Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.
(Dix heures dix-sept minutes)
Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il
vous plaît!
Je demanderais à chacun et à chacune de bien vouloir
prendre sa place afin que la commission des affaires sociales puisse
procéder à une consultation générale et à
des auditions publiques afin d'étudier l'"Énoncé de
politique sur les services de garde à l'enfance", déposé
à l'Assemblée nationale le 24 novembre 1988.
Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?
La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Thuringer
(Notre-Dame-de-Grâce) sera remplacé par M. Cannon (La
Peltrie).
Le Président (M. Bélanger): Bien. Il n'y a pas
d'autres renseignements, Mme la députée de Maisonneuve?
Mme Harel: Non.
Le Président (M. Bélanger): Non. Alors, j'appelle
donc à la table le premier groupe qui est le Regroupement des agences de
services de garde en milieu familial du Québec. Bonjour, mesdames. Je
vais vous expliquer brièvement notre procédure. Vous avez vingt
minutes ferme pour la présentation de votre mémoire et une
période de quarante minutes de discussions avec les parlementaires. Je
vous prierais, avant de procéder à la présentation de
votre mémoire, de bien vouloir présenter vos porte-parole.
Lorsque vous aurez à répondre aux questions ou à parler
à quelque moment que ce soit, s'il était possible, bien vouloir
donner votre nom avant; c'est pour les fins de transcription du Journal des
débats. Je vous prierais donc de commencer. Merci.
Regroupement des agences de services de garde en milieu familial du
Québec
Mme Potvin (Suzanne): Merci bien. Je suis Suzanne Potvin,
présidente du Regroupement des agences de services de garde en milieu
familial du Québec. À ma gauche, Mme Aline Fortin, directrice
d'une agence de la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, et, à ma
droite, la directrice du regroupement, Jocelyne Tougas.
Donc, vingt minutes, c'est court pour faire une présentation sur
les agences; j'en aurais pour une heure à moi toute seule. Je vais
tenter d'être concise dans mes propos. Vous avez déjà lu le
mémoire, vous l'avez sûrement épluché et
regardé. On n'est pas pour faire le décompte de toutes les
propositions, l'une après l'autre. Je pense que ce n'est pas
nécessaire.
Le message que j'ai à vous passer aujour- d'hui, c'est notre
réaction générale face à cet énoncé
de politique. On a trouvé très démobilisant un
énoncé de politique qui parle de la garde en milieu familial,
mais où il y a beaucoup de questionnement sur le rôle des agences
et sur la place que les agences doivent prendre dans la collectivité,
dans les services de garde au Québec. C'est démobilisant dans le
sens que, depuis longtemps, nous avons toujours la même
préoccupation de qualité des services - cela est
reflété dans l'énoncé et nous le voyons - mais il y
a toujours quelque chose qui nous accroche foncièrement, là
où on parle de la garde en milieu familial reconnue par une agence.
Du même souffle, on parle de la garde non reconnue, non
régie, avec autant de places pour ce service et autant d'informations
sur ce service. Si ce n'est le petit feuillet dont Mme la ministre parlait hier
- c'est ce qu'on m'a dit -on parle de l'entreprise de garde en milieu familial.
On a autant de places pour la garde non régie que pour celle qui est
régie. C'est quelque chose qui nous agace profondément parce
qu'on croit que les services de garde au Québec devraient avoir le souci
de parler des services qui sont reconnus, qui sont mandatés, qui ont des
permis d'opération du gouvernement. Que les autres services existent, il
n'y a pas de problème, mais arrêtons d'en parler et de leur donner
une bonne couverture. Mettons les énergies sur nos dossiers.
On sent beaucoup chez le Regroupement des agences de services de garde
en milieu familial que nos préoccupations, nos demandes, nos
revendications ne sont pas nécessairement beaucoup
véhiculées dans le monde des services de garde et ne sont pas
nécessairement bien écoutées. Entre autres, après
le dépôt de l'énoncé, il y a quelques semaines, les
agences ont reçu un formulaire constituant une demande de données
requises pour l'application de la réforme. C'est un formulaire qui nous
vient de l'office, SGF-02. Si la réforme n'est pas encore
appliquée, pourquoi nous demande-t-on ces informations? C'est
peut-être un petit peu prématuré d'aller au-devant comme
ça. Commençons par voir ce que vous aurez accepté comme
réforme et, ensuite, nous irons de l'avant pour vous donner les
données pour la mettre en application. Ce sont des petites choses. Ce
sont peut-être des détails, mais, à un moment donné,
ça nous donne l'impression de ne pas être vraiment
écoutés de façon régulière et constante.
On a toujours les mêmes revendications. Les mêmes
revendications reviennent depuis dix ans. Depuis cinq ans, il y a trois choses
principales qui ne sont pas négociables. On tient mordicus à ce
que ce pas-là soit fait pour les agences de garde. D'abord, le ratio.
Cela ne touche pas l'agence comme telle, mais ça touche la respon-
sable de famille de garde qui donne le service dans sa maison. Cela
serait vraiment important que ces responsables puissent garder cinq enfants. On
voudrait hausser le ratio. On ne demande pas que le ratio soit augmenté
de façon astronomique, mais ce cinquième enfant... On parle d'une
responsable qui garde cinq enfants d'âge préscolaire, incluant ses
propres enfants toujours. On ne parle pas des enfants d'âge scolaire
à ce moment-là. Si vous voulez ajouter des enfants d'âge
scolaire, il y a possibilité de le faire. Mais que ce soit cinq enfants
d'âge scolaire qui soient acceptés, c'est la viabilité, le
salaire de la responsable, en fin de compte. Sa marge de profit réside
dans ce cinquième enfant-là. Ce serait vraiment important de
pouvoir donner suite à cette revendication.
Ensuite, évidemment, notre prochaine revendication, ce sont des
subventions d'aide financière pour les enfants d'âge scolaire.
Là, on s'adresse plutôt à nos parents utilisateurs de
services. Les enfants d'âge scolaire reçoivent une demi-subvention
lorsque les parents ont droit à une aide financière, qu'ils
soient présents des pleines journées ou pas. Il y a eu une mesure
de réajustement pour les journées pédagogiques. Cependant,
on ne tient pas compte du fait que ces enfants, de juin à septembre,
sont en vacances et ne sont pas à l'école. Ils ont donc besoin de
pleines journées de garde. Cela serait important d'avoir un
réajustement de l'aide financière pour ces journées, selon
le besoin réel des enfants.
On parle de garde en milieu familial, qui est un mode souple qui voit
à combler des besoins pour des horaires non usuels de fin de semaine ou
de soirée, mais le parent qui travaille sur un quart de travail et a
besoin de subventions d'aide financière pour une période
excédant dix ou douze heures par jour ne peut pas se prévaloir de
cette subvention. Ce qu'on vous demande, c'est que l'enfant d'âge
scolaire reçoive la pleine subvention lorsque sa présence
réelle le demande et que cette subvention soit vraiment possible aussi
sur quatorze jours, dans une période de deux semaines, et non seulement
dix jours.
Ce ne sont pas tous les parents au Québec qui travaillent du
lundi au vendredi, de 8 heures à 17 heures. Il y a un gros pourcentage
de notre population qui travaille de 16 heures à minuit, qui travaille
les fins de semaine, qui a des quarts de travail. On ne voit pas cette
souplesse dans l'énoncé de politique et je pense que ce serait
important de l'ajouter.
Il y a une incohérence, lorsqu'on parie de garde en milieu
familial et de garde non régie, concernant le ratio. J'aimerais aussi
revenir un peu là-dessus. La gardienne qui n'est pas reconnue, qui n'a
pas d'exigences, qui n'a pas de contrôle, peut garder neuf enfants alors
que notre responsable de famille de garde ne peut en garder que quatre. Si on
parie de qualité du service, c'est bien clair qu'une personne qui garde
neuf enfants n'est peut-être pas à son meilleur. Mais la mesure
entre quatre et cinq, je pense vraiment qu'il n'y a pas de différence.
Cela encouragerait aussi nos responsables de famille de garde à avoir un
moins haut taux de roulement. Si c'est un travail qui est mieux
rémunéré, elles prendront la tâche pour plus
longtemps. Au lieu d'investir quelques années de leur vie dans la garde
en milieu familial, elles en feront une carrière. Je pense que les
mémoires subséquents de la journée pourront vous donner un
aperçu de cette dimension.
Notre troisième revendication, c'est une demande de financement
accru pour les agences de garde en milieu familial. Au moment où on se
parie, Ses agences de garde ont vraiment de la difficulté à
arriver et à fonctionner. Les petites agences n'ont pas un seuil viable
de financement. Dans les mesures proposées dans l'énoncé,
cela a l'air intéressant pour les plus petites agences. Je pense que
ça leur donne quand même une certaine possibilité, mais on
ne voit pas la même chose se traduire dans toutes les agences. Les
agences de 80, 90, 100 places et plus - il y a la moitié des agences au
Québec qui sont de cette grosseur-là - ne sont pas
nécessairement favorisées par les calculs que vous avancez.
L'encadrement administratif de l'agence est souvent une des raisons
primordiales de l'adhésion de nos responsables de famille de garde,
parce qu'elles peuvent avoir un appui et un soutien. Ce serait important de
reconnaître ce fait-là et de garder ce plein rôle à
l'agence. Il y a des propos dans l'énoncé, à plusieurs
endroits, qui ne sont pas terriblement clairs, mais qui nous laissent croire
qu'il y aurait peut-être des modifications au rôle fondamental de
l'agence de services de garde. Nous croyons que ce serait important de le
sauvegarder tel quel, qu'il y ait une réglementation qui soit mise de
l'avant pour être bien certain qu'on ait un statut de base
cohérent dans toutes les agences. Le projet de réglementation qui
avait été mis de l'avant il y a quelques années et qui
avait fait le tour de la province avait vraiment été
accepté. Il y avait eu consensus là-dessus; toutes les agences
étaient d'accord. C'est ce que l'on met en pratique dans la
majorité de nos agences, de fait, par nos régies internes. Cela
nous donnerait, par exemple, une validation si c'était une formule de
réglementation au lieu d'une régie interne ou d'une norme de
fonctionnement individuelle à chaque agence.
Lorsque l'on parie de l'encadrement de l'agence, on aimerait beaucoup
que l'Office des services de garde à l'enfance soit mieux informé
et mieux instrumenté pour être capable de donner du soutien aux
agences de services de garde. Je suis certaine que l'office a aussi des
difficultés de budget et doit faire attention à ses ressources.
Cependant, nous trouvons qu'il n'y a pas assez de ressources qui sont
affectées aux agences ou les ressources qui sont affectées en ce
moment ne donnent pas leur pleine mesure parce qu'elles ne sont pas
nécessairement
informées de ce qu'est fe vécu d'une agence de services de
garde. Ce serait important. Souvent, l'agent d'information ou de liaison vient
en région prendre de l'information, mais nous ne voyons pas que les
idées transparaissent ensuite. Alors, je me demande jusqu'à quel
point leur vécu et leur expérience ont été pris en
considération lorsque vous avez formulé cet
énoncé.
Ce qui nous préoccupe aussi, c'est le nombre de places dans les
agences. Vous parlez de rabaisser le nombre de places à 120. On se
demande pourquoi. On ne voit pas l'opportunité de réduire la
grosseur des agences. Ce que nous avons toujours maintenu, c'était que
les 150 places qui sont acceptées en ce moment, c'est tout à fait
viable pour une agence, le souci de la qualité étant quand
même respecté avec ce nombre-là et le fonctionnement se
faisant bien. C'est à peu près avec ce nombre de places au permis
qu'une agence réussit à avoir une viabilité
financière. Alors, on se pose la question, à savoir: Les 120
places, pourquoi est-ce revenu sur la table une deuxième fois?
Dans le financement des agences, vous ne tenez pas compte des frais de
logement et des frais de déplacement. Il nous apparaît important
de tenir compte de ces deux variables. Les agences ont toutes des bureaux, ont
toutes à payer un loyer et on devrait en tenir compte par une allocation
spécifique. Les frais de déplacement varient
énormément d'une agence à l'autre. Vous avez, en annexe de
notre document, de l'information là-dessus et il serait peut-être
souhaitable d'avoir un minimum de frais de déplacement et de frais de
location de bureau. Mais si une agence, selon la région où elle
est située, a à encourir des frais de plus, si son territoire est
grand, si le nombre de responsables de famille de garde qu'elle dessert est
très grand, si elle couvre plusieurs municipalités, souvent, elle
doit dépenser énormément de son budget en frais de
déplacement. Il pourrait y avoir un minimum et, ensuite, une allocation
supplémentaire, selon le vécu réel de l'agence. Cela
pourrait être quelque chose de rétroactif après les
états financiers. Ce ne serait pas nécessairement alloué
au début de l'année, mais en retour de saison, après une
année financière, qu'on puisse faire les ajustements
nécessaires.
On a parlé de réglementation tantôt. Alors, je pense
que je ne continuerai pas là-dessus.
Les frais de formation. Vous avez sûrement déjà
entendu plusieurs réactions concernant vos frais de formation. Le 1 % de
frais de formation, c'est très peu. Le 1 % de frais de formation est
inexistant pour les agences. Alors, s'il est peu pour les autres, imaginez ce
que nous, on en pense. Ce n'est vraiment pas acceptable pour nous qu'il y ait
des frais qui soient donnés à des services à but lucratif,
alors qu'on ne prend même pas en considération les services sans
but lucratif des agences. C'est absolument important que les responsables de
famille de garde et que le personnel des agences puissent avoir de la formation
et aussi des budgets réguliers pour être capables de faire du
perfectionnement de personnel pour qu'on puisse toujours tendre vers une
excellence de la qualité des services. (10 il 30)
Maintenant, la promotion des agences par l'Office des services de garde.
Lorsqu'on parle de garde non régie et de garde régie, toujours
dans les mêmes propos cela devient très difficile pour la
population en général de voir ce qui en est. Il y a peu de
distinction dans la population en général qui est faite entre les
deux modes, alors que les agences de services de garde existent
déjà depuis dix ans. Il serait important, je pense, de donner une
espèce de surplus pour faire un blitz de promotion des agences de
services de garde. Les agences le font tant bien que mal, mais ce n'est pas
nécessairement notre rôle de le faire. Je pense que c'est le
rôle de l'office d'y voir. Les responsables de famille de garde sont des
travailleuses autonomes. Il serait intéressant et important pour elles
d'avoir un outH sur les avantages de leur statut de travailleuse autonome pour
qu'elles le saisissent bien et pour qu'elles veuillent déclarer leurs
revenus et adhérer aux agences de services de garde.
Je pense que le mandat le plus Important d'un ministère et d'un
Secrétariat à la condition féminine, c'est effectivement
de voir à la condition des femmes, de valoriser ces individus qui
veulent faire du travail, qui veulent se prendre en charge. On essaie de leur
donner une certaine notion d'autonomie. Les responsables de famille de garde
visent à une Indépendance économique, mais il faudrait
leur donner les outils pour le faire - le cinquième enfant en est un -
et des outils de planification fiscale et d'information sur le statut et les
avantages de ce statut pourront aussi être très importants.
Concernant les responsables de famille de garde qui sont
bénéficiaires de bien-être social, on vous a demandé
une mesure, une espèce de mesure d'appoint, six mois, pour qu'elles
puissent continuer à garder leurs prestations de bien-être pour
faire le saut. Lorsqu'on investit dans une entreprise qui est celle de la garde
en milieu familial, cela prend un petit bout de temps avant que ça
devienne rentable. Cela donnerait peut-être la chance à la femme
qui veut s'en sortir d'être capable de voir à son
indépendance. C'est une formule qu'on a déjà
proposée I y a deux ans à une table ministérielle et vous
avez déjà des données là-dessus.
Si on revient au financement, on parle de 25 % des responsables de
famille de garde qui seraient calculés dans les subventions de
financement. Les 1100 $ seraient attribués à 25 % des
responsables de famille de garde. Cela ne fonctionne pas. Cette mesure ne
fonctionne vraiment pas selon la réalité des agences. Une bonne
partie de nos responsables de famille de garde ont des enfants à elles.
D'ailleurs, la grande majorité ont un ou deux enfants. Donc, elles
gardent souvent deux enfants parce qu'elles
doivent calculer leurs propres enfants dans le ratio. On croit que si on
parle vraiment de la réalité des agences, ce pourcentage, si on
veut s'en tenir à un calcul par pourcentage, devrait être
haussé à environ 40 %. Cela traduirait à peu près
ce qui se passe dans le vrai pays.
Les agences ont un mandat de donner ces services sur quart de travail,
les fins de semaine, sur horaire variable, aux travailleurs saisonniers, sur
répit, dans le cas d'hospitalisation, lorsqu'un parent a besoin de
quitter sa famille pour un petit bout de temps. Il faudrait qu'on mette
l'emphase sur la souplesse de ce service-là. Il n'est pas
nécessaire de développer d'autres modèles. Je pense que le
modèle des agences pourrait justement donner encore plus de valeur
à cette souplesse-là, mais il faudrait avoir les mesures
financières pour être capable de le développer le plus
possible.
Les subventions pour enfants handicapés. On demande la
parité avec les garderies. Il ne devrait pas y avoir deux poids, deux
mesures.
Le Président (M. Bélanger): Un instant. Il vous
reste deux minutes au maximum. Si vous voulez conclure, s'il vous
plaît.
Mme Potvin: Parfait! Les subventions pour enfants
handicapés devraient être données aux responsables de
famille de garde aussi.
Je termine avec les chèques d'aide financière pour les
parents. Nous avons trouvé une solution qui, je pense, est
intéressante. Chaque parent, bénéficiaire d'une aide
financière, reçoit un chèque d'aide financière.
L'agence le reçoit et fait les transactions nécessaires. Tous les
services de garde fonctionnent de la même façon au Québec.
Il y aurait une économie de milliers de dollars si le chèque
d'aide financière était remis au service de garde avec la liste
informatisée qui donne le détail des montants. Je crois, si mes
chiffres sont bons, que l'émission d'un chèque coûte 10 $
lorsqu'on parle des employés, du papier, de l'imprimerie, de la poste et
de l'acheminement. Le calcul serait facile à faire et ces
sommes-là pourraient être épargnées et
réinjectées dans les subventions de financement aux agences.
Le message est court, messieurs, dames. Si vous avez des questions, il
me fera plaisir d'y répondre, ainsi que mes deux collègues. Je
pense qu'on a quand même fait le tour de nos préoccupations
principales.
Le Président (M. Bélanger): Nous vous remercions,
Mme Potvin. Mme la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Merci, Mme Potvin, de votre exposé.
Je suis très heureuse de vous rencontrer ce matin. C'est la
première fois qu'on rencontre un regroupement d'agences en milieu
familial. On a parlé depuis le tout début de garderies à
but lucratif et sans but lucratif. Je suis très heureuse d'avoir votre
point de vue.
Au départ, je voudrais vous rassurer et vous dire qu'il n'est
nullement question, entre autres, dans l'énoncé de politique,
même si c'est peut-être la perception que vous en avez eue, de
remettre en cause le rôle des agences...
Mme Potvin: D'accord.
Mme Gagnon-Tremblay: ...en milieu familial. Vous connaissez bien
votre rôle et il n'a nullement été question de le remettre
en cause. Par contre, ce qui nous importe beaucoup aussi, c'est de conserver
l'autonomie à la gardienne à domicile. Si les responsables de
garde en milieu familial décident de vous confier certaines tâches
comme l'administration de leurs frais, les rapports d'impôt ou quoi que
ce soit, on n'a rien contre cela. Là où, par contre, cela peut
faire problème, c'est qu'on ne voudrait pas que les agences obligent les
gardiennes à le faire pour limiter leur recrutement. Qu'elles soient
libres de le faire et qu'elles soient prêtes à payer pour donner
ce service, à défrayer l'agence qui accepte de donner ce service,
nous sommes totalement d'accord avec cela. Mais là où nous sommes
en désaccord, c'est d'obliger ces gardiennes à le faire pour
pouvoir faire partie de cette agence. Alors, c'est très
différent.
Quant à l'autre service que l'agence pourrait offrir, c'est
vraiment sur une base expérimentale. C'est justement d'offrir une banque
de noms de gardiennes pour le milieu de garde non reconnue. Je pense que, dans
l'énoncé de politique, c'est à peu près seulement
à ce niveau que nous avons parlé de garde non reconnue. C'est
pour aider ces nombreuses familles parce que, même dans une agence ou
dans une garderie, on se rend compte qu'on ne peut pas toujours donner le
service. Par service, j'entends des services de garde de nuit, de fin de
semaine, parce que même des gardiennes ou des responsables de garde en
milieu familial ne sont pas toujours prêtes à accueillir des
enfants la fin de semaine ou la nuit. Il faut d'autres types de services et on
sait qu'il y a des parents qui n'ont pas d'autre choix que de faire garder
à domicile leurs propres enfants. Ils ne connaissent pas de gardienne
responsable et ils aimeraient pouvoir se référer à
quelqu'un qui pourrait leur conseiller des gardiennes à domicile. C'est
dans ce sens que c'est un autre service que votre agence pourrait offrir en
plus. Lorsqu'on vous l'offre, c'est vraiment sur une base expérimentale
et ce sera à vous de décider si, oui ou non, vous l'offrez. Si
vous ne l'offrez pas, peut-être que d'autres organismes pourront
l'offrir, mais c'est beaucoup plus dans ce sens et non pas de remettre en
question le rôle des agences en milieu familial.
Quant au formulaire que vous avez reçu - j'ai eu l'occasion de le
préciser lors de cette commission parlementaire, mais je voudrais vous
le préciser, à vous - il n'est nullement question pour l'office
de dire - la commission
parlementaire n'est pas terminée - que tout est
déjà prêt. Le formulaire qui a été
envoyé, c'est pour avoir le plus rapidement possible des
précisions qui nous permettraient, d'ici à ce que tout notre
système informatique soit complété, de faire parvenir aux
agences, par exemple aux garderies, des sommes, des mesures transitoires, d'ici
à ce que notre politique soit complètement arrêtée,
d'ici au prochain budget.
Si, par contre, nous ne recevons pas ces informations et qu'on s'oppose
à nous les remettre, ce sera peut-être beaucoup plus difficile de
réagir rapidement et on voudrait bien que les montants qui ont
été votés cette année, qui seront votés dans
le cadre du prochain budget, soient dépensés dans la même
année. On ne voudrait pas avoir à périmer des
crédits à la fin de l'année. C'est pourquoi nous prenons
les devants et que l'office a décidé d'envoyer ce formulaire.
Peut-être que la lettre ne donnait pas suffisamment d'explications, mais
c'est vraiment l'objectif visé par l'Office des services de garde
à l'enfance et non pas de croire que tout est déjà
arrêté quant à la politique. On est ici pour vous entendre,
vous écouter et réagir en conséquence.
C'est la même chose pour la réglementation. Lorsque vous
parlez de réglementation, il y a longtemps que vous en attendez une; on
a eu l'occasion d'en discuter longuement. On a même formé un
comité pour en discuter. Finalement, cette réglementation va
suivre, toujours en continuant à vous consulter; on n'a pas l'intention
de passer outre à vos recommandations quant à une
réglementation des agences en milieu familial.
Je trouve que le temps est très court pour parler de l'ensemble
du milieu familial. Avant de poser mes questions, je veux dire que ce qui est
important pour une agence, c'est de garder le contact avec la famille. Par
exemple, si on a dit que nous croyions qu'on devrait limiter les permis des
agences à 120 places, c'est tout simplement pour qu'on puisse avoir ce
contact régulier avec les agences, c'est-à-dire avec les
responsables de famille de garde. C'est important de conserver ce contact pour
que cela demeure toujours quelque chose de personnel. Donc, il y a ça
qui avait été prévu.
Il y a aussi la question de la formation, vous en avez parié.
C'est très différent d'une garderie. Tout à l'heure, vous
me disiez que des responsables de famille de garde peuvent garder un enfant,
parfois deux, mais de façon spora-dique aussi. On ne peut pas exiger la
même formation de ces responsables de famille de garde que du personnel
de garderie, là où on a toujours le même nombre d'enfants.
Je pourrais dire la même chose pour ce qui concerne le financement des
enfants handicapés. Les enfants handicapés, nous avons
décidé de les subventionner, de même que les poupons. Si on
devait financer de l'équipement qui se rattache à l'enfant,
ça pourrait être quelque chose qui pourrait être
envisagé. C'est très difficile de penser à de
l'équipement qui est rattaché à la maison puisque cet
enfant peut être gardé, encore là, de façon
sporadique, ce n'est pas comme une garderie. Du jour au lendemain, la
responsable de famille de garde peut dire: Moi, je ne garde plus. Alors, ce
n'est vraiment pas comparable. Il faut vraiment fonctionner d'une façon
très différente.
Je vais poser mes questions parce que je voudrais vous entendre. Vous
mentionnez dans votre exposé que vous ne voulez pas qu'on limite
à 120 le nombre de places au permis, mais davantage à 150. Selon
vous, pour quelles raisons devrait-on hausser la limite à 150,
étant donné que je vous ai dit qu'on veut vraiment conserver la
personnalité, on veut vraiment que vous soyez très près
des familles de garde? (10 il 45)
Mme Potvin: Je vais vous répondre, Mme la ministre, avec
ma déformation de directrice d'agence de services de garde de 200
places. Je pense que je suis en mesure d'y répondre de cette
façon. J'ai été responsable d'une agence de 60 places, de
100 places et de 200 places, alors j'ai un peu fait le tour du jardin.
Jusqu'à 200 places, je peux honnêtement vous assurer qu'on est en
mesure de connaître chaque responsable de famille de garde, chaque milieu
physique et chaque enfant. J'ai en mémoire qui est gardé chez
quel responsable de famille de garde, quel âge a cet enfant, ses
particularités, le type d'enfant et ce qu'il a l'air. Plus de 200
places, je pense que j'en perdrais des bouts.
Alors, ce qu'on s'est dit: Ne le mettons pas au maximum possible
tolerable; les 150 places, actuellement, c'est tout à fait
réaliste. C'est pour ça qu'on vous suggère de maintenir le
nombre à 150. Vraiment, à 150 places, la gestion des
données est possible dans la tête d'une personne pour faire la
coordination des interventions du personnel. Ce n'est évidemment pas
seulement une directrice qui va avoir à intervenir dans les familles
s'il y a un nombre de familles pour 150 enfants, mais elle est capable de
coordonner les interventions directes des éducatrices et de son
personnel connaissant personnellement tous les dossiers.
Mme Gagnon-Trembiay: Quant à vous, est-ce qu'on devrait
délimiter le territoire?
Mme Potvin: Je pense que ça serait peut-être plus
simple s'il y avait une délimitation du territoire dans le sens de
pouvoir faire une adéquation entre territoire et financement. Pour
justifier des mesures de plus ou des allocations supplémentaires en
raison du vécu et de la couleur locale de chaque agence, le territoire
est, en fait, la principale considération. C'est le facteur
prépondérant. Si l'agence est située dans une
municipalité rurale ou dans une région éloignée et
que le bassin de population n'est pas concentré, ça change le
portrait complet de son
fonctionnement et de ses besoins financiers pour assurer un service.
Mme Gagnon-Tremblay: Je reviens au ratio. Vous demandez que le
ratio soit modifié pour permettre d'accueillir cinq enfants par
responsable de famille de garde incluant ses propres enfants. Vous avez
sûrement entendu, la semaine dernière, plusieurs groupes qui sont
venus nous dire d'abaisser le ratio au nom de la qualité. Par contre, je
remarque que dans les mémoires des agences, et même il y a eu
d'autres intervenants qui sont venus nous dire, la semaine dernière, que
pour permettre un meilleur salaire à la responsable de famille de garde
en milieu familial il faudrait hausser le ratio. Alors, vous voyez que dans un
cas, au nom de la qualité, on veut l'abaisser et, dans un autre cas, au
nom d'un revenu supérieur, on voudrait l'augmenter. Je me sens un petit
peu mal à l'aise d'avoir à décider étant
donné que je me demande... Il faut aussi regarder le bien de l'enfant.
Alors, pourquoi demandez-vous de hausser le ratio? Est-ce qu'il y a d'autres
motifs que celui d'accorder un meilleur revenu à la responsable de
famille de garde?
Mme Potvin: Je me servirais, Mme la ministre, des arguments dont
vous vous êtes servie tantôt en disant justement que les agences et
les garderies n'ont pas le même vécu, la même façon
de fonctionner. D'abord, dans tout le Canada, il y a toujours la
possibilité d'au moins cinq enfants lorsqu'on parle de garde en milieu
familial. C'est ce qui est accepté dans toutes les provinces. Dans
certaines provinces, c'est beaucoup plus. Au minimum, au bas mot, on parle de
cinq enfants partout. On ne parle même pas de cinq enfants incluant ceux
de la responsable. En plus, si on regarde vraiment le vécu de chaque
famille, c'est bien sûr que c'est selon les capacités de chaque
responsable de famille de garde. Il y a une foule de facteurs qui vont entrer
en ligne de compte: son milieu physique, entre autres - est-ce que c'est assez
grand pour accueillir ce nombre d'enfants-là? - et il y a aussi
l'âge des enfants. Si madame a un éventail d'enfants d'un groupe
d'âge très varié, selon ses capacités et la
dynamique de son groupe, elle sera peut-être bien en mesure d'en accepter
cinq alors que, dans d'autres milieux, le nombre actuel de quatre serait tout
à fait conforme. On voudrait avoir, pour nos responsables de famille de
garde, cette marge-là, cette possibilité de hausser, mais selon
la réalité de la famille. C'est bien sûr que les agences,
même s'il n'y n'a pas de réglementation, se font chacune un souci
de faire du jumelage d'une façon Intelligente. S'il y a un petit
bébé de quatre mois, c'est bien sûr qu'on ne mettra pas
nécessairement trois autres petits bébés de quatre mois
dans cette famille-là. On va essayer de voir aux besoins de tout le
monde. Il y a des enfants d'âge préscolaire, cinq ans, qui sont
à la maternelle. Ils sont partis pendant plusieurs heures dans la
journée. Le cinquième enfant, finalement, ça peut vouloir
dire quatre têtes dans la maison, la majorité du temps, mais cinq
têtes à l'heure des repas ou aux heures de pointe.
MmeTougas (Jocelyne): Mme la ministre. Mme Gagnon-Tremblay:
Oui.
Mme Tougas: Jocelyne Tougas. Il y a un autre point, quand on
parte de qualité par rapport au ratio, qui n'est pas négligeable
non plus. Des études ont démontré que la qualité
est liée directement à la formation du personnel. Il y a un autre
critère qui est le roulement de personnel, la stabilité du
personnel. Alors, on ne peut pas le regarder en disant que ce n'est qu'un
intérêt économique. L'intérêt
économique fait que si la responsable de famille de garde a davantage
d'avantages, justement, à être à l'extérieur du
réseau, compte tenu de son revenu, elle risque de partir plus
rapidement. Notre taux de roulement augmente énormément. C'est un
facteur qui est important.
On sait que les responsables de famille de garde, lorsqu'elles se
joignent à une agence, souvent de toute manière, l'agence ne leur
réservera pas cinq enfants avant de les connaître. C'est un
processus et, dans ce processus de formation et de possibilité
d'accueillir cinq enfants, il y a une prise de conscience de la part de la
responsable de famille de garde. C'est qu'elle n'entrevoit plus son
métier comme en étant un d'aide, d'appoint ou de
complément, mais vraiment comme une carrière dans un temps
donné. Il ne faut pas regarder le cinquième enfant juste sur le
plan économique. Il faut le regarder par rapport à d'autres
facteurs aussi.
Mme Gagnon-Tremblay: Si on accordait un cinquième enfant,
est-ce que ça pourrait inclure les enfants de la gardienne et les
enfants du primaire?
Mme Potvin: Non, il faudrait qu'ils soient d'âge
préscolaire. Il faudrait vraiment qu'on puisse respecter cette partie
parce que, si on parle des enfants du primaire, on revient, finalement,
à la même chose. Les enfants d'âge scolaire ne sont pas
payants économiquement et ils ne sont pas présents longtemps, non
plus. Cela n'affecte pas beaucoup la dynamique du groupe.
Mme Gagnon-Tremblay: Par contre, comment doit-on
interpréter le fait qu'on demande de ne pas tenir compte des enfants du
primaire dans le ratio et que, d'autre part, on demande de les subventionner
autant que...
Mme Potvin: La régie Interne...
Mme Gagnon-Tremblay: Pas seulement l'été.
Mme Potvin: La régie interne de chaque agence,
normalement, va limiter le nombre d'enfants de tel âge. Par exemple, dans
certaines agences, on ne peut pas placer plus d'un bébé de
zéro à dix-huit mois par famille de garde. De la même
façon, il peut y avoir une régie interne qui dit: Si madame a
déjà ses cinq enfants d'âge préscolaire, elle ne
pourra pas avoir d'enfant d'âge scolaire. Dans votre
réglementation, vous pourriez, à ce moment, ajouter une norme,
que la loi de base soit cinq, mais qu'ensuite il y ait une clause dans la
réglementation qui parle des enfants d'âge scolaire.
Mme Tougas: Vous savez, Mme la ministre, concernant les enfants
d'âge scolaire, les agences, depuis dix ans, ont développé
leur propre réglementation et leurs normes de qualité sont
même plus exigeantes que le projet de réglementation qui est sur
la table. Si le ratio est de cinq, mais que l'enfant d'âge scolaire
arrive à 16 heures - c'est de 16 heures à 16 il 15 - il y a une
différence. Si la responsable de famille de garde reçoit cet
enfant une fin de semaine, là, c'est autre chose. C'est un temps plein
si l'enfant d'âge scolaire est accueilli au même titre que l'enfant
préscolaire, mais à temps plein. C'est là la
mobilité pour l'agence à l'intérieur d'une
réglementation et de ses normes à elle.
Mme Gagnon-Tremblay: En somme, vous êtes d'accord qu'on en
tienne compte et ça pourrait être à l'intérieur de
la réglementation.
Mme Tougas: Oui.
Mme Gagnon-Tremblay: D'accord. Je vois que vous demandez, entre
autres, qu'on accorde pleine compensation pour le milieu scolaire. Quelqu'un me
disait justement que la pleine compensation a déjà existé.
Quand cela a-t-il été aboli?
Mme Potvin: Je suis arrivée en 1983 dans le milieu des
services de garde et, à ce moment-là, il y avait pleine aide
financière pour les enfants d'âge scolaire. Mme Fortin pourrait
peut-être corroborer.
Mme Fortin (Aline): Environ en 1984.
Mme Gagnon-Tremblay: En 1984, on aurait coupé le...
Mme Fortin (Aline): C'est ça. Alors, l'aide
financière a été coupée de moitié pour les
enfants d'âge scolaire en 1984 environ. Maintenant, on a vécu un
temps même pas avec les congés pédagogiques et il y a eu
cette mesure qui est arrivée après, vers 1985,1986.
Mme Gagnon-Tremblay: Je voudrais parler de la subvention aux
poupons. C'est la première fois qu'on va subventionner les poupons de
même que les enfants handicapés. Je ne reviendrai pas sur la
question de l'équipement; tout à l'heure, je vous ai donné
des points importants qui font que ça peut être difficile si c'est
rattaché à la maison. Le fait qu'on donne des subventions aux
poupons aussi, il ne faudrait pas se retrouver avec une responsable de famille
de garde en milieu familial qui n'a uniquement que des poupons.
Avez-vous une idée, par exemple, à combien on pourrait
limiter la garde de poupons par responsable de famille de garde?
Mme Potvin: Nous ne nous sommes pas penchées
là-dessus, en fait. On croyait vraiment que ce serait comme dans un
deuxième temps de voir à ce genre d'ajustement. Cependant, cela
dépend aussi de la capacité de la personne. Je connais une
responsable de famille de garde d'une agence dans ma région qui garde
quatre poupons. Ces bébés ont tous de six à dix mois. Elle
fonctionne de façon merveilleuse, mais c'est vraiment une
maternité en milieu familial qu'elle a, avec l'équipement dont
elle a besoin. Vraiment, il faudrait qu'on le regarde de plus près.
Cependant, la subvention pour poupons serait fort appréciée parce
qu'à ce moment-là on peut exiger que le matériel en place
soit selon les normes et qu'il y ait vraiment la Cadillac des services pour ce
petit bébé-là. Ce serait vraiment très
Intéressant.
Mme Gagnon-Tremblay: Et on nous demandait aussi, concernant cette
subvention aux poupons, qu'elle soit remise à l'agence plutôt
qu'à la responsable de famille de garde. J'ai été un peu
étonnée, parce que, finalement, si on subventionne la place
poupon, c'est tout simplement pour aider cette famille de garde parce qu'on
sait que cela coûte beaucoup plus cher une place pour poupon ou pour
enfant handicapé. Pourquoi voulez-vous que cette somme qui, normalement,
devrait être remise à la responsable soit payée
plutôt à l'agence en milieu familial?
Mme Potvin: Vous verrez d'ailleurs que tes responsables des
families de garde des régions 03, 04 et 05 abondent dans le même
sens que nous à cet effet, à savoir que ce soit l'agence qui voie
à la gestion de cette somme. C'est, en fait, pour être capable de
contrôler justement la qualité des services offerts à ce
poupon. Du fait que la responsable de famille de garde soit travailleuse
autonome, on a des exigences et des critères, mais c'est plus
délicat et plus difficile de toujours critiquer et de toujours avoir
à faire les vérifications nécessaires sur la
qualité du service et sur l'équipement qui sert aux poupons,
alors que si c'est l'agence qui donne cette subvention de plus à la
responsable de famille de garde elle a peut-être un peu plus de pouvoirs.
Elle peut être capable de dire: Écoute, tu reçois ce
montant-là de plus, mais il faut
absolument que tu te soumettes aux exigences à ce
moment-là.
Mme Gagnon-Tremblay: En somme, ce que vous demandez, ce n'est pas
que l'argent aille à l'agence, mais qu'H soit tout simplement
contrôlé par l'agence.
Mme Potvin: Oui, c'est exactement cela. C'est simplement la
gestion des montants.
Mme Gagnon-Tremblay: D'accord. Ce n'est pas comme ça que
je l'avais interprété.
Mme Potvin: Non, c'était de la gestion.
Mme Gagnon-Tremblay: C'est un peu la même chose pour le
chèque. Vous parlez aussi du chèque unique. C'est sûr que,
sur le plan administratif, ce serait beaucoup plus facile d'émettre un
seul chèque, sauf que je me pose beaucoup de questions parce que, depuis
le début de la commission parlementaire, on a très peu
parlé d'exonération financière aux parents. Cela
représente 60 000 000 $ annuellement, surtout pour le prochain budget,
et on en a très peu entendu parler. C'est comme si on ne donnait jamais
rien aux parents. Cela m'inquiète beaucoup d'émettre un seul
chèque. Je me dis: II n'y a aucune visibilité dans ce sens. Je me
demande si les parents sont vraiment au fait qu'ils reçoivent de l'aide
financière pour les services de garde. Je me dis: Est-ce que la
même chose se produirait au niveau des agences puisque, depuis le
début de la commission parlementaire, on ne parle pas de l'aide
financière aux parents, ou très peu?
Mme Potvin: Mme la ministre, toutes les agences pourront vous
dire que, la semaine où l'agence reçoit les chèques d'aide
financière, elle reçoit aussi des appels de parents qui disent:
Est-ce que mon chèque a été versé dans mon compte?
Est-ce que j'ai reçu mon plein paiement? Comment cela se fait-il qu'il
me manque une journée de garde? C'est quoi, cet ajustement-là?
Les parents sont fort bien au courant de cette subvention financière,
mais, de fait, ils ne reçoivent pas le chèque en main.
Normalement, c'est un dépôt direct qui est fait dans le compte des
parents. Enfin, c'est ce qui se fart dans plusieurs services de garde. Cela
demande du travail administratif du personnel de l'agence de tamponner tous ces
chèques pour faire les dépôts, mais le parent ne voit pas
le chèque, de toute façon. Alors, que ce soit sur un papier
où il y a son nom sur ordinateur ou sous forme d'un beau chèque
bleu du gouvernement, il ne le voit pas plus et je ne pense pas que cela lui
préciserait que c'est le gouvernement, dans sa
générosité, qui lui donne ces sommes-là.
Mme Tougas: Mme la ministre, j'ai fait un calcul rapide parce que
je n'ai pas pu m'en empêcher. J'ai demandé aux agences - il y a
environ 46 agences qui nous ont répondu dans un délai de deux ou
trois jours - le nombre de chèques émis depuis un an. Il y a eu
quelque 52 923 chèques. Alors, en évaluant les 10 $ et on a
entendu dire que c'était beaucoup plus que ça, on est
très... Vous voyez tout de suite que c'est un montant de 500 000 $.
C'est beaucoup de sous pour quelque chose qui ne changerait rien, finalement.
(11 heures)
Mme Gagnon-Tremblay: Je regrette, on me dit que mon temps est
écoulé. J'aurais eu tellement d'autres questions à vous
poser, mais on aura probablement l'occasion de se rencontrer. Merci.
Le Président (M. Bélanger): Merci, Mme la ministre.
Mme la députée de Maisonneuve.
Mme Harel: Merci, M. le Président. J'attendais ce moment
avec impatience, parce que vous nous dites dans votre mémoire être
les parents pauvres des services de garde et je crois que l'occasion est venue
d'échanger avec vous sur ce qui devrait être modifié pour
que cette perception que vous avez, ou cette réalité cesse.
Alors, mesdames Tougas, Potvin et Fortin... Je pense que c'est vous, Mme
Fortin, qui avez trouvé l'illustration du ratio cinq avec les
débarbouillet-tes.
Mme Fortin (Aline): Oui, c'est bien moi! Mme Harel:
C'était vous? Mme Fortin (Aline): Oui.
Mme Harel: Vous êtes du Lac-Saint-Jean. Vous faites bien
d'insister sur le fait que la visibilité... Mme la ministre vient de
vous parler de visibilité avec 26 fois par année de
chèques aux parents. Finalement, c'est là une recherche assez
superficielle de visibilité, puisque les parents ne les touchent pas,
comme vous nous le signalez et, d'autre part, évidemment, si c'est pour
coûter 500 000 $ pour avoir la visibilité politique de rappeler
aux parents que ça vient du gouvernement, je pense bien qu'il y a une
autre rationalité d'économie qui devrait être
recherchée, comme vous nous le signalez.
Dans votre mémoire, vous relevez des faits qui devraient pourtant
faire comprendre l'incohérence de la situation actuelle. Dans la
discussion que vous aviez avec Mme la ministre, j'avais l'Impression d'assister
à une sorte de dialogue de sourds au sens où c'est comme si
l'incohérence allait se perpétuer, sans que des modifications ne
soient apportées, même s'H y avait maintenant un
énoncé.
Je donne comme exemple ce que vous nous donnez en mentionnant qu'une
personne peut garder des enfants chez elle, sans détenir d'autorisation
particulière ou sans être reconnue
par une agence. Cependant, cette personne ne peut garder plus de neuf
enfants. Effectivement, contrairement à ce qui se passe
présentement avec les personnes âgées ou même avec
des chambreurs, personne ne peut ouvrir une maison de chambres sans avoir un
permis. Évidemment, personnne ne peut loger des personnes en perte
d'autonomie, que ce soit par handicap ou à cause de l'âge, sans
avoir également un permis. Ce n'est pas possible pour d'autres
catégories, sauf pour les enfants, parce que, si je comprends bien, pour
des enfants, c'est toujours possible d'offrir un service de garde sans permis.
Donc, il n'y a pas là d'exigence de l'État et elles sont des
travailleuses autonomes, n'est-ce pas?
Il y a un petit dépliant qui nous a été
distribué hier qui nous signale quelles sont les travailleuses
autonomes. Vous posez la question dans votre mémoire et je voudrais y
revenir parce que cela semble être une question de fond. Il n'y a pas de
pagination, mais ça s'intitule: Travailleuse autonome". Vous nous dites:
Le statut de travailleuse autonome en est un qui confond nos regroupements.
Elles tiennent à gérer leurs propres entreprises, mais
apprécient les avantages d'une tarification commune et des normes de
fonctionnement qui délimitent leurs responsabilités et celles des
parents.
C'est dans ce sens-là qu'il y avait un dialogue de sourds. C'est
comme si Mme la ministre disait: II faut que ce soient des travailleuses
autonomes totalement autonomes. Vous, vous dites: Au contraire, si elles
viennent - un peu plus avant dans votre mémoire - au regroupement, c'est
pour les services qu'on leur rend. C'est ça qu'elles cherchent.
Alors, j'aimerais que vous nous expliquiez exactement pourquoi une
personne s'inscrit dans un regroupement. Un peu plus tôt, vous nous avez
dit - je pense aux deux pages précédentes - que la
déclaration au fisc des revenus tirés de la garde demeure la
cause première pour expliquer qu'il n'y ait pas plus de femmes qui
veulent être accréditées par une agence. Donc, je me dis:
Si je suis responsable et si je prétends être favorable à
ce type de services et si j'étais ministre déléguée
à la Condition féminine qui a comme responsabilité la
promotion et la reconnaissance du rôle social que les femmes jouent dans
la garde, je m'attaquerais à ce problème-là, parce que
vous me dites que c'est la cause première pour expliquer qu'il n'y ait
pas plus de femmes qui veulent être accréditées. J'aimerais
vous entendre là-dessus.
Mme Potvin: La garde en milieu familial est effectivement un
tremplin pour que les femmes se prennent en charge dans notre
société. Mais elles ont des bâtons dans les roues. Il faut
regarder dans la vraie vie. Si madame, qui a un conjoint, déclare ses
revenus, celui-ci n'est pas très heureux, parce qu'il perd des
déductions. Il y a toujours cette espèce de négociation
dans le couple à un moment donné. Il reste qu'il y a une
idéologie au Québec qui veut que ia garde d'enfants ce soit une
affaire de femmes, une affaire de maison et que cela ne devrait pas être
rémunéré. On est nées pour cela, nous, les femmes,
faire de la garde d'enfants. On est très bonnes et on adore cela. Mais N
reste que cela n'a pas nécessairement à être gratuit,
surtout lorsque c'est pour les enfants des autres.
Justement, cette responsable ou cette personne est dans sa maison; elle
a des enfants et voudrait bien rester à la maison pour élever ses
petits. C'est ce qu'on voit dans les enquêtes qu'on a faites sur le
statut des responsables de famille de garde et de la garde d'enfants au
Québec. Elles voudraient avoir un revenu mais, souvent, elles vont avoir
beaucoup de difficultés à pouvoir déclarer ce revenu parce
que le conjoint n'est pas d'accord et parce que ce n'est pas quelque chose qui
est valorisé socialement. Qu'est-ce que tu fais dans la vie, toi? Tu es
ingénieur, tu es comptable? As-tu la garde des enfants? Ce n'est pas un
métier, ce n'est pas quelque chose de noble et ce n'est pas une
carrière. On a encore beaucoup de chemin à faire dans ce
domaine.
Mme Harel: Donc, le problème de la fiscalité est
celui, entre autres, de la femme mariée pour qui le conjoint demande la
déduction qui est devenue le crédit d'impôt pour les
personnes à charge.
Mme Potvin: Oui.
Mme Harel: Parce qu'elle est, au sens de la loi, une personne
à charge. Si la maison appartient au mari, est-ce qu'elle peut en
déduire une partie comme usage pour la garde?
Mme Potvin: Oui, à ce moment-là, techniquement,
elle peut louer une portion de la maison pour la garde au domicile.
Mme Tougas: Je pourrais peut-être apporter une
précision. Actuellement, s'H n'y avait pas le problème fiscal de
la femme à charge qui, d'ailleurs, avait été une demande
adressée par la plupart des groupes de femmes - on avait appuyé
cette position - s'H n'y avait pas ce problème, lorsque la responsable
de famille de garde arrive à l'agence, elle se rend bien compte qu'elle
n'aura pas à débourser un surplus à l'impôt compte
tenu des nombreuses déductions. On a demandé au ministère
du Revenu d'abord, évidemment, cette question de fiscalité en
tant qu'individu comme tous les autres groupes de femmes, mais aussi la
possibilité d'avoir un outil créé spécifiquement
pour les responsables de famille de garde qui étaient
accréditées par une agence pour faciliter la production de cette
fameuse déclaration d'impôt pour travailleuse autonome.
En ce sens, si on part du principe qu'effectivement ce sont des femmes
qui font ce métier,
souvent depuis longtemps, elles ont découvert l'agence et elles
décident de s'y intégrer. Elles ont un cheminement à faire
en ce qui concerne leur autonomie. Et, ces outils, il me semble qu'il est de
notre devoir, à nous, d'essayer de les construire en collaboration avec
le gouvernement. C'est un peu à ce chapitre-là... C'est un
handicap pour recruter des familles de garde, c'est bien évident, et
vous l'avez lu dans des mémoires. J'ai fait le tour des agences et c'est
clair que, si les responsables de famille de garde devaient déclarer
leurs revenus ou si elles devaient se soumettre à certaines normes de ce
type, elles quitteraient tout simplement le réseau reconnu. C'est
clair.
Mme Harel: Je vous remercie. Dans le mémoire, vous
insistez sur le fait. Vous dites, et je cite: N'oublions pas qu'une des
principales raisons d'adhésion à une agence est le besoin de
formation qu'éprouve la gardienne. J'aimerais vous entendre
là-dessus parce que, au fond, ce besoin de formation ne vous est pas
reconnu. Vous dites que c'est la principale raison et qu'il n'y aura aucune
subvention.
Mme Potvin: La responsable de famille de garde a une
expérience personnelle. Normalement, elle a des enfants, elle a
élevé des enfants, mais ce n'est pas assez. À un moment
donné, il faut être capable de savoir qu'à tel âge un
enfant, dans son développement normal, devrait avoir atteint une
certaine capacité ou une certaine indépendance. Ce n'est pas
nécessaire d'avoir un bac pour avoir des données de base pour
faire de la garde dans son propre domicile, mais il reste que c'est important,
pour être capable de cheminer avec les enfants et de les stimuler. On ne
parle pas de "parking" d'enfants. On parle d'un milieu de vie organisé
qui donne de la stimulation et du développement à nos citoyens de
demain.
Donc, c'est important d'être capable, à un moment
donné, de dire: Bon, il a atteint un âge où il est en
mesure de faire ça. Donc, on va travailler cette activité. Je
parle de motricité, de développement intellectuel, de toutes les
capacités émotives, tout le bagage qu'un enfant doit avoir comme
apprentissage. On voit beaucoup de prévention, un rôle de soutien
à la famille de nos responsables de famille de garde. Papa et maman
voient leurs enfants quelques heures par jour. C'est la famille de garde, en
fait, qui est là à temps plein et qui est capable de
déceler à un moment donné s'il y a des difficultés
de fonctionnement, s'il y a des carences, s'il y a des problèmes. Il lui
faut un bagage d'informations de base pour être capable de
détecter ces choses-là et pour préparer l'enfant au monde
scolaire et à son monde à venir.
Mme Harel: Vous dites dans votre mémoire, et je pense que
c'est très bien expliqué pour que quelqu'un comme moi, qui n'est
pas vraiment familière, puisse comprendre: La responsable de famille de
garde veut se sentir soutenue par de la formation pour l'instrumenter dans son
quotidien. Et là, vous l'illustrez: alimentation, premiers soins,
psychologie, techniques d'animation, nouvelles approches éducatives,
dépistage, gestion financière. Et vous ajoutez: ...par des
visites régulières qui brisent son Isolement, confirment ses
compétences, la valorisent dans son choix de métier et l'aident
à solutionner les problèmes de tous les jours. Comment
expliquez-vous ce choix qui a été fait de prévoir des
subventions de formation pour l'ensemble des services en garderie, qu'elle soit
privée ou régie par les parents, et que l'énoncé
prévoie qu'il n'est pas nécessaire d'avoir de la formation pour
les familles en service de garde? Comment voyez-vous cela?
Mme Potvin: C'est sûrement sous-jacent à la
façon de voir la responsable de famille de garde. La garde en milieu
familial n'est pas encore prise au même titre et au même niveau que
la garde plus sérieuse en garderie ou les autres services de garde. On a
un pas à faire à un moment donné pour rehausser la couleur
de la garde en milieu familial. Nos fameuses débar-bouillettes, en fait,
on en est rendu à vouloir pleurer dedans quelquefois parce qu'on se dit:
Mon Dou! Après dix ans, il faudrait que ce soit bien connu. Le service
de garde est méconnu et peu valorisé. Pour la responsable de
famille de garde, dans sa maison, il n'est pas facile de faire comprendre
à l'extérieur tout l'apport et tout l'investissement qu'elle met
dans la garde de ces enfants-là. Elle a un rôle capital pour notre
société. On parle de politique familiale, on parle d'une
société où la place de l'enfant est importante, mais il
n'y a pas de volonté sociale, en tout cas, qui transparaît
à l'ensemble du Québec encore. Il faudrait qu'on ait des mesures
pour cela.
Mme Harel: C'est l'une de vos revendications. Vous dites: "Nous
demandons l'équivalent du montant offert aux garderies privées et
à but lucratif pour la formation et le perfectionnement du personnel des
agences, soit 1 % de la masse salariale totale."
Il y a un autre élément du mémoire qui m'a
surprise. Vous nous dites: "Longue attente avant de recevoir un permis
d'opération de l'Office des services de garde." Cela m'a
étonnée si tant est que ce soit un mode promu et reconnu. Comment
s'expliquent les attentes pour recevoir les permis? Combien cela peut-il
prendre de temps? Qu'est-ce qu'une longue attente? Quelle est la durée
de l'attente?
Mme Potvin: De 18 à 24 mois, environ. Au moment où
on inscrit une demande et qu'il y a une volonté du milieu pour partir
une agence de garde, qu'un groupe déjà en place commence à
brasser l'idée d'avoir une agence de garde, on
peut parler de 18 à 24 mois avant que cette agence ne soit
opérationnelle et ait un permis.
Mme Harel: À votre connaissance, y a-t-il des familles qui
abdiquent ou renoncent, faute de permis au bon moment, compte tenu des longs
délais?
Mme Potvin: Dans la région où je me trouve, dans
l'Outaouais, la ville d'Aylmer, qui est tout à côté de
celle de Hull, a déjà eu cinq groupes qui ont fait des demandes
de permis d'agence, et tous les groupes sont tombés à l'eau,
parce qu'à un moment donné les gens s'essoufflent, se
démotivent et se disent: De toute façon, on ne sera pas encore au
plan de développement pour l'année prochaine, II n'y a pas eu
assez de places développées en agence de garde dans les
dernières années. Il semble qu'un certain correctif doive
être apporté ici. Il faudrait vraiment que les dossiers puissent
être acheminés plus rapidement aussi.
Mme Harel: A votre connaissance, lorsqu'elles abandonnent la
demande de permis qui est faite, à ce moment-là, elles peuvent
simplement garder à la maison et, là, un dépliant leur dit
qu'elles sont travailleuses autonomes et qu'elles peuvent même en garder
neuf. À votre connaissance, est-ce que cela s'est transformé en
agence à la maison?
Mme Potvin: Beaucoup font de la garde à domicile non
reconnue à cause du fait qu'elles ne peuvent pas adhérer à
une agence. Ce n'est pas seulement de partir des agences nouvelles, il y a
aussi tout le problème de l'agence existante qui voudrait bien
reconnaître d'autres responsables de famille de garde, mais elle est
à pleine capacité, son permis est de x nombre de places d'enfants
et les places sont comblées. Il y a tellement de besoins de garde. Nos
listes d'attente sont absolument incroyables. Toutes les semaines...
Mme Harel: Les listes d'attente sont considérables?
Mme Potvin: Les attentes sont très longues.
Dans une agence de la grosseur de la mienne dans la ville de Hull, il y
a 500 demandes de garde qu'on a dû refuser...
Mme Harel: 500?
Mme Potvin: ...l'année dernière.
Mme Harel: 500?
Mme Potvin: 500. Cela n'était pas parce que
c'étaient des besoins auxquels on ne pouvait pas répondre. On
avait les responsables de famille de garde qui auraient été en
mesure de le faire, mais elles ne peuvent garder que quatre enfants, d'abord,
incluant les leurs, et, en plus, on ne peut pas en garder plus que le nombre de
places au permis. Alors, à un moment donné, on doit dire: Excusez
madame, attendez; quand l'enfant aura dix ans, on aura de la place pour lui.
Cela va vraiment être le temps de le garder à ce moment-là.
On a beaucoup de personnes qui s'inscrivent alors que le bébé
n'est pas conçu. La semaine passée, une maman m'a appelée
en plein désarroi, en disant: Je veux devenir enceinte, mais la
situation de garde dans l'Outaouais est tellement dramatique. Qu'est-ce que je
fais? Est-ce que je peux m'inscrire tout de suite, s'il vous plaît, pour
que vous me trouviez une place, parce que je sais qu'il n'y a pas de place et
je ne veux pas d'une petite gardienne à la maison. Je veux quelqu'un de
sérieux, de surveillé et de reconnu.
Mme Harel: Dans l'énoncé de politique maintenant,
on va vous suggérer d'aller recruter des gardiennes à la maison
au moment où vous aviez - pas seulement dans la ville de Hull - 500
demandes auxquelles vous n'avez pu répondre?
Mme Potvin: C'est cela. Qu'y a-t-il comme contrôle de la
garde à domicile? C'est une question qu'on se pose. Justement, si on est
pour faire du dispatching de taxi - voilà un petit, voilà une
maison, allons-y gaiement - sans pouvoir voir un peu quel suivi il y a dans
cette famille et quelle sorte de contrôle est exercé, je ne suis
pas certaine qu'on fait une faveur à cet enfant qu'on place. Cela va
être un pensez-y bien. Je pense que c'est intéressant à
examiner, par contre, mais il y a un pensez-y bien.
Mme Harel: il me reste trois minutes. Alors, j'ai bien
l'intention de les utiliser. Concernant cette question de garde à
domicile qu'on voudrait dans le fond vous confier, la ministre a dit: Si ce
n'est pas vous, j'en trouverai d'autres. Cela revient à dire ceci: Si
vous ne voulez pas, je confierai cela à d'autres organismes. C'est cela
qu'elle a dit tantôt, exactement. Cet après-midi, je sortirai les
galées et je les lui lirai. On ne peut pas les avoir
immédiatement, mais on peut les obtenir deux heures après. Elle
vous a dit exactement cela: Si vous ne pouvez pas, je confierai cela à
d'autres. Donc, dans cette question de garde à domicile, 8 y a une sorte
d'incohérence. Elle existe ailleurs. J'ai fait venir toute la
documentation sur le service qui est offert en France. Avez-vous entendu parler
des assistantes-maternelles agréées? Je crois que vous vous
êtes rendues en délégation, vous y êtes allées
ou vous avez fait venir la documentation, non? Selon vous, qu'est-ce que
l'État devrait faire en matière de garde à domicile, si
l'État devait faire quelque chose? Vous qui avez de l'expérience
et de l'expertise, qu'est-ce que
cela devrait être?
Mme Potvin: II pourrait y avoir de la garde à domicile,
mais ce n'est pas dans notre domaine. En ce moment, je ne peux pas me prononcer
là-dessus. En tant que regroupement d'agences, je n'ai pas le mandat de
mon assemblée pour donner des indications à ce chapitre. Ce qu'on
voudrait, c'est évaluer la garde au domicile de la responsable de
famille de garde d'abord, de façon qualitative et quantitative, et
après cela on trouvera d'autres mesures en chemin.
Mme Harel: Oui, parce que le danger, vous savez, c'est de
prétendre qu'on va confier cela comme si c'était une relation
privée. C'est comme si l'État n'avait rien à voir
là-dedans. Là où cela existe, en France - il y a 130 000
assistantes-maternelles qui vont à domicile -l'État assume
complètement les charges sociales, c'est-à-dire la régie
des rentes, l'assurance-maladie et l'assurance-chômage. En France, c'est
l'État qui prend cela en charge. Donc, ce sont des personnes qui ont une
reconnaissance sociale du rôle qu'elles jouent. Ce n'est pas une sorte de
renvoi à ceci: Les parents ont le choix. C'est toujours une sorte de
prétexte, de motif qui est utilisé: que les parents s'arrangent
avec les gardiennes et dans le dépliant que vous nous avez
mentionné, on dit à la gardienne salariée de faire payer
l'assurance-maladie, la régie des rentes et l'assurance-chômage
par le parent qui est son employeur. Je ne le sais pas mais, à votre
connaissance, quel est le pourcentage de parents qui jouent ce rôle
d'employeur et qui paient ces charges sociales?
Mme Tougas: Si je peux me permettre, ce qu'on a eu comme mandat
de la part des agences, c'est de regarder cette situation parce qu'il ne faut
pas se leurrer, il y a des besoins spécifiques. Les agences les
reçoivent. Il y a de grosses pressions. Il est clair que cela ne peut
pas être, dans l'esprit des agences, un service de
référence sans suivi, sans contrôle. À ce moment-ci,
ce qu'on tente de faire, c'est d'avoir les sous nécessaires pour
regarder cette situation. On en est à ce stade.
Mme Harel: Je veux vous remercier. Je ne sais pas si vous avez eu
une réponse à la demande de subvention que vous avez faite au
programme fédéral pour pouvoir étudier toute cette
question. Je le souhaite. Je souhaite que vous puissiez vous mettre à
l'étude le plus rapidement possible, pour qu'il n'y ait personne
laissé pour compte dans ce processus. Il y aurait eu plusieurs autres
questions à vous poser, évidemment. Le rôle que vous jouez
est important dans la reconnaissance et la promotion du rôle social de la
garde et dans la reconnaissance et la promotion de l'autonomie
financière des femmes qui font cette garde. Je souhaite que vous
continuiez à parler très fort parce que vous avez beaucoup
à dire et nous avons beaucoup à apprendre de vous.
Le Président (M. Bélanger): Merci. Mme la
ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Je voudrais vous remercier également.
Tout à l'heure, vous parliez de l'inscription, du temps de l'inscription
et du temps de l'implantation. On sait que les délais sont
considérables. Je pense que la députée de Maisonneuve va
comprendre pourquoi on veut développer davantage la garde en milieu
familial au cours des prochaines années, alors qu'on a peut-être
négligé cette forme de développement auparavant. Il faut
reconnaître, maigré tout le travail que vous avez fait, qu'il va
falloir vous aider davantage, que ce soit du côté de la
réglementation ou d'un quelconque soutien. Vous jouez un rôle
important. Je réitère qu'il n'est nullement question de brimer,
de vous brimer ou de vous enlever quelque droit que ce soit quant au rôle
que vous avez à jouer; au contraire, je pense que vous pouvez ajouter
d'autres secteurs à ce rôle important que vous jouez.
Tout à l'heure, je mentionnais, entre autres, que vous pouviez
jouer un rôle en aidant à mettre sur pied une banque de noms pour
des gardiennes à domicile. Je ne veux pas l'imposer aux agences. Celles
qui voudront le faire le feront et celles qui ne voudront pas le faire ne le
feront pas. C'est dans ce sens-là. D'autres personnes seront
peut-être intéressées à le faire, mais il ne s'agit
pas d'obliger l'agence à le faire. Je pense que c'est un besoin
essentiel aussi pour les parents qui sont à la maison et qui veulent
garder leurs propres enfants à la maison. Merci, mesdames.
Le Président (M. Bélanger): La commission des
affaires sociales remercie le Regroupement des agences de services de garde en
milieu familial du Québec et invite à la table les responsables
des familles de garde accréditées aux agences en milieu familial
des régions 03, 04 et 05. Nous suspendons les travaux pour quelques
instants afin de permettre le changement de groupe.
(Suspension de la séance à 11 h 23)
(Reprise à 11 h 24)
La Présidente (Mme Legault): À l'ordre, s'il vous
plaît!
Je demanderais aux intervenantes de bien vouloir s'identifier et
à la responsable de bien vouloir présenter les gens qui
l'accompagnent. Aux fins de l'enregistrement, chaque fois que vous intervenez,
j'aimerais que vous disiez votre nom.
Responsables des familles de garde
accréditées aux agences en
milieu
familial des régions 03,04 et 05
Mme Nadeau-Duval (Marie-Cécile): Alors, mon nom est
Cécile Nadeau-Duval. Je suis responsable de famille de garde, tout comme
mes copines qui sont ici avec moi. Nous représentons les régions
03, 04 et 05. À ma gauche, Johanne Gélinas qui est aussi
responsable de famille de garde; à ma droite, Jeannine Bélec,
responsable de famille de garde et de famille jumelle; Diane Simard qui est
responsable de famille de garde et de famille jumelle aussi.
Alors, Mme la Présidente, Mme la ministre, Mme la
députée de l'Opposition, le présent exposé a pour
but de vous donner un bref aperçu de nos sentiments face à
T'Énonce de politique sur les services de garde à l'enfance."
Nous voulons exprimer davantage notre vécu que des idéologies.
Nous sommes favorisées de pouvoir nous asseoir à votre table.
Nous espérons de grand coeur que notre démarche incitera Mme
Gagnon-Tremblay et son équipe à poser le même geste envers
nous, afin que nous puissions parler ensemble de la vraie vie, celle qui est
vécue tous les jours. Cela sera sûrement d'un grand secours pour
améliorer les services que nous offrons aux parents du
Québec.
À la suite d'une réunion des responsables de famille de
garde des régions 03, 04 et 05, le 9 janvier dernier, nous avons
discuté de la proposition faite par l'énoncé de politique
et, à l'unanimité, nous avons considéré que la
partie nous concernant a sûrement demandé beaucoup d'heures de
travail, mais nous ne retrouvons pas tout à fait notre
réalité dans cet énoncé. Nous ne comprenons pas
où le ministère de la condition féminine a pu prendre de
tels renseignements. Les statistiques sont comme les photos; elles ne font pas
connaître la réalité. Il est loin d'être plausible
qu'il ait communiqué une seule fois avec l'une de nos agences pour
pouvoir émettre de telles opinions sur notre travail. Jamais nous
n'accepterons que qui que ce soit nous incite à régresser. Nous
ne comprenons pas pourquoi il y a tant d'acharnement à diminuer les
femmes qui éduquent les enfants. Est-ce qu'il est nécessaire de
prendre exemple sur les pays qui se situent à l'autre bout du globe?
Est-ce que le but est de nationaliser nos services? Il nous semble que nous
vivons dans un pays libre. Nous n'avons même pas besoin de discuter de
cette liberté. Pourquoi veut-on améliorer les services de garde
si c'est pour détruire ce qui a déjà été
fait? Il nous semble maintenant que nous étions encore mieux avant cette
étude. Nous prendrons donc le temps de dire ce qui ne nous convient
pas.
Il est temps de mettre les choses à leur place, parce qu'il
s'agit d'emplois que nous, les Québécoises, avons
créés. Nous ne sommes pas venues encombrer le marché du
travail. Le titre de l'article 4.1.2 prouve que, dans l'esprit des auteurs,
nous sommes des employées. C'est faux. Nous sommes les maîtres
d'oeuvre. Nous choisissons nos engagements. D'après ce que nous lisons
dans les journaux, I y en a qui n'aiment pas notre travail et qui l'attaquent.
Nous étions là avant les gouvernements qui pensent à la
garde d'enfants et avant les syndicats qui veulent tout contrôler. Nous
ne voulons pas que la nouvelle politique de garde attaque notre statut de
travailleuse autonome, car c'est un travail qui valorise la femme au foyer.
Nous avons, à force de temps et d'énergie, mis sur pied un
service de qualité, personnalisé, qui répond bien aux
besoins de notre milieu. Ce service, bien qu'il diffère d'une
région à l'autre, est né du bénévolat, voire
même de l'apostolat des femmes que l'on traite avec tant de
mépris. Fières de notre réalisation, nous avons
quitté le travail au noir. Pour joindre une agence? Oui, et pour sortir
de l'isolement, mais aussi pour être reconnues, convaincues que nous
étions capables de parier le même langage. Nous nous empressons
d'ajouter que ce document, loin d'être une crise d'amertume, nous a
permis de réaliser que nous ne sommes pas disqualifiées en regard
des aspirations communes aux femmes qui travaillent, pas plus que nous ne
sommes disgraciées face à la société.
Entre nous, le ratio proposé de deux plus quatre enfants
d'âge scolaire n'est pas accessible à l'ensemble. Il faut penser
que la majorité d'entre nous associe sa situation de mère de
famille avec son travail de responsable de famille de garde. La baisse de la
qualité des services, c'est mathématique. L'accessibilité
sera limitée et la flexibilité éliminée. Que
fait-on des employés à temps partiel, sur appel et sur horaire
variable, de tous ces marginaux qui n'ont pas de place ailleurs que dans les
agences? Les retourner hors réseau? Dans nos agences, I n'y a pas de
grève. Aucune tempête n'interrompt nos services et nous vous
faisons grâce des problèmes que cela nous apporte, lorsque nos
homonymes sont en grève ou qu'ils ferment pour une tempête.
Être travailleuse autonome, être le maître d'oeuvre,
c'est choisir ses engagements. On ne peut nous imposer ce que les agences n'ont
pu exiger. Même si nous devons le reconnaître, nous sommes
très sensibles à leurs suggestions, parce qu'il faut dire qu'au
fil des semaines et des mois et parce que nous travaillons en étroite
collaboration, il s'est instauré entre nous, les responsables de famille
de garde et le personnel d'agence, une relation privilégiée, sans
doute due au fait que nous partagions les mêmes objectifs. Quand notre
Itinérante pédagogique frappe à notre porte, elle est
reçue comme une amie dont la tâche principale est de nous aider.
La condition essentielle pour continuer à assumer correctement notre
rôle d'éducatrices en milieu familial, c'est la persistance
à déléguer l'administration, la mise à jour de
l'information relative à la sécurité, l'étude du
marché pour ne pas être taxées de concurrence
déloyale, l'entreposage de
l'équipement poupon: les couchettes, les poussettes, les parcs,
etc. La reconnaissance, nous la voulons. Nous la souhaitons, mais pas à
n'importe quel prix, surtout pas en laissant institutionnaliser nos domiciles
et perdre notre droit à la libre et complète jouissance de nos
biens. Le prix est trop élevé, beaucoup trop.
Nous souhaitons du ministère de la condition féminine
qu'il prenne le temps nécessaire pour structurer, conformément
aux besoins des Québécois, les services de garde à
l'enfance. Nous réitérons notre invitation de vous rencontrer
pour discuter ensemble des besoins réels de notre milieu de travail. Nos
portes vous sont grandes ouvertes en tout temps, mais soyez assurés que
Jamais nous n'accepterons de régresser.
La Présidente (Mme Legault): Merci, Mme Duval. Mme la
ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Merci, Mme Duval. Écoutez, ma
première réaction est celle-ci. Vous dites que le
ministère de la condition féminine veut réduire le nombre
de femmes qui éduquent les enfants, alors que nous, au contraire,
pensons qu'il faille revaloriser ce rôle qui est tellement peu connu dans
la population. De plus, vous désirez conserver votre autonomie et c'est
ce vers quoi on tend. Je me demande comment vous pouvez affirmer que votre
statut de travailleuse autonome est remis en question, que vous n'aurez plus le
choix de vos engagements et qu'on veut réduire le nombre de femmes qui
éduquent les enfants. Pourquoi affirmez-vous ça? Qu'est-ce qui
vous fait croire ça dans l'énoncé de politique?
Mme Nadeau-Duval: Au départ, selon ce qui était
écrit dans l'énoncé concernant les subventions de 5,75 $
par poupon - vous en parliez tout à l'heure - nous ne voulons pas, et je
parle en toute connaissance de cause, que l'argent, ces 5,75 $ par poupon, nous
soit émis par chèque personnel. Lorsqu'on garde des enfants, on
n'a pas le temps de commencer à faire de l'administration. C'est le
premier point. Lorsqu'on dit dans l'énoncé que nous sommes des
employés, ce n'est pas vrai, madame. Nous ne sommes pas des
employés. Nous sommes des travailleuses autonomes, chacune dans sa
maison.
Mme Gagnon-Tremblay: II n'est nullement question -
écoutez, vous pourriez m'indiquer quelle page de l'énoncé
de politique - qu'on vous considère comme des employés. Au
contraire, vous êtes des travailleuses autonomes et j'ai môme
demandé au ministère du Revenu de publier un petit
dépliant, une petite brochure pour que toutes ces personnes puissent
savoir quoi déduire et puissent profiter le plus possible de tous les
avantages fiscaux qu'elles peuvent avoir à titre de travailleuses
autonomes. Lorsque, par exemple, on a dit qu'on était prêt
à vous allouer un montant de subvention pour chaque poupon, si vous ne
voulez pas qu'on vous émette le chèque, dites-le-nous, on
l'émettra à quelqu'un d'autre, mais il n'a pas été
question à moment-ci de décider si c'est un chèque
personnel ou non.
D'autre part, lorsque vous dites vouloir déléguer votre
administration, on n'a absolument rien contre ça. Sauf qu'on dit que si
vous voulez déléguer votre administration, que ce soit justement
un choix de la responsable de la famille de garde, et non pas un choix qu'on
lui impose, que cela lui soit imposé par l'agence, et ce, justement pour
que vous puissiez conserver votre autonomie. On dit: Si la famille est
prête à déléguer son administration, qu'elle le
fasse, mais, par contre, elle devra assumer le coût de ces services
qu'elle reçoit de l'agence. Mais on ne veut pas que l'agence oblige la
responsable de famille, qui est une travailleuse autonome, à
déléguer cette administration.
Mme Bélec (Jeannine): Nous avions compris, dans
l'énoncé, que l'agence serait réduite à un
rôle de répartiteur.
Mme Gagnon-Tremblay: II n'a jamais été question de
ça, madame.
Mme Bélec: On s'est doté de services que l'on juge
utiles. On ne veut pas perdre ces services. On les a mis en place et on tient
à les conserver.
Mme Gagnon-Tremblay: C'est dommage qu'on ait
interprété de cette façon, parce que, dans
l'énoncé de politique, on ne parle nullement d'un rôle,
comme je vous le dis, de répartiteur de l'agence. On s'est
peut-être attardé davantage au fait qu'on se questionnait
justement sur la délégation de l'administration, parce que
ça fait problème pour certaines. Il y a certaines responsables de
famille de garde qui sont venues nous dire: Nous ne pouvons pas adhérer
à cette agence parce que nous voulons nous occuper de notre propre
administration. On n'a absolument rien contre ça, sauf qu'on se dit que
si l'agence veut offrir ces services en plus du rôle qu'elle doit jouer
normalement, à ce moment-là, on n'a rien contre ça,
à condition qu'elle perçoive les honoraires en
conséquence.
Mais nous n'avons absolument rien contre cela. Je pense que c'est une
Interprétation. De toute façon, je suis heureuse de le savoir
parce que |e pense qu'on va devoir le mettre très au clair. Nulle part
dans l'énoncé de politique ne peut-on retrouver une telle
affirmation. J'espère qu'on vous rassure, ce matin, en vous disant que
votre rôle est un rôle de travailleuse autonome qui doit demeurer
ainsi, qu'on doit valoriser et qu'on doit faire connaître. La preuve,
c'est que si nous voulons justement développer autant de places en
milieu familial au cours des prochaines années, c'est tout simplement
parce qu'on reconnaît bien ce rôle. Sans ça, vous comprenez
qu'on n'aurait pas confié à n'importe qui la
garde d'enfants en milieu familial. On n'aurait pas choisi de
développer ce secteur à ce rythme au cours des prochaines
années. Est-ce que cela vous rassure? Je l'espère.
Mme Bélec: Oui.
Mme Gagnon-Tremblay: Je voudrais revenir à la question des
subventions. Tout à l'heure, j'en ai parlé avec le regroupement
des agences, mais comme vous représentez les responsables des familles
de garde, c'est important d'avoir votre opinion là-dessus. Vous demandez
que la subvention au poupon - j'imagine que c'est un peu la même chose
pour l'enfant handicapé aussi - soit donnée à l'agence.
Pouvez-vous m'expliquer, en tant que responsables, ce que vous voulez dire?
Mme Bélec: D'abord, il y a le côté
administratif dont on ne veut pas vraiment s'occuper et on a
délégué à l'agence le soin de veiller à ce
que l'équipement ou à ce que chaque chose que l'on utilise pour
le soin de l'enfant soit conforme aux normes de sécurité qui sont
définies par l'office. C'est à ce chapitre que l'on demande que
ce soit l'agence qui administre cet argent, pour nous fournir
l'équipement conforme aux normes de sécurité.
Mme Gagnon-Tremblay: En somme, si je comprends bien, c'est sur le
plan administratif.
Mme Bélec: Tout à fait.
Mme Gagnon-Tremblay: Quitte à ce que l'agence puisse
percevoir certains honoraires à partir de cette administration pour de
l'équipement qui pourrait servir.
Mme Bélec: Oui, mais de l'équipement qui est
toujours conforme aux normes de sécurité, parce que c'est un
aspect qui exige du temps de recherche et pour savoir ce qu'il y a de mieux.
Alors, on a délégué cet aspect à l'agence qui
veille à ce que l'équipement soit conforme aux normes de
sécurité.
Mme Gagnon-Tremblay: Par contre, votre objectif n'est pas de
remettre à l'agence les 5,75 $ qui iraient entièrement à
l'agence.
Mme Bélec: C'est simplement lui confier l'administration
de ce montant-là.
Mme Gagnon-Tremblay: D'accord. Il n'y a pas de problème.
Comme je vous le disais tout à l'heure, je ne reviendrai pas sur le
discours que j'ai tenu tout à l'heure. C'est un service que l'agence
peut offrir, mais en plus de son rôle premier.
Vous recevez du soutien de la part de vos agences. Pouvez-vous me dire
quelle forme de soutien, à part la formation d'encadrement?
Quelle sorte de soutien recevez-vous de vos agences?
Mme Nadeau-Duval: Au départ, nous avons le soutien
administratif qui, pour nous, constitue l'une des premières raisons pour
lesquelles une femme fait partie d'une agence. Il y a le côté
social pour les adultes qui est très important. Lorsqu'on se rencontre
tous ensemble, c'est très important de pouvoir discuter de ce qui se
passe d'une maison à l'autre et de cheminer selon cela. Il y a aussi le
soutien de notre joujouthèque. Par le biais de nos frais
d'administration, nous avons monté une joujouthèque. Donc, il est
très important que le personnel de l'agence puisse inventorier et
répertorier notre joujouthèque.
Mme Gagnon-Tremblay: Quel est le rythme de visites? Combien de
fois l'agence visite-t-elle les responsables des services de garde en milieu
familial?
Mme Bélec: Généralement aux onze
semaines.
Mme Gagnon-Tremblay: Aux onze semaines? Mme Bélec:
Oui.
Mme Gagnon-Tremblay: Le regroupement parlait tout à
l'heure de formation, demandait que les personnes puissent avoir la même
formation, le même budget que les garderies. Concernant votre formation,
j'exprimais tantôt certaines craintes. Non pas que vous ne deviez pas
être formées, parce que je pense que c'est absolument essentiel
d'avoir la formation de base, de connaître les premiers soins et c'est le
rôle premier de l'agence que de vous donner cette formation. Il est
déjà spécifié dans la loi que l'agence doit donner
une formation de base à ses responsables de famille de garde. Voyez-vous
d'autres formes de formation? Je parlais tout à l'heure de la
multiplication du nombre de responsables de famille de garde, de la garde qui
peut être occasionnelle, temporaire, car c'est quelque chose qui n'est
pas à aussi long terme que pour les éducatrices dans les
garderies. Voyez-vous autre chose dans la formation?
Mme Bélec: Je vais parler surtout de notre vécu. On
a, bien sûr, les cours de prévention et de premiers soins que l'on
prend au cégep, mais à l'intérieur de l'agence on a eu des
cours en orthopédagogie, des rencontres où l'on nous initie au
bricolage, et il y a toutes sortes de soirées d'information qui ne sont
pas nécessairement dirigées vers le quotidien. On a eu une
soirée de l'impôt où les responsables de famille de garde
venaient avec leur conjoint. Il y a des rencontres un peu plus sociales. Cela
aussi, c'est très important, parce que cela nous permet de sortir de
l'isolement. Il y a beaucoup de choses qu'on apprend entre nous. Pour citer un
exemple
qui est très quotidien, quand les enfants arrivent à un
certain âge, on a de la difficulté à leur faire manger du
foie. Certaines ont expérimenté des manières de faire pour
passer cette viande que l'enfant refusait au départ et qui est
nécessaire à sa santé. Ce sont toutes des choses qui ne
sont peut-être pas structurées comme un cours magistral, mais qui
sont, pour nous, d'une grande utilité et qui sont également une
source d'enseignement.
Mme Gagnon-Tremblay: Je voudrais peut-être revenir à
l'administration déléguée à l'agence dont vous
parliez, l'agence qui vous offre ce service de comptabilité. Est-ce que
vous payez actuellement pour ces services supplémentaires?
Mme Nadeau-Duval: Actuellement, chez nous, à Polichinelle
inc., nous donnons 12 % de notre salaire.
Mme Gagnon-Tremblay: Pour l'administration?
Mme Nadeau-Duval: Pour l'administration.
Mme Gagnon-Tremblay: Est-ce que vous croyez que c'est comme
ça dans toutes les agences?
Mme Nadeau-Duval: Non.
Mme Gagnon-Tremblay: D'autres agences le font gratuitement?
Mme Nadeau-Duval: Non, pas nécessairement, parce qu'il
manque à ce moment-là des services. C'est un service
supplémentaire que nous avons, que nous demandons. Entre autres,
à Polichinelle Inc., nous avons quelqu'un qui s'occupe de notre
administration. Donc, nous assumons ce salaire. Nous avons quelqu'un qui
s'occupe de nos jouets, de la propreté de nos jouets et de la
réparation des jouets. C'est encore nous qui payons le salaire de cette
personne. À ce moment-là, nos frais sont beaucoup plus
élevés qu'ailleurs, parce que nous sommes rendus à un
rythme plus élevé.
Mme Gagnon-Tremblay: Dans le cadre de votre autonomie, est-ce que
c'est vous qui fixez les tarifs ou si vous vous entendez avec l'agence? Les
tarifs sont-ils uniformes par agence, par exemple?
Mme Nadeau-Duval: Non, ce qui se passe, c'est qu'au cours d'une
année nous nous réunissons sept à huit fois, les
responsables de famille de garde. À ce moment-là, c'est
discuté et décidé par vote unanime.
Mme Bélec: À la suite d'un sondage.
Mme Nadeau-Duval: Quand on parle de frais d'administration, c'est
comme cela que ça fonctionne. Lorsqu'on parle d'augmentation de
tarification, à ce moment-là, c'est une autre procédure.
Nous demandons à l'agence de faire un sondage autour de nous dans les
garderies et dans les autres agences. On obtient de Statistique Canada l'indice
des prix à la consommation. À partir de là, nous calculons
combien cela nous coûte de plus par jour pour nourrir un enfant et,
à ce moment-là, nous pouvons calculer notre augmentation
annuelle.
Mme Gagnon-Tremblay: Depuis le début de la commission
parlementaire, on a beaucoup parlé de la réglementation. Entre
autres, des regroupements de garderies sont venus nous dire qu'on devrait
réglementer dans tout le milieu reconnu, autant, par exemple, dans le
milieu familial que dans les garderies, qu'on devrait avoir une
réglementation aussi stricte. Qu'est-ce que vous pensez de cette
réglemention concernant la garde en milieu familial?
Mme Nadeau-Duvail Une réglementation est toujours valable. Mais
nous sommes des travailleuses autonomes, au départ.
Mme Bélec: Nous tombons déjà sous le coup de
la réglementation Interne de l'agence que l'on accepte au moment de
notre adhésion. Je pense bien qu'une autre réglementation plus
rigide ne serait pas nécessaire. On ne la souhaite pas, en tout cas, au
départ. On connaît les règles du jeu des agences. On sait
très précisément ce qu'elles attendent de nous et, au
moment de l'adhésion, on accepte de se conformer à leurs
exigences. Je pense qu'à partir de là, c'est suffisant.
Mme Gagnon-Tremblay: Dans vos maisons, avez-vous un endroit
spécifique pour garder ces enfants ou s'ils ont accès, par
exemple, à peu près à toutes les pièces?
Mme Bélec: Chez moi, les enfants ont accès à
l'ensemble de la maison. Il y a plusieurs endroits. Ils utilisent les chambres
de mes propres enfants pour les périodes de sieste. Il n'y a aucune
restriction. Ils sont chez nous aussi chez eux que dans leur propre
domicile.
Mme Gagnon-Tremblay: Ce qui veut dire qu'une
réglementation un peu plus stricte pourrait nuire aussi au
recrutement.
Mme Bélec: Oui, parce que, là, cette
réglementation toucherait très directement nos propres
familles.
Mme Gagnon-Tremblay: La qualité pour la petite enfance,
qu'est-ce que vous avez à dire sur cela, comparativement à ce
qu'on peut offrir dans les garderies? (11 h 45)
Mme Bélec: Je pense que nous nous sou-
cions de la qualité, c'est bien évident. On est ici, ce
n'est pas pour rien. On veut très bien faire notre travail. On n'a sans
doute pas les mêmes critères pour évaluer la qualité
des services qu'on donne aux enfants parce que le milieu est plus
détendu. D'abord, c'est dans une maison. Il y a, au départ,
l'ambiance familiale qui règne et il y a aussi la complicité de
nos propres familles parce que, sans cette complicité, ce serait
très difficile. Et, pour ce qui est de la qualité des services,
nous sommes toutes des mères. On a eu des enfants et on se tient
à Jour par le biais de nos agences. Je pense qu'on n'a pas peur de se
comparer, en ce qui concerne la qualité des services, avec quelque
garderie que ce soit.
Mme Gagnon-Tremblay. On a parlé tout à l'heure avec le
regroupement des agences du ratio un pour cinq. On a fait valoir que ce ratio
était important et je pense que c'est votre position également,
c'est celle que vous défendez actuellement.
Mme Nadeau-Duval: Oui, notre position est de dire que cela
prendrait absolument un pour cinq. Maintenant, c'est bien évident que ce
n'est pas applicable pour toutes les catégories d'enfants.
C'est-à-dire qu'en ce qui concerne le poupon, cinq poupons dans une
maison, ce serait un peu trop. Il est normal que nous ne puissions avoir cinq
poupons dans une maison. C'est impensable.
Au scolaire, ce n'est pas la même chose, par exemple, parce que si
quelqu'un demeure près d'une école et qu'il reçoit
uniquement pour des dîners scolaires et après l'école,
c'est évident qu'on peut en avoir douze assis à la table et cela
ne dérangera pas grand-chose. Cela prend juste un plus gros chaudron,
c'est tout. Cela dépend, à ce moment-là, de la
catégorie d'enfants que l'on garde, de l'âge des enfants.
Mme Gagnon-Tremblay: Dans un mémoire, à un moment
donné, on disait que le ratio un pour cinq, ça excluait ses
propres enfants, cela excluait les enfants d'âge scolaire. Finalement, si
je faisais le calcul, j'arrivais à neuf. Je pouvais facilement arriver
à neuf. Je ne sais pas si vous êtes d'accord avec ça?
Mme Nadeau-Duval: Non, du tout. Écoutez, si j'en ai trois
et que j'en rajoute déjà cinq, il y a quelque chose qui ne
marchera pas quelque part, c'est certain.
Mme Gagnon-Tremblay: En ce qui concerne les poupons, avez-vous
une suggestion à nous faire? Quelle serait la norme, par exemple? On
sait qu'en subventionnant davantage les poupons, il pourrait peut-être y
avoir plus de services qui pourraient être donnés dans ce
sens-là, sauf qu'on sait que quatre ou cinq poupons, c'est quand
même beaucoup. Est-ce que vous avez pensé, comme responsables de
famille de garde, quelle devrait être la norme d'une personne responsable
de poupons?
Mme Nadeau-Duval: Quelqu'un qui se spécialiserait
uniquement dans la garde de poupons pourrait facilement avoir trois ou quatre
poupons dans la maison. Maintenant, si les poupons sont avec des enfants
d'âge différent, à ce moment-là, un poupon par
famille serait complètement insuffisant, un ou deux poupons. Mais il
faut penser à l'équipement parce que vous savez, madame, qu'une
poussette à cinq places, c'est très rare et c'est très
difficile à pousser.
Mme Gagnon-Tremblay: Pouvez-vous me dire si vous avez des
comités au sein des agences par exemple? Avez-vous votre propre
comité de responsables de famille de garde qui vous représente ou
si vous vous rencontrez lors de réunions? Avez-vous votre propre
comité qui peut vous représenter facilement?
Mme Nadeau-Duval: Nous avons, comme dans toute petite PME, un
organigramme. Donc, chez nous, N y a une responsable de familles qui est au
conseil d'administration et qui représente toutes les familles de notre
agence. A la suite de cela, nous avons un comité consultatif de
responsables qui comprend cinq personnes, qui s'occupe de tous les autres
responsables.
Mme Gagnon-Tremblay: Merci madame.
Le Président (M. Bélanger): Merci. Mme la
députée de Maisonneuve.
Mme Harel: Merci M. le Président. Il me fait plaisir de
vous recevoir Mmes Simard, Bélec, Duval et Gélinas. La
documentation que vous nous transmettez ce matin, est abondante. Nous avons vos
mémoires, et cela a été intéressant pour nous. Nous
avons également le règlement de régie interne, entre
autres, je crois, de l'agence L'Envol dans Laviolette.
Une première remarque avant que l'on entreprenne la discussion.
Vous savez qu'en politique, en général, on essaie toujours de
faire la part entre le discours et la réalité. C'est
évident que la première question qu'il faut se poser concernant
ie service que vous donnez, et je pense qu'il faut la poser à la
ministre, est celle-ci: Comment peut-on parier de revaloriser le rôle de
la garde en milieu familial, comme elle en parie, sans vous accorder les
budgets de formation? Pourquoi, si c'est une garde aussi valorisée que
les autres modes de garde, vous exclure des budgets de formation? Je pense que
les discours, c'est une chose, mais pourquoi, dans la réalité,
vous exclure des budgets de formation? Et, évidemment, l'autre question,
c'est: Puisqu'il y aura développement accru, selon
l'énoncé, est-ce parce que c'est une reconnaissance réelle
de services de qualité que vous
offrez, auquel cas il faut certainement vous offrir le même
soutien financier qu'à tous les autres services, ou bien si ce n'est pas
le constat que cela coûte moins cher, donc, on vous développe
parce que vous coûtez moins cher, mais on n'a pas, par ce
développement accru, une reconnaissance réelle des services que
vous rendez en vous permettant d'obtenir les subventions que les autres
services ont? Je ne sais pas si on se comprend. En d'autres termes, cela veut
dire ceci: Quand vous réclamez la reconnaissance de votre rôle, je
ne pense pas que ce soit suffisant, comme l'a fait la ministre tantôt, de
vous dire: Oui, la preuve qu'on vous reconnaît, c'est qu'on va vous
développer de nouvelles places. Mais ce discours m'a laissée
songeuse. Parce qu'on ne vous donnera pas les mêmes subventions, donc,
vous allez coûter moins cher que les autres ou est-ce qu'on vous
développe parce qu'on reconnaît vraiment que vous offrez un
service comme les autres? Je ne sais pas si on se comprend bien.
Mme Bélec: Oui. Nous souhaitons vraiment être
reconnues parce qu'au départ nous savons très bien que la
qualité des services qu'on offre est réelle. Au sujet de la
formation, il serait intéressant d'avoir davantage de moyens. Il reste
que, quand on veut vraiment aller chercher de l'information, on prend des
initiatives personnelles. On va en chercher, on s'inscrit à des cours
à l'université. Mais si cette formation était davantage
uniformisée pour l'ensemble des responsables de famille de garde, il est
bien évident qu'ayant une référence comme, par exemple, un
gouvernement qui dirait que, pour telle et telle raison, il y a
déjà une référence de base qui prouve que tel
service est de qualité...
Il reste qu'on aimerait beaucoup avoir davantage de moyens. Ce n'est pas
toujours facile d'avoir des personnes qui vont accepter de venir nous donner
gratuitement des conférences en orthopédagogie, par exemple. On a
eu cette chance, nous, parce qu'on était, disons, un milieu un peu
favorisé. Par contact, on connaissait quelqu'un de renommé qui a
accepté de venir nous rencontrer. Cette conférence a toute
été dactylographiée, on a un document de cela.
Mme Harel: Si je comprends bien, vous souhaitez être
traitées comme l'ensemble des autres personnes qui sont en relation avec
les enfants et vous souhaitez obtenir les budgets de formation
équivalents. C'est ce que je crois comprendre?
Mme Bélec: Pour avoir une reconnaissance
équivalente.
Mme Harel: Dans le mémoire, vous dites à la page
3... Attendez, c'est le mémoire que vous nous présentez,
Polichinelle et Les Copains.
Mme Bélec: Oui.
Mme Harel: Vous faites partie de ces agences, je crois? Vous
dites: Le mandat de percevoir les frais de garde. Pour nous, ce service est
capital et directement relié à la qualité des services
à l'enfant. Il nous permet de garder une relation au beau fixe en nous
évitant les odieuses discussions d'argent avec les parents et nous met
ainsi à l'abri de l'exploitation. Il m'est apparu, à la lecture
de votre mémoire, que c'était vraiment pour vous un aspect
très Important de déléguer, de mandater l'agence pour
percevoir. Vous êtes vous-même une famille de garde. J'aimerais
vous entendre là-dessus.
Mme Bélec: Certaines responsables de famille de garde qui
sont aujourd'hui reconnues par l'agence gardaient déjà des
enfants depuis douze, quatorze et quinze ans. On est assez sujets, quand
personne ne nous protège ou qu'on n'a pas de référence
à une agence, à entendre des réflexions ou à avoir
des discussions sur les tarifs. C'est assez lourd à supporter, d'avoir
à discuter avec le parent. On est humains, n'est-ce pas? Souvent,
à force d'accumuler des frustrations, finalement, c'est l'enfant qui en
écope. Alors là, par la délégation du
côté administratif, jamais on ne parle d'argent avec le parent. On
a un formulaire, une fiche d'assiduité, on inscrit l'heure
d'arrivée et l'heure de sortie et le parent ne discute jamais. Il signe
cette feuille-là et il sait, quand il y a du temps supplémentaire
ou des services qui ne sont pas compris dans le tarif de base, qu'il doit le
payer. On n'a pas à discuter là-dessus. Ayant toujours de
très bonnes relations avec le parent, comme lui, on a comme souci
premier son enfant et son bien-être. C'est à ce niveau-là
que, pour nous, c'est tellement important de toujours avoir de bonnes relations
en rapport avec les enfants.
Mme Harel: Considérez-vous que l'office devrait favoriser
ce type de délégation administrative en élargissant, par
exemple, le financement des agences pour pouvoir l'offrir?
Mme Nadeau-Duval: Oui. Il serait très important parce que
vous savez, lorsque le vendredi soir arrive et que c'est le temps pour le
parent de payer sa gardienne, on le voit ouvrir le portefeuille et on se fait
dire: J'espère qu'il va en rester pour l'épicerie. Je peux vous
dire que c'est fatiguant à entendre. C'est très
désagréable. C'est pour cela que, finalement, cela nous brime et
qu'on est encore mieux de déléguer parce que c'est tellement
important.
Mme Harel: Mme Duval, je pense que c'est un aspect très
important parce que vous êtes vous-même une famille d'accueil et
votre expertise est unique, d'une certaine façon. On en entendra
peut-être quelques autres aussi dans la journée, mais pas durant
toute la commission. La ministre a dit tantôt: Oui, mais l'office ne
l'interdit pas. Mais la question, c'est: Doit-il le favoriser? Vous
dites, avec l'expérience que vous avez: Définitivement. C'est
cela que je dois comprendre?
Mme Nadeau-Duval: Oui, c'est cela. Mme Bélec: Tout
à fait.
Mme Nadeau-Duval: Tout à fait. J'étais hors
réseau avant d'adhérer à l'agence et je peux vous dire
que... Et même dans nos réunions, la première chose, c'est
toujours cela, ce sont les frais d'administration et les frais
d'adhésion qui sont... C'est la première raison.
Mme Harel: C'est malheureux qu'on ne puisse pas interroger
l'office qui ne viendra pas durant la commission parlementaire présenter
son point de vue, mais je crois comprendre que votre expérience, compte
tenu de la relation directe que vous avez avec les parents, c'est que vous
pensez qu'à tous les égards, comme vous le dites, pour garder une
relation au beau fixe avec l'enfant et avec les parents, c'est une
délégation qui est souhaitable.
Mme Nadeau-Duval: Oui.
Mme Harel: Vous nous parlez également de
l'assurance-responsabilité civile que vous avez comme famille. C'est
bien cela?
Mme Nadeau-Duval: C'est cela. Mme Harel: Chacune d'entre vous?
Mme Bélec: Oui. Mme Harel: C'est personnel?
Mme Nadeau-Duval: L'assurance-responsabilité que l'on a,
au départ, c'est l'assurance-responsabilité en tant qu'individu,
comme tout le monde. Ce que l'on ajoute, c'est un avenant à notre police
qui nous protège, comme travailleuse, au cas où il arriverait un
accident à un des enfants que nous avons sous notre garde.
Mme Harel: Vous nous parlez aussi d'une police additionnelle pour
l'ensemble du groupe. Est-ce que c'est une police additionnelle que vous vous
êtes donnée entre familles d'accueil ou avec l'agence?
Mme Nadeau-Duval: C'est par l'agence. Mme Harel: C'est
l'agence.
Mme Nadeau-Duval: C'est l'agence qui fait les démarches
à ce moment-là et nous donne une nouvelle assurance qui est
payée par le biais de nos frais d'administration.
Mme Harel: C'est intéressant. Vous avez insisté sur
le fait que vous étiez des travailleuses autonomes et, en même
temps, ce qui est intéressant, c'est que vous vous êtes
donné un règlement de régie interne. Peut-être pas
la vôtre? Vous êtes des Copains, je pense, Mme Nadeau-Duval?
Mme Nadeau-Duval: Nous sommes de Polichinelle, mais la
régie interne existe dans chaque agence.
Mme Harel: Dans chaque agence.
Mme Nadeau-Duval: Chacune a sa régie interne.
Mme Harel: Considérez-vous que chaque famille d'accueil
qui est recrutée doive se conformer à la régie interne
définie par la majorité des familles dans une agence?
Mme Nadeau-Duval: Oui, madame. Qu'on fasse partie de n'importe
quelle association, il faut se conformer à la politique du regroupement.
À ce moment-là, c'est normal, lorsqu'on est rendu à 40 ou
50 femmes qui sont d'accord, que la personne qui entre chez nous adhère
automatiquement à nos politiques.
Mme Harel: C'est-à-dire que, pour l'intérêt
supérieur de la garde de l'enfant, vous pensez qu'il peut y avoir une
entorse au statut de travailleuse autonome, que la travailleuse autonome doit,
dans le fond, se considérer comme devant d'abord relever de la
régie interne décidée par le groupe. C'est cela?
Mme Nadeau-Duval: Oui, pour garder quand même notre
qualité de services, et c'est très important.
Mme Harel: Vous nous dites que vous avez, par exemple,
décidé de donner un préavis de huit semaines lorsque vous
décidez de prendre des vacances. C'est une décision que vous avez
prise entre vous?
Mme Nadeau-Duval: C'est cela.
Mme Bélec: Vous savez, je suis responsable des familles
jumelles, donc, j'ai plusieurs enfants. Les vacances sont
déterminées à l'avance et les parents en sont
informés de telle sorte qu'on ne crée pas d'embarras. Mettre le
parent dans une situation où, à quinze jours d'avis, il est mal
pris avec ses enfants parce qu'il n'est pas en vacances, il doit prendre des
journées de maladie ou des congés sans solde... C'est un avis de
deux mois. On trouvait que c'était suffisant pour permettre aux parents
de se retourner et de s'organiser pour cette période de vacances.
Mme Harel: Dans le mémoire, vous pariez
des treize jours conventionnés et de la tarification. Vous avez
opté pour une tarification uniforme.
Mme Bélec: Oui.
Mme Harel: Est-ce que vous pensez que l'office devrait favoriser
ce type de tarification par agence? Je ne parle pas, évidemment, de tout
le Québec. Mme la ministre nous a parlé tantôt de certaines
familles qui appellent à l'office pour se plaindre qu'elles doivent
être assujetties à des règles de régie interne.
Pensez-vous que ces règles de régie interne doivent
prévaloir sur l'insatisfaction de certaines des familles? Quelle est la
décision qui doit être prise sur le plan des choix politiques?
Est-ce qu'il faut souhaiter des tarifications uniformes par agence? Est-ce
qu'il faut souhaiter des règlements de régie interne? Comment
voyez-vous ça?
Mme Bélec: Avant de prendre quelque décision, je
pense qu'il faut toujours avoir le souci du plus grand bien commun. Pour ce qui
est de la tarification, je ne pense pas que l'office puisse déterminer,
car c'est très régional. Nous, nous fonctionnons par sondage. On
regarde autour de nous les tarifs qui sont facturés parce qu'on ne
voudrait pas non plus être taxées de concurrence déloyale;
alors, on veut se maintenir au niveau du marché et ça varie d'une
région à l'autre.
Maintenant, pour faire ces sondages, ça demande du temps, et
c'est par le biais du personnel de l'agence que ce sondage se fait. À la
réunion du conseil d'administration, en général, la
directrice de l'agence apporte les résultats du sondage. La responsable
de famille de garde, qui est au conseil d'administration, convoque celles qui
font partie du comité consultatif. Nous en discutons entre nous et nous
en parlons ensuite à l'ensemble des responsables de famille de garde
à une réunion et nous prenons une décision. Nous leur
disons que nous avons appelé Statistique Canada et que l'augmentation
est de tant, qu'il nous en coûte tant de plus pour nourrir un enfant.
Pour la suite, ça passe au vote populaire.
Mme Harel: Cela passe au vote entre les familles.
Mme Bélec: Entre les familles de garde.
Mme Harel: Et les treize jours conventionnés, vous en avez
discuté entre vous également?
Mme Bélec: Oui.
Mme Harel: Qu'est-ce que ça signifie, les treize jours
conventionnés?
Mme Nadeau-Duval: C'est l'équivalent des treize jours
fériés annuels.
Mme Harel: À ce moment-là, l'ensemble des familles
n'a pas à en discuter avec les parents, à négocier chaque
jour férié. C'est ça?
Mme Nadeau-Duval: C'est ça.
Mme Béiec: C'est ça. De toute façon, au
départ, beaucoup de parents ont ces jours de congé et cela nous
permet de profiter de notre propre famille, parce que nous exigeons
énormément de nos propres familles.
Mme Harel: Quant aux sondages, évidemment, il faut faire
attention. Dans l'énoncé de politique, on nous parle des sondages
SORECOM - je ne sais pas si vous avez eu l'occasion d'en prendre connaissance -
de 1986 et de 1988. En fait, il ne s'agissait pas de sondages selon la
préférence des parents, imaginez, mais plutôt de sondages
qui ont été faits auprès de toute la population du
Québec âgée de plus de 18 ans, avec ou sans enfants. Alors,
il faut faire attention avec les résultats. Ce n'est pas clairement
indiqué que ce n'est pas la clientèle potentielle qui a à
faire garder.
Mme Bélec: C'est ça.
Mme Harel: Mais on voit qu'il y a quand même une
préférence pour la garde en milieu familial pour les enfants en
bas âge.
Mme Bélec: C'est un fait.
Mme Harel: Je ne sais pas si c'est un indicateur puisque c'est un
échantillonnage qui n'est pas vraiment représentatif du choix des
parents. C'est tout de même une indication. Est-ce que vous avez surtout
de jeunes enfants? Les parents font appel à vous surtout pour des
enfants de quel âge, en fait? Quel âge ont les enfants que vous
gardez?
Mme Bélec: Quand je commence à les garder, ils ont
entre deux et trois mois; généralement, c'est à peu
près l'âge auquel ils arrivent. Je suis une famille jumelle, donc,
nous sommes deux adultes reconnus par l'agence qui travaillons ensemble. Cela
nous permet d'avoir un plus grand nombre d'enfants. Bien sûr, je ne vis
pas dans un cinq pièces et demie; j'ai une grosse maison et l'espace
suffisant. Tous ceux que j'ai aujourd'hui et qui ont plus de quatre ans, ce
sont tous des petits que j'ai eus alors qu'ils avaient deux mois.
Mme Harel: Est-ce que c'est la même chose pour vos
compagnes?
Mme Nadeau-Duval: Oui.
Mme Harel: Je pense que Mme Géllnas veut...
Mme Gainas (Johanné): Oui. Mme Harel: ...dire quelque
chose.
Mme Gélinas: Quant à moi, cela varie de dix-huit
mois jusqu'à sept ans; à un moment donné, j'ai eu un
groupe homogène qui avait davantage le même âge; cela
varie.
Mme Harel: C'est vous qui décidez de les garder à
compter de dix-huit mois ou ce sont les parents qui vous les confient à
dix-huit mois?
Mme Gélinas: Non, j'en ai eu des plus jeunes; j'en ai eu
à compter de trois mois, sauf elle qui est arrivée à
dix-huit mois.
Mme Harel: Est-ce que vous pensez - c'est presque évident
que votre demande de ratio de cinq, sans compter les enfants d'âge
scolaire, va être retenue parce que je pense que c'est raisonnable et que
ce serait impossible qu'à la suite de la commission, ce ne soit pas
modifié par Mme la ministre - qu'il devrait y avoir un ratio plus bas
pour les poupons?
Mme BéJec: J'aime beaucoup avoir deux enfants qui sont
près, qui ont des âges... Présentement j'en ai un de sept
mois et l'autre de huit mois et demi. Parce que cela leur permet de vieillir
ensemble et cela fait un groupe. C'est sûr qu'un bébé tout
seul est à part du groupe. Alors, j'ai deux groupes: un groupe de plus
âgés et un groupe de plus petits. Et je préfère
cette formule-là. Quant aux poupons, deux avec des plus grands, bien
sûr, quand ils sont intégrés à un autre groupe
d'âge... Deux poupons, c'est bien parce que ça leur permet de
vieillir ensemble.
Mme Harel: En avez-vous déjà gardé plus que
deux?
Mme Bélec: Oui. J'en ai déjà eu quatre et le
plus vieux avait sept mois. Et cela va très bien parce que j'ai fait de
mes journées... Ils sont ma raison d'exister, si l'on veut, de 8 heures
à 19 heures. Ma vie est organisée autour d'eux. J'ai même
délégué l'entretien de ma maison. Alors...
Mme Harel: Vous avez quelqu'un qui vient pour l'entretien?
Mme Bélec: J'ai quelqu'un qui vient pour l'entretien de la
maison. Je ne fais que ça. Je ne m'occupe que d'eux. Et, dans ces
conditions-là, garder quatre poupons, c'est très facilement
réalisable.
Mme Harel: Est-ce que vous pouvez déduire de vos revenus
imposables les frais d'entretien de la maison?
Mme Bélec: Oui, ça serait...
Mme Harel: Oui. Et les 12 % d'administration aussi?
Mme Bélec: Aussi.
Mme Harel: Je ne sais pas si l'une ou l'autre d'entre vous a
autre chose à nous confier sur l'expérience que vous faites. Je
ne sais pas si Mme Simard... Parfois, on discute seulement avec les personnes
qui ont déjà pris la parole. Alors, je ne sais pas si l'une ou
l'autre d'entre vous a un autre commentaire à nous faire avant qu'on
termine.
Mme Bélec: J'aimerais beaucoup ajouter une toute petite
chose en rapport avec le ratio d'un pour cinq. J'aime beaucoup le cinq parce
que les jeux coopératifs - les jeux qu'on fait dans les activités
- impliquent deux personnes. Et c'est beaucoup plus intéressant pour un
enfant quand l'adulte qui s'en occupe joue avec lui. Alors, avec quatre
enfants, ils sont déjà deux par deux. Cinq enfants, cela permet
à la personne qui s'en occupe de participer activement. Et cela est
très intéressant quant aux relations et aux résultats que
l'on obtient par le biais des activités.
Mme Harel: Oui, je pense que Mme Gélinas voulait
compléter. . Mme Gélinas: C'est que le cinquième enfant,
justement, nous permet d'avoir un revenu qui fait qu'on n'a pas besoin d'aller
trouver quelque chose ailleurs et qui donne un salaire normal comme pour tout
travailleur.
Mme Harel: Donc cinq incluant les vôtres, sans prendre en
considération les deux d'âge scolaire qui viennent après
les heures de classe. Est-ce bien ça? C'est la demande. Mme Bélec
ou Mme Simard, c'est bien ça?
Mme Bélec: C'est ça.
Mme Simard (Diane): Je voudrais dire que, des fois, les
responsables de famille de garde ne veulent pas prendre les enfants d'âge
scolaire parce que ça coupe les enfants qui sont là à la
journée. Si on pouvait avoir des enfants d'âge scolaire tout en
ayant nos enfants... Moi aussi, je suis famille jumelle. J'en ai d'âge
scolaire, mais seulement après l'école. J'en ai un qui vient
dîner aussi, mais qui m'empêche de garder un enfant à la
journée. À ce moment-là, si on pouvait avoir des enfants
d'âge scolaire qui viennent dîner sans se préoccuper des
enfants qu'on garde à la journée et avoir notre maximum pareil,
je pense que ça serait...
Le Président (M. Bélanger): C'est terminé?
Alors...
Mme Harel: Je vous remercie pour la contribution que vous
apportez aux travaux parlementaires avec l'expérience que vous avez.
Vous jouez un rôle extrêmement important et ce qu'il faut
souhaiter, ce n'est pas simplement qu'on vous le dise dans les discours, mais
qu'on vous reconnaisse un rôle social utile à toute la
société et qu'en conséquence, évidemment, vous ayez
ce que, dans notre société, on considère comme
étant l'illustration de cette reconnaissance de rôle social,
c'est-à-dire des conditions salariales adéquates. Je vous
remercie.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. Mme
la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Oui, M. le Président. Ce que je
retiens, finalement, de votre exposé c'est que, quels que soient les
moyens que vous vous donniez, les choix que vous décidiez, c'est
à la condition que ces choix soient faits de façon
démocratique. Dans ce sens, si vous décidez, par exemple, de vous
donner des règles internes, si vous décidez de fixer des tarifs,
alors, il faut que ce soit fait par l'ensemble, par la majorité et,
à ce moment-là, qu'on ne vous l'impose pas au nom de l'autonomie
que vous réclamez. C'est tout à fait important et j'irai toujours
dans le sens de l'autonomie des responsables des services de garde en milieu
familial. Merci.
Mme Nadeau-Duval: Merci.
Le Président (M. Bélanger): Merci. La commission
des affaires sociales remercie les responsables des familles de garde
accréditées aux agences en milieu familial des régions 03,
04 et 05 et appelle à la table les représentants des agences de
garde en milieu familial de la région 02. Nous suspendons pour le temps
de la transition.
(Suspension de la séance à 12 h10)
(Reprise à 12 h 11)
Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il
vous plaît!
Je demanderais à chacun et chacune de bien vouloir reprendre sa
place. Nous accueillons à la table des témoins les Agences de
garde en milieu familial de la région 02. Bonjour, mesdames. Dans un
premier temps, je vous prierais de vous présenter et d'identifier vos
porte-parole. Dans la période de discussion avec les parlementaires,
c'est-à-dire après les vingt minutes qui vous sont
allouées pour votre présentation, je vous demanderais, lorsque
vous devrez prendre la parole, de bien vouloir vous identifier et ceci, pour
les fins de transcription auJournal des débats. Je vous prierais
donc de procéder.
Agences de garde en millieu familial de la
région 02
Mme Hébert (Lyse): Merci, monsieur, Mme la ministre,
membres de la commission. Lyse Hébert, agence de garde Les Souriceaux,
région 02. À ma droite, Mme Carole Trottier, parent utilisateur,
de la région 02 et Mme Aline Fortin, directrice de l'agence de garde La
Bambinerie, région 02. Je vais commencer par vous lire un peu
l'introduction, mais je ne ferai pas une lecture complète du
mémoire. Vous l'avez devant vous. On en fera un résumé et
on ressortira les points qui nous ont posé des questionnements lors de
la lecture de l'énoncé de politique.
Le document d'orientation que la ministre déléguée
à la Condition féminine soumet à la consultation est un
document qui semble passer sous silence plusieurs éléments
problématiques. Le document ne dit pas tout, nous semble-t-il, sur des
aspects qui pourraient difficilement trouver éventuellement une
application équitable entre les services de garde à l'enfance.
Nous ne voulons pas manquer l'occasion qui nous est offerte de faire ressortir
les éléments qui nous apparaissent problématiques. Nous ne
saurions souscrire, pour l'instant, aveuglément à un
énoncé sans connaître toutes les implications de ce qui
n'est pas dit dans le document d'orientation.
Le premier point, bien évidemment, c'est le ratio qui, pour nous,
ne semblait pas clair à la lecture de l'énoncé de
politique, parce qu'on nous disait: "En augmentant de quatre à six le
nombre d'enfants susceptibles d'être gardés par une personne
lorsque au moins deux des enfants gardés sont d'âge scolaire."
Aucunement, dans ces lignes n'est-il spécifié: Est-ce que les
enfants d'âge scolaire seraient ceux de la responsable de famille de
garde ou ceux de parents? Bon, pour nous, déjà, il y avait une
question. Le ratio un pour quatre était déjà un statu quo
et était déjà ce que nous vivions en agence implicitement
depuis longtemps. Il n'y avait aucune progression à ce niveau. Au point
de vue économique, il est vrai que pour une RFQ qui recherche une
autonomie financière, cela devenait important d'avoir un
cinquième enfant et le ratio un pour quatre nous apparaissait, dans un
deuxième temps, très discriminatoire aussi face à la garde
au noir qui stipule un pour neuf, sans parler d'âge des enfants
gardés et sans inclure les enfants de la gardienne qui le fait aussi au
noir.
On se posait aussi la question: Si une RFG a chez elle trois enfants
d'âge scolaire, qu'est-ce qu'on fait avec un ratio un pour quatre et deux
enfants d'âge scolaire? Doit-on la priver du revenu potentiel d'un enfant
d'âge scolaire parce qu'elle a le malheur d'être plus disponible et
d'avoir trois enfants à elle d'âge scolaire? Et le ratio un-cinq
ne sous-tend pas, pour les agences, une obligation pour une responsable de
famille de garde d'avoir à garder cinq enfants. C'est une
possibilité qu'on peut lui offrir, compte tenu de
ses locaux, compte tenu de son organisation et de sa compétence
aussi. On n'imposera pas un-cinq à tout le monde. La RFG qui veut garder
deux enfants a tout à fait le droit de le faire, mais celle qui se sent
la capacité et la possibilité de le faire pour cinq, c'est de lui
donner l'occasion de le faire et aussi d'y trouver son compte
financièrement.
Maintenant, on va arriver au mode de fonctionnement d'une agence. Dans
notre région, il y a des agences qui perçoivent
complètement la tarification des parents et qui la retournent par
dépôts-salaires, si l'on veut, à leurs responsables de
famille de garde. Dans l'énoncé de politique, on nous disait
qu'une telle mesure pouvait être désincitative. À la
lecture de l'énoncé de politique, nous avons fait, bien
sûr, des rencontres maison avec nos RFG. Pour elles, ceci n'est pas un
désincitatif à la garde reliée à une agence. Elles
reçoivent régulièrement leur salaire toutes les semaines.
Elles n'ont pas de processus de négociations à faire à la
baisse. Elles ne deviennent pas du "cheap labour" qu'on négocie tout le
temps sur les frais de garde et ce n'est pas la course, à
l'intérieur d'une agence, pour trouver la perle rare mais qui demande le
moins cher possible. Les parents et les RFG décident eux-mêmes de
la tarification annuelle. Il y a entente là-dessus. Chez nous, cela se
fait dans une assemblée générale et la tarification est la
même pour tout le monde. Le parent sait ce qu'il a à payer. Il
reçoit régulièrement des états de compte et n'a
plus à se soucier et à comptabiliser les journées de
garde; c'est fait directement à l'agence.
Il n'y a pas non plus de place à l'interprétation sur les
journées gardées et sur les journées
déclarées. Tout est clair et tout ce qui est à payer est
payé et les reçus sont en fonction du coût réel des
services de garde qui ont été offerts aux parents durant
l'année. Cela a une incidence aussi sur la qualité des services
que la RFG a dans sa relation avec l'enfant du parent. Elle ne connaît
pas la fréquence des paiements des parents, elle n'est pas privée
d'un revenu et cela n'entache pas la relation directe qu'elle a avec l'enfant
qu'elle garde. On est tous un peu humaines, on aime bien avoir son salaire
à la fin de la semaine et, quand on n'a pas à courir
après, c'est bien évident que tout se passe dans le meilleur des
mondes.
Un autre avantage que les RFG découvraient à ce mode de
fonctionnement, c'est aussi qu'elles avaient l'impression d'appartenir à
un cadre structuré, de faire partie d'un organisme qui leur donnait des
services et qui les protégeait. Ce qui est très avantageux pour
elles. Pour les parents, bien évidemment, cela allège le fardeau
famille, garde d'enfants et travail. Quand on sait ce qu'on a à payer,
que l'on sait que c'est fait régulièrement et qu'on a le compte
exact de ce que l'on doit, sans se soucier de le calculer, déjà,
pour le parent, c'est un plus.
Pour l'agence, le fait de percevoir la tarification à l'agence,
c'est une façon d'avoir un lien direct avec les parents, parce que, bien
souvent, le lien est téléphonique, alors cela nous permet d'avoir
un lien direct, d'avoir aussi une discussion directe sur les services que l'on
offre et de s'ajuster en fonction de ce que les parents nous rapportent comme
"feedback". En conséquence, c'est ce que nous avions à dire sur
le mode de fonctionnement.
Le mode de financement. Pour certaines agences, elles y trouveraient
sûrement leur compte dans ce nouveau mode de fonctionnement, mais pour
d'autres agences ce mode de fonctionnement devient pénalisant. Où
il devient pénalisant, c'est peut-être le plus en région.
D'une part, les 20 000 $, c'est bien évident que pour une agence de 50
places et une agence de 120 places les frais directs ne sont pas les
mêmes. Il y a sûrement un coût administratif relié au
nombre de places qui est plus énorme pour une agence de 120 places que
pour une agence de 50 places.
Pour ce qui est du montant de 275 $ année-enfant, c'est bien
évident que, s'il est relié aux places au permis, cela pose moins
de problèmes. Mais s'il est relié au taux de
fréquentation, sera-t-il ajusté au taux de fréquentation
que l'on doit retrouver dans le rapport annuel, mais qui représente le
taux de fréquentation de l'année précédente ou
sera-t-il ajusté à celui que l'on pourra anticiper? En tout cas,
c'est très dur pour une agence de faire des prévisions
budgétaires à partir de ça et de développer aussi
de nouveaux services, si elle entend le faire.
Pour ce qui est de la famille réelle un-quatre en petite
région, devra-t-on maintenant ne chercher que des célibataires
qui peuvent garder quatre enfants? Devra-t-on aussi, d'une part,
pénaliser celles qui veulent en garder un ou deux, ou, pour que notre
famille soit rentable, devra-t-on éviter d'ouvrir dans des petites
municipalités où, des fois, trois places ou deux places seulement
sont nécessaires pour donner le service, surtout dans une agence comme
la nôtre - je fais peut-être un cas d'espèce - où
l'on doit couvrir un paquet de petites municipalités et où il
n'est peut-être pas nécessaire d'avoir besoin d'un ratio un-quatre
pour donner le service? Ces parents-là ne seront-ils pas
pénalisés parce qu'ils ne demeurent pas à
côté du siège social de l'agence?
Mors, c'est là-dessus que nous - la réalité en
région - on a accroché: le mode de fonctionnement et la
subvention de poupon. Nous, la subvention de poupon, on n'est pas contre, parce
que ça reconnaît une expertise qu'on a, nous, les agences, sauf
que la crainte qu'on a, c'est que c'est alléchant, pour une responsable
de famille de garde, 5,75 $ de plus. On s'est dit: À un moment
donné, est-ce qu'il n'y aurait pas une discrimination en ce qui concerne
l'autre clientèle? Ne sera-t-on pas à la recherche du poupon? Qui
aura le droit d'en avoir et combien devra-t-on en accorder par agence? Ce
n'est
inscrit nulle part, non plus.
L'aide financière aux parents. Je vais laisser la parole à
Carole Trottier, parce que ça la touche directement. Elle est
concernée par l'aide financière accordée aux parents.
Mme Trottier (Carole): Je vais expliquer un peu comment ça
fonctionne avec l'aide financière. Dans mon cas, j'ai à
travailler le jeudi, le vendredi soir et le samedi toute la journée. Ce
sont des horaires non usuels. Je ne me sens pas marginale pour autant. Je crois
que j'ai droit à un service de garde de qualité, de mon choix. Je
ne vois pas pourquoi je suis pénalisée. Pourquoi est-ce que je
n'ai pas le droit à l'aide financière quand mon enfant passe plus
de cinq heures chez la RFG. Pourquoi n'y ai-je pas droit? Parce que je ne me
conforme pas au 8 à 4 du lundi au vendredi.
Je me fais aussi le porte-parole de toutes les femmes qui, comme moi,
ont des enfants et qui sont peut-être infirmières, travailleuses
de restaurant. Il y a beaucoup d'emplois qui ont des horaires non usuels. Il
peut s'agir aussi d'une famille biparentale, dans laquelle le mari est sur les
"shifts'' aussi. Dans notre réalité, notre vécu quotidien,
en tout cas, dans notre région à nous, ça se vit. Je ne
peux pas donner de pourcentage quant au nombre de familles, mais beaucoup de
gens sont touchés par ça. Pourquoi est-ce qu'on est
pénalisé?
J'ai aussi à travailler dans le temps des fêtes, durant la
semaine de relâche, les vacances; ce ne sont pas des congés pour
moi, je ne suis pas professeur. Je le regrette, mais je ne le suis pas.
Pourquoi est-ce que je suis pénalisée? Pourquoi, quand je suis
une salariée de bas niveau, dois-je payer en services de garde pour cinq
semaines 228 $, quand une autre personne, pour un mois, va payer 80 $ si elle
fait du 8 à 4? Est-ce que j'aurais intérêt à devenir
bénéficiaire de l'aide sociale et à me laisser vivre par
l'État? Ou est-ce que je peux être encouragée à
vouloir me débattre, à gagner ma vie et à assurer une
qualité de vie à mes enfants?
Dans l'énoncé de politique, on dit qu'on va regarder
d'éventuels projets de garde à domicile. Pourquoi, en fin de
compte, chercher de midi à quatorze heures d'éventuels projets,
quand on a déjà sur place les agences de ressources? On couvre
les heures qui sont non usuelles. Pourquoi ne pas s'en servir? Pourquoi ne pas
augmenter la chance des agences de vivre et d'assurer la qualité des
services, parce qu'il reste que c'est un choix, pour nous, en tant que
parents.
Même s'il n'était pas question - peut-être que je
déborde un peu - des horaires, peut-être que c'est un choix, pour
moi, que mon enfant reste en milieu familial et non en garderie. C'est une de
mes convictions personnelles et ça touche bien des gens aussi. La
garderie ne répond pas aux besoins de tout le monde ni au choix non
plus. L'agence a sa raison d'être, a son besoin d'être et il me
semble que l'on doit la développer et la promouvoir.
Je vais repasser la parole à Lyse.
Mme Hébert: Nous sommes rendus au rôle et aux
pouvoirs de l'agence. À la lecture de l'énoncé de
politique, on peut lire: Les agences, dans le cas des services régis par
la lof, peuvent apporter un soutien technique et professionnel. Dans l'esprit
de la loi 77, on lisait très bien "doit". Alors, pour nous, il y a une
nuance, et c'est là qu'on a accroché. Comment cela se fait-il
qu'entre une loi et un énoncé de politique, nos pouvoirs se sont
autant dilués? Et cela revient aussi à la formation et à
nos critères de sélection, en tant qu'agence. Quand tu peux, tu
peux. Quand tu dois, tu dois. Il y a une notion d'obligation quelque part qui
est sous-entendue et sous-jacente. Quand on fait de la sélection dans
une agence et qu'on dit à une nouvelle recrue: Madame, vous devrez
suivre des cours recommandés par l'agence, déjà, cette
petite phrase devient le premier critère de sélection. Si la
personne n'est pas intéressée à se qualifier davantage ou
à donner un service de qualité, bien souvent elle va
répondre: "Très bien, j'y réfléchirai et je vous
rappellerai." Il n'y a jamais de suite. Le fait de mettre "devoir", est un
critère de sélection qui amène la notion de
qualité. Pour les RFG, la formation, ce n'est pas désincitatif
pour elles; au contraire, pour elles, la formation est une valorisation. C'est
reconnaître l'éducation et la valeur de l'intervention qu'elles
font auprès des enfants. Pour elles, c'est une assurance, quand on a
suivi des cours de formation, quand on est allé chercher les
connaissances nécessaires, et, pour le parent, c'est une assurance qu'il
aura un service de qualité. Et où le bât blesse le plus,
c'est évidemment le 1 % de formation qui a été
accordé aux garderies à but lucratif et aux garderies SBL J'ai de
la difficulté à comprendre que dans un énoncé de
politique, on vienne me parler de choix pour les parents quand on offre de la
formation et qu'on exige des qualifications d'une partie d'un réseau de
services de garde et qu'on laisse se détériorer, via la
formation, une autre partie du service de garde.
Comment peut-on parler de choix aux parents quand on leur dira que
maintenant ils ont un réseau de garderies qui est très bien
formé et qualifié et qu'il existe un réseau secondaire
où ils iront à leurs risques et périls. Le comité
de parents qui avait été... en tout cas, pour nous, c'est une
conséquence logique à partir du moment où il n'y a plus de
formation; à partir du moment où tu ne peux plus garantir
à ton parent la qualité de la personne que tu lui offres comme
RFG... cela peut aller dans certaines agences où il y a peu de roulement
de personnel. Chez-nous, toutes nos RFG ont reçu de la formation
à venir jusqu'à aujourd'hui; mais si notre garderie prend de
l'expansion ultérieurement, nous devrons adjoindre de nouvelles
ressources à nos services de garde et là, nous ne pourrons
pas garantir cette qualité autant qu'avant, parce que nous n'aurons pas
été en mesure de vérifier leur formation et nous n'aurons
pas comblé les carences et les lacunes que nous aurons pu
apercevoir.
Le comité de parents qui est mandaté par la loi pour
surveiller le contrôle de la qualité, que devient son rôle
quand il n'y a plus de formation, quand il ne peut plus effectuer de
contrôle de qualité? C'est un rôle un peu bidon. Cela
devient très démotivant et déjà, c'est très
dur, à l'intérieur d'une agence, de mobiliser un
comité-parent quand on a à trouver du monde pour mobiliser un
conseil d'administration.
Le Président (M. Bélanger): Madame, je vous
inviterais à conclure s'il vous plaît.
Mme Hébert: J'aurais peut-être pris plus de temps.
Je m'arrête là parce que de toute façon, la commission a
déjà le reste du texte mais en ce qui concerne la formation, cela
devenait très important pour nous. Nous sommes ici pour avoir les
réponses à nos questions.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie
madame. Mme la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Je vous remercie madame. Je ne reviendrai
pas sur la discussion du rôle de l'agence, puisque vous étiez
présente lorsque j'en ai discuté avec les groupes
précédents. Par contre, je dois vous dire que je suis toujours
étonnée lorsqu'on parle de ratio. Vous savez, depuis le
début de la commission parlementaire, on vient ici et on invoque "au nom
de la qualité"; je dois vous le répéter, parce qu'à
chaque fois, cela résonne dans mes oreilles. On dit toujours: "Au nom de
la qualité, il faut véritablement abaisser les ratios." Tous les
regroupements de garderies sont venus depuis le début de la commission
parlementaire et nous ont blâmés parce qu'on ne baissait pas les
ratios; de votre côté, vous nous dites que pour donner un meilleur
salaire à la responsable des familles de garde, il faut augmenter les
ratios. Je me sens toujours mal à l'aise quand on parle qu'il faut
augmenter le salaire de la responsable des services de garde, donc, il faut
augmenter le ratio. Je me sens toujours mal à l'aise quand on attribue
salaire, augmentation de ratios et, par contre, qualité, baisse de
ratios. Je dois vous dire que c'est difficile pour moi malgré que vous
l'ayiez expliqué tout à l'heure, je me sens toujours un peu mal
à l'aise avec cela.
L'autre affaire, c'est que vous avez parié de la
réglementation... (12 h 30)
Une voix: Est-ce que je peux...
Mme Gagnon-Tremblay: ...c'est-à-dire non pas de la
réglementation, mais dans la politique, on retrouve "peut" à la
place de "doit". Je dois vous dire au départ qu'il n'y a pas de
procès d'intention. Si on a mis "peut", c'est probablement aussi qu'il y
a... Vous savez qu'il n'y a pas actuellement de réglementation
définie. Si on avait mis "doit", peut-être qu'on nous aurait
reproché de vouloir obliger les agences à le faire; là on
a mis "peut", mais cela vous Inquiète parce qu'on aurait peut-être
dû marquer "devrait" à la place de "pourrait". Mais je dois vous
dire qu'au départ, il n'était pas de notre Intention d'exclure
quoi que ce soit ou de jouer sur les mots comme tels, et que cela ne
dénote absolument rien.
Je reviens à votre ratio. Vous mentionnez à la page 5 de
votre mémoire: "Depuis plusieurs années, le Regroupement des
agences de services de garde en milieu familial du Québec revendique un
rapport d'une éducatrice pour cinq enfants d'âge
préscolaire, incluant ceux de la responsable." La proposition de
l'État: une éducatrice pour six enfants gardés, lorsque au
moins deux des enfants gardés sont d'âge scolaire; cela correspond
au statu quo puisque c'est ce qui se vit tacitement, actuellement. Voulez-vous
me dire, par cette phrase, qu'on ne respecte pas actuellement le ratio? Vous me
dites que la proposition gouvernementale, c'est ce que vous vivez actuellement,
c'est ce qui se fait actuellement dans le milieu familial; donc, le statu quo.
Est-ce que c'est bien ce que vous voulez dire?
Mme Fortin (Aline): Honnêtement, dans notre région,
c'est ce qu'on vit. On n'ira pas remplir des maisons d'enfants d'âge
scolaire mais ils sont là. Antérieurement, on avait toujours la
garde de 0 à 12 ans.
Mme Gagnon-Tremblay: Et si on augmente à cinq, est-ce que
cela va se continuer aussi?
Mme Fortin (Aline): II s'agirait de préciser la
réglementation à ce sujet.
Mme Gagnon-Tremblay: Elle l'est actuellement et elle n'est pas
observée.
Mme Fortin (Aline): On aimerait quand même 1-5. Mme la
ministre, j'aimerais apporter une précision également concernant
ce qu'on disait tout à l'heure et ce qui vous étonne toujours,
à savoir que les agences demandent une augmentation de ratio pendant que
les garderies demandent un baisse de ratio. J'aimerais tout de même vous
faire remarquer que nous ne partons pas du même ratio, en garderie et en
agences, et que tout le monde s'entend pour dire que 1-9, cela n'a pas de bon
sens.
Mme Gagnon-Tremblay: Justement, je voudrais apporter certaines
précisions sur 1-9. Je lisais récemment la Loi sur les services
de garde à l'enfance et lorsqu'on parie de services de garde en milieu
familial, cela signifie un service de garde fourni par une personne
physique
contre rémunération, dans une résidence
privée où elle reçoit régulièrement au plus
quatre enfants, incluant ses enfants reçus dans cette résidence
privée ou, si elle est assistée d'une autre personne adulte, au
plus neuf enfants, incluant les enfants de ces deux personnes reçues
dans cette résidence privée et pour des périodes qui
peuvent excéder 24 heures consécutives.
J'ai demandé un avis parce que moi, cela me paraissait clair,
à première vue, que si on devait interpréter cet article,
cela signifiait que pour les familles en milieu familial, on devait tous
respecter ce même ratio. Par contre, d'autres l'interprètent
différemment dans le sens que dès que ce n'est pas dans la garde
reconnue, on peut faire autre chose. Je dois vous dire que je me penche
sérieusement sur cet article pour essayer d'avoir une
interprétation qui soit très claire et qu'on n'ait pas à
revenir sur le sujet de sorte que, dans le milieu familial, que la garde soit
reconnue ou non, on devra, à mon avis, se référer à
cet article. Cela devra être très clair et on devra respecter le
même ratio, que ce soit dans la garde reconnue ou non reconnue.
Mme Hébert: Mme la ministre, qu'est-ce qu'on fait durant
la semaine de relâche, comme cette semaine, où votre ratio n'est
à peu près pas respecté dans tout le Québec? Est-ce
que, pour une semaine durant l'année, on devra priver une RFG toute
l'année de deux enfants d'âge préscolaire parce qu'elle
devra recevoir deux enfants d'âge scolaire au cours d'une semaine durant
l'année?
Mme Gagnon-Tremblay: Non, je pense que ce sont des cas
d'exception. Je ne pense pas que c'est ce qu'on demande.
Mme Hébert: Alors bien souvent aussi, on est
confronté pendant les journées pédagogiques à ce
dilemme parce que, bien souvent, en régions, les services de garde en
milieu scolaire sont plus ou moins bien organisés et c'est nous qui
devons pallier cela.
Mme Gagnon-Tremblay: Je remarque aussi à la même
page de votre mémoire que vous dites: "Le regroupement souhaite un
rapport de cinq enfants par adulte... Une voix: Oui.
Mme Gagnon-Tremblay: ...pour les enfants d'âge
préscolaire, incluant ceux de la responsable de famille de garde, plus
deux enfants d'âge scolaire, sans tenir compte de ceux de la responsable
de la famille de garde. Vous rendez-vous compte que cela peut équivaloir
à neuf enfants?
Mme Hébert: Oui.
Mme Gagnon-Tremblay: Par personne! Neuf enfants par personne!
Mme Hébert: Oui. C'est bien reconnu pour la garde au noir
à la limite.
Mme Gagnon-Tremblay: Oui, mais...
Mme Hébert: Je ne dis pas que c'est l'idéal. Je ne
dis pas que c'est ce qu'on veut, mais on l'admet pour la garde au noir. C'est
quand même ambigu sauf que bien souvent... oui, cela pourrait arriver,
sauf que c'est peut-être pour un quart d'heure ou une demi-heure. Le
temps que l'enfant arrive de l'école et qu'il reparte avec le parent
à 16 il 30 qui va venir chercher l'enfant d'âge
préscolaire. Oui, c'est ce qu'on vit.
Mme Gagnon-Tremblay: Vous vous rendez compte aussi qu'un enfant
d'âge scolaire, cela peut être également pour 4 heures. Cela
peut être aussi pour 12 heures ou 13 heures, pour le dîner. Cela
peut être de 15 heures à 16 heures.
Mme Hébert: Non. À partir de ce moment, non. Quand
un enfant d'âge scolaire doit se faire garder dans une famille pour une
période excédant celle à laquelle il a droit, soit le
dîner ou après l'école, à partir de ce moment, il
est inclus comme un enfant d'âge préscolaire dans le ratio de la
RFG.
Mme Gagnon-Tremblay: Après l'école, cela veut dire
à quelle heure? À quelle heure l'enfant arrive-t-il après
l'école à votre domicile?
Mme Hébert: Cela dépend des commissions scolaires.
Il y en a qui arrivent à 16 heures. Il y en a qui arrivent à 15
il 30.
Mme Gagnon-Tremblay: II peut arriver à 15 heures. Il peut
repartir à 17 heures.
Mme Hébert: Non. En tout cas, pas chez nous, cela ne se
fait pas. Il n'y a pas une école qui finit à cette
heure-là.
Mme Gagnon-Tremblay: J'entends par cela la maternelle ou... Non,
c'est-à-dire que peut-être pas.
Mme Hébert: La maternelle est déjà
comptée comme un préscolaire dans le ratio.
Mme Gagnon-Tremblay: Dans la réglementation
éventuelle, je pense que vous avez parlé tout à l'heure...
C'est madame qui a parlé de la garde occasionnelle. Le fait que vous ne
puissiez garder... Vous n'envoyez pas votre enfant à longueur de
journée mais plutôt selon vos heures de travail. Dans la
réglementation éventuelle, on se rend compte qu'il faudrait
être beaucoup plus souples quant aux règles d'application pour les
personnes qui ont des horaires non usuels. Par
exemple, la semaine de 40 heures. Est-ce que cela veut dire la semaine
de 40 heures répartie sur quatre jours? Il y a des personnes qui peuvent
faire une semaine de 40 heures sur quatre jours? Est-ce que ces règles
devraient être beaucoup plus souples?
Mme Trottier Un horaire non usuel n'est pas nécessairement un
horaire occasionnel.
Mme Gagnon-Tremblay: C'est cela.
Mme Trottier Dans mon temps de garde qui est prévu chez ma
gardienne, dans l'entente que je prends avec elle quand je choisis d'aller avec
telle RFG, la dame connaît mes heures de travail. Ce n'est pas une garde
occasionnelle. C'est une garde régulière avec un horaire non
usuel.
Mme Gagnon-Tremblay: Cela peut être combien d'heures par
semaine, madame?
Mme Trottier Je vais faire mes 40 heures.
Mme Gagnon-Tremblay: 40 heures! Ce qui veut dire, finalement, que
nous devrions assouplir les règles d'exonération, parce que les
règles sont trop rigides actuellement pour vous permettre de
bénéficier...
Mme Trottier On l'espère.
Mme Gagnon-Tremblay: Tout à l'heure, on a beaucoup
parlé de l'administration déléguée et, comme je
vous l'ai mentionné, je ne suis pas contre, sauf que je ne veux pas
qu'on l'impose. Je pense que c'est une question d'autonomie de la part des
responsables des services de garde. Est-ce que, normalement, ce sont... Est-ce
que vous donnez ce service aux responsables?
Mme Hébert: Oui.
Mme Gagnon-Tremblay: Dans votre cas, est-ce que c'est l'agence
qui émet les reçus ou si ce sont les responsables des familles de
garde en milieu familial?
Mme Hébert: C'est l'agence qui produit le calcul du
reçu mais c'est le RFG qui signe son reçu de frais de garde. Tout
le calcul est fait à partir des fiches des parents directement à
l'agence, parce que c'est au RFG à produire son reçu avec son
numéro d'assurance sociale. Ce n'est pas à nous, en tant
qu'organisme, à le faire. Mais le calcul se fait à l'agence,
oui.
Mme Gagnon-Tremblay: Ce qui veut dire que vous les
préparez, mais ce sont toutes les responsables qui émettent leurs
propres reçus.
Mme Hébert: Oui et nous les envoyons directement aux
parents après cela. Alors, le parent n'a pas à courir non plus
après son reçu. Il le reçoit directement chez lui.
Mme Gagnon-Tremblay: Est-ce que c'est un reçu que vous
émettez annuellement, à la veille de la préparation des
déclarations d'impôt?
Mme Hébert: Oui, parce que les émettre
hebdomadairement, il y aurait de la perte et cela deviendrait très
lourd.
Mme Gagnon-Tremblay: Je voudrais parler de la formation. Vous en
avez parlé tout à l'heure en disant qu'on a oublié ou
qu'on n'a pas pensé à la formation pour les agences. Vous n'avez
pas été oubliées et, tout comme les garderies, la
formation était incluse dans la façon de faire le calcul des
subventions accordées aux agences. Je mentionnais aussi qu'il
était important que les responsables d'agence aient une formation
adéquate parce qu'elles devront aussi transmettre cette formation
à leurs propres responsables de famille de garde. Quant à la
formation des responsables de famille de garde - il y a beaucoup de
responsables de famille de garde qui ne gardent pas nécessairement
toujours sur une longue période - quelle sorte de formation voyez-vous?
Comment, par exemple, pouvons-nous accorder un budget spécial à
ces familles, en pourcentage, comme on le fait pour les garderies?
Mme Hébert: Je vais prendre le vécu de mon agence,
c'est bien évident. La façon dont on a procédé,
c'est qu'on a fait des achats de cours. J'ai fait des demandes auprès du
service de l'éducation des adultes de la commission scolaire et aussi
auprès du cégep de ma région. J'ai donné
carrément le contenu du cours dont j'avais besoin, ce que je voulais
comme cours pour mes RFG, quelle information je voulais qu'on leur donne. On
m'a mise en contact avec des professeurs, soit de la commission scolaire ou du
cégep. J'ai élaboré avec eux le contenu des cours et on a
donné ces cours. Mes RFG ont des AEC, des attestations d'études
collégiales en techniques de garde. Aussi, j'ai conclu des ententes avec
le CLSC et avec le département d'orthophonie de Roberval. C'est comme
ça qu'on a procédé. Quand il y avait des coûts pour
les cours qu'on achetait, c'est chaque RFG qui en assumait personnellement le
coût. Parfois, ça leur coûtait de 45 $ à 60 $; elles
le faisaient sans dire un mot parce qu'elles sentaient qu'elles en avaient
besoin. Pour elles, c'était identifier des choses qu'elles savaient
déjà. Bien souvent, quand on élève un enfant, on ne
sait peut-être pas que tel geste qu'on pose avec un enfant, c'est de la
psychomotricité fine, mais se le faire dire, ça valorise et on se
dit: Mon Dieu! j'ai posé un geste concret avec cet enfant et c'est comme
ça que ça se fait et c'est comme ça que c'est!
Mme Gagnon-Tremblay: Dites-moi, quel est le roulement des
responsables de famille de garde? Votre agence n'est quand même pas une
agence nouvelle.
Mme Hébert: Non.
Mme Gagnon-Tremblay: Quelle est la moyenne? Est-ce que vous avez
encore plusieurs familles qui étaient là au tout
début...
Mme Hébert: Oui.
Mme Gagnon-Tremblay: ...et qui s'y retrouvent encore?
Mme Hébert: J'ai les mêmes RFG.
Mme Gagnon-Tremblay: Est-ce qu'il y a beaucoup de mobilité
ou non?
Mme Hébert: Non, très peu de mobilité.
Depuis cinq ans, nous nous sommes adjointes trois nouvelles RFG. Je dois vous
dire que le fait de ne pas voir leur formation reconnue et de ne pas se sentir
reconnues dans l'énoncé de politique, en a démotivé
plusieurs parce qu'elles sentent une discrimination face aux nouvelles RFG qui
pourront se joindre à l'agence. Elles ont dit: Nous, nous sommes
allées chercher, sur une base volontaire, de la formation; on y a cru.
Maintenant, pour quiconque viendra se joindre à l'agence, ce ne sera
plus nécessaire, ce ne sera plus obligatoire.
Mme Gagnon-Tremblay: Dites-moi ce qui vous fait dire, à
vous aussi, que dans l'énoncé de politique on ne reconnaît
pas la responsable de famille de garde?
Mme Hébert: Quand on dit "aucune... Mme Gagnon-Tremblay:
Je suis étonnée.
Mme Hébert: ...formation n'est requise*. Quand on me dit
"peut" ou "doit", c'est bien de valeur, mais peut-être qu'on aurait
dû me mettre un feuillet explicatif à côté de
ça, mais j'y ai vu une diminution du soutien et de l'appui que nous
devions apporter à nos RFG. Je n'ai pas été capable de
lire entre les lignes que c'était peut-être "doit" qui
était sous-entendu, mais ce "peut", pour nous, à la lecture de
l'énoncé de politique - non pas seulement pour moi, mais pour
nous aussi qui sommes ici - nous y avons vu une diminution de la qualité
des services, de la formation et du contrôle qu'on devait avoir face
à nos RFG.
Mme Gagnon-Tremblay: Est-ce que vous comprenez comment on peut se
permettre de développer ce service au cours des prochaines
années, comme on a l'intention de le faire, sans se soucier de la
qualité qui doit exister dans ce service?
Mme Hébert: Bien, je vais être honnête avec
vous, Mme Gagnon. À un moment donné, nous avons vu notre
rôle réduit à celui d'agence de recrutement. On s'est vu
administrer des chèques d'aide financière à tous les
quinze jours et, même nous, les directrices, assises autour d'une table,
nous nous demandions ce qui allait aussi nous arriver.
Mme Gagnon-Tremblay: Je suis vraiment désolée que
vous ayez cette perception. Et je vous dis franchement qu'en lisant les
mémoires...
Mme Hébert: Nous aussi, nous étions très
désolées de percevoir ça. C'est pour ça qu'on est
ici, d'ailleurs.
Mme Gagnon-Tremblay: ...je me suis dit: C'est incroyable. Je me
suis dit qu'après l'annonce de la politique, on aurait pu donner
davantage de références, pour vraiment savoir ce qu'était
exactement la politique et donner plus de précisions. J'ai
été vraiment étonnée, en lisant les
mémoires, de constater qu'on croyait que l'on voulait réduire
l'autonomie des responsables et enlever le rôle des agences. Vous
comprenez qu'on ne développerait pas autant ce secteur, si
c'était là notre intention. (12 h 45)
Mme Hébert: Je suis bien contente de vous l'entendre dire
mais c'était quand même notre perception.
Mme Gagnon-Tremblay: Oui, madame, allez.
Mme Fortin (Aline): Tout à l'heure vous disiez que la
formation était prévue dans le budget de fonctionnement.
Mme Gagnon-Tremblay. De la même façon que pour les
garderies.
Mme Fortin (Aline): Que les garderies? D'accord. En fait, quand
je regarde les subventions qui sont données et la façon dont
elles sont données aux agences, je remarque qu'il y a une nette
diminution de budget au moment où on arrive à, disons, 100 places
au permis. Je pense, d'ailleurs, que la subvention de 275 $ par enfant est
donnée selon le taux d'occupation. Est-ce selon le taux d'occupation ou
si c'est à 100 %?
Mme Gagnon-Tremblay: Les 275 $ sont donnés par
place-année.
Mme Fortin (Aline): Par place-année? D'accord. C'est
parfait.
Mme Gagnon-Tremblay: Par place-année et non selon le taux
d'occupation.
Mme Fortin (Aline): Cela arrange un peu le
budget.
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Maisonneuve.
Mme Harel: Merci, M. le Président. Je veux saluer Mmes
Hébert, Fortin et Trottier et vous signaler que je compte beaucoup sur
l'échange de vues que nous allons avoir, notamment en matière de
ratio. Je crois qu'il faut clarifier cette question. Mme la ministre avait
l'air de s'étonner que le réseau des agences de garde en milieu
familial réclame le ratio un-cinq au moment où les garderies
réclament une diminution du ratio. Et je pense que c'est vous, Mme
Fortin, qui, à bon droit, lui avez rappelé que même avec
votre ratio un-cinq, ce ne serait même pas l'équivalent de la
diminution qui est réclamée et qui n'est pas encore offerte. En
d'autres termes, au niveau scolaire, le ratio est de un-vingt et ce que le
milieu réclame, c'est un-quinze. Quant aux poupons, le ratio est de
un-cinq. Vous voyez, un-cinq, ce que vous n'avez même pas pour les
enfants d'âge préscolaire, et, ce que le milieu réclame
c'est un-trois. Quant aux enfants d'un an et demi à deux ans et demi, le
ratio actuel est de un-huit.
Ce que le milieu réclame, c'est un-cinq pour les un an et demi
à deux ans et demi, et un-sept, pour les deux ans et demi à cinq
ans - vous voyez? - et un-huit pour les cinq à six ans. La diminution
qui est réclamée est loin d'être acquise. Au cours des
débats qui ont eu lieu pendant deux semaines, même le Conseil du
patronat est venu dire qu'un-cinq pour les poupons, c'était trop. C'est
la première fois en huit ans que je vois le Conseil du patronat demander
quelque chose au gouvernement pour dépenser de l'argent. Vous voyez
qu'il faut vraiment que les ratios soient trop élevés.
Même à ça, ce qui est réclamé et qui
est loin d'être acquis, est au-delà de ce ratio d'un-cinq pour le
préscolaire que vous demandez. Vous n'avez pas à en être
gênées, vraiment pas, mais j'ai l'impression qu'on veut vous
culpabiliser sur le thème "c'est juste pour faire de l'argent". C'est un
peu ça que j'entends comme argument. Il faut clarifier une chose, par
exemple. Ce sont des ratios différents et c'est certain qu'ils sont en
deçà, même, de ce qui est réclamé dans les
garderies, étant donné que l'éducatrice dans la famille
doit quand même assumer plusieurs tâches, entre autres, de
cuisinière et possiblement aussi d'entretien. Je veux savoir si vous
convenez que le ratio ne peut pas être le même que dans le service
de garderie, compte tenu de l'hétérogénéité
des tâches qu'assume une famille d'accueil.
Est-ce qu'on peut comprendre que ce que vous revendiquez, c'est cinq
enfants d'âge préscolaire, y compris ceux de la famille, plus deux
d'âge scolaire? Est-ce que c'est ça que vous demandez?
Mme Fortin (Aline): Notre position, régionalement, c'est
ça.
Mme Harel: Cinq enfants d'âge préscolaire plus
deux.
Mme Fortin (Aline): Oui.
Mme Harel: C'est ça. Alors, ce n'est pas neuf dans le
fond.
Mme Fortin (Aline): Non, non.
Mme Harel: Possiblement. C'est sept. Voilà. Je pense que
ça valait la peine de le clarifier. Vous avez insisté beaucoup
sur le "peut" et le "doit", dans votre mémoire, aux pages 18, 19 et
suivantes. Je constate, je prends acte que pour Mme la ministre, ce n'est pas
différent. Ils ont mis "peut" mais, dans le fond, Ils auraient pu mettre
"doit". Pouvez-vous nous expliquer pourquoi il faut garder "doit" et quelles
sont les conséquences du fait de substituer "peut" à "doit"?
Mme Trottier Je vais donner mon commentaire là-dessus. Vous savez
que, dans des regroupements où tout est volontaire, on a toujours de la
difficulté à avoir des gens et à s'assurer de la
qualité. Si on veut organiser un cours et qu'il n'y a que trois RFG qui
le veulent, combien cela va-t-il coûter? Il est impossible de le donner.
Quand on dit: On doit faire quelque chose. On s'implique, on s'associe à
un groupement, parce que ça nous intéresse et qu'on veut le
faire. S'il y a des obligations qui s'y rattachent, si on décide
d'embarquer, on les assume. En tant que parent, en tout cas, je peux exiger une
qualité de services, d'accord? Définir où sont les termes,
cela reste entre moi et ma gardienne, mais je tiens à savoir que ma
gardienne prend de la formation parce qu'on a toujours besoin de se former, que
ce soit dans n'importe quel travail, X, Y ou Z. Une formation est toujours
bienvenue. C'est un recyclage qui se doit d'être.
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Chicoutimi.
Mme Harel: Merci Mme Trottier. Je vais terminer et passer la
parole à ma collègue.
Le Président (M. Bélanger): S'il vous
plaît.
Mme Harel: Dans le mémoire, j'ai beaucoup aimé que
vous nous illustriez des cas. Cela nous fait bien comprendre. Notamment, vous
dites à la page 6 que la même dame qui va garder trois enfants,
dont deux de la même famille, recevra brut à la fin de la semaine,
170 $ et devra émettre des reçus parce qu'elle est reconnue par
l'agence, tandis que sa voisine d'en face qui va en garder neuf, donc qui ne
sera pas régie et
qui pourra demander un tarif moindre de 10 $, en s'assurant qu'il n'y
aura pas de reçu d'émis par ailleurs, pourra faire un revenu de
450 $ par semaine. Ces chiffres-là illustrent entièrement
l'équivoque de la reconnaissance du rôle de la garde en milieu
familial. Si le rôle est tant promu, comment se fatt-il que les effets
pervers des situations font qu'à la fin le rôle est reconnu, mais
que le revenu ne l'est pas?
Mme Hébert: D'où l'importance du cinquième
enfant aussi, Mme Harel. Quand on volt des revenus comme ça! Je veux
bien croire que c'est "plate" de parler d'argent et que l'on devrait toutes
garder des enfants par bonté d'âme, mais tout le monde travaille
aussi pour avoir une reconnaissance salariale au bout. On est toutes là
et on aime bien toucher notre chèque de paie le jeudi et qu'il soit
relié à la valeur de ce que l'on fait. Quand on regarde ce qu'une
gardienne au noir peut aller se chercher par semaine en ne déclarant pas
bien souvent, ses revenus, en ne donnant pas de reçu, comparé
à la garde reçue et reconnue, oui, il y a une
inéquité quelque part.
Mme Harel: Mme la députée de Chicoutimi aimerait
poursuivre la discussion avec vous. Je vais en profiter pour vous remercier et
vous dire que votre mémoire nous apporte vraiment un éclairage de
la réalité telle que vécue par les familles. Je vous en
remercie.
Mme Hébert: Merci.
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Permettez-moi
d'abord de saluer ces dames qui sont de la région 02, de ma
région donc. Je dois dire, à mon grand regret, que je n'ai pas eu
le bonheur de pouvoir suivre de façon assidue les audiences parce que,
ce matin encore, j'étais à une autre commission et comme on est
peu nombreux - tous nous le savons - comme membres de l'Opposition, on a au
moins deux commissions, en plus évidemment des autres travaux.
Cependant, j'ai eu l'occasion de prendre connaissance de votre mémoire.
J'ai rencontré un certain nombre de personnes également. Je vais
essayer d'aller directement à certaines questions que vous soulevez et
j'aurais souhaité que la ministre s'arrête un peu sur ces
éléments, mais elle ne l'a pas fait. Cela me préoccupe un
peu pour différentes raisons. Je vais commencer par l'aide
financière aux parents qui font garder des enfants d'âge scolaire
et la disparité que ça entraîne par rapport aux
déductions possibles, la reconnaissance pour fins de garde en vertu de
la fiscalité.
Je sais que ce n'est pas du domaine de la ministre de décider
que, lorsqu'il y a plus de cinq heures de garde pour un enfant d'âge
scolaire, le parent aurait droit à la totalité, au même
titre que celui qui fait garder son enfant à temps plein. Il a seulement
droit à 50 %, si je ne m'abuse, et c'est ce que vous soulevez. J'aurais
aimé que la ministre prenne position là-dessus et nous dise si
elle a l'Intention d'en saisir le ministre du Revenu qui est responsable de ce
genre de question. Mais elle ne l'a pas soulevée. Est-ce que ce sont des
situations qui se présentent fréquemment et couramment chez vous?
Quelle est la proportion des enfants qui sont gardés chez vous qui se
situeraient à peu près dans cette catégorie?
Mme Fortin (Aline): C'est une grande proportion des enfants. En
fait, ce qui arrive, c'est qu'à un moment donné les parents vont
quitter l'agence alors que les enfants atteignent l'âge de dix ans, parce
que les frais de garde deviennent trop onéreux. Alors, ils sont
obligés de responsabiliser les enfants à dix ans.
Mme Blackburn: Alors, à dix ans, c'est la clé dans
le cou?
Mme Fortin (Aline): C'est la clé dans le cou.
Mme Blackburn: D'accord. Vous connaissez également - je
pense que c'est dans l'autre mémoire que cela été
soulevé - les carences des services de garde en milieu scolaire. La
ministre invoquait - j'étais ici à l'ouverture et j'en ai
été amusée - l'autonomie des commissions scolaires qu'on
avait voulu respecter d'une certaine manière, en ce sens qu'on ne leur
avait pas imposé l'exigence d'organiser, à la demande des
parents, des services de garde en milieu scolaire, alors que le projet de loi
dans lequel on retrouve cet article est parmi les plus centralisateurs que le
réseau scolaire n'ait jamais connu et c'est peut-être
là-dessus qu'on a voulu leur laisser un peu plus d'autonomie.
Une autre question: le financement des agences et l'uniformité de
la formule, c'est-à-dire une formule mur à mur, soit de
considérer les mêmes normes de financement, que vous soyez
à Chibougamau ou que vous soyez sur la rue Saint-Denis à
Montréal. Cela pose un problème de disparité dans les
moyens. Est-ce que cette revendication a été reprise par d'autres
agences dans d'autres régions? Est-ce qu'on a pu évaluer les
différences dans les coûts de fonctionnement, selon qu'on est plus
ou moins éloigné ou que la région est étendue?
J'imagine qu'il y en a. Cela tombe sous le sens
Mme Fortin (Aline): C'est ça. Vous connaissez notre
région.
Mme Blackburn: Oui.
Mme Fortin (Aline): Vous savez que d'un village à un
autre, il y a du territoire à couvrir.
Mme Blackburn: Oui, il y a en qui trouvent ça drôle,
mais je sais que c'est grand.
Mme Fortin (Aline): Finalement, cela pose une difficulté
de financement quand il s'agit d'aller reconnaître, par exemple, une
famille de garde à plus de 20 kilomètres, disons, et pour un seul
enfant. Donc, sur le mode de fonctionnement qui est proposé, on se pose
toujours la question à savoir si on aura l'argent pour superviser
ensuite cette famille qui recevra peut-être un enfant quand j'ai la
possibilité, sur 100 places, d'avoir la subvention de fonctionnement
pour 25 RFG? Chez nous, on en aurait besoin de 4.
Mme Blackburn: C'est donc dire que le risque qu'on court est que
la distance soit trop grande entre l'agence et l'éventuelle famille de
garde - je pense à des régions et à des villages plus dans
l'arrière-pays - et cela veut donc dire qu'à un moment
donné on va au plus pressé dans les grandes agglomérations
et on prive ces milieux de services de garde.
Mme Fortin (Aline): Oui.
Mme Blackburn: Je sais que Mme la ministre n'a pas soulevé
cet aspect de votre mémoire, je trouvais que c'était important
parce que c'est toute une question d'équité dans la
répartition des ressources et d'accessibilité aux ressources.
Quand on ne vous donne pas des moyens comparables, il est évident qu'il
risque de se produire des disparités. Une autre question: Dans la
plupart des agences du Québec, comment fonc-tionne-t-on dans la
négociation avec les parents? De même, est-ce que c'est à
peu près égal partout ou est-ce que c'est l'agence, finalement,
qui recueille les frais de garde et qui les redistribue ensuite aux
familles?
Mme Fortin (Aline): De plus en plus, les nouvelles agences
tendent à fonctionner, à administrer entièrement les frais
de garde, à faire l'administration totale de fonctionnement. Maintenant,
si je regarde la région 02, c'est 50-50.
Mme Blackburn: Ce ne sont pas toutes les agences...
Mme Fortin (Aline): Non. Je vais vous expliquer. Nous, à
un moment donné, on s'est retournées et on a décidé
de fonctionner comme ça, tandis que d'autres ne l'ont pas fait, parce
que nous sommes de vieilles agences. On a maintenant huit ou neuf ans de
fonctionnement.
Mme Blackburn: Dans le cas où ce sont les agences qui font
entièrement l'administration, qu'arrive-M dans le cas de parents un peu
plus négligents, qui arrivent en retard, qui sont allés faire un
tour à la brasserie avant de rentrer?
Mme Hébert: C'est l'agence qui fera la démarche
pour percevoir les comptes.
Mme Blackburn: Un des objectifs de la politique, c'est
d'augmenter de façon considérable les places en agence de garde,
en famille. Est-ce que vous pensez que la politique contient des
éléments qui vont vous permettre effectivement d'augmenter de
façon considérable les places en milieu familial ou si ça
risque d'être le statu quo? Autrement dit, est-ce que la politique offre
des avantages tels que ça vous donne une chance de pouvoir mieux
recruter, de recruter davantage et de meilleure qualité ou si ce n'est
pas chose acquise?
Mme Hébert: Bon, l'énoncé de politique,
comme je le disais tout à l'heure à Mme la ministre, finalement,
la perception que nous en avions eue après, c'était que nos
rôles et pouvoirs étaient de beaucoup diminués. C'est la
perception que nous en avons eue quand nous en avons fait la lecture.
Développer, mais développer quoi et comment, si notre rôle
diminuait pour autant et si nous ne pouvions plus exercer une formation et un
contrôle de qualité? Quelle sorte de réseau
développait-on à côté d'un réseau qui avait
une qualification et une formation reconnues?
Mme Blackburn: Cela ne vient pas, pour autant, poser des
contraintes réelfes au recrutement de familles, ça pose des
questions quant à la qualité des services.
Mme Hébert: Notre mode de fonctionnement, en tout cas
celui que nous vivons présentement, est très bien perçu,
et c'est une raison pour laquelle les RFG adhèrent à nos agences.
Ce n'est sûrement pas contraignant pour elles de le faire parce qu'elles
auraient la possibilité de le faire au noir.
Mme Blackburn: Quels sont les avantages réels d'une
famille qui décide de faire de la garde en adhérant à
l'agence par rapport à celle qui le fait au noir?
Mme Hébert: Leurs avantages...
Mme Blackburn: Vous dites au noir, c'est volontairement, comme
ça s'est toujours fait.
Mme Hébert: Volontairement, en réseau... Mme
Blackburn: En réseau.
Mme Hébert: Finalement, ce que les RFG viennent chercher
dans une agence, c'est une organisation structurée, une formation, une
valorisation du travail qu'elles effectuent, c'est
le sentiment d'appartenance à un groupe. Quand on est mère
de famille ou qu'on est RFG, on est toujours un peu victime de l'isolement
qu'on vit chacune chez soi. Le fait d'appartenir à une agence brise cet
isolement. La formation qu'on donnait à nos RFG à toutes les
semaines - peut-être pas toutes les semaines dans une année -
déjà suscitait des rencontres, des amitiés, et 1 y a une
dynamique à l'intérieur de l'agence. C'est ça, aussi,
qu'elles viennent chercher chez nous.
Mme Blackburn: D'accord.
Mme Hébert: Elles venaient chercher de l'équipement
aussi.
Mme Blackburn: La politique actuelle, est-ce que ça risque
de changer cette dynamique? Je comprends l'intérêt, je connais les
agences.
Mme Hébert: Nous croyons que oui.
Mme Blackburn: Vous dites... L'intérêt - c'est
ça, ma question précise - risque-t-il d'être moins grand de
la part des familles?
Mme Hébert: Effectivement, oui.
Mme Blackburn: C'est ça votre évaluation, c'est
ça que je voulais vérifier.
Le Président (M. Bélanger): En conclusion, Mme la
députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Écoutez, une toute dernière
question. Cela m'a été soumis par une famille, et je vous la pose
même si j'ai trouvé que c'était un peu forcé, mais
quand même, c'est une interrogation qui était posée. Dans
le cas où une famille de garde ajoute du personnel parce qu'elle a plus
de cinq enfants, le personnel, c'est elle qui le choisit, j'imagine, ou si
c'est l'agence?
Mme Hébert: II doit être accrédité par
l'agence aussi.
Mme Blackburn: C'est l'agence qui choisit le personnel...
Mme Hébert: Elle peut nous proposer quelqu'un, mais nous
devons dire oui ou non, s'H répond aux critères.
Mme Blackburn: C'est dans vos règles
générales.
Mme Hébert: C'est de la régie interne.
Mme Blackburn: C'est de la régie Interne pour chacune des
agences.
Mme Hébert: Oui.
Mme Blackburn: Je voudrais vous remercier de votre
présence à cette commission. Je voudrais formuler
sincèrement le voeu que Mme la ministre se penche sur les quelques
recommandations qui ont été présentées par
l'organisme qui a précédé le vôtre, comme par vous
également, mais je dirais plus particulièrement, en ce qui me
concerne, la formation, la reconnaissance pour les parents qui ont des enfants
d'âge scolaire, qui font garder plus de cinq heures, et évidemment
les coûts reliés à l'étendue des territoires et aux
disparités régionales. Peut-être que vous auriez d'autres
priorités, mais je ne les ai pas nécessairement prises dans
l'ordre. Il me semble que ce sont des éléments qui devraient
être revisés, et qu'il est du pouvoir de la ministre de le faire.
Cela ne relève pas d'un autre niveau de gouvernement, c'est vraiment
dans ses prérogatives.
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Chicoutimi, votre temps est dépassé.
Mme Blackburn: Je vous remercie, mesdames, pour votre
participation aux travaux de cette commission.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. Mme
la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Je vous remercie, mesdames. Je vais prendre
vos recommandations en considération. Merci.
Le Président (M. Bélanger): Bien. La commission des
affaires sociales remercie les Agences de garde en milieu familial de la
région 02 et suspend ses travaux jusqu'à 16 heures.
(Suspension de la séance à 13 il 5)
(Reprise à 16 il 16)
Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il
vous plaît!
Je demanderais à chacun et à chacune de bien vouloir
reprendre sa place afin que la commission des affaires sociales puisse
procéder à une consultation générale et tenir des
auditions publiques afin d'étudier l'"Énoncé de politique
sur les services de garde à l'enfance*, déposé à
l'Assemblée nationale le 24 novembre 1988.
Nous recevons présentement à la table l'Agence de services
de garde en milieu familial du Montréal métropolitain. Dans un
premier temps, je vous inviterais à présenter vos porte-parole
et, dans un deuxième temps, à nous faire la présentation
de votre mémoire. Vous avez dix minutes au maximum. Ensuite, il y aura
vingt minutes de discussion avec les parlementaires. Je sais que vous avez un
train à prendre ensuite, alors, on va faire diligence et essayer, tout
au moins, de respecter...
Une voix:...
Le Président (M. Bélanger): ...au minimum - des
chanceux qui se promènent en train - au moins l'horaire.
Maintenant, une dernière remarque. Lorsque vous aurez à
prendre la parole pour répondre aux questions, s'il vous plaît,
veuillez vous identifier, ceci pour les fins de la transcription du Journal des
débats. Si vous voulez vous présenter et procéder, nous
vous écoutons.
Agence de services de garde en milieu familial du Montréal
métropolitain
Mme Monast (Denise): M. le Président, Mme la ministre
déléguée à la Condition féminine, Mme la
représentante de l'Opposition, Mme la présidente de l'Office des
services de garde à l'enfance, bonjour! Avant de vous présenter
les représentants de l'Agence des services de garde en milieu familial
du Montréal métropolitain, Mme Monique Daviault aimerait vous
lire une lettre qui a été envoyée à Mme la ministre
le 7 février dernier et qui, depuis, est restée sans
réponse, s'il vous plaît.
Mme Daviault (Monique): Monique Daviault. Alors, je lis: "Mme
Monique Gagnon-Tremblay, ministre déléguée à la
Condition féminine. Objet: Le formulaire SGF02. Provenance: Office des
services de garde à l'enfance du Québec. Madame, nous supposons
que des fonctionnaires auront voulu faire du zèle et que c'est
uniquement pour cette raison que ce formulaire est arrivé à
l'agence. Son titre: Données requises pour l'application de la
réforme. De quelle réforme s'agit-il? À notre
connaissance, vous avez déposé un énoncé de
politique sur les services de garde et, selon les lois démocratiques en
vigueur dans notre pays, le gouvernement a constitué une commission
parlementaire afin d'entendre les citoyens concernés par cet
énoncé. Les choses se passent comme si des fonctionnaires de
l'Office des services de garde à l'enfance du Québec
décidaient d'ignorer la tenue de la commission parlementaire et nous
imposaient, en février, un questionnaire pour une politique qui ne
devrait être déterminée qu'après la commission
parlementaire, en mars. Nous aimerions que notre droit de parole soit
respecté par tous et que l'on ne présume pas déjà
du résultat de la commission parlementaire. Mme la ministre, nous sommes
profondément offensés par cette manière d'ignorer tous les
efforts déployés par les services de garde, dont notre agence,
pour vous exposer notre position face à T'Énonce de politique sur
les services de garde à l'enfance". Pouvez-vous intervenir afin de
redresser la situation, Mme la ministre? Sinon, devrions-nous croire que cet
empressement de l'office signifie l'inutilité de la présentation
de notre mémoire à la commission parlementaire? Dans l'attente...
Mme la ministre, veuillez agréer l'expression de nos salutations
distinguées."
N'ayant pas reçu de réponse, nous avons
présumé que nous étions invités et nous sommes ici
pour nous faire entendre.
Une voix: Voici. Nous aimerions insister...
Le Président (M. Bélanger): Je m'excuse! On n'a pas
vos noms. Il y a Mme Daviault, Mme Lafond.
Une voix: J'y arrive tout de suite.
Le Président (M. Bélanger): ...et monsieur... Ah!
Vous y arriviez. D'accord, je m'excuse.
Mme Monast: Nous nous présentons immédiatement.
Avant de commencer, j'aimerais insister sur les trois principaux points qu'on
aimerait aborder pendant la présentation: le calcul de l'aide
financière, le rôle des agences par rapport à la
travailleuse autonome et le mode de financement.
Alors, voici la présentation. D'abord, Mme Unda Lafond, ici
à ma droite, représentante des responsables de famille de garde
au sein du conseil d'administration de l'agence. Ole représente
actuellement 90 RFG. Elle vous apportera le point de vue de la travailleuse
autonome membre de l'agence et vous fera part des revendications des RFG.
Pardon, elle est à ma gauche. A ma droite, maintenant, M. Antoine
Pierre, directeur adjoint de l'agence et responsable de la qualité et de
la quantité des services donnés à l'agence. Il nous
entretiendra de la position de l'agence face à l'énoncé de
politique. A mon extrême gauche, Mme Monique Daviault, directrice
générale de l'agence. Elle défendra le rôle de
l'agence. Enfin, moi-même, Denise Monast. Je suis présidente du
conseil d'administration de l'agence, parent utilisateur et mère de deux
enfants, de trois ans et de sept mois. Je travaille à titre de
responsable de la musique de concert pour une société de droits
d'auteurs. Mon fils Philippe fait partie de l'agence depuis l'âge de
quatorze mois et son frère vient tout juste de joindre les rangs.
Le but premier de ma visite est de vous sensibiliser au maintien du
choix du parent face aux divers services de garde. À ce sujet, est-ce
que la parité de l'aide financière est assurée
indépendamment du mode de garde? Cela est ma question. Je laisse la
parole à M. Pierre.
M. Pierre (Antoine): Antoine Pierre. Je vais présenter la
position de l'agence face à T'Énonce de politique sur les
services de garde à l'enfance". À notre avis, le plan de
développement des agences présente des incohérences sur le
plan de la conception qui se dégage de l'énoncé
gouvernemental. Il appert qu'une agence doit se borner à gérer
principalement les places et leur occupation. On peut considérer cette
thèse
comme l'idée centrale que se fait le gouvernement de la garde en
milieu familial. Une telle conception de la gestion des services de garde en
milieu familial est, le moins qu'on puisse dire, restrictive. Elle occulte,
volontairement ou non, tout l'aspect de soutien à l'éducation des
enfants que les agences doivent également gérer.
Or, cet aspect est directement lié à la qualité des
services. La question qui se pose est celle-ci. Pourquoi le gouvernement
fait-il usage d'un double langage dans le même document? Un langage qui
se situe au plan déclaratif qu'on retrouve à la page 50, et je
cite: "De soutenir les efforts fournis en vue d'améliorer la
qualité des services de garde". Ce type de déclaration est
gratuit dans le document parce qu'il ne traduit pas les intentions
réelles du gouvernement de favoriser la dispensation de services de
qualité dans les agences.
L'autre langage consiste à dire que la qualité peut
être obtenue sans les agences. Voyons ce que dit le gouvernement à
ce propos. Si la gestion du service de garde en milieu familial est l'affaire
de la responsable du service de garde, les agences, dans le cas des services
régis par la loi, peuvent apporter un soutien technique et
professionnel. Le mot qui retient l'attention dans la phrase
précédente est "peuvent", le verbe "pouvoir". Ce verbe exprime
une possibilité et non une obligation. Dans ces conditions, que devient
la qualité? Qui va la gérer et avec quels moyens? Le gouvernement
veut-il faire un recul par rapport à la Loi sur les services de garde
à l'enfance du Québec? Il faut se rappeler que les articles 8, 9
et 10 de cette loi font obligation aux agences d'assurer le contrôle et
la surveillance de la qualité des services, d'une part, et, d'autre, de
soutenir les responsables de famille de garde sur les plans technique et
professionnel.
Depuis leur création, les agences n'ont jamais perdu de vue
l'objectif de la qualité. C'est pourquoi nous ne comprenons pas que le
gouvernement veuille changer l'obligation en possibilité. A
l'égard des parents, c'est également le double langage qui
prédomine. D'un côté, le gouvernement parle d'une meilleure
accessibilité à un vaste choix de services et, de l'autre, il
veut marginaliser les agences de services de garde en milieu familial en leur
enlevant les moyens d'assurer soit leur existence, soit leur croissance en
fonction des besoins du parent qui a choisi ce mode de garde. Un exemple selon
l'énoncé, une agence doit avoir un nombre de RFG qui corresponde
à 27 % des places au permis. Que doit-elle faire pour donner le service
à un enfant dans la situation suivante: 1° il y a encore des places
inoccupées au permis; 2° les RFG en activité ne peuvent pas
recevoir l'enfant?
On pourrait peut-être répondre que l'agence n'a qu'à
reconnaître une autre RFG. Ne serait-elle pas pénalisée
à cause de cela? Ne doit-elle pas respecter la règle de places au
permis? Le double langage se poursuit au niveau de la qualité des
services. Pour le langage, les agences doivent former un comité de
parents qui doit se pencher sur les aspects des services qui concernent la
qualité et le rôle éducatif. Deuxième langage. Les
agences doivent s'occuper de la gestion des places.
Qu'en est-il du soutien technique et professionnel, du soutien
pédagogique? Comment opérationallser les recommandations du
comité de parents? Le gouvernement veut-il donner des orientations pour
une qualité accrue dans tous les modes de garde ou entend-il appliquer
le principe deux poids deux mesures selon qu'il s'adresse aux garderies ou aux
agences?
Pourquoi cette possible discrimination à l'égard des
enfants? S'agit-il d'une manière de pénaliser les parents qui
choisissent la garde en milieu familial? Seul le gouvernement détient
les bonnes réponses à toutes ces questions qui découlent
logiquement de I'"Énoncé de politique sur les services de garde
à l'enfance". Quant à nous, nous refusons le mode de financement
des agences contenu dans l'énoncé qui constitue sans aucun doute
un recul par rapport aux acquis en matière de garde en milieu
familial.
En vertu de cette position, nous demandons, pour accélérer
le développement de la garde en milieu familial, que soit
abandonné ce mode de financement. Nous croyons juste que le gouvernement
devrait s'en tenir au mode de financement actuel et doubler la subvention de
fonctionnement actuel, ce qui permettrait le respect de la liberté de
choix des parents.
Le Président (M. Joly): En résumé, s'il vous
plaît, il vous reste une minute. Merci.
M. Pierre: ...liberté réelle fondée sur le
choix de services de qualité équivalente soit en agence, soit en
garderie. De toute évidence, un parent ne peut pas choisir
réellement dans le cadre proposé par le gouvernement, cadre qui
défavorise la qualité des services en milieu familial
régis par la loi.
Le Président (M. Joly): Merci, M. Pierre. Je vais
maintenant reconnaître Mme la ministre.
Mme GagnorvTremblay: Merci, mesdames et monsieur. Votre agence
est ta plus grosse agence que nous ayons au Québec. Vous avez 300 places
au permis, c'est bien exact? Combien y a-t-il de travailleurs et de
travailleuses à l'agence?
Mme Daviault: Dans l'agence même? Mme Gagnon-Tremblay: Oui.
Mme Daviault: Dix personnes.
Mme Gagnon-Tremblay: Dix personnes qui travaillent à temps
plein?
Mme Daviault: Oui.
Mme Gagnon-Tremblay: Cela signifie à peu près pour
combien de familles?
Mme Lafond (Linda): Pour 90 familles.
Mme Gagnon-Tremblay: Naturellement, vous avez vu que dans notre
politique, nous n'avons plus l'intention d'accorder de permis à des
agences d'une structure aussi considérable. Avez-vous l'impression
d'être aussi près de vos familles et de pouvoir leur donner le
service de la même façon qu'une agence de 120 ou...
Mme Daviault; Ce ne serait sûrement pas de la même
façon. Nous avons des gens qui sont employés seulement pour
visiter les familles. Il y a trois personnes qui font ça à temps
plein. Il y a une personne qui s'occupe de la ludothèque 20 heures par
semaine. Il y a une personne qui fait des visites de contrôle. Il y a le
directeur adjoint qui s'occupe de l'ensemble des soins pédagogiques.
Donc, comme vous le voyez, il y a presque cinq personnes qui ne sont là
que pour le soutien pédagogique.
Mme Gagnon-Tremblay: Au sein de votre agence, avez-vous une
certaine forme de politique tarifaire dans le sens que toute responsable de
famille de garde doit demander le même tarif à l'ensemble des
parents?
Mme Lafond: À l'ensemble des parents. Oui, on a tous la
même grille de tarification.
Mme Gagnon-Tremblay: Quel est votre tarif actuel?
Mme Daviautt: C'est 85 $ par semaine.
Mme Gagnon-Trembiay: C'est 85 $ par semaine. J'imagine que vous
avez un comité de parents aussi.
Mme Daviautt: Oui.
Mme Gagnon-Trembiay: Un comité de parents qui est
composé de responsables de famille de garde?
Mme Daviault: Nous avons un conseil d'administration qui est
formé majoritairement de parents, dont Mme Monast est la
présidente. Il y a également trois responsables de famille de
garde qui sont au conseil d'administration. On a aussi un comité
consultatif de parents.
Mme Gagnon-Tremblay: Faites-vous aussi l'administration des
responsables de services de garde?
Mme Lafond: Ce n'est pas l'administration comme telle. C'est plus
le soutien pédagogique et l'administration qui se fait aussi par le fait
même, parce que nous considérons que c'est un tout. C'est un
service qu'on demande aux agences.
Mme Gagnon-Tremblay: C'est-à-dire que vous percevez les
sommes des familles et vous les redistribuez. (16 h 30)
Mme Lafond: On ne les perçoit pas des familles. C'est le
parent qui paie pour ce service.
Mme Gagnon-Tremblay: Oui, mais le parent paie-t-il directement
à l'agence?
Mme Lafond: II paie à l'agence directement.
Mme Gagnon-Tremblay: Et c'est l'agence qui prépare
également les reçus pour les familles de garde?
Mme Lafond: Oui, c'est bien cela.
Mme Gagnon-Tremblay: Quel est le montant que vous facturez aux
familles de garde pour ce service que vous rendez?
Mme Lafond: Ce n'est pas un montant qui est facturé aux
familles de garde. Nous considérons que la famille de garde
reçoit... On reçoit 70 $ par semaine. C'est comme cela que
nous...
Mme Daviault: C'est un tout, le parent paie pour les services de
garde et l'agence paie pour le soutien pédagogique, à la demande
des parents.
Mme Gagnon-Tremblay: Pour ce qui est du ratio, les responsables
de famille de garde de votre agence sont en désaccord avec l'intention
du gouvernement d'augmenter le ration de quatre à six, comparativement,
par exemple, à ce qu'on a entendu ce matin. Est-ce que vous pouvez
m'expliquer les divergences de vues que vous avez concernant le ratio?
Mme Lafond: Oui, c'est-à-dire qu'en tant que RFG on
trouvait que c'était suffisant. On ne voulait pas d'augmentation du
ratio, on trouve que celui qu'on a présentement est bien.
Mme Gagnon-Tremblay: Vous avez également parlé de
la nouvelle formule de financement proposée pour les agences, et vous
mentionnez que vous refusez ce genre de formule. À part le statu quo,
est-ce que vous avez quelque chose d'autre à nous proposer? Est-ce que
vous avez des améliorations, des bonifications à nous
suggérer pour cette formule? Est-ce que vous avez d'autres idées
à cet égard?
M. Pierre: On a des revendications qu'on peut vous faire,
c'est-à-dire que nous suggérons que la subvention actuelle de
fonctionnement par
jour par enfant soit doublée. On a fait des calculs
qui permettent de croire qu'en doublant cette subvention, ce n'est pas vraiment
une augmentation de 100 % parce que, actuellement, votre document,
l'énoncé, propose 3,69 $ par jour par enfant gardé dans
une agence de 50 places.
Si on fait le calcul, on voit qu'en demandant de doubler la
subvention actuelle dans le mode de financement actuel, cela veut dire de
passer de 2,75 $ à 5,50 $; 5,50 $ moins 3,69 $ donne 1,81 $. Au fond,
c'est une augmentation de 1,81 $ que nous demandons pour que le fonctionnement
d'une agence soit respecté, qu'il continue d'être ce qu'il est
actuellement et qu'il puisse s'améliorer.
Le Président (M. Joly): Je m'excuse. Pour les fins
d'enregistrement du Journal des débats, pourriez-vous vous
identifier chaque fois que vous prenez la parole?
M. Pierre: Antoine Pierre.
Le Président (M. Joly): Merci.
Mme Gagnon-Tremblay: Remarquez que je n'ai pas compris, je n'ai
pas saisi exactement. Vous nous demandez, dans un premier temps, de doubler la
subvention actuelle. Par contre, je ne sais pas quel genre de calcul, je n'ai
pas saisi. Est-ce que vous pouvez répéter?
Mme Daviault: Si vous regardez le mémoire à la page
33, vous allez comprendre.
Mme Gagnon-Tremblay: Je pense, de toute façon, que le
temps qui vous est alloué... Je peux regarder le mémoire, sauf
que cela va prendre tout votre temps. Je ne sais pas si c'est ce que vous
préférez.
M. Pierre: L'explication est simple. Actuellement, vous accordez
2,75 $ par jour par enfant comme subvention de fonctionnement.
Mme Gagnon-Tremblay: Oui.
M. Pierre: C'est cela?
Mme Gagnon-Tremblay: C'est cela.
M. Pierre: Nous demandons de doubler cette subvention de
fonctionnement, ce qui passerait de 2,75 $à...
Mme Gagnon-Tremblay: Que vient faire le 1,81 $, ou environ 1
$?
M. Pierre: Je vais y arriver. D'après les calculs que nous
avons effectués, selon le mode de fonctionnement, le mode de subvention
que vous proposez actuellement pour une agence de 50 places, c'est 3,69 $ par
jour par enfant.
Mme Gagnon-Tremblay: D'accord, vous ramenez la subvention par
jour.
M. Pierre: Ce qui signifie que vous avez déjà
proposé 3,69 $. Quand on demande de doubler, nous demandons d'ajouter
1,81 $.
Mme Gagnon-Tremblay: D'accord. Ne croyez-vous pas qu'avec une
agence de 300 places ou au-delà de 120, tel que stipulé dans
l'énoncé de politique, il y a quand même des coûts
moindres, c'est-à-dire qu'il y a des économies d'échelle
qu'on respecte, dans le sens que le loyer est souvent le même, les frais
fixes sont sensiblement les mêmes pour une agence de 50 ou 100, que pour
une de 300 places? Est-ce que vous ne croyez pas que, de cette façon, on
fait quand même des économies d'échelle dont il faut tenir
compte?
Mme Daviault: Vous pensez vraiment que cela prend la même
place pour dix personnes que pour une ou deux? Vous pensez vraiment que c'est
la même chose de recevoir les parents de 300 enfants en réunion?
Vous pensez vraiment que c'est le même prix d'installation
téléphonique pour répondre aux appels
téléphoniques de tous les parents de ces 300
enfants-là?
Mme Gagnon-Tremblay: Je ne parle pas de 300, je parle de 50, de
100 ou de 120.
Mme Daviault: C'est la même chose pour les autres. Si c'est
120, cela coûte plus cher aussi, il faut qu'ils aient d'autres
installations.
Mme Gagnon-Tremblay: Mais il y a quand même une portion de
base qui ne fluctue pas énormément.
Mme Daviault: Ce qui serait intéressant, Mme la
ministre...
Mme Gagnon-Tremblay: II est sûr que vous ne pouvez pas
avoir...
Mme Daviault: ...ce serait que vous regardiez...
Mme Gagnon-Tremblay: II est sûr que, lorsque vous faites
une réunion, j'imagine que vous ne pouvez pas non plus louer un bureau
pouvant contenir 10 personnes pour en recevoir 300. J'imagine que vous devez
faire vos réunions à l'extérieur ou quelque chose comme
cela. Je ne pense pas que ce soit...
Mme Daviault: Oui, mais j'aimerais attirer votre attention sur
l'annexe 3 à la page 35 qui dit que les agences de 100 places et plus
détiennent 43,5 % de toutes les places au permis des agences de services
de garde en milieu familial. Quand ces agences-là ont commencé -
on a fait la recherche dans le bottln de l'office - en 1985,
c'étaient des agences de 50 places. Maintenant, elles ont toutes
grossi. Ce qui indique qu'il y a un accroissement certain du nombre de places
dans les agences. Chaque fois que, d'après la subvention que vous avez
proposée, cela revient à dire 3,69 $ par place par enfant par
jour, on additionne une place au permis, on diminue cette subvention-là
de telle façon que lorsqu'on arrive à 120 ou même à
100 places, on perd; on reçoit 2,75 $ par enfant par jour, comme
maintenant.
Mme Gagnon-Tremblay: Oui.
Mme Daviault: À l'annexe 3, on vous dit que, si toutes ces
agences qui ont 100 places et plus voulaient réduire à 50 places,
il en coûterait 466 000 $ de plus au gouvernement demain matin. Donc, ce
serait peut-être plus intéressant pour nous de se scinder en six
agences. À ce moment-là, on bénéficierait de la
même subvention que les agences de 50 places.
Mme Gagnon-Tremblay: Merci, madame.
Le Président (M. Joly): Merci, madame. Je vais maintenant
reconnaître Mme la députée de Maisonneuve.
Mme Harei: Merci, M. le Président. Il me fait vraiment
plaisir de pouvoir discuter avec vous de la situation sur le territoire du
Montréal métropolitain. D'abord, comme on a malheureusement peu
de temps à notre disposition, je ne sais si la présence de M.
Pierre peut m'indiquer justement que beaucoup de familles des
communautés culturelles font appel aux services de l'agence. Est-ce que
c'est particulièrement pour des enfants en bas âge? Quel est
l'âge approximatif auquel on vous confie les enfants? En
général, dans quel milieu et dans quel quartier... Comme c'est le
Montréal métropolitain, dois-je comprendre que ce n'est pas
simplement la ville de Montréal? Est-ce surtout dans les banlieues?
Est-ce que c'est plus en ville? Dans les édifices à trois
étages, les escaliers sont-ils un handicap ou non? Le fait que les
logements soient petits, est-ce que cela n'a pas aussi une incidence sur le
ratio que l'on ne trouve pas nécessairement dans des régions
où ce sont de grandes maisons unifamiliales? J'aimerais vous entendre
sur votre expérience qui est assez particulière, puisque c'est le
Montréal métropolitain.
M. Pierre: Oui. Sur la question du ratio justement, on a cette
position parce que, comme cela a été dit, nous vivons dans des
conditions tout à fait spécifiques à Montréal.
Comme vous l'avez mentionné, il y a la question du local, la question
des maisons qui sont faites, à Montréal, de façon tout
à fait spécifique. Quand on reçoit des parents au bureau
qui viennent demander le service, ils sont intéressés, ils
veulent savoir, premièrement, s'il va y avoir des visites chez cette
personne qui va garder leur enfant et, aussi, combien d'enfants seront avec
elle.
Mme Harel: Demandent-ils une cour en général, un
premier étage?
M. Pierre: Beaucoup parlent de cour clôturée. Ce
sont des exigences que les parents demandent de plus en plus. En ce qui
concerne les communautés culturelles, on reçoit effectivement de
plus en plus de demandes provenant de différentes communautés
culturelles.
En ce qui concerne l'âge des enfants, la tendance actuelle, je
pense que c'est une tendance lourde dans le sens que, de plus en plus, on a
besoin de faire de la place pour les bébés de moins de 18 mois et
il y a vraiment une demande très forte pour les moins de 18 mois.
Mme Daviault: Monique Daviault. L'endettement dont j'aimerais
parler, c'est que nous sommes bien reconnaissantes envers Mme la ministre
d'avoir accordé la subvention aux poupons. Comme Antoine l'a dit, nous
avons une très forte demande pour les poupons. Ce qui nous
inquiète énormément, c'est: Qu'est-ce qui va arriver quand
nos enfants vont atteindre l'âge de 18 mois? À ce
moment-là, les RFG qui vont avoir eu l'habitude de recevoir la
subvention supplémentaire vont se retrouver devant leur petit bonheur,
quoi. C'est pour cela qu'on demande une plus grande subvention, une
augmentation de la subvention de fonctionnement, pour qu'on puisse
répartir un plus grand nombre de dollars entre les RFG, pas seulement
celles qui gardent des poupons.
M. Pierre: Ce que j'aimerais souligner, c'est que dans le cas du
mode de financement proposé actuellement dans l'énoncé,
une agence comme la nôtre se trouve pénalisée. On
reçoit actuellement 2,75 $ par place au permis, dans le cas
proposé dans l'énoncé, et on recevrait 2,37 $, ce qui
signifie vraiment...
Mme Harei: Une réduction.
M. Pierre: ...une pénalité. Pourquoi? On ne le sait
pas.
Mme Harei: J'ai bien compris, en lisant votre mémoire, que
si vous félicitiez la ministre de la subvention aux poupons, vous
considériez que pour tout le reste il pouvait y avoir matière
à une très grande inquiétude, notamment en matière
du rôle de l'agence comme tel relativement à la qualité et
au soutien. Dans votre mémoire, vous insistez sur le fait que les
parents - nous dites-vous - vous avez déclaré que parmi les
critères qui avaient retenu leur attention et les attiraient vers
l'agence, la formation était prépondérante. Vous
êtes le troisième groupe à nous le dire. J'ai l'impression
que vous
avez votre autonomie. Disons que vous avez dit des choses
différentes des autres sur d'autres domaines. Donc, pour vous, la
formation, c'est vraiment l'élément principal, central, sur
lequel le choix des parents repose, selon vous.
Mme Monast: Si je peux m'exprimer à ce sujet en tant que
parent, je pense qu'il serait bon que je vous spécifie un peu le choix
du parent vis-à-vis des modes de garde en général. Je
pourrais peut-être vous dire, à titre d'exemple, pourquoi un
parent est plus attiré vers une agence de services de garde en milieu
familial, peut-être plus particulièrement dans nos cas. Vivant
dans une grande ville, inconnue - je suis certaine que le problème se
pose ailleurs aussi - mais ne connaissant absolument personne, il est
évident que des listes de gardiennes existent partout, mais qui doit
choisir. En tant que parent, je souhaite que la qualité de vie de mon
enfant soit mise au premier plan. C'est ma préoccupation première
dans ma vie. Je dois demander et je dois préciser, finalement, chaque
jour que les services que les agences nous offrent soient maintenus et je
m'efforce très fortement à ce que tous ces services-là,
dont la formation de la RFG, y compris aussi les visites à domicile,
vous savez... Je sais déjà qu'en laissant mes enfants chez une
RFG, non seulement c'est une personne qui a été choisie, c'est
une personne très crédible, mais, de plus, l'agence voit...
Mme Harel: La visite.
Mme Monast: Oui, visite à domicile; elle voit au bon
développement de mon enfant. Je peux demander des comptes à
l'agence. Donc, pour moi, c'est une très grande
sécurité.
Mme Harel: Vous êtes en sécurité. Mme
Monast: Oui.
Mme Harel: Dans votre mémoire, vous signaliez qu'il y
avait des dangers à la garde à domicile. Je crois que c'est
à la page 13. Vous mettez en garde le gouvernement contre l'implantation
facile de la garde à domicile pour ces raisons-là, si je
comprends bien, Mme Monast, où cette garde se ferait sans
nécessairement qu'H y ait une formation, sans qu'il y ait une sorte de
reconnaissance aussi du rôle de la gardienne qui la sorte de son
isolement. C'est dans ce sens-là. C'est ça?
Mme Monast: Absolument.
Mme Harel: Vous ne m'avez pas encore indiqué si vous
êtes la seule agence sur le territoire du Montréal
métropolitain à part celle du CSS, Ville-Marie?
Mme Daviautt: II y a cinq agences.
Mme Harel: Et où est située la vôtre?
Mme Daviault: À l'est du boulevard L'Acadie, incluant La
Salle et Verdun, jusqu'à Rlvière- des-Prairies, jusqu'à
Repentigny, excluant Pointeaux-Trembles et Montréal-Est.
Mme Harel: Donc, c'est plus l'extrême...
Mme Daviaidt: Tout le bassin centre-sud, centre-ville,
Saint-Léonard, Anjou, Saint-Michel...
Mme Harel: Et les demandes les plus fortes viennent-elles des
réglons plus en banlieue ou si elles viennent du centre-ville proprement
dit? (16 il 45)
M. Pierre: D'une façon générale, les
demandes proviennent d'un peu partout.
Mme Harel: J'ai noté aussi que vous dites à la
ministre que vous souhaitez le statu quo, enfin, les familles le souhaitent,
quant à la gestion des subventions pour les enfants handicapés et
pour les poupons - que ça se fasse pour les poupons comme ça se
fait pour les enfants handicapés - et quant à l'ensemble des
mesures se rapportant a la rémunération. Ce matin, cela a
été discuté en commission. La ministre a dit: Je ne
l'interdis pas; je ne suis pas contre. Mais vous dites qu'elle devrait le
favoriser, que c'est là un mode de gestion qui facilite la garde, que
l'agence s'occupe de la gestion des frais de garde.
Mme Lafond: Nos familles de garde souhaitent garder le statu quo
à ce chapitre-là et on dit que, pour nous, c'est un tout. La RFG
n'a pas à négocier ces choses-là avec le parent. On le
décide en assemblée générale. Nous sommes des
membres et nous décidons en assemblée générale de
ce qu'on veut avec les parents et avec les RFG. Cela forme un tout, pour une
qualité de vie...
Mme Harel: Vous, Mme Lafond, vous êtes une famille
d'accueil?
Mme Lafond: Oui. Une voix: Une famille de garde. Mme Lafond: Une
famille de garde. Mme Harel: De garde. Excusez-moi!
Mme Lafond: Représentante des responsables de famille de
garde.
Mme Harel: Oui, vous avez raison.
Mme Lafond: Je trouve important que ça soit un tout, que
la ministre privilégie justement le fait que les agences
répondent à ce besoin-là, parce que je trouve que notre
service de qualité
est plus accru quand on n'a pas à s'occuper de ça. Il n'y
a pas tout le mauvais côté avec le parent. On n'a pas à
s'occuper du paiement, justement.
Mme Daviault: En plus, ça permet de donner de meilleures
conditions de travail aux RFG dans le sens qu'elles ont des congés
fériés payés qu'elles n'ont pas à négocier
avec le parent, non plus. Elles ont des vacances assurées dans le sens
que c'est l'assemblée générale qui décide des
vacances et tout le monde les prend en même temps. Donc, elles sont
certaines d'en avoir.
Mme Harel: Avez-vous une liste d'attente importante de demandes
de parents?
Mme Daviault: On a une très grande demande.
Mme Harel: Combien sont en attente?
Mme Daviault: Je ne peux pas vous donner de chiffres parce que
c'est tellement fluctuant qu'on recommence chaque semaine. C'est la
genèse chaque semaine. Ha, ha, ha!
Le Président (M. Joly): On doit malheureusement conclure.
Est-ce qu'il y aurait autre chose à rajouter?
Mme Harel: On va vous remercier. J'ai l'impression qu'on a un
sablier et que, vraiment, le sable file entre nos doigts. Il y aurait eu
beaucoup d'autres choses, évidemment, dont on aurait pu discuter. Je
souhaite qu'on ait l'occasion de le faire avec d'autres en insistant sur le
spécifique du type de logement qui est particulier à la
région densément habitée du Montréal
métropolitain.
Le Président (M. Joly): Merci, Mme la
députée.
Mme Daviault: S'il pouvait m'être permis de remercier Mme
la ministre pour les deux intentions qu'elles a mentionnées ce matin,
soit donner le même ratio pour tout le monde, que ce soit la garde
clandestine ou la garde reconnue, et assouplir les règlements
d'exonération pour redonner aux parents des agences la parité
d'exonération financière. Merci.
Le Président (M. Joly): Mme la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Je voudrais vous remercier et vous dire, en
terminant, qu'à la suite de la lettre dont vous faisiez mention au tout
début de votre intervention il y a une réponse, me dit-on, qui
vous a été envoyée lundi, je pense. Vous devriez en
recevoir copie le plus rapidement possible.
Le Président (M. Joly): Merci, Mme la ministre. À
mon tour, je remercie les représentants de l'Agence de services de garde
en milieu familial du Montréal métropolitain. Je vous souhaite un
bon retour.
Je vais maintenant appeler l'Agence de services de garde en milieu
familial Les Jeunes Pousses de Sherrington. J'aimerais vous rappeler, avant de
commencer, la règle de procédure. En fait, vous avez dix minutes
pour exposer votre mémoire ou vos remarques et le côté
ministériel et l'Opposition ont aussi dix minutes pour vous questionner.
J'apprécierais si, avant chacune des interventions, vous pouviez vous
nommer de façon que vous soyez clairement inscrits au Journal des
débats. J'apprécierais que la responsable puisse identifier les
gens qui l'accompagnent.
Agence de services de garde en milieu familial Les Jeunes Pousses de
Sherrington
Mme Tremblay (Claudine): Mesdames et messieurs, bonjour.
Le Président (M. Joly): Vous êtes madame? Mme
Tremblay: Claudine Tremblay. Le Président (M. Joly): Merci.
Mme Tremblay: Je vais faire la présentation. Je voudrais
justement vous présenter les membres de l'Agence de services de garde en
milieu familial Les Jeunes Pousses de Sherrington, ici présentes:
à ma gauche, Solange Fortin qui est la directrice; à
l'extrême gauche, Élise Vallée qui est responsable de
famille de garde; à ma droite, Danielle Coallier qui est parent et qui
remplace Martine Bouchard, et moi-même, Claudine Tremblay, parent. Nous
sommes toutes membres du conseil d'administration.
Dans notre mémoire, nous avons souligné notre
adhésion au principe de l'importance de la qualité des services
de garde qui doit favoriser le développement des enfants. Nous avons
également indiqué souscrire à l'importance de
l'implication des parents dans le choix des orientations. Notre conseil
d'administration est d'ailleurs formé majoritairement de parents, cinq
membres sur neuf; il comprend aussi trois responsables de famille de garde et
la directrice est membre à part entière.
Puisque les membres de la commission parlementaire ont
déjà pris connaissance des mémoires, nous souhaitons plus
particulièrement relever les points qui nous apparaissent les plus
importants compte tenu de la spécificité de notre milieu
essentiellement rural. Ces points touchant en grande partie la gestion du
quotidien qui doit se faire en fonction des attentes des parents et des
responsables de famille de garde, je cède donc la parole à la
directrice, Solange Fortin.
Mme Fortin (Solange): L'énoncé de politique parte
du rôle principal des agences comme étant celui de la gestion de
l'occupation des places. Bien que nous ne souscrivions pas entièrement
à ce rôle, nous avons d'autres rôles importants
également, nous voulons quand même souligner l'importance de ce
rôle. C'est dans ce contexte que nous sommes solidaires de porter le
ratio à cinq enfants. Nous ne reviendrons pas sur les arguments qui ont
été soulignés ce matin. Quand nous parions de ratio de
cinq, nous parlons d'une gestion souple du ratio.
Notre mémoire souligne abondamment les spécificités
de notre milieu, la fluctuation et la très grande variabilité des
besoins à cause du nombre d'enfants en garde par famille: les
naissances, les déménagements, la fréquentation scolaire,
le travail à temps partiel qui est très important chez nous, le
travail saisonnier et le travail contractuel. Pour respecter un ratio de quatre
enfants par famille de garde, ces fluctuations ont pour conséquences de
déplacer des enfants d'une famille de garde à une autre, de
séparer des enfants d'une même fratrie, de proposer aux parents
usagers d'utiliser des services de plus d'une RFG au cours d'une même
période, de diminuer évidemment les revenus des RFG - il y a des
jours où elles n'accueillent que deux enfants et, d'autres jours, elles
en accueillent trois ou quatre, mais il n'est pas possible de faire augmenter
la moyenne en haussant le ratio à cinq une journée semaine - et
de multiplier indûment le nombre de RFG nécessaire.
Donc, dans ce contexte, pour nous, porter le ratio à cinq, c'est
très important, ce qui ne veut pas dire que nos responsables de famille
de garde accueilleront toujours cinq enfants. Elles auront peut-être,
annuellement, en moyenne, à peu près trois enfants: des jours,
deux, d'autres jours, trois, un et cinq. Les besoins fluctuent chez nous.
Il y a des éléments d'ordre financier qui ont
été soulignés ce matin. Nous croyons aussi que s'occuper
des enfants mérite un salaire. Par contre, il y a également des
indications au plan de l'optique de la qualité. Compte tenu de la
variation des besoins, la socialisation des enfants est importante. Les
familles en milieu rural comptent très souvent deux, trois et quatre
enfants. Il est impossible de mettre des enfants en contact avec d'autres
milieux, sauf celui de la famille de garde, si on ne peut pas passer à
un ratio de cinq. De plus, on a constaté que la possibilité
d'avoir plus régulièrement trois ou quatre enfants dans une
famille stimule les responsables de famille de garde à souscrire
à une obligation légale qui est d'offrir un programme
d'activités qui stimule le développement des enfants. Donc, nous
allons dans le sens de la qualité des services.
Il y a un autre élément de la gestion qui nous
apparaît très important, c'est celui de la gestion des
Impératifs pédagogiques, la formation. Encore là,
plusieurs éléments ont été relevés depuis le
début de la journée. Selon nous, il y a différents outils
à la formation. On a parlé des cours, des conférences. Il
y a également les activités de groupe que nous organisons avec
les enfants, même si le territoire est très vaste, et ça
fait beaucoup de kilométrage. Il y a également la formation
individuelle des RFG par le biais du soutien pédagogique d'une
itinérante pédagogique et, à 50 places, il n'y a pas moyen
d'en embaucher une, on est toujours à la merci des projets d'emploi. On
perd beaucoup de temps à préparer ces projets.
Cette formation - il y a d'ailleurs une erreur à la page 22 du
mémoire - c'est la formation individuelle dont les retombées sont
maximisées et non pas la formation collective. On a parlé ce
matin de l'énoncé de politique qui dit que l'agence peut offrir
un soutien alors que la loi précisait "doit". Mme la ministre nous a dit
que son Intention était de maintenir le "doit". Cela va.
Par ailleurs, dans l'énoncé de politique, à la page
50, là où c'est difficile d'adhérer au "peut égale
doit", c'est quand on lit qu'on veut soutenir l'engagement des parents des
services de garde, soutenir les efforts au niveau de la qualité des
services de garde, accroître le soutien offert à la gestion des
services de garde, soutenir financièrement les garderies au chapitre de
la formation. C'est l'énoncé qui dit cela.
Pour nous, la qualité est essentielle même si les services
de garde sont distribués en milieu rural. Il n'est pas question de
compter sur le soutien ou sur la qualité en garderie; ce n'est pas
implantable, une garderie, dans un bassin de population de 800 ou 900
habitants. Les agences aussi doivent offrir des services de qualité.
Pour nous, la compétence n'est pas innée chez les familles de
garde, pas plus qu'elle n'est innée chez les monitrices de garderie.
C'est donc nécessaire, la formation; les enfants ont besoin de ce
critère de compétence même s'il y a moins d'enfants par
famille de garde et même s'il peut y avoir un certain roulement, mais il
n'est sûrement pas supérieur à celui du personnel en
garderie.
La ministre nous a dit ce matin qu'il y avait des budgets de
prévus pour la formation. J'ai essayé de voir où ils sont.
D'une part, on nous dit que seulement 25 % des RFG pourront être
subventionnés, 25 % du nombre de places au permis. Chez nous, c'est
impossible de fonctionner; ça prend au moins, pour 50 places au permis,
20 responsables de famille de garde. Déjà là, on sera
lourdement pénalisés si les circulaires administratives doivent
maintenir les aspects de l'énoncé de politique. Même en
portant le taux de 25 % à 40 %, avec des calculs, le montant de la
subvention est tout juste suffisant pour assurer un soutien technique, tels la
ludothèque, l'accréditation, le recrutement, les mesures de
contrôle et d'évaluation. Même si nos RFG ne partent pas, il
ne faut pas constamment les réaccréditer. Il faut tout de
même les
réévaluer et assurer un programme de formation qui se
tienne.
Pour nous, B serait minimal que les budgets des agences permettent de
répondre aux demandes à tout le moins, des agences qui
étaient stipulées au projet de règlement
déposé depuis si longtemps pour les agences. Ce projet de
règlement demandait qu'il y ait une responsable par 25 enfants pour
reconnaître, contrôler, surveiller et coordonner. Je me demande,
avec les budgets actuels, comment on pourra embaucher une directrice, une
itinérante pédagogique et du personnel de soutien clérical
compétent.
Le Président (M. Bélanger): Mme Fortin, je vous
inviterais à conclure, s'il vous plaît, hélas!
Mme Fortin (Solange): Ah! Seigneur du Bon Dieu! On vous demande
également que les centres intégrés - c'est très
important chez nous - puissent être accessibles, non pas comme le dit
l'énoncé de politique, strictement aux garderies, mais
également aux agences.
Pour ce qui est de l'aide financière aux parents, on a
parlé ce matin des clientèles particulières. Je voudrais
attirer votre attention sur les clientèles saisonnières, les
travailleuses agricoles qui doivent travailler douze jours par période
et une journée et demie en une. Elles ont besoin de 250 jours par
année, mais parce qu'elles travaillent ces 250 jours en six mois, elles
perdent l'accès à l'aide financière. Pourquoi ces femmes
sont-elles pénalisées? Merci, M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie,
madame, c'est un bel effort. Mme la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Merci, madame. Dommage qu'on ait peu de
temps pour faire le tour du mémoire.
Vous mentionnez aux pages 20 et 21 de votre mémoire un haut taux
de roulement des responsables de famille de garde. Ce matin, j'ai eu l'occasion
de poser la même question à un autre groupe qui me disait qu'il y
avait très peu de mobilité. Par contre, dans votre
mémoire, vous soulignez qu'il y a un taux de roulement assez
considérable. Pouvez-vous me donner une idée de ce que ça
peut représenter et qu'est-ce qui fait en sorte que vous ayez un taux de
roulement assez considérable?
Mme Fortin (Solange): Le mémoire souligne que le taux de
roulement est plus une conséquence des arrivées que des
départs. Notre agence est jeune, elle n'a pas encore trois ans
d'opération, donc, elle peut nous avoir crédité nos
responsables de famille de garde. De plus en plus, nous avons un grand nombre
de responsables de famille de garde pour répondre à nos besoins.
Il y a parfois des déménagements qui ont un impact, ou un retour
au marché du travail quand les enfants sont plus âgés, mais
ce ne sont pas les départs, ce sont les arrivées.
Mme Gagnon-Tremblay: Vous parlez de centre intégrant
plusieurs services. Comment voyez-vous ce centre au sein de votre agence? (17
heures)
Mme Fortin (Solange): II y a des besoins qui nous amènent
à vouloir implanter un centre intégré. Cela ne
répond à aucune des définitions actuelles de la politique
sur les services de garde à l'enfance, mais cela pourrait ressembler
à une halte-garderie, d'une part, pour répondre à la
fluctuation des besoins, aux besoins occasionnels. Quand un parent a des
enfants en garde trois jours par semaine et qu'il a subitement besoin d'une
quatrième journée, qu'est-ce qu'on fait avec les enfants? On va
chez une autre responsable de famille de garde etc. Comme des travailleuses des
RFG sont parfois malades, ce sont très souvent de jeunes femmes, elles
font des fausses couches, qu'est-ce qu'on fait le matin quand la porte est
barrée? Le parent a besoin d'aller travailler. Pour les vacances, on
s'organise mieux parce que c'est prévu un peu plus longtemps
d'avance.
Il y a également les impératifs de la formation, nos
activités de groupe. Le centre intégré, avec la
présence d'une itinérante pédagogique ou d'un personnel
sur appel pourrait nous permettre de répondre à ces types de
besoins. Il y a également le fait qu'il n'y a aucun service de garde en
milieu scolaire. Il y a 135 enfants et jusqu'à 255 enfants dans nos
écoles. Il n'y a pas de bassin pour la garde en milieu scolaire. Donc,
nous devons accueillir ces enfants.
Le centre intégré pourrait éventuellement
être ambulant. On rêve des fols. Il y a également pour des
garderies, de prendre le surplus de besoins, certains jours. Nous voyons donc
une grande réflexion nécessaire pour répondre à la
fluctuation des besoins qui seraient du type halte-garderie, mais aussi du type
formation des enfants plus qu'au niveau de pas de programme d'activités
comme dans le cas d'une halte-garderie.
Mme Gagnon-Tremblay: En somme, lorsque vous parlez d'un centre
intégrant plusieurs services, pour vous, c'est l'agence qui offrirait
ces services ou bien est-ce que vous seriez en mesure de recruter des
responsables en milieu familial qui pourraient offrir ces services? Comment le
voyez-vous?
Mme Fortin (Solange): La réflexion pour le moment est
très embryonnaire. Ce sont deux hypothèses qui ont
été mises de l'avant pour ce qui est des centres
intégrés. D'abord, l'organisation d'un local pour accueillir ces
enfants, ou on pourrait utiliser l'itinérante pédagogique, le
jour où on aura des budgets pour en embaucher une, à certains
moments et, aussi, une banque de
responsables de famille de garde qui pourraient également faire
partie d'une banque. Il y aurait probablement d'autres impératifs.
L'autonomie des responsables de famille de garde. Elles pourraient être
chez elles, des travailleuses autonomes. À certaines autres
périodes j'ai des responsables qui, certains Jours, le vendredi, n'ont
pas d'enfants. Elles pourraient ôtre sur une liste de rappel, ces
journées-là, pour aller travailler au centre
intégré. Ce sont des hypothèses.
Mme Gagnon-Tremblay: Votre agence a un permis de 50 places.
J'aimerais savoir comment cela peut fonctionner. Combien de personnes à
temps plein ou occasionnelles? Ces personnes sont affectées à
quoi? Étant donné que c'est une première agence de 50
places, il serait intéressant de savoir comment vous fonctionnez.
Mme Fortin (Solange): Vous parlez du personnel permanent?
Mme Gagnon-Tremblay: Oui, permanent ou occasionnel que vous
embauchez à l'occasion pour donner les services auprès des
responsables de famille de garde?
Mme Fortin (Solange): Tout ce que le budget actuel nous permet
d'avoir comme personnel permanent, c'est une directrice, moi-même,
à 4,5 jours par semaine et une personne qui fait tout le support,
secrétariat, comptabilité, accueil, réceptionniste,
à 3,5 jours par semaine. C'est tout ce que notre budget nous permet.
Nous faisons des pieds et des mains pour aller chercher des subventions autres,
pour avoir accès à une itinérante pédagogique, par
les programmes Défi, PDE. Tout cela, c'est du temps qui ne peut pas
être consacré à du support pédagogique. Le support
pédagogique qui est le plus important doit malheureusement être
minimisé, d'autant plus que chez nous, 50 places, c'est 100 enfants. Le
temps partiel, les départs, les arrivées, l'utilisation
saisonnière, c'est 100 enfants durant l'année et c'est un
minimum. Donc, cela prend beaucoup plus de temps à ouvrir des dossiers
d'aide financière, etc.
Mme Gagnon-Tremblay: Qui fait les visites? Est-ce que vous devez
embaucher de façon occasionnelle une autre personne pour visiter les
familles?
Mme Fortin (Solange): Absolument pas. Outre la gestion etc.,
c'est moi qui fais les visites et toutes les responsables de famille de garde
sont visitées aux deux semaines.
Mme Gagnon-Tremblay: Aux deux semaines?
Mme Fortin (Solange): Oui. C'est du sport, Mme la ministre, 750
kilomètres par mois sur des routes pas toujours très belles.
Donc, beaucoup de temps de voiture pour le peu de temps de support
pédagogique.
Mme Gagnon-Tremblay: Comment voyez-vous la formation dans le
contexte, par exemple, d'un certain roulement des responsables en famille de
garde? Quel genre de formation voyez-vous et jusqu'où peut-on aller pour
la formation?
Mme Fortin (Solange): II y a la formation de base que nous avons
préparée et, à peu près au même moment, le
document de l'office est arrivé mais elle allait dans la philosophie du
document préparé par l'office. Donc, les cinq volets ont
été offerts - il fallait bien commencer un jour - à nos
douze responsables qui étalent accréditées à cette
époque. Depuis ce temps, douze autres responsables sont arrivées
et quatre environ sont parties. Qu'est-ce qu'on fait maintenant avec ce groupe?
L'autre groupe, lui, a besoin d'aller plus loin. Donc, il y a des cours, des
conférences. Nos responsables, une fois la formation de base accomplie,
nous indiquent elle-mêmes, en assemblée de groupe, quels sont
leurs besoins de formation. Elles l'indiquent aussi au moment des visites de
contrôle. Alors, ce n'est pas le meilleur moyen de formation pour nous,
parce que les responsables doivent garder très tard; par
conséquent, à quelle heure organisons-nous les cours et quand? Le
samedi, le dimanche? Elles viennent de loin, etc.
Il y a les activités de jour qu'on fait avec les enfants
où on profite de l'aspect concret pour donner des techniques d'animation
et, également, pour enseigner des modes, des activités nouvelles
aux responsables de famille de garde. Encore là, sans transport en
commun, c'est compliqué. Mais le meilleur élément de
formation, c'est la formation donnée par l'itinérante
pédagogique, comme nous avons pu le constater pendant le peu de temps
où nous en avons eu une. Le milieu est unanime là-dessus. Les
enfants réclament Lise - elle s'appelait Use - les parents cherchent
Use, les responsables de famille de garde veulent Use et le conseil
d'administration cherche le moyen d'embaucher quelqu'un d'autre pour remplacer
cette itinérante, parce que c'est une formation qui est concrète.
Les enfants sont présents à ce moment et on répond
à des besoins précis tels, entre autres, des problèmes
d'apprentissage chez certains enfants.
Mme Gagnon-Tremblay: Merci madame.
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Maisonneuve.
Mme Harel: Merci, M. le Président. Je suis très
contente de pouvoir discuter avec vous. Vous avez un mémoire très
fouillé, Les Jeunes Pousses de Sherrington. Je crois comprendre - et je
voudrais me garder cinq minutes à la fin, j'en ai dix, pour qu'on parle
de la question particulière des femmes en milieu agricole - que
Use, votre itinérante pédagogique, vous la payiez à
même le budget de l'agence?
Mme Fortin (Solange): Non, à partir de subventions,
à l'instar de plusieurs agences, d'ailleurs. Nous allons chercher...
Mme Harel: Comme le PDE fédéral, des choses comme
ça, des programmes temporaires de création d'emplois.
Mme Fortin (Solange): Oui, quand nos députés ne
nous répondent pas qu'il y a un office pour nous subventionner. Cela
arrive fréquemment.
Mme Harel: Et quand il y a des élections, il y a parfois
plus de ce genre de programmes qu'après, pour ce qui est des PDE, en
tout cas, dans le bas de la ville de Montréal.
Écoutez, il y a une chose que votre mémoire m'a fait
comprendre, c'est la question du recrutement et des contraintes. Aux pages 12
et suivantes, vous nous dites... Comment se fait-il, d'abord, qu'il y ait des
difficultés de recrutement? Dans l'énoncé, on lit,
d'abord, que ces difficultés existent, et l'office, qui a
rédigé l'énoncé en grande partie, ou la ministre,
attribue ces difficultés à l'encadrement trop ridige des agences.
De là vient une sorte de malentendu, je trouve, depuis le début
de nos travaux en commission parlementaire, où on dit: Les
difficultés de recrutement viennent de l'encadrement, donc il faudrait
le modifier. C'est sans doute de là que vient le "peut" plutôt que
le "doit", dans l'énoncé. Dans votre mémoire, vous arrivez
à bien nous faire comprendre que c'est à cause de l'encadrement
qu'il y a des familles d'accueil qui vont à l'agence.
Mme Fortin (Solange): Oui.
Mme Harel: J'en veux... En fait, la possibilité de ne pas
avoir à négocier soi-même, d'avoir des ententes claires
avec les parents, de ne pas avoir ce genre de problèmes que les femmes
n'aiment pas avoir, qui font de la chicane, dans le fond, sont les raisons pour
lesquelles on va à t'agence, même si cela rapporte moins d'argent
que si on gardait chez soi, sans permis, sans rien du tout, sans être
contraint à aucun ratio. Alors, même si c'est un peu moins payant,
on y va, malgré les contraintes de formulaires, etc., parce qu'il y a un
encadrement qui nous soutient et nous supporte. Est-ce cela que je dois
comprendre?
Mme Fortin (Solange): C'est exact. Les difficultés de
recrutement ne viennent pas de l'encadrement que l'agence offre, elles
viennent, quand le téléphone sonne et qu'on nous dit: Vous
demandez des gardiennes, est-ce que je peux avoir plus d'information? On leur
répond: Le ratio est de quatre. Le téléphone se ferme.
Quand il reste ouvert on leur parle de l'obligation: Vous êtes une
travailleuse autonome, mais les parents, chez nous, ont la garantie d'avoir des
reçus pour fins d'impôt. On nous répond: II n'en est pas
question, et le téléphone se ferme encore une fois s'il
n'était pas déjà fermé. Parfois, il reste ouvert,
mais les gens vont rappeler plus tard et nous dire: Mon mari ne veut pas. Que
voulez-vous! On en a parié ce matin, c'est un impact.
Pour ce qui est de l'encadrement que vous offrons, à partir de
l'énoncé de politique, nous avons repris les
éléments de l'énoncé de politique et nous avons
fait le tour de nos responsables de famille de garde qui n'étaient pas
en congé de maternité ou en congé de maladie. Alors, si
nous devions cesser d'offrir cet encadrement, les responsables
démissionneraient. Sur les quinze consultées, on en perdrait
treize. Elles tiennent à cet encadrement même au chapitre de la
formation, mais on parlait surtout de l'encadrement au chapitre du support
à la négocation d'entente. Chez nous, le tissu social est
très touffu. Il n'y a pas de service mais les gens se connaissent et les
responsables nous disent souvent, au moment de la tournée: Avant
d'être avec vous autres, je pouvais être six mois sans me faire
payer. Le parent partait et j'oubliais ça. Il n'était pas
question que je m'obstine. J'avais peur des impacts sur les enfants. Il
n'était pas question non plus de demander un tarif qui avait un peu de
bon sens. Cela ne se faisait tout simplement pas parce que, très
souvent, c'était la voisine bien connue - on est en milieu rural - la
grand-mère, la maman, l'oncle ou la tante qui s'occupait de ta garde et
cela ne se paie pas.
Mme Harel: Donc, est-ce qu'il y a des difficultés de
recrutement? Avez-vous des difficultés de recrutement de familles
d'accueil?
Mme Fortin (Solange): Pour le moment, nous n'avons pas de
difficultés de recrutement. Il y a, sur quatre appels, trois auxquels il
n'y a pas de suite pour les raisons que j'ai données
prédécemment, mais celle qui reste est une personne très
motivée. La personne qui adhère à l'agence ne quitte pas
à moins d'un déménagement.
Mme Harel: Donc, celles qui ne poursuivent pas, vous dites que
c'est, en fait, en grande partie à cause du ratio, parce qu'en dehors de
toute garde régie elles peuvent faire ce qu'elles veulent jusqu'à
neuf, et que c'est toute la question de la fiscalité qu'il faudrait
réexaminer. Mais, même quand elles veulent en garder selon le
ratio prévu, il y a un empêchement, une résistance du
conjoint. C'est ça?
Mme Fortin (Solange): C'est exact. Au cours de la première
année, on a eu beaucoup de problèmes parce qu'on n'avait pas de
preuves concrètes à offrir aux gens. On a embauché,
via
le service d'éducation aux adultes, une comptable
agréée en "management", qui est venue donner du support aux
responsables, les aider à faire leur rapport d'Impôts, et personne
n'a eu d'impôt à payer. Maintenant, on a des preuves claires, donc
les gens nous croient beaucoup plus.
Mme Harel: Vous nous expliquez d'ailleurs, à la page 13 de
votre mémoire, que vous avez pu vaincre les résistances ou les
réticences parce que vous leur avez démontré et garanti
qu'il était possible... Les femmes ne sont pas très
habituées, sans doute, à ces formules d'impôts et aux
déductions qui sont permises. C'est donc en ayant cette comptable
agréée, j'imagine, que vous avez pu faire cette
démonstration. C'est ça?
Mme Fortin (Solange): Oui. Donc, un support de l'office, à
cet égard, en collaboration avec le ministère du Revenu, nous
éviterait des démarches à n'en plus finir pour mieux
connaître les lois de la fiscalité.
Mme Harel: Je retiens ça. Il me semble que c'est un
élément extrêmement important, autour duquel on tourne
depuis le début de la matinée. Pour ce qui est des travailleuses
agricoles, vous nous décrivez un peu la situation. Elles ne connaissent
exactement ni le début de leur engagement, parce que cela dépend
de la saison, du beau ou du mauvais temps, ni la fin. Vous voulez avoir un
ratio et vous insistez pour que ce soit un ratio qui se gère facilement.
Vous dites qu'il n'y a pas de service de garde scolaire en
général. C'est le cas?
Mme Fortin (Solange): Ni en général ni en
particulier, il n'y a pas de service de garde en milieu scolaire, bien qu'il y
en ait dans notre commission scolaire, mais non en milieu urbain:
Saint-Constant, La Prairie, etc.
Mme Harel: II n'y a pas de service de garde scolaire parce qu'il
n'y a pas de demande?
Mme Fortin (Solange): Non. C'est parce que les clientèles
sont beaucoup trop petites pour établir un service de garde en milieu
scolaire à peu près viable. On a besoin de 21 enfants. Nos
écoles en comptent 135 jusqu'en sixième année. Où
prendre les 21 enfants?
Mme Harel: En vous écoutant, je me suis dit: Devrait-il y
avoir une distinction entre les enfants d'âge scolaire du premier cycle
et du deuxième cycle du primaire? Comme l'énoncé ne le
fait pas et parle des enfants, je pense, de six à douze ans, est-ce
qu'il ne faudrait pas justement faire une distinction entre ceux qui ont, au
premier cycle du primaire, entre six et neuf ans, et ceux qui ont entre dix et
douze ans? Parce que ceux-ci peuvent presque devenir des moniteurs pour les
plus jeunes. Est-ce que c'est là votre opinion? Je vois Mme Tremblay qui
n'a pas l'air d'être...
Mme Fortin (Solange): Nous ne sommes pas allées si loin
que ça. Déjà la mesure permettant d'inclure deux enfants
d'âge scolaire... et, pour nous, cette mesure n'est pas tant pour la
garde estivale que pour la garde post-scolaire dont on a abondamment
parié ce matin. La période d'une demi-heure ou une heure de
chevauchement qui... Parfois, on se dit: Si on était
«légales! Mais on tâche de respecter... Par contre, c'est
bien évident qu'un enfant de onze ans est souvent une aide pour la
responsable de famille de garde. Mais, déjà l'amélioration
du deux, six, onze ans, c'est beaucoup et on n'est pas allées plus
loin.
Mme Harel: Pour le préscolaire, quel ratio
souhaitez-vous?
Mme Fortin (Solange): Un-cinq.
Mme Harel: Un-cinq. Et pour les poupons, est-ce que vous avez une
recommandation à faire? Est-ce que vous avez une forte demande pour les
poupons? Et avez-vous aussi des listes d'attente?
Mme Fortin (Solange): Nous n'avons pas de liste d'attente. Pour
ce qui est des poupons, la demande est très forte et c'est
extrêmement difficile à gérer, parce que notre politique
était de ne pas confier plus d'un poupon à une responsable de
famille de garde. Mais l'expérience nous a démontré
maintenant, qu'en ce qui concerne certaines responsables ayant des
affinités particulières avec les poupons ou les plus jeunes, il
est souvent préférable de lui confier deux ou trois poupons -
trois poupons, on n'est jamais allé jusque-là mais deux poupons
oui. Par contre, chez certaines autres responsables de famille de garde, c'est
plus facile. Mais quand on réussit à gérer à ce
point finement, on fait vraiment des miracles.
En ce qui concerne la subvention pour les poupons, nous en avons
évidemment besoin, sauf que nous sommes entièrement d'accord avec
la recommandation des autres agences, en ce sens que la gestion doit nous en
être confiée, autrement ce sera ingérable. Le
mémoire parie de la collectivisation des besoins, la qualité du
mobilier. On a déjà du mobilier qui circule et on s'assure du
respect des normes de qualité, mais si la responsable a acheté
elle-même ce mobilier, étant donné que le poupon n'aura pas
toujours 18 mois, qu'est-ce qu'elle va faire de ce mobilier? Va-t-elle le
revendre à l'agence qui elle va le revendre à la prochaine
responsable? Il y a quelque chose dans ça qui nous apparaît aller
à l'encontre des besoins collectifs. L'agence pourrait gérer
cette subvention et la renvoyer aux responsables, sous une forme ou une
autre.
Mme Harel: Je veux maintenant vous remercier. J'espère que
tout ça n'est pas une
sorte de retour à la garde à domicile, même si elle
est régie; c'est un peu l'inquiétude que J'ai
présentement. Mais, de toute façon, Les Jeunes Pousses, vraiment,
vous nous avez présenté un excellent mémoire, et je vous
remercie de votre contribution aux travaux de la commission.
Le Président (M. Bélanger): Merci, Mme la
députée de Maisonneuve. Mme la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Je vous remercie, mesdames, et je vous
félicite pour votre mémoire. Je trouve qu'il reflète bien
toute la problématique d'une agence en milieu rural. Il est bien
structuré et bien explicite. Merci beaucoup, mesdames.
Le Président (M. Bélanger): La commission des
affaires sociales remercie l'Agence de services de garde en milieu familial Les
Jeunes Pousses de Sherrington et invite à la table le groupe YMCA de
Montréal. Nous suspendons les travaux pour deux minutes.
(Suspension de la séance à 17 h 18)
(Reprise à 17 h 20)
Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il
vous plaît!
J'inviterais chacun et chacune à bien vouloir reprendre sa place
afin que nous procédions à l'audition du mémoire du YMCA
de Montréal.
Il nous fait plaisir de vous saluer et de vous expliquer nos
règles de procédure. Vous avez une enveloppe totale de trente
minutes, c'est-à-dire dix minutes, au maximum, pour la
présentation de votre point de vue et vingt minutes de discussion avec
les parlementaires. Avant de procéder, je vous prierais de bien vouloir
Identifier vos porte-parole et, chaque fois que vous aurez à prendre la
parole, de bien vouloir donner vos noms, pour fins de transcription du Journal
des débats. Je vous invite à procéder
immédiatement.
YMCA
M. Côté (Marcel): Merci. Je suis Marcel
Côté. Comme bénévole, je suis président du
YMCA de Montréal. À ma droite, Denise T. Casimir, directrice du
développement au YMCA Saint-Laurent, et, à ma gauche, Madalena
Coutinho, directrice de la garderie Le Jardin des rêves du YMCA
Saint-Laurent et Me François Goulet, secrétaire du YMCA.
Comme vous le savez, le YMCA est une association sans but lucratif,
à vocation sociale, qui compte dix centres communautaires dans la
région de Montréal. Des centres communautaires comme le YMCA, il
y en a une centaine au Québec. Avec ses dix centres, 115 000 usagers
annuels, 2000 bénévoles et un budget de l'ordre de 18 000 000 $,
le YMCA de Montréal est de loin la plus grande association sans but
lucratif à vocation communautaire, au Québec. Chaque centre
communautaire du YMCA recrute des bénévoles dans les quartiers
qu'il dessert Ces bénévoles sont appelés à former
un conseil local de direction, conseil qui est, en moyenne, composé
à 75 % de parents.
Nos centres ont toujours poursuivi un objectif de base: servir la
famille, qu'il s'agisse, d'ailleurs, d'une famille traditionnelle ou d'une
famille non traditionnelle. Tous nos centres communautaires, de par leur
mission, privilégient aussi, dans leur programmation, les familles les
moins favorisées. Le YMCA a d'ailleurs une politique d'accès
à ces programmes et services, politique selon laquelle un centre ne
saurait refuser une personne pour le seul motif que cette personne ne peut pas
payer les frais de participation.
Le YMCA s'occupe d'enfants d'âge préscolaire depuis 137
ans, avec le résultat que notre réseau est le plus grand
pourvoyeur de services à l'enfance au Canada, avec plusieurs milliers de
places en garderie, plus spécifiquement 12 % de toutes les places en
garderie offertes ou payées. Sachez, par exemple, que le YMCA de Toronto
recevait l'année dernière, dans son seul service de garde en
garderie, plus de 6400 enfants.
Pour sa part, le YMCA de Montréal accueille, dans ses centres
communautaires du centre-ville, de Pointe-Saint-Charles, de la ville de
Saint-Laurent et de Notre-Dame-de-Grâce, quatre garderies
organisées en corporation distincte gérée par des parents.
Plus de 50 % des parents d'enfants reçus dans ces garderies
bénéficient d'ailleurs de l'assistance financière de
l'office pour les frais de garde de leurs enfants. Ce nombre est de 54 % pour
ce qui est des parents utilisateurs de notre agence de garde en milieu
familial, qui est située au centre communautaire Saint-Laurent.
De plus, tous nos centres offrent, dans le cadre de leur programme
familial, de nombreuses activités pour les enfants. Au moment où
l'on se parle, plus de 5000 enfants âgés de un à cinq ans,
soit 10 % de notre clientèle, et plus de 6000 de six à onze ans,
soit 12 % de notre clientèle, sont inscrits à des
activités au YMCA de Montréal.
Le projet de réforme qui nous est proposé a fait, dans
notre association, l'objet de vigoureux débats et d'un vaste
éventail d'opinions. Pour ne pas nous écarter de nos principaux
objectifs, nous avons toutefois voulu limiter nos commentaires à quatre
points primordiaux qui concernent tous l'implication des centres communautaires
en général et du YMCA en particulier, dans le domaine des
services de garde à l'enfance. Notre principale demande porte sur les
conditions d'émission des permis de garde en garderie et, comme
corollaire, sur les conditions de versement
des subventions pour ce type de services de garde.
Notre demande pourrait se résumer de la façon suivante:
Que la loi reconnaisse les centres communautaires au même titre que les
associations de parents pour l'établissement et le financement des
garderies. Quatre raisons justifient ce traitement non discriminatoire.
Premièrement, cette reconnaissance permettrait d'ouvrir un vaste
potentiel humain, gestionnaire et financier. Nous sommes équipés
pour desservir les familles: nous avons le savoir-faire; nous avons la base
financière; nous avons généralement l'espace physique.
Deuxièmement, les centres communautaires offrent, non seulement la
continuité, mais aussi la permanence et l'intégration dans un
milieu, caractéristiques qui sont l'essence même d'un centre
communautaire. Ce sont aussi des qualités que doit rechercher une
garderie. Notre expérience dans le bénévolat - nous sommes
l'une des plus importantes associations de bénévoles du
Québec - nous enseigne clairement qu'une association dont la direction
de bénévoles roule, pour ainsi dire, à tous les deux ou
trois ans, fait face à de sérieux problèmes de
continuité et s'expose à des crises périodiques de
leadership à moins que le contrôle effectif ne soit
abandonné à des permanents. Les centres communautaires
présentent, par contre, une grande constitution institutionnelle et le
YMCA en est un exemple probant.
Troisièmement, une garderie dans un centre communautaire permet
d'intégrer un grand nombre d'activités qui enrichissent le
séjour des enfants, que ce soit la natation, la danse, l'exercice, les
jeux, etc. Nous avons beaucoup d'équipements non utilisés dans le
jour. Finalement, les centres communautaires oeuvrent le plus souvent
auprès de personnes défavorisées. Ainsi, selon une
étude du MLCP, le revenu familial de 76 % des utilisateurs des centres
communautaires serait inférieur à 15 000 $, dans 30 centres
communautaires recensés sur 32.
Au meilleur de notre connaissance, aucun centre communautaire ne serait
présentement titulaire d'un permis de garde en garderie, au
Québec. La régime actuel, auquel va nous conduire à cet
égard l'énoncé, limite grandement l'implication des
centres communautaires dans le secteur des garderies. À supposer
même qu'ils pourraient obtenir un permis de garderie, ne serait-ce que
pour un seul de ses centres, le YMCA de Montréal, suivant
l'énoncé, ne pourrait être subventionné que pour les
services de garde offerts à des poupons ou à des enfants
handicapés, ce qui restreindrait considérablement notre rayon
d'action.
Mme Casimir (Denise): Tout comme le gouvernement, le YMCA juge
primordiale la participation des parents au développement et à la
prestation des services de garde à l'enfance. D'ailleurs, s'il
était permis au YMCA d'établir des garderies, il serait le
premier à veiller à ce que les parents participent activement au
développement de celles-ci, car c'est son rôle d'assurer cette
participation.
Néanmoins, il faut se rendre à l'évidence que si
les parents s'intéressent à la qualité des services de
garde offerts à leurs enfants, plusieurs d'entre eux se passeraient bien
des nombreuses responsabilités que comporte l'administration d'une
garderie, responsabilités qui leur sont néanmoins imposées
par le régime actuel et qu'ils doivent assumer s'ils veulent
bénéficier de services de garde à prix abordable.
Pour notre part, nous croyons que plusieurs parents, sinon la
majorité, préféreraient concentrer leurs efforts sur
l'élaboration d'un programme pédagogique pour leurs enfants
plutôt que sur les nombreux problèmes administratifs et financiers
des garderies. L'énoncé de politique maintient le statu quo
à ce chapitre et relègue les centres communautaires au second
plan. Le YMCA est typique à cet égard. Dans le cas de deux
garderies, nous sommes un simple pourvoyeur d'installations. Dans deux autres
cas, le YMCA offre à des garderies gérées par des parents
des locaux et aussi des services administratifs et professionnels selon des
ententes compliquées par les considérations d'ordre juridique,
administratif et financier que commande la mise en présence de deux
corporations distinctes.
Les sources de conflits sont trop nombreuses dans ces arrangements
artificiels. Les employés de la garderie, par exemple, sont
tiraillés entre deux patrons: l'association de parents et le YMCA.
Ensuite, la séparation juridique rend plus difficile
l'intégration de la garderie et des activités du centre
communautaire qui visent la clientèle préscolaire. Avec deux
lignes d'autorité, l'intégration de la programmation est moins
facile. Finalement, comment une association sans but lucratif, comme le YMCA,
peut-elle investir dans l'aménagement de locaux sans garantie de
l'association de parents, dont les problèmes financiers sont
fréquents et dont la pérennité n'est pas
assurée?
Pour ces raisons, nous demandons au gouvernement de reconnaître
aux centres communautaires la même légitimité et les
mêmes droits qu'aux associations de parents, et ce, sur le pian du nombre
de garderies qu'ils peuvent établir, sur le plan de la diversité
des services qu'ils peuvent maintenir et sur le plan des subventions qui
peuvent leur être versées. Dans la même veine, nous
demandons aussi au législateur de considérer la
possibilité de permettre aux centres communautaires d'offrir, sur
demande, des services de garderie en milieu de travail. Nonobstant la
réthorique, iI y a très peu de garderies en milieu de travail.
Nous croyons que les manques d'expérience, d'expertise et de ressources
financières des entreprises sont à la base de cette carence. Les
centres communautaires sont habitués à offrir des services
à l'extérieur de leurs murs. On passerait ainsi de
la parole aux actes.
Notre troisième recommandation porte sur la perception des tarifs
par les agences de garde en milieu familial. Le YMCA offre un tel service
depuis longtemps, et ce, dans le meilleur intérêt des gardiennes
et du service de garde en tant que tel.
Le Président (M. Bélanger): Alors, Mme Casimir, je
vous inviterais à conclure, s'il vous plaît, rapidement.
Mme Casimir: II ne faut pas négliger le rapport de forces
entre la gardienne et les parents. La perception centralisée assure non
seulement des tarifs décents, mais aussi leur perception. Pourquoi
veut-on créer un système qui place la gardienne dans un
état de dépendance? La gardienne qui veut sortir du service de
garde et fonctionner de façon autonome peut toujours le faire.
Le Président (M. Bélanger): Merci.
M. Côté (Marcel): Vous terminerez la lecture dans
vos moments libres.
Le Président (M. Bélanger): Bien. Je vous remercie
beaucoup de votre compréhension. Mme la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Merci pour votre exposé. Compte tenu,
justement, du peu de temps mis à notre disposition, je vais aller
immédiatement aux questions. Vous nous recommandez un type ou un mode de
services qui est un peu différent de ce qui existe actuellement. Par
contre, l'objectif que nous visons... On ne veut vraiment pas aussi, à
un moment donné, se retrouver avec certaines chaînes de garderies.
Donc, ma première question est la suivante: Est-ce que vous demandez
d'être considérés sur la même base qu'une corporation
municipale ou qu'une commission scolaire? C'est-à-dire que la commission
scolaire - je ne sais pas si vous êtes au fait - ou la
municipalité peut ouvrir des garderies. On ne paye pas pour
l'implantation mais on paye la subvention de fonctionnement et, de plus, il n'y
a pas nécessairement de comités composés majoritairement
de parents.
M. Goulet (François): Si je peux me permettre de
répondre à la question, je pense que ce qu'on demande et ce qu'on
veut vraiment, c'est d'être reconnus comme des garderies de parents parce
que, de toute façon, le YMCA souhaite et désire l'implication des
parents dans les garderies qu'il voudrait établir. C'est quelque chose
de concret. Et, ma foi, s'il y a des subventions à aller chercher pour
le démarrage, eh bien, certainement que le YMCA aimerait se les procurer
lui aussi. On développe constamment des immeubles et on voudrait bien y
aménager des garderies. Donc...
Mme Gagnon-Tremblay: Par contre, où allons-nous nous
arrêter? Vous parlez du YMCA, mais vous savez qu'a y a des
communautés religieuses et d'autres organisations sans but lucratif
comme les collèges, les universités, le Centre
Immaculée-Conception. Il peut aussi y avoir le réseau des CLSC.
Alors, où s'arrête-t-on avec cette forme de garde?
M. Côté (Marcel): Je pense qu'il faut passer un
test. C'est surprenant que pour le YMCA qui, partout au Canada et en
Amérique du nord, est le plus gros pourvoyeur de services de garderie,
au Québec, on nous serve cette théorie. Les parents qui
mènent le YMCA dans leur milieu, se créent un centre
communautaire, mais Ici, au Québec, pour avoir une garderie, il faut
faire parallèlement une autre association de parents. Ils travaillent
ensemble. On a des relations très constantes, mais vous devriez voir les
problèmes que le fait de mettre deux corporations dans le système
crée dans le quotidien, les problèmes de sécurité
d'emploi pour les employés, les problèmes de... Parce qu'on a,
finalement, un arrangement qui est un arrangement bidon - il faut l'appeler par
son nom - et c'est normal. Ce sont des parents qui viennent de milieux, qui
vivent les uns à côté des autres, mais il y en a qui sont
dans la corporation de la garderie et d'autres qui sont dans la corporation du
YMCA. Alors, les parents se débrouillent entre eux. Ils s'arrangent bien
localement, mais, de temps à autre, il y a des problèmes et c'est
ce qu'on essaie d'éviter.
Quant à l'idée de savoir où s'arrêter, je
pense que vous devriez passer des tests. On est prêts à passer un
test quant au nombre de parents, quant à... à passer une
série d'exigences. Ce qu'on voudrait, c'est de ne pas, a priori,
être éliminés.
Mme Gagnon-Tremblay: Par contre, si j'ai bien compris, si on
permettait ce type de services de garde à l'intérieur du YMCA,
votre intention serait aussi d'ouvrir d'autres services en dehors de votre
centre.
M. Côté (Marcel): Non. Actuellement, si la loi
était modifiée, on en ouvrirait dans quatre ou cinq centres
communautaires. Actuellement, iI y en quatre qui n'ont pas de garderie. Il y en
a une à Hochelaga-Maisonneuve où on a donné le terrain
à une garderie, à une association de parents qui a construit sa
garderie, laquelle est même reliée physiquement, par un tunnel, au
centre communautaire où finalement iI y a beaucoup de facilités.
On ouvrirait ces cinq garderies-là. Et, si vous nous en donnez la
permission, on pourrait offrir des services de garde en milieu de travail,
à Montréal. Nous sommes équipés. Si nous n'avons
pas le droit nous ne le ferons pas. On ne le fait pas actuellement. Mais dans
le centre-ville de Montréal, on pense... On a un centre communautaire
à la
place Guy-Favreau. Évidemment, on n'a pas de garderie
là-dedans mais il pourrait y en avoir une. Il y en a une maintenant qui
s'est créée parce qu'on ne pouvait pas aller dans le centre
Guy-Favreau. Mais on n'a pas l'intention d'ouvrir une chaîne de
garderies. Non, non. Ce serait un service de succursales. Si on ouvrait une
succursale sur la rive sud, on y aménagerait une garderie.
M. Goulet: Si je peux me permettre d'ajouter, on a
récemment...
Le Président (M. Bélanger): Me Goulet.
M. Goulet: Merci. On a récemment offert 100 000 $ au YMCA,
à toutes fins utiles, pour démarrer une garderie. C'était
une entreprise qui voulait et souhaitait la participation du YMCA au
développement d'une garderie. Finalement, en raison des complications
administratives, la société a plus ou moins refusé de
s'engager dans tout le processus, soit d'aller elle-même se chercher un
permis, etc. Donc, c'est parfois très embêtant pour nous
d'être obligés de refuser de pareilles occasions d'offrir des
services de garde à une clientèle qui les réclame. On ne
peut pas donner suite à des invitations qui nous sont lancées
comme ça par des employeurs.
Mme Gagnon-Tremblay: Êtes-vous d'accord que tout
développement, y compris celui que vous pourriez faire, devrait
être soumis aux règles de la planification régionale qu'on
entend faire?
M. Côté (Marcel): Ah oui! Je pense qu'on n'a pas de
problème de relation avec les organismes locaux ou régionaux. Au
contraire, on travaille bien avec eux. On vit un peu dans le quotidien des
relations avec les employés et les associations de parents et il y a
parfois des problèmes de relation entre nos bénévoles et
leurs bénévoles, leurs employés et nos employés,
les employés syndiqués d'un groupe et les employés
syndiqués de l'autre. Il faut voir que cela devient compliqué. Le
Québec est probablement le plus gros pourvoyeur, en dehors du
système public, de services à l'enfance préscolaire. On
trouve ça un peu drôle.
Mme Gagnon-Tremblay: En somme, ce qui arrive, c'est que le fait
de penser à un statut particulier à l'intérieur d'un YMCA,
c'est quelque chose d'envisageable, quelque chose qu'on peut au moins regarder.
Comme je vous l'ai dit, par contre, il faut savoir et il faut se poser la
question: Où s'arrête-t-on? Est-ce que, par exemple, le centre
communautaire Immaculée-Conception, les collèges et les
universités auraient le droit aussi au même statut?
M. Côté (Marcel): C'est une décision
politique à prendre, à savoir si le centre
Immaculée-Conception... C'est évident que les communautés
religieuses ne sont pas des associations de parents. Il y a déjà
un test qu'on peut établir. Il faut que ce soit majoritairement des
parents dans les conseils d'administration, ainsi de suite. Mais, c'est
à vous...
Quant à nous, on croit que les centres communautaires... Je
connais un peu le centre Immaculée-Conception qui s'occupe des enfants
d'âge préscolaire. Je ne sais pas s'il est aussi Impliqué
que nous, mais, en général, le centre communautaire s'occupe
déjà des enfants au préscolaire, qui s'en occupe bien et
qui va, d'ailleurs, transiger avec l'office parce qu'il peut être
considéré comme une halte-garderie, à toutes fins utiles.
Là, il y a un service particulier qu'il ne peut offrir.
Mme Gagnon-Tremblay: Finalement, comme je le disais tout à
l'heure, peut-être que cela ne fait pas problème pour un centre
YMCA, sauf qu'à l'extérieur, c'est peut-être plus
difficile...
M. Côté (Marcel): Ah! Ne donnez pas de permis.
Mme Gagnon-Tremblay: ...de le faire sans que cela ne devienne
justement, à un moment donné, un certain monopole.
M. Côté (Marcel): On vous tend la main. Si vous ne
vouiez pas qu'on... On vous dit: Si vous voulez des garderies en milieu de
travail, on fait beaucoup de programmes en milieu de travail, on connaît
ça, des services hors murs. Si on n'en a pas le droit, on ne le fera
pas. On vient de vous donner un exemple. On trouve que c'est malheureux parce
qu'on pourrait en ouvrir, mais si on n'en a pas le droit, on ne le fera
pas.
Mme Gagnon-Tremblay: La participation des parents pourrait se
faire à quel niveau à ce moment-là?
M. Goulet: La loi prévoit déjà d'ailleurs,
pour des corporations qui ne sont pas gérées par des parents,
qu'un comité de parents doit exister, qu'il soit un comité
consultatif qui doit être consulté sur tous les aspects de la
gestion de la garderie. Au fond, des mesures existent déjà pour
assurer la participation des parents dans ces services. Ce qui manque
peut-être, c'est une façon pour l'office de vérifier que
ces mesures soient effectivement mises en oeuvre de façon efficace et
tangible. Quant à nous, n'ayez aucun doute qu'effectivement, si nous
pouvions établir ces garderies, ces comités de parents
existeraient parce que nous n'existons que par les bénévoles qui
gravitent autour de l'association.
Dans tous nos services et tous nos programmes, il y a toujours des
comités de programmation qui sont des comités d'usagers du YMCA,
alors je ne vois pas pourquoi, du jour au lendemain, on ferait une exception
pour ce qui
est des services de garde et, à plus forte raison, puisque c'est
quelque chose qu'on a toujours voulu faire, impliquer les parents. D'ailleurs,
on souscrit à la politique du gouvernement d'accorder la
préférence, si l'on veut, à des corporations
gérées par des parents; ce n'est pas qu'on ait quelque chose
contre, ce que l'on déplore dans un sens, c'est qu'en favorisant ceci,
on empêche d'autres organisations, qui ont pourtant des capacités
et des moyens importants, d'offrir de tels services, de bien les offrir; donc
on les empêche de le faire.
Mme Gagnon-Tremblay: Merci.
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Maisonneuve.
Mme Harel: Merci, M. le Président. J'ai également
le plaisir de vous saluer. Comme vous l'aviez signalé, M.
Côté, il y a un centre YMCA installé dans
Hochelaga-Maisonneuve, sur la rue Hochelaga, qui rend de très bons
services et qui a une entente avec le Jardin charmant qui s'est installé
à ses côtés.
Vous nous avez parlé des centres communautaires, dans la mesure
où la demande est faite pour les YMCA. Je crois comprendre que vous
faites partie de la Fédération des centres communautaires du
Québec.
M. Côté (Marcel): Non.
Une voix: Nous n'en faisons pas partie.
M. Côté (Marcel): C'est toujours un problème
d'être gros. Les autres YMCA en font partie. Nous, on a été
refusé. On est trop gros. En tout cas, ce sont nos problèmes. On
les connaît.
Mme Harel: Ah bon! Vous parlez du YMCA du centre-ville?
M. Côté (Marcel): Non, de l'ensemble des YMCA. Je
suis président du groupe. Malheureusement, à Montréal, pas
malheureusement, mais coopérativement, c'est une entreprise, une
association à but lucratif qui a dix centres communautaires sans but
lucratif.
Mme Harel: Je vous dis cela, M. Côté, parce que le
président de la Fédération des centres communautaires est
le directeur du Centre culturel et sportif de l'est dans Hochelaga-Maisonneuve.
J'ai eu souvent l'occasion de lui en parler et ces gens rendent aussi de
très très bons services au milieu. Je crois qu'il y en a 75
à travers le Québec, des centres communautaires. Leur vision des
choses est plutôt d'offrir des services complémentaires à
ceux qui existent déjà. Tantôt, vous posiez la question:
Pourquoi est-ce que les YMCA ailleurs, dans les autres provinces ou dans les
autres pays, sont-ils des pourvoyeurs Importants? Je faisais une blague
à la ministre. Je lui disais: Peut-être qu'ici, c'est une
société distincte dans le fond et on s'est donné un
réseau géré par les parents. Mais, il y a vraiment des
besoins complémentaires. Je pense en termes de haltes-garderies, en
termes de jardins d'enfants, en termes de garde estivale. Vous avez une
expertise qui est connue, qui est reconnue. Peut-être qu'il n'est pas
souhaitable de penser à des places en garderie l'été pour
des enfants qui auraient peut-être intérêt justement
à participer à vos camps de jour. C'est peut-être par ce
biais qu'il pourrait y avoir finalement une contribution très importante
de votre part parce qu'il y a déjà tout un réseau
régi par les parents. Vous savez, ce n'est pas les projets qui manquent.
On n'est pas dans une situation où on aurait un problème de
promoteur. On est dans une situation où il y a des centaines de projets
en attente d'implantation.
M. Côté (Marcel): Nous, on ne parle pas beaucoup de
projets. Dans notre cas, il y aurait cinq garderies de plus qui seraient
offertes probablement parce que les parents, dans cinq centres communautaires,
décideraient de les offrir. Le YMCA a peut-être cette distinction
des centres communautaires du Québec, des anciens patros et tout
ça. On a toujours été Impliqués plus socialement.
Il y a une tradition au YMCA, une tradition anglaise, d'ailleurs, d'implication
sociale, de faire financer ça par la gymnastique, mais il a toujours
été dominé par des travailleurs sociaux, pour ceux qui le
connaissent. Évidemment, si on n'a pas de permis, il va
éventuellement y avoir des garderies qui vont s'intégrer
là-dedans, comme ça s'est fait dans votre quartier. La garderie
s'est intégrée, mais je ne sais pas si c'est le meilleur
arrangement administratif qui assure la pérennité. Si je prends
les employés de cette garderie, ils n'ont peut-être pas la
sécurité d'emploi qu'ils auraient avec les employés du
YMCA. Il faut en quelque sorte qu'on essaie d'avoir une certaine parité
de salaires. Les gens travaillent ensemble, ils se côtoient. C'est le
même petit milieu. Ils sont de quinze à vingt permanents dans un
centre communautaire et peut-être de 200 à 300
bénévoles et les autos des parents arrêtent toutes à
la même place. Pour eux autres, c'est tout le YMCA parce que c'est leur
centre communautaire. Là, admlnistrativement, on essaie de créer
une fiction.
Mme Harel: Est-ce que je dois comprendre que vous seriez
prêts à les subventionner? Vous savez que les salaires sont
différents parce que les tarifs sont élevés mais, les
parents n'ont pas la capacité de payer plus et les subventions ne
seraient pas plus importantes pour une garderie qu'aurait le YMCA ou celle qui
serait reliée par un tunnel à côté et
gérée par les parents. Est-ce que vous avez l'intention de
subventionner le fonctionnement, les opérations? Est-ce que c'est
ce que je dois comprendre?
M. Côté (Marcel): Cela dépend. Dix à
Montréal, c'est un gros système de péréquation.
Dans Hochelaga-Maisonneuve, c'est un centre communautaire qui est
subventionné par les autres centres communautaires. Je me souviens que
le déficit doit être d'environ 80 000 $ à 90 000 $ par
année peut-être et c'est l'argent qu'on ramasse ailleurs qu'on met
là. À Pointe-Saint-Charles, c'est 200 000 $ par année
qu'on investit pour combler le déficit annuellement. Alors,
évidemment, s'il y avait la garderie, on essaierait d'aller chercher le
maximum partout. Vous connaissez les organisations sans but lucratif.
Mme Harel: C'est légitime.
M. Côté (Marcel): Après ça, c'est
évident que si les parents veulent avoir une garderie, on va regarder
quel est le maximum qu'on est capable d'aller chercher et, après
ça, on va Installer la garderie. Mais c'est sûr qu'il y a de la
péréquation, iI y en a continuellement dans un organisme comme le
nôtre. Je ne peux pas vous répondre précisément sur
les salaires, mais iI n'y a pas de doute que dans une même unité
de travail, on aime bien avoir une politique salariale, et non deux. C'est plus
normal. Cela nous arrive. D'ailleurs, on a eu des problèmes dans
certains cas où soit que les parents ne voulaient pas donner les
salaires qu'on donnait ou ils voulaient en donner de plus gros. Cela se
règle, finalement, mais ce sont des tracasseries.
Mme Harel: Tantôt, on parlait du centre
lmmaculée-Conception, il y a une garderie à
Immaculée-Conception. C'est une garderie qui a une très bonne
réputation parce que, pour vous, justement, il y a cet accès dont
vous parliez à la natation, à la danse, à tout ça,
mais ça reste une garderie gérée, à ma
connaissance, par les parents.
M. Côté (Marcel): Sachez, madame, que si on avait la
permission, on conserverait les garderies de parents comme elles sont, on
finirait par s'entendre, trouver des règles. On finit par s'organiser.
Mais s'il n'y a pas de garderie dans certains centres, c'est que c'est
compliqué, des fois. Nous n'avons pas l'intention d'expulser les gens.
On ne pourrait pas, ce sont des gens qui viennent du même milieu, c'est
la communauté qui décide.
Mme Harel: Concernant l'Agence de garde en milieu familial, vous
souscrivez à l'idée qu'il faut que ce soit géré.
Vous avez abondé dans le sens qu'il faut qu'il y ait le moins de sources
de conflits possible entre le parent et la famille de garde. Est-ce que vous
avez des listes d'attente? Est-ce qu'il y a des difficultés de
recrutement de familles d'accueil? Est-ce qu'il n'y aurait pas un
développement qui pourrait être fait? Par exemple, vous n'avez pas
l'idée, au YMCA de Maisonneuve, d'ouvrir une agence de garde en milieu
familial? Il me semble que le besoin serait plus grand qu'en garderie.
Mme Casimir: Je suis directrice de l'Agence de garde en milieu
familial, donc je pense que je peux vous répondre. On a une liste
d'attente, on n'a aucun problème de recrutement, justement à
cause du fait qu'on paie les gardiennes, on perçoit l'argent des
parents. Tout cela a été dit, les raisons pour lesquelles on fait
ça. Les responsables de familles de garde ne veulent pas s'occuper de
ces choses. Le montant qu'on perçoit du parent ou de la gardienne - on
peut le voir dans le sens qu'on veut - est remis à la gardienne en
services, en cours, et toutes sortes de choses qu'on offre aux parents et aux
gardiennes.
Pour ce qui est du développement, effectivement, ça fait
deux fois que je demande des augmentations de permis pour pouvoir ouvrir une
succursale, une suite, un service à Pointe-Claire. Le YMCA ne pouvait
pas avoir un deuxième permis pour le YMCA de Pointe-Claire. Je voulais
continuer, demander plus de places et ça a été
refusé. On ne peut pas avoir d'autres places.
Mme Harel: Pour quel motif? Est-ce que ça a
été refusé ou retardé? Est-ce que ça a
été refusé?
Mme Casimir Probablement que ça a été
retardé à cause de l'énoncé, j'imagine, vu qu'on
veut limiter les agences à 120 places. J'en ai déjà 110 et
j'en demandais 50 de plus.
Mme Harel: Concernant la taille, est-ce que vous pensez que vous
pourriez grossir sans difficulté?
Mme Casimir. Personnellement, je crois que le problème ne vient
pas de la taille ou du nombre de places au permis, c'est dans la façon
dont c'est géré, la façon dont c'est organisé, avec
des points de service où les gens d'un milieu sont desservis. Il ne faut
pas que le point central soit à l'autre bout de la ville. C'est ma
façon de le voir. Si on avait des points de service, même si
j'avais 200 places, je pourrais les gérer en mettant des gens
compétents à chaque point de service. L'administration pourrait
relever d'une place, mais le service comme tel aux parents et au RFG -
responsable de la famille de garde - serait dans leur milieu.
Mme Harel: En tout cas, je vais terminer parce que le
président m'a dit que c'était fini. Je veux vous dire que le nom
YMCA veut dire qualité. C'est clair et, à Montréal,
ça l'est. C'est quand même exceptionnel qu'après tant
d'années, pour ne pas dire un siècle et plus, vous n'ayez jamais
été associés à rien du tout. On dit
toujours qu'il y a des hauts et des bas, mais si vous en avez connu, on
ne l'a pas su et c'était mieux comme ça. Vous l'avez repris en
main, ça veut dire que la gestion est quand môme connue comme en
étant une au service des concitoyens. J'espère, dans le cadre des
jardins d'enfants, des haltes-garderies et de garde en milieu familial, que
vous puissiez développer des ressources qui sont manquantes. Je vous
remercie.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. Mme
la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay. Je vous remercie pour votre exposé. Soyez
assurés que je vais prendre en considération le point Important
de votre mémoire sur la structure comme telle d'ici à la fin de
la commission parlementaire. Je vous avoue qu'il s'agit de circonscrire, de
savoir où l'on s'arrêtera et de quelle façon on pourra le
faire pour ne pas créer de problèmes, mais bien rendre les
services que les parents attendent. Merci.
M. Côté (Marcel): Merci beaucoup.
Le Président (M. Bélanger): Alors, la commission
des affaires sociales remercie le YMCA de Montréal et invite à la
table des témoins l'Association féminine d'éducation et
d'action sociale, l'AFEAS. Alors, nous suspendons donc quelques instants pour
permettre à ces gens de prendre place.
(Suspension de la séance à 17 h 50)
(Reprise à 17 h 55)
Le Président (M. Bélanger): Je demanderais à
chacun et à chacune de bien vouloir reprendre sa place afin que nous
puissions continuer nos travaux. J'inviterais donc à la table des
témoins l'Association féminine d'éducation et d'action
sociale, l'AFEAS.
Bonjour, mesdames. Pour vous expliquer un peu nos règles de
fonctionnement, vous avez une heure, c'est-à-dire vingt minutes pour la
présentation de votre mémoire et quarante minutes de discussion
avec les membres de la commission. Je vous prierais de vous identifier comme
porte-parole et, lorsque vous aurez à prendre la parole lors de la
période de questions et de réponses, de bien vouloir donner votre
nom à chaque fois, et ce, pour les fins de la transcription du Journal
des débats. Je sais que c'est fastidieux et tannant, mais cela nous aide
beaucoup. Je vous remercie et je vous prie de commencer.
AFEAS
Mme Marion (Christine): Merci, M. le Président. Je suis
Christine Marion, présidente de l'AFEAS. Je vous présente
Michelle Houle-
Ouellet, chargée du plan d'action à l'AFEAS et
également rédactrice du mémoire.
Vous le savez sans doute, l'AFEAS a été fondée en
1966. Elle regroupe actuellement 30 000 membres répartis dans 550
cercles locaux dans tout le Québec. Bien entendu, l'AFEAS s'est
donné des structures hautement démocratiques qui nous permettent
d'affirmer aujourd'hui que le mémoire que nous vous présentons
représente vraiment la pensée de nos membres. Les membres de
l'AFEAS sont à l'affût des interrogations et des problèmes
majeurs de notre société. La moitié d'entre elles
travaille exclusivement au foyer alors que l'autre moitié se retrouve
sur le marché du travail rémunéré. Il est par
conséquent évident que la large majorité d'entre elles a
été, est ou sera aux prises avec un problème de garde
d'enfants.
Plusieurs des recommandations adoptées par nos membres ont
tenté d'apporter des solutions aux problèmes vécus par les
parents en matière de garde d'enfants. Ces solutions sont celles
d'utilisatrices de services, de mères aux prises avec des
problèmes et des besoins précis et soucieuses du bien-être
de leurs enfants. Nos prises de position peuvent tracer de grandes orientations
pour une politique sur les services de garde. Nous profitons de l'occasion pour
faire valoir l'opinion de nos 30 000 membres devant la présente
commission parlementaire en guise de réponse à
l'énoncé de politique sur les services de garde à
l'enfance, "Pour un meilleur équilibre", présenté par le
gouvernement du Québec. Nous tenons cependant à préciser
que n'étant pas une association de services impliquée dans ce
domaine, nous ne pouvons nous prononcer sur des aspects qui sont pourtant
majeurs dans le développement de ce dossier, par exemple, la
qualité des services ou les normes de fonctionnement. Le fait que nous
ne nous prononçons pas sur ces domaines n'implique pas cependant une
approbation ni une désapprobation de ce qui est proposé. Nous
comptons sur les groupes visés pour débattre de la pertinence des
propositions gouvernementales en regard de la réalité quotidienne
de la garde des enfants.
L'AFEAS réclame depuis 1976 l'instauration d'un réseau de
garderies sur l'ensemble des territoires du Québec. Si le dossier a,
bien sûr, évolué, il apparaît clairement que le
nombre de places disponibles accréditées par l'Office de services
de la garde à l'enfance est loin d'être suffisant pour
répondre aux besoins existants. Les parents sont exigeants et sont en
droit de l'être quand il s'agit de confier la garde de leurs enfants.
Malheureusement, la plupart du temps, ils ne peuvent utiliser les services
accrédités dont la qualité est contrôlée et
doivent se débrouiller par leurs propres moyens.
La garde des jeunes enfants exige une disponibilité de tous les
instants, 24 heures par jour, sept jours par semaine, et ce, pendant plusieurs
années. Cette complète disponibilité ne peut être
assurée par les deux parents qui
doivent aussi répondre à leurs exigences professionnelles
ou sociales. Ils doivent donc recourir à des services extérieurs
à la famille pour assurer la suppléance. Traditionnellement,
à cause de la division des tâches selon le sexe, c'est à la
mère qu'on déléguait l'entière
responsabilité de la garde des enfants. Et ce modèle de famille
traditionnelle s'est profondément modifié. La famille est
maintenant plus petite. Les couples commencent à la fonder plus tard ou
ont moins d'enfants, quand ils en ont, et le taux des divorces a accru la
proportion des familles monoparentales dont une grande partie vit avec un
revenu inférieur au seuH de la pauvreté.
Le taux de participation des femmes mariées à la
population active s'est élevé rapidement, tout
spécialement celui des mères de jeunes enfants. La famille
à deux soutiens a remplacé la famille traditionnelle. Ces
changements profonds ont fortement accru les besoins en regard des services de
garde tout en réduisant en même temps les possibilités de
recourir à cet égard à des arrangements privés.
Les enfants représentent une ressource collective et
l'État doit partager la responsabilité de leur garde avec les
parents. La volonté exprimée par le gouvernement du Québec
de doubler le nombre de places disponibles en passant de 64 742 à 130
000 places au 31 mars 1994 ne peut que nous réjouir.
Les principes directeurs qui guident le développement
prévu rejoignent les préoccupations exprimées par nos
membres. Nous tenons à rappeler au gouvernement que malgré les
efforts actuellement consentis, l'écart sera encore important entre le
nombre de places requises et la prévision des places disponibles en
1994. Les tableaux que vous voyez dans notre mémoire et qui sont
extraits du document d'orientation le démontrent clairement; les
chiffres sont particulièrement éloquents en ce qui a trait aux
services de garde en milieux familial et scolaire qui nous apparaissent comme
les parents pauvres de l'énoncé de politique. Il est donc
primordial de rappeler que la contribution gouvernementale future doit
être planifiée et réalisée dans des délais
raisonnables.
La mise sur pied d'un réseau adéquat de garderies
constitue une pierre de base dans l'édification d'une réelle
politique familiale. Elle constitue, de plus, le meilleur moyen de soutenir les
parents dans la conciliation de leurs responsabilités familiales et
professionnelles. Toutefois, même si la participation active des femmes
au marché du travail crée des besoins de plus en plus grands en
services de garde, l'AFEAS tient à rappeler que ces besoins ne sont pas
ressentis uniquement par des parents qui travaillent à
l'extérieur. À notre grand regret, cette clientèle est
complètement oubliée dans l'énoncé de politique du
gouvernement.
Les travailleuses au foyer ont besoin de services de garde en de
nombreuses occasions. Les exigences de la vie courante, les retours aux
études, les activités de loisirs, culturelles ou sportives, sont
autant de raisons qui mettent en évidence le besoin de garderies pour
les travailleuses au foyer. Mais un autre domaine où le besoin est
important, c'est celui de la participation à des activités
bénévoles et communautaires qui constituent une autre Importante
raison de recourir aux services de garde. Selon une enquête sur le
bénévolat effectuée par Statistique Canada, 55 % de tous
les bénévoles sont des femmes. On affirme, de plus, que les
femmes consacrent plus de temps que les hommes au bénévolat. Le
bénévolat a une valeur économique et sociale inestimable.
D'ailleurs, Maurice Comtois, dans son premier portrait des 500 000
bénévoles québécois, affirme que les gouvernements
voient de plus en plus le travail bénévole comme une bonne
façon de faire économiser des sous à l'État. Ainsi,
un des phénomènes nouveaux dans le monde du
bénévolat est la multiplication des soins directs de
santé.
Le travail effectué par des organismes comme l'AFEAS est surtout
soutenu par l'implication des bénévoles travailleuses au foyer.
Il permet de fournir au gouvernement des indicatifs précieux quant aux
besoins d'une partie importante de la population. Les services de garde sont
requis pour assumer ces responsabilités sociales. Les membres de la
famille et les amis sont de moins en moins disponibles pour jouer ce
rôle. Sans services de garde, c'est comme si le rôle des personnes
au foyer ne supposait jamais de relâche et qu'il devrait être
assumé 24 heures par jour, 7 jours par semaine à longueur
d'année.
Les travailleuses au foyer sont privées de la plupart des
avantages consentis à ceux et celles qui travaillent à
l'extérieur. Les haltes-garderies sont très peu nombreuses. Les
travailleuses au foyer, en réalité, ont peu accès aux
services de garde en général. L'allocation de
disponibilité, une des rares mesures que les travailleuses au foyer
pouvaient réclamer, a été abolie.
Donc, en ce qui concerne le développement global du réseau
de garderies et considérant le droit des parents à des services
de base de qualité, la participation massive des femmes au marché
du travail, les besoins des travailleuses au foyer, le nombre grandissant de
familles monoparentales, l'insuffisance de revenus d'un grand nombre de parents
pour absorber les frais de garde, surtout lorsqu'il y a plusieurs enfants,
l'AFEAS recommande qu'on développe les services de garde existants en
augmentant le nombre de places disponibles dans toute la province et en
augmentant les sommes votées à ce poste budgétaire, qu'on
rende accessibles aux travailleuses au foyer les services de garde et l'aide
financière qui s'y rattache, qu'on assure la consolidation du
réseau des garderies déjà en place, ainsi que l'extension
d'un réseau de garderies et cela à prix très réduit
afin de faciliter l'accès aux études pour les travailleuses au
foyer qui ont des enfants.
En ce qui concerne l'accessibilité aux
services, il nous apparaît important de souligner que c'est par la
diversité des services que le gouvernement pourra assurer une
réponse appropriée aux besoins des parents. Les
réalités vécues diffèrent énormément
selon la nature et les impératifs des occupations des parents. Les
priorités du gouvernement pour le développement des garderies en
milieu de travail sont compréhensibles. Ce mode de garde est à
peu près inexistant et fera appel à des investissements
privés. Nous ne pouvons que souhaiter que les moyens proposés
constituent un incitatif valable qui convainque les entreprises à ouvrir
des garderies au bénéfice de leurs employés.
Il y a lieu, cependant, de s'interroger, à savoir si la garde des
enfants est toujours l'affaire des femmes dans les mentalités. Nous
sommes un peu inquiètes à ce sujet et nous ne pouvons que nous
questionner. Par exemple, est-ce qu'on ouvrira des garderies dans des milieux
de travail majoritairement masculins? Ou bien est-ce que les garderies seront
ouvertes dans des milieux de travail majoritairement féminins? Je pense
que le gouvernement a un rôle à jouer dans ce changement de
mentalités et j'espère que les commentaires que nous faisons
actuellement pourront contribuer à ce changement des
mentalités.
Au nom de nos membres, ce que nous développons aujourd'hui
concerne particulièrement les services de garde en milieu familial et en
milieu scolaire. Nous tenons aussi à souligner l'importance de la
contribution des municipalités et des établissements du
réseau de la santé.
La garde des enfants en milieu familial regroupée sous une agence
est un mode de garde peu développé. Pourtant, ce mode de garde
offre aux parents utilisateurs une souplesse dans les horaires,
l'accessibilité et la qualité de services aux enfants. C'est en
1985 que les membres de l'AFEAS ont pris position en faveur du
développement des services de garde en milieu familial. Il est important
que le gouvernement élimine les obstacles au développement de ce
mode de garde. Les coûts d'aménagement de services de garde en
milieu familial sont minimes. La garde en milieu familial représente une
alternative intéressante aux services de garde en garderie,
particulièrement là où il s'avère impossible d'en
Implanter vu le nombre restreint d'enfants et d'en absorber le coût
d'administration et de gérance, par exemple, dans les milieux
ruraux.
Suzanne Bouchard a effectué en 1982, pour le compte de l'Office
des services de garde à l'enfance, deux enquêtes pour tracer le
profil des gardiennes et de la clientèle des agences de garde en milieu
familial. Elle concluait: "Le réseau de services de garde en milieu
familial reconnu apparaît, selon les gardiennes et les parents qui se
sont impliqués, satisfaisant et avantageux pour les deux parties." Lors
de l'enquête, les désavantages exprimés par les parents
avaient trait à l'aspect financier des services: ils sont trop
coûteux et l'aide finan- cière inférieure à celle
accordée en garderie. Pour corriger cette situation, la contribution
financière accordée par l'État aux parents a
été uniformisée en 1985, qu'ils utilisent les services de
garde en garderie ou en milieu familial. Nous regrettons que les propositions
gouvernementales ne prévoient pas de subventions pour les
équipements de ce mode de garde. Le financement prévu favorisera
le développement des agences de 50 places et plus et cette orientation
ne permettra pas le développement que nous souhaitons.
En tenant compte de l'immense besoin de développer un plus grand
nombre de places en garderie, des coûts moindres de développement
des services de garde en milieu familial, de la possibilité qu'offre ce
mode de garde d'accommoder les populations rurales, de la satisfaction
exprimée face à ce mode de garde, les membres de l'AFEAS
recommandent que l'Office des services de garde à l'enfance du
Québec accorde une part plus grande des budgets au développement
des services de garde en milieu familial en favorisant l'augmentation du nombre
de places aux permis déjà existants et l'émission de
nouveaux permis dans les réglons qui en font la demande. Que l'Office
des services de garde à l'enfance du Québec lance une campagne
d'information ou de publicité afin de faire connaître les
avantages des agences des services de garde en milieu familial auprès du
public qui ne connaît pas ou connaît très peu l'existence de
cette option.
Nous aborderons maintenant la question de la garde en milieu scolaire.
En mars 1988, ce sont 20 898 places qui étalent disponibles en milieu
scolaire alors que l'office des services de garde évalue à 102
143 le nombre de places requises pour ce type de garde. Au terme des trois
premières années du plan de développement, il manquera
encore 62 310 places pour combler les besoins identifiés.
La garde des enfants de six à douze ans est problématique.
Il est facile d'Imaginer la difficulté des parents qui ont l'obligation
d'assurer une présence adulte auprès de leurs enfants de moins de
douze ans. Quand ils existent, les services de garderie en milieu scolaire sont
disponibles selon les horaires habituels des établissements, ce qui ne
résout pas le problème pour autant. Les parents se retrouvent
avec la totalité du problème durant les jours de congé et
ils sont très nombreux: Noël, Pâques, congés de fin de
session, vacances estivales, journées pédagogiques, semaine de
relâche - comme en ce moment. Les parents ne peuvent s'absenter de leur
travail à chacun de ces congés sans risquer de perdre leur emploi
ou, à tout le moins, sans risquer de nuire à leur
carrière.
Pourtant, peut-on imaginer meilleur réseau que celui des
écoles pour répondre à la garde des enfants d'âge
scolaire? L'aménagement de garderies en milieu scolaire présente
l'avantage de maximiser l'utilisation des locaux disponibles et d'amortir les
coûts d'aménagement tout en
accélérant le processus d'Implantation du réseau de
garderies à travers la province.
Depuis 1983, l'AFEAS demande aux commissions scolaires de mettre sur
pied des services de garde et de cafétérias dans les
écoles pour les enfants fréquentant le niveau primaire. Il va
sans dire que les services de garde organisés dans les écoles
doivent répondre aux besoins des parents en allant au-delà des
heures de cours et en s'étendant aux jours de congé, sinon le
problème demeure aussi ambigu. Pour permettre le développement de
la garde en milieu scolaire, il faudra cependant une réelle
volonté de concertation des organismes impliqués, les commissions
scolaires, le ministère de l'Éducation et l'Office des services
de garde à l'enfance.
L'AFEAS réitère donc ses recommandations en matière
de garde scolaire et réclame qu'une entente soit établie avec les
commissions scolaires et autres organismes locaux pour l'accessibilité
à des locaux gratuits pour l'installation de services de garde et ce,
dans les plus brefs délais. Que les commissions scolaires mettent sur
pied des services de garde et de cafétéria dans les écoles
pour les enfants fréquentant le niveau primaire, moyennant une
contribution des parents pour défrayer le coût de certaines
dépenses de ce service et ce, à condition que le nombre d'enfants
justifie ce service. Que les commissions scolaires offrent un service de garde,
sur une base annuelle pour les enfants du cours primaire durant les
journées pédagogiques et congés de fin de session. Le
coût serait défrayé par les parents utilisant le
service.
La contribution des municipalités et des établissements de
santé. Les autorités municipales devraient être
impliquées dans l'instauration de réseaux de garderies tout au
moins en fournissant des locaux existants dans les centres culturels, de
loisirs, sportifs ou autres. Cette politique permettrait une plus grande
utilisation des équipements déjà existants et faciliterait
l'accès aux services offerts. Le document d'orientation fait état
d'études qui seront réalisées dans chacune des
régions du Québec quant à la planification des services de
garde. Les municipalités, les municipalités régionales de
comté et les communautés urbaines s'y voient attribuer un
rôle important. Nous ne pouvons que nous interroger sur les moyens qui
seront pris pour réaliser cette planification régionale et
assurer la collaboration des différents partenaires concernés:
parents, entreprises privées, milieux de travail et d'éducation,
organismes du réseau de la santé et des affaires publiques. Qui
initiera cette concertation et comment pourra-t-elle se réaliser?
En milieu hospitalier, il n'existe à peu près pas de
services prévus pour répondre à des situations d'urgence:
l'accouchement, l'accident, l'hospitalisation subite. Pour plusieurs parents,
c'est alors la course aux gardiennes et, souvent, il n'y a pas d'autre choix
que d'amener le ou les enfants avec soi à l'hôpital. Quelques CLSC
ont mis sur pied des services de garde, mais ces expériences se
révèlent très isolées et ne peuvent répondre
aux besoins de tous. Pour corriger cette situation, l'AFEAS recommande que les
locaux disponibles dans les municipalités soient mis à la
disposition des groupes qui organisent des services de garde, cela pour
éviter les coûts élevés d'aménagement et que
soit installé en milieu hospitalier un service de dépannage en
cas d'hospitalisation urgente. Que ce service soit aux frais des personnes qui
l'utilisent.
La qualité des services et le financement. Nous l'avons
déjà mentionné, d'autres groupes directement
impliqués dans l'organisation des services de garde possèdent une
expertise qui leur permet de réagir plus spécifiquement que nous
ne pouvons le faire quant aux normes et critères qui peuvent garantir la
qualité des services de garde ainsi que leur mode de financement. Les
conditions de travail et la rémunération sont, à notre
avis, des facteurs déterminants pour la qualité des services
offerts. On ne peut que déplorer les bas salaires qui, en moyenne, ont
cours dans ce secteur d'activités.
L'AFEAS réclame depuis de nombreuses années la
reconnaissance des acquis expérientiels. Dans le domaine des services de
garde, il est particulièrement important que les outils
d'évaluation qui ont été préparés soient
accessibles dans toutes les régions et permettent une reconnaissance
équitable pour les intervenantes qui oeuvrent dans le domaine. Le
gouvernement favorise dans son énoncé de politique la formation
et le ressourcement du personnel. Nous approuvons cette orientation. Cependant,
l'offre de soutenir la formation à raison de l'équivalent de 1 %
de la masse salariale ne risque-t-etle pas d'augmenter les
inégalités? Cette politique apparaît injuste envers le
personnel desservant une clientèle ayant une moins grande
capacité de payer. L'ensemble du financement repose d'ailleurs sur ce
même principe et soulève de notre part les mêmes
objections.
La participation des parents peut favoriser un meilleur contrôle
de la qualité des services offerts. Le droit de regard des parents sur
l'orientation et l'organisation des services est indispensable. Les parents
doivent cependant bénéficier des conditions qui favorisent et
rendent possible leur réelle participation ou celle de leurs
représentants. Le soutien annoncé dans la politique doit
correspondre aux besoins identifiés par les principaux
intéressés, c'est-à-dire les parents eux-mêmes.
L'AFEAS réclame l'instauration d'un réseau de garderies
sur l'ensemble du territoire du Québec, à frais partagés
entre l'État et la famille. Les coûts défrayés par
les parents devront être fixés en fonction de leur capacité
de payer. Actuellement, l'aide financière du gouvernement revêt
plusieurs formes. Le programme d'exonération financière ainsi que
le programme APPORT sont offerts aux parents qui
doivent répondre à des critères très
précis de niveau de revenu, de nombre d'enfants et le reste. Tous les
parents n'y ont pas accès. En fait, il sont peu nombreux ceux qui
peuvent s'en prévaloir. Il est très louable, certes, de commencer
par aider les plus démunis. Le gouvernement pourrait cependant apporter
une aide plus significative à un plus grand nombre de parents,
démontrant ainsi sa volonté de reconnaître l'importance des
enfants dans notre société.
La déduction pour frais de garde est accordée sur
présentation de reçus et peut être réclamée
par l'un ou l'autre des parents ou partagée par les deux. L'AFEAS
préconise la transformation de cette mesure en crédit
d'impôt remboursable. Ce crédit présente l'avantage
d'offrir une aide uniforme et plus équitable pour les parents.
L'allocation de disponibilité n'apparaît plus au tableau des
formes de contribution aux parents pour la garde de leurs enfants.
Le Président (M. Laporte): On vous inviterait à
conclure rapidement, s'il vous plaît, si possible.
Mme Marion: Comme je l'ai dit précédemment, nous
déplorons la disparition de cette mesure. (18 h15)
Le Président (M. Laporte): On va vous permettre de
terminer, avec le consentement général.
Mme Marion: D'accord, je vous remercie. L'allocation de
disponibilité, dont l'usage n'apparaît plus au tableau des formes
de contribution aux parents pour la garde de leurs enfants, cette mesure
était la seule accessible pour les travailleuses au foyer. Conçue
pour rétribuer le travail effectué auprès des jeunes
enfants, travail considéré comme un service à la
collectivité, cette allocation était également offerte aux
parents dont les deux conjoints étalent sur le marché du travail.
Les parents avaient alors le choix entre cette allocation ou la
déduction des frais de garde. Pour plusieurs parents qui ne pouvaient
produire de reçu, elle était la seule possibilité d'aide
de l'État. L'APEAS recommande que le gouvernement évalue et
Indexe périodiquement l'aide financière à apporter au
coût de fonctionnement des garderies en regard des capacités de
payer des usagers. Que le gouvernement mette en place des mécanismes
efficaces pour évaluer les conditions de travail et assurer les
compétences personnelles dans le domaine des services de garde. Que le
gouvernement accorde et/ou maintienne la parité d'exonération
financière selon le revenu des parents et ce, peu importe le mode de
garde choisi: en garderie, en milieu scolaire ou familial. Que les
systèmes fiscaux soient révisés de façon à
remplacer le principe des exemptions, déductions, par un principe de
crédit d'Impôt uniformisé et rembour- sable, s'il y a lieu,
à la personne concernée.
Que le gouvernement verse une allocation de disponibilité aux
familles ayant des enfants de zéro à douze ans jusqu'à la
fin du cours primaire. Ces allocations devraient être trois fois plus
élevées pour les enfants d'âge préscolaire et
devraient être versées au conjoint qui n'exerce pas
d'activité rémunérée ou, si les deux travaillent
à l'extérieur, le conjoint à plus faible revenu.
Les recommandations présentées par l'AFEAS aux membres de
la commission parlementaire sur les services de garde à l'enfance
reflètent les orientations souhaitées par les 30 000 membres de
notre association.
Qu'ils soient au foyer ou sur le marché du travail, les
problèmes vécus par nos membres face à la garde des
enfants, leur expérience de l'utilisation des services
accrédités ou non ont présidé à la
réflexion qui a permis l'élaboration des résolutions
présentées.
Dans le cadre d'une politique familiale, il est déplorable qu'une
importante catégorie de parents qui sont au foyer soit oubliée
à ce point par les mesures prévues pour assurer la contribution
de l'État à la garde des enfants. Nous tenons à rappeler,
en guise de conclusion, que la garde des enfants n'est pas l'apanage des
femmes, non plus que l'unique responsabilité des couples, mais bien
celui de la société toute entière. La contribution
gouvernementale aux services de garde doit refléter cette
responsabilité. Je vous remercie.
Le Président (M. Laporte): On vous remercie de votre
présentation. Mme la ministre?
Mme Gagnon-Tremblay. Merci, Mme Marlon. Juste une petite
précision avant de passer aux questions. Lorsque vous pariez de
l'allocation de disponibilité, elle n'a pas été abolie.
Elle a été transformée cette année en allocations
pour jeunes enfants et elle est incluse dans l'allocation familiale à
compter de janvier 1989.
Mme Marion: Oui, nous sommes conscientes de cette mesure.
Cependant, pour nous, c'est un peu différent. C'est une mesure qui
s'adresse aux enfants alors que l'allocation de disponibilité
s'adressait aux parents et nous semblait une mesure qui aidait vraiment les
travailleuses au foyer alors que maintenant, il n'y a plus rien qui est
spécifiquement pour les travailleuses au foyer.
Mme Gagnon-Tremblay: L'avantage, par contre, c'est qu'autrefois,
vous aviez à faire le choix entre l'allocation de disponibilité
et les déductions pour frais de garde, alors qu'aujourd'hui, vous avez
droit aux deux, ce qui n'était pas le cas auparavant. Avant, vous aviez
le choix entre l'un et l'autre alors que, maintenant, vous avez l'allocation
pour jeunes enfants et vous avez également droit aux déductions
pour frais
de garde.
Le Président (M. Laporte): Mme Oueilet.
Mme Houle-Ouellet (Michelle): Disons, si je peux compléter
- je suis Michelle Houle-Ouel-let - qu'on reconnaît l'effort du
gouvernement d'améliorer les mesures de soutien aux enfants sauf que
sous le titre "allocations de disponibilité", elle nous semblait
davantage réserver à la garde alors qu'actuellement, c'est une
mesure de soutien comme l'allocation familiale qui n'est pas spécifique
à la garde des enfants.
Mme Gagnon-Tremblay: Vous représentez de nombreuses
travailleuses au foyer. Est-ce que vous avez pu, par exemple, vérifier
auprès de vos membres, qui sont des travailleuses au foyer, quel type de
services elles auraient besoin quant à la garde de leurs enfants?
Mme Marion: Auprès de nos membres. Ce qui ressort dans le
mémoire, c'est que nos membres favorisent la garde en milieu familial
pour les enfants d'âge préscolaire et la garde en milieu scolaire
pour les enfants d'âge scolaire. On aimerait qu'il y ait des
haltes-garderies plus nombreuses; ce qui pourrait être une solution de
rechange. Mais, en fait, la garde en milieu familial offre quand même
assez de souplesse pour permettre à la travailleuse au foyer d'utiliser
cette ressource. C'est pour cela, au fond, que c'est cette forme que nos
membres privilégient. Peut-être que si les services de
haltes-garderies étaient plus nombreux, si on connaissait mieux cette
ressource-là, on se dirigerait davantage vers ça, mais
actuellement, ce sont les services de garde en milieu familial et en milieu
scolaire dont on a besoin.
Mme Gagnon-Tremblay: Est-ce que ça signifie que vous avez
plusieurs travailleuses au foyer qui utilisent les services de garde en milieu
familial reconnus ou les services de garde à temps plein ou si c'est
plutôt de façon occasionnelle?
Mme Marion: C'est bien évident que quand on parle de
travailleuses au foyer, c'est de façon occasionnelle, justement, parce
qu'elles sont des travailleuses au foyer. Leurs besoins sont là quand
même, mais c'est plus occasionnel qu'un personne qui est sur le
marché du travail et rémunérée à temps
plein.
Mme Gagnon-Tremblay: Ce qui veut dire qu'elles auraient
plutôt besoin d'un type de garde de courte durée que de longue
durée. Est-ce que c'est ce que...
Mme Marion: Par garde de longue durée, vous entendez
plusieurs jours d'affilée...
Mme Gagnon-Trembiay: Garde régulière, temps
plein.
Mme Marion: Oui. Je ne voudrait pas qu'on pense que c'est pour
une heure durant l'après-midi, ça peut être pour une
journée complète. Je pense, par exemple, aux personnes qui
siègent à un conseil d'administration de l'AFEAS et qui ont de
jeunes enfants - c'est mon cas - elles ont besoin d'avoir des journées
complètes de garde dans les services de garde en milieu familial.
Personnellement, je ne pourrais jamais me prévaloir des services en
garderie de garde parce que je ne suis pas une cliente assez
régulière.
Mme Gagnon-Tremblay: Parmi vos membres, vous avez aussi des
agricultrices. Est-ce qu'elles vous ont déjà fait
connaître, par exemple, leur point de vue et leurs besoins particuliers?
Est-ce que vous vous êtes déjà penchée sur le type
de garde dont elles auraient besoin plus particulièrement?
Mme Marion: Je pense que le fait qu'on privilégie les
services de garde en milieu familial, c'est déjà une
réponse. Vous l'avez dit vous-même, on retrouve plusieurs
agricultrices parmi notre clientèle et je pense que, dans les milieux
ruraux, c'est très difficile d'instaurer un service de garde en
garderie, justement parce qu'il n'y a pas assez de clients et il serait trop
difficile d'absorber les coûts et tout ça. Les services de garde
en milieu familial leur paraît l'alternative idéale, et je pense
que c'est ce qu'elles ont privilégié.
Mme Gagnon-Tremblay: C'est assez difficile, il semble y avoir
deux ordres de pensée. Il y a des agricultrices qui, d'une part, nous
disent: On préfère que l'enfant demeure à domicile, on
préfère avoir une aide domestique qui s'occupe de l'enfant et qui
fait certains petits travaux. Elles préfèrent que les enfants
demeurent à la maison parce qu'ils voyagent beaucoup à longueur
d'année. Par exemple, ils doivent prendre l'autobus scolaire et ils sont
absents de la maison pendant une période assez longue. Par contre, il y
a d'autres agricultrices qui nous disent: Nous, on préfère que
les enfants soient à l'extérieur parce que c'est dangereux; ils
sont souvent tout près des équipements, et c'est dangereux.
Mme Marion: Je pense que vous avez déjà
donné la réponse que je m'apprêtais à vous donner.
J'ai l'impression que, chez nous, on privilégie les services de garde en
milieu familial justement parce qu'on préfère ne pas avoir les
enfants près du travail agricole où, effectivement, c'est assez
dangereux
Mme Gagnon-Trembiay: Vous n'êtes pas contre la garde en
milieu de travail. Tout à l'heure, vous étiez ici, je pense,
lorsque le YMCA est venu faire une demande pour une
espèce de statut particulier. Est-ce que, pour vous, la garde en
milieu de travail doit être le même type de garderies que celles
qu'on retrouve dans les quartiers, c'est-à-dire des garderies sans but
lucratif avec un conseil d'administration formé majoritairement de
parents?
Mme Marion: En ce qui concerne la composition du conseil
d'administration, je pense qu'on peut se prononcer là-dessus. Oui, on
favorise tout à fait les conseils d'administration composés
majoritairement de parents. En fait, l'implication des parents dans la garderie
est une condition de qualité, il me semble, et une condition de
satisfaction. On va avoir un service de garde qui est à la mesure de nos
besoins si, comme parents, on s'implique dans le service. Dans ce domaine, je
peux répondre par l'affirmative.
Pour ce qui est du volet de votre question qui concernait les
modalités, je ne pourrais vraiment pas me prononcer actuellement. Comme
je vous le disais au début du mémoire, nous sommes des
utilisatrices, mais nous n'avons pas d'expertise sur les modalités de
financement, les modalités de sécurité, et le reste. Je ne
pourrais vraiment pas vous répondre sur ce volet.
Mme Gagnon-Tremblay: Vous êtes aussi en faveur du
développement en milieu scolaire. D'ailleurs, vous avez deux
recommandations intéressantes, les recommandations 7 et 8: "Que les
commissions scolaires mettent sur pied des services de garde et
cafétéria dans les écoles pour les enfants
fréquentant les niveaux primaire, moyennant une contribution des parents
pour défrayer le coût de certaines dépenses de ces
services, et ce, à la condition que le nombre d'enfants justifie ces
services." Et, à la recommandation 8: "Que les commissions scolaires
offrent un service de garde, sur une base annuelle, pour les enfants du cours
primaire, durant les journées pédagogiques et congés de
fin de session. Le coût serait défrayé par les parents
utilisant ce service." On sait que c'est un besoin aussi parce qu'on parle
souvent d'enfants clé au cou. Est-ce que pour vous, par contre...
Croyez-vous que les comités de parents en milieu scolaire sont
suffisamment actifs? Est-ce qu'on leur laisse une place suffisante?
Mme Marion: En général?
Mme Gagnon-Tremblay: En général, oui.
Mme Marion: En général. C'est une excellente
question. Si je vous réponds personnellement, je pense que c'est
beaucoup fonction justement des personnes qui siègent au comité
de parents. Ce qui se vivra dans les écoles finalement est fonction de
ce que sont les membres du comité de parents. Maintenant, si je vous
réponds au nom des membres de l'AFEAS, j'avoue que je ne voudrais pas me
prononcer au nom des membres de l'AFEAS. Vraiment. Mais, j'ai trois enfants
d'âge scolaire qui, à un moment donné, ont
fréquenté tous les trois, bien qu'ils étaient tous les
trois au primaire, je le signale, trois écoles différentes et je
pouvais très bien voir que, d'une école à l'autre, cela
variait énormément. C'était en fonction du dynamisme des
personnes qui sont là, au fond.
Mme Gagnon-Tremblay: Vous mentionnez aussi dans votre
mémoire que les frais de garde doivent être partagés par
les parents et par l'État. Je sais que vous ne voulez pas vous
prononcer, par exemple, sur les formules de financement puisque vous mentionnez
dans votre mémoire que ce n'est pas tellement l'objectif que vous visez,
mais par contre, est-ce que vous avez un ordre de grandeur? Pour vous, que peut
représenter la proportion des parents par rapport à celle du
gouvernement? Avez-vous une idée, un ordre de grandeur?
Mme Houle-Ouellet: On n'a pas défini à quel seuil
devait commencer la contribution gouvernementale. C'est quand même
important pour nous comme grand principe de faire valoir que les parents qui
ont le plus bas revenu ont nécessairement besoin de l'aide
gouvernementale, quel que soit le type de garde auquel ils ont accès.
Quand on dit qu'il y a une contribution des parents, c'est évidemment
pour les parents dont le revenu est plus élevé. Je pense que
ça doit être un peu proportionnel au revenu. C'est dans cet esprit
qu'on parle de participation des parents au coût des services. Mais nos
membres ne sont jamais allés jusqu'à définir quel serait
le seuil.
Le Président (M. Laporte): Merci, Mme la ministre. Mme la
députée de Malsonneuve.
Mme Harel: Merci, M. le Président. Je suis bien contente
de pouvoir discuter avec vous, Mme Marion et Mme Houle-Ouellet.
Mme Marion, je dois vous dire que, à chaque fois que je vois un
document de l'AFEAS rédigé par Michelle Houle-Ouellet, c'est un
réflexe comme Pavlov. C'est facile à lire, c'est facile à
comprendre. Il y a toujours la même disposition et vous avez une
façon pédagogique d'illustrer vos recommandations. Cela m'est
venu la première fois d'un document qui portait sur la fiscalité.
Je crois que ça doit faire deux ou trois ans.
Mme Houle-Ouellet: On l'a toujours. Oui, c'est ça.
Mme Harel: C'était un sujet compliqué. Maintenant,
j'ai l'impression de bien le contrôler, mais à l'époque,
c'est avec votre document que j'avais commencé a m'initier.
Mme Houle-Ouellet: Cela nous fait plaisir.
Mme Harel: C'était très bien fait. J'ai
remarqué que c'est toujours un peu... La façon dort vous
travaillez finalement nous permet de nous retrouver dans l'analyse que vous
faites et dans les recommandations aussi que vous suggérez.
Dans l'analyse que vous faites, il y a un aspect qui me semble un peu
spécifique c'est celui des travailleuses au foyer. Je lisais que vous
avez 30 000 membres en règle. Combien de vos membres sont à la
maison?
Mme Marion: Actuellement, bien qu'on n'ait pas de chiffres
très récents, nos dernières statistiques remontent
à quatre ou cinq ans environ...
Mme Houle-Ouellet: À 1982. C'est un petit peu plus.
Mme Marion: Cela fait plutôt sept ans. Donc, c'était
à ce moment-là environ 56 % des travailleuses au foyer ce qui
nous laisse croire, étant donné quand même que la situation
évolue, qu'actuellement cela pourrait être partagé à
part égale. (18 h 30)
Mme Houle-Ouellet: J'aimerais peut-être compléter ce
que dit ma compagne. Je pense que nos membres se partagent assez
également actuellement entre des femmes qui sont sur le marché du
travail et rémunérées et des travailleuses au foyer. Si on
a beaucoup travaillé sur le dossier des personnes qui restaient au
foyer, c'est que depuis quelques années, on a entrepris une
recherche-action sur ce dossier. C'est ce qui fait qu'on en parie, qu'on met ce
dossier beaucoup en évidence. Mais nos membres, actuellement, sont
partagés à peu près également entre les deux
secteurs.
Mme Marion: Je me permettrais d'ajouter que, même si on est
travailleuses à temps plein sur le marché du travail et
rémunérées, on n'en demeure pas moins, dans la plupart des
cas, travailleuses au foyer.
Mme Harel: On est à la fois ménagère,
même si on est ministre ou députée, c'est bien
évident, ça fait partie de cette double tâche sur laquelle
nous sommes les seules, finalement, à être évaluées.
C'est important parce que la réalité a vraiment été
bouleversée. En dix ans, on constate qu'au-delà de 60 % des
mères d'enfants de moins de six ans sont sur le marché de
l'emploi et surtout que la catégorie des mères ayant le plus
progressé sur ce marché est celle des mères d'enfants de
moins de trois ans. C'est phénoménal, cela représente
environ 90 % de progression depuis dix ans.
Je prenais connaissance des dernières statistiques sur la reprise
de la fécondité que nous annonçait La Presse en gros titre
pour, finalement, me rendre compte d'une autre donnée assez
inusitée, soit qu'une naissance sur trois survient hors du mariage. Au
Québec, en 1988, 28 850 naissances, soit 33 % de toutes les naissances,
ont été hors du mariage. Cela nous ramène à la
nécessaire réforme fiscale, parce que ces naissances hors du
mariage se font chez des personnes pour lesquelles il n'y a ni pension
alimentaire éventuelle ni obligation en cours d'union de fait puisqu'il
ne peut pas y avoir de crédit d'impôt pour personne à
charge finalement.
Je retiens la chose suivante de votre mémoire. Quel que soit le
statut professionnel de la mère, qu'elle soit au foyer ou à
l'emploi, elle devrait avoir accès à la diversité des
services de garde et aux mêmes allocations d'exonération. Est-ce
que c'est bien ce que je dois comprendre?
Mme Houle-Ouellet: Je pense que ce sont des allocations
correspondantes. Je pense bien qu'on ne peut pas demander la même
contribution gouvernementale pour une garde de cinq jours par semaine que pour
une garde occasionnelle. Il doit y avoir des proportions à respecter,
mais comme principe, pour reconnaître la valeur sociale du travail fait
au foyer, c'est important que la personne ait aussi accès à des
services de garde et aux avantages qui y sont rattachés.
Mme Harel: Je dois donc comprendre, à ce moment-là,
que c'est proportionnel aux heures utilisées...
Mme Houle-Ouellet: Cela pourrait...
Mme Harel: Donc, si c'est en halte-garderie ou en jardin
d'enfants, qui est un type de service peut-être plus adapté aux
besoins réguliers mais à temps partiel, il faudrait que ce type
de service soit ouvert aux allocations d'exonération. C'est ce que je
dois comprendre?
Mme Houle-Ouellet: C'est ça.
Mme Harel: Bon! C'est quand même un aspect important,
compte tenu qu'il y aura sans doute bientôt la levée du moratoire
sur ces deux développements de service, ou plutôt sur la
réglementation de ces services. Mais il n'y a pas d'engagement,
actuellement, je pense, à les assujettir à l'exonération,
et c'est peut-être un aspect important.
D'autre part, dans votre mémoire, vous soulignez la
nécessité d'un crédit d'impôt remboursable. Cela
nous rappelle les recommandations que vous faisiez... Il y a une
cohérence, en fait, dans ce que vous nous recommandez. Là, au fil
des ans, j'ai appris à sophistiquer ce que sont les crédits
d'Impôt remboursables. Évidemment, comme vous le souhaitez sans
doute actuellement, quoique c'est toujours une déduction, vous le
mentionnez, soit que la déduction est transformée en
crédit d'impôt...
Mme Houle-Ouellet: C'est ça.
Mme Harel: ...mais elle est maintenue dans le mode actuel; elle
vient tout simplement réduire le revenu imposable.
Mme Houle-Ouellet: C'est ça.
Mme Harel: Elle est plus juste parce qu'elle ne s'en
éloigne pas à la baisse si les salaires sont plus bas, ou
à la hausse, s'ils sont plus hauts, elle est plus juste sous forme de
crédit.
Mme Houle-Ouellet: Oui.
Mme Harel: Mais, vous ajoutez remboursable...
Mme Houle-Ouellet: Oui.
Mme Harel: ...ce n'est pas juste le crédit et là
j'ai une question. Quand vous dites remboursable, est-ce que c'est quel que
soit le revenu des parents?
Mme Houle-Ouellet: Oui.
Mme Harel: Parce que, jusqu'à maintenant, la
déduction est remboursable si les deux travaillent. Je vous renvoie la
question. Est-ce que c'est si les deux travaillent, selon le revenu, ou
à la manière fédérale du crédit
d'impôt pour enfants, qui est remboursable selon un test de revenu des
parents? À un certain seuil, vous ne l'avez plus si c'est trop
élevé, en bas vous l'avez. Est-ce que c'est un crédit
d'impôt remboursable indépendamment du revenu des parents?
Mme Houle-Ouellet: En fait oui, ce qu'on demande c'est un
crédit remboursable qui est uniformisé, qui équivaut
à la même chose pour les parents et qui doit être remis aux
parents. On va même jusqu'à demander qu'il soit
transférable, finalement, remboursable à la personne qui va
assumer le plus souvent les soins pour lesquels le crédit est
institué. Si on parle du crédit d'impôt pour la garde
d'enfants, ce sera soit la mère si c'est elle qui est le plus souvent
responsable, ou partagé entre tes deux conjoints.
Mme Harel: Donc remboursable, transférable, mais dans
l'optique où ce sont les deux parents qui travaillent à
l'extérieur du foyer, qui sont à l'emploi.
Mme Houle-Ouellet: Si le crédit d'impôt est
accordé, il pourrait être réclamé par l'un ou
l'autre des conjoints et que ce choix soit laissé aux conjoints, on n'a
pas d'objection à cela, ou partagé entre les deux s'ils ont tous
deux recours aux services de garde, si les deux réclament le
crédit.
Mme Harel: Mais les deux doivent être à l'emploi,
à ce moment-là.
Mme Houle-Ouellet: Quand les deux sont à l'emploi.
Mme Harel: D'accord.
Mme Houle-Ouellet: On a dit par contre qu'on voulait que la
travailleuse au foyer ne soit pas oubliée. S'il y avait un crédit
d'impôt pour des gardes occasionnelles, je ne peux en prévoir le
montant ni les formalités pour le réclamer, mais il serait
versé à la travailleuse au foyer et il y en aurait juste un.
Mme Harel: Je veux bien comprendre parce que je trouve que c'est
ce qui vous distingue du Cercle des fermières.
Mme Houle-Ouellet: D'accord.
Mme Harel: Effectivement, parce qu'elles demandent une allocation
de garde, quel que soft le mode, que ce soit un mode régi ou que ce soit
la personne qui garde à la maison.
Mme Houle-Ouellet: Ah, d'accord.
Mme Harel: Vous dites: On veut avoir accès à des
modes régis quel que soit notre statut, à la maison ou au foyer,
et on veut pouvoir utiliser nos reçus pour déduire et cette
déduction nous la vouions sous forme de crédit d'impôt
remboursable. C'est cela? Évidemment, j'ai essayé de faire le
calcul des crédits d'impôt remboursables - avec d'autres, je
n'avais pas de prétention - cela donnait à peu près 600
000 000 $, s'il est remboursable. Parce que si on le transforme en
crédit d'impôt, c'est plus juste, mais on joue avec la même
masse d'argent qui est celle de la déduction, mais on la partage
différemment, avec plus d'équité. Mais si on ajoute
remboursable, à ce moment, on le rembourse quel que soit le revenu,
même quand il n'y a pas de revenu imposable. Vous comprenez. Cela veut
dire que si le revenu est très bas et qu'il n'est pas imposable, il n'en
demeure pas moins qu'on le rembourse finalement à l'ensemble des
parents, même ceux qui ne paient pas d'impôt. C'est bien ce que je
dois comprendre?
C'est intéressant parce qu'on met cela sur la table, et on peut
ensuite faire des priorités comme société. Parce que vous
recommandez aussi, la recommandation 15, l'allocation de disponibilité
aux familles ayant des enfants de zéro à douze ans,
jusqu'à la fin du cours primaire. Ces allocations devraient être
trois fois plus élevées pour des enfants d'âge
préscolaire et versées au conjoint...
Mme Houle-Ouellet: Oui. Je pense que, finalement, ce qui arrive
avec nos recommandations, c'est qu'on joue un peu sur ce qui est
dans le système actuellement, et on n'ose pas le laisser tomber
complètement parce qu'on n'en est pas au système de crédit
d'impôt, mais je pense qu'il est bien évident que si on changeait
et qu'on allait vers une fiscalité qui reconnaît des
crédits d'impôt plutôt que des allocations et des
déductions, on ferait un choix entre les deux. Actuellement, on trouve
important de les porter encore tous les deux, parce qu'on se dit: On est encore
dans ce système, c'est difficile pour nous de ne pas parler de cette
recommandation, sauf qu'on préférerait éventuellement en
venir à un système de crédits d'impôt qui serait tel
qu'on vient de le discuter.
Mme Harel: Vous ne m'en voudrez pas de discuter de ces questions
avec vous parce qu'elles sont quand môme importantes. C'est sans doute
une commission parlementaire sur la fiscalité qu'il nous faudrait. Quand
on additionne tous les dossiers, que ce soit le partage du patrimoine familial,
ou précédemment le régime d'aide sociale, ou maintenant
les services de garde, et ensuite il y aura les régimes de retraite et
les congés de maternité, on se rend compte qu'on est en train
d'échafauder un système qui repose sur une fiscalité des
années cinquante où il y avait un père pourvoyeur, une
mère à la maison, deux enfants qui étaient déduits
du salaire des parents, la fille jusqu'à ce qu'elle se marie et le
garçon jusqu'à ce qu'il s'en aille travailler. En fait on a un
système qui est à peu près comme cela.
Mme Houle-Ouellet: Oui.
Mme Harel: Je ne sais pas si vous avez entendu parier de
l'allocation parentale d'éducation, en France, qui est versée aux
parents lors de la naissance d'un troisième enfant et qui est la
moitié du salaire minimum, plus des allocations familiales, ce qui
assure qu'il n'y aura pas de perte de revenus pour l'équivalent du
salaire minimum. C'est comme si c'était l'équivalent du salaire
minimum jusqu'à l'âge de trois ans, mais pour la naissance d'un
troisième enfant. Est-ce que vous avez eu l'occasion de prendre
connaissance de ces...
Mme Houle-Ouellet: Non.
Mme Harei: II y a tout un système à intégrer
au niveau de ce qu'on veut offrir, dans le fond, aux familles parce qu'on se
rend compte que pour le premier et le deuxième enfant, le taux
d'activité des femmes est très élevé, mais qu'au
troisième, ça chute radicalement.
Mme Houle-Ouellet. ...pas le choix, oui.
Mme Harel: Est-ce que c'est aussi l'impression que vous en
avez?
Mme Houle-Ouellet: Oui, c'est un peu l'impression, sauf qu'on n'a
pas d'analyse très poussée, on n'a pas de recherche,
actuellement, qui nous permette de faire des affirmations très
catégoriques ou des choix dans des modes de financement.
Mme Harel: Le président vient de me dire: En conclusion.
Imaginez-vous, il me semble qu'on n'a parlé de rien encore. Je vais vous
laisser ma conclusion, vous avez peut-être aussi des choses à nous
transmettre.
Le Président (M. Bélanger): Le président
porte l'odieux de toutes ces décisions. Vous aviez un dernier
commentaire, Mme Marion?
Mme Marion: J'allais tout simplement vous remercier de nous avoir
reçues en audience, et je souhaite que les recommandations de nos
membres pourront vous aider à voir toute la problématique sous un
jour qui vous amènera à des solutions pertinentes et
intéressantes.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. Mme
la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Je remercie l'AFEAS pour son exposé
et son mémoire, c'est un volet intéressant. Merci beaucoup,
madame.
Le Président (M. Bélanger): La commission des
affaires sociales remercie l'Association féminine d'éducation et
d'action sociale, l'AFEAS, et appelle à la table des témoins de
la garderie Pomme d'Api.
Il me fait plaisir de saluer la représentation de la garderie
Pomme d'Api. Je vais vous expliquer un peu nos règles de fonctionnement.
Nous avons trente minutes pour la présentation globale de votre point de
vue, c'est-à-dire dix minutes pour votre exposé et vingt minutes
d'échanges avec les parlementaires. Je me devrai donc de vous dire quand
les dix minutes seront écoulées et avant de procéder je
vous demanderais, s'il vous plaît, de vous identifier, tous et toutes, et
à chaque fois que vous devrez prendre la parole de bien vouloir donner
votre nom auparavant, cela pour les fins de transcription au Journal des
débats, pour que ce soit le plus fidèle possible. Je vous
prierais de commencer, s'il vous plaît.
Garderie Pomme d'Api
M. Rivet (Jacques): Je m'appelle Jacques Fiset, je vous
présente les parents du conseil d'administration de la garderie Pomme
d'Api: à mon extrême gauche, Mme Lyne Dubois, M. Idrissa Diop, Mme
Manon Boucher et Mme Marie-Claude Gagnon.
Je vais me contenter de lire le texte de notre mémoire qui dit
bien ce qu'il a à dire.
Le Président (M. Bélanger): Toujours en maintenant
l'enveloppe de dix minutes, vous êtes
d'accord?
M. Rivet: Oui.
Le Président (M. Bélanger): Merci.
M. Rivet: Notre mémoire ne sera pas long, ni bourré
de statistiques et de chiffres. On est convaincu qu'il y en a plusieurs qui ont
présenté ce genre de mémoire. Nous voulons simplement
devant votre commission lancer un grand cri d'alarme, un cri du coeur au nom de
tous ces parents qui tentent de conserver un service pour leurs enfants auquel,
pensent-Ils, eux aussi ont droit. Ce cri nous le lançons aussi au nom de
tous les parents qui ont quitté notre garderie parce que maintenant elle
n'est plus accessible à leurs enfants, au nom de ces autres parents qui
sont venus mais qui, en voyant les tarifs, s'en sont allés, et enfin, de
tous ces autres qui savent déjà que ce service n'est pas
accessible mais qui, pour leurs enfants, aimeraient aussi avoir le meilleur.
Dans ce mémoire, nous parlerons de notre garderie, une garderie en
milieu défavorisé.
Notre garderie, c'est la garderie Pomme d'Api, une garderie de 45 places
située en milieu défavorisé. Presque tous les parents
reçoivent le maximum de l'aide admissible. La grande majorité des
enfants sont de famille monoparentale dont un bon nombre vit de prestations
gouvernementales. Notre garderie accueille un nombre significatif d'enfants de
familles nouvellement arrivées au Québec. La majorité de
ces familles ont vécu et vivront au cours de l'année un ou deux
changements Importants de leur situation de travail ou autre qui modifieront
significativement leur situation économique et même leur situation
familiale. (18 h 45)
C'est cela, une garderie en milieu défavorisé. Et nous
voulons nous attarder davantage à cet aspect de notre garderie. Les
caractéristiques que nous avons utilisées pour parler de notre
garderie sont toutes des caractéristiques d'une garderie en milieu
défavorisé, mais nous allons les reprendre pour en voir mieux les
conséquences.
Une majorité de parents vit de prestations gouvernementales.
Première conséquence: capacité de payer beaucoup plus
faible. Actuellement, le taux d'effort exigé des parents, malgré
le fait que presque tous ont accès au maximum d'aide, est
déjà au-delà de cette capacité de payer. Lors de la
dernière hausse de tarif, chez nous, on a encore perdu des parents.
Deuxième conséquence: beaucoup d'inscriptions se soldent par une
tentative d'un mois, plus ou moins, et par une créance difficile
à recouvrer pour la garderie. Et souvent, dans les efforts nombreux
qu'on mettra à la recouvrer, le responsable de cette tâche a
l'impression d'enlever le pain de la bouche à une famille souvent
criblée de bien des dettes et vivant bien d'autres problèmes.
Des familles monoparentales plus nombreuses. Première
conséquence: évidemment, toujours la capacité de payer.
Deuxième conséquence: si les parents uniques ont un si jeune
enfant, c'est que la séparation est encore récente, donc tant le
parent que l'enfant sont probablement encore dans un état
perturbé. Les éducatrices doivent connaître la situation et
souvent exercer une surveillance particulière des règles que le
parent qui a inscrit l'enfant entend voir respecter par l'autre parent qui
pourrait tenter de venir chercher l'enfant, etc., des situations qu'on a
à vivre tous les jours.
La présence des enfants de communautés ethniques plus
grande. Les familles qui arrivent au Québec viennent s'Installer dans un
milieu comme le nôtre pour des raisons évidentes de
capacité de payer. Leur intégration est toute à faire et
la garderie est le moyen idéal pour le faire pour les jeunes enfants et
ainsi leur permettre une arrivée plus facile dans le milieu scolaire.
Première conséquence: toujours la capacité de payer.
Seconde conséquence: un besoin accru d'attention de la part des
éducatrices pour un enfant avec les parents duquel 1 est souvent
très difficile de communiquer. Et pourtant, il faut communiquer, donc
là aussi tout un travail supplémentaire pour lequel on se
débrouille avec les moyens du bord, avec les autres enfants à
s'occuper et en espérant que ces parents ont vraiment compris quand Us
font signe que oui.
La plupart des parents sont sur un marché du travail instable.
Première conséquence: une grande instabilité de la
clientèle. Quand la situation du parent va du salaire minimum au
chômage et au BS au gré des mois, le parent est souvent
forcé de retirer sont enfant à court terme. Et quand, en plein
coeur de l'année, la garderie doit remplacer une partie de sa
clientèle à la petite semaine, c'est un grand nombre de petites
vacances qui deviennent une grosse vacance dans le budget, et ce, sans compter
les départs avec dettes accumulées. Seconde conséquence:
les éducatrices qui ont continuellement à Intégrer de
nouveaux enfants dans leur groupe en plus des Intégrations normales lors
des passages d'un groupe à l'autre.
Une majorité de familles vivent des situations difficiles, des
situations qui sont habituellement complexes partant d'une situation
économique difficile, de conditions de logement peu reluisantes et
surtout peu adéquates à l'épanouissement et à la
stimulation d'un jeune enfant, compliquées de rapports parent-parent et
de rapports parent-enfant difficiles. Ajoutez à cela des conditions de
santé dont on sait aujourd'hui qu'elles sont pires que partout ailleurs.
Première conséquence: des enfants à problème qui,
plus que n'importe quels autres, ont besoin de la garderie, mais qui
demanderaient une attention beaucoup plus grande que celle qui nous est permise
d'avoir si on va au maximum du ratio. La garderie va donc diminuer le ratio,
mais pas
trop, ce serait de la mauvaise gestion. Seconde conséquence: les
parents avec des problèmes qui, plus que d'autres, ont besoin de la
garderie, mais qui demanderaient une attention, eux aussi. On leur demande
plutôt de remplir tout un tas de formules et de faire des
démarches pour que la garderie soit payée, on leur parle des
problèmes de la garderie, on leur demande de se préoccuper de la
garderie. Troisième conséquence: des enfants plus souvent
malades, des absences plus nombreuses. Mais il n'y a pas que des absences.
Quand on est sur le marché du travail au salaire minimum, on a rarement
des congés de maladie, encore moins pour les enfants, alors, on l'envoie
à la garderie. La situation devient souvent difficile pour
l'éducatrice quand elle doit s'Imposer aux parents et, pour elle, le
risque pour sa santé est d'autant plus accentué.
Et la nouvelle politique. C'est vrai, Mme la ministre, que nos parents
ne font pas de gros efforts pour se payer une plus belle garderie. C'est vrai,
Mme la ministre, que nos parents ne font pas de gros efforts pour payer de bons
salaires à nos éducatrices. Nos parents font des efforts pour
Joindre les deux bouts, et quand, entre les deux bouts, il y a trop de
distance, ils sont souvent forcés de laisser la garderie. Nos parents
font des efforts pour trouver un revenu décent et un logement
décent, pour se tenir en santé sans que cela ne coûte trop
cher, pour donner ce qu'ils n'ont pas eu à leurs enfants. Mais l'effort
a ses limites. Surtout, Mme la ministre, que cet effort, vous le comptez en
argent. C'est vrai, Mme la ministre, qu'on pourrait éviter ces
problèmes en étant plus sélectif. C'est vrai, Mme la
ministre, qu'on pourrait éviter les clientèles qui finissent
toujours par partir sans payer. C'est vrai, Mme la ministre, qu'on pourrait
éviter les enfants qui demandent trop d'attention et exigent une
diminution du ratio ou des ressources non prévues dans les subventions.
C'est vrai, Mme la ministre, qu'on devrait prendre d'abord ceux qui ont un
emploi stable. Mais alors, Mme la ministre, pourquoi avoir installé une
garderie dans ce quartier?
C'est vrai, Mme la ministre, qu'avec votre politique, vous allez
être débarrassée de tous nos tracas. Vous pourrez continuer
à récompenser l'effort que d'autres parents sont capables de
fournir. Merci.
Le Président (M. Bélanger): Merci. Mme la
ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Je vous remercie. Comme vous le mentionnez,
votre garderie est située dans un milieu très
défavorisé. Vous mentionnez Justement que vous avez une forte
proportion de clientèle, c'est-à-dire presque la majorité,
qui est au maximum de l'exonération financière, ce qui signifie,
finalement... Avec un tarif de 14,50 $... À combien est votre tarif,
actuellement?
M. Fiset: Actuellement, il est à 16 $. Mme
Gagnon-Tremblay: Combien?
M. Fiset: À 16 $. Il varie entre 16 $ et 16,50 $,
selon...
Mme Gagnon-Tremblay: II est maintenant à 16 $.
M. Fiset: Oui.
Mme Gagnon-Tremblay: D'accord. Alors...
M. Fiset: C'est-à-dire 15,50 $ et 16 $, plutôt, je
m'excuse.
Mme Gagnon-Tremblay: Comme vous pariez d'un milieu
défavorisé, est-ce que vous avez des problèmes face
à une conseil d'administration, par exemple? Est-ce que c'est difficile
d'avoir un conseil d'administration de parents pour administrer la garderie
dans ce genre de milieu?
M. Fiset: La difficulté vient de plusieurs sources.
D'abord, parce que la clientèle de la garderie, Je vous l'ai
signalé dans le mémoire, est instable. Il y a peu de parents...
Je pense que je suis un des seuls parents à avoir été
là depuis le début, depuis mon premier enfant, en 1983,
jusqu'à aujourd'hui; j'ai eu trois enfants en garderie. Je pense que je
suis le seul parent à avoir maintenu ma présence aussi longtemps
dans cette garderie. Il y a un roulement très élevé, pour
les raisons que Je vous ai dites. Dès qu'il y a un changement de
situation économique dans la famille ou une séparation, enfin,
toutes sortes d'événements provenant de toutes sortes de sources
et dont je vous ai parlé, il y a un roulement. Ce roulement est
très élevé. Longtemps, j'ai cru que c'était un
roulement qui était réservé à notre garderie de
quartier. Je suis maintenant dans une garderie scolaire pour mes deux plus
vieilles. À la garderie scolaire, le roulement est aussi
élevé. Je pense que c'est carrément relié à
fa situation des familles du quartier, la situation économique,
familiale et de travail, donc tous les problèmes qui sont reliés
à ça font que les gens vivent des changements continuels et ils
mettent ou non leurs enfants en garderie, selon ces changements. Donc, il y a
un roulement très élevé. Pour nous, pour la garderie,
c'est souvent la source de presque tous les autres problèmes. Donc,
trouver des gens pour le conseil d'administration où, normalement, le
mandat est de deux ans, il n'y a jamais personne qui fait un mandat de deux ans
au conseil d'administration, on essaie d'avoir des gens qui vont faire un
mandat de six mois. Tous ce que nous en sommes ici, bien, on essaie de le faire
tout simplement.
Mme Gagnon-Trembay: Avez-vous réfléchi à la
façon dont le gouvernement pourrait aider les
services de garde en milieu défavorisé, comme le
vôtre, par exemple? Est-ce que vous avez des suggestions à nous
faire?
M. Fiset: Voyez-vous, depuis 1983 qu'on marche sur une corde
ralde, on essaie de diminuer le déficit de notre garderie, on est
toujours à la limite, on crève. Entre-temps, il faudrait aussi
avoir le temps de penser à de grandes solutions. Je vais vous dire
franchement, Je m'attendais, après toutes ces années à
avoir essayé de tenir cette garderie à bout de bras, que
l'énoncé de politique serait comme le jour où on
soufflerait. C'est le contraire, on va crever définitivement. C'est
comme ça que je le vois.
Vous me demandez d'imaginer comment on pourrait s'en sortir. Je vais
vous dire que je ne le sais pas, mais je sais une affaire: ça nous prend
de l'argent, et ce ne sont pas les parents qui vont nous l'apporter.
Actuellement, la première chose dont on aurait besoin pour ne pas
crever, c'est de diminuer les frais de garde de notre garderie. Plus les frais
de garde sont élevés, moins les gens restent longtemps. Nous,
à court terme, D faut retourner à 12,50 $. On ne peut pas en
rester là. D'abord, pour les gens du quartier, ça devient de
moins en moins accessible, c'est bien certain.
Mme Gagnon-Tremblay: C'est-à-dire que pour essayer de
régler la situation de votre milieu défavorisé, vous
dites... Votre tarif est à 16 $ et, pour pouvoir arriver, pour pouvoir
permettre à ces parents de garder leurs enfants en garderie, il faudrait
réduire le tarif à 12,50 $. Est-ce ça?
M. Fiset: C'est-à-dire que pour les parents, l'effort
qu'on leur demande, si vous y pensez, actuellement, avec 10,50 $ par jour,
calculez ça pour quelqu'un qui est au salaire minimum ou qui a une job
à temps partiel ou de temps en temps, calculez comment ça lui
coûte sur son revenu mensuel de placer un enfant pendant une semaine dans
cette garderie, c'est 10,50 $... Cela fait 5 $ par jour, donc 25 $ par semaine;
mettez ça sur quatre semaines, c'est 100 $ sur un revenu de 800 $ et
où la moitié s'en va pour payer le loyer. Mettez ce coût
dans l'ensemble d'un budget d'une famille monoparentale, où la femme
travaille au salaire minimum quelque part, de temps en temps, dans des
magasins, les jeudis et vendredis soir et le samedi et où, en plus, elle
est obligée de faire garder ses enfants le soir et le samedi si elle
veut travailler, alors qu'elle a le BS ou qu'elle reçoit
l'assurance-chômage qui est 60 % du salaire minimum, avec un petit
restant de BS parce que ce serait moins élevé. Alors, vous voyez
que... Si vous pensez juste aux coûts du service de garde, ce n'est quand
même pas grand-chose. Mais mettez ça dans l'ensemble, avec la
bouffe et le logement, vous allez voir qu'elle n'est môme pas capable de
se permettre ça.
Mme Gagnon-Tremblay: Au chapitre des conditions de travail, quel
est le salaire moyen de votre garderie?
M. Fiset Savez-vous, je ne me suis jamais posé la question. Il ne
doit pas être très élevé. Je pense qu'il y a deux,
trois parents dans la garderie qui n'ont pas l'aide maximum. Il y a deux, trois
parents qui n'ont pas l'aide maximum.
Mme Gagnon-Tremblay: Je ne parle pas du revenu des parents. Je
parle du salaire moyen des éducatrices et des éducateurs.
M. Fiset: Ah! Actuellement, les permanentes sont à 9,33 $
l'heure et les remplaçantes sont à 7,50 $ de l'heure. Quand on
avait adopté ce salaire-là, en 1980, dans ce coin-là, on
était parmi les garderies qui offraient un salaire intéressant
à leurs travailleuses. Mais, aujourd'hui, on est la plus basse dans
notre secteur pour ce genre de garderie.
Mme Gagnon-Tremblay: Est-ce que ça veut dire que, depuis
1980, vos éducatrices ont des salaires de 9,33 $?
M. Fiset: Cela n'a pas bougé parce qu'on n'est pas
capables.
Mme Gagnon-Tremblay: Je n'ai pas d'autre question.
M. Fiset: Quand on avait choisi de le mettre à 9,33 $,
ça correspondait à ce qu'on pensait être capables d'aller
chercher. Mais, d'une année à l'autre, on a vécu des
déficits et on a essayé d'équilibrer tant bien que
mal.
Mme Gagnon-Tremblay: Merci.
La Président (M. Bélanger): Mme la députée
de Malsonneuve.
Mme Harel: Merci, M. le Président. Je vous écoute
avec beaucoup d'intérêt. Je pense que
Mme Boucher a un commentaire à faire Immédiatement. C'est
ça?
Mme Boucher (Manon): Manon Boucher, administratrice de la
garderie. C'est par rapport à la question que vous avez posée,
Mme la ministre. Qu'est-ce qu'on peut faire face à des parents qui n'ont
pas un revenu suffisant pour mettre les enfants en garderie? Il faut être
conscient aussi que ce sont des parents qui ont besoin de la garderie encore
plus, parce que, justement, ce sont des parents qui sont tellement
préoccupés par leur situation financière que souvent ils
ont moins d'énergie pour se concentrer sur le bien-être de leurs
enfants et sur la façon dont ils les éduquent. Donc, on a
besoin
d'un support, un support important, un support professionnel solide et
c'est à la garderie qu'on va le chercher. On va le chercher, sauf que
c'est très difficile d'aller le chercher et, en même temps, c'est
nécessaire. Donc, il faut que cette garderie puisse offrir le service
moins cher et, aussi, un service de qualité et d'une qualité
encore plus grande peut-être qu'ailleurs, où les parents ont le
temps de se concentrer sur l'éducation de leurs enfants d'abord et,
ensuite, sur certains problèmes financiers qu'ils ont. Alors que, dans
notre milieu, c'est d'abord de payer notre loyer, de payer notre
épicerie et, ensuite, de s'occuper de l'éducation comme telle des
enfants. C'est pour ça que la garderie, c'est si nécessaire
qu'elle nous offre des services de grande qualité. C'est pour nous un
support essentiel. Le service doit être d'une plus grande qualité
encore qu'ailleurs.
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Maisonneuve.
Mme Harel: Merci beaucoup, Mme Boucher. Est-ce que vous
êtes tous les cinq membres du conseil d'administration?
M. Fiset: Oui.
Mme Harel: C'est ça? J'écoutais Mme la ministre
discuter avec vous. Je me disais qu'elle aura sans doute, d'ici la
clôture de notre commission, mardi prochain, à nous indiquer quand
elle va mettre sur pied le comité ad hoc qu'elle a annoncé dans
la première semaine de nos travaux. Vous aviez parlé, Mme la
ministre, d'un comité ad hoc sur les services de garde en milieu
défavorisé.
Mme Gagnon-Tremblay:... un comité ad hoc.
Mme Harel: Ce n'est pas un comité ad hoc? Non? Il me
semblait, en tout cas, avoir retrouvé ça dans les
galées.
Mme Gagnon-Tremblay: Je l'ai dit, je ne me souviens pas...
Mme Harel: C'est important parce que... J'ai cru comprendre...
Dans la première semaine, il y a eu des représentations comme
celles que vous faites et il m'a semblé...
Mme Gagnon-Tremblay: Je me suis engagée à le
regarder.
Mme Harel: Avec un regroupement de Québec, je crois.
C'était justement le Regroupement des garderies de la région de
Québec. Je pense que ça s'impose, là. Il ne s'agit pas de
vous renvoyer la balle ou de la lui renvoyer, mais peut-être, au
contraire, de faire en sorte que, dans les plus brefs délais, il puisse
y avoir une rencontre, un comité ad hoc. Je pense que c'est le mot que
Mme la ministre avait utilisé. De toute façon, quel qu'en soit le
mot, c'est que vous soyez consultés sur ce qui devrait être
ajouté à l'énoncé pour tenir compte de
l'état particulier du milieu dans lequel vous êtes, qui est aussi
le mien. Cela m'amène à vous poser une question concernant le
programme APPORT. J'étais pas mal certaine que la ministre vous dirait:
Oui, mais il y a APPORT, les frais de garde du programme APPORT, les frais de
garde du programme d'aide sociale pour les bénéficiaires qui
participent aux mesures. Mais je vous pose la question: Est-ce qu'il y en a,
des parents qui bénéficient de ces programmes qui ont l'air aussi
rares qu'une aiguille dans une botte de foin?
M. Fiset: Justement, je ne sais pas si, dans la garderie, il y en
a. Je n'en ai jamais entendu parler. Tout ce dont j'ai entendu parler depuis
que le programme APPORT existe, c'est que tous ceux qui ont essayé d'y
participer sont soit en dessous ou au-dessus, mais jamais dedans. Surtout que
c'est tellement compliqué de se démêler là-dedans.
Selon moi, moins tu as d'argent dans cette société, plus il faut
que tu sois capable de te démêler dans les papiers parce qu'il y a
tellement de programmes qui s'adressent à toi que c'est tout
mêlé. Quand tu as de l'argent en masse, tu t'engages un comptable.
Tu n'a pas besoin de comprendre, il fait tout pour toi. C'est ça. (19
heures)
Je regarde juste un détail. Quand on Inscrit un parent à
la garderie, vous savez ce qu'est la paperasse. Je vois madame de l'office des
services de garde. Vous savez ce qu'est la paperasse et on nous donne un mois
pour la remplir; cela arrive souvent qu'on soit incapable d'avoir l'aide du
premier mois parce que, des fois, ça peut demander trois fois à
la madame pour lui faire comprendre ce qu'est un rapport d'impôt; elle
n'en a jamais fait ou c'est quelqu'un d'autre qui lui a fait et elle n'a jamais
compris ce qu'était un rapport d'impôt et où est ce
papier-là? Je ne le sais pas. Juste cette paperasse qu'on leur impose
quand ils arrivent dans une garderie, déjà, ça
décourage des gens. On a souvent des pertes de revenus reliées
juste à cette bureaucratie. Ceux qui ont de l'argent n'ont pas besoin de
bureaucratie; ils paient. Nous, on n'a pas d'argent. Il faut aller chercher le
baptistaire. Oh colle! Vous savez ce que c'est que d'envoyer quelqu'un chercher
son baptistaire, qui ne sait même pas où il est, ce maudit
baptistaire-là. Mais 8 le faut pour avoir ces maudits 10 $. Là,
on passe par toute une... Notre coordonnateur est souvent obligé de
partir avec le parent, d'aller dans une paroisse je ne sais pas trop où
pour aller chercher un baptistaire parce qu'il n'y a pas d'autre moyen. Ce
coordonnateur-là, on le paie. Je trouve que, à un moment
donné, il faut donner des services à nos parents que d'autres
garderies n'ont jamais à donner et, pourtant, on
a moins d'argent pour le faire.
Mme Boucher: Manon Boucher. Mme Harel: Oui, allez-y.
Mme Boucher Pour ce qui est du programme APPORT, je trouve
intéressant qu'on soulève la question. Je l'ai demandé
cette année. Je suis monoparentale, avec un enfant. Je n'ai pas droit au
programme APPORT, ayant un salaire de 220 $ net par semaine. Mon salaire est
trop élevé parce que j'ai une forte pension alimentaire; j'ai une
pension alimentaire de 23 $ par semaine. C'est trop élevé. Je me
fais couper directement le programme APPORT. On me dit que j'aurais droit
à peu près à... En fait, j'ai droit à 200 $ par
année. C'est quand même extraordinaire.
M. Fiset: Cela coûte plus cher pour remplir la
paperasse.
Mme Boucher. C'est ça. Juste aller chercher mon baptistaire
à Montréal, le ravoir, ça me coûte 10 $.
Tout ça pour vous dire que j'ai quand même un avantage sur
d'autres: je suis capable de remplir la paperasse. Chez nous, il y a beaucoup
de minorités ethniques visibles, des gens qui ne parlent pas la langue.
Il y a la barrière de la langue, des gens qui ne savent pas
écrire, des gens à l'aide sociale. On ne se fera pas d'Illusions;
ce ne sont pas ces gens qui ont le plus fréquenté l'école.
Ces gens ont souvent la barrière de l'écriture; ils ne savent ni
lire ni écrire. Alors, évidemment, on est Incapable d'aller
chercher ces ressources.
Mme Harel: Je sais bien que vous parlez de la
réalité parce que vous ne la dramatisez pas. C'est bien
étrange, l'information. Des fois, il y a des titres: 300 000
analphabètes au Québec, au minimum. C'est M. le ministre de
l'Éducation... D'autres rapports disent que ça pourrait
être beaucoup plus élevé. On a toujours l'impression que
ces 300 000 sont nulle part, c'est-à-dire qu'ils sont dans des titres de
journaux, mais ils ne seraient pas comme dans la vraie vie, celle du rapport
d'impôt, du formulaire d'exonération des parents. Même le
mot "exonération", j'ai l'impression qu'il faut l'expliquer parfois
longtemps.
Vous nous dites qu'il y a une présence d'enfants de familles
immigrantes. Ces enfants ont-Ils le français comme langue maternelle ou
ont-ils à faire aussi cet apprentissage-là?
M. Fiset: Je ne sais pas combien il y a de nationalités
représentées actuellement, mais, dans notre quartier, c'est
sûr qu'il y a une présence Importante de minorités
ethniques.
Mme Harel: M. Diop est Sénégalais. Êtes-vous
Sénégalais, M. Diop?
M. Diop (Idrissa): Oui.
Mme Harel: Oui. La majorité des enfants ont le
français comme langue maternelle ou ...Pas nécessairement?
M. Diop: Pardon? Je n'ai pas bien compris la question.
Mme Harel: La majorité des enfants de familles immigrantes
de la garderie ont le français comme langue maternelle?
M. Diop: Ceux qui viennent de l'Afrique de l'Ouest, par exemple,
parlent français, en général. Je pense que les enfants qui
sont présentement à la garderie viennent de parents d'Afrique de
l'Ouest. Ceux qui viennent d'Asie, en général... Je pense qu'il y
en a certains, comme des Vietnamiens, qui parlent français, mais
d'autres qui ne parlent pas du tout français.
Mme Harel: Vous pouvez les intégrer? C'est facile?
M. Diop: L'intégration est beaucoup plus difficile parce
qu'il y a le problème de la langue. Les enfants ne comprennent pas
souvent les éducatrices parce qu'ils ne parlent pas la même
langue. Ils sont supposés communiquer avec des gestes, et il y a
certains mots qu'ils ne comprennent pas. Souvent, il y a des hochements de
tête qui peuvent vouloir dire oui ou non, que les éducatrices ne
comprennent pas non plus.
M. Fiset: Souvent, les enfants vont comprendre plus vite que les
parents, mais le problème que je soulignais dans le mémoire,
c'est que, des fois, tu expliques quelque chose au parent et, une fois que tu
as fini ton explication, il te dit oui, mais qu'est-ce qui te dit qu'il a
compris? Personnellement, on vit près d'une Cambodgienne, chez nous, on
lui dit toutes sortes de choses, elle nous dit oui gros comme le poing et,
après ça, tu t'aperçois qu'elle n'a rien compris. Dans la
classe de ma deuxième, qui est en maternelle quatre ans, il y a plus
d'enfants d'origine autre que québécoise. La grande
majorité, dans notre quartier, sont originaires du sud-est de
l'Asie.
M. Diop: Je veux vous parler de mon problème personnel. Je
suis marié avec une Française, je réside Ici depuis vingt
ans, j'ai un enfant qui, actuellement, est à la garderie Pomme d'Api. Je
pense que l'éducation au complet est faite à la garderie Pomme
d'Api. Bien que j'aie vécu Ici pendant vingt ans, il y a quand
même certaines notions éducatives de base que je ne connais pas,
que je n'ai pas comme "background" dans mon trousseau. J'ai ma culture que je
véhicule encore, j'ai appris autre chose, mais ça se situe
à d'autres niveaux. Pour mon enfant, je laisse l'éducation au
complet à la garderie, ce
qui implique pour la garderie un encadrement beaucoup plus particulier
parce que l'enfant ne fait pas les mêmes gestes que tous les autres
enfants, parce qu'à la maison, il apprend autre chose que ce que les
enfants québécois apprennent. Pour mon enfant, pour son
intégration à la société québécoise,
je voudrais qu'il apprenne tous ces rudiments de l'éducation, et
l'éducatrlce, pour le faire, il faudrait qu'elle ait un bagage qui va
avec ce genre d'éducation. Cela prend de l'argent pour la garderie. Je
pense que, dans ce sens, une subvention particulière devrait être
accordée à ce genre de garderie pour qu'on puisse donner à
ces éducatrices les outils nécessaires pour qu'elles puissent
s'occuper de ces enfants.
Le Président (M. Bélanger): Malheureusement...
Mme Harel: M. le Président, ce que vous nous apportez est
très intéressant. Il me semble que vous auriez plein de choses
intéressantes à dire au comité ad hoc de Mme la ministre
que je souhaite voir créé. Vous savez que vous nous obligez
à nous rendre compte que ce n'est pas juste dans le bas de la ville de
Montréal qu'on fait face à ces réalités. Je suis
convaincue que la majorité de mes collègues de la région
de Québec ne s'imaginaient pas que c'était le cas.
Des voix:...
Mme Harel: Je suis fort heureuse de comprendre qu'ils le
savaient, mais j'en prends bonne note. J'espère que, le sachant, ils
vont en faire quelque chose. Je vous remercie.
Le President (M. Bélanger): On peut vous dire... D'ailleurs, Je
voudrais excuser M. Leclerc qui aurait aimé être ici, mais qui est
pris à la commission de l'Assemblée nationale, dans une autre
pièce. Il ne pouvait pas laisser. Je peux vous dire qu'il nous parle
souvent de son comté et des problèmes de son comté. On en
mesure l'ampleur aujourd'hui, on va lui dire que ce qu'il nous a dit
était vrai. Je vous remercie. Mme la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: En terminant, je voudrais vous remercier. Je
suis très sensible au problème particulier des enfants qui sont
en milieu de garde défavorisé. Sans parler de comité ad
hoc, une chose est certaine, c'est que j'ai déjà mandaté
l'office des services de garde pour travailler - je ne sais pas si ce serait
sous la forme d'un comité ad hoc ou autre - pour essayer de trouver des
solutions afin de régler les problèmes spécifiques
auxquels vous devez faire face. Merci.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie
beaucoup de votre participation; c'est-à-dire que c'est la commission
plus que le président.
Compte tenu de l'heure, la commission ajourne ses travaux à
demain, 10 heures, dans la même salle.
(Fin de la séance à 19 h 10)