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Version finale

33rd Legislature, 2nd Session
(March 8, 1988 au August 9, 1989)

Tuesday, May 9, 1989 - Vol. 30 N° 80

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultations particulières dans le cadre de l'étude du projet de loi 116 - Loi sur les régimes complémentaires de retraite


Journal des débats

 

(Dix heures huit minutes)

Le Président (M. Bélanger): Je demande à chacun de bien vouloir prendre sa place afin que la commission des affaires sociales procède à des consultations particulières et tienne des auditions publiques dans le cadre de l'étude du projet de loi 116, Loi sur les régimes complémentaires de retraite.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire: Non, M. le Président.

Le Président (M. Bélanger): Aucun remplacement. C'est bien. Sans plus tarder, donc, j'aimerais expliquer un peu nos règles de fonctionnement. Il y a les remarques préliminaires qui sont de quinze minutes de part et d'autre et, par la suite, les présentations de mémoires; nous aurons 20 minutes pour que nos invités puissent présenter un résumé ou leur mémoire et 20 minutes de part et d'autre pour une période de questions. Alors, c'est 60 minutes. On fera une gestion du temps assez serrée pour éviter que l'on bouscule trop l'horaire et que les invités se fassent reporter des fois à des heures tardives ou indues. On fera donc une gestion du temps très serrée pour permettre à chacun de s'exprimer à l'intérieur du temps prévu.

Sans plus tarder, j'invite donc M. le ministre à procéder. Je vais lui laisser quelques secondes-Remarques préliminaires M. André Bourbeau

M. Bourbeau: J'ai la grippe, M. le Président. À l'ouverture des travaux de cette commission parlementaire qui étudie le projet de loi 116, je veux tout d'abord souhaiter la bienvenue aux organismes qui ont répondu à notre invitation de venir nous faire part de leurs observations et de leurs recommandations sur le projet de loi. Je tiens aussi à remercier les représentants de l'Opposition officielle d'avoir accepté les modalités de fonctionnement de cette commission au cours de la présente consultation.

Je crois sincèrement que les personnes convoquées représentent un large éventail des opinions sur les régimes de retraite. Les invités représentent le monde des travailleurs, des employeurs, des compagnies d'assurances, des organismes intéressés à la condition féminine, de même que des experts, actuaires et gestionnaires des caisses de retraite.

Ces personnes sont ici parce que leur expérience et leur compétence dans le domaine très complexe et hautement technique de la planification de la retraite peuvent indiscutable- ment éclairer les membres de la commission et nous aider à bonifier le projet de loi. Je ne m'attends pas que les opinions exprimées lors de cette consultation convergent toutes dans le même sens, mais je souhaite que les membres de la commission n'engagent pas de polémique avec tes invités; c'est un exercice que nous pouvons nous réserver entre parlementaires. Nos invités, je le répète, interviennent à titre d'experts et de représentants de certains groupes et nous devons les considérer comme tels. Notre mode de fonctionnement habituel dans ce genre de consultations permet d'ailleurs de ne craindre aucun dérapage, grâce à vous, M. le Président.

Avant de passer la parole à nos invités, il convient de préciser à la fois les limites et l'importance du projet de loi sur les régimes complémentaires de retraite. Ce projet de loi ne concerne que les régimes privés de retraite, c'est-à-dire les ententes conclues entre un employeur et des employés et prévoyant le versement de prestations de retraite à certaines conditions. Le projet de loi s'adresse donc aux entreprises et aux participants à un régime de retraite ou qui s'y intéressent de façon particulière. Voilà pour la portée véritable du projet de loi.

Quant à son importance, elle n'est plus à démontrer. Ces régimes de retraite sont actuellement régis par une loi adoptée en 1965, à une époque où les personnes demeuraient à l'emploi de la même entreprise durant de nombreuses années, une époque où les femmes n'avaient pas encore largement accédé au marché du travail, une époque où les Québécois étaient beaucoup moins sensibilisés à l'importance de préparer leur retraite, une époque où les véhicules financiers pour canaliser l'épargne-retraite étaient considérablement plus restreints que ceux dont on peut disposer aujourd'hui. Nous devons donc remettre à jour cette loi, adapter à la réalité d'aujourd'hui le cadre juridique des régimes complémentaires de retraite. Ce travail législatif est d'autant plus impératif que le gouvernement fédéral et plusieurs gouvernements provinciaux ont rajeuni leurs lois à la suite du consensus pancanadien établi depuis quelques années.

En 1986, le Parlement fédéral a adopté la Loi sur les normes des prestations de pension. Cette loi canadienne s'adresse aux travailleurs des secteurs relevant de la législation fédérale, comme les employés de l'administration fédérale au sens large, de l'aréonautique, des banques, des transports maritime et aérien, des télécommunications et de la radiotélédiffusion.

À l'égard des régimes complémentaires de retraite, il y a donc au Québec trois catégories de citoyens: ceux qui travaillent dans les secteurs de compétence fédérale, qui sont maintenant assujettis à une loi révisée, ceux du secteur public et parapublic québécois assujettis

à leur propre régime de retraite et, finalement, tous les autres qui demeurent encore sous l'empire d'une loi dépassée, souffrant de lacunes importantes et de certains anachronismes.

Cette situation ne peut perdurer, vous en conviendrez, M. le Président. L'importance d'agir sans autre délai apparaît encore plus clairement quand on considère en plus le nombre de personnes visées par le projet de loi et les montants en cause.

Au 31 décembre 1987, 1 220 000 travailleurs québécois participaient à un régime complémentaire de retraite. Cela représentait 41 % de toute la main-d'oeuvre québécoise. À ce moment-là, l'actif de ces régimes dépassait 38 000 000 000 $. Il s'agit d'un montant colossal qui continue de croître à un rythme réellement impressionnant. En 1987, on estimait à 3 200 000 000 $ le montant des cotisations versées aux différentes caisses de retraite. La contribution des employeurs, en 1987, fut de 2 000 000 000 $ et celle des employés, de 1 200 000 000 $. Il est donc pressant d'accorder aux travailleurs un véritable droit de regard sur leur régime de retraite, de protéger plus adéquatement leur droit à la retraite, de préciser les obligations de l'employeur et d'accroître substantiellement la transférabilité des fonds de retraite.

Le projet de loi sur les régimes complémentaires de retraite donne suite, en premier lieu, à un consensus dégagé par l'ensemble des provinces canadiennes et le gouvernement fédéral. Ce consensus identifiait les éléments essentiels que devraient contenir les lois en matière de régimes privés de retraite afin d'assurer une protection de base des cotisants et de favoriser la création de nouveaux régimes de retraite. Les composantes de cet accord pancanadien se retrouvent en grande partie dans le projet de loi. On permet d'abord à un travailleur à temps partiel d'adhérer à un régime de retraite pourvu qu'il ait touché, durant deux années consécutives, une rémunération annuelle égale à 35 % du maximum des gains admissibles au sens de la Loi sur le régime de rentes du Québec. En 1989, cela représente un salaire brut de 9695 $ par année. Sur ce point, le projet de loi va au-delà de ce consensus canadien en accordant à la personne qui a travaillé 700 heures annuellement, durant deux années consécutives, le droit de participer au régime de retraite établi dans l'entreprise. Cette mesure accordera la possibilité à un plus grand nombre de travailleurs à temps partiel de cotiser à un régime de retraite. On propose en outre que le droit de retirer un bénéfice d'un régime de retraite soit acquis après deux ans de participation, peu importe l'âge.

Cela signifie qu'après cette période, la part de l'employé et celle de l'employeur dans la caisse de retraite servent à assurer le versement d'une rente. Il s'agit là d'une nette amélioration par rapport au régime actuel qui prévoit que ce droit n'est accordé qu'aux personnes qui ont dix ans d'ancienneté dans l'entreprise et sont âgées d'au moins 45 ans. Le projet de loi précise également qu'un intérêt minimum doit être versé sur les cotisations de l'employé qui quitte l'entreprise. Cet intérêt correspond, selon les types de régimes, au taux de rendement de la caisse de retraite ou à un indice correspondant au taux moyen d'intérêt sur les dépôts à terme de cinq ans dans les banques à charte. Conformément au consensus canadien, l'employeur doit assumer en vertu du projet de loi au moins 50 % de la valeur de la rente versée à un bénéficiaire d'un régime de retraite. Selon le régime actuel, dans bien des cas, l'employeur n'a pas l'obligation de verser une part quelconque lorsqu'un employé cesse sa participation au régime.

Ce projet de loi bonifie également les rentes versées en cas de décès. On précise en premier lieu que lorsqu'un participant décède avant d'avoir reçu des prestations, son conjoint a droit à une rente dont la valeur ne peut pas être inférieure à ce que le cotisant aurait reçu s'il avait cessé de participer au régime. Si le décès survient après que le participant ait commencé à se prévaloir d'une rente, son conjoint a droit à une rente viagère correspondant à 60 % de celle qui était payable au participant.

Enfin, le projet de loi facilite considérablement la transférabilité des fonds de retraite. On fait en sorte que les montants accumulés dans une caisse de retraite puissent être transférés chez le nouvel employeur ou dans un régime d'épargne dans lequel les fonds sont immobilisés jusqu'au jour où le participant prend sa retraite.

Voilà pour les éléments du consensus canadien.

Je suis convaincu qu'au Québec, l'immense majorité des personnes sur le marché du travail adhèrent à ces orientations fondamentales et plusieurs d'entre elles s'impatientent de les voir entrer en vigueur. Mais avec le projet de loi sur les régimes complémentaires de retraite, nous allons plus loin. Nous voulons assurer que les travailleurs seront mieux informés sur le régime de retraite et qu'ils pourront, s'ils le désirent, participer à sa gestion. C'est pourquoi nous obligeons l'administrateur du régime à informer les membres de tout changement à survenir au régime, à faciliter l'obtention de renseignements par les participants, à tenir une assemblée annuelle des participants à un régime de retraite et à accorder aux travailleurs et aux rentiers le droit de participer à la formation d'un comité de retraite et d'y désigner chacun, s'ils le désirent, un représentant au sein de ce comité destiné à administrer le régime de retraite.

Au sujet de la gestion des caisses de retraite, j'annonce immédiatement à la commission mon intention de suggérer au Conseil des ministres de proposer un amendement au projet de loi. Dans sa version actuelle, le projet de loi interdit à un employeur de gérer une caisse de retraite. Après mûre réflexion, cette interdiction m'apparaît excessive. La protection des droits

des participants ne requiert pas une mesure aussi restrictive, d'autant plus que cette disposition du projet de loi risque de provoquer des pertes d'emplois. L'amendement que j'entends proposer lors de l'étude détaillée du projet de loi aurait pour effet de permettre à un employeur de gérer la caisse de retraite à la condition qu'il y ait un comité de retraite dans l'entreprise afin que les représentants des participants puissent prendre part à l'administration du régime de retraite. Cette disposition respecterait les objectifs de transparence de l'administration du régime et de l'implication des participants dans la prise de décision concernant leur régime de retraite.

Le projet de loi établit de plus des règles de financement des régimes de retraite qui en assurent à la fois la capitalisation adéquate et la solvabilité. De plus, nous renforçons les pouvoirs de surveillance de la Régie des rentes du Québec tout en responsabilisant davantage l'administrateur du régime. Tout ça, M. le Président, représente des améliorations substantielles par rapport à la situation actuelle.

Par ailleurs, le projet de loi maintient le moratoire sur l'utilisation des surplus. Sur la question délicate et cruciale des surplus accumulés dans les caisses de retraite, une large consultation sera menée dans les prochains mois avant la levée du moratoire. Cette consultation portera spécifiquement sur la disposition des surplus accumulés dans les caisses de retraite. Il va sans dire que le projet de loi sur les régimes complémentaires de retraite contient de multiples dispositions techniques sur lesquelles les experts invités auront peut-être des observations à nous faire. Nous allons les écouter avec toute la modestie qui s'impose.

Je tiens a vous remercier à l'avance pour la contribution que vous apporterez au débat. Elle permettra de donner aux Québécois des règles du jeu dont ils seront fiers et, en conséquence, la possibilité de mieux planifier leurs vieux jours, et pourquoi pas, aussi leurs vieilles nuits.

Sur ce, M. le Président, je laisse la parole à l'Opposition officielle, aux membres de la commission et à nos invités pour les trois prochaines journées.

Le Président (M. Bélanger): Merci, M. le ministre. Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Louise Harel

Mme Harel: Merci, M. le Président. Je veux également souscrire au mot de bienvenue du ministre à l'égard des personnes qui sont ici présentes et de toutes celles qui viendront devant la commission nous faire connaître leur point de vue.

Il y a maintenant quatre ans. Il aura donc fallu quatre ans pour que le projet de loi 58 déposé par le gouvernement précédent sous la responsabilité de la ministre de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu, Mme Marois, revoie le jour, dernièrement. Ce projet de loi déposé en juin 1985 aura été "tablette" par le nouveau ministre libéral, M. Paradis, prédécesseur du ministre actuel, et iI aura vieilli dans les classeurs de la régie et du ministère. Cependant, aujourd'hui, le ministre invoque l'importance d'agir en cette matière. Il nous rappelle que la situation a trop perduré à l'égard de ceux et celles qui, finalement, ont été les victimes de ce retard.

D'abord, M. le Président, laissez-moi vous rappeler les motifs qui étaient invoqués par le prédécesseur du ministre, à l'époque, pour mettre de côté la poursuite du substantiel projet de loi 58. Il n'en a pas été ainsi dans tous les dossiers. À cette époque, j'étais également responsable du dossier de la réforme du Code civil et le projet de loi 20 déposé par le gouvernement précédent, en première et deuxième lecture et étudié en commission parlementaire en troisième lecture, a été reconduit de façon responsable par le ministre de la Justice de l'époque, l'actuel député de D'Arcy McGee, et a pu, sans retard, être adopté, avec quelques modifications que lui a apportées le présent gouvernement.

Il aurait pu tout autant en être ainsi à l'égard du projet de loi 58. Mais il y avait plus urgent, plus pressé, nous disait, à l'époque, le ministre responsable du dossier; la priorité, c'est l'accès des femmes au foyer à la Régie des rentes. Tout autre dossier devait attendre. C'étaient là les propos mêmes que nous tenait le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, le 12 juin 1986, il y a maintenant trois ans. Je le cite: "Je tiens à assurer que la priorité de l'actuel gouvernement du Québec s'orientera vers l'égalité des sexes face au régime de retraite. J'insiste et je le dis très clairement - c'est toujours le ministre qui parle - l'actuel gouvernement libéral utilisera toute la marge de manoeuvre disponible en investissant non pas dans d'autres avenues qui nous ont été suggérées par l'Opposition, comme les questions de transférabilité, mais pour rendre le conjoint ou la conjointe au foyer admissible au Régime de rentes du Québec, faisant de l'engagement du chef du Parti libéral du Québec, avant la fin du présent mandat, une réalité."

Alors, évidemment, quatre ans plus tard, la promesse libérale est restée lettre morte. Je rappelle que, déjà, le livre orange, bien connu de tous les experts et spécialistes en matière de régime de retraite - ce livre orange qui s'intitulait adéquatement "Agir maintenant pour demain" - contenait un chapitre complet qui présentait, qui illustrait les difficultés de cette proposition qui, pourtant, était reprise comme une priorité par le Parti libéral d'avant les élections.

Je rappelle, M. le Président, que, quatre ans plus tard, nous en sommes malheureusement toujours au même point. Il ne s'est rien fait. Le projet de loi 58 a vieilli. Cependant, presque

intégralement, le projet de loi 116 l'a repris. Pour en faire un exercice pédagogique facile, j'ai fait préparer les notes explicatives du projet de loi 58 avec, ici et là, quelques modifications, si peu, vous savez, ces notes explicatives qui précèdent les dispositions d'un projet de loi comme tel. Alors, je souhaiterais que nous en fassions distribuer copie à nos invités, ainsi qu'aux membres de la commission, pour pouvoir d'abord vérifier qu'à l'exception du chapitre XI sur les conditions régissant la scission d'un régime et la fusion de plusieurs régimes - en fait, cette presque seule exception - avec, finalement, un recul concernant le véritable droit de regard des travailleurs sur le régime de retraite, nous nous retrouvons face à un projet de loi à peu près, pour ne pas dire quasi identique, à deux ou trois exceptions près.

Pourtant, quatre ans plus tard, ce qui était critiqué à l'époque l'est tout autant, puisque le projet de loi 116 contient les deux mêmes omissions, l'indexation et la disposition des surplus accumulés dans les caisses. Que le gouvernement, il y a quatre ans, en déposant son projet de loi, ait annoncé qu'il allait consulter sur ces deux importantes questions, compte tenu de ses partenaires provinciaux - on pense, entre autres, à l'Ontario qui est un peu le maître d'oeuvre en cette matière maintenant, qui l'est devenu depuis sa loi adoptée en 1986 ou 1987, et le fédéral, aussi, a légiféré - qu'en 1985, le gouvernement ait voulu consulter sur ces deux importantes questions - je les rappelle, l'indexation et la disposition des surplus accumulés dans les caisses - ça se comprend. Que quatre ans après, on représente, à peu de chose près, le même projet de loi avec les deux mêmes omissions, ce serait vraiment difficile de justifier qu'en quatre ans, le gouvernement n'ait pas eu le temps, n'ait pas assumé la responsabilité de se faire une idée sur ces questions, compte tenu du fait que l'Ontario, pourtant, en a évidemment traité et, notamment, sur la question de l'indexation, dans les modifications apportées à sa loi sur les régimes privés, a introduit le principe d'une indexation. La modalité est encore, comme on le sait, en consultation. (10 h 30)

D'autre part, le ministre nous avait annoncé, lors de l'adoption du projet de loi 95, l'automne dernier, concernant un moratoire sur la disposition des surplus, qu'il allait faire un grand ménage, et je le cite: "Un grand ménage de la loi actuelle s'impose. En conséquence, j'entends proposer à cette Assemblée d'adopter une réforme en profondeur de la Loi sur les régimes supplémentaires de rentes et ce, dès la prochaine session. Nous pourrons alors dire, sans trop nous tromper, qu'il s'agit d'un grand ménage du printemps." Alors, là, il faut comprendre que le ménage du printemps a consisté à sortir du dossier le projet de loi d'il y a quatre ans. Malheureusement, ce grand ménage n'a pas eu lieu puisque deux questions fondamentales, et on les traitera durant les trois jours... Il sera impossible, j'en suis certaine, nos invités me le confirmeront, de ne pas aborder ces deux questions fondamentales qui sont l'indexation et les dispositions des surplus accumulés dans les caisses.

M. le Président, j'aimerais également rappeler - à ce moment-ci, je crois que c'est opportun de le faire - qu'autant il faut améliorer les dispositions concernant les régimes privés et les régimes complémentaires, autant il ne faut pas oublier qu'un bon nombre de travailleurs et de travailleuses n'y ont pas accès. Il n'y a pas d'obligation. La loi ne contient aucune disposition créant une obligation voulant qu'un tel régime complémentaire soit mis en place dans une entreprise. Et, évidemment, le nom même de régime complémentaire suppose qu'il vient supplémenter quelque chose d'autre et ce quelque chose d'autre qui concerne le régime public a bien besoin, lui aussi, d'un bon ménage du printemps. Tôt ou tard, le gouvernement devra prendre ses responsabilités. Déjà un bon nombre d'intervenants dans notre société ont pris conscience qu'avec un taux de natalité qui est sans cesse à la baisse, le Québec de l'an 2000 sera confronté à un très important vieillissement de sa population et, en l'an 2031, ce qui n'est pas si loin, finalement - on y sera tous, j'en suis certaine, tous ceux et celles qui sont ici aujourd'hui, n'est-ce pas, M. Legault? - la population à la retraite sera six fois plus nombreuse que présentement. Dans à peine 40 ans. Une population à la retraite six fois plus nombreuse, il y a de quoi s'inquiéter quand on sait que vers l'an 2002, si les taux de cotisation restent au même niveau qu'actuellement, la réserve du Régime de rentes du Québec sera à sec. Non seulement faut-il constater que notre régime public réussit mal à remplacer le revenu de travail au moment de la retraite, mais plus encore, si aucune mesure énergique n'est adoptée il ne réussira même plus à jouer son rôle initial. Je vous rappelle, pour les fins de la bonne compréhension de l'ensemble de ce dossier, que présentement, la rente de retraite maximale est de 566,25 $ par mois si la personne est âgée de 65 ans et de 389,38 $ par mois si la personne est âgée de 60 ans et a cessé de travailler. Ce sont là, évidemment, des rentes qui sont à peine plus élevées que les prestations que fournit l'aide sociale.

Malgré les augmentations prévues du taux de cotisation jusqu'en 1991, il est très clair que les rentrées de fonds ne seront pas suffisantes pour bonifier les prestations à un niveau plus acceptable, notamment, pour devancer convenablement l'âge d'y avoir droit. Plusieurs intervenants revendiquent l'élargissement de notre régime public, en l'occurrence le régime de rentes, afin qu'il assure au moment de la retraite 50 % du revenu gagné antérieurement plutôt que 25 %, comme c'est le cas présentement.

D'autre part, il faut se rappeler cette

tentation qu'ont, à l'occasion, les gouvernements, je dirais, d'économiser sur le dos des retraités qui forment la majorité, c'est-à-dire ceux qui ont travaillé avec des revenus faibles ou moyens. Je veux par là, évidemment, me référer à la récente réforme fédérale annoncée en matière de législation fiscale sur l'épargne-retraite. On sait que cette loi est conçue de façon à favoriser les gens à revenus élevés et à pénaliser les salariés à revenus faibles ou moyens. Je rappelle que les nouveaux plafonds de cotisation vont être le moindre de 18 % et non plus de 20 % comme auparavant, donc, le moindre de 18 % du revenu gagné ou de montants qui seront plus élevés, mais qui, évidemment, seront beaucoup plus avantageux proportionnellement aux augmentations de revenus. Cette propension qu'ont les gouvernements - je rappelle que, dans les modifications annoncées, que les nouveaux plafonds de contribution qui devaient entrer en vigueur le 1er janvier 1990 sont repoussés au 1er janvier 1991 - il faut faire très attention puisque cela aura des incidences, cette réforme fédérale de la législation fiscale, non seulement sur l'épargne-retraite privée, mais également sur l'équivalent des déductions permises...

Le Président (M. Bélanger): Je vous inviterais à conclure, s'il vous plaît.

Mme Harel: II faut faire très attention de penser qu'il y a là une voie d'avenir pour compenser convenablement les revenus qui ne sont plus, au moment où le travailleur prend sa retraite. Il sera très tentant pour les gouvernements d'aller, par ce biais, chercher des revenus en ne permettant pas que les investissements faits par les travailleurs et les employeurs soient convenablement obtenus au moment de la retraite.

Je termine, M. le Président. Il me semble que ça a passé très vite, trop...

Le Président (M. Bélanger): Oui, cela passe vite.

Mme Harel: Oui, trop évidemment. Je termine donc en vous rappelant que le ministre devra nous dire s'il entend prolonger le moratoire - puisque cela viendra très vite, le moratoire est prévu jusqu'au 1er janvier 1990 - ou, au contraire, s'il entend y mettre fin avant le 1er janvier 1990. Ce serait vraiment irresponsable que, ce matin ou durant la commission parlementaire, l'ensemble des intervenants n'en sachent rien.

Quant à la question de l'intervention, je conclus en me permettant de rappeler qu'en cette matière, l'Ontario a fait un pas de géant, le principe étant d'ores et déjà admis dans la législation adoptée en 1987. Le gouvernement ontarien a déjà présenté en consultation des hypothèses d'indexation et, de notre côté, nous avons corrigé l'omission que contenait le projet de loi 58. En novembre dernier, notre congrès a établi sa position sur cette question. Je vous remercie, M. le Président.

Auditions

Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie beaucoup. J'inviterais donc le premier organisme à présenter son mémoire. Il s'agit du Conseil du patronat, c'est bien évident, représenté par M. Ghislain Dufour, M. Robert Biais, M. Michel Saint-Germain, M. Robert Grignon et M. André Dumouchel.

Pourriez-vous nous présenter les gens qui vous accompagnent, s'il vous plaît, histoire de connaître la séquence pour les fins de transcription du Journal des débats? Ce serait apprécié. Lorsque vous aurez à parler, est-ce que vous pourriez vous identifier, ceci toujours pour les fins de transcription au Journal des débats. Vous avez 20 minutes pour la présentation de votre mémoire. Je vous remercie.

Conseil du patronat

M. Dufour (Ghisiain): Merci, M. le Président. Mes collègues sont, à mon extrême gauche, M. Robert Grignon, vice-président associé chez MLH Liée, une firme d'actuaires-conseils; à ma gauche, M. Robert Biais, vice-président chez TPFC, également une firme d'actuaires-conseils; à mon extrême droite, M. Michel Saint-Germain, associé principal chez William Mercer Itée, également une firme d'actuaires-conseils; à ma droite, M. André Dumouchel, directeur des rentes et successions chez Domtar Inc., qui représente, avec nous, ce matin, l'Association des industries forestières du Québec. Ghislain Dufour, pour les fins du Journal des débats, M. le Président

Le Président (M. Bélanger): Ha, ha, ha! Je vous remercie.

M. Dufour (Ghislain): Je voudrais d'abord, au nom du CPQ et de mes collègues, remercier le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu et ses collègues de l'Assemblée nationale, de nous avoir invités, puisqu'il s'agit d'une commission parlementaire sur invitation, à commenter le projet de loi 116. Il s'agit, vous le comprenez bien, d'un projet de loi important tant pour l'ensemble des Québécois que pour les entreprises québécoises, et nous souhaitons donc que vos travaux soient des plus fructueux.

Notre exposé se divisera en deux parties. Dans un premier temps, nous commenterons globalement le projet de loi, nous intéressant également à ce qu'il ne contient pas. Deuxièmement, nous ferons un certain nombre de recommandations techniques propres à bonifier le projet, étant informés par la Régie des rentes et auprès de M. Legault, de la mise sur pied d'un comité d'analyse technique, avec lequel nous sommes totalement d'accord. Je pense que la

cuisine peut se faire mieux auprès de ce comité qu'à l'intérieur des travaux de cette commission. Je dis immédiatement que nous n'aborderons pas non plus l'ensemble des articles du projet de loi qui suscitent des commentaires, interrogations ou modifications parce que cela deviendrait carrément trop technique.

Quant au projet de loi dans son ensemble, même s'il comporte plusieurs particularités québécoises, souvent discutables, il reprend, pour l'essentiel, la démarche qu'il est maintenant convenu d'appeler le consensus national dans le domaine des régimes complémentaires de rentes. À cet égard et malgré plusieurs réserves dont on fera état plus loin, nous donnons notre appui à ce projet de loi qui fait suite, d'ailleurs, à plusieurs années de débats amorcés en 1985. Mme Harel y a fait référence lors du dépôt du projet de loi 58 mort au feuilleton, à la suite du déclenchement des élections.

C'est un projet de loi qui - nous le répétons - malgré les failles évidentes, a l'intérêt de dépoussiérer la loi 66 et de mettre ses principales composantes à l'heure de 89 et de la réalité canadienne. Malgré cet appui de principe, force nous est cependant de regretter vivement que le gouvernement n'ait pas justement profité du dépôt du projet de loi 116 pour lever le moratoire sur le retrait de l'excédent de l'actif des régimes de retraite. Aucune disposition du projet de loi, sauf peut-être une, et de façon très incidente, ne traite en effet du retrait de l'excédent de l'actif et ne propose une position gouvernementale sur les conditions de la levée du moratoire.

Ainsi que nous l'avions déjà signalé au ministre, au mois de janvier, je pense, nous aurions souhaité en toute logique que la question du retrait de l'excédent de l'actif soit discuté en même temps que la réforme des régimes complémentaires de retraite, autrement - et c'est le cas actuellement - le projet néglige des dimensions importantes et l'ensemble du dossier devient difficile à évaluer. Quoi qu'il en soit, nous annexons au présent mémoire l'essentiel de notre position sur le retrait de l'excédent de l'actif contenu dans une lettre que nous adressions en janvier dernier au ministre André Bourbeau.

En l'absence de proposition gouvernementale ferme dans ce dossier, nous maintenons toujours cette position de janvier. Vous avez maintenant la balle dans votre camp.

Troisièmement, notre appui de principe au projet de loi 116 ne signifie pas pour autant qu'il ne soit pas nécessaire d'en modifier certains volets. Bien au contraire, puisqu'il comporte des irritants majeurs, et surtout lorsqu'il s'écarte du consensus national ou qu'il comporte des particularités québécoises. C'est ce que nous regarderons surtout en deuxième partie. Encore là, je répète, nous comptons sur le comité technique mis sur pied par la Régie des rentes pour clarifier bon nombre d'articles. Parmi les volets du projet de loi sur lesquels nous nous interrogeons, qu'on nous permette d'identifier immédiatement ceux que nous considérons les plus importants. Premièrement, les dispositions de l'article 2, quatrième paragraphe, qui exclut le gouvernement et ses diverses agences de l'application de la loi, tout en étant bien conscient - et on l'a dit très honnêtement - qu'il serait difficile pour le gouvernement de s'assujettir aux règles relatives à la capitalisation qu'il impose au secteur privé, pourquoi ne serait-if pas assujetti aux autres règles? Peut-être comprendrait-il mieux ainsi l'impact de certaines de ses propositions qu'il impose au secteur privé, telle la tenue d'une assemblée générale, M. le Président.

Deuxièmement, la tenue d'une assemblée générale, tel que prévu à l'article 162, est irréaliste pour nous. Outre les difficultés inhérentes à la tenue de telles assemblées, qui peut affirmer qu'elles seraient plus efficaces que tout autre moyen d'information adapté à la situation de chaque entreprise? Troisièmement, là je le dis comme il est écrit dans notre mémoire, M. le Président. Nous ne connaissions pas la déclaration qu'a faite tout à l'heure le ministre, mais les articles 145 et 149 du texte actuel excluent de la gestion de la caisse plusieurs entreprises qui ont développé l'expertise interne requise pour gérer l'importante caisse de retraite. En plus, l'article 149 exclut de l'administration des régimes des professionnels étrangers qui ont carrément fait leurs preuves. On trouve ces dispositions tout à fait étranges dans un contexte de libre-échange. (10 il 45)

Si vous nous permettez d'exprimer globalement notre réaction, ce sera pour dire que, de façon générale, toujours en dehors du consensus et toujours en référence aux particularités québécoises, le projet de loi est tatillon - on vous donne un certain nombre d'articles - il est confus, très complexe et technique même pour les professionnels du secteur. J'ai eu l'occasion de travailler dans ce dossier-là avec plusieurs actuaires. Ils ne sont pas tous présents ici ce matin et même ces professionnels du secteur avaient des discussions assez vigoureuses entre eux quant à l'interprétation possible de certains volets du projet de loi carrément excessifs. C'est le cas de l'article 105 auquel a fait référence le ministre dans son introduction tout à l'heure.

Rien n'indique que c'est aux employeurs à diffuser le contenu des lois. L'Éditeur officiel existe pour ça. Ce n'est pas la responsabilité de l'entreprise et cela donne à la Régie des rentes des pouvoirs trop importants. De plus, il rendra confuses les relations entre employeurs, employés et administrateurs des régimes de retraite. Qui plus est, le projet de loi témoigne d'un préjugé nettement défavorable à l'employeur.

En résumé, le législateur aura intérêt, conseillé en cela par le comité technique, à alléger le texte, à éviter les carcans et les

irritants, à faire davantage confiance aux entreprises et aux modalités des conventions collectives. Il enrichira ainsi grandement son projet de loi.

Dans notre deuxième partie, nous procédons à une analyse technique. Il y a bon nombre de thèmes qui sont abordés, M. le Président, je ne les reprendrai pas tous. De toute façon, ils ne sont pas tous de la même importance. Il y en a qui sont achalants, mais pas d'ordre de principe. Alors, vous les avez lus. Je vais aller à ce qui nous apparaît le plus important, quitte à discuter ensuite avec le parti au pouvoir et l'Opposition. Par exemple, je passe par-dessus la définition de "conjoint". Cela nous apparaît une chose possible à revoir assez facilement. J'arrête, par exemple, à l'article 3, à la définition de conseiller en valeurs qui, pour nous, est importante, en restreignant la définition de "conseiller en valeurs" à toute personne inscrite à ce titre auprès de la Commission des valeurs mobilières du Québec. Cela pourra créer un problème pour une entreprise d'envergure nationale ou internationale et ne jamais oublier qu'au Québec dans les grandes entreprises, ce sont des régimes de retraite qui sont quand même nationaux. Nos gens inscrits ici auprès de la Commission des valeurs mobilières auront automatiquement un problème. On devrait à tout le moins accepter les conseillers en valeurs mobilières reconnus par d'autres organismes compétents en la matière.

Je passe par-dessus l'article 6, la définition de contrat. Il faudrait que vous la renvoyiez. D'ailleurs, il semble bien que cette loi ne sera plus purement une chasse gardée d'actuaires, ce sera aussi un partage avec le Barreau et les avocats parce qu'il y a beaucoup d'interprétations qui devront être faites, non pas par les actuaires, M. Bourbeau, mais par les avocats.

À l'article 14.15°, qu'on appelle les congés de cotisation, l'employeur qui s'est engagé à financer le solde n'a pas négocié avec les associations de travailleurs les conditions d'un régime afin d'obtenir un congé de cotisation. On ne tient pas plus qu'il le faut à cette affirmation. En fait, elle est là tout simplement pour nous provoquer et vous amener à nous parler de la loi 95 et du moratoire, parce qu'on ne trouve pas le moyen autrement qu'en citant cet article-là qui est le seul qui réfère à tout le dossier du moratoire. Alors, on l'a mis de façon telle que vous ne pouvez pas être d'accord justement pour nous provoquer et dire que ça n'a pas d'allure, mais ça ouvrira un débat sur l'excédent de l'actif.

L'article 24, vérification des textes, c'est important. La Régie des rentes ne prendra plus la peine de dire aux administrateurs d'un régime que les textes soumis sont conformes à la loi ou pas. Cette nouvelle disposition, bien sûr, générera des frais élevés pour les entreprises puisqu'il leur faudra nécessairement recourir à des services juridiques. C'est ce que je disais tout à l'heure. On entre maintenant dans un tout nouveau domaine qui est celui du droit, peut-être pas du notariat, mais on fait intervenir des disciplines qui n'existaient pas avant comme telles dans ta gestion des régions. Je dis tout de suite que c'est un processus propre au Québec et qui vient alourdir encore notre "management" de ces régimes. Un commentaire sur l'article 34, l'adhésion des travailleurs à temps partiel. Il serait important de préciser que les travailleurs occasionnels sont exclus du régime de retraite. La notion de service continu ne devra comporter aucune ambiguïté, afin d'en limiter l'impact administratif, tout comme l'ont fait les autres juridictions. Là-dessus, j'aurais une suggestion à vous faire. C'est de carrément prendre les termes qui existent ailleurs, parce que ça, pour être dans le domaine des relations du travail, toutes les notions de travailleurs occasionnels, de travailleurs à temps partiel, de temporaires permanents, de temporaires réguliers, etc., devient extrêmement compliquée pour une entreprise qui fonctionne sur le plan national. Si vous n'avez pas la même définition, vous allez avoir des fichus problèmes. Alors, simplifions les problèmes. On en a déjà assez, d'autant plus que ce ne sont pas des questions de principe et les syndicats vont être d'accord avec nous sur ce volet.

L'article 42. Le délai de quinze jours en ce qui concerne l'obligation de verser les cotisations en autant de mensualités qu'il y a de mois dans l'exercice financier du régime de retraite, ça nous apparaît beaucoup trop court. On sent de l'inspiration très nette de M. Wilson là-dedans. Vous avez été un peu critiques de certaines dispositions récentes de M. Wilson. Alors, on pourrait faire la même critique ici et, vue par les employeurs, l'exigence mensuelle est déjà une bonne exigence. Il s'agit d'être employeur pour le savoir et, Ici, le délai est carrément trop court.

Articles 74 à 80, l'âge obligatoire de retraite. Encore là, c'est une approche qui est unique au Québec et qui n'est pas retenue dans les autres régimes de retraite comme les employés de la Fonction publique du Québec. Alors, on sent toujours deux poids, deux mesures, selon qu'il s'agit du public et du privé. Encore là, ce que l'on souhaite, c'est carrément d'être en harmonie avec les autres provinces et également de traiter de la même façon les régimes publics et privés. La seule chose qu'on vous concède, dans le fond, c'est de ne pas vous astreindre au même régime de capitalisation. De toute façon, vous ne seriez pas capables. Mais pour les autres règles, vous pourriez, pour l'essentiel, essayer de vivre le même régime.

Article 88, le recalcul de la rente. Pourquoi permettre l'aliénation du droit du conjoint à la rente au survivant, après le début du versement de la rente? De plus, la rente normale a été réduite d'un pourcentage moindre que l'équivalent actuariel. Le libellé de l'article fait en sorte que la rente réajustée deviendrait supérieure à la rente normale. Tous les actuaires concluent que

vous favorisez le divorce. Il faudrait clairement le dire, mais c'est une disposition qui deviendra extrêmement compliquée dans bon nombre de ménages.

L'article 92. Encore là, vous manquez d'harmonisation, non pas purement avec l'Ontario, mais vous manquez d'harmonisation avec le régime de rentes publiques. Là, on ne comprend pas. Cela se gère facilement. C'est votre propre régime public et il n'y a pas d'harmonisation avec le régime privé, ce qui fait que si vous ne tenez pas compte des primes qui ont été versée dans le régime public, ce réajustement pourra représenter des sommes extrêmement importantes pour les entreprises.

L'article 105. Les exigences sur l'information - je passe - pour nous, c'est important, je l'ai dit tout à l'heure. Je ne veux pas être obligé de donner la loi à 15 000 travailleurs chez Northern Telecom, mais c'est à ça que ça nous conduit. On peut donner de l'information sur le régime, pas de problème avec ça. Mais de là à donner toute l'information qui est une information qui devrait être donnée par le ministère des Communications ou l'Éditeur officiel du Québec, il nous apparaît que ce n'est pas le rôle du patron, comme tel, de le faire.

Les articles 144, 145, 146. Là, on entre carrément dans l'administration. C'est le coeur de votre projet. On était très sévères dans notre mémoire, M. le ministre. On l'est moins, après vous avoir entendu. Il faudrait que vous nous expliquiez davantage ce que vous voulez dire, parce que vous dites: Après y avoir bien repensé, on va laisser l'entreprise gérer la caisse. C'est évident que c'est l'orientation qu'on vous propose, à condition qu'il y ait un comité de retraite, avez-vous dit tout à l'heure. Je vous pose immédiatement une question à laquelle j'aimerais que vous nous répondiez tout à l'heure. Ce comité de retraite sera-t-il aviseur ou décisionnel?

Je passe là-dessus pour que vous précisiez davantage votre pensée tout à l'heure. Mais nous considérons qu'y y a un point qui est vraiment acquis. Je passe par-dessus la question du registre pour arriver à l'assemblée générale où on pensait que vous nous feriez une proposition d'ouverture, mais vous ne l'avez pas faite. Cette nouvelle proposition est typiquement québécoise et ne favorisera guère la diffusion de l'information pertinente aux participants d'un régime de retraite. De plus, une telle assemblée Implique des déplacements de personnel extrêmement coûteux, en particulier pour les entreprises qui ont de nombreux établissements géographiquement distincts, mais à l'intérieur du même régime de retraite. Pensons aux entreprises comme Provigo et Steinberg qui ont une série d'établissements, mais toujours avec le même régime de retraite.

Par ailleurs, lors d'une assemblée générale, un ou des votes sont régulièrement enregistrés. Rien ne garantit un taux de participation suffisamment représentatif. Nos amis du monde syndical vont nous dire qu'ils ont souvent bien de la misère à organiser des réunions qui sont représentatives, pas plus que la possibilité pour de nombreux participants d'assister à une telle assemblée, étant donné le caractère continu de certains processus de production dans les entreprises. Vous avez trois chiffres, par exemple, dans les pâtes et papiers, dans l'aluminium, etc. Ainsi, le choix de l'endroit et le moment d'une telle assemblée feraient en sorte qu'un grand nombre de participants à un régime de retraite serait exclu, alors qu'on peut les rejoindre différemment.

Pour toutes ces raisons, une solution de rechange beaucoup plus simple et efficace consisterait à émettre une brochure générale d'information sur laquelle on pourrait, d'ailleurs, demander leur réaction. Les mécanismes d'information prévus aux articles 105 à 109 sont, quant à nous, tout à fait suffisants.

Si le comité de retraite est retenu, les travailleurs peuvent fort bien désigner leur membre ou leurs deux membres. Quant aux cadres, l'employeur peut désigner son responsable du personnel pour le représenter, d'autant que ce comité devrait n'être que consultatif. Voilà pourquoi je vous ai posé la question, tout à l'heure, de me donner le statut de votre comité de retraite, l'administration du régime devant normalement relever de l'employeur qui, seul, a les données pour le faire, sauf si l'employeur veut la confier à un autre organisme compétent.

Je termine en disant que, pour nous, l'assemblée annuelle est un problème majeur et on aimerait en discuter avec nos collègues syndicaux. Parce qu'ils vivent les mêmes problèmes que nous dans l'organisation de ces meetings, on n'est pas sûrs du tout qu'ils seront d'accord. Je pense à Alcan qui va venir vous dire ici: Comment puis-je faire Shawinigan et Kitimat, avec le même régime de retraite?

L'assemblée annuelle n'est qu'une parmi plusieurs options possibles en vue de laisser aux participants le loisir de décider de la création d'un comité de retraite et d'élire ses représentants. La loi devrait permettre d'autres options dans la mesure où elles sont décrites dans le texte du régime qui est une chose que vous favorisez. Cela achève, M. le Président?

Le Président (M. Bélanger): Je vous demanderais de conclure, s'il vous plaît, il reste une minute.

M. Dufour (Ghislain): Je vais conclure pour le plus important...

Le Président (M. Bélanger): À moins qu'il n'y ait consentement de part et d'autre pour prolonger de quelques minutes.

M. Dufour (Ghislain): J'achève, j'en ai pour...

Le Président (M. Bélanger): Si vous me permettez une seconde de procédure, c'est tout simplement qu'on crée un précédent et qu'on se crée des problèmes. Moi, cela ne me fait rien. On diminuera sur le temps après, parfait. Alors, vous pouvez continuer, M. Dufour.

M. Dufour (Ghislain): De toute façon, je n'en ai que deux... C'est la garde des valeurs. La garde des valeurs est pour nous importante. De nombreux régimes de retraite confient la gestion et l'achat d'obligations étrangères de toute nature qui se transigent sur les marchés internationaux à des représentants qui ne sont pas nécessairement établis au Québec. Il est tout à fait inopportun d'exclure l'achat de certaines valeurs, sous prétexte qu'elles sont déposées et gardées à New York, Londres et Tokyo. Je vous renvoie simplement à la nouvelle politique de la Caisse de dépôt et de placement qui, depuis quatre ans maintenant, va sur les marchés de Tokyo et de New York pour, justement, répartir les actifs le mieux possible. Pourquoi ne le ferait-on pas?

Je termine - le plus important - étant donné que le président de la Régie est là aussi, avec les pouvoirs de la régie. Le pouvoir accordé à la Régie est ici trop important car, avant même d'enquêter et de prouver une contravention à la loi, la Régie peut mettre un régime en tutelle. Bien sûr, elle va donner à l'administrateur l'occasion d'être entendu, mais elle peut l'entendre plus tard, si elle considère qu'il y a urgence. La Régie peut ainsi agir aux frais de la caisse. Avant de procéder de manière unilatérale, la Régie devrait, à tout le moins, avoir des raisons très valables et les exprimer par écrit, tout comme entendre les parties à l'avance.

Voilà, M. le Président, je vous remercie de vos deux minutes de grâce. (11 heures)

Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M. Dufour. M. le ministre.

M. Bourbeau: M. le Président, vous me permettrez de remercier le Conseil du patronat du Québec pour un mémoire très bien préparé. Quand on parle du Conseil du patronat du Québec, on parle d'un organisme représentatif d'un groupe absolument essentiel dans la constitution de régimes de retraite puisque les régimes de retraite sont mis sur pied essentiellement par des employeurs. Donc, un acteur important dans le dossier.

Je voudrais vous dire, en premier lieu, que nous sommes très attentifs aux recommandations que vous faites. Si nous prenons la peine de faire une consultation, c'est que nous sommes convaincus que le projet de loi 116 peut être amélioré. Et il le sera, je peux vous en donner l'assurance dès maintenant.

Nous avons proposé un ensemble de mesures, pour consultation. Nous avons l'intention de tenir compte des points de vue de tous les participants, qu'ils soient du patronat, des syndicats ou des autres groupes qui viendront nous rencontrer. Déjà, j'ai annoncé, tout à l'heure, une modification majeure que j'entends apporter, c'est-à-dire de permettre à l'employeur de continuer à faire la gestion du fonds de retraite, pour autant que le comité de retraite lui délègue cette gestion. Nous avons l'intention d'apporter d'autres modifications. Nous tiendrons compte d'une façon particulière de plusieurs des recommandations que nous avons faites. Il est fort probable, par exemple, que nous apportions des modifications à la définition de "conjoint", à celle de "conseiller en valeurs", à celle de "contrat". Nous allons probablement allonger le délai de versement des cotisations. Ce sont tous des sujets sur lesquels nous réfléchissons présentement. Il y a de bonnes chances également que l'article 178 soit enlevé. Pour ce qui est des pouvoirs de la Régie du logement...

Une voix: Est-ce votre prochaine présidence, M. Bourbeau?

M. Bourbeau: Vous m'excuserez, ce sont des réflexes conditionnés. Je dois dire qu'il y a des divergences de vues entre vous et le président de la Régie. Vous prétendez que la Régie a trop de pouvoirs. Les jugements de cour rendus au cours des derniers mois indiquaient justement le contraire. On reprochait à la Régie, d'une certaine façon - et les observateurs aussi - de jouer un rôle passif, de regarder passer le train lors de situations qui se sont présentées, où on a constaté des abus de la part de certains employeurs. Je dis bien "certains employeurs" parce que je suis fort conscient que la très grande majorité des employeurs du Québec se conduisent d'une façon irréprochable à l'égard des fonds de retraite. Je tiens à dire dès ce matin que nous n'avons pas de préjugé défavorable envers les employeurs, quoi qu'en pensent certains auteurs. Au contraire! Nous pensons que la majorité des employeurs se conduisent d'une façon exemplaire et, de façon générale, ça va bien dans la gestion et l'administration des fonds de retraite. Mais, malheureusement, comme dans d'autres cas, ce sont des cas exceptionnels qui remontent à la surface, qui font la manchette des journaux et qui font en sorte que des situations excessives sont portées à l'attention du public. Nous prenons acte de vos recommandations.

La Régie a des pouvoirs accrus, c'est évident. Maintenant, la mise en tutelle de régimes demeurera des situations tout à fait exceptionnelles. On donne à la Régie des pouvoirs d'intervention rapide. Je peux vous assurer que ces interventions ne seront faites que dans des cas tout à fait exceptionnels, certainement des cas d'urgence. Vous avez posé certaines questions relativement à la levée du moratoire et à la disposition des surplus d'actifs. On aurait souhaité - en cela, vous rejoignez l'Opposition

officielle - que nous traitions de ce sujet dès maintenant. Nous aurions également aimé pouvoir le faire. Cependant, je pense qu'on pourrait employer l'expression populaire qui dit "Qui trop embrasse mai étreint*. Nous avons pensé que le temps nous manquait pour pouvoir, dans un même projet de loi, régler d'une façon définitive la question de la bonification de la loi et la question extrêmement complexe de la disposition des surplus d'actifs et donc, éventuellement, de la levée du moratoire.

Étant donné que le moratoire a été mis en vigueur jusqu'au 1er janvier 1990, il nous est apparu plus sage de prendre un peu plus de temps pour réfléchir à la question, pour faire des consultations sur la question. Je crois sincèrement que les quelque huit mois qui restent nous permettront d'arriver à des solutions qui seront peut-être plus réfléchies et plus motivées que si on avait décidé de procéder dès maintenant, sans autre forme de consultation. Vous savez comme moi que l'Ontario est présentement en train de consulter. Il a fait des propositions qui font présentement l'objet de consultations. Je pense qu'il est sage d'attendre, de voir comment l'Ontario va s'en sortir, quelles seront les suggestions apportées. D'une certaine façon, on profite toujours de l'expérience et de la sagesse des autres.

Bref, j'ai voulu éviter de précipiter les choses en ce qui concerne une décision éventuelle quant aux surplus d'actifs. Je pense qu'il est plus sage de se donner encore quelques mois pour en venir à des solutions qui permettront d'en arriver à un consensus.

L'assemblée générale annuelle. Là, vous émettez des réserves quant à l'opportunité de tenir une assemblée annuelle des participants. Pourtant, quant à nous, il apparaîtrait normal que, au moins une fois par année, l'employeur s'assoie avec les employés et leur explique un peu ce qu'est le fonds de retraite, comment il fonctionne et qu'il réponde aux principales questions des travailleurs, des employés et même des retraités. On pourrait, bien sûr, penser à d'autres formes d'information, mais il nous est apparu que cette forme était probablement la meilleure. J'aimerais peut-être, puisqu'on a quelques minutes pour discuter avec vous, que vous nous disiez pourquoi vous estimez que l'assemblée annuelle n'est pas une excellente forme d'information à l'égard des travailleurs. Est-ce que cette formule vous apparaît vraiment comme étant inacceptable? Je pose la question et, après, peut-être qu'on pourra revenir sur autre chose.

M. Dufour (Ghislain): Oui. Juste avant de vous parler de l'expérience de Domtar - elle l'a vécue, on va vous la rappeler - je voudrais dire un mot sur la levée du moratoire. Je veux qu'on se comprenne bien. Nous aussi, on sait que ce n'est pas un dossier facile. À un moment donné, il avait été question qu'il y ait, peut-être pas un dépôt de projet de loi, mais une espèce de déclaration ministérielle qui nous ferait voir où vous vous en allez. C'est important d'intégrer ça dans un tout. On a l'impression qu'actuellement, le patronat donne, parce que, de consensus national, il donne, M. Legault, on donne, et, éventuellement, dans les actifs, il y a de bonnes chances que ce soit la même chose, on va donner en deux temps, alors qu'il aurait pu y avoir des éléments qui se seraient retrouvés dans le même paquet et ça, pour nous, c'était très important.

Concernant l'assemblée générale, on pourrait en parler longtemps, mais je vais demander qu'on vous raconte l'expérience de Domtar. Ils l'ont fait.

M. Dumouchel (André): André Dumouche). Chez Domtar, avant les négociations de 1984 dans le secteur des pâtes et papiers, on avait organisé, conjointement avec les syndicats, des séances d'information à l'intention des employés. C'étaient des séances parrainées conjointement par le syndicat et par la compagnie. On faisait la tournée de toutes les usines, donc, on se déplaçait d'usine en usine pour expliquer le régime. On faisait même des présentations avant et après le quart de travail, pour avoir le plus de participation possible. Malgré tout ça, on a eu une participation de seulement 17 %, en moyenne, dans toutes les usines, au Québec. Domtar, on le sait, est une compagnie qui a des employés d'un océan à l'autre. Donc, si on pense faire une assemblée générale à Montréal, par exemple, durant les heures normales de travail, on peut s'attendre à très peu de participation. On s'interroge sur l'efficacité de la tenue d'une telle assemblée. On pense qu'il y aurait peut-être des moyens plus efficaces de communiquer de l'information. Vous avez posé la question: Est-ce qu'il y aurait des moyens alternatifs? Dans le mémoire, on propose de préparer, à l'intention de tous les employés, une brochure qui pourrait satisfaire les besoins d'information. Il y aurait peut-être aussi des moyens alternatifs qui pourraient être déterminés par le comité de retraite. On parle d'un comité de retraite qui pourrait être consultatif. On le veut consultatif. Ha, ha, ha! Le comité de retraite pourrait décider du moyen le plus efficace pour la compagnie de véhiculer l'information qu'elle veut véhiculer. C'est l'essentiel de...

M. Dufour (Ghislain): J'ajoute à ça que c'est purement un principe, je l'ai mentionné tout à l'heure. Dans certaines boites où le syndicat est militant, quand il s'agit d'assister à une assemblée générale qui a une importance autre et plus grande - ratification de conventions collectives, etc. - dans la plupart des cas, ils ne rejoignent pas la majorité. Prenons l'exemple d'Hydro-Québec qui, sur l'ensemble du territoire, est assujettie au même fonds de retraite. Comment allez-vous faire une assemblée générale annuelle? Cela nous apparaît irréaliste.

II nous apparaît que le moyen que vous recherchez et avec lequel on est d'accord - on est d'accord pour l'information - est carrément un moyen qui ne vous mène nulle part. Ensuite, c'est nous qui allons nous faire reprocher de ne pas avoir donné l'information parce qu'on aura raté l'assemblée annuelle. Il y aura 75 % des gens qui vont se chicaner parce qu'ils n'auront pas eu l'information. Si vous nous obligez à la donner par un petit dépliant, tout le monde l'aura. Cela se donne facilement avec la paie et vous êtes sûrs de rejoindre tout le monde.

M. Bourbeau: M. le Président, à ce sujet, il est bien entendu que la loi stipule des conditions minimales. Rien n'empêcherait un employeur d'imprimer un dépliant, de faire monter un vidéo ou n'importe quoi d'autre, en sus de ce que prévoit la loi. On cite une expérience chez Domtar. D'ailleurs, je félicite Domtar d'avoir pris une telle initiative, d'avoir fait le tour des usines et d'avoir tenté d'expliquer le fonds de retraite à ses travailleurs. On me dit qu'il y a eu une participation de 17 %. Je me demande si ce n'est pas justement une raison additionnelle pour faire une assemblée annuelle. L'un des constats qu'on fait, c'est que, traditionnellement, au cours des dernières années, le travailleur québécois ne s'est pas assez préoccupé de son fonds de retraite. Nous voulons justement sensibiliser les travailleurs à l'importance de prévoir une pension pour l'avenir, pour la retraite. En faisant de telles assemblées, on va finir par mousser l'intérêt des Québécois pour ce sujet très important qu'est la retraite. Envoyer un dépliant, c'est bon, mais il y a quand même un certain nombre, pour ne pas dire un très grand nombre de personnes qui ne lisent pas les dépliants. Il y en a même un grand nombre, beaucoup trop, qui ne peuvent pas les lire. C'est plus facile d'informer quand on fait une assemblée, surtout si on vulgarise un peu, que si on se contente d'envoyer un dépliant. C'est un sujet qui a besoin d'être largement vulgarisé. Notre objectif est de sensibiliser les travailleurs à l'importance de la retraite, de leur expliquer ce qui se passe et de faire en sorte de les stimuler à s'occuper et à se préoccuper de cette question. (11 h 15)

L'assemblée annuelle pourrait avoir lieu... À mon avis, il n'est pas essentiel qu'il n'y ait qu'une assemblée au siège social de la compagnie. On pourrait tenir l'assemblée annuelle dans chaque usine, si la compagnie veut le faire, plutôt que de transférer les employés et de les amener à un endroit unique. L'objectif, c'est d'informer, le mieux possible et le plus simplement possible, et de répondre aux questions. C'est sûr qu'on pourrait trouver d'autres formules, mais celle-ci nous apparaît probablement la plus susceptible de vraiment apporter les informations aux travailleurs, de la façon la plus vulgarisée possible. C'est bien quand un actuaire enseigne ce qu'est un fonds de retraite. Moi-même, j'ai eu le privilège de recevoir des cours semblables et accélérés, au cours des derniers mois, mais, parfois, c'est intéressant quand les personnes traduisent ça en langage un peu plus ordinaire. Quant à moi, je souhaiterais qu'on fasse des efforts pour tenter de présenter ça de façon que le monde ordinaire puisse comprendre. On y arrive, puisque j'y suis arrivé; alors, peut-être que d'autres peuvent y arriver aussi.

Le Président (M. Bélanger): Je m'excuse, M. le ministre. M. Dufour manifestait l'intention de réagir, si vous le permettez.

M. Dufour (Gnislain): Pour clore sur la question de l'assemblée, le fait de donner de l'information ne veut pas dire qu'il n'y aura pas d'assemblée. Ce n'est pas ça que vous faites dans le projet de loi, vous nous obligez à tenir une assemblée annuelle de tous les membres. Je voudrais simplement que vous vérifiiez avec votre collègue du ministère des Transports. Vérifiez votre hypothèse avec M. Marc-Yvan Côté pour l'application dans son ministère, à savoir s'il est d'accord avec ça, juste ça. Il ne sera pas capable - là, je prends juste un ministère à l'intérieur de la vaste convention collective. Maintenant, si vous le prenez comme étant un refus de fournir l'information, je pense qu'on ne sera pas sur la même longueur d'onde. On veut de l'information, on veut en fournir et la plus simplifiée possible, c'est vrai, sauf que l'assemblée générale, ce n'est pas possible.

M. Bourbeau: Écoutez, c'est sûr que là-dessus, on ne semble pas sur la même longueur d'onde. Nous ne pensons pas que les employeurs du Québec veuillent cacher des choses. Nous avons décidé de cette formule qui nous apparaît être la plus susceptible de rejoindre, surtout d'expliquer aux travailleurs ce qu'est le fonds de retraite. Un dépliant, c'est bien, mais quand on ne le comprend pas tout de suite, il n'y a personne pour l'expliquer. S'il y a une assemblée, on peut poser des questions et obtenir des réponses, se familiariser davantage. Il n'y a aucunement, dans notre esprit, la question de mettre en doute la bonne foi des employeurs, ce n'est pas ça. Il faut trouver quelque chose, nous avons trouvé ça. Si on nous convainc, au cours des trois jours qui viennent, qu'il y a de meilleures formules, je vous le dis, il n'y a rien là-dedans qui est coulé dans le béton, c'est pour ça que nous sommes ici, aujourd'hui.

Maintenant, la question du comité de retraite. Tantôt, vous avez posé des questions très précises: Est-ce que le comité de retraite aura des pouvoirs décisionnels ou simplement des pouvoirs consultatifs, comme en Ontario? Sur ce sujet, nous nous démarquons de l'Ontario. À certains égards, l'Ontario va plus loin et, à d'autres, il va moins loin. Nous ne voulons pas que le comité de retraite soit simplement consul-

tattf. Le comité de retraite prendra des décisions, comme, par exemple, à savoir qui gérera la caisse. C'est le comité de retraite qui décidera à qui confier la gestion de la caisse. La politique de placement, elle, sera décidée par le comité de retraite.

Je vous répète que ce comité de retraite n'est pas un comité de retraite paritaire, nécessairement. La seule obligation, quant à la constitution du comité, c'est qu'il y ait un représentant des travailleurs et un représentant des retraités. Cela ne veut pas dire, nécessairement, un comité paritaire. Le comité de retraite, donc, prendra un certain nombre de décisions.

En ce qui concerne la gestion de la caisse, si la gestion de la caisse est confiée, par exemple, à l'employeur, cela ne veut pas dire que le comité de retraite va se mettre le nez, tous les jours, dans les décisions de gestion. Pour autant que le gestionnaire respecte les directives générales, les critères de gestion et la politique de placement, ce sera le gestionnaire qui prendra les décisions. Donc, il n'est pas dans notre esprit de faire en sorte que le comité de retraite, tous les jours ou toutes les semaines, vienne prendre des décisions quant aux placements à effectuer. Je pense que ça respecte la philosophie que nous avons voulu insérer dans le projet de loi, qui est de permettre une meilleure information aux travailleurs, tout en leur permettant de participer, d'une certaine façon, à l'administration dans un climat de transparence mais, avec les amendements que j'entends proposer, en permettant à l'employeur de continuer à faire la gestion, si tel est le désir du comité de retraite. Je pense qu'on atteint là un certain équilibre, pour ne pas dire un équilibre certain, qui ne peut être que dans l'intérêt des travailleurs et, certainement aussi, à mon avis, des employeurs.

M. Dufour (Ghislain): Bon. En fait, ce que vous signalez, c'est que, encore une fois, vous vous éloignez du consensus. Et, quand on les additionne, on est loin du consensus. Et ce sont toujours des contraintes additionnelles. Nous allons assez loin, M. le Président. Nous disons que si vous êtes prêt à vous assujettir, comme gouvernement, à la règle de l'assemblée annuelle, nous sommes prêts à le regarder. Est-ce clair? On ne voit pas pourquoi le secteur privé s'assujettirait à des règles auxquelles vous n'êtes pas prêt à vous assujettir.

Sur la question du comité de retraite et son pouvoir consultatif ou décisionnel, encore là, on s'éloigne de la règle de l'Ontario. Je vais demander à M. Michel Saint-Germain de réagir là-dessus parce qu'il y a des cas, quand même, où, même dans le décisionnel, ça va nous créer des problèmes.

M. Saint-Germain (Michel): II y a plusieurs situations où les employés aimeraient mieux participer à un comité consultatif qu'à un comité administratif, question de responsabilités. Il me semble que, dans les cas où les employés choisiraient un comité consultatif, on devrait laisser à l'employeur toute la latitude pour administrer le régime, incluant la gestion de la caisse.

Le Président (M. Bélanger): Mme la députée de Maisonneuve.

M. Bourbeau: ...répondre à cette question. Écoutez...

Le Président (M. Bélanger): Excusez-moi, votre temps est écoulé.

M. Bourbeau: Bien oui, mais il y a une question...

Mme Harel: Je vous le permets. Je lui permets.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bélanger): Cela s'applique. M. le ministre.

M. Dufour (Ghislain): Merci. Sa réponse est importante pour nous.

M. Bourbeau: Je ne tiens pas à imposer mon point de vue. Écoutez, il n'y a rien qui empêche de former un comité consultatif. La loi ne l'empêche pas. Maintenant, dans l'état actuel du projet de loi, le comité de retraite ne peut être mis sur pied que si les travailleurs le désirent. Donc, dans l'état actuel du projet de loi, à moins qu'on n'y apporte des modifications, on pourrait avoir des travailleurs qui refusent un comité de retraite pour les raisons que vous avez indiquées, et on pourrait avoir des travailleurs et un employeur qui décident de former un comité consultatif. La loi impose des minimums, mais elle n'empêche pas d'ajouter à ce qu'il y a dans la loi.

M. Dufour (Ghislain): Si vous me le permettez, c'est important. On est carrément dans le domaine des relations du travail. Vous pouvez avoir le choix de former un comité consultatif avec lequel les travailleurs vont être d'accord mais, s'il est décisionnel, il y a des travailleurs qui vont refuser le comité consultatif parce qu'il est décisionnel.

M. Bourbeau: II ne serait pas décisionnel, s'il est consultatif. Ce sont deux mots qui s'opposent.

M. Dufour (Ghislain): Alors, est-ce qu'il est consultatif ou décisionnel?

M. Bourbeau: Bien non, ce n'est pas ce que je dis. C'est qu'un monsieur nous disait tantôt que certains préféreraient peut-être un comité consultatif à un comité de retraite. Le comité de

retraite ne sera pas consultatif, il va être décisionnel. Mais, si on ne veut pas d'un comité de retraite décisionnel, il n'y a pas d'obligation d'en former un, dans la loi telle qu'elle est. Et là, on pourrait former un comité consultatif "consultatif, qui n'est pas prévu dans la loi, mais qui n'est pas proscrit dans la loi non plus. À vous l'honneur.

Le Président (M. Bélanger): Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Vous voyez que ce n'est pas simple. Si je comprends bien le ministre, on peut, de façon décisionnelle, décider que ça va être consultatif. C'est ça? ...se retrouver.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bélanger): C'est un bon départ.

M. Bourbeau: C'est un peu complexe.

Mme Harel: Je veux également saluer les représentants du Conseil du patronat. M. Dufour, votre exposé était savant. Il m'a semblé que vous aviez une maîtrise des dispositions du projet de loi que, sans doute, bien peu de gens autour de cette table ont jusqu'à maintenant, mais que nous aurons certainement à la fin de cette commission parlementaire.

Le ministre, dans son discours d'ouverture, nous a dit: "Sur la question délicate et cruciale des surplus accumulés dans les caisses de retraite, une large consultation sera menée dans les prochains mois, avant la levée du moratoire." Je rappelle que la levée du moratoire est prévue pour dans quelques mois justement, le 1er janvier 1990. Quand on sait ce qu'est le calendrier d'un gouvernement, c'est comme si la levée du moratoire était pour demain étant donné qu'on finit la présente session et qu'on ne sait pas si on va commencer la prochaine, étant donné qu'il y a toutes les chances, puisque ce n'est pas au printemps, que ce soit à l'automne qu'on ait des élections et qu'il est possible qu'on soit Gros-Jean comme devant sur cette question pourtant fondamentale.

Les mois avant la levée du moratoire, je pense que c'est maintenant. Là-dessus, vous vous êtes prononcés, dans votre mémoire, assez clairement. J'aimerais discuter sur cette question. Vous dites: Le CPQ considère, en ce qui a trait aux régimes de retraite à prestations déterminées, que les entreprises, puisqu'elles assument la responsabilité des déficits, ont un droit fondamental aux excédents actuariels. Je pense que c'est une position de principe, c'est en annexe. Elle est reprise également par l'Association des manufacturiers et par l'ensemble du milieu patronal. Vous connaissez certainement les scandales - je reprends l'expression même utilisée dans tous les médias - il y a encore quelques mois à peine; la liste est évidemment très Impressionnante. C'est à la suite de toutes ces difficultés qui se sont présentées que le gouvernement avait pensé intervenir. Il y avait eu les entreprises Simonds - tout ça est devant les tribunaux - La question est: Est-ce qu'on laisse tout ça se judiciariser ou comment, de façon civilisée, peut-on envisager ces questions-là?

Le ministre dit: Moi, j'attends de voir ce que va décider l'Ontario. Finalement, c'est essentiellement ça, sur l'indexation et sur la disposition des surplus. Sur l'indexation, la différence, c'est que l'Ontario a déjà une proposition: les 75 % de l'IPC moins 1 %. Sur les surplus, l'Ontario en a une aussi. Nous, on ne connaît pas la proposition du gouvernement actuel. Est-ce que celle de l'Ontario lui convient ou non? C'est évident que - je ne le dis pas seulement pour ce dossier - en matière de main-d'oeuvre et de sécurité du revenu en général, de condition féminine et de politiques familiales, l'Ontario est en train vraiment de prendre un leadership, non pas tant sur le plan économique qui lui était déjà connu que sur le plan social dont on n'a pas idée. Le rattrapage qu'on fait au Québec avec l'actuel gouvernement, depuis trois ans, c'est d'attendre ce que fait l'Ontario pour essayer de s'y ajuster. J'ai parié de Simonds, mais on aurait pu parier de vraiment beaucoup d'autres dossiers: Singer, le Crédit foncier, etc. Finalement, on se rend compte qu'en Ontario, Us ont distingué la source des surplus, d'où venait finalement le surplus. Est-ce que le surplus était dû plus à un excès de cotisation de l'employeur ou est-ce que c'était dû à un rendement trop faible attribué aux cotisations? Le surplus ne vient pas simplement de la bonne gestion de l'employeur, il vient parfois de la trop grande modestie du taux d'intérêt de la cotisation du travailleur. Je pense aux ingénieurs de Forano qui contribuaient de 5 % de leur salaire et qui se sont retrouvés avec leur contribution plus 3 %. Alors, pour vous, est-ce une question de principe idéologique et la totalité du surplus ou si le surplus, ça se discute aussi?

M. Dufour (Ghislain): II y a deux dossiers dans votre intervention: celui de l'indexation et celui des excédents d'actifs. Sur l'indexation, étant donné que ça ne fait pas l'objet de nos discussions et que ce n'est pas dans le projet de loi et que l'Ontario est toujours en consultation puisque sa dernière proposition est encore en consultation, vous nous permettrez de nous abstenir, sauf pour dire que c'est un dossier très important, qu'on n'a pas d'objection de principe à l'indexation parce que ça se fait dans les grandes entreprises. Domtar le fait, Alcan le fait. Ça se fait, de l'indexation, sauf que c'est une autre chose, que de dire: On va l'imposer par la loi. Il faut carrément en mesurer, à ce moment-là, l'impact sur le nombre de fonds de retraite qui pourraient disparaître. Cela pourrait repré-

senter des coûts énormes. On pense que, même en Ontario, nonobstant le rapport Freeman, le débat n'est pas complet là-dessus. Mais, ce n'est pas ça que vous visez. Vous visez la loi 95 et la levée du moratoire qui, pour nous, est un dossier important. C'est vrai qu'on affiche une position de principe ici. Je vais vous dire pourquoi on l'affiche. C'est M. Robert Blais qui vous dira pourquoi on l'affiche. La seule chose qui nous intéresse, à ce moment-ci, on était prêts à entendre les propositions, soit dit en passant, nonobstant nos propres positions, bien sûr qu'on ne peut pas être d'accord avec des cas patents où il y aurait abus d'utilisation des fonds. Je le dis bien et je mesure mes mots. On ne peut pas être d'accord avec ça. On est d'accord avec des paramètres qui éviteront ça. Mais, sur le principe, on en parle avec Robert qui vit beaucoup cette situation dans un certain nombre de dossiers.

M. Blais (Robert): En fait, je pense que tout le monde est d'accord que la question des surplus est un sujet très difficile à traiter et très émotionnel. Un peu pour expliquer la position du CPQ à ce sujet, on part toujours du principe de base qu'un régime de retraite privé, c'est un engagement volontaire de la part d'un employeur. Je pense que, dans toutes les lois en vigueur, dans tous les domaines, l'indexation et le reste, c'est le point fondamental. Vous ne pourrez jamais avoir une loi qui va causer des problèmes à quelqu'un qui n'a pas de régime de retraite. Point à la ligne. Il ne faut donc pas oublier ça ou oublier que c'est toujours dans ces situations-là; ce sont souvent les employeurs les plus responsables qui se font embourber dans un paquet de paperasses et de situations difficiles. Je pense qu'il y a toujours le point de base de laisser aux parties les relations employeur-employés. C'est la façon normale de faire les choses. (11 h 30)

Quant à l'autre point de vue que vous avez mentionné, madame, la question de la responsabilité des déficits à l'employeur existe. En fait, le projet de loi 116 - et on en est bien contents - précise qu'en cas de terminaison de régime, l'employeur sera responsable, pas de problème, de sorte qu'à ce moment-là... C'est le principe que j'appelle le principe de la rue à sens unique. Dans un régime de retraite, si on se met dans une situation où, quand il y a déficit - et, des déficits, il y en a eu au cours des dernières années - I va y en avoir d'autres dont l'employeur sera responsable et, de l'autre côté de la clôture, il ne pourra pas utiliser des surplus. À ce moment-là, on va se retrouver dans une situation difficile.

Il y a un autre point qu'il est important de comprendre, quand on pratique, comme nous tous, dans ce milieu, c'est qu'il y a un paquet de moyens d'éviter des surplus, non pas à court terme, mais à long terme. Il s'agit de changer le type de régime de retraite, de terminer le régime de retraite, etc. Tous ces moyens, quand on regarde ce qu'ils font... Aussi, l'actuaire peut suggérer des... En fait, si on regarde l'historique, l'actuaire, qui est de nature très prudente, suggérait de mettre plus d'argent que moins d'argent. Pensez-vous que les employeurs vont nous écouter dans ces situations, si on leur dit: S'il y en a trop, vous le perdez et, si vous terminez le régime, vous ne pouvez pas l'utiliser, mais, s'il n'y en a pas assez, vous serez obligés de cotiser la différence. Donc, ce principe de rue à sens unique est difficile à éliminer. La loi ou la levée du moratoire devra être prudente.

Un dernier point peut-être là-dessus. En fait, de façon personnelle - et je m'adresse à M. le ministre - selon mon expérience personnelle des dernières années, depuis que le sujet est devenu de plus en plus chaud comme tel, la réponse à votre problème réside dans la divulgation. Les compagnies se retrouvent devant l'obligation de mettre cartes sur table. Quand on parle actuellement à nos clients de surplus, de congé de cotisation, on leur dit: Écoutez, faites l'hypothèse que tous les gens vont savoir que c'est ce qui va se passer. C'est très bien que ce soit ainsi. Selon nous, cette façon de faire les choses va assurer qu'il n'y aura pas de situations d'abus ou que la majorité d'entre elles seront éliminées. Donc, on pense que la solution à votre problème réside dans la divulgation.

M. Dufour (Ghislain): Je pourrais peut-être dire un mot à Mme Harel.

M. Saint-Germain: II me semble que la question de la propriété du surplus devrait faire partie, comme toutes les autres dispositions d'un régime de retraite, de l'entente entre les parties, l'employeur et les employés ou l'employeur et les syndicats, et ce sont ces parties qui devraient, en toute liberté, décider de la propriété et du partage du surplus. Il peut y avoir des cas où les parties s'entendent d'une façon et d'autres cas où elles s'entendent sur une autre façon de partager le surplus.

Mme Harel: Vous êtes évidemment des experts et votre réponse comporte des nuances. Vous nous dites que, s'il n'y a pas, maintenant, possibilité d'une décision unilatérale parce que bon nombre de cas se sont retrouvés devant les tribunaux, ce sont finalement les travailleurs qui, au moment de la fermeture, ont été mis devant le fait accompli d'une décision unilatérale de l'employeur des années antérieures qui ne leur avait pas été communiquée. D'autre part, évidemment, une partie du surplus... M. Biais, vous mentionnez: Cela dit, quel surplus l'employeur peut-il utiliser? Celui qui est finalement généré par une trop faible majoration de la contribution de l'employé au moment où il y a terminaison? Mais là, évidemment, puisqu'il y aura indexation, tout ça sera nécessairement modifié, mais la

grande question me reste en tête. Étant donné des experts, vous allez pouvoir me répondre: Comment se fait-il que, dans certains cas - je pense, entre autres, aux employés du Crédit foncier - étant donné la terminaison partielle de leur régime, ils se sont trouvés traités différemment, selon qu'ils étaient à l'emploi du Crédit foncier au Québec ou dans une autre province. Ils se sont rendu compte qu'ils auraient été bien plus avantagés avec les dispositions d'à côté et ils étaient très défavorisés parce que, finalement, on leur appliquait les dispositions d'ici.

M. Dufour (Ghislain): M. Biais.

M. Biais (Robert): Par rapport à la situation du Crédit foncier, celle-ci est corrigée dans la loi actuelle, entre parenthèses. Le problème était que, dans la loi actuelle, au Québec, on disait que dans le cas d'une terminaison partielle, on ne disait rien, alors que dans les autres provinces on dit que dans le cas d'une terminaison partielle, on doit les traiter comme dans le cas d'une terminaison totale et le régime du Crédit foncier disait spécifiquement, si je me souviens bien, que les surplus appartenaient aux employés. Donc, c'était, comme Michel le disait tout à l'heure, très clair, dans cette situation.

Pour répondre un peu à votre commentaire aussi sur la question des cotisations des employés, s'il y a déficit sur les cotisations des employés dans un régime de retraite, c'est l'employeur qui a la responsabilité de les verser aussi.

Mme Harel: Je ne vous parle pas du déficit. Je vous parle du surplus qui est généré par le fait qu'il y avait une trop faible majoration de la contribution. En Ontario, la proposition sur les excédents, je pense qu'elle consiste à différencier, à partir de 1987 ou après 1987. Je crois qu'avant 1987, un employeur va pouvoir obtenir le remboursement des surplus antérieurs à 1987, mais il doit offrir aux participants une protection rétroactive d'au moins 75 % de l'inflation, moins 2 %. C'est bien le cas. Donc, il y a déjà là une garantie de protection. Dans votre position, cela m'apparaissait assez idéologique, c'était: Le surplus nous appartient. On fait ce qu'on veut avec. En Ontario, il y a déjà...

M. Dufour (Ghislain): Là, on mêle les deux phénomènes: celui de l'indexation et celui de l'excédent. Celui de l'indexation, le rapport Freeman qui est encore en consultation, la démarche que vous venez d'identifier...

Mme Harel: Ça, c'est l'excédent.

M. Dufour (Ghislain): ...est tout à fait correcte. Il est possible que lorsque sera réglé le problème des excédents, on veuille retourner en arrière, selon une formule d'indexation, mais on ne la connaît pas.

Mme Harel: Non, mais je regrette. Je ne vous parle pas de la formule d'indexation qui est 75 % de l'IPC moins 1 %, mais de la formule de la disposition de l'excédent avant 1987, qui est finalement une protection rétroactive d'au moins 75 % de l'inflation, moins 2 %.

M. Dufour (Ghislain): Oui, mais écoutez, on vous l'a dit. Nous sommes déçus de ne pas avoir une proposition qu'on pourrait regarder dans son ensemble. Est-ce que les chiffres de l'Ontario seraient bons ou non, pour le Québec? Il faudrait faire la simulation. On a tous les spécialistes pour le faire. Mais en l'absence d'une proposition, on ne le peut pas. Là, on se rejoint, Mme Harel, parce qu'on l'a toujours dit au ministre, nous, qu'on aurait voulu avoir les deux ensemble pour faire une analyse complète. Dans le milieu des gestionnaires des fonds de retraite, cela leur crée un problème parce qu'ils en règlent une partie, mais ils ne savent pas ce qui va leur arriver dans trois mois, six mois. Est-ce que la formule retenue sera du type de celle de l'Ontario ou d'une autre, inconnue totalement?

Mme Harel: Je ne veux pas être prophète de mauvais augure, mais je ne peux pas comprendre comment il serait possible, avant le 1er janvier 1990, d'opérer dans le cas de connaître, de mettre en application plutôt des dispositions. On sait comment travaille le gouvernement finalement, quel qu'il soit. Ce n'est pas une charge que je fais contre l'actuel gouvernement, pour autant. Mais, je lui reproche cependant de ne pas le faire maintenant. Ce n'est pas l'automne prochain, je ne le pense pas, qu'il va pouvoir certainement le faire. Et là, la grande question c'est: Comment va se faire la consultation? Elle se fait maintenant. Pourquoi ne pas en profiter? Quand va avoir lieu cette consultation? Est-ce qu'on peut penser, peut-être, qu'elle aura lieu pendant les élections? Une fois la formule connue, le gouvernement élu se considérera comme mandaté pour l'appliquer.

M. Dufour (Ghislain): Là-dessus, pour être très honnête...

Mme Harei: Le gouvernement élu. La nôtre sera connue aussi.

M. Dufour (Ghislain): ...je dois dire que le président de ia Régie et le ministre ont commencé à nous consulter.

Mme Harel: Cela ne m'étonne pas parce qu'il y a un phénomène de privatisation de la consultation, ici, qui est assez phénoménal.

M. Dufour (Ghislain): Tout comme ils ont consulté les centrales syndicales, j'en témoigne.

Mme Harel: Tout autant. La privatisation, elle bénéficie à ceux qui, habituellement, ont le

privilège de faire partie de ce qu'on appelle "les dinosaures" dans notre société.

M. Dufour (Ghislain): Écoutez, il faut...

Le Président (M. Bélanger): Pas de gros mots, là.

Une voix: C'est qui, le dinosaure?

Mme Harel: J'ai heureusement réussi à faire ajouter quelques organismes qui avaient été oubliés par le ministre. Je m'en voudrais, M. le Président, que le ministre utilise même une parcelle de mon temps, j'en ai si peu à ma disposition.

Si j'ai bien compris, M. Dufour, vous dites oui à la consultation, oui à une meilleure information, mais non au moyen choisi qui est l'assemblée générale.

M. Dufour (Ghislain): Oui.

Mme Harel: Est-ce ce que je dois comprendre?

M. Dufour (Ghislain): Oui. Vous avez parfaitement raison et Je pense que si vous discutez avec d'autres milieux... Je suis loin d'être sûr que l'affirmation qui nous est faite, à savoir que d'autres milieux l'acceptent soit fondée. Il faut être très prudents parce que c'est le genre de choses qui vont automatiquement être transposées dans l'ensemble des autres provinces. Il y a des choses qu'on n'a pas intérêt à transposer dans d'autres provinces.

Mme Harel: Vraiment, je ne pourrais pas conclure sans... Combien me reste-t-il de minutes?

Le Président (M. Bélanger): Deux minutes et demie.

Mme Harel: II me reste à peine deux minutes et demie. Sur la question des régimes privés, vous nous rappelez qu'il s'agit là d'un engagement volontaire. Le ministre nous a dit: En fait, deux travailleurs sur cinq, donc 40 % de la main-d'oeuvre, bénéficient d'un tel régime. Il me reste très peu de temps, mais je pense que ce n'est pas indifférent que l'on traite de l'ensemble de cette question. Croyez-vous que ce projet de loi favorisera l'augmentation de la protection des régimes complémentaires? Pensez-vous, M. Dufour, qu'on est prêts pour une réforme du régime public?

M. Dufour (Ghislain): Je voulais d'ailleurs signaler vos commentaires sur le régime public. Comme vous, nous disons que nous n'avons pas le droit de transférer à une autre génération un régime qui ne leur donnera rien. Je ne suis pas d'accord avec les propositions de Mme Marois sur les quanta, mais sur le principe de bonifier le régime public, on était totalement d'accord. On s'en va vers un cul-de-sac et c'est évident qu'il faut mettre de l'argent additionnel là-dedans. On vient de publier un document exactement dans le même sens que ce que vous avez dit tout à l'heure. Mais Je pense que ça, c'est partagé par le gouvernement, sauf qu'il a la responsabilité d'ajouter une taxe et ce n'est jamais facile.

Votre question est fondamentale: Est-ce que ce projet de loi aidera à couvrir d'autres personnes? On le reçoit bien, on a dit oui, à condition d'éliminer une série de contraintes, parce que s'il y a de plus en plus de contraintes, c'est évident que ça n'encouragera pas les entreprises à mettre sur pied de tels régimes. L'objectif doit toujours être d'avoir un système le plus national possible qui va concourir a en mettre sur pied. On pense qu'actuellement, il y a encore trop d'irritants. Le ministre en a fait disparaître un majeur tout à l'heure, mais on pense qu'il y a encore trop d'irritants pour pouvoir dire carrément qu'avec ce projet de loi, les employeurs seront encouragés a mettre sur pied des régimes de retraite.

Je pense que c'est le rôle des parlementaires que d'être très sensibles au fait que c'est volontaire, un régime de retraite. S'il y a trop de contraintes, on ne le mettra pas sur pied.

Le Président (M. Bélanger): Voulez-vous remercier nos invités, Mme Harel?

Mme Harel: Vous êtes bien bon pour moi, M. le Président. C'est vraiment trop bref quand on sait... Sur la question de conjoint, j'aurais aimé ça aussi avoir votre expertise là-dessus, mais sans doute faut-il espérer justement qu'on ne privatise pas trop la consultation et qu'on ait l'occasion de discuter publiquement pour sensibiliser l'opinion publique. C'est une question qui exige un débat public parce que ça exigera aussi un financement public. Alors, je remercie nos invités et j'espère que le gouvernement aura la volonté politique d'assumer des responsabilités et de nous faire connaître ses orientations avant plutôt qu'après les élections.

Le Président (M. Bélanger): M. le ministre.

M. Bourbeau: Oui, M. le Président, tout en remerciant nos invités, j'aimerais souligner que le comité technique continuera à travailler dans le sens de l'amélioration du projet de loi. On est tout à fait disposés à regarder chacun des articles pour tenter de bonifier tout ça. En ce qui concerne les surplus, je voudrais quand même dire que, si nous avons décidé de ne pas tenter de régler immédiatement la question des surplus, c'est parce qu'il nous est apparu évident que, si nous tentions de mettre la bouchée trop grosse, II y avait fort à parier que tout le projet ne puisse pas être adopté avant le mois de juin. Ainsi, par exemple, le Parti québécois, au

printemps 1985, a déposé un projet de loi et n'a pas réussi à le faire adopter avec la conséquence qu'on se retrouve, quatre ans plus tard, sans loi. Je ne veux pas, et c'est justement parce que j'ai un grand désir de faire en sorte que cette loi soit adoptée, que je ne veux pas discuter des surplus, puisqu'il m'apparaît que ce serait énorme comme discussion. Je vous signale que l'Ontario a procédé exactement de la même façon que nous. On a commencé par régler le problème de la loi et, après ça, on a réglé la question des surplus. Donc, on suit un peu le même "pattern". Je vous dis simplement qu'on se reverra très bientôt, vous, la partie syndicale et les autres partenaires, et l'Opposition officielle, en temps et lieu, bien sûr, pour discuter de la question fondamentale des surplus d'actifs et de ce qu'on doit en faire.

Je vous remercie beaucoup de votre collaboration et je dois dire que le dégât...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bourbeau: Le débat m'apparaît bien engagé. Merci.

M. Dufour (Ghislain): Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bélanger): Sur ce lapsus, la commission ajourne ses travaux sine die. Je remercie le Conseil du patronat de sa participation. Je vous informe, cependant, qu'après la période de questions, nous allons siéger à la salle du Conseil législatif, en haut.

Une voix: Au salon rouge?

Le Président (M. Bélanger): Oui, à la salle du Conseil législatif.

(Suspension de la séance à 11 h 47)

(Reprise à 15 h 32)

Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il vous plaît!

Je demanderais à chacun de bien vouloir prendre sa place, afin que la commission des affaires sociales puisse procéder à des consultations particulières et auditions publiques dans le cadre de l'étude du projet de loi 116, Loi sur les régimes complémentaires de retraite.

Nous allons maintenant entendre le Forum des citoyens âgés de Montréal. Excusez-nous du retard. Il est simplement attribuable à un horaire mal planifié parce qu'il est impossible de finir en Chambre avant 15 il 15 et, quand on convoque les gens pour 15 heures, c'est évident qu'on n'est pas très respectueux. On vous prie de nous excuser. Alors, si vous voulez bien vous approcher, Mme Marguerite Levac-Saint-Amour, M. Léo Hudon, M. Pierre Brisson. C'est ça.

Alors, vous connaissez un peu nos règles de procédure. Vous avez 20 minutes pour la présentation de votre mémoire et, à la suite de votre présentation, il y aura une période de discussion avec les parlementaires pour un total de plus ou moins une heure. Nous allons faire une gestion du temps très stricte pour éviter les débordements, d'autant plus que nous avons déjà du retard. Je vous souhaite donc la bienvenue et je vous prierais de vous identifier, d'identifier votre porte-parole et de bien vouloir procéder. Je vous remercie.

Forum des citoyens âgés de Montréal

M. Hudon (Léo): Mon nom est Léo Hudon. Je suis président du conseil d'administration du Forum. Je regrette, je n'ai pas compris le nom de celui qui nous a demandé de nous approcher.

Le Présidant (M. Bélanger): Vous dites "M. !e Président" et il n'y aura pas de problème.

M. Hudon: Parfait. Je vous remercie bien de votre invitation et il nous fait plaisir d'être ici. Malheureusement, Mme Saint-Amour, qui s'était annoncée, n'a pas pu venir parce qu'elle a été retenue dans sa famille pour cause de maladie. Mlle Manon Rivest, qui est notre agent de recherche, nous accompagne.

En ce qui concerne le projet de loi 116 sur les régimes complémentaires de retraite, nous avons quatre choses dont nous voulons traiter, la transférabilité, l'indexation des régimes de retraite, les régimes complémentaires et les surplus de caisses de retraite.

La transférabilité. La mode qui semble courante dans le moment, c'est que quelqu'un, dans une entreprise où ça existe, ayant 45 ans d'âge et dix ans de service ne voit pas nécessairement son fonds de retraite transféré s'il change d'employeur, mais a droit à ce que l'on appelle habituellement un régime de retraite différé. Ce n'est pas tout à fait ce que nous envisagions. Pour résumer notre point de vue, nous souhaiterions que le projet de loi prévoie qu'après deux ans de service dans une entreprise, quel que soit l'âge de l'employé, ses contributions au régime de retraite, de même que les contributions patronales, soient transférées à son nouvel employeur, si le nouvel employeur a un régime de retraite. S'il n'en a pas, il y aurait probablement des modalités à examiner, que les deux, ses cotisations au régime de retraite et celles du patron, soient transférées à sa demande, soit dans un REER ou, encore, qu'on trouve peut-être une possibilité d'améliorer d'autres régimes de retraite qui sont à sa disposition.

La transférabilité, ce n'est peut-être pas un rêve qui nous vient des nuages. Au contraire, c'est que, dans le monde d'aujourd'hui, les changements de situations arrivent assez souvent dans la carrière des employés. On prévoit, en moyenne, que cela se produira cinq fois au cours

de la vie professionnelle.

Quand quelqu'un change d'emploi, c'est habituellement pour améliorer sa situation et en arrivant chez un nouvel employeur, s'il y a déjà un régime de retraite auquel il adhérera en remplissant les conditions d'adhésion à ce régime, si, en plus de ça, on peut transférer celui qu'il avait déjà, 1 nous semble que ce serait un bien et que cela contribuerait probablement à assurer une meilleure productivité que si, à chaque fois que quelqu'un change de situation, il est obligé de perdre tout ce qu'il a accumulé chez son employeur précédent.

En ce qui concerne l'âge, nous pensons qu'après deux ans de service les gens ont, plus souvent qu'autrement, une espèce de permanence reconnue et que tout ce qui leur revient en fait d'avantages sociaux qui peuvent les suivre, ils puissent les garder; en d'autres mots, que les contributions, comme je l'ai dit, les cotisations au régime de retraite privé, de même que la cotisation de l'employeur, avec ce que cela aurait pu rapporter, que ce soit transféré au nouvel employeur, s'il y a un régime de retraite chez le nouvel employeur. S'il n'y en a pas, il faudrait trouver...

Malheureusement, le temps nous a manqué. Nous avons reçu notre Invitation à la toute dernière minute. Nous n'avons pas une grosse organisation pouvant faire des études. Mais nous serions disposés, si vous nous le permettiez, à nous pencher davantage sur la question et faire cette suggestion dans ce sens, dans un avenir tout à fait prochain.

Donc, nous recommandons, vu qu'un individu est appelé à changer d'employeur cinq fois au cours de sa vie professionnelle, que les cotisations salariales versées par le travailleur et que les cotisations patronales versées pour le compte de l'individu avec des intérêts accumulés soient transférables dans tous les cas où c'est possible.

L'Indexation des régimes de retraite. En ce moment, je pense que vous avez certainement pu constater, par les journaux, que les unions ouvrières, les syndicats de compagnies font beaucoup dans ce sens-là, et une de leurs principales revendications c'est précisément l'indexation des pensions de retraite. En ce moment, il est plutôt exceptionnel que les pensions de retraite soient indexées. Là où elles le sont, c'est habituellement à un pourcentage bien inférieur au pourcentage de l'augmentation du coût de la vie. Encore là, une fois qu'une personne a consacré une carrière à un travail, qu'à la fin de celle-ci, au moment où elle prend sa retraite, son revenu puisse lui permettre de vivre, et une des seules façons dont cela peut être fait c'est par l'indexation des pensions de retraite. La preuve c'est que les pensions fournies par l'État, tant celles de la sécurité de la vieillesse que celles du Régime de rentes du Québec, sont des pensions indexées à la pleine valeur du taux de l'inflation. Les régimes com- plémentaires, si je comprends bien l'Idée du régime complémentaire, c'est comme une option, quelque chose d'un peu facultatif. C'est que certaines entreprises ont déjà un régime de retraite. Plus souvent qu'autrement, ce régime est financé entièrement par l'entreprise elle-même et, afin d'améliorer la situation des employés, on leur offre la possibilité de faire certaines économies en versant un montant, habituellement un montant minimal mais il n'est pas très élevé. Il y a, évidemment, aussi un montant maximal parce qu'aucune compagnie ou entreprise ne permettra, que je sache, que quelqu'un contribue à 100 % de son salaire à un régime de retraite. Nous sommes entièrement d'accord. Là encore, il faut que ces cotisations soient bien administrées. Evidemment, notre recommandation dans ce domaine, à cause des difficultés financières, vise à en faciliter l'accès aux gens.

Il y a également les surplus que l'on trouve dans les fonds de retraite à certains moments. Le cas dont on se souvient le plus, c'est l'affaire Singer où l'on accordait à des gens une pension d'environ 10 $ par mois alors que la caisse de retraite affichait un surplus de 4 200 000 $ ou environ. Cette somme a été... À ce moment-là, l'employeur a voulu que ce soit lui qui s'en charge et qu'il en dispose à sa guise. Nous recommanderions, dans le nouveau projet de loi, que le gouvernement prévoie que les cotisations des employés, les cotisations principales et les surplus des régimes de retraite soient la propriété exclusive des employés et non pas la propriété des employeurs. Je me souviens avoir lu un article dans une certaine revue, en France, où l'on résumait globalement l'idée de tous les avantages sociaux sous le titre général de Salaire familial. À mon point de vue et au point de vue des gens du Forum des citoyens âgés de Montréal, les régimes de retraite font partie du salaire familial et le salaire familial appartient à l'employé et non pas à l'employeur.

M. le Président, je vous remercie beaucoup de nous avoir accordé cet entretien. Je ferai de mon mieux pour répondre aux questions que les gens pourraient poser. Mais, si vous permettez, peut-être que M. Brisson aurait quelque chose à ajouter. Je ne pense pas que nos 20 minutes soient complètement terminées.

Le Président (M. Bélanger): Oui. On va entendre M. Brisson.

M. Brisson (Pierre): Je n'ai pas de remarques spéciales à faire.

M. Hudon: Vous n'avez pas de remarques spéciales?

Le Président (M. Bélanger): Vous n'avez pas de commentaires. Parfait. Alors, peut-être à la période de discussions tout à l'heure. Madame non plus?

Mme Rivet (Manon): Cela va.

Le Président (M. Bélanger): Bien. Je vous remercie beaucoup de votre présentation. J'invite maintenant M. le ministre à procéder à la discussion avec vous.

M. Bourbeau: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de saluer les représentants du Forum des citoyens âgés de Montréal. J'ai écouté avec attention l'exposé du président qui porte essentiellement sur quatre points majeurs. J'ai pris quelques notes ici.

En ce qui concerne la transférabilité, je tiens à vous rassurer. Le projet de loi prévoit exactement ce que vous avez demandé. Dorénavant, quand un travailleur quittera son employeur, il pourra, s'il a acquis le droit à la rente, partir avec son fonds de retraite, non seulement son capital à lui, mais les intérêts accumulés et la part de l'employeur. Il pourra les transférer dans le fonds de retraite de son nouvel employeur ou, encore, il pourra, s'il le désire, investir cette somme dans un REER, un régime d'épargne-retraite bloqué à son nom qu'il pourra gérer lui-même ou selon les modalités qui seront déterminées. Donc, il y a beaucoup de souplesse. (15 h 45)

Maintenant, pour pousser un peu plus loin, la période de deux ans est ce que nous avons retenu aussi. C'est donc dire que, dorénavant, quand on aura souscrit pendant deux ans, on aura droit, au bout de deux ans de souscription, à une rente. L'acquisition sera là. On aura acquis le droit à une rente. Pour pouvoir souscrire, il suffira d'avoir travaillé deux ans. Alors, ça se passe comme ceci. Vous commencez à travailler chez quelqu'un. Deux ans après, vous avez le droit de commencer à souscrire dans le fonds de retraite et, deux autres années après, vous avez le droit acquis à une rente. Mais c'est sûr que, si vous avez cotisé seulement deux ans, ça ne fera pas une grosse rente, mais au moins vous avez les montants d'argent qui sont déjà accumulés et qui peuvent vous donner droit à une rente.

De plus, nous avons dans le projet de loi l'obligation de créditer un intérêt qui équivaut au moins à l'intérêt du rendement moyen de la caisse ou, encore, à l'intérêt des certificats de dépôt de cinq ans. Donc, c'est un intérêt normal. Finalement, l'employeur sera obligé de contribuer à au moins 50 % de la valeur de la rente. Si vous partez après deux ans, trois ans ou quatre ans, en plus d'emporter votre argent et votre intérêt, vous emporterez également la part de l'employeur. Ce sont les nouvelles dispositions.

Pour ce qui est de l'indexation et des surplus - vous avez traité à la fois de l'indexation et des surplus - il n'en est pas question ici. Nous ne traitons pas de ce sujet ici aujourd'hui, ni dans le projet de loi. Enfin, ceux qui veulent en parler peuvent toujours en parler, mais la discussion ne porte pas là-dessus. Ce n'est pas dans le projet de loi. Cela fera l'objet de discussions plus tard. En ce qui concerne les surplus, l'indexation, on verra. Ce ne sont pas des sujets à l'ordre du jour. On ne règle pas ces problèmes-là avec le projet de loi. J'ai dit qu'en ce qui concerne les surplus, au cours des prochains mois, j'ai l'intention de tenir une consultation publique. On pourra discuter avec nos amis de l'Opposition sur la forme de la consultation, ça pourra être général, ça pourra être particulier, ça pourra être ce qu'on voudra que ce soit, mais on va consulter et, éventuellement - j'espère à l'automne - on sera en mesure de faire une proposition concrète sur ces sujets.

Finalement, il reste le dernier point que vous avez traité, les régimes complémentaires. Là-dessus, je dois dire que je n'ai peut-être pas très bien saisi le sens de votre intervention. Est-ce que c'est la problématique du temps partiel que vous voulez traiter avec le chapitre des régimes complémentaires? Est-ce que c'est le fait que des gens qui travaillent un minimum de temps puissent avoir le droit de participer au fonds de retraite? J'aimerais vous entendre préciser un peu ce que vous avez dit au sujet des régimes complémentaires.

M. Hudon: Je pense que j'ai peut-être mal compris ce que vous vouliez dire par les régimes complémentaires. J'ai peut-être interprété ça comme étant "supplémentaires". Si vous me permettez de me servir de cet exemple, j'ai fait carrière à Bell Canada où le principe est le même, même si c'est une compagnie dont l'incorporation relève du fédérai. À Bell Canada, les employés ne contribuent pas au régime de retraite. C'est un droit acquis, comme vous le disiez tout à l'heure; après deux ans, on a ce qu'on peut appeler notre permanence, ce n'est jamais dit officiellement, mais on le vit et on s'aperçoit qu'au bout de 40 ans, cela fait 40 ans qu'on est là. On a une certaine permanence.

Après deux ans, on a droit aux contributions que l'employeur nous fait. Il y a la règle 45-10 là aussi, mais, en plus de ça, pour permettre aux employés d'améliorer leur condition au moment de leur retraite, on leur permet de souscrire à un régime facultatif supplémentaire ou complémentaire à ce que la compagnie donne déjà. C'est ce que j'avais compris.

Maintenant, dans mon exposé, tout à l'heure, j'ai oublié de dire que nous vous demandions aussi que les employés à temps partiel aient droit au régime de retraite quand il y en a un dans une entreprise, peut-être selon certaines modalités tenant compte du fait qu'ils ne travaillent pas à temps plein. Peut-être qu'au lieu de deux ans d'attente, ce serait trois ans, ou quelque chose comme ça, avant de pouvoir commencer à y souscrire, mais ça, ce sont évidemment des modalités. Dans le moment, on n'a pas eu le temps - moi, du moins, je n'ai pas eu le temps - de trop regarder tout ce qu'il y

avait dans le projet de loi, avec le résultat que ça se peut qu'on ait manqué certains éléments que vous avez. Mais je pense que je me suis trompé en interprétant ce que vous vouliez dire par complémentaires, alors, c'est tout ce que je peux vous dire en réponse à votre question, M. le ministre.

Le Président (M. Bélanger): Merci. Alors, M. le ministre.

M. Bourbeau: M. le Président, je voudrais ajouter que la loi prévoit des conditions minimaies et que les employés peuvent toujours convenir de conditions meilleures. Par exemple, nous, dans la loi, nous disons que l'acquisition a lieu après deux ans; on peut très bien convenir que ce serait après un an, mais ça ne pourrait pas être plus de deux ans, ça ne pourrait pas être trois ans, on doit respecter le minimum inscrit dans la loi.

Je comprends également, en ce qui concerne la question des régimes complémentaires, que vous souhaiteriez que les participants puissent mettre des cotisations complémentaires additionnelles. Il n'y a rien, je pense bien, qui empêche qu'on puisse s'entendre pour que les cotisations additionnelles soient faites par des travailleurs. Le minimum, pour ce qui est du travail à temps partiel, nous avons prévu dans le projet de loi que quelqu'un qui travaillerait 700 heures par année, pendant deux ans, pourra avoir droit de participer au régime, alors que précédemment c'était beaucoup plus exigeant. Bref, ce sont les améliorations que nous avons apportées au régime. M. le Président, pour l'instant, j'ai terminé mes questions, et je reviendrai peut-être tout à l'heure, pour le mot de la fin.

Le Président (M. Bélanger): Merci, M. le ministre. Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Merci, M. le Président. Je voudrais saluer les porte-parole du Forum des citoyens âgés de Montréal, M. Hudon, qui êtes président, je crois, du conseil d'administration, de même que M. Brisson et Mme Rtvest, je pense. J'ai bien connu Mme Thérèse Marchand qui a été, je crois, directrice générale.

M. Hudon: Mme Marchand a été longtemps directrice générale et ensuite a été présidente à une ou deux reprises. Elle est maintenant à sa retraite et sa santé est plus ou moins bonne, alors, on la voit beaucoup moins.

Mme Harel: Enfin, elle avait retenu mes services. Elle m'avait offert mon premier emploi régulier; alors, je lui en sais gré. En fait, j'ai toujours eu beaucoup de reconnaissance pour elle. Le ministre n'aura pas le plaisir de pouvoir discuter avec mol sur des questions de fond comme celles que nous abordons cet après-midi, M. Hudon.

Dans votre mémoire, vous avez fait état abondamment de la situation de pauvreté à laquelle sont confrontés bon nombre de concitoyens âgés. Vous en avez, d'ailleurs, une connaissance intime, étant donné que le Forum, à Montréal, représente une partie importante de la population âgée pauvre. En vous écoutant discuter avec le ministre sur la question des régimes complémentaires, il ressort que le mot complémentaire est adéquatement utilisé pour signifier ce qu'il veut bien signifier, c'est-à-dire complémentaire au régime public. Ce matin le ministre, dans son discours d'ouverture, faisait état de 41 % des travailleurs et travailleuses du Québec qui bénéficiaient d'un régime complémentaire de retraite, et il faut évidemment se rendre compte que c'est une diminution, puisqu'en 1982 il y avait 45,5 % des travailleurs et travailleuses qui pouvaient profiter d'un régime complémentaire de retraite. Ces régimes sont finalement à la baisse présentement, et, encore là, il faut faire attention à l'anonymat des chiffres, parce que quand on regarde derrière on se rend compte que c'est surtout le secteur public et parapublic qui en profite, puisque, sur 1 200 000 hommes et femmes qui sont bénéficiaires de ces régimes complémentaires, il y a tous les employés du secteur public et parapublic, ceux des très grandes entreprises, comme Bell, que vous connaissez bien, également ceux et celles qui travaillent pour le gouvernement fédéral et pour ses agences. Dans le secteur privé, quand il y aura eu à peine 500 000 travailleurs et travailleuses qui auront bénéficié des fonds de retraite d'employeurs, comme on les appelle, ce sera bien le maximum.

Quand vous me parlez de pauvreté, je me disais: Peut-être que le Forum a une vue sur cette question, celle du régime public, parce qu'on devrait d'abord pouvoir compter sur le régime public pour maintenir de façon relativement acceptable le niveau de vie, et qu'ensuite le régime complémentaire vienne s'ajouter, l'objectif étant d'aller chercher à la retraite à peu près 70 % de son salaire habituel, pour ne pas tomber dans la trappe de la pauvreté. Avez-vous déjà examiné cette question sous l'angle des régimes publics? Selon vous, y a-t-il urgence à bonifier, améliorer ou intervenir tout simplement pour que ces régimes ne soient pas à sec? Quel est le point de vue du Forum là-dessus?

M. Hudon: Je dirais d'abord que récemment, et dans l'étude actuelle, nous ne nous sommes pas penchés sur cette question pour la bonne raison que, chaque fois que vous bonifiez le régime public, nous allons payer quelque part, comme c'est d'ailleurs le cas pour un régime complémentaire de retraite. Nous ne sommes certainement pas contre une bonification du régime afin d'aider ceux qui en ont le plus besoin et ceux qui dépendent essentiellement des régimes de retraite publics pour survivre une fois à leur pension, mais la réponse à votre question

est que nous ne nous sommes pas penchés récemment sur cette question. Cette question des pensions de retraite nous est venue un peu à la dernière minute; ce mémoire a été préparé un peu à la hâte. ll comprend peut-être certaines failles. On s'en excuse, on avait préparé un nouveau texte légèrement amélioré, mais ça demanderait probablement une étude beaucoup plus approfondie. Nous n'avons pas le personnel voulu pour faire plus que ce que nous avons fait à ce moment et surtout dans une si courte période de temps.

Pour ce qui est du régime public, il faudrait peut-être se pencher là-dessus et voir ce qu'en seraient les conséquences. Évidemment, si c'est pour coûter plus cher que ça rapporte pendant la vie active, il faut tenir compte de tous ces facteurs parce que les gens, pendant qu'ils travaillent, paient au régime public comme ils paient au régime privé dans certains cas. Alors, jusqu'où peut-on aller? Je ne le sais pas.

Mme Harel: Maintenant on évalue, dans le secteur privé, qu'environ un travailleur sur cinq a accès à un régime privé alors que quatre sur cinq ne peuvent compter que sur le régime public. N'est-ce pas ce qui explique la pauvreté dont vous faites grand état dans votre mémoire?

M. Hudon: Bien sûr, mais on n'a pas eu vraiment le temps d'arriver à des solutions. On a eu juste le temps d'examiner le projet de loi qui nous était soumis par le gouvernement actuel quant à la question des régimes complémentaires. C'est malheureux que les régimes complémentaires ne puissent pas être imposés. S'ils étaient imposés, cela réglerait peut-être le problème une fois pour toutes, mais là il y aurait tout le problème de la possibilité de payer des entrepreneurs privés. Pouvez-vous dire à tout le monde qui a dix employés ou cinq employés au plus: Vous aurez à l'avenir un régime de retraite dans votre entreprise? Le gouvernement a peut-être le droit de le faire, mais serait-ce de bon aloi de le faire? Je me pose la question et je n'ai pas la réponse pour le moment.

Mme Harel: M. Hudon, je ne veux surtout pas que vous vous considériez responsable, au Forum des citoyens âgés, du peu de temps qui a été imparti à votre organisme pour préparer un mémoire. Il faut savoir que malheureusement cette consultation est une consultation privée, qui n'a pas un caractère public, donc qui n'a pas été annoncée et publiée. C'est sur invitation. Évidemment, cette consultation n'étant pas à caractère général, il n'y a pas eu d'annonce dans les médias, comme cela se fait ordinairement, ce qui donne un délai beaucoup plus long, puisque c'est habituellement au moins 30 jours à compter de la date de l'information diffusée dans les médias qu'est comptabilisé le délai pour recevoir les mémoires. (16 heures)

Alors, nous sommes heureux comme membres de la commission, j'en suis certaine, de pouvoir compter sur votre expérience. Vous nous avez parié de transférabilité. Le ministre vous a dit: Mon projet de loi vient corriger les déficiences qui ont cours dans la loi actuelle. Cependant, il faut reconnaître que ça ne vaudra que pour les cotisations qui seront versées après l'adoption du projet de loi puisque, avant le 1er janvier 1990, il n'y a pas, à ma connaissance, dans le projet de loi, de rétroactivité. Un exemple qui nous a été apporté dans un des mémoires qui nous seront présentés aujourd'hui est celui d'un travailleur qui a 30 ans aujourd'hui et qui a pu travailler pendant dix ans pour un employeur à un régime non contributif. S'il quitte son emploi en l'an 2000, il aura 40 ans et il sera pénalisé, parce qu'il aura simplement droit à dix années de prestations, étant donné que les dix premières années de travail ne seront pas comptabilisées aux fins de bonifier sa pension dans le calcul de sa rente de retraite.

Alors, la grande question, je pense bien qu'elle reste encore à résoudre. Comment faire pour améliorer réellement le sort, non pas des personnes qui commenceront à travailler après l'adoption du projet de loi, mais comment faire pour améliorer également le sort des personnes qui sont en emploi maintenant? Je ne sais pas si vous avez examiné cet aspect particulier du projet de loi?

M. Hudon: Personnellement, j'ai pensé que cela avait peut-être un effet de rendre les deux, celles qui avaient été payées avant, comme celles qui seraient payées par la suite, sujettes à la transférabilité. Encore une fois, c'est toujours le même problème, nous avons manqué de temps pour fouiller l'affaire dans ses détails les plus profonds. Mais j'ai pensé de vous dire, dans ma naïveté - même si j'ai les cheveux blancs, je suis encore naïf à certains moments - que le projet pourrait comporter que les contributions faites à ce jour, comme celles qui ont été faites au 31 décembre 1989, comme celles qui seront faites après le 1er janvier 1990, seraient sujettes à la transférabilité et aux conditions prévues dans le projet de loi, à savoir: contribution de l'employé, contribution de l'employeur avec les intérêts accumulés à un taux de rendement semblable - si j'ai bien compris - à celui qui est établi par la Régie des rentes du Québec ou, encore, équivalent à l'intérêt qui est payé sur les certificats de dépôt sur une moyenne de cinq ans.

Mme Harel: En fait, la rétroactivité des règles d'acquisition, je pense bien que ça va être l'un des aspects importants de l'échange de propos qu'on va avoir durant les travaux de la présente commission parlementaire au sujet de l'ensemble des régimes, parce que ça peut jouer dans certains régimes. Mais c'est sûr que, en ce qui concerne les régimes non contributifs, i n'y

a pas de rétroactivité. En ce qui concerne les règles d'acquisition et d'adhésion, II faut faire attention, parce que dans l'opinion publique, présentement, on pense qu'avec le projet de loi ça va prendre deux ans. Mais, en fait, ça va prendre quatre ans. C'est comme si on était passé à côté de cette information. Le ministre a repris cette information pour ta première fois, selon laquelle il y aurait deux ans pour adhérer au régime, donc, pour satisfaire aux critères d'adhésion et, après, il va y avoir deux années après la date d'adhésion pour pouvoir satisfaire aux critères d'acquisition. Cela veut donc dire quatre ans.

M. Hudon: Mais, les deux dernières années, les employés contribueront, si j'ai bien compris.

Mme Harel: Je pense qu'ils contribuent immédiatement, n'est-ce pas? La contribution se fera-t-elle après la date d'adhésion?

M. Bourbeau: La loi prévoit des règles minimales. Le plus loin qu'on peut aller, c'est deux ans. Autrement dit, après deux ans d'emploi, l'employeur est obligé de permettre l'accès au fonds de retraite, la cotisation à un employé. Très souvent, dans les régimes, on permet de commencer à cotiser au bout d'un an. On peut même commencer à cotiser le premier jour d'emploi mais ce que le projet de loi dit, c'est qu'après deux ans, en ce qui a trait à un fonds de retraite, nonobstant le libellé du contrat, ça sera deux ans et on devra commencer à permettre la cotisation au bout de deux ans. Donc, c'est un maximum. Cela pourrait être avant si le contrat le prévoit.

M. Hudon: La transférabilité n'aurait lieu qu'au bout de deux années de plus, si j'ai bien compris.

Mme Harel: Oui.

M. Hudon: Une fois qu'il commence à contribuer, au bout de deux ans, pendant les deux prochaines années, ses contributions ne sont pas transférables avant encore deux ans. Est-ce que c'est juste?

Mme Harel: C'est un total de quatre ans, si vous me le permettez. Je m'excuse, on a si peu de temps et le temps qui est dévolu à l'Opposition, je vais l'utiliser. Le ministre pourra peut-être terminer sur le temps qui lui reste. Effectivement, c'est un total de quatre ans et l'ensemble, je pense, sans exception, des organismes qui représentent des femmes, en particulier, des travailleuses, vont venir devant la commission nous dire qu'étant donné les emplois précaires qu'occupent souvent les femmes ce sont des dispositions qui peuvent exclure un certain nombre d'entre elles des avantages de certains régimes. Donc, le fait qu'il peut y avoir quatre années, dont deux consécutives, de services continus - parce que c'est de ça qu'on parle - ça peut avoir aussi un effet qui défavorise une main-d'oeuvre précaire.

Le Président (M. Bélanger): En conclusion, s'U vous plaît.

Mme Harel: Je vais peut-être laisser la conclusion à M. Hudon.

Le Président (M. Bélanger): Je vous en prie.

M. Hudon: J'ai l'impression que c'est vrai que ça peut prendre quatre ans mais si vous ne faites rien maintenant, dans quatre ans, il y aura encore quatre autres années à ajouter. Je pense qu'il faut commencer. Je suis pour la vertu autant que possible, vous savez. Malheureusement, dans le passé, ça n'a pas été fait, peut-être que cela aurait dû être fait il y a déjà 10, 15 ou 20 ans, peu importe qui était là, ça n'a pas été fait. Il faut agir le plus tôt possible, dans les meilleures conditions possibles et je demanderais, en terminant, de bien examiner la possibilité de la rétroactivité avant d'adopter le projet de loi. On compte sur l'Opposition pour faire une lutte sur cette question.

Mme Harel: Finalement, est-ce que le ministre utilise son temps ou s'il remercie immédiatement, parce que je remercierais?

Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît, vous pouvez remercier.

Mme Harel: D'accord. Je vais remercier le Forum des citoyens âgés et je vais vous remettre une copie des notes explicatives du projet de loi 58 que nous avions préparé et déposé il y a maintenant quatre ans, et qu'on reprend presque intégralement quatre ans plus tard dans le cadre du projet de loi 116. Malheureusement, le projet de lof 58 d'il y a quatre ans a vieilli depuis et il aurait eu besoin d'un rajeunissement. Le ministre ne s'est pas employé à introduire de nouvelles dispositions. Il a surtout plagié abondamment ce qui avait été déposé il y a quatre ans maintenant.

Le Président (M. Bélanger): Merci. M. le ministre.

M. Bourbeau: M. le Président, comme on dit en latin In cauda venenum.

Le Président (M. Bélanger): C'est le venin dans la queue.

M. Bourbeau: Le venin dans la conclusion. Je remercie également nos amis du Forum des citoyens âgés de Montréal tout en les assurant que, effectivement, on a bien l'intention de faire en sorte que le projet de loi soit adopté main-

tenant et qu'on ne se retrouve pas dans quatre ans à en discuter encore. Pour ce qui est du sort des travailleurs, ce que vous avez appelé la rétroactivité, tout ça fera l'objet d'une discussion au moment où l'on parlera de la disposition sur les surplus. Je vous ai expliqué que ce n'était pas dans le projet de loi maintenant, ça le sera à l'automne. À ce moment-là, tous ces problèmes seront ramenés à la surface et Je vous dis simplement, pour qu'il n'y ait aucune ambiguïté, que dans les cas où on commence à cotiser dans le fonds de retraite, que ce soit après un an ou deux ans de travail, si on quitte après deux années complètes de cotisation, on a droit à l'acquisition de la rente et à l'immobilisation. Si on quitte l'employeur, on emporte avec soi sa contribution, les intérêts au taux réel plus la part de l'employeur et ça doit être réinvesti dans un autre fonds de retraite chez le nouvel employeur. Cela pourrait aussi être laissé là si on le veut. Si on quitte avant les deux ans, mais après avoir commencé à cotiser, on part avec sa portion à soi seulement et les intérêts véritables, mais, là, on n'a pas droit à la part de l'employeur. Cette somme d'argent, on peut la retirer complètement, elle n'est pas nécessairement immobilisée. Mais, si on veut, on pourrait la prendre et l'investir dans un REER ou dans un autre fonds de retraite. C'est donc la différence avec ce qui se fait maintenant. L'acquisition est beaucoup plus rapide, au bout de deux ans, et l'immobilisation aussi, après deux années. Je pense que ce projet de loi est une amélioration sensible et même spectaculaire, je dois le dire, par rapport à la situation qui prévaut présentement. Je suis d'accord avec vous quand vous dites qu'il faut absolument ne pas le retarder davantage. C'est bien ce que nous avons l'intention de faire avec le concours, bien sûr, de l'Opposition officielle qui, semble-t-il, a beaucoup de remarques à faire, mais qui, je pense, va éventuellement concourir avec nous à l'adoption du projet de loi. Je vous remercie.

M. Hudon: Merci, M. le ministre.

Le Président (M. Bélanger): Nous remercions le Forum des citoyens âgés de Montréal. Je tiens seulement à faire une petite précision. Nous avons la version révisée de votre mémoire qui a été, d'ailleurs, transmise aux gens de la commission. Je veux vous rassurer là-dessus, II n'y a pas eu de problème. On vous remercie beaucoup.

J'inviterais maintenant à la table des témoins la Confédération des syndicats nationaux, la CSN, qui sera représentée par Mme Monique Simard, par Mme Johanne Bérard, par M. Marcel Pépin et par M. Claude Rioux. Pendant que chacun prend sa place, j'invite nos invités de la Confédération des syndicats nationaux à présenter leur porte-parole et à bien vouloir procéder à la présentation de leur mémoire. Je vous fais grâce des procédures, je pense que vous les connaissez bien; on s'est vu ici à maintes reprises.

CSN

Mme Simard (Monique): Merci, M. le Président. M. le ministre et MM. les membres de la commission parlementaire, je suis accompagnée effectivement de Johanne Bérard, qui est actuaire au service de la Confédération des syndicats nationaux, de M. Marcel Guy Pépin, qui est au service de recherche de la CSN, ainsi que de M. Claude Rioux, qui est économiste et qui travaille à la Fédération des travailleurs du papier et de la forêt (CSN). Il y a également dans l'assistance des travailleurs syndiqués de la CSN, notamment de LAB Chrysotile, à Thetford Mines, un cas dont nous voudrions aborder les détails au cours de cette commission.

Évidemment, nous avons un temps très court de présentation pour un projet de loi qui est très volumineux. On a eu l'occasion de vous remettre un mémoire qui est aussi très volumineux puisque, comme vous le savez sans doute, la question des régimes supplémentaires de retraite est fort importante pour nous à la CSN. Je tenterai d'en faire un résumé qui sera nécessairement incomplet et imparfait.

C'est évident que les régimes supplémentaires de retraite sont un élément important du système de sécurité du revenu à la retraite, mais c'est aussi une constituante majeure du système nord-américain des relations de travail, notamment lorsqu'on considère l'importance qu'ils prennent à l'intérieur du processus de la négociation collective. C'est une particularité qu'il est important de souligner ici. D'autre part, ces régimes sont de plus en plus intégrés quant à leurs dispositions essentielles dans les conventions collectives.

Il est donc, à notre avis, impérieux de remplacer l'actuelle loi qui, manifestement à l'expérience, correspond de moins en moins aux besoins d'encadrement et de protection qu'ont les gens que nous représentons et d'autres. Le législateur a la responsabilité d'assurer aux participants et participantes des régimes complémentaires de retraite satisfaisants. Il n'y a plus de doute, à notre avis, que les gens souhaitent et exigent de contrôler davantage cette importante partie de leur patrimoine parce qu'il s'agit réellement d'un patrimoine pour ceux qui y participent. Il faut donc, à notre avis, que la nouvelle loi favorise l'expression de cette volonté qui, on peut le constater, se manifeste dans beaucoup de secteurs, chez de nombreux groupes. (16 h 15)

À la CSN, nous avons été actifs sur ces questions depuis fort longtemps. Depuis ces dernières années, en particulier, on a multiplié nos efforts de formation, d'analyse, d'expertise auprès de nos syndicats, auprès de nos organismes affiliés pour que nos membres s'intéressent, mettent en priorité la question de la retraite

dans le cadre de la négociation de leur convention collective, soient habilités aussi à bien traiter de ces questions et à se responsabiliser. C'est dans ce sens qu'on vient vous faire nos représentations aujourd'hui.

Au cours des derniers mois, on a eu l'occasion de faire voir au grand jour des situations qui sont assez désastreuses, pour ne pas dire scandaleuses. Je pense qu'à peu près tout le monde au Québec a en mémoire le cas de l'usine Simonds, à Granby, un des cas qui ont peut-être amené le gouvernement à agir cet automne pour l'adoption d'un moratoire sur la question de l'utilisation des surplus.

Donc, c'est toujours dans la continuité de ce processus qu'on se présente devant vous aujourd'hui. Il n'y a pas de réforme tous les jours dans le domaine dont on traite. On pense que cette réforme doit correspondre non seulement aux besoins d'aujourd'hui, mais aux besoins des années à venir aussi. Il y a cinq points sur lesquels il nous semble important d'attirer votre attention. Premièrement, II y a toute la question de l'administration du régime et de l'information aux participants. C'est pour nous quelque chose d'important. Deuxièmement, il y a toute la question des droits acquis des participants à la suite de différents événements. Troisièmement, il y a la protection du pouvoir d'achat. Quatrièmement, l'excédent d'actif, la question des surplus et, enfin, cinquièmement, les fonctions et pouvoirs de la Régie des rentes du Québec. En effet, on tient à le souligner, même si le projet de loi ne vise que les régimes privés de retraite, pour nous, cela ne doit pas avoir pour effet de reléguer au second rang les régimes publics. C'est une minorité de personnes qui jouissent d'une protection dans un régime privé. C'est donc dire que la très grande majorité des citoyens et citoyennes doivent compter sur les régimes publics pour s'assurer un certain revenu au moment de la retraite, que ça constitue encore la pierre angulaire du système et qu'il faut penser aussi à bonifier ces régimes publics qu'on a au Québec et au Canada.

Il y a d'autres outils aussi qui sont indispensables pour permettre aux gens d'avoir un revenu convenable à la retraite. A la CSN, nous avons su bâtir et construire ce genre d'outils, notamment celui qu'on appelle Bâtirente qui a été mis sur pied V y a un peu plus d'un an pour répondre aux besoins spécifiques de gens que nous représentons et qui, dans certains cas, ne peuvent pas avoir de régime de retraite privé ou qui, dans d'autres cas, en ont, mais qu'ils ne trouvent pas satisfaisants. Cela constitue, pour eux, un outil sous contrôle syndical qui peut répondre à un certain nombre de leurs besoins.

Quant à l'administration des régimes, ce qu'on veut porter à votre attention, ce sont les éléments suivants. De par les pouvoirs, les obligations et les responsabilités qu'il assume, l'administrateur d'un régime de retraite exerce un rôle clé, une fonction de contrôle au sein du régime. Il n'y a pas de doute là-dessus. Comme l'objet premier d'un régime complémentaire de retraite est la constitution d'un revenu de retraite pour les participants qui vient compléter, comme on le disait, de façon adéquate les rentes qu'ils vont retirer des régimes publics, il est Important et essentiel que les membres d'un régime de retraite puissent participer activement et de façon au moins paritaire à l'administration de leur régime. Nous ne le disons pas à la blague, évidemment. Nous avons vécu et nous vivons des expériences très concrètes de régimes dont nous participons à l'administration.

Pourquoi est-ce impérieux pour nous? On pense que, si la majorité des participants le demandent, les comités doivent être composés, au moins pour la moitié, de représentants des participants et que ces comités doivent se voir confier la totalité de l'administration du régime et non pas seulement une partie. Pourquoi? On pense que c'est une des façons de redonner confiance et de responsabiliser les participants, au niveau de leur caisse.

Nous ne sommes pas d'accord avec d'autres représentants qui se présentent devant cette commission parlementaire et qui parlent davantage de comités consultatifs ou de ce type, pour les avoir également vécus et pour savoir combien il y a des choses qui ont échappé à des participants, et qui ont eu des conséquences parfois assez catastrophiques. Donc, c'est à l'expérience qu'on pense que les comités devraient être minimalement paritaires et on a suggéré dans notre mémoire tout un mécanisme pour composer les assemblées générales et aussi les comités de retraite afin que tous les groupes représentés dans un régime puissent être bien représentés pour l'administration dudit régime.

En ce qui concerne l'information aux participants, il nous semble qu'il s'agit d'un droit élémentaire. Plusieurs s'en étonneront et, d'ailleurs, quand on le dit, s'étonnent que l'information élémentaire ne soit pas transmise aux participants, tout comme beaucoup s'étonnent que l'administration de leur caisse échappe à ceux qui y contribuent, et à qui elle appartient. Pour ce qui est de l'information, d'après nous, il faut établir le droit aux copies de documents - cela peut sembler insignifiant, mais ce n'est pas prévu, il faudrait le prévoir - le droit de mandater quelqu'un d'autre pour avoir et pouvoir avoir des copies de documents; la reconnaissance des syndicats - c'est, notamment, le cas en Ontario, on a reconnu les syndicats comme pouvant avoir les copies des informations en question - le droit à tous les documents, également, pour les participants. Cela nous semble élémentaire, là aussi.

Il y a aussi des mesures à prendre en ce qui concerne l'enregistrement d'un régime, qui doit, d'après nous, recevoir, par exemple, l'approbation préalable des règlements ou des modifications d'ordre majeur par les participants. Encore là, on connaît des cas où il y a eu des 9 mai 1989

Commission permanente

lacunes à ce sujet et qui ont eu des conséquences assez désastreuses pour les gens concernés. Qu'est-ce qu'on entend par "d'ordre majeur"? On entend, par exemple, sur une réduction des droits, ça semble assez évident, sur l'excédent d'actif, sur les fusions de régimes, sur des scissions de régimes, sur des transformations du type de régime, sur des terminaisons ou sur des modifications au comité, etc.

Dans un autre ordre d'idées - et c'est le deuxième point qu'on veut souligner - dans le bloc des droits acquis, je veux attirer votre attention sur deux ou trois choses particulièrement. Il y en a d'autres qui traitent de transferts ou d'autres événements dans le mémoire. Mais, je veux attirer votre attention sur quelque chose dont on ne parle pas souvent, qui est la question de l'invalidité. Nous, on demande que, lorsque des personnes sont déclarées invalides avant l'âge de la prise de la retraite, par la loi, elles soient couvertes par leur régime de retraite et que leur soient créditées des rentes pour le nombre d'années où elles auraient été au travail, pour qu'au moment où elles arrivent à l'âge de la retraite elles puissent avoir des rentes convenables.

On le fait pour la maternité. On dit que, pour le temps où on se retire, on est exonéré de payer des contributions, mais que c'est considéré comme si on était à la retraite. On pourrait étendre ça aux gens qui sont déclarés invalides pour toujours afin qu'ils soient considérés comme étant au travail et qu'on leur crédite des rentes. On ne pense pas que ça coûterait très cher, mais, pour les personnes que ça concerne, ça pourrait faire toute la différence entre avoir un revenu un peu convenable à l'âge où on arrive à la retraite et la pauvreté.

En ce qui concerne le décès après la retraite, on veut attirer votre attention sur le fait que l'introduction de la rente réversible au conjoint comme une forme normale de rente est une heureuse initiative, si ce n'était d'en faire assumer, comme c'est le cas, le coût aux participants qui s'en prévalent. On pense que le coût de cette amélioration devrait être assumé par l'ensemble des régimes. C'est une première remarque qu'on veut faire sur cet aspect.

Une deuxième remarque. On considère que le pourcentage de 60 % qui est proposé n'est pas suffisant et qu'on devrait le porter à 75 %, puisqu'on sait que la diminution des besoins, lorsqu'on passe de 2 à 1, n'est pas nécessairement de 100 % à 60 %, mais que c'est plus que cela. Et on vous indique des chiffres qui nous permettent de fixer ça à 75 %.

Enfin, en ce qui concerne l'extinction du droit à la rente au conjoint, pour nous, il n'est pas acceptable que ça disparaisse lorsqu'il y a divorce, annulation du mariage ou, dans le cas de conjoints non mariés, à la cessation de la vie maritale. On pense qu'il doit y avoir, à la suite de l'un de ces événements, soit divorce, séparation, etc., des partages automatiques et obliga- toires de 50 % des crédits accumulés au nom des ex-conjoints pour la période de vie commune où ces crédits ont été accumulés.

Un dernier mot sur les droits acquis, en ce qui concerne les retraites anticipées. On est d'accord avec le principe des retraites anticipées - on en négocie abondamment, d'ailleurs - mais on veut s'assurer que, pour ceux qui s'en prévalent, ça ne handicapera pas, dans certains cas, leur droit à recevoir de l'aide sociale, s'ils ont à le déclarer. On nous a indiqué qu'il pouvait y avoir là une obligation pour eux de tout déclarer et, donc, qu'ils pourraient perdre un certain nombre de droits, dont celui à des prestations d'aide sociale, et on ne voit pas quel avantage les gens en retireraient.

Troisième élément: la protection du pouvoir d'achat. Il s'agit, évidemment, d'un sujet d'actualité, puisqu'on sait que non seulement il n'y a pas d'indexation automatique des rentes, mais aussi - et les gens qui nous ont précédés l'ont bien indiqué - que beaucoup de personnes arrivées à l'âge de la retraite vivent dans la pauvreté. Pourquoi ces gens vivent-ils dans la pauvreté? Il y en a beaucoup qui n'ont pas de régime adéquat de retraite, c'est le cas. Il y en a beaucoup qui n'en ont pas ou qui n'en ont pas de bons, puis iI y en a qui en ont des bons au moment où ils arrivent à la retraite, mais, parce que les rentes ne sont pas indexées, bien rapidement, après quelques années, ils se retrouvent avec un pouvoir d'achat considérablement diminué.

Pour nous, c'est important d'inscrire dans la loi l'intégralité de la protection du pouvoir d'achat et, donc, l'indexation des rentes. Evidemment, l'argument qui vient tout de suite s'opposer à ça, c'est de dire: Cela coûte trop cher. Et voilà pourquoi on n'est pas d'accord. Nous voulons vous répondre ceci à l'argument que cela coûte trop cher. On constate très souvent que, lorsqu'il y a une hausse du taux d'inflation, ce qui fait en sorte que la rente perd de sa valeur très rapidement, ça se traduit généralement à brève échéance par des hausses de taux d'intérêt. Ce qu'on a remarqué, c'est que l'équilibre traditionnel entre les taux d'inflation et les taux de rendement des caisses de retraite est respecté.

Nous pouvons avancer devant cette commission qu'une hausse du taux d'inflation a peu ou pas du tout d'effet à la hausse sur le coût du régime de retraite dont les rentes sont indexées, parce que le taux d'indexation des rentes augmente à la suite de l'IPC, mais que le coût de l'indexation supplémentaire, lui, est couvert par la hausse quasi automatique des rendements des caisses de retraite. Donc, les caisses de retraite ont elles-mêmes une meilleure rentabilité parce que les taux d'intérêt augmentent et que ça permet d'absorber le coût de l'indexation des rentes.

C'est une question qui est très importante pour nous dans la mesure où on se demande ce

Débats de l'Assemblée nationale 9 mai 1989 que ça donne de mettre de côté de l'argent toute sa vie, de négocier avec des employeurs pour qu'ils mettent de l'argent si, au terme de quelques années, ce qui a été négocié n'a plus ou pas de valeur et que les gens que nous représentons se retrouvent dans un état de pauvreté relative. Nous pensons qu'il est préférable d'inscrire ça dans la loi, comme d'autres l'ont fait dans d'autres provinces, que de laisser à chaque négociation ou à chaque groupe le soin de le faire. (16 il 30)

Enfin, sur les surplus, M. le ministre, vous comprendrez qu'on a beaucoup de difficulté à accepter votre position qui est de reporter à plus tard la solution à l'utilisation des surplus. Je pense qu'on connaît les problèmes, qu'on connaît également les choix qui s'offrent à nous pour régler cette question, et on ne peut pas la laisser de côté ou la reporter de façon indue. Il y a trop de gens qui en vivent les conséquences assez désastreuses. Il y a des cas connus, il y en a d'autres, et il y en aura peut-être beaucoup d'autres, dans la mesure où on vit une période où il y a beaucoup de bouleversements au niveau des entreprises: beaucoup de fusions, de fermetures. C'est, à chaque fois, une occasion possible de se retrouver avec des surplus. Qu'arrivera-t-il? Nous vous invitons à revoir votre position quant à prendre une disposition pour que l'on sache ce qu'U advient de ces surplus. Dans cette optique, nous allons vous suggérer que les surplus soient évidemment remis en totalité aux participants et participantes. Pourquoi? C'est très simple, c'est que pour nous les caisses de retraite, et par définition et par conséquent leurs surplus, sont une composante de la rémunération; c'est-à-dire que l'argent qui est dans les caisses de retraite, c'est de l'argent que moi je décide de mettre dans ma caisse pour ma retraite, et c'est de l'argent que l'employeur met aussi pour moi; c'est un salaire différé qu'il ne met pas sur mon salaire.

Le Président (M. Bélanger): Si vous voulez bien conclure, s'il vous plaît.

Mme Simard: On a un cas ici, celui des gens de LAB Chrysotile qui sont dans la salle, qui sont justement aux prises avec un problème de surplus. Qu'est-ce qui va leur arriver si l'on n'en dispose pas maintenant? Ils sont actuellement en négociation. Il s'agit évidemment d'une fusion d'entreprises, dont deux sont sous le contrôle du gouvernement. Il y avait trois régimes de retraite. On va attendre, on va attendre, et dans leur cas il s'agit, je crois, de 9 000 000 $ qui leur échappent. Donc, selon nous, on doit régler la question des surplus le plus rapidement possible, pour élaborer plus longuement par des questions sur le sujet. Je pense que ça touche en gros les quatres points qu'on voulait souligner. On a un mémoire beaucoup plus volumineux.

oui. lire.

Le Président (M. Bélanger): Assez exhaustif,

Mme Simard: Oui, voilà, je vous invite à le

Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie, Mme Simard. M. le ministre.

M. Bourbeau: Oui. J'ai eu le plaisir, il y a quelques mois, de rencontrer les dirigeants de la CSN, au sujet, justement, des intentions que nous avions à ce moment-là de proposer un projet de loi. J'ai rencontré aussi les représentants du patronat. Je suis assez au courant des points de vue que vient d'exposer Mme Simard, puisqu'on a eu l'occasion d'en discuter. Bien sûr, la CSN expose un point de vue qui est celui des travailleurs, c'est son mandat. Ce matin, nous entendions un langage un peu différent, puisque nous avions l'honneur de recevoir les représentants du patronat, et bien sûr, ce groupe était un petit peu aux antipodes de ce qu'on entend cet après-midi. La vérité, en général, se retrouve toujours quelque part entre les deux points de vue. C'est évident que nous ne pourrons pas satisfaire à toutes et chacune des demandes de la CSN, mais je pense qu'on doit quand même reconnaître que le projet de loi qu'on a devant nous fait un pas important dans la direction que vous souhaitez atteindre, je dirais même un pas de géant par rapport à ce qui existe présentement.

Je vais reprendre certains des points pour faire avancer la discussion. Vous traitez de la question de la disposition des surplus d'actifs. Vous signalez même qu'il y a des gens dans la salle, ici, qui vivent un problème de surplus d'actifs. J'aurais aimé moi aussi pouvoir, au cours de ce projet de loi, régler d'une façon définitive la question des surplus d'actifs. C'est un sujet important et complexe, mais vraiment complexe. On peut affirmer, comme vous le faites, que les surplus appartiennent en totalité aux travailleurs. D'autres affirment que les surplus appartiennent en totalité à l'employeur, puisque c'est lui qui, disent-ils, est responsable de payer les rentes, et que, lorsqu'il y a un déficit, il doit les payer. Donc, i! doit les payer s'il y a un déficit et, s'il y a un surplus, il doit lui appartenir. C'est le point de vue de l'employeur. Il y en a d'autres qui croient qu'à l'occasion on peut identifier, dans le surplus, une partie qui est nettement la propriété des travailleurs et une autre qui pourrait nettement être la propriété de l'employeur, surtout dans les cas où l'employeur a fait des paiements excédentaires, volontairement ou pour toutes sortes de raisons. Bref, on peut soutenir tous les points de vue.

Je n'ai pas l'intention de régler ça aujourd'hui, parce que si on avait tenté de régler en même temps la réforme de la loi et toute la question des surplus d'actifs, à mon humble avis, on aurait manqué la date d'échéance du mois de 9 mai 1989

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juin, en vertu du principe "qui trop embrasse mal étreint". Probablement qu'on se serait retrouvés au mois d'octobre avec un nouveau gouvernement - j'espère de la môme formation politique - mais qui aurait recommencé à neuf, peut-être avec un nouveau ministre, à jouer là-dedans, et encore là on aurait peut-être encore attendu pendant quelques mois, sinon quelques années, avant de régler le problème.

Mon intention est de régler le problème de la loi, de faire en sorte que la loi soit amendée pour qu'on en finisse avec ça pour l'avenir, et j'ai pensé qu'il était plus prudent de régler, comme l'Ontario l'a fait d'ailleurs, le problème en deux parties: première partie, la loi - c'est ce qu'on est en train de faire - et, deuxième partie, les surplus d'actifs. Je pense qu'on a encore besoin de consulter un peu avant d'en arriver à une solution définitive. D'ailleurs, nous ne sommes pas les seuls qui consultons. L'Ontario consulte aussi, présentement, et, pourtant, elle a amendé la loi il y a deux ans. Donc, la preuve a été faite, l'expérience a indiqué que ce n'est pas toujours si facile que ça de régler les deux problèmes simultanément; comme je veux être certain d'en régler au moins un des deux, je préfère ne pas prendre de risque. Cela veut dire qu'on vous consultera à nouveau - ce ne sera pas très long - en ce qui concerne la question des surplus d'actifs. Nous aurons l'occasion d'en parier abondamment et de faire valoir tous les points de vue. Après ça, le gouvernement prendra ses responsabilités.

La question de l'indexation ne fait pas partie non plus du débat, présentement. Ce n'est pas dans la loi. Cela ne veut pas dire qu'on n'en reparlera pas, mais pour l'instant ça ne fait pas partie du projet de loi.

Cela laisse d'autres sujets qui sont dans le projet de loi. Vous parlez de la rente réversible au conjoint. C'est une amélioration par rapport au système actuel qui n'en prévoit pas. Nous avons décidé de reconduire le consensus canadien, lequel prévoit une rente réversible de 60 % au conjoint qui survit. C'est un minimum, encore là. La loi prévoit des minimums; rien n'empêche qu'on puisse, dans la constitution du régime, prévoir une rente plus importante. Les parties peuvent en convenir. Si les parties ne conviennent de rien du tout, c'est la loi qui s'applique, donc, minimum de 60 %. Encore là, même si c'est le minimum qui s'applique, le travailleur a toujours le choix d'opter, au moment où sa rente devient payable, pour une rente au conjoint plus importante; il peut même opter pour une rente à 100 % pour le conjoint survivant. C'est au choix de l'employé. À ce moment-là, en vertu de l'équivalence actuarielle, si on opte pour une rente plus élevée au conjoint survivant, étant donné que c'est toujours la même somme d'argent qui est en cause, que c'est le même capital, ça en fera moins pour le conjoint qui perçoit la rente en premier, et ça en fera plus pour le conjoint survivant. Donc, celui qui a droit à la rente peut décider que ça sera 75 % pour le conjoint survivant, ou 90 %, ou 100 %; c'est au choix, mais tout ça se fait à même la même masse d'argent. Bref, ce sont comme des vases communicants. Plus à l'un, moins à l'autre; plus à l'autre, moins à l'un, mais, pour le minimum, ça sera 100 % de la rente au premier et 60 % au conjoint survivant.

Vous avez apporté une notion différente. Vous voulez que les vases communicants se fassent non pas seulement entre les conjoints eux-mêmes, mais avec tout le régime. Cela est autre chose. À ce moment-là, on se trouverait probablement à pénaliser ceux qui n'ont pas de conjoint. Ce serait évident qu'ils n'auraient pas de conjoint survivant, donc, ils feraient les frais un peu de la facture additionnelle qui serait générée pour ceux qui ont des conjoints. Ce n'est pas le principe que nous avons retenu; ce n'est pas, non plus, le principe du consensus canadien, mais je retiens la suggestion quand même. Nous sommes ici pour discuter des possibilités d'améliorations au régime. Il reste encore un mois et demi avant la fin de la session et, à la fin de l'exercice que nous tenons cette semaine, nous verrons dans quelle mesure nous pouvons améliorer le projet de loi. Je ne peux pas reprendre tous et chacun des points que vous avez soulevés.

Il y a la question du comité de retraite sur laquelle j'aimerais apporter des précisions. Vous souhaiteriez que le comité de retraite ne soit pas consultatif. Il ne l'est pas. Ce n'est pas un comité consultatif. Je l'ai affirmé ce matin et déclaré devant le Conseil du patronat. C'est un comité qui est décisionnel, qui prendra des décisions et qui aura la charge d'administrer le fonds de retraite. Cela ne veut pas nécessairement dire qu'il choisira de l'administrer. Il pourra, s'U le veut, déléguer la gestion soit à une tierce partie à l'extérieur de l'entreprise, soit même à l'employeur, s'H le désire. De toute façon, le comité de retraite - si les travailleurs décident d'en former un, selon la loi actuelle en tout cas - devra formuler une politique de placement. Il devrait y avoir une politique de placement, ce qui encadrera, donc, la gestion. Le gestionnaire qui aura la tâche de gérer le fonds de retraite au jour le jour devra s'en tenir au cadre de gestion établi par le comité de retraite. Nous n'avons pas prévu un comité de retraite paritaire. Nous avons prévu qu'au minimum les travailleurs devraient avoir un poste pour ceux qui sont en emploi et un poste pour les retraités. On pourra avoir un comité de retraite composé de cinq ou six personnes. Donc, nous n'exigeons pas que ce soit paritaire.

On pourrait là-dessus - et vous le faites -apporter d'excellents arguments pour justifier la parité. Nous ne pensons pas que ce soit essentiel de le faire présentement. On pourrait trouver toutes sortes d'arguments ou de raisons pour dire qu'il n'est pas nécessaire que ce soit paritaire. Par exemple, on pourrait dire que, présentement,

Débats de l'Assemblée nationale 9 mai 1989 les employeurs cotisent plus que les travailleurs. J'ai les chiffres de l'année 1987 où, sur une masse de 3 400 000 000 $, les travailleurs ont fourni 1 400 000 000 $ et les employeurs, 2 000 000 000 $. On pourrait, également, apporter comme justification que le régime de retraite est, à toutes fins utiles, la responsabilité de l'employeur parce que, si à la fin de la période de travail d'un travailleur le fonds est déficitaire, c'est l'employeur qui doit mettre les sommes d'argent qui manquent pour satisfaire à la rente. Donc, l'employeur a la responsabilité de s'assurer que la rente sera au rendez-vous. Dans ce sens, on peut aussi affirmer - certains le font - qu'il doit avoir un contrôle sur l'administration. Nous ne sommes pas opposés à cela, mais nous tenons à ce que les travailleurs soient là, qu'ils soient présents, qu'ils puissent être informés continuellement de l'évolution de l'administration du fonds de retraite. Comme nous donnons des pouvoirs additionnels à la régie dans le projet de loi, nous pensons qu'avec cela - les pouvoirs additionnels de la régie, la meilleure information aux travailleurs et leur présence au fonds de retraite - on aura atteint un équilibre qui nous apparaît, dans le cas présent, correspondre à la réalité des faits.

Je pense que vous avez une question. Alors, je vais la recevoir.

Mme Simard: Sur l'administration des régimes. Ce qui est important pour nous de bien transmettre aux membres de la commission parlementaire, c'est que, pour nous, les sommes d'argent qui sont dans les caisses de retraite sont du salaire différé. Quand je me présente à une table de négociation, j'ai à négocier des salaires, des assurances, des congés, des vacances et des régimes de retraite. J'ai devant moi des employeurs qui font l'addition. Ils disent: Tant sur les salaires et tant sur le régime de retraite; faites votre choix, ou moins sur le régime de retraite et plus sur les salaires. C'est du salaire différé. Ce n'est pas un cadeau que nous font les employeurs de mettre de l'argent dans les caisses. C'est du salaire auquel on renonce immédiatement pour le placer dans une caisse, caisse à laquelle les gens aussi contribuent. Dans ce sens-là, ce n'est pas de l'argent de l'employeur, c'est de l'argent des employés. (16 il 45)

La totalité de l'argent qui est dans une caisse de retraite appartient aux participants et participantes à qui cette caisse est destinée, à ceux pour qui on a mis de l'argent. D'autre part, j'invite les représentants d'un gouvernement à réfléchir à la question suivante. Plus les gens vont se responsabiliser, s'équiper de bons régimes de retraite, plus ils vont consentir à prendre une partie du salaire et à la mettre dans une caisse de retraite, moins il y a de pression sur la société pour ensuite subvenir aux besoins de ces personnes lorsqu'elles se retrouvent à l'âge de la retraite. Vous aurez moins de monde pauvre.

Dans ce sens-là, il y aura moins de pression sur les caisses publiques et les autres mécanismes de prestations pour soutenir le revenu. Dans ce sens-là, ce n'est pas de consentir à nous donner un poste pour administrer leur argent, c'est dire, minimalement, d'être là à moitié pour administrer notre argent. Voilà ce qui est peut-être la philosophie qui nous sépare, parce qu'à chaque fois qu'on négocie une contribution de l'employeur c'est une forme de salaire.

Sur la question des déficits, sur l'utilisation des surplus - je tiens à le dire; c'est fort important - actuellement, je pense qu'au Québec il y a 1 300 000 000 $ de surplus pour l'année 1986.

Le Président (M. Bélanger): Je m'excuse de vous interrompre. M. le ministre, votre temps est écoulé.

Mme Simard: Je veux juste terminer sur la question.

M. Bourbeau: Un instant. J'aimerais comprendre. Vous vouliez poser une question. Vous avez pris votre temps.

Mme Harel: Elle voulait juste parler pendant les 20 minutes qui étaient imparties à son organisation.

M. Bourbeau: Je ne sais pas. J'avais cru comprendre que les 20 minutes étaient expirées.

Le Président (M. Bélanger): Non, il y a eu 20 minutes pour la présentation du mémoire. Il y a 20 minutes, M. le ministre, pour faire le point et vous avez 20 minutes après. Je pense que là-dessus il n'y a pas d'incompréhension. Tout le monde s'entend très bien.

M. Bourbeau: Pour ce qui est de la question dont vous venez de parler... M. le Président, je comprends, mais là on a amputé mon temps.

Le Président (M. Bélanger): M. le ministre, c'est vrai. Je m'excuse. Il vous reste deux minutes.

M. Bourbeau: Bon, très bien. J'en ai amplement. Je comprends très bien le point de vue que vous défendez avec beaucoup de chaleur, je dois le dire, mais vous répétez ce que je dis depuis un certain temps, que le fonds de retraite, c'est du salaire différé. Donc, vous ne me convaincrez pas. J'en suis déjà convaincu. Cela ne veut pas dire que 100 % des surplus d'actifs doivent nécessairement appartenir aux travailleurs. Il peut y avoir des cas et il y a certainement des cas où des sommes d'argent, même des surplus, pourraient très bien être identifiées comme ne provenant pas nécessairement des excédents de la cotisation des travailleurs, et ça fera l'objet d'un 9 mai 1989

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débat à l'automne. Donc, on peut en parler toute la journée si vous le voulez, mais ça ne bonifiera pas le projet de loi que l'on a devant nous. Vous aurez l'occasion, à l'automne, de venir faire un autre beau discours sur la question des surplus. Donc, je suggère, puisqu'on a devant nous un projet de loi qui ne traite pas des surplus, de tenter de se concentrer sur le projet de loi qu'on a devant nous, quitte à refaire l'exercice plus tard pour ce qui est des surplus. Maintenant, si on veut parler des surplus, de l'indexation, je n'ai absolument pas d'objection, sauf que ça ne nous permettra pas d'améliorer la partie de notre travail, soit le projet de loi 116.

Le Président (M. Bélanger): M. le ministre, malheureusement, je dois vous interrompre. Votre temps est écoulé. Mme la députée de Maison-neuve.

Mme Simard: Je faisais ma remarque sur l'administration des caisses.

Le Président (M. Bélanger): Je m'excuse, parce que le temps appartient à Mme la députée de Maisonneuve. Elle va vous chicaner.

Mme Harel: Pas du tout. Au contraire, M, le Président. Je lui cède immédiatement la parole.

Mme Simard: Le discours que je tenais, ce n'est pas un beau discours. Je pense que c'est une position qui est exprimée et j'ai la responsabilité de l'exprimer devant vous, et il porte sur le concept de l'administration des caisses. On pense qu'elle doit être minimalement paritaire parce que l'argent qui est dans ces caisses appartient aux participantes et participants. Je pense que là il faut savoir que c'est une disposition qui est dans le projet de loi actuel et qui nous semble insuffisante. Donc, on demande de la corriger.

D'autre part, sur la question des surplus, j'ai très bien compris que nous allons être reconsultés sur la question. Je vous réitère qu'on aurait souhaité régler cela maintenant. Cependant, je dois vous dire qu'il y a beaucoup plus de surplus que de déficits et que l'argument invoqué soit qu'il faut absorber les déficits et que, par conséquent, on a droit au surplus, eh bien! il y a considérablement plus de surplus à empocher que de déficits à absorber. Dans les faits, il y a très peu de déficits; d'expérience, ii y en a très très peu, sauf peut-être ceux qui ont des mauvais actuaires. Il y en a peu.

Une voix: Cela n'existe pas.

Le Président (M. Bélanger): Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Merci, M. le Président. Je veux saluer les porte-parole de la Confédération des syndicats nationaux. Même si vous recommandez au ministre une position opposée à celle que lui recommandait le Conseil du patronat, I n'en demeure pas moins que, comme le Consel ce matin, vous venez lui dire cet après-midi: Quoiqu'il en soit, décidez. À quelque part, c'est cette décision, dont il vous dit qu'elle est différée, qui est problématique. Je ne peux pas concevoir qu'un esprit sensément constitué, qui se promène un peu dans les corridors de ce parlement, puisse prévoir qu'on soit ici à siéger en commission parlementaire l'automne prochain. Selon toute probabilité, à 95 %, l'élection sera tenue cet automne et cette consultation, j'ai peur qu'elle n'ait pas lieu. Finalement, la constatation qu'on peut faire - le gouvernement disait ce matin au Conseil du patronat: Écoutez, il ne faudrait pas prendre de trop grosses bouchées - c'est que c'est plus un gouvernement qui n'a pas d'appétit. Cela manque d'appétit évidemment.

Voyez-vous, depuis ce matin, l'argument qui est invoqué par le ministre est le suivant: On va régler en deux parties, comme en Ontario. Mais, en Ontario, ils ont déjà légiféré il y a déjà deux ans de cela. Alors là, on est à quatre ans d'un projet de loi qui était déjà déposé et que le ministre reprend avec deux omissions que contenait le projet de loi. Ce sont des omissions dont il fait l'admission, à savoir l'indexation et la disposition des surplus. Il a eu quatre ans pour réfléchir là-dessus. Le danger, je pense, au moment où l'on se trouve à légiférer justement sur ces questions, c'est que ces questions soient tranchées après les élections, parce que le gouvernement n'a pas le courage maintenant de nous faire connaître sa proposition. Je vous rappelle qu'en Ontario la consultation ne se fait pas comme cela, en catimini. Elle se fait sur une proposition d'indexation et sur une proposition de gestion des surplus avec rétroactivité avant 1987 et avec des dispositions différentes pour après. Mais on ne connaît pas la proposition. Si la proposition de consultation est sérieuse, elle va s'accompagner, à la fin de cette commission ou dans les semaines qui vont suivre, à la fin de cette session, si c'est sérieux cette consultation à l'automne, d'une proposition gouvernementale sur ces deux questions.

Dans votre mémoire, vous abordez de façon très substantielle un certain nombre de choses extrêmement importantes. Je ne sais si, ce matin, vous avez été informés de l'amendement que le ministre a introduit à l'ouverture de la commission. Tantôt, il vous a dit: Le comité de retraite ne sera pas consultatif. Le comité de retraite va faire la gestion. Ce matin, il a introduit un amendement qui dit ceci, je cite: "L'amendement que j'entends proposer aura pour effet de permettre à un employeur de gérer la caisse de retraite, à la condition qu'il y ait un comité de retraite dans l'entreprise, afin que les représentants des participants puissent prendre part à l'administration du régime de retraite." Cela veut dire quoi exactement? On sait très bien que le

Débats de l'Assemblée nationale 9 mai 1989 comité de retraite n'est pas paritaire. Donc, le comité de retraite pourrait être consulté et, pour des matières décisionnelles, décider que son rôle est consultatif. Cela revient à cela. Je ne sais pas si c'est là votre interprétation. J'aimerais avoir votre point de vue là-dessus.

Mme Simard: On avait été informés de la possibilité de cet amendement. Nous n'avons pas d'objection nécessairement à ce que la gestion puisse être confiée, dans la mesure où c'est un comité paritaire qui en prend la décision. C'est là que tout change. Je sais que certaines grosses sociétés, Alcan et tout ça, sont venues dire: Écoutez, nous, nous les gérons et ils ne sont pas trop mal. On peut être d'accord avec cela dans la mesure où les participants, au moins paritaire-ment au minimum, en conviennent. Alors, c'est là toute la différence. Évidemment, si vous avez un comité qui n'est composé que de représentants de l'employeur, il va se confier sa propre gestion. C'est fort différent si vous avez la moitié des participants au moins qui décident ou qui peuvent faire des changements et aussi des choix de gestionnaires, ce qui se fait très couramment, d'ailleurs. On peut décider de le changer. C'est chose habituelle. Alors, sur le fond de l'amendement lui-même, il n'y a peut-être pas de problème, mais il y a le prérequis, pour nous, qui est important à établir. On ne s'y oppose pas de façon systématique.

Mme Harel: II pourrait même être souhaitable que, dans certains cas, l'administration qui est faite et qui est satisfaisante soit reconduite. Mais je comprends bien que c'est le fait qu'au comité paritaire ne siège qu'un représentant des retraités et un des travailleurs...

Mme Simard: Ce n'est pas un comité paritaire.

Mme Harel: Au comité de retraite, excusez-moi. C'est abusivement que J'utilise le mot "paritaire".

Vous nous parlez dans votre mémoire, et il y en a très peu qui abordent cette question, à la page 20 en particulier, de la retraite anticipée. Vous avez insisté sur le fait que, dans le projet de loi 116, on ne devrait pas obliger la retraite anticipée en regard des personnes qui reçoivent des allocations d'aide sociale parce qu'elles ont perdu leur emploi ou qu'elles n'ont pas réintégré le marché du travail. Cela nous rappelle qu'il y a des programmes d'assistance, d'assurance et que, dans la mesure où le programme dont vous nous parlez ne prévoirait pas la possibilité pour le bénéficiaire de le décider, il serait tenu d'utiliser hâtivement, prématurément ses prestations et se maintiendrait ainsi dans la pauvreté pour le restant de ses jours. C'est un peu contre ça que vous en avez, Je crois.

Mme Simard: C'est ça. C'est-à-dire qu'on craint justement... Je l'ai d'ailleurs mentionné tout à l'heure, plutôt avec un point d'interrogation, parce que je sais que M. le ministre est responsable des deux lois. C'est qu'on s'opposerait à ce qu'une disposition de retraite anticipée - parce qu'on n'a rien contre, au contraire, on en négocie fréquemment, avec les surplus dans les caisses - serve de prétexte pour obliger quelqu'un qui est à l'aide sociale à demander de façon hâtive ses prestations parce qu'il est sans emploi, qu'il n'a plus de travail, qu'il n'est pas capable d'en trouver, qu'il n'en a plus ou qu'il est mis à pied, et pour le forcer à aller chercher ça tout de suite. Ça va réduire l'aide sociale qu'il a, mais, s'il va la chercher tout de suite, ça va diminuer d'autant sa rente qu'il aurait eue à l'âge normal de la retraite. Alors, c'est la crainte qu'on exprime. On espère que ce n'est pas le cas. Si ça l'est, on demande que ce soit corrigé, que ce ne soit pas ça. Alors, c'est un point qu'il nous semblait important de souligner parce que ce n'est pas du tout l'esprit qui est recherché en introduisant des dispositions sur les retraites anticipées qui, en soi, sont des choses intéressantes.

Mme Harel: Évidemment, ce n'est pas indifférent que ce soient des dossiers qui s'interpénétrent parce qu'il demeure pour moi que le ministre est responsable de la sécurité du revenu et que, de plus en plus, il y a des programmes qui viennent maladroitement corriger l'absence de sécurité du revenu. Je pense au PATA, le Programme d'adaptation pour les travailleurs âgés, qui est censé compenser pour la non-possibilité sans doute de toucher des rentes convenables de retraite anticipée. Encore là, on voit que ce sont des programmes qui corrigent bien mal parce que, six mois après, il n'y a pas encore un seul dossier qui a été réglé et pour lequel II y a des prestations qui ont été payées. Alors, c'est peut-être hors du sujet, M. le ministre, mais vous savez que c'est vrai.

Mme Simard: J'aimerais faire une remarque. Tout d'abord, je pense qu'on va tous déplorer ici qu'il n'y ait pas assez de travailleuses et de travailleurs qui ont des régimes de retraite. Je pense qu'il faut viser à ce qu'il y en ait plus, qu'il y ait de bons régimes. Je voudrais souligner aux membres de la commission qu'à la CSN on a une longue expérience de négociation concernant les régimes de retraite et souligner les difficultés qu'on rencontre aux tables de négociation pour répondre à certains phénomènes qui peuvent se produire en cours de route, soit des transformations de régimes, des changements, des fusions de compagnies, etc. C'est pour ça qu'on insiste beaucoup pour que dans la réforme les règles soient claires et sans ambiguïté. Ça va faire économiser beaucoup de temps et d'énergie à beaucoup de monde. On me souffle aussi: Et de chicanes. On vient de régler un cas à l'usine Beloit à Sorel. Cela a pris deux ans. Combien 9 mai 1989

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d'argent et d'énergie dépensés parce qu'il y avait une transformation de régimes. C'est très complexe. Si on a une réforme par laquelle on tente, oui, d'introduire de nouveaux droits, de clarifier cela, d'introduire des mécanismes, ça va être autant d'ouvrage de moins à faire à la pièce partout, ce qui coûte beaucoup de temps et d'énergie et qui décourage beaucoup de monde. La qualité des régimes qu'on veut avoir va être améliorée. Or, plus la qualité des régimes va être améliorée, plus les gens arrivés à l'âge de la retraite vont avoir un niveau de vie convenable; plus les gens à la retraite vont avoir un niveau de vie convenable, meilleure sera la qualité de vie totale du Québec. C'est vraiment le sens de ce qu'on vient de vous dire ici, avec évidemment toutes sortes de détails techniques. Les régimes de retraite ne sont pas très compliqués. Les gens se complaisent à dire: C'est bien compliqué. Ce n'est pas si compliqué que ça. Il y a de grands principes. Ce sont ces principes qu'on doit voir à faire inscrire dans la loi avec le moins d'ambiguïté possible.

Quant à la rétroactivité...

Le Président (M. Leclerc): Mme la députée...

Je m'excuse, si vous voulez bien conclure, malheureusement, le temps est entièrement écoulé.

Mme Harel: Déjà? Mais il me semble que je n'ai pas eu tout le temps qui m'était alloué. Il me reste une minute...

Mme Simard: C'est moi qui ai trop parlé.

Mme Harel: Encore une petite minute pour parler de rétroactivité parce que vous avez fait état et donné des exemples, dans le mémoire, de travailleurs qui se verraient pour les années antérieures appliquer la règle du 45-10 et qui, après 25, 30 ou 35 ans, pourraient dans quelques années voir bien peu améliorer leur rente de retraite. Est-ce que vous pouvez nous parler des recommandations que vous nous faites à ce sujet?

Le Président (M. Leclerc): En 30 secondes, s'il vous plaît.

Mme Simard: Concernant la rétroactivité de certaines dispositions?

Mme Harel: Je pense en particulier au rachat du service antérieur non cotisé, et je pense à cet aspect sur lequel vous alertez la commission, particulièrement celui de l'acquisition immédiate de la rente créditée avant le 1er janvier 1990.

Mme Bérard (Johanne): Oui, d'accord. Ce qu'on dit, en fait, c'est que l'acquisition après deux ans de participation s'applique seulement aux services cotisés depuis le 1er janvier 1990.

Alors, l'exemple qu'on donne et que vous repreniez un peu plus tôt, c'est que, d'une part, en cas de cessation d'emploi, une personne qui ne répond pas au critère de 45 ans d'âge et 10 ans de participation au moment de la cessation d'emploi n'a droit, au titre de son service cotisé avant 1990, à aucune part de l'employeur. D'autre part, en cas de décès, c'est encore pire parce que quelqu'un qui décède n'a droit à absolument rien pour le service cotisé avant 1990, car I n'y a même pas de critères. Alors, s'il a contribué, évidemment, son bénéficiaire va avoir droit aux contributions, sinon i! n'y a pas du tout de part de l'employeur là-dedans.

Je pense que c'est encore au moins une génération de travailleurs qui va être pénalisée du fait que ce n'est pas rétroactif concernant l'acquisition, entre autres, et concernant aussi les intérêts. Les intérêts, c'est très bien. Ça va être maintenant les intérêts semblables au rendement de la caisse depuis janvier 1990; mais pour les années antérieures à janvier 1990, concernant les cotisations qui ont été versées, l'intérêt qui est crédité est de 3 % ou 4 %, et ça reste comme ça dans le projet de loi. Alors, on demande la rétroactivité à ce chapitre-là aussi.

Le Président (M. Leclerc): Bien.

Mme Harel: Merci, M. le Président.

Je vais terminer en vous disant que, notamment, toute la question de la disposition de surplus n'est pas liée qu'à la terminaison partielle ou totale des régimes. C'est aussi en cours de régime et cette disposition de surplus pourrait venir corriger certaines anomalies dont vous parlez. Je veux vous remercier. Je le dis en toute simplicité: Votre mémoire, comme tous ceux que présente la CSN, est vraiment très bien construit et va nous permettre de mieux travailler lors de l'étude article par article. Je vous en remercie.

Le Président (M. Leclerc): Merci, Mme la députée de Maisonneuve. M. le ministre.

M. Bourbeau: Le mémoire de la CSN est une contribution majeure aux débats et on en tiendra certainement compte. En terminant, je tiens à vous rassurer. On me disait tout à l'heure qu'il y avait des gens qui étaient affectés par un problème de surplus. Tant que nous n'aurons pas trouvé une solution définitive à la question des surplus, le moratoire va subsister, c'est-à-dire que le gel des excédents d'actifs va être maintenu. Si jamais il arrivait que les pronostics sombres que nous fait la députée de Maison-neuve...

Mme Harel: Vous parlez d'élections?

M. Bourbeau: ...se réalisent, c'est-à-dire notre réélection et des délais additionnels, à ce moment-là, nous pourrions prolonger le moratoire au-delà du 1er janvier 1990, l'intention étant de

Débats de l'Assemblée nationale 9 mai 1989 ne pas lever le moratoire avant qu'une solution définitive n'ait été trouvée à la question des surplus d'actifs. Pour ce qui est de la bonification des années antérieures, je ne peux présumer de ce que sera la décision éventuelle sur la disposition des surplus, mais il n'est pas interdit de penser que, dans la formulation d'une proposition éventuelle, on puisse toucher à ça. Je ne veux pas m'avancer là-dessus. L'Ontario l'a fait. On verra en temps et lieu quand ce débat sera devant nous.

Alors, je remercie encore la CSN de sa contribution.

Le Président (M. Leclerc): Merci, M. le ministre.

Mme Simard: M. le ministre, j'aimerais que vous portiez à l'attention de votre collègue, M. Savoie, ministre délégué aux Mines, le cas de LAB Chrysotile pour lequel, semble-t-il, il n'y a pas de dispositions législatives immédiates pour tenter de régler ses problèmes; mais, comme le gouvernement québécois a des intérêts dans les compagnies en question, le ministre pourrait tenter, à titre cette fois-ci de partie intéressée, de régler le problème de surplus que vivent ces quelque 200 travailleurs et travailleuses de l'amiante à Thetford Mines. Merci.

Le Président (M. Leclerc): Alors, Mmes Simard et Bérard, MM. Rioux et Pépin, au nom de la commission, je vous remercie de vous être déplacés pour vous faire entendre devant nous et je vous souhaite bon retour.

J'invite maintenant les représentants de l'Institut canadien des actuaires à se joindre à nous et je suspends les travaux pour deux minutes.

(Suspension de la séance à 17 h 7)

(Reprise à 17 h 9)

Le Président (M. Leclerc): La commission reprend ses travaux et souhaite la bienvenue aux membres de l'Institut canadien des actuaires. Je vous demanderais donc de vous identifier pour les fins du Journal des débats, s'il vous plaît.

Institut canadien des actuaires

M. Le Houillier (Marcel): M. le Président, M. le ministre, MM. les membres de la commission, tel que vous le souhaitez, j'aimerais vous présenter les membres de l'équipe qui représente l'Institut canadien des actuaires aujourd'hui: à ma gauche, M. Louis Gagnon, actuaire et membre de la Commission des relations avec les pouvoirs publics en matière de régimes de retraite, à mon extrême gauche, M. Daniel Pellerin, actuaire, membre de l'Institut canadien des actuaires, et, à ma droite, M. Pierre Courcy, actuaire, également membre de la Commission des relations avec les pouvoirs publics en matière de régimes de retraite. Mon nom est Marcel Le Houillier, actuaire, vice-président et membre du comité exécutif de l'Institut canadien des actuaires.

Le Président (M. Leclerc): Bien. Alors, M. Le Houillier, je vous rappelle que vous avez vingt minutes pour nous exposer le contenu de votre mémoire, et ensuite chacun des groupes parlementaires aura quinze minutes pour vous faire part de ses commentaires et vous poser ses questions. Je vous cède la parole.

M. Le Houillier: J'aimerais, en premier lieu, M. le Président, vous remercier au nom de l'Institut canadien des actuaires de nous donner l'occasion de vous présenter notre mémoire sur le projet de loi 116, Loi sur les régimes complémentaires de retraite. Je tiens également à mentionner que l'Institut canadien des actuaires demeure disposé à collaborer avec le gouvernement dans l'étude de ce projet de loi et à fournir toute l'assistance voulue pour trouver des solutions aux problèmes qui seront certainement soulevés par ce projet de loi.

Je vais maintenant demander à M. Gagnon de faire la lecture de notre mémoire aussi rapidement que possible pour respecter notre horaire; après cette lecture, tous les membres de l'équipe seront disponibles pour discuter avec les membres de la commission. M. Gagnon.

Le Président (M. Leclerc): Merci beaucoup.

M. Gagnon (Louis): Ce mémoire est présenté par l'Institut canadien des actuaires, un organisme professionnel établi par une loi du Parlement canadien. L'Institut compte plus de 1500 fellows au Canada. Un nombre important de ces actuaires sont actifs dans le domaine des régimes de retraite, incluant notamment la conception, l'administration et le financement de ces régimes. Ce mémoire formule donc la position de l'Institut canadien des actuaires en regard du projet de loi 116 sur les régimes complémentaires de retraite, présenté par le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu à la deuxième session de la 33e Législature. L'objectif poursuivi par l'Institut est d'assister les législateurs au Canada dans le développement de la législation en matière de régimes de retraite pour satisfaire aux besoins de tous les intervenants. Le présent mémoire traite spécifiquement de la responsabilité de l'institut canadien des actuaires et de ses membres relativement à l'expertise actuarielle requise pour l'application de la loi. Nous formulerons ensuite des commentaires généraux et des commentaires sur un certain nombre d'articles.

L'expertise actuarielle. La profession actuarielle a pris ses responsabilités en matière de régimes de retraite, à la satisfaction des participants et des autorités gouvernementales. Par 9 mai 1989

Commission permanente

le fait d'exiger l'utilisation d'hypothèses et de méthodes conformes aux principes actuariels généralement reconnus, le législateur appuie entièrement cet énoncé. Par contre, les pouvoirs attribués à la Régie des rentes en vertu des articles 240 et 244, en particulier, du projet de loi, peuvent diminuer significativement l'expertise actuarielle requise dans le cadre de la loi. À notre avis, la formulation des hypothèses et méthodes est mieux servie par l'actuaire du régime en accord avec les normes de pratique de l'Institut, appuyées par un processus de discipline et de révision. Ces normes de l'Institut définissent les bases que l'actuaire doit observer en effectuant son travail. Ces normes sont d'ailleurs constamment révisées pour s'adapter aux circonstances courantes. Pour cette raison et dans le respect de la mission de l'Institut, nous croyons que les pouvoirs de la Régie relativement aux hypothèses et méthodes doivent être limités à l'application de la loi.

Enfin, la commission de révision de l'Institut est accessible à la Régie pour fournir des opinions quant aux hypothèses et méthodes utilisées par ses membres et quant aux normes de pratique. La commission de discipline a le pouvoir d'intervenir auprès des membres blâmés pour incompétence ou inconduite. Nous pouvons affirmer que l'Institut a les moyens nécessaires pour assurer à la Régie qu'elle peut s'appuyer sur l'Institut pour faire ses devoirs relatifs aux hypothèses et méthodes d'évaluation.

Depuis plusieurs années, l'Institut a clairement indiqué que l'uniformité dans la législation entourant les régimes de retraite au Canada était nécessaire non seulement dans la signification générale des dispositions requises, mais aussi dans la description de ces dispositions. La loi québécoise suivant d'autres lois comme celle du gouvernement fédéral et de l'Ontario, nous croyons que le Québec a maintenant l'occasion de contribuer à une plus grande uniformité en adoptant sa nouvelle loi. Le projet de loi 116 est, à plusieurs égards, un pas dans ce sens, et nous ne pouvons que nous en réjouir.

Certaines dispositions spécifiques au Québec pourraient être modifiées pour s'ajuster aux lois ontariennes et fédérales déjà sanctionnées. À titre d'exemple, la règle de 50 % - la contribution minimale de l'employeur - contre laquelle l'Institut canadien s'était déjà prononcé, a été retenue, au lieu d'indexer les montants de rentes avant la retraite. Par contre, la loi fédérale permet au promoteur de remplacer cette règle de 50 % par l'indexation minimale des prestations avant la retraite pour le participant qui a terminé son emploi. D'ailleurs, le silence du Québec en matière d'indexation et d'appartenance des surplus surprend quelque peu et laisse les promoteurs, tout comme les participants au régime, dans une situation d'incertitude, particulièrement dans le contexte des recommandations actuelles déposées auprès du gouvernement ontarien.

L'Institut croit que la législation en matière de régimes de retraite doit créer un environnement qui favorise le développement et l'amélioration des régimes de retraite. Certaines complexités administratives ont été introduites par le projet de loi 116, ce qui risque de décourager les promoteurs à maintenir en vigueur les régimes actuels ou encore à en établir de nouveaux. Par contre, certains aspects positifs de ce projet méritent d'être soulignés, telles l'amélioration de la protection du participant, la plus grande flexibilité dans les divers modes de financement, l'absence d'exigences en matière de table de mortalité unisexe, et des prestations de décès avant la retraite plus simples à administrer que dans certaines autres juridictions. La date d'entrée en vigueur prévue pour le 1er janvier 1990 ne sera réaliste que dans la mesure où les textes définitifs de la loi de même que de la réglementation seront connus dans un délai raisonnable avant cette date.

Dans cette dernière section, nous désirons faire état de nos observations concernant certains articles du projet de loi 116. On y remarquera que, concernant les aspects administratifs, nous avons limité nos commentaires au strict minimum en insistant plus sur les aspects actuariels de cette nouvelle loi.

À l'article 1, les travailleurs hors Québec pourraient être simultanément être assujettis aux lois de deux juridictions, compte tenu de l'application intégrale de ces articles; donc, il y aura lieu de préciser.

À l'article 3, on constate que la définition de conjoint est différente à plusieurs égards de celle adoptée par d'autres gouvernements en matière de régimes de retraite; qui plus est, elle est même différente de celle utilisée dans la Loi sur le régime de rentes du Québec.

À l'article 6, l'introduction de la notion de contrat est nouvelle, et l'intention du législateur doit être clarifiée.

À l'article 26, l'information requise eh cas de modification au régime est trop étendue. L'information préliminaire à la modification pourrait être requise seulement dans les événements prévus au paragraphe 2°.

À l'article 34, la période de deux années civiles consécutives antérieures devrait être fixée dans le temps, tel qu'immédiatement avant la demande d'adhésion, afin d'éviter l'historique normalement requis. De plus, pour fins d'harmonisation avec les autres juridictions, la période minimale requise devrait être de 24 mois de service continu. (17 il 15)

Aux articles 42 et 43, les autres juridictions comparables accordent un délai minimum de 30 jours, contrairement aux quinze jours prévus au projet de loi.

À l'article 44, l'approche d'intérêt dès le premier jour du mois suivant le versement des cotisations n'est pas pratique et son application produira des coûts administratifs démesurés par

Débats de l'Assemblée nationale 9 mai 1989 rapport à la précision exigée. Nous osons espérer, d'ailleurs, que la réglementation permettra que des méthodes approximatives puissent être utilisées afin de satisfaire à cette exigence telle, par exemple, une demi-année d'intérêt sur les cotisations de l'exercice.

À l'article 49 - et j'aimerais que les copies soient annotées, car on ne fait allusion qu'à l'article 49 et non à l'article 50 - l'application de cet article nous apparaît Irréaliste. Dans la très grande majorité des cas, les montants mensuels varieront constamment.

À l'article 60, les recommandations pour le calcul des valeurs minimales de transfert des rentes de l'Institut canadien des actuaires traitent de cette question et cet article pourrait donc être modifié en ce sens.

À l'article 63, la désignation de bénéficiaire et sa révocation étant régies par les articles 2540 à 2555 du Code civil, en vertu du projet de loi, il convient de s'interroger à savoir si le conjoint aura préséance sur le bénéficiaire désigné, même si la désignation de ce dernier est irrévocable.

À l'article 70, le régime devrait spécifier que le participant doit avoir acquis le droit à une rente, donc après deux années de participation, avant le droit à une retraite anticipée.

À l'article 80, les principes actuariels généralement reconnus traitant déjà de cette question, le deuxième alinéa devrait être retiré.

À l'article 85, encore une fois, les principes actuariels, généralement reconnus traitent de cette question. Donc, le deuxième alinéa du paragraphe 3° devrait être retiré. De plus, les prestations de décès pourraient, dans certaines circonstances acceptables à la Régie, être versées au moyen d'un contrat collectif d'assurance-vie plutôt qu'à même la caisse de retraite.

À l'article 88, le droit du conjoint ayant été établi au jour où a débuté le service de la rente, en vertu des dispositions de l'article 84, l'annulation de ce droit par l'article 88 risque de créer des inéquités et des incohérences.

À l'article 92, comme le suggère le nom de la loi, les régimes de retraite sont complémentaires aux régimes publics pour fournir un certain niveau de remplacement de revenu à la retraite: par exemple, 60 % du salaire après 35 années de service, incluant les régimes publics. Cet objectif peut être atteint explicitement par intégration directe aux régimes publics désignés par l'utilisation de pourcentages différents selon l'échelle salariale. L'objectif est atteint implicitement par l'utilisation d'un pourcentage tout simplement inférieur, ce qui élimine ainsi la coordination directe.

L'Institut recommande donc une révision en profondeur des articles 92 à 95, 296 et 297 pour les raisons suivantes; ils sont particulièrement compliqués à décrire et à administrer; ils ne reconnaissent pas, en refusant l'intégration aux prestations de la Loi sur la sécurité de la vieillesse, la totalité des prestations versées par les régimes publics; ils pourraient avoir une portée rétroactive et des conséquences financières importantes en raison de la définition actuelle de l'élément a de l'article 92 et de l'article 297; iis sont complètement silencieux en matière de réduction indirecte, créant ainsi une situation de deux poids, deux mesures; finalement, ils ne permettent pas la coordination avec les périodes reconnues par le régime général mais non cotisées, en raison d'invalidité, par exemple.

À l'article 96, la loi, plutôt que les règlements, devrait préciser les options qu'un régime pourra offrir à un participant en matière de transfert s'il a atteint un âge inférieur par moins de dix ans à l'âge normal de retraite, sans avoir atteint cet âge nécessairement.

À l'article 105, l'expression "et de la présente loi" apparaissant à la quatrième ligne devrait être éliminée.

À l'article 162, les employeurs dont les participants à un régime de retraite unique sont dispersés dans toute la province, ceux qui ont établi des comités de retraite par suite de conventions collectives négociées, etc., connaîtront des problèmes administratifs sérieux si le projet de loi est adopté tel que proposé.

À l'article 191, l'approche décrite est inflexible et pourrait même créer des situations inéquitables.

À l'article 192, cet article nous apparaît totalement inapplicable dans bien des situations. À titre d'exemple, si les régimes se conforment à l'exigence du paragraphe 15e de l'article 14, toutes les clauses visées par cet article auront été modifiées. De plus, cet article empêche l'adoption d'une clause plus généreuse que celle existant dans un régime antérieur. Si un régime était sous une autre juridiction que celle du Québec, il est plus que probable que la clause d'appartenance des surplus aurait été différente de celle du nouveau régime. Enfin, si deux régimes en position de déficit devaient être fusionnés, la clause de partage des surplus perdrait évidemment de son importance.

Au chapitre XII, toute la procédure de fin d'un régime est devenue particulièrement complexe, entraînant sûrement des délais et des coûts importants.

Aux chapitres XIV et XV, l'extension des pouvoirs de la régie par règlement devraient être limitée au minimum requis par l'application de la loi et, de plus, un droit d'appel des intervenants devrait être prévu.

En conclusion, le projet de loi 116 marque une étape très importante dans l'évolution des régimes de retraite au Québec et permet au Québec d'adopter une loi comparable, voire même similaire à plusieurs égards, à celle qui a déjà été adoptée par d'autres juridictions en matière de régime de retraite. Certains aspects actuariels du projet devront, à notre avis, être revus ou ajustes afin de garantir notamment l'expertise actuarielle et le maintien d'utilisation des hypothèses et méthodes conformes aux principes 9 mai 1989

Commission permanente

actuariels généralement reconnus. La protection des droits du participant, la divulgation de l'information et la participation des employés à la démarche administrative des régimes de retraite demeurent des objectifs importants mais qui peuvent être atteints en évitant des complexités administratives inutiles. Merci beaucoup.

Le Président (M. Leclerc): M. le ministre.

M. Bourbeau: M. le Président, je remercie l'Institut canadien des actuaires pour ce mémoire extrêmement bien rédigé, qui dénote évidemment une compréhension, une connaissance du domaine certainement supérieure à celle que possède celui qui vous parle. C'est donc avec beaucoup de modestie que je vais tenter de répondre à quelques-unes de vos préoccupations.

Vous avez fait un survol rapide de tout le projet de loi. Je ne peux répondre à toutes vos interrogations, mais je pourrais peut-être tenter de répondre à certaines d'entre elles. Par exemple, à l'endroit de l'article 1, vous parlez des travailleurs hors Québec qui pourraient être assujettis aux lois de deux juridictions. Cet article pourrait être ajusté effectivement pour mieux définir le champ d'application. Je dois dire qu'à l'égard de plusieurs des recommandations d'ordre technique que vous nous avez faites nous avons l'intention de nous asseoir avec vous et les experts de la Régie, et d'étudier dans quelle mesure on pourrait modifier le texte de nos articles de façon à les rendre plus clairs ou couvrir des situations que peut-être nous n'aurions pas très bien prévues. Je prends au hasard les articles 92 à 95, 296 et 297. Vous recommandez une révision complète de ces articles. Ces articles ne touchent que les régimes qui coordonnent par réduction directe, c'est-à-dire moins de 300 régimes. Compte tenu des abus dans le passé, le projet de loi encadre précisément cette méthode. Toutefois, des assouplissements pourraient être apportés afin de limiter l'encadrement à celui qui est imposé dans la majorité des autres lois. Un trente-cinquième par année de service avant 1990, par exemple, pour la pension de la sécurité de la vieillesse et un trente-cinquième par année de service pour le Régime de rentes du Québec. Quant à l'article 105, vous dites: L'expression "et de la présente loi" apparaissant à la quatrième ligne devrait être éliminée. Notre réponse est que l'administrateur entretient un lien privilégié avec le participant et ce rôle est complémentaire au sien. On admet qu'on pourrait assouplir le texte des articles 42 et 43, par exemple, pour ce qui est du délai minimum de 30 jours.

À l'article 44, l'approche d'intérêt dès le premier jour du mois suivant le versement n'est pas pratique, dites-vous. On répond que le calcul n'a pas à être fait et appliqué mensuellement mais selon une méthode à être déterminée par l'actuaire ou par le comptable. Pour ce qui est de l'assemblée générale, l'article 162, vous prétendez qu'il peut y avoir un problème administratif sérieux pour les employeurs dont les participants à un régime de retraite unique sont dispersés dans toute la province. Il s'agit évidemment d'une décision gouvernementale quant à la question de tenir une assemblée générale. Il est possible que ça cause, dans certains cas, un problème d'organisation mais rien ne nous dit que l'employeur doit tenir une seule assemblée. Il peut fort bien décider de tenir une assemblée dans chaque usine, dans chaque région du Québec. On peut déléguer, à ce moment4à, l'actuaire de la compagnie ou quelqu'un qui est très au courant du régime de retraite et qui vient expliquer aux travailleurs sur place ce qu'est le régime, dans quel état il est et où on se dirige avec ce régime. Je pense que cette façon de procéder est tout à fait acceptable. Nous avions ce matin les gens de Domtar qui nous affirmaient que c'est ce qu'ils avaient fait au cours des dernières années.

Les articles 237 à 251. Vous dites que l'extension des pouvoirs de la régie par règlement devrait être limitée au minimum requis pour l'application de la loi. Un droit d'appel des intervenants devrait être prévu. Je vous signale que toute décision de la Régie peut faire l'objet d'une révision à la demande de tout intéressé.

L'article 63. Il convient de s'interroger à savoir si le conjoint aura préséance sur le bénéficiaire désigné, même si la désignation de ce dernier est irrévocable. Là-dessus, je vous annonce qu'il y aura préséance du conjoint pour les avantages relatifs aux services reconnus après l'entrée en vigueur de la loi.

L'article 80. Nous apporterons une précision en ce sens qu'il s'agit là d'un minimum. On parlait des principes actuariels généralement reconnus traitant de la revalorisation d'une rente ajournée. Vous étiez d'avis qu'on devrait retirer le deuxième paragraphe. Nous apporterons une précision tel que je l'ai indiqué.

Les prestations après décès. Vous dites: Les principes actuariels généralement reconnus traitant du calcul d'une prestation après décès, le deuxième alinéa devrait être retiré. L'utilisation des contrats d'assurance collectifs devrait être permise. Là-dessus, on vous répond que ces précisions sont nécessaires pour éviter des variations selon les situations vécues par les participants. La coordination avec l'assurance collective a été jugée non pertinente: C'est plutôt l'inverse qui serait préférable, d'après les conseillers du gouvernement en la matière. Maintenant, c'est possible que vous ne soyez pas totalement d'accord, je vous inviterais dans ce cas à poser la question après la séance ou d'en discuter avec nos gens.

L'article 191, la scission de l'actif et du passif. Vous signalez que l'approche est inflexible et pourrait même créer des situations inéquitables. Nous pensons qu'une certaine discrétion confiée à la Régie pourrait répondre à cette préoccupation d'inflexibilité dans la loi.

Débats de l'Assemblée nationale 9 mai 1989

L'article 192 concernant la fusion vous paraît totalement inapplicable dans bon nombre de situations. Nous pensons également que certaines nuances pourraient être apportées à l'article et nous allons tenter de le faire.

La question de la liquidation d'un régime. La procédure de fin de régime vous semble devenue complexe et pourrait entraîner des coûts, des délais. Là-dessus, nous pensons que, les décisions de la Régie au moment de la liquidation d'un régime étant d'ordre quasi judiciaire, tous les intéressés doivent pouvoir intervenir. Nous pensons qu'il faut également s'assurer de définir précisément les droits de chacun des participants. C'est au moment de la liquidation d'un régime que se posent une série de problèmes, en ce qui concerne entre autres les surplus. Nous pensons qu'il est important à ce moment de prévoir de façon un peu plus élaborée la procédure qui devra être retenue.

Bref, je pense que nous pouvons répondre à plusieurs de vos préoccupations. Il est évident que sur certains points nous devrons modifier le projet de toi pour clarifier davantage ce qui mériterait de l'être. Pour ce qui est du reste, des points que je n'aurais pas traités, les gens de la Régie communiqueront certainement avec vous soit pour clarifier des points, soit pour discuter davantage de certains sujets. Nous considérons que vous êtes des partenaires privilégiés dans ce projet de loi, vu votre grande expertise. Je peux vous assurer que c'est notre intention de tenter de clarifier le plus possible chacun des articles de la loi et de s'assurer que le projet de loi sera, au moment de son adoption, dans une forme qui pourra le rendre pratique, rendre le système cohérent et utilisable facilement, notre intention n'étant certainement pas de le compliquer pour le plaisir de le faire. Je ne sais pas si vous voulez réagir à cela.

Le Président (M. Leclerc): M. Gagnon. (17 h 30)

M. Gagnon: Merci beaucoup. D'abord, permettez-moi de vous dire que c'est avec beaucoup de satisfaction qu'on vous entend dire que la Régie va continuer - d'ailleurs, je pense qu'il faudrait le dire de cette façon - à consulter les actuaires en cette matière pour bien s'assurer qu'on n'aura pas de problèmes administratifs inutiles. C'est avec beaucoup de soulagement et de plaisir qu'on entend ça.

J'ai deux ou trois petites questions sur les points que vous avez précisés, les autres étant pratiquement réglés en ce qui nous concerne. Il y a, entre autres, la possibilité de tenir plusieurs assemblées. On a fait allusion à l'assemblée générale à l'article 162. Quand on dît que l'assemblée générale peut désigner un membre ou deux au sein du comité de retraite, si ont tient plusieurs assemblées générales, il me semble que le mécanisme de désignation de ce membre ou de ces deux membres, si vous voulez, au sein du comité, risque d'être particulièrement complexe.

Alors, comme première question, comment peut-on contourner ce problème concernant la possibilité qu'il y ait plusieurs assemblées dites régionales? Est-ce que je dois faire toutes mes remarques? J'en ai trois. Je peux les prendre toutes les trois de suite ou à la fin.

M. Bourbeau: Non, écoutez, on peut les prendre une par une.

M. Gagnon: D'accord, comme vous le voulez.

Le Président (M. Leclerc): M. le ministre.

M. Bourbeau: Je pense qu'il devrait y avoir une assemblée générale qui aurait lieu au siège social de la compagnie. Après ça, je pense que la compagnie pourrait décider de se rendre à chacune des usines, s'il y en a plusieurs, et d'y tenir une assemblée, appelons-la générale, pour l'usine ou la région en question et d'expliquer sur place, de tenir une autre assemblée sur place qui sera utilisée pour ces fins-là. L'objectif est d'informer et de permettre aux travailleurs de participer à une assemblée au cours de laquelle ils peuvent poser des questions.

M. Gagnon: D'accord.

M. Bourbeau: Je présume que ça prendra une forme générale, si je peux dire, et ce serait intéressant que l'employeur décide de faire des présentations à chaque endroit où il exploite son entreprise pour permettre à chaque travailleur d'avoir accès à l'information.

M. Gagnon: D'accord. L'article 85. Un point sur les prestations en cas de décès. On a posé la question à savoir si ces prestations pouvaient être assurées par un contrat d'assurance collectif, donc à l'extérieur de la caisse de retraite. Je connais quelques régimes dans lesquels, justement, les prestations de conjoint survivant qui existent depuis nombre d'années sont prévues dans des régimes d'assurances collectifs, tant avant qu'après la retraite, ce qui fait qu'à cet égard la caisse de retraite, en matière de dispositions en cas de décès, est peut-être moins généreuse, entre guillemets, mais ceci est compensé entièrement et plus par un régime collectif. Le défaut de donner cette possibilité de coordonner strictement les deux peut créer des problèmes, entre autres, à ce genre d'employeurs qui sont des employeurs assez importants.

M. Bourbeau: Écoutez, je consulte mon actuaire personnel.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bourbeau: À la régie, on pense qu'on ne devrait pas intégrer les deux, l'un étant de nature plus longue et l'autre étant de nature plus courte, les contrats d'assurance. Mais, sur 9 mai 1989

Commission permanente

ce point, je pense qu'on devrait continuer à avoir un dialogue avec vous. S'il y a lieu de modifier l'article, la Régie me fera valoir son point de vue et on prendra une décision.

Le Président (M. Leclerc): Merci, M. le ministre. Vous aviez fini?

M. Gagnon: Est-ce que j'ai encore du temps?

Le Président (M. Leclerc): C'est parce que je pense que M. le ministre n'a plus de temps. Deux minutes sinon vous pourrez...

Mme Harel: Je consens.

Le Président (M. Leclerc): Alors, on ira sur le temps de Mme la députée. Je pense qu'elle consent.

M. Gagnon: Merci à l'avance. Le Président (M. Leclerc): Allez-y.

M. Gagnon: En fait, un dernier point qui se veut, je l'espère, très positif. Vous avez souligné le chapitre XII, dans lequel on dit qu'effectivement, à cause des délais et surtout des coûts et de la complexité d'une terminaison de régime, c'est à ce moment-là que les problèmes reviennent à la surface. Ce que j'espère, et je pense que tout le monde va être d'accord avec moi, c'est que cette nouvelle loi ainsi que son application vont ajouter de la transparence aux régimes de retraite pour que, lorsque des problèmes surgiront, ce sera en cours de route et non à la fin. Merci.

M. Bourbeau: La transparence est aussi notre objectif premier. Si jamais, par hasard, le projet de loi n'a pas pour résultat de créer plus de transparence, on serait bien déçus parce que c'est ce qu'on souhaite aussi. Alors, des propositions comme le comité de retraite, par exemple, l'assemblée annuelle et tout ça vont permettre de rendre le régime plus transparent, permettre aux travailleurs et aux retraités d'être mieux informés sur l'évolution du régime. Dans ce sens, je pense bien que l'intention est qu'il y ait plus de transparence. J'espère que ce sera ça dans la réalité.

Le Président (M. Leclerc): Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Merci, M. le Président. Le temps est si court que je tenterai avec vous qui êtes porte-parole de l'Institut canadien des actuaires, d'aborder des questions dont on a peut-être moins traité, depuis le début de la journée, notamment celle du conjoint survivant. Là, j'aimerais bien qu'avec votre expertise, vous nous disiez ce que vous nous recommandez.

Évidemment, vous recommandez au gouvernement de mettre fin à l'incohérence dans les définitions. Mais il y a déjà, au fédéral, une définition qui a été introduite en 1986, je crois. En 1987?

M. Gagnon: Oui.

Mme Harei: C'est bien ça. Alors, pouvez-vous nous la rappeler et nous dire quel effet elle a?

M. Gagnon: Écoutez, en quelques mots, c'est que les autres juridictions privilégient, si vous voulez, le conjoint de fait par opposition au conjoint, disons, légalement marié avec lequel il n'y a plus de vie conjointe, commune, maritale, appelons-la comme on voudra. En fait, ce qui nous chatouille un peu, si vous voulez, ce n'est pas la définition de conjoint comme tel, c'est le manque de rigueur entre les juridictions qui fait qu'un travailleur qui habite à Ottawa pourrait ne pas être traité comme celui qui habite à Hull en ce qui a trait à sa situation de fait maritale. Encore une fois, on ne veut surtout pas faire un plaidoyer sur la définition de conjoint et sur ce qu'elle devrait être. Personnellement, je suis très mal placé pour en parler aujourd'hui. Cependant, ce qu'on vise, c'est plutôt une question d'uniformisation entre les juridictions beaucoup plus que de dicter une règle bien précise.

Mme Harel: Par ailleurs, l'article 88 éteint le droit à la rente pour le conjoint légal.

M. Gagnon: Oui, en cas de divorce.

Mme Harel: Plus facilement que ne le faisait, par exemple, le projet de loi 58 qui lui protégeait mieux le conjoint légal. Dans le fond, en lisant ça, je me demandais à quel dan... Parce que vous savez qu'il y a de bonnes controverses au sein du Conseil des ministres sur la question du partage du patrimoine familial, et je ne sais plus à quel clan appartient le ministre parce que manifestement, avec l'article 88, il n'y a pas de partage des rentes, des régimes privés, en cas de séparation ou de divorce. Cela existe, je pense, dans toutes les autres provinces, y compris au fédéral. C'est bien le cas?

M. Gagnon: C'est que la loi est silencieuse en matière de partage, à ma connaissance. Mais ce qui est peut-être une nouveauté concernant cette loi-ci, c'est justement qu'en cas de divorce le droit à la rente au conjoint disparaît, et même la rente est corrigée, entre guillemets, sur une base d'équivalence, ce à quoi, évidemment, on ne souscrit pas.

Mme Harel: En fait, c'est un choix sur lequel le ministre va avoir à s'expliquer parce que même dans le régime public, comme vous le signaliez, la possibilité de partage est Introduite au moment du jugement de séparation ou de

Débats de l'Assemblée nationale 9 mal 1989 divorce. Lorsqu'il y a eu une demande de partage, le jugement doit se prononcer sur cette demande. C'est évidemment la règle en vigueur dans le régime public, mais qu'il y ait extinction dans le régime public, est-ce que ça existe ailleurs dans d'autres lois?

M. Gagnon: Comprenons-nous bien. Quand on dit extinction - encore une fois, je ne suis pas juriste, je suis actuaire - l'interprétation qu'on en a faite, c'est qu'y y a extinction de la garantie que la rente soit réversible au conjoint, parce qu'en pratique il n'y a plus de conjoint, il y a eu divorce. Maintenant, je suis convaincu que ça n'éteint pas les autres droits que cet exconjoint peut avoir, en ayant recours à d'autres canaux. C'est clair dans mon esprit, en tout cas. Mais, ce qui est nouveau et inhabituel, c'est qu'on se donne même la peine d'aller recorriger la rente et de lancer le débat entièrement à l'extérieur et de dire que la rente n'est plus réversible au conjoint comme tel. Habituellement, on continue avec la même garantie, mais avec l'inexistence du conjoint tout simplement. Cela peut créer des situations.

Mme Harel: Oui, vous faites référence au recours en matière d'obligation alimentaire qu'on retrouve dans les dispositions générales du Code civil, c'est-à-dire que l'obligation alimentaire, c'est autre chose. Mais, en termes de partage du patrimoine, U faut voir ce qui est prévu dans le Code civil, je pense, au niveau du régime public. Le Code civil prévoyait des dispositions en termes de partage pour les rentes des régimes privés, également. Oui, parce qu'à l'occasion j'ai eu à passer quelques semaines en commission parlementaire sur ces questions. On y reviendra certainement parce qu'il y a là matière à harmonisation quant aux droits à la rente après cohabitation, que cela ait été en mariage ou en union de fait. C'est la première question à résoudre, je pense.

La seconde, vous vous la rappelez, c'est la définition de conjoint.

M. Gagnon: La définition de conjoint.

M. Le Houillier: Madame, il faut dire qu'en Ontario on a traité de cette question beaucoup plus par la nouvelle loi, le "Family Act", qui a traité du partage au moment du bris du mariage. Peut-être que le législateur du Québec a l'intention, dans la politique de la famille, d'aller de l'avant avec une loi similaire.

Mme Harel: II faut le souhaiter, M. Le Houillier, mais il semble que cela fait deux fois que la ministre déléguée à la Condition féminine, qui a la responsabilité du dossier, à deux séances où elle a présenté un mémoire en ce sens au Conseil des ministres, s'est vu opposer une résistance farouche, un refus obstiné par certains. Alors...

M. Bourbeau: Est-ce que je peux dire un mot? Comme je suis cosignataire du mémoire, je ne pense pas qu'on puisse dire que je suis parmi les opposants.

Mme Harel: Boni Alors, comme le ministre ne s'y oppose pas, il va certainement corriger ces dispositions, notamment à l'article 88, qui laissent croire qu'il ferait plutôt partie du clan opposé.

D'autre part, vous soulevez toute la question des assemblées générales et je me demandais s'il ne fallait pas les voir un peu comme des assemblées d'actionnaires: les assemblées d'actionnaires ne se multiplient pas, elles ont lieu à un endroit. Évidemment, le taux de participation n'est pas nécessairement celui que les administrateurs souhaitent, mais, quand il y a une controverse, il y a habituellement beaucoup de monde. Est-ce qu'on ne devrait pas associer un peu l'assemblée générale à la possibilité qu'il y a de rendre compte, même s'il y a pas foule à l'assemblée à toutes les années?

M. Gagnon: Oui, je pense qu'en soi il y a peut-être une grosse nuance qui n'est peut-être pas souhaitable, remarquez, pour les régimes de retraite, mais qui existe pour les actionnaires, c'est le fait de pouvoir quand même voter en l'absence...

Mme Harel: Par procuration.

M. Gagnon: ...par procuration - c'est le mot que je cherchais, merci beaucoup. En tout cas, personnellement, je ne suis pas sûr que c'est souhaitable pour les régimes de retraite. C'est évident. Mais, si l'on veut faire le parallèle avec les assemblées d'actionnaires, il ne faudrait pas oublier cette différence, ce qui fait qu'un nombre important de participants absents d'une assemblée générale pourraient quand même être représentés s'il y avait une formule assurant une représentativité acceptable à l'ensemble des participants. Je ne voudrais pas non plus que cela ait l'air tout simplement d'une assemblée "montée" à l'avance - je cherche le terme poli - ce qui n'atteindrait pas du tout, je pense, le but du projet de loi, mais il reste que, bien sûr, si l'on a 35 centres de paie différents à travers la province, ça devient difficile de rejoindre tout notre monde, et c'est un peu ce qu'on voulait illustrer tout à l'heure.

Mme Harel: Vous savez, pour nous, vous êtes des gens savants. Vous êtes des gens experts; on a toujours l'impression que la formation la plus poussée est celle d'actuaire et c'est bien évident que c'est avec intérêt qu'on lit vos recommandations, votre mémoire, et, moi, j'ai la même modestie que le ministre concernant ces questions qu'on aura à traiter, par ailleurs, avec l'intérêt de nos concitoyens en tête. En vous lisant, j'avais l'impression, quelque part,

que vous vous posiez un peu en rival de la Régie des rentes, c'est-à-dire que vous concevez finalement que, comme actuaires, vous êtes redevables des normes de votre champ de pratique. Par ailleurs, quand on se rappelle le jugement de la Cour d'appel, je pense au cas de United Stores, qui avait rabroué la Régie et lui avait laissé entendre qu'elle n'avait comme rôle que d'estampiller les avis de modification qui lui parvenaient, est-ce qu'il ne faudrait pas reconnaître que, en ce moment, il est nécessaire de renforcer les pouvoirs de la Régie, même si cela n'est que pour corriger des situations comme celles qui se sont produites et qui ont été très regrettables?

M. Gagnon: Bien, je pense que, là-dessus, il y a plusieurs réponses, évidemment. La première, c'est que plusieurs employés de la Régie sont eux-mêmes actuaires, donc, membres du même Institut canadien des actuaires. Ils sont dans une chaise extrêmement confortable ou très inconfortable, cela dépend de la façon dont ils la regardent.

Autre chose, il faut dire que l'Institut, depuis plusieurs années déjà, mais peut-être de façon plus spécifique depuis quatre ou cinq ans, a renforcé ses commissions professionnelles, a créé des groupes de travail justement pour, d'une part, rassurer encore plus fortement le public en général et les régies provinciales - il n'y a pas juste la Régie des rentes au Québec - sur ce rôle que veut jouer l'Institut en matière de discipline par rapport à ses membres, par rapport aux méthodes et aux hypothèses généralement reconnues. Alors, des situations comme celles-là, bien qu'elles soient toujours possibles, devraient normalement être absolument improbables à l'avenir, à cause de cette rigueur de plus en plus grande qu'on se donne comme institut, en termes de qualité du travail comme telle qui est effectué.

Mme Harel: Est-ce qu'un cas comme celui de United Stores, qui a traîné pendant des années devant les tribunaux, jusqu'à la Cour d'appel, dans lequel, un mois avant de fermer le régime de rentes de ses employés, la compagnie, qui avait liquidé les magasins, a modifié les règlements pour s'approprier le surplus de caisse, pourrait encore se produire si la Régie n'a pas les pouvoirs, si on ne lui reconnaît pas les pouvoirs?

M. Gagnon: Oui, comprenons-nous bien. Le pouvoir de modifier un régime n'a absolument rien d'actuariel. Cela n'a absolument rien à voir. Vraiment, à compter du moment où l'employeur a le droit, soit par la loi ou autrement, de modifier son régime et qu'il le modifie, et que la loi n'exige pas quelque forme de consultation que ce soit, c'est évident qu'il est le seul maître à bord et son actuaire a beau dire, non, non, cela ne se fait pas, il va le faire quand même. C'est bien clair, et je ne pense pas du tout, comprenez-moi bien, je ne veux pas jouer à Ponce Pilate, mais c'est très clair que l'actuaire, là-dessus, n'a qu'un rôle consultatif et même pas de recommandation, finalement, uniquement consultatif, cela va de soi.

Mme Harel: C'est un exemple, mais parfois cela peut illustrer l'intervention qu'on souhaite. Dans ce cas, la convention du régime était très claire. Elle prévoyait qu'aucune partie de la caisse ne servira ou ne sera déviée à des fins autres que le bénéfice exclusif des employés membres du régime. C'était la disposition, et elle a été modifiée unilatéralement, pour permettre à cette entreprise de faire main basse sur le surplus.

M. Gagnon: C'est sûrement ce que la loi 95, ou le moratoire sur le surplus vise; c'est cette situation. D'autre part, j'espère et j'imagine, et j'utilise le "je" mais je pense qu'on peut dire nous espérons et imaginons que très prochainement - je l'ai entendu tantôt à plusieurs reprises - on verra ce qu'il arrivera de toute cette notion de surplus et d'appartenance des surplus. C'est un dossier très difficile, il faut l'avouer.

Mme Harel: Oui, parce que j'ai bien lu que vous souhaitiez le plus tôt possible que le gouvernement fasse connaître sa position, sa proposition, notamment sur la question de l'indexation et sur la question de la disposition des surplus. C'est le cas?

M. Gagnon: Oui, c'est clair.

Mme Harel: Une question, parce que vous êtes des experts et vous allez me l'expliquer, j'ai de la difficulté à comprendre ce que vous nous recommandez au sujet de l'article 92. J'ai cru comprendre ceci: L'économie générale du projet de loi 116 ne permet pas une intégration entre les régimes complémentaires et les régimes publics.

M. Gagnon: En fait, les régimes publics...

Mme Harel: Et vous avez donné l'exemple - excusez-moi, je le prends comme exemple, ai-je tort? - du conjoint survivant, qui n'est peut-être pas couvert par une disposition du régime de retraite de l'employeur, mais qui l'est par la police d'assurance collective qui va lui assurer un revenu. Comment faut-il comprendre, finalement, les recommandations que vous nous faites?

M. Gagnon: Remarquez qu'à l'article 92, ce que la loi vise, si on l'interprète bien, c'est une coordination avec les régimes publics visant le participant lui-même, donc, Régime de rentes du Québec et Loi sur la sécurité de la vieillesse.

Débats de l'Assemblée nationale 9 mai 1989

Mme Harel: Vous nous dites qu'il faudrait reconnaître que ce sont là des régimes à cotisation, des régimes d'assurance, et qu'ils devraient pouvoir s'additionner?

M. Gagnon: Non. Les régimes d'assurance, quand on y a fait allusion tantôt, étaient pour les prestations de décès, à l'article 85, comme telles. Les régimes d'assurance privés, payés par l'Individu ou conjointement avec l'employeur, deviennent un accessoire, peut-être oui, non pas aux fins de pourvoir une rente de retraite, mais uniquement pour les bénéfices accessoires, par exemple, les prestations de décès.

Mme Harel: D'accord.

M. Gagnon: En ce qui concerne la prestation de retraite comme telle, l'article 92 visait l'intégration véritablement avec les prestations des deux régimes publics généralement considérés comme pourvoyant des revenus à la retraite, c'est-à-dire le Régime de rentes du Québec ou le Régime de pensions du Canada, évidemment, et la Loi sur la sécurité de la vieillesse.

Mme Harel: Vous dites que la totalité des prestations versées dans le régime public, plus les prestations de la Loi sur la sécurité de la vieillesse...

M. Gagnon: C'est ça.

Mme Harel: ...et celles versées dans les régimes complémentaires devraient pouvoir s'additionner.

M. Gagnon: S'additionner pour viser un objectif ultime de remplacement de revenus, parce que je pense que, si on veut un régime complémentaire de rentes, c'est justement pour "complémenter" - si le mot existe - les régimes de base existant déjà.

Mme Harel: Vous le situez à quel niveau? M. Gagnon: Écoutez, là encore...

Mme Harel: Le situez-vous à 70 %, ce remplacement de revenus? À quel niveau?

M. Gagnon: Je pense qu'en toute logique on devrait l'exprimer en pourcentage du revenu disponible après impôts, ce qui nous met probablement au moins autour de 70 % à 80 % net. Donc, pour un salaire brut plus modeste, il est évident que le niveau de remplacement de revenus bruts va être beaucoup plus faible. Les régimes publics prennent beaucoup de place, c'est sûr. Par contre, pour un revenu brut plus élevé, proportionnellement, les régimes publics prennent de moins en moins de place, et le régime complémentaire doit avoir une place de plus en plus importante.

Le Président (M. Leclerc): Je m'excuse, Mme la députée, en conclusion, s'il vous plaît.

Mme Harel: Cela passe vraiment trop vite. Je veux remercier les représentants de l'Institut canadien des actuaires d'être venus devant la commission parlementaire. Vous apportez à nos travaux un éclairage vraiment indispensable, et c'est certainement avec l'appui de ce que vous nous avez déposé que je ferai l'étude article par article du projet de loi. Je vous remercie.

M. Gagnon: Merci beaucoup.

Le Président (M. Leclerc): M. le ministre.

M. Bourbeau: Je joins mes remerciements à ceux de la députée de Maisonneuve pour vous assurer que nous allons continuer à faire l'étude de notre projet de loi, parce que c'est toujours perfectible. Quant aux clarifications que nous jugerons bon d'apporter, après nous être entretenus avec vous, nous n'hésiterons pas à les faire lorsque nous arriverons en commission parlementaire. Je vous incite à continuer à discuter avec les gens de la Régie pour améliorer la projet de loi dans la mesure du possible.

M. Le Houillier: Merci.

Le Président (M. Leclerc): Messieurs, au nom des membres de la commission, je vous remercie de vous être déplacés pour vous faire entendre devant nous. Je vous souhaite un bon retour à la maison. La commission des affaires sociales suspend ses travaux jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 17 h 51)

(Reprise à 20 h 11)

Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'y vous plaît! Je demanderais à chacun de bien vouloir prendre place - S'il vous plaît! S'il vous plaît - je demanderais à chacun de bien vouloir prendre place afin que la commission des affaires sociales puisse procéder à des consultations particulières et tenir des auditions publiques dans le cadre de l'étude du projet de loi 116, c'est-à-dire la Loi sur les régimes complémentaires de retraite.

Alors, puisque nous sommes sous les nouveaux ordres de la Chambre, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Non, M. le Président.

Conseil du statut de la femme

Le Président (M. Bélanger): Bien. Nous recevons présentement à la table le Conseil du statut de la femme, organisme qui a comme porte-parole Mme Marie Lavigne, Mme Jocelyne 9 mai 1989

Commission permanente

Olivier, Mme Micheline Boivin et Mme Louise Motard. Si vous voulez bien vous identifier et procéder à la présentation de votre mémoire. Vous avez 20 minutes ferme pour la présentation de votre mémoire et ensuite, il y aura des échanges de vues avec les parlementaires. Chaque fois que vous aurez à prendre la parole, aux fins de la transcription du Journal des débats, je vous demanderais de bien vouloir vous identifier s'il vous plaît, pour que la transcription soit la plus fidèle possible. Alors, je vous prierais de commencer.

Mme Lavigne (Marie): Je vous remercie, M. le Président. Je vais présenter à nouveau les gens. Il y a aussi Mme Francine Lepage, à gauche, parmi nous ce soir, et Mme Louise Motard; toutes deux sont des agentes de recherche au Conseil. Au bout, à droite, Mme Jocelyne Olivier, secrétaire générale du Conseil et Mme Micheline Boivin, directrice de la recherche au Conseil.

Le Président (M. Bélanger): Merci.

Mme Lavigne: Mesdames et messieurs, membres de la commission parlementaire, nous vous remercions de l'occasion qui nous est fournie de vous faire part de la réaction du Conseil du statut de la femme au projet de loi 116 sur les régimes complémentaires de retraite.

Nous avons comme Conseil, depuis quelques années, souligné les lacunes des actuels régimes complémentaires de retraite, et nous constatons avec plaisir que le projet de loi 116 vient corriger de nombreuses difficultés. Certaines dispositions permettront aux femmes d'améliorer leur situation à la retraite, notamment: la participation plus hâtive, la possibilité de participation pour les travailleuses à temps partiel, l'accès plus rapide aux contributions versées par l'employeur, le droit de transférer des crédits de rente lors d'un changement d'emploi, le droit à une rente de retraite anticipée et les droits pour les conjoints survivants. Elles auront un impact positif sur la situation économique de certaines catégories de femmes à la retraite.

En effet, rappelons que, bien que les femmes forment 43 % de la main-d'oeuvre, elles sont proportionnellement moins axées que leurs collègues masculins sur les régimes complémentaires. Cette faible participation s'explique bien sûr par certaines caractéristiques liées au marché du travail, notamment le type d'emploi que les femmes occupent, mais aussi parce qu'elles sont plus nombreuses à travailler à temps partiel. Or, les emplois à temps partiel ne sont habituellement pas couverts par les régimes complémentaires de retraite. Il en est de même pour les emplois temporaires qui sont majoritairement occupés par des femmes. De plus, une majorité de travailleuses, doit aussi quitter temporairement le marché du travail pour donner naissance à des enfants et prendre soin des enfants. Ces interruptions dans l'emploi, qui s'ajoutent aux changements habituels en cours de carrière, font en sorte que les femmes sont plus pénalisées que les hommes par les règles d'acquisition et d'immobilisation des régimes complémentaires de retraite.

Enfin, les travailleuses sont désavantagées par rapport aux hommes à cause de l'utilisation, dans l'établissement de la rente de retraite, de tables de mortalité différentes selon le sexe. Ainsi, dans les régimes à cotisation déterminée, la travailleuse qui décède au même âge qu'un travailleur reçoit, pour une épargne identique en début de retraite, un montant de rente annuelle moindre que celui versé à l'homme.

Le projet de loi 116 sur les régimes complémentaires de retraite améliore à bien des égards la situation des travailleuses telle que décrite précédemment, et devrait aussi modifier un peu le modèle de leur participation aux régimes complémentaires de retraite. Cependant, certaines modifications ou améliorations pourraient être apportées au projet de loi. Nous aborderons, en premier lieu, des modifications concernant les travailleuses rémunérées et les participantes, et, en second lieu, nous vous ferons part de nos commentaires sur certains articles relatifs à la couverture des conjoints ou des conjointes survivantes dans des régimes de retraite.

En ce qui concerne les travailleuses à temps partiel, signalons d'abord que les conditions d'admissibilité prévues à l'article 34 favoriseront une participation plus hâtive des travailleurs et des travailleuses à un régime complémentaire, et permettront l'adhésion des travailleuses à temps partiel. Il s'agit donc d'une modification très positive. Il apparaît cependant qu'un aspect important concernant les travailleuses à temps partiel doit être considéré. En effet, dans les provinces canadiennes où les juridictions sur les régimes complémentaires de retraite ont accordé un droit de participation aux travailleuses à temps partiel, on constate que celles-ci ne l'utilisent à peu près pas, choisissant de ne pas adhérer au régime. La raison en est que la plupart des régimes laissent aux travailleuses à temps partiel le choix d'adhérer ou de ne pas adhérer. Le Conseil du statut de la femme est donc d'avis que la travailleuse à temps partiel doit être traitée de la même façon que la travailleuse à temps plein. Il recommande donc que soit précisé dans la loi que, si le régime complémentaire de retraite oblige l'adhésion des travailleurs à temps plein, V l'oblige également pour les travailleurs à temps partiel.

En second lieu, le gouvernement propose dans le projet de loi 116 que l'acquisition et l'immobilisation deviennent obligatoires dès que l'employé compte deux ans de participation au régime. Cette nouvelle règle permettra certes à un plus grand nombre de personnes d'acquérir les cotisations versées par l'employeur et d'obtenir

Débats de l'Assemblée nationale 9 mal 1989 une rente de retraite différée. Mais il faudra quand même quatre ans de service auprès du même employeur pour acquérir ces droits, soit deux ans avant d'adhérer et deux ans de participation. Ce laps de temps nous semble encore trop long, particulièrement pour les femmes, compte tenu de leur grande mobilité. Je m'explique. En effet, en 1986, 59 % des femmes travaillant à temps partiel et 42 % de celles travaillant à temps plein, occupaient leur même emploi seulement depuis deux ans ou depuis moins de deux ans. Il apparaît donc qu'une portion non négligeable de travailleuses risque de ne pas toucher les cotisations versées par l'employeur.

Étant donné, toutefois, que le gouvernement fédéral et que les autres provinces canadiennes ont des règles similaires à celles que vous proposez dans l'actuel projet de loi, il nous semble pour le moment difficile pour le Québec d'opter pour une solution qui serait différente de celle des autres provinces. Le Conseil du statut de la femme demande toutefois au gouvernement d'évaluer l'application de cette disposition lorsqu'elle sera adoptée, et d'en dégager les conséquences sur l'accès des femmes à une rente différée, afin d'apporter, s'il y a lieu, les correctifs ultérieurs.

De plus, il serait important qu'une meilleure information soit donnée aux participantes en congé de maternité. Celles-ci ont la possibilité, en vertu de la loi, de continuer à contribuer au régime de retraite. Actuellement, cependant, on constate que la majorité des travailleuses qui prennent un congé de maternité ne versent pas leurs cotisations à un régime complémentaire de retraite. Il serait donc important d'améliorer l'information à cet égard.

Par ailleurs, l'expérience présente montre que les femmes, en moyenne, ont une espérance de vie plus grande que celle des hommes. Dans le domaine des rentes viagères, on anticipe donc que les femmes connaîtront, en moyenne, une période de prestations plus longue. Cette présomption a conduit à l'utilisation de tables différenciées selon le sexe dans les régimes de retraite. L'utilisation de ces tables pour déterminer le coût d'une rente viagère, établit qu'il en coûte plus cher à une femme qu'à un homme pour toucher, au moment de la retraite, le même montant de rente annuelle.

Dans l'état actuel des régimes complémentaires de retraite, seules les femmes participant à des régimes à cotisation déterminée subissent les effets discriminatoires de l'utilisation des tables différenciées selon le sexe. On constate que, par l'introduction dans le projet de loi du droit de transfert, on risque d'élargir ces effets discriminatoires aux femmes qui participent à un régime à prestations déterminées. Ainsi, les cotisantes à des régimes à prestations déterminées, lorsqu'elles se prévaudront du droit de transfert, se retrouveront dans la même situation discriminatoire que les participantes aux régimes à cotisation déterminée. Le CSF considère qu'une femme ayant travaillé dans les mêmes conditions qu'un homme devrait avoir droit à une même rente à la retraite, quel que soit le régime auquel elle adhère. Il serait, en effet, injuste de pénaliser ainsi les travailleuses individuellement, parce qu'une certaine partie d'entre elles vit plus longtemps. La discrimination selon le sexe n'est pas acceptable pour le motif que les statistiques démontrent que l'espérance de vie est plus grande chez les femmes que chez les hommes.

Il n'est pas démontré, en effet, que c'est en raison du sexe que l'espérance de vie diffère, alors qu'au contraire, des recherches épidémiolo-giques ont établi des liens entre l'espérance de vie et les habitudes de vie des personnes, telles le tabagisme, l'alcoolisme et la pratique d'activités physiques. D'autres statistiques montrent, par ailleurs, que l'espérance de vie des personnes diffère selon la catégorie professionnelle ou le niveau de vie des personnes. De plus, les statistiques relatives à l'espérance de vie sont basées sur l'expérience passée. S'y fier pour les cohortes actuelles, c'est postuler que celles-ci se comporteront de la même façon que les cohortes décédées. Or, on sait que les conditions de vie et de travail des femmes et des hommes se rapprochent de plus en plus. Enfin, il importe aussi de souligner qu'entre 1985 et 1987, si l'on considère la population âgée de plus de 65 ans, on constate que 83 % des hommes et des femmes meurent aux mêmes âges. Ce qui explique la différence dans l'espérance de vie entre les hommes et les femmes, ce sont donc les cas marginaux d'hommes qui décèdent plus tôt et de femmes qui décèdent plus âgées. Pourquoi alors la majorité des femmes devraient-elles subir les effets de la mortalité différente d'une minorité?

Actuellement, la Charte canadienne des droits interdit toute discrimination fondée sur le sexe. De plus, la législation fédérale et la plupart des législations provinciales interdisent la discrimination selon le sexe dans les régimes. On remarque que, selon l'expérience qui découle de l'application de ces lois, si on se limite à interdire la discrimination selon le sexe dans les seuls régimes de retraite, on n'atteint pas l'objectif recherché. En effet, les régimes de retraite ne sont pas les seuls à verser des rentes viagères. Les compagnies d'assurances, pour ne nommer que celles-là, en versent également et utilisent des tables de mortalité différenciées selon le sexe. C'est cette situation qui nous fait dire qu'actuellement les femmes y perdent, même lorsqu'il n'y a pas de discrimination selon le sexe dans les régimes de retraite, parce qu'il en existe aussi sur le plan des assurances.

Le CSF considère que la non-discrimination selon le sexe dans les régimes de retraite doit donc être abordée dans sa globalité. Il recommande donc au gouvernement d'abolir toute discrimination selon le sexe dans les régimes de retraite et dans les assurances, de telle sorte que ne soit plus utilisée, dans leurs prévisions 9 mai 1989

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actuarielles, une table de mortalité faisant intervenir de quelque façon que ce soit la variable sexe.

En second lieu, je vais aborder le dossier sous l'angle des femmes en tant que conjointes des participants. Le projet de loi 116 n'aborde aucunement le partage des droits de retraite lors d'une rupture entre deux conjoints, contrairement au gouvernement fédéral et à plusieurs gouvernements provinciaux qui ont inclus dans leur réforme la possibilité de partager ces droits en cas de rupture de mariage ou d'une séparation conformément à l'ordonnance d'un tribunal, ou encore dans le cas d'une rupture de conjoints de fait conformément à une entente entre eux. Le Conseil du statut de la femme considère que l'épargne accumulée dans les régimes complémentaires de retraite ainsi que dans les régimes de retraite établis par règlement en vue de transfert devrait être traitée comme un bien familial, au même titre que l'épargne accumulée au Régime de rentes du Québec. La valeur de ces biens acquis durant la vie commune devrait être partageable au moment de la rupture d'une union légale conformément à une ordonnance du tribunal et, dans, le cas de conjoints de fait, à la suite d'une entente dûment signée entre eux. C'est pourquoi le Conseil du statut de la femme recommande au gouvernement d'amender le projet de loi 116 afin de permettre le partage des droits de retraite pour les années de vie commune et afin que le transfert immédiat d'un montant global soit effectué vers le régime de retraite de la conjointe, ou que la rente réversible au conjoint soit révisée de façon à être servie en deux parties distinctes, l'une au participant, l'autre à la conjointe.

En second lieu, dans le cas d'un participant qui décède avant de commencer à recevoir sa retraite, le Conseil déplore que le projet de loi n'ait pas fait prévaloir les droits de la conjointe survivante sur toute disposition inconciliable survenue avant le 1er janvier 1990, et ceci, pour tous les services reconnus au participant par le régime complémentaire de retraite pendant les années de vie commune. Pour le Conseil, les crédits de rente constitués pendant cette vie commune sont des biens familiaux et, à ce titre, ils ne devraient pas être attribués à une tierce personne. Le Conseil demande donc au gouvernement que soit retiré l'article 294 du projet de loi 116 afin que la conjointe ou le conjoint soit obligatoirement bénéficiaire des crédits de rente accumulés par le participant pendant leur union.

Enfin, dans le cas du participant qui décède après avoir commencé à recevoir sa rente, l'inclusion du droit à une rente de conjoint survivant constitue une amélioration notable. Deux points doivent toutefois être soulevés.

Premièrement, comme le choix à une rente de conjoint survivant diminuera la rente de retraite émise aux participants qui se prévaudront de cette disposition, il est fort possible que cela constitue une raison suffisante pour amener les conjointes à renoncer à leur droit. Afin d'éviter qu'une telle chose se produise, le Conseil recommande que la possibilité de renoncer à la rente de conjoint survivant soit retirée du projet de loi 116.

Deuxièmement, afin que le principe de l'égalité des droits des conjoints soit reconnu, le Conseil préconise que la rente de conjoint soit appliquée de façon différente de ce qui est proposé dans le projet de loi 116. En effet, selon ce projet de loi, la conjointe survivante recevra, au décès du cotisant, 60 % de la rente de retraite que celui-ci recevait avant de décéder. Par contre, si le cotisant survit à sa conjointe, il continuera à recevoir la même rente qu'avant le décès de celle-ci. (20 h 30)

Étant donné que les besoins personnels de la conjointe ou du cotisant sont les mêmes, le Conseil trouve injuste que le participant, en cas de décès de sa conjointe, continue de recevoir sa pleine rente alors que la conjointe qui survit doit, pour sa part, se contenter de 60 % de cette rente. Il recommande donc que le gouvernement revoie les modalités d'application de la rente de conjoint survivant de telle sorte que la rente reçue par la personne survivante, que cette personne soit conjointe ou cotisante, représente un même pourcentage de la rente de retraite totale reçue par le couple.

Le Président (M. Bélanger): Si vous me le permettez, je vous inviterais à conclure rapidement, s'il vous plaît.

Mme Lavigne: Oui. Enfin, nous tenons à souligner à nouveau que ce projet de loi constitue une amélioration notable par rapport à la situation actuelle. Les quelques amendements que nous proposons visent essentiellement à le bonifier dans une perspective d'équité de traitement pour les femmes, comme participantes ou comme conjointes.

Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie beaucoup.

Mme Lavigne: Merci.

Le Président (M. Bélanger): M. le ministre.

M. Bourbeau: Je suis heureux de constater que les représentants du Conseil du statut de la femme accueillent, en général, favorablement le projet de loi. Les observations que vous nous faites, bien sûr, nous en tiendrons compte. C'est un point de vue qui est intéressant et qui est certainement à point. Vous êtes le groupe qui représente les femmes, de façon générale. Plusieurs groupes qui représentent les femmes viendront nous voir, mais vous êtes certainement l'un des plus autorisés.

Vous venez de faire état des problèmes qui subsistent encore, en ce qui vous concerne, dans

Débats de l'Assemblée nationale 9 mai 1989 le projet de loi. On pourrait peut-être parler de la rente du conjoint survivant. Le principe qui est en cause ici, c'est que, finalement, la rente du conjoint survivant, c'est comme un vase communicant: plus il y en a pour le conjoint, moins il en reste pour le survivant et plus il y en a pour le survivant, moins il y en a pour le conjoint, étant entendu que la somme d'argent qu'il donne, au départ, qui est utilisée pour servir cette rente, est toujours la même, c'est le total des sommes accumulées pendant la vie de celui qui a travaillé. On peut utiliser cette somme de plusieurs façons. Nous nous sommes ralliés à ce qu'on appelle le consensus pan-canadien", c'est-à-dire un droit de survie, une rente au conjoint survivant, équivalente à 60 % de la rente que retirait préalablement le cotisant ou le travailleur. Pourquoi a-t-on choisi 60 %? On me dit que c'est parce que ça coûte moins cher de vivre à une personne qu'à deux. On tient pour acquis, évidemment, qu'il s'agit d'un couple marié qui vit avec une rente de 100 % et qu'au décès, les frais de subsistance sont moins élevés. Je reconnais, de toute façon, que ça ne se passe pas toujours comme ça dans la vraie vie et qu'il arrive très souvent des cas où ça se présente différemment. Rien n'empêcherait que l'on stipule, après le décès du conjoint, du premier conjoint, une rente égale pour le conjoint survivant. Dans ce cas, il faudrait que la première rente soit moins élevée pour pouvoir générer des fonds additionnels pour la deuxième rente, pour la rente du conjoint survivant.

Il y a une série de possibilités. Vous en énoncez. Je peux vous dire que nous allons regarder ça avec attention. Les possibilités sont là, on pourrait faire des amendements au projet de loi. Je ne dis pas qu'on en fera, mais on va certainement regarder, avec beaucoup d'intérêt et d'attention, les propositions que vous faites. Ces modifications qu'on peut faire sont permises par la loi, mais ce n'est pas obligatoire. Ce qui est obligatoire dans la loi, c'est le consensus canadien qu'on reprend.

Vous nous parlez de la discrimination selon le sexe. Bien sûr, la loi ne contient rien présentement. Ce sont les règlements qui, éventuellement, traiteront de ces questions. Le point de vue que vous soulevez est intéressant. Effectivement, on doit reconnaître que, la longévité observée chez les femmes étant plus grande, cela aura des conséquences sur les montants de rente. À l'inverse, cela a aussi des conséquences sur les primes d'assurance, étant donné l'expectative de vie qui est plus longue. Je pense bien qu'éventuellement on en arrivera à abolir toutes ces discriminations. Je ne sais pas si ce sera à temps, pour le moment où seront connus nos règlements, mais disons que ça alimentera certainement ta réflexion du gouvernement.

Vous nous pariez de l'indexation. Vous regrettez l'omission d'en parier. On n'en a pas parlé, bien sûr, ni de ça ni du partage des surplus, les surplus d'actifs, parce que nous avons décidé de reporter la discussion sur ces sujets à un peu plus tard. Comme vous le savez, nous avons gelé les surplus d'actif, établi un moratoire sur les surplus, de sorte que tant que le moratoire n'aura pas été levé ou plutôt tant qu'une décision n'aura pas été prise sur la destination des surplus, nous allons maintenir le moratoire. Si jamais la discussion s'enclenche sur la question de l'indexation, ce sera à l'occasion de cette discussion générale sur les surplus d'actif. Nous prévoyons que le débat aura lieu quelque part cet automne, sur ce sujet. Si jamais, par hasard, le débat n'était pas complété à la fin de l'automne, nous n'hésiterions pas à prolonger le moratoire qui interdit la distribution des surplus d'actif.

Le partage des droits de retraite. Vous suggérez d'amender le projet de loi pour permettre le partage à la source ou le versement en deux prestations distinctes, en cas de rupture des conjoints. Tout ce que je peux vous dire, c'est que cette question fait ou fera partie de ce qu'on appelle "les droits économiques des conjoints", un dossier qui défraie la chronique par les temps qui courent. Si le gouvernement prenait une décision dans ce dossier, ce serait dans le cadre de ce dossier que le sujet dont je viens de parier serait traité.

Je pense avoir fait le tour des principaux points que vous avez traités. J'aimerais peut-être vous demander de préciser davantage les observations que vous faites dans le cas de la rente du conjoint survivant. La question de la renonciation, par exemple, la possible renonciation par un conjoint à la rente du conjoint survivant, nous y avons songé. Vous voudriez qu'on enlève la possibilité de renonciation, si je comprends bien. Par contre, on nous fait valoir qu'enlever la possibilité de renoncer, c'est enlever des droits, enlever une certaine flexibilité à des gens qui voudraient posséder cette flexibilité. Est-ce que vous ne considérez pas, justement, qu'en enlevant ces droits, on peut être sujets à la critique de gens qui nous diraient: Vous nous traitez un peu comme des enfants, vous nous enlevez des droits qu'on pourrait exercer?

Mme Lavigne: Sur cette question, la réflexion qu'on se fait, c'est que les femmes à la retraite sont parmi les citoyens les plus pauvres. Or, il peut être normal, effectivement... On peut voir assez bien la dynamique d'un couple où un conjoint dirait à son épouse: Renonce, notre rente va être plus élevée, et qui dirait, pour l'immédiat: Un tiens vaut mieux que deux tu l'auras, peut-être que tu vas mourir avant moi ou en même temps que moi, renonce. Sauf que les femmes ont quand même une espérance de vie plus longue que les hommes et elles sont les plus pauvres. Or, qu'arrive-t-il à partir du moment où une femme renonce à la rente de conjoint survivant? Cela signifie que l'ensemble, la plupart des femmes n'ayant pu accumuler leur propre régime ou étant, à l'heure actuelle, parmi la 9 mai 1989

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population de femmes âgées où seulement 15 % ont des régimes complémentaires de retraite, dans un tel contexte, ça signifie que c'est l'ensemble de la collectivité qui assumerait ce choix individuel. Je pense qu'on est confronté à nouveau entre la difficile question d'un choix individuel face à un choix collectif. Ce choix individuel risque d'amener un fardeau financier collectif plus élevé, et c'est dans cette perspective qu'on a fait cette recommandation.

M. Bourbeau: Est-ce qu'on ne pourrait pas se faire accuser d'être un peu paternalistes ou peut-être maternalistes si on introduisait ce principe dans la loi de choisir, au nom des femmes? De leur enlever un droit de renoncer à quelque chose?

Mme Lavigne: Cela ne s'appliquera pas juste aux femmes. Quand je vous explique la situation des femmes âgées qui risquent d'être mal prises financièrement, ce seront les femmes qui auront été au foyer, qui n'auront pas elles-mêmes de revenu de retraite. Pour ce qui est des femmes qui auront été sur le marché du travail, qui auront un régime complémentaire de retraite, elles auront le même type d'obligations face à leur conjoint. Là aussi, on est devant le même principe des vases communicants pour l'épouse ou la conjointe, où il y aura un transfert de rente à un conjoint survivant, mais ça vaut pour tous les deux, pour l'un et l'autre. Dans ce sens, je ne pense pas qu'on puisse être accusés de paternalisme ou de maternalisme.

M. Bourbeau: Pour l'instant, ça va. Est-ce que vous avez terminé?

Une voix:...

M. Bourbeau: Pour l'instant, je n'ai pas d'autre question.

Le Président (M. Bélanger): Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de vous accueillir, Mme Lavigne; vous devenez une habituée, en peu de temps, des commissions parlementaires. Les personnes qui vous accompagnent, ou est-ce moi, plutôt, qui ai la responsabilité de dossiers où le Conseil du statut de la femme a beaucoup à dire? Il est peut-être aussi possible que ce soit les sujets dont je m'occupe qui m'amènent à vous entendre venir présenter le point de vue du Conseil devant la commission parlementaire.

Vous avez échangé des propos avec le ministre, justement sur cette question de la renonciation à la rente de conjoint survivant, et le ministre invoquait le droit de renoncer comme une sorte de droit dont on priverait la conjointe ou le conjoint. Dans le fond, c'est un peu la même sorte d'argument qui, semble-t-il, est invoqué par ceux qui résistent au mémoire, devant le Conseil des ministres, dont iI est le cosignataire et qui traite du partage des biens familiaux. Là aussi, il y a une question fondamentale. On verra demain, au Conseil des ministres, où ça doit être discuté, comment cette question sera réglée, étant justement le droit ou non de renoncer au partage. C'est comme une question fondamentale, encore faut-il y répondre en fonction de la situation et de la réalité des femmes d'aujourd'hui, parce que le droit d'y renoncer suppose le droit de savoir à quoi on renonce, donc, d'être bien éclairés, d'avoir une information complète.

J'aimerais inviter le ministre à porter attention aux pages 6 et 7 de votre mémoire. Il y a là une mesure qui est en vigueur depuis des années. Vous nous dites, en toute fin de la page 6: "...il serait important qu'une meilleure information soit donnée, par le gouvernement ainsi que par l'employeur, aux participantes qui quittent temporairement leur emploi pour prendre un congé de maternité de la possibilité et des avantages qu'elles auraient à continuer à verser leurs cotisations durant ce congé." (20 h 45)

Là, vous décrivez les dispositions de la Loi sur les normes minimales qui obligent l'employeur à continuer de verser des cotisations à la participante en congé de maternité, et qui l'obligent à calculer les semaines de congé de maternité comme des semaines de service, aux fins de calculer ses années de participation, si l'employée paie ses propres cotisations. Si elle ne les paie pas, il advient qu'elle n'a aucun avantage, aucun bénéfice de ce qui est décrit là. Aujourd'hui même, ma recherchiste me disait justement avoir versé ses cotisations pour obtenir les effets que vous décrivez, sauf que cette disposition n'est pas connue. Je ne sais pas si vous avez eu l'occasion de l'évaluer, et pourtant elle existe depuis longtemps. Et là, le danger, comme vous le savez, ce sont les clauses dans les polices ou dans les régimes ou dans les contrats, des clauses générales où quelqu'un, sans trop savoir à quoi elle renonce, mais elle renonce par... comment les appelle-t-on, ces clauses qu'on retrouve même, par exemple, à l'égard de la protection de la résidence familiale? ce sont les clauses de renonciation générale. Je ne sais pas si vous avez une idée de ce qui pourrait se passer... Comment cela se passe-t-il dans les provinces canadiennes? Je sais qu'il y a déjà un partage prévu dans la loi même, au moment de la séparation ou du divorce, mais comment cela se passe-t-il au moment du décès? Est-ce qu'il peut y avoir renonciation?

Mme Lavigne: Lors du décès ou de la maternité?

Mme Harel: Au moment de la séparation ou du divorce, dans toutes les autres lois canadiennes, il y a partage.

Débats de l'Assemblée nationale 9 mai 1989

Mme Lavigne: Oui.

Mme Harel: Mais au moment du décès, que se passe-t-il?

M. Bourbeau: Un droit de renonciation est prévu.

Mme Lavigne: Je vais laisser Mme Motard répondre.

Mme Motard (Louise): C'est ça. En fait, dans les autres provinces, lorsque le cotisant décède après avoir commencé à recevoir sa rente de retraite, le conjoint survivant peut renoncer à sa rente de conjoint. Mais, on ne sait pas exactement combien renoncent. On n'a pas de chiffre à ce sujet.

Mme Harel: Vous dites que le conjoint survivant renonce...

Mme Motard: Le conjoint survivant peut décider de renoncer à sa rente de conjoint survivant.

Mme Harel: À ce moment-là, il y renonce au moment où il y a accumulation, dans le régime, des cotisations de son conjoint, non pas après le décès.

Mme Motard: Non, c'est ça. Mme Harel: D'accord.

M. Bourbeau: ...ce n'est pas le conjoint survivant.

Mme Harel: Bien non.

M. Bourbeau: Mais légalement, ce seraient les droits du survivant.

Mme Harel: C'est ça, c'est finalement le conjoint qui renonce.

Mme Motard: C'est ça. S'il n'y a pas de renonciation, le conjoint survivant va recevoir sa rente, la rente de conjoint survivant.

Mme Harel: Quand vous recommandez, à la page 22 de votre mémoire: "...que la possibilité de renonciation à la rente de conjoint survivant soit retirée du projet de loi 116", en vertu de quelle perception de ia réalité des choses le recommandez-vous?

Mme Lavigne: On le recommande fondamentalement en vue d'éviter la pauvreté économique des femmes à leur retraite, qui sont déjà parmi les citoyens les plus pauvres à la retraite. C'est fondamentalement en vue d'assurer au conjoint qui reste en vie une survie économique adéquate.

Mme Harel: Avez-vous des travaux, des études ou des recherches sur la renonciation? Non, il n'y a pas eu. La Régie des rentes a-t-elle fait des travaux sur la renonciation? Sait-on quel impact la renonciation peut avoir?

M. Bourbeau: On me dit que les études qu'on pourrait faire, c'est sur l'expérience des autres provinces... que la mesure est trop récente pour qu'on puisse avoir des données valables.

Mme Harel: Vous rappelez dans votre mémoire, à bon droit, qu'il y a une moindre participation des femmes que des hommes à des régimes complémentaires. Vous nous rappelez qu'en 1986, 35 % des femmes et 43 % des hommes participaient à un régime complémentaire de retraite. Donc, à peine 20 % des travailleuses du secteur privé en faisaient autant. Vous avez signalé dans votre mémoire, à bon droit, que vous souhaitiez une bonification des régimes publics, que c'est sur eux qu'on devait surtout compter pour maintenir le niveau de vie au moment de la retraite. Est-ce que le Conseil a déjà préparé des travaux sur ces attentes? Est-ce que le Conseil a déjà un avis sur ce qu'il attend des améliorations à être apportées au régime public?

Mme Lavigne: Oui, le Conseil a déjà fait une étude... Mme Francine Lepage va répondre là-dessus.

Mme Lepage (Francine): Lors du dépôt d'un document, en 1985, qui soulevait des hypothèses de bonification du Régime de rentes, le Conseil avait souhaité qu'il y ait une bonification du Régime de rentes parce qu'il considérait que c'était peut-être le vécu le plus efficace pour assurer une protection à la retraite. Il couvrait tout le monde. Il n'y avait pas de problème de tranférabilité. Les rentes étaient indexées, etc. On souhaitait quand même que la loi sur les régimes complémentaires de retraite soit modifiée de façon que ces régîmes soient aussi bonifiés, qu'on corrige leurs lacunes, ce que le projet de loi fait actuellement.

Mme Harel: Vous avez, avec raison, dans votre mémoire, à la page 2, référé à la réaction que vous aviez eue au moment du dépôt du projet de loi 58, eu égard à celle que vous manifestez maintenant à l'égard du projet de loi 116, étant donné, je crois, qu'à l'exception du chapitre XI et de quelques modifications très mineures, c'est finalement la même rédaction à 90 % ou à peu près du projet de loi. Ceci dit, dans votre mémoire, il me semblait avoir également vu une référence au dossier de l'accès des personnes au foyer à la Régie des rentes. Je ne sais pas, il me semble que c'est dans votre mémoire ou c'est peut-être dans un de ceux que l'on verra demain. Avez-vous un point de vue sur 9 mai 1989

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cette question?

Mme Lavigne: On n'en a pas fait part dans ce mémoire.

Mme Harel: Dans ce mémoire. Avez-vous un point de vue ailleurs?

Mme Lepage: Non. Dans les précédents avis, on souhaitait qu'il y ait un partage des crédits de rentes, comme on le souhaite maintenant. Quant à la participation des femmes au foyer au Régime de rentes, on avait jugé des propositions gouvernementales là-dessus, mais on était d'avis aussi que c'était une situation très complexe et on voulait voir les propositions avant de les juger. Donc, on s'est abstenues de se prononcer sur cette question.

Mme Harel: Ceci dit, quand vous demandez le partage des crédits de rentes, vous le demandez dans la totalité de la rente. Vous demandez que soient abolis, je pense, les 60 % qui sont versés au conjoint survivant au profit d'une rente maintenue dans sa totalité. C'est bien ce qu'on doit comprendre? Le ministre vous a dit tantôt qu'il en coûtait moins cher de vivre seul que de vivre à deux. Quel est votre point de vue là-dessus?

Mme Lavigne: En tout cas, l'hypothèse qu'on fait, c'est à partir du moment... Il y a une situation normale d'un couple qui vit ensemble, des personnes âgées qui vivent ensemble, qui ont un loyer, des dépenses fixes qui grugent probablement la majeure partie du budget. Les rentes, il s'agit du résultat d'un patrimoine familial accumulé tout au cours d'une vie. Or, si c'est l'épouse qui décède, le mari reste avec 100 % du montant. Il s'agit de ce qu'il a accumulé lui-même. Or, la femme se retrouve avec 60 % et c'est ce déséquilibre qui fait qu'on prolonge à nouveau le cycle de pauvreté chez les femmes. En ce sens, c'est l'inéquité. Il est possible, effectivement, que faire un marché coûte un peu moins quand il y a une personne plutôt que deux personnes. Les personnes âgées ont aussi besoin de toute une série de ressources alternatives. On n'a pas fait de budget, à proprement parier, mais les 60 %, en tout cas, conduisent directement les femmes dans une baisse très considérable du niveau de vie antérieur.

Mme Harel: Vous avez bien abordé toute la question des femmes en tant que conjointes de participants. Vous avez aussi traité - je crois que vous êtes les seules qui l'avez fait durant cette commission parlementaire - de la discrimination qui, dites-vous, vient des critères actuariels qui sont retenus, notamment des tables de mortalité. C'est vraiment un aspect spécifique, je crois, à votre mémoire et qu'on ne retrouve pas dans les autres, sinon que la Fédération des femmes, aussi, je pense, va en parler demain.

Vous nous dites que, finalement, les hommes et les femmes sont traités différemment pour des considérations d'ordre actuariel et que l'espérance de vie ne devrait pas être utilisée comme un facteur qui coûte plus cher aux femmes parce que c'est lié à une composante biologique. Alors, vous souhaitez l'adoption d'un règlement. C'est bien le cas? C'est ce qui permettrait de venir corriger la situation. C'est ça?

Mme Lavigne: La Charte des droits et libertés prévoit qu'il y a déjà une possibilité de faire une réglementation en autorisant, dans le cadre de la charte, des calculs différents. Ce qu'il s'agit de faire, c'est s'il y a un règlement, qu'en ce qui concerne une réglementation, le sexe soit explicitement exclu. Il n'y a pas eu de règlement de fait encore depuis de nombreuses années, c'est-à-dire, je pense, depuis 1982. Il y a des possibilités d'en faire un. À partir du moment où on en fera un, ce sera important que le sexe soit exclu des critères.

Mme Harel: Vous considérez que c'est à l'occasion de l'étude des travaux que nous menons qu'il y aurait intérêt à profiter de l'occasion pour corriger cette situation. C'est ce qu'on doit comprendre. Vous le recommandez dans le cadre de l'étude du projet de loi 116 au ministre de la Justice et non pas à celui de la Justice, responsable de la Charte des droits et libertés.

Mme Lavigne: Je pense qu'une commission parlementaire est une institution gouvernementale où un organisme conseil du gouvernement peut faire part à différents membres de la possibilité de le modifier. Je vais laisser Micheline continuer.

Mme Boivin (Micheline): Nous croyons que la disparition de la discrimination dans les avantages sociaux pourrait être faite dans le cadre de cette loi, même si le règlement n'a jamais été adopté en vertu de la charte. En fait, le règlement est là pour préciser quelle serait la discrimination permise. Donc, on peut fonctionner en l'absence de ce règlement, faire disparaître la discrimination dans d'autres lois. Alors, c'est le bon endroit pour apporter une demande comme celle-ci.

Mme Lepage: II faut dire aussi que, dans les régimes, il y a les régimes à prestations déterminées où ces problèmes ne se posaient pas et il y a les régimes à cotisation déterminée qui regardent le projet de loi 116, là où les problèmes d'emploi d'une table différenciée selon le sexe se posent. C'est un moment aussi de...

Mme Harel: Vous considérez que le phénomène va aller en s'accroissant avec les modifications apportées au régime à prestations déterminées. C'est l'objet de votre mémoire. Vous

Débats de l'Assemblée nationale 9 mai 1989 dites jusqu'à maintenant que c'était un problème assez restreint, surtout dans les régimes à cotisation. C'est bien ça? Tandis que là, vous nous démontrez qu'avec les modifications qui seront apportées, cette réalité va s'amplifier. C'est ça?

Mme Lavigne: C'est cela. Cela va être vraiment un effet du mécanisme du droit de transfert. On pourra se retrouver dans des cas où des gens avaient un régime à prestations déterminées, mais qui vont vivre cet effet au moment du transfert. (21 heures)

Mme Harel: Puisque vous avez - je termine là-dessus, M. le Président - eu l'occasion justement d'étudier l'impact des régimes, de la nature des régimes à prestations ou à cotisation, leur impact sur les crédits de rente disponibles, j'avais demandé si vous aviez examiné toute la question de la rente viagère traditionnelle versus les nouveaux véhicules qu'étudie la Régie comme le fonds de revenu viager. Est-ce que vous avez été mis au courant de ces hypothèses, de ces différents scénarios puisque, évidemment, jusqu'à maintenant, les différentes lois d'encadrement permettaient simplement le véhicule traditionnel qui était la rente viagère? Mais, U est envisageable, je pense, qu'H y ait d'autres véhicules qui soient étudiés, en fait, notamment le FRV, le fonds de revenu viager, qui s'est modifié en cours de route dans vos études. Est-ce que vous avez eu l'occasion, au Conseil du statut de la femme, de...

Mme Motard: On a examiné la possibilité de transférer... On sait que les crédits de rente seront transférés dans un régime d'épargne-retraite immobilisé, mais on n'a pas vraiment comparé, on n'a pas vraiment analysé les différents genres de régimes d'épargne-retraite qui pourraient être utilisés.

Mme Harel: Je parle plus des...

Le Président (M. Bélanger): Je m'excuse, Mme la députée de Maisonneuve, mais le temps est vraiment tout écoulé.

Mme Harel: M. le Président, on aura peut-être l'occasion...

Le Président (M. Bélanger): Si vous voulez bien les remercier.

Mme Harel: Je parle plus de l'instrument de liquidation lorsqu'il y a le capital de retraite, de la manière dont on le liquide pour pouvoir en profiter. Mais, on aura l'occasion et certainement qu'au Conseil du statut de la femme, vous aurez l'occasion de poursuivre des travaux avec la Régie des rentes sur cette question parce qu'elle peut avoir un impact. M. le Président, je remercie le Conseil de l'insistance qu'il met à nous rappeler qu'H n'y a pas d'indifférence dans ces questions, qu'H n'y a pas d'anonymat. En d'autres termes, il y a des choix qui sont faits et qui ont des conséquences sur les femmes. D'une certaine façon, leur pauvreté actuelle n'est pas étrangère aux décisions antérieures. Si on veut corriger la situation, il faut avoir la possibilité de bien maîtriser les véhicules pour ne pas qu'ils donnent les effets contraires a ceux qu'on recherche. Je vous remercie.

Le Président (M. Bélanger): Merci. M. le ministre, veuillez remercier nos invités.

M. Bourbeau: II nous reste à remercier les représentantes du Conseil du statut de la femme, Mme Lavigne et ses collaboratrices, pour une excellente présentation.

Le Président (M. Bélanger): On remercie le Conseil du statut de la femme. On invite à la table la Centrale de l'enseignement du Québec, représentée par M. Raymond Johnston, Mme Solange Pronovost, Mme Michèle Savard et M. Pierre Duval. Si les représentants de la Centrale de l'enseignement veulent bien prendre place à la table.

CEQ

La commission reçoit la Centrale de l'enseignement du Québec. Je pense que vous êtes assez familiers avec nos règles de procédure. Je vous demanderais quand même de vous identifier et, lorsque vous avez à prendre la parole, de ne pas oublier de vous identifier, ceci pour les fins de transcription au Journal des débats. Alors, sans plus tarder, je vous invite à procéder à la présentation de votre mémoire et à la présentation de vos porte-parole.

M. Johnston (Raymond): Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord remercier les membres de la commission qui ont accepté, en dernier recours, de nous recevoir pour que nous puissions exprimer notre point de vue sur le projet de loi 116. Du même coup, je voudrais vous présenter les personnes qui font partie de la délégation CEQ. À l'extrême droite, physiquement, Michèle Savard, une employée cadre de la CEQ, responsable, entre autres, du secteur de la sécurité sociale; M. Pierre Duval, un employé-conseil à la centrale, également dans le secteur de la sécurité sociale; à ma gauche, Solange Pronovost, vice-présidente de la centrale qui occupe une fonction assez reliée à ce secteur-là aussi; et, pour ceux qui ne me connaîtraient pas, je suis Raymond Johnston, vice-président de la CEQ.

M. le Président, puisque, connaissant vos règles, je sais bien que je n'aurai pas le temps de vous lire le mémoire qu'on vous a déposé, je voudrais vous présenter, sommairement, l'esprit qui anime le mémoire qui vous a été déposé et 9 mai 1989

Commission permanente

conclure, avec votre permission, avec quelques questions adressées au ministre responsable du projet de loi qui sont au nombre de cinq, et j'apprécierais pouvoir les poser avant qu'on commence à répliquer ou à saluer notre intervention.

Le Président (M. Bélanger): Procédez à votre guise, il n'y a pas de problème.

M. Johnston: M. le Président, mesdames et messieurs les membres de la commission, à la CEQ, on a participé, depuis quelques années, à un mouvement qui tentait de proposer au gouvernement de l'époque une approche qui visait à privilégier une réforme substantielle. D'autres pariaient de bonification, du Régime de rentes du Québec parce qu'il nous semblait que c'était probablement la mesure par laquelle on pouvait atteindre de la façon la plus universelle possible l'ensemble des travailleuses et travailleurs du Québec, dans la perspective d'assurer à toutes et à tous une retraite décente. On a participé avec d'autres organisations à la réalisation et à la promotion d'un manifeste, en 1984, qui continue largement d'inspirer nos interventions en matière de régime de retraite.

Nous sommes aujourd'hui en présence d'un projet de loi qui, bien sûr, répond probablement à certaines urgences en matière de régime complémentaire de retraite, mais qui, à notre point de vue, ne tient pas compte suffisamment de la situation de l'ensemble des travailleuses et travailleurs du Québec et ne tient pas compte, non plus, à notre satisfaction, du fait que depuis le tournant des années quatre-vingt, on a assisté à une précarisation assez importante de l'emploi au Québec. J'inviterais les députés de la commission à réfléchir un peu aux rencontres qu'ils peuvent avoir avec des jeunes qui sont confrontés de plus en plus à la nécessité de vivre l'emploi précaire pendant dix ou quinze ans avant de trouver un emploi stable.

Il nous semble aussi que non seulement le projet de loi ne tient pas compte de la nécessité d'améliorer les conditions générales de retraite, mais ne répond probablement pas, à notre point de vue, à ce qu'on pourrait appeler une loi sur les normes minimales concernant les régimes complémentaires de retraite. J'ai vu quelque part dans les notes de présentation du projet de loi que celui-ci devait établir les droits minimaux en matière de régime complémentaire. Je crois qu'on se retrouve probablement devant des conceptions fort différentes de ce que constituent des normes minimales en ce qui a trait à la retraite.

À défaut d'avoir, en parallèle, une réforme substantielle du Régime de rentes du Québec, donc une amélioration importante des mesures universelles, ce qu'on souhaiterait pouvoir trouver dans le projet de loi, ce sont des dispositions qui, premièrement, assurent à l'ensemble des travailleuses et travailleurs du Québec la possibilité d'avoir accès à une retraite décente, même en occupant. le cas échéant, l'espace qui n'est pas occupé par les régimes privés, un régime complémentaire public s'iI le faut, qui permettraient, d'une part, de tenir compte du cheminement tortueux sur le marché du travail auquel doivent faire face la plupart des jeunes d'aujourd'hui et, d'autre part, permettraient aussi une complète transférabilité des crédits de retraite.

À la lecture qu'on a faite, c'est que certains choix ont été faits par le gouvernement: le choix d'éviter le débat sur une promesse électorale de 1985 difficile à tenir sur la participation des femmes au foyer au Régime de rentes du Québec et le choix aussi, à toutes fins utiles, de laisser entre les mains des milieux financiers non seulement la gestion des caisses de retraite, mais le pouvoir déterminant en matière de définition des régimes complémentaires de retraite. L'expérience que nous avons dans ces domaines nous amène à croire que, si la préoccupation du gouvernement était élargie, au-delà des questions qui sont l'objet de scandales publics, à l'intérêt réel des travailleuses et des travailleurs québécois en matière de retraite, on se retrouverait probablement devant un projet de loi fort différent qui, comme par hasard, l'histoire se répétant, est déposé à la fin d'un mandat probable de gouvernement. Ce fut le même scénario sous l'ancien gouvernement. Notre principal défaut est peut-être d'avoir de la mémoire.

Si l'objectif... Vous comprendrez, M. le Président, qu'à compter du moment où le ministre est distrait, j'ai de la misère à...

M. Bourbeau: Pardon? M. le Président, je n'ai pas compris. Voulez-vous répéter?

M. Johnston: Pardon?

M. Bourbeau: Est-ce que vous m'avez mis en cause?

M. Johnston: Non, non, j'ai dit...

Le Président (M. Bélanger): M. Johnston faisait remarquer qu'au moment où vous étiez distrait, il ne voulait pas poursuivre son intervention. Vous pouvez continuer?

M. Bourbeau: Écoutez, je peux quand même parler à mon adjoint pendant dix secondes, non?

Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît, je vous prierais de continuer votre intervention.

M. Johnston: II n'y a rien d'agressif dans ce que je dis là, c'est peut-être une déformation de pédagogue, M. le ministre.

On croit qu'il y a un certain nombre d'éléments, à l'Intérieur du projet de loi, qui sont acceptables - je les mentionne à la page 10 - notamment, le fait de prévoir des presta-

Débats de l'Assemblée nationale 9 mai 1989 lions de décès avant la retraite, de prévoir des prestations de décès après la retraite, de prévoir des mécanismes d'Information des participantes et des participants. Je trouve que ce sont des mesures positives. (21 il 15)

On était aussi relativement satisfaits des mesures qui permettaient un encadrement plus strict du financement du régime et de la capitalisation des régimes, mais, avec l'annonce qui a été faite ce matin... On pourra en reparler tantôt.

Je pense, par ailleurs, qu'il y a des éléments qu'il faut améliorer, notamment au sujet du comité de retraite. Ce n'est pas suffisant, à notre point de vue, qu'on prévoie une simple participation des travailleuses et des travailleurs au comité de retraite comme possible. À notre point de vue, il faut la rendre obligatoire et obligatoirement au moins paritaire en n'oubliant jamais que, derrière ces choix, derrière les choix des travailleuses et des travailleurs de consentir à investir dans des régimes de retraite, c'est un choix, à toutes fins utiles, de traitement différé. C'est un choix d'épargne aujourd'hui pour l'avenir et, dans bien des cas, ça entre en compensation dans les négociations dans le cadre d'un règlement global.

Il faut reconnaître, partout où il y en a, la représentation syndicale des travailleuses et des travailleurs et il faut reconnaître aussi un rôle de soutien et d'information pour la Régie des rentes du Québec, probablement plus articulé que ce qui existe dans le projet de loi. Nous croyons qu'il n'y a pas moyen d'arriver à une réforme réaliste des régimes complémentaires à moins de déterminer d'avance que les travailleuses et travailleurs d'une entreprise ou d'un groupe d'entreprises vont avoir un rôle déterminant à la fois dans la gestion du régime, dans la définition du régime et dans la gestion de la caisse de retraite.

Notre vision des choses, c'est qu'un régime de retraite n'est pas un régime d'épargne qui peut servir à toutes sortes de choses. À compter du moment où le monde décide de se constituer un fonds de retraite, il faudrait que ce soit clair que l'argent qui est investi là-dedans par les salariés et par l'employeur ne pourra pas servir à d'autres fins que la retraite. Ce n'est pas un régime d'épargne à géométrie variable, un régime de retraite, c'est un choix pour l'avenir et, dans la mesure où on ne le préserve pas, on fait en sorte que les travailleuses et travailleurs qui prennent leur retraite se retrouvent dans des situations de pauvreté et d'indécence. Il faut donc, dès le départ, assurer l'acquisition des cotisations patronales pour l'employé qui contribue à un régime et il faut, à notre point de vue, que ça se fasse dès la première journée de participation, autrement on établit un régime pour les gens qui ont un emploi stable et un autre pour le monde qui a un statut précaire, puis on invite indirectement l'employeur à augmenter le nombre d'emplois précaires. Il faut aussi, à cette fin, Immobiliser dès le départ les cotisations patronales et salariales. Dans les cas où I y a un droit à une rente différée, il faudrait que cette rente soit obligatoirement indexée. Il faut aussi assurer l'adhésion de l'ensemble des salariés.

Je ne parlerai pas longtemps de la question du partage des gains, il nous semble que le partage des crédits entre les époux, c'est comme une façon de consacrer l'égalité des conjoints à l'intérieur du mariage. Le ministre pourrait peut-être nous dire que ça va se régler ailleurs qu'à l'intérieur de ce projet de loi, mais il nous semble, vu que ce projet de loi est à l'étude maintenant, que c'est à l'intérieur de celui-ci qu'on devrait le régler.

Il faut aussi assurer qu'il n'y ait pas de discrimination hommes-femmes dans la façon de gérer les régimes, donc, pas de tables qui font une différence selon les sexes et la longévité de l'homme ou de la femme, le cas échéant.

Quant à la retraite anticipée abordée à l'intérieur du projet de loi, nous croyons que des régimes complémentaires devraient fixer l'âge normal de la retraite non pas à 66 ans ou à la limite du 66e anniversaire, mais à 60 ans, ce qui supposerait aussi des modifications au Régime de rentes du Québec, dans la même perspective. Quant à la retraite anticipée, et là je souhaite, M. le ministre, que vous soyez très attentif là-dessus...

Le Président (M. Bélanger): Je vous inviterais à conclure, s'il vous plaît.

M. Johnston: J'y arrive. Nous souhaitons que la loi comprenne des dispositions qui permettent de s'assurer qu'il n'y aura pas de pressions de la part de l'employeur sur un travailleur pour l'éjecter du marché du travail, parce qu'il a possiblement droit à une retraite anticipée. Nous souhaitons aussi qu'à l'intérieur de nos lois, on assure les gens qu'il n'y aura pas de déviation du sens de leur régime de retraite pour assurer un abaissement des coûts des régimes de sécurité sociale. Là, je fais nettement allusion à la Loi sur l'aide sociale que vous connaissez.

Donc, indexation, surplus acquis aux travailleurs, une caisse de retraite indépendante et, croyons-nous, le mandat au comité de gestion de cette caisse indépendante qui pourrait permettre une complète transférabilité d'élaborer, conjointement avec la Régie des rentes du Québec, un régime public complémentaire qui pourra occuper l'espace laissé vacant par l'absence de régimes privés complémentaires, mais qui pourrait aussi établir, en quelque sorte, les normes minimales en matière de régime complémentaire de retraite.

Le Président (M. Bélanger): C'était le temps qu'il était possible de vous accorder. M. le ministre, si vous voulez procéder. 9 mai 1989

Commission permanente

M. Bourbeau: M. le Président, l'exposé est tellement clair que je n'ai pas de questions.

Le Président (M. Bélanger): Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Merci, M. le Président. Je suis contente que le ministre ait eu l'air de si bien saisir l'exposé, notamment, la dernière partie qui traitait du droit à l'adhésion.

Cela me permet d'ailleurs de vous souhaiter la bienvenue à la commission parlementaire de la part des membres de la commission et de l'Opposition et de discuter avec vous sur un aspect que vous traitez dans votre mémoire et que vous avez tiré du portrait de la fiscalité des particuliers au Québec - c'est à la page 15 de votre mémoire. Vous nous dites qu'en 1985, selon le ministère du Revenu, il y avait 692 501 contribuables qui se situaient dans la tranche des 5000 $ à 9999 $ de revenu, et pour cette même tranche, U n'y avait que 23 051 contribuables qui avaient fourni des contributions à un régime de retraite et 20 024 qui avaient contribué à un régime d'épargne retraite. Donc, même pas 50 000 sur un total d'environ 700 000, c'est-à-dire qu'on n'est même pas à 8 %. À ce niveau de revenu, c'est dans la moyenne du salaire minimum, finalement.

Vous concluez de la façon suivante: "Pour près de 650 000 personnes qui ont cette tranche de revenu, il n'y a que la Régie des rentes pour se préparer à la retraite." Évidemment, vous devez connaître, comme moi, beaucoup de bénéficiaires de la Régie des rentes à 60 ans qui sont obligés de faire appel à l'aide sociale, pour compléter l'allocation qui leur est versée. Certains même le regrettent: Vous n'avez pas idée combien U y en a qui regrettent d'avoir demandé leur rente, parce que cela leur rend plus difficile l'accès aux médicaments à 60 ans. Il faut alors faire des pieds et des mains, et des démarches pour que leur soit reconnue par le bureau local, la possibilité de rembourser les médicaments, ce qui n'est pas couvert finalement, par la rente qu'ils reçoivent de la Régie des rentes. Vous avez évoqué la question de l'aide sociale. C'est un aspect qui a aussi été évoqué aujourd'hui, et qui m'inquiète d'autant plus que vous nous rappelez qu'il faut deux années avant que l'employeur soit obligé d'accepter un nouvel adhérent, et deux autres années de plus avant d'avoir le droit d'acquisition, et c'est juste à ce moment-là qu'intervient l'immobilisation.

Cela dit, ça m'a fait penser à un programme que le ministre est en train d'élaborer, sur lequel il s'est beaucoup penché devant ses compatriotes de la Montégérie. Il ne le savait pas, mais j'ai fait venir le discours qu'il a prononcé devant la Chambre de commerce de la Montérégie sur la subvention salariale. Il n'en parle pas ici.

M. Bourbeau: J'aurais pu vous en envoyer copie, vous n'aviez qu'à le demander.

Mme Harel: II n'a pas voulu en parler en Chambre ni en commission, il n'a pas voulu en parler non plus, jusqu'à maintenant. Quand je l'ai Interrogé, il m'a toujours dit qu'il était à mettre ça au point, mais il en a parlé à ses confrères de la Chambre de commerce de la Montérégie. Qu'est-ce qu'elle a de particulier, cette nouvelle façon de faire les choses? C'est que dorénavant l'entreprise va recevoir directement l'allocation, engager la personne pour un an, et ce sera renouvelable indéfiniment. Cela veut donc dire que cette personne n'aura jamais accès à un régime comme celui dont on parle maintenant, puisqu'elle sera remplacée par une autre pour un an. De toute façon, l'entreprise va toujours toucher indéfiniment la prestation, et son cheptel de main-d'oeuvre va être renouvelable à l'infini.

Je ne sais pas, mais lorsque le ministre vous a dit qu'il avait tout compris, j'ai pensé qu'ayant tout compris, il verrait peut-être combien, de toute façon, coûte cher à l'ensemble du Québec ce genre d'absence de politique puisque la sécurité du revenu finit par compenser, dans des programmes d'assistance sociale, ce que les programmes d'assurance, pas au sens des assurances-vie, mais les assurances collectives qu'on se donne dans les programmes de retraite pour contrer le risque du vieillissement, justement.

Donc, en lisant votre mémoire, j'avais en tête qu'il était peut-être utile à ce stade-ci d'examiner les modifications à apporter pour se donner un vrai régime public. Vous en parlez au début de votre mémoire, et, à la fin, c'est comme si vous aviez renoncé. Vous pensez que le gouvernement, il vaut mieux ne pas en parler, ça ne vaut même pas la peine de le demander... Vous dites: En l'absence d'une vraie réforme en matière de régime public, c'est comme si le pis-aller était la caisse de retraite indépendante. Est-ce que je me trompe? (21 h 30)

M. Johnston: Je vais essayer de répondre à votre question qui, à mon point de vue, nous situe vraiment au coeur du problème. Notre première option, nous, aurait été un projet de loi qui aurait permis une bonification substantielle du RRQ, mais qui aurait donné des garanties minimales aussi au plan des régimes complémentaires qui auraient probablement perduré. On comprend que dans une période où il y a un rôle accru qui est reconnu par les gouvernements à l'entreprise privée ou un rôle accru que l'entreprise privée s'arroge au détriment de l'engagement gouvernemental, c'était probablement difficile pour le gouvernement d'envisager de canaliser l'épargne collective vers des fonds publics et que c'était probablement un des obstacles à la considération d'une amélioration du régime universel, mais on maintient toujours que c'est la meilleure approche. D'ailleurs, d'après nous, c'est la seule qui donne des garanties à

Débats de l'Assemblée nationale 9 mai 1989 l'ensemble des travailleuses et travailleurs au Québec. Mais, on dit: Si, à cause de cette conjoncture politique et à cause des engagements politiques que le gouvernement a pris, c'est impossible de remettre en question la gestion de caisse de retraite privée par des entreprises financières, n'y a-t-il pas, par ailleurs, la possibilité de faire en sorte que le projet de loi 116 devienne une véritable loi sur les normes minimales en matière de régime complémentaire de retraite? Si le gouvernement ne veut pas procéder par l'amélioration du régime universel, n'y a-t-il pas moyen de faire un pas dans cette direction sans qu'il renonce à toutes ses orientations qui pourraient permettre - et c'est l'approche que nous déployons, en conclusion - de créer un régime public qui couvrirait, comme je le disais tantôt, tout l'espace laissé vacant par les régimes privés complémentaires et qui pourrait aussi exercer, dans une certaine mesure, un rôle comme régime minimal complémentaire? C'est-à-dire que tous les régimes privés qui ne correspondraient pas minimalement à ce régime public complémentaire disparaîtraient parce que les travailleuses et les travailleurs s'orienteraient vers le régime public.

On pense que ça pourrait être un pas vers la bonification du RRQ puisqu'il resterait juste à faire la jonction entre les deux régimes dans une phase ultérieure. On ne renonce pas à l'objectif premier. On dit: Peut-être que stratégiquement, compte tenu du contexte, c'est trop demander aux entreprises de renoncer à la gestion privée des caisses de retraite. Mais, encore disons-nous dans notre mémoire que dans la mesure où il reste encore de la gestion privée avec des régimes complémentaires privés, il faudrait que les travailleurs soient assurés d'une emprise réelle sur la définition et la gestion du régime et, aussi, sur la gestion des caisses. C'est privé, mais ce n'est pas privé juste pour l'employeur ou juste pour la compagnie d'assurances, c'est privé aussi pour la collectivité des travailleurs qui sont impliqués là-dedans.

Si on réussit un amalgame de ces mesures, d'après nous, on contribue au développement social dans la perspective d'assurer éventuellement une retraite un peu plus décente à l'ensemble des travailleuses et travailleurs québécois en même temps que de leur assurer un meilleur contrôle sur leur régime, parce qu'il y a deux moyens de le faire: Le moyen général qu'on propose par la caisse complémentaire, la caisse indépendante et le régime complémentaire public, puis une participation plus serrée des travailleurs à la gestion des régimes complémentaires privés.

Ce sont deux pôles sur lesquels un gouvernement qui cherche une voie pourrait éventuellement s'appuyer pour aller dans le sens du progrès sans nécessairement marcher sur les pieds des uns ou des autres. Nous comprenons que c'est difficile pour le gouvernement, dans la conjoncture actuelle, de dire: Toute l'épargne qui va dans les régimes de retraite, va être canalisée dans une caisse publique. C'est pour cela que nous ouvrons cette voie intermédiaire et nous la situons vraiment dans la perspective d'un pas vers d'autre chose.

Mme Harel: Dans le projet de loi 116, le véhicule proposé, c'est finalement la transférabilité à la caisse du nouvel employeur ou au Régime d'épargne-retraite. J'ai compris des explications que M. Legault ou le ministre ont apportées aujourd'hui que, de la date d'entrée chez l'employeur jusqu'à deux années consécutives terminées, il y a simplement la possibilité, s'il y a cessation d'emploi, de quitter avec la contribution faite et les intérêts accumulés. Une fois ces deux années consécutives terminées, il y a un droit d'acquisition qui débute pour deux autres années. S'il y a cessation pendant ce temps, on peut quitter avec la partie immobilisée. C'est bien le cas?

M. Bourbeau: L'acquisition n'a lieu qu'à la fin des deux...

Mme Harel: De la quatrième.

M. Bourbeau: ...de la quatrième année, l'acquisition et l'immobilisation. Pendant les deux premières années, il n'y a aucune cotisation, aucun régime, rien.

Mme Harel: Ni de la part de l'employeur, ni de la part de l'employé?

M. Bourbeau: Si on veut, on peut stipuler que le régime commencera plus tôt, mais la loi fixe deux années comme le plus tard. Un régime peut commencer au plus tard au bout de deux ans, disons.

Mme Harel: Cela veut donc dire que, dans le fond, ça prend quatre ans avant qu'il y ait immobilisation. Les deux premières années, c'est volontaire, sauf qu'il n'y a pas vraiment intérêt de la part de l'employeur à maintenir un régime semblable. La Fédération des femmes viendra demain nous signaler qu'en général, les femmes travaillent 1,9 année en moyenne. La majorité des femmes n'ont pas ces deux années consécutives nécessaires à l'obtention du droit d'adhésion. Selon les chiffres les plus récents, et pourtant la participation s'est accrue considérablement, la moyenne du travail consécutif réalisé est de 1,9 année, juste en deçà de ce qui est nécessaire pour avoir le droit d'adhérer. Voyez, c'est après quatre ans qu'il y aura immobilisation. Et après deux ans, finalement, s'il y a cessation, c'est tout simplement sa propre contribution plus les intérêts. En fait, cela aurait pu être la même chose en mettant soi-même l'argent à la banque.

Vous avez pris connaissance des amendements que le ministre a annoncés, ce matin, à l'ouverture de la commission parlementaire, 9 mai 1989

Commission permanente

concernant la gestion des régimes. Vous avez un point de vue que vous exprimez à la page 11 de votre mémoire sur le comité de retraite. Vous considérez que la participation devrait être paritaire et décisionnelle. Est-ce que vous concevez, à l'instar d'une autre organisation, pour ne pas la nommer, la CSN, qui est venue devant la commission nous dire: Dans la mesure où c'est paritaire, on pourrait accepter que ce comité véritablement paritaire de retraite décide, s'il le juge souhaitable, de reconduire l'administration à l'employeur... Mais encore faut-il que ce comité soit véritablement paritaire sinon, évidemment, c'est comme changer la situation actuelle pour rien de plus. Est-ce que vous faites un peu la même évaluation?

M. Johnston: Je peux répondre, M. le Président. Nous, à compter du moment où on dit que le comité de retraite est paritaire et décisionnel, on ne présume pas du genre de décisions qui seraient prises. Si le comité en arrivait à la conclusion que l'administrateur du régime peut continuer d'être un tel ou un tel, ou telle compagnie ou telle autre, on fait confiance à la dynamique d'ensemble de ce système. Mais, ce dont on voudrait s'assurer, c'est que le projet donne vraiment la capacité aux travailleuses et aux travailleurs d'avoir une influence collective, je le répète, à la fois sur le régime, sa gestion et la gestion de la caisse. Si le comité de retraite dit: La gestion de la caisse, on laisse ça à quelqu'un d'autre. Ou, s'il dit: On se contente de définir les paramètres du régime et on en laisse la gestion à quelqu'un d'autre, ce sera la responsabilité du comité. Mais, on ne voudrait pas que la loi dépossède d'avance les travailleurs de leur droit de gestion.

Mme Harel: Je vous remercie. Le président de la commission me fait signe que mon temps est écoulé. J'aimerais simplement souligner que cette question de l'ampleur des sommes d'argent en cause dans les régimes complémentaires est tout à fait phénoménale. On sait que ce qui est actuellement accumulé dans les régimes complémentaires, soit autour de 38 000 000 000 $, c'est trois fois plus que ce qui est accumulé à la Régie des rentes. Pourtant, seulement deux travailleurs sur cinq peuvent profiter d'un régime complémentaire de retraite; donc trois sur cinq en sont exclus. Encore là, quand on sait que l'ensemble des travailleurs employés doivent cotiser au Régime de rentes du Québec, s'il y a la moindre amélioration, le moindre élargissement, ce sont des sommes phénoménales qui sont finalement en cause. Je crois que vous nous apportez un point de vue, un angle sous lequel il est utile d'examiner une vraie réforme en matière de régimes de retraite qui est finalement celui d'une épargne servant aussi au développement public dans une société. Je vous remercie.

Le Président (M. Bélanger): Merci. M. le ministre.

M. Bourbeau: Oui, M. le Président, en terminant, j'aimerais faire une observation. Tout à l'heure, dans la présentation de la CEQ, on a fait, je crois, une insinuation - je pense que c'est le mot - à savoir que le projet de loi 116 serait quelque chose comme un exercice préélectoral que le gouvernement aurait lancé un peu à la manière de la loi 58, en 1985, et que, possiblement, je présume, le gouvernement n'aurait pas l'intention d'aller plus loin qu'il ne l'a fait avec la loi 58. Alors, j'aimerais quand même rappeler que la loi 58 avait été déposée le 18 juin 1985, c'est-à-dire à une journée ou deux, je crois, de la fin de la session. À ce moment-là, le gouvernement avait déjà complété quatre années et deux mois de son mandat et on était pratiquement certains que les élections ayant lieu à l'automne, ce projet de loi mourrait au feuilleton, ce qui s'est effectivement produit. Comparativement à ça, le projet de loi 116 a été déposé le 23 mars 1989...

Mme Harel: M. le Président, je consens à ce que le ministre continue, parce qu'il devrait normalement faire ses remerciements.

M. Bourbeau: M. le Président, j'ai droit à mon temps.

Mme Harel: On était rendus aux remerciements. Vous n'aviez pas à m'amener à ma conclusion immédiatement. Moi aussi, je me réserve une conclusion.

Le Président (M. Bélanger): Excusez-moi, il n'y a pas de consentement à donner de votre part. M. le ministre avait du temps non utilisé. Il peut l'utiliser à sa guise avant de faire ses remerciements. Je pense que c'est la pratique qu'on a toujours...

Mme Harel: Ah non! Je regrette infiniment, ce n'est pas la pratique.

Le Président (M. Bélanger): Je regrette madame, c'est comme ça qu'on a toujours procédé.

Mme Harel: On ne remercie pas en plein milieu d'une commission, mais à la fin et j'aurai l'occasion de le faire moi-même.

Le Président (M. Bélanger): Excusez-moi, madame, ce n'est pas comme ça que cela fonctionne. M. le ministre, si vous voulez continuer.

M. Bourbeau: Je n'en aurai pas pour longtemps, M. le Président, soyez sans crainte. Alors, je veux simplement rappeler que le projet de loi 116 a été déposé le 23 mars dernier, c'est-à-dire environ trois mois avant la fin de la session. Nous avons délibérément planifié une commission

Débats de l'Assemblée nationale 9 mai 1989 parlementaire qui se situe à plus d'un mois de la conclu, fin de la session de sorte qu'on est raisonnablement certains de ce côté-ci de la Chambre que Le Président (M. Bélanger): Bien. Alors, ce projet de loi sera adopté avant la fin de ia compte tenu de l'heure, la commission ajourne session. C'est notre intention ferme de faire ses travaux à demain, 10 heures, même local. Je adopter ce projet de loi. Ce n'est pas, quoi qu'en vous remercie beaucoup. Bonsoir, pensent certains auteurs, un exercice préélectoral, mais une volonté délibérée du gouverne (Fin de la séance à 21 h 48) ment de faire adopter le projet de loi. Sur ce, M. le Président, je remercie la CEQ de sa présentation.

Le Président (M. Bélanger): Bien.

Mme Harel: Alors, M. le Président, vous allez me permettre de dire au ministre que, quand il veut intervenir, il le peut. Il est souhaitable, d'ailleurs qu'il le fasse...

Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît, pas sur la procédure, sur le contenu.

Mme Harel: ..mais qu'il le fasse par l'alternance. Je regrette, M. le Président, c'est l'alternance qui prévaut ici. Alors, s'il avait voulu intervenir, il l'aurait fait après mes interventions et à la toute fin de nos travaux. Vous nous auriez demandé de conclure et, par alternance, on aurait conclu. Cela m'aurait permis de vous rappeler que nous avions déposé un document intitulé "Agir maintenant pour demain". C'est un document orange qui avait permis une vaste consultation. Le ministre a décidé, quatre ans plus tard, de revenir avec le projet de loi 58 qui a vieilli pendant quatre ans, c'est évident. Il a décidé de le reproduire presque intégralement. Je ne veux pas le chicaner, mais je veux...

Le Président (M. Bélanger): Mme la députée de Maisonneuve, excusez-moi. Votre temps est écoulé vraiment, vraiment. Je pense que ce sont là des arguments partisans.

Mme Harel: Comme si le ministre n'en n'avait pas utilisés, M. le Président!

Le Président (M. Bélanger): Brièvement, s'il vous plaît.

M. Johnston: M. le Président. J'ai annoncé tantôt mon intention de poser cinq questions au parrain du projet de loi. Je crois qu'a pourrait peut-être utiliser le temps qui lui est alloué pour nous remercier. Il n'est pas encore 21 il 50.

Le Président (M. Bélanger): Non. Je pense que nos procédures ne nous permettent pas de faire ça, malheureusement. J'inviterais M. le ministre à conclure son intervention après quoi nous allons ajourner les travaux à demain. M. le ministre.

M. Bourbeau: M. le Président, je pense que vous étiez distrait tout à l'heure. J'ai déjà conclu.

Le Président (M. Bélanger): Bien. Alors, compte tenu de l'heure, la commission ajourne ses travaux à demain, 10 heures, même local. Je vous remercie beaucoup. Bonsoir.

(Fin de la séance à 21 h 48)

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