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Version finale

33rd Legislature, 2nd Session
(March 8, 1988 au August 9, 1989)

Friday, June 10, 1988 - Vol. 30 N° 23

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Interpellation: L'absence d'une véritable politique de la famille


Journal des débats

 

(Onze heures vingt-quatre minutes)

Le Président (M. Bélanger): La commission permanente des affaires sociales se réunit aux fins de procéder à une interpellation à la suite d'une question soulevée par le député de Lavio- lette au ministre délégué à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux sur l'absence d'une vraie politique de la famille.

Mme la Secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président, M. Blais (Terrebonne) est remplacé par M. Jolivet (Lavio-lette); M. Chevrette (Joliette) par Mme Blackburn (Chicoutimi).

Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. Alors, les règles de l'interpellation sont les suivantes. Chaque intervention est d'une durée maximale de dix minutes. Le ministre interpellé intervient pendant dix minutes au début et, ensuite, la règle de l'alternance est introduite, à savoir que c'est un député de l'Opposition, un député ministériel, le ministre, un député de l'Opposition, un député ministériel, le ministre, ainsi de suite, jusqu'à la fin de l'interpellation.

J'appelle donc le premier intervenant, le député de Laviolette.

Exposé du sujet M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: Merci, M. le Président. Nous sommes réunis ce matin à l'Assemblée nationale pour parler de l'absence d'une véritable politique familiale au Québec de la part du gouvernement libéral actuellement en place. Même si le Parti libéral veut nous faire croire, ici à l'Assemblée nationale et partout au Québec, qu'il est en train d'établir les bases d'une politique familiale, tout ce qu'on trouve derrière son discours, qu'on ' pourrait appeler "maître renard par le vote alléché", c'est une série de pirouettes un peu tape-à-l'oeil et, dans certains cas, considérées comme insignifiantes. Le ministre peut bien sourire, mais la réalité est là.

Il faut, pour se le rappeler, faire un historique de l'ensemble des promesses électorales faites par le Parti libéral. Souvenons nous du congrès général de juin 1985 où le Parti libéral était en train d'adopter son programme électoral qu'il a présenté à la population. Qu'est-ce que disait la résolution 51.1? Cette résolution indiquait qu'il fallait instaurer une politique globale de la famille. À l'égard d'une politique globale de la famille, si on regarde ce qui a été fait jusqu'à maintenant, j'aurai l'occasion d'y revenir, c'est que le gouvernement en place tenu d'aucune façon, encore une fois, une de ses promesses électorales.

La résolution 51.2 indiquait, toujours à ce même congrès général, qu'il fallait adopter une série de mesures concrètes touchant les divers champs d'activité de la famille, tels l'éducation, les affaires sociales, le logement, le soutien de revenu, la fiscalité et tout le reste.

La résolution 54.2 nous indiquait qu'il fallait créer une exemption spéciale qui s'adresserait aux familles ou individus qui prennent soin d'un parent, d'un enfant handicapé, d'un enfant âgé, d'une personne qui a certaines difficultés, donc des personnes âgées dans certains cas. On se retrouvait au congrès du parti libéral tout dernièrement, en février 1988, où le premier ministre disait qu'il était extrêmement préoccupé par la dénatalité au Québec. Le dossier de la politique familiale représentait donc pour lui un des grands défis pour le gouvernement actuel. C'étaient donc de la part, à la fois du Parti libéral dans l'Opposition et maintenant au pouvoir, de belles idées, de beaux idéaux qui ne se sont malheureusement pas concrétisés. Le ministre va dire: On a fait telle et telle chose, telle affaire, telle proposition lors du budget, telle proposition lors de la création du Conseil de la famille. Je vais y revenir.

Le bilan des réalisations du gouvernement en place depuis décembre 1985 alors que la ministre de la Santé et des Services sociaux était responsable à l'époque du dossier, qu'elle avait avec beaucoup de groupes fait des consultations et qu'on était sur le point d'aboutir à l'énoncé d'une politique, voilà qu'au 14 août 1987, il y a nomination d'un nouveau ministre à titre de responsable du dossier de la politique familiale, ministre délégué à la Famille, sans les pouvoirs du ministre qui avait été mis en place par le gouvernement du Parti québécois et qui avait agi avec les pleins pouvoirs. Donc, nomination du ministre actuel alors que les travaux allaient bon train et respectaient l'ensemble des échéances. Les organismes familiaux avaient été consultés sur un énoncé de politique et sur un éventuel Conseil de la famille. Ce que cela a donné finalement, cela a été que ce changement de ministre nous a permis de gagner du temps et de faire un changement d'orientations aussi. Les gens nous l'ont dit: La consultation que nous avons eue à l'époque était bien enclenchée, elle donnait des résultats qui nous semblaient satisfaisants et la nomination d'un nouveau ministre est venue changer toute cette orientation. C'est là qu'on a compris que le ministre junior du gouvernement actuel, comme ministre délégué à la Famille, s'est fait damer le pion par le grand ministre senior, ministre responsable, premier ministre, sur une politique de la dénatalité, ou de la natalité, alors que le ministre délégué à la Famille s'amuse un peu avec un Conseil de la famille qui est, malheureusement, quant à nous,

une sorte de coquille vide.

Le 9 décembre 1987, le ministre Dutil déposait un énoncé de politique familiale, et le projet de loi 94 créant le Conseil de la famille, intitulé, Penser et agir famille. Sur Penser et agir famille, le ministre nous disait de façon horizontale dans tous les ministères, dans tous les organimes: J'ai une responsabilité. On s'aperçoit malheureusement que ce n'est pas la réalité et on se retrouve devant une triste réalité. (11 h 30)

Donc, il y a eu dépôt du projet de loi 94 et discussions en commission parlementaire. J'en ai fait mention l'autre jour en disant que le ministre avait daigné accepter les deux groupes qui étaient présents, le Regroupement interorganismes pour une politique familiale au Québec ainsi que la Confédération des organismes familiaux du Québec qui se sont présentés à la commission parlementaire où on étudiait article par article. Le ministre a daigné les rencontrer alors qu'il savait très bien qu'il y avait de la réticence sur bon nombre d'articles de ce projet de loi. Donc, des gens qui, comme le Conseil des affaires sociales et de la famille, se sont élevés contre le projet tel que présenté et l'ensemble des organismes familiaux, comme le Cercle des fermières, la Confédération des organismes familiaux du Québec ou autres, une table provinciale sur la question, lesquels se sont trouvés à dénoncer le projet de loi tel que présenté. On a donc un Conseil de la famille qui est malheureusement devant nous, accepté maintenant par la majorité, mais qui est un organisme sous la tutelle du ministre qui a un petit budget et qui, quant à nous, est un organisme qui risque en cours de route de ne pas vivre comme il devrait vivre avec les pleines capacités de prendre des décisions de son propre chef. En même temps qu'on avait des réalisations qui, dans le fond, n'étaient qu'un recul par rapport à leur position lors des congrès antérieurs ou lors des discussions qui avaient eu lieu avec la ministre responsable à l'époque, nous nous trouvons devant un gouvernement qui agit même avec une formule qui est à caractère antifamilial. D'abord, dépôt de la réforme de la sécurité du revenu sur lequel mes collègues reviendront et surtout la responsable, comme membre de l'Opposition. Et je suis assuré que même le député de Chambly, qui a fait ses représentations à la commission parlementaire et qui est assis à votre droite, dira la même chose. C'est une proposition à caractère antifamilial qui vient diviser les familles et qui. d'une certaine façon, vient fausser cette réforme, quant à nous, la mettant comme une fausse réforme de la sécurité du revenu.

On a la valse-hésitation de la ministre de la Condition féminine dans le dossier des garderies. Ma collègue, la députée de Marie-Victorin, aura l'occasion de revenir sur cette question, parce qu'effectivement nous n'avons devant nous aucune politique réelle. Il y a même diminution quant au nombre de places cette année par rapport au passé.

Le ministre des Finances qui, d'une part, l'an passé, récupérait 68 000 000 S en inversant la modulation de l'allocation de disponibilité durant l'année 1987 va plus loin en 1988-1989 et fait encore une fois prendre de l'argent de l'ordre de 60 000 000 $ en 1988 en reculant la nouvelle modalité apportée par son budget.

Réforme Wilson. Silence de la part du ministre responsable au Québec et de son gouvernement sur une question aussi essentielle et qui, en fin de compte, nous donne l'impression qu'ils ne sont pas vigilants comme dans bien d'autres domaines, que l'on parle d'autres domaines: économique, frégates et autres.

Finalement, le budget de 1988-1989 propose des mesures insuffisantes et inadéquates. Je dois dire que, même à ce moment là. la première réaction semblait être une bonne réaction de certains groupes, mais après réflexion et après rediscussion et après revérification, on s'aperçoit que beaucoup de groupes maintenant dénoncent les propositions qui ont été faites comme étant insuffisantes et inadéquates. Que ce soient les groupes de femmes, les groupes de garderies, le Conseil des affaires sociales et de la famille, les centrales syndicales, le Conseil du statut de la femme, la Confédération des organismes familiaux du Québec ou autres, nous disons que nous avons devant nous un gouvernement de tape-à l'oeil, un gouvernement qui malheureusement ne donne pas la réponse à sa proposition de congrès de 1985. J'aurai l'occasion d'y revenir, M. le Président, et mes collègues aussi pour démontrer qu'il n'y a pas de véritable politique familiale au Québec. II n'y a que des mesures qui ne sont pas une politique familiale.

Le Président (M. Bélanger): Bien. Je cède la parole maintenant à M. le ministre délégué à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux.

M. le ministre.

Réponse du ministre M. Robert Dutil

M. Dutil: M. le Président, depuis 1960 des changements considérables sont intervenus dans notre société, comme on le sait. On a parlé à l'époque de révolution tranquille, on a parié d'un renouveau de la société, d'un ajustement par rapport aux sociétés occidentales et il y a eu de grands bienfaits à la suite de ces réformes qui ont été apportées à l'époque de 1960 et dans les années suivantes. On s'est rendu compte plus tard que cette évolution, ces changements, ces diverses nouvelles formules, cette nouvelle société qui émergeait, qui se modernisait au Québec, avait des conséquences pour la famille. On s'en est rendu compte d'ailleurs par divers symptômes dont le principal, celui qui est évoqué le plus souvent, celui qui frappe le plus la population - ce n'est pas le seul, M. le Prési-

dent, il y en a d'autres - est la dénatalité. Ce n'est pas un phénomène nouveau que la dénatalité, on parie de taux de renouvellement de notre société, c'est-à-dire d'un niveau de natalité qui serait suffisant pour renouveler notre société et qui se situe à 2,1 enfants par femme.

Depuis 1972-1973, cela fait donc quinze ans, nous sommes sous le seuil du taux de renouvellement. La raison pour laquelle je donne cette date, c'est que de 1976 à 1985, on so souviendra que c'était le gouvernement du Parti québécois qui dirigeait les destinées du Québec et il avait entre les mains les chiffres de ce symptôme des difficultés que vivait la famille, de l'un des symptômes, celui auquel on se réfère le plus souvent, et pourtant, en dix ans, le Parti québécois s'est attardé à beaucoup d'autres choses, à beaucoup d'autres dossiers que celui de la politique familiale. Nous l'avons mentionné à diverses occasions dans les campagnes électorales que nous avons eu l'occasion de faire contre le Parti québécois, dans l'Opposition lorsque le Parti québécois gouvernait. Leurs préoccupations, leurs idéaux pouvaient avoir des aspects légitimes, mais étaient bien souvent irréalistes. Ils ont donné de tels coups sur l'économie qu'ils tenaient pour acquise qu'ils se sont retrouvés effectivement dans une impasse faute de stimulation, faute de climat favorable à l'investissement, faute de volonté des entrepreneurs d'investir dans de pareilles conditions. Ils se sont retrouvés devant une crise économique qui a été beaucoup plus grave que celle que d'autres pays ont connue.

Il est important de le préciser, nous admettons volontiers de ce côté-ci que, dans le monde occidental, il n'y ait pas d'économie tout à fait indépendante des circonstances extérieures à son pays. On ne peut pas faire d'économie en vase clos. C'est pourtant ce que le Parti québécois a tenté de faire, et c'est ce qui a fait que la crise économique que l'ensemble du monde occidental a connue a été pire au Québec qu'elle ne l'était ailleurs.

On pourrait en parler davantage, mais tout cela pour dire que cela a amené l'ancien gouvernement jusqu'à aller imposer, dans son dernier budget, la récupération des allocations familiales, laquelle, comme on le sait, notre gouvernement a réussi à éliminer complètement avec ce dernier budget. Nous avions commencé à l'éliminer dès le premier budget à partir du quatrième enfant, nous l'avons fait à partir du troisième enfant l'année dernière et, cette année, le ministre des Finances a annoncé que la récupération des allocations familiales ne se ferait plus ni pour le premier, ni pour le deuxième enfant, en laissant entre les mains des parents 126 000 000 $ de plus, ce qui n'est qu'une partie du soutien économique que le gouvernement a accordé cette année.

Pendant dix ans, alors qu'on connaissait le symptôme de la dénatalité, le symptôme de problèmes que vit la famille et de changements de moeurs, que s'est-il passé pour que le Parti québécois ne fasse aucune politique familiale, n'envisage aucune mesure concernant ta famille? Il faut bien comprendre et il faut voir que dans les traditions du Parti québécois, la famille est totalement absente. Aujourd'hui, l'Opposition tente bien de récupérer ce cheval de bataille parce que la population est maintenant sensibilisée au phénomène de la dénatalité, se rend bien compte qu'il est temps d'agir et qu'il faut faire quoique chose. Mais, on ne peut pas prendre la responsabilité des gestes inconséquents, des gestes que n'a pas posés l'ancien gouvernement sur le plan de la politique familiale. Nous avons pris la situation telle qu'elle était en 1985, et malgré une situation budgétaire difficile, dès le départ, le ministre des Finances a augmenté graduellement le soutien aux familles en laissant, sous diverses formes, 500 000 000 $ aux familles dans le passé. Cette année, dans son budget, tout en diminuant le déficit et tout en maintenant ou en augmentant les services dans divers domaines, il a accepté de laisser ou accorder 772 000 000 $ en allocations supplémentaires aux familles, ce qui porte à plus de 1 200 000 000 $ le soutien économique aux familles que le gouvernement du Québec a accordé depuis deux ans et demi, M. le Président. C'est un chiffre qu'il faut citer alors que le soutien économique total aux parents dans le passé était de l'ordre de 700 000 000 $. On a presque triplé le soutien économique total aux familles depuis deux ans et demi dans une situation qui n'était pas facile initialement, je vous le rappelle.

Plusieurs énoncés, plusieurs discours ont annoncé notre politique familiale. Quand l'Opposition dit que le gouvernement actuel n'a pas de politique et d'orientation, je pense qu'elle veut volontairement oublier le texte que nous avons présenté au mois de décembre dernier et qui s'intitule "Énoncé des orientations et de la dynamique administrative", dans lequel nous identifions les divers champs d'activités dans lesquels nous avons l'intention d'agir ou dans lesquels nous avons agi puisque le mois de décembre, c'était il y a six mois et que depuis ce temps-là des gestes extrêmement positifs et importants ont été posés. Et je réfère l'Opposition à la page 9 où, entre autres, nous disons que la politique familiale du gouvernement du Québec aura comme objectif général de reconnaître l'importance de la famille en tant qu'institution et milieu de vie, notamment par le soutien collectif aux parents qui sont les premiers responsables de la prise en charge des enfants et du milieu familial.

Par la suite, dans notre texte, nous identifions les champs d'activité et nous nommons les ministères concernés par la politique familiale. Le soutien économique aux parents, le ministère des Finances, le ministère du Travail, l'habitation, le système d'enseignement, l'immigration et les communautés culturelles, les services sociaux et de santé, les services aux familles autochtones,

les services de garde, la famille et les loisirs, la justice et le droit de la famille, la sécurité de la famille, la recherche et la coopération, la famille et les agents culturels et ainsi de suite, M. le Président. Voilà la démonstration que nous avons clairement identifié les champs d'intervention dans lesquels nous voulons intervenir et nous interviendrons.

Ce que nous reproche l'Opposition ce matin, ce n'est pas de ne pas avoir de politique, nous en avons une. Elle souhaiterait que nous la mettions en place plus rapidement. Je pense qu'il y a là une nuance d'importance. Mais nos positions et nos couleurs sont claires. Nous allons vers une politique familiale. Nous avons identifié les champs d'activité et, dans ces champs d'activité le soutien économique, je lions à le rappeler, est un secteur important.

Que s'est-il passé depuis ce temps-là? II y a eu un discours d'ouverture. Le premier ministre en a pronconcé un au mois de mars à l'ouverture de la Chambre et, dans son texte, il a parlé abondamment de la politique familiale et a particulièrement identifié quatre secteurs prioritaires: le soutien économique aux familles - je reviendrai là-dessus - le gardiennage, l'habitation et les normes de travail, non pas comme les seuls champs d'intervention, mais comme des champs d'intervention prioritaires et fort importants pour le gouvernement du Québec parce qu'ils touchent l'ensemble de la population du Québec. Bien sûr, il y a d'autres domaines qui doivent être touchés. Je pense particulièrement à la santé et aux services sociaux qui touchent des clientèles particulières, qui touchent des clientèles avec des difficultés importantes. Mais le premier ministre, dans son discours inaugurai, s'est particulièrement attardé aux secteurs qui touchent l'ensemble de la population. Et par la suite, le 12 mai 1988, justement le jour de l'adoption du projet de loi concernant le Conseil de la famille, un budget a été déposé.

Mon temps est écoulé. J'aurai l'occasion, je l'espère, de revenir plus abondamment sur le soutien économique que le gouvernement a accordé par ce budget. Merci.

Le Président (M. Bélanger): Merci, M. le ministre. Alors je cède la parole à M. le député de Laviolette pour cinq minutes. Excusez-moi. Mme la députée de Marie-Victorin. J'avais le mauvais ordre. (11 h 45)

Argumentation Mme Cécile Vermette

Mme Vermette: Oui, M. le Président. Je suis tout à fait ébahie d'entendre les propos du ministre délégué à la Famille parce qu'il n'a pas arrêté de déclarer que des mesures de soutien sont apportées aux familles, comme le soutien collectif aux parents, et surtout au chapitre du gardiennage. Qu'est ce qu'il ne faut pas entendre? M. le ministre délégué à la Famille, est-ce que vous parlez quelquefois à la ministre déléguée à la Condition féminine qui a la responsabilité de l'Office des services de garde à l'enfance et qui, encore hier soir, me disait qu'il n'y a aucune politique en regard du réseau des garderies qui a été développée et mise de l'avant? Ce qu'elle est en train de faire depuis juin 1986, c'est de l'harmonisation. Elle a eu un document qui lui disait le nombre de places qu'il fallait créer au Québec depuis juin 1987 et rien n'est fait. Aucune politique n'est établie. Elle négocie avec Ottawa et, en plus de négocier avec Ottawa, elle se fait imposer un plafond de création de places dans les garderies, soit 60 000 places sur sept ans. J'ai appris hier, M le Président, qu'en plus de néçiocier, elle n'est pas capable de prendre de décision, Elle n'est pas capable parce qu'elle ne sait pas où le fédéral s'en va. Donc, elle ne peut pas faire sa politique parce qu'elle ne sait pas ce qui va arriver dans huit ans, quel sera le résultat de ces négociations et combien d'argent elle pourra obtenir du gouvernement fédéral dans la huitième année. À cause de cet objectif, on se laisse imposer un plafond par le fédéral et on n'est pas capables d'établir notre propre politique de développement d'un réseau des garderies ici au Québec. Je trouve cela inacceptable et inconcevable.

M. le ministre délégué à la Famille nous a dit qu'il y avait des mesures exceptionnelles qui avaient été prises. très substantielles, pour vraiment favoriser les femmes et les familles. Je lui dirai qu'à l'heure actuelle, 60 % des femmes qui ont des enfants de 0 à 6 ans sont sur le marché du travail et elles n'ont pas de place dans le réseau des services de garderie. II manque à l'heure actuelle 90 000 à 95 000 places pour répondre aux véritables besoins de nos familles québécoises. Si on voulait répondre à seulement 50 % des besoins, il faudrait développer, sur une période de trois ans, 54 000 places. On se parle, on est ici. en 1988 et j'entendais tantôt le ministre dire que, pendant les deux premières années qu'ils étaient au pouvoir, cela avait toujours été la faute du Parti québécois, de l'ancien gouvernement, s'ils n'avaient jamais pu faire quoi que ce soit depuis deux ans et demi Cela leur a pris deux ans et demi pour s'apercevoir qu'ils étaient au pouvoir et, une fois qu'ils se sont aperçus qu'ils étaient au pouvoir, ils commencent à dire que, de toute façon, les mesures qui seront apportées, ce ne sera pas pour aujourd'hui. Ce sera pour 1990. lors des prochaines élections. Cela fait une belle forme de gouvernement, ça. Deux ans et demi pour dire que, finalement, ce n'est pas nous autres, on ne gouverne pas encore, on ne peut pas rien faire, on ne peut rien modifier parce que c'est la faute de l'ancien gouvernement. Et quand on arrive en poste, on se réveille et on dit: Là, c'est le temps qu'on fasse quelque chose parce que le carnet de commandes de l'ancien gouvernement est tout

épuisé; il faut que ce soient vraiment nos politiques qu'on mette de l'avant. On dit: Houp, on n'a rien à faire, il faut attendre, en 1990, à la veille des élections et on annoncera tous les bonbons comme la dernière fois. C'est exactement cela que vous êtes venu nous dire, c'est exactement cela que vous venez faire et c'est exactement ce que m'a confirmé la ministre déléguée à la Condition féminine hier lorsqu'on parlait du développement du réseau des services de garderie. Elle-même m'a dit hier soir qu'il n'était pas question de mettre de l'argent en 1988-1989, mais que c'était beaucoup plus pour les années quatre-vingt-dix qu'ils injecteraient des sommes. Dans votre budget, où vous en faites les éloges d'une façon extraordinaire, qu'y a-t-il pour le réseau des garderies? On dit tout simplement: On développera 60 000 places sur sept ans. Pas d'argent frais, pas d'argent du tout, rien pour développer le réseau des garderies. On dit: Un pas pour consolider le réseau des garderies, 3 200 000 $ pour l'équipement et le matériel didactique; 1000 $ par garderie. Cela va loin, ça? Cela va très loin. Cela favorise un réseau des garderies et cela développe des places pour les familles. Il n'y a absolument aucune volonté de la part de votre ministère ou de la part du ministère de la Condition féminine pour faire en sorte que les familles québécoises, hommes ou femmes, puissent avoir accès à des places dans le réseau des garderies. Il n'y a aucune politique en place. Mme la ministre déléguée à la Condition féminine nous a bien laissé croire que les prochaines réunions avec le fédéral auront lieu en novembre 1988.

M. Jolivet: Ce ne sont pas des farces.

Le Président (M. Bélanger): Je cède la parole à M. le ministre.

M. Robert Dutil

M. Dutil: M. le Président, quand on fait une erreur, on se doit de le reconnaître et je vais reconnaître une erreur. J'avais estimé, lorsque je me suis présenté en politique, que quatre ans suffiraient pour réparer les dégâts que l'Opposition avait faits. Je dois vous dire que je pense que cela prendra vraiment huit ans tellement les dégâts étaient plus considérables que ceux que nous avions prévus.

Une voix: Non, mais c'est vrai.

Une voix:...

Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît.

M. Dutil: J'admets une erreur et je ne comprends pas que l'Opposition s'en plaigne. Je pense que c'est tout simplement une question d'honnêteté.

Quant au budget, je pense qu'il est bon de revenir là-dessus et de l'expliquer davantage. Le gouvernement a consenti des baisses d'impôt et a transformé des exemptions de revenu en crédits d'impôt pour environ 500 000 000 $, on dit 499 000 000 $. Arrondissons donc à 500 000 000 $ pour nous comprendre.

Je voudrais intervenir plus particulièrement au sujet des exemptions d'impôt qui ont été transformées en crédits d'impôt à la demande de beaucoup d'organismes qui disaient, à juste titre, que les exemptions d'impôt étaient une façon régressive de faire les choses puisque ceux qui avaient les plus hauts revenus bénéficiaient davantage de réductions d'impôt, étant donné qu'ils pouvaient réduire leur revenu du même montant mais, leur taux marginal d'impôt étant plus élevé, ces gens bénéficiaient donc d'un abaissement d'impôt plus considérable.

Le ministre des Finances, dans son budget, a déclaré que ces exemptions d'impôt seraient transformées en crédits d'impôt à un taux marginal de 20 %, c'est-à-dire plus élevé que la moyenne des impôts et donc, donnant davantage non seulement aux familles les plus démunies mais donnant davantage globalement à l'ensemble de la société du Québec. Donc, d'une pierre, deux coups: plus pour les familles à plus faible revenu et plus pour l'ensemble des contribuables du Québec, puisque la conversion s'est effectuée à ce taux de 20 %.

L'allocation, qui s'appelait auparavant l'allocation de disponibilité et qui obligeait les parents à choisir entre les frais de garde et l'allocation de disponibilité, a été transformée également en allocation jeunes enfants c'est-à-dire, que vous réclamiez ou non des frais de garde, vous avez droit à l'allocation jeunes enfants.

Je me rappelle ce que disait tout à l'heure le député de l'Opposition, M. le député de Laviolette en isolant un facteur, il disait: L'année dernière, le gouvernement a récupéré des parents la somme de 68 000 000 $. Il a fait abstraction de toutes les autres mesures qui étaient incluses dans le budget et qui faisaient que la somme et les différences entre les avantages et les retraits donnaient plus de 169 000 000 $ de plus aux parents. Évidemment, un oubli de la part du député de Laviolette, c'est pardonnable, il m'excusera de le lui rappeler; je pense que c'est important, la vérité a ses droits.

Il est important de rétablir la situation. On ne peut pas isoler une mesure de soutien économique qui peut avoir, elle, un effet négatif, des autres mesures qui, elles, ont des effets extrêmement positifs. Il oublie évidemment de mentionner la non-récupération des allocations familiales qui avait été prévue dans le dernier budget du gouvernement du Parti québécois, le budget Duhaime; un gouvernement en panique qui est allé enlever 200 000 000 $ dans les poches des parents en récupérant leurs allocations familiales; un gouvernement en panique, il faut le comprendre, à ce moment-là. Rappelons-nous la

situation. Les virgules du programme du Parti québécois ont fait éclater ce gouvernement. Les virgules du programme du Parti québécois ont fait éclater ce gouvernement-là. C'était beaucoup plus important de se chicaner sur les virgules que de soutenir la famille dans la société québécoise. C'était beaucoup plus important de s'entre-déchirer que de s'assurer que la stimulation économique était là, avec le résultat que lors de la préparation du budget en catastrophe de M. Duhaime, nouveau ministre des Finances qui remplaçait M. Parizeau qui avait claqué la porte parce que les virgules du programme ne lui plaisaient pas, le nouveau budget préparé en catastrophe par M. Duhaime a fait qu'il lui manquait 200 000 000 $. L'imagination considérable de ce parti a fait qu'il est allé l'enlever aux familles.

Cela n'avait pas de bon sens. Cela nous a pris trois ans, nous avons remis aux parents graduellement, au fur et à mesure du renforcement de notre économie par la stimulation que nous avons faite et du dégagement des marges de manoeuvre, ces 200 000 000 $ dont 126 000 000 $ cette année.

Le Président (M. Bélanger): Je cède la parole au député de Fabre. M. le député.

M. Jean A. Joly

M. Joly: Merci, M. le Président. Lorsqu'on est convoqués pour une interpellation, dans bien des cas on pense que c'est justifié afin de donner plus d'information à la population. Dans d'autres cas, on est drôlement surpris, surtout quand on considère la réaction favorable et positive de tous les médias et de tous les intervenants, tant économiques que ceux en relation avec la famille, à la suite de la parution du budget. Ou c'est de la mauvaise volonté de la part des gens de l'Opposition, ou c'est un manque d'information, ou on ne lit pas les journaux, ou on ne sait peut-être pas lire. Qu'on regarde tout ce qui s'est produit à la suite du dépôt du budget, les réactions favorables, je dirais par 90 % de la population parce que cela a touché exactement ce que M. le ministre délégué à la Famille disait tantôt: On a essayé de cerner dans ce budget-là le soutien économique aux familles. On a touché le gardiennage, bien sûr, on a touché aussi un autre point qui est quand même bien important, qui est l'accès à la propriété.

J'aimerais revenir surtout sur le point do l'accès à la propriété sur lequel on dit que pendant sept ans, le gouvernement se rend responsable de 10 % des intérêts sur 7000 $. Cela représente quoi, en fait, comme soutien à la famille? Si ce n'est pas un soutien tangible à la famille, je me demande ce que c'est. Cela représente quand même près de 5000 $. C'est 700 $ par année pendant sept ans, c'est 4900 $. Cela veut dire que c'est une réduction mensuelle de près de 60 $ sur le loyer de ceux qui bénéficieront de ce programme. Alors, quand on sait qu'aujourd'hui élever une famille dans le béton n'est pas facile, ce n'est pas facile d'élever une famille dans ce qu'on appelle communément les grands grands blocs d'appartements avec des pièces assez restreintes, on donne la possibilité aux gens d'avoir accès à la propriété alors que pendant sept ans on leur enlève l'inquiétude de payer des intérêts sur 7000 $ et non récupérables, à part cela et non imposables, en plus de cela.

Je pense que, quand on a nommé le ministre délégué à la Famille le 14 août 1987, il a pris son rôle au sérieux. Il a réussi à s'asseoir avec tous les autres ministres concernés. Ensemble. ils ont façonné le budget qu'on connaît On sait aussi que la venue des futurs enfants va être reconnue d'une façon quelconque par la remise de quelques dollars. Par exemple, lors de la naissance d'un troisième enfant dans une famille, aujourd'hui, la famille est aidée avec 3000 $. Je pense que c'est reconnaître notre responsabilité en ce qui concerne les familles. On a regardé le total qui a été accordé aux familles, c'est 772 000 000 $. Dans les journaux qui en ont parlé, je pense que la majorité des journaux l'ont fait, d'ailleurs, on dit: Les familles sont les grandes bénéficiaires de la réforme fiscale annoncée par le ministre des Finances. Gérard D. Levesque, dans son budget qui réduira les impôts de l'ensemble des contribuables de 305 000 000 $ cette année, de 892 000 000 S en 1989, soit 1 200 000 000 $ en deux ans. Florent Francoeur, président de la Chambre de commerce de Montréal, disait "Le budget comporte de bons éléments pour les jeunes familles sous la forme d'une aide financière". Le non moins coloré M. Larose, de la CSN, a dit: "À la CSN on félicite le gouvernement d'avoir supprimé les exemptions personnelles pour les remplacer par des crédits d'impôt. C'est une règle plus équitable pour tout le monde. "

Si ces mesures qu'on a mises de l'avant sont endossées par la majorité des personnes ou des groupes responsables dans notre société et que seule l'Opposition a quelque chose à redire, je pense que ce matin c'est non justifié de s'asseoir ici et d'être interpellé. On aura à revenir. Le ministre aura sûrement d'autres éléments à apporter tantôt Mais, certainement. je persiste à dire qu'il y a de la mauvaise volonté de l'autre côté Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bélanger): Merci. J'appelle maintenant la députée de Chicoutimi. Madame, la parole est à vous.

Mme Jeanne L. Blackburn

Mme Blackburn: Merci. M. le Président. Le ministre nous tient responsables de certaines mesures qui auraient eu comme effet de détério-

rer la condition des familles. Il cite à titre d'exemple la récupération des allocations familiales. Je voudrais juste lui rappeler qu'au moment où ce gouvernement prenait la décision d'appliquer cette mesure, simultanément il abaissait les impôts des particuliers à hauts revenus de quelque 86 000 000 $. Ce n'était pas une décision du gouvernement précédent, c'était la toute première décision de ce gouvernement en décembre 1985. (12 heures)

Le ministre impute également aux erreurs du gouvernement précédent le fait que cela se soit détérioré. Je ne sais pas si on a attiré son attention sur une erreur qui est en train de se produire et qui va avoir des conséquences considérables sur l'établissement de services de garde en milieu scolaire. Le gouvernement précédent avait dans la loi 3, qui est la Loi sur l'instruction publique, fait obligation aux directeurs d'école d'implanter des services de garde en milieu scolaire. Il faut se rappeler que la loi 3 était une loi et, n'eût été le fait qu'elle fut invalidée par les tribunaux sur une disposition qui n'avait aucun rapport avec cette disposition spécifique de la loi, elle s'appliquerait aujourd'hui.

Le projet de loi qui est sur la table et dont le parrain est l'actuel ministre de l'Éducation ne fait plus obligation aux directeurs d'école d'offrir des services de garde en milieu scolaire. Quelle est la situation aujourd'hui, au moment où on se parle? Il y a 64 % des mères de famille qui ont des enfants de moins de six ans et qui sont sur le marché du travail. Leur proportion était de 34 % il y a dix ans. Leur nombre croît en proportion, c'est-à-dire que, plus les enfants entrent à l'école, plus les femmes ont tendance à retourner sur le marché du travail. Dans nos écoles, au niveau préscolaire et au primaire, on a 555 000 enfants dont une proportion de plus en plus grande se promènent la clef dans le cou et entrent dans des appartements vides le midi et le soir, parce qu'ils arrivent à la maison entre 15 h 30 et 16 heures et que les parents entrent à la maison entre 18 heures et 19 heures. Actuellement, dans les écoles du Québec, il y a quelque 30 000 places dans les services de garde alors qu'on peut estimer, de façon tout à fait conservatrice, à quelque 300 000 le nombre d'enfants qui n'ont pas de surveillance au moment où ils entrent à la maison, à moins que les parents n'en organisent par le biais de services qu'ils s'offrent aux alentours de la famille.

Le ministre de l'Éducation n'a aucune politique touchant les services de garde en milieu scolaire; rien ne vient, par exemple, préciser la qualité des services à être offerts, les objectifs à être poursuivis par ces services, la durée des services. La durée des services qui paraît dans la règle budgétaire actuellement est déterminée comme suit: "les services doivent être ouverts une demi-heure avant le début des cours et une heure après la fin des cours". Cela veut dire qu'à 16 h 30, tout peut être terminé dans une école.

Actuellement, comme la loi 3 ne s'applique pas, il y a des directeurs d'école qui refusent systématiquement d'organiser des services de garde et d'offrir des services de surveillance à l'heure du lunch. C'est cela, la situation dans les écoles du Québec.

On veut imputer cette responsabilité au gouvernement précédent; il serait peut-être intéressant que le ministre nous fasse part des pressions qu'il a exercées auprès de son collègue, le ministre de l'Éducation, pour qu'il réintroduise dans le projet de loi actuel les obligations qui étaient dans la loi 3. Que le ministre identifie également avec le ministre de l'Éducation ce que seraient les éléments d'une réelle politique de services de garde en milieu scolaire qui définiraient la durée de ces services. Selon nous, le minimum accessible devrait être de 7 à 18 heures. Que les services aient également des objectifs d'animation et de formation et que cela ne soit pas simplement de la surveillance. Que ces services soient accessibles même aux enfants qui bénéficient du transport scolaire gratuit. Actuellement, quand un enfant bénéficie du transport scolaire gratuit, l'école n'a pas droit aux subventions le concernant - essayez de m'expliquer pourquoi - comme si l'autobus pouvait servir de lieu de garde. Je ne comprends pas vraiment la rationalité dans tout cela.

Ce que je dis à ce gouvernement et au tout nouveau ministre responsable de la politique familiale, c'est qu'il n'a peut-être pas eu le temps de tout voir, mais plutôt que d'essayer de fuir en avant en disant que le gouvernement précédent a toujours tort, pourquoi n'essaie-t-il pas d'établir un réel dialogue...

Le Président (M. Bélanger): En conclusion, Mme la députée.

Mme Blackburn: ...avec ses autres collègues de manière à établir des politiques concrètes en matière de services de garde en milieu scolaire et cela, dans les meilleurs délais...

Le Président (M. Bélanger): Votre temps est écoulé, madame, je m'excuse.

Mme Blackburn: ...et qu'il puisse - je termine, M. le Président - influencer le plus rapidement possible son collègue dans le but de faire inscrire...

Le Président (M. Bélanger): C'est terminé, madame, je m'excuse.

Mme Blackburn: ...cette obligation dans la Loi sur l'instruction publique? Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Bélanger): M. le ministre.

M. Robert Dutil

M. Dutil: Vous voyez, M. le Président, on a eu, au début de l'intervention de Mme la députée de Chicoutimi, un exemple justement du dogmatisme qui a fait que l'économie au Québec s'est développée moins rapidement pendant les dix années de l'ancien gouvernement qu'elle n'aurait dû se faire. Mme la députée a dit: Nous avons baissé les impôts des particuliers aux plus hauts revenus, donc, nous avions la marge de manoeuvre qu'il nous fallait si nous avions voulu utiliser cette marge de manoeuvre. Pourtant, cela a été dit et redit par le gouvernement actuel: II est important dans notre société d'avoir une fiscalité compétitive pour éviter de faire fuir les capitaux. Rappelons-nous la décision prise par M. Duhaime dans son dernier budget, bonne décision cette fois-ci, d'abolir les impôts sur les successions. Dogmatiquement, l'ancien ministre des Finances, M. Parizeau, maintenait ces droits de succession alors que le seul endroit en Amérique du Nord où cela était maintenu, c'était au Québec, même s'il savait très bien que le rendement de ces impôts sur les successions était très peu considérable, mais qu'il avait un effet désincitatrf et de fuite considérable de capitaux qui a eu un effet épouvantable sur l'investissement au Québec.

Ce n'est que l'un des exemples que l'on pourrait donner. On peut ajouter l'autre exemple, justement, de la fiscalité non compétitive par rapport aux autres provinces du Canada et qui a fait également fuir bien des gens qui auraient pu investir à ce moment-là au Québec. On a aujourd'hui les résultats des mesures incitatives que nous avons prises pour assurer le développement économique.

Maintenant, je voudrais intervenir sur les quelques principes que nous avons énoncés. On sait que les discussions de principe ne sont pas, en général, les plus populaires à l'Assemblée nationale. Elles me paraissent toutefois importantes. Dans le document que nous avons présenté en décembre, nous avons établi certaines bases, certains principes sur lesquels nous fondons notre action. La population du Québec aura à juger d'ici quelque temps, d'ici deux ans à deux ans et demi, de notre action sur l'ensemble de notre mandat. Nous l'avons dit: Nous nous sommes dégagé une marge de manoeuvre pour appliquer cette politique familiale. Mais, quelle est-elle, la politique familiale? Il est important que la population l'entende et se te fasse redire. Nous avons établi des principes de base, M. le Président, en page 8 du document d'orientations, qui disent: "Le gouvernement, dans les limites de sa compétence et de sa responsabilité, veut reconnaître la famille comme valeur collective fondamentale, car le bien-être et celui des individus qui la composent sont considérés comme sous-jacents au bien-être de la société. "Deuxièmement, le gouvernement veut contribuer à la cohésion et à la stabilité de la famille ainsi que tenir compte davantage de la spécificité de la réalité familiale en disant, bien sûr: C'est d'abord avec l'individu que l'État transige, mais par ailleurs, la famille constitue la cellule de base de notre société et le lieu premier d'apprentissage et de socialisation des individus. Une politique familiale implique donc que le gouvernement soutienne la famille en harmonie avec les multiples formes de soutien aux individus et aux groupes sociaux que constitue l'éventail des politiques gouvernementales.

Troisièmement, le gouvernement veut soutenir les parents à titre de premiers responsables légaux et sociaux de la prise en charge des enfants, évitant de se substituer à eux tout en protégeant l'intérêt de l'enfant."

Nous avons énoncé ces principes de base. La raison pour laquelle je les resouligne dans le peu de temps qui m'est donné pour intervenir, c'est que notre philosophie n'est pas toujours très proche de celle de l'ancien gouvernement qui voudrait maintenir en tutelle les parents, ne leur faisant aucune confiance dans le processus d'éducation de leurs enfants. Quand on parle d'un soutien économique comme celui que nous avons accordé cette année, que notre gouvernement, dans son budget, a accordé aux familles cette année, c'est le signe que notre philosophie de base est marquée par la confiance que nous avons aux parents à qui nous voulons donner les moyens économiques, d'abord. Nous voulons donner d'autres moyens. Nous en parlerons plus tard puisque nous n'avons que des périodes de cinq minutes en alternance, mais nous voulons donner les moyens économiques aux parents de faire ce qu'ils sont le plus en mesure de faire, c'est-à-dire d'assurer l'éducation de leurs enfants. Merci.

Le Président (M. Bélanger): Bien. M. le député de Chambly.

M. Gérard Latulippe

M. Latulippe: Merci, M. le Président. Pour faire référence à ce que M. le député de Lavio-lette disait tout à l'heure, si avec certains de mes collègues j'ai publiquement exprimé certaines réticences concernant le projet d'aide sociale, c'est que nous avions des préoccupations vis-à-vis des plus démunis de notre société. Mais c'est ce qui me permet, par ailleurs, de dire que dans d'autres secteurs - et là je parle de la politique familiale - nous avons fait des pas importants. Si en redevenant député j'ai acquis une plus grande liberté de parole et d'action qui me permet de discerner les bons coups des mauvais, peut-être que l'Opposition aurait avantage aussi à faire la même chose, à voir ce que nous faisons de bien et à être en mesure de le dire aussi publiquement. Vous savez, la politique familiale n'est pas quelque chose qui va arriver du jour au lendemain comme si on avait inventé du jour au lendemain une politique familiale pour régler tous

les problèmes de la famille.

La famille a profondément évolué depuis les années soixante. Nous avons vécu une chute draconienne du taux de natalité. Nous avons vécu aussi une mutation importante de la famille attribuable, par exemple, à l'évolution de la femme, sa présence sur le marché du travail, l'accroissement de notre niveau de vie, le développement de l'éducation, qui font en sorte que nous ne retrouvons plus cette famille traditionnelle que nous avions durant les années quarante et cinquante. Le taux de divorces est passablement impressionnant, le nombre de familles monoparentales aussi; l'intervention que l'on doit faire est donc une intervention qui est variée, où l'on doit tenir compte de cette nouvelle réalité familiale dans laquelle nous vivons aujourd'hui.

Je pense que d'abord la nomination d'un ministre délégué à la Famille, cela a déjà été un premier pas; un deuxième pas, ce fut la création du Conseil de la famille; mais c'est un ministre qui a une vocation horizontale, un ministre qui intervient auprès de ses collègues, qui doit faire en sorte que dans différents secteurs d'activité, comme l'immigration, les finances, il y ait des interventions ponctuelles. Je pense que vous devriez vous joindre à nous pour ce premier volet de politique familiale qui a été, à toutes fins utiles, donné dans le dernier budget du gouvernement libéral. D'ailleurs, votre porte-parole de l'Opposition, M. Parent, est venu très près de prendre cette nouvelle attitude que les parlementaires devraient avoir de dire, lorsque des mesures sont bonnes: Oui elles sont bonnes, et, lorsqu'elles sont moins bonnes: Oui elles sont moins bonnes.

Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît! On respecte le droit de parole du député de Chambly.

M. Latulippe: Dans le budget, un des premiers aspects de la politique familiale est le soutien financier aux familles, parce que compte tenu que la famille a été modifiée depuis les années soixante, qu'elle n'est plus nucléaire, le soutien financier à cette famille éclatée est un des volets fondamentaux de la politique familiale.

Vous le savez, c'est vous qui avez instauré la taxation des allocations familiales. Vous devriez applaudir cette abolition complète de la récupération des allocations familiales.

Le deuxième volet est l'allocation à la naissance. C'est certain que 3000 $, par exemple, pour un troisième enfant ne règlent pas tout, mais c'est un pas important pour aider nos familles à avoir plus d'enfants et à accroître ainsi le taux de natalité. Je suis convaincu que le ministre de la Famille a eu une influence prépondérante dans les mesures de soutien financier que nous retrouvons dans ce budget concernant la famille et je pense que l'on doit tous, et vous devriez vous joindre à nous, approuver ces mesures qui forment un volet important de la politique familiale. (12 h 15)

Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M. le député. Mme la députée de Johnson.

Mme Carmen Juneau

Mme Juneau: Merci beaucoup, M. le Président. J'écoutais attentivement le ministre qui parlait de philosophie. En décembre dernier, il parlait aussi de penser et agir famille. Je souhaiterais énormément que, dans ce discours, le ministre inclue aussi les gens du troisième âge, parce que ce sont les parents de ces jeunes familles et ce sont également eux qui nous ont ouvert les chemins, qui nous ont aidés dans la vie et qui, aujourd'hui, mériteraient qu'on ait une attention toute spéciale quand on parle de la famille. La plupart ou une grande partie de ces gens vivent en deçà du seuil de la pauvreté. Quand on parle de logements pour les personnes âgées, on se rend compte que ces gens n'ont pas le nécessaire ou l'équité qu'on pourrait leur assurer aujourd'hui, surtout quand on pense qu'on vit des années de vaches grasses. Lorsqu'on songe à une politique familiale, je pense qu'on pourrait inclure les gens âgés.

Si on se rend bien compte que la natalité est à la baisse, il faut quand même admettre que la longévité est à la hausse. Aujourd'hui, 10 % de la population du Québec ont 65 ans et plus. Donc, dans des années futures qui ne sont pas très loin, c'est-à-dire en 2040, nous aurons deux personnes âgées pour une personne de moins de 65 ans. Si les politiciens ne s'assoient pas et ne pensent pas également à nos parents, aux gens âgés d'aujourd'hui, lorsqu'ils pensent à la politique familiale, ce sera regrettable mais on arrivera à un moment où ces pauvres personnes - et nous allons allègrement vers cette période - n'auront pas ce à quoi elles doivent s'attendre, c'est-à-dire une vie décente pour continuer à vivre parmi les leurs.

On parle beaucoup du souhait de la ministre de la Santé et des Services sociaux, qui était aussi celui de notre gouvernement, concernant le maintien des personnes âgées à domicile. Qu'a-t-on fait de plus pour garder le plus de gens âgés à domicile le plus longtemps possible? Est-ce qu'on a injecté les sommes essentielles dans les CLSC pour aider les jeunes familles qui veulent garder leurs parents à la maison? Est-ce qu'on a ajouté du personnel pour l'aide à domicile, des gens qui sont capables de visiter les familles qui ont le coeur de garder un de leurs parents à la maison? Est-ce qu'on a des mesures fiscales pour aider les familles à pouvoir garder leurs parents? Est-ce qu'on a pensé aussi au manque de ressources pour ces personnes âgées qui sont peut-être autonomes physiquement, mais financièrement incapables de faire quoi que ce soit?

Vous savez, on a trop souvent tendance à penser que la place qu'on dort réserver aux personnes âgées, c'est un petit coin pour jouer aux cartes, de façon à ce qu'ils ne dérangent pas beaucoup de monde. Je pense que si on avait le coeur d'admettre que les gens âgés sont, bien plus souvent qu'autrement, des personnes qui font du bénévolat dans les hôpitaux, qui vont passer la popote roulante à des gens qui sont moins autonomes qu'elles, qui gardent les petits à la maison, si on reconnaissait dans tous les sens ce que ces personnes âgées ont apporté à la famille, peut-être qu'en pensant à la politique familiale, on pourrait songer davantage à instaurer des mesures qui aideraient les jeunes familles à garder leurs parents à la maison le plus longtemps possible.

J'espère bien qu'après ce premier pas de mise sur pied de cette politique familiale, le ministre aura tendance à penser que ce ne sont pas seulement les tout petits qui représentent une famille, mais aussi les gens qui ont été là avant nous et qui méritent qu'on les intègre, avec les possibilités de le faire, c'est-à-dire en leur accordant un logement décent, des mesures fiscales, la possibilité de se sentir importants et de sentir qu'eux aussi ils ont droit, dans cette famille, d'avoir leur place qui, à mon point de vue, est juste et équitable compte tenu de ce qu'ils nous apportent comme expérience et comme valeur de vie.

Une voix: Bravo!

Le Président (M. Bélanger): M. le ministre. M. Robert Dutil

M. Dutil: M. le Président, plusieurs mesures importantes ont été apportées concernant les personnes âgées. Je ne veux pas en faire une enumeration exhaustive. Rappelons-nous tout simplement qu'au budget, on a parlé d'un montant de 86 000 000 $. Rappelons-nous qu'au chapitre des centres d'accueil, on a parlé d'un redressement de 70 000 000 $ sur une base de trois ans. Plusieurs autres mesures sont apportées. Nous ne les négligeons pas. Évidemment, la difficulté d'une interpellation comme celle-ci est que, de cinq minutes en cinq minutes, on ne peut pas faire le tour de l'ensemble des mesures qui sont apportées.

C'est pourquoi je pense qu'il est important de partir des principes de la politique familiale, de partir de ses objectifs. Et cela me ramène à mentionner ici, à la population, aux gens qui nous écoutent, les objectifs fonctionnels que le gouvernement a adoptés lors de l'énoncé des orientations, et qui vont nous permettre justement de mettre en place l'ensemble de la politique familiale.

Entre autres, faire en sorte que chaque ministère ou organisme gouvernemental concerné assume la dimension familiale et l'intègre dans ses politiques et programmes. En second lieu, assurer la concertation gouvernementale nécessaire. C'est un point important, assurer la concertation gouvenementale, en particulier sur le plan de la cohérence et de la concordance des politiques qui doivent répondre à l'objectif général de la politique familiale. En troisième lieu, assurer la même concertation gouvernementale pour faciliter aux différents ministères et organismes gouvernementaux l'harmonisation requise avec les autres paliers de gouvernement et milieux responsables du soutien apporté aux parents et aux autres membres de la famille. M. le Président, je parle de ce troisième point et je donne des exemples. Les municipalités sont également concernées par la politique familiale. Il est important qu'elles soient sensibilisées au rôle qu'elles peuvent jouer dans la politique familiale, de même que les commissions scolaires, de même que le monde du travail, que ce soit le milieu syndical ou le milieu patronal. Et le quatrième objectif fonctionnel que nous identifiions au moment de l'annonce de notre politique familiale, en décembre dernier, était de favoriser l'expression des familles à l'égard du développement de la politique familiale.

Cela m'amène à vous parler du Conseil de la famille que nous avons décidé de créer. On sait que, dans le passé, il existait un conseil qui avait les deux vocations, c'est-à-dire un conseil qui portait le titre de Conseil des affaires sociales et de la famille et qui avait donc comme vocation de se préoccuper des affaires sociales tout autant, sinon plus, que de la famille. On se rappellera les déclarations de la présidente de cet organisme-là qui disait: De 1981 à 1985 - je pense que c'était en réponse à une question du député de Laviolette d'ailleurs, si je me rappelle bien - nous n'avons rien fait parce que cela n'intéressait pas les ministres qui étaient, à ce moment-là, titulaires du ministère de la Santé et des Services sociaux. On se rappelle que les titulaires du ministère de la Santé et des Services sociaux, à cette époque-là, ont été l'ancien chef de l'Opposition, M. Johnson et M. le chef parlementaire de l'Opposition, M. le député de Joliette. Ces deux personnages semblaient ne pas s'intéresser à la politique familiale, ce qui a fait que le Conseil des affaires sociales et de la famille, qui avait quand même le mandat de s'occuper expressément de la famille, ne s'en occupait pas.

Nous avons décidé d'abord de mettre en évidence le dossier famille et, ensuite, de nous assurer qu'un conseil ait exclusivement le mandat de se préoccuper de politique familiale et de développement de la famille, non seulement auprès du gouvernement, mais également en regard des autres intervenants que nous avons dans la société et qui, eux aussi, peuvent avoir une influence, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, sur la politique familiale, sur un redressement des valeurs familiales et sur un redressement des situations familiales.

Nous avons effectivement eu un débat qui a duré quelques mois sur ta création de ce Conseil de la famille, et où l'Opposition s'est dite insatisfaite des pouvoirs et fonctions de ce conseil. M. le Président, je tiens à répéter, je l'ai déjà dit, que le Conseil de la famille a davantage de souplesse, de pouvoirs et de possibilités qu'en avait le Conseil des affaires sociales et de la famille, à plusieurs chapitres. J'en mentionne un: la recherche et les études. Au Conseil des affaires sociales et de la famille, il fallait obtenir l'autorisation du ministre pour pouvoir les faire. Au Conseil de la famille, ce n'est qu'après consultation avec le ministre délégué à la Famille que l'on peut faire les études et la recherche. Consultation et approbation, c'est bien différent. C'est un progrès. Merci.

Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M. le ministre. Je reconnais le député de Sainte-Marie.

M. Michel Laporte

M. Laporte: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de prendre la parole ce matin à cette interpellation qui concerne la politique familiale, étant donné que je représente un comté, comme on dit habituellement, socialement défavorisé. Les mesures annoncées dans le dernier budget me servent ou, à tout le moins, m'incitent à intervenir ce matin. J'ai essayé de trouver une forme d'introduction pour expliquer pourquoi parler de politique familiale. J'ai retenu une phrase de l'actuel ministre délégué à la Famille, en date du 28 avril 1988. Il disait: "La dénatalité, à mon avis, est beaucoup plus un symptôme, une sonnette d'alarme pour notre société québécoise particulièrement dans un contexte nord-américain de culture française ici au Québec entourée par une société nord-américaine anglophone. " À cela, on pourrait ajouter assurément que la dénatalité est un élément déclencheur des années 1972 et 1973 sur le nombre d'enfants qu'avait chaque famille. Donc, ce n'est pas un phénomène nouveau ou récent dans notre société, surtout et plus particulièrement par rapport à la volonté que notre gouvernement a eue de mettre en place un ministre délégué à la Famille et, plus particulièrement, un budget qui se voulait le premier jalon d'une politique d'intervention qui était pour penser à l'individu et à l'individu qui constituait cette famille.

Qu'est-ce qui peut guider dans le choix de fonder une famille ou de continuer à soutenir la famille? Il y a assurément des choix personnels, il y a aussi plusieurs interventions qui peuvent nous aider à décider ou, à tout le moins, nous guider dans le choix de fonder une famille, dont l'organisation du travail. Il y a aussi - c'est ce à quoi on s'est attardé plus particulièrement dans le récent budget - des raisons fiscales et financières. Assurément, on pourrait parler aussi de l'habitation. On pourra y revenir plus spécifiquement.

J'aimerais simplement souligner un phénomène qui n'est pas récent, mais qui m'apparaît de plus en plus insistant sur le comportement, si je peux m'exprimer ainsi, d'une société où des individus ne peuvent pas nécessairement être régis par une loi ou tout le temps faire la surveillance d'une loi. Il y a des personnes du comté de Sainte-Marie qui sont venues au bureau de comté et qui m'ont signalé leurs vains efforts pour obtenir un logement pour une famille. Je pense en particulier à une famille de quatre enfants. Une personne s'est vu refuser de façon systématique le droit, pourrais-je dire, d'accessibilité à un logement parce que le propriétaire considérait, après que l'annonce lui eut été faite que cette personne avait quatre enfants, que cela constituait pour lui une sorte d'obstacle ou un empêchement à effectuer la location. C'est certain qu'il existe des dispositions législatives, tant à la Régie du logement qu'à la Commission des droits de la personne, pour prendre des recours, mais c'est simplement pour illustrer jusqu'où on peut en arriver dans la préoccupation d'une politique familiale et la mettre de l'avant, en faire une forme d'insistance pour dire que c'est quand même important et qu'on doit préconiser ce type de valeur.

On pourrait certes énumérer d'autres phénomènes du même genre, comme la famille monoparentale qui compte deux ou trois enfants et à qui on demande des preuves, je peux presque dire... sur son rôle social dans la société, ses sources de revenus. A-t-elle un homme pour l'appuyer? C'est simplement pour souligner que notre société a évolué, peu importent le jugement de valeur et les valeurs que nous possédons personnellement. La société a évolué depuis plusieurs années et on retrouve aujourd'hui une composition des ménages qui n'est pas celle d'autrefois. On retrouve aussi 70 % des femmes, des jeunes femmes plus particulièrement, sur le marché du travail.

On m'indique qu'il ne me reste qu'une minute. J'aimerais revenir plus spécifiquement sur une mesure qui, plus particulièrement dans le comté de Sainte-Marie, nous affecte, et ce, d'une façon qu'on ne peut pas qualifier de négative. On sait tous qu'une famille de deux enfants, qui payait auparavant de l'impôt à partir de 13 400 $, paiera, avec le nouveau budget, de l'impôt à partir de 21 000 $. Cela représente des économies dans la poche des gens qui varient entre 107 $ et 250 $. Quand on sait qu'on fait souvent des batailles pour 5 $ par mois parce que cela se répercute à la fin de l'année sur l'achat en tant que tel de souliers ou de vêtements, je pense que cette disposition est une mesure qui va aider plus particulièrement des quartiers comme le mien. (12 h 30)

Si vous me le permettez, M. le Président, en conclusion. On a aussi revendiqué depuis

plusieurs années, ne serait-ce qu'en frais scolaires, une augmentation, ce que le ministre a annoncé dernièrement. Tout ceci pour indiquer que c'est le premier jalon et qu'on doit poursuivre, tant dans l'organisation du travail que dans le reste, nos efforts soutenus à l'intérieur de cela. Merci.

Le Président (M. Bélanger): Merci. Je reconnais maintenant Mme la députée de Maison-neuve.

Mme Louise Harel

Mme Harel: Merci, M. le Président. En tant que députée de Maisonneuve, voisine du comté de Sainte-Marie, je dois vous dire qu'à la suite des propos tenus par le député de Sainte-Marie, je me disais que ce qui n'aidera pas la population du quartier qu'il représente à cette Assemblée, ce sont certainement les intentions contenues dans le projet de réforme, de fausse réforme de l'aide sociale de son collègue, le ministre Paradis.

M. le Président, il y a peu de temps, suffisamment peu de temps en tout cas pour que j'utilise le peu de temps qui m'est imparti pour examiner les correctifs qu'il faut apporter si, comme le prétend le ministre, il a vraiment à coeur la situation des familles au Québec. Je dois vous dire que je lui laisse tout le temps à sa disposition pour faire valoir les bons coups du gouvernement.

Quant à moi, je voudrais également rappeler, au ministre et aux députés qui l'accompagnent, que c'est important de rétablir la situation. C'était assez navrant d'entendre le ministre délégué à la Famille faire comme si tout avait commencé avec son gouvernement. Il a même dit, je l'ai pris en note: Nous avons décidé de mettre en évidence la question familiale.

Il faut peut-être rappeler au ministre que, quand ils sont arrivés le travail de sensibilisation était déjà en grande partie réalisé. Je veux lui rappeler simplement qu'en 1983 le ministre de la Santé et des Services sociaux a publié un premier rapport très volumineux et très exhaustif sur la situation de la démographie au Québec; que moi-même, comme députée, j'ai participé à une commission parlementaire qui s'est donné un mandat d'initiative d'examiner toute la question de la démographie au Québec; et que, concernant ce mandat d'initiative, il faudrait parfois souhaiter que l'actuelle deputation libérale ait le courage de s'impliquer dans des débats parfois controversés parce que cela met en cause des enjeux de notre société. C'est ce qui s'est passé avec le mandat d'initiative que s'est donné la commission de la culture, avec l'appui du gouvernement précédent.

Je constate que pour tout de suite, depuis deux ans, la commission de la culture ne s'est donné aucun autre mandat d'initiative. Le ministre délégué à la Famille, la consultation dans tout le Québec, consultation fondamentale qui nous a permis de cerner, comme le disait le député de Sainte-Marie, que la famille a éclaté et qu'il ne faut plus parler de la famille, mais des familles.

Dans ce sens, là où le député de Sainte-Marie a tort, c'est que si la société a évolué et qu'on doit parler de famille, ce qui n'a pas évolué c'est la conception de la famille qu'on retrouve dans le budget du ministre Gérard D. Levesque.

Rapidement, pour le bénéfice de mon collègue et ami, le député de Fabre, je lui rappelle que beaucoup de groupes très crédibles dans notre société, je pense particulièrement à la Fédération des associations de familles monoparentales, à la Fédération des femmes du Québec, au Regroupement des centres de femmes du Québec, au Regroupement des centres de santé des femmes du Québec, au Conseil d'intervention pour l'accès des femmes au travail, ont réagi au budget du ministre Levesque en disant, et je les cite: On constate que ces mesures ne répondent pas aux besoins actuellement les plus criants pour permettre aux parents de faire face convenablement, et sur une base permanente, à leurs responsabilités parentales.

Ce n'est pas que moi qui le dit parce que je suis de l'Opposition. Ce sont des porte-parole de groupes de femmes au Québec autorisés à le dire. Pourquoi, M. le Président? Entre autres parce que, et je rappelle que ce n'est qu'en partie que le gouvernement a répondu aux attentes des groupes de femmes qui avaient fait de la réforme fiscale la question prioritaire en cette année.

On constate que le gouvernement a choisi de ne pas verser en propre à la femme mariée l'exemption de personne mariée pourtant transformée en un crédit d'impôt, et que ce crédit d'impôt continuera d'être versé au mari malgré les propositions libérales, les engagements contraires durant la dernière élection et malgré la forte attente des groupes de femmes en faveur de ce qui pourrait être un début d'autonomie économique pour les travailleuses au foyer. Également, nous sommes consternés de constater que, malgré le discours d'équité fiscale, le ministre qui l'utilise maintenant sait très bien que ce discours a été écarté en ce qui concerne les déductions pour frais de garde, et que la déduction pour frais de garde est encore considérée comme une dépense effectuée en vue de gagner un revenu, et non comme une compensation...

Le Président (M. Bélanger): Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: ...des charges parentales. M. le Président, en conclusion, c'est que dans son mandat, le ministre a la responsabilité non seulement de son propre secrétariat ou du conseil, mais des autres ministères. Je rappelle ce

que disait la Commission des services juridiques hier, en matière d'aide sociale et en matière de pensions alimentaires: L'actuelle administration proposée par le ministre Paradis, et c'est la mise en tutelle des femmes assistées sociales, chefs de famille monoparentale. Il en va de même pour la fiscalité, M. le Président, puisque dorénavant, les femmes qui travaillent, qui ont un revenu et qui cohabitent...

Le Président (M. Bélanger): Je m'excuse, Mme la députée de Maisonneuve, vous avez dépassé votre temps. Je m'excuse.

Mme Harel: ...perdront leur statut de femmes chefs de famille. En conclusion, les discours ne conviennent pas au moment où les femmes attendent avec vigilance des moyens pour réaliser leur égalité dans ces familles dont elles ont maintenant souvent la charge.

Le Président (M. Bélanger): M. le ministre. M. Robert Dutil

M. Dutil: M. le Président, vous savez que je déteste interrompre les autres quand ils parlent, sauf qu'on a une entente qui est bien convenue. J'espère que cela ne coupera pas mon temps; cela nous permettra peut-être de l'allonger un peu, de la même façon que l'Opposition. Je comprends que Mme la députée de Maisonneuve voulait terminer, mais malheureusement notre organisation fait que nous avons cinq minutes chacun et je pense que, de ce côté-ci, nous avons respecté cela jusqu'à maintenant.

Nous sommes entre nous ici, cet après-midi; les interpellations ne sont peut-être pas suivies avec autant de cote d'écoute que les autres débats. Vous savez, on nous parle beaucoup des consultations qui ont été faites sous l'ancien gouvernement. Je reconnais qu'il doit y avoir des consultations et que c'est important d'en faire. Mais les consultations doivent finir par aboutir à des gestes concrets. Elles doivent finir par donner des résultats concrets. Elles doivent finir par nous permettre de passer aux actions et que les citoyens du Québec doivent s'apercevoir que les discours et les consultations se sont transformés, au fil du temps et au fil des ans, en gestes concrets. Ce que la population du Québec constatera à la fin de notre mandat, c'est qu'entre autres - je parle de la politique familiale, c'est le sujet de notre débat - les progrès qui ont été faits dans la politique familiale auront été considérables, non pas en termes de consultation, non pas en termes de livres blancs, oranges, verts, bleus, rouges ou quelque autre couleur que ce soit. Ce que les citoyens du Québec constateront, c'est qu'il y a eu des gestes concrets pour que la vie de tous les jours des citoyens du Québec soit facilitée de telle sorte qu'ils puissent envisager avec beaucoup plus d'optimisme leur volonté qui est connue de créer, d'élever et de vivre en famille.

Cela ne veut pas dire que le gouvernement peut changer les valeurs, peut changer les moeurs. Les citoyens ont un choix à faire au niveau de leurs familles. C'est un choix qui leur appartient. C'est un choix qui est le leur. Il faut l'admettre. Mais on sait qu'il y a des barrières qui existent depuis fort longtemps et qui ont été augmentées à diverses occasions par les gouvernements qui ont agi sur la société. Les mesures que nous prenons ont des conséquences. Elles en ont eu sur la famille, elles en ont eu de néfastes. Ce que nous disons aujourd'hui, ce n'est pas que l'ancien gouvernement n'a pas fait de consultation, n'a pas fait de livre, n'a pas fait de choses importantes, admettons-le. Ce sont des choses qu'il faut faire. Le débat public sur ce sujet est important, nous le concédons. Mais, il ne doit pas durer éternellement.

Il doit se concrétiser et le gouvernement actuel peut le concrétiser par son réalisme à divers niveaux, entre autres sur le dégagement d'une marge de manoeuvre parce que des beaux débats et des consultations qui donnent de grands objectifs et de beaux plans d'action, s'ils ne peuvent pas se concrétiser faute de stagnation économique due à une politique gouvernementale qui serait de ce côté néfaste au développement, qui ne tiendrait pas compte de la réalité fiscale de l'ensemble du continent nord-américain, etc. Tous les reproches qu'on peut faire et que je ne veux pas répéter ici sur la façon d'agir de l'ancien gouvernement dans le domaine économique, cela n'aboutirait pas, ces beaux principes et ces belles consultations, à du concret pour les citoyens du Québec. Le budget de 1988, c'est du concret pour les citoyens du Québec et ils l'ont bien compris puisque, eux, approuvent ce budget et qu'ils en sont très heureux. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bélanger): Merci, M. le ministre. Je cède maintenant la parole au député de Fabre.

M. Jean A. Joly

M. Joly: Merci, M. le Président. Je pense que plus cela avance, plus on est surpris. J'aurais cru que l'Opposition aurait ajusté son tir et qu'elle aurait au moins reconnu que, dans le budget supportant les familles, il y a des choses positives. Tantôt, mon collègue de Chambly a légèrement effleuré le rôle du député. Qu'est-ce que le rôle d'un député? Un rôle de député n'est pas nécessairement un rôle automatique de critique. Si on veut tous ensemble faire avancer la cause, si on veut tous ensemble faire en sorte que certaines injustices puissent être éliminées et qu'on puisse bonifier les projets de loi et les budgets qu'on met de l'avant, à mon sens, c'est à l'aide de suggestions constructives. On parle de réforme tape-à-l'oeil. C'est une réforme qui a ouvert les yeux des gens, tout en promettant un

avenir encourageant. D'ailleurs, le ministre lui-même a mentionné au journal La Presse... Pour le ministre, le dernier budget provincial doit être perçu comme un premier pas vers une politique familiale plus globale. C'est certain que, du premier coup, on ne peut pas tout régler. C'est sûr qu'on ne peut pas tout régler, mais le fait de savoir qu'on est dans la bonne direction...

D'ailleurs, j'étais content de voir qu'il y a une intervention du côté de l'Opposition qui a semblé encourager les mesures qu'on mettait de l'avant. C'est la députée de Johnson - et je la cite - qui disait parce que, dans le fond, elle concède que c'est un premier pas important... Je pense qu'on doit la féliciter de son objectivité de reconnaître que ce qu'on a mis de l'avant, tant pour les personnes âgées... Elle a quand même bien défini le portrait de la personne âgée qui faisait partie de la famille, qui fait encore partie de la famille et qui se doit d'être intégrée encore à toutes les décisions. Alors, je tiens à la féliciter publiquement parce que je pense que c'est le rôle du député ou de la députée, et elle s'en acquitte bien pendant que d'autres... Quelquefois, j'aurais tendance à vouloir, moi aussi, être un peu méchant, mais je ne le serai pas. Je suis content de savoir qu'elle a admis que c'était un début et de réaliser que les 86 000 000 $ qu'on a investis - je dis bien "investis", je n'ai pas dit "dépensés" - pour le mieux-être des personnes âgées, c'est reconnu par au moins quelqu'un qui a l'esprit et l'oeil ouverts du côté de l'Opposition.

Par contre, la députée de Maisonneuve a fait mention que l'ensemble des groupes n'a pas accepté d'emblée toutes les mesures qu'on a mises de l'avant. C'est bien certain, il n'y a rien de surprenant là-dedans. Si on en donne 100 000 000 $, 200 000 000 $, 300 000 000 $, on en voudra le double, c'est normal, mais est-ce qu'on va tuer dans l'oeuf le contribuable? Est-ce qu'on va l'écraser?

On l'a clairement défini ce matin. Quand vous considérez qu'il y a ce qu'on peut appeler des dépenses quasi fixes qu'on peut difficilement ignorer, il y a aussi des revenus. Alors, il faut aller en accord avec un budget et un budget, c'est équilibrer d'un côté et de l'autre. C'est essayer d'être juste, d'être équitable. Je pense qu'en tant que gouvernement, à ce jour, à moins que les sondages ne soient fausses, les gens appuient le genre de politique qu'on met de l'avant. SI actuellement, à I'interlour do tout co qu'on réussit à donner, 772 000 000 $ à la famille directement, mais en plus, on réussit à ne pas augmenter les impôts, ce ne sont pas des tours de force, ce sont des tours d'administration parce qu'on est des gens qui, venant de milieux différents, ayant des expériences différentes, ayant un vécu différent, tous ensemble, peuvent apporter à ce gouvernement, à cette population une expérience qui fait en sorte que chacun, à sa façon, peut bénéficier d'un budget tel qu'on l'a présenté.

(12 h 45)

Alors, il n'y a rien qui me surprend, M. le Président, de savoir que de l'autre côté, ils critiquent pour critiquer, sauf exception, je l'ai dit tantôt, de la députée de Johnson qui, j'espère, va réussir à rallier de ses collègues aux bonnes choses qu'on met de l'avant et qu'elle continuera à leur faire réaliser que, de temps en temps, il faut lire les journaux et il faut respecter ceux qui, à mon avis, ont une expérience et un jugement pour faire en sorte que, mettant de l'avant les réformes telles qu'on les connaît, on puisse tous ensemble dire: La population est encore mieux qu'elle ne l'était auparavant. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bélanger): Merci, M. le député de Fabre. Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme Cécile Vermette

Mme Vermette: Oui, M. le Président, c'est mon tour de pouvoir retourner les paroles du député de Fabre. Si l'Opposition n'est là que pour critiquer pour critiquer, on n'est pas au gouvernement pour se trouver bons seulement pour le plaisir de se trouver bons. Cela va dans les deux sens.

M. le Président, alors qu'on parle d'une politique familiale, il aurait été intéressant de voir finalement l'implication des femmes dans l'élaboration de politiques qui favorisent, d'une part, la place que doivent occuper les femmes à l'intérieur de la famille. Je trouve cela dommage, M. le Président, que la ministre déléguée à la Condition féminine ne soit pas présente à cette interpellation. Si elle n'était pas capable d'être présente ici, ce matin, elle aurait pu envoyer une déléguée, un représentant ou une députée ministérielle qui aurait très bien pu faire office et représenter les vraies revendications des femmes, parce que cela est très important. Une politique familiale ne peut se concevoir sans l'apport et l'implication des femmes. Quant à nous, je pense que nous avons fait preuve d'une grande ouverture d'esprit et que nous laissons le droit de parole aux femmes dans notre instance politique et aussi à l'Assemblée nationale.

Je voudrais revenir à l'équité et finalement aux largesses de ce bon gouvernement à l'endroit des politiques familiales, notamment à l'endroit clos fommos monoparontalos qui touchent à l'heure actuolloe... Quand on sait que 20 % de nos familles sont des familles monoparentales, que cela touche environ 83 % des femmes et que, généralement, ces femmes monoparentales ont un salaire de 17 000 $ quand elles sont chefs de famille, comparativement à une famille biparen-tale dont la moyenne de revenus avec enfants est de 43 000 $, il y a une grande marge. On n'a pas apporté de modifications finalement suivant les attentes nécessaires pour favoriser l'indépendance économique des femmes, et surtout leur

autonomie financière. Au contraire, on tend à les maintenir dans des ghettos de dépendance et on tend à les maintenir dans une cellule traditionnelle familiale qui ne convient plus et qui ne répond plus finalement au développement de notre société moderne à l'heure actuelle. Il faut tenir compte de cette réalité et absolument rien, ni d'une part dans les politiques familiales, ni dans le budget, n'en tient compte.

Je pourrai vous faire remarquer, concernant les femmes, qu'on ne tient pas vraiment compte des problèmes des femmes et des demandes et représentations qu'ont faites les femmes à ce gouvernement. Je pourrais regarder dans le dernier budget en ce qui concerne les allocations de disponibilité. Le gouvernement parle d'une amélioration des allocations de disponibilité pour jeunes enfants, alors qu'il n'accorde rien aux familles pour l'année 1988. Voyez le jeu de passe-passe que fait le gouvernement, ce bon gouvernement. Il a transformé l'allocation de disponibilité pour jeunes enfants en allocations mensuelles versées aux parents à partir de janvier 1989 seulement. En 1988, il n'y a absolument rien. Le gouvernement économise à peu près 50 000 000 $ sur le dos des familles et essentiellement sur le dos des mères de famille. Il faudrait le relever, c'est important. On n'a pas encore la notion des femmes dans votre gouvernement qui profitent majoritairement des allocations de disponibilité. À ces 50 000 000 $ s'ajoutent les 68 000 000 $ que le gouvernement a économisés l'année dernière à cause des changements de modulation. En fait, le ministre des Finances est maintenant d'accord pour allouer 48 000 000 $ plutôt que 68 000 000 $, mais c'est à vérifier.

Donc, au lieu d'avoir 300 $ au premier enfant, le tour de passe-passe est qu'on dit: Comme il y a beaucoup de mères qui reçoivent 300 $ pour un premier enfant, c'est trop. On va changer, notre générosité va s'appliquer pour le troisième enfant, quand on sait qu'il y en a très peu au Québec. Finalement, on donne uniquement 100 $ pour le premier enfant. Voyez-vous ce que cela donne tout cela? On a fait une économie d'environ 48 000 000 $. Les coupures sont odieuses. Par exemple, je vais vous dire maintenant ce qui se passe pour une famille ayant un seul enfant né en 1985, et dont l'allocation de disponibilité a chuté considérablement depuis 1986. Ce que cela va donner concrètement: en 1986, 300 $ réclamés sur son impôt; en 1987, 100 $; en 1988, 0; et en 1989, 100,08 $ payables en crédits d'impôt mensuels de 8,34 $ à partir de 1989.

Le Président (M. Bélanger): Je vous...

Mme Vermette: C'est cela un bon gouvernement et les mesures qui favorisent les familles...

Le Président (M. Bélanger): Votre temps est écoulé, Mme la députée.

Mme Vermette: ...et d'autant plus les femmes. On ne tient pas compte de la dimension monoparentale de la femme et des exigences des femmes.

Le Président (M. Bélanger): Votre temps est écoulé, Mme la députée, je m'excuse.

Mme Vermette: Le Régime des rentes du Québec, il n'y a rien encore dans ce budget.

Le Président (M. Bélanger): M. le ministre. M. Robert Dutil

M. Dutil: M. le Président, je vous remercie et je vous garantis que je vais respecter le temps qui est mis à ma disposition.

M. le Président, l'Opposition est insatiable. Ce que l'Opposition dit dans le fond, c'est qu'elle trouve qu'on ne va pas assez vite. En résumé, c'est cela. Elle ne dit pas que nous n'allons pas dans la bonne direction, elle oublie évidemment les bonnes mesures qui sont passées, les considérant comme des acquis, mais elle dit que nous n'allons pas assez vite. On peut résumer de cette façon l'interpellation de ce matin, puisque bien des projets sont en marche dans les divers dossiers qui ont été soulevés par l'Opposition. Dernièrement je rencontrais le député de Terrebonne qui me disait comme ceci: Vous êtes chanceux, l'économie va bien. Il me disait cela en aparté, reflétant par là même justement la philosophie et l'opinion que l'Opposition a de ce qu'est une économie. L'économie, cela va bien ou cela va mal et on n'a rien à faire là-dedans. Si cela va bien, on est chanceux et si cela va mal, on est malchanceux. C'est cela l'opinion que l'Opposition a de la situation économique.

Rappelez-vous, dans le discours sur le budget, nous avons volontairement identifié la croissance économique du Québec par rapport aux divers autres partenaires ou voisins que nous avons dans le monde occidental: les États-Unis, l'Ontario, le Japon, modèle de croissance dans la société de libre marché, l'Europe, et il se dégageait très bien que la croissance économique du Québec était nettement supérieure à la croissance économique de ces autres pays. Pourquoi? Parce qu'au lieu de ne s'en tenir qu'à des consultations et des débats importants... J'ai mentionné tout à l'heure et je répète que les débats publics sur des questions aussi importantes que la politique familiale sont nécessaires et on doit les faire. L'ancien gouvernement nous dit les avoir faits, mais son ineptie sur le plan économique ne lui a pas permis de passer à l'action, d'aller à la vitesse qu'il nous reproche de ne pas atteindre. Non seulement il n'a pas été à la vitesse qu'il nous reproche de ne pas avoir atteinte, mais il était comme un vieux véhicule

arrêté sur le bord de la route avec quatre pneus éclatés.

Une voix:...

Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît. On doit respecter le droit de parole du ministre.

M. Dutil: Je donnais une image caricaturale. Évidemment, une caricature est une caricature et ne reflète jamais très bien la réalité. Je ne veux pas blesser l'Opposition. Ce que je veux dire, c'est qu'à l'intérieur de l'automobile, on a beau avoir toutes les bonnes idées et le génie de l'organisation, si on a oublié de changer nos pneus qui ont un peu trop de millage de fait, les pneus reflétant l'économie... Si on dit: L'automobile avance, quand elle n'avancera plus, elle arrêtera, c'est tout; et en ce qui concerne l'écomomie: On sera malchanceux si elle arrête, et si elle avance, on sera chanceux. C'est cela l'économie. Le véhicule, c'est l'économie. À l'intérieur, on a de hautes discussions, de la haute voltige intellectuelle, c'est vraiment fantastique d'entendre tous les raisonnements, toutes les revendications, toutes les choses qu'on peut faire. C'est très intéressant d'être à l'intérieur de l'automobile et de discuter, mais l'automobile de l'ancien gouvernement n'avançait pas et ne pouvait pas avancer parce qu'on avait oublié de l'entretenir, on avait oublié de changer l'huile, on avait oublié de changer les pneus et on a même oublié, à un moment donné, de mettre de l'essence dedans.

C'est évident qu'il y a eu des ratés et que les belles idées qui étaient à l'intérieur, qui étaient véhiculées et avaient fait l'objet de débats, de consultations sur divers points importants, ne pouvaient pas être mises en pratique par le gouvernement de l'époque. Nous avons pris ce véhicule qui avait quatre pneus éclatés et nous avons mis des pneus neufs. Nous avons pris ce véhicule en mauvais état et nous avons mis de l'essence dedans. Nous avons pris ce véhicule en mauvais état et nous avons changé l'huile. Nous avons retapé le véhicule économique. Les idées qui étaient véhiculées et que nous trouvions aussi Intéressantes, nous nous sommes engagés dans notre programme électoral, on le mentionnait tout à l'heure, à les mettre de l'avant et pour les mettre de l'avant, cela nous prend un véhicule économique en état de marche. Tout le monde au Québec comprend cela sauf l'Opposition.

Les mesures sociales et le progrès social d'une société sont fonction de la qualité de l'économie de la société. Ce qui nous permet de donner de l'argent aux gens, c'est que les gens peuvent nous en donner parce qu'ils font des revenus. Et je souhaiterais, M. le Président, que l'Opposition comprenne ce raisonnement tout simple.

Le Président (M. Bélanger): Je vous remer- cie, M. le ministre. Je cède maintenant la parole au député de Chambly.

M. Gérard Latulippe

M. Latulippe: Les députées de Maisonneuve et de Marie-Victorin disaient tout à l'heure que les mesures qui ont été prises par le gouvernement actuel en rapport avec les familles ne correspondaient pas à la réalité familiale des années 1980 et des années 1990. Cette famille éclatée où le taux de parents uniques est très important - 20,8 % de l'ensemble des familles avec des enfants de 0 à 24 ans et le taux de divorce qui était de 60 % en 1987 - les députées disaient que le gouvernement actuel en avait une conception un peu rétrograde.

Je voudrais vous ramener sur certaines de ces mesures et certaines de ces mesures qui ont été faites dans l'ancien budget pour voir quel est l'effet par rapport à la réalité familiale et vous ramener aussi à quelques dossiers sur lesquels le ministre délégué à la Famille travaille actuellement pour voir vraiment comment cela se situe en rapport avec la réalité familiale.

Je voudrais vous rappeler le discours d'ouverture de la 33e Législature prononcé par M. Robert Bourassa où il annonçait déjà à ce moment-là des mesures d'aide financière aux familles. On reviendra aux mesures qui ont été faites dans le budget. Mais il disait aussi: II nous faut aussi rendre plus compatibles les conditions de travail et les responsabilités parentales, notamment par la révision de la Loi sur les normes du travail, par l'aménagement du temps de travail et par le développement des garderies en milieux de travail et scolaire. De plus, il nous faut assurer à chaque famille l'accès à un logement adéquat, que ce soit par la mise en place de programmes pour améliorer la sécurité financière et la stabilité du milieu familial ou par un programme d'accès à la propriété.

En ce qui concerne les normes du travail, je vous réfère à un article de La Presse qui date de mars 1988 où le ministre, qui est à ma gauche, le ministre délégué à la Famille, disait publiquement que c'était sur les normes de travail que porterait le second volet de la politique familiale du gouvernement du Québec. Déjà, il disait qu'il travaillait avec son collègue, le ministre Paradis, en ce qui a trait au congé parental non rémunéré avec garantie d'emploi. C'est bien beau aujourd'hui avoir des enfants, mais si le lendemain matin le père ne s'en occupe pas, ou si le lendemain matin on n'est pas certain, si on s'en occupe, qu'on va retrouver son emploi, cela fait se poser bien des questions et on se demande, finalement, si cela vaut réellement, économiquement ou humainement, la peine d'en avoir. Travailler déjà et concevoir qu'un deuxième volet de la politique familiale aurait un rapport avec des changements importants en ce qui concerne les normes du travail, ma collègue, la députée de Maisonneuve,

conviendra avec moi que c'est aussi un pas dans la bonne direction, il est évident qu'elle va nous dire: Mais vous n'allez pas assez vite; vous devriez déjà avoir accouché de ce deuxième volet. Effectivement, c'est un pas dans la bonne direction et je pense qu'on doit dire que mon ex-collègue travaille dans la bonne direction.

En ce qui concerne le budget spécifiquement, voyons les différentes mesures qui y ont été incluses. L'abolition de la récupération des allocations familiales, cela a clairement un effet face à tous les types de famille, peu importe le concept qu'on peut avoir de la famille. Les diminutions d'impôt pour toutes les familles et la transformation en crédits d'impôt, cela a un effet, peu importe la nature de la famille. Cela a même un effet qui est maximal dans les familles à bas revenu, eu égard à cette transformation en crédits d'impôt. Je pense que ce sont là des mesures positives. Je conviens que, dans d'autres secteurs, par exemple, au plan de la réforme de l'aide sociale, des concepts comme celui du partage du logement mériteraient d'être révisés et je peux vous dire que je vais continuer à faire des pressions dans ce sens-là... (13 heures)

Le Président (M. Bélanger): M. le député de Chambly...

M. Latulippe: Je suis convaincu que vous convenez avec moi que des pas positifs et importants sont faits et sont en train d'être faits en regard des différents volets de la politique familiale au Québec.

Le Président (M. Bélanger): Votre temps est écoulé, M. le député de Chambly. M. le député de

Laviolette, il reste quatre minutes à votre formation.

M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: Merci, M. le Président. Je veux simplement dire au ministre que premièrement, pour ce qui est des rapports on pourrait s'en parler longtemps. Vous avez le rapport Rochon, M. le ministre, dont votre ministre en tutelle est responsable. Elle fait encore de la consultation là-dessus. Donc, avant de nous dire que vous passez des rapports aux actes, il ne faudrait pas trop charrier.

Deuxièmement, vous avez le ministre de l'Environnement qui a reçu un rapport sur le flottage du bois et qui a formé un comité additionnel pour étudier le rapport rendu. Alors, faites attention à ce que vous dites. Comme membre de l'Opposition, je suis capable d'être positif quand c'est le temps, mais quand cela va mal, il faut le dire. Notre rô\e, notre devoir, c'est cela.

Troisièmement, quand cela va bien et qu'on ne se prémunit pas pour le temps où cela va aller mal, il va y avoir des problèmes tout à l'heure. Alors, je vous souhaite bonne chance parce que le cycle normal des moments faciles et des moments difficiles, vous allez le vivre comme on l'a vécu. On se demande comment vous allez être prêts à les vivre. La société va en voir les conséquences.

J'aimerais parler de la politique d'habitation en vous rappelant des décisions prises par le gouvernement actuel en matière d'habitation depuis 1985 qui ont été défavorables aux familles. D'abord, il y a l'abolition en mars 1986 du Programme d'accès à la propriété résidentielle que le Parti québécois avait mis sur pied en novembre 1981, qui avait touché près de 60 000 familles au Québec et qui avait en même temps engendré 135 000 000 $ d'investissements.

Vous avez une diminution du nombre de HLM publics mis en chantier depuis 1985, passant de 2378 unités en 1985 à 1564 en 1986 et à seulement 1262 unités en 1987. Tous reconnaissent que les HLM sont une formule adaptée pour répondre aux besoins des familles à faible revenu. On devrait parler aussi de l'ensemble de l'adaptation des domiciles pour des familles, donc des habitations familiales.

Un projet de règlement élaboré en 1987 par la Société d'habitation du Québec visait à réduire les listes d'attente pour les logements à loyer modique en faisant une discrimination contre les familles monoparentales au profit des familles biparentales et en attribuant à ce moment 25 % de logements pour les familles biparentales alors que tous reconnaissent que les familles les plus démunies sur le plan économique demeurent toujours et encore les familles monoparentales.

Ces quelques gestes témoignent donc de l'absence de préoccupations véritables du ministre responsable de l'Habitation à l'égard de la problématique que suppose une politique familiale, d'autant plus que l'habitation et l'alimentation constituent les deux éléments les plus importants du budget familial.

J'aurais voulu vous parler du programme que vous avez annoncé. Pour une fois, par rapport à l'abolition du programme d'accessibilité à la propriété, vous en mettez un qui, d'abord, indique qu'il faut avoir deux enfants et, avec des conditions telles qu'ils ne répondront pas avec les 9 000 000 $ par année, alors que c'était 27 000 000 $ par année que le programme du Parti québécois qui avait été mis sur pied en 1981 indiquait.

Quand on vient nous dire qu'il y a une politique familiale et qu'on oublie des volets aussi importants que celui-là, je continue toujours à dire que vous n'avez pas de vision globale, que vous avez des actions qui sont du tape-à-l'oeil et qui sont telles que finalement on s'aperçoit qu'une politique familiale vous n'en avez pas.

Le Président (M. Bélanger): Merci, M. le député. Je cède maintenant la parole au ministre pour les conclusions. Vous avez dix minutes et M. le député de Laviolette aura dix minutes de

réplique par la suite. M. le ministre. Conclusions M. Robert Dutil

M. Dutil: M. le Président, je pense que nous avons eu un bon débat ce matin qui a reflété les philosophies diverses et les opinions diverses des deux côtés de cette Chambre. Dans le véhicule dont je parlais tout à l'heure, où nous sommes tous, la population du Québec, il y a des idées qui se brassent, il y a des idées qui se discutent. Les consultations dont je parlais tout à l'heure, je les estimais importantes et contrairement à ce que disait le député de Joliette, je n'ai jamais dit que les consultations n'étaient pas importantes. Je n'ai jamais dit que le débat public n'était pas Important Co quo jo dis tout simplement, c'est qu'il faut pouvoir, avoc notro véhicule, passer des Idées, passer des discussions, des consultations, passer des débats publics et des conclusions que nous tirons de tout ce brassage d'idées aux actions.

Pour passer aux actions, cela nous prend un véhicule. Le député de Laviolette confirmait, tout à l'heure, la philosophie du Parti québécois en disant: II y a des cycles inévitables. Cela ne peut pas toujours aller bien. Cela va finir par aller mal. On va y goûter. Ce qu'on dit, ce n'est pas qu'il n'existe pas de cycle économique. On sait qu'il existe des cycles économiques. Mais on sait qu'on peut intervenir pour minimiser les dégâts en cycles défavorables et que l'on peut intervenir pour maximiser les avantages en cycles favorables. Il ne s'agit pas de dire que l'on peut se soustraire à l'économie et à tout ce que cela concerne. Il s'agit de dire que notre premier travail en arrivant au gouvernement a été de retaper le véhicule de la société québécoise. Le grand véhicule gouvernemental et économique, le grand véhicule qui fait qu'on peut trouver un produit intérieur brut intéressant qui nous permet de dégager des marges de manoeuvre et nous permet de prendre les idées qui sont à l'intérieur du véhicule et de les mettre en pratique parce que le véhicule est en état de fonctionner, en bon état de marche. Donc, de faire avancer, avec ce véhicule sur l'autoroute du progrès social, la société québécoise vers un mieux-être, vers une amélioration, vers des politiques favorables à la société et particulièrement, puisque c'est le dossier qui me concerne, dans le dossier de la famille.

Je vous donne un exemple de l'attitude du Parti québécois. J'écoutais l'autre jour le nouveau chef de l'Opposition, il y a quelque temps déjà, il y a quelques mois sans doute, M. Parizeau, qui était ministre des Finances et qui, dans la dernière étape de son strip-tease... Il avait lui-même baptisé cela son strip-tease - malheureusement, le dernier élément de son striptease était la politique familiale, c'est un peu inapproprié, vous comprendrez, en tout cas, je ne veux pas intervenir là-dessus, c'était son choix. Mais il intervenait à la radio sur la politique familiale et j'étais arrêté sur le bord de l'autoroute, M. le Président, non pas parce que j'avais une crevaison sur les quatre pneus, mais parce que les ondes de la radio sur lesquelles il émettait ne pouvaient pas émettre jusqu'à Québec et je voulais entendre ce qu'il avait à dire pour voir s'il y avait du nouveau. Et rien de nouveau sous le ciel bleu. Rien de nouveau parce que l'ex-ministre des Finances et actuellement chef de l'Opposition disait: Ce qu'il faut faire comme soutien économique, c'est ceci, ceci, cela et si cela ne s'est pas fait... Parce qu'il fallait bien qu'il se trouve une raison pour ne pas l'avoir fait, il était ministre des Finances et il l'a été pendant neuf ans.

Il aurait donc pu éliminer les complications de co fouillis qui otait à ce moment là la fiscalité quobécolso ot quo nous sommos on train de simplifier et il aurait pu ne pas être ce que M. Dubuc a appelé l'un des pères de ce fouillis. Et il proposait des solutions relativement simples en disant: Bien sûr que pour les appliquer, il faudrait que nous soyons un état indépendant. La faute était au gouvernement fédéral. L'avons-nous entendu ce discours-là, M. le Président? C'était la faute du gouvernement fédéral et, évidemment, la prémisse, le départ d'une politique familiale pour le Parti québécois, ce n'est pas d'avoir une économie saine, ce n'est pas d'avoir des relations harmonieuses avec l'autre palier de gouvernement, ce n'est pas d'être proche de la préoccupation de la population; la prémisse de base, encore une fois - Mon Dieu que c'est vieux jeu! Mon Dieu qu'on l'a entendu celle-là! - c'est de faire l'indépendance du Québec. C'est la prémisse de base.

Le chef du Parti québécois parlait également de diverses mesures qu'il avait essayé de mettre en place au plan de la politique familiale et j'en prends une qui concerne les normes de travail et c'est important. C'est important les normes de travail, on le sait, pour pouvoir concilier les responsabilités familiales avec les contraintes du monde du travail et il y a donc des mesures qui sont connues, ce sont des choses connues et M. Parizeau connaissait ces choses-là également quand il était ministre des Finances et quand il participait au gouvernement. Entre autres, le fameux congé parental dont on parle, la certaine assurance de retrouver son emploi si, pour une période de un ou deux ans, tu le quittes pour des raisons de maternité ou de paternité et que tu veux le retrouver par la suite là où tu l'avais laissé. M. Parizeau disait: Nous avons accordé cela dans le secteur public en estimant que le secteur privé allait suivre de lui-même. C'était l'optique qu'il avait eue et ils se sont aperçus que le secteur privé n'avait pas suivi.

Mais pourquoi n'ont-ils pas implanté cette mesure-là comme d'autres mesures importantes quant à la politique familiale? Pourquoi ne l'ont-

ils pas fait, M. le Président? La réponse est relativement simple, c'est que les idées sont connues. Les débats, ils sont faits. Les recommandations, on les a. On est d'ailleurs, en train d'analyser les recommandations qui avaient été faites, à la suite du comité d'étude sur la politique familiale; de les analyser une à une en regard d'autres contraintes dont on n'a pas tenu compte et dont n'avait pas à tenir compte le comité de consultation. Le comité de consultation avait à tenir compte des besoins et de l'idéal que l'on pouvait avoir comme recommandations pour une politique familiale, mais n'a pas tenu compte des coûts, n'a pas tenu compte des contraintes à l'égard des investissements, par exemple, si on parle des normes de travail, c'est important de tenir compte de l'incidence des mesures des normes de travail sur l'investissement, sur la création d'emplois et sur ces autres aspects, et ce travail-là, nous le faisons.

La raison fondamentale pour laquelle ces idées intéressantes, ces idées connues, ces idées que l'on voulait mettre en application ne l'ont pas été sous l'ancien gouvernement, c'est que l'ancien gouvernement a dilapidé toute marge de manoeuvre financière pour des raisons d'inattention, de croyance, des raisons tout à fait imaginaires où l'on croyait que l'économie c'était une chose sur laquelle on peut s'appuyer et peser de tout son poids sans que l'économie risque de s'effondrer. Et c'est ce qu'ils ont fait. Ils ont fait cela dans une période économique qui était très forte, très vive et l'économie, lorsqu'elle a diminué dans l'ensemble des nations occidentales, comme on l'a connu, l'économie s'est effondrée chez nous avec beaucoup plus de force, notre creux a été beaucoup plus profond qu'il ne l'a été dans d'autres économies. Et les mesures qu'avait envisagées le gouvernement étaient telles que l'on s'est retrouvés sans marge de manoeuvre.

Ce que nous avons fait, dès que nous sommes arrivés au gouvernement, c'est que nous avons pris des mesures, qui ont été critiquées par l'Opposition, sous des aspects démagogiques à mon point de vue, qui avaient pour but de rendre notre fiscalité compétitive, de rendre leur confiance aux entrepreneurs, d'éliminer le fameux débat constitutionel - vous savez le travail immense qu'on a fait et qui a finalement abouti à l'accord du lac Meech - qui ont envelé un nuage de plus, un nuage de plus dans l'état de la situation de l'économie québécoise et qui ont fait que l'on se rend compte que les gens ont confiance au Québec. Les gens ont confiance en notre économie, ils investissent, ils créent des emplois. C'est cela qui va nous permettre et c'est cela qui nous a permis, jusqu'à maintenant, d'investir 772 000 000 $, cette année, pour les familles. Plus 500 000 000 $ de diminution d'impôt, tout en diminuant le déficit de 750 000 000 $. Il n'y a pas de mystère là-dedans. C'est le résultat des semences que nous avons investies, il y deux ans et demi par des mesures qui avaient pour objectif de dire aux citoyens du Québec: Vous pouvez avoir confiance, vous pouvez investir, vous pouvez créer des emplois; on va vous appuyer. On va enlever certaines réglementations. On va sortir de certains secteurs qui ne concernent pas l'État, qui concernent et qui peuvent être très bien administrés, et avec beaucoup plus de compétence, par l'entreprise privée, pour nous préoccuper, nous, des champs d'activité qui sont de notre responsabilité, entres autres la politique familiale.

Ne croyez-vous pas qu'il aurait été préférable, au lieu de nationaliser l'amiante, ce qui a coûté 300 000 000 $, d'injecter des sommes dans une politique familiale et, au lieu d'avoir un débat idéologique sur cette façon de gérer l'économie, de se diriger, à partir des impôts que l'on recevait de ces entreprises, qui étaient à profit à ce moment-là et qui pouvaient donc participer à la grande caisse de l'État, d'acheminer cet argent, d'acheminer ces ressources vers des politiques sociales comme nous le faisons actuellement.

Le Président (M. Bélanger): Alors, je vous remercie, M. le ministre, et je cède la parole, pour une dernière réplique, au député de Lavio-lette. M. le député. (13 h 15)

M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: Merci, M. le Président. D'abord, je commencerai mes derniers mots de conclusion en me disant étonné, surpris, de voir que lors de tout ce débat à l'Assemblée nationale, du côté libéral, il n'y a eu aucune femme qui est venue défendre l'ensemble des besoins de la famille par des femmes qui le vivent journellement. Pour répondre au député de Chambly, je lui dirai. À quand, justement, une politique sur les changements du Code du travail permettant des possibilités de temps partiel? Dans ce sens, peut-être qu'on croira d'avantage à l'ensemble des propositions qui sont faites. Mais on peut s'apercevoir que le gouvernement n'a pas de politique familiale globale. Il n'a pas de volonté d'apporter un soutien économique, aux familles québécoises ni de faciliter la levée des obstacles afin de permettre aux personnes d'avoir le nombre d'enfants qu'elles désirent. Le gouvernement par son choix de favoriser le troisième enfant nous indique la position qu'il a prise par ces incitatifs économiques: la motivation du gouvernement c'est de choisir l'option la moins chère, selon les colonnes de chiffres. Par exemple, en 1986, 39 682 pour la naissance d'un premier enfant, 30 999 d'un deuxième enfant, et 10 355 d'un troisième enfant; donc, l'option la moins chère possible.

Le gouvernement, quant à nous, fait fausse route. La réalité démontre que le statut économique n'a que peu d'influence sur la décision de mettre des enfants au monde. Plus les gens sont

scolarisés et plus les revenus sont élevés, moins les gens ont d'enfants. Les réactions à la suite du budget Lévesque démontrent que les attentes vont du côté des garderies, de l'aménagement du temps de travail, du congé de maternité, du congé parental, de l'horaire flexible, du travail à temps partiel avec avantages sociaux et sécurité d'emploi, de l'accès à des logements familiaux et à la propriété. Cela, ce sont, justement, les attentes de l'ensemble des familles au Québec. De plus, plusieurs ont dit au gouvernement qu'il devait favoriser la venue du premier et du deuxième enfant. Le taux de natalité du Québec, on le sait très bien, est de 1,4, c'est donc le premier et le deuxième enfant que les couples retardent d'abord de mettre au monde.

Il y a un article que j'ai lu dernièrement dans la Revue française des affaires sociales, le numéro 4, qui était d'octobre à décembre 1987 et qui était intitulé: Les politiques familiales en France et au Québec. Je dois vous dire que je partage ce que les auteurs ont précisé au sujet des aides à la naissance du troisième enfant dans la politique familiale française et cela s'applique très bien à l'ensemble des données pour le Québec. Qu'est-ce que l'on disait dans cette revue et que je partage? C'est ceci: "Bien sûr on peut douter de l'efficacité d'un tel choix: il n'est en effet pas certain que l'Incitation soit optimale du seul fait de la progressivité de l'aide. Avant de prendre la décision d'avoir un troisième enfant, la famille devra prendre la décision du premier puis du second enfant, or, il faudra que ces décisions aient été prises dans de bonnes conditions, c'est-à-dire suffisamment tôt dans le temps et à un coût le plus faible possible, pour que se pose à un moment opportun la question du troisième enfant." Donc, quand le gouvernement décide d'appuyer sur le troisième enfant, aussi bien dans sa politique d'incitatifs économiques que dans d'autres politiques, telle que la politique d'accessibilité à la propriété privée, nous croyons qu'il fait fausse route et nous ne sommes pas les seuls à lui avoir dit ces choses.

Pourquoi, à ce moment-là, ne pas avoir choisi de maintenir le programme d'allocation de disponibilité et de créer le programme d'allocation à la naissance qui, d'une certaine façon, aurait dû être changé comme le proposait, d'ailleurs, le chef du Parti québécois, c'est-à-dire d'augmenter les allocations familiales et d'apporter à ce moment-là un vrai soutien économique aux familles?

Le congé parental d'un an sans solde annoncé comme étant la prochaine mesure pour les familles, cela nous indique, encore une fois, que le gouvernement n'a pas de politique globale; il y va à la pièce selon les vents et le ministre junior du gouvernement actuel se fait damer le pion, dans bien des cas, par le senior qui est le premier ministre. Donc, le congé parental d'un an, c'est une mesure très faible. Pourquoi pas, à ce moment-là, un congé sans solde. Le ministre n'a pas précisé quand il entendait, d'ailleurs, rendre cette mesure obligatoire dans toutes les entreprises. Pourquoi n'est-elle pas déjà en place si c'est vraiment une politique qui doit l'être? Comment le ministre réussira-t-il à convaincre le Conseil du patronat du bien-fondé de cette mesure? On sait que 90 % des entreprises membres du Conseil du patronat du Québec ne croient pas à la valeur de cette mesure comme étant un moyen d'accroître le taux de natalité au Québec, tandis que 84 % ne sont pas d'accord pour que le gouvernement oblige les entreprises à accorder un congé parental d'un an. Est-ce que le ministre va prendre ses responsabilités et, à ce moment-là, flétrir les relations entre le gouvernement et le Conseil du patronat? Le ministre a-t-il l'intention d'améliorer les congés de maternité de 15 semaines payées à 60 % par l'assurance chômage? On sait que seulement 20 % des femmes bénéficient d'un congé de maternité de 20 semaines payées de 90 % à 100 %. Nous constatons donc que les actions du gouvernement vont, non pas dans le sens d'une vraie politique de la famille, mais dans le sens d'une politique avec objectif et échéancier selon les grés du vent. Le gouvernement laisse espérer les gens et, par la suite, annonce avec fracas quelques mesures, et tout ça, en donnant l'impression qu'il fait beaucoup pour les familles.

Nous avons vu, justement, le lendemain du dépôt du budget par quel tour de passe-passe le ministre des Finances prive les familles de 60 000 000 $ en ne versant pas l'allocation de disponibilité pour 1988 alors qu'en 1987, il l'avait arrêtée dans le sens de l'inversion de la modulation de l'aide à l'allocation de disponibilité. En faisant en sorte de mettre en place un nouveau programme, il récupère 60 000 000 $. Et, quand le ministre nous dit: Avec toutes les autres mesures... l'Opposition ne regarde pas ces autres mesures, je dois lui dire et lui rappeler que des décisions pour s'harmoniser au budget Wilson au fédéral, ont fait en sorte que dans une décision, par une déclaration ministérielle, nous avons augmenté au Québec, le gouvernement en place a augmenté au Québec de 325 000 000 $ l'ensemble des impôts des Québécois et cela a touché les familles. Les familles les plus démunies, les familles sur lesquelles on a des renseignements nous disant que, dans un temps où, semble-t-il, cela va très bien, elles se sentent de plus en plus démunies, des gens qui sont agressés de différentes façons par le gouvernement et qui, dans un temps qui normalement est un temps de vaches grasses, devraient être favorisés mais ne le sont pas. Et cela, c'est le ministre des Finances qui la dit que l'économie allait bien.

Nous disons, comme membres de l'Opposition, que nous avons devant nous un gouvernement tape-à l'oeil, un gouvernement qui fait des déclarations avec fracas, des déclarations qui, finalement, ne donnent pas la pleine réalité des choses et nous disons que nous sommes, comme l'ensemble des Québécois, dans l'attente du dépôt

d'une vraie politique de la famille au Québec.

Je dois vous dire que, lorsque je suis allé en Belgique avec le comité de coopération, les représentants du Parti libéral et du Parti québécois, on a fait mention de la politique familiale au Québec. Par rapport à celle qu'il y a en Belgique, j'étais un peu gêné de voir que, dans le fond, ce qu'on est en train de présenter c'est une politique nataliste, ce n'est pas une politique de la famille ou des familles, comme dit ma collègue la députée responsable de l'aide sociale, comme porte-parole, la députée de Maisonneuve. Je pense qu'effectivement nous nous retrouvons avec un gouvernement qui n'a pas de vraie politique et que le ministre devrait plutôt se soucier de demander au premier ministre de lui donner un vrai mandat d'un vrai ministre, un vrai ministre de la famille non pas comme il l'est actuellement, délégué, mais un ministre qui est directement relié au Conseil exécutif.

Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M. le député de Laviolette. Je remercie M. le ministre. La commission ayant rempli son mandat suspend ses travaux jusqu'à ce qu'elle entreprenne un autre mandat, soit à quinze heures cet après-midi. Merci.

(Fin de la séance à 13 h 25)

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