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(Dix heures quatorze minutes)
Le Président (M. Bélanger): La commission des
affaires sociales se réunit afin de procéder à une
consultation générale et à des auditions publiques afin
d'étudier l'énoncé de politique sur les services de garde
à l'enfance déposé à l'Assemblée nationale
le 24 novembre 1988.
À l'ordre, s'il vous plaît! On doit aussi souligner la
présence des cameramen. C'est une première à notre
commission de pouvoir filmer l'ensemble des travaux. On leur souhaite la
bienvenue.
Sans plus tarder, Mme la secrétaire, y a-t-il des
remplacements?
La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Biais
(Terrebonne) est remplacé par M. Boulerice (Saint-Jacques); M. Gervais
(L'Assomption) est remplacé par M. Gardner (Arthabaska); M. Joly (Fabre)
est remplacé par M. Cannon (La Peltrle) et M. Laporte (Sainte-Marie) est
remplacé par M. Doyon (Louis-Hébert).
Le Président (M. Bélanger): Bien. Je vous remercie
beaucoup. Est-ce qu'il y a d'autres remarques? Non?
L'ordre du jour est simple. Nous recevrons ce matin, à la table
des témoins, après les déclarations d'ouverture de Mme la
ministre déléguée à la Condition féminine et
de Mme la porte-parole de l'Opposition officielle, le Conseil
québécois pour l'enfance et la jeunesse et le Conseil du statut
de la femme; cet après-midi, la Confédération des
organismes familiaux du Québec, le Conseil de la famille
Richelleu-Yamaska, le comité régional de la
Fédération de la famille de Québec, l'Organisation
mondiale de l'éducation préscolaire, OMEP-Canada; à 17
heures, Mme Raquel Betsalel Presser et, à 17 il 30, l'Association
canadienne pour la promotion des services de garde à l'enfance.
C'est donc le programme de la journée et, sans plus tarder,
j'aimerais donner la parole à Mme la ministre
déléguée à la Condition féminine pour sa
déclaration d'ouverture. Mme la ministre.
Déclarations d'ouverture Mme Monique
Gagnon-Tremblay
Mme Gagnon-Tremblay: Merci, M. le Président.
Collègues de l'Assemblée nationale, mesdames, messieurs, il me
fait plaisir de procéder à l'ouverture des travaux de la
commission des affaires sociales et d'entreprendre les discussions sur
l'énoncé de politique sur les services de garde à
l'enfance.
Lorsque j'ai été nommée ministre
déléguée à la Condition féminine et
responsable des services de garde, j'ai vite compris que le gouvernement se
devait de combler l'absence d'une politique sur les services de garde à
l'enfance. Plusieurs situations problématiques étaient
soulevées et pour éviter, comme je l'ai mentionné à
quelques reprises, de régler des cas à la pièce, une
politique d'ensemble devenait essentielle.
On se souviendra d'ailleurs que, déjà, en 1982, sous
l'ancien gouvernement, on réclamait une telle politique d'ensemble de la
ministre responsable du dossier afin de permettre l'amélioration des
conditions de travail, l'indexation des subventions au coût de la vie et
l'élaboration d'un plan de développement. Les multiples ministres
qui se sont succédé à la Condition féminine
tergiversaient encore lors de notre entrée au pouvoir en décembre
1985.
Après avoir haussé les budgets des services de garde tout
en procédant aux études et consultations nécessaires, j'ai
rendu public, le 24 novembre dernier, un énoncé de politique sur
les services de garde à l'enfance. Ce document d'orientation
témoigne de l'engagement profond du gouvernement libéral à
mieux soutenir les parents québécois en matière de garde,
à améliorer le financement des services existants, à
établir un meilleur équilibre entre les besoins
diversifiés des parents et l'offre de services aptes à les
satisfaire.
Ainsi, le gouvernement orientera ses actions afin que soient
assurés un développement concerté, une qualité
accrue et un financement amélioré pour les services de garde
à l'enfance.
Au cours des cinq prochaines années, le gouvernement
développera 60 830 nouvelles places au Québec, doublant ainsi
pratiquement le nombre de places disponibles. Le gouvernement entend
développer plus rapidement la garde en milieu scolaire et la garde en
milieu familial. Il se propose de "prioriser", au cours des deux prochaines
années, la création de places de garde en milieu de travail pour
effectuer un rattrapage essentiel et permettre une conciliation plus efficace
des responsabilités parentales et professionnelles.
Au cours des trois premières années d'application de la
politique proposée, le gouvernement du Québec injectera 513 800
000 $ dans le but d'améliorer l'accessibilité aux services, de
maintenir et d'accroître la qualité et de soutenir plus
équitablement les parents et les services existants. Pour la seule
année 1989-1990, le budget des services de garde augmentera de 43 500
000 $, soit une majoration de 41 % par rapport à l'année
précédente. De ces nouvelles sommes injectées, 17 700 000
$ serviront au développement de nouveaux services alors que 25 800 000 $
iront à la consolidation des services déjà en
opération.
Ceci constitue un engagement sans précé-
dent pour une seule année par un gouvernement et je suis heureuse
que le milieu ait reconnu notre effort À ce chapitre, I faut, en effet,
admettre que, depuis la création de l'Office des services de garde
à l'enfance et ce, Jusqu'en 1987. les crédits additionnels
accordés à l'Office des services de garde n'ont jamais
excédé 8 000 000 $ pour une année.
Le gouvernement se devait de faire des choix et l'énoncé
de politique a été élaboré en tenant compte de la
capacité de payer des parents, bien sûr, qui sont aussi des
payeurs de taxes, mais également en tenant compte de la capacité
de payer de l'État, donc de l'ensemble des citoyens et des
citoyennes.
Tout en reconnaissant qu'iI existe d'immenses besoins, Je suis
néanmoins convaincue que les nouveaux montants Investis sauront nous
permettre à très court terme d'améliorer les services de
garde existants.
En effet, le gouvernement s'engage bien au-delà du simple octroi
de subventions fixes, ce qui a actuellement pour résultat que les
parents doivent assumer seuls toute augmentation de tarif. Par les nouvelles
formules de financement proposées, le gouvernement s'engage à
suivre l'évolution des dépenses et à assumer en partie,
mais de façon responsable, la croissance des coûts
récurrents qui en découleront. Ainsi, chaque fois qu'une garderie
devra augmenter ses tarifs à cause de l'évolution
inévitable de ses dépenses, le gouvernement augmentera
simultanément la subvention de fonctionnement et la subvention aux
parents admissibles à l'exonération financière. Le
gouvernement assumera ainsi toutes ses responsabilités.
Le gouvernement injectera 43 000 000 $ supplémentaires au cours
de la prochaine année et ceci constitue une limite bien établie.
Des choix ont dû être faits et des priorités ont
été arrêtées. Toutefois, à la lumière
des discussions que nous aurons au cours de cette commission parlementaire et
tout en respectant notre cadre budgétaire, nous serons ouverts à
tout aménagement concernant les modalités d'application qui
pourraient nous être proposées à l'intérieur de ces
limites.
Le gouvernement du Québec considère que les parents ont un
rôle de premier plan à Jouer dans le maintien et le
développement de services de garde de qualité. À cette
fin, iI entend soutenir davantage la participation des parents dans
l'organisation, la gestion et la direction des services de garde.
Au chapitre de la qualité, iI faut retenir que la qualification
du personnel constitue aussi un élément particulièrement
essentiel. Le gouvernement entend donc consacrer, à l'intérieur
de sa formule de financement, un budget spécial pour contribuer à
la formation, au perfectionnement et au ressourcement du personnel,
équivalant à 1 % de la masse salariale des services de garde.
Le gouvernement n'a pas choisi d'abaisser les ratios, tel que le
réclamaient certains intervenants. En effet, diminuer les ratios aurait
supposé des millions de dollars additionnels et récurrents
à être défrayés par les parents et par
l'État, sans compter les coûts supplémentaires
destinés à l'aménagement des locaux des garderies.
Compte tenu des besoins criants à bien d'autres niveaux, nous
avons préféré, dans un premier temps, consolider les
services existants. Il sera toujours possible, ultérieurement, de
diminuer les ratios lorsque les services pourront Jouir d'une marge de
manoeuvre plus grande.
Convaincu du bien-fondé de soutenir financièrement les
parents usagers, à la fois par des subventions aux services de garde et
par des programmes de soutien économique s'adressant directement
à eux, le gouvernement entend maintenir cet appui dans l'avenir. L'aide
directe aux garderies et l'aide financière aux parents permettent de
soutenir les clientèles en tenant compte de tours revenus et de leurs
besoins de garde.
L'application du système de services de garde actuel, on ne peut
que le constater, instaure puis perpétue des disparités,
hélas, de plus en plus flagrantes entre les parents utilisateurs. Est-il
Juste qu'un parent paie 12 $ par jour alors qu'un autre en paie 18 $ pour un
service Identique et de même qualité? Est-il équitable que
l'exonération financière maximale soit plafonnée à
10,50 $, peu importe le tarif payé? Il est faux de prétendre que
les parents qui paient un tarif de 18 $ sont plus riches que ceux qui paient un
tarif de 12 $, tout comme il est aussi faux d'affirmer qu'une garderie qui
affiche un tarif de 18 $ est une garderie riche, il est vrai, cependant,
d'affirmer que les parents admissibles à l'aide financière qui
paient un tarif de 18 $ doivent débourser davantage que d'autres pour
combler la différence entre le tarif payé et le montant
versé à titre d'exonération et, partant, se priver
d'autres biens nécessaires à la famille. Voilà autant de
disparités, d'inéquités, qu'il y a de garderies.
Voilà pourquoi le gouvernement a modifié la formule d'aide aux
parents afin de la rendre plus équitable.
Le gouvernement n'a pas choisi d'uniformiser les tarifs, ce qui aurait
signifié l'étatisation. Le gouvernement veut établir des
mécanismes permettant de stabiliser les plus élevés et de
réduire les écarts actuellement observés. Bien sûr,
les tarifs varieront toujours puisque les dépenses varient d'un service
à l'autre, d'un quartier à l'autre et d'une région
à l'autre. De plus, chaque garderie étant une corporation
autonome, les frais de garde sont fixés par les administrateurs en
fonction des priorités qu'ils se donnent. C'est pourquoi le gouvernement
modulera l'aide financière accordée aux parents en fonction des
tarifs payés par ces derniers. La nouvelle formule d'exonération
financière aux parents, qui prévoit un montant fixe et un
pourcentage du tarif payé, viendra réduire les
effets pervers des écarts de tarifs, corrigeant ainsi les
inéquités entre les parents et créant un meilleur
équilibre.
Dès l'entrée en vigueur de la politique, les 20 000
familles bénéficiant actuellement du programme d'aide
financière et les familles de classe moyenne nouvellement rejointes par
ce programme profiteront d'une diminution de leurs frais de garde. Les familles
qui ne pourront bénéficier de l'exonération
financière profiteront, quant à elles, d'une déduction
fiscale accrue. On sait, en effet, que le dernier budget Levesque a fait passer
cette déduction de 2000 $ à 4000 $ par enfant, peu importe leur
nombre. Cette réduction atteint donc 8000 $ pour deux enfants ou 12 000
$ pour trois enfants. Ces parents peuvent d'ailleurs en voir l'effet direct sur
leur chèque de paie s'is en font la demande à leur employeur,
lequel procédera à une déduction à la source des
frais de garde.
À titre d'exemple, pour un tarif de 16 $, un couple avec un
enfant en garderie et dont le revenu familial est de 40 000 $ pourrait recevoir
une aide fiscale d'environ 6,20 $ par jour. Il resterait donc aux parents un
déboursé net de 9,80 $.
La bonification du programme d'exonération financière
accordée aux parents représente 9 000 000 $
supplémentaires en 1989-1990. Il a fallu un gouvernement libéral
pour adopter une telle mesure de soutien aux familles
québécoises. C'est une somme considérable jamais consentie
auparavant. Cette bonification s'ajoute, faut-il le souligner, aux
déductions fiscales pour frais de garde, au programme APPORT, aux
allocations mensuelles pour jeunes enfants et à l'aide accordée
à la garde pour les bénéficiaires de l'aide sociale
engagés dans un programme d'em-ployabilité. Ces derniers
programmes totalisent environ 165 000 000 $ annuellement.
En plus du soutien accordé aux parents, le gouvernement,
conscient de sa responsabilité en matière de services de garde,
accorde des subventions directes aux services de garde gérés par
les parents, leur assurant ainsi une stabilité de financement.
Jusqu'à maintenant, la formule de financement de ces services
était rigide et non évolutive.
Dans le cadre de l'énoncé de politique, de ' nouvelles
formules de financement sont proposées, tant pour les garderies que pour
les agences de garde en milieu familial. Cette nouvelle formule permet donc aux
garderies de mieux s'ajuster à l'évolution de leurs
dépenses, de mieux répartir le fardeau additionnel pouvant
découler de cette évolution et, ultimement, de réduire les
écarts de tarifs actuellement constatés. Elle a été
élaborée en lien direct avec la nouvelle formule
d'exonération financière, d'où la nécessité
de ne Jamais dissocier ces deux mesures puisqu'elles assurent, l'une et
l'autre, un meilleur soutien aux parents.
Comment, d'ailleurs, ignorer cette mesure puisqu'elle représente
à elle seule près de la moitié du budget de l'office,
c'est-à-dire près de 62 000 000 $? Pourquoi faire croire à
la population que le parent paie 4000 $ de frais de garde par enfant par
année, alors que l'État assume entre 40 % et 85 % de ces 4000 $
par le biais de l'aide financière, de la fiscalité et du
programme APPORT? De plus, cette aide globale aux parents exclut les
subventions accordées directement aux services de garde dont
bénéficient tous les parents.
On observe actuellement des disparités dans les garderies et
elles sont nombreuses: des tarifs de 12 $ à 20 $; des salaires variant
de 6 $ à 14 $; des garderies ayant un coût de logement ou
d'hypothèque, d'autres pas du tout; des éducatri-ces ayant une
formation, d'autres aucune; des garderies existant depuis quinze ans, d'autres
très récentes; des garderies qui font payer les jours
fériés ou qui ont des contrats signés avec les parents,
d'autres pas; des garderies qui ont un taux d'occupation de 60 %, 70 % et
d'autres de 80 % et 98 %. Au-delà de tout discours, ces
disparités continueront d'exister et ce, quelle que soit la formule de
financement retenue, puisque les garderies sont des corporations autonomes,
différentes les unes des autres et qu'elles ont des besoins
diversifiés.
Le choix du nouveau mode de financement a été fait dans le
but de garantir, dans l'immédiat, un potentiel de consolidation qui
produira également des effets à plus long terme tout en
amenuisant graduellement les écarts relevés. Rappelons que la
subvention sera accordée selon les revenus perçus par la
garderie, donc...
Le Président (M. Bélanger): En conclusion, Mme la
ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, est-ce qu'il serait
possible d'avoir quelques minutes supplémentaires...
Une voix: Consentement.
Mme Gagnon-Tremblay: ...parce que je pense que c'est important,
compte tenu de la complexité du dossier, d'avoir une vue d'ensemble? (10
il 30)
Le Président (M. Bélanger): D'accord.
Mme Gagnon-Tremblay: SI vous préférez, je serais
prête à allouer le même temps à...
Le Président (M. Bélanger): Si nous avons
consentement et dans la mesure où l'Opposition aura le même temps,
1 ne devrait pas y avoir de problèmes. Est-ce qui y a consentement?
Mme Harel: Consentement.
Le Président (M. Bélanger): II y a consentement,
Mme la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Merci. La formule
qui prévaut actuellement s'adapte mal à
l'évolution des budgets et laisse peu de place à une
réelle planification. Ainsi, chaque fois qu'une garderie voit augmenter
ses dépenses, les parents en défraient seuls les coûts.
Dorénavant, et pour la première fois, le gouvernement soutiendra
les garderies à raison de 0,45 $ par tranche de 1 $ d'augmentation, en
plus de l'exonération financière aux parents qui sera
automatiquement ajustée en conséquence.
Plusieurs prétendent que la formule sera
inflationniste. Pour ma part, l'affirme que cette formule ne peut, à
long terme, qu'avoir des effets bénéfiques en ce qu'elle permet
de s'adapter à des situations tarifaires différentes, permet une
planification budgétaire efficace et incite à la maximisation des
taux d'occupation. Elle m'apparaît. de plus, donner aux parents tous les
moyens nécessaires de freiner toute augmentation exagérée
des tarifs. Premièrement, puisque les parents sont à la fois
consommateurs de services et décideurs de tarifs, nous croyons qu'ils
n'auront aucun Incitatif à augmenter ceux-ci à moins que les
besoins ne le commandent. Deuxièmement, on sait également que la
subvention de 45 % des revenus réels sera limitée par un plafond
établi à 120 % du tarif moyen observé dans l'ensemble des
garderies au cours de l'année précédente. Ainsi, pour un
tarif actuel moyen de 15 $. le plafond se situera à 18 $. En 1989-1990,
en conséquence, la subvention de 45 % et l'exonération
financière ne pourront s'appliquer au-delà de ce tarif de 18
$.
Toute modification à un système établi
est, par définition, Insécurisante. Cependant, nous croyons
fermement que la nouvelle formule de financement porte en elle les assises
d'une consolidation et d'un meilleur partage des coûts entre
l'État et les parents.
Il va de soi que les revenus sont en fonction du tarif et
du taux d'occupation de la garderie. Ainsi, une garderie affichant un tarif
moyen avec un bon taux d'occupation verra l'aide de l'État augmenter de
façon substantielle. Une garderie affichant un tarif élevé
et un bas taux d'occupation aura avantage à augmenter son taux
d'occupation plutôt que d'augmenter son tarif pour obtenir l'aide
supplémentaire de l'État. Les garderies auront donc un
intérêt évident à maintenir des tarifs raisonnables
et à chercher à combler les places vacantes avant de
procéder à une augmentation des tarifs et ainsi risquer de perdre
une partie de leur clientèle.
Avant de procéder à l'ouverture de nouveaux
services, n'est-il pas légitime que, dans un souci d'une saine gestion
des fonds publics, le gouvernement s'assure que les garderies existantes
maximisent le taux d'occupation des places disponibles sans que cela ne se
fasse au détriment de la qualité?
Certes, un certain nombre de garderies éprouvent des
difficultés et ont du mal à ajuster tarifs et taux d'occupation.
Je peux, dès à présent, garantir que des dispositions
particulières seront prises et que l'Office des services de garde
à l'enfance leur accordera une priorité en termes de soutien.
Dès l'entrée en vigueur de la politique,
cette nouvelle formule permettra à 20 % des garderies de
bénéficier d'une majoration de l'aide de l'État se situant
entre 500 $ et 5000 $. à 65 % d'entre elles de recevoir entre 5000 $ et
30 000 $ de plus, alors que, pour d'autres garderies, l'augmentation sera de
plus de 30 000 $. Pour la seule année 1989-1990, 10 000 000 $
supplémentaires seront consentis pour la consolidation des garderies
sans but lucratif.
Pour les agences de garde en milieu familial, la formule de
financement proposée, tout en offrant une amélioration du niveau
de financement pour la très grande majorité d'entre elles, prend
mieux en considération la réalité de ce mode de garde. Ce
nouveau mode prévoit une subvention de base, une subvention par
enfant-année et une subvention par famille. Il tient compte
également des économies d'échelle et accorde aux
différentes agences un financement plus équitable.
Ainsi, pour une agence de service de garde en milieu
familial recevant 50 enfants à temps plein, la subvention pourra
s'établir à 48 050 $ comparativement à une somme de 35 750
$ selon le programme actuellement en vigueur.
De plus, pour répondre à la demande des
parents qui préfèrent la garde des poupons en milieu familial, le
gouvernement introduira une subvention de 5,75 $ par place par jour pour la
garde de ces poupons.
Lors de la promulgation de la Loi sur les services de garde
à l'enfance en 1979, le gouvernement de l'époque faisait le choix
conscient et délibéré de permettre aux garderies à
but lucratif d'être titulaires de permis et de continuer à se
développer sans pour autant doter l'office des moyens légaux qui
lui auraient alors permis de contrôler efficacement ce
développement.
Aujourd'hui, nous faisons face à l'existence de plus
de 250 garderies à but lucratif non subventionnées. Quels
étaient nos choix? Fermer les garderies à but lucratif et priver
ainsi la population de plus de 11 000 places en garderie et abolir du
même coup près de 2500 emplois? Les transformer en garderies sans
but lucratif, ce qui, en pratique, s'avérait Irréalisable?
Proposer un moratoire quant au développement de ces garderies ou les
maintenir en apportant certaines améliorations?
Le gouvernement a clairement opté pour le maintien
des garderies à but lucratif tout en assujettissant dorénavant
leur développement à la planification régionale. Cette
décision entraîne la nécessité pour le gouvernement
d'assurer des services de garde de qualité aux enfants qui
fréquentent les garderies à but lucratif. Encore une fois,
conscient de ses responsabilités, le gouvernement a décidé
d'octroyer à ces garderies des subventions pour tes soins
apportés aux
enfants handicapés et aux poupons, ainsi que pour la
formation et l'équipement. Ces subventions qui permettront
d'améliorer la qualité des services seront données
à la condition que soit formé un comité consultatif de
parents véritablement opérationnel.
Concernant la garde en milieu scolaire, un rattrapage
s'impose, d'où le choix de développer davantage, au cours des
deux prochaines années, ce mode de garde de plus en plus
réclamé par les parents. Dans le respect de l'autonomie des
commissions scolaires, le gouvernement a choisi de ne pas leur imposer
l'obligation d'offrir ces services compte tenu des progrès
constatés au cours des dernières années,
particulièrement dans les milieux urbains. Cependant, le gouvernement
est conscient qu'un effort spécial devra être consenti pour
atteindre la clientèle des milieux semi-urbains et ruraux.
L'obstacle majeur affronté touche la
disponibilité de locaux dans certaines écoles. Pour pallier en
partie à ce problème, le gouvernement mettra à la
disposition des commissions scolaires un budget annuel de 3 900 000 $ afin
qu'elles puissent prévoir un local spécifique lors d'une
construction ou d'un réaménagement majeur d'école. Une
enquête effectuée récemment par le ministère de
l'Éducation auprès des commissions scolaires et des écoles
devrait également permettre au gouvernement de redresser des situations
problématiques.
Une mesure très importante en matière de
financement est l'application nouvelle du principe d'indexation de la plupart
des subventions. Le budget accordé pour le milieu scolaire, les
subventions pour les agences, le montant de base du programme
d'exonération financière et les subventions pour la garde des
poupons et des enfants handicapés seront Indexés au cours des
trois prochaines années. Ce principe était réclamé
depuis très longtemps par les intervenants du milieu et il fait
maintenant partie des orientations du gouvernement. Plusieurs l'ont reconnu,
c'est une mesure jugée exceptionnelle et elle démontre bien
l'engagement du gouvernement dans ce dossier.
Outre le soutien financier accordé tant aux parents
qu'aux services de garde eux-mêmes, l'énoncé de politique
propose d'autres modifications, particulièrement pour un
développement des services de garde au Québec basé sur une
planification régionale des besoins. Le plan de développement
entraînera l'ouverture de 60 830 nouvelles places en services de garde au
cours des cinq prochaines années.
Les places à développer pour les trois
prochaines années sont identifiées et réparties selon les
modes de services de garde, soit garderies, agences et milieu scolaire. Le plan
est basé sur la préférence des parents, établie
à la suite de deux sondages, et selon les indications que nous procurent
les demandes d'implantation actuellement en attente à l'Office des
services de garde à l'enfance.
Bien que les préférences des parents ne
puissent à elles seules servir à traduire les besoins en services
de garde, elles représentent toutefois un indicateur
révélateur sur lequel s'appuyer pour développer les divers
modes de garde. Bien que de nombreux besoins restent encore à satisfaire
à l'échelle provinciale, on s'approche dans certaines
régions ou certains quartiers de l'adéquation entre les services
offerts et les besoins réels.
Comme iI l'a fait avec succès dans bien d'autres
dossiers depuis son arrivée au pouvoir, le gouvernement, encore une
fois, entend avoir recours à la planification et au développement
concerté avec les partenaires régionaux, particulièrement
les municipalités régionales de comté, les organismes
socio-économiques, de même qu'avec les regroupements. Cette
orientation ne vient pas pour autant mettre un terme à l'action
communautaire des groupes promoteurs; elle vient, cependant, l'enrichir.
L'office procédera à une évaluation
régulière des besoins pour chaque région et les
résultats de cette évaluation détermineront la
répartition des places à développer pour les
quatrième et cinquième années du plan de
développement.
Nous commencerons dans quelques instants ces audiences
publiques concernant l'énoncé de politique sur les services de
garde à l'enfance. Plus de 80 organismes viendront exprimer leur
position face à l'énoncé de politique. Les demandes sont
multiples et diversifiées. Je suis consciente qu'il n'y a pas de formule
miracle et que tout est perfectible. J'entends être à
l'écoute des opinions exprimées et j'ai bon espoir que cet
exercice démocratique permettra d'aplanir les divergences de vues qui
séparent présentement le gouvernement de certains
intervenants.
Je vous remercie de votre attention et je souhaite
sincèrement que cette consultation publique soit constructive et
permette de dégager des consensus en matière de garde pour le
mieux-être des familles et des enfants québécois. Merci, M.
le Président.
Le Président (M. Bélanger): Merci. Mme la ministre.
Vous avez donc utilisé 25 minutes. Mme la députée,
porte-parole de l'Opposition, Mme la députée de Maisonneuve.
Mme Harel: M. le Président, vous allez d'abord m'excuser
pour cette voix enrouée. Je la dois évidemment à une
laryngite qui n'en finit plus.
M. le Président, comme nous avions convenu
d'utliser quinze minutes de chaque côté, je souhaiterais que nous
puissions compléter les dix minutes Imparties à l'Opposition par
des interventions que souhaiteraient faire mes collègues qui
m'accompagnent ce matin.
Le Président (M. Bélanger): II n'y a pas de
problème, Mme la députée de Maisonneuve.
Mme Louise Harel
Mme Harel: M. le Président, à écouter
certains collègues de la ministre déléguée à
la Condition féminine, on pourrait se rappeler, comme dans la chanson
cajun très connue "L'arbre est dans ses feuilles", que les services de
garde sont dans la politique familiale, la politique familiale est dans la
natalité, la natalité est dans la langue et la langue est tout
mélangée.
Voyez-vous, M. le Président, le ministre Rivard confiait la
semaine dernière à son auditoire de l'Université McGiII
que "si la langue dépérit, c'est qu'on ne fait pas assez de
petits. Arrêtez de parler d'affichage, faites plus de
bébés, cela va régler la question de la langue", a-t-il
à peu près dit.
Malheureusement, un autre collègue de la ministre a
décidé de reprendre à peu près le même
raisonnement, Invoquant encore il y a quelques jours, et je le cite: "Que la
principale menace contre la survie du français était la question
démographique".
Les propos des deux hommes, de toute façon, ne sont pas
étrangers à la formation gouvernementale, puisqu'ils sont presque
analogues à ceux que le premier ministre lui-même tenait sur cette
question avant Noël, au salon bleu, de l'autre côté.
M. le Président, comment un tel sophisme peut-il continuer
à se répandre? Voit-on les Allemands de l'Ouest, qui ont un taux
de natalité encore plus bas que le nôtre, se faire exhorter
à faire des bébés pour sauver leur langue? Faut-il
prévoir pour bientôt des primes pour les bébés
francophones ou des certificats de francisation en langue maternelle?
Qu'arrivera-t-il aux bébés nés dans des familles
immigrantes qui, à 75 %, choisissent un transfert linguistique en faveur
de l'anglais?
Je tiens à le dire très fort à l'ouverture de cette
commission qui discutera des besoins de garde des petits et du grand besoin de
petits pour notre collectivité: le procédé qui consiste
à transférer sur le ventre des femmes la responsabilité
gouvernementale de promouvoir le Québec français est totalement
odieux. Le gouvernement doit cesser de culpabiliser la population, à
défaut de prendre ses responsables à la fois dans le dossier
linguistique comme dans le dossier démographique. L'époque est
révolue du partage des enfants aux Canadiens français et des
immigrants aux Canadters anglais. Nous avons besoin de politiques courageuses
en matière démographique, distinctes des politiques en
matière linguistique.
Malgré le caractère spectaculaire des primes à la
naissance annoncées dans le dernier budget, particulièrement
l'allocation de 3000 $ pour le troisième enfant, te gouvernement sait
lui-même qu'elles auront peu d'effet puisque la diminution des naissances
est attribuabie surtout à la réduction des enfants de premier et
de deuxième rangs. Une véritable politique de natalité
passe d'abord par des congés de maternité, des congés
parentaux, une réorganisation du temps de traval et une véritable
accessibilité à des services de garde de qualité. Les
millers de Québécoises enceintes qui se débattent
présentement avec le droit à un retrait préventif,
refusé malgré des attestations médicales, paient
très cher l'inertie du gouvernement qui continue d'ergoter sur la
nécessité de faire des enfants.
Les modifications à la Loi sur les normes du travail, d'abord
annoncées par la ministre déléguée à la
Condition féminine pour le 15 janvier dernier, sont maintenant
reportées. Peut-être avant jullet dans un avant-projet de loi, m'a
répondu le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité
du revenu la semaine dernière. (10 h 45)
En matière de services de garde, l'énoncé de
politique provoque une déception presque générale.
D'abord, force est de constater qu'au moment où la société
québécoise tout entière est prête à consentir
un effort substantiel en faveur des ressources de garde adéquates et
accessibles, l'effort le plus important viendra d'Ottawa. Le tableau de la
répartition, en dollars courants, de la contribution de Québec et
d'Ottawa au financement de l'Office des services de garde depuis dix ans
démontre clairement le statu quo, cette année, de la contribution
du Québec. Ainsi, le budget de 69 200 000 $ en 1988-1989 n'atteindra que
69 400 000 $ en 1989-1990 parce que, malgré la valse des millions, la
ministre déléguée sauve les apparences avec l'argent du
gouvernement fédéral. Dans un domaine aussi névralgique
qui constitue, selon le gouvernement Bourassa lui-même, un volet majeur
de la politique familiale, la population est cependant en mesure d'attendre un
effort accru des deux paliers de gouvernement
II est inadmissible que le gouvernement du Québec s'agite en se
laissant seulement porter par les centaines de millions que lui distribuera
Ottawa durant les prochaines années. Les différents modes de
services de garde ont tour à tour vivement réagi contre certains
aspects spécifiques plus controversés de
l'énoncé.
Je rappelle ces attentes qui ne sont pas satisfaites de la part des
intervenants du milieu des services de garde. D'abord, la nouvelle
méthode de financement des garderies. Le nouveau mode de subventions, en
fonction de 45 % des revenus réels de garde et l'abandon de la
subvention par jour par place assortie d'une subvention de logement, va
accroître dramatiquement l'écart entre les garderies. Unanimement
décriée tant par le milieu des parents que par celui des
travalleuses en garderie, cette méthode de financement va
étouffer les services de garde dans les miteux moins nantis. Nous
pensons que la ministre doit retirer immédiatement cette disposition,
qui ne fera qu'accroître les inégalités, pour examiner un
mode de financement plus respectueux des principes de justice distributive.
II en est de même du 1 % de la masse salariale de chacune des
garderies consacré à la formation du personnel et à son
perfectionnement. Il serait totalement injuste que le personnel desservant des
clientèles ayant une moins grande capacité de payer
éprouve plus de difficultés à obtenir une formation et un
ressourcement adéquats.
La garde en milieu familial. Sans motif valable, l'énoncé
de politique fait défaut de reconnaître pourtant la principale
revendication des gardiennes responsables des familles de garde, soit la
modification du ratio permis par la loi pour les enfants d'âge
préscolaire. Les agences de services de garde en milieu familial
demandent que les responsables de famille de garde puissent accueillir cinq
enfants, y compris les leurs, plutôt que le ratio de quatre actuellement
permis. L'augmentation du ratio telle que proposée pour permettre
d'accueillir deux enfants d'âge scolaire après les heures de
classe ne vient qu'officialiser une situation de fait sans répondre
à la modification du ratio demandée.
D'autre part, l'agence de garde en milieu familial se trouve Injustement
exclue de toute subvention pour l'achat de matériel pédagogique
et pour la formation et le perfectionnement du personnel. Cette situation est
d'autant plus déplorable que les garderies privées pourront
dorénavant bénéficier de ces subventions.
Malgré l'augmentation du nombre de places prévues en garde
scolaire, ce réseau fait toujours figure de parent pauvre dans
l'ensemble des services de garde au Québec. Au terme de la
période de trois ans définie par la ministre, le réseau
scolaire pourra offrir un total de 40 000 places aux 600 000 enfants des
écoles primaires publiques. C'est bien peu en regard du rattrapage
auquel il faut procéder puisque, par ailleurs, tout reste à faire
en matière de garde estivale.
Conscient de la faible implication des commissions scolaires dans les
services de garde, il est inconcevable que le gouvernement ait retiré
l'obligation d'offrir un tel service dans le cadre de la loi 107 adoptée
en décembre dernier.
II est décevant que les subventions à la formation et au
perfectionnement du personnel en service de garde scolaire ainsi que les
subventions à l'acquisition du matériel pédagogique soient
exclues de ce service.
Au-delà de l'insatisfaction propre à chacun des modes de
garde reconnus, ce qui consterne le plus dans l'énoncé de
politique, c'est que les principes directeurs qui y sont affirmés sont
totalement étrangers aux modes de fonctionnement et aux formules de
financement retenus. Manifestement les principes ont été
dégagés au Secrétariat à la condition
féminine et les formules de financement au ministère des
Finances. D'ailleurs, la relecture du discours sur le budget d'avrl 1968 du
ministre des Finances s'impose pour éclairer les zones obscures de
l'énoncé de politique. Dans ce discours sur le budget, les frais
de garde d'enfants y sont exclusivement présentés comme un
coût relié à la présence sur le marché du
traval. Pour ce motif, et malgré le discours d'équité
fiscale utilisé dans le budget pour justifier, avec raison, la
transformation des régimes de déductions personnelles en
crédit d'impôt, le gouvernement a choisi de maintenir la
déduction en matière de frais de garde, d'exclure la
transformation en crédit d'impôt et de considérer les frais
de garde comme une dépense effectuée en vue de gagner un revenu
et non comme une compensation des charges parentales.
Cette mesure est inéquitable pour les familles à faible
revenu. Je rappelle ce qu'en dit le Conseil du statut de la femme qui
présentera aujourd'hui un mémoire devant cette commission
parlementaire. Lorsque le revenu imposable de chacun des conjoints, sans
compter la déduction des frais de garde de 4000 $, s'élève
à 14 000 $, par exemple, le couple qui se prévaut de la
déduction entière obtiendra une réduction d'Impôt
égale à 1460 $. Mais à l'extrémité
supérieure de l'échelle, quand le revenu imposable de chacun des
conjoints atteindra 60 000 $ ou plus, la réduction d'impôt se
chiffrera à 2200 $. Inéquitable pour les familles à moyen
revenu, cette formule pénalise les femmes à la maison qui
souhaitent étudier à temps partiel ou, à l'occasion,
profiter d'un répit parental ou encore faire profiter leur enfant de la
présence d'enfants du même âge.
La formule retenue va rendre le service de garde pratiquement
inaccessible aux enfants des parents à très faible revenu,
chômeurs et assistés sociaux, puisque les coûts vont devenir
totalement exorbitants compte tenu de la modulation selon les tarifs
payés. En effet, sans déduction fiscale sur un revenu imposable,
en l'absence de tout crédit d'impôt remboursable, compte tenu de
l'échec de participation au programme APPORT qui, un an après sa
mise en vigueur, atteint à peine 35 % de son objectif, les enfants des
parents en difficulté se verront dans la presque impossibilité de
bénéficier d'une telle socialisation dans un service de
garde.
Ce choix est éminemment contestable au moment où le
gouvernement presse les couples à penser aux enfants, comme est
contestable l'attitude véhémente de la ministre à
l'égard des critiques formulées sur sa politique. Comment ne pas
douter de l'offre de dialogue quand on sait que les travaux de la commission
parlementaire se termineront à peine trois semaines avant l'application
de cette politique déjà toute décidée d'avance?
Malheureusement, je crains fort que l'exercice que nous débutons
aujourd'hui ne serve finalement à rien d'autre du côté
gouvernemental qu'à faire l'éloge de propositions pourtant si
contestées. Je vous remercie, M. le Président
Le Président (M. Bélanger): Bien. Il reste douze
minutes à votre formation politique, Mme la députée de
Chicoutimi.
Mme Jeanne L Blackburn
Mme Blackburn: Merci. M. le Président. Je pense que la
porte-parole de l'Opposition a fait ressortir assez clairement les faiblesses
de la politique qui nous est proposée aujourd'hui. Une commission
parlementaire, comme il se doit, est un exercice qui devrait nous permettre de
mesurer l'écart entre le discours et la politique de la ministre, ainsi
que la perception qu'en ont ceux et celles qui ont à vivre et à
appliquer quotidiennement le programme qui leur est proposé.
D'entrée de Jeu, comme parlementaires, nous devons
reconnaître que les plus qualifiés pour parier d'une telle
politique, une fois qu'elle a été étudiée, peuvent
être, à l'occasion, les membres de l'Opposition ou ceux du
gouvernement. Cependant, les plus qualifiés, à mon humble avis,
sont vraiment ceux et celles qui ont à travailler, à gérer
et à vivre avec une telle politique. C'est pourquoi Je souhaite qu'on
soit extrêmement attentifs à ce que les gens viendront nous dire
ici.
J'aborderai brièvement deux aspects de la politique: le premier,
pour le déplorer parce qu'on ne pourra pas y revenir, c'est le fait
qu'au moment où on adoptait la loi 107, comme le rappelait la
députée de Maisonneuve, la loi sur les commissions scolaires, le
ministre ne croyait pas utile de faire obligation aux commissions scolaires
d'organiser des services de garde en milieu scolaire. En fait, il ne s'agissait
pas d'une obligation aux commissions scolaires, mais bien aux directeurs
d'école. Dans le texte de la loi 3, le directeur de l'école avait
l'obligation, à la demande des parents, d'organiser des services de
garde en milieu scolaire. L'idée nous était venue au moment
où M. Jacques-Yvan Morin, ministre de l'Éducation, trouvait
insupportable et intolérable que de Jeunes enfants soient tenus de se
promener avec la clé dans le cou, comme on le disait, en attendant que
les parents reviennent du travail. On avait donc fait obligation aux directeurs
d'école d'organiser des services de garde en milieu scolaire lorsqu'une
telle demande leur venait des parents.
L'actuel ministre de l'Éducation - l'avis est vraisemblablement
partagé par la ministre responsable des services de garde - n'a pas cru
utile de confirmer cette obligation qui était faite aux directeurs
d'école. Pourtant, les progrès qu'on a connus dans le milieu
scolaire sont venus surtout du fait qu'une obligation était faite. Les
directeurs d'école savaient que, dorénavant, sous prétexte
que c'est dérangeant d'avoir des enfants à l'école
à l'heure du midi, Is n'auraient plus la possibilité de se
soustraire à cette obligation. Alors, si on a fait des progrès
qui sont intéressants dans les écoles, c'est parce que cette
obligation était pendante auprès des directeurs
d'école.
Le ministre de l'Éducation nous annonçait un
investissement de 3 900 000 $ pour organiser les locaux. Vous savez que
ça donne, au total, environ 6 $ ou 7 $ par enfant au primaire, au
Québec, par armée. Alors, ce n'est pas astronomique.
La seconde question touche toute la discrimination qui persiste à
cause des déductions fiscales pour les services de garde. C'est connu:
plus vous avez un revenu élevé, plus vous aurez des
déductions élevées. C'est une situation qu'on n'aurait pas
intérêt, à notre avis, à perpétuer.
Je souhaite Juste qu'à la fin de cet exercice la ministre se soit
laissé suffisamment de marge de manoeuvre pour pouvoir tenir compte, de
façon concrète et réelle, des propos et des
recommandations qui nous seront faites par les différents intervenants.
J'espère qu'elle ne s'est pas enfermée dans des règles qui
lui auraient été dictées, par exemple, par le ministre des
Finances, à la fois sur les déductions d'impôt, sur la
participation du gouvernement, et qu'elle s'est laissé un peu de marge
de manoeuvre pour que l'exercice que nous faisons, auquel nous consentirons
plusieurs heures, ne soit pas inutile. Je vous remercie, M. le
Président.
Audition
Le Président (M. Bélanger): Bien. Ceci met fin aux
remarques préliminaires.
J'invite donc le premier groupe à se présenter à la
table des témoins. Il s'agit du Conseil québécois pour
l'enfance et la jeunesse, représenté par Mme Nicole
DeGrandmont-Fortier, Mme Danielle Bertrand-Poirier et M. Jean-Claude Boisvert.
Je vous souhaite la bienvenue à la commission et vous précise un
peu les règles. Vous avez 20 minutes pour faire la présentation
de votre mémoire et 40 minutes seront réparties en 20 minutes -
20 minutes pour la période de discussion sur votre
présentation.
Alors, je vais Imposer des règles strictes pour la
présentation afin d'éviter qu'on ne prenne trop de temps et qu'on
ne cumule des retards dans la tenue des travaux. Je vous prierais donc, Mme la
présidente, de vous identifier et de présenter les gens qui sont
avec vous. Chaque fois que vous aurez à prendre la parole, s'il vous
plaît, veuillez donner votre nom pour les fins de la transcription du
Journal des débats. Je vous remercie et vous pouvez
procéder.
Conseil québécois pour l'enfance et la
Jeunesse
Mme DeGrandmont-Fortier (Nicole): Merci. Nicole
DeGrandmont-Fortier, présidente du CQEJ et m'accompagnant, mes
collègues, Mme Danielle Bertrand-Poirier, première
vice-présidente, et M. Jean-Claude Boisvert, directeur
général du CQEJ. (11 heures)
Mme la ministre déléguée à la Condition
féminine, mesdames, messieurs, le CQEJ existe en fait depuis 26 ans et
sa mission a toujours été
de fournir un appui des plus adéquats aux divers
intervenants qui oeuvrent auprès des enfants et des Jeunes dans ce qui
touche tous leurs besoins. Le CQEJ est un organisme qui réunit
différents professionnels dont le point commun, vous vous en doutez
bien, est l'enfant et les jeunes. Sa deuxième mission est de promouvoir
les besoins et les intérêts du Québec.
Cela étant dit, vous comprendrez qu'avec une telle
mission le CQEJ, le Conseil québécois pour l'enfance et la
jeunesse, se devait de déposer un mémoire concernant
l'éventuelle loi sur les services de garde à l'enfance pour
attirer l'attention sur trois pôles interreliés et, d'après
nos officiers du conseil d'administration, considérés comme les
plus importants, soit: la qualité de vie et des services et la
stimulation que les jeunes peuvent recevoir dans les conditions de garderie, la
stabilité et la compétence du personnel, sans oublier son
perfectionnement, et, enfin, le cas des jeunes enfants différents tant
socialement, mentalement que physiquement et dont l'énoncé de
politique ne fait qu'une brève mention en page 60. Voyons ces
différents pôles plus en détail.
Ce qui a le plus préoccupé le CQEJ, c'est de
pouvoir retenir que l'amélioration des services de qualité pour
les jeunes enfants en garderie a été un souci constant dans les
demandes du futur énoncé de politique. C'est une
préoccupation très sérieuse du CQEJ de voir à ce
qu'il y ait une qualité de services pour les jeunes enfants qui seront
appelés à vivre en dehors du foyer pendant un assez long moment
de leur enfance. Cette qualité de services devrait être, à
notre sens, un équivalent des intentions parentales, donc, un milieu de
vie de qualité et de stimulation assurant le plein épanouissement
de l'enfant.
C'est par un milieu privilégié que la
socialisation et l'épanouissement d'une personnalité peuvent
s'accomplir. On en convient tous. Est-ce qu'on en est conscient dans les
garderies? C'est un des facteurs qui nous posent problème, pour lequel
on ne semble pas démontrer un grand souci dans l'énoncé
politique.
Est-ce que le personnel en place a suffisamment de
ressources pour être qualifié et est-ce que son intervention est
adéquate? Nous avons donc pour premier objectif d'alerter la commission
sur l'absence d'énoncé clair et précis sur la
qualité des services, la vie stimulante et le milieu de garderie.
Un autre objectif de notre mémoire touche l'enfant
à problèmes. Qu'il s'agisse d'un enfant carencé
socialement, c'est-à-dire un enfant qui subit des mauvais traitements,
d'un enfant abusé, d'un enfant mésadapté, d'un enfant
carencé intellectuellement par des déficiences, d'un enfant
carencé physiquement, le milieu devrait, le cas échéant,
pouvoir dépister ce genre d'enfant C'est le milieu idéal pour le
faire, le milieu où on peut le dépister en donnant le plus de
chances de rééducation à nos enfants, offrir un appui
adéquat et même poursuivre les interventions des programmes de
stimulation précoce. Si l'enfant est appelé à vivre dans
une garderie, qu'il ait besoin d'un secours de stimulation précoce, je
ne crois pas que les parents soient habilités à pouvoir mener
à bien ce programme puisqu'ils le mettent à la garderie. C'est
donc qu'ils ont besoin d'un supplément. À ce moment-là, la
garderie devrait, par le perfectionnement de son personnel, pouvoir assumer une
telle fonction et les autres enfants seraient loin d'en être
incommodés puisque la stimulation précoce pourrait
améliorer l'ensemble du programme déjà émis dans
les garderies.
L'intégration fait désormais partie d'une
action sociale et scolaire. Nous n'en tenons pour cela que des mémoires
déposés par les ministres des Affaires sociales et de
l'Éducation. Nous pensons qu'il serait des plus importants que
l'intégration se fasse dans le premier échelon de la
société de nos enfants, c'est-à-dire la garderie. Le CQEJ
veut donc porter une attention toute particulière aux trois pôles
que je viens de citer: la qualité des services, la stabilité du
personnel et l'intégration inconditionnelle de tout genre d'enfant.
Ou même souffle, nous sommes bien conscients que ces
facteurs amènent une question précise de budget. Dans
l'énoncé de politique, le CQEJ a constaté un effort
consenti pour aider au présent budget, mais, à la lumière
d'un tableau issu de l'énoncé de politique, nous sommes enclines
à croire que les réajustements pour une garderie type n'accordant
de fait que 3,7 % d'augmentation par rapport à la situation actuelle
nous semblent douteux quant à leur efficacité à
démontrer qu'ils ont été réajustés de
façon significative.
En terminant, le CQEJ tient à souligner de
façon claire et précise que tout ce qui a été
présenté précédemment ne peut être
réalisé adéquatement qu'avec la complicité d'un
personnel efficace et qualifié. Pour ce faire, I faut un personnel
stable, et donc, ayant automatiquement des conditions de vie lui permettant une
stabilité qui lui assure un climat de vie adéquat qui suscite son
désir de travailler dans ce milieu; un personnel compétent
à manoeuvrer avec les enfants et compétent à
dépister, le cas échéant, les problèmes; un
personnel soutenu par un recyclage et un perfectionnement continu et, enfin, un
personnel soutenu par une instrumentation et des ressources que nous croyons
susceptibles d'être prêtées ou puisées à
même les expertises existantes dans le milieu social ou scolaire.
Bref, Mme la ministre, mesdames et messieurs, le CQEJ croit
en une politique de garde, à condition que cette politique ne perde pas
de vue l'enfant et son enfance, donc qu'elle favorise un personnel
préparé adéquatement à stimuler et à
éduquer l'enfant en développant son sens social et son goût
de la découverte pour en faire un excellent étudiant dans le
futur; qu'elle permette le perfectionnement périodique pour
nourrir ces éducateurs, les soutenir
adéquatement et ainsi contribuer à la stablité du
personnel; puis qu'elle démontre un souci évident de permettre
une intégration adéquate à tous les enfants ayant des
potentiels différents.
Permettez-moi, Mme la ministre, en conclusion, de
céder la parole à ma collègue, Mme Danielle
Bertrand-Poirier.
Mme Bertrand-Poirier (Danielle): Bonjour, mesdames et
messieurs.
Tel que l'a mentionné Mme DeGrandmont-Fortier, le
Conseil québécois pour l'enfance et la jeunesse a pour mission de
favoriser la meilleure qualité possible des services aux enfants et aux
Jeunes du Québec. Dans notre mémoire, sous l'énoncé
de politique pour les services de garde à l'enfance, le CQEJ
considère comme très important d'énoncer clairement les
principes pour la qualité des services à offrir aux enfants car
il est essentiel de leur assurer les services de qualité auxquels Is ont
un droit fondamental.
Pour une meilleure qualité de services, le CQEJ
propose d'éclaircir les notions de programmes éducatifs. De plus,
il propose de favoriser le développement des mesures de
prévention et de dépistage des problèmes sociaux tels
l'hyperactivité, les maladies mentales, les troubles de comportement et
tout ce qu'on peut retrouver chez un enfant éprouvant des
difficultés. La stabilité à l'emploi et un
perfectionnement continu constituent, selon le CQEJ, les fondements pour la
qualité des services. La garde en milieu scolaire et les services de
répit et de dépannage sont aussi à développer. Le
CQEJ aimerait donc voir stabiliser et consolider tout ce qui est
déjà en place.
Enfin, le Conseil québécois pour l'enfance et
la jeunesse souhaite que les enfants ayant un handicap physique ou intellectuel
soient intégrés dans les différentes garderies, les
conditions de réussite étant le rôle positif des
gestionnaires, des éducateurs, leur préparation adéquate,
les ressources financières pertinentes, la préparation des autres
enfants, l'instrumentation qui se doit aussi d'être appropriée, le
soutien des divers intervenants ainsi que la concertation qui doit les animer.
Enfin la participation des parents n'est pas à oublier. Puisque tout se
joue avant six ans, il est alors important qu'une future politique des services
de garde à l'enfance demeure aussi une politique de services aux enfants
du Québec. Merci.
Le Président (M. Bélanger): Merci, madame. Alors,
Mme la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Merci, madame, pour la présentation
de votre mémoire. Il y a certains aspects que vous avez soulevés
qui sont exacts et qui sont très intéressants. J'en regardais
quelques-uns, entre autres, concernant la qualité de la programmation et
le développement de l'enfant. Vous savez qu'il existe déjà
quand même un certain cadre de vie pour l'enfant et comme les services
sont autonomes, cela reflète aussi les valeurs du milieu. Donc
j'aimerais savoir de vous quelles devraient être les exigences à
formuler par rapport aux programmes d'actrvités? Jusqu'à
maintenant, la formulation de telle exigence a toujours été faite
par les parents, c'est-à-dire que le contenu des programmes a toujours
été précisé davantage par les parents. Voyez-vous
autre chose et comment, de quelle façon le voyez-vous?
M. Boisvert (Jean-Claude): Jean-Claude Boisvert. Je peux
peut-être répondre en vous disant que l'expertise
développée depuis plusieurs années par le conseil fait
que, sans nécessairement changer ce qui a déjà
été implanté par l'office, il nous semble que pour des
problématiques récentes, depuis dix ans, enfance
négligée, enfance maltraitée, les abus sexuels, les cas
d'hyperactivité, les troubles de comportement, il y a moyen
d'améliorer les programmes dans les garderies pour dépister
tôt les cas qui n'ont pas été annoncés dans le
système et, dans le fond, d'inciter les garderies et faire en sorte
qu'elles puissent avoir la formation qu'elles désirent pour le faire, de
dépister tôt les cas problèmes et de pouvoir s'y adresser,
faire référence aux bonnes ressources du réseau des
affaires sociales et de l'éducation.
Comme cela a été dit tantôt, tout se
joue avant six ans. Sans vous apporter de proposition de contenu de programme,
ce qui nous semble devoir être ajouté porte davantage sur les
nouvelles problématiques auxquelles les enfants font face, les
problèmes qu'on voit beaucoup dans nos milieux, les listes d'attente
à la protection de la jeunesse, cela manifeste des absences et des
problèmes concernant les parents et certainement que les travailleurs en
garderie sont bien placés pour les dépister et de tenter de les
redresser. On a l'impression qu'ils voudraient certainement avoir les outils,
l'instrumentation, le perfectionnement et les programmes conséquents
pour être capables de les résoudre.
Ce serait intéressant de vérifier
jusqu'à quel point ces Intervenants vont vous faire des propositions de
programmes précis. Mais ce sont non seulement des programmes pour le
vécu quotidien des enfants et leur socialisation, c'est aussi pour faire
face à ces situations qu'on voit tard à l'école, mais
qu'on pourrait voir tôt à la garderie.
Mme Gagnon-Tremblay: Dans les cours qu'on donne, entre
autres, sur les techniques de garde - c'est sûr qu'on n'en donne
peut-être pas suffisamment - avez-vous quand même une idée
du programme qui se donne actuellement et désirez-vous que ce soit un
peu plus pointu, c'est-à-dire qu'on aille davantage dans cette
formation? Croyez-vous qu'on aurait avantage que cette formation soit
donnée lors du cours en techniques de garde plutôt que dans les
garderies
comme telles?
Mme DeGrandmont-Fortier: Oui. Nicole DeGrandmont-Fortier. Dans
les cours, on fait un survol de ce qui devrait faire partie de la profession.
À notre sens, ce que nous constatons, c'est qu'il y a une absence assez
marquée d'une facilité de dépistage, premièrement,
et d'une espèce de dynamisation de l'action à entreprendre pour
stimuler l'enfant afin qu'l ait le goût de découvrir. Cela nous
apparaît être une lacune. Il n'y a pas un grand impact à ce
niveau dans le programme actuel. Surtout le niveau de dépistage est
à peu près nul.
Mme Gagnon-Tremblay: Pour vous, ça prendrait quand
même des cours spécifiques pour le dépistage. Vous croyez
que les éducatrices ou les éducateurs n'ont pas suffisamment
cette formation à l'intérieur des garderies pour faire ce genre
de dépistage?
Mme DeGrandmont-Fortier: C'est indéniable. Surtout si on
pense que l'application, telle que prévue, est d'une personne
qualifiée sur trois. À ce moment, nous pensons que le
dépistage ne peut pas se faire de façon adéquate. (11 h
15)
M. Boisvert: J'aimerais pouvoir ajouter quelque chose. Je suis
Jean-Claude Boisvert. À la page 10 du mémoire, on vous fait une
suggestion. Remarquez qu'on n'a pas quantifié ça outre mesure,
mais pour les milieux défavorisés, en particulier - je pense aux
milieux défavorisés de la région de Montréal, mais
aussi dans d'autres milieux - peut-être que 1 % de la masse salariale qui
a été prévue dans l'énoncé de politique,
s'il y avait un montant de 100 000 $ qui était prévu pour des
projets spéciaux de formation et de perfectionnement, pour des milieux
de garde qui sont en butte à des concentrations de problèmes, ce
serait intéressant. Cela pourrait être géré par
l'office directement, sur demande et non pas automatiquement. Cela ne demande
pas de gros budgets, mais cela aiderait beaucoup à des gens qui, dans
des milieux défavorisés urbains, font face à des
situations particulières difficiles. Alors, ce serait sur demande,
à la proposition des services eux-mêmes. Cela respecte leur
autonomie, mais cela permettrait aussi de répondre à des
problématiques récentes et pas faciles.
Mme Gagnon-Tremblay: C'est quelque chose qui est fort possible.
Nous avons quand même une certaine somme, une enveloppe pour certains
projets spéciaux, mais aussi, dans le cadre du programme du fonds d'aide
mis à la disposition des provinces, on pourrait expérimenter ce
genre de programme et voir ce qui pourrait se donner de plus spécifique
en termes d'intervention et de prévention. C'est une suggestion
excellente.
Vous parlez aussi de la qualité du personnel stable qui est bien
formé. Vous êtes au fait que nous accordons cette subvention de 1
%. Il est sûr que tant et aussi longtemps que nous n'aurons pas atteint
la norme - vous savez qui y a un règlement entré en vigueur en
octobre dernier qui était prévu depuis cinq ans - on n'a pas
atteint la norme pour différentes raisons que j'aurai à expliquer
plus tard... Donc, c'est certain que pour les trois prochaines années,
étant donné que nous avons accordé un délai
supplémentaire, ce pourcentage sera versé surtout pour atteindre
cette norme, mais une fois que nous aurons de plus en plus de techniciens ou de
techniciennes en garderie, à ce moment-là, on pourra utiliser
davantage cette masse salariale pour du ressourcement ou du perfectionnement,
ou peut-être des cas comme ceux dont vous faites mention.
Vous disiez, par contre, dans votre mémoire - vous l'avez
cité tout à l'heure dans votre présentation - que cela
représente peut-être 3,5 % d'augmentation prévue des
garderies. Donc, c'est très peu pour ce genre de besoin dont vous faites
mention. Sauf que je dois vous dire que, lorsque vous parlez des 3,7 %, c'est
à l'intérieur du statu quo. Vous comprenez qu'avec le nouveau
programme, cela revient à plus que cela, c'est seulement si on ne change
ou ne modifie absolument rien.
Un autre point Intéressant, c'est lorsque vous parlez des enfants
handicapés: l'intégration des enfants handicapés. Vous
êtes sûrement au courant que l'Office des services de garde a fait
des efforts considérables pour intégrer des enfants
handicapés. Il y a une subvention de 14 $ qui est accordée au
service pour l'enfant handicapé et aussi une subvention qui peut aller
jusqu'à 1000 $ pour aménager les locaux avec des
équipements spécialisés. Quand vous parlez d'enfants
handicapés, iI faut s'entendre. Vous avez différents handicaps
qui peuvent être très lourds. Jusqu'où allez-vous?
Où s'arrête-t-on? Avez-vous une idée à ce
moment-là concernant les services de garde?
Mme DeGrandmont-Fortier: Nicole DeGrandmont-Fortier.
L'idée de l'intégration actuellement est une idée qui
englobe tous les types de déficients, que ce soit social, comme je l'ai
dit, mental ou physique. Je ne vois pas le COEJ commencer, à mettre une
balise quelque part, puisque le fondement de notre société, c'est
de pouvoir vérifier que tous les enfants du Québec puissent avoir
des services. On s'est toujours battu pour que, quel que soit leur handicap ou
leur difficulté, ils aient accès à des services. Cela fait
26 ans que l'on fait ça et je pense qu'on est bons pour encore 26
ans.
Mme Gagnon-Tremblay: Tout à l'heure lorsque je vous
mentionnais que l'office a fait des efforts, il y a aussi des brochures. Dans
la revue Petit à Petit, on parle régulièrement
d'enfants handicapés. C'est sûr qu'il y a une prise de conscience,
une volonté d'intégrer de plus en plus ces enfants, selon,
naturellement, le
handicap, parce qu'il faut quand même que la garderie puisse
garder d'autres enfants. Il se fait des efforts louables actuellement dans les
services pour Intégrer de plus en plus cette catégorie d'enfants.
Peut-être que l'on pourrait fake plus, cependant.
M. Boisvert: Jean-Claude Boisvert. Si vous me le permettez, je
reviendrai sur le détail que vous avez donné tantôt: 14 $
par jour de subvention pour l'intégration d'un enfant handicapé,
mate par expérience, puisque je suis moi-même père d'un
enfant handicapé, 1 est évident que 14 $ pendant cinq jours, cela
fait 70 $. Ce n'est pas cela qui va faire qu'on va engager quelqu'un à
mi-temps ou à temps plein pour un ou deux enfants. A moins que la
garderie ne soit de taille à atteindre une certaine limite, une masse
critique - je m'excuse du terme - ce n'est pas possible, ce n'est pas cela qui
va faire que, dans le fond, on aura quelqu'un de plus pour s'occuper d'un
enfant, même si cela peut aussi profiter aux autres enfants. Alors, j'ai
le sentiment que ce que nous vous proposons, c'est d'examiner avec l'office,
sans mettre de chiffres, la possibilité de donner, un peu comme dans le
milieu scolaire, du mi-temps de plus ou deux tiers de temps de plus à la
garderie pour s'occuper de cet enfant, ce qui va aussi rejaillir sur les autres
enfants puisque les apprentissages de socialisation seront dans les deux
sens.
Lorsque l'intégration scolaire est réussie - on a fait une
tournée du Québec l'an dernier là-dessus - là
où 1 y a eu des réussites, c'est parce que les parents, les
responsables, les intervenants ont réussi à accepter qu'l y avait
une part et que les autres enfants y trouvaient leur compte aussi. J'ai
l'impression que les 14 $ ne sont pas suffisants, pour un seul enfant dans une
garderie, pour atteindre le montant qui serait nécessaire pour donner le
soutien direct. Il y aurait sûrement moyen de bonifier, avec peu de sous
de plus, pour être capable d'ajouter le mi-temps que cela
nécessiterait.
Mme Gagnon-Tremblay: Croyez-vous que l'Office des personnes
handicapées a quand même une responsabilité? Quelle devrait
être, normalement, la part de l'Office des personnes handicapées
dans ce genre d'intégration? Ou est-ce que, tout simplement, nous
devrions prendre à notre charge cette responsabilité?
M. Boisvert: Si vous me permettez... Jean-Claude Boisvert je
tiens compte un peu de votre statut de ministre qui doit influencer vos
consoeurs et confrères; je pense au ministre de l'Éducation,
à la ministre de la Santé et des Services sociaux, à
l'office et aux autres ministères. Je ne peux pas faire abstraction du
fait que oui, on peut toujours se dire que dans le milieu de l'éducation
l'office va payer des intervenants pour aller en classe. Par ailleurs,
certaines commissions scolaires vont le faire.
C'est un peu mélangeant pour les parents. J'ai le sentiment
qu'indépendamment du fait que vous décidiez, avec vos
confrères, de mettre les sous à l'office ou par le biais des
services de garde, quelles que soient les ententes, un peu comme dans le
modèle scolaire, cela demande un peu plus de temps et de personnel pour
appuyer cette Intégration. Est-iI préférable que cela
vienne de l'office par le biais des écoles et des garderies? C'est
possible, pour qu'il ait un oeil sur l'aspect de l'enfant handicapé.
Est-I possible de l'inclure dans votre énoncé de politique? Je
pense que c'est une mesure qui doit être prévue, mais c'est plus
d'influencer les autres peut-être. L'office, oui, mais iI ne faudrait pas
non plus envoyer les sous de ce côté-là sans que ce soit
pour répondre véritablement aux services de garde qui font face
à la situation.
Mme DeGrandmont-Fortier: J'ajouterais à cela qu'il
faudrait peut-être faire très attention de ne pas reprendre le
pattern qui existe actuellement en milieu social et scolaire de donner l'odieux
aux parents de magasiner une place pour leur enfant en disant: Voilà,
l'Office des personnes handicapées t'aidera si tu trouves le moyen de te
faire aider. Attention à cela! N'oublions pas qu'on fait affaire avec
des parents qui n'ont pas encore eu de contacts avec le système scolaire
et qui sont déjà très démunis la plupart du temps
parce qu'ils en ont juste un ou deux et que ce sont leurs premiers. Comme on
est en mesure d'appliquer une nouvelle norme, une nouvelle politique ou qu'on
pense à des choses nouvelles, il serait peut-être temps de le
faire de façon adéquate et de façon à ne pas
surcharger encore le lobbying des parents à se chercher une garderie ou
un service à l'OPHQ pour pouvoir avoir droit à la garderie avec
tous les services que cela Implique. Je pense qu'l faut avoir cela
présent à l'esprit.
Mme Gag non-Tremblay: En somme, le message que vous nous livrez,
c'est que le gouvernement s'organise entre les différents
ministères, mais qu'on n'impose pas ou qu'on évite aux parents
ces tracasseries et que, finalement, lorsqu'on a besoin d'une place pour un
enfant handicapé, on puisse l'avoir.
Pour votre information, vous savez qu'il y a quand même 121
garderies - il est sûr que ce n'est pas énorme - qui offrent
actuellement ces services pour enfants handicapés, ce qui correspond
à environ 235 places, pour un budget total annuel, en 1986-1987, de 461
234 $. C'est un effort, mais je constate qu'il doit être encore plus
considérable. Merci.
Pour le moment, je n'ai pas d'autres questions, M. le
Président
Le Président (M. Leclerc): Mme la députée de
Maisonneuve.
Mme Harel: Merci, M. le Président. Je veux
également saluer le Conseil québécois pour
l'enfance et la Jeunesse. Je vais immédiatement commencer mes questions
parce que mes collègues souhaiteraient également échanger
des vues avec vous. Deux aspects de votre mémoire m'ont beaucoup
Intéressée, soit le service de garde utilisé comme un
instrument de prévention et de dépistage des problèmes
sociaux. Cela m'amène évidemment à poser la question: Dans
quelle mesure les services peuvent-ils jouer ce rôle, si les enfants qui
y sont admis sont ceux dont les parents ont les moyens de payer la garde? La
lecture de votre mémoire m'a amenée à revoir le programme
de consultation d'experts, que la Commission d'enquête sur les services
de santé et les services sociaux avait consultés, sur les enfants
de zéro à onze ans et de constater que les taux d'incidence les
plus élevés, dans les cas de mauvais traitement ou de
négligence, étaient notés, beaucoup plus là
où il y avait une corrélation très forte entre le
pourcentage de familles vivant en situation de pauvreté que dans les
milieux où il y avait un certain seuil d'aisance. Est-ce que c'est
là l'expérience que vous avez au conseil québécois?
Est-ce qu'on peut nettement considérer au Québec - c'est le cas
aussi aux États-Unis, je crois - qu'il y a des problèmes relatifs
au traitement des enfants plus nombreux dans les milieux où on retrouve
des situations de pauvreté?
Mme Bertrand-Poirier: Danielle Bertrand-Poirier. J'aimerais tout
d'abord citer un fait. L'enfance maltraitée ne se retrouve pas seulement
dans les milieux défavorisés; c'est un fait, il y en a. Il y en a
aussi dans les milieux plus aisés. On n'a qu'à penser à la
capacité de payer des gens. Souvent, les deux parents vont travailler et
on retrouve des enfants laissés à eux-mêmes, qui peuvent
être violentés à cause de choses que les parents vivent au
travail. De ce côté-là, je pense que ce n'est pas à
négliger. Lorsqu'on parle de parents dans les milieux
défavorisés, quand on cite que les services de garde seraient
à développer, des centres de répit et de dépannage,
ce serait extrêmement efficace pour éviter... On a fait un dossier
sur l'enfance maltraitée; de nombreuses choses sont
démontrées dans ce dossier.
r
Mme Harel: Justement, c'est cet aspect qui m'intéresse. Je
crois que le directeur général veut aussi intervenir.
M. Boisvert: Oui, je voulais juste compléter. Jean-Claude
Boisvert. Je crois qu'il faut distinguer deux choses. Les handicaps physiques
et les handicaps mentaux, ça se distribue dans la population. Sauf pour
les cas des enfants en bas âge, c'est-à-dire que, pendant la
maternité, des problèmes de nutrition peuvent conduire à
certaines déficiences; on peut dire que ça se retrouve un peu
dans tous les quartiers. Il reste que dans Hochelaga-Maisonneuve,
Saint-Henri,
Petite-Bourgogne et Pointe-Saint-Charles, à Montréal, on
va retrouver des parents qui auront plus de difficultés à obtenir
les Informations ou les services pour leur enfant. Par ailleurs, je crois que
le Conseil scolaire de l'île de Montréal a fait des études
sur le milieu scolaire en milieu défavorisé et je crois qu'il y a
des concentrations de problèmes de comportement, d'hyperactivité
et d'autres problèmes du genre qui se retrouvent dans ces milieux. Je
pense que les gens du mlieu scolaire se retrouvent avec ces jeunes alors que
les six années sont déjà passées.
Je pense que ce ne sont pas les parents qui peuvent les manifester. Je
crois avoir entendu souvent des gens qui travaillent dans les garderies dire:
J'ai vu, mais je ne suis pas outillé et je n'ai pas le temps; je n'ai
pas la formation et on n'est pas assez nombreux pour savoir quoi faire avec ces
enfants. Dans des milieux précis, pour des troubles de comportement qui
conduisent plus tard à la délinquance, à
l'hyperactivité ou à d'autres problèmes psychologiques, et
même au suicide chez les adolescents - vous savez qu'ici, au Canada, on a
le plus haut taux de suicides chez les adolescents - on a le sentiment que ce
n'est pas le principal programme du travailleur en garderie, ce n'est pas sa
préoccupation principale, mais, à l'occasion, il peut s'occuper
d'enfants qui ont ces problèmes et être un outil efficace
tôt, si on lui donne l'occasion d'acquérir la formation pour le
faire et, évidemment, s'il a le temps de le faire. (11 h 30)
Mme Harel: C'est intéressant parce que, finalement, il y a
deux ordres de problèmes. Le premier, c'est de donner des outils
nécessaires, adéquats, aux travailleuses - je dis surtout
"travailleuses" parce qu'on me dit qu'elles représentent 98 % - dans les
garderies qui ont un contact avec des enfants qui présentent ce genre de
trouble de comportement. Le deuxième ordre de problèmes, c'est de
faire en sorte que les enfants qui présentent ce type de problème
de comportement puissent avoir accès à la garderie.
Évidemment, d'une certaine façon, c'est relié aux moyens
que les parents ont de payer ou non, ce qui n'est pas le cas pour
l'école puisqu'ils s'y retrouveront de façon obligatoire et que
l'État, bien ou mal, les prendra en charge d'une certaine
façon.
Vous nous dites que les mêmes principes que pour
l'intégration scolaire devraient s'appliquer - c'est ce que je comprends
dans le mémoire que vous nous présentez - aussi pour le service
de garde. Mais il y a une différence fondamentale entre les deux: la
garde en services de garde, quel que soit le mode, est assumée
financièrement par les parents. Je pose à nouveau la question,
parce que, je sais qu'il y a des enfants qui sont négligés ou qui
connaissent de mauvais traitements dans des mlieux où il y a une
certaine aisance. Finalement, le document de la commission Rochon me permettait
de constater
que les Indicateurs strictement économiques
expliquaient à 75 % les problèmes présentés,
disait-on. Est-ce que vous envisagez ou si vous avez étudié ce
que devrait être le mode de garde, finalement? Vous avez parlé de
garde de répit, de dépannage. Est-ce que vous pouvez
préciser cette question puisque c'est absent de l'énoncé
de politique actuellement?
Mme DeGrandmont-Fortier: Nicole DeGrand-mont-Fortier. Je pense
que, pour l'instant, on n'a pas apporté un grand éclairage sur ce
point parce qu'on voulait surtout sensibiliser l'action de ce matin vers
l'intégration comme telle qui est à peu près inexistante,
enfin dans l'énoncé de politique actuel. De fait, il est
très Important qu'on soit sensibles à la chose et qu'ensemble on
devienne créatifs pour régler ce problème important. On ne
réglera peut-être pas le cas de chaque enfant, mais il va falloir
trouver des solutions efficaces, lucides et logiques pour que cela se
règle afin d'en arriver a ce que les enfants partent tous du même
pied.
Quant à savoir si on doit laisser cela aux parents
ou comment on doit arriver à mettre cela dans un budget, il est fort
Important de comprendre que, quelle que soit la carence de l'enfant... On vient
de parier de l'enfant carence émotivement et effectivement, mais celui
qui vit avec un handicap quelconque est toujours carence dans notre
société. Il faudrait peut-être arriver à faire
comprendre que la garderie est l'endroit idéal pour commencer à
devenir tolérants, à accepter ces problèmes et à
aider. C'est dans ce sens que nous abordons la question. Quant au répit
et au dépannage, je pense qu'ils devraient être un service offert
continuellement à une famille ou à un membre d'une famille, mais
de façon sporadique. Le dépannage et le répit, comme leur
nom l'indique, c'est pour aider en cas de détresse. Actuellement, ce
sont à peu près juste les associations qui se permettent entre
elles de former ce genre d'intervention. Actuellement, on n'a pas beaucoup
recours aux garderies pour ce genre de choses. Les associations de personnes
handicapées mentales vont mettre sur pied un répit, un
dépannage. Or, je pense que c'est encore beaucoup imputé au
bénévolat pour arriver à réussir cela. En fait, on
a les locaux, le personnel et on aurait probablement juste à manoeuvrer
les ressources actuelles pour pouvoir aider les parents qui ont besoin d'un
dépannage ou d'un répit.
Mme Harel: Pensez-vous qu'il faudrait envisager des ratios
différents dans la réglementation, par exemple? Avez-vous
examiné cette question? Dans votre problématique, vous nous
présentez le service de garde comme un droit de l'enfant à
l'Intégration, comme une sorte de recherche, de projet
d'égalité des enfants, finalement Mais le fait est que, dans
l'énoncé de politique, le service de garde est d'abord un droit
pour les parents qui travailent puisque l'enfant dont le parent ne travaille
pas - donc, ne travaille pas avec un revenu - est peu susceptible de
bénéficier du service de garde compte tenu des coûts
exorbitants qu'il va encourir à ce moment-là.
M. Boisvert: Jean-Claude Boisvert. Je pense que c'était
l'essentiel de la discussion des membres du conseï d'administration
lorsqu'on a préparé le mémoire. Le message principal
était de dire: Pour ce qui est de l'énoncé de politique,
les membres sont d'accord; dans le fond, I s'agit d'un élément de
la politique familiale et aussi d'un élément de soutien a
l'amélioration de la condition féminine. La réaction des
membres a aussi été de dire: Oui. mais ce sont les enfants qui
sont dans les garderies et ceux qui n'y sont pas, comme vous le dites,
pourraient peut-être aussi en bénéficier. Ce sont eux les
clients; c'est vrai que ce sont les parents qui ont à placer leur enfant
dans une garderie, mais c'est l'enfant qui est dans une garderie.
Je pense que ce que les membres du conseil d'administration
voulaient venir dire ce matin, que ce soit pour ceux qui sont en garderie,
quels que soient les problèmes d'accès pour les autres, c'est que
ce sont les enfants qui sont concernés, bien sûr les parents aussi
pour ce qui est de l'accès. Quand je regarde avec les membres du
conseil, depuis deux ans et demi, les différents problèmes qu'on
a touchés, que vous entendez et que vous traitez au gouvernement de
différentes façons, tous ces problèmes, soit parce qu'il y
a des parents qui ne sont pas adéquats ou qui sont
dépassés; il y a aussi des familles monoparentales qui ont
à joindre les deux bouts; c'est difficile d'élever des enfants
dans ces conditions. Je ne blâme personne. Je vois qu'il y a des enfants
qui vivent des situations difficiles. Tout se joue avant six ans. La garderie
pourrait être un instrument Intéressant dans les milieux
défavorisés, en particulier, et dans d'autres milieux aussi. Ce
qui est Intéressant, c'est d'aborder la question de l'ouverture des
garderies en milieu scolaire, lors des journées pédagogiques et
pendant l'été.
Alors, il est fait mention, dans l'énoncé de
politique, de possibilités de projets spéciaux. Cela nous
rejoignait beaucoup, dans le sens de l'accès, et pour l'enfant
lui-même aussi. Je crois que c'était le message que les gens
voulaient apporter.
Mme Harel: Très rapidement, une toute dernière
question avant que mes collègues n'interviennent. Concernant le
personnel, vous avez beaucoup insisté dans votre mémoire sur la
nécessité d'un meilleur traitement du personnel. Vous soulevez le
fait que, dans l'énoncé de politique, on prévoit une
amélioration de 3,7 %. Je n'ai pas bien saisi la réponse de la
ministre; elle aura sûrement l'occasion au cours du mois de la clarifier.
Cela me fait penser à un autre mémoire qu'on recevra aujourd'hui.
Un profes-
seur, Mme Presser, disait et je la cite: "Hélas, la
réalité actuelle nous montre un panorama sombre dans lequel le
'burnout" le taux d'abandon en début de carrière et le
découragement font partie intégrante des scénarios des
services de garde*
II serait peut-être intéressant que nous vous entendions
sur le type de conditions qui doivent être offertes à un personnel
pour faire en sorte qu'il y ait le maintien d'une bonne relation avec
l'enfant.
M. Boisvert: Jean-Claude Boisvert. Je dois vous dire que les
membres du conseil d'administration ont plutôt pensé que les
groupes qui représentent les travailleuses et les travailleurs de
garderie viendraient eux-mêmes défendre leurs points de vue.
Cependant, ce qui nous rejoignait tous, c'était de dire que la
stabilité du personnel pour les enfants, c'est important; que la
stabilité et le plaisir de travailler dans un cadre dans lequel on
reconnaît notre apport, c'est Important. Dans ce cas-là,
évidemment, ça touche la question salariale, les conditions de
travail auxquelles les parents sont confrontés, bien sûr, avec les
moyens.
Ce que le conseil d'administration a soulevé, c'est le tableau
à la page 69. On l'avait interprété de la façon
suivante, bien sûr en constatant qu'il y a des places
supplémentaires qui vont être créées par
l'énoncé de politique. C'est très bien. Ce que montre le
tableau, c'est la différence entre la formule de financement actuelle et
la nouvelle formule. Les 8300 $ de surplus que la nouvelle politique va donner
sur le budget total de la situation actuelle, c'est ce qui donne 3,7 %. Notre
réflexion nous faisait dire: Oui, bien sûr, on va créer
d'abord de nouvelles places, c'est nécessaire. La politique actuelle
bonifie légèrement pour les garderies actuelles, mais on doutait
que ça puisse améliorer tant que cela la situation et la
stabilité du personnel au travail, des travailleuses en particulier.
Le Président (M. Bélanger): Oui, madame.
Mme DeGrandmont-Fortier: Pour compléter, si vous voulez,
la question du "burnout" que vous avez soulevée, au CQEJ, nous avons des
études qui ont été faites sur ce sujet. L'une des raisons
du 'burnout", c'est la mauvaise préparation ou le manque d'aérage
ou de recyclage d'un individu. Nous pensons que si les travailleuses et les
travailleurs qui sont dans ce milieu sont adéquatement
préparés, s'ils peuvent bénéficier de
périodes de perfectionnement ou de recyclage, ce qui n'est pas le cas -
on le constate lors de nos congrès, ce n'est pas ce personnel qui vient
à nos congrès - à ce moment-là, 1s ne peuvent pas
bénéficier de rencontres avec des gens de leur milieu ou de
milieux connexes. Ils ne peuvent pas bénéficier non plus de
l'annonce de nouvelles stratégies dans l'éducation, etc. À
ce moment-là, ça devient un cercle vicieux ou un mode de vie
très restrictif où chacun essaie de se stimuler tant bien que
mal. Et si c'est plus mal que bien, eh bien, mon Dieu, ça crée le
"burnout". Or, c'est dans ce sens-là que nous pensons que le milieu doit
être sain, stable et efficace. Autrement, ce sont les enfants qui vont en
supporter le poids.
Le Président (M. Leclerc): Mme la députée de
Marie-victorin, en vous rappelant qu'il reste un peu moins de cinq minutes
à votre formation.
Mme Vermette: Je suis heureuse de constater que vous vous
êtes penchés sur la question de toutes les personnes
handicapées et des enfants handicapés. Je trouve qu'actuellement,
au Québec, on est en train de constater un net recul quant à
l'intégration de la personne handicapée. Et je pense que, si on
démontre déjà une volonté quant à
l'intégration, il faudrait bien commencer par le début,
c'est-à-dire dans les premières années de vie de la
personne. C'est la seule façon d'arriver à changer des habitudes
et des attitudes vis-à-vis de la personne handicapée; son
intégration se ferait d'une façon beaucoup plus harmonieuse,
à mon avis, et les préjugés tomberaient. C'est pourquoi je
dis qu'il est important, actuellement, que dans les garderies on fasse un
effort substantiel pour favoriser leur intégration, et non pas comme on
a fait à l'intérieur des commissions scolaires où,
finalement, l'accès aux édifices est très difficile,
où l'intégration dans les classes est très difficile parce
que le personnel n'est pas préparé. Et c'est ce qu'on a
constaté régulièrement. Généralement, le
personnel, les enseignants ont toujours très peur. C'est un fardeau,
c'est une tâche additionnelle parce qu'on ne respecte pas les ratios.
Je pense que ce qui est important, ce que vous venez de souligner - et
je reprends votre mémoire - c'est que la qualité de vie à
offrir à ces enfants a ses exigences. Je pense que c'est un petit peu
dans ce sens-là que vous avez fait valoir vos points de vue, si j'ai
bien compris.
Vous avez dit aussi qu'il y a déjà de l'expertise qui
existe actuellement, ne serait-ce, d'une part, chez les enseignants dans les
écoles et, d'autre part, dans les services sociaux. Comment verriez-vous
cette collaboration-là? Qui pourrait être le maître d'oeuvre
de cette collaboration ou de cet échange d'expertise qui pourrait
favoriser justement cette qualité à offrir à nos enfants
en milieu de garderie?
Le Président (M. Leclerc): M. Jean-Claude Boisvert.
M. Boisvert: Je crois que ce que les membres du consel voulaient
vous dire sur cette question d'expertise rejoint, en particulier,
l'élément d'information qui a été apporté
tantôt en pariant des 121 garderies qui offrent des services pour les
enfants. La tournée qu'on a faite l'an passé nous a montré
qu'l y avait en
milieu scolaire des études, qu'il y avait des
instruments de développés, mais que les gens les connaissaient
plus ou moins. Il y aurait donc déjà dans le milieu scolaire, au
niveau primaire, des éléments qui pourraient servir, si on
était capable de les résumer et de les rendre accessibles aux
gens des garderies. D'autre part, peut-être qu'un bian de ce qui se fait
comme intégration dans les garderies qui offrent ce service serait
intéressant. Une étude ponctuelle pourrait permettre, au bout
d'un an à 18 mois, de fournir de l'instrumentation type à des
garderies qui voudraient offrir de tels services.
Quant à la collaboration avec les autres milieux,
c'est évident que les CLSC sont les premiers à qui on peut
penser. Qu'est-ce que les CLSC peuvent offrir à une garderie en termes
d'appui? Ils le font déjà par le biais du personnel en
santé maternelle et infantile ou à d'autres niveaux: programmes
de santé, dépistage, etc. On sait aussi que les ressources des
CLSC sont limitées, mais ils peuvent fournir une certaine aide. Mais on
a l'intuition que le milieu de l'éducation, au niveau primaire, dans
certaines commissions scolaires, a déjà développé
des 'kits*, des façons. On a rencontré des gens qui nous ont dit
qu'une Intégration avec succès provient du fait que le directeur
d'école était persuadé que ça devait marcher, que
les parents des autres enfants avaient été prévenus
à l'avance et que l'enseignant ou l'enseignante avait accepté
volontairement, etc. Pourquoi ne pas former des équipes ou une
équipe volante pour essayer d'en faire la démonstration dans les
garderies? Comment pourrait-on tirer cette conclusion du milieu scolaire et
faire un transfert, entre guillemets, aux services de garde? Avec les 121
essais qui se font, je ne sais trop comment l'imaginer, mais je crois qu'l y a
des leçons à tirer de ce qui s'est déjà fait.
Le Président (M. Leclerc): M. Boisvert,
compte tenu que le temps de l'Opposition est écoulé, je vais
demander à la députée de Maison-neuve de conclure.
Mme Harel: Je veux simplement vous remercier et vous
signaler que nous avions encore de très nombreuses questions à
vous poser. Je sais que ma collègue, la députée de
Chicoutimi, qui a été longtemps porte-parole en matière
d'éducation, aurait souhaité poursuivre cet échange de
vues avec vous. Je crois que c'est important de nous rappeler, comme vous
l'avez fait au début de nos travaux, que nous avons surtout à
penser en fonction du bien-être de la petite enfance au Québec. Il
m'apparaît, à ce stade-ci, que l'énoncé de politique
vise tout à fait autre chose et que nous ne sommes pas devant une
politique de la petite enfance, bien au contraire. M est certainement
légitime et souhaitable que nous ayons des services adéquats
pour, comme vous le dites, remplacer l'un ou l'autre des parents ou les deux,
mais I faut aussi des services lorsque les parents décident qui serait
plus stimulant pour l'enfant. Indépendamment de leur propre choix de vie
ou de profession, de se retrouver à la garderie, et c'est ce qu'on n'a
pas encore. Je vous remercie.
Le Président (M. Leclerc): Mme la ministre, en
conclusion.
Mme Gagnon-Tremblay: On nous reproche, dans notre
énoncé de politique, de parler souvent des parents sur le
marché du travail. Je pense, entre autres, compte tenu des services
limités qui existent actuellement, que, lorsqu'on parle d'enfants
handicapés, c'est sûr qu'on parle d'enfants handicapés dont
les parents sont, en premier lieu, sur le marché du traval. Cela
n'exclut pas, par contre, tout autre enfant qui pourrait nous être
référé et je pense qu'on doit avoir une ouverture en ce
qui concerne les enfants qui pourraient nous être
référés, soit des enfants handicapés ou des enfants
à problème. À ce chapitre, il y a une volonté du
gouvernement de prendre ces enfants en charge.
On parle de dépannage pour les autres enfants, ces
enfants dont les parents ne sont pas sur le marché du travail; on parle
de dépannage, de besoins spécifiques. Nous en sommes fort
conscients. Par contre, nous n'avons pas trouvé de solution magique. On
se rend compte que très peu de personnes veulent garder ces enfants, non
seulement ceux à problèmes ou ceux qui ont des troubles
quelconques, mais tout simplement les enfants à la garde de fin de
semaine ou à la garde du soir. Nous avons quand même des
difficultés actuellement et c'est pourquoi nous avons prévu
certaines sommes d'argent avec la caisse d'aide, dans le but d'explorer ou
d'expérimenter certains services. On espère que les Intervenants
de la commission parlementaire pourront nous éclairer à ce sujet
parce qu'on ne possède pas de véritable solution.
Je voudrais aussi, par contre, rendre à César
ce qui lui appartient. Vous savez que l'Office des services de garde à
l'enfance a déjà une politique pour les enfants
handicapés. Je voyais ici justement qu'on disait que la réussite
de l'intégration sociale devient alors la responsabilité de
toutes les intervenantes et de tous les Intervenants concernés. La
principale condition, cependant, demeure l'évolution des idées et
des attitudes envers les personnes handicapées. Je pense que c'est un
message qu'on devrait véhiculer de plus en plus, mais qui l'est
déjà par l'Office des services de garde à l'enfance.
Je vous remercie pour votre exposé.
Le Président (M. Leclerc): Merci, Mme la ministre. Mme
Bertrand-Poirier, Mme DeGrandmont-Fortier et M. Boisvert, Je voudrais vous
remercier, au nom de la commission, de vous être déplacés
pour vous faire entendre.
Je voudrais que l'on suspende une minute, le temps de
permettre aux représentantes du
Conseil du statut de la femme de s'installer à la
table.
(Suspension de la séance à 11 h 49)
(Reprise à 11 h 50)
Le Président (M. Leclerc): À l'ordre, si vous
plaît!
Je souhaite ta bienvenue au Conseil du statut de la femme
et je demanderais à Mme Lavigne, la présidente, de nous
présenter les gens qui l'accompagnent aux fins du Journal des
débats.
Conseil du statut de la femme
Mme Lavigne (Marie): M'accompagnent aujourd'hui Mme Micheline
Boivin, directrice de la recherche au Conseil du statut de la femme, Mme
Chantale Brouillet, agente de recherche au conseil, Mme Francine Lepage, agente
de recherche au conseil, et Mme Jocelyne Olivier, secrétaire
générale du conseil.
Le Président (M. Leclerc): Mme Lavigne, vous savez comment
nous procédons. Vous avez 20 minutes pour faire part aux membres de la
commission du contenu de votre mémoire et, ensuite, chaque formation
politique aura 20 minutes pour vous interroger. La parole est à
vous.
Mme Lavigne: Je vous remercie. Mme la ministre, mesdames et
messieurs, membres de la commission parlementaire, et Mme la présidente
de l'Office des services de garde à l'enfance, près d'un
siècle après l'implantation des premières garderies
réservées aux familles les plus démunies, le gouvernement
du Québec présente l'énoncé de politique sur les
services de garde à l'enfance comme étant le volet majeur de sa
politique familiale et faisant partie intégrante de ses orientations en
matière de condition féminine. Cent ans après la mise sur
pied des premières garderies, la nécessité de services de
garde n'est évidemment plus à démontrer. Au Québec,
la majorité des femmes, notamment des mères de jeunes enfants,
font partie de la population active. Ainsi, l'énoncé de politique
s'avère-t-il l'instrument privilégié pour faire le bilan
de la situation et proposer des pistes d'action.
L'énoncé de politique présente
plusieurs mesures intéressantes. Ainsi, la planification
régionale quant au développement des services de garde constitue
un élément prometteur pour assurer une réponse
adaptée aux besoins des parents. L'intégration des jardins
d'enfants et des haltes-garderies au réseau des services reconnus, de
môme que l'expérimentation de projets spéciaux, permettront
de diversifier davantage les services offerts aux parents ainsi qu'aux enfants.
Mentionnons également l'octroi de plus de 500 000 000 $ au cours des
trois prochaines années, qui témoigne de la volonté du
gouvernement de poursuivre le développement et la consolidation des
services de garde. L'aide financière à la formation, au
perfectionnement, au ressourcement du personnel de garde constitue une
reconnaissance de principe fort Intéressante.
Enfin, plusieurs mesures concernent le soutien aux parents
et aux services de garde. Soulignons, notamment, l'élaboration et la
diffusion d'instruments visant à soutenir la gestion et permettant
d'évaluer la qualité des services; l'intensification de la
collaboration avec le réseau de ta santé et des services sociaux
en vue d'accroître la promotion de la santé et la
prévention dans les services de garde; la mise sur pied de cours de
formation dans les domaines de la petite enfance et de la gestion; la
production de documents d'information à l'intention des parents ou des
divers services de garde. L'ensemble de ces mesures nous apparaît fort
pertinent pour assurer des services de garde de qualité.
Les membres du Conseil du statut de la femme ont
analysé l'énoncé de politique dans le mémoire que
vous avez en main et transmettent à la commission parlementaire des
recommandations afin d'améliorer la politique des services de garde.
Sans reprendre chacune de ces recommandations qui sont contenues dans notre
mémoire, je vais vous faire part de certaines d'entre elles.
En premier lieu, la planification régionale. La
planification régionale, en concertation avec les partenaires, constitue
un élément novateur de cette politique. Non seulement
permettra-t-elle de connaître de façon plus précise les
besoins des parents et les priorités de la communauté dans un
territoire donné, mais elle permettra aussi, selon la politique, de
corriger progressivement les disparités régionales en termes de
services. En préconisant une planification régionale pour
l'identification du développement des services, l'office de garde
s'inscrit d'emblée dans le large mouvement de concertation avec les
partenaires qui caractérise désormais la gestion
gouvernementale.
L'énoncé de politique est cependant peu
explicite sur les modalités de cette planification régionale.
S'iI est important que les municipalités soient impliquées dans
le processus, I nous semble aussi fondamental que des partenaires, tels les
regroupements et associations de services de garde, les parents, les
commissions scolaires, les entreprises privées, y soient
associés. Nous pensons aussi que les CRSSS - les consols
régionaux des services sociaux et de santé - qui ont
assumé plusieurs mandats de planification, pourraient assumer la
coordination des études de besoins dans leurs régions
respectives.
Par ailleurs, on est étonné de voir que, dans
l'énoncé de politique, les services en milieu scolaire ne
semblent pas soumis à la planification régionale. Or, près
de la moitié des 60 830 places
prévues au plan quinquennal sont pour la garde scolaire. Nous
croyons qu'une véritable planification régionale devrait
intégrer l'ensemble des services. Donc, afin de rendre effective la
planification, d'assurer un développement harmonieux des divers services
les uns par rapport aux autres, d'éviter la concurrence Inutile entre
les services, de favoriser la concertation entre les instances
concernées et une réponse adéquate aux besoins des
parents, le conseil recommande que toutes les catégories de services de
garde soient soumises à la planification régionale. De plus, le
conseil recommande que la répartition des nouvelles places entre les
différents modes de services de garde tienne compte des priorités
définies dans les communautés.
En second lieu, la question des garderies à but lucratif est fort
préoccupante. Le bilan dressé dans l'énoncé de
politique montre que, depuis quelques années, le nombre de places en
garderie à but lucratif s'est accru à un point tel
qu'actuellement un enfant sur quatre est gardé dans un service à
but lucratif non géré par les parents. Ces garderies forment
maintenant près de 29 % du réseau québécois. Leur
taux de croissance était de 20 %, comparativement à 4,4 % pour
les garderies sans but lucratif. Ceci s'explique. Comme l'a souligné ce
matin la ministre, l'office de garde ne dispose pas des moyens légaux
pour soumettre le développement de ces garderies aux mêmes
critères que ceux exigés pour les garderies sans but
lucratif.
Selon nous, un tel développement menace un principe de base de la
politique québécoise des garderies, c'est-à-dire celui de
la gestion par les parents. Il est donc important que l'office possède
ces moyens légaux. À cet égard, il sera aussi important
que l'office élabore un cadre global de planification régionale
dont les paramètres permettront l'articulation des besoins des parents
au principe et à la philosophie de base du réseau
québécois des garderies.
Par conséquent, nous recommandons qu'un moratoire soit
imposé quant au développement des garderies à but lucratif
et ce, tant que l'office ne dispose pas des moyens légaux pour soumettre
ces garderies aux impératifs de la planification régionale; en
second lieu, que, lors d'une levée éventuelle de ce moratoire, un
contingentement soit établi afin de limiter le développement des
garderies à but lucratif et d'accorder ainsi une nette
préférence au développement de garderies
gérées par les parents, tel que préconisé dans
l'énoncé de politique.
En troisième lieu, la qualité des services. Plusieurs
facteurs contribuent à assurer la qualité des services de garde.
Au terme du plan quinquennal, iI devrait y avoir 180 000 enfants
fréquentant ces services. Il est donc essentiel d'assurer à ces
Jeunes enfants qui fréquentent des services de garde pour des
périodes pouvant s'étaler Jusqu'à 50 heures par semaine un
environnement favorable à leur développement et à leur
épanouissement. Actuellement, seuls les services de garde en garderie
sont soumis à un règlement, lequel complète les
obligations inscrites dans la loi. Aussi, l'office devrait-il utiliser son
pouvoir de réglementation face aux autres catégories de garde,
c'est-à-dire la garde en milieu famlial, en milieu scolaire, en jardin
d'enfants et en halte-garderie, afin de compléter les normes
édictées. Un règlement adapté à chacune de
ces catégories assurerait un minimum de qualité. Ainsi,
outillés d'une réglementation, les parents seraient mieux
équipés pour contrôler, de concert avec l'office, la
qualité des services offerts aux enfants.
Par ailleurs, l'établissement de normes minimales relatives
à la formation du personnel, au ratio, à l'hygiène, ne
garantit pas nécessairement que tous les services les respecteront.
C'est pourquoi nous soulignons la nécessité d'un contrôle
adéquat et ce, particulièrement pour les services non
gérés par les parents.
Nous demandons que l'office utilise son pouvoir de réglementer et
qu'ensuite le contrôle des services de garde, lorsque les autres modes
seront réglementés, soit amélioré.
Nous recommandons aussi que la possibilité de partager la
responsabilité de l'inspection avec les municipalités soit
étudiée et qu'enfin une attention spéciale soit
accordée au contrôle des garderies non gérées par
les parents.
La question du ratio éducateur-enfants est un critère
important de qualité. Ces critères sont déterminants,
notamment pour les enfants de trois ans et moins, en raison de l'attention et
des soins qu'ils requièrent. Au Québec, le règlement
prévoit, pour les enfants de moins de 17 mois, un ratio d'un adulte pour
cinq enfants. On constate, selon le Centre national d'information sur les
services de garde de Jour, que ces ratios classent le Québec au dernier
rang, comparativement aux autres provinces. Pour les enfants âgés
de 18 à 35 mois, iI est d'un adulte pour huit enfants. Dans les autres
provinces, ce ratio est aussi différent et on se situe dans un ratio
passablement bas. Nous recommandons d'abaisser le nombre d'enfants par ratio,
à l'instar des autres provinces.
Pour les poupons, c'est-à-dire les enfants âgés de
17 mois et moins, nous suggérons un ratio de trois adultes pour dix
poupons, ce qui est identique au ratio de l'Ontario. Nous suggérons
également que l'office examine la possibilité de fixer un nombre
limite de places-poupons au permis de la garderie afin d'éviter les abus
potentiels, compte tenu qu'il y a une subvention aux poupons.
Enfin, pour les enfants âgés de 18 à 30 mois, un
ratio de cinq enfants pour un adulte correspondrai au ratio moyen en vigueur
dans les autres provinces. Le ratio de 1 pour 20 en garde scolaire nous
apparaît trop élevé pour les enfants de 4 et 5 ans. Un
ratio de 1 pour 15 nous semblerait plus approprié et serait
cohérent avec ce qui existe déjà en garderie pour les
enfants qui fréquentent la maternelle. Enfin, des
ratios devraient être également établis pour les
services de garde en Jardins d'enfants.
Les conditions de travail. Le rôle des personnes responsables des
soins et de l'éducation des Jeunes enfants qui fréquentent un
service de garde est primordial, tant par rapport au développement de
chacun de ces enfants que par rapport au devenir de notre
société. La reconnaissance de l'importance de ce rôle
devrait se traduire par une amélioration des conditions de travail du
personnel de garde. Le personnel de garde, détenteur d'un diplôme
en techniques d'éducation en service de garde, a un salaire hebdomadaire
inférieur à celui attribué dans la plupart des formations
académiques de niveau collégial. Nous reconnaissons et ce,
à l'instar de ce qui est écrit dans l'énoncé de
politique, et Je cite, que "cette rémunération relativement peu
élevée crée une situation qui risque d'affecter le climat
général des garderies et la qualité des services. Elle
n'est pas non plus sans avoir des répercussions sur la stabilité
du personnel.*
Au-delà de ces problèmes engendrés par les bas
salaires, tel que mentionné dans l'énoncé de politique,
nous assistons à la création d'un ghetto d'emplois, d'ailleurs
très majoritairement féminins, et mal
rémunérés, alors que, comme société, nous
visons à l'équité salariale. Est-iI normal que le salaire
hebdomadaire des diplômés en techniques de garde soit de 253 $ par
semaine, alors que la moyenne est de 323 $ pour l'ensemble du secteur
professionnel? Cette situation nécessite un redressement significatif.
Or, le financement proposé dans l'énoncé de politique nous
semble insuffisant pour améliorer les conditions salariales et les
avantages sociaux du personnel oeuvrant en milieu de garde et pour poursuivre
l'atteinte de l'équité salariale.
Dans notre mémoire, nous avons examiné cette question
à partir du cas fictif présenté à la page 69 de
l'énoncé de politique. Il appert donc que, si une garderie
consacrait le surplus de financement qu'elle reçoit exclusivement
à l'accroissement des salaires, elle disposerait d'environ 900 $ par
année pour majorer le salaire de ses employés. C'est fort peu,
compte tenu du rattrapage à effectuer sur le plan salarial. Comme
conseil, nous ne disposons pas des données permettant d'identifier les
sommes 'actuellement requises, mais iI nous semble que la proposition actuelle
ne permettra pas de rétablir la situation salariale des employés
en garderie. Ainsi, dans une perspective d'équité salariale, nous
recommandons que le gouvernement s'assure que les garderies sans but lucratif
soient dotées de moyens financiers suffisants pour leur permettre
d'améliorer les conditions salariales et les avantages sociaux de leur
personnel.
En ce qui concerne la structure de financement des garderies sans but
lucratif, le nouveau mode de subvention proposé présente certains
intérêts. Notons en premier lieu que la mise sur pied des
garderies sans but lucratif sera facïitée par l'obtention d'une
subvention égale à 75 % de leur coût d'implantation. Si
l'on compare cette situation à la situation actuelle, cela nous semble
une amélioration. Quant à la subvention de fonctionnement des
garderies gérées par les parents, on sait que la nouvelle formule
est basée sur les tarifs perçus par la garderie. Cette formule
comporte un certain dynamisme, notamment parce qu'elle incite à la
maximisation des taux d'occupation, à une meilleure utilisation des
services et qu'elle permet aussi de suivre les tarifs.
Cependant, à certains égards, la formule de subvention au
fonctionnement comporte une certaine rigidité. Ainsi, elle nous
apparaît manquer de souplesse pour les garderies qui présentent un
faible taux d'occupation en raison d'une ouverture récente. Comme toute
entreprise, les garderies doivent pouvoir disposer des ressources leur
permettant de fonctionner pendant un certain temps avant d'avoir fait le plein
de leur clientèle. De plus, le mode de financement prévu ne tient
pas spécifiquement compte des baisses de fréquentation
causées par la maladie chez les enfants ou par les vacances des parents
ou encore par des baisses de clientèle qui résulteraient d'une
mauvaise conjoncture économique à la suite de grèves, de
fermetures d'entreprises ou d'une hausse du chômage. Par ailleurs, avec
l'incitation qui est faite aux garderies de combler au maximum leurs places,
n'y a-t-il pas risque que les services de garde prennent d'abord en
considération la clientèle inscrite à temps plein et
relèguent au second rang les inscriptions à temps partiel? Or,
nous savons que 23 % des femmes en emploi au Québec travaillent à
temps partiel. Il Importe donc que le mécanisme de financement n'incite
pas à une discrimination à leur endroit.
La nouvelle formule de subvention fondée essentiellement sur les
revenus perçus de la garderie, donc sur les Jours de
fréquentation, laisse aux garderies une mince marge de manoeuvre. Pour
tenir compte de ces éventualités, les garderies pourraient se
voir obligées de hausser leurs tarifs. Donc, sur la question du
financement, le conseil recommande que, durant les deux premières
années d'opération, les garderies sans but lucratif, qui ont un
taux d'occupation faible, puissent bénéficier d'un soutien
spécial, qu'il y ait des mécanismes d'ajustement visant à
faire face aux diminutions de la fréquentation et que des
modalités soient prévues pour le temps partiel.
Enfin, dans la perspective de ces recommandations, ne pourrait-on pas
étudier les mérites d'une formule de subvention mixte qui,
plutôt que d'être basée essentiellement sur les revenus de
tarif, comme proposé, intégrerait un montant de base
Indexé annuellement? Donc, le conseil recommande que, pour les garderies
sans but lucratif, on étudie la pertinence d'une formule mixte de
subvention au fonctionnement qui serait d'abord composée d'un montant de
base indexé annuellement et, ensuite, d'un
montant variant en fonction des revenus
réalisés.
En ce qui concerne les subventions aux parents, diverses
mesures s'adressent à ces derniers. Nous discuterons ici de deux mesures
particulières, soit le programme d'exonération financière
et la déduction fiscale pour frais de garde. Le programme
d'exonération financière s'adresse aux parents ayant des revenus
en dessous de la moyenne quand leurs enfants fréquentent un mode de
garde régi par l'office. Cette aide se traduit pour les parents par une
réduction de tarif. Bien que l'aide annoncée dans la politique
soit plus généreuse, la nouvelle formule d'exonération
financière nous montre que l'aide octroyée aux parents est quand
même limitée pour les familles se situant au seuil des faibles
revenus. Ainsi, une famille biparentale, dont le revenu se situe au seul de la
pauvreté et qui a deux enfants fréquentant la garderie au tarif
de 16 $ par jour, a encore un solde à payer de 77,40 $, et ce,
malgré l'exonération financière reçue. Ces
coûts sont prohibitifs. L'exonération financière
proposée n'atteint alors que 52 % du tarif pour cette famille
biparentale.
Afin que les services de garde soient financièrement
accessibles aux parents, qu'ils soient ou non en emploi, ainsi qu'à tous
les enfants, nous recommandons que l'échelle quotidienne
d'exonération à la garde soit relevée de façon
à couvrir, au départ, une plus grande portion du tarif dans les
modes de garde régis et que le montant de base prévu à la
formule soit indexé annuellement.
Par ailleurs, pour les familles à revenu moyen, les
déductions fiscales offrent un remboursement partiel des frais de garde
encourus. D'ailleurs, à cet égard, iI y a eu récemment une
augmentation des déductions. Mais, prise isolément, la
déduction des frais de garde apporte au parent contribuable qui en fait
la demande un avantage qui croît avec le revenu, tant que s'accroissent
les taux marginaux d'imposition. Ce résultat s'explique par le fait
qu'au moment de la réforme fiscale les gouvernements
québécois et fédéral n'ont pas converti la
déduction de frais de garde en un crédit d'impôt
représentant la même valeur pour tous pour une même
dépense, comme 1s l'ont fait dans le cas d'autres exemptions ou
déductions.
Dans le but de corriger le caractère
inéquitable de la déduction fiscale des frais de garde
accordée aux parents en emploi et aux études et pour que cette
disposition puisse dorénavant profiter à tous ceux qui, parmi
eux, ne touchent pas suffisamment de revenus pour être imposables, nous
recommandons que le gouvernement du Québec convertisse ces
déductions fiscales de frais de garde en un crédit d'impôt
remboursable à la garde, ce crédit représentant un
pourcentage de la dépense encourue jusqu'à un maximum admissible,
et que des représentations soient faites auprès du gouvernement
fédérai afin qu'ï fasse de même avec sa
déduction de frais de garde.
En conclusion, l'universalité des services de garde,
leur accessibiité géographique et financière, la
diversité des services offerts, la liberté de choix des parents,
leur participation à la gestion, la qualité des services de garde
et l'amélioration des conditions de traval sont les principes qui nous
ont guidées dans l'analyse de cet énoncé de politique.
Nous sommes conscientes que l'application intégrale de ces principes
constitue un projet à long terme pour la société
québécoise.
Le réseau des services de garde s'est
développé grâce au dynamisme, à l'implication et aux
efforts de nombreux parents, travailleuses et travailleurs, et organismes de la
communauté. Malgré les efforts consentis par ces derniers,
combinés aux efforts du gouvernement, Il reste encore beaucoup à
faire pour doter le Québec d'un réseau complet de services de
garde de qualité.
Des choix s'imposent dans le contexte où la
politique sur les services de garde constitue un des volets majeurs de la
politique familiale du gouvernement et qu'elle fait partie intégrante de
ses orientations en matière de condition féminine. Nous
souhaiterions voir le gouvernement investir davantage dans les services de
garde et ce, en vue d'établir un meilleur équilibre entre la
contribution des parents et celle de l'État. Je vous remercie.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie, Mme
la présidente. Mme la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Merci, Mme la présidente, pour votre
énoncé. J'aimerais commencer, parce que vous avez quand
même soulevé plusieurs interrogations, par la planification
régionale. Vous vous posez des questions sur la planification
régionale, sur ce qui est inclus. En somme, vous regrettez de constater
que le milieu scolaire ne fait pas partie, par exemple, de la planification
régionale. Je pense que je dois vous dire que ce n'est pas parce qu'on
veut l'exclure, mais on sait que les besoins sont tellement nombreux que,
même une fois que cette planification régionale sera
terminée, il y aura encore des besoins. Donc, dans ce cas-ci, nous
croyons qu'au cours des prochaines années nous pourrons quand même
planifier le développement en milieu scolaire, mais ça ne veut
pas dire, lorsque nous irons en région consulter les différents
intervenants, que les commissions scolaires, le milieu scolaire et les
regroupements seront mis de côté pour autant. Je pense que nous
devons absolument travailler avec ces intervenants, parce qu'il n'y a pas
seulement la question du milieu scolaire, mais il y a tout ce qui y est
connexe. Je pense à la garde estivale, etc. Alors, nous travaillerons
aussi pour trouver des solutions au milieu scolaire.
Quant à la planification régionale, je dois
vous dire qu'on a entrepris des efforts depuis le printemps 1988, depuis le
printemps dernier, afin
de prévoir les étapes de transition entre la
procédure actuelle et une planification régionale
systématique. Les éléments de cette dernière ne
sont pas encore tous définis; je pense qu'il s'agira de clarifier au fur
et à mesure de la mise en place. Par contre, je peux vous donner une
brève description des actions qui sont déjà
réalisées. On a déjà mis à jour le document
analysant l'évolution des services de garde. On a constitué un
Inventaire Informatisé des projets actuellement en attente, selon le
stade où ils sont rendus. Il y a un bilan de la formule de
l'émergence de la demande qui a été préparé
et la détermination des régions à considérer dans
une perspective de planification régionale. Je pense, par exemple, aux
MRC à l'intérieur de Montréal et de Québec et aux
territoires des CLSC pour ces deux communautés urbaines. Il y a encore
beaucoup de travail à faire, mais compte tenu justement de la commission
parlementaire, à la lumière des travaux de la commission
parlementaire, on sera plus en mesure de pouvoir poursuivre les
éléments de cette planification, selon ce que le gouvernement
retiendra comme orientation définitive. Alors, lors de la commission
parlementaire, si des propositions nous sont faites, nous les prendrons en
considération.
Vous avez parlé également des garderies à but
lucratif. Vous parlez d'un moratoire. Si j'ai bien compris, vous
suggérez que ce moratoire soit imposé tant et aussi longtemps que
la Loi sur les services de garde à l'enfance ne sera pas
modifiée. Vous souhaitez aussi que ces garderies à but lucratif
soient soumises au même développement et à la même
purification régionale. Je dois vous dire que c'est déjà
prévu. Jusqu'à maintenant, il est vrai que les garderies à
but lucratif se sont développées à un rythme
supérieur à celui des garderies sans but lucratif, compte tenu du
nombre et compte tenu aussi du fait que nous n'avions aucun moyen de les
contingenter. Par contre, dans le cadre de la nouvelle politique, il est bien
de l'intention du gouvernement de soumettre les garderies à but lucratif
au même plan de développement parce que, alors qu'on fait une
planification, ce serait quand même une aberration de continuer de ne pas
intégrer toutes les sortes de garderies ou les formes de services dans
cette planification. L'un ne peut pas aller sans l'autre. (12 h 15)
Vous parlez de la qualité des normes concernant les
haltes-garderies et les jardins d'enfants. Est-ce que vous vous êtes
penchées sur la question, à savoir jusqu'où on pourrait
aller quant à la normalisation de règles quelconques dans les
haltes-garderies et dans les jardins d'enfants? Est-ce que c'est plus important
de "normer" dans les jardins d'enfants que dans les haltes, compte tenu des
nombreuses demandes qui nous sont faites par les municipalités, les
nombreuses mises en demeure, devrais-je dire, par les municipalités ou
les municipalités régio- nales de comté à l'effet
de ne pas trop "normer*, de ne pas avoir une réglementation qui
freinerait, par exemple, les haltes-garderies alors qu'actuellement - je parle
de haltes-garderies parce que c'est un peu du dépannage, ce n'est pas
une garde d'enfants à longue échéance ou de toute une
journée - on nous met finalement un peu en demeure de ne pas "normer",
autant que possible, ce genre de garderies. Quelle est votre opinion sur
ça?
Vous pourriez peut-être aussi parler des jardins d'enfants, parce
que le jardin, c'est plus spécifique. Là, il s'agit vraiment
d'une garde qui se fait à plus long terme que dans une halte-garderie
qu'on peut retrouver, par exemple, dans des centres commerciaux, qu'on peut
retrouver un peu partout. J'aimerais avoir votre opinion sur les normes qu'on
pourrait exiger dans les haltes et les jardins.
Mme Brouillet (Chantale): Chantale Brouillet. Effectivement, en
ce qui concerne les haltes et les jardins, ça répond à
deux types de besoins et de clientèles différents. Je crois que
les normes pourraient être différentes aussi. En ce qui concerne
les haltes, je crois qu'il est essentiel d'imposer des normes pour assurer la
santé et la sécurité des enfants. Je donne comme exemple
les fiches d'assiduité. C'est très important de s'assurer qu'on
sache qui sont dans les haltes-garderies, quel est le type de
fréquentation. Quant à la sécurité, c'est la
même chose.
D'ailleurs, par rapport aux jardins d'enfants, je crois que les normes
peuvent être différentes. En halte-garderie, il n'est pas
nécessaire d'exiger le même type de formation puisqu'on sait que
ça répond réellement à des besoins de courte
durée, de façon très ponctuelle ou occasionnelle, si on
s'en tient aux définitions inscrites dans la loi, alors qu'en jardin
d'enfants ça répond à des besoins différents. Il
s'agit effectivement de la garde de courte durée mais qui semble plus
régulière. On pourrait exiger davantage quant à la
formation du personnel en assurant toujours des normes de base quant à
la sécurité, l'hygiène et la salubrité.
Mme Gagnon-Tremblay: Sans vouloir refiler la facture aux
municipalités, croyez-vous que les municipalités sont plus en
mesure que l'office, étant donné qu'elles sont peut-être
plus près de cette clientèle des haltes, de s'assurer d'une
qualité dans les haltes ou les jardins d'enfants? Est-ce l'office qui
devrait surveiller cette qualité ou si la municipalité devrait
avoir une responsabilité ou continuer de s'occuper de cette portion?
Mme Lavigne: II nous semble important, compte tenu du mandat
conféré à l'office en vertu de la loi, que l'office
conserve les mandats quant aux normes, quant aux règlements et quant
à la garantie de la qualité des services de garde et ce, d'une
façon globale. Néanmoins, il est fort
possible de conclure, par l'intermédiaire des
municipalités, des ententes de services qui se développeront
lorsque les municipalités seront prêtes à le faire. Les
ententes peuvent porter... Le travail de vérification, de
contrôle, peut se faire à différents paliers; ll y a une
série de normes concernant l'hygiène, l'espace, la
salubrité, et les municipalités sont généralement
déjà dotées d'infrastructures et de programmes effectuant
ces types de contrôle dans un ensemble d'établissements sur leur
territoire. Il est donc possible d'avoir une approche mixte. Que des contrats,
des vérifications et des contrôles assumés
régulièrement par des municipalités sur un ensemble
d'éléments soient davantage liés à des conditions
matérielles et que l'office, par ailleurs, soit néanmoins en
mesure d'effectuer régulièrement des vérifications qui,
à ce moment-là, se borneraient plus à l'aspect
qualité, application des programmes, formation du personnel et
véritablement ce qui s'inscrit dans le volet éducation.
Mme Gagnon-Tremblay: Vous recommandez aussi d'abaisser les
ratios, étant donné que notre ratio est peut-être moyen
dans certains cas, et dans d'autres, supérieur à celui d'autres
provinces. Je pense que vous avez raison. On admet que cela aurait quand
même pu faire l'objet d'une décision ou d'un choix, mais, comme je
le mentionnais dans ma déclaration d'ouverture, c'est un choix que le
gouvernement n'a pas retenu actuellement compte tenu des nombreux besoins.
Dans un deuxième temps, il sera toujours possible d'abaisser les
ratios. On sait fort bien, d'ailleurs, qu'abaisser le ratio de 1,4 ou de 1,5
coûte quand même énormément d'argent. C'est en termes
de millions; c'est du récurrent et, en plus de ça, cela signifie
qu'on est obligés, dans le cas de certaines garderies, de faire des
aménagements de locaux parce que, si on modifie les ratios, on devra
également modifier, dans plusieurs garderies, l'aménagement des
locaux. Depuis fort longtemps, depuis que je suis là, j'ai surtout
entendu dire qu'on a "norme", réglementé et imposé une
quantité de mesures aux services de garde, depuis quelques
années. On nous avait aussi demandé de... On voulait bien
digérer toutes ces mesures avant d'en imposer de nouvelles. Finalement,
pour toutes ces considérations, le gouvernement, dans une premier temps,
n'a pas choisi, dans le cadre de l'énoncé de politique,
d'abaisser les ratios, mais plutôt de consolider ce qui existe,
actuellement, de développer et de faire une meilleure planification.
Dans un deuxième temps, lorsque le tout sera stabilisé, il sera
toujours temps, je pense, d'abaisser les ratios.
Par contre, vous pariez des poupons. Concernant la subvention qu'on
accorde aux poupons, entre autres, en milieu familial, laquelle n'était
pas accordée auparavant, de même que celle que nous accordons
aussi pour les mêmes poupons dans les garderies à but lucratif,
vous vous inquiétez un peu du nombre de poupons qui pourraient
être gardés et vous vous demandez si le gouvernement a
pensé, par exemple, à définir le nombre de poupons qui
pourraient être acceptés dans l'un ou l'autre des services.
Avez-vous une idée, pouvez-vous me suggérer ce que vous voyez,
par exemple, dans un milieu familial, quant à une gardienne à
domicile. quel serait, par exemple, l'objectif idéal? Et dans le cas des
garderies à but lucratif, quel serait également le nombre
idéal à suggérer pour la garde des poupons?
Mme Lavigne: La question du nombre limite est différente
de celle du ratio, du nombre de places de poupons. Si on fait une
recommandation dans ce sens, c'est véritablement pour éviter
qu'on se retrouve avec une spécialisation de garderie, d'autant plus que
la situation est difficile à cause du ratio qui est assez
élevé en ce moment. Quant au nombre limite de places, I est
évident qu'il y a un certain nombre de garderies qui sont
équipées, qui se concentrent davantage dans le soin des poupons.
C'est évidemment dans la perspective de conserver à la fois les
droits acquis, mais pour les garderies qui se développeraient il nous
semble que, compte tenu des ratios, compte tenu de la difficulté
d'équilibre concernant les ratios actuels, de dix à douze
places-poupons par garderie subventionnée, cela permettrait de maintenir
un équilibre et de redresser les difficultés qu'on a actuellement
avec les ratios, d'autant plus que selon la politique, comme vous le
mentionnez, on n'est pas prêt à modifier les ratios pour le
moment.
Cela prendrait, par ailleurs, un programme spécifique
d'inspection dans la mesure où 1 s'agit des clientèles
évidemment les plus vulnérables qui n'ont surtout pas les moyens
de s'exprimer. Cette considération, cette réflexion que nous
avons faite au conseil s'inscrivait néanmoins dans une perspective plus
globale. Il est important, certes, de développer des nombres de
places-poupons, mais il est encore aussi fort important de regarder à
nouveau toute la question des congés de maternité et des
congés parentaux. Il s'agit de deux mesures Indissociables et,
actuellement, le Québec a de la difficulté à se targuer
d'être à l'avant-garde en ce qui a trait aux congés de
maternité.
Ce sont deux mesures complémentaires et nous croyons qu'il est
important de les mener de façon simultanée.
Mme Gagnon-Tremblay: Vous avez tout à fait raison. Je
pense que ce ne sont pas les services de garde qui peuvent répondre
à tous les besoins des parents, et les congés de maternité
sont tout à fait importants également dans le cas d'une politique
familiale. Lorsque vous parlez de dix à douze places-poupons par
garderie, est-ce qu'à ce moment vous Incluez aussi les garderies sans
but lucratif?
Mme Lavigne: Oui. effectivement.
Mme Gagnon-Tremblay: Vous parlez également de la formule
de financement et vous vous Inquiétez un peu des garderies qui
viendraient d'ouvrir, de l'ouverture récente et aussi de la baisse de
fréquentation. Je dois vous dire qu'actuellement l'Office des services
de garde à l'enfance prend déjà en considération,
concernant le taux d'occupation dans sa subvention de fonctionnement,
l'ouverture récente, par exemple, d'une garderie. Aussi, c'est tout
à fait normal, parce qu'on sait que lorsqu'une garderie ouvre, avant
d'avoir une clientèle stable, on peut quand même prendre une
période de six mois et même jusqu'à un an avant d'avoir un
taux d'occupation raisonnable, mais déjà l'office prévoit
dans ses formules ce genre de besoin et verse une subvention en
conséquence.
Lorsque vous nous parlez d'une formule mixte de financement, j'imagine
que c'est un peu une formule comme on en suggère pour les agences en
milieu familial, c'est-à-dire 4,75 $ comme montant fixe, plus, par
exemple, 40 % du tarif. Lorsque vous parlez de cette formule fixe, croyez-vous
que cette formule fixe évitera les augmentations de tarif, entre autres?
Croyez-vous aussi qu'elle limitera le potentiel? J'aimerais bien savoir si vous
croyez que cette formule mixte pourra éviter l'augmentation de tarif
dans les garderies.
Mme Lavigne: La formule mixte proposée serait
composée d'un volet fixe et d'un volet variable. Le volet fixe permet
à tout le moins à une garderie de mieux planifier, d'être
en mesure d'assumer des coûts qui reviennent de toute façon, quel
que soit le taux de fréquentation de la garderie, donc, d'exercer
davantage de contrôle sur le lien existant par rapport à son
marché, à la capacité de payer des parents et d'ajuster sa
structure de prix à la clientèle qu'elle dessert parce qu'elle
sait qu'à la base elle a un montant garanti. Cette formule-là
permettrait, en tout cas, de conserver un dynamisme et des
éléments importants dans la structure variable liée au
tarif. Il y a des éléments intéressants, notamment en ce
qui concerne la possibilité d'occuper le maximum de places dans le
moment. Cet élément dynamique peut rester et I y a moyen de
l'avoir. Par ailleurs, un volet fixe permettrait aux garderies de beaucoup
mieux planifier et d'identifier un an à l'avance les tarifs pour leur
clientèle, parce qu'elles le sauraient assez clairement et seraient
assurées d'un certain revenu. C'est véritablement pour pallier
à des inconvénients de fluctuations incontrôlables.
Mme Gagnon-Tremblay: Si je comprends bien, avec un certain
pourcentage, cette formule qui est une formule dynamique permet en même
temps de maximiser le taux d'occupation. Vous n'êtes pas en
désaccord pour que, tout en finançant, il y ait aussi une
préoccupation de maximiser le plus possible le taux d'occupation.
Mme Lavigne: C'est un principe intéressant puisque
l'État paie déjà pour des infrastructures prévues
pour 50 enfants, qu'il y a des investissements publics faits à partir
des impôts des citoyens pour cette capacité. Il est évident
qu'il faut voir à ce que les services déjà mis en place
desservent au maximum. Par ailleurs. ll faut absolument avoir une formule de
financement qui ne crée pas l'Instabilité dans ces services, qu!
leur permette de faire davantage une projection à long terme et
d'assumer des coûts fixes, d'assurer aussi des éléments
liés à cela... et leur permettre de rétablir les bases
financières qui, dans le moment, sont fragiles, sauf que la
recommandation dit: C'est une recommandation d'étude de ces
possibilités. On sait que les situations sont multiples. Quand on fait
de nombreuses simulations à partir de la proposition actuelle, cela
s'avère difficile et je pense que cela prend véritablement toute
une série de simulations. Notre recommandation vise à vous
suggérer d'étudier une formule qui rallierait les deux types
d'avantages.
Mme Gagnon-Tremblay: Merci, Mme la présidente.
Le Président (M. Bélanger): Bien. Mme la
députée de Maisonneuve. (12 h 30)
Mme Harel: Merci, M. le Président. Je veux d'abord saluer
la nouvelle présidente du Conseil du statut de la femme ainsi que les
personnes qui l'accompagnent. Vous me permettrez d'insister
particulièrement sur le fait suivant: à moins que je ne me trompe
je crois que c'est votre première, présentation devant une
commission parlementaire. Je dois vous dire que la réputation du
conseil, qui en est une de compétence et d'expertise dans l'ensemble des
mémoires qu'il a déposés depuis des années devant
la commission, ne s'est pas démentie une fois de plus. Votre
mémoire est une mine d'or de renseignements. C'est le rôle que
vous jouez en préparant des travaux comme ceux-là, c'est
extrêmement utile pour la connaissance qu'on peut avoir des enjeux
conservés.
La première question qui suit les propos que vous venez d'avoir
avec Mme la ministre sur le choix de la formule de financement, puisque le 1er
avril approche rapidement et qu'on sait que les programmes Informatiques
basés sur le pourcentage du revenu réel, donc, basés sur
45 % des tarifs, doivent être mis en place... La commande est
donnée pour qu'ïs soient en vigueur à partir du 1er avril.
Compte tenu de la recommandation que vous faites à la ministre, moi, je
comprends dans les propos qu'elle a avec vous qu'elle est prête à
réexaminer la formule pour éventuellement envisager une formule
mixte.
D'ailleurs. j'aimerais qu'elle dise clairement, à un moment
donné de nos travaux, s'il y a encore moyen de modifier ce qui est
commandé et prévu pour le 1er avril prochain. Ceci dit. si tant
est qu'elle ne pouvait pas y arriver pour le 1er avril, qu'est-ce que vous lui
recommanderiez? De maintenir la formule actuelle en la majorant jusqu'à
ce qu'une formule mixte puisse être retenue ou bien de procéder
à l'application de son pourcentage de 45 % des tarifs?
Mme Lavigne: Là, vous me demandez de prendre la place de
la présidente de l'Office des services de gardes à l'enfance.
Écoutez, je pense qu'l y a différentes approches qui peuvent
être prises. L'office travaille sûrement à établir
des simulations et des grilles. Chacun sait que le financement d'une
année financière et des subventions ne se font jamais dans un
seul versement. Il y a des possibilités de maintenir un rythme de
croisière sur une demi-année si, à l'office et à la
commission parlementaire, on en arrive à reconsidérer le
modèle de financement, cela dépendra des résultats. Je
pense que différentes possibles sont offertes ou se présentent,
compte tenu de l'avancement des programmes informatiques et cela peut se faire
dans six mois comme dans un an, tout dépend. Je dois vous dire que. ne
gérant pas l'office, je suis un peu mal placée pour voir ce
qui... Ce qui est important pour des services de garde, c'est que les gens
reçoivent leurs montants à la date habituelle. C'est ce qui est
le plus important à respecter. C'est donc dire un souci de service
rapide accordé aux clientèles. Le souci qui doit sûrement
animer l'office en premier lieu, c'est que le chèque arrive à la
date prévue.
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Maisonneuve, vous permettez un instant? Est-ce que
nous avons le consentement de cette commission pour continuer les travaux
jusqu'à 12 il 45?
Mme Harel: Certainement.
Le Président (M. Bélanger): II y a consentement.
Alors, Mme la députée.
Mme Harel: Alors, que le chèque arrive et qu'l soit du bon
montant, c'est l'autre question, évidemment Je ne pense pas que vous
ayez à vous sentir mal à l'aise. L'office a décidé
de ne pas présenter de mémoire devant la commission. Les
informations que nous retrouvons dans votre mémoire, heureusement, nous
sont fournies par le Conseil du statut de la femme; l'office doit les
détenir certainement, mais nous n'y avons pas directement accès.
Je pense, entre autres, à un certain nombre d'informations
intéressantes et sur lesquelles je reviens immédiatement,
notamment en ce qui concerne la subvention aux poupons et aux enfants
handicapés à l'intention des garderies à but lucratif.
Dans votre mémoire, aux pages 29 et 30, vous faites état
de ce que l'office connaît bien, d'une réalité selon
laquelle la plupart des plaintes adressées à l'office concernent
les garderies à but lucratif. Nous retrouvons cela exactement
indiqué à la page 29 du mémoire et à la page 30
également, où vous reprenez le chiffre de 73 % des plaintes
adressées à l'office qui concernent les garderies à but
lucratif quand, dites-vous, celles-ci desservent 24 % des places en garderie.
Dans le mémoire que vous nous présentez, à la page 20,
vous mettez en garde la ministre de confier des clientèles
particulièrement vulnérables; vous nous dites: Les poupons, les
enfants handicapés sont des clientèles particulièrement
vulnérables. Vous l'enjoignez d'accroître le contrôle
exercé envers ces garderies. Vous lui avez parlé d'un ratio,
ça ne semble pas avoir été retenu. Vous semble-t-il
inquiétant que ces clientèles vulnérables puissent
être promues dans des garderies qui, compte tenu des statistiques que
vous nous mentionnez, peuvent être sujettes à des plaintes plus
nombreuses?
Mme Lavigne: évidemment, à la suite de
données comme celles-là, on s'inquiète et on trouve
absolument essentiel qu'il y ait des mesures de contrôle, un programme
spécifique. On a d'ailleurs une mesure complémentaire
là-dessus qui vise véritablement à bonifier le rôle
du comité consultatif. L'énoncé de politique parte de
modifier le rôle du comité consultatif de parents, mais nous
croyons qu'à partir du moment où des subventions sont
données à des garderies à but lucratif, c'est là
que doit s'exercer fondamentalement le rôle du comité
consultatif.
Évidemment, on ne peut pas revenir en arrière. Il existe
au-delà de 250 garderies à but lucratif, il y a des enfants et
des parents qui y sont. Il y a une proposition, un choix pour régler un
problème, d'avoir des poupons et d'accorder des subventions liées
à la qualité. À ce moment-là, dans la mesure
où ce sont des fonds publics, nous croyons que le principe de base de la
politique, qui est la gestion par les parents, doit s'exercer sur le transfert
de ces fonds publics. C'est pourquoi on recommande que le rôle du
comité consultatif de parents soit modifié de façon que ce
soit eux qui, à la fois, endossent la demande de subvention
spécifique et signent le rapport d'utilisation de la subvention. Si
l'État consent à donner des subventions à ce type de
garderie, c'est pour régler un problème de pénurie de
places pour les poupons et c'est en fonction de normes de qualité. Comme
il s'agit de fonds publics, il est absolument essentiel que les parents
reçoivent un mandat de cet ordre et qu'on crée un
mécanisme de révision. La position du conseil s'articule
véritablement dans ce sens.
Mme Harel: Je vous remercie. Une autre
question dont vous avez à peine traité - je le comprends,
avec le peu de temps mis à votre disposition - c'est celle de
l'universalité des services de garde. Vous en parlez aux pages 54 et
suivantes de votre mémoire, particulièrement à la page 64,
où vous énoncez l'affirmation suivante: "L'universalité
des services de garde est donc sérieusement compromise. Compte tenu des
coûts exorbitants reliés à la garde des enfants, l'emploi
des parents constitue de plus en plus le seul motif de garde." Vous aviez
d'ailleurs titré, à la page 54 de votre mémoire, "Des
parents et des enfants oubliés". Cette analyse vous a amenées
à constater "que la fréquentation des modes de garde reconnus,
sauf quand la famille en a les moyens, sera réservée aux enfants
dont les parents travaillent. " Et suit une analyse extrêmement
serrée et certainement très démonstrative selon laquelle
les programmes d'exonération couvrent de moins en moins les frais de
garde encourus par les parents de famille modeste et qu'il faudra
dorénavant deux programmes, soit le programme APPORT et le programme
d'exonération, mais qu'encore là le programme APPORT est
exclusivement réservé aux parents qui ont des revenus de travail
et qui sont à faibles revenus. Vous dites: "Ces modes de garde seront
donc peu accessibles aux enfants car l'un des parents ou l'unique responsable
de la famille est à la maison."
L'autre volet, c'est que vous nous rappelez avec raison que les services
de courte durée qui pourraient pallier au répit, au
dépannage comme la halte-garderie ou les jardins d'enfants, dans
l'énoncé de politique, ne sont pas subventionnés, Is ne
donnent pas droit au programme d'exonération. Donc, c'est comme s'il y
avait des enfants dont les parents étaient piégés.
À la page 54 suit vraiment une très belle démonstration du
rôle que le service de garde peut donner à la socialisation des
enfants, l'apport au développement, surtout dans les milieux
défavorisés. Vous nous citez des études, etc. La
détection précoce - je ne sais pas si vous étiez là
quand les Intervenants du Conseil québécois pour l'enfance et la
jeunesse sont venus - des problèmes chez les enfants, vous nous en
parlez également. Est-ce que ça ne vous inquiète pas,
cette orientation de l'énoncé de politique?
Mme Lavigne: Je dois dire que les orientations en tant que telles
de l'énoncé de politique, on l'a dit au début, ne nous
inquiètent pas, dans la mesure où on est d'accord avec les grands
principes et les grandes orientations de base. Ce qui est inquiétant,
c'est le niveau de ressources financières et, finalement, la
difficulté éprouvée par l'ensemble des programmes,
notamment le programme d'exonération financière, à suivre
le rythme.
Mme Harel: Des fois, on pense que les modes de financement ne
suivent pas les principes affirmés.
Mme Lavigne: On est présentement dans une situation
où les coûts de garde augmentent. On arrive à un changement
important et il est Important d'avoir un redressement significatif du
financement C'est un élément qui doit se faire à un moment
ou l'autre dans la société québécoise. On a
vécu, comme société, un redressement significatif de
l'ensemble du secteur de l'éducation qui, historiquement était
assumé gratuitement par des femmes ou des communautés
religieuses. On a fait le môme mouvement pour l'ensemble des services
sociaux et l'ensemble des services de santé, et on en est arrivé,
au moment présent, à un certain équlibre.
Dans la conjoncture actuelle, la vie des femmes a profondément
changé, au Québec. Auparavant, les femmes s'occupaient des
enfants. Ce n'était pas un enjeu majeur de société lors de
la Révolution tranquille, d'étendre le réseau
d'éducation ou d'étendre le réseau des services sociaux
à la garde des enfants d'âge préscolaire. On est face
à un changement structurel. Il est absolument important que, comme
société, on s'adapte à ce changement structurel et que ce
ne soient ni les mères, ni les enfants, ni les travailleuses en garderie
qui aient de la difficulté.
Je sais que c'est un long processus, cela a été
extrêmement long. De Laure Gaudreault aux enseignantes d'aujourd'hui il y
a eu une bonne cinquantaine d'années et un long cheminement. C'est la
même situation dans les services de santé, il y a eu un long
cheminement. Mais je pense qu'on s'inscrit fondamentalement dans le même
mouvement de fond parce que la vie des femmes a changé, et il est
important qu'on considère ce changement de fond. Il y a plus de la
moitié des femmes ayant des enfants qui sont sur le marché du
travail, et il est important qu'un ajustement s'effectue. C'est une nouvelle
réalité sociale dans laquelle on vit. Par ailleurs, je
pense...
Mme Harel: Je m'excuse, le temps nous presse beaucoup, on a
encore juste quelques minutes. J'aimerais avoir l'opinion du conseil, compte
tenu de toutes les analyses qu'on retrouve dans le mémoire, sur une
question précise, à savoir: Vous nous dites que le programme
d'exonération est insuffisant pour les parents et que la
fréquentation - je vous lis - des services de garde reconnus est de plus
en plus réservée aux parents qui travaillent ou... sauf lorsque
la famille en a les moyens. Considérez-vous que la société
et que le gouvernement doivent injecter de l'argent pour assurer un service de
garde avec exonération des parents, même lorsque l'un des deux ou
les deux ne sont pas au traval, à l'emploi? En d'autres termes,
considérez-vous les services de garde comme un développement de
l'enfant ou comme un remplacement de garde des parents?
Mme Lavigne: La proposition qu'on fait sur
l'exonération financière est daire à cet
égard. Que le parent soit ou ne soft pas à l'emploi, on demande
de redresser les seuils et, par ailleurs, le transfert en crédit
d'impôt remboursable s'inscrit dans cette perspective. Les parents
peuvent avoir de multiples raisons et un service doit tour être
accessible. Ce n'est pas essentiellement un complément lié au
travail, il s'agit aussi d'une extension d'un service d'éducation, parce
qu'on reconnaît, comme société, que l'éducation se
commence tôt et que l'éducation ne se fait pas uniquement dans le
cadre du milieu familial.
Mme Harel: L'approche que vous avez en matière de garde
scolaire est extrêmement Intéressante. Je retrouve, entre autres,
à la page 57, une information qui n'est pas pour distribution courante,
que j'ignorais, à savoir que 76 % des enfants gardés en milieu
familial reconnu et 47 % en garderie bénéficient du programme
d'exonération. C'est donc dire combien ce programme d'exonération
est utilisé malgré tout et combien il est important de le
bonifier, mais vous nous signalez que seulement 17 % des enfants gardés
en milieu scolaire étaient admissibles à une exonération
financière, au 31 mars 1988. Et vous posez la question suivante: En
dépit de l'aide quotidienne versée, serait-ce que ces services
sont considérés comme trop coûteux par les parents?
En matière de garde scolaire, il y a évidemment du
rattrapage à faire. Il n'y a pas d'exonération
l'été. Vous le mentionnez dans votre mémoire, la garde
estivale est entièrement à la charge des parents et
également au moment des Journées pédagogiques. Est-ce que
vous avez pu examiner l'effort qui devrait être consenti en
matière de garde scolaire? Considérez-vous que le programme
d'exonération est insuffisant, qu'il devrait être augmenté?
Comment se fait-il qu'il y ait finalement si peu de demandes
d'exonération, selon vous?
Mme Lavigne: Je vais laisser répondre Mme Lepage.
Mme Lepage (Francine): Justement, on se pose la question à
savoir pourquoi. Dans ce cas-ci, notre texte est un peu imprécis. Il
aurait fallu dire "de places subventionnées par rapport au nombre de
places* plutôt que "d'enfants subventionnés*. Il y a une petite
nuance. On se surprend qu'il y ait seulement 17 % de places
subventionnées, c'est-à-dire de places qui donnent droit à
l'exonération financière en milieu scolaire alors que le
pourcentage est plus élevé en garderie et en garde en milieu
familial. Justement, on n'a pas les données nous permettant de
répondre mais on se pose la question: Est-ce parce que le service reste
coûteux malgré l'exonération? On sait, d'autre part,
qu'à l'école seulement les parents qui travaillent ou qui
étudient ont droit à l'exonération. Est-ce que cela
explique la question? On ne sait pas, on aurait aimé que le
mémoire soft plus explicite sur la question de la garde scolaire.
Le Président (M. Bélanger): Bien. Mme la
députée de Maisonneuve, si vous voulez conclure
brièvement
Mme Harel: Merci, M. le Président. Il y aurait eu
évidemment tellement de choses à dire encore compte tenu de
toutes ces Informations qu'on retrouve dans le mémoire, compte tenu
aussi des questions qu'il suscite. Je n'ai pu discuter avec vous la
difficulté qui est liée au fait que la déduction fiscale
n'avantage que les parents qui ont des revenus élevés. Vous avez
chiffré les avantages pour des parents qui ont des revenus
différents et on voit très nettement qu'on va déplacer,
avec l'énoncé de politique, l'offre de service de garde vers des
parents à revenus moyens supérieurs ou moyens
élevés.
Au nom de l'Opposition, je vous remercie pour ce mémoire qui va
certainement au-delà des travaux qu'on vient de terminer et qui va
certainement nous servir durant plusieurs mois, sinon quelques années.
Merci.
Le Président (M. Bélanger): Merci. Mme la
ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, je voudrais, avant
de terminer, peut-être corriger une affirmation faite par la
députée de Maison-neuve à savoir que le fait que peu de
personnes se prévalent de l'exonération financière en
milieu scolaire serait peut-être relié à la question du
tarif. C'est tout simplement relié aux critères
d'exonération financière. Comme vous le mentionniez, en milieu
scolaire, l'exonération est accordée aux parents s'ils sont au
travail ou aux études. Ce n'est pas depuis que je suis arrivée,
c'est depuis fort longtemps, depuis le tout début, que cela existe comme
ça. Il n'y a jamais eu de modification faite et ce n'est pas une
modification que nous avons faite récemment.
Je voudrais apporter aussi certains éclaircissements. Lorsque Mme
la députée de Maisonneuve parle de la mise en application de la
politique en disant: Le tout est déjà...
Mme Harel: M. le Président, est-ce que c'est la
période pour remercier le Conseil du statut de la femme?
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Maisonneuve.
Mme Harel: Parce qu'il y aura une période dans la
journée où la ministre pourra aussi reprendre. Là,
normalement, on n'a pas de réplique. Ce n'est pas une réplique,
M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): Si vous plaît!
Je demanderais à Mme la ministre de conclure
brièvement
Mme Gagnon-Tremblay: Écoutez, on aura probablement
l'occasion de vous donner cette information parce que je voulais justement vous
parier de la mise en application de la politique. Puisqu'on est en commission
parlementaire, Je tiens à vous remercier, Mme la présidente et
les intervenantes du Conseil du statut de la femme, pour la qualité et
le sérieux de votre mémoire. Il y a des suggestions qui sont
intéressantes et nous prendrons sûrement le temps de les examiner
en profondeur et de faire des études, entre autres, sur des formules que
vous nous proposez. Merci.
Le Président (M. Bélanger): La commission remercie
les membres du Conseil du statut de la femme et suspend ses travaux
Jusqu'à 14 heures. Merci.
(Suspension de la séance à 12 h 50)
(Reprise à 14 h 13)
Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il
vous plaît!
La commission des affaires sociales reprend ses travaux afin de
procéder à des consultations générales et à
des auditions publiques pour étudier l'énoncé de politique
sur les services de garde à l'enfance déposé à
l'Assemblée nationale le 24 novembre 1988.
J'inviterais la Confédération des organismes familiaux du
Québec, la COFAQ, qui est représentée par Mme Pierrette
Godbout-Perreault, M. Marcel Faulkner, Mme Clarisse Forest et M. Michel Morel,
à se présenter à la table des témoins.
Mesdames, messieurs, vous avez 20 minutes pour présenter votre
mémoire. Ensuite, il y a une période de questions de 40 minutes
avec les députés ministériels et ceux de l'Opposition. Un
instant! Excusez-moi, R y avait un petit malentendu. Mme la présidente,
je vous incite donc à vous présenter ainsi que votre
équipe et, chaque fois que quelqu'un de votre groupe prendra la parole,
à bien vouloir vous identifier pour fins d'identification - excusez la
redondance - au Journal des débats. Je vous remercie. Si vous
voulez procéder...
Confédération des organismes familiaux
du Québec
Mme Godbout-Perreault (Pierrette): Bonjour, M. le
Président.
Le Président (M. Bélanger): Bonjour!
Mme Godbout-Perreault: Je suis accompagnée aujourd'hui de
M. Marcel Faulkner, qui représente le groupement des parents d'enfants
handicapés, de Mme Clarisse Forest, vice-présidente de la COFAQ
et de M. Michel Morel, secrétaire générai de la COFAQ. Je
vous remercie d'avoir accepté de nous entendre.
La Confédération des organismes familiaux du Québec
a une structure de type confédératif qui regroupe des
associations sur l'ensemble du territoire du Québec. Nous existons
depuis 1971, regroupons plusieurs centaines d'organismes familiaux et
rejoignons annuellement au-delà de 100 000 familles. Depuis plus de 20
ans, les organismes réunis au sein de la COFAQ se préoccupent de
la famille, des conditions de vie des familles et de la promotion du concept de
la politique familiale globale.
Il y a maintenant plus d'un an, soit en décembre 1987, le
gouvernement du Québec déposait à l'Assemblée
nationale son énoncé des orientations et de la dynamique
administrative de la politique familiale du gouvernement du Québec. Ce
geste venait confirmer l'intention gouvernementale de penser à la
famille et de tenir compte de la réalité familiale dans toutes
les politiques où il peut être requis de le faire.
Le dossier de la politique des services de garde est un secteur de
premier plan où iI est requis de tenir compte des réalités
familiales. Cela justifie l'intervention des organismes familiaux devant cette
commission, tout comme cela devrait justifier que les travaux de cette
commission tiennent compte des besoins et des attentes des familles tels
qu'exprimés par les organismes chargés de les
représenter.
Les délais consentis aux organismes pour la production des
mémoires furent trop courts. La COFAQ est d'avis qu'une politique de
cette envergure aurait mérité que les délais
alloués soient satisfaisants pour procéder à une analyse
adéquate et à une consultation véritable. Si le
gouvernement souhaite vraiment entendre les représentants des organismes
chargés de représenter les familles, encore faut-il que les
conditions de la consultation respectent le fonctionnement de ces organismes,
ce qui ne fut pas le cas pour l'actuelle consultation. La présente
intervention de la COFAQ sera donc partielle; elle n'abordera que quelques
éléments de cette politique. Il ne faut cependant pas croire pour
autant que les familles et les organismes chargés de les
représenter approuvent et endossent les aspects de cette politique qui
ne seront pas abordés ici.
D'abord, nous voudrions faire des commentaires généraux
pour dire que la politique familiale est une politique horizontale,
multisectorielle et concertée. C'est du moins ainsi qu'elle est
présentée. Pour l'être vraiment, elle doit pouvoir
s'appuyer sur des orientations claires, spécifiquement définies
dans un plan d'action global témoignant de l'ensemble des mesures devant
être mises de l'avant pour soutenir les familles. Ce plan d'action
existe, mais iI n'a toujours pas été rendu public, ce qui
laisse
malheureusement tes familles dans l'Ignorance des mesures
prévues par le gouvernement, les obligeant à considérer la
politique familiale à travers les éléments de politiques
sectorielles qui voient le Jour depuis décembre 1987. Or, à
l'analyse, ces mesures et ces politiques ne répondent pas toutes
à l'engagement gouvernemental de penser famille.
C'est pourquoi la COFAQ formule une recommandation dans le
sens que le gouvernement rende public, dans les meilleurs délais, son
plan d'action global en matière de politique famliale. Cette
recommandation est d'ailleurs la première de celles exprimées par
la COFAQ. La COFAQ constate que le dossier de la politique des services de
garde s'est développé dans un contexte de condition
féminine. Elle se réjouit grandement de l'évolution de la
condition féminine au cours des 20 dernières années et
partage bon nombre d'objectifs communs avec les groupes de femmes. Nous croyons
pertinent et justifié d'insister ici sur le fait que la
responsabilité parentale à l'égard des enfants est une
responsabilité que doivent partager également les hommes et les
femmes. Nous sommes fort conscients que les femmes ont, jusqu'à ce jour,
porté cette responsabilité à l'égard des enfants,
mais nous ne pouvons que réaffirmer la nécessité de
concevoir les responsabilités parentales en termes de
responsabilités partagées également entre hommes et
femmes.
Un dernier commentaire sur l'oubli gouvernemental
concernant les clientèles spécifiques constituées des
parents d'enfants handicapés ou des handicapés. Nous ne pouvons
que nous ranger derrière les propos qui seront tenus tout à
l'heure par le porte-parole du Regroupement de parents pour déficients
mentaux.
Sur les principes directeurs, la COFAQ approuve les
principes directeurs retenus. Une première analyse du document
gouvernemental nous amène cependant à formuler certains
commentaires à l'égard des principes directeurs. La politique des
services de garde est décrite comme un soutien essentiel pour les
parents car elle permet de conclier les obligations familiales et
professionnelles. Nous souscrivons pleinement à cet
énoncé, mais nous croyons pertinent d'ajouter qu'une vue plus
globale des besoins des parents pour concilier obligations familiales et
professionnelles permet d'identifier d'autres besoins: des congés
parentaux, des horaires de travail conçus en fonction des besoins des
parents et la possiblité de s'absenter du travail lorsque les besoins de
l'enfant requièrent la présence des parents. De telles mesures
existent mais elles ne sont pas suffisantes et le plan d'action global en
matière de politique famliale ne nous est pas encore connu à ce
moment-ci.
Les milieux de garde doivent être des milieux de
développement pour l'enfant. La qualité des services de garde fut
au coeur de nos réflexions et a justifié bon nombre de nos
recommandations.
Un développement qui respecte le choix des parents.
Nous affirmons ce principe mais nous constatons que divers aspects de la
politique proposée semblent aller à rencontre.
Une préférence pour les services
gérés par les parents. Nous sommes pleinement d'accord avec ce
principe qui confère notamment aux parents un droit de regard sur la
qualité des services et nous formulons une recommandation concernant les
garderies à but lucratif à l'effet de donner aux parents
utlisateurs un droit de regard semblable.
Une réaffirmation de l'autonomie des services de
garde. Bien qu'en accord avec ce principe, nous croyons justifié de
préciser que l'application de ce principe ne doit pas, par voie de
conséquence, écarter la responsabilité gouvernementale
à l'égard du développement de nouveaux services de garde.
La responsabilité communautaire également évoquée
au nom d'un principe directeur nous conduit à formuler une
recommandation précise concernant le rôle déterminant du
gouvernement dans la mise sur pied de nouveaux services en collaboration
étroite avec les partenaires sociaux.
Le développement prévu du nombre de places
dans les différents services de garde appelle également certains
commentaires: une évaluation de limiter les besoins. Le document
gouvernemental établit à 201 310 le nombre de places requises en
services de garde régis pour l'année 1987, tel qu'indiqué
au tableau 2 de la page 22. Le calcul fait pour en arriver à ce chiffre
écarte systématiquement les familles ayant recours à des
services non régis de même que les familles dont l'un des
conjoints demeure au foyer. Parmi les 337 914 enfants gardés selon un
mode de garde non régi, combien de familles en arrivent à des
choix autres que les services non régis en raison des coûts trop
onéreux de ces services, de la non-disponibilité des services, et
du peu de confiance à l'égard des services disponibles dans leur
milieu? Des 337 914 enfants, combien portent la clé dans le cou?
Nous nous permettons de croire que les besoins en services
de garde pourraient être beaucoup plus importants que l'évaluation
qui en est faite. C'est pourquoi nous formulons une recommandation demandant
que soient revus à la hausse les objectifs de développement des
services de garde en ce qui concerne les nouvelles places à
créer. De plus, nous croyons qu'une politique des services de garde doit
suivre de près l'évolution des besoins des enfants et des
parents. C'est pourquoi nous formulons une recommandation afin que des sondages
et enquêtes soient menés régulièrement et de
façon systématique auprès des familles
québécoises pour que le développement de la politique des
services de garde puisse mieux suivre les besoins des familles.
La COFAQ considère que le développement
annoncé est également décevant en ce qui concerne la
diversité des modes de garde. C'est pourquoi nous formulons un certain
nombre de
recommandations afin que soient mieux soutenus les parents qui font le
choix de faire garder leurs enfants à la maison, en améliorant
les dispositions fiscales, en diffusant largement les outils de formation et
d'information prévus pour les responsables de garde en milieu familial,
en soutenant les parents dans la recherche de gardiens et de gardiennes
qualifiés.
On demande que soient aussi revus à la hausse les objectifs de la
politique en ce qui concerne le nombre de places créées pour
chacun des types de garde; que la garde en garderie soit
développée à un rythme accru et que certains moyens soient
pris pour s'assurer que la qualité de ces services continue de
s'améliorer afin de mieux répondre aux besoins des familles; que
le développement des services en milieu de travail ne soit pas
"priorisé* par le gouvernement car ce type de services ne correspond pas
à la préférence des parents.
On demande aussi que le développement de la garde en milieu
scolaire soit accompagné d'un nouveau service répondant aux
besoins de garde des enfants d'âge scolaire durant la période
estivale et les congés scolaires; que les formules de halte-garderie et
de jardin d'enfants soient aussi l'objet d'un plan de développement, car
ces formules répondent à des besoins spécifiques de
très nombreux parents, et que l'on tienne compte des besoins des
clientèles particulières que constituent les familles dont l'un
des parents est handicapé dans l'élaboration de la politique des
services de garde.
La recommandation 5 formulée par la COFAQ demande que le
gouvernement renonce à sa priorité du développement des
garderies en milieu de travail et qu'il "priorisé" le
développement de services nouveaux correspondant à des besoins
précis des familles: la garde des enfants d'âge scolaire durant la
saison estivale, les besoins spécifiques des familles dont l'un des
membres est handicapé et le développement des formules de
halte-garderie et de jardin d'enfants.
Il ne fait aucun doute, dans notre esprit, qu'une politique des services
de garde doit tendre à offrir aux enfants et aux parents des services
répondant à leurs besoins, d'où la nécessité
de services variés.
La qualité des services de garde préoccupe au premier plan
les familles lorsque vient le moment de choisir un type de services, et la
COFAQ disait, dans l'un de ses documents, que dans le cadre d'une politique
familiale l'intérêt de l'enfant et le respect de ses droits
doivent constituer les motifs déterminant des décisions prises
à son sujet Ce principe s'adresse donc à la fois aux parents,
à l'État et à toutes les personnes susceptibles
d'intervenir auprès des enfants.
Le respect du droit des enfants nous a amenés, tout au long de
notre Intervention, à formuler des recommandations visant à
l'amélioration de ta qualité des services dispensés aux
enfants. La recommandation 2 demande que des sondages et enquêtes soient
menés régulièrement afin d'adapter le développement
de la politique des services de garde aux besoins des familles.
La recommandation 4 demande que le gouvernement tienne compte des
besoins des familles, dont l'un des membres est handicapé, dans
l'élaboration d'une politique des services de garde. La recommandation 5
demande que le gouvernement "priorise", dans l'élaboration d'une
politique des services de garde, le développement de services nouveaux
offrant des réponses adéquates aux besoins des familles.
La recommandation 6 demande que le gouvernement assure une large
diffusion des outils d'information et de formation prévus pour les
responsables de services de garde en milieu familial. Cette diffusion devrait
rejoindre les familles en général afin qu'elles puissent juger
elles-mêmes de la qualité des services auxquels elles ont
actuellement recours. Elle devrait également viser à rejoindre
les gardiens et gardiennes oeuvrant dans ce service et ce qu'il est convenu
d'appeler, dans votre document, les services non régis. Une telle
diffusion contribuerait à améliorer des services, qu'ils soient
régis ou non.
La recommandation 8 demande que soit assuré aux parents ayant
recours aux services de garderie à but lucratif le droit d'accès
dans les locaux de la garderie durant les heures d'ouverture afin de
vérifier la qualité des services offerts.
La recommandation 9 demande que des efforts soient faits pour assurer
une certaine uniformisation de la qualité des services. En ce sens, il a
été demandé que des sommes allouées au
perfectionnement et a la formation du personnel des services de garde soient de
valeur équivalente pour tous les travailleurs et travailleuses oeuvrant
dans ce secteur et non proportionnelles à la masse salariale plus ou
moins élevée du service à l'intérieur duquel ils
oeuvrent.
Dans cette même recommandation, nous demandons que soit
haussée la rémunération du personnel oeuvrant dans ce
secteur, tout en visant à une certaine uniformisation de la
rémunération afin de favoriser la stabilité du
personnel.
La recommandation 10 vient conclure en insistant sur le fait que le
rôle fondamental de maître d'oeuvre de la politique familiiale du
gouvernement du Québec lui confère un rôle
déterminant dans le développement des services à
être offerts aux enfants et aux parents.
Concernant le financement, nous ne nous y sommes pas attardés
très longtemps puisque nous manquions de temps. Nous pouvons vous dire
que nous voudrions qu'on trouve des mesures qui permettent d'offrir des
services équivalents aux parents. Nous reviendrons peut-être plus
tard, si nous avons du temps, pour développer ce côté.
Nous voudrions plutôt vous faire entendre
ce que M. Faulkner a à dire concernant les parents d'enfants
handicapés.
M. Faulkner (Marcel): En guise d'introduction, Je voudrais
simplement vous dire que notre organisme regroupe quelque 300 à 350
familles de la région de Montréal qui ont assumé la
respon-sablité d'une personne handicapée, en particulier des
enfants, et que notre problématique générale se trouvait
et se trouve encore dans ce document qu'est l'énoncé de politique
du gouvernement en matière d'intégration sociale À part...
égale. C'est un peu par référence à ça qu'on
va réagir également parce que les services de garde
étaient déjà énoncés I y a cinq ans dans
cette politique gouvernementale.
Depuis plus de dix ans, on assiste à un transfert important de la
clientèle Institutionnelle ou susceptible de l'être vers le
réseau communautaire sans lui fournir l'encadrement nécessaire
à cette nouvelle prise en charge. L'idéologie de la normalisation
et le mouvement de déslnstitutionnalisation ont largement puisé
à même l'énergie des familles et de la communauté.
Les millieux oeuvrant dans la promotion et la défense des droits de la
personne handicapée ont sonné l'alarme plus d'une fois. Des
tables régionales de concertation d'organismes de promotion,
d'intervenants sociaux et de parents se sont constituées pour briser le
mur de l'oubli et de la marginalisation et afin de faire pression pour
l'obtention des services appropriés au sein des familles assumant la
prise en charge d'une personne handicapée.
Plusieurs d'entre elles ont espéré trouver dans
l'énoncé de politique sur les services de garde à
l'enfance quelques éléments de réponse aux
difficultés auxquelles elles sont confrontées. Force est de
constater, encore une fois, que les famlles dont l'un des enfants est
handicapé ont été oubliées.
Le gouvernement du Québec exprime sa volonté - et je cite
le document - d'assouplir les divers modes de garde afin de respecter les
disparités individuelles des parents. Plus spécifiquement, le
gouvernement désire mieux répondre aux besoins de garde
réguliers à temps plein ou partiel de la clientèle du
milieu agricole ainsi que du milieu rural, des communautés culturelles
et des nations autochtones et répondre également aux attentes des
clientèles travaillant à l'intérieur d'horaires non
usuels.
Il est regrettable de constater qu'au lendemain du dixième
anniversaire de la Loi assurant l'exercice des droits des personnes
handicapées le gouvernement du Québec oublie les parents
handicapés dans le choix de la clientèle cible de ses nouvelles
orientations en matière de services de garde à l'enfance. Si les
disparités culturelles et les horaires de traval méritent
l'attention particulière du gouvernement et la mise en place de services
spécifiques, pourquoi en serait-il autrement pour les parents
handicapés, confrontés également à des difficul-
tés particulières? (14 il 30)
Dans le même ordre d'idées, I nous semble que l'enfance
handicapée aurait dû être une catégorie
particulière de la clientèle visée par
l'énoncé de politique. On serait tenté de nous
référer à la politique d'intégration des enfants
handicapés dans les services de garde de l'Office des services de garde
à l'enfance que nous n'ignorons pas et sur laquelle nous reviendrons
plus loin. Notre propos ici est plutôt d'indiquer comme prioritaire cette
clientèle dans l'énoncé de politique au même titre
que les autres catégories dites particulières.
Relativement aux services de garde non régis par la loi, une
majorité de parents assumant la responsabilité d'un enfant
handicapé recourt souvent à la garde à domicile de
l'enfant. Le gouvernement du Québec conclut à l'insuffisance de
soutien aux parents utilisant ce mode de garde, particulièrement quant
au recrutement de la sélection de personnes fiables et
compétentes, a fortiori, dirons-nous, quand l'enfant présente une
déficience qui requiert une approche particulière ou une
compétence spécifique en matière de garde.
Or, l'énoncé de politique est cruellement muet à
cet égard. Pourtant, la politique du gouvernement du Québec en
matière d'intégration sociale des personnes handicapées
proposait déjà à l'office des services de garde, dans le
document À part... égale, il y a cinq ou six ans, d'implanter des
services de gardiennage à domicile pour les familles d'enfants
handicapés, de mettre en oeuvre des formules permettant à ces
familles d'obtenir et d'administrer des budgets pour l'acquisition des services
de gardiennage dont elles ont besoin pendant les heures habituelles de travaH
parce que plusieurs besoins de garde exprimés par les parents restent
encore à satisfaire. Le gouvernement du Québec entend diversifier
les services de garde et modifier au besoin les définitions de ces
services. Page 31 de voire document.
La lecture de l'énoncé de politique nous porte à
croire que l'atteinte de cet objectif sera réalisée par le
financement de l'expérimentation de nouveaux modèles de garde
plus souples et mieux adaptés aux besoins de clientèles
spécifiques et pour soutenir les agences de services de garde en milieu
familial dans l'offre de référence de gardiens et de gardiennes
pour les parents désireux de faire garder leurs enfants à leur
domicile.
On prévoit 1 000 000 $ par année pour le financement de
tels projets, ce qui inclut également des projets pour la garde estivale
des enfants d'âge scolaire et ceux permettant l'ouverture de nouvelles
places en jardins d'enfants et en haltes-garderies. L'énoncé de
politique est donc très en deçà des attentes
déjà formulées et des propostions d'actions du
gouvernement du Québec en matière d'intégration sociale de
la personne handicapée. L'ajout de 3 000 000 $ en
trois ans sur un total de 514 000 000 $ représente très
peu.
Relativement à la politique d'intégration des enfants
handicapés dans les services de garde, en premier lieu sur le droit
à l'intégration, 1 y a maintenant cinq ans...
Le Président (M. Bélanger): Je m'excuse, M.
Faulkner, nous devons vous demander de conclure.
Mme Harel: À moins d'un consentement? J'aurai l'occasion
alors de discuter avec vous et on reviendra sur les questions que vous n'aurez
pas eu l'occasion de traiter.
Le Président (M. Bélanger): Malheureusement. Vous
voulez peut-être émettre une brève conclusion pour
terminer?
Mme Godbout-Perreault: Vous me permettez de faire...
Le Président (M. Bélanger): Je vous en prie,
madame.
Mme Godbout-Perrreault: Pour nous, la politique de services de
garde est un volet majeur d'une politique familiale. Elle doit témoigner
de la volonté collective de soutenir la famille en permettant aux
parents de mieux concilier leurs responsabilités parentales et
professionnelles et de tenir compte de façon prioritaire des
intérêts des enfants à être gardés. Elle
commande donc une préoccupation marquée pour la qualité
des services, le développement de services variés respectant les
besoins et les choix des parents, incluant une préoccupation
évidente pour les besoins spécifiques de certaines familles,
notamment celles où vivent des personnes handicapées,
l'accessibilité et la disponibilité des services, une structure
de financement assurant un financement adéquat des services, une
rémunération accrue du personnel oeuvrant dans ce secteur, une
uniformisation de cette rémunération, l'amélioration
constante de la formation du personnel, un soutien financier de valeur
équivalente aux familles, quel que soit le type de service choisi, une
aide financière accrue " aux familles à faible revenu, de
façon que les coûts ne constituent pas des freins à
l'exercice du libre choix des parents.
Les enfants constituent l'avenir d'une société.
L'intérêt collectif démontré à l'endroit des
enfants et des familles est révélateur de notre
préoccupation pour la qualité de vie des personnes. Il importe
donc que, pour nous comme pour vous, la politique des services de garde
s'intègre comme mesure de renforcement à rengagement
récent du gouvernement québécois de soutenir les familles
du Québec.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie
beaucoup, madame.
Mme la ministre?
Mme Gagnon-Tremblay: Oui. Merci, madame, messieurs. Je pense que
dans votre mémoire vous avez bien identifié toute la
problématique des services de garde. J'aimerais peut-être en
premier lieu, parce que cela me concerne davantage lorsque vous parlez de la
condition féminine par rapport à la politique des services de
garde... Je pense qu'il existe des raisons historiques pour lesquelles la
responsabilité de l'Office des services de garde à l'enfance est
logée auprès de la ministre déléguée
à la Condition féminine. Je pense, entre autres, aux groupes de
femmes qui ont été les premiers organismes à
préconiser la mise en place de services de garde; I y a aussi le
Secrétariat à la famille qui est une création beaucoup
plus récente. Pour toutes ces raisons, j'avoue que c'est peut-être
accidentellement que les services de garde se sont retrouvés à la
Condition féminine, mais compte tenu des nombreux besoins dans le
domaine de la santé et des services sociaux je pense qu'on n'en serait
peut-être pas arrivé, finalement, à un énoncé
de politique aujourd'hui si on n'avait pas identifié davantage ce besoin
spécifique à la Condition féminine.
Lorsque je regardais la manifestation de vendredi dernier à la
télévision, je me rendais compte que cela semblait être
encore un problème de femmes puisqu'on n'y voyait encore à peu
près que des femmes. Malheureusement, je trouvais dommage de voir que
les pères n'étaient pas là, que cela semblait être
encore une affaire de femmes.
Tout cela pour vous dire que je suis totalement d'accord avec vous pour
dire qu'un jour ou l'autre, lorsque le processus sera bien enclenché, on
devra penser possiblement à faire une modification et à
transférer ces services à la Famille, qu'ils relèvent
effectivement de la Famille et non pas uniquement de la Condition
féminine.
En ce qui concerne le développement des services de garde, vous
préconisez que soit tenue régulièrement une enquête
dans le but de répondre aux besoins qu'on pourra identifier. Je dois
vous mentionner que c'est justement l'objet de la planification
régionale qu'on doit amorcer incessamment avec tous les partenaires du
milieu dans le but justement de bien Identifier chacun des besoins et de
répondre à ces besoins-là.
Il est certain qu'actuellement on ne répond pas à tous les
besoins et on n'a pas toutes les solutions non plus. La commission
parlementaire est ici pour cela. Je pense que, même après la
commission parlementaire, on n'aura pas encore toutes les solutions. Je pense
qu'on devra expérimenter différents projets. On disait tout
à l'heure que les sommes ne sont peut-être pas suffisantes. Il y a
aussi actuellement une caisse d'aide qui est prévue à la
disposition de toutes les provinces. Je pense qu'on devra s'efforcer de
préparer des projets dans le but d'aller chercher
le maximum pour le Québec. Il y a des besoins qu'on devra
combler, des besoins peut-être pas nouveaux, qu'on a identifiés
depuis longtemps, mais pour lesquels on n'a pas eu de réponse
jusqu'à maintenant
Dans le cadre de cette diversité des besoins, il est certain que
l'expérimentation de la garde à domicile pour toute la
clientèle d'enfants handicapés sera considérée
prioritairement. Par contre, cette expérimentation n'exclut pas pour
autant l'intégration des enfants handicapés dans les
services.
Vous disiez tout à l'heure qu'il y a longtemps qu'on a
interpellé le gouvernement depuis cinq ou six ans, pour intégrer
davantage les enfants handicapés. Vous avez cité, en plus, la
politique d'intégration de l'Office des services de garde à
l'enfance. Je dois vous dire que, malgré tout, on ne peut pas affirmer
que rien ne s'est passé depuis. Justement, depuis, vous avez quand
même une politique de l'office des services de garde pour les enfants
handicapés.
J'avais l'occasion de mentionner ce matin que, déjà, 121
garderies, 121 services équivalant à 235 places sont
prévus. Je sais que c'est insuffisant, mais on devra en
développer davantage. Par contre, en 1986-1987, le budget
s'élevait à tout près de 500 000 $ annuellement. L'enfant
handicapé est une préoccupation. D'ailleurs, ce matin, le Conseil
québécois pour l'enfance et la jeunesse nous le soulignait aussi.
C'est une préoccupation, mais aussi une priorité pour le milieu
familial.
Vous ne sembliez pas être d'accord avec la priorité qu'on
accordera au milieu de travail au cours des deux prochaines années.
Comme vous le savez, au cours des deux prochaines années, 50 % des
places en garderie seront réservées pour le milieu de travail.
Selon notre plan de développement, on a quand même prévu
certains développements de services au cours des trois prochaines
années, mais les deux dernières années seront
modifiées selon la planification régionale qui sera faite. C'est
certain qu'il n'y a rien de coulé dans le ciment. Je pense qu'on doit
s'adapter à cette planification. Donc, en ce qui concerne le milieu de
travail, on travaillera avec ses entrepreneurs, ses entreprises, dans le but
d'identifier si les besoins sont là.
Je ne pense pas qu'il y ait uniquement des inconvénients à
la garde en milieu de travail. Le Conseil du patronat réclame davantage
de garde en milieu de travail. Il y a des avantages pour les employés;
entre autres, pour certains, il y a la question de la réduction du temps
de transport pour leur permettre de visiter l'enfant durant le jour. Parfois,
tes heures d'ouverture sont plus flexibles parce qu'elles sont justement en
fonction du parent travaileur de l'entreprise même. Les tarifs peuvent
être parfois moins élevés que dans d'autres garderies, par
exemple, si l'entreprise en fait une priorité. On peut aussi
accroître la familiarité de l'enfant avec le monde du travail des
parents et sécuriser davantage le parent qui est près de l'enfant
iI y a des avantages et aussi des inconvénients. On ne peut pas, non
plus, implanter une garderie dans tous les milieux de travail; cela prend quand
même une qualité de vie importante, que ce soit en ce qui concerne
les locaux ou l'aire de jeu. Mais je pense que là où c'est
possible... C'est quand même depuis fort longtemps qu'on demande d'ouvrir
des garderies en milieu de travail. Et, comme ces garderies doivent s'inscrire
au plan de développement de l'office des services de garde, elles
doivent attendre le même temps. Souvent, elles se découragent et,
comme d'autres promoteurs d'ailleurs, elles n'ouvrent pas. On sait que dans une
entreprise, lorsqu'on décide d'ouvrir une garderie, on veut
répondre à un besoin immédiat et non pas à un
besoin dans cinq ans ou dans dix ans.
Finalement, je veux vous dire qu'il y a des besoins, mais que,
malgré tout, lors de notre planification régionale, s'iI y a des
milieux ou des régions où ce ne sera pas possible, compte tenu
des priorités des parents... Je pense que la seule façon de bien
reconnaître les priorités des parents, ce sera tout simplement de
faire... On a beau faire des guerres de chiffres en disant: Voici, on n'est pas
d'accord avec tel sondage ni avec tel chiffre, mais je pense que c'est la
planification régionale qui nous permettra effectivement de bien
connaître et d'identifier les besoins.
Vous avez parlé d'uniformisation des conditions de travail. Je
n'ai pas bien saisi ce que vous avez dit à ce moment-là. Est-ce
que vous voulez dire que les éducatrices et les éducateurs de
garderie, entre autres, devraient être payés le même
salaire, devraient être traités sur le même pied,
c'est-à-dire avoir un salaire égal et des conditions de travail
égales? Est-ce que c'est cela que vous avez voulu dire ou si j'ai mal
saisi?
Mme Godbout-Perreault: Ce que nous mentionnons, ce sont des
conditions uniformes. Bien sûr, il y a le ratio dont nous sommes au
courant. Maintenant, il nous semble que, si on veut des services de
qualité et si on veut assurer un personnel qui soit assez stable, il
faut bien que des conditions de travail permettent d'avoir un personnel stable.
Donc, il faut prévoir des conditions de travail qui soient... Nous
n'allons pas jusqu'à parler d'un salaire négocié pour
l'ensemble de la province, mais nous parions de conditions stables.
Mme Gagnon-Tremblay: Vous savez qu'actuellement, dans chacune des
garderies, ce sont les administrateurs, donc ce sont les parents qui
décident des conditions de travail de chaque éducatrice ou
éducateur, donc autant de conditions de travail qu'il peut y avoir de
garderies. Finalement, la seule façon d'uniformiser, ce serait qu'il y
ait quelqu'un d'autre qui prenne la charge de ces conditions de travail,
c'est-à-dire...
Qui va négocier les conditions de travail si ce ne sont pas les
parents qui vont le faire? Comment uniformiser dans ces circonstances, à
moins d'étatiser?
Mme Godbout-Perreault: Vous voulez ajouter quelque chose, Michel,
à ce sujet?
M. Moral (Michel): Oui. Quand on parle d'uniformisation,
évidemment, ce qu'on se dit, c'est: Quelqu'un qui exécute un
travail dans une garderie à Montréal, une tâche
spécifique, devrait avoir droit à une rémunération
équivalente à celle de quelqu'un qui fait le même travail
à Laval ou à Québec. Je dis "équivalente*, en tout
cas à peu près semblable. A l'heure actuelle, il y a des niveaux
de rémunération tellement disparates les uns par rapport aux
autres qu'on en arrive à des disparités dans la
rémunération et surtout à faire en sorte que le personnel
de ces garderies ne soit pas stable, c'est-à-dire qu'il est toujours
à la recherche de meilleures conditions de travail. Les techniciens et
les techniciennes cherchent à aller vers une autre garderie qui paie
mieux ses employés.
Ce que nous disons, c'est qu'une certaine uniformisation - je pense que
le terme est vague - pourrait faire en sorte d'améliorer la
stabilité du personnel, donc, par voie de conséquence, la
qualité des services.
Mme Gagnon-Tremblay: Mais comme chaque service est autonome et,
comme je l'ai mentionné et je le répète,
géré par les parents, quelle est la suggestion que vous nous
faites pour uniformiser?
M. Morel: Je pense qu'il y a sans doute moyen d'en arriver
à définir des critères minimaux de
rémunération tout en laissant aux parents une marge de manoeuvre
discrétionnaire. D'abord, je pense qu'une structure de financement
adéquate pourrait permettre aux parents de gérer la garderie en
fonction de critères qui pourraient être déterminés
afin d'en arriver à des rémunérations, et je dis, de
valeur équivalente, tout simplement. (14 h 45)
Mme Gagnon-Tremblay: Je n'ai pas d'autres questions, M. le
Président.
Le Président (M. Bélanger): Bien. Mme la
députée de Maisonneuve.
Mme Harel: Merci, M. le Président. D'abord, j'aimerais
m'excuser pour ma voix éraillée. Je salue les porte-parole de la
Confédération des organismes familiaux du Québec. Durant
les discussions que vous venez d'avoir, je me disais que les commissions
scolaires sont aussi des entités autonomes et iI n'en demeure pas moins
que la rémunération des enseignants est la même sur tout le
territoire. Depuis longtemps, iI y a une revendication dans le rnilieu des
travailleuses de garderie qui est celle d'une table provinciale de
négociation où les garderies, tout en conservant leur autonomie,
pourraient discuter de façon concertée, des conditions de
travail.
J'aimerais vous permettre, M. Faulkner, de compléter, comme je
vous le proposais tantôt, si vous le désirez, les recommandations
que vous vouliez faire à la commission.
M. Faulkner Merci beaucoup. De toute façon, je serai très
bref. Je pense avoir fait tantôt une distinction entre les enfants
handicapés et les parents handicapés. Ce sont deux
clientèles différentes, quant à moi, qui pourraient
être visées par une politique sur les services de garde.
D'autre part, je connais très bien la politique
d'intégration en garderie et je la trouve excellente. Ce n'est pas
là-dessus que sont nos interrogations, mais on aimerait que le droit
à l'intégration soit clairement reconnu dans la Loi sur les
services de garde à l'enfance. Il est prévu à l'article 2
que tout détenteur de permis peut refuser l'accès aux services de
garde à un parent, donc à un enfant, et iI nous semble que cet
article-là va peut-être un peu à rencontre de la charte
québécoise des droits selon laquelle on ne peut pas faire de
discrimination en vertu d'un handicap. Ce n'est pas la première fois que
nous sommes confrontés à ça, où on a de grandes
déclarations de principe en faveur de l'intégration. On a la
Charte québécoise des droits et libertés de la personne
qui nous garantit qu'il n'y aura pas de discrimination en vertu d'un handicap
ou d'une déficience mais, dans le vécu quotidien, on est toujours
confrontés à un paquet de dispositions et de règlements
qui limitent ce droit-là. Et, en matière de services de garde,
l'article 2 est relativement clair là-dessus. Alors, dans ce
sens-là, nous aurions une recommandation à faire à l'effet
d'envisager la possibilité de garantir l'accès aux services de
garde dans la loi.
J'aimerais souligner un deuxième point de vue. Je me demande si
l'office des services de garde s'est penché sur... Premièrement,
est-ce qu'il y a eu une évaluation de faite de l'intégration des
enfants en garderie, d'enfants handicapés, d'une part? D'autre part, je
sais qu'iI y a une tendance récente dans les centres d'accueil, dans le
cadre de programmes spécifiques pour les enfants, qu'on appelle des
programmes de stimulation précoce - qui sont donnés en externe,
qui, à l'origine, étaient dispensés dans des centres de
jour, des centres d'accueil, et qui, progressivement, ont été
transférés en services à domicile - qui, maintenant,
sollicitent les services de garde. Cela veut dire qu'on aurait
éventuellement des éducateurs spécialisés des
centres d'accuel qui viendraient dispenser des services de stimulation
précoce à des enfants dans des services de garde. Je sais que
c'est une tendance qui est déjà amorcée et ma crainte,
c'est qu'au nom de la normalisation et de l'intégration des enfants
handicapés on oublie te spécifique de
l'enfant handicapé et qu'on le prive peut-être de tous les
services dont il aurait besoin à ce moment-là, qui seraient des
services de stimulation précoce qui sont donnés par du personnel
compétent hablité à le faire et qu'on ne retrouve
peut-être pas dans tes services de garde. Je sais qui y a une tendance -
dans la région de Montréal, c'est déjà largement
commencé - et je ne voudrais pas que, môme s'il est prévu
dans la loi que les services de garde doivent offrir des activités de
développement aux enfants - on est bien d'accord avec ça, tant
mieux... Mais ces activités-là et des programmes de
réadaptation, c'est autre chose. On craint que, tranquillement, on ne
glisse et on n'abandonne ces programmes de réadaptation pour
peut-être se limiter aux services dispensés par tes garderies.
Mme Harel: Merci, M. Faulkner. Je crois que l'expertise que
détient la COFAQ est unique, d'une certaine façon, compte tenu du
fait que vous êtes un regroupement d'organismes familiaux qui militez
dans te milieu. Je vous le dis bien simplement, j'espère que. durant le
mois que nous allons examiner toute la question des services de garde, la
ministre responsable de la politique familiale viendra au moins nous saluer. Je
peux vous dire que je souhaiterais plus. J'aurais d'ailleurs souhaité
qu'elle soit présente aujourd'hui au moment où nous entendions
des groupes qui se préoccupent plus particulièrement de la petite
enfance et de la famille. Le cabinet de la ministre a
préféré entendre les groupes qui, comme le vôtre,
s'occupent plus généralement de politique familiale et, demain,
nous commencerons à entendre les intervenants du milieu des services de
garde.
Je prends bonne note des réflexions que vous faites
dans votre mémoire, notamment concernant l'ignorance dans laquelle les
organismes familiaux sont de la stratégie globale du gouvernement en
matière de politique familiale, de son plan d'action qui se fait
toujours attendre et du fait qu'un énoncé de politique en
matière de services de garde ne peut pas encore se raccrocher comme tel
à un plan d'action qui nous est toujours Inconnu. J'en al pris bonne
note.
J'aimerais vous entendre sur deux questions
particulières, la première concernant les garderies en milieu de
travail. Vous avez une position assez ferme et, dans votre mémoire, en
particulier à la page 14, je crois, vous décrivez tes
désavantages qui pourraient être rattachés à ce type
de garde. Vous dites, par exemple: Cela peut astreindre les enfants à
des déplacements souvent plus longs aux heures de pointe dans une
circulation dense, les éloigner quotidiennement des enfants de leur
quartier, de leurs amis, de leur milieu, en plus de problèmes
évidents pour les familles de deux enfants dont l'un fréquente
l'école du quartier et l'autre la garderie en mBieu de travail.
J'aimerais vous entendre là-dessus. Compte tenu des rencontres et des
consultations que vous avez tenues sur cette question, avez-vous des
études que vous pourriez nous faire parvenir sur cette question?
Mme Godbout-Perreault: II y a une chose, Mme Harel, que je dois
aussi vous dire. Les consultations n'ont pas pu être très longues.
Vous le savez, nous étions à la période des fêtes et
ce n'est pas un temps facile pour consulter les familles.
Ce sur quoi nous avons bâti notre position, c'est en
fonction des consultations que nous avions déjà faites
antérieurement et en fonction des sondages faits dans le document
même où les parents n'ont pas manifesté de
préférence pour la garderie en milieu de travail; elle n'y est
même pas soulignée. Nous en avons discuté avec les parents
et ce sont des arguments qu'ils nous apportent.
Il y a aussi un autre point qui n'est pas là,
lorsqu'on a à accorder des budgets, c'est que la garderie en milieu de
travail est bonne et efficace pour les enfants qui ne fréquentent pas
encore le miieu scolaire. C'est pour une période de temps
limitée. On constate aussi que, de nos jours, le renouvellement de
personnel n'est pas si grand dans un milieu de travail. Donc, lorsque les
sommes vont davantage vers une garderie dans le quartier, si le personnel d'une
compagnie n'utilise plus ou n'a plus besoin de services de garde parce que les
enfants fréquentent l'école qui est parfois très
éloignée du milieu de travail, d'autres familles pourront
utiliser les mêmes équipements qui auront été mis en
place.
Mme Harel: Donc, vous préféreriez un service de
garde plus mixte qui serait ouvert au milieu, aux quartiers, et en fonction des
besoins du milieu et de ceux des employés.
Mme Godbout-Perreault: C'est ça, oui.
M. Morel: Sur la même question, même s'I
n'a pas été possible de tenir de réelles consultations
auprès d'un certain nombre d'organismes, on s'est aperçu ce matin
même, en discutant avec des représentants d'autres organismes, que
nos analyses, d'un côté, et les leurs, faites chacun de son
côté, en arrivent aux mêmes conclusions, que ce n'est pas,
selon nous, le mode de garde que devrait tendre à 'prioriser* le
gouvernement. Donc, si cela ne tient pas lieu de consultation, admettons qu'on
en arrive aux mêmes conclusions.
Mme Harel: D'ailleurs, vous recommandez dans votre mémoire
qu'il y ait plutôt l'introduction de congés parentaux, d'horaires
de traval et d'aménagement de temps de travail de manière
à tenir compte des responsabilités professionnelles plutôt
que des services de garde en milieu de travail. C'est ce qu'on doit
comprendre.
Mme Godbout-Perreault: Oui, c'est ce qu'on
doit comprendre. Je pense que, derrière tout ça, il y
aurait aussi une volonté du gouvernement: Est-ce que l'on veut que les
parents s'ajustent au milieu de travail ou si on veut soutenir les parents qui
sont des travailleurs? Pour moi, ça va faire toute une différence
dans les politiques que l'on va établir. Si on demande au milieu de
travail de tenir compte de la responsabilité parentale, on va donc
modifier des conditions de traval et on va reconnaître que des parents ne
sont pas toujours capables d'être présents et que c'est important
d'être parent au Québec. Donc, si on doit s'absenter, on n'est pas
pénalisé parce qu'on assume son rôle de parent. SI, par
contre, on subordonne toute la société, toute la vie familiale au
monde du travail, alors, on ne pourra pas dire qu'on soutient les parents et la
vie familiale.
Mme Harel: Dans votre mémoire, vous introduisez une notion
qui inquiète beaucoup. Vous dites que le mode de financement des
services de garde pourrait introduire des classes de garderies: des garderies,
disons, pour enfants de parents plus fortunés qui pourront payer des
tarifs plus élevés, donc qui auront un plus fort taux de
subvention et qui pourront donner de meilleurs services, et des garderies,
disons, pour des enfants de parents plus défavorisés. Est-ce que
c'est là l'opinion de la COFAQ que ce mode de financement est sujet
à ce type de conséquence?
M. Morel: Oui. Ce que nous considérons, c'est que le
financement des services et le soutien économique aux parents devraient
faire en sorte que le respect du droit de choisir des parents se
concrétise. Autrement dit, si les frais ou les tarifs en vigueur varient
d'un service à un autre ou même d'une garderie à une autre,
le parent va automatiquement faire le choix, malheureusement, d'aller vers le
service qui lui coûte le moins cher et la qualité des services
risque fort de s'en ressentir et la qualité de la réponse faite
par la collectivité aux besoins des parents risque aussi de s'en
ressentir.
Ce que nous disons, c'est que le financement des services de garde et le
soutien économique aux parents devraient faire en sorte que ce soutien
gouvernemental soit de valeur équivalente pour tous les parents. Donc,
doit-on parler à ce moment-ci d'une formule de financement par place,
tel que c'était avant, ou d'une formule modulée en fonction d'un
pourcentage? On n'a pas pu aller jusque-là dans nos analyses. Ce qu'on
dit, c'est que si le gouvernement veut vraiment respecter le choix des parents
quant au mode de garde, I faut que toute la question du financement vienne
respecter aussi la possibilité pour les parents de choisir
adéquatement. Cela est important.
Mme Harel: II y a déjà des tarifs qui sont
modulés de façon différente. Si je comprends bien, vous
dites qui ne faut pas que l'aide gouvernementale vienne aggraver cette
situation. C'est bien ça. Il y a quand même déjà des
tarifs qui sont différents. Le danger, c'est que la subvention, le mode
de calcul vienne, finalement, augmenter l'écart, si je comprends
bien.
M. Morel: vienne augmenter les disparités entre les
différents services et fasse en sorte que ça devienne un frein
à l'exercice du choix des parents. Le parent qui a un revenu faible ou
un revenu moyen, compte tenu de sa situation, va faire le choix d'aller vers
des services qui lui coûtent moins cher et dont la qualité
laissera peut-être à désirer. Il va aller vers un service
qui n'aurait pas été forcément son premier choix. Si on
veut respecter le choix, bien allons-y.
Mme Harel: Vous parlez beaucoup dans votre mémoire des
enfants qui trouvent à être gardés, mais en dehors des
services reconnus. Avant que le président me rappelle à l'ordre
parce que le temps sera terminé, je vais vous demander, M. Faulkner,
comment vous réagissez à la proposition de l'énoncé
de politique disant que les garderies à but lucratif soient
dorénavant subventionnées pour la garde des enfants
handicapés. Avez-vous eu l'occasion d'étudier cette
recommandation précise?
M. Faulkner: Non.
Mme Harel: Si tant est que votre organisme le fait, vous pouvez,
jusqu'à la fin de nos travaux, nous faire parvenir vos commentaires. (15
heures)
Vous nous parlez des enfants qui ont besoin d'une garde plus
intermittente. Vous les évaluez à 464 000, en fait presque un
demi-million, je pense, qui n'ont pas besoin d'être gardés
régulièrement, à temps plein, dites-vous, à la page
10 de votre mémoire, mais qui ont besoin d'une garde à temps
partiel.
Ce matin, la présidente du Conseil du statut de la femme
signalait que 23 % des travailleuses sont à temps partiel et, que
là aussi, il y a un mode de garde qui doit être planifié.
Avez-vous des recommandations à faire concernant le mode de garde
à temps partiel? Comment le voyez-vous? Par le biais des
haltes-garderies, jardins d'enfants, qui ne sont pas subventionnés, qui
ne permettent pas l'exonération financière, ou
préconisez-vous qu'il y ait exonération financière dans ce
nouveau type de services de garde ou qu'il y ait ouverture de places à
temps partiel dans la garde reconnue jusqu'à maintenant?
Mme Godbout-Perreault: Madame, notre position est plus en termes
de... On a demandé que la promulgation des articles 5 et 6 soit faite,
que, finalement, les haltes-garderies deviennent une réalité.
Maintenant, là où nous nous situons, c'est plus en termes des
mesures qui permettent aux parents d'utiliser un service ou l'autre, mais
qu'on les soutienne financièrement de façon
équitable. Que ce soit un milieu ou l'autre, pour autant qu'il y ait un
service et un soutien équitables. Michel.
M. Morel: J'aimerais ajouter que la recommandation S qui est
annexée au mémoire, si on en fait lecture, dit ceci: Que le
gouvernement renonce à sa priorité concernant le
développement des garderies en milieu de travail, qui ne nous semblent
pas correspondre aux besoins et préférences des familles -
là Je viens à la réponse - et qui "priorise" plutôt
le développement de services nouveaux correspondant à des besoins
précis des familles - et là, on précise notamment, les
besoins des familles dont l'un des membres est handicapé - ainsi que les
services pour la garde des enfants d'âge scolaire durant la saison
estivale et les services de halte-garderie et de jardin d'enfants.
Évidemment, on peut penser à d'autres besoins des parents pour
lesquels des services nouveaux pourraient être mis en marche. À ce
moment-là, votre question trouve sa réponse dans cette
recommandation.
Mme Harel: Je vous remercie. Mme la députée de
Marie-Victorin.
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Marie-Victorin.
Mme Vermette: Je suis toujours très heureuse de voir la
préoccupation des parents à l'endroit de l'intégration des
personnes handicapées, étant responsable du dossier des personnes
handicapées pour ma formation politique. Ayant suivi depuis trois ans ce
dossier, il me tient énormément à coeur que ça
devienne du concret, cette intégration, et que, finalement, on
l'applique à tous les niveaux. Comme je le disais plus tôt, ce
matin, c'est peut-être la meilleure occasion pour faire en sorte que les
préjugés finissent pas s'estomper. C'est au tout début de
la première enfance que, finalement, on apprendra à côtoyer
des gens avec un handicap de quelque nature que ce soit et qu'on sera
peut-être plus favorable à la cohabitation, après, pour le
reste de sa vie.
J'aimerais savoir - vous n'avez pas pu vous prononcer tantôt - si
vous préféreriez que ce soit dans les garderies privées
plutôt que ce soit accessible, finalement, à toutes les formes de
garderies, le soin des enfants ayant un handicap. Mais ça fait partie
des propositions en disant qu'on les aiderait davantage, on les dirigerait
davantage vers des garderies privées. Mais ma préoccupation
à l'heure actuelle... On disait que la qualité a ses exigences.
J'imagine qu'on n'a pas parlé vraiment de formation. Croyez-vous qu'en
garderie, justement, actuellement, le personnel a la formation
nécessaire pour répondre à ce genre de clientèle
que sont les personnes handicapées physiques ou ayant un retard
intellectuel?
M. Faulkner: Je répondrai de façon approximative.
On n'a jamais été capables d'en faire une évaluation un
peu serrée. L'Office des services de garde à l'enfance pourrait
peut-être faire une évaluation semblable. Evidemment, c'est une
question qu'on s'est posée, quant à la formation du personnel.
C'est une impression, ça ne nous apparaît pas tellement un
handicap du service parce que les enfants sont très jeunes et la
déficience apparaît comme étant plus lourde au fur et
à mesure que les enfants vieillissent. Un enfant de trois ou quatre ans,
s'a est mobile et s'iI ne pose pas de problèmes physiques majeurs, est
assez facilement accepté en garderie. Par rapport à d'autres
milieux, le milieu de garde est un milieu relativement ouvert, il faut le
reconnaître. Alors, en termes de formation, je ne pense pas que cela ait
posé de problèmes jusqu'à maintenant, à moins
d'arriver avec des cas lourds. Les personnes handicapées auxquelles je
pense et que je représente, on les qualifie de déficience
moyenne, mais cela les rend tout à fait aptes à profiter des
services de garde en garderie. Je ne pense pas qu'il y aurait de
problèmes concernant la formation du personnel. L'Office des services de
garde à l'enfance a déjà un programme de formation. Je me
souviens de l'avoir consulté il y a deux ans et cela m'apparaissait
correspondre aux besoins. S'il a été effectivement
appliqué, je ne suis pas en mesure de le dire ou de le confirmer;
l'office, peut-être pas non plus.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. Si
Mme la députée de Maisonneuve veut bien remercier le groupe.
Mme Harel: Oui, avec plaisir. Je connais la COFAQ pour les
travaux qu'elle fait qui ont été particulièrement utiles
en matière de sécurité du revenu. Je crois que vous nous
rappelez qu'avant toute chose l'énoncé de politique doit
répondre à un projet de politique familiale. Il ne s'en dessine
pas un clairement une fois la lecture complétée et
j'espère que les remarques que vous nous avez faites seront prises en
considération par ta ministre déléguée à la
Condition féminine, à défaut d'être entendues par la
ministre responsable de la politique familiale.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie, Mme
la députée de Maisonneuve. Mme la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Combien ai-je de minutes, M. le
Président?
Le Président (M. Bélanger): Quelques minutes.
Mme Gagnon-Tremblay: Tout à l'heure, vous avez
parlé des écarts de tarifs que les parents devaient payer. Donc,
cela suppose les disparités qui existent entre les différentes
garderies. On
salt qu'il en existe beaucoup, comme je le mentionnais ce matin lors de
mon discours d'ouverture. Vous avez des tarifs différents, des
conditions de travail différentes, des taux d'occupation
différents, des loyers différents. Il y a plein de
disparités entre les services. C'est justement pour cela qu'on a
modifié notre formule d'exonération aux parents, dans le but de
donner plus d'argent aux parents. La formule qui était prévue
auparavant, soit 10,50 $ par enfant par jour, était une formule rigide,
une formule stable. Ce qui est prévu actuellement avec la formule de
base de 4,75 $, plus 40 % du tarif, c'est justement pour combler cet
écart et faire en sorte que le parent qui pale 18 $ puisse être
soutenu comparativement à celui qui paie 13 $ pour un même
service. Vous savez, et je pense que vous êtes en mesure de le
déterminer, que ce n'est pas parce qu'un parent paie 18 $ que c'est un
parent plus riche ou que c'est une garderie plus riche. S'il paie 18 $, c'est
probablement parce que la garderie a des dépenses et des besoins plus
considérables et qu'elle est obligée de demander de tels tarifs
pour payer ses dépenses, puisque ce sont les parents qui
déterminent les tarifs.
Alors, dans le cadre de cette nouvelle formule d'exonération, 9
000 000 $ d'argent neuf seulement l'an prochain seront investis pour aider
davantage les parents à réduire cet écart entre les tarifs
existant actuellement.
En terminant, je pourrais aussi parler de la question de la
consultation. Tout à l'heure, vous nous reprochiez le fait qu'on a eu
très peu de temps pour la consultation entre l'énoncé de
politique et la présente commission parlementaire. Justement c'est que
la commission parlementaire est là pour la consultation. Je dois vous
rappeler cependant que le milieu était consulté depuis de
nombreuses années, que ce soit par le gouvernement fédéral
ou le gouvernement provincial. Depuis de nombreuses années, on identifie
les problèmes et je suis persuadée que si on avait
recommencé encore ce genre d'études on nous l'aurait
reproché. Je comprends, par contre, que le fait d'avoir annoncé
la politique en novembre et de tenir cette commission parlementaire maintenant,
au cours de la période des fêtes, cela a pu vous occasionner
certains problèmes, mais d'une façon ou d'une autre le milieu
avait été quand même grandement consulté et cette
commission-ci permet aussi la consultation.
Quant à la politique familiale, cela aurait peut-être
été souhaitable que le plan soit dévoilé, mais je
tiens à vous souligner là encore que même, si le plan
d'action de la politique familiale n'est pas encore dévoilé, cela
n'a pas empêché pour autant le gouvernement d'agir. Si vous vous
souvenez du budget Levesque. des 700 000 000 $ et quelques qui ont
été annoncés pour la famlle, à ce moment-ci, vous
avez la politique familiale. Nous travaillons actuellement à
préparer les normes du travail et les congés de maternité.
Alors, je pense que vous devez quand même conserver cette confiance; ce
n'est pas parce que le plan n'est pas connu que nous ne prenons pas en
considération pour autant la famille.
Je vous remercie de votre exposé et de vos suggestions que nous
prendrons en considération.
Le Président (M. Bélanger): La commission remercie
la Confédération des organismes familiaux du Québec et
Invite à la table des témoins le Conseil de la famille
Richelieu-Yamaska.
Le Conseil de la famille Richelieu-Yamaska sera représenté
par Mme Pierrette Perreault, Mme Normande Dolan, Mme Murielle Désilets
et Mme Lise Grenon.
Mme Harel: On va suspendre, M. le Président, selon notre
habitude, pour une seconde.
Le Président (M. Bélanger): Si on regarde le nombre
d'organismes et le peu de temps, 30 minutes, on va tout simplement faire en
sorte qu'à la fin de la journée on soit largement
déficitaires. J'essaie de gérer cela le plus serré
possible. Je m'en excuse.
Mme Harel: Je veux bien que vous régissiez ça
serré ou gériez cela serré, mais cela ne nous permet pas
de saluer des gens qu'on n'aura pas l'occasion de revoir. Ce serait la
première fois, en commission parlementaire...
Le Président (M. Bélanger): Je sais, madame.
Mme Harel: ...depuis des années, que Je verrais le
procédé que vous utilisez. Je ne souhaite pas qu'on se
prétende sur une chaîne de montage.
Le Président (M. Bélanger): Je sais, madame, mais
si vous acceptez que les travaux se poursuivent plus tard, si vous acceptez
toutes les contraintes qui vont avec, personnellement, je n'ai aucune
objection, mais si j'ai l'accord de cette commission. Veuillez comprendre que
ce n'est pas ma décision personnelle, c'est une décision que nous
Imposent les limites de temps. On s'en excuse d'avance auprès de tous
nos invités. Malheureusement, nous devons faire vite.
Nous accueillons donc le Consel de la famille Richelieu-Yamaska. Vous
avez 30 minutes, dont 10 minutes pour la présentation de votre
mémoire; je vous suggère donc un résumé. Ensuite,
il y aura la période de questions et de discussions avec les
parlementaires.
Je vous prierais aussi de vous présenter et de présenter
vos porte-parole. Dès que vous aurez à prendre la parole, s'iI
vous plaît, bien vouloir donner vos noms auparavant; c'est pour les fins
d'enregistrement du Journal des débats. Je vous remercie et bonne
chance.
Conseil de la famille Richelieu-Yamaska
Mme Godbout-Perreautt: Bonjour. Je précise que, parce que
le Conseil de la famille est membre de la COFAQ, c'était à titre
de déléguée que j'étais présente tout
à l'heure, et présidente de la COFAQ. Maintenant, je suis membre
du Conseil de la famille comme une autre personne. Je suis accompagnée
de Mme Normande Dolan, Mme Murielle Désilets et Mme Use Grenon, du
Consei de la famille Richelieu-Yamaska.
Le Président (M. Bélanger): Bonjour. Cela nous fait
plaisir.
Mme Godbout-Perreault: Mon nom est
Pierrette Godbout-Perreault. Le Conseil de la famlle oeuvre depuis 18
ans. Nous sommes une fédération régionale. Nous regroupons
onze organismes et, à l'intérieur de ces organismes, il y a une
centaine d'associations locales. Le consei travaille depuis ces 18 ans à
l'obtention d'une politique familiale globale. C'est une politique axée
sur la qualité de la vie de famille, l'épanouissement et
l'égalité des personnes au sein des familles, la concertation
avec les familles et la prévention.
Pour nous, une politique des services de garde doit tenir compte des
besoins de garde multiples des familles - et ces besoins sont variés -
qui ont des jeunes enfants et, que ce soit pour le travail ou pour d'autres
raisons, les besoins de garde sont toujours présents.
Nous avons dû, dans ce cas-ci comme dans l'autre, nous limiter
dans nos consultations et dans notre travail et notre mémoire ne couvre
pas l'ensemble de la politique. Nous nous sommes davantage penchées sur
les principes directeurs et les orientations. Cela ne veut pas dire que nous
sommes d'accord avec d'autres parties du document, mais nous devions nous
restreindre.
Nous nous Interrogeons aussi, comme organisme familial régional,
sur le fait que nous n'avons pas de plan d'action à partir duquel nous
pourrions faire l'évaluation de la politique des services de garde.
Nous vous ferons part de nos grands commentaires concernant les
principes directeurs. Le soutien essentiel pour les parents, nous sommes
d'accord avec ce principe, et pour tous les parents et non seulement pour les
parents au travail, comme le laisse entendre le document. Pour nous, bien
sûr, des mesures dans le monde du traval pourront facliter la tâche
des parents qui sont travailleurs, mais I y a aussi des besoins en termes de
garde lorsqu'on va recevoir des services de santé, lorsqu'on poursuit
des études ou lorsqu'on veut participer à la vie communautaire.
(15 il 15)
Que le milieu des services de garde soft un milieu de
développement pour l'enfant, pour nous, cela va de soi puisque les
services de garde doivent être le prolongement de la famille. Ils doivent
donc permettre le développement Intégral de l'enfant Que ce
développement des services de garde respecte les choix des parents, nous
sommes complètement d'accord. Mais vous verrez que, dans certaines de
nos recommandations, nous vous disons que nous ne trouvons pas que le document
en tient compte puisqu'il va surtout dans le sens des services qui sont
régis.
On parle de principes où I est question d'une
préférence pour les services gérés par les parents.
Nous sommes d'accord aussi avec cela pour autant qu'on aide les parents dans
leur travail de gérer ces services et qu'on leur facilite la
tâche.
Il y a une réaffirmation de l'autonomie des services de garde. On
constate que l'application de ce principe a subi certaines entorses puisqu'l y
a des lois qui sont édictées par l'Office des services de garde
à l'enfance et I y a des permis qui sont accordés. Donc, nous ne
voudrions pas que le développement des services de garde ne
relève que de l'initiative des parents. Nous voudrions que le
gouvernement continue de maintenir ses responsabilités en termes de
développement des services de garde pour les enfants. Nous ne voulons
pas enlever aux parents cette responsabilité, mais nous trouvons qu'elle
peut parfois leur sembler très lourde à porter.
Qu'il y ait une responsabilité communautaire, nous sommes
d'accord. Pour nous, ce principe reconnaît la contribution de ta famille
à la société et la responsabilité de la
société envers la famille.
Maintenant, pour ce qui est du développement des services de
garde, c'est Mme Lise Grenon qui poursuivra.
Mme Grenon (Lise): Le développement des services de garde
présenté dans le document d'orientation l'est uniquement en
fonction des services régis par la loi. La lecture du tableau 4,
à la page 25, indique que les préférences des parents,
selon le mode de garde et l'âge de l'enfant, montrent toujours un
pourcentage plus élevé pour ta garde au domicile de l'enfant,
quels que soient l'âge et le temps de l'année, à
l'exception des enfants de trois et quatre ans. Cette préférence
n'est plus prise en considération dans l'ensemble des mesures et
priorités proposées, sauf pour un projet expérimental.
Ceci nous amène à déclarer que, malgré
l'annonce de la création de 60 830 nouvelles places sur une
période de cinq ans, nous croyons que c'est insuffisant et
Insatisfaisant puisque c'est échelonné sur une trop longue
période et axé, dès te début, presque uniquement
sur des services en institution, alors que la majorité des parents
préfèrent la garde à domicile et n'ont d'autres moyens,
non plus, que de recourir à des services non régis car, le
coût étant trop élevé, I y a aussi une
non-disponibilité des services et des horaires irréguliers pour
certaines personnes qui travaillent dans des usines ou dans d'autres
commerces.
En lien avec cette lecture de la préférence
des parents et le constat que nous avons fait aussi, c'est le moyen le plus
utilisé et nous vous demandons d'amender la Loi sur les services de
garde à l'enfance afin de permettre que se constituent, sur le
modèle des agences de garde en milieu famlial, des agences de gardiennes
en milieu familial qui, elles, répondraient aux
préférences des parents et ne demanderaient pas un budget
d'implantation aussi élevé. Ce serait chaque famille qui
offrirait le service et cela créerait un nombre encore plus grand de
places.
Après avoir reçu une formation ou obtenu une
reconnaissance de leurs acquis, ces personnes pourraient recevoir un permis et
les parents pourraient, en choisissant ces personnes, profiter d'un programme
d'exonération s'ils y sont admissibles. Ce serait une solution à
l'accessibilité restreinte au programme d'aide financière pour
les parents, tel que décrit à la page 59 du document. L'ensemble
des familles aurait le choix du mode de garde des enfants et non pas seulement
les familles dont le revenu peut le leur permettre. Nous croyons que c'est un
moyen de valoriser et de favoriser la vie familiale.
Nous reconnaissons qu'il est nécessaire d'offrir et
de développer une variété de services de garde en garderie
en collaboration avec d'autres intervenants et d'assouplir certaines
règles pour répondre aux besoins diversifiés des familles.
Nous voulons cependant qu'il y ait un meilleur équilibre, tel que le dit
le titre du document, dans la "priorisation* du développement des
services pour répondre aux préférences des parents.
Un rééquilibrage, la garde en milieu
familial. Toujours en lien avec la préférence des parents, nous
nous posons également des questions sur la proportion du
développement accordé à la garde en mlieu familial par
rapport à la garde en garderie en fonction des besoins à combler
décrits dans le tableau 6, surtout pour l'année 1988-1989, alors
qu'on propose 210 places et que ça répond à 15 % des
places. Par contre, dans les garderies, on prévoit instaurer 2331
places, alors que ça répond à 59 % des places.
Mme Godbout-Perreault: C'est maintenant 'Mme Normande Dolan qui
poursuivra pour parler de la contestation que nous faisons de la
priorité des services en milieu de traval.
Le Président (M. Thutinger): II reste deux minutes,
madame.
Mme Dolan (Normande): D'accord. Le Conseil de la famille ne veut
pas nier le besoin de garde en mlieu de traval, mais s'interroge plutôt
sur le fait que le gouvernement veuDIe en faire une priorité. Par
contre, la garde en milieu de traval présente de nombreuses
difficultés; on en a énuméré plusieurs tout
à l'heure et j'en ai ajouté une ici, le transport en commun avec
les enfants, ce qui est souvent un obstacle pour se rendre au travail. De plus,
elles s'ajoutent au fait que ce choix n'est pas présent dans les
préférences des parents.
Il est reconnu aussi que les services ou entreprises qui
assument leur responsabilité sociale et offrent les services de garderie
en retirent des avantages concrets par le rendement supérieur de leurs
employés. Il n'est donc pas nécessaire de leur accorder, en plus,
des avantages financiers, donc des subventions. Une autre solution serait
d'établir des liens avec des garderies existantes dans le quartier pour
en faciliter l'utilisation par leurs employés, mais celles-ci ne
seraient pas considérées comme des garderies en milieu de traval
et n'auraient donc pas les inconvénients de la garderie en mlieu de
travail.
Le service de garde en mlieu scolaire. Nous sommes d'accord
avec l'une de vos priorités en ce qui concerne la garde en milieu
scolaire. Il y a donc lieu de développer plus rapidement ce mode de
garde et d'y apporter les modifications proposées afin de
répondre aux besoins des familles spécialement lors des
journées pédagogiques ou des congés scolaires. Plusieurs
Instances pourraient aussi répondre aux besoins des familles, tels le
service des loisirs, les loisirs socioculturels, selon les différentes
particularités des régions.
La garde de courte durée: les haltes-garderies. Le
parent au foyer, pour ne pas dire la femme au foyer, se réjouit de la
mise en vigueur des articles 5 et 6 de la Loi sur les services de garde
à l'enfance qui implique les services de halte-garderie et les jardins
d'enfants. Ils répondront davantage aux besoins des parents qui
s'occupent eux-mêmes de leurs enfants et qui ont des besoins de garde
occasionnels, mais nécessaires pour des raisons de santé physique
et mentale et d'engagement social, comme on l'a dit auparavant.
Nous regrettons, cependant, que l'octroi d'un soutien
financier pour le démarrage de certains types de projets soit
accordé seulement aux municipalités. On croit que l'initiative ne
devrait pas seulement venir des municipalités, mais on devrait tenir
compte aussi des organismes familiaux et communautaires.
Le Président (M. Thuringer): En conclusion, s'il vous
plaît!
Mme Dolan: Cependant, la mise en vigueur de ces articles ne
devrait pas causer la fermeture des services de halte-garderie que des
communautés se sont donnés pour répondre à leurs
besoins. Dans ce cas, la règle des droits acquis devrait s'appliquer car
nous croyons qui n'est pas dans les intentions du gouvernement de vouloir
diminuer les services, mais plutôt au contraire, de les augmenter.
Merci.
Le Président (M. Thuringer): Merci. Mme la ministre.
Merci, M. le Président. Je me demande si j'ai bien lu
votre mémoire, à la page 14, alors que vous mentionnez que vous
êtes d'accord avec la formule d'exonération financière aux
parents proposée par le gouvernement Est-ce exact?
Mme Godbout-Perreault: Lorsque nous nous plaçons du point
de vue des parents, la formule d'exonération pourrait s'ajuster,
augmenter. Notre position n'est pas du tout en fonction du financement des
garderies comme tel, mais de la position des parents.
Mme Gagnon-Tremblay: Cela signifie que vous seriez d'accord avec
la formule proposée quant à l'exonération
financière aux parents.
Mme Godbout-Perreault: Les parents qui étaient
présents à notre table étalent d'accord avec cette mesure
qui pouvait tenir compte des augmentations qui se faisaient en cours
d'année.
Mme Gagnon-Tremblay: Vous parlez également de
crédit d'impôt non remboursable. D'autres intervenants, ce matin,
nous ont parlé de crédit d'impôt remboursable. Vous nous
demandez de transformer, si possible, les déductions pour frais de garde
en crédit d'impôt non remboursable.
Mme Godbout-Perreault: De toute façon, madame, lorsqu'il
est question d'une déduction, si les gens n'ont pas un revenu suffisant,
elle ne leur sert absolument à rien. Alors, qu'il y ait un
crédit, I y a parfois des chances qu'il puisse leur servir. Nous avons
parlé de crédit non remboursable. Bien sûr, si le
gouvernement voulait offrir un crédit remboursable, je ne crois pas
qu'il y ait grand monde qui refuse, mais nous trouvions quand même qu'un
crédit d'impôt pourrait être plus équitable pour les
parents.
Mme Gagnon-Tremblay: À la page 9 de votre mémoire,
le conseil demande d'amender la Loi sur les services de garde à
l'enfance "afin de permettre que se constituent des agences de gardiennes au
domicile de l'enfant sur le modèle des agences de garde en milieu
familial." Est-ce que vous pouvez expliciter davantage cette idée?
Mme Godbout-Perreault: Voici, actuellement, en ce qui a trait aux
agences de garde en milieu, il y a une agence qui regroupe plusieurs foyers.
Lorsque nous parlons d'agences de gardiennes à domicile, nous parlons
d'une agence qui engagerait des personnes en ayant vérifié leurs
compétences; ensuite, ces personnes iraient garder au foyer des
famïles. Donc, il y aurait une liste de gens qui pourraient garder au
domicile des parents. C'est pourquoi, à un moment donné, nous
disions qu'il n'y aurait pas de frais d'implantation. De la même
façon, les frais d'implantation seraient pour le secrétariat de
l'agence, mais le service serait offert dans les familes.
Mme Gagnon-Tremblay: SI vous avez pris connaissance de notre
politique, nous suggérons à un moment donné que cette
expérience soit faite par les agences de garde en milieu familial
existant actuellement. Est-ce que ce serait suffisant pour vous ou si,
malgré tout, vous aimeriez avoir une structure complètement
différente des agences en milieu famlial?
Mme Grenon: II n'existe aucun service dans notre région.
Il y a trois services de garde en milieu dans la Montérégie et,
ailleurs, il n'en existe pas. Dans un rayon de 40 kilomètres, I n'existe
aucun service de garde en milieu familial et de gardiennes non plus. Et le
nombre de places en garderies subventionnées ou non
subventionnées est très limité. Les parents n'ont pas le
choix des services non gérés.
Mme Gagnon-Tremblay: Par contre, s'il existait des agences de
garde en milieu familial, est-ce que vous seriez d'accord pour dire qu'elles
devraient être en mesure d'offrir ces services ou, au moins, sur une base
expérimentale ou si, même là, il faudrait avoir une agence
complètement différente pour gérer ce genre de
services?
Mme Godbout-Perreault: Je pense, madame, que ce que nous avons
voulu faire, c'est que les parents aient le service, que l'agence soit
strictement une agence de garde en milieu familial ou une agence qui regroupe
les deux services. Actuellement, nous n'en avons pas fait l'évaluation.
Ce que nous trouvons, par contre, c'est qu'on devrait offrir ce choix aux
parents puisque leur préférence va vers des services à
domicile.
Mme Gagnon-Tremblay: En somme, ce qui est important pour vous,
c'est que ces parents à la maison puissent avoir une banque de
données de noms de personnes fiables et compétentes pour pouvoir
répondre à des besoins.
Mme Godbout-Perreault: C'est plus que cela, madame. Quand nous
parlons d'agence, cela voudrait dire que des parents qui, selon leur revenu,
auraient droit à l'exonération pourraient en profiter comme ceux
qui actuellement utilisent les services régis.
Mme Gagnon-Tremblay: Oui. Mais c'est quant à
l'application. J'essaie de voir comment pratiquement on peut appliquer cela,
étant donné que le parent paie, d'une part, la gardienne...
Mme Godbout-Perreault: Oui.
Mme Gagnon-Tremblay: ...qui donne des reçus. Bon, ce qui
veut dire que vous préféreriez que cette personne-là soit
admissible à l'exonéra-
tion financière plutôt qu'aux déductions
fiscales.
Mme Godbout-Perreault: Dans certains cas, pour certains parents,
la déduction ne veut rien dire. Ils ont vraiment besoin de
l'exonération. Alors, qu'un parent ait trois enfants chez lui et qu'il
puisse profiter de l'exonération parce qu'une personne vient garder ses
enfants chez lui ou qu'il prenne ses trois enfants et qu'il aille les conduire
dans une autre famlle ou une agence de garde en milieu familial, puisque la
personne en a une, et qu'à ce moment-là il puisse profiter de
l'exonération, nous disons qu'il devrait être admissible au
programme d'exonération et, à ce moment-là, ça lui
permettrait d'avoir le service.
Mme Gagnon-Tremblay: Vous comprenez qu'en termes pratiques une
gardienne qui aurait, par exemple, à garder un enfant, même si le
parent est admissible à l'exonération financière, comment
pourrait-elle avoir un salaire décent si elle ne garde qu'un seul
enfant? J'essaie de voir comment on pourrait, sans pénaliser cette
gardienne, mettre ce principe en oeuvre.
Mme Godbout-Perreault: C'est une expérience qui pourrait
être tentée. On sait qu'actuellement il y a quand même
beaucoup de femmes qui gardent un seul enfant.
Mme Gagnon-Tremblay: Est-ce que mon temps est
écoulé?
Le Président (M. Thuringer): Non.
Mme Godbout-Perreault: Je voudrais aussi, si vous voulez me
permettre, madame, vous parler de la qualité des services. J'aimerais
que Mme Désilets puisse en parler un petit peu aussi. (15 h 30)
Mme Gagnon-Tremblay: Oui, il me reste encore trois minutes et
j'avais une question. On pourra peut-être y revenir tout à
l'heure. Il y a une question très importante. Vous parliez de la mise en
vigueur des articles concernant les haltes-garderies ou les jardins d'enfants.
Est-ce que vous vous êtes penchées sur ce que seraient, par
exemple, les normes minimales qu'on devrait imposer aux haltes-garderies et aux
jardins 'd'enfants? Jusqu'où peut-on aller dans l'application de ces
normes? Est-ce que vous avez réfléchi à ça?
Mme Désilets (Murielle): Murielle Désilets. Je
pense que les normes de qualité déjà établies
pourraient s'insérer un peu dans ce volet. On parle de normes de
qualité par rapport aux enfants, au personnel et aux éducateurs,
mais aussi de toutes les normes techniques, assurances et tout ça. On ne
voudrait pas que ces normes techniques, pour parler des autres volets, aient un
impact en pénalisant les petits groupes comme tels à cause de
leurs structures qui peuvent sembler énormes. Il y a une lacune que je
porte personnellement et comme déléguée du Conseil de la
famille, peut-être que le programme éducatif ne semble pas aussi
détaillé que les normes de qualité, matériel
technique et autre. On aimerait avoir, justement parce que vous avez la
préoccupation d'une qualité constante dans tous les concepts et
les choses du genre, un programme de qualité, mais plus
détalé pour être en mesure de l'évaluer en cours de
route.
Mme Gagnon-Tremblay: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Thuringer): Mme la députée
de Maisonneuve.
Mme Harel: Merci, M. le Président. Je salue le Conseil de
la famille Richelieu-Yamaska et je retrouve avec plaisir Mme Perreault, je
crois, oui, qui l'accompagne. C'est intéressant et Je me demandais,
lorsque vous présentiez votre position sur la garde en milieu de
travail, si le nouveau Conseil de la famille mis en place par le gouvernement
au début de l'automne passé avait été
consulté sur les priorités mises de l'avant dans
l'énoncé de politique. Je ne le sais pas; je n'ai pas eu
l'occasion de le vérifier, mais je crois que c'est une bonne occasion de
le faire aujourd'hui puisque l'énoncé de politique a
été publié à la fin de novembre. Je me demandais si
un avis était parvenu à la ministre, soit du Secrétariat
à la famille ou du conseil.
Mme Gagnon-Tremblay: Nous avons consulté le
Secrétariat à la famille, mais, comme il s'agissait d'une
politique gouvernementale, nous n'avons pas consulté le Conseil de la
famille comme nous n'avons pas consulté le Conseil du statut de la
femme. Ces consultations avaient eu lieu bien auparavant; nous connaissions
déjà les différents besoins. Nous avons consulté,
par contre, le Secrétariat à la famille.
Mme Harel: De toute façon, R sera intéressant, je
pense, de suivre la question de l'avis que le Conseil de la famille aura
à donner, je le souhaite, en tout cas, avant la fin de nos travaux, si
ce n'est pas en présentant un mémoire, tout au moins que cela
puisse se faire en présentant sa position devant la commission.
J'ai un certain nombre de questions à vous poser. Vous savez
comme le temps file. Mme la ministre a fait état de votre appui à
la nouvelle politique d'exonération. J'ai compris, selon votre
présentation au tout début, que vous aviez eu relativement peu de
temps pour fouiller cela attentivement. J'aimerais simplement vous signaler ce
que nous en disait le Conseil du statut de la femme ce matin. Cela vous
Intéressera peut-être. C'est à la page 51 de son
mémoire. Il fait valoir que, bien que la nouvelle formule soit plus
généreuse, l'exonération accordée est peu
importante lorsqu'on s'approche des seuls. Là, les exemples qui nous
sont donnés portent sur un
revenu familial de 22 000 $ alors que la famille
monoparentale ayant un enfant en garderie bénéficiera d'une
exonération quotidienne de 3.15 $ et devra donc débourser 12.85
$.
Une de mes collègues, qui n'est pas ici cet
après-midi, parce qu'elle est remontée à Chicoutimi, Mme
Blackburn, a fait te calcul que 12.85 $ par jour, même à 250
jours-année, c'est au-delà de 2200 $ et que. si le même
chef de famille monoparentale au môme revenu de 22 000 $ avait un enfant
à l'université. Il serait complètement exempté de
toute contribution parentale parce que le revenu serait jugé insuffisant
et 1 aurait droit pleinement au régime des prêts et bourses. Donc,
finalement, cela coûterait beaucoup plus cher d'avoir un enfant à
la garderie qu'à l'université à ce niveau de revenu.
Alors, Je vous invite peut-être à lire les illustrations qui sont
faites de manière à réexaminer la question de
l'exonération, si tant est que vous le Jugiez à propos.
Deux aspects de votre mémoire m'intéressent
plus particulièrement. Vous souhaitez des services de halte-garderie et
des jardins d'enfants. Vous les souhaitez rapidement. Vous dites que ce serait
malheureux que ce soient seulement les municipalités qui obtiennent un
financement pour les organiser. Vous signalez que les organismes familiaux
communautaires pourraient aussi être considérés comme des
partenaires dans l'implantation de ces services. Je sais que vous avez de
l'expertise là-dessus. Je voudrais vous entendre à ce sujet.
Je vous rappelle que le programme d'exonération
n'est pas ouvert actuellement pour ce genre de services. Est-ce qu'il y aurait
là aussi matière à corriger cette lacune? Après, je
voudrais vous entendre sur la garde en maison privée. J'aimerais revenir
là-dessus.
Mme Godbout-Perreault: Lorsqu'il est question des
haltes-garderies, comme l'a dit Mme Dolan tout à l'heure, pour nous, ce
serait une façon de reconnaître que les parents ont aussi d'autres
besoins de garde que de leur offrir un service.
Nous n'avions pas le temps d'aller jusqu'à discuter
de l'exonération et de l'accessibilité. Ce sont des programmes
assez compliqués. Pour des familles qui essaient de se comprendre parmi
tous ces programmes, c'est vraiment très compliqué pour eux Mous
avons tenté d'avoir un service qui soit au moins accessible et nous
n'avons pas été plus loin dans les discussions sur le
financement
Mme Harel: Merci. Je remercie mon adjoint parce que je me
rappelais avoir vu dans un mémoire qu'il était fait mention de la
forte popularité des services de garderie auprès des parents
d'enfants de trois et quatre ans; c'est dans le mémoire de la COFAQ qui
vous précédait.
Mme Godbout-Perreault: Dans le nôtre aussi.
Mme Harel: Ne craignez-vous pas le fait que dans le programme
APPORT le mode de financement ne soit laissé entièrement au choix
du parent participant au programme. Le remboursement n'est pas obligatoirement
fait à l'Intérieur d'un mode de garde reconnu. Donc, il y a
déjà une ouverture pour une garde dans un service qui n'est pas
reconnu. C'est tout nouveau. Est-ce bien la voie dans laquelle I faut
s'engager? La question que je vous pose est la suivante: Est-ce qu'il y a une
socialisation - on connaît la taille des familles maintenant et on sait
que l'enfant a peu d'occasions d'apprendre avant d'arriver à
l'école, qui n'est pas le champion entre tous et qu'il y a beaucoup de
champions du même âge. Est-ce que l'absence d'un milieu stimulant,
l'absence de créativité, de socialisation ne pourrait pas
être un handicap pour l'enfant? En élaborant une politique de la
petite enfance, ne devrait-on pas penser à des modes de garde où
les enfants sont finalement appelés à un développement
plus grand parce que en contact les uns avec les autres?
Mme Godbout-Perreault: Lorsque nous parlons de tenir compte des
préférences des parents, nous avons dit dans notre document
qu'à l'exception des parents d'enfants de trois ans et quatre ans
où on parie de garderies et de jardins d'enfants, on reconnaît
très bien qu'à certains moments ils peuvent utiliser ces services
justement pour permettre à leur enfant de socialiser.
Avec les sondages et la consultation des parents de notre
milieu, nous en sommes venus à constater que leur choix était
davantage de services à domicile ou en milieu familial,
c'est-à-dire avec des groupes plus restreints.
Mme Harel: Mais quand vous dites à domicile, pour vous,
ça va jusqu'à la garde d'un seul enfant.
Mme Godbout-Perreault: Oui. À domicile. On dit que des
services de poupons sont très difficiles à obtenir. On regarde
aussi les services de santé. On dit que des jeunes enfants en contact
avec un nombre Important d'autres enfants sont plus susceptibles d'être
malades souvent. Donc, ce n'est pas nécessairement mauvais qui y ait un
peu moins d'enfants. Mais notre position est plus en termes de choix des
parents. Quand les parents font ce choix, si on veut dire qu'on respecte leur
choix, on doit tenir compte de ce qu'ils choisissent.
Mme Harel: Dans l'ordre des priorités, parce que je me
rappelle le mémoire de la COFAQ que j'ai devant les yeux, vous
recommandiez un développement plus rapide que celui annoncé dans
l'énoncé de politique des services de garde en garderie. Je ne
sais pas si le Consei de la famille Richelieu-Yamaska partage la même
opinion.
Mme Dolan: Je m'excuse, je me nomme Normande Dolan. On
réalise que le nombre de places accessibles ou disponibles pour les
trois années à venir, dans le projet, en fin de compte, est peu
réaliste compte tenu des besoins des parents. Je pense que, si on veut
demeurer réaliste, iI ne faut pas non plus dire que tous les enfants
vont aller dans un milieu de garde, en tout cas, reconnu ou géré.
C'est pour ça aussi qu'on avait laissé une porte ouverte pour
dire qui faudrait peut-être tenir compte aussi des garderies existantes
et qu'elles aient droit à des acquis et que les parents ne soient pas
pénalisées par rapport aux autres garderies, que ce soit, en fin
de compte, un choix libre des parents d'envoyer leurs enfants dans une garderie
non gérée.
Mme Harel: Est-ce que c'est un choix libre quand I n'y a pas de
services?
Le Président (M. Thuringer): En conclusion, Mme la
députée.
Mme Harel: Est-ce que c'est un choix libre quand, d'une part,
comme vous le mentionnez, le choix est freiné par l'absence de places
disponibles ou par l'absence d'un service à proximité de la
maison ou par les coûts?
Mme Grenon: Je ne pourrai pas répondre à cela par
des statistiques. Dans notre région, la région Richelieu-Yamaska,
il y a 43 places de poupons. Je sais, après avoir fait, chez moi, un
petit sondage, que les mères sont obligées de retourner
travailler après un mois d'allaitement. Elles choisissent quoi? il n'y
en a presque pas de services de garderie, d'aucune façon.
Mme Harel: En conclusion, est-ce que vous pensez que les
mères choisiraient un congé parental ou un congé de
maternité?
Mme Godbout-Perreault: Vous me permettrez d'ajouter quelque chose
là-dessus. C'est une mesure complémentaire que nous avions
abordée dans notre document, c'est-à-dire qu'on sait que
ça ne relève pas strictement de vous, Mme Tremblay, et de votre
gouvernement, mais nous vous proposions des mesures complémentaires, que
le programme de prestations de congé au moment de la naissance soit
allongé et que la période allongée soit un congé
parental, pris soit par le père ou par la mère, de façon
à rendre ce congé jusqu'à 26 semaines, ce qui ferait que
ça serait sans doute une solution pour les tout petits enfants.
Le Président (M. Thuringer): Merci. Mme la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: En conclusion, mesdames, je prends bonne
note que vous êtes en accord avec la formule d'exonération
financière aux parents. On peut être en accord avec la formule. On
peut être en désaccord, par contre, avec les sommes qui sont
allouées. On peut tout simplement se questionner et vouloir avoir
davantage d'argent pour répondre à cette formule, mais vous
êtes quand même en accord avec cette formule d'exonération.
Je vous remercie de votre Intervention. Vous avez quand même
soulevé quelque chose de très intéressant quant à
la garde en milieu familial, par exemple, la garde à domicile. Je pense
qu'il y a quelque chose qui pourrait être fait concernant
l'expérimentation pour certains types de services, entre autres, pour la
garde de nuit, la garde occasionnelle, les périodes un peu plus
compliqués, là où c'est très difficile d'avoir des
gardiennes ou d'avoir ces services actuellement dans les types des service
connus. Je pense que vous avez quand même, à mon avis, une piste
qu'il est important de vérifier et qu'il faut expérimenter ce
champ d'activités. Je vous remercie beaucoup, mesdames.
Le Président (M. Thuringer): Merci, Mme la ministre.
J'aimerais remercier aussi le Conseil de la famille Richelieu-Yamaska et
j'invite le comité régional de la Fédération de la
famille de Québec à s'approcher, s'il vous plaît, et
à s'identifier. Vous avez 10 minutes pour la présentation et 20
minutes de discussions. Pouvez-vous vous identifier, s'il vous plaît? (15
h 45)
Comité régional de la Fédération de la
famille de Québec
Mme Pichet-Bédard (Johanne): Oui. Je représente la
Fédération de la famille de Québec, région 03. Nous
faisons partie de la Confédération des organismes familiaux du
Québec, mais nous représentons les familles de la région
03. La Fédération de la famille de Québec regroupe 25
organismes familiaux et parle au nom de 30 000 familles de la région 03.
Mon nom est Johanne Pichet-Bédard, coordonnatrice des activités
de la fédération. J'ai été aussi la personne
mandatée pour rassembler les organismes afin de former le comité
régional. À ma droite, Mme Monique Maltais, qui a
participé au comité régional et qui vient du réseau
Nouveaux Sentiers, familles monoparentales; à ma gauche, Mme Alice
Landry, représentant la Maison de la famille de Limoilou, à
Québec.
Le Président (M. Thuringer): Merci.
Mme Pichet-Bédard: Mme la ministre, messieurs et mesdames,
membres de la commission parlementaire sur les services de garde à
l'enfance, pour la première fois dans la région de Québec,
des associations de parents se sont rassemblées pour prendre la parole
sur des besoins communs et des principes de base au sujet de
l'énoncé de politique sur les services de
garde à l'enfance.
Le comité régional de la
Fédération de la famille de Québec regroupe six
associations et services pour enfants. La fédération est le
porte-parole de plus de 35 000 familles de la région dont les enfants
fréquentent actuellement les milieux préscolaires et scolaires.
Elles se sont regroupées parce qu'elles portent depuis plus de 20 ans
des préoccupations communes concernant les services offerts en milieu de
garde.
Les organismes famliaux ont pris la parole à ce
sujet dès 1970. Au cours des discussions en vue de la
présentation de ce mémoire, les membres du comité
régional ont été unanimes sur les sujets suivants:
premièrement, services de garde et responsabilités des femmes.
Nous croyons que tes services de garde constituent un élément
organisationnel important dans la conciliation des responsabilités
familiales et professionnelles. Cependant, la garde des enfants doit
interpeller l'autre parent. Selon notre point de vue, le rôle du
père fait partie de la dynamique des rôles parentaux. Il est
important dans une optique familiale que la garde des enfants ne soit pas
associée unilatéralement aux responsabilités
socio-économiques des femmes.
Deuxièmement, la non-reconnaissance des parents
comme partenaires à part entière dans les milieux de garde. Dans
la structure administrative proposée des services de garde, il est
fréquent que l'on doute de la qualité de l'engagement des parents
et de leur compétence. Les lieux où les parents sont
appelés à collaborer ont déjà
démontré avec évidence que les enjeux discutés
reflètent davantage les intérêts d'un financement
anticipé et d'un bon fonctionnement administratif, plutôt que le
bien-être des enfants dans une coresponsabilité parents,
éducateurs et éducatrices. De plus, nous interrogeons la
sursollicitation des parents en milieu de garde. La collaboration des parents
ne devrait pas se référer uniquement à la notion de
personnel bénévole toujours disponible.
Troisièmement, l'importance de reconnaître le
droit des parents au choix de services de garde, c'est-à-dire le choix
du mode de garde qui répond le mieux aux besoins de l'enfant et à
l'organisation propre à son milieu familial. De zéro à
deux ans, les parents ont affirmé préférer la garde au
domicile de l'enfant dans le présent énoncé, quelles sont
les mesures pour améliorer ce mode de garde? Pourquoi le présent
document met-il la priorité sur le mode de garde en garderie? Les
différents modes de garde font l'objet de mesures de
développement que nous pouvons qualifier d'inégales. Le
développement de la garde en garderie en milieu de traval fait l'objet
de préoccupations particulières dans le présent
énoncé: Améliorer les conditions de garde des enfants, en
collaboration avec les employeurs, est souhaitable, mais pourquoi ce mode
plutôt qu'un autre?
Quatrièmement, la politique d'intégration des
enfants handicapés. Nous remarquons l'absence de référence
à la politique d'intégration des enfants handicapés, telle
que proposée en 1983. Ce document de consultation démontre
l'importance de la stimulation et les enjeux à long terme concernant
l'intégration de ces enfants en bas âge, dès la garderie,
et ce, dans un esprit de partager collectivement et équl-tablement cette
responsable, au lieu de faire reposer les coûts essentiellement sur les
parents de cette clientèle.
Le financement des services de garde. Selon les modes de
subventions proposes, les parents ne semblent pas avoir de prise sur des
hausses graduelles de tarifs. Le présent énoncé ne semble
pas se préoccuper de la capacité réelle du parent de payer
des services de garde.
Nous terminons notre intervention auprès de la
commission en réitérant que la participation des organismes
familiaux à cette consultation ne devrait pas être perçue
comme étant optionnelle. L'adoption d'une politique sur les services de
garde constitue, selon l'énoncé, un élément de
premier plan d'une politique familiale. En novembre dernier, nous n'avons
reçu aucune information sur les conditions de participation à
cette consultation. Les organismes familiaux font la démonstration
depuis plus de 20 ans de l'urgence d'une politique familiale pour le
Québec. Les familles membres de notre regroupement se voient de plus en
plus contraintes par l'État à poursuivre un rôle social
restreint, c'est-à-dire celui d'un filet de sécurité
sociale. Une politique familiale permettrait de rétablir
l'équilibre dans une coresponsabilité État-familles,
c'est-à-dire démarrer un processus visant à une
transformation du rôle de l'État en fonction du rôle social
de la famille et non pas l'inverse. Je vous remercie.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie, Mme
la présidente. Mme la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Oui, merci, Mme la présidente, de
votre intervention. J'aurais quelques questions et, compte tenu de la
période de temps qui nous est allouée, je vais m'adresser
immédiatement à vous pour la première question. Vous
mentionnez, à la page 6 de votre mémoire, qu'en milieu scolaire
et dans les municipalités vous constatez qu'il y a une sursollicitation
des parents et une sous-utilisation de leur collaboration. Alors, les parents
veulent être considérés comme des partenaires à part
entière. Qu'entend-on par sursollicitation des parents et
sous-utilisation de leur collaboration?
Mme Pichet-Bédard: Ce que nous constatons dans la
région, et nous l'avons aussi développé concernant le
mémoire que nous avons présenté sur la réforme de
l'instruction... On entend par sursollicitation que les parents sont
demandés, à plusieurs étapes, pour intervenir surtout
comme gestionnaires. Ils ne sont pas toujours intégrés dans un
processus d'information continue de
façon à pouvoir prendre la parole autant comme parent que
comme gestionnaire. Souvent, on va leur demander de s'exprimer d'abord comme
gestionnaire. Cela leur prend un certain temps avant d'être famliers.
Alors. Ils sont sursollicités, c'est-à-dire qu'on leur demande
souvent de participer, mais ils n'ont pas toujours le temps d'acquérir
une compétence pour développer leur droit de parent, leur
connaissance du milieu et vraiment agir en conséquence. C'est vite pour
la plupart d'entre eux; cela va trop vite.
Mme Gagnon-Tremblay: Parlez-vous uniquement du milieu scolaire
à ce moment-là ou si vous parlez également des autres
types de garderie?
Mme Pichet-Bédard: Les autres types aussi.
Mme Gagnon-Tremblay: Les autres types de garderie.
Mme Pichet-Bédard: Les autres types de garderie.
Mme Gagnon-Tremblay: Ce qui signifie que le fait pour les parents
de gérer au conseil d'administration, d'être présents aussi
au moment où il y a des enfants à la garderie, mais de devoir
quitter par la suite, il se fait une rotation qui, à votre avis, ne
permet peut-être pas aux parents de jouer un rôle qu'on
souhaiterait leur voir jouer.
Mme Pichet-Bédard: Oui. Ce qu'on veut mettre en
évidence, c'est que les parents qui sont gestionnaires, les parents qui
ont une responsabilité au consel d'administration doivent être
conscients qu'ils doivent préparer une relève. L'information doit
circuler, c'est-à-dire que les parents qui vont venir, à un
moment donné, dans le circuit doivent être préparés.
Les parents ne peuvent pas s'improviser à un conseil d'administration
pour comprendre les enjeux du développement de la garderie, le stade
où la garderie en est. Nous considérons qu'à ce
moment-là, si ce processus n'est pas respecté, cela fait un
milieu de garde où on répète toujours les mêmes
choses, que les permanents ont un poids décisionnel beaucoup plus grand
que les parents, parce que les parents doivent développer une
compétence. Il faut leur laisser un certain temps pour le faire.
Mme Gagnon-Tremblay: Par contre, ce que vous avez pu
réaliser ou lire dans la politique, c'est un peu ce vers quoi le
gouvernement vise actuellement: une certaine stabilité dans les conseils
d'administration pour permettre justement d'éviter ces types de
problèmes que vous venez d'énumérer.
Mme Pichet-Bédard: Oui, on en avait pris connaissance,
mais les parents dans ta région 03 nous avaient demandé de le
porter à votre attention.
Mme Gagnon-Tremblay: Oui. La deuxième question concerne la
garde estivale. À la page 8 de votre mémoire, vous
déplorez que rien ne soit prévu pour la clientèle des
10-16 ans. Vous savez comme moi qu'en vertu de la Loi sur les services de garde
à l'enfance cette clientèle des 12-16 ans n'est pas sous la
juridiction de l'Office des services de garde à l'enfance. Par contre,
croyez-vous que les besoins de cette clientèle très
précise doivent être davantage liés aux loisirs qu'à
la garde proprement dite ou si vous croyez qu'on doit continuer à leur
donner plutôt des services de garde?
Mme Pichet-Bédard: À la page 8? Attendez un
peu.
En fait, nous voulions porter à votre attention la
capacité que l'Office des services de garde à l'enfance a
d'interpeller les municipalités là-dessus. C'est cet aspect que
nous voulions porter à votre attention.
Mme Gagnon-Tremblay: D'accord. Une autre question concernant les
enfants handicapés. À la page 9 de votre mémoire, vous
mentionnez qu'il serait nécessaire de réajuster la subvention de
base avant de l'indexer régulièrement en ce qui concerne les
enfants handicapés. Quel type de partage suggérez-vous? Par
exemple, est-ce une plus grande part de l'État par le biais de l'office,
quel que soit le besoin, ou si ce pourrait être des coûts
supplémentaires en santé qui pourraient être
remboursés à l'Office des services de garde à l'enfance ou
qui pourraient être partagés avec l'Éducation ou avec les
parents? Quel type de partage suggérez-vous lorsque vous parlez de la
nécessité de réajuster la subvention de base avant de
l'indexer? Est-ce, tout simplement, carrément l'office qui devrait
penser à réajuster les 14 $ par jour avant d'indexer? Est-ce que
c'est ce que vous voulez dire? Est-ce que j'ai bien compris?
Mme Pichet-Bédard: Je vais répondre de
mémoire à cette partie. La personne qui devait être
présente pour défendre cette partie de notre mémoire a de
la mortalité dans sa famille. Elle ne peut pas être
présente aujourd'hui. Je me rappelle qu'Anne avait
développé ça avec nous et que la préoccupation
qu'elle avait semblait venir de l'État. C'est-à-dire qu'elle
trouvait que... C'est difficile. C'est un secteur avec lequel je suis beaucoup
moins... J'aimerais mieux faire la recommandation par écrit...
Mme Gagnon-Tremblay: D'accord. Vous pourriez nous la faire
parvenir.
Mme Pichet-Bédard: ...comme Mme Harel le proposait.
Mm Gagnon-Tremblay: D'accord, madame.
Mme Pichet-Bédard: Anne Vigneault n'est pas ici. Je trouve
ça.
Mme Gagnon-Tremblay: II n'y a pas de problème, madame.
Mme Pichet-Bédard: C'est un problème trop
spécifique pour nous.
Mme Gagnon-Tremblay: D'accord. Vous pourriez nous faire parvenir
cette recommandation par écrit Est-ce possible?
Mme Pichet-Bédard: Oui. Est-ce que ça te
revient?
Mme Landry (Alice): Oui. Alice Landry. Par ailleurs, à la
fédération, nous nous disions qu'il y avait une question
d'équité sociale, à savoir que, selon nous, iI revenait
à l'ensemble de la société d'assumer un surcroît de
coûts pour une clientèle handicapée. Il y avait cet aspect
qu'on reprenait à notre compte.
Mme Gagnon-Tremblay: Vous dites également, à la
page 10 de votre mémoire, que le programme d'exonération
financière ne répond pas aux besoins des familles à revenu
moyen. Tout en croyant que cette formule ne répond pas aux besoins des
familles à revenu moyen, est-ce que vous constatez, par contre, que la
nouvelle formule va y répondre mieux qu'auparavant puisque les nouvelles
familles y seront admissibles et aussi que les actuels
bénéficiaires seront mieux soutenus que selon le tarif actuel?
Comme je le mentionnais tout à l'heure, on peut être en accord ou
en désaccord avec la formule. On peut être d'accord avec la
formule, mais on peut peut-être être en désaccord avec les
sommes allouées. Mais, en ce qui concerne le dynamisme de la formule,
êtes-vous d'accord pour dire que même si, pour vous, ça ne
répond pas, cela répond quand même mieux que la formule
actuelle?
Mme Pichet-Bédard: Cela répond mieux que la formule
actuelle.
Mme Gagnon-Tremblay: Merci, madame.
Le Président (M. Bélanger): Merci, Mme la ministre.
Mme la députée de Maisonneuve.
Mme Harel: Merci, M. le Président. Je veux donc
également saluer à la fois le comité régional de la
Fédération de la famille de Québec... Vous
représentez la Maison de la famile aussi, Je crois?
Mme Landry: Je suis membre déléguée, oui.
Mme Harel: C'est un peu comme la Maison des parents ici, dans la
région de Québec?
Mme Landry: C'est un peu l'équivalent C'est semblable.
Mme Harel: À ce qu'on connaît à
Montréal sous le vocable Maison des parents.
Mme Landry: C'est semblable.
Mme Harel: Le constat que vous faites... Est-ce la
première fois que vous venez présenter un mémoire en
commission parlementaire?
Mme Pichet-Bédard: Non. Nous sommes venues lors de la
réforme de la Loi sur l'instruction publique.
Mme Harel: D'accord. Lors de l'étude du projet de loi
107.
Mme Pichet-Bédard: Oui.
Mme Harel: Dans votre mémoire, à la page 6, vous
mentionnez que, d'une façon générale, en milieu scolaire,
dans les municipalités, II y a sursollicitation des parents et
sous-utilisation de leur collaboration. Vous faites un constat assez
général. Vous le faites de façon plus spécifique en
disant: "Nous constatons également, d'une façon unanime, la
non-reconnaissance des parents comme partenaires à part entière
en milieu de garde." C'est un constat très sévère. En
fait, cela m'étonne beaucoup. Je ne sais pas, cela peut dépendre
des expériences menées dans chacun de nos milieux respectifs.
Quand vous dites "d'une façon unanime", est-ce que c'était de la
part de parents qui siègent à des conseils d'administration de
services de garde? (16 heures)
Mme Pichet-Bédard: De parents qui étalent aussi
à des comités de parents et à des...
Mme Harel: Dans des garderies.
Mme Pichet-Bédard: ...conseils d'administration...
Mme Harel: À but non lucratif.
Mme Pichet-Bédard: ...à but non lucratif. C'est le
reflet de la région 03.
Mme Harel: Vous avez consulté... Votre
échantillonnage était composé de combien de personnes?
Mme Pichet-Bédard: Six organismes étalent
représentés au comité régional. C'est à peu
près unanime. Il y en avait six sur six qui constataient..
Mme Maltais (Monique): Si Je peux ajouter quelque chose.
Mme Harel: Oui. ça m'intéresse beaucoup parce que
j'ai l'impression que c'est peut-être une sorte de sentiment
généralisé dans tes organismes familiaux. mate à
l'égard de l'ensemble des institutions. Cela m'intéresse d'autant
plus que, s'il y a un milieu où les études faites
prétendent qu'il y a implication des parents et gestion directe, c'est
bien celui des services de garde. Alors, votre réflexion m'apparaissait
contraire à ce qu'on entend habituellement et à ce que les
études démontrent habituellement.
Une voix: D'accord.
Mme Maltais: L'implication des parents, en effet, a
lieu dans le domaine des garderies, mais on n'a pas l'impression d'être
sollicités pour vraiment ce qu'on est capables de donner aussi.
Lorsqu'on nous sollicite, par exemple pour faire de la peinture à la
garderie, je me dis que c'est quand même intéressant Au conseil
d'administration, on nous apporte des choses; c'est de la gestion en tant que
telle. On parle beaucoup aussi... Nous parlions beaucoup, en tout cas je pense,
du projet éducatif en tant que tel, soit dans les garderies ou...
Mme Harel: êtes-vous membre du conseil d'administration,
vous-même?
Mme Maltais: Dans une garderie? Mon mari, oui.
Mme Harel: Votre conjoint... Mme Maltais: Oui.
Mme Harel: ...siège actuellement à un consel
d'administration.
Mme Maltais: Au conseil d'administration d'une garderie et j'ai
travaillé dans une garderie. J'ai aussi été membre d'un
comité qui existait à la garderie, un comité de
publicité où... J'étais bénévole dans une
garderie, celle où allait ma fille. Je me dis... On nous demandait des
choses, mais c'était quand même limité. On était
sursollicités pour plein de choses. On disait: Impliquez-vous, les
parents, faites quelque chose. On en , faisait, mais on avait aussi
l'impression d'être capables de donner plus. Je ne sais pas si vous
pourriez ajouter.
Mme Harel: C'est intéressant parce qu'il y a vraiment un
point de vue... Je regrette beaucoup que le Conseil de la famille n'ait pas
encore donné d'avis sur l'ensemble de l'énoncé de
politique et je ne sais pas s'iI le fera. Mais je trouvais ça
Intéressant que vous veniez exposer votre point de vue. Je me demandais
si le fait que, comme vous le disiez - c'est important quand même que
vous le mentionniez... Comment le signaliez-vous? Il est peu question du projet
éducatif, je crois; en fait, dans votre mémoire, vous le
mentionniez...
Mme Maltais: "II est fréquent que l'on doute de la
qualité de l'engagement des parents." C'est peut-être là
que vous...
Mme Harel: Oui.
Mme Maltais: Et on dit: "et de leur compétence
parentale."
Mme Harel: À quelle page déjà? Mme Maltais:
La page 7, en haut
Mme Pichet-Bédard: Dans la partie en italique.
Mme Harel: Ah oui!
Mme Maltais: "II est fréquent que l'on doute de la
qualité de l'engagement des parents et de leur compétence
parentale alors que ceux-ci devraient être considérés comme
des partenaires dans le réseau des services de garde."
Mme Harel: Par ailleurs, dans le fond, ils sont partenaires
puisque c'est sans doute... De façon institutionnelle, ce n'est pas dans
le milieu scolaire, même avec la loi 107, que les parents ont directement
un mot à dire comme usagers. Dans le fond, c'est le modèle, le
seul qu'on connaisse, finalement, dans notre société où
les parents, comme usagers, ont voix directe au chapitre, c'est bien dans le
modèle des services de garde reconnus.
C'est intéressant de voir qu'il y a encore matière
à amélioration. Vous mentionniez que ce n'est pas - je crois que
c'est à la page 6 - là que peut se discuter la question
parentale. Est-ce parce que les services ne se débattent pas dans des
problèmes immédiats, au jour le jour, qui fait que l'ensemble des
intervenants, qu'ils soient parents usagers ou travailleurs ou travailleuses,
finalement dans la gestion même, ne sont pas en mesure d'aborder des
questions de perfectionnement, de ressourcement, du fait d'avoir à
combler jour après jour le défi de faire rouler,
finalement...
Mme Pichet-Bédard: La garderie.
Mme Harel: ...la garderie? Mme Maltais: Oui.
Mme Harel: Est-ce que c'est un des facteurs?
Mme Landry: Je pense que c'est beaucoup plus une question
d'attitude de fond. Je pense que c'est un problème qui est d'ordre
collectif aussi. C'est toute la considération ou le peu de
considération ou le manque total de considération qu'on a
envers la notion de parentalité en fin de compte. Alors, dès
qu'on a un enfant qui part de la maison pour aller soit à la garderie en
milieu scolaire ou autrement. lI y a toujours des gens qui sont là pour
nous dire qu'ils sont très compétents. On peut être
soi-même enseignant..
Mme Harel: Mais, en milieu scolaire, le modèle est
différent. Je ne crois pas qu'il y ait partenariat en milieu scolaire.
Je crois que la garde en milieu scolaire, n'étant pas régie par
les mômes dispositions, finalement copie plus le modèle
traditionnel scolaire.
Mme Landry: Oui. Par alleurs, je suis membre d'un comité
d'école et j'ai encore là l'ilusion de participer à
quelque chose et d'être partenaire. C'est ce qu'on me
répète une fois par mois, que je suis partenaire.
Mme Harel: Oui. Je le comprends. Je trouve ça
Intéressant que vous le mentionniez parce que le comité
d'école, c'est le modèle scolaire. Et, justement, le
modèle scolaire est resté le modèle traditionnel d'une
parentalité en marge. Même la loi 107 vient finalement consolider
ce modèle-là. Mais, comme je le mentionnais, le seul
modèle différent où les parents usagers ont voix au
chapitre directement, c'est celui des services de garde.
Mme Pichet-Bédard: Mais, Mme Harel, la nuance qu'on veut
faire, c'est que même actuellement, dans le milieu des services de garde,
c'est comme dans d'autres milieux Même si le parent peut participer
à un conseil d'administration ou à d'autres comités de
travail, on constate là comme ailleurs la non-reconnaissance du
rôle social du parent. C'est ce qu'on constate là aussi. C'est la
seule nuance qu'on apporte. Ce n'est pas facile, même là,
d'être parent, de porter nos préoccupations de parents
également. Il y a tout le roulement des garderies. Il y a toute la
question de la gestion qui prend beaucoup d'énergie. Cela demande du
temps et de l'énergie à un parent pour se mettre à jour,
pour être un gestionnaire compétent.
Mme Harel: Oui, parce que c'est évident que gérer
la précarité est plus difficile que gérer...
Mme Pichet-Bédard: Que gérer l'abondance. Mme
Harel: ...l'aisance. C'est bien évident.
Mme Pichet-Bédard: Oui, les familles le savent toutes.
Mme Harel: Je regardais juste les salaires des travailleuses en
garderie, 253 $ par semaine en moyenne. Il est évident que dans ce
contexte-là et compte tenu de l'absence, je pense, de budgets
afférents au ressourcement du personnel ou à sa participation
à des activités de formation autres, iI peut y avoir un moment
où l'ensemble des énergies sont converties à faire
simplement fonctionner.
Mais je pense bien que tout le monde peut prendre bonne note des
réflexions que vous nous faites. La question est de savoir comment tous
les milieux, scolaire, municipal, que vous mentionnez peuvent approcher
différemment les parents. Vous n'êtes pas très explicites
sur ça dans votre mémoire.
Mme Pichet-Bédard: Non, c'est un constat
général. On avait six représentants d'organismes à
notre table qui disaient: On ne se retrouve pas comme partenaires dans ces
milieux-là. C'est un petit échantillonnage, si vous voulez, mais
1s constataient une tendance. Mais c'est dans la ligne, comme je l'ai dit tout
à l'heure, d'une non-reconnaissance de l'importance du rôle social
du parent.
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Maisonneuve, si vous voulez remercier le groupe.
Mme Harel: Oui. Je vous remercie... Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Harel: Je vais vous inviter à continuer votre
réflexion. Je vous dis qu'elle est intéressante mais elle est
à l'état d'ébauche parce qu'à force de tout arroser
on n'atteint pas la cible exacte que l'on poursuit. Là, d'une certaine
façon, je comprends que c'est comme un cri du coeur. Vous dites que
l'ensemble ou presque des milieux auxquels nous avons affaire, scolaire,
municipal et de garde, ne reconnaissent pas notre rôle social. De quelle
manière devraient-ils le reconnaître? J'ai l'impression qu'il
devrait y avoir continuité dans la réflexion sur ça. Je
vous remercie.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. Mme
la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Oui, M. le Président. Ce que je
retiens de votre intervention, mesdames, me laisse un peu songeuse parce que je
constate finalement que ce que vous semblez nous dire aujourd'hui, c'est qu'on
sollicite beaucoup les parents pour des menus travaux dans les garderies.
Lorsque vient le temps de les solliciter pour de la gestion véritable
comme on devrait le faire, à ce moment-là, on consulte
très peu et c'est quelqu'un d'autre, finalement, qui prend les
décisions. Je dois vous dire - par contre, je voudrais vous encourager -
que les nouvelles formules que nous apportons vont donner aux parents ce
véritable pouvoir de gestion qu'ils avaient et dont iIs doivent
absolument jouir. Ces nouvelles formules de finance-
ment sont justement faites en fonction d'une responsable et d'une
gestion des parents.
Je vous remercie infiniment, mesdames, pour votre
présentation.
Le Président (M. Bélanger): La commission remercie
le comité régional de la Fédération de la famille
de Québec et elle invite à la table l'Organisation mondiale de
l'éducation préscolaire, l'OMEP. section Canada,
représentée par Mmes Madeleine Baillargeon, Françoise
Julien, Rolande Filion et Hélène Tardif.
Mesdames, nous avons une heure à votre disposition. Vous avez
donc 20 minutes pour présenter votre mémoire; ensuite, il y aura
une période de discussion de 40 minutes avec les membres de la
commission. Avant de procéder à la présentation de votre
mémoire, je vous demanderais de bien identifier votre porte-parole et de
présenter vos collaboratrices ou vos compagnes.
Organisation mondiale de l'éducation préscolaire,
section Canada
Mme Baillargeon (Madeleine): Je suis Madeleine Baillargeon,
présidente d'OMEP-Canada. Je suis accompagnée de Françoise
Julien, à ma gauche, notre trésorière, et de Rolande
Filion, responsable de notre bulletin de nouvelles; Mme Tardif fait quelque
chose d'important: un bébé. Alors, elle est absente; elle n'a pu
se joindre à nous.
Je vais me limiter à une présentation assez brève
de notre organisation. Nous sommes un organisme canadien qui existe depuis les
années cinquante. Nous sommes membres de l'Organisation mondiale de
l'éducation préscolaire; nous sommes le représentant du
Canada à cette organisation. La structure de notre organisation fait que
des régions ou provinces sont représentées et le
Québec est une de ces provinces, une province très active dans
notre organisation. L'exécutif actuel est formé
entièrement de membres québécois, à l'exception de
la présidente sortante, et la majorité de ses membres sont
québécois. C'est donc à ce titre qu'on a jugé qu'on
avait un certain regard sur la situation québécoise des services
de garde et qu'on est venues présenter notre position sur
l'énoncé de politique.
Peut-être aussi pour vous situer, disons que notre type
d'organisation comporte des organismes membres et des individus membres. La
majorité des personnes sont actuellement des gens qui travaillent dans
les milieux de formation, en recherche, aux niveaux universitaire et
collégial; quelques-uns sont aussi membres d'organismes gouvernementaux
D'une façon plus marginale, on a quand même quelques membres aussi
qui les représentent: des enseignantes au niveau préscolaire et
des gens qui interviennent au chapitre des services de garde.
Nous avons fait un peu comme tous les organismes, c'est-à-dire
que nous avons tenté de réagir rapidement, dans un laps de temps
quand même assez court, et nous avons pris une option de position que je
qualifierais de globale. Nous avons abordé certains aspects très
rapidement et nous en avons carrément escamoté d'autres. il ne
faudrait pas penser que, parce qu'on n'en parle pas, on ne les considère
pas comme importants, mais on a cru que d'autres organismes aborderaient ces
questions-là, peut-être même de façon plus
adéquate que nous. Je pense en particulier aux conditions de travail du
personnel de garderie que nous n'avons pas abordées et qui nous
paraissent très Importantes en termes de qualité; aussi aux
normes de qualité dans les services qui n'en ont pas encore - on passe
là-dessus très rapidement - et, d'une façon implicite, aux
ressources allouées à l'Office des services de garde à
l'enfance pour exercer son mandat. Ce sont tous des points qui devraient
être améliorés, mais sur lesquels on n'a rien dit.
Notre mémoire suit les grandes parties de l'énoncé.
Il examine d'abord les grands principes directeurs et il s'attarde aux moyens
préconisés pour mettre ces principes en pratique,
c'est-à-dire le développement et la qualité des services
et leur financement. Selon notre examen des principes directeurs de la
politique, certains principes nous paraissent tout à fait
adéquats; I y en a d'autres sur lesquels on se pose des questions et
d'autres nous paraissent également contradictoires les uns avec les
autres. Par exemple, nous sommes d'accord que les services de garde sont un
soutien essentiel pour les parents, mais pas uniquement pour leur travail. On
considère que les services de garde, dans la société
moderne, sont un support essentiel pour l'exercice du rôle parental dans
son ensemble. Cela a beaucoup d'importance ensuite dans l'application des
politiques. (16 h 15)
Nous croyons aussi que les services de garde peuvent constituer une
réponse aux besoins de développement de l'enfant. Le rôle
éducatif des services de garde est, pour nous, un aspect primordial.
C'est peut-être une des premières fois qu'il est
énoncé clairement, sauf qu'il vient en deuxième lieu. On
aimerait beaucoup pouvoir recourir à ce principe, à lui seul,
pour juger de la nécessité des services de garde. On entend
particulièrement par là que tous les enfants devraient y avoir
droit et aussi que les besoins de certaines clientèles
particulières nous apparaissent plus considérables même que
les besoins de leurs parents. Nous pensons en particulier aux enfants
handicapés, aux enfants qui ont une intégration sociale plus
difficile pour toutes sortes de raisons, soit à cause de
difficultés familiales ou, encore, des enfants qui viennent de familles
immigrantes, par exemple, où l'apprentissage de la langue au
Québec et de nos conditions de vie, etc., constitue un premier contact
avec une organisation sociale.
En passant, on a été heureux d'entendre des organismes
souligner le silence de l'énoncé fait par rapport à la
politique des services de garde pour l'accueil des enfants handicapés.
Cela nous préoccupe de voir qu'on y fait tout simplement allusion en
termes de mode de financement, mais qu'on n'en parle pas du tout au niveau des
principes.
Le troisième principe vise à un développement des
services et des modes de garde qui respecte les choix des parents. Cela nous
apparat un principe un peu vertueux mais sur lequel on a très peu
d'explications ensuite sur la façon dont on assure ce choix. Donc,
beaucoup de questions qui nous apparaissent fondamentales sont soulevées
par ce principe. Finalement, on ne peut pas dire si on est d'accord ou non
parce qu'on ne sait pas trop à quoi ça rime.
Le quatrième principe affirme une préférence pour
les services gérés par les parents et un soutien à cette
prise en charge afin de maintenir un lien très étroit entre la
famille, ses valeurs et le milieu de garde de l'enfant. C'est un principe qui
existe depuis la création des services de garde, avant même la
création de l'office, du temps où les services étaient au
service des garderies du ministère des Affaires sociales, entre autres.
On ne semble jamais vouloir le regarder à fond. On pense que des
questions Importantes sont soulevées là-dedans. Il nous
apparaît que ce qu'on cherche à faire, c'est assurer une
Implication et une participation des parents dans les services par ce biais. Il
nous apparaît un peu bizarre de le faire uniquement par la gestion. Les
gens qui nous ont précédées soulevaient d'ailleurs des
problèmes qui ressemblaient un peu à ça. Que les parents
participent, qu'ils aient voix au chapitre, qu'on assure une liaison
étroite entre leurs valeurs, leur façon d'élever leurs
enfants et ce que les enfants vont vivre dans les services de garde, cela nous
paraît excellent. Mais gérer des services, c'est autre chose! Il
nous apparaît ici qu'on fait assumer aux parents des
responsabilités qui dépassent la responsabilité d'un
parent.
Finalement, la question qu'on se pose, c'est: En quoi la
responsabilité des parents envers leurs propres enfants les rendrait-ils
automatiquement responsables de ceux des autres? Et pourquoi seraient-is plus
responsables de services collectifs que les autres individus de la
collectivité? Pourquoi aussi, parce qu'ils sont parents, seraient-Ils
automatiquement qualifiés pour gérer des organisations
collectives? Il y a beaucoup de responsabilités à gérer
des services de garde.
Nous sommes d'accord avec l'autre principe aussi de l'autonomie des
services: "Small is beautiful*. Je crois que c'est un peu une application de ce
principe qu'on vise. C'est excellent, mais I ne faut pas non plus le faire aux
dépens de normes de qualité et de gestion sévères.
Ce sont des fonds publics qui sont en cause et, surtout, ce sont des
êtres humains à une période très critique de leur
vie.
On ne croit pas non plus que le respect de l'autonomie aille
nécessairement de pair avec le caractère privé des
services qui est affirmé dans le même souffle dans
l'énoncé. On croit aussi qu'il y a un problème de
compatibilité avec la responsabilité communautaire qu'on aimerait
mieux appeler responsabilité collective et sociale. On y reviendra plus
loin.
Le dernier principe est celui de la saine gestion. Cela nous parait
aussi aller de soi, sauf qu'on ne voudrait pas que l'objectif des meileurs
services au meilleur coût possible soit entendu au strict point de vue du
coût financier. Il y a évidemment d'importants coûts sociaux
aussi qui sont impliqués là-dedans et il nous apparaît
très important d'en tenir compte.
Finalement, notre propre position, c'est que la responsabilité
collective est contredite par un développement de services qui
relèvent actuellement uniquement de l'initiative privée et par
une gestion qui est confiée aux parents et à des corporations
privées. Nous croyons plutôt que pour assurer le
développement concerté, une qualité accrue et un
financement amélioré, qui est l'objectif de
l'énoncé, il faudrait viser ultimement à la
création d'un réseau public, universel de services de garde
répondant a des besoins divers, mais en coordination avec les autres
services aux jeunes enfants et aux familles, qu'on enchâsserait dans une
politique familiale large.
Cet objectif s'appuie essentiellement sur le principe que, dans le
contexte social des familles actuelles, assurer aux parents un soutien
essentiel à leur rôle de parent et, aux enfants, des milieux
favorables à leur développement, c'est une responsabilité
qui incombe à toute la collectivité, au même titre que
l'éducation scolaire, les services sociaux ou les services de
santé. C'est à la lumière de ce principe, finalement,
qu'on a examiné le reste de l'énoncé. On est conscient que
ce n'est pas un virage qui peut se prendre tout d'un coup. On est conscient
qu'il faut le faire par étapes. On suggère un peu dans notre
mémoire, à mesure qu'on examine des aspects de
l'énoncé, des étapes qui pourraient aller vers cet
établissement d'un réseau public universel.
On compare aussi avec ce qui existe ailleurs parce que ça nous
paraît être un point de vue que. comme organisation membre d'un
organisme mondial, on a peut-être plus que d'autres organisations qui
sont venues ici.
Si on passe maintenant aux moyens qui sont préconisés, iI
y a d'abord la partie du développement. Premièrement, on est
Inquiet de l'estimation des préférences. Dans certains cas, on
trouve que cela repose sur des bases très fragiles. Les sondages vont
plutôt dans un sens, en tout cas avec le temps, où les gens
semblent préférer des services reconnus qui sont
gérés par la loi actuellement. Cette réserve étant
faite, on se demande pourquoi on vise à un objectif de réponse
partielle aux besoins. Pourquoi ne vise-ton pas à une réponse
à 100 % des besoins?
Quand va-t-on répondre à 100 % des besoins? C'est
peut-être une étape. Quand viendra l'étape des 100 %? Il
nous parait essentiel de le savoir pour la planification.
Dans le développement, iI y a des aspects qui sont
Intéressants. On parle d'assouplir la définition des services
pour pallier, entre autres, à des problèmes d'implantation dans
certains milieux. Mais ça nous parait quand même très
insuffisant. Tant que ça reste de l'initiative privée, même
si on veut insister, même si on veut y mettre de l'argent, même si
on souhaite que des services soient créés, iI reste que, dans les
zones qui sont mal desservies actuellement, rien ne garantit que ce sera
développé. Cela reste finalement de l'initiative privée,
principalement de l'initiative des parents. Il nous apparaît, par
exemple, que si ce pourrait être une étape de confier à
l'office, par exemple l'initiative de la création des nouveaux services
dans les zones les moins bien desservies actuellement, ce pourrait être
un rôle qu'on prendrait comme organisme public. Cette partie de
création des services ne serait pas uniquement la responsabilité
d'organismes privés.
Quant à la garde en milieu de travail, nous sommes très
heureux de voir qu'on veut l'améliorer, qu'on veut la développer
beaucoup, mais on trouve aussi que les moyens sont Insuffisants. On ne comprend
pas pourquoi "prioriser" la garde en milieu de travail et là-dessus
même, dans l'énoncé, toute l'argumentation semble nous dire
que c'est bien, que ce n'est pas nécessairement mauvais. Il y a certains
avantages. Il y a certains inconvénients, mais on ne comprend pas
pourquoi on lui accorde la priorité. Si c'est la participation des
entreprises qu'on souhaite, pourquoi ne le fait-on pas plutôt par le
biais de la fiscalité ou par le biais de normes de travail, plutôt
que leur laisser l'initiative et, en plus, consacrer une partie des places
à cet aspect?
Pour ce qui est de la garde scolaire, on trouve que tout est dit
très timidement. On regrette beaucoup, entre autres, de ne pas voir ici
des gens qui nous semblent concernés très directement par les
services de garde, c'est-à-dire les gens du ministère de
l'Éducation. Il y a des aspects très Importants qui les
concernent. Il y a plein de timidité. On dirait qu'on a peur d'obliger
le ministère de l'Éducation à faire quelque chose, qu'on a
peur d'obliger les commissions scolaires aussi.
Un peu de la même façon, c'est bien qu'on décide
enfin d'apporter une attention aux clientèles particulières et
aux besoins de garde partielle, mais iI n'y a à peu près pas de
soutien financier, sinon par le biais des municipalités. Alors, comment
peut-on décemment soutenir des services sans les subventionner? Cela
nous semble un peu étrange et, là aussi, iI y a des besoins chez
les parents. En même temps, le même problème se pose pour la
garde scolaire qui est actuellement subventionnée pour des enfants
réguliers et non pour les sporadiques, dans le jargon utilisé.
Cela veut dire que, là non plus, on ne reconnaît pas la garde
partielle.
Concernant aussi la planification, ce qui nous apparaît comme une
chose améliorée, c'est que l'on souhaite une planification
à long terme avec beaucoup de partenaires. Mais, en même temps, on
craint que les services qui sont déjà un peu
éclatés, qui sont multiples et un peu éparpillés,
que cet éclatement ne soit accentué. Si le nombre de partenaires
augmente, est-ce que la coordination augmentera aussi? C'est une question qui
se pose.
Je passe très rapidement. On vous a donné un peu l'exemple
des modèles de services préscolaires européens. Vous
comprenez aussi notre vocabulaire du domaine préscolaire. Nous sommes
l'organisation d'éducation préscolaire et ailleurs qu'en
Amérique du Nord, c'est-à-dire surtout en Europe,
l'éducation préscolaire comprend les services de garde, lesquels
relèvent Ici du ministère de l'Éducation.
Cela nous apparaît une question qu'l faut regarder de front,
d'autant plus que l'évolution des services ailleurs est
nécessairement et presque inévitablement allée vers une
espèce de conjonction de ces deux grands besoins de garde et
d'éducation. On croit que, finalement, on est un peu dans un cul-de-sac
avec le modèle qu'on a ici et qu'il faudrait regarder ailleurs pour voir
ce qui est utilisable et transférable pour nous.
Tous ces modèles d'organisation européens, je ne vous en
fais pas une lecture détaillée; vous avez déjà le
mémoire. L'avantage qu'on y voit surtout, c'est qu'ils évitent ou
du moins diminuent grandement le ballottement des enfants et des parents d'un
service à l'autre et ils facilitent beaucoup la planification pour
toutes les personnes et organismes impliqués.
Dans les réseaux que les pays européens ont mis sur pied,
les services sont graduits ou peu coûteux. Ils sont à la charge de
l'État qui n'a alors pas à aider des parents démunis
à assumer des frais. Alors, au lieu d'avoir des problèmes
d'exonération des parents, d'aide financière aux parents, ces
systèmes sont aussi beaucoup moins compliqués. Tout cela
s'inscrit dans des politiques qui sont ouvertement natalistes dans la plupart
des cas. Ce contexte-là est signalé dans renoncé de
politique et par d'autres organismes qui se sont présentés ici.
Comment soutenir, d'une part, une volonté d'améliorer le taux de
natalité au Québec et, en même temps, y aller toujours avec
le dos de la cuillère dans les services que l'on développe? C'est
évidemment une question de fond.
Dans l'examen de la planification avec les partenaires de
l'éducation, on a souligné au passage une hypothèse qui
est souvent discutée dans les milieux, qui pose de nombreux
problèmes, mais qui, croyons-nous, devrait être examinée
très sérieusement, soit celle de la maternelle à cinq ans
à temps plein. Cela ne va pas sans difficulté. On en a
discuté, d'ailleurs, tout à l'heure dans la salle avec d'autres
organismes.
Les gens y votent des problèmes. Pour nous, c'est une lustration
du problème d'un système qui a été mis sur pied de
façon parallèle. Il existe des services préscolaires
relevant du ministère de l'Éducation. Il y a des enfants qui vont
à la maternelle à quatre ans; ll y a des enfants qui vont
à la maternelle à cinq ans. La plupart des enfants
québécois fréquentent la maternelle à cinq ans. Ces
enfants-là se retrouvent avec des besoins de garde à demi-temps,
quand leurs parents ont des besoins sur ce plan. Ils sont, soit dans les
garderies scolaires, soit dans des garderies de quartier, soit dans des gardes
familiales. Dans la même journée, ces enfants peuvent se promener
dans plusieurs services. Alors, imaginons quotidiennement ce que c'est pour les
enfants, les parents et les personnes de ces services-là. Ce sont des
échos que nous recevons à notre organisation. (16 h 30)
La qualité des services est un autre aspect très
important. L'aspect de la stabilité et de la sécurité de
services mieux coordonnés, évidemment, cela nous paraît
important, en plus des critères habituels. En passant, on a surtout
souligné le problème de la formation du personnel. On a
trouvé qu'ici aussi il y avait une timidité dans les exigences.
On y va très lentement.
Le Président (M. Bélanger): Mme Baillar-geon, je
vous Inviterais à conclure, s'il vous plaît!
Mme Baillargeon: Oui.
Le Président (M. Bélanger): Vos minutes sont
écoulées.
Mme Baillargeon: Pour conclure sur le financement - c'est le
dernier point qu'il reste à aborder - on n'a pas abordé cette
question-là d'une façon technique, détaillée, mais,
globalement, on a la même crainte que beaucoup d'organismes, soit qu'un
mode de financement basé sur les revenus plutôt que sur les
besoins nous apparaît très discutable. On a surtout peur, comme
beaucoup d'autres, que les milieux qui ne sont déjà pas
très favorisés soient ceux qui en souffrent le plus. Et,
finalement, c'est peut-être dans ces milieux-là qu'on a le plus
besoin de s'assurer de la qualité des services.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie Mme
Baillargeon. Mme la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Merci, Mme Baillargeon. Finalement, vous
préconisez à court et à moyen terme un réseau
universel et gratuit. Vous nous demandez, par exemple, pourquoi on ne
répond pas à 100 % des besoins, compte tenu justement des
nombreux besoins des parents. Je dois vous dire que c'est très simple.
Si on n'aborde pas ou si on n'accepte pas le réseau universel et
gratuit, si on a fait un choix autre, et sur le plan des besoins aussi, c'est
tout simplement que cela dépend de la capacité de payer de
l'État et des parents qui sont également des contribuables. Dans
cet ordre d'idées, je me demande si vous pensez que toute la population
est prête à assumer les coûts de la garde pour des services
universels et gratuits?
Mme Baillargeon: Je crois - et c'est beaucoup discuté
entre nous - que c'est une objectif qu'on devrait viser. On ne croit pas que
cela va se faire du jour au lendemain; on croit que c'est coûteux, mais
la population québécoise a déjà fait des choix de
ce genre-là quand, dans les années soixante, elle s'est
dotée, par exemple, d'un système scolaire axé sur la
démocratisation de l'enseignement, sur une égalité des
chances pour tout le monde d'aller à l'école, de se scolariser.
Ce sont des choix qu'elle a déjà faits pour les services de
santé. Nous croyons qu'il y a une progression vers cela dans la
population et que, de plus en plus, les gens vont vers une option de cet
ordre-là.
Maintenant, pour nous, ce ne sont pas seulement les services de garde
comme tels et organisés comme ils le sont maintenant. C'est l'ensemble
des services à la famille et des politiques familiales qui doit
être coordonné, qui doit chercher à satisfaire les besoins
de l'ensemble de la population. C'est donc un objectif. Il ne s'agit pas que,
demain matin, cela soit fait; cet objectif devrait être visé et
les politiques devraient s'orienter vers cet objectif-là.
Mme Gagnon-Tremblay: Vous parlez également du rôle
que l'office a à jouer. Par exemple, dans certains milieux plus
défavorisés, entre autres, il est difficile pour des promoteurs
de monter un projet ou d'ouvrir une garderie. Vous avez sans doute pu
reconnaître ou lire à l'Intérieur de cet
énoncé de politique qu'on prévoit déjà, pour
certaines clientèles, dans certains milieux, que l'office pourrait
être justement le promoteur et aider à l'ouverture de ces
garderies.
Il y avait aussi la garde en milieu scolaire. Vous disiez tout à
l'heure qu'on a été peut-être très silencieux dans
l'énoncé de politique sur le milieu scolaire et vous vous
interrogiez, par exemple, sur la participation du ministère de
l'Éducation. Je dois vous dire que nous avons essayé de
concentrer tous les principaux groupes représentant le milieu scolaire
à la fin de cette commission parlementaire pour permettre justement au
ministre de l'Éducation d'être présent à la
commission pour entendre les recommandations de ces différents groupes.
Nous soumettrons, entre autres, votre recommandation au ministre de
l'Éducation.
Il y a aussi - et Je m'interroge un peu là-dessus - le
préscolaire. Vous pariez du préscolaire. Vous semblez dire que,
pour les enfants de cinq ans, I serait Intéressant de penser à
les
intégrer davantage dans ces prématernelles, alors que pour
le milieu des garderies, c'est le contraire qu'on nous recommande. On nous dit:
Ces enfants de cinq ans doivent demeurer en garderie. Il semble y avoir une
contradiction finalement entre les deux discours. Vous tenez toujours à
ce que ces enfants puissent être intégrés?
Mme Baillargeon: Pour nous, c'est justement l'exemple du
problème d'avoir mis sur pied des services sans les coordonner. On est
un peu devant une situation où on a créé deux
réseaux parallèles: on a les services de garde d'un
côté, et les services de l'éducation de l'autre. Dans le
quotidien, pour l'enfant, les parents et le personnel, cela se vit ensemble.
Quand, en plus, on n'est pas géographiquement situé dans le
même édifice, la coordination est très compliquée.
Je pourrais personnellement vous en parler plus longuement parce que j'ai
été impliquée dans un projet de recherche qui a
porté sur cette question-là. C'est un problème qu'on voit
comme organisme qui regroupe des gens qui viennent autant des services de garde
que des services d'éducation préscolaire. Il y a une
espèce de cul-de-sac. Comment vous dire? Je crois que la structure
actuelle accentue ces positions qui s'opposent et qui, finalement, ne devraient
pas s'opposer. C'est le même enfant. C'est foncièrement le
même développement de l'enfant. C'est le même type
d'éducation qui devrait avoir lieu partout.
Dans les pays européens, c'est justement un problème
auquel on a eu à faire face. Ils ont une histoire beaucoup plus longue
que la nôtre, et leur évolution est allée vers une telle
structure. Très classiquement, l'évolution des services a
été la suivante. D'abord, ils ont été
créés pour répondre à des services de garde.
Ensuite, sous la pression des organismes, des intervenants, etc., 8s ont
évolué pour améliorer leur qualité. Donc, on
reconnaissait peu à peu leur rôle éducatif. Et, en
reconnaissant leur rôle éducatif, on leur a aussi confié
l'éducation des enfants.
Chronologiquement, c'est un peu dans cet ordre que cela s'est
passé. Remarquez qu'ici, cela aurait pu arriver. On a une histoire des
services ' de garde qui a commencé au XIXe siècle, qui s'est
arrêtée et qui a repris beaucoup plus tard. Entre-temps, on a eu
la création de nos écoles maternelles, par exemple.
Mme Gagnon-Tremblay: Vous parlez de l'intégration
d'enfants handicapés, tout comme l'ont fait, d'ailleurs, plusieurs
groupes qui vous ont précédés. Donc, à ce
moment-ci, je ne peux pas passer sous sience tout ce que l'office a
déjà fait pour les enfants handicapés. Justement, l'une
des premières politiques de l'office a été la politique
d'intégration des enfants handicapés, suivie de la
rédaction de documents, comme le plan d'intégration, la
démarche qui a visé à intégrer adéquatement
les enfants dans les services de garde ainsi qu'une quantité de
publications. Je pense, entre autres, à 'Entrez dans la ronde..." des
documents d'orientation qui ont déjà été
préparés. Il y a eu des tournées provinciales
d'évaluation de l'ensemble des programmes de l'office. Il y a eu des
mises à jour de documents et du plan d'Intégration ainsi que des
subventions de 300 $ pour la préparation du plan d'intégration.
Je pense qu'il y a quand même eu une volonté de la part de
l'Office des services de garde à l'enfance de vraiment mettre en
application cette politique d'intégration des enfants handicapés.
Je me demandais si on était tous conscients de cet effort louable qui a
été fait, puisque je remarque que chaque groupe en parle depuis
le début de cette commission parlementaire. C'était tout
simplement une constatation. D'ailleurs, vous êtes justement l'auteur de
"Entrez dans la ronde...".
Il y a une question très importante que je voulais vous poser.
À la page 3 de votre mémoire, vous dites: "Nous ne croyons pas
non plus qu'en devenant parents les individus soient automatiquement
qualifiés pour gérer une organisation collective." Alors, tout
comme le groupe qui vous a précédées, vous semblez vous
interroger sur la gestion des garderies par les parents. Finalement, vous
semblez remettre en question le fait de laisser gérer les parents, comme
si cela dépassait leur responsabilité que de gérer des
services. Est-ce que j'ai bien compris? Est-ce que c'est bien ce que vous
voulez dire?
Mme Baillargeon: Oui. C'est ce que nous voulons dire, d'autant
plus que ces parents doivent s'occuper de leurs enfants. Comme la plupart des
parents usagers de la garderie, ce sont des gens au travail dans la
journée. Cela veut dire qu'ils doivent se taper des horaires très
chargés pour, en plus, s'occuper de la gestion des services de garde.
C'est leur confier beaucoup et, en même temps, ne pas assurer
nécessairement la participation des autres parents qui ne sont pas au
conseil d'administration. Il y a une ambiguïté dans cela qu'il nous
paraît important de souligner.
Mme Gagnon-Tremblay: Alors, si, pour toutes sortes de raisons,
les parents ne devraient pas être les gestionnaires des garderies, qui
devrait gérer les garderies...
Mme Baillargeon: L'État.
Mme Gagnon-Tremblay: ...sans but lucratif? L'État?
Mme Baillargeon: L'État.
Mme Gagnon-Tremblay: Cela signifie véritablement que vous
préconisez un service universel et gratuit.
Mme Baillargeon: C'est cela.
Mme Gagnon-Tremblay: Mais si. par contre, d'autres personnes
pouvaient les gérer? Supposons qu'on soit contre cette philosophie
d'étatiser. Par exemple, si nous devions continuer dans ce type de
services que nous avons présentement, croyez-vous toujours que les
parents ne devraient pas en être les gestionnaires? Finalement, qui
devrait gérer pour les parents, si ce n'est pas l'État?
Mme Baillargeon: On ne veut pas interdire aux parents de
gérer les services. Il ne faudrait pas prendre une position inverse.
Mme Gagnon-Tremblay: Mais vous semblez croire qu'ils ne sont pas
suffisamment compétents pour les gérer.
Mme Baillargeon: On croit que c'est beaucoup leur demander et
qu'ils ne sont pas nécessairement responsables de cela, ni toujours
compétents non plus. Gérer une garderie, c'est une grosse
affaire; en plus. lIs sont passants, 1s sont là quand leurs enfants sont
en services de garde. La garderie doit continuer, elle doit planifier. C'est un
problème que pose la gestion par les parents, mais cela ne veut pas dire
qu'ils ne doivent pas y participer. Il ne faudrait pas prendre notre position
à l'envers non plus, sauf qu'à long terme on croit que c'est une
responsabilité collective qui doit être assumée par un
maître d'oeuvre quelque part et on croit que c'est l'État qui doit
faire ça.
Mme Gagnon-Tremblay: Vous savez que c'est un principe fort
important. Lorsqu'on parle de l'autonomie des garderies, cela suppose la
gestion par les parents.
Mme Baillargeon: Oui.
Mme Gagnon-Tremblay: Si, d'une part, certains groupes ou
certaines personnes s'interrogent sur la gestion des parents, à ce
moment-ci, cela me laisse très songeuse, comme Je le mentionnais tout
à l'heure. C'est pour ça que je veux vraiment avoir
l'idée, l'intention, vraiment connaître à fond la
perception que vous avez à ce sujet parce que c'est très
important pour la commission.
Mme Baillargeon: Pour nous, de dire que la responsabilité
première devrait appartenir à l'État, cela ne veut pas
dire que les garderies ne doivent pas avoir une certaine autonomie et que les
parents ne doivent pas participer à la gestion. On croit qu'il y a moyen
de trouver une façon de le faire, mais sans que toute la
responsabilité repose sur les épaules des parents et que
l'autonomie qui est donnée aux garderies soit encadrée.
Mme Julien (François): II y a aussi le fait que les
parents changent continuellement Cela aussi vient jouer dans une certaine
stabilité des garderies. Les parents changent, la structure change, tout
change, mais le personnel de la garderie pourrait le faire, comme dans les
commissions scolaires où ce ne sont pas les parents qui vont
gérer et, pourtant, elles sont autonomes.
Mme Gagnon-Tremblay: En somme, vous voulez dire que le personnel,
les éducatrices et les éducateurs pourraient gérer;
à ce moment-là, les parents ne seraient...
Mme Julien: La coordonnatrice.
Mme Gagnon-Tremblay: En ce qui concerne la gestion, nous n'aurons
pas nécessairement besoin de parents pour gérer.
Mme Julien: Pas nécessairement.
Mme Gagnon-Tremblay: D'accord.
Vous dites, à la page 4: "Nous voyons donc une certaine
ambiguïté et même une contradiction entre certains principes.
La responsabilité collective nous semble contredite par un
développement de services relevant entièrement de l'initiative
privée et par la responsabilité de la gestion confiée aux
parents et à des corporations privées." Pourquoi affirmez-vous
ça? Je ne saisis pas bien. Qu'est-ce que vous voulez vraiment dire par
cette affirmation?
Mme Baillargeon: Cela revient à ce qu'on vient de
dire.
Mme Gagnon-Tremblay: C'est ça, finalement, que vous
vouliez mentionner.
Mme Baillargeon: Oui.
Mme Gagnon-Tremblay: D'accord.
Mme Baillargeon: Si vous me le permettez, j'aimerais revenir sur
la question des enfants handicapés. C'est un dossier que,
personnellement, je connais très bien, vous le savez. J'ai écrit
pour l'office et j'ai participé à l'élaboration de la
politique.
Évidemment, ce n'est pas ce que l'office fait qu'on critique,
c'est l'absence de reconnaissance de ça dans l'énoncé qui
nous fait peur. J'ai l'impression que c'est aussi ce que les autres organismes
ont voulu souligner.
Pour ma part, je dirais même - je parie en mon nom personnel
là-dessus - que c'est un exemple du problème que crée le
fait que les garderies sont des entités privées et non pas une
responsabilité collective d'abord. Je me rappelle très bien les
discussions qu'on avait eues, par exemple, au moment de l'élaboration de
la politique et de la rédaction de mon document
avec l'Office des personnes handicapées qui
découvrait à quel point le service de garde n'était pas un
service universel offert à tous les enfants québécois.
Nécessairement, iI se heurtait, à la limite, à une
clientèle particulière pour laquelle il aurait voulu que les
services de garde ouvrent leurs portes.
Les garderies sont déjà dans une situation
précaire. Elles ont déjà beaucoup de difficultés
à assurer des services de qualité, ont des problèmes de
roulement de personnel, des problèmes de formation, des problèmes
de maintien des services aussi, etc. Évidemment, c'est la même
situation en milieu scolaire et je dirais même qu'elle est encore
pire.
Alors, comment peut-on dire comme collectivité: Oui,
un enfant handicapé a droit à des services de garde de
qualité. On le reconnaîtrait exclusivement pour lui, on en ferait
un droit particulier alors qu'on n'applique pas ce droit à l'ensemble
des enfants. C'est une des limites au fait qu'on ait un réseau
morcelé comme ça.
Mme Gagnon-Tremblay: Remarquez que nous étions
tellement d'accord avec cette politique d'intégration de l'Office des
services de garde à l'enfance qu'on n'a pas cru bon de le
réaffirmer dans l'énoncé de politique, mais vous pouvez
être certaines que nous y croyons. D'ailleurs, nous allons poursuivre sa
mise en application. (16 h 45)
II y a une dernière question que je voudrais vous
poser. Vous avez parlé à un moment donné dans votre
présentation d'une saine gestion. Qu'est-ce que c'est pour vous, une
saine gestion dans les services de garde?
Mme Baillargeon: En fait, c'est le principe qui est
énoncé. C'est un des sept principes directeurs de
l'énoncé qu'on a tout simplement souligné au passage en
disant qu'on était bien d'accord avec ça. C'est évident
qu'il est nécessaire, pour la survie des garderies et des services de
garde en général, qu'ils soient bien gérés. Si vous
voulez, on peut vous donner un exemple de problèmes qui se posent. On
vous a dit, entre autres, à la fin de notre mémoire, qu'on
n'était pas d'accord avec le financement des garderies à but
lucratif. On a à l'esprit des problèmes épiques, que Je
qualifierais de secrets de polichinelle, de certaines garderies à but
lucratif qui ont posé des problèmes énormes en termes de
respect des normes de qualité de l'Office des services de garde à
l'enfance et pour lesquels, finalement, iI y a beaucoup d'énergie, de
temps, de personnel et d'argent, qui sont des fonds publics, qui ont
été consacrés à recoller des pots cassés. Et
quand, dans notre mémoire, on fait allusion à des
problèmes comme ça, c'est à ça
précisément qu'on pense. Il y a eu des cas célèbres
dans la région de Québec. Il y en a eu dans la région de
Montréal aussi. Cela nous apparaît être des choses qu'on ne
devrait pas laisser continuer.
Mme Gagnon-Tremblay: Merci, madame.
Le Président (M. Bélanger): Merci, Mme la
ministre.
Mme la députée de Maisonneuve.
Mme Julien: Est-ce que je pourrais ajouter quelque chose?
Le Président (M. Bélanger): Oui. Vous êtes
Mme Julien, je crois.
Mme Julien: Oui. Au sujet de la question de Mme Gagnon-Tremblay,
quand vous avez dit que les enfants de cinq ans devraient aller à la
garderie plutôt qu'à la maternelle, est-ce que j'ai bien
compris?
Mme Gagnon-Tremblay: Non. J'ai tout simplement dit qu'V y a une
contradiction. D'une part, vous avez des groupes qui disent que ces
enfants-là de la maternelle devraient être plutôt
considérés comme d'âge préscolaire. Par contre, les
intervenants des garderies disent: Non, ces enfants-là ont cinq ans et
devraient plutôt relever des garderies. Alors, après avoir lu
certains mémoires ou pratiquement tous les mémoires
jusqu'à maintenant, il y a une certaine contradiction qui semble
s'instaurer peut-être entre ces deux groupes de pensée.
Mme Julien: Mais vous savez pourquoi... Mme Gagnon-Tremblay:
Oui.
Mme Julien: ...les garderies voudraient s'approprier les enfants
de cinq ans. Je pense qu'il ne faut pas se le cacher. C'est aussi une question
financière. Je veux dire que plus on développe un service, plus
on veut que des enfants de cet âge-là fassent partie de ce
service-là. Je pense que c'est une question d'argent plutôt qu'une
question de qualité des services.
Mme Gagnon-Tremblay: On leur posera la question.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie.
Mme la députée de Maisonneuve.
Mme Harel: Merci, M. le Président. Je crois bien que la
discussion que vous venez d'avoir démontre bien que, lorsque
l'État met en rivalité des services entre eux, ça revient
un peu à cette situation-là. Alors d'une certaine façon,
au gouvernement, on peut vertueusement se retrancher en disant: Loin de moi ces
mesquines rivalités, mais c'est le système même qui
amène les services à vouloir se recruter des clientèles
dans la mesure où I s'agit de services à initiative
privée, en fait, privée au sens non pas lucratif mais au sens de
l'intervention.
Votre mémoire est extrêmement intéressant. Je me
demandais, Mme Baillargeon. ce que vous faites dans la vie.
Mme Baillargeon: Je suis professeure à l'Université
Laval.
Mme Harel: Et vous vous occupez d'éducation
préscolaire?
Mme Baillargeon: Oui. c'est ça
Mme Harel: Et les personnes qui vous accompagnent aussi?
Mme Baillargeon: Elles sont aussi en formation.
Mme Julien: J'enseigne au Collège de Sainte-Foy la
technique d'éducation en services de garde à l'enfance.
Mme Filion (Rolande): J'enseigne également au
Collège de Sainte-Foy.
Mme Harel: C'est vrai? Remarquez que le débat qui s'est
amorcé sur la question de la participation des usagers - en fait, il
s'agit là des parents - est très intéressant. C'est une
question Importante et ça n'a rien à voir avec une façon
morale de voir les choses. Nous sommes des parents. Il y en a qui sont
compétents pour gérer, d'autres qui ne le sont pas. Il y a toutes
les sortes de parents comme il y a toutes sortes de gens, toutes sortes de
députés. Il n'y a pas un jugement moral quand on est à la
recherche d'une formule adéquate de gestion. Je pense que la
première question, c'est qu'il faut cesser d'élever au rang de
principe sacré celui de la gestion des parents. Ça peut
être, malgré tout, un modèle extrêmement
intéressant, celui, en tout cas, qui s'est développé au
Québec.
Vous avez, j'ai l'impression, une idée de ce qui se passe dans le
monde; les illustrations que vous nous donnez des autres pays sont fort
Intéressantes. Il faut convenir qu'au Québec il s'est
développé, à partir de la Révolution tranquille,
depuis 25 ans, ce qu'on appelle la démocratie participative; les usagers
dans les services... Cela donne des résultats qu'il faudra analyser
à un moment donné, qui l'ont été en partie par
l'INRS dans les services sociaux, je crois, dans les CLSC et autres. Vous nous
dites: II vaudrait mieux un service universel public gratuit comme I s'est
développé dans les autres pays. D'un côté, vous
faites état des inconvénients. Les personnes qui vous ont
précédées - vous y étiez - faisaient valoir les
difficultés de gestion. Il faudrait peut-être distinguer, comme le
mentionnait un Intervenant, les difficultés de gérer les
problèmes financiers de celles de la gestion de qualité d'une
garderie. Si tant est que les problèmes financiers étaient
réglés, je pense bien que la gestion pourrait avoir une autre
vision des choses dans un service de garde.
Je ne sais pas ce qu'en pense la ministre, mais c'est évident que
ce n'est pas nécessairement une question de compétence. À
n'assujettir le développement des garderies qu'au modèle de
garderies où les parents usagers sont chargés de la gestion ou
à l'autre modèle qui est complètement privé et qui,
à bon droit, comme vous le mentionnez, fait finalement le jeu du libre
marché, à n'avoir que ces deux modèles, je me demande si
on se retrouve devant une situation où des parents nous disent: Moi, je
n'ai pas le temps; je n'ai tout simplement pas le temps; je suis trop
sollicité par mes activités professionnelles ou parce que j'y
ajoute un apprentissage, une formation ou parce que j'étudie; je n'ai
pas le temps, en plus, d'être sollicité.
Dans le type de services où les parents usagers sont
chargés de la gestion, une grande pression est faite sur eux. La crainte
que j'ai, c'est que des parents démissionnent devant ce type de services
et qu'ils choisissent un autre type de services où Is n'auront pas
à être sollicités pour ce genre de responsabilité
qu'ils ne peuvent pas assumer ou qu'ils ne veulent pas assumer. Aussi, ils ont
le droit de choisir de s'impliquer dans autre chose dans la vie. S'iI faut
qu'ils gèrent leur coopérative d'habitation, leur
coopérative d'alimentation, leur garderie, et on pourrait en ajouter, il
est possible que des gens n'aient plus le temps de gagner leur vie. C'est
là sans doute que le bât blesse, dans le développement
quand on ne l'assujettit qu'à un seul modèle de gestion. Je ne
sais pas ce que vous en pensez. Ce que je souhaite, c'est qu'on puisse - je
pense que c'est un peu votre recommandation - voir cohabiter des modèles
de garde sans but lucratif offerts aux parents d'enfants d'âge
préscolaire. C'est ce que je comprends.
Mme BaUlargeon: Quand on parle des modèles
européens, la partie, je dirais, participation et gestion par les
parents varie énormément. On n'a pas donné de
détails dans le mémoire, mais il y a des pays où les
parents ne participent à peu près pas; lls sont totalement
exclus. Il y en a d'autres où iIs ont une participation par
représentant interposé et d'autres où iIs ont une
participation directe. Les pays Scandinaves ont peut-être des
modèles intéressants parce que leur histoire ressemble beaucoup
à la nôtre; c'est à peu près la même
période de développement même si, dans certains cas, cela a
commencé plus tôt qu'ici. Mais I reste que la période
importante de développement est à peu près la même.
Ils ont souvent aussi des options et des visions un peu
sociales-démocrates, comme on peut en avoir au Québec, où
la participation de l'État est importante, mais ce n'est pas une
mainmise, ce n'est pas une...
Mme Harel: Ce n'est pas l'étatisation.
Mme Baillargeon: Non, complète et totale. Il y a une
autonomie des services, mais il y a une planification et une prise en charge
financière par l'État
Mme Harel: Alors, on doit comprendre qui faut distinguer la
gestion de l'intervention de l'État. L'intervention de l'État
pourrait assumer à 100 %, par exemple, le financement d'un service de
garde, et I ne faut pas confondre avec la gestion, il pourrait y avoir des
modes de gestion participatifs même avec un financement à 100
%.
Mme Baillargeon: Exactement.
Mme Harel: Je le dis, le gros mot étant lâché
par la ministre, le mot "étatisation", faisons bien attention, les
écoles sont aussi entièrement financées et, en ce sens,
étatisées, mais voilà, c'est un service public et c'est
celui qui favorise l'égalité des chances dans la
société.
Je reviens à la question de l'intégration. En
écoutant la ministre, je me demandais comment il se fait, après
tant d'efforts louables et tant d'années, que les résultats
d'intégration soient, malgré tout, de consensus, si
décevants. On parle de 235 places après tous ces efforts qui ont
été mis en place. C'est peut-être parce que le
système n'est pas adéquat; peut-être faudrait-il
développer des modèles d'intégration qui soient plus
soutenus par l'État? Comment pensez-vous qu'on pourrait favoriser ou
faciliter l'intégration qui se fait vraiment à petits pas tout
simplement?
Mme Baillargeon: J'ai bien peur que cela ne suive ie rythme de
développement des services. En même temps, si on regarde
l'ensemble de la question de l'intégration et si on compare ce qui se
fait en milieu de garde, déjà très démuni
financièrement comparativement au milieu scolaire, je pense que les
milieux de garde en sortiraient plutôt bien. Ils subiraient la
comparaison certainement à leur avantage. Donc, ce n'est pas une
question de volonté ou de fermeture, globalement.
Mme Harel: D'attitude.
Mme Baillargeon: Évidemment, il y a des exceptions, mais
s'iI n'y a pas de services dans un quartier, comment peut-on y intégrer
un enfant handicapé? Il ne peut pas exister d'intégration s'il
n'y a pas de services. Les zones qui sont mal desservies actuellement, les
petites municipalités, les zones rurales, ne peuvent évidemment
pas, non plus, accueillir des enfants handicapés s'iI n'y a pas de
services. C'est plutôt dans cette perspective que nous avons
signalé ici le problème.
Mme Harel: Dans votre mémoire, à la page 12, vous
citez l'exemple américain. Vous dites que des efforts avaient
été particulièrement nombreux aux États-Unis dans
les années soixante à l'égard des services
préscolaires. Vous faites état d'une expérience qui a
été suivie par des évaluateurs indépendants et qui
a permis en fin de compte - l'imagine que cette étude s'est
terminée récemment - de constater qu'il y avait eu moins
d'abandons scolaires, moins de recours aux services scolaires spéciaux,
moins de délinquance, moins de grossesses précoces, plus
d'intégration sur le marché du traval chez les enfants des
programmes préscolaires que chez leurs pairs des groupes
témoins.
Vous concluez en disant qu'l y avait donc là un
bénéfice économique de cet Investissement dans des
ressources préscolaires et qu'l y a donc, j'imagine - je conclus
à rebours - un coût économique à ne pas avoir
d'investissements plus considérables de la part des pouvoirs publics
dans le préscolaire. Avez-vous été capables de
chiffrer...
Mme Baillargeon: Nous ne l'avons pas fait, mais une des équipes
membres de ce consortium, l'équipe de Weikart et Schweinhart du
Michigan, a fait faire ce chiffrage par un économiste. Cela s'est
passé il y a déjà quelque temps, au début du
gouvernement Reagan. Alors, les chercheurs avaient dit: On nous demande de
parler "Reaganomics"; on va parler en termes "Reaganomics". Et Ils
avaient fait cette traduction. C'est ce à quoi je fais allusion aussi
dans le texte.
C'est très important de le souligner, on voulait terminer notre
mémoire là-dessus en pariant du financement et des coûts.
C'est sûr qu'à court terme on fait un investissement dans des
services de qualité. Cela coûte des sous; on ne peut pas se le
cacher. Ce serait démagogique de dire que ça ne coûte rien.
Cela coûte des sous. Si on le regarde à très court terme,
donc, c'est coûteux, mais si on regarde ça à long terme, en
termes de prévention... Imaginez bien que les chercheurs, quand ils
avaient commencé ça, ne pensaient pas arriver à de telles
choses. C'est assez exceptionnel qu'ils aient réussi à suivre
leur sujet si longtemps. Je ne peux même pas vous dire que c'est
terminé parce que je sais qu'il y a encore des équipes qui
continuent de suivre leurs enfants qui sont maintenant des adultes.
J'avais rencontré, entre autres, une chercheuse d'une de ces
équipes qui avait pris les enfants à trois ans. Ils avaient 23
ans quand elle m'a fait part des résultats. C'est quelque chose de
très important dans la recherche préscolaire américaine,
et je dirais même mondiale, parce qu'on n'a pas d'exemple d'études
qui arrivent à expliciter aussi clairement que ça les effets que
cela a pu avoir eus. (17 heures)
Mme Harel: C'est extrêmement intéressant, M. le
Président. Il y a tellement de choses intéressantes dans votre
mémoire et notamment, vous y suggérez immédiatement des
décisions qui
pourraient être prises sur plusieurs des aspects que
l'on va discuter durant les travaux de la commission. Vous reprenez la
recommandation du comité consultatif sur les services de garde à
l'enfance, à savoir que l'office supplée justement l'absence de
ressources dans certains milieux défavorisés ou dans des milieux
comme les petites communautés rurales, dans des municipalités
où iI n'y a pas encore de services. Également, je pense, en
matière de garderie à but lucratif, vous recommandez nettement
que... Votre point de vue était bien exprimé. Vous dites qu'iI
faut que tes promoteurs de ces projets assument les choix qu'iIs ont faits et
que, dans la mesure où leur choix est d'établir une garderie
à profit. Ils ne doivent pas, d'un autre côté, demander
d'être subventionnés à moins de ne transformer leur
garderie. C'est bien l'essentiel de la recommandation que vous faites.
Je pense que - je vais terminer là-dessus - sans
doute l'aspect le plus important est au début de votre mémoire,
dans la présentation que vous nous en faites, quand vous soulignez que
les services de garde sont un soutien essentiel pour les parents, mais pas
uniquement pour leur travail. C'est sans doute ce qui, à la lecture de
l'énoncé de politique, m'a le plus inquiétée parce
que, malgré tout, ce serait un changement de cap en regard des
orientations prises il y a dix ans. Dans l'énoncé de politique,
à la page 16, on y lit: indispensables quant à ta participation
des parents au marché du travail, les services de garde, donc,
s'avèrent essentiels, etc. On vient restreindre, d'une certaine
façon, ce qui, à l'origine, était considéré
comme un volet de la politique de la petite enfance. Cela provoque chez moi
vraiment une vive inquiétude tant qu'il n'y aura pas un engagement
public et ferme de ne pas assujettir l'accessibilité aux services de
garde au fait d'être considéré comme un mauvais parent.
C'est ma plus profonde inquiétude compte tenu, justement, des
recommandations du comité consultatif qui recommandait, par exemple, que
les personnes assistées sociales...
Le Président (M. Bélanger): En conclusion, Mme la
députée de Maisonneuve.
Mme Harel: ...ne puissent y avoir accès que dans la mesure
où un travailleur ou une travailleuse sociale viendrait, par un
certificat, déclarer d'une certaine façon leur inaptitude
à s'occuper de leur enfant et de ses besoins, donc, de le mettre en
garde. Je crois que c'est là une façon de voir tes choses qui
encourage les parents à démissionner, à abdiquer, à
renoncer pour avoir un service. C'est tout à fait contraire à une
vision d'une politique farriiate qui soutient le parent dans son rôle
parental. Je vous remercie, M. te Président.
Le Président (M. Bélanger): Si vous voulez bien
remercier les représentants.
Mme Harel: Je vais leur laisser la possibilité de
réagir à ma place...
Le Président (M. Bélanger): Brièvement, si
vous plaît!
Mme Harel: ...avant que je n'aie plus de voix.
Mme Baillargeon: Je crois qu'on a fait le tour de l'essentiel.
Pour ce qui est des détails, on pourrait en parler très
longuement On vous remercie beaucoup.
Le Président (M. Bélanger): Merci, madame. Mme la
députée de Maisonneuve, ça va. Mme la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Je voudrais vous remercier, mesdames, pour
vos Interventions et vous féliciter pour la qualité de votre
mémoire. Je pense que vous soulevez des aspects qui sont fort
intéressants et qui méritent une réflexion approfondie.
Merci.
Mme Baillargeon: Merci.
Le Président (M. Bélanger): La commission remercie
l'Organisation mondiale de l'éducation préscolaire,
l'OMEP-Canada, et Invite à la table Mme Raquel Betsalel-Presser.
Bonjour, Mme Presser. Je veux simplement vous informer que
nous avons une enveloppe de 30 minutes, c'est-à-dire environ dix minutes
pour la présentation de votre mémoire et 20 minutes
d'échanges de propos avec les membres de la commission. Je vous prierais
donc de présenter votre mémoire. Je vous remercie.
Mme Raquel Betsalel-Presser
Mme Betsalel-Presser: D'accord. Alors, je vais essayer de passer
brièvement sur les premiers points de mon mémoire. J'aimerais par
ailleurs situer le sens de mon intervention où je me présente
comme chercheure et professeure en milieu universitaire. Je passe par hasard
après ma collègue, mais... C'est donc un point de vue de
chercheur qui m'intéresse et sur lequel je tiens à attirer
l'attention de la commission parlementaire. Par ailleurs, j'ai eu aussi le
privilège de présider l'ex-comité consultatif sur les
services de garde et je ne peux pas faire abstraction de cette
expérience si enrichissante.
Alors, d'abord concernant les sept principes directeurs, je
vais les traiter de façon relativement globale. Il me semble qu'au moins
six d'entre eux se regroupent autour de la participation des parents et du
soutien aux parents. Il me semble que les principes sont extrêmement
intéressants. On ne pourrait être contre ces principes. Il y a
malheureusement un seul principe qui touche l'enfant, c'est le deuxième,
et c'est un milieu de développement. Par ailleurs,
Je constate et c'est intéressant de voir que pour la
première fois dans des documents officiels, concernant les services de
garde, la question de prévention et de développement est
clairement présente. C'est un enrichissement et je voudrais revenir tout
à l'heure sur l'importance de cette question, étant donné
que mon point de vue se situe surtout autour de la défense du concept de
la qualité dans les services de garde. Je vais donc
nécessairement mettre l'accent sur le développement de l'enfant
plus que sur le restant des services à la famille, bien que je sois
évidemment d'accord avec la raison d'être des services de garde
comme un service à la famille.
Par ailleurs, je tiens à souligner que je le vois comme un
service à la famille et non pas aux parents qui travallent. C'est
d'ailleurs ce qui m'a posé un petit problème dans le premier
principe qui me semblait un peu limitatif aux parents travailleurs, qui paient
des taxes. Je souhaiterais que cela dépasse cela de façon plus
explicite et que cela couvre tous les parents ayant besoin de services, quelles
que soient les raisons de ces besoins.
Le troisième principe: Un développement qui respecte le
choix des parents. Encore là, cela supposerait que l'on ait vraiment les
possibilités de choix en termes de nombre suffisant, mais je trouve
quand même Intéressant de pouvoir préserver cette richesse
dans le système actuel qui offre différentes possibilités
et que les parents puissent choisir à l'intérieur de
différentes ressources et avec le projet de développement
d'autres ressources. Il me semble qu'il faut absolument favoriser cette
question.
La préférence pour les services gérés par
les parents. Je suis étonnée de voir le changement dans la
terminologie. Il me semble qu'avant on parlait davantage de services
contrôlés par les parents. La gestion ici est un peu
différente de celle qui a précédé. Je pense
qu'effectivement les parents doivent participer à la gestion, mais
doivent absolument contrôler et participer de façon conjointe avec
le personnel du service de garde. Je trouve qu'il y a très peu de place
laissée au personnel des services de garde concernant la gestion et la
prise de décisions. Encore là, je pense que c'est mettre
énormément sur le dos des parents que d'exiger ou que de leur
demander d'assumer toute cette gestion puisque, cela a déjà
été dit. lls font appel aux services de garde justement parce
qu'ils sont pris pendant toute la journée. Leur demander en plus de
gérer les services, cela suppose, à mon avis, qu'on est en train
de redéfinir le concept de parent et qu'on ajoute d'autres paliers
à cette charge qui est déjà assez difficile. Alors, je
pense qu'il faut garder la participation des parents... il faut garder les
services sans but lucratif, c'est très Important, mais, par ailleurs, il
ne faut pas tout mettre sur le dos des parents; il me semble que c'est trop
leur demander.
Je sais qui va falloir que je passe très vite. La question de la
responsabilité communautaire est un excellent principe, mais encore
faut-il qu'on puisse se concerter et que tous les milieux impliqués
soient vraiment en mesure de le faire, ce qui, me semble-t-il. n'est pas le cas
actuellement. Tout le problème des enfants maltraités, des
enfants handicapés, dont on a déjà parlé, des
enfants qui posent des problèmes sociaux, des services de garde en
milieu scolaire, cela exige nécessairement des concertations qui sont,
jusqu'à maintenant, presque Inexistantes.
La saine gestion de l'ensemble du service. Il me semble qu'on parle
là-dedans d'un choix d'investissement social. À mon avis, les
services de garde à l'enfance doivent aller de l'avant en termes de
qualité et de prévention, ce qui est déjà dit dans
le deuxième principe, mais si on veut le rendre opérationnel iI
faut qu'on fasse un choix de société et qu'on dise: Voici, on va
investir dans de jeunes enfants et dans la famille de sorte qu'on ait moins
à pallier plus tard dans les domaines scolaire, médical et
social.
Je vais sauter directement à la conclusion de mon intervention
parce que celle-ci a une incidence directe sur la qualité des services.
Il me semble que là-dessus, l'énoncé de politique est
plutôt timide. Dans une perspective de développement du secteur
des services de garde, qu'on pourrait appeler le cadet de la famille des
services sociaux éducatifs, iI est normal que le démarrage se
fasse graduellement. Mais i faut qu'il atteigne un rythme de croissance sans
délai, car il ne s'agit pas d'un luxe, mais d'un besoin social.
Les commentaires qui ont précédé cette partie ont
permis de mettre en évidence l'importance que le principe directeur de
l'énoncé de politique revêt et comment, dans une certaine
mesure, il va dans le sens de répondre aux besoins de la famille et de
la société québécoise. Toutefois, les conditions de
mise en application de ce principe me rendent plutôt sceptique quant
à leur possibilité réelle d'application. En effet, comment
peut-on prétendre favoriser la qualité alors que les conditions
de base susceptibles de l'assurer ne connaissent qu'un minimum de
progrès dans ce projet de politique?
Je signalerai ici les principaux aspects de l'énoncé qui
me permettent de craindre un maintien d'entraves dans la poursuite de la
qualité. Alors que l'ensemble des recherches confirme que la formation
pertinente et les conditions de travail du personnel constituent le vecteur de
qualité de prédilection dans un service qui accueille la
population d'âge la plus vulnérable, les prévisions autour
de ce facteur demeurent assez discrètes. Indiscutablement, l'atteinte de
65 % des garderies pouvant maintenant répondre à la norme d'une
personne sur trois ayant la formation pertinente est Intéressante, c'est
un progrès, mais cela signifie que, dans chaque garderie, iI y a au
moins deux personnes qui, quotidiennement, doivent s'inspirer de leur intuition
et de leur amour des enfants
pour répondre au programme éducatif
exigé par la réglementation.
Par programme éducatif, je voudrais signaler qui
faut comprendre qu'il s'agit de tout geste, toute attitude, tout comportement,
toute idée ou initiative et toutes valeurs qui sont
véhiculés dans le contact, environ dix heures par jour,
auprès d'un groupe d'enfants. Donc, le programme éducatif va bien
au-delà de l'activité de bricolage ou de la ronde qu'on
connaît. Il exige de l'éducatrice un savoir inspiré des
principales sources théoriques qui permettent d'ajuster les
activités en fonction des capacités individuelles des enfants et
du contexte dans lequel ce programme se réalise.
Le Président (M. Bélanger): Si vous permettez,
madame...
Mme Betsalel-Presser: Oui.
Le Président (M. Bélanger): ...je vous inviterais
à conclure rapidement.
Mme Betsalel-Presser: D'accord. Je veux vous dire que, pour
assumer et pouvoir assurer de façon réaliste la qualité,
il me semble qu'il faut d'abord regarder les conditions de travail du
personnel, la formation du personnel, réviser le ratio enfants-adulte et
la taille des groupes dans le service. Il me semble aussi que, quelle que soit
la forme des services de garde, le concept de qualité doit être
préservé et doit être toujours encouragé, y compris
dans les haltes-garderies. (17 h 15)
En terminant, j'aimerais dire un mot sur la situation des
poupons en garderie qui exigent une attention encore plus sérieuse et
plus concentrée que celle qu'on a vue à ce jour.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie,
madame. Mme la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Merci, Mme Presser. Je suis très
heureuse de vous accueillir à cette commission parlementaire. Je me
souviens fort bien des discussions qu'on a déjà eues concernant
le rapport d'ailleurs, la présidente actuelle de l'Office des services
de garde à l'enfance siégeait également à ce
conseil d'administration et vous êtes sûrement au courant qu'on
cite souvent votre document en référence. C'est pourquoi je suis
très heureuse de mentionner aussi que nous avons respecté au
moins 72 % des recommandations du rapport Presser. Pour d'autres raisons que
nous avons expliquées dans le discours d'ouverture, ce matin, I y a
d'autres recommandations qu'on pourra mettre en vigueur ultérieurement.
Mais je suis quand même très heureuse de votre participation
à cette commission parlementaire.
Mme Betsalel-Presser: Merci.
Mme Gagnon-Tremblay: Vous avez abordé la question des
services gérés par les parents en mentionnant qu'on parlait de
gérance des parents. Mme Presser, je vous avoue que si nous avons
Intégré dans notre document d'énoncé de politique
cette question de gérance, c'est un peu pour différencier les
garderies à but lucratif des garderies sans but lucratif, étant
donné qu'l était très difficile pour la population en
général de bien comprendre. Lorsqu'on parle de but lucratif, on
s'imagine que c'est le secteur privé, alors que, sans but lucratif, on
s'imagine que c'est le secteur public. Finalement, ce sont deux formes de
corporations privées. C'était seulement dans le but de
différencier les deux groupes de garderies.
Je reviens à la gérance des services. On en a parlé
tout à l'heure. Les groupes qui vous ont précédée
en ont parlé aussi. On se dit: Est-ce que les parents ont le temps
nécessaire? Est-ce que les parents sont les véritables personnes
pour gérer? Est-ce qu'on ne devrait pas tout simplement contrôler,
avoir un comité consultatif de parents pour s'occuper de la vie
pédagogique des enfants sur le plan de la gestion? Par contre, supposons
que ce ne soient pas les parents qui gèrent les services. Étant
donné que nous n'avons pas et que ce n'est pas la philosophie du
gouvernement de faire un réseau universel et gratuit, donc de prendre le
contrôle des garderies, à ce moment-là, qui peut
gérer véritablement? Il y a toujours un certain conflit qui
existe entre les éducateurs et les éducatrices lorsque vient le
temps de discuter des conditions de travail. Alors, qui peut
véritablement gérer une garderie, d'après vous?
Mme Betsalel-Presser: D'accord.
Mme Gagnon-Tremblay: Est-ce que c'est la directrice? Est-ce que
c'est...
Mme Betsalel-Presser: II y a plusieurs facteurs dans votre
question. Je vais prendre la dernière partie: Qui peut gérer?
Tantôt, j'ai dit qu'à mon avis, ce sont les parents avec la
direction et le personnel de la garderie qui devraient gérer le service
avec le conseil d'administration. Mais, à ce moment-là, j'ai
déploré qu'au comité consultatif on ait
suggéré que ce soit l'assemblée générale. Il
nous semblait que c'était encore plus démocratique, cette
possibilité pour un plus grand nombre de parents de s'exprimer et
d'avoir un oeil de contrôle sur la vie quotidienne d'une garderie. Or, si
on laisse cela seulement au conseil d'administration, cela peut bien marcher,
mais cela peut aussi devenir une contrainte pour la gestion. Donc, je pense
qu'i faut impliquer le personnel et qu'l faut impliquer les parents.
Par ailleurs, je n'ai pas suggéré, du moins
pour le moment, qu'on aille vers un système universellement gratuit. Je
pense qu'il faudrait tendre - je l'ai dit dans le mémoire - vers des
mesures de plus en plus favorables à la gratuité pour les
familles pauvres et celles à revenu moyen. Je pense que graduellement il
faudrait le faire. De là à dire qu'on va passer tout de suite au
système public, j'ai l'impression qu'on n'a pas encore atteint ce
niveau-là de développement Pour l'instant, je pense qu'il est
préférable que ça reste ce qu'on appelle autonome, secteur
privé. Je ne vote pas comment ce secteur pourrait à la fois
supporter un système à but lucratif, cela me semble
incompatible.
Mme Gagnon-Tremblay: Nous avons étudié votre
recommandation dans le rapport Presser, madame. Nous nous sommes rendu compte
qu'en vertu de la Loi sur les compagnies l'assemblée
générale des membres n'était pas souveraine. On s'est
demandé comment, en pratique, nous pourrions à ce
moment-là faire appel à une assemblée des membres, qui est
une assemblée quand même assez élargie, pour discuter
vraiment de la gestion. Chaque fois qu'on a besoin, par exemple, de se
référer ou de prendre des décisions, qu'on soit
obligé de se référer à cette assemblée qui
est beaucoup plus large, comment, en pratique, pourrait-on véritablement
l'appliquer? C'est ça, finalement, qui...
Mme Betsalel-Presser: II me semble qu'on peut sérier les
problèmes de décision. Il y a certaines décisions qui
peuvent être prises au sein du conseil d'administration, sans
problème. Par ailleurs, des décisions qui vont déterminer
la vie de la garderie, il faudrait qu'elles soient prises par un groupe plus
large parce que ça affectera tout le monde.
Mme Gagnon-Tremblay: Je pense, Mme Presser, aux conditions de
travail.
Mme Betsalel-Presser: D'accord.
Mme Gagnon-Tremblay: Je pense qu'on en discute...
Mme Betsalel-Presser: C'est crucial.
Mme Gagnon-Tremblay: ...énormément de ce temps-ci
et les conditions de travail représentent 80 % du budget de chacune des
garderies. Donc, c'est finalement le morceau le plus considérable qu'on
a à gérer dans une garderie.
Comment pourrait-on, par exemple, remettre cette décision entre
les mains d'une assemblée aussi élargie? Par exemple, si ce ne
sont pas ces parents qui doivent décider et que le gouvernement n'a pas
l'intention de s'ingérer dans l'administration ou la gérance
comme telle des services autonomes, est-ce qu'on peut mandater la directrice?
Qui? Vous avez aussi des éducatrices et des éducateurs qui
peuvent être en conflit d'intérêts.
Mme Betsalel-Presser- Justement. On parle de la directrice ou du
directeur. Il y a peu d'accent mis sur la formation de ce personnel. On
espère qu'éventuellement ils vont obtenir certaines
compétences en gestion. Je pense que non seulement ils devraient
être extrêmement compétents en gestion, mais en plus ils
devraient au moins avoir l'équivalent du diplôme qui a le reste du
personnel. Il me semble que c'est le minimum qu'on devrait leur demander.
À ce moment-là, ils pourraient...
Mme Gagnon-Tremblay: Est-ce que... Mme Betsalel-Presser: Oui?
Mme Gagnon-Tremblay: Est-ce que, Mme Presser, cela veut dire
qu'à ce moment-là vous seriez contre la cogestion dans les
garderies?
Mme Betsalel-Presser: Non.
Mme Gagnon-Tremblay: Non, pas nécessairement.
Mme Betsalel-Presser: Non.
Mme Gagnon-Tremblay: Pour autant...
Mme Betsalel-Presser: Je ne suis pas contre.
Mme Gagnon-Tremblay: ...qu'on ait toute cette compétence
de gestion.
Mme Betsalel-Presser: Exactement Vous me parlez des conditions de
travail. C'est une question absolument cruciale. De là va
découler 50 % de la qualité des services que le personnel va
offrir. Alors, on ne peut pas faire abstraction de cette question.
Mme Gagnon-Tremblay: Une autre question qui est très
importante, c'est que vous constatez, dans l'énoncé de politique,
que nous augmentons le ratio en milieu scolaire, c'est-à-dire que le
ratio passera de quatre à six, à la condition que cette personne
garde deux enfants d'âge scolaire. Qu'est-ce que vous pensez de cette
mesure, Mme Presser?
Mme Betsalel-Presser: Je trouve cette mesure
déplorable.
Mme Gagnon-Tremblay: Oui.
Mme Betsalel-Presser: Je pense que ce n'est pas réaliste.
Je l'ai mentionné dans le mémoire, de penser à six enfants
pour une seule personne, imaginez-vous! Lorsqu'on parle de secteur scolaire,
ça peut aussi signifier des enfants de la maternelle. Cela pourrait
signifier qu'il y aurait quatre bébés de moins de deux ans plus
deux enfants de cinq ou six ans sous la responsabilité d'une seule
personne. On s'attend que cette personne soit capable de donner des services
de
qualité. En tant que parents, on sait que ce n'est pas possible
d'être aussi attentif à six enfants simultanément. J'essaie
d'imaginer comment cette personne le ferait à la journée
longue.
Mme Gagnon-Tremblay: Peut-être une petite précision,
c'est que nous, en ce qui concerne les cinq ans, ce n'est pas du scolaire, on
les considère encore au niveau de la maternelle.
Mme Betsalel-Presser: D'accord, mais Is sont dans le
système scolaire quand même.
Mme Gagnon-Tremblay: Oui. C'est quand môme curieux. D'une
part, on nous demande d'abaisser les ratios et, d'autre part, les agences en
milieu familial nous demandent d'augmenter les ratios.
Mme Betsalel-Presser: Oui, mais Mme la ministre, vous savez bien
qu'un bon nombre d'enfants qui fréquentent la maternelle une
demi-journée, s'en vont ensuite en services de garde en milieu familial.
De sorte qu'il serait très possible de voir ce scénario: quatre
enfants de moins de deux ans et deux enfants de maternelle, disons entre cinq
et six ans. Il me semble que ce n'est pas réaliste, encore en termes de
qualité.
Le Président (M. Bélanger): Alors, on vous
remercie.
Mme Gagnon-Tremblay: Merci, madame.
Le Président (M. Bélanger): Je passe la parole
à Mme la députée de Maisonneuve.
Mme Harel: Merci, M. le Président. Combien ai-je de temps
à ma disposition?
Le Président (M. Bélanger): Dix minutes.
Mme Harel: La ministre a eu seulement dix minutes?
Le Président (M. Bélanger): Oui.
Mme Harel: Mon Dieu, que cela a donc passé vite! Mme
Presser, c'est avec énormément d'intérêt que j'ai lu
votre mémoire. Vous êtes sans doute la personne qui, avec le plus
d'éloquence, a parlé - dans un mémoire tout au moins - des
exigences qu'on a à l'égard de l'éducatrice ou de
l'éducateur qu'est la travailleuse ou le travailleur de garderie. Et
vous nous dites que cette personne doit se sentir valorisée, reconnue et
respectée pour être en mesure de transmettre cette vitalité
Indispensable dans sa relation avec les Jeunes enfants. Vous signalez et
insistez sur le fart que la réalité actuelle - et je vous cite -
"nous montre un panorama beaucoup plus sombre dans lequel le "burnout*, le taux
d'abandon en début de carrière et le découragement font
partie intégrante des scénarios des services de garde* C'est
là un jugement qui est sévère finalement, mais qui, compte
tenu de l'expertise que vous avez, m'a amenée à penser que...
Parce que dans le mémoire, en fait, vous considérez qu'il devrait
y avoir un fonds spécial alloué à la formation et au
ressourcement J'aimerais vous entendre là-dessus.
Mme Betsalel-Presser: Je déplore fortement le 1 %. Il me
semble qu'il est nettement insuffisant. Je pense que, si on veut assurer la
qualité des services, il faut qu'il y ait un budget spécifique,
mais bien supérieur à 1 % qui permette le ressourcement
régulier. C'est une profession qu'on ne peut pas pratiquer pendant deux
ou trois ans et garder le reste de sa vie. Il faut continuer à se
développer en tant que personne puisqu'on doit continuer à aider
les enfants à se développer. De sorte qu'il faut que le personnel
se ressource. Et 1 % du budget n'est pas suffisant pour pouvoir assurer ce
ressourcement et ce perfectionnement.
Mme Harel: Vous expliquez bien que c'est très exigeant
comme métier parce que ça suppose un savoir-faire, un
savoir-être et un savoir-vivre aussi...
Mme Betsalel-Presser: Oui.
Mme Harel: ...puisqu'on sert de modèle aux enfants. Il y a
là toute une argumentation qui, Je le souhaite, sera utilisée par
la ministre auprès du Conseil du trésor pour justifier
l'augmentation ou...
Mme Betsalel-Presser: Je l'espère. Ha, ha, ha!
Mme Harel: J'espère. Ha, ha, ha!
Sur des questions d'orientation fondamentale, il m'est apparu
évident que l'énoncé de politique s'éloignait du
rapport du comité consultatif. Je pense, entre autres, au moratoire
concernant les permis des garderies à but lucratif. Au moment de la
publication du rapport, j'avais préparé une sorte de
résumé des recommandations. Et je me rendais compte que vous
recommandiez de ne plus octroyer de permis à des garderies à but
lucratif jusqu'à ce que le réseau soit consolidé, les
garderies à but lucratif existantes conservant leurs droits acquis.
D'autre part, tantôt peut-être parce qu'on a peu de temps,
je vais peut-être vous signaler ce qui me semble être fort
différent de l'énoncé et voir si vous avez un point de vue
nouveau sur ces questions-là. Sur la question de l'accessibilité,
vous avez insisté dès le début de votre mémoire sur
le fait que l'énoncé de politique devrait être
modifié pour reconnaître explicitement que c'est un soutien
essentiel pour les parents, mais pas seulement pour les parents sur le
marché du travail, mais pour l'ensemble des parents ayant un besoin
régulier ou partiel de
garde. (17 h 30)
Vous avez insisté, dans votre mémoire, et tantôt
dans l'échange de propos Mme la ministre, sur le fait que dans votre
vision évolutive des choses vous souhaiteriez la gratuité pour
les familles pauvres et à revenu moyen. Il semble, selon les
observateurs les plus attentifs - je pense au Conseil du statut de la femme qui
venait ce matin devant la commission et qui portait le jugement suivant
à savoir que l'accessibilité aux services de garde reconnus, avec
l'énoncé de politique, sera graduellement restreinte aux parents
dont les revenus sont élevés ou moyennement
élevés... Et je cite le conseil du statut qui ajoutait: II est
étrange de constater qu'autrefois ces services étaient
réservés aux familles les plus démunies. Maintenant que
l'apport des services de garde au développement et à
l'éducation est reconnu, il faudrait, selon nous, s'assurer que tous les
enfants puissent en bénéficier.
Le second aspect et le dernier - par la suite, vous avez pris la parole
jusqu'à ce que mon temps soit écoulé - c'est que vous avez
insisté sur les poupons dans votre mémoire, à cause de la
vulnérabilité de ces enfants. Quelles sont vos réactions
plus précisément au fait que. dorénavant, des subventions
spécifiques aux garderies à but lucratif pourront être
allouées pour la garde des poupons et des enfants handicapés?
Mme Betsalel-Presser: Vous comprendrez que je ne peux être
contre une subvention pour cette catégorie d'enfants, quel que soit le
type de services. Heureusement qu'elles seront là. Par ailleurs,
pourquoi créer des différences entre les garderies à but
lucratif et celles à but non lucratif? Je continue à penser que
les garderies à but lucratif n'auraient pas dû recevoir de
subventions jusqu'à ce qu'elles arrivent graduellement à devenir
sans but lucratif. Il me semble qu'elles ont signalé plusieurs fois
qu'elles ne faisaient pas de profit dans leur service, alors pourquoi continuer
à se heurter à cette condition différente des autres?
J'aurais trouvé plus juste à ce moment-là que les
garderies à but lucratif deviennent graduellement sans but lucratif et
que les subventions soient égales pour toutes.
Mme Harel: Concernant l'accessibilité pour les familles
à faible revenu, avez-vous cette même opinion que celle
exprimée par le conseil du statut à savoir que, plutôt que
d'en faire bénéficier les familles à faible revenu,
l'énoncé de politique va plutôt avantager les familles
à revenu moyen, supérieur ou élevé?
Mme Betsalel-Presser: Je ne sais pas s'il va les avantager, mais
ce qui me semble en découler, c'est qui devient difficile pour des
familles à revenu moyen d'envoyer leurs enfants en services de garde
parce que le seul est encore relativement limité au chapitre des
subventions. Une famille qui gagne 27 000 $, ce n'est quand même pas un
salaire très gros pour être admissible à des subventions et
le seul est autour de ça. Dans ce sens-là, cela va effectivement
favoriser plutôt les familles nanties. Mais je pense que cela crée
un écart et c'est ce que j'ai essayé de souligner à la fin
de mon mémoire. C'est-à-dire que les mesures
préconisées pour le financement diversifié vont, iI me
semble, à encontre d'une politique qui favoriserait graduellement un
financement au moins plus fort pour une plus grande partie de la
population.
Mme Harel: Une dernière question. Vous avez
recommandé un soutien accru au projet de garderie en milieu de travail,
dans le rapport du comité consultatif.
Mme Betsalel-Presser: D'accord.
Mme Harel: Mais vous n'en parlez pas dans votre mémoire,
je crois, en ce qui concerne les garderies en milieu de travail.
Mme Betsalel-Presser: Non.
Mme Harel: Je voulais avoir votre opinion compte tenu de ce qu'on
a entendu cet après-midi. Est-ce que vous croyez qu'il faut, comme le
dit l'énoncé de politique, qu'il y ait une priorité en
faveur des garderies en milieu de travail ou qu'il y ait le maintien du rythme
de croisière actuel?
Mme Betsalel-Presser: Je vous avoue que ça m'a
étonnée. Nous avons recommandé qu'il y ait plus d'accent
et de priorité. Par ailleurs, je pense qu'il faudrait aussi
définir dans quelles conditions, que ça ne se fasse pas au
détriment d'autres projets qui pourraient être
développés dans le même secteur. Je n'ai strictement rien
contre les garderies en milieu de travail, au contraire! Je pense qu'elles ont
une excellente fonction à jouer dans la mesure où elles peuvent
aussi accueillir...
Mme Harel: Je ne suis pas contre, mais je me demandais s'il faut
une priorité.
Mme Betsalel-Presser: Pardon?
Mme Harel: Faut-il leur accorder une priorité?
Mme Betsalel-Presser: C'est ce qui m'a étonnée
comme priorité, mais je pense que, dans la mesure où les services
de garde en milieu de travail peuvent accueillir les enfants du quartier, I
faudrait quand même les encourager.
Mme Harel: Merci.
Le Président (M. Bélanger): Voulez-vous
remercier madame?
Mme Harel: Oui. Je vous remercie. C'est très
Intéressant, c'est très utile, ça l'est maintenant et
ça l'a été pour des travaux de commissions parlementaires
antérieures. C'est très utile que des chercheurs comme vous, des
professeurs à l'université, s'engagent suffisamment pour venir
nous présenter l'état de leurs réflexions et de tours
recherches. Je vous remercie beaucoup.
Le Président (M. Bélanger): Bien. Mme la
ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Mme Betsalel-Presser, Je regrette. J'aurais
eu de nombreuses autres questions à vous poser. J'ose espérer que
j'aurai l'occasion de vous contacter à nouveau d'ici à la fin de
la commission parlementaire. Merci, madame.
Le Président (M. Bélanger): La commission remercie
Mme Betsalei-Presser. J'invite à la table des témoins
l'Association canadienne pour la promotion des services de garde à
l'enfance.
Bonjour! Je présume que c'est Mme Micheline Ferron qui est la
déléguée.
Association canadienne pour la promotion des services de garde à
l'enfance
Mme Ferron (Micheline): C'est ça.
Le Président (M. Bélanger): Bonjour! Je vous
inviterais à procéder à la présentation de votre
mémoire, s'iI vous plaît.
Mme Ferron: Merci. Effectivement, je suis seule aujourd'hui, non
pas que je sois seule dans l'association canadienne, loin de là. En
fait, c'est à cause de la disponibilité des gens. Il y a quand
même une des travailleuses permanentes de notre bureau d'Ottawa qui est
ici présente aussi aujourd'hui.
En fait, je suis déléguée provinciale du
Québec à l'association canadienne mais, avant tout, je suis aussi
parent de deux enfants: un de six ans et un de deux ans. J'ai aussi
été travailleuse en garderie, éducatrice pendant quatre
ans et demi et ça fait quatre ans que je suis directrice d'une garderie.
Je trouve important de le mentionner, non pas parce que Je veux avoir beaucoup
de chapeaux ce soir mais je pense que je peux avoir une vision quand même
assez concrète de ce que peuvent être les services de garde au
Québec.
L'Association canadienne pour la promotion des services de garde
à l'enfance est un organisme sans but lucratif qui est né
à la suite de la deuxième conférence nationale sur la
garde de Jour au Canada qui a eu lieu à Winnipeg, en 1982. Pendant cette
conférence, les quelque 500 délégués
présents s'étaient rendu compte qui y avait vraiment un
problème: personne ne pouvait porter la voix des services de garde dans
tout le Canada et défendre des services de garde de haute qualité
un peu partout. Alors, cette association a été
créée. Elle existe maintenant depuis 1982.
Plusieurs se demandent ce que l'association canadienne vient faire dans
une commission parlementaire provinciale, dans les services de garde qui sont
de juridiction provinciale. Eh bien! Il y a deux raisons majeures pour
lesquelles on se permet de se présenter aujourd'hui.
Premièrement, parce qu'on a de nombreux membres québécois,
dont, entre autres, l'Office des services de garde à l'enfance, qui ont
élu démocratiquement des délégués pour
promouvoir huit grands principes qui sont à la base des services de
garde que les familles désirent dans tout le Canada. Ces principes sont
le fruit de réflexions, d'expériences et de discussions dans tout
le Canada. Nous savons qu'ils reflètent l'image du réseau de
services de garde que tous les Canadiens veulent, de Vancouver à
Terre-Neuve, et ça inclut aussi les territoires.
Deuxièmement, à la lecture de l'énoncé de
politique sur les services de garde, on a constaté que ce dernier
s'appuie largement sur les lignes directrices qui avaient été
énoncées dans le projet de loi C-144 concernant le partage du
financement entre le gouvernement fédéral et le gouvernement
provincial. Comme groupe de pression national, on s'est penché sur le
projet de loi C-144 afin d'essayer d'en mesurer les effets, tant à court
terme qu'à long terme. On a l'humilité de penser qu'on a quand
même développé une certaine expertise mais on est surtout
un lieu de discussions où on a pu vraiment discuter de tous les points
là-dedans.
Brièvement, ce sont, entre autres, les raisons pour lesquelles on
se permet d'être là aujourd'hui. On sait que, depuis une vingtaine
d'années, la famille, tant canadienne que québécoise, a
subi de profondes transformations. Entre autres, une des plus percutantes est
sans contredit l'entrée irréversible des femmes sur le
marché du travail. Cette modification importante dans le rôle des
femmes a nécessité l'implantation de nouvelles ressources pour
répondre aux besoins de garde et d'éducation des jeunes enfants,
un rôle qui était traditionnellement dévolu aux
mères.
La mutation des familles a entraîné la mise sur pied de
plusieurs services, dont les services de garde. Cependant, la rapidité
des changements dans la structure de la société a provoqué
l'émergence de services non planifiés, sans véritable
contrôle et parfois mal organisés. On dit plus tard: Le manque de
volonté politique et les coûts, iI ne faut pas l'ignorer,
reliés à l'instauration d'un réseau complet de services de
garde ont engendré la crise aiguë que nous connaissons. Certaines
provinces, tel le Québec, ont quand même réagi plus vite et
se sont dotées de lois et de réglementations permettant de mieux
superviser les prémisses de ce réseau
grandissant. Nous devons en être fiers.
Par contre, avec le temps, on se rend compte que les besoins restent
très grands et que la future politique de services de garde à
l'enfance tente d'y répondre. Nous allons voir comment cette politique,
qui est généralement admise comme un élément
essentiel de soutien et d'encouragement à la famille, pourrait
répondre à ces huit principes de base. C'est donc dans l'optique
de ces huit facteurs, qui sont l'universalité, la diversité, la
haute qualité, l'accessibilité, la participation des parents, le
statut juridique sans but lucratif, les conditions de traval et les
congés parentaux, que nous allons regarder l'énoncé de
politique, que nous l'avons étudié.
Jusqu'à maintenant, on peut dire que nous étions
très fiers de représenter le Québec à l'Association
canadienne pour la promotion des services de garde à l'enfance. Nous
étions fiers de constater que le Québec s'était
engagé dans une voie qui se dirigeait vers l'atteinte de plusieurs de
ces objectifs. Notre province était parmi les plus farouches
défenseurs de l'implication des parents dans le processus
décisionnel des services de garde, de même que du statut sans but
lucratif de ces organismes comme condition sine qua non de financement public.
Force nous est de constater que, dorénavant, il en sera autrement avec
l'énoncé de politique. C'est un de nos plus vifs regrets.
Quand on regarde les sept principes directeurs de la politique, on parle
du soutien essentiel pour les parents. Dans ce volet, on dit toujours que la
politique est le deuxième volet d'une politique plus large de la famille
et nous croyons que c'est un principe très important, mais nous
souhaitons que le troisième volet de la politique familiale aborde toute
la question des congés parentaux, maternité, paternité,
congé pour responsabilité familiale, qui sont absents de cette
politique et qui sont aussi une mesure de soutien pour les parents.
Nous sommes d'accord pour que les services de garde s'inscrivent dans un
processus d'égalité d'accès au marché du travail,
mais nous croyons qu'ils peuvent être aussi un agent catalyseur et
formateur pour les parents. Par l'information qui est véhiculée
et l'implication des parents qui est exigée, les services de garde
jouent un rôle qui est plus que positif dans un objectif de soutien des
familles. Les parents ne pouvant plus justement compter sur le soutien de la
famille au sens large, telle qu'on l'a connue dans les années
auparavant, incluant les grands-mères, les oncles, les tantes, les
services de garde peuvent apporter une aide considérable dans
l'éducation même des parents face à leurs
responsabilités familiales.
Les services de garde pourraient s'ouvrir de façon beaucoup plus
visible à la communauté. Comme l'a souligné Mme Presser
aussi, iI est intéressant de voir que, pour la première fois, les
services de garde sont aussi mentionnés comme services
préventifs. On voulait aussi souligner, dans une analyse des audiences
tenues par le comité spécial sur la garde des enfants, que
déjà 49 % des 975 Intervenants avaient abordé la question
des effets des services de garde sur les enfants. Et 89 % de ces gens disaient
avoir constaté les effets bénéfiques des services de garde
sur les enfants.
Nous appuyons donc le principe directeur qui réaffirme le
rôle préventif et éducatif des services de garde dans la
croissance et le développement des enfants qui les
fréquentent.
Nous trouvons important de rappeler au gouvernement que, parmi les
facteurs qui influencent le choix des parents quand on parle d'un
développement qui respecte le choix des parents, il en existe plusieurs,
dont: le coût du service, la connaissance ou l'expérience que l'on
en a, la facilité d'accès, la disponibilité et la
flexibilité des. services offerts par rapport aux besoins de la famille.
Ce ne sont que quelques-unes des nombreuses facettes qui dictent le choix des
parents. Lorsqu'on veut donner un véritable choix aux parents, il faut
s'assurer avant tout qu'il existe plusieurs possibilités.
Quand on parle de la préférence pour des services
gérés par les parents, c'est un principe qui nous a causé
beaucoup d'inquiétude et qui nous en cause encore. Nous sommes
très sceptiques qu'une préférence pour des services
gérés par les parents soit un engagement du gouvernement à
promouvoir et implanter de tels services.
Nous sommes fermement convaincus que les parents ont un rôle
primordial à jouer dans l'atteinte, le respect et l'amélioration
de la qualité du service de garde qu'ils fréquentent. Ils sont
les mieux placés pour juger de cette qualité et pour en effectuer
la surveillance. Pour s'assurer que les parents puissent atteindre cet
objectif, il faut plus que des comités consultatifs. (17 h 45)
Si le gouvernement entend vraiment privilégier des services
gérés par les parents et assumer sa responsabilité sociale
dans l'atteinte du plus grand bien-être possible des enfants faisant
partie de notre société, iI doit accepter de poser des gestes
concrets prouvant sa volonté. Il doit légiférer
immédiatement pour arrêter et empêcher le
développement des services commerciaux puisque leur but ultime est la
réalisation de profits. Cette recherche de profits ne peut qu'être
néfaste dans un type de service comme les services de garde, puisqu'elle
va à l'encontre de la recherche de qualité. La qualité se
doit toujours d'être le premier objectif.
Quand on parie d'autonomie des services, on dit: Oui, les services de
garde au Québec sont des organismes privés qui sont issus des
parents et de la collectivité. Il faut se rappeler que la loi 77 sur les
services de garde, qui a été adoptée en 1979, ne laissait
guère de choix puisque le législateur a décidé de
laisser entre les mains de la collectivité le soin de développer
les services. Par cette loi, iI instituait le cadre
d'Implantation, d'organisation, de développement et de
fonctionnement des services au Québec. Cependant, on peut penser qu'en
se contentant de déterminer le cadre d'action des services de garde, le
gouvernement voulait aussi surtout s'assurer de ne pas créer un
réseau public qui coûtait cher.
Nous sommes pourtant d'accord avec le respect de l'autonomie des
services de garde. Nous vouions cependant qu'ls aient les moyens d'être
autonomes afin d'effectuer des choix qui reflètent vraiment leur
personnalité propre.
Nous sommes d'accord aussi que la collectivité doit s'impliquer
et appuyer les parents dès la naissance de leur enfant. Il faut
s'assurer que dans les milieux où peu de ressources sont disponibles,
les parents puissent bénéficier d'un appui accru de
l'État. Afin de stimuler l'implication des partenaires sociaux, le
gouvernement devrait instaurer lui-même des mesures qui nous convainquent
de son leadership. La meilleure façon d'inciter les partenaires sociaux
à épauler la famille et de s'ajuster à ses besoins, c'est
encore de prêcher par l'exemple.
Quand on parle de saine gestion de l'ensemble des services, nous croyons
que le moyen le plus efficace de s'assurer une saine gestion de l'ensemble des
services et une plus grande rentabilité des deniers publics Investis et
une performance de qualité, c'est de créer un réseau sans
but lucratif avant tout. Nous sommes convaincus qu'une saine gestion doit
suivre les lois du marché: offrir un produit de qualité à
prix accessible pour la plus large clientèle possible. C'est ce que
Zellers essaie de faire aussi.
Depuis leur création, les services de garde ont du mal à
suivre ces lois du marché. Faut-il cependant conclure qu'ls sont mal
gérés? Année après année, les services de
garde jonglent avec les lois du marché et Is se retrouvent toujours
devant les mêmes dilemmes: conserver et augmenter la qualité du
produit équivaut à rendre le prix de moins en moins accessible
et, par conséquent, limiter la clientèle potentielle. Si on vise
une plus large clientèle possible en restant à prix abordable, I
faut alors couper dans la qualité. Peut-être devrions-nous cesser
de marchander l'éducation et le développement de nos enfants.
À la lecture du chapitre traitant des principes directeurs, iI
nous est apparu qu'il aurait fallu en ajouter deux autres: une assurance
d'accès à des services pour toutes les familles qui en ont
besoin. Ceci implique une accessibilité physique, financière
à un réseau diversifié de services.
Et te plus Important de tous, le grand absent: la garantie de
qualité. Pourtant, dans toute grande maison, qu'est-ce qu'on vous promet
d'abord? Satisfaction garantie ou argent remis. Est-ce que c'est ce qu'on va
donner aux parents?
Il est difficile d'évaluer la proposition du gouvernement quant
au nombre de places à développer et à la
répartition de ces services en se basant sur tes données
avancées dans l'énoncé. La raison en est simple, c'est que
les chiffres et les indications contenus dans ce chapitre se contredisent et ne
correspondent pas au tableau qu'on retrouve en annexe. Cependant, je
n'aborderai pas spécifiquement ce chapitre-la étant donné
qui est détaillé dans te mémoire.
J'irai un peu plus loin, excusez-moi. Une autre orientation visait
à diversifier les services de garde et à modifier au besoin les
définitions de ces services. On dit: II est possible que certains
changements soient nécessaires à cause même de
l'évolution des services. Cependant, I faudrait s'assurer, avant toute
modification, que les services existants ne soient pas pénalisés
et qu'ils puissent être consultés.
Nous sommes heureux de constater que le gouvernement soumettra enfin les
services de garde à but lucratif aux mêmes critères que les
autres services en ce qui a trait à la planification régionale et
au contingentement qui en découle. Cependant, nous insistons encore une
fois auprès du gouvernement pour qu'il adopte une position beaucoup plus
radicale, soit arrêter et empêcher le développement du
secteur commercial.
Nous voulons souligner notre satisfaction de voir un engagement du
gouvernement provincial à encourager les projets novateurs qui
permettraient de répondre aux besoins diversifiés des familles
pour la garde de leurs enfants. Nous pensons qu'il faut donner priorité
aux services existants qui désireraient élargir ou assouplir les
services qu'ils offrent puisqu'ils possèdent déjà une
expertise et des ressources pour faciliter ces projets. Cette nouvelle
possibilité aurait l'avantage de restaurer certains services, comme la
garde à temps partiel ou occasionnelle, qui ont déjà
été offerts dans les services de garde et qui ont disparu parce
que les services de garde ont dû les éliminer à cause de
contraintes budgétaires.
Quant à la qualité des services, c'est l'un des premiers
principes de base défendu par l'association canadienne. On ne parle pas
juste de qualité, mais on parle de haute qualité dans les
services de garde. On n'a pas détaillé de normes qui traduiraient
ce que signifie une haute qualité pour nous. Il existe de nombreuses
recherches qui l'ont fait et de multiples rapports, d'ailleurs cités
dans l'énoncé, qui ont longuement fait état de cette
question. Nous avons toujours défendu que des normes de qualité
devraient se baser sur ces études et être élaborées
à partir des plus hauts critères qui y sorti
mentionnés.
Les principaux aspects soulevés dans ces nombreuses recherches et
rapports et, aussi, dans l'énoncé de politique touchent la
formation du personnel, le ratio personnel-enfants, la taille des groupes
d'enfants, tes Installations, l'aménagement, tes conditions de travail
offertes aux éducateurs, la participation des parents, et j'en
passe.
Nous souhaitons que l'Office des services de garde à l'enfance
adopte dans les plus brefs délais une réglementation semblable
à celle des garderies pour la garde en millieu familial, la garde en
mlieu scolaire, les haltes-garderies et les Jardins d'enfants. Nous
désirons que cette réglementation soit déposée
après consultation des millieux concernés afin qu'elle
reflète le plus possible les nécessités, mais aussi les
contraintes vécues par ces services depuis plusieurs années. On
ne voudrait surtout pas revivre ce qui s'est passé avec les services de
garde où la réglementation a été adoptée
sans qu'il y ait nécessairement l'argent pour les assumer.
À la lecture de ce chapitre de l'énoncé qui traite
de la qualité, nous avons ressenti un grand malaise. Bien que le
gouvernement reconnaisse la grande efficacité sur le plan de la gestion
- page 49 - la volonté et le dynamisme des parents et du milieu - page
20 - II prévoit établir certaines exigences en matière de
qualification des responsables de la gestion des services de garde - page 50 -
puisque les nouvelles orientations Indiquent clairement que l'office et les
garderies devront accorder une priorité aux besoins de perfectionnement
des responsables de la gestion des garderies - page 51 - et qu'il encouragera
la formule du parrainage, permettant ainsi aux garderies de
bénéficier de cet apport indispensable que peuvent fournir ici
les organismes du milieu - page 51.
Tout au long de cette section, nous avons l'impression de recevoir deux
messages: d'un côté, des félicitations aux services de
garde d'avoir survécu financièrement et d'offrir des services de
qualité et, d'un autre côté, les moyens que prévoit
mettre en branle le gouvernement pour assurer une meilleure performance. Le
moins qu'on puisse dire, c'est que le message est étonnant et
ambigu.
La plus grande surprise que nous avons eue fut de ne trouver aucune
mesure qui permette d'améliorer les conditions de travail des
travailleurs en services de garde, alors qu'on leur demandera de continuer
à se former et à se perfectionner avec le 1 % sur la masse
salariale.
Nous retrouvons d'ailleurs un texte qui est très
révélateur, à la page 43 de l'énoncé, quand
on dit: "Cette formation ne va pas sans des conditions de travail
intéressantes qui contribuent à assurer la satisfaction au
travail et la stabilité du personnel appelé à travailler
auprès de l'enfant, un élément de premier ordre lorsqu'il
s'agit de la qualité des services de garde."
Nous ne nous étendrons pas davantage sur ce sujet car nous
croyons que les syndicats, les regroupements régionaux et les
associations professionnelles d'éducateurs qui font aussi partie de nos
rangs vous feront largement part de leur insatisfaction et vous proposeront
eux-mêmes des solutions beaucoup plus acceptables et
détaillées que nous n'aurions pu le faire. Nous vous disons que
nous appuyons d'avance ces recommandations.
Le Président (M. Bélanger): En conclusion,
rapidement, madame.
Mme Ferron: En conclusion, nous n'avons pas eu beaucoup de temps
pour préparer notre réponse à l'énoncé de
politique et nous espérons grandement pouvoir terminer aujourd'hui nos
recommandations. Nous pensons qu'l est absolument inacceptable, par exemple,
que les garderies soient soumises à autant d'incertitude, quand on parle
du financement à 45 %. On parle de saine gestion, on parle d'une
meilleure planification, mais Je peux vous dire - Je le vis présentement
dans le service de garde où je travaille - qu'l est absolument
impossible de faire une saine gestion et une saine planification
budgétaire dans notre service de garde. Il est absolument impossible de
savoir combien d'argent on aura l'année prochaine pour fonctionner. Et
ce sera comme ça un peu partout. On peut prévoir une augmentation
la première année. Mais, pour les années
subséquentes, tout ce qu'on pourra faire pour augmenter nos subventions,
ce sera d'augmenter les parents.
Je termine, M. le Président, en disant que quand on parle du mode
de gestion des garderies à but lucratif et de leur philosophie
d'entreprise qui a un but lucratif déclaré, indépendamment
des objectifs de qualité poursuivis par plusieurs, on dit qu'il est
difficile de trouver un mode de subvention qui soit approprié et qui
garantirait l'utilisation des subventions aux seules fins de
l'amélioration de la qualité. Lorsque ceux-là même
qui accordent des subventions - Is sont responsables du contrôle et de la
vérification de leur application - sont sceptiques, nous avons
grandement raison d'être très Inquiets sur le nouveau mode de
financement. Merci beaucoup.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie,
madame. Mme la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Merci, Mme Ferron. Vous venez justement de
mentionner qu'avec la nouvelle formule de financement vous ne pourrez pas
planifier. Comment faites-vous, actuellement, pour planifier?
Mme Ferron: On fait plusieurs scénarios, Mme la ministre.
On fait des scénarios avec différentes augmentations des parents.
On fait des scénarios avec plusieurs taux de fréquentation. On
souhaite... Si Je vous disais: Dans ma garderie, si je budgétise avec un
taux maximal d'occupation et une augmentation de tarif pour les parents, oui,
j'arrive à 17 000 $ d'augmentation pour le prochain budget. Par contre,
I s'agit qui arrive une épidémie de varicelle, que des places ne
soient pas comblées pendant l'été, comme c'est
arrivé la dernière année, et que va-t-il arriver? Non
seulement y aura-t-il le manque à gagner de l'enfant qui ne
fréquente pas la
garderie mais, en plus, on va perdre les 45 % de
subvention.
Mme Gagnon-Tremblay: Est-ce que... Mme Ferron: II est très
difficile de prévoir.
Mme Gagnon-Tremblay: Oui. Justement, pour vous éviter ce
manque à gagner, est-ce que, dans votre garderie, vous avez des contrats
dûment signés avec les parents?
Mme Ferron: Oui. Nous avons des contrats dûment
signés avec les parents, dans lesquels ils s'engagent à payer 49
semaines parce qu'on leur donne le loisir de prendre deux semaines de
vacances.
Mme Gagnon-Tremblay: Oui.
Mme Ferron: On leur laisse une période de cinq jours de
maladie.
Mme Gagnon-Tremblay: Et s'ils s'engagent à payer 49
semaines. Si les enfants ont la varicelle, à ce moment-là,
êtes-vous coupée?
Mme Ferron: Je ne sais pas très bien, Mme la ministre, si
vous vous rendez compte de ce que ça veut dire quand un parent
arrive...
Mme Gagnon-Tremblay: Non, mais je voudrais que vous
répondiez seulement à cette question parce que c'est vous...
Mme Ferron: À cette question...
Mme Gagnon-Tremblay: ...qui l'avez abordée.
Mme Ferron: Je ne pense pas qu'on puisse exiger... Même si
le parent signe un contrat avec moi, avec la garderie, comme quoi il s'engage
à payer 49 semaines, s'il décide de ne pas me payer, dites-moi
quels seront mes recours pour aller chercher ça.
Mme Gagnon-Tremblay: On pourra en discuter. De toute
façon, je voudrais vous ramener à votre mémoire, à
la page 23. Vous dites que l'association est abasourdie devant
l'évidence et l'ampleur des risques inhérents au nouveau
système de financement, c'est-à-dire 45 % des revenus de garde.
La nouvelle formule de financement sera avantageuse pour la plupart des
garderies la première année, mais, les années suivantes,
la situation sera fort différente. Pourquoi cette formule de financement
est-elle bonne la première année et ne l'est-elle pas la
deuxième? Quels sont, pour vous, les risques que vous
prévoyez?
Mme Ferron: Première des choses, je vous l'ai dit
tantôt, à cause de l'incertitude qui règne. Dans une
première armée, comme je vous l'ai dit. On va avoir une
augmentation pour autant que le taux d'occupation soit à son maximum. Et
on dit que ça peut être intéressant pour la majorité
des garderies.
J'aimerais souligner que, lors de la présentation de
l'énoncé, effectivement, on parlait... Excusez-moi, je ne me
souviens pas du pourcentage des garderies qui profiteraient de subventions de
l'ordre de plus de 30 000 $. Ce qu'on a pu constater, c'est que
c'étaient des garderies qui avaient des permis de plus de 60 places,
très souvent, et, bien évidemment, des tarifs très
élevés pour les parents. Ce qui est dangereux dans la formule des
45 %, c'est que c'est une pression à hausser les tarifs. Bien sûr,
vous allez me dire qu'il y a un plafonnement à 120 % du tarif
provincial, mais I reste que la pression va être sur le parent, s'il veut
améliorer la qualité de son service de garde, de se voter une
augmentation. Il va toujours se retrouver dans le même dilemme. Est-ce
que je dois payer plus pour pouvoir avoir plus d'argent? Qu'est-ce qui va se
passer?
Et j'aimerais ajouter une chose. Tantôt, vous me
parliez des contrats de services avec les parents. Entre autres, chez nous, on
laissait la possibilité aux parents de retirer les enfants pendant la
période estivale et de réserver leur place pendant
l'été moyennant un tarif très minime. On ne pourra plus
faire ça parce qu'on va baisser nos revenus et, par conséquent,
on ne sera plus sûr du financement non plus. On va perdre du financement
l'année suivante.
Mme Gagnon-Tremblay: Vous mentionnez, Mme Ferron, dans votre
mémoire également - je pense que c'est à la page 24 -
L'association appuie le regroupement des agences de services de garde en milieu
familial du Québec qui rejette la nouvelle formule de financement pour
les agences. Elle dénonce aussi le rôle de répartiteur que
le gouvernement veut faire jouer aux agences. Sur quelle base rejetez-vous
cette formule? Et laquelle suggérez-vous? (18 heures)
Mme Ferron: Ce qui est un peu curieux, en fait, ce n'est pas...
Les agences, lors de la présentation de l'énoncé de
politique, ont déjà réagi face à la nouvelle
formule qui leur était proposée en disant que cela
créerait des problèmes d'iniquité régionale et que,
par rapport à la grosseur de chaque agence, cela pouvait occasionner des
problèmes financiers, des différences importantes. Je ne suis pas
spécialiste en services de garde en milieu familial et je pense qu'eux
pourront beaucoup mieux que moi expliquer pourquoi 1s ont rejeté cette
nouvelle formule.
Quand je parle du rôle de répartiteur c'est,
entre autres, quand on leur suggérait que dorénavant is
pourraient devenir un service de référence pour les parents qui
utilisent des modes de garde non régis ou qui voudraient utiliser de la
garde à domicile. C'est simplement
un rôle de répartiteur, de référence qu'ils
vont donner alors qu'il n'y aura aucun moyen de contrôle ou de
supervision. Les agences n'auront aucun rôle de supervision à
jouer pour savoir si les gens qu'elles vont donner en référence
sont des personnes qualifiées.
Mme Gagnon-Tremblay: Vous comprenez que lorsque nous parions...
C'est-à-dire que ce n'est pas nous qui employons le mot
"répartiteur". Nous voulons faire Jouer un rôle beaucoup plus
Important aux services de garde en milieu familial. aux agences, puisque
déjà ces agences ont un rôle important à jouer et
elles devront continuer ce rôle important. C'est un projet
expérimental que nous voulons ici non pas Imposer, mais demander aux
agences, si elles veulent bien le faire sur une base volontaire, finalement.
Nous ne voulons Imposer à aucune agence l'obligation de distribuer ce
genre de services.
Je tiens aussi à vous souligner, puisque je l'ai mentionné
dans mon discours de ce matin, que, justement, pour une agence en milieu
familial qui reçoit 50 enfants à temps plein, c'est-à-dire
qui a déjà 50 places au permis, la subvention seulement pour
cette année, dans le cadre de la nouvelle politique, s'établira
à 48 050 $ comparativement à une somme de 35 750 $ selon le
programme actuellement en vigueur. Ce qui veut dire que ce n'est pas le statu
quo. C'est quand même une augmentation par rapport à ce qui existe
actuellement.
C'est la même chose aussi par rapport à la formule qui est
suggérée par le gouvernement dans l'énoncé de
politique puisqu'on constate qu'aucun service n'est perdant par rapport au
système actuel. C'est un petit peu pourquoi je m'étonne lorsque
vous mentionnez dans votre document: "Nous devons malheureusement constater que
la consolidation des services existants reste encore à faire et I nous
apparaît évident que, loin d'établir un meilleur
équilibre, la politique provinciale élargira les nombreuses
disparités régionales." Comme je le mentionnais ce matin, ces
disparités, elles existent actuellement. Vous avez des tarifs
différents. Vous avez des conditions de travail différentes. Vous
avez des éducatrices qui ont des formations différentes. Alors,
ces disparités existent actuellement. Ce que nous essayons de faire avec
notre nouvelle formule, c'est d'essayer de réduire le plus possible ces
écarts et de faire en sorte qu'un tarif que l'on n'augmente pas, qui est
déjà élevé, puisse au moins se stabiliser et qu'on
cesse d'augmenter ces tarifs, par contre, par d'autres moyens.
Mme Ferron: Vous me permettrez, Mme Gagnon-Tremblay, d'avoir des
doutes quand vous me dites qu'il n'y a pas de garderie qui sera
pénalisée. Sûrement que les regroupements régionaux
vous feront part de garderies dans leur région, entre autres dans les
régions éloignées, qui vont, effectivement, être
pénalisées par les nouvelles mesures. Si ce n'était pas le
cas,il faudrait se questionner à savoir pourquoi les mesures d'appoint
ont été prévues dans l'énoncé.
Mme Gagnon-Tremblay: Non, je regrette, Mme Ferron, aucune
garderie ne sera pénalisée. Pour les garderies qui pourraient
être en difficulté, nous leur avons déjà
confirmé le statu quo et, en plus du statu quo, ces garderies recevront
1 % de la masse salariale en sus du statu quo de sorte qu'elles ne seront pas
pénalisées pour la prochaine année et de sorte qu'on
puisse leur donner immédiatement le soutien nécessaire pour
améliorer leur situation.
Une voix: C'est à souhaiter.
Mme Gagnon-Tremblay: Vous parlez du statu quo. C'est pour cette
année et tant et aussi longtemps, finalement, qu'on n'aura pas
réussi à rejoindre toutes ces garderies.
Le Président (M. Bélanger): Bien, Mme la ministre.
Mme la députée de Maisonneuve.
Mme Harel: Merci, M. le Président. Je vous remercie au nom
de ma formation politique, Mme Ferron. Vous mettez une énergie à
la fin de cette journée qui va, finalement, nous aider à
continuer.
Je reviendrai sur la question du statu quo - on appelle ça, dans
certains milieux, le statu quo ante - pour savoir combien de temps I durera,
parce que les remarques que vous avez faites peuvent s'avérer exactes,
une fois cette période-là terminée.
Je veux vous signaler que dans le mémoire que vous nous
présentez, vous faites état de huit principes directeurs, huit
objectifs pour les services de garde. Évidemment, je n'ai pas à
vous rappeler que l'objectif d'universalité que vous exprimez en tout
premier lieu, celui pour tous les enfants d'avoir droit à des services
de garde, peu importent le lieu qu'ils habitent, le statut professionnel de
leurs parents et leurs revenus, je n'ai pas à vous rappeler que cet
objectif ne se retrouve pas dans l'énoncé de politique. Et vous
savez certainement comme moi que parmi les sept principes directeurs qu'on
retrouve dans l'énoncé de politique, le deuxième, qui
concerne un soutien essentiel aux parents, restreint ce droit indispensable
à la participation des parents au marché du travail. Il peut
s'avérer que ce soit là une sorte de restriction du droit,
jusqu'à maintenant convenu, de l'enfant à un service de
qualité.
Mme Ferron, je reviendrai sur des éléments de votre
mémoire, puisque vous avez l'expertise canadienne. Je reviendrai
notamment sur la déclaration que vous faites en page 4 dans le sens que
vous regrettez "de constater que le gouvernement fédéral, qui a
exprimé son intention de partager les coûts d'opération du
secteur
commercial, ait pu influencer notre gouvernement provincial*. Je vous
citais.
J'aimerais connaître la vision que vous avez des rapports entre
les deux gouvernements, de qui a influencé qui. Cependant, j'aimerais
aussi avoir votre réaction, parce que je crois qu'il s'est passé
quelque chose de très important en fin de journée, il y a
quelques minutes à peine. J'ai découvert un élément
qui était encore obscur dans l'énoncé de politique et,
malheureusement, j'ai l'impression que l'ensemble de la nouvelle méthode
de financement repose sur le fait que les contrats dûment signés
par les parents devront être respectés, faute de quoi, et
là, il y a trois points de suspension. Je vais souhaiter que la ministre
s'explique sur cette question, peut-être pas avant la fin de notre
commission, aujourd'hui, mais certainement durant nos travaux demain.
Si tant est que les contrats n'étaient pas respectés...
Vous signez des contrats, et j'aimerais savoir si c'est fréquent, soit
à la suite de grèves, j'imagine, ou des arrêts de travail
ou des mises à pied ou pour cause de maladie s'il arrive... Quel est le
pourcentage, à votre connaissance, selon l'expérience que vous
avez, de contrats ainsi établis entre la garderie et les parents qui ne
peuvent pas être respectés? Et dans la mesure où la
méthode reposerait sur le respect, est-ce qu'on envisage de faire
exécuter le contrat par voie de jugement? Est-ce qu'on envisage que les
garderies mettent ça en 'collection*, s'adressent à des agences
pour faire 'collecter" ou encore procèdent à des saisies pour
pouvoir se faire payer? Est-ce qu'il y a quelqu'un qui peut prétendre
qu'il serait souhaitable de judiciariser les relations entre les parents et la
garderie? Et est-ce qu'on n'a pas d'Inquiétude sur les effets pervers
que cela peut amener? Avant de signer de tels contrats qui, dans un laps de
temps d'un an, engagent, sans connaître l'avenir, est-ce qu'il n'y a pas
beaucoup de parents qui ne vont pas s'en effrayer et choisir un autre mode de
garde, même s'il n'est pas reconnu, pour ne pas avoir à s'engager
dans cette espèce de corridor qui ne leur permet pas de prévoir
l'avenir? Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus.
Mme Ferron: Effectivement, c'est une des contraintes, en fait, la
"collection" des comptes impayés. C'est un dossier complexe. Vous parlez
de pourcentages, cela dépend certainement du milieu dans lequel on est,
que ce soit un milieu favorisé ou défavorisé,
malgré qu'il n'y ait pas de normes là-dessus. C'est une question
de bonne volonté des parents. À partir du moment où un
parent décide de ne pas payer un compte qu'il a à la garderie,
des moyens, iI en existe, il ne faut pas dire qu'il n'en existe pas, mais ils
sont quand même limités. Entre autres, les services de garde
étant des corporations autonomes, iIs n'ont pas droit aux petites
créances qui sont un service peu coûteux et efficace
habituellement.
Donc, la plupart envoient une lettre d'avocat; lI y a quand même
des frais à assumer selon le montant si vous avez un compte de 50 $ ou
de 100 $, vous ne dépenserez pas 25 $ à 30 $ pour une lettre
d'avocat pour réclamer 20 $ ou. encore, ce sont les agences de
recouvrement qui sont contactées. Il m'est arrivé de faire
affaire avec ces agences, mais dès que ce sont des parents qui
bénéficient de l'aide sociale iI faut oublier cela parce qu'ils
n'ont aucun recours contre ces gens. C'est regrettable que cela soit souvent
avec ces gens qu'on perde de l'argent mais, à partir du moment où
les subventions sont accordées sur les revenus, cela devient doublement
dramatique de ne pas être capable de récupérer la
contribution du parent pour des services qui ont été donnes. Le
seul recours qu'on a, à ce moment-là, c'est de dire que,
dorénavant, on ne recevra plus l'enfant à la garderie. Quand on a
une chance, à ce moment-là, on passe le mot aux autres garderies
pour dire: Attention à ce parent, vous devez faire attention et
réclamer chaque semaine. Il y a aussi la Loi sur la protection du
consommateur qui nous empêche de réclamer des frais d'avance, ce
qui fait qu'on ne peut pas se faire garantir par un dépôt, afin de
ne pas se faire attraper quelque part.
Mme Harel: Vous parlez de parents qui, manifestement, sont
négligents et qui ont obtenu le service, mais qu'en est-il de ceux qui
vous avertissent que temporairement, pour des raisons qui sont
indépendantes de leur volonté, que ce soit un arrêt de
travail, une mise à pied, une grève ou autre, ils ne pourront
utiliser le service? Qu'arrive-t-il dans ces cas?
Mme Ferron: J'ai travaillé dans trois garderies et, chaque
fois, que ce soit pour un enfant qui est hospitalisé pour une
période très longue, un mois, deux mois, trois mois... Qu'est-ce
qui se passe à ce moment-là? Autant que possible, à ce
moment-là, ce qu'on essayait de faire, c'était de tenter de
remplacer l'enfant ou de demander un demi-tarif ou un quart de tarif à
un parent pour lui permettre de conserver sa place. À ce
moment-là, iI pouvait revenir utiliser la place plus tard, chose qu'on
ne pourra vraiment pas faire à moins d'être absolument certain de
combler la place parce qu'on va avoir besoin des revenus.
Mme Harel: Je vous remercie. On aura sans doute l'occasion
également avec Concertaction, demain matin, de revenir sur cette
question. Maintenant, concernant votre déclaration à la page 24
sur les relations d'influence entre les deux gouvernements?
Mme Ferron: Vous comprendrez qu'étant un organisme avant
tout canadien, c'est peut-être un peu plus la vision qu'on en a. Cela a
toujours été une de nos craintes. En même temps qu'on a
toujours demandé au gouvernement fédéral d'assumer
un leadership en ce qui concerne les services de garde, de la même
façon on s'inquiétait à savoir comment iI assumerait ce
leadership. Par le biais du régime d'assistance publique du Canada, le
gouvernement fédéral n'assumait pas l'aide financière qui
était accordée aux familles qui fréquentaient des services
de garde à but lucratif. Dorénavant, cela va changer. En fait,
cela aurait dû changer avec le nouveau projet de loi. On ne sait pas de
quoi aura l'air le prochain. Vous pouvez être sûr qu'on va essayer
de se battre pour que cela soit changé et que ça ne soit pas
là.
Ce qu'on a constaté dans les derniers mois, entre autres,
à la réunion du mois de juin, une réunion du comité
national de direction de l'association canadienne, c'est qu'il y avait d'autres
provinces, comme la Nouvelle-Écosse, entre autres, qui ont vu changer...
Elle ne subventionnait pas le secteur à but lucratif. Du jour au
lendemain, quand cette politique a été connue dans le domaine
fédéral, il y a eu plusieurs changements. Il y a aussi la
Saskatchewan; le ministre n'a pas menacé, mais il a laissé
entendre qu'il pourrait changer sa politique et aussi subventionner le secteur
à but lucratif. On trouve que c'est un net recul par rapport à ce
qui existe présentement. Quand on parle d'améliorer, on se dit
qu'il faudrait au moins commencer par ça.
Mme Harel: Je vous remercie, Mme Ferron.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Chambly.
M. Latulippe: Madame, dans votre mémoire, à la page
12, vous dites que le gouvernement devrait légiférer
immédiatement pour arrêter et empêcher le
développement de services commerciaux puisque leur but ultime est la
réalisation de profits. En fait, vous dites que dans les garderies
à but lucratif la recherche de profits est incompatible avec la
poursuite de la qualité des services. Pourquoi nous dites-vous que, pour
une personne, parce qu'il y en a plusieurs, qui dirige une garderie à
but lucratif, c'est incompatible avec la qualité des services?
r
Mme Ferron: C'est incompatible dans le sens où c'est
l'objectif premier qui est visé. Vous comme moi, si on Investit 300 000
$ et plus dans une entreprise, on espère qu'elle rapportera, et c'est
bien naturel. Par contre, ça ne doit pas être le premier but
visé. Quand on parle de services de garde, quand on parle de garde des
enfants, le premier but doit être des services de garde de
qualité. Alors, c'est dans ce sens que c'est Incompatible.
M. Latulippe: Vous ne pensez pas que la qualité des
services est mieux gérée et contrôlée par des normes
ou par la formation que par la qualification de la garderie, qu'elle soit
à but lucratif ou sans but lucratif?
Mme Ferron: II y a deux façons de regarder cela. Il y a
effectivement les normes, la qualification du personnel, des choses qui sont
mises en place par un gouvernement, qui sont des normes à suivre. Mais
chaque jour, comment va-t-on vérifier que c'est appliqué dans les
services de garde? Je crois que ce sont les parents qui sont les mieux
placés pour vérifier et s'assurer que c'est là. C'est pour
ça aussi qu'on demande que ce soient des services de garde sans but
lucratif, pour s'assurer que si jamais I y a des profits réinvestis dans
la garderie iIs restent dans la garderie et, deuxièmement, qu'ils soient
contrôlés par les parents, les services de garde, parce que ce
sont quand même eux qui sont les mieux placés et qui ont aussi une
responsabilité face à leurs enfants et qui peuvent décider
quelle est la meilleure qualité possible.
Il y a les normes. On a toujours dit: Les normes, c'est minimal. Mais
quand on veut aller un petit peu plus loin que ça, ce sont les parents
qui sont les mieux placés pour choisir et administrer.
M. Latulippe: Madame, je vais vous donner un exemple que j'ai
dans mon comté, parce que j'ai rencontré tous les services de
garde dans mon comté, indépendamment qu'Us soient à but
lucratif ou sans but lucratif. Vous, vous êtes impliquée dans la
gestion des garderies, selon votre expérience. Vous avez deux garderies,
et c'est exactement le cas. L'une, avec un nombre de places, une cinquantaine
de places. L'une est sans but lucratif, l'autre est à but lucratif.
L'une, celle qui est sans but lucratif, exige 14,80 $ par jour pour
chaque enfant. Et elle est soutenue par les moyens de subvention actuels.
L'autre, à but lucratif, exige 15 $ par jour par enfant. Vous, si vous
aviez à administrer la garderie à but lucratif de la même
capacité, comment pourriez-vous véritablement faire un profit,
madame?
Mme Ferron: En ne payant pas les employés, c'est
très simple. C'est clair que la majeure partie du budget d'une garderie
est consacrée aux salaires. C'était clair dans tous les rapports.
Que vous preniez l'analyse des états, des bilans financiers des
garderies, que ce soit à but lucratif ou sans but lucratif, vous allez
voir que la majeure partie du budget d'une garderie passe dans les salaires,
dans la masse salariale.
Quand on parle de garderies à but lucratif, on parie d'environ 55
% du budget qui passe en masse salariale, alors que dans une garderie sans but
lucratif, ça va être 80 %. Vous allez me dire: Est-ce que c'est de
la mauvaise gestion? Est-ce que c'est de la mauvaise gestion de tenter de mieux
payer le personnel pour garder la stabilité? C'est clairement
établi dans l'énoncé politique qui est là que les
conditions de travail
intéressantes étaient un facteur de stablité du
personnel et que c'était un facteur très important quand on
parlait de qualité de services de garde. Alors, si on veut être
logique, I faudrait dire que des conditions de traval intéressantes,
donc des meilleurs salaires, favorisent une meilleure qualité.
M. Latulippe: Ce que vous êtes en train de me dire, en
fait, madame, c'est qu'il est plus facile de gérer, plus facile de mieux
gérer une garderie sans but lucratif à cause du système de
subventions, entre autres, qui fait en sorte que, de toute façon, ces
gens-là peuvent respirer un peu plus que dans le système de
garderies à but lucratif. Mais de porter le jugement que c'est la
qualité et la nature de la garderie qui fait la qualité des
services, bien, je m'excuse, je pense que c'est un mauvais jugement.
Je pense que ce n'est pas parce qu'on a un but lucratif ou que l'on est
sans but lucratif que la qualité des services peut être
altérée. On peut avoir une garderie à but lucratif avec
une bonne qualité de service et l'autre, avec une mauvaise
qualité de services. Je pense que les normes gouvernementales sont
importantes, que la formation est importante, mais porter un jugement
uniquement sur la qualité, sur la nature de la garderie, je pense que
c'est un faux jugement.
Mme Ferron: Ce n'est pas uniquement sur la nature de la garderie,
je m'excuse, c'est à partir de plusieurs études qui
démontrent que le taux de roulement du personnel est plus
élevé aussi, qu'a y a plus de plaintes qui sont portées
dans ces garderies par les parents. Ce n'est pas juste une question de nature
et de statut juridique, sauf que, comme par hasard, les moins bonnes conditions
de travail, là où 1 y a le plus de plaintes portées, c'est
dans ces garderies.
M. Latulippe: Si vous n'avez pas le même budget pour
gérer le même genre de garderies, vous n'avez pas besoin
d'être un homme d'affaires pour comprendre qu'effectivement vous avez
plus de misère à gérer la garderie...
Mme Ferron: Alors, pourquoi ne ferme-t-elle pas?
M. Latulippe: ...avec un budget qui est inférieur que
celle avec un budget supérieur. C'est de toute évidence et cela
n'a rien à voir avec la qualité des services.
Mme Ferron: Je ne le pense pas.
Mme Harel: C'est intéressant, mais dans la mesure
où le député conviendra qu'l faudra à ce
moment-là les mêmes conditions salariales, indépendemment
du statut de la garderie. Parce que vous aviez raison, 75 % des plaintes
fondées à l'office proviennent de parents qui ont des enfants
dans des garderies à but lucratif.
Le Président (M. Bélanger): Alors, si vous voulez,
Mme la députée de Maisonneuve.
Mme Harel: Cela reste un débat intéressant, parce
qu'l faut faire comprendre aux membres de la commission parlementaire que ce
n'est pas seulement une question idéologique, mais que c'est une
question éminemment pratique. Le salaire moyen, je crois, des
travailleuses en garderie à but lucratif est de 6,53 $, de
mémoire, et dans une garderie à but non lucratif d'environ 8 $.
Est-ce que le député peut convenir que ce n'est pas parce qu'il y
aura augmentation de la subvention qu'il y aura pour autant augmentation de
salaire, que ce ne sont pas là des vases communicants, et...
M. Latulippe: C'est une réponse idéologique, Mme la
députée de Maisonneuve.
Mme Harel: Ah oui, mais l'inverse est vrai aussi!
M. Latulippe: C'est une question Idéologique de votre
part.
Le Président (M. Bélanger): Sur ce, Mme la
ministre, si vous voulez remercier.
Mme Gagnon-Tremblay: Alors, madame, je vous remercie de votre
présentation. Je tiens à souligner qu'effectivement l'Office des
services de garde à l'enfance est membre de votre association par son
centre de documentation. Je ne sais pas, par contre, je ne pense pas que
l'office ait été consulté sur vos prises de position. Ce
qui me déçoit peut-être un petit peu dans les
réponses que vous nous avez données, c'est que j'aurais
souhaité avoir davantage la vision canadienne de votre organisme - dans
vos réponses - que d'avoir peut-être le cas plus précis
d'une garderie en particulier.
Tout de même, je pense que votre mémoire est bien
structuré et je vous remercie de votre présentation, Mme
Ferron.
Le Président (M. Bélanger): La commission remercie
l'Association canadienne pour la promotion des services de garde à
l'enfance et, compte tenu de l'heure, ajourne ses travaux à demain 10
heures, dans la même salle.
(Fin de la séance à 18 h 24)