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Version finale

33rd Legislature, 2nd Session
(March 8, 1988 au August 9, 1989)

Tuesday, February 7, 1989 - Vol. 30 N° 58

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultation générale sur l'Énoncé de politique sur les services de garde à l'enfance


Journal des débats

 

(Dix heures quatorze minutes)

Le Président (M. Bélanger): La commission des affaires sociales se réunit afin de procéder à une consultation générale et à des auditions publiques afin d'étudier l'énoncé de politique sur les services de garde à l'enfance déposé à l'Assemblée nationale le 24 novembre 1988.

À l'ordre, s'il vous plaît! On doit aussi souligner la présence des cameramen. C'est une première à notre commission de pouvoir filmer l'ensemble des travaux. On leur souhaite la bienvenue.

Sans plus tarder, Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Biais (Terrebonne) est remplacé par M. Boulerice (Saint-Jacques); M. Gervais (L'Assomption) est remplacé par M. Gardner (Arthabaska); M. Joly (Fabre) est remplacé par M. Cannon (La Peltrle) et M. Laporte (Sainte-Marie) est remplacé par M. Doyon (Louis-Hébert).

Le Président (M. Bélanger): Bien. Je vous remercie beaucoup. Est-ce qu'il y a d'autres remarques? Non?

L'ordre du jour est simple. Nous recevrons ce matin, à la table des témoins, après les déclarations d'ouverture de Mme la ministre déléguée à la Condition féminine et de Mme la porte-parole de l'Opposition officielle, le Conseil québécois pour l'enfance et la jeunesse et le Conseil du statut de la femme; cet après-midi, la Confédération des organismes familiaux du Québec, le Conseil de la famille Richelleu-Yamaska, le comité régional de la Fédération de la famille de Québec, l'Organisation mondiale de l'éducation préscolaire, OMEP-Canada; à 17 heures, Mme Raquel Betsalel Presser et, à 17 il 30, l'Association canadienne pour la promotion des services de garde à l'enfance.

C'est donc le programme de la journée et, sans plus tarder, j'aimerais donner la parole à Mme la ministre déléguée à la Condition féminine pour sa déclaration d'ouverture. Mme la ministre.

Déclarations d'ouverture Mme Monique Gagnon-Tremblay

Mme Gagnon-Tremblay: Merci, M. le Président. Collègues de l'Assemblée nationale, mesdames, messieurs, il me fait plaisir de procéder à l'ouverture des travaux de la commission des affaires sociales et d'entreprendre les discussions sur l'énoncé de politique sur les services de garde à l'enfance.

Lorsque j'ai été nommée ministre déléguée à la Condition féminine et responsable des services de garde, j'ai vite compris que le gouvernement se devait de combler l'absence d'une politique sur les services de garde à l'enfance. Plusieurs situations problématiques étaient soulevées et pour éviter, comme je l'ai mentionné à quelques reprises, de régler des cas à la pièce, une politique d'ensemble devenait essentielle.

On se souviendra d'ailleurs que, déjà, en 1982, sous l'ancien gouvernement, on réclamait une telle politique d'ensemble de la ministre responsable du dossier afin de permettre l'amélioration des conditions de travail, l'indexation des subventions au coût de la vie et l'élaboration d'un plan de développement. Les multiples ministres qui se sont succédé à la Condition féminine tergiversaient encore lors de notre entrée au pouvoir en décembre 1985.

Après avoir haussé les budgets des services de garde tout en procédant aux études et consultations nécessaires, j'ai rendu public, le 24 novembre dernier, un énoncé de politique sur les services de garde à l'enfance. Ce document d'orientation témoigne de l'engagement profond du gouvernement libéral à mieux soutenir les parents québécois en matière de garde, à améliorer le financement des services existants, à établir un meilleur équilibre entre les besoins diversifiés des parents et l'offre de services aptes à les satisfaire.

Ainsi, le gouvernement orientera ses actions afin que soient assurés un développement concerté, une qualité accrue et un financement amélioré pour les services de garde à l'enfance.

Au cours des cinq prochaines années, le gouvernement développera 60 830 nouvelles places au Québec, doublant ainsi pratiquement le nombre de places disponibles. Le gouvernement entend développer plus rapidement la garde en milieu scolaire et la garde en milieu familial. Il se propose de "prioriser", au cours des deux prochaines années, la création de places de garde en milieu de travail pour effectuer un rattrapage essentiel et permettre une conciliation plus efficace des responsabilités parentales et professionnelles.

Au cours des trois premières années d'application de la politique proposée, le gouvernement du Québec injectera 513 800 000 $ dans le but d'améliorer l'accessibilité aux services, de maintenir et d'accroître la qualité et de soutenir plus équitablement les parents et les services existants. Pour la seule année 1989-1990, le budget des services de garde augmentera de 43 500 000 $, soit une majoration de 41 % par rapport à l'année précédente. De ces nouvelles sommes injectées, 17 700 000 $ serviront au développement de nouveaux services alors que 25 800 000 $ iront à la consolidation des services déjà en opération.

Ceci constitue un engagement sans précé-

dent pour une seule année par un gouvernement et je suis heureuse que le milieu ait reconnu notre effort À ce chapitre, I faut, en effet, admettre que, depuis la création de l'Office des services de garde à l'enfance et ce, Jusqu'en 1987. les crédits additionnels accordés à l'Office des services de garde n'ont jamais excédé 8 000 000 $ pour une année.

Le gouvernement se devait de faire des choix et l'énoncé de politique a été élaboré en tenant compte de la capacité de payer des parents, bien sûr, qui sont aussi des payeurs de taxes, mais également en tenant compte de la capacité de payer de l'État, donc de l'ensemble des citoyens et des citoyennes.

Tout en reconnaissant qu'iI existe d'immenses besoins, Je suis néanmoins convaincue que les nouveaux montants Investis sauront nous permettre à très court terme d'améliorer les services de garde existants.

En effet, le gouvernement s'engage bien au-delà du simple octroi de subventions fixes, ce qui a actuellement pour résultat que les parents doivent assumer seuls toute augmentation de tarif. Par les nouvelles formules de financement proposées, le gouvernement s'engage à suivre l'évolution des dépenses et à assumer en partie, mais de façon responsable, la croissance des coûts récurrents qui en découleront. Ainsi, chaque fois qu'une garderie devra augmenter ses tarifs à cause de l'évolution inévitable de ses dépenses, le gouvernement augmentera simultanément la subvention de fonctionnement et la subvention aux parents admissibles à l'exonération financière. Le gouvernement assumera ainsi toutes ses responsabilités.

Le gouvernement injectera 43 000 000 $ supplémentaires au cours de la prochaine année et ceci constitue une limite bien établie. Des choix ont dû être faits et des priorités ont été arrêtées. Toutefois, à la lumière des discussions que nous aurons au cours de cette commission parlementaire et tout en respectant notre cadre budgétaire, nous serons ouverts à tout aménagement concernant les modalités d'application qui pourraient nous être proposées à l'intérieur de ces limites.

Le gouvernement du Québec considère que les parents ont un rôle de premier plan à Jouer dans le maintien et le développement de services de garde de qualité. À cette fin, iI entend soutenir davantage la participation des parents dans l'organisation, la gestion et la direction des services de garde.

Au chapitre de la qualité, iI faut retenir que la qualification du personnel constitue aussi un élément particulièrement essentiel. Le gouvernement entend donc consacrer, à l'intérieur de sa formule de financement, un budget spécial pour contribuer à la formation, au perfectionnement et au ressourcement du personnel, équivalant à 1 % de la masse salariale des services de garde.

Le gouvernement n'a pas choisi d'abaisser les ratios, tel que le réclamaient certains intervenants. En effet, diminuer les ratios aurait supposé des millions de dollars additionnels et récurrents à être défrayés par les parents et par l'État, sans compter les coûts supplémentaires destinés à l'aménagement des locaux des garderies.

Compte tenu des besoins criants à bien d'autres niveaux, nous avons préféré, dans un premier temps, consolider les services existants. Il sera toujours possible, ultérieurement, de diminuer les ratios lorsque les services pourront Jouir d'une marge de manoeuvre plus grande.

Convaincu du bien-fondé de soutenir financièrement les parents usagers, à la fois par des subventions aux services de garde et par des programmes de soutien économique s'adressant directement à eux, le gouvernement entend maintenir cet appui dans l'avenir. L'aide directe aux garderies et l'aide financière aux parents permettent de soutenir les clientèles en tenant compte de tours revenus et de leurs besoins de garde.

L'application du système de services de garde actuel, on ne peut que le constater, instaure puis perpétue des disparités, hélas, de plus en plus flagrantes entre les parents utilisateurs. Est-il Juste qu'un parent paie 12 $ par jour alors qu'un autre en paie 18 $ pour un service Identique et de même qualité? Est-il équitable que l'exonération financière maximale soit plafonnée à 10,50 $, peu importe le tarif payé? Il est faux de prétendre que les parents qui paient un tarif de 18 $ sont plus riches que ceux qui paient un tarif de 12 $, tout comme il est aussi faux d'affirmer qu'une garderie qui affiche un tarif de 18 $ est une garderie riche, il est vrai, cependant, d'affirmer que les parents admissibles à l'aide financière qui paient un tarif de 18 $ doivent débourser davantage que d'autres pour combler la différence entre le tarif payé et le montant versé à titre d'exonération et, partant, se priver d'autres biens nécessaires à la famille. Voilà autant de disparités, d'inéquités, qu'il y a de garderies. Voilà pourquoi le gouvernement a modifié la formule d'aide aux parents afin de la rendre plus équitable.

Le gouvernement n'a pas choisi d'uniformiser les tarifs, ce qui aurait signifié l'étatisation. Le gouvernement veut établir des mécanismes permettant de stabiliser les plus élevés et de réduire les écarts actuellement observés. Bien sûr, les tarifs varieront toujours puisque les dépenses varient d'un service à l'autre, d'un quartier à l'autre et d'une région à l'autre. De plus, chaque garderie étant une corporation autonome, les frais de garde sont fixés par les administrateurs en fonction des priorités qu'ils se donnent. C'est pourquoi le gouvernement modulera l'aide financière accordée aux parents en fonction des tarifs payés par ces derniers. La nouvelle formule d'exonération financière aux parents, qui prévoit un montant fixe et un pourcentage du tarif payé, viendra réduire les

effets pervers des écarts de tarifs, corrigeant ainsi les inéquités entre les parents et créant un meilleur équilibre.

Dès l'entrée en vigueur de la politique, les 20 000 familles bénéficiant actuellement du programme d'aide financière et les familles de classe moyenne nouvellement rejointes par ce programme profiteront d'une diminution de leurs frais de garde. Les familles qui ne pourront bénéficier de l'exonération financière profiteront, quant à elles, d'une déduction fiscale accrue. On sait, en effet, que le dernier budget Levesque a fait passer cette déduction de 2000 $ à 4000 $ par enfant, peu importe leur nombre. Cette réduction atteint donc 8000 $ pour deux enfants ou 12 000 $ pour trois enfants. Ces parents peuvent d'ailleurs en voir l'effet direct sur leur chèque de paie s'is en font la demande à leur employeur, lequel procédera à une déduction à la source des frais de garde.

À titre d'exemple, pour un tarif de 16 $, un couple avec un enfant en garderie et dont le revenu familial est de 40 000 $ pourrait recevoir une aide fiscale d'environ 6,20 $ par jour. Il resterait donc aux parents un déboursé net de 9,80 $.

La bonification du programme d'exonération financière accordée aux parents représente 9 000 000 $ supplémentaires en 1989-1990. Il a fallu un gouvernement libéral pour adopter une telle mesure de soutien aux familles québécoises. C'est une somme considérable jamais consentie auparavant. Cette bonification s'ajoute, faut-il le souligner, aux déductions fiscales pour frais de garde, au programme APPORT, aux allocations mensuelles pour jeunes enfants et à l'aide accordée à la garde pour les bénéficiaires de l'aide sociale engagés dans un programme d'em-ployabilité. Ces derniers programmes totalisent environ 165 000 000 $ annuellement.

En plus du soutien accordé aux parents, le gouvernement, conscient de sa responsabilité en matière de services de garde, accorde des subventions directes aux services de garde gérés par les parents, leur assurant ainsi une stabilité de financement. Jusqu'à maintenant, la formule de financement de ces services était rigide et non évolutive.

Dans le cadre de l'énoncé de politique, de ' nouvelles formules de financement sont proposées, tant pour les garderies que pour les agences de garde en milieu familial. Cette nouvelle formule permet donc aux garderies de mieux s'ajuster à l'évolution de leurs dépenses, de mieux répartir le fardeau additionnel pouvant découler de cette évolution et, ultimement, de réduire les écarts de tarifs actuellement constatés. Elle a été élaborée en lien direct avec la nouvelle formule d'exonération financière, d'où la nécessité de ne Jamais dissocier ces deux mesures puisqu'elles assurent, l'une et l'autre, un meilleur soutien aux parents.

Comment, d'ailleurs, ignorer cette mesure puisqu'elle représente à elle seule près de la moitié du budget de l'office, c'est-à-dire près de 62 000 000 $? Pourquoi faire croire à la population que le parent paie 4000 $ de frais de garde par enfant par année, alors que l'État assume entre 40 % et 85 % de ces 4000 $ par le biais de l'aide financière, de la fiscalité et du programme APPORT? De plus, cette aide globale aux parents exclut les subventions accordées directement aux services de garde dont bénéficient tous les parents.

On observe actuellement des disparités dans les garderies et elles sont nombreuses: des tarifs de 12 $ à 20 $; des salaires variant de 6 $ à 14 $; des garderies ayant un coût de logement ou d'hypothèque, d'autres pas du tout; des éducatri-ces ayant une formation, d'autres aucune; des garderies existant depuis quinze ans, d'autres très récentes; des garderies qui font payer les jours fériés ou qui ont des contrats signés avec les parents, d'autres pas; des garderies qui ont un taux d'occupation de 60 %, 70 % et d'autres de 80 % et 98 %. Au-delà de tout discours, ces disparités continueront d'exister et ce, quelle que soit la formule de financement retenue, puisque les garderies sont des corporations autonomes, différentes les unes des autres et qu'elles ont des besoins diversifiés.

Le choix du nouveau mode de financement a été fait dans le but de garantir, dans l'immédiat, un potentiel de consolidation qui produira également des effets à plus long terme tout en amenuisant graduellement les écarts relevés. Rappelons que la subvention sera accordée selon les revenus perçus par la garderie, donc...

Le Président (M. Bélanger): En conclusion, Mme la ministre.

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, est-ce qu'il serait possible d'avoir quelques minutes supplémentaires...

Une voix: Consentement.

Mme Gagnon-Tremblay: ...parce que je pense que c'est important, compte tenu de la complexité du dossier, d'avoir une vue d'ensemble? (10 il 30)

Le Président (M. Bélanger): D'accord.

Mme Gagnon-Tremblay: SI vous préférez, je serais prête à allouer le même temps à...

Le Président (M. Bélanger): Si nous avons consentement et dans la mesure où l'Opposition aura le même temps, 1 ne devrait pas y avoir de problèmes. Est-ce qui y a consentement?

Mme Harel: Consentement.

Le Président (M. Bélanger): II y a consentement, Mme la ministre.

Mme Gagnon-Tremblay: Merci. La formule

qui prévaut actuellement s'adapte mal à l'évolution des budgets et laisse peu de place à une réelle planification. Ainsi, chaque fois qu'une garderie voit augmenter ses dépenses, les parents en défraient seuls les coûts. Dorénavant, et pour la première fois, le gouvernement soutiendra les garderies à raison de 0,45 $ par tranche de 1 $ d'augmentation, en plus de l'exonération financière aux parents qui sera automatiquement ajustée en conséquence.

Plusieurs prétendent que la formule sera inflationniste. Pour ma part, l'affirme que cette formule ne peut, à long terme, qu'avoir des effets bénéfiques en ce qu'elle permet de s'adapter à des situations tarifaires différentes, permet une planification budgétaire efficace et incite à la maximisation des taux d'occupation. Elle m'apparaît. de plus, donner aux parents tous les moyens nécessaires de freiner toute augmentation exagérée des tarifs. Premièrement, puisque les parents sont à la fois consommateurs de services et décideurs de tarifs, nous croyons qu'ils n'auront aucun Incitatif à augmenter ceux-ci à moins que les besoins ne le commandent. Deuxièmement, on sait également que la subvention de 45 % des revenus réels sera limitée par un plafond établi à 120 % du tarif moyen observé dans l'ensemble des garderies au cours de l'année précédente. Ainsi, pour un tarif actuel moyen de 15 $. le plafond se situera à 18 $. En 1989-1990, en conséquence, la subvention de 45 % et l'exonération financière ne pourront s'appliquer au-delà de ce tarif de 18 $.

Toute modification à un système établi est, par définition, Insécurisante. Cependant, nous croyons fermement que la nouvelle formule de financement porte en elle les assises d'une consolidation et d'un meilleur partage des coûts entre l'État et les parents.

Il va de soi que les revenus sont en fonction du tarif et du taux d'occupation de la garderie. Ainsi, une garderie affichant un tarif moyen avec un bon taux d'occupation verra l'aide de l'État augmenter de façon substantielle. Une garderie affichant un tarif élevé et un bas taux d'occupation aura avantage à augmenter son taux d'occupation plutôt que d'augmenter son tarif pour obtenir l'aide supplémentaire de l'État. Les garderies auront donc un intérêt évident à maintenir des tarifs raisonnables et à chercher à combler les places vacantes avant de procéder à une augmentation des tarifs et ainsi risquer de perdre une partie de leur clientèle.

Avant de procéder à l'ouverture de nouveaux services, n'est-il pas légitime que, dans un souci d'une saine gestion des fonds publics, le gouvernement s'assure que les garderies existantes maximisent le taux d'occupation des places disponibles sans que cela ne se fasse au détriment de la qualité?

Certes, un certain nombre de garderies éprouvent des difficultés et ont du mal à ajuster tarifs et taux d'occupation. Je peux, dès à présent, garantir que des dispositions particulières seront prises et que l'Office des services de garde à l'enfance leur accordera une priorité en termes de soutien.

Dès l'entrée en vigueur de la politique, cette nouvelle formule permettra à 20 % des garderies de bénéficier d'une majoration de l'aide de l'État se situant entre 500 $ et 5000 $. à 65 % d'entre elles de recevoir entre 5000 $ et 30 000 $ de plus, alors que, pour d'autres garderies, l'augmentation sera de plus de 30 000 $. Pour la seule année 1989-1990, 10 000 000 $ supplémentaires seront consentis pour la consolidation des garderies sans but lucratif.

Pour les agences de garde en milieu familial, la formule de financement proposée, tout en offrant une amélioration du niveau de financement pour la très grande majorité d'entre elles, prend mieux en considération la réalité de ce mode de garde. Ce nouveau mode prévoit une subvention de base, une subvention par enfant-année et une subvention par famille. Il tient compte également des économies d'échelle et accorde aux différentes agences un financement plus équitable.

Ainsi, pour une agence de service de garde en milieu familial recevant 50 enfants à temps plein, la subvention pourra s'établir à 48 050 $ comparativement à une somme de 35 750 $ selon le programme actuellement en vigueur.

De plus, pour répondre à la demande des parents qui préfèrent la garde des poupons en milieu familial, le gouvernement introduira une subvention de 5,75 $ par place par jour pour la garde de ces poupons.

Lors de la promulgation de la Loi sur les services de garde à l'enfance en 1979, le gouvernement de l'époque faisait le choix conscient et délibéré de permettre aux garderies à but lucratif d'être titulaires de permis et de continuer à se développer sans pour autant doter l'office des moyens légaux qui lui auraient alors permis de contrôler efficacement ce développement.

Aujourd'hui, nous faisons face à l'existence de plus de 250 garderies à but lucratif non subventionnées. Quels étaient nos choix? Fermer les garderies à but lucratif et priver ainsi la population de plus de 11 000 places en garderie et abolir du même coup près de 2500 emplois? Les transformer en garderies sans but lucratif, ce qui, en pratique, s'avérait Irréalisable? Proposer un moratoire quant au développement de ces garderies ou les maintenir en apportant certaines améliorations?

Le gouvernement a clairement opté pour le maintien des garderies à but lucratif tout en assujettissant dorénavant leur développement à la planification régionale. Cette décision entraîne la nécessité pour le gouvernement d'assurer des services de garde de qualité aux enfants qui fréquentent les garderies à but lucratif. Encore une fois, conscient de ses responsabilités, le gouvernement a décidé d'octroyer à ces garderies des subventions pour tes soins apportés aux

enfants handicapés et aux poupons, ainsi que pour la formation et l'équipement. Ces subventions qui permettront d'améliorer la qualité des services seront données à la condition que soit formé un comité consultatif de parents véritablement opérationnel.

Concernant la garde en milieu scolaire, un rattrapage s'impose, d'où le choix de développer davantage, au cours des deux prochaines années, ce mode de garde de plus en plus réclamé par les parents. Dans le respect de l'autonomie des commissions scolaires, le gouvernement a choisi de ne pas leur imposer l'obligation d'offrir ces services compte tenu des progrès constatés au cours des dernières années, particulièrement dans les milieux urbains. Cependant, le gouvernement est conscient qu'un effort spécial devra être consenti pour atteindre la clientèle des milieux semi-urbains et ruraux.

L'obstacle majeur affronté touche la disponibilité de locaux dans certaines écoles. Pour pallier en partie à ce problème, le gouvernement mettra à la disposition des commissions scolaires un budget annuel de 3 900 000 $ afin qu'elles puissent prévoir un local spécifique lors d'une construction ou d'un réaménagement majeur d'école. Une enquête effectuée récemment par le ministère de l'Éducation auprès des commissions scolaires et des écoles devrait également permettre au gouvernement de redresser des situations problématiques.

Une mesure très importante en matière de financement est l'application nouvelle du principe d'indexation de la plupart des subventions. Le budget accordé pour le milieu scolaire, les subventions pour les agences, le montant de base du programme d'exonération financière et les subventions pour la garde des poupons et des enfants handicapés seront Indexés au cours des trois prochaines années. Ce principe était réclamé depuis très longtemps par les intervenants du milieu et il fait maintenant partie des orientations du gouvernement. Plusieurs l'ont reconnu, c'est une mesure jugée exceptionnelle et elle démontre bien l'engagement du gouvernement dans ce dossier.

Outre le soutien financier accordé tant aux parents qu'aux services de garde eux-mêmes, l'énoncé de politique propose d'autres modifications, particulièrement pour un développement des services de garde au Québec basé sur une planification régionale des besoins. Le plan de développement entraînera l'ouverture de 60 830 nouvelles places en services de garde au cours des cinq prochaines années.

Les places à développer pour les trois prochaines années sont identifiées et réparties selon les modes de services de garde, soit garderies, agences et milieu scolaire. Le plan est basé sur la préférence des parents, établie à la suite de deux sondages, et selon les indications que nous procurent les demandes d'implantation actuellement en attente à l'Office des services de garde à l'enfance.

Bien que les préférences des parents ne puissent à elles seules servir à traduire les besoins en services de garde, elles représentent toutefois un indicateur révélateur sur lequel s'appuyer pour développer les divers modes de garde. Bien que de nombreux besoins restent encore à satisfaire à l'échelle provinciale, on s'approche dans certaines régions ou certains quartiers de l'adéquation entre les services offerts et les besoins réels.

Comme iI l'a fait avec succès dans bien d'autres dossiers depuis son arrivée au pouvoir, le gouvernement, encore une fois, entend avoir recours à la planification et au développement concerté avec les partenaires régionaux, particulièrement les municipalités régionales de comté, les organismes socio-économiques, de même qu'avec les regroupements. Cette orientation ne vient pas pour autant mettre un terme à l'action communautaire des groupes promoteurs; elle vient, cependant, l'enrichir.

L'office procédera à une évaluation régulière des besoins pour chaque région et les résultats de cette évaluation détermineront la répartition des places à développer pour les quatrième et cinquième années du plan de développement.

Nous commencerons dans quelques instants ces audiences publiques concernant l'énoncé de politique sur les services de garde à l'enfance. Plus de 80 organismes viendront exprimer leur position face à l'énoncé de politique. Les demandes sont multiples et diversifiées. Je suis consciente qu'il n'y a pas de formule miracle et que tout est perfectible. J'entends être à l'écoute des opinions exprimées et j'ai bon espoir que cet exercice démocratique permettra d'aplanir les divergences de vues qui séparent présentement le gouvernement de certains intervenants.

Je vous remercie de votre attention et je souhaite sincèrement que cette consultation publique soit constructive et permette de dégager des consensus en matière de garde pour le mieux-être des familles et des enfants québécois. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bélanger): Merci. Mme la ministre. Vous avez donc utilisé 25 minutes. Mme la députée, porte-parole de l'Opposition, Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: M. le Président, vous allez d'abord m'excuser pour cette voix enrouée. Je la dois évidemment à une laryngite qui n'en finit plus.

M. le Président, comme nous avions convenu d'utliser quinze minutes de chaque côté, je souhaiterais que nous puissions compléter les dix minutes Imparties à l'Opposition par des interventions que souhaiteraient faire mes collègues qui m'accompagnent ce matin.

Le Président (M. Bélanger): II n'y a pas de problème, Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Louise Harel

Mme Harel: M. le Président, à écouter certains collègues de la ministre déléguée à la Condition féminine, on pourrait se rappeler, comme dans la chanson cajun très connue "L'arbre est dans ses feuilles", que les services de garde sont dans la politique familiale, la politique familiale est dans la natalité, la natalité est dans la langue et la langue est tout mélangée.

Voyez-vous, M. le Président, le ministre Rivard confiait la semaine dernière à son auditoire de l'Université McGiII que "si la langue dépérit, c'est qu'on ne fait pas assez de petits. Arrêtez de parler d'affichage, faites plus de bébés, cela va régler la question de la langue", a-t-il à peu près dit.

Malheureusement, un autre collègue de la ministre a décidé de reprendre à peu près le même raisonnement, Invoquant encore il y a quelques jours, et je le cite: "Que la principale menace contre la survie du français était la question démographique".

Les propos des deux hommes, de toute façon, ne sont pas étrangers à la formation gouvernementale, puisqu'ils sont presque analogues à ceux que le premier ministre lui-même tenait sur cette question avant Noël, au salon bleu, de l'autre côté.

M. le Président, comment un tel sophisme peut-il continuer à se répandre? Voit-on les Allemands de l'Ouest, qui ont un taux de natalité encore plus bas que le nôtre, se faire exhorter à faire des bébés pour sauver leur langue? Faut-il prévoir pour bientôt des primes pour les bébés francophones ou des certificats de francisation en langue maternelle? Qu'arrivera-t-il aux bébés nés dans des familles immigrantes qui, à 75 %, choisissent un transfert linguistique en faveur de l'anglais?

Je tiens à le dire très fort à l'ouverture de cette commission qui discutera des besoins de garde des petits et du grand besoin de petits pour notre collectivité: le procédé qui consiste à transférer sur le ventre des femmes la responsabilité gouvernementale de promouvoir le Québec français est totalement odieux. Le gouvernement doit cesser de culpabiliser la population, à défaut de prendre ses responsables à la fois dans le dossier linguistique comme dans le dossier démographique. L'époque est révolue du partage des enfants aux Canadiens français et des immigrants aux Canadters anglais. Nous avons besoin de politiques courageuses en matière démographique, distinctes des politiques en matière linguistique.

Malgré le caractère spectaculaire des primes à la naissance annoncées dans le dernier budget, particulièrement l'allocation de 3000 $ pour le troisième enfant, te gouvernement sait lui-même qu'elles auront peu d'effet puisque la diminution des naissances est attribuabie surtout à la réduction des enfants de premier et de deuxième rangs. Une véritable politique de natalité passe d'abord par des congés de maternité, des congés parentaux, une réorganisation du temps de traval et une véritable accessibilité à des services de garde de qualité. Les millers de Québécoises enceintes qui se débattent présentement avec le droit à un retrait préventif, refusé malgré des attestations médicales, paient très cher l'inertie du gouvernement qui continue d'ergoter sur la nécessité de faire des enfants.

Les modifications à la Loi sur les normes du travail, d'abord annoncées par la ministre déléguée à la Condition féminine pour le 15 janvier dernier, sont maintenant reportées. Peut-être avant jullet dans un avant-projet de loi, m'a répondu le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu la semaine dernière. (10 h 45)

En matière de services de garde, l'énoncé de politique provoque une déception presque générale. D'abord, force est de constater qu'au moment où la société québécoise tout entière est prête à consentir un effort substantiel en faveur des ressources de garde adéquates et accessibles, l'effort le plus important viendra d'Ottawa. Le tableau de la répartition, en dollars courants, de la contribution de Québec et d'Ottawa au financement de l'Office des services de garde depuis dix ans démontre clairement le statu quo, cette année, de la contribution du Québec. Ainsi, le budget de 69 200 000 $ en 1988-1989 n'atteindra que 69 400 000 $ en 1989-1990 parce que, malgré la valse des millions, la ministre déléguée sauve les apparences avec l'argent du gouvernement fédéral. Dans un domaine aussi névralgique qui constitue, selon le gouvernement Bourassa lui-même, un volet majeur de la politique familiale, la population est cependant en mesure d'attendre un effort accru des deux paliers de gouvernement

II est inadmissible que le gouvernement du Québec s'agite en se laissant seulement porter par les centaines de millions que lui distribuera Ottawa durant les prochaines années. Les différents modes de services de garde ont tour à tour vivement réagi contre certains aspects spécifiques plus controversés de l'énoncé.

Je rappelle ces attentes qui ne sont pas satisfaites de la part des intervenants du milieu des services de garde. D'abord, la nouvelle méthode de financement des garderies. Le nouveau mode de subventions, en fonction de 45 % des revenus réels de garde et l'abandon de la subvention par jour par place assortie d'une subvention de logement, va accroître dramatiquement l'écart entre les garderies. Unanimement décriée tant par le milieu des parents que par celui des travalleuses en garderie, cette méthode de financement va étouffer les services de garde dans les miteux moins nantis. Nous pensons que la ministre doit retirer immédiatement cette disposition, qui ne fera qu'accroître les inégalités, pour examiner un mode de financement plus respectueux des principes de justice distributive.

II en est de même du 1 % de la masse salariale de chacune des garderies consacré à la formation du personnel et à son perfectionnement. Il serait totalement injuste que le personnel desservant des clientèles ayant une moins grande capacité de payer éprouve plus de difficultés à obtenir une formation et un ressourcement adéquats.

La garde en milieu familial. Sans motif valable, l'énoncé de politique fait défaut de reconnaître pourtant la principale revendication des gardiennes responsables des familles de garde, soit la modification du ratio permis par la loi pour les enfants d'âge préscolaire. Les agences de services de garde en milieu familial demandent que les responsables de famille de garde puissent accueillir cinq enfants, y compris les leurs, plutôt que le ratio de quatre actuellement permis. L'augmentation du ratio telle que proposée pour permettre d'accueillir deux enfants d'âge scolaire après les heures de classe ne vient qu'officialiser une situation de fait sans répondre à la modification du ratio demandée.

D'autre part, l'agence de garde en milieu familial se trouve Injustement exclue de toute subvention pour l'achat de matériel pédagogique et pour la formation et le perfectionnement du personnel. Cette situation est d'autant plus déplorable que les garderies privées pourront dorénavant bénéficier de ces subventions.

Malgré l'augmentation du nombre de places prévues en garde scolaire, ce réseau fait toujours figure de parent pauvre dans l'ensemble des services de garde au Québec. Au terme de la période de trois ans définie par la ministre, le réseau scolaire pourra offrir un total de 40 000 places aux 600 000 enfants des écoles primaires publiques. C'est bien peu en regard du rattrapage auquel il faut procéder puisque, par ailleurs, tout reste à faire en matière de garde estivale.

Conscient de la faible implication des commissions scolaires dans les services de garde, il est inconcevable que le gouvernement ait retiré l'obligation d'offrir un tel service dans le cadre de la loi 107 adoptée en décembre dernier.

II est décevant que les subventions à la formation et au perfectionnement du personnel en service de garde scolaire ainsi que les subventions à l'acquisition du matériel pédagogique soient exclues de ce service.

Au-delà de l'insatisfaction propre à chacun des modes de garde reconnus, ce qui consterne le plus dans l'énoncé de politique, c'est que les principes directeurs qui y sont affirmés sont totalement étrangers aux modes de fonctionnement et aux formules de financement retenus. Manifestement les principes ont été dégagés au Secrétariat à la condition féminine et les formules de financement au ministère des Finances. D'ailleurs, la relecture du discours sur le budget d'avrl 1968 du ministre des Finances s'impose pour éclairer les zones obscures de l'énoncé de politique. Dans ce discours sur le budget, les frais de garde d'enfants y sont exclusivement présentés comme un coût relié à la présence sur le marché du traval. Pour ce motif, et malgré le discours d'équité fiscale utilisé dans le budget pour justifier, avec raison, la transformation des régimes de déductions personnelles en crédit d'impôt, le gouvernement a choisi de maintenir la déduction en matière de frais de garde, d'exclure la transformation en crédit d'impôt et de considérer les frais de garde comme une dépense effectuée en vue de gagner un revenu et non comme une compensation des charges parentales.

Cette mesure est inéquitable pour les familles à faible revenu. Je rappelle ce qu'en dit le Conseil du statut de la femme qui présentera aujourd'hui un mémoire devant cette commission parlementaire. Lorsque le revenu imposable de chacun des conjoints, sans compter la déduction des frais de garde de 4000 $, s'élève à 14 000 $, par exemple, le couple qui se prévaut de la déduction entière obtiendra une réduction d'Impôt égale à 1460 $. Mais à l'extrémité supérieure de l'échelle, quand le revenu imposable de chacun des conjoints atteindra 60 000 $ ou plus, la réduction d'impôt se chiffrera à 2200 $. Inéquitable pour les familles à moyen revenu, cette formule pénalise les femmes à la maison qui souhaitent étudier à temps partiel ou, à l'occasion, profiter d'un répit parental ou encore faire profiter leur enfant de la présence d'enfants du même âge.

La formule retenue va rendre le service de garde pratiquement inaccessible aux enfants des parents à très faible revenu, chômeurs et assistés sociaux, puisque les coûts vont devenir totalement exorbitants compte tenu de la modulation selon les tarifs payés. En effet, sans déduction fiscale sur un revenu imposable, en l'absence de tout crédit d'impôt remboursable, compte tenu de l'échec de participation au programme APPORT qui, un an après sa mise en vigueur, atteint à peine 35 % de son objectif, les enfants des parents en difficulté se verront dans la presque impossibilité de bénéficier d'une telle socialisation dans un service de garde.

Ce choix est éminemment contestable au moment où le gouvernement presse les couples à penser aux enfants, comme est contestable l'attitude véhémente de la ministre à l'égard des critiques formulées sur sa politique. Comment ne pas douter de l'offre de dialogue quand on sait que les travaux de la commission parlementaire se termineront à peine trois semaines avant l'application de cette politique déjà toute décidée d'avance? Malheureusement, je crains fort que l'exercice que nous débutons aujourd'hui ne serve finalement à rien d'autre du côté gouvernemental qu'à faire l'éloge de propositions pourtant si contestées. Je vous remercie, M. le Président

Le Président (M. Bélanger): Bien. Il reste douze minutes à votre formation politique, Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Jeanne L Blackburn

Mme Blackburn: Merci. M. le Président. Je pense que la porte-parole de l'Opposition a fait ressortir assez clairement les faiblesses de la politique qui nous est proposée aujourd'hui. Une commission parlementaire, comme il se doit, est un exercice qui devrait nous permettre de mesurer l'écart entre le discours et la politique de la ministre, ainsi que la perception qu'en ont ceux et celles qui ont à vivre et à appliquer quotidiennement le programme qui leur est proposé.

D'entrée de Jeu, comme parlementaires, nous devons reconnaître que les plus qualifiés pour parier d'une telle politique, une fois qu'elle a été étudiée, peuvent être, à l'occasion, les membres de l'Opposition ou ceux du gouvernement. Cependant, les plus qualifiés, à mon humble avis, sont vraiment ceux et celles qui ont à travailler, à gérer et à vivre avec une telle politique. C'est pourquoi Je souhaite qu'on soit extrêmement attentifs à ce que les gens viendront nous dire ici.

J'aborderai brièvement deux aspects de la politique: le premier, pour le déplorer parce qu'on ne pourra pas y revenir, c'est le fait qu'au moment où on adoptait la loi 107, comme le rappelait la députée de Maisonneuve, la loi sur les commissions scolaires, le ministre ne croyait pas utile de faire obligation aux commissions scolaires d'organiser des services de garde en milieu scolaire. En fait, il ne s'agissait pas d'une obligation aux commissions scolaires, mais bien aux directeurs d'école. Dans le texte de la loi 3, le directeur de l'école avait l'obligation, à la demande des parents, d'organiser des services de garde en milieu scolaire. L'idée nous était venue au moment où M. Jacques-Yvan Morin, ministre de l'Éducation, trouvait insupportable et intolérable que de Jeunes enfants soient tenus de se promener avec la clé dans le cou, comme on le disait, en attendant que les parents reviennent du travail. On avait donc fait obligation aux directeurs d'école d'organiser des services de garde en milieu scolaire lorsqu'une telle demande leur venait des parents.

L'actuel ministre de l'Éducation - l'avis est vraisemblablement partagé par la ministre responsable des services de garde - n'a pas cru utile de confirmer cette obligation qui était faite aux directeurs d'école. Pourtant, les progrès qu'on a connus dans le milieu scolaire sont venus surtout du fait qu'une obligation était faite. Les directeurs d'école savaient que, dorénavant, sous prétexte que c'est dérangeant d'avoir des enfants à l'école à l'heure du midi, Is n'auraient plus la possibilité de se soustraire à cette obligation. Alors, si on a fait des progrès qui sont intéressants dans les écoles, c'est parce que cette obligation était pendante auprès des directeurs d'école.

Le ministre de l'Éducation nous annonçait un investissement de 3 900 000 $ pour organiser les locaux. Vous savez que ça donne, au total, environ 6 $ ou 7 $ par enfant au primaire, au Québec, par armée. Alors, ce n'est pas astronomique.

La seconde question touche toute la discrimination qui persiste à cause des déductions fiscales pour les services de garde. C'est connu: plus vous avez un revenu élevé, plus vous aurez des déductions élevées. C'est une situation qu'on n'aurait pas intérêt, à notre avis, à perpétuer.

Je souhaite Juste qu'à la fin de cet exercice la ministre se soit laissé suffisamment de marge de manoeuvre pour pouvoir tenir compte, de façon concrète et réelle, des propos et des recommandations qui nous seront faites par les différents intervenants. J'espère qu'elle ne s'est pas enfermée dans des règles qui lui auraient été dictées, par exemple, par le ministre des Finances, à la fois sur les déductions d'impôt, sur la participation du gouvernement, et qu'elle s'est laissé un peu de marge de manoeuvre pour que l'exercice que nous faisons, auquel nous consentirons plusieurs heures, ne soit pas inutile. Je vous remercie, M. le Président.

Audition

Le Président (M. Bélanger): Bien. Ceci met fin aux remarques préliminaires.

J'invite donc le premier groupe à se présenter à la table des témoins. Il s'agit du Conseil québécois pour l'enfance et la jeunesse, représenté par Mme Nicole DeGrandmont-Fortier, Mme Danielle Bertrand-Poirier et M. Jean-Claude Boisvert. Je vous souhaite la bienvenue à la commission et vous précise un peu les règles. Vous avez 20 minutes pour faire la présentation de votre mémoire et 40 minutes seront réparties en 20 minutes - 20 minutes pour la période de discussion sur votre présentation.

Alors, je vais Imposer des règles strictes pour la présentation afin d'éviter qu'on ne prenne trop de temps et qu'on ne cumule des retards dans la tenue des travaux. Je vous prierais donc, Mme la présidente, de vous identifier et de présenter les gens qui sont avec vous. Chaque fois que vous aurez à prendre la parole, s'il vous plaît, veuillez donner votre nom pour les fins de la transcription du Journal des débats. Je vous remercie et vous pouvez procéder.

Conseil québécois pour l'enfance et la Jeunesse

Mme DeGrandmont-Fortier (Nicole): Merci. Nicole DeGrandmont-Fortier, présidente du CQEJ et m'accompagnant, mes collègues, Mme Danielle Bertrand-Poirier, première vice-présidente, et M. Jean-Claude Boisvert, directeur général du CQEJ. (11 heures)

Mme la ministre déléguée à la Condition féminine, mesdames, messieurs, le CQEJ existe en fait depuis 26 ans et sa mission a toujours été

de fournir un appui des plus adéquats aux divers intervenants qui oeuvrent auprès des enfants et des Jeunes dans ce qui touche tous leurs besoins. Le CQEJ est un organisme qui réunit différents professionnels dont le point commun, vous vous en doutez bien, est l'enfant et les jeunes. Sa deuxième mission est de promouvoir les besoins et les intérêts du Québec.

Cela étant dit, vous comprendrez qu'avec une telle mission le CQEJ, le Conseil québécois pour l'enfance et la jeunesse, se devait de déposer un mémoire concernant l'éventuelle loi sur les services de garde à l'enfance pour attirer l'attention sur trois pôles interreliés et, d'après nos officiers du conseil d'administration, considérés comme les plus importants, soit: la qualité de vie et des services et la stimulation que les jeunes peuvent recevoir dans les conditions de garderie, la stabilité et la compétence du personnel, sans oublier son perfectionnement, et, enfin, le cas des jeunes enfants différents tant socialement, mentalement que physiquement et dont l'énoncé de politique ne fait qu'une brève mention en page 60. Voyons ces différents pôles plus en détail.

Ce qui a le plus préoccupé le CQEJ, c'est de pouvoir retenir que l'amélioration des services de qualité pour les jeunes enfants en garderie a été un souci constant dans les demandes du futur énoncé de politique. C'est une préoccupation très sérieuse du CQEJ de voir à ce qu'il y ait une qualité de services pour les jeunes enfants qui seront appelés à vivre en dehors du foyer pendant un assez long moment de leur enfance. Cette qualité de services devrait être, à notre sens, un équivalent des intentions parentales, donc, un milieu de vie de qualité et de stimulation assurant le plein épanouissement de l'enfant.

C'est par un milieu privilégié que la socialisation et l'épanouissement d'une personnalité peuvent s'accomplir. On en convient tous. Est-ce qu'on en est conscient dans les garderies? C'est un des facteurs qui nous posent problème, pour lequel on ne semble pas démontrer un grand souci dans l'énoncé politique.

Est-ce que le personnel en place a suffisamment de ressources pour être qualifié et est-ce que son intervention est adéquate? Nous avons donc pour premier objectif d'alerter la commission sur l'absence d'énoncé clair et précis sur la qualité des services, la vie stimulante et le milieu de garderie.

Un autre objectif de notre mémoire touche l'enfant à problèmes. Qu'il s'agisse d'un enfant carencé socialement, c'est-à-dire un enfant qui subit des mauvais traitements, d'un enfant abusé, d'un enfant mésadapté, d'un enfant carencé intellectuellement par des déficiences, d'un enfant carencé physiquement, le milieu devrait, le cas échéant, pouvoir dépister ce genre d'enfant C'est le milieu idéal pour le faire, le milieu où on peut le dépister en donnant le plus de chances de rééducation à nos enfants, offrir un appui adéquat et même poursuivre les interventions des programmes de stimulation précoce. Si l'enfant est appelé à vivre dans une garderie, qu'il ait besoin d'un secours de stimulation précoce, je ne crois pas que les parents soient habilités à pouvoir mener à bien ce programme puisqu'ils le mettent à la garderie. C'est donc qu'ils ont besoin d'un supplément. À ce moment-là, la garderie devrait, par le perfectionnement de son personnel, pouvoir assumer une telle fonction et les autres enfants seraient loin d'en être incommodés puisque la stimulation précoce pourrait améliorer l'ensemble du programme déjà émis dans les garderies.

L'intégration fait désormais partie d'une action sociale et scolaire. Nous n'en tenons pour cela que des mémoires déposés par les ministres des Affaires sociales et de l'Éducation. Nous pensons qu'il serait des plus importants que l'intégration se fasse dans le premier échelon de la société de nos enfants, c'est-à-dire la garderie. Le CQEJ veut donc porter une attention toute particulière aux trois pôles que je viens de citer: la qualité des services, la stabilité du personnel et l'intégration inconditionnelle de tout genre d'enfant.

Ou même souffle, nous sommes bien conscients que ces facteurs amènent une question précise de budget. Dans l'énoncé de politique, le CQEJ a constaté un effort consenti pour aider au présent budget, mais, à la lumière d'un tableau issu de l'énoncé de politique, nous sommes enclines à croire que les réajustements pour une garderie type n'accordant de fait que 3,7 % d'augmentation par rapport à la situation actuelle nous semblent douteux quant à leur efficacité à démontrer qu'ils ont été réajustés de façon significative.

En terminant, le CQEJ tient à souligner de façon claire et précise que tout ce qui a été présenté précédemment ne peut être réalisé adéquatement qu'avec la complicité d'un personnel efficace et qualifié. Pour ce faire, I faut un personnel stable, et donc, ayant automatiquement des conditions de vie lui permettant une stabilité qui lui assure un climat de vie adéquat qui suscite son désir de travailler dans ce milieu; un personnel compétent à manoeuvrer avec les enfants et compétent à dépister, le cas échéant, les problèmes; un personnel soutenu par un recyclage et un perfectionnement continu et, enfin, un personnel soutenu par une instrumentation et des ressources que nous croyons susceptibles d'être prêtées ou puisées à même les expertises existantes dans le milieu social ou scolaire.

Bref, Mme la ministre, mesdames et messieurs, le CQEJ croit en une politique de garde, à condition que cette politique ne perde pas de vue l'enfant et son enfance, donc qu'elle favorise un personnel préparé adéquatement à stimuler et à éduquer l'enfant en développant son sens social et son goût de la découverte pour en faire un excellent étudiant dans le futur; qu'elle permette le perfectionnement périodique pour

nourrir ces éducateurs, les soutenir adéquatement et ainsi contribuer à la stablité du personnel; puis qu'elle démontre un souci évident de permettre une intégration adéquate à tous les enfants ayant des potentiels différents.

Permettez-moi, Mme la ministre, en conclusion, de céder la parole à ma collègue, Mme Danielle Bertrand-Poirier.

Mme Bertrand-Poirier (Danielle): Bonjour, mesdames et messieurs.

Tel que l'a mentionné Mme DeGrandmont-Fortier, le Conseil québécois pour l'enfance et la jeunesse a pour mission de favoriser la meilleure qualité possible des services aux enfants et aux Jeunes du Québec. Dans notre mémoire, sous l'énoncé de politique pour les services de garde à l'enfance, le CQEJ considère comme très important d'énoncer clairement les principes pour la qualité des services à offrir aux enfants car il est essentiel de leur assurer les services de qualité auxquels Is ont un droit fondamental.

Pour une meilleure qualité de services, le CQEJ propose d'éclaircir les notions de programmes éducatifs. De plus, il propose de favoriser le développement des mesures de prévention et de dépistage des problèmes sociaux tels l'hyperactivité, les maladies mentales, les troubles de comportement et tout ce qu'on peut retrouver chez un enfant éprouvant des difficultés. La stabilité à l'emploi et un perfectionnement continu constituent, selon le CQEJ, les fondements pour la qualité des services. La garde en milieu scolaire et les services de répit et de dépannage sont aussi à développer. Le CQEJ aimerait donc voir stabiliser et consolider tout ce qui est déjà en place.

Enfin, le Conseil québécois pour l'enfance et la jeunesse souhaite que les enfants ayant un handicap physique ou intellectuel soient intégrés dans les différentes garderies, les conditions de réussite étant le rôle positif des gestionnaires, des éducateurs, leur préparation adéquate, les ressources financières pertinentes, la préparation des autres enfants, l'instrumentation qui se doit aussi d'être appropriée, le soutien des divers intervenants ainsi que la concertation qui doit les animer. Enfin la participation des parents n'est pas à oublier. Puisque tout se joue avant six ans, il est alors important qu'une future politique des services de garde à l'enfance demeure aussi une politique de services aux enfants du Québec. Merci.

Le Président (M. Bélanger): Merci, madame. Alors, Mme la ministre.

Mme Gagnon-Tremblay: Merci, madame, pour la présentation de votre mémoire. Il y a certains aspects que vous avez soulevés qui sont exacts et qui sont très intéressants. J'en regardais quelques-uns, entre autres, concernant la qualité de la programmation et le développement de l'enfant. Vous savez qu'il existe déjà quand même un certain cadre de vie pour l'enfant et comme les services sont autonomes, cela reflète aussi les valeurs du milieu. Donc j'aimerais savoir de vous quelles devraient être les exigences à formuler par rapport aux programmes d'actrvités? Jusqu'à maintenant, la formulation de telle exigence a toujours été faite par les parents, c'est-à-dire que le contenu des programmes a toujours été précisé davantage par les parents. Voyez-vous autre chose et comment, de quelle façon le voyez-vous?

M. Boisvert (Jean-Claude): Jean-Claude Boisvert. Je peux peut-être répondre en vous disant que l'expertise développée depuis plusieurs années par le conseil fait que, sans nécessairement changer ce qui a déjà été implanté par l'office, il nous semble que pour des problématiques récentes, depuis dix ans, enfance négligée, enfance maltraitée, les abus sexuels, les cas d'hyperactivité, les troubles de comportement, il y a moyen d'améliorer les programmes dans les garderies pour dépister tôt les cas qui n'ont pas été annoncés dans le système et, dans le fond, d'inciter les garderies et faire en sorte qu'elles puissent avoir la formation qu'elles désirent pour le faire, de dépister tôt les cas problèmes et de pouvoir s'y adresser, faire référence aux bonnes ressources du réseau des affaires sociales et de l'éducation.

Comme cela a été dit tantôt, tout se joue avant six ans. Sans vous apporter de proposition de contenu de programme, ce qui nous semble devoir être ajouté porte davantage sur les nouvelles problématiques auxquelles les enfants font face, les problèmes qu'on voit beaucoup dans nos milieux, les listes d'attente à la protection de la jeunesse, cela manifeste des absences et des problèmes concernant les parents et certainement que les travailleurs en garderie sont bien placés pour les dépister et de tenter de les redresser. On a l'impression qu'ils voudraient certainement avoir les outils, l'instrumentation, le perfectionnement et les programmes conséquents pour être capables de les résoudre.

Ce serait intéressant de vérifier jusqu'à quel point ces Intervenants vont vous faire des propositions de programmes précis. Mais ce sont non seulement des programmes pour le vécu quotidien des enfants et leur socialisation, c'est aussi pour faire face à ces situations qu'on voit tard à l'école, mais qu'on pourrait voir tôt à la garderie.

Mme Gagnon-Tremblay: Dans les cours qu'on donne, entre autres, sur les techniques de garde - c'est sûr qu'on n'en donne peut-être pas suffisamment - avez-vous quand même une idée du programme qui se donne actuellement et désirez-vous que ce soit un peu plus pointu, c'est-à-dire qu'on aille davantage dans cette formation? Croyez-vous qu'on aurait avantage que cette formation soit donnée lors du cours en techniques de garde plutôt que dans les garderies

comme telles?

Mme DeGrandmont-Fortier: Oui. Nicole DeGrandmont-Fortier. Dans les cours, on fait un survol de ce qui devrait faire partie de la profession. À notre sens, ce que nous constatons, c'est qu'il y a une absence assez marquée d'une facilité de dépistage, premièrement, et d'une espèce de dynamisation de l'action à entreprendre pour stimuler l'enfant afin qu'l ait le goût de découvrir. Cela nous apparaît être une lacune. Il n'y a pas un grand impact à ce niveau dans le programme actuel. Surtout le niveau de dépistage est à peu près nul.

Mme Gagnon-Tremblay: Pour vous, ça prendrait quand même des cours spécifiques pour le dépistage. Vous croyez que les éducatrices ou les éducateurs n'ont pas suffisamment cette formation à l'intérieur des garderies pour faire ce genre de dépistage?

Mme DeGrandmont-Fortier: C'est indéniable. Surtout si on pense que l'application, telle que prévue, est d'une personne qualifiée sur trois. À ce moment, nous pensons que le dépistage ne peut pas se faire de façon adéquate. (11 h 15)

M. Boisvert: J'aimerais pouvoir ajouter quelque chose. Je suis Jean-Claude Boisvert. À la page 10 du mémoire, on vous fait une suggestion. Remarquez qu'on n'a pas quantifié ça outre mesure, mais pour les milieux défavorisés, en particulier - je pense aux milieux défavorisés de la région de Montréal, mais aussi dans d'autres milieux - peut-être que 1 % de la masse salariale qui a été prévue dans l'énoncé de politique, s'il y avait un montant de 100 000 $ qui était prévu pour des projets spéciaux de formation et de perfectionnement, pour des milieux de garde qui sont en butte à des concentrations de problèmes, ce serait intéressant. Cela pourrait être géré par l'office directement, sur demande et non pas automatiquement. Cela ne demande pas de gros budgets, mais cela aiderait beaucoup à des gens qui, dans des milieux défavorisés urbains, font face à des situations particulières difficiles. Alors, ce serait sur demande, à la proposition des services eux-mêmes. Cela respecte leur autonomie, mais cela permettrait aussi de répondre à des problématiques récentes et pas faciles.

Mme Gagnon-Tremblay: C'est quelque chose qui est fort possible. Nous avons quand même une certaine somme, une enveloppe pour certains projets spéciaux, mais aussi, dans le cadre du programme du fonds d'aide mis à la disposition des provinces, on pourrait expérimenter ce genre de programme et voir ce qui pourrait se donner de plus spécifique en termes d'intervention et de prévention. C'est une suggestion excellente.

Vous parlez aussi de la qualité du personnel stable qui est bien formé. Vous êtes au fait que nous accordons cette subvention de 1 %. Il est sûr que tant et aussi longtemps que nous n'aurons pas atteint la norme - vous savez qui y a un règlement entré en vigueur en octobre dernier qui était prévu depuis cinq ans - on n'a pas atteint la norme pour différentes raisons que j'aurai à expliquer plus tard... Donc, c'est certain que pour les trois prochaines années, étant donné que nous avons accordé un délai supplémentaire, ce pourcentage sera versé surtout pour atteindre cette norme, mais une fois que nous aurons de plus en plus de techniciens ou de techniciennes en garderie, à ce moment-là, on pourra utiliser davantage cette masse salariale pour du ressourcement ou du perfectionnement, ou peut-être des cas comme ceux dont vous faites mention.

Vous disiez, par contre, dans votre mémoire - vous l'avez cité tout à l'heure dans votre présentation - que cela représente peut-être 3,5 % d'augmentation prévue des garderies. Donc, c'est très peu pour ce genre de besoin dont vous faites mention. Sauf que je dois vous dire que, lorsque vous parlez des 3,7 %, c'est à l'intérieur du statu quo. Vous comprenez qu'avec le nouveau programme, cela revient à plus que cela, c'est seulement si on ne change ou ne modifie absolument rien.

Un autre point Intéressant, c'est lorsque vous parlez des enfants handicapés: l'intégration des enfants handicapés. Vous êtes sûrement au courant que l'Office des services de garde a fait des efforts considérables pour intégrer des enfants handicapés. Il y a une subvention de 14 $ qui est accordée au service pour l'enfant handicapé et aussi une subvention qui peut aller jusqu'à 1000 $ pour aménager les locaux avec des équipements spécialisés. Quand vous parlez d'enfants handicapés, iI faut s'entendre. Vous avez différents handicaps qui peuvent être très lourds. Jusqu'où allez-vous? Où s'arrête-t-on? Avez-vous une idée à ce moment-là concernant les services de garde?

Mme DeGrandmont-Fortier: Nicole DeGrandmont-Fortier. L'idée de l'intégration actuellement est une idée qui englobe tous les types de déficients, que ce soit social, comme je l'ai dit, mental ou physique. Je ne vois pas le COEJ commencer, à mettre une balise quelque part, puisque le fondement de notre société, c'est de pouvoir vérifier que tous les enfants du Québec puissent avoir des services. On s'est toujours battu pour que, quel que soit leur handicap ou leur difficulté, ils aient accès à des services. Cela fait 26 ans que l'on fait ça et je pense qu'on est bons pour encore 26 ans.

Mme Gagnon-Tremblay: Tout à l'heure lorsque je vous mentionnais que l'office a fait des efforts, il y a aussi des brochures. Dans la revue Petit à Petit, on parle régulièrement d'enfants handicapés. C'est sûr qu'il y a une prise de conscience, une volonté d'intégrer de plus en plus ces enfants, selon, naturellement, le

handicap, parce qu'il faut quand même que la garderie puisse garder d'autres enfants. Il se fait des efforts louables actuellement dans les services pour Intégrer de plus en plus cette catégorie d'enfants. Peut-être que l'on pourrait fake plus, cependant.

M. Boisvert: Jean-Claude Boisvert. Si vous me le permettez, je reviendrai sur le détail que vous avez donné tantôt: 14 $ par jour de subvention pour l'intégration d'un enfant handicapé, mate par expérience, puisque je suis moi-même père d'un enfant handicapé, 1 est évident que 14 $ pendant cinq jours, cela fait 70 $. Ce n'est pas cela qui va faire qu'on va engager quelqu'un à mi-temps ou à temps plein pour un ou deux enfants. A moins que la garderie ne soit de taille à atteindre une certaine limite, une masse critique - je m'excuse du terme - ce n'est pas possible, ce n'est pas cela qui va faire que, dans le fond, on aura quelqu'un de plus pour s'occuper d'un enfant, même si cela peut aussi profiter aux autres enfants. Alors, j'ai le sentiment que ce que nous vous proposons, c'est d'examiner avec l'office, sans mettre de chiffres, la possibilité de donner, un peu comme dans le milieu scolaire, du mi-temps de plus ou deux tiers de temps de plus à la garderie pour s'occuper de cet enfant, ce qui va aussi rejaillir sur les autres enfants puisque les apprentissages de socialisation seront dans les deux sens.

Lorsque l'intégration scolaire est réussie - on a fait une tournée du Québec l'an dernier là-dessus - là où 1 y a eu des réussites, c'est parce que les parents, les responsables, les intervenants ont réussi à accepter qu'l y avait une part et que les autres enfants y trouvaient leur compte aussi. J'ai l'impression que les 14 $ ne sont pas suffisants, pour un seul enfant dans une garderie, pour atteindre le montant qui serait nécessaire pour donner le soutien direct. Il y aurait sûrement moyen de bonifier, avec peu de sous de plus, pour être capable d'ajouter le mi-temps que cela nécessiterait.

Mme Gagnon-Tremblay: Croyez-vous que l'Office des personnes handicapées a quand même une responsabilité? Quelle devrait être, normalement, la part de l'Office des personnes handicapées dans ce genre d'intégration? Ou est-ce que, tout simplement, nous devrions prendre à notre charge cette responsabilité?

M. Boisvert: Si vous me permettez... Jean-Claude Boisvert je tiens compte un peu de votre statut de ministre qui doit influencer vos consoeurs et confrères; je pense au ministre de l'Éducation, à la ministre de la Santé et des Services sociaux, à l'office et aux autres ministères. Je ne peux pas faire abstraction du fait que oui, on peut toujours se dire que dans le milieu de l'éducation l'office va payer des intervenants pour aller en classe. Par ailleurs, certaines commissions scolaires vont le faire.

C'est un peu mélangeant pour les parents. J'ai le sentiment qu'indépendamment du fait que vous décidiez, avec vos confrères, de mettre les sous à l'office ou par le biais des services de garde, quelles que soient les ententes, un peu comme dans le modèle scolaire, cela demande un peu plus de temps et de personnel pour appuyer cette Intégration. Est-iI préférable que cela vienne de l'office par le biais des écoles et des garderies? C'est possible, pour qu'il ait un oeil sur l'aspect de l'enfant handicapé. Est-I possible de l'inclure dans votre énoncé de politique? Je pense que c'est une mesure qui doit être prévue, mais c'est plus d'influencer les autres peut-être. L'office, oui, mais iI ne faudrait pas non plus envoyer les sous de ce côté-là sans que ce soit pour répondre véritablement aux services de garde qui font face à la situation.

Mme DeGrandmont-Fortier: J'ajouterais à cela qu'il faudrait peut-être faire très attention de ne pas reprendre le pattern qui existe actuellement en milieu social et scolaire de donner l'odieux aux parents de magasiner une place pour leur enfant en disant: Voilà, l'Office des personnes handicapées t'aidera si tu trouves le moyen de te faire aider. Attention à cela! N'oublions pas qu'on fait affaire avec des parents qui n'ont pas encore eu de contacts avec le système scolaire et qui sont déjà très démunis la plupart du temps parce qu'ils en ont juste un ou deux et que ce sont leurs premiers. Comme on est en mesure d'appliquer une nouvelle norme, une nouvelle politique ou qu'on pense à des choses nouvelles, il serait peut-être temps de le faire de façon adéquate et de façon à ne pas surcharger encore le lobbying des parents à se chercher une garderie ou un service à l'OPHQ pour pouvoir avoir droit à la garderie avec tous les services que cela Implique. Je pense qu'l faut avoir cela présent à l'esprit.

Mme Gag non-Tremblay: En somme, le message que vous nous livrez, c'est que le gouvernement s'organise entre les différents ministères, mais qu'on n'impose pas ou qu'on évite aux parents ces tracasseries et que, finalement, lorsqu'on a besoin d'une place pour un enfant handicapé, on puisse l'avoir.

Pour votre information, vous savez qu'il y a quand même 121 garderies - il est sûr que ce n'est pas énorme - qui offrent actuellement ces services pour enfants handicapés, ce qui correspond à environ 235 places, pour un budget total annuel, en 1986-1987, de 461 234 $. C'est un effort, mais je constate qu'il doit être encore plus considérable. Merci.

Pour le moment, je n'ai pas d'autres questions, M. le Président

Le Président (M. Leclerc): Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Merci, M. le Président. Je veux

également saluer le Conseil québécois pour l'enfance et la Jeunesse. Je vais immédiatement commencer mes questions parce que mes collègues souhaiteraient également échanger des vues avec vous. Deux aspects de votre mémoire m'ont beaucoup Intéressée, soit le service de garde utilisé comme un instrument de prévention et de dépistage des problèmes sociaux. Cela m'amène évidemment à poser la question: Dans quelle mesure les services peuvent-ils jouer ce rôle, si les enfants qui y sont admis sont ceux dont les parents ont les moyens de payer la garde? La lecture de votre mémoire m'a amenée à revoir le programme de consultation d'experts, que la Commission d'enquête sur les services de santé et les services sociaux avait consultés, sur les enfants de zéro à onze ans et de constater que les taux d'incidence les plus élevés, dans les cas de mauvais traitement ou de négligence, étaient notés, beaucoup plus là où il y avait une corrélation très forte entre le pourcentage de familles vivant en situation de pauvreté que dans les milieux où il y avait un certain seuil d'aisance. Est-ce que c'est là l'expérience que vous avez au conseil québécois? Est-ce qu'on peut nettement considérer au Québec - c'est le cas aussi aux États-Unis, je crois - qu'il y a des problèmes relatifs au traitement des enfants plus nombreux dans les milieux où on retrouve des situations de pauvreté?

Mme Bertrand-Poirier: Danielle Bertrand-Poirier. J'aimerais tout d'abord citer un fait. L'enfance maltraitée ne se retrouve pas seulement dans les milieux défavorisés; c'est un fait, il y en a. Il y en a aussi dans les milieux plus aisés. On n'a qu'à penser à la capacité de payer des gens. Souvent, les deux parents vont travailler et on retrouve des enfants laissés à eux-mêmes, qui peuvent être violentés à cause de choses que les parents vivent au travail. De ce côté-là, je pense que ce n'est pas à négliger. Lorsqu'on parle de parents dans les milieux défavorisés, quand on cite que les services de garde seraient à développer, des centres de répit et de dépannage, ce serait extrêmement efficace pour éviter... On a fait un dossier sur l'enfance maltraitée; de nombreuses choses sont démontrées dans ce dossier.

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Mme Harel: Justement, c'est cet aspect qui m'intéresse. Je crois que le directeur général veut aussi intervenir.

M. Boisvert: Oui, je voulais juste compléter. Jean-Claude Boisvert. Je crois qu'il faut distinguer deux choses. Les handicaps physiques et les handicaps mentaux, ça se distribue dans la population. Sauf pour les cas des enfants en bas âge, c'est-à-dire que, pendant la maternité, des problèmes de nutrition peuvent conduire à certaines déficiences; on peut dire que ça se retrouve un peu dans tous les quartiers. Il reste que dans Hochelaga-Maisonneuve, Saint-Henri,

Petite-Bourgogne et Pointe-Saint-Charles, à Montréal, on va retrouver des parents qui auront plus de difficultés à obtenir les Informations ou les services pour leur enfant. Par ailleurs, je crois que le Conseil scolaire de l'île de Montréal a fait des études sur le milieu scolaire en milieu défavorisé et je crois qu'il y a des concentrations de problèmes de comportement, d'hyperactivité et d'autres problèmes du genre qui se retrouvent dans ces milieux. Je pense que les gens du mlieu scolaire se retrouvent avec ces jeunes alors que les six années sont déjà passées.

Je pense que ce ne sont pas les parents qui peuvent les manifester. Je crois avoir entendu souvent des gens qui travaillent dans les garderies dire: J'ai vu, mais je ne suis pas outillé et je n'ai pas le temps; je n'ai pas la formation et on n'est pas assez nombreux pour savoir quoi faire avec ces enfants. Dans des milieux précis, pour des troubles de comportement qui conduisent plus tard à la délinquance, à l'hyperactivité ou à d'autres problèmes psychologiques, et même au suicide chez les adolescents - vous savez qu'ici, au Canada, on a le plus haut taux de suicides chez les adolescents - on a le sentiment que ce n'est pas le principal programme du travailleur en garderie, ce n'est pas sa préoccupation principale, mais, à l'occasion, il peut s'occuper d'enfants qui ont ces problèmes et être un outil efficace tôt, si on lui donne l'occasion d'acquérir la formation pour le faire et, évidemment, s'il a le temps de le faire. (11 h 30)

Mme Harel: C'est intéressant parce que, finalement, il y a deux ordres de problèmes. Le premier, c'est de donner des outils nécessaires, adéquats, aux travailleuses - je dis surtout "travailleuses" parce qu'on me dit qu'elles représentent 98 % - dans les garderies qui ont un contact avec des enfants qui présentent ce genre de trouble de comportement. Le deuxième ordre de problèmes, c'est de faire en sorte que les enfants qui présentent ce type de problème de comportement puissent avoir accès à la garderie. Évidemment, d'une certaine façon, c'est relié aux moyens que les parents ont de payer ou non, ce qui n'est pas le cas pour l'école puisqu'ils s'y retrouveront de façon obligatoire et que l'État, bien ou mal, les prendra en charge d'une certaine façon.

Vous nous dites que les mêmes principes que pour l'intégration scolaire devraient s'appliquer - c'est ce que je comprends dans le mémoire que vous nous présentez - aussi pour le service de garde. Mais il y a une différence fondamentale entre les deux: la garde en services de garde, quel que soit le mode, est assumée financièrement par les parents. Je pose à nouveau la question, parce que, je sais qu'il y a des enfants qui sont négligés ou qui connaissent de mauvais traitements dans des mlieux où il y a une certaine aisance. Finalement, le document de la commission Rochon me permettait de constater

que les Indicateurs strictement économiques expliquaient à 75 % les problèmes présentés, disait-on. Est-ce que vous envisagez ou si vous avez étudié ce que devrait être le mode de garde, finalement? Vous avez parlé de garde de répit, de dépannage. Est-ce que vous pouvez préciser cette question puisque c'est absent de l'énoncé de politique actuellement?

Mme DeGrandmont-Fortier: Nicole DeGrand-mont-Fortier. Je pense que, pour l'instant, on n'a pas apporté un grand éclairage sur ce point parce qu'on voulait surtout sensibiliser l'action de ce matin vers l'intégration comme telle qui est à peu près inexistante, enfin dans l'énoncé de politique actuel. De fait, il est très Important qu'on soit sensibles à la chose et qu'ensemble on devienne créatifs pour régler ce problème important. On ne réglera peut-être pas le cas de chaque enfant, mais il va falloir trouver des solutions efficaces, lucides et logiques pour que cela se règle afin d'en arriver a ce que les enfants partent tous du même pied.

Quant à savoir si on doit laisser cela aux parents ou comment on doit arriver à mettre cela dans un budget, il est fort Important de comprendre que, quelle que soit la carence de l'enfant... On vient de parier de l'enfant carence émotivement et effectivement, mais celui qui vit avec un handicap quelconque est toujours carence dans notre société. Il faudrait peut-être arriver à faire comprendre que la garderie est l'endroit idéal pour commencer à devenir tolérants, à accepter ces problèmes et à aider. C'est dans ce sens que nous abordons la question. Quant au répit et au dépannage, je pense qu'ils devraient être un service offert continuellement à une famille ou à un membre d'une famille, mais de façon sporadique. Le dépannage et le répit, comme leur nom l'indique, c'est pour aider en cas de détresse. Actuellement, ce sont à peu près juste les associations qui se permettent entre elles de former ce genre d'intervention. Actuellement, on n'a pas beaucoup recours aux garderies pour ce genre de choses. Les associations de personnes handicapées mentales vont mettre sur pied un répit, un dépannage. Or, je pense que c'est encore beaucoup imputé au bénévolat pour arriver à réussir cela. En fait, on a les locaux, le personnel et on aurait probablement juste à manoeuvrer les ressources actuelles pour pouvoir aider les parents qui ont besoin d'un dépannage ou d'un répit.

Mme Harel: Pensez-vous qu'il faudrait envisager des ratios différents dans la réglementation, par exemple? Avez-vous examiné cette question? Dans votre problématique, vous nous présentez le service de garde comme un droit de l'enfant à l'Intégration, comme une sorte de recherche, de projet d'égalité des enfants, finalement Mais le fait est que, dans l'énoncé de politique, le service de garde est d'abord un droit pour les parents qui travailent puisque l'enfant dont le parent ne travaille pas - donc, ne travaille pas avec un revenu - est peu susceptible de bénéficier du service de garde compte tenu des coûts exorbitants qu'il va encourir à ce moment-là.

M. Boisvert: Jean-Claude Boisvert. Je pense que c'était l'essentiel de la discussion des membres du conseï d'administration lorsqu'on a préparé le mémoire. Le message principal était de dire: Pour ce qui est de l'énoncé de politique, les membres sont d'accord; dans le fond, I s'agit d'un élément de la politique familiale et aussi d'un élément de soutien a l'amélioration de la condition féminine. La réaction des membres a aussi été de dire: Oui. mais ce sont les enfants qui sont dans les garderies et ceux qui n'y sont pas, comme vous le dites, pourraient peut-être aussi en bénéficier. Ce sont eux les clients; c'est vrai que ce sont les parents qui ont à placer leur enfant dans une garderie, mais c'est l'enfant qui est dans une garderie.

Je pense que ce que les membres du conseil d'administration voulaient venir dire ce matin, que ce soit pour ceux qui sont en garderie, quels que soient les problèmes d'accès pour les autres, c'est que ce sont les enfants qui sont concernés, bien sûr les parents aussi pour ce qui est de l'accès. Quand je regarde avec les membres du conseil, depuis deux ans et demi, les différents problèmes qu'on a touchés, que vous entendez et que vous traitez au gouvernement de différentes façons, tous ces problèmes, soit parce qu'il y a des parents qui ne sont pas adéquats ou qui sont dépassés; il y a aussi des familles monoparentales qui ont à joindre les deux bouts; c'est difficile d'élever des enfants dans ces conditions. Je ne blâme personne. Je vois qu'il y a des enfants qui vivent des situations difficiles. Tout se joue avant six ans. La garderie pourrait être un instrument Intéressant dans les milieux défavorisés, en particulier, et dans d'autres milieux aussi. Ce qui est Intéressant, c'est d'aborder la question de l'ouverture des garderies en milieu scolaire, lors des journées pédagogiques et pendant l'été.

Alors, il est fait mention, dans l'énoncé de politique, de possibilités de projets spéciaux. Cela nous rejoignait beaucoup, dans le sens de l'accès, et pour l'enfant lui-même aussi. Je crois que c'était le message que les gens voulaient apporter.

Mme Harel: Très rapidement, une toute dernière question avant que mes collègues n'interviennent. Concernant le personnel, vous avez beaucoup insisté dans votre mémoire sur la nécessité d'un meilleur traitement du personnel. Vous soulevez le fait que, dans l'énoncé de politique, on prévoit une amélioration de 3,7 %. Je n'ai pas bien saisi la réponse de la ministre; elle aura sûrement l'occasion au cours du mois de la clarifier. Cela me fait penser à un autre mémoire qu'on recevra aujourd'hui. Un profes-

seur, Mme Presser, disait et je la cite: "Hélas, la réalité actuelle nous montre un panorama sombre dans lequel le 'burnout" le taux d'abandon en début de carrière et le découragement font partie intégrante des scénarios des services de garde*

II serait peut-être intéressant que nous vous entendions sur le type de conditions qui doivent être offertes à un personnel pour faire en sorte qu'il y ait le maintien d'une bonne relation avec l'enfant.

M. Boisvert: Jean-Claude Boisvert. Je dois vous dire que les membres du conseil d'administration ont plutôt pensé que les groupes qui représentent les travailleuses et les travailleurs de garderie viendraient eux-mêmes défendre leurs points de vue. Cependant, ce qui nous rejoignait tous, c'était de dire que la stabilité du personnel pour les enfants, c'est important; que la stabilité et le plaisir de travailler dans un cadre dans lequel on reconnaît notre apport, c'est Important. Dans ce cas-là, évidemment, ça touche la question salariale, les conditions de travail auxquelles les parents sont confrontés, bien sûr, avec les moyens.

Ce que le conseil d'administration a soulevé, c'est le tableau à la page 69. On l'avait interprété de la façon suivante, bien sûr en constatant qu'il y a des places supplémentaires qui vont être créées par l'énoncé de politique. C'est très bien. Ce que montre le tableau, c'est la différence entre la formule de financement actuelle et la nouvelle formule. Les 8300 $ de surplus que la nouvelle politique va donner sur le budget total de la situation actuelle, c'est ce qui donne 3,7 %. Notre réflexion nous faisait dire: Oui, bien sûr, on va créer d'abord de nouvelles places, c'est nécessaire. La politique actuelle bonifie légèrement pour les garderies actuelles, mais on doutait que ça puisse améliorer tant que cela la situation et la stabilité du personnel au travail, des travailleuses en particulier.

Le Président (M. Bélanger): Oui, madame.

Mme DeGrandmont-Fortier: Pour compléter, si vous voulez, la question du "burnout" que vous avez soulevée, au CQEJ, nous avons des études qui ont été faites sur ce sujet. L'une des raisons du 'burnout", c'est la mauvaise préparation ou le manque d'aérage ou de recyclage d'un individu. Nous pensons que si les travailleuses et les travailleurs qui sont dans ce milieu sont adéquatement préparés, s'ils peuvent bénéficier de périodes de perfectionnement ou de recyclage, ce qui n'est pas le cas - on le constate lors de nos congrès, ce n'est pas ce personnel qui vient à nos congrès - à ce moment-là, 1s ne peuvent pas bénéficier de rencontres avec des gens de leur milieu ou de milieux connexes. Ils ne peuvent pas bénéficier non plus de l'annonce de nouvelles stratégies dans l'éducation, etc. À ce moment-là, ça devient un cercle vicieux ou un mode de vie très restrictif où chacun essaie de se stimuler tant bien que mal. Et si c'est plus mal que bien, eh bien, mon Dieu, ça crée le "burnout". Or, c'est dans ce sens-là que nous pensons que le milieu doit être sain, stable et efficace. Autrement, ce sont les enfants qui vont en supporter le poids.

Le Président (M. Leclerc): Mme la députée de Marie-victorin, en vous rappelant qu'il reste un peu moins de cinq minutes à votre formation.

Mme Vermette: Je suis heureuse de constater que vous vous êtes penchés sur la question de toutes les personnes handicapées et des enfants handicapés. Je trouve qu'actuellement, au Québec, on est en train de constater un net recul quant à l'intégration de la personne handicapée. Et je pense que, si on démontre déjà une volonté quant à l'intégration, il faudrait bien commencer par le début, c'est-à-dire dans les premières années de vie de la personne. C'est la seule façon d'arriver à changer des habitudes et des attitudes vis-à-vis de la personne handicapée; son intégration se ferait d'une façon beaucoup plus harmonieuse, à mon avis, et les préjugés tomberaient. C'est pourquoi je dis qu'il est important, actuellement, que dans les garderies on fasse un effort substantiel pour favoriser leur intégration, et non pas comme on a fait à l'intérieur des commissions scolaires où, finalement, l'accès aux édifices est très difficile, où l'intégration dans les classes est très difficile parce que le personnel n'est pas préparé. Et c'est ce qu'on a constaté régulièrement. Généralement, le personnel, les enseignants ont toujours très peur. C'est un fardeau, c'est une tâche additionnelle parce qu'on ne respecte pas les ratios.

Je pense que ce qui est important, ce que vous venez de souligner - et je reprends votre mémoire - c'est que la qualité de vie à offrir à ces enfants a ses exigences. Je pense que c'est un petit peu dans ce sens-là que vous avez fait valoir vos points de vue, si j'ai bien compris.

Vous avez dit aussi qu'il y a déjà de l'expertise qui existe actuellement, ne serait-ce, d'une part, chez les enseignants dans les écoles et, d'autre part, dans les services sociaux. Comment verriez-vous cette collaboration-là? Qui pourrait être le maître d'oeuvre de cette collaboration ou de cet échange d'expertise qui pourrait favoriser justement cette qualité à offrir à nos enfants en milieu de garderie?

Le Président (M. Leclerc): M. Jean-Claude Boisvert.

M. Boisvert: Je crois que ce que les membres du consel voulaient vous dire sur cette question d'expertise rejoint, en particulier, l'élément d'information qui a été apporté tantôt en pariant des 121 garderies qui offrent des services pour les enfants. La tournée qu'on a faite l'an passé nous a montré qu'l y avait en

milieu scolaire des études, qu'il y avait des instruments de développés, mais que les gens les connaissaient plus ou moins. Il y aurait donc déjà dans le milieu scolaire, au niveau primaire, des éléments qui pourraient servir, si on était capable de les résumer et de les rendre accessibles aux gens des garderies. D'autre part, peut-être qu'un bian de ce qui se fait comme intégration dans les garderies qui offrent ce service serait intéressant. Une étude ponctuelle pourrait permettre, au bout d'un an à 18 mois, de fournir de l'instrumentation type à des garderies qui voudraient offrir de tels services.

Quant à la collaboration avec les autres milieux, c'est évident que les CLSC sont les premiers à qui on peut penser. Qu'est-ce que les CLSC peuvent offrir à une garderie en termes d'appui? Ils le font déjà par le biais du personnel en santé maternelle et infantile ou à d'autres niveaux: programmes de santé, dépistage, etc. On sait aussi que les ressources des CLSC sont limitées, mais ils peuvent fournir une certaine aide. Mais on a l'intuition que le milieu de l'éducation, au niveau primaire, dans certaines commissions scolaires, a déjà développé des 'kits*, des façons. On a rencontré des gens qui nous ont dit qu'une Intégration avec succès provient du fait que le directeur d'école était persuadé que ça devait marcher, que les parents des autres enfants avaient été prévenus à l'avance et que l'enseignant ou l'enseignante avait accepté volontairement, etc. Pourquoi ne pas former des équipes ou une équipe volante pour essayer d'en faire la démonstration dans les garderies? Comment pourrait-on tirer cette conclusion du milieu scolaire et faire un transfert, entre guillemets, aux services de garde? Avec les 121 essais qui se font, je ne sais trop comment l'imaginer, mais je crois qu'l y a des leçons à tirer de ce qui s'est déjà fait.

Le Président (M. Leclerc): M. Boisvert, compte tenu que le temps de l'Opposition est écoulé, je vais demander à la députée de Maison-neuve de conclure.

Mme Harel: Je veux simplement vous remercier et vous signaler que nous avions encore de très nombreuses questions à vous poser. Je sais que ma collègue, la députée de Chicoutimi, qui a été longtemps porte-parole en matière d'éducation, aurait souhaité poursuivre cet échange de vues avec vous. Je crois que c'est important de nous rappeler, comme vous l'avez fait au début de nos travaux, que nous avons surtout à penser en fonction du bien-être de la petite enfance au Québec. Il m'apparaît, à ce stade-ci, que l'énoncé de politique vise tout à fait autre chose et que nous ne sommes pas devant une politique de la petite enfance, bien au contraire. M est certainement légitime et souhaitable que nous ayons des services adéquats pour, comme vous le dites, remplacer l'un ou l'autre des parents ou les deux, mais I faut aussi des services lorsque les parents décident qui serait plus stimulant pour l'enfant. Indépendamment de leur propre choix de vie ou de profession, de se retrouver à la garderie, et c'est ce qu'on n'a pas encore. Je vous remercie.

Le Président (M. Leclerc): Mme la ministre, en conclusion.

Mme Gagnon-Tremblay: On nous reproche, dans notre énoncé de politique, de parler souvent des parents sur le marché du travail. Je pense, entre autres, compte tenu des services limités qui existent actuellement, que, lorsqu'on parle d'enfants handicapés, c'est sûr qu'on parle d'enfants handicapés dont les parents sont, en premier lieu, sur le marché du traval. Cela n'exclut pas, par contre, tout autre enfant qui pourrait nous être référé et je pense qu'on doit avoir une ouverture en ce qui concerne les enfants qui pourraient nous être référés, soit des enfants handicapés ou des enfants à problème. À ce chapitre, il y a une volonté du gouvernement de prendre ces enfants en charge.

On parle de dépannage pour les autres enfants, ces enfants dont les parents ne sont pas sur le marché du travail; on parle de dépannage, de besoins spécifiques. Nous en sommes fort conscients. Par contre, nous n'avons pas trouvé de solution magique. On se rend compte que très peu de personnes veulent garder ces enfants, non seulement ceux à problèmes ou ceux qui ont des troubles quelconques, mais tout simplement les enfants à la garde de fin de semaine ou à la garde du soir. Nous avons quand même des difficultés actuellement et c'est pourquoi nous avons prévu certaines sommes d'argent avec la caisse d'aide, dans le but d'explorer ou d'expérimenter certains services. On espère que les Intervenants de la commission parlementaire pourront nous éclairer à ce sujet parce qu'on ne possède pas de véritable solution.

Je voudrais aussi, par contre, rendre à César ce qui lui appartient. Vous savez que l'Office des services de garde à l'enfance a déjà une politique pour les enfants handicapés. Je voyais ici justement qu'on disait que la réussite de l'intégration sociale devient alors la responsabilité de toutes les intervenantes et de tous les Intervenants concernés. La principale condition, cependant, demeure l'évolution des idées et des attitudes envers les personnes handicapées. Je pense que c'est un message qu'on devrait véhiculer de plus en plus, mais qui l'est déjà par l'Office des services de garde à l'enfance.

Je vous remercie pour votre exposé.

Le Président (M. Leclerc): Merci, Mme la ministre. Mme Bertrand-Poirier, Mme DeGrandmont-Fortier et M. Boisvert, Je voudrais vous remercier, au nom de la commission, de vous être déplacés pour vous faire entendre.

Je voudrais que l'on suspende une minute, le temps de permettre aux représentantes du

Conseil du statut de la femme de s'installer à la table.

(Suspension de la séance à 11 h 49)

(Reprise à 11 h 50)

Le Président (M. Leclerc): À l'ordre, si vous plaît!

Je souhaite ta bienvenue au Conseil du statut de la femme et je demanderais à Mme Lavigne, la présidente, de nous présenter les gens qui l'accompagnent aux fins du •Journal des débats.

Conseil du statut de la femme

Mme Lavigne (Marie): M'accompagnent aujourd'hui Mme Micheline Boivin, directrice de la recherche au Conseil du statut de la femme, Mme Chantale Brouillet, agente de recherche au conseil, Mme Francine Lepage, agente de recherche au conseil, et Mme Jocelyne Olivier, secrétaire générale du conseil.

Le Président (M. Leclerc): Mme Lavigne, vous savez comment nous procédons. Vous avez 20 minutes pour faire part aux membres de la commission du contenu de votre mémoire et, ensuite, chaque formation politique aura 20 minutes pour vous interroger. La parole est à vous.

Mme Lavigne: Je vous remercie. Mme la ministre, mesdames et messieurs, membres de la commission parlementaire, et Mme la présidente de l'Office des services de garde à l'enfance, près d'un siècle après l'implantation des premières garderies réservées aux familles les plus démunies, le gouvernement du Québec présente l'énoncé de politique sur les services de garde à l'enfance comme étant le volet majeur de sa politique familiale et faisant partie intégrante de ses orientations en matière de condition féminine. Cent ans après la mise sur pied des premières garderies, la nécessité de services de garde n'est évidemment plus à démontrer. Au Québec, la majorité des femmes, notamment des mères de jeunes enfants, font partie de la population active. Ainsi, l'énoncé de politique s'avère-t-il l'instrument privilégié pour faire le bilan de la situation et proposer des pistes d'action.

L'énoncé de politique présente plusieurs mesures intéressantes. Ainsi, la planification régionale quant au développement des services de garde constitue un élément prometteur pour assurer une réponse adaptée aux besoins des parents. L'intégration des jardins d'enfants et des haltes-garderies au réseau des services reconnus, de môme que l'expérimentation de projets spéciaux, permettront de diversifier davantage les services offerts aux parents ainsi qu'aux enfants. Mentionnons également l'octroi de plus de 500 000 000 $ au cours des trois prochaines années, qui témoigne de la volonté du gouvernement de poursuivre le développement et la consolidation des services de garde. L'aide financière à la formation, au perfectionnement, au ressourcement du personnel de garde constitue une reconnaissance de principe fort Intéressante.

Enfin, plusieurs mesures concernent le soutien aux parents et aux services de garde. Soulignons, notamment, l'élaboration et la diffusion d'instruments visant à soutenir la gestion et permettant d'évaluer la qualité des services; l'intensification de la collaboration avec le réseau de ta santé et des services sociaux en vue d'accroître la promotion de la santé et la prévention dans les services de garde; la mise sur pied de cours de formation dans les domaines de la petite enfance et de la gestion; la production de documents d'information à l'intention des parents ou des divers services de garde. L'ensemble de ces mesures nous apparaît fort pertinent pour assurer des services de garde de qualité.

Les membres du Conseil du statut de la femme ont analysé l'énoncé de politique dans le mémoire que vous avez en main et transmettent à la commission parlementaire des recommandations afin d'améliorer la politique des services de garde. Sans reprendre chacune de ces recommandations qui sont contenues dans notre mémoire, je vais vous faire part de certaines d'entre elles.

En premier lieu, la planification régionale. La planification régionale, en concertation avec les partenaires, constitue un élément novateur de cette politique. Non seulement permettra-t-elle de connaître de façon plus précise les besoins des parents et les priorités de la communauté dans un territoire donné, mais elle permettra aussi, selon la politique, de corriger progressivement les disparités régionales en termes de services. En préconisant une planification régionale pour l'identification du développement des services, l'office de garde s'inscrit d'emblée dans le large mouvement de concertation avec les partenaires qui caractérise désormais la gestion gouvernementale.

L'énoncé de politique est cependant peu explicite sur les modalités de cette planification régionale. S'iI est important que les municipalités soient impliquées dans le processus, I nous semble aussi fondamental que des partenaires, tels les regroupements et associations de services de garde, les parents, les commissions scolaires, les entreprises privées, y soient associés. Nous pensons aussi que les CRSSS - les consols régionaux des services sociaux et de santé - qui ont assumé plusieurs mandats de planification, pourraient assumer la coordination des études de besoins dans leurs régions respectives.

Par ailleurs, on est étonné de voir que, dans l'énoncé de politique, les services en milieu scolaire ne semblent pas soumis à la planification régionale. Or, près de la moitié des 60 830 places

prévues au plan quinquennal sont pour la garde scolaire. Nous croyons qu'une véritable planification régionale devrait intégrer l'ensemble des services. Donc, afin de rendre effective la planification, d'assurer un développement harmonieux des divers services les uns par rapport aux autres, d'éviter la concurrence Inutile entre les services, de favoriser la concertation entre les instances concernées et une réponse adéquate aux besoins des parents, le conseil recommande que toutes les catégories de services de garde soient soumises à la planification régionale. De plus, le conseil recommande que la répartition des nouvelles places entre les différents modes de services de garde tienne compte des priorités définies dans les communautés.

En second lieu, la question des garderies à but lucratif est fort préoccupante. Le bilan dressé dans l'énoncé de politique montre que, depuis quelques années, le nombre de places en garderie à but lucratif s'est accru à un point tel qu'actuellement un enfant sur quatre est gardé dans un service à but lucratif non géré par les parents. Ces garderies forment maintenant près de 29 % du réseau québécois. Leur taux de croissance était de 20 %, comparativement à 4,4 % pour les garderies sans but lucratif. Ceci s'explique. Comme l'a souligné ce matin la ministre, l'office de garde ne dispose pas des moyens légaux pour soumettre le développement de ces garderies aux mêmes critères que ceux exigés pour les garderies sans but lucratif.

Selon nous, un tel développement menace un principe de base de la politique québécoise des garderies, c'est-à-dire celui de la gestion par les parents. Il est donc important que l'office possède ces moyens légaux. À cet égard, il sera aussi important que l'office élabore un cadre global de planification régionale dont les paramètres permettront l'articulation des besoins des parents au principe et à la philosophie de base du réseau québécois des garderies.

Par conséquent, nous recommandons qu'un moratoire soit imposé quant au développement des garderies à but lucratif et ce, tant que l'office ne dispose pas des moyens légaux pour soumettre ces garderies aux impératifs de la planification régionale; en second lieu, que, lors d'une levée éventuelle de ce moratoire, un contingentement soit établi afin de limiter le développement des garderies à but lucratif et d'accorder ainsi une nette préférence au développement de garderies gérées par les parents, tel que préconisé dans l'énoncé de politique.

En troisième lieu, la qualité des services. Plusieurs facteurs contribuent à assurer la qualité des services de garde. Au terme du plan quinquennal, iI devrait y avoir 180 000 enfants fréquentant ces services. Il est donc essentiel d'assurer à ces Jeunes enfants qui fréquentent des services de garde pour des périodes pouvant s'étaler Jusqu'à 50 heures par semaine un environnement favorable à leur développement et à leur épanouissement. Actuellement, seuls les services de garde en garderie sont soumis à un règlement, lequel complète les obligations inscrites dans la loi. Aussi, l'office devrait-il utiliser son pouvoir de réglementation face aux autres catégories de garde, c'est-à-dire la garde en milieu famlial, en milieu scolaire, en jardin d'enfants et en halte-garderie, afin de compléter les normes édictées. Un règlement adapté à chacune de ces catégories assurerait un minimum de qualité. Ainsi, outillés d'une réglementation, les parents seraient mieux équipés pour contrôler, de concert avec l'office, la qualité des services offerts aux enfants.

Par ailleurs, l'établissement de normes minimales relatives à la formation du personnel, au ratio, à l'hygiène, ne garantit pas nécessairement que tous les services les respecteront. C'est pourquoi nous soulignons la nécessité d'un contrôle adéquat et ce, particulièrement pour les services non gérés par les parents.

Nous demandons que l'office utilise son pouvoir de réglementer et qu'ensuite le contrôle des services de garde, lorsque les autres modes seront réglementés, soit amélioré.

Nous recommandons aussi que la possibilité de partager la responsabilité de l'inspection avec les municipalités soit étudiée et qu'enfin une attention spéciale soit accordée au contrôle des garderies non gérées par les parents.

La question du ratio éducateur-enfants est un critère important de qualité. Ces critères sont déterminants, notamment pour les enfants de trois ans et moins, en raison de l'attention et des soins qu'ils requièrent. Au Québec, le règlement prévoit, pour les enfants de moins de 17 mois, un ratio d'un adulte pour cinq enfants. On constate, selon le Centre national d'information sur les services de garde de Jour, que ces ratios classent le Québec au dernier rang, comparativement aux autres provinces. Pour les enfants âgés de 18 à 35 mois, iI est d'un adulte pour huit enfants. Dans les autres provinces, ce ratio est aussi différent et on se situe dans un ratio passablement bas. Nous recommandons d'abaisser le nombre d'enfants par ratio, à l'instar des autres provinces.

Pour les poupons, c'est-à-dire les enfants âgés de 17 mois et moins, nous suggérons un ratio de trois adultes pour dix poupons, ce qui est identique au ratio de l'Ontario. Nous suggérons également que l'office examine la possibilité de fixer un nombre limite de places-poupons au permis de la garderie afin d'éviter les abus potentiels, compte tenu qu'il y a une subvention aux poupons.

Enfin, pour les enfants âgés de 18 à 30 mois, un ratio de cinq enfants pour un adulte correspondrai au ratio moyen en vigueur dans les autres provinces. Le ratio de 1 pour 20 en garde scolaire nous apparaît trop élevé pour les enfants de 4 et 5 ans. Un ratio de 1 pour 15 nous semblerait plus approprié et serait cohérent avec ce qui existe déjà en garderie pour les enfants qui fréquentent la maternelle. Enfin, des

ratios devraient être également établis pour les services de garde en Jardins d'enfants.

Les conditions de travail. Le rôle des personnes responsables des soins et de l'éducation des Jeunes enfants qui fréquentent un service de garde est primordial, tant par rapport au développement de chacun de ces enfants que par rapport au devenir de notre société. La reconnaissance de l'importance de ce rôle devrait se traduire par une amélioration des conditions de travail du personnel de garde. Le personnel de garde, détenteur d'un diplôme en techniques d'éducation en service de garde, a un salaire hebdomadaire inférieur à celui attribué dans la plupart des formations académiques de niveau collégial. Nous reconnaissons et ce, à l'instar de ce qui est écrit dans l'énoncé de politique, et Je cite, que "cette rémunération relativement peu élevée crée une situation qui risque d'affecter le climat général des garderies et la qualité des services. Elle n'est pas non plus sans avoir des répercussions sur la stabilité du personnel.*

Au-delà de ces problèmes engendrés par les bas salaires, tel que mentionné dans l'énoncé de politique, nous assistons à la création d'un ghetto d'emplois, d'ailleurs très majoritairement féminins, et mal rémunérés, alors que, comme société, nous visons à l'équité salariale. Est-iI normal que le salaire hebdomadaire des diplômés en techniques de garde soit de 253 $ par semaine, alors que la moyenne est de 323 $ pour l'ensemble du secteur professionnel? Cette situation nécessite un redressement significatif. Or, le financement proposé dans l'énoncé de politique nous semble insuffisant pour améliorer les conditions salariales et les avantages sociaux du personnel oeuvrant en milieu de garde et pour poursuivre l'atteinte de l'équité salariale.

Dans notre mémoire, nous avons examiné cette question à partir du cas fictif présenté à la page 69 de l'énoncé de politique. Il appert donc que, si une garderie consacrait le surplus de financement qu'elle reçoit exclusivement à l'accroissement des salaires, elle disposerait d'environ 900 $ par année pour majorer le salaire de ses employés. C'est fort peu, compte tenu du rattrapage à effectuer sur le plan salarial. Comme conseil, nous ne disposons pas des données permettant d'identifier les sommes 'actuellement requises, mais iI nous semble que la proposition actuelle ne permettra pas de rétablir la situation salariale des employés en garderie. Ainsi, dans une perspective d'équité salariale, nous recommandons que le gouvernement s'assure que les garderies sans but lucratif soient dotées de moyens financiers suffisants pour leur permettre d'améliorer les conditions salariales et les avantages sociaux de leur personnel.

En ce qui concerne la structure de financement des garderies sans but lucratif, le nouveau mode de subvention proposé présente certains intérêts. Notons en premier lieu que la mise sur pied des garderies sans but lucratif sera facïitée par l'obtention d'une subvention égale à 75 % de leur coût d'implantation. Si l'on compare cette situation à la situation actuelle, cela nous semble une amélioration. Quant à la subvention de fonctionnement des garderies gérées par les parents, on sait que la nouvelle formule est basée sur les tarifs perçus par la garderie. Cette formule comporte un certain dynamisme, notamment parce qu'elle incite à la maximisation des taux d'occupation, à une meilleure utilisation des services et qu'elle permet aussi de suivre les tarifs.

Cependant, à certains égards, la formule de subvention au fonctionnement comporte une certaine rigidité. Ainsi, elle nous apparaît manquer de souplesse pour les garderies qui présentent un faible taux d'occupation en raison d'une ouverture récente. Comme toute entreprise, les garderies doivent pouvoir disposer des ressources leur permettant de fonctionner pendant un certain temps avant d'avoir fait le plein de leur clientèle. De plus, le mode de financement prévu ne tient pas spécifiquement compte des baisses de fréquentation causées par la maladie chez les enfants ou par les vacances des parents ou encore par des baisses de clientèle qui résulteraient d'une mauvaise conjoncture économique à la suite de grèves, de fermetures d'entreprises ou d'une hausse du chômage. Par ailleurs, avec l'incitation qui est faite aux garderies de combler au maximum leurs places, n'y a-t-il pas risque que les services de garde prennent d'abord en considération la clientèle inscrite à temps plein et relèguent au second rang les inscriptions à temps partiel? Or, nous savons que 23 % des femmes en emploi au Québec travaillent à temps partiel. Il Importe donc que le mécanisme de financement n'incite pas à une discrimination à leur endroit.

La nouvelle formule de subvention fondée essentiellement sur les revenus perçus de la garderie, donc sur les Jours de fréquentation, laisse aux garderies une mince marge de manoeuvre. Pour tenir compte de ces éventualités, les garderies pourraient se voir obligées de hausser leurs tarifs. Donc, sur la question du financement, le conseil recommande que, durant les deux premières années d'opération, les garderies sans but lucratif, qui ont un taux d'occupation faible, puissent bénéficier d'un soutien spécial, qu'il y ait des mécanismes d'ajustement visant à faire face aux diminutions de la fréquentation et que des modalités soient prévues pour le temps partiel.

Enfin, dans la perspective de ces recommandations, ne pourrait-on pas étudier les mérites d'une formule de subvention mixte qui, plutôt que d'être basée essentiellement sur les revenus de tarif, comme proposé, intégrerait un montant de base Indexé annuellement? Donc, le conseil recommande que, pour les garderies sans but lucratif, on étudie la pertinence d'une formule mixte de subvention au fonctionnement qui serait d'abord composée d'un montant de base indexé annuellement et, ensuite, d'un

montant variant en fonction des revenus réalisés.

En ce qui concerne les subventions aux parents, diverses mesures s'adressent à ces derniers. Nous discuterons ici de deux mesures particulières, soit le programme d'exonération financière et la déduction fiscale pour frais de garde. Le programme d'exonération financière s'adresse aux parents ayant des revenus en dessous de la moyenne quand leurs enfants fréquentent un mode de garde régi par l'office. Cette aide se traduit pour les parents par une réduction de tarif. Bien que l'aide annoncée dans la politique soit plus généreuse, la nouvelle formule d'exonération financière nous montre que l'aide octroyée aux parents est quand même limitée pour les familles se situant au seuil des faibles revenus. Ainsi, une famille biparentale, dont le revenu se situe au seul de la pauvreté et qui a deux enfants fréquentant la garderie au tarif de 16 $ par jour, a encore un solde à payer de 77,40 $, et ce, malgré l'exonération financière reçue. Ces coûts sont prohibitifs. L'exonération financière proposée n'atteint alors que 52 % du tarif pour cette famille biparentale.

Afin que les services de garde soient financièrement accessibles aux parents, qu'ils soient ou non en emploi, ainsi qu'à tous les enfants, nous recommandons que l'échelle quotidienne d'exonération à la garde soit relevée de façon à couvrir, au départ, une plus grande portion du tarif dans les modes de garde régis et que le montant de base prévu à la formule soit indexé annuellement.

Par ailleurs, pour les familles à revenu moyen, les déductions fiscales offrent un remboursement partiel des frais de garde encourus. D'ailleurs, à cet égard, iI y a eu récemment une augmentation des déductions. Mais, prise isolément, la déduction des frais de garde apporte au parent contribuable qui en fait la demande un avantage qui croît avec le revenu, tant que s'accroissent les taux marginaux d'imposition. Ce résultat s'explique par le fait qu'au moment de la réforme fiscale les gouvernements québécois et fédéral n'ont pas converti la déduction de frais de garde en un crédit d'impôt représentant la même valeur pour tous pour une même dépense, comme 1s l'ont fait dans le cas d'autres exemptions ou déductions.

Dans le but de corriger le caractère inéquitable de la déduction fiscale des frais de garde accordée aux parents en emploi et aux études et pour que cette disposition puisse dorénavant profiter à tous ceux qui, parmi eux, ne touchent pas suffisamment de revenus pour être imposables, nous recommandons que le gouvernement du Québec convertisse ces déductions fiscales de frais de garde en un crédit d'impôt remboursable à la garde, ce crédit représentant un pourcentage de la dépense encourue jusqu'à un maximum admissible, et que des représentations soient faites auprès du gouvernement fédérai afin qu'ï fasse de même avec sa déduction de frais de garde.

En conclusion, l'universalité des services de garde, leur accessibiité géographique et financière, la diversité des services offerts, la liberté de choix des parents, leur participation à la gestion, la qualité des services de garde et l'amélioration des conditions de traval sont les principes qui nous ont guidées dans l'analyse de cet énoncé de politique. Nous sommes conscientes que l'application intégrale de ces principes constitue un projet à long terme pour la société québécoise.

Le réseau des services de garde s'est développé grâce au dynamisme, à l'implication et aux efforts de nombreux parents, travailleuses et travailleurs, et organismes de la communauté. Malgré les efforts consentis par ces derniers, combinés aux efforts du gouvernement, Il reste encore beaucoup à faire pour doter le Québec d'un réseau complet de services de garde de qualité.

Des choix s'imposent dans le contexte où la politique sur les services de garde constitue un des volets majeurs de la politique familiale du gouvernement et qu'elle fait partie intégrante de ses orientations en matière de condition féminine. Nous souhaiterions voir le gouvernement investir davantage dans les services de garde et ce, en vue d'établir un meilleur équilibre entre la contribution des parents et celle de l'État. Je vous remercie.

Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie, Mme la présidente. Mme la ministre.

Mme Gagnon-Tremblay: Merci, Mme la présidente, pour votre énoncé. J'aimerais commencer, parce que vous avez quand même soulevé plusieurs interrogations, par la planification régionale. Vous vous posez des questions sur la planification régionale, sur ce qui est inclus. En somme, vous regrettez de constater que le milieu scolaire ne fait pas partie, par exemple, de la planification régionale. Je pense que je dois vous dire que ce n'est pas parce qu'on veut l'exclure, mais on sait que les besoins sont tellement nombreux que, même une fois que cette planification régionale sera terminée, il y aura encore des besoins. Donc, dans ce cas-ci, nous croyons qu'au cours des prochaines années nous pourrons quand même planifier le développement en milieu scolaire, mais ça ne veut pas dire, lorsque nous irons en région consulter les différents intervenants, que les commissions scolaires, le milieu scolaire et les regroupements seront mis de côté pour autant. Je pense que nous devons absolument travailler avec ces intervenants, parce qu'il n'y a pas seulement la question du milieu scolaire, mais il y a tout ce qui y est connexe. Je pense à la garde estivale, etc. Alors, nous travaillerons aussi pour trouver des solutions au milieu scolaire.

Quant à la planification régionale, je dois vous dire qu'on a entrepris des efforts depuis le printemps 1988, depuis le printemps dernier, afin

de prévoir les étapes de transition entre la procédure actuelle et une planification régionale systématique. Les éléments de cette dernière ne sont pas encore tous définis; je pense qu'il s'agira de clarifier au fur et à mesure de la mise en place. Par contre, je peux vous donner une brève description des actions qui sont déjà réalisées. On a déjà mis à jour le document analysant l'évolution des services de garde. On a constitué un Inventaire Informatisé des projets actuellement en attente, selon le stade où ils sont rendus. Il y a un bilan de la formule de l'émergence de la demande qui a été préparé et la détermination des régions à considérer dans une perspective de planification régionale. Je pense, par exemple, aux MRC à l'intérieur de Montréal et de Québec et aux territoires des CLSC pour ces deux communautés urbaines. Il y a encore beaucoup de travail à faire, mais compte tenu justement de la commission parlementaire, à la lumière des travaux de la commission parlementaire, on sera plus en mesure de pouvoir poursuivre les éléments de cette planification, selon ce que le gouvernement retiendra comme orientation définitive. Alors, lors de la commission parlementaire, si des propositions nous sont faites, nous les prendrons en considération.

Vous avez parlé également des garderies à but lucratif. Vous parlez d'un moratoire. Si j'ai bien compris, vous suggérez que ce moratoire soit imposé tant et aussi longtemps que la Loi sur les services de garde à l'enfance ne sera pas modifiée. Vous souhaitez aussi que ces garderies à but lucratif soient soumises au même développement et à la même purification régionale. Je dois vous dire que c'est déjà prévu. Jusqu'à maintenant, il est vrai que les garderies à but lucratif se sont développées à un rythme supérieur à celui des garderies sans but lucratif, compte tenu du nombre et compte tenu aussi du fait que nous n'avions aucun moyen de les contingenter. Par contre, dans le cadre de la nouvelle politique, il est bien de l'intention du gouvernement de soumettre les garderies à but lucratif au même plan de développement parce que, alors qu'on fait une planification, ce serait quand même une aberration de continuer de ne pas intégrer toutes les sortes de garderies ou les formes de services dans cette planification. L'un ne peut pas aller sans l'autre. (12 h 15)

Vous parlez de la qualité des normes concernant les haltes-garderies et les jardins d'enfants. Est-ce que vous vous êtes penchées sur la question, à savoir jusqu'où on pourrait aller quant à la normalisation de règles quelconques dans les haltes-garderies et dans les jardins d'enfants? Est-ce que c'est plus important de "normer" dans les jardins d'enfants que dans les haltes, compte tenu des nombreuses demandes qui nous sont faites par les municipalités, les nombreuses mises en demeure, devrais-je dire, par les municipalités ou les municipalités régio- nales de comté à l'effet de ne pas trop "normer*, de ne pas avoir une réglementation qui freinerait, par exemple, les haltes-garderies alors qu'actuellement - je parle de haltes-garderies parce que c'est un peu du dépannage, ce n'est pas une garde d'enfants à longue échéance ou de toute une journée - on nous met finalement un peu en demeure de ne pas "normer", autant que possible, ce genre de garderies. Quelle est votre opinion sur ça?

Vous pourriez peut-être aussi parler des jardins d'enfants, parce que le jardin, c'est plus spécifique. Là, il s'agit vraiment d'une garde qui se fait à plus long terme que dans une halte-garderie qu'on peut retrouver, par exemple, dans des centres commerciaux, qu'on peut retrouver un peu partout. J'aimerais avoir votre opinion sur les normes qu'on pourrait exiger dans les haltes et les jardins.

Mme Brouillet (Chantale): Chantale Brouillet. Effectivement, en ce qui concerne les haltes et les jardins, ça répond à deux types de besoins et de clientèles différents. Je crois que les normes pourraient être différentes aussi. En ce qui concerne les haltes, je crois qu'il est essentiel d'imposer des normes pour assurer la santé et la sécurité des enfants. Je donne comme exemple les fiches d'assiduité. C'est très important de s'assurer qu'on sache qui sont dans les haltes-garderies, quel est le type de fréquentation. Quant à la sécurité, c'est la même chose.

D'ailleurs, par rapport aux jardins d'enfants, je crois que les normes peuvent être différentes. En halte-garderie, il n'est pas nécessaire d'exiger le même type de formation puisqu'on sait que ça répond réellement à des besoins de courte durée, de façon très ponctuelle ou occasionnelle, si on s'en tient aux définitions inscrites dans la loi, alors qu'en jardin d'enfants ça répond à des besoins différents. Il s'agit effectivement de la garde de courte durée mais qui semble plus régulière. On pourrait exiger davantage quant à la formation du personnel en assurant toujours des normes de base quant à la sécurité, l'hygiène et la salubrité.

Mme Gagnon-Tremblay: Sans vouloir refiler la facture aux municipalités, croyez-vous que les municipalités sont plus en mesure que l'office, étant donné qu'elles sont peut-être plus près de cette clientèle des haltes, de s'assurer d'une qualité dans les haltes ou les jardins d'enfants? Est-ce l'office qui devrait surveiller cette qualité ou si la municipalité devrait avoir une responsabilité ou continuer de s'occuper de cette portion?

Mme Lavigne: II nous semble important, compte tenu du mandat conféré à l'office en vertu de la loi, que l'office conserve les mandats quant aux normes, quant aux règlements et quant à la garantie de la qualité des services de garde et ce, d'une façon globale. Néanmoins, il est fort

possible de conclure, par l'intermédiaire des municipalités, des ententes de services qui se développeront lorsque les municipalités seront prêtes à le faire. Les ententes peuvent porter... Le travail de vérification, de contrôle, peut se faire à différents paliers; ll y a une série de normes concernant l'hygiène, l'espace, la salubrité, et les municipalités sont généralement déjà dotées d'infrastructures et de programmes effectuant ces types de contrôle dans un ensemble d'établissements sur leur territoire. Il est donc possible d'avoir une approche mixte. Que des contrats, des vérifications et des contrôles assumés régulièrement par des municipalités sur un ensemble d'éléments soient davantage liés à des conditions matérielles et que l'office, par ailleurs, soit néanmoins en mesure d'effectuer régulièrement des vérifications qui, à ce moment-là, se borneraient plus à l'aspect qualité, application des programmes, formation du personnel et véritablement ce qui s'inscrit dans le volet éducation.

Mme Gagnon-Tremblay: Vous recommandez aussi d'abaisser les ratios, étant donné que notre ratio est peut-être moyen dans certains cas, et dans d'autres, supérieur à celui d'autres provinces. Je pense que vous avez raison. On admet que cela aurait quand même pu faire l'objet d'une décision ou d'un choix, mais, comme je le mentionnais dans ma déclaration d'ouverture, c'est un choix que le gouvernement n'a pas retenu actuellement compte tenu des nombreux besoins.

Dans un deuxième temps, il sera toujours possible d'abaisser les ratios. On sait fort bien, d'ailleurs, qu'abaisser le ratio de 1,4 ou de 1,5 coûte quand même énormément d'argent. C'est en termes de millions; c'est du récurrent et, en plus de ça, cela signifie qu'on est obligés, dans le cas de certaines garderies, de faire des aménagements de locaux parce que, si on modifie les ratios, on devra également modifier, dans plusieurs garderies, l'aménagement des locaux. Depuis fort longtemps, depuis que je suis là, j'ai surtout entendu dire qu'on a "norme", réglementé et imposé une quantité de mesures aux services de garde, depuis quelques années. On nous avait aussi demandé de... On voulait bien digérer toutes ces mesures avant d'en imposer de nouvelles. Finalement, pour toutes ces considérations, le gouvernement, dans une premier temps, n'a pas choisi, dans le cadre de l'énoncé de politique, d'abaisser les ratios, mais plutôt de consolider ce qui existe, actuellement, de développer et de faire une meilleure planification. Dans un deuxième temps, lorsque le tout sera stabilisé, il sera toujours temps, je pense, d'abaisser les ratios.

Par contre, vous pariez des poupons. Concernant la subvention qu'on accorde aux poupons, entre autres, en milieu familial, laquelle n'était pas accordée auparavant, de même que celle que nous accordons aussi pour les mêmes poupons dans les garderies à but lucratif, vous vous inquiétez un peu du nombre de poupons qui pourraient être gardés et vous vous demandez si le gouvernement a pensé, par exemple, à définir le nombre de poupons qui pourraient être acceptés dans l'un ou l'autre des services. Avez-vous une idée, pouvez-vous me suggérer ce que vous voyez, par exemple, dans un milieu familial, quant à une gardienne à domicile. quel serait, par exemple, l'objectif idéal? Et dans le cas des garderies à but lucratif, quel serait également le nombre idéal à suggérer pour la garde des poupons?

Mme Lavigne: La question du nombre limite est différente de celle du ratio, du nombre de places de poupons. Si on fait une recommandation dans ce sens, c'est véritablement pour éviter qu'on se retrouve avec une spécialisation de garderie, d'autant plus que la situation est difficile à cause du ratio qui est assez élevé en ce moment. Quant au nombre limite de places, I est évident qu'il y a un certain nombre de garderies qui sont équipées, qui se concentrent davantage dans le soin des poupons. C'est évidemment dans la perspective de conserver à la fois les droits acquis, mais pour les garderies qui se développeraient il nous semble que, compte tenu des ratios, compte tenu de la difficulté d'équilibre concernant les ratios actuels, de dix à douze places-poupons par garderie subventionnée, cela permettrait de maintenir un équilibre et de redresser les difficultés qu'on a actuellement avec les ratios, d'autant plus que selon la politique, comme vous le mentionnez, on n'est pas prêt à modifier les ratios pour le moment.

Cela prendrait, par ailleurs, un programme spécifique d'inspection dans la mesure où 1 s'agit des clientèles évidemment les plus vulnérables qui n'ont surtout pas les moyens de s'exprimer. Cette considération, cette réflexion que nous avons faite au conseil s'inscrivait néanmoins dans une perspective plus globale. Il est important, certes, de développer des nombres de places-poupons, mais il est encore aussi fort important de regarder à nouveau toute la question des congés de maternité et des congés parentaux. Il s'agit de deux mesures Indissociables et, actuellement, le Québec a de la difficulté à se targuer d'être à l'avant-garde en ce qui a trait aux congés de maternité.

Ce sont deux mesures complémentaires et nous croyons qu'il est important de les mener de façon simultanée.

Mme Gagnon-Tremblay: Vous avez tout à fait raison. Je pense que ce ne sont pas les services de garde qui peuvent répondre à tous les besoins des parents, et les congés de maternité sont tout à fait importants également dans le cas d'une politique familiale. Lorsque vous parlez de dix à douze places-poupons par garderie, est-ce qu'à ce moment vous Incluez aussi les garderies sans but lucratif?

Mme Lavigne: Oui. effectivement.

Mme Gagnon-Tremblay: Vous parlez également de la formule de financement et vous vous Inquiétez un peu des garderies qui viendraient d'ouvrir, de l'ouverture récente et aussi de la baisse de fréquentation. Je dois vous dire qu'actuellement l'Office des services de garde à l'enfance prend déjà en considération, concernant le taux d'occupation dans sa subvention de fonctionnement, l'ouverture récente, par exemple, d'une garderie. Aussi, c'est tout à fait normal, parce qu'on sait que lorsqu'une garderie ouvre, avant d'avoir une clientèle stable, on peut quand même prendre une période de six mois et même jusqu'à un an avant d'avoir un taux d'occupation raisonnable, mais déjà l'office prévoit dans ses formules ce genre de besoin et verse une subvention en conséquence.

Lorsque vous nous parlez d'une formule mixte de financement, j'imagine que c'est un peu une formule comme on en suggère pour les agences en milieu familial, c'est-à-dire 4,75 $ comme montant fixe, plus, par exemple, 40 % du tarif. Lorsque vous parlez de cette formule fixe, croyez-vous que cette formule fixe évitera les augmentations de tarif, entre autres? Croyez-vous aussi qu'elle limitera le potentiel? J'aimerais bien savoir si vous croyez que cette formule mixte pourra éviter l'augmentation de tarif dans les garderies.

Mme Lavigne: La formule mixte proposée serait composée d'un volet fixe et d'un volet variable. Le volet fixe permet à tout le moins à une garderie de mieux planifier, d'être en mesure d'assumer des coûts qui reviennent de toute façon, quel que soit le taux de fréquentation de la garderie, donc, d'exercer davantage de contrôle sur le lien existant par rapport à son marché, à la capacité de payer des parents et d'ajuster sa structure de prix à la clientèle qu'elle dessert parce qu'elle sait qu'à la base elle a un montant garanti. Cette formule-là permettrait, en tout cas, de conserver un dynamisme et des éléments importants dans la structure variable liée au tarif. Il y a des éléments intéressants, notamment en ce qui concerne la possibilité d'occuper le maximum de places dans le moment. Cet élément dynamique peut rester et I y a moyen de l'avoir. Par ailleurs, un volet fixe permettrait aux garderies de beaucoup mieux planifier et d'identifier un an à l'avance les tarifs pour leur clientèle, parce qu'elles le sauraient assez clairement et seraient assurées d'un certain revenu. C'est véritablement pour pallier à des inconvénients de fluctuations incontrôlables.

Mme Gagnon-Tremblay: Si je comprends bien, avec un certain pourcentage, cette formule qui est une formule dynamique permet en même temps de maximiser le taux d'occupation. Vous n'êtes pas en désaccord pour que, tout en finançant, il y ait aussi une préoccupation de maximiser le plus possible le taux d'occupation.

Mme Lavigne: C'est un principe intéressant puisque l'État paie déjà pour des infrastructures prévues pour 50 enfants, qu'il y a des investissements publics faits à partir des impôts des citoyens pour cette capacité. Il est évident qu'il faut voir à ce que les services déjà mis en place desservent au maximum. Par ailleurs. ll faut absolument avoir une formule de financement qui ne crée pas l'Instabilité dans ces services, qu! leur permette de faire davantage une projection à long terme et d'assumer des coûts fixes, d'assurer aussi des éléments liés à cela... et leur permettre de rétablir les bases financières qui, dans le moment, sont fragiles, sauf que la recommandation dit: C'est une recommandation d'étude de ces possibilités. On sait que les situations sont multiples. Quand on fait de nombreuses simulations à partir de la proposition actuelle, cela s'avère difficile et je pense que cela prend véritablement toute une série de simulations. Notre recommandation vise à vous suggérer d'étudier une formule qui rallierait les deux types d'avantages.

Mme Gagnon-Tremblay: Merci, Mme la présidente.

Le Président (M. Bélanger): Bien. Mme la députée de Maisonneuve. (12 h 30)

Mme Harel: Merci, M. le Président. Je veux d'abord saluer la nouvelle présidente du Conseil du statut de la femme ainsi que les personnes qui l'accompagnent. Vous me permettrez d'insister particulièrement sur le fait suivant: à moins que je ne me trompe je crois que c'est votre première, présentation devant une commission parlementaire. Je dois vous dire que la réputation du conseil, qui en est une de compétence et d'expertise dans l'ensemble des mémoires qu'il a déposés depuis des années devant la commission, ne s'est pas démentie une fois de plus. Votre mémoire est une mine d'or de renseignements. C'est le rôle que vous jouez en préparant des travaux comme ceux-là, c'est extrêmement utile pour la connaissance qu'on peut avoir des enjeux conservés.

La première question qui suit les propos que vous venez d'avoir avec Mme la ministre sur le choix de la formule de financement, puisque le 1er avril approche rapidement et qu'on sait que les programmes Informatiques basés sur le pourcentage du revenu réel, donc, basés sur 45 % des tarifs, doivent être mis en place... La commande est donnée pour qu'ïs soient en vigueur à partir du 1er avril. Compte tenu de la recommandation que vous faites à la ministre, moi, je comprends dans les propos qu'elle a avec vous qu'elle est prête à réexaminer la formule pour éventuellement envisager une formule mixte.

D'ailleurs. j'aimerais qu'elle dise clairement, à un moment donné de nos travaux, s'il y a encore moyen de modifier ce qui est commandé et prévu pour le 1er avril prochain. Ceci dit. si tant est qu'elle ne pouvait pas y arriver pour le 1er avril, qu'est-ce que vous lui recommanderiez? De maintenir la formule actuelle en la majorant jusqu'à ce qu'une formule mixte puisse être retenue ou bien de procéder à l'application de son pourcentage de 45 % des tarifs?

Mme Lavigne: Là, vous me demandez de prendre la place de la présidente de l'Office des services de gardes à l'enfance. Écoutez, je pense qu'l y a différentes approches qui peuvent être prises. L'office travaille sûrement à établir des simulations et des grilles. Chacun sait que le financement d'une année financière et des subventions ne se font jamais dans un seul versement. Il y a des possibilités de maintenir un rythme de croisière sur une demi-année si, à l'office et à la commission parlementaire, on en arrive à reconsidérer le modèle de financement, cela dépendra des résultats. Je pense que différentes possibles sont offertes ou se présentent, compte tenu de l'avancement des programmes informatiques et cela peut se faire dans six mois comme dans un an, tout dépend. Je dois vous dire que. ne gérant pas l'office, je suis un peu mal placée pour voir ce qui... Ce qui est important pour des services de garde, c'est que les gens reçoivent leurs montants à la date habituelle. C'est ce qui est le plus important à respecter. C'est donc dire un souci de service rapide accordé aux clientèles. Le souci qui doit sûrement animer l'office en premier lieu, c'est que le chèque arrive à la date prévue.

Le Président (M. Bélanger): Mme la députée de Maisonneuve, vous permettez un instant? Est-ce que nous avons le consentement de cette commission pour continuer les travaux jusqu'à 12 il 45?

Mme Harel: Certainement.

Le Président (M. Bélanger): II y a consentement. Alors, Mme la députée.

Mme Harel: Alors, que le chèque arrive et qu'l soit du bon montant, c'est l'autre question, évidemment Je ne pense pas que vous ayez à vous sentir mal à l'aise. L'office a décidé de ne pas présenter de mémoire devant la commission. Les informations que nous retrouvons dans votre mémoire, heureusement, nous sont fournies par le Conseil du statut de la femme; l'office doit les détenir certainement, mais nous n'y avons pas directement accès. Je pense, entre autres, à un certain nombre d'informations intéressantes et sur lesquelles je reviens immédiatement, notamment en ce qui concerne la subvention aux poupons et aux enfants handicapés à l'intention des garderies à but lucratif.

Dans votre mémoire, aux pages 29 et 30, vous faites état de ce que l'office connaît bien, d'une réalité selon laquelle la plupart des plaintes adressées à l'office concernent les garderies à but lucratif. Nous retrouvons cela exactement indiqué à la page 29 du mémoire et à la page 30 également, où vous reprenez le chiffre de 73 % des plaintes adressées à l'office qui concernent les garderies à but lucratif quand, dites-vous, celles-ci desservent 24 % des places en garderie. Dans le mémoire que vous nous présentez, à la page 20, vous mettez en garde la ministre de confier des clientèles particulièrement vulnérables; vous nous dites: Les poupons, les enfants handicapés sont des clientèles particulièrement vulnérables. Vous l'enjoignez d'accroître le contrôle exercé envers ces garderies. Vous lui avez parlé d'un ratio, ça ne semble pas avoir été retenu. Vous semble-t-il inquiétant que ces clientèles vulnérables puissent être promues dans des garderies qui, compte tenu des statistiques que vous nous mentionnez, peuvent être sujettes à des plaintes plus nombreuses?

Mme Lavigne: évidemment, à la suite de données comme celles-là, on s'inquiète et on trouve absolument essentiel qu'il y ait des mesures de contrôle, un programme spécifique. On a d'ailleurs une mesure complémentaire là-dessus qui vise véritablement à bonifier le rôle du comité consultatif. L'énoncé de politique parte de modifier le rôle du comité consultatif de parents, mais nous croyons qu'à partir du moment où des subventions sont données à des garderies à but lucratif, c'est là que doit s'exercer fondamentalement le rôle du comité consultatif.

Évidemment, on ne peut pas revenir en arrière. Il existe au-delà de 250 garderies à but lucratif, il y a des enfants et des parents qui y sont. Il y a une proposition, un choix pour régler un problème, d'avoir des poupons et d'accorder des subventions liées à la qualité. À ce moment-là, dans la mesure où ce sont des fonds publics, nous croyons que le principe de base de la politique, qui est la gestion par les parents, doit s'exercer sur le transfert de ces fonds publics. C'est pourquoi on recommande que le rôle du comité consultatif de parents soit modifié de façon que ce soit eux qui, à la fois, endossent la demande de subvention spécifique et signent le rapport d'utilisation de la subvention. Si l'État consent à donner des subventions à ce type de garderie, c'est pour régler un problème de pénurie de places pour les poupons et c'est en fonction de normes de qualité. Comme il s'agit de fonds publics, il est absolument essentiel que les parents reçoivent un mandat de cet ordre et qu'on crée un mécanisme de révision. La position du conseil s'articule véritablement dans ce sens.

Mme Harel: Je vous remercie. Une autre

question dont vous avez à peine traité - je le comprends, avec le peu de temps mis à votre disposition - c'est celle de l'universalité des services de garde. Vous en parlez aux pages 54 et suivantes de votre mémoire, particulièrement à la page 64, où vous énoncez l'affirmation suivante: "L'universalité des services de garde est donc sérieusement compromise. Compte tenu des coûts exorbitants reliés à la garde des enfants, l'emploi des parents constitue de plus en plus le seul motif de garde." Vous aviez d'ailleurs titré, à la page 54 de votre mémoire, "Des parents et des enfants oubliés". Cette analyse vous a amenées à constater "que la fréquentation des modes de garde reconnus, sauf quand la famille en a les moyens, sera réservée aux enfants dont les parents travaillent. " Et suit une analyse extrêmement serrée et certainement très démonstrative selon laquelle les programmes d'exonération couvrent de moins en moins les frais de garde encourus par les parents de famille modeste et qu'il faudra dorénavant deux programmes, soit le programme APPORT et le programme d'exonération, mais qu'encore là le programme APPORT est exclusivement réservé aux parents qui ont des revenus de travail et qui sont à faibles revenus. Vous dites: "Ces modes de garde seront donc peu accessibles aux enfants car l'un des parents ou l'unique responsable de la famille est à la maison."

L'autre volet, c'est que vous nous rappelez avec raison que les services de courte durée qui pourraient pallier au répit, au dépannage comme la halte-garderie ou les jardins d'enfants, dans l'énoncé de politique, ne sont pas subventionnés, Is ne donnent pas droit au programme d'exonération. Donc, c'est comme s'il y avait des enfants dont les parents étaient piégés. À la page 54 suit vraiment une très belle démonstration du rôle que le service de garde peut donner à la socialisation des enfants, l'apport au développement, surtout dans les milieux défavorisés. Vous nous citez des études, etc. La détection précoce - je ne sais pas si vous étiez là quand les Intervenants du Conseil québécois pour l'enfance et la jeunesse sont venus - des problèmes chez les enfants, vous nous en parlez également. Est-ce que ça ne vous inquiète pas, cette orientation de l'énoncé de politique?

Mme Lavigne: Je dois dire que les orientations en tant que telles de l'énoncé de politique, on l'a dit au début, ne nous inquiètent pas, dans la mesure où on est d'accord avec les grands principes et les grandes orientations de base. Ce qui est inquiétant, c'est le niveau de ressources financières et, finalement, la difficulté éprouvée par l'ensemble des programmes, notamment le programme d'exonération financière, à suivre le rythme.

Mme Harel: Des fois, on pense que les modes de financement ne suivent pas les principes affirmés.

Mme Lavigne: On est présentement dans une situation où les coûts de garde augmentent. On arrive à un changement important et il est Important d'avoir un redressement significatif du financement C'est un élément qui doit se faire à un moment ou l'autre dans la société québécoise. On a vécu, comme société, un redressement significatif de l'ensemble du secteur de l'éducation qui, historiquement était assumé gratuitement par des femmes ou des communautés religieuses. On a fait le môme mouvement pour l'ensemble des services sociaux et l'ensemble des services de santé, et on en est arrivé, au moment présent, à un certain équlibre.

Dans la conjoncture actuelle, la vie des femmes a profondément changé, au Québec. Auparavant, les femmes s'occupaient des enfants. Ce n'était pas un enjeu majeur de société lors de la Révolution tranquille, d'étendre le réseau d'éducation ou d'étendre le réseau des services sociaux à la garde des enfants d'âge préscolaire. On est face à un changement structurel. Il est absolument important que, comme société, on s'adapte à ce changement structurel et que ce ne soient ni les mères, ni les enfants, ni les travailleuses en garderie qui aient de la difficulté.

Je sais que c'est un long processus, cela a été extrêmement long. De Laure Gaudreault aux enseignantes d'aujourd'hui il y a eu une bonne cinquantaine d'années et un long cheminement. C'est la même situation dans les services de santé, il y a eu un long cheminement. Mais je pense qu'on s'inscrit fondamentalement dans le même mouvement de fond parce que la vie des femmes a changé, et il est important qu'on considère ce changement de fond. Il y a plus de la moitié des femmes ayant des enfants qui sont sur le marché du travail, et il est important qu'un ajustement s'effectue. C'est une nouvelle réalité sociale dans laquelle on vit. Par ailleurs, je pense...

Mme Harel: Je m'excuse, le temps nous presse beaucoup, on a encore juste quelques minutes. J'aimerais avoir l'opinion du conseil, compte tenu de toutes les analyses qu'on retrouve dans le mémoire, sur une question précise, à savoir: Vous nous dites que le programme d'exonération est insuffisant pour les parents et que la fréquentation - je vous lis - des services de garde reconnus est de plus en plus réservée aux parents qui travaillent ou... sauf lorsque la famille en a les moyens. Considérez-vous que la société et que le gouvernement doivent injecter de l'argent pour assurer un service de garde avec exonération des parents, même lorsque l'un des deux ou les deux ne sont pas au traval, à l'emploi? En d'autres termes, considérez-vous les services de garde comme un développement de l'enfant ou comme un remplacement de garde des parents?

Mme Lavigne: La proposition qu'on fait sur

l'exonération financière est daire à cet égard. Que le parent soit ou ne soft pas à l'emploi, on demande de redresser les seuils et, par ailleurs, le transfert en crédit d'impôt remboursable s'inscrit dans cette perspective. Les parents peuvent avoir de multiples raisons et un service doit tour être accessible. Ce n'est pas essentiellement un complément lié au travail, il s'agit aussi d'une extension d'un service d'éducation, parce qu'on reconnaît, comme société, que l'éducation se commence tôt et que l'éducation ne se fait pas uniquement dans le cadre du milieu familial.

Mme Harel: L'approche que vous avez en matière de garde scolaire est extrêmement Intéressante. Je retrouve, entre autres, à la page 57, une information qui n'est pas pour distribution courante, que j'ignorais, à savoir que 76 % des enfants gardés en milieu familial reconnu et 47 % en garderie bénéficient du programme d'exonération. C'est donc dire combien ce programme d'exonération est utilisé malgré tout et combien il est important de le bonifier, mais vous nous signalez que seulement 17 % des enfants gardés en milieu scolaire étaient admissibles à une exonération financière, au 31 mars 1988. Et vous posez la question suivante: En dépit de l'aide quotidienne versée, serait-ce que ces services sont considérés comme trop coûteux par les parents?

En matière de garde scolaire, il y a évidemment du rattrapage à faire. Il n'y a pas d'exonération l'été. Vous le mentionnez dans votre mémoire, la garde estivale est entièrement à la charge des parents et également au moment des Journées pédagogiques. Est-ce que vous avez pu examiner l'effort qui devrait être consenti en matière de garde scolaire? Considérez-vous que le programme d'exonération est insuffisant, qu'il devrait être augmenté? Comment se fait-il qu'il y ait finalement si peu de demandes d'exonération, selon vous?

Mme Lavigne: Je vais laisser répondre Mme Lepage.

Mme Lepage (Francine): Justement, on se pose la question à savoir pourquoi. Dans ce cas-ci, notre texte est un peu imprécis. Il aurait fallu dire "de places subventionnées par rapport au nombre de places* plutôt que "d'enfants subventionnés*. Il y a une petite nuance. On se surprend qu'il y ait seulement 17 % de places subventionnées, c'est-à-dire de places qui donnent droit à l'exonération financière en milieu scolaire alors que le pourcentage est plus élevé en garderie et en garde en milieu familial. Justement, on n'a pas les données nous permettant de répondre mais on se pose la question: Est-ce parce que le service reste coûteux malgré l'exonération? On sait, d'autre part, qu'à l'école seulement les parents qui travaillent ou qui étudient ont droit à l'exonération. Est-ce que cela explique la question? On ne sait pas, on aurait aimé que le mémoire soft plus explicite sur la question de la garde scolaire.

Le Président (M. Bélanger): Bien. Mme la députée de Maisonneuve, si vous voulez conclure brièvement

Mme Harel: Merci, M. le Président. Il y aurait eu évidemment tellement de choses à dire encore compte tenu de toutes ces Informations qu'on retrouve dans le mémoire, compte tenu aussi des questions qu'il suscite. Je n'ai pu discuter avec vous la difficulté qui est liée au fait que la déduction fiscale n'avantage que les parents qui ont des revenus élevés. Vous avez chiffré les avantages pour des parents qui ont des revenus différents et on voit très nettement qu'on va déplacer, avec l'énoncé de politique, l'offre de service de garde vers des parents à revenus moyens supérieurs ou moyens élevés.

Au nom de l'Opposition, je vous remercie pour ce mémoire qui va certainement au-delà des travaux qu'on vient de terminer et qui va certainement nous servir durant plusieurs mois, sinon quelques années. Merci.

Le Président (M. Bélanger): Merci. Mme la ministre.

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, je voudrais, avant de terminer, peut-être corriger une affirmation faite par la députée de Maison-neuve à savoir que le fait que peu de personnes se prévalent de l'exonération financière en milieu scolaire serait peut-être relié à la question du tarif. C'est tout simplement relié aux critères d'exonération financière. Comme vous le mentionniez, en milieu scolaire, l'exonération est accordée aux parents s'ils sont au travail ou aux études. Ce n'est pas depuis que je suis arrivée, c'est depuis fort longtemps, depuis le tout début, que cela existe comme ça. Il n'y a jamais eu de modification faite et ce n'est pas une modification que nous avons faite récemment.

Je voudrais apporter aussi certains éclaircissements. Lorsque Mme la députée de Maisonneuve parle de la mise en application de la politique en disant: Le tout est déjà...

Mme Harel: M. le Président, est-ce que c'est la période pour remercier le Conseil du statut de la femme?

Le Président (M. Bélanger): Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Parce qu'il y aura une période dans la journée où la ministre pourra aussi reprendre. Là, normalement, on n'a pas de réplique. Ce n'est pas une réplique, M. le Président.

Le Président (M. Bélanger): Si vous plaît!

Je demanderais à Mme la ministre de conclure brièvement

Mme Gagnon-Tremblay: Écoutez, on aura probablement l'occasion de vous donner cette information parce que je voulais justement vous parier de la mise en application de la politique. Puisqu'on est en commission parlementaire, Je tiens à vous remercier, Mme la présidente et les intervenantes du Conseil du statut de la femme, pour la qualité et le sérieux de votre mémoire. Il y a des suggestions qui sont intéressantes et nous prendrons sûrement le temps de les examiner en profondeur et de faire des études, entre autres, sur des formules que vous nous proposez. Merci.

Le Président (M. Bélanger): La commission remercie les membres du Conseil du statut de la femme et suspend ses travaux Jusqu'à 14 heures. Merci.

(Suspension de la séance à 12 h 50)

(Reprise à 14 h 13)

Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission des affaires sociales reprend ses travaux afin de procéder à des consultations générales et à des auditions publiques pour étudier l'énoncé de politique sur les services de garde à l'enfance déposé à l'Assemblée nationale le 24 novembre 1988.

J'inviterais la Confédération des organismes familiaux du Québec, la COFAQ, qui est représentée par Mme Pierrette Godbout-Perreault, M. Marcel Faulkner, Mme Clarisse Forest et M. Michel Morel, à se présenter à la table des témoins.

Mesdames, messieurs, vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire. Ensuite, il y a une période de questions de 40 minutes avec les députés ministériels et ceux de l'Opposition. Un instant! Excusez-moi, R y avait un petit malentendu. Mme la présidente, je vous incite donc à vous présenter ainsi que votre équipe et, chaque fois que quelqu'un de votre groupe prendra la parole, à bien vouloir vous identifier pour fins d'identification - excusez la redondance - au Journal des débats. Je vous remercie. Si vous voulez procéder...

Confédération des organismes familiaux du Québec

Mme Godbout-Perreault (Pierrette): Bonjour, M. le Président.

Le Président (M. Bélanger): Bonjour!

Mme Godbout-Perreault: Je suis accompagnée aujourd'hui de M. Marcel Faulkner, qui représente le groupement des parents d'enfants handicapés, de Mme Clarisse Forest, vice-présidente de la COFAQ et de M. Michel Morel, secrétaire générai de la COFAQ. Je vous remercie d'avoir accepté de nous entendre.

La Confédération des organismes familiaux du Québec a une structure de type confédératif qui regroupe des associations sur l'ensemble du territoire du Québec. Nous existons depuis 1971, regroupons plusieurs centaines d'organismes familiaux et rejoignons annuellement au-delà de 100 000 familles. Depuis plus de 20 ans, les organismes réunis au sein de la COFAQ se préoccupent de la famille, des conditions de vie des familles et de la promotion du concept de la politique familiale globale.

Il y a maintenant plus d'un an, soit en décembre 1987, le gouvernement du Québec déposait à l'Assemblée nationale son énoncé des orientations et de la dynamique administrative de la politique familiale du gouvernement du Québec. Ce geste venait confirmer l'intention gouvernementale de penser à la famille et de tenir compte de la réalité familiale dans toutes les politiques où il peut être requis de le faire.

Le dossier de la politique des services de garde est un secteur de premier plan où iI est requis de tenir compte des réalités familiales. Cela justifie l'intervention des organismes familiaux devant cette commission, tout comme cela devrait justifier que les travaux de cette commission tiennent compte des besoins et des attentes des familles tels qu'exprimés par les organismes chargés de les représenter.

Les délais consentis aux organismes pour la production des mémoires furent trop courts. La COFAQ est d'avis qu'une politique de cette envergure aurait mérité que les délais alloués soient satisfaisants pour procéder à une analyse adéquate et à une consultation véritable. Si le gouvernement souhaite vraiment entendre les représentants des organismes chargés de représenter les familles, encore faut-il que les conditions de la consultation respectent le fonctionnement de ces organismes, ce qui ne fut pas le cas pour l'actuelle consultation. La présente intervention de la COFAQ sera donc partielle; elle n'abordera que quelques éléments de cette politique. Il ne faut cependant pas croire pour autant que les familles et les organismes chargés de les représenter approuvent et endossent les aspects de cette politique qui ne seront pas abordés ici.

D'abord, nous voudrions faire des commentaires généraux pour dire que la politique familiale est une politique horizontale, multisectorielle et concertée. C'est du moins ainsi qu'elle est présentée. Pour l'être vraiment, elle doit pouvoir s'appuyer sur des orientations claires, spécifiquement définies dans un plan d'action global témoignant de l'ensemble des mesures devant être mises de l'avant pour soutenir les familles. Ce plan d'action existe, mais iI n'a toujours pas été rendu public, ce qui laisse

malheureusement tes familles dans l'Ignorance des mesures prévues par le gouvernement, les obligeant à considérer la politique familiale à travers les éléments de politiques sectorielles qui voient le Jour depuis décembre 1987. Or, à l'analyse, ces mesures et ces politiques ne répondent pas toutes à l'engagement gouvernemental de penser famille.

C'est pourquoi la COFAQ formule une recommandation dans le sens que le gouvernement rende public, dans les meilleurs délais, son plan d'action global en matière de politique famliale. Cette recommandation est d'ailleurs la première de celles exprimées par la COFAQ. La COFAQ constate que le dossier de la politique des services de garde s'est développé dans un contexte de condition féminine. Elle se réjouit grandement de l'évolution de la condition féminine au cours des 20 dernières années et partage bon nombre d'objectifs communs avec les groupes de femmes. Nous croyons pertinent et justifié d'insister ici sur le fait que la responsabilité parentale à l'égard des enfants est une responsabilité que doivent partager également les hommes et les femmes. Nous sommes fort conscients que les femmes ont, jusqu'à ce jour, porté cette responsabilité à l'égard des enfants, mais nous ne pouvons que réaffirmer la nécessité de concevoir les responsabilités parentales en termes de responsabilités partagées également entre hommes et femmes.

Un dernier commentaire sur l'oubli gouvernemental concernant les clientèles spécifiques constituées des parents d'enfants handicapés ou des handicapés. Nous ne pouvons que nous ranger derrière les propos qui seront tenus tout à l'heure par le porte-parole du Regroupement de parents pour déficients mentaux.

Sur les principes directeurs, la COFAQ approuve les principes directeurs retenus. Une première analyse du document gouvernemental nous amène cependant à formuler certains commentaires à l'égard des principes directeurs. La politique des services de garde est décrite comme un soutien essentiel pour les parents car elle permet de conclier les obligations familiales et professionnelles. Nous souscrivons pleinement à cet énoncé, mais nous croyons pertinent d'ajouter qu'une vue plus globale des besoins des parents pour concilier obligations familiales et professionnelles permet d'identifier d'autres besoins: des congés parentaux, des horaires de travail conçus en fonction des besoins des parents et la possiblité de s'absenter du travail lorsque les besoins de l'enfant requièrent la présence des parents. De telles mesures existent mais elles ne sont pas suffisantes et le plan d'action global en matière de politique famliale ne nous est pas encore connu à ce moment-ci.

Les milieux de garde doivent être des milieux de développement pour l'enfant. La qualité des services de garde fut au coeur de nos réflexions et a justifié bon nombre de nos recommandations.

Un développement qui respecte le choix des parents. Nous affirmons ce principe mais nous constatons que divers aspects de la politique proposée semblent aller à rencontre.

Une préférence pour les services gérés par les parents. Nous sommes pleinement d'accord avec ce principe qui confère notamment aux parents un droit de regard sur la qualité des services et nous formulons une recommandation concernant les garderies à but lucratif à l'effet de donner aux parents utlisateurs un droit de regard semblable.

Une réaffirmation de l'autonomie des services de garde. Bien qu'en accord avec ce principe, nous croyons justifié de préciser que l'application de ce principe ne doit pas, par voie de conséquence, écarter la responsabilité gouvernementale à l'égard du développement de nouveaux services de garde. La responsabilité communautaire également évoquée au nom d'un principe directeur nous conduit à formuler une recommandation précise concernant le rôle déterminant du gouvernement dans la mise sur pied de nouveaux services en collaboration étroite avec les partenaires sociaux.

Le développement prévu du nombre de places dans les différents services de garde appelle également certains commentaires: une évaluation de limiter les besoins. Le document gouvernemental établit à 201 310 le nombre de places requises en services de garde régis pour l'année 1987, tel qu'indiqué au tableau 2 de la page 22. Le calcul fait pour en arriver à ce chiffre écarte systématiquement les familles ayant recours à des services non régis de même que les familles dont l'un des conjoints demeure au foyer. Parmi les 337 914 enfants gardés selon un mode de garde non régi, combien de familles en arrivent à des choix autres que les services non régis en raison des coûts trop onéreux de ces services, de la non-disponibilité des services, et du peu de confiance à l'égard des services disponibles dans leur milieu? Des 337 914 enfants, combien portent la clé dans le cou?

Nous nous permettons de croire que les besoins en services de garde pourraient être beaucoup plus importants que l'évaluation qui en est faite. C'est pourquoi nous formulons une recommandation demandant que soient revus à la hausse les objectifs de développement des services de garde en ce qui concerne les nouvelles places à créer. De plus, nous croyons qu'une politique des services de garde doit suivre de près l'évolution des besoins des enfants et des parents. C'est pourquoi nous formulons une recommandation afin que des sondages et enquêtes soient menés régulièrement et de façon systématique auprès des familles québécoises pour que le développement de la politique des services de garde puisse mieux suivre les besoins des familles.

La COFAQ considère que le développement annoncé est également décevant en ce qui concerne la diversité des modes de garde. C'est pourquoi nous formulons un certain nombre de

recommandations afin que soient mieux soutenus les parents qui font le choix de faire garder leurs enfants à la maison, en améliorant les dispositions fiscales, en diffusant largement les outils de formation et d'information prévus pour les responsables de garde en milieu familial, en soutenant les parents dans la recherche de gardiens et de gardiennes qualifiés.

On demande que soient aussi revus à la hausse les objectifs de la politique en ce qui concerne le nombre de places créées pour chacun des types de garde; que la garde en garderie soit développée à un rythme accru et que certains moyens soient pris pour s'assurer que la qualité de ces services continue de s'améliorer afin de mieux répondre aux besoins des familles; que le développement des services en milieu de travail ne soit pas "priorisé* par le gouvernement car ce type de services ne correspond pas à la préférence des parents.

On demande aussi que le développement de la garde en milieu scolaire soit accompagné d'un nouveau service répondant aux besoins de garde des enfants d'âge scolaire durant la période estivale et les congés scolaires; que les formules de halte-garderie et de jardin d'enfants soient aussi l'objet d'un plan de développement, car ces formules répondent à des besoins spécifiques de très nombreux parents, et que l'on tienne compte des besoins des clientèles particulières que constituent les familles dont l'un des parents est handicapé dans l'élaboration de la politique des services de garde.

La recommandation 5 formulée par la COFAQ demande que le gouvernement renonce à sa priorité du développement des garderies en milieu de travail et qu'il "priorisé" le développement de services nouveaux correspondant à des besoins précis des familles: la garde des enfants d'âge scolaire durant la saison estivale, les besoins spécifiques des familles dont l'un des membres est handicapé et le développement des formules de halte-garderie et de jardin d'enfants.

Il ne fait aucun doute, dans notre esprit, qu'une politique des services de garde doit tendre à offrir aux enfants et aux parents des services répondant à leurs besoins, d'où la nécessité de services variés.

La qualité des services de garde préoccupe au premier plan les familles lorsque vient le moment de choisir un type de services, et la COFAQ disait, dans l'un de ses documents, que dans le cadre d'une politique familiale l'intérêt de l'enfant et le respect de ses droits doivent constituer les motifs déterminant des décisions prises à son sujet Ce principe s'adresse donc à la fois aux parents, à l'État et à toutes les personnes susceptibles d'intervenir auprès des enfants.

Le respect du droit des enfants nous a amenés, tout au long de notre Intervention, à formuler des recommandations visant à l'amélioration de ta qualité des services dispensés aux enfants. La recommandation 2 demande que des sondages et enquêtes soient menés régulièrement afin d'adapter le développement de la politique des services de garde aux besoins des familles.

La recommandation 4 demande que le gouvernement tienne compte des besoins des familles, dont l'un des membres est handicapé, dans l'élaboration d'une politique des services de garde. La recommandation 5 demande que le gouvernement "priorise", dans l'élaboration d'une politique des services de garde, le développement de services nouveaux offrant des réponses adéquates aux besoins des familles.

La recommandation 6 demande que le gouvernement assure une large diffusion des outils d'information et de formation prévus pour les responsables de services de garde en milieu familial. Cette diffusion devrait rejoindre les familles en général afin qu'elles puissent juger elles-mêmes de la qualité des services auxquels elles ont actuellement recours. Elle devrait également viser à rejoindre les gardiens et gardiennes oeuvrant dans ce service et ce qu'il est convenu d'appeler, dans votre document, les services non régis. Une telle diffusion contribuerait à améliorer des services, qu'ils soient régis ou non.

La recommandation 8 demande que soit assuré aux parents ayant recours aux services de garderie à but lucratif le droit d'accès dans les locaux de la garderie durant les heures d'ouverture afin de vérifier la qualité des services offerts.

La recommandation 9 demande que des efforts soient faits pour assurer une certaine uniformisation de la qualité des services. En ce sens, il a été demandé que des sommes allouées au perfectionnement et a la formation du personnel des services de garde soient de valeur équivalente pour tous les travailleurs et travailleuses oeuvrant dans ce secteur et non proportionnelles à la masse salariale plus ou moins élevée du service à l'intérieur duquel ils oeuvrent.

Dans cette même recommandation, nous demandons que soit haussée la rémunération du personnel oeuvrant dans ce secteur, tout en visant à une certaine uniformisation de la rémunération afin de favoriser la stabilité du personnel.

La recommandation 10 vient conclure en insistant sur le fait que le rôle fondamental de maître d'oeuvre de la politique familiiale du gouvernement du Québec lui confère un rôle déterminant dans le développement des services à être offerts aux enfants et aux parents.

Concernant le financement, nous ne nous y sommes pas attardés très longtemps puisque nous manquions de temps. Nous pouvons vous dire que nous voudrions qu'on trouve des mesures qui permettent d'offrir des services équivalents aux parents. Nous reviendrons peut-être plus tard, si nous avons du temps, pour développer ce côté.

Nous voudrions plutôt vous faire entendre

ce que M. Faulkner a à dire concernant les parents d'enfants handicapés.

M. Faulkner (Marcel): En guise d'introduction, Je voudrais simplement vous dire que notre organisme regroupe quelque 300 à 350 familles de la région de Montréal qui ont assumé la respon-sablité d'une personne handicapée, en particulier des enfants, et que notre problématique générale se trouvait et se trouve encore dans ce document qu'est l'énoncé de politique du gouvernement en matière d'intégration sociale À part... égale. C'est un peu par référence à ça qu'on va réagir également parce que les services de garde étaient déjà énoncés I y a cinq ans dans cette politique gouvernementale.

Depuis plus de dix ans, on assiste à un transfert important de la clientèle Institutionnelle ou susceptible de l'être vers le réseau communautaire sans lui fournir l'encadrement nécessaire à cette nouvelle prise en charge. L'idéologie de la normalisation et le mouvement de déslnstitutionnalisation ont largement puisé à même l'énergie des familles et de la communauté. Les millieux oeuvrant dans la promotion et la défense des droits de la personne handicapée ont sonné l'alarme plus d'une fois. Des tables régionales de concertation d'organismes de promotion, d'intervenants sociaux et de parents se sont constituées pour briser le mur de l'oubli et de la marginalisation et afin de faire pression pour l'obtention des services appropriés au sein des familles assumant la prise en charge d'une personne handicapée.

Plusieurs d'entre elles ont espéré trouver dans l'énoncé de politique sur les services de garde à l'enfance quelques éléments de réponse aux difficultés auxquelles elles sont confrontées. Force est de constater, encore une fois, que les famlles dont l'un des enfants est handicapé ont été oubliées.

Le gouvernement du Québec exprime sa volonté - et je cite le document - d'assouplir les divers modes de garde afin de respecter les disparités individuelles des parents. Plus spécifiquement, le gouvernement désire mieux répondre aux besoins de garde réguliers à temps plein ou partiel de la clientèle du milieu agricole ainsi que du milieu rural, des communautés culturelles et des nations autochtones et répondre également aux attentes des clientèles travaillant à l'intérieur d'horaires non usuels.

Il est regrettable de constater qu'au lendemain du dixième anniversaire de la Loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées le gouvernement du Québec oublie les parents handicapés dans le choix de la clientèle cible de ses nouvelles orientations en matière de services de garde à l'enfance. Si les disparités culturelles et les horaires de traval méritent l'attention particulière du gouvernement et la mise en place de services spécifiques, pourquoi en serait-il autrement pour les parents handicapés, confrontés également à des difficul- tés particulières? (14 il 30)

Dans le même ordre d'idées, I nous semble que l'enfance handicapée aurait dû être une catégorie particulière de la clientèle visée par l'énoncé de politique. On serait tenté de nous référer à la politique d'intégration des enfants handicapés dans les services de garde de l'Office des services de garde à l'enfance que nous n'ignorons pas et sur laquelle nous reviendrons plus loin. Notre propos ici est plutôt d'indiquer comme prioritaire cette clientèle dans l'énoncé de politique au même titre que les autres catégories dites particulières.

Relativement aux services de garde non régis par la loi, une majorité de parents assumant la responsabilité d'un enfant handicapé recourt souvent à la garde à domicile de l'enfant. Le gouvernement du Québec conclut à l'insuffisance de soutien aux parents utilisant ce mode de garde, particulièrement quant au recrutement de la sélection de personnes fiables et compétentes, a fortiori, dirons-nous, quand l'enfant présente une déficience qui requiert une approche particulière ou une compétence spécifique en matière de garde.

Or, l'énoncé de politique est cruellement muet à cet égard. Pourtant, la politique du gouvernement du Québec en matière d'intégration sociale des personnes handicapées proposait déjà à l'office des services de garde, dans le document À part... égale, il y a cinq ou six ans, d'implanter des services de gardiennage à domicile pour les familles d'enfants handicapés, de mettre en oeuvre des formules permettant à ces familles d'obtenir et d'administrer des budgets pour l'acquisition des services de gardiennage dont elles ont besoin pendant les heures habituelles de travaH parce que plusieurs besoins de garde exprimés par les parents restent encore à satisfaire. Le gouvernement du Québec entend diversifier les services de garde et modifier au besoin les définitions de ces services. Page 31 de voire document.

La lecture de l'énoncé de politique nous porte à croire que l'atteinte de cet objectif sera réalisée par le financement de l'expérimentation de nouveaux modèles de garde plus souples et mieux adaptés aux besoins de clientèles spécifiques et pour soutenir les agences de services de garde en milieu familial dans l'offre de référence de gardiens et de gardiennes pour les parents désireux de faire garder leurs enfants à leur domicile.

On prévoit 1 000 000 $ par année pour le financement de tels projets, ce qui inclut également des projets pour la garde estivale des enfants d'âge scolaire et ceux permettant l'ouverture de nouvelles places en jardins d'enfants et en haltes-garderies. L'énoncé de politique est donc très en deçà des attentes déjà formulées et des propostions d'actions du gouvernement du Québec en matière d'intégration sociale de la personne handicapée. L'ajout de 3 000 000 $ en

trois ans sur un total de 514 000 000 $ représente très peu.

Relativement à la politique d'intégration des enfants handicapés dans les services de garde, en premier lieu sur le droit à l'intégration, 1 y a maintenant cinq ans...

Le Président (M. Bélanger): Je m'excuse, M. Faulkner, nous devons vous demander de conclure.

Mme Harel: À moins d'un consentement? J'aurai l'occasion alors de discuter avec vous et on reviendra sur les questions que vous n'aurez pas eu l'occasion de traiter.

Le Président (M. Bélanger): Malheureusement. Vous voulez peut-être émettre une brève conclusion pour terminer?

Mme Godbout-Perreault: Vous me permettez de faire...

Le Président (M. Bélanger): Je vous en prie, madame.

Mme Godbout-Perrreault: Pour nous, la politique de services de garde est un volet majeur d'une politique familiale. Elle doit témoigner de la volonté collective de soutenir la famille en permettant aux parents de mieux concilier leurs responsabilités parentales et professionnelles et de tenir compte de façon prioritaire des intérêts des enfants à être gardés. Elle commande donc une préoccupation marquée pour la qualité des services, le développement de services variés respectant les besoins et les choix des parents, incluant une préoccupation évidente pour les besoins spécifiques de certaines familles, notamment celles où vivent des personnes handicapées, l'accessibilité et la disponibilité des services, une structure de financement assurant un financement adéquat des services, une rémunération accrue du personnel oeuvrant dans ce secteur, une uniformisation de cette rémunération, l'amélioration constante de la formation du personnel, un soutien financier de valeur équivalente aux familles, quel que soit le type de service choisi, une aide financière accrue " aux familles à faible revenu, de façon que les coûts ne constituent pas des freins à l'exercice du libre choix des parents.

Les enfants constituent l'avenir d'une société. L'intérêt collectif démontré à l'endroit des enfants et des familles est révélateur de notre préoccupation pour la qualité de vie des personnes. Il importe donc que, pour nous comme pour vous, la politique des services de garde s'intègre comme mesure de renforcement à rengagement récent du gouvernement québécois de soutenir les familles du Québec.

Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie beaucoup, madame.

Mme la ministre?

Mme Gagnon-Tremblay: Oui. Merci, madame, messieurs. Je pense que dans votre mémoire vous avez bien identifié toute la problématique des services de garde. J'aimerais peut-être en premier lieu, parce que cela me concerne davantage lorsque vous parlez de la condition féminine par rapport à la politique des services de garde... Je pense qu'il existe des raisons historiques pour lesquelles la responsabilité de l'Office des services de garde à l'enfance est logée auprès de la ministre déléguée à la Condition féminine. Je pense, entre autres, aux groupes de femmes qui ont été les premiers organismes à préconiser la mise en place de services de garde; I y a aussi le Secrétariat à la famille qui est une création beaucoup plus récente. Pour toutes ces raisons, j'avoue que c'est peut-être accidentellement que les services de garde se sont retrouvés à la Condition féminine, mais compte tenu des nombreux besoins dans le domaine de la santé et des services sociaux je pense qu'on n'en serait peut-être pas arrivé, finalement, à un énoncé de politique aujourd'hui si on n'avait pas identifié davantage ce besoin spécifique à la Condition féminine.

Lorsque je regardais la manifestation de vendredi dernier à la télévision, je me rendais compte que cela semblait être encore un problème de femmes puisqu'on n'y voyait encore à peu près que des femmes. Malheureusement, je trouvais dommage de voir que les pères n'étaient pas là, que cela semblait être encore une affaire de femmes.

Tout cela pour vous dire que je suis totalement d'accord avec vous pour dire qu'un jour ou l'autre, lorsque le processus sera bien enclenché, on devra penser possiblement à faire une modification et à transférer ces services à la Famille, qu'ils relèvent effectivement de la Famille et non pas uniquement de la Condition féminine.

En ce qui concerne le développement des services de garde, vous préconisez que soit tenue régulièrement une enquête dans le but de répondre aux besoins qu'on pourra identifier. Je dois vous mentionner que c'est justement l'objet de la planification régionale qu'on doit amorcer incessamment avec tous les partenaires du milieu dans le but justement de bien Identifier chacun des besoins et de répondre à ces besoins-là.

Il est certain qu'actuellement on ne répond pas à tous les besoins et on n'a pas toutes les solutions non plus. La commission parlementaire est ici pour cela. Je pense que, même après la commission parlementaire, on n'aura pas encore toutes les solutions. Je pense qu'on devra expérimenter différents projets. On disait tout à l'heure que les sommes ne sont peut-être pas suffisantes. Il y a aussi actuellement une caisse d'aide qui est prévue à la disposition de toutes les provinces. Je pense qu'on devra s'efforcer de préparer des projets dans le but d'aller chercher

le maximum pour le Québec. Il y a des besoins qu'on devra combler, des besoins peut-être pas nouveaux, qu'on a identifiés depuis longtemps, mais pour lesquels on n'a pas eu de réponse jusqu'à maintenant

Dans le cadre de cette diversité des besoins, il est certain que l'expérimentation de la garde à domicile pour toute la clientèle d'enfants handicapés sera considérée prioritairement. Par contre, cette expérimentation n'exclut pas pour autant l'intégration des enfants handicapés dans les services.

Vous disiez tout à l'heure qu'il y a longtemps qu'on a interpellé le gouvernement depuis cinq ou six ans, pour intégrer davantage les enfants handicapés. Vous avez cité, en plus, la politique d'intégration de l'Office des services de garde à l'enfance. Je dois vous dire que, malgré tout, on ne peut pas affirmer que rien ne s'est passé depuis. Justement, depuis, vous avez quand même une politique de l'office des services de garde pour les enfants handicapés.

J'avais l'occasion de mentionner ce matin que, déjà, 121 garderies, 121 services équivalant à 235 places sont prévus. Je sais que c'est insuffisant, mais on devra en développer davantage. Par contre, en 1986-1987, le budget s'élevait à tout près de 500 000 $ annuellement. L'enfant handicapé est une préoccupation. D'ailleurs, ce matin, le Conseil québécois pour l'enfance et la jeunesse nous le soulignait aussi. C'est une préoccupation, mais aussi une priorité pour le milieu familial.

Vous ne sembliez pas être d'accord avec la priorité qu'on accordera au milieu de travail au cours des deux prochaines années. Comme vous le savez, au cours des deux prochaines années, 50 % des places en garderie seront réservées pour le milieu de travail. Selon notre plan de développement, on a quand même prévu certains développements de services au cours des trois prochaines années, mais les deux dernières années seront modifiées selon la planification régionale qui sera faite. C'est certain qu'il n'y a rien de coulé dans le ciment. Je pense qu'on doit s'adapter à cette planification. Donc, en ce qui concerne le milieu de travail, on travaillera avec ses entrepreneurs, ses entreprises, dans le but d'identifier si les besoins sont là.

Je ne pense pas qu'il y ait uniquement des inconvénients à la garde en milieu de travail. Le Conseil du patronat réclame davantage de garde en milieu de travail. Il y a des avantages pour les employés; entre autres, pour certains, il y a la question de la réduction du temps de transport pour leur permettre de visiter l'enfant durant le jour. Parfois, tes heures d'ouverture sont plus flexibles parce qu'elles sont justement en fonction du parent travaileur de l'entreprise même. Les tarifs peuvent être parfois moins élevés que dans d'autres garderies, par exemple, si l'entreprise en fait une priorité. On peut aussi accroître la familiarité de l'enfant avec le monde du travail des parents et sécuriser davantage le parent qui est près de l'enfant iI y a des avantages et aussi des inconvénients. On ne peut pas, non plus, implanter une garderie dans tous les milieux de travail; cela prend quand même une qualité de vie importante, que ce soit en ce qui concerne les locaux ou l'aire de jeu. Mais je pense que là où c'est possible... C'est quand même depuis fort longtemps qu'on demande d'ouvrir des garderies en milieu de travail. Et, comme ces garderies doivent s'inscrire au plan de développement de l'office des services de garde, elles doivent attendre le même temps. Souvent, elles se découragent et, comme d'autres promoteurs d'ailleurs, elles n'ouvrent pas. On sait que dans une entreprise, lorsqu'on décide d'ouvrir une garderie, on veut répondre à un besoin immédiat et non pas à un besoin dans cinq ans ou dans dix ans.

Finalement, je veux vous dire qu'il y a des besoins, mais que, malgré tout, lors de notre planification régionale, s'iI y a des milieux ou des régions où ce ne sera pas possible, compte tenu des priorités des parents... Je pense que la seule façon de bien reconnaître les priorités des parents, ce sera tout simplement de faire... On a beau faire des guerres de chiffres en disant: Voici, on n'est pas d'accord avec tel sondage ni avec tel chiffre, mais je pense que c'est la planification régionale qui nous permettra effectivement de bien connaître et d'identifier les besoins.

Vous avez parlé d'uniformisation des conditions de travail. Je n'ai pas bien saisi ce que vous avez dit à ce moment-là. Est-ce que vous voulez dire que les éducatrices et les éducateurs de garderie, entre autres, devraient être payés le même salaire, devraient être traités sur le même pied, c'est-à-dire avoir un salaire égal et des conditions de travail égales? Est-ce que c'est cela que vous avez voulu dire ou si j'ai mal saisi?

Mme Godbout-Perreault: Ce que nous mentionnons, ce sont des conditions uniformes. Bien sûr, il y a le ratio dont nous sommes au courant. Maintenant, il nous semble que, si on veut des services de qualité et si on veut assurer un personnel qui soit assez stable, il faut bien que des conditions de travail permettent d'avoir un personnel stable. Donc, il faut prévoir des conditions de travail qui soient... Nous n'allons pas jusqu'à parler d'un salaire négocié pour l'ensemble de la province, mais nous parions de conditions stables.

Mme Gagnon-Tremblay: Vous savez qu'actuellement, dans chacune des garderies, ce sont les administrateurs, donc ce sont les parents qui décident des conditions de travail de chaque éducatrice ou éducateur, donc autant de conditions de travail qu'il peut y avoir de garderies. Finalement, la seule façon d'uniformiser, ce serait qu'il y ait quelqu'un d'autre qui prenne la charge de ces conditions de travail, c'est-à-dire...

Qui va négocier les conditions de travail si ce ne sont pas les parents qui vont le faire? Comment uniformiser dans ces circonstances, à moins d'étatiser?

Mme Godbout-Perreault: Vous voulez ajouter quelque chose, Michel, à ce sujet?

M. Moral (Michel): Oui. Quand on parle d'uniformisation, évidemment, ce qu'on se dit, c'est: Quelqu'un qui exécute un travail dans une garderie à Montréal, une tâche spécifique, devrait avoir droit à une rémunération équivalente à celle de quelqu'un qui fait le même travail à Laval ou à Québec. Je dis "équivalente*, en tout cas à peu près semblable. A l'heure actuelle, il y a des niveaux de rémunération tellement disparates les uns par rapport aux autres qu'on en arrive à des disparités dans la rémunération et surtout à faire en sorte que le personnel de ces garderies ne soit pas stable, c'est-à-dire qu'il est toujours à la recherche de meilleures conditions de travail. Les techniciens et les techniciennes cherchent à aller vers une autre garderie qui paie mieux ses employés.

Ce que nous disons, c'est qu'une certaine uniformisation - je pense que le terme est vague - pourrait faire en sorte d'améliorer la stabilité du personnel, donc, par voie de conséquence, la qualité des services.

Mme Gagnon-Tremblay: Mais comme chaque service est autonome et, comme je l'ai mentionné et je le répète, géré par les parents, quelle est la suggestion que vous nous faites pour uniformiser?

M. Morel: Je pense qu'il y a sans doute moyen d'en arriver à définir des critères minimaux de rémunération tout en laissant aux parents une marge de manoeuvre discrétionnaire. D'abord, je pense qu'une structure de financement adéquate pourrait permettre aux parents de gérer la garderie en fonction de critères qui pourraient être déterminés afin d'en arriver à des rémunérations, et je dis, de valeur équivalente, tout simplement. (14 h 45)

Mme Gagnon-Tremblay: Je n'ai pas d'autres questions, M. le Président.

Le Président (M. Bélanger): Bien. Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Merci, M. le Président. D'abord, j'aimerais m'excuser pour ma voix éraillée. Je salue les porte-parole de la Confédération des organismes familiaux du Québec. Durant les discussions que vous venez d'avoir, je me disais que les commissions scolaires sont aussi des entités autonomes et iI n'en demeure pas moins que la rémunération des enseignants est la même sur tout le territoire. Depuis longtemps, iI y a une revendication dans le rnilieu des travailleuses de garderie qui est celle d'une table provinciale de négociation où les garderies, tout en conservant leur autonomie, pourraient discuter de façon concertée, des conditions de travail.

J'aimerais vous permettre, M. Faulkner, de compléter, comme je vous le proposais tantôt, si vous le désirez, les recommandations que vous vouliez faire à la commission.

M. Faulkner Merci beaucoup. De toute façon, je serai très bref. Je pense avoir fait tantôt une distinction entre les enfants handicapés et les parents handicapés. Ce sont deux clientèles différentes, quant à moi, qui pourraient être visées par une politique sur les services de garde.

D'autre part, je connais très bien la politique d'intégration en garderie et je la trouve excellente. Ce n'est pas là-dessus que sont nos interrogations, mais on aimerait que le droit à l'intégration soit clairement reconnu dans la Loi sur les services de garde à l'enfance. Il est prévu à l'article 2 que tout détenteur de permis peut refuser l'accès aux services de garde à un parent, donc à un enfant, et iI nous semble que cet article-là va peut-être un peu à rencontre de la charte québécoise des droits selon laquelle on ne peut pas faire de discrimination en vertu d'un handicap. Ce n'est pas la première fois que nous sommes confrontés à ça, où on a de grandes déclarations de principe en faveur de l'intégration. On a la Charte québécoise des droits et libertés de la personne qui nous garantit qu'il n'y aura pas de discrimination en vertu d'un handicap ou d'une déficience mais, dans le vécu quotidien, on est toujours confrontés à un paquet de dispositions et de règlements qui limitent ce droit-là. Et, en matière de services de garde, l'article 2 est relativement clair là-dessus. Alors, dans ce sens-là, nous aurions une recommandation à faire à l'effet d'envisager la possibilité de garantir l'accès aux services de garde dans la loi.

J'aimerais souligner un deuxième point de vue. Je me demande si l'office des services de garde s'est penché sur... Premièrement, est-ce qu'il y a eu une évaluation de faite de l'intégration des enfants en garderie, d'enfants handicapés, d'une part? D'autre part, je sais qu'iI y a une tendance récente dans les centres d'accueil, dans le cadre de programmes spécifiques pour les enfants, qu'on appelle des programmes de stimulation précoce - qui sont donnés en externe, qui, à l'origine, étaient dispensés dans des centres de jour, des centres d'accueil, et qui, progressivement, ont été transférés en services à domicile - qui, maintenant, sollicitent les services de garde. Cela veut dire qu'on aurait éventuellement des éducateurs spécialisés des centres d'accuel qui viendraient dispenser des services de stimulation précoce à des enfants dans des services de garde. Je sais que c'est une tendance qui est déjà amorcée et ma crainte, c'est qu'au nom de la normalisation et de l'intégration des enfants

handicapés on oublie te spécifique de l'enfant handicapé et qu'on le prive peut-être de tous les services dont il aurait besoin à ce moment-là, qui seraient des services de stimulation précoce qui sont donnés par du personnel compétent hablité à le faire et qu'on ne retrouve peut-être pas dans tes services de garde. Je sais qui y a une tendance - dans la région de Montréal, c'est déjà largement commencé - et je ne voudrais pas que, môme s'il est prévu dans la loi que les services de garde doivent offrir des activités de développement aux enfants - on est bien d'accord avec ça, tant mieux... Mais ces activités-là et des programmes de réadaptation, c'est autre chose. On craint que, tranquillement, on ne glisse et on n'abandonne ces programmes de réadaptation pour peut-être se limiter aux services dispensés par tes garderies.

Mme Harel: Merci, M. Faulkner. Je crois que l'expertise que détient la COFAQ est unique, d'une certaine façon, compte tenu du fait que vous êtes un regroupement d'organismes familiaux qui militez dans te milieu. Je vous le dis bien simplement, j'espère que. durant le mois que nous allons examiner toute la question des services de garde, la ministre responsable de la politique familiale viendra au moins nous saluer. Je peux vous dire que je souhaiterais plus. J'aurais d'ailleurs souhaité qu'elle soit présente aujourd'hui au moment où nous entendions des groupes qui se préoccupent plus particulièrement de la petite enfance et de la famille. Le cabinet de la ministre a préféré entendre les groupes qui, comme le vôtre, s'occupent plus généralement de politique familiale et, demain, nous commencerons à entendre les intervenants du milieu des services de garde.

Je prends bonne note des réflexions que vous faites dans votre mémoire, notamment concernant l'ignorance dans laquelle les organismes familiaux sont de la stratégie globale du gouvernement en matière de politique familiale, de son plan d'action qui se fait toujours attendre et du fait qu'un énoncé de politique en matière de services de garde ne peut pas encore se raccrocher comme tel à un plan d'action qui nous est toujours Inconnu. J'en al pris bonne note.

J'aimerais vous entendre sur deux questions particulières, la première concernant les garderies en milieu de travail. Vous avez une position assez ferme et, dans votre mémoire, en particulier à la page 14, je crois, vous décrivez tes désavantages qui pourraient être rattachés à ce type de garde. Vous dites, par exemple: Cela peut astreindre les enfants à des déplacements souvent plus longs aux heures de pointe dans une circulation dense, les éloigner quotidiennement des enfants de leur quartier, de leurs amis, de leur milieu, en plus de problèmes évidents pour les familles de deux enfants dont l'un fréquente l'école du quartier et l'autre la garderie en mBieu de travail. J'aimerais vous entendre là-dessus. Compte tenu des rencontres et des consultations que vous avez tenues sur cette question, avez-vous des études que vous pourriez nous faire parvenir sur cette question?

Mme Godbout-Perreault: II y a une chose, Mme Harel, que je dois aussi vous dire. Les consultations n'ont pas pu être très longues. Vous le savez, nous étions à la période des fêtes et ce n'est pas un temps facile pour consulter les familles.

Ce sur quoi nous avons bâti notre position, c'est en fonction des consultations que nous avions déjà faites antérieurement et en fonction des sondages faits dans le document même où les parents n'ont pas manifesté de préférence pour la garderie en milieu de travail; elle n'y est même pas soulignée. Nous en avons discuté avec les parents et ce sont des arguments qu'ils nous apportent.

Il y a aussi un autre point qui n'est pas là, lorsqu'on a à accorder des budgets, c'est que la garderie en milieu de travail est bonne et efficace pour les enfants qui ne fréquentent pas encore le miieu scolaire. C'est pour une période de temps limitée. On constate aussi que, de nos jours, le renouvellement de personnel n'est pas si grand dans un milieu de travail. Donc, lorsque les sommes vont davantage vers une garderie dans le quartier, si le personnel d'une compagnie n'utilise plus ou n'a plus besoin de services de garde parce que les enfants fréquentent l'école qui est parfois très éloignée du milieu de travail, d'autres familles pourront utiliser les mêmes équipements qui auront été mis en place.

Mme Harel: Donc, vous préféreriez un service de garde plus mixte qui serait ouvert au milieu, aux quartiers, et en fonction des besoins du milieu et de ceux des employés.

Mme Godbout-Perreault: C'est ça, oui.

M. Morel: Sur la même question, même s'I n'a pas été possible de tenir de réelles consultations auprès d'un certain nombre d'organismes, on s'est aperçu ce matin même, en discutant avec des représentants d'autres organismes, que nos analyses, d'un côté, et les leurs, faites chacun de son côté, en arrivent aux mêmes conclusions, que ce n'est pas, selon nous, le mode de garde que devrait tendre à 'prioriser* le gouvernement. Donc, si cela ne tient pas lieu de consultation, admettons qu'on en arrive aux mêmes conclusions.

Mme Harel: D'ailleurs, vous recommandez dans votre mémoire qu'il y ait plutôt l'introduction de congés parentaux, d'horaires de traval et d'aménagement de temps de travail de manière à tenir compte des responsabilités professionnelles plutôt que des services de garde en milieu de travail. C'est ce qu'on doit comprendre.

Mme Godbout-Perreault: Oui, c'est ce qu'on

doit comprendre. Je pense que, derrière tout ça, il y aurait aussi une volonté du gouvernement: Est-ce que l'on veut que les parents s'ajustent au milieu de travail ou si on veut soutenir les parents qui sont des travailleurs? Pour moi, ça va faire toute une différence dans les politiques que l'on va établir. Si on demande au milieu de travail de tenir compte de la responsabilité parentale, on va donc modifier des conditions de traval et on va reconnaître que des parents ne sont pas toujours capables d'être présents et que c'est important d'être parent au Québec. Donc, si on doit s'absenter, on n'est pas pénalisé parce qu'on assume son rôle de parent. SI, par contre, on subordonne toute la société, toute la vie familiale au monde du travail, alors, on ne pourra pas dire qu'on soutient les parents et la vie familiale.

Mme Harel: Dans votre mémoire, vous introduisez une notion qui inquiète beaucoup. Vous dites que le mode de financement des services de garde pourrait introduire des classes de garderies: des garderies, disons, pour enfants de parents plus fortunés qui pourront payer des tarifs plus élevés, donc qui auront un plus fort taux de subvention et qui pourront donner de meilleurs services, et des garderies, disons, pour des enfants de parents plus défavorisés. Est-ce que c'est là l'opinion de la COFAQ que ce mode de financement est sujet à ce type de conséquence?

M. Morel: Oui. Ce que nous considérons, c'est que le financement des services et le soutien économique aux parents devraient faire en sorte que le respect du droit de choisir des parents se concrétise. Autrement dit, si les frais ou les tarifs en vigueur varient d'un service à un autre ou même d'une garderie à une autre, le parent va automatiquement faire le choix, malheureusement, d'aller vers le service qui lui coûte le moins cher et la qualité des services risque fort de s'en ressentir et la qualité de la réponse faite par la collectivité aux besoins des parents risque aussi de s'en ressentir.

Ce que nous disons, c'est que le financement des services de garde et le soutien économique aux parents devraient faire en sorte que ce soutien gouvernemental soit de valeur équivalente pour tous les parents. Donc, doit-on parler à ce moment-ci d'une formule de financement par place, tel que c'était avant, ou d'une formule modulée en fonction d'un pourcentage? On n'a pas pu aller jusque-là dans nos analyses. Ce qu'on dit, c'est que si le gouvernement veut vraiment respecter le choix des parents quant au mode de garde, I faut que toute la question du financement vienne respecter aussi la possibilité pour les parents de choisir adéquatement. Cela est important.

Mme Harel: II y a déjà des tarifs qui sont modulés de façon différente. Si je comprends bien, vous dites qui ne faut pas que l'aide gouvernementale vienne aggraver cette situation. C'est bien ça. Il y a quand même déjà des tarifs qui sont différents. Le danger, c'est que la subvention, le mode de calcul vienne, finalement, augmenter l'écart, si je comprends bien.

M. Morel: vienne augmenter les disparités entre les différents services et fasse en sorte que ça devienne un frein à l'exercice du choix des parents. Le parent qui a un revenu faible ou un revenu moyen, compte tenu de sa situation, va faire le choix d'aller vers des services qui lui coûtent moins cher et dont la qualité laissera peut-être à désirer. Il va aller vers un service qui n'aurait pas été forcément son premier choix. Si on veut respecter le choix, bien allons-y.

Mme Harel: Vous parlez beaucoup dans votre mémoire des enfants qui trouvent à être gardés, mais en dehors des services reconnus. Avant que le président me rappelle à l'ordre parce que le temps sera terminé, je vais vous demander, M. Faulkner, comment vous réagissez à la proposition de l'énoncé de politique disant que les garderies à but lucratif soient dorénavant subventionnées pour la garde des enfants handicapés. Avez-vous eu l'occasion d'étudier cette recommandation précise?

M. Faulkner: Non.

Mme Harel: Si tant est que votre organisme le fait, vous pouvez, jusqu'à la fin de nos travaux, nous faire parvenir vos commentaires. (15 heures)

Vous nous parlez des enfants qui ont besoin d'une garde plus intermittente. Vous les évaluez à 464 000, en fait presque un demi-million, je pense, qui n'ont pas besoin d'être gardés régulièrement, à temps plein, dites-vous, à la page 10 de votre mémoire, mais qui ont besoin d'une garde à temps partiel.

Ce matin, la présidente du Conseil du statut de la femme signalait que 23 % des travailleuses sont à temps partiel et, que là aussi, il y a un mode de garde qui doit être planifié. Avez-vous des recommandations à faire concernant le mode de garde à temps partiel? Comment le voyez-vous? Par le biais des haltes-garderies, jardins d'enfants, qui ne sont pas subventionnés, qui ne permettent pas l'exonération financière, ou préconisez-vous qu'il y ait exonération financière dans ce nouveau type de services de garde ou qu'il y ait ouverture de places à temps partiel dans la garde reconnue jusqu'à maintenant?

Mme Godbout-Perreault: Madame, notre position est plus en termes de... On a demandé que la promulgation des articles 5 et 6 soit faite, que, finalement, les haltes-garderies deviennent une réalité. Maintenant, là où nous nous situons, c'est plus en termes des mesures qui permettent aux parents d'utiliser un service ou l'autre, mais

qu'on les soutienne financièrement de façon équitable. Que ce soit un milieu ou l'autre, pour autant qu'il y ait un service et un soutien équitables. Michel.

M. Morel: J'aimerais ajouter que la recommandation S qui est annexée au mémoire, si on en fait lecture, dit ceci: Que le gouvernement renonce à sa priorité concernant le développement des garderies en milieu de travail, qui ne nous semblent pas correspondre aux besoins et préférences des familles - là Je viens à la réponse - et qui "priorise" plutôt le développement de services nouveaux correspondant à des besoins précis des familles - et là, on précise notamment, les besoins des familles dont l'un des membres est handicapé - ainsi que les services pour la garde des enfants d'âge scolaire durant la saison estivale et les services de halte-garderie et de jardin d'enfants. Évidemment, on peut penser à d'autres besoins des parents pour lesquels des services nouveaux pourraient être mis en marche. À ce moment-là, votre question trouve sa réponse dans cette recommandation.

Mme Harel: Je vous remercie. Mme la députée de Marie-Victorin.

Le Président (M. Bélanger): Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme Vermette: Je suis toujours très heureuse de voir la préoccupation des parents à l'endroit de l'intégration des personnes handicapées, étant responsable du dossier des personnes handicapées pour ma formation politique. Ayant suivi depuis trois ans ce dossier, il me tient énormément à coeur que ça devienne du concret, cette intégration, et que, finalement, on l'applique à tous les niveaux. Comme je le disais plus tôt, ce matin, c'est peut-être la meilleure occasion pour faire en sorte que les préjugés finissent pas s'estomper. C'est au tout début de la première enfance que, finalement, on apprendra à côtoyer des gens avec un handicap de quelque nature que ce soit et qu'on sera peut-être plus favorable à la cohabitation, après, pour le reste de sa vie.

J'aimerais savoir - vous n'avez pas pu vous prononcer tantôt - si vous préféreriez que ce soit dans les garderies privées plutôt que ce soit accessible, finalement, à toutes les formes de garderies, le soin des enfants ayant un handicap. Mais ça fait partie des propositions en disant qu'on les aiderait davantage, on les dirigerait davantage vers des garderies privées. Mais ma préoccupation à l'heure actuelle... On disait que la qualité a ses exigences. J'imagine qu'on n'a pas parlé vraiment de formation. Croyez-vous qu'en garderie, justement, actuellement, le personnel a la formation nécessaire pour répondre à ce genre de clientèle que sont les personnes handicapées physiques ou ayant un retard intellectuel?

M. Faulkner: Je répondrai de façon approximative. On n'a jamais été capables d'en faire une évaluation un peu serrée. L'Office des services de garde à l'enfance pourrait peut-être faire une évaluation semblable. Evidemment, c'est une question qu'on s'est posée, quant à la formation du personnel. C'est une impression, ça ne nous apparaît pas tellement un handicap du service parce que les enfants sont très jeunes et la déficience apparaît comme étant plus lourde au fur et à mesure que les enfants vieillissent. Un enfant de trois ou quatre ans, s'a est mobile et s'iI ne pose pas de problèmes physiques majeurs, est assez facilement accepté en garderie. Par rapport à d'autres milieux, le milieu de garde est un milieu relativement ouvert, il faut le reconnaître. Alors, en termes de formation, je ne pense pas que cela ait posé de problèmes jusqu'à maintenant, à moins d'arriver avec des cas lourds. Les personnes handicapées auxquelles je pense et que je représente, on les qualifie de déficience moyenne, mais cela les rend tout à fait aptes à profiter des services de garde en garderie. Je ne pense pas qu'il y aurait de problèmes concernant la formation du personnel. L'Office des services de garde à l'enfance a déjà un programme de formation. Je me souviens de l'avoir consulté il y a deux ans et cela m'apparaissait correspondre aux besoins. S'il a été effectivement appliqué, je ne suis pas en mesure de le dire ou de le confirmer; l'office, peut-être pas non plus.

Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. Si Mme la députée de Maisonneuve veut bien remercier le groupe.

Mme Harel: Oui, avec plaisir. Je connais la COFAQ pour les travaux qu'elle fait qui ont été particulièrement utiles en matière de sécurité du revenu. Je crois que vous nous rappelez qu'avant toute chose l'énoncé de politique doit répondre à un projet de politique familiale. Il ne s'en dessine pas un clairement une fois la lecture complétée et j'espère que les remarques que vous nous avez faites seront prises en considération par ta ministre déléguée à la Condition féminine, à défaut d'être entendues par la ministre responsable de la politique familiale.

Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie, Mme la députée de Maisonneuve. Mme la ministre.

Mme Gagnon-Tremblay: Combien ai-je de minutes, M. le Président?

Le Président (M. Bélanger): Quelques minutes.

Mme Gagnon-Tremblay: Tout à l'heure, vous avez parlé des écarts de tarifs que les parents devaient payer. Donc, cela suppose les disparités qui existent entre les différentes garderies. On

salt qu'il en existe beaucoup, comme je le mentionnais ce matin lors de mon discours d'ouverture. Vous avez des tarifs différents, des conditions de travail différentes, des taux d'occupation différents, des loyers différents. Il y a plein de disparités entre les services. C'est justement pour cela qu'on a modifié notre formule d'exonération aux parents, dans le but de donner plus d'argent aux parents. La formule qui était prévue auparavant, soit 10,50 $ par enfant par jour, était une formule rigide, une formule stable. Ce qui est prévu actuellement avec la formule de base de 4,75 $, plus 40 % du tarif, c'est justement pour combler cet écart et faire en sorte que le parent qui pale 18 $ puisse être soutenu comparativement à celui qui paie 13 $ pour un même service. Vous savez, et je pense que vous êtes en mesure de le déterminer, que ce n'est pas parce qu'un parent paie 18 $ que c'est un parent plus riche ou que c'est une garderie plus riche. S'il paie 18 $, c'est probablement parce que la garderie a des dépenses et des besoins plus considérables et qu'elle est obligée de demander de tels tarifs pour payer ses dépenses, puisque ce sont les parents qui déterminent les tarifs.

Alors, dans le cadre de cette nouvelle formule d'exonération, 9 000 000 $ d'argent neuf seulement l'an prochain seront investis pour aider davantage les parents à réduire cet écart entre les tarifs existant actuellement.

En terminant, je pourrais aussi parler de la question de la consultation. Tout à l'heure, vous nous reprochiez le fait qu'on a eu très peu de temps pour la consultation entre l'énoncé de politique et la présente commission parlementaire. Justement c'est que la commission parlementaire est là pour la consultation. Je dois vous rappeler cependant que le milieu était consulté depuis de nombreuses années, que ce soit par le gouvernement fédéral ou le gouvernement provincial. Depuis de nombreuses années, on identifie les problèmes et je suis persuadée que si on avait recommencé encore ce genre d'études on nous l'aurait reproché. Je comprends, par contre, que le fait d'avoir annoncé la politique en novembre et de tenir cette commission parlementaire maintenant, au cours de la période des fêtes, cela a pu vous occasionner certains problèmes, mais d'une façon ou d'une autre le milieu avait été quand même grandement consulté et cette commission-ci permet aussi la consultation.

Quant à la politique familiale, cela aurait peut-être été souhaitable que le plan soit dévoilé, mais je tiens à vous souligner là encore que même, si le plan d'action de la politique familiale n'est pas encore dévoilé, cela n'a pas empêché pour autant le gouvernement d'agir. Si vous vous souvenez du budget Levesque. des 700 000 000 $ et quelques qui ont été annoncés pour la famlle, à ce moment-ci, vous avez la politique familiale. Nous travaillons actuellement à préparer les normes du travail et les congés de maternité. Alors, je pense que vous devez quand même conserver cette confiance; ce n'est pas parce que le plan n'est pas connu que nous ne prenons pas en considération pour autant la famille.

Je vous remercie de votre exposé et de vos suggestions que nous prendrons en considération.

Le Président (M. Bélanger): La commission remercie la Confédération des organismes familiaux du Québec et Invite à la table des témoins le Conseil de la famille Richelieu-Yamaska.

Le Conseil de la famille Richelieu-Yamaska sera représenté par Mme Pierrette Perreault, Mme Normande Dolan, Mme Murielle Désilets et Mme Lise Grenon.

Mme Harel: On va suspendre, M. le Président, selon notre habitude, pour une seconde.

Le Président (M. Bélanger): Si on regarde le nombre d'organismes et le peu de temps, 30 minutes, on va tout simplement faire en sorte qu'à la fin de la journée on soit largement déficitaires. J'essaie de gérer cela le plus serré possible. Je m'en excuse.

Mme Harel: Je veux bien que vous régissiez ça serré ou gériez cela serré, mais cela ne nous permet pas de saluer des gens qu'on n'aura pas l'occasion de revoir. Ce serait la première fois, en commission parlementaire...

Le Président (M. Bélanger): Je sais, madame.

Mme Harel: ...depuis des années, que Je verrais le procédé que vous utilisez. Je ne souhaite pas qu'on se prétende sur une chaîne de montage.

Le Président (M. Bélanger): Je sais, madame, mais si vous acceptez que les travaux se poursuivent plus tard, si vous acceptez toutes les contraintes qui vont avec, personnellement, je n'ai aucune objection, mais si j'ai l'accord de cette commission. Veuillez comprendre que ce n'est pas ma décision personnelle, c'est une décision que nous Imposent les limites de temps. On s'en excuse d'avance auprès de tous nos invités. Malheureusement, nous devons faire vite.

Nous accueillons donc le Consel de la famille Richelieu-Yamaska. Vous avez 30 minutes, dont 10 minutes pour la présentation de votre mémoire; je vous suggère donc un résumé. Ensuite, il y aura la période de questions et de discussions avec les parlementaires.

Je vous prierais aussi de vous présenter et de présenter vos porte-parole. Dès que vous aurez à prendre la parole, s'iI vous plaît, bien vouloir donner vos noms auparavant; c'est pour les fins d'enregistrement du Journal des débats. Je vous remercie et bonne chance.

Conseil de la famille Richelieu-Yamaska

Mme Godbout-Perreautt: Bonjour. Je précise que, parce que le Conseil de la famille est membre de la COFAQ, c'était à titre de déléguée que j'étais présente tout à l'heure, et présidente de la COFAQ. Maintenant, je suis membre du Conseil de la famille comme une autre personne. Je suis accompagnée de Mme Normande Dolan, Mme Murielle Désilets et Mme Use Grenon, du Consei de la famille Richelieu-Yamaska.

Le Président (M. Bélanger): Bonjour. Cela nous fait plaisir.

Mme Godbout-Perreault: Mon nom est

Pierrette Godbout-Perreault. Le Conseil de la famlle oeuvre depuis 18 ans. Nous sommes une fédération régionale. Nous regroupons onze organismes et, à l'intérieur de ces organismes, il y a une centaine d'associations locales. Le consei travaille depuis ces 18 ans à l'obtention d'une politique familiale globale. C'est une politique axée sur la qualité de la vie de famille, l'épanouissement et l'égalité des personnes au sein des familles, la concertation avec les familles et la prévention.

Pour nous, une politique des services de garde doit tenir compte des besoins de garde multiples des familles - et ces besoins sont variés - qui ont des jeunes enfants et, que ce soit pour le travail ou pour d'autres raisons, les besoins de garde sont toujours présents.

Nous avons dû, dans ce cas-ci comme dans l'autre, nous limiter dans nos consultations et dans notre travail et notre mémoire ne couvre pas l'ensemble de la politique. Nous nous sommes davantage penchées sur les principes directeurs et les orientations. Cela ne veut pas dire que nous sommes d'accord avec d'autres parties du document, mais nous devions nous restreindre.

Nous nous Interrogeons aussi, comme organisme familial régional, sur le fait que nous n'avons pas de plan d'action à partir duquel nous pourrions faire l'évaluation de la politique des services de garde.

Nous vous ferons part de nos grands commentaires concernant les principes directeurs. Le soutien essentiel pour les parents, nous sommes d'accord avec ce principe, et pour tous les parents et non seulement pour les parents au travail, comme le laisse entendre le document. Pour nous, bien sûr, des mesures dans le monde du traval pourront facliter la tâche des parents qui sont travailleurs, mais I y a aussi des besoins en termes de garde lorsqu'on va recevoir des services de santé, lorsqu'on poursuit des études ou lorsqu'on veut participer à la vie communautaire. (15 il 15)

Que le milieu des services de garde soft un milieu de développement pour l'enfant, pour nous, cela va de soi puisque les services de garde doivent être le prolongement de la famille. Ils doivent donc permettre le développement Intégral de l'enfant Que ce développement des services de garde respecte les choix des parents, nous sommes complètement d'accord. Mais vous verrez que, dans certaines de nos recommandations, nous vous disons que nous ne trouvons pas que le document en tient compte puisqu'il va surtout dans le sens des services qui sont régis.

On parle de principes où I est question d'une préférence pour les services gérés par les parents. Nous sommes d'accord aussi avec cela pour autant qu'on aide les parents dans leur travail de gérer ces services et qu'on leur facilite la tâche.

Il y a une réaffirmation de l'autonomie des services de garde. On constate que l'application de ce principe a subi certaines entorses puisqu'l y a des lois qui sont édictées par l'Office des services de garde à l'enfance et I y a des permis qui sont accordés. Donc, nous ne voudrions pas que le développement des services de garde ne relève que de l'initiative des parents. Nous voudrions que le gouvernement continue de maintenir ses responsabilités en termes de développement des services de garde pour les enfants. Nous ne voulons pas enlever aux parents cette responsabilité, mais nous trouvons qu'elle peut parfois leur sembler très lourde à porter.

Qu'il y ait une responsabilité communautaire, nous sommes d'accord. Pour nous, ce principe reconnaît la contribution de ta famille à la société et la responsabilité de la société envers la famille.

Maintenant, pour ce qui est du développement des services de garde, c'est Mme Lise Grenon qui poursuivra.

Mme Grenon (Lise): Le développement des services de garde présenté dans le document d'orientation l'est uniquement en fonction des services régis par la loi. La lecture du tableau 4, à la page 25, indique que les préférences des parents, selon le mode de garde et l'âge de l'enfant, montrent toujours un pourcentage plus élevé pour ta garde au domicile de l'enfant, quels que soient l'âge et le temps de l'année, à l'exception des enfants de trois et quatre ans. Cette préférence n'est plus prise en considération dans l'ensemble des mesures et priorités proposées, sauf pour un projet expérimental.

Ceci nous amène à déclarer que, malgré l'annonce de la création de 60 830 nouvelles places sur une période de cinq ans, nous croyons que c'est insuffisant et Insatisfaisant puisque c'est échelonné sur une trop longue période et axé, dès te début, presque uniquement sur des services en institution, alors que la majorité des parents préfèrent la garde à domicile et n'ont d'autres moyens, non plus, que de recourir à des services non régis car, le coût étant trop élevé, I y a aussi une non-disponibilité des services et des horaires irréguliers pour certaines personnes qui travaillent dans des usines ou dans d'autres commerces.

En lien avec cette lecture de la préférence des parents et le constat que nous avons fait aussi, c'est le moyen le plus utilisé et nous vous demandons d'amender la Loi sur les services de garde à l'enfance afin de permettre que se constituent, sur le modèle des agences de garde en milieu famlial, des agences de gardiennes en milieu familial qui, elles, répondraient aux préférences des parents et ne demanderaient pas un budget d'implantation aussi élevé. Ce serait chaque famille qui offrirait le service et cela créerait un nombre encore plus grand de places.

Après avoir reçu une formation ou obtenu une reconnaissance de leurs acquis, ces personnes pourraient recevoir un permis et les parents pourraient, en choisissant ces personnes, profiter d'un programme d'exonération s'ils y sont admissibles. Ce serait une solution à l'accessibilité restreinte au programme d'aide financière pour les parents, tel que décrit à la page 59 du document. L'ensemble des familles aurait le choix du mode de garde des enfants et non pas seulement les familles dont le revenu peut le leur permettre. Nous croyons que c'est un moyen de valoriser et de favoriser la vie familiale.

Nous reconnaissons qu'il est nécessaire d'offrir et de développer une variété de services de garde en garderie en collaboration avec d'autres intervenants et d'assouplir certaines règles pour répondre aux besoins diversifiés des familles. Nous voulons cependant qu'il y ait un meilleur équilibre, tel que le dit le titre du document, dans la "priorisation* du développement des services pour répondre aux préférences des parents.

Un rééquilibrage, la garde en milieu familial. Toujours en lien avec la préférence des parents, nous nous posons également des questions sur la proportion du développement accordé à la garde en mlieu familial par rapport à la garde en garderie en fonction des besoins à combler décrits dans le tableau 6, surtout pour l'année 1988-1989, alors qu'on propose 210 places et que ça répond à 15 % des places. Par contre, dans les garderies, on prévoit instaurer 2331 places, alors que ça répond à 59 % des places.

Mme Godbout-Perreault: C'est maintenant 'Mme Normande Dolan qui poursuivra pour parler de la contestation que nous faisons de la priorité des services en milieu de traval.

Le Président (M. Thutinger): II reste deux minutes, madame.

Mme Dolan (Normande): D'accord. Le Conseil de la famille ne veut pas nier le besoin de garde en mlieu de traval, mais s'interroge plutôt sur le fait que le gouvernement veuDIe en faire une priorité. Par contre, la garde en milieu de traval présente de nombreuses difficultés; on en a énuméré plusieurs tout à l'heure et j'en ai ajouté une ici, le transport en commun avec les enfants, ce qui est souvent un obstacle pour se rendre au travail. De plus, elles s'ajoutent au fait que ce choix n'est pas présent dans les préférences des parents.

Il est reconnu aussi que les services ou entreprises qui assument leur responsabilité sociale et offrent les services de garderie en retirent des avantages concrets par le rendement supérieur de leurs employés. Il n'est donc pas nécessaire de leur accorder, en plus, des avantages financiers, donc des subventions. Une autre solution serait d'établir des liens avec des garderies existantes dans le quartier pour en faciliter l'utilisation par leurs employés, mais celles-ci ne seraient pas considérées comme des garderies en milieu de traval et n'auraient donc pas les inconvénients de la garderie en mlieu de travail.

Le service de garde en mlieu scolaire. Nous sommes d'accord avec l'une de vos priorités en ce qui concerne la garde en milieu scolaire. Il y a donc lieu de développer plus rapidement ce mode de garde et d'y apporter les modifications proposées afin de répondre aux besoins des familles spécialement lors des journées pédagogiques ou des congés scolaires. Plusieurs Instances pourraient aussi répondre aux besoins des familles, tels le service des loisirs, les loisirs socioculturels, selon les différentes particularités des régions.

La garde de courte durée: les haltes-garderies. Le parent au foyer, pour ne pas dire la femme au foyer, se réjouit de la mise en vigueur des articles 5 et 6 de la Loi sur les services de garde à l'enfance qui implique les services de halte-garderie et les jardins d'enfants. Ils répondront davantage aux besoins des parents qui s'occupent eux-mêmes de leurs enfants et qui ont des besoins de garde occasionnels, mais nécessaires pour des raisons de santé physique et mentale et d'engagement social, comme on l'a dit auparavant.

Nous regrettons, cependant, que l'octroi d'un soutien financier pour le démarrage de certains types de projets soit accordé seulement aux municipalités. On croit que l'initiative ne devrait pas seulement venir des municipalités, mais on devrait tenir compte aussi des organismes familiaux et communautaires.

Le Président (M. Thuringer): En conclusion, s'il vous plaît!

Mme Dolan: Cependant, la mise en vigueur de ces articles ne devrait pas causer la fermeture des services de halte-garderie que des communautés se sont donnés pour répondre à leurs besoins. Dans ce cas, la règle des droits acquis devrait s'appliquer car nous croyons qui n'est pas dans les intentions du gouvernement de vouloir diminuer les services, mais plutôt au contraire, de les augmenter. Merci.

Le Président (M. Thuringer): Merci. Mme la ministre.

Merci, M. le Président. Je me demande si j'ai bien lu votre mémoire, à la page 14, alors que vous mentionnez que vous êtes d'accord avec la formule d'exonération financière aux parents proposée par le gouvernement Est-ce exact?

Mme Godbout-Perreault: Lorsque nous nous plaçons du point de vue des parents, la formule d'exonération pourrait s'ajuster, augmenter. Notre position n'est pas du tout en fonction du financement des garderies comme tel, mais de la position des parents.

Mme Gagnon-Tremblay: Cela signifie que vous seriez d'accord avec la formule proposée quant à l'exonération financière aux parents.

Mme Godbout-Perreault: Les parents qui étaient présents à notre table étalent d'accord avec cette mesure qui pouvait tenir compte des augmentations qui se faisaient en cours d'année.

Mme Gagnon-Tremblay: Vous parlez également de crédit d'impôt non remboursable. D'autres intervenants, ce matin, nous ont parlé de crédit d'impôt remboursable. Vous nous demandez de transformer, si possible, les déductions pour frais de garde en crédit d'impôt non remboursable.

Mme Godbout-Perreault: De toute façon, madame, lorsqu'il est question d'une déduction, si les gens n'ont pas un revenu suffisant, elle ne leur sert absolument à rien. Alors, qu'il y ait un crédit, I y a parfois des chances qu'il puisse leur servir. Nous avons parlé de crédit non remboursable. Bien sûr, si le gouvernement voulait offrir un crédit remboursable, je ne crois pas qu'il y ait grand monde qui refuse, mais nous trouvions quand même qu'un crédit d'impôt pourrait être plus équitable pour les parents.

Mme Gagnon-Tremblay: À la page 9 de votre mémoire, le conseil demande d'amender la Loi sur les services de garde à l'enfance "afin de permettre que se constituent des agences de gardiennes au domicile de l'enfant sur le modèle des agences de garde en milieu familial." Est-ce que vous pouvez expliciter davantage cette idée?

Mme Godbout-Perreault: Voici, actuellement, en ce qui a trait aux agences de garde en milieu, il y a une agence qui regroupe plusieurs foyers. Lorsque nous parlons d'agences de gardiennes à domicile, nous parlons d'une agence qui engagerait des personnes en ayant vérifié leurs compétences; ensuite, ces personnes iraient garder au foyer des famïles. Donc, il y aurait une liste de gens qui pourraient garder au domicile des parents. C'est pourquoi, à un moment donné, nous disions qu'il n'y aurait pas de frais d'implantation. De la même façon, les frais d'implantation seraient pour le secrétariat de l'agence, mais le service serait offert dans les familes.

Mme Gagnon-Tremblay: SI vous avez pris connaissance de notre politique, nous suggérons à un moment donné que cette expérience soit faite par les agences de garde en milieu familial existant actuellement. Est-ce que ce serait suffisant pour vous ou si, malgré tout, vous aimeriez avoir une structure complètement différente des agences en milieu famlial?

Mme Grenon: II n'existe aucun service dans notre région. Il y a trois services de garde en milieu dans la Montérégie et, ailleurs, il n'en existe pas. Dans un rayon de 40 kilomètres, I n'existe aucun service de garde en milieu familial et de gardiennes non plus. Et le nombre de places en garderies subventionnées ou non subventionnées est très limité. Les parents n'ont pas le choix des services non gérés.

Mme Gagnon-Tremblay: Par contre, s'il existait des agences de garde en milieu familial, est-ce que vous seriez d'accord pour dire qu'elles devraient être en mesure d'offrir ces services ou, au moins, sur une base expérimentale ou si, même là, il faudrait avoir une agence complètement différente pour gérer ce genre de services?

Mme Godbout-Perreault: Je pense, madame, que ce que nous avons voulu faire, c'est que les parents aient le service, que l'agence soit strictement une agence de garde en milieu familial ou une agence qui regroupe les deux services. Actuellement, nous n'en avons pas fait l'évaluation. Ce que nous trouvons, par contre, c'est qu'on devrait offrir ce choix aux parents puisque leur préférence va vers des services à domicile.

Mme Gagnon-Tremblay: En somme, ce qui est important pour vous, c'est que ces parents à la maison puissent avoir une banque de données de noms de personnes fiables et compétentes pour pouvoir répondre à des besoins.

Mme Godbout-Perreault: C'est plus que cela, madame. Quand nous parlons d'agence, cela voudrait dire que des parents qui, selon leur revenu, auraient droit à l'exonération pourraient en profiter comme ceux qui actuellement utilisent les services régis.

Mme Gagnon-Tremblay: Oui. Mais c'est quant à l'application. J'essaie de voir comment pratiquement on peut appliquer cela, étant donné que le parent paie, d'une part, la gardienne...

Mme Godbout-Perreault: Oui.

Mme Gagnon-Tremblay: ...qui donne des reçus. Bon, ce qui veut dire que vous préféreriez que cette personne-là soit admissible à l'exonéra-

tion financière plutôt qu'aux déductions fiscales.

Mme Godbout-Perreault: Dans certains cas, pour certains parents, la déduction ne veut rien dire. Ils ont vraiment besoin de l'exonération. Alors, qu'un parent ait trois enfants chez lui et qu'il puisse profiter de l'exonération parce qu'une personne vient garder ses enfants chez lui ou qu'il prenne ses trois enfants et qu'il aille les conduire dans une autre famlle ou une agence de garde en milieu familial, puisque la personne en a une, et qu'à ce moment-là il puisse profiter de l'exonération, nous disons qu'il devrait être admissible au programme d'exonération et, à ce moment-là, ça lui permettrait d'avoir le service.

Mme Gagnon-Tremblay: Vous comprenez qu'en termes pratiques une gardienne qui aurait, par exemple, à garder un enfant, même si le parent est admissible à l'exonération financière, comment pourrait-elle avoir un salaire décent si elle ne garde qu'un seul enfant? J'essaie de voir comment on pourrait, sans pénaliser cette gardienne, mettre ce principe en oeuvre.

Mme Godbout-Perreault: C'est une expérience qui pourrait être tentée. On sait qu'actuellement il y a quand même beaucoup de femmes qui gardent un seul enfant.

Mme Gagnon-Tremblay: Est-ce que mon temps est écoulé?

Le Président (M. Thuringer): Non.

Mme Godbout-Perreault: Je voudrais aussi, si vous voulez me permettre, madame, vous parler de la qualité des services. J'aimerais que Mme Désilets puisse en parler un petit peu aussi. (15 h 30)

Mme Gagnon-Tremblay: Oui, il me reste encore trois minutes et j'avais une question. On pourra peut-être y revenir tout à l'heure. Il y a une question très importante. Vous parliez de la mise en vigueur des articles concernant les haltes-garderies ou les jardins d'enfants. Est-ce que vous vous êtes penchées sur ce que seraient, par exemple, les normes minimales qu'on devrait imposer aux haltes-garderies et aux jardins 'd'enfants? Jusqu'où peut-on aller dans l'application de ces normes? Est-ce que vous avez réfléchi à ça?

Mme Désilets (Murielle): Murielle Désilets. Je pense que les normes de qualité déjà établies pourraient s'insérer un peu dans ce volet. On parle de normes de qualité par rapport aux enfants, au personnel et aux éducateurs, mais aussi de toutes les normes techniques, assurances et tout ça. On ne voudrait pas que ces normes techniques, pour parler des autres volets, aient un impact en pénalisant les petits groupes comme tels à cause de leurs structures qui peuvent sembler énormes. Il y a une lacune que je porte personnellement et comme déléguée du Conseil de la famille, peut-être que le programme éducatif ne semble pas aussi détaillé que les normes de qualité, matériel technique et autre. On aimerait avoir, justement parce que vous avez la préoccupation d'une qualité constante dans tous les concepts et les choses du genre, un programme de qualité, mais plus détalé pour être en mesure de l'évaluer en cours de route.

Mme Gagnon-Tremblay: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Thuringer): Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Merci, M. le Président. Je salue le Conseil de la famille Richelieu-Yamaska et je retrouve avec plaisir Mme Perreault, je crois, oui, qui l'accompagne. C'est intéressant et Je me demandais, lorsque vous présentiez votre position sur la garde en milieu de travail, si le nouveau Conseil de la famille mis en place par le gouvernement au début de l'automne passé avait été consulté sur les priorités mises de l'avant dans l'énoncé de politique. Je ne le sais pas; je n'ai pas eu l'occasion de le vérifier, mais je crois que c'est une bonne occasion de le faire aujourd'hui puisque l'énoncé de politique a été publié à la fin de novembre. Je me demandais si un avis était parvenu à la ministre, soit du Secrétariat à la famille ou du conseil.

Mme Gagnon-Tremblay: Nous avons consulté le Secrétariat à la famille, mais, comme il s'agissait d'une politique gouvernementale, nous n'avons pas consulté le Conseil de la famille comme nous n'avons pas consulté le Conseil du statut de la femme. Ces consultations avaient eu lieu bien auparavant; nous connaissions déjà les différents besoins. Nous avons consulté, par contre, le Secrétariat à la famille.

Mme Harel: De toute façon, R sera intéressant, je pense, de suivre la question de l'avis que le Conseil de la famille aura à donner, je le souhaite, en tout cas, avant la fin de nos travaux, si ce n'est pas en présentant un mémoire, tout au moins que cela puisse se faire en présentant sa position devant la commission.

J'ai un certain nombre de questions à vous poser. Vous savez comme le temps file. Mme la ministre a fait état de votre appui à la nouvelle politique d'exonération. J'ai compris, selon votre présentation au tout début, que vous aviez eu relativement peu de temps pour fouiller cela attentivement. J'aimerais simplement vous signaler ce que nous en disait le Conseil du statut de la femme ce matin. Cela vous Intéressera peut-être. C'est à la page 51 de son mémoire. Il fait valoir que, bien que la nouvelle formule soit plus généreuse, l'exonération accordée est peu importante lorsqu'on s'approche des seuls. Là, les exemples qui nous sont donnés portent sur un

revenu familial de 22 000 $ alors que la famille monoparentale ayant un enfant en garderie bénéficiera d'une exonération quotidienne de 3.15 $ et devra donc débourser 12.85 $.

Une de mes collègues, qui n'est pas ici cet après-midi, parce qu'elle est remontée à Chicoutimi, Mme Blackburn, a fait te calcul que 12.85 $ par jour, même à 250 jours-année, c'est au-delà de 2200 $ et que. si le même chef de famille monoparentale au môme revenu de 22 000 $ avait un enfant à l'université. Il serait complètement exempté de toute contribution parentale parce que le revenu serait jugé insuffisant et 1 aurait droit pleinement au régime des prêts et bourses. Donc, finalement, cela coûterait beaucoup plus cher d'avoir un enfant à la garderie qu'à l'université à ce niveau de revenu. Alors, Je vous invite peut-être à lire les illustrations qui sont faites de manière à réexaminer la question de l'exonération, si tant est que vous le Jugiez à propos.

Deux aspects de votre mémoire m'intéressent plus particulièrement. Vous souhaitez des services de halte-garderie et des jardins d'enfants. Vous les souhaitez rapidement. Vous dites que ce serait malheureux que ce soient seulement les municipalités qui obtiennent un financement pour les organiser. Vous signalez que les organismes familiaux communautaires pourraient aussi être considérés comme des partenaires dans l'implantation de ces services. Je sais que vous avez de l'expertise là-dessus. Je voudrais vous entendre à ce sujet.

Je vous rappelle que le programme d'exonération n'est pas ouvert actuellement pour ce genre de services. Est-ce qu'il y aurait là aussi matière à corriger cette lacune? Après, je voudrais vous entendre sur la garde en maison privée. J'aimerais revenir là-dessus.

Mme Godbout-Perreault: Lorsqu'il est question des haltes-garderies, comme l'a dit Mme Dolan tout à l'heure, pour nous, ce serait une façon de reconnaître que les parents ont aussi d'autres besoins de garde que de leur offrir un service.

Nous n'avions pas le temps d'aller jusqu'à discuter de l'exonération et de l'accessibilité. Ce sont des programmes assez compliqués. Pour des familles qui essaient de se comprendre parmi tous ces programmes, c'est vraiment très compliqué pour eux Mous avons tenté d'avoir un service qui soit au moins accessible et nous n'avons pas été plus loin dans les discussions sur le financement

Mme Harel: Merci. Je remercie mon adjoint parce que je me rappelais avoir vu dans un mémoire qu'il était fait mention de la forte popularité des services de garderie auprès des parents d'enfants de trois et quatre ans; c'est dans le mémoire de la COFAQ qui vous précédait.

Mme Godbout-Perreault: Dans le nôtre aussi.

Mme Harel: Ne craignez-vous pas le fait que dans le programme APPORT le mode de financement ne soit laissé entièrement au choix du parent participant au programme. Le remboursement n'est pas obligatoirement fait à l'Intérieur d'un mode de garde reconnu. Donc, il y a déjà une ouverture pour une garde dans un service qui n'est pas reconnu. C'est tout nouveau. Est-ce bien la voie dans laquelle I faut s'engager? La question que je vous pose est la suivante: Est-ce qu'il y a une socialisation - on connaît la taille des familles maintenant et on sait que l'enfant a peu d'occasions d'apprendre avant d'arriver à l'école, qui n'est pas le champion entre tous et qu'il y a beaucoup de champions du même âge. Est-ce que l'absence d'un milieu stimulant, l'absence de créativité, de socialisation ne pourrait pas être un handicap pour l'enfant? En élaborant une politique de la petite enfance, ne devrait-on pas penser à des modes de garde où les enfants sont finalement appelés à un développement plus grand parce que en contact les uns avec les autres?

Mme Godbout-Perreault: Lorsque nous parlons de tenir compte des préférences des parents, nous avons dit dans notre document qu'à l'exception des parents d'enfants de trois ans et quatre ans où on parie de garderies et de jardins d'enfants, on reconnaît très bien qu'à certains moments ils peuvent utiliser ces services justement pour permettre à leur enfant de socialiser.

Avec les sondages et la consultation des parents de notre milieu, nous en sommes venus à constater que leur choix était davantage de services à domicile ou en milieu familial, c'est-à-dire avec des groupes plus restreints.

Mme Harel: Mais quand vous dites à domicile, pour vous, ça va jusqu'à la garde d'un seul enfant.

Mme Godbout-Perreault: Oui. À domicile. On dit que des services de poupons sont très difficiles à obtenir. On regarde aussi les services de santé. On dit que des jeunes enfants en contact avec un nombre Important d'autres enfants sont plus susceptibles d'être malades souvent. Donc, ce n'est pas nécessairement mauvais qui y ait un peu moins d'enfants. Mais notre position est plus en termes de choix des parents. Quand les parents font ce choix, si on veut dire qu'on respecte leur choix, on doit tenir compte de ce qu'ils choisissent.

Mme Harel: Dans l'ordre des priorités, parce que je me rappelle le mémoire de la COFAQ que j'ai devant les yeux, vous recommandiez un développement plus rapide que celui annoncé dans l'énoncé de politique des services de garde en garderie. Je ne sais pas si le Consei de la famille Richelieu-Yamaska partage la même opinion.

Mme Dolan: Je m'excuse, je me nomme Normande Dolan. On réalise que le nombre de places accessibles ou disponibles pour les trois années à venir, dans le projet, en fin de compte, est peu réaliste compte tenu des besoins des parents. Je pense que, si on veut demeurer réaliste, iI ne faut pas non plus dire que tous les enfants vont aller dans un milieu de garde, en tout cas, reconnu ou géré. C'est pour ça aussi qu'on avait laissé une porte ouverte pour dire qui faudrait peut-être tenir compte aussi des garderies existantes et qu'elles aient droit à des acquis et que les parents ne soient pas pénalisées par rapport aux autres garderies, que ce soit, en fin de compte, un choix libre des parents d'envoyer leurs enfants dans une garderie non gérée.

Mme Harel: Est-ce que c'est un choix libre quand I n'y a pas de services?

Le Président (M. Thuringer): En conclusion, Mme la députée.

Mme Harel: Est-ce que c'est un choix libre quand, d'une part, comme vous le mentionnez, le choix est freiné par l'absence de places disponibles ou par l'absence d'un service à proximité de la maison ou par les coûts?

Mme Grenon: Je ne pourrai pas répondre à cela par des statistiques. Dans notre région, la région Richelieu-Yamaska, il y a 43 places de poupons. Je sais, après avoir fait, chez moi, un petit sondage, que les mères sont obligées de retourner travailler après un mois d'allaitement. Elles choisissent quoi? il n'y en a presque pas de services de garderie, d'aucune façon.

Mme Harel: En conclusion, est-ce que vous pensez que les mères choisiraient un congé parental ou un congé de maternité?

Mme Godbout-Perreault: Vous me permettrez d'ajouter quelque chose là-dessus. C'est une mesure complémentaire que nous avions abordée dans notre document, c'est-à-dire qu'on sait que ça ne relève pas strictement de vous, Mme Tremblay, et de votre gouvernement, mais nous vous proposions des mesures complémentaires, que le programme de prestations de congé au moment de la naissance soit allongé et que la période allongée soit un congé parental, pris soit par le père ou par la mère, de façon à rendre ce congé jusqu'à 26 semaines, ce qui ferait que ça serait sans doute une solution pour les tout petits enfants.

Le Président (M. Thuringer): Merci. Mme la ministre.

Mme Gagnon-Tremblay: En conclusion, mesdames, je prends bonne note que vous êtes en accord avec la formule d'exonération financière aux parents. On peut être en accord avec la formule. On peut être en désaccord, par contre, avec les sommes qui sont allouées. On peut tout simplement se questionner et vouloir avoir davantage d'argent pour répondre à cette formule, mais vous êtes quand même en accord avec cette formule d'exonération. Je vous remercie de votre Intervention. Vous avez quand même soulevé quelque chose de très intéressant quant à la garde en milieu familial, par exemple, la garde à domicile. Je pense qu'il y a quelque chose qui pourrait être fait concernant l'expérimentation pour certains types de services, entre autres, pour la garde de nuit, la garde occasionnelle, les périodes un peu plus compliqués, là où c'est très difficile d'avoir des gardiennes ou d'avoir ces services actuellement dans les types des service connus. Je pense que vous avez quand même, à mon avis, une piste qu'il est important de vérifier et qu'il faut expérimenter ce champ d'activités. Je vous remercie beaucoup, mesdames.

Le Président (M. Thuringer): Merci, Mme la ministre. J'aimerais remercier aussi le Conseil de la famille Richelieu-Yamaska et j'invite le comité régional de la Fédération de la famille de Québec à s'approcher, s'il vous plaît, et à s'identifier. Vous avez 10 minutes pour la présentation et 20 minutes de discussions. Pouvez-vous vous identifier, s'il vous plaît? (15 h 45)

Comité régional de la Fédération de la famille de Québec

Mme Pichet-Bédard (Johanne): Oui. Je représente la Fédération de la famille de Québec, région 03. Nous faisons partie de la Confédération des organismes familiaux du Québec, mais nous représentons les familles de la région 03. La Fédération de la famille de Québec regroupe 25 organismes familiaux et parle au nom de 30 000 familles de la région 03. Mon nom est Johanne Pichet-Bédard, coordonnatrice des activités de la fédération. J'ai été aussi la personne mandatée pour rassembler les organismes afin de former le comité régional. À ma droite, Mme Monique Maltais, qui a participé au comité régional et qui vient du réseau Nouveaux Sentiers, familles monoparentales; à ma gauche, Mme Alice Landry, représentant la Maison de la famille de Limoilou, à Québec.

Le Président (M. Thuringer): Merci.

Mme Pichet-Bédard: Mme la ministre, messieurs et mesdames, membres de la commission parlementaire sur les services de garde à l'enfance, pour la première fois dans la région de Québec, des associations de parents se sont rassemblées pour prendre la parole sur des besoins communs et des principes de base au sujet de l'énoncé de politique sur les services de

garde à l'enfance.

Le comité régional de la Fédération de la famille de Québec regroupe six associations et services pour enfants. La fédération est le porte-parole de plus de 35 000 familles de la région dont les enfants fréquentent actuellement les milieux préscolaires et scolaires. Elles se sont regroupées parce qu'elles portent depuis plus de 20 ans des préoccupations communes concernant les services offerts en milieu de garde.

Les organismes famliaux ont pris la parole à ce sujet dès 1970. Au cours des discussions en vue de la présentation de ce mémoire, les membres du comité régional ont été unanimes sur les sujets suivants: premièrement, services de garde et responsabilités des femmes. Nous croyons que tes services de garde constituent un élément organisationnel important dans la conciliation des responsabilités familiales et professionnelles. Cependant, la garde des enfants doit interpeller l'autre parent. Selon notre point de vue, le rôle du père fait partie de la dynamique des rôles parentaux. Il est important dans une optique familiale que la garde des enfants ne soit pas associée unilatéralement aux responsabilités socio-économiques des femmes.

Deuxièmement, la non-reconnaissance des parents comme partenaires à part entière dans les milieux de garde. Dans la structure administrative proposée des services de garde, il est fréquent que l'on doute de la qualité de l'engagement des parents et de leur compétence. Les lieux où les parents sont appelés à collaborer ont déjà démontré avec évidence que les enjeux discutés reflètent davantage les intérêts d'un financement anticipé et d'un bon fonctionnement administratif, plutôt que le bien-être des enfants dans une coresponsabilité parents, éducateurs et éducatrices. De plus, nous interrogeons la sursollicitation des parents en milieu de garde. La collaboration des parents ne devrait pas se référer uniquement à la notion de personnel bénévole toujours disponible.

Troisièmement, l'importance de reconnaître le droit des parents au choix de services de garde, c'est-à-dire le choix du mode de garde qui répond le mieux aux besoins de l'enfant et à l'organisation propre à son milieu familial. De zéro à deux ans, les parents ont affirmé préférer la garde au domicile de l'enfant dans le présent énoncé, quelles sont les mesures pour améliorer ce mode de garde? Pourquoi le présent document met-il la priorité sur le mode de garde en garderie? Les différents modes de garde font l'objet de mesures de développement que nous pouvons qualifier d'inégales. Le développement de la garde en garderie en milieu de traval fait l'objet de préoccupations particulières dans le présent énoncé: Améliorer les conditions de garde des enfants, en collaboration avec les employeurs, est souhaitable, mais pourquoi ce mode plutôt qu'un autre?

Quatrièmement, la politique d'intégration des enfants handicapés. Nous remarquons l'absence de référence à la politique d'intégration des enfants handicapés, telle que proposée en 1983. Ce document de consultation démontre l'importance de la stimulation et les enjeux à long terme concernant l'intégration de ces enfants en bas âge, dès la garderie, et ce, dans un esprit de partager collectivement et équl-tablement cette responsable, au lieu de faire reposer les coûts essentiellement sur les parents de cette clientèle.

Le financement des services de garde. Selon les modes de subventions proposes, les parents ne semblent pas avoir de prise sur des hausses graduelles de tarifs. Le présent énoncé ne semble pas se préoccuper de la capacité réelle du parent de payer des services de garde.

Nous terminons notre intervention auprès de la commission en réitérant que la participation des organismes familiaux à cette consultation ne devrait pas être perçue comme étant optionnelle. L'adoption d'une politique sur les services de garde constitue, selon l'énoncé, un élément de premier plan d'une politique familiale. En novembre dernier, nous n'avons reçu aucune information sur les conditions de participation à cette consultation. Les organismes familiaux font la démonstration depuis plus de 20 ans de l'urgence d'une politique familiale pour le Québec. Les familles membres de notre regroupement se voient de plus en plus contraintes par l'État à poursuivre un rôle social restreint, c'est-à-dire celui d'un filet de sécurité sociale. Une politique familiale permettrait de rétablir l'équilibre dans une coresponsabilité État-familles, c'est-à-dire démarrer un processus visant à une transformation du rôle de l'État en fonction du rôle social de la famille et non pas l'inverse. Je vous remercie.

Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie, Mme la présidente. Mme la ministre.

Mme Gagnon-Tremblay: Oui, merci, Mme la présidente, de votre intervention. J'aurais quelques questions et, compte tenu de la période de temps qui nous est allouée, je vais m'adresser immédiatement à vous pour la première question. Vous mentionnez, à la page 6 de votre mémoire, qu'en milieu scolaire et dans les municipalités vous constatez qu'il y a une sursollicitation des parents et une sous-utilisation de leur collaboration. Alors, les parents veulent être considérés comme des partenaires à part entière. Qu'entend-on par sursollicitation des parents et sous-utilisation de leur collaboration?

Mme Pichet-Bédard: Ce que nous constatons dans la région, et nous l'avons aussi développé concernant le mémoire que nous avons présenté sur la réforme de l'instruction... On entend par sursollicitation que les parents sont demandés, à plusieurs étapes, pour intervenir surtout comme gestionnaires. Ils ne sont pas toujours intégrés dans un processus d'information continue de

façon à pouvoir prendre la parole autant comme parent que comme gestionnaire. Souvent, on va leur demander de s'exprimer d'abord comme gestionnaire. Cela leur prend un certain temps avant d'être famliers. Alors. Ils sont sursollicités, c'est-à-dire qu'on leur demande souvent de participer, mais ils n'ont pas toujours le temps d'acquérir une compétence pour développer leur droit de parent, leur connaissance du milieu et vraiment agir en conséquence. C'est vite pour la plupart d'entre eux; cela va trop vite.

Mme Gagnon-Tremblay: Parlez-vous uniquement du milieu scolaire à ce moment-là ou si vous parlez également des autres types de garderie?

Mme Pichet-Bédard: Les autres types aussi.

Mme Gagnon-Tremblay: Les autres types de garderie.

Mme Pichet-Bédard: Les autres types de garderie.

Mme Gagnon-Tremblay: Ce qui signifie que le fait pour les parents de gérer au conseil d'administration, d'être présents aussi au moment où il y a des enfants à la garderie, mais de devoir quitter par la suite, il se fait une rotation qui, à votre avis, ne permet peut-être pas aux parents de jouer un rôle qu'on souhaiterait leur voir jouer.

Mme Pichet-Bédard: Oui. Ce qu'on veut mettre en évidence, c'est que les parents qui sont gestionnaires, les parents qui ont une responsabilité au consel d'administration doivent être conscients qu'ils doivent préparer une relève. L'information doit circuler, c'est-à-dire que les parents qui vont venir, à un moment donné, dans le circuit doivent être préparés. Les parents ne peuvent pas s'improviser à un conseil d'administration pour comprendre les enjeux du développement de la garderie, le stade où la garderie en est. Nous considérons qu'à ce moment-là, si ce processus n'est pas respecté, cela fait un milieu de garde où on répète toujours les mêmes choses, que les permanents ont un poids décisionnel beaucoup plus grand que les parents, parce que les parents doivent développer une compétence. Il faut leur laisser un certain temps pour le faire.

Mme Gagnon-Tremblay: Par contre, ce que vous avez pu réaliser ou lire dans la politique, c'est un peu ce vers quoi le gouvernement vise actuellement: une certaine stabilité dans les conseils d'administration pour permettre justement d'éviter ces types de problèmes que vous venez d'énumérer.

Mme Pichet-Bédard: Oui, on en avait pris connaissance, mais les parents dans ta région 03 nous avaient demandé de le porter à votre attention.

Mme Gagnon-Tremblay: Oui. La deuxième question concerne la garde estivale. À la page 8 de votre mémoire, vous déplorez que rien ne soit prévu pour la clientèle des 10-16 ans. Vous savez comme moi qu'en vertu de la Loi sur les services de garde à l'enfance cette clientèle des 12-16 ans n'est pas sous la juridiction de l'Office des services de garde à l'enfance. Par contre, croyez-vous que les besoins de cette clientèle très précise doivent être davantage liés aux loisirs qu'à la garde proprement dite ou si vous croyez qu'on doit continuer à leur donner plutôt des services de garde?

Mme Pichet-Bédard: À la page 8? Attendez un peu.

En fait, nous voulions porter à votre attention la capacité que l'Office des services de garde à l'enfance a d'interpeller les municipalités là-dessus. C'est cet aspect que nous voulions porter à votre attention.

Mme Gagnon-Tremblay: D'accord. Une autre question concernant les enfants handicapés. À la page 9 de votre mémoire, vous mentionnez qu'il serait nécessaire de réajuster la subvention de base avant de l'indexer régulièrement en ce qui concerne les enfants handicapés. Quel type de partage suggérez-vous? Par exemple, est-ce une plus grande part de l'État par le biais de l'office, quel que soit le besoin, ou si ce pourrait être des coûts supplémentaires en santé qui pourraient être remboursés à l'Office des services de garde à l'enfance ou qui pourraient être partagés avec l'Éducation ou avec les parents? Quel type de partage suggérez-vous lorsque vous parlez de la nécessité de réajuster la subvention de base avant de l'indexer? Est-ce, tout simplement, carrément l'office qui devrait penser à réajuster les 14 $ par jour avant d'indexer? Est-ce que c'est ce que vous voulez dire? Est-ce que j'ai bien compris?

Mme Pichet-Bédard: Je vais répondre de mémoire à cette partie. La personne qui devait être présente pour défendre cette partie de notre mémoire a de la mortalité dans sa famille. Elle ne peut pas être présente aujourd'hui. Je me rappelle qu'Anne avait développé ça avec nous et que la préoccupation qu'elle avait semblait venir de l'État. C'est-à-dire qu'elle trouvait que... C'est difficile. C'est un secteur avec lequel je suis beaucoup moins... J'aimerais mieux faire la recommandation par écrit...

Mme Gagnon-Tremblay: D'accord. Vous pourriez nous la faire parvenir.

Mme Pichet-Bédard: ...comme Mme Harel le proposait.

Mm Gagnon-Tremblay: D'accord, madame.

Mme Pichet-Bédard: Anne Vigneault n'est pas ici. Je trouve ça.

Mme Gagnon-Tremblay: II n'y a pas de problème, madame.

Mme Pichet-Bédard: C'est un problème trop spécifique pour nous.

Mme Gagnon-Tremblay: D'accord. Vous pourriez nous faire parvenir cette recommandation par écrit Est-ce possible?

Mme Pichet-Bédard: Oui. Est-ce que ça te revient?

Mme Landry (Alice): Oui. Alice Landry. Par ailleurs, à la fédération, nous nous disions qu'il y avait une question d'équité sociale, à savoir que, selon nous, iI revenait à l'ensemble de la société d'assumer un surcroît de coûts pour une clientèle handicapée. Il y avait cet aspect qu'on reprenait à notre compte.

Mme Gagnon-Tremblay: Vous dites également, à la page 10 de votre mémoire, que le programme d'exonération financière ne répond pas aux besoins des familles à revenu moyen. Tout en croyant que cette formule ne répond pas aux besoins des familles à revenu moyen, est-ce que vous constatez, par contre, que la nouvelle formule va y répondre mieux qu'auparavant puisque les nouvelles familles y seront admissibles et aussi que les actuels bénéficiaires seront mieux soutenus que selon le tarif actuel? Comme je le mentionnais tout à l'heure, on peut être en accord ou en désaccord avec la formule. On peut être d'accord avec la formule, mais on peut peut-être être en désaccord avec les sommes allouées. Mais, en ce qui concerne le dynamisme de la formule, êtes-vous d'accord pour dire que même si, pour vous, ça ne répond pas, cela répond quand même mieux que la formule actuelle?

Mme Pichet-Bédard: Cela répond mieux que la formule actuelle.

Mme Gagnon-Tremblay: Merci, madame.

Le Président (M. Bélanger): Merci, Mme la ministre. Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Merci, M. le Président. Je veux donc également saluer à la fois le comité régional de la Fédération de la famille de Québec... Vous représentez la Maison de la famile aussi, Je crois?

Mme Landry: Je suis membre déléguée, oui. Mme Harel: C'est un peu comme la Maison des parents ici, dans la région de Québec?

Mme Landry: C'est un peu l'équivalent C'est semblable.

Mme Harel: À ce qu'on connaît à Montréal sous le vocable Maison des parents.

Mme Landry: C'est semblable.

Mme Harel: Le constat que vous faites... Est-ce la première fois que vous venez présenter un mémoire en commission parlementaire?

Mme Pichet-Bédard: Non. Nous sommes venues lors de la réforme de la Loi sur l'instruction publique.

Mme Harel: D'accord. Lors de l'étude du projet de loi 107.

Mme Pichet-Bédard: Oui.

Mme Harel: Dans votre mémoire, à la page 6, vous mentionnez que, d'une façon générale, en milieu scolaire, dans les municipalités, II y a sursollicitation des parents et sous-utilisation de leur collaboration. Vous faites un constat assez général. Vous le faites de façon plus spécifique en disant: "Nous constatons également, d'une façon unanime, la non-reconnaissance des parents comme partenaires à part entière en milieu de garde." C'est un constat très sévère. En fait, cela m'étonne beaucoup. Je ne sais pas, cela peut dépendre des expériences menées dans chacun de nos milieux respectifs. Quand vous dites "d'une façon unanime", est-ce que c'était de la part de parents qui siègent à des conseils d'administration de services de garde? (16 heures)

Mme Pichet-Bédard: De parents qui étalent aussi à des comités de parents et à des...

Mme Harel: Dans des garderies.

Mme Pichet-Bédard: ...conseils d'administration...

Mme Harel: À but non lucratif.

Mme Pichet-Bédard: ...à but non lucratif. C'est le reflet de la région 03.

Mme Harel: Vous avez consulté... Votre échantillonnage était composé de combien de personnes?

Mme Pichet-Bédard: Six organismes étalent représentés au comité régional. C'est à peu près unanime. Il y en avait six sur six qui constataient..

Mme Maltais (Monique): Si Je peux ajouter quelque chose.

Mme Harel: Oui. ça m'intéresse beaucoup parce que j'ai l'impression que c'est peut-être une sorte de sentiment généralisé dans tes organismes familiaux. mate à l'égard de l'ensemble des institutions. Cela m'intéresse d'autant plus que, s'il y a un milieu où les études faites prétendent qu'il y a implication des parents et gestion directe, c'est bien celui des services de garde. Alors, votre réflexion m'apparaissait contraire à ce qu'on entend habituellement et à ce que les études démontrent habituellement.

Une voix: D'accord.

Mme Maltais: L'implication des parents, en effet, a lieu dans le domaine des garderies, mais on n'a pas l'impression d'être sollicités pour vraiment ce qu'on est capables de donner aussi. Lorsqu'on nous sollicite, par exemple pour faire de la peinture à la garderie, je me dis que c'est quand même intéressant Au conseil d'administration, on nous apporte des choses; c'est de la gestion en tant que telle. On parle beaucoup aussi... Nous parlions beaucoup, en tout cas je pense, du projet éducatif en tant que tel, soit dans les garderies ou...

Mme Harel: êtes-vous membre du conseil d'administration, vous-même?

Mme Maltais: Dans une garderie? Mon mari, oui.

Mme Harel: Votre conjoint... Mme Maltais: Oui.

Mme Harel: ...siège actuellement à un consel d'administration.

Mme Maltais: Au conseil d'administration d'une garderie et j'ai travaillé dans une garderie. J'ai aussi été membre d'un comité qui existait à la garderie, un comité de publicité où... J'étais bénévole dans une garderie, celle où allait ma fille. Je me dis... On nous demandait des choses, mais c'était quand même limité. On était sursollicités pour plein de choses. On disait: Impliquez-vous, les parents, faites quelque chose. On en , faisait, mais on avait aussi l'impression d'être capables de donner plus. Je ne sais pas si vous pourriez ajouter.

Mme Harel: C'est intéressant parce qu'il y a vraiment un point de vue... Je regrette beaucoup que le Conseil de la famille n'ait pas encore donné d'avis sur l'ensemble de l'énoncé de politique et je ne sais pas s'iI le fera. Mais je trouvais ça Intéressant que vous veniez exposer votre point de vue. Je me demandais si le fait que, comme vous le disiez - c'est important quand même que vous le mentionniez... Comment le signaliez-vous? Il est peu question du projet éducatif, je crois; en fait, dans votre mémoire, vous le mentionniez...

Mme Maltais: "II est fréquent que l'on doute de la qualité de l'engagement des parents." C'est peut-être là que vous...

Mme Harel: Oui.

Mme Maltais: Et on dit: "et de leur compétence parentale."

Mme Harel: À quelle page déjà? Mme Maltais: La page 7, en haut

Mme Pichet-Bédard: Dans la partie en italique.

Mme Harel: Ah oui!

Mme Maltais: "II est fréquent que l'on doute de la qualité de l'engagement des parents et de leur compétence parentale alors que ceux-ci devraient être considérés comme des partenaires dans le réseau des services de garde."

Mme Harel: Par ailleurs, dans le fond, ils sont partenaires puisque c'est sans doute... De façon institutionnelle, ce n'est pas dans le milieu scolaire, même avec la loi 107, que les parents ont directement un mot à dire comme usagers. Dans le fond, c'est le modèle, le seul qu'on connaisse, finalement, dans notre société où les parents, comme usagers, ont voix directe au chapitre, c'est bien dans le modèle des services de garde reconnus.

C'est intéressant de voir qu'il y a encore matière à amélioration. Vous mentionniez que ce n'est pas - je crois que c'est à la page 6 - là que peut se discuter la question parentale. Est-ce parce que les services ne se débattent pas dans des problèmes immédiats, au jour le jour, qui fait que l'ensemble des intervenants, qu'ils soient parents usagers ou travailleurs ou travailleuses, finalement dans la gestion même, ne sont pas en mesure d'aborder des questions de perfectionnement, de ressourcement, du fait d'avoir à combler jour après jour le défi de faire rouler, finalement...

Mme Pichet-Bédard: La garderie.

Mme Harel: ...la garderie? Mme Maltais: Oui.

Mme Harel: Est-ce que c'est un des facteurs?

Mme Landry: Je pense que c'est beaucoup plus une question d'attitude de fond. Je pense que c'est un problème qui est d'ordre collectif aussi. C'est toute la considération ou le peu de

considération ou le manque total de considération qu'on a envers la notion de parentalité en fin de compte. Alors, dès qu'on a un enfant qui part de la maison pour aller soit à la garderie en milieu scolaire ou autrement. lI y a toujours des gens qui sont là pour nous dire qu'ils sont très compétents. On peut être soi-même enseignant..

Mme Harel: Mais, en milieu scolaire, le modèle est différent. Je ne crois pas qu'il y ait partenariat en milieu scolaire. Je crois que la garde en milieu scolaire, n'étant pas régie par les mômes dispositions, finalement copie plus le modèle traditionnel scolaire.

Mme Landry: Oui. Par alleurs, je suis membre d'un comité d'école et j'ai encore là l'ilusion de participer à quelque chose et d'être partenaire. C'est ce qu'on me répète une fois par mois, que je suis partenaire.

Mme Harel: Oui. Je le comprends. Je trouve ça Intéressant que vous le mentionniez parce que le comité d'école, c'est le modèle scolaire. Et, justement, le modèle scolaire est resté le modèle traditionnel d'une parentalité en marge. Même la loi 107 vient finalement consolider ce modèle-là. Mais, comme je le mentionnais, le seul modèle différent où les parents usagers ont voix au chapitre directement, c'est celui des services de garde.

Mme Pichet-Bédard: Mais, Mme Harel, la nuance qu'on veut faire, c'est que même actuellement, dans le milieu des services de garde, c'est comme dans d'autres milieux Même si le parent peut participer à un conseil d'administration ou à d'autres comités de travail, on constate là comme ailleurs la non-reconnaissance du rôle social du parent. C'est ce qu'on constate là aussi. C'est la seule nuance qu'on apporte. Ce n'est pas facile, même là, d'être parent, de porter nos préoccupations de parents également. Il y a tout le roulement des garderies. Il y a toute la question de la gestion qui prend beaucoup d'énergie. Cela demande du temps et de l'énergie à un parent pour se mettre à jour, pour être un gestionnaire compétent.

Mme Harel: Oui, parce que c'est évident que gérer la précarité est plus difficile que gérer...

Mme Pichet-Bédard: Que gérer l'abondance. Mme Harel: ...l'aisance. C'est bien évident.

Mme Pichet-Bédard: Oui, les familles le savent toutes.

Mme Harel: Je regardais juste les salaires des travailleuses en garderie, 253 $ par semaine en moyenne. Il est évident que dans ce contexte-là et compte tenu de l'absence, je pense, de budgets afférents au ressourcement du personnel ou à sa participation à des activités de formation autres, iI peut y avoir un moment où l'ensemble des énergies sont converties à faire simplement fonctionner.

Mais je pense bien que tout le monde peut prendre bonne note des réflexions que vous nous faites. La question est de savoir comment tous les milieux, scolaire, municipal, que vous mentionnez peuvent approcher différemment les parents. Vous n'êtes pas très explicites sur ça dans votre mémoire.

Mme Pichet-Bédard: Non, c'est un constat général. On avait six représentants d'organismes à notre table qui disaient: On ne se retrouve pas comme partenaires dans ces milieux-là. C'est un petit échantillonnage, si vous voulez, mais 1s constataient une tendance. Mais c'est dans la ligne, comme je l'ai dit tout à l'heure, d'une non-reconnaissance de l'importance du rôle social du parent.

Le Président (M. Bélanger): Mme la députée de Maisonneuve, si vous voulez remercier le groupe.

Mme Harel: Oui. Je vous remercie... Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Harel: Je vais vous inviter à continuer votre réflexion. Je vous dis qu'elle est intéressante mais elle est à l'état d'ébauche parce qu'à force de tout arroser on n'atteint pas la cible exacte que l'on poursuit. Là, d'une certaine façon, je comprends que c'est comme un cri du coeur. Vous dites que l'ensemble ou presque des milieux auxquels nous avons affaire, scolaire, municipal et de garde, ne reconnaissent pas notre rôle social. De quelle manière devraient-ils le reconnaître? J'ai l'impression qu'il devrait y avoir continuité dans la réflexion sur ça. Je vous remercie.

Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. Mme la ministre.

Mme Gagnon-Tremblay: Oui, M. le Président. Ce que je retiens de votre intervention, mesdames, me laisse un peu songeuse parce que je constate finalement que ce que vous semblez nous dire aujourd'hui, c'est qu'on sollicite beaucoup les parents pour des menus travaux dans les garderies. Lorsque vient le temps de les solliciter pour de la gestion véritable comme on devrait le faire, à ce moment-là, on consulte très peu et c'est quelqu'un d'autre, finalement, qui prend les décisions. Je dois vous dire - par contre, je voudrais vous encourager - que les nouvelles formules que nous apportons vont donner aux parents ce véritable pouvoir de gestion qu'ils avaient et dont iIs doivent absolument jouir. Ces nouvelles formules de finance-

ment sont justement faites en fonction d'une responsable et d'une gestion des parents.

Je vous remercie infiniment, mesdames, pour votre présentation.

Le Président (M. Bélanger): La commission remercie le comité régional de la Fédération de la famille de Québec et elle invite à la table l'Organisation mondiale de l'éducation préscolaire, l'OMEP. section Canada, représentée par Mmes Madeleine Baillargeon, Françoise Julien, Rolande Filion et Hélène Tardif.

Mesdames, nous avons une heure à votre disposition. Vous avez donc 20 minutes pour présenter votre mémoire; ensuite, il y aura une période de discussion de 40 minutes avec les membres de la commission. Avant de procéder à la présentation de votre mémoire, je vous demanderais de bien identifier votre porte-parole et de présenter vos collaboratrices ou vos compagnes.

Organisation mondiale de l'éducation préscolaire,

section Canada

Mme Baillargeon (Madeleine): Je suis Madeleine Baillargeon, présidente d'OMEP-Canada. Je suis accompagnée de Françoise Julien, à ma gauche, notre trésorière, et de Rolande Filion, responsable de notre bulletin de nouvelles; Mme Tardif fait quelque chose d'important: un bébé. Alors, elle est absente; elle n'a pu se joindre à nous.

Je vais me limiter à une présentation assez brève de notre organisation. Nous sommes un organisme canadien qui existe depuis les années cinquante. Nous sommes membres de l'Organisation mondiale de l'éducation préscolaire; nous sommes le représentant du Canada à cette organisation. La structure de notre organisation fait que des régions ou provinces sont représentées et le Québec est une de ces provinces, une province très active dans notre organisation. L'exécutif actuel est formé entièrement de membres québécois, à l'exception de la présidente sortante, et la majorité de ses membres sont québécois. C'est donc à ce titre qu'on a jugé qu'on avait un certain regard sur la situation québécoise des services de garde et qu'on est venues présenter notre position sur l'énoncé de politique.

Peut-être aussi pour vous situer, disons que notre type d'organisation comporte des organismes membres et des individus membres. La majorité des personnes sont actuellement des gens qui travaillent dans les milieux de formation, en recherche, aux niveaux universitaire et collégial; quelques-uns sont aussi membres d'organismes gouvernementaux D'une façon plus marginale, on a quand même quelques membres aussi qui les représentent: des enseignantes au niveau préscolaire et des gens qui interviennent au chapitre des services de garde.

Nous avons fait un peu comme tous les organismes, c'est-à-dire que nous avons tenté de réagir rapidement, dans un laps de temps quand même assez court, et nous avons pris une option de position que je qualifierais de globale. Nous avons abordé certains aspects très rapidement et nous en avons carrément escamoté d'autres. il ne faudrait pas penser que, parce qu'on n'en parle pas, on ne les considère pas comme importants, mais on a cru que d'autres organismes aborderaient ces questions-là, peut-être même de façon plus adéquate que nous. Je pense en particulier aux conditions de travail du personnel de garderie que nous n'avons pas abordées et qui nous paraissent très Importantes en termes de qualité; aussi aux normes de qualité dans les services qui n'en ont pas encore - on passe là-dessus très rapidement - et, d'une façon implicite, aux ressources allouées à l'Office des services de garde à l'enfance pour exercer son mandat. Ce sont tous des points qui devraient être améliorés, mais sur lesquels on n'a rien dit.

Notre mémoire suit les grandes parties de l'énoncé. Il examine d'abord les grands principes directeurs et il s'attarde aux moyens préconisés pour mettre ces principes en pratique, c'est-à-dire le développement et la qualité des services et leur financement. Selon notre examen des principes directeurs de la politique, certains principes nous paraissent tout à fait adéquats; I y en a d'autres sur lesquels on se pose des questions et d'autres nous paraissent également contradictoires les uns avec les autres. Par exemple, nous sommes d'accord que les services de garde sont un soutien essentiel pour les parents, mais pas uniquement pour leur travail. On considère que les services de garde, dans la société moderne, sont un support essentiel pour l'exercice du rôle parental dans son ensemble. Cela a beaucoup d'importance ensuite dans l'application des politiques. (16 h 15)

Nous croyons aussi que les services de garde peuvent constituer une réponse aux besoins de développement de l'enfant. Le rôle éducatif des services de garde est, pour nous, un aspect primordial. C'est peut-être une des premières fois qu'il est énoncé clairement, sauf qu'il vient en deuxième lieu. On aimerait beaucoup pouvoir recourir à ce principe, à lui seul, pour juger de la nécessité des services de garde. On entend particulièrement par là que tous les enfants devraient y avoir droit et aussi que les besoins de certaines clientèles particulières nous apparaissent plus considérables même que les besoins de leurs parents. Nous pensons en particulier aux enfants handicapés, aux enfants qui ont une intégration sociale plus difficile pour toutes sortes de raisons, soit à cause de difficultés familiales ou, encore, des enfants qui viennent de familles immigrantes, par exemple, où l'apprentissage de la langue au Québec et de nos conditions de vie, etc., constitue un premier contact avec une organisation sociale.

En passant, on a été heureux d'entendre des organismes souligner le silence de l'énoncé fait par rapport à la politique des services de garde pour l'accueil des enfants handicapés. Cela nous préoccupe de voir qu'on y fait tout simplement allusion en termes de mode de financement, mais qu'on n'en parle pas du tout au niveau des principes.

Le troisième principe vise à un développement des services et des modes de garde qui respecte les choix des parents. Cela nous apparat un principe un peu vertueux mais sur lequel on a très peu d'explications ensuite sur la façon dont on assure ce choix. Donc, beaucoup de questions qui nous apparaissent fondamentales sont soulevées par ce principe. Finalement, on ne peut pas dire si on est d'accord ou non parce qu'on ne sait pas trop à quoi ça rime.

Le quatrième principe affirme une préférence pour les services gérés par les parents et un soutien à cette prise en charge afin de maintenir un lien très étroit entre la famille, ses valeurs et le milieu de garde de l'enfant. C'est un principe qui existe depuis la création des services de garde, avant même la création de l'office, du temps où les services étaient au service des garderies du ministère des Affaires sociales, entre autres. On ne semble jamais vouloir le regarder à fond. On pense que des questions Importantes sont soulevées là-dedans. Il nous apparaît que ce qu'on cherche à faire, c'est assurer une Implication et une participation des parents dans les services par ce biais. Il nous apparaît un peu bizarre de le faire uniquement par la gestion. Les gens qui nous ont précédées soulevaient d'ailleurs des problèmes qui ressemblaient un peu à ça. Que les parents participent, qu'ils aient voix au chapitre, qu'on assure une liaison étroite entre leurs valeurs, leur façon d'élever leurs enfants et ce que les enfants vont vivre dans les services de garde, cela nous paraît excellent. Mais gérer des services, c'est autre chose! Il nous apparaît ici qu'on fait assumer aux parents des responsabilités qui dépassent la responsabilité d'un parent.

Finalement, la question qu'on se pose, c'est: En quoi la responsabilité des parents envers leurs propres enfants les rendrait-ils automatiquement responsables de ceux des autres? Et pourquoi seraient-is plus responsables de services collectifs que les autres individus de la collectivité? Pourquoi aussi, parce qu'ils sont parents, seraient-Ils automatiquement qualifiés pour gérer des organisations collectives? Il y a beaucoup de responsabilités à gérer des services de garde.

Nous sommes d'accord avec l'autre principe aussi de l'autonomie des services: "Small is beautiful*. Je crois que c'est un peu une application de ce principe qu'on vise. C'est excellent, mais I ne faut pas non plus le faire aux dépens de normes de qualité et de gestion sévères. Ce sont des fonds publics qui sont en cause et, surtout, ce sont des êtres humains à une période très critique de leur vie.

On ne croit pas non plus que le respect de l'autonomie aille nécessairement de pair avec le caractère privé des services qui est affirmé dans le même souffle dans l'énoncé. On croit aussi qu'il y a un problème de compatibilité avec la responsabilité communautaire qu'on aimerait mieux appeler responsabilité collective et sociale. On y reviendra plus loin.

Le dernier principe est celui de la saine gestion. Cela nous parait aussi aller de soi, sauf qu'on ne voudrait pas que l'objectif des meileurs services au meilleur coût possible soit entendu au strict point de vue du coût financier. Il y a évidemment d'importants coûts sociaux aussi qui sont impliqués là-dedans et il nous apparaît très important d'en tenir compte.

Finalement, notre propre position, c'est que la responsabilité collective est contredite par un développement de services qui relèvent actuellement uniquement de l'initiative privée et par une gestion qui est confiée aux parents et à des corporations privées. Nous croyons plutôt que pour assurer le développement concerté, une qualité accrue et un financement amélioré, qui est l'objectif de l'énoncé, il faudrait viser ultimement à la création d'un réseau public, universel de services de garde répondant a des besoins divers, mais en coordination avec les autres services aux jeunes enfants et aux familles, qu'on enchâsserait dans une politique familiale large.

Cet objectif s'appuie essentiellement sur le principe que, dans le contexte social des familles actuelles, assurer aux parents un soutien essentiel à leur rôle de parent et, aux enfants, des milieux favorables à leur développement, c'est une responsabilité qui incombe à toute la collectivité, au même titre que l'éducation scolaire, les services sociaux ou les services de santé. C'est à la lumière de ce principe, finalement, qu'on a examiné le reste de l'énoncé. On est conscient que ce n'est pas un virage qui peut se prendre tout d'un coup. On est conscient qu'il faut le faire par étapes. On suggère un peu dans notre mémoire, à mesure qu'on examine des aspects de l'énoncé, des étapes qui pourraient aller vers cet établissement d'un réseau public universel.

On compare aussi avec ce qui existe ailleurs parce que ça nous paraît être un point de vue que. comme organisation membre d'un organisme mondial, on a peut-être plus que d'autres organisations qui sont venues ici.

Si on passe maintenant aux moyens qui sont préconisés, iI y a d'abord la partie du développement. Premièrement, on est Inquiet de l'estimation des préférences. Dans certains cas, on trouve que cela repose sur des bases très fragiles. Les sondages vont plutôt dans un sens, en tout cas avec le temps, où les gens semblent préférer des services reconnus qui sont gérés par la loi actuellement. Cette réserve étant faite, on se demande pourquoi on vise à un objectif de réponse partielle aux besoins. Pourquoi ne vise-ton pas à une réponse à 100 % des besoins?

Quand va-t-on répondre à 100 % des besoins? C'est peut-être une étape. Quand viendra l'étape des 100 %? Il nous parait essentiel de le savoir pour la planification.

Dans le développement, iI y a des aspects qui sont Intéressants. On parle d'assouplir la définition des services pour pallier, entre autres, à des problèmes d'implantation dans certains milieux. Mais ça nous parait quand même très insuffisant. Tant que ça reste de l'initiative privée, même si on veut insister, même si on veut y mettre de l'argent, même si on souhaite que des services soient créés, iI reste que, dans les zones qui sont mal desservies actuellement, rien ne garantit que ce sera développé. Cela reste finalement de l'initiative privée, principalement de l'initiative des parents. Il nous apparaît, par exemple, que si ce pourrait être une étape de confier à l'office, par exemple l'initiative de la création des nouveaux services dans les zones les moins bien desservies actuellement, ce pourrait être un rôle qu'on prendrait comme organisme public. Cette partie de création des services ne serait pas uniquement la responsabilité d'organismes privés.

Quant à la garde en milieu de travail, nous sommes très heureux de voir qu'on veut l'améliorer, qu'on veut la développer beaucoup, mais on trouve aussi que les moyens sont Insuffisants. On ne comprend pas pourquoi "prioriser" la garde en milieu de travail et là-dessus même, dans l'énoncé, toute l'argumentation semble nous dire que c'est bien, que ce n'est pas nécessairement mauvais. Il y a certains avantages. Il y a certains inconvénients, mais on ne comprend pas pourquoi on lui accorde la priorité. Si c'est la participation des entreprises qu'on souhaite, pourquoi ne le fait-on pas plutôt par le biais de la fiscalité ou par le biais de normes de travail, plutôt que leur laisser l'initiative et, en plus, consacrer une partie des places à cet aspect?

Pour ce qui est de la garde scolaire, on trouve que tout est dit très timidement. On regrette beaucoup, entre autres, de ne pas voir ici des gens qui nous semblent concernés très directement par les services de garde, c'est-à-dire les gens du ministère de l'Éducation. Il y a des aspects très Importants qui les concernent. Il y a plein de timidité. On dirait qu'on a peur d'obliger le ministère de l'Éducation à faire quelque chose, qu'on a peur d'obliger les commissions scolaires aussi.

Un peu de la même façon, c'est bien qu'on décide enfin d'apporter une attention aux clientèles particulières et aux besoins de garde partielle, mais iI n'y a à peu près pas de soutien financier, sinon par le biais des municipalités. Alors, comment peut-on décemment soutenir des services sans les subventionner? Cela nous semble un peu étrange et, là aussi, iI y a des besoins chez les parents. En même temps, le même problème se pose pour la garde scolaire qui est actuellement subventionnée pour des enfants réguliers et non pour les sporadiques, dans le jargon utilisé. Cela veut dire que, là non plus, on ne reconnaît pas la garde partielle.

Concernant aussi la planification, ce qui nous apparaît comme une chose améliorée, c'est que l'on souhaite une planification à long terme avec beaucoup de partenaires. Mais, en même temps, on craint que les services qui sont déjà un peu éclatés, qui sont multiples et un peu éparpillés, que cet éclatement ne soit accentué. Si le nombre de partenaires augmente, est-ce que la coordination augmentera aussi? C'est une question qui se pose.

Je passe très rapidement. On vous a donné un peu l'exemple des modèles de services préscolaires européens. Vous comprenez aussi notre vocabulaire du domaine préscolaire. Nous sommes l'organisation d'éducation préscolaire et ailleurs qu'en Amérique du Nord, c'est-à-dire surtout en Europe, l'éducation préscolaire comprend les services de garde, lesquels relèvent Ici du ministère de l'Éducation.

Cela nous apparaît une question qu'l faut regarder de front, d'autant plus que l'évolution des services ailleurs est nécessairement et presque inévitablement allée vers une espèce de conjonction de ces deux grands besoins de garde et d'éducation. On croit que, finalement, on est un peu dans un cul-de-sac avec le modèle qu'on a ici et qu'il faudrait regarder ailleurs pour voir ce qui est utilisable et transférable pour nous.

Tous ces modèles d'organisation européens, je ne vous en fais pas une lecture détaillée; vous avez déjà le mémoire. L'avantage qu'on y voit surtout, c'est qu'ils évitent ou du moins diminuent grandement le ballottement des enfants et des parents d'un service à l'autre et ils facilitent beaucoup la planification pour toutes les personnes et organismes impliqués.

Dans les réseaux que les pays européens ont mis sur pied, les services sont graduits ou peu coûteux. Ils sont à la charge de l'État qui n'a alors pas à aider des parents démunis à assumer des frais. Alors, au lieu d'avoir des problèmes d'exonération des parents, d'aide financière aux parents, ces systèmes sont aussi beaucoup moins compliqués. Tout cela s'inscrit dans des politiques qui sont ouvertement natalistes dans la plupart des cas. Ce contexte-là est signalé dans renoncé de politique et par d'autres organismes qui se sont présentés ici. Comment soutenir, d'une part, une volonté d'améliorer le taux de natalité au Québec et, en même temps, y aller toujours avec le dos de la cuillère dans les services que l'on développe? C'est évidemment une question de fond.

Dans l'examen de la planification avec les partenaires de l'éducation, on a souligné au passage une hypothèse qui est souvent discutée dans les milieux, qui pose de nombreux problèmes, mais qui, croyons-nous, devrait être examinée très sérieusement, soit celle de la maternelle à cinq ans à temps plein. Cela ne va pas sans difficulté. On en a discuté, d'ailleurs, tout à l'heure dans la salle avec d'autres organismes.

Les gens y votent des problèmes. Pour nous, c'est une lustration du problème d'un système qui a été mis sur pied de façon parallèle. Il existe des services préscolaires relevant du ministère de l'Éducation. Il y a des enfants qui vont à la maternelle à quatre ans; ll y a des enfants qui vont à la maternelle à cinq ans. La plupart des enfants québécois fréquentent la maternelle à cinq ans. Ces enfants-là se retrouvent avec des besoins de garde à demi-temps, quand leurs parents ont des besoins sur ce plan. Ils sont, soit dans les garderies scolaires, soit dans des garderies de quartier, soit dans des gardes familiales. Dans la même journée, ces enfants peuvent se promener dans plusieurs services. Alors, imaginons quotidiennement ce que c'est pour les enfants, les parents et les personnes de ces services-là. Ce sont des échos que nous recevons à notre organisation. (16 h 30)

La qualité des services est un autre aspect très important. L'aspect de la stabilité et de la sécurité de services mieux coordonnés, évidemment, cela nous paraît important, en plus des critères habituels. En passant, on a surtout souligné le problème de la formation du personnel. On a trouvé qu'ici aussi il y avait une timidité dans les exigences. On y va très lentement.

Le Président (M. Bélanger): Mme Baillar-geon, je vous Inviterais à conclure, s'il vous plaît!

Mme Baillargeon: Oui.

Le Président (M. Bélanger): Vos minutes sont écoulées.

Mme Baillargeon: Pour conclure sur le financement - c'est le dernier point qu'il reste à aborder - on n'a pas abordé cette question-là d'une façon technique, détaillée, mais, globalement, on a la même crainte que beaucoup d'organismes, soit qu'un mode de financement basé sur les revenus plutôt que sur les besoins nous apparaît très discutable. On a surtout peur, comme beaucoup d'autres, que les milieux qui ne sont déjà pas très favorisés soient ceux qui en souffrent le plus. Et, finalement, c'est peut-être dans ces milieux-là qu'on a le plus besoin de s'assurer de la qualité des services.

Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie Mme Baillargeon. Mme la ministre.

Mme Gagnon-Tremblay: Merci, Mme Baillargeon. Finalement, vous préconisez à court et à moyen terme un réseau universel et gratuit. Vous nous demandez, par exemple, pourquoi on ne répond pas à 100 % des besoins, compte tenu justement des nombreux besoins des parents. Je dois vous dire que c'est très simple. Si on n'aborde pas ou si on n'accepte pas le réseau universel et gratuit, si on a fait un choix autre, et sur le plan des besoins aussi, c'est tout simplement que cela dépend de la capacité de payer de l'État et des parents qui sont également des contribuables. Dans cet ordre d'idées, je me demande si vous pensez que toute la population est prête à assumer les coûts de la garde pour des services universels et gratuits?

Mme Baillargeon: Je crois - et c'est beaucoup discuté entre nous - que c'est une objectif qu'on devrait viser. On ne croit pas que cela va se faire du jour au lendemain; on croit que c'est coûteux, mais la population québécoise a déjà fait des choix de ce genre-là quand, dans les années soixante, elle s'est dotée, par exemple, d'un système scolaire axé sur la démocratisation de l'enseignement, sur une égalité des chances pour tout le monde d'aller à l'école, de se scolariser. Ce sont des choix qu'elle a déjà faits pour les services de santé. Nous croyons qu'il y a une progression vers cela dans la population et que, de plus en plus, les gens vont vers une option de cet ordre-là.

Maintenant, pour nous, ce ne sont pas seulement les services de garde comme tels et organisés comme ils le sont maintenant. C'est l'ensemble des services à la famille et des politiques familiales qui doit être coordonné, qui doit chercher à satisfaire les besoins de l'ensemble de la population. C'est donc un objectif. Il ne s'agit pas que, demain matin, cela soit fait; cet objectif devrait être visé et les politiques devraient s'orienter vers cet objectif-là.

Mme Gagnon-Tremblay: Vous parlez également du rôle que l'office a à jouer. Par exemple, dans certains milieux plus défavorisés, entre autres, il est difficile pour des promoteurs de monter un projet ou d'ouvrir une garderie. Vous avez sans doute pu reconnaître ou lire à l'Intérieur de cet énoncé de politique qu'on prévoit déjà, pour certaines clientèles, dans certains milieux, que l'office pourrait être justement le promoteur et aider à l'ouverture de ces garderies.

Il y avait aussi la garde en milieu scolaire. Vous disiez tout à l'heure qu'on a été peut-être très silencieux dans l'énoncé de politique sur le milieu scolaire et vous vous interrogiez, par exemple, sur la participation du ministère de l'Éducation. Je dois vous dire que nous avons essayé de concentrer tous les principaux groupes représentant le milieu scolaire à la fin de cette commission parlementaire pour permettre justement au ministre de l'Éducation d'être présent à la commission pour entendre les recommandations de ces différents groupes. Nous soumettrons, entre autres, votre recommandation au ministre de l'Éducation.

Il y a aussi - et Je m'interroge un peu là-dessus - le préscolaire. Vous pariez du préscolaire. Vous semblez dire que, pour les enfants de cinq ans, I serait Intéressant de penser à les

intégrer davantage dans ces prématernelles, alors que pour le milieu des garderies, c'est le contraire qu'on nous recommande. On nous dit: Ces enfants de cinq ans doivent demeurer en garderie. Il semble y avoir une contradiction finalement entre les deux discours. Vous tenez toujours à ce que ces enfants puissent être intégrés?

Mme Baillargeon: Pour nous, c'est justement l'exemple du problème d'avoir mis sur pied des services sans les coordonner. On est un peu devant une situation où on a créé deux réseaux parallèles: on a les services de garde d'un côté, et les services de l'éducation de l'autre. Dans le quotidien, pour l'enfant, les parents et le personnel, cela se vit ensemble. Quand, en plus, on n'est pas géographiquement situé dans le même édifice, la coordination est très compliquée. Je pourrais personnellement vous en parler plus longuement parce que j'ai été impliquée dans un projet de recherche qui a porté sur cette question-là. C'est un problème qu'on voit comme organisme qui regroupe des gens qui viennent autant des services de garde que des services d'éducation préscolaire. Il y a une espèce de cul-de-sac. Comment vous dire? Je crois que la structure actuelle accentue ces positions qui s'opposent et qui, finalement, ne devraient pas s'opposer. C'est le même enfant. C'est foncièrement le même développement de l'enfant. C'est le même type d'éducation qui devrait avoir lieu partout.

Dans les pays européens, c'est justement un problème auquel on a eu à faire face. Ils ont une histoire beaucoup plus longue que la nôtre, et leur évolution est allée vers une telle structure. Très classiquement, l'évolution des services a été la suivante. D'abord, ils ont été créés pour répondre à des services de garde. Ensuite, sous la pression des organismes, des intervenants, etc., 8s ont évolué pour améliorer leur qualité. Donc, on reconnaissait peu à peu leur rôle éducatif. Et, en reconnaissant leur rôle éducatif, on leur a aussi confié l'éducation des enfants.

Chronologiquement, c'est un peu dans cet ordre que cela s'est passé. Remarquez qu'ici, cela aurait pu arriver. On a une histoire des services ' de garde qui a commencé au XIXe siècle, qui s'est arrêtée et qui a repris beaucoup plus tard. Entre-temps, on a eu la création de nos écoles maternelles, par exemple.

Mme Gagnon-Tremblay: Vous parlez de l'intégration d'enfants handicapés, tout comme l'ont fait, d'ailleurs, plusieurs groupes qui vous ont précédés. Donc, à ce moment-ci, je ne peux pas passer sous sience tout ce que l'office a déjà fait pour les enfants handicapés. Justement, l'une des premières politiques de l'office a été la politique d'intégration des enfants handicapés, suivie de la rédaction de documents, comme le plan d'intégration, la démarche qui a visé à intégrer adéquatement les enfants dans les services de garde ainsi qu'une quantité de publications. Je pense, entre autres, à 'Entrez dans la ronde..." des documents d'orientation qui ont déjà été préparés. Il y a eu des tournées provinciales d'évaluation de l'ensemble des programmes de l'office. Il y a eu des mises à jour de documents et du plan d'Intégration ainsi que des subventions de 300 $ pour la préparation du plan d'intégration. Je pense qu'il y a quand même eu une volonté de la part de l'Office des services de garde à l'enfance de vraiment mettre en application cette politique d'intégration des enfants handicapés. Je me demandais si on était tous conscients de cet effort louable qui a été fait, puisque je remarque que chaque groupe en parle depuis le début de cette commission parlementaire. C'était tout simplement une constatation. D'ailleurs, vous êtes justement l'auteur de "Entrez dans la ronde...".

Il y a une question très importante que je voulais vous poser. À la page 3 de votre mémoire, vous dites: "Nous ne croyons pas non plus qu'en devenant parents les individus soient automatiquement qualifiés pour gérer une organisation collective." Alors, tout comme le groupe qui vous a précédées, vous semblez vous interroger sur la gestion des garderies par les parents. Finalement, vous semblez remettre en question le fait de laisser gérer les parents, comme si cela dépassait leur responsabilité que de gérer des services. Est-ce que j'ai bien compris? Est-ce que c'est bien ce que vous voulez dire?

Mme Baillargeon: Oui. C'est ce que nous voulons dire, d'autant plus que ces parents doivent s'occuper de leurs enfants. Comme la plupart des parents usagers de la garderie, ce sont des gens au travail dans la journée. Cela veut dire qu'ils doivent se taper des horaires très chargés pour, en plus, s'occuper de la gestion des services de garde. C'est leur confier beaucoup et, en même temps, ne pas assurer nécessairement la participation des autres parents qui ne sont pas au conseil d'administration. Il y a une ambiguïté dans cela qu'il nous paraît important de souligner.

Mme Gagnon-Tremblay: Alors, si, pour toutes sortes de raisons, les parents ne devraient pas être les gestionnaires des garderies, qui devrait gérer les garderies...

Mme Baillargeon: L'État.

Mme Gagnon-Tremblay: ...sans but lucratif? L'État?

Mme Baillargeon: L'État.

Mme Gagnon-Tremblay: Cela signifie véritablement que vous préconisez un service universel et gratuit.

Mme Baillargeon: C'est cela.

Mme Gagnon-Tremblay: Mais si. par contre, d'autres personnes pouvaient les gérer? Supposons qu'on soit contre cette philosophie d'étatiser. Par exemple, si nous devions continuer dans ce type de services que nous avons présentement, croyez-vous toujours que les parents ne devraient pas en être les gestionnaires? Finalement, qui devrait gérer pour les parents, si ce n'est pas l'État?

Mme Baillargeon: On ne veut pas interdire aux parents de gérer les services. Il ne faudrait pas prendre une position inverse.

Mme Gagnon-Tremblay: Mais vous semblez croire qu'ils ne sont pas suffisamment compétents pour les gérer.

Mme Baillargeon: On croit que c'est beaucoup leur demander et qu'ils ne sont pas nécessairement responsables de cela, ni toujours compétents non plus. Gérer une garderie, c'est une grosse affaire; en plus. lIs sont passants, 1s sont là quand leurs enfants sont en services de garde. La garderie doit continuer, elle doit planifier. C'est un problème que pose la gestion par les parents, mais cela ne veut pas dire qu'ils ne doivent pas y participer. Il ne faudrait pas prendre notre position à l'envers non plus, sauf qu'à long terme on croit que c'est une responsabilité collective qui doit être assumée par un maître d'oeuvre quelque part et on croit que c'est l'État qui doit faire ça.

Mme Gagnon-Tremblay: Vous savez que c'est un principe fort important. Lorsqu'on parle de l'autonomie des garderies, cela suppose la gestion par les parents.

Mme Baillargeon: Oui.

Mme Gagnon-Tremblay: Si, d'une part, certains groupes ou certaines personnes s'interrogent sur la gestion des parents, à ce moment-ci, cela me laisse très songeuse, comme Je le mentionnais tout à l'heure. C'est pour ça que je veux vraiment avoir l'idée, l'intention, vraiment connaître à fond la perception que vous avez à ce sujet parce que c'est très important pour la commission.

Mme Baillargeon: Pour nous, de dire que la responsabilité première devrait appartenir à l'État, cela ne veut pas dire que les garderies ne doivent pas avoir une certaine autonomie et que les parents ne doivent pas participer à la gestion. On croit qu'il y a moyen de trouver une façon de le faire, mais sans que toute la responsabilité repose sur les épaules des parents et que l'autonomie qui est donnée aux garderies soit encadrée.

Mme Julien (François): II y a aussi le fait que les parents changent continuellement Cela aussi vient jouer dans une certaine stabilité des garderies. Les parents changent, la structure change, tout change, mais le personnel de la garderie pourrait le faire, comme dans les commissions scolaires où ce ne sont pas les parents qui vont gérer et, pourtant, elles sont autonomes.

Mme Gagnon-Tremblay: En somme, vous voulez dire que le personnel, les éducatrices et les éducateurs pourraient gérer; à ce moment-là, les parents ne seraient...

Mme Julien: La coordonnatrice.

Mme Gagnon-Tremblay: En ce qui concerne la gestion, nous n'aurons pas nécessairement besoin de parents pour gérer.

Mme Julien: Pas nécessairement.

Mme Gagnon-Tremblay: D'accord.

Vous dites, à la page 4: "Nous voyons donc une certaine ambiguïté et même une contradiction entre certains principes. La responsabilité collective nous semble contredite par un développement de services relevant entièrement de l'initiative privée et par la responsabilité de la gestion confiée aux parents et à des corporations privées." Pourquoi affirmez-vous ça? Je ne saisis pas bien. Qu'est-ce que vous voulez vraiment dire par cette affirmation?

Mme Baillargeon: Cela revient à ce qu'on vient de dire.

Mme Gagnon-Tremblay: C'est ça, finalement, que vous vouliez mentionner.

Mme Baillargeon: Oui.

Mme Gagnon-Tremblay: D'accord.

Mme Baillargeon: Si vous me le permettez, j'aimerais revenir sur la question des enfants handicapés. C'est un dossier que, personnellement, je connais très bien, vous le savez. J'ai écrit pour l'office et j'ai participé à l'élaboration de la politique.

Évidemment, ce n'est pas ce que l'office fait qu'on critique, c'est l'absence de reconnaissance de ça dans l'énoncé qui nous fait peur. J'ai l'impression que c'est aussi ce que les autres organismes ont voulu souligner.

Pour ma part, je dirais même - je parie en mon nom personnel là-dessus - que c'est un exemple du problème que crée le fait que les garderies sont des entités privées et non pas une responsabilité collective d'abord. Je me rappelle très bien les discussions qu'on avait eues, par exemple, au moment de l'élaboration de la politique et de la rédaction de mon document

avec l'Office des personnes handicapées qui découvrait à quel point le service de garde n'était pas un service universel offert à tous les enfants québécois. Nécessairement, iI se heurtait, à la limite, à une clientèle particulière pour laquelle il aurait voulu que les services de garde ouvrent leurs portes.

Les garderies sont déjà dans une situation précaire. Elles ont déjà beaucoup de difficultés à assurer des services de qualité, ont des problèmes de roulement de personnel, des problèmes de formation, des problèmes de maintien des services aussi, etc. Évidemment, c'est la même situation en milieu scolaire et je dirais même qu'elle est encore pire.

Alors, comment peut-on dire comme collectivité: Oui, un enfant handicapé a droit à des services de garde de qualité. On le reconnaîtrait exclusivement pour lui, on en ferait un droit particulier alors qu'on n'applique pas ce droit à l'ensemble des enfants. C'est une des limites au fait qu'on ait un réseau morcelé comme ça.

Mme Gagnon-Tremblay: Remarquez que nous étions tellement d'accord avec cette politique d'intégration de l'Office des services de garde à l'enfance qu'on n'a pas cru bon de le réaffirmer dans l'énoncé de politique, mais vous pouvez être certaines que nous y croyons. D'ailleurs, nous allons poursuivre sa mise en application. (16 h 45)

II y a une dernière question que je voudrais vous poser. Vous avez parlé à un moment donné dans votre présentation d'une saine gestion. Qu'est-ce que c'est pour vous, une saine gestion dans les services de garde?

Mme Baillargeon: En fait, c'est le principe qui est énoncé. C'est un des sept principes directeurs de l'énoncé qu'on a tout simplement souligné au passage en disant qu'on était bien d'accord avec ça. C'est évident qu'il est nécessaire, pour la survie des garderies et des services de garde en général, qu'ils soient bien gérés. Si vous voulez, on peut vous donner un exemple de problèmes qui se posent. On vous a dit, entre autres, à la fin de notre mémoire, qu'on n'était pas d'accord avec le financement des garderies à but lucratif. On a à l'esprit des problèmes épiques, que Je qualifierais de secrets de polichinelle, de certaines garderies à but lucratif qui ont posé des problèmes énormes en termes de respect des normes de qualité de l'Office des services de garde à l'enfance et pour lesquels, finalement, iI y a beaucoup d'énergie, de temps, de personnel et d'argent, qui sont des fonds publics, qui ont été consacrés à recoller des pots cassés. Et quand, dans notre mémoire, on fait allusion à des problèmes comme ça, c'est à ça précisément qu'on pense. Il y a eu des cas célèbres dans la région de Québec. Il y en a eu dans la région de Montréal aussi. Cela nous apparaît être des choses qu'on ne devrait pas laisser continuer.

Mme Gagnon-Tremblay: Merci, madame.

Le Président (M. Bélanger): Merci, Mme la ministre.

Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Julien: Est-ce que je pourrais ajouter quelque chose?

Le Président (M. Bélanger): Oui. Vous êtes Mme Julien, je crois.

Mme Julien: Oui. Au sujet de la question de Mme Gagnon-Tremblay, quand vous avez dit que les enfants de cinq ans devraient aller à la garderie plutôt qu'à la maternelle, est-ce que j'ai bien compris?

Mme Gagnon-Tremblay: Non. J'ai tout simplement dit qu'V y a une contradiction. D'une part, vous avez des groupes qui disent que ces enfants-là de la maternelle devraient être plutôt considérés comme d'âge préscolaire. Par contre, les intervenants des garderies disent: Non, ces enfants-là ont cinq ans et devraient plutôt relever des garderies. Alors, après avoir lu certains mémoires ou pratiquement tous les mémoires jusqu'à maintenant, il y a une certaine contradiction qui semble s'instaurer peut-être entre ces deux groupes de pensée.

Mme Julien: Mais vous savez pourquoi... Mme Gagnon-Tremblay: Oui.

Mme Julien: ...les garderies voudraient s'approprier les enfants de cinq ans. Je pense qu'il ne faut pas se le cacher. C'est aussi une question financière. Je veux dire que plus on développe un service, plus on veut que des enfants de cet âge-là fassent partie de ce service-là. Je pense que c'est une question d'argent plutôt qu'une question de qualité des services.

Mme Gagnon-Tremblay: On leur posera la question.

Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie.

Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Merci, M. le Président. Je crois bien que la discussion que vous venez d'avoir démontre bien que, lorsque l'État met en rivalité des services entre eux, ça revient un peu à cette situation-là. Alors d'une certaine façon, au gouvernement, on peut vertueusement se retrancher en disant: Loin de moi ces mesquines rivalités, mais c'est le système même qui amène les services à vouloir se recruter des clientèles dans la mesure où I s'agit de services à initiative privée, en fait, privée au sens non pas lucratif mais au sens de l'intervention.

Votre mémoire est extrêmement intéressant. Je me demandais, Mme Baillargeon. ce que vous faites dans la vie.

Mme Baillargeon: Je suis professeure à l'Université Laval.

Mme Harel: Et vous vous occupez d'éducation préscolaire?

Mme Baillargeon: Oui. c'est ça

Mme Harel: Et les personnes qui vous accompagnent aussi?

Mme Baillargeon: Elles sont aussi en formation.

Mme Julien: J'enseigne au Collège de Sainte-Foy la technique d'éducation en services de garde à l'enfance.

Mme Filion (Rolande): J'enseigne également au Collège de Sainte-Foy.

Mme Harel: C'est vrai? Remarquez que le débat qui s'est amorcé sur la question de la participation des usagers - en fait, il s'agit là des parents - est très intéressant. C'est une question Importante et ça n'a rien à voir avec une façon morale de voir les choses. Nous sommes des parents. Il y en a qui sont compétents pour gérer, d'autres qui ne le sont pas. Il y a toutes les sortes de parents comme il y a toutes sortes de gens, toutes sortes de députés. Il n'y a pas un jugement moral quand on est à la recherche d'une formule adéquate de gestion. Je pense que la première question, c'est qu'il faut cesser d'élever au rang de principe sacré celui de la gestion des parents. Ça peut être, malgré tout, un modèle extrêmement intéressant, celui, en tout cas, qui s'est développé au Québec.

Vous avez, j'ai l'impression, une idée de ce qui se passe dans le monde; les illustrations que vous nous donnez des autres pays sont fort Intéressantes. Il faut convenir qu'au Québec il s'est développé, à partir de la Révolution tranquille, depuis 25 ans, ce qu'on appelle la démocratie participative; les usagers dans les services... Cela donne des résultats qu'il faudra analyser à un moment donné, qui l'ont été en partie par l'INRS dans les services sociaux, je crois, dans les CLSC et autres. Vous nous dites: II vaudrait mieux un service universel public gratuit comme I s'est développé dans les autres pays. D'un côté, vous faites état des inconvénients. Les personnes qui vous ont précédées - vous y étiez - faisaient valoir les difficultés de gestion. Il faudrait peut-être distinguer, comme le mentionnait un Intervenant, les difficultés de gérer les problèmes financiers de celles de la gestion de qualité d'une garderie. Si tant est que les problèmes financiers étaient réglés, je pense bien que la gestion pourrait avoir une autre vision des choses dans un service de garde.

Je ne sais pas ce qu'en pense la ministre, mais c'est évident que ce n'est pas nécessairement une question de compétence. À n'assujettir le développement des garderies qu'au modèle de garderies où les parents usagers sont chargés de la gestion ou à l'autre modèle qui est complètement privé et qui, à bon droit, comme vous le mentionnez, fait finalement le jeu du libre marché, à n'avoir que ces deux modèles, je me demande si on se retrouve devant une situation où des parents nous disent: Moi, je n'ai pas le temps; je n'ai tout simplement pas le temps; je suis trop sollicité par mes activités professionnelles ou parce que j'y ajoute un apprentissage, une formation ou parce que j'étudie; je n'ai pas le temps, en plus, d'être sollicité.

Dans le type de services où les parents usagers sont chargés de la gestion, une grande pression est faite sur eux. La crainte que j'ai, c'est que des parents démissionnent devant ce type de services et qu'ils choisissent un autre type de services où Is n'auront pas à être sollicités pour ce genre de responsabilité qu'ils ne peuvent pas assumer ou qu'ils ne veulent pas assumer. Aussi, ils ont le droit de choisir de s'impliquer dans autre chose dans la vie. S'iI faut qu'ils gèrent leur coopérative d'habitation, leur coopérative d'alimentation, leur garderie, et on pourrait en ajouter, il est possible que des gens n'aient plus le temps de gagner leur vie. C'est là sans doute que le bât blesse, dans le développement quand on ne l'assujettit qu'à un seul modèle de gestion. Je ne sais pas ce que vous en pensez. Ce que je souhaite, c'est qu'on puisse - je pense que c'est un peu votre recommandation - voir cohabiter des modèles de garde sans but lucratif offerts aux parents d'enfants d'âge préscolaire. C'est ce que je comprends.

Mme BaUlargeon: Quand on parle des modèles européens, la partie, je dirais, participation et gestion par les parents varie énormément. On n'a pas donné de détails dans le mémoire, mais il y a des pays où les parents ne participent à peu près pas; lls sont totalement exclus. Il y en a d'autres où iIs ont une participation par représentant interposé et d'autres où iIs ont une participation directe. Les pays Scandinaves ont peut-être des modèles intéressants parce que leur histoire ressemble beaucoup à la nôtre; c'est à peu près la même période de développement même si, dans certains cas, cela a commencé plus tôt qu'ici. Mais I reste que la période importante de développement est à peu près la même. Ils ont souvent aussi des options et des visions un peu sociales-démocrates, comme on peut en avoir au Québec, où la participation de l'État est importante, mais ce n'est pas une mainmise, ce n'est pas une...

Mme Harel: Ce n'est pas l'étatisation.

Mme Baillargeon: Non, complète et totale. Il y a une autonomie des services, mais il y a une planification et une prise en charge financière par l'État

Mme Harel: Alors, on doit comprendre qui faut distinguer la gestion de l'intervention de l'État. L'intervention de l'État pourrait assumer à 100 %, par exemple, le financement d'un service de garde, et I ne faut pas confondre avec la gestion, il pourrait y avoir des modes de gestion participatifs même avec un financement à 100 %.

Mme Baillargeon: Exactement.

Mme Harel: Je le dis, le gros mot étant lâché par la ministre, le mot "étatisation", faisons bien attention, les écoles sont aussi entièrement financées et, en ce sens, étatisées, mais voilà, c'est un service public et c'est celui qui favorise l'égalité des chances dans la société.

Je reviens à la question de l'intégration. En écoutant la ministre, je me demandais comment il se fait, après tant d'efforts louables et tant d'années, que les résultats d'intégration soient, malgré tout, de consensus, si décevants. On parle de 235 places après tous ces efforts qui ont été mis en place. C'est peut-être parce que le système n'est pas adéquat; peut-être faudrait-il développer des modèles d'intégration qui soient plus soutenus par l'État? Comment pensez-vous qu'on pourrait favoriser ou faciliter l'intégration qui se fait vraiment à petits pas tout simplement?

Mme Baillargeon: J'ai bien peur que cela ne suive ie rythme de développement des services. En même temps, si on regarde l'ensemble de la question de l'intégration et si on compare ce qui se fait en milieu de garde, déjà très démuni financièrement comparativement au milieu scolaire, je pense que les milieux de garde en sortiraient plutôt bien. Ils subiraient la comparaison certainement à leur avantage. Donc, ce n'est pas une question de volonté ou de fermeture, globalement.

Mme Harel: D'attitude.

Mme Baillargeon: Évidemment, il y a des exceptions, mais s'iI n'y a pas de services dans un quartier, comment peut-on y intégrer un enfant handicapé? Il ne peut pas exister d'intégration s'il n'y a pas de services. Les zones qui sont mal desservies actuellement, les petites municipalités, les zones rurales, ne peuvent évidemment pas, non plus, accueillir des enfants handicapés s'iI n'y a pas de services. C'est plutôt dans cette perspective que nous avons signalé ici le problème.

Mme Harel: Dans votre mémoire, à la page 12, vous citez l'exemple américain. Vous dites que des efforts avaient été particulièrement nombreux aux États-Unis dans les années soixante à l'égard des services préscolaires. Vous faites état d'une expérience qui a été suivie par des évaluateurs indépendants et qui a permis en fin de compte - l'imagine que cette étude s'est terminée récemment - de constater qu'il y avait eu moins d'abandons scolaires, moins de recours aux services scolaires spéciaux, moins de délinquance, moins de grossesses précoces, plus d'intégration sur le marché du traval chez les enfants des programmes préscolaires que chez leurs pairs des groupes témoins.

Vous concluez en disant qu'l y avait donc là un bénéfice économique de cet Investissement dans des ressources préscolaires et qu'l y a donc, j'imagine - je conclus à rebours - un coût économique à ne pas avoir d'investissements plus considérables de la part des pouvoirs publics dans le préscolaire. Avez-vous été capables de chiffrer...

Mme Baillargeon: Nous ne l'avons pas fait, mais une des équipes membres de ce consortium, l'équipe de Weikart et Schweinhart du Michigan, a fait faire ce chiffrage par un économiste. Cela s'est passé il y a déjà quelque temps, au début du gouvernement Reagan. Alors, les chercheurs avaient dit: On nous demande de parler "Reaganomics"; on va parler en termes "Reaganomics". Et Ils avaient fait cette traduction. C'est ce à quoi je fais allusion aussi dans le texte.

C'est très important de le souligner, on voulait terminer notre mémoire là-dessus en pariant du financement et des coûts. C'est sûr qu'à court terme on fait un investissement dans des services de qualité. Cela coûte des sous; on ne peut pas se le cacher. Ce serait démagogique de dire que ça ne coûte rien. Cela coûte des sous. Si on le regarde à très court terme, donc, c'est coûteux, mais si on regarde ça à long terme, en termes de prévention... Imaginez bien que les chercheurs, quand ils avaient commencé ça, ne pensaient pas arriver à de telles choses. C'est assez exceptionnel qu'ils aient réussi à suivre leur sujet si longtemps. Je ne peux même pas vous dire que c'est terminé parce que je sais qu'il y a encore des équipes qui continuent de suivre leurs enfants qui sont maintenant des adultes.

J'avais rencontré, entre autres, une chercheuse d'une de ces équipes qui avait pris les enfants à trois ans. Ils avaient 23 ans quand elle m'a fait part des résultats. C'est quelque chose de très important dans la recherche préscolaire américaine, et je dirais même mondiale, parce qu'on n'a pas d'exemple d'études qui arrivent à expliciter aussi clairement que ça les effets que cela a pu avoir eus. (17 heures)

Mme Harel: C'est extrêmement intéressant, M. le Président. Il y a tellement de choses intéressantes dans votre mémoire et notamment, vous y suggérez immédiatement des décisions qui

pourraient être prises sur plusieurs des aspects que l'on va discuter durant les travaux de la commission. Vous reprenez la recommandation du comité consultatif sur les services de garde à l'enfance, à savoir que l'office supplée justement l'absence de ressources dans certains milieux défavorisés ou dans des milieux comme les petites communautés rurales, dans des municipalités où iI n'y a pas encore de services. Également, je pense, en matière de garderie à but lucratif, vous recommandez nettement que... Votre point de vue était bien exprimé. Vous dites qu'iI faut que tes promoteurs de ces projets assument les choix qu'iIs ont faits et que, dans la mesure où leur choix est d'établir une garderie à profit. Ils ne doivent pas, d'un autre côté, demander d'être subventionnés à moins de ne transformer leur garderie. C'est bien l'essentiel de la recommandation que vous faites.

Je pense que - je vais terminer là-dessus - sans doute l'aspect le plus important est au début de votre mémoire, dans la présentation que vous nous en faites, quand vous soulignez que les services de garde sont un soutien essentiel pour les parents, mais pas uniquement pour leur travail. C'est sans doute ce qui, à la lecture de l'énoncé de politique, m'a le plus inquiétée parce que, malgré tout, ce serait un changement de cap en regard des orientations prises il y a dix ans. Dans l'énoncé de politique, à la page 16, on y lit: indispensables quant à ta participation des parents au marché du travail, les services de garde, donc, s'avèrent essentiels, etc. On vient restreindre, d'une certaine façon, ce qui, à l'origine, était considéré comme un volet de la politique de la petite enfance. Cela provoque chez moi vraiment une vive inquiétude tant qu'il n'y aura pas un engagement public et ferme de ne pas assujettir l'accessibilité aux services de garde au fait d'être considéré comme un mauvais parent. C'est ma plus profonde inquiétude compte tenu, justement, des recommandations du comité consultatif qui recommandait, par exemple, que les personnes assistées sociales...

Le Président (M. Bélanger): En conclusion, Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: ...ne puissent y avoir accès que dans la mesure où un travailleur ou une travailleuse sociale viendrait, par un certificat, déclarer d'une certaine façon leur inaptitude à s'occuper de leur enfant et de ses besoins, donc, de le mettre en garde. Je crois que c'est là une façon de voir tes choses qui encourage les parents à démissionner, à abdiquer, à renoncer pour avoir un service. C'est tout à fait contraire à une vision d'une politique farriiate qui soutient le parent dans son rôle parental. Je vous remercie, M. te Président.

Le Président (M. Bélanger): Si vous voulez bien remercier les représentants.

Mme Harel: Je vais leur laisser la possibilité de réagir à ma place...

Le Président (M. Bélanger): Brièvement, si vous plaît!

Mme Harel: ...avant que je n'aie plus de voix.

Mme Baillargeon: Je crois qu'on a fait le tour de l'essentiel. Pour ce qui est des détails, on pourrait en parler très longuement On vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Bélanger): Merci, madame. Mme la députée de Maisonneuve, ça va. Mme la ministre.

Mme Gagnon-Tremblay: Je voudrais vous remercier, mesdames, pour vos Interventions et vous féliciter pour la qualité de votre mémoire. Je pense que vous soulevez des aspects qui sont fort intéressants et qui méritent une réflexion approfondie. Merci.

Mme Baillargeon: Merci.

Le Président (M. Bélanger): La commission remercie l'Organisation mondiale de l'éducation préscolaire, l'OMEP-Canada, et Invite à la table Mme Raquel Betsalel-Presser.

Bonjour, Mme Presser. Je veux simplement vous informer que nous avons une enveloppe de 30 minutes, c'est-à-dire environ dix minutes pour la présentation de votre mémoire et 20 minutes d'échanges de propos avec les membres de la commission. Je vous prierais donc de présenter votre mémoire. Je vous remercie.

Mme Raquel Betsalel-Presser

Mme Betsalel-Presser: D'accord. Alors, je vais essayer de passer brièvement sur les premiers points de mon mémoire. J'aimerais par ailleurs situer le sens de mon intervention où je me présente comme chercheure et professeure en milieu universitaire. Je passe par hasard après ma collègue, mais... C'est donc un point de vue de chercheur qui m'intéresse et sur lequel je tiens à attirer l'attention de la commission parlementaire. Par ailleurs, j'ai eu aussi le privilège de présider l'ex-comité consultatif sur les services de garde et je ne peux pas faire abstraction de cette expérience si enrichissante.

Alors, d'abord concernant les sept principes directeurs, je vais les traiter de façon relativement globale. Il me semble qu'au moins six d'entre eux se regroupent autour de la participation des parents et du soutien aux parents. Il me semble que les principes sont extrêmement intéressants. On ne pourrait être contre ces principes. Il y a malheureusement un seul principe qui touche l'enfant, c'est le deuxième, et c'est un milieu de développement. Par ailleurs,

Je constate et c'est intéressant de voir que pour la première fois dans des documents officiels, concernant les services de garde, la question de prévention et de développement est clairement présente. C'est un enrichissement et je voudrais revenir tout à l'heure sur l'importance de cette question, étant donné que mon point de vue se situe surtout autour de la défense du concept de la qualité dans les services de garde. Je vais donc nécessairement mettre l'accent sur le développement de l'enfant plus que sur le restant des services à la famille, bien que je sois évidemment d'accord avec la raison d'être des services de garde comme un service à la famille.

Par ailleurs, je tiens à souligner que je le vois comme un service à la famille et non pas aux parents qui travallent. C'est d'ailleurs ce qui m'a posé un petit problème dans le premier principe qui me semblait un peu limitatif aux parents travailleurs, qui paient des taxes. Je souhaiterais que cela dépasse cela de façon plus explicite et que cela couvre tous les parents ayant besoin de services, quelles que soient les raisons de ces besoins.

Le troisième principe: Un développement qui respecte le choix des parents. Encore là, cela supposerait que l'on ait vraiment les possibilités de choix en termes de nombre suffisant, mais je trouve quand même Intéressant de pouvoir préserver cette richesse dans le système actuel qui offre différentes possibilités et que les parents puissent choisir à l'intérieur de différentes ressources et avec le projet de développement d'autres ressources. Il me semble qu'il faut absolument favoriser cette question.

La préférence pour les services gérés par les parents. Je suis étonnée de voir le changement dans la terminologie. Il me semble qu'avant on parlait davantage de services contrôlés par les parents. La gestion ici est un peu différente de celle qui a précédé. Je pense qu'effectivement les parents doivent participer à la gestion, mais doivent absolument contrôler et participer de façon conjointe avec le personnel du service de garde. Je trouve qu'il y a très peu de place laissée au personnel des services de garde concernant la gestion et la prise de décisions. Encore là, je pense que c'est mettre énormément sur le dos des parents que d'exiger ou que de leur demander d'assumer toute cette gestion puisque, cela a déjà été dit. lls font appel aux services de garde justement parce qu'ils sont pris pendant toute la journée. Leur demander en plus de gérer les services, cela suppose, à mon avis, qu'on est en train de redéfinir le concept de parent et qu'on ajoute d'autres paliers à cette charge qui est déjà assez difficile. Alors, je pense qu'il faut garder la participation des parents... il faut garder les services sans but lucratif, c'est très Important, mais, par ailleurs, il ne faut pas tout mettre sur le dos des parents; il me semble que c'est trop leur demander.

Je sais qui va falloir que je passe très vite. La question de la responsabilité communautaire est un excellent principe, mais encore faut-il qu'on puisse se concerter et que tous les milieux impliqués soient vraiment en mesure de le faire, ce qui, me semble-t-il. n'est pas le cas actuellement. Tout le problème des enfants maltraités, des enfants handicapés, dont on a déjà parlé, des enfants qui posent des problèmes sociaux, des services de garde en milieu scolaire, cela exige nécessairement des concertations qui sont, jusqu'à maintenant, presque Inexistantes.

La saine gestion de l'ensemble du service. Il me semble qu'on parle là-dedans d'un choix d'investissement social. À mon avis, les services de garde à l'enfance doivent aller de l'avant en termes de qualité et de prévention, ce qui est déjà dit dans le deuxième principe, mais si on veut le rendre opérationnel iI faut qu'on fasse un choix de société et qu'on dise: Voici, on va investir dans de jeunes enfants et dans la famille de sorte qu'on ait moins à pallier plus tard dans les domaines scolaire, médical et social.

Je vais sauter directement à la conclusion de mon intervention parce que celle-ci a une incidence directe sur la qualité des services. Il me semble que là-dessus, l'énoncé de politique est plutôt timide. Dans une perspective de développement du secteur des services de garde, qu'on pourrait appeler le cadet de la famille des services sociaux éducatifs, iI est normal que le démarrage se fasse graduellement. Mais i faut qu'il atteigne un rythme de croissance sans délai, car il ne s'agit pas d'un luxe, mais d'un besoin social.

Les commentaires qui ont précédé cette partie ont permis de mettre en évidence l'importance que le principe directeur de l'énoncé de politique revêt et comment, dans une certaine mesure, il va dans le sens de répondre aux besoins de la famille et de la société québécoise. Toutefois, les conditions de mise en application de ce principe me rendent plutôt sceptique quant à leur possibilité réelle d'application. En effet, comment peut-on prétendre favoriser la qualité alors que les conditions de base susceptibles de l'assurer ne connaissent qu'un minimum de progrès dans ce projet de politique?

Je signalerai ici les principaux aspects de l'énoncé qui me permettent de craindre un maintien d'entraves dans la poursuite de la qualité. Alors que l'ensemble des recherches confirme que la formation pertinente et les conditions de travail du personnel constituent le vecteur de qualité de prédilection dans un service qui accueille la population d'âge la plus vulnérable, les prévisions autour de ce facteur demeurent assez discrètes. Indiscutablement, l'atteinte de 65 % des garderies pouvant maintenant répondre à la norme d'une personne sur trois ayant la formation pertinente est Intéressante, c'est un progrès, mais cela signifie que, dans chaque garderie, iI y a au moins deux personnes qui, quotidiennement, doivent s'inspirer de leur intuition et de leur amour des enfants

pour répondre au programme éducatif exigé par la réglementation.

Par programme éducatif, je voudrais signaler qui faut comprendre qu'il s'agit de tout geste, toute attitude, tout comportement, toute idée ou initiative et toutes valeurs qui sont véhiculés dans le contact, environ dix heures par jour, auprès d'un groupe d'enfants. Donc, le programme éducatif va bien au-delà de l'activité de bricolage ou de la ronde qu'on connaît. Il exige de l'éducatrice un savoir inspiré des principales sources théoriques qui permettent d'ajuster les activités en fonction des capacités individuelles des enfants et du contexte dans lequel ce programme se réalise.

Le Président (M. Bélanger): Si vous permettez, madame...

Mme Betsalel-Presser: Oui.

Le Président (M. Bélanger): ...je vous inviterais à conclure rapidement.

Mme Betsalel-Presser: D'accord. Je veux vous dire que, pour assumer et pouvoir assurer de façon réaliste la qualité, il me semble qu'il faut d'abord regarder les conditions de travail du personnel, la formation du personnel, réviser le ratio enfants-adulte et la taille des groupes dans le service. Il me semble aussi que, quelle que soit la forme des services de garde, le concept de qualité doit être préservé et doit être toujours encouragé, y compris dans les haltes-garderies. (17 h 15)

En terminant, j'aimerais dire un mot sur la situation des poupons en garderie qui exigent une attention encore plus sérieuse et plus concentrée que celle qu'on a vue à ce jour.

Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie, madame. Mme la ministre.

Mme Gagnon-Tremblay: Merci, Mme Presser. Je suis très heureuse de vous accueillir à cette commission parlementaire. Je me souviens fort bien des discussions qu'on a déjà eues concernant le rapport d'ailleurs, la présidente actuelle de l'Office des services de garde à l'enfance siégeait également à ce conseil d'administration et vous êtes sûrement au courant qu'on cite souvent votre document en référence. C'est pourquoi je suis très heureuse de mentionner aussi que nous avons respecté au moins 72 % des recommandations du rapport Presser. Pour d'autres raisons que nous avons expliquées dans le discours d'ouverture, ce matin, I y a d'autres recommandations qu'on pourra mettre en vigueur ultérieurement. Mais je suis quand même très heureuse de votre participation à cette commission parlementaire.

Mme Betsalel-Presser: Merci.

Mme Gagnon-Tremblay: Vous avez abordé la question des services gérés par les parents en mentionnant qu'on parlait de gérance des parents. Mme Presser, je vous avoue que si nous avons Intégré dans notre document d'énoncé de politique cette question de gérance, c'est un peu pour différencier les garderies à but lucratif des garderies sans but lucratif, étant donné qu'l était très difficile pour la population en général de bien comprendre. Lorsqu'on parle de but lucratif, on s'imagine que c'est le secteur privé, alors que, sans but lucratif, on s'imagine que c'est le secteur public. Finalement, ce sont deux formes de corporations privées. C'était seulement dans le but de différencier les deux groupes de garderies.

Je reviens à la gérance des services. On en a parlé tout à l'heure. Les groupes qui vous ont précédée en ont parlé aussi. On se dit: Est-ce que les parents ont le temps nécessaire? Est-ce que les parents sont les véritables personnes pour gérer? Est-ce qu'on ne devrait pas tout simplement contrôler, avoir un comité consultatif de parents pour s'occuper de la vie pédagogique des enfants sur le plan de la gestion? Par contre, supposons que ce ne soient pas les parents qui gèrent les services. Étant donné que nous n'avons pas et que ce n'est pas la philosophie du gouvernement de faire un réseau universel et gratuit, donc de prendre le contrôle des garderies, à ce moment-là, qui peut gérer véritablement? Il y a toujours un certain conflit qui existe entre les éducateurs et les éducatrices lorsque vient le temps de discuter des conditions de travail. Alors, qui peut véritablement gérer une garderie, d'après vous?

Mme Betsalel-Presser: D'accord.

Mme Gagnon-Tremblay: Est-ce que c'est la directrice? Est-ce que c'est...

Mme Betsalel-Presser: II y a plusieurs facteurs dans votre question. Je vais prendre la dernière partie: Qui peut gérer? Tantôt, j'ai dit qu'à mon avis, ce sont les parents avec la direction et le personnel de la garderie qui devraient gérer le service avec le conseil d'administration. Mais, à ce moment-là, j'ai déploré qu'au comité consultatif on ait suggéré que ce soit l'assemblée générale. Il nous semblait que c'était encore plus démocratique, cette possibilité pour un plus grand nombre de parents de s'exprimer et d'avoir un oeil de contrôle sur la vie quotidienne d'une garderie. Or, si on laisse cela seulement au conseil d'administration, cela peut bien marcher, mais cela peut aussi devenir une contrainte pour la gestion. Donc, je pense qu'i faut impliquer le personnel et qu'l faut impliquer les parents.

Par ailleurs, je n'ai pas suggéré, du moins pour le moment, qu'on aille vers un système universellement gratuit. Je pense qu'il faudrait tendre - je l'ai dit dans le mémoire - vers des

mesures de plus en plus favorables à la gratuité pour les familles pauvres et celles à revenu moyen. Je pense que graduellement il faudrait le faire. De là à dire qu'on va passer tout de suite au système public, j'ai l'impression qu'on n'a pas encore atteint ce niveau-là de développement Pour l'instant, je pense qu'il est préférable que ça reste ce qu'on appelle autonome, secteur privé. Je ne vote pas comment ce secteur pourrait à la fois supporter un système à but lucratif, cela me semble incompatible.

Mme Gagnon-Tremblay: Nous avons étudié votre recommandation dans le rapport Presser, madame. Nous nous sommes rendu compte qu'en vertu de la Loi sur les compagnies l'assemblée générale des membres n'était pas souveraine. On s'est demandé comment, en pratique, nous pourrions à ce moment-là faire appel à une assemblée des membres, qui est une assemblée quand même assez élargie, pour discuter vraiment de la gestion. Chaque fois qu'on a besoin, par exemple, de se référer ou de prendre des décisions, qu'on soit obligé de se référer à cette assemblée qui est beaucoup plus large, comment, en pratique, pourrait-on véritablement l'appliquer? C'est ça, finalement, qui...

Mme Betsalel-Presser: II me semble qu'on peut sérier les problèmes de décision. Il y a certaines décisions qui peuvent être prises au sein du conseil d'administration, sans problème. Par ailleurs, des décisions qui vont déterminer la vie de la garderie, il faudrait qu'elles soient prises par un groupe plus large parce que ça affectera tout le monde.

Mme Gagnon-Tremblay: Je pense, Mme Presser, aux conditions de travail.

Mme Betsalel-Presser: D'accord.

Mme Gagnon-Tremblay: Je pense qu'on en discute...

Mme Betsalel-Presser: C'est crucial.

Mme Gagnon-Tremblay: ...énormément de ce temps-ci et les conditions de travail représentent 80 % du budget de chacune des garderies. Donc, c'est finalement le morceau le plus considérable qu'on a à gérer dans une garderie.

Comment pourrait-on, par exemple, remettre cette décision entre les mains d'une assemblée aussi élargie? Par exemple, si ce ne sont pas ces parents qui doivent décider et que le gouvernement n'a pas l'intention de s'ingérer dans l'administration ou la gérance comme telle des services autonomes, est-ce qu'on peut mandater la directrice? Qui? Vous avez aussi des éducatrices et des éducateurs qui peuvent être en conflit d'intérêts.

Mme Betsalel-Presser- Justement. On parle de la directrice ou du directeur. Il y a peu d'accent mis sur la formation de ce personnel. On espère qu'éventuellement ils vont obtenir certaines compétences en gestion. Je pense que non seulement ils devraient être extrêmement compétents en gestion, mais en plus ils devraient au moins avoir l'équivalent du diplôme qui a le reste du personnel. Il me semble que c'est le minimum qu'on devrait leur demander. À ce moment-là, ils pourraient...

Mme Gagnon-Tremblay: Est-ce que... Mme Betsalel-Presser: Oui?

Mme Gagnon-Tremblay: Est-ce que, Mme Presser, cela veut dire qu'à ce moment-là vous seriez contre la cogestion dans les garderies?

Mme Betsalel-Presser: Non.

Mme Gagnon-Tremblay: Non, pas nécessairement.

Mme Betsalel-Presser: Non.

Mme Gagnon-Tremblay: Pour autant...

Mme Betsalel-Presser: Je ne suis pas contre.

Mme Gagnon-Tremblay: ...qu'on ait toute cette compétence de gestion.

Mme Betsalel-Presser: Exactement Vous me parlez des conditions de travail. C'est une question absolument cruciale. De là va découler 50 % de la qualité des services que le personnel va offrir. Alors, on ne peut pas faire abstraction de cette question.

Mme Gagnon-Tremblay: Une autre question qui est très importante, c'est que vous constatez, dans l'énoncé de politique, que nous augmentons le ratio en milieu scolaire, c'est-à-dire que le ratio passera de quatre à six, à la condition que cette personne garde deux enfants d'âge scolaire. Qu'est-ce que vous pensez de cette mesure, Mme Presser?

Mme Betsalel-Presser: Je trouve cette mesure déplorable.

Mme Gagnon-Tremblay: Oui.

Mme Betsalel-Presser: Je pense que ce n'est pas réaliste. Je l'ai mentionné dans le mémoire, de penser à six enfants pour une seule personne, imaginez-vous! Lorsqu'on parle de secteur scolaire, ça peut aussi signifier des enfants de la maternelle. Cela pourrait signifier qu'il y aurait quatre bébés de moins de deux ans plus deux enfants de cinq ou six ans sous la responsabilité d'une seule personne. On s'attend que cette personne soit capable de donner des services de

qualité. En tant que parents, on sait que ce n'est pas possible d'être aussi attentif à six enfants simultanément. J'essaie d'imaginer comment cette personne le ferait à la journée longue.

Mme Gagnon-Tremblay: Peut-être une petite précision, c'est que nous, en ce qui concerne les cinq ans, ce n'est pas du scolaire, on les considère encore au niveau de la maternelle.

Mme Betsalel-Presser: D'accord, mais Is sont dans le système scolaire quand même.

Mme Gagnon-Tremblay: Oui. C'est quand môme curieux. D'une part, on nous demande d'abaisser les ratios et, d'autre part, les agences en milieu familial nous demandent d'augmenter les ratios.

Mme Betsalel-Presser: Oui, mais Mme la ministre, vous savez bien qu'un bon nombre d'enfants qui fréquentent la maternelle une demi-journée, s'en vont ensuite en services de garde en milieu familial. De sorte qu'il serait très possible de voir ce scénario: quatre enfants de moins de deux ans et deux enfants de maternelle, disons entre cinq et six ans. Il me semble que ce n'est pas réaliste, encore en termes de qualité.

Le Président (M. Bélanger): Alors, on vous remercie.

Mme Gagnon-Tremblay: Merci, madame.

Le Président (M. Bélanger): Je passe la parole à Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Merci, M. le Président. Combien ai-je de temps à ma disposition?

Le Président (M. Bélanger): Dix minutes.

Mme Harel: La ministre a eu seulement dix minutes?

Le Président (M. Bélanger): Oui.

Mme Harel: Mon Dieu, que cela a donc passé vite! Mme Presser, c'est avec énormément d'intérêt que j'ai lu votre mémoire. Vous êtes sans doute la personne qui, avec le plus d'éloquence, a parlé - dans un mémoire tout au moins - des exigences qu'on a à l'égard de l'éducatrice ou de l'éducateur qu'est la travailleuse ou le travailleur de garderie. Et vous nous dites que cette personne doit se sentir valorisée, reconnue et respectée pour être en mesure de transmettre cette vitalité Indispensable dans sa relation avec les Jeunes enfants. Vous signalez et insistez sur le fart que la réalité actuelle - et je vous cite - "nous montre un panorama beaucoup plus sombre dans lequel le "burnout*, le taux d'abandon en début de carrière et le découragement font partie intégrante des scénarios des services de garde* C'est là un jugement qui est sévère finalement, mais qui, compte tenu de l'expertise que vous avez, m'a amenée à penser que... Parce que dans le mémoire, en fait, vous considérez qu'il devrait y avoir un fonds spécial alloué à la formation et au ressourcement J'aimerais vous entendre là-dessus.

Mme Betsalel-Presser: Je déplore fortement le 1 %. Il me semble qu'il est nettement insuffisant. Je pense que, si on veut assurer la qualité des services, il faut qu'il y ait un budget spécifique, mais bien supérieur à 1 % qui permette le ressourcement régulier. C'est une profession qu'on ne peut pas pratiquer pendant deux ou trois ans et garder le reste de sa vie. Il faut continuer à se développer en tant que personne puisqu'on doit continuer à aider les enfants à se développer. De sorte qu'il faut que le personnel se ressource. Et 1 % du budget n'est pas suffisant pour pouvoir assurer ce ressourcement et ce perfectionnement.

Mme Harel: Vous expliquez bien que c'est très exigeant comme métier parce que ça suppose un savoir-faire, un savoir-être et un savoir-vivre aussi...

Mme Betsalel-Presser: Oui.

Mme Harel: ...puisqu'on sert de modèle aux enfants. Il y a là toute une argumentation qui, Je le souhaite, sera utilisée par la ministre auprès du Conseil du trésor pour justifier l'augmentation ou...

Mme Betsalel-Presser: Je l'espère. Ha, ha, ha!

Mme Harel: J'espère. Ha, ha, ha!

Sur des questions d'orientation fondamentale, il m'est apparu évident que l'énoncé de politique s'éloignait du rapport du comité consultatif. Je pense, entre autres, au moratoire concernant les permis des garderies à but lucratif. Au moment de la publication du rapport, j'avais préparé une sorte de résumé des recommandations. Et je me rendais compte que vous recommandiez de ne plus octroyer de permis à des garderies à but lucratif jusqu'à ce que le réseau soit consolidé, les garderies à but lucratif existantes conservant leurs droits acquis.

D'autre part, tantôt peut-être parce qu'on a peu de temps, je vais peut-être vous signaler ce qui me semble être fort différent de l'énoncé et voir si vous avez un point de vue nouveau sur ces questions-là. Sur la question de l'accessibilité, vous avez insisté dès le début de votre mémoire sur le fait que l'énoncé de politique devrait être modifié pour reconnaître explicitement que c'est un soutien essentiel pour les parents, mais pas seulement pour les parents sur le marché du travail, mais pour l'ensemble des parents ayant un besoin régulier ou partiel de

garde. (17 h 30)

Vous avez insisté, dans votre mémoire, et tantôt dans l'échange de propos Mme la ministre, sur le fait que dans votre vision évolutive des choses vous souhaiteriez la gratuité pour les familles pauvres et à revenu moyen. Il semble, selon les observateurs les plus attentifs - je pense au Conseil du statut de la femme qui venait ce matin devant la commission et qui portait le jugement suivant à savoir que l'accessibilité aux services de garde reconnus, avec l'énoncé de politique, sera graduellement restreinte aux parents dont les revenus sont élevés ou moyennement élevés... Et je cite le conseil du statut qui ajoutait: II est étrange de constater qu'autrefois ces services étaient réservés aux familles les plus démunies. Maintenant que l'apport des services de garde au développement et à l'éducation est reconnu, il faudrait, selon nous, s'assurer que tous les enfants puissent en bénéficier.

Le second aspect et le dernier - par la suite, vous avez pris la parole jusqu'à ce que mon temps soit écoulé - c'est que vous avez insisté sur les poupons dans votre mémoire, à cause de la vulnérabilité de ces enfants. Quelles sont vos réactions plus précisément au fait que. dorénavant, des subventions spécifiques aux garderies à but lucratif pourront être allouées pour la garde des poupons et des enfants handicapés?

Mme Betsalel-Presser: Vous comprendrez que je ne peux être contre une subvention pour cette catégorie d'enfants, quel que soit le type de services. Heureusement qu'elles seront là. Par ailleurs, pourquoi créer des différences entre les garderies à but lucratif et celles à but non lucratif? Je continue à penser que les garderies à but lucratif n'auraient pas dû recevoir de subventions jusqu'à ce qu'elles arrivent graduellement à devenir sans but lucratif. Il me semble qu'elles ont signalé plusieurs fois qu'elles ne faisaient pas de profit dans leur service, alors pourquoi continuer à se heurter à cette condition différente des autres? J'aurais trouvé plus juste à ce moment-là que les garderies à but lucratif deviennent graduellement sans but lucratif et que les subventions soient égales pour toutes.

Mme Harel: Concernant l'accessibilité pour les familles à faible revenu, avez-vous cette même opinion que celle exprimée par le conseil du statut à savoir que, plutôt que d'en faire bénéficier les familles à faible revenu, l'énoncé de politique va plutôt avantager les familles à revenu moyen, supérieur ou élevé?

Mme Betsalel-Presser: Je ne sais pas s'il va les avantager, mais ce qui me semble en découler, c'est qui devient difficile pour des familles à revenu moyen d'envoyer leurs enfants en services de garde parce que le seul est encore relativement limité au chapitre des subventions. Une famille qui gagne 27 000 $, ce n'est quand même pas un salaire très gros pour être admissible à des subventions et le seul est autour de ça. Dans ce sens-là, cela va effectivement favoriser plutôt les familles nanties. Mais je pense que cela crée un écart et c'est ce que j'ai essayé de souligner à la fin de mon mémoire. C'est-à-dire que les mesures préconisées pour le financement diversifié vont, iI me semble, à encontre d'une politique qui favoriserait graduellement un financement au moins plus fort pour une plus grande partie de la population.

Mme Harel: Une dernière question. Vous avez recommandé un soutien accru au projet de garderie en milieu de travail, dans le rapport du comité consultatif.

Mme Betsalel-Presser: D'accord.

Mme Harel: Mais vous n'en parlez pas dans votre mémoire, je crois, en ce qui concerne les garderies en milieu de travail.

Mme Betsalel-Presser: Non.

Mme Harel: Je voulais avoir votre opinion compte tenu de ce qu'on a entendu cet après-midi. Est-ce que vous croyez qu'il faut, comme le dit l'énoncé de politique, qu'il y ait une priorité en faveur des garderies en milieu de travail ou qu'il y ait le maintien du rythme de croisière actuel?

Mme Betsalel-Presser: Je vous avoue que ça m'a étonnée. Nous avons recommandé qu'il y ait plus d'accent et de priorité. Par ailleurs, je pense qu'il faudrait aussi définir dans quelles conditions, que ça ne se fasse pas au détriment d'autres projets qui pourraient être développés dans le même secteur. Je n'ai strictement rien contre les garderies en milieu de travail, au contraire! Je pense qu'elles ont une excellente fonction à jouer dans la mesure où elles peuvent aussi accueillir...

Mme Harel: Je ne suis pas contre, mais je me demandais s'il faut une priorité.

Mme Betsalel-Presser: Pardon?

Mme Harel: Faut-il leur accorder une priorité?

Mme Betsalel-Presser: C'est ce qui m'a étonnée comme priorité, mais je pense que, dans la mesure où les services de garde en milieu de travail peuvent accueillir les enfants du quartier, I faudrait quand même les encourager.

Mme Harel: Merci.

Le Président (M. Bélanger): Voulez-vous

remercier madame?

Mme Harel: Oui. Je vous remercie. C'est très Intéressant, c'est très utile, ça l'est maintenant et ça l'a été pour des travaux de commissions parlementaires antérieures. C'est très utile que des chercheurs comme vous, des professeurs à l'université, s'engagent suffisamment pour venir nous présenter l'état de leurs réflexions et de tours recherches. Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Bélanger): Bien. Mme la ministre.

Mme Gagnon-Tremblay: Mme Betsalel-Presser, Je regrette. J'aurais eu de nombreuses autres questions à vous poser. J'ose espérer que j'aurai l'occasion de vous contacter à nouveau d'ici à la fin de la commission parlementaire. Merci, madame.

Le Président (M. Bélanger): La commission remercie Mme Betsalei-Presser. J'invite à la table des témoins l'Association canadienne pour la promotion des services de garde à l'enfance.

Bonjour! Je présume que c'est Mme Micheline Ferron qui est la déléguée.

Association canadienne pour la promotion des services de garde à l'enfance

Mme Ferron (Micheline): C'est ça.

Le Président (M. Bélanger): Bonjour! Je vous inviterais à procéder à la présentation de votre mémoire, s'iI vous plaît.

Mme Ferron: Merci. Effectivement, je suis seule aujourd'hui, non pas que je sois seule dans l'association canadienne, loin de là. En fait, c'est à cause de la disponibilité des gens. Il y a quand même une des travailleuses permanentes de notre bureau d'Ottawa qui est ici présente aussi aujourd'hui.

En fait, je suis déléguée provinciale du Québec à l'association canadienne mais, avant tout, je suis aussi parent de deux enfants: un de six ans et un de deux ans. J'ai aussi été travailleuse en garderie, éducatrice pendant quatre ans et demi et ça fait quatre ans que je suis directrice d'une garderie. Je trouve important de le mentionner, non pas parce que Je veux avoir beaucoup de chapeaux ce soir mais je pense que je peux avoir une vision quand même assez concrète de ce que peuvent être les services de garde au Québec.

L'Association canadienne pour la promotion des services de garde à l'enfance est un organisme sans but lucratif qui est né à la suite de la deuxième conférence nationale sur la garde de Jour au Canada qui a eu lieu à Winnipeg, en 1982. Pendant cette conférence, les quelque 500 délégués présents s'étaient rendu compte qui y avait vraiment un problème: personne ne pouvait porter la voix des services de garde dans tout le Canada et défendre des services de garde de haute qualité un peu partout. Alors, cette association a été créée. Elle existe maintenant depuis 1982.

Plusieurs se demandent ce que l'association canadienne vient faire dans une commission parlementaire provinciale, dans les services de garde qui sont de juridiction provinciale. Eh bien! Il y a deux raisons majeures pour lesquelles on se permet de se présenter aujourd'hui. Premièrement, parce qu'on a de nombreux membres québécois, dont, entre autres, l'Office des services de garde à l'enfance, qui ont élu démocratiquement des délégués pour promouvoir huit grands principes qui sont à la base des services de garde que les familles désirent dans tout le Canada. Ces principes sont le fruit de réflexions, d'expériences et de discussions dans tout le Canada. Nous savons qu'ils reflètent l'image du réseau de services de garde que tous les Canadiens veulent, de Vancouver à Terre-Neuve, et ça inclut aussi les territoires.

Deuxièmement, à la lecture de l'énoncé de politique sur les services de garde, on a constaté que ce dernier s'appuie largement sur les lignes directrices qui avaient été énoncées dans le projet de loi C-144 concernant le partage du financement entre le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial. Comme groupe de pression national, on s'est penché sur le projet de loi C-144 afin d'essayer d'en mesurer les effets, tant à court terme qu'à long terme. On a l'humilité de penser qu'on a quand même développé une certaine expertise mais on est surtout un lieu de discussions où on a pu vraiment discuter de tous les points là-dedans.

Brièvement, ce sont, entre autres, les raisons pour lesquelles on se permet d'être là aujourd'hui. On sait que, depuis une vingtaine d'années, la famille, tant canadienne que québécoise, a subi de profondes transformations. Entre autres, une des plus percutantes est sans contredit l'entrée irréversible des femmes sur le marché du travail. Cette modification importante dans le rôle des femmes a nécessité l'implantation de nouvelles ressources pour répondre aux besoins de garde et d'éducation des jeunes enfants, un rôle qui était traditionnellement dévolu aux mères.

La mutation des familles a entraîné la mise sur pied de plusieurs services, dont les services de garde. Cependant, la rapidité des changements dans la structure de la société a provoqué l'émergence de services non planifiés, sans véritable contrôle et parfois mal organisés. On dit plus tard: Le manque de volonté politique et les coûts, iI ne faut pas l'ignorer, reliés à l'instauration d'un réseau complet de services de garde ont engendré la crise aiguë que nous connaissons. Certaines provinces, tel le Québec, ont quand même réagi plus vite et se sont dotées de lois et de réglementations permettant de mieux superviser les prémisses de ce réseau

grandissant. Nous devons en être fiers.

Par contre, avec le temps, on se rend compte que les besoins restent très grands et que la future politique de services de garde à l'enfance tente d'y répondre. Nous allons voir comment cette politique, qui est généralement admise comme un élément essentiel de soutien et d'encouragement à la famille, pourrait répondre à ces huit principes de base. C'est donc dans l'optique de ces huit facteurs, qui sont l'universalité, la diversité, la haute qualité, l'accessibilité, la participation des parents, le statut juridique sans but lucratif, les conditions de traval et les congés parentaux, que nous allons regarder l'énoncé de politique, que nous l'avons étudié.

Jusqu'à maintenant, on peut dire que nous étions très fiers de représenter le Québec à l'Association canadienne pour la promotion des services de garde à l'enfance. Nous étions fiers de constater que le Québec s'était engagé dans une voie qui se dirigeait vers l'atteinte de plusieurs de ces objectifs. Notre province était parmi les plus farouches défenseurs de l'implication des parents dans le processus décisionnel des services de garde, de même que du statut sans but lucratif de ces organismes comme condition sine qua non de financement public. Force nous est de constater que, dorénavant, il en sera autrement avec l'énoncé de politique. C'est un de nos plus vifs regrets.

Quand on regarde les sept principes directeurs de la politique, on parle du soutien essentiel pour les parents. Dans ce volet, on dit toujours que la politique est le deuxième volet d'une politique plus large de la famille et nous croyons que c'est un principe très important, mais nous souhaitons que le troisième volet de la politique familiale aborde toute la question des congés parentaux, maternité, paternité, congé pour responsabilité familiale, qui sont absents de cette politique et qui sont aussi une mesure de soutien pour les parents.

Nous sommes d'accord pour que les services de garde s'inscrivent dans un processus d'égalité d'accès au marché du travail, mais nous croyons qu'ils peuvent être aussi un agent catalyseur et formateur pour les parents. Par l'information qui est véhiculée et l'implication des parents qui est exigée, les services de garde jouent un rôle qui est plus que positif dans un objectif de soutien des familles. Les parents ne pouvant plus justement compter sur le soutien de la famille au sens large, telle qu'on l'a connue dans les années auparavant, incluant les grands-mères, les oncles, les tantes, les services de garde peuvent apporter une aide considérable dans l'éducation même des parents face à leurs responsabilités familiales.

Les services de garde pourraient s'ouvrir de façon beaucoup plus visible à la communauté. Comme l'a souligné Mme Presser aussi, iI est intéressant de voir que, pour la première fois, les services de garde sont aussi mentionnés comme services préventifs. On voulait aussi souligner, dans une analyse des audiences tenues par le comité spécial sur la garde des enfants, que déjà 49 % des 975 Intervenants avaient abordé la question des effets des services de garde sur les enfants. Et 89 % de ces gens disaient avoir constaté les effets bénéfiques des services de garde sur les enfants.

Nous appuyons donc le principe directeur qui réaffirme le rôle préventif et éducatif des services de garde dans la croissance et le développement des enfants qui les fréquentent.

Nous trouvons important de rappeler au gouvernement que, parmi les facteurs qui influencent le choix des parents quand on parle d'un développement qui respecte le choix des parents, il en existe plusieurs, dont: le coût du service, la connaissance ou l'expérience que l'on en a, la facilité d'accès, la disponibilité et la flexibilité des. services offerts par rapport aux besoins de la famille. Ce ne sont que quelques-unes des nombreuses facettes qui dictent le choix des parents. Lorsqu'on veut donner un véritable choix aux parents, il faut s'assurer avant tout qu'il existe plusieurs possibilités.

Quand on parle de la préférence pour des services gérés par les parents, c'est un principe qui nous a causé beaucoup d'inquiétude et qui nous en cause encore. Nous sommes très sceptiques qu'une préférence pour des services gérés par les parents soit un engagement du gouvernement à promouvoir et implanter de tels services.

Nous sommes fermement convaincus que les parents ont un rôle primordial à jouer dans l'atteinte, le respect et l'amélioration de la qualité du service de garde qu'ils fréquentent. Ils sont les mieux placés pour juger de cette qualité et pour en effectuer la surveillance. Pour s'assurer que les parents puissent atteindre cet objectif, il faut plus que des comités consultatifs. (17 h 45)

Si le gouvernement entend vraiment privilégier des services gérés par les parents et assumer sa responsabilité sociale dans l'atteinte du plus grand bien-être possible des enfants faisant partie de notre société, iI doit accepter de poser des gestes concrets prouvant sa volonté. Il doit légiférer immédiatement pour arrêter et empêcher le développement des services commerciaux puisque leur but ultime est la réalisation de profits. Cette recherche de profits ne peut qu'être néfaste dans un type de service comme les services de garde, puisqu'elle va à l'encontre de la recherche de qualité. La qualité se doit toujours d'être le premier objectif.

Quand on parie d'autonomie des services, on dit: Oui, les services de garde au Québec sont des organismes privés qui sont issus des parents et de la collectivité. Il faut se rappeler que la loi 77 sur les services de garde, qui a été adoptée en 1979, ne laissait guère de choix puisque le législateur a décidé de laisser entre les mains de la collectivité le soin de développer les services. Par cette loi, iI instituait le cadre

d'Implantation, d'organisation, de développement et de fonctionnement des services au Québec. Cependant, on peut penser qu'en se contentant de déterminer le cadre d'action des services de garde, le gouvernement voulait aussi surtout s'assurer de ne pas créer un réseau public qui coûtait cher.

Nous sommes pourtant d'accord avec le respect de l'autonomie des services de garde. Nous vouions cependant qu'ls aient les moyens d'être autonomes afin d'effectuer des choix qui reflètent vraiment leur personnalité propre.

Nous sommes d'accord aussi que la collectivité doit s'impliquer et appuyer les parents dès la naissance de leur enfant. Il faut s'assurer que dans les milieux où peu de ressources sont disponibles, les parents puissent bénéficier d'un appui accru de l'État. Afin de stimuler l'implication des partenaires sociaux, le gouvernement devrait instaurer lui-même des mesures qui nous convainquent de son leadership. La meilleure façon d'inciter les partenaires sociaux à épauler la famille et de s'ajuster à ses besoins, c'est encore de prêcher par l'exemple.

Quand on parle de saine gestion de l'ensemble des services, nous croyons que le moyen le plus efficace de s'assurer une saine gestion de l'ensemble des services et une plus grande rentabilité des deniers publics Investis et une performance de qualité, c'est de créer un réseau sans but lucratif avant tout. Nous sommes convaincus qu'une saine gestion doit suivre les lois du marché: offrir un produit de qualité à prix accessible pour la plus large clientèle possible. C'est ce que Zellers essaie de faire aussi.

Depuis leur création, les services de garde ont du mal à suivre ces lois du marché. Faut-il cependant conclure qu'ls sont mal gérés? Année après année, les services de garde jonglent avec les lois du marché et Is se retrouvent toujours devant les mêmes dilemmes: conserver et augmenter la qualité du produit équivaut à rendre le prix de moins en moins accessible et, par conséquent, limiter la clientèle potentielle. Si on vise une plus large clientèle possible en restant à prix abordable, I faut alors couper dans la qualité. Peut-être devrions-nous cesser de marchander l'éducation et le développement de nos enfants.

À la lecture du chapitre traitant des principes directeurs, iI nous est apparu qu'il aurait fallu en ajouter deux autres: une assurance d'accès à des services pour toutes les familles qui en ont besoin. Ceci implique une accessibilité physique, financière à un réseau diversifié de services.

Et te plus Important de tous, le grand absent: la garantie de qualité. Pourtant, dans toute grande maison, qu'est-ce qu'on vous promet d'abord? Satisfaction garantie ou argent remis. Est-ce que c'est ce qu'on va donner aux parents?

Il est difficile d'évaluer la proposition du gouvernement quant au nombre de places à développer et à la répartition de ces services en se basant sur tes données avancées dans l'énoncé. La raison en est simple, c'est que les chiffres et les indications contenus dans ce chapitre se contredisent et ne correspondent pas au tableau qu'on retrouve en annexe. Cependant, je n'aborderai pas spécifiquement ce chapitre-la étant donné qui est détaillé dans te mémoire.

J'irai un peu plus loin, excusez-moi. Une autre orientation visait à diversifier les services de garde et à modifier au besoin les définitions de ces services. On dit: II est possible que certains changements soient nécessaires à cause même de l'évolution des services. Cependant, I faudrait s'assurer, avant toute modification, que les services existants ne soient pas pénalisés et qu'ils puissent être consultés.

Nous sommes heureux de constater que le gouvernement soumettra enfin les services de garde à but lucratif aux mêmes critères que les autres services en ce qui a trait à la planification régionale et au contingentement qui en découle. Cependant, nous insistons encore une fois auprès du gouvernement pour qu'il adopte une position beaucoup plus radicale, soit arrêter et empêcher le développement du secteur commercial.

Nous voulons souligner notre satisfaction de voir un engagement du gouvernement provincial à encourager les projets novateurs qui permettraient de répondre aux besoins diversifiés des familles pour la garde de leurs enfants. Nous pensons qu'il faut donner priorité aux services existants qui désireraient élargir ou assouplir les services qu'ils offrent puisqu'ils possèdent déjà une expertise et des ressources pour faciliter ces projets. Cette nouvelle possibilité aurait l'avantage de restaurer certains services, comme la garde à temps partiel ou occasionnelle, qui ont déjà été offerts dans les services de garde et qui ont disparu parce que les services de garde ont dû les éliminer à cause de contraintes budgétaires.

Quant à la qualité des services, c'est l'un des premiers principes de base défendu par l'association canadienne. On ne parle pas juste de qualité, mais on parle de haute qualité dans les services de garde. On n'a pas détaillé de normes qui traduiraient ce que signifie une haute qualité pour nous. Il existe de nombreuses recherches qui l'ont fait et de multiples rapports, d'ailleurs cités dans l'énoncé, qui ont longuement fait état de cette question. Nous avons toujours défendu que des normes de qualité devraient se baser sur ces études et être élaborées à partir des plus hauts critères qui y sorti mentionnés.

Les principaux aspects soulevés dans ces nombreuses recherches et rapports et, aussi, dans l'énoncé de politique touchent la formation du personnel, le ratio personnel-enfants, la taille des groupes d'enfants, tes Installations, l'aménagement, tes conditions de travail offertes aux éducateurs, la participation des parents, et j'en

passe.

Nous souhaitons que l'Office des services de garde à l'enfance adopte dans les plus brefs délais une réglementation semblable à celle des garderies pour la garde en millieu familial, la garde en mlieu scolaire, les haltes-garderies et les Jardins d'enfants. Nous désirons que cette réglementation soit déposée après consultation des millieux concernés afin qu'elle reflète le plus possible les nécessités, mais aussi les contraintes vécues par ces services depuis plusieurs années. On ne voudrait surtout pas revivre ce qui s'est passé avec les services de garde où la réglementation a été adoptée sans qu'il y ait nécessairement l'argent pour les assumer.

À la lecture de ce chapitre de l'énoncé qui traite de la qualité, nous avons ressenti un grand malaise. Bien que le gouvernement reconnaisse la grande efficacité sur le plan de la gestion - page 49 - la volonté et le dynamisme des parents et du milieu - page 20 - II prévoit établir certaines exigences en matière de qualification des responsables de la gestion des services de garde - page 50 - puisque les nouvelles orientations Indiquent clairement que l'office et les garderies devront accorder une priorité aux besoins de perfectionnement des responsables de la gestion des garderies - page 51 - et qu'il encouragera la formule du parrainage, permettant ainsi aux garderies de bénéficier de cet apport indispensable que peuvent fournir ici les organismes du milieu - page 51.

Tout au long de cette section, nous avons l'impression de recevoir deux messages: d'un côté, des félicitations aux services de garde d'avoir survécu financièrement et d'offrir des services de qualité et, d'un autre côté, les moyens que prévoit mettre en branle le gouvernement pour assurer une meilleure performance. Le moins qu'on puisse dire, c'est que le message est étonnant et ambigu.

La plus grande surprise que nous avons eue fut de ne trouver aucune mesure qui permette d'améliorer les conditions de travail des travailleurs en services de garde, alors qu'on leur demandera de continuer à se former et à se perfectionner avec le 1 % sur la masse salariale.

Nous retrouvons d'ailleurs un texte qui est très révélateur, à la page 43 de l'énoncé, quand on dit: "Cette formation ne va pas sans des conditions de travail intéressantes qui contribuent à assurer la satisfaction au travail et la stabilité du personnel appelé à travailler auprès de l'enfant, un élément de premier ordre lorsqu'il s'agit de la qualité des services de garde."

Nous ne nous étendrons pas davantage sur ce sujet car nous croyons que les syndicats, les regroupements régionaux et les associations professionnelles d'éducateurs qui font aussi partie de nos rangs vous feront largement part de leur insatisfaction et vous proposeront eux-mêmes des solutions beaucoup plus acceptables et détaillées que nous n'aurions pu le faire. Nous vous disons que nous appuyons d'avance ces recommandations.

Le Président (M. Bélanger): En conclusion, rapidement, madame.

Mme Ferron: En conclusion, nous n'avons pas eu beaucoup de temps pour préparer notre réponse à l'énoncé de politique et nous espérons grandement pouvoir terminer aujourd'hui nos recommandations. Nous pensons qu'l est absolument inacceptable, par exemple, que les garderies soient soumises à autant d'incertitude, quand on parle du financement à 45 %. On parle de saine gestion, on parle d'une meilleure planification, mais Je peux vous dire - Je le vis présentement dans le service de garde où je travaille - qu'l est absolument impossible de faire une saine gestion et une saine planification budgétaire dans notre service de garde. Il est absolument impossible de savoir combien d'argent on aura l'année prochaine pour fonctionner. Et ce sera comme ça un peu partout. On peut prévoir une augmentation la première année. Mais, pour les années subséquentes, tout ce qu'on pourra faire pour augmenter nos subventions, ce sera d'augmenter les parents.

Je termine, M. le Président, en disant que quand on parle du mode de gestion des garderies à but lucratif et de leur philosophie d'entreprise qui a un but lucratif déclaré, indépendamment des objectifs de qualité poursuivis par plusieurs, on dit qu'il est difficile de trouver un mode de subvention qui soit approprié et qui garantirait l'utilisation des subventions aux seules fins de l'amélioration de la qualité. Lorsque ceux-là même qui accordent des subventions - Is sont responsables du contrôle et de la vérification de leur application - sont sceptiques, nous avons grandement raison d'être très Inquiets sur le nouveau mode de financement. Merci beaucoup.

Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie, madame. Mme la ministre.

Mme Gagnon-Tremblay: Merci, Mme Ferron. Vous venez justement de mentionner qu'avec la nouvelle formule de financement vous ne pourrez pas planifier. Comment faites-vous, actuellement, pour planifier?

Mme Ferron: On fait plusieurs scénarios, Mme la ministre. On fait des scénarios avec différentes augmentations des parents. On fait des scénarios avec plusieurs taux de fréquentation. On souhaite... Si Je vous disais: Dans ma garderie, si je budgétise avec un taux maximal d'occupation et une augmentation de tarif pour les parents, oui, j'arrive à 17 000 $ d'augmentation pour le prochain budget. Par contre, I s'agit qui arrive une épidémie de varicelle, que des places ne soient pas comblées pendant l'été, comme c'est arrivé la dernière année, et que va-t-il arriver? Non seulement y aura-t-il le manque à gagner de l'enfant qui ne fréquente pas la

garderie mais, en plus, on va perdre les 45 % de subvention.

Mme Gagnon-Tremblay: Est-ce que... Mme Ferron: II est très difficile de prévoir.

Mme Gagnon-Tremblay: Oui. Justement, pour vous éviter ce manque à gagner, est-ce que, dans votre garderie, vous avez des contrats dûment signés avec les parents?

Mme Ferron: Oui. Nous avons des contrats dûment signés avec les parents, dans lesquels ils s'engagent à payer 49 semaines parce qu'on leur donne le loisir de prendre deux semaines de vacances.

Mme Gagnon-Tremblay: Oui.

Mme Ferron: On leur laisse une période de cinq jours de maladie.

Mme Gagnon-Tremblay: Et s'ils s'engagent à payer 49 semaines. Si les enfants ont la varicelle, à ce moment-là, êtes-vous coupée?

Mme Ferron: Je ne sais pas très bien, Mme la ministre, si vous vous rendez compte de ce que ça veut dire quand un parent arrive...

Mme Gagnon-Tremblay: Non, mais je voudrais que vous répondiez seulement à cette question parce que c'est vous...

Mme Ferron: À cette question...

Mme Gagnon-Tremblay: ...qui l'avez abordée.

Mme Ferron: Je ne pense pas qu'on puisse exiger... Même si le parent signe un contrat avec moi, avec la garderie, comme quoi il s'engage à payer 49 semaines, s'il décide de ne pas me payer, dites-moi quels seront mes recours pour aller chercher ça.

Mme Gagnon-Tremblay: On pourra en discuter. De toute façon, je voudrais vous ramener à votre mémoire, à la page 23. Vous dites que l'association est abasourdie devant l'évidence et l'ampleur des risques inhérents au nouveau système de financement, c'est-à-dire 45 % des revenus de garde. La nouvelle formule de financement sera avantageuse pour la plupart des garderies la première année, mais, les années suivantes, la situation sera fort différente. Pourquoi cette formule de financement est-elle bonne la première année et ne l'est-elle pas la deuxième? Quels sont, pour vous, les risques que vous prévoyez?

Mme Ferron: Première des choses, je vous l'ai dit tantôt, à cause de l'incertitude qui règne. Dans une première armée, comme je vous l'ai dit. On va avoir une augmentation pour autant que le taux d'occupation soit à son maximum. Et on dit que ça peut être intéressant pour la majorité des garderies.

J'aimerais souligner que, lors de la présentation de l'énoncé, effectivement, on parlait... Excusez-moi, je ne me souviens pas du pourcentage des garderies qui profiteraient de subventions de l'ordre de plus de 30 000 $. Ce qu'on a pu constater, c'est que c'étaient des garderies qui avaient des permis de plus de 60 places, très souvent, et, bien évidemment, des tarifs très élevés pour les parents. Ce qui est dangereux dans la formule des 45 %, c'est que c'est une pression à hausser les tarifs. Bien sûr, vous allez me dire qu'il y a un plafonnement à 120 % du tarif provincial, mais I reste que la pression va être sur le parent, s'il veut améliorer la qualité de son service de garde, de se voter une augmentation. Il va toujours se retrouver dans le même dilemme. Est-ce que je dois payer plus pour pouvoir avoir plus d'argent? Qu'est-ce qui va se passer?

Et j'aimerais ajouter une chose. Tantôt, vous me parliez des contrats de services avec les parents. Entre autres, chez nous, on laissait la possibilité aux parents de retirer les enfants pendant la période estivale et de réserver leur place pendant l'été moyennant un tarif très minime. On ne pourra plus faire ça parce qu'on va baisser nos revenus et, par conséquent, on ne sera plus sûr du financement non plus. On va perdre du financement l'année suivante.

Mme Gagnon-Tremblay: Vous mentionnez, Mme Ferron, dans votre mémoire également - je pense que c'est à la page 24 - L'association appuie le regroupement des agences de services de garde en milieu familial du Québec qui rejette la nouvelle formule de financement pour les agences. Elle dénonce aussi le rôle de répartiteur que le gouvernement veut faire jouer aux agences. Sur quelle base rejetez-vous cette formule? Et laquelle suggérez-vous? (18 heures)

Mme Ferron: Ce qui est un peu curieux, en fait, ce n'est pas... Les agences, lors de la présentation de l'énoncé de politique, ont déjà réagi face à la nouvelle formule qui leur était proposée en disant que cela créerait des problèmes d'iniquité régionale et que, par rapport à la grosseur de chaque agence, cela pouvait occasionner des problèmes financiers, des différences importantes. Je ne suis pas spécialiste en services de garde en milieu familial et je pense qu'eux pourront beaucoup mieux que moi expliquer pourquoi 1s ont rejeté cette nouvelle formule.

Quand je parle du rôle de répartiteur c'est, entre autres, quand on leur suggérait que dorénavant is pourraient devenir un service de référence pour les parents qui utilisent des modes de garde non régis ou qui voudraient utiliser de la garde à domicile. C'est simplement

un rôle de répartiteur, de référence qu'ils vont donner alors qu'il n'y aura aucun moyen de contrôle ou de supervision. Les agences n'auront aucun rôle de supervision à jouer pour savoir si les gens qu'elles vont donner en référence sont des personnes qualifiées.

Mme Gagnon-Tremblay: Vous comprenez que lorsque nous parions... C'est-à-dire que ce n'est pas nous qui employons le mot "répartiteur". Nous voulons faire Jouer un rôle beaucoup plus Important aux services de garde en milieu familial. aux agences, puisque déjà ces agences ont un rôle important à jouer et elles devront continuer ce rôle important. C'est un projet expérimental que nous voulons ici non pas Imposer, mais demander aux agences, si elles veulent bien le faire sur une base volontaire, finalement. Nous ne voulons Imposer à aucune agence l'obligation de distribuer ce genre de services.

Je tiens aussi à vous souligner, puisque je l'ai mentionné dans mon discours de ce matin, que, justement, pour une agence en milieu familial qui reçoit 50 enfants à temps plein, c'est-à-dire qui a déjà 50 places au permis, la subvention seulement pour cette année, dans le cadre de la nouvelle politique, s'établira à 48 050 $ comparativement à une somme de 35 750 $ selon le programme actuellement en vigueur. Ce qui veut dire que ce n'est pas le statu quo. C'est quand même une augmentation par rapport à ce qui existe actuellement.

C'est la même chose aussi par rapport à la formule qui est suggérée par le gouvernement dans l'énoncé de politique puisqu'on constate qu'aucun service n'est perdant par rapport au système actuel. C'est un petit peu pourquoi je m'étonne lorsque vous mentionnez dans votre document: "Nous devons malheureusement constater que la consolidation des services existants reste encore à faire et I nous apparaît évident que, loin d'établir un meilleur équilibre, la politique provinciale élargira les nombreuses disparités régionales." Comme je le mentionnais ce matin, ces disparités, elles existent actuellement. Vous avez des tarifs différents. Vous avez des conditions de travail différentes. Vous avez des éducatrices qui ont des formations différentes. Alors, ces disparités existent actuellement. Ce que nous essayons de faire avec notre nouvelle formule, c'est d'essayer de réduire le plus possible ces écarts et de faire en sorte qu'un tarif que l'on n'augmente pas, qui est déjà élevé, puisse au moins se stabiliser et qu'on cesse d'augmenter ces tarifs, par contre, par d'autres moyens.

Mme Ferron: Vous me permettrez, Mme Gagnon-Tremblay, d'avoir des doutes quand vous me dites qu'il n'y a pas de garderie qui sera pénalisée. Sûrement que les regroupements régionaux vous feront part de garderies dans leur région, entre autres dans les régions éloignées, qui vont, effectivement, être pénalisées par les nouvelles mesures. Si ce n'était pas le cas,il faudrait se questionner à savoir pourquoi les mesures d'appoint ont été prévues dans l'énoncé.

Mme Gagnon-Tremblay: Non, je regrette, Mme Ferron, aucune garderie ne sera pénalisée. Pour les garderies qui pourraient être en difficulté, nous leur avons déjà confirmé le statu quo et, en plus du statu quo, ces garderies recevront 1 % de la masse salariale en sus du statu quo de sorte qu'elles ne seront pas pénalisées pour la prochaine année et de sorte qu'on puisse leur donner immédiatement le soutien nécessaire pour améliorer leur situation.

Une voix: C'est à souhaiter.

Mme Gagnon-Tremblay: Vous parlez du statu quo. C'est pour cette année et tant et aussi longtemps, finalement, qu'on n'aura pas réussi à rejoindre toutes ces garderies.

Le Président (M. Bélanger): Bien, Mme la ministre. Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Merci, M. le Président. Je vous remercie au nom de ma formation politique, Mme Ferron. Vous mettez une énergie à la fin de cette journée qui va, finalement, nous aider à continuer.

Je reviendrai sur la question du statu quo - on appelle ça, dans certains milieux, le statu quo ante - pour savoir combien de temps I durera, parce que les remarques que vous avez faites peuvent s'avérer exactes, une fois cette période-là terminée.

Je veux vous signaler que dans le mémoire que vous nous présentez, vous faites état de huit principes directeurs, huit objectifs pour les services de garde. Évidemment, je n'ai pas à vous rappeler que l'objectif d'universalité que vous exprimez en tout premier lieu, celui pour tous les enfants d'avoir droit à des services de garde, peu importent le lieu qu'ils habitent, le statut professionnel de leurs parents et leurs revenus, je n'ai pas à vous rappeler que cet objectif ne se retrouve pas dans l'énoncé de politique. Et vous savez certainement comme moi que parmi les sept principes directeurs qu'on retrouve dans l'énoncé de politique, le deuxième, qui concerne un soutien essentiel aux parents, restreint ce droit indispensable à la participation des parents au marché du travail. Il peut s'avérer que ce soit là une sorte de restriction du droit, jusqu'à maintenant convenu, de l'enfant à un service de qualité.

Mme Ferron, je reviendrai sur des éléments de votre mémoire, puisque vous avez l'expertise canadienne. Je reviendrai notamment sur la déclaration que vous faites en page 4 dans le sens que vous regrettez "de constater que le gouvernement fédéral, qui a exprimé son intention de partager les coûts d'opération du secteur

commercial, ait pu influencer notre gouvernement provincial*. Je vous citais.

J'aimerais connaître la vision que vous avez des rapports entre les deux gouvernements, de qui a influencé qui. Cependant, j'aimerais aussi avoir votre réaction, parce que je crois qu'il s'est passé quelque chose de très important en fin de journée, il y a quelques minutes à peine. J'ai découvert un élément qui était encore obscur dans l'énoncé de politique et, malheureusement, j'ai l'impression que l'ensemble de la nouvelle méthode de financement repose sur le fait que les contrats dûment signés par les parents devront être respectés, faute de quoi, et là, il y a trois points de suspension. Je vais souhaiter que la ministre s'explique sur cette question, peut-être pas avant la fin de notre commission, aujourd'hui, mais certainement durant nos travaux demain.

Si tant est que les contrats n'étaient pas respectés... Vous signez des contrats, et j'aimerais savoir si c'est fréquent, soit à la suite de grèves, j'imagine, ou des arrêts de travail ou des mises à pied ou pour cause de maladie s'il arrive... Quel est le pourcentage, à votre connaissance, selon l'expérience que vous avez, de contrats ainsi établis entre la garderie et les parents qui ne peuvent pas être respectés? Et dans la mesure où la méthode reposerait sur le respect, est-ce qu'on envisage de faire exécuter le contrat par voie de jugement? Est-ce qu'on envisage que les garderies mettent ça en 'collection*, s'adressent à des agences pour faire 'collecter" ou encore procèdent à des saisies pour pouvoir se faire payer? Est-ce qu'il y a quelqu'un qui peut prétendre qu'il serait souhaitable de judiciariser les relations entre les parents et la garderie? Et est-ce qu'on n'a pas d'Inquiétude sur les effets pervers que cela peut amener? Avant de signer de tels contrats qui, dans un laps de temps d'un an, engagent, sans connaître l'avenir, est-ce qu'il n'y a pas beaucoup de parents qui ne vont pas s'en effrayer et choisir un autre mode de garde, même s'il n'est pas reconnu, pour ne pas avoir à s'engager dans cette espèce de corridor qui ne leur permet pas de prévoir l'avenir? Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus.

Mme Ferron: Effectivement, c'est une des contraintes, en fait, la "collection" des comptes impayés. C'est un dossier complexe. Vous parlez de pourcentages, cela dépend certainement du milieu dans lequel on est, que ce soit un milieu favorisé ou défavorisé, malgré qu'il n'y ait pas de normes là-dessus. C'est une question de bonne volonté des parents. À partir du moment où un parent décide de ne pas payer un compte qu'il a à la garderie, des moyens, iI en existe, il ne faut pas dire qu'il n'en existe pas, mais ils sont quand même limités. Entre autres, les services de garde étant des corporations autonomes, iIs n'ont pas droit aux petites créances qui sont un service peu coûteux et efficace habituellement.

Donc, la plupart envoient une lettre d'avocat; lI y a quand même des frais à assumer selon le montant si vous avez un compte de 50 $ ou de 100 $, vous ne dépenserez pas 25 $ à 30 $ pour une lettre d'avocat pour réclamer 20 $ ou. encore, ce sont les agences de recouvrement qui sont contactées. Il m'est arrivé de faire affaire avec ces agences, mais dès que ce sont des parents qui bénéficient de l'aide sociale iI faut oublier cela parce qu'ils n'ont aucun recours contre ces gens. C'est regrettable que cela soit souvent avec ces gens qu'on perde de l'argent mais, à partir du moment où les subventions sont accordées sur les revenus, cela devient doublement dramatique de ne pas être capable de récupérer la contribution du parent pour des services qui ont été donnes. Le seul recours qu'on a, à ce moment-là, c'est de dire que, dorénavant, on ne recevra plus l'enfant à la garderie. Quand on a une chance, à ce moment-là, on passe le mot aux autres garderies pour dire: Attention à ce parent, vous devez faire attention et réclamer chaque semaine. Il y a aussi la Loi sur la protection du consommateur qui nous empêche de réclamer des frais d'avance, ce qui fait qu'on ne peut pas se faire garantir par un dépôt, afin de ne pas se faire attraper quelque part.

Mme Harel: Vous parlez de parents qui, manifestement, sont négligents et qui ont obtenu le service, mais qu'en est-il de ceux qui vous avertissent que temporairement, pour des raisons qui sont indépendantes de leur volonté, que ce soit un arrêt de travail, une mise à pied, une grève ou autre, ils ne pourront utiliser le service? Qu'arrive-t-il dans ces cas?

Mme Ferron: J'ai travaillé dans trois garderies et, chaque fois, que ce soit pour un enfant qui est hospitalisé pour une période très longue, un mois, deux mois, trois mois... Qu'est-ce qui se passe à ce moment-là? Autant que possible, à ce moment-là, ce qu'on essayait de faire, c'était de tenter de remplacer l'enfant ou de demander un demi-tarif ou un quart de tarif à un parent pour lui permettre de conserver sa place. À ce moment-là, iI pouvait revenir utiliser la place plus tard, chose qu'on ne pourra vraiment pas faire à moins d'être absolument certain de combler la place parce qu'on va avoir besoin des revenus.

Mme Harel: Je vous remercie. On aura sans doute l'occasion également avec Concertaction, demain matin, de revenir sur cette question. Maintenant, concernant votre déclaration à la page 24 sur les relations d'influence entre les deux gouvernements?

Mme Ferron: Vous comprendrez qu'étant un organisme avant tout canadien, c'est peut-être un peu plus la vision qu'on en a. Cela a toujours été une de nos craintes. En même temps qu'on a

toujours demandé au gouvernement fédéral d'assumer un leadership en ce qui concerne les services de garde, de la même façon on s'inquiétait à savoir comment iI assumerait ce leadership. Par le biais du régime d'assistance publique du Canada, le gouvernement fédéral n'assumait pas l'aide financière qui était accordée aux familles qui fréquentaient des services de garde à but lucratif. Dorénavant, cela va changer. En fait, cela aurait dû changer avec le nouveau projet de loi. On ne sait pas de quoi aura l'air le prochain. Vous pouvez être sûr qu'on va essayer de se battre pour que cela soit changé et que ça ne soit pas là.

Ce qu'on a constaté dans les derniers mois, entre autres, à la réunion du mois de juin, une réunion du comité national de direction de l'association canadienne, c'est qu'il y avait d'autres provinces, comme la Nouvelle-Écosse, entre autres, qui ont vu changer... Elle ne subventionnait pas le secteur à but lucratif. Du jour au lendemain, quand cette politique a été connue dans le domaine fédéral, il y a eu plusieurs changements. Il y a aussi la Saskatchewan; le ministre n'a pas menacé, mais il a laissé entendre qu'il pourrait changer sa politique et aussi subventionner le secteur à but lucratif. On trouve que c'est un net recul par rapport à ce qui existe présentement. Quand on parle d'améliorer, on se dit qu'il faudrait au moins commencer par ça.

Mme Harel: Je vous remercie, Mme Ferron.

Le Président (M. Bélanger): M. le député de Chambly.

M. Latulippe: Madame, dans votre mémoire, à la page 12, vous dites que le gouvernement devrait légiférer immédiatement pour arrêter et empêcher le développement de services commerciaux puisque leur but ultime est la réalisation de profits. En fait, vous dites que dans les garderies à but lucratif la recherche de profits est incompatible avec la poursuite de la qualité des services. Pourquoi nous dites-vous que, pour une personne, parce qu'il y en a plusieurs, qui dirige une garderie à but lucratif, c'est incompatible avec la qualité des services?

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Mme Ferron: C'est incompatible dans le sens où c'est l'objectif premier qui est visé. Vous comme moi, si on Investit 300 000 $ et plus dans une entreprise, on espère qu'elle rapportera, et c'est bien naturel. Par contre, ça ne doit pas être le premier but visé. Quand on parle de services de garde, quand on parle de garde des enfants, le premier but doit être des services de garde de qualité. Alors, c'est dans ce sens que c'est Incompatible.

M. Latulippe: Vous ne pensez pas que la qualité des services est mieux gérée et contrôlée par des normes ou par la formation que par la qualification de la garderie, qu'elle soit à but lucratif ou sans but lucratif?

Mme Ferron: II y a deux façons de regarder cela. Il y a effectivement les normes, la qualification du personnel, des choses qui sont mises en place par un gouvernement, qui sont des normes à suivre. Mais chaque jour, comment va-t-on vérifier que c'est appliqué dans les services de garde? Je crois que ce sont les parents qui sont les mieux placés pour vérifier et s'assurer que c'est là. C'est pour ça aussi qu'on demande que ce soient des services de garde sans but lucratif, pour s'assurer que si jamais I y a des profits réinvestis dans la garderie iIs restent dans la garderie et, deuxièmement, qu'ils soient contrôlés par les parents, les services de garde, parce que ce sont quand même eux qui sont les mieux placés et qui ont aussi une responsabilité face à leurs enfants et qui peuvent décider quelle est la meilleure qualité possible.

Il y a les normes. On a toujours dit: Les normes, c'est minimal. Mais quand on veut aller un petit peu plus loin que ça, ce sont les parents qui sont les mieux placés pour choisir et administrer.

M. Latulippe: Madame, je vais vous donner un exemple que j'ai dans mon comté, parce que j'ai rencontré tous les services de garde dans mon comté, indépendamment qu'Us soient à but lucratif ou sans but lucratif. Vous, vous êtes impliquée dans la gestion des garderies, selon votre expérience. Vous avez deux garderies, et c'est exactement le cas. L'une, avec un nombre de places, une cinquantaine de places. L'une est sans but lucratif, l'autre est à but lucratif.

L'une, celle qui est sans but lucratif, exige 14,80 $ par jour pour chaque enfant. Et elle est soutenue par les moyens de subvention actuels. L'autre, à but lucratif, exige 15 $ par jour par enfant. Vous, si vous aviez à administrer la garderie à but lucratif de la même capacité, comment pourriez-vous véritablement faire un profit, madame?

Mme Ferron: En ne payant pas les employés, c'est très simple. C'est clair que la majeure partie du budget d'une garderie est consacrée aux salaires. C'était clair dans tous les rapports. Que vous preniez l'analyse des états, des bilans financiers des garderies, que ce soit à but lucratif ou sans but lucratif, vous allez voir que la majeure partie du budget d'une garderie passe dans les salaires, dans la masse salariale.

Quand on parle de garderies à but lucratif, on parie d'environ 55 % du budget qui passe en masse salariale, alors que dans une garderie sans but lucratif, ça va être 80 %. Vous allez me dire: Est-ce que c'est de la mauvaise gestion? Est-ce que c'est de la mauvaise gestion de tenter de mieux payer le personnel pour garder la stabilité? C'est clairement établi dans l'énoncé politique qui est là que les conditions de travail

intéressantes étaient un facteur de stablité du personnel et que c'était un facteur très important quand on parlait de qualité de services de garde. Alors, si on veut être logique, I faudrait dire que des conditions de traval intéressantes, donc des meilleurs salaires, favorisent une meilleure qualité.

M. Latulippe: Ce que vous êtes en train de me dire, en fait, madame, c'est qu'il est plus facile de gérer, plus facile de mieux gérer une garderie sans but lucratif à cause du système de subventions, entre autres, qui fait en sorte que, de toute façon, ces gens-là peuvent respirer un peu plus que dans le système de garderies à but lucratif. Mais de porter le jugement que c'est la qualité et la nature de la garderie qui fait la qualité des services, bien, je m'excuse, je pense que c'est un mauvais jugement.

Je pense que ce n'est pas parce qu'on a un but lucratif ou que l'on est sans but lucratif que la qualité des services peut être altérée. On peut avoir une garderie à but lucratif avec une bonne qualité de service et l'autre, avec une mauvaise qualité de services. Je pense que les normes gouvernementales sont importantes, que la formation est importante, mais porter un jugement uniquement sur la qualité, sur la nature de la garderie, je pense que c'est un faux jugement.

Mme Ferron: Ce n'est pas uniquement sur la nature de la garderie, je m'excuse, c'est à partir de plusieurs études qui démontrent que le taux de roulement du personnel est plus élevé aussi, qu'a y a plus de plaintes qui sont portées dans ces garderies par les parents. Ce n'est pas juste une question de nature et de statut juridique, sauf que, comme par hasard, les moins bonnes conditions de travail, là où 1 y a le plus de plaintes portées, c'est dans ces garderies.

M. Latulippe: Si vous n'avez pas le même budget pour gérer le même genre de garderies, vous n'avez pas besoin d'être un homme d'affaires pour comprendre qu'effectivement vous avez plus de misère à gérer la garderie...

Mme Ferron: Alors, pourquoi ne ferme-t-elle pas?

M. Latulippe: ...avec un budget qui est inférieur que celle avec un budget supérieur. C'est de toute évidence et cela n'a rien à voir avec la qualité des services.

Mme Ferron: Je ne le pense pas.

Mme Harel: C'est intéressant, mais dans la mesure où le député conviendra qu'l faudra à ce moment-là les mêmes conditions salariales, indépendemment du statut de la garderie. Parce que vous aviez raison, 75 % des plaintes fondées à l'office proviennent de parents qui ont des enfants dans des garderies à but lucratif.

Le Président (M. Bélanger): Alors, si vous voulez, Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Cela reste un débat intéressant, parce qu'l faut faire comprendre aux membres de la commission parlementaire que ce n'est pas seulement une question idéologique, mais que c'est une question éminemment pratique. Le salaire moyen, je crois, des travailleuses en garderie à but lucratif est de 6,53 $, de mémoire, et dans une garderie à but non lucratif d'environ 8 $. Est-ce que le député peut convenir que ce n'est pas parce qu'il y aura augmentation de la subvention qu'il y aura pour autant augmentation de salaire, que ce ne sont pas là des vases communicants, et...

M. Latulippe: C'est une réponse idéologique, Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Ah oui, mais l'inverse est vrai aussi!

M. Latulippe: C'est une question Idéologique de votre part.

Le Président (M. Bélanger): Sur ce, Mme la ministre, si vous voulez remercier.

Mme Gagnon-Tremblay: Alors, madame, je vous remercie de votre présentation. Je tiens à souligner qu'effectivement l'Office des services de garde à l'enfance est membre de votre association par son centre de documentation. Je ne sais pas, par contre, je ne pense pas que l'office ait été consulté sur vos prises de position. Ce qui me déçoit peut-être un petit peu dans les réponses que vous nous avez données, c'est que j'aurais souhaité avoir davantage la vision canadienne de votre organisme - dans vos réponses - que d'avoir peut-être le cas plus précis d'une garderie en particulier.

Tout de même, je pense que votre mémoire est bien structuré et je vous remercie de votre présentation, Mme Ferron.

Le Président (M. Bélanger): La commission remercie l'Association canadienne pour la promotion des services de garde à l'enfance et, compte tenu de l'heure, ajourne ses travaux à demain 10 heures, dans la même salle.

(Fin de la séance à 18 h 24)

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