To use the Calendar, Javascript must be activated in your browser.
For more information

Home > Parliamentary Proceedings > Committee Proceedings > Journal des débats (Hansard) of the Committee on Social Affairs

Advanced search in the Parliamentary Proceedings section

Start date must precede end date.

Skip Navigation LinksJournal des débats (Hansard) of the Committee on Social Affairs

Version finale

33rd Legislature, 2nd Session
(March 8, 1988 au August 9, 1989)

Wednesday, May 10, 1989 - Vol. 30 N° 81

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultations particulières dans le cadre de l'étude du projet de loi 116 - Loi sur les régimes complémentaires de retraite


Journal des débats

 

(Dix heures dix-sept minutes)

Le Président (M. Bélanger): A l'ordre, s'il vous plaît! Je demanderais à chacun de bien vouloir prendre place afin que la commission des affaires sociales procède à des consultations particulières et à des auditions publiques dans le cadre de l'étude du projet de loi 116, Loi sur les régimes complémentaires de retraite. Y a-t-il des remplacements ce matin?

La Secrétaire: Non, M. le Président.

Le Président (M. Bélanger): Aucun remplacement, bien. Nous recevons un premier groupe à la table des témoins, la Chambre de commerce du Québec, qui sera représentée par M. Jean-Paul Létourneau, par Me Louise Marchand et par M. Richard Bisson.

Je ne vous expliquerai pas nos règles de procédure, sauf de vous rappeler de faire attention à notre personnel qui est chargé de la transcription. Alors, quand vous aurez à prendre la parole, s'il vous plaît, veuillez vous identifier afin que le Journal des débats soit le plus fidèle possible. Sans plus tarder, je vous inviterais à procéder à la présentation de vos collègues et de votre mémoire. Merci.

Chambre de commerce du Québec

M. Létourneau (Jean-Paul): Merci, M. le Président. Mon nom est Jean-Paul Létourneau. Je suis le vice-président exécutif de la Chambre de commerce du Québec. Je suis accompagné, pour les fins de la présentation de notre mémoire à cette commission, comme vous l'avez déjà signalé, par Me Louise Marchand, directrice de la recherche à la Chambre de commerce du Québec, et par M. Richard Bisson, actuaire, vice-président à la firme MLH et A inc.

Pour ceux à qui cela peut rappeler des souvenirs, autrefois, dit-on, cela voulait dire Marcel Le Houillier et associés. N'est-ce pas, monsieur? Hébert Le Houillier, c'est cela.

M. le Président, nous avons relativement un court mémoire. Je pense que je vais en lire des extraits pour essayer de m'en tenir aux vingt minutes qui nous sont allouées pour la présentation du mémoire.

La Chambre de commerce du Québec tient à remercier tout d'abord le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu et ses collègues de l'Assemblée nationale de la possibilité qui lui est offerte de soumettre ses commentaires sur un projet de loi volumineux qui a des impacts sur les entreprises québécoises et, particulièrement, les PME. Vous remarquerez qu'au cours de notre mémoire nous attachons de l'importance, en plusieurs endroits, à l'impact sur les PME; donc, cet impact-là sera signalé.

Relativement aux régimes supplémentaires de rentes ou complémentaires de retraite - incidemment, le changement d'appellation nous laisse un peu perplexe; on n'a pas réussi à en découvrir la raison, mais enfin, on en parlera peut-être plus tard avec M. le ministre - la Chambre recommande depuis longtemps la mise en place de tels régimes par les employeurs dans leurs entreprises et la facilitation de l'expansion de ces régimes chez les employeurs. Nous estimons que ces objectifs peuvent être atteints par une intervention minimale du gouvernement, par l'intermédiaire des régimes publics et par une réglementation la plus légère et la plus encourageante possible pour les employeurs offrant déjà cet avantage à leurs employés ou qui songeraient à le faire.

Comme dans les autres dossiers où nous intervenons auprès du législateur, nous nous exprimons ici au nom de la très grande majorité de nos membres et de tous les employeurs qui respectent les lois et qui se comportent comme des personnes morales raisonnables et responsables.

La Chambre estime que la réglementation des régimes supplémentaires de rentes est déjà très lourde pour toutes les entreprises et, en particulier, pour les petites et moyennes entreprises. Tout en acceptant que les règles de fonctionnement de nos régimes supplémentaires doivent s'harmoniser au mieux avec celles des régimes semblables au fédéral et dans les autres provinces canadiennes, nous estimons qu'un maximum de liberté doit être laissé aux employeurs d'implanter des régimes en leur faisant confiance. D'ailleurs, la Chambre adhère au principe que la sécurité du revenu à la retraite constitue une responsabilité qui appartient d'abord aux individus et aux groupes privés.

Dans les notes explicatives, le législateur souligne que "l'objet de ce projet de loi est d'assurer une plus grande protection des droits acquis par les travailleurs qui participent à un régime de retraite." Nous souscrivons à cet objectif et soulignons que cette préoccupation exprimée par le législateur rejoint celle de la majorité des entreprises du Québec qui offrent un tel régime à leurs employés pour les aider à mieux préparer leur retraite.

Je passe à la page suivante pour ceux qui suivent notre texte. Article 6: la nature du régime de retraite. Cet article, qui précise que le régime de retraite est un contrat, nous laisse perplexes. Quel est l'objectif que veut atteindre le législateur en procédant ainsi et en ne spécifiant pas qui sont les parties à ce contrat, ainsi que le fait le Code civil? Incidemment, on y trouve là aussi un particularisme québécois qui pourrait peut-être rendre difficile l'harmonisation avec le reste du pays, entre autres choses. L'article 984 du Code civil précise en

Débats de l'Assemblée nationale 10 mai 1989 effet que, pour qu'il soit valide - en parlant d'un contrat - il faut des parties. En l'espèce, outre l'employeur dont on peut présumer qu'il est une partie à cause de l'esprit de la loi et de toutes les obligations qui lui incombent, on peut légitimement se demander qui est l'autre partie. Est-ce que ce sont les participants en général, chaque participant en particulier, le ou les employés ou, le cas échéant, le syndicat? S'agit-il plutôt d'une stipulation pour autrui en vertu des articles 1028 et 1029? Enfin, on pourra débattre cette question plus tard.

Par ailleurs, en combinant l'article 6 aux articles 14, 15e, 136 et 137, on est confronté au fait qu'un employeur lié par un contrat (article 6) doit déterminer dans le texte du régime (articles 14 et 15e, encore une fois) "à qui, de môme qu'à quelles conditions pourra être attribué tout excédent d'actif et à quelles conditions cet excédent pourra être affecté à l'acquittement de cotisations."

En vertu des articles 136 et 137, "l'excédent d'actif ne peut être affecté à l'acquittement de cotisations salariales ou patronales que si la vérification de la capitalisation et de la solvabilité ont déterminé chacune un excédent d'actif, le moindre des deux excédents ainsi déterminé devant être utilisé à cet effet.

On se retrouve donc dans la situation où un employeur ne pourrait utiliser les surplus ou excédents d'actif pour acquitter ses cotisations si rien n'a été prévu au contrat, quand bien même il serait le seul cotisant ou si l'excédent d'actif lui permettait de dépasser les engagements pris.

Comme la loi entrerait en vigueur le 1er janvier 1990, selon l'article 315, on peut légitimement s'interroger sur le sort des régimes existants et présumer qu'ils devraient s'ajuster à la nouvelle philosophie "contractuelle", entre guillemets, rétroactivement, ce qui donne à penser que, notamment au titre des surplus existants, il y aurait risque de ne rien pouvoir modifier.

En outre, avec ces 315 articles qui encadrent la rédaction et le fonctionnement du contrat, la loi est tellement rigide et spécifique dans ses prescriptions que nous nous expliquons mal comment le législateur peut encore qualifier le régime de contrat, ce qui normalement laisse présumer un esprit de "consensual isme" et de libre choix entre les parties. Nous craignons même qu'en raison, justement, de cet esprit rigoriste et lourd à administrer plusieurs petits et moyens employeurs ne cèdent à la tentation d'évacuer ce champ d'intervention pour adopter des régimes de retraite plus souples et surtout moins complexes. Compte tenu de ces remarques et parce que la nature de ces bénéfices ne s'accorde pas avec la notion de contrat, nous sommes d'avis que ce terme de contrat devrait être éliminé.

La responsabilité des administrateurs. Le projet de loi 116 alourdit beaucoup trop la responsabilité des administrateurs d'un régime. Tout d'abord, la simple comparaison de la loi actuelle, Loi sur les régimes supplémentaires de rentes, avec le projet de loi 116 nous fait passer d'une loi de 81 articles à une loi de 315 articles pour les mêmes fins, et ceci ne tient pas compte des règlements. Pour nous, c'est de l'inflation législative.

D'autre part, la Chambre de commerce s'inquiète de l'esprit de responsabilisation que l'on retrouve dans la nouvelle loi, esprit sous-jacent à la législation créant le moratoire de décembre 1988. Par les modifications apportées à la Loi sur les régimes supplémentaires de rentes, la loi 95 renverse, en effet, le fardeau de la preuve en créant à l'égard de certains versements non autorisés de l'actif de la caisse une présomption d'avoir été fait avec l'intention de frauder. En outre, ces dispositions précisent que si l'administrateur est une personne morale, les membres de son conseil d'administration doivent répondre personnellement et solidairement d'avoir consenti à tout versement illégal.

Nous nous permettons de manifester notre inquiétude quant a ce qu'il adviendra de ces nouvelles dispositions dérogatoires au chapitre de la responsabilité des membres d'un conseil d'administration et, d'autre part, de ce que nous retrouvons, dans cette même foulée, au projet de loi 116. L'article 51 crée encore une exception au principe de la responsabilité limitée pour les cotisations échues et nous nous interrogeons également sur la portée des articles 153 et 154 qui traitent de la responsabilité de l'administrateur de régimes de retraite.

Puis on apprend, à l'article 165, qu'il y a l'obligation pour les administrateurs d'établir une politique de placement, contenant toute une panoplie de critères difficiles à prévoir et à respecter. Par exemple, comment établir et prédire - je cite la loi, à l'article 165.2 - "le degré de risque attaché au portefeuille, eu égard, notamment, à la fluctuation des cours"? Songeant surtout ici aux petites et moyennes entreprises, voilà encore des coûts de gestion du régime qui seront onéreux, compte tenu de tous les types d'expérience professionnelle que requiert l'établissement d'une politique aussi formaliste.

Une autre responsabilité nouvelle aux administrateurs qui pourra être très lourde et qui nous apparaît même vouée à l'inefficacité, c'est l'obligation de convoquer une assemblée générale des participants à un régime. C'est l'article 162. Notons d'abord que c'est une disposition qui ne se retrouve pas dans le consensus canadien et que ce serait donc une obligation particulière faite aux employeurs québécois. Les données relatives à un régime de retraite deviennent très rapidement complexes et difficiles à apprécier, et une assemblée générale ne nous apparaît pas être le moyen approprié pour transmettre adéquatement les informations qui doivent être communiquées. Toutes sortes d'embûches attendent cette formule, dont les coûts de réalisation 10 mai 1989

Commission permanente

ne sont pas les moindres. Nous ne citerons que le cas d'une entreprise de plus de 2000 employés ou même de 100 employés répartis sur un vaste territoire.

D'autre part, pour toute entreprise, on peut finalement imaginer qu'à la longue la participation à une telle réunion pose un problème de présence. Qu'arrivera-t-il alors de la validité des décisions qu'on pourra y prendre? Les réalités que nous connaissons relativement à l'intérêt et à la compréhension des participants pour ce qui est de leur régime de retraite, font qu'un ou des moyens de communication beaucoup plus révélateurs et efficaces qu'une assemblée générale peuvent être utilisés. Le projet de loi en prévoit d'ailleurs plusieurs aux articles 105 à 109.

Enfin, on apprend, par l'article 145, qu'un employeur ne peut gérer la caisse de retraite du régime. Je ne m'étendrai pas là-dessus parce qu'on m'a prévenu qu'hier il y avait eu une déclaration ministérielle qui semblait annuler cette requête, à toutes fins utiles, ou enfin, répondre à cette requête.

Transfert de droits et d'actifs. Au chapitre des transferts, nous constatons que de nombreux critères sont inscrits au projet de loi. Par contre, le dernier alinéa de l'article 96 demeure, à notre avis, trop peu révélateur des intentions du législateur. En effet, nous aimerions qu'on y précise que le transfert dans un REER immobilisé, par exemple, est permis. Ce serait là une solution commode à la fois pour les participants et les administrateurs du régime.

Par ailleurs, nous disons tout de suite au législateur que nous nous opposerions à une autre possibilité de transfert déjà évoquée, soit celle d'un fonds de transfert administré par la RRQ et dont elle pourrait décider par règlement.

Le financement et la solvabilité. Au chapitre du financement et de la solvabilité, la Chambre observe que le projet ajoute au test habituel et bien connu de la capitalisation d'un régime complémentaire un deuxième test qu'on appelle "solvabilité" (articles 114 à 135). Ces deux tests conjugués ont pour objet d'ajouter à la sécurité du régime pour les participants. Il est difficile de nous opposer en principe à un tel objectif, ainsi que nous l'avons souligné plus haut, à cause du fait que ça devient partie du consensus canadien. Toutefois, nous aimerions faire remarquer au législateur que rechercher la sécurité à 100 % est un exercice coûteux et qu'encore une fois on en fait payer le prix aux employeurs, lesquels assument déjà les risques de leur entreprise et presque tous les risques du régime. Ils devront en assumer encore plus parce que, dorénavant: 1) les possibilités que le régime soit en déficit actuariel sont augmentées, d'où une obligation de devoir combler plus de déficits qu'auparavant, et plus rapidement; 2) sont, parallèlement, diminuées les possibilités d'obtenir des surplus qui peuvent être utilisés pour acquitter des contributions de l'employeur; 3) la nécessité de faire exécuter par des actuai- res ce deuxième test ajoutera autant aux coûts administratifs du régime qui seront encore une fois absorbés par l'employeur. Ici, nous pensons à nouveau aux moyennes et petites entreprises qui ont un régime ou qui songent à s'en doter. Tous ces coûts additionnels peuvent devenir onéreux et décourageants, surtout lorsqu'ils s'appliqueront à des fonds pour lesquels ils représenteront une partie significative du rendement. (10 il 30)

L'article 190 et les suivants: scission et fusion. Par les mécanismes mis en place par ces articles, le législateur rend la scission ou la fusion de l'actif ou du passif d'un régime tellement difficile et complexe qu'il bloque, à toutes fins utiles, quelque initiative en ce sens. Nous somme d'avis que si, d'aventure, une telle opération devenait nécessaire les employeurs n'auront d'autre choix que de liquider le régime existant ou de continuer à administrer plusieurs régimes pour des employés de même classification, avec tous les embêtements que cela représente.

Je passe aux observations générales. En parcourant ce projet de loi, nous sont venues une série non exhaustive d'observations, et incidemment nous avons ici, M. le Président, consulté des experts, et ce que nous vous apportons, c'est la perception des gens d'affaires, des avis que les experts nous ont donnés de ce que contenait la loi. Alors, encore une fois, nous déplorons devoir évaluer un projet de loi sans les règlements qui lui donnent tout son sens. Avec les énormes pouvoirs de réglementation que se donne en plus la Régie des rentes du Québec, nous sommes loin d'examiner un projet de loi qui a toute la transparence souhaitable.

Nous observons que l'État évite bien de s'imposer le flot de contraintes qu'il impose à l'entreprise par le projet de loi. Nous comprenons que, pour ce qui est des règles de capitalisation des régimes, l'État est une entité différente dont la pérennité est plus certaine, mais on voit quand même qu'il y a des déficits considérables qui se sont accumulés du côté de l'État, qui sont même difficiles et très lourds à porter.

Comment réagirait l'État si on lui imposait aussi les règles de l'assemblée générale annuelle, les dispositions qui traitent du placement, la règle des 50 %, la revalorisation des rentes après l'âge de la retraite, l'obligation de faire porter intérêt à la cotisation de l'employé qui quitte avant un an de service, la prestation de décès avant la retraite, et ainsi de suite?

À la suite des pressions des milieux d'entreprise, le gouvernement a mis sur pied, en 1988, le comité sur la gestion documentaire, alors sous l'autorité du ministre responsable de la PME, dont le mandat est de vérifier le fardeau administratif additionnel, c'est-à-dire la paperasse, que toute une nouvelle loi pourrait apporter à l'entreprise et particulièrement à la PME. Je dois vous dire que nous, du milieu des affaires, avons obtenu de haute lutte ce comité de la part

Débats de l'Assemblée nationale 10 mai 1989 du gouvernement et il a finalement été accordé justement pour évaluer le fardeau de la paperasse que toute nouvelle loi pourrait apporter à l'entreprise et particulièrement à la PME. Alors, comme ce comité existe toujours, selon nos informations, nous demandons que cette commission sollicite son avis à l'égard du projet de loi 116.

Nous sommes très déçus de constater que le projet de loi 116 ne met pas un terme au moratoire imposé aux surplus des caisses de retraite que le projet de loi 95 a gelés. La Chambre estime que cette mesure législative, imposée à tous les employeurs, crée des inquiétudes et des embarras inutiles pour une grande majorité des employeurs touchés. Le moratoire aurait pu être levé avec l'adoption du projet de loi 116 et ce, en reconnaissant le principe que, si l'employeur est responsable de tous les risques de déficit de son régime, il doit, en toute équité, demeurer propriétaire des surplus qui s'en dégagent, à moins qu'il n'en soit spécifiquement convenu autrement. L'absence de dispositions à cet effet nous fait manquer une occasion de régler cette affaire pendant que nous sommes plongés dans le sujet complexe des caisses de retraite.

Nous constatons avec plaisir que le projet de loi apporte plusieurs mesures générales d'harmonisation et que, plus spécifiquement, il propose des pouvoirs à la Régie de conclure des ententes particulières d'harmonisation pour éviter les conflits de juridiction dans l'application des régimes des entreprises qui comptent des participants dans plusieurs régions du pays (article 245).

Le Président (M. Bélanger): M. Létoumeau, je vous inviterais à conclure, s'il vous plaît!

M. Létourneau: Je termine, j'en ai pour une minute, M. le Président.

Le Président (M. Bélanger): Je vous en prie.

M. Létourneau: Merci de votre indulgence. Nous apprécions beaucoup que le projet de loi ne s'applique pas aux régimes qui n'offrent pas de prestations au-dessus des limites fiscales. Après avoir apprécié les bons points du projet de loi 116 et avoir exprimé ses recommandations spécifiques sur d'autres dispositions, la Chambre sollicite l'attention de cette commission sur l'importance de simplifier et d'alléger le plus possible les obligations qui découlent de cette loi. Nous croyons, d'une façon générale, que les employeurs méritent qu'on leur fasse confiance en ce domaine. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. M. le ministre.

M. Bourbeau: M. le Président, c'est avec intérêt que nous avons pris connaissance du mémoire de la Chambre de commerce du Québec qui est toujours un interlocuteur majeur dans les dossiers, tels que ceux que nous étudions présentement. Je comprends qu'en gros la Chambre appuie les efforts d'harmonisation du projet de loi, avec le gouvernement fédéral et avec l'Ontario. Je comprends également qu'elle déplore l'absence de règlements et la complexité que la loi provoquera et qu'elle réclame plus de liberté dans rétablissement et dans le fonctionnement des régimes.

J'aimerais répondre à certaines des questions que vous avez soulevées. En premier lieu, pourquoi avons-nous changé le nom du projet de loi? Ce n'est pas un caprice, enfin, pas de notre part, c'est un caprice des légistes qui nous disent qu'un régime complémentaire de retraite, c'est beaucoup plus français que des régimes supplémentaires de rentes, étant entendu que "supplémentaires*, c'est plutôt un anglicisme. Alors, c'est de bonne grâce, voulant améliorer la qualité du français dans la loi, que nous nous sommes plies à cette demande.

En ce qui concerne les règlements, il est exact qu'ils ne sont pas encore connus. Je peux quand même vous annoncer une bonne nouvelle. La réglementation sera sensiblement moins volumineuse avec la nouvelle loi qu'à l'égard de l'ancienne. On me rétorquera que la loi est plus volumineuse que l'ancienne et c'est ce que vous avez dit. Alors, nous avons choisi d'en mettre plus dans la loi et moins dans les règlements.

Le comité dont vous parliez tout à l'heure sera heureux de voir que le législateur réglemente moins présentement que sous l'empire de l'ancienne loi. Les règlements ne sont pas ici aujourd'hui. On ne les a pas avec nous pour discussion, mais ce n'est pas étonnant, en ce sens que l'Assemblée nationale a pour objet de voter des lois, le législateur légifère par les lois et l'exécutif exécute par des règlements. Or, les règlements ne sont pas encore prêts et on peut simplement dire qu'il est un peu prématuré de produire des règlements quand on ne sait pas si la loi sera adoptée et dans quel état elle le sera. On peut concevoir, dès maintenant, qu'il y aura passablement d'amendements apportés à cette loi. C'est d'ailleurs l'objet des consultations que nous faisons, de voir dans quelle mesure on peut bonifier la loi.

Donc, à la fin de la consultation, on verra comment on peut bonifier la loi et à la préparation des règlements. Vous savez que les règlements, de toute façon, subissent leur propre procédure d'adoption et de prépublication. On peut faire toutes les représentations auprès du gouvernement pendant la période de prépublication et, finalement, les règlements seront publiés d'une façon définitive dans La Gazette officielle. C'est vrai que nous ne traitons pas, dans le projet de loi, de la question des surplus d'actifs et vous le déplorez. En ce sens, vous rejoignez l'Opposition officielle qui fait corps avec vous pour déplorer l'absence de dispositions traitant 10 mai 1989

Commission permanente

des surplus d'actifs. Mais là s'arrête tout parallèle entre l'Opposition et vous, parce que vous suggérez de lever le moratoire en retenant le principe que les surplus appartiennent à l'employeur puisqu'il est responsable des déficits et ce n'est pas la thèse de l'Opposition. Quant à nous, nous entendons consulter sur ce sujet spécifique, au cours des prochains mois, notre intention étant de régler le problème des surplus d'actifs, de leur propriété, de la façon dont on peut les sortir après cette large consultation que nous avons l'intention de tenir au cours des prochains mois.

Il nous est apparu dangereux de tenter de faire passer en même temps une foi qui traiterait à la fois d'une réforme en profondeur de la loi et du problème extrêmement complexe de la disposition des surplus d'actifs. Nous avons pensé que nous aurions peut-être pu mettre en péril l'adoption même de la loi en prenant les bouchées trop grosses, suivant en cela l'exemple de l'Ontario qui s'y est pris en deux temps comme, d'ailleurs, nous avons l'intention de le faire. Je pense que, dans ce domaine, il vaut mieux se donner le temps de réfléchir et de consulter. Il sera toujours temps, à l'automne, de décider de la façon de procéder. Je vous signale, de toute façon, que le moratoire va être maintenu tant et aussi longtemps qu'une décision n'aura pas été prise relativement à la disposition des surplus d'actifs.

En ce qui concerne le mémoire que vous avez déposé, je vais reprendre certaines de ses dispositions et peut-être me permettre de les commenter. Vous demandez, par exemple, si l'État accepterait de s'imposer les mêmes contraintes qu'on impose aux régimes privés? C'est une bonne question et nous avons l'intention de la soumettre à la Commission administrative des régimes de retraite et d'assurances ainsi qu'au Conseil du trésor. Maintenant, je ne sais pas quelle sera la réponse. On peut penser que l'État estimera que, sa responsabilité étant en cause, il n'a pas à se soumettre à toutes les contraintes puisqu'il s'estime extrêmement responsable et capable de faire face à toutes les éventualités à même le fonds consolidé du revenu.

Deuxièmement, l'administration du régime, des responsabilités lourdes que nous imposons, semble-t-il, à l'administrateur. Évidemment, cette nouvelle réglementation s'inscrit dans la suite des mauvaises nouvelles que la presse nous annonçait il y a quelques mois, alors que certains travailleurs ou groupes de travailleurs ont dû poursuivre en justice des compagnies qui, semble-t-il - je n'affirme rien - selon la prétention de ces groupes de travailleurs, avaient détourné ou tentaient d'accaparer des surplus d'actifs. Dans ces actions en justice, ils prétendent que les surplus appartiendraient non pas à l'employeur, mais aux employés. Je ne veux pas, en aucune façon, me prononcer sur ces dossiers, mais cela dénote quand même un climat d'incer- titude entourant l'administration des fonds, la gestion des fonds, la propriété, etc. Cela a évidemment forcé la réflexion en ce qui concerne la responsabilité des administrateurs.

Nous pensons que, dans une large mesure, les fonds qui sont déposés par les travailleurs dans un régime complémentaire de retraite sont en quelque sorte du salaire différé. Nous pensons que la situation a suffisamment évolué, au cours des 25 dernières années, pour faire en sorte qu'à toutes fins utiles, ce soit considéré comme du salaire différé par les travailleurs. Dans ce sens-là, il conviendrait probablement de penser que les responsabilités des administrateurs peuvent être apparentées aux responsabilités similaires qui sont imposées à l'égard du salaire, en vertu de la Loi sur les compagnies qui rend les administrateurs responsables des salaires non payés. On pourrait alors et on peut franchir ce pas-là et conclure que les administrateurs d'un fonds de retraite ou d'un régime de retraite ont des responsabilités à l'égard des sommes d'argent qui sont déposées dans le fonds dont ils sont les gestionnaires. Ce sont des gestionnaires du bien d'autrui qui voient à administrer un patrimoine fiduciaire; je pense donc qu'il faut les responsabiliser. (10 il 45)

La politique de placement qui pourrait être trop formaliste... On prétend qu'il y aurait des coûts de gestion à cause de critères plus ou moins imprévisibles. Je peux répondre uniquement que cela correspond, selon nous, à peu près aux règles de l'art en ce domaine.

L'assemblée générale, non pas des actionnaires, mais des participants, c'est le moyen que nous avons trouvé pour tenter de mieux informer les participants à un régime. On déplore dans bien des milieux que le travailleur québécois ne se préoccupe pas assez de sa retraite, de ses fonds de retraite. Dans le passé, on a même souvent vu des travailleurs retirer les fonds qu'ils avaient déposés dans un fonds de retraite et les utiliser pour s'acheter une automobile ou des trucs comme ça. On leur reproche donc de ne pas se préoccuper, surtout lorsqu'ils sont jeunes, de l'avenir.

Nous tentons de faire en sorte d'intéresser davantage les travailleurs à la problématique de la retraite. Je pense que c'est dans l'intérêt même des travailleurs et dans l'intérêt de la collectivité aussi.

Dans ce sens, une assemblée d'information annuelle sur l'état du fonds de retraite, je pense, serait de nature à mieux sensibiliser les travailleurs à l'importance de ces fonds de retraite. Nous pensons que, finalement, c'est probablement la meilleure façon. On nous dit: C'est complexe, un fonds de retraite. Possiblement que les travailleurs n'y comprendront rien ou ne seront pas intéressés. J'espère qu'ils seront intéressés. En ce qui concerne leur compréhension, je compte justement sur l'employeur pour tenter d'expliquer, de vulgariser la problématique des

Débats de l'Assemblée nationale 10 mai 1989 fonds de retraite pour faire en sorte que les travailleurs comprennent. À mon avis, l'envoi d'un dépliant ou d'un texte est bon, mais ça ne répond pas à toutes les questions. Si celui qui lit le texte ne comprend pas très bien, personne ne peut lui expliquer. Si on procède au moyen d'une assemblée d'information, là, pour autant qu'on fasse des efforts de vulgarisation, il y a de meilleures chances que les travailleurs comprennent un peu mieux ce que signifie le fonds de retraite et ce qui se passe quant à son administration.

Le Président (M. Bélanger): Je vous inviterais à conclure, M. le ministre.

M. Bourbeau: Je regrette, mais c'est tout le temps qui m'est imparti. Peut-être pourra-t-on revenir, à la fin, pour un mot ou deux? Je vous remercie.

Le Président (M. Bélanger): Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: M. le Président, je vais peut-être immédiatement souhaiter une réaction de la part de nos invités. Ils sont ici également pour qu'on puisse discuter avec eux. À la suite des propos que le ministre vient de tenir, j'ai l'impression, M. Létoumeau, que vous avez quelques réactions à nous faire connaître.

M. Létourneau: Merci beaucoup de m'offrir cette occasion à ce moment-ci. M. le Président, si vous le permettez. D'abord, M. le ministre, vous n'avez pas réagi à notre demande de soumettre le projet de loi au comité sur la gestion documentaire. Nous apprécierions beaucoup si ce geste pouvait être posé par la commission.

M. Bourbeau: Je n'ai pas d'objection du tout, au contraire.

M. Létourneau: Bon, très bien, merci beaucoup. Pour ce qui est de la question de l'assemblée générale, enfin, nous estimons que ce genre de réunion n'est pas la façon... Comme vous l'avez expliqué vous-même, l'objectif de cette réunion est l'information, mais ce genre de réunion n'est pas nécessairement la meilleure façon pour plusieurs raisons. D'abord, il y a les coûts pour une entreprise et le fait d'amener tous les employés au même lieu, le même jour, au même endroit. Peut-être pourrait-on explorer d'autres solutions comme, par exemple, d'inviter des employés par petits groupes avec des gens qui comprennent bien et qui connaissent bien le fonds, soit des experts, des actuaires, je ne sais pas, alors rencontrer les employés par petits groupes? Ce serait moins onéreux pour l'employeur qui, à ce moment-là, aurait moins de frais et ne serait peut-être pas nécessairement obligé d'arrêter la production ou de tenir ça en dehors des heures de travail et risquer de n'avoir que très peu de participants. Il nous semble que ce moyen ou plusieurs autres moyens pourraient mieux atteindre l'objectif d'information et seraient moins coûteux tout en étant plus efficaces.

M. Bourbeau: II n'y a pas de problème. Nous ne nous opposons pas du tout à ça. C'est l'esprit même de la loi.

Mme Harel: M. le ministre...

Le Président (M. Bélanger): Si vous permettez, M. le ministre, on va laisser à madame...

M. Bourbeau: II me pose des...

Mme Harel: Je suis altruiste quand cela concerne nos invités, mais je ne le suis pas quand cela concerne le ministre. S'il avait voulu discuter avec vous, il n'avait qu'à le faire dans le temps qui lui était imparti. Maintenant, j'ai le même temps que lui, alors je voudrais, d'abord, pouvoir faire deux remarques, puis vous poser deux questions.

Vous savez, quand le projet de loi 116 a été déposé à l'Assemblée nationale, dans la même journée, il s'est trouvé que j'ai fait, par curiosité, l'exercice de lire les notes explicatives du projet de loi 116 et celles du projet de loi 58, déposé il y a quatre ans par Mme Marois lorsqu'elle était ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. Vraiment, c'est un décalque. J'en ai, d'ailleurs, quelques copies que je vous remettrai. C'est presque un décalque, quatre ans plus tard, à l'exception, je pense, du chapitre XI sur la scission d'un régime et la fusion des régimes et, avec un recul, il faut bien le dire, par ailleurs, par rapport au projet de loi 58, sur l'aspect paritaire des comités. Mais on va revenir là-dessus, si vous le voulez.

Donc, c'est une sorte de décalque avec les mêmes omissions que contenait le projet de loi 58 qui a vieilli entre-temps, évidemment, omissions portant sur l'indexation et la disposition des surplus. Mais, à l'époque, il y a quatre ans, on prévoyait une consultation. Là, le ministre, je pense, se compare abusivement avec l'exercice que fait l'Ontario. À l'inverse, par ailleurs, l'Ontario a déposé une proposition d'indexation et de disposition des surplus. La grande question qui reste inconnue jusqu'à maintenant, c'est: Quelle est la position du gouvernement? Je comprends qu'il veuille consulter, bien qu'il ait eu quatre ans pour le faire - disons qu'il est plein de bonne foi - mais sur quoi exactement? Sur le néant pour tout de suite. Ce qu'on lui dit, c'est: Faites comme l'Ontario et donnez-nous la proposition sur laquelle vous voulez faire la consultation, avant les élections et non après, étant donné que, selon toutes probabilités... Le premier ministre lui-même a fait une déclaration annonçant des élections pour l'automne, alors, on 10 mai 1989

Commission permanente

aimerait mieux le savoir avant qu'après. C'est la première remarque.

La seconde, M. Létourneau, tantôt - et c'est important, je crois que c'est la pierre d'assise de votre position - vous disiez: La responsabilité de la sécurité à la retraite appartient d'abord aux individus et aux groupes privés. Vous l'avez dit mais c'est aussi écrit. Il reste que le poids des paiements de transfert sur la collectivité est énorme à cause de l'absence de responsabilité. Les paiements de transfert aux personnes de 65 ans et plus sont énormes. Quand je parle des paiements de transfert, je pense à tous ceux que paie notre collectivité, y compris le supplément, la grosse pension par rapport à la petite, comme disent les gens, le supplément qui est quand même payé collectivement; je pense à l'aide sociale qui est quand même de plus en plus importante chez les 55 ans et plus, jusqu'à 65 ans; je pense au programme d'adaptation des travailleurs âgés, PATA, pour retraités et préretraités, qui est un programme de transfert; je pense à Logirente qui est aussi un programme de transfert parce que les personnes de 60 ans et plus et, espérons-le, celles qui en ont 55 aussi, qui sont les plus mal prises, voient une partie de leur loyer remboursé si les revenus qu'elles ont sont insuffisants. En fait, il y a une multiplicité de paiements de transfert qui coûte cher et que sont assumés par l'ensemble de la collectivité. Il me semble que l'État a un rôle à jouer pour inciter les individus et les groupes privés à prévoir qu'à un moment donné les salaires vont s'interrompre et qu'il faut un remplacement de revenu. Je ne sais pas quel est votre point de vue là-dessus.

M. Létourneau: M. le Président, nous sommes d'accord que les paiements de transfert sont énormes, mais une des raisons pour lesquelles ils sont énormes, c'est parce qu'ils sont universels et qu'ils vont, dans une forte proportion, à des gens qui n'en ont pas besoin. D'autre part, j'ai fait observer que, justement, jusqu'à récemment, les régimes complémentaires de retraite, les régimes privés, ont augmenté considérablement et - je ne connais pas exactement les chiffres, mais je pourrai les demander à M. Bisson, ici, qui est peut-être plus versé que moi là-dedans - d'après ce que j'ai cru entendre, les entreprises ont graduellement pris leurs responsabilités de plus en plus, de telle sorte que les actifs des régimes supplémentaires dépassent de beaucoup les actifs du régime de base public.

Nous n'avons pas dit non plus que l'État n'avait aucun rôle à jouer. Nous avons dit que c'était prioritairement la responsabilité des individus et des groupes privés. Alors, nous n'avons pas dénié le rôle complémentaire de l'État et, effectivement, dans notre mémoire, nous disons que ce rôle complémentaire doit continuer d'être joué en ne décourageant pas les gens d'avoir recours à ces régimes qui offrent aux participants une aide à la retraite.

Mme Harel: Je suis obligée de nuancer vos propos parce que tous les programmes dont j'ai fait mention sont des programmes d'aide, ce sont des programmes de transfert qui ne sont attribués qu'à partir d'un test de besoins: Supplément de revenu, aide sociale, PATA. Je ne vous parle pas de la pension de vieillesse, je ne vous en ai pas parié, je veux parler du supplément...

M. Létourneau: J'avais compris pension, la petite et la grande.

Mme Harel: Non, la grosse. La petite, elle, est universelle, sauf avec les nouvelles dispositions fiscales, mais la grosse, la vraie, c'est elle qui coûte cher, c'est elle qui est offerte à 60 % des anciens travailleurs et travailleuses pourtant, pas simplement à des personnes qui n'ont pas eu de revenu de travail. Donc, tous ces programmes de transfert offerts à partir d'un test de revenu sont de plus en plus nombreux parce qu'il y a de plus en plus de pauvreté, finalement. Ces programmes coûtent cher. D'autre part, je suis également obligée de nuancer le fait qu'il y a de moins en moins de travailleurs et de travailleuses, d'employés en général, qui profitent des régimes complémentaires. En cinq ans, il y a eu une réduction de 4%; ça a passé de 45 % à 41 %.

J'aimerais vous entendre là-dessus, je vais vous laisser la parole, mais, juste avant, il y a un autre aspect important sur lequel j'aimerais avoir votre point de vue, c'est celui de la cotisation, si vous voulez, versée comme faisant partie de la rémunération globale. Sur cet aspect, j'aimerais vraiment connaître votre point de vue parce que le gouvernement devra trancher là-dessus et c'est important: Est-ce que ça fait partie ou non de la rémunération globale?

Ici, vous savez, on ne peut pas avoir deux poids, deux mesures. Comme employeur, le gouvernement a créé le Centre de recherche et de statistiques sur le marché du travail, que vous connaissez sans doute, qui prépare une étude comparative de la rémunération dans les secteurs privé et public pour ralentir les hausses que le secteur public souhaite obtenir. Dans ces politiques, le Centre de recherche et de statistiques sur le marché du travail inclut, dans le calcul de la rémunération globale, les déboursés faits pour les régimes de retraite. C'est vraiment retenu comme un avantage inclus au même titre que le congé de maternité, etc. comme faisant partie de la rémunération globale. Quel est votre point de vue là-dessus?

M. Létourneau: M. le Président, d'abord, quant au fait qu'il y ait de moins en moins d'employés couverts par des régimes supplémentaires, c'est fort possible. En effet, on a eu des informations à savoir que, récemment, ça a été le cas. Nous croyons que cela ne veut pas

Débats de l'Assemblée nationale 10 mai 1989 nécessairement dire qu'à cause de ça il y aura de plus en plus de personnes pauvres parmi les personnes âgées. D'autres études que nous avons fait faire nous indiquent que, dans l'avenir, il est fort possible que la proportion ou la comparaison que l'on fait entre vieillesse et pauvreté diminue de plus en plus. D'ailleurs, elle ne cesse de diminuer depuis quelques années.

Mme Harel: Parce que les gouvernements sont généreux. Les familles avec jeunes enfants s'appauvrissent et les personnes de 60 ans et plus voient leur situation s'améliorer sensiblement à cause des programmes de transfert.

M. Létoumeau: M. le Président, il y a toutes sortes d'explications à cette situation, mais nous observons que l'épargne privée, l'épargne due à la possession d'une propriété, l'épargne que, de toute façon, les gens font, continue d'augmenter et va continuer d'assurer un meilleur revenu aux personnes âgées dans l'avenir.

Maintenant, pour nous, il est bien important de signaler que, peu importe l'interprétation que différents groupes peuvent en faire, quand on parle à nos membres et qu'on essaie d'évaluer comment ils considèrent le régime supplémentaire de rentes, on s'aperçoit qu'ils le voient plutôt comme un avantage social pour aider les employés à mieux préparer leur retraite. On peut lui donner d'autres sens si on le désire, mais il faut considérer aussi le sens que lui donnent ceux qui offrent ce service, cette indemnité c'est-à-dire, qui, la plupart du temps, a été offerte unilatéralement par l'employeur à ses employés. Il y a une évolution, maintenant. Je ne sais pas quelle est la proportion des nouveaux régimes mais, comme ils diminuent, nous prévoyons, notamment, que les nouveaux régimes, si la loi actuelle est adoptée, vont diminuer encore plus, parce qu'on choisira d'autres moyens, à cause de la difficulté de gérer ou d'administrer les régimes actuels et de la lourdeur de la réglementation. On ira peut-être vers les régimes enregistrés d'épargne-retraite, immobilisés ou autres, ou les régimes à contribution fixe par l'employeur, qui éviteront plusieurs problèmes qui découlent de la réglementation que nous avons.

J'aimerais, M. le Président, si vous me le permettez, demander à M. Bisson, qui est ici présent, d'ajouter à ces quelques commentaires.

Le Président (M. Bélanger): M. Bisson.

M. Bisson (Richard): D'accord. Sur un autre point de vue, M. le ministre, vous avez aussi mentionné, je crois bien, la politique des placements. Je suis peut-être un petit peu hors sujet, Mme Harel?

Mme Harel: Ce n'est pas nécessairement la question que je vous posais. J'en aurais eu d'autres à vous poser, mais je consens à ce que vous nous exprimiez... Vous êtes ici pour exprimer votre point de vue, alors je suis contente de l'entendre.

Le Président (M. Bélanger): Merci madame. Allez-y, monsieur.

M. Bisson: Quelques points: le premier concerne la nature du contrat. On n'a pas exprimé vraiment quel était le but de dire que ce sera un contrat à compter de telle date. Deuxièmement, pour aider les PME, est-ce que ça signifie que si on a un gestionnaire professionnel dans le domaine, c'est suffisant pour répondre aux exigences et critères des politiques de placement, selon les règles de l'art que M. le ministre a mentionnées?

Autre chose, concernant les surplus, M. le ministre, vous avez mentionné qu'il y aurait des consultations, disons dans les prochains mois, et que le moratoire serait maintenu un petit peu indéfiniment, jusqu'à la prise de décision. Or, quand on voit le projet de loi, il est mentionné qu'il faut que ce soit prévu dans les modifications apportées au texte des règlements. Qu'est-ce qui arrive au point de vue de l'utilisation du surplus quant à l'exonération des cotisations? On veut savoir si ça aura une portée rétroactive.

Vous avez également fait des commentaires concernant le fait que ce serait peut-être considéré comme un salaire différé, je ne sais pas; donc, si c'est un salaire différé ça laisse peut-être présager la façon dont vous allez considérer les surplus et à qui ils appartiennent. On parle de la nature du contrat et de quelles en sont les parties. D'ici à la fin de 1990, on voit que le texte doit mentionner comment prévoir l'utilisation du surplus. Est-ce que ça a une portée rétroactive? Est-ce qu'indirectement, à la fin de 1990, si le moratoire n'est pas levé et que les consultations ne sont pas terminées, dans les textes, on devra déjà, entre parties peut-être non mentionnées, avoir décidé comment utiliser le surplus, alors qu'on devrait plutôt savoir à qui appartient le surplus avant? Pourquoi les textes sont-Us silencieux alors qu'il y en a d'autres qui ne le sont pas?

Mme Harel: M. le Président, je ne sais pas, le ministre profitera peut-être des mots de remerciement pour répondre à ces questions. J'allais justement vous poser cette question sur les congés de contribution patronale. C'est quand même une concession importante. Je pense que c'est l'article 137 du projet de loi. Le ministre dit: On ne parle pas des surplus, mais, dans le projet de loi, il accorde, avec l'excédent d'actifs, le congé de contribution patronale. C'est déjà une manière d'en disposer qui est décidée. Évidemment, ce matin, à 7 heures, en écoutant le bulletin de nouvelles, je me suis dit: Non, il y a une confusion terrible. On annonçait à la radio qu'il y avait maintenant un comité de retraite paritaire, alors que ça n'a rien à voir parce que

ce que le ministre a finalement décidé, c'est que le comité de retraite, au sein duquel les retraités ou les employés sont minoritaires, pourrait confier la gestion - je pense que tout le monde est assez favorable à ça - à ceux qui la font déjà, qui sont déjà experts en la matière et qui pourraient la reconduire en la continuant. Mais la question de fond n'est pas de savoir qui doit gérer, mais qui doit décider de cette gestion. Est-ce que le comité sera paritaire ou, finalement, est-ce que ce sera un comité où les travailleurs et les employés feront de la figuration, comme c'est le cas dans le projet de loi présentement? L'astuce, c'est évidemment un comité de retraite qui sera minoritaire en termes de représentation des employés et qui va tout simplement décider de continuer, "business as usual", ce qui se fait présentement.

Le Président (M. Bélanger): En conclusion.

Mme Harel: En conclusion, je veux évidemment vous remercier. C'est vraiment trop court. Je pense qu'on a intérêt, sur des questions aussi fondamentales que celles-là, à discuter plus longuement, mais je veux vous remercier, M. Létourneau, M. Bisson et Mme Marchand. Je sais que vous avez travaillé, comme directrice de la recherche, à l'élaboration et à la rédaction du projet et je crois qu'il y aura aussi une autre période où on pourra vous consulter sur les surplus. J'espère que la consultation ne sera pas privatisée et que, comme c'est un débat public et que cela concerne l'ensemble de notre collectivité, ce sera en commission également.

Le Président (M. Bélanger): M. le ministre, en conclusion.

M. Bourbeau: M. le Président, dans une seule phrase, je voudrais bien conclure, mais je pense que je vais manquer de souffle, en disant premièrement que - je réponds rapidement - puisque l'objectif de l'assemblée annuelle est de rendre compte, étant donné que les administrateurs sont des gestionaires, cela peut se faire par petits groupes. Mais il n'est pas essentiel qu'il y ait seulement une assemblée; il peut y en avoir plusieurs dans chacune des usines, comme la Domtar l'a fait, nous dit-elle. Donc, l'objectif est vraiment d'informer les travailleurs.

En ce concerne les surplus d'actifs, il ne faut pas présumer que le gouvernement va, dès maintenant, prendre une décision dans un sens ou dans l'autre. La vérité ne se situe jamais aux extrêmes et la consultation indiquera dans quel sens le gouvernement devra aller quant à la disposition des surplus d'actifs, quant à la propriété, quant à la question des congés de cotisations, etc. Les jeux sont ouverts, comme on dit, et nous consulterons avant de présenter un projet.

En ce qui concerne les comités paritaires, non, ce ne sera pas des comités paritaires, je l'ai dit hier et je le répète. Ce ne sera pas non plus des comités consultatifs, les travailleurs seront présents et les retraités aussi, s'ils le veulent, mais notre intention n'est pas d'en faire des comités paritaires et si les journaux ou les médias ont repris ça, c'est qu'ils avaient entendu le point de vue de la députée de Maisonneuve qui a parlé, hier, au nom du gouvernement à quelques reprises. Alors, il y a peut-être eu confusion là.

Mme Harel: Voyons donc! Franchement! La confusion vient de vos propos, M. le ministre, vraiment.

Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît! On va laisser M. le ministre conclure.

Mme Harel: Pas de transfert de responsabilité.

Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît!

M. Bourbeau: J'ai été très clair hier, à deux reprises, devant les travailleurs et devant les patrons; ce ne sera pas des comités paritaires. En ce qui concerne la politique de placement dont vous parliez tout à l'heure - et je termine un peu là-dessus - l'article 165 est clair: il doit y avoir une politique de placement au comité de retraite, mais l'article dit bien que la régie peut en autoriser la simplification. Alors, s'il s'agit d'un très petit fonds de retraite avec une petite compagnie, la Régie pourra certainement simplifier un peu la procédure dans ces cas-là.

Finalement, je termine en vous remerciant de votre contribution importante aux débats et en vous disant que, s'il y a des questions - et je sais qu'il y en a - qui n'ont pas obtenu de réponse parce que le temps nous a manqué, je vous incite à communiquer avec nous ou avec la Régie qui est tout à fait disposée à reprendre la discussion avec vous sur certains aspects du projet de loi qui feraient encore problème, de façon...

Le Président (M. Bélanger): En conclusion, M. le ministre.

M. Bourbeau: Je suis dans la même phrase, M. le Président. Alors, de façon à permettre de bonifier et d'améliorer le projet de loi dans la mesure du possible. Je vous remercie de votre contribution.

Le Président (M. Bélanger): M. le vice-président de la Chambre de commerce du Québec, les membres de la commission vous remercient. Un bref instant, oui.

M. Létourneau: M. le Président, simplement pour remercier le ministre de cette dernière ouverture que nous venons d'entendre sur la

Débats de l'Assemblée nationale 10 mai 1989 possibilité de simplification des mesures pour les PME ou pour le petit fonds, enfin sur la possibilité, pour ceux pour qui cela représente un fardeau vraiment nuisible au rendement du fonds, que cela soit simplifié.

Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M. Létoumeau. La commission remercie la Chambre de commerce du Québec de sa participation et invite à la table des témoins l'Association de bienfaisance et de retraite des policiers de la Communauté urbaine de Montréal qui est représentée par M. Jacques Perron, M. Pierre Lenoir et Me Louise-Andrée Gauthier.

Nous allons suspendre quelques brefs instants pour une pause sanitaire, comme on dit.

(Suspension de la séance à 11 il 10)

(Reprise à 11 il 17)

Le Président (M. Bélanger): Je demanderais à chacun de bien vouloir reprendre sa place. Nous allons reprendre les travaux. Vous excuserez Mme la porte-parole de l'Opposition qui est en entrevue derrière, pour quelques instants. On sait quand ça commence, mais on sait rarement quand ça finit. Mais pour ne pas prendre de temps indu à la commission, nous allons commencer. Soyez assurés qu'elle a lu votre mémoire et qu'elle l'a bien commenté et que, tout à l'heure, elle saura vous poser des questions tout à fait pertinentes.

J'inviterais M. le ministre à reprendre sa place, que nous reprenions nos travaux. Nous recevons présentement à la table l'Association de bienfaisance et de retraite des policiers de la Communauté urbaine de Montréal. Je vais vous expliquer un peu nos procédures: vous avez un maximum de vingt minutes pour la présentation de votre mémoire. Il y a une période de discussion avec les parlementaires et, chaque fois que vous devez prendre la parole, je vous demande, s'il vous plaît, de bien vouloir vous identifier, ceci pour les fins de transcription au Journal des débats. Cela nous aide beaucoup. M. le ministre.

M. Bourbeau: M. le Président, je ne sais pas ce que vous avez convenu avec l'Opposition. J'avais convenu avec l'Opposition officielle qu'on attendrait le retour de Mme la députée de Maisonneuve avant de reprendre les débats. Je ne voudrais pas manquer à ma parole. Est-ce que vous avez convenu autrement avec elle?

Le Président (M. Bélanger): Non, M. le ministre, et cela aurait été bien mieux qu'elle convienne avec le président.

M. Bourbeau: Je comprends, mais il y avait quand même un consensus entre les deux formations politiques qu'on ne reprendrait pas la discussion avant que l'Opposition officielle soit représentée. Je ne voudrais surtout pas qu'on dise que j'ai manqué à une parole que j'ai donnée tout à l'heure à Mme la députée de Maisonneuve.

Le Président (M. Bélanger): M. le ministre, vous mettrez ça sur mon dos; on va le prendre.

M. Bourbeau: Très bien!

Le Président (M. Bélanger): Mais je pense que le recherchiste...

M. Bourbeau: Alors, vous témoignerez auprès de la députée que j'ai tout fait.

Le Président (M. Bélanger): ...de Mme la députée est d'accord avec nous.

Sans plus tarder, passons à la présentation de votre mémoire. D'abord, présentez votre équipe et lisez votre mémoire. Je vous remercie et on s'excuse de ce petit contretemps.

Association de bienfaisance et de retraite des policiers de la

Communauté urbaine de Montréal

M. Perron (Jacques): Mon nom est Jacques Perron. Je suis président de la caisse de retraite de l'Association de bienfaisance et de retraite des policiers de la CUM. À ma gauche, M. Claude Moses qui est secrétaire à l'Association et, à ma droite, Me Louise-Andrée Gauthier qui est conseillère juridique à l'Association. Avant de commencer et d'entrer dans le vif du sujet, j'aurais deux remarques préliminaires à faire: j'aimerais préciser que les membres du conseil d'administration de l'Association qui représente la communauté et la ville de Montréal ne partagent pas nécessairement les recommandations qui sont contenues au mémoire et que la Fraternité des policiers de la Communauté urbaine de Montréal ainsi que la Fédération des policiers du Québec partagent amplement les recommandations qui sont dans notre mémoire.

Il est évident qu'il y a certains irritants dans la loi 116. Un des irritants qui semble important, c'est la composition du comité de retraite et le fait que les employés soient représentés à ce comité. C'est dans ce contexte que j'aimerais vous lire l'introduction et vous faire la démonstration que l'implication des travailleurs dans un comité de retraite, ça existe, ça va continuer fort probablement d'exister et cela a aussi réussi.

En 1892 - ce n'est pas d'aujourd'hui - était sanctionnée une loi constituant en corporation l'Association de bienfaisance et de retraite de la police de Montréal, fondée dans le but de secourir ses membres dans le cas de maladie ou d'incapacité de travailler, de leur accorder les gratifications et pensions pour services rendus, de procurer des secours et de conférer d'autres avantages à leurs veuves, enfants ou héritiers.

De sa création jusqu'en 1954, l'Association fut administrée exclusivement par les policiers sous la présidence du directeur du service de police. En 1955, à la suite de négociations entre les policiers et la ville de Montréal, l'administration en fut confiée à un conseil de direction qui était composé de six policiers actifs, un policier retraité et deux représentants de la ville de Montréal. Financée par les seules contributions des policiers jusqu'en 1929, la caisse de retraite a poursuivi les objectifs qu'on lui avait fixés, son actif étant alors constitué des contributions des policiers, de celles versées par la ville de Montréal, ainsi que des revenus générés par celles-ci.

La création de la Communauté urbaine de Montréal, en 1969, ainsi que l'intégration des forces policières, en 1972, commandèrent un réaménagement des structures policières et la création d'un régime de retraite pour tous les policiers de la Communauté urbaine. Le 15 décembre 1977, le gouvernement du Québec a donc sanctionné la Loi relative à l'Association de bienfaisance et de retraite des policiers de la Communauté urbaine de Montréal désignant l'Association existante sous son nom actuel. Cette loi a remplacé l'ancienne loi sans interrompre l'existence corporative de l'Association et lui confère le pouvoir et le droit d'administrer et de gérer le régime de rentes des ex-policiers de Montréal et le régime de rentes des policiers de la Communauté urbaine de Montréal.

Au 31 décembre 1988, l'Association comptait parmi ses membres 4495 policiers actifs et 2749 prestataires - je dois ajouter que les membres actifs de l'Association comprennent aussi les membres de la direction du service de police - soit des policiers retraités, des conjoints admissibles ou des orphelins. A cette même date, l'Association gérait un actif d'une valeur de 1 023 000 000 $ au marché. Elle a versé, au cours de l'année 1988, des prestations et des remboursements à ses membres pour plus de 43 000 000 $.

La direction générale. L'Association est administrée par un conseil d'administration composé de douze personnes, dont six membres sont élus par les policiers actifs, un membre est élu par les policiers retraités et cinq membres sont nommés par la Communauté urbaine de Montréal. La caisse est donc administrée en majorité par des employés.

Les opérations dites quotidiennes des régimes que gère l'Association sont assurées par ses officiers, soit six policiers dégagés à temps plein qui sont parmi les membres du conseil d'administration. Les réunions du conseil ont lieu au moins une fois par mois et un rapport complet de la gestion de la caisse y est présenté. L'Association tient des livres et des dossiers montrant en détail les opérations des régimes; ces livres sont examinés au moins une fois par exercice financier par les vérificateurs que le comité exécutif de la Communauté urbaine désigne à l'Association, mais ils sont payés par cette dernière.

Jusqu'à la terminaison du régime de rentes de l'Association de bienfaisance et de retraite de la police de Montréal, le vérificateur de la ville de Montréal a également un droit de regard, d'inspection et de vérification.

Le comité de placement. En plus d'administrer deux régimes de retraite, l'Association agit également comme fiduciaire des fonds qui lui sont confiés. En effet, l'article 4 de sa loi constitutive stipule qu'aux fins de la Loi sur les régimes complémentaires de retraite la caisse de retraite de chacun de ces régimes forme un patrimoine dont l'administration est confiée à l'Association qui, dès l'entrée en vigueur de cette loi, en est saisie comme fiduciaire. Une documentation écrite complète contenant la politique et les objectifs de placement de l'Association est élaborée et mise à jour régulièrement par le comité de placement, de concert avec des experts retenus par le conseil d'administration après recommandation dudit comité.

Le comité des placements se compose du président de l'Association et de deux personnes choisies parmi les membres du conseil d'administration de l'Association et nommées par résolution du comité exécutif de la Communauté urbaine. Le comité des placements est donc composé en majorité des représentants de l'employeur, et je fais une remarque: en aucun temps il n'y a eu une décision majoritaire au comité des placements concernant la politique, les objectifs et les stratégies de placement. Les décisions prises par le comité des placements doivent faire l'objet d'un rapport écrit au conseil d'administration de l'Association qui est chargé de mettre en application la politique et les objectifs de placement contenus audit rapport jusqu'à ce qu'il soit modifié. Les décisions de placement sont prises à l'interne par les professionnels du service des placements, qui tiennent compte des paramètres de la politique et des objectifs de placement, avec l'assentiment de la direction générale.

Le comité des prêts hypothécaires. Ce comité, créé par résolution du conseil de l'Association, est chargé de statuer sur les demandes de prêts hypothécaires faites par les membres de l'Association, conformément aux normes d'octroi qui ont été déterminées par le conseil d'administration.

L'Association exerce ses activités par le biais d'une équipe qui assure la permanence de divers services. Sous la responsabilité des officiers, cette équipe est constituée de 33 cadres et employés permanents qui font rapport au président-directeur général qui, à son tour, fait rapport au conseil d'administration.

Le service des rentes est chargé de déterminer le droit au paiement d'une rente en vertu des dispositions des régimes, d'en effectuer le calcul et d'en assurer le versement. Il est secondé dans son travail par une firme d'actuai-

Débats de l'Assemblée nationale 10 mai 1989 res-conseils, notamment pour ce qui est de l'informatique. Le service des rentes fournit également aux futurs bénéficiaires ainsi qu'aux pensionnés toutes les informations qui les concernent.

Tel qu'il a été dit précédemment, le service des placements assure l'exécution des décisions prises par le comité de placement et toutes les opérations de l'Association en matière de placement sont effectuées à l'interne par ce service.

Le service des finances a la responsabilité du contrôle financier des opérations de l'Association. Quant aux évaluations actuarielles triennales des engagements des régimes de rentes administrés, elles sont effectuées par les actuaires que la Communauté urbaine désigne. La trésorerie effectue l'administration complète des prêts hypothécaires aux membres de l'Association. À ce jour, environ 3000 prêts sont administrés par la trésorerie.

Le secrétariat fournit, entre autres, le soutien des activités générales de l'Association et il assume la responsabilité de l'information aux membres.

Ceux qui présentent ce mémoire sont les policiers membres du conseil d'administration, élus par les participants. Ils sont aussi ceux qui assument la gestion quotidienne des affaires de l'Association. À notre connaissance, la caisse de retraite des policiers de la Communauté urbaine de Montréal est la seule caisse de retraite au Canada - je parle d'une caisse majeure - administrée en majorité par des employés. En 97 ans, la qualité de cette administration n'a jamais été contestée. Ce résultat ne peut être obtenu que par la mise en place d'une structure corporative adéquate et l'établissement de règles permettant un équilibre sur le plan des décisions fondamentales d'administration et de placement.

Donc, la position des auteurs du présent mémoire est sans équivoque et appuie des intérêts les participants qui croient pouvoir administrer leur caisse de retraite. C'est une chose qui est réalisable, elle se réalise depuis 97 ans déjà. Je pense qu'on a énormément de succès, tant pour ce qui est de la qualité de nos professionnels qui nous entourent à la caisse que des rendements qui sont aussi générés sur les placements qui sont faits par la caisse.

Je voudrais aborder les questions un peu plus techniques, ce qui fait partie du mémoire. À l'article 14, le premier alinéa de cet article devrait être modifié afin de permettre à la Régie des rentes du Québec d'accorder un délai plus long pour la mise par écrit d'un régime de retraite. Il est prévu 90 jours. Il est évident que - cela nous est arrivé à plusieurs occasions - pour écrire les textes du régime de retraite, il nous faut trois, quatre, six mois. Pour le dernier texte en 1984, il nous a fallu six mois pour l'écrire. Donc, U y aurait lieu effectivement que la Régie puisse nous accorder des délais plus longs pour écrire les textes des régimes.

D'autre part, le paragraphe 2° de l'alinéa 2 du même article devrait comprendre rénumération de tous les administrateurs autorisés en vertu de l'article 144. Il en manque quelques-uns, dont nous.

Les articles 22 et 23. Ces articles rendent possible la transformation du type de régime sans attribution de la pleine réserve. Dans le cas de transformation d'un régime à prestations déterminées en un régime à cotisations déterminées, nous recommandons que soit acquise aux participants la réserve capitalisée en fonction de l'existence perpétuelle du régime de retraite. Il est certain que beaucoup de gens, compte tenu de la loi 116 et compte tenu de la réforme fiscale sur les régimes de retraite ou sur les prestations de retraite de M. Wilson, vont trouver un prétexte pour transformer des régimes en régimes à cotisations déterminées. Il est évident - d'ailleurs, c'est marqué dans le projet de loi 116 - que si l'évaluation peut se faire sur une base de terminaison de régime, généralement, il devrait se dégager des surplus. Pour ces surplus-là, il n'y a pas tout à fait de dispositions à savoir comment ils doivent être attribués, mais au moins, s'il y a modification de régime, ce surplus devrait retourner aux participants. (11 h 30)

Enregistrement d'un régime de retraite et de ses modifications. Le paragraphe 3° de l'article 24 devrait être modifié de façon à prévoir que le consentement écrit des employés ou de leur représentant ou tout autre consentement prévu au régime de retraite dans le cas de modification est également requis.

L'article 26. Dans le cas où un régime de retraite est établi ou modifié par entente qui ne fait pas partie de la convention collective, mais qui est négociée par un syndicat, il devrait y avoir la même restriction qui est appliquée. C'est le dernier alinéa de cet article.

Le régime de retraite des policiers de la Communauté urbaine ne fait pas partie de la convention collective, donc il y a une exclusion pour les régimes qui font partie de la convention collective en ce qui concerne l'information aux participants. Cette exclusion devrait aussi s'appliquer dans le cas d'un régime négocié par un syndicat, même s'il ne fait pas partie de la convention collective.

L'article 34. Nous recommandons que les conditions prévues aux paragraphes 1° et 2° de l'alinéa 1 de l'article 34 soient exigées non pas pour chacune des deux années consécutives, mais pour la moyenne de ces deux années. Il est possible qu'un travailleur puisse faire 600 heures une année, 1500 heures une autre année et 600 heures une autre année; à ce moment-là, il ne pourrait jamais participer à un régime de retraite. Donc, nous recommandons que ce soit la moyenne des deux années consécutives qui compte pour qu'il puisse participer au régime de retraite.

L'article 45. Nous recommandons que la méthode de calcul des taux de rendement ainsi 10 mai 1989

Commission permanente

que la méthode d'application du taux d'intérêt mensuel puissent être également déterminées par les dispositions du régime de retraite. Il est prévu que c'est l'actuaire ou le comptable qui prévoit la méthode et la façon de les calculer. Dans le régime de retraite des policiers de la Communauté urbaine, il est déjà prévu comment se calcule l'intérêt et comment il est attribué. C'est le taux de rendement de la caisse qu'on a choisi à l'époque. Il faudrait faire intervenir l'actuaire ou le comptable pour qu'il nous donne la méthode. On l'a déjà dans le régime de retraite. Je pense que ça pourrait être ajouté facilement.

Remboursement et prestations. Le paragraphe 1° du premier alinéa de l'article 59 utilise l'expression "et des droits qui en sont dérivés". Nous aimerions connaître la définition des droits qui en sont dérivés. Je pense qu'il y aurait lieu de préciser ou de marquer une définition un peu plus claire parce que, dans notre esprit, les droits qui en sont dérivés... Par exemple, une rente au conjoint est un droit qui est dérivé de la rente du participant. Une rente d'invalidité peut être un droit dérivé de la rente du participant. Donc, probablement qu'il y aurait lieu de clarifier cette partie, soit les droits qui en sont dérivés.

L'article 72. L'âge normal de la retraite devrait être fixé à 65 ans au lieu de 12 mois après 65 ans, donc à 66 ans. Il s'agit là de l'âge utilisé pour la majorité des régimes de retraite ainsi que pour le régime des rentes du Québec.

L'article 88. Cela nous crée un problème important dans le régime de retraite. Le régime établit déjà une rente au conjoint à 50 % de la rente du cotisant. On partage l'orientation du gouvernement lorsqu'il dit que ça devrait être à 60 %, à l'exception que la détermination du conjoint, selon ce qui est prévu dans le projet de loi 116, est faite au moment où la rente est servie. Je comprends bien l'objectif que poursuivait le gouvernement, à savoir de ne pas créer de coûts supplémentaires dans le régime. Donc, il pourrait y avoir réduction de la rente du cotisant et on verserait 60 % de la rente au conjoint. Je pense qu'il pourrait être ajouté au projet de loi que si un régime prévoit déjà que la rente au conjoint satisfait à la loi, à savoir 60 %, celle-ci pourrait être déterminée à toute autre date et, en l'occurrence, chez les policiers, elle est déterminée au décès du policier. C'est le conjoint qui existe au moment du décès du policier. Donc, si un régime prévoit une rente de 60 %, il pourrait aussi déterminer à quel moment cette rente est versée. Je ne pense pas que ça pourrait faire des objections.

Les articles 96 et 263. Je pense qu'il y a peut-être certains problèmes. Il faudrait probablement que les articles 263 et 96 soient clarifiés, c'est-à-dire que vous, M. le ministre, en tant qu'ancien ministre des Affaires municipales, puisque c'est un élément qui est important en ce qui concerne les ententes de transfert, vous demandiez que ce soit retiré de l'article 465 de la Loi sur les cités et villes; mais, à notre avis, cela ne crée pas une obligation aux municipalités, en vertu de la loi des régimes complémentaires, d'accorder aux participants aux régimes des municipalités le droit de transfert à la seule demande du participant. il y aurait lieu, je pense, d'avoir tout simplement une clarification de cet article.

À l'article 105, l'administrateur devrait avoir l'obligation de fournir à chaque participant ou travailleur admissible le texte intégral des dispositions du régime de retraite et de ses modifications et non un simple sommaire écrit. Dans ce contexte, il a aussi souvent été fait mention des assemblées qui sont prévues au projet de loi 116. À l'Association, depuis nombre d'années - de toute façon, depuis l'existence du régime de retraite - il se fait une assemblée générale annuelle.

Le Président (M. Bélanger): Je vous inviterais à conclure, M. Perron.

M. Perron (Jacques): De toute façon, vous avez en main le mémoire.

Le Président (M. Bélanger): C'est toujours trop court, je le sais.

M. Perron (Jacques): J'aurais aimé continuer. C'est vrai que 20 minutes, ce n'est pas long. On va conclure.

Dans l'ensemble, nous croyons que ce projet de loi sur les régimes complémentaires de retraite constitue un projet de loi adéquat dans la mesure où le gouvernement entreprendra une consultation publique en vue de légiférer ultérieurement sur la question des surplus et sur celle de l'indexation. Merci bien.

Le Président (M. Bélanger): Merci, M. Perron. M. le ministre.

M. Bourbeau: Qu'est-ce qui se passe? Le Président (M. Béianger): C'est à vous.

M. Bourbeau: Ah bon! Je ne croyais pas que vous m'aviez donné la parole, M. le Président. Je pense que c'est avec beaucoup d'humilité qu'on aborde le mémoire de l'Association de bienfaisance et de retraite des policiers de la CUM, étant donné la très grande expérience de cet organisme dans la gestion des fonds de retraite, puisqu'on nous dit que c'est l'ancêtre des fonds de retraite québécois. Il y a beaucoup à apprendre et, effectivement, je me suis rendu compte en lisant le mémoire et en en discutant avec les gens de la Régie que vous avez apporté une foule d'observations qui vont nous être très utiles dans notre démarche pour perfectionner le projet de loi.

Vous n'avez pas eu le temps de terminer,

Débats de l'Assemblée nationale 10 mai 1989 c'est un peu frustrant, je dois le dire. Votre cours magistral était extrêmement intéressant mais je peux vous assurer que, même si vous n'avez pas eu le temps de terminer, tous les points qui ont été apportés dans votre mémoire sont en train d'être étudiés ou ont même déjà été étudiés par la Régie et un grand nombre des recommandations que vous faites vont être incorporées au texte.

Je ne sais pas, je pourrais peut-être, comme cela, regarder vos remarques concernant l'article 59: définir plus clairement l'expression "les droits qui en sont dérivés", la valeur des droits. Effectivement, on apportera des précisions à ce sujet.

À l'article 72, fixer à 65 ans l'âge de la retraite plutôt qu'à 66 ans. À la suite de vos représentations... Cela avait été fait dans le sens d'uniformiser avec l'Ontario, mais on va regarder cela de nouveau et il est possible qu'on revienne à l'ancienne définition.

À l'article 88, le droit à la rente au conjoint devrait s'éteindre au décès du conjoint et on devrait recalculer la rente du participant. On est en train de regarder de nouveau tout ce problème pour décider si on peut permettre de déterminer, au moment du décès du participant, à l'égard du conjoint qui est survivant à ce moment-là... On va regarder cela de nouveau. Il est possible qu'on se rende à vos suggestions.

À l'article 96, le transfert de droits et d'actif, permettre le droit au transfert à la demande exclusive du participant d'un régime municipal... On va considérer cela aussi d'une façon très favorable.

En fait, je pourrais faire le tour d'un grand nombre d'observations que vous avez faites et, dans bien des cas, cela demandera une précision; vous avez bien raison de nous le signaler. À l'article 14, par exemple, permettre à la Régie d'accorder un délai supplémentaire, je pense qu'effectivement vous avez raison. On devrait le faire et on le fera. D'une façon générale, il est évident que l'exercice est utile.

L'Intérêt sur les cotisations: la méthode de calcul pourrait être déterminée dans le régime plutôt qu'on la fasse déterminer par l'actuaire ou le comptable. Effectivement, vous avez raison, et nous avons l'intention d'amender la loi en conséquence pour permettre que le régime lui-même détermine la méthode de calcul.

Je voudrais revenir à la question des surplus. Il est entendu que les surplus sont gelés tant que le moratoire n'est pas levé. Même si un régime est modifié entre-temps, il n'est pas question de permettre la sortie de l'excédent de l'actif, si tant est qu'il y en avait, tant qu'une décision finale n'aura pas été prise relativement à toute la question des surplus.

Mme Harel: Sauf s'il y a entente entre les parties.

M. Bourbeau: Bien sûr. D'ailleurs, la loi 95 le mentionnait. Mais je tiens pour acquis qu'on serait dans une situation où il n'y aurait pas d'entente entre les parties.

Mme Harel: Hygrade, dernièrement...

M. Bourbeau: Le président me signale que c'est assez rare qu'il y ait une entente totale et absolue là-dessus.

Mme Harel: Ah! il y a des cas!

M. Bourbeau: Allez-y. Vous avez une observation à faire?

Mme Harel: Je vous laisse continuer, M. le ministre.

M. Bourbeau: À propos des surplus, je pense que la position du gouvernement est claire, même si elle n'est pas connue. Nous n'avons pas l'intention de bouger tant qu'une consultation plus large n'aura pas eu lieu. D'ici là, c'est le statu quo, le moratoire se poursuit. Il est prévu jusqu'au 1er janvier 1990 mais, si jamais nous n'étions pas arrivés à une décision à cette date, rien ne dit que nous ne pourrions pas prolonger le moratoire, comme l'Ontario l'a fait, d'ailleurs.

Je pense que tous et chacun peuvent dormir tranquilles, personne ne va s'enfuir avec la caisse et les surplus vont demeurer là tant qu'on n'aura pas pris une décision finale.

Maintenant, concernant la question de l'assemblée annuelle, plusieurs participants ont apporté des commentaires relativement à l'obligation de tenir une assemblée annuelle. Je sais que vous avez un régime exemplaire en ce sens que non seulement les participants sont bien informés, mais ils sont très actifs dans la gestion. Est-ce que vous avez des commentaires additionnels à faire au sujet de l'opportunité de tenir une assemblée annuelle? Est-ce que vous trouvez que c'est la meilleure façon ou si on devrait procéder d'une façon différente?

M. Perron (Jacques): Vous avez peut-être fait un petit lapsus tout à l'heure en parlant des actionnaires; par la suite, vous avez parlé de participants. Je considère que les participants à une caisse de retraite, ce sont les actionnaires de la caisse de retraite. Fondamentalement, lorsqu'une entreprise fait son assemblée générale annuelle, elle rend compte de son administration vis-à-vis de ses actionnaires. C'est dans le même esprit, je pense, qu'il faut voir l'assemblée générale annuelle, de rendre compte de son administration vis-à-vis des participants, de leur permettre, surtout, de pouvoir comprendre ce qu'est un régime de retraite, comment ça se calcule, de parler un peu d'évaluation actuarielle et de parler des états financiers de la caisse de retraite. D'ailleurs, tous les membres reçoivent un rapport annuel avec les états financiers, avec la capitalisation qu'il y a dans le régime, avec 10 mai 1989

Commission permanente

tous les retraités, avec les placements que l'on fait - pas toute la liste des placements, parce qu'avec 1 000 000 000 $, ça en ferait beaucoup - la répartition de notre actif, le taux de rendement que la caisse a eu. Ce sont des informations essentielles, au même titre qu'une entreprise donne des informations à ses actionnaires.

J'entendais certaines objections selons lesquelles il y aurait peu de participants. Écoutez, lorsque Bell Canada fait son assemblée annuelle avec le nombre de millions d'actionnaires, ils ne sont pas tous là, c'est certain. C'est le même phénomème qui se produit chez nous, lorsqu'on fait des asemblées générales annuelles, mais j'ai vu des assemblées de 2000 personnes. Il y a eu des assemblées de 500, 300, 200 ou 75 personnes. C'est évident que, dans ce contexte, c'est la confiance. Lorsque les gens ont confiance en leur administration, ce ne sont pas des assemblées houleuses, ce ne sont pas des assemblées syndicales. Il faut distinguer l'administrateur de la caisse, du syndicat et de l'employeur. C'est une entité différente qui est là pour rendre compte de son administration et qui fait en sorte de protéger les droits des individus qui, éventuellement, vont prendre leur retraite. C'est ça qui va leur assurer la sécurité, et c'est fondamental. Je m'excuse d'aller trop loin, de m'étendre.

M. Bourbeau: Cela va. Une observation seulement: en ce qui concerne la question de la participation des participants, comme on les appelle, ou des employés, des travailleurs, à la gestion et à l'administration du fonds de retraite, la loi prévoit des règles minimales. Rien, absolument rien n'empêche l'employeur et les travailleurs de décider de faire participer davantage les travailleurs. On pourrait certainement avoir des comités paritaires, si tel est le désir des parties. On pourrait même avoir une caisse où les travailleurs seraient majoritaires au comité de retraite, si tel était le désir des parties. La loi impose des règles minimales: il doit nécessairement y avoir au comité de retraite un représentant des participants et un représentant des retraités; c'est le strict minimum, mais on peut ajouter à ça. Donc, je pense qu'il y a beaucoup de flexibilité dans la loi pour permettre le genre de gestion que l'employeur et les travailleurs voudront bien se donner. (11 h 45)

M. Perron (Jacques): Est-ce que je pourrais juste passer une petite remarque à ce sujet, M. le ministre?

M. Bourbeau: Oui, sûrement.

M. Perron (Jacques): II y a une phrase très embêtante dans l'article 146: "avec le consentement de l'employeur". C'est un peu paternaliste, la formation des comités de retraite. Il nous semble très paternaliste d'écrire: "Avec le consentement de l'employeur". C'est comme si l'employeur avait le droit d'augmenter effectivement le nombre de participants à la gestion du régime de retraite. J'imagine assez bien un arbitre qui arbitrerait une convention collective - je m'avance peut-être au plan juridique - et qui pourrait dire: Non, je me cache derrière la loi 116 pour dire qu'effectivement ça prend le consentement de l'employeur. Donc, cet aspect de la participation des participants au comité de retraite n'est pas arbitraire, parce que la loi 116 dit que c'est avec la permission de l'employeur. J'ai l'impression qu'on pourait utiliser une autre phraséologie pour dire: "après entente entre les employés et l'employeur" ou quelque chose du genre. Ça m'apparaît relativement paternaliste.

M. Bourbeau: Effectivement, vous avez raison. On va réécrire cet article et on va faire sauter la phrase incriminante.

Le Président (M. Leclerc): Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Merci, M. le Président. Je veux saluer M. Perron, Mme Gauthier et M. Moses. Il semble qu'habituellement, pour accéder à la Régie des rentes, il faut faire ses classes chez vous. Vous êtes encore jeune M. Perron.

M. Bourbeau: ...le président de la Régie aussi.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Harel: Plus sérieusement, votre mémoire est évidemment, comme le soulignait le ministre, vraiment une étude substantielle, analytique, méticuleuse du projet de loi 116 qui va certainement nous servir au moment de l'étude article par article, si on peut y arriver avant la fin de la présente session. Il y a certains aspects, je les relève rapidement, qui apportent une réponse pragmatique à des difficultés qui ont été soulevées depuis le début des travaux, notamment celle des 700 heures successives pendant deux années. Vous avez tout à fait raison, parce que nombreuses sont les recommandations des groupes de femmes, en particulier les travailleuses, pour qui il est difficile de satisfaire à ces exigences de 700 heures chaque année. C'est une façon d'établir une moyenne qui peut permettre, au cours d'une année, de prendre du temps partiel et l'autre année, de faire du temps plein. Alors, c'est vraiment truffé de recommandations, y compris au sujet de l'assemblée générale annuelle. Avec raison, vous rappeliez qu'il y a des périodes où il y a plus de participation, d'autres où il y en a moins, et cela dépend, j'imagine, de bien des facteurs, y compris du nombre de policiers qui sont sujets à prendre leur retraite une année, ou qui s'y préparent, ou qui commencent à l'envisager plus sérieusement.

Débats de l'Assemblée nationale 10 mai 1989

Cela dit, vous avez, à bon droit, regretté dans votre mémoire que la notion de gestion paritaire qui était contenue dans le projet de loi 58 ait été abandonnée en cours de route et vous signaliez que l'article 146 avait dans sa rédaction un aspect paternaliste. Le ministre vient de vous dire qu'il va corriger. Il va peut-être corriger la rédaction, mais va-t-il modifier le fond? Je pense que c'est sans doute à cette question qu'on aimerait avoir une réponse également. Depuis le début de nos travaux, il nous dit: Non, ce ne sera pas paritaire. Dans votre mémoire, j'avais l'impression que vous faisiez la démonstration inverse de ce qu'il propose, c'est-à-dire que pour vous, c'est paritaire, mais le comité des placements est composé en majorité de représentants de l'employeur. Dans le projet de loi, il proposait que la gestion de l'employeur soit exclue, mais que le comité ne soit pas paritaire. Pourquoi d'abord avoir retenu ce comité des placements majoritairement composé d'employeurs dans le cas de l'association que vous représentez?

M. Perron (Jacques): Cela a été une question d'équilibre. Au conseil d'administration, les policiers sont majoritaires. Donc, il y a cinq représentants de la communauté et on est sept, incluant le retraité. Dans ce contexte-là, c'est une question d'équilibre à l'intérieur. Lorsque des politiques sont adoptées par le comité des placements, le conseil doit voir à ce que ces politiques soient mises en application. D'autre part, la gestion quotidienne ne se fait pas par le comité des placements. Il y a une autorité directe des administrateurs de la caisse, des officiers de la caisse, sur les placements directs qui se font.

Dans ce contexte-là, c'est toute une question d'équilibre à l'intérieur d'avoir permis - et ça, c'est en négociation - que l'employeur puisse avoir une majorité au comité des placements. D'ailleurs, il faut bien comprendre qu'H n'y a aucune politique qui se fait au comité des placements. Les gens sont là pour faire un boulot et pour placer les fonds de la caisse. Donc, dans ce contexte-là, je le disais tout à l'heure, il n'y a jamais eu de décision majoritaire et on est entourés de quatre autres experts qui viennent un peu limiter le contrôle que l'employeur peut avoir au comité des placements. Tout cela doit se faire selon les règles de l'art et, à un moment donné, ces quatre experts viennent limiter des orientations qui pourraient être définies par les deux représentants de l'employeur. Je vous donne un exemple. Si on nous obligeait à acheter 25 % de la caisse dans l'obligation de la communauté, ça ne s'est jamais produit et il n'y a jamais eu ce genre d'obligation, parce qu'on sait que les quatre experts autour de la table s'y opposeraient. C'est évident que je m'y opposerais. Donc, il y a un équilibre. C'est cet équilibre qu'il faut rechercher.

Mme Harel: Voilà, justement! Dans cette recherche d'équilibre, vous dites au ministre: Non seulement la rédaction est-elle paternaliste, mais, même s'il la modifiait, comme il vient de le dire, pour qu'on ne lise plus "avec le consentement de l'employeur", mais "avec l'accord du comité de retraite", il pourrait y avoir, par exemple, d'autres membres désignés par les participants. Ce serait peut-être une manière plus élégante de dire les choses, mais la réalité serait la même. Le résultat serait que le comité de retraite est majoritairement composé de représentants de l'employeur, parce que, nécessairement - le ministre l'a dit et répété - les participants auront droit à un représentant des retraités, un des employés, mais au sein d'un comité qui sera majoritairement composé de représentants de l'employeur. Alors, c'est blanc bonnet, bonnet blanc. Appelons ça d'une autre manière, mais la réalité revient à dire que c'est avec l'accord de l'employeur.

Là, la grande question que je me pose, c'est: Pour obtenir son consentement, faudra-t-il des conflits de travail? Pourquoi faire un objet de controverse, pourquoi faire un objet de conflit, pourquoi laisser ces questions au libre jeu des rapports de force des parties si tant est qu'on croie que c'est finalement une question qui pourrait se régler par voie législative?

Je ne vous pose pas la question; je la pose au ministre. J'espère qu'il aura l'occasion d'y répondre d'ici à la fin de cette commission. L'indexation. Quelle est la formule d'indexation du régime chez vous?

M. Perron (Jacques): II y a trois formules différentes. Il y a une formule pour le régime - celui de Montréal anciennement - pour les retraités et les veuves du régime de Montréal pour laquelle on vient d'obtenir une indexation, par voie d'entente avec la ville de Montréal, soir 60 % de l'indice des prix à la consommation, parce que leur offre n'était pas indexée. Dans le régime de la CUM, l'indexation, c'est l'IPC moins un, dans le cas des policiers qui étaient là avant le 1er janvier 1984 et, dans le cas des policiers à compter du 1er janvier 1984, c'est l'IPC moins trois, l'indice des prix à la consommation, moins trois. C'est toute leur rente qui est indexée, à compter de l'âge de 49 ans et demi.

C'est un élément... On a payé pour ça. Écoutez, c'est fondamental. Un régime de retraite, ce sont les employés qui paient pour ça, en fin de compte. Cela fait partie de l'ensemble de la négociation. Lorsqu'il y a négociation, c'est évident qu'il y a une masse salariale qui est disponible et cette masse salariale est divisée entre divers avantages sociaux, dont le régime de retraite. L'indexation, on l'a payée. On débourse, on a donné des avantages qui s'appellent des journées de maladie qui étaient monnayables en fin de carrière et on a donné 7,5 journées de maladie pour obtenir ces avantages d'indexation. C'est comme ça que ça se fait, une négociation

de régime de retraite. C'est une masse qui est distribuée. Donc, à la fin, c'est dans ce contexte qu'on dit qu'au sein d'un comité de retraite les travailleurs doivent avoir une représentation importante, parce que c'est leur fonds. C'est uniquement leur fonds, et le risque qui reçoit l'appui de l'employeur est aussi un risque qui a été négocié. Donc, dans ce contexte - c'est d'ailleurs ça qu'on a fait comprendre à nos membres - je pense qu'il y aurait une émeute à Montréal si jamais le comité de retraite ou le conseil d'administration avait une composition différente. C'est comme ça qu'ils ont grandi. C'est comme ça qu'ils ont vécu leur caisse de retraite et, pour eux, c'est la sécurité de l'avenir à leur retraite.

Mme Harel: Cela "responsabilise" les participants.

M. Perron (Jacques): C'est ça.

Mme Harel: C'est étonnant de voir combien la partie patronale n'est pas consciente que, s'il n'y a pas implication de la part des participants, il peut y avoir une résistance à considérer tout cela comme un salaire différé. Comment l'employeur peut-il penser agir seul dans ce domaine? De toute façon, j'ai pris note de votre recommandation que, lorsqu'il y a modification de régime, on peut avoir l'air d'insister sur ce genre de modification de régime de prestations déterminées en cotisations, le surplus retourne aux participants. Là-dessus, c'est bien noté. La question d'indexation est importante parce que le ministre a aussi annoncé la consultation non seulement sur la disposition des surplus, mais sur l'indexation également. M en parie moins mais, en faisant un petit geste comme ça, il va falloir qu'il parle. Le non-verbal n'est pas enregistré dans le Journal des débats. Cela reste important.

Je reviens à la question des surplus. Tantôt, quand il a échangé des propos avec vous, il a dit qu'il ne fallait pas s'inquiéter, les surplus étaient gelés. Il dit ça comme si c'était une solution. Mais justement, en attendant, les employés qui pourraient en profiter n'en profitent pas. Geler les surplus, ce n'est pas une solution à long terme, même que le ministre devrait avoir le goût... Ou qu'on exerce une pression sur lui pour que ça dure le moins possible. Au fond, pendant que ça dure, l'argent dort et il y a des gens qui n'en profitent pas. Il n'y a pas pire situation, en tout cas, que celle des employés de Singer qui reçoivent parfois 35 $ par mois pendant qu'il y a des millions qui dorment devant les tribunaux, et il reste que pour les autres...

Entre-temps, il y a aussi toute la question des surplus en cours de régime. On n'a pas à invoquer que c'est gelé pour nous rassurer; quant à moi, cela continue de m'inquiéter que des gens n'en profitent pas au moment où ils devraient en profiter. Le ministre annonce une consultation sur la disposition des surplus et sur l'indexation.

Avez-vous l'intention de participer à cette consultation?

M. Perron (Jacques): Oui.

Mme Harei: Quelles sont vos recommandations à l'égard de la disposition des surplus et de l'indexation? Je termine là-dessus.

M. Perron (Jacques): Bon. Je comprends un peu la position du ministre d'attendre l'Ontario - parce que c'est en plein débat en Ontario - nécessairement, pour essayer d'harmoniser le plus possible avec les provinces, je comprends le ministre d'attendre que l'Ontario ait terminé l'ensemble de ses débats. Cela ne veut pas dire nécessairement que le Québec doit suivre l'Ontario, mais, au moins, connaître l'ensemble des résultats.

Comme je le mentionnais tout à l'heure, je disais que dans le régime de retraite, c'est le participant exclusivement qui paie, sous une forme ou sous une autre, pour les surplus, s'ils se dégagent. Mais il faut faire attention, par exemple, parce que, s'il y a des surplus qui se créent au cours d'un exercice quant au temps de l'évaluation actuarielle, je pense qu'il serait quand même sain de pouvoir garder en réserve une partie de ces surplus-là au cas où, à un moment donné, parce qu'on a vu le krach et l'effet que cela a eu sur les caisses de retraite, pour faire en sorte de ne pas rendre la caisse de retraite vulnérable en distribuant l'ensemble de ses surplus. D'autre part, une fois cette réserve établie, je pense que l'ensemble des autres surplus devrait être redistribué exclusivement aux participants. C'est leur droit, c'est leur propriété.

Le Président (M. Leclerc): M. le ministre, en conclusion, s'il vous plaît. Excusez-moi, j'ai inversé. C'est d'abord Mme la députée de Mai-sonneuve, en conclusion.

M. Bourbeau: Aucun problème.

Mme Harel: Je veux vraiment remercier l'association et ses porte-parole pour leur importante contribution aux travaux de la commission parlementaire. Merci.

M. Perron (Jacques): Merci.

Le Président (M. Leclerc): M. le ministre.

M. Bourbeau: Puisqu'il me reste un petit peu de temps, M. le Président, avant de conclure...

Le Président (M. Leclerc): II vous reste deux minutes.

M. Bourbeau: J'aimerais simplement dire, au sujet de la participation à l'administration des fonds de retraite au Québec, comparativement

avec ce qui se passe chez vous, la situation se présente différemment. Il y a une tradition chez vous. On a un employeur public et un fonds qui a été mis sur pied exclusivement par les travailleurs et auquel l'employeur n'a adhéré que subséquemment. Donc, il y avait une tradition d'administration par les travailleurs.

La situation se présente différemment dans le reste de la province en ce sens que, dans la plupart des cas, il s'agit d'un employeur privé qui a lui-même mis sur pied son fonds de retraite auquel ont adhéré subséquemment les travailleurs. L'origine des fonds, dans la plupart des cas, n'est pas la même pour démarrer le fonds, si je peux m'exprimer ainsi. Cela peut évidemment avoir eu des effets sur les traditions d'administration et de gestion. Cela peut expliquer aussi pourquoi on ne peut pas prendre le modèle de gestion en vigueur chez vous pour l'appliquer de façon intégrale dans l'ensemble du Québec.

Puisque nous n'avons pas eu le temps de tout discuter, je vous invite à poursuivre les discussions avec la Régie. Je sais que vos entrées à la Régie sont excellentes. Vos communications sont très bonnes. Vous parlez certainement le même langage. Je tiens à vous remercier de votre contribution, M. Perron, M. Moses que je connais bien et qui, en plus d'être secrétaire, est également conseiller municipal à Brossard. Un petit conseil, M. Moses, ne vous découragez pas. Moi aussi, j'ai commencé comme conseiller municipal et, voyez-vous, j'ai fini comme ministre. Peut-être qu'un jour cela pourra vous arriver aussi!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bourbeau: Qu'est-ce qu'elle a dit?

Une voix: Elle a dit: Ce n'est pas un modèle nécessairement.

M. Bourbeau: Ha, ha, ha! Alors, vous pourrez toujours continuer comme gestionnaire de la caisse. Merci, Mme Gauthier, pour vos excellents conseils juridiques. Merci.

Le Président (M. Leclerc): Bien, mesdames, messieurs, au nom de la commission, je voudrais vous remercier de vous être déplacés pour nous rencontrer. Je vous souhaite un bon retour. J'invite maintenant l'Association canadienne des compagnies d'assurance de personnes à s'approcher à la table. Je suspends pour une minute.

(Suspension de la séance à 12 il 3)

(Reprise à 12 il 5)

Association canadienne des compagnies d'assurance de personnes

Le Président (M. Leclerc): A l'ordre, s'il vous plaît!

Je souhaite la bienvenue à l'Association canadienne des compagnies d'assurance de personnes. Je vous demanderais, messieurs, de vous identifier pour ies fins du Journal des débats.

M. Millette (Yves): Je suis Yves Millette, conseiller spécial à l'Association canadienne des compagnies d'assurance de personnes. Je suis accompagné, aujourd'hui, de M. René Massicotte, premier vice-président et directeur général d'Assurance-vie Desjardins, M. Claude Gravel, vice-président exécutif et directeur général de la Mutuelle des fonctionnaires du Québec et aussi membre du conseil d'administration de l'Association canadienne des compagnies d'assurance de personnes...

M. Gravel (Claude): Bonjour.

M. Millette: ...M. Michel Turcotte, directeur principal, rentes collectives à l'Industrielle-Alliance compagnie d'assurance sur la vie.

M. Turcotte (Michel): Bonjour.

Le Président (M. Leclerc): Bien. M. Millette, je vous rappelle que vous avez vingt minutes pour faire part à la commission de votre mémoire. Ensuite, chacun des groupes parlementaires aura quinze minutes pour vous poser ses questions. Vous pouvez y aller.

M. Millette: M. le Président, mesdames, messieurs du comité, l'Association canadienne des compagnies d'assurance de personnes regroupe 111 compagnies qui possèdent à elles seules 99 % du volume des primes qui sont transigées au Canada. Les sociétés d'assurance-vie sont chargées de la gestion de plus de 74 % des régimes de retraite privés au Canada, mais ces régimes ne couvrent qu'environ 14 % de l'ensemble des participants à des régimes. C'est donc dire que les sociétés d'assurances administrent surtout les régimes offerts par les PME. Souvent, ce sont des régimes garantis ou des régimes assurés, alors que les régimes véritablement négociés entre les employeurs et les employés sont le fait des grandes entreprises et souvent administrés par des fiduciaires indépendants.

Nous vous demanderions de tenir compte de ce facteur et du fait que nous, des sociétés d'assurance-vie, sommes déjà sous la surveillance et le contrôle d'une autorité gouvernementale ici, au Québec, c'est l'Inspecteur général des institutions financières. Donc, notre industrie est déjà sous une surveillance considérable concernant, par exemple, la solvabilité de l'entreprise, les pouvoirs de placement de l'entreprise, les règles concernant les conflits d'intérêts, etc.

Abordons maintenant notre mémoire proprement dit. En résumé, nous sommes heureux de constater que la refonte de la Loi sur les

régimes supplémentaires de rentes tient compte des principes fondamentaux du consensus national en matière de réforme des pensions. Cependant, nous nous préoccupons d'un certain manque d'uniformité sur plusieurs aspects techniques. Les nouvelles normes législatives, de façon générale, augmentent considérablement les exigences relatives aux déclarations ainsi qu'à la tenue des livres, en plus d'alourdir sensiblement la tâche des répondants de régimes aussi bien sur le plan administratif que financier.

Les répondants des régimes de petite taille ne sont pas toujours en mesure, selon nous, d'endosser le fardeau administratif qui leur est imposé, ni les coûts qui découlent de la nouvelle loi qui est proposée. En conséquence, les produits moins réglementés, tels que les REER collectifs, ont accaparé une part de plus en plus grande du marché, au cours des dernières années. Nous estimons que le traitement nettement plus favorable accordé aux REER, au détriment des régimes de retraite, n'est pas pour le plus grand avantage des employés. À titre d'exemple, les contributions des employeurs dans un REER ne sont pas réglementées. La gestion des fonds n'est pas surveillée. Les contributions ne sont pas gelées, ce qui peut inciter les travailleurs à utiliser les fonds a d'autres fins. En fait, il y a un débalancement notable entre la réglementation qui va s'appliquer aux régimes de retraite et l'absence de réglementation qui s'applique aux régimes collectifs de REER.

Notre mémoire se divise en deux parties: la première partie traite de certains points techniques, sur lesquels je vais passer assez rapidement, et la deuxième partie concerne nos préoccupations à l'égard de l'administration des régimes de retraite pour les petites entreprises. Un des sujets d'inquiétude contenus dans le projet de loi porte sur les dispositions de la nouvelle loi qui s'appliquent aux rentes différées ainsi qu'aux contrats collectifs de retraite souscrits auprès d'assureurs, c'est-à-dire des régimes garantis. Plusieurs dispositions de la loi ont un effet rétroactif qui va influer sur les avantages souscrits parfois depuis de très nombreuses années. La loi semble exiger des modalités fondées sur des critères différents de ceux qui avaient été négociés par les parties au contrat. La loi stipule que les régimes de retraite doivent satisfaire à certaines exigences et va obliger les employeurs à combler toute insuffisance de fonds, donc sans préciser quels seront les critères de base du provisionnement du déficit actuariel par l'employeur, ni l'effet des déficits actuariels non recouvrables sur les droits des participants. Par surcroît, la loi prévoit imposer à l'assureur de nouvelles exigences au plan administratif et à la tenue de livre, concernant des contrats de rentes déjà constitués. Comme nous vous l'avons dit au début, la majorité des régimes assurés par les compagnies d'assurances ou couverts par les compagnies d'assurances étant des régimes offerts aux PME, il s'agit là de facteurs qui peuvent naturellement inciter les petites entreprises à abandonner les régimes de retraite pour alier vers d'autres formes, ou même abandonner complètement les régimes de retraite.

Il y a certaines dispositions qu'on va vous signaler. Entre autres, à l'article 9, la définition d'un régime de retraite ne semble pas conforme aux pratiques qui ont cours dans ce domaine, surtout lorsqu'il y a un assureur d'impliqué. Assez souvent, le régime et l'administration du régime ne sont pas assumés entièrement par l'assureur, il y a certaines fonctions qui demeurent à l'employeur. À ce moment-là, il n'est pas clair qui aura à remplir les obligations prévues par la définition ou par la loi.

Le paragraphe 3 de l'article 14 semble ouvrir la porte au retrait d'un employeur d'un régime en cours d'emploi, ce qui n'apparaît pas souhaitable. Cela ne nous apparaît jamais souhaitable, mais encore moins si la personne peut prendre cette décision en cours d'emploi, et nous ne sommes pas certains que c'était l'objectif visé par l'article 14.

À l'article 42, nous estimons que le délai de quinze jours prévu pour le versement des cotisations salariales, à partir de la date de leur perception, est trop court et entraîne une augmentation des formalités administratives qui doivent être accomplies. Nous recommandons que ce délai soit porté à trente jours.

À l'article 56, la restriction prévue aux termes de cet article concernant la variation des cotisations patronales en fonction des périodes de service désavantage, encore là, les régimes de retraite par rapport aux REER, et on demande au gouvernement de porter beaucoup d'attention à cette question.

A l'article 88, l'exigence relative à la réévaluation de la rente à l'extinction du droit du conjoint en cas de séparation s'applique également à la rente en cours de service. Nous estimons que ce principe peut être acceptable lorsque la rente est différée, mais non après que les arrérages ont commencé à être servis. Dans un tel cas, nous considérons qu'il y a antisélection, ce qui entre en conflit avec les principes de base de l'assurance.

À l'article 162, nous croyons que l'assemblée générale prévue ne devrait pas être une obligation dans la loi, surtout pour ce qui est des petits employeurs qui, la plupart du temps, ont leurs employés au sein d'un seul lieu, d'un seul endroit, et où les gens sont peu nombreux. Il s'agit là d'un mécanisme qui est beaucoup trop formel, qui implique toutes sortes d'obligations légales d'information, etc., alors que ça pourrait être fait beaucoup plus informellement si l'assemblée était convoquée selon une façon déterminée par le comité de retraite ou par l'administrateur du régime en place.

À l'article 164, il semble qu'une politique écrite de placement soit exigée dans tous les cas. Je vous rappelle que, dans le cas des régimes

assurés, ceux-ci sont déjà placés ou sont déjà administrés conformément à la politique de placement de la compagnie d'assurances, la Loi sur les assurances obligeant les compagnies d'assurances à avoir de telles politiques de placement. On constate, encore là, qu'il y a un dédoublement, avec des dispositions déjà existantes. Évidemment, il y a plusieurs autres articles qui font l'objet de représentations dans notre mémoire, mais j'ai voulu donner celles-là à titre documentaire, ce qui n'enlève pas la pertinence des autres recommandations qui sont faites dans ce mémoire.

J'aimerais m'attarder un peu à la deuxième partie de notre mémoire, qui concerne les régimes des employés des petites entreprises. Les changements qui ont été apportés ou prévus à la loi de l'impôt fédérale et l'adoption de lois mettant en oeuvre la réforme des pensions dans plusieurs provinces ont eu un effet défavorable sur la croissance des régimes de retraite au cours des dernières années. Au Canada, il y a environ, maintenant, seulement 40 % de la main-d'oeuvre du secteur privé qui bénéficie de la protection offerte par les régimes de retraite privés. C'est une diminution par rapport à ce qu'il y avait. Le reste des employés ne bénéficie pas des régimes de retraite privés. La plupart des travailleurs qui participent à des régimes de retraite privés sont des employeurs de grandes entreprises. Dans le cas des PME, ces employés sont souvent non couverts. Les sociétés d'assurances, à cause des services dont elles disposent pour l'administration des régimes, ont beaucoup investi dans les régimes où il y a peu des participants. Les changements qui ont été apportés à la loi de l'impôt et les nouvelles lois sur les régimes de retraite qui sont déjà en vigueur ailleurs au Canada - on sait que le régime québécois s'apparente beaucoup au régime qui a été entériné dans les autres provinces - découragent les petits employeurs à mettre sur pied des régimes de retraite et les amènent même à abandonner les régimes de retraite existants au profit de régimes de rechange, c'est-à-dire les REER collectifs, quand ce n'est pas à abandonner les régimes tout simplement.

Notre industrie a noté un changement important en faveur des REER collectifs. A titre d'exemple, en 1987, le nombre de nouveaux régimes à cotisations déterminées avait connu une baisse de plus de 50 % par rapport à celui de 1985 et ce, malgré une importante amélioration de la conjoncture économique qui aurait vraisemblablement dû entraîner une augmentation appréciable du nombre de régimes établis. Au cours de la môme période, le nombre des REER collectifs s'est accru de 47 %. Les résultats du sondage de l'Association, qui sont annexés à notre mémoire, indiquent également qu'en 1987 le secteur des assurances a fait souscrire deux fois plus de REER collectifs que de régimes à cotisations déterminées. On voit donc, au sein de notre industrie, qu'il y a un net déplacement.

Évidemment, ça reste toujours au sein de l'industrie, mais on est bien conscients que la protection des cotisants est beaucoup moindre dans le cas des REER collectifs que dans le cas des régimes de retraite. Nous croyons qu'une plus grande protection des cotisants dans des régimes de retraite n'atteint pas nécessairement les buts que le législateur se fixe, parce qu'on s'aperçoit qu'il y a un déplacement vers d'autres types de régimes qui ne bénéficient pas des protections accordées par la loi.

J'en viens maintenant aux recommandations que nous pourrions faire plus particulièrement concernant cette situation. Nous recommandons que la loi prévoie des mécanismes de surveillance différents pour la réglementation des régimes de retraite des petites entreprises, plus particulièrement les régimes à cotisations déterminées qui sont administrés par des institutions financières elles-mêmes réglementées et ce, par opposition aux dispositions qui existent pour les grands régimes à prestations déterminées. Nous comprenons que, pour les grands régimes, on puisse avoir une loi un peu plus sévère. Au fond, ils s'apparentent à des compagnies d'assurances. Plusieurs de ces fonds de retraite administrent même des actifs nettement supérieurs à ceux de plusieurs compagnies d'assurances. Donc, qu'il y ait un certain équilibre, ça va. Mais, lorsqu'on est en présence de petits régimes, on considère qu'il y a un dédoublement de réglementation et qu'on devrait éviter ces chevauchements qui découragent souvent les petits employeurs. En particulier, les mesures administratives devraient être simplifiées afin d'inciter les employeurs des petites entreprises à mettre en place des régimes de retraite qui soient régis par la loi sur les régimes de retraite.

Outre les propositions contenues dans la partie technique de notre mémoire, nous pouvons faire les recommandations suivantes. Les institutions financières réglementées devraient être autorisées à enregistrer à l'avance les documents spécimens des régimes de retraite. En pareil cas, seules les variations précises seraient déposées auprès de la commission lors de l'établissement d'un régime. La présentation des déclarations devrait être rendue beaucoup plus facile. Seuls les renseignements financiers ainsi que les renseignements personnels de base relatifs aux participants devraient être exigés dans les déclarations périodiques. Les participants devraient être autorisés, au moment de la cessation de leur protection ou de leur retraite, à choisir à l'avance les modalités de règlement basées sur l'information fournie dans les déclarations antérieures. Les droits d'enregistrement et les droits annuels payables à la Régie devraient être réduits pour les petits régimes et ne représenter qu'une valeur symbolique. Les droits minimaux ne devraient pas être exigés lorsque des spécimens des régimes enregistrés à l'avance sont utilisés. Cela se justifierait, étant donné que les coûts de surveillance de tels régimes seraient inférieurs à

ceux qui sont nécessaires lorsque les régimes sont déposés avec des documents sur mesure.

Nous espérons que ces quelques commentaires permettront d'amener une bonification à la Loi sur les régimes supplémentaires de rentes qui, nous le croyons, a toute sa raison d'être et, quant à ses grandes orientations, doit être maintenue et même mise en application le plus rapidement possible. Nous vous remercions.

Le Président (M. Bélanger): Merci, M. le président. M. le ministre.

M. Bourbeau: M. le Président, je pense qu'on peut dire que l'Association canadienne des compagnies d'assurance de personnes inc., d'une façon générale, accueille favorablement le projet de loi, moyennant évidemment certaines réserves qui ont été exprimées. On peut dire, entre autres, que vous semblez regretter le manque d'uniformité ainsi que l'augmentation des normes administratives. D'une façon plus précise, je constate que vous appuyez les éléments de la réforme qui ont fait l'objet de ce qu'on a appelé le consensus national canadien.

Vous vous interrogez sur l'opportunité de certaines initiatives comme, par exemple, la non-possibilité ou l'impossibilité pour un organisme de gérer la caisse du régime établi par ses propres employés. Là-dessus, je crois que vous êtes au courant que j'ai annoncé hier l'intention du gouvernement de modifier le projet de loi pour permettre à un employeur de gérer le fonds de retraite, la caisse, dans la mesure où ce mandat lui aura été confié par le comité de retraite.

Vous faites également des observations relativement à l'assemblée annuelle ainsi que sur le délai de versement des cotisations, entre autres. En ce qui concerne l'assemblée annuelle, vous employez l'expression "l'assemblée générale". L'article 162 du projet de loi ne reprend pas ces mots. On ne parle pas d'assemblée générale. On parie d'une assemblée dans les douze mois de la fin de chaque exercice, donc, on peut dire "assemblée annuelle". C'est un peu à dessein que nous n'avons pas utilisé l'expression "générale", en ce sens que l'intention dans cet article, c'est de faire en sorte que, chaque année, l'administrateur informe ou rende compte d'abord aux cotisants et aux retraités de l'état de la caisse. Le texte même du projet de loi dit que c'est pour prendre connaissance des modifications apportées au régime, des indications portées au registre tenu en application de l'article 156 et de la situation financière de la caisse et, deuxièmement, pour décider de la formation ou du maintien d'un comité de retraite, le cas échéant, pour en désigner les membres. Donc, il pourrait y avoir une ou plusieurs assemblées d'information; il y en aura certainement une principale pour traiter des problèmes généraux comme la désignation des membres du comité de retraite ou la formation et le maintien du comité, mais il pourrait aussi y avoir dans chaque région, si c'est une société qui a beaucoup de succursales ou d'usines dans le Québec, des assemblées d'information annuelles où on ferait en sorte de permettre aux cotisants, aux membres, de prendre connaissance du régime et de sa situation financière.

À l'article 24, enfin, la question de la surveillance différente des régimes selon leur taille, vous signalez que les régimes qui sont en vigueur à l'endroit des petites entreprises, les PME, devraient faire l'objet de mesures administratives simplifiées, afin d'inciter leur mise en place ou leur maintien. Là-dessus, je vous répondrais que l'article 2 du projet de loi permet au gouvernement - on peut peut-être regarder l'article 2 - "...par règlement et dans les conditions qu'il fixe, de soustraire toute catégorie de régime de retraite à l'application de la totalité ou d'une partie de la présente loi." Probablement que le règlement ou la réglementation pourra permettre un certain assouplissement des conditions, surtout s'il s'agit d'un petit régime pour de très petites compagnies ou de très petits groupes de travailleurs. Nous ne vouions pas faire en sorte d'inonder une PME d'une réglementation lourde, de la même réglementation qui pourrait s'adresser à une grosse compagnie, une grosse société. Nous allons tenter de faire en sorte d'amener un certain élément de souplesse pour adapter la réglementation à la taille du régime.

Quant à l'article 145, j'en ai parlé tout à l'heure, vous avez fait des représentations, j'ai annoncé déjà que nous allons modifier le projet de loi. La politique écrite de placement... Vous souhaiteriez exempter les régimes garantis et ceux pour lesquels les placements sont effectués dans les fonds garantis ou mis en commun dans des institutions financières. Là-dessus, je répondrais que les régimes garantis n'ayant pas de caisse de retraite, il va de soi que la section sur les placements ne s'applique pas. Pour les autres types de régimes, il est déjà prévu que la Régie pourra autoriser une politique de placement simplifiée. Encore là, c'est ia même philosophie que celle dont j'ai parlé tout à l'heure. Vraisemblablement, on ne pourra pas traiter les petits régimes de la même façon que les très gros; les principes seront les mêmes, mais les modalités pourront varier pour s'adapter à la taille du régime. Les délais de versement des cotisations, je vous indique tout de suite que notre intention est, effectivement, d'assouplir l'article 42 afin d'augmenter le délai pour le versement des cotisations.

La question de la cessation du droit à la rente au conjoint pour une cause autre que le décès, à l'article 88: vous suggérez d'éliminer l'obligation de réévaluer la rente en cours de paiement en raison de l'extinction du droit à la rente au conjoint, par exemple, lors d'un cas de divorce. Je peux répondre à ce sujet que le gouvernement est présentement en train d'étudier un dossier qu'on nomme le dossier sur les droits

économiques des conjoints et que ce problème fait partie des discussions en cours, sans préjuger aucunement des conclusions de ces discussions. (12 il 30)

J'aimerais, si vous le voulez bien, vous poser une question relativement aux comités de retraite. Le projet de loi prévoit la formation de comités de retraite qui ne sont pas prévus être des comités paritaires, mais qui seront quand même des comités décisionnels. Est-ce que vous êtes d'accord avec la formation de ces comités de retraite et la façon dont on entend procéder?

M. Millette: M. Turcotte va vous répondre.

M. Turcotte (Michel): Comme M. Millette vous en a fait part au début, la majorité des régimes de retraite administrés par les compagnies d'assurances sont des régimes de retraite avec cinq, six ou douze participants. Juste la formation d'un comité de retraite avec une dizaine de participants, ça devient presque un comité de retraite paritaire, même si vous ne voulez pas le nommer "paritaire" dans la loi. À cet effet et pour éviter, justement, les conversions ou les changements vers les REER individuels ou collectifs, parce que douze participants, c'est presque même de l'individuel, ils ne mettront même pas un régime collectif en place pour ne pas faire de cotisation salariale et pour éviter tous les problèmes de paperasse au point de vue des ressources humaines. À mon sens, le comité de retraite, pour répondre plus précisément à votre question, M. le ministre, ne devrait même pas exister pour les petites entreprises. Donc, il ne devrait même pas être décisionnel.

M. Bourbeau: C'est bien évident qu'il y a des régimes où il n'y a qu'un seul participant, ou deux, trois ou une demi-douzaine. Cela deviendrait une procédure assez lourde et irréaliste que de former un comité de retraite pour deux personnes ou pour une personne. En ce sens, nous allons utiliser la souplesse qui est prévue pour s'adapter à la conjoncture, l'intention étant de favoriser la formation de comités de retraite dans les cas et dans tous les cas où cela pourrait être utile et serait utile et non pas d'imposer une réglementation ou des tracasseries administratives dans les cas où il ne serait pas logique ou rentable de le faire.

M. le Président, là-dessus, je suis prêt à passer la parole à la députée de Maisonneuve ou à d'autres membres de la commission.

Le Président (M. Leclerc): Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Merci, M. le Président. Je veux également souhaiter la bienvenue aux porte-parole de l'Association canadienne des compagnies d'assurance de personnes inc. Vous signalez que, dans votre mémoire, vous nous apportez un point de vue qui ne se retrouve, je crois, dans aucun autre mémoire que nous aurons à étudier durant la présente commission, à savoir l'augmentation, la croissance assez spectaculaire du nombre de REER collectifs en regard des autres véhicules. Vous avez inclus, dans les annexes de votre mémoire, des tableaux qui illustrent ce mouvement vers ce type de véhicule et vous êtes à même de voir, là où vous êtes placés, où les mouvements se font. À la page 11, vous dites: "Nous estimons que cette tendance est dangereuse et qu'un tel mouvement empêcherait beaucoup de personnes de bénéficier de dispositions souhaitables dans la législation sur les régimes de retraite." J'aimerais, pour les fins de nos travaux, pour les fins de la commission parlementaire, que vous explicitiez les désavantages qui vous amènent à conclure au danger de la tendance qui est constatée.

M. Millette: Je pense que le principal désavantage est que ces régimes ne sont à peu près pas réglementés. Donc, l'employeur peut faire à peu près n'importe quelle entente avec ses employés et il n'y a aucune garantie que ce régime va être continué pendant une certaine période de temps. Il n'y a aucune garantie que l'employé ne pourra pas mettre fin à son REER, surtout dans les cas où le REER est individuel, ne pourra pas avoir accès aux sommes d'argent qui auront été déposées pour d'autres fins qu'une retraite, etc. Le fait que ça ne soit pas réglementé amène des problèmes et le fait que les petits employeurs sentent que les régimes de retraite sont surréglementés, on a une tendance donc, à ce moment, on risque d'avoir une loi qui, théoriquement, va couvrir à merveille les travailleurs, mais, dans les faits, chez les petits employeurs, les régimes de retraite seront inexistants. Ce sont d'autres véhicules, où aucune protection n'est offerte par la loi, qui vont prendre la place. À ce moment-là, je pense que tout l'effort qui aura été fait sera un effort peut-être utile pour les grandes entreprises où les syndicats sont fortement implantés, mais où, dans la majorité des entreprises, la majorité des travailleurs n'y trouvera pas son compte. Je pense que M. Turcotte voudrait ajouter quelque chose.

Le Président (M. Bélanger): M. Turcotte.

M. Turcotte: Je pense qu'il y a un élément qui est aussi important pour l'évolution des REER collectifs qu'on a vu dernièrement, c'est l'obligation, qui est louable en soi, d'une cotisation de l'employeur dans le fonds de retraite qui n'existe pas dans le REER collectif, ce qui fait que le REER, dans une autre loi, la loi fiscale, le met sur le même pied que les fonds de retraite. Donc, vous avez toutes les flexibilités pour le REER, sans aucune contrainte et vous avez des contraintes pour les fonds de retraite, avec les mêmes flexibilités fiscales. C'est là

qu'est toute la problématique.

Mme Harel: C'est vraiment le paradoxe, donc, d'un secteur qui est surréglementé et d'un autre qui est sous-réglementé, mais avec les mêmes avantages fiscaux puisque la réforme fiscale sur l'épargne-retraite va introduire des règles d'équivalence pour les cotisations permises. Sur cette question, étant donné que dans le projet de loi 116 il y a maintenant le principe des 50 % qui est introduit, j'imagine que c'est ce à quoi vous faites référence, M. Turcotte?

M. Turcotte: C'est ça, madame.

Mme Harel: Essentiellement, c'est le principe des 50 % après le droit d'acquisition. À ce moment-là, vous concevez qu'il devrait y avoir - en vous écoutant, j'ai pensé que c'était possible, si les gouvernements sont cohérents - des avantages fiscaux supplémentaires pour favoriser, inciter le type de régime où il y a une épargne-retraite véritable? Sinon, les autres véhicules dont vous nous faites mention, comme le REER collectif, ce n'est pas nécessairement de l'épargne-retraite. On peut soustraire ses économies pour une autre utilisation.

M. Millette: Je pense qu'il y a plusieurs façons d'aborder ce problème. Cela pourrait être des avantages fiscaux améliorés pour les régimes de retraite, cela pourrait être une réglementation pour les REER collectifs ou ça pourrait être une diminution ou une réglementation plus adéquate des régimes de retraite. Je pense qu'il y a toutes les voies possibles. Personnellement, l'Association favorise plutôt une réglementation moins lourde des régimes de retraite.

Mme Harel: Dans lesquels de ces aspects recommandez-vous au gouvernement de diminuer les exigences législatives?

M. Millette: Dans notre mémoire, on a fait plusieurs remarques. Évidemment, on nous parie de flexibilité au chapitre de la réglementation, mais vous avez remarqué qu'en annexe de notre mémoire, on a fait une comparaison en prenant... Comme la loi du Québec ressemblait à la loi de l'Ontario, on a tenu pour acquis que la réglementation pourrait être semblable à celle de l'Ontario et on vous a fait une comparaison de la lourdeur du système mis en place et qui fait fuir les gens. Je pense, à ce chapitre, qu'on peut faire beaucoup de travail.

Mme Harel: En fait, en annexe, vous nous avez indiqué les fonctions et obligations du répondant ou de l'administrateur d'un régime de retraite en Ontario. Si je comprends bien, c'est vous qui avez préparé ce tableau et ça établit finalement les exigences que la loi ontarienne a à l'égard de l'administrateur. Trouvez-vous que c'est un exemple à suivre ou à proscrire?

M. Millette: Non, c'est un exemple à proscrire. Je pense que l'Ontario est allé très foin dans ce domaine. Je veux qu'il soit clair que nos principales remarques et ce que nous croyons être la principale cause de la désaffection à l'égard des régimes de retraite pour les petits employeurs, ce sont les tracasseries administratives, et non pas les garanties principales du régime telles qu'elles sont là. Les points sur lesquels tout le monde s'est entendu au Canada, y compris les gens qui administrent les régimes de retraite - meilleure "transférabilité", toutes ces choses-là - je ne pense pas que ce soit remis en cause et que ce soit une cause de désaffection. Au contraire, je pense que ce sont les tracasseries administratives qui amènent les gens à fuir les régimes de retraite.

Mme Harel: Vous avez dit, au début de votre intervention, que 14 % de l'ensemble des employés participe à un régime complémentaire. Est-ce que c'est ce que je dois comprendre? Non.

M. Millette: Non, ce n'est pas ça. Les compagnies d'assurances gèrent 74 % des régimes, mais ces 74 % de régimes ne comptent que pour 14 % des employés qui sont couverts par un régime, et non pas 14 % de l'ensemble des travailleurs.

Mme Harel: Donc, la grande majorité des régimes sont pour des entreprises ayant moins de dix employés.

M. Millette: Exactement.

M. Grave!: Peut-être pas moins de dix, mais si vous voyez...

Le Président (M. Bélanger): M. Gravel?

M. Gravel: Excusez-moi. Claude Gravel. Si vous regardez les statistiques de 1987 qu'on vous a fournies, pour les nouveaux contrats souscrits au cours de 1987, ia moyenne dans les régimes de retraite est de 30 % pour les régimes à prestations déterminées et de 26 % pour ceux à cotisations déterminées. Ce ne sont pas des entreprises de dix employés, mais on parle de petites entreprises. Si on regarde le cumulatif et les contrats en vigueur, la moyenne pour les régimes à prestations déterminées est de 65 % et de 15 % seulement pour ceux à cotisations déterminées.

Mme Hare!: Un aspect qui est relevé, à la page 6 de votre mémoire, c'est l'impact que pourrait avoir l'article 56 du projet de loi sur les participants qui comptent une longue période de service. Vous dites que, compte tenu du manque de flexibilité sur le plan des cotisations variables, selon la période de service reconnue en fonction d'un régime à cotisations déter-

minées, les participants qui comptent une longue période de service ne pourraient recevoir de compensation pour le fait qu'ils risquent de toucher à l'avenir une rente inférieure à celle de l'ancien régime qui a été transformé. Les REER collectifs offrent cette flexibilité, et bien plus. Quel véhicule vous apparaît le plus souhaitable pour le genre de clientèle que vous représentez?

M. Turcotte: Je pense...

Le Président (M. Bélanger): Michel Turcotte?

M. Turcotte: C'est bien ça. Mme la députée, je pense que le véhicule souhaité par les compagnies d'assurances, c'est effectivement un régime réglementé en vue de la retraite. Présentement, ce sont des régimes de retraite privés agréés par la Régie des rentes. Si les REER collectifs étaient réglementés en vue de la retraite, ce serait aussi acceptable. C'est là qu'est le dilemme dont on parlait tantôt: les deux sont sur un pied d'égalité fiscalement, mais ne le sont pas au point de vue de la réglementation. Donc, le véhicule qu'on pourrait préconiser, c'est tout régime en vue de prévoir un revenu pour la retraite, indépendamment que ce soit un REER ou un fonds de retraite.

L'inconvénient qu'on voyait, à l'article 56, c'est que nous voyons fréquemment des régimes à cotisations déterminées où la cotisation de l'employé ou de l'employeur dont certains sont en fonction de l'âge et certains sont en fonction du nombre d'années de service. On sait que les personnes de moins de 35 ans pensent plus à se bâtir un foyer, une maison et une famille, probablement qu'ils veulent un régime à 2 % employé-employeur. Lorsqu'ils arrivent vers la quarantaine, ils sont prêts à aller à 4 % employé-employeur; lorsqu'ils arrivent à la cinquantaine, ils sont prêts à 6 % employé-employeur. On sait aussi que les coûts par dollar de rente sont plus élevés quand on est près de la retraite. Donc, si les cotisations sont conformes, elles augmentent quand on arrive à la retraite. Ils vont pouvoir augmenter leur montant de rente lors de la retraite. Pour les personnes les plus âgées, on ne peut plus maintenant, en raison de la Charte des droits et liberté de la personne, faire de la discrimination en raison de l'âge. Cela a été fait d'une autre façon qui n'était pas discriminatoire à mon sens. Concernant le nombre d'années de service, on s'aperçoit que ce sont fréquemment les personnes les plus âgées qui ont le nombre d'années de service le plus élevé par rapport aux plus jeunes. On parvenait de cette manière à augmenter la caisse de retraite, augmenter les contributions employé-employeur dans le but de pourvoir à une rente suffisante.

Mme Harel: Avec les nouvelles dispositions du projet de loi 116, une fois l'adhésion acquise et ensuite l'acquisition capitalisée, la personne va, si elle quitte, si elle fait face à une cessation d'emploi, devoir transférer à une sorte de REER bloqué ou encore, elle va pouvoir le laisser dans le fonds de son employeur pour avoir droit plus tard à une rente différée. Ce REER bloqué, c'est finalement une façon de reconnaître que cette épargne doit servir à la retraite. Par ailleurs, je ne sais pas si vous avez remarqué, il y a un aspect qui est un peu inquiétant, mais c'est en ce qui a trait aux régimes à prestations déterminées qui ne sont pas ceux, je pense, que vous administrez couramment. Ne pourrait-il pas y avoir transfert dans un REER bloqué, même dans un régime à prestations déterminées, après le 56e anniversaire, ou dans un autre fonds, ou dans un REER bloqué, après le 56e anniversaire?

Une des inquiétudes que nous communiquent un certain nombre de personnes qui étudient sur ces questions, c'est qu'on pourrait en créer l'obligation, compte tenu des autres lois, par exemple, en matière d'allocations sociales. Pensons à l'aide sociale proprement dite. On pourrait créer l'obligation de se prévaloir tout de suite de sa rente même si ce n'est pas dans le meilleur intérêt du participant puisque, avec la nouvelle Loi sur l'aide sociale, si vous avez droit à un crédit de rentes, et si ce crédit est supérieur à 60 000 $, vous allez devoir l'utiliser avant d'avoir droit à toute aide. Comme un bon nombre de cas de cessation d'emploi, de mise à pied ou de fermeture touchent particulièrement les personnes de cet âge, finalement, il y a un danger qu'en ne reconnaissant pas que ces épargnes sont prévues pour la retraite on les fasse servir à d'autres fins en cours de route pour compenser des revenus d'emploi qui n'existent plus.

Le Président (M. Bélanger): En conclusion.

Mme Harel: Je vais laisser la conclusion à nos invités. Alors, M. Millette, je sentais que vous aviez l'intention de réagir là-dessus.

M. Millette: Je pense qu'il s'agit là de questions de choix sociaux dans une période de transition au plan social et ce ne serait malheureusement pas la première fois qu'un véhicule conçu pour servir à une fin serve à une autre fin. C'est malheureux, mais je pense qu'on doit laisser aux politiciens le soin d'énoncer des solutions à ces problèmes.

Mme Harel: Merci. Est-ce que le ministre a terminé?

Le Président (M. Bélanger): M. le ministre. Mme Harel: Est-ce que vous remerciez? M. Bourbeau: Oui.

Mme Harel: Ah bon! Je vais tout de suite vous remercier et vous dire que votre mémoire apporte une contribution originale et spécifique, en fait, aux travaux de la commission parlementaire. Je vous en remercie.

M. Millette: Merci, madame.

Le Président (M. Bélanger): M. le ministre.

M. Bourbeau: M. Gravel, M. Massicotte, M. Millette, M. Turcotte, merci de votre contribution. Soyez assurés que nous allons en tenir compte dans la préparation des amendements que nous apporterons éventuellement au projet de loi. Merci.

Le Président (M. Bélanger): La commission des affaires sociales remercie l'Association canadienne des compagnies d'assurance de personnes inc. et suspend ses travaux jusqu'à 16 heures, soit après la période de questions, au même endroit. Merci, bon appétit.

(Suspension de la séance à 12 h 50)

(Reprise à 16 h 11)

Le Président (M. Leclerc): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission des affaires sociales reprend ses travaux et invite la Fédération des femmes du Québec à se joindre à nous en se présentant à la table. Vous ne nous entendez pas? Alors, j'invite la Fédération des femmes du Québec à se présenter à la table, s'il vous plaît.

Prenez le temps de vous installer. Donc, mesdames, au nom de la commission je vous souhaite la bienvenue parmi nous et je vous demande de vous identifier pour les fins du Journal des débats.

Fédération des femmes du Québec

Mme Middleton-Hope (Constance): M. le Président, nous représentons la Fédération des femmes du Québec, organisme regroupant environ 98 associations, quelque 300 membres individuelles, et plus de 65 000 femmes. Je m'appelle Constance Middleton-Hope, M l-d-d-l-e-t-o-n-il-o-p-e.

Le Président (M. Leclerc): C'est gentil de I'épeler.

Mme Middleton-Hope: Je suis la toute nouvelle présidente de la Fédération depuis dimanche.

Le Président (M. Leclerc): On vous félicite.

Mme Middleton-Hope: Je vous remercie. C'est à la Fédération qu'on remet aussi les félicitations, bien sûr. Je vous présente mes collègues, Me Miriam Grassby, à ma gauche, qui est à l'origine du projet Partage, et depuis quatre ans elle travaille à la reconnaissance du droit économique des conjoints. Elle est aussi membre du comité du Barreau sur ce même dossier, et membre individuelle de la Fédération des femmes du Québec. À ma droite, je vous présente Mme Ginette Busque, qui est d'ailleurs bien connue de plusieurs d'entre vous. C'est la présidente sortante de la fédération, qui a été responsable de ce dossier qui vous est présenté aujourd'hui et qui a rédigé le mémoire. À ce titre, M. le Président et membres de cette commission, j'inviterais, si vous le permettez, Mme Busque à vous faire cette présentation.

Le Président (M. Leclerc): Avec plaisir. Je sais que Mme Busque est une habituée de nos travaux. Cependant, je voudrais simplement rappeler que vous avez vingt minutes pour nous faire part de votre mémoire et que chacun des groupes ministériels aura ensuite quinze minutes pour discuter avec vous. Madame, vous pouvez y aller.

Mme Busque (Ginette): Je vous remercie. Ne soyez pas inquiets. Notre présentation sera relativement brève. Nous n'avons pas de commentaires à faire sur chacun des articles ou des points de ce projet de loi. Cependant, j'aimerais peut-être compléter une information qui vous a été apportée par Mme Middleton-Hope et rappeler que la Fédération des femmes du Québec a fait partie de la Coalition pour une retraite décente qui, au début des années quatre-vingt, réclamait une réforme des régimes publics de rentes et qui, à l'occasion des positions qu'elle avait développées en regard des régimes publics, avait aussi réclamé un certain nombre d'améliorations et d'amendements qui devaient être apportés à la Loi sur les régimes complémentaires de rentes. Donc, un certain nombre de points du projet de loi 116 se rapportent aux revendications que nous avons faites à cette époque. Nous reprendrons ces points.

Je commencerai donc, tout d'abord, par fa question de l'adhésion. Le projet de loi 116 propose une adhésion ou une formule d'adhésion qui rejoint tout à fait les revendications que nous avions dans ce dossier. J'aimerais cependant faire remarquer que, même si c'est une amélioration substantielle dans le sens qu'on permet maintenant à des travailleurs ou à des travailleuses à temps partiel d'adhérer à un régime de rentes, cela n'améliorera pas d'une façon substantielle ou même intéressante la situation des femmes, celles-ci n'étant en moyenne que 1,9 année dans un même emploi. Donc, très peu de femmes arriveront à cotiser à un régime privé là où il y en a et aussi, par le fait même, très peu de femmes pourront bénéficier des règles d'acquisition et d'immobilisation.

Nous reconnaissons, cependant, qu'il est

très difficile, à l'intérieur des régimes privés, de prévoir un mode d'adhésion qui soit plus rapide que celui qui est prévu. Donc, notre commentaire serait peut-être qu'il demeure extrêmement intéressant ou nécessaire de penser à une réforme des régimes publics puisque c'est à peu près le seul régime qui puisse couvrir la catégorie de travailleuses à laquelle on fait référence.

Pour ce qui est de l'acquisition et de l'immobilisation, nous avons toujours maintenu que la règle du 10-45 qui s'applique à peu près partout, était nettement désavantageuse pour un très grand nombre de travailleurs et de travailleuses. L'évolution récente du marché du travail, qui exige une très grande mobilité de la part des travailleurs, pénalisait donc une très grande partie de la main-d'oeuvre. Alors, en tant que membre de la Coalition pour une retraite décente, la FFQ avait appuyé les recommandations selon lesquelles les dispositions régissant des rentes supplémentaires permettent l'acquisition et l'immobilisation de la rente après deux ans de participation, ce que reconnaît le projet de loi 116. Donc, nous ne pouvons qu'être d'accord avec cette partie du projet.

Nous faisons remarquer que les commentaires qu'on vient d'apporter quant aux règles d'adhésion s'appliquent encore plus quand il est question d'acquisition et d'immobilisation parce que les caractéristiques de la participation des femmes au marché du travail ne favorisent nullement une sécurité économique à la retraite. Parmi celles qui acquerront, finalement, le droit d'adhérer au régime, très peu de femmes travailleront suffisamment longtemps pour un même employeur pour voir leur droit acquis. Pour ce qui est de la transférabilité, nous avions aussi réclamé, dans la foulée de nos recommandations sur l'acquisition, de nouvelles dispositions qui permettaient la transférabilité des gains accumulés. Alors, les règles prévues au projet de loi 116 répondent encore une fois aux objectifs que nous visions dans le manifeste de cette Coalition.

Maintenant, la protection en cas de décès. Les dispositions relatives à la protection du conjoint survivant prévoient le versement de la valeur de la rente différée si le conjoint participant au régime meurt avant sa retraite et une rente égale à 60 % du montant de la rente du participant si celui-ci meurt après sa retraite. Cela rejoint aussi, en quelque sorte, les recommandations qui visaient à l'établissement d'une rente de conjoint survivant obligatoire - c'est la terminologie que nous utilisions à l'époque - à moins de renoncement de la part des deux conjoints. Étant donné que votre projet prévoit que c'est le conjoint du participant qui peut renoncer à son droit ou révoquer sa renonciation, en fait, le genre de protection que nous recherchions est à peu près garanti par le projet.

Maintenant, je pense que nous avons fait erreur sur la définition du mot "conjoint". On a pu s'apercevoir de ça dans une conversation qu'on vient d'avoir, avant la présentation. Nous croyons que le projet de loi, en utilisant une terminologie qui parle d'une personne qui vit maritalement avec une autre personne non mariée, avait l'Intention de reconnaître les couples homosexuels, ce qui ne semble pas le cas d'après les commentaires qu'on vient de nous donner. Notre interrogation se situait à l'égard de l'interprétation qu'on donnerait à l'expression "vivre maritalement". Il semble aussi que, dans l'esprit des rédacteurs, "vivre maritalement", cela signifie "être mariés". Donc, forcément, c'est l'hétérosexualité. Notre paragraphe qui commente la partie sur la définition du mot "conjoint" ne doit plus être considéré si votre intention n'était pas de reconnaître justement les couples homosexuels.

Pour ce qui est de la cotisation patronale, des dispositions relatives aux administrateurs, des dispositions relatives à l'information qui doit être diffusée, toutes les mesures qui sont proposées dans le projet rejoignent en fait les objectifs que nous visions aussi, c'est-à-dire que nous voulions une contribution de l'employeur égale à au moins la moitié du coût de la rente, ce qui semble être prévu dans le projet de loi 116 si notre compréhension est exacte. Donc, c'est exactement ce que nous recherchions.

La possibilité aussi pour les travailleurs de faire partie d'un comité qui surveille la gestion ou qui participe à la gestion des fonds répond aussi à nos objectifs, de même que toute la partie qui traite de l'information. Nous ajouterions peut-être, cependant, qu'il serait intéressant de songer à demander que l'information soit aussi diffusée aux conjoints des participants dans la mesure où ils sont visés par les régimes. C'est-à-dire que toute personne sur qui le régime peut avoir une influence ou toute personne dont la situation financière peut être influencée devrait pouvoir avoir accès aussi à l'information.

Pour ce qui est des failles du projet, parce que, jusqu'à maintenant, ce qu'on vous envoie, ce ne sont pas nécessairement des fleurs, mais au moins un acquiescement à la direction qui est prise, nous regrettons infiniment qu'il n'y ait pas d'indexation prévue dans le projet de loi 116. Nous sommes au courant des difficultés que pose l'indexation des rentes. Nous savons que l'Ontario est présentement en train d'étudier cette question, mais nous souhaiterions du moins entendre de la part du gouvernement sa volonté d'intervenir à ce niveau-là, dès qu'il sera possible de le faire. Donc, c'est un peu, je dirais, la volonté politique qu'on n'est pas sûres de voir transparaître, actuellement, en ce qui concerne l'indexation.

Pour ce qui est des partages des crédits au moment du divorce, cette question est extrêmement importante pour nous. Vous vous demandez peut-être pourquoi nous avons choisi de l'amener ici, le ministre responsable de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu n'étant pas celui qui est responsable directement de la reconnaissance des droits économiques des conjoints, on est très

conscientes de ça. Par contre, nous avons cru que c'était essentiel de soulever cette question ici pour une raison très simple. C'est que le ministre responsable de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu est celui qu'on va certainement interpeller pour savoir dans quelle mesure ce partage est faisable, pour savoir quelles sont les règles qu'on peut appliquer dans un tel pargage. Je pense que si M. Bourbeau est lui-même convaincu du bien-fondé de ce partage, il peut donc soutenir Mme Gagnon-Tremblay et M. Gil Rémillard, dont dépend le dossier en question. Alors, je dirais que notre intervention à ce niveau est plus politique qu'autre chose, connaissant votre niveau d'intervention dans ce dossier.

Nous avons donc choisi de démontrer, actuellement, comment cela se fait ailleurs. Vous allez voir qu'au texte de la Fédération nous avons annexé différents documents qui permettent de voir que cela se fait dans d'autres provinces. Actuellement, le Québec est vraiment une province qui refuse de progresser dans ce dossier, c'est celle qui traîne le plus la patte, celle qui ne veut pas reconnaître cette égalité économique des conjoints à travers le partage des crédits de rentes. Cela se fait ailleurs et il y a différentes modalités. Je pense que vous le savez aussi. Je pense que vous êtes entouré d'experts qui connaissent très bien ces questions. Mais c'est aussi une question de volonté politique et nous ne saurions que trop vous manifester notre adhésion totale à ce principe de partage et notre désir de vous voir le concrétiser. Nous avons fait nos revendications lors des audiences sur les droits économiques des conjoints, Me Grassby a aussi comparu devant cette commission, mais nous tenions à venir répéter ces propos ici.

Il y a une chose que le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu peut certainement mettre dès maintenant dans son projet de loi, soit la possibilité, pour les conjoints qui le veulent, de partager ces crédits. Actuellement, les gens qui vont voir des avocats au moment d'un divorce et qui sont prêts à le faire ne le font pas à cause des difficultés inhérentes. La loi du Québec, actuellement, ne permet pas de le faire. Donc, qu'on permette, à tout le moins, aux gens, aux couples qui, en instance de divorce, veulent partager ces crédits de pouvoir le faire, ce serait déjà une ouverture sur cette reconnaissance des droits économiques des conjoints.

Pour ma part, je vous ai transmis l'essentiel de la position de la Fédération des femmes du Québec dans ce dossier, mais je pense que Me Grassby aurait des informations et un point de vue à vous exprimer.

Le Président (M. Leclerc): Me Grassby.

Mme Grassby (Miriam): Je ne voudrais pas être longue mais je voudrais quand même rediscuter un petit peu de cette question de la nécessité de prévoir, dans cette loi, la possibilité au moins pour ies époux qui veulent se partager des crédits de rentes de pouvoir le faire. Parce que tout le monde n'est pas ministre et, effectivement, il y a des maris, à Montréal - j'en ai vu dans mon bureau - qui voudraient donner à leur femme la moitié de leurs crédits de rentes.

Je suis venue au mois d'octobre devant la commission parlementaire et j'avais alors parlé de certains genres de femmes. J'avais appelé ça... Il y avait Mme Ordinaire, Mme Nouvelle Carrière et Mme Propriétaire de maison, et on avait regardé ensemble les difficultés dans lesquelles ces femmes pouvaient se trouver. J'avais parlé, par exemple, de Mme Nouvelle Carrière qui, à l'âge de 50 ans, vient de finir des études, de se recycler après avoir eu ses enfants, qui arrive sur ie marché du travail et qui, lorsque son mari lui demande le divorce, se sent prête à voler de ses propres ailes. Elle vient chez son avocat et dit: On veut un divorce. Moi, je suis correcte, je peux gagner 30 000 $ par année. Je suis bien. Moi, je dois lui dire: Écoutez, madame, vous êtes bien aujourd'hui, mais si vous n'avez pas de pension alimentaire ou si vous n'avez pas droit à une pension alimentaire réservée ou des droits dans le fonds de retraite de votre mari, à 65 ans, vous ne pourrez jamais voir à vos besoins parce qu'entre l'âge de 50 et 65 ans vous ne pourrez pas accumuler ce qui vous sera nécessaire pour vivre d'une façon normale comme vous avez vécu par le passé.

Quand je suis venue au mois d'octobre, j'avais pensé à Mme Nouvelle Carrière, ce cas était vraiment frais dans mon esprit. Entretemps, son mari a négocié avec elle et il a été d'accord pour lui donner la moitié de la maison et la moitié de ses crédits pendant la période où Us ont cohabité. Quand elle est allée voir un avocat, il lui a dit: Cela ne se fait pas. C'est impossible. Ce n'est pas dans la loi. C'est beaucoup trop tordu. Disons qu'il était moins prêt à le faire une fois qu'il a vu qu'il n'y avait pas de mécanisme dans la loi pour le faire. Alors, je pense qu'il est très important qu'on insère des paragraphes dans la loi qui le permettraient, tout comme, par exemple, dans la loi fédérale où on prévoit que, s'il y a convention entre les époux, l'envoi d'une convention à l'administrateur du régime de rentes permet alors la division des crédits. Évidemment, on espère que, si on le permet dans les cas où il y a consentement, cela va aussi convaincre des gens que c'est une nécessité dans tous les cas.

J'avais discuté au mois d'octobre, et je le répète brièvement, de la nouvelle loi sur te divorce de 1985 où c'est le "no-fault divorce", où de plus en plus on dit que les femmes doivent devenir autonomes et où on leur donne seulement quelques années de pension alimentaire pour se recycler. C'est maintenant rendu plus important que jamais de permettre le partage des crédits de rentes parce qu'elles n'auront pas, elles, la protection qu'ont eue Ses femmes, pendant les

dernières années, qui n'ont jamais travaillé, qui n'ont jamais été sur le marché et qui ont toujours eu une pension de leur mari jusqu'à l'âge de 65 ans, et qu'elles continuent d'avoir une pension alimentaire basée sur les droits à la retraite de leur mari. Ces femmes arrivent à 45 ans, 50 ans sans pension alimentaire et, à 65 ans, elles n'ont pas droit à une pension alimentaire. C'est pour cela que lorsqu'ils se quittent, lorsqu'ils divorcent, il faut quand même prévoir, basée sur le nombre d'années de mariage, une certaine sécurité pour elles, surtout parce que, normalement, lorsqu'elles n'ont pas de crédit de rentes, c'est parce qu'elles sont restées à la maison pour élever les enfants, ou parce que, comme couple, Us ont choisi que madame ne travaille pas, ou, en travaillant, qu'elle n'adhère pas à un régime de retraite, parce que, souvent, un couple se demande pourquoi il aurait besoin d'un deuxième régime de retraite.

Que ce soit le cas de la dame qui retourne sur le marché du travail à 50 ans ou celui de celle qui retourne sur le marché à 40 ans, c'est extrêmement difficile de recommencer à zéro. Souvent le mari, à l'âge de 40 ans, travaille déjà depuis vingt ans pour un employeur et il fui reste encore 25 ans pour accumuler les droits, tandis que madame commence à zéro. C'est certain qu'un partage dans un jeune couple est moins onéreux pour le mari ou pour la femme qui doit elle aussi partager, mais c'est tout aussi important qu'H y ait un certain partage s'il y a divorce dans ce cas-là.

Finalement, on s'était également parlé du fait que si on prévoit une division des biens familiaux et que les femmes qui sont propriétaires de leur maison doivent en donner la moitié à leur époux, effectivement, vu que les deux biens les plus importants dans la famille sont normalement la maison et les droits à la retraite, il faudrait tout de même qu'il y ait une espèce d'égalité; si la femme doit donner, elle va recevoir, elle va partager les crédits de rentes et vice versa.

Alors, je pense qu'on est vraiment la seule place, on reste la seule province où on ne permet pas le partage des crédits de rentes. Je pense que cette loi, ce projet de loi nous permet justement de prévoir que les gens peuvent se mettre d'accord, peuvent le faire par convention et qu'ils devraient le faire. Je souligne l'importance et la nécessité urgente de prévoir ça car, si on le met dans la loi, non seulement les époux qui le voudront pourront le faire, mais cela va aussi aider les juges à reconnaître la nécessité et l'importance de ne pas oublier, lors des divorces, le fait qu'effectivement les droits à la retraite sont un bien important. Le législateur doit y penser et tout le monde doit y penser lors de la dissolution du mariage. (16 il 30)

Le Président (M. Lecierc): Puisque votre temps de parole est terminé, est-ce que vous pourriez conclure, s'il vous plaît?

Mme Grassby: C'était ma conclusion.

Le Président (M. Lecierc): C'était votre conclusion. Je vous remercie. M. le ministre.

M. Bourbeau: Oui. M. le Président, on peut conclure, à la lecture du mémoire de la Fédération des femmes du Québec, qu'en principe elle appuie le projet de loi tout en soulignant que les dispositions minimales profiteraient probablement à un petit nombre de femmes seulement. La loi ne fait pas de discrimination sexuelle, mais elle ne contient pas de dispositions sur le partage des crédits de rentes entre les conjoints - on vient d'en parler abondamment - sur l'information au conjoint, qu'on voudrait voir améliorer, et sur l'indexation. La Fédération se dit cependant en accord avec l'implication des participants à la gestion des fonds.

J'ai écouté avec beaucoup d'attention les plaidoyers que vous venez de faire en faveur du partage de la rente lors d'un divorce. Effectivement, il n'y a présentement rien dans la loi qui prévoit un tel partage des crédits de rentes entre conjoints, mais vous savez sûrement autant que moi que ce dossier est tout à fait d'actualité; il ne peut pas être plus d'actualité que ça. Pour nous, le dossier des droits économiques des conjoints comprend tout un ensemble de choses, dont, entre autres, le partage des crédits de rentes entre conjoints et d'autres actifs, bien sûr. Tout ce que je peux vous dire, c'est que c'est par le biais de ce dossier que nous croyons qu'une solution devrait être apportée aux problèmes que vous évoquez. Espérons que d'ici peu de temps le gouvernement sera en mesure de faire connaître ses intentions à ce sujet.

Vous avez parlé de l'indexation en évoquant que ça se faisait en Ontario. Effectivement, l'Ontario a ouvert, un peu timidement, la porte de l'indexation. Le projet de loi n'en parle pas, parce que nous n'avions pas l'intention de parler de ce sujet ni de la disposition des surplus d'actifs. On verra au cours des prochains mois. Nous avons l'intention de consulter, au cours des prochains mois, principalement au sujet des surplus d'actifs et de leur disposition. On verra, à ce moment-là, si oui ou non le gouvernement voudra également s'avancer sur la question de l'indexation. Pour l'instant, disons que les efforts du gouvernement portent sur la refonte de la loi comme telle, et les autres sujets seront ou pourront être discutés dans les prochains mois, probablement à l'automne.

Vous soulevez des commentaires au sujet de la question de la définition du conjoint. Nous avons l'intention de clarifier la désignation de conjoint pour bien souligner que l'on vise l'homme et la femme. Quand on parle de conjoints, on ne vise pas des individus du même sexe, mais un homme et une femme qui vivent maritalement ou qui cohabitent. On va trouver une formule peut-être un peu plus claire pour bien clarifier l'intention du législateur, mais je

confirme que nous visons les conjoints de sexe opposé.

Maintenant, vous avez également soulevé un point intéressant, c'est la première fois d'ailleurs que je le vois dans les mémoires, c'est la possibilité de fournir de l'information au conjoint sur celui qui est inscrit au fonds de retraite. C'est la première fois qu'on nous fait une observation semblable. Je dois dire que cela m'étonne un peu. Au premier chef, on est porté à penser qu'en principe, quand on donne de l'information à un travailleur, on se trouve à informer l'ensemble de ceux qui, dans la famille, ont un intérêt à la chose. Cela présuppose évidemment que l'information ne transiterait pas très bien entre le travailleur et son conjoint. Cela réapparaîtrait un peu lourd de prévoir systématiquement une double information, tant au travailleur qu'au conjoint. Ainsi, il faudrait aussi tenir à jour un fichier de l'évolution des conjoints. Je ne dis pas non. Il serait peut-être plus facile de penser qu'on pourrait donner l'information à la requête d'un conjoint dans des cas où le conjoint le demanderait. À ce moment-là, il faudrait peut-être faire les vérifications d'usage pour s'assurer que ce soit le vrai conjoint. D'autre part, il faudrait également vérifier avec la Commission d'accès à l'information si on a le droit de faire de telles communications. On me signale que, de toute façon, tout conjoint qui reçoit une rente a évidemment droit à l'information. Si je comprends bien votre point, selon vous, on devrait faire parvenir de l'information à un conjoint alors que c'est le participant ou le retraité qui reçoit la rente.

Mme Busque: Ce n'est pas nécessairement le conjoint au moment où il reçoit la rente, mais bel et bien, comme vous le dites, que le conjoint d'un participant ou d'une participante...

M. Bourbeau: D'un travailleur.

Mme Busque: ...ait accès à l'information. Que celui qui répondra à la définition de conjoint qui sera dans le projet de loi ait accès à l'information qui le concerne.

M. Bourbeau: Même au moment où le travailleur est en emploi et qu'il paie ses cotisations? Dès ce moment-là?

Mme Busque: Oui. Il n'est pas nécessaire de prévoir que cette information circule "at large", en dehors de l'entreprise en question. C'est quand même de l'information qui n'est habituellement divulguée qu'au sein de l'entreprise, mais on demande que les personnes qui en font la requête puissent avoir accès à cette information, comme personnes intéressées.

M. Bourbeau: II y a des implications juridiques qu'on va vérifier. Quand même, ces renseignements sont de nature personnelle. Il ne faudrait pas que ce soit ouvert ainsi à tout le monde, quoique je reconnaisse qu'un conjoint, ce n'est pas tout le monde. Il faut d'abord s'assurer que la Régie a le droit de donner ce genre d'information à une tierce partie et, si elle en avait le droit, que des mécanismes de contrôle soient mis en place pour que l'information se rende bien à la bonne personne. Disons qu'on prend note de la suggestion. On va l'évaluer.

Mme Busque: Quand on parle d'information, on ne veut pas dire non plus nécessairement et uniquement: Combien j'aurais si mon mari mourait? À quel niveau en est rendu le plan de retraite de mon conjoint? C'est plutôt que de l'information sur les mécanismes et sur le fonctionnement soit accessible.

Mme Grassby: M. le ministre, dans la loi fédérale sur les normes de prestation de pension, je pense qu'on prévoit que, sur demande d'un conjoint, l'administrateur doit donner de l'information. C'est quand même plus restreint que de donner de l'information nécessairement aux deux, chaque année. C'est assez précis.

M. Bourbeau: Très bien, on va vérifier cette suggestion. Le temps partiel. Selon vous, très peu de femmes pourraient avoir accès au régime, étant donné la mobilité très grande, le fait que les femmes ne demeurent pas, d'après vos prétentions, à un emploi très longtemps. Alors, dans le régime complémentaire - je sais que vous avez proposé de modifier le régime général des rentes du Québec, mais dans le régime auquel on travaille présentement, le régime complémentaire de retraite - est-ce que vous trouvez que d'autres façons de procéder pourraient être envisagées pour améliorer cette carence?

Mme Busque: Je dirais qu'on ne voit pas, effectivement, comment, à l'intérieur des régimes complémentaires, ce serait véritablement possible de le faire. Évidemment que les entreprises qui permettent d'adhérer après un an... L'employeur peut toujours bonifier son régime, il n'est pas obligé de respecter cette règle, mais, en même temps, on est sensibles à l'argumentation qui nous a été apportée, à savoir que les employeurs, très souvent, tenaient à voir dans quelle mesure un employé serait un employé stable dans l'entreprise. On revient encore avec la question des régimes publics, ce qui demeure peut-être la seule voie pour ces travailleuses.

M. Bourbeau: La loi prévoit que le conjoint peut renoncer à la rente, moyennant quoi il y a une bonification, évidemment, de la rente. Ce matin ou hier, je crois, le Conseil du statut de la femme a demandé qu'on lui enlève ce droit, cette faculté de pouvoir renoncer. C'est à l'article 86 du projet de loi qui dit: "Le conjoint d'un participant... peut, avant la date où débute

le service de la rente du participant, renoncer à ce droit, ou révoquer cette renonciation, à condition que l'administrateur en soit informé avant cette date." Évidemment, cela a pour effet de bonifier la rente.

Mme Busque: C'est évident qu'on peut penser que cette renonciation peut prêter à certaines manipulations et, dans ce sens, ça peut, effectivement, être dangereux. Mais c'est d'autant plus Important, justement, que les conjoints aient une pleine Information pour qu'au moment où une renonciation se fait, ce soit un geste éclairé qui tienne compte d'une situation spécifique dans un couple. Si on y renonce parce que le conjoint qui est non participant est, je ne sais pas, dans un mauvais état de santé et qu'on est certain qu'il ne sera pas le conjoint survivant, par exemple, ce qui augmente, par le fait même, la prestation du participant, à ce moment, je pense qu'il faut éviter qu'il n'y ait ce genre de manipulation, et la façon d'éviter ça, c'est de s'assurer que l'information soit donnée d'une façon adéquate.

M. Bourbeau: Le fait d'enlever la possibilité de renoncer nous apparaissait un peu paternaliste, puisqu'on ne laisserait pas la possibilité à un conjoint d'exercer un droit. On pourrait concevoir des cas, par exemple, où un participant a de fortes assurances sur la vie, et qu'alors on déciderait de renoncer au droit de survie à la rente pour bonifier la rente pendant le vivant du participant ou du retraité, sachant qu'au décès les assurances sur la vie prendront le relais. Je voulais simplement savoir si vous endossiez cette demande du Conseil du statut de la femme, mais je crois que vous semblez plutôt... Enfin, je déduis que vous préférez conserver le droit de pouvoir renoncer, mais en s'assurant que l'information soit adéquate. Est-ce que je me trompe en disant ça?

Mm» Busque: C'est à peu près exact. Je n'ai pas vu le mémoire du Conseil du statut de la femme, mais je ne doute pas qu'on soit sensibles aux arguments qu'il a amenés. Si c'est une crainte de manipulation de la part du conjoint participant à l'égard de l'autre conjoint, je suis sensible, et je pense qu'on le sera toutes, à ce genre d'argument. Nous apportons un point de vue qui est la possibilité que cette renonciation se fasse parce que, dans certains cas, elle est peut-être utile, mais, encore une fois, si elle est faite dans l'ignorance des répercussions, on manipule alors véritablement quelqu'un. Donc, on souhaite qu'il n'y ait pas d'ouverture, au moins dans la loi, à cette manipulation.

M. Bourbeau: On me signale que mon temps est écoulé. Je ne voudrais surtout pas m'attirer les foudres de la députée de Maisonneuve. Alors, je vais lui laisser la parole. (16 h 45)

Le Président (M. Leclerc): Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Le ministre veut faire croire que je suis un peu mégère. Je veux, M. le Président, saluer la nouvelle présidente de la Fédération des femmes du Québec, Mme Middleton-Hope, et Me Grassby, et vous allez me permettre de rendre hommage à Mme Busque. Je sais que vous lui avez rendu hommage au cours de votre congrès qui s'est terminé en fin de semaine passée. Elle a été nouvellement nommée vice-présidente du Conseil consultatif canadien sur la situation de la femme. Je crois qu'elle est reconnue par nous toutes au Québec comme l'une de celles qui, dans ces années difficiles, a malgré tout fait progresser le dossier de la cause des femmes. Alors, je veux qu'elle sache que j'ai beaucoup regrette de n'avoir pu assister à la soirée d'hommages qui lui ont été rendus par le mouvement de la Fédération des femmes du Québec.

Le ministre vous a fait part de son désir de consulter l'automne prochain. Chaque fois qu'il en parle, j'ai comme l'impression qu'il est au pays des merveilles et qu'il se prend pour Peter Pan parce que les probabilités de consultations sur la disposition des surplus et sur l'indexation sont à peu près les mêmes que celles d'aller ensemble à Walt Disney, c'est-à-dire à peu près nulles. À 95 %, l'automne prochain sera consacré à l'échéance électorale. Le premier ministre lui-même l'a annoncé. Alors, quand cela vient du premier ministre, je suis surprise que son ministre n'en prenne pas bonne note et continue d'annoncer une consultation pour l'automne prochain.

Là, il ne faut tout de même pas nous prendre pour des enfants, il est évident que sur cette question le gouvernement a retardé les échéances de façon qu'il ne puisse pas faire connaître véritablement ses propositions avant l'élection. Il invoque la comparaison avec l'Ontario qui continue de consulter, mais la loi est déjà adoptée depuis 1987. La différence, c'est que l'Ontario consulte sur une proposition d'indexation et une proposition de disposition de surplus. Au Québec, nous n'avons ni l'une, ni l'autre. C'est le néant. On ne sait pas. Et plus les travaux de la commission se poursuivent, plus je me rends compte que sur l'indexation je ne sais même pas si, en principe, le ministre pense qu'il en faut une. Alors il faudrait clarifier cela d'ici à la fin de nos travaux, parce qu'il y en a quand même eu pendant quatre ans. Il faut quand même se répéter, et on aura l'occasion, sans doute, avec le groupe qui vous suivra, de rappeler que pendant plusieurs années le prédécesseur du ministre qui avait la responsabilité, qui était porteur du dossier, invoquait qu'il ne pouvait pas nettoyer ou rajeunir toute cette loi sur les régimes complémentaires parce qu'y avait d'abord la priorité de son gouvernement à réaliser, celle de l'intégration des femmes au

foyer à la Régie des rentes du Québec. Tantôt, je vous ferai part des déclarations officielles que faisait son prédécesseur à cet effet dans The Gazette.

Alors, on en est maintenant, quatre ans plus tard, au néant devant le dossier de l'intégration des femmes au foyer à la Régie des rentes du Québec, puis à un report de deux questions qui étaient sujettes à la consultation il y a quatre ans, celles de l'indexation et de la disposition des surplus. Je prends bonne note que vous souhaitez l'indexation et je veux simplement vérifier que vous soyez de la consultation. Le ministre n'a pas encore annoncé que la consultation serait publique sur ces deux questions essentielles, et je souhaite qu'elle le soit. Étant entendu que ce n'était pas évident que vous soyez des nôtres cette fois-ci, je souhaiterais que ce soit confirmé que vous y soyez la fois d'après.

Alors, sur la question que vous abordez - je vous remercie car votre document est complet - vous avez ajouté à la fois les analyses qui avaient été faites en ce qui concerne la rente du conjoint et diverses analyses, dont une intéressante qui s'intitule: "Droits économiques des conjoints, proposition du gouvernement du Québec", des commentaires relativement à la proposition dans un document signé par une entreprise, je pense, Me Mireille Deschênes, conseillère chez Mercer. Je voudrais revenir là-dessus parce que vous avez sûrement pris connaissance de l'article 88 du projet de loi. Je veux vous en entendre parler parce que le ministre dit que ce n'est pas ici qu'on va décider, ça sera ailleurs, peut-être que ça se décide d'ailleurs maintenant parce que c'est au Conseil des ministres au moment même où on se parle. Donc, il dit: Je n'ai pas besoin d'en parler dans mon projet de loi. Je veux vérifier avec vous si vous avez la même interprétation. L'article 88 dit: "Le droit à la rente au conjoint s'éteint par le divorce, l'annulation de mariage ou, dans le cas du conjoint non marié, par la cessation de vie maritale". Donc, Me Grassby, croyez-vous qu'il faut prévoir une modification?

Mme Grassby: Justement, j'allais faire le commentaire quand le temps de M. le ministre s'est terminé. Aussi, il faut faire un changement à l'article 88 parce qu'il n'y a vraiment aucune raison, si quelqu'un prend sa retraite et divorce par la suite, que son épouse perde le droit à la rente. Je pense que c'est quelque chose qui, dans les autres provinces, n'est pas inclus dans la loi et il n'y a pas de raison qu'au Québec la femme qui divorce après la retraite de son mari perde ce droit à la rente. Je pense que c'est un des commentaires qu'on a voulu... C'était ma tâche de vous l'apporter et je ne l'ai pas fait, mais c'est essentiel qu'au Québec on fasse comme ailleurs et qu'on permette au conjoint survivant ce droit à la rente même si le divorce a eu lieu après la retraite.

Mme Harel: Donc, c'est important que le ministre ne transfère pas la responsabilité de la décision uniquement ailleurs. Vous disiez tantôt, Me Grassby, qu'à votre bureau vous receviez des personnes qui pourraient éventuellement partager, les parties étant même susceptibles de l'accepter si tant est que le droit leur soit ouvert. Cela veut donc dire que, même dans l'état actuel des choses, même si le Conseil des ministres et le clan des ministres réfractaires refusaient le partage des biens familiaux ou refusaient d'inclure les régimes privés dans le partage, même à ça, le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, dans son projet de loi 116, aurait la responsabilité de ne pas empêcher un tel partage si les parties en conviennent. Est-ce ça que je dois comprendre?

Mme Grassby: C'est exactement ça parce que c'est le genre de partage qui est extrêmement difficile à faire si la méthode technique n'est pas incluse dans la loi. C'est pour ça que nous y tenons et aussi on tient au fait que si un divorce a lieu après la retraite, l'épouse ne perde pas nécessairement le droit à la rente, parce que, ailleurs, elle ne le perd pas.

Mme Harel: Vous savez, dans le projet de loi 58 qui a servi, d'une certaine façon, de décalque, malgré tout, il y a quelques reculs, l'un portant sur les régimes paritaires, les comités paritaires de retraite, et l'autre portant justement sur cette question de l'extinction ou pas du droit. C'est à l'article 104, si jamais vous voulez vous retrouver, dans le projet de loi 58. Voyez-vous, dans le mémoire que vous déposez, vous avez fait référence à la loi fédérale. Dans la loi fédérale, il y a l'article 25 qui édicté que les droits à la rente sont assujettis au droit provincial. Vous dites que: "le droit québécois ne reconnaît pas le partage des droits à la pension et un tribunal québécois ne peut pas ordonner le partage des droits accumulés dans un régime de retraite assujetti à la loi fédérale".

Mme Grassby: C'est exact.

Mme Harei: Donc, même si, dans notre régime de droit familial, il n'y a pas de partage automatique, il faudrait - c'est ça qu'il faut faire comprendre au ministre - quand même que les dispositions de son projet retiennent la possibilité de le faire. C'est bien ça?

Mme Grassby: C'est exact.

Mme Harel: C'est quand même très utile que vous soyez venues nous rappeler cette dimension parce qu'on allait l'échapper, finalement, uniquement au profit d'une décision qui allait être prise ailleurs.

Il y a une autre question, peut-être avez-vous eu le temps de l'examiner à la Fédération,

c'est celle de la dévolution. Vous dites: "II faut donc inclure les droits à la pension parmi les biens familiaux". C'est sûr que ça se discute ailleurs, mais aussi: "amender les lois régissant les régimes de retraite afin de permetttre le partage des droits à la pension à la source, à môme la caisse, et de prévoir les règles de dévolution..." Ça peut devenir très très complexe si ce n'est pas déjà prévu. C'est ce qu'il faut comprendre. Prévu, ça veut donc dire avec des régies qui sont aussi prévues. Est-ce que vous en avez à privilégier? Est-ce que vous en avez à proposer?

Mme Busque: Non, j'allais vous céder fa parole, Mme Grassby.

Mme Grassby: Et moi qui pensais que vous écoutiez la question.

Mme Busque: J'écoutais la question, mais je n'ai pas la réponse.

Mme Harel: De toute façon, dans votre document joint à votre mémoire, il y a une explication des règles possibles, soit la méthode du partage des crédits de rentes, soit la méthode d'une portion prédéterminée de la rente ou ia méthode de la rente attribuée au conjoint dans un transfert de montant global. En fait, vous parlez des trois formes.

Mme Grassby: II y a plusieurs façons et ce que je pense qui va arriver, c'est qu'il y a une façon qui est plus pertinente, dépendamment de l'âge des parties. La méthode "if and when", c'est très pertinent si une femme ou le couple a 55 ans ou plus. C'est beaucoup moins intéressant pour les deux si le couple a 35 ans. Mais je vais vous assurer que demain, au nom du Barreau, Me Deschênes sera ici.

Mme Harel: Je lui poserai les questions. Très bien. Sur la question de l'information, vous dites qu'il faut donner l'information au conjoint avant qu'il devienne survivant ou encore avant qu'il ait droit à la rente, parce que, dans le fond, il a droit à la rente quand il est conjoint survivant, sinon la rente, dans le projet de loi actuel, est payée au participant. Alors, quelle forme voulez-vous que cette information prenne? Le Conseil du statut de la femme nous a rappelé hier une disposition des normes minimales qui n'est pas appliquée, qui n'est pas connue et qui dit que lorsqu'une travailleuse enceinte prend un congé de maternité, si elle cotise à son régime, l'employeur est tenu, par la loi, de le faire aussi et, donc, de cotiser sa propre part. Mais si elle ne le fait pas, l'employeur n'y est pas tenu, non plus. Mais, comme plusieurs travailleuses ne le savent pas, elles ne cotisent pas durant la durée de leur congé et, à ce moment-là, elles perdent, malgré tout, ces crédits. Alors, quelle sorte d'information souhaiteriez-vous? Qu'il y ait un dépliant, une formule du régime de la Régie des rentes ou du régime privé?

Mme Busque: Du régime privé. Je pense que, du côté de la Régie des rentes, on fait de gros efforts avec les programmes d'information aux cotisants, et tout. Donc, tout travailleur, de toute façon, a accès... Du côté de la Régie des rentes, je pense que les mécanismes d'information sont établis, en tout cas, pour tout ce qui a trait à la rente publique. Nous disons que, très souvent, dans les régimes privés, l'employeur va être très réticent à divulguer de l'information à quelqu'un qui n'est pas son employé même si l'information concerne cette personne directement, c'est-à-dire, dans le cas qui nous concerne ici, qui a qualité de conjoint. Cette information peut être nécessaire strictement en fonction d'une planification financière. Ce n'est pas évident, non plus, que le conjoint participant, et lui-même a très bien compris les mécanismes, est la meilleure personne pour transmettre l'information. Donc, que cette information soit directement accessible au conjoint qui en fait la demande.

Mme Harel: On me dit que mon temps est écoulé. M. ie ministre a-t-il également épuisé le temps qui lui était imparti? Alors, malheureusement, c'est tout le temps à notre disposition. C'est bien court, surtout qu'il y a un problème qui a été illustré ce matin par l'association qui représentait les compagnies d'assurances, à savoir qu'il y a de moins en moins de travailleurs et de travailleuses qui bénéficient des régimes à prestations déterminées parce qu'il y a une augmentation spectaculaire des REER collectifs. Mais les REER collectifs ne sont pas réglementés du tout, tandis que les autres régimes sont surréglementés. En tout cas, c'est ce qui était leur prétention. En d'autres termes, ils ont les mêmes avantages fiscaux, exactement, puisque tout est déductible dans un cas comme dans l'autre, mais dans ie cas des REER collectifs il n'y a là aucune protection. Ce n'est pas bloqué comme épargne-retraite, ce n'est rien de ça. Alors, j'ai l'impression que c'est un aspect... Ils nous faisaient part que c'est surtout dans des entreprises de petite taille et c'est surtout dans des entreprises, justement, où se retrouvent concentrées les femmes. Je crois qu'il y a vraiment matière à vigilance sur ce phénomène qui est en train d'écarter, finalement, un grand nombre de travailleuses des avantages des régimes complémentaires de retraite.

Je veux vous remercier pour votre présentation, pour le rappel que vous faites des responsabilités que Ie ministre a, à l'intérieur de son projet de loi, en matière d'équité pour les conjoints.

Mme Busque: Est-ce qu'on pourrait juste ajouter une remarque?

Le Président (M. Leclerc): Avec le consentement. Consentement.

Mme Busque: C'est qu'au moment où on a rédigé notre mémoire on n'avait pas pris connaissance du budget Wilson. Dans une certaine mesure, la question du partage des crédits de rentes devient de plus en plus importante pour les femmes parce que cette atteinte qu'on est en train de porter tranquillement pas vite à l'universalité de la PSV risque de faire en sorte que les travailleurs et les travailleuses vont devoir compter davantage dans l'avenir soit sur les régimes publics, soit sur les régimes privés, mais le régime universel de la PSV risque de disparaître. À ce compte-là, un grand nombre de femmes vont se retrouver encore plus pauvres qu'elles ne le sont déjà au moment de la retraite.

Le Président (M. Leclerc): M. le ministre.

M. Bourbeau: M. le Président, il me reste à remercier la Fédération des femmes du Québec pour sa contribution substantielle au débat et à l'assurer que nous allons certainement tenir compte des remarques qui ont été formulées et des suggestions qui ont été faites.

Le Président (M. Leclerc): Mesdames, au nom des membres de la commission, il me reste à vous remercier de vous être déplacées pour présenter votre mémoire. Je vous souhaite un bon retour à la maison. J'invite les représentantes des Cercles de fermières du Québec à se joindre à nous.

Nous suspendons nos travaux pour deux minutes.

(Suspension de la séance à 17 h 2)

(Reprise à 17 h 5)

Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il vous plaît!

Je demanderais à chacun de bien vouloir reprendre sa place pour que nous puissions recevoir le groupe des Cercles de fermières du Québec qui sera représenté par Mme Noëlla Huot, Mme Lise Nicole et Mme Kristiane Pilote que j'inviterais à la table des témoins, s'il vous plaît.

Bonjour, mesdames. Bienvenue à la commission. Est-ce que vous connaissez un peu les règles de procédure? Oui. Mme Huot, je pense qu'elle est une habituée? Effectivement. Je vous incite à les suivre. Chaque fois que vous avez à faire une intervention, s'il vous plaît, bien vouloir donner vos noms. Cela rend plus facile le travail des gens qui font la transcription des débats. Sans plus tarder, je vous invite à présenter votre mémoire.

Cercles de fermières du Québec

Mme Huot (Noëlla): Bonjour à chacun et à chacune. Je veux vous présenter Mme Kristiane Pilote qui m'accompagne. Mme Lise Nicole qui devait être ici aujourd'hui, n'a pas pu venir nous rejoindre pour une question de santé. Nous serons deux et nous allons faire notre possible.

Les Cercles de fermières du Québec, un organisme inscrit dans la tradition sociale de la province, ardent défenseur des conditions de vie des femmes et de la famille, ont fait l'étude du projet de loi 116. Ils viennent aujourd'hui apporter leurs commentaires et recommandations au nom des 60 000 membres qu'ils représentent, assurés qu'ils recevront une écoute attentive, provoquant ainsi une sérieuse réflexion sur le fond du problème des régimes de retraite.

Bien sûr, nous ne sommes pas des fiscalistes ni des spécialistes dans le domaine des rentes, mais nous croyons important de faire entendre la voix des femmes dans ce dossier. Nous ne relèverons pas, non plus, tous les points du projet de loi, mais seulement ceux qui ont fait l'objet d'un mémoire en 1984.

En 1984, les Cercles de fermières du Québec faisaient paraître un mémoire sur les femmes au foyer et les régimes de retraite. Nous recommandions alors la révision du droit matrimonial pour y inclure les rentes de retraite comme actifs du ménage; le partage égal entre conjoints des crédits de retraite, privés et publics, à la retraite; le partage automatique des crédits de retraite privés et publics lors d'un divorce; la rente d'orphelin réajustée et indexée; la réforme en profondeur des régimes de retraite, publics et privés; la participation des femmes au foyer au Régime de rentes du Québec, moyennant un crédit d'impôt et l'exemption pour personne au foyer transformée en crédit d'impôt remboursable.

Cinq ans plus tard, à la lumière des lois adoptées et du projet de loi 116 que nous avons à débattre, malgré certaines lueurs d'espoir, nous devons admettre que nous sommes encore très loin de l'atteinte de ce qui nous semblait et nous semble toujours comme un seuil minimal en matière de régimes de retraite, de fonds de retraite.

Qu'est-ce qu'un régime de retraite, sinon une assurance, une façon de garantir un revenu de base à celles et à ceux dont les ressources personnelles sont insuffisantes pour assurer sans trop de heurts une retraite dans la dignité la plus élémentaire? Or, nous sommes à discuter des régimes complémentaires alors qu'une large part de la collectivité est exclue du régime dit universel, le Régime de rentes du Québec.

L'équation travail-salaire peut sembler paradoxale dans une société où le chômage sévit, dans une société où l'on a découvert, comme le dit Félix Leclerc, que "la meilleure façon de tuer un homme, c'est de le payer à ne rien faire". Pourtant, cette équation travail-salaire est inti-

mement liée à toute forme de régime de retraite: les femmes accomplissant un travail non rémunéré au foyer, par exemple, en savent quelque chose puisqu'elles ne sont pas admissibles au Régime de rentes du Québec. C'est là un droit fondamental de tout individu vivant dans notre société que celui de prévoir l'heure de sa retraite et c'est un devoir de l'État de l'y aider, ce pourquoi le Régime de rentes du Québec existe. Il devient donc urgent que la femme, et pourquoi pas l'homme, qui exerce un travail non rémunéré, travail qui a un effet direct sur sa famille et son entourage, soit inscrite au RRQ. Après seulement pourra-t-on parler plus librement des autres régimes. Malheureusement, nous n'en sommes pas là et le projet de loi 116 nous le rappelle.

Que nous soyons bien comprises, le projet déposé par M. André Bourbeau, ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, vient effectivement corriger d'énormes lacunes au système existant dont la désuétude a engendré des injustices sociales terribles. Il n'y aura peut-être plus de cas Singer au Québec, mais toutes les injustices ne seront pas corrigées pour autant.

Pour nous comme pour d'autres, un régime de retraite, c'est de l'argent en banque, c'est un salaire différé. Qui participe? Qui gère? Qui bénéficie? Questions simples, réponses complexes auxquelles le projet de loi 116 n'apporte pas toutes les solutions.

Pour répondre correctement à la première question, il faut d'abord qu'il y ait un régime complémentaire de retraite sur les lieux de travail. Les citoyens corporatifs doivent aujourd'hui comprendre que, parmi les rôles que la société attend d'eux, celui d'appuyer leurs employés dans la quête d'une retraite digne leur incombe autant qu'aux employés eux-mêmes. Si, de plus, Us décident de participer au régime, nous comprendrons sans trop de difficultés qu'il s'agit là véritablement de salaire différé ayant une certaine incidence sur le salaire actuel.

Autrefois, un slogan publicitaire disait "Faites-le maintenant, payez tard", mais aujourd'hui il est devenu "Payez maintenant, profitez-en plus tard". La liberté de participer ou non de l'employeur, si elle doit être respectée, entraînera nécessairement un contrôle sévère de ta part de l'État.

Maintenant, si nous parlions de l'adhésion. Quant à la participation des employés, même si les conditions minimales d'admissibilité sont grandement améliorées, elles n'en écartent pas moins une large part d'entre eux, notamment dans des occupations généralement confiées aux femmes. Nous trouvons que le délai de deux ans, autant dans le cas de la participation que de l'immobilisation, est trop long. Nous souhaitons que les femmes ne soient plus victimes de leur mobilité en emploi, quand on sait que parmi les raisons évoquées par celles-ci pour quitter un emploi, c'est la naissance d'un enfant qui vient au premier rang. Nous recommandons, bien sûr, que le délai maximal soit d'un an pour chacun des délais.

Considérant que les régimes complémentaires de retraite s'adressent plus particulièrement aux travailleurs et aux travailleuses dont les revenus sont plus que suffisants pour vivre, il nous apparaît certain que les travailleurs et les travailleuses à bas salaire seraient plus avantagés par le régime public. On sait aussi que les régimes complémentaires de retraite ne sont pas disponibles pour tous les travailleurs et travailleuses. Nous, les Cercles de fermières, on demande qu'il y ait une bonification du Régime de rentes du Québec afin de pallier ces deux inconvénients majeurs.

Si on s'arrêtait à la discrimination selon le sexe, on voit que le projet de loi 116 demeure silencieux sur cet aspect. Nous tenons à préciser que nous dénonçons toute discrimination entre les hommes et les femmes dans les régimes complémentaires de retraite et demandons de retirer les méthodes, règles ou facteurs qui sont utilisés aux fins du calcul des cotisations ou prestations. La Charte canadienne des droits et libertés n'interdit-elle pas toute discrimination basée sur le sexe? Comme il n'en est pas question dans le projet de loi 116, nous en concluons que cela a probablement été éliminé.

Dans la définition de conjoint - tantôt, la Fédération des femmes du Québec en parlait - nous aussi souhaiterions qu'à l'article 3.2 l'expression "sexe opposé", ou une autre, soit ajoutée afin que ce soit plus précis.

Cotisations et intérêts. Au "qui gère", le projet de loi 116 apporte certaines réponses, tout comme il apporte des orientations à cette gestion et à sa rentabilité. Certes, nous sommes loin des principes d'économie domestique, mais le pouvoir collectif, surtout quand il est de nature économique, ne doit jamais être inférieur au pouvoir individuel; sinon, à quoi servirait-il? Les cotisants à un régime de retraite ont donc droit à une meilleure rentabilité possible, laquelle doit être garantie par un seuil minimal comparable à ce que, par exemple, les institutions financières autorisent à leurs bons clients pour un laps de temps raisonnable. Comme il n'existait pas d'obligation de verser des intérêts sur les cotisations patronales et salariales, nous sommes satisfaites que le projet de loi 116 veille à corriger cette situation.

Indexation. Le projet de loi 116 n'indique aucune obligation quant à l'indexation des rentes. Pour nous, cet aspect est assez important pour que soient mises de l'avant certaines modalités qui pourraient compenser la baisse de valeur de la pension à cause de l'inflation. Nous recommandons donc d'instaurer une certaine indexation des régimes complémentaires de retraite afin de sauvegarder le pouvoir d'achat des bénéficiaires.

Prestations. Dans un contexte de chômage et de pénurie d'emploi, la mise à la retraite anticipée est à ta mode; parfois une bien triste

mode qui, souvent, diminue moralement et physiquement ceux qui y sont contraints. Il faut pourtant prévoir pour ceux qui, tôt ou tard, poursuivront leur travail bien longtemps après que la cloche de la retraite aura sonné. Ce qui est aujourd'hui un encouragement à la retraite pourrait alors devenir un encouragement au travail. La famille du travailleur, épouse et enfants, a aussi à voir dans les retombées d'un régime de retraite. Au moment du décès, certes, et selon une formule équitable soit de remboursement,- soit du bénéfice. Au moment de la rupture aussi, cette forme contemporaine de décès, car ce "salaire différé" était aussi pour assurer la vieillesse du couple. Ce n'est pas une matière simple à légiférer, mais il faut à tout prix trancher la question une fois pour toutes, le patrimoine familial étant directement impliqué.

Alors, nulle trace dans le projet de loi 116 d'un partage possible des crédits de rentes accumulés dans un régime complémentaire de retraite. On sait qu'un autre ministère est déjà impliqué dans ce dossier. On le comprend mais, pour nous, les régimes complémentaires de retraite entrent dans la catégorie des biens familiaux et devraient être non seulement partagés au moment d'un divorce, mais aussi au moment de la retraite. Les crédits de rentes provenant du Régime de rentes du Québec sont déjà considérés comme des biens familiaux et cela, peu importe le régime matrimonial, et sont partageables a la rupture de l'union. Pourquoi les crédits de rentes provenant d'un régime complémentaire de retraite feraient-ils exception?

Nous nous étonnons qu'il y ait un traitement différent entre les deux. Ces biens ne sont-ils pas des revenus différés? Comme nous le mentionnions à la commission parlementaire sur les droits économiques des conjoints à l'automne 1988, nous ne pouvons accepter de voir exclus du patrimoine familial les régimes complémentaires de retraite et les REER, les Régimes enregistrés d'épargne-retraite. Nous croyons qu'ils ont un caractère familial, car ils assurent au conjoint une partie du soutien financier, au-delà des années de travail actif. C'est sûr que nous demandons que les crédits de rentes d'un régime complémentaire soient partagés automatiquement lors d'un divorce ou à la retraite.

Nous tenons à souligner que le Régime de rentes du Québec devrait comprendre la même clause qu'offre le Régime de pensions du Canada quant au partage des rentes à la retraite.

Renonciation. Le projet de loi prévoit le droit de renoncer à la rente de conjoint survivant. Nous croyons que ce droit de renonciation soustraira bon nombre de femmes à cette amélioration contenue dans le projet de loi. Nous croyons également que ce droit sera sujet à des pressions indues de la part du conjoint. Nous recommandons donc que cette possibilité de renonciation à ta rente de conjoint survivant soit retirée, que la rente soit de même valeur, quel que soit le conjoint qui survive.

La réforme de lois concernant les régimes complémentaires de retraite apporte des améliorations sensibles par rapport à la loi actuelle: par exemple, la transférabilité, l'administration du régime, l'intérêt sur les cotisations, etc., mais le projet de loi demeure muet sur certains points. Outre le partage des crédits, l'indexation obligatoire, aucune allusion n'est faite à la discrimination selon le sexe qui a cours dans le calcul des rentes, ni à la question de la propriété des excédents d'actifs qui n'est toujours pas réglée; le moratoire sur cette question persiste encore.

Bref, nous souhaitons, d'une part, faire plus de place à un régime universel comme le Régime de rentes du Québec et, d'autre part, régir avec fermeté, sinon sévérité, les régimes complémentaires de retraite, pour que ceux et celles qui y participent ainsi que leurs ayants droit en tirent un profit juste et équitable.

J'aimerais, en conclusion, ajouter qu'il est important que toutes les femmes puissent bénéficier de rentes de retraite leur permettant ainsi d'échapper à la pauvreté, ce qui est le lot d'un bon nombre d'entre elles. Voilà pourquoi nous réclamons depuis si longtemps que toutes les femmes au foyer adhèrent au Régime de rentes de Québec et nous demandons que le gouvernement réalise sa promesse faite lors de la campagne électorale de 1985 à cet effet C'est toute la notion du mot "travail" qu'il faudra repenser dans notre société, et nous croyons que c'est urgent. Merci.

Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie, madame. M. le ministre.

M. Bourbeau: M. le Président, il me fait plaisir de souhaiter la bienvenue aux représentantes des Cercles de fermières du Québec. En tant que seul ministre du gouvernement du Québec qui a en poche sa carte de producteur agricole, je suis bien placé pour...

Mme Huot: M. Bourbeau, est-ce que je pourrais vous dire juste un petit mot?

M. Bourbeau: Oui.

Mme Huot: Les Cercles de fermières du Québec existent depuis 74 ans et ne sont pas rattachés à la vocation rurale.

M. Bourbeau: II n'y a aucune relation, du tout.

Mme Huot: D'accord. Cela va. Je voyais que vous auriez pu mélanger...

M. Bourbeau: Non. Écoutez, je sais que...

Le Président (M. Bélanger): Je croyais qu'elles y étaient rattachées. Je l'avoue humblement.

M. Bourbeau: Je sais que ce n'est pas relié d'une façon absolue, mais vous ne me direz pas qu'il n'y a pas, parmi vos membres, des gens qui sont dans le secteur agricole! Quand même)

Mme Huot: Oui. Comme ailleurs. M. Bourbeau: Comme ailleurs. Mme Huot: C'est ça.

M. Bourbeau: Comme moi, je suis dans le secteur agricole et je suis aussi ailleurs.

Mme Huot: C'est ça.

M. Bourbeau: Dans le rapport, votre organisme, d'une façon générale, est d'avis que le projet de loi apporte des améliorations sensibles par rapport à la loi actuelle, mais vous constatez ou vous affirmez que le rapport reste muet sur certains points particuliers qui vous intéressent d'une façon évidente, comme l'indexation, le partage des droits à la retraite, lors d'un divorce, entre autres. Je dois répéter ce que j'ai dit à plusieurs reprises, que ce dossier du partage des droits à la retraite est traité couramment, ce n'est pas un dossier qui est sur le "back burner* ou le rond arrière du poêle, il est vraiment sur le devant de la cuisinière, mais il ne fait pas l'objet d'un traitement particulier dans ce projet de loi. Il sera traité dans un autre dossier qu'on appelle le dossier des droits économiques des conjoints. Je formule le voeu, comme vous, que nous soyons en mesure, dans les meilleurs délais, de faire connaître la décision gouvernementale à ce sujet. De toute façon, je pense qu'on en entendra parler très bientôt.

Également, vous mentionnez dans votre mémoire votre objection à ce qu'un conjoint puisse renoncer à la rente de son conjoint. C'est un point de vue qui a été exprimé par un autre groupe hier, je crois. Le Conseil du statut de la femme était du même avis que vous hier. Cependant, la Fédération des femmes du Québec divergeait d'opinion, semble-t-il. C'est un point de vue intéressant, mais qui pourrait être qualifié d'une certaine façon de paternaliste ou de maternaliste en ce sens qu'on enlèverait à des gens un droit, le droit de renoncer ou non, sous prétexte de mieux les protéger. Il pourrait quand même y avoir des cas plus nombreux peut-être, de personnes, de conjoints qui voudraient conserver ce droit. Si on l'enlève, évidemment, elles ne pourront pas l'exercer.

Par exemple, prenons le cas d'un mari qui a de fortes assurances sur la vie. Sa conjointe, sa femme, voulant bonifier la rente commune, la rente du mari, déciderait d'y renoncer en se disant: Aussi bien avoir une rente plus élevée maintenant, quand le mari est vivant; si je survis, j'aurai les assurances. Il pourrait y avoir des gens qui fassent ce calcul, c'est possible. Ce sont même sûrement des choses qui arrivent. En enlevant le droit de renoncer, on enlève la possibilité de s'ajuster à une conjoncture comme celle-là. Je ne sais pas ce que vous pouvez ajouter là-dessus. Aimeriez-vous commenter davantage ce sujet?

Mme Huot: Quand nous demandons cela, nous demandons que les femmes soient protégées et qu'elles ne soient pas intimidées ni forcées, dans certaines circonstances, à renoncer à certaines choses auxquelles elles n'auraient pas renoncé en d'autres temps. Nous voulons éliminer cette occasion de manipuler certaines femmes qui plieraient facilement, parfois. Je pense que vous comprenez ce que nous voulons dire.

M. Bourbeau: Oui, je comprends bien. Vous préférez un surcroît de protection plutôt qu'un surcroît de droits. Vous traitez aussi de la question des surplus, des excédents d'actifs. Vous recommandez qu'on règle dans les meilleurs délais. D'ailleurs, vous déplorez qu'on n'en parle pas. Je peux répéter ce que j'ai dit. Les surplus, c'est un sujet qu'on a délibérément gardé à l'extérieur de ce dossier dans le but de tenter d'adopter ce projet de loi avant le mois de juin. La députée de Maisonneuve va vous dire tout à l'heure qu'il y a peu de chances qu'on puisse adopter quelque chose à l'automne puisque, semble-t-il, elle nous annonce des élections pour l'automne. Dans ces conditions, il est bien évident qu'il reste un peu plus d'un mois avant la fin de la session. Adopter un tel projet de loi d'ici à un mois, c'est déjà un bon contrat. Cela va demander un travail assez important de la part de la commission et des députés. Et, d'une certaine façon, cela va demander aussi l'aide ou, enfin, la collaboration de l'Opposition. Il y a quand même au-delà de 300 articles dans le projet de loi. Si on avait choisi d'y ajouter des sujets aussi controversés que la propriété et la disposition des surplus, la question des congés de cotisation et la question de l'indexation, si on doit en parier, vraiment les débats auraient été allongés d'une façon telle qu'on aurait mis en péril l'adoption même de ce projet de loi qui, vous le reconnaissez, apporte quand même une amélioration sensible par rapport à la situation actuelle.

Nous avons donc opté pour une stratégie en deux temps, deux mouvements, si vous voulez. Dans un premier temps, c'est la réforme de la loi telle qu'on la présente aujourd'hui et, dans un deuxième temps, à l'automne, nous entreprendrons des consultations sur ce qui reste à régler, pour régler tout cela à l'automne, possiblement. Maintenant, cela va dépendre à quelle date la députée de Maisonneuve va convoquer les élections. Si les élections étaient tôt à l'automne, on aurait peut-être une session en octobre ou en novembre qui permettrait de régler un certain nombre de problèmes. Par contre, si les élections avaient lieu plus tard, il est possible

qu'on manque de temps et, dans ce cas, nous nous sommes gardé la possibilité de prolonger le moratoire qui a gelé l'excédent des fonds de retraite. Un simple décret gouvernemental pourrait prolonger le moratoire, tel que l'Ontario l'a fait, après avoir gelé l'excédent de l'actif. Ils ont maintenu ou prolongé le moratoire.

Ce sont essentiellement, M. le Président, les remarques que j'avais à faire, et il me fait plaisir de remettre la parole à Mme la députée de Maisonneuve.

Le Président (M. Bélanger): Merci, M. le ministre. Alors, Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Je ne sais pas, M. le Président, si vous consentiriez à entendre peut-être les remarques de Mme la présidente, Mme Huot.

Le Président (M. Bélanger): Bien sûr. Je vous en prie.

Mme Huot: Cela va, j'attends...

Le Président (M. Bélanger): Cela va? Bon.

Mme Harel: Dès l'ouverture, d'abord permettez-moi de vous souhaiter la bienvenue parmi nous. Vous êtes, je le constate, une habituée des travaux parlementaires. Je veux également souhaiter la bienvenue à la personne qui vous accompagne. Une première remarque, le ministre vous a dit, quant à la question du partage de la rente de conjoint: Cela ne me concerne pas, c'est un autre dossier, celui du partage des droits à la retraite. Cela l'intéresse, mais il ne se sent pas concerné. Cela l'intéresse, ça le concerne et, plus encore, il est responsable.

M. Bourbeau: Je n'ai pas dit ça. M. le Président, je m'oppose à cela. On déforme mes paroles. Cela me concerne beaucoup, sauf que ça ne fait pas l'objet du projet de loi qui est devant nous.

Le Président (M. Bélanger): M. le ministre, vous aurez en conclusion, tout à l'heure, tout le loisir de faire ces corrections.

M. Bourbeau: M. le Président, je vais soulever une question de règlement.

Le Président (M. Bélanger): Une question de privilège.

Mme Harel: D'accord, c'est bien, je reprends donc exactement ses dernières paroles. Cela ne concerne pas le projet de loi qui est devant nous. C'est faux! L'article 88 éteint le droit à la rente en cas de séparation ou de divorce et pour que les conjoints du Québec, je le répète, soient sur le même pied que ceux des autres juridictions dans les autres provinces, y compris la loi fédérale qui, à l'article 25 prévoit que c'est la loi de la province qui s'applique, il faut deux choses: il faut inclure les droits à la pension parmi les biens familiaux partageables au moment de la rupture. Oui Cela concerne ses collègues, mais il faut aussi amender les lois qui régissent les régimes de retraite, afin de permettre le partage des droits à la pension à la source. Et même si ses collègues rejetaient la proposition qui est devant eux présentement, on le sait, et au sujet de laquelle il y a toute une controverse, même s'ils la rejetaient, le ministre aurait quand même une responsabilité, celle de permettre, lorsque les parties en conviennent, que cela se fasse. Pour ça, il faudrait qu'il amende l'article 88 du projet de loi 116.

Mme Huot: Oui, et j'ai oublié de le dire, j'avais ma note ici, il faudrait que ça se fasse comme pour le régime des rentes du Québec, avoir la possibilité de demander le partage de la rente privée, et d'accorder un certain temps pour le faire, comme au régime public. Il le faut absolument, et je ne me pardonne pas d'avoir omis ça tantôt.

Mme Harel: Ce n'est pas grave, c'est dit. Cela permet encore une fois de répéter au ministre que ce n'est pas uniquement la responsabilité des autres; c'est aussi la sienne propre, ne serait-ce que lorsque les parties conviennent de le permettre, et quand un tribunal le décide aussi.

D'autre part, il y a un autre aspect sur lequel je dois revenir, parce que le ministre a dit, et tout de suite il vous a dit: Vous proposez qu'il n'y ait pas de renonciation possible pour le conjoint - et là je trouve qu'il fait un abus de langage - mais cela va atteindre un droit Non, ça atteint leur liberté de renoncer, et la question est: Est-ce que cette atteinte est justifiée ou non? Je lui rappelle une phrase bien connue qui dit qu'entre le fort et le faible, c'est la liberté qui opprime et le droit qui affranchit, n'est-ce pas? Cela revient à dire ceci: L'exemple qu'il donne, l'assurance-vie, on reprend cet exemple. La personne se fait dire par le participant: Écoute, chérie, j'ai une bonne assurance-vie pour toi, alors renonce à la rente de conjoint. Mais, évidemment, l'assurance-vie peut avoir un bénéficiaire révocable, et chérie peut être remplacée par une nouvelle amie, et elle perdrait a ce rnoment-là le bénéfice de l'assurance-vie mais, également, elle aura renoncé pour toujours au partage possible pour les années de vie commune de la rente et chérie se trouverait perdante des deux côtés. Alors, ce n'est pas à un droit auquel elle renoncerait, c'est à sa liberté. Est-ce qu'il est souhaitable - je pense que c'est la façon de se poser la question - qu'il y ait des exceptions à la règle mais que la règle soit qu'on ne puisse pas renoncer? Dois-je comprendre que c'est là... (17 h 30)

Mme Huot: Oui.

Mme Harel: ...la position des Cercles? Quant à la question de la Régie des rentes pour les travailleuses au foyer, je vais vous lire ce que le prédécesseur du ministre disait le 12 juin 1986, lorsque mon collègue de l'époque l'interrogeait sur ce qui arrivait avec les régimes complémentaires. Il disait, et je le cite textuellement: "Je tiens à assurer que la priorité de l'actuel gouvernement du Québec s'orientera vers l'égalité des sexes face aux régimes de retraite. J'insiste et je le dis très clairement, l'actuel gouvernement libéral utilisera toute la marge de manoeuvre disponible en investissant non pas dans d'autres avenues qui nous ont été suggérées par l'Opposition, comme les questions de transférabilité, mais pour rendre le conjoint et la conjointe au foyer admissibles au régime des rentes du Québec, faisant de l'engagement du chef du parti libéral du Québec, avant la fin du présent mandat, une réalité." C'était ce qui était invoqué pour retarder le projet de loi qui, quatre ans plus tard, est à l'étude aujourd'hui. Quel est l'état du dossier? Vous l'avez suivi de près. Le gouvernement nous dit toujours, quand on lui pose la question, qu'il vous consulte. Il en est toujours à une consultation qui a eu lieu et à une qui viendra. Où en est-on là?

Mme Huot: Le 25 avril dernier, nous avons rencontré M. Robert Bourassa, justement pour lui demander où cela en était rendu. On voulait avoir ta réponse. Il nous a dit qu'il maintenait sa promesse mais quand, il ne le savait pas. Bien sûr, on ne veut pas faire de chantage, ce n'est pas dans notre langage, mais nous avons dit à M. Bourassa qu'il y a quatre ans, alors que le parti au pouvoir venait de dire aux femmes au foyer qu'elles n'adhéraient pas au régime de rentes du Québec, le Parti libéral qui était en campagne électorale nous le promettait. Cela avait fait plaisir à nos femmes et cela avait certainement influencé bon nombre de femmes à voter de ce côté-là. C'est un peu comme du chantage, mais on a dit que les fermières avaient bonne mémoire, qu'on s'en souviendrait cette année parce que le gouvernement aussi aura à rendre des comptes. M. Bourassa nous a dit: Je vous vois venir, je vous vois venirl Mais la réponse, nous ne l'avons toujours pas. On commence a être pas mal impatientes face à ça.

Mme Harel: Peut-être que le ministre qui est responsable du dossier pourrait nous donner des réponses sur l'échéancier.

Mme Huot: J'aimerais ça. Mme Harel: Nous aussi.

M. Bourbeau: Moi aussi. Je peux vous en donner si vous le voulez.

Mme Harel: Alors, allez-y.

M. Bourbeau: M. le Président, vous me donnez la parole.

Le Président (M. Bélanger): Je vous en prie. Mme la députée de Maisonneuve vous y autorise.

M. Bourbeau: Ce que je peux vous dire, c'est que je ne peux pas dire mieux que ce que le premier ministre a dit. Je pense que sa réponse était vraiment la réponse du gouvernement.

Mme Harel: Vous savez, on a l'impression, dans ce dossier, que des réponses comme celle-là, c'est une sorte de mépris pour les gens, comme si c'étaient des enfants, qu'à force de répéter une promesse qu'on n'a pas l'intention de réaliser on finira par l'oublier.

Mme Huot: On ne l'oubliera pas, nous autres.

Une voix: II ne connaît pas les Cercles de fermières.

Mme Huot: C'est que le gouvernement ne nous connaît pas, s'il pense qu'on va l'oublier.

Mme Harel: Est-ce que vous avez eu des rencontres avec la Régie des rentes du Québec pour connaître le point de vue de la Régie sur ces questions? Est-ce que vous avez eu des rencontres avec Mme la ministre déléguée à la Condition féminine sur les différents scénarios probables? Est-ce qu'il y a eu des scénarios qui vous ont été présentés?

Mme Huot: Au mois de juin dernier, avec la Fédération des femmes du Québec, l'AFEAS, les Cercles de fermières du Québec, Mme Gagnon-Tremblay nous avait convoqués pour nous présenter différentes personnes d'autres ministères, pour seulement nous soumettre certaines avenues qui ne concernaient pas spécialement les femmes au foyer, qui concernaient les gens à l'heure de la retraite. C'était pour les messieurs et pour les dames. Ce n'était pas spécialement pour les femmes au foyer. À ce moment-là, rien n'a été retenu. De toute façon, on ne nous a rien remis, on n'a pas eu de feuilles. Cela nous avait été présenté seulement sur un tableau. C'est seulement ça qu'on a eu. Si on a consulté des gens de la Régie des rentes du Québec pour savoir si c'était possible, c'est ce que vous voulez savoir, Mme Harel?

Mme Harel: Oui.

Mme Huot: Cela fait longtemps qu'on le demande, l'accès au Régime de rentes du Québec et on pense que c'est possible. Mais si M. Bourassa, dans sa campagne électorale, il y a quatre ans, l'a promis, je pense que là, c'était

possible. Il devait y croire. S'il y en a un qui était au courant des faits... Ce n'était pas le dernier venu en politique! Écoutez, on y a cru et il devait y croire. Il n'a pas dû nous donner ça comme un bonbon, je ne peux le croire.

Mme Harel: II annonçait, à ce moment-là, une commission parlementaire pour envisager, disait-il, non pas l'objectif mais les modalités, la manière de le faire dès l'élection de son gouvernement.

Mme Huot: Oui.

Mme Harel: Cela fait trois ans et demi maintenant, et on est à la fin du mandat; y croyez-vous encore?

Mme Huot: La foi commence à baisser. Quand même, on ne lâchera pas prise. C'est une promesse qui a été faite.

Mme Harel: L'autre question, c'est qu'à l'époque vous vous rappellerez qu'il y a eu un livre orange qui s'appelait "Agir maintenant pour demain" et qui contenait une analyse de cette question. Mme la ministre déléguée à la Condition féminine a fait état d'études nouvelles qui démontrent que ce ne serait pas vraiment bénéfique pour les femmes. Enfin, elle a fait état, dans le cadre d'une entrevue... Avez-vous eu accès à ces études? Vous les a-t-elle transmises? Où en est-ce présentement?

Mme Huot: Non, à la rencontre justement avec M. Bourassa, le 25 avril, Mme Monique Gagnon-Tremblay était présente. Elle nous a dit qu'elle avait des choses à nous soumettre mais qu'elle ne pouvait les dévoiler tout de suite. Elle attendait. Cela pouvait aller jusqu'au mois de juin avant de nous proposer quelque chose. Pour elle, elle ne voyait pas que le Régime de rentes était vraiment possible même si M. Bourassa lui demandait où ça bloquait. il lui posait plusieurs questions. Elle nous a dit qu'elle avait des choses à nous soumettre mais qu'elle ne pouvait les dévoiler tout de suite. Alors, c'est ça.

Mme Harel: L'an passé, finalement, les scénarios vous ont été transmis, comme vous le disiez, sur acétate, rapidement, le lendemain, je pense, de la clôture de la session parlementaire. Il faudrait s'assurer que, si des informations vous étaient transmises, elles ne le soient pas au moment où la Chambre ne siège plus et qu'il n'est plus possible de poser des questions, au moment où le gouvernement n'est plus responsable devant l'Assemblée des orientations qu'il prend. À ce moment-là, c'est facile parfois. Les gouvernements ont la tentation d'attendre à l'été pour communiquer des informations en espérant que les nuits chaudes et humides fassent oublier leurs décisions. A-t-elle précisé une date en juin?

Mme Huot: Non, au mois d'avril, elle nous a dit que ça pouvait prendre quatre à cinq semaines. Elle nous a dit, en tout cas, probablement à la mi-juin.

Mme Harel: À la mi-juin, la session se termine le 21 juin. Essayez que ça ne soit pas le 22.

Mme Huot: C'est bien.

Mme Harel: Dans ce dossier, je pense que ça reste un exemple qui illustre un discours avant les élections et, évidemment, une façon différente de faire pendant et après les élections. Sur cette question, précisément, j'aimerais avoir votre point de vue. Le gouvernement nous a dit, depuis deux mois maintenant, que de toute façon le partage de la rente allait tenir lieu d'avantages suffisants. Pensez-vous que l'un des dossiers, qui est le partage des rentes en cas de séparation, de divorce ou au moment du décès, peut satisfaire la revendication de l'intrégration à la rente pour les personnes au foyer?

Mme Huot: Le seul partage des rentes - nous le demandons aussi - fait partie des choses que nous avons demandées qui reconnaîtraient le travail des femmes au foyer, en tout cas, une plus grande justice envers les conjoints, mais ça n'exclut pas l'action à la Régie des rentes du Québec. On sait qu'en ce moment, au Québec, pour reconnaître un travail, il y a juste le Régime de rentes. C'est la seule mesure sociale universelle qui reconnaisse que c'est un travail. Il n'y a pas autre chose qui reconnaisse que c'est un travail. Alors, le travail qui est fait au foyer pour élever des enfants et tout ce que ça comporte, il n'y a rien pour le reconnaître. C'est pour ça que nous demandons, du moins, d'avoir accès au Régime de rentes du Québec pour faire reconnaître ce travail. Cela n'exclut pas toutes sortes de reconnaissances comme le droit économique des conjoints, le partage des rentes, etc. C'est tout un ensemble de mesures que nous demandons.

Mme Harel: Si je comprends bien, Mme Huot, et là, je veux bien être certaine qu'on se comprend, vous ne demandez pas nécessairement l'intégration pour l'ensemble des personnes au foyer, mais pour celles qui font un travail socialement utile.

Mme Huot: Oui.

Mme Harel: C'est-à-dire que cela pourrait être, par exemple, une reconnaissance pour le soin et l'entretien ou l'éducation d'enfants de moins de six ans ou cela pourrait être une reconnaissance pour l'entretien ou le soin de personnes en perte d'autonomie, handicapées ou âgées. Il y a toute une différence entre demander une rente lorsqu'il s'agit de deux adultes

consentants, dont l'un rend privément des services à l'autre. Je ne pense pas que l'État ait, à ce moment-là, à venir s'immiscer dans ce contrat entre les deux et à dire qu'on va prendre des ressources collectives pour payer la rente de l'un qui est au service exclusif de l'autre. C'est une chose. Mais l'autre chose est de dire: On va reconnaître un travail socialement utile, par exemple, auprès d'enfants de moins de six ans ou de cinq ans s'Hs sont à la maternelle. On va reconnaître le travail fait auprès des personnes âgées ou des personnes handicapées. Est-ce que vous seriez prêtes à adopter un point de vue où ce n'est pas la rente au foyer parce qu'on est au foyer, mais c'est la rente parce qu'on joue au foyer un rôle socialement utile?

Le Président (M. Bélanger): Mme la députée...

Mme Huot: Non. Dans notre mémoire, nous demandions qu'on reconnaisse celles qui ont charge d'enfants mais aussi toutes celles qui, à un moment dans leur vie, n'ont pas eu vraiment un choix de carrière. Cela veut dire les femmes qui ont 45 ans, 50 ans et plus. Ces femmes, à un moment donné... On n'a pas besoin de remonter aussi loin que ça, mais, en se mariant, les femmes rentraient à la maison et elles avaient des enfants. Alors, il faut penser à celles-là aussi. Il ne faut pas qu'elles soient oubliées. Alors, c'est pour cela qu'on demandait l'accès au Régime de rentes du Québec. Il y a peut-être des moyens différents de le faire, mais, en tout cas, c'est à ceux qui sont spécialistes là-dedans de trouver la solution.

Mme Harel: On me dit que mon temps est déjà écoulé.

Le Président (M. Bélanger): Déjà.

Mme Harel: Je le regrette beaucoup. Je vous remercie Mme Pilote. Je ne sais pas si vous aviez quelque chose... Est-ce qu'on lui permettrait? Avez-vous quelque chose à ajouter? Non. Mme Huot, merci pour votre contribution à nos travaux.

Le Président (M. Bélanger): M. le ministre.

M. Bourbeau: M. le Président, j'ai écouté avec beaucoup d'intérêt les questions de la députée de Maisonneuve, l'interrogatoire, plutôt, de la députée de Maisonneuve en soulignant que quelques-unes des questions avaient l'air de ce qu'on appelle des questions suggestives dans les procès. Ce que je peux vous dire au sujet du dossier qui fait l'objet de votre préoccupation, l'accessibilité des femmes au Régime de rentes du Québec, c'est que le gouvernement qui nous a précédés a conclu qu'y ne pouvait pas le faire ou qu'il ne voulait pas le faire. Nous nous sommes engagés à tenter de le faire. Le premier ministre nous a dit que c'était encore dans ses intentions.

Mme Harel: Pas à tenter, à le faire.

M. Bourbeau: Tout ce que je peux vous dire, c'est que le mandat d'un gouvernement ne se termine pas après trois ans et trois mois. Il y a encore du temps à venir. Alors, je pense qu'il n'y a pas lieu de désespérer. J'espère que d'ici quelque temps - Mme Gagnon-Tremblay vous a parlé de quelques semaines - le gouvernement sera en mesure de faire des annonces qui, j'espère, pourront vous satisfaire. Quant à moi, je tiens à vous remercier de votre présence parmi nous et de la contribution que vous avez apportée au débat. Merci.

Mme Huot: Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Bélanger): La commission des affaires sociales remercie les Cercles de fermières du Québec et invite à la table des témoins le Syndicat des métallos. S'il vous plaît! Elle invite le Syndicat des métallos, le syndicat FTQ, à la table des témoins. Ce syndicat FTQ sera représenté par M. Clément Godbout, M. Marcel Rivest et M. Michel Blondin. Je vous prierais de vous approcher. (17 il 45)

Syndicat des métallos (FTQ)

Bienvenue au Syndicat des métallos. Vous connaissez nos règles de procédure. Vous avez vingt minutes fermes pour la présentation de votre mémoire. Je vais vous l'indiquer quand le temps sera écoulé et, par la suite, il y aura une période de discussion avec les membres de la commission.

Chaque fois que vous devrez prendre la parole, s'il vous plaît, veuillez vous identifier, donner vos noms, pour les fins de transcription du Journal des débats parce que les dames, ne vous connaissant pas, ont bien des problèmes à vous identifier. Sans plus tarder, donc, je vous invite à présenter vos délégués et à présenter votre mémoire. Je vous remercie.

M. Godbout (Clément): M. le Président, on vous remercie. Je voudrais vous présenter ceux qui m'accompagnent. À ma gauche, Me Marcel Rivest; à ma droite, Michel Blondin, mon adjoint, et Réjean Bellemare de notre service de recherche. Nous sommes également accompagnés d'un groupe du Syndicat des métallos de la région montréalaise et du Québec qui sont préoccupés par les problèmes concernant la retraite.

Comme vous le savez, actuellement, les régimes de retraite privés octroient des rentes équivalant à peu près à 70 % du revenu précédant la rente, mais on retrouve la plupart du temps ce type de régime dans le secteur public. On le retrouve très peu dans le secteur privé.

On se souviendra que, lors de l'introduction du régime de retraite dans le secteur public, les employeurs s'opposaient à ce que le régime public soit généreux en alléguant que les régimes de retraite privés compenseraient pour assurer aux travailleurs un revenu décent à la retraite. En plus de constater l'effet majeur des ravages causés par l'inflation, qui sont cruels pour les retraités, on voit, contrairement aux régimes publics, qu'ils ont été indexés; rares sont ceux des régimes privés qui le sont et qui protègent adéquatement les retraités contre l'inflation. L'expérience vécue démontre que l'indexation obligatoire devrait être Imposée par la loi si on veut protéger adéquatement les travailleurs. On regrette que le projet de loi 116 n'ait pas pour objet de doter le Québec d'une véritable politique en matière de retraite. Bien que cette loi améliore la situation actuelle pour les années à venir, elle demeure une loi qui établit des normes minimales.

Dans le contexte actuel, les sujets les plus importants à améliorer pour les participants à un régime de retraite sont: l'appartenance des surplus lors de la terminaison du régime, les congés de contribution des employeurs qu'ils prennent lorsqu'ils vident les caisses de retraite pendant la vie du régime, l'abstention d'indexation des rentes, la situation des participants lors de la vente de leur entreprise et la participation des travailleurs à la gestion des fonds de retraite. Dans les quatre premiers sujets que je viens de soulever, le projet de loi 116 n'améliore pas la situation actuelle ou n'en traite pas et, sur le dernier sujet, la loi apporte une certaine amélioration mais, selon nous, ne va pas assez loin.

Les surplus des caisses, c'est un gros "motton". Tout à l'heure, j'ai entendu le ministre dire à quelques reprises: on n'est pas ici... On comprend cela, sauf que je ne suis pas certain qu'on nous offre un véhicule dans le domaine des retraites. On met un peu d'essence, mais peut-être de l'essence sans véhicule et on risque que nos objectifs passent au feu si on ne fait pas attention.

Dans ce domaine, présentement, la loi indique simplement que l'employeur a le droit de prendre les surplus à la terminaison s'il y a le texte qui les lui attribue. Des abus se sont produits fréquemment dans le passé lorsque des employeurs, en cours de régime, ont unilatéralement et sans le consentement des salariés apporté des modifications au texte du régime original en vue de s'approprier des surplus alors que le régime original prévoyait spécifiquement que les surplus appartenaient exclusivement aux bénéficiaires. Ces amendements, que nous considérons comme illégaux, n'ont pas fait l'objet d'étude approfondie de la régie. La régie a regardé passer le train lorsque les approbations des rapports et les terminaisons sont arrivées. Si aucune contestation n'intervient présentement auprès de la régie, on approuve de tels changements unilatéraux.

Le Syndicat des métallos, présentement, est Intervenu, en tout cas, dans cinq dossiers qui représentent à peu près 35 000 000 $ pour des retraités ou ceux qui vont prendre leur retraite où des employeurs veulent s'accaparer ou se sont accaparés des surplus en amendant illégalement leurs fonds. Par exemple, on parle de Singer - vous en avez entendu parler - Aciers Marshall, Orange-Maison, Les mines d'amiante Bell et Lac d'amiante. Les mines d'amiante Bell, il ne faudrait pas oublier que c'est nous. C'est la SNA, la Société nationale de l'amiante.

Il est certain que plusieurs employeurs ont réussi à s'approprier des surplus alors qu'ils n'y avaient pas droit. Nous demandons, comme syndicat, que la liste des employeurs qui ont reçu des surplus de caisse de retraite au cours des cinq dernières années soit publiée pour que les travailleurs concernés puissent étudier la légalité des agissements de ces employeurs. Nous ne savons pas qui l'a retirée. La Régie ne nous le dit pas, à moins qu'on ne le découvre par accident.

Un régime de retraite, c'est de fournir un revenu décent aux travailleurs et aux travailleuses qui quittent le marché du travail. Le but d'un tel régime n'est pas d'enrichir les employeurs.

Les employeurs mettent de l'avant l'argument que les surplus ont été créés à même des sommes qui ont été versées à la caisse de retraite et que l'engagement qu'ils ont pris auprès des participants était de fournir un certain bénéfice préétabli. En plus, ce sont eux qui prennent les risques s'H y a insuffisance de fonds dans la caisse de retraite.

Lorsqu'un régime est contributoire, par exemple, c'est la situation dans la plupart des cas privés, il est difficile de comprendre comment les employeurs peuvent prétendre que ce sont uniquement leurs contributions à eux qui créent des surplus. De toute façon, l'argument relatif à la prise de risques est plus théorique parce qu'en réalité les régimes de retraite privés sont évalués de façon fort conservatrice et les déficits sont amortissables sur une période de quinze ans. De toute façon, en pratique, on a constaté chez nous que les régimes de retraite ont créé des surplus plutôt que des déficits. Nous soumettons que le projet de loi 116 doit être modifié pour prévoir que les surplus appartiennent exclusivement aux participants et qu'ils doivent servir uniquement à augmenter les crédits de rentes.

L'existence du moratoire prévu à la loi 95 interdisant le versement des surplus à l'employeur avait laissé l'impression que le gouvernement est en période de réflexion sur le sujet et que des changements importants seraient apportés au projet de loi 116. Malheureusement, ce n'est pas la situation et nous le déplorons.

Même si la loi interdit aux employeurs d'accaparer des surplus pendant la vie du régime de retraite, ceux-ci ont réussi à contourner la

loi, par exemple, en prenant ce qu'ils ont convenu d'appeler les congés de contribution. Il s'agit d'une autre facette pour les employeurs de s'approprier les surplus et, petit à petit, ils vident les caisses de retraite. Ce qui arrive, c'est que les travailleurs en paient la note des deux côtés. Les employeurs profitent des surplus, arrêtent de payer, on sèche tes fonds de retraite, l'indexation n'est pas là et les travailleurs et les travailleuses qui prennent leur retraite en paient la note. Donc, lis se font prendre des deux côtés. Ils sont les véritables perdants.

Quant au moratoire 95 qui a été adopté, si je me souviens, en décembre dernier, ce n'est peut-être pas écrit comme cela dans notre mémoire mais nous le proposons de façon très spécifique. Le ministre nous dit que le dossier des surplus, I veut le regarder plus tard, mais nous voulons nous assurer que cela ne parte pas. C'est l'essentiel même de nos garanties de retraite, les surplus. Il faut que le moratoire soit là et demeure tant et aussi longtemps que le problème des surplus ne sera pas réglé et il faut que le moratoire soit amendé de façon à prévoir que les congés de contribution des employeurs ne puissent pas se faire non plus durant la période de l'application du moratoire. Ces deux aspects doivent être couverts par le moratoire.

La situation que nous vivons doit cesser. De la même façon que les surplus, à la terminaison du régime, devraient appartenir aux participants, les congés de contribution de l'employeur devraient être spécifiquement interdits dans le moratoire. Nous suggérons que la loi soit amendée pour que les surplus ne puissent servir qu'à titre de réserve pour les années difficiles ou à indexer les rentes pour tenir compte de l'inflation.

La protection contre l'inflation. On vous en a parié et vous le savez. Notre position comme syndicat à la FTQ et ailleurs, c'est qu'il faut un régime qui nous assure une indexation pour maintenir le pouvoir d'achat. L'Ontario a fait un bout là-dessus en disant: Le premier 1 % n'est pas Indexé, Jusqu'à 8 %, 75 % de cela, ce n'est peut-être pas assez. Il y a des choses qui sont intéressantes. Au moins le principe est engagé, il faut le regarder.

Actuellement ce sont les employeurs qui vident les fonds de retraite outrageusement, qui bénéficient de l'inflation, qui prennent des congés de contribution, retirent des surplus lorsqu'on ne le sait pas et on ne peut pas les en empêcher et ils paient des rentes avec des dollars dévalués, finalement. La réalité vécue par les retraités au cours des vingt dernières années démontre la gravité de la situation et démontre également que les employeurs n'indexeront pas facilement et volontairement les régimes de retraite privés. Ils ne le font pas. Il y a eu des grèves la-dessus. Nous ne les avons pas toujours gagnées et nous allons continuer à nous battre, mais cela va prendre une volonté politique en même temps pour l'assurer.

Dans un premier temps également, tous les surplus existant présentement dans les caisses de retraite doivent servir, s'ils servent à quelque chose, à indexer les régimes de retraite. Dans un deuxième temps, nous croyons que le gouvernement devrait légiférer pour rendre obligatoire l'indexation des rentes privées. Le principe de l'indexation, comme je vous l'ai dit tout à l'heure, était acquis en Ontario et dans d'autres provinces. Nous recommandons au gouvernement qu'il amende la loi 116 pour inclure une pleine indexation des retraites.

La participation des travailleurs à la gestion de leur régime de retraite constitue à notre avis un point auquel on devrait accorder une attention toute particulière. Un fonds de retraite est créé pour le bénéfice exclusif des retraités. L'administration du régime est faite à titre de fiducie pour les participants. Il n'y a aucune logique pour justifier que les participants n'aient pas le contrôle entier sur leur propre régime de retraite. Une grande partie des abus commis par les employeurs, comme les congés de contribution, l'appropriation des surplus, les amendements illégaux au régime, les transferts excédentaires de fonds lors de ventes, les fusions ou divisions de fonds de retraite, fusions, séparations, multiplications, on a vu tout cela dans nos dossiers, proviennent du fait que les employeurs ont agi seuls, hors de la connaissance des travailleurs, des travailleuses et des participants au régime. Il faut favoriser la circulation de l'information et la prise de conscience parmi les participants de l'importance du régime de retraite. L'acquisition d'une certaine expertise dans le domaine nous semble essentielle. Donc, il faut qu'ils participent à la gestion. Ainsi, les régimes de retraite seront placés à leur vraie place, à savoir qu'il s'agit des conditions de travail les plus importantes pour un travailleur et une travailleuse lorsqu'on parle d'épargne accumulée pendant la vie de travail.

Le projet de loi 116 reconnaît l'intérêt des participants dans leur recherche d'un régime de retraite et nous saluons cette approche. Cependant, le Syndicat des métallos demande que le projet 116 soit modifié pour prévoir que tous les régimes de retraite doivent être administrés par les comités paritaires de retraite, dont la moitié des membres sont nommés par l'agent ou l'association accréditée - cela passe singulièrement sous silence - et, à défaut, par les participants. Là-dessus, j'aimerais qu'on en parle parce que l'association accréditée a certainement plus d'outils, d'équipements et d'expertise pour faire la vérification qu'un travailleur et une travailleuse seuls devant l'employeur.

Une participation directe des travailleurs et de leurs représentants à la gestion du régime constitue non seulement un geste démocratique, mais aussi une grande garantie additionnelle que les régimes de retraite vont vraiment servir les intérêts des travailleurs et des participants qui prennent leur retraite.

Lors d'une vente, la protection des participants n'a pas été considérée dans le projet de loi 116. Il est primordial de constater que la vente d'une entreprise peut avoir des répercussions très sérieuses sur les droits acquis des travailleurs ou d'un employé, ailleurs. L'exemple des 2000 de Thetford est frappant. Actuellement, nous vivons toute une série de changements dans notre société, une mutation importante qui fait qu'il faudra, dans la loi 116, regarder ce qu'on peut faire là-dessus. On assiste généralement à la terminaison de régimes de retraite par l'ancien employeur, à la mise sur pied d'un nouveau régime par le nouvel employeur et, même si le régime de retraite du nouvel employeur est semblable au régime de l'ancien, il est utile de noter que les employés perdent généralement des gains importants a cause de la situation, dont, entre autres, les surplus accumulés. Ainsi, les bénéfices acquis chez l'ancien employeur ne seront pas améliorés dans l'avenir puisque l'acquéreur n'a pas d'obligation de reconnaître normalement les services passés chez l'ancien. Les améliorations futures ne s'appliqueront qu'aux services acquis auprès du nouvel employeur.

Cependant, lorsqu'il y a terminaison d'un régime, les crédits de rentes sont alors calculés sur une base de terminaison c'est-à-dire sur te salaire de l'employé à la date à laquelle ferme l'usine ou que le régime se termine, c'est-à-dire de la vente de l'entreprise et non pas selon le salaire projeté. Cela fait des surplus. Cette façon de calculer crée automatiquement des surplus dans le régime, qu'on nous a dit, en réalité, c'est une perte pour les participants à cause de la terminaison du régime de retraite.

Les surplus créés par ces changements devraient servir à augmenter les crédits de rentes des participants. Une autre avenue à explorer serait de ne pas accepter la terminaison du régime dans une telle circonstance et d'obliger le transfert de toute la caisse de retraite chez le nouvel employeur. Une autre approche serait d'obliger l'acquéreur à reconnaître, totalement et à toutes fins, le service passé chez l'ancien employeur. Si des surplus existent, ils devraient alors servir à bonifier les rentes.

La loi devrait également obliger l'ancien employeur à garantir tous les paiements d'amortissement pour services passés non encore payés dans la caisse au moment de la vente, parce que les fonds de retraite, comme on le dit en anglais, ne sont pas toujours "full invested". Ils ne sont pas toujours payés. Une telle clause permettrait d'éviter que des employeurs accumulent les déficits pour ensuite échapper à leurs obligations en vendant leur entreprise.

Le Syndicat des métallos recommande que le projet de loi 116 soit modifié pour régler la situation défavorable des participants lors de la vente d'entreprise.

En ce qui a trait à l'information, nous suggérons que l'article 106 de la loi 116 soit amendé pour prévoir spécifiquement que le relevé annuel qu'un administrateur doit fournir à chaque participant contienne spécifiquement de l'information sur le montant des surplus de la caisse, si l'employeur a pris congé de contribution et le montant du congé de contribution.

De plus, ce sommaire devrait contenir les éléments prévus à l'article 156 du projet de loi 116, relativement au droit du syndicat et des participants actifs et non actifs à recevoir cette information. Ces dossiers d'information devront aussi comprendre l'ancien texte et le nouveau texte tel que modifié, et c'est là-dessus qu'on se fait jouer des tours. La loi devra prévoir qu'à défaut de fournir de telles informations les amendements demandés ne pourraient pas arriver. Ça prend des dents à ce sujet, dans la loi. (18 heures)

Nous suggérons également que l'article 108 du régime soit modifié pour donner le droit aux participants non seulement de consulter une disposition du régime, mais d'en obtenir une copie; une photocopie de certaines feuilles n'est pas assez. Comme le prévoit l'article 108, le travailleur est un participant actif, il a droit à ces informations.

Le rôle des syndicats dans les régimes de retraite. Le Syndicat des métallos trouve déraisonnable que les syndicats ne soient pas reconnus dans le projet de loi 116 comme les mandataires des participants qu'ils représentent à titre de syndicat accrédité. Nous recommandons que le projet de loi 116 soit modifié pour reconnaître aux syndicats leurs droits de représenter et de défendre leurs membres, et d'être considérés comme partie prenante au régime.

À titre de partie à part entière, le syndicat pourrait avoir accès au texte du régime de retraite et à tout autre document prescrit par le règlement. Il recevra aussi, normalement, avis de terminaison du régime, copie du rapport de terminaison et, de la même manière, le syndicat devrait être convoqué à l'assemblée des participants, c'est lui qui devrait nommer les représentants des participants au comité de retraite.

L'article 34 indique qu'un employé n'acquiert pas, pendant deux années civiles consécutives, des droits d'adhérer à un régime. On pense que ça devrait être un peu comme dans les conventions collectives. Chez nous, normalement, un travailleur a le droit d'adhérer au fonds de retraite après sa période de probation terminée.

Il y a un élément qu'il nous semble aussi important de vous souligner, c'est celui de l'acquisition d'un droit à une rente différée. Cela nous semble être lourd, compliqué, peu facile d'administration; ça nous semble être un casse-tête chinois. Je vais demander à Réjean Bellemare, de notre service de recherche, de vous en parler.

M. Bellemare (Réjean): Réjean Bellemare, service de recherche. Il semble que, dans le nouvelle loi, on ait réduit à deux ans le temps

pour avoir des droits acquis à une rente différée. On applaudit à ça, mais on aimerait que cette nouvelle option s'applique à tout le service passé des employés. Au chapitre VIII de la loi, Dispositions diverses et transitoires, on indique que cette nouvelle option sera seulement applicable au service accumulé à partir du 1er janvier 1990. On arrive à des situations assez bizarres où un employé qui a travaillé pendant des années pour un employeur se retrouve avec les mêmes droits acquis, pour une rente, que son collègue qui est là depuis un an ou deux seulement.

Comme indiqué ici, la loi complique encore plus les choses en disant, à l'article 285, que s'il y a des modifications, des améliorations aux prestations sur des droits acquis passés elles sont acquises selon la nouvelle disposition de la loi, tandis que la base qui a servi à l'amélioration sera acquise selon les anciennes dispositions de 4510. Ce qui fait qu'un employé peut avoir droit, s'il a vu sa rente augmenter de 4 $, aux 4 $ pour les dix ans où V a été là, et seulement à 20 $ pour les deux ans après que la loi est adoptée. Cela rend le calcul très compliqué. L'administration de tout ça est très compliquée et complètement ridicule, puisque les fonds sont déjà mis dans les régimes de retraite pour payer tous ces bénéfices. Donc, de rendre ça rétroactif à tout le service passé ne devrait pas...

Le Président (M. Bélanger): Je vous inviterais à conclure, s'il vous plaît.

M. Bellemare: C'est conclu. Notre demande va tout simplement dans le sens que les deux ans de droits acquis soient applicables à tous les services passés. Merci.

M. Godbout: Me Rivest aura la chance de conclure tout à l'heure, mais je pense qu'on devrait un peu vous parler des surplus en cours de régime et en amendement de régime. C'est fondamental. On veut en parler, parce qu'on est pris avec des problèmes, et il y a des choses qu'on veut vous dire là-dessus.

Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie beaucoup. M. le ministre.

M. Bourbeau: M. le Président, voilà un mémoire intéressant, présenté d'une façon énergique, c'est le moins qu'on puisse dire, avec conviction. On nous demande effectivement des changements radicaux par rapport à la situation qui existe jusqu'à maintenant. C'est une demande syndicale, bien sûr. Si on avait à votre place le Conseil du patronat, et on l'a eu avant vous... Évidemment, vous pouvez comprendre que les demandes étaient un peu différentes. Tout ça est de bonne guerre, comme on dit. Il s'agit de fonds de retraite contributoires, en général, auxquels les deux parties contribuent. Les patrons contribuent autant que les travailleurs. Les statistiques pour l'an dernier indiquent que, sur 3400000000$, 2000000000$ avaient été souscrits par les employeurs et 1 400 000 000 $ par les travailleurs. Cela ne veut pas dire que les travailleurs n'ont pas d'intérêt là-dedans, au contraire, ils ont un intérêt évident. Ce sont, en fait, ceux qui sont le plus intéressés quant à la destination des fonds. Nous tentons, comme gouvernement, de faire en sorte de mettre sur pied un système qui soit juste et équitable envers tout le monde et, en premier lieu, envers les travailleurs. C'est pour eux que nous faisons cette réforme. La plupart des modifications que nous proposons vont dans le sens de bonifier la part des travailleurs, d'améliorer leur sort et leurs droits. Alors je pense qu'on peut être assez rassurés à ce sujet.

Maintenant, nous ne voulons pas non plus désintéresser totalement les employeurs. Je ne crois pas que ce serait même dans l'intérêt général du système que de sortir les employeurs du régime, à toutes fins utiles. Il s'agit de trouver une solution qui soit respectueuse des droits des deux parties et susceptible d'amener un maximum de rendement et, forcément, éventuellement, un maximum de prestations pour les travailleurs.

Je tiens à vous rassurer dès le départ en ce qui concerne les surplus d'actifs. Il aurait peut-être été possible de tenter de régler d'un seul coup les amendements à la loi et toute la question des surplus d'actifs, la propriété de ces surplus, la question des congés de cotisations à même les surplus, la question de l'appartenance des surplus, la question du retrait des surplus. On aurait peut-être pu parler de tout ça. Mais, compte tenu du temps que nous avions devant nous, il nous est apparu extrêmement dangereux de tenter de tout régler d'un seul coup. Selon nous, en tout cas, selon les experts que nous avons consultés, il est apparu que le risque que nous prenions est que nous n'aurions pas pu faire tout ça au cours de la présente session et que le projet de loi serait resté sur la table, comme cela a été le cas en 1985 lorsqu'on a déposé le projet de loi au mois de juin. Il ne restait plus assez de temps et la loi est morte au feuilleton.

Il y a un dicton qui dit que: Qui trop embrasse, mal étreint. On a tenté d'embrasser un peu moins, mais de passer au moins ce paquet, la réforme de la loi, qui est assez important d'ailleurs: une loi qui a au-dessus de 300 articles, et Dieu sait combien sont compliqués ce projet de loi et ce domaine-là. On ne peut parler qu'en présence de son actuaire, en général, parce que c'est un domaine qui est très complexe. Nous avons donc préféré y aller avec un projet en deux volets, en deux temps. Dans un premier temps, nous tentons de modifier la loi, de l'améliorer d'une façon importante, pour faire en sorte que les travailleurs puissent compter sur un régime de retraite moderne, amélioré, qui leur permettra d'espérer avoir une retraite décente.

Dans un deuxième temps - notre intention est de procéder le plus rapidement possible - nous allons commencer à consulter sur la question très importante de l'appartenance des surplus, sans préjuger au départ en aucune façon de quelque conclusion que ce soit. Je n'ai pas d'idée préconçue sur le sujet. J'entends deux sons de cloche. D'une part, des patrons me disent: Les surplus devraient nous appartenir. D'autre part, des employés me disent: Non, les surplus doivent appartenir aux travailleurs. Je ne peux me prononcer, à ce moment-ci. Le gouvernement ne peut pas se prononcer. Probablement que la vérité se situe quelque part entre ces deux extrêmes et nous allons certainement consulter les experts des deux côtés, autant vos experts que les autres, pour tenter de voir clair dans tout ça. Chose certaine, c'est que l'Ontario, qui a commencé avant nous, n'a pas encore pris de décision. Ils sont en train de consulter, après avoir réglé la loi, comme nous le faisons, sur les surplus. La consultation qu'ils mènent ne nous laisse pas indifférents ici parce que, en fait, c'est le même sujet, le même problème qu'ils sont en train de discuter. Pendant que nous réglons la phase 1 du projet, pourquoi ne pas écouter ce qui se dit en Ontario, parce que ce sont les mêmes sujets, les mêmes experts, et, lorsque nous serons prêts à procéder, nous aurons l'expérience de l'Ontario. Nous pourrons ajouter à ça l'expérience ou l'expertise que nous trouverons ici. En gros, c'est ce que nous avons à l'esprit.

Maintenant, je vous rassure en ce sens que la loi 95, que nous avons passée en décembre dernier - le moratoire qui met un gel sur les excédents d'actifs, sur les surplus - ce gel va demeurer tant et aussi longtemps que nous n'aurons pas trouvé une solution au problème de l'appartenance des surplus, des retraits des surplus par les parties, les congés de cotisation, etc. C'est donc dire que nous maintenons le gel de tous les surplus tant que nous n'aurons pas trouvé une solution définitive.

Donc, je pense qu'on peut dormir en paix, d'une certaine façon. Personne ne se sauvera avec la caisse à partir de maintenant, à partir du mois de novembre 1988, puisque le moratoire est en place. Même les cas où il y a des actions en cours, les cas de Singer, etc., tout ça serait sujet au moratoire si un jugement était rendu entre-temps. Alors, je pense que pour ça, on peut dormir en paix.

Ceci laisse en suspens la question des congés de cotisation. Nous avons jugé bon de ne pas modifier le statu quo en ce qui concerne les congés de cotisation, c'est-à-dire que la loi actuelle prévoit la possibilité de prendre des congés de cotisation et cela s'inscrit dans la foulée des directives fiscales émises par le ministère du Revenu, qui oblige, à toutes fins utiles, d'utiliser les surplus, lorsqu'il y en a, pour éviter de mettre à l'abri de la fiscalité et de l'impôt des sommes d'argent importantes.

Donc, nous n'avons pas bougé là-dessus mais, comme notre intention est de légiférer rapidement dans les meilleurs délais, en tout cas en ce qui concerne les surplus, nous ne pensons pas que cela puisse avoir des conséquences tragiques.

Maintenant, vous déplorez l'absence d'indexation. C'est la même chose. Il n'en est pas question pour l'instant dans le projet de loi et, si ce sujet devait faire l'objet de la considération du gouvernement, ce serait dans la phase 2. Est-ce qu'il me reste encore du temps, M. le Président?

Le Président (M. Bélanger): Oui, quatre minutes.

M. Bourbeau: Je voudrais quand même revenir sur certaines des remarques que vous avez faites. Vous avez parié des droits minimaux, de l'adhésion et de l'acquisition. Dans le projet de loi, nous prévoyons que, pour commencer à cotiser à un régime de rentes, il faut avoir travaillé pendant deux ans. Vous proposez six mois. La raison pour laquelle nous avons indiqué deux ans, c'est que c'est le consensus auquel en sont venues toutes les provinces canadiennes, ainsi que le gouvernement fédéral. C'est ce que nous avons appelé le consensus canadien et nous tentons de nous coller un peu à cette réalité.

Pour ce qui est de l'acquisition, c'est-à-dire le droit à une rente, il sera acquis après deux années de cotisation mais sans rétroactivité, c'est-à-dire qu'après deux années de cotisation on a droit à une rente et cette rente, évidemment, sera le résultat de ce qui sera mis dans la caisse, y compris la partie de l'employeur et les intérêts au nouveau taux qu'on prévoit, mais cela, sans rétroactivité. Cela veut dire, par exemple, que si la loi entre en vigueur le 1er janvier 1990, une personne qui cotise depuis deux années aura droit à la rente dès le départ, mais non pas rétroactivement pour les cotisations passées. Elle aura droit, pour le passé, à ce à quoi elle avait droit sous l'ancienne loi et, pour l'avenir à ce à quoi elle aura droit en vertu de la nouvelle loi.

Vous demandez plus d'informations aux participants, obliger l'information sur les surplus et sur les congés de cotisation. Ce sont des sujets qui seront traités lors de la préparation et de la publication des règlements. Nous allons, éventuellement, faire connaître les règlements. Nous allons procéder, selon la Loi sur les règlements, à une prépublication et vous aurez l'occasion, à ce moment-là, de faire connaître votre point de vue sur la question. La même chose pour l'article 105, l'obligation de préciser que les participants ont le droit de désigner des membres au comité de retraite. Tout cela sera prévu dans les règlements.

Toujours à l'égard de l'article 105, vous demandez d'obliger la transmission de l'ancienne et de la nouvelle disposition. On parie de l'information lors de modifications: Lors de modifica-

tions, obliger la transmission de l'ancienne et de la nouvelle disposition et, à défaut, cette dernière n'entre pas en vigueur. Je vous signale que le projet de loi prévoit l'accès sur demande à cette information.

La consultation de documents. Vous voulez qu'on ait le droit de consulter et d'obtenir copie d'une disposition. Je vous signale que la consultation est prévue au projet de loi. Si l'administrateur du régime n'accorde pas le droit à une copie de document, celle-ci peut être obtenue auprès de la Régie, selon le projet de loi.

En ce qui concerne le comité de retraite, vous demandez qu'il soit obligatoire et paritaire et que les représentants des participants soient nommés par eux-mêmes. L'article 146 du projet de loi ouvre l'accès aux participants sur l'aspect de la gestion du régime. Les intéressés participants peuvent convenir des modalités et du type de représentations. C'est ce que prévoit le projet de loi. Cela nous apparaît être une solution correcte. Le comité de retraite ne sera pas paritaire. Ce n'est pas notre intention de le rendre paritaire, mais il n'est pas obligatoire non plus dans l'état actuel du projet de loi. Cependant, si les participants demandent qu'un comité de retraite soit formé à la majorité lors de l'assemblée annuelle, à ce moment-là, il y aura un comité de retraite. (18 h 15)

C'est donc à la demande des participants que le comité de retraite sera formé. Il sera obligatoire si les participants le veulent, en majorité. C'est ce que nous avons prévu. Cela nous semble quand même une grosse amélioration sur le statu quo et même une amélioration par rapport à ce qui se fait présentement en Ontario, où le comité de retraite n'est que consultatif. Le projet de loi ne limite pas les participants quant au choix de leurs mandataires ou représentants. On laisse aux participants le choix de nommer leurs mandataires et on n'a pas prévu, par exemple, que ce soit le syndicat qui nomme les représentants, mais plutôt les participants à l'assemblée annuelle. Nous pensons que la question des fonds de retraite est très complexe et qu'il y a de bonnes chances que ceux qui se présentent à l'assemblée annuelle seront ceux qui ont vraiment un intérêt marqué pour la chose.

Il serait donc Intéressant que ces travailleurs qui sont assez intéressés pour se déplacer pour aller à l'assemblée annuelle aient le mandat de désigner ceux qui siégeront au comité de retraite. En gros, c'est un peu ce que j'avais à l'esprit. Je ne sais pas si vous voulez réagir. Je présume que vous voulez réagir par rapport à ce que je viens d'affirmer. Je vous vois prendre des notes depuis tantôt. On pourrait peut-être continuer.

M. Godbout: J'ai deux points rapides avant de passer à Marcel. D'abord, je ne suis pas certain qu'on comprenne, à la lecture, le comité de gestion, comme vous l'expliquez. Deuxième- ment, on est convaincus d'une chose, c'est que vous placez de façon systématique sur la voie d'évitement l'association accréditée. Or, je vous pose une question, M. le ministre. Qui est capable de s'équiper d'actuaires, de chercheurs, d'avocats pour aller rencontrer toute l'équipe patronale, si ce n'est l'association accréditée? Cela veut donc dire que les travailleurs seuls dans la salle... Vous dites que ceux qui auront intérêt participeront, bien sûr, mais ils ne pourront pas se payer tout l'équipement, le service, les ressources et l'énergie que ça va prendre pour aller chercher ça. L'association accréditée va en être capable, mais elle est sur la voie d'évitement, dans votre projet.

M. Bourbeau: Écoutez, je comprends très bien le point de vue, mais je ne vois pas en quoi ça empêche le syndicat ou l'association accréditée de mettre à la disposition des travailleurs son effectif. Ce sont quand même des travailleurs qui sont membres du syndicat. S'il y a un syndicat, je ne vois pas pourquoi ce serait, disons, (l'"establishment" syndical qui nommerait un représentant. Cela peut très bien être les travailleurs eux-mêmes qui sont particulièrement intéressés à la question et qui tiennent pour acquis que le syndicat va venir à leur aide et va leur fournir l'expertise voulue.

M. Godbout: Vous ne laisserez pas la gestion des patrons aux contremaîtres?

M. Bourbeau: Pardon?

M. Godbout: Les compagnies qui vont gérer les fonds de retraite, vous ne laisserez pas ça à des contremaîtres, par la loi. Vous allez gérer ça de façon compétente. À un moment donné, ce ne sera peut-être pas scandaleux que les représentants de l'association soient présents. Ce n'est pas nécessairement de l'empiètement, c'est tout simplement jouer le rôle qu'on doit jouer.

M. Bourbeau: En aucun cas nous ne voulons exclure le représentant de l'association, au contraire.

M. Godbout: C'est-à-dire qu'on devra négocier le plan en partant.

M. Bourbeau: II n'y a rien qui empêche, dans la loi, que ce soit lui qui soit délégué par les travailleurs. Si le syndicat est présent et fait son travail, il va certainement convaincre les travailleurs que la meilleure personne pour les représenter, c'est Mme Unetelle ou M. Untel. Je n'ai pas d'objection que ce soit quiconque, un travailleur nommé par la majorité des travailleurs présents, avec le concours du syndicat. Tant mieux! Ce serait l'idéal. J'espère que ce sera comme ça.

M. Godbout: J'ai fait mon point. Je ne veux

pas passer quatre heures là-dessus.

M. Bourbeau: Oui, très bien. J'ai bien compris.

M. Godbout: Mais votre loi parle de participants. Je vous suggère et je vous soumets respectueusement que l'association accréditée n'est pas un participant. Elle négocie avec l'employeur. Je voudrais que vous regardiez cette affaire parce que je pense qu'il y a un problème.

M. Bourbeau: Très bien. On a pris note de vos suggestions.

Le Président (M. Bélanger): M. le ministre, le temps est écoulé. Mme la députée de Maison-neuve.

Mme Harel: Je voudrais vous saluer, M. Godbout et les personnes qui vous accompagnent, M. Blondin, M. Bédard et Me Rivest. On a eu l'occasion de vous lire récemment dans les journaux, Me Rivest. Vous nous avez rappelé, à juste titre, dans le mémoire que vous présentez, M. Godbout, que le projet de loi laisse en plan des sujets importants qui pourraient améliorer la situation des participants. D'abord, si on veut éviter la langue de bois... La langue de bois est très en usage ici, c'est-à-dire que c'est une sorte de langage où on ne dit pas les choses tout en parlant. On parle pour parler, comme on dit. Là, on va se parler franc. Il y a quatre ans, un projet de loi a été déposé, le projet de loi 58. Cela a été déposé en juin 1985, après une consultation dans le cadre d'un livre orange qui s'appelait "Agir maintenant pour demain" et qui avait précédé le dépôt du projet de loi.

À ce moment-là, ce projet de loi 58 contenait deux omissions: la disposition des surplus et l'indexation. Sur ces deux questions, if devait y avoir consultation, il y a quatre ans de ça. Je m'occupais d'autres dossiers, à l'époque, dont un, entre autres, était la réforme du Code civil, le projet de loi 20, qui avait été déposé aussi par le précédent gouvernement. Comme le ministre de la Justice était responsable même si c'était un ministre du gouvernement libérai, il a reconduit et on a complété le projet de loi 20 tout simplement en le terminant. Cela avait été déposé par l'un et adopté par l'autre. Cela se fait. Mais le gouvernement a décidé de mettre le projet de loi 58 de côté. Il a vieilli, entre-temps. Quand il a ressorti le projet de loi 116, par curiosité, j'ai relu les notes explicatives du projet de loi 58 et, oh! surprise! je me suis rendue compte que c'était à peu près la même chose, à quelques exceptions près. Une nouveauté, le chapitre XI sur les scissions et les fusions, quelques reculs sur le comité de retraite, qui pouvait être paritaire dans le projet de loi 58 et qui ne l'est plus dans le projet de loi 116, et sur la rente de conjoint survivant en cas de séparation ou de divorce, des choses comme ça. Finalement, les deux mêmes omissions quatre ans après, c'est-à-dire l'indexation et la disposition des surplus.

Quand le ministre nous dit que cela aurait été risqué, parce qu'il n'y aurait pas eu de projet de loi s'il avait introduit des dispositions sur ces questions, je pense qu'il faut comprendre ce qu'il dit. Ce qu'il dit, c'est qu'on n'aurait pas eu de projet de loi parce qu'il n'aurait pas pu le passer au Conseil des ministres, car il n'aurait pas réussi à le déposer parce que c'est controversé. Ce n'est pas tant controversé, on le sait. La controverse, elle est comme ça dans tout. C'est évident que le Conseil du patronat vient de dire une chose et les centrales, une autre. Ce n'est pas nouveau pour ce projet de loi. C'est dans tous les projets de loi. Mais la controverse, ce n'est pas ici qu'elle est, c'est au gouvernement. La controverse, c'est au Conseil des ministres.

Sur la question des surplus, peut-être parce que vous représentez Singer et quelques autres cas, en lisant votre mémoire, je me suis rendu compte qu'il y avait vraiment deux éléments importants, non pas simplement les surplus au moment de la terminaison, mais aussi les surplus en cours de régime. En terminaison, ce n'est pas une solution de dire qu'il y a un moratoire parce que les employés ne peuvent pas en bénéficier. Chez Singer, il y en a qui ont 35 $ par mois, entre-temps, pendant que c'est devant les tribunaux. Les surplus ont beau être gelés, ils ne sont pas faits pour ça, finalement. Ils seraient faits pour être distribués. Ce n'est pas parce que le moratoire va être prolongé que c'est une solution pour ceux qui pourraient en profiter de leur vivant. En cours de régime, vous avez vu que dans le projet de ioi, à l'article 136, on prévoit qu'il pourrait y avoir des congés de contribution. Donc, il y a déjà une décision qui est prise sur les surplus. Le ministre dit: Les surplus, mon idée n'est pas du tout faite là-dessus. Elle est faite à l'article 136. Les congés de contribution sont possibles. À l'article 95, on dit aussi: "L'interdiction n'a pas pour effet d'empêcher l'affectation de tout ou partie du solde de l'actif de la caisse de retraite à l'acquittement de cotisations patronales". Les congés de contribution sont possibles aussi. Il y a déjà une décision qui est prise.

J'aimerais, M. Godbout, si vous me le permettez, profiter de la présence de Me Rivest pour qu'on bénéficie de son expertise sur cette question. En cours de régime, est-ce que, présentement, le fait qu'avec la loi 116 les congés de contributions soient toujours possibles, c'est une sorte d'usage qui peut disposer du surplus?

Le Président (M. Bélanger): M. Rivest.

M. Rivest (Marcel): M. le ministre, tout à l'heure, vous avez parlé des employeurs et des employés qui faisaient des contributions plus ou

moins égalitaires. Vous reconnaissiez les droits des employés en ce qui concerne les régimes de retraite. Je pense qu'il est assez évident que les employés ont des droits en ce qui a trait aux régimes de retraite. C'est leur argent. C'est leur retraite à eux. Par ailleurs, si on examine le projet de loi, il reste quand même qu'actuellement, avec le projet de loi, on n'est pas dans un système d'égalité en ce qui concerne les employeurs et les employés. Qu'on prenne les sujets importants. C'est vrai que, dans la loi, il y a des améliorations et on le reconnaît. Sur les sujets quand môme majeurs qui sont, à notre avis, le nerf de la guerre, finalement, si on parle de surplus, à la terminaison, c'est vrai que le moratoire de la loi 95 les règle. À ce moment-là, éventuellement, il se passera quelque chose.

Par ailleurs, en ce qui concerne les congés de contribution, la situation n'est effectivement pas réglée, ce qui signifie qu'année après année, depuis cinq ou six ans, la situation est quand même désastreuse parce qu'on parle de centaines de millions de dollars que les employeurs prennent à leur profit. On parlait tout à l'heure de système contributoire où vous avez et des employeurs et des employés qui contribuent. Or, les congés de contribution, ce sont seulement les employeurs qui les prennent et non pas les employés, de sorte qu'on n'est pas dans un système d'égalité sur cette question. Effectivement, si votre intention est de remettre à plus tard la question des surplus, en attendant, il faudrait que le moratoire inclue aussi la question des congés de contribution. Je comprends qu'on va contester devant les tribunaux cette question de congés de contribution parce qu'il n'apparaît pas du tout évident que les employeurs ont le droit de prendre les congés de contribution. Je n'en parlerai pas ici. Effectivement, il y a eu un article que j'ai écrit dans La Presse qui explique la légalité de la situation.

Si on regarde la question de la gestion des fonds de retraite, encore là, voilà un point important, je comprends, pour les deux côtés. Si on considère que les employés sont, à juste titre, au moins aussi importants que les employeurs, parce que c'est leur argent, normalement, en ce qui concerne la gestion, on devrait avoir une gestion paritaire et non pas un participant parmi les actifs, un participant parmi les retraités, en vertu de quoi on arrive à ce principe. Je comprends que c'est une amélioration par rapport à ce qui existe, mais pourquoi ne pas aller jusqu'à une gestion paritaire? Une des explications, parmi d'autres, sur la situation concernant les surplus, que ce soit la terminaison ou les congés de contribution, c'est le manque d'information, le manque d'expertise, le fait que les employeurs ont agi à l'insu des employés. On a fait des amendements au plan alors qu'on n'avait pas le droit de le faire, mais les employés n'y étaient pas, ils ont plus ou moins su que ça existait. S'il y avait gestion paritaire, à ce moment-là, ce serait beaucoup plus difficile de le faire.

Également, autre sujet, à mon sens, qui est parmi les plus importants, on parte de l'inflation. En réalité, on doit s'interroger, à savoir qui profite ou qui est visé par l'inflation. Au moment où on se parle, ceux qui sont visés, pénalisés par l'inflation, ce sont les retraités, qu'ils soient syndiqués ou non. Ce sont seulement les retraités. Chaque année, avec un revenu fixe, cela vous coûte 5 % ou à peu près. Dans les années soixante-dix, c'était 12 %, 13 %, 14 %, 15 %, ce qui fait que les gens qui sont à la retraite depuis 1970 sont dans la pauvreté, à toutes fins utiles, avec, comme corollaire de ça, que celui qui profite de l'inflation, c'est celui qui paie les rentes dévaluées. Donc, cela veut dire que c'est l'employeur, à ce moment-là.

Finalement, quand on regarde la loi, on s'aperçoit qu'on n'est pas dans un principe d'égalité. Je comprends qu'il y a eu le "task force" en Ontario. Mais on a quand môme accepté, là-bas, le principe de l'inflation, il y a des pays, la France, la Suède, l'Allemagne, où l'indexation obligatoire existe dans la loi. Également, dans le régime de retraite public, il y a une indexation obligatoire. Ce n'est rien d'exceptionnel, cette question d'indexation. On pense que, finalement, les surplus qui ont été créés en grande partie par l'inflation devraient tout simplement retourner alléger le fardeau de ceux qui sont visés par l'inflation. (18 h 30)

Mme Harel: C'est d'autant plus important que les mots aient un sens que le ministre a dit tantôt: - ici, les mots sont importants, n'est-ce pas - que si l'indexation devait faire l'objet de considérations, ce serait à l'automne. Il dit: Oui, on va consulter sur les dispositions de surplus, mais, sur l'indexation, depuis le début des travaux de la commission, il dit toujours: Si ça doit faire l'objet de considérations... On n'en est même pas au point où l'Ontario en est déjà arrivé à décider que oui, le principe de l'indexation était retenu dans la loi et, là, ils discutent des modalités. On n'en est pas là. Le principe n'est pas dans la loi, le ministre ne dit même pas, de vive voix, qu'il va consulter. Il dit: Si ça doit faire l'objet de considérations... En plus, on n'a pas de proposition. En Ontario, il y a quand même une proposition sur la table, sur laquelle les gens sont consultés. Ce n'est quand même pas le néant.

Votre mémoire apporte un élément extrêmement intéressant, nouveau, je dirais, par rapport à ceux qui nous ont été présentés jusqu'à maintenant. C'est vraiment un fait que l'inflation fait perdre du pouvoir d'achat aux travailleurs, mais cela pourrait leur bénéficier par les rendements des caisses de retraite; le paradoxe, c'est qu'ils perdent des deux côtés. Ils perdent, parce que l'inflation gruge leurs augmentations et ils perdent en pouvoir d'achat dans leurs salaires, et ils perdent également, s'ils n'en profitent pas, en ce qui concerne les avantages ou les rendements des caisses où ils

pourraient contrebalancer, où ils pourraient compenser la perte du pouvoir d'achat pendant qu'Us travaillent, d'une certaine façon.

Ils perdent également parce que les rendements qui sont à l'origine des surplus qu'on connaît maintenant et qui sont, comme vous le mentionnez, en grande partie, tributaires du fait que l'inflation augmente, Us ne profitent pas de ces rendements, parce qu'ils en sont exclus du fait que les surplus ne leur sont pas attribués sous une forme ou sous une autre.

M. Godbout: Très rapidement, madame, pour la réflexion de tout le monde, j'aimerais dire ceci là-dessus - j'espère qu'on ne l'oubliera pas - Drummond McCall, Aciers Marshall, 117 travailleurs. On prend le surplus, on amène 18 900 000 $ en Ontario; on en laisse 2 100 000 $ au Québec. 117 travailleurs; on parle de 21 000 000 $. Kik Cola Orange-Maison vendu à Agropur. Cela nous dit quelque chose: 47 salariés, 1 000 000 $ retournés aux coffres. On offre 150 000 $ aux travailleurs pour autant qu'ils se désistent de leurs poursuites possibles. Tout ça, la loi le permet. Singer, 4 000 000 $ à 6 000 000 $, 600 travailleurs, l'argent parti en Ontario. Lac d'amiante, 475 travailleurs. On tente d'amener 12 000 000 $ dans les coffres d'ASERCO à New York. Pourtant, ce sont les citoyens de Thetford qui ont bâti ce fonds. Bell qui appartient à SNA, 395 travailleurs. On veut retourner entre 7 000 000 $ et 9 000 000 $ dans les fonds de la caisse de SNA.

Juste pour ça, le Syndicat des métallos, avec tous les services bénévoles et les coups de main qu'on a reçus de nos procureurs et de nos chercheurs, tout ça pour rien. À ce jour, cela nous a coûté 63 470,44 $ en cotisations syndicales, en frais, juste pour empêcher que ça parte et il y en a qui sont partis. Cela, c'est juste nous. S'il n'y a pas un drame au Québec là-dessus, je ne sais pas ce qui se passe.

Mme Harel: Dans votre mémoire, vous dites que vous réclamez la liste des cinq dernières années, parce que beaucoup d'employés n'ont pas la chance de cette protection syndicale et sont soustraits de ces surplus, sans même savoir qu'il y en avait un, d'ailleurs.

M. Godbout: La Régie n'a jamais publié la liste des employeurs qui ont fait des demandes auxquelles elle a accepté de reprendre les surplus ou des contributions qui avaient cessé. On ne sait pas qui ils sont.

Le Président (M. Bélanger): Je vous inviterais à conclure, Mme la députée de Maison-neuve.

Mme Harel: Déjà?

Le Président (M. Bélanger): Eh oui!

Mme Harel: II y a toute la question des ventes d'entreprise, des fusions et des restructurations d'entreprise. Je pense que ce que vous nous dites est Important. Les lois sur les normes du Code du travail prévoient le transfert. L'accréditation suit la vente. En fait, vous nous dites que la caisse devrait suivre aussi. Le ministre n'a pas répondu là-dessus. Il y a également la question de la rétroactivité au moment de l'acquisition.

Je veux vous remercier. Je crois que votre contribution à nos travaux était extrêmement importante, à ce moment-ci, tant sur l'indexation que sur les dispositions de surplus. Je pense bien qu'il va falloir être vigilants pour que les décisions se prennent rapidement et dans le sens d'une reconnaissance, non pas comme un cadeau, mais comme une rémunération qui est différée par le travailleur.

Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. M. le ministre.

M. Bourbeau: M. le Président, en remerciant nos invités, j'aimerais quand même replacer ça un peu dans le contexte. Il y a quatre ans, le Parti québécois avait déposé, à la veille de la fin de la session, un projet de loi où on ne traitait ni des surplus ni de l'indexation. Il n'y avait rien dans le projet de loi. Il faut quand même le dire.

Mme Harel: Je l'ai dit moi-même...

M. Bourbeau: La veille de la fin de la session.

Mme Harel: ...mais, vous avez pris quatre ans pour vous en rendre compte.

Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît, Mme la députée!

Mme Harel: II n'avait pas sorti du dossier.

M. Bourbeau: La veille de la fin de la session, il était évident que vous n'aviez pas l'intention de légiférer. La session finissait le lendemain. Nous sommes quand même intervenus énergiquement, l'automne dernier.

Mme Harel: C'est faux, M. le Président.

Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît, on laisse M. le ministre compléter son intervention.

Mme Harel: Qu'il ne dise pas des choses fausses! La session ne finissait pas le lendemain.

Le Président (M. Bélanger): Mme la députée, il y aura une période à la fin où on pourra passer nos commentaires.

M. Bourbeau: Le 18 juin, c'est la veille de la fin de la session, l'avant-veille. Nous sommes Intervenus énerglquement, l'automne dernier. Nous avons bloqué tous les surplus d'actifs pour éviter les fuites. Cela comprend toutes les sommes d'argent en cause dans les actions en justice, y compris les 4000000$ à 6000000$ de Singer, qui ne sont pas partis pour l'Ontario. C'est gelé, on me certifie que c'est ici, que ce n'est pas parti en Ontario.

Donc, nous avons pris des mesures pour protéger tout le paquet, tant que nous n'aurons pas trouvé la solution. Je ne dis pas que, dans l'avenir, la solution que nous trouverons n'aidera pas pour le passé. J'ai déjà même fait des allusions, à plusieurs reprises dans des allocutions, à des bonifications possibles. L'Ontario est en train de le proposer. On peut donc espérer qu'on pourra suivre un chemin semblable.

Pour aujourd'hui, nous avons un projet de loi qui améliore d'une façon considérable la question des fonds de retraite pour les travailleurs. Si on réussit à passer ce projet de loi, ce sera la phase 1 d'une réforme importante, je dois le dire. À la phase 2, ce n'est pas l'intention du gouvernement de se traîner les pieds. C'est le temps qui nous manque. Mais je peux vous assurer que, dès le début de la prochaine session, nous serons de retour avec un projet de loi pour régler de façon définitive la question de l'appartenance des surplus. Notre intention n'est pas d'agir de façon irresponsable envers les travailleurs. Au contraire, je pense que toutes nos attitudes jusqu'à maintenant indiquent que nous avons l'intention de traiter les travailleurs avec justice et équité.

Sur ce, je remercie nos visiteurs, nos invités du Syndicat des métallos, M. Godbout et ceux qui l'assistent, pour un mémoire bien articulé et, surtout, bien présenté. Merci.

Le Président (M. Bélanger): M. Godbout, avez-vous un dernier commentaire?

M. Godbout: En conclusion, je ne pense pas qu'on ait dit qu'il y avait des intentions de traiter à la légère les travailleurs, mais on a voulu apporter des points particuliers qui nous préoccupent au plus haut point. Ce qu'on dit, dans le fond, c'est ceci. Mon Dieu, Seigneur! on ne vous le demande pas, on vous en supplie! Regardez donc tout de suite pour garder le moratoire jusqu'à ce que la loi arrive, comme vous nous l'avez dit, mais en incluant les congés de contribution. Vous savez, on va assécher quand même par les congés de contribution, si on ne va pas chercher la caisse. Donc, c'est fondamental.

L'autre point, la participation, M. le ministre. Nous vous disons que le mouvement syndical, dans son ensemble, au Québec, a prouvé qu'il est capable de jouer un rôle présent, intelligent, objectif et paritaire. Il faut qu'il le soit au niveau des régimes. Si l'objectif du ministre est de partir comme il faut avec une première étape, partons-le comme il faut avec une première étape. Après ça, on fera la deuxième étape s'il faut la faire. Mais partons-le comme il faut là-dessus.

On n'a pas parlé beaucoup de la Régie des rentes parce qu'on n'a pas beaucoup de temps. Mais on a regardé passer le train un peu trop souvent et, là, ce n'est plus le train qui passe, ce sont les rails qui rouillent et qui regardent encore s'H n'en passera pas un autre. La Régie des rentes n'a pas fait sa job. Je vous ai dit, tout à l'heure, que c'était un projet. On s'est dit: On va arriver avec un véhicule. J'ai peur qu'on arrive juste avec de l'essence, sans véhicule, et que l'affaire passe au feu. Je l'ai dit tout à l'heure.

Le dernier point, je reviens là-dessus, c'est la gestion. Laisser les travailleurs seuls devant un employeur qui a tout l'équipement qu'il faut, tous les services, toute l'expertise pour administrer une retraite ou un régime, ce n'est pas correct. Il faut qu'on leur donne des outils collectifs pour se défendre devant ça. On revient là-dessus, c'est important. Ce n'est pas de l'ingérence, c'est tout simplement d'être capables, dans un forum d'administration, d'avoir des gens à peu près égaux. Un chat et un lion dans une maison, le chat chante en sacrement! Mais deux lions, ça s'écoute un peu plus. À un moment donné, si on ne fait pas attention, on va se ramasser avec des distorsions. On viendra vous voir en disant: Ça n'a pas de sens. Le problème ne sera peut-être pas l'orientation du projet de loi, ce sera dû aux mécanismes d'application qui l'entourent, et on trouve ça souvent. Les employeurs n'aiment peut-être pas qu'on soit présents, mais je pense que, de plus en plus, ils acceptent notre présence. En tout cas, ils acceptent notre intervention du fonds de solidarité avec beaucoup de plaisir, souvent.

Je peux vous dire là-dessus qu'on est très fiers de vous avoir présenté ce mémoire. Il y aura, je l'espère, un forum de discussions a l'automne sur les surplus et les problèmes dont on a parlé, de même que sur l'indexation. Je pense que, dans l'ensemble, nous avons voulu apporter un éclairage un peu spécifique à ce problème parce que c'est notre expertise dans le domaine privé et industriel. Nous ne voulons pas remplacer, bien sûr, mais on veut que ce soit un complément au mémoire de notre centrale qui est la FTQ, que vous aurez le plaisir de rencontrer demain, je pense. Je vous remercie.

Le Président (M. Bélanger): Sur ce, M. Godbout, on vous remercie énormément, votre groupe, le Syndicat des métallos (FTQ). Je vous rappelle que la commission ajourne ses travaux jusqu'à demain, 10 heures, dans la même salle.

(Fin de la séance à 18 h 41)

Document(s) related to the sitting