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Version finale

35th Legislature, 2nd Session
(March 25, 1996 au October 21, 1998)

Thursday, June 13, 1996 - Vol. 35 N° 28

Étude détaillée du projet de loi n° 33 - Loi sur l'assurance-médicaments et modifiant diverses dispositions législatives


Étude détaillée du projet de loi n° 11 - Loi modifiant la Loi sur les services de garde à l'enfance et d'autres dispositions législatives


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Table des matières

Projet de loi n° 33 – Loi sur l'assurance-médicaments et modifiant diverses dispositions législatives

Projet de loi n° 11 – Loi modifiant la Loi sur les services de garde à l'enfance et d'autres dispositions législatives


Autres intervenants
M. Rosaire Bertrand, président
Mme Madeleine Bélanger
M. Claude Boucher
M. Jean Garon
M. Serge Deslières
Mme Solange Charest
M. Michel Létourneau
* Mme Claudette Pitre-Robin, CIRGQ
* Mme Hélène Potvin, idem
* Mme Nicole Marcotte, Office des services de garde à l'enfance
* Mme Danielle Joyal, idem
*Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats


(Onze heures vingt-trois minutes)

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): À l'ordre, s'il vous plaît! Le quorum est constaté, nous pouvons commencer. Je vous rappelle, un, que la séance est ouverte; deux, le mandat de la commission: la commission des affaires sociales se réunit afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 33, Loi sur l'assurance-médicaments et modifiant diverses dispositions législatives.

Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Vaive (Chapleau) sera remplacée par M. Fournier (Châteauguay).


Projet de loi n° 33

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci. Nous arrivons maintenant aux remarques préliminaires. Je vous rappelle que chaque membre de la commission a 20 minutes de remarques préliminaires, mais non pas en deux ou trois périodes. Si vous prenez 10 minutes, c'est 10 minutes; si vous prenez 15, c'est 15, mais 20 minutes maximum. M. le ministre, vous commencez les remarques préliminaires, s'il vous plaît.


Remarques préliminaires


M. Jean Rochon

M. Rochon: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord très brièvement rappeler quels sont les grands objectifs qui sont poursuivis par ce projet de loi. Deuxièmement, je pense qu'il est utile, vu qu'on commence l'étude article par article, de revoir de façon synthétique les principaux commentaires qu'on a eus, les principales critiques et suggestions qu'on a eues lors des auditions, et je finirai en essayant de montrer comment les modifications qu'on a faites au projet de loi, à mon avis – et je pense qu'on a de plus en plus de témoignages qui vont dans ce sens-là – répondent essentiellement et assez bien aux commentaires, aux critiques et tiennent compte des suggestions de façon satisfaisante pour qu'on puisse vraiment procéder et, je l'espère, adopter à cette session-ci ce projet de loi qui sera très important pour la population du Québec.

D'abord, on se rappelle la situation générale qui nous amène à viser trois objectifs avec ce projet de loi là. Il y a d'abord une question d'équité – c'est vraiment la question fondamentale – entre les Québécois et les Québécoises quant à la protection vis-à-vis du médicament. Présentement, la situation est la suivante. Il y a un certain nombre de personnes dans notre société qui ont une couverture très bonne, excellente, et c'est essentiellement les gens qui sont les prestataires de l'aide sociale, par exemple; et les personnes âgées, qui ont leurs médicaments, dans le cas des prestataires de l'aide sociale, pour à peu près aucun coût. Aucun prix n'est demandé. Pour les personnes âgées, on sait que les médicaments sont offerts avec un 2 $ à payer par médicament. S'il y a trois, quatre médicaments qui sont prescrits sur une prescription du médecin, ça fait trois ou quatre ordonnances, donc ça peut coûter 6 $ ou 8 $, ce qui fait que les personnes âgées qui utilisent beaucoup de médicaments vont payer jusqu'à une centaine de dollars par année avec ce 2 $. Alors, ça, c'est 1 500 000 personnes.

Il y a 4 500 000 personnes au Québec qui ont des couvertures par des régimes collectifs qui sont des régimes qui font partie des conventions collectives négociées entre les employeurs et les employés et qui sont gérés par l'employeur et les assureurs privés. Et ces régimes sont très différents, très diversifiés: il y en a qui offrent une assez bonne protection, d'autres sont des régimes plus... ce qu'on appelle des régimes de type catastrophe, c'est-à-dire que, si les médicaments coûtent très cher, au-delà d'un montant très élevé, pour éviter que quelqu'un se ruine complètement, l'assurance va alléger un peu le montant.

Quatre millions cinq cent mille personnes; 1 500 000 qui sont sur le régime public avec une bonne protection, je pense; et, finalement, il y a 1 100 000, 1 200 000 personnes au Québec qui n'ont aucune couverture et qui sont des gens qui sont des travailleurs autonomes, des gens qui ont des petits revenus et beaucoup de personnes qui ont des emplois précaires, des emplois à temps partiel. Et, pour eux, avec le type d'emploi qu'ils ont et dans des entreprises qui ne sont pas assez grosses pour avoir un syndicat et pour avoir un régime collectif négocié entre l'employeur et l'employé, le choix d'une prime individuelle n'en est pas vraiment un, parce que, présentement, une police d'assurance-santé qui couvre les médicaments pour un individu coûte très, très cher. Ça va jusqu'à 700 $, 800 $, voire 1 000 $ par année, s'il y a une couverture qui est le moindrement consistante.

Donc, il y a vraiment un problème d'équité, parce que, collectivement, au Québec – régime public, régime privé, personnes non assurées qui paient de leur poche quand elles ont besoin de médicaments – on dépense 2 200 000 000 $, 2 300 000 000 $ par année, et ça augmente. Le coût augmente régulièrement, puis on a très peu de contrôle efficace là-dessus. Alors, j'arrête la démonstration, pour le moment, là-dessus, mais je pense qu'on peut retenir une conclusion: il y a énormément d'argent qu'on dépense; comme population, on n'en a pas vraiment pour notre argent; s'il y a des gens qui ont une bonne protection, d'autres en ont une moyenne, puis d'autres n'en ont pas du tout. Alors, collectivement, on n'a pas notre dû, et, sur une base individuelle, bien, il y a des gens qui, là-dedans, pour tout l'argent qui est dépensé comme société dans ce domaine-là, en retirent vraiment très peu.

La deuxième question, c'est le contrôle des coûts dans un domaine comme ça. Les coûts, ça dépend de deux choses: ça dépend du prix et ça dépend de l'utilisation, du volume dans l'année. Le prix. Il y a deux aspects, au moins, au prix, là, si on veut résumer ça rapidement, en ce qui regarde les médicaments. Il y a le prix sur l'ensemble des médicaments sur lequel il y a un certain contrôle qui a été institué dans l'ensemble du Canada à partir de 1987, je pense, où il s'est créé par le gouvernement fédéral un comité d'examen et de contrôle des prix du médicament, et ça, ça a permis d'amener sous contrôle l'augmentation du prix qui suit au moins des paramètres économiques et qui s'ajuste plus à l'évolution du produit intérieur brut, par exemple. Mais ce qui est venu compliquer la situation et qui est hors contrôle par les organismes de contrôle des prix, c'est tous les nouveaux médicaments qui sont des produits de biotechnologie ou qui sont des médicaments qui ont nécessité de longues années de recherche pour, en général, des maladies chroniques graves.

(11 h 30)

Bon, on en a parlé beaucoup devant la commission. On a rencontré des gens qui représentaient des patients qui souffrent des différents types de cancers – la leucémie chez les enfants, par exemple – des gens qui souffrent de sclérose en plaques, des gens qui souffrent de fibrose kystique. Bon, il y a peut-être une bonne demi-douzaine de maladies au moins – le sida est important là-dedans – pour lesquelles il y a de ces nouveaux médicaments qui commencent à venir sur le marché, et ça, ça coûte terriblement cher. Ça coûte de 10 000 $ à 20 000 $ par patient, par année pour avoir ces médicaments-là. Alors, personne ne peut se payer ça de sa poche, et les régimes privés ne couvrent pas ça actuellement; ça coûte trop cher. Parce que, comme une entreprise privée est là pour faire des profits, nécessairement, tout régime privé d'assurance fait ce qu'on appelle de la sélection de risques, et on fait la sélection de risques de deux façons: soit en chargeant plus cher compte tenu de l'âge et de l'état de santé de la personne qui s'assure ou en excluant carrément des gens ou des services. En tout cas, des gens qui ont un état de santé ou un âge qui coûteraient trop cher, il y a des programmes qui ne les prennent pas, même dans le collectif. Ou des services ou des médicaments qui coûtent trop cher, on ne les met pas sur la liste de ce qu'on a à offrir. C'est ce qui permet de contrôler un régime purement privé.

Donc, il y a ce prix-là des nouveaux médicaments sur lequel on n'a pas de contrôle et qui coûte des millions de dollars, très rapidement, pour des petits groupes de personnes, mais pour qui ça fait la différence, quasiment, entre la vie et la mort ou entre une vie de grabataire et une vie avec une autonomie, puis un bon fonctionnement, puis une intégration utile dans une société. Alors, s'ils sont pris tout seuls pour porter le poids de ces médicaments-là si coûteux, ils ne s'en sortent pas, c'est foutu. Avec des petits budgets de fonds de tiroirs, on ne peut plus les aider, ça coûte trop cher. Donc, on revient à cette problématique d'un besoin de mutualiser, de se partager le coût du médicament pour que tout le monde en ait selon ses besoins.

J'ai dit que, dans le coût, il y a un autre élément. En plus du prix, il y a l'utilisation. Sur l'utilisation du médicament, il y a beaucoup d'études de faites. On sait très bien qu'il y a deux types de problèmes avec ça. Il y a, pour des gens, une sous-utilisation de médicaments. Il y a des gens – le groupe dont je viens de parler, par exemple – qui ont un problème de santé grave pour lequel les médicaments qui existent, c'est des médicaments nouveaux, qui sont puissants, qui peuvent les aider beaucoup, mais qui coûtent très cher, et, à ce moment-là, les gens peuvent ne pas les prendre. Même si ce n'est pas si dramatique, quelqu'un qui a une hypertension artérielle, par exemple, qui doit prendre des médicaments régulièrement, s'il prend des médicaments régulièrement, ça fait une différence énorme, parce que ça veut dire qu'il va éviter complètement un problème cardiovasculaire ou que, s'il l'a, de toute façon, ça va le retarder de 10, 15, voire 20 ans. Mais, comme l'hypertension, ce n'est pas quelque chose qui fait mal à chaque jour, que ce n'est pas quelque chose qu'on ressent, que c'est vraiment une médication qui est prise de façon préventive, si ça coûte trop cher, que les gens n'ont pas assez d'argent, à un moment donné, il y a un problème d'observance, comme on dit, les gens ne le prennent pas. Bien, là, cinq ans après, ils vont avoir un problème majeur, cardiaque ou vasculaire, qu'ils auraient évité complètement ou qu'ils auraient retardé autrement.

Il y a de la sous-consommation. Maintenant, il y a de la surconsommation aussi, dans le système actuel, où il n'y a pas assez de contrôle, et on sait que, surtout, chez les personnes âgées – ça, c'est très bien documenté – en quantité, il y a des médicaments, souvent, qui se prennent trop, surtout des psychotropes, Valium, Librium, ou des médicaments pour dormir, ou des choses du genre. Et il y a des mélanges, comme, souvent, à mesure qu'on avance en âge, on peut avoir différents types de problèmes de santé, qui ne sont pas très grands, mais qui font appel à différentes médications, et puis on sait que, quelqu'un qui prend quatre ou cinq médicaments différents en même temps, ça cause des situations qui sont risquées parce qu'il y a des interactions entre ces médicaments-là qui ne sont pas toujours faciles à prévoir. Et ça, là-dessus, c'est assez dramatique, parce qu'on a des études – il y en a une qui a été faite l'année dernière en Colombie-Britannique – qui révèlent que, dans une année, il y a eu 10 000 hospitalisations qui étaient causées directement ou indirectement par une mauvaise utilisation du médicament. Et, sur ces 10 000 personnes-là – c'était quand même assez grave – il y en a 90 qui sont décédées.

On sait – il y a des études américaines qui ont été faites et des études, ici, au Québec – que, parmi les personnes qui consomment régulièrement des médicaments, il y a à peu près 20 % de ces gens-là qui, dans une année, se retrouvent dans une salle d'urgence, ou dans une clinique externe d'hôpital, ou chez leur médecin pour un problème qui est relié à la prise du médicament, à une mauvaise utilisation en trop ou à un mauvais «mix» du médicament et que, parmi ces personnes-là, ce 20 % là qui a un problème qui les amène à l'urgence ou à la clinique externe, il y en a 15 % que c'est assez grave qu'on doit les hospitaliser. Donc, on a, là encore, un autre problème de contrôle, et ça nous coûte très cher. Il y a des gens qui n'en ont pas assez par rapport à leurs besoins puis il y a des gens qui en prennent trop, puis non seulement ils en prennent trop, mais ça leur cause un problème de santé, la façon dont ils prennent trop de médicaments. Bon. Problème d'équité, problème d'utilisation, problème de coûts. Alors, il me semble que, si on veut continuer à offrir un service aux gens, il faut bouger. J'ai dit qu'il y avait trois choses.

En plus de l'équité et du coût relié à l'utilisation et au prix, le troisième, c'est le lien avec le virage ambulatoire. On sait que, maintenant, grâce à différentes technologies – on en a parlé beaucoup, je ne vais pas m'étendre longtemps là-dessus ce matin – il y a beaucoup de traitements, beaucoup d'interventions dans le domaine de la santé qui peuvent être faites de façon beaucoup plus légère, de façon beaucoup moins agressive, qui demandent de moins en moins d'hospitalisations et d'institutionnalisations d'une forme ou d'une autre, et, parmi toutes ces technologies-là, il y a, évidemment, le médicament. Il y a beaucoup de problèmes de santé qui peuvent être bien contrôlés, avec lesquels les gens peuvent être à l'aise, confortables, fonctionner dans leur communauté plutôt qu'être en établissement, mais à condition que le médicament soit disponible. Donc, si on veut continuer et réussir ce virage ambulatoire qui est terriblement important pour donner des bons services aux gens et pour qu'on en ait, là aussi, plus pour notre argent, il faut que le médicament soit disponible aussi, comme les autres technologies qu'on veut utiliser, pour, comme on a dit souvent, là, la bonne personne au bon endroit puis au bon moment. Donc, c'est ça, les objectifs essentiels de ce projet de loi: assurer une meilleure équité dans l'accès aux médicaments, nous donner les moyens d'avoir un meilleur contrôle sur le coût et faire le lien avec le virage ambulatoire.

Bon. Qu'est-ce qu'on nous a dit en commission sur le projet qu'on propose? Je résume. Il y a quatre ou cinq points majeurs, je pense – là, je suis obligé d'être très synthétique, je n'essaie pas d'être exhaustif – pour pouvoir décider si le régime proposé est bon ou pas bon, si on peut y aller tout de suite ou s'il faut retourner aux tables à dessin. Bon. On nous a dit, d'une part: Comme le régime est présenté, on ne voit pas très bien l'encadrement. Il y a des mécanismes de contrôle des prix et de l'utilisation, comme le Conseil consultatif de pharmacologie qui assure la qualité du produit qui est mis sur la liste disponible. Il y a la Revue d'utilisation des médicaments pour assurer qu'on fait une meilleure utilisation selon les besoins des gens. C'est-à-dire, on ne voit pas, là, peut-être complètement où on s'en va là-dessus, et, tout ça, ça référait, en fait, au manque de lien avec la politique du médicament qu'on va développer, qui va aussi devoir prévoir comment on s'assure qu'on réalise les objectifs qu'on s'est donnés, quel genre de suivi et d'évaluation continue va être faite de ce programme-là, par quel indice et comment va se faire toute la formation des professionnels pour qu'ils améliorent la qualité du service et l'information à tout le monde, y compris, et surtout, à ceux qui utilisent le médicament.

Et les gens nous ont demandé aussi: On voudrait pouvoir participer un peu plus. Là, le Comité consultatif de pharmacologie et le Comité de revue de l'utilisation des médicaments, c'est des comités très techniques. Les gens ont demandé de pouvoir être représentés là-dessus autrement, mais de pouvoir dire un mot via leur représentant, qui va informer, d'abord, et influencer le décideur, qui va influencer le ministre, qui devra faire des recommandations au gouvernement pour le suivi de ce programme-là qu'il devra lui-même gérer avec la Régie de l'assurance-maladie. Les gens veulent être plus en lien avec les décisions qui vont se prendre. Première chose qu'on nous a dite.

Je pense, pour chacun d'eux, là, je vais essayer de montrer en même temps – ça va être plus facile – ce qu'on amène comme changement pour répondre à ça. Alors, quand on arrivera à l'étude article par article, on va déposer un article, un amendement, un ajout à la loi qui va faire la référence et identifier les éléments essentiels de la politique du médicament. Et, pour répondre à l'autre suggestion qu'on nous a faite, on a repris une suggestion qui avait été faite par le comité Castonguay, ce qu'on avait l'intention de faire, de toute façon, mais on n'avait pas prévu de le mettre dans la loi. Mais on va les mettre dans la loi. Ça va être plus clair que, ayant une politique du médicament, il y aura un groupe de concertation, comme le proposait le rapport Castonguay, qui sera responsable d'aviser et de conseiller le ministre sur l'élaboration et sur la mise en oeuvre de la politique du médicament.

(11 h 40)

Deuxièmement, on nous a parlé, évidemment, beaucoup – et ça, je pense que c'est assez crucial – des coûts de ce programme-là, qui se répartissent de deux façons. Et je pense qu'il faut vraiment les voir de deux façons parce que c'est deux logiques complémentaires qui s'appliquent. Il y a d'abord une prime. C'est d'abord une assurance, une prime. Et la prime, ce que ça paie, c'est la protection. On paie tant par année, tant par mois pour avoir une protection. Alors, je pense que la bonne comparaison qu'on peut faire avec ça, c'est l'assurance automobile. On peut payer de l'assurance automobile pendant des années sans avoir jamais d'accident, si on est chanceux, puis jamais se servir de notre assurance, et, dans un sens, on peut dire qu'on a payé pour rien. Mais on n'a pas payé pour rien, on a acheté une protection. Quand le problème nous arrive, par exemple, qui, souvent, causerait des déboursés énormes qui pourraient ruiner quelqu'un dans une année, bien, comme on a une protection, à ce moment-là, pour la fois que ça nous arrive, très souvent, on est content, parce que ça compense pour les fois où ce ne sera pas arrivé. Et, si quelqu'un a la chance que ça ne lui arrive jamais, bien, dans un sens, tant mieux. Il s'est donné une protection, c'est encore mieux de l'avoir eue que pas du tout, parce qu'on ne peut pas savoir d'avance si on en aura besoin ou pas. Alors, la prime qui est demandée, c'est ça que ça paie. Ça, il faut être bien conscient de ça, et c'est important qu'elle soit ajustée, que ça ne coupe pas l'utilisation du médicament et que, en termes d'équité, on se partage le coût du régime, qui est financé, d'abord, par la prime, équitablement.

Il y avait deux problèmes là. On nous a dit – les syndicats entre autres, je me rappelle très bien, et d'autres représentants – que, en général, comme le programme était présenté, les paramètres étaient même assez généreux. On a utilisé cette expression-là devant la commission, c'est-à-dire que, ce qu'on demandait, c'était assez généreux si on compare ça à d'autres produits. Je voyais juste dans les journaux, ce matin, par exemple, que Desjardins offre une assurance-convalescence qui va offrir certains services pour des gens qui ont besoin d'un peu de convalescence, de compenser à 80 % pour des services de convalescence quand quelqu'un quitte l'hôpital. Bien, la prime qui est demandée pour ça, qui offre quelque chose – je n'ai pas évalué le détail, là – qui n'est pas énorme comparativement à une assurance-médicaments, varie de 19 $ à 30 $ selon l'âge des gens. C'est gradué.

Alors, il y avait ça et il y avait un problème de liquidités. On a dit: Il y a des gens qui ont des petits salaires, à ce qu'on proposait, qui vont avoir une prime moins grande, qui vont être compensés, qui vont payer une prime partielle. Ils ont dit: S'il faut toute la payer et qu'on est compensés à la fin de l'année, il faut quand même avoir de l'argent à débourser.

Alors, ces problèmes-là, je pense qu'on a répondu à ça, parce que, avec la décision qui a été prise d'avoir – et ça, je pourrai y revenir si j'ai le temps – toute l'assurance individuelle régie et gérée par la Régie de l'assurance-maladie du Québec, on n'aura plus à payer d'avance la prime et elle va être payée seulement à la fin de l'année. Au moment où les gens vont payer leur impôt, on demande au ministère du Revenu... Et ça, ça ne fait pas de la prime une taxe et un impôt. Le ministère du Revenu prélève d'autres contributions qui sont faites au moment du rapport d'impôts. On paie, même... le fonds de l'assurance va payer le ministère du Revenu pour faire ça pour la Régie de l'assurance-maladie du Québec.

Les assureurs nous ont dit qu'ils n'étaient pas capables de rencontrer les paramètres qu'on avait fixés. On a toujours dit que la prime allait être entre 175 $ et 200 $ par individu, par année. Les assureurs privés, avec qui on veut travailler, avec qui on va travailler de toute façon parce qu'ils vont demeurer responsables du collectif, ne peuvent pas rencontrer ça. Et je pourrai m'étendre là-dessus tout à l'heure, quand on en rediscutera. Alors, la Régie de l'assurance-maladie, elle, peut le faire, et la prime va être de 175 $ par année, tout compris, frais administratifs inclus, et elle va être payable à la fin de l'année seulement. Ça revient à une prime de 15 $ par mois, alors c'est pas mal moins cher que l'assurance qui est annoncée ce matin, qui va de 19 $ à 30 $ – juste pour faire un point de comparaison – et les gens auront à payer seulement à la fin de l'année. Et, pour ceux qui paient une prime partielle... Il y a beaucoup de personnes qui vont payer 40 $, 80 $ ou seulement 120 $ plutôt que de payer toute la prime, selon leur revenu, la prime va être payable selon le revenu. Le maximum pour une famille qui a un revenu au-dessus de 30 000 $, 31 000 $, ça sera la prime de 175 $, et ça va être pris seulement à la fin de l'année.

Je finis rapidement en rappelant, vu qu'il ne me reste pas de temps – et je reviendrai, dans notre discussion, sur les autres éléments – l'autre grosse modification qui a été faite. On a dit: Les paramètres sont généreux, mais il y a toujours un problème de liquidités aussi. Si on est obligé de payer une franchise de 100 $ et de payer toute notre franchise dès le premier achat parce qu'on a une grosse prescription, les gens n'auront peut-être pas l'argent. On dit: Si c'est des gens qui sont des gros consommateurs, même s'il y a un plafond à 200 $, à 500 $ ou à 750 $, selon les revenus, si on est obligé de le payer en dedans de quelques mois, ça peut coûter cher. Alors, là, le changement qu'on a fait, il est très important, c'est que le plafond pour les plus petits revenus, tous les gens qui sont des prestataires de l'aide sociale et les personnes âgées qui ont le supplément de revenu garanti maximum – ça, c'est 9 % des personnes âgées – tout ça ensemble, ça fait à peu près 700 000 personnes qui ne vont avoir aucune prime à payer et qui vont avoir un plafond à 200 $, et le plafond à 200 $ va être exigible sur une base trimestrielle, c'est-à-dire que, par blocs de trois mois, le plafond va être un maximum de 50 $. Quand la personne va avoir payé 50 $ pour des médicaments, le reste du trois mois, ça ne coûtera plus rien. En commençant l'autre trois mois, la personne va repayer jusqu'à concurrence de 50 $. Après ça, ça ne coûte plus rien. Et, comme ça, c'est plus facile en termes de liquidités financières et ça reste un plafond qui est bas.

Les personnes âgées qui ont le supplément partiel de la sécurité du revenu auront un plafond à 500 $, exigible aussi sur une base trimestrielle, selon la consommation. Une personne qui utilise, on sait bien, pour 300 $ de médicaments, là, qu'elle va payer dans l'année, c'est une personne qui va en avoir consommé pour la valeur de 900 $. Le régime paie les deux tiers, et les personnes paient de leur poche seulement le tiers du médicament.

Alors, pour les autres choses, les pharmaciens nous ont dit des choses: La gestion, on la trouve compliquée. On l'a simplifiée. Je reviendrai, si j'ai un peu plus de temps, plus tard, M. le Président, mais je pense sincèrement que tous les commentaires étaient importants pour s'assurer que ce programme-là parte bien, soit sous contrôle et améliore énormément la situation d'un grand maximum de personnes au Québec. Qu'il demande une contribution supplémentaire à certaines personnes, c'est vrai, mais dosée selon leurs revenus. Il va nous donner un programme de solidarité sociale très important au Québec et il va permettre en même temps d'absorber l'ensemble du prix du médicament dans tout le système, de sorte qu'on va faire une économie générale dans l'ensemble du système de santé et des services sociaux. Je m'arrête là-dessus, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci, M. le ministre. Je passe maintenant la parole au député de Robert-Baldwin, porte-parole officiel de l'opposition en matière de santé et de services sociaux. M. le député.


M. Pierre Marsan

M. Marsan: Merci, M. le Président, mais, avant de prendre la parole, je voudrais demander au ministre... Il nous avait promis de déposer les règlements du projet de loi. Il l'avait fait à l'Assemblée, et on s'attendait à ce qu'ils soient déposés à l'Assemblée nationale, et j'apprécierais avoir le dépôt de ces règlements.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): On me dit, M. le député, que ce serait à l'étape des motions préliminaires.

M. Marsan: Je vous rappelle qu'il y a eu, je pense, la promesse du ministre, là, à l'Assemblée nationale, que ça soit déposé à l'Assemblée.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Le message est passé. J'imagine que vous pouvez quand même commencer, M. le député.

M. Marsan: Juste avant, est-ce que c'est parce qu'ils ne sont pas prêts, M. le Président?

M. Rochon: M. le Président, sur la base de l'expérience qu'on a eue avec l'autre commission, on va suivre notre procédure de façon rigoureuse, et il n'y a personne qui va se mêler, là. Alors, tout va être déposé au moment où ça doit être déposé. Les règlements vont être déposés au moment où on sera rendu pour ça.

Maintenant, l'autre chose. Avec les simplifications qu'on a faites et avec la transparence plus grande qu'on a donnée, il y a une bonne partie des choses qui devaient être dans les règlements et pour lesquelles on n'aura plus besoin de règlements ou bien certaines choses qui vont être dans la loi. Les paramètres du programme, la franchise, la coassurance et le plafond vont être dans la loi. Alors, il y a un...

M. Copeman: Ils vont être dans la loi?

M. Rochon: Ils vont être dans la loi. Alors, toutes ces choses-là vont sortir de façon précise à mesure qu'on va avancer dans chacun des articles. Alors, si on est assez efficace pour procéder assez bien et rapidement, tout va tomber sur la table, comme information, au moment où ça sera utile pour notre discussion, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci, M. le ministre. M. le député.

M. Marsan: Alors, M. le Président, je comprends que c'est parce qu'ils ne sont pas prêts, les règlements...

M. Rochon: Ils sont prêts.

M. Marsan: ...au moment où on se parle...

M. Rochon: Ils sont prêts à être déposés, M. le Président.

M. Marsan: ...parce que, s'ils étaient prêts, ils seraient déposés.

M. Rochon: Ils sont prêts. On a déjà déposé à l'avance des choses, et ça a juste confondu le débat, parce que l'opposition s'est complètement mêlée avec ce qu'on lui a donné comme information avant le temps.

M. Marsan: M. le Président...

M. Rochon: Alors, ils vont l'avoir à temps, quand on va être rendu à étudier ça.

M. Marsan: ...je pense que c'est moi qui ai le droit de parole.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous invite à commencer votre 20 minutes, M. le député.

M. Marsan: Je vous remercie beaucoup, M. le Président.

M. Copeman: Ça va bien. Ça va bien.

M. Marsan: Un projet de loi...

Une voix: Ça va très bien.

M. Marsan: ...sur l'assurance-médicaments qui doit être universel, eh bien, c'est quelque chose qui est extrêmement important et intéressant. Un régime universel de collection d'impôts, c'est quelque chose qui est très désagréable lorsqu'on l'arrime au régime universel d'assurance-médicaments. On poursuit deux objectifs complètement contradictoires. D'un côté, on veut assurer l'ensemble des Québécoises et des Québécois pour leurs médicaments, mais, de l'autre, on profite de l'instauration d'un nouveau régime pour récupérer des impôts: 196 000 000 $ inscrits au premier budget de M. Bouchard.

M. le Président, on nous dit en plus que ce n'est pas une taxe déguisée. Vous vous souvenez de cette promesse du premier ministre qu'il n'y aurait pas d'augmentation d'impôts dans le budget? Eh bien, le ministre de la Santé confirme qu'il y aura vraiment une augmentation d'impôts, puisque, dans le cas des régimes individuels, lorsqu'on va vouloir assurer les 1 200 000 personnes additionnelles, la prime sera perçue à la fin de l'année avec le rapport d'impôts. Ce que ça veut dire, c'est que, sur votre rapport d'impôts, il va y avoir une petite ligne et que, pour la première année, ça va être marqué 176 $ de plus. Bien, ça, c'est la promesse de M. Bouchard de ne pas augmenter les impôts. Beau cadeau, M. le Président!

Le ministre, quant à lui, il devient le percepteur d'impôts. Alors, sous la tutelle du premier ministre et du Conseil du trésor, c'est lui qui va faire les basses oeuvres de collecter les contribuables du Québec.

M. Gaulin: M. le Président...

M. Marsan: Je voudrais...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Oui, M. le député de Taschereau.

M. Gaulin: Article 35.

M. Marsan: Mon temps...

M. Gaulin: Je ne vois pas en quoi, même si c'était vrai qu'on collecte des impôts, c'est des basses oeuvres de collecter des impôts quand on est un État. Alors, je demanderais au député de surveiller ses propos.

(11 h 50)

M. Marsan: M. le Président, je pourrais vous l'expliquer rapidement. Nous avons un régime d'assurance-médicaments. On doit fournir à la population une assurance pour payer les médicaments, pas pour collecter des impôts, et c'est pour ça que je dis ça.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous invite à poursuivre, M. le député.

M. Marsan: Nous remarquons également, chaque fois qu'on a eu des votes, soit sur des motions d'ajournement, de report, ou encore sur le principe, que ça ne fait pas l'unanimité du côté du parti ministériel. Plusieurs personnes restent assises et n'applaudissent même plus le ministre. Plusieurs ministres, certaines ministres, M. le Président.

On nous a gargarisés du principe d'équité sociale. C'est ça, la grande équité, M. le Président: l'individu qui gagne 15 000 $ ou celui qui gagne 1 000 000 $ par année vont payer le même montant pour leurs médicaments. Beau principe d'équité au Parti québécois et au gouvernement ministériel!

On a trouvé quelque chose, cependant: c'est qui, qui va payer. Ça, on l'a trouvé puis on l'a trouvé comme il faut. On ne sait pas encore comment ça va fonctionner, ce régime-là, mais on sait qui va payer, M. le Président, et ce sont les personnes aînées. Et je me permettrai de saluer quelques jeunes personnes aînées qui sont ici, que je me permets de rencontrer pour une des premières fois, des gens de Québec, je crois, et qui semblent vraiment intéressés par ce qu'il va leur coûter, ce nouveau régime. On sait qui va payer. On se demande simplement qui consomme les médicaments. Eh bien, ceux qui consomment le plus, ce sont les personnes aînées de 65 ans et plus. On sait qu'elles consomment, en moyenne, pour 800 $ par année et que les premiers estimés du régime font en sorte qu'elles vont supporter ce régime à 80 % des coûts.

On a un nouveau discours du ministre et du premier ministre, M. le Président: il fallait adapter la situation. Alors, ce qu'on entend maintenant, c'est que les aînés sont riches, qu'ils sont capables de payer et que les pauvres ont les moyens. M. le Président, c'est un renversement de situation depuis la dernière campagne électorale, vous allez en convenir. Je voudrais rappeler au ministre que, en pleine campagne, il accusait les libéraux de vouloir aller chercher 2 $ dans la poche des personnes aînées dans le cadre de la circulaire «Malades sur pied». Ça a bien changé.

Je voudrais quand même rappeler que le Parti libéral, à tous les moments de son existence, a toujours été le parti qui a participé aux grandes réformes sociales, que ce soit le système d'assurance-santé, que ce soit la nouvelle loi 120, passée sous l'ancien gouvernement. Eh bien, de nouveau, M. le Président, nous disons oui, puis un gros oui, à un véritable régime d'assurance-médicaments pour tous les Québécois, mais nous disons un non retentissant au collecteur des impôts, à celui qui ne maintient même pas sa promesse, une autre fois, qu'il ne devait pas imposer les Québécoises et les Québécois.

Un court rappel, M. le Président. Vous vous souvenez du mandat confié à M. Castonguay pour nous donner des alternatives, comment devrait être implanté un régime d'assurance-médicaments. Alors, ce dernier a fait des consultations privées – on n'a toujours pas su qui il avait rencontré exactement – et il y a eu, suite au rapport de M. Castonguay, le dépôt du projet de loi, dépôt qui a été fait la dernière journée où on pouvait déposer des projets de loi dans cette session, c'est-à-dire le 15 mai. Pourquoi? Parce que le projet n'était pas prêt. Et on a attendu à la dernière minute. De nouveau, on fait preuve d'improvisation.

Le projet de loi était très incomplet. Première modification: le ministre dépose un communiqué de presse et nous donne des barèmes d'exemption selon le revenu familial. Alors, exemption de la prime, M. le Président. Par la suite, nous avons eu des audiences publiques – je pense qu'on les appelle ainsi – nous avons invité beaucoup de groupes, et plusieurs d'entre eux nous ont fait des recommandations extrêmement intelligentes et intéressantes. Le ministre ne les écoute pas. Une recommandation revenait tout le temps, à tous les groupes, ou presque, et c'était de reporter ce projet de loi parce qu'il n'était pas prêt, parce qu'il n'avait pas fait l'objet d'études sérieuses dans son application.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député, je m'excuse. Est-ce que je peux avoir l'attention, s'il vous plaît, de tout le monde, parce qu'il y a beaucoup de bruits qui nous viennent, et c'est difficile de suivre.

M. Marsan: Je pense que ce serait intéressant, M. le Président, que les députés ministériels écoutent vraiment ce que nous avons à dire...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député...

M. Marsan: ...à ce sujet.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): ...vous n'avez pas, je pense, à commenter. C'est moi qui préside. Alors...

M. Marsan: Alors, M. le Président, je suis d'accord avec vous.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): J'ai demandé, simplement, qu'on fasse attention, tout le monde.

M. Marsan: Alors, les groupes recommandent de reporter le projet de loi; il n'est pas prêt. Le ministre ne les écoute pas. Même, il va plus loin, il se permet d'afficher dans les journaux des annonces à pleines pages – on me dit que c'est des dizaines de milliers de dollars que ces annonces ont coûté, près de 100 000 $ – où il indique ce qui va arriver au niveau du projet de loi, qui n'est même pas adopté par l'Assemblée parlementaire, et ça a conduit, M. le Président, comme vous le savez, à une intervention musclée de notre leader parlementaire, le député de Brome-Missisquoi, avec comme résultat que le président de l'Assemblée nationale va écrire une lettre au ministre le blâmant d'avoir agi de cette façon, et je pense que c'est significatif de ce que le ministre de la Santé pense de nos institutions et des parlementaires des deux côtés de cette table.

Donc, la contestation continue, les gens ne sont toujours pas d'accord avec le ministre. Deuxième communiqué de presse. Cette fois, un renversement de tendance, c'est la Régie de l'assurance-maladie du Québec qui va assurer les 1 200 000 Québécois qui ne le sont pas actuellement. Le ministre n'avait pas apprécié les regroupements d'assureurs privés lorsqu'ils sont venus ici et qu'ils lui ont dit en pleine face que ses chiffres n'étaient pas bons et qu'il devait refaire ses devoirs. Le ministre est fâché contre les assureurs privés, donne le mandat à la Régie de l'assurance-maladie du Québec, direction, M. le Président, qui n'était même pas prévue dans le rapport Castonguay. Le rapport Castonguay prévoyait un choix, pour les 1 200 000 personnes, entre les assureurs privés et la Régie de l'assurance-maladie du Québec. Au point où nous sommes rendus, on se questionne sérieusement. Pourquoi avoir fait l'étude de M. Castonguay? On est vraiment loin des recommandations qui nous ont été faites, et j'attends toujours les réponses, là, combien a coûté cette étude.

Les groupes ne sont toujours pas d'accord avec la cinquième version du ministre, et j'en ai pour preuve le dernier communiqué de presse du front commun CEQ-CSN-FTQ, qui indique, et je le reconnais, M. le Président, une amélioration, parce que, eux autres, ils avaient demandé que ce soit la Régie qui assure les 1 200 000 Québécoises et Québécois qui ne l'étaient pas. Mais là s'arrêtent les aspects de support au ministre, parce que, par la suite, on entreprend une véritable dénonciation de toutes les difficultés que ce projet va engendrer, pour lesquelles on demande du temps nécessaire et additionnel pour qu'on ait un projet de loi qui soit vivable pour les gens qui auront à être assurés maintenant.

Quelques petits exemples, M. le Président. Premièrement, la mutualisation des risques – ce n'est pas moi qui le dis, ce n'est pas le député de Robert-Baldwin, c'est le Front commun CEQ-CSN-FTQ, qui représente plus d'un million de personnes – on nous laisse savoir que, dans les régimes collectifs qui assurent actuellement les maladies graves et le paiement de ces médicaments, eh bien, on va sûrement voir un changement de direction vers la Régie de l'assurance-maladie du Québec, et, là-dessus, on aimerait ça, pouvoir écouter ce qu'ils ont à nous dire, les représentants d'un million de personnes du Québec.

Un autre problème, le deuxième: la liste des médicaments est encore inconnue au moment où on se parle, malgré que le ministre se soit engagé à la donner. On sait que, actuellement, dans les régimes privés, il y a beaucoup de médicaments qui sont couverts et qui ne sont pas nécessairement sur la liste qui est reconnue par la Régie de l'assurance-maladie, donc tout l'arrimage entre les médicaments reconnus sur la liste du privé et du public, eh bien, ce n'est pas fait.

Troisièmement, M. le Président: les primes exigées des personnes âgées et des personnes à faibles revenus sont trop élevées et peuvent entraîner un effet pervers qui est l'infidélité au traitement, c'est-à-dire que les gens, parce qu'ils ne sont pas capables de payer leurs médicaments, ils ne les prendront pas, et, s'ils ne les prennent pas, eh bien, leur état de santé général pourrait se détériorer et ils auraient peut-être à revenir soit dans les services d'urgence, soit dans les cliniques, soit dans les CLSC, ou, encore, peut-être même, être hospitalisés.

(12 heures)

Sur quelle base a été déterminée la prime de la Régie de l'assurance-maladie du Québec, le 176 $ du rapport Castonguay, alors que les assureurs privés, qui ont une expertise depuis plusieurs années, nous disent que ce n'est pas 176 $, les primes individuelles, c'est 230 $, que les primes familiales, ce n'est pas 350 $, c'est 600 $? Comment ça se fait que ça va coûter moins cher au gouvernement? C'est la première fois dans l'histoire d'un gouvernement que quelque chose qui est administré par le gouvernement va coûter moins cher que le privé. C'est à suivre, M. le Président.

Qu'est-ce qu'il y a dans les frais d'administration? Bien, il y a des frais de gestion. Est-ce que la Régie de l'assurance-maladie va les avoir comme le privé? Je pense que oui. Il y a des frais de paiement automatique. Il y a des gens qui vont accepter qu'on prenne, dans leur compte de banque, un montant x, et ça, il y a des frais qui sont associés à ça. Quand on fait un chèque, souvent, c'est 0,50 $. Le paiement automatique, ça peut être la même chose. S'ils l'ont dans le privé, comment ça se fait qu'ils ne l'auraient pas dans le public? Il y a des frais de réclamation. Il y a des patients qui vont réclamer à la Régie: Bien, je voudrais me faire payer mes médicaments, hein, depuis le temps que vous m'assurez. Et puis, là-dessus, comment ça se fait qu'à la Régie de l'assurance-maladie ça va coûter moins cher que dans le privé? Aussi, en payant sur le rapport d'impôts, donc à la fin de l'année, eh bien, il y aura des frais d'intérêt importants qui vont être encourus par la Régie de l'assurance-maladie, et, là aussi, on nous dit que ça devrait coûter moins cher. Une chose cependant, la notion de profit. Oui, la Régie de l'assurance-maladie n'a pas cette notion; oui, le privé a la notion. Par contre, nous pensons et nous sommes convaincus que l'appareil bureaucratique coûte toujours plus cher que dans le secteur privé.

Cinquièmement, l'arrimage des régimes public et privés. On sait qu'il y a des emplois occasionnels et précaires. Il y en a beaucoup plus actuellement à cause des conditions économiques. Alors, un travailleur, une travailleuse peuvent passer d'un régime privé à un régime public soit parce qu'on peut avoir deux emplois ou qu'on a une perte d'emploi. Eh bien, l'arrimage n'est même pas fait, on ne sait pas du tout comment ça va fonctionner, et, chaque fois qu'on pose des questions, pas de réponse là-dessus.

On continue, M. le Président. Sixièmement, le problème des régimes d'assurance collectifs pour les retraités. Les retraités, dans les régimes, actuellement, ne paient que 2 $ lorsqu'ils ont leur prescription. Alors, ça veut dire qu'ils auront très bientôt une augmentation de prime. Pour ceux qui sont assurés dans les régimes collectifs avec le secteur privé, eh bien, ils auront des petites surprises que le ministre leur réserve, M. le Président, et on parle de 5 % à 10 %, le ministre nous l'a même avoué. Moi, je suis certain – je vais vous confier un secret – que ça va être 10 %.

Rien de neuf au chapitre du contrôle des coûts des médicaments. Comment arrêter cette spirale, cette augmentation en flèche? Rien de nouveau dans le projet de loi, malgré tout ce que nous avons entendu en commission parlementaire.

Aucun échéancier. Le ministre nous avait parlé, lorsqu'il a reçu la Coalition des aînés, que, dès le 1er juillet, il voulait commencer à taxer les aînés. En conférence de presse, il a avoué qu'il n'était pas prêt, que ça allait être au mois d'août. Là, c'est rendu au mois de septembre. Moi, je vous prédis quelque chose, M. le Président: que ce soit au mois de septembre ou au mois d'octobre, le ministre va les taxer de façon rétroactive au 1er juillet comme un bon percepteur.

Neuvièmement, rien sur la représentation du public dans les différents organismes prévus au projet de loi – Conseil consultatif de pharmacologie ou Comité de la revue d'utilisation – alors que tous les groupes ont demandé à être entendus.

Dixièmement, rien sur la confidentialité des dossiers médicaux. Et vous savez qu'on peut faire confiance aux gens, mais qu'on a de sérieux doutes quant aux systèmes informatisés. Il y a beaucoup de choses qui leur échappent, et je ne voudrais pas qu'on puisse voir un arrimage entre les informations de la Régie de l'assurance-maladie du Québec et le ministère du Revenu, comme le risque demeure actuellement.

Onzièmement, les plafonds d'exemption ne sont pas relevés quoique tous les groupes l'aient demandé, et la seule petite surprise, c'est qu'ils ont même été baissés. Ça veut dire que, lorsqu'un adulte va gagner plus de 14 775 $ – dans la première version, c'était 14 800 $ – eh bien, il va être obligé de payer toute la prime, la franchise et la coassurance, M. le Président.

Rien sur une limite à l'augmentation de la prime. M. le ministre nous dit: Ça va être 175 $ cette année. Attendez l'année prochaine, l'expérience des autres provinces canadiennes le démontre: ça monte en flèche, M. le Président. Et aucune limite à l'indexation. On lui a demandé d'imposer l'indexation en fonction, au moins, de l'augmentation des prix. Ça a été non. On sait que les médicaments augmentent, bon an, mal an, de 10 % à 12 %.

La taxe de vente de 9 % sur les régimes collectifs. Alors, les régimes collectifs vont être taxés à 9 %, et les régimes individuels ne le seront pas au début. C'est donc une taxe spéciale sur le travail, M. le Président, et, là, je vous prédis que, l'année prochaine, le ministre des Finances, qui aura vu ça, va sûrement imposer la taxe de vente du Québec sur les primes payées par l'ensemble des Québécois.

Quatorzièmement, politique de reconnaissance des nouveaux médicaments: pas connue. On a eu des exemples. Des patients sont venus en chaise roulante nous dire: On a besoin de nouveaux médicaments; le Betaseron est un bel exemple. Jamais de réponse à ce moment-ci. Le médicament soulage ces patients-là et leur permet de ne pas utiliser leur chaise roulante, ils peuvent marcher. Il ne guérit pas la sclérose en plaques, mais, c'est très important, on a eu des témoignages pathétiques de patients. Aucune réponse de l'autre côté, M. le Président.

Quinzièmement, le fait que les médicaments vont être gratuits dans les établissements de santé, dans les hôpitaux, dans les centres d'accueil, bien, c'est un incitatif à être hospitalisé, alors qu'on veut – et le ministre en parlait tantôt – avoir un virage ambulatoire. Bien, on a un effet pervers: si on est hospitalisé, ça va être gratis. Alors, je ne pense pas que le ministre se soit attardé longtemps sur ce genre d'incitatif.

Seizièmement, trop de pouvoirs aux règlements. Le ministre dit qu'il va y en avoir moins. On ne les a pas vus, les règlements, mais une chose est certaine, c'est qu'il veut contrôler le coût des médicaments, la liste des médicaments et les honoraires des pharmaciens. Alors, c'est un chèque en blanc qui nous est demandé encore une fois, M. le Président.

Et, dix-septièmement, puis je pourrais continuer, c'est le cadeau du premier ministre cette fois. C'est vraiment l'impôt – appelez-le par le nom d'impôt Rochon-Bouchard – qui va à l'encontre de la promesse du premier ministre, qui nous avait dit qu'il n'y en aurait pas d'impôts, qu'il n'y aurait pas de taxes, M. le Président.

En conclusion, le ministre de la Santé s'est vraiment transformé en collecteur d'impôts. Dans les rapports d'impôts, je pense que les gens sauront se rappeler de cette promesse du gouvernement du Parti québécois. Nous, ce que nous demandons comme opposition libérale, c'est la même chose que l'ensemble de la population: qu'on prenne le temps de regarder ce programme-là. Il n'est pas prêt, il a été fait à la hâte. En fin de semaine dernière, dans les locaux de la Régie de l'assurance-maladie, tout le monde travaillait. Les lumières étaient allumées en pleine nuit. Ça a été fait à la dernière minute, dans la dernière fin de semaine. Ce n'est pas vrai que c'était prêt, ça, que les 1 200 000 personnes devaient être assurées par la Régie. Ça s'est fait la semaine passée.

En terminant, conclusion de la conclusion, M. le Président, le ministère de la Santé s'est transformé en ministère de l'improvisation, en ministère de la taxation et de l'imposition et, surtout, en ministère du manque de compassion pour les patients qu'il doit, d'abord et en premier, desservir. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci, M. le député. Avant de passer la parole à un autre député, j'aimerais attirer l'attention de tous les députés sur le fait de ne jamais nommer un député par son nom, mais de le nommer par le comté qu'il ou elle représente. Ce matin, on a eu une discussion en Assemblée, justement, sur le programme, et il y a eu une discussion là-dessus. Je ne pense pas qu'on ait à discuter de procédure là-dessus. C'est simplement de faire attention. Mme la députée de Sherbrooke.


Mme Marie Malavoy

Mme Malavoy: Merci, M. le Président. Ça me fait plaisir de prendre la parole, parce que je pense qu'il y a un certain nombre de choses qui méritent d'être précisées. Manifestement, elles n'ont pas été bien comprises par l'opposition, et je vais faire ma petite contribution pour essayer d'éclairer un peu cette question.

Je veux dire, d'abord, que je suis fière, quant à moi, que le gouvernement soit passé à l'action. C'est une question qui était dans l'air depuis longtemps, et je pense que nous avons enfin le porteur de dossier qui est capable de mener à terme cette réforme fort importante. On nous accuse de faire quelque chose qui ne va pas dans le sens de l'équité. Bien, moi, je pense que, précisément, c'est une réforme qui va dans le sens de l'équité, et pour deux raisons simples.

C'est quoi, l'équité? Qu'est-ce qui fait que des gens considèrent qu'une réforme est équitable? À mon avis, ça s'explique à partir de deux considérations fort simples. La première, c'est qu'une assurance équitable, c'est une assurance qui offre à tout le monde la même couverture. Je pense que c'est ça, d'abord, l'équité: s'assurer que tout le monde ait accès aux mêmes choses. La santé est un bien extrêmement précieux, et on peut comprendre que, dans une société qui se dit démocratique, on considère que cet accès à la santé, au maintien de sa santé, doive être garanti à tout le monde.

(12 h 10)

Mais l'équité, ça n'est pas simplement le fait que tout le monde ait accès. L'équité, c'est aussi, je pense, dans notre société, le fait que tout le monde contribue pour cette équité selon ses moyens, et on a eu, malheureusement, tendance à oublier, je pense, ces dernières années, qu'il n'y a rien de gratuit. Les gens parlent encore couramment de l'assurance-santé qui est gratuite. Ça n'est pas gratuit, il n'y a rien de gratuit. C'est quelque chose qui demande une contribution et c'est un régime qui est une assurance, donc une contribution qui vient de différentes sources, mais qui a l'immense avantage que, quand on a de gros besoins, cette assurance couvre ces gros besoins. Mais en aucun cas il ne faut croire que, l'équité, c'est de garantir à des gens quelque chose de gratuit. Je pense que l'assurance-médicaments, avec les différentes modulations que le ministre a fort bien expliquées, permet de s'assurer que les gens paient selon leurs moyens.

Cela dit, payer selon ses moyens ne nous empêche pas de reconnaître qu'il y a, dans notre société, un grand nombre de personnes qui n'ont pas les moyens, et ces personnes-là, dans le projet de loi que le ministre a déposé, sont justement exemptées parce que nous savons que ces gens n'ont pas les moyens, ce qui fait que les prestataires de la sécurité du revenu, qui sont environ 500 000, seront exemptés de la prime à 100 %. Ils n'auront pas à payer cette prime, parce qu'ils font malheureusement partie des gens qui n'ont pas les moyens. Parmi les personnes âgées, il y a également un certain nombre de personnes, 128 000, qui n'auront pas à payer de prime, parce qu'elles ont des revenus qui sont en deçà du seuil permettant qu'on paie la prime. Et, parmi les gens non assurés, il y a également 500 000 personnes, particulièrement des enfants ou un certain nombre d'adultes également non assurés pour différentes raisons, qui ne paieront pas de prime. Donc, notre régime est un régime qui est équitable au sens où il donne à tout le monde accès à des services d'assurance-médicaments et, en même temps, il s'assure que les gens qui n'ont vraiment pas les moyens ne paient rien, que, par contre, ceux et celles qui ont les moyens, peu importe leur âge, aient une contribution qui va croissante, selon les moyens des gens.

J'aimerais également insister sur le fait que je trouve fort intéressant qu'on fasse cela au moment où on parle du virage ambulatoire. Le ministre l'a bien expliqué tout à l'heure, il y a une continuité dans notre logique entre le virage ambulatoire et l'assurance-médicaments, et je pense que ce que ça montre essentiellement, c'est que nous tentons du mieux possible de faire des choses dans une vision globale et non pas des projets de loi qui se suivent l'un derrière l'autre sans forcément être articulés. Je pense que l'assurance-médicaments arrive au bon moment. C'est comme la dernière pièce maîtresse, je pense, d'une réforme de la santé et des services sociaux qui a été entamée il y a déjà un certain temps, et nous avons pris sur nous de mener ça à terme. Mais je crois que c'est un choix intelligent parce que ça permet d'avoir un portrait d'ensemble où les différents morceaux retomberont à la bonne place.

J'aimerais, si vous permettez, reprendre ce que je crois être des erreurs, disons peut-être de bonne foi, je ne sais pas, mais, en tout cas, certainement des erreurs du côté du porte-parole de l'opposition et de déclarations que j'ai entendues plusieurs fois, mais encore ce matin. L'erreur, c'est de penser et de laisser croire qu'il s'agit, par la prime de l'assurance-médicaments, d'un impôt déguisé. Alors, je vais faire une toute petite explication, en des mots fort simples, parce que je ne suis absolument pas spécialiste dans le domaine, mais je voudrais simplement dire que la prime s'en va dans un fonds spécial qui sert à financer le régime d'assurance-médicaments.

Or, nos impôts, ceux qui sont vraiment nos impôts, ils vont où? Ils vont dans le fonds consolidé du Québec, et c'est à même ce fonds consolidé que l'on finance ensuite les différentes dépenses de l'État. Donc, puisqu'il s'agit d'une prime qui va ailleurs que dans le fonds consolidé, ça n'est pas un impôt, et j'ai même tendance à croire que vous le savez fort bien. Le ministère du Revenu du Québec sert de véhicule, il sert de percepteur tout simplement parce qu'il est le mieux placé pour le faire pour une raison simple: c'est que cette prime est calculée en fonction du revenu des contribuables. Or, l'organisme le mieux placé pour savoir ce que sont les revenus des contribuables, c'est le ministère du Revenu du Québec.

Mais c'est fallacieux de laisser croire qu'il s'agit d'un impôt. Il ne s'agit pas d'un impôt, il s'agit simplement d'une prime d'assurance-médicaments qui est collectée au meilleur endroit pour le faire, mais qui s'en va dans un fonds spécial pour financer l'ensemble du régime et pour financer, donc, entre autres choses, les gens qui n'ont pas les moyens d'avoir cette assurance, qui n'ont pas les moyens de payer cette prime dont j'ai parlé tout à l'heure et qui sont quand même plusieurs centaines de milliers à travers le Québec.

Je terminerai donc en disant que, ce projet d'assurance-médicaments, ce projet de loi, il complète, je crois, dans le domaine de la santé et des services sociaux, le filet de sécurité sociale. Il nous permet également – et je pense que ça n'est certainement pas honteux de le reconnaître – dans cette réorganisation de faire un certain nombre d'économies. Et, ma foi, je ne vois pas pourquoi ce serait mauvais de faire, au passage, des économies, parce que nous sommes dans un contexte, au Québec, où tous les secteurs doivent trouver une façon meilleure de faire les choses, mais, en même temps, en essayant de faire que l'État ait moins à contribuer, tout simplement parce que, si nous voulons maintenir la qualité des services que nous offrons, il faut être capable d'avoir un regard très, très attentif aux fonds dont nous disposons.

Alors, je crois que nous avons en main quelque chose de fort intéressant qui, à l'aide des auditions publiques dont j'ai entendu, je crois, la plupart, va être bonifié, un projet qui va permettre une excellente couverture, un projet qui est responsable, un projet qui est équitable et un projet aussi qui est moderne, mais moderne dans le sens des grandes valeurs démocratiques que le Québec a réussi à développer ces dernières années et continue à développer, même si on avait la tentation, en voyant ce qui se fait ailleurs, parfois, de dire: La démocratie coûte trop cher. Non, je pense que, la démocratie, on a les moyens de se la payer quand on fait les choses de façon intelligente et responsable. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci, Mme la députée de Sherbrooke. Je reconnais maintenant le député de Notre-Dame-de-Grâce.


M. Russell Copeman

M. Copeman: M. le Président, je suis, honnêtement, quasiment attristé d'être obligé de faire des remarques préliminaires sur le projet de loi n° 33, dans le sens qu'on a eu tellement de témoignages de toutes sortes de groupes représentant des syndicats, représentant des patients, représentant des clientèles démunies, représentant les employeurs, représentant des malades, de tout le monde qui a mis un bémol sur le projet de loi, qui nous a dit: Oui, on est pour un système d'assurance-médicaments universel, mais on est pour le bon système, celui qui fonctionne. Et, à ma connaissance, tous ces 43 groupes ont amené des suggestions de modification, et une bonne partie de ces groupes-là ont demandé au ministre de retarder son projet de loi, de ne pas procéder si vite que ça.

Là, j'aurais pu sortir toutes sortes d'éditoriaux qui vont dans le même sens. Moi, j'ai souvent l'impression que, quand c'est l'opposition qui réclame des choses, le ministre est complètement fermé, même si l'opposition reflète un certain consensus dans la population. Mais, parce que ça vient de nous, le ministre est complètement fermé. J'ai un peu l'impression que le ministre n'apprécie pas le rôle de l'opposition, ne comprend pas le rôle de l'opposition dans un parlement démocratique. On est là, oui, quand on peut, pour travailler avec lui, pour tenter de bonifier des choses, mais, oui, pour s'opposer à des choses qu'on trouve inacceptables, comme on l'a fait avec la loi 83. Il n'y avait pas de prétexte, M. le Président, avec la loi 83, l'année passée. On était contre, contre, contre. On n'avait aucunement l'intention de voter avec le gouvernement là-dessus. On n'avait aucunement l'intention de laisser passer ça sans utiliser tous les moyens à notre disposition pour le bloquer.

M. le Président, je vais tenter d'aborder trois thèmes dans les quelques minutes qui me sont accordées: le thème de l'empressement, le thème de l'équité – parce que je vais renchérir sur les commentaires de la députée de Sherbrooke – et celui de l'impact sur les plus démunis de notre société.

L'empressement, M. le Président. Le ministre, depuis quelques jours, nous dit: Il faut agir rapidement, il faut aller de l'avant, on ne peut pas attendre. Il a laissé entendre que l'opposition faisait des mesures dilatoires pour retarder. Par contre, également, le ministre nous indique que, le principe du projet de loi sur l'assurance-médicaments, on travaille dessus depuis deux ans. C'est comme ça a été dit souvent. Ça ne vient pas d'hier, ça, selon lui. On travaille deux ans: comité Demers, comité Castonguay, projet de loi.

(12 h 20)

Il faut agir rapidement. Je vous fais remarquer simplement, M. le Président, que l'Assemblée nationale siège depuis le 12 mars, mais que le projet de loi sur l'assurance-médicaments a été déposé le 15 mai, deux mois plus tard. Si on travaille là-dessus depuis deux ans, s'il a fallu agir rapidement dans l'esprit du ministre, pourquoi le gouvernement a-t-il décidé d'attendre jusqu'au 15 mai pour déposer son projet de loi, sinon pour tenter de nous mettre dans un entonnoir dont l'effet très réel est qu'on est rendu le 13 juin et qu'on commence l'étude détaillée? Il nous reste sept jours dans notre calendrier parlementaire selon nos règlements, M. le député de Salaberry-Soulanges. Selon nos règlements, il nous reste sept jours pour terminer l'étude détaillée de ce projet de loi majeur pour les Québécois et Québécoises, dont le ministre nous amène des amendements par le biais d'un communiqué de presse, dont le ministre refuse de déposer des règlements pour notre considération, sur lequel le ministre nous lance une petite remarque: Maintenant, les barèmes vont être inscrits dans le projet de loi. Il nous lance ça comme ça aujourd'hui, il y a une vingtaine de minutes. Ce n'était pas dans le communiqué de lundi, mais on nous annonce aujourd'hui, dès qu'on commence notre étude article par article, qu'il y a encore des amendements majeurs. Cent vingt et un articles dans le projet de loi, M. le Président, qu'il faut regarder de façon très détaillée pour le bénéfice de tous les Québécois et Québécoises.

Alors, l'argumentation du ministre quant à l'urgence d'agir, de passer à l'action, je n'achète pas ça, parce qu'il a eu l'occasion, depuis le 12 mars, de présenter son projet de loi, et il ne l'a pas fait. J'étais, hier soir, à une séance de reddition des comptes publics dans le beau comté de Notre-Dame-de-Grâce avec le député fédéral et le député provincial, votre humble serviteur. Cinquante personnes ont répondu à toutes sortes de questions. C'est ça, notre version de la reddition des comptes publics. On fait la reddition des comptes de la part des élus provinciaux et fédéraux. On le fait à chaque année. Je peux vous dire, M. le Président – puis croyez-moi, croyez-moi pas – que la vaste majorité des questions étaient posées sur la loi sur l'assurance-médicaments, puis, pour la très grande majorité, le consensus dans la salle, parmi les 50 personnes présentes, c'était: Pourquoi est-ce qu'on va si vite? Pourquoi est-ce qu'on ne prend pas le temps de l'étudier comme il faut, de faire un projet de loi qui a du bon sens?

Nous avons déjà avancé notre thèse là-dessus, M. le Président. Notre thèse quant à l'empressement et à l'entêtement du ministre là-dedans, c'est parce que c'est également une mesure fiscale, parce qu'il a promis de livrer au Trésor 200 000 000 $ cette année, 300 000 000 $ l'année prochaine, et c'est pour cela qu'il faut aller si vite, pas pour couvrir les 1 200 000 qui ne l'ont pas. Le ministre ne réussira jamais à me faire croire que, la raison pour laquelle on est si empressé, c'est pour couvrir ceux qui ne l'ont pas, l'assurance-médicaments, présentement. Je regrette, c'est parce qu'il faut livrer 200 000 000 $ au Trésor cette année et 300 000 000 $ l'année prochaine. C'est ça, la vraie raison pour laquelle on est si empressé d'adopter ce projet de loi, et il est malhonnête de laisser entendre autrement. Prenons le temps qu'il faut, on l'étudiera ensemble, on bonifiera, puis tous les Québécois et Québécoises sortiront bénéficiaires.

Parlant des plus démunis, des personnes prestataires de la sécurité du revenu, de celles à bas salaire et de la contribution financière qui est demandée de leur part, M. le Président, moi, je suis convaincu qu'on a été tous touchés par les témoignages qu'on a eus des représentants des prestataires de la sécurité du revenu quant à l'impact de la contribution financière. La députée de Sherbrooke se réjouit qu'ils soient exonérés de la prime, mais la députée de Sherbrooke oublie de mentionner qu'il faut payer une franchise et qu'il faut payer une coassurance. Elle oublie ça dans son discours touchant l'impact sur les plus démunis de notre société. Oui, tout le monde en convient, les prestataires de la sécurité du revenu, les personnes âgées qui reçoivent le supplément du fédéral, les personnes à bas revenus, en bas de 10 000 $ – c'est vraiment les pauvres, M. le Président, en bas de 10 000 $, là, on est rendu pauvre profond – ils sont exemptés de la prime, mais il faut qu'ils paient une franchise, il faut qu'ils paient la coassurance, et la thèse qu'on avait, nous, et qu'on a toujours, c'est que ces personnes-là n'ont pas les moyens de le faire.

M. le Président, malgré mon ton un peu dur, je me réjouis personnellement que le ministre ait décidé de mettre les paramètres dans le projet de loi. À moins qu'il ne change les paramètres, je ne serai pas d'accord avec le niveau de la contribution financière, mais je me réjouis qu'il le mette dans le projet de loi, parce que, comme vous le savez, j'ai déjà fait des interventions pour m'opposer au pouvoir réglementaire. Les règlements, ça change beaucoup plus facilement qu'un projet de loi. Alors, d'une façon, je me réjouis de la décision du ministre d'inclure ces barèmes dans le projet de loi, tout en vous indiquant que, à moins qu'il ait changé encore d'idée puis que les barèmes soient moins imposants – puis, là, on a changé encore – si on se maintient dans le même ordre, je ne serai pas d'accord avec les barèmes et la contribution financière. Mais je peux me réjouir du fait qu'on va l'inscrire dans le projet de loi, parce que ça indiquera, à un moment donné... À moins qu'il y ait une possibilité qu'on mette, dans le projet de loi, un mécanisme d'indexation. Mais, là, de le mettre dans le projet de loi, mais de donner le pouvoir d'indexation au ministre, c'est à peu près pareil à ne pas le mettre. On verra rendu là. Si le ministre était disposé à déposer son amendement là-dessus tout de suite, on aurait pu en prendre connaissance, savoir. Semble-t-il, il ne l'est pas.

Parlant, je vais consacrer le restant de mon temps, M. le Président, à un sujet qui me tient à coeur: l'impact sur les personnes handicapées. Et, là, encore une fois, la députée de Sherbrooke a soulevé une question avec laquelle je suis totalement d'accord: la question d'équité. Elle nous a donné une leçon d'équité. C'est son style de professeure, j'imagine, mais je l'apprécie. Elle a pu démontrer ce que c'est, l'équité. Mais, par exemple, je dois vous dire que, en ce qui concerne les mesures pour les personnes handicapées, il n'y a aucune équité dans l'esprit du ministre, aucune équité dans les mesures annoncées par le ministre, et je vais prendre le temps nécessaire pour m'expliquer.

(12 h 30)

Le communiqué de presse de lundi annonçait des changements, et je le cite, M. le Président: «Les personnes handicapées – ça vient du ministère de la Santé – dont le handicap est survenu avant l'âge de 18 ans et ne bénéficiant pas de l'allocation de sécurité du revenu seront exemptées de la franchise et de la coassurance.» Exemptées de tout: bonne nouvelle! C'est une bonne nouvelle, on ne le cachera pas. «Elles seront aussi exclues du paiement de la prime.» Également une bonne nouvelle. Une personne handicapée dont le handicap est survenu avant l'âge de 18 ans est exemptée de toute contribution financière. Alléluia! Les personnes handicapées dont le handicap est survenu après l'âge de 18 ans, par exemple, elles, il faut qu'elles paient. C'est où, l'équité, Mme la députée de Sherbrooke? C'est où, l'équité d'une telle mesure, M. le Président? Parce que le handicap est survenu après l'âge de 18 ans, on n'est pas exonéré? J'ai eu l'occasion d'interroger le ministre en Chambre là-dessus et je lui ai posé essentiellement la même question. Moi, j'ai suggéré que c'était de la discrimination, et le ministre m'a répondu ainsi... Là, il faut que je le lise, M. le Président, parce que je dois vous dire, sans méchanceté, que je n'ai pas compris grand-chose là-dedans – puis, là, vous allez dire: Bien, c'est juste, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, ce n'est pas anormal – et que le milieu associatif n'a pas compris grand-chose là-dedans. Le ministre Rochon: «Il ne s'agit pas de discrimination, M. le Président, il s'agit plutôt d'une amélioration pour couvrir les gens que la première version du projet ne couvrait pas. C'est une pratique établie, quand on ajoute un groupe de personnes qui sont des enfants de 18 à 25 ans, comme dans ce cas-ci, qui seront protégés tant qu'ils sont domiciliés chez leurs parents et qu'ils sont aux études, de leur assimiler les personnes handicapées qui ont contracté leur incapacité avant l'âge de 18 ans. C'est un groupe bien connu d'individus qui, dans beaucoup de programmes sociaux, sont assimilés ou sont rajoutés à une protection qui est donnée pour les enfants de 18 à 25 ans. Et ce groupe-là a été ajouté.»

Moi, je n'ai rien compris là-dedans. Ce n'est pas clair. C'est vrai qu'on n'a pas la même... Moi, j'ai soumis ça à la présidente de la COPHAN, elle, personne handicapée, présidente du regroupement des organismes provinciaux des personnes handicapées – qui fait un doctorat en droit, en passant, M. le Président, ce n'est pas n'importe qui – qui a comparu devant cette commission, qui a comparu devant d'autres commissions, et elle ne comprend strictement rien de l'explication du ministre. Semble-t-il que juste le ministre comprend. Bien, qu'il nous explique. Quand on est rendu là, qu'il nous explique.

Là, plus loin, par exemple, il nous donne une indication d'où il s'en va avec ça, parce que, là, il m'a répondu: Bien, les accidentés de la route de plus de 18 ans, ils ont leur couverture par la SAAQ – c'est vrai – pour l'assurance-médicaments. Là, il dit: Les accidentés du travail, ils ont une couverture d'assurance-médicaments. C'est vrai. Là, il dit: On couvre probablement à peu près tout le monde avec cette mesure-là. Et il dit plus tard: S'il y a des propositions comme ça – pour, vraisemblablement, étendre la couverture – à faire, on peut les regarder en détail, on peut en – ça, c'est le ministre de la Santé qui parle – évaluer les coûts. Ah! bien, là, ça allume chez moi. Là, c'est plus clair. Les personnes dont... C'est un miracle. M. le député de Taschereau va dire que c'est un miracle. Les personnes dont le handicap est survenu avant l'âge de 18 ans sont couvertes, celles après 18 ans, même si ça couvre juste un petit peu de monde, il faut évaluer les coûts. Ah! c'est parce que ça peut coûter plus cher aux Québécois et Québécoises de le faire après 18 ans. Mais où est l'équité? Je regrette, je ne vois aucune équité là-dedans.

M. le Président, on n'est pas là pour évaluer, quant à moi, les coûts d'une couverture pour un groupe de personnes en bas de 18 ans et un autre en haut de 18 ans. Le ministre dit: On couvre à peu près tout le monde avec des maladies graves. Les maladies graves qui frappent après l'âge de 18 ans ne sont pas exonérées: le glaucome, quelqu'un qui est à demi aveugle; la sclérose en plaques, quelqu'un qui perd sa capacité de travailler, qui devient une personne handicapée; toutes sortes d'accidentés domestiques, les accidentés dans une piscine; tout le monde avec des maladies graves comme le cancer, qui ne peut plus fonctionner. Eux autres ne sont pas couverts par la proposition du ministre parce que leur handicap est survenu après l'âge de 18 ans.

Ça n'a pas de bon sens, M. le Président. Il n'y a personne qui va me convaincre que ça a du bon sens. C'est clair que cette distinction est faite, malgré toutes les contorsions possibles d'une explication de qui que ce soit, par souci de coûts, et je le déplore. Comme le ministre a ouvert la porte, si on veut exempter les personnes handicapées du paiement de la prime, de la franchise et de la coassurance, qu'on le fasse pour toutes les personnes reconnues handicapées selon la Loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées au Québec. On a une loi québécoise qui définit qui est une personne handicapée, qui ne fait aucune distinction 18 ans ou moins, 18 ans ou plus. Bien, qu'on se serve de nos lois québécoises pour déterminer si on veut exempter un bloc de personnes des mesures contributoires du projet de loi.

M. le Président, pour toutes ces raisons, je ne comprends pas pourquoi on va si vite avec le projet de loi. Je commence à me répéter, mais qu'on prenne le temps qu'il faut, qu'on prenne le temps de l'examiner pour s'assurer que le régime qu'on va instaurer est le meilleur régime possible pour les Québécois et Québécoises, que ce ne sera pas une mesure fiscale, mais que, vraiment, les 1 200 000 Québécois et Québécoises qui n'ont pas d'assurance-médicaments maintenant puissent y avoir accès avec des mesures qui sont équitables, qui ne pénalisent pas les plus démunis et qui ne répondent pas à une commande du Conseil du trésor. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. Je reconnais maintenant M. le député de Taschereau.


M. André Gaulin

M. Gaulin: M. le Président, je voudrais faire quelques notes préliminaires pour répondre, entre autres, à quelques-unes des avancées de nos collègues de l'opposition officielle. Je ferai remarquer, d'ailleurs, que eux, qui nous accusent souvent de faire de grands discours, en ont fait de très beaux ce matin. Et je le dis parce que je sais que le député de Châteauguay est un de ceux qui nous rappellent ça des fois. Lui-même fait de beaux discours, et, pour moi qui suis un littéraire, faire des discours, c'est aussi une action. Mais les discours, ils sont fondés aussi et ils ont donné des arguments. Moi, je peux, comme député du gouvernement, les respecter, mais je trouve aussi que, ce matin, ils ont été enflammés par leurs propres propos, ils sont montés un peu aux barricades de la compassion.

Je voudrais leur rappeler, d'ailleurs – parce que c'est une des choses qu'ils nous reprochent souvent, qu'ils reprochent en particulier au ministre, de ne pas avoir de compassion – que le mot «compassion» vient de «patior, pati, passus sum», le verbe souffrir, et que, la compassion, c'est la souffrance avec quelqu'un d'autre. Et je pense que, en l'occurrence, s'il y a quelqu'un qui a de la compassion, c'est celui qui, ce matin, nous présente la loi n° 33, parce que, ça, c'est un exemple de compassion.

Et, là, je reprends peut-être des arguments du député de Notre-Dame-de-Grâce. Je rappelle, hein, qu'il dit que cette loi a un impact sur les plus démunis de notre société. Oui, cette loi a un impact sur les plus démunis de notre société, mais dans le sens contraire de ce qu'ils disent, parce que, justement, on va aller assurer 1 200 000 personnes de plus. Et je voudrais faire remarquer, M. le Président, que, dans les personnes de plus que nous allons assurer, dans le 1 200 000 – eux qui nous disent d'attendre – nous allons assurer 300 000 enfants qui ne le sont pas et nous allons assurer 500 000 personnes qui n'auront pas à payer de prime, ce qui fait 800 000 personnes sur 1 200 000 qui, actuellement, n'ont pas l'assurance-médicaments.

(12 h 40)

Moi, je voudrais rappeler que l'assurance-médicaments manquait au filet de sécurité sociale des Québécois et je voudrais aussi rappeler à nos collègues d'en face qu'on devrait, dans une certaine mesure, essayer d'améliorer cette loi s'ils la jugent perfectible – et je pense qu'elle l'est – et de se rappeler que le régime ou le système de la santé au Québec a compris des grands ministres des deux côtés de cette Assemblée. On pourrait nommer Castonguay, Lavoie-Roux, Lazure, Côté, Rochon. Alors, je pense qu'il faut essayer, à un moment donné, de sortir d'une certaine partisanerie qui ne fait plus voir les choses que sous un certain angle donné, celui du pouvoir qu'on n'a pas.

Alors, je pense que, ça, c'est important de le faire et je dois dire que, depuis deux ans que je suis dans cette assemblée du peuple, l'Assemblée dite nationale, j'entends nos amis d'en face nous dire qu'on va toujours trop vite pour les lois qu'ils ont contestées. Parce que, à certaines, ils nous ont donné leur appui. Je pense, par exemple, à celle des pensions alimentaires, et ça a été très bien comme ça. On peut avoir des résistances à des lois, mais, à un moment donné, je pense qu'il y a une utilisation démagogique qu'il faudrait essayer d'éviter. Je ne leur dis pas qu'ils sont démagogues, je dis d'essayer d'éviter la démagogie.

Alors, je pense, M. le Président, que cette loi est une loi qu'il importe de passer rapidement. Un défaut que j'ai constamment reproché aux libéraux d'en face, c'est la procrastination, c'est-à-dire la remise à demain, la remise constante en avant, et c'est comme ça qu'ils ont pris neuf ans à nous donner la couleur de la margarine. On ne veut pas faire la même chose avec la loi n° 33. Je pense que c'est important que cette loi-là soit en acte, soit efficiente le plus rapidement possible.

Tout à l'heure, le député de Jacques-Cartier disait qu'on a attendu jusqu'au 15 mai. Le député de Notre-Dame-de-Grâce. Excusez-moi, M. le député de Jacques-Cartier.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gaulin: Non, non. J'ai beaucoup d'estime pour le député de Notre-Dame-de-Grâce. C'est un social-démocrate qui est du mauvais bord. Ha, ha, ha!

Une voix: C'est vrai.

M. Gaulin: Le député disait qu'on a attendu le 15 mai. Franchement, il ne faut pas exagérer! Il y a combien de lois qui sont déposées le 15 mai dans les divers gouvernements depuis des années? Et le 15 novembre aussi, parce que les lois sont toujours peaufinées jusqu'à l'extrême limite de leur dépôt. Puis, si on avait eu le 16 mai, elle aurait été déposée le 16 mai, mais c'est prévu que c'est le 15 mai. Les lois sont perfectibles et elles sont améliorées jusqu'à la fin. Il ne faut quand même pas charrier.

Alors, M. le Président, je voudrais dire que, justement, oui, cette loi va avoir des impacts très importants sur la santé des Québécoises et des Québécois. Ce que nous nous donnons, maintenant, c'est une assurance-médicaments. Tout à l'heure, le ministre de la Santé disait que le propre de l'assurance, c'était de donner de la sécurité. Je pourrais rappeler ici – je l'ai fait, d'ailleurs, en interpellation – le fait que, moi, j'ai eu un jeune frère qui est mort d'une hémorragie du foie il y a beaucoup d'années et que mon père a dû payer pendant le restant de ses jours cette maladie de mon jeune frère, parce que, à l'époque, il n'y avait pas d'assurance sur la santé. Il y a des gens qui ont vendu jusqu'à leur maison, qui ont donné leur REER pour la maladie de certains de leurs enfants dans des familles. On estime que la santé est un bien, sauf qu'on ne le sait pas. C'est un peu comme la vie, on ne le sait pas tant qu'on n'a pas été atteint dans nos corps physiques.

Et je pense que c'est important de donner cette assurance aux Québécoises et aux Québécois, parce que, comme le rappelait tout à l'heure le ministre, il y a un certain nombre de maladies qui sont ruineuses en plus d'être absolument éprouvantes pour le corps: le sida, la fibrose kystique, la sclérose en plaques, la leucémie. Et c'est pour ça, justement, qu'il y a une assurance-médicaments qu'il est urgent de passer, de faire. La santé est un bien, et le gouvernement du Québec veut assurer ce bien-là. Et tant mieux si les gens paient et ne sont jamais malades, ils auront payé pour ceux qui ont moins de chance et qui sont malades, parce que c'est ça, une assurance.

Moi, j'ai compris mon assurance-feu le jour où je suis passé au feu, en 1987: un incendie d'une centaine de milliers de dollars. Jusqu'alors, j'avais toujours considéré que je payais en vain une assurance annuelle qui ne donnait rien, qui ne me rapportait rien, et, quand je suis passé au feu et qu'on m'a remis des sous parce que j'étais assuré, justement, j'ai compris que, l'assurance, elle avait une fonction sociale, et c'est ça qu'a aussi l'assurance-médicaments. Et, aujourd'hui, je suis presque devenu masochiste. Quand je paie ma prime d'assurance-incendie, je suis toujours heureux parce que je paie pour la sécurité, pour être assuré et, surtout, pour être rassuré, et je pense que c'est surtout ça, la fonction fondamentale de l'assurance. Ce n'est pas seulement de payer quand les gens sont malades, mais c'est de leur donner une sécurité qui est fondamentale, qui leur permet de vivre, qui leur permet de ne pas être anxieux, et, même ça, au titre du médicament, c'est déjà un tas d'économies sur les psychotropes, si on le prenait simplement comme ça.

Alors, tout à l'heure, le député de Robert-Baldwin disait que le ministre n'écoutait pas. Ça, il faut vraiment faire un effort pour lui dire ça, au ministre Jean Rochon, qu'il n'écoute pas. C'est un ministre exceptionnel à ce titre.

Une voix: C'est un privilège de travailler avec.

M. Gaulin: S'il y a un ministre qui se tourne vite, s'il y a un ministre qui est capable de changer vite un article de loi, s'il y a un ministre qui est capable d'écouter les groupes – nous en avons entendu 43, ici – c'est Jean Rochon. Et il a pu rapidement faire des choses que l'opposition, d'ailleurs, lui reproche, entre autres d'avoir donné l'assurance de 1 200 000 citoyennes et citoyens québécois à la RAMQ.

On voit là une petite vendetta du ministre. Pas du tout. Le ministre est en bons rapports avec des assureurs privés, mais, moi, je me réjouis de ce côté-ci, étant toujours dans un parti social-démocrate, de voir qu'on vient de faire la preuve que le public peut accoter le privé, peut le concurrencer et peut lui créer une saine concurrence. Et il y aura toujours la collaboration des deux types d'assurances, même si c'est la RAMQ qui va assurer les 1 200 000 Québécois et Québécoises qui ne le sont pas.

On a dit que la contestation continue, que les gens contestent les choses. Les grandes lois, de toute manière, en leur temps, sont toujours contestées. L'assurance automobile, M. le député de Châteauguay qui vous voilez les yeux, à l'époque – rappelez-vous du temps de Mme la ministre Payette – c'est une assurance dont on ne voulait pas. Allez l'enlever aux Québécois aujourd'hui, et ils vont vous faire des caracolages terribles pour éviter que ce soit fait.

Alors, au fond, les gens sont venus ici et ils se sont fait entendre. On essaie de faire la meilleure loi possible, mais je rappelle au député de Jacques-Cartier – de Notre-Dame-de-Grâce, pardon, il va m'en vouloir – que le mieux est souvent l'ennemi du bien. Le député nous dit qu'il faut faire la meilleure loi possible, et c'est vrai. Cependant, il ne faut pas croire que, pour faire la meilleure loi, il faille constamment et constamment remettre de la faire. Il faut la faire. Il y a des choses à faire, nous sommes en politique pour faire des choses, et cette chose-là en particulier, l'assurance-médicaments, à côté du ministre Rochon, que nous appuyons – puis c'est un des ministres qui a le plus fort appui du cabinet de M. Bouchard – et nous allons faire cette loi. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci, M. le député de Taschereau. Je reconnais maintenant M. le député de Châteauguay, tout en vous rappelant, M. le député, que, à 13 heures, je devrai interrompre de toute façon.


M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: C'est dommage, M. le Président, je n'ai pas souvent l'occasion d'être devant cette commission et j'aurais aimé pouvoir profiter de l'ensemble du temps, mais j'ai l'impression qu'on pourra revenir, sans doute, et je pourrai, à ce moment-là, compléter mes remarques préliminaires. Je suis heureux d'intervenir après le député de Taschereau, qui constatait que nous étions enflammés dans nos discours. Je fais le même constat de son côté. Évidemment, il nous a laissés sur des propos qui me laissent songeur. Si le ministre de la Santé est celui qui a l'appui le plus fort au Conseil des ministres, j'imagine qu'il y en a un qui a l'appui le plus faible...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Fournier: ...et ça serait peut-être intéressant de la part du député de Taschereau de nous renseigner sur le sujet, lui qui a l'air bien informé. Peut-être que ce sera pour la pause de 13 heures, et on pourra y revenir.

(12 h 50)

J'avais des commentaires, M. le Président, à faire avant que le député de Taschereau parle et je vais être obligé de revenir sur certains éléments qu'il a dits et ensuite enclencher le plus rapidement possible, tout en ayant un débit compréhensible. Quand même, il nous a dit à un moment donné – et il l'a dit un peu durant tout le temps de son allocution – qu'on est là pour améliorer le projet de loi et qu'on va être capable de le bonifier, et tout ça, et je m'étonne un petit peu de sa conviction si bien sentie qu'il sera possible d'améliorer un projet de loi pour lequel on sait déjà qu'il y aura des amendements importants, dans le sens qu'ils vont même jusqu'à dire que, dorénavant, ce qui était prévu pour être dans les règlements ira dans la loi. Des amendements en quantité importante, M. le Président, et on est là, avec une conviction bien sentie du côté ministériel, à nous dire qu'il sera possible d'améliorer quelque chose dont on nous cache pourtant des éléments excessivement importants.

Alors, je veux bien jouer le jeu parlementaire, mais je ne partage pas la conviction qu'a le député de Taschereau qu'il sera aisé d'améliorer un projet de loi pour lequel on nous cache des éléments essentiels dès le départ, M. le Président. Dès le débat sur le principe, avant même de l'entamer, on nous avait dit qu'il y aurait des modifications majeures sans nous les montrer. Alors, imaginez-vous, on est allé débattre du principe d'un projet de loi qui sera modifié fort probablement – puisque les amendements sont considérables – de façon telle que le principe lui-même en sera affecté, et on était pris à en débattre. Et, après ça, on se fait dire par le député de Taschereau qu'on conteste la façon dont agit le gouvernement en disant qu'on conteste que le gouvernement aille trop vite. Il va trop vite parce qu'il ne met pas les choses dans le bon ordre, et, dans ce sens-là, faire un débat sur le principe alors qu'il y avait des modifications majeures qui allaient suivre après, dénaturant le principe même, je pense que tout le monde va convenir qu'on a bien raison de contester cette façon de faire là.

Le député de Notre-Dame-de-Grâce a souligné tantôt le fait qu'il considérait que le gouvernement bousculait non seulement l'opposition officielle – ça, on en a l'habitude depuis l'année et demie que le gouvernement est en place, ce qui ne nous empêche pas de continuer de ramener le gouvernement à l'ordre – mais qu'il bousculait l'ensemble des intervenants dans le milieu, et c'est pour ça qu'on dit que ça va trop vite, parce que ça bouscule. Le député de Notre-Dame-de-Grâce disait: On a déposé ça le 15 mai. Le député de Taschereau dit: Bien, c'était prêt le 15 mai. Ce n'était pas prêt le 16, c'était prêt le 15. Mais on sait tous très bien, M. le Président, que, si ça a été déposé si tardivement, c'était pour condenser la période d'étude de ce projet de loi là, pour essayer d'éviter que l'opposition révèle ce qui était vraiment le fondement de ce projet de loi.

Malheureusement pour le gouvernement, mon collègue de Robert-Baldwin, dans un travail acharné, tel qu'on le connaît, a réussi à bien voir, à bien saisir quel était l'objet véritable de ce projet de loi là, et je pense que les groupes qui sont venus ici – on parle d'une quarantaine de groupes... Le député de Taschereau disait tantôt que le ministre, une de ses qualités les plus fortes – c'est pour ça, sans doute, qu'il a l'appui le plus solide au Conseil des ministres – c'était sa capacité d'écoute des groupes, et les groupes sont venus demander le report à peu près tous unanimement, mais la capacité fondamentale, manifeste du ministre qui a la plus grande capacité d'écoute au sein du Conseil des ministres – ce n'est pas peu dire et ce n'est pas reposant quand on pense aux autres – M. le Président, lui qui a la plus grande capacité d'écoute ne se souvient pas, ne réalise pas, ne veut pas voir qu'il y a, à l'extérieur de la salle du Conseil des ministres, une société, une collectivité, qui est là.

Une voix: ...

M. Fournier: Ah non! Je faisais référence à une quarantaine de groupes qui sont venus ici, qui ont été entendus, dont on fait état dans tous les médias à chaque jour – et à chaque jour le ministre pourrait l'entendre – qui disent: Vous allez trop vite. Sur le principe même, M. le Président, mon collègue l'a dit tantôt, bien sûr que l'ensemble de la société veut participer à un projet comme celui-là, si tant est que ce soit véritablement un projet englobant les participants à un esprit d'équité.

Mon collègue de Taschereau a parlé tantôt, abondamment, de son caractère personnel à lui de social-démocrate. C'est toute une opération... Encore faut-il dire à sa décharge qu'il nous a dit que, pour lui, faire des discours, c'était de l'action. En termes de parlementaires, c'est évident qu'un des moyens d'action que nous avons pour éveiller le gouvernement aux actions que le gouvernement doit prendre, bien sûr que ça peut être une action, mais c'est assez étonnant de voir enveloppée dans tous ces discours d'équité et de transparence, de social-démocratie une mesure qui n'est pas une mesure d'équité, de générosité et de redistribution.

Bien oui, il y en a une mesure de redistribution, quand on y pense bien. Mon collègue de Robert-Baldwin l'a bien vue, M. le Président. L'ensemble des groupes de la société l'ont bien vue, l'ensemble des commentateurs dans les médias l'ont bien vue. Il y en a une mesure de redistribution. Mon collègue social-démocrate doit en être très fier de cette mesure de redistribution. Il s'agit de prendre l'argent dans les poches du monde et de le redistribuer au gouvernement. C'est ça, la mesure de redistribution qu'il y a là-dedans. C'est le contraire de ce qui doit être fait normalement, lorsqu'on parle des gens qui sont démunis. Oui, il faut ajouter, M. le Président: L'argent de qui? J'avais oublié de dire l'argent de qui. On avait oublié de dire que, finalement, ceux qui étaient le plus touchés, c'étaient les personnes qui étaient démunies. C'étaient les personnes âgées, notamment, qui ont fait grand état de leur mécontentement devant ce projet de loi là.

Alors, social-démocrate, j'aurais un peu honte, M. le Président, de proclamer ma social-démocratie dans un projet de loi comme celui-là. J'aurais un peu honte, quand on voit la nature même du projet. J'ai eu l'occasion, sur une motion de report à l'Assemblée nationale, il y a deux jours de ça, à quatre heures du matin, de faire un discours où j'ai élaboré sur le caractère d'improvisation de ce projet de loi là. Je vais donc référer les gens qui nous liront à ce discours, puisque j'imagine que mon temps est à la veille de se terminer, simplement pour mentionner mon grand, grand étonnement à la façon dont on procède, et je le dis comme un nouveau parlementaire de l'opposition qui a constaté comment le gouvernement actuel agissait lorsqu'il était dans l'opposition et qui constate aujourd'hui que, lorsqu'on essaie simplement de partager le travail parlementaire, ça semble bien, bien difficile.

Le ministre nous a dit tantôt: J'aurais pu vous les donner, les règlements, mais j'ai vu comment c'est allé dans d'autres commissions sur d'autres projets de loi, puis, dans le fond, là, vous n'avez pas été assez fins. Vous n'avez pas fait ce que j'aurais voulu que vous fassiez, ça fait que, les règlements, là, vous allez attendre; les amendements, vous allez attendre. Ça m'inquiète beaucoup, M. le Président. Comme parlementaire, ça m'inquiète beaucoup, et je le dis tout bonnement pour réflexion pour le ministre et j'aimerais bien qu'il y songe durant la fin de semaine. Nous sommes dans un système de démocratie où l'opposition a non seulement le droit, mais le devoir de révéler ce que nous voyons dans des projets de loi et de servir de focus pour aussi démontrer ce que la population, que nous devons tous servir, soyons-nous du pouvoir ou de l'opposition... C'est les gens qui sont à l'extérieur, qui ne sont pas ici, sur la colline parlementaire, qui sont chez eux, qui vont s'apercevoir, à un moment donné, que les grandes attentes qu'on leur avait promises sur de la générosité, de l'entraide, de la redistribution, bien, que la redistribution, elle ne va pas vers eux, elle vient d'eux vers le gouvernement. Pour faire quoi, M. le Président? Référez aux dépenses qu'il y a eu pendant un an de temps, l'année passée: pour servir toujours une même cause.

Alors, j'espère juste que le gouvernement et le ministre, particulièrement, durant les travaux qui vont se poursuivre sur ce projet de loi excessivement important, vont considérer que notre démocratie ne doit pas être détournée au point d'imposer la tyrannie de la majorité, M. le Président. Il faut permettre que l'opposition accomplisse son devoir, et, nous, du côté de l'opposition, nous allons le faire, j'en suis persuadé. Mon collègue de Robert-Baldwin a déjà entrepris un travail colossal pour décoder ce qu'on lui montre à la dernière minute, pour être capable de voir où le gouvernement s'en va, parce que c'est ce qu'il faut faire, en tout état de cause, à l'égard de ce gouvernement. Dans tous les longs exposés où on nous brandit la social-démocratie, l'équité et la transparence, on s'aperçoit toujours, lorsqu'on allume notre décodeur, que, dans le fond, les actes ne suivent pas les paroles et que, dans le fond, les actes vont à l'encontre des paroles. Et c'est pour ça qu'il faut qu'on continue à se battre, à faire notre travail, et on espère, M. le Président – et je termine là-dessus – avoir dorénavant, à compter d'aujourd'hui, 13 heures, le respect du ministre dans notre travail. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci, M. le député. Je suspends les travaux jusqu'à 15 heures, cet après-midi, même endroit, pour un autre sujet.

(Suspension de la séance à 13 heures)

(Reprise à 15 h 14)


Projet de loi n° 11

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): À l'ordre, s'il vous plaît! Le quorum est vérifié et il est correct. Je déclare la séance ouverte et vous rappelle le mandat de la commission: la commission des affaires sociales se réunit afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 11, Loi modifiant la Loi sur les services de garde à l'enfance et d'autres dispositions législatives.

Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Marsan (Robert-Baldwin) sera remplacé par M. Kelley (Jacques-Cartier); M. Parent (Sauvé) par Mme Houda-Pepin (La Pinière); Mme Vaive (Chapleau) par Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François); M. Williams (Nelligan) par M. Gobé (LaFontaine). Voilà.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci. Nous sommes à l'étape des remarques préliminaires. Alors, je vous rappelle que chaque membre de la commission a droit à 20 minutes consécutives de remarques préliminaires. Et je commence par vous, Mme la ministre.


Remarques préliminaires


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. En fait, j'ai peu de remarques préliminaires à faire, compte tenu qu'on a eu, je pense, une assez bonne discussion déjà, depuis un moment, sur la loi, particulièrement lors de l'adoption du principe, si ce n'est, peut-être, de rappeler juste les grands axes de la loi que nous proposons. Par la suite, on pourra procéder, M. le Président.

D'abord, c'est le résultat, cette loi, d'une réflexion en profondeur avec l'ensemble du réseau des services de garde au Québec. Il y a eu des consultations, il y a eu des débats, il y a eu des échanges, il y a eu des discussions, il y a même eu un moratoire. C'est d'ailleurs suite à la levée de ce moratoire que nous avons présenté le projet de loi que nous allons étudier aujourd'hui. Ce temps d'arrêt, donc, nous a amenés à proposer des modifications assez substantielles à la loi.

Premièrement, nous proposons de réserver le financement aux garderies sans but lucratif dont le conseil d'administration sera formé majoritairement de parents, de même qu'aux services de garde en milieu familial reconnus par une agence. D'autre part, nous voulons, par certains resserrements de la loi, certaines précisions, nous assurer que la santé, la sécurité, le bien-être et le développement des enfants seront protégés. Alors, nous pensons, entre autres, au niveau de certaines obligations nouvelles qui seront faites aux personnes voulant garder des enfants dans une résidence privée; nous pensons aussi aux permis qui devront être obtenus pour offrir des services en jardin d'enfants ou en halte-garderie, avec un certain nombre de délais pour le faire; et, aussi, en donnant à l'Office de meilleurs moyens pour s'assurer du respect de ses lois et règlements, toujours dans le sens de la santé, de la sécurité, du bien-être et du développement des enfants. Un troisième bloc dans la loi couvre l'instauration d'une consultation, d'un plan de consultation au niveau régional, et ce, dans le cadre du processus de répartition des places qui vont donner accès à du financement de l'État. D'autre part, un certain nombre d'autres modifications vont être apportées, soit concernant les comités de parents et la délivrance de permis.

C'est donc un projet qui permet de consolider les services de garde, d'aider de façon accrue les garderies sans but lucratif, de permettre la participation des gens des différents milieux dans les régions pour déterminer les places qui devront être développées et le lieu de leur développement et assurer une meilleure qualité de services, de façon générale, en ce qui a trait à la santé, la sécurité et le bien-être des enfants gardés en milieu de garderie.

Alors, M. le Président, je termine ces remarques préliminaires, mais je voudrais ajouter ceci: nous avons, à quelques reprises, mon collègue de Jacques-Cartier et moi-même, discuté, à l'Assemblée nationale ou ailleurs, du fait que nous voulions ensemble écouter des gens qui auraient des points de vue sur le projet de loi qui est devant nous. Alors, comme j'ai su ce matin que nous étions convoqués, mes adjointes ont communiqué avec des groupes pour voir s'ils étaient disponibles, dont, entre autres, le Regroupement des garderies privées du Québec, l'Association des services de garde en milieu scolaire et Concertaction. Dans certains cas, on a laissé des messages – parce que, évidemment, ces gens ne sont pas nécessairement toujours là – je pense, entre autres, au Regroupement des garderies privées du Québec, elles ne pouvaient pas se présenter, de même que l'Association des services de garde en milieu scolaire du Québec.

Je sais cependant qu'il y a un regroupement qui est ici. Si on souhaite les entendre, on pourrait voir combien de temps on pourrait leur accorder. Je n'ai pas d'objection, au contraire, à ce qu'on le fasse. Maintenant, je vous suggère bien simplement, M. le Président, si vous me le permettez, qu'on limite, bien sûr, ces interventions, sinon on pourrait passer un long moment sans adopter la loi ou sans la travailler.

(15 h 20)

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vais suspendre les remarques préliminaires en vous demandant, M. le député de Jacques-Cartier et porte-parole... Si je comprends bien, il y a une proposition qui est faite. Est-ce que vous êtes d'accord avec le fait de recevoir le groupe qui est présent? La suggestion que je ferais, c'est qu'on emploie la formule usuelle, c'est-à-dire une heure: 20 minutes pour permettre aux gens de s'exprimer et 20 minutes de chaque côté pour une période d'échange.

M. Kelley: Moi, je pense, M. le Président, que c'est très important. Il y a plusieurs groupes qui ont manifesté un intérêt, et je trouve que le fait de les appeler – surtout les gens de Montréal qui travaillent dans les garderies, qui travaillent dans les services de garde – à quatre heures d'avis pour les convoquer ici, on ne peut pas accepter ça. Je pense que c'est une réforme très importante qu'on est en train de regarder ici. Comme la ministre l'a souligné, c'est le fruit d'un an et demi de réflexion que nous avons faite. Alors, je pense qu'il faut prendre le temps qu'il faut pour faire une propre consultation. De ne pas, juste parce qu'il y a un groupe qui est disponible à court avis, écarter la possibilité pour d'autres groupes de venir ici s'exprimer.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce que je peux me permettre, M. le député, de suggérer – vous semblez être d'accord des deux côtés – de recevoir le groupe qui est là, quitte à ce qu'on discute, soit en séance de travail – on peut ajourner et discuter en séance de travail – ou qu'on aille au vote après. Mais je pense que le groupe qui est là, si l'accord des deux côtés de l'entendre est correct, on peut d'abord régler cette partie-là et on réglera la partie suivante, des autres. Mme la ministre.

Mme Marois: Bon, moi, je suis d'accord avec la proposition que vous faites que nous recevions le groupe qui est là – je crois que c'est Concertaction qui est là – et, par la suite, que nous procédions à l'étude du projet de loi. Quand on arrive en fin de session, je pense que c'est de tradition, les gens sont habitués à cela, quand des groupes veulent se faire entendre, ils sont très, très vigilants, ils restent disponibles, s'il y a lieu. Je comprends que ce sont des groupes qui n'ont pas beaucoup de moyens, je ne dis pas cela, mais on connaît assez nos règles. Et, moi, j'avais manifesté une ouverture assez claire à cet égard. Je pense que le député de Jacques-Cartier peut en témoigner.

Alors, moi, je vous propose, si on est d'accord, qu'on reçoive le groupe qui est présent et qu'on procède à l'étude du projet de loi article par article.

M. Kelley: Non.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Mme la députée.

Mme Loiselle: Là, il y a une difficulté, parce que, au début du mois, la ministre nous disait en Chambre que: Oui – c'est la ministre qui parle – je n'ai pas d'objection à ce qu'on prenne un temps pour les entendre sur le projet de loi. On savait depuis longtemps que certains regroupements voulaient se faire entendre en commission parlementaire. Là, ce matin, tout à coup, on se réveille, on appelle les gens puis on pense que les gens ont juste ça à faire, attendre l'appel téléphonique du ministère. Ils ne sont pas là, ils n'ont parlé à personne, puis, là, on vient de les brimer de leur droit de parole parce qu'ils ne se retrouvent pas ici en commission parlementaire.

La ministre le savait depuis longtemps que les groupes voulaient se faire entendre. Alors, cette démocratie de bulldozer, M. le Président, où on appelle les gens le matin pour qu'ils se fassent entendre à 15 heures, puis on leur dit que c'est un peu de leur faute, ils n'étaient pas là, ils n'ont pas retourné l'appel, je m'excuse, ça, ça ne passe pas.

Je pense qu'il faut s'entendre, M. le Président, pour donner la chance aux groupes qui ont demandé à être entendus de s'entendre qu'ils aient au moins le temps de retourner l'appel qu'ils ont reçu ce matin et de s'entendre pour peut-être les rencontrer soit demain, au cours de la journée de demain, on est ici demain... Alors, il n'y a rien à bousculer tout le monde.

On serait, j'en suis sûre, assez d'accord, je pense, de pouvoir entendre le groupe qui est ici présentement, mais que la ministre s'engage immédiatement à rencontrer d'autres groupes demain, de la liste qu'elle a donnée, s'ils veulent venir se faire entendre. Mais au moins que les gens aient le temps de retourner l'appel, M. le Président. C'est le minimum de politesse qu'on peut accorder à ces groupes-là.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Mme la députée de Saint-François.

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, je suis tout à fait d'accord avec les propos de ma collègue. Écoutez, même si on arrive à la toute fin de session, on ne veut bousculer personne. Si ce projet de loi n'a pas été appelé auparavant, ce n'est pas non plus la faute de l'opposition. Je vous fais remarquer, M. le Président, que, depuis la dernière élection, en 1994, on a très peu siégé. Alors, donc, on aurait pu le prévoir, on aurait pu le déposer avant, on aurait pu l'appeler avant. Tout dépend des priorités du gouvernement. Le gouvernement a d'autres priorités, c'est son droit, mais, cependant, ça ne veut pas dire pour autant qu'on doive bousculer les groupes.

Il ne faut pas oublier non plus que les groupes les plus touchés par ce projet de loi, entre autres, sont les représentants des milieux scolaires. Alors, qu'on n'entende pas, entre autres, les représentants du milieu scolaire pour qu'ils puissent s'exprimer et nous dire, finalement, ce qu'ils souhaiteraient avoir comme modification, s'il y a lieu, ou qu'ils viennent nous dire qu'ils sont en accord avec... La même chose, par exemple, pour les représentants des garderies à but lucratif.

Alors, c'est deux groupes, à mon avis, qui sont assez touchés par le projet de loi. Et je ne vois pas comment, à quelques heures d'intervalle, on puisse aviser ces personnes, ces groupes, pour venir nous faire part de leurs commentaires et, parce qu'ils n'ont pas répondu ou qu'on n'a pas été capable de communiquer avec eux, on décide pour autant qu'on passe par-dessus, puis qu'on continue, puis qu'on va commencer à étudier article par article. Pour l'opposition, M. le Président, vous comprendrez que c'est impensable. On ne pourra pas avancer avec l'étude de ce projet si on n'est pas capable d'avoir, de connaître au moins les préoccupations des groupes. Je ne dis pas que l'on puisse passer deux jours là-dessus. Ce n'est pas ça. Notre intention, c'est d'avoir des groupes, une consultation particulière. Ce n'est pas de retarder pour autant le projet de loi. Ce n'est pas d'avoir tous les groupes du Québec, mais au moins les principaux concernés pour qu'ils puissent se faire entendre sur le projet.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Dernière remarque, M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: Oui, on vient d'avoir l'information que Mme Drouin, qui est une des représentantes du regroupement des propriétaires de garderies, qui est à Montréal aujourd'hui, a parlé effectivement avec un représentant de la ministre, mais il n'y avait aucune offre de faite dans la conversation de venir ici témoigner.

Une voix: Double langage.

M. Kelley: C'est ça qu'elle vient de dire. On vient de l'appeler. Alors, je pense qu'il y avait une confusion, parce que Mme Drouin n'a pas compris, selon la conversation, que c'est la consultation. Elle a été avisée que l'étude détaillée commençait cet après-midi. C'est ça, l'avis qu'elle a reçu.

Alors, je pense que le travail est mal fait. Et, comme je l'ai dit, ça fait un an et demi qu'on dit qu'il faut faire la réforme. À ce moment, ça va revenir devant les parlementaires pour regarder tout ça. Je trouve ça inacceptable qu'on ne puisse pas donner le temps qu'il faut aux groupes qui sont touchés par le projet de loi d'organiser une consultation particulière comme il faut.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Vous n'êtes pas sans savoir, les membres de la commission des deux côtés, qu'actuellement je laisse discuter sur quelque chose que, normalement, on retrouve aux motions préliminaires. Alors, là, j'ai le choix: ou je permets qu'on reçoive un groupe tout de suite et on passe aux motions préliminaires – et, là, vous pouvez faire la motion et on débattra la motion – ou on continue les remarques et chaque membre de la commission peut faire ses remarques, ce qui peut vouloir dire quand même beaucoup de temps, et on passe, après ça, à la motion préliminaire.

Ma suggestion, si c'est accepté des deux côtés, serait que je fasse un petit accroc à la procédure, que je permette au groupe qui est présent, Concertaction, tel que je l'ai dit tout à l'heure, de venir, comme on fait traditionnellement, et, après, on revient aux remarques préliminaires, on arrive aux motions préliminaires, de façon à ne pas faire attendre les gens, si, eux, veulent s'en aller. Mais qu'on fasse les débats dans l'ordre, parce que, là, je serais obligé de changer.

Alors, est-ce que ça vous convient, Mme la ministre, qu'on reçoive le groupe, qu'on fasse un écart?

Mme Marois: Je suis tout à fait d'accord, je l'avais proposé, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Et on rediscutera sur le sujet. Je n'élimine pas la discussion sur le sujet.

M. Kelley: Si on procède aux consultations, on va faire ça avec plusieurs groupes. Alors, s'il n'y a pas d'engagement de la ministre qu'on va retarder de regarder ça article par article, il faut accepter qu'on va consulter plusieurs groupes, pas juste un.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Moi, j'avais pensé vous faire une bonne offre de compromis, mais, si vous n'acceptez pas le compromis que j'offre, je continue sur les remarques préliminaires. Et c'est vous, M. le député de Jacques-Cartier, qui avez la parole.


M. Geoffrey Kelley

M. Kelley: Merci, M. le Président. Moi, je pense qu'il faut regarder le projet de loi n° 11 qui est devant nous comme faisant partie d'une série de décisions qui ont été prises par la ministre depuis la fin mars. Comme je l'ai dit, je souhaite avoir l'occasion de discuter avec les regroupements dans le milieu, parce qu'il y a une série de décisions qui ont été prises qui ont des effets très, très graves dans plusieurs des réseaux des services de garde à travers le Québec.

(15 h 30)

On commence au moment du dépôt des crédits à la fin mars; il y avait toutes les compressions très, très sévères dans le domaine des milieux scolaires. Nous avons vu, encore une fois aujourd'hui, l'Association des services de garde en milieu scolaire qui n'a pas encore reçu l'information requise pour planifier la rentrée scolaire à la fin d'août. C'est complètement inacceptable. Il y avait un budget de 25 000 000 $, qui est maintenant coupé à 12 000 000 $, qui est une compression drastique. À cause de cette compression, les parents ne savent pas encore c'est quoi, le niveau des tarifs pour le mois d'août. Il y en a plusieurs qui risquent d'être fermés. J'ai déjà pris contact avec plusieurs services de garde en milieu scolaire sur l'île de Montréal, en milieu défavorisé, qui risquent de fermer leurs portes dès la fin d'août, faute de budgets suffisants. Alors, c'est la première démarche dans les décisions que la ministre a prises. Elle s'est vraiment mise à dos tous les services de garde en milieu scolaire.

Et, comme je l'ai dit, les impacts ne sont pas encore connus. C'est pourquoi on a cru bon d'inviter l'Association des services de garde en milieu scolaire pour venir témoigner ici, et aussi des personnes qui travaillent dans le milieu. Et ça, c'est l'autre chose qui est très importante à souligner: le genre de personnes que l'opposition veut entendre travaillent dans les services de garde, sont des personnes qui, si elles sont obligées de venir ici, doivent se faire remplacer parce qu'elles sont effectivement soit les directrices, les propriétaires, les éducatrices, en tout cas, les personnes qui ont un contact direct, qui sont présentes dans les services de garde à tous les jours.

Alors, à quatre heures d'avis, si on est responsable d'une soixantaine d'enfants, on ne peut laisser tomber tout ça pour le plaisir de la ministre. Il faut planifier ça, il faut organiser ça, il faut avoir le temps de se faire remplacer. Alors, de dire qu'on peut appeler quelqu'un qui travaille dans une garderie à 11 heures et dire: À 15 heures, venez témoigner ici à Québec, quand on est à Montréal, c'est inconcevable, M. le Président. Je trouve que ce n'est pas une façon de... Parce que, nous autres, on veut tester l'impact du projet de loi dans le milieu, sur le terrain. Ce n'est pas un exercice ici complètement juriste, de regarder de beaux articles. C'est quoi, l'impact de tout ça dans la vraie vie? Ça, c'est le monde qu'on veut consulter, M. le Président, et, de la manière dont on a procédé, on a évacué cette possibilité.

Le deuxième impact – et c'est une des choses que Concertaction, qui était avec nous, a soulevée dans un communiqué de presse hier – c'est la publication, le 1er mai, dans la Gazette officielle , des mauvaises nouvelles: les nouveaux barèmes pour le financement, l'aide financière aux parents. Ça, c'est les parents à faibles revenus et revenus modestes qui vont être coupés. Sur le projet de règlement qui a été publié, on a proposé des compressions de 15 %. Ça semble être minimum, mais pour les personnes à faibles revenus, trouver un autre 3 $ par jour, 260 journées par année, ça représente 780 $ de plus par année pour une famille à revenus faibles, à revenus modestes. Si on ajoute à ça toutes les autres compressions dans l'aide sociale, dans les frais d'hébergement que ce gouvernement est en train de faire, c'est une catastrophe pour ces familles qui essaient d'améliorer leur sort. C'est souvent des familles monoparentales, où la femme travaille, la femme fait un retour aux études pour améliorer son sort. Et, ça, c'est les personnes qui sont visées par les compressions, les coupures dans le projet de règlement qui a été publié par la ministre.

La ministre a dit qu'elle va corriger ça, mais, si j'ai bien compris l'engagement, elle va attendre la fin de la session, parce que, comme ça, elle ne sera pas obligée de répondre aux questions des parlementaires sur le nouveau règlement. Alors, elle va publier ça, comme dans la vieille tradition, à la fin de juin, quand tout le monde est déconnecté, débranché de la vie politique et est au chalet à la campagne.

Alors, c'est ça, le truc. C'est ça qu'elle va faire, elle va cacher... pas cacher, mais elle va annoncer au début de l'été, dans la Gazette officielle , des mauvaises nouvelles: le règlement qui va couper dans l'aide financière qui est donnée aux parents à faibles revenus. Encore une fois, les garderies doivent commencer à composer avec ces coupures à partir du 24 juin. Alors, même si c'est publié la semaine prochaine, ces garderies auront comme cinq, six jours pour réagir, mettre en place les compressions, ajuster les tarifs, réviser le panier de services qu'elles peuvent donner aux enfants. Alors, ce n'est pas de la planification pour eux autres, elles sont mises devant un fait accompli. Et ça va vraiment causer énormément de difficultés pour les gestionnaires de nos services de garde, et surtout nos garderies qui travaillent l'été.

Comme je l'ai dit, c'est quelque chose qui est complètement inacceptable, c'est une compression de 15 000 000 $ qu'on est en train d'aller chercher dans les poches des familles à faibles revenus, des familles à revenus modestes. Ce sont les familles avec des revenus de 20 000 $, 22 000 $, quelque chose comme ça, qui sont visées par cette compression.

C'est complètement inacceptable, et je pense qu'il faut prendre le temps qu'il faut pour entendre, oui, Concertaction, et on aimerait entendre Concertaction, mais on veut aussi parler aux autres groupes communautaires qui travaillent dans le milieu, qui connaissent les impacts des compressions que ce gouvernement est en train de faire.

Maintenant, on arrive au dépôt du projet de loi n° 11 qui va toucher d'une façon directe les garderies à but lucratif. On peut avoir un long débat sur ça et on va faire ça au moment opportun. Mais, encore une fois, ça, ce sont les personnes de bonne foi, selon notre loi, selon nos règlements, qui ont mis l'argent pour créer une entreprise. Il y en a 325 qui ont des parents admissibles à l'aide financière et un autre 85 qui ne le sont pas. Je pense qu'on aurait tout intérêt de voir comment ils voient les articles qui les touchent dans le projet de loi, parce que c'est leur entreprise, c'est leur affaire. C'est une petite entreprise très souvent gérée par les femmes. Très souvent, c'est un travail de 70 à 80 heures par semaine qu'il faut faire pour faire vivre ces garderies. Ce sont des garderies qui sont régies par les mêmes règlements, les mêmes normes, les mêmes ratios, la même formation requise pour les éducatrices. Elles sont directement touchées par le projet de loi qui est ici. On aurait tout intérêt à les entendre. Mais, encore une fois, la présidente de l'Association des garderies privées à Montréal, Mme Ceppi, travaille dans une garderie. Ce n'est pas quelqu'un qui peut laisser tomber tout ça à quatre heures d'avis pour venir ici. Ce n'est pas possible.

Mme Loiselle: Ce n'est pas sérieux, ça.

M. Kelley: M. Rhysick, qui travaille dans Dollard-des-Ormeaux, c'est quelqu'un, avec son épouse, qui travaille à tous les jours. Ils ont les enfants, ils reçoivent les enfants, alors il ne peut pas abandonner ça à quatre heures d'avis pour venir ici.

Une voix: C'est rire du monde.

M. Kelley: Et, ça, c'est des personnes, comme je l'ai dit, dont l'entreprise, l'avenir sont directement touchés par le projet de loi. On a tout intérêt à les entendre et à expliquer comment ça fonctionne.

Moi, j'ai été contacté par une femme qui a une garderie à Saint-Hubert qui a ouvert ses portes en 1994 et qui n'est pas admissible. Elle a mis l'argent. L'Office des services de garde à l'enfance a laissé croire qu'un jour elle aurait l'occasion de recevoir les enfants qui reçoivent l'aide financière. Tout d'un coup, la ministre veut changer les règles du jeu. Je pense que ce témoin a le droit de venir ici, parce qu'elle a travaillé de bonne foi, avec les règles existantes. Elle donne aujourd'hui un service de qualité pour une quarantaine d'enfants dans la région de Montréal. Elle avait l'indication des fonctionnaires de notre gouvernement qu'un jour elle serait admissible, et, tout d'un coup, tout cela est changé.

J'ai une autre madame, qui demeure dans Gatineau, qui m'a appelé, qui a travaillé en étroite collaboration avec l'Office des services de garde à l'enfance, qui a dépensé 200 000 $ à partir de la fin de 1994 pour réaliser un projet de garderie. Tout d'un coup, tout ça est mis en cause par le projet de loi qui est devant nous. Elle n'aura pas l'occasion de venir témoigner ici non plus.

Comme je l'ai dit, ce sont des décisions qui sont très graves. Les personnes qui ont mis l'argent de bonne foi, avec les règles existantes, sont des personnes qui donnent un service de qualité à 20 000 enfants par jour au Québec. De dire qu'on n'a pas le droit de les entendre à cause d'un horaire trop chargé de la ministre, M. le Président, on ne peut pas accepter ça. Si, ça, c'est le fruit de la réforme majeure de la ministre, il faut prendre le temps qu'il faut pour entendre les groupes qui sont touchés et pour voir s'il y a des impacts directs. Même les choses...

De ce côté de la table, on est très d'accord avec la mise en vigueur pour les haltes-garderies, pour la mise en vigueur pour les jardins d'enfants, mais j'aimerais consulter les groupes qui gèrent déjà les jardins d'enfants, juste pour m'assurer que ça ne causerait pas de problème lors de la période de transition, la mise en vigueur du projet de loi. Je veux avoir l'impact réel pour les citoyens et les citoyennes, pour les enfants du Québec, et je pense qu'on a tout intérêt à le faire.

(15 h 40)

Alors, il y a des règlements qui représentent surtout les jardins d'enfants dans mon coin, et j'aimerais les inviter. J'aimerais savoir, si on applique ça dans les 18 prochains mois, c'est quoi l'impact. Est-ce que ça va vous causer des problèmes? Est-ce qu'il y a des irritants? Est-ce qu'il y a des façons dont la loi est faite qui causent des problèmes pour vous, ou est-ce qu'on peut effectivement mettre ça en vigueur sans causer trop de problèmes? Alors, ça, c'est un autre secteur.

Mais je pense qu'il y a un secteur que cette ministre oublie toujours de consulter, c'est les parents. La ministre consulte les regroupements, consulte des personnes qui travaillent dans les garderies, mais il faut trouver un mécanisme pour aller voir ce que les parents pensent. Et, ça, c'est quelque chose aussi. Il y a 20 000 enfants dans les garderies à but lucratif. Alors, c'est quelque chose comme, j'imagine, entre 10 000 et 15 000 parents qui sont affectés par la décision. J'aimerais les entendre aussi pour savoir si un service de garde à but lucratif est si mauvais que ça. Si j'écoute la ministre, c'est toujours: Ils sont méchants dans le réseau, il faut tout faire pour limiter leurs places dans les services de garde. Moi, j'aimerais voir avec les parents, parce que les parents ont à composer avec les propriétaires des services de garde et les éducatrices des services de garde à but lucratif à tous les jours. Peut-être qu'ils sont satisfaits. Oui, il y a un mécanisme pour porter plainte. Ils peuvent toujours utiliser ça, mais ils ont une place qui fait leur affaire. Surtout avec l'épuisement du bénévolat, et tout ça, le temps qui est limité des parents, peut-être que ce modèle fait l'affaire.

Parce que, comme je l'ai dit, au moment où nous avons discuté le projet de loi n° 11 en Chambre, nous, de ce côté de la Chambre, on a trois grands principes pour lesquels il faut examiner le projet de loi en fonction.

Le premier. Je pense que c'est très important de protéger la diversité de notre système. Moi, je pense qu'au lieu d'éliminer certains modèles, d'éliminer certains secteurs, on a tout intérêt à avoir une gamme de services. Alors, c'est pourquoi je suis heureux que la ministre veuille procéder avec les haltes-garderies et les jardins d'enfants, parce que ça va juste ajouter à la gamme de services, aux modèles qui sont disponibles pour les parents. Mais, si, au même moment, pour faire progresser d'autres secteurs, on veut éliminer le développement des garderies à but lucratif et mettre en péril l'existence même de plusieurs des garderies en milieu scolaire, je suis beaucoup moins satisfait, parce que, ça, c'est deux modèles qui fonctionnent, qui offrent un service à au-delà de 90 000 enfants par jour au Québec. Alors, je pense qu'on a tout intérêt à regarder et à entendre ces groupes et à respecter les intérêts des 90 000 enfants qui sont soit dans un service de garde en milieu scolaire ou dans une garderie à but lucratif à tous les jours. Alors, la diversité du système. Et je pense que, sur ça, le projet de loi n° 11 laisse à désirer, et je veux entendre surtout les milieux scolaires pour voir l'impact néfaste des décisions prises par la ministre.

Deuxièmement. Moi, je pense que c'est très important de respecter les choix de tous les parents. C'est pourquoi, comme je l'ai dit, si on veut entendre les parents, si c'était possible d'avoir un échantillon des parents qui ont des enfants dans des garderies à but lucratif, je pense que ce serait très enrichissant pour les membres de la commission. Parce que, comme je l'ai dit, ils ont fait un choix. Peut-être que c'est un choix qui fait leur affaire. Et on a tout intérêt, surtout avec la crise dans les finances publiques qu'on vit en ce moment... Il faut rappeler aux membres de la commission qu'en subventions directes aux garderies à but lucratif c'est 4 000 000 $; à but non lucratif, c'est 96 000 000 $. Et, pour cet argent, les garderies à but lucratif fournissent 20 000 places au Québec pour 4 000 000 $ et les garderies à but non lucratif en fournissent 35 000 pour 96 000 000 $. Notre expert en passage et... Alors, je pense qu'on a tout intérêt à...

Une voix: ...

M. Kelley: J'ai juste reconnu son expertise. Ça, c'est une «cheap shot». C'était dit en tout respect.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Continuez, M. le député.

M. Kelley: Troisièmement, nous avons défendu une équité entre les enfants. Je pense que, ça, c'est très important aussi. Le ministre sait, tout le monde autour de la table sait qu'on n'a pas les moyens de créer un système universel mur à mur pour tous les enfants qui en ont besoin au Québec. On peut avoir un long débat sur les taux de couverture, et ça varie entre régions, ça varie entre les types de services de garde, mais les taux de couverture, les places sont insuffisantes.

Moi, j'ai parlé longuement, il y a deux semaines, avec une de nos voisines, et la liste d'attente, chez nous, c'est deux ans et demi pour avoir accès à une place dans une garderie à but non lucratif. Mais elle a l'enfant aujourd'hui, elle doit retourner au travail cet automne. Alors, une liste d'attente de deux ans et demi, on ne fait pas grand-chose pour cette madame. Mais elle a trouvé une place dans une garderie à but lucratif pour l'automne, quand elle en aura besoin. Alors, je pense, l'équité, c'est le même enfant et c'est le même parent qui cherche une place pour son enfant dès cet automne. Alors, si elle a réussi à trouver une place dans une garderie, peu importe le type, je pense qu'il y a une certaine équité entre les enfants. Je n'ai jamais dit égalité. Je pense que l'État a tout intérêt à continuer de privilégier les garderies à but non lucratif, et leur présence dans le réseau a l'effet de hausser la qualité des services. Mais, pour cette madame qui a trouvé une place dans une garderie à but lucratif, je pense qu'une certaine équité s'impose: il faut donner certains moyens à cette garderie de continuer d'exister. Si on enrichit les subventions, par exemple, pour les équipements, pour la formation, pour d'autres fins, pourquoi ne pas inclure les garderies à but lucratif? Parce que c'est le même enfant, et, si cet enfant veut aller dans une garderie à but non lucratif, il faut attendre jusqu'à son troisième anniversaire. Ce n'est pas là: on en a besoin tout de suite, on en a besoin cet automne.

Alors, je pense que, ça, c'est les trois grands principes. Il faut conserver la diversité de notre système; je pense que c'est très important. Comme ça, tous les parents peuvent trouver un service de garde à leur goût. Deuxièmement, il faut respecter le choix des parents et ne pas imposer un modèle. Je pense qu'il faut que les parents aient le choix d'aller dans un modèle de services de garde qui fait leur affaire. Troisièmement, il faut conserver une notion d'équité entre les enfants. Il y a 20 000 enfants, aujourd'hui, qui sont dans des garderies à but lucratif, et je pense que, si la ministre continue à agrandir l'écart entre le financement des garderies à but non lucratif et celui des garderies à but lucratif, elle va mettre en péril la qualité des services dans les garderies à but lucratif. Au nom de l'équité des enfants, on ne peut pas justifier ça.

Alors, en terminant, c'est ça, le grand enjeu qu'on a dans le projet de loi. C'est pourquoi je pense que la commission des affaires sociales a tout intérêt à organiser une consultation particulière comme il faut.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci, M. le député. Mme la députée de Saint-Henri– Sainte-Anne.


Mme Nicole Loiselle

Mme Loiselle: M. le Président, je dois vous dire que je trouve que ce qui se passe cet après-midi, ici en commission parlementaire, c'est assez choquant. C'est choquant et c'est grave. Parce que l'attitude qu'on retrouve, de la ministre, est au niveau du type autoritaire, intransigeant, et je dirais même voire impoli, M. le Président, envers les partenaires du réseau des garderies, envers les gens, les regroupements qui ont voulu se faire entendre. Ils l'ont demandé depuis longtemps. La ministre l'a même confirmé à l'Assemblée nationale, le 3 juin, où elle disait: M. le Président, j'ai déjà rencontré les représentants et les représentantes de l'ensemble des services de garde, dont les garderies à but lucratif, et je les ai informés que je n'avais pas d'objections à ce qu'on prenne un temps pour les entendre sur le projet de loi n° 11.

Mais, M. le Président, il est très clair, le jeu de la ministre, et ça fait pitié tant qu'il est clair et qu'il est gros, son jeu. D'appeler des regroupements le matin où la commission commence à 15 heures, des regroupements dont elle sait très bien que les dirigeants et les dirigeantes sont à Montréal, de les appeler et de dire: Ils ne nous ont pas retourné leur appel, alors on va procéder avec le groupe qui est ici et on entame article par article l'étude détaillée du projet de loi, M. le Président, c'est de l'impolitesse à haut niveau, ce que la ministre vient de faire pour ces regroupements-là.

(15 h 50)

On sait pourquoi la ministre ne veut pas les rencontrer, ces gens-là. On aura seulement à regarder ce qu'on lit dans les journaux, M. le Président: «La moitié des garderies en péril dans les écoles»; «Marois redonne d'une main, prend de l'autre»; «Sur le terrain, on ne mâche pas sa désapprobation»; «Québec rafistole ici et là sans planification»; «Brigitte Guay, de l'Association des services de garde en milieu scolaire, estime maintenant que les garderies scolaires verront leurs subventions de base réduites de plus de la moitié puisqu'il faut bien financer les annonces d'hier.» La dame dit – Mme Guay: «Ce qui se passe actuellement, c'est qu'on cherche le scénario le plus odieux parmi des scénarios qui sont tous odieux.» On peut comprendre pourquoi la ministre ne veut pas les rencontrer, ces regroupements-là. «Les garderies, une compression qui pénalise les plus démunis du Québec»; «Des compressions dans les garderies de milieu scolaire, des compressions catastrophiques. Les garderies qui reçoivent uniquement ou presque des enfants provenant des milieux défavorisés devront fermer leurs portes faute de clientèle.» Et ça continue, M. le Président.

Il faut comprendre le jeu, le gros jeu impoli de la ministre aujourd'hui, de dire à son personnel d'appeler à Montréal, les regroupements. Parce que, vraiment, moi, je suis offusquée que le gouvernement agisse de la sorte, d'appeler les regroupements le matin, M. le Président, et de dire: Ah! malheureusement, ils ne sont pas ici. On passe à la... en sachant très bien... Depuis des mois, la ministre, elle le savait, que ces regroupements-là voulaient être entendus en commission parlementaire, ont demandé du temps, ont écrit des minutes. Je pense même qu'il y a un regroupement qui a écrit au premier ministre pour être entendu. Et, là, on nous joue le jeu aujourd'hui: On a téléphoné, mais on a laissé des messages sur répondeur. Et on vient de parler à un regroupement, Mme Drouin, qui nous a clairement dit que la personne qui lui a téléphoné n'a pas laissé sous-entendre qu'on l'invitait à venir se faire entendre en commission parlementaire. On a laissé sous-entendre que, oui, l'étude détaillée du projet de loi commençait cet après-midi. Mais jamais l'invitation claire, nette et précise n'a été donnée à Mme Drouin. Pourquoi, M. le Président? Parce que Mme Drouin représente l'Association des garderies à but lucratif et que la ministre ne veut pas les entendre, ce regroupement-là, parce qu'elle l'a évincé du regroupement de travail; il ne faisait même pas partie du regroupement de travail qui a soumis des recommandations à la ministre. Alors, la ministre devrait même s'excuser à la fin de cette commission d'avoir agi de la sorte envers ces regroupements-là.

Une voix: ...

Mme Loiselle: M. le Président, aujourd'hui, si la députée de Rimouski veut parler, qu'elle vous demande la parole. On ne commencera pas le petit jeu d'hier.

Mme Bélanger: Elle grogne tout le temps, de toute façon.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): S'il vous plaît...

Mme Loiselle: Ça, ça revient, M. le Président...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): S'il vous plaît, s'il vous plaît...

Mme Loiselle: Ce qui est très flagrant cet après-midi, M. le Président...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Mme la députée, je vous ferais juste remarquer que, moi, ça ne me fait rien, parce que vous êtes toujours sur vos remarques préliminaires sur le fond, là. Tantôt, on aura peut-être une des motions que vous allez présenter, et une grosse partie de ce que vous dites, à mon sens, s'applique aussi ou principalement sur les motions préliminaires. En tout cas, faites-les où vous voudrez, mais je vous souligne que vous êtes surtout...

Mme Loiselle: Je le fais de la façon dont la commission a été entamée par la ministre aujourd'hui, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Alors, si vous voulez continuer, Mme la députée.

M. Gaulin: M. le Président...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Oui.

Mme Loiselle: Parce que, dans ces remarques...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Un instant. M. le député de Taschereau.

M. Gaulin: Bon. M. le Président, j'invoquerais l'article 35 pour inviter la députée de Saint-Henri– Sainte-Anne, peut-être, à éviter les qualificatifs qui pourraient ressembler à des injures, en toute déférence.

Mme Loiselle: M. le Président, si j'ai dit un mot qui est antiparlementaire, j'aimerais que vous me le précisiez, s'il vous plaît.

M. Gaulin: Bien, l'impolitesse. On pourrait...

Mme Loiselle: Bien, comment est-ce que vous appelez ça, vous?

M. Kelley: Un constat.

M. Gaulin: Alors, c'est une invitation que je fais à la bonne volonté de la députée.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Alors, je pense que tout le monde connaît bien l'article 35. J'invite tout simplement les gens à être prudents.

Mme Loiselle: Je n'ai pas prononcé de mots antiparlementaires, M. le Président, je pense que vous êtes d'accord avec moi.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): J'invite tout simplement les gens à être prudents. Je ne dis pas que qui que ce soit a dit quoi que ce soit à l'heure actuelle. Tout simplement être prudents, compte tenu de l'allure que prend le débat. Mme la députée, si vous voulez continuer.

Mme Loiselle: Oui, M. le Président. Tantôt, la ministre nous a dit que, si on n'entendait pas le groupe qui est ici aujourd'hui, on commençait l'étude détaillée, parce que, de toute façon, on avait déjà beaucoup discuté de ce projet de loi là. La ministre n'a pas fait mention que, durant l'interpellation que mon collègue a demandée un vendredi matin, la ministre n'a pas précisé que, après, peut-être, je pense, 25 minutes d'interpellation, elle s'est levée et elle a quitté. C'est un autre ministre qui est venu la remplacer. Ce n'est pas avec la ministre responsable des garderies qu'on a échangé, c'est avec le député d'Anjou et ministre de la Réforme électorale. Écoutez, ça, la ministre ne le précise pas, mais c'est une réalité: ce n'est pas avec la ministre qu'on a échangé sur le sujet, c'est avec un autre ministre, M. le Président.

Ça, là, ça me fait penser à ce qu'on s'est fait faire ici, encore dans cette commission parlementaire, il n'y a pas très longtemps, où le ministre de la Santé discutait, échangeait et recevait des invités en commission parlementaire sur le projet de loi n° 116 et, en même temps, le ministre des Affaires municipales se levait en Chambre pour faire le discours de l'adoption de principe sur un projet de loi du ministre de la Santé. C'est assez loufoque et incongru, ce qui se passe actuellement avec ce gouvernement. On joue avec la démocratie, on joue avec les droits des parlementaires et, en plus, on ne respecte même pas les partenaires du réseau des garderies, les gens qui représentent les parents et les enfants du Québec. C'est ça qu'on voit aujourd'hui. Puis c'est ça qui est malheureux, puis c'est ça que j'appelle, moi, de l'impolitesse à haut niveau, M. le Président.

M. le Président, ça me fait penser aussi, parce que j'en parle souvent, que, de façon quotidienne, je constate que c'est ça, c'est du double langage de ce gouvernement-là. Parce que, quand ils arrivent devant des regroupements, quand ils arrivent devant des assistances, ils ont le coeur sur le main puis ils nous font de très beaux discours. Je dois admettre, M. le Président, je suis certaine qu'ils ont pris un cours intensif ensemble en communications sur la compassion et l'équité sociale, parce qu'ils sont très performants.

Mais, quand on regarde ce que ces ministres-là... Parce que je donne, M. le Président, crédit à certains députés avec qui je travaille en commission parlementaire au niveau ministériel. Moi, je parle plutôt de l'équipe ministérielle, des ministres et du premier ministre. Quand ces gens-là, M. le Président, dans leur double langage... Surtout la phrase du premier ministre, celle-là, je vais m'en souvenir pour le restant de mes jours. Le premier ministre, dans son discours inaugural: «La famille est à la fois la brique et le ciment de nos vies, il faut en prendre grand soin.» Elle est belle, cette phrase-là, M. le Président. Mais le premier geste que ces gens-là ont fait envers les familles du Québec, les familles les plus pauvres, les plus vulnérables, les plus fragiles du Québec, ils se sont acharnés sur les familles de l'aide sociale, les familles bénéficiaires de l'aide sociale. Ça, ça a été le premier grand geste de ce gouvernement après le référendum. Après avoir dépensé plus de 100 000 000 $ dans un référendum, en comptant le préréférendaire et tout le tralala, le premier geste en arrivant en Chambre après le référendum, ce gouvernement-là est allé chercher 200 000 000 $ dans les poches vides des plus démunis de notre société.

Et là, M. le Président, la ministre s'est dit: Moi, là, je vais faire ma part. Il faut que le message de mon chef, de mon premier ministre, «la famille est à la fois la brique et le ciment de nos vies, il faut en prendre grand soin», il faut que je fasse ma part. Qu'est-ce que la ministre fait, M. le Président? Elle s'attaque aux parents à revenus modestes et elle s'attaque aux parents les plus démunis. Encore les bénéficiaires de l'aide sociale, M. le Président.

Parce que, la ministre, ses mauvais coups ne se retrouvent pas vraiment dans son projet de loi. Ses mauvais coups, elle, elle les a faits avant, parce qu'elle a modifié le règlement sur l'exonération et l'aide financière pour un enfant en service de garde. Elle a coupé de moitié les services de garde en milieu scolaire, qui est parti, le budget, de 24 000 000 $ à 12 000 000 $. Ça, M. le Président, on s'entend bien, là, ce n'est pas des gens qui roulent en Mercedes, on parle ici de parents à faibles revenus, des parents dont les enfants vont dans des services de garde, des parents qui, chaque mois, n'arrivent pas à attacher les deux bouts.

M. Kelley: Ou en limousine.

Mme Loiselle: Pardon?

M. Kelley: Ils ne roulent pas en limousine non plus.

Mme Loiselle: Non, non, ce sont des parents habituellement qui n'ont pas de voiture.

M. le Président, c'est là que la ministre a coupé la moitié du budget. Vous savez que, en faisant ça, il y a des parents qui ne sont pas capables d'envoyer leurs enfants en services de garde. Vous savez qu'on handicape ces enfants-là. On les handicape au niveau éducatif, on les handicape au niveau que, après l'école, ils n'auront pas le soutien et l'encadrement nécessaires. Puis on parle ici, M. le Président, de familles démunies. Mais ça, bien non: «La famille est à la fois la brique et le ciment de nos vies, il faut en prendre grand soin.» Et ça continue, M. le Président, parce que les mauvais coups de la ministre, c'est dans la modification du règlement sur l'exonération.

La ministre, elle, ce dont elle ne s'est pas vantée encore, vous avez bien remarqué, c'est qu'elle fait des économies avec ça aussi. Elle va économiser 14 300 000 $ en coupant dans le Programme d'exonération et d'aide financière pour un enfant en service de garde. En plus, elle va se greffer des économies de 5 600 000 $ en excluant de ce programme les parents dont les enfants sont âgés de plus de cinq ans et vont à l'école primaire. Ça, c'est des beaux coups pour aider les familles québécoises à faibles revenus, les familles démunies, M. le Président.

Et ça continue. Là, on parle ici... Oui, les diminutions de pourcentage. Ça, ça a passé en douce, M. le Président. Mais, quand on diminue le pourcentage pour justement calculer le montant quotidien maximum de l'exonération, ça veut dire que l'argent qui est diminué, qu'on donnait aux parents, c'est les parents qui doivent le fournir.

Moi, j'ai une situation dans mon comté, M. le Président, où, avec les beaux changements de la ministre, avec les beaux cadeaux qu'elle fait aux familles démunies, une famille à faibles revenus – ça, tous les députés ministériels en ont dans leur comté, puis, ça, c'est grave, là – qui a de la difficulté à arriver à chaque fin de mois, qui a de la difficulté à se loger convenablement, qui, des fois, a de la difficulté le 26, 27, 28 du mois, qui n'a presque plus de nourriture dans le frigidaire, la ministre a dit à ces gens-là: Vous avez deux enfants, alors maintenant vous allez débourser 400 $ par mois pour les services de garde à l'école.

(16 heures)

Qu'est-ce que les groupes qui travaillent avec les familles à faibles revenus, qui nous ont communiqué et qu'on a rencontrés, nous ont dit? Ils nous ont dit qu'avec cette mesure-là certaines familles, pour ne pas que les enfants se retrouvent dans la rue parce qu'ils ne pourront plus se payer les services de garde, pour ne pas que les enfants se retrouvent dans la rue, la clé dans le cou, vont être obligées de laisser leur emploi pour s'en aller vers l'aide sociale. Parce que c'est ça, les effets pervers d'une coupure brutale, M. le Président, c'est que ces gens-là vont être obligés de laisser leur emploi, à salaire minimum bien souvent, pour s'en aller sur l'aide sociale afin de s'assurer que leurs enfants vont être en sécurité quand ils vont quitter l'école. C'est fou comme ça, ces coupures-là qu'on met en place, puis on ne regarde pas les impacts que ça va avoir sur le terrain ou dans la vie des gens.

Ça, M. le Président, ce n'est pas la première fois que je le dis, mais la ministre, elle a la même maladie que le ministre de la Santé avait hier: des attaques de surdité contrôlée. On parle, elle fait semblant qu'elle nous écoute, mais elle ne nous écoute pas, les oreilles sont bouchées. C'est exactement le problème de ce gouvernement, M. le Président, qui n'écoute pas les représentants, qui n'écoute pas les organismes, qui n'écoute pas les citoyens, les citoyens qui nous rencontrent, qui nous appellent puis qui nous disent: Moi, là, si la ministre va dans ce sens-là, je n'ai pas l'argent. Je n'arrive pas à la fin du mois, alors je ne peux même pas penser que je pourrais payer la moitié du 400 $. Ce n'est pas possible, ils ne l'ont pas, l'argent dans leurs poches, M. le Président. C'est des gens qui n'arrivent pas, qui n'ont pas d'économies. C'est des gens, là, chaque sou est calculé dans leur budget du mois. Alors, c'est ce qu'on dit à ces parents-là, que maintenant leurs enfants vont être dans la rue. Ou, l'autre solution: Si vous ne voulez pas que vos enfants soient dans la rue avec la clé au cou, bien, lâchez votre job puis allez-vous-en sur l'aide sociale.

La ministre aussi ne s'est pas vantée, M. le Président... Là aussi, il va y avoir des déboursés pour des parents: elle élimine le paiement des journées pédagogiques. Ça, M. le Président, l'ensemble des ministères sont disponibles pour obtenir ce paiement des journées pédagogiques. Nous, on a calculé que ça pourrait donner des déboursés additionnels de 240 $ à 250 $ par famille, ça, M. le Président.

Dans les mauvais coups que la ministre a faits avant son projet de loi, elle ne nous a pas parlé beaucoup des travailleurs saisonniers et des personnes inscrites à des programmes de réinsertion au marché du travail. Parce que, là aussi, M. le Président, la ministre, elle a lancé une petite brique sur la tête de ces gens-là. Parce que ces gens-là, M. le Président, n'auront plus droit à l'aide financière pour les journées excédant 20 jours. Alors, ces gens-là: éliminés. L'exception prévue au règlement est abolie, on élimine tout ça, on passe ça sous le couperet.

Ça continue, M. le Président. Éliminer le paiement des journées et demie et des deux journées. Je me souviens, lors de l'interpellation avec le député de Saint-Hyacinthe, il nous a vraiment fait une belle présentation, assez touchante, des jeunes familles, des jeunes femmes qu'il recevait à son bureau, des jeunes femmes qui avaient de la difficulté à arriver, qui devaient, des fois, avoir deux emplois. Alors, moi, je lui dis justement... Le député de Saint-Hyacinthe n'était pas au courant que sa ministre venait justement, M. le Président, de frapper avec la brique ces familles-là. Pourquoi? Parce que, justement, éliminer le paiement des journées et demie et des deux journées, c'est, pour ces familles-là... souvent familles monoparentales, chefs de familles monoparentales... Et on le sait tous qu'en grande majorité ce sont des femmes qui sont obligées d'occuper deux emplois pour boucler leur budget ou qui ont décidé: Moi, je veux m'en sortir. J'ai un enfant, j'ai deux enfants, puis je veux lui offrir un bel avenir. Alors, je vais travailler au salaire minimum puis, en même temps, je vais étudier pour parfaire mes études. Alors, là, M. le Président, ces gens-là pouvaient obtenir cette aide-là. Maintenant, M. le Président, oubliez ça: les femmes chefs de familles monoparentales, débrouillez-vous! Alors, M. le Président, c'est un projet de loi qui, en grande partie, en très, très grande partie, s'attaque directement aux familles démunies, aux familles à revenus modestes, et c'est ça qui est le plus malheureux dans ce projet de loi là, M. le Président.

Il y a une autre partie, aussi, puis je comprends pourquoi la ministre ne veut pas les rencontrer. Je comprends! Si j'étais une femme parlementaire, ministre en plus, M. le Président, je serais gênée, moi, de rencontrer les femmes qui représentent l'association, le regroupement des garderies à but lucratif. Pourquoi, me diriez-vous, M. le Président? Parce que la ministre, avec son projet de loi, vient de fermer la porte définitivement à tout développement pour les garderies à but lucratif. C'est ça, le projet de loi de la ministre. La ministre, elle, elle dit à des femmes, des jeunes Québécoises qui ont étudié puis qui ont dit: Bon, moi, je veux construire ma petite entreprise, je veux être propriétaire de ma petite entreprise qui va créer de l'emploi pour d'autres femmes – parce qu'on sait tous qu'en grande majorité ce sont des femmes qui travaillent dans les garderies – alors, la ministre leur dit: Bien, vous autres, votre rêve, là, puis votre détermination, puis votre courage... Parce que ces femmes-là, M. le Président, ont le courage d'aller dans les caisses populaires, dans les institutions bancaires, ont le courage de s'endetter parce qu'elles veulent créer leur petite entreprise puis qu'elles veulent aussi générer de l'emploi, parce que ces femmes-là vont créer de l'emploi pour d'autres femmes. Bien, Mme la ministre, elle vient de leur dire: Non, votre rêve à vous, vous n'avez pas le droit. Moi, j'ai décidé que je favorisais les associations à but non lucratif.

Puis, ça, M. le Président, que ce soit clair, je l'ai répété maintes et maintes fois: Je n'ai aucun problème, parce que les deux sont aussi importants l'un que l'autre. Moi, je favorise autant les organismes à but non lucratif que les organismes à but lucratif, parce que, ça, ça donne le choix aux parents. Parce qu'on dit souvent: Parents différents, choix différents. Alors, d'avoir la diversité dans les services de garde, moi, je dis bravo à ça parce que, si, moi, j'ai le goût d'envoyer mon enfant dans une garderie à but non lucratif, c'est ma décision comme parent, puis ce n'est pas au gouvernement de me dire dans quel organisme je vais envoyer mon enfant, M. le Président. Je regrette, c'est ma responsabilité de parent, de mère, de décider dans quelle garderie je vais l'envoyer. Mais, dorénavant, pour les futures mères, M. le Président, la ministre, elle, elle dit à ces femmes-là: Vous autres, vous n'ouvrirez pas vos garderies, c'est fini, allez ouvrir d'autres genres d'entreprise parce que, moi, dans mon projet de loi, j'ai décidé qu'il y en avait suffisamment, de garderies à but lucratif et que, dorénavant, le développement de garderies à but lucratif, je mets la clé dans ça, la hache dans ça, je vous ferme la porte.

Parce que c'est ça, le projet de loi, M. le Président. Alors, il faut comprendre pourquoi la ministre a démontré une certaine appréhension à rencontrer ces gens-là, M. le Président, à rencontrer les représentantes de l'association des garderies à but lucratif. Et la ministre devra expliquer aussi pourquoi elle les a évincées du regroupement de travail. Pourquoi les garderies à but lucratif, qui sont une partie, qui font partie de tout le service de garde au Québec, n'ont pas été invitées à participer au groupe de travail? Poser la question, M. le Président, je pense que c'est y répondre quand on sait devant quel projet de loi on se retrouve actuellement.

Alors, moi, je dis, M. le Président, que ce projet de loi là, finalement, ne bonifie rien, ce projet de loi là punit, punit les femmes, en grande majorité, qui voulaient créer leur propre entreprise, punit l'emploi. Mais au-delà de tout ça, M. le Président, ce gouvernement, ce projet de loi punit les familles à faibles revenus, punit les enfants de familles modestes. Et la ministre devra vivre avec les conséquences de son geste, les conséquences de son projet de loi quand elle va voir ce qui va se passer avec les jeunes enfants des familles défavorisées, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci, Mme la députée. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Mme la députée de Saint-François.


Mme Monique Gagnon-Tremblay

Mme Gagnon-Tremblay: Oui, merci, M. le Président. M. le Président, quand on voit la difficulté de la ministre à accepter qu'on rencontre les groupes, et surtout qu'on rencontre des groupes particuliers, il n'est pas question que l'on commence une grande consultation pendant quatre, cinq jours; ce n'est pas ce qu'on demande à la ministre. Mais, lorsqu'on demande à la ministre de rencontrer des groupes, je pense que cette dernière, M. le Président, elle a deux choix très simples – on est tous des parlementaires, on sait ce qui peut arriver: elle a le choix d'accepter de rencontrer certains groupes, et on va poursuivre très rapidement et on va essayer de bonifier le projet de loi, et puis l'opposition, à ce moment-là, va collaborer à étudier article par article; ou bien la ministre a le choix de dire: Non, je n'accepte pas de rencontrer ces groupes. Par contre, elle connaît les conséquences, c'est-à-dire que nous allons prendre tout le temps qu'il faut pour discuter du projet de loi, au risque, bien sûr, que le gouvernement soit obligé, comme il l'a fait dans plusieurs projets de loi et comme il le fera sûrement, de suspendre les règles et de bâillonner l'opposition sans avoir donné la chance à l'opposition, justement, de bonifier le projet de loi.

La ministre nous dit qu'ils ont téléphoné très rapidement pour faire en sorte que ces gens puissent se présenter cet après-midi. Mais, M. le Président, si je me fie aux remarques préliminaires de la ministre, j'ai même l'impression qu'elle-même a été étonnée d'être appelée cet après-midi. Elle n'a même pas eu le temps, elle non plus, de préparer ses remarques préliminaires. Parce que j'aurais aimé entendre, justement, la ministre sur les points importants soulevés dans le projet de loi; j'aurais aimé comprendre davantage son projet de loi pour être capable d'y apporter des modifications, surtout en ce qui concerne les articles 41.7 et suivants, mais la ministre a été très, très limitative dans ses remarques préliminaires, mentionnant, bien sûr, qu'on en avait longuement discuté. Mais, moi, ce que j'ai entendu, M. le Président, à l'Assemblée nationale, c'est les questions répétées de mon collègue à la ministre, et c'est toujours les mêmes réponses. Mais, finalement, je n'ai pas été mise au fait du contenu du projet de loi plus que ça, M. le Président. Et c'est, bien sûr, à l'étude article par article... Mais, par contre, j'aurais souhaité que la ministre nous fasse part, justement, de ses intentions dans ses remarques préliminaires.

(16 h 10)

Ceci dit, M. le Président, je reviens encore à dire que la ministre a le choix d'accepter rapidement: Oui, j'accepte de rencontrer certains groupes, ou bien, tout simplement, de s'obstiner à dire tout simplement qu'il y en a un seul qu'on pourra rencontrer cet après-midi. Et, comme je le mentionnais, à ce moment-là, on prendra tout le temps qu'il faut, parce qu'on a des droits, puis je pense qu'on va les faire respecter, malgré qu'en bout de ligne on sache très bien que, fort de sa majorité, le gouvernement peut accepter ou peut adopter à peu près n'importe quoi. On l'a vu dans d'autres projets de loi, et on sait que le gouvernement peut le faire. Mais, au moins, on ne nous reprochera pas d'avoir adopté ce projet de loi à la vapeur, avec toutes les conséquences et l'impact que ça peut avoir sur différentes clientèles.

Pourquoi il y a tant d'urgence, M. le Président? Pourquoi on veut passer soudainement ce projet de loi rapidement, à la vapeur? J'aurais le goût de poser la question à la ministre et de lui dire: Est-ce que c'est vraiment pour améliorer ce qu'il y a déjà de fait, ou bien si c'est pour livrer une commande qui lui vient, bien sûr, du Conseil du trésor, des Finances? Et est-ce que ce n'est pas plutôt, justement, pour atteindre l'enveloppe fermée qu'on lui a suggérée, la raison pour laquelle il faut adopter ce projet très rapidement? Et on se fiche, finalement, des groupes qu'on veut entendre, puisqu'on veut tout simplement couper, que ce soit l'exonération financière ou encore le financement dans les milieux scolaires. Donc, comme on a cette commande et qu'on veut absolument atteindre les objectifs budgétaires, à ce moment-là, c'est ce qu'on a l'intention de faire.

Parce que je trouve ça bien curieux, M. le Président... Je vais vous donner certains exemples. Quand il s'agit, entre autres, de l'équité salariale pour les femmes, lorsqu'on est arrivé à discuter de l'équité salariale... parce que c'est de ça qu'on devrait discuter aujourd'hui. Imaginez-vous que c'est à la commission des affaires sociales. Et même, on devait commencer la semaine dernière à entendre les groupes, hein, et, normalement, on devrait étudier le projet de loi article par article. Alors, donc, lorsque est arrivé le temps de l'équité salariale, comme il s'agissait pour le gouvernement de remettre des sommes ou de payer l'équité salariale pour les femmes, parce qu'on s'est rendu compte qu'entre l'avant-projet de loi puis le projet de loi le gouvernement ne pouvait pas s'en dissocier, à ce moment-là, on retarde, il faut prendre tout le temps, hein. Le premier ministre l'a dit à plusieurs reprises. Par contre, il a bien dit: On ne modifiera pas, le projet de loi ne sera pas dilué, il ne sera pas modifié, mais, par contre, on va tout simplement commander la commission parlementaire pour entendre les différents groupes à la veille du sommet socioéconomique. Comme ça, on va être sûr de s'assurer de la participation des différents groupes économiques, on va être sûr que les patrons seront au fameux sommet, mais, par contre, on va tout simplement le reporter. Tandis que, quand il s'agit, par exemple, des dossiers de la santé, comme, par exemple, la loi n° 33, quand il s'agit d'aller chercher 300 000 000 $ dans les poches des contribuables rapidement et qu'on a une commande de 200 000 000 $ pour 1996-1997, là, plus question d'entendre des groupes, plus question, il faut faire rapidement.

Alors, j'ai un peu l'impression que, quant à ce projet de loi, c'est un peu la même chose, M. le Président, c'est-à-dire qu'il y a sûrement des améliorations qui sont apportées dans le projet de loi, mais, par contre, il ne faut pas oublier qu'il y a aussi des sommes considérables qu'on va chercher dans les poches des contribuables et qui auront un impact, un impact majeur, que ce soit, par exemple, au niveau de l'éducation des enfants, tout le développement social des enfants, mais aussi des parents, parce que, d'une part, on promet une loi d'équité salariale... C'est bien beau, avoir une loi d'équité salariale, mais encore faut-il avoir les moyens d'être en emploi, encore faut-il avoir des services de garde de qualité, puis en avoir, des services de garde, si on ne veut pas que les femmes se retrouvent, justement, à l'extérieur du marché de l'emploi. Et les services de garde, c'est le meilleur moyen pour les femmes, un des meilleurs moyens pour les femmes de pouvoir demeurer sur le marché du travail tout en sachant fort bien qu'il y a quelqu'un de compétent, capable de donner des services de qualité à des enfants. Il y a aussi, bien sûr, tout le volet des enfants qui sont plus défavorisés, et peut-être dont les parents ne sont pas nécessairement sur le marché du travail à temps plein, mais qui ont besoin des services de garde pour améliorer leur éducation, pour se socialiser, pour faire face à l'avenir, pour faire face au futur. Et, ça, je pense que c'est très important, et on ne peut pas se permettre d'exclure ces clientèles.

J'entendais la ministre, M. le Président, dans ses remarques préliminaires très brèves, dire qu'il fallait faire une réflexion en profondeur. Je veux bien qu'on fasse une réflexion en profondeur, M. le Président. Le gouvernement en a fait une en 1988, hein: «Énoncé de politique sur les services de garde à l'enfance: pour un meilleur équilibre», et je pense qu'on n'a pas besoin de réinventer la roue. Je pense qu'on peut partir d'une politique dont, à mon avis, les grands principes ont fait quand même consensus.

Je veux bien croire qu'il y a des possibilités d'améliorer certaines parties de cette politique avec l'expérience, avec l'usage, qu'il est peut-être normal que l'on veuille améliorer certaines parties de cette politique, qu'on regarde tout le financement des services de garde. Je veux bien croire qu'on le regarde, M. le Président, parce qu'on sait fort bien qu'avec la formule qu'on avait développée en 1988 il peut arriver qu'à la longue on ait à se requestionner sur la formule de financement des services de garde. Mais est-ce qu'on se questionne sur la formule parce qu'on veut couper ou si on se questionne sur la formule parce qu'on veut l'améliorer? Je pense que ce sont des questions auxquelles il faut répondre, parce que, si c'est dans le but de couper, bien, là, on coupe les gens qui en ont le plus besoin.

Alors, donc, M. le Président, je pense qu'à ce moment-ci c'est important d'avoir aussi l'opinion des différents groupes, de connaître mieux l'impact. Parce que je peux bien savoir, je peux bien vous dire, M. le Président: Oui, ça va avoir un impact dans le milieu scolaire, mais j'aimerais bien que les gens soient ici pour me dire véritablement si oui ou non puis de quelle façon, pour qu'on puisse trouver des solutions. Si c'est une question de coûts puis que le gouvernement n'a plus les moyens, bien, qu'il le dise franchement et, à ce moment-là, on regardera ce qu'on peut faire pour compenser. Mais, moi, je pense, M. le Président, que c'est agir rapidement. Et il ne faut pas oublier que, dans son programme électoral, en 1994, le Parti québécois reconnaissait justement l'immense besoin des services de garde. Il s'est engagé à créer non pas 6 000 places en services de garde par année, mais bien 8 000 places par année donnant droit à l'exonération, à l'aide financière et aux subventions.

Donc, finalement, on se rend compte après quelque temps... La meilleure façon de s'en sortir élégamment, M. le Président, quand on se rend compte qu'on n'a pas les moyens de le faire, c'est de former un comité de travail. On a formé un comité de travail, lequel comité a fait des recommandations et, bien sûr, la recommandation, premièrement, de moratoire: donc, moratoire concernant l'émission de permis pendant un an, concernant le développement de nouvelles places à financer. Je comprends, M. le Président, si on n'a plus les moyens, qu'il faut peut-être arrêter un certain temps, mais, d'un autre côté, c'est que ce n'est pas le cas, là: c'est qu'on arrête, mais on enlève aussi, on coupe dans le budget de l'Office des services de garde ou dans les services de garde en milieu scolaire. Donc, ce n'est pas juste un moratoire, là, c'est qu'on enlève à des clientèles, on enlève, entre autres aux personnes qui ont le plus besoin de services de garde, des sommes considérables qu'elles devront supporter, qu'elles devront assumer.

M. le Président, le budget de l'Office des services de garde est passé, entre 1988-1989 et 1995, de 96 000 000 $ à 207 000 000 $. Ce n'est pas pour rien, M. le Président, que ce budget a été augmenté d'une façon substantielle, c'est parce qu'il y avait des besoins. Il fallait y répondre. Alors, donc, maintenant, en milieu scolaire, le budget est coupé de 50 %; 50 % de coupures dans les milieux scolaires. Et, donc, il faut les justifier, quand même, il faut être capable de connaître de la part des groupes ce qui arrive. Ma collègue parlait des enfants, justement, la clé dans le cou. C'est ce qu'on a voulu éviter. Ce n'est pas pour rien, M. le Président, qu'on a accordé des sommes supplémentaires dans le réseau, c'est justement pour éviter ça, pour éviter aussi que les enfants se retrouvent avec des problèmes majeurs dans le futur, parce que, naturellement, cette éducation que l'enfant doit avoir en bas âge, si l'enfant ne reçoit pas cette éducation, bien sûr que ça aura des conséquences sur son avenir, ça aura des conséquences majeures.

(16 h 20)

Non seulement on ne se contente pas de couper au niveau des services de garde, mais j'ai été estomaquée, M. le Président, quand je me suis rendu compte qu'on enlevait près de 14 000 000 $ dans le programme d'exonération et d'aide financière aux parents. Déjà, les parents étaient financés, mais moyennement. Déjà, on avait fait, par exemple, un programme qui, bon, permettait d'aider les plus démunis, mais les autres devaient supporter à fort prix les services de garde. Mais, là, on décide de couper 14 000 000 $ dans l'exonération aux services de garde, l'aide financière aux parents. Mais qui va assumer? M. le Président, on s'est rendu compte qu'avec ce gouvernement, depuis un certain temps, on avait ciblé les personnes âgées. On s'attaquait aux personnes âgées, on ciblait les personnes âgées. Là, on a décidé de cibler les familles, les familles qui ont le plus besoin, les familles, naturellement, qui sont les plus démunies. On cible maintenant les familles. Et 14 000 000 $ pour l'exonération financière des parents, M. le Président, c'est sûr qu'il y aura des conséquences. C'est certain qu'il y a des familles qui ne pourront plus se payer le luxe... Le luxe: quand on dit que c'est un luxe, c'est rire, M. le Président, parce que ce n'est pas un luxe, hein. Elles ne pourront plus même se payer ce service important des services de garde. Déjà, on avait exclu une forte proportion de familles, dans le sens que les familles qui étaient capables de payer, on leur demandait un support plus considérable. Mais, là, maintenant, on s'attaque à des familles qui ont moins les moyens de le faire. Je comprends, M. le Président, que, pour toutes les garderies à but lucratif futures, les parents n'auront même plus cette aide financière.

Sûrement, on va avoir l'occasion de revenir sur les choix que fait le gouvernement, mais je dois vous dire, M. le Président, qu'il faut vraiment se questionner à ce moment-ci. Et je relisais justement cette politique, tout à l'heure, «Pour un meilleur équilibre», et je me disais: Qu'est-ce qui a guidé le gouvernement à adopter une telle politique, à l'époque, hein? Je pense que c'est suite à une consultation très large. Et, comme je le disais, on n'a pas, je pense, à refaire, là, toute la politique. Et je me disais: Il y avait sept grand principes directeurs qui nous avaient guidés pour l'adoption de cette politique, à l'époque. Et je voudrais vous en faire part, M. le Président, parce que vous allez voir qu'on est en train de briser l'équilibre de cette politique, et je ne vois pas, dans le projet de loi, comment on va pouvoir aider à rééquilibrer la politique une fois qu'on aura adopté ce projet de loi.

On parlait d'un soutien essentiel pour les parents; c'est indispensable quant à la participation des parents au marché du travail. Les services de garde s'avèrent essentiels pour les Québécoises engagées dans un processus d'égalité économique, d'autonomie financière. J'en parlais tout à l'heure, M. le Président. Je vous disais que, quand on parle d'équité salariale pour les femmes, on parle en même temps d'équité en emploi. L'équité en emploi, c'est d'obtenir pour les femmes, d'avoir pour les femmes les moyens, que ce soit, par exemple, au niveau des services de garde, que ce soit à tous les niveaux, qu'on puisse permettre aux parents de demeurer sur le marché du travail. Et je vise particulièrement les femmes, parce que c'est en bonne partie, il faut bien l'avouer, c'est en bonne partie encore les femmes qui ont charge d'enfants. Alors, donc, les services de garde, c'est un principe directeur absolument essentiel pour permettre de concilier les responsabilités familiales avec les responsabilités professionnelles.

Il y avait un autre principe qui était très important, et c'était celui du développement pour l'enfant, le milieu pour le développement, alors que les services de garde jouent un rôle préventif, un rôle éducatif important. Donc, il ne faut pas s'arranger pour vider les services de garde puis s'arranger pour qu'on n'en ouvre plus. Au contraire, il faut développer le réseau puis il faut s'assurer que le plus de parents possible puissent avoir accès à un service de qualité, parce que c'est un rôle qui est préventif et c'est un rôle éducatif.

Un autre principe était celui d'un développement qui respecte le choix des parents, et le développement diversifié des modes de garde et leur consolidation devaient tenir compte du choix des parents. Ça, je pense que c'est bien important, que l'on puisse permettre aux parents de décider du choix des services de garde. Je pense que les parents sont suffisamment de grandes personnes, ont suffisamment de responsabilités pour savoir ce qui est meilleur, ce qui est bon pour leur enfant.

Il y avait un autre principe également, qui était une préférence pour les services de garde gérés par les parents. M. le Président, le Parti libéral du Québec, à l'époque, oui, entendait continuer à privilégier le développement des services de garde sans but lucratif dont le conseil d'administration était majoritairement formé de parents, mais on n'éliminait pas pour autant les services de garde à but lucratif. Je pense que c'est important d'avoir un secteur témoin, de voir comment on peut se comparer et de permettre aussi aux parents d'utiliser...

Le gouvernement n'a pas les moyens, n'a plus les moyens de développer. On le voit, M. le Président, il coupe dans l'exonération financière des parents puis il coupe dans l'aide au milieu scolaire. Donc, comment le réseau va pouvoir se développer si on pense qu'on ne peut plus avoir de garderies à but lucratif? Comme je vous dis, M. le Président, personnellement, et c'est ce que notre gouvernement avait fait à l'époque, on avait privilégié le développement de services sans but lucratif. Et je pense qu'on doit poursuivre dans cette voie, mais sans éliminer pour autant les garderies à but lucratif, et sans éliminer non plus et sans obliger les parents qui décident de faire ce choix à être pénalisés parce qu'ils font le choix.

Et il y avait, bien sûr, un autre principe, qui était la réaffirmation de l'autonomie des services de garde, qui sont des organismes privés, des entités juridiques autonomes, et, bon, je pense que, dans ce sens-là, le gouvernement a l'intention de poursuivre. Et bien sûr que c'est une responsabilité communautaire, hein. Je pense que tous les milieux doivent s'impliquer. Mais, lorsque, par contre, je vois que la ministre veut permettre le développement régional à partir de consultations des régies ou encore des conseils de développement régional... M. le Président, les régies, elles ne savent plus quoi faire, elles sont débordées; les conseils de développement régional, on leur donne des responsabilités de jour en jour, ils ne savent plus où donner de la tête. Est-ce que vous pensez que ces organismes vont pouvoir faire une meilleure planification des services de garde en région et vont pouvoir prendre l'intérêt des services de garde, que, par exemple, l'intérêt... ils vont pouvoir faire mieux que l'Office des services de garde pouvait faire en région? Je pense que les consulter, oui, mais leur donner plus de pouvoirs pour qu'ils décident de toute la planification? Je pense que l'Office des services de garde, jusqu'à maintenant, avait fait un travail et pouvait continuer à faire un travail intéressant dans ce sens-là.

Donc, M. le Président, je vois que mon temps s'achève, mais ce qui est important, c'est que je trouve ça vraiment aberrant de voir qu'on n'est pas capable de rencontrer des groupes, les principaux groupes pour qu'ils puissent vraiment nous faire connaître les véritables impacts du projet de loi. Et, comme je le mentionnais, la ministre a le choix de refuser, de s'obstiner à refuser, et puis on va prendre tout le temps qu'il nous faut, M. le Président; ou elle a le choix d'accepter de rencontrer ces groupes rapidement, et je pense qu'on va tous collaborer à l'amélioration du projet de loi.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci, Mme la députée de Saint-François. Autre intervention, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.


M. Russell Copeman

M. Copeman: J'osais espérer, M. le Président, que quelqu'un du parti ministériel était pour prendre la parole à ce moment, par souci d'alternance, mais ceci n'est pas le cas. Alors, ça me fait plaisir de présenter mes quelques remarques préliminaires sur le projet de loi n° 11, Loi modifiant la Loi sur les services de garde à l'enfance et d'autres dispositions législatives.

Quelques mots – bien, peut-être plus, M. le Président, on verra, peut-être plus que quelques mots – sur le processus devant nous, et je vais également parler, évidemment, du contenu du projet de loi et de deux sujets qui me tiennent particulièrement à coeur: la question de l'utilisation rationnelle des ressources de l'État à un moment où c'est important pour tous les Québécois et les Québécoises; et la question qui a été abordée et par ma collègue, la députée de Saint-François, et par mon collègue député de Jacques-Cartier, la question du choix des parents.

(16 h 30)

Au niveau du processus, M. le Président, je ne suis pas le seul à déplorer, je pense, la façon de procéder proposée par la ministre de l'Éducation. Tous les députés ministériels vont trouver ça inconcevable, mais les mots m'échappent presque, M. le Président, les mots m'échappent pour décrire la situation dans laquelle on se trouve, où, à 11 heures le matin – ils reviennent tranquillement, les mots, là, ha, ha, ha! – on fait des appels à des groupes pour leur demander de se présenter en commission parlementaire à 15 heures. Le moins qu'on puisse dire, M. le Président, c'est que ça manque de sérieux, ça manque de politesse, je pense, un avis de quatre heures de temps. Et ça manque tellement de sérieux, M. le Président, que je ne sais plus quoi dire. La ministre le prend tellement à la légère, ce processus-là, qu'elle pense qu'elle va nous faire avaler ça. Pas nous, mais les groupes aussi. Moi, je fais appel, peut-être, à la vaste expérience parlementaire et ministérielle de notre collègue, le député de Lévis. Je suis convaincu que notre collègue, le député de Lévis, n'aurait jamais fait ça, comme ministre, n'aurait jamais osé convoquer du monde à quatre heures d'avis. C'est incroyable, M. le Président! Quatre heures d'avis! Des regroupements d'organismes, des gens qui se fient sur les bénévoles. En fin de compte, des regroupements, c'est souvent des bénévoles. Puis, là, on s'étonne du fait qu'on n'ait pas pu les rejoindre, puis qu'ils ne soient pas ici, à 15 heures, parce qu'on n'a pas pu communiquer avec eux autres. Mais, M. le Président, ça manque de sérieux, cette affaire-là, complètement! Ça manque non pas de sérieux pour nous, parlementaires, mais ça manque de respect – et, là, c'est très sérieux, M. le Président – envers les groupes impliqués. Mais on peut bien trouver ça comique, nous; on peut bien trouver ça curieux, nous, de convoquer du monde à quatre heures d'avis, nous qui passons des heures et des heures ici, à Québec, dans la Vieille Capitale, des nuits blanches sur les projets de loi. On est habitués, nous, à travailler jusqu'à 5 heures du matin, s'il le faut. On l'a fait dans la nuit de lundi à mardi. Mais, pour le monde, pour les personnes dans le monde réel, M. le Président, il y a une certaine décence, je pense, qu'il faut utiliser, puis cette décence, quant à moi, ne s'applique pas quand on appelle des regroupements à quatre heures d'avis.

Moi, je me pose la question: Pourquoi, M. le Président? Pourquoi cet empressement? C'est un thème que j'ai abordé ce matin. Et, moi, j'en viens à une conclusion. Ce n'est peut-être pas la bonne conclusion, mais, si ce n'est pas le cas, la ministre va me corriger, va me le reprocher. Le 3 juin, la ministre, en Chambre, a pris... moi, j'appelle ça un engagement, M. le Président, et je la cite. En réponse à une question de mon collègue, le député de Jacques-Cartier, je la cite... le 3 juin: «M. le Président, j'ai déjà rencontré les représentants et les représentantes de l'ensemble des services de garderie du Québec, dont les garderies à but lucratif, et je les ai informés que je n'avais pas d'objection à ce qu'on prenne un temps – un, peut-être un temps, on verra combien de temps – pour les entendre sur le projet de loi n° 11.» Quant à moi, M. le Président, ça, c'est un engagement de la ministre. Un engagement de ministre... si mes cours de sciences politiques ont été exacts à l'Université McGill, la ministre s'engage également au nom du gouvernement. À cause de la nature de notre système, vous le savez fort bien, M. le Président, les impératifs de notre système parlementaire responsable, avec un conseil des ministres collégial, un engagement de ministre représente un engagement du gouvernement. C'est ça que la ministre a dit le 3 juin.

Je dois avouer, M. le Président, pour les parlementaires peut-être moins... ou plus expérimentés que moi ou... j'avais envie de dire quasiment plus cyniques que moi... Quant à moi, cela voulait dire qu'on faisait des audiences particulières. Moi, j'avais juste ça en tête, je ne voyais pas d'autre possibilité. Elle a pris un engagement qu'on prenne un temps pour les entendre sur le projet de loi n° 11. Bien, là, vous pouvez comprendre, M. le Président, notre étonnement. Quand notre collègue, le député de Jacques-Cartier, à la période des renseignements sur les travaux, a posé la question: Est-ce qu'on va procéder, avant qu'on commence l'étude détaillée... est-ce qu'on va avoir la possibilité d'entendre les représentants et les représentantes des services de garde au Québec? Et, là, on voit un élément d'une réponse, M. le Président. Ce n'est pas la ministre qui répond, c'est le leader. Le leader dit, et je le cite: «La décision du gouvernement est de procéder à l'étude détaillée, en commission, du projet de loi.» Il continue: «Il existe un mécanisme au niveau des commissions parlementaires et, à ce moment-là, les députés peuvent faire des demandes pour que les groupes soient entendus avant d'entamer l'étude article par article. Alors, à ce moment-là, je conseille au député de le faire en commission, M. le Président.» Mais j'insiste sur la première phrase que le leader a prononcée en Chambre: «La décision du gouvernement est de procéder à l'étude détaillée, en commission, du projet de loi.» Pour moi, M. le Président, avec mon expérience parlementaire limitée, il y a un renversement clair et net entre la décision de la ministre le 3 juin et la décision du gouvernement d'aujourd'hui. On renie l'engagement que la ministre a pris en Chambre.

C'est ça que le leader a fait ce matin, M. le Président. Il a renié un engagement pris par la ministre au nom du gouvernement, à ce moment-là, le 3 juin. Là, aujourd'hui, on renie cet engagement. Et les députés ministériels posent la question pourquoi on utilise, nous, les mots «double langage»? Il y a un exemple flagrant. Peut-être que la ministre avait oublié qu'elle avait pris l'engagement d'entendre les groupes. Ça se peut. Je ne peux pas vous le dire. Peut-être que la ministre l'avait oublié.

On a eu d'autres occasions de regarder les oublis des divers membres de ce gouvernement. Le premier ministre a oublié des conversations. Peut-être que la ministre a oublié qu'elle a pris cet engagement, puis elle a été obligée de se virer de bord de façon très vite. Peut-être pas. Moi, j'aimerais bien savoir ce qui est arrivé entre le 3 juin et aujourd'hui qui fait en sorte que le gouvernement renie son engagement d'entendre les groupes, M. le Président. C'est un revirement assez important, quant à moi, un revirement majeur de dire, le 3 juin: Oui, on entend des groupes, et, aujourd'hui, on dit: Non, on n'en entend plus. C'est, quant à moi, inconcevable.

Là, la ministre me fait signe que non. Bien, si c'est le cas, si la ministre est prête à entendre des groupes... Bien, des groupes... Pas un groupe, là, je regrette. Avec les efforts que la ministre a faits ce matin pour rejoindre du monde, je regrette, ce n'est pas sérieux. Si la ministre est sérieuse, on va entendre ce groupe-là tout de suite, on va ajourner jusqu'à demain, puis on va faire les efforts nécessaires aujourd'hui pour s'assurer que les gens qui le veulent viennent. Si c'est ça qu'elle veut, bien, on va suspendre et on en discutera.

Le Président (M. Gaulin): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, je vous invite à vous adresser à la présidence.

M. Copeman: Oui, effectivement, M. le Président. Je m'en excuse.

Le Président (M. Gaulin): Je vous remercie. Ça va simplifier les choses.

M. Copeman: Oui. M. le Président, si c'est ça que la ministre veut, c'est ça qu'on va faire. La ministre a juste à nous faire signe que oui, effectivement, je n'ai pas pu rejoindre un certain nombre de groupes, je trouve que c'est important, je respecte ma parole. Je respecte ma parole, puis on va les entendre, les groupes qui sont ici, tout de suite, M. le Président. Mais là on va stopper nos travaux sur ce projet de loi puis on va relancer l'invitation comme il faut, comme du monde, poliment, respectueusement, sérieusement, et ceux qui le veulent viendront demain ou lundi. Ceux qui ne veulent pas, ceux qui nous signifient qu'ils ne sont pas intéressés, bien, ils ne viendront pas. Alors, M. le Président: processus vraiment pas sérieux qui, quant à moi, insulte le sérieux de cette question et insulte les groupes impliqués dans l'organisation des services de garde au Québec et qui renie la parole de la ministre de l'Éducation.

(16 h 40)

Au niveau du contenu, M. le Président, je me suis déjà exprimé en Chambre là-dessus et j'avance la même thèse que j'ai avancée lors de l'adoption du principe. En ce qui concerne l'avantage financier que la ministre propose, dans son projet de loi, pour les garderies sans but lucratif, moi, j'ai fait un calcul rapide, M. le Président. Les garderies sans but lucratif nous coûtent, juste en termes de subventions, si la mathématique est correcte, à peu près 2 742 $ par place. Un calcul très rapide: on prend le chiffre des subventions, 96 000 000 $, pour 35 000 places en garderies sans but lucratif, ça donne 2 742 $ par place. Garderies à but lucratif, on prend des subventions de 4 000 000 $ accordées par année, pour 20 000 places, alors c'est 200 $ par place. Alors, à un moment où le gouvernement nous dit quotidiennement qu'il faut utiliser nos ressources de façon rationnelle, efficace et responsable, la ministre préfère subventionner des places dans les garderies sans but lucratif, qui coûtent 10 fois plus cher – plus de 10 fois plus cher – que les places en garderies à but lucratif.

M. le Président, pour le bénéfice de tous les membres et de la ministre, je répète que deux de mes trois enfants ont été gardés dans des garderies sans but lucratif. Alors, comme parent, personnellement, je n'ai aucun préjugé favorable envers les garderies à but lucratif, parce que mes deux enfants ont passé des années dans les garderies sans but lucratif. Personne ne peut m'accuser de vouloir, par intérêt personnel, même par expérience personnelle, favoriser les garderies à but lucratif. Non. C'est le choix qu'on a fait.

Ça rejoint, M. le Président, le deuxième élément des critiques que je voulais faire à ce moment-ci: Question de choix des parents. Notre collègue, la députée de Saint-François, tantôt, a indiqué, quant à elle, que les mesures fiscales contenues dans le projet de loi n° 11 auront comme effet de limiter le choix des parents. La ministre a dit: Non, ce n'est pas ça qu'on fait. Elle n'a pas dit non, elle a fait signe que non. Sur le plan très strict, M. le Président, c'est très clair qu'il n'y a aucun article dans la loi qui dit que, comme parent – moi, j'ai une fille – je ne peux pas envoyer ma fille dans une garderie à but lucratif. On s'entend bien, M. le Président? Il n'y a aucun article dans le projet de loi qui me défend, qui m'empêche – c'est un meilleur mot – qui m'empêche d'envoyer ma fille dans une garderie à but lucratif. C'est clair. Mais il faut, M. le Président, que la ministre entende avec nous que le fait qu'on arrête les subventions aux garderies à but lucratif et le fait, pour les nouveaux parents, qu'on n'accorde pas d'aide financière à ces parents s'ils désirent envoyer leurs enfants dans des garderies à but lucratif, c'est un fort incitatif financière – je ne sais pas si j'accorde bien mes mots – financier, pardon, un fort incitatif financier, pour des parents, à ne pas envoyer leurs enfants dans des garderies à but lucratif.

Si, comme parent, j'ai besoin de ces subventions pour être capable de payer, là le gouvernement me dit: Je regrette, M. Copeman, vous qui avez besoin de ces subventions, vous êtes éligible – je ne le suis pas, on le sait tous, mais je prends un cas fictif – vous en avez besoin, mais là nous avons décidé qu'on vous empêchait, par moyens financiers, d'envoyer vos enfants dans des garderies à but lucratif. Et, ça, M. le Président, je ne l'accepte pas. Je n'accepte pas que le gouvernement, que cette ministre responsable des services de garde au Québec se substitue à l'autorité parentale, au libre choix des parents de faire ce qu'ils pensent qui est dans le meilleur intérêt de leurs enfants. Et, si des parents pensent que c'est dans le meilleur intérêt de leurs enfants, pour quelque raison que ce soit, d'envoyer leurs enfants à une garderie à but lucratif, ce n'est pas cette ministre responsable et ce gouvernement qui vont enlever ce choix aux parents, et, je le répète, M. le Président, ils l'enlèvent par le biais de mesures incitatives. C'est clair dans mon esprit et je pense que c'est clair dans l'esprit de tout le monde.

M. le Président, pour toutes ces raisons, pour l'absence d'intégrité dans le processus, pour le manque de sérieux avec lequel la ministre a tenté de procéder pour entendre des groupes, et avec des objections de fond sur le projet de loi, on se trouve dans la situation actuelle où on est obligés d'utiliser tous les moyens à notre disposition, comme députés de l'opposition, pour convaincre la ministre qu'elle n'a pas raison et qu'elle devrait modifier de façon substantielle son projet de loi avant que, nous, de notre côté de la Chambre, on le trouve acceptable. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. Je reconnais maintenant le député de Johnson.

M. Boucher: Très rapidement, parce que le message que j'ai à livrer, M. le Président, est assez court. Je trouve ça assez étonnant que le député de Notre-Dame-de-Grâce et ses collègues déchirent leur chemise sur le fait que la ministre ait téléphoné à des groupes ce matin pour les inviter, alors que, depuis le début de l'après-midi, il y a des gens ici qui ne souhaitent qu'être entendus et qui n'ont rien à faire avec tout ce qui est dit là, et qu'on n'entend pas. Je pense que, si c'est vrai qu'on respecte les gens ici, dans cette salle, alors on devrait cesser de faire ce que vous faites et les entendre; là on serait sérieux. Moi, je propose qu'effectivement on entende ces gens-là, qui attendent pour rien d'être entendus. Quant au reste, on disposera de cela. Merci.

M. Copeman: Question de directive, M. le Président. Question de directive.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Oui.

M. Copeman: Si jamais on acceptait d'entendre les groupes qui sont présents, ou le groupe, est-ce qu'on peut revenir au même stade où on est dans nos travaux? Parce que, si on peut revenir au même stade où on est, peut-être qu'on pourrait faire ça, M. le Président. Mais je pense qu'on ne veut surtout pas accepter d'entendre ce groupe-là en perdant nos droits de continuer le processus. Moi, je m'avance parce que j'ai... Mais est-ce qu'on peut le faire? Techniquement, M. le Président, si on arrête nos travaux maintenant et qu'on entend le groupe qui s'est présenté, est-ce qu'on peut reprendre au même stade où on est présentement?

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député, je vous ferai remarquer qu'au tout début j'ai offert justement qu'on reçoive le groupe et qu'on fasse nos remarques préliminaires, et c'est votre groupe qui a refusé. À ce moment-ci, c'est bien sûr qu'on peut toujours modifier. Maintenant, ce que je suggère, c'est qu'étant donné qu'on achève les remarques préliminaires, on termine les remarques préliminaires, on tombera aux motions préliminaires et il y aura lieu que le député de Johnson revienne avec sa motion, et je la recevrai en premier et puis on débattra cette motion-là en premier et on continuera comme ça. Alors, je vous invite, M. le député de Johnson... Est-ce que vous avez terminé votre intervention? C'était dans ce sens-là?

M. Boucher: Oui, c'est dans le sens que je...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): O.K. Alors, je vous invite à...

M. Boucher: ...ne comprends pas que le respect des gens qui sont là passe après des règles de procédure. Je ne comprends pas.

(16 h 50)

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Alors, je vous invite à retenir votre motion et je vous passerai en premier. Ce sera la première motion qu'on prendra aux motions préliminaires. M. le député de LaFontaine. C'est plus facile avec le nom du député qu'avec le nom du comté. M. le député de LaFontaine.


M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: C'est ça. Merci, M. le Président. C'est tout à votre honneur, d'ailleurs, de reconnaître vos collègues par leur nom avant leur comté. Ça démontre l'aspect humain que vous leur témoignez. Je vous en remercie.

Alors, M. le Président, bien sûr, je ne suis pas un familier de cette commission. Si je suis ici cet après-midi, c'est parce que, en tant que citoyen qui vit et qui est élu dans une circonscription électorale de Montréal où il y a énormément de jeunes familles, énormément d'enfants, je suis particulièrement interpellé par ce projet. En effet, vous n'êtes pas sans savoir que j'ai plutôt la responsabilité des politiques en matière de travail que celles en matière de garde ou de milieu scolaire.

M. le Président, il m'apparaît très important, à la lumière de ce que je peux vivre dans ma circonscription, de mentionner et de rappeler à Mme la ministre que les garderies à but lucratif ont toujours joué un rôle extrêmement important, particulièrement là où le système traditionnel de l'État avait de la difficulté à s'installer. La ministre n'est pas sans savoir que, dans la circonscription de LaFontaine – dans l'est de Montréal, le nord-est de Montréal – qui est un des endroits, dans l'île de Montréal, où il y a le plus grand nombre de jeunes familles, un grand nombre de garderies se sont établies depuis les quatre, cinq et même six dernières années. Une grande partie sont à but lucratif.

Pourquoi ces garderies se sont-elles établies de cette manière et pas d'une autre façon? C'est parce que des citoyens et des citoyennes spécialisés en garde d'enfants ont jugé utile, devant le besoin, la nécessité d'ouvrir des établissements comme celui-là, de le faire. Je dois dire, pour y avoir moi-même envoyé ma fille, que j'ai toujours considéré que ces établissements correspondaient certainement aux normes, aux critères d'abord de qualité et de sérieux d'éducation, mais aussi, M. le Président, je ne voyais pas de raison pour laquelle l'État ne devait pas leur venir en aide ou devait, au contraire, s'en désengager. Alors, lorsque je vois la manière dont la ministre essaie de faire en sorte, pas de dilapider, mais de lapider ce réseau, faire en sorte de le laisser... de faire cesser son développement, je ne peux pas être d'accord, je ne peux pas l'accepter. Ça, c'est un des premiers points que j'aurai l'occasion de discuter.

Le deuxième point qui me touche vraiment, que je trouve tout à fait déplorable et que j'ai beaucoup de difficulté à comprendre – et je ne comprends pas que la ministre, avec l'expérience qu'elle peut avoir, puisse accepter ça elle-même; peut-être que c'est le Conseil du trésor, peut-être que c'est le ministre des Finances qui lui impose ça, pourtant elle a été au Trésor antérieurement – c'est, bien sûr, la baisse du financement des garderies en milieu scolaire. Et, ça, M. le Président, c'est inadmissible – et je m'explique – surtout dans les milieux urbains. En effet, qui d'entre vous et d'entre nous n'a pas vu déjà, n'a pas rencontré, les après-midi, vers 15 heures, 15 h 15, de jeunes enfants qui traînent dans les centres d'achats, de jeunes enfants qui traînent dans les rues, de jeunes enfants qui rentrent chez eux, qui allument la télévision et s'allongent devant avec un sandwich ou un soda? Est-ce que la société ne devrait pas plutôt encourager et prendre les mesures pour que ces enfants restent dans les écoles pour s'y divertir, une fois l'école terminée, mais aussi pour y avoir un certain nombre d'activités pédagogiques et éducationnelles? Ce serait certainement pour le mieux de ces enfants, pour le mieux de leur éducation et pour le mieux de leur formation. Ça aurait aussi un grand avantage: c'est d'éviter de voir tous ces jeunes qui, livrés à eux-mêmes, se promènent ou baguenaudent dans les centres d'achats et dans les rues, créant à l'occasion, la tentation étant là, quelques délits.

M. le Président, je ne comprends pas que la ministre puisse vraiment, là, sérieusement, avec son côté social... On sait que la ministre a déjà été engagée socialement très fortement. Et je ne dis pas ça d'une manière péjorative, pour l'avoir, moi aussi, depuis 11 années, côtoyée. Je suis vraiment, vraiment surpris. J'aurais même pensé le contraire. Je me serais attendu et j'aurais cru que la ministre aurait renforcé les services de garde en milieu scolaire. Pour moi, je ne me posais même pas la question. C'est quelque chose qui est fondamental. Ça se fait dans presque tous les pays occidentaux, M. le Président. C'est la solution que les sociétés ont trouvée pour pallier les nouvelles situations des femmes et des pères qui sont au travail et qui terminent plus tard. C'est la société moderne qui favorise ça. Et, là, on rétrograde, on retourne en arrière, un peu comme dans les années cinquante, alors que les familles étaient plutôt traditionnelles, les mères restant à la maison et les pères allant travailler. À ce moment-là, les enfants, lorsqu'ils quittaient l'école, bien, ils rentraient à la maison. Bien souvent, la mère de famille allait même les chercher, allait les raccompagner. Moi, je me souviens d'avoir vu ça encore, mais on ne le voit presque plus. On n'en voit presque plus, des mères de famille qui vont chercher les enfants. Comment se fait-il qu'un gouvernement qui se targue d'être un gouvernement qui a une vision sociale puisse passer à côté de cela? C'est impensable. C'est une catastrophe. Ces jeunes vont se retrouver laissés à eux-mêmes, vont se retrouver sans support. Bien souvent, c'est des enfants qui sont issus de milieux défavorisés ou non favorisés, fragilisés.

Nous regardions hier, vous comme moi, dans les journaux, ces études qui sont sorties sur les enfants québécois, tous ces enfants de familles monoparentales qui sont en situation de détresse. Imaginez, quand la mère travaille, il arrive quoi aux enfants lorsqu'ils ont fini l'école? Ou alors la ministre, peut-être, va nous annoncer une réforme des heures d'enseignement et va nous dire que maintenant les enfants sortiront à 17 heures de l'école. Peut-être est-ce ça, peut-être a-t-elle un secret qu'elle ne nous dit pas, mais on ne l'a pas vu arriver.

En attendant, une chose est certaine, c'est qu'en coupant 12 000 000 $, une somme très importante, dans les services de garde scolaire elle va obliger les gens à fournir un certain montant d'argent, qui sera peut-être, pour une grande partie des mères de famille, excessif, difficile à trouver. On essaie de faire, à Montréal, des programmes pour que les enfants puissent manger le midi, parce qu'il a été reconnu depuis quelques années... Et je me souviens que la ministre était déjà intervenue là-dessus. Il y a des enfants pour qui on a pris des mesures afin qu'ils aient à manger – un lunch, comme on dit ici – le midi, parce qu'on considérait que le matin, quand ils partaient de chez eux, ils n'avaient même pas déjeuné, bien souvent, pas pris de petit déjeuner. Alors, imaginez si, en plus, il faut que les mères de ces enfants-là, si elles travaillent, pour que leur enfant soit en garde en milieu scolaire le soir, sur la fin de l'après-midi, elles déboursent de l'argent. C'est impossible. Je le dis sans éclat de voix et je le dis juste avec une espèce d'incrédulité dans la voix. Je n'en reviens pas. Je ne sais pas comment ça va être dans les régions. J'ai peut-être moins de connaissance de ces situations-là en région, hors Montréal, mais je peux vous assurer que, dans la grande région métropolitaine de Montréal, et particulièrement dans le centre et dans l'île de Montréal, ça va être une catastrophe. C'est une vraie catastrophe.

Alors, je m'interroge vraiment sur la nouvelle conscience de la ministre. Est-ce que c'est son ancien travail au Conseil du trésor qui a déteint sur elle? Est-ce qu'elle a oublié que, comme ministre, dans le poste qu'elle a actuellement, elle a une mission sociale, éducative et de responsabilité familiale et non pas une responsabilité financière uniquement? Ça, c'était dans l'ancien temps, quand vous étiez aspirante aux Finances, vous étiez au Trésor. Maintenant, vous n'êtes plus au Trésor, vous êtes à l'Éducation, madame. Vous êtes une ministre à vocation sociale, éducative, familiale, et c'est ces trois dimensions-là qui devraient vous interpeller constamment et non pas le contraire. Vous ne devriez avoir de cesse que de vous battre auprès de votre président du Conseil du trésor et de votre ministre des Finances pour faire en sorte que ces coupures-là soient annulées, pour faire en sorte que vous récupériez les sommes d'argent, supplémentaires même, pour développer ce réseau de garderies en milieu scolaire. Ça, c'est une des choses... Je pourrais en parler des heures, mais il me semble que le message est assez clair.

(17 heures)

Un autre détail me déçoit un peu, et je l'ai appris en arrivant à cette commission ce matin. Vous avez remarqué que mon collègue, le député de Jacques-Cartier, s'était levé à la Chambre, à côté, il avait demandé au leader la marche à suivre pour tenir des consultations promises. J'ai moi-même connu, et je connais actuellement dans un autre dossier dont je suis le porte-parole, le dossier de la loi n° 31 qui modifie les normes du travail, un peu le même genre de chose. Il semblerait que ce gouvernement a de la difficulté, ou certains ministres... Ne généralisons pas, il y a certainement des gens encore là-dedans qui ont le goût de faire leur travail correctement, qui ne sont pas encore convertis, là, au virage à droite que le gouvernement est en train de prendre, le néoconservatisme, avec d'anciens conservateurs, d'ailleurs, dans certains cas, et...

Une voix: ...

M. Gobé: Oui, en effet, Mme la députée. Et est-ce que c'est vrai, ce que j'ai appris, que Mme la ministre a offert de convoquer des gens à 11 heures ce matin...

Une voix: Oui.

M. Gobé: ...ceux qui sont à Montréal et à travers la province, pour les faire venir en cette Chambre cet après-midi pour témoigner? Mais c'est deux choses... Ou la ministre a oublié les distances, elle qui le fait à toutes les semaines – depuis qu'elle a une limousine, peut-être a-t-elle oublié ça – ou alors elle ne veut pas les voir. Il y a deux choses. Moi, je préférerais croire qu'elle a oublié la distance. Jamais je ne croirai que la ministre ne veut pas voir les gens, qu'elle les convoque pour ne pas les voir, en trouvant des trucs. Alors, peut-être qu'elle a oublié, dans toute l'activité qui est la sienne, que les gens n'ont pas tous des chauffeurs avec des voitures qui roulent à 150 km/h, sans prendre de contravention, entre Québec et Montréal, mais qu'ils viennent en autobus, bien souvent, ou par d'autres moyens de transport. Alors, il serait souhaitable, peut-être, qu'elle puisse reconsidérer la convocation et faire envoyer par ses fonctionnaires ou son cabinet – il y a toujours des gens qui sont là pour ça – rapidement, une invitation – même pas une convocation, je ne trouve pas le mot approprié – aux gens avec lesquels les collègues se sont entendus pour qu'ils soient... peut-être demain, leur donner au moins 24 heures ou quelques heures pour venir ici.

Alors, je suis vraiment abasourdi de cette attitude de la ministre. Je pense que je ne la percevais pas de cette manière-là, mais peut-être qu'en discutant plus dans cette commission à laquelle je vais participer on aura l'occasion de voir que, à un moment donné, elle va comprendre et retrouver le sens social qui était le sien dans les bonnes années, où c'était la défense des travailleurs et des citoyens qui était son combat. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci, M. le député. Ça termine les remarques préliminaires. J'accepte maintenant que le député de Johnson fasse la première motion préliminaire. Je vous souligne, sans empêcher qui que ce soit de parler, qu'il y a eu accord entre les deux côtés, suite à la proposition que le député va faire, de façon à ce qu'on ne discute pas sur la motion, qu'on passe immédiatement à la proposition. M. le député?

M. Boucher: Je veux juste dire, avant...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Allez-y...

M. Boucher: ...en...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): J'apprécierais que vous alliez sur la motion uniquement...

M. Boucher: Je suis...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): ...pour ne pas...

M. Boucher: ...étonné que, pendant qu'il disait qu'elle avait oublié la distance, il oubliait, lui, qu'il y avait des gens qui attendaient.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député, j'apprécierais que vous lisiez votre motion.


Motion proposant d'entendre Concertaction interrégionale des garderies du Québec

M. Boucher: Alors, ma motion, c'est: «Que, conformément à l'article 244 du règlement de l'Assemblée nationale, la commission des affaires sociales, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 11, Loi modifiant la Loi sur les services de garde à l'enfance et d'autres dispositions législatives, tienne des consultations particulières relativement à ce projet de loi et qu'à cette fin elle entende Concertaction interrégionale des garderies du Québec.»

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Alors, avant de demander si c'est adopté, je vous soulignerais qu'on recevrait ce groupe, qu'on ajournerait à 18 heures et qu'à 20 heures on reprendrait les motions préliminaires.


Mise aux voix

Est-ce que c'est adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Adopté? Adopté. Alors, j'invite le groupe de Concertaction à venir se préparer. Je vous souligne, le temps que vous vous prépariez, que vous avez 20 minutes de remarques préliminaires et qu'on fera un échange ensuite avec les membres de la commission.

Je vous remercie d'être là. On s'excuse de vous avoir fait attendre, mais vous avez pris connaissance des discussions, donc vous savez le pourquoi, mais on s'excuse quand même. Maintenant, on apprécierait vos remarques, et j'apprécierais aussi que vous nous présentiez, madame, la personne qui vous accompagne et vos nom et titre officiels.


Auditions


Concertaction interrégionale des garderies du Québec (CIRGQ)

Mme Pitre-Robin (Claudette): Bonjour. Je suis Claudette Pitre-Robin. Je suis présidente de Concertaction interrégionale des garderies du Québec, et Mme Hélène Potvin, qui est vice-présidente de l'association, m'accompagne.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci.

Mme Pitre-Robin (Claudette): Alors, avant de commencer, évidemment, je vous remercie d'avoir accepté de nous entendre. À cet égard-là, on ne savait plus. Alors, compte tenu que je viens aussi de Montréal, j'ai eu chaud de retourner sans avoir été entendue. Oui, c'est vrai qu'on a été bousculées – ça, je pense qu'on peut le dire aussi – mais l'importance de ce projet de loi là fait en sorte qu'on a laissé tomber tout le reste et on ne s'est pas posé la question. Il nous fallait être ici. C'est sûr que ça ne nous permet pas de vous déposer un document comme on a l'habitude de le faire. D'habitude, il est déjà commencé, avec nos petits commentaires article par article, parce qu'on en a toujours aussi plusieurs, et on a certainement certaines modifications à proposer à la ministre, qui, pour nous, auraient pu permettre de bonifier le projet de loi. Nous allons quand même vous les faire déposer dans vos bureaux pour que vous puissiez en tenir compte lors de vos débats article par article.

Je me permets aussi de faire un commentaire personnel. On se sentait un peu mal, quasiment, d'être ici tantôt, je vais vous dire. Bien sûr que je comprends le débat, mais pour avoir très, très souvent eu, depuis 20 ans, à confronter nos divergences avec les garderies, particulièrement les garderies commerciales, je vous jure qu'on s'arrange toujours pour être disponibles pour la télé et la radio à 20 minutes d'avis. Alors, je me dis que, d'habitude, on s'organise quand il y a urgence, et c'est ce qu'on a fait. Alors, j'espère qu'on va être écoutées en ce sens-là aussi, parce que, vraiment, on est moins bien préparées, mais il y a urgence et on veut finalement transmettre nos commentaires à l'Assemblée.

Je vous dirai d'abord que Concertaction représente 500 garderies sans but lucratif à travers le Québec. Il est fait de regroupements qui existent, dont certains depuis plus de 20 ans. C'est donc une expertise qui est à l'intérieur de Concertaction depuis le tout début de l'implantation des services de garde, uniquement les garderies à ce moment-là. À Concertaction, ce sont les garderies qui sont membres, et, pour le membership, la cotisation de Concertaction, c'est chacun des parents qui paie à partir d'une résolution. Chaque garderie a une cotisation payée par les parents, qui va à l'organisme provincial. Nous sommes donc des organismes représentant à la fois les travailleurs qui sont là et les parents, puisque, par eux-mêmes, ils paient la cotisation à Concertaction. Et, évidemment, tout le monde s'entend pour que toutes les décisions, toutes les orientations que nous avons et que nous prenons à Concertaction soient toujours d'abord centrées sur l'intérêt de l'enfant. Je pense que l'essentiel dans tous nos débats, c'est de toujours regarder le bien-être de l'enfant. Et bien sûr qu'on a aussi des groupes divergents. Parfois, les intérêts des parents et ceux des travailleurs peuvent avoir des divergences, mais l'intérêt de l'enfant doit toujours primer. Et c'est dans ce sens-là aussi qu'est la trame de notre présentation.

Bon. Dans le projet de loi, je pense qu'il y a une chose au départ dont on peut être heureux, et je pense que c'est l'ensemble des services de garde qui sont heureux de ça. En ajoutant à l'article 2 le mot «développement», c'est reconnaître que, vraiment, les services de garde au Québec ont un rôle éducatif et non pas uniquement un rôle de garde; on se le fait trop souvent dire par d'autres milieux, dont le milieu scolaire entre autres, qui nous targue de ne faire que de la garde. Je pense que c'est maintenant reconnu, et, que la loi en tienne compte, c'est un élément qui fait du bien à l'ensemble des services de garde du Québec.

La plus grande partie du débat, évidemment, et le gros point essentiel qu'on voudrait aborder, c'est, bien sûr, évidemment, la question de la garde commerciale et également celle d'un article qui dit, finalement, que les commissions scolaires n'auraient pas le droit à des permis de jardin d'enfants, qui sont un point important dans tout le débat des états généraux actuellement. Donc, c'est de ces deux points-là dont on voudrait vous entretenir maintenant.

Oui, on se retrouve encore avec un débat. Ce n'est pas la première fois que je me retrouve devant des représentants du gouvernement pour finalement débattre de cette histoire de la place des garderies commerciales au Québec. Je vous rappellerai même que c'est depuis 1974 qu'on en parle. Puis à tour de rôle; des fois, c'est un parti et l'autre, hein, ça ne fait pas de différence, là, depuis le temps, un parti et l'autre, finalement. Et, finalement, c'est toujours le même débat, où tout le monde dit: On n'est pas vraiment intéressé à ce qu'il y ait des garderies commerciales, mais on continue toujours à s'arranger pour qu'elles se maintiennent en filigrane.

En 1974, à ce moment-là, le gouvernement libéral ne voulait pas leur accorder d'aide financière. Et le gouvernement fédéral d'alors, et tout au long jusqu'à l'an dernier, où on a changé le RAPC... les garderies commerciales n'ont jamais été financées par le financement fédéral. Donc, il y a depuis le début, finalement, une vision par rapport à ça.

Et, jusqu'en 1979 – et là le reproche va finalement au parti au pouvoir – avec l'adoption de la loi, c'est votre parti, le Parti libéral, qui a finalement décidé entre 1974 et 1979 et en 1974 qu'il n'y en aurait plus, de développement de garderies à but lucratif. C'était clair dans tous les textes, il n'y en avait plus. Et ce n'est qu'avec l'adoption de la loi en 1979 que, malheureusement, le gouvernement du Parti québécois avait laissé la possibilité de rouvrir des garderies commerciales, en disant: Ce n'est pas grave, on ne les financera pas, ils n'en ouvriront pas. On voit l'exemple que ça donne. De 90 qu'elles étaient, elles sont rendues à près de 500. Et, depuis ce temps-là, le débat continue et on est encore à ce débat-là.

(17 h 10)

On avait, dans les plans de développement, tenté de quand même limiter, parce que tout le monde s'entend pour dire: Il faut favoriser le développement des garderies sans but lucratif. Donc, on avait mis une règle de, bon, à peu près 25 % des garderies commerciales versus l'ensemble des services de garde. Et cette règle-là a tenu jusqu'en 1990, où, là, M. Chouinard, qui est un monsieur de Laval qui voulait obtenir un permis, mais qui n'entrait pas dans le plan de développement qui disait 25 %, a fait finalement des recours en justice et a débattu afin d'obtenir un permis parce qu'il ne demandait pas de financement. Il disait: Moi, si je suis conforme à la loi et aux règlements, il n'y a pas de raison pour que le gouvernement ne m'accorde pas de permis. Je n'en veux pas, de leur argent; tout ce que je veux, c'est un permis. Et M. Chouinard a eu gain de cause. Le jugement Chouinard-Perry, finalement, a admis, a séparé l'attribution du permis du financement.

Donc, on se retrouve en 1992, où, à ce moment-là, c'était le gouvernement libéral au pouvoir, et on s'est retrouvé devant vous, où on a dit: Bon, on ne peut pas laisser développer ça comme ça et ne pas contrôler la dépense, puisque l'aide financière dont on parle, c'est la plus grosse dépense qu'on a dans les services de garde. Et, en plus, pour les garderies à but lucratif, le gouvernement fédéral ne remboursait pas son 50 %. Donc, ça coûtait 100 % au Québec quand on finançait les garderies à but lucratif. Donc, le gouvernement a dit: On ne peut pas ne pas contrôler nos dépenses. Et c'est donc finalement dans un salon à côté où se sont discutées les choses, où on a dit: Oui, dorénavant, on va constituer une règle où il y a 28 % des places développées par année en garderies à but lucratif qui pourront avoir du financement. Les autres pourront ouvrir, mais on ne les financera pas puis elles ne recevront pas d'aide financière aux familles.

Notre groupe, qui était présent, s'est objecté à ça en disant: Mais ça ne tiendra pas. Ce n'est pas possible de décider que, dans celles qui vont ouvrir, il y en a 28 % qui auront droit à l'aide financière puis les autres n'y auront pas droit. Elles pouvaient se mettre en liste d'attente l'année suivante, etc. Mais quelle mesure discrétionnaire on va prendre pour décider que cette garderie commerciale là a droit à du financement puis l'autre à côté n'y a pas droit?

Mais le gouvernement d'alors n'a pas voulu prendre de décision formelle et a dit: Ça limite les dégâts, on verra. Pour le moment... Sauf que, les dégâts, là, ils ont continué. Et, depuis 1992, il y a 91 propriétaires de garderies commerciales qui ont été chercher un permis en disant: Nous, tout ce qu'on veut, c'est un permis, on ne veut pas de financement. Quand on sait le coût de donner des services de qualité aux enfants, comment se fait-il... Et c'est pour ça qu'on était d'accord avec un moratoire. Ça n'a pas de sens de laisser se développer des services de garde pour nos plus jeunes citoyens sans se préoccuper de ce qu'ils vont avoir comme services. Et 91 garderies à but lucratif en trois ans, c'est plus que le développement régulier dans les années antérieures, et il y en a une centaine d'autres qui sont en attente pour avoir un permis. Et ces gens-là, ils n'en veulent pas, de financement, c'est ce qu'ils ont toujours dit. On n'en veut pas. Tout ce qu'on veut, c'est un permis. Et ils vont le chercher.

Ce qu'on a vu, en tout cas, à moins que vous nous disiez qu'on lit mal, dans ce projet de loi là, ce n'est pas interdit encore qu'ils viennent chercher des permis s'ils ne viennent pas chercher du financement. L'article 4 – il me semble que c'est bien ça, je ne le connais pas encore par coeur, là, mais il me semble – finalement, les autorise à avoir un permis, comme ils le font depuis trois ans allégrement. Ce qu'on ne leur donne pas automatiquement, c'est le droit d'avoir un financement.

Et le financement pour les garderies à but lucratif ou commerciales, finalement, ce qu'elles veulent, c'est uniquement le financement qui touche le droit de leur clientèle, soit l'aide financière aux familles. Il y a des garderies à but lucratif qui sont financées puis qui vont continuer à l'être; elles ont droit à du financement pour la formation du personnel, elles ont droit à d'autres types de financement, et elles ne vont même pas chercher, le financement auquel elles ont droit, les subventions auxquelles elles ont droit, parce qu'elles ne veulent pas avoir de contrôle. Or, si ce n'est pas de l'amélioration de qualité de vie des enfants que de permettre que le personnel puisse avoir de la formation payée, je ne vois pas l'avantage qu'ont les propriétaires à se limiter, finalement, au niveau de l'accès à ce financement-là.

Le gouvernement libéral, en 1994, avait même donné des montants d'argent auxquels les garderies à but lucratif pouvaient avoir accès pour améliorer les salaires. Bien, un grand nombre d'entre elles ne sont pas allées chercher ce financement-là, parce qu'elles ne voulaient pas avoir le contrôle qui va avec. Donc, elles ont privé leur personnel d'améliorations de salaire pour ne pas avoir à subir du contrôle. Moi, je pense que, quand on parle de qualité, il va falloir régler ça un jour au Québec, je pense qu'il est plus que temps. Il y a des choses que je n'aime pas dans le projet de loi, mais je pense qu'il y a des choses importantes qu'il faut régler, et c'en est une.

Tantôt, quelqu'un a dit: Ce qui est important, c'est le droit des parents. O.K.? Bien, le droit des parents d'avoir le choix, c'est aussi d'avoir le choix d'en avoir, une garderie sans but lucratif disponible, et c'est aussi le droit d'être sûrs que, durant le temps qu'ils travaillent, leur enfant a le meilleur service possible. Et je ne dis pas que toutes les garderies commerciales sont pourries, loin de là, et je ne l'ai jamais dit. Ceux qui me connaissent depuis 20 ans – et pourtant je me suis battue contre les garderies commerciales – savent que jamais je n'ai dit ça. Mais j'ai vu assez – et j'ai même déjà été membre du tribunal administratif de l'Office – de garderies commerciales dans le groupe, finalement, qui donnent des services pourris aux enfants pour m'inquiéter pour ces enfants-là.

Il faut donc être sûr que ce qu'on accorde et ce qu'on finance, sûrement, c'est pour être certain qu'il y a de l'imputabilité possible, qu'on est certain que l'argent qu'on donne, c'est pour que les enfants aient une meilleure qualité de services. Et, à l'heure où on se parle, le nombre de plaintes et le nombre de... Moi, j'ai donné des cours longtemps au cégep, Hélène en donne, nous avons des étudiantes qui venaient de ces réseaux-là. Il y a malheureusement au Québec des milieux où il y a des horreurs, et je ne pense pas que, comme gouvernement, on doive accepter que des enfants vivent dans ces conditions-là et qu'on doive accepter que des parents paient cher – ça leur coûte cher, leurs garderies – pour que leurs enfants n'aient pas la meilleure qualité de services possible. Et, ça, c'est notre responsabilité à tous de s'assurer que les enfants ont la meilleure qualité possible.

Et le seul moyen, c'est que les parents aient un droit dans les garderies. Le seul moyen, c'est que les parents soient décisionnels, qu'ils puissent entrer à n'importe quel moment dans la garderie, qu'ils puissent aller voir ce qui se passe. Parce que les parents qui ne peuvent pas entrer dans la garderie, comment peuvent-ils savoir que leur enfant n'a pas mangé à sa faim le midi? Comment peuvent-ils savoir qu'ils sont rabroués? Ils ont deux ans, ils ont trois ans. Des représentants des garderies commerciales nous ont régulièrement répété: Le droit et le privilège du parent, son droit, c'est de retirer l'enfant s'il n'est pas satisfait. Beau droit, ça! Ça veut dire que, le parent, il retire son enfant et il y a un autre parent qui, en toute confiance, parce qu'il y a un permis de l'Office et qu'il y a le permis de sa municipalité, dit: Bon, bien, mon enfant, je peux le mettre là, ils ont des permis, donc ils sont de qualité, et finalement le réinscrit. Donc, les enfants, tout simplement, roulent. Et on vous dira que, dans les garderies commerciales, en général, la clientèle roule puis le personnel roule. O.K.? Parce que, dès qu'un membre du personnel, dans les garderies qui ne sont pas de qualité, veut mentionner ou émettre une opinion: Bien, si tu n'es pas content des services qu'on offre ici, bien, tu sais où est la porte. Va travailler ailleurs. Donc, je pense que c'est important pour nous, l'importance de la place des parents.

Merci beaucoup de me rappeler qu'il reste cinq minutes, parce qu'il y a un autre dossier important, c'est vraiment toute la question – et notre réseau est à la même place encore – de la garde en milieu scolaire. Je voulais juste vous faire un petit point, c'est que dans la loi il y a trois éléments, finalement, dont deux qui donnent réponse à une revendication importante des services de garde en milieu scolaire, qui donnent le droit de ratio du personnel, que l'Office puisse faire un règlement sur le ratio, et un droit également sur la qualification du personnel. Et ça, je pense que les services de garde en milieu scolaire seront très satisfaits de cette partie-là. Et l'aide financière, le débat de tantôt, finalement, l'article 41.7 permet d'accorder de l'exonération financière dans le milieu scolaire. Donc, il y a toujours ce droit-là, il est dans la loi.

(17 h 20)

L'article 5, qui dit de ne pas donner de permis de jardin d'enfants aux commissions scolaires, pour nous, c'est essentiel. Vous avez entendu depuis déjà un an tout le débat par rapport à la faim ou la soif des commissions scolaires d'agrandir leur clientèle et de venir chercher des enfants de trois et quatre ans pour faire en sorte que leur taux de fréquentation dans les écoles augmente. Bien sûr, c'est sur des motifs nobles, qu'on entend toujours, pour mieux, finalement, préparer les enfants à l'école, etc. Tout le débat de Concertaction là-dessus, c'est: Oui, l'importance qu'on intervienne plus rapidement auprès des jeunes enfants, l'importance que les enfants aient droit à des services, mais des services qui répondent à leurs besoins. Malheureusement, parce que je suis ici, justement, on n'a pas fini notre document, là; on devait le finir cet après-midi, on va vous en donner une copie de travail. Nous avons fait une recherche fort étoffée sur la littérature quant aux dangers de la scolarisation précoce, le danger, finalement, de mettre les enfants trop tôt en situation d'apprentissage académique, puisque c'est ça qu'on retrouve dans les écoles. Et, finalement, toute notre argumentation, vous allez la retrouver là-dedans. Je pense qu'il y a 250 stations de recherche en tout qui montrent le danger de scolariser les enfants trop tôt, et c'est cette raison-là pour laquelle on n'est pas d'accord que les commissions scolaires puissent donner des services aux enfants de trois et quatre ans, et c'est pour ces raisons-là qu'on est satisfait de l'article 5, qui ne leur permet pas d'avoir des permis.

Alors, oui, on va vous le donner. Est-ce qu'on peut vous le faire remettre comme ça? O.K.? Ça s'appelle: «Une enfance à préserver: réflexions sur les dangers de la scolarisation précoce». Et je...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Madame va s'en occuper.

Mme Pitre-Robin (Claudette): Alors, je vous rappelle quand même que c'est un document de travail, là. Vous allez voir qu'il y a encore des coquilles et des petites notes, mais le contenu y est.

Là-dessus, je pense que la ministre devra même être ferme par rapport à toute la question des enfants de trois et quatre ans dans les commissions scolaires. L'autonomie des commissions scolaires, comme elles nous le répétent régulièrement, finalement, fait en sorte que... Hélène pourra vous en dire quelques mots, finalement, puisque ça se passe dans la région de Québec, particulièrement à la commission scolaire des Découvreurs, qui tient tête et continue son projet de donner des services aux enfants de quatre ans et de trois ans pour l'année après. Même si on dit: Vous n'avez pas le droit, ce n'est pas possible, ils tiennent tête et continuent parce qu'ils jugent que leur clientèle en a besoin.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci, madame. Il vous reste environ deux minutes. Si vous avez d'autres commentaires, madame.

Mme Pitre-Robin (Claudette): Non. Bon, je pense que c'est vraiment le fond. Il y a un point qu'on aurait voulu pouvoir amener comme proposition. Qu'on reconnaisse le développement des services de garde dans la loi, c'est déjà beau; nous, on aurait voulu que le mot «garderies» change, et, ça, c'est le voeu des gens des garderies depuis à peu près... sur 20 ans, là, depuis au moins 18 ans, qu'on cesse de penser que les enfants ne sont que gardés dans les garderies. On voudrait que les mots auxquels correspond finalement la mission de ces services-là, ce soit «centres à la petite enfance». Et on propose aussi régulièrement, et vous allez le voir dans le document ici également, toute une vision de centres intégrés de services plus intégrés à la petite enfance. On ne veut pas ça dans le projet de loi, mais on demande au moins de changer de nom, on aurait déjà cet acquis-là.

Un autre point qu'on voudrait voir également. Dans la définition de services de garde comme «jardins d'enfants», on laisse encore la définition des services qui n'excèdent pas quatre heures par jour, puis on ne voit pas pourquoi quatre heures, puisque la mission même de ces services-là, qui sont des groupes stables, des groupes de stimulation qui peuvent s'apparenter à ce qu'on appelle les prématernelles, etc., habituellement, c'est des temps de deux heures, deux heures 15 maximum... Donc, de donner déjà un trois heures est nettement suffisant pour correspondre à cette réalité-là et éviter que ça devienne de la garde à mi-temps, parce que quatre heures de temps, des enfants, dans un service, à ce moment-là, il faut leur donner des conditions différentes. Il faut qu'ils puissent avoir accès à des toilettes séparément, un temps de repos, une collation. Ça appelle toute une organisation différente quand des enfants sont gardés même quatre heures dans un même lieu quand on parle d'un enfant de deux, trois ans. Alors, on ne comprend pas pourquoi on continue à garder quatre heures. Oups!

Mme Potvin (Hélène): Ils vont nous fermer...

Une voix: Vous allez être coupée.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je...

Mme Pitre-Robin (Claudette): Vous allez nous couper? O.K. Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie...

Mme Pitre-Robin (Claudette): On a...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie, c'est très intéressant. Vous aurez sûrement l'occasion, vous qui avez beaucoup l'habitude, vous allez sûrement trouver le moyen, dans les prochaines minutes, de continuer à passer les autres messages. J'ai comme l'impression que vous en avez quelques-uns. Mais je dois permettre, à ce moment-ci, de commencer l'échange.

J'ai actuellement Mme la ministre, M. le député de Jacques-Cartier, M. le député de Lévis. S'il y en a d'autres, je vais les prendre au fur et à mesure.

Mme Marois: Merci, M. le Président. Je vais être assez brève, parce que j'aimerais entendre... Justement, je vais donner la chance aux représentantes de Concertaction interrégionale des garderies de faire valoir d'autres points de vue, peut-être, pour nous assurer que, si c'est possible de le faire, on puisse en tenir compte dans des amendements qu'on pourrait apporter.

D'abord, les remercier d'être venues témoigner ici, devant la commission. Ce sont des représentantes dont l'une d'elles est à Montréal, et c'est le cas d'autres regroupements que nous avons rejoints ce matin – pas à 11 heures, là, mais à 9 heures – pour venir se présenter, dont, entre autres, le Regroupement des garderies privées du Québec. Bon. Je comprends que ce n'est pas facile. Ce sont des gens qui agissent à titre bénévole, souvent, mais il reste qu'on a mis tout le monde dans les mêmes conditions, et ce n'est pas par impolitesse. Je pense que les gens qui me connaissent savent que je ne fonctionne pas de cette façon-là et que c'est les règles de nos fins de session. Et les organismes, habituellement, le savent. Nous les prévenons, et ils savent que la loi peut être appelée à n'importe quel moment. Et ils savent généralement, et c'est comme ça qu'ils procèdent. Et la présidente de l'Office, d'ailleurs, me dit qu'on le signifie généralement aux groupes: la loi va être entendue; s'il y a des audiences, vous pourriez être rejoints assez rapidement, à la dernière minute. Bon. C'est comme ça que ça se passe et, en ce sens-là, on a fait les efforts honnêtes qu'il fallait faire pour inviter les gens.

Je veux ajouter une autre chose aussi. Quand le député de Jacques-Cartier nous dit: Ah! On ne recevra pas les représentants des jardins d'enfants, etc. Nous, on a reçu sa liste, on a appelé les gens sur sa liste. Il n'y avait pas de représentants des jardins d'enfants, alors j'imagine que lui non plus ne voulait pas les voir.

Cela étant, je veux féliciter et remercier les gens de Concertaction pour l'excellent travail qu'elles accomplissent et que les garderies qu'elles représentent accomplissent. J'ai eu l'occasion de travailler en étroite collaboration avec ce regroupement, et nous avons ainsi réussi à bonifier et à modifier la loi, la formule de financement, et je suis très heureuse des résultats auxquels nous arrivons. Le projet de loi qui est devant nous aujourd'hui aussi tient compte de beaucoup de leurs recommandations et de leurs remarques – peut-être pas de toutes, c'est ce que j'ai compris – et j'aimerais donc les entendre à ce sujet, s'il y a d'autres commentaires qu'elles voudraient nous faire sur ce qui leur apparaît nécessaire que nous resserrions ou que nous modifiions. Si nous pouvons le faire, nous allons en tenir compte. Si, évidemment, notre choix allait dans un sens différent, au moins au saura qu'il y avait des représentations de votre part.

Alors, je n'irai pas plus loin à ce moment-ci. Plutôt demander aux représentantes de Concertaction de nous dire quels autres points elles souhaiteraient – peut-être assez rapidement, pour que d'autres collègues puissent vous questionner, là – que l'on regarde ou que l'on améliore dans le projet de loi qui est là.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce que vous avez compris la question?

Mme Pitre-Robin (Claudette): Oui, mais je pensais...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): La question est: Quels sont les autres points, rapidement...

Mme Pitre-Robin (Claudette): Ah! Les autres points? Vous voulez les avoir? Ah! Je pensais qu'on répondrait au fur et à mesure – vous m'excuserez – aux questions. Les points importants, en tout cas, c'est... Je pense que partout on insiste fortement sur la place des parents. Même dans les garderies commerciales, on exige quand même qu'il y ait un comité consultatif, là, même si, pour nous, ce n'est pas suffisant. Mais la place des parents, on ne la voit pas quant à la garde scolaire. Et, ça, ça nous apparaît important. Quand on a commencé à mettre sur pied la garde scolaire – je le sais parce que j'ai des enfants qui sont là depuis le début, là, puis j'en ai encore un en garde scolaire, finalement – donc, il y avait quand même ce principe. Et c'est des parents qui ont mis sur pied la garde scolaire à l'intérieur des écoles. Et, maintenant, cette habitude-là s'est souvent perdue dans beaucoup, beaucoup de gardes scolaires, et les parents – qui sont les parents usagers, dans le fond, qui sont les parents des enfants usagers, je devrais dire, finalement – donc, n'ont plus vraiment voix au chapitre, ils ne sont pas consultés, et il en devient selon l'ouverture ou non du directeur de l'école ou de l'organisation de la garde scolaire. Il me semble que de replacer là aussi l'importance des parents sur ce que vivent leurs enfants au sein de la garde scolaire est important.

Un autre point qui nous préoccupe également, bien qu'on en comprenne les motifs, si on veut, c'est la modification, à savoir que, dans la garde en milieu familial, on ne comptabilise plus, dans le nombre d'enfants gardés, les enfants de plus de neuf ans. Et je pense que sûrement certains d'entre vous ont des enfants de neuf et 10 ans, et je ne pense pas que... En tout cas, moi, j'en ai un, puis je ne pense pas qu'on puisse dire qu'un enfant de neuf et 10 ans, qui arrive après l'école, les journées pédagogiques, les dîners, etc., si on garde déjà six enfants, ça n'ajoute pas au fardeau puis qu'il n'y a pas de la surveillance et qu'il n'y a pas, finalement, besoin de s'occuper de ces enfants-là. Ils ne sont pas une aide automatique pour la garde des plus jeunes. Donc, ça nous apparaît une mesure qui va diminuer la qualité de services aux enfants, d'autant plus que, dans la garde en milieu familial, ce serait la deuxième fois qu'on augmente le ratio. En 1989, on est passé de quatre à six, et là on passerait de six à sept, huit, neuf, selon le nombre d'enfants qu'il y a entre neuf et 12 ans, mettons. Alors, il nous semble que... On fait une recommandation à l'effet qu'on ne compte pas les enfants de 12 ans et plus – des enfants du secondaire, etc. – mais qu'à neuf et 10 ans, là, ce sont des enfants qui ont encore besoin, finalement, d'encadrement de leur famille. À preuve, ils sont dans la garde scolaire parce qu'ils ont besoin d'être encadrés, ils ne peuvent pas être seuls. Donc, je pense que ce serait important. C'est peut-être les points les plus importants, là, qu'on soulignerait.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie. Si jamais il y a quelque chose, vous me faites signe...

Mme Pitre-Robin (Claudette): D'accord.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): ...puis on essaiera, à la fin, de trouver quelques minutes. M. le député de Jacques-Cartier.

(17 h 30)

M. Kelley: Merci beaucoup, M. le Président. Je veux remercier Concertaction pour leur disponibilité aujourd'hui, mais je pense qu'on a un exemple typique d'une consultation menée par cette ministre, parce qu'elle aime consulter ses amis.

Les points qui sont soulevés par Concertaction sont très intéressants, mais ils donnent un portrait incomplet de la situation. Tout le débat en milieu scolaire, ce qu'on fait avec les quatre, cinq ans, la notion de la petite enfance, je conviens que c'est une question très compliquée. Et, moi, comme père de famille, je ne me suis pas encore fait une tête si ça doit être vraiment à l'école ou si c'est quelque chose qu'il faut garder en garderie. Ça, c'est une question complexe, et je vais consulter le document. Mais j'aimerais entendre, par exemple, la Centrale de l'enseignement du Québec sur cette question, parce qu'elle a une autre perspective. Pour compléter le portrait, pour alimenter notre réflexion comme parlementaires, je pense que c'est très important de les entendre aussi.

Encore une fois, les questions qui sont soulevées sur les garderies à but lucratif... Première des choses, il faut les entendre aussi, parce qu'ils ont une perspective qui n'est pas tout à fait la même que Mme Pitre-Robin, et c'est comme ça dans une société démocratique, il y a des opinions qui sont différentes. Bravo! Et j'aimerais les entendre.

Je veux juste rappeler à Mme Pitre-Robin que même d'être une garderie sans but lucratif, ce n'est pas une assurance qu'on n'est pas en infraction de la loi. Si je regarde dans le rapport annuel de l'Office des services de garde à l'enfance, dans des inspections faites dans les garderies sans but lucratif l'année passée, sur l'entreposage des médicaments, des produits toxiques ou d'entretien, 4,8 % des garderies sans but lucratif étaient en infraction; la qualification du personnel, 7,8 % étaient en infraction; les menus, nous avons parlé du menu le midi, 8,3 % des garderies sans but lucratif étaient en infraction; cours de premiers soins, 30,8 % en infraction; le registre des médicaments...

Alors, si on regarde... Ce sont des chiffres qui sont mieux que ceux des garderies à but lucratif, je ne conteste pas ça, mais il n'y a pas d'assurance que d'être sans but lucratif, ça donne un service de qualité et qu'il n'y a pas de problème. Parce que, si on regarde les infractions suite aux inspections, même les garderies à but non lucratif sont souvent en infraction aussi. Alors, je pense que c'est très important... De dire que les privées, les commerciales ou les garderies à but lucratif, elles, sont les méchantes et que, nous autres, on n'a pas de problème, je pense que c'est un portrait incomplet. Alors, c'est pourquoi j'aimerais entendre les groupes qui représentent les propriétaires des garderies aussi pour avoir un portrait complet.

Moi, j'ai appelé un groupe qui a été appelé à midi moins le quart. Alors, il y a une confusion aussi, c'est le moins que l'on puisse dire, parce que la ministre vient de dire: 9 heures. Mais, moi, j'ai parlé à deux groupes qui étaient sur notre liste, qui ont été appelés après la période des questions de ce matin, c'est-à-dire après 11 heures, pour venir de Montréal témoigner à Québec, et ce sont des personnes qui travaillent avec les enfants. Alors, on trouvait ça impossible de trouver quelqu'un pour les remplacer à court avis pour venir témoigner ici.

Je comprends, et comme je l'ai dit, je respecte la disponibilité de Concertaction, mais aussi il faut respecter le fait qu'il y ait d'autres groupes qui ne peuvent pas se déplacer assez rapidement. Moi, comme parlementaire, je veux défendre le droit de parole de tous les groupes, y compris Concertaction, et c'est ça que j'entends faire. On va continuer de faire ça, parce que c'est très important d'avoir le portrait complet. Je suis très heureux d'avoir le document de réflexion ici, on va lire ça attentivement. Mais il y a d'autres groupes, avec d'autres points de vue, et je pense que cette commission a tout intérêt à voir l'ensemble.

Juste pour revenir sur... Parce que, oui, on a le projet de loi, mais le projet de loi et le projet de développement qui est compris dedans, on fait, en partie, le financement de tout ça avec des compressions avec le Règlement sur l'exonération et l'aide financière. Vous allez appliquer ça prochainement. Pouvez-vous me donner une idée, au niveau de la planification de vos tarifs, pour les parents qui sont dans le système, c'est quoi, le niveau d'incertitude grâce au fait qu'on a la prépublication d'un projet de règlement qui va être corrigé, amélioré, bonifié, on ne sait pas, probablement tout de suite après que les parlementaires seront en congé ici à Québec? Alors, au niveau de la planification, c'est quoi, les problèmes qui sont causés par l'incertitude qui règne dans le domaine?

Mme Pitre-Robin (Claudette): Bien, merci bien. Merci aussi parce que vos autres réflexions me permettent de faire d'autres commentaires. Je pense que, par rapport aux plaintes et aux infractions, vous avez là, justement, un très bon exemple. Jamais nous ne dirons que les garderies sans but lucratif sont parfaites. Jamais. Je pense qu'on travaille très fort pour améliorer leur qualité, pour les sensibiliser. Mais, justement, quand il y a une infraction dans une garderie sans but lucratif, c'est le conseil d'administration qui reçoit, finalement, un avis en disant: La garderie dont vous êtes les gestionnaires a commis ou commet telle infraction, et, automatiquement, les parents – évidemment, c'est leur enfant qui est dans ce service-là – s'assurent que la correction est apportée. Quand je suis dans une garderie commerciale, c'est le propriétaire qui reçoit le papier en question. Personne d'autre ne le voit. Ça lui appartient de faire que des corrections sont apportées ou pas et, évidemment, d'aviser aussi les parents sur ces infractions-là ou pas. Donc, je pense que c'est là qu'on rejoint toute l'importance de la place des parents.

L'Office a des inspecteurs, mais il y en a, je pense, une dizaine pour 1 000 services de garde. Si les parents ne sont pas là pour s'assurer de la qualité des services, personne ne peut s'assurer de cette qualité-là, c'est la place des parents. Il faut que les parents puissent s'assurer que la qualité est là au jour le jour. Et c'est pour ça leur importance, l'importance qu'ils soient décisionnels, parce qu'il faut qu'ils puissent être capables d'apporter les modifications qu'il faut. Ça, c'en est un bon exemple.

Quant aux groupes par rapport, par exemple, à la garde des enfants de trois et quatre ans, je vous soulignerai qu'il existe un mouvement qui s'appelle le Mouvement québécois pour des services de garde de qualité, dont l'Association des services de garde en milieu scolaire, Concertaction, les agences aussi en garde familiale, les syndicats, CSN, CEQ, et plusieurs organismes familiaux sont membres. Nous avons soumis un mémoire au niveau des états généraux justement sur la garde des enfants de trois et quatre ans. L'ensemble de ces groupes-là sont solidaires, ont la même vision. Les enfants de trois et quatre ans ne devraient pas être dans les écoles. Et, là-dessus, j'ai été régulièrement porte-parole, ou Mme Guy, de l'Association des services de garde en milieu scolaire, à son tour, pour notre service... parce que les positions sont les mêmes pour l'ensemble des réseaux de garde pour les enfants de trois et quatre ans.

L'autre point que vous apportez, c'est toute la question de l'aide financière aux familles. C'est sûr que, pour nous, c'est dramatique. C'est dramatique qu'on aille couper de l'aide aux familles les plus défavorisées. Le problème, c'est que le programme d'exo s'adresse aux familles pauvres. On n'est pas pour couper sur les familles riches, il s'adresse aux familles pauvres. Alors, là, c'est dramatique. C'est dramatique. Et on a tenté – on n'a pas encore de résultats, alors là-dessus on pousse encore – de s'assurer que, s'il doit y avoir coupure – parce qu'on nous assure qu'il faut qu'il y ait coupure puisqu'il y a eu dépassement budgétaire – s'il doit en avoir absolument, qu'elles soient le plus faibles possible et qu'elles ne s'appliquent qu'aux familles qui reçoivent le moins d'aide et non pas celles qui ont le plus besoin d'aide. Nous sommes tous favorables: les enfants des familles les plus défavorisées devraient avoir droit à des services gratuits. Ces familles ne devraient même pas avoir à payer pour ces services-là, puisqu'il en convient de la qualité de vie de ces jeunes enfants là.

L'important aussi, et vous l'avez vu, nous avons – même si vous avez semblé dire tantôt qu'on était les amis de Mme Marois, je pense qu'on n'est les amis de personne, on est les amis des services de garde – émis, hier, un communiqué de presse pour s'assurer que toute décision... Bien, je pense que nous avons travaillé avec Mme Gagnon-Tremblay régulièrement quand elle était ministre responsable des services de garde, avec Mme Trépanier. Nous avons toujours travaillé avec les ministres responsables des services de garde. Donc, toutes les mesures qui devraient s'appliquer... Actuellement, on a encore la date du 24 juin. Et, ça, c'est dramatique parce que les familles ne savent pas encore qu'elles pourraient avoir une coupure, ne savent pas de quel ordre elle serait, et ce n'est pas possible de pouvoir appliquer des coupures durant la période d'été. On disait: Au moins, qu'on ait le temps de voir ça, quel impact ça aura, puis qu'on attende au moins en septembre pour toute mesure, toute modification qui pourrait toucher l'aide financière. Aussi qu'on s'arrange pour avoir le moindre impact possible sur les familles à plus faibles revenus, particulièrement pour les enfants, en plus, des familles qui sont sur l'aide sociale, qui ont droit à l'aide financière.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie. Je suis obligé de couper parce qu'il reste 20 minutes...

Mme Pitre-Robin (Claudette): D'accord.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): ...et j'ai beaucoup d'interventions encore. Est-ce que je peux passer à une autre intervention? Il me reste les députés de Lévis, Saint-François, Sherbrooke, Notre-Dame-de-Grâce et, évidemment, les conclusions. Alors, j'aimerais ça que les questions soient courtes, ça va inviter peut-être à des réponses courtes.

(17 h 40)

M. Garon: Moi, j'ai une question très courte. Dans les années qui viennent, on voit, avec les statistiques qu'on vient de publier, que le nombre d'enfants dans beaucoup de milieux va diminuer considérablement. Il y a le vieillissement de la population à bien des endroits, et le nombre de jeunes diminue. Ça veut dire que des écoles en milieu... Il y a des écoles qui vont être appelées à fermer, à moins qu'elles soient utilisées, qu'il y ait des locaux, à un moment donné, d'une école qui est utilisée... Elle peut être utilisée à 75 %, 60 %, 50 %, et dans une perspective... Parce qu'il y a une question de moyens aussi, puis de rentabiliser les espaces qu'on a et qui sont déjà payés, qui sont déjà là. Vous ne pensez pas – quelle que soit la nature de la garderie, quelle qu'elle soit, qu'elle soit privée, publique, scolaire ou autre, quelle que soit la façon d'opérer de la garderie – que le meilleur endroit pour avoir une garderie, ce serait dans les locaux qui sont disponibles dans une école? Parce que, si les locaux sont là, n'est-ce pas une façon de les rentabiliser que de les louer à qui que ce soit? Mais quelle que soit la nature de la garderie – le projet de garderie, c'est une autre affaire – mais que... Parce que ça va aider l'école à demeurer dans son milieu et ça va aider des parents, souvent, qui en ont un en garderie puis qui en ont un en première, en deuxième, en troisième, en quatrième année, à ne pas être éparpillés dans plusieurs lieux pour leurs enfants. Et ça va contribuer à faire une vie plus communautaire où le contrôle social joue un rôle plus grand.

Mme Pitre-Robin (Claudette): On est tout à fait d'accord avec ça. Quand il y a des places disponibles, il n'y a pas de raison... Mais est-ce que, parce qu'on offrirait un service de garderie à proximité d'une école ou dans l'école, il faut nécessairement que ce soit la commission scolaire qui en soit responsable?

M. Garon: Non, non.

Mme Pitre-Robin (Claudette): Est-ce que vous l'avez bien dit? Ils peuvent louer les locaux et faire en sorte que la gestion appartienne quand même aux parents avec une vision axée sur le jeu pour l'enfant et garder le milieu de vie enfant. On n'a absolument pas objection. Il y a tellement de garderies qui ont de la difficulté à avoir des locaux disponibles pour s'installer. C'est ça qui retarde toujours le développement: d'avoir une place, des locaux, de faire construire des locaux, d'avoir un terrain à bon marché pour ça. Donc, s'il y a des espaces disponibles n'importe quand, on va utiliser les locaux. Mais on ne veut pas devenir, à ce moment-là, sous la direction du directeur d'école parce qu'on est proche de l'école ou dans l'école. C'est ça qui est différent.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci, madame. Mme la députée de Saint-François.

Mme Gagnon-Tremblay: Oui. Merci, M. le Président. Je veux, bien sûr, saluer Mme Pitre-Robin et Mme Potvin et vous dire que ça a toujours été un plaisir de travailler avec vous. J'ai retenu votre collaboration dans le passé et, bien sûr, je sais aussi tous les efforts que vous faites pour obtenir des services de garde de qualité. Alors, on reconnaît votre travail dans ce sens-là.

Il y a certaines choses, cependant, sur lesquelles je voudrais revenir et que je voudrais mettre un peu au point, c'est toute la question des garderies à but lucratif et sans but lucratif. Vous les appelez «commerciales». C'est sûr que «commerciales», ça a une connotation un peu, je dirais, péjorative. Bon. Mais je dirais que le vrai nom, c'est «sans but lucratif» et «but lucratif». Malgré que notre formation politique, et notre gouvernement, à l'époque, avec l'énoncé de politique, on ait toujours priorisé les garderies sans but lucratif, on s'est toujours dit également qu'il fallait avoir, comme je vous le disais tout à l'heure, un témoin. Je pense que c'était important.

Je n'accepte pas non plus que l'on pense ou que l'on croie qu'on a des services de moindre qualité dans les garderies à but lucratif que dans celles sans but lucratif. Comme vous le disiez tout à l'heure, il y a des garderies qui peuvent être pourries aussi bien dans un domaine que dans l'autre. Je pense qu'on doit se fier aussi à la responsabilité des parents, on doit se fier au bon sens des parents aussi. Ces parents-là ont des enfants et ils veulent leur bien. Alors, les parents qui sont responsables vérifient aussi la qualité des garderies.

Bien sûr qu'il peut y avoir plein de choses, parfois, qu'on peut plus difficilement identifier, mais c'est un peu la raison pour laquelle on avait aidé les garderies à but lucratif quant à la formation, entre autres, des éducatrices et des éducateurs. Si on avait prévu 1 % de la masse salariale aussi bien – de formation, j'entends – dans les garderies à but lucratif que dans les sans but lucratif, c'était pour permettre d'avoir une qualité qui était semblable, au moins, mais qui n'était pas moindre. Je comprends qu'il y a peut-être plusieurs garderies à but lucratif qui ne s'en sont pas servi. Mais aussi il y avait des critères, dans le sens qu'il y a déjà des éducatrices qui ont une formation de niveau collégial ou universitaire et que, bien sûr, on n'allait pas donner une formation, déjà, à ces éducatrices.

Alors, il y a ça que je voulais mettre au point. L'autre question aussi. On s'imagine toujours – et je l'ai entendu de la bouche de la ministre d'ailleurs, à quelques reprises en Chambre, lorsqu'on lui posait des questions – que les garderies à but lucratif sont financées. Il faut être très prudent. Écoutez, le financement, premièrement, au niveau du fonctionnement, il n'y a rien comparativement aux sans but lucratif, qui représentent à peu près 89 000 000 $. Il n'y a rien, pour les garderies, en subventions de fonctionnement.

Maintenant, on avait accordé, à l'époque, des subventions, de l'aide au niveau de l'assurance collective, des congés de maternité, qui touchent encore les employées, pour essayer d'éviter, comme vous le disiez si bien, la mobilité des employées. Mais, encore là, c'est 765 000 $ environ comparativement à 3 200 000 $.

Pour l'implantation des garderies, les garderies à but lucratif n'ont absolument rien, tandis que les garderies sans but lucratif, c'est environ 4 400 000 $ annuellement.

Les enfants handicapés de même que les poupons, je pense que c'est normal qu'on aide parce qu'on sait que ça demande des efforts supplémentaires. C'est beaucoup plus coûteux. Mais je me pose la question: Pourquoi, dans les garderies à but lucratif, on retrouve, par exemple, plus de poupons que dans les sans but lucratif? La même chose, par exemple, pour les... Non, peut-être un peu moins pour les handicapés. Mais c'est quand même 2 300 000 $ qu'on donne pour les enfants, les poupons, dans les garderies à but lucratif comparativement à 483... C'est parce qu'il y a des besoins. C'est parce qu'il y a des besoins. On sait qu'on n'en a pas suffisamment, de garderies, actuellement.

Et je me dis que, dans le contexte où le gouvernement est en train de couper partout... C'est sûr que l'idéal, ce serait d'avoir des services de qualité gratuits pour tout le monde, mais on sait que c'est impensable. C'était impensable dans notre temps et c'est impensable pour le gouvernement actuel. Cependant, la question qu'il faut se poser, c'est qu'il y a quand même un pourcentage énorme de garderies à but lucratif actuellement qui se sont développées, mais là, si on arrête aussi le développement complètement... Je comprends qu'on puisse avoir un moratoire et qu'on puisse le planifier. Je suis d'accord avec ça. Mais, cependant, qu'on pénalise les parents qui pourraient faire un choix d'envoyer leurs enfants dans des garderies à but lucratif, ça, je m'oppose à ça.

Je voudrais revenir aussi à la scolarisation précoce ou l'importance de la scolarisation précoce, l'inverse c'est-à-dire, faire attention à ce qu'on ne scolarise pas de façon trop jeune. Je me dis qu'il faut faire attention. Vous êtes un petit peu en conflit d'intérêts, dans le sens que, si, bien sûr, on ajoute dans le milieu scolaire, on enlève dans les garderies, inévitablement. C'est pour ça qu'il aurait été important d'entendre, par exemple, Mme Guy, qui aurait pu venir s'exprimer.

La même chose, par exemple... J'aurais aimé vous entendre, lors de votre présentation, sur le financement: l'aide aux parents qu'on enlève, milieu scolaire. Mon collègue en a parlé, vous vous êtes exprimée un tout petit peu là-dessus. Mais, vous connaissant, Mme Pitre-Robin, vous auriez déchiré votre chemise, jadis, pour pas mal moins que ça. Alors, donc, j'aurais aimé vous entendre un peu là-dessus aussi, parce que je pense que c'est important. On coupe de moitié l'aide financière en milieu scolaire et on coupe de 14 000 000 $ l'aide aux parents.

Alors, donc, on a beau ne pas vouloir développer les but lucratif, ainsi de suite, mais il y a aussi un contexte qui fait que, à un moment donné, on ne développera peut-être pas du tout, mais toujours en planifiant, bien sûr.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce que, si je comprends bien, c'est la dernière partie de votre intervention qui représente la question?

Mme Gagnon-Tremblay: Oui, j'aimerais...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Madame.

Mme Pitre-Robin (Claudette): Le problème, on le reconnaît, il y a des garderies à but lucratif qui vont continuer à être financées, puis, vous avez vu, on ne s'oppose pas à ça. On dit: Bon, il y a des règles du jeu, elles étaient là, elles ont du financement, qu'on continue. Le problème, c'est que tous les gouvernements ont tenté de voir comment on peut contrôler le développement et on ne peut pas trouver de moyen pour contrôler le développement des garderies à but lucratif: elles peuvent se développer à côté d'une autre, trois sur les mêmes coins de rues. On ne peut pas l'harmoniser. C'est pour ça... Elles vont continuer à se développer. Sauf que, si, parce qu'elles se développent, on les finance... On sait tous que les garderies à but lucratif, elles sont dans Montréal, en Montérégie, parce qu'il y a le plus haut taux d'enfants nouvellement nés, et à Québec. Tout le monde est dans les grands centres. Mais on ne va mettre de l'argent que dans les grands centres parce qu'il n'y aura plus d'argent pour les autres si on n'arrive pas à contrôler, faire un développement contrôlé, harmonieux et s'assurer que les garderies se développent à travers la province. Donc, c'est important.

L'autre partie, pour les quatre ans, je trouve ça toujours difficile. Nous autres, on est toujours en conflit d'intérêts quand on parle du bien-être des enfants de trois et quatre ans, puis les commissions scolaires, eux autres, ne sont jamais en conflit d'intérêts. Eux autres, c'est toujours pour le bien-être des enfants, puis, nous autres, c'est toujours parce qu'on ne veut pas se faire voler de la clientèle. Ça, je trouve toujours ça un peu odieux. Parce que, à la limite, je vous dirai que, demain matin, il y a si peu de garderies au Québec, qu'on enlèverait les quatre ans et elles vont continuer à vivre pareil. Elles vont coûter un peu plus cher parce que les ratios seront plus bas, mais elles vont continuer à vivre.

Le problème n'est pas là, c'est le milieu de vie. Et, là-dessus, ce que je disais tantôt, Mme Guy le défendrait autant que moi. Nous sommes ensemble depuis des mois à se battre là-dessus. Nous avons été ensemble dans des commissions parlementaires, aux états généraux, pour dire que les enfants de trois, quatre ans, ils doivent rester dans des milieux de vie, des milieux comme les garderies, comme d'autres milieux, les jardins d'enfants, mais qui ne sont pas scolarisants. Et, là-dessus, il n'y aurait pas d'opposition, je peux vous mettre ma tête à couper, nous sommes du même avis.

Je suis d'accord avec vous. Par contre... Bon, le projet de loi, le mérite qu'il a, c'est d'être clair par rapport à la règle des but lucratif et des sans but lucratif, mais... qu'est-ce que je voulais dire, il y avait autre chose que je voulais ajouter...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Vous réfléchissez, le temps que Mme Malavoy vous pose la question. Madame... Excusez.

(17 h 50)

Mme Pitre-Robin (Claudette): Ah! c'est sur l'exo. O.K. Oui, vous avez raison. Je pense que, là-dessus, on est allé... Je suis allée avec Mme Guy rencontrer les gens au ministère de l'Éducation pour essayer de trouver des solutions. Nous ne sommes pas plus d'accord. J'ai un enfant en garde scolaire, je sais ce que c'est, finalement. Je ne suis pas plus d'accord à ce que les services de garde scolaire n'aient plus de moyens. Est-ce que c'est par le programme d'exo ou un autre? Mais qu'il y ait du soutien financier aux familles pour faire en sorte que les familles aient accès aux services de garde scolaire. Pour avoir mis moi-même deux services de garde scolaire sur pied, j'en sais l'importance, et, comme parent: il faut que les enfants aient accès à ce service-là. Ça, tout à fait. Et nous sommes solidaires là-dessus aussi.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci. Mme la députée de Sherbrooke. Je m'excuse d'avoir nommé votre nom avant.

Mme Malavoy: Je vous en prie. Ce n'est jamais une insulte, ça me fait plaisir qu'on entende le nom de mon comté.

Je sais qu'on n'a pas beaucoup de temps, alors je vais vous poser deux petites questions rapidement. Moi, je connais les garderies particulièrement à but non lucratif pour ce qui est de mon expérience comme mère, parce que mes enfants ont fréquenté la première garderie à but non lucratif de Sherbrooke, il y a déjà un petit moment. Et je les connais aussi parce que j'ai des représentations, dans mon comté, de personnes qui viennent de garderies à but lucratif et qui s'inquiètent du... et qui reproduisent un peu le débat qu'on a ici.

Ma première question, c'est sur l'appellation, que ma collègue de Saint-François d'ailleurs a relevée, de «commerciale». Moi, j'aimerais savoir pourquoi vous y tenez, parce que j'ai remarqué que vous n'utilisez que ça. Je sais que, pour les gens qui sont dans des garderies à but lucratif, c'est vu comme étant un terme un peu méprisant par rapport au travail qu'elles font. Je voudrais savoir pourquoi vous l'utilisez.

Et, l'autre chose: Quand vous parlez d'un milieu scolarisant pour les petits enfants, qu'est-ce que vous accrochez derrière ça? Parce que, si je comprends bien la réponse que vous avez faite à mon collègue de Lévis, ce n'est pas forcément l'emplacement, c'est autre chose, c'est, j'imagine, le cadre des activités dans lequel tout ça se déroule. J'aimerais vous entendre rapidement là-dessus.

Mme Pitre-Robin (Claudette): D'accord. Pourquoi on dit «commerciale»? Pour démêler. Pour les parents, pour les journalistes – parce qu'on est arrivé souvent là – dire des BL puis des SBL, c'est du pareil au même. Les gens ne démêlent pas ça. Et, simplement, on dit des sans but lucratif. Quand je crée une entreprise, c'est un commerce. Je peux avoir le commerce de la meilleure qualité possible, ce n'est pas méprisant si je suis de qualité.

Mme Malavoy: Oui, mais...

Mme Pitre-Robin (Claudette): Mais c'est quand même une garderie commerciale. Leur objectif... Elles ont le droit de faire des profits. C'est leur droit. Je ne dis pas qu'elles en font, qu'elles en font largement ou pas, mais elles ont le droit.

Mme Malavoy: Mais, si vous permettez...

Mme Pitre-Robin (Claudette): Pourquoi... Elles préfèrent se faire appeler des garderies privées, alors que nous sommes toutes des garderies privées. Les garderies sans but lucratif sont privées. Elles aiment se faire appeler garderies privées parce qu'il y a un préjugé favorable pour l'école privée, au Québec, pour la qualité. Les écoles privées, elles ont des conseils d'administration où les parents siègent. Les écoles privées sont comme les garderies sans but lucratif. Mais c'est l'appellation «privées» qu'elles aiment accoler à leur nom parce que ça a un préjugé favorable. Donc, c'est pour ça...

Mme Malavoy: Mais, si vous permettez, «sans but lucratif» n'est pas plus facile à comprendre qu'«à but lucratif». Mais je comprends votre position.

Mme Pitre-Robin (Claudette): Non, c'est de mettre les deux côte à côte. Les gens ne démêlent plus SBL, BL, etc. Au moins, ça a le mérite d'avoir l'air de deux affaires différentes. Parce que, pour le monde ordinaire, il ne démêle pas.

Pour ce qui est de la mission, peut-être revenir à la garde... Tout le document vous explique bien la nuance. Il faut que les enfants aient des activités toutes axées sur le jeu, où on respecte leur rythme, où le mouchage, le maternage est aussi important que, tantôt, le découpage ou le sautage. Parce que les enfants, à l'âge où ils sont, il faut qu'ils développent globalement, sur l'ensemble, leur potentialité. Il faut que ce soit axé sur: aujourd'hui, on a des activités différentes de demain. Mais on tient toujours compte de l'ensemble et non pas juste des activités qui favorisent le développement intellectuel. On peut apprendre à lire à des enfants de trois ans, mais à quel prix? Ils ne sont pas prêts à ça. Il faut permettre que ces enfants-là continuent à vivre, qu'ils aient un milieu de vie.

Vous savez, le thème de la Semaine des services de garde cette année, c'était justement «Laisse-moi le temps d'être enfant». On bouscule nos enfants actuellement. On a la méthode américaine, où ils ont des ulcères à huit ans parce qu'on les bouscule pour apprendre de plus en plus. Laissons-les vivre leur enfance, faisons des êtres créateurs, capables d'apprentissages par la suite.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci. Encore une fois, je m'excuse, j'ai le mauvais rôle.

Mme Pitre-Robin (Claudette): C'est correct.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député, on a à peu près deux minutes.

Mme Pitre-Robin (Claudette): J'ai de la passion, ça fait que...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ah! On est nous-mêmes des gens passionnés, alors on aime les gens passionnés.

M. le député, il reste environ deux minutes à votre formation. J'apprécierais, parce que... par respect pour les gens qu'on a accepté de rencontrer. Étant donné qu'on a commencé à 17 h 5, je vais accepter qu'on finisse à 18 h 5, en incluant les conclusions de la ministre et du député de Jacques-Cartier.

M. Copeman: Merci, M. le Président. D'entrée de jeu, je dois vous dire que je ne partage pas votre point de vue à tous les égards, mais je suis content d'avoir eu l'occasion de vous entendre. On souhaite que ce sera la même chose avec d'autres groupes, M. le Président.

Quelques questions très pointues. Pendant votre présentation, honnêtement, j'ai eu l'impression, la façon dont vous avez décrit les garderies à but lucratif, que vous désirez peut-être, essentiellement, fermer toutes les garderies à but lucratif. Là, j'ai eu un son de cloche que ce n'est pas tout à fait ça, que c'est plutôt de contrôler le développement.

Juste en quelques mots, êtes-vous contre le développement de toute nouvelle garderie à but lucratif à partir de maintenant? Et, s'il y avait une façon de le faire, idéalement, est-ce que vous seriez pour un moratoire complet du développement des garderies à but lucratif à partir de maintenant?

Mme Pitre-Robin (Claudette): Si on avait un choix réel sur la qualité, ce serait oui. Mais on a toujours composé avec des garderies à but lucratif en disant: Par contre, il faut s'assurer d'avoir les moyens pour assurer la qualité. C'est pour ça qu'on a toujours défendu des comités de parents minimalement. Donc, on a toujours été capable, depuis 25 ans, de vivre avec.

M. Copeman: Mais, idéalement, oui. Vos éducateurs et éducatrices, ils sont syndiqués à quel pourcentage?

Mme Pitre-Robin (Claudette): 25 % seulement.

M. Copeman: 25 %. Juste, peut-être, en terminant...

Mme Pitre-Robin (Claudette): C'est 25 % pour l'ensemble de la province, ce n'est pas dans Concertaction. Il y a 25 % du personnel dans la province qui est syndiqué.

M. Copeman: O.K. Mais, chez vous, chez vos...

Mme Pitre-Robin (Claudette): Ça aussi, 25 %.

M. Copeman: C'est également...

Mme Pitre-Robin (Claudette): Il y a des garderies syndiquées qui sont membres de Concertaction, puis il y en a qui sont syndiquées qui ne sont pas membres, là, mais c'est 25 %. On arrive au même pourcentage dans nos regroupements régionaux aussi. Dans la vie de tous les jours, ça ne change rien, parce que c'est les garderies qui sont membres et, dans les garderies, bien, les négociations se font à livre ouvert avec le personnel et les membres du conseil d'administration. Donc, le débat... Même quand elles sont syndiquées, ça ne change pas grand-chose, tout le monde voit les conditions qu'il y a, puis on fait avec.

M. Copeman: Une dernière petite phrase, M. le Président. Vous avez laissé entendre, à un moment donné – je trouve ça très curieux, vous allez me corriger ou renchérir là-dessus – que, dans les garderies à but lucratif – je n'ai aucune expérience personnelle – on peut empêcher un parent d'entrer. Parce que vous avez laissé entendre un peu, là, que s'il... Est-ce que le parent sait à quel point on mange bien, etc.? À votre connaissance, est-ce que les garderies à but lucratif empêchent les parents de visiter leurs enfants à n'importe quel moment de la journée?

Mme Pitre-Robin (Claudette): Les garderies à but lucratif n'ont pas le droit, dans les faits, d'empêcher, parce que la loi, une modification du règlement leur a... Mais il y a des tas de façons de faire. Par exemple, on dit aux parents que les enfants sont occupés, ils sont en sieste, etc. Il faut que les parents se sentent largement invités. Pour entrer dans la garderie, puis s'amener dans le groupe de son enfant qui est en train de faire une activité où il y en a d'autres... Et, aussi, les parents, quand ils ne sont pas invités, quand il n'y a pas un passage où il y a les gens du conseil d'administration qui viennent, etc., souvent les parents ne sont là qu'à des pôles précis: à l'entrée et à la sortie. Tout ce qui se passe entre ça, il n'y a pas de parent qui est là. Et ça on l'a vu aussi, des reportages et des enquêtes américaines où il y a eu la même affaire. On a vu, dans de ces reportages-là, que le ratio est très beau alors que les parents arrivent, puis, une fois que les parents ne sont plus là, il y a trois membres du personnel qui s'en vont, pour se retrouver avec des ratios de 1/25. Il faut que les parents puissent être là en tout temps et il faut que les éducatrices, qui sont les seuls témoins de ce qui se passe, puissent exprimer aux parents, au sein d'un conseil d'administration, les problèmes qu'il y a par rapport à la qualité.

Nous, là, les éducatrices, on en entend. On en entend dans les cours, quand on donne des cours à des éducatrices, on en entend partout. Et pourquoi il y a un roulement aussi grand? Moi, j'entends des éducatrices qui disent: Bien, je reste là parce que ce n'est pas pire, mais je prends une partie de mon salaire pour acheter du matériel. Donc, il y a quand même des conditions... Et je dis toujours: Ce n'est pas vrai! Malheureusement, celles qui sont de qualité paient pour les autres. Et c'est pour ça que les associations de garderies à but lucratif ne se lèvent pas si fort que ça pour faire en sorte que des tas de garderies à but lucratif puissent ouvrir n'importe comment, comme ça. Ça vient en leur propre compétition. Ce n'est pas vrai, il n'y a pas eu de tollé si large que ça là-dessus, hein.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Là-dessus, je vous remercie. Au nom de la commission, je vous remercie beaucoup d'être là. M. le député de Jacques-Cartier, en conclusion.

M. Kelley: Merci beaucoup, encore une fois, Mme Potvin et Mme Pitre-Robin, pour votre présence aujourd'hui. On va lire attentivement «Une enfance à préserver».

Juste rappeler aussi l'importance... Moi, j'ai une certaine expérience comme parent, avec cinq enfants, et il y a de la diversité juste même sous le même toit. Alors, je pense qu'il faut toujours dire que, oui, peut-être qu'il y a certains enfants où une scolarisation précoce n'est pas la bonne approche, mais il y a d'autres enfants où peut-être ça fait leur affaire.

(18 heures)

Moi, comme je l'ai dit, j'ai cinq enfants qui sont très, très, différents. Je ne suis jamais prêt à dire qu'il y a un modèle qui répondrait aux besoins de mes cinq enfants, uniquement. Quand on projette ça à la société québécoise dans son ensemble, les différents milieux, les personnes qui sont avantagées, les personnes qui sont dans les milieux défavorisés, je pense qu'il faut faire attention de ne pas avoir le mur-à-mur. Ce qu'on cherche de ce côté de la table, ici, c'est d'avoir de la flexibilité dans le système et les services de garde disponibles aux parents du Québec.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci, M. le député. Conclusion, Mme la ministre.

Mme Marois: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, brièvement, je veux remercier nos invitées de nous avoir apporté leur éclairage. Je vais bien prendre connaissance de «Une enfance à préserver». Je pense que nos invitées, comme les gens de la commission, savent que, à l'occasion des états généraux, c'est un des débats sur lesquels j'ai demandé que l'on se penche en particulier. J'avoue que j'ai plutôt, malgré que je sois ministre de l'Éducation, je le dis, un préjugé favorable au fait que l'on développe dans les services de garde des services de développement des enfants. Un jour, si nous y arrivons... Je sais que ça se fait, mais, un jour, il faudra le reconnaître au niveau aussi de l'appellation. J'ai bien compris le point de vue, mais j'aimerais quand même que l'éclairage des états généraux vienne nous aider dans la suite des choses.

Je veux peut-être rappeler aux membres de cette commission que Mme la ministre de la Condition féminine de l'époque, qui est maintenant député de Saint-François, avait aussi reçu une recommandation par un comité qu'elle avait mis sur pied – qui était présidé, je crois, par Mme Presser – que le gouvernement cesse d'octroyer des permis à des garderies à but lucratif et même recommandait que les enfants qui s'inscriraient dans ces garderies ne soient pas admissibles au programme d'exonération financière. Alors, ce n'est pas, je dirais, une idée saugrenue que nous avons eue ou pour discriminer. Je pense que c'est vraiment un souhait qui a été largement exprimé, qui répond à une réalité et auquel nous adhérons comme formation politique, et maintenant comme gouvernement, ce qui fait que cela se retrouve dans la loi. Par contre, nous préservons les droits acquis des garderies à but lucratif déjà existantes.

D'ailleurs, sans doute qu'effectivement celles-ci sont satisfaites de cela, et cela joue aussi sûrement sur le fait qu'elles ne soient pas intervenues très fort sur cette question. Elles l'ont fait. Je les ai rencontrées, même avant de déposer le projet de loi, pour les informer, non pas dans le détail, par respect pour les membres de l'Assemblée nationale, mais je les informées de ce que l'on ferait. Il n'y a pas eu de surprise dans ce que l'on faisait. Ce n'est pas non plus mon habitude.

Alors, merci encore à nos invitées qui sont venues nous aider, éclairer, par leurs propos, nos décisions.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci. Je suspends les travaux jusqu'à 20 heures ce soir.

(Suspension de la séance à 18 h 3)

(Reprise à 20 h 13)

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): À l'ordre, s'il vous plaît! Le quorum est vérifié. Nous recommençons nos travaux. Nous sommes toujours aux motions préliminaires. Est-ce que quelqu'un aurait une motion préliminaire? Mme la ministre.

Mme Marois: Moi, je n'ai pas de motion préliminaire, mais je suis prête à ce que nous commencions l'étude du projet de loi.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je dois vérifier s'il y a d'autres motions préliminaires. M. le député de Jacques-Cartier.


Motion proposant d'entendre le Regroupement des garderies privées du Québec inc.

M. Kelley: Oui. J'aimerais proposer la motion suivante: «Que, conformément à l'article 244 du règlement de l'Assemblée nationale, la commission des affaires sociales, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 11, Loi modifiant la Loi sur les services de garde à l'enfance et d'autres dispositions législatives, tienne des consultations particulières relativement à ce projet de loi et qu'à cette fin elle entende le Regroupement des garderies privées du Québec.»

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce que je peux avoir...

(Consultation)

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Alors, on parle d'entendre le Regroupement des garderies privées du Québec avant... Le point que je dois vous souligner pour fins de discussion, c'est «avant d'entreprendre l'étude détaillée». Alors, c'est recevable. Je n'ai pas l'intention de suspendre les travaux, parce que les membres de la commission connaissent, je pense, assez le mot à mot de la motion.

Alors, conformément à l'article, il s'agit... La motion, c'est de recevoir, avant qu'on discute article par article, le Regroupement des garderies privées du Québec. C'est recevable. Je ne suspends pas même si on s'apprête à faire des copies tout de suite. Alors, je vous permets tout de suite, M. le député, de... votre droit de parole, qui est de 20 minutes...

Une voix: Trente minutes.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): ...30 minutes, M. le député.


M. Geoffrey Kelley

M. Kelley: Merci beaucoup. Je pense que nous avons, comme je l'ai dit, fait une consultation particulière dans le style de la ministre cet après-midi, c'est-à-dire entendre juste les choses qu'elle aimerait entendre. Ça ne marche pas comme ça. Je pense qu'on a tout intérêt, sur la réforme que la ministre a promise depuis maintenant 18 mois, comme commission, comme parlementaires, à prendre le temps qu'il faut pour entendre tous les groupes qui sont touchés et qui aimeraient s'exprimer sur ce projet de loi.

Moi, j'ai confirmé avec Mme Drouin, qui est une des porte-parole pour le Regroupement des garderies privées du Québec, qui m'a dit qu'elle a été appelée à 11 heures. Elle avait déjà fixé des rencontres à Montréal parce qu'elle veut amener pour cette commission le témoignage de parents qui sont touchés par le projet de loi n° 11. Alors, ça, c'était déjà prévu. Elle était en route pour Montréal. Alors, je trouve qu'un avis de quatre heures est insuffisant.

Moi, je pense que, si on veut procéder... Surtout parce que la ministre a dit, le 3 juin 1996, au moment où j'ai posé la question de l'importance d'entendre les groupes... Le dernier élément d'information, M. le Président: «J'ai déjà rencontré les représentants et les représentantes de l'ensemble des services de garderie du Québec, dont les garderies à but lucratif, et je les ai informés que je n'avais pas d'objection à ce qu'on prenne le temps pour les entendre sur le projet de loi n° 11.» Alors, je pense que c'est un engagement qui est fait par la ministre aux groupes qui sont touchés directement par le projet de loi n° 11. Il faut prendre le temps de mieux organiser les travaux de la commission. Ce n'est pas de les aviser à court avis de venir témoigner ici.

Donc, Mme Drouin a juste compris l'appel... On a informé Mme Drouin qu'on commence l'étude article par article à 15 heures. Alors, oui, nous autres qui sommes habitués à notre coutume et à nos façons de faire ici, à l'Assemblée nationale, nous autres, on savait qu'il fallait demander les audiences, les consultations particulières avant de commencer l'étude article par article. Mais, pour nos concitoyens et concitoyennes qui sont moins familiers avec comment ça fonctionne dans l'Assemblée nationale... J'imagine que Mme Drouin ne savait pas que c'est avant le commencement de l'étude détaillée qu'il faut demander une consultation particulière. Alors, je trouve que la façon dont elle a été informée, le fait qu'on ait fait ça au dernier moment et le fait qu'on n'ait pas bien expliqué le processus, c'était juste un manque de respect envers un groupe qui, comme je l'ai dit, représente plusieurs des garderies à but lucratif, surtout dans l'Est du Québec, mais également dans la région de Montréal.

Ils ont fait les efforts. Moi, j'ai devant moi une lettre que le Regroupement a écrite au premier ministre le 4 juin 1996:

«M. le premier ministre, au nom de tous nos membres ainsi qu'au nom de tous les parents d'enfants du Québec, je requiers par la présente, avec les membres du conseil d'administration, le privilège de vous rencontrer. Si nous avions cette opportunité, vous pourriez observer par vous-même qui sont ces propriétaires de garderies privées du Québec, en grande majorité des femmes. Vous auriez l'occasion de discuter avec elles et ainsi saisir le sens de leurs motivations. Vous serez heureux d'entendre parler de leur dévouement auprès des jeunes enfants qu'elles accueillent. Vous trouverez agréable leur intérêt pour les familles québécoises et leur contribution personnelle à leur bien-être.

(20 h 20)

«Si nous avions plus de temps, nous pourrions aborder les thèmes suivants, soit: l'aide financière aux parents, non disponible dans les nouvelles garderies privées du Québec; l'orientation gouvernementale qui privilégie les garderies dites sans but lucratif à coups de subventions superflues, au détriment des contribuables québécois qui paient déjà une facture imposante; les frais supplémentaires qu'on désire ajouter au compte des garderies privées, tel l'examen financier obligatoire lorsqu'on reçoit 25 000 $ de subvention en incluant l'aide financière, lorsqu'il est clair que l'aide financière appartient aux parents et non à la garderie; les subventions de formation aux nouvelles garderies privées, non disponibles au prochain budget, lorsque l'on connaît l'importance de la formation du personnel qui travaille auprès des jeunes enfants et l'impact positif et éducatif qui en découle; le désir pour nos propriétaires de garderies privées d'offrir un salaire horaire à leurs éducatrices équivalent à celui offert dans les garderies dites à but non lucratif et la nécessité d'étendre à nos garderies les subventions aux salaires; l'importance réelle pour votre gouvernement que le plus grand nombre d'enfants de 0 à 5 ans fréquentent un service de garde pour leur développement global et harmonieux et la nécessité pour vous d'inclure les services de garde privés dans le processus du développement pour atteindre vos objectifs de société à un coût abordable et qui réponde aux besoins des plus démunis, sans ghetto de riches ou de pauvres; l'intérêt pour votre gouvernement de reconnaître l'importance et l'impact positif des garderies privées du Québec, lesquelles sont majoritairement propriété de femmes, gérées par des femmes et dont les employés sont à 95 % des femmes.

«Je crois bien, M. le premier ministre, que tant de richesse d'esprit, d'entrepreneurship, de volonté et de qualité de gestionnaires justifient amplement que quelques minutes de votre temps y soient consacrées. Nous attendons le plaisir de vous rencontrer prochainement, ainsi que vos nombreux collaborateurs et collaboratrices à ce dossier, et ainsi discuter avec ouverture des nombreuses possibilités que nous vous offrons.»

Ça, c'est signé Ginette Drouin, présidente du Regroupement des garderies privées du Québec.

Moi, je pense que les thèmes qui sont énumérés dans la liste démontrent très clairement le genre de perspective, d'opinion, de point de vue que le Regroupement peut amener devant cette commission. Je pense qu'ils sont les personnes visées par les changements à la fois dans la méthode de financement et également sur l'avenir du développement au Québec. On a tout intérêt à les écouter.

Un certain rappel des faits, M. le Président, est nécessaire. Le secteur des garderies des deux sortes, il y a 55 000 places. Alors, ça, c'est un service essentiel pour 55 000 enfants au Québec chaque jour. De ce nombre, 20 000, alors au-delà du tiers du nombre, se trouvent dans les garderies à but lucratif. Alors, pour 20 000 enfants, pour 15 000 à 20 000 familles québécoises, tous les jours, c'est un service essentiel, un service de qualité offert aux familles québécoises pour assurer qu'elles puissent avoir un endroit sécuritaire pour leurs jeunes quand ils travaillent, quand ils vont aux études ou pour toutes les autres raisons qui motivent les parents québécois à avoir besoin d'une place dans une garderie au Québec.

Alors, c'est vraiment, comme je le dis, un partenaire très important: c'est 35 000 dans un réseau, 20 000 dans l'autre réseau. On a entendu, cet après-midi, une représentante – deux représentantes – du réseau des garderies sans but lucratif qui a bien expliqué son point de vue. C'est quelqu'un qui connaît très, très bien le régime. C'est quelqu'un qui est toujours très dévoué au dossier des garderies et aux intérêts de nos enfants. Moi, je ne conteste pas ça, mais je pense qu'on a tout intérêt, au moment de regarder la réforme majeure de la ministre, à prendre le temps qu'il faut, parce que, ça, c'est un travail qui reflète 18 mois de réflexion. Il y a un groupe de travail qui a été formé en 1994 pour regarder le problème. Encore une fois, il faut rappeler que les garderies à but lucratif avaient été exclues et n'étaient pas membres du groupe de travail. Elles ont été consultées un jour. Alors, la ministre a décidé de se protéger: elle a consacré une journée de consultation. Mais, pour participer aux recommandations, pour participer à la rédaction du rapport du groupe de travail, elles ont été exclues, comme je le dis. Un partenaire majeur, un réseau majeur à l'intérieur de nos services existants, et la ministre les a carrément exclues du processus.

Et qu'est-ce que nous avons vu aujourd'hui? C'est tout à fait la même chose: On a décidé qu'on ne voulait pas les entendre parce que c'est évident qu'elles vont venir ici témoigner qu'elles sont... Elles vont contester les provisions du projet de loi n° 11, et la ministre ne veut rien savoir de ça. Alors, elle a décidé: On va organiser les soi-disant consultations en catastrophe, à 11 heures, midi, pour éviter que les gens puissent se déplacer pour venir ici. Moi, je pense que c'est soit la «malorganisation» habituelle de ce gouvernement ou... je ne sais pas. Mais, encore une fois, on a freiné ou on a trouvé des moyens pour que le groupe ne puisse pas venir s'exprimer devant la commission, et, comme je dis, c'est le secteur qui est probablement le plus touché par le projet de loi.

Alors, je pense que, comme parlementaires, avant de regarder le projet de loi n° 11, on a tout intérêt à les entendre, on a tout intérêt à regarder leurs priorités. C'est 20 000 emplois et quelque chose comme 4 000 éducatrices – quelques éducateurs, mais des éducatrices avant tout – qui travaillent dans le secteur. Alors, c'est quatre fois la Kenworth, quatre fois l'impact de cette fermeture d'usine, ce qui est en question ici. Alors, je pense qu'au nom de ces 4 000 éducatrices qui travaillent dans le domaine on a tout intérêt à regarder. C'est au-delà de 400 petites entreprises.

Je pense que peut-être que le Regroupement s'est inspiré du discours inaugural de notre premier ministre, qui a flatté l'esprit d'entrepreneurship québécois. Je pense que c'est un des autres très beaux passages qu'on trouve dans le discours inaugural du premier ministre. Si on est prêt à souligner l'importance de l'entrepreneurship – et souvent on entend, dans les discours des élus, que c'est très important pour les gens de prendre l'initiative de se créer un emploi, l'ère de l'État-providence est chose du passé, c'est vraiment aux Québécois et aux Québécoises de prendre l'initiative de se créer un emploi, de lancer une affaire, de lancer une entreprise pour améliorer leur sort – je pense qu'on a un très bel exemple ici parce que, parmi les entrepreneurs, les femmes qui ont décidé de lancer des garderies à but lucratif, on trouve souvent des personnes qui ont travaillé dans des garderies, qui en avaient le rêve, l'idée, qu'elles aimeraient lancer une entreprise. Elles aiment travailler avec les enfants, elles aiment rendre un service très, très important aux jeunes familles québécoises. Alors, elles ont décidé d'aller emprunter de l'argent auprès de la caisse populaire ou de la banque, organiser... C'est beaucoup de travail.

J'ai parlé à une dame, la semaine passée, qui m'a tout expliqué les 14 mois que ça a pris pour arranger le financement, aller trouver un site, soit construire ou rénover un édifice existant, travailler avec l'Office des services de garde pour rencontrer toutes les exigences, parce qu'on sait que notre règlement est fait pour assurer la sécurité de nos enfants. Alors, au niveau du nombre de fenêtres, de la lumière requise, les portes de sortie, les escaliers... En tout cas, on a toute une série d'exigences, d'adapter les salles de bain, les autres choses qu'il faut faire à l'intérieur d'une garderie, et je pense qu'il faut faire ça. Mais c'est le travail d'avoir tout ça respecté et, après ça, d'ouvrir les portes, chercher la clientèle. Il faut embaucher le personnel pour faire fonctionner un service de garde. Alors, c'est tout un travail et c'est vraiment quelque chose, il faut mettre du coeur dans tout ça. Je pense que les personnes qui ont décidé de lancer les garderies à but lucratif...

(20 h 30)

Moi, comme je le disais, j'en ai visité maintenant peut-être trois ou quatre douzaines, surtout dans la région de Montréal, hors la session de l'Assemblée nationale, et souvent, c'est des couples. Le mari a peut-être un autre emploi à l'extérieur, mais il est là le matin – parce que la journée commence tôt, comme on le sait – pour recevoir les jeunes enfants. Peut-être que le mari part, laisse son épouse gérer la garderie pendant la journée. Il revient à la fin de la journée, parce que c'est des journées qui durent jusqu'à 18 heures, 19 heures. J'ai fait une tournée de peut-être six ou sept garderies à but lucratif dans l'ouest de l'île de Montréal, à l'heure du souper. C'est le moment peut-être le plus difficile: les enfants sont fatigués, les éducatrices sont fatiguées. C'était l'hiver. À la garderie que j'ai visitée, une en particulier, il y avait 60 enfants. Alors, 120 bottes à mettre, 120 mitaines à mettre, 60 chapeaux à mettre, etc. C'est vraiment le moment peut-être le plus mouvementé de la journée, où il faut... Mais, ça, c'est quelque chose, et, comme je dis, c'étaient souvent des couples ou une femme qui a décidé que c'est comme ça qu'elle veut se créer un emploi. C'est comme ça qu'elle veut rendre un service à sa communauté.

Tout le long de l'autoroute 40, dans l'ouest de l'île de Montréal, il y a beaucoup de jeunes familles, il y a beaucoup de besoins. Souvent, le réseau des garderies à but non lucratif ne peut pas combler les besoins. Il n'y a pas assez de places. Il y a des listes d'attente. Alors, dans ces circonstances, les parents ont une autre alternative, c'est-à-dire qu'au lieu de trouver des arrangements informels, au lieu de trouver une autre manière, moins structurée, moins formelle, peut-être même quelque chose qui n'est pas connu par notre ministère du Revenu, ils ont l'option de choisir une place dans une garderie à but lucratif. Je pense que c'est très important. Les propriétaires des garderies à but lucratif n'exigent pas d'énormes subventions, mais ils ne veulent pas que l'écart entre les deux réseaux devienne trop grand. Je pense que, dans ça, ils ont raison, parce qu'il faut équilibrer les conditions entre les deux réseaux. Parce que, si les salaires, dans les garderies à but non lucratif, deviennent... Il y a déjà un écart, mais, si ça devient trop prononcé, ça va rendre le recrutement du personnel très difficile pour les garderies à but lucratif et, ça, c'est quelque chose... L'écart est dû au fait qu'il y a des subventions de 96 000 000 $ qui viennent de l'État pour les 35 000 enfants qui ont la chance, et c'est une chance... Trente-cinq mille enfants sont chanceux: ils ont accès aux garderies à but non lucratif. Ils ont accès indirectement à ce financement de 96 000 000 $. Pour les autres parents et les autres enfants, hors du réseau, ils doivent se contenter des subventions de 4 000 000 $.

Alors, comme je l'ai dit, un des principes que nous aimerions défendre, c'est une certaine équité entre les enfants. Moi, je ne trouve pas qu'un enfant qui, faute de places dans un réseau, se trouve dans l'autre réseau... Les décisions prises par la ministre, par l'Office des services de garde, rendent la vie très difficile à l'intérieur des services de garde à but lucratif. Alors, je pense qu'on a tout intérêt à entendre les représentants de ce réseau très important, surtout leur problématique, surtout parce qu'ils étaient exclus du groupe de travail. Cette décision, qui a été prise arbitrairement par la ministre, elle a dit: Oui, on va faire une journée de consultation. Depuis, le groupe a eu un accès très, très limité à la ministre. Ils ont eu beaucoup de misère à rencontrer la ministre, à faire prévaloir leur position. C'est pourquoi, j'imagine, ils ont décidé d'écrire directement au premier ministre, parce qu'ils n'ont pas...

Alors, ça, c'est... Je trouve qu'on a tout intérêt, comme parlementaire, à entendre ce réseau, à entendre ces femmes qui représentent le Regroupement des garderies privées du Québec pour avoir leur point de vue aussi. On a discuté, entre autres, disons, des... Moi, j'ai rencontré Mme Drouin, il y a trois semaines, je pense. Il y a beaucoup de questionnement sur la nouvelle façon d'octroyer les permis...

Une voix: ...deux minutes...

M. Kelley: Parfait. Je pense qu'ils ont tout intérêt... Ils aimeraient s'exprimer sur la façon dont on va octroyer les permis, l'arrimage entre le rôle de l'Office et la nouvelle mission qu'on veut donner aux conseils régionaux de développement et aux régies régionales de la santé et des services sociaux. Est-ce qu'il y aura du monde, à l'intérieur de ces groupes, qui aura l'expertise qu'il faut pour évaluer le développement dans les services de garde? On demande énormément de nos régies régionales en ce moment; elles sont responsables pour le virage ambulatoire, elles sont responsables pour toutes sortes de changements. Alors, ajouter à ça un rôle dans l'octroi des permis, ce n'est pas évident. Je pense qu'on a tout intérêt à entendre Mme Drouin et à voir leur positionnement sur ça.

Alors, ça, c'est quelques-unes des questions par lesquelles ces personnes vont être touchées. Il y a également, et j'ai soulevé ça en Chambre, le fait de la clause grand-mère de la ministre qui est dans le projet de loi: Qui est touché? Qui n'est pas touché? Comment est-ce que les parents vont être touchés par cette clause grand-mère? Alors, ça, c'est des choses... C'est leurs droits acquis, c'est leurs droits qui sont en jeu. Alors, je pense qu'on a tout intérêt à regarder ça.

On a également tout intérêt à regarder les personnes qui ont, de bonne foi, investi, dans le passé, dans le réseau dans l'espoir un jour de devenir admissibles au financement, et je pense... J'en ai rencontré quelques-uns qui ont développé des projets avant le moratoire, dans... Ils s'attendaient qu'un jour ils auraient l'occasion d'être admissibles au financement. Ils ont fait un plan d'affaires basé sur ça et ils n'ont pas l'occasion... Maintenant, d'une façon très arbitraire, la ministre va changer les règles du jeu, après que l'argent aura été investi, après avoir compris que, s'ils ne sont pas admissibles tout de suite, il y a toujours la possibilité qu'ils puissent recevoir les parents qui sont subventionnés. Même, j'ai vu, dans un dépliant publié au mois de mai par le Secrétariat à la famille, que tout parent qui a un enfant dans une garderie régie par l'Office est admissible au financement pour les parents – et c'est textuel, je peux aller en haut le chercher – mais ce n'est pas vrai. Ce n'est même pas vrai, mais le Secrétariat à la famille l'a publié quand même et ça a semé la confusion pour les parents qui sont dans ces quelque 85 garderies régies avec un permis non admissible.

Alors, c'est ça, la confusion qui existe. C'est ça, l'information qui circule avec l'imprimatur de ce gouvernement. Alors, je pense que, pour mieux éclairer notre travail, pour avoir une meilleure idée de l'impact, des conséquences du projet de loi n° 11, il faut recevoir les représentants des garderies privées. Comme je dis, c'est très, très important. Dans les derniers cinq ans, je pense que ce n'est pas loin des deux tiers du développement, les nouvelles places étaient dans les garderies à but lucratif. C'est eux autres qui ont réussi à créer le projet.

Quand je regarde le tableau des projets à développer à travers le Québec, on a parlé de pénurie de places, surtout dans la région de l'Outaouais, qui est la région avec le moins de places disponibles. Dans ce secteur, il n'y a aucun projet de garderie à but non lucratif en banque. Ça, c'est les chiffres que la ministre a déposés au moment de l'étude des crédits, au mois d'avril. Alors, pour l'Outaouais, comme je dis, qui est la région avec le plus grand besoin, il y a zéro projet en banque. Au moins, dans les garderies à but lucratif, il y en a cinq. En ce moment, pour 29 % des parents, les enfants ont accès à une garderie dans l'Outaouais. Alors, je pense qu'au lieu de dire non aux cinq projets qui sont là...

(20 h 40)

Parce qu'on sait que déjà ça prend, en moyenne, 18 à 24 mois pour développer un projet. Dans l'Outaouais, comme je le disais, il y en a zéro dans la banque. Alors, ça va prendre très longtemps pour développer ces projets. Et, avec les étapes que la ministre va ajouter, si jamais on adopte le projet de loi n° 11, ça va encore compliquer. Parce qu'on a déjà tous les problèmes de financement, de recrutement de personnel, de choisir un site, de réaménager un édifice, de faire tout ça, mais on va ajouter à ça les étapes d'aller voir les conseils régionaux de développement, d'aller voir les régies régionales de la santé et des services sociaux. Ça va juste alourdir le processus au lieu de l'alléger, alors ça va prendre encore du temps pour développer une place.

Quand je regarde, dans les régions qui en ont besoin, prenons Lanaudière, Laurentides, Montérégie, il y a beaucoup de projets de garderies à but lucratif prêts à partir. Ça, c'est les banlieues de Montréal. Ça, c'est les endroits où il y a beaucoup de jeunes familles. Alors, c'est évident qu'il y a des besoins dans ces secteurs. Je pense qu'on a tout intérêt à regarder... dans la couronne de Montréal, à développer ces services. Il y a beaucoup plus de projets prêts à partir dans le but lucratif que dans le but non lucratif, où il y en a quatre dans Lanaudière, seulement trois dans Laurentides et 13 en Montérégie, en comparaison avec 13 dans Lanaudière, 12 dans Laurentides et 32 en Montérégie. Alors, il y a beaucoup de projets, beaucoup d'intérêt. C'est évident qu'il y aura plus de places en garderie dans les grandes villes, parce que ça prend une masse critique pour lancer une garderie. Ce n'est pas le modèle le mieux adapté, dans les villages; ce n'est pas le modèle le mieux adapté, en campagne, parce que les enfants sont trop loin les uns des autres, mais, dans les banlieues, c'est là le site où les services de garde en garderie... je pense, c'est le meilleur modèle. Ce n'est pas surprenant que ce soit dans la région de Québec, dans la région de Montréal et dans les banlieues de Montréal qu'on retrouve les projets prêts à partir.

Dernièrement, il y avait un article, récemment, et... Comme je vous dis, quand je défends la notion de diversité des services de garde... Il y a des parents qui sont épuisés. Alors, la notion de participer pleinement à la gestion de leur garderie ne fait pas leur affaire, parce qu'ils sont monoparentaux, peut-être qu'ils prennent un cours ou deux, un soir, pendant la semaine. C'est une famille qui a eu des difficultés. Ils ont eu une perte d'emploi, peut-être, alors ils sont obligés de prendre deux emplois à temps partiel. Il y a beaucoup de stress sur la famille québécoise, ces temps-ci. Alors, oui, pour les parents qui ont le temps, le goût et l'enthousiasme de participer pleinement dans une garderie, chapeau! Je pense que tout le monde est très heureux de leur participation pour assurer la qualité, mais ça ne fait pas l'affaire de toutes les familles québécoises. Alors, ça, c'est une autre raison pour regarder, parce qu'il y a toujours les conseils d'administration des comités aviseurs qui fonctionnent dans les garderies à but lucratif. Alors, j'aimerais voir avec Mme Drouin comment les comités aviseurs des parents fonctionnent dans des garderies à but lucratif. J'aimerais aussi avoir le témoignage des parents qui ont des enfants dans des garderies à but lucratif.

Alors, je pense qu'on a tout intérêt à regarder ça, parce que la ministre a pris quelques décisions, après une consultation minime avec le Regroupement des garderies. Je pense, comme parlementaire, et surtout sous l'angle que, ça, c'est le réseau qui, à moindre coût, réussit à développer les places, que de les recevoir ici, de les entendre poser les questions, améliorer notre réflexion, peut-être bonifier le projet de loi qui est devant nous... Alors, je pense, comme je l'ai dit, qu'on aurait tout intérêt à planifier une rencontre avec quelques-uns de ces regroupements pour entendre leur point de vue. Je pense que c'est très important. Ça va alimenter notre réflexion. Ça va nous donner une idée, à savoir c'est quoi, exactement, gérer une garderie à but lucratif, c'est quoi, les enjeux, comment ça fonctionne, c'est quoi, toutes les étapes qu'ils doivent prendre avant d'ouvrir les portes, c'est quoi, leur journée typique, c'est quoi, l'implication des parents, c'est quoi, leur relation avec l'Office des services de garde à l'enfance.

Il y a toute une série de questions qu'on peut poser: L'inspection, comment ça fonctionne? Comment on procède? C'est quoi, le processus interne pour traiter les plaintes des parents? En tout cas, on a une longue série de choses qu'on peut aborder avec le Regroupement des garderies et les propriétaires des garderies privées. Comme je l'ai dit, je propose fortement aux membres de la commission qu'on prenne le temps qu'il faut pour organiser ça, laisser au monde, peut-être, un petit peu plus que quatre heures d'avis pour se rendre à Québec pour expliquer leur position. On va regarder ça, on va les écouter attentivement et ça va nous permettre de regarder le projet de loi n° 11 avec un meilleur éclairage. Alors, on aura une meilleure connaissance des enjeux, surtout pour le réseau des garderies à but lucratif. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci, M. le député de Jacques-Cartier. Maintenant, je passe la parole à Mme la ministre.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, M. le Président, j'ai déjà expliqué à quelques reprises que nous avions communiqué avec les gens qui ne pouvaient pas être là aujourd'hui. Les gens connaissent nos règles, avaient été prévenus de cela. J'ai cependant pris la peine, avant même que je ne dépose la loi, pour ne pas que les gens soient autrement surpris, de les informer. Alors, évidemment, leur éclairage nous amènerait sûrement des points de vue qui ne sont pas ceux que l'on retrouve au projet de loi, que je connais pour l'essentiel, mais qui auraient pu éclairer, d'autre part, d'autres membres de la commission. Cependant, à partir du moment où le gouvernement a privilégié un certain nombre d'orientations et qu'on sait que ce groupe a des objections à ces orientations, à partir de là, évidemment, le reste vient dans la nuance, dans l'expression de points de vue, etc., et, malheureusement, ils ne pouvaient pas être là aujourd'hui. Je le déplore tout autant que l'opposition, mais je suis prête à ce que nous commencions l'étude du projet de loi.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci, Mme la ministre. Mme la députée de Saint-François.


Mme Monique Gagnon-Tremblay

Mme Gagnon-Tremblay: Oui, M. le Président. Je viens de saisir la position de la ministre. Elle vient de m'éclairer davantage sur sa position. Elle avait averti les groupes qu'elle était prête à les entendre, mais elle ne leur avait pas dit qu'elle le ferait à une ou deux heures d'avis. Je comprends aussi que le groupe qui faisait son affaire et qui était en accord avec sa position, il n'y a pas eu de problème.

M. Kelley: Quelle coïncidence!

Mme Gagnon-Tremblay: Le groupe est arrivé à temps et puis, bon...

M. Kelley: Quelle heureuse coïncidence!

Mme Gagnon-Tremblay: ...on a pu l'entendre cet après-midi...

M. Kelley: C'est incroyable!

Mme Gagnon-Tremblay: ...alors que les groupes qui sont en désaccord...

M. Kelley: Vous devriez avoir honte!

Mme Gagnon-Tremblay: ...avec la position de la ministre, plutôt que de les écouter puis de voir s'il n'y aurait pas possibilité d'améliorer quoi que ce soit, la ministre refuse tout simplement de les recevoir.

M. le Président, depuis 15 heures cet après-midi qu'on discute de la possibilité de rencontrer les groupes. J'avais avisé la ministre que, si elle avait acquiescé à 15 heures cet après-midi, on aurait pu suspendre, vaquer à d'autres occupations, permettre à cette commission de continuer l'étude d'autres projets de loi. On aurait pu revenir demain matin, et les trois heures qu'on a passées cet après-midi, on aurait pu entendre ces trois groupes; dans trois heures, on les aurait entendus et on serait rendu actuellement à l'étude article par article. Donc, la ministre n'a pas voulu, et je comprends qu'elle ne veut pas non plus les rencontrer parce que ces groupes sont en désaccord avec son projet de loi et elle ne veut pas qu'ils s'expriment. C'est ça, la démocratie, M. le Président. Donc, comme la ministre ne veut pas que les groupes viennent s'exprimer, je vais essayer de m'exprimer au nom des groupes.

(20 h 50)

Alors, je vais vous parler des garderies à but lucratif. Je dois vous dire, M. le Président, que, cet après-midi, ça m'a choquée et ça me choque toujours d'entendre parler des garderies commerciales. Lorsque j'étais responsable des services de garde, de 1985 à 1989, j'entendais souvent ce vocable de «garderie commerciale» et je sursautais chaque fois. J'ai toujours eu l'impression que c'était voulu, en plus. C'était voulu pour la simple et bonne raison... pour laisser croire à la population que ces gens-là faisaient des profits, des profits énormes avec les services de garde, au détriment de la qualité, au détriment des services donnés aux enfants. Alors, je pense qu'il est temps de remettre les pendules à l'heure et de vous dire, M. le Président, que, bien sûr, tout en étant à but lucratif, ces gens-là actuellement ne font pas nécessairement de profits. Ils se paient un salaire comme il est tout à fait normal que des citoyens et citoyennes au Québec se paient des salaires. Mais je vous avoue qu'avec le prix d'une place quotidienne en garderie il n'y a pas nécessairement de profits à faire. Et, pour faire des profits, ça prend une garderie, justement, qui a au moins 50 à 60 places, parce que les garderies qui ont 30 places au permis, 20 places au permis, au contraire, sont beaucoup plus près du déficit. J'ai connu énormément de garderies sans but lucratif qui, n'eût été la subvention gouvernementale, n'eût été, à l'époque, le fait qu'on subventionnait des places qui n'étaient pas occupées et qu'on subventionnait des ratios beaucoup moindres... Parce qu'on le sait, c'est le gouvernement qui les subventionnait; c'est la raison pour laquelle on maintenait en vie les garderies sans but lucratif. Alors, avec la politique qu'on a mise en place en 1988, à ce moment-là, on a au moins demandé un effort aux garderies sans but lucratif pour s'assurer que les places au permis seraient occupées et, en plus de ça, que le ratio, bien sûr... on s'assurerait que, justement, les ratios aussi seraient respectés.

Alors, M. le Président, je reviens aux garderies à but lucratif. Là, je dois vous dire que notre gouvernement a toujours privilégié le développement des garderies sans but lucratif. Mais on a toujours compris une chose, cependant: qu'il était important d'avoir aussi des garderies à but lucratif et que, si on n'avait pas aujourd'hui les garderies à but lucratif, comment pourrions-nous combler les nombreuses places existantes actuellement? M. le Président, il y a, au Québec... Au 31 mars 1996, le total des subventions de fonctionnement versées, il y avait 670 garderies sans but lucratif pour 96 000 000 $, en moyenne 140 000 $ par garderie, pour environ 35 000 places; comparativement à ce qui coûtait 4 000 000 $ de subventions, en moyenne, c'est-à-dire, en moyenne, 4 000 $ par établissement, pour 20 000 places, pour 330 garderies à but lucratif. Ce qui veut dire que vous avez déjà, en moyenne – et, là, ça a peut-être changé, ça n'a pas changé depuis le 31 mars, mais je serais censée avoir les bons chiffres – 20 000 places en garderie à but lucratif qui existent actuellement.

J'imagine qu'on ne veut pas qu'elles disparaissent. J'imagine qu'on veut qu'elles se maintiennent, parce que, si, demain matin, avec les budgets qu'a le gouvernement, le gouvernement devait remplacer ces 20 000 places en garderie, je vous avoue qu'à 8 000 places auxquelles on s'était engagé et puis qu'on en aura peut-être 6 000 – puis encore, on a un moratoire – bien, ça prendrait du temps avant qu'on atteigne l'objectif visé pour donner des services de garde aux parents.

Alors, je comprends, M. le Président, qu'on maintient les 20 000 places, on maintient l'exonération aux parents, mais, d'autre part, on cesse le développement des garderies à but lucratif en pénalisant les parents. On dit aux garderies à but lucratif: Bien oui, vous allez continuer de vous développer. Là, il y a un moratoire pour tout le monde, je comprends, mais vous pourrez par la suite vous développer, vous pourrez avoir un permis qu'on sera obligé de vous donner, mais, par contre, on ne subventionnera plus les parents, alors qu'on sait que, comme je le mentionnais tout à l'heure, une place en garderie coûte facilement 20 $ par jour. Alors, le parent qui n'obtient pas de subvention, bien sûr, va devoir s'adresser aux garderies sans but lucratif. Mais le jour où il n'y en aura pas de place en garderie sans but lucratif, où allons-nous envoyer les enfants? En milieu familial? Est-ce qu'en milieu familial, par exemple, on est mieux en mesure de contrôler la qualité des services qu'on l'est dans une garderie à but lucratif? Je pense, M. le Président, qu'il y a des exagérations aussi bien dans un que dans l'autre système. Il y a des horreurs, je devrais dire, qu'on a connues dans les garderies à but lucratif comme dans les garderies sans but lucratif. De là à laisser croire, à laisser supposer que, dans les garderies à but lucratif, on ne retrouve pas la qualité, qu'on n'est pas capable de faire confiance aux parents qui y envoient leurs enfants, sachant très bien que les parents sont quand même des parents responsables... Moi, je ne connais pas beaucoup de parents qui, avant d'envoyer leurs enfants dans une garderie, ne vont pas visiter cette garderie-là et ne font pas non plus des suivis. Je pense que, si j'avais des enfants à envoyer en garderie, je vous avoue, M. le Président, que je suivrais ça de très, très près.

Donc, actuellement, M. le Président, j'ai comme l'impression que plutôt que d'affronter ces gens, ce groupe de représentants de garderies, plutôt que de leur dire carrément: Écoutez, le gouvernement n'a plus l'intention de vous voir développer... Donc, on a choisi de couper l'exonération aux parents au lieu de dire carrément: On ne veut tout simplement plus vous voir. On veut tout simplement... Si vous pouvez disparaître, bien, à ce moment-là, on essaiera de vous remplacer par d'autre chose.

Alors, M. le Président, encore une fois, personnellement, je suis pour, je privilégie toujours les garderies sans but lucratif. Je ne suis pas non plus... Personnellement, je ne suis pas pour le financement des garderies à but lucratif. Et, si on avait décidé de le faire à un moment donné, ce n'est pas le financement des garderies à but lucratif. On a décidé de financer les poupons, les personnes handicapées. On a décidé de financer les éducatrices et les éducateurs pour qu'elles puissent ou qu'ils puissent donner des soins de meilleure qualité aux enfants. C'est pourquoi, par exemple, on a permis des subventions pour les assurances collectives, pour que ces personnes soient au même niveau que toutes les éducatrices dans le système de garderies, des congés de maternité, parce que ça s'adresse à des femmes. Ce sont des femmes majoritairement qui travaillent dans les garderies. On pensait aux femmes, à ce moment-là. On savait très bien qu'elles n'ont pas non plus le même salaire, et qu'il y a une mobilité, et c'est important. Par contre, on ne peut pas se passer de ces 20 000 places-là demain matin. Même si le gouvernement voulait les fermer demain matin, il ne serait pas capable de remplacer ces 20 000 places-là, et à quel prix, en plus de ça?

Donc, M. le Président, ça aurait été important de les entendre même si ces groupes ne sont pas d'accord avec le projet de la ministre, parce qu'on aurait peut-être pu trouver des solutions. Je conviens, M. le Président, que le grave problème, c'est au niveau de la planification. On n'a pas été capable de planifier pour les raisons qu'on nous a dites aujourd'hui, parce qu'on a intenté une poursuite et on ne peut pas planifier. Mais il me semble qu'il y aurait eu possibilité de trouver ensemble, si on les avait entendus, peut-être de trouver une solution à cette planification. Donc, à ce moment-là, on aurait pu sûrement en arriver à une solution.

Alors, je regrette énormément, M. le Président, qu'on n'ait pas pu entendre ces groupes et je le déplore énormément. Comme je vous le dis, on serait probablement rendu aujourd'hui, à ce moment-ci, à étudier article par article, alors que, là, on argumente. Il faut bien défendre des groupes qui ne sont pas ici.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie, Mme la députée de Saint-François. Maintenant, je passe la parole à M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.


M. Russell Copeman

M. Copeman: Merci, M. le Président. «J'ai déjà rencontré les représentants et les représentantes de l'ensemble des services de garderies du Québec, dont les garderies à but lucratif, et je les ai informés que je n'avais pas d'objection à ce qu'on prenne un temps pour les entendre sur le projet de loi n° 11.» C'étaient les paroles de la ministre de l'Éducation, la ministre responsable des services de garde, le 3 juin.

«Il existe un mécanisme au niveau des commissions parlementaires et, à ce moment-là, les députés peuvent faire les demandes pour que des groupes soient entendus avant d'entamer l'étude article par article. Alors, à ce moment-là, je conseille aux députés de le faire en commission, M. le Président.» C'étaient les paroles du leader du gouvernement, aujourd'hui, en Chambre.

(21 heures)

M. le Président, la ministre responsable des services de garde n'a pas tenu parole. Elle n'a pas tenu parole. Quelqu'un qui ne tient pas parole, il y a des mots non parlementaires pour ça. Il m'est défendu de les utiliser, mais il y en a, des mots tout à fait appropriés dans ce cas-là. La ministre n'a pas tenu parole. Elle a, le 3 juin, induit la Chambre en erreur. Le leader, aujourd'hui, a induit la Chambre en erreur. Je vais vous dire très sincèrement, M. le Président, que...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Oui, Mme la ministre.

Mme Marois: S'il vous plaît, je n'ai pas induit la Chambre en erreur, j'ai fait toutes les démarches utiles et nécessaires pour recevoir les groupes aujourd'hui. La preuve en est qu'un de ces groupes s'est présenté et je l'ai traité de la même façon que tous les autres groupes.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Alors, je vous rappelle simplement l'article 35, que tout le monde connaît. Soyons prudents, tout le monde. Continuez, M. le député.

M. Copeman: Moi, je prétends que la ministre a induit la Chambre en erreur...

Mme Marois: M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): S'il vous plaît, je vous demande de respecter l'article 35: on ne peut «imputer des motifs...

M. Copeman: Ce n'est pas des motifs indignes, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): ...indignes à un député ou refuser d'accepter sa parole».

M. Copeman: Que ça ait été fait délibérément ou pas, peut-être par accident, c'est ça, M. le Président, je regrette.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous prierais de continuer votre argumentation, M. le député, sur le fond, s'il vous plaît.

M. Copeman: Sur le fond, je maintiens mes paroles: La ministre a induit la Chambre en erreur, et le résultat est très clair.

Mme Marois: M. le Président, non...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député, je ne peux accepter que... S'il vous plaît, continuez sur le fond, et je dois, moi, interpréter l'article 35.

Mme Marois: M. le Président, si vous me le permettez, je pense que nous écoutons très patiemment et paisiblement les propos des gens d'en face, mais, cependant, je n'ai pas induit la Chambre en erreur et je crois que c'est inacceptable qu'on prétende que je l'ai fait.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Alors, M. le député, ou je vous demande de retirer vos paroles ou vous continuez sans insinuer quoi que ce soit.

M. Copeman: La ministre s'est arrangée pour entendre devant cette commission le seul groupe qui appuie son projet de loi.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député, je ne peux accepter des paroles qui imputent des motifs indignes à un député ou refusent d'accepter sa parole.

M. Copeman: Mais je pense que ma collègue, la députée de Saint-François, a dit la même chose tantôt, et vous ne l'avez pas rappelée à l'ordre, M. le Président, alors...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): J'ai peut-être été patient une fois.

Mme Marois: Non, non, la députée de Saint-François n'a pas dit que j'avais induit la Chambre en erreur, elle a dit que je préférais entendre mes amis. Sûrement comme, sans doute, pour elle aussi, c'est le cas, mais, cependant, je n'ai pas traité les groupes qui ont été invités différemment selon qu'ils étaient d'accord ou non avec le projet de loi.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Alors, M. le député, tel que je vous connais, en gentleman, je vous demanderais de retirer vos paroles et de continuer sur le fond, s'il vous plaît.

M. Copeman: Quelles paroles, M. le Président?

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Les paroles que vous avez mentionnées, qui imputent des motifs indignes, comme vous avez mentionné tout à l'heure.

M. Copeman: Bien, je vous demande simplement, question de directive, M. le Président, lesquelles des paroles vous voulez que je retire, précisément.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): «Tenter d'induire la Chambre en erreur», M. le député, c'est imputer des motifs indignes à la députée.

M. Copeman: O.K. Là, on va argumenter sur la question, M. le Président, avec votre patience. En Chambre, j'ai déjà indiqué à l'endroit du ministre délégué aux Relations avec les citoyens qu'il avait induit la Chambre en erreur. Le leader du gouvernement s'est levé et il a demandé que je retire les paroles, et la décision du président de la Chambre était que d'«induire la Chambre en erreur» n'était pas antiparlementaire, n'imputait d'aucune façon des motifs indignes. Et j'ai pu poser cette question en Chambre, devant toute la Chambre.

Alors, moi, tout en respectant votre interprétation des règles, M. le Président, je ne vois pas pourquoi, en Chambre, je peux utiliser l'expression «induit la Chambre en erreur» sans me faire retirer ces propos par le président de l'Assemblée nationale, mais qu'ici, en commission parlementaire, vous m'indiquez que ces propos sont non parlementaires.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je pense, M. le député, que le contexte est peut-être différent, mais je voudrais qu'on continue à discuter, comme on l'a toujours fait dans cette commission-ci, sur une base de bonne foi et sans insinuer quoi que ce soit envers l'un ou l'autre ou l'une ou l'autre des membres de cette commission.

M. Copeman: M. le Président, l'effet des démarches de la ministre, c'est que nous avons, suite à une proposition du député de Johnson, entendu un seul groupe. Un seul groupe. Selon, j'imagine, l'interprétation du parti ministériel et de la ministre, c'est une pure coïncidence, une pure coïncidence que c'est le groupe qui appuie le projet de loi. Quelle fort heureuse coïncidence pour la ministre responsable des garderies! Et le moment vient que, nous, dans l'opposition, de bonne foi, proposons d'entendre un deuxième groupe, qui est le Regroupement des garderies privées du Québec, et là la ministre nous indique que les ministériels vont voter contre.

Mme Marois: ...

M. Copeman: Bien, la ministre a dit qu'elle était prête... Si les ministériels vont voter pour, on n'a pas besoin de faire cette discussion-là, on peut passer à autre chose. Moi, je suis...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): La ministre n'a pas encore indiqué quoi que ce soit dans ce sens-là, M. le député.

M. Copeman: Non, mais la ministre, je regarde...

Mme Marois: On était prêt à les recevoir, on les a invités; ils ne sont pas venus, alors on procède. C'est tout.

M. Copeman: Moi, si vous me permettez, M. le Président, j'interprète les mots de la ministre dans le sens que les ministériels vont voter contre. Donc, l'effet très clair, c'est de refuser d'entendre d'autres groupes ce soir. Et, nous, nous allons continuer à proposer d'autres groupes par souci d'avoir un éclairage équilibré ici, en commission parlementaire. Et...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Un instant, M. le député.

M. Copeman: Oui.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce que vous voulez avoir la parole après ou c'est une intervention sur ce que...

M. Boucher: Bien, je ne comprends pas, là, son intervention, parce qu'il dit que... Il me prête des propos, il me fait un procès d'intention. Il dit que j'ai invité des gens parce qu'ils étaient pour nous autres, alors que j'ai invité des gens parce qu'ils étaient les seuls ici, point, à la ligne. Je ne sais pas, là, mais je n'accepte pas qu'on me fasse un procès d'intention, ce n'est pas vrai du tout. Tous les groupes qui auraient été ici, je les aurais invités.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Vous aurez l'occasion, si vous voulez la parole, M. le député, après le député de Notre-Dame-de-Grâce, d'intervenir.

M. Boucher: Je pourrais lui faire un procès d'intention, mais je ne le ferai pas, mais, tu sais, je veux dire, on perd notre temps ici, là. On perd notre temps ici, là.

M. Copeman: Tout à l'heure, quand ce sera votre tour.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le député de Johnson, vous pourrez intervenir immédiatement après, si vous le désirez.

M. Boucher: Très bien.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député.

M. Copeman: Oui. Peut-être que le député de Johnson, dans son intervention, peut indiquer à quel point il a apprécié la présentation faite par Concertaction interrégionale des garderies du Québec. Peut-être qu'il peut nous amener son appréciation de leur présentation, lui. Moi, je l'ai aimée. J'ai écouté attentivement les représentantes, alors, ce serait fort heureux d'avoir son appréciation de cette présentation, M. le Président.

Mme Gagnon-Tremblay: Il n'était pas ici.

M. Copeman: Ah! il n'était pas ici?

Mme Gagnon-Tremblay: Non, il était parti. Il l'avait suggéré, mais il n'était pas ici.

M. Copeman: Ah! bien, alors, je m'en excuse, M. le Président. Ça m'a échappé que l'auteur de la motion d'entendre le groupe Concertaction interrégionale des garderies du Québec n'était pas présent pendant leur présentation.

Mme Gagnon-Tremblay: C'est ça, il s'est en allé.

M. Boucher: Point d'ordre, M. le Président. J'étais présent. Je ne comprends pas.

Mme Gagnon-Tremblay: Non, non...

M. Boucher: Je me suis absenté à 17 h 45, monsieur. Alors, j'ai été là jusqu'à 17 h 45. Vous n'acceptez pas ça?

Une voix: Non.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Alors, la mise au point est faite, continuez, M. le député.

M. Copeman: Merci, M. le Président. La ministre prétend, avec sa démarche, une démarche dans laquelle on téléphone à des groupes à 11 heures et on leur demande de venir pour 15 heures, et le député de Johnson prétend que les ministériels se sont conformés à ce désir d'ouverture de prendre un temps pour écouter les groupes.

(21 h 10)

M. le Président, j'ai eu l'heureuse occasion, pendant un certain nombre d'années, de faire des études en sciences politiques dans une université à Montréal, avec des professeurs très renommés, qui m'ont appris une chose très fondamentale, M. le Président: le Parlement est formé de trois groupes: le Parlement est formé de la souveraine, de l'exécutif et de la Législature. En aucun temps, M. le Président, avec la démarche de la ministre, en aucun temps la Législature n'a procédé à des consultations, sauf avec l'invitation à un seul groupe. Parce que, M. le Président, et vous allez comprendre très vite mon argumentation, les démarches qui ont été faites auprès des groupes ont été faites par l'exécutif, elles n'ont pas été faites par la commission parlementaire, M. le Président, elles n'ont pas été faites par vous, comme président, elles n'ont pas été faites par notre secrétaire, elles ont été faites par la ministre ou le cabinet de la ministre. Ce n'est pas une démarche de la Législature, M. le Président, c'est une démarche de l'exécutif. Alors, en aucune façon, à l'exception d'une fort heureuse coïncidence, d'entendre, suite à la motion du député de Johnson, un seul groupe – qui appuie le projet de loi – en aucun temps est-ce que cette commission parlementaire a respecté... Est-ce que la ministre a respecté son engagement devant le Parlement du Québec de procéder à des consultations? En aucun temps. Et je vais avoir l'occasion, à d'autres motions, M. le Président, de renchérir. Merci.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci, M. le député. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? M. le député de Johnson, est-ce que vous... Non?

M. Boucher: Non, ça ne vaut même pas la peine.


Mise aux voix

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce que la motion est adoptée?

Une voix: Adopté.

M. Copeman: Vote nominal, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Vote nominal, Mme la secrétaire.

La Secrétaire: Alors, M. le député de Jacques-Cartier?

M. Kelley: Pour.

La Secrétaire: Mme la députée de Saint-François?

Mme Gagnon-Tremblay: Pour.

La Secrétaire: M. le député de Notre-Dame-de-Grâce?

M. Copeman: Pour.

La Secrétaire: Mme la ministre?

Mme Marois: Contre.

La Secrétaire: M. le député de Johnson?

M. Boucher: Contre.

La Secrétaire: M. le député de Salaberry-Soulanges?

M. Deslières: Contre.

La Secrétaire: Mme la députée de Rimouski?

Mme Charest: Contre.

La Secrétaire: M. le député de Lévis?

M. Garon: Abstention.

La Secrétaire: M. le député d'Ungava?

M. Létourneau: Contre.

La Secrétaire: M. le député de Taschereau?

M. Gaulin: Contre, madame.

La Secrétaire: M. le Président?

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je m'abstiens. Alors, la motion est rejetée. On reste à l'article des motions préliminaires, si je comprends bien, M. le député de Jacques-Cartier?


Motion proposant d'entendre l'Association des employé(e)s de soutien de la Commission des écoles catholiques de Montréal

M. Kelley: Oui. «Que, conformément à l'article 244 du règlement de l'Assemblée nationale, la commission des affaires sociales, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 11, Loi modifiant la Loi sur les services de garde à l'enfance et d'autres dispositions législatives, tienne des consultations particulières relativement à ce projet de loi et qu'à cette fin elle entende l'Association des employé(e)s de soutien de la Commission des écoles catholiques de Montréal.»

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci. Alors, la motion est recevable. Je n'ai pas l'intention de suspendre pour que les gens aient des copies, je pense qu'on est assez familiers maintenant. M. le député de Jacques-Cartier, si vous voulez commencer tout de suite.


M. Geoffrey Kelley

M. Kelley: Merci beaucoup, M. le Président. Je n'ai pas pris les deux premiers groupes qu'on a proposés par hasard. C'est les deux groupes qui ont pris le temps de venir écouter cette commission au moment du dépôt des crédits. La représentante du regroupement des propriétaires des garderies privées est venue pour écouter nos discussions. Mme Drouin a échangé avec la ministre tout de suite après l'étude de nos crédits; Mme la ministre a pris l'engagement de les entendre concernant le projet de loi n° 11 à ce moment et à d'autres moments dans ses pourparlers avec le Regroupement. Alors, l'autre groupe qui était là, un groupe qui était profondément touché par certaines des décisions de ce gouvernement et de cette ministre, est effectivement l'Association des employé(e)s de soutien de la Commission des écoles catholiques de Montréal.

Comme je l'ai mentionné dans mes remarques préliminaires, M. le Président, il faut voir le projet de loi dans l'ensemble des décisions qui ont été prises depuis le moment du dépôt des crédits. Et la ministre a annoncé une série de mesures qui coupent d'une façon dramatique l'aide aux parents avec des enfants en services de garde en milieu scolaire, mais également les familles à revenus modestes et à faibles revenus. Alors, ça, c'est les deux groupes qui étaient visés par les compressions importantes faites au moment du dépôt des crédits. Pour rappeler aux membres de la commission: 12 000 000 $ pour les services de garde en milieu scolaire ont été coupés, plus 1 000 000 $ pour les camps d'été, pour un total de 13 000 000 $ dans ce volet. Au niveau des parents et des enfants des familles à faibles revenus, à revenus modestes, c'était 14 300 000 $ ou 14 800 000 $, je ne me rappelle pas, mais une compression très, très importante, des millions de dollars que la ministre et le gouvernement vont chercher dans les poches des familles à faibles revenus. Alors, c'est ça, les personnes qui vont payer pour les autres aventures de ce gouvernement.

Alors, nous avons contesté ça, nous avons posé une série de questions en Chambre. On a essayé, au moment de l'étude des crédits, de soulever ces questions aussi. Mais je pense qu'on a tout intérêt, M. le Président, à entendre les groupes qui sont directement touchés. Et de ça, un des groupes, comme je dis, l'Association des employé(e)s de soutien de la Commission des écoles catholiques de Montréal, ce sont des personnes qui travaillent... souvent, ce sont des écoles en milieu défavorisé; ils ont témoigné de l'importance des services de garde en milieu scolaire. Surtout, comme j'ai dit, j'ai choisi la Commission des écoles catholiques de Montréal, qui travaille souvent en milieu défavorisé, qui travaille avec les enfants victimes de l'éclatement des familles, des femmes monoparentales qui ont fait un retour aux études, qui ont trouvé un emploi au salaire minimum ou un petit peu au-delà du salaire minimum. Alors, les services de garde en milieu scolaire, c'est essentiel pour ces femmes.

J'ai eu l'honneur d'aller rencontrer 300 parents à l'école Lambert-Closse, à Montréal, sur la rue Saint-Urbain, coin Bernard, pour entendre ces parents. Et c'était vraiment émouvant, les femmes monoparentales qui expliquent le niveau de sécurité, que c'est très rassurant pour elles de savoir que leur enfant, après les heures d'école, sans changer d'édifice, sans complications, dans le même édifice, peut aller soit avant ou après les heures d'école dans une garderie en milieu scolaire. Et les propositions, le développement qui est dans le projet de loi n° 11 est financé par les compressions qu'on va faire dans les services offerts à ces enfants. Alors, je pense qu'on a tout intérêt...

Et j'ai insisté. Une des raisons: c'est difficile pour ces groupes de se déplacer rapidement. C'est des gens de terrain, ce sont des personnes qui travaillent avec les enfants à tous les jours. Et, moi, je pense, comme législateurs, qu'on a tout intérêt à aller entendre les personnes qui travaillent dans le milieu, les personnes qui travaillent dans les services. Et, comme je dis, cette Association est un des groupes qui ont pris le temps de venir ici au mois d'avril. Alors, s'ils ont un avis convenable, ils peuvent arranger leurs affaires pour venir et suivre de près les activités dans cette Assemblée. Alors, si le gouvernement peut mieux planifier le travail de la Chambre, le travail des commissions, je pense qu'on aura une occasion en or d'entendre l'Association.

Comme je dis, ce sont des personnes qui comprennent très bien l'importance des services de garde en milieu scolaire pour les familles à faibles revenus, qui comprennent l'importance, surtout sur l'île de Montréal, pour les familles avec une langue maternelle autre que le français – un point que je comprends très bien – et elles ont insisté beaucoup sur l'importance d'avoir une couple d'heures de plus d'encadrement en langue française. Alors, pour les enfants issus des familles avec une langue autre que le français comme langue maternelle, c'était très important d'avoir une couple d'heures de plus qui aident dans le rattrapage scolaire pour les aider à mieux s'adapter à l'école française. Et, si j'ai bien compris, une des priorités de ce gouvernement est effectivement la promotion du fait français au Québec. Je suis complètement d'accord avec ça, mais c'est beaucoup mieux de mettre un petit peu d'argent dans nos garderies en milieu scolaire au lieu d'embaucher des personnes avec des règles pour aller mesurer les affiches à travers l'île de Montréal. Et je pense que, le même montant d'argent, ce serait beaucoup mieux de le mettre dans ces programmes.

(21 h 20)

Mais, vu que la ministre, j'imagine, va traiter simplement avec la même fin de non-recevoir la dernière motion, je vais prendre le temps de lire le témoignage d'une des responsables des garderies que j'ai eu l'honneur de rencontrer au mois d'avril à l'école Lambert-Closse. Elle était responsable du service de garde en milieu scolaire à l'école Garneau, qui est sur le coin de Papineau et Lafontaine, à Montréal. Je pense que presque 80 % des enfants dans son service de garde ont accès au financement. Alors, c'est un milieu défavorisé dans la région de Hochelaga-Maisonneuve. Et je pense que le témoignage qu'elle a fait, c'était pire que des choses que j'ai entendues depuis la décision de la ministre de faire des compressions catastrophiques, selon certains groupes. Ce n'est pas moi qui ai inventé le terme. Alors, je pense que je vais prendre le temps de lire ça, parce que c'est le genre de témoignage qu'on peut avoir si on accepte de planifier nos travaux parlementaires comme il faut et d'entendre les groupes qui, je trouve, ont à dire.

Alors, ça, c'est Mme Claudine Goulet, qui est la responsable de ce service de garde dans l'école Garneau: «En tant que responsable d'un service de garde en milieu défavorisé, j'aimerais vous informer de nos préoccupations actuelles suite à l'annonce concernant les coupures budgétaires. Certains enfants vivent des choses difficiles à la maison et sont présentement en service de garde pour favoriser leur intégration et leur apprentissage scolaire, particulièrement en milieu défavorisé, car, souvent, le service de garde est la prolongation des apprentissages de l'école, qu'il serait souvent difficile, voire impossible, de recréer à la maison dans certains cas. En coupant les subventions, on laisse tomber ces familles dans le besoin qui n'ont souvent pas d'autre recours. La société devra, tôt ou tard, venir en aide à ces familles. Ce n'est pas en coupant les subventions reliées à l'apprentissage que nous allons former des individus productifs et compétents. Présentement, certaines personnes vivant d'aide sociale sont dans l'obligation de participer à une mesure désignée afin de favoriser leur réintégration sociale. Dans l'obligation, oui, car, sans cette participation, leurs prestations sont considérablement diminuées. Ce plan d'action a un but bien noble, mais, lorsque les coupures viennent empêcher ces prestataires de faire garder leurs enfants, il leur devient impossible de participer à la mesure désignée.

«Si on suit le raisonnement, leurs prestations seraient coupées, car ils devront prendre soin de leurs enfants à leur domicile, à la maison, et ils ne pourront pas participer au plan d'action. Résultat: augmentation de la pauvreté et de tous les problèmes qui en découlent. Lorsque l'on prend, par exemple, un parent monoparental qui travaille au salaire minimum, les coupures de subventions des services de garde signifient un énorme creux dans son budget, tellement que, si ce dernier décide de demander de l'aide sociale et de garder son enfant à la maison, il serait plus riche d'environ 200 $ par mois; 200 $ de plus s'il reste à la maison, et peut-être un emploi comme gardien sur le marché noir qui lui fournira un revenu supplémentaire.

«Depuis deux ans, le gouvernement du Québec accorde un remboursement pour une partie des frais de garde aux familles à faibles revenus quand les deux parents travaillent. Le problème qui résulte de ce remboursement est qu'il est remis aux familles en fin d'année seulement. Pendant les 10 mois que dure l'année scolaire, les gens à faibles revenus doivent se serrer la ceinture. Pourquoi ne pas effectuer un remboursement mensuel comme les allocations familiales? Cette mesure pourrait certainement aider quelques familles, sans totalement régler le problème qui nous préoccupe ici.

«La ministre Marois tente de nous réconforter en nous promettant que le gouvernement accordera de l'aide financière pour les enfants de quatre et cinq ans. Ce qu'elle a cependant omis de nous annoncer, c'est qu'on pense diminuer de 40 $ la subvention de fonctionnement dans tous les services de garde. Afin de boucler leur budget, les services de garde devront augmenter leurs tarifs, ce qui annulera la subvention que les parents des quatre et cinq ans recevront. Avec cette nouvelle situation, il est probable que certains services de garde, principalement en milieu défavorisé, soient menacés.

«La question que nous sommes en droit de nous poser maintenant est: Est-ce qu'on voudrait éliminer les services de garde en milieu défavorisé et laisser plus de place aux organismes communautaires? Si tel est le cas, ça revient à dire des mises à pied auprès de personnel qualifié ayant de l'expérience en service de garde pour le remplacer par du personnel non qualifié, sans expérience, qui recevra une allocation très minime. Ils reçoivent, j'ose croire, une certaine formation, mais il ne peut y avoir de comparaison avec les études prolongées et l'expérience requises pour le personnel qui travaille présentement dans les services de garde. Une récompense, sûrement, mais une inquiétude pour la qualité des services aux enfants.

«En conclusion, j'aimerais comprendre le raisonnement de Mme la ministre. Les coupures, oui, mais à quel prix? Ces coupures feront économiser quelques sous au gouvernement, mais feront du même coup augmenter le nombre d'assistés sociaux ainsi que le nombre de chômeurs. Le gouvernement ne fait que changer le mal de place.»

Je trouve que c'est un témoignage très éloquent, et je pense à Mme Pitre-Robin, avant le souper, qui soulevait toute la notion de l'arrimage entre les garderies et les services de garde en milieu scolaire. Il y a tout un débat, je pense, qu'il faut avoir sur la meilleure façon d'organiser nos services de garde, c'est quoi la place pour l'école, c'est quoi la place pour les commissions scolaires, c'est quoi la place pour les garderies. Des sujets très intéressants. Et je pense que, comme parlementaires, on a tous intérêt à aborder ces questions, à entendre les groupes qui peuvent apporter un éclairage.

Cette question est très compliquée aussi parce que la ministre a commencé en coupant l'aide aux enfants. Après ça, elle a essayé de corriger le tir en coupant dans l'aide... de subventions, pour restaurer le programme d'aide pour les quatre, cinq ans. Mais, pour une garderie en milieu défavorisé, c'était vraiment déshabiller Paul pour habiller Pierre ou... C'est quoi, l'expression «rob Peter to pay Paul», en anglais? Parce que, prenez l'exemple avec les nouvelles propositions de la ministre. Les subventions cette année pour les enfants... Et, comme je dis, c'est toujours le ouï-dire, parce que le nouveau projet de règlement va être publié dans la Gazette officielle des mauvaises nouvelles prochainement, parce qu'on ne le sait pas encore, mais ce qui est sur la table, c'est de prendre les subventions de cette année, qui sont de 215 $ par enfant, et de réduire ça à 100 $ pour les premiers 25 enfants et, pour le 26e enfant et plus, ça tombe à 50 $.

Alors, moi, j'ai parlé à une directrice d'une garderie dans le réseau de la Commission des écoles catholiques de Montréal, qui a présentement 225 enfants après et avant les heures d'école. Alors, 225 fois 215 $, ça donne un résultat d'environ 48 000 $ en subvention directe aux services de garde en milieu scolaire. Avec la nouvelle formule, ça va tomber à environ 12 000 $ par année. Alors, c'est un manque à gagner d'à peu près 36 000 $. Alors, la directrice... Comme je dis, ce n'est pas confirmé. On est à la veille de la fin de l'année scolaire. Mes deux filles, au secondaire, ont terminé aujourd'hui. Elles ont complété leur dernier examen. L'école, c'est chose du passé. La piscine communautaire va ouvrir samedi, alors c'est toutes des bonnes nouvelles chez nous.

(21 h 30)

Mais, pour les personnes qui doivent faire la planification – la ministre insiste beaucoup sur l'importance de la planification – ces personnes ne savent pas encore sur quelle base préparer le budget pour le service de garde en milieu scolaire qui doit ouvrir ses portes à la fin du mois d'août 1996. Et on sait très bien, dans la communauté d'une école, que, tout de suite, le 21 juin arrive, les parents vont disparaître, les personnes qui travaillent dans des services de garde en milieu scolaire vont prendre leurs vacances bien méritées. Alors, ça va être très difficile de se réunir avec les parents, avec les éducatrices, avec les représentants de la commission scolaire pour organiser, pour fixer un tarif, pour faire les choix difficiles pour l'année prochaine. Et ça, c'est un réseau qui offre un service essentiel à 72 000 enfants à travers le Québec. Alors, c'est beaucoup, beaucoup de familles québécoises qui sont impliquées, qui, en ce moment – on parle aujourd'hui, jeudi 13 juin – n'ont pas encore les chiffres requis pour fixer leur budget pour l'année scolaire qui va commencer la troisième ou la quatrième semaine d'août. Parce que, en règle générale, on commence même avant la fête du Travail.

Alors, ça, c'est la façon de la ministre d'aider les groupes à planifier d'une façon ordonnée, après 18 mois de réflexion, de moratoire, de temps... année transitoire? On n'est pas plus avancé que ça? C'est étonnant, M. le Président, et je pense que ces groupes ont le droit de venir ici exprimer leurs frustrations. Ils ont le droit de venir ici expliquer c'est quoi, les conséquences des décisions de ce gouvernement, sur le terrain, sur les personnes qui sont obligées de gérer les programmes, qui sont obligées d'offrir un service essentiel aux familles québécoises. Le groupe que j'ai proposé a pris la peine de venir ici. Il ne représente pas l'Association, mais, dans son ensemble, il y a 4 000 personnes qui travaillent également dans ce réseau. C'est le même nombre qui travaillent dans le réseau des garderies à but lucratif. Alors, c'est un nombre important d'emplois qui est en jeu.

Comme je l'ai dit, pour les parents, si les coupures sont maintenues, ça représente quand même une augmentation de 175 $ par année, 17 $ à 20 $ de plus par mois, mais, si on ajoute à ça – parce que la ministre responsable des services de garde est également ministre de l'Éducation – le fait qu'il y ait des compressions de 257 000 000 $ pour les commissions scolaires... Les commissions scolaires commencent à chercher d'autres sources de revenus. Souvent, ces services de garde n'ont pas payé pour leur local parce que l'école a compris que, pour faire la promotion de l'école, pour attirer les jeunes enfants qui peuvent devenir étudiants après, un service de garde en milieu scolaire, c'est un atout. S'il faut être concurrentiel avec d'autres écoles, c'est un autre service qu'on peut offrir aux parents, qui rend plus facile la tâche d'encourager les personnes à inscrire leur enfant dans une école de quartier. Mais les commissions scolaires qui doivent chercher d'autres sources de revenus à cause des compressions très importantes de ce gouvernement vont commencer à charger un loyer. Il y en a qui chargent un loyer déjà, mais il y en a d'autres qui n'ont jamais fait ça. Alors, obligées de chercher d'autres sources de revenus, elles vont augmenter les loyers. Il y en a certaines qui ne chargent pas pour l'électricité ou le chauffage, mais qui vont être obligées, cette année, parce qu'elles doivent trouver d'autres sources de revenus, de charger davantage. Et il y a quelques services de garde en milieu scolaire qui laissent la garderie utiliser un téléphone, une ligne téléphonique fournie par l'école. Ça, c'est un autre genre de chose pour laquelle, maintenant, ils vont être obligés de payer.

Alors, ça, c'est les autres augmentations des coûts. Il faut soit hausser les services ou couper dans la qualité d'un service fourni. Souvent, ce sont des écoles qui offrent des programmes pour aider les jeunes avec les devoirs après les heures d'école. Alors, c'est une augmentation de ratio ou peut-être du personnel additionnel pour venir aider les enfants à faire leurs devoirs. Et, ça, c'est quelque chose qu'on vise à couper. Peut-être que c'est dans la collation qu'on offre aux enfants à la fin de la journée scolaire. Je sais que, chez nous, c'est peut-être, entre 15 heures et 16 heures, l'heure la plus dispendieuse, dans notre famille, parce que les enfants arrivent de l'école et ils vident le frigo. C'est incroyable de voir les dégâts que toutes les familles peuvent faire au frigo à cette heure de la journée. C'est évident que les enfants qui ont fini une journée d'école ont faim. Je pense que c'est tout à fait normal, s'ils vont dans un service de garde en milieu scolaire après les heures d'école, qu'on leur offre une petite collation. Mais, si c'est quelque chose, surtout en milieu défavorisé, dont on est obligé d'augmenter le tarif ou de le couper...

Alors, ça, c'est le genre de décision, c'est le genre de chose que les personnes, comme les membres de l'Association des employés de soutien, doivent faire. Mais, avant de faire ces choix, avant de faire une consultation auprès de leurs parents, ils doivent avoir les renseignements qu'il faut de l'Office, de la commission scolaire et de la ministre. Et ils n'ont pas encore ça. Alors, ils vont être obligés de se réunir probablement en catastrophe, au mois de juillet – quand tout le monde a commencé à prendre ses vacances, est en congé – de fixer les tarifs, d'essayer de rejoindre tous les parents pour leur indiquer que, l'année prochaine, on va être obligé d'augmenter les tarifs de 5 $ ou 10 $ par semaine. Et, mettons qu'on a une centaine de personnes, on fixe un budget à partir d'une clientèle d'une centaine de personnes, mais peut-être qu'à 10 $ de plus, 10 familles vont se désister, vont trouver ça trop cher, vont dire: On n'a plus les moyens, on laisse faire. Alors, c'est ça, le cas. Il faut revoir le budget, parce qu'à partir de 90 enfants on n'arrive plus. Alors, peut-être qu'il faut rehausser les tarifs pour arriver avec un budget. C'est le genre de chose qui prend du temps. En règle générale, ils ont les renseignements qu'il faut avant la fin d'avril. On est déjà six semaines en retard. La ministre a indiqué qu'elle va peut-être publier le prochain projet de règlement dans une semaine ou deux, on ne sait pas. Alors, ça va vraiment compliquer. Et, pour une ministre qui a toujours prôné la planification, je ne comprends pas les décisions qu'elle a prises en milieu scolaire.

Si on ajoute à ça la compression qui est faite au niveau du règlement de l'exonération de l'aide financière, qui va influencer les choix qui sont faits par les parents aussi parce que... La ministre essaie de banaliser tout ça en disant: Oh! c'est juste comme 3 $ de plus par jour. Mais, à 260 journées de travail, plus ou moins, dans une année, c'est 780 $ de plus. Une famille qui travaille au salaire minimum, mettons, une femme monoparentale qui travaille au salaire minimum, elle ne gagne que 12 000 $. Alors, chercher 780 $ de plus, ce n'est pas évident. Ça, c'est le genre de personne qui, je trouve, va être obligé de réfléchir deux fois, de dire: Au bout de la ligne, est-ce que ça vaut la peine de travailler au salaire minimum?

Avec un autre 780 $, avec les autres décisions qui sont prises dans le domaine de l'aide sociale de comprimer, de couper dans les barèmes de l'aide sociale, on rend la tâche très difficile pour ces personnes. Les personnes qui travaillent dans le... Les employés de soutien de la Commission des écoles catholiques de Montréal travaillent avec ce monde-là. Ils ont une expérience directe, ils ont une expérience pratique avec ces personnes. Je viens de lire le témoignage d'une personne, mais je peux assurer les membres de la commission qu'il y a plusieurs témoins éloquents qui ont assisté à la rencontre à l'école Lambert-Closse. Je pense qu'on a tout intérêt à voir c'est quoi, les impacts.

(21 h 40)

Nous autres, on est ici, au parlement. On est un petit peu détachés du vrai monde, ici. On a l'air climatisé. On est bien, ici. Mais, dans le vrai monde, c'est moins évident. Je pense qu'on a tout intérêt, avant de procéder à l'adoption d'un projet de loi et toutes les autres décisions qui y sont rattachées... Parce que, comme je l'ai dit, il faut être conscient que le projet de loi n'est pas fondé uniquement sur les changements qui sont proposés, mais aussi sur les décisions déjà prises par ce gouvernement au moment du dépôt des crédits sur le financement des familles à faibles revenus et des services de garde en milieu scolaire. Alors, je pense qu'on a tout intérêt... Oui, on peut lire ça dans notre cahier des crédits. C'est un exercice aride pour regarder... 12 000 000 $ ici, 14 000 000 $ là... Ce n'est pas plus grave que ça. Mais, de rencontrer le monde qui doit essayer de comprendre c'est quoi, le niveau de financement pour l'année prochaine, comment est-ce qu'on va être capables de refaire nos budgets, c'est quoi, les tarifs qu'on va être obligés de demander, d'exiger des parents au mois d'août, pas dans six mois, pas loin dans l'avenir, mais au mois d'août... Si, moi, je veux garder mon enfant dans votre service de garde en milieu scolaire, ça va me coûter combien, à partir de la quatrième semaine d'août? Alors, c'est ça. Je pense que c'est une question que tout parent pose en ce moment, et les directrices de ces services sont incapables d'y répondre. Et, ça, c'est la ministre qui prône la planification, qui prône qu'il faut avoir un développement ordonné. C'est toutes les promesses que la ministre a faites. Mais, quand on voit les vraies choses pour ce monde...

Et même ses règles du jeu ne sont pas assurées, parce que la ministre a déjà indiqué ce... On a remplacé l'année transitoire. L'année passée était supposée être l'année transitoire, mais l'année transitoire a produit une autre année qu'on a intitulée «année transitoire». Alors, quel beau progrès! On va remplacer une année transitoire par une autre année transitoire. Alors, ces directrices et directeurs de services de garde, ils ne savent pas trop quoi faire. Ils ne savent pas trop quoi dire aux parents, comment ils vont être capables, surtout en milieu défavorisé. Au bout de la ligne, de couper le budget de financement de subventions directes aux services de garde pour bonifier le programme pour les quatre ou cinq ans, on n'est pas beaucoup plus avancé, parce que le niveau de financement global demeure le même: 12 000 000 $. Alors, on peut faire des petits réaménagements dans le même pot d'argent, mais, au bout de la ligne, ces 12 000 000 $, c'est des compressions de 50 %. Alors, pour les services de garde en milieu défavorisé, ça risque d'être une catastrophe.

Je pense qu'avant de procéder à l'étude du projet de loi n° 11 il faut consulter ce monde et il faut dire comment ça se passe, c'est quoi, l'impact des décisions qui sont prises sur le terrain, c'est quoi, l'impact pour les 72 000 enfants qui ont une place dans un service de garde en milieu scolaire, à travers le Québec, c'est quoi, l'impact sur les 4 000... surtout éducatrices – il y a des éducateurs – qui travaillent dans ces services, c'est quoi, la perspective des commissions scolaires qui viennent de recevoir des compressions très importantes de 257 000 000 $ et c'est quoi, leur vue sur les avantages des services de garde en milieu scolaire pour la qualité de vie dans une école.

Moi, je pense qu'on a tout intérêt à suspendre nos travaux, à regarder, à prendre le temps qu'il faut pour convoquer l'Association qui, comme je l'ai dit, a déjà fait la preuve d'un intérêt en se déplaçant ici, au mois d'avril, pour suivre nos discussions sur les crédits, à aménager le temps qu'il faut, à prendre le temps qu'il faut pour aménager une audience particulière avec cette Association. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci, M. le député. Est-ce qu'il y a d'autres interventions?


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Très brièvement, M. le Président. Ce qu'on constate, là... C'est qu'on demande à entendre des groupes, bien sûr, mais sur un autre sujet que celui pour lequel nous avons été convoqués ici ce soir, puisqu'on parle du financement des services de garde, alors que ce pourquoi nous sommes convoqués ce soir, c'est l'étude d'un projet de loi qui porte sur des amendements quant à l'obtention d'un permis: qui est éligible à l'obtention d'un permis, à qui s'appliquera la loi, certains resserrements. En plus, M. le Président, du fait que tous les groupes, en général... enfin l'ensemble des groupes qui s'occupent de services de garde est d'accord avec le projet de loi qui est là, sauf sur certains amendements qu'on souhaiterait voir corrigés, mais jamais de façon fondamentale, à l'exception d'un seul groupe. Et on sait exactement la raison pour laquelle il est en désaccord: c'est le fait qu'il n'aura plus accès aux subventions, et encore, pas ceux qui ont déjà des permis, qui sont les garderies privées à but lucratif, mais les nouvelles garderies privées à but lucratif qui obtiendraient des permis.

Alors, ce n'est pas pertinent, même, au moment où on se parle. Ça pourrait être intéressant – ça, c'est autre chose – mais ce n'est pas pertinent à nos débats.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci, Mme la ministre. L'article, lui, est pertinent, malheureusement...

Mme Marois: Eh voilà!

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): ...ou heureusement, dépendamment de quel bord on se situe. Mais l'article est pertinent. Alors, je demanderais au prochain intervenant, évidemment, de s'en tenir à la pertinence de l'article. M. le député... j'ai un blanc de mémoire...

M. Gobé: Encore?

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): ...de LaFontaine.

M. Gobé: Merci, M. le Président. Comment? LaFontaine, oui, depuis 11 ans. Jean.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Alors, M. le député de LaFontaine, vous pouvez y aller, s'il vous plaît.


M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: Merci, M. le Président. Voyez-vous, malgré tout ça, on voit qu'il y a une bonne ambiance chez les parlementaires et un bon esprit de coopération. C'est ce qui est le principal et c'est ce qui m'a toujours impressionné, en 11 années de service en cette Chambre, de voir que, de part et d'autre, dans des situations comme celle-ci, un esprit, quand même, de fraternité peut subsister par-dessus les contradictions entre les différents intervenants.

Une voix: Tu parles pour toi-même, j'espère.

M. Gobé: Et je trouve ça assez paradoxal qu'après avoir été de l'autre côté j'avais le même sentiment, probablement, que les gens de ce côté-là ont, en voyant, des fois, des ministres qui s'obstinent absolument devant des évidences. Pour avoir supporté les situations comme celles-là, je comprends que les collègues doivent certainement conserver un optimisme à toute épreuve. Ça peut des fois paraître assez long et fastidieux.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): La sérénité a toujours sa place. Oui, continuez, M. le député.

M. Gobé: Oui, c'est ça. Exactement. Alors, M. le Président, j'écoutais Mme la ministre qui reprenait mon collègue, le député de Jacques-Cartier, et qui disait qu'il ne semblait pas tellement pertinent d'entendre l'Association des services de garde en milieu scolaire. Si on se fie vraiment à la lettre du projet de loi, on pourrait, à la limite, penser qu'elle a partiellement raison, mais je crois qu'un projet de loi comme celui-là, qui modifie...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Allez-y. Oui, oui. Excusez-moi.

M. Gobé: Je ne voulais pas vous déranger, M. le Président. Un projet de loi comme celui-là, qui modifie, quand même, d'une manière importante, le système de garde que nous avons actuellement, doit faire l'étude ou l'appréciation la plus large possible des différents groupes. Alors, l'opposition demande à entendre l'Association des services de garde en milieu scolaire parce que, tout d'abord, ils sont touchés indirectement, dans ce projet de loi là, car on sait que la ministre, d'un autre côté, a coupé 12 000 000 $ dans le financement des services de garde en milieu scolaire et que ça va avoir une pression, à un moment donné, importante, au niveau des places de services de garde, des places en garderie.

Je ne vois pas pourquoi elle nous dit que ce n'est pas pertinent. Moi, je crois, au contraire, que, plus on entend de gens lorsqu'on touche des projets de loi qui modifient les règles du jeu des organismes au service de la population et des citoyens, que plus on entend de groupes, moins on a de chances de se tromper et meilleures sont les législations. Alors, moi, je crois qu'ils devraient venir. Je crois que la ministre devrait les rencontrer, eux. Puis d'autres. Vous savez, on parle d'eux pour l'instant. Je pense que, s'il y avait preuve d'ouverture de la part de la ministre ou du gouvernement, bien, certainement que les députés ne passeraient pas autant de temps à essayer de convaincre de recevoir tel groupe, puis tel groupe, puis tel groupe, puis tel groupe. On les recevrait tout simplement, et le temps qui est passé à essayer de convaincre la ministre serait utilisé pour écouter ces gens-là.

J'avais l'occasion, la semaine dernière, de parler à un autre ministre qui, lui aussi, semblait obstinément refuser les consultations. On parlait de trois heures. Les groupes qui voulaient être entendus, des groupes très représentatifs au Québec, des groupes sérieux, trois groupes, demandaient à être entendus, en trois heures. Alors, pour convaincre le ministre, ça nous a pris cinq heures. Moi, j'aurais préféré, pour le bon fonctionnement de la commission et le sérieux du travail des législateurs, qu'au lieu de prendre cinq heures à convaincre le ministre du bien-fondé, bien, on prenne trois heures pour écouter les gens.

(21 h 50)

Après tout, les parlementaires, on est faits pour écouter les gens. Nous sommes élus par les citoyens. Ce n'est pas les fonctionnaires qui doivent faire les projets de loi, c'est les parlementaires. Malheureusement, trop souvent, on retrouve des ministres qui font des projets de loi de fonctionnaires. Des fonctionnaires écrivent des projets de loi, dans des officines quelque part sur la Grande Allée ou dans d'autres buildings, donnent ça à des ministres qui, bien souvent, ont peu de temps pour les lire ou ne les comprennent pas tout le temps, ou encore qui ont des commandes du Conseil du trésor ou du Conseil des ministres et essaient de les faire adopter par les parlementaires. Je trouve ça anormal. Nous sommes les mandataires. Les gens votent pour nous pour que nous les représentions, pour que nous fassions valoir leur point de vue dans les législations.

Trop souvent, les législations qui n'ont pas fait l'objet de consultations du public ou l'objet de toute l'attention des parlementaires se retrouvent avec des choses qui ne fonctionnent pas, avec des contradictions, avec des irritants qui font que les citoyens sont mécontents, ou les projets de loi deviennent tout simplement contre-productifs à répondre à l'objectif qui était visé. Car peut-être aussi qu'il arrive que l'objectif soit simplement juste, mais que la manière d'y parvenir ne corresponde pas au meilleur intérêt du citoyen.

Alors, je crois qu'on devrait agir en bons parlementaires, en bons citoyens, que la ministre, qui a été elle-même députée de l'opposition pendant longtemps, qui a demandé elle-même – je vois sa collaboratrice qui sourit, mais je parle à la ministre, je ne parle pas aux fonctionnaires... la ministre qui a été députée, qui a été élue, qui a eu le courage de mettre sa photo sur un poteau pour se faire élire – pas à un concours dans une officine, en arrière, sur la Grande Allée, là – qui répond aux citoyens à chaque quatre ans. Ça ne mérite pas de sourire, ça. Et tous les parlementaires ici font la même chose et ont le courage de le faire. Bien, la ministre, qui a eu le courage de le faire, devrait savoir que, si elle a été élue, c'est parce que les citoyens s'attendent à ce qu'elle les écoute. Puis aussi les citoyens s'attendent à ce que la ministre écoute les autres parlementaires quand les citoyens leur parlent. Pour cette raison-là, j'aurais pensé que, venant d'elle, ça aurait été très facile de la convaincre de rencontrer les groupes. J'aurais pensé que son expérience aussi de vie parlementaire, simplement de vie parlementaire, lui aurait appris qu'il vaut mieux rencontrer, recevoir, écouter les gens que de s'obstiner à ne pas les recevoir.

Qu'avons-nous à gagner ce soir, en cette Chambre, à nous obstiner pour essayer de nous convaincre, les uns et les autres, de recevoir et, l'autre, de ne pas recevoir des gens, des Québécois, des payeurs de taxes? Qui ça va déranger? À qui ça fait-il peur? Si le projet de loi est si bien fait et s'il est tellement justifié, qu'est-ce que ça changera de fondamental de prendre trois heures ou quatre heures pour écouter le monde? Ça ne changera rien. Puis, s'il n'est pas justifié, bien, tant mieux, ils nous le montreront. Maintenant, ça dérange peut-être des gens dans les savantes officines, au 22e étage, là-haut dans la grande tour à l'air pollué. Peut-être. Peut-être qu'ils disent: Non. Nous, on a la vérité, là. On n'écoute pas la population. Moi, je déplore ça, et ça se fait trop souvent actuellement, M. le Président, trop souvent. Quelques ministres ont encore gardé cette espèce d'esprit d'ouverture et de collaboration. On en a quelques-uns qui le font. Volontairement, on y va, on écoute les gens, on écoute les citoyens. Mais, malheureusement, on se rend compte qu'après quelques mois, une année et demie de pouvoir, un certain nombre de parlementaires ont oublié ces raisons qui font qu'ils sont élus.

Alors, l'Association des services de garde en milieu scolaire, M. le Président, elle pourrait nous dire, entre autres choses, ce que je disais dans ma motion préliminaire – que j'ai arrêtée rapidement parce que le temps a duré – que, si on coupe 12 000 000 $ dans leur budget de fonctionnement, un grand nombre d'enfants vont se retrouver à la rue aussitôt l'école finie parce que leurs parents, leur mère ou leur père, n'auront pas forcément toujours les moyens de payer le montant qui va leur être dû. Mais peut-être que des gens qui n'ont pas ces difficultés financières, ou qui vivent dans un cocon, dans le confort, ou qui n'ont plus d'enfant, ou qui ont oublié qu'ils en ont eu, bien, ils ne se rendent pas compte de ça, puis ils ne le vivent pas. C'est peut-être ça, s'éloigner des réalités. Mais il serait peut-être temps qu'on s'y rapproche. Couper pour couper, ce n'est pas ça, la solution, ce n'est pas ça, la vie. Un gouvernement, ce n'est pas juste un comptable. Un gouvernement, ça gère des gens, ça gère des citoyens, ça gère des malheurs, des bonheurs, des émotions, des peines et des joies. C'est ça, un gouvernement. Et ça doit le faire dans le meilleur intérêt des gens, pas dans le meilleur intérêt du comptable, et c'est ce qu'on voit actuellement, M. le Président.

Alors, vous comprendrez que je suis extrêmement déçu de voir que je suis obligé de parler, à 21 h 55, pour essayer de convaincre ma collègue, mon ancienne collègue députée – avant qu'elle soit ministre, on était tous les deux députés – de recevoir des gens, des citoyens et des citoyennes qui ont des choses à dire pour essayer de faire évoluer sa législation, une législation qui va les concerner puis qui va les toucher, pas la législation des autres, mais celle qui va avoir une influence sur leur manière de fonctionner puis sur la vie des Québécois et des Québécoises, particulièrement des mères de famille puis des enfants du Québec. Alors, M. le Président, malheureusement, j'espère... j'espérais que la ministre se laisse convaincre et retrouve son sens de l'humanité qu'elle avait, il y a quelques années, dans ses bonnes années d'opposition. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci, M. le député de LaFontaine. Est-ce qu'il y a d'autres interventions?

Mme Marois: Bien sûr, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce...

Mme Marois: Alors, je pense que le sens de l'humanité, ça ne se perd jamais. Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Si je comprends bien, c'est juste un commentaire que vous voulez donner, Mme la ministre?

Mme Marois: Un commentaire. J'ajouterai peut-être une autre chose. On s'est plaint, de l'autre côté de cette Assemblée, que l'on consultait trop. Le résultat de ce projet, voyez-vous, il est le fruit d'une très longue consultation qui a commencé dès l'arrivée de notre gouvernement au pouvoir. Nous avons eu l'occasion d'entendre une multitude de groupes, dont tous les groupes dont nous parlons ce soir.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci, Mme la ministre. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.


M. Russell Copeman

M. Copeman: M. le Président: «J'ai déjà rencontré les représentants et les représentantes de l'ensemble des services de garderie du Québec, dont les garderies à but lucratif, et je les ai informés que je n'avais pas d'objection à ce qu'on prenne un temps pour les entendre sur le projet de loi n° 11.» C'est peut-être familier, ces mots-là, M. le Président, surtout à vous, peut-être à la ministre. J'espère qu'à la fin de la soirée ça va être plus familier. On pourrait peut-être tous les répéter sans être obligé de les lire. C'était l'engagement de la ministre. Il peut y avoir un test, à la fin, pour savoir si les ministériels sont capables de répéter cette phrase, M. le Président – un examen, je devrais dire en bon français. C'était l'engagement de la ministre. Malheureusement, on se trouve, à 22 heures, déjà à la veille, semble-t-il, à cause de la majorité ministérielle, d'entreprendre – je dis bien «à la veille», M. le Président – l'étude détaillée.

M. le Président, la ministre n'a pas tenu parole. C'est extrêmement décevant pour moi, comme parlementaire, de voir dans quelle situation on nous met. Je ne peux que peut-être anticiper qu'il y a d'autres parlementaires qui sont mal à l'aise avec ça, M. le Président, sans nommer qui que ce soit. Sans nommer qui que ce soit, il y en a peut-être d'autres qui sont mal à l'aise, d'autres moins. Mais, des deux côtés de la table, il y a peut-être des parlementaires qui sont mal à l'aise avec le processus actuel.

M. le Président, je parlais sur la première motion du...

M. Garon: ...

M. Copeman: Ça, c'est le deuxième commentaire le plus intelligent de la soirée, M. le député de Lévis. Le premier a été son vote... Le premier a été son vote, le deuxième, c'est... Ha, ha, ha!

(22 heures)

M. le Président, je tentais de convaincre la commission par rapport à la première motion que mon collègue, le député de Jacques-Cartier, a déposée, que la Législature d'aucune façon n'a respecté l'engagement de la ministre. L'invitation qui a été lancée, semble-t-il, on est obligé de prendre la parole de la ministre, selon nos règlements, M. le Président, et l'invitation qui a été lancée, on est obligé, M. le Président... C'est ça, selon nos règlements. L'invitation qui a été lancée, semble-t-il, M. le Président, sur la parole de la ministre, à tous les groupes, a fait en sorte que – et je l'ai déjà mentionné – fort heureuse coïncidence, le seul groupe ayant pu répondre de façon positive à cette invitation-là, c'était un groupe qui appuyait totalement et quasi sans réserve le projet de loi de la ministre.

M. le Président, avec une certaine appréciation pour... a certain amount of appreciation, Mr. Chairman, for the Bard, for William Shakespeare, it could be suggested that «something is rotten in the state of Denmark». Perhaps, my learned friend, the MNA for Taschereau, can find an equivalent from Molière; it would be of great comfort to me if he were able to do that. But, unfortunately, Mr. Chairman, I have to rely on my version of classical education in the '70s, in the Protestant School Board of Greater Montréal, and rely on that fairly famous phrase from Hamlet: «Something is rotten in the state of Denmark.»

Mr. Chairman, I think something is rotten here. I think we have been witness to a very interesting manoeuvre by the governing party, the manoeuvre which resulted in the presentation of one group favorable to the law before this commission, on a motion from the MNA for Johnson, and it's, I think, a very regrettable manoeuvre. You know, I just hope, Mr. Chairman, for example, I really hope... And I kind of wish I had asked this question myself when we had Concertaction in front of us. I'd like to know when they were invited. I really hope they received the invitation today, at relatively the same hour that the other groups did, because, you know, Mr. Chairman, someone with a more suspicious mind than mine might come to the conclusion that there was some collusion, there. I mean, you know, it's possible...

Mme Marois: On peut s'assurer auprès du député, M. le Président...

M. Copeman: Stranger things have happened...

Mme Marois: ...si c'est utile, mais, nous, on le sait.

M. Copeman: Well, the Minister will have a time to respond later, Mr. Chairman, unless she's raising a question of privilege or regulation of the commission. She'll have an occasion to respond. I really hope that was the case, Mr. Chairman.

Et, pour satisfaire la ministre, qui nous dit que notre motion n'est pas pertinente, je rappelle à la ministre l'article 35 de la loi, à la page 18, qui fait des amendements à l'article 40: «Sous réserve de l'article 41.7, l'Office peut, dans les cas et suivant les conditions déterminés par règlement, exonérer partiellement ou entièrement une personne qui en fait la demande du paiement d'une contribution exigée d'elle en vertu de l'article 38 ou 39, par – et on trouve drôlement, pertinemment, M. le Président, le sous-alinéa 4 – la commission scolaire qui fournit un service de garde en milieu scolaire.» Oh! C'est peut-être pertinent, ça. On ne peut pas trop juger, mais on a les mots «la commission scolaire qui fournit un service de garde en milieu scolaire», puis notre motion parle – Ah! une autre heureuse coïncidence – des services en milieu scolaire.

Pour faire la démonstration une deuxième fois – je suis obligé, M. le Président, de faire la démonstration à la ministre avec son projet de loi – à l'article 37, qui amende l'article 41.6 de la loi, et 41.7... L'article 41.7 recommandait: «Le gouvernement peut fixer annuellement un nombre de places pour lesquelles l'Office peut accorder une exonération, une aide financière ou des subventions pour chacune des catégories suivantes: une commission scolaire...» Puis, le prochain paragraphe, le plus important, M. le Président: «Le gouvernement peut également affecter annuellement des sommes permettant à l'Office d'accorder de l'exonération et de l'aide financière pour des services de garde en milieu scolaire.» Oups!

M. le Président, comme parlementaire et, je l'avoue, avec une connaissance limitée de ce fameux projet de loi n° 11, j'ai pu découvrir deux articles qui touchent les services de garde en milieu scolaire. Quand la ministre a fait cette déclaration que ce n'était pas pertinent, elle n'avait peut-être pas saisi la portée de ces deux articles, elle n'avait peut-être pas pu les prendre en considération. Mais nous trouvons que c'est très pertinent de procéder à cette consultation avec l'Association des services de garde en milieu scolaire, à cause de ces deux articles, M. le Président. Je vous remercie.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci, M. le député. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur cette motion?


Mise aux voix

Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Une voix: Rejeté.

M. Kelley: Vote nominal.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Vote nominal? Mme la secrétaire. Que les députés veuillent bien prendre place.

La Secrétaire: M. le député de Jacques-Cartier?

M. Kelley: Pour.

La Secrétaire: M. le député de Notre-Dame-de-Grâce?

M. Copeman: Pour.

La Secrétaire: M. le député de LaFontaine?

M. Gobé: Pour.

La Secrétaire: Mme la ministre?

Mme Marois: Contre.

La Secrétaire: M. le député de Johnson?

M. Boucher: Contre.

La Secrétaire: Mme la députée de Sherbrooke?

Mme Malavoy: Contre.

La Secrétaire: Mme la députée de Rimouski?

Mme Charest: Contre.

La Secrétaire: M. le député d'Ungava?

M. Létourneau: Contre.

La Secrétaire: M. le député de Taschereau?

M. Gaulin: Contre, madame.

La Secrétaire: M. le Président?

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je m'abstiens. La motion est rejetée. Est-ce que nous sommes prêts à commencer l'étude détaillée, article par article?

Mme Marois: Oui, M. le Président.

M. Kelley: Non. J'ai une motion, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député...

Des voix: ...

M. Kelley: On a le choix. On peut entendre le groupe ou quelqu'un peut exprimer ça de sa voix.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Jacques-Cartier.


Motion proposant d'entendre l'association des garderies privées du Québec

M. Kelley: «Que, conformément à l'article 244 du règlement de l'Assemblée nationale, la commission des affaires sociales, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 11, Loi modifiant la Loi sur les services de garde à l'enfance et d'autres dispositions législatives, tienne des consultations particulières relativement à ce projet de loi et qu'à cette fin elle entende l'association des garderies privées du Québec.»

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): La motion est recevable. M. le député de Taschereau.

M. Gaulin: Je n'ai pas mon texte, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Nous n'avons pas le texte. Mais, compte tenu que le texte est le même que tous les autres, je le considère recevable. Cependant, je pense que ça serait le temps qu'on suspende pour trois à quatre minutes, ça ferait du bien à tout le monde.

M. Copeman: M. le Président, est-ce qu'on peut avoir copie des motions rejetées?

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Vous les avez toutes eues.

M. Copeman: Rejetées? O.K., pardon.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Toutes les copies ont été données.

M. Copeman: Ah! Pardon, c'était peut-être...

(Suspension de la séance à 22 h 9)

(Reprise à 22 h 22)

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors M. le député de Jacques-Cartier, votre motion est recevable, et vous pouvez commencer à vous exprimer.


M. Geoffrey Kelley

M. Kelley: Merci beaucoup, M. le Président. Après les commentaires de la ministre, je pense que c'est très important de ne pas confondre les consultations qu'elle peut mener comme ministre, comme représentante du gouvernement et l'occasion pour les parlementaires des deux côtés de l'Assemblée nationale d'entendre les groupes. Alors, je n'ai jamais remis en question qu'il y avait eu certaines consultations. Moi, j'ai dit que la formule de consultation que la ministre a adoptée était incomplète, parce que, dans le groupe décisionnel, le groupe qui a formulé les recommandations, il y avait des exclusions, et, moi, j'ai contesté ça. Mais, moi-même, j'ai assisté à une des consultations générales que le groupe de travail a organisées à Montréal, sur la rue Sherbrooke, dans l'est de Montréal. Alors, j'ai passé une journée qui a été très enrichissante. C'était juste au moment où j'ai été nommé porte-parole, pour ce dossier, de ma formation politique. Alors, c'était très enrichissant pour ma formation.

Mais on ne peut pas confondre le travail que la ministre, l'Office des services de garde à l'enfance, le gouvernement a fait avec le fait qu'on est ici dans l'Assemblée nationale, dans une commission qui émane de l'Assemblée nationale, et, nous autres aussi, nous avons le droit de consulter d'une façon ordonnée, d'une façon organisée, d'une façon planifiée, d'avoir des consultations particulières avant de procéder à un projet de loi, surtout un projet de loi qui compte – de mémoire, quoi? – 80, 82 articles.

Alors, c'est la réforme majeure que la ministre a mentionnée depuis quelques mois. Ça réfère à plusieurs volets de la Loi sur les services de garde à l'enfance. Alors, ce n'est pas des changements mineurs ou des changements de concordance, c'est vraiment une réforme majeure de la loi. Alors, je pense que, comme parlementaires, on a l'obligation, et surtout comme députés de l'opposition, on a le droit d'entendre les groupes, d'entendre surtout les personnes qui travaillent dans le milieu, qui doivent vivre avec les conséquences de nos décisions comme législateurs, qui doivent appliquer la loi qui est devant nous, de les entendre préalablement.

Et, s'il y a un groupe, un secteur qui est particulièrement ciblé par ce projet de loi, c'est effectivement les garderies à but lucratif. Il y a deux grands regroupements ou associations de garderies à but lucratif au Québec. La première, dont nous avons discuté tantôt, est le Regroupement des garderies privées du Québec, à Saint-Jean-Chrysostome. Alors, on a eu le débat. La ministre ne veut pas les entendre, c'est son plein droit de le faire. Mais, pour le faire, selon Mme Drouin, ça prend plus que trois, quatre heures d'avis, une journée où elle avait déjà des obligations à Montréal. Et comme je dis, Mme Drouin a été avisée à 11 h 45; c'est ça qu'elle nous a dit.

Deuxièmement, c'est l'Association des propriétaires de garderies du Québec, qui est une association plus centrée sur la ville de Montréal, dans la région de Montréal. Donc, la présidente, Mme Rachel Ceppi, est venue témoigner, l'année passée, au moment du projet de loi n° 70. Alors, je pense que, ça, c'est une preuve tangible du fait qu'elle est habituée à suivre de près les travaux de cette Assemblée. Mais, encore une fois, à trois ou quatre heures d'avis... Elle travaille dans une garderie tous les jours. Elle est quelqu'un qui s'en occupe, qui est toujours en place. Alors, elle ne peut pas juste s'absenter comme ça. Elle doit organiser quelqu'un pour prendre la relève et tout ça. Et je pense qu'on ne peut pas faire ça en catastrophe, comme ça.

Alors, si on avait des travaux de la commission ordonnés, planifiés, je pense qu'on aurait tout intérêt à aménager le temps comme il le faut pour entendre l'association. Comme ils n'auront probablement pas le droit d'être entendus ici, je vais prendre le temps de lire une lettre qu'eux autres aussi viennent d'écrire au premier ministre du Québec, le 29 mai dernier. Alors, vu qu'ils n'auront pas l'occasion de témoigner ici, de toute évidence, moi, je vais essayer au moins de lire, pour le journal de nos travaux, ici, leur point de vue, parce que je pense que c'est très important. Alors, c'est une lettre datée du 29 mai de cette année à l'honorable premier ministre du Québec.

«M. le premier ministre, lors d'une rencontre avec Mme Pauline Marois, le 14 mai dernier, jour du dépôt de cette loi, nous avons encore une fois constaté le manque d'ouverture de la ministre face aux garderies privées dites à but lucratif. C'est en dernier recours, M. le premier ministre, que, nous, représentantes des garderies privées du Québec, sollicitons votre compréhension afin que nous soyons entendues pour vous persuader de faire stopper ce projet de loi n° 11.

«Nous sommes 402 garderies qui croyons fermement et profondément que cette loi va à l'encontre du libre choix des parents à choisir le service de garde qui leur convient sans être pénalisés pour ce choix par votre gouvernement. Également, certains articles de cette loi sont une entrave importante à l'équité pour les enfants du Québec. Au nom des 20 000 enfants et des 40 000 parents que nous représentons et qui aiment leurs garderies privées dites à but lucratif, nous vous demandons de stopper cette loi.

«Dorénavant, les nouvelles garderies privées ne recevront plus aucune aide de l'Office des services de garde. Les familles à faibles revenus ne pourront plus bénéficier d'aide financière, parce qu'elles ont choisi une garderie privée. Ces nouvelles garderies devront refuser des enfants handicapés et les poupons de moins de 18 mois, faute de subvention permettant d'alléger le ratio éducateur-enfants. Nos parents sont en colère face à cette discrimination envers leurs garderies. Ces parents payeurs de taxes refusent que leur contribution fiscale serve à aider d'autres garderies régies et non celles de leurs enfants. Est-ce là une politique familiale équitable et juste envers les parents et les enfants du Québec?

(22 h 30)

«Nos services de garde offrent un encadrement de qualité, quoi qu'en disent les syndicats et les représentants des garderies dites sans but lucratif. Certaines de nos garderies ont plus de 25 ans d'expérience. L'Office des services de garde à l'enfance ne respecte pas le bon jugement de nos parents quand il met en doute notre qualité de services. Un sondage CROP effectué par le Conseil du patronat du Québec indique que 81 % de la population privilégie le secteur privé en matière de garde pour la petite enfance.

«De plus, mentionnons que, pour la première fois dans l'histoire des garderies au Québec, 2 500 personnes – parents, éducateurs, enfants – sont descendues dans la rue le 14 janvier 1995 pour qu'il y ait équité envers les parents, les enfants et les éducatrices qui venaient de perdre le 1 $ d'augmentation accordé par le gouvernement précédent à toutes les éducatrices du Québec. N'est-ce pas la preuve de la satisfaction des parents pour leurs garderies privées, et de leur mécontentement des politiques discriminatoires de Mme Marois?

«Ce projet de loi n° 11 n'assure pas au réseau des garderies régies une diversité permettant le libre choix des parents ou des économies pour l'État. Il va à l'encontre d'une création d'emplois qui vise l'équité salariale en matière de garde. Il démontre qu'en matière de garde il y a deux poids, deux mesures au Québec. Ce projet de loi, quoiqu'il assure un droit acquis à environ 335 de nos garderies, aide financière et petites subventions représentant au total 6,7 % de ce que reçoivent les garderies dites sans but lucratif, met en danger la permanence du secteur privé et sa subsistance même à moyen terme. Ce projet de loi encourage la garde au noir non régie.

«Nous sommes les derniers des Mohicans, et l'obtention d'un permis avec toutes ses exigences sera bientôt chose du passé. À quoi bon l'obtention d'un permis si nous ne pouvons pas répondre aux normes sans aide, si nous ne pouvons pas offrir des salaires décents à des éducatrices formées? À quoi bon demander un permis quand l'Office des services de garde tolère davantage les garderies au noir que les garderies privées?

«Nous demandons que cesse d'augmenter l'écart entre deux types de garderies qui offrent les mêmes services et qui répondent aux même normes. Nous demandons que les maigres subventions que nous recevons soient maintenues pour toutes les garderies privées détentrices de permis. Nous coûtons beaucoup moins cher à l'État que ne coûteront les 26 000 nouvelles places hautement subventionnées par année qu'a annoncées Mme Marois. Nous désirons faire partie du plan de développement afin d'assurer une saine répartition et un partenariat harmonieux de tous les services de garde du réseau.

«Bien sûr que cette seule requête ne serait pas suffisante sans une rencontre expresse avec vous personnellement et dans les plus brefs délais. Cette demande audacieuse de rencontre est le dernier espoir de plus de 500 garderies, 20 000 enfants et 40 000 parents. Elle est primordiale et urgente afin d'assurer dans l'avenir un développement harmonieux de toutes les garderies, sans discrimination et dans une philosophie de liberté de choix.» Et c'est signé Rachel Ceppi, présidente de l'Association des propriétaires de garderies du Québec.

Et je comprends, M. le Président, que c'est une façon inélégante de faire valoir les points de vue de ce groupe. Moi, j'aimerais beaucoup mieux entendre Mme Ceppi, poser les questions, avoir un échange vivant avec Mme Ceppi et les autres représentants au lieu d'être obligé de lire les textes que j'ai reçus, mais je n'ai pas le choix. Et je pense qu'il y a des points qui sont soulevés dans cette lettre. Je ne dirais pas que j'endosse la totalité des opinions qui sont exprimées ici, mais c'est des points de vue valables. Je pense que c'est des personnes qui sont directement touchées par le projet de loi n° 11. On a tout intérêt à aménager le travail de cette commission afin d'avoir l'occasion d'entendre ce monde-là. Parce que, comme ils l'ont dit, c'est 402 garderies, c'est 20 000 enfants, c'est 4 000 éducatrices, quelques éducateurs, c'est 40 000 parents, plus ou moins. Alors, c'est beaucoup de monde, c'est du monde dans tous nos comtés, qui sont touchés.

Et, ça, c'est une association qui représente leurs intérêts. Ils ont travaillé. Mme Ceppi a une garderie depuis plusieurs années. Alors, c'est quelqu'un qui connaît le domaine. M. Hrycyk, qui demeure dans le comté de Nelligan, c'est quelqu'un qui – je suis allé à l'école avec son épouse – connaît très bien ça. Et c'est un travail de couple, un travail qui a commencé il y a 10 ans, dans le sous-sol d'une église à Beaconsfield, et ils ont maintenant une grande garderie à Dollard-des-Ormeaux. Il ont gagné des prix de la chambre de commerce pour la qualité de l'entreprise, et tout ça. Et ils travaillent. Elle connaît la garderie à but non lucratif, Les Bois verts, qui n'est pas loin. Alors, les deux travaillent ensemble à faire des échanges, et tout ça. C'est loin d'être la situation hostile que la ministre a dénoncée à maintes reprises. C'est juste deux personnes, deux modèles différents, mais qui rencontrent les besoins des parents, des familles, à tous les jours.

Alors, c'est ça qu'on questionne. On questionne les personnes qui offrent ce genre de services dans le projet de loi n° 11. Et je pense qu'on a tout intérêt, avant de procéder à l'étude détaillée de ce projet de loi, à les inviter, à leur donner 24 heures d'avis. Parce que, ça, c'est le regroupement de Montréal; ça, c'est les gens qui travaillent dans le domaine, qui ont une soixantaine d'enfants qui arrivent à leur porte à tous les matins. Alors, on a tout intérêt à leur laisser le temps d'aménager une relève, quelqu'un qui va s'en occuper, de la garderie, pour une journée, pour leur laisser le temps d'aménager une visite à Québec pour témoigner ici, parce que le projet de loi l'exige. Le projet de loi veut qu'on mette une hache dans ce développement et que les autres couples, comme Linda McPherson et Dan Hrycyk, qui ont commencé il y a 10 ans, qui ont maintenant une garderie de qualité... Et j'invite la ministre à aller la regarder. C'est une garderie de toute beauté. Ils viennent de fêter leur 10e anniversaire. Ils m'ont invité à planter un arbre dans la cour, entouré par les enfants. C'était une belle journée d'été, au mois d'août de l'année passée, si mes souvenirs sont fidèles. Et ça, on ne veut rien savoir de ça. On ne veut pas avoir d'autres arbres du savoir au Québec.

Je ne comprends pas. La ministre a fait ses choix, mais je pense que, ce genre de personnes, on a le droit de les entendre, parce qu'elles sont directement touchées. Et, comme je dis, dans le discours de ce gouvernement, de ce premier ministre qui a flatté l'esprit d'entrepreneurship dans le discours inaugural, oui, ils sont les témoins vivants de cet entrepreneurship, de ce message que les gouvernements, pas juste le gouvernement existant mais plusieurs gouvernements dans l'Occident ont dit: que l'État-providence, c'est chose du passé. Il faut réaménager nos façons de faire, il faut réinventer l'État, tout ce beau discours. Mais un des défis qui est lancé, c'est les petites et moyennes entreprises. C'est là qu'on va trouver les emplois pour l'an 2000. C'est là qu'il faut miser pour la création d'emplois pour le nombre trop élevé des chômeurs dans notre société.

Alors, on a un exemple ici. Et de dire que c'est une façon immorale ou illégale de faire un profit en fournissant un service aux enfants, je ne suis pas convaincu. Je pense qu'il faut avoir ce débat, il faut nous donner le temps d'avoir ce débat. La personne qui fait les souliers pour mes enfants fait une fortune, je suis très sûr, et il y a beaucoup d'autres services qui sont fournis à nos jeunes, dont le monde tire un profit. Alors, il n'y a rien d'immoral dans tout ça, à mon sens. Et, dans le discours du gouvernement, dans le fait que l'État-providence est chose du passé, je pense qu'on a tout intérêt à développer un partenariat avec le privé pour les parents qui n'ont pas la bonne chance d'avoir accès à une place dans une garderie à but non lucratif parce qu'elles sont très limitées. Et même pour les taux de couverture dans la formule de l'Office des services de garde à l'enfance, si on enlève les 20 000 places dans les garderies à but lucratif, je pense que le taux de couverture tombe à 40 %, en chiffres ronds. On parle d'un taux de couverture, dans la province, de 63 %, mais presque le tiers de ça, c'est des garderies à but lucratif. Or, si on enlève ça, les places subventionnées dans les garderies à but non lucratif, c'est 40 %. Alors, trois enfants sur cinq, au Québec, n'ont pas accès à une garderie à but non lucratif, selon les chiffres de l'Office.

(22 h 40)

Alors, on a le choix. On peut faire nos arrangements et faire quelque chose d'informel, au noir – la voisine va garder vos enfants – ou on peut bâtir un partenariat avec le secteur privé, on peut les régir, les mêmes normes, les mêmes règlements s'appliquent. Et peut-être que c'est ça, un modèle, pas le seul modèle. Et j'ai mentionné à maintes reprises que je suis convaincu de l'importance de la présence des garderies à but non lucratif dans le réseau, parce que c'est elles qui fixent les standards, c'est elles, vraiment, qui «set the place» pour les autres à suivre. Mais, après ça, pourquoi, avec les moyens limités de l'État, ne pas bâtir, ne pas favoriser un partenariat avec le privé? Parce que, à moindre coût, 4 000 000 $ de frais de fonctionnement contre 96 000 000 $, ils ont réussi à créer 20 000 places sur 55 000. C'est non négligeable, M. le Président.

Et je pense qu'il ne faut pas abandonner ce modèle. Au contraire, je pense qu'il faut continuer de développer le partenariat avec le privé et également de développer les garderies à but non lucratif. Mais, comme je dis, dans plusieurs des régions, il n'y a pas beaucoup de projets à développer. On a un problème. On a un problème parce qu'il y a deux fois plus de projets à développer dans les buts lucratifs que dans les buts non lucratifs, selon les chiffres de la ministre et de l'Office.

Alors, de mettre à dos les deux tiers des projets qui sont en réserve, qu'il y a en banque, je trouve ça regrettable, M. le Président. Et, au nom des parents qui cherchent une place demain, pas après une autre année transitoire de la ministre, la deuxième année transitoire de suite, pas dans 24 à 36 mois, dans des projets existants qui vont se réaliser... Parce que ça prend du temps, c'est compliqué. Il faut trouver un site, il faut trouver soit un édifice existant à louer ou à acheter, il faut faire tous les réaménagements, il faut embaucher le personnel, il faut trouver la clientèle. Ce n'est pas évident, ça prend du temps. Et, si on regarde dans le rapport de l'Office des services de garde, les projets développés récemment, ça nous donne une idée que ce n'est pas quelque chose qui se fait d'une journée à l'autre. C'est la liste des services de garde en garderies ouvertes, et on trouve les projets qui ont commencé en 1991-1992, 1989-1990 dans la ville de Sherbrooke, en 1992-1993, en 1991-1992, en 1993-1994. Dans les 14 services qui ont ouvert les portes l'année passée, comme je dis, 1988-1989 est le plus vieux projet, mais il y en a d'autres où ça a pris quatre, cinq ans avant de les réaliser. C'est ça, le temps que ça prend, M. le Président.

Alors, c'est beau de dire qu'on va développer dans l'avenir, qu'il y aura des choses qu'on va réaliser dans quatre, cinq ans, mais, quand nous avons fait l'interpellation avec le député d'Anjou, j'ai dit qu'il doit agir vite s'il veut créer – parce qu'il vient de devenir père pour la première fois... Parce que, avec des délais comme ça, son enfant va être rendu à l'école primaire avant qu'on soit capable de lancer un projet de garderie à but non lucratif. Alors, dépêchez-vous, M. le député d'Anjou et Mme la ministre, parce que ça presse, parce que, effectivement, les chances sont de trois sur cinq qu'il n'aura pas accès à une place dans une garderie à but non lucratif. Trois sur cinq. Alors, peut-être – je n'ai pas eu le plaisir de rencontrer son épouse – entre les deux, peut-être que ça va faire l'affaire des deux d'avoir une place dans une garderie à but lucratif. Pourquoi pas? Mais la ministre a dit: On ne veut pas favoriser, on ne peut pas permettre le développement dans ce secteur. Alors, son collègue, le député d'Anjou, va être obligé de faire d'autres arrangements, de chercher autre chose, parce que ses chances sont de trois sur cinq. Il n'y aura pas de place dans une garderie pour son enfant.

Je soulève ça. Ça, c'est la réalité des choses. Et, comme je l'ai dit, dans les derniers cinq ans, le secteur qui a réussi à créer les deux tiers des nouvelles places, effectivement, c'est le partenariat avec le privé. Alors, avant de mettre la hache dans tout ça, avant de l'abandonner, est-ce qu'on peut au moins, comme parlementaires, prendre une heure pour les entendre – parce qu'ils sont un partenaire majeur, exclu dès le départ du groupe de travail – les consulter pendant une journée, rapidement? Mais on sait que, dans tout groupe de travail, la place clé, c'est d'avoir une chance de participer à la rédaction des recommandations au ministre ou à la ministre. C'est ça, le moment qui est le plus intéressant. On peut entendre les groupes, il y a beaucoup de choses qu'on peut entendre. Ils ont fait une tournée de la province au complet, alors on entend beaucoup de choses. Mais c'est au moment où on va sélectionner les choses qu'on a trouvées les plus pertinentes puis les choses qu'on veut laisser de côté, ça, c'est le moment très intéressant. Et, à partir de cet exercice, formuler les recommandations auprès de la ministre, ça, c'est le moment clé dans le processus. Et ce réseau, ces garderies étaient exclues à ce moment, et je trouve ça regrettable.

Comme j'ai dit l'année passée, au moment de l'adoption du projet de loi n° 70, on a eu l'occasion de faire un échange avec Mme Ceppi et M. Hrycyk. C'était fort intéressant, fort enrichissant, et je pense qu'on a tout intérêt, comme parlementaires, comme membres de cette commission, à répéter l'expérience, à avoir leurs commentaires sur le projet de loi n° 11, parce que, comme j'ai dit, avant tout, c'est eux autres qui sont ciblés par ce projet de loi, par ce gouvernement, par cette ministre, et je pense qu'on a tout intérêt à leur donner l'occasion de venir ici témoigner, faire état de leurs doléances. Parce que, s'ils sont obligés d'écrire au premier ministre, c'est toujours la lettre de dernier recours pour un groupe. On essaie toujours de régler nos affaires avec un ministre, et c'est vraiment exceptionnel.

Moi, j'ai eu l'occasion de travailler pour un ministre pendant quatre ans, quatre ans et demi, et c'était toujours une mauvaise nouvelle quand une lettre allait au bureau du premier ministre, parce que c'est presque rompre les relations avec le ministre sectoriel et, en dernier appel, il faut aller au premier ministre. Et, quand j'ai travaillé au cabinet, la dernière chose qu'on voulait était un appel du «bunker». Ça, c'était à éviter à tout prix, parce que c'est parce que les choses vont mal dans un dossier qu'on reçoit des appels du «bunker». Moi, j'ai travaillé pour trois ministres performants et efficaces, alors ce n'est pas arrivé trop souvent, mais c'est arrivé assez de fois qu'il fallait... Ça, c'est toujours une alerte que les choses vont mal.

Alors, dans le cas ici, ils ont décidé d'aller plaider devant le premier ministre parce que, effectivement, ils n'ont pas eu satisfaction au niveau de la ministre. Et je pense que c'était clair dans la lettre que je viens de lire. Comme je dis, ma préférence, c'est toujours d'entendre Mme Ceppi elle-même parce que, moi, je ne prétends pas que je peux représenter son expérience et sa connaissance de ce domaine et de ce dossier, mais, faute de la collaboration de la ministre et du gouvernement, je vais faire un «second best», c'est-à-dire qu'au moins je peux lire, pour le profit des membres de la commission, la lettre qu'elle a écrite au premier ministre à la fin de mai de cette année. Et je pense qu'on a tout intérêt, comme commission, à réaménager nos travaux afin de permettre à l'association de venir témoigner ici. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci, M. le député. Est-ce qu'il y a une autre intervention? M. le député de LaFontaine.


M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: Oui, merci, M. le Président. Alors, M. le Président, bien sûr, j'appuie la motion qui a été présentée par mon collègue, le député de Jacques-Cartier, qui demande à ce qu'on tienne des consultations particulières relativement au projet de loi et qu'à cette fin nous entendions, bien sûr, l'association des garderies privées du Québec.

Alors, je pense que c'est tout à fait pertinent au projet de loi, car, en effet, il s'agit de constater que, dans le projet de loi, les garderies privées sont touchées de plein fouet. Alors, il me semble que, lorsqu'on légifère dans un domaine qui va affecter un secteur d'activité, quel qu'il soit, mais particulièrement dans le milieu familial ou le milieu social, lorsque, il me semble, on va légiférer pour enlever aux gens des avantages ou compliquer leur manière de fonctionner, on devrait, comme parlementaires, au moins les rencontrer et les entendre. Peut-être ont-ils d'autres solutions à nous proposer. Peut-être ont-ils d'autres arguments à nous faire valoir, que la ministre n'a pas entendus. Peut-être peuvent-ils faire en sorte de trouver d'autres manières de procéder. Alors, M. le Président, ça semblerait tout à fait logique que nous les rencontrions.

(22 h 50)

Et même, je m'étonne que ça n'ait pas déjà été fait. Je m'étonne de ce délai. Le projet de loi n'a pas été déposé hier; ça fait quand même pas mal de temps. Est-ce que quelqu'un dans le cabinet de la ministre n'a pas pu penser que, avant d'arriver en commission parlementaire, on demanderait des consultations publiques? Est-ce que les gens étaient trop occupés ou tellement occupés qu'ils n'ont pas dit: Un instant, Mme la ministre. Ça, là, ça va toucher de plein fouet des organisations qui existent, qui fonctionnent, qui rendent des services aux citoyens, des gens responsables, des gens respectables. Est-ce qu'on ne devrait pas les rencontrer avant de toucher à leur manière de fonctionner, avant d'aller compliquer tout ce système? Ou alors auraient-ils pu dire: Mme la ministre, peut-être, nous, on n'est pas prêts à les rencontrer, mais l'opposition va le demander. Alors, prenons donc les devants et faisons en sorte que nous leur demandions de venir nous rencontrer, que nous les écoutions.

Alors, je suis vraiment estomaqué de voir avec quelle légèreté ça a été fait, je répète, ce matin, à ma grande surprise, lorsque, après la période des affaires courantes, mon collègue, le député de Jacques-Cartier, s'est levé à l'étape des renseignements sur les travaux de l'Assemblée et s'est informé de quelle manière on devait procéder pour convoquer ou inviter des groupes à venir témoigner sur un projet de loi. J'étais surpris, parce que, en 11 ans, je n'ai jamais vu ça. Moi, je sais qu'il y a des députés, ici, qui ont fait de l'opposition pendant longtemps et qui n'auraient jamais toléré une attitude comme celle-là. Puis je suis certain que, si on retourne en arrière et qu'on regarde, qu'on prend la peine de regarder, même la ministre, parce qu'elle a été députée, n'aurait jamais accepté une telle situation de l'ancien gouvernement. Et à juste titre, d'ailleurs, parce que, nous autres non plus, les députés du gouvernement, nous ne l'aurions pas acceptée.

Et il y a eu de nombreux cas où c'est les députés ministériels qui ont appuyé les députés de l'opposition pour obtenir des consultations. De nombreux cas. Que ça soit la commission du budget et de l'administration, que ça soit la commission de l'économie et du travail, ça a été fait régulièrement. Et c'était tout à l'honneur des parlementaires. Pourquoi? Parce que, comme je le disais précédemment pour l'autre groupe, il est du rôle des parlementaires d'écouter les citoyens. Nous sommes là pour représenter les citoyens. On ne représente pas le gouvernement auprès des citoyens, on représente les citoyens auprès du gouvernement. Ce n'est pas la même chose, ça. Est-ce qu'il y a du monde qui confondrait le rôle, qui se pensent des envoyés du gouvernement auprès des gens pour leur expliquer les politiques gouvernementales? Ce n'est pas ça, le rôle des députés, ce n'est pas ça, le rôle des législateurs. On est élus pour légiférer dans l'intérêt des citoyens et selon leurs besoins et leurs désirs. Encore, pour ce faire, faut-il que nous les entendions, faut-il faire en sorte que les projets de loi ne descendent pas d'en haut d'une machine bureaucratique, technocratique, coupée des réalités, bien souvent.

Et on a pu le voir. Regardez l'état des services d'éducation au Québec, regardez le taux d'échec scolaire, regardez la situation qu'on rencontre dans le système hospitalier. Pourtant, ça a été fait avec toutes des lois qui venaient d'en haut, de savants fonctionnaires qui ont fait légiférer des députés puis des ministres pendant 20 ans, 25 ans. Ils «avaient-u» les solutions? On les a écoutés. Regardez où nous en sommes rendus: plus haut taux de décrochage, plus haut taux d'échec de nos finissants en français en rentrant au cégep. Pourtant, on a nos lois qui ont été amenées par en haut, par la grosse machine. Bien, il est temps qu'on se réveille, qu'on prenne nos responsabilités puis qu'on se rende compte que ces gens-là, là, ce n'est pas vrai qu'ils ont toujours raison, puis qu'on devrait écouter plus le peuple, puis plus la population et le bon sens qui est là. Puis c'est pour ça qu'ils nous ont envoyés ici. Puis, si, des fois, les gens, les citoyens, ils ont moins de respect – on le voit un peu, des fois, dans les études d'opinion publique – envers leurs élus, bien, c'est parce que, peut-être, on ne prend pas le temps de les écouter une fois qu'on est rendus ici. On pense qu'une fois qu'on est rendus ici on connaît tout puis on se dépêche d'aller prendre des mémoires et puis des projets de loi présentés, des projets de règlement, par des gens qui ne sont pas élus et qui n'ont pas forcément les intérêts de la population. Peut-être le font-ils de bonne foi. En attendant, on voit le résultat que ça donne.

Alors, lorsque des citoyens demandent à être entendus, bien, je pense qu'une ministre devrait le faire, et elle devrait être appuyée par ses députés, bien sûr. D'autant plus qu'on frappe directement les garderies. Imaginez qu'on baisse l'exonération... on baisse le... Incroyable! Et je vais lire ça un peu: Diminuer par le pourcentage d'un montant de base qui sert au calcul pour déterminer le montant quotidien maximum de l'exonération et de l'aide financière, de 60 % à 45 %. Ça se traduit par des baisses de 4 $ par jour, soit 80 $ par mois, 960 $ par année. Si ce n'est pas frapper de plein fouet des citoyens, hein... Non, ça ne vaut pas la peine. Éliminer le paiement des journées pédagogiques, ça affecte l'ensemble des bénéficiaires. Allons-y, tant qu'à faire. Pourquoi pas? 12 000 000 $ dans les programmes de garde scolaire.

Les travailleurs saisonniers. Les travailleurs saisonniers, il n'y a pas de travailleurs plus précaires que les travailleurs saisonniers, les personnes inscrites à des programmes de réinsertion. Les travailleurs saisonniers, ça, ça peut travailler 40, 50 jours d'affilée, ça travaille l'été, ça travaille l'hiver, et non pas quatre jours par semaine, non pas 33 heures de travail et payés 35 heures. Ça travaille tant qu'il y a du travail, un travailleur saisonnier. Eh bien, ces gens-là, ils n'auront plus droit à l'aide financière pour les journées, par jour, quand ils auront un excédent de 20 jours de travail; ils auront droit juste à 20 jours. L'excédent: fini, terminé, on n'en parle plus. Bien, voyons donc! Est-ce que vous pensez qu'un travailleur saisonnier décide, lui, de travailler un nombre de jours quand il faut faire ces travaux-là? Il faut commencer à s'aligner sur des réglementations gouvernementales? Non. Il faut travailler parce que c'est le temps de travailler puis de gagner de l'argent, puis ça ne repasse pas deux fois, la saison.

M. le Président, je suis honnêtement, foncièrement mal à l'aise avec ce que nous faisons actuellement, parce qu'on touche, en plus, un domaine familial, un domaine sensible, un domaine qui peut créer de l'insécurité chez les parents, qui peut créer des tensions dans les familles, et je pense qu'on devrait y apporter toute l'attention possible, toutes les précautions possibles. C'est un domaine dans lequel on doit agir encore plus précautionneusement que dans d'autres domaines parce qu'il touche des enfants, il touche la seule ressource que des mères de famille peuvent avoir pour pouvoir aller travailler, pour dire: Moi, je vais travailler puis j'ai besoin d'une garderie, puis qu'elle soit fiable puis qu'elle ne me coûte pas cher; si ça me coûte trop cher, une garderie, bien, ça ne vaut plus la peine de travailler, des fois, parce que mon salaire n'est pas assez élevé, puis je vais aller sur l'aide sociale. C'est un des exemples, M. le Président.

Je crois, M. le Président, que c'est tellement délicat, c'est tellement important que la ministre devrait se rendre à l'évidence qu'elle doit écouter les gens, elle doit écouter les groupes concernés puis elle doit prendre le temps de le faire. Et ce serait meilleur pour son projet de loi, ce serait meilleur pour la population, ce serait meilleur pour les citoyens puis ce serait meilleur pour les enfants. Puis, nous aussi, de ce côté-là, on ne dira pas qu'on a gagné des consultations. Ce qu'on va dire: La ministre, là, elle a fait sa job, sa job humaine, d'humanité. Et elle en sortira grandie, de ça, pas amoindrie, M. le Président.

Alors, je réitère ma demande, en terminant: Mme la ministre, de grâce, revenez à la raison, redevenez celle que vous étiez dans l'opposition et recommencez à écouter les citoyens.

(23 heures)

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie, M. le député de LaFontaine. Je reconnais maintenant M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.


M. Russell Copeman

M. Copeman: Merci, M. le Président. J'ai écouté attentivement mon collègue, le député de LaFontaine; j'ai trouvé qu'il a tellement éloquemment présenté notre point de vue que j'ai très peu de choses à ajouter, très peu de choses. Il a très bien décrit la position de ce côté de la table.

Mais, M. le Président, peut-être pour une dernière fois ce soir, j'aimerais bien rappeler à la commission les paroles tenues en Chambre par la ministre de l'Éducation. Et, si c'est familier, c'est que, à force, comme le ministre de la Santé nous le dit – je vois que le député d'Ungava opine du bonnet, parce qu'il sait ce qui s'en vient – comme le ministre de la Santé nous a assez dit, à force de répéter des choses, ça va rentrer. Alors, les paroles de la ministre de la Santé, encore une fois, prononcées en Chambre: «M. le Président, j'ai déjà rencontré des représentants et représentantes de l'ensemble des services de garderie du Québec...»

Mme Marois: Je ne suis pas le ministre de la Santé.

M. Copeman: Pardon, la ministre de l'Éducation...

Mme Marois: Merci. Ça va. Ha, ha, ha!

M. Copeman: ...et responsable des garderies.

Mme Marois: Il peut arriver qu'on se...

M. Copeman: Il va falloir que je recommence, M. le Président. J'ai perdu mon... Mon train est dépassé.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Copeman: Je suis obligé, M. le Président, de tout recommencer.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Copeman: Alors, je disais, ce qui est le conseil de notre ministre, notre très cher ministre de la Santé: À force de répéter...

Une voix: De la Santé?

M. Copeman: De la Santé, oui.

Une voix: De l'Éducation?

M. Copeman: Non, non, de la Santé. À force de répéter des choses, ça va rentrer, à un moment donné. Alors, les paroles de la ministre de l'Éducation en Chambre, le 3 juin: «M. le Président, j'ai déjà rencontré les représentants et les représentantes de l'ensemble des services de garderie du Québec, dont les garderies à but lucratif, et je les ai informés que je n'avais pas d'objection à ce qu'on prenne un temps pour les entendre sur le projet de loi n° 11.»

Malheureusement, M. le Président, il y a eu un certain revirement dans la pensée de la ministre – c'est le moins qu'on puisse dire – dont l'effet est d'écarter de notre processus des groupes comme le groupe dont on discute présentement, l'association des garderies privées du Québec. Et je ne peux que déplorer, peut-être pour la dernière fois ce soir, l'attitude, l'entêtement de la ministre à cet égard.

M. le Président, les gens de l'association des garderies privées du Québec sont prêts à venir, avec un avis raisonnable, un avis qui n'est pas donné quatre heures avant, un avis basé sur la bonne foi et la politesse, ils sont prêts à venir. Et, en réponse à la ministre, qui a dit, à un moment donné: On connaît l'attitude de tous ces groupes-là, on les connaît, on n'a pas besoin de les entendre, moi, je dis – il y a une phrase qu'on utilise en anglais: «I'd rather hear from the horse's mouth than the horse's ass.»

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Marois: Est-ce que c'est parlementaire, ça, M. le Président?

M. Copeman: So, you know, Mr. Chairman, I would rather hear from the horse's mouth. If these groups have some element that they wish to bring to our attention, I believe it's pertinent that we should hear them.

M. le Président, l'attitude étonnante de la ministre peut être basée sur beaucoup de choses. Qu'est-ce qui a changé depuis le 3 juin jusqu'à aujourd'hui? Mr. Chairman, you know, we could build a certain hypothesis of what's happening here tonight; it might be difficult, but we could do so. And I'll submit to you a certain hypothesis, Mr. Chairman, that this bill will not be before this committee tomorrow – I only advance a hypothesis, Mr. Chairman – that the Government, in its infinite wisdom, will bring before this commission another bill, which, if that would occur, would leave only five days in our parliamentary calendar to complete a study clause by clause of this bill, of Bill 33 and of Bill 116. Those are the three bills that are before this commission. They're concurrently before the commission, Mr. Chairman, I point that out to you. You're well aware of that, that we have begun in a very checkered fashion the study of all three of those pieces of legislation. One day we do 116, the next day we do 33 in the morning, then we do 11 in the afternoon, and tomorrow we'll be doing 33, and maybe Monday we'll be doing 116, and then maybe we're back to 33.

Une voix: A real puzzle.

M. Copeman: It's a real puzzle, a real jigsaw puzzle, Mr. Chairman, which your humble servant finds very difficult to follow. It's very, very hard to follow the Government's logic on how these bills come before this committee. You know, we did two hours, Mr. Chairman, you know full well, we did two hours, this morning, on Bill 33, only two hours. Hardly enough time for us to get our respective positions out on the table. Then they change. Perhaps, the Minister was tired, he had work to do – the Minister of Health, that would be – and, you know, then we bring in the Minister of Education to do this bill, «à toute vapeur». Dernière minute. On arrive. Les fonctionnaires rappelés à toute vitesse des quatre coins de notre province pour assister la ministre dans son travail.

Vraiment, ça démontre au moins, M. le Président, l'improvisation de ce gouvernement. C'est très clair à quel point il improvise. Ça fait que, M. le Président, l'hypothèse que j'avançais, c'est que, malheureusement, cette commission parlementaire n'aura pas l'occasion – c'est une hypothèse que j'avance – nécessairement de terminer l'étude des 83 articles dans le projet de loi.

M. le Président, avec la loi 33, la loi 116 et celle-là, ça fait du travail en mosus devant nous. Et, moi, je ne peux pas concevoir qu'avec une étude sérieuse, détaillée de ces trois projets de loi on va arriver. Moi, j'anticipe, M. le Président – et je ne sais pas, je me trompe peut-être, ma boule de cristal ne fonctionne peut-être pas si bien que ça – une suspension des règles sur plusieurs projets de loi. Et je vous préviens, M. le Président, que, si le gouvernement, à cause de sa mauvaise organisation du temps ici, en commission parlementaire et ailleurs... Moi, je vous préviens qu'ils vont tenter d'imposer une suspension des règles sur ce projet de loi et peut-être d'autres. Et c'est pour ça que la ministre ne veut pas entendre des groupes. Elle sait.

Because, you know, the Minister, since we've begun our study, Mr. Chairman, has very much looked like the cat that caught the pigeon. She has been looking very smug, Mr. Chairman. There has to be a reason for that, and I think – it's a very personal opinion – it's because the Minister knows full well that this bill will not be brought back into this parliamentary committee, and that, if the Minister wants it, she is going to have to get it by imposing a suspension of our... une suspension de nos règles, M. le Président. That's why the Minister doesn't look particularly ruffled. That's why she's not particularly interested in hearing tomorrow from various groups, because we won't be before this commission on this bill tomorrow. And that's the choice of the Government, Mr. Chairman. But, you know, as my colleagues have said in the past, if we had only used this time to hear the groups rather than argue about them, we could be over and done with and on to article 1. Thank you, Mr. Chairman.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Mme la députée de Saint-Henri– Sainte-Anne.

Mme Loiselle: Merci, M. le Président. Pardon?

M. Garon: J'ai dit: Vous allez y donner la claque.

Mme Loiselle: Merci, M. le Président.

Une voix: Jamais!


Mme Nicole Loiselle

Mme Loiselle: Non. J'aimerais intervenir sur la motion que mon collègue a déposée afin de rencontrer et d'entendre particulièrement l'association des garderies privées du Québec. Vous comprendrez, M. le Président, que, pour nous, il est comme assez important et essentiel de passer par la voie plutôt démocratique et de rencontrer les citoyens et d'entendre ce qu'ils ont à dire sur un projet de loi.

Si on insiste, M. le Président, pour rencontrer des groupes, c'est que ces gens-là nous ont téléphoné, nous ont écrit et nous ont dit que, dans le projet de loi de la ministre, sur ces coupures dans les services de garde à l'enfance, il y a des effets qui sont très, très négatifs, il y a des conséquences qui sont très fâcheuses, autant pour les garderies privées que pour les familles plus démunies puis les familles à revenus modestes.

(23 h 10)

M. le Président, le projet de loi n° 11, comme je l'ai dit un peu plus tôt au cours de la journée, s'attaque principalement aux familles, aux enfants, aux parents démunis, aux plus vulnérables de notre société et aussi aux familles et aux parents et enfants au salaire minimum, dont les parents gagnent le salaire minimum et ont des revenus très modestes. Mais il touche également, je devrais dire s'acharne également sur les garderies privées. Parce que c'est clair, dans le projet de loi, quand on regarde les articles et qu'on analyse légèrement les articles, on se rend compte facilement que la ministre a décidé de passer par son projet de loi pour fermer la porte définitivement à tout développement de garderies privées au Québec. Ça, c'est clair. Et je pense que, si on avait le moindrement de politesse, de respect envers ces groupements-là, dans lesquels on retrouve toutes les dirigeantes et tous les dirigeants des garderies privées, ils pourraient au moins venir dire à la ministre ce qu'ils pensent de son projet de loi et comment, peut-être, ils pourraient en arriver à la faire changer d'idée et à lui offrir des solutions de rechange, afin, justement, qu'un geste aussi sévère ne soit pas posé.

Mais je peux comprendre aussi, M. le Président, pourquoi la ministre préfère se cacher. Je peux comprendre aussi qu'elle a peut-être honte de la façon dont elle a traité les dirigeants et les dirigeantes des garderies privées. Je vous rappelle que la ministre, en octobre 1994, quand elle a annoncé en grande pompe la mise sur pied de son Groupe de travail sur le financement des services de garde, elle a nommé plein de représentants sur ce groupe de travail là, M. le Président, sauf... Parce que là je vais vous dire, il y avait les concertations interrégionales, l'association des services de garde en milieu familial, l'Association des services de garde en milieu scolaire, il va de soi, ses amis, la Confédération des syndicats nationaux, mais les garderies privées à but lucratif ont été complètement écartées du groupe de travail.

On peut aujourd'hui comprendre devant quoi on se retrouve, devant quel genre de recommandation on s'est retrouvé et que, finalement, le projet de loi que la ministre nous dépose et pour lequel elle ne veut pas rencontrer de groupe... On peut se questionner, peut-être, sur l'objectivité de cette décision, parce qu'il est évident que le projet de loi favorise particulièrement les objectifs des garderies sans but lucratif et, finalement, vise l'élimination du libre marché et de la concurrence dans le domaine du service de garde. Ça, c'est clair, M. le Président. Et, même, je l'ai dit et je ne m'en cache pas, il y a plein de gens qui disent que la ministre, finalement, elle a fait un cadeau à ses amis des syndicats; puis ça, je ne suis pas la première ni la dernière à le dire, M. le Président. Alors...

Mme Marois: ...

Mme Loiselle: M. le Président, je n'ai pas terminé. La ministre pourra intervenir après.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): ...un point...

Mme Marois: C'est juste pour m'assurer qu'on comprend bien à qui sont allées les subventions. Parce que 25 %...

Mme Loiselle: M. le Président, je n'ai pas terminé...

Mme Marois: ...des personnes en garderies...

Mme Loiselle: ...la ministre pourra revenir.

Mme Marois: ...sont syndiquées. Donc, ça ne peut être allé que dans une proportion de 25 % à ceux-là...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): On pourra revenir, s'il y a lieu. Continuez, Mme la députée.

Mme Marois: ...et le reste aux 75 %...

Mme Loiselle: Merci, M. le Président. Si la ministre avait accepté de rencontrer ces regroupements-là, elle pourrait peut-être s'expliquer aujourd'hui avec eux. Mais, comme elle préfère se cacher ici, en commission parlementaire, à 23 h 15, alors...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): On continue toujours avec beaucoup de sérénité.

Mme Loiselle: Alors, M. le Président, moi, je rappelle à la ministre que ce qu'elle fait avec son projet de loi, finalement, c'est qu'en fermant la porte aux garderies privées elle ferme la porte à des petites entreprises qui sont génératrices d'emplois. M. le Président, depuis 1992, le réseau des garderies privées a développé 70 % des nouvelles places et a créé 2 000 emplois, des emplois majoritairement à des femmes, je vous le rappelle, des femmes qui, habituellement, sont chefs de famille monoparentale et des emplois qui, avec le temps, génèrent d'autres emplois et qui font que ces femmes-là qui travaillent dans les garderies décident un jour d'ouvrir leur propre garderie. M. le Président, ce que la ministre vient de dire... Et ça, je trouve ça vraiment déplorable, même presque indécent, qu'un gouvernement puisse se donner le pouvoir, par le biais d'un projet de loi, de dire à des citoyennes et des citoyens que leur rêve, que leur vouloir, leur détermination de vouloir avoir leur petite entreprise... qu'eux viennent de fermer la porte à ces gens-là, M. le Président. Alors, on vient, avec ce projet de loi là...

M. le Président, aussi pour les parents, on met fin à la liberté de choix, j'en ai parlé cet après-midi. Parce que le gouvernement a décidé que, lui, il était pour décider pour les parents à quel endroit ils vont envoyer leurs enfants. Fini la liberté de choix, fini aussi la diversité des services de garde, au Québec. Alors, M. le Président, de plus en plus, ce gouvernement essaie de s'infiltrer dans la responsabilité, dans la vie des familles québécoises.

M. le Président, en terminant, j'aimerais vous lire une lettre qui a paru dans le journal et qui en dit long sur ce que les citoyens et les parents pensent du fameux projet de loi de la ministre responsable de l'Office des services de garde. Le titre de la lettre, c'est «Blessée par madame Marois». Lettre à Pauline Marois. «Suite à l'article paru dans le journal Le Soleil concernant votre idée de couper les subventions dans les garderies scolaires, là où apparemment les efforts budgétaires...»

Mme Marois: M. le Président, s'il vous plaît, point d'ordre...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Point d'ordre sur...

Mme Marois: ...sur le fait que la lecture peut être très intéressante, je n'en disconviens pas, mais absolument pas pertinente, compte tenu...

Mme Loiselle: Bien, est-ce que je pourrais terminer, M. le Président?

Mme Marois: ...que le projet de loi n'aborde pas...

Mme Loiselle: Comment est-ce que la ministre peut deviner le texte de la lettre, M. le Président...

Mme Marois: Je l'ai déjà lue...

Mme Loiselle: ...elle qui ne prend même pas le temps d'écouter les gens. Alors, s'il vous plaît...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): S'il vous plaît!

Mme Loiselle: Alors, je reprends M. le Président. Lettre à Pauline Marois. «Suite à l'article paru dans le journal Le Soleil concernant votre idée de couper les subventions dans les garderies scolaires, là où apparemment les efforts budgétaires "blessent le moins", je me demande si vous réalisez deux minutes où et qui vous allez blesser par cette mesure.

«Premièrement, les premiers à être lésés seront les enfants qui devront rentrer à la maison après l'école, seuls, inquiets, pour attendre le retour des parents. Ou encore, les mères monoparentales qui, enfin de retour sur le marché du travail, devront maintenant laisser leur emploi pour retourner sur l'assistance sociale car incapables de payer le plein montant d'une garderie.

«Tout le monde crie qu'il faut couper dans l'aide sociale pour que les gens retournent travailler, mais est-ce là une solution pour garder les gens au travail? En leur coupant la moindre petite subvention qui puisse les aider, les sécuriser en sachant leurs enfants à la garderie scolaire jusqu'à ce que leur journée de travail soit terminée? Bien sûr, il ne faudrait surtout pas penser à couper dans les salaires et les dépenses des ministres. Ça pourrait être dramatique de changer votre train de vie afin d'améliorer celui de nos jeunes enfants, n'est-ce pas? Pendant que vous y êtes, pourquoi ne pas venir nous couper la "gorge" directement chez nous à la maison, puisque c'est ce que vous nous faites de façon détournée?

«J'espère seulement qu'on va finir par se réveiller un jour et dire tout haut: Là c'est assez, on va réagir. Faites quand même de beaux rêves, Mme la ministre.»

Ça, M. le Président, c'est une mère, une mère de famille qui, à sa façon – parce que, finalement, peut-être qu'elle a demandé à la ministre de la rencontrer, mais la ministre n'était pas intéressée – écrit à la ministre par la voie du journal pour lui dire vraiment ce que les citoyennes, les parents et les femmes chefs de familles monoparentales pensent de son projet de loi qui, d'un côté, s'attaque...

Mme Marois: M. le Président, je m'excuse, là... Je ne veux pas faire ici de la procédure. Cependant, la députée qui intervient à ce moment-ci ne parle pas du projet de loi qui est devant nous. Alors, je m'excuse, mais elle fait référence à des mesures de financement qui n'ont rien à voir avec ce qui est au projet de loi que nous étudions, M. le Président.

M. Kelley: M. le Président...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): ...M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: ...j'attire votre attention sur les articles 35...

Mme Marois: D'ailleurs, on est sur une motion pour entendre un groupe.

M. Kelley: ...et 37 du projet de loi qui est devant nous. Elle est effectivement dans la pertinence.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Mme la députée, je vous rappelle simplement la règle: tout discours doit porter sur le sujet en discussion. Et, évidemment, je vous rappelle qu'on discute du projet de loi... «et qu'à cette fin elle entende l'association des garderies...» Je vous prierais, en terminant, de...

Mme Loiselle: J'espère que la ministre réalise que, dans son projet de loi, M. le Président, on parle de garderies.

Alors, en terminant, M. le Président, je peux comprendre, mais j'insiste encore pour que la ministre accepte de rencontrer – demain, on est ici toute la journée – au moins un groupe, l'association de garderies privées, pour que la ministre sache vraiment ce qu'elle est en train de faire et les gestes qu'elle est en train de poser pour les dirigeants et dirigeantes des garderies privées, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci, Mme la députée. Pas d'autres interventions? M. le député?

Une voix: Non, non.


Mise aux voix

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): O.K. Est-ce que la motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Mme Marois: Non, rejeté, M. le Président.

M. Kelley: Vote nominal.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Vote nominal? Mme la secrétaire.

La Secrétaire: M. le député de Jacques-Cartier?

M. Kelley: Pour.

La Secrétaire: M. le député de Notre-Dame-de-Grâce?

M. Copeman: Pour.

La Secrétaire: Mme la députée de Saint-Henri– Sainte-Anne?

Mme Loiselle: Pour.

La Secrétaire: Mme la ministre?

Mme Marois: Contre.

La Secrétaire: M. le député de Salaberry-Soulanges?

M. Deslières: Contre.

(23 h 20)

La Secrétaire: Mme la députée de Sherbrooke?

Mme Malavoy: Contre.

La Secrétaire: Mme la députée de Rimouski?

Mme Charest: Contre.

La Secrétaire: M. le député de Lévis?

M. Garon: Abstention.

La Secrétaire: M. le député d'Ungava?

M. Létourneau: Contre.

La Secrétaire: M. le député de Taschereau?

M. Gaulin: Contre, madame.

La Secrétaire: M. le Président?

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je m'abstiens. Alors, la motion est rejetée. Alors, on commence si vous êtes prêts... Non? M. le député de Jacques-Cartier.

Mme Marois: Moi, je suis prête, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Vous, vous êtes prête, Mme la ministre.

Mme Marois: Oui, tout à fait.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je comprends. À ma gauche...

M. Kelley: Moi, je veux juste, si vous permettez un bref commentaire... On va procéder à l'étude article par article. C'est «le bunker». Nous avons préparé ici beaucoup d'autres motions. On peut continuer. Je pense que le point est fait que la façon dont la ministre a procédé n'est pas respectueuse des groupes qui aimeraient dire quelque chose sur le projet de loi n° 11. Moi, je veux juste souligner, entre autres, qu'on aimerait entendre... il y a une Mme Lemire, qui est la dirigeante des services de garde en milieu scolaire de la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal, il y avait l'Association des services de garde en milieu scolaire, et peut-être la Confédération des syndicats nationaux, la Centrale de l'enseignement du Québec, il y a des parents. Alors, il y a beaucoup de groupes. Et, moi, je peux continuer parce que je pense qu'on a tous intérêt à bonifier le projet de loi, mais je pense que notre point est fait.

Je trouve que la ministre a pris un engagement en Chambre le 3 juin. Et, à cause d'une mauvaise planification des travaux de cette commission et de ce gouvernement, on n'a pas eu l'occasion de le faire. Je trouve ça très regrettable. Mais, cela étant dit, je suis maintenant prêt à procéder à l'étude, et vous pouvez appeler l'article 1. Mais je trouve ça très, très regrettable et peu respectueux pour les regroupements qui travaillent dans le domaine des services de garde au Québec.


Étude détaillée

Loi sur les services de garde à l'enfance


Interprétation et application

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci, M. le député. J'appelle maintenant l'article 1. Mme la ministre.

Mme Marois: Alors, l'article 1, M. le Président – est-ce qu'il y a des gens qui ont des problèmes avec leur gorge? – est modifié:

1° par le remplacement de la définition de l'expression «service de garde en garderie» par la suivante:

«"garderie": un établissement qui fournit un service de garde dans une installation où l'on reçoit, de façon régulière et pour des périodes qui n'excèdent pas 24 heures consécutives, au moins sept enfants auxquels on offre des activités favorisant leur développement physique, intellectuel, affectif, social et moral»;

2° par le remplacement de la définition de l'expression «service de garde en halte-garderie» par la suivante:

«"halte-garderie": un établissement qui fournit un service de garde dans une installation où l'on reçoit au moins sept enfants de façon occasionnelle telle que déterminée par règlement et pour des périodes qui n'excèdent pas 24 heures consécutives»;

3° par le remplacement de la définition de l'expression «service de garde en jardin d'enfants» par la suivante:

«"jardin d'enfants": un établissement qui fournit un service de garde dans une installation où l'on reçoit, de façon régulière et pour des périodes qui n'excèdent pas 4 heures par jour, en groupe stable, au moins sept enfants âgés de 2 à 5 ans auxquels on offre des activités se déroulant sur un période fixe et favorisant leur développement physique, intellectuel, affectif, social et moral»;

4° par l'insertion, dans la première ligne du paragraphe 1°, de la définition de l'expression «service de garde en milieu familial» et après les mots «en incluant ses enfants», de «de moins de 9 ans» et par l'insertion, dans la deuxième ligne du paragraphe 2° de cette définition et après les mots «en incluant leurs enfants», de «de moins de 9 ans»;

5° par l'insertion de la définition suivante:

«"parent": le titulaire de l'autorité parentale ou la personne qui assume de fait la garde de l'enfant, sauf en cas d'opposition du titulaire de l'autorité parentale».

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci, Mme la ministre. Est-ce qu'il y a des commentaires, des questions sur l'article 1?

Mme Marois: Bon, alors, rapidement peut-être, M. le Président, une fois qu'on en a fait la lecture, parce que c'est quand même assez important... Essentiellement, dans les définitions, on change les appellations «service de garde en garderie» pour «garderie» et on définit la garderie comme un établissement, et on ajoute à la définition de garderie – ce qui était souhaité d'ailleurs par les représentantes des garderies que nous avons rencontrées cet après-midi – un volet développement de l'enfant. D'autre part, en ce qui a trait à la halte-garderie, on définit la halte comme un établissement et on prévoit qu'il y aura des règlements qui concerneront la halte-garderie. Il en va de même pour «jardin d'enfants», etc. Donc, on simplifie le vocabulaire. Ça va?

Bon. Maintenant, pour ce qui est de l'autre aspect de l'article, qui concerne la personne qui peut recevoir et qui garde des enfants, elle n'aura pas à inclure ses enfants de neuf ans et plus et ceux de son assistante dans le nombre des enfants gardés. Cela permettra, bien sûr, à la responsable de garder plus d'enfants, ce qui correspond à une demande du milieu, particulièrement dans les milieux, je vous dirais, ruraux, où, évidemment, ce sont beaucoup des familles qui gardent les enfants, donc de la garde en milieu familial, et, souvent, cela amenait des familles à ne pas pouvoir recevoir le nombre d'enfants qui était prévu parce que leurs propres qui avaient neuf ans et plus étaient comptabilisés dans le nombre d'enfants dans la famille. Je sais que, cet après-midi, nous avons eu des remarques sur cela. C'est évident qu'un enfant de neuf ans reste un enfant. Mais nous croyons cependant qu'il est raisonnable d'accepter qu'un tel enfant ne soit plus comptabilisé dans l'ensemble des enfants qui sont gardés et qui, de toute façon, ont moins de neuf ans.

Enfin, sur la question de l'autorité parentale, en fait, quoiqu'il soit souhaitable d'employer le même mot partout, soit le mot «parent»... Parce que, la loi actuelle, elle emploie à la fois «titulaire de l'autorité parentale» et «parent». Donc, ce mot va désigner le titulaire de l'autorité parentale ou la personne qui assure de fait la garde de l'enfant, le titulaire de l'autorité parentale étant celui, évidemment, qui a le dernier mot, car il peut s'opposer à ce que la personne qui assure de fait la garde de l'enfant soit considérée comme parent aux fins de la loi.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci, Mme la ministre. M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: Ma première question, si on peut prendre...

M. Copeman: M. le Président, si vous me permettez... Juste une petite question d'ordre technique, si vous me permettez, M. le député de Jacques-Cartier...

M. Kelley: En tout temps.

M. Copeman: Par souci de faire avancer nos travaux, je ne sais pas si la ministre a l'intention de lire tous et chacun des amendements...

Mme Marois: Non, je n'ai pas d'objection à ce qu'on ne lise pas tous les amendements.

M. Copeman: Parfait. O.K.

Mme Marois: D'accord? C'est parce que c'était le premier article, qui définissait la base des services.

M. Copeman: Je comprends, mais, même à cette heure de la soirée, on est tous capables de lire, je pense.

Mme Marois: Ah! bien, c'est très bien, ça. À ce moment-là, aucun problème.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): C'est aussi ma faute d'avoir oublié d'en parler. M. le député...

M. Copeman: Par souci de faire avancer nos travaux, M. le Président. Vous savez à quel point...

Mme Marois: Très bien.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: C'est juste... Je ne sais pas si on peut poser les questions une par une. Alors, si je commence par le premier alinéa, le changement, c'est d'ajouter – le reste, c'est juste dans le vocabulaire – «...favorisant leur développement physique, intellectuel, affectif, social et moral». Ce sont des termes, je pense... Il faut certaines précisions, surtout... Je trouve ça un petit peu curieux de trouver le mot «intellectuel» parce que Concertaction est venu cet après-midi... «...réflexion sur les dangers de la scolarisation précoce». Alors, je sais qu'«intellectuel» ce n'est pas tout à fait «scolarisation». Mais c'est quoi, dans la tête de la ministre? Qu'est-ce qu'on veut dire par «développement intellectuel»?

Mme Marois: Ça s'adresse à l'intelligence de l'enfant, bien sûr, et au développement de ses capacités...

M. Kelley: Qui est naturelle.

Mme Marois: ...intellectuelles. Alors...

M. Kelley: On est né avec l'intelligence.

Mme Marois: ...je pense que le député de Jacques-Cartier sait sûrement de quoi nous parlons, lorsque nous parlons de cela...

M. Kelley: Non, non, mais, si on prend le temps de changer une loi, il faut avoir une raison de le faire.

Mme Marois: Je suis tout à fait d'accord. Mais, quand on parle...

M. Kelley: Alors, je...

Mme Marois: ...généralement du développement de l'enfant, on s'adresse à l'ensemble de son potentiel, son potentiel, évidemment, étant physique, intellectuel, moral, et c'est ce qu'on retrouve essentiellement dans la définition qui est ici.

M. Kelley: Mais, si ça va faire partie de la définition maintenant, dans la loi, c'est quoi les attentes? Comme j'ai dit, on n'ajoute pas ça... On prend le mot «moral». Le mot «moral», c'est un mot quand même chargé. Dans un autre dossier, la ministre, avec les commissions scolaires et les garanties pour la confessionnalité et tout ça, on tombe dans la moralité, et je pense qu'elle va convenir avec moi que c'est fort compliqué, M. le Président. Alors, avant d'ajouter ça, c'est quoi, l'obligation, pour les garderies, à partir de demain, d'avoir à favoriser le développement moral? Dans le concret, est-ce qu'on va obliger des changements? Est-ce que ça va faire un changement dans les garderies? Pourquoi est-ce qu'on est en train de faire ça? Ou est-ce que c'est juste d'ajouter quelques mots pour ajouter quelques mots?

(23 h 30)

Mme Marois: Non, ce n'est pas pour ajouter quelques mots. Quand on regarde la loi que nous modifions, qui est la Loi sur les services de garde à l'enfance, on voit que «service de garde» – il faut que je le retrouve ici, bon – ne qualifiait pas le type de service qui s'offrait, pas dans la définition en tout cas. Or, depuis un long moment, on sait que, dans les garderies, il s'offre des services de développement aux enfants, il y a des activités de développement de l'enfant. D'ailleurs, c'est ce que souhaitaient et souhaitent toujours les garderies, à savoir qu'on les considère comme des lieux de développement de l'enfant et non pas comme des lieux où on parque l'enfant, si vous me passez l'expression. Donc, ici, on fait référence à l'ensemble des caractéristiques d'un enfant que concerne son développement, soit le développement physique, intellectuel, affectif, social et moral. Quand on pense au développement moral, évidemment, ce sont les valeurs morales de solidarité, de justice, etc. C'est dans ce sens-là qu'on s'assure que les garderies vont être sollicitées dans le sens de ce développement.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce que, Mme Marcotte, la présidente, vous auriez quelque chose à ajouter, de l'information additionnelle là-dessus?

Mme Marois: Si vous le souhaitez, Mme Marcotte, je n'ai aucune objection à...

Mme Marcotte (Nicole): Bien, effectivement, je pense que l'importance après autant d'années d'implication du milieu dans le développement de l'enfant... il fallait trouver la façon de bien décrire dans la loi qu'un service de garde ce n'est pas juste un lieu où on garde des enfants, mais c'est un endroit où il se fait du développement de l'enfant. C'était en lien, dans le fond, avec les exigences qu'on met dans un programme d'activités. C'était important, dans le fond, de le reconnaître dans la loi et aussi d'être capable, éventuellement – si, pour une raison ou une autre, on s'apercevait qu'on ne va pas suffisamment loin dans ce sens-là – d'exiger ou de bien préciser dans des règlements, de façon plus spécifique, des choses, parce que, effectivement, on reconnaît que les garderies ne sont pas que des endroits où on garde des enfants.

M. Kelley: Si je regarde la loi existante, dans l'objet, dans le 1.1: «La présente loi a pour objet de promouvoir la qualité des services de garde à l'enfance, en vue d'assurer la santé, la sécurité et le bien-être des enfants qui les reçoivent.»

Mme Marcotte (Nicole): C'est ça.

M. Kelley: Alors, «le bien-être des enfants», c'est une expression englobante, mais peut-être moins précise. Je pense que de mettre «développement moral»... Pas pour tous les parents parce qu'il y a des parents qui préfèrent que, ça, ce soit quelque chose qui soit fait à la maison, ou à l'église, ou quelque chose comme ça, et ils ne cherchent pas, dans une garderie, un développement moral. Alors, je me demande pourquoi on met autant de précisions dans la définition quand on a déjà, dans le projet de loi, la notion de bien-être des enfants, qui est englobante, qui peut à la fois toucher toutes les choses qui sont ici. Alors, changer la loi pour changer la loi, je ne suis pas convaincu de ça.

Et, comme je le dis, la moralité est quelque chose qu'on touche, comme législateur, avec beaucoup de délicatesse. On procède tranquillement pas vite. Parce que, dans toutes les familles québécoises, il y a des concepts moraux différents. Alors, avant d'imposer que c'est juste les garderies qui possèdent la vertu, je pense qu'il faut faire attention. C'est évidemment le développement physique, intellectuel. Moi, j'ai moins d'objections à ça, mais je pense que le mot «moral» n'est pas pour tout le monde. Moi, je continue de défendre la notion de diversité. Pour les parents, surtout les parents avec certaines croyances religieuses, je pense qu'il faut être respectueux de ça. Alors, je ne vois pas nécessairement que c'est le devoir de nos garderies de procéder au développement des enfants.

Moi, je pense qu'on a tout intérêt... J'aime beaucoup «le bien-être des enfants». C'est quelque chose d'englobant, qui n'est pas limitatif. Ma crainte, c'est juste qu'en allant trop loin, ici, dans la définition... Est-ce qu'il y aura des sanctions, quand une garderie qui ne fait pas tous ses devoirs... s'il y a quelqu'un qui... si c'est vraiment une garderie axée sur l'activité physique? Si c'est pour les jeunes qui aiment courir, qui aiment jouer dehors, et tout ça? C'est les parents qui disent que les enfants auront assez d'école à partir de la maternelle... laisser la chance d'avoir une garderie dévouée aux activités physiques. Est-ce qu'il n'y a pas de problème avec ça? Moi, je ne pense pas. Alors, pourquoi être allé avec trop de précisions dans notre définition de base de «garderie»? Parce que ça suggère que peut-être, s'il y a une garderie qui ne répond pas... qui ne fait pas toutes ces activités, ce n'est pas une garderie. Je pense que c'est faux, M. le Président.

Mme Marois: Écoutez, M. le Président, on peut discuter sur le fond. Je n'ai pas d'objection.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Oui, je pense qu'on...

Mme Marois: Je regardais, d'ailleurs, la définition de «moral» au dictionnaire: «Qui concerne les moeurs, les habitudes et surtout les règles de conduite admises et pratiquées dans une société.» Cependant, je ramènerais le député au texte de la loi actuelle, que nous amendons par le projet qui est devant nous, et on constatera que, dans la loi actuelle, ça y est déjà, mais c'est dans un autre article, qu'on le retrouve, lorsque, à l'article 4, on dit: «Un permis de service de garde en garderie ne peut être délivré qu'à...» puis là on décrit les organismes qui peuvent recevoir un permis, qui peuvent demander un permis. Et on définit le requérant, qui doit s'engager, et je cite, «à fournir aux enfants des services de garde et un programme d'activités favorisant leur développement physique, intellectuel, affectif, social et moral et doit de plus remplir les autres conditions prévues par la présente loi ou ses règlements».

Alors, on s'assure tout simplement que ce qu'on demande au requérant se retrouve dans la définition même du service de garde en garderie. Notre loi, évidemment, a été adoptée en 1979, mais a été amendée en 1982, en 1988, en 1989 et en 1992, cet article en particulier, et on retrouve toujours ces mêmes éléments.

Je reviens à la définition de la notion de «moral». Dans le fond, je dirais que ce sont des distinctions de base entre le bien et le mal, entre la vérité et le mensonge, etc., ce qui est très normal que... c'est-à-dire qu'il est très normal – pardon, il est un peu tard – il est très normal, M. le Président, qu'évidemment cela se retrouve dans un programme général de développement de l'enfant.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député, est-ce que la réponse vous convient?

M. Kelley: C'est parfait.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci. Est-ce que l'article 1 est adopté?

Mme Marois: Adopté.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce qu'il y a d'autres questions? Je m'excuse.

M. Kelley: Oui. J'ai regardé ça alinéa par alinéa. Alors, je...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ah! Alors, allez-y, M. le député.

M. Kelley: J'étais juste en train de faire la comparaison entre les définitions existantes et la nouvelle formulation pour voir le pourquoi des changements. Alors, par économie, on veut enlever «les services de garde» partout pour éviter la répétition? C'est ça, le...

Mme Marois: Oui, tout à fait. C'est ça.

M. Kelley: Très bonne idée. C'est juste pour mon information. Un «groupe stable», dans l'alinéa 3°, c'est une liste qui est plus ou moins... Comment est-ce qu'on applique la notion de groupe stable?

Mme Marois: Un groupe stable, c'est généralement un groupe régulier, c'est-à-dire un groupe où on retrouve le même nombre d'enfants et les mêmes enfants.

M. Kelley: C'est parce que, moi... C'est juste que, quand nous avons participé à un jardin d'enfants, il y avait l'option pour les parents de participer trois, quatre ou cinq jours par semaine. Alors, le groupe n'était pas complètement stable.

Mme Marois: Non. C'est sûr qu'il n'est pas, nécessairement, complètement stable, mais généralement stable.

M. Kelley: Non, non. Mais, encore une fois, c'est juste que... Je sais les nuances...

Mme Marois: Oui, oui, je comprends bien.

M. Kelley: ...mais, vu qu'on va mettre en vigueur la notion des jardins d'enfants... Notre groupe n'était pas stable, il y avait une variation. Souvent, les parents qui travaillent quatre jours par semaine n'en ont pas besoin les vendredis et il y a moins de monde les vendredis. Il y a d'autres personnes qui...

Mme Marois: Oui, mais c'est vraiment, je dirais, par comparaison, par exemple, avec la halte-garderie, où on dit que c'est un établissement qui fournit un service à au moins sept enfants de façon occasionnelle, tandis que, là, c'est de façon stable dans le sens où généralement on retrouve les mêmes enfants dans un même groupe. Ce n'est pas toujours les mêmes enfants dans le même groupe, mais il y a quand même une notion de stabilité.

M. Kelley: Sur l'alinéa 4°, j'ai écouté la ministre, mais c'était assez compliqué.

Mme Marois: Oui, quand on le lit. Ha, ha, ha!

(23 h 40)

M. Kelley: Les changements, si je peux résumer ça, c'est que dans une agence en milieu familial, maintenant on compte les enfants de 9 ans à 12 ans?

Mme Marois: Actuellement, quand on regarde la loi, on dit: «"service de garde en milieu familial" [...] dans une résidence privée où elle reçoit, en incluant ses enfants, au plus six enfants parmi lesquels au plus deux enfants peuvent être âgés de moins de 18 mois – alors, c'est six enfants incluant les siens – ou, si elle est assistée d'une personne adulte [...] au plus neuf enfants parmi lesquels au plus quatre enfants peuvent être âgés de moins de 18 mois.»

Donc, on précise dans la modification que l'on apporte ici que ce sont des enfants... Parce que la lecture, quand on fait le recoupage, effectivement... Elle n'aura pas à inclure ses enfants de 9 ans et plus, mais les enfants de moins de 9 ans devront toujours être inclus dans le maximum d'enfants qui peuvent se trouver en même temps dans sa maison qui sert pour de la garde en milieu familial.

M. Kelley: Ah! C'est ça. Mais le changement, c'est que les enfants de neuf ans et plus...

Mme Marois: C'est ça.

M. Kelley: ...ne comptent plus.

Mme Marois: Voilà. Ne sont plus comptés.

M. Kelley: Et...

Mme Marois: Comme me dit Mme la présidente de l'Office, ça ne veut pas dire qu'ils ne sont pas gardés, mais ils ne sont plus comptés.

M. Kelley: Non, non, non, mais je comprends que ça va lui permettre d'admettre un enfant de plus.

Mme Marcotte (Nicole): C'est très difficile, de toute façon, parce que, souvent, les enfants de neuf ans, c'est des enfants de deuxième cycle du primaire qui arrivent, bon, en fin de journée, ce qui empêchait, dans le fond, la responsable de recevoir un enfant de plus toute la journée. Dans l'application, la loi ne précisait pas l'âge des enfants. Donc, vaut mieux venir le préciser et être capable de s'entendre sur un niveau d'âge qui est acceptable que de laisser les choses floues comme c'était dans le moment.

M. Kelley: Si je peux ouvrir une parenthèse, parce que, chez nous, les enfants arrivent à 14 h 35: ce n'est pas la fin de la journée. Mais les heures d'école, ça, c'est un autre dossier avec la ministre, dans un autre contexte.

Mme Marois: Un autre dossier, un autre contexte, une autre commission parlementaire.

Une voix: 3 h 20, c'est de bonne heure.

M. Kelley: Alors, la fin de la journée, c'est optimiste un petit peu.

Le changement dans l'alinéa 5°, c'est comme le changement qui a été fait dans la Loi sur l'instruction publique et le changement dans le Code civil aussi?

Mme Marois: Oui, je crois que c'est cela. En fait, c'est qu'on dit, par l'insertion de la définition de «parent»... Je vais revenir à la loi originale. C'est que, dans notre loi, actuellement, on parle de l'autorité parentale et on vient ici changer cela par la définition de «parent», qui désigne le titulaire de l'autorité parentale ou la personne qui assure de fait la garde de l'enfant.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ça va pour l'article 1?

M. Kelley: Oui. Je pense que mon collègue...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce qu'il y a d'autres questions? M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Copeman: Oui, juste une petite question, M. le Président, si vous me permettez. Dans nos lois – je n'ai pas assez d'expérience, malheureusement, avec nos lois – est-ce que, quand on indique le masculin un peu tout partout, on a une prévision pour le féminin? Est-ce qu'on dit dans la loi, quelque part, que... Parce que, moi, je regardais «le» titulaire de l'autorité parentale. Est-ce que ça ne peut pas également être «la» titulaire? Puis dans...

Mme Marois: Ça peut être tout à fait «la» titulaire. Bien sûr.

M. Copeman: Mais... O.K.

Mme Marois: Et nos lois incluent...

M. Copeman: C'est peut-être plus souvent «la» titulaire que «le» titulaire.

Mme Marois: Malheureusement, dans certains... Oui, c'est inclus dans nos lois. Le masculin inclut le féminin, dans ce cas-ci. C'est amusant qu'on soulève ça, parce qu'une de mes premières interventions, lorsque j'ai eu une fonction ministérielle il y a déjà quelques années, a été de me préoccuper de cette question. Dans les faits, nos lois sont écrites au masculin et elles comprennent le féminin.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ça répond, M. le député?

M. Copeman: Ça répond.

Mme Marois: Je suis heureuse d'entendre quelqu'un... Peut-être, cependant, qu'il serait d'accord avec moi pour...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ça se corrige éventuellement.

Mme Marois: ...qu'on puisse le féminiser.

M. Copeman: Ah oui! Tout à fait.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce qu'il y a d'autres questions sur l'article 1?

M. Kelley: Juste pour revenir... Mais c'est conforme à d'autres... La raison pour laquelle je... On vient de regarder la Loi sur l'aide juridique et j'ai été étonné d'apprendre qu'on a 16 définitions différentes de «conjoint» dans nos lois québécoises. Est-ce que pour «parent», on voit ça dans toutes nos lois? Est-ce qu'on a une certaine concordance ou est-ce qu'on a différentes formulations pour dire la même chose?

Mme Marois: Voilà, c'est exactement l'harmonisation avec le Code civil.

M. Kelley: Parfait. C'est juste pour vérifier, parce que, quand nous avons essayé de définir «conjoint»...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): On est là pour ça. C'est le rôle de la commission. Est-ce qu'il y a d'autres questions sur l'article 1? Est-ce que l'article 1 est adopté?

Mme Marois: Adopté, M. le Président.

M. Kelley: Adopté.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Adopté. Article 2. Je vais me permettre de dire: Est-ce qu'il y a des questions sur l'article 2? Ou, Mme la ministre, est-ce que vous voulez donner une courte explication?

Mme Marois: Je vais donner une courte explication, parce que, là, il faut que je les relise évidemment pour moi-même, en tout cas, à tout le moins.

Encore une fois, on dit: Le paragraphe 1° vise à souligner que la loi a pour objet d'assurer aussi le développement de l'enfant en service de garde et le paragraphe 2° vise à préciser que la loi privilégie le développement des garderies et agences sans but lucratif.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce qu'il y a des questions sur l'article 2? Est-ce que l'article 2 est adopté?

M. Kelley: Un moment.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Excusez. M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: Encore une fois, on fait un changement: «sous réserve des restrictions contenues dans la présente loi». Pourquoi est-ce que nous avons ajouté ça?

Mme Marois: Attendez un petit peu, je vais vous... Alors, Mme Marcotte va répondre.

Mme Marcotte (Nicole): Ici, il s'agit, dans le fond, de venir souligner dans la loi qu'on a pour objet d'assurer aussi le développement de l'enfant en service de garde. On ne peut pas retrouver cet élément-là juste dans la définition. Il faut le retrouver dans l'élément de la loi qui concerne plus précisément cet article-là.

Ici, on est vraiment dans le coeur de l'application de la loi. Donc, il faut, si on veut introduire la notion de développement, qu'on vienne l'introduire à cet article-ci. Donc, c'est cohérent, dans le fond, avec le changement qui est fait au niveau de la définition parce qu'on vise le développement harmonieux de l'enfant et c'est...

M. Kelley: Oui, mais ça, c'est dans le premier. Moi, je suis dans le deuxième.

Mme Marcotte (Nicole): Oui, l'article 2. C'est ça, l'article 2.

M. Kelley: Mais «sous réserve des restrictions contenues dans la présente loi».

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Mme Marcotte est la présidente.

Mme Marcotte (Nicole): Oui, c'est ça.

M. Kelley: Et le député de Charlevoix est le président. Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Lévis, Mme Marcotte est la présidente de l'Office de garde du Québec... des services...

Une voix: Des services de garde à l'enfance.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): ...de garde à l'enfance. Est-ce que ça répond à votre question?

M. Garon: Vous êtes supposé nommer les personnes...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Pour fins d'enregistrement? C'est beau. M. le député, est-ce que...

Mme Marois: Attendez un petit peu, M. le Président. On va donner l'explication, quand même, si c'était possible. Madame, identifiez-vous.

Mme Joyal (Danielle): Danielle Joyal, avocate à l'Office. Alors, c'est que tous les services ne reçoivent pas l'exonération et les subventions. C'est toujours sujet à la possibilité qu'ils soient retenus à un plan de développement. C'est sujet aux restrictions concernant le financement. C'est pour ça qu'il fallait mettre un bémol lorsqu'on dit privilégier les garderies et agences, parce que c'est toujours sujet à la fixation et à la répartition.

(23 h 50)

M. Kelley: Mais c'était le cas antérieurement aussi. Et on a réussi à faire fonctionner l'Office... Encore une fois, c'est juste la question... Si on prend la peine de changer un article, il faut connaître le raisonnement. Si, depuis 1979, on a été capable de vivre avec le libellé tel qu'il existe... On savait que c'était toujours assujetti à un plan de développement, au règlement qui prévoit la fixation du nombre de places, au règlement qui fixe l'exonération et l'aide financière aux parents. Ça, c'est tout prévu. Alors, je me demande pourquoi... Parce qu'on est toujours dans les déclarations plus ou moins des objets. Alors, c'est évident qu'on va venir limiter ça plus loin, dans le projet de loi, parce que c'est toujours... Toute application de loi est limitée par les moyens de l'État, et tout ça. Alors, je me demande pourquoi on ajoute après 17 ans... Parce qu'on avait cette déclaration «de favoriser le développement harmonieux», ça existe depuis ce temps-là.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Mme Marcotte, vous avez un commentaire additionnel? Vous sembliez être prête.

Mme Marcotte (Nicole): C'est parce que je ne comprends pas très bien le sens de la question. Pourquoi on ajoute «17 ans»?

Mme Marois: Non. Pourquoi on ajoute «sous réserve des restrictions contenues dans la présente loi»? On le faisait, sauf que ce que je comprends, c'est qu'il y avait nécessité de le dire dans la loi, pour une forme de sécurité, si on veut, lorsque nous sommes amenés à mettre des restrictions, par exemple, sur le nombre de places à développer et sur le financement disponible pour ce nombre de places que nous développons. C'est bien cela, Me Joyal?

Mme Joyal (Danielle): Oui.

Mme Marois: Voilà.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ça va, M. le député?

M. Kelley: En tout cas, moi... Si c'est lié au financement, pourquoi ne pas mentionner «le financement» directement, si c'est ça qu'on... Comme je dis, ça m'apparaît un petit peu curieux, juste... Si c'est une précision qu'on cherche, qu'on trouve une formulation plus précise. Si c'est juste pour ajouter des mots, je suis toujours réticent à le faire.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Mme Joyal, est-ce que vous pouvez préciser davantage?

Mme Marois: Bien, écoutez, on ne peut pas vous donner d'autre explication que celle qu'on vous donne maintenant... Ce n'est pas Me Joyal qui parle, là, c'est Mme Marois, la ministre responsable. Non, mais il n'y a pas d'autre explication que celle de sécuriser le geste que nous posons par la suite, que nous posions déjà, ça ne change pas, mais ça nous assure que, dans la loi, on retrouve très clairement énoncée cette restriction.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ça va? Est-ce que l'article 2 est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Adopté. Article 3. Mme la ministre.

Une voix: Là, c'est compliqué.

Mme Marois: Bien, on revient à la définition justement de «parent», qui sera remplacée tout au long, là. C'est de la concordance par rapport à ce qu'on a adopté tout à l'heure.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ça va? L'article 3, est-ce qu'il est adopté?

M. Copeman: C'est peut-être moi qui ai mal compris, M. le Président, si vous me permettez, là. Dans l'article 1, à l'alinéa 5°, après la définition de «parent», on ajoute «le titulaire de l'autorité parentale». C'était ça, le but de l'article 1?

Mme Marois: Non, c'est l'inverse.

M. Copeman: Pardon? C'est l'inverse?

Mme Marois: C'est ça. Voilà. C'est que la loi actuelle emploie à la fois «titulaire de l'autorité parentale» et «parent». Alors, il est souhaitable d'employer le même mot partout, le mot «parent». Donc, là, on l'a modifié là-bas, et, maintenant, on fait de la concordance ici, tout simplement.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ça va? Est-ce que l'article 3 est adopté?

Mme Marois: Adopté.


Organisation des garderies, des jardins d'enfants, des haltes-garderies et des services de garde en milieu familial

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): L'article 4.

Mme Marois: Attendez un petit peu, là. C'est de la concordance aussi, puisqu'on change le titre, tout simplement. Alors, comme on change le titre de la loi actuelle, pour lequel nous avons changé les définitions dans le premier article, on fait de la concordance au niveau du titre.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce qu'il y a des questions?

M. Kelley: Dans la loi existante, est-ce qu'on va biffer les sections et mettre tout ça dans une section? Parce que, maintenant, on parle de chapitre II, «Organisation des services de garde», section I, garderies, jardins d'enfants, haltes-garderies et en milieu familial.

Mme Marois: Regardez, là... Non, on ne change rien. On reste toujours avec la même section. C'est toujours le même chapitre II, c'est toujours la section I. La section I disait: «Organisation des services de garde», alors que, maintenant, ça va se lire: «Organisation des garderies, des jardins d'enfants...» C'est le titre lui-même qui est changé, c'est tout, pour enlever le mot «services» comme on l'a fait au niveau des définitions. Concordance.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce qu'il y a... Oui, M. le député.

M. Copeman: Je vois, dans la version anglaise de la loi... Est-ce qu'il n'y avait pas lieu de le changer en anglais aussi? Parce qu'on dit: The said Act is amended by replacing, in the French text, the heading of Division I of Chapter II...

Mme Marois: Est-ce qu'on l'a avec nous, la version anglaise?

M. Copeman: Je me demandais s'il n'y avait pas lieu de le faire en anglais aussi.

Mme Marois: Normalement, il y a une concordance parfaite qui est faite du côté de...

M. Copeman: O.K. Mais on l'«avait-u» dans le texte anglais de la loi, de dire que le titre d'un chapitre, d'une division... Là, on répète le français puis on dit qu'on change le français, puis l'anglais est changé automatiquement après? Est-ce que c'est ça qu'on fait?

Mme Marois: C'est ça. Ce n'est pas la même... Ce n'est pas nécessaire, c'est ça. Je pense que ce n'était pas nécessaire à ce moment-là.

M. Copeman: O.K. C'est ça, ma question: Est-ce que c'était nécessaire ou pas?

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Réponse satisfaisante?

M. Copeman: Bien, je ne sais pas. Mon collège m'a donné une réponse. On va voir si la ministre...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): C'est ce que Mme l'avocate dit, je pense.

Mme Joyal (Danielle): Je n'ai pas le texte devant moi, mais ce qu'on me lit... «Day-care center» ne rendait pas la modification nécessaire.

M. Copeman: Alors, si vous me permettez, M. le Président, l'anglais: «Organization of Day-care Centers, Nursery Schools, Stopover Centers and Home Day-care» is...

Mme Marcotte (Nicole): La problématique ne se pose pas de la même façon...

Mme Marois: C'est ça, exactement, avec la langue anglaise.

M. Copeman: Quelle heureuse nouvelle!

Mme Marois: Ce sont les particularités propres des langues avec lesquelles nous communiquons.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Alors, est-ce qu'il y a d'autres questions sur l'article 4? Est-ce que l'article 4 est adopté?

Mme Marois: Adopté.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Compte tenu de l'heure, j'ajourne les travaux sine die.

(Fin de la séance à 23 h 57)


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