvernement a fait sans exiger un retour d'ascenseur de la part des prestataires, c'est d'avoir augmenté des revenus de travail pour une personne seule à 200 $ puis pour un couple à 300 $.

Alors, Mme la Présidente, il y a beaucoup de travail à faire pour le nouveau ministre de la Solidarité sociale s'il veut réparer, s'il veut vraiment et sincèrement réparer les torts que son gouvernement a faits et les souffrances que son gouvernement a fait subir aux plus démunis de notre société au cours de son quatrième mandat.

Je lui donne le bénéfice du doute, qu'il va essayer au moins de convaincre - je lui souhaite bonne chance - le ministre des Finances et le président du Conseil du trésor d'arrêter de frapper sur les assistés sociaux, d'arrêter de frapper sur les plus démunis de notre société, parce que ça n'a pas de sens, ce que ces gens-là ont vécu à cause des gestes qui ont été posés par le gouvernement du Parti québécois au cours de son dernier mandat. Étant donné qu'ils commencent un nouveau mandat, alors j'espère qu'ils vont avoir la décence de réparer le mal qu'ils ont fait, Mme la Présidente. Merci.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Je vous remercie, Mme la députée de Saint-Henri-Sainte-Anne. Est-ce qu'il y a d'autres membres qui ont des remarques préliminaires? Non.


Discussion générale

Alors, nous allons débuter immédiatement l'étude des crédits sous la responsabilité du ministre de la Solidarité sociale pour l'année financière 1999-2000. Mme la députée de Saint-Henri-Sainte-Anne, je vous cède la parole.


Nombre de dossiers par agent dans les CLE

Mme Loiselle: J'aimerais peut-être revenir, Mme la Présidente, sur le nombre de dossiers que les agents ont à traiter. Dans le cahier des demandes particulières... Attendez que je m'installe, là.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): La salle n'est pas nécessairement organisée...

Mme Loiselle: Non, c'est ça.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): ...vous aider à avoir plusieurs documents.

Mme Loiselle: Oui, ce n'est pas agréable de travailler ici. Alors, page 55, Cahier explicatif des demandes particulières. Ah! c'est toi qui l'as. Ah! O.K. Bon. Vous nous dites, à la page 55, que le nombre moyen des dossiers par agent, pour l'ensemble des CLE, au 1er avril 1997, le nombre de dossiers confiés à un agent était en moyenne de 400; en date du 28 février 1999, il n'était plus que de 317.

Dans le document qui est sorti il y a quelques mois, un document du ministère, Vers une gestion de sécurité du revenu favorisant la solidarité sociale , on parle de la problématique, des points forts, des points à améliorer. Et on nous dit, à la page 28, qu'il y a une expérience qui a été faite, qui consistait à diminuer considérablement le nombre de dossiers, de 400 à 265 dossiers par agent, qui s'avère concluante. Puis ça, c'est un document de votre ministère, là: «L'expérience démontre que, en effet, plus on consacre de temps à la personne prestataire, plus il y a une satisfaction à l'égard des services et plus de conformité. Des économies substantielles sont ainsi générées. L'objectif du ministère est donc de poursuivre cette expérience et de la généraliser dans le réseau.»

On disait - j'aimerais peut-être le rappeler, Mme la Présidente, pour certains députés - dans le document du ministère qui a été fait, l'étude, que les points forts - il faut les donner - de l'offre de services actuelle, c'est que le personnel est courtois et dévoué, le matériel informatif écrit, accessible et de qualité, les brochures, les dépliants sont accessibles aux prestataires. Les points à améliorer: les agents sont difficiles à joindre, particulièrement au téléphone, il y a un manque d'information quant aux droits de recours des prestataires - on n'informait pas bien le prestataire s'il avait droit à des recours - le désintérêt et le manque d'empathie de certains agents face aux personnes avec qui ils communiquent, difficulté d'obtenir des relations satisfaisantes entre la personne prestataire et l'agent. Alors, il y avait plein de points. Et on soulignait également dans ce rapport l'importance de diminuer le nombre de dossiers à traiter.

Tantôt, le ministre a dit qu'il avait comme objectif, d'ici l'été, de diminuer de 400 à 268 les dossiers à traiter par agent. Moi, j'avais lu qu'il devait embaucher d'ici le 1er avril - et que les gens seraient en poste - au moins 195 personnes. C'est une déclaration qu'il a faite... Attendez, là...

M. Boisclair: Oui, 110, c'est à peu près ça.

(10 h 20)

Mme Loiselle: ...vous avez dit 195...

M. Boisclair: C'est à peu près ça.

Mme Loiselle: ...à partir du 1er avril. Ah! ici: «André Boisclair a par ailleurs annoncé que 195 nouveaux postes d'agents s'ajouteront au 1er avril.»

M. Boisclair: C'est ça, mais ce n'est pas de l'embauche.

Mme Loiselle: Alors, sur les 400, est-ce que les 195 sont déjà en poste?

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. le ministre.

M. Boisclair: Regardez. Les chiffres que donne la députée sont effectivement des chiffres qui sont exacts. Je pourrais peut-être décliner plus dans le détail les informations qu'elle détient. D'abord, sur les effectifs, avril 1998 - elle a raison de nous le dire - ceux qui font de la gestion de dossiers actifs, 1 051 ETC. Il y a 416 000 dossiers actifs. Donc, un ratio dossiers-agent qui est d'environ 396. Nous allons, en avril 1999, procéder à faire en sorte que nous ayons 1 457 équivalents temps complet. À 390 000 dossiers actifs, ça fait un ratio de 268.

Maintenant, la façon d'arriver à cette augmentation de postes se fait de la façon suivante: essentiellement par la conversion de postes de vérificateurs. C'est 110 postes de vérificateurs que nous allons transformer en postes de gestion. Il y a aussi des ajustements budgétaires qui nous permettent effectivement d'ajouter, au niveau des effectifs, quelque 150 ETC pour avril 1999. La balance a été ajoutée au cours de l'année 1998.

Maintenant, dans le livre des crédits aussi, on vous explique ce qu'il en est au niveau tout simplement des variations budgétaires. Mais effectivement, pour les 110 vérificateurs, la transformation est à se faire puis pour les ajouts d'effectifs, c'est en cours. Il y a une problématique particulière pour Montréal qu'on regarde aussi.

Mme Loiselle: Qui est?

M. Boisclair: Bien, une problématique particulière à Montréal, puisque, à Montréal, plusieurs activités, qui ailleurs se font localement, se font régionalement et que, dans l'évaluation des besoins et de la demande, on est en discussion avec les représentants de la ville de Montréal. Vous savez que c'est un contrat de gestion signé avec la ville de Montréal. Et on est à regarder de quelle façon vont se faire les ajustements pour qu'ils puissent, eux aussi, arriver aux objectifs de 268 dossiers-agent, en comprenant qu'il pourrait y avoir un certain nombre d'ajustements, puisque des activités qui se font ailleurs localement se font régionalement à Montréal, en fonction de l'organisation que la ville s'est donnée dans la gestion de son entente de services.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Mme la députée de Saint-Henri-Sainte-Anne.

Mme Loiselle: Oui. Juste pour revenir... Tantôt, dans vos remarques préliminaires, vous avez parlé de 400. Là, vous m'avez dit que 110 vérificateurs deviennent des agents.

M. Boisclair: Oui, pour avril 1999.

Mme Loiselle: Plus le 150.

M. Boisclair: Plus un 150. Mais il y a eu aussi des investissements qui se sont faits en avril 1998 et en octobre 1998. Je pourrais vous donner le détail des ajouts puis des retraits, là, mais le total effectivement nous permet d'arriver aux chiffres que je vous ai donnés tout à l'heure.

Mme Loiselle: D'ici le début de l'été, il devrait y avoir 400 nouveaux agents. Et, avec ce...

M. Boisclair: Mais il y a 110... Mais ce n'est pas nécessairement du nouveau personnel.

Mme Loiselle: Non. Bien, vos vérificateurs qui deviennent des agents, là.

M. Boisclair: C'est 300.

Mme Loiselle: Puis vous êtes assuré que, avec ce nombre-là, vous allez pouvoir répondre, abaisser les dossiers d'environ... Votre moyenne, à vous, c'est 268, que vous avez dit tantôt, là.

M. Boisclair: Oui.

Mme Loiselle: Ça va être suffisant?

M. Boisclair: C'est l'engagement de toute l'administration que je porte. Ces chiffres-là ont été validés par tous les sous-ministres, par la Direction des ressources humaines, par la Direction du budget. Et c'est avec toute l'assurance de la compétence des gens qui m'entourent que je vous donne cette réponse et en sachant qu'en cours de route il arrive toute sorte d'imprévus aussi. L'objectif qui est là, là, on m'a bien dit que ce n'était pas un objectif... On n'a pas une obligation de moyen mais bien une obligation de résultat.

Je fais tout simplement une mise en garde: Montréal. Compte tenu de la gestion qui se fait sur le territoire de la ville de Montréal, et non pas de l'île, il pourrait y avoir quelques différences, sachant la façon dont certaines activités sont gérées régionalement et que les dossiers ne sont pas traités de la même façon.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Mme la députée de Saint-Henri-Sainte-Anne.

M. Boisclair: Bien sûr, ce qui nous aide aussi beaucoup, pour en arriver là - faut-il le rappeler? - c'est la diminution de la clientèle. Je vous indiquais tout à l'heure qu'on estime à 390 000 le nombre de dossiers actifs, et je pense que nos prévisions sont dans le ton. Elle ne sont ni jovialistes ni conservatrices. Elles sont dans le ton.


Amélioration de l'offre de services à la clientèle

Mme Loiselle: Dans le document interne de votre ministère, on parlait aussi d'améliorer l'offre de services à la clientèle. Il y avait des points importants à améliorer. Est-ce que vous vous êtes penché sur ça? Est-ce qu'il y a des modifications qui ont été apportées ou...

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. le ministre.

M. Boisclair: Oui. J'ai fait état, Mme la députée, de nombreuses modifications que je souhaite apporter. Entre autres, faire en sorte qu'il y ait un accueil à deux niveaux pour faire en sorte que, en tout temps, une personne puisse se présenter et être accueillie dans un CLE, pour le volet sécurité du revenu, sans avoir besoin d'un rendez-vous, ce qui n'est pas évident à l'heure actuelle, et que nous allons expérimenter.

Je regarde aussi la possibilité d'utiliser les nouvelles technologies pour la déclaration du formulaire qu'on appelle la SR-7. Vous savez que c'est cette déclaration mensuelle qui accompagne le chèque et qui nécessite un traitement considérable. Et on nous dit que les déclarations qui, dans les faits, ont un impact sur le montant du chèque, c'est uniquement quelque chose comme 8 % des déclarations qui sont faites. Alors, vous imaginez tout le traitement papier que ça nous demande et aussi les complications pour la clientèle. On souhaite regarder du côté des nouvelles technologies la façon dont on peut améliorer les choses.

Je vous indique aussi que nous nous sommes donné une obligation de résultat dans le projet de loi n° 186 quant à notre volonté de porter assistance à une personne qui vient à la Sécurité du revenu ou qui cherche à intégrer le marché du travail. Et, pour concrétiser cette obligation qui est dans la loi, nous allons mettre sur chacun des territoires des régions un centre local d'emploi qui sera dit Innovation.

Qu'est-ce qui sera fait dans un CLE Innovation? On va d'abord les soutenir financièrement pour essayer de trouver des façons de faire qui correspondent davantage aux besoins des gens. Concrètement, il y a un certain nombre de conditions pour être un CLE Innovation. Il faudrait être un CLE permanent, il faudrait qu'il y ait une volonté, d'abord, du personnel, un engagement d'Emploi-Québec et des gens de la Sécurité du revenu, donc réunir toutes les conditions pour dire: D'abord et avant tout, nous autres, comme équipe, dans un centre local, on veut travailler.

J'en veux un par région, et ce qu'on va faire, c'est qu'on va s'assurer d'avoir une offre de services à deux niveaux ou qu'en tout temps quelqu'un puisse avoir un rendez-vous. On va faire très attention au service à la clientèle et à l'information quant aux droits et aux recours. Le bureau de révision et plaintes, c'est une nouvelle institution peu connue, et on va s'assurer qu'il y ait de l'information bien visible, accessible sur les services du Bureau des renseignements et plaintes. Il va y avoir un engagement de qualité des services pris à l'endroit de la clientèle qui se présente, à l'endroit des CLE, par le personnel, qui lui-même se sera doté d'un certain nombre d'objectifs organisationnels distincts de ceux qui peuvent être adoptés ailleurs dans le réseau.

Nous pensons bien sûr à l'utilisation des nouvelles technologies, à doter la salle multiservices d'une espèce de centre de référence pour que les choses puissent se faire rapidement, que les gens puissent avoir accès aux conseils, et, bon, un certain nombre de choses comme celles-là.

Donc, ce sont, pour nous, des façons nouvelles de faire. Je vous indique qu'en cela nous serons aussi conseillés par un comité aviseur, qui est prévu au projet de loi n° 186, qui accompagnera le bureau de révision et plaintes dans ses façons de faire et qui pourra aussi nous conseiller dès qu'il sera institué, d'ici la fin de l'année.

Mme Loiselle: C'est pour quand? Parce que vous dites: Nous pensons, nous pensons, nous voulons. Mais c'est pour quand?

M. Boisclair: Les CLE Innovation? Alors, je rencontre l'ensemble des directeurs régionaux la semaine prochaine. D'ici 10 jours, M. Martin? Peut-être demain? Bon. Alors, c'est demain qu'on rencontre l'ensemble des directeurs régionaux. La commande va être passée là. Déjà, elle est convenue avec les gens de l'administration, et on va demander à chacune des régions d'identifier ce qui pourrait être un CLE Innovation. Il y a un certain nombre de démarches de validation avant d'y arriver, mais les budgets sont disponibles sur cette année.

D'une façon bien précise, là, je vous redonne la liste: l'offre de services à deux niveaux dont je vous parlais, processus de déclaration SR-7, avis de décision acheminé à la clientèle, centre de communication avec la clientèle, salle multiservices et libre-service.

Mme Loiselle: Est-ce qu'on va avoir une copie de ça?

M. Boisclair: C'est ce que je vous ai donné. C'est déjà, je pense, dans les... Ah! c'est dans mon recueil à moi, ça. Je vous l'ai lu.

Mme Loiselle: Est-ce que vous allez faire aussi un effort pour... Parce qu'on nous dit que, pour les prestataires de la sécurité du revenu, il y a toujours aussi ce genre de gardien de sécurité. Dans certains centres d'emploi, il y a même encore des vitres. J'ai lu qu'il y a même un sous-ministre en région qui a pris un tournevis puis qui a enlevé la vitre. Est-ce que c'est le sous-ministre actuel?

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: Il sourit!

Une voix: Alors, M. le ministre.

M. Boisclair: Non, mais c'est le précédent, et, si le ministre...

Mme Loiselle: C'est le précédent? O.K.

M. Boisclair: Oui. Et je peux vous dire...

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Il était plus peureux.

Mme Loiselle: Il a été congédié?

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Il était moins brave.

(10 h 30)

M. Boisclair: Il y a un problème qui se pose. Les vitres qui sont là ne sont pas là dû à une volonté de l'administration. Elles sont là souvent à cause de décisions qui ont été prises par la CSST. Et on est à négocier avec notre syndicat. Je souhaite toutes les voir disparaître. Il y a des façons modernes de faire en sorte de bien accueillir les gens et d'assurer à la fois aussi la sécurité de nos employés. Et une des façons de faire, c'est la distance qui peut nous séparer. On peut mettre des barres d'éloignement. On peut faire en sorte que, malgré parfois des gens qui peuvent avoir un comportement colérique et vouloir agresser quelqu'un, le fait qu'il y ait une grande distance entre les deux - mais qui leur permet quand même de travailler, là, pas un comptoir de trois pieds - peut assurer une protection aux gens. C'est le genre de chose qu'on veut faire disparaître.

Parce que, comme vous, particulièrement sur le territoire de Montréal, dans mon propre comté, quand je vais dans les CLE, ils sont temporaires - ils ne sont pas des CLE permanents - je comprends bien l'importance de relocaliser les centres locaux pour l'emploi. Et, dès que nous nous sommes entendus sur le concept, l'appel d'offres à Montréal a été lancé - c'est la ville de Montréal qui l'administre - et nous sommes en processus... Je ne sais pas si les appels d'offres sont terminés? Chaque mois, il y en a six qui se font pour identifier des nouveaux locaux. Donc, le déménagement va se faire, parce que la députée a tout à fait raison de s'inquiéter de la qualité du service qui est donné à Montréal. Ce n'est pas ce que nous souhaitons offrir.

Dans mon propre comté, le CLE sur l'avenue du Parc, qui est parqué au cinquième étage, dans un édifice qui n'est pas accessible en transport public, on se présente dans une petite salle étroite où c'est étouffant, les chaises vissées sur le plancher, le ticket pour attendre, faire la queue, puis la bay-window... Ce n'est, à l'évidence, pas ce que nous avons en tête.

Maintenant, une fois qu'on sait ça, je pense qu'on doit se donner, garder un objectif: Est-ce que nous avons raison de faire en sorte de vouloir développer des services accessibles en un lieu? À cette question, nous répondons tous oui. Comment on y arrive? On s'assure, en gérant correctement les choses, de les relocaliser. Les appels d'offres sont en cours. En attendant, sachant qu'on était insatisfait, on a rajouté 1 000 000 $ pour faire des améliorations locatives qui nous permettent, de façon bien significative, d'améliorer le service à la clientèle. Il y a six appels d'offres qui se font par mois pour localiser les nouveaux CLE.

J'ai rencontré le maire de Montréal, aussi, pour le sensibiliser à cette problématique. Il m'a assuré qu'il mobilisait les meilleures énergies de son administration pour nous appuyer dans la recherche de locaux. J'ai aussi rencontré les gens de la commission scolaire de Montréal, la présidente de la commission scolaire, pour voir, dans la réflexion qu'ils font sur l'utilisation de leurs immeubles, s'il y avait des immeubles excédentaires qu'on pourrait possiblement utiliser. Parce que notre objectif est, avant d'aller dans le privé, de faire en sorte qu'on puisse utiliser des immeubles qui sont dans le patrimoine public, soit de la commission scolaire ou de la ville de Montréal, dans lesquels on pourrait installer des CLE.

Mme Loiselle: Parce que vous comprendrez que ce qui se vit actuellement sur le terrain puis ce qui se dit dans les discours puis dans les lois, c'est deux mondes.

M. Boisclair: Mais, madame, ce qui se...

Mme Loiselle: Juste un instant.

M. Boisclair: Oui.

Mme Loiselle: Quand on parle d'éliminer l'exclusion sociale, quand on dit qu'on met sur le même pied d'égalité, pour qu'ils aient les mêmes chances, les prestataires d'aide sociale comparativement à un chômeur puis que la personne se présente dans un centre d'emploi, dès que t'as l'étiquette d'assisté social, bien, toi, tu t'en vas vers où est-ce qu'est le gardien de sécurité ou où est la baie vitrée, et l'autre s'en va vers la gauche. Dans les faits, ils sont dans le même local, Mme la Présidente, mais ils vivent les mêmes préjugés qu'ils vivaient avant.

Alors, c'est pour ça qu'il y a un gros travail à faire pour qu'est-ce qui se vit actuellement sur le terrain puis qu'est-ce qu'on veut envoyer comme message parce que, actuellement, ce n'est pas du tout ça qui se vit. Les gens ne voient aucune différence. Même, ils sont peut-être encore plus blessés de la façon dont ils sont traités parce que la distinction, elle est flagrante, dans les centres d'emploi actuellement. Si t'es chômeur, tu viens de l'assurance-emploi, il y a une direction différente de si t'arrives là puis t'es prestataire de l'aide sociale; tu n'es pas traité de la même façon.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. le ministre.

M. Boisclair: Mme la Présidente, il y a quand même une limite à la démagogie. Moi, ça fait 10 ans que je suis député...

Mme Loiselle: Aïe!

M. Boisclair: Ça fait 10 ans que je suis député...

Mme Loiselle: Il l'a dit lui-même, seulement dans son comté.

M. Boisclair: ...Mme la Présidente, et depuis toujours je trouve que l'accueil qu'on fait aux prestataires de la sécurité du revenu dans les ex-centres Travail-Québec est un accueil qui n'est pas correct et que nous voulons changer.

J'ai été député, moi, d'opposition, puis j'ai écrit combien de fois aux ministres qui étaient responsables de la Sécurité du revenu, je leur disais: On souhaite bouger. Tous les gens du milieu sont d'accord. Quand est-ce que vous allez bouger? Et jamais on n'a été capable de cheminer sur cette question. Puis je pourrais vous sortir la liste de la correspondance que j'ai envoyée.

On a réussi à régler le problème grâce non seulement au talent des membres du gouvernement, mais aussi parce qu'on a été capable d'aller chercher l'appui de bien des partenaires. On a réglé cette question-là et on est en processus.

Je comprends bien, là, que, en ce moment, au centre local d'emploi chez nous, à part la salle multiservices dans laquelle il y a des améliorations comparativement à la situation d'il y a 10 ans quand je suis arrivé député, il n'y a pas beaucoup de changements dans l'organisation physique des lieux. Dans la qualité des services...

Mme Loiselle: ...

M. Boisclair: Oui, mais, pendant que la députée me dit ça...

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): ...adresser à la présidence, s'il vous plaît.

Mme Loiselle: Il parle de démagogie. Je ne suis pas démagogue, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Non, je m'excuse...

Mme Loiselle: Je lui dis ce qui se vit sur le terrain, puis il me dit...

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Non, je m'excuse...

Mme Loiselle: Il a les mêmes paroles que moi, là.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): ...je souhaiterais qu'on s'adresse à la présidence, premièrement. Et, pour le moment, c'est le ministre qui a la parole, alors je lui cède la parole.

Mme Loiselle: Je ne suis pas démagogue.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Vous aurez votre droit de réplique, Mme la députée de Saint-Henri-Sainte-Anne. M. le ministre.

M. Boisclair: Et, pendant ce temps-là, ça, se sont des problèmes qui se règlent. 75 % des CLE, d'ici juin, seront réglés. Et j'aimerais que la députée fasse des nuances, qu'elle se rappelle bien qu'il y a des CLE permanents dont on est tout à fait satisfait de la qualité des services, tout à fait satisfait de l'organisation des lieux.

Les Chutes-de-la-Chaudière, que je suis allé inaugurer il y a quelques jours, je rêve d'avoir un CLE comme celui-là dans mon quartier. Beauport, que je suis allé inaugurer, tout à fait satisfait de la qualité de l'accueil. Verdun, que nous allons inaugurer dans les prochains jours avec votre collègue, très, très, très satisfait - j'en suis convaincu - de ce qui va se passer dans son centre local pour l'emploi. Verdun, on va inaugurer ça vendredi, si ma mémoire est juste. Fleury aussi, prochainement, qu'on va inaugurer. Donc, les choses bougent, les choses avancent, puis plusieurs des députés libéraux, lorsqu'on se présente dans leur comté pour inaugurer un CLE, sont les premiers contents.

Alors, je demande tout simplement, Mme la Présidente, que la députée nuance un peu ses propos. Les choses cheminent. 75 % des CLE vont être réglés pour juin, puis on avance, tranquillement pas vite. Ceci étant dit, est-ce que vous allez me demander de scraper des baux puis de continuer à payer pour des locaux vides, puis faire en sorte d'engager davantage de dépenses dans la mise sur pied des centres locaux pour l'emploi? La réponse, c'est non. Au fur et à mesure que les baux se terminent, on change les choses.

Mme Loiselle: Je ne vous demande pas d'annuler des baux, Mme la Présidente.

M. Boisclair: Bien, alors...

Mme Loiselle: Je ne demande pas au ministre d'annuler des baux.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Alors, Mme la députée de Saint-Henri-Sainte-Anne.

Mme Loiselle: Je lui demande que les projets de loi qui sont votés, que les discours des ministres sur l'élimination de l'exclusion sociale, que, à part des discours, ça se vive sur le terrain. Parce que ce n'est pas ça, puis il le sait. Des inaugurations, c'est sûr que tout se passe bien quand on va à des inaugurations. Moi aussi, j'en fais. Mais la réalité, quand le prestataire, le lendemain matin que l'inauguration est terminée, se présente dans un CLE, ce n'est pas ce qu'il vit, Mme la Présidente. Alors, c'est ce que je dis au ministre.

Ça fait deux ans, depuis décembre, que tout est supposé être implanté. Alors, ça va très mal, l'implantation des CLE, il le sait très bien. Lui, le premier ministre et la ministre de l'Emploi et du Travail, les trois nous donnent tout le temps des dates différentes quant à l'implantation des CLE. On ne sait même pas où est-ce qu'on s'en va avec ça. La ministre nous a dit, quand elle a fait l'inauguration de Beauport, que tous les 151 CLE devraient être en poste, prêts pour le 31 mars. Le ministre nous parle de juin. Le premier ministre, dans son discours inaugural, il me semble qu'il a donné la date du mois de juillet. Alors, il le sait très bien. Je ne suis pas démagogue quand je dis que la réalité, pour un prestataire de l'aide sociale, quand il se présente dans un CLE actuellement, pour lui, il n'y a rien de changé actuellement.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Merci, madame.

Mme Loiselle: Et il le sait très bien.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Merci, Mme la députée. M. le ministre.

M. Boisclair: Qu'est-ce que vous voulez, il y a plusieurs CLE qui sont permanents. Qu'elle aille donc dire ça aux gens de Verdun puis au député de Verdun, qu'elle aille donc dire ça à la députée de Chutes-de-la-Chaudière - puis qu'elle aille visiter le CLE - qu'il n'y a rien de changé.

Mme Loiselle: Mais pourquoi...

M. Boisclair: À l'évidence, c'est changé. Quand on regarde, ensuite de ça, non seulement l'organisation des lieux, qui était déterminante, mais quant à l'offre de services... Quand on dit que les assistés sociaux, cette année, ils ont reçus 60 000 000 $ de plus dans les mesures de participation qu'ils en ont reçu l'an dernier, il y a sans doute peut-être quelque chose de changé. Quand, au premier juillet, on annonce l'harmonisation du soutien du revenu pour les personnes assistées sociales qui vont participer à des mesures d'Emploi-Québec puis qu'elle nous dit qu'il n'y a rien de changé, écoutez... Je la laisse avec ses propos, mais il lui appartient de les justifier. Ce n'est pas avec ça qu'elle va faire la manchette des journaux.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Mme la députée de Mille-Îles.

Mme Loiselle: Ce n'est pas ça, mon objectif, à moi. C'est ça, la différence entre le ministre et moi, Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Alors, je m'excuse, Mme la députée de Mille-Îles...

Mme Loiselle: ...de ne pas faire la «front page» des journaux.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Est-ce que c'est sur le même sujet? Oui. Alors, je vous cède la parole.


Harmonisation des mesures d'aide à l'emploi

Mme Leduc: Je vous remercie, Mme la Présidente. C'est sûr que les échanges auxquels on vient d'assister soulignent qu'il y a eu d'importants changements dans les services qui sont offerts, dans la façon d'offrir les services aux personnes assistées sociales. Et, dans ses remarques préliminaires, la députée de Saint-Henri-Sainte-Anne constatait quand même qu'un des acquis de la réforme, c'était justement d'avoir voulu que, dans ce qu'on appelle les mesures actives, il n'y ait qu'un endroit, qu'un guichet ou, qu'on reçoive des prestations d'assurance-chômage ou de la sécurité du revenu ou qu'on soit sans chèque, finalement, les mesures soient offertes et qu'on puisse participer de la même façon à ces mesures-là. C'est sûr que, compte tenu que c'est quand même une réforme importante, il peut y avoir des échéanciers différents selon les régions - c'est ce dont on entendait parler - et des ajustements qui sont faits.

(10 h 40)

Maintenant, moi, M. le ministre, vous l'avez mentionné rapidement, mais je voudrais quand même que vous élaboriez sur des effets positifs, concrets, quant au prestataire qui est finalement intégré à ces mesures-là. Et, lui, finalement, qu'est-ce que ça a pu lui donner, que ce soit dans le soutien au revenu ou dans les différentes mesures auxquelles il peut avoir accès et dans le climat dans lequel il participe à sa réinsertion au marché du travail, aux mesures d'insertion? Alors, vous en avez mentionné une, mais j'aimerais que vous élaboriez un peu quant à l'harmonisation et quant à l'ensemble des mesures qui lui sont présentées et la façon de participer.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. le ministre.

M. Boisclair: Essentiellement, la volonté du gouvernement est la suivante: Comment faire en sorte de traduire dans les faits qu'au-delà de l'étiquette de chômeur ou d'assisté social on a d'abord et avant tout, devant nous, dans l'organisation des services publics d'aide à l'emploi, des demandeurs d'emplois et qu'il nous faut les traiter indistinctement de leur statut? On a dit d'abord: On va faire en sorte que les services soient offerts et donnés dans un même lieu, le centre local pour l'emploi, où on va définir une offre de services qui ne sera pas à deux niveaux et qui va, d'abord et avant tout, être offerte aux personnes, aux demandeurs d'emplois. C'est un pas qui est important, qui est nécessaire, parce qu'on convient que l'organisation physique des lieux, le niveau des services offerts, la qualité des services offerts vont avoir, bien sûr, une influence sur la prestation de services puis sur la personne.

Maintenant, quand je suis arrivé là, rapidement on a regardé les choses, puis on s'est dit: S'il y a un élément où il nous faudrait continuer à faire preuve de la même cohérence, c'est au niveau du soutien du revenu. Comment expliquer que, dans une classe, quelqu'un qui est inscrit à une mesure de participation, qui prend un cours de formation technique, par exemple, de niveau collégial, un chômeur soit payé en fonction de ses besoins individuels et un assisté social soit payé en fonction d'un barème, le 120 $ de plus que le 495 $ qui est versé pour une personne seule? Alors, on se dit: Si c'est vrai qu'on veut décloisonner les services puis les organiser dans un même lieu, est-ce qu'on peut aussi penser à harmoniser le soutien du revenu? E c'est ce qu'on va essayer de faire à partir du 1er juillet.

La députée de Saint-Henri-Sainte-Anne, tout à l'heure, n'a pas relevé un certain nombre de décisions qu'on a prises, mais qu'est-ce qu'on a fait? D'abord, on a dit: On va s'assurer, pour des gens qui sont à l'aide sociale, qui ont des pénalités pour refus ou abandon d'emploi, de lever la pénalité lorsqu'ils participent à une mesure d'Emploi-Québec parce qu'on va considérer que les gens se sont amendés de leur refus ou de leur abandon d'emploi. Donc, faire en sorte qu'il n'y ait pas de contrainte.

Deuxièmement, on dit qu'on va faire en sorte, dans le nouveau règlement qui va être publié très bientôt, qui accompagne l'entrée en vigueur de la loi, de faciliter le passage de la sécurité du revenu à Emploi-Québec, et, si jamais la mesure ne marchait pas à Emploi-Québec, faire en sorte que les gens puissent revenir sans pénalité à la sécurité du revenu. Donc, les gens qui ont accès à un certain nombre de frais spéciaux, entre autres à l'aide sociale, vont pouvoir les conserver à Emploi-Québec. Si jamais ils reviennent à la sécurité du revenu, ils vont avoir une exemption, dans le calcul de leurs revenus, de 130 $ par mois pour faire en sorte qu'ils puissent, après un certain temps, s'il y a lieu, avoir accès à nouveau à l'aide sociale.

Mais, par-dessus tout, on se dit qu'on va essayer, pour des gens qui se sont inscrits dans des mesures intensives, de donner un soutien du revenu qui soit semblable à celui qu'on donne à des chômeurs. Alors, le nouveau règlement qu'on va publier ne contiendra pas de barème de participation. Tout ce que le règlement va dire, pour des gens qui participent à des mesures, c'est que la personne reçoit un minimum de 30 $ par semaine, ce qui est déjà plus que le 120 $ par mois: une semaine, c'est 4,33 $ - toutes les nouvelles, si petites soient-elles, sont des bonnes nouvelles, dans cette matière.

Donc, on va évaluer les besoins des personnes, et le règlement va dire: 30 $ minimum par semaine. Puis le maximum de ce qui pourrait être versé à la personne, c'est le salaire moyen versé dans la profession visée à la sortie de la formation. En moyenne, ce qu'on nous dit, c'est que c'est quelque chose comme 225 $ par semaine, qui seront versés aux deux semaines et non plus au mois. Et nous serons capables aussi de faire en sorte d'appuyer aussi des gens, mais qui sont inscrits dans des formations moins intensives.

Et c'est là le débat que j'ai eu et la question que je me suis posée. C'est, sachant que dans les faits nous allons dépenser beaucoup plus d'argent - c'est environ au moins 65 000 000 $, M. Boudreau, 65 000 000 $ de plus qui vont retourner dans la poche des prestataires de la sécurité du revenu qui participent à des mesures - sachant, donc, que c'est plus dispendieux puis que je ne peux pas l'offrir à tout le monde, faute, bien sûr, de budget, est-ce que je peux commencer par un premier pas?

Le premier pas est le suivant. On reconnaît le principe, l'harmonisation, puis, deuxièmement, si on fait des distinctions, on va les faire quant au type de mesure et non pas quant à la provenance de la personne, si elle est assistée sociale ou chômeur. On va plutôt distinguer entre des mesures qui sont plus intensives et moins intensives.

Les plus intensives vont donner droit à l'aide individualisée; les moins intensives, les gens vont être payés sous une forme de barème mais qui ne sera pas un barème au sens où on l'entend, prévu dans le règlement mais qui sera quand même fixé plus généreux que celui qui existe à l'heure actuelle. On pourra peut-être me sortir les chiffres qui sont prévus, là. Je ne les ai pas en tête, mais, dépendant de la situation - un enfant, deux enfants, trois enfants - ils sont indiqués. Et, par mesures moins intensives, on entend: francisation, alphabétisation, rattrapage scolaire, alphabétisation à long terme, qui n'est pas alpha-travail. Francisation, alpha, rattrapage scolaire, ce sont les mesures moins intensives. Les autres sont toutes des mesures plus intensives.

Alors, tout le mécanisme est en place pour qu'on puisse y arriver au 1er juillet. Et on espère, au fur et à mesure, qu'on pourra mettre en oeuvre, répondre aux besoins des gens. Ce n'est pas simple, parce qu'il faut former le personnel. Les agents de première ligne, on fait davantage appel à leur jugement puis à leur connaissance de la personne. C'est plus difficile à appliquer, de l'aide individualisée, que d'appliquer un barème. Mais on est heureux, en tout cas, de tracer cette destination puis de donner un appui bien concret pour les prestataires de la sécurité du revenu qui participeront à des mesures.

Et nous pensons, en conclusion, que ce sera une façon plus efficace de faire, parce que des abandons dans les mesures de participation sont très coûteux pour l'État, des gens qui s'inscrivent puis qui ne complètent pas. Et notre prétention, c'est qu'en appuyant mieux les personnes qui participent et en les ciblant mieux aussi on aura moins d'abandons et moins de coûts. Alors, voilà pour ce qui est de l'harmonisation du soutien du revenu.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Merci, M. le ministre.


Prévision du nombre de participants aux mesures d'aide à l'emploi

Mme Leduc: M. le ministre, vous avez dit un montant de 65 000 000 $. Est-ce qu'on a une idée du nombre de personnes qu'on pense rejoindre? C'est juste si vous l'avez, là. 65 000 000 $, c'est toujours des gros chiffres. Moi, j'aime voir les visages.

M. Boisclair: Le chiffre, moi, que j'ai vu, je ne voudrais pas me tromper, 77 000... 55 000, sur une pleine année. Mais la contrainte est toujours la même, ça va être la capacité du Fonds de développement du marché du travail d'absorber les demandes. Bon. On sait que les budgets fédéraux vont augmenter, il y a une problématique avec le budget de Québec, je présume que vous l'avez vu avec ma collègue, hier. Une des façons de faire, pour nous, ce sera de transférer les budgets de la Sécurité du revenu à Emploi-Québec pour faire en sorte de rendre admissibles le plus de gens possible au soutien individualisé. On prévoit transférer quelque chose comme 110 000 000 $ par année, sur une année pleine, qu'on va transférer de la Sécurité du revenu à Emploi-Québec pour rendre accessible l'aide individualisée à des gens qui n'ont pas de lien avec la caisse d'assurance-emploi.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Merci, M. le ministre. M. le député de Masson, je vous cède la parole.

M. Labbé: Merci, Mme la Présidente. On a parlé un petit peu de l'accueil. Je vais y revenir, si vous me permettez, deux petites secondes. D'abord, je connais un petit peu c'est quoi, l'accueil dans un centre Travail-Québec, j'ai oeuvré pendant 29 ans comme chef d'équipe. Alors, dans le fond, les impacts à l'accueil, je pense que, dans un premier temps, il faut être logique, et c'est sûr que les impacts qu'il y a, dans un premier temps, c'est d'abord le volume de clientèle qui entre dans les centres Travail-Québec, les délais d'attente, évidemment, qui en résultent automatiquement et qui créent aussi une agressivité. C'est ce qui fait qu'à un moment donné il y a eu beaucoup de changements au niveau de la sécurité, ou des éléments comme ça.


Embauche d'agents dans les CLE

Je tire mon chapeau au ministre quand il vient nous annoncer aujourd'hui qu'il va y avoir un allégement au niveau du nombre de dossiers par agent. Et ça, je pense que c'est ça qui va aider le plus, peut-être, au niveau, justement, de ce qu'on appelle l'accueil. Les gens vont être plus disponibles. Les clients vont être capables d'avoir des rendez-vous qui seront normaux et logiques, à ce moment-là, et je pense que ça va avoir un effet excessivement positif. Parce qu'on a beau avoir des beaux locaux, si on n'est pas capable de les recevoir, ce n'est pas pratique.

Alors, j'aimerais savoir, de la part du ministre, comment vous allez fonctionner pour, justement, l'engagement de ces employés-là. Est-ce que vous avez prévu des façons de faire? C'est un petit peu le but de ma question.

M. Boisclair: Je laisserais peut-être nos spécialistes de l'administration... Je sais qu'il y a 110 postes de vérificateurs qui sont transférés. Les autres...

(Consultation)

M. Boisclair: Alors, M. Deroy, qui est...

(10 h 50)

M. Deroy (Alain): On va procéder normalement, avec les listes. On a des listes dans chacune des régions de concours et puis des gens qui se sont déjà qualifiés. Donc, au besoin, on va aller chercher ces listes-là. Dans la mesure où les listes seront épuisées, on va procéder à des concours de la fonction publique rapidement.

M. Labbé: À l'externe. Ce qui veut dire, si vous permettez, que tous les agents actuellement qui sont en fonction temporaire, qui sont là depuis quatre, cinq, six, sept ans, ça leur donne une possibilité d'avancement. C'est ce que je comprends aussi.

M. Boisclair: Oui, mais ça ne veut pas dire que ca va être des postes permanents.

M. Labbé: C'est ce que je voulais valider avec vous.

M. Boisclair: Parce que vous savez comme moi, puisque vous avez été 30 ans dans le réseau, qu'un des gros problème dans le service à la clientèle, selon la perception qui est la mienne, c'est que nous avons un nombre élevé d'occasionnels. Dans le réseau de la sécurité du revenu, je ne me trompe pas en disant que plus de 50 % des gens sont des occasionnels. Et je vous dirais même que, chez les agents qui font de la gestion de dossiers actifs, ceux qu'on appelle des GDA, ça monte à 60 %, au moins à 60 %. Donc, il est clair que j'ai un très grand intérêt. Mme la Présidente, qui a été aussi présidente du Conseil du trésor, connaît toute la problématique des occasionnels dans la fonction publique. Je suis avec beaucoup d'intérêt et d'attention les négos dans le secteur public, parapublic. Et l'engagement du gouvernement de rendre admissibles à un concours des gens qui ont été cinq ans sur le même poste, je suis ça de très près parce que ça aura un effet très structurant pour notre organisation.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Merci, M. le ministre. Alors, M. le député de Jacques-Cartier.


Office de la sécurité du revenu des chasseurs et piégeurs cris


Coût de l'administration

M. Kelley: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Moi, je suis ici, comme porte-parole en matière des affaires autochtones, pour aborder juste une couple de questions sur l'Office de la sécurité du revenu des chasseurs et piégeurs cris. Alors, je ne sais pas...

M. Boisclair: Bien, allons-y.

M. Kelley: Non, non, je vais... Juste pour déclarer mon intérêt, d'entrée de jeu. Juste une couple de questions de peut-être l'ordre précis... Dans le livre de crédits, on trouve qu'on est en train de voter 16 800 000 $ pour ce programme. Est-ce qu'on peut avoir une idée de c'est quoi, le coût de gestion de ce programme?

M. Boisclair: Ce que vous cherchez à obtenir, c'est le coût de fonctionnement de l'Office.

M. Kelley: À l'intérieur de l'enveloppe de 16 000 000 $.

M. Boisclair: 996 000 $, me dit-on, mais j'aimerais vous trouver la... J'ai déposé hier le rapport annuel. Je le consulte un instant, peut-être que je pourrai vous trouver le... Et on me dit qu'à la page 44 du cahier explicatif des crédits vous avez la référence exacte. Donc, pour l'administration dans les crédits 1999-2000, le cahier bleu. Est-ce que vous avez ce cahier, le cahier explicatif des crédits, le cahier bleu? Je pense que ça a été transmis à tous les membres de la commission.

M. Kelley: Non, je ne le suis pas.

M. Boisclair: Je vous invite, monsieur, à consulter la page 44. À la page 44, vous avez l'évaluation des coûts par activité. L'administration, dans le tableau: 996 000 $.

M. Kelley: Parfait, merci. Non, c'est juste pour mettre ça au clair.

M. Boisclair: C'est ça, oui.


Nombre de bénéficiaires

M. Kelley: Deuxièmement, au niveau du nombre de bénéficiaires, c'est quoi, les tendances? Est-ce que c'est un programme qui est plutôt stable? Moi, je pense au profil démographique de ces communautés. Pour devenir éligible, il faut avoir 18 ans. Je pense que les deux tiers des communautés cries ont 19 ans ou moins. Alors, est-ce qu'il y a des tendances déjà établies? Et est-ce qu'il y a des prévisions que ce programme aura beaucoup de bénéficiaires additionnels dans les années qui vont venir?

M. Boisclair: Je pense que l'information que j'ai dans les documents qu'on vous a remis, c'est environ 1 700 personnes qui sont bénéficiaires. La compréhension que j'en ai: c'est plutôt stable. Maintenant, peut-être que M. Boudreau, qui est aux politiques, pourrait compléter la réponse.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. Boudreau.

M. Boudreau (Yvon): Oui, bonjour. Il y a un groupe de travail conjoint avec les Cris, qui est justement à l'oeuvre pour étudier certaines des questions que vous soulevez, et notamment sur des changements que plusieurs souhaitent apporter, y compris, bien sûr, les Cris eux-mêmes. Et on est en train d'examiner l'ensemble de ces problématiques-là. Notamment, on constate un vieillissement assez accéléré des gens qui bénéficient du programme. Alors, compte tenu effectivement des poussées démographiques dans ces milieux-là, il y a des questions de fond qui se posent, et on est en train de les étudier très, très ouvertement avec eux.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: Et chez les jeunes, est-ce qu'il y a une tendance à embarquer dans ce programme? Parce que l'idée, il y a 25 ans, était d'offrir la possibilité de maintenir une façon de vivre traditionnelle. Au lieu de travailler contre un salaire, l'idée était de maintenir les personnes qui veulent travailler à l'extérieur des communautés, pour les piégeurs, etc. Chez les jeunes, avec 25 ans d'ajout de l'éducation, avec les routes qu'on a établies ou on est en train d'établir vers les communautés cries, est-ce qu'on voit un changement dans les options des jeunes? Ou est-ce qu'on peut présumer que, parmi... Comme j'ai dit, le phénomène du baby-boom cri, qui va entrer sur le marché du travail dans les prochaines années, est-ce que ça risque d'avoir une incidence sur ce programme?

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. le ministre.

M. Boisclair: Mme la Présidente, si vous me permettez, juste... M. Boudreau pourra certainement compléter. Nous aurions souhaité que le secrétaire général - doit-on l'appeler - de l'Office soit parmi nous. Nous comprenons qu'aujourd'hui il avait un conseil d'administration. Il sera avec nous toutefois demain. Je veux l'indiquer au député, si jamais il souhaitait lui adresser des questions bien pointues.


Actualisation du programme

Je pourrais profiter aussi de cette occasion pour vous dire que nous sommes à revoir le programme. Il y a un rapport, comme M. Boudreau le disait. Nous allons le revoir. Il y a eu discussion avec le grand chef, M. Coon Come, on a confirmé des discussions. Et, en juin 1998, il y a eu une première rencontre du groupe de travail sur la révision du programme. Quant aux tendances plus récentes chez les jeunes...

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. Boudreau.

M. Boudreau (Yvon): Le représentant de l'Office pourra apporter des précisions additionnelles. C'est clair que la jeune génération a une plus grande diversité de formation et a accès à une plus grande diversité d'activités économiques, mais évidemment ce programme-là suscite néanmoins de l'intérêt chez les jeunes également, mais évidemment en proportion moindre, compte tenu des possibilités d'emploi qui s'offrent dans la communauté.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: Je suis en train de voir à quel point - parce qu'on parle beaucoup du développement économique, et dans nos façons de revoir nos relations avec les premières nations, entre autres les Cris - est-ce que les changements de ce programme quant à l'avenir, la viabilité de ce programme... Parce que est-ce qu'on a à investir davantage pour maintenir cette façon de vivre traditionnelle? Mais est-ce qu'il y a des modifications qu'on peut apporter au programme pour l'utiliser d'une meilleure façon, comme outil de développement économique? Peut-être que c'est ça, le sens de ma question.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. le ministre.

M. Boisclair: Bien, sûrement. C'est ce qui est en cours.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. le député de Jacques-Cartier, est-ce que ça complète? Non?

M. Kelley: Pour juste un...

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Oui?

M. Boisclair: Oui, c'est ça. Écoutez, moi, comme je vous dis, demain...

M. Kelley: Oui.

M. Boisclair: Je vais vous dire, moi, je ne suis pas un grand spécialiste de cette question. Demain, les gens seront avec nous, s'il y avait des questions plus détaillées... J'aurais souhaité... Je tiens à m'excuser, les gens n'ont...

M. Kelley: Bien, moi, à mon tour, je veux m'excuser. Demain, je dois présider une commission, demain après-midi.

M. Boisclair: Ah! O.K.

M. Kelley: Alors, c'est difficile d'être à deux endroits en même temps. C'est pourquoi je suis venu ce matin plutôt que demain après-midi, parce que j'ai déjà pris un engagement de présider une autre commission.

M. Boisclair: Ça me ferait plaisir, en tout cas, M. le député, si vous souhaitez... Je vous invite à consulter le rapport annuel qu'on a déposé hier, vous allez trouver sans doute de nombreuses indications. Quant à la suite des choses, on est bien disposé, peut-être, à faire avec vous le point sur l'état des discussions en cours. Peut-être que M. Boudreau voudrait rajouter.

M. Kelley: Parfait. Oui, peut-être que je vais soumettre une couple de questions par écrit parce que malheureusement je ne peux pas assister demain, quand les représentants de l'Office vont être ici. Merci, M. le ministre. Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Alors, merci, M. le député de Jacques-Cartier. Je cède maintenant la parole à la députée de Saint-Henri-Sainte-Anne.


Modifications au régime d'assurance-médicaments

Mme Loiselle: Merci, Mme la Présidente. J'aimerais retourner au livre des crédits, les renseignements particuliers, à la page 57, quand on parle des...

Une voix: ...

(11 heures)

Mme Loiselle: Oui. Quand on parle de la répartition des bénéficiaires du programme Soutien financier selon les diagnostics, selon leur maladie... Il y a quand même, on regarde, au niveau du nombre d'adultes, Soutien financier, au niveau du retard mental, déficience mentale en décembre 1998, il y en avait 14 119; des psychoses, 12 600; schizophrénie, 9 200; troubles névrotiques, 15 000; déficiences intellectuelles sévères, 6 255.

Je veux revenir, Mme la Présidente, à l'assurance-médicaments, aux effets dévastateurs sur la vie des gens les plus démunis du Québec de l'implantation du nouveau système. L'étude des chercheurs de McGill, il y avait eu une fuite durant la campagne électorale, vous vous souviendrez, d'une certaine section du rapport. Et le premier ministre, à l'époque, avait dit qu'il était pour faire des rectifications s'il reprenait le pouvoir.

Mais il y a des points que je veux rappeler aux membres de la commission parce que, selon l'étude qui a été faite par les chercheurs de l'Université McGill quant à l'impact de l'assurance-médicaments, particulièrement sur la clientèle des prestataires de l'aide sociale et les personnes âgées à faibles revenus, c'est vraiment dramatique, ce que ces gens-là vivent dans le quotidien, Mme la Présidente. L'étude démontre qu'il y a une baisse, là, mais vraiment dramatique de la consommation. Je vous donne les chiffres de l'étude, si certains députés n'ont pas eu la chance de regarder cette étude-là. Une baisse de consommation marquée, chez les prestataires de la sécurité du revenu, de 14 %.

Il faut faire une différence, M. le Président, quand on parle de médicaments essentiels et non essentiels. Essentiels, c'est vraiment des médicaments pour contrôler votre maladie et qui sont essentiels à la personne pour pouvoir, en quelque part, survivre. Alors, on parle ici, dans le rapport, qu'avec l'implantation de l'assurance-médicaments la baisse de consommation touche de façon plus importante les médicaments essentiels. Ça, c'est grave. Les non-essentiels, comme les aspirines et ces choses-là, ça a moins d'effets, mais les médicaments essentiels, c'est très important sur la qualité de vie des gens, leur santé.

Une baisse de 16,5 %, chez les prestataires de la sécurité du revenu, de leurs médicaments essentiels. On parle que les prestataires de la sécurité du revenu, les plus jeunes et les femmes, ont réduit davantage leur consommation de médicaments que les autres personnes de même niveau de consommation.

On dit, dans les effets qu'on appelle les événements indésirables... Ça, Mme la Présidente, c'est les hospitalisations, le retour en institution, malheureusement les décès. Alors, dans cette recherche-là de l'Université McGill, on dit que le nombre d'événements indésirables a augmenté de 93 % pour les prestataires de l'aide sociale, le nombre de visites médicales a augmenté de 16 %, et le nombre de visites à l'urgence a augmenté de 71 %.

Un peu plus loin dans l'étude, on dit que, chez les prestataires de l'aide sociale, la baisse de consommation des médicaments essentiels pour le traitement de l'asthme, de l'épilepsie, des maladies cardiaques, du diabète, du risque d'embolie, a fait un bon de 260 % du nombre d'événements indésirables, hospitalisations, et tout ça, 260 % avec l'implantation de l'assurance-médicaments.

La baisse de consommation des médicaments essentiels a touché durement plus particulièrement les prestataires qui souffrent de maladie mentale. Ça, c'est plus de 45 000 personnes qui souffrent de maladie mentale, Mme la Présidente, et qui sont au Soutien financier à l'aide sociale. Ces événements indésirables ont augmenté de 183 %, les visites médicales pour ces personnes-là, qui souffrent de maladie mentale, de 167 %, les visites à l'urgence de 457 %. C'est grave, on parle d'humains, là. Moi, je ne parle pas de barèmes, à ce point-ci, je parle d'êtres humains qui souffrent de maladie mentale, de l'impact de l'assurance-médicaments dans leur vie de tous les jours, sur la gravité de leur maladie. Des visites à l'urgence, de 457 %, parce que ces gens-là ne peuvent pas se procurer leurs médicaments.

Dans les 10 premiers mois de son implantation, le gouvernement a fait des économies. C'est ça qui est le plus odieux dans tout ça. Le gouvernement a fait des économies dans les 10 premiers mois, pour les gens qui souffrent de santé mentale, de 16 000 000 $ à 17 000 000 $, seulement pour cette partie de la clientèle, Mme la Présidente.

Il y a eu la promesse du premier ministre en campagne électorale, comme je le disais tantôt, de revoir pour les personnes plus vulnérables de notre société, les personnes âgées puis les prestataires de l'aide sociale, le programme de l'assurance-médicaments, de revoir la contribution financière de ces gens-là.

Au 31 mars, en Chambre, il y a eu un échange entre le chef de l'opposition et la ministre de la Santé, et également la députée de Bourassa. La ministre, elle, a minimisé ça. Je reprends les débats à l'Assemblée nationale. La ministre de la Santé dit: «M. le Président, on parle de 460 personnes âgées et on parle de 825 personnes qui ont des problèmes de santé mentale.» Alors, la ministre, là, devrait avoir une discussion avec le ministre de la Solidarité sociale parce que le rapport indique bien les 45 000 personnes qui sont à l'aide sociale et qui ont eu des problématiques suite à l'implantation de l'assurance-médicaments. La ministre, en Chambre, a dit: Bon, je revois de nouveaux scénarios, et tout ça, et d'ici quelques semaines, on va passer à l'action. Lors de l'étude des crédits, le 23 avril, exactement la même phrase encore: Dans quelques semaines, on regarde le scénario puis on va proposer des choses.

Moi, je suis très inquiète parce que plus on attend, plus on nous dit: Dans quelques semaines, dans quelques semaines, dans quelques semaines, plus il y a des gens qui souffrent, plus il y a des gens qui ne peuvent pas se procurer leurs médicaments, plus il y a des personnes âgées qui doivent faire le choix, Mme la Présidente, entre se nourrir convenablement puis aller chercher leurs médicaments, ou aller quémander dans les organismes communautaires, ou aller quémander des sous auprès de leurs amis, qui ne sont souvent pas plus fortunés qu'elles, pour pouvoir se procurer leurs médicaments. Mais, plus on attend, plus on attend pour passer à l'action et amener des propositions qui vont faire que ça, ça va s'arrêter, Mme la Présidente, il y a des gens qui aggravent leur santé.

Alors, moi, je n'ai pas entendu le ministre de la Solidarité sociale, il était très silencieux depuis tous ces échanges-là. Depuis la sortie du rapport, je ne l'ai pas entendu nous dire ou faire une conférence de presse, dire: Écoutez, je vais tout faire en mon pouvoir auprès du Conseil des ministres, auprès de la ministre de la Santé, auprès du premier ministre pour que la clientèle que, moi, je représente et que mon rôle principal est de protéger ne soit plus affectée quotidiennement par l'impact de l'assurance-médicaments, particulièrement, Mme la Présidente, les 45 000 personnes qui souffrent de santé mentale à l'aide sociale.

Moi, je veux entendre le ministre pour savoir qu'est-ce qu'il a fait, puis, si, à date, il n'a rien fait, qu'est-ce qu'il a l'intention de faire pour convaincre la ministre de la Santé parce que, elle, elle m'inquiète davantage. Parce qu'il a sûrement vu comme moi, la semaine dernière, La ministre Marois exclut la gratuité . Elle dit même: «C'est sûr qu'on ne revient pas à la gratuité complète, ça va de soi.» Et, quand la ministre de la Santé dit «ça va de soi», Mme la Présidente, c'est qu'elle n'a vraiment pas l'intention, elle, de reculer, puis elle n'a pas l'intention de... exclure la gratuité.

Que va faire le ministre de la Solidarité sociale pour protéger sa clientèle, particulièrement les gens qui souffrent de santé mentale, qui sont gravement affectés par l'implantation de l'assurance-médicaments et la contribution financière qu'ils sont obligés de débourser pour obtenir leurs médicaments?

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. le ministre.

M. Boisclair: Je voudrais peut-être commencer à dire que cette fois-ci je pense que la vigilance de la députée est de bon ton, parce que nous convenons tous dans l'Assemblée nationale - et je pense que tous les membres de la commission parlementaire vont convenir - qu'il y a un problème. Et on pourra débattre de l'ampleur du problème, du nombre de personnes touchées, quant au type de solutions qu'il nous faut apporter. Donc, on convient tous qu'il y a une difficulté qui a été bien illustrée dans le rapport que la députée citait.

Je veux l'assurer de l'attention du ministre, de l'attention, aussi, des fonctionnaires de l'administration. La Direction générale des politiques, celle qu'on appelle la DGP, chez nous, fait des études sur cette question. Il y a maintenant plus d'un mois, j'avais l'occasion, de façon bien précise, sur des enjeux spécifiques, d'échanger avec ma collègue de la Santé. Donc, mon intérêt, là, il y a déjà longtemps que je l'ai, je le lui ai déclaré sur cette question. Et ce que je vous dis, c'est que le gouvernement avisera lorsqu'une décision sera prise, mais vous pouvez être assurée de ma vigilance et de mon intérêt pour cette question.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Mme la députée de Saint-Henri-Sainte-Anne.

Mme Loiselle: Mais, Mme la Présidente, il faut rappeler que l'ex-ministre de la Santé est resté sourd. Même, je me souviens d'un échange en commission parlementaire. Le ministre, il ne nous écoutait pas. Il y avait des groupes qui lui disaient l'impact, parce qu'il venait juste de déposer son projet puis il disait: Écoutez, nous, on connaît notre clientèle.

Avec les coupures qu'il y a eu à l'aide sociale, si vous exigez un montant pour les prestataires de l'aide sociale et les personnes âgées à faibles revenus pour qu'ils se procurent leurs médicaments, il vont basculer dans la misère, ils ne seront pas capables de se procurer leurs médicaments, ils vont aller couper à des endroits que... C'est des besoins essentiels. Manger, là, c'est un besoin essentiel.

(11 h 10)

C'est exactement ça qui est arrivé deux ans plus tard. Il a fallu une étude, une étude pour... mais pas pour convaincre parce que, si on avait convaincu le gouvernement et s'il admettait qu'il a fait un faux pas, s'il admettait, même s'il n'avait pas écouté les critiques de l'opposition, des organismes communautaires, que... Maintenant, il y a une étude de chercheurs qui démontre, là, qu'il y a des gens qui ont aggravé leur état de santé. Il y a des gens qui sont malheureusement, il faut le dire, décédés parce qu'ils n'ont pas pu se procurer leurs médicaments.

Moi, je me dis: Bien, là, si on a moindrement de compassion, qu'on nous l'a promis en campagne électorale, ça aurait dû être le premier geste que le gouvernement du Parti québécois pose en arrivant dans cette Chambre. Au lieu de déposer la loi sur la réforme électorale n° 1, le premier geste que le gouvernement... Si le premier ministre avait été franc en campagne électorale, il se serait levé en Chambre, puis il aurait dit: Moi, j'annonce ce qu'on va faire pour diminuer la contribution financière et donner la gratuité aux personnes qui souffrent de santé mentale.

Là, Mme la Présidente, la ministre de la santé se lève en Chambre, le 31 mars, elle dit: Oui, oui, oui, oui, 31 mars, j'annonce qu'on analyse des scénarios, propositions. Et puis ça, ce rapport-là, ils l'ont en poche depuis le ministre Rochon. L'ex-ministre député de Charlesbourg avait ça depuis le mois d'août, puis il ne l'a pas sorti, ce rapport-là, parce qu'ils n'ont pas appris ça durant la campagne électorale, ils n'ont pas appris ça quand le rapport au complet a été déposé au gouvernement. Depuis le mois d'août que le gouvernement du Parti québécois est au courant des effets pervers de l'assurance-médicaments sur les plus vulnérables de notre société. Rien n'a été fait.

Moi, je suis très inquiète parce que j'ai l'impression qu'on nous niaise encore. Le premier ministre, en campagne électorale, nous dit: Oui, oui, oui, on va faire quelque chose. Là, on est rendu, Mme la Présidente, presque au mois de mai, il n'y a rien de fait. La ministre se lève en Chambre, puis elle nous dit: Dans quelques semaines - ça, c'est le 31 mars - 23 avril, en commission parlementaire, elle répète exactement la même phrase: Dans quelques semaines.

Il va falloir que les députés ministériels, avec le ministre de la Solidarité sociale, brassent le caucus du gouvernement du Parti québécois, brassent ensemble. Il faut qu'il se passe quelque chose. Soyez conscients qu'il y a des gens qui souffrent, qu'il y a des gens qui aggravent leur santé, qu'il y a des gens qui meurent. Puis à chaque minute qu'on passe ici, en commission parlementaire, il y a des gens au Québec qui sont pauvres qui ne prennent pas leurs médicaments parce qu'ils ne sont pas capables de se les procurer.

Il va falloir qu'il y ait quelqu'un qui ait la conscience sociale dans votre caucus pour brasser Bernard Landry, pour brasser le président du Conseil du trésor, pour brasser votre premier ministre puis la ministre de la santé. Puis, moi, je fais appel aux députés ministériels pour donner un appui au ministre de la Solidarité sociale pour que vous ayez un caucus particulier juste sur ça, puis dire: Écoutez, ça suffit, mettez vos culottes, il y a des gens qui souffrent, puis vous devez amener des propositions dès aujourd'hui pour que ça arrête, ce carnage-là.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. le ministre.

M. Boisclair: La vigilance de la députée est de bon ton. Je salue sa persévérance, mais je ne peux faire autre chose que lui répéter la réponse que je lui ai donnée tout à l'heure. Mon intérêt sur cette question, il est déclaré depuis longtemps. Les rencontres avec les gens concernés ont eu lieu à plusieurs reprises. Nous avons, nous-mêmes, fait notre analyse de la situation. Nous avons un certain nombre de recommandations et de conclusions auxquelles nous en sommes arrivés. Le gouvernement prendra une décision. Et, comme la députée, j'entends tous ceux et celles nous dire que... D'abord, le premier ministre s'est engagé clairement à apporter des modifications, la ministre aussi souhaite apporter des modifications. Je comprends que ce ne sont pas des choses simples à modifier, mais j'ai confiance que le gouvernement va respecter son engagement, comme il l'a fait pour tous les autres engagements qu'il a pris au premier mandat et qu'il respectera aussi au deuxième mandat.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Merci, M. le ministre. Mme la députée de Saint-Henri-Sainte-Anne.

Mme Loiselle: Bien, juste pour conclure sur ça, Mme la Présidente, parce que ce qui me trouble le plus, c'est que, sachant que c'est eux qui ont mis en place le régime, sachant qu'ils connaissaient... On les a avisés des effets pervers. Ils pouvaient, à ce moment-là, dire: Aïe! ils exagèrent. Je peux l'accepter. Mais, sachant que, depuis le mois d'août, l'ex-ministre avait une partie du rapport en poche et connaissait les effets sur la vie des gens, sachant que, pendant la campagne électorale, en novembre, le premier ministre était au courant puis il a promis des changements... Aïe! novembre, décembre, janvier, février, mars, avril. On arrive au mois de mai. Il n'y a rien, rien, rien qui a été fait. Puis, pendant que rien ne se fait - c'est presque six mois, plus deux ans d'implantation - puis sachant qu'il y a eu des morts, Mme la Présidente, sachant qu'encore aujourd'hui il y a des gens qui souffrent à cause de l'inertie de ce gouvernement-là à mettre en place des propositions, des scénarios pour régler la situation...

Qu'est-ce qu'il va falloir pour convaincre ce gouvernement qu'il aurait dû agir hier? C'est pour ça que, moi, je n'en reviens pas. Ce n'est même pas de la politique, là, qu'on parle ici. On parle de gens dont l'état de santé s'aggrave à tous les jours, puis il n'y a rien qui se fait. Il n'y a rien qui se fait. Je ne parle pas de l'implantation des CLE, ou quoi que ce soit. En quelque part, là, dans la vie... C'est une question de vie humaine. Puis on nous promet des choses, puis il ne se passe rien. Parce que le gouvernement aura à payer son inaction, son manque de compassion, puis... Je ne peux même pas trouver les mots pour exprimer, en quelque part, le dégoût de voir l'inaction de ce gouvernement-là pour réparer les souffrances qu'il a faites à ces personnes-là.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Oui, M. le ministre.

M. Boisclair: Je retiendrai, cette fois-ci, l'aveu de la députée de Saint-Henri-Sainte-Anne, qu'elle exagère parfois. On l'a tous entendue, ici.

Mme Loiselle: Le mot «dégoût» est le mot parfait pour déterminer la situation que vivent ces gens-là.

M. Boisclair: Je comprends que ça puisse être agréable d'utiliser des gros mots, mais...

Mme Loiselle: Ce n'est pas des gros mots, c'est dans le dictionnaire.

M. Boisclair: La députée aurait intérêt à nuancer un peu son propos. Elle pourrait rappeler aussi qu'il n'y a pas si longtemps, dans notre société, quelqu'un qui était séropositif, qui devait consommer pour 15 000 $ de médicaments par année, devait glisser à l'aide sociale pour pouvoir se payer des médicaments. Elle devrait se rappeler qu'il n'y a pas si longtemps, dans notre société, quelqu'un qui souffrait, par exemple, de fibrose kystique, qui avait un parent ou un enfant qui souffrait de fibrose kystique, devait payer des dizaines de milliers de dollars par année pour pouvoir rencontrer les besoins essentiels de son enfant qui n'avait pas droit à une assurance. Donc, il y a un principe général, je pense, qui a été affirmé par le gouvernement, qui a été de rendre accessible une assurance à tout le monde. Qu'on veuille discuter aujourd'hui des seuils, de la prime, du montant, du pourcentage de coassurance, de la franchise, soit.

Je rappellerai que le gouvernement n'a pas attendu le rapport pour apporter un certain nombre de modifications. Quand on a décidé de mensualiser la prime et de la porter à 16 $, on a soulagé plusieurs familles qui avaient de la difficulté, gérant un tout petit budget, à pouvoir avoir accès aux médicaments, malgré le régime. Il y a une première modification qui a été apportée et, je pense, qui a soulagé un certain nombre de personnes. Tous les membres du gouvernement vous disent qu'il faut en apporter d'autres, et j'ai confiance que nous respecterons notre engagement. Et j'attends l'appui de la députée de Saint-Henri-Sainte-Anne, comme je suis convaincu de l'appui de tous les collègues députés, qui se sont d'ailleurs exprimés à plusieurs reprises sur cette question.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Mme la députée de Saint-Henri-Sainte-Anne, toujours sur le même sujet, parce que j'ai une demande d'intervention de la part de la députée de Mille-Îles. Est-ce que ça complète ce sujet?

Mme Loiselle: Oui, oui. Justement pour terminer en disant que je préférais les premiers propos de notre échange, du ministre, parce que, là, il vient de me servir la cassette du député de Charlesbourg, l'ancien ministre de la Santé, qu'il m'a servie pendant deux ans à cet égard-là. C'est sûr qu'on salue les bonifications du programme, Mme la Présidente, on l'a toujours fait. Mais ce qu'on décrie aujourd'hui, c'est les effets pervers de l'implantation de l'assurance-médicaments sur les plus vulnérables, sur les personnes âgées, les plus pauvres du Québec, puis l'inertie du gouvernement, l'inertie du premier ministre du Québec qui, depuis six mois, nous promet des changements.

Quand on a un rapport devant nous, qui parle de la souffrance des gens, que le gouvernement ne fait rien, c'est de ça que je parle depuis tantôt. Je ne parle pas des bonifications qui ont été apportées par l'assurance-médicaments, c'est sûr, tout le monde est heureux de ça. Je parle des conséquences dramatiques sur la vie des gens. Quand on sait qu'il y a eu des morts suite à ça, Mme la Présidente, et que le gouvernement qui est en place depuis le 1er décembre n'a rien fait... Et on nous promet, on nous promet, on nous promet, mais il ne se passe rien. C'est là, moi, que je suis inquiète. C'est là que je dis que, le temps que vous ne faites rien, il y a des gens qui continuent à souffrir à tous les jours. C'est ça, le message que je dis au ministre de la Solidarité sociale: qu'il va falloir qu'il brasse son gouvernement, qu'il va falloir qu'il brasse son premier ministre parce que ça, c'est urgent. C'est plus qu'urgent, c'est la santé des gens qui est en cause.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Alors, merci, Mme la députée de Saint-Henri-Sainte-Anne. Oui, M. le ministre.

M. Boisclair: Puisque je suis interpellé, Mme la Présidente, tout simplement un mot pour dire que la députée s'indigne de façon bien inégale devant différents phénomènes qui, dans les faits, concernent les plus démunis de notre société. Mais la députée de Saint-Henri-Sainte-Anne ne se gêne pas du tout pour se promener sur les mêmes tribunes publiques que le ministre des Finances fédéral, Paul Martin, son bon ami, qui, lui, a exclu des dizaines de milliers de personnes de l'assurance-chômage, qui les a fait glisser vers l'aide sociale. Je peux utiliser ce ton-là aussi et...

Nuançons un peu nos propos. Faisons attention à des gens qui soudainement utilisent les mots de l'indignation, le dégoût, et ainsi de suite. Je pense que ce n'est pas de cette façon-là que l'opposition va réussir à réaliser son engagement d'une opposition constructive, en tout cas certainement pas tant et aussi longtemps que la députée de Saint-Henri-Sainte-Anne va se promener sur les tribunes publiques avec le ministre des Finances fédéral, qui a rendu l'assurance-chômage inaccessible à des milliers de travailleurs temporaires, à des milliers de travailleurs occasionnels, à des milliers de travailleurs saisonniers, et particulièrement à des jeunes et à des familles monoparentales.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Alors, je cède...

(11 h 20)

Mme Loiselle: Mme la Présidente, un instant, je n'ai pas terminé, s'il vous plaît.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Oui, là, c'est la dernière...

M. Boisclair: Je répondais à une question, Mme la Présidente. Là vous avez donné la...

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Alors, vous aurez peut-être l'occasion, Mme la députée, de revenir tout à l'heure.

Mme Loiselle: Oui, certainement. Certainement. On parlera des amis du ministre.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Parce que je cède la parole à la députée de Mille-Îles. Mais je répète qu'on devra terminer nos travaux vers 11 h 25, étant donné qu'on doit changer de programme, qu'on doit étudier un autre programme et permettre aux gens de transférer de salle. Alors, Mme la députée de Mille-Îles.

Mme Leduc: Je vous remercie, Mme la Présidente, et je voudrais juste, avant ma question, dire que la ministre Marois s'est engagée - ça ne veut pas dire qu'on ne fait rien - particulièrement à regarder la situation des personnes en santé mentale, puisque c'est le groupe le plus vulnérable qui a été souligné. Alors, je pense qu'il faut quand même replacer les choses. Devant cette commission même, elle s'était engagée à regarder plus précisément la situation de ces personnes-là.


Mesures s'adressant aux jeunes

Maintenant, moi, M. le ministre, je voudrais... En ce qui concerne la sécurité du revenu, on sait qu'il y a eu beaucoup de discussions quant à la situation des jeunes à la sécurité du revenu, les jeunes qui ont un haut taux de chômage, qui ont subi les effets des dernières récessions et qui subissent évidemment les effets de la précarisation du marché du travail. On sait qu'ils sont beaucoup en situation de travailleurs autonomes, etc.

Alors, je voudrais savoir - évidemment, c'est sûr que le nombre de jeunes assistés sociaux avait augmenté d'une façon assez importante lors du dernier mandat du gouvernement du parti libéral - est-ce que cette année il y a des mesures plus particulières que vous entendez prendre pour intégrer les jeunes sur le marché du travail? On sait qu'il y a eu quand même aussi... Mentionnons qu'il y a eu le rétablissement du barème unique, aussi. Déjà, les jeunes étaient discriminés quant ils étaient sous 30 ans. On sait que maintenant il y a eu un rétablissement. Mais est-ce qu'il y a d'autres mesures plus particulières que vous entendez prendre vis-à-vis des jeunes - même s'il nous reste deux, trois minutes?

M. Boisclair: Alors, sur la question des jeunes, la députée me permet d'informer les membres de cette commission que la Cour d'appel a rendu un jugement qui... Ça va intéresser la présidente de la commission puis la députée de Saint-Henri-Sainte-Anne. À l'époque où il y avait les deux barèmes, un petit barème et un grand barème, entre autres pour les prestataires de moins de 30 ans, on se souviendra que, en 1984-1985, le gouvernement libéral de l'époque avait décidé de revenir avec un barème unique, avait, en contrepartie, introduit la contribution parentale.

Il y a eu une contestation devant les tribunaux. Et la Cour d'appel, dans un jugement majoritaire, à deux sur trois, a confirmé le fait que c'était raisonnable que le gouvernement du Québec procède de cette façon. C'est un jugement qui a été publié, je pense, il y a quelques jours. Donc, ça va certainement éclairer de beaucoup les discussions pour la suite des choses. Peut-être que ce jugement sera porté en appel par le plaignant; les délais d'appel en Cour d'appel ne sont pas encore écoulés. Je tenais à vous donner cette information.

Deuxièmement, quant au pourcentage de jeunes à la sécurité du revenu, lorsqu'on regarde le nombre de jeunes de moins de 24 ans à la sécurité du revenu, juste pour donner une idée, là, de la diminution, de juillet 1996 à novembre 1998, diminution de 10 %. On est passé, dans les moins de 24 ans, à 70 000 en juillet 1996 puis on est, en novembre 1998, à 55 000. Donc, diminution significative du nombre de prestataires de la sécurité du revenu. Même chose pour les jeunes de 25 à 29 ans, de 65 000 en juillet 1996 à 46 000 en novembre 1998.

Donc, au total, chez les moins de 30 ans, le chiffre est le suivant: 136 000 en juillet 1996 et, aujourd'hui, en novembre 1998 - ce ne sont pas les données sans doute les plus... les dernières données; il y a sûrement des données plus à jour qui existent, mais ça donne une très bonne idée de la tendance - 101 000. Donc, une diminution de près de 12 %. Il est clair que les éléments les plus significatifs sont la reprise économique, la croissance du produit intérieur brut, l'augmentation de l'activité économique et les activités, aussi, du ministère auprès des jeunes.

À la question que vous posez, Emploi-Québec a la responsabilité d'un panier de mesures. C'est d'abord notre collègue Diane Lemieux qui a cette responsabilité, et je comprends que de nombreuses mesures s'adressent aux jeunes. Ce sont d'ailleurs ces derniers qui seront priorisés dans l'octroi des budgets d'Emploi-Québec, et je m'explique.

On sait très bien que le nombre de mesures qui existent comparativement à la demande n'est pas suffisant. On souhaiterait être capable d'en offrir davantage, de mesures. Le pourcentage de personnes à l'aide sociale qui participent à des mesures est d'environ, chez les aptes, 12 %, 16 % et 18 %, quelque chose dans le genre, si ma mémoire est juste... 19 %? Alors, il faudra donc utiliser des critères de repérage puis faire du ciblage auprès de nos clientèles.

Et je voudrais informer les membres de cette commission que trois critères seront retenus. D'abord deux, mais trois catégories. Au niveau du premier critère, d'abord des gens qui veulent participer à des mesures; ça, c'est la meilleure garantie de succès. Et, deuxièmement, on va identifier, comme deuxième élément, des jeunes qui sont à risque de chômage prolongé. Et de quelle façon on va les identifier? En regardant le profil de la personne mais aussi son historique, si je peux m'exprimer ainsi. Et il est clair que, là-dedans, des jeunes et des femmes chefs de famille monoparentale seront des clientèles privilégiées. Donc, je pense que les jeunes vont bénéficier de ces nouveaux outils de repérage qui vont guider les administrateurs locaux et régionaux d'Emploi-Québec dans la gestion des budgets qui sont à leur disposition.

Ensuite de ça, il est clair qu'en vue du Sommet sur la jeunesse et l'avenir du Québec nous sommes à nous questionner sur notre contribution. Nous la souhaitons la plus utile possible, et je suis à proposer un certain nombre d'initiatives. Il y a d'abord toute la question de la reconduction du Fonds de lutte à la pauvreté où il y a une occasion, certainement, au Sommet sur la jeunesse, de faire le point sur l'impact que cette initiative a pu avoir sur les jeunes.

Et je suis à penser aussi à une mesure qui pourrait nous permettre...

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): En conclusion, M. le ministre.

M. Boisclair: ...de mieux mettre à contribution certains organismes, dont les carrefours, dans le soutien à donner aux jeunes qui se destineraient à la sécurité du revenu.

Est-ce qu'on peut penser - puis vraiment je me questionne à voix haute avec vous, mais c'est ce que j'explore à l'heure actuelle - qu'un jeune qui se présente, qui est en bonne santé, qui n'a pas de problèmes de santé mentale ou quoi que ce soit, ce jeune-là qui arrive à l'aide sociale, est-ce qu'on ne devrait pas être capable de lui donner un coup de pouce, si c'est volontaire, libre, volontaire, et tout le tralala? De dire: Va plutôt au carrefour, il va te donner l'équivalent de ce que tu aurais à l'aide sociale puis les différents frais spéciaux qui peuvent venir avec une présence à l'aide sociale? Prendre une période de quatre mois, de six mois, où on va essayer de travailler vraiment, là, au coude à coude avec ce jeune-là? De cibler particulièrement des jeunes dont les parents ont déjà un historique à la sécurité du revenu, dont on sait que les chances qu'eux-mêmes se retrouvent à l'aide sociale sont très élevées puis, lorsqu'ils y sont, ils y demeurent très longtemps, selon les études qu'on a faites? Alors, je regarde ce genre d'initiatives là, Mme la députée.

Mme Leduc: Merci, M. le ministre, et je vais terminer là.

M. Boisclair: Ah bien!

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Oui, alors, M. le ministre, c'est une discussion intéressante qu'on pourra poursuivre demain après-midi.

Alors, sur ce, je suspends les travaux de la commission pour cinq minutes afin de permettre de libérer la salle.

(Fin de la séance à 11 h 29)


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