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(Neuf heures trente-sept minutes)
Le Président (M. Bélanger): La commission des
Affaires sociales se réunit aux fins d'étudier les crédits
budgétaires du ministre délégué à la
Santé et aux Services sociaux, responsable de la politique familiale et
de l'Office des personnes handicapées du Québec, pour
l'année financière 1988-1989. Référence:
Gouvernement du Québec, budget 1988-1989 et crédits pour
l'année financière se terminant le 31 mars 1989.
Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements ce
matin?
La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Chevrette
(Joliette) sera remplacé par M. Jolivet (Laviolette).
Le Président (M. Bélanger): Bien, alors M. Jolivet
(Laviolette) remplace M. Chevrette (Joliette). Évidemment, M. le
ministre délégué à la Santé et aux Services
sociaux, M. Dutil (Beauce-Sud), est membre d'office de la commission,
c'est-à-dire qu'il est notre invité témoin à la
barre.
Sans plus tarder, est-ce que vous voulez passer aux notes explicatives?
M. le ministre, la parole est à vous.
Remarques préliminaires M. Robert Dutil
M. Dutil: Merci, M. le Président. Ce matin, nous
procédons à l'étude des crédits de...
Le Président (M. Bélanger): Est-ce qu'on pourrait
monter le son? On entend très mal.
Bien, merci. Vous pouvez y aller, M. le ministre.
M. Dutil: Ce matin, nous procédons à l'étude
des crédits concernant le Secrétariat à la famille et les
. autres domaines qui la touchent directement. J'imagine que ce sera l'occasion
de discuter également de l'ensemble de la politique familiale que le
gouvernement du Québec est actuellement à mettre en place.
Je voudrais tout simplement rappeler quelques gestes assez fondamentaux
que nous avons posés depuis les deux dernières années
où nous occupons le pouvoir, gestes fort importants quant
particulièrement, à la réduction du fardeau fiscal des
familles. Des gestes qui se mesurent en centaines de millions de dollars, avec
une situation budgétaire, comme vous le savez, M. le Président,
qui n'était pas facile lorsque nous avons pris le pouvoir.
Malgré tout cela, malgré le déficit important,
malgré notre volonté de réduire ce déficit,
malgré la gestion plus serrée des deniers publics que nous
voulions faire, le gouvernement du Québec, depuis deux ans, a
réduit considérablement le fardeau fiscal, plus
particulièrement celui des familles. C'est en centaines de millions, je
le répète, que ces choses se mesurent.
Pour ce qui est des autres gestes posés par le gouvernement
à l'heure actuelle, en plus de nommer un ministre spécifiquement
délégué à la famille, il a également
annoncé la création éventuelle d'un conseil de la famille.
Les discussions sont en cours concernant ce conseil. Nous avons
procédé à l'étude, article par article. Ce travail
est complété. Nous procéderons donc à la prise en
considération du rapport à l'Assemblée nationale et
à l'adoption de ce projet de loi sur le Conseil de la famille
incessamment, le plus rapidement possible, de façon à le mettre
en place et à avoir cet instrument, cette voix des familles
auprès du ministre de telle sorte que la mise en place de la politique
familiale éventuelle se fasse en consultation avec le milieu et les
principaux intervenants.
Nous avons également publié cet automne un
énoncé des orientations de notre politique familiale dans un
fascicule d'une douzaine ou d'une quinzaine de pages environ, qui disait,
globalement, dans quel secteur d'activité et avec quels partenaires le
gouvernement avait l'intention de travailler. On sait que la politique
familiale n'est pas que l'affaire du gouvernement. C'est également
l'affaire d'un ensemble d'intervenants qui sont bien identifiés, que ce
soit le monde du travail, tant du côté patronal que du
côté syndical, que ce soit le monde scolaire, que ce soit le monde
municipal et, bien sûr, chacun des individus puisqu'on sait qu'il y a eu,
depuis 25 ans, un changement dans les moeurs, un changement de mentalité
fort important et que tout cela a touché la famille d'une façon
substantielle.
Le discours d'ouverture, M. le Président, a également fait
état de notre volonté d'intervenir dans le domaine de la
politique familiale. Quatre grands thèmes ont été
touchés lors de ce discours. On aurait pu, évidemment, toucher
l'ensemble des thèmes. Je pense qu'on voulait mettre le focus sur les
éléments qui touchent l'ensemble de la population. Un des quatre
grands thèmes, nous le rappelons, est le soutien économique, qui
est considéré par le gouvernement comme fort important. À
preuve, je l'ai mentionné tout à l'heure, les gestes posés
depuis deux ans par notre gouvernement dans une situation budgétaire
difficile et qui ont tout de même permis de réduire le fardeau
fiscal des familles de plusieurs centaines de millions. Nous considérons
encore que ce soutien économique devra aller en croissant et que c'est
un des aspects les plus importants qui touchent l'ensemble de la population, M.
le Président, au chapitre de la politique familiale.
Le discours d'ouverture a également touché la garde
à l'enfance et la problématique fondamentale qu'elle
représente, aujourd'hui, dans une société où le
marché du travail, pour les femmes, est en hausse. On sait que
maintenant près de 70 % des jeunes femmes sont sur le marché du
travail. C'est un phénomène qui est là pour rester. C'est
un phénomène dont il faut tenir compte et c'est pourquoi le
discours d'ouverture a également mentionné l'importance que le
gouvernement entend accorder à ces services.
Un troisième point qui a été touché lors de
ce discours concerne les normes du travail. Il est bien évident qu'il
est difficile, aujourd'hui, de concilier le travail avec la
responsabilité parentale. Il y des choses qui ont été
faites ailleurs, dans d'autres pays, dont on peut s'inspirer. Il y a un travail
à faire de ce côté-ci. Cela a également
été dit dans le discours d'ouverture et c'est l'intention du
gouvernement de toucher à ce secteur.
Le quatrième point qui a été touché est
l'habitation. L'habitation familiale, on le sait, est un problème fort
important également et le gouvernement a mentionné par la voix de
son premier ministre dans ce même discours, son intention d'intervenir
également dans ce secteur-là.
M. le Président, je pense qu'on ne peut pas passer outre à
un problème majeur dans notre société actuellement, il est
important et c'est une excellente occasion de le faire, c'est celui de la
dénatalité au Québec. On sait que, traditionnellement, la
natalité au Québec a été, à une certaine
époque, la plus élevée des pays occidentaux. Nous
comptions environ quatre enfants par femme en moyenne. Aujourd'hui, ce taux est
autour de 1,4. Cette année, il serait même réduit autour de
1,38 enfant par femme. Alors, on voit la diminution importante que le taux de
natalité a subi dans notre province. C'est un phénomène
inédit puisque nous sommes passés du plus fort taux de
natalité au plus faible ou presque dans les pays occidentaux. Cette
année, selon mes informations, le seul autre pays qui aurait un taux de
natalité inférieur au Québec dans les pays occidentaux
serait l'Italie, à 1,27. Ce sont des chiffres qui peuvent paraître
mystérieux pour la population. Il est donc important de les expliquer
brièvement - bien que cela ait déjà été fait
- et de le répéter pour la bonne compréhension de
l'ensemble de la population. Il est fort important pour que notre
société se renouvelle, c'est-à-dire qu'elle n'ait ni
croissance ni diminution de population, que chaque adulte ait un enfant. Donc,
étant donné que la natalité relève des femmes,
chaque femme doit avoir en moyenne deux enfants. On ajoute à ces deux
enfants 0,1 ce qui tient compte des accidents, des mortalités et des
divers facteurs qui peuvent intervenir avant l'âge adulte, avant la fin
de l'âge de procréer. Cela nous démontre la marge
importante qu'il y a actuellement entre le 1,4 et le 2,1. Je pense que ce sont
des chiffres bien connus.
Ce qui est moins connu et ce qui est moins apprécié
à sa juste valeur, c'est le nombre de personnes qui n'ont pas d'enfants
dans une société et ce nombre est relativement constant Je dis
relativement constant parce qu'il peut varier tout de même d'un certain
pourcentage de l'ordre de 20 à 30 %. Nous dépassons actuellement
les 30 % de personnes qui n'ont pas d'enfants dans notre société.
Ce chiffre a déjà été plus bas. Il a
déjà été autour de 20 % mais il y a une constante
dans toute la société. H y a un certain nombre de personnes, pour
des raisons qui peuvent varier d'une époque à l'autre - dans le
passé cela pouvait être des raisons culturelles, le célibat
était jusqu'à un certain point valorisé - notamment dans
les communautés religieuses où les gens étaient
célibataires ou les personnes qui, pour plusieurs autres raisons,
n'avaient pas d'enfants. Le même phénomène se reproduit
aujourd'hui pour des raisons qui peuvent être différentes mais qui
sont quand même là et qui semblent être une constante
difficile à gérer. Ce que cela veut dire, en supposant par
exemple que 30 % des personnes dans une société n'aient pas
d'enfants, que pour atteindre le chiffre de 2,1 enfants par femme, il faut donc
que la moyenne des autres, c'est relativement facile à compter, soit de
3 pour atteindre le taux de renouvellement. Alors, 70 % fois 3 égale
2,1. C'est un chiffre qui s'avère pas mal exact. D'où toutes les
discussions et toutes les polémiques qui sont soulevées autour du
troisième enfant.
Cela m'amène à parier de l'avis qui a été,
dernièrement, présenté publiquement et qui m'a
été soumis par le Conseil des affaires sociales et de la famille
sur lequel, malheureusement, nous n'avons pas eu le temps de faire toutes les
discussions appropriées à l'Assemblée nationale. Une
question m'a été posée à ce sujet juste à la
fin de la période des questions mais nous n'avons eu que trois
brèves minutes pour nous expliquer là-dessus. C'est le bon moment
ce matin d'expliquer la divergence de point de vue que nous pouvons avoir sur
ce sujet par rapport aux calculs qui ont été faits. La raison en
est la suivante. Dans ce texte, on dit que la baisse de la natalité au
Québec est due pour 72 % aux premier et deuxième enfants. S'il
n'existait plus du tout de familles de trois enfants et plus et qu'il y avait
baisse de natalité au Québec, 100 % de la baisse de
natalité bien évidemment serait due aux premier et
deuxième enfants puisqu'il n'y aurait plus, dans cette hypothèse,
de familles avec un troisième enfant. Est-ce qu'on pourrait conclure de
cela que le problème ne réside que dans les familles qui ont un
ou deux enfants. Évidemment, je donne un cas limite, mais ce ne serait
pas le cas. Si on en était rendu à zéro dans les familles
de trois enfants et plus, il serait impossible d'avoir une baisse
supérieure à ce qu'elle est, nous serions à zéro.
Mais on se rendrait facilement compte que ce serait une
situation épouvantablement critique pour les raisons que j'ai
expliquées tout à l'heure.
La baisse de 1100 enfants cette année - on donne des chiffres
à peu près exacts, je les arrondis pour les fins de
simplification de calcul - se répartit de la façon suivante: 800
pour les enfants de premier et de deuxième rangs; 300 pour tes enfants
de troisième rang et plus. Cela peut nous permettre de conclure que la
baisse est due surtout au premier et au deuxième enfants. Il est
Important de regarder une autre façon de le calculer et de mettre le
nombre de baisses au premier et deuxième enfants sur le nombre de
naissances. C'est-à-dire, s'il y a une diminution de 800 enfants pour
les enfants de premier et de deuxième rangs, il faut considérer
sur combien de naissances ce chiffre s'appuie. C'est sur environ 70 000
naissances. Si on divise 800 par 70 000 on se rend compte que la baisse
à ce niveau est de 1,14 %, ce qui est énorme. Ce qui est
important et ce dont il faut tenir compte, nous en convenons. Mais si on fait
le même calcul en ce qui a trait aux enfants de troisième rang et
plus, sur 15 000 enfants c'est 300. Vous voyez qu'entre 15 000 et 70 000 il y a
une marge énorme.
Ces chiffres peuvent nous paraître aujourd'hui normaux mais si on
se rappelle le passé, le nombre de naissances d'enfants de
troisième rang et plus était beaucoup plus considérable
que le nombre de naissances d'enfants de premier rang et de deuxième
rang alors qu'actuellement il y a cinq fois plus d'enfants de premier rang et
de deuxième rang que d'enfants de troisième rang. Donc, cette
baisse de 300 sur 15 000 naissances d'enfants de troisième rang et plus
représente 2 %, c'est-à-dire presque deux fois plus que la baisse
de natalité des premier et deuxième enfants. C'est la raison pour
laquelle j'avais apporté certaines remarques concernant l'avis. Je
disais que c'est important qu'on nous soulève qu'il y a un
problème en ce qui a trait à la natalité des premier et
deuxième enfants. Qu'on nous soulève que la difficulté
d'avoir des enfants existe - à preuve, R y a des baisses par rapport aux
premier et deuxième enfants - je le conçois, mais qu'on
élude ou qu'on exclut le problème de la natalité des
enfants à partir du troisième rang, je pense que c'est une erreur
importante et qu'B faut tenir compte de ce facteur. C'est cette simple
rectification que j'aurais aimé pouvoir avoir l'occasion de faire
à l'Assemblée nationale à la période de questions.
La brièveté du temps que nous a laissé la fin d'une seule
période de questions où on m'a interrogé sur cela, ne m'a
pas permis d'apporter les précisions fort importantes que j'apporte
aujourd'hui.
Le dernier point de mes remarques préliminaires devrait concerner
l'équité envers les familles sur le plan du soutien
économique. Évidemment on peut parler de la problématique
des valeurs et on peut parler de diverses autres problématiques
concernant la famille. Si on parle de soutien économique, si on parle
d'équité ta question qu'il faut se poser c'est: Ne devrions-nous
pas tenir compte du nombre d'enfants dans une famille, de leur âge et du
revenu des personnes de cette famille pour être véritablement
équitable dans notre approche de soutien économique? Ma remarque
est fondée sur les points suivants: Quant au nombre, il est
indéniable que les familles qui ont le plus d'enfants sont celles
actuellement, sur le plan économique, qui ont le plus de
difficultés. Les raisons sont multiples mais une chose est certaine, H y
a des choix à faire dans les familles nombreuses. Ce choix est souvent
celui de dire: Est-ce que je reste sur le marché du travail et, à
ce moment, je dois absorber non seulement des coûts de consommation mais
des coûts de gardiennage d'enfants qui sont fort élevés ou
est-ce que l'un des deux membres de la famille se retire du marché du
travail pour s'occuper des enfants à la maison? Et à ce moment la
question qui se pose est la suivante: Quelle est, en chiffres, la diminution de
notre niveau de vie? Je parle de revenus diminués parce qu'on quitte le
marché du travail. Cette question est une question moderne, c'est une
question qu'il faut se poser et qui ne se posait pas il y a une vingtaine
d'années et qui est fort importante. C'est la raison pour -laquelle
nous, nous soulevons cette problématique du nombre d'enfants dans la
famille. Est-ce que par rapport à l'équité, on ne doit pas
tenir compte du nombre d'enfants dans la famille? Et à cette question,
nous pensons que nous devons répondre: Oui.
Pour la même raison nous devons répondre oui, à
notre point de vue en ce qui a trait à l'âge des enfants dans la
famille. La discussion que je viens d'avoir, les arguments que je viens de vous
apporter par rapport au nombre d'enfants sont les mêmes que ceux
concernant l'âge des enfants. Avant l'âge scolaire, les enfants
sont soit à la maison, soit en garderie. À la maison, donc, avec
la conséquence que j'ai mentionnée tout à l'heure,
c'est-à-dire que l'un des deux parents doit se retirer du marché
du travail, à la garderie avec la conséquence que j'ai
également mentionnée tout à l'heure, à savoir,
qu'il y a des frais de garderie qui doivent être absorbés par les
parents, des frais fort importants, et qui viennent réduire le niveau de
vie des parents qui ont un certain nombre d'enfants en bas âge.
Finalement, ce troisième point, je pense que c'est un point qui ne
devrait être contredit ni par l'Opposition ni par quiconque: celui des
revenus. Ne doit-on pas tenir compte des revenus, ne doit-on pas aider d'abord
et avant tout les gens qui prennent charge d'enfants, les parents qui ont les
plus faibles revenus? Voici, M. le Président, pour l'ensemble des
remarques préliminaires concernant la politique familiale que le
gouvernement est en train de mettre en place. Des gestes importants ont
été posés dans le passé, je les ai
mentionnés tout à l'heure, je n'ai pas l'intention de les
répéter. Des gestes importants doivent être
posés
dans l'avenir. Le gouvernement, par la voix, par la bouche du premier
ministre, s'est engagé à les poser au cours de la session qui
s'est ouverte en mars dernier. Il les posera. Les secteurs sont
identifiés, le travail se fait, la politique familiale est en marche,
enfin. Il y aura des gestes vraiment concrets et vraiment importants pour les
familles du Québec qui seront posés incessamment. Merci.
Le Président (M. Bélanger): Merci M. le
député de Laviolette.
M. Jean-Pierre Jolivet
' M. Jolivet: Merci, M. le Président. D'abord, je tiens
à saluer les gens qui accompagnent le ministre ce matin, aussi bien ceux
du secrétariat que de son cabinet. Mais avant de commencer, j'ai une
question pour le ministre. Je lui avais fait mention par
téléphone que j'aimerais, aujourd'hui... que j'aurais aimé
- j'ai toujours la même demande - entendre les gens du Conseil des
affaires sociales et de la famille. Je ne les vois pas. Alors, avant de
commencer, je veux seulement savoir s'ils seront ici ce matin et à
quelle heure.
M. Dutil: Oui, M. le Président, j'ai invité Mme
Blanchet lorsque je l'ai rencontrée mardi soir dernier. Elle m'a
confirmé qu'elle serait ici ce matin; elle ne devrait pas tarder. Je ne
sais pas pourquoi elle est en retard, mais elle ne devrait certainement pas
tarder.
M. Jolivet: D'accord. Dans notre plan de travail, cela ira un peu
plus tard. Je suis heureux d'être ici ce matin pour procéder
à l'étude des crédits budgétaires du ministre
délégué à la Famille et aux Services sociaux dans
ce qu'on appelle le volet famille.
Je crois que c'est un travail important pour les parlementaires de cette
commission aussi bien du côté ministériel que du
côté de l'Opposition officielle. C'est l'occasion que nous avons
de questionner et de discuter avec le ministre des grandes orientations qu'il a
l'intention de prendre au cours de l'année qui vient.
J'aimerais également rappeler que, lors de l'étude du
projet de loi 94 sur le Conseil de la famille, j'ai eu nombre de questions et
d'échanges avec le ministre sur le rôle que devrait assumer un tel
organisme consultatif. Vous en conviendrez, M. le Président et les
membres de la commission, je n'ai malheureusement pas été capable
de convaincre le ministre d'apporter des modifications majeures à son
projet de loi lesquelles, d'ailleurs, ont été
suggérées par de nombreux amendements que je considère,
encore aujourd'hui, avec la même conviction, comme très
pertinents. Je vais continuer à les défendre jusqu'à la
fin, étant donné que nous aurons l'occasion de rediscuter de ces
amendements possibles lors de la prise en considération du rapport et de
l'adoption du projet de loi.
Par la même occasion, il m'a également été
permis de constater - je l'ai d'ailleurs souligné au ministre - qu'il ne
semble pas être le véritable ministre délégué
à la Famille. C'est plutôt le premier ministre qui en est un peu
le responsable, surtout quand on parie de l'ensemble de l'immigration et de
toute la question de la population.
Le rôle du ministre, jusqu'à maintenant, a
été de livrer une marchandise qu'on lui a demandé de
livrer pour des besoins tactiques, comme cela l'a été pour le
projet de loi 94, sans beaucoup de conviction et sans, non plus, beaucoup
d'idées nouvelles quant à ce que devrait être une politique
familiale au Québec.
On a considéré les interventions du ministre comme celles
d'une personne qui décide de présenter un projet de loi, parce
qu'on a dit qu'il faudrait bien le présenter. On a à livrer une
marchandise et on doit, au moins, donner l'impression que cette marchandise,
est importante. On en a eu la preuve lorsqu'il s'est présenté en
conférence de presse; en fait, c'est lui qui l'a donnée comme
tel, en décembre dernier, en présentant un énoncé
de politique familiale dont nous considérons le contenu un peu vide et
un projet qui crée un conseil de la famille - on l'a maintes fois
répété qui arrive les pieds et les mains liés.
Je noterai également son silence et son inertie devant la
réforme fiscale du ministre fédéral Wilson, réforme
qui est dramatique pour la famille et, on va l'apprendre ici, au Québec.
D'ailleurs, cette réforme a été décriée par
tous les groupes de femmes, les organismes familiaux, les partis politiques
fédéraux. Le ministre qui nous promet des mesures pour les
familles dans le prochain budget, est resté muet. (10 heures)
Le ministre nous dit: Vous allez voir, il y aura des actions; on pense
à la famille. J'ai comme mandat horizontal d'inviter mes
collègues et les organismes à penser à la famille. Il nous
dit toujours: Vous verrez cela au prochain budget, vous regarderez cela et vous
allez voir qu'on aura des actions. Il nous disait tout à l'heure que
beaucoup d'actions ont été prises et que d'autres sont à
prendre. Mais je ne vois pas, pour le moment, que cela ait des effets
bénéfiques pour les familles québécoises. Je crois,
au contraire, qu'i y a lieu de s'inquiéter. Que doit-on penser de la
réforme du ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité
du revenu qui pénalise les familles monoparentales et les femmes
enceintes? Alors que le ministre délégué à la
Famille, à la Santé et aux Services sociaux exhortait ses
collègues, en décembre dernier, de penser et agir pour la
famille, voici que quatre mois plus tard, il déclare que la
réforme, que l'on appelle la réforme Paradis, est un volet de la
politique familiale. Je maintiens qu'il y a lieu de s'inquiéter.
Le ministre nous a dévoilé récemment la
principale mesure de sa politique familiale, il en fait longuement
mention ce matin, celle du troisième enfant. Cette mesure coûtera
le moins cher. Le ministre et le premier ministre en sont, j'en suis
assuré, fort conscients. On a vu l'an dernier - on se demande encore par
quel tour de passe-passe - le gouvernement a réussi à
économiser des dizaines des militions de dollars en inversant
l'allocation de disponibilité qui est passée à 100 $ pour
le premier enfant, qui est restée à 200 $ pour le deuxième
enfant et qui a augmenté de 100 $ à 500 $ pour le
troisième. Comme il y a peu de familles qui ont trois enfants, le
Conseil des affaires sociales et de la famille évalue que le
gouvernement économisera environ 65 000 000 $ on considère une
telle attitude de la part d'un gouvernement qui dit agir et penser famille on
le considère comme étant irresponsable et, pour nous, cela
dénote le peu de souci qu'il a de la condition des enfants
déjà nés. Des gens ont, finalement, fait un rapport, et
ont indiqué - et on aura l'occasion de questionner le ministre sur
l'ensemble - qu'on fait fi des enfants déjà nés.
De tels gestes de la part du gouvernement contribuent à
l'appauvrissement des familles québécoises et nous jugeons, par
le fait même, cette situation inacceptable. Nous allons tenter, dans les
minutes qui vont suivre, à partir des budgets, à partir du projet
de loi qui est toujours sur la table, de sensibiliser le ministre
délégué à la Famille, à la Santé et
aux Services sociaux à la pénible situation des familles
démunies qui attendent un soutien de l'État. Nous tenterons aussi
de convaincre le ministre qu'il a un rôle important à jouer
auprès de ses collègues - il n'est pas là pour rien - pour
faire en sorte que les actions sectorielles rapportent à ces familles et
ne les pénalisent pas tout en leur permettant à ce
moment-là d'être soutenues par l'État à
différents niveaux. Le ministre a parlé de garderies - ma
collègue, la députée de Marie-Victorin en a fait
longuement mention avec la ministre déléguée à la
Condition féminine, hier - il a aussi parlé de l'ensemble du
soutien que l'on pourrait obtenir par l'intermédiaire des changements au
régime du travail à partir desquels il devrait être
possible de regarder comment aider et soutenir des gens qui acceptent de fonder
des familles et de permettre une natalité plus forte au
Québec.
Je pense à la réforme de la sécurité du
revenu à laquelle je faisais allusion tout à l'heure, aux
difficultés des familles monoparentales et des femmes enceintes,
à fa politique des services de garde que nous espérons plus
audacieuse qu'elle ne l'est, à la nécessité d'apporter des
changements majeurs aux lois qui régissent le monde du travail.
Nous allons espérer, dans le temps qui nous est dévolu,
que le ministre saura reconsidérer nos interventions comme voulant
apporter des correctifs à sa façon de traiter le dossier de la
politique familiale et permettre aux familles québécoises
d'obtenir davantage de soutien de l'État dans tous les domaines qui
concernent la famille.
Nous allons, après les remarques préliminaires, M. le
Président, passer à l'étude des crédits qui sont
dévolus au ministre. En même temps, nous allons questionner le
conseil des Affaires sociales et de la famille pour essayer de faire avancer le
dossier de la politique familiale au Québec.
Direction et coordination régionale Direction
et gestion ministérielle
Le Président (M. Bélanger): Merci, M. le
député de Laviolette. Est-ce qu'il y a d'autres remarques
préliminaires?
Personne. J'appelle le programme 8, élément 1, "Direction
et gestion ministérielle". M. le député de Gouin.
M. Rochefort: J'avoue que... Sans avoir de remarques
préliminaires à faire, est-ce qu'il n'y a pas une période
qu'on souhaite consacrer à des discussions d'ordre un peu plus
général?
Le Président (M. Bélanger): À votre
convenance. Je suis ouvert à toute procédure. Le seul objectif
est l'adoption des crédits.
M. Rochefort: Je me dis que si on embarque immédiatement
dans les programmes, par exemple, le service du secrétariat, on risque
de faire une discussion de nature administrative. Je ne sais pas ce qu'en pense
le député de Laviolette. Je trouve qu'il y a un certain nombre de
questions d'ordre plus général que j'aurais souhaité
aborder avec le ministre.
Le Président (M. Bélanger): D'accord. M. le
député de Gouin, dans le fond, on se rejoint.
M. Rochefort: Tant mieux.
Le Président (M. Bélanger): Essentiellement, il y a
juste un élément dans le programme.
M. Rochefort: C'est le seul.
Le Président (M. Bélanger): Alors, on ne peut pas
tellement se perdre.
M. Jolivet: Je pense qu'on serait mieux de commencer. La
discussion sera générale, d'une façon ou d'une autre,
à partir du seul élément du budget.
M. Rochefort: S'il y a un seul élément...
Le Président (M. Bélanger): On s'entend pour une
certaine souplesse de fonctionnement?
M. Jolivet: Oui, oui.
Le Président (M. Bélanger): Est-ce qu'il y a des
premières questions?
M. Jolivet: Je pense qu'il y a d'abord une présentation du
ministre.
Le Président (M. Bélanger): M. le ministre.
M. Dutil: Je pense avoir fait ma présentation tout
à l'heure de façon globale. On devrait passer
immédiatement aux questions plus précises de façon
à embarquer dans le vif du sujet.
Le Président (M. Bélanger): Excellent.
M. Jolivet: Je commencerai d'abord par certains renseignements
concernant le budget duSecrétariat à la famille. Ma
question est la suivante: quels étaient les crédits de 1986-1987,
1987-1988 et pour 1988-1989, quels sont ceux prévus pour le
ministre?
M. Outil: Votre question porte sur le Secrétariat à
la famille?
M. Jolivet: Oui. Dans l'annexe A que vous nous avez fournie, on a
le budget de 1985-1986. Après cela, on dit que les budgets de 1986-1987
et 1987-1988 sont non inscrits parce que "le secrétariat a
été transféré au ministère de la
Santé et des Services sociaux le 17 mars 1986. Étant donné
que ses dépenses sont comptabilisées dans les comptes globaux du
ministère, nous avons inscrit le montant du budget. "
J'aimerais avoir une ventilation précise des budgets 1985-1986,
1986-1987, 1987-1988 et 1988-1989.
M. Dutil: Les dépenses 1987-1988... M. Jolivet:
1986-1987.
M. Dutil: C'est au plan budgétaire que vous voulez avoir
cela? Le budget total pour 1986-1987 a été de 538 000 $ pour des
dépenses, que vous avez, je pense, de 446 900 $.
M. Jolivet: D'accord. Le budget de 1987-1988?
M. Dutil: 567 400 $ et une dépense, que vous avez
également de 528 900 $.
M. Jolivet: Et le budget de 1988-1989 qui est
prévisible?
M. Dutil: De 721 500 $.
M. Jolivet: C'est le budget qui est là. Vous
prévoyez le dépenser complètement ou prévoyez-vous
avoir des crédits périmés?
M. Dutil: Nous prévoyons le dépenser
complètement. Évidemment, il peut toujours y avoir une petite
marge du même genre que celles de 1987-1988 et de 1986-1987, qui est
minime, si vous remarquez. Particulièrement en 1987-1988, elle est de
l'ordre de 40 000 $, donc de 6 % ou 7 %.
M. Jolivet: Dans le personnel du secrétariat, on compte
neuf professionnels et une conseillère juridique à temps partiel.
Avec la création prévisible du Conseil de la famille, est-ce que
le personnel va être maintenu dans son entier?
M. Dutil: Non seulement le personnel devrait être maintenu
dans son entier, mais nous avons plusieurs prêts de personnel, M. le
Président. Quand on regarde l'ensemble de l'organigramme et qu'on compte
le nombre de personnes, incluant les prêts de services, actuellement le
Secrétariat à la famille est formé de 18 personnes. Il y a
lieu de regarder la façon de transformer les prêts de services en
personnel permanent.
M. Jolivet: En fait, c'est dix, neuf plus une à temps
partiel. Dans le contexte où la partie "Conseil de la famille" est
créée, est-ce que vous prévoyez prendre une partie de ce
personnel et l'envoyer à ce conseil? L'autre question, c'est la
discussion actuellement en cours avec le ministère de la Main-d'Oeuvre
et de la Sécurité du revenu par le comité formé
pour étudier le transfert potentiel.
M. Dutil: M. le Président, nous estimons que le personnel
que nous avons actuellement au Secrétariat de la famille est minimal et
nous avons besoin de l'ensemble de ces ressources. Donc, sur le plan des
effectifs du Conseil éventuel de la famille, cela ne veut pas dire qu'on
ne pourrait pas aller chercher une personne bien identifiée, mais on
n'irait pas chercher un poste - si c'est la question du député -
au Secrétariat à la famille, puisque nous avons besoin de
l'ensemble de nos effectifs.
M. Jolivet: Quelles orientations ou quels mandats le ministre
a-t-il l'intention de donner au secrétariat pour l'année qui
vient, 1988-1989?
M. Dutil: J'ai étayé tout à l'heure, dans ma
présentation, les dossiers les plus majeurs, les plus importants sur
lesquels nous travaillons avec nos collègues, actuellement. Quant au
dossier du soutien économique, il tombe sous le sens que nous y avons
travaillé depuis plusieurs mois puisqu'on sait que le budget s'en vient
rapidement. Nous avons mis beaucoup d'énergie à étudier
divers scénarios dont le résultat ne sera connu que lors du
discours sur le budget, c'est évident.
Parmi les autres dossiers, j'ai mentionné tout à l'heure
ceux des normes du travail, des services de garde et de l'habitation. Ce sont
des
dossiers sur lesquels nous mettons également de l'énergie
afin d'obtenir des résultats le plus rapidement possible. Cela n'exclut
pas le travail entrepris dans divers autres dossiers qui sont peut-être
moins gros en crédits budgétaires ou par rapport aux populations
touchées. Par exemple, en ce qui a trait à la violence conjugale,
on se rappellera le travail qui a été fait pour en arriver
à changer les mentalités soit par des campagnes publicitaires,
soit par des soutiens qui vont en augmentant d'une façon Importante.
Cela été discuté sûrement lors de l'étude des
crédits de ma collègue, la ministre de la Santé et des
Services sociaux en ce qui concerne les maisons d'hébergement. Il y a
donc plusieurs autres dossiers qui sont, comme je l'ai dit, sans doute moins
gros en crédits budgétaires ou par rapport aux populations
touchées, mais qui sont très importants sur le plan social et
auxquels nous prêtons une attention qui ne se démentira pas.
M. Jolivet: Est-ce que le ministre peut me dire si le rôle
du secrétariat sera modifié avec l'arrivée du Conseil de
la famille? Est-ce qu'il n'y a pas un risque, à ce moment-là,
d'avoir des dédoublements de mandats, d'études ou de recherches
sur certains points? Est-ce que le ministre a l'intention de lui conserver le
même rôle ou s'il a l'intention de le modifier avec
l'arrivée du conseil?
M. Dutil: Le rôle du secrétariat n'a pas à
être modifié. Le rôle du secrétariat est beaucoup
plus exécutoire, bien que cela ne l'empêche d'avoir ses
idées, de penser et de suggérer des choses, alors que le
rôle du conseil est beaucoup plus un, comme son nom le dit, de conseil
auprès du ministre. Est-ce que, par exemple, il pourra arriver que des
études demandées par le conseil et le secrétariat soient
les mêmes? C'est possible et on gérera cela en temps et lieu en
fonction de celles qui seront présentées. Il faut bien distinguer
entre le rôle du secrétariat qui en est beaucoup plus un
d'exécution, de mise en place et de travail avec les ministères
pour réaliser ce qui est commandé par le gouvernement et par le
ministre, et le rôle du Conseil de la famille qui, bien sûr, en est
un de conseil auprès du ministre et qui n'a pas ce côté
exécutoire qu'a le secrétariat.
M. Jolivet: Dans ce contexte, est-ce que le ministre pourrait me
dire le rôle que joue actuellement M. Maurice Champagne-Gilbert? (10 h
15)
M. Dutil: M. Champagne-Gilbert est actuellement mon conseiller
spécial. M. Champagne-Gilbert a demandé, à la suite de
l'énorme travail qu'il a abattu depuis quelques années -
d'ailleurs, je pense qu'il s'agit de lui en être bien reconnaissant -
d'avoir une tâche différente de celle qu'il occupait et nous avons
agréé à sa demande. D'ailleurs, j'en profite pour lui
souhaiter un prompt rétablissement. M. Champagne-Gilbert a
été gravement malade dernièrement. Il se remet de cette
maladie. Son rôle, actuellement, est d'être mon conseiller
spécial. Nous lui avons également demandé, à la
suite d'une discussion que nous avons eue avec lui, de réaliser des
travaux, particulièrement au sujet de ce que nous pourrions appeler la
mentalité masculine dans notre société. Je m'explique. On
sait qu'un des facteurs importants de la famille, ce sont les moeurs, les
mentalités. Aujourd'hui, les femmes sont de plus en plus sur le
marché du travail. C'est une chose qui est correcte et qui est
acceptée par l'ensemble de la société, sauf que,
malheureusement, cela n'a pas toujours été compris par les
hommes. On se rend compte - des études le démontrent d'ailleurs
dans plusieurs pays du monde où les femmes sont sur le marché du
travail - dans le partage des tâches ménagères, dans les
soins et l'éducation aux enfants, que la mentalité masculine n'a
peut-être pas suivi et que les femmes se retrouvent souvent devant la
triste réalité d'avoir la double tâche, c'est-à-dire
le travail à l'extérieur et le travail à la maison. On le
sait.
Les travaux de M. Champagne-Gilbert sont -sûrement bien connus du
député de Laviolette. On sait l'importance que M.
Champagne-Gilbert accorde à ce problème et à ce facteur.
Nous lui avons demandé, justement, de travailler là-dessus, de
voir de quelle façon on pourrait en arriver, bien que ce soit toujours
difficile d'envisager des changements de mentalité et de moeurs,
à ce que cette situation s'améliore, à ce que la double
tâche ne repose pas uniquement sur les épaules des femmes mais
qu'elle repose de façon égale sur les épaules des hommes
et des femmes qui décident d'être parents et de prendre en charge
des familles, surtout quand les deux parents sont sur le marché du
travail.
M. Jolivet: Le ministre nous a donné l'ensemble du budget
et des personnes qui travaillent à son cabinet. Quand vous dites qu'il
est votre conseiller spécial, il est payé à partir de quel
budget?
M. Dutil: Le budget est pris à même celui du
Secrétariat à la famille.
M. Jolivet: Et non pas dans celui de votre cabinet.
M. Dutil: Non.
M. Jolivet: Quelles sont les raisons pour lesquelles H est pris
là plutôt que dans votre budget, vu qu'il est un conseiller
spécial?
M. Dutil: Nous ne considérons pas que M. Champagne-Gilbert
est un attaché politique. Nous considérons que c'est une personne
qui a demandé d'avoir une tâche allégée par rapport
à celle qu'il occupait, pour les raisons que j'ai mention-
nées tout à l'heure, des raisons de santé. M.
Champagne-Gilbert, pendant deux années - je tiens à le rappeler
à la population du Québec parce que cela a été fort
important - a été celui qui a présidé le
comité sur la consultation de la politique familiale. On sait ce que
peut représenter comme charge de travail la présidence d'un
comité itinérant comme celui qu'il a présidé, qui a
fait le tour de la province de Québec pendant près de 18 mois et
qui a, par la suite, rédigé un rapport avec une
célérité exemplaire. On sait qu'un des problèmes de
ce genre de comité est parfois d'obtenir les rapports dans les
délais requis, de cotliger l'ensemble des données d'une
consultation, d'en arriver, après discussion, à faire des
recommandations synthèses qui recoupent, regroupent et qui satisfont
l'ensemble de ceux qui sont intervenus au cours de la consultation. C'est la
masse énorme de travail que cela a pu représenter. M.
Champagne-Gilbert a eu une tâche différente,
allégée, qui lui seyait davantage étant donné son
état de santé, étant donné également la
grande fatigue qu'il avait accumulée au cours de ces années. Ce
n'est pas un attaché politique donc, il n'y a pas lieu qu'il soit
payé à même la masse salariale du cabinet, bien
évidemment.
M. Jolivet: Je ne mets pas en doute le travail qu'a pu accomplir
la personne, ni la tâche qu'on lui avait demandé d'accomplir. Je
pose la question parce que vous dites que c'est un conseiller spécial.
Est-ce que le ministre est en train de me dire que la personne aurait, dans ce
contexte, agi un peu comme le Conseil consultatif de la famille? Est-ce que
cela vaut la peine, à ce moment-là, de mettre en place toute une
structure avec les pieds et les mains liés pour remplacer une personne
qui aurait fait le job de conseiller spécial auprès du ministre?
Est-ce que le ministre, dans le fond, est en train de nous dire qu'il a
demandé à quelqu'un de faire un job politique, à partir de
la masse salariale du secrétariat pour ne pas avoir à le payer
sur son budget de cabinet?
M. Dutil: M. le Président, je répète qu'il
ne s'agit pas là d'un job politique. J'ai mentionné l'importance
des travaux que faisait M. Champagne-Gilbert. On connaît sa
réputation d'écrivain à ce sujet. Je suis sûr que le
député de Laviolette a lu le livre important que M.
Champagne-Gilbert a publié il y a quelques années, La famille
enfin... C'était le titre de l'ouvrage. Le titre de l'ouvrage
était La famille enfin... Cet ouvrage a beaucoup fait
évoluer les mentalités, malheureusement pas assez vite pour que
le (\ gouvernement du Parti québécois de l'époque j/ mette
lui-même en place une politique familiale. | Si M. Champagne-Gilbert
n'avait pas écrit ce livre-là à l'époque, s'il
n'avait pas été responsable du dossier de la politique familiale,
ce dossier aurait cheminé beaucoup plus lentement et peut-être
différemment de la façon dont il chemine actuellement.
Ceci dit, le député de Laviolette nous dit: M.
Champagne-Gilbert fait un travail d'attaché politique, pas du tout! J'ai
justement soulevé l'importance des travaux de M. Champagne-Gilbert
concernant l'implication des hommes dans la famille, c'est un facteur fort
important. Je pense qu'il ne s'agit pas d'un conseil politique, il s'agit
d'essayer par un moyen qui est celui privilégié par M.
Champagne-Gilbert, l'écriture, de faire évoluer les
mentalités masculines dans la province de Québec.
M. Jolivet: Si le ministre m'avait dit qu'il était un
conseiller spécial ou une personne employée par le
Secrétariat à la famille pour sa politique.. Mais ce n'est pas ce
que le ministre m'a dit, il a dit: C'est un conseiller spécial du
ministre, c'est mon conseiller spécial C'est dans ce sens-là que
je dis: Pourquoi à ce moment-là, si c'est son conseiller,
n'est-il pas dans le budget de son cabinet plutôt que d'être
payé par le secrétariat pour les voyages qu'il a le droit
d'accomplir pour son travail? Il pourrait aller faire des conférences un
peu partout, à Paris, à Bonn, à London, peu importe. Je ne
comprends pas le lien que le ministre fait. Si c'est un conseiller
spécial, il devrait être normalement une personne engagée
soit contractuellement ou soit dans la masse permanente de son cabinet. Le
ministre est en train de me déclarer qu'H a dit au secrétariat:
Vous allez l'engager pour être mon conseiller. C'est cela que ça
veut dire dans le fond.
M. Dutil: Mais M. le Président, il faut rappeler que M.
Champagne-Gilbert était engagé, et il l'est toujours, par le
secrétariat. Cela n'a pas modifié la provenance de sa masse
salariale. On semble croire que le salaire de M. Champagne-Gilbert était
payé ailleurs, auparavant...
M. Jolivet: Non, non.
M. Dutil: ...On semble laisser sous-entendre cela.
M. Jolivet: Non, non
M. Dutil: Le salaire de M. Champagne-Gilbert, engagé il y
a quatre ans de cela par contrat pour une période de cinq ans, est
toujours et continue d'être payé par le Secrétariat
à la famille; c'est une chose qui n'est pas modifiée. ,,
M. Jolivet: Une dernière question avant de laisser le
député de Gouin poser les autres questions qu'il voudra poser.
J'aimerais poser la question suivante au ministre: II y a des organismes
familiaux qui parlent d'argent disponible qui pourrait être
nécessaire pour maintenir le travail important qu'ils font. Le ministre
peut-il me dire s'il a fait des pressions auprès de sa
ministre de tutelle, la ministre de la Santé et des Services
sociaux, pour que ces organismes aient priorité dans la distribution des
sommes nécessaires à leur action, à l'intérieur du
programme des organismes communautaires du ministère, qu'on appelait
autrefois la Fédération des organismes bénévoles du
ministère des Affaires sociales du Québec, la FOBASQ? Le ministre
peut-il nous dire s'il a fait des pressions? Si oui, quels résultats
a-t-il obtenu?
M. Dutil: M. le Président, des discussions sont toujours
en cours entre moi et la ministre de la Santé et des Services sociaux
plus particulièrement, évidemment, concernant le budget
dévolu aux organismes dits familiaux. Un nombre considérable de
ces organismes demandent des subventions. Un budget est prévu quant
à la redistribution. Nous avons demandé - et nous y regardons de
très près - qu'il soit redistribué pour être le plus
efficace et le plus rentable possible. Si je me rappelle bien, l'année
dernière, un nombre considérable de ces organismes ont
été subventionnés. C'était de l'ordre de 102
organismes. On voit l'importance du nombre d'organismes sur le plan
budgétaire. Cette donnée a dû être
dévoilée lors de l'étude des crédits de Mme la
ministre de la Santé et des Services sociaux. Elle est de l'ordre de 1
228 250 $.
M. Jolivet: Pour les besoins de la commission, le ministre
pourrait-il déposer la liste des organismes avec les subventions qu'ils
ont reçues en 1987-1988 et qui concernent concrètement les
organismes familiaux?
M. Dutil: On va trouver la liste et la donner à la
commission, sans aucune objection, M. le Président.
M. Jolivet: L'autre question concerne la proposition faite par le
Conseil des affaires sociales et de la famille en ce qui a trait au Centre de
solidarité des familles. Qu'est-ce que le ministre en pense?
M. Dutil: II est important de consulter les familles
là-dessus. On sait que cette recommandation avait été
faite dans le rapport de consultations qui nous avait été
présenté par l'équipe de M. Champagne-Gilbert à
l'époque, sauf qu'on n'avait pas donné, à ce
moment-là, la modalité de financement ou si on en avait
donné une, c'était une modalité qui était
entièrement payée par le gouvernement.
On sait que le Conseil des affaires sociales et de la famille nous
recommande de faire une retenue à la source, si je peux m'exprimer
ainsi, à même les allocations familiales versées aux
familles. C'est une formule qui, semble-t-il, existe ailleurs. On me rapporte
qu'en Belgique, ce serait le cas. À même les allocations
familiales, une certaine retenue tout à fait minimale de l'ordre de
quelques dollars par année, est faite et cette retenue est donnée
aux familles, aux organisme familiaux.
Personnellement, je n'ai pas d'objection à une formule semblable
s! les familles sont d'accord. Vous me demanderez de quelle façon il
faut consulter les familles pour voir leur accord là-dessus, c'est toute
la problématique et toute la difficulté puisque ce mode de
financement, dans le rapport de consultation initiale, n'avait pas
été prévu. Advenant que les familles manifesteraient leur
accord sur cette formule, je pense que ce serait une excellente façon
d'avoir les deniers suffisants pour l'établissement d'un centre tout
à fait indépendant, un centre de solidarité des familles -
c'est le nom qu'on voudrait lui donner - qui pourrait faire cheminer les
dossiers concernant la famille, et pas seulement auprès du gouvernement.
On se rappellera, en effet, que le gouvernement n'est qu'un des nombreux
intervenants en matière de politique familiale.
J'ai énuméré initialement l'ensemble des
intervenants qui peuvent jouer un rôle fort important en matière
de politique familiale et du mieux-être des familles: le monde du
travail, celui de l'Éducation, des municipalités et ainsi de
suite. Une organisation comme cela, financée directement par les
familles, aurait certainement une force intéressante. La condition
initiale, primordiale, de base, c'est que les familles manifestent leur accord
à cette retenue.
M. Jolivet: Dans le contexte d'une possibilité de centre,
est-ce que le ministre aurait l'intention de faire disparaître toute
forme d'aide des organismes communautaires telle qu'on la connaît
actuellement?
M. Dutil: Au contraire, M. le Président, je pense que les
deux choses peuvent très bien se côtoyer. Un organisme qui serait
probablement plus regroupeur de l'ensemble des famille, peut-être
même de l'ensemble des organismes, pourrait bénéficier de
cette formule et des subventions qui se donnent actuellement et qui pourraient
continuer à se donner à l'avenir aux organismes familiaux comme
tels.
Le Président (M. Bélanger): M. le député
de
Gouin.
M. Rochefort: Merci, M. le Président. J'aurais un certain
nombre de questions, moins directement liées au détail des
crédits budgétaires à proprement parler, mais plutôt
liées aux orientations, aux philosophies et aux actions
envisagées. Voici la première question que je voudrais poser au
ministre, question à laquelle N faut donner une réponse avant
d'aller plus avant dans une politique familiale. J'imagine qu'il a dû
donner une réponse, je voudrais essayer de bien la saisir et je pense
que c'est important qu'il nous en fasse part pour qu'on comprenne les
motivations des actions qu'il entreprendra.
II y a, au fond, deux volets à toute la discussion entourant la
politique familiale depuis un certain nombre d'années, mais je dirais
particulièrement depuis que la crise démographique réelle
est devenue un sujet d'intérêt et d'actualité politque
soutenu. Il y a donc tout ce nouveau volet, tout le volet démographique,
nataliste qui s'est ajouté, je dirais, avec plus d'acuité, avec
plus de force, avec un sentiment d'urgence plus prononcé, et sur lequel
je pense que je n'ai pas à m'étendre. Je pense qu'on comprend
très bien ce à quoi je fais référence.
D'autre part, H y a également toute cette notion qui ne tient pas
nécessairement compte de cette préoccupation nataliste ou
démographique à l'effet de mettre en place une politique
familiale dont l'objectif premier n'est pas d'accroître les taux de
natalité mais bien plus de reconnaître la famille en soi, de la
soutenir et de lui donner non seulement des moyens de s'accroître mais
des moyens de vivre la vie de famille avec ce que cela implique, dans un cadre
de qualité de vie plus élevé, pour l'ensemble des membres
de la cellule familiale. (10 h 30)
J'ai l'impression, actuellement - quand j'entends, par exemple, la
présentation du ministre - que le volet démographique, le volet
nataliste non seulement prend le dessus du pavé mais est l'essentiel de
ce qui guide la volonté, les orientations du ministre. Je le vois
immédiatement ressortir son énoncé de politique mais
j'aimerais vraiment qu'il nous explique ce qu'est pour lui le mariage,
l'importance respective qu'il accorde aux deux éléments - mariage
n'est pas à double sens - le mariage qu'il fait entre les deux
éléments.
J'avoue que dans la présentation qu'il nous a faite, je sens
beaucoup plus la préoccupation, la sensibilité, la volonté
d'agir sur la natalité - donc sur les éléments
démographiques de la préoccupation de la politique familiale -
que sur les éléments de reconnaissance, de soutien de la famille
telle qu'elle est. J'aimerais voir vraiment, pour vous, quel est le lien que
vous établissez entre les deux et l'importance relative de l'un par
rapport à l'autre?
M. Dutil: Voyez-vous, M. le Président, on essaie de placer
d'un côté le problème de la démographie et de
l'autre, celui de la qualité du niveau de vie des parents alors qu'il
s'agit d'un problème qui est interrelié. Si, aujourd'hui, il y a
un problème démographique au Québec, ne faut-il pas se
poser la question. Pourquoi ce problème existe-t-il?
Évidemment, on dira qu'on veut toujours tout diviser en deux
volets. Je ferai la même chose pour la bonne compréhension du
député de Gouin et je diviserai en deux volets les
problèmes qui ont amené la dénatalité au
Québec.
Le premier est certainement le changement des valeurs. C'est
évident, les sociétés évoluent. On n'a pas à
faire un procès de valeur sur les changements de valeurs. Les gens
pensent différemment de ce qu'ils pensaient il y a trente ans. Ils sont
influencés différemment qu'ils l'étaient il y a trente
ans. Ils agissent différemment dans une multitude de domaines, y compris
dans celui du nombre d'enfants qu'ils désirent avoir. Ceci est une
réalité.
Quand on fait des études, on se rend compte qu'entre le nombre
d'enfants que les gens désirent et le nombre d'enfants qu'ils ont
réellement au bout de la ligne, il y a une différence
appréciable, surprenante. Elle est due, à notre point de vue, aux
obstacles créés par 'a société en
général. Ne parlons pas du gouvernement. Parions de la
société en général, qui a évolué
d'une façon qui a eu pour effet de mettre - on le constate aujourd'hui -
des obstacles importants, surtout quant au nombre d'enfants dans les
familles.
Je vais lire le petit texte de l'énoncé de politique. Je
pense que cela va bien resituer - c'est un paragraphe seulement, M. le
Président - la problématique. Je vais expliquer tout à
l'heure pourquoi je suis intervenu davantage sur la natalité dans ma
courte allocution du début. On dit à la page 7 de
l'énoncé que "la politique familiale a ses finalités
propres et, problème de dénatalité ou pas, nous devons
nous donner cette politique. Mais si la famille, l'exercice des
responsabilités parentales et l'intérêt porté aux
enfants sont favorisés et soutenus par la collectivité et
l'État, on est justifié de penser que cela pourra avoir un impact
sur la natalité. À ce titre, la politique familiale peut devenir
ferment d'une politique de population, surtout si elle permet de diminuer les
contraintes à la prise en charge des enfants que rencontrent les parents
et qui peut souvent être ressentie davantage comme une
pénalité sociale que comme une contribution sociale."
La dénatalité, à mon avis, est beaucoup plus un
symptôme, une sonnette d'alarme pour notre société
québécoise, particulièrement dans un contexte
nord-américain de culture française ici au Québec,
entourée par une société nord-américaine
anglophone. L'ancien chef de l'Opposition l'avait soulevé à
plusieurs reprises. La survie collective française en Amérique du
Nord va d'abord passer par le problème de la démographie et de la
natalité.
M. le Président, est-ce qu'une politique familiale aura pour
effet de rehausser la natalité? Nous le saurons dans quelques
années Mais nous savons une chose dans le monde occidental en
général et au Québec en particulier, les familles ont des
problèmes. Les familles rencontrent des obstacles parfois
insurmontables. On le sait depuis fort longtemps, le symptôme n'est pas
d'aujourd'hui. Le symptôme de la dénatalité date du
début des années soixante où la chute libre a
commencé. D'ailleurs, dès 1972 ou 1973, nous avons franchi la
barrière du seuil de renouvellement. Dès 1972, 1973 notre taux de
natalité est tombé sous le seuil du 2,1. Donc ce
n'est pas d'aujourd'hui que ce symptôme existe. Ce n'est pas
d'aujourd'hui que le symptôme nous indique qu'il y a lieu de lever des
obstabtes à la famille. Entre 1973 et 1988 I y a eu bien du temps pour
réfléchir à une politique familiale et pour faire des
choses qui lèveraient ces obsta-bles. Cela ne s'est pas fait. On ne peut
pas revenir là-dessus, c'est malheureux. La situation est ce qu'elle est
aujourd'hui et c'est à notre gouvernement d'agir et d'essayer de
rectifier des choses. La raison pour laquelle j'ai parlé tout à
l'heure du problème de la natalité dans mon exposé c'est
qu'on se rend compte d'une certaine incompréhension de la
problématique de la natalité. C'est normal. Si ces chiffres ne
sont pas donnés, comment voulez-vous que la population les
interprète correctement? C'est pour cela que j'ai insisté
là-dessus en regard, particulièrement, de l'avis du Conseil des
affaires sociales et de la famille, qui mettait une emphase intéressante
mais trop prononcée, trop accentuée, à mon point de vue,
sur la problématique des premier et deuxième enfants. Je n'ai
voulu que rétablir un certain équilibre. Sans nier qu'il y ait
des problèmes pour les familles de deux enfants, j'ai voulu dire qu'il y
avait des problèmes pour l'ensemble des familles du Québec, pour
les petites et, évidemment, pour les plus nombreuses.
Reste une autre question importante à soulever et, de la part
d'un député en région, je pense que c'est
particulièrement important. Les conséquences de la
dénatalité se font sentir dès maintenant, dès
aujourd'hui dans les régions. Les villes, actuellement, ne sont pas en
perte de population. Il y a dénatalité, c'est un problème.
On se rend compte des conséquences dans les milieux scolaires. Certaines
écoles sont vides ou ont perdu beaucoup de leur clientèle. Cela
cause des difficultés. Mais, quand on regarde le total de la population
des villes on se rend compte que le problème n'est pas encore visible.
Quand on vit dans une région, comme c'est mon cas, le problème
est très visible. Mon comté, Beauce-Sud, réputé
pour son dynamisme industriel, pour ses initiatives, réputé pour
son développement économique devrait donc être en mesure de
retenir sa population. J'ai certaines municipalités de mon comté
qui, depuis 15 ans, ont perdu 20 % de leur population. Voyez-vous les
conséquences immédiates du problème démographique
pour les régions? C'est la raison pour laquelle je pense que nous devons
dire aux citoyens du Québec qu'il y a des conséquences à
la dénatalité qui ne se manifesteront pas dans 40 ans, dans 50
ans, dans 100 ans. Il y a des conséquences immédiates. Ceci dit,
si les gens décident de ne pas avoir davantage d'enfants, suivant leurs
valeurs, c'est un choix individuel qu'Bs ont le droit de faire, mais si la
population nous dit: Écoutez, la qualité de vie des familles, le
niveau de vie des familles aujourd'hui, on n'en tient pas suffisamment compte
et c'est un obstable Important à la venue d'un plus grand nombre
d'enfants dans nos familles est-ce que le gouvernement est prêt à
nous écouter de ce côté-là? C'est pour cela que nous
disons que la qualité de vie des familles, le niveau de vie des familles
et la dénatalité sont, jusqu'à un certain point,
interreliés. Cela ne règle pas les questions de valeurs. Il y a
des gens qui ont décidé de ne pas avoir d'enfant par choix. C'est
un choix que nous devons respecter. Mais, on sait - des études, des
statistiques et des expériences de d'autres pays nous le
démontrent - que des gens voudraient avoir davantage d'enfants mais pour
des raisons d'organisation du travail, des raisons fiscales ou
financières, ils n'en ont pas autant qu'ils le souhaiteraient. C'est
dans ce sens-là, M. le Président, qu'on ne peut pas mettre d'un
côté le problème de la démographie et de l'autre, le
problème de la qualité et du niveau de vie des familles. Ce sont
des problèmes interreliés. Ce sont les symptômes d'un
malaise considérable pour lequel il nous faut trouver, si possible, des
solutions.
M. Rochefort: M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Gouin.
M. Rochefort: Je veux d'abord simplement faire remarquer au
ministre que mon intention n'était pas d'opposer un problème
à l'autre. S'il y a quelqu'un de convaincu du lien éminemment
direct entre les deux, c'est bien moi. Je ne veux pas commencer un débat
avec le ministre, mais je veux quand même lui souligner que, dans
l'exposé qu'il vient de nous faire, il a essentiellement parlé
des questions de dénatalité. Par exemple, j'ai noté une de
ses dernières phrases. J'étais à peu près
convaincu, à au moins deux reprises dans son exposé, qu'il
était pour nous expliquer, en soi, en mettant de côté la
question de la natalité, le soutien qu'il compte et qu'il croit devoir
être apporté aux familles. Mais, il bifurque tout le temps sur la
natalité. Il a conclu à peu près, vers la fin de son
intervention, en disant, après nous avoir parlé longuement des
effets de la dénatalité dans les régions, ce que j'ai
observé aussi et que je reconnais amplement... Je dirais que cela a
même d'autres effets, notamment sur le vieillissement de la population et
les services que la cellule familiale n'est plus en mesure d'accorder aux
personnes âgées en milieu rural. Un problème additionnel,
c'est le déplacement des personnes âgées, souvent vers le
milieu urbain, pour être en mesure de leur donner un certain nombre de
services, avec les conséquences que cela comporte. Mais, après
que le ministre nous eut fait ce long développement et dit: Oui, mais il
y a aussi évidemment les problèmes de qualité de vie, de
niveau de revenu des familles et tout cela, qui sont sûrement des
obstacles à la venue du troisième enfant, il est reparti sur la
natalité. Je veux seulement être certain, M. le ministre,
au-delà de ce qui est écrit - vous m'avez lu un excellent
paragraphe que je signerais demain matin, parfait, pas de
problème avec cela - que dans les faits, dans le concret, dans
les décisions qui vont être prises, dans le rôle horizontal
que vous jouez auprès de l'ensemble des ministères et des
organismes gouvernementaux, ce soit parfaitement intégré. Moi,
honnêtement, je vous dis: Je vous écoute, je lis, je regarde les
actions qui se font, on voit bien venir ce qui s'en vient. Quand je dis qu'on
voit bien venir ce qui s'en vient...
Dans votre exposé d'introduction, vous avez fait un
développement sur l'équité qui vous préoccupe au
plus haut point. À partir de quoi? L'équité de l'aide?
À partir de quoi? Du nombre, de l'âge et des moyens. Je vous dirai
que le nombre et l'âge, et plus particulièrement, le nombre cela
ressemble plutôt à une préoccupation démographique
et nataliste qu'à une préoccupation de soutien à la
famille tout court. Je ne suis pas en train de vous faire un reproche. Je vous
le dis, je suis inquiet que, justement, dans les faits, peut-être
inconsciemment - parce que je sens bien que votre volonté est celle que
vous avez exprimée - on finisse par trop centrer. Ce n'est pas qu'il ne
faut pas centrer. Je suis éminemment préoccupé par
l'avenir du peuple québécois. Mais, j'ai peur que, dans les
faits, il y ait une trop forte concentration de l'action du côté
du volet nataliste, avec une approche tellement stricte que cela n'ait pas
beaucoup d'effet sur le soutien réel aux familles qui existent
déjà et qui ne s'accroîtront peut-être pas,
malgré les mesures à caractère nataliste qu'on pourrait
prendre. Donc, ces effets pourraient aussi faire qu'on passe carrément
à côté du bateau. Alors, donc, je veux simplement attirer
votre attention là-dessus. Je suis un peu inquiet par rapport à
cela. Je crois même que si pour moi le volet nataliste n'a pas
nécessairement d'influence sur le volet - permettez-moi l'expression
pour les fins de la discussion - de la politique familiale en soi... Ce n'est
pas parce qu'on se concentrera sur le volet nataliste que cela aura
nécessairement un impact sur le soutien à la famille, telle
qu'elle existe ce matin. On devra apporter une solution une fois pour toutes.
Par contre, j'ai la conviction qu'un accent particulier accordé au
soutien aux familles auquel on ajoute un volet nataliste complémentaire,
nous permettra plus de prendre le bateau et le train qu'en nous concentrant
uniquement sur le volet nataliste, en laissant tomber l'autre volet, ce qui
risque de nous faire regarder passer le train et manquer le bateau, notamment
par rapport à nos préoccupations natalistes.
D'autre part, il y a le développement que vous nous avez fait sur
un des éléments contenus dans le récent avis du Conseil
des affaires sociales et de la famille, notamment sur cette discussion, ce
débat qui existe visiblement - vous en avez fait état entre vous
et le conseil - sur la question à savoir si le problème est au
premier, au deuxième ou troisième rang. Je vous avoue
honnêtement que, quand j'observe cette discussion, là aussi je
suis un peu inquiet sur la finalité, sur le résultat des actions
qu'on va mener. À trop vouloir circonscrire, à trop vouloir viser
et toucher uniquement le mille, à trop vouloir être
précisément strict, à trop être ciblé,
à trop être pointu sur un aspect très précis, j'ai
peur qu'on rate là aussi un peu, sinon tout le bateau.
Par exemple, concrètement, pour me faire comprendre, j'ai
l'impression que si on met tous nos oeufs ou l'essentiel de nos oeufs sur le
troisième enfant et qu'on s'est trompé, on risque d'avoir un
résultat nul. Si on y va plutôt par une approche où on vise
à aider la venue d'enfants, point... Je ne dis pas qu'il faut couper
cela au couteau. Je suis d'accord, par exemple, qu'en ce qui concerne
l'habitation, il y a peut être un volet plus ffavorable au
troisième, un peu comme dans l'avis du conseil, même si le
volet... On parle par rapport à des préoccupations natalistes.
Par rapport à une préoccupation de soutien à la famille,
une politique d'accès à la propriété pour les
familles tout court devrait exister aussi, comme cela a déjà
existé.
Donc, si on aide la venue du premier, celle du deuxième et celle
du troisième, on risque d'avoir plus de résultats. Je vous dirai
que, reprenant un peu votre développement... Vous nous disiez: Pour les
premiers et les deuxièmes, le manque à gagner - on peut toujours
utiliser des expressions comme celle-là - pour l'année qui vient
de s'écouler, c'est 1100 $ par rapport à je ne me souviens plus
trop combien pour le troisième, mais, en proportion, pour le
troisième, c'est évidemment plus élevé que pour le
premier et le deuxième. J'ai le goût de vous dire que l'objectif
n'est pas d'accroître des proportions, mais d'en avoir plus. Et, qu'ils
soient de rang premier ou de rang deuxième, l'important, c'est d'en
avoir plus. En ce sens, l'objectif de mon intervention de ce matin est de vous
inciter à y aller un peu plus largement, d'abord, pour être
sûr de ne pas manquer le bateau et, ensuite, de ne pas vous tromper afin
d'arriver avec les résultats souhaités. On ne pourra recommencer
quatre fois la politique nataliste québécoise, compte tenu de
l'évolution des taux de natalité actuellement.
D'autre part, je vous dis qu'en y allant un peu plus largement, vous
êtes beaucoup plus certain de toucher les familles actuelles, donc,
d'établir une réelle intégration entre votre
préoccupation nataliste et votre préoccupation de soutien
à la famille. C'est vraiment une incitation que je veux faire par cette
intervention auprès du ministre afin qu'on ne s'engage pas dans un
débat qui risque de ne nous mener nulle part. Est-ce que c'est plus un,
plus deux ou plus trois? Je vais vous le dire que dans l'état actuel de
toutes les statistiques que j'ai pu lire et regarder, c'est préoccupant
à tous les niveaux et à tous les rangs. Je pense qu'on est mieux
d'y aller avec une politique un peu plus large. Au fond, je vous dirai que le
pire qui peut arriver, c'est qu'on en ait fait un peu trop. Le danger
qui nous guette, c'est qu'à vouloir couper les cennes en quatre
on n'en ait pas fait assez et qu'on se soit trompé. Je vais vous dire
qu'on ne joue pas avec le développement d'un parc industriel d'ici ou de
là qui pourrait être un peu plus petit que les besoins qu'on aura
dans 20 ans. Cela n'est pas trop dramatique pour l'avenir d'un peuple. Je vais
vous dire que si on se trompe cette fois-ci dans l'action qu'on va mener avec
notre politique familiale, il n'y aura pas de reprise possible, pas de
deuxième partie. Il n'y aura pas de deuxième compétition,
cette fois-ci, étant donné les taux, avec les résultats
qu'on connaîtra pour le meilleur et pour le pire. Le pire qui peut
arriver c'est qu'on en mette un peu trop. Par contre, ce qui m'inquiète
c'est qu'on n'en mette pas assez. J'arrête pour l'instant, j'ai un autre
sujet à aborder après.
M. Dutil: M. le Président, vous permettez... J'ai
soulevé tout à l'heure des problèmes
d'équité. Je pense que le député a
sousestimé l'importance que j'y ai accordée. Je dis que les
familles actuelles les plus nombreuses - et, chacun, dans son comté,
peut en faire la démonstration - sont celles qui ont le niveau de vie le
plus difficile. Il en existe peu, mais il y a, quand même, quelques
familles nombreuses. J'ai eu un cas récemment dans mon comté, je
suis certain que le député de Gouin pourrait raconter des
aventures du même genre, où une famille comptait neuf enfants de
dix-huit ans à dix-huit mois. C'est exceptionnel, et je le reconnais, M.
le Président. Est-ce que, parce que c'est exceptionnel on ne doit pas en
tenir compte? La difficulté était la suivante. On devait avoir un
permis de chauffeur parce que le véhicule pour transporter la famille
était plus gros qu'un véhicule normal et que cela coûtait,
en plus des neuf enfants, 70 $ de plus pour le permis. On a réglé
cela, on a trouvé une façon de régler cela. C'était
aberrant. Ce genre de chose n'arrive pas souvent, mais cela ne devrait pas
arriver. C'est dans ce sens qu'il est important de ne pas oublier pour des fins
d'équité qu'il existe encore des familles nombreuses de trois
enfants et plus et que ce sont celles-là qui ont le plus de
problèmes de niveau de vie. À un moment donné il va
falloir penser à cela aussi. On me fait rire quand on dit que cela ne
coûte pas cher, qu'on ne devrait pas mettre d'argent là. Je me
dis: Où est la logique? C'est un peu le raisonnement qui est
véhiculé. On dit, de l'autre côté de la table, qu'on
devrait plutôt aider les premiers et les deuxièmes que d'aider les
grosses familles, parce que cela ne coûtera pas cher si on aide les
grosses familles. C'est un peu le raisonnement que j'entends, un sophisme
épouvantable qui m'apparalt tout à fait aberrant.
M. Rochefort: M. le Président, j'espère que le
ministre n'est pas en train de dire que j'ai développé ce
raisonnement-là. On parle de qualité...
M. Dutil: J'ai la parole, M. le Président, si vous
permettez.
M. Rochefort: Oui, mais je veux juste vous comprendre.
Le Président (M. Bélanger): On va laisser le
ministre finir son Intervention, vous l'interrogerez par la suite.
M. Rochefort: Je ne comprends pas.
M. Dutil: Quand même, étant donné que j'ai
compris malgré tout la question du député de Gouin... Je
ne dis pas qu'il le dit actuellement, je ne dis pas qu'il le dit à cette
table, mais c'est un discours que J'entends. On dit: Si le gouvernement aide
les grosses familles, il va économiser de l'argent. Voyons-donc! Si le
gouvernement aide les plus grosses familles cela va lui coûter de
l'argent. Ce ne seront pas les seules mesures. Il est important d'aider les
plus petites familles, c'est bien sûr et on le comprend. Mais il est
évident que si le gouvernement aide les plus grosses familles cela va
lui coûter de l'argent.
D'ailleurs, je regarde les remarques qui sont faites au sujet de la
supposée économie qu'aurait faite le gouvernement en changeant
l'ordre des allocations de disponibilité l'année dernière.
On ne tient compte que de ce changement qui, selon l'avis
présenté, aurait fait épargner des dizaines de millions au
gouvernement. On oublie de tenir compte de l'ensemble des mesures que le
gouvernement a prises l'année dernière. Dans ces mesures, il y a
eu une réduction d'impôt pour les contribuables avec enfants.
Cette réduction a été de 169 000 000 $. On a oublié
cela. On a oublié de dire cela, par hasard.
M. le Président, quand on donne des opinions, on doit tenir
compte de l'ensemble des mesures que le gouvernement a prises en compte. Le
total net des mesures que nous avons prises l'année dernière est
de 194 000 000 $ de plus pour les familles. Le total net, c'est cela, M. le
Président. C'est ce chiffre-là qu'il est important de citer. Dans
une situation budgétaire pas facile, vous le savez, le gouvernement a
reçu en revenus, l'année passée, 194 000 000 $ de moins,
parce qu'il a réduit les Impôts des contribuables avec enfants.
C'est pas mal mieux que d'avoir décidé, comme cela a
été le cas dans le dernier budget du gouvernement du Parti
québécois, le budget Duhaime, de récupérer les
allocations familiales qu'il avait données. C'est pas mal plus
intelligent. Quand on dit qu'on n'aura pas l'occasion de se reprendre, qu'il ne
faut pas se tromper, je suis d'accord avec le député de Gouin,
mais fi faut se rappeler que si on est rendu au bord du précipice, c'est
dû à des manoeuvres de panique du genre de celles que le Parti
québécois a adoptées en fin de mandat. La
récupération des allocations familiales, rappelons-le-nous M. le
Président, a été une manoeuvre de
panique, il manquait 200 000 000 $. Il manquait 200 000 000 $ dans le
budget Duhaime pour finir le mandat du Parti québécois et la
solution intelligente qu'on a trouvée, c'est d'aller
récupérer les allocations familiales dans les poches des
contribuables. Belle mesure familiale que celle-là! Je dis que le
député de Gouin a raison en ce qui a trait à l'importance,
à l'acuité de la problématique. Je lui dis: Oui, c'est
vrai, vous avez raison, M. le député de Gouin, mais
rappelons-nous les causes qui ont fait que nous sommes au bord d'un si grand
précipice. L'une des causes, c'est que la politique familiale
n'intéressait pas l'ancien gouvernement.
Centrer ou cibler les mesures. C'est un autre point qu'a soulevé
le député de Gouin. C'est un point important. C'est un point
extrêmement sérieux. Les accents que l'on doit mettre, quels
sont-ils? Je voudrais lui rappeler, à titre anecdotique, un discours que
son chef a prononcé récemment, d'ailleurs. M. le
Président, je revenais de Montréal ce soir-là; j'ai fait
arrêter l'automobile sur le bord de l'autoroute parce que la station
n'émettait pas assez loin et j'étais sur le point de sortir des
ondes. Je voulais entendre le discours qu'allait nous livrer le nouveau chef -
à ce moment-là, il était l'éventuel chef du Parti
québécois - sur la politique familiale.
M. Rochefort: Ce n'est pas le mien... Vous avez commis un
lapsus... C'est important.
M. Dutil: Excusez-moi. Je dois dire qu'effectivement...
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît,
on laisse M. le ministre aller avec son intervention.
M. Dutil: Je m'excuse, M. le Président, ce n'était
effectivement pas son chef. Le député de Gouin se rapproche
davantage du bon sens. Je vais quand même citer M. Parizeau. Je pense que
c'est important. Toute blague exceptée, cet aspect est bien important
parce qu'il y a eu des chiffres de cités, ce soir-là. Il a dit
entre autres: II faut ramasser le fouillis, - ce qu'a oublié de dire M.
Parizeau, entre parenthèses, c'est que ce fouillis, il a
contribué à le créer, mais quoi qu'il en soit - il faut
régler, éliminer le fouillis de mesures et cibler davantage nos
interventions vis-à-vis de la famille, ce avec quoi, je pense, on ne
peut pas être en désaccord. Maintenant, H nous a donné
l'exemple de ce ciblage. De quelle façon, lui il le ferait. Je vous
rappelle qu'il y avait une différence très importante en fonction
du rang de l'enfant. Le premier, à ce moment, si je me rappelle bien des
chiffres qu'il avait cités, bénéficiait de 150 $ par mois,
le deuxième de 200 $ et le troisième de 250 $ par mois. Quand on
parle de cibler, on se rend compte dans cette intervention qu'on donne
davantage d'importance aux enfants de rangs plus élevés sur le
plan fiscal sans négliger toutefois, évidemment les enfants de
rangs 1 et 2. Cette préoccupation, je veux rassurer le
député de Gouin, nous l'avons. Nous comprenons très bien
que tout ne peut pas être mis pour les enfants de derniers rangs et rien
du tout pour les enfants de premiers rangs. Nous n'avons jamais dit cela. Sauf
que sur le plan de l'équité sociale, il faut bien finir par se
rendre compte que les familles qui ont le plus de problèmes de finance
ce sont les grosses familles et qu'il y a des montants à injecter
là pour les soutenir quelle que soit la quantité d'argent
à injecter. Je pense qu'on ne peut pas être en désaccord
avec cela.
J'accepte la remarque de prudence que me lance le député
de Gouin. Il me dit d'être prudent. Il faut cibler mais il faut faire
attention à ne pas exagérer le ciblage. Il y a un dosage II y a
une question de dosage important dans cela Je prends sa remarque et je dis:
Oui, H faut être prudents mais je lui dis: Nous le serons prudents; nous
le sommes et nous le serons. Je sais très bien que lorsque les mesures
seront connues, l'Opposition faisant son devoir dira que nous avons mal
ciblé ou trop à gauche ou trop à droite. C'est bien
normal, quelle que soit notre décision. Mais nous tenons compte de ce
facteur, soyez-en sûr, M. le Président. C'est fort important pour
l'ensemble des familles du Québec et nous veillons au grain. Cela c'est
quant au nombre. Quant à l'âge, je vous en ai parlé, tout
à l'heure. N'est-ce pas une question d'équité encore
là que de tenir compte de l'âge? Ce n'est pas une question
nataliste. Tenir compte de l'âge, c'est une question
d'équité. On sait que le plus grand problème dans la
décision des gens d'avoir ou non un enfant, c'est: Est-ce qu'on va
être capable de vivre? Est-ce que pendant les six première
années de la vie de l'enfant, on va être soutenu
adéquatement? Est-ce qu'on va être soutenu équitablement?
Ceux qui ont des familles de deux, trois ou quatre enfants... (11 heures)
J'ai eu, dernièrement, un cas tout à fait exceptionnel
d'un couple qui avait deux enfants et qui a eu des jumeaux. Cela arrive. Ils
sont passés de deux à quatre enfants. Ils ont doublé leur
nombre d'enfants et les deux travaillent. Mais c'est dramatique pour le niveau
de vie de ces gens-là.
Vous nous dites qu'on ne devrait pas, sur le strict plan de
l'équité, tenir compte de ce phénomène qui peut
arriver rarement, je l'admets. Eh bien, je dis que le nombre, l'âge et le
revenu, bien sûr, sont trois variables fort importantes pour
l'équité sociale en matière de politique familiale.
Merci.
M. Jolivet: M. le Président.
M. Rochefort: Si vous me permettez quelques commentaires...
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de
Gouin.
M. Rochefort: ...je n'en ai pas pour longtemps, M. le
député de Laviolette. Je comprends que vous avez des questions
pour le Conseil des affaires sociales.
M. Jolivet: Oui.
M. Rochefort: II n'y a pas de problème.
M. Jolivet: Je le sais, mais c'est parce que cela fait au moins
une demi-heure là. J'aurais bien aimé, puisqu'on a
convoqué quelqu'un, d'au moins, le questionner d'ici à la fin. On
a des questions.
M. Rochefort: Non, mais, M. le Président, il est 11
heures; on a jusqu'à 12 h 30.
M. Jolivet: Oui, mais il y a d'autres sujets à
traiter.
M. Rochefort: Oui, mais chacun choisit le sujet qu'il veut
aborder dans sa période, j'imagine.
M. Jolivet: Oui, mais je veux seulement...
Le Président (M. Bélanger): On doit quand
même respecter le temps de parole et le privilège de chacun de
disposer du temps qu'il veut pour questionner le ministre à sa guise.
Dans ce sens-la, on va laisser le député de Gouin terminer en
rappelant qu'on a une invitée ce matin qui est Mme la présidente
du Conseil des affaires sociales et... encore de la famille, peut-on dire.
M. Rochefort: Bien, oui, c'est encore... M. Jolivet: Ah
oui, il est encore...
Le Président (M. Bélanger): Oui, parce que la loi
n'est pas encore changée. J'inviterais le député de Gouin
à continuer, s'il vous plaît.
M. Rochefort: M. le Président, je veux conclure. J'ai deux
ou trois commentaires et une question très factuelle au ministre.
D'abord, sur la question d'équité, je crois comprendre un peu
mieux votre philosophie. Je pense qu'on emploie l'expression
équité dans deux sens: vous lui donnez un sens un peu
différent de l'utilisation générale qu'on en a faite au
fil des années en parlant d'équité dans les programmes
sociaux.
De la façon dont vous la présentiez, j'avoue qu'avec les
références et le sens qu'on lui donne habituellement, vous alliez
plus dans le sens de dire qu'on va cibler très directement. Dans le
raisonnement que vous développez, c'est évident que toute mesure
qui visera a aider un nombre d'enfants va évidemment finir par aider
davantage ceux qui en ont plus que ceux qui en ont moins.
Donc, dans ce sens-là, c'est évident qu'on se rejoint. En
tout cas, pour moi, B y a vraiment un problème d'utilisation de
l'expression d'équité compte tenu des références
plus habituelles dans le domaine social. D'autre part, je vous soumettrai un
exemple que votre collègue de l'Habitation a véhiculé
longtemps à la suite d'une décision qu'il a prise dès son
arrivée au ministère et qui illustre une des craintes que j'ai
quand je parle du dosage entre les deux aspects d'une éventuelle
politique de famille et ce, d'autant plus qu'il semble que, maintenant, on va
revenir en arrière.
Quand le ministre actuel, le responsable de l'Habitation, a aboli le
programme d'accès à la propriété pour les jeunes
ménages, il nous donnait un argument qu'il tenait de votre gouvernement
après votre élection. Il disait qu'étant donné son
volet nataliste, ce programme n'a pas prouvé que les ménages qui
en avaient bénéficié aient eu un taux de natalité
différent de celui des ménages qui n'en avaient pas
bénéficié ou profité. Pourquoi, disait-il,
continuer le programme d'accession aux propriétés? Et il a mis la
clé dans la porte le lendemain matin.
Cela ne s'est pas fait il y a 64 ans. Cela s'est fait il n'y a pas
longtemps. Vous étiez au Conseil des ministres et c'est ce type
d'attitude qui, d'après moi, est une attitude à courte vue et
bêtement trop ciblée avec les résultats qu'aujourd'hui, le
premier ministre du même ministre du même gouvernement nous annonce
dans son message inaugural, dans le chapeau politique familiale, qu'il va
mettre en place un programme d'accession à la propriété
qui tiendra compte des préoccupations familiales.
C'est un exemple pour bien illustrer la prudence à laquelle je
faisais référence et à laquelle vous vous dites, de toute
façon, sensibilisé depuis longtemps.
D'autre part, je veux un commentaire sur le dossier des allocations
familiales. Dans une assemblée électorale du comté de
Beauce-Sud ou du comté de Gouin, le discours que vous avez tenu serait
sympathique. Mais honnêtement, ne faites pas plus de millage que cela,
ici, il n'y a pas de millage à faire là-dessus. On a au moins une
belle responsabilité partagée, quelqu'un y a pensé et un
autre l'a réalisé. Cela fait au moins du 50-50.
Pendant ce temps, pendant que les coqs se battent comme s'ils
étaient dans le comté de Beauce-Sud ou dans le comté de
Gouin en pleine campagne électorale, H n'y a pas beaucoup de familles
qui bénéficient de la modification qui devrait être faite
et complétée à partir de celle qui a été
amorcée au dernier budget et que vous devrez faire au prochain si vous
voulez vraiment que vos gestes soient conformes au discours que vous nous
tenez.
Finalement, et je termine là-dessus, M. le Président,
j'aimerais savoir... Vous avez repris quatre éléments
abordés par le premier ministre dans le discours d'ouverture: le soutien
économi-
que qui existe déjà, dites-vous et qui devra être
accru, le service de garde, les normes du travail et l'habitation. Y a-t-il au
moins un échéancier d'arrêté? Pas quant à
l'annonce, on comprend que le soutien financier sera dans le budget et qu'il
reste à établir la date du budget et à s'assurer qu'H n'y
ait pas de fuite, mais pour le reste... Pour les services de garde, la ministre
nous dit: J'aurai une politique mais par rapport à vos
préoccupations et à vos responsabilités, quand cela
devrait-il être? On sait que les normes du travail vont nécessiter
des modifications législatives. Le 15 mai, cela s'en vient vite si on
veut légiférer avant le 21 juin. Et, finalement, pour
l'habitation, je comprends que ce n'est pas compliqué. Si on remet le
progamme qu'il a aboli, ceia va prendre dix minutes et on ne fera pas trop de
débats sur l'erreur qu'H a commise, bon. Mais y a-t-y au moins un
échéancier d'arrêté pour ces quatre
éléments? Je termine avec cela, M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): M. le ministre.
M. Dutil: M. le Président, il y a eu un discours
d'ouverture dont la portée maximale est, je pense bien, d'ici à
la fin de notre mandat. C'est clair? On a dit qu'on mettrait en place cet
ensemble de mesures d'ici à la fin de notre mandat et c'est cela
l'échéancier, le plus rapidement possible. Le
député de Gouin est bien sensible, je le vois, à la date
du discours sur le budget. J'aimerais pouvoir lui en donner la date mais comme
chacun le sait, c'est un secret bien gardé...
M. Rochefort: ...à l'occasion...
M. Dutil: ...et il le saura en même temps que tout le
monde. Il pourra être en mesure de constater les efforts du gouvernement
quant à la politique familiale. J'ai dit tout à l'heure, et j'ai
répété que nous avons travaillé, que nous avons
fait nos devoirs à ce sujet, au chapitre du soutien économique.
Nous faisons habituellement nos devoirs quant aux autres dossiers qu'il a
soulevés. Quand le gouvernement décidera d'en faire l'annonce, il
la fera. Mais l'horizon, c'est d'ici à la fin de notre mandat, M. le
Président. Nous avons été élus, comme vous le
savez, pour cinq ans, entre quatre et cinq ans. La tradition voulait que les
mandats soient de quatre ans, cette tradition a été un peu
écorchée par le Parti québécois et c'est rendu
à quatre ans et demi. Le mandat officiel est de cinq ans. D'ici
là - nous sommes au pouvoir depuis deux ans et demi - ce qui a
été prévu dans le discours d'ouverture sera mis en place
pour le bien-être des familles du Québec.
M. Rochefort: Je dirai simplement, M. le Président, que
j'espère que c'est simplement parce que le ministre ne veut pas nous
donner son échéancier, mais ie souhaite au moins au'il en ait
un.
M. Jolivet: M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Laviolette.
M. Jolivet: Oui, merci, M. le Président. En parlant
d'écorchage, il faudrait peut-être que le ministre se souvienne
que celui qui, le premier, a écorché le rite de quatre ans, c'est
l'actuel premier ministre, avec des élections après trois ans.
C'est à l'inverse, mais il a subi les conséquences de son geste,
à l'époque.
Le Président (M. Bélanger): ...un contrat de quatre
ans.
M. Jolivet: J'aimerais demander au Conseil des affaires sociales
et de la famille, M. le Président, d'être là pour qu'on
puisse. Mme Blanchet.
Le Président (M. Bélanger): Mme la
présidente du Conseil des affaires sociales et de la famille. Dr
Blanchet.
M. Jolivet: Je vais commencer, M. le Président, d'abord en
saluant Mme Blanchet, la remerciant d'être ici, à notre demande,
par l'intermédiaire du ministre et en lui donnant quelques
éléments pour l'ensemble des questions qu'on aura à poser
qui sont les suivants: D'abord, le budget de 1988-1989 qui nous est
donné est de l'ordre de 800 000 $. On sait qu'une partie de cette somme
va aller au Conseil de la famille qui sera prochainement créé. On
sait aussi qu'il y a cinq postes vacants dont les mandats sont échus au
conseil d'administration. Les dernières nominations remontent au Dr
Laurin à l'époque. Deux mandats ont été
donnés depuis le 12 décembre 1985: le premier est un mandat sur
la promotion de la santé dans les entreprises; le deuxième, de
produire un avis sur le document de consultation de la politique familiale.
On a fait mention, lors de l'étude du projet de loi 94, de la
nécessité de conserver un organisme intersectoriel qui s'occupe
des questions de santé, de services sociaux, de la
sécurité du revenu et de la famille et qui ne soit pas
attaché, quant à nous, à un ministère.
Or, depuis deux ans, le conseil a produit six avis sur la famille en
utilisant le volet: attirer l'attention du ministre. Il a produit deux avis sur
la sécurité du revenu et un sur les sages-femmes. Maintenant,
selon ce que l'on sait, il est en train de préparer une réaction
au rapport ' Rochon.
L'ensemble de tout cela nous invite donc à vous poser quelques
questions, Mme la présidente. Dans les discussions que vous avez eues,
le budget actuellement de 800 000 $ va probablement être ameuté
dans la mise sur pied du
Conseil de la famille. Donc, étant donné que ce volet va
être confié au Conseil de la famille, quel est, de ces 800 000 $,
selon les discussions que vous avez actuellement, le montant d'argent qui vous
sera retiré?
Conseil des affaires sociales et de la famille
Mme Blanchet (Madeleine): Pour ce que j'en sais, M. le
député de Laviolette. D'abord, je voudrais peut-être
rectifier quelque chose. Nous avons trois ministres. M. Paradis est aussi notre
ministre. Il a le droit de partir avec le tiers de nos effectifs, ce qui
réduirait à 10. M. Dutil a le droit de partir avec 5 de nos
effectifs, ce qui réduirait à 5.
D'autre part, comme il est question de scinder services de santé
de services sociaux - du moins, c'est une idée du Conseil du
trésor - chacun de ces ministères aurait droit à deux
postes et demie. Je pense que nous sommes dans l'absurdité totale.
Pour ma part, je dois certainement quitter la Fonction publique
puisqu'il ne semble pas y avoir de place pour la fonction consultative
intersectorielle au gouvernement à l'heure actuelle. C'est très
dommage parce que les acquis du passé nous montrent que Claude
Castonguay, quand il avait mis sur pied un organisme de ce genre, avait eu une
pensée sociale et économique très profonde. Pour des
raisons évidentes, chaque ministère ou chaque ministre veut avoir
son organisme consultatif en choissisant, bien entendu, ses collaborateurs.
C'est absolument normal.
Cependant on reste, pour l'ensemble du gouvernement, avec une absence de
coordination pour les dossiers intersectoriels qui sont les plus grandes
préoccupations actuelles du gouvernement à l'exception de la
langue, peut-être. Ce sont les dossiers qui concernent la population, le
développement régional, la luttre contre la pauvreté,
dossiers dont le conseil s'occupe en ce moment.
Nous organisons un séminaire sur la population le 15 juin. Nous
en avons un à caractère international en préparation pour
l'automne. Nous avons un dossier extrêmement important de lutte contre la
pauvreté grâce au développement régional. M. le
député, nous avons plus que la réaction à la
commission Rochon. Nous avons également une étude en marche sur
le financement des services de santé et des services sociaux puisque la
commission Rochon a passé à côté de la question.
Je crois qu'il s'agit là de dossiers très importants qui
vont devoir être menés. Je ne sais pas où, ni quand mais il
est certain que nous ne pourrons plus le faire.
M. Jolivet: Dans le contexte où vous fartes mention du
tiers, tiers et tiers, on sait qu'il y a des discussions actuellement avec le
ministre de la Sécurité du revenu concernant les cinq postes de
la partie "revenu". Vous vous sentez comment dans tout cela avec votre conseil
qui est encore là?
Mme Blanchet: Je sens que notre conseil n'est plus
désiré. On élimine, à toutes fins utiles, l'action
intersectorielle du gouvernement. C'est ce dont je veux traiter aujourd'hui
parce que je pense que c'est extrêmement dangereux.
M. Jolivet: Est-ce que cela Inquiète le conseil?
Mme Blanchet: Cela m'inquiète, bien sûr. Je suis
là pour défendre mes crédits mais c'est bien plus grave
que l'on pense. Ce n'est pas une question de défense de crédits.
On parle d'orientations très fondamentales du gouvernement. On parle des
choses qui sont les préoccupations immédiates du premier
ministre. On va enlever le seul organisme qui a ses dossiers-là entre
les mains. Je pense qu'il a fait une bonne job dans le passé.
M. Jolivet: À ce moment-là, est-ce qu'on peut
comprendre la réaction du ministre - c'est peut-être au ministre
qu'il faudrait poser cette question - qui acceptait un amendement venant du
député de Gouin à l'effet de conserver des
représentants de la famille à l'intérieur du conseil, en
sachant que... (11 h 15)
Mme Blanchet: Ce n'est pas suffisant pour conserver nos
postes.
M. Jolivet: M. le ministre.
M. Dutil: M. le Président, le partage dont on parie
actuellement n'est pas fait. On envisage cinq postes parce qu'on parle d'un
partage équitable. Je voudrais rappeler deux choses. D'abord, la
création d'un conseil de la famille, c'est une revendication qui a
été faite par les gens du milieu lors de la tournée de
consultations qui a eu lieu. C'est une recommandation qui nous est faite par le
document final de ce comité de consultations d'avoir un organisme qui se
préoccuperait spécifiquement des problèmes de la famille
et qui réunirait des gens intéressés au plus haut point
par ses problèmes. Il faut admettre que les problèmes de la
famille touchent beaucoup de secteurs. C'est une décision que nous avons
prise parce que nous étions d'accord avec l'argumentation
présentée par des gens qui ont été consultés
a ce sujet et qui nous ont dit: C'est devenu tellement important qu'on pense
que cela devrait être un conseil relié exclusivement à la
famille.
Ceci dit, la raison pour laquelle j'ai accepté l'amendement la
dernière fois, c'est que je conçois très bien qu'il est
important d'avoir à un Conseil des affaires sociales et de la famille -
qui pourrait s'appeler et qui s'appellera éventuellement, si la loi est
adoptée, le Conseil
des affaires sociales - des représentants des familles. Je n'ai
pas besoin de vous rappeler la qualité, le haut niveau de l'intervention
qu'a faite là-dessus le député de Gouin, seul
représentant indépendant en Chambre. Il a vu la question et t'a
plaidée d'une façon magistrale. C'est la raison pour laquelle
nous avons accepté cet amendement qui vient justement permettre au
Conseil des affaires sociales et de la famille d'avoir recours à des
gens qui se préoccupent de la famille.
Quant au partage, on va évidemment parler du budget du Conseil de
la famille. Les ressources que le Conseil de la famille aura ne sont pas
entièrement prises - évidemment, cela aurait comme
conséquence de mettre en péril l'existence même du Conseil
des affaires sociales et de la famille, si c'était le cas - au Conseil
des affaires sociales et de fa famille. On essaie de départager. Il y
aura des discussions à terminer là-dessus. Quelle est la juste
proportion accaparée par le Conseil des affaires sociales et de la
famille qui concernait la famille? Et, cette juste proportion, il s'agit de la
transférer au Conseil de la famille.
M. Jolivet: Mme Blanchet a peut-être quelque chose à
ajouter sur cette question.
Mme Blanchet: Je vais vous parler de gestionnaire à
gestionnaire. Je sais que vous êtes un chef d'entreprise, que votre
famille... Un conseil n'est pas viable en bas de seize, dix-sept... Je veux
dire viable sur la place publique, viable en faisant des bonnes études.
C'est cela, le problème. Je ne sais pas à quel niveau un
secrétariat à la famille est viable, mais je soupçonne que
ce ne l'est pas avec sept postes. Si le Conseil du trésor a
décidé d'allouer onze postes à la famille, ce n'est
déjà pas beaucoup. Ce n'est pas en venant les chercher dans notre
conseil, en tuant ce conseil, en somme, ou en coupant le bébé en
deux ou en trois qu'on va arriver à avoir un bébé vivant.
D'ailleurs, à mon sens, le bébé est très
prématuré.
M. Jolivet: Des gens ont dit que le Conseil des affaires sociales
et de la famille avait commencé à se préoccuper de la
famille le jour où il s'est aperçu qu'il serait amputé du
travail.
Mme Blanchet: C'est une bonne question, mais ce n'est pas exact.
Mon premier mandat m'est venu de M. René Lévesque. En 1980, quand
j'ai été nommée, M. Lévesque m'a dit: La famille,
cela m'intéresse. Mais, après cela, les ministres successifs
m'ont dit: Cela ne nous intéresse pas. Ils nous ont fait travailler sur
la santé. Ensuite, Mme Lavoie-Roux a dit: Cela m'intéresse, mais
ce qui m'intéresse, c'est la violence, la négligence, etc. Alors,
on a fait des choses à cet égard, on a commencé
là-dessus, mais, toujours, nous restions avec l'idée que les
questions démographiques étaient très
préoccupantes. Le conseil, même avant que je ne sois là, a
toujours eu une très grande préoccupation à propos des
questions de natalité. Je dois dire que mon prédécesseur a
été le premier à mettre cela sur la place publique. Mais
vous comprenez qu'un conseil obéit à des mandats. Heureusement,
la ministre ne nous en a pas donné beaucoup et on a pu répondre
à ce qu'on pensait être le plus important. On s'est situé
dans l'actualité. On a préparé six avis. On en a
même fait un pour le gouvernement fédéral. En
préparant avis, on s'est très bien rendu compte... D'ailleurs, en
1982, nous avons publié un document extrêmement important qui
s'appelle La famille demain, qui résume et est tout à fait
près des orientations. Je pense que M. Aubert Ouellet m'a dit: Au fond,
on ne lisait pas ce que vous produisiez parce qu'on ne voulait pas le lire et
qu'on voulait... L'ex-secré-taire général associé,
on permettra de le dire, avait une vision totalement différente de la
famille. Il la voyait de façon très intimiste, le rapport
homme-femme, etc. C'est une façon de voir les choses. C'est un dossier
où il y a une confusion absolument totale, permettez-moi de le dire, et
les problèmes que nous avons dans notre budget ne sont rien à
côté de ce que je pourrais vous dire au sujet de la confusion qui
existe dans ce dossier-là. J'ai travaillé avec cinq ministres
successifs et pas un n'avait la même idée là-dessus. En
plus, nous avons nos valeurs. Chacun d'entre nous a des valeurs, selon que l'on
vient d'une famille de deux, trois ou six enfants, on transpose cela. Pour ce
qui est du public, il ne sait même pas encore de quoi il s'agit. Il ne
sait même pas si le gouvernement devrait s'en mêler. La semaine
prochaine, je participerai à l'émission de Claire Lamarche et la
question est: Est-ce que le gouvernement devrait ou pas s'en mêler? Nous
sommes, dans cette salle, cinq ans en avance sur le peuple. Nous sommes
certainement au moins deux ans en avance sur ce que le gouvernement fera et
nous avons encore le temps.
M.Jolivet: Mais...
Mme Blanchet: Attention! Quand on crée un organisme, il va
rester longtemps. Cela fait huit ans qu'on veut m'abolir et je suis encore
là. On produit encore. On est très dangereux, les conseils. On a
une loi qui nous permet d'être sur la place publique. On a un lien avec
les journalistes. On les voit, je ne dirai pas incestueuse-ment, mais on les
voit. Je m'excuse, il y en a un dans la salle.
M. Jolivet: Mais... Je vais glisser sur la partie de la loi qui
va créer le Conseil de la famille...
Mme Blanchet: Oui, mais, ce qui nous inquiète, M. Jolivet,
c'est que, même si nous conservions les deux personnes qui
représentent les organismes familiaux, notre budget soit
amputé. Nous avons besoin de cinq personnes de plus en ce moment,
pas de cinq de moins, pour remplir des mandats importants qui nous viennent du
plus haut niveau. J'espère qu'on va comprendre cela ici.
M. Jolivet: Avant, je voudrais parler du conseil
d'administration. Après cela, je glisserai sur la loi 94. Le conseil
d'administration a cinq postes vacants. Comment les gens y sont-ils
nommés? Qui vous fait des représentations pour nommer des gens au
conseil d'administration?
Mme Blanchet: Bien, écoutez, je suis très
embêtée, parce que nous avons deux... enfin, je subis les
pressions des organismes syndicaux, de M. Fernand Daoust et de Mme Monique
Simard pour ne pas les nommer, parce qu'ils veulent entrer chez nous.
M. Jolivet: Ils ne sont pas là.
Mme Blanchet: Aucun ministre n'a voulu les nommer, y compris M.
Johnson. Bon, c'est le moment de vérité, disons-le, c'est cela
qui s'est produit. On a peur de cet organisme. Je ne sais pas pourquoi on en a
peur, mais, on en a peur.
M. Jolivet: Mais, actuellement, pour remplacer les cinq
personnes, parce qu'il y a cinq postes vacants, il y a des gens qui continuent
des mandats alors qu'ils devraient quitter.
Mme Blanchet: II n'y a pas de problème pour cela. On peut
même continuer. Tous les mandats sont échus en ce moment, sauf le
mien qui court encore pour deux ans.
M. Jolivet: Deux ans.
Mme Blanchet: Mais, on peut continuer pareil. Tous nos membres
sont là à vie, jusqu'à ce qu'on les nomme ou qu'ils
meurent.
M. Jolivet: Oui, mais, avez-vous eu des recommandations pour
nommer des gens?
Mme Blanchet: II y en a eu. Je ne le dirai pas... Oui, il y en a
eu. Je ne dirai pas d'où cela venait, mais B y en a eu.
M. Jolivet: Cela ne pourrait pas être Alliance
Québec?
Mme Blanchet: Bien... oui.
M. Jolivet: Merci. Que pensez-vous, à ce moment-là,
de la création du projet de loi 94, lequel donne des mandats venant du
ministre lui-même? Vous dites: Je suis liée quand même par
les mandats qu'on a donnés; si on ne m'a pas donné de mandat,
j'ai quand même une marge de . manoeuvre qui me permet d'agir. On a vu
que vous avez présenté des avis en utilisant le volet qui vous a
permis d'attirer l'attention du ministre ou de la ministre. Mais le conseil qui
doit être créé ne semble pas donner une Impression autre
que celle où c'est le ministre qui, finalement, va décider quel
mandat donner. Est-ce que cela ne vous inquiète pas? Quelle est votre
réaction en regard de cette proposition?
Mme Blanchet: Je peux vous dire que Je n'accepterais certainement
pas la présidence d'un tel organisme. C'est très clair. Je pense
qu'il aurait les pieds et les mains liés, qu'il n'aurait pas
suffisamment de personnel même s'il venait en chercher cinq chez nous. Ce
n'est pas viable. C'est né prématurément, c'est
définitivement mort-né. Je n'y crois absolument pas. Je ne suis
pas la seule. Je ne pense pas que les organismes familiaux - cela n'a rien
à voir avec les organismes syndicaux - soient unanimement en faveur de
cela. Dans cette salle, il y a M. Michel Morel, qui a écrit dans les
journaux très récemment et qui n'est pas en faveur du type
d'organisme qui est actuellement suggéré par le projet de loi 94.
Comme je suis extrêmement franche, j'ai toujours dit à M. Dutil
que je n'y étais pas non plus favorable. Je ne suis pas sûre qu'on
se soit très bien compris là-dessus parce qu'on n'a jamais
peut-être regardé cela aussi attentivement que je vous le dis,
qu'on peut le regarder actuellement. Je voudrais, aussi, apporter une autre
dimension. Le public ne réclame pas cela, pas une miette. Les
organismes, ceux qui veulent entrer dans cela, le réclament, sans doute,
mais quel poids politique ont-ils! Je ne veux pas aller trop loin mais
qu'est-ce que le public attend du ministre? il attend des allégements au
fardeau fiscal. Il n'attend pas un autre conseil formé de je ne sais
quoi. Il n'attend pas un déplacement de fonctionnaires. C'est pour cela
que la réaction est extrêmement tiède pour ne pas dire
très négative dans les journaux. Ce n'est pas cela qu'on
attend.
M. Jolivet: Vous avez présenté un avis qui parie de
la création d'un centre de solidarité des familles.
Mme Blanchet: Oui.
M. Jolivet: Le ministre semble dire qu'il n'est pas en
désaccord avec cela, qu'il examine cette possibilité. Il parlait
de la Belgique tout à l'heure quant à la façon de le
financer. Il ne le met pas en contradiction non plus avec le conseil
consultatif de la famille qu'il veut créer. Parlez nous donc d'abord du
centre de solidarité des familles que vous proposez et des joints entre
les deux.
Mme Blanchet: Bon, écoutez cela m'amène à
faire une petite réflexion sur le passé. En 1982, on avait
réclamé un ministre de la Famille. On ne l'a obtenu que
très tard grâce à mon intervention auprès de
René Lévesque. Cela a pris du
temps. En 1982, on pensait encore que cela devait être quelque
chose comme le Conseil du statut de la femme. On se rend bien compte,
actuellement, que c'est une goélette et qu'il faudrait y aller avec un
sous-marin tel que le Secrétariat à la famille et un navire de
guerre tel qu'un vrai conseil. Je pense que c'est cela. Maintenant, il est
important de réaliser que la frégate ce sont les organismes
familiaux, les organismes féminins et tout ce qui dans notre
société représente les familles. Cela ne peut pas
être juste les organismes familiaux non plus, je pense en tout cas. Il y
a les organismes féminins. La femme, c'est quand même la
moitié de la famille. Alors, il faut un centre de solidarité des
familles, c'est absolument évident. Nous en sommes venus à cette
idée en 1986 en écrivant. Investir dans les enfants. Nous
nous rendions très bien compte que, pour le gouvernement l'action
consultative avait beaucoup changé, que des organismes, tels que les
divers types de secrétariat, étaient créés et que
l'exercice de la fonction consultative semblait se modifier très
profondément. Ces organismes représentent, de moins en moins, le
lobby de la population auprès du gouvernement. Le gouvernement
libéral vient d'en créer plusieurs. Il a créé celui
de la jeunesse, celui du statut de l'artiste etc. Ce sont de petits lobbies
internes. Je ne sais pas à quel degré ils seront efficaces mais
je suis absolument persuadée qu'ils seront moins efficaces qu'un centre
de solidarité des familles. Ce qu'il faut entreprendre c'est la lutte
contre Ottawa, contre ce que Wilson fait. C'est cela qui est grave en ce
moment. Le principal bailleur de fonds dans ce dossier, c'est Ottawa. Il faut
s'insurger contre le traitement infligé aux familles par le gouvernement
Mulroney et auparavant par le précédent et peut-être par le
suivant. C'est cela qui est grave. Comment voulez-vous qu'on fasse cela dans un
organisme consultatif du gouvernement du Québec? C'est impossible,
absolument impossible! Il faut absolument que les familles se liguent entre
elles et qu'elles marchent sur la colline parlementaire...
M. Jolivet: Le centre de solidarité aurait...
Mme Blanchet: ...d'Ottawa, d'abord, est-il besoin de le
préciser.
M. Jolivet: Le centre de solidarité des familles que vous
proposez aurait donc pour but de ramasser tous les organismes...
Mme Blanchet: Oui.
M. Jolivet: ...qui touchent à la famille de quelque
façon que ce soit.
Mme Blanchet: Non pas juste ceux-là. M. Jolivet:
Pas juste ceux-là.
Mme Blanchet: D'après moi, les organismes féminins
aussi devraient être là, mais cela pourrait être
décidé ultérieurement. Je pense que ce qu'on a
essayé de faire ici c'est de bien montrer que si le lobby politique des
familles n'existe pas, cela ne servira à rien de créer quelque
organisme que ce soit. C'est inefficace. Dieu sait qu'on a essayé de
créer une coalition des familles! C'est impossible. Aussi longtemps que
les familles ne se prendront pas en main elles-mêmes, il n'y a rien qui
va se produire. C'est cela qui est difficile à l'heure actuelle. Je sais
que le ministre est très conscient de cela. C'est bien dommage qu'on en
soit encore là II y a quelque 104 organismes familiaux. Il y a trois
grands organismes féminins et ils ne se parlent pas beaucoup. Il y a eu
beaucoup de problèmes, je pense. Les organismes familiaux sont
extrêmement dépendants du gouvernement. Les organismes
féminins sont très peu dépendants. Ils se sont
organisés par eux-mêmes et ils semblent avoir des objectifs
beaucoup plus précis, beaucoup plus articulés. Ils ont
créé des centres de femmes. Enfin, ils sont extrêmement
dynamiques. Je ne veux pas dire que les organismes familiaux ne sont pas
dynamiques, mais il sont pluralistes et ils sont divisés entre eux. Ils
réunissent à la fois pro-vie et pro-choix. Vous voyez ce que je
veux dire. Quand on les rencontre et qu'on veut qu'ils se liguent dans une
action vis-à-vis d'Ottawa, ils décompensent totalement, ils ne
savent pas de quoi on parle. (11 h 30)
M. Jolivet: Quand j'ai parlé de la loi 94, j'ai dit: II y
en a qui veulent cela plutôt que rien et d'autres aiment mieux n'avoir
rien plutôt que cela. Actuellement des gens disent...
Mme Blanchet: Oui, je pense que c'est mieux de retarder.
M. Jolivet: Oui, mais il y a des gens qui disent: Écoutez,
vous avez fait mention de cela. Il y a eu plusieurs ministres. Ils n'ont pas
tous la même mentalité, ne prennent pas les mêmes
décisions. Finalement, les gens disent: On a peut-être une chance
avec le projet de loi 94 devant nous d'au moins créer quelque chose qui
nous permette d'avancer. D'autres disent que c'est un danger. Le danger, si on
le crée actuellement, c'est d'en arriver à ce que les gens ne se
fient qu'à cela et que cela n'avance pas.
Mme Blanchet: C'est cela. C'est là qu'est le danger. Il
faut absolument créer à la fois le centre de solidarité et
peut-être un autre organisme. Je me dis pourquoi pas plutôt pour
l'enfance, pour l'enfant? Il n'y a que les petits et les personnes
âgées qui ne sont pas représentés en ce moment
à l'exécutif. Peut-être que ce serait une idée. Ce
serait moins dangereux pour les organismes féminins également.
Ils verraient moins cela venir. Ne nous leurrons pas, le secrétariat
à la Famille et le secrétariat à la
Condition féminine vont devoir partager leurs effectifs.
Le conseil... Ce n'est pas le nôtre qui va perdre
là-dedans, c'est le Conseil du statut de la femme parce que le
nôtre est déjà intersectoriel et y fonctionne.
M. Jolivet: Mais les gens ont parlé de la
possibilité d'avoir - j'en ai fait mention lors de l'étude du
projet de loi 94 - d'un ministère de la population et de la famille ou
de la jeune enfance. Il y a des gens qui ont dit: Un instant! Ne faites pas
cela, c'est justement le lobby des patrons qui voudraient en arriver à
une chose semblable pour contrôler l'ensemble démographique.
Mme Blanchet: Oui. Mais ma solution serait la suivante, si vous
permettez. Cela fait quand même un bout de temps qu'on
réfléchit là-dessus. Je pense que ce serait bon qu'il y
ait un conseil de la famille et de l'enfance à l'Exécutif, mais
certainement pas aux Affaires sociales. On n'est pas au même niveau de
préoccupations, absolument pas. Je pense que c'est vous-même qui
aviez fait une suggestion à cet égard.
L'Opposition officielle a parfois de bonnes idées. Elle a
également souvent de bonnes idées.
M. Jolivet: On n'est pas toujours écoutés.
Mme Blanchet: Ah bon! Je suis également en contact avec
les organismes fédéraux qui partagent les mêmes objectifs
que nous. Si on ne se ligue pas tout autour de l'image de l'enfant, je pense
qu'on va se bouffer réciproquement. C'est dangereux, en ce moment, parce
que les femmes ont l'impression qu'on leur enlève quelque chose. Il ne
faut pas nier qu'il y a ce danger-là aussi, tandis qu'autour de
l'enfant, comme le disait Victor Hugo: Lorsque l'enfant parait, tout le monde
se rallie ou quelque chose dans ce genre. En tout cas, tout le monde
sourit.
Il me semble que ce serait une idée assez formidable. Plus j'y
pense, plus je trouve que cela pourrait être une très bonne
solution pourvu qu'il s'agisse d'un conseil qui se situe au niveau de
l'exécutif, là où il se trouve. Mais, là, nous
faisons face à un problème: M commence à y avoir pas mal
de monde à l'exécutif et cela risque...
Je ne sais pas. Il me semble qu'avant le remaniement ministériel,
I n'y a absolument rien qui presse et qu'il faut peut-être
résister à l'idée de créer des affaires avec
lesquelles on va être pris après. Cela fait huit ans que je vis
dans un organisme qui n'est pas voulu et je considère qu'après
huit ans, H est encore plus vigoureux qu'H l'était. Chaque fois qu'on va
au Conseil du trésor, on réussit toujours à obtenir de
l'argent.
Alors, le problème que j'ai, c'est d'être dans un
ministère qui ne nous veut pas et où on sabre constamment mes
budgets. Récemment, je recevais une lettre du sous-ministre - si vous
permettez, c'est plus administratif - disant que le Conseil du trésor
nous sabrait. Je téléphone et c'est absolument faux. Je m'excuse,
mais notre problème à nous, c'est d'être dans un
ministère qui ne nous comprend pas et avec lequel nous n'avons aucun
dialogue. Je ne parle pas de M. Dutil, là.
M. Dutil: Vous parlez des fonctionnaires?
Mme Blanchet: Je parle des fonctionnaires. Les fonctionnaires
nous nuisent.
M. Jolivet: Est-ce que...
Une voix:...
Mme Blanchet: Les hauts-fonctionnaires.
M. Dutil: M. le Président, je pense que...
Mme Blanchet: On va arrêter là.
M. Dutil: ...on ne devrait pas tomber dans les chicanes
interministérielles chez les fonctionnaires. On sait qu'il y a des
luttes qui se font et ce n'est pas nouveau, cela.
M. Jolivet: Ah bon! Je pensais que c'était fini, cela.
M. Dutil: Non, M. le Président.
Mme Blanchet: Je m'excuse, M. Dutil. Je ne voudrais pas vous
interrompre, mais seulement ajouter que le gros problème, c'est qu'ils
sabrent dans nos budgets. Il faut tout le temps intervenir nous-mêmes
auprès du Conseil du trésor. Avec le Conseil du trésor, je
n'ai aucun problème; je pourrais obtenir cinq postes de plus
rapidement.
M. Jolivet: Donc, à ce moment-là...
M. Rochefort: II y a un membre pas loin...
M. Jolivet: ...il y a le phénomène...
Mme Blanchet: Je sais qu'il va me défendre. M. Gobeil nous
aime beaucoup.
M. Jolivet: Oui, il y a un phénomène... Les gens
disent que le Conseil des affaires sociales et de la famille veut
préserver ses acquis. Vous dites: On se bat pour rester.
Mme Blanchet: Ah non! On veut bien plus que nos acquis, on en
veut bien plus que cela.
M. Jolivet: Non, mais ce que je veux dire... Les gens disent: Ils
veulent rester là et c'est pour cela qu'ils montrent des dents
actuellement.
Mme Blanchet: Ah non, non! Pas du tout! Pour nous, ce qui est
très important, c'est le
maintien de la fonction consultative intersectorielle au gouvernement.
Le gouvernement a énormément besoin d'organismes tampons qui lui
permettent de faire son virage à la fois économique et social. Je
pense que le conseil peut servir à cet égard. Personnellement -
et je suis sûr que les membres de mon conseil seraient de cet avis - nous
sommes tout à fait disposés à céder au nouveau
secrétariat à la famille, nouvellement dirigé, la partie
qui concerne les aspects plus techniques du dossier. Dans ce dossier, nous
sommes prêts à garder encore, si vous voulez, le bastion
jusqu'à ce que des décisions importantes puissent être
prises quant à la place où devrait se situer un nouveau conseil
de la famille, de l'enfance ou des deux. Je pense que ce conseil doit
être où va se situer le secrétariat. Je dirais à
tout le monde qu'il faut se dépêcher à quitter un
ministère de la Santé et des Services sociaux qui n'a rien
à voir, finalement, avec les questions démographiques et les
questions de famille.
M. Jolivet: En tout cas, lorsque j'entends parler aujourd'hui,
par mes enfants, des sévices de différentes natures subis par les
enfants, il y une urgence actuelle...
Mme Bianchet: Oui.
M. Jolivet: ...au même titre que celle qu'on a eue pour la
violence faite aux femmes.
Mme Bianchet: Nous préparons d'ailleurs un avis
là-dessus pour le mois d'octobre. Voyez que nous sommes optimistes.
M. Jolivet: Dans votre avis sur la politique familiale, vous
proposez d'augmenter les allocations familiales et de les fixer à 100 $
par mois par enfant quel que soit son...
Mme Blanchet: 100 $.
M. Jolivet: Pardon?
Mme Blanchet: 100 $.
M. Jolivet: Oui, 100 $ par mois quel que sort son rang et qui
seraient non imposables, non remboursables et indexées. Vous proposez en
même temps une allocation de bienvenue de 1000$ pour le premier et de 500
$ pour les suivants. Je voudrais savoir, de votre part, ce que vous proposez au
gouvernement dans ce contexte-là par rapport aux premier et
troisième enfants.
Mme Bianchet: D'abord, le conseil a voulu préserver ce que
le ministre disait d'ailleurs dans son exposé: Faire une sorte de
"mixte", si vous me permettez l'expression, entre une politique avisée,
plus démographique et une politique de protection, si vous voulez, des
familles et peut-être des familles les plus démunies. On est tout
à fait conscient que le gouvernement, au cours des deux dernières
années, a injecté 500 000 000 $ au profit des familles. Une bonne
partie de cela est allée aux familles les plus démunies et bravo!
Je pense que c'est là qu'il fallait commencer et c'est très
bien.
Par ailleurs, nous en sommes maintenant rendus au moment où nous
devrions aider les familles qui ont le plus d'enfants et qui, dans l'ensemble,
ne sont pas les plus démunies. Le panorama a assez changé.
Actuellement, c'est assez différent, ce sont au fond les familles de la
classe moyenne qui ont deux enfants; une partie d'entre elles en ont trois.
Nous en sommes là. La position du conseil à cet égard a
été, je dirais, plus morale que comptable. Mais les deux se
défendent. Effectivement, un premier enfant, cela coûte plus cher
qu'un deuxième et le troisième coûte souvent le salaire de
la mère à l'extérieur, il coûte très cher. Le
conseil avait résolu un peu la question - c'est un organisme un peu
moral et assez éthique à certains égards - en disant: Tout
enfant ayant une valeur égale aux yeux des parents, pourquoi
l'État ne dirait-il pas que tout enfant a une valeur égale
à ses yeux? C'est un peu cela notre position. Néanmoins, pour
bien accueillir un enfant il y a des déboursés à faire et
nous pensons que l'allocation de bienvenue pourrait servir à payer une
partie évidemment très minime de ce que cela coûte, mais
quand même, une partie du mobilier de la chambre, les sièges
d'auto, etc.
Dans le cas d'un premier enfant, nous pensons que l'allocation de
bienvenue devrait être de 1000 $ et de 500 $ pour les enfants
subséquents. Quant au troisième enfant, nous pensons surtout
à une aide indirecte venant plutôt d'un programme d'habitation
puisque c'est à ce moment-là qu'on doit faire des
rénovations dans son foyer ou même acheter une maison et parfois,
c'est une condition à la venue d'un troisième enfant,
l'installation dans une maison. Nous ne croyons pas que tout ceci, M. le
député, soit nécessairement l'aspect le plus nataliste de
notre avis. Je pense que l'aspect le plus nataliste, c'est de procurer du
travail aux jeunes, de protéger ces emplois, d'avoir une
assurance-maternité convenable. C'est là l'aspect le plus
nataliste. C'est ce que je vais d'ailleurs dire à Droit de parole,
parce que je pense qu'il ne faut faire dévier le débat de
cela. C'est le plus important. Je suis persuadée que le ministre pense
cela aussi, parce qu'on en a beaucoup parlé.
Et le lien avec les entreprises, ce qu'il va falloir faire auprès
des entreprises... Je me réjouis que le ministre soit lui-même
issu d'une famille où il y a tant de chefs d'entreprise, je crois que sa
voix va être entendue par les chefs d'entreprise. On a rencontré
le Conseil du patronat et il y a une certaine ouverture; elle n'est pas grosse
mais elle existe.
Alors moi, je pense que notre avis, on y a
réfléchi, on a consulté. Je pense aussi qu'il
reflète beaucoup la situation des jeunes couples à l'heure
actuelle. Déjà, arrêter l'hémorragie serait un
début très modeste, arrêter la descente, cela serait
déjà quelque chose. Avant qu'on ait des troisièmes
supplémentaires, cela va prendre du temps. Cela prendra peut-être
vingt ans. Ils ne sont peut-être pas encore nés ceux qui vont nous
amener au 2,1. Des objectifs très modestes: d'abord arrêter
l'hémorragie. En tant que médecin, on arrête d'abord
l'hémorragie; on fait un garrot avant de plâtrer le bras lors d'un
accident. Je dirais qu'on est à peu près dans cette
situation-là. Et pour arrêter l'hémorragie, il faut
vraiment travailler en fonction du travail des jeunes, des emplois, des
conditions dans lesquelles les femmes vont pouvoir vivre leur maternité.
Si c'est trop difficile, elles n'y reviendront pas. On a même,
là-dedans, parlé des sages-femmes. On est tellement
intersectoriel qu'on a mis l'allocation de bienvenue conditionnelle à un
suivi adéquat. On pensait aux sages-femmes, évidemment.
Les conditions, les obstacles dont parlait le ministre sont
matériels, ils sont aussi immatériels. Ils viennent des
mentalités, des attitudes. Combien de jeunes vivent actuellement dans
leur famille? Combien de jeunes hommes vivent dans leur famille parce qu'ils
n'ont pas de travail. Comme, actuellement, H n'est pas nécessaire
d'être marié pour bénéficier des faveurs des jeunes
filles, Ils n'ont même pas besoin de se marier. Et quand on pense
à l'engagement que cela peut signifier pour deux jeunes d'avoir des
enfants, bien c'est quelque chose, c'est énorme. Et le premier enfant au
Québec, contrairement à ailleurs, est en baisse à cause de
cela. C'est à cause de cela qu'il est en baisse, à cause des
valeurs de ces jeunes-là. C'est très profond, cela; c'est bien
plus profond, évidemment, que l'aide matérielle que l'État
va pouvoir accorder.
En ce qui concerne les familles de trois enfants: là, cela va
être très difficile. Parce que... Bon, je comprends qu'il y en a
quelques unes. Je ne suis pas sûre que les finances-Personne d'entre nous
n'a les chiffres pour pouvoir décider si on doit accorder de l'aide aux
familles de trois enfants. Je suis d'accord avec le ministre pour dire que les
familles de quatre et cinq enfants s'appauvrissent énormément,
qu'elles ont certainement besoin d'aide, parce que... Trois enfants, je ne le
sais pas... Il y a quand même, parmi ces familles-là, un tas de
professionnels dont les deux travaillent et qui ont trois enfants. Il y a des
familles assez riches parmi celles-là, et je ne suis pas sûre
qu'on devrait les avantager. Je suis même assurée qu'elles vont
avoir trois enfants même si on ne fait absolument rien.
Alors c'est un petit peu cela, si vous voulez, le débat
là-dessus.
Quant aux services de garde, on en a très peu parlé parce
qu'il s'en vient un programme à cet égard-là; on fait tout
à fait confiance au gouvernement, d'autant plus que monsieur Epp a fait
une injection d'argent. Mais la grande préoccupation, c'est
d'arrêter l'hémorragie. Cela ne va pas être facile.
Deuxièmement... Ah oui! il y a une légère remontée
des premiers enfants. Ce sont les seuls qui bougent un peu vers le haut. Mais
si on se compare aux autres provinces, nous sommes la seule au Canada à
avoir ce séisme des premiers et deuxièmes enfants. Absolument les
seuls. En Ontario, cela remonte partout: même le cinquième enfant
est en augmentation en Ontario.
M. Jolivet: En tout cas, je dois dire, pour revenir à un
cas personnel, que mon épouse et moi avons six enfants. On est parmi
ceux qui, justement, peu importent les revenus méritent des fois...
Une voix: S'appauvrissent.
M. Jolivet: Oui, oui. Oui, oui. ...Mais, ce sont des choix
personnels.
Mme Blanchet: Monsieur Jolivet? M. Jolivet: Oui.
Mme Blanchet: Pensons à la France quand elle a fait sa
politique du troisième enfant, c'était tout à fait cynique
parce qu'au fond, c'étaient les fonctionnaires qui avaient trois enfants
qui l'avaient faite et c'était pour leur propre
bénéfice.
M. Jolivet: Ha! ha! ha! ha!
Mme Blanchet: Je ne pense pas qu'on fasse cela au
Québec.
M. Jolivet: J'avais une autre question mais vous y avez
répondu à travers la réponse que vous m'avez
donnée, c'était concernant justement votre proposition d'aide
à l'habitation pour le troisième enfant. Il y avait un programme
qui existait, qui était...
Mme Blanchet: Oui, qui est disparu.
M. Jolivet: ... l'accessibilité à la
propriété, qui est disparu, mais qu'on semble devoir remettre.
Bien là, je fais ma partie à moi qui concerne le travail qu'on a
à faire comme député de l'Opposition en disant au ministre
qu'ils ont peut-être commis une erreur et qu'ils s'aperçoivent
qu'ils l'ont commise. Ils veulent la corriger, et là, les
députés du pouvoir applaudiront très fort une politique
qui n'aurait jamais dû être enlevée. Mais en tout cas, c'est
une autre question.
Ce programme-là, vous le voyez de quelle façon quant aux
modalités d'application? Est-ce que vous le voyez comme celui
d'autrefois ou autrement? (11 h 45)
Mme Blanche*: Celui qui était là autrefois M.
Lévesque, avait une vision des choses qui était de favoriser tous
les enfants, quel que soit leur rang, qui était peut-être la
bonne; c'était peut-être une vision d'avenir, parce que
c'était un homme très profond qui avait une vision d'avenir. Il
avait peut-être prévu que les jeunes auraient de la
difficulté à avoir un premier enfant. Néanmoins, dans le
contexte actuel, je me demande si ce ne serait pas plus réaliste de le
réserver à ceux qui sont effectivement en situation d'avoir un
troisième enfant ou qui sont en train de l'avoir. Ce n'est pas facile
tout cela parce que... Nous n'avons pas beaucoup parlé avec les gens de
la Société d'habitation du Québec nous disant que ce
serait peut-être mieux de laisser cela à notre collègue au
Secrétariat à la famille et à M. Dut», bien
sûr.
Je dois vous dire qu'on est très conscient de ce qui est
demandé. Les attentes de la population sont absolument énormes
à l'endroit du gouvernement. Je suis très inquiète
à propos du budget. Je ne sais pas quand ce sera, mais je suis
très inquiète parce que nous sommes demandés pour le
commenter et j'ai peur qu'il n'y ait pas grand-chose là-dedans. Je vous
le dis franchement, j'ai peur parce qu'on n'a pas eu le temps au fond de faire
des changements sans doute. On va faire ce que l'on peut pour couvrir cela un
peu, mais c'est dangereux parce que la population est en très grande
attente.
Quand il y a eu la récupération des allocations
familiales, la population n'a vu que cela. Évidemment, ce sont des
sommes absolument dérisoires, seulement elles sont visibles. Même
si on met 500 000 000 $, s'H est invisible, si la population ne l'a pas vu,
elle pense encore que le gouvernement n'a rien fait. C'est un peu cela. On est
en contact constant avec la population par le biais des sondages, des entrevues
téléphoniques, ou voit le niveau d'attente. Cela
m'inquiète assez. Je ne sais pas ce que l'on va faire.
M. Jolivet: En ce qui concerne le service de garde, il y a une
discussion entre le régime de garderie universelle gratuit et celui du
secteur privé. Vous voyez cela comment? Quelles sont vos
propositions?
Mme Blanchet: Je dois vous dire, M. le député, que
nous n'avons pas poussé extrêmement loin notre réflexion
nous disant qu'il y a beaucoup de gens au gouvernement qui pensent à
cela, notamment ceux concernés par la condition féminine.
Néanmoins, il nous apparaissait important de distinguer entre l'enfant
de 0 à 3 ans et l'enfant qui a entre 3 et 6 ans. L'enfant de 0 à
3 ans doit retrouver les conditions du milieu familial, de sorte que c'est sans
doute la garde en milieu familial avec quelques variantes qui serait
préférable. Il faut penser que le pool des femmes à la
maison s'en va en rétrécissant et qu'à un moment
donné on ne pourra plus mettre son enfant chez la voisine, que d'autre
part c'est beaucoup trop cher pour avoir un gardienne à la maison,
même si la garderie collective n'est pas une solution idéale pour
ces enfants. Alors, je ne voudrais pas qu'on fasse comme dans les pays de l'Est
où ces femmes doivent transporter leurs bébés dans les
usines. Je pense qu'on a assez de nos travailleurs exposés, sans exposer
nos bébés en plus.
C'est très difficile à solutionner. Le congé
parental est peut-être une solution. Les femmes n'osent pas
réclamer de salaire à la maison, mais il faudra peut-être
penser à des choses qui ont l'air très traditionnelles, comme un
salaire à temps partiel ou quelque chose de ce genre là...
M. Jolivet: À partir du congé parental puis des
modalités, quand on...
Mme Blanchet: Ce sont les modalités de flexibilité
du monde du travail qui nous paraissent être les mesures à mettre
de l'avant. Je dois dire que les entreprises sont très réticentes
pour ne pas dire contre. D'après nos contacts avec le Conseil du
patronat, elles ne sont pas rendues là du tout.
M. Jolivet: On se souvient des batailles qui ont eu lieu d'abord
pour les congés de maternité. En 1965, dans ma propre
région, alors que j'étais responsable syndical, neuf femmes
avaient été congédiées par une commission scolaire
parce qu'elles étaient propices à avoir un enfant. Il a fallu
faire une bataille qu'on a gagnée en 1968. Entre-temps, les neufs femmes
avaient été réintégrées, mais cela a
coûté énormément cher à la commission
scolaire. Ce sont les premières batailles, à l'époque. Il
y a aussi le congé parental. Il y a alors des choix qui doivent
être faits entre les deux conjoints pour savoir laquelle des deux
personnes, après le congé de maternité, pourra être
celle qui demeure au foyer. Donc, c'est un changement de mentalité en
même temps.
C'est toute la question des changements concernant le temps partiel,
occasionnel, donc un Code du travail changé pour permettre justement des
possibilités de retour au travail dans des conditions meilleures avec
conservation des acquis. C'est une question de changement complet de
mentalité.
Mme Blanchet: C'est très complet. D'abord, si on avait
déjà une assurance maternité convenable, deux mois avant,
six mois après, ce serait déjà bien. Si, après
cela, il y a possibilité d'avoir des congés parentaux comme cela
existe dans la fonction publique et paraputXique... Je pense qu'il y a à
peu près 20 % des travailleuses au Québec, qui ont droit à
cela. On peut constater qu'elles n'ont peut-être pas
nécessairement plus d'enfants, mais elles les font plus tôt. ce
qui est très important aussi. C'est rendu que les femmes retardent
au-delà de 30 ans. Les enfants qu'on n'a pas eus à 30 ans,
souvent, on ne les
aura pas. Cette mesure serait très favorable. Il faudrait
s'assurer que les femmes et les hommes puissent avoir leurs enfants à
peu près entre 25 et 30 ans. À l'heure actuelle, on constate que,
même s'ils se marient plus tôt ou qu'ils vivent ensemble plus
tôt, ils les ont de plus en plus tard; c'est même un gros
problème de coûts engendrés dans le milieu hospitalier
à cause des cas de prématurité, etc. D'abord, je crois que
c'est cela qu'il faut regarder attentivement. On ne pourra pas tout faire
à la fois. Nous avons fait des estimations de coûts pour ces
choses et ce n'est pas minime. Il va falloir regarder cela de plus près
avec les ministères concernés. M. Ouellet va certainement vouloir
regarder cela de plus près. Il faut commencer par quelque chose. On ne
pourra pas être sur tous les fronts à la fois. Le conseil a fait
son petit bout de chemin. Pour nous, ce qui est important, c'est de garder cela
vivant sur la place publique, et c'est ce qu'on va essayer de faire au cours
des prochains mois.
M. Jolivet: Vous avez fait des recommandations, vous avez
présenté un avis concernant la réforme dite réforme
Paradis. Je ne veux pas vous mettre dans l'eau chaude en répondant
à la question suivante, mais que pensez-vous de la déclaration du
ministre responsable de la Politique familiale qui a dit que la réforme
d'aide sociale constitue un volet de la politique familiale? D'après
vous, quelles sont les principales mesures qui sont anttfamiliales?
Mme Blanchet: M. Jolivet, vous savez, moi aussi, j'ai affaire aux
journalistes et je sais ce qu'ils mettent par rapport à ce qu'on dit.
D'autre part, dans ce même article paru dans le Devoir, on nous faisait
dire des choses absolument incorrectes. Ce qui est malheureux, c'est que cette
journaliste, je dois le dire, n'ait rien compris à ce que nous lui avons
raconté. J'ai pensé qu'elle n'avait rien compris, non plus, de ce
que le ministre lui avait raconté.
M. Dutil: Je n'a) pas dit cela. Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Blanchet: Nous avons eu beaucoup de difficulté
à faire comprendre certaines choses à cette journaliste. Comme
elle n'est pas dans la salle, je ne veux pas l'accuser. C'est quand même
assez fréquent. Ce sont des dossiers assez compliqués. Nous
sommes intervenus sur ce dossier. Cela m'amène à une question. Je
pense qu'il faudrait faire la distinction entre l'équité pour les
familles et une politique familiale. Nous demandons que les allocations
familiales ne soient pas imposables. On ne doit pas faire payer notre dette
collective par les enfants. Je trouve absolument inique qu'on fasse payer par
des parents les dettes accumulées du passé. C'est cela que fait
le fédéral en ce moment.
M. Jolivet: Et le programme APPORT dans cela, le nouveau
programme qui doit normalement entrer en vigueur le 1er Juillet? On n'a pas vu
de loi encore qui le...
Mme Blanchet: Nous sommes en discussion avec M. Paradis à
ce sujet. Je ne pense pas que je puisse aller plus loin que cela. Je ne suis
pas sûre que tout soit fixé dans le béton à cet
égard, M. Jolivet.
M. Jolivet: D'ailleurs, on semble comprendre, puisque cela a
été annoncé dans le dernier budget. Le programme devait
entrer en vigueur le 1er janvier 1988, c'est retardé au 1er juillet 1988
et on n'a pas encore vu de projet de loi qui le mette en vigueur non plus.
Mme Blanchet: Non. J'étais à la commission et je
pense qu'il y aura sans doute des retards, du moins, sur certains des volets.
C'est un domaine dont la complexité est énorme. Je pense que la
réaction qu'il y a eu montre très bien à quel point il
faut faire la distinction entre politique de lutte contre la pauvreté,
politique familale et politique d'égalisation des niveaux de revenu
entre les familles. Je crois que l'un des grands problèmes, c'est la
confusion entre tout cela.
M. Jolivet: En tout cas, je vous remercie. M. le
Président, je sais qu'il y en a d'autres qui veulent poser des
questions.
Le Président (M. Thuringer): M. le ministre, avez-vous
quelque chose à ajouter?
M. Dutil: M. le Président, je voudrais faire un retour
rapide sur l'ensemble des remarques faites à la suite des questions
posées à Mme la présidente. J'ai pris quelques notes. Je
ne pourrai pas soulever toutes les questions sur l'ensemble de la
problématique, mais c'était bien intéressant. On voit
qu'en ce qui concerne les accents, il y a des choses à discuter pour une
bonne compréhension.
La première remarque que j'aurais à faire sur les propos
de Mme Blanchet est la suivante. Elle disait initialement que, s'il n'y a pas
eu d'avis sur la famille, entre 1980 et 1985, cela dépendait de
l'intérêt des divers ministres de la Santé et des Services
sociaux face à la famille et que cette préoccupation
n'était pas là. C'est justement l'un des points majeurs de la
problématique de la création du Conseil de la famille. Les
organismes familiaux - et je reviendrai tout à l'heure sur
l'intérêt de la population face au conseil quel qu'il soit -
disaient justement, que le problème était d'avoir un conseil qui
a plusieurs mandats sectoriels et que, selon l'opinion du gouvernement et
surtout du ministre en place, on pouvait demander ou ne pas demander des avis
concernant la famille, s'intéresser ou ne
pas s'intéresser aux avis la concernant. C'est de là
qu'est venue la grande revendication d'avoir un conseil qui a pour seul nom:
Conseil de la famille, qui a pour membres des gens qui se préoccupent
uniquement de la problématique de la famille et qui a des ressources qui
lui permettent de mettre en évidence l'ensemble des problèmes de
la famille face à la population. C'est justement ce que les organismes
veulent régler, c'est à cette argumentation que le gouvernement a
répondu.
Je comprends très bien que, pour un organisme qui se voit enlever
une partie de son mandat, c'est très désagréable, d'autant
plus qu'il aurait sans doute, comme le disait la présidente, voulu faire
davantage concernant le secteur de la famille si les ministres de
l'époque, au cours de ces années, avaient manifesté
davantage d'intérêt. Ce que veulent les organismes familiaux,
c'est une assurance qu'H y aura, quelle que soit l'opinion du ministre, un
conseil qui se préoccupera des problèmes de la famille et qui
continuera à mettre davantage en évidence cette
problématique que nous vivons actuellement pour les raisons
démographiques ou pour les raisons de qualité de vie dont nous
parlions tout à l'heure. En donnant son exemple tout à l'heure,
le député de Laviolette, M. Jolivet, qui a six enfants - je pense
que c'est admirable - l'a confirmé, les familles qui ont six enfants,
comme lui, s'appauvrissent. Ne doit-on pas tenir compte de cela?
Une deuxième remarque: est-ce que la population veut ou ne veut
pas de conseils? Je pense que chez la population, il n'y a pas de grands
débats, il n'y a pas de chicane dans les autobus, pour reprendre une
expression que j'ai déjà entendue de la part de l'Opposition, il
n'y a pas de chicane dans les métros, à savoir si on doit
créer tel ou tel conseil et si on doit abolir tel ou tel autre.
La remarque que faisait, Mme la Présidente - et je lui donne
raison là-dessus - concernant la création du Conseil de la
famille face à la population peut s'appliquer à l'ensemble des
conseils gouvernementaux qui existent. On pourrait aller plus loin. Elle peut
s'appliquer à beaucoup de structures qui existent, que ce soient des
conseils ou d'autres structures. Je pense que ce n'est pas un argument qui
devrait faire que l'on rejette la question de créer ou non un Conseil de
la famille. Je pense qu'on doit s'attarder plutôt à
l'argumentation présentée par les organismes familiaux qui nous
disent: si on ne met pas l'évidence directement sur la famille, on sera
soumis aux aléas de l'intérêt qu'un gouvernement ou l'autre
peut porter à la famille. Je mentionnais tout à l'heure que
l'intérêt que le Parti québécois a manifesté
à la famille lorsqu'il gouvernait n'a peut-être pas
été aussi considérable qu'il aurait mérité
de l'être. Se prémunir contre ce fait en ayant un Conseil de la
famille est, à mon point de vue - et je suis d'accord avec les
organismes familiaux là-dessus - fort important.
Mme la Présidente mentionnait aussi que le gouvernement a
injecté quelques centaines de millions de dollars, 500 000 000 $, pour
les familles particulièrement les plus démunies Elle disait que
c'était sans doute par là qu'il fallait commencer. Je pense qu'il
fallait commencer par là. On nous reproche la visibilité des
choses qui ont été faites, les sommes d'argent qui ont
été investies pour la famille, ce qu'on nous reproche, c'est la
visibilité, mais on ne nous reproche pas le fait qu'elles aient
effectivement été faites. C'est un facteur important. En
général, ce qu'on reproche au gouvernement, c'est le contraire,
c'est de vouloir être trop visible, mais de ne pas faire suffisamment.
Cette fois-ci, on nous dit: Vous avez fait un sapré bon départ,
500 000 000 $, c'est quand même une somme très
considérable! Sauf qu'on nous reproche qu'elle n'ait pas
été suffisamment visible. C'est sans doute une chose qu'il faudra
corriger dans l'avenir. Mais je tenais à souligner que cet effort
substantiel existe. Cela ne veut pas dire qu'il ne faut rien faire dans le
futur, au contraire, il faut faire encore beaucoup de choses, mais on ne peut
pas faire tout en même temps
Mme la Présidente a également soulevé la question
des valeurs. Aujourd'hui, dans notre société, il te faut un
emploi et des conditions de travail qui te permettent de choisir d'être
parent, sinon ta valeur - une valeur qui a augmenté aujourd'hui - c'est
de faire carrière, d'être sur le marché du travail, c'est
d'avoir des gains de travail, donc de pouvoir aussi augmenter ton niveau de
vie. C'est effectivement quelque chose qui existe et dont il faut tenir compte.
C'est une problématique extrêmement difficile. Nous en avons
discuté à plusieurs reprises et je discute
régulièrement de cette question des valeurs et de quelle
façon on peut l'aborder. (12 heures)
Le gouvernement se préoccupe énormément du travail
chez les jeunes. La création d'emplois doit se faire de la façon
la plus vigoureuse possible On le répète constamment. Je pense
que notre année passée démontre qu'il y a eu une
très vive création d'emplois. Notre mandat depuis deux ans et
demi démontre aussi, je pense, notre intérêt pour le
développement économique. On ne prend pas l'économie pour
une poule aux oeufs d'or qu'on peut égorger, dont on n'a pas à
tenir compte et qui va continuer à nous donner ses oeufs d'or.
C'était peut-être l'erreur de certains gouvernements dans le
passé. On pensait que l'économie continuait à progresser
et qu'on pouvait, sans faire attention, la vider complètement sans
craindre que la poule aux oeufs d'or ne meure. Au contraire.
Nous, notre gouvernement, depuis que nous sommes là, nous nous
préoccupons grandement du développement économique. C'est
vrai ce que Mme la présidente dit. C'est un facteur important pour les
jeunes que d'avoir une certaine stabilité, un emploi plus stable pour
prendre la décision d'avoir une famille.
Quant au programme sur la sécurité du revenu, j'imagine
qu'on y reviendra. Il y a bien sûr des choses à retravailler. Nous
avons actuellement des discussions qui se poursuivent avec le ministère
à la suite de la très longue et très importante commission
parlementaire qui s'est déroulée et où bien des
mémoires ont été présentés sur ce qu'on a
évalué comme étant les faiblesses de ce programme. Ce
travail se poursuit. Il faudra attendre que le ministre donne les amendements
qu'il veut faire à son programme, s'il y a lieu.
Nous avons toutes les raisons de croire que la commission parlementaire
aura son efficacité. Elle n'a pas été faite pour rien.
Elle était faite pour consulter la population et les gens qui
étaient intéressés par cette importante réforme,
pour connaître leur point de vue et, si nécessaire, pour ajuster
le tir. Ce sont non seulement les familles mais également les personnes
handicapées, il y a en fait beaucoup de personnes qui sont
touchées par cette réforme de sécurité du revenu.
Cet ensemble sera certainement pris en considération, par le
ministre.
Comme je vous le dis, je ne veux pas prendre davantage de temps. Il ne
nous reste malheureusement qu'une demi-heure pour terminer les crédits
concernant la politique familiale.
Mme la présidente voudrait ajouter une petite chose, si vous le
permettez, M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): Mme la
présidente. Ensuite, ce sera M. le député de Chambly, Mme
la députée de Marie-Victorin et Mme la députée de
Maisonneuve.
Mme Blanchet: J'ai compris que c'était le dernier moment
de mon Intervention. Je voudrais revenir sur la question des conflits
d'intérêts. Nous ne sommes pas du tout opposés à la
création d'un Conseil de la famille ou de la famille et de l'enfance.
Nous voudrions qu'il se situe à l'Exécutif. Nous pensons qu'il
doit se situer à l'Exécutif. Nous pensons qu'il ne doit pas
entrer par la porte de derrière que constitue santé et services
sociaux. Une porte de garage, en fart, en ce moment.
Nous pensons que si on en crée un, on doit en créer un
vrai, que ce ne soit pas un simulacre de conseil. Qu'on lui donne au moins ce
que nous avons comme pouvoirs, ce n'est pas tellement. Qu'on lui donne un
budget au moins comparable au nôtre et qui ne sera certainement pas pris
chez nous puisqu'il se situera à l'Exécutif. Je ne sais pas si le
Conseil du trésor ira le prendre au Conseil du statut de la femme. Je
lui laisse la responsabilité de faire ce partage. Mais R est
évident qu'il va partager ces dossiers avec le Conseil du statut de la
femme. Pas avec nous.
Par conséquent, en tant que présidente de cet organisme,
je demande que nos crédits soient maintenus au minimum et que nos postes
soient augmentés à cinq. Je suis sûre que je peux
convaincre le ministre Dutil de nous permettre d'augmenter à vingt
postes. C'était le sens de mon intervention.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. M. le
député de Chambly.
M. Latulippe: M. le ministre, je pense que vous avez
déjà déclaré, si je ne m'abuse, que la politique de
sécurité du revenu devait être un volet de la politique
familiale. C'est-à-dire l'inverse, que la politique familiale et la
politique de sécurité du revenu étaient
interreliées.
M. Dutil: Justement, on a soulevé cette question tout
à l'heure et je mentionnais ce que j'avais dit précisément
aux journalistes à savoir que la politique de la sécurité
du revenu avait certainement des implications sur les familles du
Québec. C'est la raison pour laquelle nous intervenons
régulièrement, dès le départ et encore
actuellement, suite à la commission parlementaire, je l'ai
mentionné tout à l'heure, pour modifier certaines choses, s'il y
a lieu.
M. Latulippe: Est-ce que vous avez l'intention de demander au
ministre de la Main-d'Oeu-vre et de la Sécurité du revenu
d'attendre pour sa réforme que vous ayez déposé une
politique complète en matière de famille?
M. Dutil: Nous pensons que cette réforme de l'aide sociale
est très importante. Il n'y a pas d'objection à ce que le
ministre avance dans sa politique pour autant que ce soit en concertation et en
consultation avec nous et avec la condition féminine qui intervient,
d'ailleurs, tout autant que nous sur les choses que nous voudrions voir
modifier, voir aller de l'avant. La raison pour laquelle Je vous réponds
ceci, c'est qu'il faut bien voir que la politique familiale ne commencera pas
demain matin, c'est déjà commencé depuis longtemps. C'est
commencé depuis longtemps - c'est le sens de la remarque importante de
tout à l'heure - avec les montants injectés dans le passé
auprès des familles les plus démunies et qui représentent
environ 500 000 000 $. Cela fait partie d'un soutien économique à
la famille. Nous n'avons certainement pas l'intention d'attendre que l'ensemble
des mesures soient prêtes pour les mettre en place. Il faut cheminer
constamment dans les divers dossiers, la sécurité du revenu, le
soutien économique et, Mme la Présidente le disait tout à
l'heure, le monde du travail, bien sûr. Est-ce qu'il y aura l'ouverture
nécessaire pour les modifications au Code du travail? Ce sont des
discussions que nous menons. Sur tous les fronts, nous avançons et
dès qu'une mesure est prête, nous la lançons.
M. Latulippe: J'aurais peut-être quelques questions
très précises, M. le ministre. Dans le
projet de réforme du ministre de la Main-d'Oeu-vre et de la
Sécurité du revenu, un couple sans enfant, admissible au
programme APTE et participant, recevra 820 $. Cela comprend les conjoints de
fait et les personnes mariées. Mais, les personnes partageant un
logement et les conjoints de fait sans enfants, comptant moins d'une
année de vie commune - donc si on a moins d'une année de vie
commune - reçoivent 115 $ de moins. Quelle est votre opinion
là-dessus en rapport avec votre mandat sur la famille?
M. Outil: 11 est évident que la problématique du
conjoint de fait par rapport à la personne mariée est importante.
C'est un débat qui dure depuis longtemps. On plaide que les couples
mariés sont pénalisés par rapport à ceux qui sont
conjoints de fait, ce qui représente une désincitatton au mariage
en plus de représenter une injustice sur le plan social. M. le
député, il faut bien se rendre compte que ce n'est pas un
problème facile de démêler tout cela. Je pourrais vous
donner d'autres exemples d'ailleurs. Les personnes divorcées ont le
droit de déduire la pension alimentaire. C'est une
réalité. Les personnes divorcées ont le droit de
déduire entièrement la pension alimentaire. Les personnes
mariées n'ont le droit de déduire qu'un certain montant
déjà prédéterminé de 5200 $. Donc, quand on
est divorcé, on peut déduire davantage de son revenu que si on
est marié. C'est toute une problématique qui est regardée
par beaucoup de ministres actuellement. Je ne peux pas vous donner des
réponses sur la solution que l'on trouvera à cette
nouveauté sociale qui existe de façon croissante. Je peux vous
dire qu'on est sensibilisé au problème de l'injustice.
M. Latulippe: Est-ce que vous trouvez que c'est aussi une
injustice qu'un couple sans enfants vivant ensemble depuis plus d'un an
reçoive 120 $ de moins alors que le couple sans enfants vivant ensemble
depuis moins d'un an reçoive 115 $ de moins? Est-ce que vous ne trouvez
pas qu'il s'agit: 1° d'une injustice, 2° d'une intrusion dans les
droits et libertés de la personne puisqu'on va demander à partir
de quand ce couple vit ensemble? Cela va jusqu'à demander: Est-ce que
ces personnes vivant dans le même logement ont des relations intimes ou
pas? Que pensez-vous de cela?
M. Dutil: Vous voyez toute la difficulté. D'ailleurs, n'y
a-t-il pas une cause, un procès actuellement où quelqu'un plaide
qu'il y a discrimination face à la Charte des droits et
libertés?
M. Latulippe: Je ne vous demande pas si c'est un problème.
On a un dépôt. Le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu a déposé un projet
précis. J'aimerais savoir votre opinion. Qu'est-ce que vous allez
recommander au ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du
revenu en ce qui concerne ces problèmes qui sont sérieux?
M. Dutil: M. le Président, je ne vais pas faire
état des recommandations que je suis en train de discuter, actuellement
avec le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu.
Je dis que nous travaillons entre autres, sur ce problème et que nous
sommes inquiets parce que, en effet, entre les conjoints de fait et les couples
mariés... Vous soulevez le problème plus particulièrement
là où il n'y a pas d'enfants. Remarquez que ma
préoccupation est particulièrement là où il y a des
enfants et où on peut retrouver un phénomène relativement
similaire entre conjoints de fait avec enfants et couples mariés avec
enfants. Il y a toute sorte de formules aujourd'hui qui permettent aux gens de
passer à côté.
M. Latulippe: M. le ministre...
M. Dutil: Si vous voulez me laisser terminer.
M. Latulippe: Oui, allez-y.
M. Dutil: Je tiens à dire à ce sujet que le travail
se poursuit avec intensité avec le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu pour essayer de résorber ces
problèmes. Je ne dis pas qu'on parviendra à résorber tous
les problèmes issus des nouveautés dans la société,
particulièrement en ce qui concerne le mariage ou les conjoints de fait,
mais on comprend qu'il y a là matière à critique de la
part de ceux qui sont mariés particulièrement.
M. Latulippe: M. le ministre, j'ai une autre question. Vous avez
mentionné, et je pense que vous avez raison, que votre
préoccupation est encore plus grande dans le cas de couples qui ont des
enfants. Je ne sais pas si vous avez pris connaissance de l'étude et du
sondage que le ministre Paradis a déposés en commission
parlementaire cette semaine où il est mentionné - il y a des
statistiques très précises que je peux vous donner aussi, si vous
n'en avez pas pris connaissance - que les mesures d'employabilité comme
les travaux communautaires, les stages et le rattrapage scolaire sont beaucoup
moins efficaces, ont beaucoup moins d'impact et beaucoup moins de succès
dans les cas des couples qui ont des enfants ou des familles monoparentales. On
s'apprête dans la réforme Paradis à prolonger ces
programmes aux personnes qui ont plus de 30 ans. Est-ce que cela ne vous
inquiète pas que, dans un cas semblable le taux d'insuccès puisse
être encore plus grand?
M. Dutil: Au début de l'étude des crédits,
ce matin, j'ai parlé de toute la problématique de la charge
d'enfants. Cela peut être davantage le cas en ce qui concerne les
familles monoparen-
tales. Cela existe aussi chez les familles biparen-tales à faible
revenu qui ont un ou plus d'un enfant. C'est toute cette problématique
du choix d'aller ou de ne pas aller sur le marché du travail. Bien
sûr, ce choix est plus impératif en ce qui a trait aux familles
monoparentales. Cela a été soulevé abondamment en
commission parlementaire. Cette question d'être ou de ne pas être
apte ou considéré comme apte ou disponible pour aller sur le
marché du travail quand on est monoparental et qu'on a à sa
charge un, parfois deux et parfois trois enfants cette difficulté nous
inquiète énormément.
On parlait de soutien économique tout à l'heure. Le
coût des enfants est soulevé de plus en plus par de plus en plus
de gens qui étudient la problématique du soutien à
apporter aux enfants. Le fait de soutenir seulement en fonction du coût
de consommation est probablement une façon dépassée
d'envisager la chose. Il faut aussi tenir compte aujourd'hui du coût des
décisions que les parents ont à prendre en fonction du nombre
d'enfants qu'ils ont. Pour certains c'est le coût du gardiennage. Si les
parents décident tous deux de travailler ou si, dans le cas d'une
famille monoparentale, une personne décide de continuer à
être sur le marché du travail, il est évident qu'il y a un
coût supplémentaire important plus particulièrement pour
les enfants en bas âge qui ne sont pas encore à l'école ou
qui ne sont pas encore en âge de se garder eux-mêmes.
Évidemment, il y a certains soutiens qui sont accordés
actuellement, mais la question à se poser est: Est-ce que c'est juste,
suffisant et adéquat? Une question fort importante. Donc, je comprends
que les mesures d'employabilité soient moins efficaces. C'est tout
à fait normal pour les personnes qui ont charge d'enfants parce que,
justement ils ont des décisions à prendre non seulement en ce qui
a trait à leur intérêt mais quant à la
viabilité, si je peux m'exprimer ainsi, d'aller sur le marché du
travail plutôt que de s'occuper eux-mêmes de leurs enfants.
M. Latulippe: Une dernière question sur ce sujet. M. le
ministre. Sur la question du choix, vous nous dites: L'évaluation des
mesures d'employabilité, je comprends que c'est moins efficace, qu'il y
a moins de succès quand les parents ont des enfants, parce qu'ils ont un
choix à faire. Je vais vous poser une question bien précise sur
cela. On voit dans le projet du ministre Paradis, je vous donne deux exemples,
qu'une famille monoparentale avec un enfant verra, dans les neuf premiers mois,
ses prestations réduites de 684 $ à 585 $ et qu'une famille
monoparentale avec deux enfants la verra réduite de 740 $ à 687
$. Est-ce que c'est une façon de faciliter le choix auquel vous faites
référence?
M. Dutil: Alors, voilà! Vous soulevez toute la
problématique. Il y a eu une commission parlementaire justement qui, en
long et en large, a discuté de la problématique des familles
monoparentales plus particulièrement. C'est un point sur lequel nous
sommes en discussion actuellement. Est-ce qu'on doit inciter les gens de
familles monoparentales à retourner sur le marché du travail de
la façon dont on l'envisage? Je pense que nos interventions sont faites
justement dans le sens de la protection de la famille. (12 h 15)
M. Paradis s'est engagé - il respecte sa parole là-dessus
- à consulter et à s'entendre, particulièrement avec ses
collègues de la Condition féminine et de la famille. Il l'a dit
explicitement parce qu'il y a justement diverses difficultés qui ont
été soulevées en commission parlementaire et qu'il y a
certainement des réflexions à compléter avant de mettre en
place cette importante réforme.
M. Latulippe: Merci. Est-ce que vous avez espoir que la
réforme qui sera déposée. la nouvelle réforme,
corrigera les problèmes auxquels vous avez fart référence
aujourd'hui et dont on a discuté...
M. Dutil: Je viens tout juste de répondre exactement dans
ce sens-là. M. Paradis s'est engagé non seulement à nous
consulter, mais à ce que nous soyons en accord sur un projet final qui
sera déposé. Je pense que c'est un engagement fort important
qu'il a pris. En général, bien sûr, un ministre, dit qu'il
va consulter ses collègues et qu'il va s'entendre avec eux, mais,
explicitement, en Chambre, lors d'une réponse à une question, si
je me rappelle bien, le ministre a précisé: Je suis en
discussion. Nous terminons la commission parlementaire - qui n'était pas
finie à ce moment-là - et nous serons en étroite
consultation avec le ministre délégué à la Famille
et la ministre déléguée à la Condition
féminine pour nous assurer d'avoir un consensus sur le projet final qui
sera présenté et qui entrera éventuellement en
vigueur.
Je vous mentionne que cette assurance est actuellement respectée
par le ministre Paradis. Les discussions sont très franches, très
ouvertes avec le ministère et je suis convaincu que nous arriverons
à nous entendre et que nous aurons un projet de réforme qui
veillera au grain sur l'ensemble des problèmes concernant la famille et
la condition féminine.
Le Président (M. Bélanger): Merci, M. le ministre.
Mme la députée de Marie-Victorin.
Mme Vermette: Ce sera une question très brève et,
j'espère, une réponse très brève parce que je
voudrais que ma collègue de Maisonneuve, qui a tout de même des
questions très Importantes et très pertinentes, puisse aussi
avoir du temps.
M. le ministre, hier, aux crédits de l'Office des services de
garde, nous avons entendu votre
coMègue nous dire au sujet des problèmes de garderie
qu'elle ne sait pas, actuellement, quelle orientation elle devra prendre. Elle
ne sait pas, non plus, quand elle pourra statuer sur une politique de garderie
parce qu'elle attend toujours que le gouvernement fédéral se
prononce dans ce domaine.
Actuellement, il y a deux projets politiques très importants: la
réforme d'aide sociale et les politiques familiales. A votre avis,
est-ce que vous favorisez les politiques familiales au détriment de la
réforme d'aide sociale ou est-ce que tout cela sera pris...? Cela risque
de prendre énormément de temps parce que vous n'êtes pas
encore capable de cibler des clientèles types à l'heure actuelle
pour ce qui est du développement des garderies surtout qu'au budget de
cette année, du moins aux crédits, il y a une diminution de
places et non pas une augmentation.
M. Dutil: Je n'ai pas en mémoire l'augmentation de places
qu'il y a cette année, mais je pense que vous...
Mme Vermette: C'est une diminution, M. le ministre.
M. Dutil: ...faites référence à
l'accroissement du nombre de places plutôt qu'au nombre de places. Je
m'explique. Je pense que c'est important d'éliminer toute
ambiguïté là-dessus. Les places vont augmenter. Vous nous
dites: Est-ce qu'elles augmentent moins que l'année dernière?
C'est cela, la question. Je n'ai pas les chiffres...
Mme Vermette: Je pense que... Il y en a moins.
M. Dutil: ...exacts ici. Mais ce qui a été
plaidé, c'est qu'il y avait une diminution de l'augmentation de
l'année dernière. Quand on en finira avec les véritables
chiffres, on finira par se comprendre. Il y a négociation - vous le
savez - avec le gouvernement fédéral en ce qui concerne les
garderies. Mme la ministre a dû vous confirmer hier cette importante
négociation où nous avons des points à défendre. Il
y a eu une question à l'Assemblée nationale à ce sujet. Je
ne vais pas répondre à la place de la ministre
déléguée à la Condition féminine qui est
actuellement responsable des services de garde.
Vous avez sûrement eu l'occasion hier de lui poser des questions.
Vous aurez encore l'occasion, si vous êtes insatisfaite de ses
réponses, de lui poser des questions à l'Assemblée
nationale. C'est un dossier qui relève d'elle, bien sûr, mais sur
lequel j'interviens et sur lequel je lui fait une recommandation. Je suis fort
intéressé à ce dossier en tant que ministre
délégué à la Famille car on ne peut pas faire
abstraction, dans une politique familiale, des services de garde. C'est bien
évident. On ne Deut pas plus faire abstraction, dans une politi- que
familiale, du soutien économique. On ne peut pas faire abstraction, dans
une politique familiale, des nonnes du travail. On ne peut pas faire
abstraction, dans une politique familiale, de l'habitation. On ne peut pas
faire abstraction, dans une politique familiale, de la violence conjugale. On
ne peut pas, dans une politique familiale, faire abstraction des
difficultés des couples qui divorcent. On est à travailler sur le
problème de la médiation en tâchant de l'étendre
à l'ensemble de la province de Québec.
Alors, quand on me dit: À quoi accorderez-vous la
priorité? Je réponds que le premier ministre a été
très clair dans le discours d'ouverture. Il y a soulevé quatre
problèmes, quatre dossiers majeurs sur lesquels nous travaillons avec
acharnement et dont l'un - j'allais dire, va aboutir bientôt - a
déjà abouti. C'est celui du soutien économique, 500 000
000 $ depuis deux ans et demi, M. le Président, pour le soutien
économique des familles. On nous reproche le manque de
visibilité, on ne nous reproche pas le montant d'argent, la
présidente l'a dit tout à l'heure. Le gouvernement devrait
démontrer plus de visibilité dans ses politiques alors que ce
qu'on reproche, en général, à un gouvernement, c'est de
vouloir se montrer trop visible et de ne pas faire assez. Là on nous
reproche d'en faire assez mais de ne pas le montrer assez. Je pense que c'est
un point qu'il faudra corriger.
Le premier ministre a également parlé dans son discours de
l'habitation, des services de garde et des normes du travail. Pour aller au
plus court, ce sont quatre dossiers sur lesquels nous mettons une
énergie fort importante, cela va de soi. Mais on continue à
travailler sur des dossiers également très importants qui
touchent peut-être une partie moins considérable de la population
mais qui sont, sur le plan social, extrêmement importants et qui me
préoccupent beaucoup. Chaque fois que j'ai fait un discours à
l'Assemblée nationale, M. le Président, j'ai parlé du
problème épouvantable, dans une société comme la
nôtre, de la violence conjugale. La violence conjugale, on le sait...
Mme Harel: Ce n'est pas là-dessus que vous êtes
interrogé, M. le ministre. M. le Président, peut-être
pourrions-nous inviter le ministre à répondre à la
question de ma collègue...
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Maisonneuve.
Mme Harel: ...et ne pas prendre le temps qui lui a
été alloué. Cela portait sur les services de garde, pas
sur la violence conjugale et j'aimerais pouvoir maintenant lui poser une
question.
M. Dutil: M. le Président, j'ai vingt minutes pour
répondre mais je vais accepter de répondre aux questions de la
députée...
Le Président (M. Bélanger): Bien, Mme la
iéputée de Maisonneuve.
Mme Harel: M. le Président, j'ai suivi avec attention
l'échange que le ministre a eu avec le député de Chambly
concernant la politique de sécurité du revenu. J'ai
également pris note qu'il considérait qu'il y avait des oeufs
d'or actuellement et qu'il ne fallait pas étouffer la poule. Je veux
simplement lui rappeler que la poule ne pond pas pour tout le monde, en tout
cas certainement pas pour les familles. Pensons que, selon le Conseil national
du Bien-être social, 285 100 familles québécoises vivent
présentement sous le seuil de la pauvreté et qu'elles conspuent
33 % du total canadien alors que les Québécois ne comptent que
pour 24 % de la Dopulation canadienne. Cela permettait à tous les
nédias de titrer à travers tout le Québec, hier Tiatin,
que plus du tiers des pauvres au Canada sont des Québécois.
Alors, j'inviterais le ministre i prendre connaissance de cette étude
que le Donseil du Bien-être a publiée il y a deux jours
naintenant, à prendre connaissance que ce sont, J'abord, les familles
qui sont pauvres. Une jrande réalité s'impose à nous:
certaines catégo-ïes de population ont pu augmenter relativement
eur niveau général de bien-être - en particulier es
personnes âgées, retraitées, qui reçoivent leur
tension et qui, sans être dans une aisance totale, jeuvent quand
même bénéficier de meilleures conditions de vie - tandis
que la catégorie qui, selon tous les indicateurs, est en
régression sur e plan des conditions de vie, c'est la famille, et
surtout la famille monoparentale.
Actuellement, au Québec, un enfant sur cinq, selon les
données les plus récentes de 1988, vit dans une famille pauvre et
une des six personnes qui accouchent est assistée sociale. Je ne
rappelle pas, évidemment, les mesures les plus odieuses du projet
Paradis, notamment la réduction de prestations au sixième mois de
grossesse et suivants.
Je veux interroger le ministre, dans le court laps de temps qui m'est
imparti, sur un programme, le programme APPORT, qui, lui, sera en vigueur et
auquel, au mois de mai, on invite les populations qui y auraient droit à
s'inscrire. Et là, je ne pourrais pas concevoir que ce matin le ministre
n'ait pas de réponse à me donner, étant donné que
ce programme APPORT sera en vigueur dès le 1er mai et qu'il s'adresse
uniquement aux travailleurs et travailleuses à faible revenu qui ont
charge d'enfant(s). Je veux savoir comment le ministre peut expliquer que la
plupart des familles monoparentales soient perdantes lorsqu'on examine les
tableaux des prestations et les conditions pour participer au programme APPORT.
Quelles ont été les représentations que le ministre
délégué à la Famille a faites auprès de son
collègue du budget et auprès de son collègue responsable
de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu concernant ce
programme APPORT?
M. Dutil: M. le Président, je ne peux m'empêcher de
relever quand même les premières remarques de la
députée de Maisonneuve avant de répondre à ses
questions. S'il y a plus de pauvres au Québec actuellement, il faudrait
peut-être s'interroger sur les dix ans de gouvernement du Parti
québécois. Il y a peut-être là une raison valable,
aussi. La pauvreté ne s'est pas créée le 2 décembre
1985 au Québec. Il faut bien se le rappeler. Je disais tout à
l'heure que je reprochais justement à l'ancien gouvernement en
matière économique d'avoir pensé, peut-être, qu'il
pouvait tout se permettre et que cela n'aurait pas de conséquence sur le
plan de la richesse sociale. Des exemples on pourrait en énumérer
plusieurs. Mais juste pour terminer là-dessus, rappelons les droits de
succession que, dogmatiquement, le chef actuel du Parti
québécois, M. Parizeau, qui était à ce
moment-là ministre des Finances, ne voulait pas abandonner et auxquels
son collègue a renoncé.
Mme Harel: Si le ministre nous parfait du programme APPORT, M. le
Président, ce serait apprécié.
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît!
On laisse M. le ministre répondre et il doit donner les réponses
que lui conçoit et non pas celles que vous concevez. Laissez M. le
ministre s'exprimer.
Mme Harel: J'invoque la pertinence du débat. Les droits de
succession, il me semble que ce n'est pas tout à fait...
Le Président (M. Bélanger): M. le ministre,
voulez-vous répondre à la question, s'il vous plaît!
Mme Harel: ...adéquat à ce moment-ci.
M. Dutil: M. le Président, je veux juste vous rappeler que
je répondais aux remarques incisives et vitrioliques habituelles de la
députée de Maisonneuve concernant le soutien que l'on apporte
à l'économie. Je réponds vraiment à ce que madame
disait tout à l'heure, à ses interrogations à savoir que
tous les oeufs d'or ne vont pas suffisamment aux plus pauvres de la
société. Je n'ai pas dit que nous étions parvenus enfin au
nirvana économique, je dis que nous faisons un sapré gros
redressement par rapport à ce que faisait le Parti
québécois à l'époque et que c'est cela qui va nous
permettre justement de commencer par le commencement, c'est-à-dire par
les plus démunis de la société. La présidente le
disait tout à l'heure: 500 000 000 $ aux plus démunis de la
société, est-ce que cela ne compte pas? Je comprends que
l'Opposition veuille bien oublier cela.
Quant au programme APPORT, je conteste...
Mme Harel: M. le Président, j'invoque la
pertinence. Le ministre ne répond pas parce qu'il ne
connaît peut-être pas le programme, mais qu'il le dise tout
simplement.
M. Dutil: J'allais justement répondre sur le programme
APPORT au moment où la députée de Maisonneuve
m'interrompait. J'allais dire quant au programme APPORT... M. le
Président, est-ce que je peux terminer, il me reste deux minutes?
Le Président (M. Bélanger): Je vous en prie, M. le
ministre.
M. Dutil: Je ne sais pas quelle est cette habitude d'interrompre
constamment les personnes qui parlent. J'ai l'habitude de répondre aux
questions et aux remarques...
Mme Harel: Quand on parle à côté du sujet, M.
le Président, on est interrompu.
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît!
S'il vous plaît! Nous laissons M. le ministre répondre. C'est lui
qui sait ce qu'il a à répondre concernant les crédits
qu'il a à défendre ici. Alors, allez-y, M. le ministre.
Mme Harel: Mais vous acceptez que j'invoque la pertinence des
débats?
M. Dutil: J'apprécie l'attitude de gentleman du
député de Laviolette qui me laisse habituellement répondre
aux questions. Je déplore que je sois toujours interrompu par la
députée de Maisonneuve. Quoi qu'il en soit, pour revenir au
programme APPORT dans le peu de temps qu'il nous reste, M. le Président,
nous contestons ce que dit la députée de Maisonneuve.
Premièrement, les familles à faible revenu, - c'est un programme
fait pour les familles - les gens qui ont charge d'enfants vont recevoir, au
contraire, plus qu'elles ne recevaient. C'est un point important.
Deuxièmement, point encore plus important, regardez la distinction entre
notre programme et l'ancien programme qui s'appelait SUPRET. Elles vont le
recevoir mensuellement. Vous vous souvenez du programme SUPRET? Il
n'était pas demandé par beaucoup de familles pour une raison bien
simple: c'était tellement compliqué et lointain de recevoir le
bénéfice du programme SUPRET. Elles ne le recevaient que 18 mois
plus tard. La plupart des citoyens ne se prévalaient pas de la
possibilité d'aller chercher des sommes d'argent dans ce programme. Ce
que nous faisons... Nous comprenons que le citoyen ordinaire ne s'administre
pas...
Mme Harel: Je vous parle des familles monoparentales, M. le
ministre.
M. le Président, j'interroge le ministre sur les familles
monoparentales et je dis qu'elles sont perdantes avec le programme APPORT. Je
lui dis de faire les calculs, s'il ne les a pas faits. C'est encore doublement
plus inquiétant qu'il ne se soit pas rendu compte, au moment où
on se parle, que les familles monoparentales, avec ce programme mis en place le
1er mai, seront perdantes en regard de ce à quoi elles avaient droit
dans le programme précédent.
M. Dutil: M. le Président, en terminant, la
députée de Maisonneuve me reproche de ne pas répondre aux
questions, mais est-ce que je peux lui reprocher d'être arrivée un
peu en retard à l'étude des crédits? Il reste à
peine une demi-heure sur trois heures de crédits, et elle vient me
reprocher dans un délai aussi court que celui qui nous reste de ne pas
répondre aux questions. Je dis que le programme APPORT est fait pour les
familles, incluant les familles monoparentales, qu'il ajoute des revenus aux
familles, incluant les familles monoparentales, et que ce montant est
versé tous les mois au lieu d'être versé tous les 18 mois,
comme c'était le cas sous l'ancien gouvernement. Je conteste les
affirmations de la députée de Maisonneuve quand elle dit que les
familles monoparentales recevront moins. Elles recevront plus, plus vite et
mieux. (12 h 30)
Le Président (M. Bélanger): Compte tenu de
l'heure...
M. Jolivet: M. le Président, j'aurais un mot de la
fin.
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît,
très rapidement.
M. Jolivet: Très rapidement. Je veux dire simplement que
le ministre ne connaît pas du tout la question des familles
monoparentaies. Dans la réponse qu'il vient de nous donner, il dit
qu'elles vont recevoir plus, plus vite et mieux, c'est faux. Dans ce sens, le
ministre serait peut-être mieux d'aller refaire ses devoirs et de
regarder attentivement ce qui a été écrit sur l'ensemble
du programme APPORT pour les familles monoparentales.
Je remercie le ministre...
Le Président (M. Bélanger): S'il vous
plaît!
M. Jolivet: ...d'avoir essayé de répondre à
toutes nos questions. Je remercie la présidente du Conseil des affaires
sociales et de la famille d'avoir répondu directement à nos
questions. Nous souhaitons maintenant un rendez-vous sur la prise en
considération du rapport du projet de loi 94.
M. Dutil: M. le Président, en terminant, j'apprécie
la façon dont s'est déroulée la presque totalité de
cette réunion, ce matin. Ce que je déplore, c'est qu'on mette en
évidence un problème qu'on semble juger très important de
l'autre côté et dont on n'a parlé que dans les dix
dernières minutes de l'étude des crédits.
Quand le député de La violette me fait ce genre de
reproche sur la connaissance...
Mme Harel: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Bélanger): Question de
règlement, Mme la députée de Maison-neuve.
Mme Harel: M. le Président, je vous ai demandé la
parole dès mon arrivée et je rappelle au ministre que les membres
de l'Opposition ont plusieurs responsabilités. Je
prononçais...
Le Président (M. Bélanger): Je m'excuse, madame, ce
n'est pas une question de règlement.
Mme Harel: ...un discours devant le congrès du Barreau
canadien, ce matin...
Le Président (M. Bélanger): Je m'excuse, Mme la
députée de Maisonneuve, ce n'est pas une question de
règlement.
Mme Harel: La question de règlement est la suivante, M. le
Président. Je vous ai demandé la parole dès mon
arrivée et je ne l'ai pas eue immédiatement. Je vous rappelle que
c'est au député de Chambly que vous avez donné la parole.
Alors, si le ministre a des reproches...
Le Président (M. Bélanger): En vertu de la
règle de l'alternance, madame.
Mme Harel: ...à faire, c'est peut-être à ses
collègues qui prennent trop de temps pendant l'étude des
crédits.
Adoption des crédits
Le Président (M. Bélanger): Bien. Avant de
suspendre les travaux, est-ce que les crédits budgétaires du
ministre délégué à la Santé et aux Services
sociaux et responsable de la Politique familiale pour l'année 1988-1989
sont adoptés?
M. Jolivet: Sur division.
Le Président (M. Bélanger): Sur division. Alors,
adopté sur division.
Nous ajournons nos travaux sine die. Nous aurons de nouveaux
ordres de la Chambre. Nous rappelons, quand même, que nous
siégerons de 15 h 30 à 17 h 30 pour discuter du dossier de
l'Office des personnes handicapées du Québec. Merci.
(Fin de la séance à 12 h 32)
(Reprisée 15 h 41)
Office des personnes handicapées du
Québec
Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il
vous plaît!
La commission des affaires sociales reprend ses travaux. Nous sommes
maintenant au programme 9, Office des personnes handicapées du
Québec. Nous saluons le président M. Mercure, et son
équipe.
M. le ministre, est-ce que vous avez des déclarations
préalables à faire?
M. Dutil: Oui, quelques remarques, oui.
Le Président (M. Bélanger): Quelques
considérations, je vous en prie.
M. Dutil: J'ai quelques remarques très brèves, M.
le Président. Je voudrais corriger une erreur qui s'est glissée
dans les journaux dernièrement disant qu'il y avait seulement 1,9 % de
personnes handicapées qui travaillaient à l'office. Ce nombre est
de 31 sur 196. On voit donc que le pourcentage est beaucoup plus
élevé que le 1,9 % qui avait été mis là par
erreur. Il est précisément de 15,81632 %. Ce 15,8 % de personnes
handicapées engagées représente une norme très
élevée. Mais on se rend bien compte que l'Office des personnes
handicapées du Québec se doit de donner l'exemple et elle le
donnait dans le passé. Ce n'est pas le fait de notre seul gouvernement.
Un nombre assez considérable de personnes handicapées a toujours
été employé à l'Office des personnes
handicapées du Québec et c'est nettement supérieur au
chiffre qui a été mentionné par erreur.
Je n'ai pas d'autres remarques parce que je pense que des questions
seront posées sur l'évolution du budget, sur les principaux
programmes et les principales activités de l'Office des personnes
handicapées. Alors, M. le Président, je serais disposé
à répondre immédiatement aux questions.
Mme Vermette: Est-ce que M. Mercure aurait un mot à dire,
M. le Président, vu qu'il est le président de l'Office des
personnes handicapées, ou si on peut...
Le Président (M. Bélanger): On va débuter.
Je pense que M. Mercure aura l'occasion de s'exprimer amplement durant les deux
heures qui nous sont allouées.
Mme la députée de Marie-Victorin.
Mme Vermette: Permettez-moi, M. le Président, d'apporter
quelques notes d'introduction et de faire un peu le survol. On pourra
procéder après d'une façon plus approfondie dossier par
dossier.
Il me fait plaisir de vous accueillir ici, M.
Mercure, pour prendre connaissance plus en profondeur de l'étude
des crédits. Je vous remercie à l'avance des réponses que
vous pourrez nous donner et de l'éclaircissement que vous allez nous
apporter à l'occasion de cette étude.
Je suis heureuse d'être ici pour procéder à
l'étude des crédits de l'Office des personnes handicapées
du Québec. Cet organisme a, par les années passées, fait
un travail considérable pour la promotion et la défense des
droits des personnes handicapées. Cependant, à la lecture des
crédits de cette année et après avoir suivi
l'évolution du dossier, j'ai quelques inquiétudes. J'ajouterais
que ce dossier me semble avoir subi un net recul.
J'ai eu l'occasion, lors d'une interpellation, de discuter avec le
ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu du
dangeureux piège que représente la réforme de la
sécurité du revenu pour les personnes handicapées.
J'aimerais que le ministre responsable me donne des explications sur le nombre
de dossiers en attente, soit 3500, le 1er avril 1988, sur le nombre de centres
de travail adapté et le nombre de travailleurs et de travailleuses
subventionnés qui a diminué par rapport à l'an dernier,
sur le nombre de contrats d'intégration au travail qui a diminué,
sur le nombre de personnes handicapées employées à
l'office qui a diminué de 5, à propos de la fonction publique qui
n'atteint pas son objectif de 2 % pour les plans d'embauché, sur le
protocole sur l'intégration scolaire entre le ministère de
l'Éducation et le ministre de la Santé et des Services sociaux
qui n'est pas encore signé, sur le règlement concernant
l'accès aux édifices publics qui n'est pas encore en vigueur. Par
ailleurs, j'aimerais faire le point avec le ministre et avec le
président de l'Office des personnes handicapées du Québec
sur le transfert des programmes et des nouvelles orientations que prendra
l'OPHQ à la suite de ce transfert. M. le Président, j'ai
souligné ici, d'une façon très générale, les
points sur lesquels nous allons nous attarder davantage.
Services aux personnes handicapées
J'aimerais commencer par l'étude de l'élément 1 du
programme 9: Services aux personnes handicapées. En ce qui concerne
d'une façon beaucoup plus globale le budget de cette année, on y
voit une croissance. Le budget passe de 39 665000$ à 42 000 000 $ pour
1988-1989. Cette variation de crédits s'explique en partie par une
croissance de 3 400 000 $ du budget de transfert. À l'intérieur
de ces 3 400 000 $, en fait, on peut voir 1 800 000 $ pour l'aide
matérielle; l'autre partie va pour l'indexation des dépenses de
fonctionnement. M. le ministre, j'aimerais connaître les crédits
nouveaux qui vont favoriser les services aux personnes handicapées.
M. Dutil: En ce qui concerne les chiffres mentionnés, 39
000 000 $, c'est le total des montants de transfert, M. le Président, et
non pas le total du budget. Je pense qu'il faut bien se comprendre.
Mme Vermette: Non, c'est cela. J'ai bien précisé.
C'est l'élément 1 du programme.
M. Dutil: Parfait. D'accord. Ces montants-là sont
portés sur le plan budgétaire à 42 941 000 $, c'est une
hausse de 8, 76 % dans un budget global gouvernemental en hausse de 5, 5 %
C'est donc une proportion supérieure à la moyenne du budget. Si
on fait le détail de chacun des secteurs les plus importants, l'aide
matérielle passerait de 15 498 000 $, 15 500 000 $ pour faire un chiffre
arrondi, à 17 888 000 $. Ce serait donc un secteur qui serait en hausse
de 15, 42 % Les centres de travail adapté passeraient de 19 879 000 $
à 20 624 000 $, en hausse de 3, 75 %. Les CIT, contrats
d'intégration au travail, de 2 252 000 $ à 2 337 000 $, pour une
hausse de 3, 75 %. Les organismes de promotion, d'un montant de 1 850 000 $
à un montant de 2 090 000 $ une hausse de 12, 97 %, à toutes fins
utiles une hausse de 13 %. C'est le total de tout cela qui nous donne une
hausse globale de 8, 76 % des montants de transfert, c'est-à-dire de 39
481 000 $ à 42 941 000 $.
Mme Vermette: Oui. J'ai pris connaissance, M. le ministre, de ces
données mais, moi, c'est une meilleure ventilation que j'aimerais avoir
parce que, finalement, on le voit d'une façon très globale. Je
voudrais savoir exactement la part qui va à l'indexation des
dépenses et la part qui sera traduite réellement en services pour
les personnes handicapées. Il y a, cette année, une augmentation
de 3 400 000 $, dont 1 800 000 $ d'augmentation en ce qui concerne l'aide
matérielle et il y a une partie qui va à l'indexation des
dépenses. Je voudrais connaître exactement quelle part de cette
augmentation de 16 % de nouveaux crédits ira directement en services et
ne sera pas réellement attribuée à des dépenses de
fonctionnement pour fins d'indexation.
M. Dutil: M. le Président, je ne sais pas si je peux
répondre d'une façon générale à cette
question-là. Il est évident, dans un monde comme le nôtre
où l'inflation est d'environ 4 %, que l'indexation représente en
moyenne quelque chose du même ordre et que les services
supplémentaires constituent, globalement, la différence entre la
hausse et l'inflation. Est-ce que dans certains services bien
spécifiques, en particulier, cette hausse des prix à la
consommation, cette hausse des coûts est supérieure ou
inférieure à 4 % et vient influencer les divers services qui sont
accordés? Nous n'avons pas ce détail. Nous pourrions essayer de
retrouver cela, bien que ce soit, à mon avis, extrêmement
difficile. C'est pour cela qu'on se base, quand on fait notre budget, sur une
hausse de service qui est le
surplus de l'inflation générale.
Mme Vermette: Ce qui m'étonne, M. le ministre, si je tiens
compte de vos propos, c'est que nous devrions constater d'une façon
générale une augmentation d'environ 4 % à l'indexation des
dépenses. Lorsqu'on arrive au sujet Organismes de promotion,
l'augmentation est tellement peu sensible qu'elle ne correspond même pas
à l'indexation du coût de la vie pour les organismes de
promotion.
M. Dutil: Oui. Vous avez une hausse qui part de 1 850 000 $
à 2 090 000 $.
Mme Vermette: Oui. Il faudrait peut-être aller en
étude plus détaillée; il y a une augmentation, mais je ne
sais pas s'il y a eu des organismes qui se sont dissociés. En fait, cela
ne fait pas une augmentation très substantielle.
M. Dutil: Cela fait une augmentation de 13 %. Je suis convaincu
que vous soulevez le problème de la hausse du nombre d'organismes qui
nous demandent des subventions.
Mme Vermette: C'est pourquoi je vous dis qu'il faudrait qu'on ait
plus en détail la ventilation pour savoir exactement la part des
indexations et des dépenses et la part donnée réellement
aux services.
M. Dutil: On regardera cela de plus près, M. le
Président.
Mme Vermette: On voit déjà une projection de
crédits périmés de 595 800 $. C'est basé sur quels
critères pour arriver à périmer autant d'argent, autant de
crédits?
M. Dutil: M. le Président, c'est un montant
périmé total de l'ensemble du budget qui était à ce
moment-là de 47 000 000 $, parce que cela inclut plus que les montants
de transfert. Cela inclut également les montants globaux de budget qui
étaient à ce moment-là de 47 000 000 $.
Je voudrais faire remarquer à la députée de
Marie-Victorin que 595 000 $ sur 47 545 000 $, cela ne représente pas
une proportion énorme, cela représente un peu plus de 1 %,
environ 1,4 %.
Mme Vermette: Je m'étonne qu'on ait des crédits
périmés puisqu'on connaît tellement les besoins
énormes des personnes handicapées, surtout concernant l'aide
matérielle et les différents autres services, mais en particulier
dans ce domaine. D'autre part, je veux savoir si cette somme-là a
été injectée à nouveau et incluse dans les nouveaux
crédits.
M. Dutil: M. le Président, la formule de crédits
périmés, on le sait, c'est en général ce que l'on
appelle une friction machine, c'est-à-dire qu'il y a des crédits
votés en début d'année, et on essaie de faire les
prévisions les plus proches possible de la réalité. On se
trompe parfois parce que notre système est celui que l'on connaît.
Il arrive qu'à la fin de l'année les sommes entières n'ont
pas été dépensées. Ce n'est pas parce qu'il y a un
objectif de périmer des crédits, c'est parce qu'il y a une
friction machine qui fait qu'on essaie d'avoir les prévisions les
meilleures possible. Vous retrouvez ce même phénomène dans
beaucoup de ministères. Je me rappelle même, lorsque
j'étais aux Pêcheries, d'avoir vu ce
phénomène-là avec une ampleur considérable, puisque
l'ordre des crédits périmés était de 15 % à
25 % de l'ensemble du budget. M. le ministre de l'Agriculture à
l'époque...
Mme Vermette: M. le Président, je demande la pertinence
des débats, parce que j'ai posé une question très
précise au ministre. Je lui ai demandé si les crédits
périmés étaient inclus dans les nouveaux crédits.
Je suis rendue avec les crédits de 15 % dans le domaine de
l'agriculture.
Le Président (M. Bélanger): Madame, dans le
contexte de l'étude des crédits, et de tout temps dans les
commissions, il y a toujours eu une interprétation très
très large de la pertinence des débats. Cela permet de poser des
questions qui sont en relation, par exemple, avec les politiques du
ministère sans nécessairement parler des budgets ou des sommes
allouées pour ces politiques. C'est une pratique qui a toujours eu lieu
dans les commissions parlementaires. Alors, quand on évoque la
pertinence des débats, pour autant que le ministre parle de son
ministère, des interractions qui s'y passent et des actions qui s'y
posent, je pense que c'est pertinent. Cela deviendrait non pertinent s'il nous
parlait de la température, s'il nous parlait de je ne sais pas quoi et,
même là, peut-être qu'il pourrait trouver un lien. Mais je
pense qu'il faut écouter le ministre. Si la réponse ne vous est
pas satisfaisante, reposez la question jusqu'à ce qu'il vous donne
satisfaction.
Alors, M. le ministre, si vous voulez continuer votre
réponse.
M. Dutil: Mais, M. le Président, je peux assurer la
députée de Marie-Victorin que mon objectif n'est pas d'être
en dehors du débat. Je voulais seulement illustrer que, pour ce qui est
des crédits périmés, il arrive fréquemment - et je
donnais un exemple tout simplement, j'allais revenir, d'ailleurs, à
l'OPHQ - je voulais simplement dire qu'il y a eu des ministères, et il y
en a encore, où le pourcentage de crédits périmés
est beaucoup plus élevé et que 1,4 % est probablement un des
niveaux de crédits périmés les plus bas qui puissent
exister. Quand on essaie de faire des prévisions, on essaie de les faire
les plus justes possible. Je pense que c'est tout à l'honneur de l'OPHQ,
qui a préparé des prévi-
sions budgétaires, que d'avoir visé à peu
près juste en fonction des dépenses qu'il avait à faire
dans le courant de l'année. Mais, pour répondre à la
question précise: Est-ce que les montants d'argent de ces crédits
périmés sont retournés à l'OPHQ? Bien, je pense que
la réponse est toute évidente, il y a une augmentation de 8, 66 %
du budget. C'est une augmentation qui représente quelques millions de
dollars. Alors, faites la soustraction: 51 662 000 $ par rapport à 47
545 000 $, vous obtenez 4 117 000 $. Alors, on voit qu'il y en a eu beaucoup
plus de réinjecté dans l'OPHQ comme augmentation du budget que
les seuls crédits périmés de l'année passée.
Mais je ne voudrais pas que la députée de Marie-Victorin pense
qu'il n'y aura plus du tout de crédits périmés à la
prochaine année. Il est impossible d'arriver en fin d'année
exactement et précisément au budget qui avait été
voté initialement une année auparavant. On essaie de viser le
plus près possible.
Mme Vermette: Je prends bonne note de la réponse que les
crédits périmés de 595 000 $ sont réaffectés
au dossier de l'Office des personnes handicapées. Ils ne sont pas
retournés au fonds consolidé de la province. C'est ce que je
voulais vérifier.
M. Dutil: Je n'ai pas dit cela. Je n'ai pas dit cela, M. le
Président.
Mme Vermette: Ah! bon!
M. Dutil: J'ai dit ceci: Les crédits périmés
sont toujours retournés au fonds consolidé, quel que sort le
ministère qui les fasse. L'année suivante, nous tenons compte des
dépenses et des budgets qui avaient été votés par
rapport à l'année précédente. Mais il est
évident que, quand le fonds consolidé reçoit de l'argent,
cela lui donne des disponibilités ultérieures pour augmenter
davantage les budgets l'année suivante. C'est dans ce sens-là que
je le dis, M. le Président. S'il n'y avait pas eu du tout de
crédits périmés, par exemple, l'année
dernière - il y en a eu pour plus de 500 000 000 $ - ce serait cet
argent-là qui serait en moins, évidemment, quand on fait un
nouveau budget.
Mme Vermette: J'aimerais savoir, de la part de l'Office des
personnes handicapées, au cours de l'année 1987-1988, quelles ont
été les principales réalisations. Est-ce qu'ils ont eu des
mandats particuliers, au cours de l'année 1987-1988, autres que l'aide
matérielle?
M. Dutil: Je vais demander à M. Mercure de répondre
à votre question.
M. Mercure (Paul): L'office, évidemment, fait beaucoup
plus qu'uniquement l'aide matérielle. Les principales
réalisations de l'office, disons, touchent plusieurs programmes dont,
entre autres, les relations et les subventions aux organismes de promotion, les
centres de travail adapté et aussi les contrats d'intégration au
travail. L'office a un certain nombre de priorités et fonctionnait,
l'année dernière, dans les priorités triennales qui
avaient été adoptées pour la période 1985-1988. Ces
priorités comportaient des domaines très importants comme, par
exemple, l'intégration scolaire et l'intégration au travail.
L'office s'est impliqué grandement dans le domaine de
l'intégration scolaire encore cette année, pour pratiquement la
troisième année consécutive. On s'implique dans
l'intégration scolaire non pas uniquement dans le domaine de l'aide
matérielle, mais aussi par de très nombreux contacts au plan
régional et au plan provincial avec les organismes qui décident
des systèmes d'éducation. (16 heures)
Je voudrais aussi signaler que l'année qui vient de
s'écouler a été un peu spéciale sur la question de
la reprise des discussions avec les ministères et avec les
réseaux sur le transfert éventuel des programmes d'aide
matérielle. Une partie des ressources de l'office a été
consacrée à cette activité qui prévoyait une
structure d'un comité provincial formé par le gouvernement et de
neuf sous-comités dont l'un s'occupait des normes, sept s'occupaient de
différents volets d'aide matérielle et un dernier s'occupait de
réfléchir sur le rôle futur de l'office en ce qui concerne
la défense des droits, la promotion des intérêts et aussi
le développement des services, en utilisant moins
qu'antérieurement l'aide matérielle. Alors, ce n'est pas le
rôle futur de l'office dans le sens de revoir toutes les fonctions
confiées à l'office par ses lois, mais quels sont les ajustements
qui doivent être faits, en tenant pour acquis que, dans un avenir assez
prochain, l'office aura un rôle moins considérable d'aide
matérielle dans le contexte d'aide matérielle à
l'individu, c'est-à-dire la personne handicapée.
Ce sont, je pense, quelques-uns des principaux dossiers de l'office:
l'intégration au travail, l'intégration scolaire et le transfert
des programmes. Nous continuons aussi à promouvoir la réalisation
de "À part... égale". Nous avons commencé, au cours de
l'année qui vient de s'écouler, à faire un bilan. Ce bilan
a été fait, dans un premier temps, pour l'office. On a aussi
demandé à tous les ministères, et on a fourni des
documents pour le faire, de commencer à faire un bilan des
activités qui ont été réalisées et qui sont
en relation avec la réalisation de "À part... égale",
c'est-à-dire les engagements qui ont été pris par les
ministères et les organismes gouvernementaux, et même par les
organismes privés, lors de la conférence "À part...
égale" qui a été tenue en février 1985. Ce sont les
principaux dossiers de l'office pour l'année qui vient de
s'écouler.
Transfert des programmes d'aide matérielle
Mme Vermette: Vous avez mentionné qu'il y a un des
dossiers, qui est tout de même assez Important, auquel vous avez
porté énormément attention et même attribué
énormément de ressources, c'est celui des transferts de
programmes, puisque la moitié de vos effectifs, en tout cas une bonne
partie de vos effectifs a travaillé dans les différents
sous-comités et aussi au comité provincial. Quand vous parlez
d'une bonne partie des ressources, est-ce qu'on peut savoir exactement combien
de ressources affectées à ce dossier cela représente?
M. Mercure: Je n'ai pas utilisé le terme: une grande
partie des ressources, j'ai dit: une partie des ressources.
Mme Vermette: Ah bon!
M. Mercure: Oisons qu'en tout et partout c'était
peut-être huit à dix personnes de l'office, à temps plein,
surtout dans le secteur de la recherche, même en comptant le travail de
bureau. Cependant, comme c'est une démarche de concertation, un grand
nombre de personnes ont été impliquées, provenant des
ministères, des réseaux, des organismes de promotion du mouvement
associatif et aussi des conseils régionaux, c'est-à-dire des
instances qui ont une fonction de coordination.
Mme Vermette: Huit à dix personnes, cela représente
combien par rapport à l'ensemble de votre personnel? Est-ce qu'elles
viennent plus précisément de la région de
Trois-Rivières, qui est le siège social, ou si elles viennent de
différentes autres régions?
M. Mercure: Le personnel de l'office, au cours de l'année
qui vient de s'écouler, était d'environ 123 employés
permanents et de 61 employés occasionnels, pour un total de 184,
malgré que, pour ce qui est des employés occasionnels, c'est un
chiffre annualisé. En cours d'année, le nombre d'occasionnels
peut varier mais, sur une base annuelle, il y avait 187 employés. Il y a
une petite erreur, c'est 126 et 61. Donc, c'est une partie. Les 8 à 10
employés que j'ai mentionnés étaient, en grande partie,
des employés du siège social. Le siège social, il faut
bien le constater, sur les 187 employés, il y a au-dessus de 120
employés qui sont au siège social, soit à Drummondville,
plus exactement. C'est la région économique de
Trois-Rivières. Les autres employés sont dans 11 bureaux
régionaux et les bureaux régionaux ont participé, tout de
même, pour leur part mais d'une façon relativement modeste par
rapport au siège social. La presque totalité des employés
impliqués dans le transfert provenait du siège social.
Mme Vermette: Alors, vous avez sûrement un
échéancier par rapport au transfert des programmes. C'est une des
premières choses qu'on établit lorsque l'on forme un
comité ou, en tout cas, si vous n'avez pas d'échéancier,
vous devez sûrement avoir un plan de décroissance pour
compléter le transfert. Alors, est-ce que vous pourriez nous en faire
part et vers quand prévoyez-vous atteindre votre objectif quant au
transfert des programmes?
M. Mercure: L'opération qu'on peut appeler transfert des
programmes a commencé au mois de mai 1987, soit depuis près d'un
an à partir de maintenant, et l'échéancier des travaux qui
a été publié au tout début de l'opération
prévoyait que la grande majorité des travaux serait
terminée en avril 1988. Cependant, pour deux raisons, il y a eu un
décalage d'environ trois mois et les raisons sont que, au départ,
la formation des comités, dû à certaines
négociations avec des organismes qui devaient participer à ces
comités-là, a pris un peu plus de temps que prévu et les
comités n'ont été formés qu'en juin et juillet
alors qu'on espérait les former dès le mois de mai.
Et aussi, à la suite de demandes insistantes, Mme la ministre
Lavoie-Roux, qui était responsable de l'office à ce
moment-là, a demandé qu'on introduise une période de
consultation qu'on avait prévu durer six semaines et qui,
malheureusement, a duré un peu plus de six semaines. Donc, il y a une
période d'au moins trois à quatre mois où il y a un
décalage dans notre travail, de sorte qu'on ne prévoit pas
terminer notre travail, à ce moment-ci, avant le mois de juillet ou
août de la présente année. Cependant, je dois dire qu'au
niveau des sous-comités, sur les neuf sous-comités dont j'ai
parlé, il y en a, à ce moment-ci, six dont les travaux sont
terminés. Et, dans ces travaux-là, il y en a quatre pour lesquels
la consultation est terminée. Et le travail se fait au comité de
coordination qui prépare, à ce moment-ci, un mémoire au
gouvernement.
Dans un des comités, celui sur les normes, le premier qui devait
soumettre un rapport, un mémoire avait effectivement été
expédié aux instances décisionnelles, soit au Conseil des
ministres et au Conseil du trésor. Quant aux autres, étant
donné l'importance de la première décision, nous attendons
une décision sur la première question concernant les normes
plutôt que... Et c'est essentiel, parce que certains organismes, disons,
tiennent à savoir exactement quelles sont les normes qui vont être
appliquées. Alors, au comité de coordination, on a
décidé d'attendre une décision sur le premier
mémoire avant de transmettre d'autres mémoires. Mais, à ce
moment-ci, H y aurait peut-être des mémoires qui pourraient assez
prochainement être transmis. On prévoit qu'à l'automne
l'opération sera terminée en termes de planification des
transferts. Ce qui ne veut pas dire que les transferts
vont être effectifs au cours de la présente année
financière. Je pense que le mieux qu'on puisse espérer du
côté des transferts proprement dits, c'est que, peut-être en
janvier 1989, peut-être en avril 1989, un ou deux éléments
de programme pourraient être pris en charge par les ministères ou
par les réseaux. Mais, comme j'ai eu l'occasion de le dire publiquement,
il faut prévoir que cela puisse prendre au moins deux à trois ans
avant qu'une partie importante des responsabilités de l'office dans
l'aide matérielle soit transférée dans les
différents ministères et dans les réseaux qui administrent
des services de même nature à la population en
général.
Mme Vermette: Vous avez dit tantôt que là où
cela bloque un peu... Vous en avez déposé un et ce qui bloque
pour faire avancer les autres c'est le rapport que vous avez
déposé en ce qui concerne les normes. Est-ce que l'objet qui
cause ce retard est le fait qu'on est en train d'étudier une
possibilité de normes à la baisse ou simplement qu'on est en
train de changer complètement, d'avoir une nouvelle accessibilité
à l'aide matérielle ou autres, par exemple l'adaptation de
véhicule pour les personnes handicapées?
M. Mercure: Je voudrais seulement corriger le mot "bloque". Je
n'ai pas drt que cela bloquait.
Mme Vermette: Non, non. Vous attendez ce rapport pour pouvoir
aller plus allègrement avec les autres?
M. Dutil: M. le Président, avant de redonner la parole
à M. Mercure, je veux préciser certaines choses. En ce qui
concerne les transferts, les organismes que j'ai rencontrés, qui
étaient inquiets parce qu'ils veulent que cela se fasse avec la
même qualité de services qu'ils obtiennent de l'OPHQ, je leur ai
assuré que l'échéance n'était pas une contrainte
telle qu'on voudrait le faire - comme on pourrait le laisser entendre -
à rabais. Lorsque le transfert se fera, on sera assuré que le
traitement par les ministères sera au moins d'une équivalente
qualité et à des montants tout aussi généreux
qu'ils le sont actuellement pour permettre qu'il n'y ait aucune perte pour les
handicapés pour les services qui leur sont accordés. Toutefois,
on sait que le monde des handicapés souhaite être
intégré aux ministères plutôt que d'être
séparé de l'ensemble des autres citoyens, y compris dans les
programmes qui leur sont administrés. Ils estiment que cela fait aussi
partie de l'intégration des personnes handicapées dans la
société normale que les programmes qui les concernent soient
traités par les ministères de façon normale. Ce qui se
passe c'est que l'OPHQ a fait, depuis quelques années, ce travail
à titre palliatif et c'est pour cela que le transfert se fait d'une
façon graduelle. Je voulais simplement dire que ce n'est pas une urgence
de faire les transferts et c'est pour cela qu'on prend toutes les
précautions nécessaires avant de le faire pour s'assurer que cela
se fera à la satisfaction du monde des handicapés. M. Mercure
pourrait compléter.
M. Mercure: Oui, disons que le premier mémoire porte
effectivement sur l'approche que l'office a tradionnellement suivie et cela
touche beaucoup la qualité des services et la nature de la
réponse que l'office a accordée. L'office - c'est une
décision de notre conseil d'administration - a émis un certain
nombre de conditions et, parmi les conditions, celle de la qualité de la
réponse, celle de l'approche du pian de services, par exemple.
Plutôt qu'une approche absolument dépersonnalisée,
l'approche de l'office a toujours été une approche individuelle
et planifiée. Alors, on tient bien à ce que cette approche soit,
dans toute la mesure du possible, celle qui soit utilisée, même
après le transfert des responsabilités de l'office
Mme Vermette: Mes questions s'adressent, d'une part, au ministre
et l'autre question va s'adresser au directeur de l'office. Ma première
question au ministre, vous semblez très sûr et vous affirmez d'une
façon très péremptoire que rien dans la qualité du
service ne pourra être révisé à la baisse et que
cela sera exactement l'intégration quant à la qualité des
services par rapport à ce qu'on connaît à l'heure actuelle.
Sur quoi vous basez-vous pour être aussi affir-matif? (16 h 15)
M. Dutil: Sur le travail que je fais et sur les engagements que
j'ai pris face aux personnes handicapées, madame. Je pense que ma
responsabilité c'est de m'assurer que les acquis des personnes
handicapées soient maintenus et qu'on leur offre le meilleur service et
la meilleure qualité possible. Alors, un transfert, comme toute
transition dans d'autres domaines, est toujours inquiétant pour les gens
qui sont à l'extérieur, qui sont ceux qui se préoccupent
des personnes handicapées. Alors, ce sont les assurances que je leur ai
données. On fait cheminer le dossier de sorte qu'on s'assure
qu'effectivement il n'y ait pas de pertes de ce côté.
Mme Vermette: Est-ce que le passé est garant de votre
assurance en ce qui concerne les différentes expériences qu'on a
vécues tout dernièrement?
M. Dutil: II faudrait que vous me donniez les exemples auxquels
vous référez.
Mme Vermette: Je pourrais vous en donner. Il y a l'adaptation
domiciliaire, il y a l'adaptation des véhicules qui, dune part, fait
l'objet de décrets très particuliers et très restrictifs
notamment à l'intérieur du projet PARCQ, où on est en
train de faire différentes catégories de personnes, ce qui nous
semble beaucoup plus être un ticket modérateur aux utilisateurs
qu'une
qualité d'aide sociale. Je pourrais vous parler aussi de la
réforme du ministre Paradis en ce qui concerne les personnes
handicapées. Je pense qu'on est en train de faire d'autres classes avec
les personnes handicapées. Je ne crois pas que cela va viser à
l'intégration sociale, en tout cas.
M. Dutil: Pour ce qui est du programme de sécurité
du revenu, je voudrais dire qu'il y a des choses très importantes et
très valables pour les personnes handicapées. Toutefois, il a
été mis en lumière par le président, lors de la
commission parlementaire, certains points qui seront aussi
étudiés, qui ont porté de façon importante sur
l'intégration des personnes handicapées et qui ont porté
sur la notion "apte" et "inapte". On sait qu'il y a des personnes
handicapées qui pourraient être considérées comme
inapte selon les termes de la réforme et qui ne veulent pas être
considérées comme inaptes, qui veulent travailler, qui peuvent
travailler et qui travaillent effectivement. Cela pose des difficultés,
sur le plan technique, qui sont considérables.
Quant aux premières questions que m'a adressées Mme la
députée de Marie-Victorin quant à l'adaptation de
domiciles et l'adaptation de véhicules, ce qui est en cause, ce n'est
pas la pleine compensation qui est prévue comme principe dans "À
part... égale", ce qui est en cause, c'est de voir à trouver sur
le plan de la gestion la façon d'atteindre la pleine compensation tout
en respectant un minimum de normes et d'équité. Si on parle, par
exemple, de l'adaptation de domiciles, c'est sûr qu'il est plus facile
d'envisager un programme qui pourrait coûter 40 000 $ ou 50 000 $. Ce
qu'on essaie de voir, c'est ce qu'il faut faire pour atteindre la pleine
compensation du handicap, ce qui est un des principes amenés par "A
part... égale", tout en ayant la façon de le faire qui soit la
meilleure gestion possible en respect des deniers publics que nous
dépensons et qui respecte donc un minimum d'expertise.
Mme Vermette: Oui, je veux bien croire tout cela pour autant que
les personnes handicapées ne soient pas pénalisées, d'une
part, parce que cela devient de plus en plus restrictif. Justement en ce qui
regarde l'adaptation de véhicules, actuellement, c'est une norme
très restrictive parce qu'on dit: Là où il n'y a pas de
transport adapté pour les personnes, on accorde une allocation pour
favoriser l'adaptation, mais, là où il y a du transport
uniquement aux personnes qui sont en chaise électrique, on le
tolère. Je trouve qu'à ce moment-là ce n'est pas faire
comprendre exactement les différents besoins de la personne
handicapée et, d'autre part, favoriser son intégration parce que
plus cela va, avec les mesures auxquelles on est en train de faire face par.
les décrets, plus ces normes sont restrictives et tentent
d'éliminer une clientèle. Il y a aussi le décret qui
laissait entendre d'aller au ralenti en ce qui concerne les demandes... Je les
sortirai tantôt, on arrivera à cela. Il y a des décrets qui
démontrent qu'il ne faut pas aller trop vite pour remplir les demandes
comme telles. On accuse réception des demandes, on fait le plan de
services, mais on ne le remplit pas automatiquement pour autant.
L'autre aspect, quelles sont les garanties en ce qui regarde la
qualité - parce que j'arrive toujours à la qualité du
service - quelles sont les garanties que les personnes handicapées
à l'intérieur des différents ministères auront le
même traitement et seront traitées avec autant de
célérité qu'elles le sont à l'heure actuelle par
l'office?
On me dit qu'au programme PARCQ, aux Affaires municipales, il y a des
listes d'attente de deux ans à l'heure actuelle en ce qui concerne les
personnes handicapées. Est-ce que c'est cela que vous appelez,
finalement, l'intégrité de la qualité du service par
rapport à ce qui existe actuellement? Et est-ce sur cela que vous
êtes très assuré qu'il ne se passera absolument rien de
discriminatoire, en fin de compte, pour les personnes handicapées, parce
que cela devient de la discrimination par rapport à ce qui se passe
à l'heure actuelle et par rapport à ce qu'elles ont connu?
M. Dutil: M. le Président, j'aimerais bien que Mme la
députée me montre les décrets auxquels elle fait
référence, et l'interprétation qu'elle en fait m'apparait
inadéquate et non conforme à ce qui est écrit dans ces
décrets. J'aimerais bien avoir ces décrets pour que je puisse en
prendre connaissance et essayer de comprendre d'où elle tire une
pareille interprétation.
Je parlerai del'adaptation de véhicules qu'elle a
soulevée tout à l'heure où, effectivement, un
critère a été soulevé' au niveau de la fonction
publique en disant qu'on pourrait tenir compte des endroits où il y a
des transports adaptés pour justifier de ne pas faire d'adaptation de
véhicules. C'est un critère que l'office conteste et que je
conteste également. Nous sommes à résorber ce
problème et je tiens à préciser que cela ne vient pas
toucher du tout le principe de la pleine compensation, fort important, à
mon avis, quant aux personnes handicapées. Et ce qu'il s'agit de
démêler, ce qu'il s'agit de voir, c'est est-ce que là
où il y a un transport adapté, effectivement, on doit tenir
compte ou non d'une éventuelle adaptation de véhicules? Nous
plaidons, je plaide que non, il n'y a pas de relation entre les deux et c'est
un dossier qui sera éclairci incessamment. À ce moment, si la
députée prend connaissance de notre décision et qu'elle
n'est pas d'accord, je suis certain que cela l'amènera à faire
une intervention à la période de questions, mais pour l'instant
il n'y a pas de décision d'aller dans l'autre sens comme elle le
prétend.
Quant à ses autres remarques concernant le retard dans certains
dossiers, je veux préciser
quant à la liste d'attente que, si la liste s'est allongée
dans le passé, cela n'est dû d'aucune façon à aucun
frein qui aurait été mis par le gouvernement. C'est dû
à la hausse des demandes qui ont été faites à
l'OPHQ par les personnes handicapées. D'ailleurs, dans les chiffres qui
étaient soulevés initialement par la députée de
Marie-Victorin, je dois vous dire que l'année dernière, à
pareille date, au 1er avril de l'année dernière, nous avions en
attente 4644 dossiers et qu'actuellement, au 31 mars, nous avons 3038 dossiers,
ce qui fait une diminution de la liste d'attente de 1600 dossiers. Je ne veux
pas prétendre que la liste d'attente n'est pas trop longue et qu'il n'y
a pas d'efforts à faire. Au contraire, nous estimons qu'il y a encore
beaucoup d'efforts à faire pour diminuer la liste d'attente. Il faut se
rendre compte que cette liste d'attente a augmenté d'une façon
assez considérable à la suite de demandes qui ont
été faites et non pas à la suite de diminutions de
ressources, comme pourrait le laisser entendre l'Opposition. Par exemple, les
demandes reçues en 1984-1985 ont été de 3750. En
1985-1986, M. le Président, et c'est là le saut important, les
demandes ont été de 5679. En 1986-1987, de 4661 et, en 1987-1988,
de 3939. On voit que les demandes rediminuent un peu. Il y a eu une hausse qui
n'a pas actuellement été entièrement absorbée, nous
l'admettons bien. Il faut en arriver à une diminution encore plus
considérable de cette liste d'attente qui, en 1984-1985, était de
1471. Mais je tiens à rappeler, et c'est fort important, que la hausse
de la liste d'attente est non pas due à une diminution des dossiers en
traitement, au contraire, les dossiers en traitement eux aussi ont
augmenté. Je donne également des chiffres. En 1984-1985, les
dossiers en traitement ont été de 3941, en 1985-1986, de 4447, en
1986-1987, de 3990, mais, en 1987-1988, de 5545. Et c'est cela qui nous a
permis de rattraper un certain retard et de réduire la liste,
finalement, à tout près des 3000.
Deuxièmement, quant à la durée d'attente sur cette
liste d'attente, il faut bien se rendre compte qu'une liste d'attente qui ne
tiendrait pas compte de l'ordre chronologique serait injustifiée. Quand
on dit qu'il y a 3038 dossiers en attente, il y a des dossiers dans cela qui
attendent depuis peut-être longtemps, mais il y a beaucoup de dossiers
aussi qui viennent d'entrer. Alors, au rythme où les dossiers entrent,
vous voyez, on en a reçu pour cette année 3939,
c'est-à-dire tout près de 4000. On voit que les dossiers entrent
au rythme d'à peu près 350 par mois. Quant au traitement des
dossiers, bien, on voit qu'on a 5545 dossiers, cette année, et ils
sortent actuellement au rythme d'à peu près 462 par mois. Donc,
on voit qu'il y a plus de dossiers qui sont traités que de dossiers qui
entrent actuellement, ce qui est un bon signe, ce qui est normal et ce qu'il
faut faire pour résorber cette liste d'attente. Deuxièmement, il
y a des graphiques qui me démontrent très bien, parce que je suis
le dossier de très près, que la plupart des dossiers , en liste
d'attente sont, évidemment, plus au début qu'à la fin,
bien que quelques cas, effectivement, pour diverses raisons, parfois parce
qu'il nous manque certains renseignements, parfois parce qu'il nous manque
certaines données, aient des longueurs d'attente plus
considérables.
Mme Vermette: M. le Président, j'aimerais revenir sur le
transfert des programmes qui, à mon avis, est une problématique
très importante, puisque c'est de l'avenir même, finalement, de
l'office aussi qu'on parle. À cet effet-là, j'aimerais savoir
exactement de la part de M. Mercure, le président, de quelle
façon vous voyez votre rôle et comment vous pourriez exercer un
contrôle sur la qualité des services. Comment allez-vous
procéder avec les différents ministères pour voir si, oui,
effectivement, chaque ministère va bien mettre à profit les
normes en faveur des personnes handicapées, d'une part, et croyez-vous
que les organismes de promotion devront jouer un rôle très
important face à l'éventualité du transfert des
programmes?
M. Mercure: D'abord, il faut bien constater que le budget de
l'office, même s'il est de l'ordre de 18 000 000 $, ne représente
qu'une très petite partie des services gouvernementaux à
l'égard des personnes handicapées. C'est la dernière
instance quand il n'y a pas d'autres ressources. Alors, l'office doit - comme
vous le signalez, c'est aussi le rôle des organismes de promotion -
s'assurer que les services donnés par tous les ministères... Je
prends, par exemple, le ministère des Transports; l'office a
réussi, disons, en discussion avec les différentes instances,
dont le ministère des Transports et les différentes
communautés de transport qui existent dans la province, à faire
en sorte que chaque communauté soit responsable d'un service de
transport adapté. Alors, ces services-là sont déjà
fournis par les réseaux. Dans cet exemple-là, on a beaucoup de
collaboration de la part des différentes commissions de transport et du
ministère et l'office n'a pas besoin d'intervenir
financièrement.
Alors, le genre de relation qu'il y a là, c'est la
présence de personnes de l'office dans les comités
d'admissibilité au transport adapté, c'est la révision des
rapports, c'est, à l'occasion, des demandes d'études
particulières et c'est des contacts constants avec les fonctionnaires du
ministère des Transports pour s'assurer que le service est
adéquat. Il y a parfois des ajustements de parcours qui sont
nécessaires et les organismes de promotion signalent parfois des
lacunes. C'est ce genre de travail, ce genre de relation avec les instances
gouvernementales que l'office devra faire dans les autres domaines où,
malheureusement, au cours des années, on a dû s'impliquer
davantage dans le financement direct des services à l'individu,
étant donné que,
admettons, certains programmes tardaient à être
adaptés aux besoins des personnes handicapées. (16 h 30)
Alors, il n'y a pas de recette miracle pour la garantie de la
qualité des services. On s'est posé cette question-là
très sérieusement et on a listé des hypothèses de
réponses. Je pense que la première chose que cela prend, c'est
une volonté gouvernementale de donner des services de qualité. En
deuxième lieu, cela peut vouloir dire, dans les ministères, des
politiques claires. Je prends l'exemple, mettons, du maintien à
domi-cfle. Je pense qu'il y a une politique de maintien à domicile qui
est en révision au ministère de la Santé et des Services
sociaux. Alors, ce serait important que, dans, la revision de cette
politi-que-là, on s'assure que les besoins des personnes
handicapées soient bien pris en considération.
À l'Éducation, c'est la même chose. Je veux parler
des politiques du ministère de l'Éducation et, dans ce
cas-là, c'est peut-être un peu plus compliqué parce que,
les commissions scolaires ayant une marge d'autonomie assez grande dans
l'organisation des services, il faut aussi s'assurer que chaque commission
scolaire adhère au principe d'intrégration scolaire des
personnnes handicapées. Alors, c'est un travail que l'office
actuellement fait et, je dois le dire, cela aide grandement à l'occasion
d'avoir des possibilités d'intervention financière.
Il va falloir trouver des moyens et ces moyens-là sont, comme je
vous le dis, de demander et d'obtenir que les ministères publient des
politiques claires et, parfois, cela voudra peut-être dire, dans certains
ministères, des budgets spécifiques pour les services aux
personnes handicapées. Mais, même là, les budgets
spécifiques, ce n'est pas une garantie à long terme, parce que,
d'une année à l'autre, cela dépend si on introduit dans
ces budgets-là les ressources financières suffisantes pour
répondre aux besoins réels qui se trouvent dans la population et
qui peuvent varier.
Alors, même s'il y a plusieurs moyens que j'ai exposés, en
définitive, c'est le travail de l'office d'être un peu le chien de
garde en ce qui concerne les services aux personnes handicapées et ce
travail-là va devoir se continuer. L'office, dans les rapports qu'il va
transmettre au gouvernement, va demander le pouvoir d'obtenir des Informations
des ministères sur les programmes et sur la façon dont ces
programmes-là rencontrent les besoins des personnes handicapées,
et il va être en mesure de faire des recommandations. Le mouvement
associatif a un rôle extrêmement Important qui est
substantiellement le même, mais sans doute qu'ils ont des moyens
différents de ceux de l'office pour promouvoir leurs
intérêts.
Alors, je pense qu'en définitive la qualité des services,
comme dans d'autres domaines, doit beaucoup à la vigilance des
organismes de défense des droits et à la vigilance des groupes
intéressés dans la population.
Adaptation de domicile ou de véhicule
Mme Vermette: Je vous remercie, M. le président. Alors, je
pense que c'est très important le rôle que vous devez jouer pour
les années qui viennent, parce que cela va être très
névralgique, en tous cas, pour favoriser l'intégration des
personnes handicapées à la société
québécoise et pour réaliser, justement le projet collectif
qu'on s'était donné, c'est-à-dire "À part...
égale". En effet! si je regarde l'aide matérielle et si je me
réfère aux décrets que vous avez vous-même
signés, M. Dutil, à partir du 8 décembre 1987 afin
d'approuver, pour la période du 1er décembre 1987 au 31 mars
1988, les normes proposées d'aide matérielle relatives à
l'adaptation de domicile et à l'adaptation de véhicule, et au
maintien à domicile, c'est exactement... C'est le 8 décembre I987
et c'est le CT 166128. Et il est signé de votre main, M. le
ministre.
Donc, si on revient, justement, au projet PARCQ, je pense que là
aussi cela soulève l'inquiétude des personnes handicapées.
La plupart de celles qui doivent maintenant travailler à
l'intérieur des normes du projet PARCQ se trouvent un petit peu
pénalisées, parce qu'on a retouché les critères.
Cela fait que les gens, d'une part, doivent attendre parce qu'ils sont
considérés comme des personnes comme toutes les autres. Les
recommandations qu'a faites tantôt M. Mercure ne sont pas prises en
considération à l'intérieur de ce ministère, en
tout cas.
Tantôt, vous vouliez que je fasse référence aux
décrets.
M. Dutil: Cela va.
Mme Vermette: Je fais référence aux décrets,
parce que, quant à moi, lorsque je le lis, cela a des effets
restrictifs. Vous disiez que non et, quand je le lis, cela a des effets
restrictifs. Quand on regarde, finalement, la conclusion à laquelle vous
arrivez, quand on est locataire, on a 8000 $ et, quand on est
propriétaire, on a au maximum 16 000 $. Ce qui n'était pas
antérieurement dans les normes de l'Office des personnes
handicapées, si je me souviens bien.
M. Dutil: Ce à quoi vous vous référez, c'est
à la demande qui avait été faite par le comité des
normes afin, justement, d'avoir ces normes-là. Les demandes qui ont
été faites étaient d'obtenir comme aide matérielle
pour l'adaptation de domicile, quand la personne était
propriétaire, 20 000 $ et, quand la personne était locataire, 10
000 $. Une autre décision a été prise
ultérieurement à cette décision-là, qui maintient
le plafond à 16 000 $ et 8000 $, mais qui permet des cas d'exception
lorsque c'est jugé approprié par l'OPHQ et sur décision du
ministre, de façon à pouvoir, avec un montant qui nous
paraît suffisant pour couvrir l'ensemble des cas où la
chose peut se produire, couvrir les cas qui sont entre 16 000 $ et 20
000 $ et les cas qui sont entre 8000 $ et 10 000 $ concernant, dans un cas, les
propriétaires et, dans l'autre cas, les locataires.
Mme Vermette: Est-ce qu'il y a eu beaucoup de cas qui ont
été portés à l'attention du Conseil du
trésor et qui ont été approuvés où on a pu
accorder des montants au-delà de ce qui est permis, tel que
normalisé?
M. Dutil: Les cas apportés au Conseil du trésor
sont seulement ceux qui dépassent les normes, c'est-à-dire...
Mme Vermette: Oui, c'est cela.
M. Dutil: Dans le passé, depuis deux ans et demi, il y a
beaucoup de cas qui ont même dépassé 20 000 $. Il y a
même eu des cas qui, sont allés jusqu'à 35 000 $ et 40 000
$. Je ne dis pas qu'il y en a eu énormément, mais il y en a eu
beaucoup. C'est ce qui a amené, d'ailleurs, les interrogations sur le
plan de la gestion des cas. On se disait: Oui, la pleine compensation, c'est un
principe qui est dans "À part... égale" et que l'on admet, mais
est-ce qu'il n'y a pas moyen, sur le plan de la gestion, sur le plan du
service, d'être rationnel, d'être bien cohérent et d'arriver
à une adaptation de domicile adéquate qui va dans le sens de la
pleine compensation, mais qui serait à l'intérieur de montants
plus normaux, plus justifiés? Il faut, quand même, se rappeler
qu'un montant de 35 000 $ ou de 40 000 $, c'est un montant fort important et
qu'en général, à l'intérieur d'un montant plus
petit, on peut très bien atteindre les mêmes objectifs de pleine
compensation, ce qui nous permet, justement, de servir davantage de personnes
handicapées.
Mme Vermette: Alors, j'aimerais savoir de la part du ministre
combien de cas qui dépassaient les normes ont fait l'objet
d'étude de la part du Conseil du trésor. Je voudrais aussi savoir
combien de temps ils ont dû attendre pour avoir leur réponse. Ce
serait fort intéressant aussi de vérifier le délai que
prend le Conseil du trésor pour donner des réponses face à
des demandes pressantes.
M. Dutil: M. le Président, on n'a, évidemment, pas
les informations ici. Je ne le crois pas. On pourra noter la question et
soumettre cela à l'Opposition. Je répète bien la liste des
cas et les délais.
Mme Vermette: Cela veut dire que dorénavant les
décrets qui ont été déposés le 8
décembre feront l'objet des nouvelles normes appliquées à
l'Intérieur du projet PARCQ pour les domiciles et, en ce qui concerne
les véhicules, vous me dites que c'est sujet à être
ratifié?
M. Dutil: II y a toujours des discussions en ce qui concerne les
normes du projet PARCQ actuellement. Ce qui est réglé pour
l'instant, tant et aussi longtemps que les décisions finales ne sont pas
prises, c'est qu'on peut aller jusqu'à 20 000 $ dans le cas d'un
propriétaire et jusqu'à 10 000 $ dans le cas d'un locataire.
Mme Vermette: Sans passer devant le Conseil du trésor?
M. Dutil: Sans passer devant le Conseil du trésor, sauf
que, quand cela dépasse 16 000 $ et 8000 $, il y a une demande qui doit
être adressée par l'OPHQ au ministre qui peut la confirmer.
Mme Vermette: À l'heure actuelle, ce qui s'applique, c'est
cela? Je veux être très claire.
M. Dutil: Oui. C'est ce que je viens de vous dire. Ce n'est pas
exactement la décision que vous avez, celle du 8 décembre.
Mme Vermette: C'est ce que vous venez de dire, avec une
modification qui a un effet d'extension entre 16 000 $ et 20 000 $, à
peu près si on adresse une demande à votre ministère.
M. Dutil: C'est cela et je tiens à le
répéter. Cela correspond à la recommandation faite par le
comité qui a fait l'étude des normes, c'est-à-dire de
pouvoir se rendre jusqu'à 20 000 $ On sait que ce sont des cas
exceptionnels. M. Mercure pourrait peut-être me confirmer cela. La
proportion de cas qui risqueraient de dépasser 16 000 $ est infime.
Peut-être de l'ordre de 5 %, M. Mercure?
M. Mercure: II y en a très peu. Peut-être que je
pourrais demander à M. Capistran de préciser le nombre de cas,
mais disons que le nombre de cas de l'ensemble de l'aide matérielle pour
ce qui est de l'adaptation de domicile est de l'ordre de 800 par année.
Il n'y a pas plus que 20 ou 25 cas qui sont susceptibles de dépasser 16
000 $. Je ne sais pas quel pourcentage cela fait; 20 sur 800, cela fait
approxi- , math/ement 2 % ou 3 % des cas qui dépassent 16 000 $.
Quand on dit qu'il y a une limite à 20 000 $, il faudrait
peut-être penser aussi qu'il y a une approche un peu nouvelle: on
introduit la possibilité d'un déménagement lorsque le
coût d'une adaptation de domicile est très élevé et
| que l'excédent de coût n'est pas basé sur la nature de la
déficience ou des limitations fonctionnelles, mais est plutôt
basé sur la nature des lieux, sur la nature de la maison. Ce qu'on dit,
c'est que dans le cadre d'un budget qui prévoit une adaptation ne
dépassant pas 20 000 $, d'une façon générale - il
va y avoir
peut-être encore des exceptions - dans toutes les régions
de la province, il y a des maisons qui peuvent être adaptées
à toute circonstance concernant les limitations fonctionnelles et les
déficiences pour des montants ne dépassant pas 20 000 $. S'il y
avait des situations très particulières... Par exemple, je
pourrais prendre le cas d'une famille qui vit sur une ferme et qui a une maison
avec des pièces qui ne conviennent pas du tout; s'il y a plusieurs
adaptations à faire et que cela serait très coûteux, c'est
bien sûr que ce n'est pas possible d'exiger qu'une famille, qui vit sur
une ferme qui est en même temps un lieu domiciliaire et un lieu de
travail, déménage. Alors, dans des cas comme cela, la
possibilité d'aller au Conseil du trésor demeure toujours, parce
que cela dépasse les normes en vertu desquelles on peut fonctionner sans
référence aux instances décisionnelles comme le Conseil du
trésor. Donc, il y aura certains cas, mais très peu, qui devront,
quand même, être référés avec ces
normes-là qui sont de 20 000 $ pour l'adaptation de domicile.
Mme Vermette: Je voudrais revenir sur le pouvoir
discrétionnaire du ministre dans certains cas. Bien sûr, il faut
un contrôle, mais c'est une pratique qui me semble un peu douteuse. Sur
le plan politique, en tout cas, cela me pose des interrogations. Vu qu'on a un
organisme qui s'appelle l'OPHQ, je pense qu'il peut très bien jouer son
rôle d'évaluation des besoins. Je pense que ce sont des gens qui
ont eu la formation pour arriver à faire exactement l'évaluation
qui s'imposait dans le cas de chaque personne concernée qui faisait une
demande. Maintenant, c'est une nouvelle pratique que je trouve un peu douteuse:
il me semble que maintenant, dans peu de cas, quand les gens ne seront pas
satisfaits une fois qu'ils auront passé devant l'office, il n'y aura
qu'un pas à faire: ils se rendront au bureau du mjnistre et il pourront
avoir satisfaction. Est-ce que vous avez un décret qui vous donne
maintenant cette juridiction-là sur les nouvelles normes de
procédure? Ce serait intéressant, si vous en avez un, de le
déposer à la commission, d'une part. D'autre part, est-ce qu'il y
a des critères à ce moment-là? Est-ce que c'est
d'emblée toutes les demandes qui devront être acheminées
à votre bureau? Comment cela va-t-il se produire? Cela
m'inquiète. (16 h 45)
M. Dutil: Cela vous inquiète. M. le Président, ce
qu'on a fait, c'est qu'on a décidé que la décision, au
lieu d'être prise par le Conseil du trésor, pour des raisons
pratiques et de rapidité, serait prise par le ministre. Alors,
premièrement, on a n'a pas passé des pouvoirs de l'office au
ministre; on a passé des pouvoirs du Conseil du trésor au
ministre.
Deuxièmement, il est bien évident que ce ne sont pas les
personnes handicapées elles-mêmes qui vont venir au bureau du
ministre. C'est à la suite des analyses faites par l'OPHQ qui me
transmettra les recommandations et après avoir eu toutes les
informations requises que je prendrai les décisions quant à ces
cas. Ce n'est qu'un palier intermédiaire pour régler des
situations qui sont relativement exceptionnelles, on le voit. Il y a une autre
instance qui s'appelle le Conseil du trésor pour les quelques cas par
année, de l'ordre de trois, quatre ou cinq, qui pourraient se produire
et qui dépasseraient les 20 000 $. À ce moment-là, cela
nous amènerait à obtenir une décision du Conseil du
trésor.
Mais, comme l'a soulevé la députée de
Marie-Victorin tout à l'heure, on sait que le processus d'aller jusqu'au
Conseil du trésor et d'obtenir une décision est plus long - c'est
normal, c'est une étape supplémentaire - que d'obtenir une
décision directement de l'OPHQ ou directement du ministre. On pensait
que, sur le plan administratif, c'était beaucoup plus rapide, pour les
personnes handicapées toujours de procéder de cette façon.
Quant au décret, il n'y a pas de décret, c'est une
décision du Conseil du trésor, M. le Président.
Mme Vermette: Est-ce qu'on peut avoir la ventilation des demandes
d'aide matérielle pour l'adaptation de véhicule et l'adaptation
de domicile...
M. Dutil: Bien sûr.
Mme Vermette: ...et aussi les délais de traitement? M. le
Président, on pourrait demander aussi, à la suite de la lecture,
le dépôt du document. Ce serait peut-être intéressant
pour cette étude.
Le Président (M. Bélanger): S'il y a suffisamment
de copies. M. le ministre, est-ce que vous jugez pertinent de déposer ce
document?
M. Dutil: Oui, M. le Président. Je pense que cela
faciliterait nos travaux de le déposer. Est-ce qu'on a des copies
ici?
Une voix: D'accord.
M. Dutil: M. le Président, on va en demander cinq copies
afin qu'on puisse suivre tous ensemble, chacun des députés.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Chambly, vous avez une question?
M. Latulippe: M. le ministre, je comprends que l'un de vos
objectifs, c'est que l'Intégration des personnes handicapées dans
la société québécoise doit se faire en partie par
le travail. Le travail est une excellente façon d'intégrer les
personnes handicapées dans la société. C'est l'un de vos
objectifs.
M. Dutil: Absolument.
Plans d'embauché
M. Latulippe: Vous avez des programmes d'intégration au
travail par des contrats d'intégration au travail et des plans
d'embauché. Est-ce que vous considérez que ces contrats et ces
plans d'embauché sont un succès auprès de la
clientèle handicapée?
M. Dutil: Vous avez mentionné deux programmes. On pourrait
ajouter les centres de travail adapté à ce que vous dites et je
pourrai y revenir plus tard. Quant aux contrats d'intégration et aux
plans d'embauché, actuellement, on a des statistiques qui nous
démontrent qu'on aurait à peu près 600 contrats
d'intégration au travail en cours actuellement.
Quant aux plans d'embauché, je pense que cela mérite de
plus amples explications. À l'époque, le gouvernement avait
décidé qu'au lieu d'imposer, comme cela s'est fait,
malheureusement, avec peu de succès dans certains pays, l'obligation
d'engager des personnes handicapées sans davantage de forme on
procéderait plutôt avec une loi plus incitative,
c'est-à-dire qu'on exigerait des entreprises d'avoir des plans
d'embauché qui auraient pour objectif d'éliminer le plus possible
les barrières à l'embauche de personnes handicapées. C'est
la formule qu'avait adoptée l'ancien gouvernement et qui fonctionne
depuis quelques années.
Actuellement, on peut dire que 3000 firmes représentant 9000
entreprises - c'est bien cela, M. Mercure? - ont soumis leur plan
d'embauché. Malheureusement, on n'a pas le suivi de tout, cela, mais,
règle générale, elles respectent ce qu'elles ont mis dans
le plan d'embauché. Et on se rend compte que l'effet net de cela, c'est
qu'il y a eu une certaine modification de pensée dans ces
entreprises-là et on le sent dans la société parce qu'il y
a plusieurs entreprises qui disent: Moi, j'ai fait mon plan d'embauché.
Puis, bon, on respecte cela. Et cela fonctionne relativement bien. Et cela
amène ce qu'avait prévu l'ancien gouvernement quand il l'avait
mis en place, ce que nous croyons devoir garder parce que c'est excellent, ce
changement de mentalité qui fait que, quand on engage une personne
handicapée, maintenant on sait que ce n'est pas nécessairement
compliqué. Surtout avec la technologie moderne d'aujourd'hui puis la
possibilité d'adapter les postes de travail de façon plus facile
et avec le suivi qui peut se faire de cela, on peut obtenir des employés
qui sont d'excellents travailleurs sauf que, dans le passé, pour des
raisons ou pour d'autres, on ne se préoccupait pas de les
intégrer. Aujourd'hui on s'en préoccupe et cela se fait de plus
en plus.
Alors, votre dernière question était: Combien ces plans
d'embauché ont-il permis d'engager de personnes?
Ce qu'on sait, c'est que, depuis que cela existe, II y a à peu
près 1500 employés; 1000? D'accord, 1088 personnes auraient
été employées, à la suite de ces plans
d'embauché
M. Latulippe: Alors moi, je voudrais, à partir de cela,
faire le pont entre cela et la réforme de l'aide sociale. Dans la
réforme qui a été déposée par le ministre
Paradis, il existe une présomption que toute personne est employable,
est disponible. Est-ce que vous croyez que cette présomption devrait
s'appliquer aussi aux personnes handicapées?
M. Dutil: C'est-à-dire que la grande difficulté...
Et je pense que M. Mercure pourrait au niveau de la pensée des
regroupements de personnes handicapées, expliquer cela davantage, je
pense que cela serait important. C'est que les personnes handicapées ne
veulent pas être considérées comme des personnes inaptes au
travail, pour beaucoup d'entre elles. Et, quant à leur
intégration et, justement, à la perception des gens du milieu du
travail, pour elles c'est important qu'elles ne soient pas
considérées comme telles.
Moi, j'aimerais que M. Mercure explicite le mémoire qu'il a
présenté, concernant cet aspect-là de la
problématique qui est bien important pour les personnes
handicapées.
M. Mercure: Le document qui a été
déposé en commission parlementaire et qui était une
intention de législation prévoyait, justement, la division en
aptes et inaptes et à plusieurs endroits on constatait qu'il y avait une
espèce de présomption que les personnes handicapées
seraient considérées inaptes au travail et
bénéficieraient donc des allocations sociales plus
élevées que celles qui sont aptes au travail. Et pour les
organismes représentant les personnes handicapées, pour l'Office
des personnes handicapées, cela pose une difficulté majeure parce
qu'on ne prétend pas que toutes les personnes handicapées sont
aptes au travail. Je pense qu'il y a, parmi les personnes qui ont une
déficience intellectuelle profonde... Par exemple, je prends cet
exemple-là, il peut y avoir aussi des gens qui ont des problèmes
de coordination extrêmement graves - donc, c'est un handicap physique -
qui sont absolument incapables de la stabilité nécessaire pour
être dans le milieu du travail. Donc, il y a une proportion des personnes
handicapées qui sont inaptes au travail, mais on doit perfectionner les
moyens de qualifier les gens pour le travail. Comme vous le savez, la pratique
traditionnelle, c'est d'obtenir un certificat médical. Alors, l'office
a, devant la commission parlementaire qui étudiait cette
question-là, fait valoir qu'aujourd'hui il y a des méthodes
beaucoup plus sophistiquées et qui impliquent des
spécialités autres que la médecine, en particulier des
ergothérapeutes, des physiothérapeutes et un certain nombre de
professionnels qui peuvent mieux qu'une simple expertise médicale
déterminer les capacités de travail d'une personne
handicapée.
Mais, par contre, on a demandé que la mesure qui puisse
être prise ne soit pas de nature, non plus, à pénaliser les
personnes handicapées. Alors, je pense qu'il y a eu une acceptation
assez favorable et qu'on a exprimé l'intention d'examiner de plus
près cette question. On a aussi référé à
l'utilisation de la classification Internationale, de la définition
claire et de la liste des différents déficiences,
incapacités et handicaps et on a dit que cette méthode serait une
méthode qui permettrait beaucoup mieux qu'une simple expertise
médicale de déterminer les capacités de travail des
personnes handicapées, de les qualifier correctement.
M. Latulippe: M. le ministre, est-ce que vous allez recommander
qu'il y ait un traitement ou une classification spéciale,
différente ou particulière pour ce qui est des personnes
handicapées dans la réforme de l'aide sociale? Quand on regarde
les prestations, si une personne handicapée fait appel au programme de
soutien financier, elle reçoit 585 $, mais si elle est
considérée comme apte au travail, pour une personne seule, elle
recevra, dans les neuf premiers mois 405 $, soit moins que la situation
actuelle. Est-ce que ce n'est pas pénaliser encore plus la personne
handicapée que la personne qui n'est pas handicapée? C'est
déjà une pénalisation vis-à-vis de cette personne.
Est-ce que vous allez avoir des recommandations précises pour votre
collègue en rapport avec cette situation?
M. Dutil: Je m'en tiens aux principes, ce qu'il faut trouver
quant aux solutions techniques, le ministère est en train de regarder
cela. Ce qu'il faut trouver comme solution, c'est que les personnes dites
handicapées et qui seraient donc déclarées inaptes au
travail et qui recevraient davantage, que ces personnes puissent
s'intégrer normalement sur le marché du travail si elles le
veulent et si elles sont capables de l'être, sans les pénaliser.
Mon rôle vis-à-vis des handicapés, c'est d'essayer de
trouver la solution qui avait été soulevée d'une
façon très élaborée dans le mémoire
présenté par l'OPHQ lors de la commission parlementaire. Il y a
cette difficulté de dire: Est-ce qu'on ne va pas pénaliser les
personnes handicapées si on les déclare aptes au travail? Il ne
faut donc pas les pénaliser sur le plan financier parce qu'on sait que
l'intégration est plus difficile pour elles. Par contre, on ne doit pas
les pénaliser non plus en disant: Bon, puisque maintenant vous
êtes déclarées inaptes au travail, ne vous intégrez
pas au marché du travail et n'essayez pas de le faire, ce qui serait
contradictoire avec Cobjectcf que vise l'OPHQ, objectif qui est de permettre au
plus grand nombre de citoyens possible qui ont un handicap d'intégrer
quand même le marché du travail, d'intégrer la
société, de vivre comme les autres citoyens du Québec,
finalement, à part égale.
M. Latulippe: Une dernière question là-dessus, si
vous permettez. Avec la désinstitution-nalisation, il y a des personnes
handicapées qui sont handicapées physiques ou ont un handicap
mental léger... Il y a une institution dans mon comté, entre
autres, où les personnes vont maintenant vivre ensemble dans un
même logement. Souvent ces personnes sont mêmes aptes au travail.
Est-ce que vous trouvez acceptable que ces personnes qui ont été
déinstitutionnalisées, qui vivent ensemble dans un même
logement subissent une réduction de 115 $ par mois de leur chèque
de prestations d'aide sociale?
M. Dutil: Est-ce que vous vous référez à la
question du logement?
M. Latulippe: Je me réfère à la question du
logement.
M. Dutil: Ce sont des choses qu'il faut démêler. Il
n'y avait pas de pénalité. Vous m'étonnez quand vous me
dites cela parce qu'ils n'y avait pas de pénalité du logement
prévue, en tout cas, entre autres, en ce qui concerne les familles qui
ont une personne handicapée. Pour une famille qui a une personne
handicapée, ce critère de diminution de l'aide par rapport aux
fait qu'elle vit avec ses parents n'existe pas.
M. Latulippe: Je parle en particulier des personnes
handicapées qui vivent ensemble. J'ai des cas bien précis dans
mon comté en particulier; à la suite de la
désinstitutionnalisation, cela s'est vraiment passé. Ce que je me
demande, c'est: Si ces personnes sont aptes au travail, est-ce qu'elles vont
subir la même situation que les autres, avoir une réduction de 115
$ par mois, comme y fait référence le document de réforme
de l'aide sociale?
M. Dutil: Je vais prendre note de votre question et
vérifier cette chose parce que, à ma connaissance, on
s'était assuré que, pour les personnes handicapées,
surtout celles qui vivaient dans un milieu familial, il n'y avait pas cette
coupure concernant le logement parce qu'elles vivaient en logement. Alors, il y
a une certaine contradiction entre ce que vous me dites et ma perception de la
réforme.
M. Latulippe: D'accord.
Le Président (M. Bélanger): Mme la députée
de Marie-Victorin. (17 heures)
Mme Vermette: J'aimerais revenir à ce qui concerne les
contrats d'intégration au travail, les plans d'embauché, pour
faire suite aux questions qu'à posées le député de
Chambly.
M. Gobeil considère que cela a eu très peu de
résultats et que, plutôt que de maintenir des plans
d'embauché, on devrait développer un
programme d'accès à l'égalité. Est-ce que
vous pourriez nous dire votre point de vue par rapport aux déclarations
du président du Conseil du trésor sur ce qui se passait dans la
fonction publique, ce qui nous concerne encore davantage?
M. Dutil: Personnellement, je pense que nous avons entrepris la
formule des plans d'embauche pour une certaine période. Le moment n'est
peut-être pas venu pour l'instant d'aller plus loin. On sent qu'il y a
une sensibilisation, on sent qu'il y a des résistances qui tombent
actuellement dans les divers milieux de travail et que les personnes
handicapées ne sont plus considérées - de moins en moins -
comme des personnes à part des autres. Éventuellement, dans
quelque temps - est-ce que cela sera dans un an, dans deux ans, dans trois ans?
- est-ce qu'il y aurait lieu d'avoir des programmes d'accès au travail
plutôt que des plans d'embauche? Possiblement, je ne dis pas que la
formule est à rejeter complètement, mais nous estimons que, pour
l'instant, elle est prématurée et que la formule qui est
là actuellement, d'après ce qu'on peut voir par rapport à
d'autres pays, est sans doute la meilleure, c'est-à-dire celle de la
persuasion des employeurs.
Mme Vermette: Oui, M. Mercure, vous avez quelque chose à
dire là-dessus?
M. Mercure: Non, je n'ai rien à ajouter.
Mme Vermette: Vous n'avez rien à ajouter. J'aurais une
question à vous poser, par exemple. Est-ce que vous avez des projections
pour 1988-1989 en ce qui concerne les plans d'embauche? Est-ce que vous allez
avoir à faire des pressions au président du Conseil du
trésor qui considère que, dans la fonction publique, du fait
qu'il n'y ait que 2 % et qu'on n'ait pas atteint notre objectif, il faudrait
changer de formule?
M. Mercure: Disons d'abord que, pour ce qui est des plans
d'embauche, c'est une approche incitative qui est très
élaborée et qui touche tous les employeurs à
l'égard de leurs pratiques concernant l'emploi et l'accès aux
édifices et aussi leur façon de publier et de faire
connaître les disponibilités de travail. On pense que cette
approche est très valable. Il y a d'ailleurs eu une rencontre
dernièrement entre l'Office des personnes handicapées et la
Commission des droits de la personne dont c'est la responsabilité
d'établir des plans d'accès à l'égalité pour
d'autres clientèles. La Commission des droits de la personne nous a
confirmé que sa priorité à ce moment-ci ne va pas
vis-à-vis des personnes handicapées parce qu'elle continue
à suivre l'expérience des plans d'embauche, la considère
comme une approche meilleure pour les personnes handicapées, et la
trouve adéquate de sorte qu'il n'y a nulle part, à ce moment-ci,
d'employeurs dans le privé et dans le public qui ont des plans
d'accès à l'égalité à l'égard des
personnes handicapées. Ils en ont à l'égard d'autres
clientèles, mais pas à l'égard des personnes
handicapées.
Le programme du plan d'embauche vient de terminer sa deuxième
révision annuelle. Actuellement, on a une très bonne connaissance
des résultats. Ce que l'office fait avec ces résultats, c'est
qu'il publie des rapports qu'il met à la disposition des centres
Travail-Québec, du ministère du Travail et aussi des organismes
de promotion, de même qu'aux SEMO, de façon qu'ils puissent
connaître dans chaque région quels sont les employeurs qui ont
manifesté des intentions d'engager des personnes handicapées,
mais aussi de procurer des stages. Disons qu'il y a eu une déclaration
récente concernant le plan d'embauche du gouvernement. Comme cela a
été dit au tout début de la séance, des
renseignements qui n'étaient pas exacts ont été
publiés en ce qui concerne le nombre de personnes handicapées qui
travaillent à l'Office des personnes handicapées. Mais ce que je
voulais peut-être dire, c'est que ces déclarations n'ont pas
été faites à l'égard de l'ensemble des plans
d'embauche, mais à l'égard du plan d'embauche du gouvernement du
Québec qui couvre les ministères et les organismes centraux. Il y
a des plans d'embauche aussi dans le réseau des affaires sociales et
dans le réseau de l'éducation. Mais les plans d'embauche sont
distincts selon les différents employeurs dans le réseau des
affaires sociales et dans le réseau de l'éducation. M. Gobeil,
quand il a fait des déclarations, s'exprimait en parlant du plan
d'embauche du gouvernement.
Mme Vermette: Est-ce que vous allez faire des pressions pour
favoriser l'augmentation? Ma question n'était pas en ce qui concerne la
mécanique comme telle, mais beaucoup plus concernant le rôle de
promotion que vous devez jouer. Allez-vous faire des pressions pour favoriser
l'augmentation des plans d'embauche ou avez-vous, pour cette année
1988-1989, des objectifs précis à atteindre?
M. Mercure: En fait, les plans d'embauche sont actuellement en
place dans toutes les entreprises sauf quelques dizaines de cas qui sont encore
en négociation. On cherche à les régler et cela arrive
qu'on prend des mesures comme des mises en demeure. Dans le moment, tous les
plans d'embauche sont en place de sorte qu'on n'a pas d'objectif d'augmenter le
nombre de plans d'embauche. Il y en a 3000 qui couvrent près de 10 000
établissements qui sont en vigueur. Cependant, notre travail, c'est
l'évaluation des résultats parce que tous ces
employeurs-là doivent faire des rapports annuels. Notre travail, c'est
justement d'obtenir les rapports annuels, de les analyser, de questionner les
entreprises dont les résultats ne sont pas conformes au plan initial.
Alors, c'est ce genre
de travail qu'il nous faut faire avec les organismes et notre travail
constant de ce côté est de faire en sorte qu'on relance les
entreprises qui ne vivent pas selon leur promesse dans le plan
d'embauché initial.
Mme Vermette: Je vous remercie. Je voudrais avoir une note
explicative en ce qui concerne un document qui nous a été
transmis en ce qui concerne le personnel en place à l'Office des
personnes handicapées, notamment le personnel handicapé. On
retrouve à la lecture des chiffres qu'il y a une diminution de postes
permanents parmi le personnel handicapé et qu'il y a trois postes
occasionnels qui ont disparu en 1987-1988, alors que, pour le personnel
régulier, H y a eu une augmentation de trois postes permanents par
rapport à 1987 et de neuf postes pour le personnel occasionnel. Que
valent les explications de ce changement à l'heure actuelle?
M. Mercure: II s'agit alors d'information sur l'ensemble du
personnel de l'office. Effectivement, il y a une réduction depuis deux
ans du personnel de l'office et c'est une réduction qui est la
même que celle qui est imposée à l'ensemble des
ministères.
Mme Vermette: Non, non, ce n'est pas ma question. Ah oui, vous
voulez me répondre par rapport au personnel handicapé. Ma
question était: Pourquoi y a-t-il une diminution en ce qui concerne le
personnel handicapé et par rapport à une augmentation... Je
comprends très bien l'augmentation du personnel régulier qui a
été prêté aux différents sous-comités
à cause du comité provincial. Il y a une diminution en ce qui
concerne le personnel handicapé; donc, cela est dû à quoi?
Est-ce que ce sont des diminutions de postes ou des postes vacants?
M. Mercure: En fait, il y a très peu de diminution. Je
pense qu'au cours de l'année qu'on vient de passer...
Mme Vermette: À la lecture, je ne sais pas, c'est parce
que ce sont les chiffres qui nous ont été transmis, en fait,
à la demande de l'Opposition. Donc, c'est un document très
officiel sur lequel on peut lire, finalement: personnel handicapé,
permanents, permanentes: douze; on peut le voir ici.
M. Mercure: J'ai le document en question ici et on me dit que,
dans le cas des employés permanents, il y a effectivement trois
personnes qui ont cessé d'être à l'emploi de l'office. Il y
a deux de ces personnes-là qui ont été mutées dans
d'autres ministères, qui, à leur demande, ont posé leur
candidature pour des fonctions dans d'autres ministères et ont
accepté une mutation dans un autre ministère.
Chez les occasionnels, H y a un accroissement d'une personne, de sorte
que le nombre est resté substantiellement le même. Il y a deux
personnes de moins et c'est toujours dans un contexte où il y a un
nombre de postes qui a été réduit de six dans l'ensemble,
de sorte qu'il y a très peu de différence dans la proportion.
La situation actuelle, c'est qu'il y a onze personnes. On a
déjà eu 14 personnes dans les postes permanents, mais comme je
vous le dis, elles ont demandé elles-mêmes, pour ce qui est de
deux personnes, une mutation à un autre ministère. En ce qui
concerne les occasionnels, c'est une proportion très importante
d'environ 30 % de notre personnel.
Mme Vermette: M. Mercure, vous faites mention que les gens ont
été mutés dans différents ministères. Cela
veut dire que, même s'ils ont été mutés, il reste
des postes qui n'ont pas été comblés. Est-ce que vous
maintenez finalement qu'il y aura dorénavant cinq postes en moins chez
les personnes handicapées dans l'ensemble du personnel à l'Office
des personnes handicapées? Est-ce ce que vous êtes en train de me
dire ou si simplement ce sont des postes laissés vacants et qui devront
être comblés? C'est ma question.
M. Mercure: À l'Office des personnes handicapées il
n'y a pas de postes réservés pour les personnes
handicapées. Cela dépend de la nature de la fonction et cela
dépend s'il y a des personnes handicapées qui posent leur
candidature aux différents postes. Surtout pour les postes permanents,
même si on fait un effort pour obtenir dans toute la mesure du possible
des candidats et qu'en plus il y a un certain nombre d'associations qui savent
très bien qu'on est assez ouvert à l'emploi des personnes
handicapées, de sorte qu'on nous réfère des personnes,
dans les postes permanents, on ne peut pas garantir qu'on maintiendra un nombre
donné de personnes handicapées, étant donné que
l'on est sujet aux procédures régulières pour combler un
emploi, c'est-à-dire qu'on doit prendre des personnes compétentes
pour l'emploi.
Quant aux occasionnels...
Mme Vermette: En fait, ce que vous me dites, c'est que c'est
conjoncturel à l'heure actuelle. Vous n'avez pas de politique
établie en ce qui concerne l'embauche de personnes handicapées.
Tout dépend de la nature du travail et c'est très ponctuel, de
toute façon, le nombre de personnes que vous pouvez utiliser comme
personnel permanent ou même occasionnel à l'Office des personnes
handicapées.
M. Mercure: II y a une politique précise qui est
très détaillée et que l'on pourrait peut-être
déposer, qui est une politique d'ailleurs discutée avec les
parties syndicales à l'Office des personnes handicapées, mais on
n'a pas de quota. La politique ne prévoit pas un nombre
déterminé de postes.
Mme Vermette: Alors que l'on parle de la réforme de l'aide
sociale, il y a des volets très importants qui restent encore aussi une
interrogation. Le nombre de SEMO. Êtes-vous en discussion à
l'heure actuelle, M. le ministre, vu que la réforme est incessante,
à nos portes, pour qu'il y ait davantage de développement de SEMO
pour favoriser l'intégration des personnes handicapées sur le
marché du travail?
Est-ce que vous êtes capable de prendre l'engagement que vous
allez faire toutes les pressions nécessaires auprès du
ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu
pour qu'il puisse octroyer des subventions de 10 900 000 $ pour répondre
aux demandes de la population de Thetford-Mines afin que les services du SEMO
soient étendus au reste du territoire de la région 03,
c'est-à-dire toute la région de Québec?
M. Dutil: M. le Président, entre collègues au
Conseil des ministres on ne se fait pas de pression, on discute, on dialogue,
on collabore et on trouve des solutions. Alors, il faut tout de suite
préciser ces choses-là.
Mme Vermette: Mais l'important, ce sont les résultats qui
comptent et quelquefois il faut faire...
M. Dutil: Oui, M. le Président.
Mme Vermette: ...certaines pressions parce que justement ce n'est
pas toujours une priorité et vous savez que, comme on a
énormément de préoccupations quelquefois, il y a certains
aspects qui sont plus négligés que d'autres, notamment quand on
arrive auprès des personnes handicapées, elles ont toujours
été un peu laissées pour compte et il a fallu qu'elles
descendent dans la rue il y a presque deux ans maintenant pour que l'on puisse
faire face à leurs revendications.
M. Dutil: Ce dont la députée de Marie-Victorin
parle, c'est de la vigilance, la vigueur, la présence que nous avons
toujours dans les dossiers qui nous concernent auprès des personnes
handicapées aux différents ministères, y compris au
ministère du Travail.
C'est bien sûr qu'on est en contact avec le ministre du Travail
sur cette question-là comme sur toutes les autres qui concernent les
personnes handicapées. Je peux assurer la députée de
Marie-Victorin là-dessus. (17 h 15)
Centres de travail adapté
Mme Vermette: Comme on est dans les assurances, mon Dou! il
faudrait faire des études actuarielles. Ce serait très
intéressant pour vérifier les résultats, voir si on est
à la hausse ou à la baisse. Mais, je me demande aussi -
j'espère que le ministre va faire autre chose que de me donner son
assurance - en ce qui concerne les centres de travail adapté, ce qui est
très important pour les personnes handicapées... Mme la ministre
de la Santé et des Services sociaux nous affirmait qu'elle voulait
développer ces centres de travail adapté puisqu'ils avaient de
forts résultats et qu'ils arrivaient à une forme
d'autofinancement, pour la plupart. Au lieu d'aller en progression, on arrive
et il y en a déjà deux qui viennent de fermer leurs portes. Donc,
encore là, quand je vois le rapport de M. Paradis qui s'en vient, qu'on
parle d'intégration et qu'on veut maintenir la qualité du
service, je vois toutes sortes d'incohérences. On me dit de me fier
à l'assurance du ministre, mais croyez fort bien que, avec tout ce qui
se passe, j'essaie de trouver un peu ma trace et je ne la vois pas.
M. Dutil: Quant à l'assurance, M. le Président, M.
Mercure est actuaire de formation. Alors, si on a besoin de détails sur
les chiffres, on pourra les lui demander. Puisque la députée de
Marie-Victorin soulevait la question d'un actuaire, alors, vous voyez que nous
sommes très bien organisés de ce côté-là.
Quant aux centres de travail adapté, je dois rappeler - je pense
que c'est important de le faire - qu'ils sont des organismes autonomes qui ont
un contrat avec l'Office des personnes handicapées, qui les soutient au
chapitre des employés handicapés qu'ils ont chez eux. Mais ce
sont des organismes autonomes dans chacune des régions. Il peut y avoir
des initiatives dans les régions pour ouvrir des centres de travail
adapté. Cela s'est fait dans plusieurs régions. Je ne dis pas que
tout va toujours parfaitement bien dans les centres de travail adapté
sur le plan de la gestion. Ils ont des responsabilités, des
critères à respecter et, quant à leur rentabilité,
je pense qu'on peut dire que l'ensemble des centres de travail adapté,
sur le plan financier, est en très bonne posture, bien que certains
soient plus faibles que d'autres, bien sûr, comme dans n'importe quelle
organisation.
Ils sont en très bonne posture et c'est une formule qui
m'apparaît solide. Elle a été développée au
fil des années et elle m'apparaît solide. On me dit qu'il y a 38
centres de travail adapté et qu'il y en avait 37 l'année
dernière. Donc, on a une certaine contradiction en ce qui concerne le
nombre des centres de travail adapté. Au lieu d'une diminution de deux,
comme le prétend la députée de Marie-Victorin, il y aurait
plutôt une augmentation d'un centre.
Mme Vermette: Mais, M. le Président, je me fie toujours
aux décrets qui sont présentés et signés par Mme
Thérèse Lavoie-Roux le 30 mars 1987, où on dit que le
nombre de postes qui devront être subventionnés en 1987-1988 par
l'office devra être de 1525 au lieu de 1550. Ce à quoi je fais
référence, c'est qu'il y avait 40 centres de travail
adapté antérieurement. Il y
avait 1580 travailleurs handicapés qui étaient
subventionnés. C'était Mme Lavoie-Roux qui avait sorti ce
décret. Je ne sais pas, entre le discours et les écrits, il y a
une grosse différence.
M. Dutil: On va vérifier vos dires, Mme ta
députée.
Mme Vermette: Oui, je peux vous donner le CT et la
référence. C'est le CT 163887 du 30 mars 1987.
M. Dutil: Alors, on va faire la recherche appropriée.
Mme Vermette: Mon Dou! cela vient de votre gouvernement. Je ne
sais pas si vous êtes encore arrivé. Vous faites plus
l'étude des anciens dossiers que celle de vos dossiers à l'heure
actuelle.
M. Dutil: Vous savez, M. le Président, le nombre de
décisions qui se prennent. Si je prenais une décision qui a
été prise par l'ancien gouvernement et que j'allais demander si
la députée de Marie-Victorin se la rappelle, je suis certain
qu'elle ne se la rappellerait pas. J'aurais eu tout le temps qu'il faut pour
lire cette seule page que j'aurais pu aller chercher. Alors, je pense que la
députée de Marie-Victorin comprendra qu'on veut vérifier
d'abord le texte qu'elle prétend avoir et qu'elle interprète de
la façon qu'elle a bien le droit de le faire.
Mme Vermette: Donc, je vais vous donner la chance, M. le
ministre, de vous reprendre. Combien de CT prévoyez-vous pour 1988-1989?
Combien de travailleurs subventionnés prévoyez-vous pour
l'année 1988-1989? Cela fait partie de votre juridiction maintenant.
M. Dutil: M. le Président.
Mme Vermette: Vous en avez l'entière
responsabilité.
M. Dutil: M. le Président, je n'ai aucun contrôle
sur le nombre de CT. CT, pour nous, cela veut dire Conseil du
trésor.
Mme Vermette: Je ne veux pas parler du nombre de CT. Je vous ai
demandé combien de centres de travail adapté.
M. Dutil: Ah! Vous avez dit CT. Je m'excuse.
Mme Vermette: C'est CTA. J'ai oublié le A. Combien de
centres de travail adapté prévoyez-vous développer pour
1988-1989? Combien d'employés handicapés prévoyez-vous
subventionner?
M. Dutil: Alors, vous voyez, M. le Président, il y avait
vraiment eu confusion. On m'a parlé de CT. Je me demandais comment la
députée pouvait imaginer que je puisse savoir le nombre de
documents qui s'en vont au Conseil du trésor dans une année,
puisque c'est évidemment élaboré dans chacun des
ministères et que cela va au Conseil du trésor par la suite. Elle
parie des centres de travail adapté, donc des CTA, alors je pense qu'on
se comprend mieux. Il y a déjà eu effectivement 40 centres de
travail adapté. On me dit que le nombre n'a pas été
réduit et que ce sont plutôt des fusions qui ont été
faites entre différents centres de travail adapté. Je tiens
à rappeler que les centres de travail adapté ne sont pas
créés par le gouvernement, ce sont des organismes autonomes, ce
sont des organismes créés à partir de l'initiative du
milieu et le gouvernement, par l'Office des personnes handicapées, vient
en soutien à ces organismes. C'est une approche bien différente
de celle que semble concevoir la députée de Marie-Victorin, qui
n'est pas au courant - je le comprends, on ne peut pas être au courant de
toutes les façons de procéder dans tous les secteurs - de la
façon de procéder dans la création des centres de travail
adapté. C'est une initiative locale...
Mme Vermette: Mais, concrètement, M. le ministre, cela va
nous donner combien de CTA pour cette année, en 1988-1989?
M. Dutil: M. le Président, la députée...
Mme Vermette: La mécanique m'intéresse peu. Ce sont
les résultats qui m'intéressent. Alors, je voudrais savoir
combien, cette année, pour 1988-1989, nous allons avoir de centres de
travail adapté.
M. Dutil: M. le Président, la députée de
Marie-Victorin est en train de prendre les défauts majeurs de la
députée de Maisonneuve, c'est-à-dire qu'elle ne me laisse
pas terminer les réponses aux questions.
Une voix: C'est contagieux!
Mme Vermette: Si c'était plus court, peut-être qu'on
ne vous couperait pas continuellement la parole. Ce sont les réponses.
On est dans l'expectative de réponses.
Le Président (M. Bélanger): M. le ministre, si vous
voulez répondre.
M. Dutil: M. le Président, j'ai répondu à
une première question. La députée m'a demandé
combien de CTA on avait l'intention de créer. Je lui ai dit: Nous ne
créons pas de CTA, cela vient de l'initiative du milieu. J'ai
répondu à sa question. J'allais passer à la prochaine
étape, M. le Président. Est-ce que la députée veut
me
laisser répondre, s'il vous plaît?
Le Président (M. Bélanger): Bien. On vous
écoute en ce qui concerne la prochaine étape.
M. Outil: Actuellement, il y a 1525 emplois dans les centres de
travail adapté et il y a une possibilité de 1550 emplois.
Mme Vermette: Oui, on le sait parce qu'il y a eu un décret
qui était à la baisse. C'était 1550 et le décret a
été de 1525. Est-ce que vous allez continuer en fonction de ce
décret ou si vous allez atteindre votre objectif de 1550? Allez-vous
avoir des incitatifs auprès des différents groupes du milieu pour
favoriser le développement des centres de travail adapté?
M. Dutil: Premièrement, actuellement, il n'y a pas de
demande du milieu pour la création de nouveaux centres de travail
adapté. On sait que ces centres de travail adapté, je le
répète, sont créés et demandés par les gens
du milieu et que ce sont eux qui, par la suite, viennent nous dire: On a besoin
de tant de postes.
Ceci étant établi, effectivement, le nombre de postes
actuellement est de 1525. À notre avis, cela correspond aux demandes
faites par les CTA. Il est important de préciser, et je pense que c'est
tout au mérite du milieu et que c'est la preuve, d'ailleurs, qu'il y a
un changement de mentalité assez important et considérable, qu'il
y aurait 300 postes supplémentaires, non subventionnés, mais qui
existent dans les CTA et qui sont la preuve que les CTA sont d'abord en bonne
situation financière et, deuxièmement, qu'il est possible d'avoir
du travail fait par les personnes handicapées et que ce soit du travail
productif. Les CTA, ce sont aussi des gens qui vendent leurs services, leurs
produits et leurs biens, qui en tirent donc une bonne partie de leur revenu. Il
serait intéressant, sans doute, de voir la proportion de revenus
autonomes par rapport aux revenus qui viennent... Je vais chercher, je pense
que c'est une donnée qui pourrait être intéressante et qui
pourrait convaincre la députée de Marie-Victorin que le dynamisme
du milieu, c'est une chose fort importante.
Alors, je répète: 300 postes de personnes
handicapées dans les CTA non subventionnés existent parce que, et
c'est la preuve qu'on peut y parvenir, ce sont des postes productifs et les CTA
s'en tirent sur le plan de leur revenu autonome extérieur très
bien.
Mme Vermette: Oui. Il y a une question qui brûle les
lèvres d'un de mes collègues de l'autre côté. Je me
souviens que l'année dernière, lors de l'étude des
crédits, on avait...
Une voix:...
Mme Vermette: Non, non, je peux bien, mais je vais le laisser la
poser parce que j'ai aussi la documentation qui va corroborer ses dires.
Une voix:...
Mme Vermette: Alors, voilà!
Le Président (M. Bélanger): Alors, M. le
député de Taschereau.
M. Leclerc: Merci. Je remercie la députée de
Marie-Victorin.
M. le ministre, M. Mercure, notamment M. Mercure, vous vous souviendrez
que, l'an passé, devant le problème de plusieurs CTA
d'écouler leur marchandise, je vous avais posé la question,
à savoir pourquoi les CTA ne vendaient pas au gouvernement. Vous aviez
fait état du fait que, dans le passé, ils avaient le droit de
vendre et que, à un certain moment, ils ne pouvaient être
fichés dans Rosalie. Je me rappelle vous avoir alors donné des
exemples, comme les prisons fédérales qui fabriquaient les
boîtes à lettres métalliques pour Postes Canada. Enfin, H y
a un certain nombre d'exemples d'institutions fédérales qui
produisent des biens et services pour le gouvernement fédéral et
je me suis toujours demandé pourquoi cela ne pouvait pas s'appliquer
dans le cadre des CTA, pourquoi certains petits meubles de bureau, pourquoi
certains produits achetés présentement par le gouvernement du
Québec ne pouvaient pas être fabriqués justement par les
CTA. Alors, j'aimerais savoir si, depuis l'an passé, il y a eu quelque
développement dans ce dossier-là.
Le Président (M. Bélanger): Excusez, on va vous
laisser répondre. Il y a aussi M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce qui, depuis fort longtemps, m'a demandé la
parole. J'attendais...
Mme Vermette: Je lui ai passé la parole pour autant que je
vienne en addionnelle sur le même sujet.
Le Président (M. Bélanger): Oui, je suis d'accord,
mais on va quand même permettre tout à l'heure au
député de Notre-Dame-de-Grâce de poser une question parce
que cela fait fort longtemps, puis je pense qu'on a même changé de
sujet depuis. Cela a été une inattention de ma part.
M. Mercure, vous aviez une réponse à nous donner?
M. Mercure: Effectivement, les centres de travail adapté,
jusqu'à maintenant, ne sont pas dans Rosalie, c'est-à-dire la
liste des organismes dans le fichier. Ils y ont déjà
été, mais 8s ont été enlevés, à un
moment donné, ou on a enlevé les organismes sans but lucratif et
les organismes subventionnés - c'était un peu cela l'idée.
À la suite de la discussion sur ce sujet-là en commis-
sion parlementaire, il y a des démarches qui ont
été faites dans le but de les réintroduire.
Malheureusement, je n'ai pas les données exactes sur les
résultats des démarches, mais je pense que cela n'a pas
été finalisé cette question-là; ils ne sont pas
réintroduits dans la liste. Mais, effectivement, des démarches
ont été faites, en particulier par M. Sirros, à quelques
reprises pour réintroduire les centres de travail adapté à
la suite des travaux de la commission parlementaire, parce que cette
question-là avait été discutée d'une façon
très précise. Peut-être qu'on pourrait, assez rapidement,
vous dire où sont rendues ces démarches-là et à
quelle étape, mais je n'ai pas l'information.
M. Leclerc: S'il était possible de déposer
auprès de la commission où cela est rendu, on pourrait en prendre
connaissance ultérieurement. Cela serait apprécié. Mais,
si je comprends bien, il y a un accord de principe à votre organisme
selon lequel cela pourrait aider certains CTA.
M. Mercure: Oui.
Le Président (M. Bélanger): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce. (17 h 30)
M. Thuringer: Merci, M. le Président. Il y a deux
questions que j'aimerais poser. Une qui touche la famille et l'importance de la
famille pour les familles handicapées ou les individus
handicapés. On sait que, même dans les commissions parlementaires,
il est bien ressorti que l'appui de la famille, des membres de la famille est
très important, mais que souvent ils sont épuisés parce
que cette responsabilité est de 365 jours par année. Je me
demande, dans le domaine de la famille, sort dans vos propres programmes, soit
dans les programmes du ministère de la Santé et des Services
sociaux, quels gestes vous avez posés pour donner du répit
à des familles. C'est la première question. Les familles qui
gardent des handicapés.
La deuxième question touche la réforme du ministre de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. Je me rappelle que M.
Mercure a mentionné qu'il y a des individus qui peuvent seulement
remplir 25 % ou 50 % de la description de tâche. Il me semble que, si on
veut vraiment réinsérer une personne handicapée,
bénéficiaire du bien-être social - c'est déjà
difficile - mais si elle ou lui est seulement partiellement capable, comment
faire pour vraiment réussir dans un tel cas? J'ai beaucoup
d'inquiétude, surtout quand on parte avec des agents économiques
qui doivent travailler là-dessus.
M. Mercure: Sur la première partie, à savoir quel
effort l'office et peut-être le ministère - parce que le
ministère est le principal responsable - fait pour accorder un
répit - parce que c'est effectivement cela, je pense, dont il est
question - aux familles où la garde de la personne handicapée
occasionne un stress considérable, il y a des cas comme cela. D'abord,
l'office a une possibilité d'intervention lorsqu'il n'y a pas d'autre
ressource. Il y a un certain nombre de cas dans l'aide matérielle, dans
notre programme de soutien aux familles et dans le programme de répit.
Mais, tout dernièrement, la semaine dernière, il y a à
peine dix jours, le ministère de la Santé et des Services
sociaux, dans l'information qui a été donnée publiquement
concernant des ressources additionnelles qui se montaient à 131 000 000
$, Mme Lavoie-Roux a mentionné des budgets additionnels, je crois, qui
était de...
M. Dutil: 4 500 000 $
M. Mercure: ...4 500 000 $ pour en particulier les services de
répit. Disons qu'on est à ce moment-ci à établir
des contacts avec le ministère pour coordonner nos efforts en
égard à ces ressources nouvelles. C'est effectivement un domaine
dans lequel il est très important d'investir. Cela ne donne rien de
parler de désinsti- , tutionnalisation si on ne donne pas le soutien
adéquat aux personnes qui sont absolument à la veille d'une
institutionnalisation.
Le Président (M. Bélanger): Étant
donné l'heure, le temps disponible est écoulé...
Mme Vermette: Compte tenu de l'importance du sujet, il y aurait
un certain volet qui me tient à coeur dont j'aurais aimé parler.
Je me demande si M. le ministre ou si M. Mercure - vu qu'il vient nous visiter
- ne pourrait pas prolonger à peu près de quinze minutes ou une
demi-heure.
Le Président (M. Bélanger): Je sais que, pour ma
part, j'ai des obligations dans exactement quinze minutes.
M. Dutil: Est-ce qu'on pourrait concentrer cela en cinq minutes
parce que j'ai également des obligations, j'ai un rendez-vous?
Mme Vermette: Oui.
Le Président (M. Bélanger): Si vous pouvez...
Une voix:...
Le Président (M. Bélanger): On va faire ces
dernières questions, on les adoptera après. Est-ce que j'ai le
consentement pour prolonger d'une dizaine de minutes? Cinq minutes, oui, parce
que j'ai quelqu'un qui m'attend.
Intégration scolaire
Mme Vermette: Donc, il y a un dossier qui me semble très
important et vous en avez parlé
comme étant une de vos préoccupations, dossier sur lequel
vous avez travaillé beaucoup cette année, et c'est
l'intégration scolaire. Le ministre de l'Éducation a
refusé de signer le protocole qui était sur la table entre les
différentes commissions scolaires et l'office. Il a dit que ce
n'était pas prêt, que c'était trop normatif. J'aimerais que
vous m'expliquiez davantage ce qui fait qu'à l'heure actuelle on ne peut
pas encore avoir un protocole d'entente en ce qui concerne l'intégration
scolaire qui, à mon avis, est un des éléments fondamentaux
de l'intégration de la personne handicapée dans notre
société.
M. Mercure: Je pense que vous fartes allusion aux discussions qui
ont amené un projet précis et qui s'appelait la mission MSSS-MEQ,
qui avait établi un projet précis d'intégration scolaire
et un certain nombre de ressources nécessaires. Selon les informations
que j'ai, ce projet, étant donné les ressources additionnelles
importantes qu'il demande, est à l'étude au ministère de
l'Éducation. Nous allons suivre ce dossier de près parce qu'il
est effectivement très important. Devant l'importance des ressources qui
étaient prévues dans ce protocole, le ministère de
l'Éducation a prolongé ses études.
Mme Vermette: Qu'est-ce que vous allez faire concrètement
pour que ce dossier puisse progresser le plus rapidement possible, parce qu'il
y a plein d'enfants qui sont retournés dans leur maison parce que,
justement, il n'y avait pas encore possibilité pour eux d'accéder
à des classes régulières?
M. Dutil: il y a quand même eu pas mal d'intégration
qui a été farte. L'an passé, nous avons
traité...
M. Mercure: 600 cas, dont 400 à qui on donne un appui
financier. Mais il y a quand même 600 cas. Ce n'est quand même pas
une proportion importante du nombre de cas qui sont en classe spéciale.
De toute façon, l'office ne prétend pas que toutes les personnes
handicapées qui sont en classe spéciale doivent être dans
les classes régulières. On fait quand même un travail et
c'est un travail de sensibilisation qui doit se faire auprès des
commissions scolaires et de la population en général parce qu'il
peut y avoir des cas où il y a une certaine résistance de la
population en raison de l'incompréhension de la question.
Mme Vermette: Donc, si je comprends bien, vous êtes
satisfait du rythme auquel le dossier progresse à l'heure actuelle.
L'autre volet, c'est qu'il y a eu un reportage concernant les
cégeps sur l'accessibilité aux édifices qui
démontrait à quel point c'était difficile pour ces jeunes
de pouvoir accéder aux édifices, notamment les cégeps. Or,
il y a une loi, M. le ministre, qui avait été
déposée par notre gouvernement et qui n'a pu être
sanctionnée à cause des élections. Depuis 1985,
c'était la première fois qu'il y avait un consensus d'autant
d'intervenants pour favoriser l'accès aux édifices publics pour
les personnes handicapées. Depuis que vous êtes en poste, en fait,
pas vous, mais le gouvernement, Mme Lavoie-Roux m'avait promis qu'il se
passerait des choses. Cela fait deux ans et demi déjà et on est
toujours sans réponse et c'est toujours aussi difficile pour les gens
d'avoir accès aux édifices publics. Je pense que ce serait une
des réformes à faire le plus rapidement possible d'autant plus
que les consensus étaient là. Tout était fait, les
recherches avaient été faites. Il y a aussi le ministre de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu... Je ne sais pas s'il
est trop occupé avec sa réforme mais, lorsque je lui ai appris
cela, il n'était même pas au courant qu'il y avait ce dossier.
Donc, j'imagine que vous allez faire les pressions nécessaires pour
qu'il y ait des correctifs.
M. Dutil: M. le Président, les démarches sont
entreprises depuis fort longtemps dans ce dossier. Nous poursuivons nos
démarches pour nous assurer que ce dossier chemine. C'est dommage que
l'ancien gouvernement, qui était tout près d'adopter cette chose,
ne l'ait pas fait quelques mois plus tôt avant de déclencher les
élections. Cela aurait été une question
réglée, mais, quoi qu'il en soit, c'est un sujet que nous
n'oublions pas et qui est très important pour les personnes
handicapées. Nous poursuivons nos démarches avec vigueur.
Mme Vermette: Ce que je trouve dommage surtout, c'est que vous
n'ayez pas procédé.
L'autre question que j'aurais à vous poser, c'est en ce qui
concerne les subventions pour les organismes de promotion du milieu. Combien y
a-t-il eu de nouveaux organismes de promotion? Est-ce qu'il y a de nouveaux
organismes? Quelle est la répartition de ces différents
organismes qui seront subventionnés en 1988-1989?
M. Dutil: Je pense que vous avez la liste dans le document, M. le
Président. Je pense que la liste a été fournie dans le
document.
Mme Vermette: En 1987-1988, mais en 1988-1989? Est-ce qu'il va y
en avoir de nouveaux ou I si ce sont les mêmes?
M. Mercure: En 1987-1988, on vous a fourni la liste. Je peux me
tromper d'un organisme, mais je pense qu'il y a 17 organismes provinciaux, 17
regroupements et 211 organismes locaux. Maintenant, on ne peut pas, à ce
moment-ci, déterminer le nombre d'organismes qu'on va subventionner
étant donné que le processus de subvention est en cours. Il n'y a
pas d'organismes provinciaux nouveaux. Quant aux regroupements, je ne peux pas
me prononcer et, quant aux organismes locaux, le travail n'étant pas
terminé, je
ne peux pas dire le nombre d'organismes qu'on va subventionner au cours
de l'année qui vient de commencer.
Mme Vermette: Est-ce que vous vous engagez à nous faire
part, si jamais il y a une possibilité de nouveaux organismes...
Le Président (M. Bélanger): Je regrette. On avait
convenu de cinq minutes et cela fait dix minutes. Je pense que là on ne
peut pas aller plus loin.
Alors, est-ce que les crédits du programme 9, Office des
personnes handicapées du Québec, Santé et Services
sociaux, sont adoptés?
Mme Vermette: Ils sont adoptés.
Le Président (M. Bélanger): Adopté. Est-ce
que l'ensemble des crédits budgétaires relevant de la
compétence du ministre délégué à la
Santé et aux Services sociaux pour l'année financière
1988-1989 sont adoptés?
Mme Vermette: Ils sont adoptés.
Le Président (M. Bélanger): Adopté. La
commission ayant rempli son mandat ajourne ses travaux sine die. Merci.
(Fin de la séance à 17 h 41 )