Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.
(Onze heures vingt-quatre minutes)
Le Président (M. Bélanger): La commission
permanente des affaires sociales se réunit aux fins de procéder
à une interpellation à la suite d'une question soulevée
par le député de Lavio- lette au ministre
délégué à la Famille, à la Santé et
aux Services sociaux sur l'absence d'une vraie politique de la famille.
Mme la Secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?
La Secrétaire: Oui, M. le Président, M. Blais
(Terrebonne) est remplacé par M. Jolivet (Lavio-lette); M. Chevrette
(Joliette) par Mme Blackburn (Chicoutimi).
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie.
Alors, les règles de l'interpellation sont les suivantes. Chaque
intervention est d'une durée maximale de dix minutes. Le ministre
interpellé intervient pendant dix minutes au début et, ensuite,
la règle de l'alternance est introduite, à savoir que c'est un
député de l'Opposition, un député
ministériel, le ministre, un député de l'Opposition, un
député ministériel, le ministre, ainsi de suite,
jusqu'à la fin de l'interpellation.
J'appelle donc le premier intervenant, le député de
Laviolette.
Exposé du sujet M. Jean-Pierre Jolivet
M. Jolivet: Merci, M. le Président. Nous sommes
réunis ce matin à l'Assemblée nationale pour parler de
l'absence d'une véritable politique familiale au Québec de la
part du gouvernement libéral actuellement en place. Même si le
Parti libéral veut nous faire croire, ici à l'Assemblée
nationale et partout au Québec, qu'il est en train d'établir les
bases d'une politique familiale, tout ce qu'on trouve derrière son
discours, qu'on ' pourrait appeler "maître renard par le vote
alléché", c'est une série de pirouettes un peu
tape-à-l'oeil et, dans certains cas, considérées comme
insignifiantes. Le ministre peut bien sourire, mais la réalité
est là.
Il faut, pour se le rappeler, faire un historique de l'ensemble des
promesses électorales faites par le Parti libéral. Souvenons nous
du congrès général de juin 1985 où le Parti
libéral était en train d'adopter son programme électoral
qu'il a présenté à la population. Qu'est-ce que disait la
résolution 51.1? Cette résolution indiquait qu'il fallait
instaurer une politique globale de la famille. À l'égard d'une
politique globale de la famille, si on regarde ce qui a été fait
jusqu'à maintenant, j'aurai l'occasion d'y revenir, c'est que le
gouvernement en place tenu d'aucune façon, encore une fois, une de ses
promesses électorales.
La résolution 51.2 indiquait, toujours à ce même
congrès général, qu'il fallait adopter une série de
mesures concrètes touchant les divers champs d'activité de la
famille, tels l'éducation, les affaires sociales, le logement, le
soutien de revenu, la fiscalité et tout le reste.
La résolution 54.2 nous indiquait qu'il fallait créer une
exemption spéciale qui s'adresserait aux familles ou individus qui
prennent soin d'un parent, d'un enfant handicapé, d'un enfant
âgé, d'une personne qui a certaines difficultés, donc des
personnes âgées dans certains cas. On se retrouvait au
congrès du parti libéral tout dernièrement, en
février 1988, où le premier ministre disait qu'il était
extrêmement préoccupé par la dénatalité au
Québec. Le dossier de la politique familiale représentait donc
pour lui un des grands défis pour le gouvernement actuel.
C'étaient donc de la part, à la fois du Parti libéral dans
l'Opposition et maintenant au pouvoir, de belles idées, de beaux
idéaux qui ne se sont malheureusement pas concrétisés. Le
ministre va dire: On a fait telle et telle chose, telle affaire, telle
proposition lors du budget, telle proposition lors de la création du
Conseil de la famille. Je vais y revenir.
Le bilan des réalisations du gouvernement en place depuis
décembre 1985 alors que la ministre de la Santé et des Services
sociaux était responsable à l'époque du dossier, qu'elle
avait avec beaucoup de groupes fait des consultations et qu'on était sur
le point d'aboutir à l'énoncé d'une politique,
voilà qu'au 14 août 1987, il y a nomination d'un nouveau ministre
à titre de responsable du dossier de la politique familiale, ministre
délégué à la Famille, sans les pouvoirs du ministre
qui avait été mis en place par le gouvernement du Parti
québécois et qui avait agi avec les pleins pouvoirs. Donc,
nomination du ministre actuel alors que les travaux allaient bon train et
respectaient l'ensemble des échéances. Les organismes familiaux
avaient été consultés sur un énoncé de
politique et sur un éventuel Conseil de la famille. Ce que cela a
donné finalement, cela a été que ce changement de ministre
nous a permis de gagner du temps et de faire un changement d'orientations
aussi. Les gens nous l'ont dit: La consultation que nous avons eue à
l'époque était bien enclenchée, elle donnait des
résultats qui nous semblaient satisfaisants et la nomination d'un
nouveau ministre est venue changer toute cette orientation. C'est là
qu'on a compris que le ministre junior du gouvernement actuel, comme ministre
délégué à la Famille, s'est fait damer le pion par
le grand ministre senior, ministre responsable, premier ministre, sur une
politique de la dénatalité, ou de la natalité, alors que
le ministre délégué à la Famille s'amuse un peu
avec un Conseil de la famille qui est, malheureusement, quant à
nous,
une sorte de coquille vide.
Le 9 décembre 1987, le ministre Dutil déposait un
énoncé de politique familiale, et le projet de loi 94
créant le Conseil de la famille, intitulé, Penser et agir
famille. Sur Penser et agir famille, le ministre nous disait de
façon horizontale dans tous les ministères, dans tous les
organimes: J'ai une responsabilité. On s'aperçoit malheureusement
que ce n'est pas la réalité et on se retrouve devant une triste
réalité. (11 h 30)
Donc, il y a eu dépôt du projet de loi 94 et discussions en
commission parlementaire. J'en ai fait mention l'autre jour en disant que le
ministre avait daigné accepter les deux groupes qui étaient
présents, le Regroupement interorganismes pour une politique familiale
au Québec ainsi que la Confédération des organismes
familiaux du Québec qui se sont présentés à la
commission parlementaire où on étudiait article par article. Le
ministre a daigné les rencontrer alors qu'il savait très bien
qu'il y avait de la réticence sur bon nombre d'articles de ce projet de
loi. Donc, des gens qui, comme le Conseil des affaires sociales et de la
famille, se sont élevés contre le projet tel que
présenté et l'ensemble des organismes familiaux, comme le Cercle
des fermières, la Confédération des organismes familiaux
du Québec ou autres, une table provinciale sur la question, lesquels se
sont trouvés à dénoncer le projet de loi tel que
présenté. On a donc un Conseil de la famille qui est
malheureusement devant nous, accepté maintenant par la majorité,
mais qui est un organisme sous la tutelle du ministre qui a un petit budget et
qui, quant à nous, est un organisme qui risque en cours de route de ne
pas vivre comme il devrait vivre avec les pleines capacités de prendre
des décisions de son propre chef. En même temps qu'on avait des
réalisations qui, dans le fond, n'étaient qu'un recul par rapport
à leur position lors des congrès antérieurs ou lors des
discussions qui avaient eu lieu avec la ministre responsable à
l'époque, nous nous trouvons devant un gouvernement qui agit même
avec une formule qui est à caractère antifamilial. D'abord,
dépôt de la réforme de la sécurité du revenu
sur lequel mes collègues reviendront et surtout la responsable, comme
membre de l'Opposition. Et je suis assuré que même le
député de Chambly, qui a fait ses représentations à
la commission parlementaire et qui est assis à votre droite, dira la
même chose. C'est une proposition à caractère antifamilial
qui vient diviser les familles et qui. d'une certaine façon, vient
fausser cette réforme, quant à nous, la mettant comme une fausse
réforme de la sécurité du revenu.
On a la valse-hésitation de la ministre de la Condition
féminine dans le dossier des garderies. Ma collègue, la
députée de Marie-Victorin, aura l'occasion de revenir sur cette
question, parce qu'effectivement nous n'avons devant nous aucune politique
réelle. Il y a même diminution quant au nombre de places cette
année par rapport au passé.
Le ministre des Finances qui, d'une part, l'an passé,
récupérait 68 000 000 S en inversant la modulation de
l'allocation de disponibilité durant l'année 1987 va plus loin en
1988-1989 et fait encore une fois prendre de l'argent de l'ordre de 60 000 000
$ en 1988 en reculant la nouvelle modalité apportée par son
budget.
Réforme Wilson. Silence de la part du ministre responsable au
Québec et de son gouvernement sur une question aussi essentielle et qui,
en fin de compte, nous donne l'impression qu'ils ne sont pas vigilants comme
dans bien d'autres domaines, que l'on parle d'autres domaines:
économique, frégates et autres.
Finalement, le budget de 1988-1989 propose des mesures insuffisantes et
inadéquates. Je dois dire que, même à ce moment là.
la première réaction semblait être une bonne
réaction de certains groupes, mais après réflexion et
après rediscussion et après revérification, on
s'aperçoit que beaucoup de groupes maintenant dénoncent les
propositions qui ont été faites comme étant insuffisantes
et inadéquates. Que ce soient les groupes de femmes, les groupes de
garderies, le Conseil des affaires sociales et de la famille, les centrales
syndicales, le Conseil du statut de la femme, la Confédération
des organismes familiaux du Québec ou autres, nous disons que nous avons
devant nous un gouvernement de tape-à l'oeil, un gouvernement qui
malheureusement ne donne pas la réponse à sa proposition de
congrès de 1985. J'aurai l'occasion d'y revenir, M. le Président,
et mes collègues aussi pour démontrer qu'il n'y a pas de
véritable politique familiale au Québec. II n'y a que des mesures
qui ne sont pas une politique familiale.
Le Président (M. Bélanger): Bien. Je cède la
parole maintenant à M. le ministre délégué à
la Famille, à la Santé et aux Services sociaux.
M. le ministre.
Réponse du ministre M. Robert Dutil
M. Dutil: M. le Président, depuis 1960 des changements
considérables sont intervenus dans notre société, comme on
le sait. On a parlé à l'époque de révolution
tranquille, on a parié d'un renouveau de la société, d'un
ajustement par rapport aux sociétés occidentales et il y a eu de
grands bienfaits à la suite de ces réformes qui ont
été apportées à l'époque de 1960 et dans les
années suivantes. On s'est rendu compte plus tard que cette
évolution, ces changements, ces diverses nouvelles formules, cette
nouvelle société qui émergeait, qui se modernisait au
Québec, avait des conséquences pour la famille. On s'en est rendu
compte d'ailleurs par divers symptômes dont le principal, celui qui est
évoqué le plus souvent, celui qui frappe le plus la population -
ce n'est pas le seul, M. le Prési-
dent, il y en a d'autres - est la dénatalité. Ce n'est pas
un phénomène nouveau que la dénatalité, on parie de
taux de renouvellement de notre société, c'est-à-dire d'un
niveau de natalité qui serait suffisant pour renouveler notre
société et qui se situe à 2,1 enfants par femme.
Depuis 1972-1973, cela fait donc quinze ans, nous sommes sous le seuil
du taux de renouvellement. La raison pour laquelle je donne cette date, c'est
que de 1976 à 1985, on so souviendra que c'était le gouvernement
du Parti québécois qui dirigeait les destinées du
Québec et il avait entre les mains les chiffres de ce symptôme des
difficultés que vivait la famille, de l'un des symptômes, celui
auquel on se réfère le plus souvent, et pourtant, en dix ans, le
Parti québécois s'est attardé à beaucoup d'autres
choses, à beaucoup d'autres dossiers que celui de la politique
familiale. Nous l'avons mentionné à diverses occasions dans les
campagnes électorales que nous avons eu l'occasion de faire contre le
Parti québécois, dans l'Opposition lorsque le Parti
québécois gouvernait. Leurs préoccupations, leurs
idéaux pouvaient avoir des aspects légitimes, mais étaient
bien souvent irréalistes. Ils ont donné de tels coups sur
l'économie qu'ils tenaient pour acquise qu'ils se sont retrouvés
effectivement dans une impasse faute de stimulation, faute de climat favorable
à l'investissement, faute de volonté des entrepreneurs d'investir
dans de pareilles conditions. Ils se sont retrouvés devant une crise
économique qui a été beaucoup plus grave que celle que
d'autres pays ont connue.
Il est important de le préciser, nous admettons volontiers de ce
côté-ci que, dans le monde occidental, il n'y ait pas
d'économie tout à fait indépendante des circonstances
extérieures à son pays. On ne peut pas faire d'économie en
vase clos. C'est pourtant ce que le Parti québécois a
tenté de faire, et c'est ce qui a fait que la crise économique
que l'ensemble du monde occidental a connue a été pire au
Québec qu'elle ne l'était ailleurs.
On pourrait en parler davantage, mais tout cela pour dire que cela a
amené l'ancien gouvernement jusqu'à aller imposer, dans son
dernier budget, la récupération des allocations familiales,
laquelle, comme on le sait, notre gouvernement a réussi à
éliminer complètement avec ce dernier budget. Nous avions
commencé à l'éliminer dès le premier budget
à partir du quatrième enfant, nous l'avons fait à partir
du troisième enfant l'année dernière et, cette
année, le ministre des Finances a annoncé que la
récupération des allocations familiales ne se ferait plus ni pour
le premier, ni pour le deuxième enfant, en laissant entre les mains des
parents 126 000 000 $ de plus, ce qui n'est qu'une partie du soutien
économique que le gouvernement a accordé cette année.
Pendant dix ans, alors qu'on connaissait le symptôme de la
dénatalité, le symptôme de problèmes que vit la
famille et de changements de moeurs, que s'est-il passé pour que le
Parti québécois ne fasse aucune politique familiale, n'envisage
aucune mesure concernant ta famille? Il faut bien comprendre et il faut voir
que dans les traditions du Parti québécois, la famille est
totalement absente. Aujourd'hui, l'Opposition tente bien de
récupérer ce cheval de bataille parce que la population est
maintenant sensibilisée au phénomène de la
dénatalité, se rend bien compte qu'il est temps d'agir et qu'il
faut faire quoique chose. Mais, on ne peut pas prendre la responsabilité
des gestes inconséquents, des gestes que n'a pas posés l'ancien
gouvernement sur le plan de la politique familiale. Nous avons pris la
situation telle qu'elle était en 1985, et malgré une situation
budgétaire difficile, dès le départ, le ministre des
Finances a augmenté graduellement le soutien aux familles en laissant,
sous diverses formes, 500 000 000 $ aux familles dans le passé. Cette
année, dans son budget, tout en diminuant le déficit et tout en
maintenant ou en augmentant les services dans divers domaines, il a
accepté de laisser ou accorder 772 000 000 $ en allocations
supplémentaires aux familles, ce qui porte à plus de 1 200 000
000 $ le soutien économique aux familles que le gouvernement du
Québec a accordé depuis deux ans et demi, M. le Président.
C'est un chiffre qu'il faut citer alors que le soutien économique total
aux parents dans le passé était de l'ordre de 700 000 000 $. On a
presque triplé le soutien économique total aux familles depuis
deux ans et demi dans une situation qui n'était pas facile initialement,
je vous le rappelle.
Plusieurs énoncés, plusieurs discours ont annoncé
notre politique familiale. Quand l'Opposition dit que le gouvernement actuel
n'a pas de politique et d'orientation, je pense qu'elle veut volontairement
oublier le texte que nous avons présenté au mois de
décembre dernier et qui s'intitule "Énoncé des
orientations et de la dynamique administrative", dans lequel nous identifions
les divers champs d'activités dans lesquels nous avons l'intention
d'agir ou dans lesquels nous avons agi puisque le mois de décembre,
c'était il y a six mois et que depuis ce temps-là des gestes
extrêmement positifs et importants ont été posés. Et
je réfère l'Opposition à la page 9 où, entre
autres, nous disons que la politique familiale du gouvernement du Québec
aura comme objectif général de reconnaître l'importance de
la famille en tant qu'institution et milieu de vie, notamment par le soutien
collectif aux parents qui sont les premiers responsables de la prise en charge
des enfants et du milieu familial.
Par la suite, dans notre texte, nous identifions les champs
d'activité et nous nommons les ministères concernés par la
politique familiale. Le soutien économique aux parents, le
ministère des Finances, le ministère du Travail, l'habitation, le
système d'enseignement, l'immigration et les communautés
culturelles, les services sociaux et de santé, les services aux familles
autochtones,
les services de garde, la famille et les loisirs, la justice et le droit
de la famille, la sécurité de la famille, la recherche et la
coopération, la famille et les agents culturels et ainsi de suite, M. le
Président. Voilà la démonstration que nous avons
clairement identifié les champs d'intervention dans lesquels nous
voulons intervenir et nous interviendrons.
Ce que nous reproche l'Opposition ce matin, ce n'est pas de ne pas avoir
de politique, nous en avons une. Elle souhaiterait que nous la mettions en
place plus rapidement. Je pense qu'il y a là une nuance d'importance.
Mais nos positions et nos couleurs sont claires. Nous allons vers une politique
familiale. Nous avons identifié les champs d'activité et, dans
ces champs d'activité le soutien économique, je lions à le
rappeler, est un secteur important.
Que s'est-il passé depuis ce temps-là? II y a eu un
discours d'ouverture. Le premier ministre en a pronconcé un au mois de
mars à l'ouverture de la Chambre et, dans son texte, il a parlé
abondamment de la politique familiale et a particulièrement
identifié quatre secteurs prioritaires: le soutien économique aux
familles - je reviendrai là-dessus - le gardiennage, l'habitation et les
normes de travail, non pas comme les seuls champs d'intervention, mais comme
des champs d'intervention prioritaires et fort importants pour le gouvernement
du Québec parce qu'ils touchent l'ensemble de la population du
Québec. Bien sûr, il y a d'autres domaines qui doivent être
touchés. Je pense particulièrement à la santé et
aux services sociaux qui touchent des clientèles particulières,
qui touchent des clientèles avec des difficultés importantes.
Mais le premier ministre, dans son discours inaugurai, s'est
particulièrement attardé aux secteurs qui touchent l'ensemble de
la population. Et par la suite, le 12 mai 1988, justement le jour de l'adoption
du projet de loi concernant le Conseil de la famille, un budget a
été déposé.
Mon temps est écoulé. J'aurai l'occasion, je
l'espère, de revenir plus abondamment sur le soutien économique
que le gouvernement a accordé par ce budget. Merci.
Le Président (M. Bélanger): Merci, M. le ministre.
Alors je cède la parole à M. le député de
Laviolette pour cinq minutes. Excusez-moi. Mme la députée de
Marie-Victorin. J'avais le mauvais ordre. (11 h 45)
Argumentation Mme Cécile Vermette
Mme Vermette: Oui, M. le Président. Je suis tout à
fait ébahie d'entendre les propos du ministre
délégué à la Famille parce qu'il n'a pas
arrêté de déclarer que des mesures de soutien sont
apportées aux familles, comme le soutien collectif aux parents, et
surtout au chapitre du gardiennage. Qu'est ce qu'il ne faut pas entendre? M. le
ministre délégué à la Famille, est-ce que vous
parlez quelquefois à la ministre déléguée à
la Condition féminine qui a la responsabilité de l'Office des
services de garde à l'enfance et qui, encore hier soir, me disait qu'il
n'y a aucune politique en regard du réseau des garderies qui a
été développée et mise de l'avant? Ce qu'elle est
en train de faire depuis juin 1986, c'est de l'harmonisation. Elle a eu un
document qui lui disait le nombre de places qu'il fallait créer au
Québec depuis juin 1987 et rien n'est fait. Aucune politique n'est
établie. Elle négocie avec Ottawa et, en plus de négocier
avec Ottawa, elle se fait imposer un plafond de création de places dans
les garderies, soit 60 000 places sur sept ans. J'ai appris hier, M le
Président, qu'en plus de néçiocier, elle n'est pas capable
de prendre de décision, Elle n'est pas capable parce qu'elle ne sait pas
où le fédéral s'en va. Donc, elle ne peut pas faire sa
politique parce qu'elle ne sait pas ce qui va arriver dans huit ans, quel sera
le résultat de ces négociations et combien d'argent elle pourra
obtenir du gouvernement fédéral dans la huitième
année. À cause de cet objectif, on se laisse imposer un plafond
par le fédéral et on n'est pas capables d'établir notre
propre politique de développement d'un réseau des garderies ici
au Québec. Je trouve cela inacceptable et inconcevable.
M. le ministre délégué à la Famille nous a
dit qu'il y avait des mesures exceptionnelles qui avaient été
prises. très substantielles, pour vraiment favoriser les femmes et les
familles. Je lui dirai qu'à l'heure actuelle, 60 % des femmes qui ont
des enfants de 0 à 6 ans sont sur le marché du travail et elles
n'ont pas de place dans le réseau des services de garderie. II manque
à l'heure actuelle 90 000 à 95 000 places pour répondre
aux véritables besoins de nos familles québécoises. Si on
voulait répondre à seulement 50 % des besoins, il faudrait
développer, sur une période de trois ans, 54 000 places. On se
parle, on est ici. en 1988 et j'entendais tantôt le ministre dire que,
pendant les deux premières années qu'ils étaient au
pouvoir, cela avait toujours été la faute du Parti
québécois, de l'ancien gouvernement, s'ils n'avaient jamais pu
faire quoi que ce soit depuis deux ans et demi Cela leur a pris deux ans et
demi pour s'apercevoir qu'ils étaient au pouvoir et, une fois qu'ils se
sont aperçus qu'ils étaient au pouvoir, ils commencent à
dire que, de toute façon, les mesures qui seront apportées, ce ne
sera pas pour aujourd'hui. Ce sera pour 1990. lors des prochaines
élections. Cela fait une belle forme de gouvernement, ça. Deux
ans et demi pour dire que, finalement, ce n'est pas nous autres, on ne gouverne
pas encore, on ne peut pas rien faire, on ne peut rien modifier parce que c'est
la faute de l'ancien gouvernement. Et quand on arrive en poste, on se
réveille et on dit: Là, c'est le temps qu'on fasse quelque chose
parce que le carnet de commandes de l'ancien gouvernement est tout
épuisé; il faut que ce soient vraiment nos politiques
qu'on mette de l'avant. On dit: Houp, on n'a rien à faire, il faut
attendre, en 1990, à la veille des élections et on annoncera tous
les bonbons comme la dernière fois. C'est exactement cela que vous
êtes venu nous dire, c'est exactement cela que vous venez faire et c'est
exactement ce que m'a confirmé la ministre déléguée
à la Condition féminine hier lorsqu'on parlait du
développement du réseau des services de garderie. Elle-même
m'a dit hier soir qu'il n'était pas question de mettre de l'argent en
1988-1989, mais que c'était beaucoup plus pour les années
quatre-vingt-dix qu'ils injecteraient des sommes. Dans votre budget, où
vous en faites les éloges d'une façon extraordinaire, qu'y a-t-il
pour le réseau des garderies? On dit tout simplement: On
développera 60 000 places sur sept ans. Pas d'argent frais, pas d'argent
du tout, rien pour développer le réseau des garderies. On dit: Un
pas pour consolider le réseau des garderies, 3 200 000 $ pour
l'équipement et le matériel didactique; 1000 $ par garderie. Cela
va loin, ça? Cela va très loin. Cela favorise un réseau
des garderies et cela développe des places pour les familles. Il n'y a
absolument aucune volonté de la part de votre ministère ou de la
part du ministère de la Condition féminine pour faire en sorte
que les familles québécoises, hommes ou femmes, puissent avoir
accès à des places dans le réseau des garderies. Il n'y a
aucune politique en place. Mme la ministre déléguée
à la Condition féminine nous a bien laissé croire que les
prochaines réunions avec le fédéral auront lieu en
novembre 1988.
M. Jolivet: Ce ne sont pas des farces.
Le Président (M. Bélanger): Je cède la
parole à M. le ministre.
M. Robert Dutil
M. Dutil: M. le Président, quand on fait une erreur, on se
doit de le reconnaître et je vais reconnaître une erreur. J'avais
estimé, lorsque je me suis présenté en politique, que
quatre ans suffiraient pour réparer les dégâts que
l'Opposition avait faits. Je dois vous dire que je pense que cela prendra
vraiment huit ans tellement les dégâts étaient plus
considérables que ceux que nous avions prévus.
Une voix: Non, mais c'est vrai.
Une voix:...
Le Président (M. Bélanger): S'il vous
plaît.
M. Dutil: J'admets une erreur et je ne comprends pas que
l'Opposition s'en plaigne. Je pense que c'est tout simplement une question
d'honnêteté.
Quant au budget, je pense qu'il est bon de revenir là-dessus et
de l'expliquer davantage. Le gouvernement a consenti des baisses d'impôt
et a transformé des exemptions de revenu en crédits d'impôt
pour environ 500 000 000 $, on dit 499 000 000 $. Arrondissons donc à
500 000 000 $ pour nous comprendre.
Je voudrais intervenir plus particulièrement au sujet des
exemptions d'impôt qui ont été transformées en
crédits d'impôt à la demande de beaucoup d'organismes qui
disaient, à juste titre, que les exemptions d'impôt étaient
une façon régressive de faire les choses puisque ceux qui avaient
les plus hauts revenus bénéficiaient davantage de
réductions d'impôt, étant donné qu'ils pouvaient
réduire leur revenu du même montant mais, leur taux marginal
d'impôt étant plus élevé, ces gens
bénéficiaient donc d'un abaissement d'impôt plus
considérable.
Le ministre des Finances, dans son budget, a déclaré que
ces exemptions d'impôt seraient transformées en crédits
d'impôt à un taux marginal de 20 %, c'est-à-dire plus
élevé que la moyenne des impôts et donc, donnant davantage
non seulement aux familles les plus démunies mais donnant davantage
globalement à l'ensemble de la société du Québec.
Donc, d'une pierre, deux coups: plus pour les familles à plus faible
revenu et plus pour l'ensemble des contribuables du Québec, puisque la
conversion s'est effectuée à ce taux de 20 %.
L'allocation, qui s'appelait auparavant l'allocation de
disponibilité et qui obligeait les parents à choisir entre les
frais de garde et l'allocation de disponibilité, a été
transformée également en allocation jeunes enfants
c'est-à-dire, que vous réclamiez ou non des frais de garde, vous
avez droit à l'allocation jeunes enfants.
Je me rappelle ce que disait tout à l'heure le
député de l'Opposition, M. le député de Laviolette
en isolant un facteur, il disait: L'année dernière, le
gouvernement a récupéré des parents la somme de 68 000 000
$. Il a fait abstraction de toutes les autres mesures qui étaient
incluses dans le budget et qui faisaient que la somme et les différences
entre les avantages et les retraits donnaient plus de 169 000 000 $ de plus aux
parents. Évidemment, un oubli de la part du député de
Laviolette, c'est pardonnable, il m'excusera de le lui rappeler; je pense que
c'est important, la vérité a ses droits.
Il est important de rétablir la situation. On ne peut pas isoler
une mesure de soutien économique qui peut avoir, elle, un effet
négatif, des autres mesures qui, elles, ont des effets extrêmement
positifs. Il oublie évidemment de mentionner la
non-récupération des allocations familiales qui avait
été prévue dans le dernier budget du gouvernement du Parti
québécois, le budget Duhaime; un gouvernement en panique qui est
allé enlever 200 000 000 $ dans les poches des parents en
récupérant leurs allocations familiales; un gouvernement en
panique, il faut le comprendre, à ce moment-là. Rappelons-nous
la
situation. Les virgules du programme du Parti québécois
ont fait éclater ce gouvernement. Les virgules du programme du Parti
québécois ont fait éclater ce gouvernement-là.
C'était beaucoup plus important de se chicaner sur les virgules que de
soutenir la famille dans la société québécoise.
C'était beaucoup plus important de s'entre-déchirer que de
s'assurer que la stimulation économique était là, avec le
résultat que lors de la préparation du budget en catastrophe de
M. Duhaime, nouveau ministre des Finances qui remplaçait M. Parizeau qui
avait claqué la porte parce que les virgules du programme ne lui
plaisaient pas, le nouveau budget préparé en catastrophe par M.
Duhaime a fait qu'il lui manquait 200 000 000 $. L'imagination
considérable de ce parti a fait qu'il est allé l'enlever aux
familles.
Cela n'avait pas de bon sens. Cela nous a pris trois ans, nous avons
remis aux parents graduellement, au fur et à mesure du renforcement de
notre économie par la stimulation que nous avons faite et du
dégagement des marges de manoeuvre, ces 200 000 000 $ dont 126 000 000 $
cette année.
Le Président (M. Bélanger): Je cède la
parole au député de Fabre. M. le député.
M. Jean A. Joly
M. Joly: Merci, M. le Président. Lorsqu'on est
convoqués pour une interpellation, dans bien des cas on pense que c'est
justifié afin de donner plus d'information à la population. Dans
d'autres cas, on est drôlement surpris, surtout quand on considère
la réaction favorable et positive de tous les médias et de tous
les intervenants, tant économiques que ceux en relation avec la famille,
à la suite de la parution du budget. Ou c'est de la mauvaise
volonté de la part des gens de l'Opposition, ou c'est un manque
d'information, ou on ne lit pas les journaux, ou on ne sait peut-être pas
lire. Qu'on regarde tout ce qui s'est produit à la suite du
dépôt du budget, les réactions favorables, je dirais par 90
% de la population parce que cela a touché exactement ce que M. le
ministre délégué à la Famille disait tantôt:
On a essayé de cerner dans ce budget-là le soutien
économique aux familles. On a touché le gardiennage, bien
sûr, on a touché aussi un autre point qui est quand même
bien important, qui est l'accès à la propriété.
J'aimerais revenir surtout sur le point do l'accès à la
propriété sur lequel on dit que pendant sept ans, le gouvernement
se rend responsable de 10 % des intérêts sur 7000 $. Cela
représente quoi, en fait, comme soutien à la famille? Si ce n'est
pas un soutien tangible à la famille, je me demande ce que c'est. Cela
représente quand même près de 5000 $. C'est 700 $ par
année pendant sept ans, c'est 4900 $. Cela veut dire que c'est une
réduction mensuelle de près de 60 $ sur le loyer de ceux qui
bénéficieront de ce programme. Alors, quand on sait
qu'aujourd'hui élever une famille dans le béton n'est pas facile,
ce n'est pas facile d'élever une famille dans ce qu'on appelle
communément les grands grands blocs d'appartements avec des
pièces assez restreintes, on donne la possibilité aux gens
d'avoir accès à la propriété alors que pendant sept
ans on leur enlève l'inquiétude de payer des
intérêts sur 7000 $ et non récupérables, à
part cela et non imposables, en plus de cela.
Je pense que, quand on a nommé le ministre
délégué à la Famille le 14 août 1987, il a
pris son rôle au sérieux. Il a réussi à s'asseoir
avec tous les autres ministres concernés. Ensemble. ils ont
façonné le budget qu'on connaît On sait aussi que la venue
des futurs enfants va être reconnue d'une façon quelconque par la
remise de quelques dollars. Par exemple, lors de la naissance d'un
troisième enfant dans une famille, aujourd'hui, la famille est
aidée avec 3000 $. Je pense que c'est reconnaître notre
responsabilité en ce qui concerne les familles. On a regardé le
total qui a été accordé aux familles, c'est 772 000 000 $.
Dans les journaux qui en ont parlé, je pense que la majorité des
journaux l'ont fait, d'ailleurs, on dit: Les familles sont les grandes
bénéficiaires de la réforme fiscale annoncée par le
ministre des Finances. Gérard D. Levesque, dans son budget qui
réduira les impôts de l'ensemble des contribuables de 305 000 000
$ cette année, de 892 000 000 S en 1989, soit 1 200 000 000 $ en deux
ans. Florent Francoeur, président de la Chambre de commerce de
Montréal, disait "Le budget comporte de bons éléments pour
les jeunes familles sous la forme d'une aide financière". Le non moins
coloré M. Larose, de la CSN, a dit: "À la CSN on félicite
le gouvernement d'avoir supprimé les exemptions personnelles pour les
remplacer par des crédits d'impôt. C'est une règle plus
équitable pour tout le monde. "
Si ces mesures qu'on a mises de l'avant sont endossées par la
majorité des personnes ou des groupes responsables dans notre
société et que seule l'Opposition a quelque chose à
redire, je pense que ce matin c'est non justifié de s'asseoir ici et
d'être interpellé. On aura à revenir. Le ministre aura
sûrement d'autres éléments à apporter tantôt
Mais, certainement. je persiste à dire qu'il y a de la mauvaise
volonté de l'autre côté Merci, M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): Merci. J'appelle
maintenant la députée de Chicoutimi. Madame, la parole est
à vous.
Mme Jeanne L. Blackburn
Mme Blackburn: Merci. M. le Président. Le ministre nous
tient responsables de certaines mesures qui auraient eu comme effet de
détério-
rer la condition des familles. Il cite à titre d'exemple la
récupération des allocations familiales. Je voudrais juste lui
rappeler qu'au moment où ce gouvernement prenait la décision
d'appliquer cette mesure, simultanément il abaissait les impôts
des particuliers à hauts revenus de quelque 86 000 000 $. Ce
n'était pas une décision du gouvernement précédent,
c'était la toute première décision de ce gouvernement en
décembre 1985. (12 heures)
Le ministre impute également aux erreurs du gouvernement
précédent le fait que cela se soit
détérioré. Je ne sais pas si on a attiré son
attention sur une erreur qui est en train de se produire et qui va avoir des
conséquences considérables sur l'établissement de services
de garde en milieu scolaire. Le gouvernement précédent avait dans
la loi 3, qui est la Loi sur l'instruction publique, fait obligation aux
directeurs d'école d'implanter des services de garde en milieu scolaire.
Il faut se rappeler que la loi 3 était une loi et, n'eût
été le fait qu'elle fut invalidée par les tribunaux sur
une disposition qui n'avait aucun rapport avec cette disposition
spécifique de la loi, elle s'appliquerait aujourd'hui.
Le projet de loi qui est sur la table et dont le parrain est l'actuel
ministre de l'Éducation ne fait plus obligation aux directeurs
d'école d'offrir des services de garde en milieu scolaire. Quelle est la
situation aujourd'hui, au moment où on se parle? Il y a 64 % des
mères de famille qui ont des enfants de moins de six ans et qui sont sur
le marché du travail. Leur proportion était de 34 % il y a dix
ans. Leur nombre croît en proportion, c'est-à-dire que, plus les
enfants entrent à l'école, plus les femmes ont tendance à
retourner sur le marché du travail. Dans nos écoles, au niveau
préscolaire et au primaire, on a 555 000 enfants dont une proportion de
plus en plus grande se promènent la clef dans le cou et entrent dans des
appartements vides le midi et le soir, parce qu'ils arrivent à la maison
entre 15 h 30 et 16 heures et que les parents entrent à la maison entre
18 heures et 19 heures. Actuellement, dans les écoles du Québec,
il y a quelque 30 000 places dans les services de garde alors qu'on peut
estimer, de façon tout à fait conservatrice, à quelque 300
000 le nombre d'enfants qui n'ont pas de surveillance au moment où ils
entrent à la maison, à moins que les parents n'en organisent par
le biais de services qu'ils s'offrent aux alentours de la famille.
Le ministre de l'Éducation n'a aucune politique touchant les
services de garde en milieu scolaire; rien ne vient, par exemple,
préciser la qualité des services à être offerts, les
objectifs à être poursuivis par ces services, la durée des
services. La durée des services qui paraît dans la règle
budgétaire actuellement est déterminée comme suit: "les
services doivent être ouverts une demi-heure avant le début des
cours et une heure après la fin des cours". Cela veut dire qu'à
16 h 30, tout peut être terminé dans une école.
Actuellement, comme la loi 3 ne s'applique pas, il y a des directeurs
d'école qui refusent systématiquement d'organiser des services de
garde et d'offrir des services de surveillance à l'heure du lunch. C'est
cela, la situation dans les écoles du Québec.
On veut imputer cette responsabilité au gouvernement
précédent; il serait peut-être intéressant que le
ministre nous fasse part des pressions qu'il a exercées auprès de
son collègue, le ministre de l'Éducation, pour qu'il
réintroduise dans le projet de loi actuel les obligations qui
étaient dans la loi 3. Que le ministre identifie également avec
le ministre de l'Éducation ce que seraient les éléments
d'une réelle politique de services de garde en milieu scolaire qui
définiraient la durée de ces services. Selon nous, le minimum
accessible devrait être de 7 à 18 heures. Que les services aient
également des objectifs d'animation et de formation et que cela ne soit
pas simplement de la surveillance. Que ces services soient accessibles
même aux enfants qui bénéficient du transport scolaire
gratuit. Actuellement, quand un enfant bénéficie du transport
scolaire gratuit, l'école n'a pas droit aux subventions le concernant -
essayez de m'expliquer pourquoi - comme si l'autobus pouvait servir de lieu de
garde. Je ne comprends pas vraiment la rationalité dans tout cela.
Ce que je dis à ce gouvernement et au tout nouveau ministre
responsable de la politique familiale, c'est qu'il n'a peut-être pas eu
le temps de tout voir, mais plutôt que d'essayer de fuir en avant en
disant que le gouvernement précédent a toujours tort, pourquoi
n'essaie-t-il pas d'établir un réel dialogue...
Le Président (M. Bélanger): En conclusion, Mme la
députée.
Mme Blackburn: ...avec ses autres collègues de
manière à établir des politiques concrètes en
matière de services de garde en milieu scolaire et cela, dans les
meilleurs délais...
Le Président (M. Bélanger): Votre temps est
écoulé, madame, je m'excuse.
Mme Blackburn: ...et qu'il puisse - je termine, M. le
Président - influencer le plus rapidement possible son collègue
dans le but de faire inscrire...
Le Président (M. Bélanger): C'est terminé,
madame, je m'excuse.
Mme Blackburn: ...cette obligation dans la Loi sur l'instruction
publique? Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): M. le ministre.
M. Robert Dutil
M. Dutil: Vous voyez, M. le Président, on a eu, au
début de l'intervention de Mme la députée de Chicoutimi,
un exemple justement du dogmatisme qui a fait que l'économie au
Québec s'est développée moins rapidement pendant les dix
années de l'ancien gouvernement qu'elle n'aurait dû se faire. Mme
la députée a dit: Nous avons baissé les impôts des
particuliers aux plus hauts revenus, donc, nous avions la marge de manoeuvre
qu'il nous fallait si nous avions voulu utiliser cette marge de manoeuvre.
Pourtant, cela a été dit et redit par le gouvernement actuel: II
est important dans notre société d'avoir une fiscalité
compétitive pour éviter de faire fuir les capitaux.
Rappelons-nous la décision prise par M. Duhaime dans son dernier budget,
bonne décision cette fois-ci, d'abolir les impôts sur les
successions. Dogmatiquement, l'ancien ministre des Finances, M. Parizeau,
maintenait ces droits de succession alors que le seul endroit en
Amérique du Nord où cela était maintenu, c'était au
Québec, même s'il savait très bien que le rendement de ces
impôts sur les successions était très peu
considérable, mais qu'il avait un effet désincitatrf et de fuite
considérable de capitaux qui a eu un effet épouvantable sur
l'investissement au Québec.
Ce n'est que l'un des exemples que l'on pourrait donner. On peut ajouter
l'autre exemple, justement, de la fiscalité non compétitive par
rapport aux autres provinces du Canada et qui a fait également fuir bien
des gens qui auraient pu investir à ce moment-là au
Québec. On a aujourd'hui les résultats des mesures incitatives
que nous avons prises pour assurer le développement
économique.
Maintenant, je voudrais intervenir sur les quelques principes que nous
avons énoncés. On sait que les discussions de principe ne sont
pas, en général, les plus populaires à l'Assemblée
nationale. Elles me paraissent toutefois importantes. Dans le document que nous
avons présenté en décembre, nous avons établi
certaines bases, certains principes sur lesquels nous fondons notre action. La
population du Québec aura à juger d'ici quelque temps, d'ici deux
ans à deux ans et demi, de notre action sur l'ensemble de notre mandat.
Nous l'avons dit: Nous nous sommes dégagé une marge de manoeuvre
pour appliquer cette politique familiale. Mais, quelle est-elle, la politique
familiale? Il est important que la population l'entende et se te fasse redire.
Nous avons établi des principes de base, M. le Président, en page
8 du document d'orientations, qui disent: "Le gouvernement, dans les limites de
sa compétence et de sa responsabilité, veut reconnaître la
famille comme valeur collective fondamentale, car le bien-être et celui
des individus qui la composent sont considérés comme sous-jacents
au bien-être de la société. "Deuxièmement, le
gouvernement veut contribuer à la cohésion et à la
stabilité de la famille ainsi que tenir compte davantage de la
spécificité de la réalité familiale en disant, bien
sûr: C'est d'abord avec l'individu que l'État transige, mais par
ailleurs, la famille constitue la cellule de base de notre
société et le lieu premier d'apprentissage et de socialisation
des individus. Une politique familiale implique donc que le gouvernement
soutienne la famille en harmonie avec les multiples formes de soutien aux
individus et aux groupes sociaux que constitue l'éventail des politiques
gouvernementales.
Troisièmement, le gouvernement veut soutenir les parents à
titre de premiers responsables légaux et sociaux de la prise en charge
des enfants, évitant de se substituer à eux tout en
protégeant l'intérêt de l'enfant."
Nous avons énoncé ces principes de base. La raison pour
laquelle je les resouligne dans le peu de temps qui m'est donné pour
intervenir, c'est que notre philosophie n'est pas toujours très proche
de celle de l'ancien gouvernement qui voudrait maintenir en tutelle les
parents, ne leur faisant aucune confiance dans le processus d'éducation
de leurs enfants. Quand on parle d'un soutien économique comme celui que
nous avons accordé cette année, que notre gouvernement, dans son
budget, a accordé aux familles cette année, c'est le signe que
notre philosophie de base est marquée par la confiance que nous avons
aux parents à qui nous voulons donner les moyens économiques,
d'abord. Nous voulons donner d'autres moyens. Nous en parlerons plus tard
puisque nous n'avons que des périodes de cinq minutes en alternance,
mais nous voulons donner les moyens économiques aux parents de faire ce
qu'ils sont le plus en mesure de faire, c'est-à-dire d'assurer
l'éducation de leurs enfants. Merci.
Le Président (M. Bélanger): Bien. M. le
député de Chambly.
M. Gérard Latulippe
M. Latulippe: Merci, M. le Président. Pour faire
référence à ce que M. le député de
Lavio-lette disait tout à l'heure, si avec certains de mes
collègues j'ai publiquement exprimé certaines réticences
concernant le projet d'aide sociale, c'est que nous avions des
préoccupations vis-à-vis des plus démunis de notre
société. Mais c'est ce qui me permet, par ailleurs, de dire que
dans d'autres secteurs - et là je parle de la politique familiale - nous
avons fait des pas importants. Si en redevenant député j'ai
acquis une plus grande liberté de parole et d'action qui me permet de
discerner les bons coups des mauvais, peut-être que l'Opposition aurait
avantage aussi à faire la même chose, à voir ce que nous
faisons de bien et à être en mesure de le dire aussi publiquement.
Vous savez, la politique familiale n'est pas quelque chose qui va arriver du
jour au lendemain comme si on avait inventé du jour au lendemain une
politique familiale pour régler tous
les problèmes de la famille.
La famille a profondément évolué depuis les
années soixante. Nous avons vécu une chute draconienne du taux de
natalité. Nous avons vécu aussi une mutation importante de la
famille attribuable, par exemple, à l'évolution de la femme, sa
présence sur le marché du travail, l'accroissement de notre
niveau de vie, le développement de l'éducation, qui font en sorte
que nous ne retrouvons plus cette famille traditionnelle que nous avions durant
les années quarante et cinquante. Le taux de divorces est passablement
impressionnant, le nombre de familles monoparentales aussi; l'intervention que
l'on doit faire est donc une intervention qui est variée, où l'on
doit tenir compte de cette nouvelle réalité familiale dans
laquelle nous vivons aujourd'hui.
Je pense que d'abord la nomination d'un ministre
délégué à la Famille, cela a déjà
été un premier pas; un deuxième pas, ce fut la
création du Conseil de la famille; mais c'est un ministre qui a une
vocation horizontale, un ministre qui intervient auprès de ses
collègues, qui doit faire en sorte que dans différents secteurs
d'activité, comme l'immigration, les finances, il y ait des
interventions ponctuelles. Je pense que vous devriez vous joindre à nous
pour ce premier volet de politique familiale qui a été, à
toutes fins utiles, donné dans le dernier budget du gouvernement
libéral. D'ailleurs, votre porte-parole de l'Opposition, M. Parent, est
venu très près de prendre cette nouvelle attitude que les
parlementaires devraient avoir de dire, lorsque des mesures sont bonnes: Oui
elles sont bonnes, et, lorsqu'elles sont moins bonnes: Oui elles sont moins
bonnes.
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît!
On respecte le droit de parole du député de Chambly.
M. Latulippe: Dans le budget, un des premiers aspects de la
politique familiale est le soutien financier aux familles, parce que compte
tenu que la famille a été modifiée depuis les
années soixante, qu'elle n'est plus nucléaire, le soutien
financier à cette famille éclatée est un des volets
fondamentaux de la politique familiale.
Vous le savez, c'est vous qui avez instauré la taxation des
allocations familiales. Vous devriez applaudir cette abolition complète
de la récupération des allocations familiales.
Le deuxième volet est l'allocation à la naissance. C'est
certain que 3000 $, par exemple, pour un troisième enfant ne
règlent pas tout, mais c'est un pas important pour aider nos familles
à avoir plus d'enfants et à accroître ainsi le taux de
natalité. Je suis convaincu que le ministre de la Famille a eu une
influence prépondérante dans les mesures de soutien financier que
nous retrouvons dans ce budget concernant la famille et je pense que l'on doit
tous, et vous devriez vous joindre à nous, approuver ces mesures qui
forment un volet important de la politique familiale. (12 h 15)
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M. le
député. Mme la députée de Johnson.
Mme Carmen Juneau
Mme Juneau: Merci beaucoup, M. le Président.
J'écoutais attentivement le ministre qui parlait de philosophie. En
décembre dernier, il parlait aussi de penser et agir famille. Je
souhaiterais énormément que, dans ce discours, le ministre inclue
aussi les gens du troisième âge, parce que ce sont les parents de
ces jeunes familles et ce sont également eux qui nous ont ouvert les
chemins, qui nous ont aidés dans la vie et qui, aujourd'hui,
mériteraient qu'on ait une attention toute spéciale quand on
parle de la famille. La plupart ou une grande partie de ces gens vivent en
deçà du seuil de la pauvreté. Quand on parle de logements
pour les personnes âgées, on se rend compte que ces gens n'ont pas
le nécessaire ou l'équité qu'on pourrait leur assurer
aujourd'hui, surtout quand on pense qu'on vit des années de vaches
grasses. Lorsqu'on songe à une politique familiale, je pense qu'on
pourrait inclure les gens âgés.
Si on se rend bien compte que la natalité est à la baisse,
il faut quand même admettre que la longévité est à
la hausse. Aujourd'hui, 10 % de la population du Québec ont 65 ans et
plus. Donc, dans des années futures qui ne sont pas très loin,
c'est-à-dire en 2040, nous aurons deux personnes âgées pour
une personne de moins de 65 ans. Si les politiciens ne s'assoient pas et ne
pensent pas également à nos parents, aux gens âgés
d'aujourd'hui, lorsqu'ils pensent à la politique familiale, ce sera
regrettable mais on arrivera à un moment où ces pauvres personnes
- et nous allons allègrement vers cette période - n'auront pas ce
à quoi elles doivent s'attendre, c'est-à-dire une vie
décente pour continuer à vivre parmi les leurs.
On parle beaucoup du souhait de la ministre de la Santé et des
Services sociaux, qui était aussi celui de notre gouvernement,
concernant le maintien des personnes âgées à domicile.
Qu'a-t-on fait de plus pour garder le plus de gens âgés à
domicile le plus longtemps possible? Est-ce qu'on a injecté les sommes
essentielles dans les CLSC pour aider les jeunes familles qui veulent garder
leurs parents à la maison? Est-ce qu'on a ajouté du personnel
pour l'aide à domicile, des gens qui sont capables de visiter les
familles qui ont le coeur de garder un de leurs parents à la maison?
Est-ce qu'on a des mesures fiscales pour aider les familles à pouvoir
garder leurs parents? Est-ce qu'on a pensé aussi au manque de ressources
pour ces personnes âgées qui sont peut-être autonomes
physiquement, mais financièrement incapables de faire quoi que ce
soit?
Vous savez, on a trop souvent tendance à penser que la place
qu'on dort réserver aux personnes âgées, c'est un petit
coin pour jouer aux cartes, de façon à ce qu'ils ne
dérangent pas beaucoup de monde. Je pense que si on avait le coeur
d'admettre que les gens âgés sont, bien plus souvent qu'autrement,
des personnes qui font du bénévolat dans les hôpitaux, qui
vont passer la popote roulante à des gens qui sont moins autonomes
qu'elles, qui gardent les petits à la maison, si on reconnaissait dans
tous les sens ce que ces personnes âgées ont apporté
à la famille, peut-être qu'en pensant à la politique
familiale, on pourrait songer davantage à instaurer des mesures qui
aideraient les jeunes familles à garder leurs parents à la maison
le plus longtemps possible.
J'espère bien qu'après ce premier pas de mise sur pied de
cette politique familiale, le ministre aura tendance à penser que ce ne
sont pas seulement les tout petits qui représentent une famille, mais
aussi les gens qui ont été là avant nous et qui
méritent qu'on les intègre, avec les possibilités de le
faire, c'est-à-dire en leur accordant un logement décent, des
mesures fiscales, la possibilité de se sentir importants et de sentir
qu'eux aussi ils ont droit, dans cette famille, d'avoir leur place qui,
à mon point de vue, est juste et équitable compte tenu de ce
qu'ils nous apportent comme expérience et comme valeur de vie.
Une voix: Bravo!
Le Président (M. Bélanger): M. le ministre. M.
Robert Dutil
M. Dutil: M. le Président, plusieurs mesures importantes
ont été apportées concernant les personnes
âgées. Je ne veux pas en faire une enumeration exhaustive.
Rappelons-nous tout simplement qu'au budget, on a parlé d'un montant de
86 000 000 $. Rappelons-nous qu'au chapitre des centres d'accueil, on a
parlé d'un redressement de 70 000 000 $ sur une base de trois ans.
Plusieurs autres mesures sont apportées. Nous ne les négligeons
pas. Évidemment, la difficulté d'une interpellation comme
celle-ci est que, de cinq minutes en cinq minutes, on ne peut pas faire le tour
de l'ensemble des mesures qui sont apportées.
C'est pourquoi je pense qu'il est important de partir des principes de
la politique familiale, de partir de ses objectifs. Et cela me ramène
à mentionner ici, à la population, aux gens qui nous
écoutent, les objectifs fonctionnels que le gouvernement a
adoptés lors de l'énoncé des orientations, et qui vont
nous permettre justement de mettre en place l'ensemble de la politique
familiale.
Entre autres, faire en sorte que chaque ministère ou organisme
gouvernemental concerné assume la dimension familiale et
l'intègre dans ses politiques et programmes. En second lieu, assurer la
concertation gouvernementale nécessaire. C'est un point important,
assurer la concertation gouvenementale, en particulier sur le plan de la
cohérence et de la concordance des politiques qui doivent
répondre à l'objectif général de la politique
familiale. En troisième lieu, assurer la même concertation
gouvernementale pour faciliter aux différents ministères et
organismes gouvernementaux l'harmonisation requise avec les autres paliers de
gouvernement et milieux responsables du soutien apporté aux parents et
aux autres membres de la famille. M. le Président, je parle de ce
troisième point et je donne des exemples. Les municipalités sont
également concernées par la politique familiale. Il est important
qu'elles soient sensibilisées au rôle qu'elles peuvent jouer dans
la politique familiale, de même que les commissions scolaires, de
même que le monde du travail, que ce soit le milieu syndical ou le milieu
patronal. Et le quatrième objectif fonctionnel que nous identifiions au
moment de l'annonce de notre politique familiale, en décembre dernier,
était de favoriser l'expression des familles à l'égard du
développement de la politique familiale.
Cela m'amène à vous parler du Conseil de la famille que
nous avons décidé de créer. On sait que, dans le
passé, il existait un conseil qui avait les deux vocations,
c'est-à-dire un conseil qui portait le titre de Conseil des affaires
sociales et de la famille et qui avait donc comme vocation de se
préoccuper des affaires sociales tout autant, sinon plus, que de la
famille. On se rappellera les déclarations de la présidente de
cet organisme-là qui disait: De 1981 à 1985 - je pense que
c'était en réponse à une question du député
de Laviolette d'ailleurs, si je me rappelle bien - nous n'avons rien fait parce
que cela n'intéressait pas les ministres qui étaient, à ce
moment-là, titulaires du ministère de la Santé et des
Services sociaux. On se rappelle que les titulaires du ministère de la
Santé et des Services sociaux, à cette époque-là,
ont été l'ancien chef de l'Opposition, M. Johnson et M. le chef
parlementaire de l'Opposition, M. le député de Joliette. Ces deux
personnages semblaient ne pas s'intéresser à la politique
familiale, ce qui a fait que le Conseil des affaires sociales et de la famille,
qui avait quand même le mandat de s'occuper expressément de la
famille, ne s'en occupait pas.
Nous avons décidé d'abord de mettre en évidence le
dossier famille et, ensuite, de nous assurer qu'un conseil ait exclusivement le
mandat de se préoccuper de politique familiale et de
développement de la famille, non seulement auprès du
gouvernement, mais également en regard des autres intervenants que nous
avons dans la société et qui, eux aussi, peuvent avoir une
influence, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, sur la
politique familiale, sur un redressement des valeurs familiales et sur un
redressement des situations familiales.
Nous avons effectivement eu un débat qui a duré quelques
mois sur ta création de ce Conseil de la famille, et où
l'Opposition s'est dite insatisfaite des pouvoirs et fonctions de ce conseil.
M. le Président, je tiens à répéter, je l'ai
déjà dit, que le Conseil de la famille a davantage de souplesse,
de pouvoirs et de possibilités qu'en avait le Conseil des affaires
sociales et de la famille, à plusieurs chapitres. J'en mentionne un: la
recherche et les études. Au Conseil des affaires sociales et de la
famille, il fallait obtenir l'autorisation du ministre pour pouvoir les faire.
Au Conseil de la famille, ce n'est qu'après consultation avec le
ministre délégué à la Famille que l'on peut faire
les études et la recherche. Consultation et approbation, c'est bien
différent. C'est un progrès. Merci.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M. le
ministre. Je reconnais le député de Sainte-Marie.
M. Michel Laporte
M. Laporte: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de
prendre la parole ce matin à cette interpellation qui concerne la
politique familiale, étant donné que je représente un
comté, comme on dit habituellement, socialement
défavorisé. Les mesures annoncées dans le dernier budget
me servent ou, à tout le moins, m'incitent à intervenir ce matin.
J'ai essayé de trouver une forme d'introduction pour expliquer pourquoi
parler de politique familiale. J'ai retenu une phrase de l'actuel ministre
délégué à la Famille, en date du 28 avril 1988. Il
disait: "La dénatalité, à mon avis, est beaucoup plus un
symptôme, une sonnette d'alarme pour notre société
québécoise particulièrement dans un contexte
nord-américain de culture française ici au Québec
entourée par une société nord-américaine
anglophone. " À cela, on pourrait ajouter assurément que la
dénatalité est un élément déclencheur des
années 1972 et 1973 sur le nombre d'enfants qu'avait chaque famille.
Donc, ce n'est pas un phénomène nouveau ou récent dans
notre société, surtout et plus particulièrement par
rapport à la volonté que notre gouvernement a eue de mettre en
place un ministre délégué à la Famille et, plus
particulièrement, un budget qui se voulait le premier jalon d'une
politique d'intervention qui était pour penser à l'individu et
à l'individu qui constituait cette famille.
Qu'est-ce qui peut guider dans le choix de fonder une famille ou de
continuer à soutenir la famille? Il y a assurément des choix
personnels, il y a aussi plusieurs interventions qui peuvent nous aider
à décider ou, à tout le moins, nous guider dans le choix
de fonder une famille, dont l'organisation du travail. Il y a aussi - c'est ce
à quoi on s'est attardé plus particulièrement dans le
récent budget - des raisons fiscales et financières.
Assurément, on pourrait parler aussi de l'habitation. On pourra y
revenir plus spécifiquement.
J'aimerais simplement souligner un phénomène qui n'est pas
récent, mais qui m'apparaît de plus en plus insistant sur le
comportement, si je peux m'exprimer ainsi, d'une société
où des individus ne peuvent pas nécessairement être
régis par une loi ou tout le temps faire la surveillance d'une loi. Il y
a des personnes du comté de Sainte-Marie qui sont venues au bureau de
comté et qui m'ont signalé leurs vains efforts pour obtenir un
logement pour une famille. Je pense en particulier à une famille de
quatre enfants. Une personne s'est vu refuser de façon
systématique le droit, pourrais-je dire, d'accessibilité à
un logement parce que le propriétaire considérait, après
que l'annonce lui eut été faite que cette personne avait quatre
enfants, que cela constituait pour lui une sorte d'obstacle ou un
empêchement à effectuer la location. C'est certain qu'il existe
des dispositions législatives, tant à la Régie du logement
qu'à la Commission des droits de la personne, pour prendre des recours,
mais c'est simplement pour illustrer jusqu'où on peut en arriver dans la
préoccupation d'une politique familiale et la mettre de l'avant, en
faire une forme d'insistance pour dire que c'est quand même important et
qu'on doit préconiser ce type de valeur.
On pourrait certes énumérer d'autres
phénomènes du même genre, comme la famille monoparentale
qui compte deux ou trois enfants et à qui on demande des preuves, je
peux presque dire... sur son rôle social dans la société,
ses sources de revenus. A-t-elle un homme pour l'appuyer? C'est simplement pour
souligner que notre société a évolué, peu importent
le jugement de valeur et les valeurs que nous possédons personnellement.
La société a évolué depuis plusieurs années
et on retrouve aujourd'hui une composition des ménages qui n'est pas
celle d'autrefois. On retrouve aussi 70 % des femmes, des jeunes femmes plus
particulièrement, sur le marché du travail.
On m'indique qu'il ne me reste qu'une minute. J'aimerais revenir plus
spécifiquement sur une mesure qui, plus particulièrement dans le
comté de Sainte-Marie, nous affecte, et ce, d'une façon qu'on ne
peut pas qualifier de négative. On sait tous qu'une famille de deux
enfants, qui payait auparavant de l'impôt à partir de 13 400 $,
paiera, avec le nouveau budget, de l'impôt à partir de 21 000 $.
Cela représente des économies dans la poche des gens qui varient
entre 107 $ et 250 $. Quand on sait qu'on fait souvent des batailles pour 5 $
par mois parce que cela se répercute à la fin de l'année
sur l'achat en tant que tel de souliers ou de vêtements, je pense que
cette disposition est une mesure qui va aider plus particulièrement des
quartiers comme le mien. (12 h 30)
Si vous me le permettez, M. le Président, en conclusion. On a
aussi revendiqué depuis
plusieurs années, ne serait-ce qu'en frais scolaires, une
augmentation, ce que le ministre a annoncé dernièrement. Tout
ceci pour indiquer que c'est le premier jalon et qu'on doit poursuivre, tant
dans l'organisation du travail que dans le reste, nos efforts soutenus à
l'intérieur de cela. Merci.
Le Président (M. Bélanger): Merci. Je reconnais
maintenant Mme la députée de Maison-neuve.
Mme Louise Harel
Mme Harel: Merci, M. le Président. En tant que
députée de Maisonneuve, voisine du comté de Sainte-Marie,
je dois vous dire qu'à la suite des propos tenus par le
député de Sainte-Marie, je me disais que ce qui n'aidera pas la
population du quartier qu'il représente à cette Assemblée,
ce sont certainement les intentions contenues dans le projet de réforme,
de fausse réforme de l'aide sociale de son collègue, le ministre
Paradis.
M. le Président, il y a peu de temps, suffisamment peu de temps
en tout cas pour que j'utilise le peu de temps qui m'est imparti pour examiner
les correctifs qu'il faut apporter si, comme le prétend le ministre, il
a vraiment à coeur la situation des familles au Québec. Je dois
vous dire que je lui laisse tout le temps à sa disposition pour faire
valoir les bons coups du gouvernement.
Quant à moi, je voudrais également rappeler, au ministre
et aux députés qui l'accompagnent, que c'est important de
rétablir la situation. C'était assez navrant d'entendre le
ministre délégué à la Famille faire comme si tout
avait commencé avec son gouvernement. Il a même dit, je l'ai pris
en note: Nous avons décidé de mettre en évidence la
question familiale.
Il faut peut-être rappeler au ministre que, quand ils sont
arrivés le travail de sensibilisation était déjà en
grande partie réalisé. Je veux lui rappeler simplement qu'en 1983
le ministre de la Santé et des Services sociaux a publié un
premier rapport très volumineux et très exhaustif sur la
situation de la démographie au Québec; que moi-même, comme
députée, j'ai participé à une commission
parlementaire qui s'est donné un mandat d'initiative d'examiner toute la
question de la démographie au Québec; et que, concernant ce
mandat d'initiative, il faudrait parfois souhaiter que l'actuelle deputation
libérale ait le courage de s'impliquer dans des débats parfois
controversés parce que cela met en cause des enjeux de notre
société. C'est ce qui s'est passé avec le mandat
d'initiative que s'est donné la commission de la culture, avec l'appui
du gouvernement précédent.
Je constate que pour tout de suite, depuis deux ans, la commission de la
culture ne s'est donné aucun autre mandat d'initiative. Le ministre
délégué à la Famille, la consultation dans tout le
Québec, consultation fondamentale qui nous a permis de cerner, comme le
disait le député de Sainte-Marie, que la famille a
éclaté et qu'il ne faut plus parler de la famille, mais des
familles.
Dans ce sens, là où le député de
Sainte-Marie a tort, c'est que si la société a
évolué et qu'on doit parler de famille, ce qui n'a pas
évolué c'est la conception de la famille qu'on retrouve dans le
budget du ministre Gérard D. Levesque.
Rapidement, pour le bénéfice de mon collègue et
ami, le député de Fabre, je lui rappelle que beaucoup de groupes
très crédibles dans notre société, je pense
particulièrement à la Fédération des associations
de familles monoparentales, à la Fédération des femmes du
Québec, au Regroupement des centres de femmes du Québec, au
Regroupement des centres de santé des femmes du Québec, au
Conseil d'intervention pour l'accès des femmes au travail, ont
réagi au budget du ministre Levesque en disant, et je les cite: On
constate que ces mesures ne répondent pas aux besoins actuellement les
plus criants pour permettre aux parents de faire face convenablement, et sur
une base permanente, à leurs responsabilités parentales.
Ce n'est pas que moi qui le dit parce que je suis de l'Opposition. Ce
sont des porte-parole de groupes de femmes au Québec autorisés
à le dire. Pourquoi, M. le Président? Entre autres parce que, et
je rappelle que ce n'est qu'en partie que le gouvernement a répondu aux
attentes des groupes de femmes qui avaient fait de la réforme fiscale la
question prioritaire en cette année.
On constate que le gouvernement a choisi de ne pas verser en propre
à la femme mariée l'exemption de personne mariée pourtant
transformée en un crédit d'impôt, et que ce crédit
d'impôt continuera d'être versé au mari malgré les
propositions libérales, les engagements contraires durant la
dernière élection et malgré la forte attente des groupes
de femmes en faveur de ce qui pourrait être un début d'autonomie
économique pour les travailleuses au foyer. Également, nous
sommes consternés de constater que, malgré le discours
d'équité fiscale, le ministre qui l'utilise maintenant sait
très bien que ce discours a été écarté en ce
qui concerne les déductions pour frais de garde, et que la
déduction pour frais de garde est encore considérée comme
une dépense effectuée en vue de gagner un revenu, et non comme
une compensation...
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Maisonneuve.
Mme Harel: ...des charges parentales. M. le Président, en
conclusion, c'est que dans son mandat, le ministre a la responsabilité
non seulement de son propre secrétariat ou du conseil, mais des autres
ministères. Je rappelle ce
que disait la Commission des services juridiques hier, en matière
d'aide sociale et en matière de pensions alimentaires: L'actuelle
administration proposée par le ministre Paradis, et c'est la mise en
tutelle des femmes assistées sociales, chefs de famille monoparentale.
Il en va de même pour la fiscalité, M. le Président,
puisque dorénavant, les femmes qui travaillent, qui ont un revenu et qui
cohabitent...
Le Président (M. Bélanger): Je m'excuse, Mme la
députée de Maisonneuve, vous avez dépassé votre
temps. Je m'excuse.
Mme Harel: ...perdront leur statut de femmes chefs de famille. En
conclusion, les discours ne conviennent pas au moment où les femmes
attendent avec vigilance des moyens pour réaliser leur
égalité dans ces familles dont elles ont maintenant souvent la
charge.
Le Président (M. Bélanger): M. le ministre. M.
Robert Dutil
M. Dutil: M. le Président, vous savez que je
déteste interrompre les autres quand ils parlent, sauf qu'on a une
entente qui est bien convenue. J'espère que cela ne coupera pas mon
temps; cela nous permettra peut-être de l'allonger un peu, de la
même façon que l'Opposition. Je comprends que Mme la
députée de Maisonneuve voulait terminer, mais malheureusement
notre organisation fait que nous avons cinq minutes chacun et je pense que, de
ce côté-ci, nous avons respecté cela jusqu'à
maintenant.
Nous sommes entre nous ici, cet après-midi; les interpellations
ne sont peut-être pas suivies avec autant de cote d'écoute que les
autres débats. Vous savez, on nous parle beaucoup des consultations qui
ont été faites sous l'ancien gouvernement. Je reconnais qu'il
doit y avoir des consultations et que c'est important d'en faire. Mais les
consultations doivent finir par aboutir à des gestes concrets. Elles
doivent finir par donner des résultats concrets. Elles doivent finir par
nous permettre de passer aux actions et que les citoyens du Québec
doivent s'apercevoir que les discours et les consultations se sont
transformés, au fil du temps et au fil des ans, en gestes concrets. Ce
que la population du Québec constatera à la fin de notre mandat,
c'est qu'entre autres - je parle de la politique familiale, c'est le sujet de
notre débat - les progrès qui ont été faits dans la
politique familiale auront été considérables, non pas en
termes de consultation, non pas en termes de livres blancs, oranges, verts,
bleus, rouges ou quelque autre couleur que ce soit. Ce que les citoyens du
Québec constateront, c'est qu'il y a eu des gestes concrets pour que la
vie de tous les jours des citoyens du Québec soit facilitée de
telle sorte qu'ils puissent envisager avec beaucoup plus d'optimisme leur
volonté qui est connue de créer, d'élever et de vivre en
famille.
Cela ne veut pas dire que le gouvernement peut changer les valeurs, peut
changer les moeurs. Les citoyens ont un choix à faire au niveau de leurs
familles. C'est un choix qui leur appartient. C'est un choix qui est le leur.
Il faut l'admettre. Mais on sait qu'il y a des barrières qui existent
depuis fort longtemps et qui ont été augmentées à
diverses occasions par les gouvernements qui ont agi sur la
société. Les mesures que nous prenons ont des
conséquences. Elles en ont eu sur la famille, elles en ont eu de
néfastes. Ce que nous disons aujourd'hui, ce n'est pas que l'ancien
gouvernement n'a pas fait de consultation, n'a pas fait de livre, n'a pas fait
de choses importantes, admettons-le. Ce sont des choses qu'il faut faire. Le
débat public sur ce sujet est important, nous le concédons. Mais,
il ne doit pas durer éternellement.
Il doit se concrétiser et le gouvernement actuel peut le
concrétiser par son réalisme à divers niveaux, entre
autres sur le dégagement d'une marge de manoeuvre parce que des beaux
débats et des consultations qui donnent de grands objectifs et de beaux
plans d'action, s'ils ne peuvent pas se concrétiser faute de stagnation
économique due à une politique gouvernementale qui serait de ce
côté néfaste au développement, qui ne tiendrait pas
compte de la réalité fiscale de l'ensemble du continent
nord-américain, etc. Tous les reproches qu'on peut faire et que je ne
veux pas répéter ici sur la façon d'agir de l'ancien
gouvernement dans le domaine économique, cela n'aboutirait pas, ces
beaux principes et ces belles consultations, à du concret pour les
citoyens du Québec. Le budget de 1988, c'est du concret pour les
citoyens du Québec et ils l'ont bien compris puisque, eux, approuvent ce
budget et qu'ils en sont très heureux. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Bélanger): Merci, M. le ministre.
Je cède maintenant la parole au député de Fabre.
M. Jean A. Joly
M. Joly: Merci, M. le Président. Je pense que plus cela
avance, plus on est surpris. J'aurais cru que l'Opposition aurait ajusté
son tir et qu'elle aurait au moins reconnu que, dans le budget supportant les
familles, il y a des choses positives. Tantôt, mon collègue de
Chambly a légèrement effleuré le rôle du
député. Qu'est-ce que le rôle d'un député? Un
rôle de député n'est pas nécessairement un
rôle automatique de critique. Si on veut tous ensemble faire avancer la
cause, si on veut tous ensemble faire en sorte que certaines injustices
puissent être éliminées et qu'on puisse bonifier les
projets de loi et les budgets qu'on met de l'avant, à mon sens, c'est
à l'aide de suggestions constructives. On parle de réforme
tape-à-l'oeil. C'est une réforme qui a ouvert les yeux des gens,
tout en promettant un
avenir encourageant. D'ailleurs, le ministre lui-même a
mentionné au journal La Presse... Pour le ministre, le dernier
budget provincial doit être perçu comme un premier pas vers une
politique familiale plus globale. C'est certain que, du premier coup, on ne
peut pas tout régler. C'est sûr qu'on ne peut pas tout
régler, mais le fait de savoir qu'on est dans la bonne direction...
D'ailleurs, j'étais content de voir qu'il y a une intervention du
côté de l'Opposition qui a semblé encourager les mesures
qu'on mettait de l'avant. C'est la députée de Johnson - et je la
cite - qui disait parce que, dans le fond, elle concède que c'est un
premier pas important... Je pense qu'on doit la féliciter de son
objectivité de reconnaître que ce qu'on a mis de l'avant, tant
pour les personnes âgées... Elle a quand même bien
défini le portrait de la personne âgée qui faisait partie
de la famille, qui fait encore partie de la famille et qui se doit d'être
intégrée encore à toutes les décisions. Alors, je
tiens à la féliciter publiquement parce que je pense que c'est le
rôle du député ou de la députée, et elle s'en
acquitte bien pendant que d'autres... Quelquefois, j'aurais tendance à
vouloir, moi aussi, être un peu méchant, mais je ne le serai pas.
Je suis content de savoir qu'elle a admis que c'était un début et
de réaliser que les 86 000 000 $ qu'on a investis - je dis bien
"investis", je n'ai pas dit "dépensés" - pour le mieux-être
des personnes âgées, c'est reconnu par au moins quelqu'un qui a
l'esprit et l'oeil ouverts du côté de l'Opposition.
Par contre, la députée de Maisonneuve a fait mention que
l'ensemble des groupes n'a pas accepté d'emblée toutes les
mesures qu'on a mises de l'avant. C'est bien certain, il n'y a rien de
surprenant là-dedans. Si on en donne 100 000 000 $, 200 000 000 $, 300
000 000 $, on en voudra le double, c'est normal, mais est-ce qu'on va tuer dans
l'oeuf le contribuable? Est-ce qu'on va l'écraser?
On l'a clairement défini ce matin. Quand vous considérez
qu'il y a ce qu'on peut appeler des dépenses quasi fixes qu'on peut
difficilement ignorer, il y a aussi des revenus. Alors, il faut aller en accord
avec un budget et un budget, c'est équilibrer d'un côté et
de l'autre. C'est essayer d'être juste, d'être équitable. Je
pense qu'en tant que gouvernement, à ce jour, à moins que les
sondages ne soient fausses, les gens appuient le genre de politique qu'on met
de l'avant. SI actuellement, à I'interlour do tout co qu'on
réussit à donner, 772 000 000 $ à la famille directement,
mais en plus, on réussit à ne pas augmenter les impôts, ce
ne sont pas des tours de force, ce sont des tours d'administration parce qu'on
est des gens qui, venant de milieux différents, ayant des
expériences différentes, ayant un vécu différent,
tous ensemble, peuvent apporter à ce gouvernement, à cette
population une expérience qui fait en sorte que chacun, à sa
façon, peut bénéficier d'un budget tel qu'on l'a
présenté.
(12 h 45)
Alors, il n'y a rien qui me surprend, M. le Président, de savoir
que de l'autre côté, ils critiquent pour critiquer, sauf
exception, je l'ai dit tantôt, de la députée de Johnson
qui, j'espère, va réussir à rallier de ses
collègues aux bonnes choses qu'on met de l'avant et qu'elle continuera
à leur faire réaliser que, de temps en temps, il faut lire les
journaux et il faut respecter ceux qui, à mon avis, ont une
expérience et un jugement pour faire en sorte que, mettant de l'avant
les réformes telles qu'on les connaît, on puisse tous ensemble
dire: La population est encore mieux qu'elle ne l'était auparavant.
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): Merci, M. le
député de Fabre. Mme la députée de
Marie-Victorin.
Mme Cécile Vermette
Mme Vermette: Oui, M. le Président, c'est mon tour de
pouvoir retourner les paroles du député de Fabre. Si l'Opposition
n'est là que pour critiquer pour critiquer, on n'est pas au gouvernement
pour se trouver bons seulement pour le plaisir de se trouver bons. Cela va dans
les deux sens.
M. le Président, alors qu'on parle d'une politique familiale, il
aurait été intéressant de voir finalement l'implication
des femmes dans l'élaboration de politiques qui favorisent, d'une part,
la place que doivent occuper les femmes à l'intérieur de la
famille. Je trouve cela dommage, M. le Président, que la ministre
déléguée à la Condition féminine ne soit pas
présente à cette interpellation. Si elle n'était pas
capable d'être présente ici, ce matin, elle aurait pu envoyer une
déléguée, un représentant ou une
députée ministérielle qui aurait très bien pu faire
office et représenter les vraies revendications des femmes, parce que
cela est très important. Une politique familiale ne peut se concevoir
sans l'apport et l'implication des femmes. Quant à nous, je pense que
nous avons fait preuve d'une grande ouverture d'esprit et que nous laissons le
droit de parole aux femmes dans notre instance politique et aussi à
l'Assemblée nationale.
Je voudrais revenir à l'équité et finalement aux
largesses de ce bon gouvernement à l'endroit des politiques familiales,
notamment à l'endroit clos fommos monoparontalos qui touchent à
l'heure actuolloe... Quand on sait que 20 % de nos familles sont des familles
monoparentales, que cela touche environ 83 % des femmes et que,
généralement, ces femmes monoparentales ont un salaire de 17 000
$ quand elles sont chefs de famille, comparativement à une famille
biparen-tale dont la moyenne de revenus avec enfants est de 43 000 $, il y a
une grande marge. On n'a pas apporté de modifications finalement suivant
les attentes nécessaires pour favoriser l'indépendance
économique des femmes, et surtout leur
autonomie financière. Au contraire, on tend à les
maintenir dans des ghettos de dépendance et on tend à les
maintenir dans une cellule traditionnelle familiale qui ne convient plus et qui
ne répond plus finalement au développement de notre
société moderne à l'heure actuelle. Il faut tenir compte
de cette réalité et absolument rien, ni d'une part dans les
politiques familiales, ni dans le budget, n'en tient compte.
Je pourrai vous faire remarquer, concernant les femmes, qu'on ne tient
pas vraiment compte des problèmes des femmes et des demandes et
représentations qu'ont faites les femmes à ce gouvernement. Je
pourrais regarder dans le dernier budget en ce qui concerne les allocations de
disponibilité. Le gouvernement parle d'une amélioration des
allocations de disponibilité pour jeunes enfants, alors qu'il n'accorde
rien aux familles pour l'année 1988. Voyez le jeu de passe-passe que
fait le gouvernement, ce bon gouvernement. Il a transformé l'allocation
de disponibilité pour jeunes enfants en allocations mensuelles
versées aux parents à partir de janvier 1989 seulement. En 1988,
il n'y a absolument rien. Le gouvernement économise à peu
près 50 000 000 $ sur le dos des familles et essentiellement sur le dos
des mères de famille. Il faudrait le relever, c'est important. On n'a
pas encore la notion des femmes dans votre gouvernement qui profitent
majoritairement des allocations de disponibilité. À ces 50 000
000 $ s'ajoutent les 68 000 000 $ que le gouvernement a
économisés l'année dernière à cause des
changements de modulation. En fait, le ministre des Finances est maintenant
d'accord pour allouer 48 000 000 $ plutôt que 68 000 000 $, mais c'est
à vérifier.
Donc, au lieu d'avoir 300 $ au premier enfant, le tour de passe-passe
est qu'on dit: Comme il y a beaucoup de mères qui reçoivent 300 $
pour un premier enfant, c'est trop. On va changer, notre
générosité va s'appliquer pour le troisième enfant,
quand on sait qu'il y en a très peu au Québec. Finalement, on
donne uniquement 100 $ pour le premier enfant. Voyez-vous ce que cela donne
tout cela? On a fait une économie d'environ 48 000 000 $. Les coupures
sont odieuses. Par exemple, je vais vous dire maintenant ce qui se passe pour
une famille ayant un seul enfant né en 1985, et dont l'allocation de
disponibilité a chuté considérablement depuis 1986. Ce que
cela va donner concrètement: en 1986, 300 $ réclamés sur
son impôt; en 1987, 100 $; en 1988, 0; et en 1989, 100,08 $ payables en
crédits d'impôt mensuels de 8,34 $ à partir de 1989.
Le Président (M. Bélanger): Je vous...
Mme Vermette: C'est cela un bon gouvernement et les mesures qui
favorisent les familles...
Le Président (M. Bélanger): Votre temps est
écoulé, Mme la députée.
Mme Vermette: ...et d'autant plus les femmes. On ne tient pas
compte de la dimension monoparentale de la femme et des exigences des
femmes.
Le Président (M. Bélanger): Votre temps est
écoulé, Mme la députée, je m'excuse.
Mme Vermette: Le Régime des rentes du Québec, il
n'y a rien encore dans ce budget.
Le Président (M. Bélanger): M. le ministre. M.
Robert Dutil
M. Dutil: M. le Président, je vous remercie et je vous
garantis que je vais respecter le temps qui est mis à ma
disposition.
M. le Président, l'Opposition est insatiable. Ce que l'Opposition
dit dans le fond, c'est qu'elle trouve qu'on ne va pas assez vite. En
résumé, c'est cela. Elle ne dit pas que nous n'allons pas dans la
bonne direction, elle oublie évidemment les bonnes mesures qui sont
passées, les considérant comme des acquis, mais elle dit que nous
n'allons pas assez vite. On peut résumer de cette façon
l'interpellation de ce matin, puisque bien des projets sont en marche dans les
divers dossiers qui ont été soulevés par l'Opposition.
Dernièrement je rencontrais le député de Terrebonne qui me
disait comme ceci: Vous êtes chanceux, l'économie va bien. Il me
disait cela en aparté, reflétant par là même
justement la philosophie et l'opinion que l'Opposition a de ce qu'est une
économie. L'économie, cela va bien ou cela va mal et on n'a rien
à faire là-dedans. Si cela va bien, on est chanceux et si cela va
mal, on est malchanceux. C'est cela l'opinion que l'Opposition a de la
situation économique.
Rappelez-vous, dans le discours sur le budget, nous avons volontairement
identifié la croissance économique du Québec par rapport
aux divers autres partenaires ou voisins que nous avons dans le monde
occidental: les États-Unis, l'Ontario, le Japon, modèle de
croissance dans la société de libre marché, l'Europe, et
il se dégageait très bien que la croissance économique du
Québec était nettement supérieure à la croissance
économique de ces autres pays. Pourquoi? Parce qu'au lieu de ne s'en
tenir qu'à des consultations et des débats importants... J'ai
mentionné tout à l'heure et je répète que les
débats publics sur des questions aussi importantes que la politique
familiale sont nécessaires et on doit les faire. L'ancien gouvernement
nous dit les avoir faits, mais son ineptie sur le plan économique ne lui
a pas permis de passer à l'action, d'aller à la vitesse qu'il
nous reproche de ne pas atteindre. Non seulement il n'a pas été
à la vitesse qu'il nous reproche de ne pas avoir atteinte, mais il
était comme un vieux véhicule
arrêté sur le bord de la route avec quatre pneus
éclatés.
Une voix:...
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît.
On doit respecter le droit de parole du ministre.
M. Dutil: Je donnais une image caricaturale. Évidemment,
une caricature est une caricature et ne reflète jamais très bien
la réalité. Je ne veux pas blesser l'Opposition. Ce que je veux
dire, c'est qu'à l'intérieur de l'automobile, on a beau avoir
toutes les bonnes idées et le génie de l'organisation, si on a
oublié de changer nos pneus qui ont un peu trop de millage de fait, les
pneus reflétant l'économie... Si on dit: L'automobile avance,
quand elle n'avancera plus, elle arrêtera, c'est tout; et en ce qui
concerne l'écomomie: On sera malchanceux si elle arrête, et si
elle avance, on sera chanceux. C'est cela l'économie. Le
véhicule, c'est l'économie. À l'intérieur, on a de
hautes discussions, de la haute voltige intellectuelle, c'est vraiment
fantastique d'entendre tous les raisonnements, toutes les revendications,
toutes les choses qu'on peut faire. C'est très intéressant
d'être à l'intérieur de l'automobile et de discuter, mais
l'automobile de l'ancien gouvernement n'avançait pas et ne pouvait pas
avancer parce qu'on avait oublié de l'entretenir, on avait oublié
de changer l'huile, on avait oublié de changer les pneus et on a
même oublié, à un moment donné, de mettre de
l'essence dedans.
C'est évident qu'il y a eu des ratés et que les belles
idées qui étaient à l'intérieur, qui étaient
véhiculées et avaient fait l'objet de débats, de
consultations sur divers points importants, ne pouvaient pas être mises
en pratique par le gouvernement de l'époque. Nous avons pris ce
véhicule qui avait quatre pneus éclatés et nous avons mis
des pneus neufs. Nous avons pris ce véhicule en mauvais état et
nous avons mis de l'essence dedans. Nous avons pris ce véhicule en
mauvais état et nous avons changé l'huile. Nous avons
retapé le véhicule économique. Les idées qui
étaient véhiculées et que nous trouvions aussi
Intéressantes, nous nous sommes engagés dans notre programme
électoral, on le mentionnait tout à l'heure, à les mettre
de l'avant et pour les mettre de l'avant, cela nous prend un véhicule
économique en état de marche. Tout le monde au Québec
comprend cela sauf l'Opposition.
Les mesures sociales et le progrès social d'une
société sont fonction de la qualité de l'économie
de la société. Ce qui nous permet de donner de l'argent aux gens,
c'est que les gens peuvent nous en donner parce qu'ils font des revenus. Et je
souhaiterais, M. le Président, que l'Opposition comprenne ce
raisonnement tout simple.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remer- cie, M.
le ministre. Je cède maintenant la parole au député de
Chambly.
M. Gérard Latulippe
M. Latulippe: Les députées de Maisonneuve et de
Marie-Victorin disaient tout à l'heure que les mesures qui ont
été prises par le gouvernement actuel en rapport avec les
familles ne correspondaient pas à la réalité familiale des
années 1980 et des années 1990. Cette famille
éclatée où le taux de parents uniques est très
important - 20,8 % de l'ensemble des familles avec des enfants de 0 à 24
ans et le taux de divorce qui était de 60 % en 1987 - les
députées disaient que le gouvernement actuel en avait une
conception un peu rétrograde.
Je voudrais vous ramener sur certaines de ces mesures et certaines de
ces mesures qui ont été faites dans l'ancien budget pour voir
quel est l'effet par rapport à la réalité familiale et
vous ramener aussi à quelques dossiers sur lesquels le ministre
délégué à la Famille travaille actuellement pour
voir vraiment comment cela se situe en rapport avec la réalité
familiale.
Je voudrais vous rappeler le discours d'ouverture de la 33e
Législature prononcé par M. Robert Bourassa où il
annonçait déjà à ce moment-là des mesures
d'aide financière aux familles. On reviendra aux mesures qui ont
été faites dans le budget. Mais il disait aussi: II nous faut
aussi rendre plus compatibles les conditions de travail et les
responsabilités parentales, notamment par la révision de la Loi
sur les normes du travail, par l'aménagement du temps de travail et par
le développement des garderies en milieux de travail et scolaire. De
plus, il nous faut assurer à chaque famille l'accès à un
logement adéquat, que ce soit par la mise en place de programmes pour
améliorer la sécurité financière et la
stabilité du milieu familial ou par un programme d'accès à
la propriété.
En ce qui concerne les normes du travail, je vous réfère
à un article de La Presse qui date de mars 1988 où le
ministre, qui est à ma gauche, le ministre délégué
à la Famille, disait publiquement que c'était sur les normes de
travail que porterait le second volet de la politique familiale du gouvernement
du Québec. Déjà, il disait qu'il travaillait avec son
collègue, le ministre Paradis, en ce qui a trait au congé
parental non rémunéré avec garantie d'emploi. C'est bien
beau aujourd'hui avoir des enfants, mais si le lendemain matin le père
ne s'en occupe pas, ou si le lendemain matin on n'est pas certain, si on s'en
occupe, qu'on va retrouver son emploi, cela fait se poser bien des questions et
on se demande, finalement, si cela vaut réellement,
économiquement ou humainement, la peine d'en avoir. Travailler
déjà et concevoir qu'un deuxième volet de la politique
familiale aurait un rapport avec des changements importants en ce qui concerne
les normes du travail, ma collègue, la députée de
Maisonneuve,
conviendra avec moi que c'est aussi un pas dans la bonne direction, il
est évident qu'elle va nous dire: Mais vous n'allez pas assez vite; vous
devriez déjà avoir accouché de ce deuxième volet.
Effectivement, c'est un pas dans la bonne direction et je pense qu'on doit dire
que mon ex-collègue travaille dans la bonne direction.
En ce qui concerne le budget spécifiquement, voyons les
différentes mesures qui y ont été incluses. L'abolition de
la récupération des allocations familiales, cela a clairement un
effet face à tous les types de famille, peu importe le concept qu'on
peut avoir de la famille. Les diminutions d'impôt pour toutes les
familles et la transformation en crédits d'impôt, cela a un effet,
peu importe la nature de la famille. Cela a même un effet qui est maximal
dans les familles à bas revenu, eu égard à cette
transformation en crédits d'impôt. Je pense que ce sont là
des mesures positives. Je conviens que, dans d'autres secteurs, par exemple, au
plan de la réforme de l'aide sociale, des concepts comme celui du
partage du logement mériteraient d'être révisés et
je peux vous dire que je vais continuer à faire des pressions dans ce
sens-là... (13 heures)
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Chambly...
M. Latulippe: Je suis convaincu que vous convenez avec moi que
des pas positifs et importants sont faits et sont en train d'être faits
en regard des différents volets de la politique familiale au
Québec.
Le Président (M. Bélanger): Votre temps est
écoulé, M. le député de Chambly. M. le
député de
Laviolette, il reste quatre minutes à votre formation.
M. Jean-Pierre Jolivet
M. Jolivet: Merci, M. le Président. Je veux simplement
dire au ministre que premièrement, pour ce qui est des rapports on
pourrait s'en parler longtemps. Vous avez le rapport Rochon, M. le ministre,
dont votre ministre en tutelle est responsable. Elle fait encore de la
consultation là-dessus. Donc, avant de nous dire que vous passez des
rapports aux actes, il ne faudrait pas trop charrier.
Deuxièmement, vous avez le ministre de l'Environnement qui a
reçu un rapport sur le flottage du bois et qui a formé un
comité additionnel pour étudier le rapport rendu. Alors, faites
attention à ce que vous dites. Comme membre de l'Opposition, je suis
capable d'être positif quand c'est le temps, mais quand cela va mal, il
faut le dire. Notre rô\e, notre devoir, c'est cela.
Troisièmement, quand cela va bien et qu'on ne se prémunit
pas pour le temps où cela va aller mal, il va y avoir des
problèmes tout à l'heure. Alors, je vous souhaite bonne chance
parce que le cycle normal des moments faciles et des moments difficiles, vous
allez le vivre comme on l'a vécu. On se demande comment vous allez
être prêts à les vivre. La société va en voir
les conséquences.
J'aimerais parler de la politique d'habitation en vous rappelant des
décisions prises par le gouvernement actuel en matière
d'habitation depuis 1985 qui ont été défavorables aux
familles. D'abord, il y a l'abolition en mars 1986 du Programme d'accès
à la propriété résidentielle que le Parti
québécois avait mis sur pied en novembre 1981, qui avait
touché près de 60 000 familles au Québec et qui avait en
même temps engendré 135 000 000 $ d'investissements.
Vous avez une diminution du nombre de HLM publics mis en chantier depuis
1985, passant de 2378 unités en 1985 à 1564 en 1986 et à
seulement 1262 unités en 1987. Tous reconnaissent que les HLM sont une
formule adaptée pour répondre aux besoins des familles à
faible revenu. On devrait parler aussi de l'ensemble de l'adaptation des
domiciles pour des familles, donc des habitations familiales.
Un projet de règlement élaboré en 1987 par la
Société d'habitation du Québec visait à
réduire les listes d'attente pour les logements à loyer modique
en faisant une discrimination contre les familles monoparentales au profit des
familles biparentales et en attribuant à ce moment 25 % de logements
pour les familles biparentales alors que tous reconnaissent que les familles
les plus démunies sur le plan économique demeurent toujours et
encore les familles monoparentales.
Ces quelques gestes témoignent donc de l'absence de
préoccupations véritables du ministre responsable de l'Habitation
à l'égard de la problématique que suppose une politique
familiale, d'autant plus que l'habitation et l'alimentation constituent les
deux éléments les plus importants du budget familial.
J'aurais voulu vous parler du programme que vous avez annoncé.
Pour une fois, par rapport à l'abolition du programme
d'accessibilité à la propriété, vous en mettez un
qui, d'abord, indique qu'il faut avoir deux enfants et, avec des conditions
telles qu'ils ne répondront pas avec les 9 000 000 $ par année,
alors que c'était 27 000 000 $ par année que le programme du
Parti québécois qui avait été mis sur pied en 1981
indiquait.
Quand on vient nous dire qu'il y a une politique familiale et qu'on
oublie des volets aussi importants que celui-là, je continue toujours
à dire que vous n'avez pas de vision globale, que vous avez des actions
qui sont du tape-à-l'oeil et qui sont telles que finalement on
s'aperçoit qu'une politique familiale vous n'en avez pas.
Le Président (M. Bélanger): Merci, M. le
député. Je cède maintenant la parole au ministre pour les
conclusions. Vous avez dix minutes et M. le député de Laviolette
aura dix minutes de
réplique par la suite. M. le ministre. Conclusions M. Robert
Dutil
M. Dutil: M. le Président, je pense que nous avons eu un
bon débat ce matin qui a reflété les philosophies diverses
et les opinions diverses des deux côtés de cette Chambre. Dans le
véhicule dont je parlais tout à l'heure, où nous sommes
tous, la population du Québec, il y a des idées qui se brassent,
il y a des idées qui se discutent. Les consultations dont je parlais
tout à l'heure, je les estimais importantes et contrairement à ce
que disait le député de Joliette, je n'ai jamais dit que les
consultations n'étaient pas importantes. Je n'ai jamais dit que le
débat public n'était pas Important Co quo jo dis tout simplement,
c'est qu'il faut pouvoir, avoc notro véhicule, passer des Idées,
passer des discussions, des consultations, passer des débats publics et
des conclusions que nous tirons de tout ce brassage d'idées aux
actions.
Pour passer aux actions, cela nous prend un véhicule. Le
député de Laviolette confirmait, tout à l'heure, la
philosophie du Parti québécois en disant: II y a des cycles
inévitables. Cela ne peut pas toujours aller bien. Cela va finir par
aller mal. On va y goûter. Ce qu'on dit, ce n'est pas qu'il n'existe pas
de cycle économique. On sait qu'il existe des cycles économiques.
Mais on sait qu'on peut intervenir pour minimiser les dégâts en
cycles défavorables et que l'on peut intervenir pour maximiser les
avantages en cycles favorables. Il ne s'agit pas de dire que l'on peut se
soustraire à l'économie et à tout ce que cela concerne. Il
s'agit de dire que notre premier travail en arrivant au gouvernement a
été de retaper le véhicule de la société
québécoise. Le grand véhicule gouvernemental et
économique, le grand véhicule qui fait qu'on peut trouver un
produit intérieur brut intéressant qui nous permet de
dégager des marges de manoeuvre et nous permet de prendre les
idées qui sont à l'intérieur du véhicule et de les
mettre en pratique parce que le véhicule est en état de
fonctionner, en bon état de marche. Donc, de faire avancer, avec ce
véhicule sur l'autoroute du progrès social, la
société québécoise vers un mieux-être, vers
une amélioration, vers des politiques favorables à la
société et particulièrement, puisque c'est le dossier qui
me concerne, dans le dossier de la famille.
Je vous donne un exemple de l'attitude du Parti québécois.
J'écoutais l'autre jour le nouveau chef de l'Opposition, il y a quelque
temps déjà, il y a quelques mois sans doute, M. Parizeau, qui
était ministre des Finances et qui, dans la dernière étape
de son strip-tease... Il avait lui-même baptisé cela son
strip-tease - malheureusement, le dernier élément de son
striptease était la politique familiale, c'est un peu
inapproprié, vous comprendrez, en tout cas, je ne veux pas intervenir
là-dessus, c'était son choix. Mais il intervenait à la
radio sur la politique familiale et j'étais arrêté sur le
bord de l'autoroute, M. le Président, non pas parce que j'avais une
crevaison sur les quatre pneus, mais parce que les ondes de la radio sur
lesquelles il émettait ne pouvaient pas émettre jusqu'à
Québec et je voulais entendre ce qu'il avait à dire pour voir
s'il y avait du nouveau. Et rien de nouveau sous le ciel bleu. Rien de nouveau
parce que l'ex-ministre des Finances et actuellement chef de l'Opposition
disait: Ce qu'il faut faire comme soutien économique, c'est ceci, ceci,
cela et si cela ne s'est pas fait... Parce qu'il fallait bien qu'il se trouve
une raison pour ne pas l'avoir fait, il était ministre des Finances et
il l'a été pendant neuf ans.
Il aurait donc pu éliminer les complications de co fouillis qui
otait à ce moment là la fiscalité quobécolso ot quo
nous sommos on train de simplifier et il aurait pu ne pas être ce que M.
Dubuc a appelé l'un des pères de ce fouillis. Et il proposait des
solutions relativement simples en disant: Bien sûr que pour les
appliquer, il faudrait que nous soyons un état indépendant. La
faute était au gouvernement fédéral. L'avons-nous entendu
ce discours-là, M. le Président? C'était la faute du
gouvernement fédéral et, évidemment, la prémisse,
le départ d'une politique familiale pour le Parti
québécois, ce n'est pas d'avoir une économie saine, ce
n'est pas d'avoir des relations harmonieuses avec l'autre palier de
gouvernement, ce n'est pas d'être proche de la préoccupation de la
population; la prémisse de base, encore une fois - Mon Dieu que c'est
vieux jeu! Mon Dieu qu'on l'a entendu celle-là! - c'est de faire
l'indépendance du Québec. C'est la prémisse de base.
Le chef du Parti québécois parlait également de
diverses mesures qu'il avait essayé de mettre en place au plan de la
politique familiale et j'en prends une qui concerne les normes de travail et
c'est important. C'est important les normes de travail, on le sait, pour
pouvoir concilier les responsabilités familiales avec les contraintes du
monde du travail et il y a donc des mesures qui sont connues, ce sont des
choses connues et M. Parizeau connaissait ces choses-là également
quand il était ministre des Finances et quand il participait au
gouvernement. Entre autres, le fameux congé parental dont on parle, la
certaine assurance de retrouver son emploi si, pour une période de un ou
deux ans, tu le quittes pour des raisons de maternité ou de
paternité et que tu veux le retrouver par la suite là où
tu l'avais laissé. M. Parizeau disait: Nous avons accordé cela
dans le secteur public en estimant que le secteur privé allait suivre de
lui-même. C'était l'optique qu'il avait eue et ils se sont
aperçus que le secteur privé n'avait pas suivi.
Mais pourquoi n'ont-ils pas implanté cette mesure-là comme
d'autres mesures importantes quant à la politique familiale? Pourquoi ne
l'ont-
ils pas fait, M. le Président? La réponse est relativement
simple, c'est que les idées sont connues. Les débats, ils sont
faits. Les recommandations, on les a. On est d'ailleurs, en train d'analyser
les recommandations qui avaient été faites, à la suite du
comité d'étude sur la politique familiale; de les analyser une
à une en regard d'autres contraintes dont on n'a pas tenu compte et dont
n'avait pas à tenir compte le comité de consultation. Le
comité de consultation avait à tenir compte des besoins et de
l'idéal que l'on pouvait avoir comme recommandations pour une politique
familiale, mais n'a pas tenu compte des coûts, n'a pas tenu compte des
contraintes à l'égard des investissements, par exemple, si on
parle des normes de travail, c'est important de tenir compte de l'incidence des
mesures des normes de travail sur l'investissement, sur la création
d'emplois et sur ces autres aspects, et ce travail-là, nous le
faisons.
La raison fondamentale pour laquelle ces idées
intéressantes, ces idées connues, ces idées que l'on
voulait mettre en application ne l'ont pas été sous l'ancien
gouvernement, c'est que l'ancien gouvernement a dilapidé toute marge de
manoeuvre financière pour des raisons d'inattention, de croyance, des
raisons tout à fait imaginaires où l'on croyait que
l'économie c'était une chose sur laquelle on peut s'appuyer et
peser de tout son poids sans que l'économie risque de s'effondrer. Et
c'est ce qu'ils ont fait. Ils ont fait cela dans une période
économique qui était très forte, très vive et
l'économie, lorsqu'elle a diminué dans l'ensemble des nations
occidentales, comme on l'a connu, l'économie s'est effondrée chez
nous avec beaucoup plus de force, notre creux a été beaucoup plus
profond qu'il ne l'a été dans d'autres économies. Et les
mesures qu'avait envisagées le gouvernement étaient telles que
l'on s'est retrouvés sans marge de manoeuvre.
Ce que nous avons fait, dès que nous sommes arrivés au
gouvernement, c'est que nous avons pris des mesures, qui ont été
critiquées par l'Opposition, sous des aspects démagogiques
à mon point de vue, qui avaient pour but de rendre notre
fiscalité compétitive, de rendre leur confiance aux
entrepreneurs, d'éliminer le fameux débat constitutionel - vous
savez le travail immense qu'on a fait et qui a finalement abouti à
l'accord du lac Meech - qui ont envelé un nuage de plus, un nuage de
plus dans l'état de la situation de l'économie
québécoise et qui ont fait que l'on se rend compte que les gens
ont confiance au Québec. Les gens ont confiance en notre
économie, ils investissent, ils créent des emplois. C'est cela
qui va nous permettre et c'est cela qui nous a permis, jusqu'à
maintenant, d'investir 772 000 000 $, cette année, pour les familles.
Plus 500 000 000 $ de diminution d'impôt, tout en diminuant le
déficit de 750 000 000 $. Il n'y a pas de mystère
là-dedans. C'est le résultat des semences que nous avons
investies, il y deux ans et demi par des mesures qui avaient pour objectif de
dire aux citoyens du Québec: Vous pouvez avoir confiance, vous pouvez
investir, vous pouvez créer des emplois; on va vous appuyer. On va
enlever certaines réglementations. On va sortir de certains secteurs qui
ne concernent pas l'État, qui concernent et qui peuvent être
très bien administrés, et avec beaucoup plus de
compétence, par l'entreprise privée, pour nous préoccuper,
nous, des champs d'activité qui sont de notre responsabilité,
entres autres la politique familiale.
Ne croyez-vous pas qu'il aurait été
préférable, au lieu de nationaliser l'amiante, ce qui a
coûté 300 000 000 $, d'injecter des sommes dans une politique
familiale et, au lieu d'avoir un débat idéologique sur cette
façon de gérer l'économie, de se diriger, à partir
des impôts que l'on recevait de ces entreprises, qui étaient
à profit à ce moment-là et qui pouvaient donc participer
à la grande caisse de l'État, d'acheminer cet argent, d'acheminer
ces ressources vers des politiques sociales comme nous le faisons
actuellement.
Le Président (M. Bélanger): Alors, je vous
remercie, M. le ministre, et je cède la parole, pour une dernière
réplique, au député de Lavio-lette. M. le
député. (13 h 15)
M. Jean-Pierre Jolivet
M. Jolivet: Merci, M. le Président. D'abord, je
commencerai mes derniers mots de conclusion en me disant étonné,
surpris, de voir que lors de tout ce débat à l'Assemblée
nationale, du côté libéral, il n'y a eu aucune femme qui
est venue défendre l'ensemble des besoins de la famille par des femmes
qui le vivent journellement. Pour répondre au député de
Chambly, je lui dirai. À quand, justement, une politique sur les
changements du Code du travail permettant des possibilités de temps
partiel? Dans ce sens, peut-être qu'on croira d'avantage à
l'ensemble des propositions qui sont faites. Mais on peut s'apercevoir que le
gouvernement n'a pas de politique familiale globale. Il n'a pas de
volonté d'apporter un soutien économique, aux familles
québécoises ni de faciliter la levée des obstacles afin de
permettre aux personnes d'avoir le nombre d'enfants qu'elles désirent.
Le gouvernement par son choix de favoriser le troisième enfant nous
indique la position qu'il a prise par ces incitatifs économiques: la
motivation du gouvernement c'est de choisir l'option la moins chère,
selon les colonnes de chiffres. Par exemple, en 1986, 39 682 pour la naissance
d'un premier enfant, 30 999 d'un deuxième enfant, et 10 355 d'un
troisième enfant; donc, l'option la moins chère possible.
Le gouvernement, quant à nous, fait fausse route. La
réalité démontre que le statut économique n'a que
peu d'influence sur la décision de mettre des enfants au monde. Plus les
gens sont
scolarisés et plus les revenus sont élevés, moins
les gens ont d'enfants. Les réactions à la suite du budget
Lévesque démontrent que les attentes vont du côté
des garderies, de l'aménagement du temps de travail, du congé de
maternité, du congé parental, de l'horaire flexible, du travail
à temps partiel avec avantages sociaux et sécurité
d'emploi, de l'accès à des logements familiaux et à la
propriété. Cela, ce sont, justement, les attentes de l'ensemble
des familles au Québec. De plus, plusieurs ont dit au gouvernement qu'il
devait favoriser la venue du premier et du deuxième enfant. Le taux de
natalité du Québec, on le sait très bien, est de 1,4,
c'est donc le premier et le deuxième enfant que les couples retardent
d'abord de mettre au monde.
Il y a un article que j'ai lu dernièrement dans la Revue
française des affaires sociales, le numéro 4, qui
était d'octobre à décembre 1987 et qui était
intitulé: Les politiques familiales en France et au Québec.
Je dois vous dire que je partage ce que les auteurs ont
précisé au sujet des aides à la naissance du
troisième enfant dans la politique familiale française et cela
s'applique très bien à l'ensemble des données pour le
Québec. Qu'est-ce que l'on disait dans cette revue et que je partage?
C'est ceci: "Bien sûr on peut douter de l'efficacité d'un tel
choix: il n'est en effet pas certain que l'Incitation soit optimale du seul
fait de la progressivité de l'aide. Avant de prendre la décision
d'avoir un troisième enfant, la famille devra prendre la décision
du premier puis du second enfant, or, il faudra que ces décisions aient
été prises dans de bonnes conditions, c'est-à-dire
suffisamment tôt dans le temps et à un coût le plus faible
possible, pour que se pose à un moment opportun la question du
troisième enfant." Donc, quand le gouvernement décide d'appuyer
sur le troisième enfant, aussi bien dans sa politique d'incitatifs
économiques que dans d'autres politiques, telle que la politique
d'accessibilité à la propriété privée, nous
croyons qu'il fait fausse route et nous ne sommes pas les seuls à lui
avoir dit ces choses.
Pourquoi, à ce moment-là, ne pas avoir choisi de maintenir
le programme d'allocation de disponibilité et de créer le
programme d'allocation à la naissance qui, d'une certaine façon,
aurait dû être changé comme le proposait, d'ailleurs, le
chef du Parti québécois, c'est-à-dire d'augmenter les
allocations familiales et d'apporter à ce moment-là un vrai
soutien économique aux familles?
Le congé parental d'un an sans solde annoncé comme
étant la prochaine mesure pour les familles, cela nous indique, encore
une fois, que le gouvernement n'a pas de politique globale; il y va à la
pièce selon les vents et le ministre junior du gouvernement actuel se
fait damer le pion, dans bien des cas, par le senior qui est le premier
ministre. Donc, le congé parental d'un an, c'est une mesure très
faible. Pourquoi pas, à ce moment-là, un congé sans solde.
Le ministre n'a pas précisé quand il entendait, d'ailleurs,
rendre cette mesure obligatoire dans toutes les entreprises. Pourquoi
n'est-elle pas déjà en place si c'est vraiment une politique qui
doit l'être? Comment le ministre réussira-t-il à convaincre
le Conseil du patronat du bien-fondé de cette mesure? On sait que 90 %
des entreprises membres du Conseil du patronat du Québec ne croient pas
à la valeur de cette mesure comme étant un moyen
d'accroître le taux de natalité au Québec, tandis que 84 %
ne sont pas d'accord pour que le gouvernement oblige les entreprises à
accorder un congé parental d'un an. Est-ce que le ministre va prendre
ses responsabilités et, à ce moment-là, flétrir les
relations entre le gouvernement et le Conseil du patronat? Le ministre a-t-il
l'intention d'améliorer les congés de maternité de 15
semaines payées à 60 % par l'assurance chômage? On sait que
seulement 20 % des femmes bénéficient d'un congé de
maternité de 20 semaines payées de 90 % à 100 %. Nous
constatons donc que les actions du gouvernement vont, non pas dans le sens
d'une vraie politique de la famille, mais dans le sens d'une politique avec
objectif et échéancier selon les grés du vent. Le
gouvernement laisse espérer les gens et, par la suite, annonce avec
fracas quelques mesures, et tout ça, en donnant l'impression qu'il fait
beaucoup pour les familles.
Nous avons vu, justement, le lendemain du dépôt du budget
par quel tour de passe-passe le ministre des Finances prive les familles de 60
000 000 $ en ne versant pas l'allocation de disponibilité pour 1988
alors qu'en 1987, il l'avait arrêtée dans le sens de l'inversion
de la modulation de l'aide à l'allocation de disponibilité. En
faisant en sorte de mettre en place un nouveau programme, il
récupère 60 000 000 $. Et, quand le ministre nous dit: Avec
toutes les autres mesures... l'Opposition ne regarde pas ces autres mesures, je
dois lui dire et lui rappeler que des décisions pour s'harmoniser au
budget Wilson au fédéral, ont fait en sorte que dans une
décision, par une déclaration ministérielle, nous avons
augmenté au Québec, le gouvernement en place a augmenté au
Québec de 325 000 000 $ l'ensemble des impôts des
Québécois et cela a touché les familles. Les familles les
plus démunies, les familles sur lesquelles on a des renseignements nous
disant que, dans un temps où, semble-t-il, cela va très bien,
elles se sentent de plus en plus démunies, des gens qui sont
agressés de différentes façons par le gouvernement et qui,
dans un temps qui normalement est un temps de vaches grasses, devraient
être favorisés mais ne le sont pas. Et cela, c'est le ministre des
Finances qui la dit que l'économie allait bien.
Nous disons, comme membres de l'Opposition, que nous avons devant nous
un gouvernement tape-à l'oeil, un gouvernement qui fait des
déclarations avec fracas, des déclarations qui, finalement, ne
donnent pas la pleine réalité des choses et nous disons que nous
sommes, comme l'ensemble des Québécois, dans l'attente du
dépôt
d'une vraie politique de la famille au Québec.
Je dois vous dire que, lorsque je suis allé en Belgique avec le
comité de coopération, les représentants du Parti
libéral et du Parti québécois, on a fait mention de la
politique familiale au Québec. Par rapport à celle qu'il y a en
Belgique, j'étais un peu gêné de voir que, dans le fond, ce
qu'on est en train de présenter c'est une politique nataliste, ce n'est
pas une politique de la famille ou des familles, comme dit ma collègue
la députée responsable de l'aide sociale, comme porte-parole, la
députée de Maisonneuve. Je pense qu'effectivement nous nous
retrouvons avec un gouvernement qui n'a pas de vraie politique et que le
ministre devrait plutôt se soucier de demander au premier ministre de lui
donner un vrai mandat d'un vrai ministre, un vrai ministre de la famille non
pas comme il l'est actuellement, délégué, mais un ministre
qui est directement relié au Conseil exécutif.
Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M. le
député de Laviolette. Je remercie M. le ministre. La commission
ayant rempli son mandat suspend ses travaux jusqu'à ce qu'elle
entreprenne un autre mandat, soit à quinze heures cet après-midi.
Merci.
(Fin de la séance à 13 h 25)