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(Dix heures dix-sept minutes)
Le Président (M. Bélanger): A l'ordre, s'il vous
plaît! Je demanderais à chacun de bien vouloir prendre place afin
que la commission des affaires sociales procède à des
consultations particulières et à des auditions publiques dans le
cadre de l'étude du projet de loi 116, Loi sur les régimes
complémentaires de retraite. Y a-t-il des remplacements ce matin?
La Secrétaire: Non, M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): Aucun remplacement,
bien. Nous recevons un premier groupe à la table des témoins, la
Chambre de commerce du Québec, qui sera représentée par M.
Jean-Paul Létourneau, par Me Louise Marchand et par M. Richard
Bisson.
Je ne vous expliquerai pas nos règles de procédure, sauf
de vous rappeler de faire attention à notre personnel qui est
chargé de la transcription. Alors, quand vous aurez à prendre la
parole, s'il vous plaît, veuillez vous identifier afin que le Journal
des débats soit le plus fidèle possible. Sans plus tarder, je
vous inviterais à procéder à la présentation de vos
collègues et de votre mémoire. Merci.
Chambre de commerce du Québec
M. Létourneau (Jean-Paul): Merci, M. le Président.
Mon nom est Jean-Paul Létourneau. Je suis le vice-président
exécutif de la Chambre de commerce du Québec. Je suis
accompagné, pour les fins de la présentation de notre
mémoire à cette commission, comme vous l'avez déjà
signalé, par Me Louise Marchand, directrice de la recherche à la
Chambre de commerce du Québec, et par M. Richard Bisson, actuaire,
vice-président à la firme MLH et A inc.
Pour ceux à qui cela peut rappeler des souvenirs, autrefois,
dit-on, cela voulait dire Marcel Le Houillier et associés. N'est-ce pas,
monsieur? Hébert Le Houillier, c'est cela.
M. le Président, nous avons relativement un court mémoire.
Je pense que je vais en lire des extraits pour essayer de m'en tenir aux vingt
minutes qui nous sont allouées pour la présentation du
mémoire.
La Chambre de commerce du Québec tient à remercier tout
d'abord le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du
revenu et ses collègues de l'Assemblée nationale de la
possibilité qui lui est offerte de soumettre ses commentaires sur un
projet de loi volumineux qui a des impacts sur les entreprises
québécoises et, particulièrement, les PME. Vous
remarquerez qu'au cours de notre mémoire nous attachons de l'importance,
en plusieurs endroits, à l'impact sur les PME; donc, cet
impact-là sera signalé.
Relativement aux régimes supplémentaires de rentes ou
complémentaires de retraite - incidemment, le changement d'appellation
nous laisse un peu perplexe; on n'a pas réussi à en
découvrir la raison, mais enfin, on en parlera peut-être plus tard
avec M. le ministre - la Chambre recommande depuis longtemps la mise en place
de tels régimes par les employeurs dans leurs entreprises et la
facilitation de l'expansion de ces régimes chez les employeurs. Nous
estimons que ces objectifs peuvent être atteints par une intervention
minimale du gouvernement, par l'intermédiaire des régimes publics
et par une réglementation la plus légère et la plus
encourageante possible pour les employeurs offrant déjà cet
avantage à leurs employés ou qui songeraient à le
faire.
Comme dans les autres dossiers où nous intervenons auprès
du législateur, nous nous exprimons ici au nom de la très grande
majorité de nos membres et de tous les employeurs qui respectent les
lois et qui se comportent comme des personnes morales raisonnables et
responsables.
La Chambre estime que la réglementation des régimes
supplémentaires de rentes est déjà très lourde pour
toutes les entreprises et, en particulier, pour les petites et moyennes
entreprises. Tout en acceptant que les règles de fonctionnement de nos
régimes supplémentaires doivent s'harmoniser au mieux avec celles
des régimes semblables au fédéral et dans les autres
provinces canadiennes, nous estimons qu'un maximum de liberté doit
être laissé aux employeurs d'implanter des régimes en leur
faisant confiance. D'ailleurs, la Chambre adhère au principe que la
sécurité du revenu à la retraite constitue une
responsabilité qui appartient d'abord aux individus et aux groupes
privés.
Dans les notes explicatives, le législateur souligne que "l'objet
de ce projet de loi est d'assurer une plus grande protection des droits acquis
par les travailleurs qui participent à un régime de retraite."
Nous souscrivons à cet objectif et soulignons que cette
préoccupation exprimée par le législateur rejoint celle de
la majorité des entreprises du Québec qui offrent un tel
régime à leurs employés pour les aider à mieux
préparer leur retraite.
Je passe à la page suivante pour ceux qui suivent notre texte.
Article 6: la nature du régime de retraite. Cet article, qui
précise que le régime de retraite est un contrat, nous laisse
perplexes. Quel est l'objectif que veut atteindre le législateur en
procédant ainsi et en ne spécifiant pas qui sont les parties
à ce contrat, ainsi que le fait le Code civil? Incidemment, on y trouve
là aussi un particularisme québécois qui pourrait
peut-être rendre difficile l'harmonisation avec le reste du pays, entre
autres choses. L'article 984 du Code civil précise en
Débats de l'Assemblée nationale 10 mai 1989 effet que,
pour qu'il soit valide - en parlant d'un contrat - il faut des parties. En
l'espèce, outre l'employeur dont on peut présumer qu'il est une
partie à cause de l'esprit de la loi et de toutes les obligations qui
lui incombent, on peut légitimement se demander qui est l'autre partie.
Est-ce que ce sont les participants en général, chaque
participant en particulier, le ou les employés ou, le cas
échéant, le syndicat? S'agit-il plutôt d'une stipulation
pour autrui en vertu des articles 1028 et 1029? Enfin, on pourra
débattre cette question plus tard.
Par ailleurs, en combinant l'article 6 aux articles 14, 15e, 136 et 137,
on est confronté au fait qu'un employeur lié par un contrat
(article 6) doit déterminer dans le texte du régime (articles 14
et 15e, encore une fois) "à qui, de môme qu'à quelles
conditions pourra être attribué tout excédent d'actif et
à quelles conditions cet excédent pourra être
affecté à l'acquittement de cotisations."
En vertu des articles 136 et 137, "l'excédent d'actif ne peut
être affecté à l'acquittement de cotisations salariales ou
patronales que si la vérification de la capitalisation et de la
solvabilité ont déterminé chacune un excédent
d'actif, le moindre des deux excédents ainsi déterminé
devant être utilisé à cet effet.
On se retrouve donc dans la situation où un employeur ne pourrait
utiliser les surplus ou excédents d'actif pour acquitter ses cotisations
si rien n'a été prévu au contrat, quand bien même il
serait le seul cotisant ou si l'excédent d'actif lui permettait de
dépasser les engagements pris.
Comme la loi entrerait en vigueur le 1er janvier 1990, selon l'article
315, on peut légitimement s'interroger sur le sort des régimes
existants et présumer qu'ils devraient s'ajuster à la nouvelle
philosophie "contractuelle", entre guillemets, rétroactivement, ce qui
donne à penser que, notamment au titre des surplus existants, il y
aurait risque de ne rien pouvoir modifier.
En outre, avec ces 315 articles qui encadrent la rédaction et le
fonctionnement du contrat, la loi est tellement rigide et spécifique
dans ses prescriptions que nous nous expliquons mal comment le
législateur peut encore qualifier le régime de contrat, ce qui
normalement laisse présumer un esprit de "consensual isme" et de libre
choix entre les parties. Nous craignons même qu'en raison, justement, de
cet esprit rigoriste et lourd à administrer plusieurs petits et moyens
employeurs ne cèdent à la tentation d'évacuer ce champ
d'intervention pour adopter des régimes de retraite plus souples et
surtout moins complexes. Compte tenu de ces remarques et parce que la nature de
ces bénéfices ne s'accorde pas avec la notion de contrat, nous
sommes d'avis que ce terme de contrat devrait être
éliminé.
La responsabilité des administrateurs. Le projet de loi 116
alourdit beaucoup trop la responsabilité des administrateurs d'un
régime. Tout d'abord, la simple comparaison de la loi actuelle, Loi sur
les régimes supplémentaires de rentes, avec le projet de loi 116
nous fait passer d'une loi de 81 articles à une loi de 315 articles pour
les mêmes fins, et ceci ne tient pas compte des règlements. Pour
nous, c'est de l'inflation législative.
D'autre part, la Chambre de commerce s'inquiète de l'esprit de
responsabilisation que l'on retrouve dans la nouvelle loi, esprit sous-jacent
à la législation créant le moratoire de décembre
1988. Par les modifications apportées à la Loi sur les
régimes supplémentaires de rentes, la loi 95 renverse, en effet,
le fardeau de la preuve en créant à l'égard de certains
versements non autorisés de l'actif de la caisse une présomption
d'avoir été fait avec l'intention de frauder. En outre, ces
dispositions précisent que si l'administrateur est une personne morale,
les membres de son conseil d'administration doivent répondre
personnellement et solidairement d'avoir consenti à tout versement
illégal.
Nous nous permettons de manifester notre inquiétude quant a ce
qu'il adviendra de ces nouvelles dispositions dérogatoires au chapitre
de la responsabilité des membres d'un conseil d'administration et,
d'autre part, de ce que nous retrouvons, dans cette même foulée,
au projet de loi 116. L'article 51 crée encore une exception au principe
de la responsabilité limitée pour les cotisations échues
et nous nous interrogeons également sur la portée des articles
153 et 154 qui traitent de la responsabilité de l'administrateur de
régimes de retraite.
Puis on apprend, à l'article 165, qu'il y a l'obligation pour les
administrateurs d'établir une politique de placement, contenant toute
une panoplie de critères difficiles à prévoir et à
respecter. Par exemple, comment établir et prédire - je cite la
loi, à l'article 165.2 - "le degré de risque attaché au
portefeuille, eu égard, notamment, à la fluctuation des cours"?
Songeant surtout ici aux petites et moyennes entreprises, voilà encore
des coûts de gestion du régime qui seront onéreux, compte
tenu de tous les types d'expérience professionnelle que requiert
l'établissement d'une politique aussi formaliste.
Une autre responsabilité nouvelle aux administrateurs qui pourra
être très lourde et qui nous apparaît même
vouée à l'inefficacité, c'est l'obligation de convoquer
une assemblée générale des participants à un
régime. C'est l'article 162. Notons d'abord que c'est une disposition
qui ne se retrouve pas dans le consensus canadien et que ce serait donc une
obligation particulière faite aux employeurs québécois.
Les données relatives à un régime de retraite deviennent
très rapidement complexes et difficiles à apprécier, et
une assemblée générale ne nous apparaît pas
être le moyen approprié pour transmettre adéquatement les
informations qui doivent être communiquées. Toutes sortes
d'embûches attendent cette formule, dont les coûts de
réalisation 10 mai 1989
Commission permanente
ne sont pas les moindres. Nous ne citerons que le cas d'une entreprise
de plus de 2000 employés ou même de 100 employés
répartis sur un vaste territoire.
D'autre part, pour toute entreprise, on peut finalement imaginer
qu'à la longue la participation à une telle réunion pose
un problème de présence. Qu'arrivera-t-il alors de la
validité des décisions qu'on pourra y prendre? Les
réalités que nous connaissons relativement à
l'intérêt et à la compréhension des participants
pour ce qui est de leur régime de retraite, font qu'un ou des moyens de
communication beaucoup plus révélateurs et efficaces qu'une
assemblée générale peuvent être utilisés. Le
projet de loi en prévoit d'ailleurs plusieurs aux articles 105 à
109.
Enfin, on apprend, par l'article 145, qu'un employeur ne peut
gérer la caisse de retraite du régime. Je ne m'étendrai
pas là-dessus parce qu'on m'a prévenu qu'hier il y avait eu une
déclaration ministérielle qui semblait annuler cette
requête, à toutes fins utiles, ou enfin, répondre à
cette requête.
Transfert de droits et d'actifs. Au chapitre des transferts, nous
constatons que de nombreux critères sont inscrits au projet de loi. Par
contre, le dernier alinéa de l'article 96 demeure, à notre avis,
trop peu révélateur des intentions du législateur. En
effet, nous aimerions qu'on y précise que le transfert dans un REER
immobilisé, par exemple, est permis. Ce serait là une solution
commode à la fois pour les participants et les administrateurs du
régime.
Par ailleurs, nous disons tout de suite au législateur que nous
nous opposerions à une autre possibilité de transfert
déjà évoquée, soit celle d'un fonds de transfert
administré par la RRQ et dont elle pourrait décider par
règlement.
Le financement et la solvabilité. Au chapitre du financement et
de la solvabilité, la Chambre observe que le projet ajoute au test
habituel et bien connu de la capitalisation d'un régime
complémentaire un deuxième test qu'on appelle
"solvabilité" (articles 114 à 135). Ces deux tests
conjugués ont pour objet d'ajouter à la sécurité du
régime pour les participants. Il est difficile de nous opposer en
principe à un tel objectif, ainsi que nous l'avons souligné plus
haut, à cause du fait que ça devient partie du consensus
canadien. Toutefois, nous aimerions faire remarquer au législateur que
rechercher la sécurité à 100 % est un exercice
coûteux et qu'encore une fois on en fait payer le prix aux employeurs,
lesquels assument déjà les risques de leur entreprise et presque
tous les risques du régime. Ils devront en assumer encore plus parce
que, dorénavant: 1) les possibilités que le régime soit en
déficit actuariel sont augmentées, d'où une obligation de
devoir combler plus de déficits qu'auparavant, et plus rapidement; 2)
sont, parallèlement, diminuées les possibilités d'obtenir
des surplus qui peuvent être utilisés pour acquitter des
contributions de l'employeur; 3) la nécessité de faire
exécuter par des actuai- res ce deuxième test ajoutera autant aux
coûts administratifs du régime qui seront encore une fois
absorbés par l'employeur. Ici, nous pensons à nouveau aux
moyennes et petites entreprises qui ont un régime ou qui songent
à s'en doter. Tous ces coûts additionnels peuvent devenir
onéreux et décourageants, surtout lorsqu'ils s'appliqueront
à des fonds pour lesquels ils représenteront une partie
significative du rendement. (10 il 30)
L'article 190 et les suivants: scission et fusion. Par les
mécanismes mis en place par ces articles, le législateur rend la
scission ou la fusion de l'actif ou du passif d'un régime tellement
difficile et complexe qu'il bloque, à toutes fins utiles, quelque
initiative en ce sens. Nous somme d'avis que si, d'aventure, une telle
opération devenait nécessaire les employeurs n'auront d'autre
choix que de liquider le régime existant ou de continuer à
administrer plusieurs régimes pour des employés de même
classification, avec tous les embêtements que cela représente.
Je passe aux observations générales. En parcourant ce
projet de loi, nous sont venues une série non exhaustive d'observations,
et incidemment nous avons ici, M. le Président, consulté des
experts, et ce que nous vous apportons, c'est la perception des gens
d'affaires, des avis que les experts nous ont donnés de ce que contenait
la loi. Alors, encore une fois, nous déplorons devoir évaluer un
projet de loi sans les règlements qui lui donnent tout son sens. Avec
les énormes pouvoirs de réglementation que se donne en plus la
Régie des rentes du Québec, nous sommes loin d'examiner un projet
de loi qui a toute la transparence souhaitable.
Nous observons que l'État évite bien de s'imposer le flot
de contraintes qu'il impose à l'entreprise par le projet de loi. Nous
comprenons que, pour ce qui est des règles de capitalisation des
régimes, l'État est une entité différente dont la
pérennité est plus certaine, mais on voit quand même qu'il
y a des déficits considérables qui se sont accumulés du
côté de l'État, qui sont même difficiles et
très lourds à porter.
Comment réagirait l'État si on lui imposait aussi les
règles de l'assemblée générale annuelle, les
dispositions qui traitent du placement, la règle des 50 %, la
revalorisation des rentes après l'âge de la retraite, l'obligation
de faire porter intérêt à la cotisation de l'employé
qui quitte avant un an de service, la prestation de décès avant
la retraite, et ainsi de suite?
À la suite des pressions des milieux d'entreprise, le
gouvernement a mis sur pied, en 1988, le comité sur la gestion
documentaire, alors sous l'autorité du ministre responsable de la PME,
dont le mandat est de vérifier le fardeau administratif additionnel,
c'est-à-dire la paperasse, que toute une nouvelle loi pourrait apporter
à l'entreprise et particulièrement à la PME. Je dois vous
dire que nous, du milieu des affaires, avons obtenu de haute lutte ce
comité de la part
Débats de l'Assemblée nationale 10 mai 1989 du
gouvernement et il a finalement été accordé justement pour
évaluer le fardeau de la paperasse que toute nouvelle loi pourrait
apporter à l'entreprise et particulièrement à la PME.
Alors, comme ce comité existe toujours, selon nos informations, nous
demandons que cette commission sollicite son avis à l'égard du
projet de loi 116.
Nous sommes très déçus de constater que le projet
de loi 116 ne met pas un terme au moratoire imposé aux surplus des
caisses de retraite que le projet de loi 95 a gelés. La Chambre estime
que cette mesure législative, imposée à tous les
employeurs, crée des inquiétudes et des embarras inutiles pour
une grande majorité des employeurs touchés. Le moratoire aurait
pu être levé avec l'adoption du projet de loi 116 et ce, en
reconnaissant le principe que, si l'employeur est responsable de tous les
risques de déficit de son régime, il doit, en toute
équité, demeurer propriétaire des surplus qui s'en
dégagent, à moins qu'il n'en soit spécifiquement convenu
autrement. L'absence de dispositions à cet effet nous fait manquer une
occasion de régler cette affaire pendant que nous sommes plongés
dans le sujet complexe des caisses de retraite.
Nous constatons avec plaisir que le projet de loi apporte plusieurs
mesures générales d'harmonisation et que, plus
spécifiquement, il propose des pouvoirs à la Régie de
conclure des ententes particulières d'harmonisation pour éviter
les conflits de juridiction dans l'application des régimes des
entreprises qui comptent des participants dans plusieurs régions du pays
(article 245).
Le Président (M. Bélanger): M. Létoumeau, je
vous inviterais à conclure, s'il vous plaît!
M. Létourneau: Je termine, j'en ai pour une minute, M. le
Président.
Le Président (M. Bélanger): Je vous en prie.
M. Létourneau: Merci de votre indulgence. Nous
apprécions beaucoup que le projet de loi ne s'applique pas aux
régimes qui n'offrent pas de prestations au-dessus des limites fiscales.
Après avoir apprécié les bons points du projet de loi 116
et avoir exprimé ses recommandations spécifiques sur d'autres
dispositions, la Chambre sollicite l'attention de cette commission sur
l'importance de simplifier et d'alléger le plus possible les obligations
qui découlent de cette loi. Nous croyons, d'une façon
générale, que les employeurs méritent qu'on leur fasse
confiance en ce domaine. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. M. le
ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, c'est avec
intérêt que nous avons pris connaissance du mémoire de la
Chambre de commerce du Québec qui est toujours un interlocuteur majeur
dans les dossiers, tels que ceux que nous étudions présentement.
Je comprends qu'en gros la Chambre appuie les efforts d'harmonisation du projet
de loi, avec le gouvernement fédéral et avec l'Ontario. Je
comprends également qu'elle déplore l'absence de
règlements et la complexité que la loi provoquera et qu'elle
réclame plus de liberté dans rétablissement et dans le
fonctionnement des régimes.
J'aimerais répondre à certaines des questions que vous
avez soulevées. En premier lieu, pourquoi avons-nous changé le
nom du projet de loi? Ce n'est pas un caprice, enfin, pas de notre part, c'est
un caprice des légistes qui nous disent qu'un régime
complémentaire de retraite, c'est beaucoup plus français que des
régimes supplémentaires de rentes, étant entendu que
"supplémentaires*, c'est plutôt un anglicisme. Alors, c'est de
bonne grâce, voulant améliorer la qualité du
français dans la loi, que nous nous sommes plies à cette
demande.
En ce qui concerne les règlements, il est exact qu'ils ne sont
pas encore connus. Je peux quand même vous annoncer une bonne nouvelle.
La réglementation sera sensiblement moins volumineuse avec la nouvelle
loi qu'à l'égard de l'ancienne. On me rétorquera que la
loi est plus volumineuse que l'ancienne et c'est ce que vous avez dit. Alors,
nous avons choisi d'en mettre plus dans la loi et moins dans les
règlements.
Le comité dont vous parliez tout à l'heure sera heureux de
voir que le législateur réglemente moins présentement que
sous l'empire de l'ancienne loi. Les règlements ne sont pas ici
aujourd'hui. On ne les a pas avec nous pour discussion, mais ce n'est pas
étonnant, en ce sens que l'Assemblée nationale a pour objet de
voter des lois, le législateur légifère par les lois et
l'exécutif exécute par des règlements. Or, les
règlements ne sont pas encore prêts et on peut simplement dire
qu'il est un peu prématuré de produire des règlements
quand on ne sait pas si la loi sera adoptée et dans quel état
elle le sera. On peut concevoir, dès maintenant, qu'il y aura
passablement d'amendements apportés à cette loi. C'est d'ailleurs
l'objet des consultations que nous faisons, de voir dans quelle mesure on peut
bonifier la loi.
Donc, à la fin de la consultation, on verra comment on peut
bonifier la loi et à la préparation des règlements. Vous
savez que les règlements, de toute façon, subissent leur propre
procédure d'adoption et de prépublication. On peut faire toutes
les représentations auprès du gouvernement pendant la
période de prépublication et, finalement, les règlements
seront publiés d'une façon définitive dans La Gazette
officielle. C'est vrai que nous ne traitons pas, dans le projet de loi, de
la question des surplus d'actifs et vous le déplorez. En ce sens, vous
rejoignez l'Opposition officielle qui fait corps avec vous pour déplorer
l'absence de dispositions traitant 10 mai 1989
Commission permanente
des surplus d'actifs. Mais là s'arrête tout
parallèle entre l'Opposition et vous, parce que vous suggérez de
lever le moratoire en retenant le principe que les surplus appartiennent
à l'employeur puisqu'il est responsable des déficits et ce n'est
pas la thèse de l'Opposition. Quant à nous, nous entendons
consulter sur ce sujet spécifique, au cours des prochains mois, notre
intention étant de régler le problème des surplus
d'actifs, de leur propriété, de la façon dont on peut les
sortir après cette large consultation que nous avons l'intention de
tenir au cours des prochains mois.
Il nous est apparu dangereux de tenter de faire passer en même
temps une foi qui traiterait à la fois d'une réforme en
profondeur de la loi et du problème extrêmement complexe de la
disposition des surplus d'actifs. Nous avons pensé que nous aurions
peut-être pu mettre en péril l'adoption même de la loi en
prenant les bouchées trop grosses, suivant en cela l'exemple de
l'Ontario qui s'y est pris en deux temps comme, d'ailleurs, nous avons
l'intention de le faire. Je pense que, dans ce domaine, il vaut mieux se donner
le temps de réfléchir et de consulter. Il sera toujours temps,
à l'automne, de décider de la façon de procéder. Je
vous signale, de toute façon, que le moratoire va être maintenu
tant et aussi longtemps qu'une décision n'aura pas été
prise relativement à la disposition des surplus d'actifs.
En ce qui concerne le mémoire que vous avez déposé,
je vais reprendre certaines de ses dispositions et peut-être me permettre
de les commenter. Vous demandez, par exemple, si l'État accepterait de
s'imposer les mêmes contraintes qu'on impose aux régimes
privés? C'est une bonne question et nous avons l'intention de la
soumettre à la Commission administrative des régimes de retraite
et d'assurances ainsi qu'au Conseil du trésor. Maintenant, je ne sais
pas quelle sera la réponse. On peut penser que l'État estimera
que, sa responsabilité étant en cause, il n'a pas à se
soumettre à toutes les contraintes puisqu'il s'estime extrêmement
responsable et capable de faire face à toutes les
éventualités à même le fonds consolidé du
revenu.
Deuxièmement, l'administration du régime, des
responsabilités lourdes que nous imposons, semble-t-il, à
l'administrateur. Évidemment, cette nouvelle réglementation
s'inscrit dans la suite des mauvaises nouvelles que la presse nous
annonçait il y a quelques mois, alors que certains travailleurs ou
groupes de travailleurs ont dû poursuivre en justice des compagnies qui,
semble-t-il - je n'affirme rien - selon la prétention de ces groupes de
travailleurs, avaient détourné ou tentaient d'accaparer des
surplus d'actifs. Dans ces actions en justice, ils prétendent que les
surplus appartiendraient non pas à l'employeur, mais aux
employés. Je ne veux pas, en aucune façon, me prononcer sur ces
dossiers, mais cela dénote quand même un climat d'incer- titude
entourant l'administration des fonds, la gestion des fonds, la
propriété, etc. Cela a évidemment forcé la
réflexion en ce qui concerne la responsabilité des
administrateurs.
Nous pensons que, dans une large mesure, les fonds qui sont
déposés par les travailleurs dans un régime
complémentaire de retraite sont en quelque sorte du salaire
différé. Nous pensons que la situation a suffisamment
évolué, au cours des 25 dernières années, pour
faire en sorte qu'à toutes fins utiles, ce soit considéré
comme du salaire différé par les travailleurs. Dans ce
sens-là, il conviendrait probablement de penser que les
responsabilités des administrateurs peuvent être
apparentées aux responsabilités similaires qui sont
imposées à l'égard du salaire, en vertu de la Loi sur les
compagnies qui rend les administrateurs responsables des salaires non
payés. On pourrait alors et on peut franchir ce pas-là et
conclure que les administrateurs d'un fonds de retraite ou d'un régime
de retraite ont des responsabilités à l'égard des sommes
d'argent qui sont déposées dans le fonds dont ils sont les
gestionnaires. Ce sont des gestionnaires du bien d'autrui qui voient à
administrer un patrimoine fiduciaire; je pense donc qu'il faut les
responsabiliser. (10 il 45)
La politique de placement qui pourrait être trop formaliste... On
prétend qu'il y aurait des coûts de gestion à cause de
critères plus ou moins imprévisibles. Je peux répondre
uniquement que cela correspond, selon nous, à peu près aux
règles de l'art en ce domaine.
L'assemblée générale, non pas des actionnaires,
mais des participants, c'est le moyen que nous avons trouvé pour tenter
de mieux informer les participants à un régime. On déplore
dans bien des milieux que le travailleur québécois ne se
préoccupe pas assez de sa retraite, de ses fonds de retraite. Dans le
passé, on a même souvent vu des travailleurs retirer les fonds
qu'ils avaient déposés dans un fonds de retraite et les utiliser
pour s'acheter une automobile ou des trucs comme ça. On leur reproche
donc de ne pas se préoccuper, surtout lorsqu'ils sont jeunes, de
l'avenir.
Nous tentons de faire en sorte d'intéresser davantage les
travailleurs à la problématique de la retraite. Je pense que
c'est dans l'intérêt même des travailleurs et dans
l'intérêt de la collectivité aussi.
Dans ce sens, une assemblée d'information annuelle sur
l'état du fonds de retraite, je pense, serait de nature à mieux
sensibiliser les travailleurs à l'importance de ces fonds de retraite.
Nous pensons que, finalement, c'est probablement la meilleure façon. On
nous dit: C'est complexe, un fonds de retraite. Possiblement que les
travailleurs n'y comprendront rien ou ne seront pas intéressés.
J'espère qu'ils seront intéressés. En ce qui concerne leur
compréhension, je compte justement sur l'employeur pour tenter
d'expliquer, de vulgariser la problématique des
Débats de l'Assemblée nationale 10 mai 1989 fonds de
retraite pour faire en sorte que les travailleurs comprennent. À mon
avis, l'envoi d'un dépliant ou d'un texte est bon, mais ça ne
répond pas à toutes les questions. Si celui qui lit le texte ne
comprend pas très bien, personne ne peut lui expliquer. Si on
procède au moyen d'une assemblée d'information, là, pour
autant qu'on fasse des efforts de vulgarisation, il y a de meilleures chances
que les travailleurs comprennent un peu mieux ce que signifie le fonds de
retraite et ce qui se passe quant à son administration.
Le Président (M. Bélanger): Je vous inviterais
à conclure, M. le ministre.
M. Bourbeau: Je regrette, mais c'est tout le temps qui m'est
imparti. Peut-être pourra-t-on revenir, à la fin, pour un mot ou
deux? Je vous remercie.
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Maisonneuve.
Mme Harel: M. le Président, je vais peut-être
immédiatement souhaiter une réaction de la part de nos
invités. Ils sont ici également pour qu'on puisse discuter avec
eux. À la suite des propos que le ministre vient de tenir, j'ai
l'impression, M. Létoumeau, que vous avez quelques réactions
à nous faire connaître.
M. Létourneau: Merci beaucoup de m'offrir cette occasion
à ce moment-ci. M. le Président, si vous le permettez. D'abord,
M. le ministre, vous n'avez pas réagi à notre demande de
soumettre le projet de loi au comité sur la gestion documentaire. Nous
apprécierions beaucoup si ce geste pouvait être posé par la
commission.
M. Bourbeau: Je n'ai pas d'objection du tout, au contraire.
M. Létourneau: Bon, très bien, merci beaucoup. Pour
ce qui est de la question de l'assemblée générale, enfin,
nous estimons que ce genre de réunion n'est pas la façon... Comme
vous l'avez expliqué vous-même, l'objectif de cette réunion
est l'information, mais ce genre de réunion n'est pas
nécessairement la meilleure façon pour plusieurs raisons.
D'abord, il y a les coûts pour une entreprise et le fait d'amener tous
les employés au même lieu, le même jour, au même
endroit. Peut-être pourrait-on explorer d'autres solutions comme, par
exemple, d'inviter des employés par petits groupes avec des gens qui
comprennent bien et qui connaissent bien le fonds, soit des experts, des
actuaires, je ne sais pas, alors rencontrer les employés par petits
groupes? Ce serait moins onéreux pour l'employeur qui, à ce
moment-là, aurait moins de frais et ne serait peut-être pas
nécessairement obligé d'arrêter la production ou de tenir
ça en dehors des heures de travail et risquer de n'avoir que très
peu de participants. Il nous semble que ce moyen ou plusieurs autres moyens
pourraient mieux atteindre l'objectif d'information et seraient moins
coûteux tout en étant plus efficaces.
M. Bourbeau: II n'y a pas de problème. Nous ne nous
opposons pas du tout à ça. C'est l'esprit même de la
loi.
Mme Harel: M. le ministre...
Le Président (M. Bélanger): Si vous permettez, M.
le ministre, on va laisser à madame...
M. Bourbeau: II me pose des...
Mme Harel: Je suis altruiste quand cela concerne nos
invités, mais je ne le suis pas quand cela concerne le ministre. S'il
avait voulu discuter avec vous, il n'avait qu'à le faire dans le temps
qui lui était imparti. Maintenant, j'ai le même temps que lui,
alors je voudrais, d'abord, pouvoir faire deux remarques, puis vous poser deux
questions.
Vous savez, quand le projet de loi 116 a été
déposé à l'Assemblée nationale, dans la même
journée, il s'est trouvé que j'ai fait, par curiosité,
l'exercice de lire les notes explicatives du projet de loi 116 et celles du
projet de loi 58, déposé il y a quatre ans par Mme Marois
lorsqu'elle était ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu. Vraiment, c'est un décalque. J'en ai,
d'ailleurs, quelques copies que je vous remettrai. C'est presque un
décalque, quatre ans plus tard, à l'exception, je pense, du
chapitre XI sur la scission d'un régime et la fusion des régimes
et, avec un recul, il faut bien le dire, par ailleurs, par rapport au projet de
loi 58, sur l'aspect paritaire des comités. Mais on va revenir
là-dessus, si vous le voulez.
Donc, c'est une sorte de décalque avec les mêmes omissions
que contenait le projet de loi 58 qui a vieilli entre-temps, évidemment,
omissions portant sur l'indexation et la disposition des surplus. Mais,
à l'époque, il y a quatre ans, on prévoyait une
consultation. Là, le ministre, je pense, se compare abusivement avec
l'exercice que fait l'Ontario. À l'inverse, par ailleurs, l'Ontario a
déposé une proposition d'indexation et de disposition des
surplus. La grande question qui reste inconnue jusqu'à maintenant,
c'est: Quelle est la position du gouvernement? Je comprends qu'il veuille
consulter, bien qu'il ait eu quatre ans pour le faire - disons qu'il est plein
de bonne foi - mais sur quoi exactement? Sur le néant pour tout de
suite. Ce qu'on lui dit, c'est: Faites comme l'Ontario et donnez-nous la
proposition sur laquelle vous voulez faire la consultation, avant les
élections et non après, étant donné que, selon
toutes probabilités... Le premier ministre lui-même a fait une
déclaration annonçant des élections pour l'automne, alors,
on 10 mai 1989
Commission permanente
aimerait mieux le savoir avant qu'après. C'est la première
remarque.
La seconde, M. Létourneau, tantôt - et c'est important, je
crois que c'est la pierre d'assise de votre position - vous disiez: La
responsabilité de la sécurité à la retraite
appartient d'abord aux individus et aux groupes privés. Vous l'avez dit
mais c'est aussi écrit. Il reste que le poids des paiements de transfert
sur la collectivité est énorme à cause de l'absence de
responsabilité. Les paiements de transfert aux personnes de 65 ans et
plus sont énormes. Quand je parle des paiements de transfert, je pense
à tous ceux que paie notre collectivité, y compris le
supplément, la grosse pension par rapport à la petite, comme
disent les gens, le supplément qui est quand même payé
collectivement; je pense à l'aide sociale qui est quand même de
plus en plus importante chez les 55 ans et plus, jusqu'à 65 ans; je
pense au programme d'adaptation des travailleurs âgés, PATA, pour
retraités et préretraités, qui est un programme de
transfert; je pense à Logirente qui est aussi un programme de transfert
parce que les personnes de 60 ans et plus et, espérons-le, celles qui en
ont 55 aussi, qui sont les plus mal prises, voient une partie de leur loyer
remboursé si les revenus qu'elles ont sont insuffisants. En fait, il y a
une multiplicité de paiements de transfert qui coûte cher et que
sont assumés par l'ensemble de la collectivité. Il me semble que
l'État a un rôle à jouer pour inciter les individus et les
groupes privés à prévoir qu'à un moment
donné les salaires vont s'interrompre et qu'il faut un remplacement de
revenu. Je ne sais pas quel est votre point de vue là-dessus.
M. Létourneau: M. le Président, nous sommes
d'accord que les paiements de transfert sont énormes, mais une des
raisons pour lesquelles ils sont énormes, c'est parce qu'ils sont
universels et qu'ils vont, dans une forte proportion, à des gens qui
n'en ont pas besoin. D'autre part, j'ai fait observer que, justement,
jusqu'à récemment, les régimes complémentaires de
retraite, les régimes privés, ont augmenté
considérablement et - je ne connais pas exactement les chiffres, mais je
pourrai les demander à M. Bisson, ici, qui est peut-être plus
versé que moi là-dedans - d'après ce que j'ai cru
entendre, les entreprises ont graduellement pris leurs responsabilités
de plus en plus, de telle sorte que les actifs des régimes
supplémentaires dépassent de beaucoup les actifs du régime
de base public.
Nous n'avons pas dit non plus que l'État n'avait aucun rôle
à jouer. Nous avons dit que c'était prioritairement la
responsabilité des individus et des groupes privés. Alors, nous
n'avons pas dénié le rôle complémentaire de
l'État et, effectivement, dans notre mémoire, nous disons que ce
rôle complémentaire doit continuer d'être joué en ne
décourageant pas les gens d'avoir recours à ces régimes
qui offrent aux participants une aide à la retraite.
Mme Harel: Je suis obligée de nuancer vos propos parce que
tous les programmes dont j'ai fait mention sont des programmes d'aide, ce sont
des programmes de transfert qui ne sont attribués qu'à partir
d'un test de besoins: Supplément de revenu, aide sociale, PATA. Je ne
vous parle pas de la pension de vieillesse, je ne vous en ai pas parié,
je veux parler du supplément...
M. Létourneau: J'avais compris pension, la petite et la
grande.
Mme Harel: Non, la grosse. La petite, elle, est universelle, sauf
avec les nouvelles dispositions fiscales, mais la grosse, la vraie, c'est elle
qui coûte cher, c'est elle qui est offerte à 60 % des anciens
travailleurs et travailleuses pourtant, pas simplement à des personnes
qui n'ont pas eu de revenu de travail. Donc, tous ces programmes de transfert
offerts à partir d'un test de revenu sont de plus en plus nombreux parce
qu'il y a de plus en plus de pauvreté, finalement. Ces programmes
coûtent cher. D'autre part, je suis également obligée de
nuancer le fait qu'il y a de moins en moins de travailleurs et de
travailleuses, d'employés en général, qui profitent des
régimes complémentaires. En cinq ans, il y a eu une
réduction de 4%; ça a passé de 45 % à 41 %.
J'aimerais vous entendre là-dessus, je vais vous laisser la
parole, mais, juste avant, il y a un autre aspect important sur lequel
j'aimerais avoir votre point de vue, c'est celui de la cotisation, si vous
voulez, versée comme faisant partie de la rémunération
globale. Sur cet aspect, j'aimerais vraiment connaître votre point de vue
parce que le gouvernement devra trancher là-dessus et c'est important:
Est-ce que ça fait partie ou non de la rémunération
globale?
Ici, vous savez, on ne peut pas avoir deux poids, deux mesures. Comme
employeur, le gouvernement a créé le Centre de recherche et de
statistiques sur le marché du travail, que vous connaissez sans doute,
qui prépare une étude comparative de la
rémunération dans les secteurs privé et public pour
ralentir les hausses que le secteur public souhaite obtenir. Dans ces
politiques, le Centre de recherche et de statistiques sur le marché du
travail inclut, dans le calcul de la rémunération globale, les
déboursés faits pour les régimes de retraite. C'est
vraiment retenu comme un avantage inclus au même titre que le
congé de maternité, etc. comme faisant partie de la
rémunération globale. Quel est votre point de vue
là-dessus?
M. Létourneau: M. le Président, d'abord, quant au
fait qu'il y ait de moins en moins d'employés couverts par des
régimes supplémentaires, c'est fort possible. En effet, on a eu
des informations à savoir que, récemment, ça a
été le cas. Nous croyons que cela ne veut pas
Débats de l'Assemblée nationale 10 mai 1989
nécessairement dire qu'à cause de ça il y aura de plus en
plus de personnes pauvres parmi les personnes âgées. D'autres
études que nous avons fait faire nous indiquent que, dans l'avenir, il
est fort possible que la proportion ou la comparaison que l'on fait entre
vieillesse et pauvreté diminue de plus en plus. D'ailleurs, elle ne
cesse de diminuer depuis quelques années.
Mme Harel: Parce que les gouvernements sont
généreux. Les familles avec jeunes enfants s'appauvrissent et les
personnes de 60 ans et plus voient leur situation s'améliorer
sensiblement à cause des programmes de transfert.
M. Létoumeau: M. le Président, il y a toutes sortes
d'explications à cette situation, mais nous observons que
l'épargne privée, l'épargne due à la possession
d'une propriété, l'épargne que, de toute façon, les
gens font, continue d'augmenter et va continuer d'assurer un meilleur revenu
aux personnes âgées dans l'avenir.
Maintenant, pour nous, il est bien important de signaler que, peu
importe l'interprétation que différents groupes peuvent en faire,
quand on parle à nos membres et qu'on essaie d'évaluer comment
ils considèrent le régime supplémentaire de rentes, on
s'aperçoit qu'ils le voient plutôt comme un avantage social pour
aider les employés à mieux préparer leur retraite. On peut
lui donner d'autres sens si on le désire, mais il faut considérer
aussi le sens que lui donnent ceux qui offrent ce service, cette
indemnité c'est-à-dire, qui, la plupart du temps, a
été offerte unilatéralement par l'employeur à ses
employés. Il y a une évolution, maintenant. Je ne sais pas quelle
est la proportion des nouveaux régimes mais, comme ils diminuent, nous
prévoyons, notamment, que les nouveaux régimes, si la loi
actuelle est adoptée, vont diminuer encore plus, parce qu'on choisira
d'autres moyens, à cause de la difficulté de gérer ou
d'administrer les régimes actuels et de la lourdeur de la
réglementation. On ira peut-être vers les régimes
enregistrés d'épargne-retraite, immobilisés ou autres, ou
les régimes à contribution fixe par l'employeur, qui
éviteront plusieurs problèmes qui découlent de la
réglementation que nous avons.
J'aimerais, M. le Président, si vous me le permettez, demander
à M. Bisson, qui est ici présent, d'ajouter à ces quelques
commentaires.
Le Président (M. Bélanger): M. Bisson.
M. Bisson (Richard): D'accord. Sur un autre point de vue, M. le
ministre, vous avez aussi mentionné, je crois bien, la politique des
placements. Je suis peut-être un petit peu hors sujet, Mme Harel?
Mme Harel: Ce n'est pas nécessairement la question que je
vous posais. J'en aurais eu d'autres à vous poser, mais je consens
à ce que vous nous exprimiez... Vous êtes ici pour exprimer votre
point de vue, alors je suis contente de l'entendre.
Le Président (M. Bélanger): Merci madame. Allez-y,
monsieur.
M. Bisson: Quelques points: le premier concerne la nature du
contrat. On n'a pas exprimé vraiment quel était le but de dire
que ce sera un contrat à compter de telle date. Deuxièmement,
pour aider les PME, est-ce que ça signifie que si on a un gestionnaire
professionnel dans le domaine, c'est suffisant pour répondre aux
exigences et critères des politiques de placement, selon les
règles de l'art que M. le ministre a mentionnées?
Autre chose, concernant les surplus, M. le ministre, vous avez
mentionné qu'il y aurait des consultations, disons dans les prochains
mois, et que le moratoire serait maintenu un petit peu indéfiniment,
jusqu'à la prise de décision. Or, quand on voit le projet de loi,
il est mentionné qu'il faut que ce soit prévu dans les
modifications apportées au texte des règlements. Qu'est-ce qui
arrive au point de vue de l'utilisation du surplus quant à
l'exonération des cotisations? On veut savoir si ça aura une
portée rétroactive.
Vous avez également fait des commentaires concernant le fait que
ce serait peut-être considéré comme un salaire
différé, je ne sais pas; donc, si c'est un salaire
différé ça laisse peut-être présager la
façon dont vous allez considérer les surplus et à qui ils
appartiennent. On parle de la nature du contrat et de quelles en sont les
parties. D'ici à la fin de 1990, on voit que le texte doit mentionner
comment prévoir l'utilisation du surplus. Est-ce que ça a une
portée rétroactive? Est-ce qu'indirectement, à la fin de
1990, si le moratoire n'est pas levé et que les consultations ne sont
pas terminées, dans les textes, on devra déjà, entre
parties peut-être non mentionnées, avoir décidé
comment utiliser le surplus, alors qu'on devrait plutôt savoir à
qui appartient le surplus avant? Pourquoi les textes sont-Us silencieux alors
qu'il y en a d'autres qui ne le sont pas?
Mme Harel: M. le Président, je ne sais pas, le ministre
profitera peut-être des mots de remerciement pour répondre
à ces questions. J'allais justement vous poser cette question sur les
congés de contribution patronale. C'est quand même une concession
importante. Je pense que c'est l'article 137 du projet de loi. Le ministre dit:
On ne parle pas des surplus, mais, dans le projet de loi, il accorde, avec
l'excédent d'actifs, le congé de contribution patronale. C'est
déjà une manière d'en disposer qui est
décidée. Évidemment, ce matin, à 7 heures, en
écoutant le bulletin de nouvelles, je me suis dit: Non, il y a une
confusion terrible. On annonçait à la radio qu'il y avait
maintenant un comité de retraite paritaire, alors que ça n'a rien
à voir parce que
ce que le ministre a finalement décidé, c'est que le
comité de retraite, au sein duquel les retraités ou les
employés sont minoritaires, pourrait confier la gestion - je pense que
tout le monde est assez favorable à ça - à ceux qui la
font déjà, qui sont déjà experts en la
matière et qui pourraient la reconduire en la continuant. Mais la
question de fond n'est pas de savoir qui doit gérer, mais qui doit
décider de cette gestion. Est-ce que le comité sera paritaire ou,
finalement, est-ce que ce sera un comité où les travailleurs et
les employés feront de la figuration, comme c'est le cas dans le projet
de loi présentement? L'astuce, c'est évidemment un comité
de retraite qui sera minoritaire en termes de représentation des
employés et qui va tout simplement décider de continuer,
"business as usual", ce qui se fait présentement.
Le Président (M. Bélanger): En conclusion.
Mme Harel: En conclusion, je veux évidemment vous
remercier. C'est vraiment trop court. Je pense qu'on a intérêt,
sur des questions aussi fondamentales que celles-là, à discuter
plus longuement, mais je veux vous remercier, M. Létourneau, M. Bisson
et Mme Marchand. Je sais que vous avez travaillé, comme directrice de la
recherche, à l'élaboration et à la rédaction du
projet et je crois qu'il y aura aussi une autre période où on
pourra vous consulter sur les surplus. J'espère que la consultation ne
sera pas privatisée et que, comme c'est un débat public et que
cela concerne l'ensemble de notre collectivité, ce sera en commission
également.
Le Président (M. Bélanger): M. le ministre, en
conclusion.
M. Bourbeau: M. le Président, dans une seule phrase, je
voudrais bien conclure, mais je pense que je vais manquer de souffle, en disant
premièrement que - je réponds rapidement - puisque l'objectif de
l'assemblée annuelle est de rendre compte, étant donné que
les administrateurs sont des gestionaires, cela peut se faire par petits
groupes. Mais il n'est pas essentiel qu'il y ait seulement une
assemblée; il peut y en avoir plusieurs dans chacune des usines, comme
la Domtar l'a fait, nous dit-elle. Donc, l'objectif est vraiment d'informer les
travailleurs.
En ce concerne les surplus d'actifs, il ne faut pas présumer que
le gouvernement va, dès maintenant, prendre une décision dans un
sens ou dans l'autre. La vérité ne se situe jamais aux
extrêmes et la consultation indiquera dans quel sens le gouvernement
devra aller quant à la disposition des surplus d'actifs, quant à
la propriété, quant à la question des congés de
cotisations, etc. Les jeux sont ouverts, comme on dit, et nous consulterons
avant de présenter un projet.
En ce qui concerne les comités paritaires, non, ce ne sera pas
des comités paritaires, je l'ai dit hier et je le répète.
Ce ne sera pas non plus des comités consultatifs, les travailleurs
seront présents et les retraités aussi, s'ils le veulent, mais
notre intention n'est pas d'en faire des comités paritaires et si les
journaux ou les médias ont repris ça, c'est qu'ils avaient
entendu le point de vue de la députée de Maisonneuve qui a
parlé, hier, au nom du gouvernement à quelques reprises. Alors,
il y a peut-être eu confusion là.
Mme Harel: Voyons donc! Franchement! La confusion vient de vos
propos, M. le ministre, vraiment.
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît!
On va laisser M. le ministre conclure.
Mme Harel: Pas de transfert de responsabilité.
Le Président (M. Bélanger): S'il vous
plaît!
M. Bourbeau: J'ai été très clair hier,
à deux reprises, devant les travailleurs et devant les patrons; ce ne
sera pas des comités paritaires. En ce qui concerne la politique de
placement dont vous parliez tout à l'heure - et je termine un peu
là-dessus - l'article 165 est clair: il doit y avoir une politique de
placement au comité de retraite, mais l'article dit bien que la
régie peut en autoriser la simplification. Alors, s'il s'agit d'un
très petit fonds de retraite avec une petite compagnie, la Régie
pourra certainement simplifier un peu la procédure dans ces
cas-là.
Finalement, je termine en vous remerciant de votre contribution
importante aux débats et en vous disant que, s'il y a des questions - et
je sais qu'il y en a - qui n'ont pas obtenu de réponse parce que le
temps nous a manqué, je vous incite à communiquer avec nous ou
avec la Régie qui est tout à fait disposée à
reprendre la discussion avec vous sur certains aspects du projet de loi qui
feraient encore problème, de façon...
Le Président (M. Bélanger): En conclusion, M. le
ministre.
M. Bourbeau: Je suis dans la même phrase, M. le
Président. Alors, de façon à permettre de bonifier et
d'améliorer le projet de loi dans la mesure du possible. Je vous
remercie de votre contribution.
Le Président (M. Bélanger): M. le
vice-président de la Chambre de commerce du Québec, les membres
de la commission vous remercient. Un bref instant, oui.
M. Létourneau: M. le Président, simplement pour
remercier le ministre de cette dernière ouverture que nous venons
d'entendre sur la
Débats de l'Assemblée nationale 10 mai 1989
possibilité de simplification des mesures pour les PME ou pour le petit
fonds, enfin sur la possibilité, pour ceux pour qui cela
représente un fardeau vraiment nuisible au rendement du fonds, que cela
soit simplifié.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M.
Létoumeau. La commission remercie la Chambre de commerce du
Québec de sa participation et invite à la table des
témoins l'Association de bienfaisance et de retraite des policiers de la
Communauté urbaine de Montréal qui est représentée
par M. Jacques Perron, M. Pierre Lenoir et Me Louise-Andrée
Gauthier.
Nous allons suspendre quelques brefs instants pour une pause sanitaire,
comme on dit.
(Suspension de la séance à 11 il 10)
(Reprise à 11 il 17)
Le Président (M. Bélanger): Je demanderais à
chacun de bien vouloir reprendre sa place. Nous allons reprendre les travaux.
Vous excuserez Mme la porte-parole de l'Opposition qui est en entrevue
derrière, pour quelques instants. On sait quand ça commence, mais
on sait rarement quand ça finit. Mais pour ne pas prendre de temps indu
à la commission, nous allons commencer. Soyez assurés qu'elle a
lu votre mémoire et qu'elle l'a bien commenté et que, tout
à l'heure, elle saura vous poser des questions tout à fait
pertinentes.
J'inviterais M. le ministre à reprendre sa place, que nous
reprenions nos travaux. Nous recevons présentement à la table
l'Association de bienfaisance et de retraite des policiers de la
Communauté urbaine de Montréal. Je vais vous expliquer un peu nos
procédures: vous avez un maximum de vingt minutes pour la
présentation de votre mémoire. Il y a une période de
discussion avec les parlementaires et, chaque fois que vous devez prendre la
parole, je vous demande, s'il vous plaît, de bien vouloir vous
identifier, ceci pour les fins de transcription au Journal des
débats. Cela nous aide beaucoup. M. le ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, je ne sais pas ce que vous
avez convenu avec l'Opposition. J'avais convenu avec l'Opposition officielle
qu'on attendrait le retour de Mme la députée de Maisonneuve avant
de reprendre les débats. Je ne voudrais pas manquer à ma parole.
Est-ce que vous avez convenu autrement avec elle?
Le Président (M. Bélanger): Non, M. le ministre, et
cela aurait été bien mieux qu'elle convienne avec le
président.
M. Bourbeau: Je comprends, mais il y avait quand même un
consensus entre les deux formations politiques qu'on ne reprendrait pas la
discussion avant que l'Opposition officielle soit représentée. Je
ne voudrais surtout pas qu'on dise que j'ai manqué à une parole
que j'ai donnée tout à l'heure à Mme la
députée de Maisonneuve.
Le Président (M. Bélanger): M. le ministre, vous
mettrez ça sur mon dos; on va le prendre.
M. Bourbeau: Très bien!
Le Président (M. Bélanger): Mais je pense que le
recherchiste...
M. Bourbeau: Alors, vous témoignerez auprès de la
députée que j'ai tout fait.
Le Président (M. Bélanger): ...de Mme la
députée est d'accord avec nous.
Sans plus tarder, passons à la présentation de votre
mémoire. D'abord, présentez votre équipe et lisez votre
mémoire. Je vous remercie et on s'excuse de ce petit contretemps.
Association de bienfaisance et de retraite des policiers de la
Communauté urbaine de Montréal
M. Perron (Jacques): Mon nom est Jacques Perron. Je suis
président de la caisse de retraite de l'Association de bienfaisance et
de retraite des policiers de la CUM. À ma gauche, M. Claude Moses qui
est secrétaire à l'Association et, à ma droite, Me
Louise-Andrée Gauthier qui est conseillère juridique à
l'Association. Avant de commencer et d'entrer dans le vif du sujet, j'aurais
deux remarques préliminaires à faire: j'aimerais préciser
que les membres du conseil d'administration de l'Association qui
représente la communauté et la ville de Montréal ne
partagent pas nécessairement les recommandations qui sont contenues au
mémoire et que la Fraternité des policiers de la
Communauté urbaine de Montréal ainsi que la
Fédération des policiers du Québec partagent amplement les
recommandations qui sont dans notre mémoire.
Il est évident qu'il y a certains irritants dans la loi 116. Un
des irritants qui semble important, c'est la composition du comité de
retraite et le fait que les employés soient représentés
à ce comité. C'est dans ce contexte que j'aimerais vous lire
l'introduction et vous faire la démonstration que l'implication des
travailleurs dans un comité de retraite, ça existe, ça va
continuer fort probablement d'exister et cela a aussi réussi.
En 1892 - ce n'est pas d'aujourd'hui - était sanctionnée
une loi constituant en corporation l'Association de bienfaisance et de retraite
de la police de Montréal, fondée dans le but de secourir ses
membres dans le cas de maladie ou d'incapacité de travailler, de leur
accorder les gratifications et pensions pour services rendus, de procurer des
secours et de conférer d'autres avantages à leurs veuves, enfants
ou héritiers.
De sa création jusqu'en 1954, l'Association fut
administrée exclusivement par les policiers sous la présidence du
directeur du service de police. En 1955, à la suite de
négociations entre les policiers et la ville de Montréal,
l'administration en fut confiée à un conseil de direction qui
était composé de six policiers actifs, un policier
retraité et deux représentants de la ville de Montréal.
Financée par les seules contributions des policiers jusqu'en 1929, la
caisse de retraite a poursuivi les objectifs qu'on lui avait fixés, son
actif étant alors constitué des contributions des policiers, de
celles versées par la ville de Montréal, ainsi que des revenus
générés par celles-ci.
La création de la Communauté urbaine de Montréal,
en 1969, ainsi que l'intégration des forces policières, en 1972,
commandèrent un réaménagement des structures
policières et la création d'un régime de retraite pour
tous les policiers de la Communauté urbaine. Le 15 décembre 1977,
le gouvernement du Québec a donc sanctionné la Loi relative
à l'Association de bienfaisance et de retraite des policiers de la
Communauté urbaine de Montréal désignant l'Association
existante sous son nom actuel. Cette loi a remplacé l'ancienne loi sans
interrompre l'existence corporative de l'Association et lui confère le
pouvoir et le droit d'administrer et de gérer le régime de rentes
des ex-policiers de Montréal et le régime de rentes des policiers
de la Communauté urbaine de Montréal.
Au 31 décembre 1988, l'Association comptait parmi ses membres
4495 policiers actifs et 2749 prestataires - je dois ajouter que les membres
actifs de l'Association comprennent aussi les membres de la direction du
service de police - soit des policiers retraités, des conjoints
admissibles ou des orphelins. A cette même date, l'Association
gérait un actif d'une valeur de 1 023 000 000 $ au marché. Elle a
versé, au cours de l'année 1988, des prestations et des
remboursements à ses membres pour plus de 43 000 000 $.
La direction générale. L'Association est
administrée par un conseil d'administration composé de douze
personnes, dont six membres sont élus par les policiers actifs, un
membre est élu par les policiers retraités et cinq membres sont
nommés par la Communauté urbaine de Montréal. La caisse
est donc administrée en majorité par des employés.
Les opérations dites quotidiennes des régimes que
gère l'Association sont assurées par ses officiers, soit six
policiers dégagés à temps plein qui sont parmi les membres
du conseil d'administration. Les réunions du conseil ont lieu au moins
une fois par mois et un rapport complet de la gestion de la caisse y est
présenté. L'Association tient des livres et des dossiers montrant
en détail les opérations des régimes; ces livres sont
examinés au moins une fois par exercice financier par les
vérificateurs que le comité exécutif de la
Communauté urbaine désigne à l'Association, mais ils sont
payés par cette dernière.
Jusqu'à la terminaison du régime de rentes de
l'Association de bienfaisance et de retraite de la police de Montréal,
le vérificateur de la ville de Montréal a également un
droit de regard, d'inspection et de vérification.
Le comité de placement. En plus d'administrer deux régimes
de retraite, l'Association agit également comme fiduciaire des fonds qui
lui sont confiés. En effet, l'article 4 de sa loi constitutive stipule
qu'aux fins de la Loi sur les régimes complémentaires de retraite
la caisse de retraite de chacun de ces régimes forme un patrimoine dont
l'administration est confiée à l'Association qui, dès
l'entrée en vigueur de cette loi, en est saisie comme fiduciaire. Une
documentation écrite complète contenant la politique et les
objectifs de placement de l'Association est élaborée et mise
à jour régulièrement par le comité de placement, de
concert avec des experts retenus par le conseil d'administration après
recommandation dudit comité.
Le comité des placements se compose du président de
l'Association et de deux personnes choisies parmi les membres du conseil
d'administration de l'Association et nommées par résolution du
comité exécutif de la Communauté urbaine. Le comité
des placements est donc composé en majorité des
représentants de l'employeur, et je fais une remarque: en aucun temps il
n'y a eu une décision majoritaire au comité des placements
concernant la politique, les objectifs et les stratégies de placement.
Les décisions prises par le comité des placements doivent faire
l'objet d'un rapport écrit au conseil d'administration de l'Association
qui est chargé de mettre en application la politique et les objectifs de
placement contenus audit rapport jusqu'à ce qu'il soit modifié.
Les décisions de placement sont prises à l'interne par les
professionnels du service des placements, qui tiennent compte des
paramètres de la politique et des objectifs de placement, avec
l'assentiment de la direction générale.
Le comité des prêts hypothécaires. Ce comité,
créé par résolution du conseil de l'Association, est
chargé de statuer sur les demandes de prêts hypothécaires
faites par les membres de l'Association, conformément aux normes
d'octroi qui ont été déterminées par le conseil
d'administration.
L'Association exerce ses activités par le biais d'une
équipe qui assure la permanence de divers services. Sous la
responsabilité des officiers, cette équipe est constituée
de 33 cadres et employés permanents qui font rapport au
président-directeur général qui, à son tour, fait
rapport au conseil d'administration.
Le service des rentes est chargé de déterminer le droit au
paiement d'une rente en vertu des dispositions des régimes, d'en
effectuer le calcul et d'en assurer le versement. Il est secondé dans
son travail par une firme d'actuai-
Débats de l'Assemblée nationale 10 mai 1989 res-conseils,
notamment pour ce qui est de l'informatique. Le service des rentes fournit
également aux futurs bénéficiaires ainsi qu'aux
pensionnés toutes les informations qui les concernent.
Tel qu'il a été dit précédemment, le service
des placements assure l'exécution des décisions prises par le
comité de placement et toutes les opérations de l'Association en
matière de placement sont effectuées à l'interne par ce
service.
Le service des finances a la responsabilité du contrôle
financier des opérations de l'Association. Quant aux évaluations
actuarielles triennales des engagements des régimes de rentes
administrés, elles sont effectuées par les actuaires que la
Communauté urbaine désigne. La trésorerie effectue
l'administration complète des prêts hypothécaires aux
membres de l'Association. À ce jour, environ 3000 prêts sont
administrés par la trésorerie.
Le secrétariat fournit, entre autres, le soutien des
activités générales de l'Association et il assume la
responsabilité de l'information aux membres.
Ceux qui présentent ce mémoire sont les policiers membres
du conseil d'administration, élus par les participants. Ils sont aussi
ceux qui assument la gestion quotidienne des affaires de l'Association.
À notre connaissance, la caisse de retraite des policiers de la
Communauté urbaine de Montréal est la seule caisse de retraite au
Canada - je parle d'une caisse majeure - administrée en majorité
par des employés. En 97 ans, la qualité de cette administration
n'a jamais été contestée. Ce résultat ne peut
être obtenu que par la mise en place d'une structure corporative
adéquate et l'établissement de règles permettant un
équilibre sur le plan des décisions fondamentales
d'administration et de placement.
Donc, la position des auteurs du présent mémoire est sans
équivoque et appuie des intérêts les participants qui
croient pouvoir administrer leur caisse de retraite. C'est une chose qui est
réalisable, elle se réalise depuis 97 ans déjà. Je
pense qu'on a énormément de succès, tant pour ce qui est
de la qualité de nos professionnels qui nous entourent à la
caisse que des rendements qui sont aussi générés sur les
placements qui sont faits par la caisse.
Je voudrais aborder les questions un peu plus techniques, ce qui fait
partie du mémoire. À l'article 14, le premier alinéa de
cet article devrait être modifié afin de permettre à la
Régie des rentes du Québec d'accorder un délai plus long
pour la mise par écrit d'un régime de retraite. Il est
prévu 90 jours. Il est évident que - cela nous est arrivé
à plusieurs occasions - pour écrire les textes du régime
de retraite, il nous faut trois, quatre, six mois. Pour le dernier texte en
1984, il nous a fallu six mois pour l'écrire. Donc, U y aurait lieu
effectivement que la Régie puisse nous accorder des délais plus
longs pour écrire les textes des régimes.
D'autre part, le paragraphe 2° de l'alinéa 2 du même
article devrait comprendre rénumération de tous les
administrateurs autorisés en vertu de l'article 144. Il en manque
quelques-uns, dont nous.
Les articles 22 et 23. Ces articles rendent possible la transformation
du type de régime sans attribution de la pleine réserve. Dans le
cas de transformation d'un régime à prestations
déterminées en un régime à cotisations
déterminées, nous recommandons que soit acquise aux participants
la réserve capitalisée en fonction de l'existence
perpétuelle du régime de retraite. Il est certain que beaucoup de
gens, compte tenu de la loi 116 et compte tenu de la réforme fiscale sur
les régimes de retraite ou sur les prestations de retraite de M. Wilson,
vont trouver un prétexte pour transformer des régimes en
régimes à cotisations déterminées. Il est
évident - d'ailleurs, c'est marqué dans le projet de loi 116 -
que si l'évaluation peut se faire sur une base de terminaison de
régime, généralement, il devrait se dégager des
surplus. Pour ces surplus-là, il n'y a pas tout à fait de
dispositions à savoir comment ils doivent être attribués,
mais au moins, s'il y a modification de régime, ce surplus devrait
retourner aux participants. (11 h 30)
Enregistrement d'un régime de retraite et de ses modifications.
Le paragraphe 3° de l'article 24 devrait être modifié de
façon à prévoir que le consentement écrit des
employés ou de leur représentant ou tout autre consentement
prévu au régime de retraite dans le cas de modification est
également requis.
L'article 26. Dans le cas où un régime de retraite est
établi ou modifié par entente qui ne fait pas partie de la
convention collective, mais qui est négociée par un syndicat, il
devrait y avoir la même restriction qui est appliquée. C'est le
dernier alinéa de cet article.
Le régime de retraite des policiers de la Communauté
urbaine ne fait pas partie de la convention collective, donc il y a une
exclusion pour les régimes qui font partie de la convention collective
en ce qui concerne l'information aux participants. Cette exclusion devrait
aussi s'appliquer dans le cas d'un régime négocié par un
syndicat, même s'il ne fait pas partie de la convention collective.
L'article 34. Nous recommandons que les conditions prévues aux
paragraphes 1° et 2° de l'alinéa 1 de l'article 34 soient
exigées non pas pour chacune des deux années consécutives,
mais pour la moyenne de ces deux années. Il est possible qu'un
travailleur puisse faire 600 heures une année, 1500 heures une autre
année et 600 heures une autre année; à ce
moment-là, il ne pourrait jamais participer à un régime de
retraite. Donc, nous recommandons que ce soit la moyenne des deux années
consécutives qui compte pour qu'il puisse participer au régime de
retraite.
L'article 45. Nous recommandons que la méthode de calcul des taux
de rendement ainsi 10 mai 1989
Commission permanente
que la méthode d'application du taux d'intérêt
mensuel puissent être également déterminées par les
dispositions du régime de retraite. Il est prévu que c'est
l'actuaire ou le comptable qui prévoit la méthode et la
façon de les calculer. Dans le régime de retraite des policiers
de la Communauté urbaine, il est déjà prévu comment
se calcule l'intérêt et comment il est attribué. C'est le
taux de rendement de la caisse qu'on a choisi à l'époque. Il
faudrait faire intervenir l'actuaire ou le comptable pour qu'il nous donne la
méthode. On l'a déjà dans le régime de retraite. Je
pense que ça pourrait être ajouté facilement.
Remboursement et prestations. Le paragraphe 1° du premier
alinéa de l'article 59 utilise l'expression "et des droits qui en sont
dérivés". Nous aimerions connaître la définition des
droits qui en sont dérivés. Je pense qu'il y aurait lieu de
préciser ou de marquer une définition un peu plus claire parce
que, dans notre esprit, les droits qui en sont dérivés... Par
exemple, une rente au conjoint est un droit qui est dérivé de la
rente du participant. Une rente d'invalidité peut être un droit
dérivé de la rente du participant. Donc, probablement qu'il y
aurait lieu de clarifier cette partie, soit les droits qui en sont
dérivés.
L'article 72. L'âge normal de la retraite devrait être
fixé à 65 ans au lieu de 12 mois après 65 ans, donc
à 66 ans. Il s'agit là de l'âge utilisé pour la
majorité des régimes de retraite ainsi que pour le régime
des rentes du Québec.
L'article 88. Cela nous crée un problème important dans le
régime de retraite. Le régime établit déjà
une rente au conjoint à 50 % de la rente du cotisant. On partage
l'orientation du gouvernement lorsqu'il dit que ça devrait être
à 60 %, à l'exception que la détermination du conjoint,
selon ce qui est prévu dans le projet de loi 116, est faite au moment
où la rente est servie. Je comprends bien l'objectif que poursuivait le
gouvernement, à savoir de ne pas créer de coûts
supplémentaires dans le régime. Donc, il pourrait y avoir
réduction de la rente du cotisant et on verserait 60 % de la rente au
conjoint. Je pense qu'il pourrait être ajouté au projet de loi que
si un régime prévoit déjà que la rente au conjoint
satisfait à la loi, à savoir 60 %, celle-ci pourrait être
déterminée à toute autre date et, en l'occurrence, chez
les policiers, elle est déterminée au décès du
policier. C'est le conjoint qui existe au moment du décès du
policier. Donc, si un régime prévoit une rente de 60 %, il
pourrait aussi déterminer à quel moment cette rente est
versée. Je ne pense pas que ça pourrait faire des objections.
Les articles 96 et 263. Je pense qu'il y a peut-être certains
problèmes. Il faudrait probablement que les articles 263 et 96 soient
clarifiés, c'est-à-dire que vous, M. le ministre, en tant
qu'ancien ministre des Affaires municipales, puisque c'est un
élément qui est important en ce qui concerne les ententes de
transfert, vous demandiez que ce soit retiré de l'article 465 de la Loi
sur les cités et villes; mais, à notre avis, cela ne crée
pas une obligation aux municipalités, en vertu de la loi des
régimes complémentaires, d'accorder aux participants aux
régimes des municipalités le droit de transfert à la seule
demande du participant. il y aurait lieu, je pense, d'avoir tout simplement une
clarification de cet article.
À l'article 105, l'administrateur devrait avoir l'obligation de
fournir à chaque participant ou travailleur admissible le texte
intégral des dispositions du régime de retraite et de ses
modifications et non un simple sommaire écrit. Dans ce contexte, il a
aussi souvent été fait mention des assemblées qui sont
prévues au projet de loi 116. À l'Association, depuis nombre
d'années - de toute façon, depuis l'existence du régime de
retraite - il se fait une assemblée générale annuelle.
Le Président (M. Bélanger): Je vous inviterais
à conclure, M. Perron.
M. Perron (Jacques): De toute façon, vous avez en main le
mémoire.
Le Président (M. Bélanger): C'est toujours trop
court, je le sais.
M. Perron (Jacques): J'aurais aimé continuer. C'est vrai
que 20 minutes, ce n'est pas long. On va conclure.
Dans l'ensemble, nous croyons que ce projet de loi sur les
régimes complémentaires de retraite constitue un projet de loi
adéquat dans la mesure où le gouvernement entreprendra une
consultation publique en vue de légiférer ultérieurement
sur la question des surplus et sur celle de l'indexation. Merci bien.
Le Président (M. Bélanger): Merci, M. Perron. M. le
ministre.
M. Bourbeau: Qu'est-ce qui se passe? Le Président (M.
Béianger): C'est à vous.
M. Bourbeau: Ah bon! Je ne croyais pas que vous m'aviez
donné la parole, M. le Président. Je pense que c'est avec
beaucoup d'humilité qu'on aborde le mémoire de l'Association de
bienfaisance et de retraite des policiers de la CUM, étant donné
la très grande expérience de cet organisme dans la gestion des
fonds de retraite, puisqu'on nous dit que c'est l'ancêtre des fonds de
retraite québécois. Il y a beaucoup à apprendre et,
effectivement, je me suis rendu compte en lisant le mémoire et en en
discutant avec les gens de la Régie que vous avez apporté une
foule d'observations qui vont nous être très utiles dans notre
démarche pour perfectionner le projet de loi.
Vous n'avez pas eu le temps de terminer,
Débats de l'Assemblée nationale 10 mai 1989 c'est un peu
frustrant, je dois le dire. Votre cours magistral était
extrêmement intéressant mais je peux vous assurer que, même
si vous n'avez pas eu le temps de terminer, tous les points qui ont
été apportés dans votre mémoire sont en train
d'être étudiés ou ont même déjà
été étudiés par la Régie et un grand nombre
des recommandations que vous faites vont être incorporées au
texte.
Je ne sais pas, je pourrais peut-être, comme cela, regarder vos
remarques concernant l'article 59: définir plus clairement l'expression
"les droits qui en sont dérivés", la valeur des droits.
Effectivement, on apportera des précisions à ce sujet.
À l'article 72, fixer à 65 ans l'âge de la retraite
plutôt qu'à 66 ans. À la suite de vos
représentations... Cela avait été fait dans le sens
d'uniformiser avec l'Ontario, mais on va regarder cela de nouveau et il est
possible qu'on revienne à l'ancienne définition.
À l'article 88, le droit à la rente au conjoint devrait
s'éteindre au décès du conjoint et on devrait recalculer
la rente du participant. On est en train de regarder de nouveau tout ce
problème pour décider si on peut permettre de déterminer,
au moment du décès du participant, à l'égard du
conjoint qui est survivant à ce moment-là... On va regarder cela
de nouveau. Il est possible qu'on se rende à vos suggestions.
À l'article 96, le transfert de droits et d'actif, permettre le
droit au transfert à la demande exclusive du participant d'un
régime municipal... On va considérer cela aussi d'une
façon très favorable.
En fait, je pourrais faire le tour d'un grand nombre d'observations que
vous avez faites et, dans bien des cas, cela demandera une précision;
vous avez bien raison de nous le signaler. À l'article 14, par exemple,
permettre à la Régie d'accorder un délai
supplémentaire, je pense qu'effectivement vous avez raison. On devrait
le faire et on le fera. D'une façon générale, il est
évident que l'exercice est utile.
L'Intérêt sur les cotisations: la méthode de calcul
pourrait être déterminée dans le régime plutôt
qu'on la fasse déterminer par l'actuaire ou le comptable. Effectivement,
vous avez raison, et nous avons l'intention d'amender la loi en
conséquence pour permettre que le régime lui-même
détermine la méthode de calcul.
Je voudrais revenir à la question des surplus. Il est entendu que
les surplus sont gelés tant que le moratoire n'est pas levé.
Même si un régime est modifié entre-temps, il n'est pas
question de permettre la sortie de l'excédent de l'actif, si tant est
qu'il y en avait, tant qu'une décision finale n'aura pas
été prise relativement à toute la question des
surplus.
Mme Harel: Sauf s'il y a entente entre les parties.
M. Bourbeau: Bien sûr. D'ailleurs, la loi 95 le
mentionnait. Mais je tiens pour acquis qu'on serait dans une situation
où il n'y aurait pas d'entente entre les parties.
Mme Harel: Hygrade, dernièrement...
M. Bourbeau: Le président me signale que c'est assez rare
qu'il y ait une entente totale et absolue là-dessus.
Mme Harel: Ah! il y a des cas!
M. Bourbeau: Allez-y. Vous avez une observation à
faire?
Mme Harel: Je vous laisse continuer, M. le ministre.
M. Bourbeau: À propos des surplus, je pense que la
position du gouvernement est claire, même si elle n'est pas connue. Nous
n'avons pas l'intention de bouger tant qu'une consultation plus large n'aura
pas eu lieu. D'ici là, c'est le statu quo, le moratoire se poursuit. Il
est prévu jusqu'au 1er janvier 1990 mais, si jamais nous n'étions
pas arrivés à une décision à cette date, rien ne
dit que nous ne pourrions pas prolonger le moratoire, comme l'Ontario l'a fait,
d'ailleurs.
Je pense que tous et chacun peuvent dormir tranquilles, personne ne va
s'enfuir avec la caisse et les surplus vont demeurer là tant qu'on
n'aura pas pris une décision finale.
Maintenant, concernant la question de l'assemblée annuelle,
plusieurs participants ont apporté des commentaires relativement
à l'obligation de tenir une assemblée annuelle. Je sais que vous
avez un régime exemplaire en ce sens que non seulement les participants
sont bien informés, mais ils sont très actifs dans la gestion.
Est-ce que vous avez des commentaires additionnels à faire au sujet de
l'opportunité de tenir une assemblée annuelle? Est-ce que vous
trouvez que c'est la meilleure façon ou si on devrait procéder
d'une façon différente?
M. Perron (Jacques): Vous avez peut-être fait un petit
lapsus tout à l'heure en parlant des actionnaires; par la suite, vous
avez parlé de participants. Je considère que les participants
à une caisse de retraite, ce sont les actionnaires de la caisse de
retraite. Fondamentalement, lorsqu'une entreprise fait son assemblée
générale annuelle, elle rend compte de son administration
vis-à-vis de ses actionnaires. C'est dans le même esprit, je
pense, qu'il faut voir l'assemblée générale annuelle, de
rendre compte de son administration vis-à-vis des participants, de leur
permettre, surtout, de pouvoir comprendre ce qu'est un régime de
retraite, comment ça se calcule, de parler un peu d'évaluation
actuarielle et de parler des états financiers de la caisse de retraite.
D'ailleurs, tous les membres reçoivent un rapport annuel avec les
états financiers, avec la capitalisation qu'il y a dans le
régime, avec 10 mai 1989
Commission permanente
tous les retraités, avec les placements que l'on fait - pas toute
la liste des placements, parce qu'avec 1 000 000 000 $, ça en ferait
beaucoup - la répartition de notre actif, le taux de rendement que la
caisse a eu. Ce sont des informations essentielles, au même titre qu'une
entreprise donne des informations à ses actionnaires.
J'entendais certaines objections selons lesquelles il y aurait peu de
participants. Écoutez, lorsque Bell Canada fait son assemblée
annuelle avec le nombre de millions d'actionnaires, ils ne sont pas tous
là, c'est certain. C'est le même phénomème qui se
produit chez nous, lorsqu'on fait des asemblées générales
annuelles, mais j'ai vu des assemblées de 2000 personnes. Il y a eu des
assemblées de 500, 300, 200 ou 75 personnes. C'est évident que,
dans ce contexte, c'est la confiance. Lorsque les gens ont confiance en leur
administration, ce ne sont pas des assemblées houleuses, ce ne sont pas
des assemblées syndicales. Il faut distinguer l'administrateur de la
caisse, du syndicat et de l'employeur. C'est une entité
différente qui est là pour rendre compte de son administration et
qui fait en sorte de protéger les droits des individus qui,
éventuellement, vont prendre leur retraite. C'est ça qui va leur
assurer la sécurité, et c'est fondamental. Je m'excuse d'aller
trop loin, de m'étendre.
M. Bourbeau: Cela va. Une observation seulement: en ce qui
concerne la question de la participation des participants, comme on les
appelle, ou des employés, des travailleurs, à la gestion et
à l'administration du fonds de retraite, la loi prévoit des
règles minimales. Rien, absolument rien n'empêche l'employeur et
les travailleurs de décider de faire participer davantage les
travailleurs. On pourrait certainement avoir des comités paritaires, si
tel est le désir des parties. On pourrait même avoir une caisse
où les travailleurs seraient majoritaires au comité de retraite,
si tel était le désir des parties. La loi impose des
règles minimales: il doit nécessairement y avoir au comité
de retraite un représentant des participants et un représentant
des retraités; c'est le strict minimum, mais on peut ajouter à
ça. Donc, je pense qu'il y a beaucoup de flexibilité dans la loi
pour permettre le genre de gestion que l'employeur et les travailleurs voudront
bien se donner. (11 h 45)
M. Perron (Jacques): Est-ce que je pourrais juste passer une
petite remarque à ce sujet, M. le ministre?
M. Bourbeau: Oui, sûrement.
M. Perron (Jacques): II y a une phrase très
embêtante dans l'article 146: "avec le consentement de l'employeur".
C'est un peu paternaliste, la formation des comités de retraite. Il nous
semble très paternaliste d'écrire: "Avec le consentement de
l'employeur". C'est comme si l'employeur avait le droit d'augmenter
effectivement le nombre de participants à la gestion du régime de
retraite. J'imagine assez bien un arbitre qui arbitrerait une convention
collective - je m'avance peut-être au plan juridique - et qui pourrait
dire: Non, je me cache derrière la loi 116 pour dire qu'effectivement
ça prend le consentement de l'employeur. Donc, cet aspect de la
participation des participants au comité de retraite n'est pas
arbitraire, parce que la loi 116 dit que c'est avec la permission de
l'employeur. J'ai l'impression qu'on pourait utiliser une autre
phraséologie pour dire: "après entente entre les employés
et l'employeur" ou quelque chose du genre. Ça m'apparaît
relativement paternaliste.
M. Bourbeau: Effectivement, vous avez raison. On va
réécrire cet article et on va faire sauter la phrase
incriminante.
Le Président (M. Leclerc): Mme la députée de
Maisonneuve.
Mme Harel: Merci, M. le Président. Je veux saluer M.
Perron, Mme Gauthier et M. Moses. Il semble qu'habituellement, pour
accéder à la Régie des rentes, il faut faire ses classes
chez vous. Vous êtes encore jeune M. Perron.
M. Bourbeau: ...le président de la Régie aussi.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Harel: Plus sérieusement, votre mémoire est
évidemment, comme le soulignait le ministre, vraiment une étude
substantielle, analytique, méticuleuse du projet de loi 116 qui va
certainement nous servir au moment de l'étude article par article, si on
peut y arriver avant la fin de la présente session. Il y a certains
aspects, je les relève rapidement, qui apportent une réponse
pragmatique à des difficultés qui ont été
soulevées depuis le début des travaux, notamment celle des 700
heures successives pendant deux années. Vous avez tout à fait
raison, parce que nombreuses sont les recommandations des groupes de femmes, en
particulier les travailleuses, pour qui il est difficile de satisfaire à
ces exigences de 700 heures chaque année. C'est une façon
d'établir une moyenne qui peut permettre, au cours d'une année,
de prendre du temps partiel et l'autre année, de faire du temps plein.
Alors, c'est vraiment truffé de recommandations, y compris au sujet de
l'assemblée générale annuelle. Avec raison, vous rappeliez
qu'il y a des périodes où il y a plus de participation, d'autres
où il y en a moins, et cela dépend, j'imagine, de bien des
facteurs, y compris du nombre de policiers qui sont sujets à prendre
leur retraite une année, ou qui s'y préparent, ou qui commencent
à l'envisager plus sérieusement.
Débats de l'Assemblée nationale 10 mai 1989
Cela dit, vous avez, à bon droit, regretté dans votre
mémoire que la notion de gestion paritaire qui était contenue
dans le projet de loi 58 ait été abandonnée en cours de
route et vous signaliez que l'article 146 avait dans sa rédaction un
aspect paternaliste. Le ministre vient de vous dire qu'il va corriger. Il va
peut-être corriger la rédaction, mais va-t-il modifier le fond? Je
pense que c'est sans doute à cette question qu'on aimerait avoir une
réponse également. Depuis le début de nos travaux, il nous
dit: Non, ce ne sera pas paritaire. Dans votre mémoire, j'avais
l'impression que vous faisiez la démonstration inverse de ce qu'il
propose, c'est-à-dire que pour vous, c'est paritaire, mais le
comité des placements est composé en majorité de
représentants de l'employeur. Dans le projet de loi, il proposait que la
gestion de l'employeur soit exclue, mais que le comité ne soit pas
paritaire. Pourquoi d'abord avoir retenu ce comité des placements
majoritairement composé d'employeurs dans le cas de l'association que
vous représentez?
M. Perron (Jacques): Cela a été une question
d'équilibre. Au conseil d'administration, les policiers sont
majoritaires. Donc, il y a cinq représentants de la communauté et
on est sept, incluant le retraité. Dans ce contexte-là, c'est une
question d'équilibre à l'intérieur. Lorsque des politiques
sont adoptées par le comité des placements, le conseil doit voir
à ce que ces politiques soient mises en application. D'autre part, la
gestion quotidienne ne se fait pas par le comité des placements. Il y a
une autorité directe des administrateurs de la caisse, des officiers de
la caisse, sur les placements directs qui se font.
Dans ce contexte-là, c'est toute une question d'équilibre
à l'intérieur d'avoir permis - et ça, c'est en
négociation - que l'employeur puisse avoir une majorité au
comité des placements. D'ailleurs, il faut bien comprendre qu'H n'y a
aucune politique qui se fait au comité des placements. Les gens sont
là pour faire un boulot et pour placer les fonds de la caisse. Donc,
dans ce contexte-là, je le disais tout à l'heure, il n'y a jamais
eu de décision majoritaire et on est entourés de quatre autres
experts qui viennent un peu limiter le contrôle que l'employeur peut
avoir au comité des placements. Tout cela doit se faire selon les
règles de l'art et, à un moment donné, ces quatre experts
viennent limiter des orientations qui pourraient être définies par
les deux représentants de l'employeur. Je vous donne un exemple. Si on
nous obligeait à acheter 25 % de la caisse dans l'obligation de la
communauté, ça ne s'est jamais produit et il n'y a jamais eu ce
genre d'obligation, parce qu'on sait que les quatre experts autour de la table
s'y opposeraient. C'est évident que je m'y opposerais. Donc, il y a un
équilibre. C'est cet équilibre qu'il faut rechercher.
Mme Harel: Voilà, justement! Dans cette recherche
d'équilibre, vous dites au ministre: Non seulement la rédaction
est-elle paternaliste, mais, même s'il la modifiait, comme il vient de le
dire, pour qu'on ne lise plus "avec le consentement de l'employeur", mais "avec
l'accord du comité de retraite", il pourrait y avoir, par exemple,
d'autres membres désignés par les participants. Ce serait
peut-être une manière plus élégante de dire les
choses, mais la réalité serait la même. Le résultat
serait que le comité de retraite est majoritairement composé de
représentants de l'employeur, parce que, nécessairement - le
ministre l'a dit et répété - les participants auront droit
à un représentant des retraités, un des employés,
mais au sein d'un comité qui sera majoritairement composé de
représentants de l'employeur. Alors, c'est blanc bonnet, bonnet blanc.
Appelons ça d'une autre manière, mais la réalité
revient à dire que c'est avec l'accord de l'employeur.
Là, la grande question que je me pose, c'est: Pour obtenir son
consentement, faudra-t-il des conflits de travail? Pourquoi faire un objet de
controverse, pourquoi faire un objet de conflit, pourquoi laisser ces questions
au libre jeu des rapports de force des parties si tant est qu'on croie que
c'est finalement une question qui pourrait se régler par voie
législative?
Je ne vous pose pas la question; je la pose au ministre. J'espère
qu'il aura l'occasion d'y répondre d'ici à la fin de cette
commission. L'indexation. Quelle est la formule d'indexation du régime
chez vous?
M. Perron (Jacques): II y a trois formules différentes. Il
y a une formule pour le régime - celui de Montréal anciennement -
pour les retraités et les veuves du régime de Montréal
pour laquelle on vient d'obtenir une indexation, par voie d'entente avec la
ville de Montréal, soir 60 % de l'indice des prix à la
consommation, parce que leur offre n'était pas indexée. Dans le
régime de la CUM, l'indexation, c'est l'IPC moins un, dans le cas des
policiers qui étaient là avant le 1er janvier 1984 et, dans le
cas des policiers à compter du 1er janvier 1984, c'est l'IPC moins
trois, l'indice des prix à la consommation, moins trois. C'est toute
leur rente qui est indexée, à compter de l'âge de 49 ans et
demi.
C'est un élément... On a payé pour ça.
Écoutez, c'est fondamental. Un régime de retraite, ce sont les
employés qui paient pour ça, en fin de compte. Cela fait partie
de l'ensemble de la négociation. Lorsqu'il y a négociation, c'est
évident qu'il y a une masse salariale qui est disponible et cette masse
salariale est divisée entre divers avantages sociaux, dont le
régime de retraite. L'indexation, on l'a payée. On
débourse, on a donné des avantages qui s'appellent des
journées de maladie qui étaient monnayables en fin de
carrière et on a donné 7,5 journées de maladie pour
obtenir ces avantages d'indexation. C'est comme ça que ça se
fait, une négociation
de régime de retraite. C'est une masse qui est distribuée.
Donc, à la fin, c'est dans ce contexte qu'on dit qu'au sein d'un
comité de retraite les travailleurs doivent avoir une
représentation importante, parce que c'est leur fonds. C'est uniquement
leur fonds, et le risque qui reçoit l'appui de l'employeur est aussi un
risque qui a été négocié. Donc, dans ce contexte -
c'est d'ailleurs ça qu'on a fait comprendre à nos membres - je
pense qu'il y aurait une émeute à Montréal si jamais le
comité de retraite ou le conseil d'administration avait une composition
différente. C'est comme ça qu'ils ont grandi. C'est comme
ça qu'ils ont vécu leur caisse de retraite et, pour eux, c'est la
sécurité de l'avenir à leur retraite.
Mme Harel: Cela "responsabilise" les participants.
M. Perron (Jacques): C'est ça.
Mme Harel: C'est étonnant de voir combien la partie
patronale n'est pas consciente que, s'il n'y a pas implication de la part des
participants, il peut y avoir une résistance à considérer
tout cela comme un salaire différé. Comment l'employeur peut-il
penser agir seul dans ce domaine? De toute façon, j'ai pris note de
votre recommandation que, lorsqu'il y a modification de régime, on peut
avoir l'air d'insister sur ce genre de modification de régime de
prestations déterminées en cotisations, le surplus retourne aux
participants. Là-dessus, c'est bien noté. La question
d'indexation est importante parce que le ministre a aussi annoncé la
consultation non seulement sur la disposition des surplus, mais sur
l'indexation également. M en parie moins mais, en faisant un petit geste
comme ça, il va falloir qu'il parle. Le non-verbal n'est pas
enregistré dans le Journal des débats. Cela reste
important.
Je reviens à la question des surplus. Tantôt, quand il a
échangé des propos avec vous, il a dit qu'il ne fallait pas
s'inquiéter, les surplus étaient gelés. Il dit ça
comme si c'était une solution. Mais justement, en attendant, les
employés qui pourraient en profiter n'en profitent pas. Geler les
surplus, ce n'est pas une solution à long terme, même que le
ministre devrait avoir le goût... Ou qu'on exerce une pression sur lui
pour que ça dure le moins possible. Au fond, pendant que ça dure,
l'argent dort et il y a des gens qui n'en profitent pas. Il n'y a pas pire
situation, en tout cas, que celle des employés de Singer qui
reçoivent parfois 35 $ par mois pendant qu'il y a des millions qui
dorment devant les tribunaux, et il reste que pour les autres...
Entre-temps, il y a aussi toute la question des surplus en cours
de régime. On n'a pas à invoquer que c'est gelé pour nous
rassurer; quant à moi, cela continue de m'inquiéter que des gens
n'en profitent pas au moment où ils devraient en profiter. Le ministre
annonce une consultation sur la disposition des surplus et sur
l'indexation.
Avez-vous l'intention de participer à cette consultation?
M. Perron (Jacques): Oui.
Mme Harei: Quelles sont vos recommandations à
l'égard de la disposition des surplus et de l'indexation? Je termine
là-dessus.
M. Perron (Jacques): Bon. Je comprends un peu la position du
ministre d'attendre l'Ontario - parce que c'est en plein débat en
Ontario - nécessairement, pour essayer d'harmoniser le plus possible
avec les provinces, je comprends le ministre d'attendre que l'Ontario ait
terminé l'ensemble de ses débats. Cela ne veut pas dire
nécessairement que le Québec doit suivre l'Ontario, mais, au
moins, connaître l'ensemble des résultats.
Comme je le mentionnais tout à l'heure, je disais que dans le
régime de retraite, c'est le participant exclusivement qui paie, sous
une forme ou sous une autre, pour les surplus, s'ils se dégagent. Mais
il faut faire attention, par exemple, parce que, s'il y a des surplus qui se
créent au cours d'un exercice quant au temps de l'évaluation
actuarielle, je pense qu'il serait quand même sain de pouvoir garder en
réserve une partie de ces surplus-là au cas où, à
un moment donné, parce qu'on a vu le krach et l'effet que cela a eu sur
les caisses de retraite, pour faire en sorte de ne pas rendre la caisse de
retraite vulnérable en distribuant l'ensemble de ses surplus. D'autre
part, une fois cette réserve établie, je pense que l'ensemble des
autres surplus devrait être redistribué exclusivement aux
participants. C'est leur droit, c'est leur propriété.
Le Président (M. Leclerc): M. le ministre, en conclusion,
s'il vous plaît. Excusez-moi, j'ai inversé. C'est d'abord Mme la
députée de Mai-sonneuve, en conclusion.
M. Bourbeau: Aucun problème.
Mme Harel: Je veux vraiment remercier l'association et ses
porte-parole pour leur importante contribution aux travaux de la commission
parlementaire. Merci.
M. Perron (Jacques): Merci.
Le Président (M. Leclerc): M. le ministre.
M. Bourbeau: Puisqu'il me reste un petit peu de temps, M. le
Président, avant de conclure...
Le Président (M. Leclerc): II vous reste deux minutes.
M. Bourbeau: J'aimerais simplement dire, au sujet de la
participation à l'administration des fonds de retraite au Québec,
comparativement
avec ce qui se passe chez vous, la situation se présente
différemment. Il y a une tradition chez vous. On a un employeur public
et un fonds qui a été mis sur pied exclusivement par les
travailleurs et auquel l'employeur n'a adhéré que
subséquemment. Donc, il y avait une tradition d'administration par les
travailleurs.
La situation se présente différemment dans le reste de la
province en ce sens que, dans la plupart des cas, il s'agit d'un employeur
privé qui a lui-même mis sur pied son fonds de retraite auquel ont
adhéré subséquemment les travailleurs. L'origine des
fonds, dans la plupart des cas, n'est pas la même pour démarrer le
fonds, si je peux m'exprimer ainsi. Cela peut évidemment avoir eu des
effets sur les traditions d'administration et de gestion. Cela peut expliquer
aussi pourquoi on ne peut pas prendre le modèle de gestion en vigueur
chez vous pour l'appliquer de façon intégrale dans l'ensemble du
Québec.
Puisque nous n'avons pas eu le temps de tout discuter, je vous invite
à poursuivre les discussions avec la Régie. Je sais que vos
entrées à la Régie sont excellentes. Vos communications
sont très bonnes. Vous parlez certainement le même langage. Je
tiens à vous remercier de votre contribution, M. Perron, M. Moses que je
connais bien et qui, en plus d'être secrétaire, est
également conseiller municipal à Brossard. Un petit conseil, M.
Moses, ne vous découragez pas. Moi aussi, j'ai commencé comme
conseiller municipal et, voyez-vous, j'ai fini comme ministre. Peut-être
qu'un jour cela pourra vous arriver aussi!
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Bourbeau: Qu'est-ce qu'elle a dit?
Une voix: Elle a dit: Ce n'est pas un modèle
nécessairement.
M. Bourbeau: Ha, ha, ha! Alors, vous pourrez toujours continuer
comme gestionnaire de la caisse. Merci, Mme Gauthier, pour vos excellents
conseils juridiques. Merci.
Le Président (M. Leclerc): Bien, mesdames, messieurs, au
nom de la commission, je voudrais vous remercier de vous être
déplacés pour nous rencontrer. Je vous souhaite un bon retour.
J'invite maintenant l'Association canadienne des compagnies d'assurance de
personnes à s'approcher à la table. Je suspends pour une
minute.
(Suspension de la séance à 12 il 3)
(Reprise à 12 il 5)
Association canadienne des compagnies d'assurance de
personnes
Le Président (M. Leclerc): A l'ordre, s'il vous
plaît!
Je souhaite la bienvenue à l'Association canadienne des
compagnies d'assurance de personnes. Je vous demanderais, messieurs, de vous
identifier pour ies fins du Journal des débats.
M. Millette (Yves): Je suis Yves Millette, conseiller
spécial à l'Association canadienne des compagnies d'assurance de
personnes. Je suis accompagné, aujourd'hui, de M. René
Massicotte, premier vice-président et directeur général
d'Assurance-vie Desjardins, M. Claude Gravel, vice-président
exécutif et directeur général de la Mutuelle des
fonctionnaires du Québec et aussi membre du conseil d'administration de
l'Association canadienne des compagnies d'assurance de personnes...
M. Gravel (Claude): Bonjour.
M. Millette: ...M. Michel Turcotte, directeur principal, rentes
collectives à l'Industrielle-Alliance compagnie d'assurance sur la
vie.
M. Turcotte (Michel): Bonjour.
Le Président (M. Leclerc): Bien. M. Millette, je vous
rappelle que vous avez vingt minutes pour faire part à la commission de
votre mémoire. Ensuite, chacun des groupes parlementaires aura quinze
minutes pour vous poser ses questions. Vous pouvez y aller.
M. Millette: M. le Président, mesdames, messieurs du
comité, l'Association canadienne des compagnies d'assurance de personnes
regroupe 111 compagnies qui possèdent à elles seules 99 % du
volume des primes qui sont transigées au Canada. Les
sociétés d'assurance-vie sont chargées de la gestion de
plus de 74 % des régimes de retraite privés au Canada, mais ces
régimes ne couvrent qu'environ 14 % de l'ensemble des participants
à des régimes. C'est donc dire que les sociétés
d'assurances administrent surtout les régimes offerts par les PME.
Souvent, ce sont des régimes garantis ou des régimes
assurés, alors que les régimes véritablement
négociés entre les employeurs et les employés sont le fait
des grandes entreprises et souvent administrés par des fiduciaires
indépendants.
Nous vous demanderions de tenir compte de ce facteur et du fait que
nous, des sociétés d'assurance-vie, sommes déjà
sous la surveillance et le contrôle d'une autorité gouvernementale
ici, au Québec, c'est l'Inspecteur général des
institutions financières. Donc, notre industrie est déjà
sous une surveillance considérable concernant, par exemple, la
solvabilité de l'entreprise, les pouvoirs de placement de l'entreprise,
les règles concernant les conflits d'intérêts, etc.
Abordons maintenant notre mémoire proprement dit. En
résumé, nous sommes heureux de constater que la refonte de la Loi
sur les
régimes supplémentaires de rentes tient compte des
principes fondamentaux du consensus national en matière de
réforme des pensions. Cependant, nous nous préoccupons d'un
certain manque d'uniformité sur plusieurs aspects techniques. Les
nouvelles normes législatives, de façon générale,
augmentent considérablement les exigences relatives aux
déclarations ainsi qu'à la tenue des livres, en plus d'alourdir
sensiblement la tâche des répondants de régimes aussi bien
sur le plan administratif que financier.
Les répondants des régimes de petite taille ne sont pas
toujours en mesure, selon nous, d'endosser le fardeau administratif qui leur
est imposé, ni les coûts qui découlent de la nouvelle loi
qui est proposée. En conséquence, les produits moins
réglementés, tels que les REER collectifs, ont accaparé
une part de plus en plus grande du marché, au cours des dernières
années. Nous estimons que le traitement nettement plus favorable
accordé aux REER, au détriment des régimes de retraite,
n'est pas pour le plus grand avantage des employés. À titre
d'exemple, les contributions des employeurs dans un REER ne sont pas
réglementées. La gestion des fonds n'est pas surveillée.
Les contributions ne sont pas gelées, ce qui peut inciter les
travailleurs à utiliser les fonds a d'autres fins. En fait, il y a un
débalancement notable entre la réglementation qui va s'appliquer
aux régimes de retraite et l'absence de réglementation qui
s'applique aux régimes collectifs de REER.
Notre mémoire se divise en deux parties: la première
partie traite de certains points techniques, sur lesquels je vais passer assez
rapidement, et la deuxième partie concerne nos préoccupations
à l'égard de l'administration des régimes de retraite pour
les petites entreprises. Un des sujets d'inquiétude contenus dans le
projet de loi porte sur les dispositions de la nouvelle loi qui s'appliquent
aux rentes différées ainsi qu'aux contrats collectifs de retraite
souscrits auprès d'assureurs, c'est-à-dire des régimes
garantis. Plusieurs dispositions de la loi ont un effet rétroactif qui
va influer sur les avantages souscrits parfois depuis de très nombreuses
années. La loi semble exiger des modalités fondées sur des
critères différents de ceux qui avaient été
négociés par les parties au contrat. La loi stipule que les
régimes de retraite doivent satisfaire à certaines exigences et
va obliger les employeurs à combler toute insuffisance de fonds, donc
sans préciser quels seront les critères de base du
provisionnement du déficit actuariel par l'employeur, ni l'effet des
déficits actuariels non recouvrables sur les droits des participants.
Par surcroît, la loi prévoit imposer à l'assureur de
nouvelles exigences au plan administratif et à la tenue de livre,
concernant des contrats de rentes déjà constitués. Comme
nous vous l'avons dit au début, la majorité des régimes
assurés par les compagnies d'assurances ou couverts par les compagnies
d'assurances étant des régimes offerts aux PME, il s'agit
là de facteurs qui peuvent naturellement inciter les petites entreprises
à abandonner les régimes de retraite pour alier vers d'autres
formes, ou même abandonner complètement les régimes de
retraite.
Il y a certaines dispositions qu'on va vous signaler. Entre autres,
à l'article 9, la définition d'un régime de retraite ne
semble pas conforme aux pratiques qui ont cours dans ce domaine, surtout
lorsqu'il y a un assureur d'impliqué. Assez souvent, le régime et
l'administration du régime ne sont pas assumés entièrement
par l'assureur, il y a certaines fonctions qui demeurent à l'employeur.
À ce moment-là, il n'est pas clair qui aura à remplir les
obligations prévues par la définition ou par la loi.
Le paragraphe 3 de l'article 14 semble ouvrir la porte au retrait d'un
employeur d'un régime en cours d'emploi, ce qui n'apparaît pas
souhaitable. Cela ne nous apparaît jamais souhaitable, mais encore moins
si la personne peut prendre cette décision en cours d'emploi, et nous ne
sommes pas certains que c'était l'objectif visé par l'article
14.
À l'article 42, nous estimons que le délai de quinze jours
prévu pour le versement des cotisations salariales, à partir de
la date de leur perception, est trop court et entraîne une augmentation
des formalités administratives qui doivent être accomplies. Nous
recommandons que ce délai soit porté à trente jours.
À l'article 56, la restriction prévue aux termes de cet
article concernant la variation des cotisations patronales en fonction des
périodes de service désavantage, encore là, les
régimes de retraite par rapport aux REER, et on demande au gouvernement
de porter beaucoup d'attention à cette question.
A l'article 88, l'exigence relative à la
réévaluation de la rente à l'extinction du droit du
conjoint en cas de séparation s'applique également à la
rente en cours de service. Nous estimons que ce principe peut être
acceptable lorsque la rente est différée, mais non après
que les arrérages ont commencé à être servis. Dans
un tel cas, nous considérons qu'il y a antisélection, ce qui
entre en conflit avec les principes de base de l'assurance.
À l'article 162, nous croyons que l'assemblée
générale prévue ne devrait pas être une obligation
dans la loi, surtout pour ce qui est des petits employeurs qui, la plupart du
temps, ont leurs employés au sein d'un seul lieu, d'un seul endroit, et
où les gens sont peu nombreux. Il s'agit là d'un mécanisme
qui est beaucoup trop formel, qui implique toutes sortes d'obligations
légales d'information, etc., alors que ça pourrait être
fait beaucoup plus informellement si l'assemblée était
convoquée selon une façon déterminée par le
comité de retraite ou par l'administrateur du régime en
place.
À l'article 164, il semble qu'une politique écrite de
placement soit exigée dans tous les cas. Je vous rappelle que, dans le
cas des régimes
assurés, ceux-ci sont déjà placés ou sont
déjà administrés conformément à la politique
de placement de la compagnie d'assurances, la Loi sur les assurances obligeant
les compagnies d'assurances à avoir de telles politiques de placement.
On constate, encore là, qu'il y a un dédoublement, avec des
dispositions déjà existantes. Évidemment, il y a plusieurs
autres articles qui font l'objet de représentations dans notre
mémoire, mais j'ai voulu donner celles-là à titre
documentaire, ce qui n'enlève pas la pertinence des autres
recommandations qui sont faites dans ce mémoire.
J'aimerais m'attarder un peu à la deuxième partie de notre
mémoire, qui concerne les régimes des employés des petites
entreprises. Les changements qui ont été apportés ou
prévus à la loi de l'impôt fédérale et
l'adoption de lois mettant en oeuvre la réforme des pensions dans
plusieurs provinces ont eu un effet défavorable sur la croissance des
régimes de retraite au cours des dernières années. Au
Canada, il y a environ, maintenant, seulement 40 % de la main-d'oeuvre du
secteur privé qui bénéficie de la protection offerte par
les régimes de retraite privés. C'est une diminution par rapport
à ce qu'il y avait. Le reste des employés ne
bénéficie pas des régimes de retraite privés. La
plupart des travailleurs qui participent à des régimes de
retraite privés sont des employeurs de grandes entreprises. Dans le cas
des PME, ces employés sont souvent non couverts. Les
sociétés d'assurances, à cause des services dont elles
disposent pour l'administration des régimes, ont beaucoup investi dans
les régimes où il y a peu des participants. Les changements qui
ont été apportés à la loi de l'impôt et les
nouvelles lois sur les régimes de retraite qui sont déjà
en vigueur ailleurs au Canada - on sait que le régime
québécois s'apparente beaucoup au régime qui a
été entériné dans les autres provinces -
découragent les petits employeurs à mettre sur pied des
régimes de retraite et les amènent même à abandonner
les régimes de retraite existants au profit de régimes de
rechange, c'est-à-dire les REER collectifs, quand ce n'est pas à
abandonner les régimes tout simplement.
Notre industrie a noté un changement important en faveur des REER
collectifs. A titre d'exemple, en 1987, le nombre de nouveaux régimes
à cotisations déterminées avait connu une baisse de plus
de 50 % par rapport à celui de 1985 et ce, malgré une importante
amélioration de la conjoncture économique qui aurait
vraisemblablement dû entraîner une augmentation appréciable
du nombre de régimes établis. Au cours de la môme
période, le nombre des REER collectifs s'est accru de 47 %. Les
résultats du sondage de l'Association, qui sont annexés à
notre mémoire, indiquent également qu'en 1987 le secteur des
assurances a fait souscrire deux fois plus de REER collectifs que de
régimes à cotisations déterminées. On voit donc, au
sein de notre industrie, qu'il y a un net déplacement.
Évidemment, ça reste toujours au sein de l'industrie, mais
on est bien conscients que la protection des cotisants est beaucoup moindre
dans le cas des REER collectifs que dans le cas des régimes de retraite.
Nous croyons qu'une plus grande protection des cotisants dans des
régimes de retraite n'atteint pas nécessairement les buts que le
législateur se fixe, parce qu'on s'aperçoit qu'il y a un
déplacement vers d'autres types de régimes qui ne
bénéficient pas des protections accordées par la loi.
J'en viens maintenant aux recommandations que nous pourrions faire plus
particulièrement concernant cette situation. Nous recommandons que la
loi prévoie des mécanismes de surveillance différents pour
la réglementation des régimes de retraite des petites
entreprises, plus particulièrement les régimes à
cotisations déterminées qui sont administrés par des
institutions financières elles-mêmes réglementées et
ce, par opposition aux dispositions qui existent pour les grands régimes
à prestations déterminées. Nous comprenons que, pour les
grands régimes, on puisse avoir une loi un peu plus
sévère. Au fond, ils s'apparentent à des compagnies
d'assurances. Plusieurs de ces fonds de retraite administrent même des
actifs nettement supérieurs à ceux de plusieurs compagnies
d'assurances. Donc, qu'il y ait un certain équilibre, ça va.
Mais, lorsqu'on est en présence de petits régimes, on
considère qu'il y a un dédoublement de réglementation et
qu'on devrait éviter ces chevauchements qui découragent souvent
les petits employeurs. En particulier, les mesures administratives devraient
être simplifiées afin d'inciter les employeurs des petites
entreprises à mettre en place des régimes de retraite qui soient
régis par la loi sur les régimes de retraite.
Outre les propositions contenues dans la partie technique de notre
mémoire, nous pouvons faire les recommandations suivantes. Les
institutions financières réglementées devraient être
autorisées à enregistrer à l'avance les documents
spécimens des régimes de retraite. En pareil cas, seules les
variations précises seraient déposées auprès de la
commission lors de l'établissement d'un régime. La
présentation des déclarations devrait être rendue beaucoup
plus facile. Seuls les renseignements financiers ainsi que les renseignements
personnels de base relatifs aux participants devraient être exigés
dans les déclarations périodiques. Les participants devraient
être autorisés, au moment de la cessation de leur protection ou de
leur retraite, à choisir à l'avance les modalités de
règlement basées sur l'information fournie dans les
déclarations antérieures. Les droits d'enregistrement et les
droits annuels payables à la Régie devraient être
réduits pour les petits régimes et ne représenter qu'une
valeur symbolique. Les droits minimaux ne devraient pas être
exigés lorsque des spécimens des régimes
enregistrés à l'avance sont utilisés. Cela se
justifierait, étant donné que les coûts de surveillance de
tels régimes seraient inférieurs à
ceux qui sont nécessaires lorsque les régimes sont
déposés avec des documents sur mesure.
Nous espérons que ces quelques commentaires permettront d'amener
une bonification à la Loi sur les régimes supplémentaires
de rentes qui, nous le croyons, a toute sa raison d'être et, quant
à ses grandes orientations, doit être maintenue et même mise
en application le plus rapidement possible. Nous vous remercions.
Le Président (M. Bélanger): Merci, M. le
président. M. le ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, je pense qu'on peut dire que
l'Association canadienne des compagnies d'assurance de personnes inc., d'une
façon générale, accueille favorablement le projet de loi,
moyennant évidemment certaines réserves qui ont été
exprimées. On peut dire, entre autres, que vous semblez regretter le
manque d'uniformité ainsi que l'augmentation des normes administratives.
D'une façon plus précise, je constate que vous appuyez les
éléments de la réforme qui ont fait l'objet de ce qu'on a
appelé le consensus national canadien.
Vous vous interrogez sur l'opportunité de certaines initiatives
comme, par exemple, la non-possibilité ou l'impossibilité pour un
organisme de gérer la caisse du régime établi par ses
propres employés. Là-dessus, je crois que vous êtes au
courant que j'ai annoncé hier l'intention du gouvernement de modifier le
projet de loi pour permettre à un employeur de gérer le fonds de
retraite, la caisse, dans la mesure où ce mandat lui aura
été confié par le comité de retraite.
Vous faites également des observations relativement à
l'assemblée annuelle ainsi que sur le délai de versement des
cotisations, entre autres. En ce qui concerne l'assemblée annuelle, vous
employez l'expression "l'assemblée générale". L'article
162 du projet de loi ne reprend pas ces mots. On ne parle pas
d'assemblée générale. On parie d'une assemblée dans
les douze mois de la fin de chaque exercice, donc, on peut dire
"assemblée annuelle". C'est un peu à dessein que nous n'avons pas
utilisé l'expression "générale", en ce sens que
l'intention dans cet article, c'est de faire en sorte que, chaque année,
l'administrateur informe ou rende compte d'abord aux cotisants et aux
retraités de l'état de la caisse. Le texte même du projet
de loi dit que c'est pour prendre connaissance des modifications
apportées au régime, des indications portées au registre
tenu en application de l'article 156 et de la situation financière de la
caisse et, deuxièmement, pour décider de la formation ou du
maintien d'un comité de retraite, le cas échéant, pour en
désigner les membres. Donc, il pourrait y avoir une ou plusieurs
assemblées d'information; il y en aura certainement une principale pour
traiter des problèmes généraux comme la désignation
des membres du comité de retraite ou la formation et le maintien du
comité, mais il pourrait aussi y avoir dans chaque région, si
c'est une société qui a beaucoup de succursales ou d'usines dans
le Québec, des assemblées d'information annuelles où on
ferait en sorte de permettre aux cotisants, aux membres, de prendre
connaissance du régime et de sa situation financière.
À l'article 24, enfin, la question de la surveillance
différente des régimes selon leur taille, vous signalez que les
régimes qui sont en vigueur à l'endroit des petites entreprises,
les PME, devraient faire l'objet de mesures administratives simplifiées,
afin d'inciter leur mise en place ou leur maintien. Là-dessus, je vous
répondrais que l'article 2 du projet de loi permet au gouvernement - on
peut peut-être regarder l'article 2 - "...par règlement et dans
les conditions qu'il fixe, de soustraire toute catégorie de
régime de retraite à l'application de la totalité ou d'une
partie de la présente loi." Probablement que le règlement ou la
réglementation pourra permettre un certain assouplissement des
conditions, surtout s'il s'agit d'un petit régime pour de très
petites compagnies ou de très petits groupes de travailleurs. Nous ne
vouions pas faire en sorte d'inonder une PME d'une réglementation
lourde, de la même réglementation qui pourrait s'adresser à
une grosse compagnie, une grosse société. Nous allons tenter de
faire en sorte d'amener un certain élément de souplesse pour
adapter la réglementation à la taille du régime.
Quant à l'article 145, j'en ai parlé tout à
l'heure, vous avez fait des représentations, j'ai annoncé
déjà que nous allons modifier le projet de loi. La politique
écrite de placement... Vous souhaiteriez exempter les régimes
garantis et ceux pour lesquels les placements sont effectués dans les
fonds garantis ou mis en commun dans des institutions financières.
Là-dessus, je répondrais que les régimes garantis n'ayant
pas de caisse de retraite, il va de soi que la section sur les placements ne
s'applique pas. Pour les autres types de régimes, il est
déjà prévu que la Régie pourra autoriser une
politique de placement simplifiée. Encore là, c'est ia même
philosophie que celle dont j'ai parlé tout à l'heure.
Vraisemblablement, on ne pourra pas traiter les petits régimes de la
même façon que les très gros; les principes seront les
mêmes, mais les modalités pourront varier pour s'adapter à
la taille du régime. Les délais de versement des cotisations, je
vous indique tout de suite que notre intention est, effectivement, d'assouplir
l'article 42 afin d'augmenter le délai pour le versement des
cotisations.
La question de la cessation du droit à la rente au conjoint pour
une cause autre que le décès, à l'article 88: vous
suggérez d'éliminer l'obligation de réévaluer la
rente en cours de paiement en raison de l'extinction du droit à la rente
au conjoint, par exemple, lors d'un cas de divorce. Je peux répondre
à ce sujet que le gouvernement est présentement en train
d'étudier un dossier qu'on nomme le dossier sur les droits
économiques des conjoints et que ce problème fait partie
des discussions en cours, sans préjuger aucunement des conclusions de
ces discussions. (12 il 30)
J'aimerais, si vous le voulez bien, vous poser une question relativement
aux comités de retraite. Le projet de loi prévoit la formation de
comités de retraite qui ne sont pas prévus être des
comités paritaires, mais qui seront quand même des comités
décisionnels. Est-ce que vous êtes d'accord avec la formation de
ces comités de retraite et la façon dont on entend
procéder?
M. Millette: M. Turcotte va vous répondre.
M. Turcotte (Michel): Comme M. Millette vous en a fait part au
début, la majorité des régimes de retraite
administrés par les compagnies d'assurances sont des régimes de
retraite avec cinq, six ou douze participants. Juste la formation d'un
comité de retraite avec une dizaine de participants, ça devient
presque un comité de retraite paritaire, même si vous ne voulez
pas le nommer "paritaire" dans la loi. À cet effet et pour
éviter, justement, les conversions ou les changements vers les REER
individuels ou collectifs, parce que douze participants, c'est presque
même de l'individuel, ils ne mettront même pas un régime
collectif en place pour ne pas faire de cotisation salariale et pour
éviter tous les problèmes de paperasse au point de vue des
ressources humaines. À mon sens, le comité de retraite, pour
répondre plus précisément à votre question, M. le
ministre, ne devrait même pas exister pour les petites entreprises. Donc,
il ne devrait même pas être décisionnel.
M. Bourbeau: C'est bien évident qu'il y a des
régimes où il n'y a qu'un seul participant, ou deux, trois ou une
demi-douzaine. Cela deviendrait une procédure assez lourde et
irréaliste que de former un comité de retraite pour deux
personnes ou pour une personne. En ce sens, nous allons utiliser la souplesse
qui est prévue pour s'adapter à la conjoncture, l'intention
étant de favoriser la formation de comités de retraite dans les
cas et dans tous les cas où cela pourrait être utile et serait
utile et non pas d'imposer une réglementation ou des tracasseries
administratives dans les cas où il ne serait pas logique ou rentable de
le faire.
M. le Président, là-dessus, je suis prêt à
passer la parole à la députée de Maisonneuve ou à
d'autres membres de la commission.
Le Président (M. Leclerc): Mme la députée de
Maisonneuve.
Mme Harel: Merci, M. le Président. Je veux
également souhaiter la bienvenue aux porte-parole de l'Association
canadienne des compagnies d'assurance de personnes inc. Vous signalez que, dans
votre mémoire, vous nous apportez un point de vue qui ne se retrouve, je
crois, dans aucun autre mémoire que nous aurons à étudier
durant la présente commission, à savoir l'augmentation, la
croissance assez spectaculaire du nombre de REER collectifs en regard des
autres véhicules. Vous avez inclus, dans les annexes de votre
mémoire, des tableaux qui illustrent ce mouvement vers ce type de
véhicule et vous êtes à même de voir, là
où vous êtes placés, où les mouvements se font.
À la page 11, vous dites: "Nous estimons que cette tendance est
dangereuse et qu'un tel mouvement empêcherait beaucoup de personnes de
bénéficier de dispositions souhaitables dans la
législation sur les régimes de retraite." J'aimerais, pour les
fins de nos travaux, pour les fins de la commission parlementaire, que vous
explicitiez les désavantages qui vous amènent à conclure
au danger de la tendance qui est constatée.
M. Millette: Je pense que le principal désavantage est que
ces régimes ne sont à peu près pas
réglementés. Donc, l'employeur peut faire à peu
près n'importe quelle entente avec ses employés et il n'y a
aucune garantie que ce régime va être continué pendant une
certaine période de temps. Il n'y a aucune garantie que l'employé
ne pourra pas mettre fin à son REER, surtout dans les cas où le
REER est individuel, ne pourra pas avoir accès aux sommes d'argent qui
auront été déposées pour d'autres fins qu'une
retraite, etc. Le fait que ça ne soit pas réglementé
amène des problèmes et le fait que les petits employeurs sentent
que les régimes de retraite sont surréglementés, on a une
tendance donc, à ce moment, on risque d'avoir une loi qui,
théoriquement, va couvrir à merveille les travailleurs, mais,
dans les faits, chez les petits employeurs, les régimes de retraite
seront inexistants. Ce sont d'autres véhicules, où aucune
protection n'est offerte par la loi, qui vont prendre la place. À ce
moment-là, je pense que tout l'effort qui aura été fait
sera un effort peut-être utile pour les grandes entreprises où les
syndicats sont fortement implantés, mais où, dans la
majorité des entreprises, la majorité des travailleurs n'y
trouvera pas son compte. Je pense que M. Turcotte voudrait ajouter quelque
chose.
Le Président (M. Bélanger): M. Turcotte.
M. Turcotte: Je pense qu'il y a un élément qui est
aussi important pour l'évolution des REER collectifs qu'on a vu
dernièrement, c'est l'obligation, qui est louable en soi, d'une
cotisation de l'employeur dans le fonds de retraite qui n'existe pas dans le
REER collectif, ce qui fait que le REER, dans une autre loi, la loi fiscale, le
met sur le même pied que les fonds de retraite. Donc, vous avez toutes
les flexibilités pour le REER, sans aucune contrainte et vous avez des
contraintes pour les fonds de retraite, avec les mêmes
flexibilités fiscales. C'est là
qu'est toute la problématique.
Mme Harel: C'est vraiment le paradoxe, donc, d'un secteur qui est
surréglementé et d'un autre qui est
sous-réglementé, mais avec les mêmes avantages fiscaux
puisque la réforme fiscale sur l'épargne-retraite va introduire
des règles d'équivalence pour les cotisations permises. Sur cette
question, étant donné que dans le projet de loi 116 il y a
maintenant le principe des 50 % qui est introduit, j'imagine que c'est ce
à quoi vous faites référence, M. Turcotte?
M. Turcotte: C'est ça, madame.
Mme Harel: Essentiellement, c'est le principe des 50 %
après le droit d'acquisition. À ce moment-là, vous
concevez qu'il devrait y avoir - en vous écoutant, j'ai pensé que
c'était possible, si les gouvernements sont cohérents - des
avantages fiscaux supplémentaires pour favoriser, inciter le type de
régime où il y a une épargne-retraite véritable?
Sinon, les autres véhicules dont vous nous faites mention, comme le REER
collectif, ce n'est pas nécessairement de l'épargne-retraite. On
peut soustraire ses économies pour une autre utilisation.
M. Millette: Je pense qu'il y a plusieurs façons d'aborder
ce problème. Cela pourrait être des avantages fiscaux
améliorés pour les régimes de retraite, cela pourrait
être une réglementation pour les REER collectifs ou ça
pourrait être une diminution ou une réglementation plus
adéquate des régimes de retraite. Je pense qu'il y a toutes les
voies possibles. Personnellement, l'Association favorise plutôt une
réglementation moins lourde des régimes de retraite.
Mme Harel: Dans lesquels de ces aspects recommandez-vous au
gouvernement de diminuer les exigences législatives?
M. Millette: Dans notre mémoire, on a fait plusieurs
remarques. Évidemment, on nous parie de flexibilité au chapitre
de la réglementation, mais vous avez remarqué qu'en annexe de
notre mémoire, on a fait une comparaison en prenant... Comme la loi du
Québec ressemblait à la loi de l'Ontario, on a tenu pour acquis
que la réglementation pourrait être semblable à celle de
l'Ontario et on vous a fait une comparaison de la lourdeur du système
mis en place et qui fait fuir les gens. Je pense, à ce chapitre, qu'on
peut faire beaucoup de travail.
Mme Harel: En fait, en annexe, vous nous avez indiqué les
fonctions et obligations du répondant ou de l'administrateur d'un
régime de retraite en Ontario. Si je comprends bien, c'est vous qui avez
préparé ce tableau et ça établit finalement les
exigences que la loi ontarienne a à l'égard de l'administrateur.
Trouvez-vous que c'est un exemple à suivre ou à proscrire?
M. Millette: Non, c'est un exemple à proscrire. Je pense
que l'Ontario est allé très foin dans ce domaine. Je veux qu'il
soit clair que nos principales remarques et ce que nous croyons être la
principale cause de la désaffection à l'égard des
régimes de retraite pour les petits employeurs, ce sont les tracasseries
administratives, et non pas les garanties principales du régime telles
qu'elles sont là. Les points sur lesquels tout le monde s'est entendu au
Canada, y compris les gens qui administrent les régimes de retraite -
meilleure "transférabilité", toutes ces choses-là - je ne
pense pas que ce soit remis en cause et que ce soit une cause de
désaffection. Au contraire, je pense que ce sont les tracasseries
administratives qui amènent les gens à fuir les régimes de
retraite.
Mme Harel: Vous avez dit, au début de votre intervention,
que 14 % de l'ensemble des employés participe à un régime
complémentaire. Est-ce que c'est ce que je dois comprendre? Non.
M. Millette: Non, ce n'est pas ça. Les compagnies
d'assurances gèrent 74 % des régimes, mais ces 74 % de
régimes ne comptent que pour 14 % des employés qui sont couverts
par un régime, et non pas 14 % de l'ensemble des travailleurs.
Mme Harel: Donc, la grande majorité des régimes
sont pour des entreprises ayant moins de dix employés.
M. Millette: Exactement.
M. Grave!: Peut-être pas moins de dix, mais si vous
voyez...
Le Président (M. Bélanger): M. Gravel?
M. Gravel: Excusez-moi. Claude Gravel. Si vous regardez les
statistiques de 1987 qu'on vous a fournies, pour les nouveaux contrats
souscrits au cours de 1987, ia moyenne dans les régimes de retraite est
de 30 % pour les régimes à prestations déterminées
et de 26 % pour ceux à cotisations déterminées. Ce ne sont
pas des entreprises de dix employés, mais on parle de petites
entreprises. Si on regarde le cumulatif et les contrats en vigueur, la moyenne
pour les régimes à prestations déterminées est de
65 % et de 15 % seulement pour ceux à cotisations
déterminées.
Mme Hare!: Un aspect qui est relevé, à la page 6 de
votre mémoire, c'est l'impact que pourrait avoir l'article 56 du projet
de loi sur les participants qui comptent une longue période de service.
Vous dites que, compte tenu du manque de flexibilité sur le plan des
cotisations variables, selon la période de service reconnue en fonction
d'un régime à cotisations déter-
minées, les participants qui comptent une longue période
de service ne pourraient recevoir de compensation pour le fait qu'ils risquent
de toucher à l'avenir une rente inférieure à celle de
l'ancien régime qui a été transformé. Les REER
collectifs offrent cette flexibilité, et bien plus. Quel véhicule
vous apparaît le plus souhaitable pour le genre de clientèle que
vous représentez?
M. Turcotte: Je pense...
Le Président (M. Bélanger): Michel Turcotte?
M. Turcotte: C'est bien ça. Mme la députée,
je pense que le véhicule souhaité par les compagnies
d'assurances, c'est effectivement un régime réglementé en
vue de la retraite. Présentement, ce sont des régimes de retraite
privés agréés par la Régie des rentes. Si les REER
collectifs étaient réglementés en vue de la retraite, ce
serait aussi acceptable. C'est là qu'est le dilemme dont on parlait
tantôt: les deux sont sur un pied d'égalité fiscalement,
mais ne le sont pas au point de vue de la réglementation. Donc, le
véhicule qu'on pourrait préconiser, c'est tout régime en
vue de prévoir un revenu pour la retraite, indépendamment que ce
soit un REER ou un fonds de retraite.
L'inconvénient qu'on voyait, à l'article 56, c'est que
nous voyons fréquemment des régimes à cotisations
déterminées où la cotisation de l'employé ou de
l'employeur dont certains sont en fonction de l'âge et certains sont en
fonction du nombre d'années de service. On sait que les personnes de
moins de 35 ans pensent plus à se bâtir un foyer, une maison et
une famille, probablement qu'ils veulent un régime à 2 %
employé-employeur. Lorsqu'ils arrivent vers la quarantaine, ils sont
prêts à aller à 4 % employé-employeur; lorsqu'ils
arrivent à la cinquantaine, ils sont prêts à 6 %
employé-employeur. On sait aussi que les coûts par dollar de rente
sont plus élevés quand on est près de la retraite. Donc,
si les cotisations sont conformes, elles augmentent quand on arrive à la
retraite. Ils vont pouvoir augmenter leur montant de rente lors de la retraite.
Pour les personnes les plus âgées, on ne peut plus maintenant, en
raison de la Charte des droits et liberté de la personne, faire de la
discrimination en raison de l'âge. Cela a été fait d'une
autre façon qui n'était pas discriminatoire à mon sens.
Concernant le nombre d'années de service, on s'aperçoit que ce
sont fréquemment les personnes les plus âgées qui ont le
nombre d'années de service le plus élevé par rapport aux
plus jeunes. On parvenait de cette manière à augmenter la caisse
de retraite, augmenter les contributions employé-employeur dans le but
de pourvoir à une rente suffisante.
Mme Harel: Avec les nouvelles dispositions du projet de loi 116,
une fois l'adhésion acquise et ensuite l'acquisition capitalisée,
la personne va, si elle quitte, si elle fait face à une cessation
d'emploi, devoir transférer à une sorte de REER bloqué ou
encore, elle va pouvoir le laisser dans le fonds de son employeur pour avoir
droit plus tard à une rente différée. Ce REER
bloqué, c'est finalement une façon de reconnaître que cette
épargne doit servir à la retraite. Par ailleurs, je ne sais pas
si vous avez remarqué, il y a un aspect qui est un peu
inquiétant, mais c'est en ce qui a trait aux régimes à
prestations déterminées qui ne sont pas ceux, je pense, que vous
administrez couramment. Ne pourrait-il pas y avoir transfert dans un REER
bloqué, même dans un régime à prestations
déterminées, après le 56e anniversaire, ou dans un autre
fonds, ou dans un REER bloqué, après le 56e anniversaire?
Une des inquiétudes que nous communiquent un certain nombre de
personnes qui étudient sur ces questions, c'est qu'on pourrait en
créer l'obligation, compte tenu des autres lois, par exemple, en
matière d'allocations sociales. Pensons à l'aide sociale
proprement dite. On pourrait créer l'obligation de se prévaloir
tout de suite de sa rente même si ce n'est pas dans le meilleur
intérêt du participant puisque, avec la nouvelle Loi sur l'aide
sociale, si vous avez droit à un crédit de rentes, et si ce
crédit est supérieur à 60 000 $, vous allez devoir
l'utiliser avant d'avoir droit à toute aide. Comme un bon nombre de cas
de cessation d'emploi, de mise à pied ou de fermeture touchent
particulièrement les personnes de cet âge, finalement, il y a un
danger qu'en ne reconnaissant pas que ces épargnes sont prévues
pour la retraite on les fasse servir à d'autres fins en cours de route
pour compenser des revenus d'emploi qui n'existent plus.
Le Président (M. Bélanger): En conclusion.
Mme Harel: Je vais laisser la conclusion à nos
invités. Alors, M. Millette, je sentais que vous aviez l'intention de
réagir là-dessus.
M. Millette: Je pense qu'il s'agit là de questions de
choix sociaux dans une période de transition au plan social et ce ne
serait malheureusement pas la première fois qu'un véhicule
conçu pour servir à une fin serve à une autre fin. C'est
malheureux, mais je pense qu'on doit laisser aux politiciens le soin
d'énoncer des solutions à ces problèmes.
Mme Harel: Merci. Est-ce que le ministre a terminé?
Le Président (M. Bélanger): M. le ministre. Mme
Harel: Est-ce que vous remerciez? M. Bourbeau: Oui.
Mme Harel: Ah bon! Je vais tout de suite vous remercier et vous
dire que votre mémoire apporte une contribution originale et
spécifique, en fait, aux travaux de la commission parlementaire. Je vous
en remercie.
M. Millette: Merci, madame.
Le Président (M. Bélanger): M. le ministre.
M. Bourbeau: M. Gravel, M. Massicotte, M. Millette, M. Turcotte,
merci de votre contribution. Soyez assurés que nous allons en tenir
compte dans la préparation des amendements que nous apporterons
éventuellement au projet de loi. Merci.
Le Président (M. Bélanger): La commission des
affaires sociales remercie l'Association canadienne des compagnies d'assurance
de personnes inc. et suspend ses travaux jusqu'à 16 heures, soit
après la période de questions, au même endroit. Merci, bon
appétit.
(Suspension de la séance à 12 h 50)
(Reprise à 16 h 11)
Le Président (M. Leclerc): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission des affaires sociales reprend ses travaux et invite la
Fédération des femmes du Québec à se joindre
à nous en se présentant à la table. Vous ne nous entendez
pas? Alors, j'invite la Fédération des femmes du Québec
à se présenter à la table, s'il vous plaît.
Prenez le temps de vous installer. Donc, mesdames, au nom de la
commission je vous souhaite la bienvenue parmi nous et je vous demande de vous
identifier pour les fins du Journal des débats.
Fédération des femmes du Québec
Mme Middleton-Hope (Constance): M. le Président, nous
représentons la Fédération des femmes du Québec,
organisme regroupant environ 98 associations, quelque 300 membres
individuelles, et plus de 65 000 femmes. Je m'appelle Constance Middleton-Hope,
M l-d-d-l-e-t-o-n-il-o-p-e.
Le Président (M. Leclerc): C'est gentil de
I'épeler.
Mme Middleton-Hope: Je suis la toute nouvelle présidente
de la Fédération depuis dimanche.
Le Président (M. Leclerc): On vous félicite.
Mme Middleton-Hope: Je vous remercie. C'est à la
Fédération qu'on remet aussi les félicitations, bien
sûr. Je vous présente mes collègues, Me Miriam Grassby,
à ma gauche, qui est à l'origine du projet Partage, et depuis
quatre ans elle travaille à la reconnaissance du droit économique
des conjoints. Elle est aussi membre du comité du Barreau sur ce
même dossier, et membre individuelle de la Fédération des
femmes du Québec. À ma droite, je vous présente Mme
Ginette Busque, qui est d'ailleurs bien connue de plusieurs d'entre vous. C'est
la présidente sortante de la fédération, qui a
été responsable de ce dossier qui vous est présenté
aujourd'hui et qui a rédigé le mémoire. À ce titre,
M. le Président et membres de cette commission, j'inviterais, si vous le
permettez, Mme Busque à vous faire cette présentation.
Le Président (M. Leclerc): Avec plaisir. Je sais que Mme
Busque est une habituée de nos travaux. Cependant, je voudrais
simplement rappeler que vous avez vingt minutes pour nous faire part de votre
mémoire et que chacun des groupes ministériels aura ensuite
quinze minutes pour discuter avec vous. Madame, vous pouvez y aller.
Mme Busque (Ginette): Je vous remercie. Ne soyez pas inquiets.
Notre présentation sera relativement brève. Nous n'avons pas de
commentaires à faire sur chacun des articles ou des points de ce projet
de loi. Cependant, j'aimerais peut-être compléter une information
qui vous a été apportée par Mme Middleton-Hope et rappeler
que la Fédération des femmes du Québec a fait partie de la
Coalition pour une retraite décente qui, au début des
années quatre-vingt, réclamait une réforme des
régimes publics de rentes et qui, à l'occasion des positions
qu'elle avait développées en regard des régimes publics,
avait aussi réclamé un certain nombre d'améliorations et
d'amendements qui devaient être apportés à la Loi sur les
régimes complémentaires de rentes. Donc, un certain nombre de
points du projet de loi 116 se rapportent aux revendications que nous avons
faites à cette époque. Nous reprendrons ces points.
Je commencerai donc, tout d'abord, par fa question de l'adhésion.
Le projet de loi 116 propose une adhésion ou une formule
d'adhésion qui rejoint tout à fait les revendications que nous
avions dans ce dossier. J'aimerais cependant faire remarquer que, même si
c'est une amélioration substantielle dans le sens qu'on permet
maintenant à des travailleurs ou à des travailleuses à
temps partiel d'adhérer à un régime de rentes, cela
n'améliorera pas d'une façon substantielle ou même
intéressante la situation des femmes, celles-ci n'étant en
moyenne que 1,9 année dans un même emploi. Donc, très peu
de femmes arriveront à cotiser à un régime privé
là où il y en a et aussi, par le fait même, très peu
de femmes pourront bénéficier des règles d'acquisition et
d'immobilisation.
Nous reconnaissons, cependant, qu'il est
très difficile, à l'intérieur des régimes
privés, de prévoir un mode d'adhésion qui soit plus rapide
que celui qui est prévu. Donc, notre commentaire serait peut-être
qu'il demeure extrêmement intéressant ou nécessaire de
penser à une réforme des régimes publics puisque c'est
à peu près le seul régime qui puisse couvrir la
catégorie de travailleuses à laquelle on fait
référence.
Pour ce qui est de l'acquisition et de l'immobilisation, nous avons
toujours maintenu que la règle du 10-45 qui s'applique à peu
près partout, était nettement désavantageuse pour un
très grand nombre de travailleurs et de travailleuses.
L'évolution récente du marché du travail, qui exige une
très grande mobilité de la part des travailleurs,
pénalisait donc une très grande partie de la main-d'oeuvre.
Alors, en tant que membre de la Coalition pour une retraite décente, la
FFQ avait appuyé les recommandations selon lesquelles les dispositions
régissant des rentes supplémentaires permettent l'acquisition et
l'immobilisation de la rente après deux ans de participation, ce que
reconnaît le projet de loi 116. Donc, nous ne pouvons qu'être
d'accord avec cette partie du projet.
Nous faisons remarquer que les commentaires qu'on vient d'apporter quant
aux règles d'adhésion s'appliquent encore plus quand il est
question d'acquisition et d'immobilisation parce que les
caractéristiques de la participation des femmes au marché du
travail ne favorisent nullement une sécurité économique
à la retraite. Parmi celles qui acquerront, finalement, le droit
d'adhérer au régime, très peu de femmes travailleront
suffisamment longtemps pour un même employeur pour voir leur droit
acquis. Pour ce qui est de la transférabilité, nous avions aussi
réclamé, dans la foulée de nos recommandations sur
l'acquisition, de nouvelles dispositions qui permettaient la
transférabilité des gains accumulés. Alors, les
règles prévues au projet de loi 116 répondent encore une
fois aux objectifs que nous visions dans le manifeste de cette Coalition.
Maintenant, la protection en cas de décès. Les
dispositions relatives à la protection du conjoint survivant
prévoient le versement de la valeur de la rente différée
si le conjoint participant au régime meurt avant sa retraite et une
rente égale à 60 % du montant de la rente du participant si
celui-ci meurt après sa retraite. Cela rejoint aussi, en quelque sorte,
les recommandations qui visaient à l'établissement d'une rente de
conjoint survivant obligatoire - c'est la terminologie que nous utilisions
à l'époque - à moins de renoncement de la part des deux
conjoints. Étant donné que votre projet prévoit que c'est
le conjoint du participant qui peut renoncer à son droit ou
révoquer sa renonciation, en fait, le genre de protection que nous
recherchions est à peu près garanti par le projet.
Maintenant, je pense que nous avons fait erreur sur la définition
du mot "conjoint". On a pu s'apercevoir de ça dans une conversation
qu'on vient d'avoir, avant la présentation. Nous croyons que le projet
de loi, en utilisant une terminologie qui parle d'une personne qui vit
maritalement avec une autre personne non mariée, avait l'Intention de
reconnaître les couples homosexuels, ce qui ne semble pas le cas
d'après les commentaires qu'on vient de nous donner. Notre interrogation
se situait à l'égard de l'interprétation qu'on donnerait
à l'expression "vivre maritalement". Il semble aussi que, dans l'esprit
des rédacteurs, "vivre maritalement", cela signifie "être
mariés". Donc, forcément, c'est
l'hétérosexualité. Notre paragraphe qui commente la partie
sur la définition du mot "conjoint" ne doit plus être
considéré si votre intention n'était pas de
reconnaître justement les couples homosexuels.
Pour ce qui est de la cotisation patronale, des dispositions relatives
aux administrateurs, des dispositions relatives à l'information qui doit
être diffusée, toutes les mesures qui sont proposées dans
le projet rejoignent en fait les objectifs que nous visions aussi,
c'est-à-dire que nous voulions une contribution de l'employeur
égale à au moins la moitié du coût de la rente, ce
qui semble être prévu dans le projet de loi 116 si notre
compréhension est exacte. Donc, c'est exactement ce que nous
recherchions.
La possibilité aussi pour les travailleurs de faire partie d'un
comité qui surveille la gestion ou qui participe à la gestion des
fonds répond aussi à nos objectifs, de même que toute la
partie qui traite de l'information. Nous ajouterions peut-être,
cependant, qu'il serait intéressant de songer à demander que
l'information soit aussi diffusée aux conjoints des participants dans la
mesure où ils sont visés par les régimes.
C'est-à-dire que toute personne sur qui le régime peut avoir une
influence ou toute personne dont la situation financière peut être
influencée devrait pouvoir avoir accès aussi à
l'information.
Pour ce qui est des failles du projet, parce que, jusqu'à
maintenant, ce qu'on vous envoie, ce ne sont pas nécessairement des
fleurs, mais au moins un acquiescement à la direction qui est prise,
nous regrettons infiniment qu'il n'y ait pas d'indexation prévue dans le
projet de loi 116. Nous sommes au courant des difficultés que pose
l'indexation des rentes. Nous savons que l'Ontario est présentement en
train d'étudier cette question, mais nous souhaiterions du moins
entendre de la part du gouvernement sa volonté d'intervenir à ce
niveau-là, dès qu'il sera possible de le faire. Donc, c'est un
peu, je dirais, la volonté politique qu'on n'est pas sûres de voir
transparaître, actuellement, en ce qui concerne l'indexation.
Pour ce qui est des partages des crédits au moment du divorce,
cette question est extrêmement importante pour nous. Vous vous demandez
peut-être pourquoi nous avons choisi de l'amener ici, le ministre
responsable de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu
n'étant pas celui qui est responsable directement de la reconnaissance
des droits économiques des conjoints, on est très
conscientes de ça. Par contre, nous avons cru que c'était
essentiel de soulever cette question ici pour une raison très simple.
C'est que le ministre responsable de la Main-d'oeuvre et de la
Sécurité du revenu est celui qu'on va certainement interpeller
pour savoir dans quelle mesure ce partage est faisable, pour savoir quelles
sont les règles qu'on peut appliquer dans un tel pargage. Je pense que
si M. Bourbeau est lui-même convaincu du bien-fondé de ce partage,
il peut donc soutenir Mme Gagnon-Tremblay et M. Gil Rémillard, dont
dépend le dossier en question. Alors, je dirais que notre intervention
à ce niveau est plus politique qu'autre chose, connaissant votre niveau
d'intervention dans ce dossier.
Nous avons donc choisi de démontrer, actuellement, comment cela
se fait ailleurs. Vous allez voir qu'au texte de la Fédération
nous avons annexé différents documents qui permettent de voir que
cela se fait dans d'autres provinces. Actuellement, le Québec est
vraiment une province qui refuse de progresser dans ce dossier, c'est celle qui
traîne le plus la patte, celle qui ne veut pas reconnaître cette
égalité économique des conjoints à travers le
partage des crédits de rentes. Cela se fait ailleurs et il y a
différentes modalités. Je pense que vous le savez aussi. Je pense
que vous êtes entouré d'experts qui connaissent très bien
ces questions. Mais c'est aussi une question de volonté politique et
nous ne saurions que trop vous manifester notre adhésion totale à
ce principe de partage et notre désir de vous voir le
concrétiser. Nous avons fait nos revendications lors des audiences sur
les droits économiques des conjoints, Me Grassby a aussi comparu devant
cette commission, mais nous tenions à venir répéter ces
propos ici.
Il y a une chose que le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu peut certainement mettre dès maintenant
dans son projet de loi, soit la possibilité, pour les conjoints qui le
veulent, de partager ces crédits. Actuellement, les gens qui vont voir
des avocats au moment d'un divorce et qui sont prêts à le faire ne
le font pas à cause des difficultés inhérentes. La loi du
Québec, actuellement, ne permet pas de le faire. Donc, qu'on permette,
à tout le moins, aux gens, aux couples qui, en instance de divorce,
veulent partager ces crédits de pouvoir le faire, ce serait
déjà une ouverture sur cette reconnaissance des droits
économiques des conjoints.
Pour ma part, je vous ai transmis l'essentiel de la position de la
Fédération des femmes du Québec dans ce dossier, mais je
pense que Me Grassby aurait des informations et un point de vue à vous
exprimer.
Le Président (M. Leclerc): Me Grassby.
Mme Grassby (Miriam): Je ne voudrais pas être longue mais
je voudrais quand même rediscuter un petit peu de cette question de la
nécessité de prévoir, dans cette loi, la
possibilité au moins pour ies époux qui veulent se partager des
crédits de rentes de pouvoir le faire. Parce que tout le monde n'est pas
ministre et, effectivement, il y a des maris, à Montréal - j'en
ai vu dans mon bureau - qui voudraient donner à leur femme la
moitié de leurs crédits de rentes.
Je suis venue au mois d'octobre devant la commission parlementaire et
j'avais alors parlé de certains genres de femmes. J'avais appelé
ça... Il y avait Mme Ordinaire, Mme Nouvelle Carrière et Mme
Propriétaire de maison, et on avait regardé ensemble les
difficultés dans lesquelles ces femmes pouvaient se trouver. J'avais
parlé, par exemple, de Mme Nouvelle Carrière qui, à
l'âge de 50 ans, vient de finir des études, de se recycler
après avoir eu ses enfants, qui arrive sur ie marché du travail
et qui, lorsque son mari lui demande le divorce, se sent prête à
voler de ses propres ailes. Elle vient chez son avocat et dit: On veut un
divorce. Moi, je suis correcte, je peux gagner 30 000 $ par année. Je
suis bien. Moi, je dois lui dire: Écoutez, madame, vous êtes bien
aujourd'hui, mais si vous n'avez pas de pension alimentaire ou si vous n'avez
pas droit à une pension alimentaire réservée ou des droits
dans le fonds de retraite de votre mari, à 65 ans, vous ne pourrez
jamais voir à vos besoins parce qu'entre l'âge de 50 et 65 ans
vous ne pourrez pas accumuler ce qui vous sera nécessaire pour vivre
d'une façon normale comme vous avez vécu par le passé.
Quand je suis venue au mois d'octobre, j'avais pensé à Mme
Nouvelle Carrière, ce cas était vraiment frais dans mon esprit.
Entretemps, son mari a négocié avec elle et il a
été d'accord pour lui donner la moitié de la maison et la
moitié de ses crédits pendant la période où Us ont
cohabité. Quand elle est allée voir un avocat, il lui a dit: Cela
ne se fait pas. C'est impossible. Ce n'est pas dans la loi. C'est beaucoup trop
tordu. Disons qu'il était moins prêt à le faire une fois
qu'il a vu qu'il n'y avait pas de mécanisme dans la loi pour le faire.
Alors, je pense qu'il est très important qu'on insère des
paragraphes dans la loi qui le permettraient, tout comme, par exemple, dans la
loi fédérale où on prévoit que, s'il y a convention
entre les époux, l'envoi d'une convention à l'administrateur du
régime de rentes permet alors la division des crédits.
Évidemment, on espère que, si on le permet dans les cas où
il y a consentement, cela va aussi convaincre des gens que c'est une
nécessité dans tous les cas.
J'avais discuté au mois d'octobre, et je le répète
brièvement, de la nouvelle loi sur te divorce de 1985 où c'est le
"no-fault divorce", où de plus en plus on dit que les femmes doivent
devenir autonomes et où on leur donne seulement quelques années
de pension alimentaire pour se recycler. C'est maintenant rendu plus important
que jamais de permettre le partage des crédits de rentes parce qu'elles
n'auront pas, elles, la protection qu'ont eue Ses femmes, pendant les
dernières années, qui n'ont jamais travaillé, qui
n'ont jamais été sur le marché et qui ont toujours eu une
pension de leur mari jusqu'à l'âge de 65 ans, et qu'elles
continuent d'avoir une pension alimentaire basée sur les droits à
la retraite de leur mari. Ces femmes arrivent à 45 ans, 50 ans sans
pension alimentaire et, à 65 ans, elles n'ont pas droit à une
pension alimentaire. C'est pour cela que lorsqu'ils se quittent, lorsqu'ils
divorcent, il faut quand même prévoir, basée sur le nombre
d'années de mariage, une certaine sécurité pour elles,
surtout parce que, normalement, lorsqu'elles n'ont pas de crédit de
rentes, c'est parce qu'elles sont restées à la maison pour
élever les enfants, ou parce que, comme couple, Us ont choisi que madame
ne travaille pas, ou, en travaillant, qu'elle n'adhère pas à un
régime de retraite, parce que, souvent, un couple se demande pourquoi il
aurait besoin d'un deuxième régime de retraite.
Que ce soit le cas de la dame qui retourne sur le marché du
travail à 50 ans ou celui de celle qui retourne sur le marché
à 40 ans, c'est extrêmement difficile de recommencer à
zéro. Souvent le mari, à l'âge de 40 ans, travaille
déjà depuis vingt ans pour un employeur et il fui reste encore 25
ans pour accumuler les droits, tandis que madame commence à zéro.
C'est certain qu'un partage dans un jeune couple est moins onéreux pour
le mari ou pour la femme qui doit elle aussi partager, mais c'est tout aussi
important qu'H y ait un certain partage s'il y a divorce dans ce
cas-là.
Finalement, on s'était également parlé du fait que
si on prévoit une division des biens familiaux et que les femmes qui
sont propriétaires de leur maison doivent en donner la moitié
à leur époux, effectivement, vu que les deux biens les plus
importants dans la famille sont normalement la maison et les droits à la
retraite, il faudrait tout de même qu'il y ait une espèce
d'égalité; si la femme doit donner, elle va recevoir, elle va
partager les crédits de rentes et vice versa.
Alors, je pense qu'on est vraiment la seule place, on reste la seule
province où on ne permet pas le partage des crédits de rentes. Je
pense que cette loi, ce projet de loi nous permet justement de prévoir
que les gens peuvent se mettre d'accord, peuvent le faire par convention et
qu'ils devraient le faire. Je souligne l'importance et la
nécessité urgente de prévoir ça car, si on le met
dans la loi, non seulement les époux qui le voudront pourront le faire,
mais cela va aussi aider les juges à reconnaître la
nécessité et l'importance de ne pas oublier, lors des divorces,
le fait qu'effectivement les droits à la retraite sont un bien
important. Le législateur doit y penser et tout le monde doit y penser
lors de la dissolution du mariage. (16 il 30)
Le Président (M. Lecierc): Puisque votre temps de parole
est terminé, est-ce que vous pourriez conclure, s'il vous
plaît?
Mme Grassby: C'était ma conclusion.
Le Président (M. Lecierc): C'était votre
conclusion. Je vous remercie. M. le ministre.
M. Bourbeau: Oui. M. le Président, on peut conclure,
à la lecture du mémoire de la Fédération des femmes
du Québec, qu'en principe elle appuie le projet de loi tout en
soulignant que les dispositions minimales profiteraient probablement à
un petit nombre de femmes seulement. La loi ne fait pas de discrimination
sexuelle, mais elle ne contient pas de dispositions sur le partage des
crédits de rentes entre les conjoints - on vient d'en parler abondamment
- sur l'information au conjoint, qu'on voudrait voir améliorer, et sur
l'indexation. La Fédération se dit cependant en accord avec
l'implication des participants à la gestion des fonds.
J'ai écouté avec beaucoup d'attention les plaidoyers que
vous venez de faire en faveur du partage de la rente lors d'un divorce.
Effectivement, il n'y a présentement rien dans la loi qui prévoit
un tel partage des crédits de rentes entre conjoints, mais vous savez
sûrement autant que moi que ce dossier est tout à fait
d'actualité; il ne peut pas être plus d'actualité que
ça. Pour nous, le dossier des droits économiques des conjoints
comprend tout un ensemble de choses, dont, entre autres, le partage des
crédits de rentes entre conjoints et d'autres actifs, bien sûr.
Tout ce que je peux vous dire, c'est que c'est par le biais de ce dossier que
nous croyons qu'une solution devrait être apportée aux
problèmes que vous évoquez. Espérons que d'ici peu de
temps le gouvernement sera en mesure de faire connaître ses intentions
à ce sujet.
Vous avez parlé de l'indexation en évoquant que ça
se faisait en Ontario. Effectivement, l'Ontario a ouvert, un peu timidement, la
porte de l'indexation. Le projet de loi n'en parle pas, parce que nous n'avions
pas l'intention de parler de ce sujet ni de la disposition des surplus
d'actifs. On verra au cours des prochains mois. Nous avons l'intention de
consulter, au cours des prochains mois, principalement au sujet des surplus
d'actifs et de leur disposition. On verra, à ce moment-là, si oui
ou non le gouvernement voudra également s'avancer sur la question de
l'indexation. Pour l'instant, disons que les efforts du gouvernement portent
sur la refonte de la loi comme telle, et les autres sujets seront ou pourront
être discutés dans les prochains mois, probablement à
l'automne.
Vous soulevez des commentaires au sujet de la question de la
définition du conjoint. Nous avons l'intention de clarifier la
désignation de conjoint pour bien souligner que l'on vise l'homme et la
femme. Quand on parle de conjoints, on ne vise pas des individus du même
sexe, mais un homme et une femme qui vivent maritalement ou qui cohabitent. On
va trouver une formule peut-être un peu plus claire pour bien clarifier
l'intention du législateur, mais je
confirme que nous visons les conjoints de sexe opposé.
Maintenant, vous avez également soulevé un point
intéressant, c'est la première fois d'ailleurs que je le vois
dans les mémoires, c'est la possibilité de fournir de
l'information au conjoint sur celui qui est inscrit au fonds de retraite. C'est
la première fois qu'on nous fait une observation semblable. Je dois dire
que cela m'étonne un peu. Au premier chef, on est porté à
penser qu'en principe, quand on donne de l'information à un travailleur,
on se trouve à informer l'ensemble de ceux qui, dans la famille, ont un
intérêt à la chose. Cela présuppose
évidemment que l'information ne transiterait pas très bien entre
le travailleur et son conjoint. Cela réapparaîtrait un peu lourd
de prévoir systématiquement une double information, tant au
travailleur qu'au conjoint. Ainsi, il faudrait aussi tenir à jour un
fichier de l'évolution des conjoints. Je ne dis pas non. Il serait
peut-être plus facile de penser qu'on pourrait donner l'information
à la requête d'un conjoint dans des cas où le conjoint le
demanderait. À ce moment-là, il faudrait peut-être faire
les vérifications d'usage pour s'assurer que ce soit le vrai conjoint.
D'autre part, il faudrait également vérifier avec la Commission
d'accès à l'information si on a le droit de faire de telles
communications. On me signale que, de toute façon, tout conjoint qui
reçoit une rente a évidemment droit à l'information. Si je
comprends bien votre point, selon vous, on devrait faire parvenir de
l'information à un conjoint alors que c'est le participant ou le
retraité qui reçoit la rente.
Mme Busque: Ce n'est pas nécessairement le conjoint au
moment où il reçoit la rente, mais bel et bien, comme vous le
dites, que le conjoint d'un participant ou d'une participante...
M. Bourbeau: D'un travailleur.
Mme Busque: ...ait accès à l'information. Que celui
qui répondra à la définition de conjoint qui sera dans le
projet de loi ait accès à l'information qui le concerne.
M. Bourbeau: Même au moment où le travailleur est en
emploi et qu'il paie ses cotisations? Dès ce moment-là?
Mme Busque: Oui. Il n'est pas nécessaire de prévoir
que cette information circule "at large", en dehors de l'entreprise en
question. C'est quand même de l'information qui n'est habituellement
divulguée qu'au sein de l'entreprise, mais on demande que les personnes
qui en font la requête puissent avoir accès à cette
information, comme personnes intéressées.
M. Bourbeau: II y a des implications juridiques qu'on va
vérifier. Quand même, ces renseignements sont de nature
personnelle. Il ne faudrait pas que ce soit ouvert ainsi à tout le
monde, quoique je reconnaisse qu'un conjoint, ce n'est pas tout le monde. Il
faut d'abord s'assurer que la Régie a le droit de donner ce genre
d'information à une tierce partie et, si elle en avait le droit, que des
mécanismes de contrôle soient mis en place pour que l'information
se rende bien à la bonne personne. Disons qu'on prend note de la
suggestion. On va l'évaluer.
Mme Busque: Quand on parle d'information, on ne veut pas dire non
plus nécessairement et uniquement: Combien j'aurais si mon mari mourait?
À quel niveau en est rendu le plan de retraite de mon conjoint? C'est
plutôt que de l'information sur les mécanismes et sur le
fonctionnement soit accessible.
Mme Grassby: M. le ministre, dans la loi fédérale
sur les normes de prestation de pension, je pense qu'on prévoit que, sur
demande d'un conjoint, l'administrateur doit donner de l'information. C'est
quand même plus restreint que de donner de l'information
nécessairement aux deux, chaque année. C'est assez
précis.
M. Bourbeau: Très bien, on va vérifier cette
suggestion. Le temps partiel. Selon vous, très peu de femmes pourraient
avoir accès au régime, étant donné la
mobilité très grande, le fait que les femmes ne demeurent pas,
d'après vos prétentions, à un emploi très
longtemps. Alors, dans le régime complémentaire - je sais que
vous avez proposé de modifier le régime général des
rentes du Québec, mais dans le régime auquel on travaille
présentement, le régime complémentaire de retraite -
est-ce que vous trouvez que d'autres façons de procéder
pourraient être envisagées pour améliorer cette
carence?
Mme Busque: Je dirais qu'on ne voit pas, effectivement, comment,
à l'intérieur des régimes complémentaires, ce
serait véritablement possible de le faire. Évidemment que les
entreprises qui permettent d'adhérer après un an... L'employeur
peut toujours bonifier son régime, il n'est pas obligé de
respecter cette règle, mais, en même temps, on est sensibles
à l'argumentation qui nous a été apportée, à
savoir que les employeurs, très souvent, tenaient à voir dans
quelle mesure un employé serait un employé stable dans
l'entreprise. On revient encore avec la question des régimes publics, ce
qui demeure peut-être la seule voie pour ces travailleuses.
M. Bourbeau: La loi prévoit que le conjoint peut renoncer
à la rente, moyennant quoi il y a une bonification, évidemment,
de la rente. Ce matin ou hier, je crois, le Conseil du statut de la femme a
demandé qu'on lui enlève ce droit, cette faculté de
pouvoir renoncer. C'est à l'article 86 du projet de loi qui dit: "Le
conjoint d'un participant... peut, avant la date où débute
le service de la rente du participant, renoncer à ce droit, ou
révoquer cette renonciation, à condition que l'administrateur en
soit informé avant cette date." Évidemment, cela a pour effet de
bonifier la rente.
Mme Busque: C'est évident qu'on peut penser que cette
renonciation peut prêter à certaines manipulations et, dans ce
sens, ça peut, effectivement, être dangereux. Mais c'est d'autant
plus Important, justement, que les conjoints aient une pleine Information pour
qu'au moment où une renonciation se fait, ce soit un geste
éclairé qui tienne compte d'une situation spécifique dans
un couple. Si on y renonce parce que le conjoint qui est non participant est,
je ne sais pas, dans un mauvais état de santé et qu'on est
certain qu'il ne sera pas le conjoint survivant, par exemple, ce qui augmente,
par le fait même, la prestation du participant, à ce moment, je
pense qu'il faut éviter qu'il n'y ait ce genre de manipulation, et la
façon d'éviter ça, c'est de s'assurer que l'information
soit donnée d'une façon adéquate.
M. Bourbeau: Le fait d'enlever la possibilité de renoncer
nous apparaissait un peu paternaliste, puisqu'on ne laisserait pas la
possibilité à un conjoint d'exercer un droit. On pourrait
concevoir des cas, par exemple, où un participant a de fortes assurances
sur la vie, et qu'alors on déciderait de renoncer au droit de survie
à la rente pour bonifier la rente pendant le vivant du participant ou du
retraité, sachant qu'au décès les assurances sur la vie
prendront le relais. Je voulais simplement savoir si vous endossiez cette
demande du Conseil du statut de la femme, mais je crois que vous semblez
plutôt... Enfin, je déduis que vous préférez
conserver le droit de pouvoir renoncer, mais en s'assurant que l'information
soit adéquate. Est-ce que je me trompe en disant ça?
Mm» Busque: C'est à peu près exact. Je n'ai
pas vu le mémoire du Conseil du statut de la femme, mais je ne doute pas
qu'on soit sensibles aux arguments qu'il a amenés. Si c'est une crainte
de manipulation de la part du conjoint participant à l'égard de
l'autre conjoint, je suis sensible, et je pense qu'on le sera toutes, à
ce genre d'argument. Nous apportons un point de vue qui est la
possibilité que cette renonciation se fasse parce que, dans certains
cas, elle est peut-être utile, mais, encore une fois, si elle est faite
dans l'ignorance des répercussions, on manipule alors
véritablement quelqu'un. Donc, on souhaite qu'il n'y ait pas
d'ouverture, au moins dans la loi, à cette manipulation.
M. Bourbeau: On me signale que mon temps est
écoulé. Je ne voudrais surtout pas m'attirer les foudres de la
députée de Maisonneuve. Alors, je vais lui laisser la parole. (16
h 45)
Le Président (M. Leclerc): Mme la députée de
Maisonneuve.
Mme Harel: Le ministre veut faire croire que je suis un peu
mégère. Je veux, M. le Président, saluer la nouvelle
présidente de la Fédération des femmes du Québec,
Mme Middleton-Hope, et Me Grassby, et vous allez me permettre de rendre hommage
à Mme Busque. Je sais que vous lui avez rendu hommage au cours de votre
congrès qui s'est terminé en fin de semaine passée. Elle a
été nouvellement nommée vice-présidente du Conseil
consultatif canadien sur la situation de la femme. Je crois qu'elle est
reconnue par nous toutes au Québec comme l'une de celles qui, dans ces
années difficiles, a malgré tout fait progresser le dossier de la
cause des femmes. Alors, je veux qu'elle sache que j'ai beaucoup regrette de
n'avoir pu assister à la soirée d'hommages qui lui ont
été rendus par le mouvement de la Fédération des
femmes du Québec.
Le ministre vous a fait part de son désir de consulter l'automne
prochain. Chaque fois qu'il en parle, j'ai comme l'impression qu'il est au pays
des merveilles et qu'il se prend pour Peter Pan parce que les
probabilités de consultations sur la disposition des surplus et sur
l'indexation sont à peu près les mêmes que celles d'aller
ensemble à Walt Disney, c'est-à-dire à peu près
nulles. À 95 %, l'automne prochain sera consacré à
l'échéance électorale. Le premier ministre lui-même
l'a annoncé. Alors, quand cela vient du premier ministre, je suis
surprise que son ministre n'en prenne pas bonne note et continue d'annoncer une
consultation pour l'automne prochain.
Là, il ne faut tout de même pas nous prendre pour des
enfants, il est évident que sur cette question le gouvernement a
retardé les échéances de façon qu'il ne puisse pas
faire connaître véritablement ses propositions avant
l'élection. Il invoque la comparaison avec l'Ontario qui continue de
consulter, mais la loi est déjà adoptée depuis 1987. La
différence, c'est que l'Ontario consulte sur une proposition
d'indexation et une proposition de disposition de surplus. Au Québec,
nous n'avons ni l'une, ni l'autre. C'est le néant. On ne sait pas. Et
plus les travaux de la commission se poursuivent, plus je me rends compte que
sur l'indexation je ne sais même pas si, en principe, le ministre pense
qu'il en faut une. Alors il faudrait clarifier cela d'ici à la fin de
nos travaux, parce qu'il y en a quand même eu pendant quatre ans. Il faut
quand même se répéter, et on aura l'occasion, sans doute,
avec le groupe qui vous suivra, de rappeler que pendant plusieurs années
le prédécesseur du ministre qui avait la responsabilité,
qui était porteur du dossier, invoquait qu'il ne pouvait pas nettoyer ou
rajeunir toute cette loi sur les régimes complémentaires parce
qu'y avait d'abord la priorité de son gouvernement à
réaliser, celle de l'intégration des femmes au
foyer à la Régie des rentes du Québec.
Tantôt, je vous ferai part des déclarations officielles que
faisait son prédécesseur à cet effet dans The
Gazette.
Alors, on en est maintenant, quatre ans plus tard, au néant
devant le dossier de l'intégration des femmes au foyer à la
Régie des rentes du Québec, puis à un report de deux
questions qui étaient sujettes à la consultation il y a quatre
ans, celles de l'indexation et de la disposition des surplus. Je prends bonne
note que vous souhaitez l'indexation et je veux simplement vérifier que
vous soyez de la consultation. Le ministre n'a pas encore annoncé que la
consultation serait publique sur ces deux questions essentielles, et je
souhaite qu'elle le soit. Étant entendu que ce n'était pas
évident que vous soyez des nôtres cette fois-ci, je souhaiterais
que ce soit confirmé que vous y soyez la fois d'après.
Alors, sur la question que vous abordez - je vous remercie car votre
document est complet - vous avez ajouté à la fois les analyses
qui avaient été faites en ce qui concerne la rente du conjoint et
diverses analyses, dont une intéressante qui s'intitule: "Droits
économiques des conjoints, proposition du gouvernement du
Québec", des commentaires relativement à la proposition dans un
document signé par une entreprise, je pense, Me Mireille
Deschênes, conseillère chez Mercer. Je voudrais revenir
là-dessus parce que vous avez sûrement pris connaissance de
l'article 88 du projet de loi. Je veux vous en entendre parler parce que le
ministre dit que ce n'est pas ici qu'on va décider, ça sera
ailleurs, peut-être que ça se décide d'ailleurs maintenant
parce que c'est au Conseil des ministres au moment même où on se
parle. Donc, il dit: Je n'ai pas besoin d'en parler dans mon projet de loi. Je
veux vérifier avec vous si vous avez la même
interprétation. L'article 88 dit: "Le droit à la rente au
conjoint s'éteint par le divorce, l'annulation de mariage ou, dans le
cas du conjoint non marié, par la cessation de vie maritale". Donc, Me
Grassby, croyez-vous qu'il faut prévoir une modification?
Mme Grassby: Justement, j'allais faire le commentaire quand le
temps de M. le ministre s'est terminé. Aussi, il faut faire un
changement à l'article 88 parce qu'il n'y a vraiment aucune raison, si
quelqu'un prend sa retraite et divorce par la suite, que son épouse
perde le droit à la rente. Je pense que c'est quelque chose qui, dans
les autres provinces, n'est pas inclus dans la loi et il n'y a pas de raison
qu'au Québec la femme qui divorce après la retraite de son mari
perde ce droit à la rente. Je pense que c'est un des commentaires qu'on
a voulu... C'était ma tâche de vous l'apporter et je ne l'ai pas
fait, mais c'est essentiel qu'au Québec on fasse comme ailleurs et qu'on
permette au conjoint survivant ce droit à la rente même si le
divorce a eu lieu après la retraite.
Mme Harel: Donc, c'est important que le ministre ne
transfère pas la responsabilité de la décision uniquement
ailleurs. Vous disiez tantôt, Me Grassby, qu'à votre bureau vous
receviez des personnes qui pourraient éventuellement partager, les
parties étant même susceptibles de l'accepter si tant est que le
droit leur soit ouvert. Cela veut donc dire que, même dans l'état
actuel des choses, même si le Conseil des ministres et le clan des
ministres réfractaires refusaient le partage des biens familiaux ou
refusaient d'inclure les régimes privés dans le partage,
même à ça, le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu, dans son projet de loi 116, aurait la
responsabilité de ne pas empêcher un tel partage si les parties en
conviennent. Est-ce ça que je dois comprendre?
Mme Grassby: C'est exactement ça parce que c'est le genre
de partage qui est extrêmement difficile à faire si la
méthode technique n'est pas incluse dans la loi. C'est pour ça
que nous y tenons et aussi on tient au fait que si un divorce a lieu
après la retraite, l'épouse ne perde pas nécessairement le
droit à la rente, parce que, ailleurs, elle ne le perd pas.
Mme Harel: Vous savez, dans le projet de loi 58 qui a servi,
d'une certaine façon, de décalque, malgré tout, il y a
quelques reculs, l'un portant sur les régimes paritaires, les
comités paritaires de retraite, et l'autre portant justement sur cette
question de l'extinction ou pas du droit. C'est à l'article 104, si
jamais vous voulez vous retrouver, dans le projet de loi 58. Voyez-vous, dans
le mémoire que vous déposez, vous avez fait
référence à la loi fédérale. Dans la loi
fédérale, il y a l'article 25 qui édicté que les
droits à la rente sont assujettis au droit provincial. Vous dites que:
"le droit québécois ne reconnaît pas le partage des droits
à la pension et un tribunal québécois ne peut pas ordonner
le partage des droits accumulés dans un régime de retraite
assujetti à la loi fédérale".
Mme Grassby: C'est exact.
Mme Harei: Donc, même si, dans notre régime de droit
familial, il n'y a pas de partage automatique, il faudrait - c'est ça
qu'il faut faire comprendre au ministre - quand même que les dispositions
de son projet retiennent la possibilité de le faire. C'est bien
ça?
Mme Grassby: C'est exact.
Mme Harel: C'est quand même très utile que vous
soyez venues nous rappeler cette dimension parce qu'on allait
l'échapper, finalement, uniquement au profit d'une décision qui
allait être prise ailleurs.
Il y a une autre question, peut-être avez-vous eu le temps de
l'examiner à la Fédération,
c'est celle de la dévolution. Vous dites: "II faut donc inclure
les droits à la pension parmi les biens familiaux". C'est sûr que
ça se discute ailleurs, mais aussi: "amender les lois régissant
les régimes de retraite afin de permetttre le partage des droits
à la pension à la source, à môme la caisse, et de
prévoir les règles de dévolution..." Ça peut
devenir très très complexe si ce n'est pas déjà
prévu. C'est ce qu'il faut comprendre. Prévu, ça veut donc
dire avec des régies qui sont aussi prévues. Est-ce que vous en
avez à privilégier? Est-ce que vous en avez à
proposer?
Mme Busque: Non, j'allais vous céder fa parole, Mme
Grassby.
Mme Grassby: Et moi qui pensais que vous écoutiez la
question.
Mme Busque: J'écoutais la question, mais je n'ai pas la
réponse.
Mme Harel: De toute façon, dans votre document joint
à votre mémoire, il y a une explication des règles
possibles, soit la méthode du partage des crédits de rentes, soit
la méthode d'une portion prédéterminée de la rente
ou ia méthode de la rente attribuée au conjoint dans un transfert
de montant global. En fait, vous parlez des trois formes.
Mme Grassby: II y a plusieurs façons et ce que je
pense qui va arriver, c'est qu'il y a une façon qui est plus pertinente,
dépendamment de l'âge des parties. La méthode "if and
when", c'est très pertinent si une femme ou le couple a 55 ans ou plus.
C'est beaucoup moins intéressant pour les deux si le couple a 35 ans.
Mais je vais vous assurer que demain, au nom du Barreau, Me Deschênes
sera ici.
Mme Harel: Je lui poserai les questions. Très bien. Sur la
question de l'information, vous dites qu'il faut donner l'information au
conjoint avant qu'il devienne survivant ou encore avant qu'il ait droit
à la rente, parce que, dans le fond, il a droit à la rente quand
il est conjoint survivant, sinon la rente, dans le projet de loi actuel, est
payée au participant. Alors, quelle forme voulez-vous que cette
information prenne? Le Conseil du statut de la femme nous a rappelé hier
une disposition des normes minimales qui n'est pas appliquée, qui n'est
pas connue et qui dit que lorsqu'une travailleuse enceinte prend un
congé de maternité, si elle cotise à son
régime, l'employeur est tenu, par la loi, de le faire aussi et, donc, de
cotiser sa propre part. Mais si elle ne le fait pas, l'employeur n'y est pas
tenu, non plus. Mais, comme plusieurs travailleuses ne le savent pas, elles ne
cotisent pas durant la durée de leur congé et, à ce
moment-là, elles perdent, malgré tout, ces crédits. Alors,
quelle sorte d'information souhaiteriez-vous? Qu'il y ait un dépliant,
une formule du régime de la Régie des rentes ou du régime
privé?
Mme Busque: Du régime privé. Je pense que, du
côté de la Régie des rentes, on fait de gros efforts avec
les programmes d'information aux cotisants, et tout. Donc, tout travailleur, de
toute façon, a accès... Du côté de la Régie
des rentes, je pense que les mécanismes d'information sont
établis, en tout cas, pour tout ce qui a trait à la rente
publique. Nous disons que, très souvent, dans les régimes
privés, l'employeur va être très réticent à
divulguer de l'information à quelqu'un qui n'est pas son employé
même si l'information concerne cette personne directement,
c'est-à-dire, dans le cas qui nous concerne ici, qui a qualité de
conjoint. Cette information peut être nécessaire strictement en
fonction d'une planification financière. Ce n'est pas évident,
non plus, que le conjoint participant, et lui-même a très bien
compris les mécanismes, est la meilleure personne pour transmettre
l'information. Donc, que cette information soit directement accessible au
conjoint qui en fait la demande.
Mme Harel: On me dit que mon temps est écoulé. M.
ie ministre a-t-il également épuisé le temps qui lui
était imparti? Alors, malheureusement, c'est tout le temps à
notre disposition. C'est bien court, surtout qu'il y a un problème qui a
été illustré ce matin par l'association qui
représentait les compagnies d'assurances, à savoir qu'il y a de
moins en moins de travailleurs et de travailleuses qui
bénéficient des régimes à prestations
déterminées parce qu'il y a une augmentation spectaculaire des
REER collectifs. Mais les REER collectifs ne sont pas réglementés
du tout, tandis que les autres régimes sont
surréglementés. En tout cas, c'est ce qui était leur
prétention. En d'autres termes, ils ont les mêmes avantages
fiscaux, exactement, puisque tout est déductible dans un cas comme dans
l'autre, mais dans ie cas des REER collectifs il n'y a là aucune
protection. Ce n'est pas bloqué comme épargne-retraite, ce n'est
rien de ça. Alors, j'ai l'impression que c'est un aspect... Ils nous
faisaient part que c'est surtout dans des entreprises de petite taille et c'est
surtout dans des entreprises, justement, où se retrouvent
concentrées les femmes. Je crois qu'il y a vraiment matière
à vigilance sur ce phénomène qui est en train
d'écarter, finalement, un grand nombre de travailleuses des avantages
des régimes complémentaires de retraite.
Je veux vous remercier pour votre présentation, pour le rappel
que vous faites des responsabilités que Ie ministre a, à
l'intérieur de son projet de loi, en matière
d'équité pour les conjoints.
Mme Busque: Est-ce qu'on pourrait juste ajouter une remarque?
Le Président (M. Leclerc): Avec le consentement.
Consentement.
Mme Busque: C'est qu'au moment où on a
rédigé notre mémoire on n'avait pas pris connaissance du
budget Wilson. Dans une certaine mesure, la question du partage des
crédits de rentes devient de plus en plus importante pour les femmes
parce que cette atteinte qu'on est en train de porter tranquillement pas vite
à l'universalité de la PSV risque de faire en sorte que les
travailleurs et les travailleuses vont devoir compter davantage dans l'avenir
soit sur les régimes publics, soit sur les régimes privés,
mais le régime universel de la PSV risque de disparaître. À
ce compte-là, un grand nombre de femmes vont se retrouver encore plus
pauvres qu'elles ne le sont déjà au moment de la retraite.
Le Président (M. Leclerc): M. le ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, il me reste à
remercier la Fédération des femmes du Québec pour sa
contribution substantielle au débat et à l'assurer que nous
allons certainement tenir compte des remarques qui ont été
formulées et des suggestions qui ont été faites.
Le Président (M. Leclerc): Mesdames, au nom des membres de
la commission, il me reste à vous remercier de vous être
déplacées pour présenter votre mémoire. Je vous
souhaite un bon retour à la maison. J'invite les représentantes
des Cercles de fermières du Québec à se joindre à
nous.
Nous suspendons nos travaux pour deux minutes.
(Suspension de la séance à 17 h 2)
(Reprise à 17 h 5)
Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il
vous plaît!
Je demanderais à chacun de bien vouloir reprendre sa place pour
que nous puissions recevoir le groupe des Cercles de fermières du
Québec qui sera représenté par Mme Noëlla Huot, Mme
Lise Nicole et Mme Kristiane Pilote que j'inviterais à la table des
témoins, s'il vous plaît.
Bonjour, mesdames. Bienvenue à la commission. Est-ce que vous
connaissez un peu les règles de procédure? Oui. Mme Huot, je
pense qu'elle est une habituée? Effectivement. Je vous incite à
les suivre. Chaque fois que vous avez à faire une intervention, s'il
vous plaît, bien vouloir donner vos noms. Cela rend plus facile le
travail des gens qui font la transcription des débats. Sans plus tarder,
je vous invite à présenter votre mémoire.
Cercles de fermières du Québec
Mme Huot (Noëlla): Bonjour à chacun et à
chacune. Je veux vous présenter Mme Kristiane Pilote qui m'accompagne.
Mme Lise Nicole qui devait être ici aujourd'hui, n'a pas pu venir nous
rejoindre pour une question de santé. Nous serons deux et nous allons
faire notre possible.
Les Cercles de fermières du Québec, un organisme inscrit
dans la tradition sociale de la province, ardent défenseur des
conditions de vie des femmes et de la famille, ont fait l'étude du
projet de loi 116. Ils viennent aujourd'hui apporter leurs commentaires et
recommandations au nom des 60 000 membres qu'ils représentent,
assurés qu'ils recevront une écoute attentive, provoquant ainsi
une sérieuse réflexion sur le fond du problème des
régimes de retraite.
Bien sûr, nous ne sommes pas des fiscalistes ni des
spécialistes dans le domaine des rentes, mais nous croyons important de
faire entendre la voix des femmes dans ce dossier. Nous ne relèverons
pas, non plus, tous les points du projet de loi, mais seulement ceux qui ont
fait l'objet d'un mémoire en 1984.
En 1984, les Cercles de fermières du Québec faisaient
paraître un mémoire sur les femmes au foyer et les régimes
de retraite. Nous recommandions alors la révision du droit matrimonial
pour y inclure les rentes de retraite comme actifs du ménage; le partage
égal entre conjoints des crédits de retraite, privés et
publics, à la retraite; le partage automatique des crédits de
retraite privés et publics lors d'un divorce; la rente d'orphelin
réajustée et indexée; la réforme en profondeur des
régimes de retraite, publics et privés; la participation des
femmes au foyer au Régime de rentes du Québec, moyennant un
crédit d'impôt et l'exemption pour personne au foyer
transformée en crédit d'impôt remboursable.
Cinq ans plus tard, à la lumière des lois adoptées
et du projet de loi 116 que nous avons à débattre, malgré
certaines lueurs d'espoir, nous devons admettre que nous sommes encore
très loin de l'atteinte de ce qui nous semblait et nous semble toujours
comme un seuil minimal en matière de régimes de retraite, de
fonds de retraite.
Qu'est-ce qu'un régime de retraite, sinon une assurance, une
façon de garantir un revenu de base à celles et à ceux
dont les ressources personnelles sont insuffisantes pour assurer sans trop de
heurts une retraite dans la dignité la plus élémentaire?
Or, nous sommes à discuter des régimes complémentaires
alors qu'une large part de la collectivité est exclue du régime
dit universel, le Régime de rentes du Québec.
L'équation travail-salaire peut sembler paradoxale dans une
société où le chômage sévit, dans une
société où l'on a découvert, comme le dit
Félix Leclerc, que "la meilleure façon de tuer un homme, c'est de
le payer à ne rien faire". Pourtant, cette équation
travail-salaire est inti-
mement liée à toute forme de régime de retraite:
les femmes accomplissant un travail non rémunéré au foyer,
par exemple, en savent quelque chose puisqu'elles ne sont pas admissibles au
Régime de rentes du Québec. C'est là un droit fondamental
de tout individu vivant dans notre société que celui de
prévoir l'heure de sa retraite et c'est un devoir de l'État de
l'y aider, ce pourquoi le Régime de rentes du Québec existe. Il
devient donc urgent que la femme, et pourquoi pas l'homme, qui exerce un
travail non rémunéré, travail qui a un effet direct sur sa
famille et son entourage, soit inscrite au RRQ. Après seulement
pourra-t-on parler plus librement des autres régimes. Malheureusement,
nous n'en sommes pas là et le projet de loi 116 nous le rappelle.
Que nous soyons bien comprises, le projet déposé par M.
André Bourbeau, ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu, vient effectivement corriger d'énormes
lacunes au système existant dont la désuétude a
engendré des injustices sociales terribles. Il n'y aura peut-être
plus de cas Singer au Québec, mais toutes les injustices ne seront pas
corrigées pour autant.
Pour nous comme pour d'autres, un régime de retraite, c'est de
l'argent en banque, c'est un salaire différé. Qui participe? Qui
gère? Qui bénéficie? Questions simples, réponses
complexes auxquelles le projet de loi 116 n'apporte pas toutes les
solutions.
Pour répondre correctement à la première question,
il faut d'abord qu'il y ait un régime complémentaire de retraite
sur les lieux de travail. Les citoyens corporatifs doivent aujourd'hui
comprendre que, parmi les rôles que la société attend
d'eux, celui d'appuyer leurs employés dans la quête d'une retraite
digne leur incombe autant qu'aux employés eux-mêmes. Si, de plus,
Us décident de participer au régime, nous comprendrons sans trop
de difficultés qu'il s'agit là véritablement de salaire
différé ayant une certaine incidence sur le salaire actuel.
Autrefois, un slogan publicitaire disait "Faites-le maintenant, payez
tard", mais aujourd'hui il est devenu "Payez maintenant, profitez-en plus
tard". La liberté de participer ou non de l'employeur, si elle doit
être respectée, entraînera nécessairement un
contrôle sévère de ta part de l'État.
Maintenant, si nous parlions de l'adhésion. Quant à la
participation des employés, même si les conditions minimales
d'admissibilité sont grandement améliorées, elles n'en
écartent pas moins une large part d'entre eux, notamment dans des
occupations généralement confiées aux femmes. Nous
trouvons que le délai de deux ans, autant dans le cas de la
participation que de l'immobilisation, est trop long. Nous souhaitons que les
femmes ne soient plus victimes de leur mobilité en emploi, quand on sait
que parmi les raisons évoquées par celles-ci pour quitter un
emploi, c'est la naissance d'un enfant qui vient au premier rang. Nous
recommandons, bien sûr, que le délai maximal soit d'un an pour
chacun des délais.
Considérant que les régimes complémentaires de
retraite s'adressent plus particulièrement aux travailleurs et aux
travailleuses dont les revenus sont plus que suffisants pour vivre, il nous
apparaît certain que les travailleurs et les travailleuses à bas
salaire seraient plus avantagés par le régime public. On sait
aussi que les régimes complémentaires de retraite ne sont pas
disponibles pour tous les travailleurs et travailleuses. Nous, les Cercles de
fermières, on demande qu'il y ait une bonification du Régime de
rentes du Québec afin de pallier ces deux inconvénients
majeurs.
Si on s'arrêtait à la discrimination selon le sexe, on voit
que le projet de loi 116 demeure silencieux sur cet aspect. Nous tenons
à préciser que nous dénonçons toute discrimination
entre les hommes et les femmes dans les régimes complémentaires
de retraite et demandons de retirer les méthodes, règles ou
facteurs qui sont utilisés aux fins du calcul des cotisations ou
prestations. La Charte canadienne des droits et libertés n'interdit-elle
pas toute discrimination basée sur le sexe? Comme il n'en est pas
question dans le projet de loi 116, nous en concluons que cela a probablement
été éliminé.
Dans la définition de conjoint - tantôt, la
Fédération des femmes du Québec en parlait - nous aussi
souhaiterions qu'à l'article 3.2 l'expression "sexe opposé", ou
une autre, soit ajoutée afin que ce soit plus précis.
Cotisations et intérêts. Au "qui gère", le projet de
loi 116 apporte certaines réponses, tout comme il apporte des
orientations à cette gestion et à sa rentabilité. Certes,
nous sommes loin des principes d'économie domestique, mais le pouvoir
collectif, surtout quand il est de nature économique, ne doit jamais
être inférieur au pouvoir individuel; sinon, à quoi
servirait-il? Les cotisants à un régime de retraite ont donc
droit à une meilleure rentabilité possible, laquelle doit
être garantie par un seuil minimal comparable à ce que, par
exemple, les institutions financières autorisent à leurs bons
clients pour un laps de temps raisonnable. Comme il n'existait pas d'obligation
de verser des intérêts sur les cotisations patronales et
salariales, nous sommes satisfaites que le projet de loi 116 veille à
corriger cette situation.
Indexation. Le projet de loi 116 n'indique aucune obligation quant
à l'indexation des rentes. Pour nous, cet aspect est assez important
pour que soient mises de l'avant certaines modalités qui pourraient
compenser la baisse de valeur de la pension à cause de l'inflation. Nous
recommandons donc d'instaurer une certaine indexation des régimes
complémentaires de retraite afin de sauvegarder le pouvoir d'achat des
bénéficiaires.
Prestations. Dans un contexte de chômage et de pénurie
d'emploi, la mise à la retraite anticipée est à ta mode;
parfois une bien triste
mode qui, souvent, diminue moralement et physiquement ceux qui y sont
contraints. Il faut pourtant prévoir pour ceux qui, tôt ou tard,
poursuivront leur travail bien longtemps après que la cloche de la
retraite aura sonné. Ce qui est aujourd'hui un encouragement à la
retraite pourrait alors devenir un encouragement au travail. La famille du
travailleur, épouse et enfants, a aussi à voir dans les
retombées d'un régime de retraite. Au moment du
décès, certes, et selon une formule équitable soit de
remboursement,- soit du bénéfice. Au moment de la rupture aussi,
cette forme contemporaine de décès, car ce "salaire
différé" était aussi pour assurer la vieillesse du couple.
Ce n'est pas une matière simple à légiférer, mais
il faut à tout prix trancher la question une fois pour toutes, le
patrimoine familial étant directement impliqué.
Alors, nulle trace dans le projet de loi 116 d'un partage possible des
crédits de rentes accumulés dans un régime
complémentaire de retraite. On sait qu'un autre ministère est
déjà impliqué dans ce dossier. On le comprend mais, pour
nous, les régimes complémentaires de retraite entrent dans la
catégorie des biens familiaux et devraient être non seulement
partagés au moment d'un divorce, mais aussi au moment de la retraite.
Les crédits de rentes provenant du Régime de rentes du
Québec sont déjà considérés comme des biens
familiaux et cela, peu importe le régime matrimonial, et sont
partageables a la rupture de l'union. Pourquoi les crédits de rentes
provenant d'un régime complémentaire de retraite feraient-ils
exception?
Nous nous étonnons qu'il y ait un traitement différent
entre les deux. Ces biens ne sont-ils pas des revenus différés?
Comme nous le mentionnions à la commission parlementaire sur les droits
économiques des conjoints à l'automne 1988, nous ne pouvons
accepter de voir exclus du patrimoine familial les régimes
complémentaires de retraite et les REER, les Régimes
enregistrés d'épargne-retraite. Nous croyons qu'ils ont un
caractère familial, car ils assurent au conjoint une partie du soutien
financier, au-delà des années de travail actif. C'est sûr
que nous demandons que les crédits de rentes d'un régime
complémentaire soient partagés automatiquement lors d'un divorce
ou à la retraite.
Nous tenons à souligner que le Régime de rentes du
Québec devrait comprendre la même clause qu'offre le Régime
de pensions du Canada quant au partage des rentes à la retraite.
Renonciation. Le projet de loi prévoit le droit de renoncer
à la rente de conjoint survivant. Nous croyons que ce droit de
renonciation soustraira bon nombre de femmes à cette amélioration
contenue dans le projet de loi. Nous croyons également que ce droit sera
sujet à des pressions indues de la part du conjoint. Nous recommandons
donc que cette possibilité de renonciation à ta rente de conjoint
survivant soit retirée, que la rente soit de même valeur, quel que
soit le conjoint qui survive.
La réforme de lois concernant les régimes
complémentaires de retraite apporte des améliorations sensibles
par rapport à la loi actuelle: par exemple, la
transférabilité, l'administration du régime,
l'intérêt sur les cotisations, etc., mais le projet de loi demeure
muet sur certains points. Outre le partage des crédits, l'indexation
obligatoire, aucune allusion n'est faite à la discrimination selon le
sexe qui a cours dans le calcul des rentes, ni à la question de la
propriété des excédents d'actifs qui n'est toujours pas
réglée; le moratoire sur cette question persiste encore.
Bref, nous souhaitons, d'une part, faire plus de place à un
régime universel comme le Régime de rentes du Québec et,
d'autre part, régir avec fermeté, sinon
sévérité, les régimes complémentaires de
retraite, pour que ceux et celles qui y participent ainsi que leurs ayants
droit en tirent un profit juste et équitable.
J'aimerais, en conclusion, ajouter qu'il est important que toutes les
femmes puissent bénéficier de rentes de retraite leur permettant
ainsi d'échapper à la pauvreté, ce qui est le lot d'un bon
nombre d'entre elles. Voilà pourquoi nous réclamons depuis si
longtemps que toutes les femmes au foyer adhèrent au Régime de
rentes de Québec et nous demandons que le gouvernement réalise sa
promesse faite lors de la campagne électorale de 1985 à cet effet
C'est toute la notion du mot "travail" qu'il faudra repenser dans notre
société, et nous croyons que c'est urgent. Merci.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie,
madame. M. le ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, il me fait plaisir de
souhaiter la bienvenue aux représentantes des Cercles de
fermières du Québec. En tant que seul ministre du gouvernement du
Québec qui a en poche sa carte de producteur agricole, je suis bien
placé pour...
Mme Huot: M. Bourbeau, est-ce que je pourrais vous dire juste un
petit mot?
M. Bourbeau: Oui.
Mme Huot: Les Cercles de fermières du Québec
existent depuis 74 ans et ne sont pas rattachés à la vocation
rurale.
M. Bourbeau: II n'y a aucune relation, du tout.
Mme Huot: D'accord. Cela va. Je voyais que vous auriez pu
mélanger...
M. Bourbeau: Non. Écoutez, je sais que...
Le Président (M. Bélanger): Je croyais qu'elles y
étaient rattachées. Je l'avoue humblement.
M. Bourbeau: Je sais que ce n'est pas relié d'une
façon absolue, mais vous ne me direz pas qu'il n'y a pas, parmi vos
membres, des gens qui sont dans le secteur agricole! Quand même)
Mme Huot: Oui. Comme ailleurs. M. Bourbeau: Comme
ailleurs. Mme Huot: C'est ça.
M. Bourbeau: Comme moi, je suis dans le secteur agricole et je
suis aussi ailleurs.
Mme Huot: C'est ça.
M. Bourbeau: Dans le rapport, votre organisme, d'une façon
générale, est d'avis que le projet de loi apporte des
améliorations sensibles par rapport à la loi actuelle, mais vous
constatez ou vous affirmez que le rapport reste muet sur certains points
particuliers qui vous intéressent d'une façon évidente,
comme l'indexation, le partage des droits à la retraite, lors d'un
divorce, entre autres. Je dois répéter ce que j'ai dit à
plusieurs reprises, que ce dossier du partage des droits à la retraite
est traité couramment, ce n'est pas un dossier qui est sur le "back
burner* ou le rond arrière du poêle, il est vraiment sur le devant
de la cuisinière, mais il ne fait pas l'objet d'un traitement
particulier dans ce projet de loi. Il sera traité dans un autre dossier
qu'on appelle le dossier des droits économiques des conjoints. Je
formule le voeu, comme vous, que nous soyons en mesure, dans les meilleurs
délais, de faire connaître la décision gouvernementale
à ce sujet. De toute façon, je pense qu'on en entendra parler
très bientôt.
Également, vous mentionnez dans votre mémoire votre
objection à ce qu'un conjoint puisse renoncer à la rente de son
conjoint. C'est un point de vue qui a été exprimé par un
autre groupe hier, je crois. Le Conseil du statut de la femme était du
même avis que vous hier. Cependant, la Fédération des
femmes du Québec divergeait d'opinion, semble-t-il. C'est un point de
vue intéressant, mais qui pourrait être qualifié d'une
certaine façon de paternaliste ou de maternaliste en ce sens qu'on
enlèverait à des gens un droit, le droit de renoncer ou non, sous
prétexte de mieux les protéger. Il pourrait quand même y
avoir des cas plus nombreux peut-être, de personnes, de conjoints qui
voudraient conserver ce droit. Si on l'enlève, évidemment, elles
ne pourront pas l'exercer.
Par exemple, prenons le cas d'un mari qui a de fortes assurances sur la
vie. Sa conjointe, sa femme, voulant bonifier la rente commune, la rente du
mari, déciderait d'y renoncer en se disant: Aussi bien avoir une rente
plus élevée maintenant, quand le mari est vivant; si je survis,
j'aurai les assurances. Il pourrait y avoir des gens qui fassent ce calcul,
c'est possible. Ce sont même sûrement des choses qui arrivent. En
enlevant le droit de renoncer, on enlève la possibilité de
s'ajuster à une conjoncture comme celle-là. Je ne sais pas ce que
vous pouvez ajouter là-dessus. Aimeriez-vous commenter davantage ce
sujet?
Mme Huot: Quand nous demandons cela, nous demandons que les
femmes soient protégées et qu'elles ne soient pas
intimidées ni forcées, dans certaines circonstances, à
renoncer à certaines choses auxquelles elles n'auraient pas
renoncé en d'autres temps. Nous voulons éliminer cette occasion
de manipuler certaines femmes qui plieraient facilement, parfois. Je pense que
vous comprenez ce que nous voulons dire.
M. Bourbeau: Oui, je comprends bien. Vous préférez
un surcroît de protection plutôt qu'un surcroît de droits.
Vous traitez aussi de la question des surplus, des excédents d'actifs.
Vous recommandez qu'on règle dans les meilleurs délais.
D'ailleurs, vous déplorez qu'on n'en parle pas. Je peux
répéter ce que j'ai dit. Les surplus, c'est un sujet qu'on a
délibérément gardé à l'extérieur de
ce dossier dans le but de tenter d'adopter ce projet de loi avant le mois de
juin. La députée de Maisonneuve va vous dire tout à
l'heure qu'il y a peu de chances qu'on puisse adopter quelque chose à
l'automne puisque, semble-t-il, elle nous annonce des élections pour
l'automne. Dans ces conditions, il est bien évident qu'il reste un peu
plus d'un mois avant la fin de la session. Adopter un tel projet de loi d'ici
à un mois, c'est déjà un bon contrat. Cela va demander un
travail assez important de la part de la commission et des
députés. Et, d'une certaine façon, cela va demander aussi
l'aide ou, enfin, la collaboration de l'Opposition. Il y a quand même
au-delà de 300 articles dans le projet de loi. Si on avait choisi d'y
ajouter des sujets aussi controversés que la propriété et
la disposition des surplus, la question des congés de cotisation et la
question de l'indexation, si on doit en parier, vraiment les débats
auraient été allongés d'une façon telle qu'on
aurait mis en péril l'adoption même de ce projet de loi qui, vous
le reconnaissez, apporte quand même une amélioration sensible par
rapport à la situation actuelle.
Nous avons donc opté pour une stratégie en deux temps,
deux mouvements, si vous voulez. Dans un premier temps, c'est la réforme
de la loi telle qu'on la présente aujourd'hui et, dans un
deuxième temps, à l'automne, nous entreprendrons des
consultations sur ce qui reste à régler, pour régler tout
cela à l'automne, possiblement. Maintenant, cela va dépendre
à quelle date la députée de Maisonneuve va convoquer les
élections. Si les élections étaient tôt à
l'automne, on aurait peut-être une session en octobre ou en novembre qui
permettrait de régler un certain nombre de problèmes. Par contre,
si les élections avaient lieu plus tard, il est possible
qu'on manque de temps et, dans ce cas, nous nous sommes gardé la
possibilité de prolonger le moratoire qui a gelé
l'excédent des fonds de retraite. Un simple décret gouvernemental
pourrait prolonger le moratoire, tel que l'Ontario l'a fait, après avoir
gelé l'excédent de l'actif. Ils ont maintenu ou prolongé
le moratoire.
Ce sont essentiellement, M. le Président, les remarques que
j'avais à faire, et il me fait plaisir de remettre la parole à
Mme la députée de Maisonneuve.
Le Président (M. Bélanger): Merci, M. le ministre.
Alors, Mme la députée de Maisonneuve.
Mme Harel: Je ne sais pas, M. le Président, si vous
consentiriez à entendre peut-être les remarques de Mme la
présidente, Mme Huot.
Le Président (M. Bélanger): Bien sûr. Je vous
en prie.
Mme Huot: Cela va, j'attends...
Le Président (M. Bélanger): Cela va? Bon.
Mme Harel: Dès l'ouverture, d'abord permettez-moi de vous
souhaiter la bienvenue parmi nous. Vous êtes, je le constate, une
habituée des travaux parlementaires. Je veux également souhaiter
la bienvenue à la personne qui vous accompagne. Une première
remarque, le ministre vous a dit, quant à la question du partage de la
rente de conjoint: Cela ne me concerne pas, c'est un autre dossier, celui du
partage des droits à la retraite. Cela l'intéresse, mais il ne se
sent pas concerné. Cela l'intéresse, ça le concerne et,
plus encore, il est responsable.
M. Bourbeau: Je n'ai pas dit ça. M. le Président,
je m'oppose à cela. On déforme mes paroles. Cela me concerne
beaucoup, sauf que ça ne fait pas l'objet du projet de loi qui est
devant nous.
Le Président (M. Bélanger): M. le ministre, vous
aurez en conclusion, tout à l'heure, tout le loisir de faire ces
corrections.
M. Bourbeau: M. le Président, je vais soulever une
question de règlement.
Le Président (M. Bélanger): Une question de
privilège.
Mme Harel: D'accord, c'est bien, je reprends donc exactement ses
dernières paroles. Cela ne concerne pas le projet de loi qui est devant
nous. C'est faux! L'article 88 éteint le droit à la rente en cas
de séparation ou de divorce et pour que les conjoints du Québec,
je le répète, soient sur le même pied que ceux des autres
juridictions dans les autres provinces, y compris la loi fédérale
qui, à l'article 25 prévoit que c'est la loi de la province qui
s'applique, il faut deux choses: il faut inclure les droits à la pension
parmi les biens familiaux partageables au moment de la rupture. Oui Cela
concerne ses collègues, mais il faut aussi amender les lois qui
régissent les régimes de retraite, afin de permettre le partage
des droits à la pension à la source. Et même si ses
collègues rejetaient la proposition qui est devant eux
présentement, on le sait, et au sujet de laquelle il y a toute une
controverse, même s'ils la rejetaient, le ministre aurait quand
même une responsabilité, celle de permettre, lorsque les parties
en conviennent, que cela se fasse. Pour ça, il faudrait qu'il amende
l'article 88 du projet de loi 116.
Mme Huot: Oui, et j'ai oublié de le dire, j'avais ma note
ici, il faudrait que ça se fasse comme pour le régime des rentes
du Québec, avoir la possibilité de demander le partage de la
rente privée, et d'accorder un certain temps pour le faire, comme au
régime public. Il le faut absolument, et je ne me pardonne pas d'avoir
omis ça tantôt.
Mme Harel: Ce n'est pas grave, c'est dit. Cela permet encore une
fois de répéter au ministre que ce n'est pas uniquement la
responsabilité des autres; c'est aussi la sienne propre, ne serait-ce
que lorsque les parties conviennent de le permettre, et quand un tribunal le
décide aussi.
D'autre part, il y a un autre aspect sur lequel je dois revenir, parce
que le ministre a dit, et tout de suite il vous a dit: Vous proposez qu'il n'y
ait pas de renonciation possible pour le conjoint - et là je trouve
qu'il fait un abus de langage - mais cela va atteindre un droit Non, ça
atteint leur liberté de renoncer, et la question est: Est-ce que cette
atteinte est justifiée ou non? Je lui rappelle une phrase bien connue
qui dit qu'entre le fort et le faible, c'est la liberté qui opprime et
le droit qui affranchit, n'est-ce pas? Cela revient à dire ceci:
L'exemple qu'il donne, l'assurance-vie, on reprend cet exemple. La personne se
fait dire par le participant: Écoute, chérie, j'ai une bonne
assurance-vie pour toi, alors renonce à la rente de conjoint. Mais,
évidemment, l'assurance-vie peut avoir un bénéficiaire
révocable, et chérie peut être remplacée par une
nouvelle amie, et elle perdrait a ce rnoment-là le
bénéfice de l'assurance-vie mais, également, elle aura
renoncé pour toujours au partage possible pour les années de vie
commune de la rente et chérie se trouverait perdante des deux
côtés. Alors, ce n'est pas à un droit auquel elle
renoncerait, c'est à sa liberté. Est-ce qu'il est souhaitable -
je pense que c'est la façon de se poser la question - qu'il y ait des
exceptions à la règle mais que la règle soit qu'on ne
puisse pas renoncer? Dois-je comprendre que c'est là... (17 h 30)
Mme Huot: Oui.
Mme Harel: ...la position des Cercles? Quant à la question
de la Régie des rentes pour les travailleuses au foyer, je vais vous
lire ce que le prédécesseur du ministre disait le 12 juin 1986,
lorsque mon collègue de l'époque l'interrogeait sur ce qui
arrivait avec les régimes complémentaires. Il disait, et je le
cite textuellement: "Je tiens à assurer que la priorité de
l'actuel gouvernement du Québec s'orientera vers l'égalité
des sexes face aux régimes de retraite. J'insiste et je le dis
très clairement, l'actuel gouvernement libéral utilisera toute la
marge de manoeuvre disponible en investissant non pas dans d'autres avenues qui
nous ont été suggérées par l'Opposition, comme les
questions de transférabilité, mais pour rendre le conjoint et la
conjointe au foyer admissibles au régime des rentes du Québec,
faisant de l'engagement du chef du parti libéral du Québec, avant
la fin du présent mandat, une réalité." C'était ce
qui était invoqué pour retarder le projet de loi qui, quatre ans
plus tard, est à l'étude aujourd'hui. Quel est l'état du
dossier? Vous l'avez suivi de près. Le gouvernement nous dit toujours,
quand on lui pose la question, qu'il vous consulte. Il en est toujours à
une consultation qui a eu lieu et à une qui viendra. Où en est-on
là?
Mme Huot: Le 25 avril dernier, nous avons rencontré M.
Robert Bourassa, justement pour lui demander où cela en était
rendu. On voulait avoir ta réponse. Il nous a dit qu'il maintenait sa
promesse mais quand, il ne le savait pas. Bien sûr, on ne veut pas faire
de chantage, ce n'est pas dans notre langage, mais nous avons dit à M.
Bourassa qu'il y a quatre ans, alors que le parti au pouvoir venait de dire aux
femmes au foyer qu'elles n'adhéraient pas au régime de rentes du
Québec, le Parti libéral qui était en campagne
électorale nous le promettait. Cela avait fait plaisir à nos
femmes et cela avait certainement influencé bon nombre de femmes
à voter de ce côté-là. C'est un peu comme du
chantage, mais on a dit que les fermières avaient bonne mémoire,
qu'on s'en souviendrait cette année parce que le gouvernement aussi aura
à rendre des comptes. M. Bourassa nous a dit: Je vous vois venir, je
vous vois venirl Mais la réponse, nous ne l'avons toujours pas. On
commence a être pas mal impatientes face à ça.
Mme Harel: Peut-être que le ministre qui est responsable du
dossier pourrait nous donner des réponses sur
l'échéancier.
Mme Huot: J'aimerais ça. Mme Harel: Nous aussi.
M. Bourbeau: Moi aussi. Je peux vous en donner si vous le
voulez.
Mme Harel: Alors, allez-y.
M. Bourbeau: M. le Président, vous me donnez la
parole.
Le Président (M. Bélanger): Je vous en prie. Mme la
députée de Maisonneuve vous y autorise.
M. Bourbeau: Ce que je peux vous dire, c'est que je ne peux pas
dire mieux que ce que le premier ministre a dit. Je pense que sa réponse
était vraiment la réponse du gouvernement.
Mme Harel: Vous savez, on a l'impression, dans ce dossier, que
des réponses comme celle-là, c'est une sorte de mépris
pour les gens, comme si c'étaient des enfants, qu'à force de
répéter une promesse qu'on n'a pas l'intention de réaliser
on finira par l'oublier.
Mme Huot: On ne l'oubliera pas, nous autres.
Une voix: II ne connaît pas les Cercles de
fermières.
Mme Huot: C'est que le gouvernement ne nous connaît pas,
s'il pense qu'on va l'oublier.
Mme Harel: Est-ce que vous avez eu des rencontres avec la
Régie des rentes du Québec pour connaître le point de vue
de la Régie sur ces questions? Est-ce que vous avez eu des rencontres
avec Mme la ministre déléguée à la Condition
féminine sur les différents scénarios probables? Est-ce
qu'il y a eu des scénarios qui vous ont été
présentés?
Mme Huot: Au mois de juin dernier, avec la
Fédération des femmes du Québec, l'AFEAS, les Cercles de
fermières du Québec, Mme Gagnon-Tremblay nous avait
convoqués pour nous présenter différentes personnes
d'autres ministères, pour seulement nous soumettre certaines avenues qui
ne concernaient pas spécialement les femmes au foyer, qui concernaient
les gens à l'heure de la retraite. C'était pour les messieurs et
pour les dames. Ce n'était pas spécialement pour les femmes au
foyer. À ce moment-là, rien n'a été retenu. De
toute façon, on ne nous a rien remis, on n'a pas eu de feuilles. Cela
nous avait été présenté seulement sur un tableau.
C'est seulement ça qu'on a eu. Si on a consulté des gens de la
Régie des rentes du Québec pour savoir si c'était
possible, c'est ce que vous voulez savoir, Mme Harel?
Mme Harel: Oui.
Mme Huot: Cela fait longtemps qu'on le demande, l'accès au
Régime de rentes du Québec et on pense que c'est possible. Mais
si M. Bourassa, dans sa campagne électorale, il y a quatre ans, l'a
promis, je pense que là, c'était
possible. Il devait y croire. S'il y en a un qui était au courant
des faits... Ce n'était pas le dernier venu en politique!
Écoutez, on y a cru et il devait y croire. Il n'a pas dû nous
donner ça comme un bonbon, je ne peux le croire.
Mme Harel: II annonçait, à ce moment-là, une
commission parlementaire pour envisager, disait-il, non pas l'objectif mais les
modalités, la manière de le faire dès l'élection de
son gouvernement.
Mme Huot: Oui.
Mme Harel: Cela fait trois ans et demi maintenant, et on est
à la fin du mandat; y croyez-vous encore?
Mme Huot: La foi commence à baisser. Quand même, on
ne lâchera pas prise. C'est une promesse qui a été
faite.
Mme Harel: L'autre question, c'est qu'à l'époque
vous vous rappellerez qu'il y a eu un livre orange qui s'appelait "Agir
maintenant pour demain" et qui contenait une analyse de cette question. Mme la
ministre déléguée à la Condition féminine a
fait état d'études nouvelles qui démontrent que ce ne
serait pas vraiment bénéfique pour les femmes. Enfin, elle a fait
état, dans le cadre d'une entrevue... Avez-vous eu accès à
ces études? Vous les a-t-elle transmises? Où en est-ce
présentement?
Mme Huot: Non, à la rencontre justement avec M. Bourassa,
le 25 avril, Mme Monique Gagnon-Tremblay était présente. Elle
nous a dit qu'elle avait des choses à nous soumettre mais qu'elle ne
pouvait les dévoiler tout de suite. Elle attendait. Cela pouvait aller
jusqu'au mois de juin avant de nous proposer quelque chose. Pour elle, elle ne
voyait pas que le Régime de rentes était vraiment possible
même si M. Bourassa lui demandait où ça bloquait. il lui
posait plusieurs questions. Elle nous a dit qu'elle avait des choses à
nous soumettre mais qu'elle ne pouvait les dévoiler tout de suite.
Alors, c'est ça.
Mme Harel: L'an passé, finalement, les scénarios
vous ont été transmis, comme vous le disiez, sur acétate,
rapidement, le lendemain, je pense, de la clôture de la session
parlementaire. Il faudrait s'assurer que, si des informations vous
étaient transmises, elles ne le soient pas au moment où la
Chambre ne siège plus et qu'il n'est plus possible de poser des
questions, au moment où le gouvernement n'est plus responsable devant
l'Assemblée des orientations qu'il prend. À ce moment-là,
c'est facile parfois. Les gouvernements ont la tentation d'attendre à
l'été pour communiquer des informations en espérant que
les nuits chaudes et humides fassent oublier leurs décisions. A-t-elle
précisé une date en juin?
Mme Huot: Non, au mois d'avril, elle nous a dit que ça
pouvait prendre quatre à cinq semaines. Elle nous a dit, en tout cas,
probablement à la mi-juin.
Mme Harel: À la mi-juin, la session se termine le 21 juin.
Essayez que ça ne soit pas le 22.
Mme Huot: C'est bien.
Mme Harel: Dans ce dossier, je pense que ça reste un
exemple qui illustre un discours avant les élections et,
évidemment, une façon différente de faire pendant et
après les élections. Sur cette question,
précisément, j'aimerais avoir votre point de vue. Le gouvernement
nous a dit, depuis deux mois maintenant, que de toute façon le partage
de la rente allait tenir lieu d'avantages suffisants. Pensez-vous que l'un des
dossiers, qui est le partage des rentes en cas de séparation, de divorce
ou au moment du décès, peut satisfaire la revendication de
l'intrégration à la rente pour les personnes au foyer?
Mme Huot: Le seul partage des rentes - nous le demandons aussi -
fait partie des choses que nous avons demandées qui
reconnaîtraient le travail des femmes au foyer, en tout cas, une plus
grande justice envers les conjoints, mais ça n'exclut pas l'action
à la Régie des rentes du Québec. On sait qu'en ce moment,
au Québec, pour reconnaître un travail, il y a juste le
Régime de rentes. C'est la seule mesure sociale universelle qui
reconnaisse que c'est un travail. Il n'y a pas autre chose qui reconnaisse que
c'est un travail. Alors, le travail qui est fait au foyer pour élever
des enfants et tout ce que ça comporte, il n'y a rien pour le
reconnaître. C'est pour ça que nous demandons, du moins, d'avoir
accès au Régime de rentes du Québec pour faire
reconnaître ce travail. Cela n'exclut pas toutes sortes de
reconnaissances comme le droit économique des conjoints, le partage des
rentes, etc. C'est tout un ensemble de mesures que nous demandons.
Mme Harel: Si je comprends bien, Mme Huot, et là, je veux
bien être certaine qu'on se comprend, vous ne demandez pas
nécessairement l'intégration pour l'ensemble des personnes au
foyer, mais pour celles qui font un travail socialement utile.
Mme Huot: Oui.
Mme Harel: C'est-à-dire que cela pourrait être, par
exemple, une reconnaissance pour le soin et l'entretien ou l'éducation
d'enfants de moins de six ans ou cela pourrait être une reconnaissance
pour l'entretien ou le soin de personnes en perte d'autonomie,
handicapées ou âgées. Il y a toute une différence
entre demander une rente lorsqu'il s'agit de deux adultes
consentants, dont l'un rend privément des services à
l'autre. Je ne pense pas que l'État ait, à ce moment-là,
à venir s'immiscer dans ce contrat entre les deux et à dire qu'on
va prendre des ressources collectives pour payer la rente de l'un qui est au
service exclusif de l'autre. C'est une chose. Mais l'autre chose est de dire:
On va reconnaître un travail socialement utile, par exemple,
auprès d'enfants de moins de six ans ou de cinq ans s'Hs sont à
la maternelle. On va reconnaître le travail fait auprès des
personnes âgées ou des personnes handicapées. Est-ce que
vous seriez prêtes à adopter un point de vue où ce n'est
pas la rente au foyer parce qu'on est au foyer, mais c'est la rente parce qu'on
joue au foyer un rôle socialement utile?
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée...
Mme Huot: Non. Dans notre mémoire, nous demandions qu'on
reconnaisse celles qui ont charge d'enfants mais aussi toutes celles qui,
à un moment dans leur vie, n'ont pas eu vraiment un choix de
carrière. Cela veut dire les femmes qui ont 45 ans, 50 ans et plus. Ces
femmes, à un moment donné... On n'a pas besoin de remonter aussi
loin que ça, mais, en se mariant, les femmes rentraient à la
maison et elles avaient des enfants. Alors, il faut penser à
celles-là aussi. Il ne faut pas qu'elles soient oubliées. Alors,
c'est pour cela qu'on demandait l'accès au Régime de rentes du
Québec. Il y a peut-être des moyens différents de le faire,
mais, en tout cas, c'est à ceux qui sont spécialistes
là-dedans de trouver la solution.
Mme Harel: On me dit que mon temps est déjà
écoulé.
Le Président (M. Bélanger): Déjà.
Mme Harel: Je le regrette beaucoup. Je vous remercie Mme Pilote.
Je ne sais pas si vous aviez quelque chose... Est-ce qu'on lui permettrait?
Avez-vous quelque chose à ajouter? Non. Mme Huot, merci pour votre
contribution à nos travaux.
Le Président (M. Bélanger): M. le ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, j'ai écouté
avec beaucoup d'intérêt les questions de la députée
de Maisonneuve, l'interrogatoire, plutôt, de la députée de
Maisonneuve en soulignant que quelques-unes des questions avaient l'air de ce
qu'on appelle des questions suggestives dans les procès. Ce que je peux
vous dire au sujet du dossier qui fait l'objet de votre préoccupation,
l'accessibilité des femmes au Régime de rentes du Québec,
c'est que le gouvernement qui nous a précédés a conclu
qu'y ne pouvait pas le faire ou qu'il ne voulait pas le faire. Nous nous sommes
engagés à tenter de le faire. Le premier ministre nous a dit que
c'était encore dans ses intentions.
Mme Harel: Pas à tenter, à le faire.
M. Bourbeau: Tout ce que je peux vous dire, c'est que le mandat
d'un gouvernement ne se termine pas après trois ans et trois mois. Il y
a encore du temps à venir. Alors, je pense qu'il n'y a pas lieu de
désespérer. J'espère que d'ici quelque temps - Mme
Gagnon-Tremblay vous a parlé de quelques semaines - le gouvernement sera
en mesure de faire des annonces qui, j'espère, pourront vous satisfaire.
Quant à moi, je tiens à vous remercier de votre présence
parmi nous et de la contribution que vous avez apportée au débat.
Merci.
Mme Huot: Je vous remercie beaucoup.
Le Président (M. Bélanger): La commission des
affaires sociales remercie les Cercles de fermières du Québec et
invite à la table des témoins le Syndicat des métallos.
S'il vous plaît! Elle invite le Syndicat des métallos, le syndicat
FTQ, à la table des témoins. Ce syndicat FTQ sera
représenté par M. Clément Godbout, M. Marcel Rivest et M.
Michel Blondin. Je vous prierais de vous approcher. (17 il 45)
Syndicat des métallos (FTQ)
Bienvenue au Syndicat des métallos. Vous connaissez nos
règles de procédure. Vous avez vingt minutes fermes pour la
présentation de votre mémoire. Je vais vous l'indiquer quand le
temps sera écoulé et, par la suite, il y aura une période
de discussion avec les membres de la commission.
Chaque fois que vous devrez prendre la parole, s'il vous plaît,
veuillez vous identifier, donner vos noms, pour les fins de transcription du
Journal des débats parce que les dames, ne vous connaissant pas, ont
bien des problèmes à vous identifier. Sans plus tarder, donc, je
vous invite à présenter vos délégués et
à présenter votre mémoire. Je vous remercie.
M. Godbout (Clément): M. le Président, on vous
remercie. Je voudrais vous présenter ceux qui m'accompagnent. À
ma gauche, Me Marcel Rivest; à ma droite, Michel Blondin, mon adjoint,
et Réjean Bellemare de notre service de recherche. Nous sommes
également accompagnés d'un groupe du Syndicat des métallos
de la région montréalaise et du Québec qui sont
préoccupés par les problèmes concernant la retraite.
Comme vous le savez, actuellement, les régimes de retraite
privés octroient des rentes équivalant à peu près
à 70 % du revenu précédant la rente, mais on retrouve la
plupart du temps ce type de régime dans le secteur public. On le
retrouve très peu dans le secteur privé.
On se souviendra que, lors de l'introduction du régime de
retraite dans le secteur public, les employeurs s'opposaient à ce que le
régime public soit généreux en alléguant que les
régimes de retraite privés compenseraient pour assurer aux
travailleurs un revenu décent à la retraite. En plus de constater
l'effet majeur des ravages causés par l'inflation, qui sont cruels pour
les retraités, on voit, contrairement aux régimes publics, qu'ils
ont été indexés; rares sont ceux des régimes
privés qui le sont et qui protègent adéquatement les
retraités contre l'inflation. L'expérience vécue
démontre que l'indexation obligatoire devrait être Imposée
par la loi si on veut protéger adéquatement les travailleurs. On
regrette que le projet de loi 116 n'ait pas pour objet de doter le
Québec d'une véritable politique en matière de retraite.
Bien que cette loi améliore la situation actuelle pour les années
à venir, elle demeure une loi qui établit des normes
minimales.
Dans le contexte actuel, les sujets les plus importants à
améliorer pour les participants à un régime de retraite
sont: l'appartenance des surplus lors de la terminaison du régime, les
congés de contribution des employeurs qu'ils prennent lorsqu'ils vident
les caisses de retraite pendant la vie du régime, l'abstention
d'indexation des rentes, la situation des participants lors de la vente de leur
entreprise et la participation des travailleurs à la gestion des fonds
de retraite. Dans les quatre premiers sujets que je viens de soulever, le
projet de loi 116 n'améliore pas la situation actuelle ou n'en traite
pas et, sur le dernier sujet, la loi apporte une certaine amélioration
mais, selon nous, ne va pas assez loin.
Les surplus des caisses, c'est un gros "motton". Tout à l'heure,
j'ai entendu le ministre dire à quelques reprises: on n'est pas ici...
On comprend cela, sauf que je ne suis pas certain qu'on nous offre un
véhicule dans le domaine des retraites. On met un peu d'essence, mais
peut-être de l'essence sans véhicule et on risque que nos
objectifs passent au feu si on ne fait pas attention.
Dans ce domaine, présentement, la loi indique simplement que
l'employeur a le droit de prendre les surplus à la terminaison s'il y a
le texte qui les lui attribue. Des abus se sont produits fréquemment
dans le passé lorsque des employeurs, en cours de régime, ont
unilatéralement et sans le consentement des salariés
apporté des modifications au texte du régime original en vue de
s'approprier des surplus alors que le régime original prévoyait
spécifiquement que les surplus appartenaient exclusivement aux
bénéficiaires. Ces amendements, que nous considérons comme
illégaux, n'ont pas fait l'objet d'étude approfondie de la
régie. La régie a regardé passer le train lorsque les
approbations des rapports et les terminaisons sont arrivées. Si aucune
contestation n'intervient présentement auprès de la régie,
on approuve de tels changements unilatéraux.
Le Syndicat des métallos, présentement, est Intervenu, en
tout cas, dans cinq dossiers qui représentent à peu près
35 000 000 $ pour des retraités ou ceux qui vont prendre leur retraite
où des employeurs veulent s'accaparer ou se sont accaparés des
surplus en amendant illégalement leurs fonds. Par exemple, on parle de
Singer - vous en avez entendu parler - Aciers Marshall, Orange-Maison, Les
mines d'amiante Bell et Lac d'amiante. Les mines d'amiante Bell, il ne faudrait
pas oublier que c'est nous. C'est la SNA, la Société nationale de
l'amiante.
Il est certain que plusieurs employeurs ont réussi à
s'approprier des surplus alors qu'ils n'y avaient pas droit. Nous demandons,
comme syndicat, que la liste des employeurs qui ont reçu des surplus de
caisse de retraite au cours des cinq dernières années soit
publiée pour que les travailleurs concernés puissent
étudier la légalité des agissements de ces employeurs.
Nous ne savons pas qui l'a retirée. La Régie ne nous le dit pas,
à moins qu'on ne le découvre par accident.
Un régime de retraite, c'est de fournir un revenu décent
aux travailleurs et aux travailleuses qui quittent le marché du travail.
Le but d'un tel régime n'est pas d'enrichir les employeurs.
Les employeurs mettent de l'avant l'argument que les surplus ont
été créés à même des sommes qui ont
été versées à la caisse de retraite et que
l'engagement qu'ils ont pris auprès des participants était de
fournir un certain bénéfice préétabli. En plus, ce
sont eux qui prennent les risques s'H y a insuffisance de fonds dans la caisse
de retraite.
Lorsqu'un régime est contributoire, par exemple, c'est la
situation dans la plupart des cas privés, il est difficile de comprendre
comment les employeurs peuvent prétendre que ce sont uniquement leurs
contributions à eux qui créent des surplus. De toute
façon, l'argument relatif à la prise de risques est plus
théorique parce qu'en réalité les régimes de
retraite privés sont évalués de façon fort
conservatrice et les déficits sont amortissables sur une période
de quinze ans. De toute façon, en pratique, on a constaté chez
nous que les régimes de retraite ont créé des surplus
plutôt que des déficits. Nous soumettons que le projet de loi 116
doit être modifié pour prévoir que les surplus
appartiennent exclusivement aux participants et qu'ils doivent servir
uniquement à augmenter les crédits de rentes.
L'existence du moratoire prévu à la loi 95 interdisant le
versement des surplus à l'employeur avait laissé l'impression que
le gouvernement est en période de réflexion sur le sujet et que
des changements importants seraient apportés au projet de loi 116.
Malheureusement, ce n'est pas la situation et nous le déplorons.
Même si la loi interdit aux employeurs d'accaparer des surplus
pendant la vie du régime de retraite, ceux-ci ont réussi à
contourner la
loi, par exemple, en prenant ce qu'ils ont convenu d'appeler les
congés de contribution. Il s'agit d'une autre facette pour les
employeurs de s'approprier les surplus et, petit à petit, ils vident les
caisses de retraite. Ce qui arrive, c'est que les travailleurs en paient la
note des deux côtés. Les employeurs profitent des surplus,
arrêtent de payer, on sèche tes fonds de retraite, l'indexation
n'est pas là et les travailleurs et les travailleuses qui prennent leur
retraite en paient la note. Donc, lis se font prendre des deux
côtés. Ils sont les véritables perdants.
Quant au moratoire 95 qui a été adopté, si je me
souviens, en décembre dernier, ce n'est peut-être pas écrit
comme cela dans notre mémoire mais nous le proposons de façon
très spécifique. Le ministre nous dit que le dossier des surplus,
I veut le regarder plus tard, mais nous voulons nous assurer que cela ne parte
pas. C'est l'essentiel même de nos garanties de retraite, les surplus. Il
faut que le moratoire soit là et demeure tant et aussi longtemps que le
problème des surplus ne sera pas réglé et il faut que le
moratoire soit amendé de façon à prévoir que les
congés de contribution des employeurs ne puissent pas se faire non plus
durant la période de l'application du moratoire. Ces deux aspects
doivent être couverts par le moratoire.
La situation que nous vivons doit cesser. De la même façon
que les surplus, à la terminaison du régime, devraient appartenir
aux participants, les congés de contribution de l'employeur devraient
être spécifiquement interdits dans le moratoire. Nous
suggérons que la loi soit amendée pour que les surplus ne
puissent servir qu'à titre de réserve pour les années
difficiles ou à indexer les rentes pour tenir compte de l'inflation.
La protection contre l'inflation. On vous en a parié et vous le
savez. Notre position comme syndicat à la FTQ et ailleurs, c'est qu'il
faut un régime qui nous assure une indexation pour maintenir le pouvoir
d'achat. L'Ontario a fait un bout là-dessus en disant: Le premier 1 %
n'est pas Indexé, Jusqu'à 8 %, 75 % de cela, ce n'est
peut-être pas assez. Il y a des choses qui sont intéressantes. Au
moins le principe est engagé, il faut le regarder.
Actuellement ce sont les employeurs qui vident les fonds de retraite
outrageusement, qui bénéficient de l'inflation, qui prennent des
congés de contribution, retirent des surplus lorsqu'on ne le sait pas et
on ne peut pas les en empêcher et ils paient des rentes avec des dollars
dévalués, finalement. La réalité vécue par
les retraités au cours des vingt dernières années
démontre la gravité de la situation et démontre
également que les employeurs n'indexeront pas facilement et
volontairement les régimes de retraite privés. Ils ne le font
pas. Il y a eu des grèves la-dessus. Nous ne les avons pas toujours
gagnées et nous allons continuer à nous battre, mais cela va
prendre une volonté politique en même temps pour l'assurer.
Dans un premier temps également, tous les surplus existant
présentement dans les caisses de retraite doivent servir, s'ils servent
à quelque chose, à indexer les régimes de retraite. Dans
un deuxième temps, nous croyons que le gouvernement devrait
légiférer pour rendre obligatoire l'indexation des rentes
privées. Le principe de l'indexation, comme je vous l'ai dit tout
à l'heure, était acquis en Ontario et dans d'autres provinces.
Nous recommandons au gouvernement qu'il amende la loi 116 pour inclure une
pleine indexation des retraites.
La participation des travailleurs à la gestion de leur
régime de retraite constitue à notre avis un point auquel on
devrait accorder une attention toute particulière. Un fonds de retraite
est créé pour le bénéfice exclusif des
retraités. L'administration du régime est faite à titre de
fiducie pour les participants. Il n'y a aucune logique pour justifier que les
participants n'aient pas le contrôle entier sur leur propre régime
de retraite. Une grande partie des abus commis par les employeurs, comme les
congés de contribution, l'appropriation des surplus, les amendements
illégaux au régime, les transferts excédentaires de fonds
lors de ventes, les fusions ou divisions de fonds de retraite, fusions,
séparations, multiplications, on a vu tout cela dans nos dossiers,
proviennent du fait que les employeurs ont agi seuls, hors de la connaissance
des travailleurs, des travailleuses et des participants au régime. Il
faut favoriser la circulation de l'information et la prise de conscience parmi
les participants de l'importance du régime de retraite. L'acquisition
d'une certaine expertise dans le domaine nous semble essentielle. Donc, il faut
qu'ils participent à la gestion. Ainsi, les régimes de retraite
seront placés à leur vraie place, à savoir qu'il s'agit
des conditions de travail les plus importantes pour un travailleur et une
travailleuse lorsqu'on parle d'épargne accumulée pendant la vie
de travail.
Le projet de loi 116 reconnaît l'intérêt des
participants dans leur recherche d'un régime de retraite et nous saluons
cette approche. Cependant, le Syndicat des métallos demande que le
projet 116 soit modifié pour prévoir que tous les régimes
de retraite doivent être administrés par les comités
paritaires de retraite, dont la moitié des membres sont nommés
par l'agent ou l'association accréditée - cela passe
singulièrement sous silence - et, à défaut, par les
participants. Là-dessus, j'aimerais qu'on en parle parce que
l'association accréditée a certainement plus d'outils,
d'équipements et d'expertise pour faire la vérification qu'un
travailleur et une travailleuse seuls devant l'employeur.
Une participation directe des travailleurs et de leurs
représentants à la gestion du régime constitue non
seulement un geste démocratique, mais aussi une grande garantie
additionnelle que les régimes de retraite vont vraiment servir les
intérêts des travailleurs et des participants qui prennent leur
retraite.
Lors d'une vente, la protection des participants n'a pas
été considérée dans le projet de loi 116. Il est
primordial de constater que la vente d'une entreprise peut avoir des
répercussions très sérieuses sur les droits acquis des
travailleurs ou d'un employé, ailleurs. L'exemple des 2000 de Thetford
est frappant. Actuellement, nous vivons toute une série de changements
dans notre société, une mutation importante qui fait qu'il
faudra, dans la loi 116, regarder ce qu'on peut faire là-dessus. On
assiste généralement à la terminaison de régimes de
retraite par l'ancien employeur, à la mise sur pied d'un nouveau
régime par le nouvel employeur et, même si le régime de
retraite du nouvel employeur est semblable au régime de l'ancien, il est
utile de noter que les employés perdent généralement des
gains importants a cause de la situation, dont, entre autres, les surplus
accumulés. Ainsi, les bénéfices acquis chez l'ancien
employeur ne seront pas améliorés dans l'avenir puisque
l'acquéreur n'a pas d'obligation de reconnaître normalement les
services passés chez l'ancien. Les améliorations futures ne
s'appliqueront qu'aux services acquis auprès du nouvel employeur.
Cependant, lorsqu'il y a terminaison d'un régime, les
crédits de rentes sont alors calculés sur une base de terminaison
c'est-à-dire sur te salaire de l'employé à la date
à laquelle ferme l'usine ou que le régime se termine,
c'est-à-dire de la vente de l'entreprise et non pas selon le salaire
projeté. Cela fait des surplus. Cette façon de calculer
crée automatiquement des surplus dans le régime, qu'on nous a
dit, en réalité, c'est une perte pour les participants à
cause de la terminaison du régime de retraite.
Les surplus créés par ces changements devraient servir
à augmenter les crédits de rentes des participants. Une autre
avenue à explorer serait de ne pas accepter la terminaison du
régime dans une telle circonstance et d'obliger le transfert de toute la
caisse de retraite chez le nouvel employeur. Une autre approche serait
d'obliger l'acquéreur à reconnaître, totalement et à
toutes fins, le service passé chez l'ancien employeur. Si des surplus
existent, ils devraient alors servir à bonifier les rentes.
La loi devrait également obliger l'ancien employeur à
garantir tous les paiements d'amortissement pour services passés non
encore payés dans la caisse au moment de la vente, parce que les fonds
de retraite, comme on le dit en anglais, ne sont pas toujours "full invested".
Ils ne sont pas toujours payés. Une telle clause permettrait
d'éviter que des employeurs accumulent les déficits pour ensuite
échapper à leurs obligations en vendant leur entreprise.
Le Syndicat des métallos recommande que le projet de loi 116 soit
modifié pour régler la situation défavorable des
participants lors de la vente d'entreprise.
En ce qui a trait à l'information, nous suggérons que
l'article 106 de la loi 116 soit amendé pour prévoir
spécifiquement que le relevé annuel qu'un administrateur doit
fournir à chaque participant contienne spécifiquement de
l'information sur le montant des surplus de la caisse, si l'employeur a pris
congé de contribution et le montant du congé de contribution.
De plus, ce sommaire devrait contenir les éléments
prévus à l'article 156 du projet de loi 116, relativement au
droit du syndicat et des participants actifs et non actifs à recevoir
cette information. Ces dossiers d'information devront aussi comprendre l'ancien
texte et le nouveau texte tel que modifié, et c'est là-dessus
qu'on se fait jouer des tours. La loi devra prévoir qu'à
défaut de fournir de telles informations les amendements demandés
ne pourraient pas arriver. Ça prend des dents à ce sujet, dans la
loi. (18 heures)
Nous suggérons également que l'article 108 du
régime soit modifié pour donner le droit aux participants non
seulement de consulter une disposition du régime, mais d'en obtenir une
copie; une photocopie de certaines feuilles n'est pas assez. Comme le
prévoit l'article 108, le travailleur est un participant actif, il a
droit à ces informations.
Le rôle des syndicats dans les régimes de retraite. Le
Syndicat des métallos trouve déraisonnable que les syndicats ne
soient pas reconnus dans le projet de loi 116 comme les mandataires des
participants qu'ils représentent à titre de syndicat
accrédité. Nous recommandons que le projet de loi 116 soit
modifié pour reconnaître aux syndicats leurs droits de
représenter et de défendre leurs membres, et d'être
considérés comme partie prenante au régime.
À titre de partie à part entière, le syndicat
pourrait avoir accès au texte du régime de retraite et à
tout autre document prescrit par le règlement. Il recevra aussi,
normalement, avis de terminaison du régime, copie du rapport de
terminaison et, de la même manière, le syndicat devrait être
convoqué à l'assemblée des participants, c'est lui qui
devrait nommer les représentants des participants au comité de
retraite.
L'article 34 indique qu'un employé n'acquiert pas, pendant deux
années civiles consécutives, des droits d'adhérer à
un régime. On pense que ça devrait être un peu comme dans
les conventions collectives. Chez nous, normalement, un travailleur a le droit
d'adhérer au fonds de retraite après sa période de
probation terminée.
Il y a un élément qu'il nous semble aussi important de
vous souligner, c'est celui de l'acquisition d'un droit à une rente
différée. Cela nous semble être lourd, compliqué,
peu facile d'administration; ça nous semble être un
casse-tête chinois. Je vais demander à Réjean Bellemare, de
notre service de recherche, de vous en parler.
M. Bellemare (Réjean): Réjean Bellemare, service de
recherche. Il semble que, dans le nouvelle loi, on ait réduit à
deux ans le temps
pour avoir des droits acquis à une rente différée.
On applaudit à ça, mais on aimerait que cette nouvelle option
s'applique à tout le service passé des employés. Au
chapitre VIII de la loi, Dispositions diverses et transitoires, on indique que
cette nouvelle option sera seulement applicable au service accumulé
à partir du 1er janvier 1990. On arrive à des situations assez
bizarres où un employé qui a travaillé pendant des
années pour un employeur se retrouve avec les mêmes droits acquis,
pour une rente, que son collègue qui est là depuis un an ou deux
seulement.
Comme indiqué ici, la loi complique encore plus les choses en
disant, à l'article 285, que s'il y a des modifications, des
améliorations aux prestations sur des droits acquis passés elles
sont acquises selon la nouvelle disposition de la loi, tandis que la base qui a
servi à l'amélioration sera acquise selon les anciennes
dispositions de 4510. Ce qui fait qu'un employé peut avoir droit, s'il a
vu sa rente augmenter de 4 $, aux 4 $ pour les dix ans où V a
été là, et seulement à 20 $ pour les deux ans
après que la loi est adoptée. Cela rend le calcul très
compliqué. L'administration de tout ça est très
compliquée et complètement ridicule, puisque les fonds sont
déjà mis dans les régimes de retraite pour payer tous ces
bénéfices. Donc, de rendre ça rétroactif à
tout le service passé ne devrait pas...
Le Président (M. Bélanger): Je vous inviterais
à conclure, s'il vous plaît.
M. Bellemare: C'est conclu. Notre demande va tout simplement dans
le sens que les deux ans de droits acquis soient applicables à tous les
services passés. Merci.
M. Godbout: Me Rivest aura la chance de conclure tout à
l'heure, mais je pense qu'on devrait un peu vous parler des surplus en cours de
régime et en amendement de régime. C'est fondamental. On veut en
parler, parce qu'on est pris avec des problèmes, et il y a des choses
qu'on veut vous dire là-dessus.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie
beaucoup. M. le ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, voilà un
mémoire intéressant, présenté d'une façon
énergique, c'est le moins qu'on puisse dire, avec conviction. On nous
demande effectivement des changements radicaux par rapport à la
situation qui existe jusqu'à maintenant. C'est une demande syndicale,
bien sûr. Si on avait à votre place le Conseil du patronat, et on
l'a eu avant vous... Évidemment, vous pouvez comprendre que les demandes
étaient un peu différentes. Tout ça est de bonne guerre,
comme on dit. Il s'agit de fonds de retraite contributoires, en
général, auxquels les deux parties contribuent. Les patrons
contribuent autant que les travailleurs. Les statistiques pour l'an dernier
indiquent que, sur 3400000000$, 2000000000$ avaient été souscrits
par les employeurs et 1 400 000 000 $ par les travailleurs. Cela ne veut pas
dire que les travailleurs n'ont pas d'intérêt là-dedans, au
contraire, ils ont un intérêt évident. Ce sont, en fait,
ceux qui sont le plus intéressés quant à la destination
des fonds. Nous tentons, comme gouvernement, de faire en sorte de mettre sur
pied un système qui soit juste et équitable envers tout le monde
et, en premier lieu, envers les travailleurs. C'est pour eux que nous faisons
cette réforme. La plupart des modifications que nous proposons vont dans
le sens de bonifier la part des travailleurs, d'améliorer leur sort et
leurs droits. Alors je pense qu'on peut être assez rassurés
à ce sujet.
Maintenant, nous ne voulons pas non plus désintéresser
totalement les employeurs. Je ne crois pas que ce serait même dans
l'intérêt général du système que de sortir
les employeurs du régime, à toutes fins utiles. Il s'agit de
trouver une solution qui soit respectueuse des droits des deux parties et
susceptible d'amener un maximum de rendement et, forcément,
éventuellement, un maximum de prestations pour les travailleurs.
Je tiens à vous rassurer dès le départ en ce qui
concerne les surplus d'actifs. Il aurait peut-être été
possible de tenter de régler d'un seul coup les amendements à la
loi et toute la question des surplus d'actifs, la propriété de
ces surplus, la question des congés de cotisations à même
les surplus, la question de l'appartenance des surplus, la question du retrait
des surplus. On aurait peut-être pu parler de tout ça. Mais,
compte tenu du temps que nous avions devant nous, il nous est apparu
extrêmement dangereux de tenter de tout régler d'un seul coup.
Selon nous, en tout cas, selon les experts que nous avons consultés, il
est apparu que le risque que nous prenions est que nous n'aurions pas pu faire
tout ça au cours de la présente session et que le projet de loi
serait resté sur la table, comme cela a été le cas en 1985
lorsqu'on a déposé le projet de loi au mois de juin. Il ne
restait plus assez de temps et la loi est morte au feuilleton.
Il y a un dicton qui dit que: Qui trop embrasse, mal étreint. On
a tenté d'embrasser un peu moins, mais de passer au moins ce paquet, la
réforme de la loi, qui est assez important d'ailleurs: une loi qui a
au-dessus de 300 articles, et Dieu sait combien sont compliqués ce
projet de loi et ce domaine-là. On ne peut parler qu'en présence
de son actuaire, en général, parce que c'est un domaine qui est
très complexe. Nous avons donc préféré y aller avec
un projet en deux volets, en deux temps. Dans un premier temps, nous tentons de
modifier la loi, de l'améliorer d'une façon importante, pour
faire en sorte que les travailleurs puissent compter sur un régime de
retraite moderne, amélioré, qui leur permettra d'espérer
avoir une retraite décente.
Dans un deuxième temps - notre intention est de procéder
le plus rapidement possible - nous allons commencer à consulter sur la
question très importante de l'appartenance des surplus, sans
préjuger au départ en aucune façon de quelque conclusion
que ce soit. Je n'ai pas d'idée préconçue sur le sujet.
J'entends deux sons de cloche. D'une part, des patrons me disent: Les surplus
devraient nous appartenir. D'autre part, des employés me disent: Non,
les surplus doivent appartenir aux travailleurs. Je ne peux me prononcer,
à ce moment-ci. Le gouvernement ne peut pas se prononcer. Probablement
que la vérité se situe quelque part entre ces deux extrêmes
et nous allons certainement consulter les experts des deux côtés,
autant vos experts que les autres, pour tenter de voir clair dans tout
ça. Chose certaine, c'est que l'Ontario, qui a commencé avant
nous, n'a pas encore pris de décision. Ils sont en train de consulter,
après avoir réglé la loi, comme nous le faisons, sur les
surplus. La consultation qu'ils mènent ne nous laisse pas
indifférents ici parce que, en fait, c'est le même sujet, le
même problème qu'ils sont en train de discuter. Pendant que nous
réglons la phase 1 du projet, pourquoi ne pas écouter ce qui se
dit en Ontario, parce que ce sont les mêmes sujets, les mêmes
experts, et, lorsque nous serons prêts à procéder, nous
aurons l'expérience de l'Ontario. Nous pourrons ajouter à
ça l'expérience ou l'expertise que nous trouverons ici. En gros,
c'est ce que nous avons à l'esprit.
Maintenant, je vous rassure en ce sens que la loi 95, que nous avons
passée en décembre dernier - le moratoire qui met un gel sur les
excédents d'actifs, sur les surplus - ce gel va demeurer tant et aussi
longtemps que nous n'aurons pas trouvé une solution au problème
de l'appartenance des surplus, des retraits des surplus par les parties, les
congés de cotisation, etc. C'est donc dire que nous maintenons le gel de
tous les surplus tant que nous n'aurons pas trouvé une solution
définitive.
Donc, je pense qu'on peut dormir en paix, d'une certaine façon.
Personne ne se sauvera avec la caisse à partir de maintenant, à
partir du mois de novembre 1988, puisque le moratoire est en place. Même
les cas où il y a des actions en cours, les cas de Singer, etc., tout
ça serait sujet au moratoire si un jugement était rendu
entre-temps. Alors, je pense que pour ça, on peut dormir en paix.
Ceci laisse en suspens la question des congés de cotisation. Nous
avons jugé bon de ne pas modifier le statu quo en ce qui concerne les
congés de cotisation, c'est-à-dire que la loi actuelle
prévoit la possibilité de prendre des congés de cotisation
et cela s'inscrit dans la foulée des directives fiscales émises
par le ministère du Revenu, qui oblige, à toutes fins utiles,
d'utiliser les surplus, lorsqu'il y en a, pour éviter de mettre à
l'abri de la fiscalité et de l'impôt des sommes d'argent
importantes.
Donc, nous n'avons pas bougé là-dessus mais, comme notre
intention est de légiférer rapidement dans les meilleurs
délais, en tout cas en ce qui concerne les surplus, nous ne pensons pas
que cela puisse avoir des conséquences tragiques.
Maintenant, vous déplorez l'absence d'indexation. C'est la
même chose. Il n'en est pas question pour l'instant dans le projet de loi
et, si ce sujet devait faire l'objet de la considération du
gouvernement, ce serait dans la phase 2. Est-ce qu'il me reste encore du temps,
M. le Président?
Le Président (M. Bélanger): Oui, quatre
minutes.
M. Bourbeau: Je voudrais quand même revenir sur certaines
des remarques que vous avez faites. Vous avez parié des droits minimaux,
de l'adhésion et de l'acquisition. Dans le projet de loi, nous
prévoyons que, pour commencer à cotiser à un régime
de rentes, il faut avoir travaillé pendant deux ans. Vous proposez six
mois. La raison pour laquelle nous avons indiqué deux ans, c'est que
c'est le consensus auquel en sont venues toutes les provinces canadiennes,
ainsi que le gouvernement fédéral. C'est ce que nous avons
appelé le consensus canadien et nous tentons de nous coller un peu
à cette réalité.
Pour ce qui est de l'acquisition, c'est-à-dire le droit à
une rente, il sera acquis après deux années de cotisation mais
sans rétroactivité, c'est-à-dire qu'après deux
années de cotisation on a droit à une rente et cette rente,
évidemment, sera le résultat de ce qui sera mis dans la caisse, y
compris la partie de l'employeur et les intérêts au nouveau taux
qu'on prévoit, mais cela, sans rétroactivité. Cela veut
dire, par exemple, que si la loi entre en vigueur le 1er janvier 1990, une
personne qui cotise depuis deux années aura droit à la rente
dès le départ, mais non pas rétroactivement pour les
cotisations passées. Elle aura droit, pour le passé, à ce
à quoi elle avait droit sous l'ancienne loi et, pour l'avenir à
ce à quoi elle aura droit en vertu de la nouvelle loi.
Vous demandez plus d'informations aux participants, obliger
l'information sur les surplus et sur les congés de cotisation. Ce sont
des sujets qui seront traités lors de la préparation et de la
publication des règlements. Nous allons, éventuellement, faire
connaître les règlements. Nous allons procéder, selon la
Loi sur les règlements, à une prépublication et vous aurez
l'occasion, à ce moment-là, de faire connaître votre point
de vue sur la question. La même chose pour l'article 105, l'obligation de
préciser que les participants ont le droit de désigner des
membres au comité de retraite. Tout cela sera prévu dans les
règlements.
Toujours à l'égard de l'article 105, vous demandez
d'obliger la transmission de l'ancienne et de la nouvelle disposition. On parie
de l'information lors de modifications: Lors de modifica-
tions, obliger la transmission de l'ancienne et de la nouvelle
disposition et, à défaut, cette dernière n'entre pas en
vigueur. Je vous signale que le projet de loi prévoit l'accès sur
demande à cette information.
La consultation de documents. Vous voulez qu'on ait le droit de
consulter et d'obtenir copie d'une disposition. Je vous signale que la
consultation est prévue au projet de loi. Si l'administrateur du
régime n'accorde pas le droit à une copie de document, celle-ci
peut être obtenue auprès de la Régie, selon le projet de
loi.
En ce qui concerne le comité de retraite, vous demandez qu'il
soit obligatoire et paritaire et que les représentants des participants
soient nommés par eux-mêmes. L'article 146 du projet de loi ouvre
l'accès aux participants sur l'aspect de la gestion du régime.
Les intéressés participants peuvent convenir des modalités
et du type de représentations. C'est ce que prévoit le projet de
loi. Cela nous apparaît être une solution correcte. Le
comité de retraite ne sera pas paritaire. Ce n'est pas notre intention
de le rendre paritaire, mais il n'est pas obligatoire non plus dans
l'état actuel du projet de loi. Cependant, si les participants demandent
qu'un comité de retraite soit formé à la majorité
lors de l'assemblée annuelle, à ce moment-là, il y aura un
comité de retraite. (18 h 15)
C'est donc à la demande des participants que le comité de
retraite sera formé. Il sera obligatoire si les participants le veulent,
en majorité. C'est ce que nous avons prévu. Cela nous semble
quand même une grosse amélioration sur le statu quo et même
une amélioration par rapport à ce qui se fait présentement
en Ontario, où le comité de retraite n'est que consultatif. Le
projet de loi ne limite pas les participants quant au choix de leurs
mandataires ou représentants. On laisse aux participants le choix de
nommer leurs mandataires et on n'a pas prévu, par exemple, que ce soit
le syndicat qui nomme les représentants, mais plutôt les
participants à l'assemblée annuelle. Nous pensons que la question
des fonds de retraite est très complexe et qu'il y a de bonnes chances
que ceux qui se présentent à l'assemblée annuelle seront
ceux qui ont vraiment un intérêt marqué pour la chose.
Il serait donc Intéressant que ces travailleurs qui sont assez
intéressés pour se déplacer pour aller à
l'assemblée annuelle aient le mandat de désigner ceux qui
siégeront au comité de retraite. En gros, c'est un peu ce que
j'avais à l'esprit. Je ne sais pas si vous voulez réagir. Je
présume que vous voulez réagir par rapport à ce que je
viens d'affirmer. Je vous vois prendre des notes depuis tantôt. On
pourrait peut-être continuer.
M. Godbout: J'ai deux points rapides avant de passer à
Marcel. D'abord, je ne suis pas certain qu'on comprenne, à la lecture,
le comité de gestion, comme vous l'expliquez. Deuxième- ment, on
est convaincus d'une chose, c'est que vous placez de façon
systématique sur la voie d'évitement l'association
accréditée. Or, je vous pose une question, M. le ministre. Qui
est capable de s'équiper d'actuaires, de chercheurs, d'avocats pour
aller rencontrer toute l'équipe patronale, si ce n'est l'association
accréditée? Cela veut donc dire que les travailleurs seuls dans
la salle... Vous dites que ceux qui auront intérêt participeront,
bien sûr, mais ils ne pourront pas se payer tout l'équipement, le
service, les ressources et l'énergie que ça va prendre pour aller
chercher ça. L'association accréditée va en être
capable, mais elle est sur la voie d'évitement, dans votre projet.
M. Bourbeau: Écoutez, je comprends très bien le
point de vue, mais je ne vois pas en quoi ça empêche le syndicat
ou l'association accréditée de mettre à la disposition des
travailleurs son effectif. Ce sont quand même des travailleurs qui sont
membres du syndicat. S'il y a un syndicat, je ne vois pas pourquoi ce serait,
disons, (l'"establishment" syndical qui nommerait un représentant. Cela
peut très bien être les travailleurs eux-mêmes qui sont
particulièrement intéressés à la question et qui
tiennent pour acquis que le syndicat va venir à leur aide et va leur
fournir l'expertise voulue.
M. Godbout: Vous ne laisserez pas la gestion des patrons aux
contremaîtres?
M. Bourbeau: Pardon?
M. Godbout: Les compagnies qui vont gérer les fonds de
retraite, vous ne laisserez pas ça à des contremaîtres, par
la loi. Vous allez gérer ça de façon compétente.
À un moment donné, ce ne sera peut-être pas scandaleux que
les représentants de l'association soient présents. Ce n'est pas
nécessairement de l'empiètement, c'est tout simplement jouer le
rôle qu'on doit jouer.
M. Bourbeau: En aucun cas nous ne voulons exclure le
représentant de l'association, au contraire.
M. Godbout: C'est-à-dire qu'on devra négocier le
plan en partant.
M. Bourbeau: II n'y a rien qui empêche, dans la loi, que ce
soit lui qui soit délégué par les travailleurs. Si le
syndicat est présent et fait son travail, il va certainement convaincre
les travailleurs que la meilleure personne pour les représenter, c'est
Mme Unetelle ou M. Untel. Je n'ai pas d'objection que ce soit quiconque, un
travailleur nommé par la majorité des travailleurs
présents, avec le concours du syndicat. Tant mieux! Ce serait
l'idéal. J'espère que ce sera comme ça.
M. Godbout: J'ai fait mon point. Je ne veux
pas passer quatre heures là-dessus.
M. Bourbeau: Oui, très bien. J'ai bien compris.
M. Godbout: Mais votre loi parle de participants. Je vous
suggère et je vous soumets respectueusement que l'association
accréditée n'est pas un participant. Elle négocie avec
l'employeur. Je voudrais que vous regardiez cette affaire parce que je pense
qu'il y a un problème.
M. Bourbeau: Très bien. On a pris note de vos
suggestions.
Le Président (M. Bélanger): M. le ministre, le
temps est écoulé. Mme la députée de
Maison-neuve.
Mme Harel: Je voudrais vous saluer, M. Godbout et les personnes
qui vous accompagnent, M. Blondin, M. Bédard et Me Rivest. On a eu
l'occasion de vous lire récemment dans les journaux, Me Rivest. Vous
nous avez rappelé, à juste titre, dans le mémoire que vous
présentez, M. Godbout, que le projet de loi laisse en plan des sujets
importants qui pourraient améliorer la situation des participants.
D'abord, si on veut éviter la langue de bois... La langue de bois est
très en usage ici, c'est-à-dire que c'est une sorte de langage
où on ne dit pas les choses tout en parlant. On parle pour parler, comme
on dit. Là, on va se parler franc. Il y a quatre ans, un projet de loi a
été déposé, le projet de loi 58. Cela a
été déposé en juin 1985, après une
consultation dans le cadre d'un livre orange qui s'appelait "Agir maintenant
pour demain" et qui avait précédé le dépôt du
projet de loi.
À ce moment-là, ce projet de loi 58 contenait deux
omissions: la disposition des surplus et l'indexation. Sur ces deux questions,
if devait y avoir consultation, il y a quatre ans de ça. Je m'occupais
d'autres dossiers, à l'époque, dont un, entre autres,
était la réforme du Code civil, le projet de loi 20, qui avait
été déposé aussi par le précédent
gouvernement. Comme le ministre de la Justice était responsable
même si c'était un ministre du gouvernement libérai, il a
reconduit et on a complété le projet de loi 20 tout simplement en
le terminant. Cela avait été déposé par l'un et
adopté par l'autre. Cela se fait. Mais le gouvernement a
décidé de mettre le projet de loi 58 de côté. Il a
vieilli, entre-temps. Quand il a ressorti le projet de loi 116, par
curiosité, j'ai relu les notes explicatives du projet de loi 58 et, oh!
surprise! je me suis rendue compte que c'était à peu près
la même chose, à quelques exceptions près. Une
nouveauté, le chapitre XI sur les scissions et les fusions, quelques
reculs sur le comité de retraite, qui pouvait être paritaire dans
le projet de loi 58 et qui ne l'est plus dans le projet de loi 116, et sur la
rente de conjoint survivant en cas de séparation ou de divorce, des
choses comme ça. Finalement, les deux mêmes omissions quatre ans
après, c'est-à-dire l'indexation et la disposition des
surplus.
Quand le ministre nous dit que cela aurait été
risqué, parce qu'il n'y aurait pas eu de projet de loi s'il avait
introduit des dispositions sur ces questions, je pense qu'il faut comprendre ce
qu'il dit. Ce qu'il dit, c'est qu'on n'aurait pas eu de projet de loi parce
qu'il n'aurait pas pu le passer au Conseil des ministres, car il n'aurait pas
réussi à le déposer parce que c'est controversé. Ce
n'est pas tant controversé, on le sait. La controverse, elle est comme
ça dans tout. C'est évident que le Conseil du patronat vient de
dire une chose et les centrales, une autre. Ce n'est pas nouveau pour ce projet
de loi. C'est dans tous les projets de loi. Mais la controverse, ce n'est pas
ici qu'elle est, c'est au gouvernement. La controverse, c'est au Conseil des
ministres.
Sur la question des surplus, peut-être parce que vous
représentez Singer et quelques autres cas, en lisant votre
mémoire, je me suis rendu compte qu'il y avait vraiment deux
éléments importants, non pas simplement les surplus au moment de
la terminaison, mais aussi les surplus en cours de régime. En
terminaison, ce n'est pas une solution de dire qu'il y a un moratoire parce que
les employés ne peuvent pas en bénéficier. Chez Singer, il
y en a qui ont 35 $ par mois, entre-temps, pendant que c'est devant les
tribunaux. Les surplus ont beau être gelés, ils ne sont pas faits
pour ça, finalement. Ils seraient faits pour être
distribués. Ce n'est pas parce que le moratoire va être
prolongé que c'est une solution pour ceux qui pourraient en profiter de
leur vivant. En cours de régime, vous avez vu que dans le projet de ioi,
à l'article 136, on prévoit qu'il pourrait y avoir des
congés de contribution. Donc, il y a déjà une
décision qui est prise sur les surplus. Le ministre dit: Les surplus,
mon idée n'est pas du tout faite là-dessus. Elle est faite
à l'article 136. Les congés de contribution sont possibles.
À l'article 95, on dit aussi: "L'interdiction n'a pas pour effet
d'empêcher l'affectation de tout ou partie du solde de l'actif de la
caisse de retraite à l'acquittement de cotisations patronales". Les
congés de contribution sont possibles aussi. Il y a déjà
une décision qui est prise.
J'aimerais, M. Godbout, si vous me le permettez, profiter de la
présence de Me Rivest pour qu'on bénéficie de son
expertise sur cette question. En cours de régime, est-ce que,
présentement, le fait qu'avec la loi 116 les congés de
contributions soient toujours possibles, c'est une sorte d'usage qui peut
disposer du surplus?
Le Président (M. Bélanger): M. Rivest.
M. Rivest (Marcel): M. le ministre, tout à l'heure, vous
avez parlé des employeurs et des employés qui faisaient des
contributions plus ou
moins égalitaires. Vous reconnaissiez les droits des
employés en ce qui concerne les régimes de retraite. Je pense
qu'il est assez évident que les employés ont des droits en ce qui
a trait aux régimes de retraite. C'est leur argent. C'est leur retraite
à eux. Par ailleurs, si on examine le projet de loi, il reste quand
même qu'actuellement, avec le projet de loi, on n'est pas dans un
système d'égalité en ce qui concerne les employeurs et les
employés. Qu'on prenne les sujets importants. C'est vrai que, dans la
loi, il y a des améliorations et on le reconnaît. Sur les sujets
quand môme majeurs qui sont, à notre avis, le nerf de la guerre,
finalement, si on parle de surplus, à la terminaison, c'est vrai que le
moratoire de la loi 95 les règle. À ce moment-là,
éventuellement, il se passera quelque chose.
Par ailleurs, en ce qui concerne les congés de contribution, la
situation n'est effectivement pas réglée, ce qui signifie
qu'année après année, depuis cinq ou six ans, la situation
est quand même désastreuse parce qu'on parle de centaines de
millions de dollars que les employeurs prennent à leur profit. On
parlait tout à l'heure de système contributoire où vous
avez et des employeurs et des employés qui contribuent. Or, les
congés de contribution, ce sont seulement les employeurs qui les
prennent et non pas les employés, de sorte qu'on n'est pas dans un
système d'égalité sur cette question. Effectivement, si
votre intention est de remettre à plus tard la question des surplus, en
attendant, il faudrait que le moratoire inclue aussi la question des
congés de contribution. Je comprends qu'on va contester devant les
tribunaux cette question de congés de contribution parce qu'il
n'apparaît pas du tout évident que les employeurs ont le droit de
prendre les congés de contribution. Je n'en parlerai pas ici.
Effectivement, il y a eu un article que j'ai écrit dans La Presse qui
explique la légalité de la situation.
Si on regarde la question de la gestion des fonds de retraite, encore
là, voilà un point important, je comprends, pour les deux
côtés. Si on considère que les employés sont,
à juste titre, au moins aussi importants que les employeurs, parce que
c'est leur argent, normalement, en ce qui concerne la gestion, on devrait avoir
une gestion paritaire et non pas un participant parmi les actifs, un
participant parmi les retraités, en vertu de quoi on arrive à ce
principe. Je comprends que c'est une amélioration par rapport à
ce qui existe, mais pourquoi ne pas aller jusqu'à une gestion paritaire?
Une des explications, parmi d'autres, sur la situation concernant les surplus,
que ce soit la terminaison ou les congés de contribution, c'est le
manque d'information, le manque d'expertise, le fait que les employeurs ont agi
à l'insu des employés. On a fait des amendements au plan alors
qu'on n'avait pas le droit de le faire, mais les employés n'y
étaient pas, ils ont plus ou moins su que ça existait. S'il y
avait gestion paritaire, à ce moment-là, ce serait beaucoup plus
difficile de le faire.
Également, autre sujet, à mon sens, qui est parmi les plus
importants, on parte de l'inflation. En réalité, on doit
s'interroger, à savoir qui profite ou qui est visé par
l'inflation. Au moment où on se parle, ceux qui sont visés,
pénalisés par l'inflation, ce sont les retraités, qu'ils
soient syndiqués ou non. Ce sont seulement les retraités. Chaque
année, avec un revenu fixe, cela vous coûte 5 % ou à peu
près. Dans les années soixante-dix, c'était 12 %, 13 %, 14
%, 15 %, ce qui fait que les gens qui sont à la retraite depuis 1970
sont dans la pauvreté, à toutes fins utiles, avec, comme
corollaire de ça, que celui qui profite de l'inflation, c'est celui qui
paie les rentes dévaluées. Donc, cela veut dire que c'est
l'employeur, à ce moment-là.
Finalement, quand on regarde la loi, on s'aperçoit qu'on n'est
pas dans un principe d'égalité. Je comprends qu'il y a eu le
"task force" en Ontario. Mais on a quand môme accepté,
là-bas, le principe de l'inflation, il y a des pays, la France, la
Suède, l'Allemagne, où l'indexation obligatoire existe dans la
loi. Également, dans le régime de retraite public, il y a une
indexation obligatoire. Ce n'est rien d'exceptionnel, cette question
d'indexation. On pense que, finalement, les surplus qui ont été
créés en grande partie par l'inflation devraient tout simplement
retourner alléger le fardeau de ceux qui sont visés par
l'inflation. (18 h 30)
Mme Harel: C'est d'autant plus important que les mots aient un
sens que le ministre a dit tantôt: - ici, les mots sont importants,
n'est-ce pas - que si l'indexation devait faire l'objet de
considérations, ce serait à l'automne. Il dit: Oui, on va
consulter sur les dispositions de surplus, mais, sur l'indexation, depuis le
début des travaux de la commission, il dit toujours: Si ça doit
faire l'objet de considérations... On n'en est même pas au point
où l'Ontario en est déjà arrivé à
décider que oui, le principe de l'indexation était retenu dans la
loi et, là, ils discutent des modalités. On n'en est pas
là. Le principe n'est pas dans la loi, le ministre ne dit même
pas, de vive voix, qu'il va consulter. Il dit: Si ça doit faire l'objet
de considérations... En plus, on n'a pas de proposition. En Ontario, il
y a quand même une proposition sur la table, sur laquelle les gens sont
consultés. Ce n'est quand même pas le néant.
Votre mémoire apporte un élément extrêmement
intéressant, nouveau, je dirais, par rapport à ceux qui nous ont
été présentés jusqu'à maintenant. C'est
vraiment un fait que l'inflation fait perdre du pouvoir d'achat aux
travailleurs, mais cela pourrait leur bénéficier par les
rendements des caisses de retraite; le paradoxe, c'est qu'ils perdent des deux
côtés. Ils perdent, parce que l'inflation gruge leurs
augmentations et ils perdent en pouvoir d'achat dans leurs salaires, et ils
perdent également, s'ils n'en profitent pas, en ce qui concerne les
avantages ou les rendements des caisses où ils
pourraient contrebalancer, où ils pourraient compenser la perte
du pouvoir d'achat pendant qu'Us travaillent, d'une certaine façon.
Ils perdent également parce que les rendements qui sont à
l'origine des surplus qu'on connaît maintenant et qui sont, comme vous le
mentionnez, en grande partie, tributaires du fait que l'inflation augmente, Us
ne profitent pas de ces rendements, parce qu'ils en sont exclus du fait que les
surplus ne leur sont pas attribués sous une forme ou sous une autre.
M. Godbout: Très rapidement, madame, pour la
réflexion de tout le monde, j'aimerais dire ceci là-dessus -
j'espère qu'on ne l'oubliera pas - Drummond McCall, Aciers Marshall, 117
travailleurs. On prend le surplus, on amène 18 900 000 $ en Ontario; on
en laisse 2 100 000 $ au Québec. 117 travailleurs; on parle de 21 000
000 $. Kik Cola Orange-Maison vendu à Agropur. Cela nous dit quelque
chose: 47 salariés, 1 000 000 $ retournés aux coffres. On offre
150 000 $ aux travailleurs pour autant qu'ils se désistent de leurs
poursuites possibles. Tout ça, la loi le permet. Singer, 4 000 000 $
à 6 000 000 $, 600 travailleurs, l'argent parti en Ontario. Lac
d'amiante, 475 travailleurs. On tente d'amener 12 000 000 $ dans les coffres
d'ASERCO à New York. Pourtant, ce sont les citoyens de Thetford qui ont
bâti ce fonds. Bell qui appartient à SNA, 395 travailleurs. On
veut retourner entre 7 000 000 $ et 9 000 000 $ dans les fonds de la caisse de
SNA.
Juste pour ça, le Syndicat des métallos, avec tous les
services bénévoles et les coups de main qu'on a reçus de
nos procureurs et de nos chercheurs, tout ça pour rien. À ce
jour, cela nous a coûté 63 470,44 $ en cotisations syndicales, en
frais, juste pour empêcher que ça parte et il y en a qui sont
partis. Cela, c'est juste nous. S'il n'y a pas un drame au Québec
là-dessus, je ne sais pas ce qui se passe.
Mme Harel: Dans votre mémoire, vous dites que vous
réclamez la liste des cinq dernières années, parce que
beaucoup d'employés n'ont pas la chance de cette protection syndicale et
sont soustraits de ces surplus, sans même savoir qu'il y en avait un,
d'ailleurs.
M. Godbout: La Régie n'a jamais publié la liste des
employeurs qui ont fait des demandes auxquelles elle a accepté de
reprendre les surplus ou des contributions qui avaient cessé. On ne sait
pas qui ils sont.
Le Président (M. Bélanger): Je vous inviterais
à conclure, Mme la députée de Maison-neuve.
Mme Harel: Déjà?
Le Président (M. Bélanger): Eh oui!
Mme Harel: II y a toute la question des ventes d'entreprise, des
fusions et des restructurations d'entreprise. Je pense que ce que vous nous
dites est Important. Les lois sur les normes du Code du travail
prévoient le transfert. L'accréditation suit la vente. En fait,
vous nous dites que la caisse devrait suivre aussi. Le ministre n'a pas
répondu là-dessus. Il y a également la question de la
rétroactivité au moment de l'acquisition.
Je veux vous remercier. Je crois que votre contribution à nos
travaux était extrêmement importante, à ce moment-ci, tant
sur l'indexation que sur les dispositions de surplus. Je pense bien qu'il va
falloir être vigilants pour que les décisions se prennent
rapidement et dans le sens d'une reconnaissance, non pas comme un cadeau, mais
comme une rémunération qui est différée par le
travailleur.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. M. le
ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, en remerciant nos
invités, j'aimerais quand même replacer ça un peu dans le
contexte. Il y a quatre ans, le Parti québécois avait
déposé, à la veille de la fin de la session, un projet de
loi où on ne traitait ni des surplus ni de l'indexation. Il n'y avait
rien dans le projet de loi. Il faut quand même le dire.
Mme Harel: Je l'ai dit moi-même...
M. Bourbeau: La veille de la fin de la session.
Mme Harel: ...mais, vous avez pris quatre ans pour vous en rendre
compte.
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît,
Mme la députée!
Mme Harel: II n'avait pas sorti du dossier.
M. Bourbeau: La veille de la fin de la session, il était
évident que vous n'aviez pas l'intention de légiférer. La
session finissait le lendemain. Nous sommes quand même intervenus
énergiquement, l'automne dernier.
Mme Harel: C'est faux, M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît,
on laisse M. le ministre compléter son intervention.
Mme Harel: Qu'il ne dise pas des choses fausses! La session ne
finissait pas le lendemain.
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée, il y aura une période à la fin où
on pourra passer nos commentaires.
M. Bourbeau: Le 18 juin, c'est la veille de la fin de la session,
l'avant-veille. Nous sommes Intervenus énerglquement, l'automne dernier.
Nous avons bloqué tous les surplus d'actifs pour éviter les
fuites. Cela comprend toutes les sommes d'argent en cause dans les actions en
justice, y compris les 4000000$ à 6000000$ de Singer, qui ne sont pas
partis pour l'Ontario. C'est gelé, on me certifie que c'est ici, que ce
n'est pas parti en Ontario.
Donc, nous avons pris des mesures pour protéger tout le paquet,
tant que nous n'aurons pas trouvé la solution. Je ne dis pas que, dans
l'avenir, la solution que nous trouverons n'aidera pas pour le passé.
J'ai déjà même fait des allusions, à plusieurs
reprises dans des allocutions, à des bonifications possibles. L'Ontario
est en train de le proposer. On peut donc espérer qu'on pourra suivre un
chemin semblable.
Pour aujourd'hui, nous avons un projet de loi qui améliore d'une
façon considérable la question des fonds de retraite pour les
travailleurs. Si on réussit à passer ce projet de loi, ce sera la
phase 1 d'une réforme importante, je dois le dire. À la phase 2,
ce n'est pas l'intention du gouvernement de se traîner les pieds. C'est
le temps qui nous manque. Mais je peux vous assurer que, dès le
début de la prochaine session, nous serons de retour avec un projet de
loi pour régler de façon définitive la question de
l'appartenance des surplus. Notre intention n'est pas d'agir de façon
irresponsable envers les travailleurs. Au contraire, je pense que toutes nos
attitudes jusqu'à maintenant indiquent que nous avons l'intention de
traiter les travailleurs avec justice et équité.
Sur ce, je remercie nos visiteurs, nos invités du Syndicat des
métallos, M. Godbout et ceux qui l'assistent, pour un mémoire
bien articulé et, surtout, bien présenté. Merci.
Le Président (M. Bélanger): M. Godbout, avez-vous
un dernier commentaire?
M. Godbout: En conclusion, je ne pense pas qu'on ait dit qu'il y
avait des intentions de traiter à la légère les
travailleurs, mais on a voulu apporter des points particuliers qui nous
préoccupent au plus haut point. Ce qu'on dit, dans le fond, c'est ceci.
Mon Dieu, Seigneur! on ne vous le demande pas, on vous en supplie! Regardez
donc tout de suite pour garder le moratoire jusqu'à ce que la loi
arrive, comme vous nous l'avez dit, mais en incluant les congés de
contribution. Vous savez, on va assécher quand même par les
congés de contribution, si on ne va pas chercher la caisse. Donc, c'est
fondamental.
L'autre point, la participation, M. le ministre. Nous vous disons que le
mouvement syndical, dans son ensemble, au Québec, a prouvé qu'il
est capable de jouer un rôle présent, intelligent, objectif et
paritaire. Il faut qu'il le soit au niveau des régimes. Si l'objectif du
ministre est de partir comme il faut avec une première étape,
partons-le comme il faut avec une première étape. Après
ça, on fera la deuxième étape s'il faut la faire. Mais
partons-le comme il faut là-dessus.
On n'a pas parlé beaucoup de la Régie des rentes parce
qu'on n'a pas beaucoup de temps. Mais on a regardé passer le train un
peu trop souvent et, là, ce n'est plus le train qui passe, ce sont les
rails qui rouillent et qui regardent encore s'H n'en passera pas un autre. La
Régie des rentes n'a pas fait sa job. Je vous ai dit, tout à
l'heure, que c'était un projet. On s'est dit: On va arriver avec un
véhicule. J'ai peur qu'on arrive juste avec de l'essence, sans
véhicule, et que l'affaire passe au feu. Je l'ai dit tout à
l'heure.
Le dernier point, je reviens là-dessus, c'est la gestion. Laisser
les travailleurs seuls devant un employeur qui a tout l'équipement qu'il
faut, tous les services, toute l'expertise pour administrer une retraite ou un
régime, ce n'est pas correct. Il faut qu'on leur donne des outils
collectifs pour se défendre devant ça. On revient
là-dessus, c'est important. Ce n'est pas de l'ingérence, c'est
tout simplement d'être capables, dans un forum d'administration, d'avoir
des gens à peu près égaux. Un chat et un lion dans une
maison, le chat chante en sacrement! Mais deux lions, ça s'écoute
un peu plus. À un moment donné, si on ne fait pas attention, on
va se ramasser avec des distorsions. On viendra vous voir en disant: Ça
n'a pas de sens. Le problème ne sera peut-être pas l'orientation
du projet de loi, ce sera dû aux mécanismes d'application qui
l'entourent, et on trouve ça souvent. Les employeurs n'aiment
peut-être pas qu'on soit présents, mais je pense que, de plus en
plus, ils acceptent notre présence. En tout cas, ils acceptent notre
intervention du fonds de solidarité avec beaucoup de plaisir,
souvent.
Je peux vous dire là-dessus qu'on est très fiers de vous
avoir présenté ce mémoire. Il y aura, je l'espère,
un forum de discussions a l'automne sur les surplus et les problèmes
dont on a parlé, de même que sur l'indexation. Je pense que, dans
l'ensemble, nous avons voulu apporter un éclairage un peu
spécifique à ce problème parce que c'est notre expertise
dans le domaine privé et industriel. Nous ne voulons pas remplacer, bien
sûr, mais on veut que ce soit un complément au mémoire de
notre centrale qui est la FTQ, que vous aurez le plaisir de rencontrer demain,
je pense. Je vous remercie.
Le Président (M. Bélanger): Sur ce, M. Godbout, on
vous remercie énormément, votre groupe, le Syndicat des
métallos (FTQ). Je vous rappelle que la commission ajourne ses travaux
jusqu'à demain, 10 heures, dans la même salle.
(Fin de la séance à 18 h 41)