(Onze heures trente-huit minutes)
Le Président (M. Beaumier): Bonjour, madame. Bonjour, madame. Bonjour, tout le monde. Alors, nous allons commencer nos travaux. La commission des affaires sociales est réunie afin d'étudier les crédits budgétaires sous la responsabilité de la ministre de la Justice et ministre responsable de la Condition féminine également pour l'année financière 1999-2000.
Mme la secrétaire, est-ce qu'il y aurait des remplacements?
La Secrétaire: Non, M. le Président.
Remarques préliminaires
Le Président (M. Beaumier): Bon. Alors, je rappelle pour tout le monde que nous avons une heure pour passer et adopter les crédits budgétaires, et j'inviterais Mme la ministre à des remarques préliminaires. Je profite de l'occasion peut-être pour vous saluer, vous souhaiter la bienvenue ainsi qu'aux membres du Conseil du statut de la femme et aussi du Secrétariat à la condition féminine. Alors, bienvenue, tout le monde. Allons-y, Mme la ministre.
Mme Linda Goupil
Mme Goupil: Alors, M. le Président, permettez-moi, en ce début de première étude des crédits à la Condition féminine, de vous saluer et de saluer tous les membres de la commission. Aussi, je vais vous faire part d'un petit texte et, par la suite, je vous... Bien, je pense que je peux le faire tout de suite, je vais vous présenter les gens qui m'accompagnent, dans un premier temps, avant de débuter. Alors, vous avez Mme Léa Cousineau, qui est ici, à ma droite, et qui est sous-ministre au Secrétariat à la condition féminine; vous avez Mme Mailloux, qui assume par intérim la présidence du Conseil du statut de la femme; ainsi que Pauline Gingras, qui est la directrice adjointe à mon cabinet pour la Condition féminine. Également, vous avez toute l'équipe du Conseil du statut de la femme et du Secrétariat à la condition féminine qui nous accompagne. Ce sont des femmes principalement et il y a quelques hommes, qui sont grandement dévoués, qui font un travail exceptionnel. C'est agréable pour moi de travailler avec ces gens.
(11 h 40)
Alors, M. le Président, l'étude des crédits 1999-2000 me fournit l'occasion de vous présenter le bilan des activités réalisées en 1998-1999 en matière de condition féminine. Je suis convaincue qu'il y a des actions qui ont contribué à faire progresser la situation des Québécoises au cours de la dernière année. Non seulement la quantité, mais aussi la qualité de travail réalisé témoigne des efforts investis à cette fin.
À titre de ministre responsable de la Condition féminine, mon mandat consiste à assurer la coordination, la cohérence et le développement des actions gouvernementales en faveur de l'égalité entre les femmes et les hommes. Je vois, entre autres, à l'application de la politique en matière de condition féminine de même qu'au suivi et à l'évaluation des programmes d'action qui en découlent. Le Secrétariat à la condition féminine et le Conseil du statut de la femme sont les deux organismes qui, selon leurs rôles respectifs et les champs de compétence qui leur sont propres, relèvent de ma responsabilité. Je ferai donc état de leurs réalisations en 1998-1999.
Le Secrétariat à la condition féminine a continué, depuis mon entrée en fonction, à me fournir l'expertise professionnelle et le soutien administratif nécessaires à l'accomplissement de mon mandat. Afin de poursuivre l'actualisation de la politique en matière de condition féminine Un avenir à partager , le Secrétariat a lancé une vaste opération auprès de 34 ministères et organismes gouvernementaux pour faire le point sur l'état d'avancement des trois projets mobilisateurs et des 58 mesures inscrites au programme d'action 1997-2000. Les projets mobilisateurs, je tiens à le rappeler, visent l'instauration de l'analyse différenciée selon les sexes dans les pratiques gouvernementales, qui consiste essentiellement à prévoir les effets concrets des politiques et programmes sur les femmes et les hommes, la prévention des grossesse précoces et le soutien aux mères adolescentes et, enfin, le soutien à la progression des Québécoises dans les sciences et l'innovation technologique. Un rapport synthèse a donc été rédigé à cet effet.
Le Secrétariat a aussi produit des analyses et soumis des recommandations sur plusieurs questions qui ont une incidence directe sur la situation des femmes. Il a aussi pris part à de nombreux groupes de travail et comités interministériels. Parmi les dossiers sur lesquels le Secrétariat s'est penché, je citerais la politique familiale, le plan d'action jeunesse, les ententes spécifiques de développement de certaines régions, la mise en oeuvre et l'évaluation de la Politique d'intervention en matière de violence conjugale, le projet d'orientation en matière d'agressions sexuelles, la consultation nationale sur la prostitution ainsi que la Loi modifiant la Loi sur la pratique des sages-femmes dans le cadre des projets-pilotes, le nouveau régime simplifié d'impôt sur le revenu. Je pourrais poursuivre cette énumération encore longtemps, tant les sujets d'intérêt et de préoccupation des femmes, qui sont aussi ceux du Secrétariat, sont nombreux. Heureusement que le Secrétariat peut compter sur l'appui du réseau des responsables ministériels en condition féminine pour couvrir ces différents sujets!
Afin d'assurer la mise en oeuvre de la cinquième orientation de la politique en matière de condition féminine, qui porte sur la place des femmes dans le développement des régions, le Secrétariat a soutenu les bureaux régionaux du ministère des Régions et du ministère de la Métropole. Il a aussi élaboré un programme visant à augmenter la représentation des femmes dans les instances locales et régionales. Le Secrétariat à la condition féminine a d'autre part assuré la préparation et le suivi des quatre rencontres intergouvernementales des ministres et des hauts fonctionnaires responsables de la Condition féminine. Il a partagé son expertise avec les femmes de divers pays soit en accueillant des missions étrangères ou en participant, au sein des délégations, à de telles missions.
Comme je le mentionnais au début de mon exposé, je ferai aussi brièvement état des réalisations du Conseil du statut de la femme. Le Conseil est un organisme gouvernemental de consultation et d'étude qui veille à promouvoir et à défendre les droits des Québécoises. Le Conseil est un organisme indépendant, il conseille le gouvernement sur toute question liée à la condition féminine, il fournit de l'information pertinente aux femmes, aux groupes de femmes et au public. En 1998-1999, le Conseil du statut de la femme a rendu publiques ses orientations triennales. Il a témoigné en commission parlementaire sur la réforme de l'aide sociale et commenté le plan d'amélioration des services de la Régie régionale de la santé et des services sociaux de Montréal-Centre. Le Conseil a produit son premier avis régional sur les conditions de vie des femmes et le développement régional en Montérégie. Sur le plan de la recherche, le Conseil a publié un document sur la présence des femmes au sein des conseils régionaux de développement, de même qu'une étude sur la reconnaissance légale des conjointes de même sexe.
En ce qui a trait aux activités d'information, le Conseil a poursuivi la publication du magazine La Gazette des femmes . Il a conçu et produit le matériel de la Journée internationale des femmes, le 8 mars, dont le thème était Complices au fil des âges . Dans le cadre des activités entourant son 25e anniversaire, le Conseil a tenu le colloque Marcher sur des oeufs sur les enjeux du féminisme d'aujourd'hui. Par l'entremise de ses bureaux régionaux, le Conseil du statut de la femme a offert des services aux femmes et aux groupes de femmes des différentes régions du Québec. Cette présence régionale du Conseil lui permet de mettre en lumière les grands enjeux de la régionalisation pour les femmes. Il peut ainsi mieux combler les besoins de formation et d'analyse exprimés par les groupes dans le cadre de la mise en oeuvre de la politique de développement local et régional.
Je suis persuadée que l'ensemble de ces réalisations, qu'il s'agisse de celles du Secrétariat à la condition féminine, de celles du Conseil du statut de la femme ou encore de celles des autres ministères et organismes gouvernementaux, ont contribué à nous rapprocher de l'objectif de l'égalité entre les femmes et les hommes. À l'aube du XXIe siècle, je suis confiante que la société québécoise saura relever le défi de l'égalité, et ce, pour le mieux-être de l'ensemble de notre collectivité. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Beaumier): Merci, Mme la ministre. Est-ce qu'il y a d'autres membres qui auraient des remarques préliminaires? Oui, Mme la députée de Saint-François.
Mme Monique Gagnon-Tremblay
Mme Gagnon-Tremblay: Merci, M. le Président. Mes remarques seront très brèves. Étant donné que nous n'avons pas de porte-parole officiel, tous les membres de notre formation politique, les députés de notre formation politique se préoccupent de la condition féminine, donc, dans chacun de leurs dossiers respectifs, et je dois vous dire également que, la dernière fois que j'ai travaillé sur un dossier qui touchait, bon, plus particulièrement la condition féminine, c'était lors de l'adoption de la Loi sur l'équité salariale. Alors, j'en profite bien sûr pour vous saluer également, Mme la ministre, vous féliciter à titre de ministre, et Mme la secrétaire, et Mme la présidente par intérim, et tous ceux et celles qui sont ici, qui vous accompagnent aujourd'hui. Je reconnais d'anciennes bonnes collaboratrices au Secrétariat à la condition féminine et au Conseil du statut de la femme et je vous salue.
Alors, sans plus tarder, étant donné qu'on a très peu de temps, M. le Président, je céderais plutôt la parole à la députée de Beauce-Nord.
Une voix: Beauce-Sud.
Mme Gagnon-Tremblay: Beauce-Sud, pardon.
Le Président (M. Beaumier): Mme la députée de Mille-Îles.
Mme Leduc: Moi, je voudrais intervenir au niveau des remarques préliminaires.
Le Président (M. Beaumier): Oui? D'accord. C'est tout à fait correct. Allez-y.
Mme Leduc: Si on passe à la période de questions, là, je voudrais intervenir au niveau des remarques préliminaires.
Le Président (M. Beaumier): Oui. La parole est à vous.
Mme Lyse Leduc
Mme Leduc: Je vous remercie, M. le Président. Alors, à mon tour, Mme la ministre, de vous féliciter pour votre nomination au poste de ministre de la Condition féminine, de le faire publiquement, puisqu'on l'a fait d'une façon plus privée, mais de le faire publiquement aujourd'hui parce que c'est la première fois que j'ai l'occasion de participer en commission parlementaire sur le dossier de la condition féminine.
Je pense que la condition féminine, c'est un sujet qui nous préoccupe tous et toutes, et toute la population québécoise. De mon côté, évidemment, puisque, avant d'être députée, j'ai travaillé pendant 10 ans dans le milieu de la condition féminine, c'est sûr que je porte une attention particulière à l'ensemble des dossiers qui peuvent influencer les conditions de vie des femmes. Je pense que, lors de notre premier mandat, vous en avez mentionné quelques-unes, Mme la députée de Saint-François aussi, on a adopté des législations qui ont considérablement amélioré la condition de vie des femmes. Moi, je voudrais souligner celles auxquelles j'ai participé plus particulièrement: la perception automatique des pensions alimentaires, la grille de fixation des pensions, la politique familiale, les garderies à 5 $, mais plus particulièrement la Loi sur l'équité salariale.
Et vous me permettrez une remarque personnelle. Si je devais conserver un souvenir intéressant de mon temps à l'Assemblée nationale, je pense qu'aucun ne serait plus important que le moment où j'ai pu me lever à l'Assemblée nationale et voter la Loi sur l'équité salariale, compte tenu que j'étais dans ce dossier. Je l'ai suivi de différentes façons: à la fois de l'extérieur du Parlement, dans le mouvement, dans les rues, pour avoir déposé des pétitions, et à l'intérieur du gouvernement, une fois élue comme députée. Alors, je pense que c'est un moment qui, pour moi, va toujours rester privilégié et marqué dans ma mémoire, à moins qu'il y en ait d'autres dans ce prochain mandat qui l'éclipsent, mais ça m'étonnerait.
Jusqu'à maintenant, c'est celui qui, pour moi, est le plus important et qui m'amène, dans le fond, aussi à parler un peu de l'importance que peut avoir la présence des femmes dans les lieux décisionnels, dossier auquel notre gouvernement s'est quand même attardé et accorde une importance particulière. C'est sûr qu'on a posé des gestes, et un des chiffres qui est le plus important, c'est que nous sommes maintenant 23 % à la députation. C'est le nombre le plus important de femmes qui siègent à l'Assemblée nationale. D'un côté ou de l'autre de la Chambre, je pense que, à ce moment-là, toutes les élues sont les bienvenues, et font partie de la représentation des femmes, et portent les préoccupations des femmes.
(11 h 50)
Maintenant, j'ai toujours considéré ça important et j'y ai travaillé très fort, que ce soit avant d'être députée... Je me souviens d'un moment - et, sans doute, Mme la députée de Saint-François s'en souviendra - où les femmes, dans les différentes consultations, devaient partager un siège à trois groupes; alors, nous avions un tiers de siège. Je pense que ce temps-là est révolu, et ça montre les acquis. En tout cas, moi, je trouve ça important de continuer à faire cheminer les dossiers, mais de voir que, oui, ça avance et, oui, qu'il y a des choses qui changent. Alors, je pense que, maintenant, si on prend les différentes consultations, on reconnaît évidemment la place des femmes à part entière et non pas juste comme accessoires.
À cet effet, j'aimerais quand même souligner - je pense que vous l'avez souligné - le programme À égalité pour décider, qui a été annoncé le 8 mars dernier, mais qui, pour moi, est un programme très important parce que autant j'ai soutenu la présence des femmes dans les lieux décisionnels, autant je me suis rendu compte, par mon expérience personnelle, qu'il fallait soutenir leur présence continue aussi. Ce n'est pas juste de dire à quelqu'un: Oui, va t'asseoir à ce réseau-là, et là, ici, je pense particulièrement... Vu qu'on a beaucoup décentralisé les réseaux régionaux, comme les conseils de développement régionaux, les centres locaux de développement ou les centres locaux d'emploi, c'est sûr que, les femmes, ça va être de plus en plus important qu'elles soient présentes à ces instances-là, sauf que la difficulté, ce n'est pas juste la présence, c'est de faire un travail qui puisse être porteur de fruits. Dans ce sens-là, je pense que le programme À égalité pour décider reconnaît cette situation et va être un outil important pour les groupes afin que, une fois qu'une femme sera dans une instance - prenons le conseil de développement régional - elle... Les autres personnes qui sont là sont souvent soutenues par des réseaux importants, alors elle se doit d'avoir accès à un soutien pour lui permettre de faire des interventions qui sont intéressantes et qui finalement vont faire avancer la condition de vie économique des femmes.
Alors, c'est, Mme la ministre, ce que je souhaitais souligner ce matin, et je suis sûre que, au cours de la période, vous allez pouvoir nous donner plus d'information sur ce programme-là plus spécifiquement. Maintenant, je reconnais votre grande sensibilité face aux réalités et aux besoins des femmes et je suis confiante que vous ferez en sorte que les politiques gouvernementales soient adaptées à la condition des femmes. À brève échéance, je suis certaine que vous ferez tout en votre pouvoir pour contribuer à la mise en place d'un congé d'assurance parental qui est le troisième volet de notre politique familiale et qui est très important. Je pense que vous avez mon appui dans ce dossier et l'appui de l'ensemble de la députation du Parti québécois, et probablement du Parti libéral parce que je pense que, dans les dossiers qui concernent la condition féminine, on a su faire des alliances stratégiques qui ont porté fruit. Alors, je vous remercie.
Discussion générale
Le Président (M. Beaumier): Alors, on va vérifier ça tout de suite, Mme la députée de Mille-Îles. Merci beaucoup. Mme la députée de Beauce-Sud.
Programme de perception des pensions alimentaires
Mme Leblanc: Merci, M. le Président. Alors, je vais saluer la ministre de la Condition féminine, mais qui est aussi la ministre de la Justice, et je pense que c'est bien, en soi, que vous ayez les deux rôles. Je salue également l'état-major du ministère ainsi que du Secrétariat à la condition féminine. J'ai vu tantôt que le gouvernement veut faire beaucoup d'efforts pour améliorer la condition des femmes, et le rôle de l'opposition officielle en tant que critique est de s'assurer justement qu'elle puisse vous faire des critiques constructives pour effectivement apporter des améliorations au sort des femmes.
Vous assurez une coordination entre les différents ministères, vous vous assurez aussi de la cohérence des actions - c'est ce que vous nous avez dit tantôt - au gouvernement, alors ça m'amène à vous parler du dossier des pensions alimentaires. En tant que ministre de la Justice, en plus, il y a beaucoup de choses que vous pouvez faire pour améliorer ce dossier-là. Ce ne sont pas les problèmes qui manquent au niveau des pensions alimentaires. Tant le rapport du Vérificateur général que celui du Protecteur du citoyen, d'année en année, parlent des problèmes qui perdurent, et certains de ces problèmes-là... Il faut se rappeler qu'il y a 72 000 créanciers alimentaires au Québec et que plus de 90 % de ces personnes-là sont des femmes. Alors, les problèmes, tant qu'ils perdureront, vont sûrement... Pas sûrement, mais, en fait, ces problèmes-là font en sorte que les femmes et les enfants vivent des moments de détresse, vivent des moments pénibles, et c'est important de s'attaquer à cette question-là.
Et il y en a deux qui vous interpellent directement. Je veux parler du rapport du Protecteur du citoyen en 1997, dans lequel on disait: La judiciarisation est-elle encore nécessaire? Vous savez, il y a un jugement, une ordonnance de pension alimentaire qui fait foi, là... Le ministère du Revenu applique cette disposition-là, ce jugement-là qui fait suite... En fait, ça fait suite à un jugement, c'est sûr. Et, lorsqu'il y a une modification dans l'entente soit parce que les besoins augmentent, soit parce que les revenus du débiteur diminuent et qu'il y a consentement entre les deux parties, présentement, il faut retourner devant la cour et obtenir une nouvelle ordonnance.
Le Protecteur du citoyen disait, en 1997, dans son rapport qu'il demandait au ministère du Revenu d'étudier, de concert avec la Cour supérieure, le Barreau du Québec, le ministère de la Justice, la faisabilité d'octroyer au ministère du Revenu, au médiateur, le pouvoir d'apprécier un projet d'entente entre un créancier et un débiteur lorsque ce projet-là vise à modifier l'ordonnance de la pension alimentaire qui est rendue par le tribunal à cause de changements subséquents dans la situation des parties. Alors, moi, j'aimerais savoir si vous entendez donner suite à cette recommandation-là du rapport du Protecteur du citoyen.
Le Président (M. Beaumier): Mme la ministre.
Mme Goupil: M. le Président, la question soulevée par la députée de Beauce-Sud, Mme Leblanc, elle est fort pertinente, et c'est un dossier qui me préoccupe énormément, considérant qu'avant d'être assise ici je l'ai déjà été pour représenter le Barreau en ce qui touche les dossiers en matière familiale. C'est une préoccupation que nous devons avoir, et, bien que ce soit un dossier qui relève de ma consoeur, Mme Rita Dionne-Marsolais, pour ce qui est de l'évaluation du régime de perception automatique de pensions alimentaires, je me permettrai d'ajouter ceci.
D'abord, lorsque ce régime de perception automatique de pensions alimentaires a été demandé, il faut se rappeler que c'est un régime qui était demandé depuis de nombreuses années parce que, malheureusement, beaucoup de femmes et d'enfants ne recevaient pas les pensions alimentaires auxquelles ils étaient en droit de s'attendre pour subvenir aux besoins des enfants. Donc, cette réforme de la perception automatique doit faire l'objet d'une évaluation au 1er décembre de l'an 2000 parce qu'on s'est donné, d'abord, pour faire un suivi, cinq années pour permettre de bien l'évaluer parce que cette réforme-là, elle a été complexe à faire. Il y a plusieurs intervenants qui ont exprimé qu'ils étaient pour ou qu'ils étaient contre, mais, de façon majeure, les femmes souhaitaient qu'on puisse aller de l'avant avec la perception automatique des pensions alimentaires.
(12 heures)
Depuis ce temps, nous avons été à même de constater certaines problématiques, un peu comme Mme Leblanc vient de le soulever, en regard du fait que la pension pouvait varier en cours de route. Ce qui est important, c'est qu'on puisse permettre aux gens d'avoir des mécanismes souples pour pouvoir régler leur nouvel ajustement lorsque c'est possible, et notre gouvernement a mis en place justement des mécanismes pour permettre aux gens de régler des ententes à l'amiable. Donc, on a également été de l'avant avec la médiation familiale volontaire qui permet aux hommes et aux femmes, lorsqu'ils s'entendent, de pouvoir convenir de modalités de paiement pour une pension alimentaire.
Tout est possible dans la mesure où on respecte la loi, c'est-à-dire que, les parents, pour des raisons économiques ou des changements de garde, peu importe, s'il y a des modifications, il leur est possible, dans le cadre d'une entente, de rédiger un document dans lequel ils écrivent noir sur blanc leurs nouveaux arrangements, et, à ce moment-là, il n'est pas nécessaire de retourner devant le tribunal, c'est-à-dire qu'il y a une enquête ou une audition sur une entente qui est signée à la fois par le père et la mère, on convient des modifications et, à ce moment-là, avec un affidavit détaillé, chacun des parents confirme que les modifications qu'il a apportées à son entente est conforme à sa volonté. Ils s'entendent, ça a été fait avec un consentement libre et éclairé, il n'y a pas eu de pression, alors le père et la mère, dans le cadre d'un affidavit détaillé, indiquent clairement les raisons pour lesquelles ils en sont arrivés à ces modifications-là.
Je peux vous dire que, à ma connaissance, je n'ai pas vu de dossier qui, à la face même... On avait respecté l'entente des parties. On s'était assuré que le consentement avait été donné librement et de façon éclairée de la part de la mère ou du père. À ce moment-là, les ententes sont entérinées par le tribunal, et ça n'oblige pas les parents à revenir devant le tribunal, ils n'ont pas à revenir. Et, par rapport particulièrement aux pensions alimentaires, quand il pouvait y avoir un changement dû à la défiscalisation des pensions alimentaires, si les parents s'entendaient pour que le montant demeure le même sans incidences fiscales, ils n'avaient qu'à compléter un formulaire et qu'à l'acheminer au ministère, donc on n'avait pas besoin de revenir devant les tribunaux. Et c'est tellement vrai qu'on avait prévu, on avait mis des sommes d'argent en disponibilité parce qu'on croyait, on nous avait informés qu'il y aurait tellement de demandes devant les tribunaux qu'on devait prévoir des montants. Mais, finalement, les parents, en grande partie, ont réglé ça à l'amiable entre eux. Une fois qu'ils ont eu bien compris ce qu'ils pouvaient faire, ils ont convenu de régler ça à l'amiable, et, pour plusieurs personnes, elles ne sont même jamais revenues devant les tribunaux et elles ont continué à appliquer les ententes comme elles l'avaient fait dans le passé.
Mme Leblanc: Il faut tout de même, Mme la ministre, admettre que le processus doit revenir devant le ministère de la Justice, et ça occasionne, par le fait même, des délais supplémentaires au ministère du Revenu qui, lui, ne peut pas apprécier le projet d'entente, donc est lié par une décision du ministère de la Justice, et c'est ce qui provoque des délais. Et on sait que, dans des cas comme ça, les délais, ça peut parfois être très pénible. Quand une personne a une diminution de revenus et qu'elle n'est pas capable de supporter le montant de sa pension alimentaire, ça peut être très critique, ça peut mettre en péril plusieurs situations, plusieurs cas. En tout cas, il y aurait sûrement un moyen, parce que vous avez fait un bout de chemin en médiation familiale, il y a sûrement un petit bout de chemin que vous pourriez faire de façon à ce que le ministère du Revenu soit autorisé par législation à apprécier ce projet d'entente là sans pénaliser les parties.
Mme Goupil: Alors, il est évident que nous nous ajustons toujours au fur et à mesure que les demandes nous sont faites. Jusqu'à maintenant, au niveau de la perception automatique, pour les délais, on a réduit les délais de beaucoup. Selon un communiqué qui m'est parvenu récemment du ministère du Revenu, on me disait qu'on avait permis d'augmenter le taux de perception des pensions qui étaient versées sur une base volontaire de 45 % à 74 %. Donc, dans la majorité des cas, on a des grandes améliorations. Les pensions alimentaires sur une base volontaire ont augmenté jusqu'à 75 %, donc ça, c'est un élément très positif.
Maintenant, vous avez raison de dire que, peu importent les délais qu'il y a, même s'il y a des dossiers minimes, il est important... Et, lorsque nous aurons notre rapport d'évaluation qui nous sera remis par ma collègue, Mme Marsolais, responsable du ministère du Revenu, sûrement que nous aurons des améliorations ou des recommandations à faire. Mais il faut comprendre aussi que, toutes les recommandations ou les améliorations qu'on peut faire, il faut être capable d'en vérifier les tenants et aboutissants. Souvent, quand on veut mettre une mesure pour corriger, il faut s'assurer qu'on ne crée pas d'autres problèmes, et l'objectif premier de notre gouvernement était de faire en sorte que le plus grand nombre possible de familles et d'enfants puisse percevoir de façon automatique la pension alimentaire, et là-dessus, de façon unanime, les groupes de femmes, les gens qui le demandaient sont satisfaits de cela.
Maintenant, vous savez, habituellement, lorsqu'il y a des changements de pension alimentaire, entre autres pour des raisons comme vous avez évoquées tout à l'heure, dans plus de 90 % des cas, ce sont des ententes à l'amiable, et, à l'amiable, ce que ça veut dire, c'est que papa et maman se sont parlé, ont pris en compte les éléments de fiscalité qu'ils avaient, leurs revenus, les besoins, et, je vais vous dire, grâce, entre autres, à ces nouvelles mesures là, on a permis davantage aux parents de se parler. Voici, on a des balises qui sont claires, on a des balises qui sont comprises par les gens, et, lorsque les gens comprennent ces balises-là, il est beaucoup plus facile d'engager un processus de discussion. Alors, dans ce contexte-là, je vous dirai que plus de 90 % font l'objet d'ententes, et, lorsque les gens s'entendent, ils peuvent déjà inscrire dans leur entente: Nous, parents, nous nous sommes entendus pour une certaine modification et nous demandons au ministère de prendre en compte notre entente. Et, tant et aussi longtemps que le dossier ne sera pas en état au ministère, les parties pourront entre elles payer directement la pension alimentaire, donc la souplesse.
Il y a beaucoup, beaucoup, beaucoup de souplesse qui a été apportée, et cette souplesse-là, elle a été apportée parce que, au fur et à mesure qu'on avançait, on s'est fait identifier de façon claire et précise quelle était telle problématique dans tel cas et on s'est donné des outils pour faciliter les choses. Donc, dans les 90 % des dossiers où les dossiers se règlent à l'amiable, il est possible, pour papa et maman qui ont des enfants, d'écrire dans leur entente: Tant et aussi longtemps que le dossier ne sera pas pris en charge par le ministère, nous continuons à nous entendre entre nous, c'est-à-dire que le père peut payer directement la pension alimentaire à la mère tant et aussi longtemps que le système ne prend pas en charge le dossier, et ça peut durer longtemps. Ce qui est important, c'est que la pension alimentaire soit payée et pour les enfants et pour la mère qui, elle, assume encore en grande partie la responsabilité des enfants.
Mme Leblanc: Merci, Mme la ministre, de ces précisions-là. Je ne veux pas partir une guerre de chiffres avec vous, là, mais je vous signale qu'il ne faut pas trop se gargariser avec le fait qu'il y a 45 % à 74 % de gens qui paient volontairement leur pension alimentaire. Je pense que le programme a donné ses suites. L'important, le chiffre qui est important, qu'il faut se rappeler, c'est qu'il y avait 26 % des gens qui ne payaient pas leur pension alimentaire. On a voulu inclure tout le monde dans le même bateau, on a créé des problèmes administratifs épouvantables. On tente encore de corriger, après trois ans, tous ces problèmes-là. Et savez-vous que le nombre de mauvais payeurs dû au nouveau système a baissé de 5 % seulement? Ça, c'est le chiffre qui est important. C'est parce que l'objectif du gouvernement était que toutes les femmes perçoivent leur pension alimentaire. Bien, là-dessus, on a obtenu un gain de 5 % seulement. Alors, il y a encore beaucoup de choses à faire, il y a encore 21 % des hommes qui ne paient pas leur pension alimentaire malgré le fait qu'on ait la loi sur la perception des pensions alimentaires. Malgré le fait qu'on a voulu y mettre tout le monde, tout ce qu'on a fait, finalement, c'est de s'occasionner des problèmes, de causer des problèmes aux femmes qui recevaient auparavant leur pension alimentaire sans aucune difficulté. Alors, il faut toujours faire attention aux chiffres que l'on prend.
Délais de correction d'un dossier concernant la garde des enfants
Ça m'amène à vous parler d'un autre dossier qui ressemble au premier, et c'est l'ordonnance de la Cour du Québec par la chambre de la jeunesse. Encore là, c'est à peu près le même problème, c'est-à-dire que, si le jugement, l'ordonnance dit que c'est la mère qui a la garde des enfants, et si le père verse une pension alimentaire, et si, pour une raison ou une autre, à un moment donné, la chambre de la jeunesse modifie la garde, la confie au père, admettons, à ce moment-là le ministère du Revenu n'est pas capable de modifier la pension alimentaire, il va continuer à aller débiter le père et créditer la mère qui n'a pourtant plus ses enfants, et ça occasionne des problèmes et des délais épouvantables, encore une fois, à des enfants qui sont dans le besoin pendant deux, trois mois avant qu'on règle leur situation. Alors, encore là, le Protecteur du citoyen avait soulevé le fait qu'il faudrait modifier la législation pour que, aux conditions à déterminer, le ministère du Revenu puisse tenir compte d'une décision rendue par la Cour du Québec, chambre de la jeunesse. J'aimerais vous entendre là-dessus, Mme la ministre.
Programme de perception des pensions alimentaires (suite)
Mme Goupil: On a terminé tout à l'heure sur l'autre sujet, puis je vais répondre à votre deuxième intervention. D'abord, faut se rappeler que, au Québec, je peux vous dire que, dans ma pratique de tous les jours, en matière de droit familial, l'ensemble des parents assumaient leurs responsabilités. La perception automatique des pensions alimentaires a même facilité la vie à ceux et celles qui s'entendaient parce que, pour eux, c'est devenu un élément de discussion qu'ils n'avaient pas à discuter.
Vous savez, malgré que des gens réglaient leur dossier à l'amiable, il arrivait encore souvent que c'étaient les enfants, qui se transportaient avec leur petit packsack, qui amenaient le chèque qui, pour une raison ou une autre, avait été oublié, bon. Alors, je vous dirais que ça a eu pour effet de faciliter la vie de bien des gens, le fait que la perception automatique des pensions alimentaires, c'était quelque chose qui était un peu comme les gens qui font des prélèvements automatiques pour le paiement de l'électricité, des prélèvements automatiques pour Vidéotron. Alors, l'obligation alimentaire, pour des parents responsables, c'est quelque chose qui va de soi. Il est normal que l'on contribue financièrement pour nos enfants, donc les parents responsables ont demeuré, et, pour eux, c'est devenu aussi un outil facilitant.
(12 h 10)
Et je peux vous dire que, dans la grande majorité... Parce qu'il y a toujours des cas d'exception. Avoir une boule de cristal puis être magicienne, on réussirait à régler tous les cas, mais ce n'est pas la réalité. Notre objectif est d'essayer de donner des outils à l'ensemble de la population du Québec qui lui conviennent puis qui conviennent à ses besoins. Donc, pour la perception, vous avez raison de mentionner que tout n'est pas parfait, et c'est la raison pour laquelle ma collègue va être en mesure de nous présenter un rapport gouvernemental qui va faire un état de la situation des cinq dernières années, les améliorations qui ont été faites et les points sur lesquels il reste encore de l'amélioration. Nous allons y travailler, et j'ai assuré à ma collègue qu'elle aurait mon entière collaboration parce que c'est un domaine que je connais bien et que, la pratique sur le terrain avec les femmes et avec les hommes, je la connais bien.
Vous savez, parfois ce n'est pas de la mauvaise volonté, mais, dans la machine gouvernementale, avec des hommes et des femmes pour lesquels j'ai un grand respect, qui travaillent très fort, le temps d'harmoniser toutes les étapes, parfois il y a des petits éléments qui font en sorte qu'on peut facilement régler une technicalité; mais, pour cela, faut prendre le temps de se rencontrer, de discuter, d'analyser. Et, si on propose des réformes, on ne peut pas le faire pour un cas d'espèce ou pour deux - peut-être que ça, ça peut se régler de façon individuelle - mais il faut apporter des améliorations, lorsqu'on a besoin d'en avoir, qui répondent à l'ensemble de la collectivité. Alors, pour ça, vous pouvez être assurée, Mme Leblanc, que je vais travailler de concert avec ma collègue. Nous avons déjà eu des rencontres, particulièrement pour tous les dossiers qui touchent les femmes, et on va continuer à le faire.
Délais de correction d'un dossier concernant la garde des enfants (suite)
Maintenant, pour ce qui est de l'ordonnance au niveau du Tribunal de la jeunesse, vous savez que, justement au Tribunal de la jeunesse, c'est des dossiers qui sont très émouvants, des dossiers qui ne sont pas faciles, des dossiers où les juges ont à prendre des décisions par rapport au fait: Est-ce qu'on laisse l'enfant dans le milieu, est-ce qu'on le change de parent, etc.? Souvent, il y a des décisions qui sont prises de façon temporaire en attendant qu'on arrive à un autre processus ou qu'on prenne une nouvelle décision ou en attendant qu'on ait un rapport d'expertise qui vienne éclairer la cour davantage pour savoir qu'est-ce qui serait le mieux pour l'enfant, la preuve qui est présentée. Donc, ce n'est pas des jugements qui ont normalement une application à long terme. Alors qu'un jugement de la Cour supérieure, c'est pour statuer sur qui aura la garde des enfants dans une situation où il n'y a pas de problème particulier, au Tribunal de la jeunesse, c'est un dossier qui est plus particulier.
Je peux vous dire encore une fois que, lorsque les gens qui représentent les parents vont devant les tribunaux, ils prennent la peine d'expliquer aux gens qui travaillent à la Sécurité du revenu la situation ou la particularité. J'ai des exemples, je l'ai déjà vécu moi-même personnellement, et, tant et aussi longtemps qu'on n'avait pas une décision finale des tribunaux, tant et aussi longtemps qu'on ne réévaluait pas le dossier à court ou à moyen terme, on mettait le dossier sur la glace, c'est-à-dire que les gens qui travaillaient avaient le discernement, et, selon aussi les éléments qu'on leur amenait...
Vous savez, quand on dit les choses en toute transparence, quand on explique la situation clairement aux gens qui travaillent à la Sécurité du revenu dans le cadre du programme de la perception et qu'on prend le temps de leur expliquer une problématique particulière ou qu'on explique, par exemple, que l'enfant va être temporairement chez la mère plutôt que chez le père, ou vice versa, il y a des ajustements qui peuvent se faire. Cependant, il faut prendre la peine d'expliquer dans quel contexte on se situe et si la décision du Tribunal de la jeunesse, c'est une décision à court terme, à moyen terme ou à long terme. Et je vous dirais que, au niveau du Tribunal de la jeunesse, les personnes qui font des représentations devant le Tribunal ont comme mandat premier de s'assurer que les parents puissent se parler. Indépendamment des conflits qu'ils peuvent vivre, nous avons toujours intérêt à faire parler le père et la mère afin qu'ils puissent prendre des décisions.
Dans les dossiers les plus conflictuels qu'il peut y avoir, quand on prend la peine, on réussit à expliquer aux gens et on leur soumet, avec un petit document, une entente dans laquelle on indique clairement que la mère, pendant une période x, n'aura pas la garde de l'enfant, et il est possible de préparer un petit document, de l'acheminer d'abord au tribunal pour que le tribunal puisse l'entériner sans qu'il y ait des représentations. Ça se fait dans un contexte, je vous dirais, assez simple.
Le Président (M. Beaumier): Merci, Mme la ministre. Pour les fins de gestion de nos travaux, je vous rappelle que nous devons terminer au plus tard à 12 h 38 et que j'ai déjà quatre membres qui ont demandé d'intervenir; alors, chacun gérera le temps pour que tout le monde puisse se prévaloir de ses droits. Le député de Kamouraska-Témiscouata, s'il vous plaît.
Intégration du dossier de l'équité salariale aux négociations des conventions collectives
M. Béchard: Merci, M. le Président. D'abord, j'ai écouté avec attention les remarques préliminaires de la ministre, notamment quand elle parlait de l'objectif d'égalité entre les femmes et les hommes. Elle est sûrement au courant des démarches présentement de la Centrale de l'enseignement du Québec relativement à l'équité salariale, et j'aimerais savoir de sa part si sa position est la même que celle de son gouvernement, c'est-à-dire de voir à régler la question de l'équité salariale à l'intérieur de l'ensemble des négociations qui concernent le secteur public. Et savoir un peu: Est-ce qu'elle est plutôt d'accord avec les démarches de la Centrale de l'enseignement du Québec pour dire qu'il faut éviter d'y aller dans différents calculs qui feraient en sorte que finalement les buts qu'on recherche, en jouant sur les échelons et autres, sont beaucoup plus d'en arriver à un exercice qui, en bout de ligne, ne réglerait pas le problème d'équité salariale comme tel, à une situation qui permettrait d'évacuer la question de l'équité salariale, je dirais, des présentes discussions?
Il y a différentes propositions qui avaient été faites à l'époque où la Loi sur l'équité salariale avait été adoptée, et notamment une de ces propositions-là, si je me souviens bien, était de faire en sorte que les augmentations de masse salariale prévues en ce qui a trait à l'équité salariale soient pour régler l'équité salariale. Donc, on profite d'un contexte de négociations où l'on augmente de toute façon la masse salariale comme telle pour régler en même temps les questions d'équité salariale, et j'aimerais voir, la ministre, à quel niveau, comment elle est impliquée dans le présent dossier de négociations, entre autres, sur la question de l'équité salariale dans le secteur de l'enseignement.
Le Président (M. Beaumier): Mme la ministre.
Mme Goupil: Alors, M. le Président, en ce qui a trait au dossier sur les relations de travail, c'est ma collègue, Mme Diane Lemieux, qui est responsable de ce dossier, et, comme vous l'avez mentionné, actuellement nous sommes en pleines négociations, et, dans l'optique des négociations, la Loi sur l'équité salariale en fait partie. Évidemment, la Commission devra aussi se prononcer sur tout ce qui touche la Loi sur l'équité salariale parce que vous savez qu'il y a des griefs de certains regroupements syndicaux, et tout ça. Je peux vous dire que, comme Mme Leduc le disait tout à l'heure, c'est un dossier que nous suivons de très près, que je suis de très près. J'ai grande confiance en ma collègue, Mme Lemieux, qui est bien au fait de cette réalité-là aussi, et c'est le Conseil du trésor qui actuellement est mandaté pour s'occuper de toutes les négociations. Donc, vous comprendrez, M. le député, que je n'en dirai pas plus dans le cadre de l'étude des crédits de la Condition féminine.
Le Président (M. Beaumier): Merci, Mme la ministre. M. le député de Masson.
Représentation des femmes à des postes décisionnels
M. Labbé: Alors, merci, M. le Président. Mme la ministre, permettez-moi d'abord de vous féliciter pour votre nomination, dans un premier temps. Ensuite, vous annonciez dernièrement, le 8 mars dernier, donc à l'occasion de la Journée internationale de la femme, la sortie d'un programme de soutien financier intitulé À égalité pour décider . Alors, j'aimerais, si c'est possible, que vous puissiez m'indiquer un petit peu les objectifs et la clientèle qui vont être visés par ce programme, et peut-être même certains exemples types de projets qui pourraient être acceptés, à ce moment-là.
Le Président (M. Beaumier): Mme la ministre.
Mme Goupil: Alors, M. le Président, comme Mme Leduc en parlait tout à l'heure, du programme À égalité pour décider, je rappellerai un petit peu le contexte dans lequel ce programme-là avait été lancé. D'abord, je ne m'approprierai pas à moi seule la réalisation de ce programme parce que, dans notre gouvernement, ce sont principalement les femmes qui étaient en place qui assumaient la responsabilité de ce dossier, en l'occurrence Mme Harel qui travaillait avec toutes les femmes députées qui siégeaient lors de la Législature précédente. Mais, cependant, j'ai pris la relève quand je suis arrivée, et c'est un dossier dans lequel j'ai travaillé avec les gens du Secrétariat aussi pour m'assurer qu'on allait bien avoir les budgets nécessaires pour le faire. Et c'est dans ce contexte que, dans le cadre de la Journée internationale, nous avons annoncé ce programme.
(12 h 20)
Vous savez, le thème Complices au fil des âges , j'étais en présence de ma fille et de ma mère au moment où j'ai annoncé ce programme. Pour moi, ça a été un grand privilège de pouvoir le faire parce qu'il y a des femmes extraordinaires qui ont fait en sorte que j'aie eu le goût, moi-même, personnellement, d'abord d'étudier, le goût aussi d'occuper des postes qui sont fort importants. Et, comme première femme ministre de la Justice, n'eût été du travail exceptionnel des femmes qui m'ont précédée, je pense qu'on n'aurait pas pu encore voir une femme occuper cette fonction-là à l'aube de l'an 2000. Donc, oui, il y a un travail extraordinaire qui a été fait, et je profite de l'occasion pour rendre hommage à ces femmes. Mme Gagnon-Tremblay, vous qui occupez les fonctions que vous occupez, vous avez été à votre manière, vous aussi, quelqu'un qui a donné le goût aux femmes de continuer à s'avancer, bien que ce ne soit pas toujours facile de le faire. Et permettez-moi de vous dire que je suis heureuse que, avec ce programme-là, on puisse aller de l'avant parce qu'il y a encore énormément de travail à faire.
Donc, ce programme est pour permettre aux femmes, dans leurs localités, dans les régions, de pouvoir occuper davantage des postes ou des fonctions qui sont à des endroits stratégiques où les décisions se prennent pour notre société. Nous sommes heureux, comme gouvernement, de voir que les femmes ont plus de place, et notre gouvernement a fait de la place, mais il faut aller de l'avant parce qu'il y a encore beaucoup de régions qui ne sont pas représentées. Ce programme-là, évidemment, ça permet, d'abord, de s'assurer que l'on ait davantage comme préoccupation que les femmes et les hommes soient à des degrés et à des normes égalitaires pour prendre les décisions qui nous concernent. Donc, ce programme-là, c'est un programme dans lequel on a un budget financier de 1 000 000 $ par année. C'est un programme qui sera offert pour les cinq prochaines années, et il s'adresse aux organismes locaux et régionaux à but non lucratif, et ça, justement pour qu'on puisse augmenter le nombre de femmes sur les postes décisionnels principalement dans nos localités et dans les régions. C'est un outil que le gouvernement met à la disposition de ces groupes pour favoriser une participation plus large des femmes aux instances locales et régionales.
Les projets qui sont présentés devront permettre - j'ai quelques critères ici - de faciliter et de promouvoir l'accès des femmes aux postes décisionnels des instances locales et régionales, d'augmenter le bassin des candidatures de femmes à ces postes, de préparer et de former ces femmes à occuper ces postes, de leur donner le soutien nécessaire pour qu'elles demeurent sur ces postes aussi, qu'elles aient le goût de continuer, et enfin de sensibiliser les institutions sur la nécessité d'une répartition plus équitable des postes de décision entre les femmes et les hommes.
Alors, évidemment, ce programme est conçu pour permettre que les femmes, qui composent la moitié de notre population, soient en nombre équivalent à celui des hommes sur ces postes de décision, et ce qui est important, c'est que c'est un programme qui est quand même souple, qui a des balises, puis je vais vous en parler un petit peu. Des projets de réalisation, il pourrait s'agir, exemple, d'une constitution de noms de femmes qui pourraient être ciblées pour occuper des postes, ça pourrait être aussi la mise sur pied d'un réseau dans une région Y, où on aurait un réseau de personnes qui viendraient informer les femmes des postes qu'elles pourraient occuper et leur faire connaître les organigrammes, leur faire connaître c'est quoi, un CLD, c'est quoi, les centres locaux de développement, à quoi on s'attend d'une femme pour qu'elle occupe un poste de conseiller, conseillère, à quoi on s'attend d'une femme lorsqu'elle est mairesse, en fait, pour bien faire connaître les structures, pour bien faire connaître tous les organismes qui finalement prennent des décisions importantes pour les régions.
La date d'entrée en vigueur de ce programme: ce programme débutera dans la première semaine de mai - c'est bien cela. On en fera une promotion pour toutes les régions du Québec, on va l'annoncer officiellement. Ce qu'il est important aussi de dire, c'est quels sont les critères qui vont être retenus pour accepter ou refuser un projet qui sera présenté par un groupe, un organisme à but non lucratif d'une région. D'abord, les critères sont les suivants: la pertinence du projet, la qualité, l'impact, les coûts du projet et la crédibilité de l'organisme responsable. Alors, il faut aussi s'assurer que ce programme corresponde aux orientations qu'on s'est données dans notre politique de condition féminine. Donc, c'est des critères qui sont à la fois souples mais à la fois spécifiques pour être capable de répondre à notre besoin qui est de faire en sorte qu'il y ait plus de femmes qui occupent des postes en région.
Une fois que les critères de sélection seront rencontrés par l'organisme qui demandera des sous, il y aura un comité qui, lui, va être formé de femmes qui sont issues de toutes les régions du Québec et qui va, en fait, recommander qu'on puisse accepter tel projet plutôt qu'un autre. Donc, ça va se faire en toute transparence, ça va se faire en partenariat avec le Secrétariat et ça va se faire aussi en concertation avec ce comité sur lequel vont siéger des femmes de toutes les régions du Québec. Donc, c'est un programme fort intéressant. C'est un programme qui confirme que nous tenons nos engagements aussi parce que M. Bouchard l'avait annoncé pendant la campagne électorale, qu'on verrait à mettre en place un programme pour susciter l'intérêt et pour s'assurer d'une meilleure représentation en région. Je suis heureuse et j'invite toutes les femmes du Québec, dès que le programme sera annoncé, au mois de mai, à y participer dans le plus grand nombre possible, et ainsi on pourra augmenter le nombre de représentations de femmes dans ces postes de décision.
J'aimerais ajouter ceci, que le gouvernement, ce qu'il met en place, c'est un outil, mais j'invite aussi le domaine privé, les entreprises privées à participer, à faire des efforts pour s'assurer que nous ayons des femmes qui occupent des postes sur des conseils d'administration, ou peu importe. Ça ne se fait pas seul, ça se fait, la promotion des femmes sur des postes de décision, avec des femmes et avec des hommes aussi, avec le gouvernement, mais avec les partenaires privés, et c'est comme ça qu'on va réussir à être représentatives de la moitié de la population que nous sommes, les femmes, au Québec.
Le Président (M. Beaumier): Mme la ministre, merci beaucoup. Alors, Mme la députée de Saint-Henri-Sainte-Anne.
Mme Loiselle: Merci, M. le Président. Juste un commentaire sur ce que vous venez de dire. On m'a remis une note dans laquelle on remarque que, sur le conseil d'administration de la Caisse de dépôt et placement du Québec, sur 12 membres dont certains sont nommés par le gouvernement, ce ne sont que des hommes. Alors, peut-être sensibiliser davantage, au sein de votre cabinet, ceux qui décident des personnes à être nommées sur les conseils d'administration, particulièrement de la Caisse de dépôt, parce que, actuellement, dans le dernier rapport de la Caisse, il n'y a aucune femme, et pourtant on me fait remarquer aussi que 100 % des fonds de pension des femmes au Québec sont à la Caisse de dépôt. Alors, ce serait peut-être bon qu'on nomme quelques femmes à ces postes décisionnels.
Mme Goupil: On va continuer, il y a du travail encore à faire, vous avez raison.
Mme Loiselle: Il y a du travail à faire parce qu'il n'y en a pas une. Ha, ha, ha!
Mme Goupil: Mais, cependant, on a quand même 144 % d'augmentation au niveau des sous-ministres, depuis deux ans, qui sont des nominations féminines. Mais, vous avez raison, il faut continuer.
Impact du virage ambulatoire sur certaines femmes
Mme Loiselle: Exact. Moi, je veux revenir sur le virage ambulatoire, l'impact du virage ambulatoire sur les conditions de vie de certaines femmes. L'année dernière, j'ai eu un échange avec la ministre responsable de la Condition féminine et je lui rappelais que, avec les ratés du virage ambulatoire, il y a des femmes qui ont été obligées d'abandonner leur poste, leur travail parce qu'elles devaient dorénavant s'occuper d'un parent malade, d'autres ont dû laisser un poste permanent pour seulement accepter un travail occasionnel parce qu'elles devenaient responsables, qu'elles devenaient l'aidante naturelle, comme on appelle, du parent malade, d'autres, à cause justement de leur vie qui a été mouvementée par l'impact du virage ambulatoire, ont développé certaines maladies comme de l'anxiété, de l'angoisse, de la détresse psychologique. À l'époque, la ministre de la Condition féminine m'a dit deux choses, que le ministre de la Santé et le gouvernement étaient en train de faire une évaluation de l'impact des conditions de vie des femmes à cause des ratés du virage ambulatoire, et on m'a dit aussi - Mme Mailloux - que le Conseil du statut de la femme était en train de faire une réflexion importante sur ces impacts-là et d'amener des recommandations au gouvernement.
Étant donné que le temps file, alors je demande à la ministre: Un, est-ce que le gouvernement a terminé son évaluation? Quels en sont les résultats et quelles recommandations va-t-il prendre? Et est-ce que le Conseil du statut de la femme a aussi terminé sa réflexion? Si oui, est-ce que c'est possible d'obtenir les grandes lignes de ce que vous recommandez au gouvernement de faire pour remédier à cette situation-là?
Le Président (M. Beaumier): Alors, juste un instant, Mme la ministre. C'est qu'il est midi trente, donc j'aurais besoin de l'autorisation des membres pour continuer jusqu'à 12 h 38?
Mme Loiselle: 12 h 35 parce que, nous, on a notre caucus, en préparation à la période de questions, à midi trente.
Le Président (M. Beaumier): 12 h 35? Alors, il resterait trois minutes parce qu'il faut procéder à la mise aux voix des crédits. Il resterait trois minutes. C'est un métier odieux, mais c'est un métier.
(12 h 30)
Mme Goupil: Alors, M. le Président, il est évident que ce qui a été dit par mes prédécesseures était exact, et nous continuons toujours à reconnaître tout le travail qui a été fait. Puis, quand vous dites «les ratés du virage ambulatoire», bien, je me permettrais avec grand respect de vous reprendre parce que vous savez que c'était nécessaire qu'on puisse le faire. On se devait de le faire.
Mme Loiselle: ...quand même. Ça a été mal fait. Les femmes paient le prix de ça.
Mme Goupil: Et, malgré tout cela, on a quand même des réussites. M. le Président, ce que j'aimerais juste ajouter, c'est que, juste au niveau du gouvernement du Parti québécois, on a clairement indiqué qu'il y aura un budget de 25 000 000 $ qui va apporter du support aux familles et aux proches - le plus souvent qui sont des femmes - habitant avec des patients en convalescence, des personnes âgées ou des handicapés, comme ma collègue vient de le mentionner. Pour ce qui est de l'état de la situation, où on en est, je vais demander à Mme Mailloux de répondre exactement au suivi du dossier.
Le Président (M. Beaumier): Mme Mailloux.
Mme Mailloux (Thérèse): Eh bien, moi, ce que je peux vous dire en ce qui concerne le Conseil, c'est que nous avons effectivement travaillé toute l'année sur une grosse recherche, je dirais, sur les impacts sur les femmes du virage ambulatoire. Malheureusement, nous approchons d'un avis, mais il n'est pas encore rédigé - c'est ça - bien que nous voyions, avec la recherche, quelques pistes qui se dessinent déjà et qui peuvent être intéressantes. Mais, dans un premier temps, nous allons livrer les résultats de cette recherche-là qui est une recherche fort fouillée, documentée.
Vous savez, le virage ambulatoire, c'est un phénomène très, très complexe. C'est un phénomène complexe parce que, d'abord, on a tendance à le confondre avec toutes sortes d'autres phénomènes qui sont arrivés en même temps, ne serait-ce que la volonté de réduire les coûts, la régionalisation aussi qui s'est passée un petit peu avant et à laquelle, à tous ces mouvements-là, se superpose finalement le virage comme tel et qui vise peut-être plus, de façon plus précise, à écourter les séjours dans les hôpitaux, etc. Donc, ce que nous avons fait, nous, c'est vraiment étudier de façon plus spécifique quels sont ces effets-là sur trois catégories de femmes: les femmes aidantes - c'est peut-être le plus gros morceau - les femmes travailleuses et puis les femmes patientes, bien entendu. On a étudié surtout le domaine des soins physiques, médecine et chirurgie, puis celui de la périnatalité parce que, lui, il concerne uniquement les femmes. Alors, qu'en est-il, par exemple, des courts séjours lors des grossesses, des accouchements en hôpitaux? Quels sont les effets du retour à la maison plus précoce, et tout ça, dans ces cas-là?
Il y a beaucoup de documentation qui commence à sortir seulement sur le virage, et il est indéniable qu'il y en a, des effets. En particulier pour les femmes aidantes, il y a effectivement un alourdissement des tâches des femmes. Alors, nous, dans notre recherche, on va effectivement essayer de trouver des moyens qui ne sont pas faciles, mais des moyens passant peut-être par notamment des modifications aux lois du travail. On annonce des modifications à l'automne aux lois du travail; est-ce qu'on peut penser, là-dedans, à prendre en compte la dimension du virage et de ses effets sur les femmes et donc à voir non pas seulement la perspective des enfants - il y a ça aussi - la conciliation famille-travail qu'il y a à améliorer, mais est-ce qu'on ne peut pas aussi prendre en compte ce nouveau phénomène là qui est que de plus en plus de familles s'occupent dorénavant d'un malade, de personnes âgées? Bon. Donc, ce rôle-là revient souvent aux femmes, et les femmes doivent être appuyées, c'est clair, pour ce rôle.
Adoption des crédits
Le Président (M. Beaumier): Merci beaucoup, Mme Mailloux. Alors, est-ce que le programme 5, intitulé Condition féminine, est adopté?
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Beaumier): Est-ce que les crédits budgétaires sous la responsabilité de la ministre de la Justice, responsable de la Condition féminine, pour l'année financière 1999-2000 sont adoptés?
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Beaumier): Alors, compte tenu de l'heure, j'ajourne les travaux, et merci, tout le monde. Mme la ministre.
Mme Goupil: ...remercier de l'excellent travail les gens autant au niveau du Conseil du statut de la femme que du Secrétariat, parce que ces femmes-là se préparent énormément. Alors, merci beaucoup.
Mme Loiselle: Et de l'opposition! Et de l'opposition! Bien oui, dites-le!
Des voix: Ha, ha, ha!
(Fin de la séance à 12 h 35)