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Version finale

33rd Legislature, 2nd Session
(March 8, 1988 au August 9, 1989)

Wednesday, March 30, 1988 - Vol. 30 N° 13

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultation générale sur le document intitulé 'Pour une politique de sécurité du revenu'


Journal des débats

 

(Dix heures treize minutes)

Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il vous plaît!

Je demanderais à chacun de bien vouloir prendre sa place afin que nous puissions procéder, à cette commission des affaires sociales, à une consultation générale dans le but de tenir des auditions publiques pour étudier le document intitulé "Pour une politique de sécurité du revenu".

D'abord, est-ce qu'il y a des remplacements, Mme la secrétaire? Je m'excuse de vous bousculer.

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Gervais (L'Assomption) sera remplacé par M. Polak (Sainte-Anne).

Le Président (M. Bélanger): Bien, merci.

Mme Harel: M. le Président.

Le Président (M. Bélanger): Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Très bien. Avant que nous recevions le premier groupe, ce matin, j'aimerais vérifier auprès du ministre s'il a pu se rendre à son bureau ou si...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est ce qui explique mon retard.

Mme Harel: Est-ce que les documents qu'il devait nous remettre au début de la semaine pourront l'être aujourd'hui même, ce matin?

Demande de document

M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'ai eu une réponse additionnelle aux questions que vous aviez formulées, touchant la combinaison ou la juxtaposition des postes de contribution alimentaire parentale et partage du logement, que je devais vous remettre ce matin. Quant à l'élément principal, la pièce maîtresse - si je peux utiliser l'expression - que vous réclamez, à savoir les analyses des taux de réussite, de succès des différents programmes d'employabilité du ministère, je ne l'ai malheureusement pas encore reçu. Dès que je l'obtiendrai, je vous le communiquerai. Les dernières informations que j'ai eues en fin de journée, hier, m'indiquent que je n'aurai pas ledit document avant le 15 avril.

Mme Harel: S'agit-il du document intitulé "Étude d'évaluation des programmes de développement de l'employabilité", étude produite par la direction de l'évaluation et de la statistique du ministère?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Comme je ne l'ai pas, je ne peux pas vous donner le titre.

Mme Harel: C'est déjà en circulation. Le volet I produit par MM. Gérard Brouillette, Serge Hamel et Jacques Lavigne, et intitulé "Agents de développement de l'employabilité", est un premier volet de cette étude. Le second volet porte sur les bénéficiaires et le troisième est intitulé "Synthèse et orientation".

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Selon ce que l'on m'a indiqué au ministère, on tente de donner suite à la commande que j'ai passée, il y a eu des travaux préliminaires d'effectués, mais on n'est pas encore en mesure de me remettre une version complète et finale dudit rapport. On m'a indiqué cela hier.

Mme Harel: Vous dites des travaux préliminaires.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est ce qu'on m'a indiqué.

Mme Harel: M. le ministre, j'aurai peut-être l'occasion, demain, de vous remettre l'étude.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Si vous disposez de documents, moi je n'ai aucune objection à ce que vous les fassiez circuler. Je vous donne...

Mme Harel: Non, mais peut-être qu'aujourd'hui vous pourriez, par exemple, vous faire remettre cette étude de 103 pages qui circule déjà depuis le 25 janvier 1988.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Si vous avez des documents que vous voulez me remettre, moi je suis...

Mme Harel: Ce ne sont pas les miens, ce sont les vôtres.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mme la députée, je vous donne le plus honnêtement et le plus fidèlement possible les réponses qui m'ont été données hier en fin de journée.

Mme Harel: Alors, il faudrait que vous requestionniez, puisque le document est actuellement complété et le premier volet est actuellement en circulation auprès des professionnels du ministère.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Qu'est-ce que vous entendez par premier volet afin que je

comprenne bien, si on parle de la même chose.

Mme Harel: Le rapport 1, intitulé, Volet 1, "Agents de développement de l'employabilité", par Gérard Brouillette, Serge Hamel et Jacques Lavigne.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Le titre, c'est "Agents de développement de l'employabilité". Il y a trois auteurs: Gérard Brouillette, Serge Hamel et Jacques Lavigne. Et cela porte quelle date?

Mme Harel: Le document a 103 pages... M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui.

Mme Harel:... et porte la date du 25 janvier 1988.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): 25 janvier 1988.

Mme Harel: Oui. C'est le premier des volets de l'évaluation de la pertinence des interventions de développement de l'employabilité auprès des bénéficiaires d'aide sociale.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Le premier volet. C'est peut-être cela...

Mme Harel: Le second volet s'intitule: "Bénéficiaires d'aide sociale". Et le troisième volet s'intitule...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Deuxième volet: "Bénéficiaires d'aide sociale".

Mme Harel: Et le troisième volet s'intitule: "Synthèse et orientation".

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Troisième volet: "Synthèse et orientation".

Mme Harel: Cette évaluation de la pertinence des interventions de développement de l'employabilité auprès des bénéficiaires d'aide sociale a été produite par la direction de l'évaluation et de la statistique et est actuellement complétée. Elle se trouve entre les mains du sous-ministre. Je ne peux pas concevoir que la publication en soit retardée.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ce que je vous indique, c'est la réponse que j'ai obtenue hier. Je la maintiens. Je la dis sous mon serment d'office.

Mme Harel: Vous maintenez que le document n'est pas complété.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'ai passé une commande au ministère à la suite de votre question. Je maintiens qu'on m'a informé, hier, que le document n'était pas terminé dans sa version finale et que je ne pourrais l'obtenir qu'aux alentours du 15 avril prochain.

Mme Harel: Quand vous dites, le document incomplet dans sa version finale, cela veut dire que les travaux ne sont pas terminés, ou pas brochés?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je pense que si c'est une question de brochage ou de boudina-ge, dans certains cas...

Mme Harel: II est boudiné d'ailleurs'

M. Paradis (Brome-Missisquoi): II est boudiné.

Mme Harel: Oui.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): De boudinage ou de brochage, je ne pense pas que ce soit là le critère qui fait en sorte qu'on puisse considérer un document comme étant final ou non. J'ai demandé un document qui soit terminé pour les fins de la commission.

Le Président (M. Bélanger): Avant de passer au groupe l'Auberge sous mon toit inc., je veux souligner que c'est le 100e groupe ce matin. On avait des intentions de faire la vague ou toutes sortes de manifestations du genre. C'est notre 18e séance, c'est-à-dire la 18e journée de session sur le sujet. Je veux aussi souligner, pour le bénéfice des gens qui sont ici, l'exceptionnelle présence de M. le ministre et de Mme la députée de Maisonneuve qui ont assisté à toutes les présentations...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Et les députés...

Le Président (M. Bélanger):... les députés ont assisté à la très grande majorité...

Mme Harel:... les plus assidus sont encore là, M. le Président, dont vous-mêmes.

Auditions (suite)

Le Président (M. Bélanger):... et l'ensemble des députés qui ont été exceptionnellement présents à cette commission, il y a toujours eu cinq ou six membres de présents. Je pense que c'est vraiment à souligner d'autant plus que cette commission siège depuis le 5 janvier avec la politique sur la santé mentale, la politique sur la famille et, par la suite, la réforme de l'aide sociale. C'est donc une somme de travail colossal. Il me semble que cela méritait d'être souligné et consigné aux minutes de cette auguste Assemblée.

Nous recevons ce matin, avec grand plaisir, Auberge sous mon toit inc., qui sera représenté

par M. Benoit Houle, Mme Elizabeth Thibault, M. Roger Dufresne, M. Eddy Fortier et Mme Carole Bernier. Vous connaissez nos règles de procédures. Vous avez 20 minutes fermes pour présenter votre mémoire ou son résumé. Ensuite, il y a une période d'échanges avec les parlementaires. Je vous prierais, chaque fois que vous devez prendre la parole, dans la mesure où vous pourrez vous en rappeler en faisant un petit effort, de bien vouloir donner vos noms auparavant, histoire de les consigner au Journal des débats pour que les sténotypistes puissent les prendre en note et consigner ce qui vous appartient comme réponses au Journal des débats. Je vous invite donc à identifier votre porte-parole, à vous présenter comme groupe et à procéder à la présentation de votre mémoire. Merci.

Auberge sous mon toit inc.

M. Houle (Benoit): Bonjour. Je m'appelle Benoit Houle. Je suis co-directeur à l'Auberge sous mon toit inc. M. le ministre Pierre Paradis, mesdames et messieurs les commissaires, mesdames et messieurs, j'aurais préféré ce matin m'adresser à vous de façon spontanée mais, craignant d'oublier des choses importantes, j'ai pensé vous lire tout simplement l'exposé que j'ai composé à votre intention. Celui-ci se veut complémentaire au mémoire déjà envoyé, le 31 janvier dernier. Il reflète le point de vue de trois organismes de la ville de Granby. Mon intention est de vous donner notre opinion sur la réforme d'aide sociale à partir de la réalité qui se vit chez nous, à Granby.

Vous remarquerez des divergences d'opinions par rapport à ce qui a été avancé par des organismes d'autres municipalités, bien que je n'aie pas suivi de près tout ce qui a été dit ici depuis le début des auditions. Notre seule intention est d'apporter un éclairage qui, nous l'espérons, vous facilitera la tâche lorsque vous légiférerez bientôt sur la question.

Vous avez sans doute en main le mémoire que les trois organismes que je représente ont préparé en collaboration et endossé. Je ne veux pas vous lire le mémoire, quoique tous les points apportés dans celui-ci apparaîtront dans les paragraphes qui vont suivre. Depuis le 31 janvier dernier, nous avons toutefois repensé 100 fois le sujet. Nous en avons parlé avec des bénéficiaires, avec des travailleurs. Maintes fois, ce sujet brûlant est venu sur la table et, aussi, je pense que notre pensée a considérablement évolué depuis cette date.

Les trois organismes qui ont signé le mémoire sont le Mouvement action handicapés Granby, mieux connu sous le sigle MAHG, le Transit et l'Auberge sous mon toit inc. Ce qu'ils ont en commun? Chacun d'eux gère un projet de travaux communautaires, volet santé et services sociaux. Le MAHG est un regroupement de handicapés qui compte 125 membres. Il est de loin le plus populaire organisme de handicapés de la région. Établi depuis 1975, il a pour mandat de regrouper, d'animer et de développer des services qui répondent aux besoins de ses membres.

Depuis 1984, le MAHG gère avec votre ministère un projet de travaux communautaires mieux connu chez nous sous le nom de Implication communautaire. Ce projet compte 25 participants. Ces participants sont des jeunes bénéficiaires d'aide sociale. Chacun d'eux doit donner 20 heures de travail par semaine sur une tâche de maintien à domicile en retour de laquelle il reçoit un supplément d'aide sociale qui peut atteindre le montant du gros chèque comme on s'emploie souvent à dire en certains cas, c'est-à-dire lorsque le candidat a plus de 25 ans ou bien s'il a un Secondaire V complété et réussi.

Mais le mandat du projet Implication commmunautaire n'est pas d'occuper le candidat pendant 20 heures. L'organisme a le mandat bien clair de le préparer au marché du travail. Ainsi, en plus de la formation directe qu'il reçoit en travaillant au projet chaque semaine, il reçoit une formation individuelle et/ou en groupe, selon le plan de carrière que le responsable du projet a établi avec lui à son entrée au projet. Le candidat a un an pour atteindre son objectif, c'est-à-dire décrocher un emploi satisfaisant et selon ses capacités et ses compétences. Le projet d'implication communautaire est ce qui ressemble beaucoup à un volet du programme APTE que vous proposez dans votre réforme.

Voici quelques-uns des résultats mesurables. Entre le 1er janvier et le 31 décembre 1987, le nombre total de participants inscrits au projet: 43. De ce nombre, pendant ou à la fin de leur projet, ceux qui se sont inscrits au rattrapage scolaire: 5; ceux qui se sont engagés sur stage en milieu de travail: 4; ceux qui ont abandonné par manque de motivation: 8; ceux qui ont abandonné pour toute autre cause, tel un déménagement: 8; ceux qui ont décroché un travail permanent ou temporaire, c'est-à-dire qui ont atteint leur objectif: 19, soit 44 %.

Pour mieux interpréter ces résultats, je veux attirer l'attention sur un point que je trouve important. Les jeunes bénéficiaires, qui sont référés par le centre Travail-Québec, sont les bénéficiaires chez qui on retrouve une bien faible capacité d'employabilité.

Voici un peu la façon dont on réfère un candidat sur notre programme de travaux communautaires. D'abord, on repère un individu susceptible de participer à l'un ou l'autre des volets du programme DÉCLIC. L'agent d'employabilité lui fait passer une entrevue afin d'établir avec lui un plan de carrière. Si le candidat a besoin de scolarité pour atteindre son projet personnel, compte tenu de ses capacités, on le réfère au volet Rattrapage scolaire. Si le candidat possède à peu près ce qu'il faut pour déjà commencer à travailler, on l'inscrit au Stage en milieu de travail. Enfin, si l'agent d'aide sociale juge que le candidat n'a pas la capacité ou la

motivation pour un retour aux études ou s'il ne se trouve pas d'employeur pour un stage en milieu de travail, on le réfère au volet Travaux communautaires.

Ainsi, ce sont les moins employables que l'on réfère à nos projets. Il faut conclure que ces 19 participants ont décroché un emploi pendant ou à la fin de leur stage chez nous. La formule du programme s'avère très efficace pour effectuer un retour au travail chez les participants à l'aide sociale.

Avant d'apporter d'autres considérations sur le programme Travaux communautaires et sur la réforme de l'aide sociale, je veux continuer à présenter les deux autres organismes que je représente ce matin. Ainsi, le second est le Transit. Le Transit gère deux maisons. La première est un centre de dépannage pour hommes en difficulté âgés de 18 ans et plus. Sa capacité est de neuf lits. Elle est, pour ainsi dire, la Maison du père ou l'accueil Bonneau de Granby, mais elle fonctionne avec des moyens beaucoup plus modestes, adaptés à la dimension de la ville.

La seconde maison gérée par le Transit est un centre d'hébergement pour hommes et femmes qui sortent de l'hôpital, après un séjour plus ou moins long en psychiatrie.

Le Transit gère également un projet de travaux communautaires depuis octobre dernier, au nombre de cinq participants, étant sur pied depuis trop peu de temps, les responsables du projet des travaux communautaires de cet organisme n'ont pu apporter de statistiques appuyant la valeur du programme. Toutefois, ils ont voulu endosser le mémoire, compte tenu de la connaissance qu'ils ont de la clientèle de bénéficiaires d'aide sociale la plus démunie, celle chez qui on retrouve beaucoup de délinquance et de maladie mentale. Celle-là qui trouve difficilement une place ou que ce soit dans la société.

Le Transit vit toutefois un problème sérieux de recrutement de candidats à son projet de travaux communautaires. Le centre Travail-Québec ne lui réfère pas suffisamment de clients susceptibles de participer au projet. Le problème de recrutement est, pour tous nos projets, un problème sérieux. Il semblerait qu'au niveau de l'ensemble du Québec, 30 % des places restent disponibles dans les programmes d'implication communautaire parce que les centres Travail-Québec leur réfèrent peu ou pas de candidats. (10 h 30)

Les employés de notre centre Travail-Québec, avec qui nous entretenons une très bonne relation, ont été rencontrés à deux reprises. Ils nous ont affirmé qu'il ne fallait pas interpréter cela par une mauvaise foi de leur part, le fait que peu ou pas de candidats soient référés au programme de travaux communautaires. L'extrême instabilité de leurs employés, le nombre croissant d'occasionnels qui terminent à tout moment ou qui sont transférés, les changements fréquents dans les règlements d'aide sociale et l'ajout constant de nouveaux programmes font que les employés du centre Travail-Québec disent ne s'en tenir qu'à l'essentiel dans leur travail quotidien.

Je ne veux pas faire ici le procès de cette question, mais je veux attirer l'attention du ministre à savoir qu'il lui faudra trouver la solution au problème de recrutement s'il veut que le programme APTE fonctionne. Car, aussi merveilleux soit-il, si les gens en place ne réfèrent pas de candidats au programme, personne ne pourra prouver l'efficacité dudit programme.

Avant d'aborder d'autres considérations sur le programme APTE, je veux vous présenter le troisième organisme qui a signé le mémoire. C'est l'organisme qui me tient le plus à coeur puisque j'y travaille depuis bientôt près de 17 ans, l'Auberge sous mon toit. C'est un centre d'hébergement et de dépannage pour jeunes travailleurs. Sa capacité est de 19 personnes, avec un taux occupationnel moyen de 94 %.

Le point de vue que je veux vous livrer dans les prochains paragraphes a été influencé fortement par les travailleurs avec qui je vis tous les jours. Quand je dis "travailleurs", je parle le plus souvent de journaliers d'usine avec peu ou pas de spécialisation. La plupart des résidents arrivent chez nous sans emploi et, plus souvent qu'autrement, ce sont des emplois près du salaire minimum qu'ils décrochent.

L'Auberge sous mon toit gère un projet de travaux communautaires de 17 participants et cela, depuis les tout débuts du programme, soit en 1984. Comme tous les organismes qui ont parrainé un tel projet, au début, nous nous sommes fait dire: Vous créez du "cheap labour", vous faites en sorte qu'une personne travaille 80 heures par mois pour un salaire n'équivalant pas au salaire minimum, dans certains cas Cette situation se présente lorsque le candidat à l'implication communautaire a moins de 25 ans et qu'il n'a pas terminé et réussi le secondaire V. Il reçoit alors 100 $ de moins que les autres. Toutefois, bien des organismes tels le Centre d'action bénévole, pour n'en nommer qu'un, ont réalisé que la meilleure façon de remettre un gars ou une fille sur le marché du travail, c'est déjà de le faire travailler; il développe ainsi de vraies habitudes de travail.

Il ne faut pas se cacher une certaine réalité: au point de vue économique, certains individus ne valent pas le salaire minimum. Veuillez croire que je ne parle pas ici de la valeur personnelle de la personne humaine qui ne se calcule pas en termes d'argent. Bien des individus ne rapportent pas à leur employeur ce qu'il lui en coûterait s'ils étaient embauchés. Cela ne veut pas dire que la personne ne pourra jamais devenir rentable ni accéder à un besoin fondamental pour tous, un travail. Nous croyons à une politique de plein emploi. Mais, tant que l'individu ne rapportera pas à son employeur ce qu'il lui en coûtera, il ne pourra être embauché.

Ou bien, qu'on donne à tout le monde le salaire minimum et ceux qui sont plus rentables rapporteront pour ceux qui ne le sont pas ou peu. Il faudrait alors changer tout le système et surtout les mentalités, mais ce n'est pas cela que je suis venu vous proposer ce matin. L'objectif que nous poursuivons par les travaux communautaires est de sortir le gars ou la fille bénéficiaire de l'aide sociale et de le ou la rendre apte, travailleur à part entière.

Je veux vous donner certaines statistiques relevées à partir de notre projet d'implication communautaire pour la période du 1er avril 1987 à aujourd'hui. Le nombre total de participants inscrits au projet: 32. De ce nombre, pendant ou à la fin du projet: ceux qui se sont inscrits au rattrappage scolaire, 5; ceux qui se sont engagés dans un stage en milieu de travail, 2; ceux qui ont abandonné le projet par manque de motivation, 7; ceux qui ont abandonné pour toutes sortes d'autres causes tel le déménagement: 7; ceux qui ont décroché- un travail permanent ou temporaire, c'est-à-dire atteint leur objectif: 11.

Je veux vous rappeler que les gens référés chez nous sont moins compétitifs que l'ensemble des jeunes assistés sociaux, tout en ayant été jugés aptes au travail au préalable. Je veux attirer votre attention sur certains problèmes du programme Travaux communautaires. D'abord, le temps maximum de participation est de douze mois, non renouvelable. Nous souhaitons allonger cette période à 24 mois et que, en plus, un retour soit possible aux travaux communautaires, cela après un arrêt que nous établissons, de façon aléatoire, à douze mois.

Il y a des gens aptes à travailler, mais qui ne sont pas pour autant employables. Certains individus, comme nous l'avons expliqué plus haut, ne valent pas le salaire minimum, l'employeur n'étant pas là pour faire la charité, mais pour réaliser des profits que nous souhaitons justes et équitables. Mais ce n'est pas parce que l'individu est inemployable qu'il n'éprouve pas pour autant le besoin d'être un vrai travailleur. Nous avons vérifié à maintes occasions qu'un participant aux travaux communautaires se sent vraiment un travailleur à part entière, mais il faudrait suffisamment de places dans le programme de travaux communautaires pour permettre à un plus grand nombre possible de bénéficiaires d'exécuter un retour au travail. À Granby, présentement, il y a une possibilité d'une cinquantaine de places aux travaux communautaires. Étant donné qu'il n'y aura bientôt plus de distinction entre les plus ou moins de 30 ans, tous les bénéficiaires de l'aide sociale aptes au travail pourront participer aux travaux communautaires. Or, 50 places sur un territoire de 4000 assistés sociaux aptes, c'est peu, vraiment trop peu.

Les bénéficiaires d'aide sociale sont classés aptes ou inaptes au travail. C'est le médecin qui détermine ce facteur. Toutefois, nous pensons qu'une personne peut être jugée apte au travail tout en étant inemployable. Un médecin peut affirmer que, médicalement, certains bénéficiaires peuvent travailler. Un employeur jugerait tout autrement la même situation et affirmerait, sans hésitation: jamais je n'embaucherais cette personne pour faire quoi que ce soit. Aussi nous croyons qu'un bénéficiaire jugé apte au travail pourrait être classé, dans certains cas, inemployable pour une période déterminée, de trois mois par exemple, et que cette période de trois mois pourrait être renouvelable, selon le cas. Nous proposons, à cet effet, qu'une commission d'appel, avec mandat décisionnel, soit formée pour évaluer ces candidats qui sont aptes mais possiblement inemployables. Ce comité mixte pourrait être formé d'un représentant du réseau de la santé, tel un employé du CLSC, d'un représentant du patronat, tel un membre nommé par la chambre de commerce, d'un agent d'aide sociale, qui connaît bien la clientèle, et enfin d'un professionnel qui connaît la problématique de la personne en cause. Ainsi, ce comité déterminerait l'inemployabilité temporaire d'un candidat, au même titre qu'un médecin détermine l'inaptitude d'un bénéficiaire, et cela avec tous les droits et privilèges qui s'y rattachent. Un détenu qui sort d'une incarcération prolongée est apte au travail mais, parfois, difficilement employable, du moins pour une certaine période. Le comité mixte pourrait donc le qualifier d'inemployable, avec tous les droits et privilèges qui s'y rattachent, au statut d'inapte au travail. Une femme se retrouve bénéficiaire de l'aide sociale à cause d'une séparation. Elle pourrait être jugée inemployable à cause du trop grand nombre d'années à l'écart du marché du travail. Un bénéficiaire qui est tout simplement bénéficiaire depuis un si grand nombre d'années pourrait être classé inemployable. Enfin, tant d'autres situations que vivent certaines personnes pourraient les rendre inemployables, cela toujours de façon temporaire. Chez nous, plus d'une fois, nous avons donné le gîte et la nourriture à des individus aptes mais inemployables. Sans dramatiser la situation, je suis assuré que nous avons évité, du moins retardé, à certains individus une incarcération ou bien un séjour en psychiatrie. Enfin, nous ne pouvons que nous réjouir en pensant qu'il n'y aura désormais plus d'individus qui recevront moins de 405 $ par mois.

Autre fait, dans la réforme d'aide sociale, vous mentionnez que l'État considère comme indépendantes les personnes de 18 ans ou plus ayant résidé deux ans en dehors du milieu familial pour des raisons autres que les études, ayant occupé un emploi régulier pendant deux ans, étant ou ayant été marié, étant conjointe de fait, ayant un ou des enfants à charge ou détenant un diplôme universitaire de premier cycle. Tout cela est bien vrai pour l'ensemble des bonnes familles du Québec, et je ne dis pas cela péjorativement. Toutefois, il y a de nombreux cas où il est impératif que le jeune quitte le milieu familial à 18 ans parce que la violence de toute sorte qui y sévit est trop importante,

ou bien, parce que le jeune est aux prises avec un sérieux problème de drogue et que les parents ne peuvent tout simplement plus l'endurer. De plus, avec le nombre de divorces, parfois l'enfant n'a tout simplement plus sa place au foyer paternel ou maternel. Que l'enfant amène ses parents en cour pour se faire verser une allocation est, je pense, un moyen bien brutal pour solutionner le problème.

Devant tous ces faits, je considère que le comité mixte, dont j'ai parlé plus haut, pourrait déterminer le statut d'indépendance dont le jeune a besoin pour recevoir un minimum vital d'aide sociale. De plus, le jeune pourrait participer ainsi aux différents volets du programme APTE. Toute personne qui ne travaille pas doit recevoir un revenu décent. Cela, nous ne voulons, en aucun cas, remettre ce postulat en question. Chez nous, plus d'une fois j'ai vu un jeune travailleur, au salaire minimum, jalouser un bénéficiaire d'aide sociale retirant le gros chèque et qui, en plus, occupait un travail au noir. Plus d'une fois nous avons vu un employeur révolté devant un jeune travailleur qui relevait le nez sur un emploi au salaire minimum. Nous savons que le salaire minimum est peu gratifiant, mais nous croyons qu'il est souvent plus valable pour un individu apte et employable de gagner le salaire minimum que de recevoir un chèque sur une base permanente, sans l'avoir gagné.

La valeur du travail est remise en question par une partie de la population. Aujourd'hui, on veut un travail, oui, mais pas à n'importe quel prix. L'homme veut garder sa dignité, car s'il y a des employeurs justes et équitables, il y en a aussi qui sont prêts à demander tellement à un employé que celui-ci en perd même sa dignité. Même après plusieurs années de service, l'employé est parfois obligé de se contenter encore du salaire minimum ou à peine davantage. Je connais un employé de la restauration, aide-cuisinier depuis une dizaine d'années, et qui gagne 6,50 $ l'heure. Comment puis-je penser faire vivre une famille avec ce salaire? Je souhaiterais fortement avoir deux enfants et une femme à la maison pour les éduquer. Je pense qu'avec ce salaire je ne réussirai même pas à les nourrir.

Un autre travailleur, tout récemment, me disait: J'ai 34 ans, je dois encore recommencer au salaire minimum. Il me semble que je mérite plus, que je vaux plus que cela. Le salaire minimum n'est pas le lot que des jeunes à leur premier emploi. Plusieurs ne peuvent presque pas espérer davantage tout au cours de leur vie. Je n'ai rien à proposer pour corriger ces situations de pauvreté. Toutefois, si je mentionne ces faits c'est pour rappeler au ministre que le refus d'effectuer certains travaux pour les bénéficiaires est parfois, sinon justifiable, du moins explicable et fort compréhensible. Cela existe des situations dégradantes en ce qui a trait à l'emploi. Également, je souhaiterais qu'on invente des façons originales pour redorer le blason des assistés sociaux. "Être sur le BS", comme on dit, c'est presque une maladie honteuse, et je connais très peu d'individus qui s'en vantent. Cela, dans une société où l'argent et le travail donnent tant d'importance à celui qui donne son opinion. Je souhaiterais des projets nationaux d'envergure où il se dirait à qui veut l'entendre: Sans l'apport des gens à l'aide sociale, nous n'aurions pas réalisé ceci ou cela. Je pense, par exemple, au projet de dépollution des abords du Saint-Laurent, un projet d'étudiants qui a malheureusement avorté. Il y a toute une catégorie d'individus qui, pour certaines raisons énumérées plus haut, seront pour ainsi dire très peu employables. Et si on valorisait ces gens par des réalisations positives qu'ils pourraient apporter à la société.

En termes de conclusion, les trois organismes que je représente ce matin vous félicitent pour le courage dont vous faites preuve en voulant réviser la Loi sur l'aide sociale, cela dans son ensemble. Enfin, c'est votre ministère qui a le mandat de gérer la pauvreté au Québec et personne de nous voudrait en porter le poids. Chaque jour, des hommes et des femmes se retrouvent à l'aide sociale. Depuis quatre ans, nous avons consacré beaucoup d'énergie à faire en sorte que des individus sortent de l'aide sociale et occupent un emploi qu'ils ont le droit et le devoir d'occuper. Depuis quatre ans, nous avons constaté qu'environ le tiers, parfois la moitié des participants qui passaient sur nos projets d'implication communautaire se retrouvaient sur une vraie "job" pendant ou à la fin de leur participation aux projets. Nous croyons honnêtement que la solution aux problèmes des gens à l'aide sociale devrait aller en ce sens. Ce matin, j'ai amené avec moi des jeunes qui ont vécu ces situations et qui ont un emploi. J'avais invité ce matin, des ex-participants aux projets dont, Carole Bernier qui a 23 ans et qui a travaillé douze mois à notre projet comme secrétaire; grâce aux qualités qu'elle a développées et à ses aptitudes, elle est aujourd'hui secrétaire dans une entreprise à Granby. Malheureusement, elle a demandé la permission hier à son employeur qui n'a pas voulu la laisser aller pour la journée, même si on lui avait offert de défrayer sa journée, le problème était par rapport à son employeur. On avait invité aussi Roger Dufresne qui a 23 ans et qui a travaillé à notre projet pendant environ huit mois. Aujourd'hui il est employé à la Commission scolaire de Chambly. Lui aussi, on lui a montré la comptabilité et l'information chez nous, dans notre projet. Aujourd'hui, il a un emploi stable, il n'occupe pas un emploi temporaire. Il y a aussi Christiane Daigle que je m'étais promis de vous amener. Elle a 29 ans et elle est mère, chef de famille de trois enfants. Elle est présentement dans notre projet depuis six mois. Ce qu'elle aime de nos projets d'Implication communautaire, c'est que cela demande seulement 20 heures par semaine. Pour une mère qui a des enfants et qui veut s'occuper, elle trouve que c'est la meilleure

façon pour réintégrer le travail tout en s'oc-cupant de sa famille. J'ai amené quand même, ici, des personnes qui n'ont pas pu se présenter la dernière..., Christiane, parce qu'elle était trop malade pour pouvoir venir ce matin. J'ai amené Eddy Fortier, qui est père d'un enfant. Il était bénéficiaire d'aide sociale depuis trois ans lorsqu'il est arrivé au projet. Il a travaillé au projet pendant huit mois. Son honnêteté a été reconnue et il s'est trouvé un emploi comme gardien de nuit, un poste permanent. Il y a aussi Elizabeth Thibault qui est a ma droite, qui a 25 ans, qui n'avait jamais connu de vrais emplois et qui se retrouvait à tout bout de champ bénéficiaire d'aide sociale depuis l'âge de 18 ans. Elle est maintenant coordonnatrice de projets, un emploi permanent et stable. Merci de votre attention. (10 h 45)

Le Président (M. Bélanger): Merci. M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Bien que la feuille de route qu'on nous remet à chaque matin indique Auberge sous mon toit inc., je tiens pour acquis que mes remarques s'adressent également à MAHG et à Transit. Vous êtes, comme l'a souligné le président de la commission, le 100e organisme que nous entendons dans le cadre de cette commission parlementaire.

Vous nous rendez un témoignage que vous vivez dans le champ et qui se veut généralement positif. Étant donné le peu de temps dont je dispose pour vous questionner, je peux dire que je vous connais déjà, parce que je suis les activités des organismes par deux sources indirectes, par un journal régional qui s'appelle La voix de l'Est, qui publie régulièrement des reportages sur vos activités, ainsi que par le voisin de comté, le député de Shefford - on n'est pas censé utiliser le nom, mais Roger Paré - avec qui je discute de ces projets fréquemment.

Je n'ai pas l'intention de vous poser des questions sur ce qui fonctionne bien; j'ai plutôt l'intention de vous poser des questions sur les accrochages que vous évoquez. Le premier et peut-être le plus important touche tout l'aspect recrutement de vos gens. Vous n'êtes pas le premier organisme qui nous soulignez des lacunes dans l'application quotidienne. Vous nous dites que vous avez rencontre à deux reprises...

M. Houle: J'ai rencontré tous les employés du centre Travail-Québec à deux reprises depuis une année: l'année passée après les fêtes et cette année, le 7 janvier. Les raisons qu'ils m'ont données sont celles que j'ai énumérées dans le document. Nos participants... Seulement pour vous dire comment est-ce qu'on trouve nos participants, on fait paraître des rubriques dans La voix de l'Est régulièrement dans les annonces classées comme demande de personnel auxquelles on indique...

Là, les gens nous appellent. On les invite à notre bureau et lorsqu'ils répondent aux exigences, on les envoie au centre Travail-Québec. De temps en temps, le centre Travail-Québec ne nous les retourne pas. Il les envoie sur stage en milieu ou sur les autres programmes. Il ne nous les retourne souvent même pas. C'est nous qui payons la publicité dans le journal. Cela ne se fait pas seulement chez nous.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, mais dans ce sens-là, étant donné que l'individu en bénéficie, vous ne devez pas tenir rigueur au centre Travail-Québec si l'individu est plus adapté à un stage en milieu de travail.

M. Houle: Sûrement, à condition qu'il remplisse le nombre de places disponibles chez nous, parce qu'il y a quelque chose...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Le fonctionnement avec ça.

M. Houle: ...d'un peu frustrant là-dedans.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Quand vos places ne sont pas complétées, vous ne disposez pas comme organisme de ce qu'on appelle les budgets accessoires de fonctionnement. Cela occasionne des problèmes au personnel qui oeuvre sur une base annuelle chez vous.

M. Houle: Exactement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est cela, le problème. Maintenant, en ce qui concerne votre recrutement dans un milieu comme Granby qui n'est ni une petite ville ni une très grande, qui est quand même une grande ville si on la compare à l'ensemble des municipalités du Québec, est-ce que vous avez déjà eu connaissance de cas de jeunes qui auraient voulu aller travailler chez vous, que vous auriez voulu engager, mais qui n'ont pas pu profiter du stage chez vous parce qu'il y avait un manque de ressources financières?

M. Houle: Un manque de ressources financières?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, un manque de ressources financières, c'est-à-dire qu'un jeune était disponible pour aller travailler chez vous...

M. Houle: Oui.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous étiez prêts à l'accueillir, mais au centre Travail-Québec, on aurait pu éventuellement vous répondre qu'il n'y avait pas de budget ou qu'on ne dispose pas des fonds nécessaires.

M. Houle: Nous avons le droit d'inscrire 17

participants par mois. Voulez-vous parler d'un 18e qui aurait voulu s'inscrire?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Exactement.

M. Houle: C'est que nous avons des ententes avec le CRSSS. On ne dépasse jamais le chiffre 17. De. temps en temps, on voudrait se faire une liste d'attente de gens mais on s'aperçoit que lorsqu'on a des postes disponibles, des postes à combler, les gens sont déjà moins motivés ou ils se sont trouvé autre chose entretemps. Est-ce que cela répond à votre question, parce que je ne suis pas certain de bien vous saisir?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non. Ma question était à savoir si, à un moment donné, dans les 17 participants, on vous a déjà dit: Non, ne vous rendez pas à 17 participants ce mois-ci parce qu'il nous manque de l'argent?

M. Houle: Non, non. C'est parce que nos budgets sont établis...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ils sont préétablis...

M. Houle: Oui.

M. Paradis (Brome-Missisquoi):... et vous n'avez jamais été incités à ne pas recruter parce qu'il y aurait eu manque de ressources.

M. Houle: Sauf que l'année passée, on avait 25 participants et, à cause des coupures budgétaires, on a réduit à 17. L'autre projet du MAHG, le Mouvement action handicapés Granby, ils étaient à 30 et ils ont dû réduire à 25. Tous les projets ont été coupés. Donc, plutôt que de couper les projets, ils ont réduit le nombre des participants dans chacun des projets.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'accord. Cela fait partie de vos négociations avec le CRSSS?

M. Houle: Oui. On voudrait en avoir plus, mais compte tenu des disponibilités qu'ils ont... Vous savez, je pense que tous les projets voudraient en avoir plus également, naturellement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'accord. Vous avez également soulevé un problème qui a trait à la durée du stage. Vous mentionnez qu'une période de douze mois ne vous semble pas suffisamment longue. J'aimerais vous entendre un peu sur cette durée du stage.

M. Houle: C'est souvent à cause du critère de peu d'employabilité des personnes qui nous sont référées. Il y a des gens qui partent de très loin. Ils n'ont jamais eu quelque chose qui ressemble à "une job". On trouve qu'on leur a donné des bonnes habitudes de travail au cours des douze mois mais, pour certains individus, on n'a pas eu le temps de les rendre encore jusqu'à ce qu'on peut appeler "une vraie job". Ils retournent à l'aide sociale après une période de douze mois et on trouve cela regrettable parce qu'on sait qu'ils perdront un peu ce qu'on leur a montré dans les mois qui suivront.

Nous parlions de 24 mois parce que, finalement, ils travaillent 20 heures par semaine chez nous. Douze mois représentent six mois finalement. Si on les avait pendant deux ans, cela représenterait un an. Mais sachez que nos préoccupations ne sont pas de les couver ou de les garder dans notre projet, c'est vraiment de les retourner sur le marché du travail, parce qu'on est fier quand ils ont "une vraie job et une job permanente". On pense qu'un retour possible serait important aussi parce que la personne s'est essayée sur le marché du travail. Elle a travaillé pendant un petit bout de temps et elle revient à l'aide sociale. Elle est finie à vie et elle ne peut plus jamais participer au projet. Je trouve regrettable qu'elle ne puisse pas rembarquer une deuxième fois.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Est-ce que le fait qu'il y ait certains participants qui ne reçoivent pas la même rémunération - si je peux utiliser l'expression - que d'autres, là je fais référence à ceux qui sont plus jeunes et qui n'ont pas complété leurs études secondaires, à cause des difficultés au plan du fonctionnement, des relations pénibles avec les autres membres du groupe, etc. ?

M. Houle: Je vais laisser répondre Élizabeth, qui coordonne le projet.

Mme Thibault (Élizabeth): Je pourrais dire qu'il y a des participants qui ne veulent pas être à notre programme parce qu'ils ne reçoivent pas les 100 $, disons, et que ce n'est pas assez pour eux. C'est comme les engager à moins du salaire minimum et pour faire du bénévolat. Ils n'arrivent pas et ils ne veulent pas.

Votre question était aussi à savoir s'il y en avait qui n'acceptait pas le projet...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non. Il y a une catégorie de gens, comme ceux qui n'ont pas complété leur diplôme d'études secondaires et qui sont âgés de moins de 25 ans, qui ne reçoivent pas la pleine parité - si je peux utiliser l'expression - je demandais si vous aviez des cas semblables chez vous?

Mme Thibault: Oui, j'en ai plusieurs.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Est-ce que cela cause des problèmes de fonctionnement à l'intérieur de l'équipe? Parce que ce ne sont pas des gens qui fonctionnent isolément, est-ce que

vous entendez parier que c'est correct comme ça ou que ce n'est pas correct?

Mme Thibault: Non. Je pourrais dire qu'ils sont frustrés de cela. Ils me demandent souvent si je pourrais l'avoir. C'est surtout au plan de la frustration. Au plan du travail, je ne pense pas qu'il y ait des différences. S'ils acceptent d'être sur le projet, il n'y a pas de différence par la suite.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'accord. Vous avez fait allusion à la question de la création d'un comité interdisciplinaire sur une base régionale, d'après ce que j'ai compris de votre mémoire et de votre exposé oral, vous lui donneriez, suivant ce que j'ai compris et vous pouvez me corriger si ce n'est pas exact, deux mandats. Un premier qui viserait la catégorisation initiale des bénéficiaires éligibles au programme de soutien financier et au programme APTE et un deuxième mandat qui serait celui de déterminer, bien que les personnes soient aptes, une période de non-disponibilité. Vous avez donné comme exemple le cas des ex-détenus, des femmes qui vivent des chocs à la suite d'une séparation, etc.

J'aimerais vous entendre davantage sur cette idée d'un comité régional.

M. Houle: Pour moi, il était formé des quatre personnes que j'ai mentionnées tantôt. Quatre professionnels, si vous voulez, chacun compétent dans son domaine. Il y a tellement de situations qui se présentent. J'en ai donné deux, parce que je vis avec ces deux catégories.

Celle du détenu, par exemple, qui sort après 20 ans. Les trois premiers mois, il n'est pas employable. Je vous le dis vraiment parce que je travaille... À notre centre d'hébergement, on en a cinq sur l'ensemble qui sont ex-détenus. J'ai donné aussi l'exemple de la mère qui connaît un divorce et qui ne peut pas penser être apte et tout de suite se trouver un emploi.

Il y a tellement de situations où une personne peut être apte au travail mais inemployable. il va en arriver des situations. J'en connais des hommes qui mesurent quatre pieds et cinq et qui sont d'une nervosité incroyable - j'en ai un en tête - ils les quittent leur job. Celui-là, on le garde une journée. Pourtant, médicalement, il ne prend pas de médicaments psychiatriques. Tous ceux qui sont sur la "border line" entre le travail et l'inaptitude...

Je pense à un comité qui voterait des mandats temporaires, parce que le but est toujours de les retourner sur le marché du travail. Mon idée est toujours temporaire. Je dis trois mois. Cela pourrait être six mois. Comme un médecin donne un papier temporaire à l'effet que cette personne est inapte ou apte au travail.

Je trouve que ce serait le tampon le plus réaliste si, au moment où vous allez passer le changement de la Loi sur l'aide sociale... je trouve qu'il va se présenter des cas auxquels on ne pense pas. Il faut comme un tampon quelque part sinon, si vous n'avez pas vu certains faits, il va se passer... Les gens peuvent être révoltés et ils auront raison de l'être. Ce comité servirait de comité-tampon jusqu'à ce que vous statuiez après cela, que vous établissiez d'autres critères par rapport à l'inaptitude ou l'inemployabilité. Peut-être allez-vous découvrir des choses qui reviendront dans toutes les régions, des choses bien fixes.

Cela ne veut pas dire non plus que tous les détenus qui sortent de prison sont inemployables. Ce n'est pas ce que je veux dire non plus. Il y en a beaucoup qui le sont et. d'autres qui ne le sont pas.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ma prochaine question s'adresserait à M. Fortier. Vous avez participé à quel type de travaux communautaires, pendant combien de temps et dans quelles circonstances?

M. Fortier (Eddy): J'ai travaillé à l'Auberge sous mon toit pendant huit mois comme chauffeur de camionnette et je nettoyais l'auberge. Quand j'ai commencé, j'avais 24 ans. Cela m'avait donné 100 $ de plus à l'aide sociale. L'Auberge ne me payait pas. Je l'avais pris surtout pour essayer d'avoir quelque chose plus tard. Si cela marchait bien comme camionneur, on ne sait jamais, je pouvais trouver quelque chose d'autre plus tard dans ce domaine. Je vais le faire. Je l'ai fait huit mois. Après les huit mois, Benoît Houle et M. l'abbé Bossé m'ont parlé. Ils avaient besoin d'un gardien de nuit pour les libérations conditionnelles et les tours pour le feu. Cela m'avait intéressé. J'ai commencé le 1er novembre 1987. Je suis encore là. Je travaille encore à l'Auberge sous mon toit.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Sentez-vous bien libre de répondre, mais vous m'avez mentionné que vous avez commencé à 24 ans. Si cela vous tente, vous répondez. Si cela ne vous tente pas, vous ne répondez pas.

Entre 18 et 24 ans, vous avez fait quoi?

M. Fortier (Eddy): Pardon? (11 heures)

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Entre 18 et 24 ans, vous avez fait quoi?

M. Fortier (Eddy): J'ai travaillé à Montréal pendant un an comme concierge. J'ai été trois ans sur l'aide sociale, du commencement de 1985 jusqu'à la fin de 1987. Auparavant, j'ai surtout eu des jobs à temps partiel. Je viens juste de déménager à Granby. Avant, je restais à Waterloo et, là-bas, il n'y avait pas beaucoup d'ouvrage. C'est pour cela que je suis allé à l'extérieur, trouver de l'ouvrage à Montréal comme gardien de nuit et concierge.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Quelle est votre formation scolaire de base?

M. Fortier (Eddy): Le secondaire III terminé.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous avez terminé votre secondaire III. Merci. En vertu de l'alternance...

Le Président (M. Bélanger): Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Merci, M. le Président. Je suis heureuse, moi aussi, de vous recevoir, M. Thibault, M. Houle... Mme Thibault, excusez-moi, c'est parce que vous êtes au milieu, M. Houle et M. Fortier, je crois. M. Houle, en terminant votre mémoire, vous dites: Nous croyons aux projets de Travaux communautaires. Je crois que c'est un peu l'élan que vous voulez donner à votre témoignage devant la commission sur les résultats que vous avez obtenus avec les travaux communautaires. Je dois dire que je partage aussi votre enthousiasme, ayant soutenu, comme c'est le cas pour vous depuis 1984, c'est ce que je crois comprendre...

M. Houle: Oui.

Mme Harel: ...la mise en place de programmes de travaux communautaires. Je ne sais pas si vous avez entendu parler de certaines réalisations dans l'est de Montréal comme le chic café Resto-pop qui fait la cueillette d'aliments et qui, à partir de cela, peut offrir 150 repas chaque jour et plein d'autres choses également. C'est sans doute important qu'on parte de cet acquis. Cela me fait plaisir, je dois rencontrer l'instigatrice de ces projets ce soir, Mme Marois. Cela me donnera l'occasion de lui dire que ce n'est pas seulement dans l'est de Montréal, mais aussi à Granby que les programmes ont été utiles. Je crois comprendre que pour vous, M. Fortier, pour vous, Mme Thibault, pour vous aussi, M. Houle, d'une certaine façon et pour la communauté...

Il faudrait peut-être qu'on examine ensemble les conditions de succès, de manière à pouvoir corriger les carences actuelles. On ne peut pas prétendre aveuglément que les carences actuelles n'existent pas, étant donné que ces carences ont fait qu'il y a eu à peine 20 % et même, au moment où la performance a été la plus élevée, 30 % de participation au programme; cela a baissé parfois à 18 et oscille entre cela. Dans les carences, il y a le fait suivant: Comment se fait-il qu'il y a eu si peu de capacité d'accueil de ces programmes? Je ne parle pas seulement des travaux communautaires, mais des autres également. Les travaux communautaires, c'est agent d'entreprise et retour à l'école. Comment se fait-il qu'il y ait un si haut taux d'échec puisque, même si c'est une participation autour de 20 %, c'est une participation qui, encore là, doit être examinée avec l'éclairage des abandons qui sont encore plus importants?

Dans le petit texte de deux pages que vous nous avez remis, celui qui accompagnait votre mémoire et où l'on retrouve les neuf points - je crois comprendre - les neufs recommandations au ministre, vous dites: Tous les organismes sont d'accord pour laisser le choix au bénéficiaire de participer ou non au programme.

M. Houle: Vous savez pourquoi.

Mme Harel: Je voudrais vous entendre là-dessus.

M. Houle: Lorsqu'une personne est obligée d'adhérer à l'un de nos projets, non seulement elle ne fait rien, mais elle retarde les autres dans ce qu'ils font. Elle crée une mentalité déplorable. Le libre choix est important. Nous ne congédions à peu près jamais personne. On est tolérant le plus possible.

Mme Harel: Juste à vous voir, on le comprend.

M. Houle: Ha, ha!

Mme Harel: Cela veut donc dire que, pour vous, la libre participation, c'est une condition de réussite.

M. Houle: Oui, comme le libre choix pour retourner en classe. Oui. Quelqu'un qui retourne en classe et qui n'est pas motivé, je pense qu'il retarde tout le monde. Je pense bien.

Mme Harel: Donc, première condition, le libre choix, l'aspect volontaire.

M. Houle: Oui.

Mme Harel: Dans le projet ministériel, actuellement, il n'y a plus l'aspect volontaire. C'est l'aspect obligatoire, sinon c'est une baisse de prestation. C'est que, actuellement, dans toutes les catégories, toutes les catégories vont avoir un chèque coupé si elles ne veulent pas participer.

M. Houle: Est-ce qu'elles sont coupées en bas de 405 $ par mois? C'est le minimum.

Mme Harel: Elle sont coupées plus bas que les 405 $. Pour les chefs de famille monoparentale, je vais vous donner un exemple.

M. Houle: Oui.

Mme Harel: Disons une chef de famille qui a un enfant de deux ans et demi et qui veut rester avec l'enfant; actuellement, cette personne reçoit 684 $. Ce montant est indexé, parce que

j'ai les chiffres du ministre, mais indexé pour 1989, alors c'est de ce chiffre qu'on va se servir parce que c'est celui-là qui est officiel. Une chef de famille avec un enfant, indexé en 1989, reçoit 684 $. Si elle refuse de participer, elle recevrait 585 $, avec le projet du ministre, c'est-à-dire 99 $ de moins par mois.

M. Houle: Que présentement. Mme Harel: Que présentement. M. Houle: D'accord.

Mme Harel: Cela veut dire 99 $. On sait ce que les montants représentent à ce niveau-là. Cela veut dire 1200 $ par année. La même personne qui participe avec Mme Thibault, présentement, une chef de famille, je ne sais pas... Est-ce qu'il y en a, Mme Thibault, des chefs de famille qui participent actuellement?

Mme Thibault: Oui, il y en a plusieurs.

Mme Harel: Bon. Bien, regardez, la personne va perdre avec le projet parce que, vous voyez, elle aurait - reprenons les mêmes chiffres pour bien se comprendre - avec le système actuel, indexé, 684 $. Elle a 100 $ de besoins spéciaux, plus 100 $ du projet. Cela lui fait 884 $. On se comprend?

Mme Thibault: Oui.

Mme Harel: Avec la proposition, elle n'aurait plus que 820 $. 720 $ comme participante, plus 100 $ du projet. Cela veut dire 820 $. Là, qu'on ne me parle pas des gains d'emploi fictif, n'est-ce pas, parce que si elle est chef de famille et qu'elle participe, d'imaginer qu'elle va aller se gagner ensuite des revenus, c'est illusoire. Cela veut dire...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je ne sais pas si cela se peut que, dans le cas de l'auberge, on verse les 100 $? D'après ce que j'ai compris de...

Mme Harel: L'auberge verse les 100 $?

Mme Thibault: Seulement à ceux qui ont 25 ans et plus ou un secondaire V. Les autres ne l'ont pas. Ils ne sont pas admissibles.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'accord.

Mme Harel: Mais elle le verse à la chef de famille monoparentale?

Mme Thibault: Non. Seulement s'ils ont 25 ans ou un secondaire V, que ce soit une chef de famille monoparentale ou une personne...

Mme Harel: Parce que normalement, c'est dans les besoins spéciaux de la chef de famille monoparentale.

Mme Thibault: Peut-être que, au niveau de l'aide sociale, on donne les 100 $.

Mme Harel: Ah! d'accord.

Mme Thibault: Mais nous autres, non.

Mme Harel: D'accord, mais là, présentement, admettons que cette personne, qui aurait disons 28 ans, qui aurait un enfant d'environ trois ans, peut recevoir actuellement et reçoit sans doute dans certains cas 884 $, elle va maintenant recevoir 820 $, c'est-à-dire 64 $ de moins parce qu'il n'y a plus les 100 $ pour les besoins spéciaux, montant qui ne lui est donné ni pour elle ni pour d'autres.

L'autre aspect est le partage du logement. Les 405 $, M. Houle, il ne faut pas que vous oubliiez que les 405 $ peuvent être mangés par une réduction de 115 $ pour les chefs de famille ou les personnes seules de moins de 30 ans ou de plus de 30 ans qui partagent leur logement. Prenez deux jeunes qui participent à vos programmes et qui habitent ensemble.

M. Houle: Oui.

Mme Harel: Et qui auraient, disons, un minimum, comme vous dites, de 405 $. Non, pas s'ils participent à vos programmes mais qui seraient à 405 $, en étant tous les deux, deux jeunes qui se sont dit: On va s'entraider, on va se louer un logement à Granby. Non, c'est cela, mais s'ils sont... parce que M. Houle dit que le minimum est de 405 $.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ils ne peuvent pas être à 405 $ s'ils participent.

Mme Harel: Oui, mais il ne parle pas de ceux qui participent. Il dit que, dorénavant, le minimum sera de 405 $.

M. Houle: C'est bien cela.

Mme Harel: Mais, M. Houle, le minimum de 405 $ va pouvoir être déduit de 115 $...

M. Houle: S'il vit...

Mme Harel: ...s'il y a partage de logement.

M. Houle: Oui.

Mme Harel: On sait qu'il y en a 40 % qui partagent leur logement. C'est une manière pour eux de s'entraider.

M. Houle: Oui.

Mme Harel: En plus, il va y avoir une réduction de 100 $ pour toutes les familles, indépendamment de leur revenu, sous forme dite de contribution parentale, même si le jeune n'habite plus dans sa famille, si cela ne fait pas au moins deux ans qu'il a quitté. Alors le jeune peut se retrouver avec 190 $ par mois aussi, n'est-ce pas?

M. Houle: J'ai parlé tantôt de la clause d'indépendance. Les parents ont le devoir d'aider leurs enfants dans les cas normaux. Il peut avoir les 100 $ de ses parents normalement.

Mme Harel: Les cas normaux, comme vous dites... Actuellement, il y a, près de 30 % des familles au Québec où le père travaille, il est le pourvoyeur, la mère est à la maison et les enfants habitent à la maison. Les autres 70 % ce sont des familles soit monoparentales, soit reconstituées. On dit qu'en 1990 un couple sur deux sera divorcé, un sur quatre remarié et un sur cinq redivorcé. On reconnaît que dans 85 % des cas les 100 $ de contribution parentale ne sont pas versés dans le cas des prêts-bourses. Vous pensez qu'ils vont être versés dans le cas de l'aide sociale?

M. Houle: Comme je l'ai dit, il y en a qui ne peuvent pas compter sur leurs parents. Mais je pense que, dans une bonne majorité, les parents doivent subvenir à leurs enfants.

Mme Harel: À leurs enfants adultes.

M. Houle: Oui. Adultes, les deux premières années. Dans l'ensemble. Je vous parle des foyers de bonnes familles.

Mme Harel: Ce qui arrive, M. Houle, c'est qu'on ne peut pas légiférer différemment pour les bonnes que pour les mauvaises.

M. Houle: C'est pour cela que je vous ai parlé du fameux comité, le comité mixte, justement pour être capable d'aider ces situations.

Mme Harel: Oui.

M. Houle: Si la personne est dans une situation où ni son père ni sa mère ne vont l'aider, ce n'est pas pensable, si elle a son statut d'indépendance, jugé par le fameux comité mixte, au moins elle ne se retrouvera pas avec 190 $ par mois.

Mme Harel: On va revenir tout de suite, si vous voulez, sur le comité mixte.

M. Houle: Oui.

Mme Harel: D'abord, il faut comprendre que la famille qui s'entraide est pénalisée. C'est seulement quand H y a un échec, que cela ne marche pas, que l'on peut prouver son dénuement, qu'on le plaide devant un comité mixte plutôt qu'un agent de laide sociale, qu'on peut avoir l'assistance.

M. Houle: Pas nécessairement. Cela peut être toute circonstance où la personne admet qu'elle a vraiment tout fait, qu'elle peut prouver qu'elle est indépendante, c'est-à-dire qu'elle ne peut plus recevoir d'aide de ses parents Elle peut alors recevoir le statut d'indépendance par le comité mixte.

Mme Harel: Donc il faut qu'elle prouve un échec de ses relations familiales pour recevoir assistance.

M. Houle: Je ne suis pas sûr que le mot "échec" soit bien choisi. Je dirais qu'elle prouve sa situation.

Mme Harel: Une situation qui doit être exceptionnelle. Si cela va bien, elle ne peut pas recevoir.

M. Houle: Si vous dites que 50 % des foyers sont divorcés, je ne sais pas si on parle de situation exceptionnelle. C'est une situation différente.

Mme Harel: Revenons, car c'est fort intéressant et je suis certaine que cela vient d'une bonne volonté. Prenons votre proposition du comité mixte.

M. Houle: Oui.

Mme Harel: Commission d'appel avec mandat décisionnel. On a déjà dans la proposition du ministre le critère apte, inapte.

M. Houle: Oui.

Mme Harel: II y a eu le Collège des médecins, les omnipraticiens, les psychologues, et tous les autres qui sont venus dire qu'il fallait faire attention, parce que ce n'était pas simplement par une décision médicale mais biopsychosociale. Cela pouvait être évolutif. Il fallait revenir épisodiquement pour juger de l'aptitude ou de l'inaptitude et qu'H allait y avoir des formulaires à remplir. On a presque assisté à un début de négociations entre les omnipraticiens et le ministre. Ils ont indiqué qu'ils allaient demander des honoraires pour pouvoir remplir ces analyses. Il y a d'autres professionnels qui ont dit: II n'y a pas que les médecins qui peuvent juger de l'inaptitude, nous aussi, nous voulons faire partie du comité. Il y a les aptes et les inaptes, les disponibles et non disponibles. Il y a même des personnes qui sont venues nous dire: Est-ce qu'il y aurait les épousables et les non épousables? Maintenant vous nous proposez les employables et les inemployables.

M. Houle: Je trouve la logique très bonne.

Mme Harel: On va suivre votre logique. Dans cette logique, il y aurait des possibilités de décision selon les circonstances.

M. Houle: Moi, je n'avais pas indiqué selon les circonstances. Ils auraient le pouvoir décisionnel.

Mme Harel: Sauf que, pour le pouvoir décisionnel, vous allez avoir la Commission des services juridiques, vous allez avoir le Barreau et les avocats qui vont venir plaider que ce sont des décisions qui ont une importance telle dans la vie de quelqu'un qu'il faut pouvoir en appeler devant la commission des affaires sociales.

M. Houle: Je pensais que c'était un comité d'appel. S'il faut qu'il y ait un autre comité d'appel par-dessus... (11 h 15)

Mme Harel: Un pouvoir quasijudiciaire peut toujours aller en appel dans notre société. Même quand on va devant la Commission des affaires sociales, il peut y avoir une évocation devant la Cour supérieure. Il peut y avoir un appel devant la Cour d'appel, parce que, dans notre société, personne ne peut décréter qu'elles sont finales et sans appel. Oui, sauf la Cour suprême. Donc, cela veut dire que vous avez un comité...

M. Houle: Oui.

Mme Harel: Ce comité serait sur un territoire d'à peu près l'équivalent du CLSC?

M. Houle: Oui, d'une région.

Mme Harel: II y aurait dans ce comité, normalement, un représentant du CLSC, de la

Chambre de commerce, un agent de l'aide sociale et un professionnel.

M. Houle: Du domaine concerné.

Mme Harel: D'accord. Ce n'est pas peu de choses, parce que là dans votre système, ceux qui seraient inemployables auraient quand même leurs besoins essentiels couverts par les barèmes. Tandis qu'ils sont employables, là, ils ont la réduction.

M. Houle: C'est cela.

Mme Harel: Donc, il y a une foule de gens qui, une fois après être passés devant le médecin et s'être fait juger aptes malgré que là ils vont aller devant un médecin, qu'est-ce que cela va coûter à l'État, tout le système? Pour avoir des avantages, il faut se faire déclarer inaptes ou il faut se faire déclarer inemployables.

M. Houle: C'est cela.

Mme Harel: Donc, là ils vont aller devant un médecin. Le médecin va évaluer et, eux, ils vont contester sa décision. Là, ils vont pouvoir aller devant la Commission des services juridiques. La commission va faire faire une expertise par un autre médecin. La commission est venue, devant nous, dire que cela coûte à peu près 250$. Une fois l'expertise faite, ils vont pouvoir demander une révision. Après, ils vont aller devant la Commission des affaires sociales. Là, la Commission des affaires sociales, cela peut aller en évocation. C'est juste pour l'inaptitude. Supposons que finalement ils sont toujours jugés aptes. Là, ils pourraient aller devant votre comité mixte et plaider l'inemployabilité, n'est-ce-pas? Le processus va recommencer. On se comprend. Là, il y a des professionnels dans cela, ils ne feront pas cela bénévolement. Ils vont faire cela pour de l'argent. Vous mettez en place un immense réseau de professionnels autour du fait qu'on a un système qui est mal parti. Le système, c'est quand vous êtes inaptes ou inemployables, là la société se reconnaît un devoir de sécurité et de protection mais quand vous êtes aptes, là c'est votre faute et c'est à vous de vous en sortir sauf qu'il y a tout de même un taux de chômage de 10 %. Il y a des régions, non pas la vôtre, je le comprends, mais en Gaspésie encore en 1988 c'est 16 %. C'est un système qui m'apparait bien coûteux, comprenez-vous. Ce n'est pas du tout... Là, dans chaque territoire de CLSC, il se peut que les décisions soient différentes parce que les personnes peuvent juger différemment dans un territoire comme l'Est ou l'Abitibi. Là, il peut y avoir pour les mêmes raisons une femme qui vient d'être séparée ou divorcée qui serait considérée inemployable à Granby mais qui serait considérée employable à Saint-Georges-de-Beauce. Cela va tout se retrouver devant un tribunal.

M. Houle: Non, pas nécessairement. Moi, je travaille beaucoup en ce qui a trait aux libérations conditionnelles. Je peux vous dire que lorsqu'un comité décide par rapport à la commission qu'une personne n'aura pas sa libération conditionnelle, le gars peut toujours aller en Ontario ou aller dans une autre région pour voir s'il va l'être. Il y a des comités d'appel. La décision est là pour six mois. Dans six mois, tu reviendras et tu feras ta demande à nouveau. C'est la même chose, c'est d'un caractère temporaire.

Mme Harel: D'accord. J'aurais vraiment aimé poursuivre la discussion avec vous plus longtemps, M. Houle.

M, Houle: Oui, moi aussi.

Mme Harel: Cela aurait été vraiment intéressant sur la question des disponibilités pour

les programmes et à quel moment vos projets ont dû réduire leur nombre de participants. Cela dit, heureusement que dans notre société on n'envisage pas encore de restreindre les droits des concitoyens qui sont à l'aide sociale et qui sont des citoyens à part entière à ceux des détenus dans les prisons. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Bélanger): M. le ministre, brièvement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): La question que j'aurais à vous poser - on m'indique qu'il me reste à peine deux minutes - m'est un peu suggérée par M. Fortier dans sa dernière réponse. M. Fortier a dit, je vais paraphraser: J'ai réussi à me trouver un emploi parce que M. Houle en avait parlé avec...Est-ce que vous faites du placement finalement?

M. Houle: Dans notre programme de travaux communautaires, on alloue quatre heures par deux semaines pour que la personne établisse un plan de recherche d'emploi. On lui fait faire un curriculum vitae et, après cela, if faut qu'elle prenne 4 heures sur les 20 heures pour des démarches d'emploi lorsqu'elle est rendue à cet endroit dans son processus de démarches personnelles. C'est à cause de cela. Là, c'est parce qu'on connaissait quelqu'un et l'honnêteté, pour être gardien, c'est très important. Le connaissant et, vous savez, on embauche souvent quelqu'un parce qu'on le connait. C'est bien dit. J'ai travaillé pour un service de placement et c'est comme cela. C'est par les amis qu'on trouve le plus possible des emplois. Les gens, on les sort de leur solitude et de leur appartement et on les fait rencontrer du monde. C'est là que ceux qui veulent vraiment travailler sont dans le trafic des emplois. C'est une façon bien normale, je pense bien.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Seulement sur le plan de la mécanique, pour que je comprenne bien, est-ce que les quatre heures par deux semaines auxquelles vous faites référence sont incluses dans les vingt heures?

M. Houle: Oui, c'est inclus dans les vingt heures.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est inclus dans les vingt heures de...

M. Houle: Avec preuve à l'appui quand même, avec des moyens de contrôle, mais c'est dans les vingt heures.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): En moyenne, après combien de temps de participation les gens se retrouvent-ils en recherche d'emploi - quatre heures à toutes les deux semaines - est-ce que c'est après trois mois ou quatre mois en général? Je sais que chaque cas est un cas individuel, mais...

M. Houle: C'est à peu près au troisième ou au quatrième mois. Ce n'est jamais au tout début quand il vient travailler et qu'il faut qu'il se cherche un emploi. Il faut quand même qu'on lui donne des habitudes de travail, parce que s'il est bénéficiaire d'aide sociale, il y a un problème quelque part. On le sait. Soit qu'il ne se lève pas le matin, en tout cas, il y a bien des choses.

Le Président (M. Bélanger): Alors...

Mme Harel: ...rapidement et je vais vous dire M. Houle, avoir à faire des stages, j'aimerais les faire avec vous, moi. C'est entre vos mains que j'aimerais être et je suis certaine que cela doit être pas mal enthousiasmant.

M. Houle: Oui?

Mme Harel: Mais je dois vous dire que... Pour les motifs...

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Harel: II n'y a pas de présomption de vie maritale partout. J'imagine que c'est ce que pense M. Fortier et Mme Thibault. Par ailleurs, en matière de législation, j'aime autant laisser cela entre mes mains. Je vous remercie.

M. Houle: Oui, merci.

Le Président (M. Bélanger): M. le ministre, brièvement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je tiens à remercier les trois organismes, leur porte-parole. Je comprends que Mme la députée de Maison-neuve souhaiterait avoir un stage chez vous plutôt que de le passer avec ceux qui vous parlent. Vous êtes un organisme qui nous avez apporté des suggestions positives pour améliorer quelque chose que vous qualifiez déjà de bon, mais qui comprend des lacunes qu'il nous faut corriger. C'est là un des buts, un des objectifs principaux de cette commission parlementaire La contribution positive que vous avez apportée à cette commission parlementaire est à l'honneur des groupes et des gens que vous représentez devant nous aujourd'hui. Au nom de cette commission et au nom du gouvernement du Québec, nous vous remercions de cette contribution positive.

Le Président (M. Bélanger): La commission des affaires sociales remercie le groupe de l'Auberge sous mon toit Inc. et les deux autres groupes. J'invite à la table des témoins le groupe Action-travail région de Matane inc., représenté par M. Romain Gagné et M. Pierre Côté.

Vous connaissez nos règles de procédure. Je

vous ai vu assister. Alors, on n'insistera pas davantage. Si vous voulez bien vous présenter et nous présenter votre mémoire, nous vous écoutons. Merci.

Action-Travail région de Matane inc.

M. Côté (Pierre): Nous vous remercions et nous remercions les membres de la commission d'avoir bien voulu nous recevoir. En passant, nous avons été changés de date, ce qui nous a obligés à partir ce matin à 4 heures de Matane pour venir vous rencontrer, mais cela nous fait plaisir, étant le 101e groupe. Disons que le mérite est des deux côtés ce matin.

Le Président (M. Bélanger): Je m'excuse de cet inconvénient. Vous savez, c'est très difficile de planifier autant de groupes. Parfois, il y a des désistements, parfois, il y a des changements dans les horaires législatifs et tout cela. Alors, on s'en excuse vraiment.

M. Côté (Pierre): II n'y pas de problème, M. le Président. Je m'appelle Pierre Côté, secrétaire de la corporation Action-Travail. Je vous présente à ma gauche, Romain Gagné, président de la corporation Action-Travail région de Matane. On a choisi de faire une lecture complète de notre mémoire, étant donné qu'il est très bref. Je pense que c'est en en faisant la lecture qu'on va voir un peu dans l'ensemble qu'on vise par ce mémoire qui se veut un peu un pas en avant pour bonifier ou pour être un peu complémentaire à la proposition de la réforme. Nous allons donc procéder à la lecture immédiatement.

Le présent document n'est pas l'oeuvre d'un groupe de hauts fonctionnaires spécialistes des programmes gouvernementaux. C'est le témoignage d'animateurs et d'intervenants d'un groupe nommé Action-Travail de l'Est du Québec, travaillant auprès des jeunes de moins de 30 ans qui vivent la réalité du manque d'argent, du chômage, de l'inactivité forcée, qui trouvent difficilement leur place dans la société et pour qui l'avenir semble pour le moins incertain.

Tous les jours, nous côtoyons des jeunes qui vivent en marge d'une société adulte et qui désespèrent souvent de s'y voir un jour reconnaître un statut de membre à part entière. Étant plus près d'eux quotidiennement, nous sommes à même de comprendre ce qu'ils vivent. Trop souvent, nous devons constater nos limites à intervenir auprès d'eux. Les apprentissages importants qu'ils font au cours de leur fréquentation dans nos divers organismes et dans les différents programmes visant le développement de l'employabilité trouvent difficilement leur aboutissement quand il s'agit de passer dans les sphères du monde adulte et du monde du travail en particulier.

Les jeunes adultes, comme n'importe quel autre groupe, veulent apporter par leur travail leur contribution à la société. Les jeunes veulent des emplois qui leur permettent par la rémunération d'apporter une réponse adéquate aux autres besoins de la vie quotidienne, et en particulier, le besoin d'être reconnus. Chacun sait que l'occupation est un des principaux déterminants du statut social. Quand quelqu'un vous demande votre nom, la question qui suit presque invariablement est: Que fais-tu dans la vie ou quelle est votre occupation? Le ton ou la formule peut varier selon l'interlocuteur ou les circonstances, mais le fait demeure. Chacun a besoin de connaître l'occupation de l'autre pour l'identifier, le situer et le reconnaître. C'est vrai dans les rencontres sociales et dans les occasions d'affaires comme lorsqu'on loue un appartement ou que l'on change un chèque. C'est vrai pour s'inscrire sur la liste électorale ou à un club sportif. C'est vrai à chaque fois qu'on se fait poser la question: Votre numéro de téléphone au travail, s'il vous plaît.

Pour les jeunes adultes avec lesquels nous travaillons, le temps presse de leur reconnaître un statut d'individu à part entière et de ne plus les affubler de l'étiquette de bénéficiaire de l'aide sociale ou de celle de chômeur chronique. Faire en sorte que tous les individus puissent, par des mesures de sécurité du revenu, bénéficier des biens et des services minimaux et essentiels au maintien de la vie, c'est un pas, mais permettre qu'ils soient fiers d'apporter à part entière leur contribution à la société, c'est beaucoup mieux et plus rentable à tous les niveaux.

Les gouvernements vont-ils attendre patiemment le milieu des années quatre-vingt-dix, où l'on prévoit une baisse des taux de chômage résultant d'une diminution de la population ou, au contraire, vont-ils faire un pas en avant dès maintenant afin de rentabiliser cette force vive et capitale pour une société que sont ses ressources humaines? Le document n'a pas la prétention d'apporter la solution. Il se veut le reflet le plus fidèle de la réalité vécue quotidiennement par les jeunes en particulier, que l'on a qualifiés de génération sacrifiée, et par les organismes qui oeuvrent auprès d'eux.

Dans les pages qui suivent, nous allons brièvement vous entretenir de notre réalité régionale, de l'accès ou l'admissibilité à l'aide sociale, du programme de soutien financier, du volet d'aide aux parents pour leur revenu de travail et plus particulièrement, du programme Actions positives pour le travail et l'emploi - APTE - qui concerne plus spécifiquement les individus que nous rencontrons quotidiennement.

En principe, nous sommes d'accord que le programme d'aide sociale soit modifié pour en faire une politique qui tendra à faire disparaître les entraves à l'autonomie, à l'émancipation du bénéficiaire. Mais faut-il encore que ces bonnes intentions soient un pas en avant et non un pas de côté qui ne fait que rendre plus vivable une situation intolérable. Parce qu'il est intolérable qu'une société ne puisse utiliser l'énergie de

toute sa population polir l'amélioration de la richesse collective et susciter la fierté d'une nation.

Notre réalité régionale. Il est inutile de faire de longues démonstrations statistiques sur le taux de chômage régional et des prestations d'aide sociale. Il est bien connu que le Bas-Saint-Laurent, la Gaspésie et les Îles-de-la-Madeleine battent fréquemment des records à ce niveau. Les jeunes adultes et les femmes sont particulièrement touchés par ce manque de travail. De plus, notre région est présentement en voie de désintégration démographique. Ce phénomène se traduit de la façon suivante: Les communautés en voie de désintégration se caractérisent par le vieillissement de la population. Quant aux jeunes de moins en moins nombreux et aux adultes en âge de travailler, ils ont tendance à émigrer vers les bassins géographiques actifs sur le plan économique. Ils suivent la route de l'emploi bien sûr, toujours parsemée d'embûches et souvent illusoire. On n'a qu'à se rappeler le téléroman de Rock qui part des Escoumins pour s'en aller à Montréal. Cela nous donne une idée de ce que peuvent vivre les jeunes dans notre région. (11 h 30)

Nous sommes aux prises avec ce facteur important qui influence notre vie de tous les jours et particulièrement l'avenir de la région. La population vieillissante, les personnes actives qui émigrent vers les grands centres et l'éloi-gnement rendent notre territoire moins attrayant pour des investissements majeurs économiques, créateurs d'emplois permanents.

L'Est du Québec, comme toutes les régions éloignées des grands centres, a toujours été dans l'obligation d'insister sur ses besoins et de défendre farouchement ses intérêts face à la centralisation des pouvoirs souvent dans les mains des politiciens et fonctionnaires des capitales. Le contexte a contraint la population à développer un esprit d'initiative et de coopération qui a permis à la région de se maintenir, malgré un exode massif et une perte d'énergie vive.

Depuis l'automne 1982, période correspondant à une phase aiguë de la crise économique qui a affecté plus particulièrement les jeunes et d'une façon plus dramatique, les jeunes des régions éloignées, de nombreux organismes communautaires jeunesse ont vu le jour afin de permettre à ces jeunes de bénéficier d'un soutien dans un cheminement d'insertion sociale pour certains et/ou professionnel, pour d'autres.

Des centaines de bénévoles, appuyés par les intervenants de services publics et para-publics, - CLSC, service de probation, centre d'éducation des adultes, centre Travail-Québec, centre de services sociaux - ont mis sur pied des organismes qui se sont préoccupés de la situation catastrophique des jeunes sans emploi. L'attention particulière des organismes publics et para-publics à la situation des jeunes a généré des modifications dans leur façon de travailler, ce qui a permis des prises de conscience à tous les niveaux de la communauté.

Les organismes de jeunes sans-emploi, comme le regroupement des Action-Travail du Bas-Saint-Laurent, Gaspésie, Îles-de-la-Madeleine, ont été jusqu'à maintenant un lieu privilégié d'innovation et ont permis à des jeunes adultes d'explorer leur potentiel. Nous pouvons sans nous tromper mentionner que nos organismes ont été un apport important dans le succès des programmes d'employabilité et de création d'entreprises dans la région de l'Est du Québec.

Comme nous le mentionnions plus tôt, nous sommes d'accord pour que le gouvernement du Québec se préoccupe de sécurité du revenu pour les plus démunis de notre société. Notre principale préoccupation est qu'il ne s'accomode plus de l'énorme gaspillage de ressources humaines que représentent des bénéficiaires aptes au travail. Il faut que les correctifs apportent de vraies solutions plutôt que d'esquiver le fond du problème, le manque d'emploi.

C'est l'inaptitude du programme APTE à répondre clairement aux besoins de la population apte au travail qui nous a incités à contribuer à la réflexion et au débat suscité par le dépôt du document d'orientation "Pour une politique de sécurité du revenu".

Le travail est, et demeurera, pour chacun le moyen par excellence de contribuer à la création de la richesse collective et d'en retirer la part qui lui revient. C'est à un choix de société auquel nous voulons participer, une société qui offre à chacun la possibilité de travailler, d'avoir un vrai emploi.

Les travaux de cette commission soulèvent des enjeux importants tant pour la jeune génération que pour l'ensemble de la société Le sujet de l'assistance sociale, de la formation et de l'emploi préoccupe une large proportion de la population. Dernièrement, le Conseil national du bien-être social déposait un rapport, "Un filet de sécurité troué", qui a traité de l'accès aux mesures d'assistance sociale. Un sous-comité de la formation et de l'emploi du Comité sénatorial permanent des sciences et de la technologie a déposé lui aussi un rapport plus près de nos préoccupations, qui suggère des pistes intéressantes afin d'accéder à la sécurité du revenu en contribuant à l'enrichissement collectif. Les gouvernements devront éviter que la poussière ne s'accumule sur les conclusions de ces rapports Ils devront avoir le courage d'agir pour favoriser l'accès à des emplois pour tous. L'emploi est pour nous le moyen le plus limpide de sécurité du revenu. C'est d'un nouveau contrat social et collectif qu'il faut parier.

Le programme de Soutien financier, c'est pour les individus et les ménages qui sont dans l'impossibilité de subvenir à leurs besoins, à cause d'un état de santé physique ou mental altéré de façon significative pendant une période relativement longue, que l'assistance sociale, bien

sûr au départ, a été mise sur pied. Il nous apparaît donc très important que l'on se préoccupe du bien-être de cette partie de la population. S'assurer que ces individus ou ménages puissent compter sur des ressources financières pour répondre aux besoins fondamentaux que requiert leur situation est une responsabilité collective.

Il est heureux que cet engagement puisse s'ajuster à la réalité contemporaine en offrant des services adaptés dépassant, dans toute la mesure du possible, l'aide financière pour s'attaquer également aux problèmes qui accompagnent trop souvent l'absence de ressources particulièrement ressentie dans les régions périphériques, comme l'Est du Québec.

Nous souhaitons que l'écart entre le seuil de la pauvreté et les mesures de Soutien financier soit résolument réduit sinon éliminé, que l'établissement de l'employabilité ne soit plus sujet à l'arbitraire et à la discrimination trop souvent ressentie chez ces populations défavorisées et que les budgets du réseau de la santé et des services sociaux soient augmentés dans les régions périphériques pour permettre aux personnes démunies de recevoir les services auxquels elles ont droit.

Le programme d'aide aux parents pour le revenu de travail, APPORT. Les familles avec enfants sont le capital humain nécessaire au développement futur d'une collectivité, particulièrement chez nous aussi. Dans une région comme la nôtre où la désintégration démographique a des effets majeurs, le maintien sur le territoire de la population en âge de se reproduire apparaît comme un élément essentiel à l'essor socio-économique. Vouloir inciter les personnes avec enfants a charge dont les revenus sont faibles ou insuffisants à demeurer sur le marché du travail ou à y retourner nous semble une mesure essentielle, mais faut-il encore qu'il y ait des emplois stables disponibles sur le marché du travail.

Au chapitre de l'emploi, c'est pour nous très inquiétant, l'Est du Québec accuse un essoufflement certain. La plupart des statistiques compilées pour l'année 1986 indiquent un fléchissement du marché de l'emploi. Nous pourrions dire qu'il y a une légère amélioration pour 1987. Nous ne pouvons que souhaiter, pour l'instant, qu'une volonté politique s'exprime pour la création de nouveaux emplois dans l'est.

Le programme actions positives pour le travail et l'emploi. En 1982, des jeunes du Bas-Saint-Laurent, de la Gaspésie et des Îles-de-la-Madeleine ont entrepris de faire de l'action positive pour le travail et l'emploi. Les groupes Action-Travail ont oeuvré à développer chez les jeunes de la région l'esprit d'entreprendre; entreprendre le retour à l'école, entreprendre des travaux volontaires dans leur communauté, entreprendre des stages en milieu de travail et entreprendre aussi le démarrage d'entreprises. Les commentaires recueillis auprès des différents ministères qui proposent des mesures de maintien et de développement de l'employabilité nous révèlent que la région a été et est encore parmi celles qui ont beaucoup utilisé ces mesures. Cependant, nous remarquons présentement que les jeunes qui ont bénéficié de l'amalgame des programmes d'employabilité recommencent le cycle une fois, deux fois et peut-être plus parce qu'ils ne se sont pas trouvé d'emplois permanents ou saisonniers permanents, si vous voulez, dans notre région.

Nous croyons qu'il est essentiel de développer l'employabilité d'une personne dans le contexte actuel du marché du travail et de ses liens avec le système économique de plus en plus mondialisé. De plus, notre taux élevé de chômage n'est pas seulement l'effet de nos problèmes économiques. Il en devient aussi une des causes majeures, et le développement de l'employabilité est un des moyens d'essayer de le contrer.

L'opinion traditionnelle voulant que l'éducation et la formation aient une incidence directe sur l'emploi et le chômage est mise en doute par plusieurs organismes dont l'Organisation de coopération et de développement économique.

En d'autres termes, la formation n'est pas une panacée pour les maux dont souffre l'économie. Elle favorise ceux qui la possèdent, mais elle ne crée pas d'emplois.

Dans le document d'orientation, nous pouvons lire que le succès du programme APTE sera en grande partie tributaire de l'évolution générale de l'activité économique et de la création d'emplois permanents. La désintégration démographique et le sous-développement social et économique qui en résultent nous laissent très perplexes. Et notre expérience des cinq dernières années avec les programmes d'employabilité n'est pas très encourageante non plus au chapitre de l'emploi. Bien sûr, le gouvernement est l'un des principaux responsables du chômage car ses politiques, si bien intentionnées qu'elles soient, n'atteignent pas leur objectif.

Les experts ne s'entendent pas sur les coûts sociaux du chômage. Toutefois, ces coûts sociaux existent réellement; ils sont probablement considérables, entraînent des souffrances humaines et ont un effet destructeur sur la civilité dans notre société.

D'instinct, on reconnaît que le chômage favorise des tensions, des maladies physiques et mentales, l'alcoolisme et la toxicomanie, le suicide, la criminalité et des problèmes familiaux.

Parmi les coûts économiques du chômage, et ils sont élevés, il faut citer la perte de production, de salaires, de biens et de services, de recettes gouvernementales et des prestations qu'il faut verser. De plus, les enfants des sans-emploi abandonnent plus souvent l'école, s'en absentent en raison de mauvaise conduite ou de maladie et ont plus souvent des difficultés à lire, à calculer et à communiquer. Nous sous-estimons peut-être ces coûts parce qu'un pourcentage de plus en

plus élevé de la population ne travaille pas.

L'emploi a donc une valeur fondamentale pour l'individu. Les gouvernements doivent en être convaincus. Dans l'Est du Québec, la population croit qu'il est possible et viable économiquement d'y demeurer si tous les acteurs socio-économiques, plus particulièrement les gouvernements, décident de faire un pas en avant, parce qu'il est impossible de prévoir les emplois créés par le marché libre, il faut former pour l'adaptabilité surtout. La formation doit développer des notions de base et des aptitudes clés, telle la capacité de travailler en équipe, de prendre des décisions, de s'adapter aux circonstances nouvelles et de faire preuve de créativité. Elle doit permettre à l'individu d'acquérir des connaissances de base: lire, écrire, compter et fonctionner efficacement; elle devrait aider l'individu et apprendre, et ce n'est que dans le milieu du travail que l'on peut y parvenir avec succès.

La situation du chômage est en train d'isoler une partie de la population active. Il est préférable de donner aux chômeurs l'occasion d'occuper des postes temporaires leur permettant d'acquérir une formation que de les tenir à l'écart du marché du travail. Il est donc facile de se rendre compte qu'il serait plus judicieux d'investir dans la création d'emplois à court terme que de verser des prestations de bien-être social à long terme.

Alors, on a appelé cela, nous autres, un nouveau PACTE, programme d'assistance concertée pour le travail et l'emploi.

Il faut éviter que la création d'emplois ne soit perçue que comme une palliatif sans utilité économique. Les programmes destinés à éponger le chômage, qui ne débouchent sur aucun produit ou service utile et ne développent pas non plus de compétences utiles, sont dégradants pour les participants et coûteux pour les contribuables. Tous les partenaires socio-économiques doivent se mettre d'accord pour agir ensemble afin de rentabiliser toute intervention pour la création d'emplois.

Lorsqu'on essaie de changer ou de faire évoluer le système, il faut monter d'abord des modèles à petite échelle qui fonctionnent. La seule façon d'avoir l'assurance que les multiplicateurs d'emplois fonctionnent est d'adopter une approche locale. Seule la région peut savoir où sont ses forces, ses ressources. Le nouveau PACTE compléterait la boucle d'une politique de sécurité du revenu en faisant un pas en avant vers une réponse collective au chômage. Ce programme s'emploierait à encourager la formation par la création d'emplois. Les sans-emploi seraient formés et payés pour produire les biens et les services dont la collectivité a besoin.

Les emplois créés dans le programme PACTE seraient, dans un premier temps, des travaux d'utilité collective. Ils représenteraient une formule pour l'insertion et la préparation à la vie professionnelle. Ils permettraient d'effec- tuer une activité répondant à des besoins collectifs locaux au sein des communautés territoriales comme les MRC, associations sans but lucratif, fondations et établissements publics; ces emplois seraient dans le domaine du service social a l'individu, de l'amélioration de l'environnement, sécurité civile ou routière, etc. Les emplois créés seraient financés par le gouvernement, sans nécessairement être gérés par lui.

Le Président (M. Thuringer): Excusez moi, en conclusion, s'il vous plaît.

M. Côté (Pierre): D'accord.

Le Président (M. Thuringer): un peu.

M. Côté (Pierre): D'accord.

Le Président (M. Thuringer): Continuez, s'il vous plaît.

M. Côté (Pierre): Alors, on pourrait parler de la contribution alimentaire parentale. Pour nous, la contribution alimentaire parentale qui devrait dorénavant influencer l'admissibilité et, le cas échéant, le montant de l'aide versée aux personnes seules considérées comme dépendantes, en majorité des jeunes de 18 à 30 ans, nous apparaît comme une mesure à haut risque social. À notre avis, combien de jeunes seront chassés ou se retrouveront dans l'obligation de quitter le milieu familial, contrairement à ce qu'on peut penser, et ainsi venir augmenter le nombre des sans-abri des grands centres ou provoquer une progression des problèmes socio-sanitaires des capitales sous-régionales? Pour nous, cette mesure est inadmissible.

Nous décelons, dans la présentation du programme APTE, une certaine ouverture d'esprit aux disparités régionales et à la conversion des prestations en subvention salariale. Serait-il possible de mettre sur pied un programme spécifique qui aurait comme objectif l'adhésion et l'association des milieux régionaux et locaux à la réinsertion des bénéficiaires par la création d'emplois collectifs qui permettraient aux bénéficiaires d'obtenir enfin le statut de travailleur?

Au cours des prochaines années, la démographie devrait être favorable à la création d'emplois, mais nous croyons que d'attendre les bras croisés que viennent ces années de vaches grasses, c'est prendre le risque d'une dégradation grave et peut-être irréversible d'une partie de nos ressourcess humaines.

En conclusion, nous retiendrons les commentaires de M. Weldon, du département d'économie de l'Université McGill et de M. Bruce Wilkinson, de l'Université d'Alberta, dans "II n'y a que le travail qui vaille". Le plein emploi est le fondement logique de toute politique. Sa réalisation est fonction de la volonté politique des gouvernements. Les chômeurs constituent des ressources inutilisées. Le maintien à l'emploi

d'une population contribue à la croissance, à la réussite et à l'épanouissement de l'économie. Une société qui applique un plein emploi est libérée et libre, et elle peut efficacement surmonter les obstacles, tel les tensions régionales. Pour appliquer une politique de plein emploi, le gouvernement doit être prêt à intervenir socialement pour créer des emplois là où sont les ressources humaines. En ce qui concerne les programmes de bien-être social, des études semblent démontrer que les hausses de prestations ont pour effet d'accroître la dépendance envers le système. Pour les mêmes sommes, il est possible de concevoir un système du genre "work for welfare", qui aurait des résultats beaucoup plus positifs et beaucoup plus productifs. Il faut offrir des stimulants pour rompre le cycle de la dépendance envers le système actuel, ce qui pourrait, en même temps, régler des problèmes comme les soins aux personnes âgées, l'environnement, la sécurité civile et routière, l'aménagement forestier, la protection de la faune et bien d'autres. L'utilisation du bien-être social pour encourager les gens à accomplir dans la dignité des tâches nécessaires, faciliterait le règlement des problèmes sociaux et économiques. Ce pas en avant favoriserait la diminution des attentes et la conception de nouvelles approches au règlement de nos problèmes d'emploi. (11 h 45)

Nous vous remercions de votre attention et espérons avoir l'occasion de discuter plus à fond avec vous du contenu de ce mémoire.

Le Président (M. Thuringer): Merci. M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'aimerais remercier, dans un premier temps, Action-Travail région de Matane inc., pour son mémoire écrit et pour sa présentation verbale.

Peut-être avant de débuter, Mme la députée de Maisonneuve, tout simplement pour vérifier le consentement, est-ce que Mme la députée de Matane aurait quelques questions à adresser? Si on peut régler cette petite question de procédure avant que j'enclenche le débat.

Ce n'est pas le premier groupe de la grande région Gaspésie-Bas-Saint-Laurent qui se présente devant cette commission. Le fait que la situation sur le plan économique qui est vécu dans cette région du Québec se différencie négativement des autres régions du Québec n'est sans doute pas étranger au fait que plusieurs groupes viennent devant la commission. Cela rejoint également l'argument que vous mettez de l'avant que cette situation occasionne un resserrement des liens des intervenants dans votre région. Les dernières statistiques dont je dispose comme ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu et qui datent de mars 1987 indiquent que vous avez un taux de dépendance - cela inclut l'ensemble de la population face à l'aide sociale dans votre région - de 16,1 %, alors que sur l'ensemble du Québec, c'est un taux qui se situe davantage autour de 10 %. Il y a donc un écart considérable avec les autres régions du Québec. Nous sommes, à cet égard, encore plus attentifs et intéressés aux propositions que vous mettez de l'avant. Une des propositions concrètes dont vous traitez dans votre mémoire et que vous avez reprise verbalement devant cette commission est la mise sur pied du programme PACTE. Vous connaissez les programmes de travaux communautaires qui ne s'adressent qu'aux moins de 30 ans. La première différence que je peux constater ou analyser entre ce que vous proposez et les travaux communautaires est à l'effet que la prestation, au lieu d'aller directement aux bénéficiaires, irait davantage à des groupes. J'aimerais vous entendre sur l'approche qu'on devrait avoir dans votre région: moins de formation, plus d'action directe.

M. Gagné (Romain): Pour résumer le programme PACTE, présentement un bénéficiaire d'aide sociale qui est apte au travail ne devrait pas l'être. Il ne répond pas vraiment au régime d'aide sociale parce qu'il est apte au travail. Voici ce que nous disons tout simplement en résumé, on voulait éliminer l'étiquette du jeune bénéficiaire de l'aide sociale, car c'est néfaste pour son avenir. Même si on monte ses prestations à 1000 $, quand on va lui demander: Qu'est-ce que tu fais dans la vie? il dira: Je suis sur un programme d'aide sociale, il aura une étiquette collée. C'est très local et très identifié. Ce qu'on veut, c'est enlever l'étiquette aux jeunes, aux individus qui sont aptes au travail. En région, de plus en plus, on vit beaucoup des esprits de clocher. Ces esprits de clocher ne sont quelquefois que deux individus. J'ai travaillé cinq ans avec des jeunes sans emploi, je hais le mot "jeunes assistés sociaux", parce que ce ne sont pas des assistés sociaux. En réalité, il y a un manque d'emploi. On dit que le problème n'est pas seulement de santé, c'est un problème de société. Il y a un manque d'emploi. Il y a 300 000 assistés sociaux, entre guillemets, qui ne sont pas vraiment des assistés sociaux. Donc, le problème est beaucoup plus un problème de société.

On propose, par le programme PACTE, une dignité aux jeunes. On veut une dignité, c'est-à-dire qu'on veut à peu près les mêmes montants. Quelqu'un disait tout à l'heure: C'est vrai qu'ils ne sont pas toujours productifs à 100 %. Peu importe qu'on sorte de l'université ou du collège, ce n'est pas vrai qu'on est 100 % productif au premier emploi. Je pourrais vous parler plus longtemps là-dessus.

Ce n'est pas vrai qu'il manque de travail en région. Il y a beaucoup d'emplois à créer. Il est vrai que cela coûte cher. Même s'ils sont productifs à 50 %, 60 % ou 75 %, moins de 50 %, je n'y crois pas, à ce moment, ils deviennent inaptes. Donc on ne dira pas qu'ils sont aptes.

Les travaux qu'ils exécuteraient pourraient produire 50 %, 60 % ou 75 % de leur revenu, le reste serait comblé par les programmes qu'on dit d'aide sociale. L'individu deviendrait un payeur de taxes et quelqu'un qui pourrait marcher la tête droite. Il pourrait dire: Oui, je travaille. Il pourrait acquérir de l'expérience. Il ne l'a pas toujours aux études. Tout le monde ne fera pas des baccalauréats, même en ville. Tout le monde n'a pas la même capacité. Il y a beaucoup de manoeuvres. On est d'accord avec une bonne formation. Cela ne se fait pas toujours sur les bancs d'écoles. Formation alternance travail fait partie du PACTE.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je saisis bien l'approche que vous suggérez. La question suivante, qui découle naturellement: Qui serait l'employeur? Les groupes communautaires, le gouvernement par ses différentes agences ou sociétés d'État? Il y a un manque d'emplois créés par l'entreprise privée dans vos régions.

M. Gagné: L'entreprise privée... Tout à l'heure vous donniez le chiffre de 16 %. Ils étaient plus nombreux. Ce n'est pas parce qu'il s'est créé plus d'emplois, c'est parce qu'ils sont venus en autobus dans les grands centres. Il faut le dire. J'ai vécu souvent avec 25 %, 30 %. À un moment donné, on se tanne, on fait un bout, on revient, etc. Le chiffre de 16 % est beaucoup dramatique, si on veut être réaliste. Je vis là depuis un bout de temps.

C'est sûr que les organismes seraient à but non lucratif. Il ne faut pas entrer en compétition avec l'entreprise privée. Pour vous dire que je participe à l'entreprise privée, il y a aussi un apport intéressant. Quand cela fait quatre ans qu'un jeune n'a pas travaillé, qu'il arrive à votre entreprise qui est privée, tout de suite on lui dit: II te manque de l'expérience. Il a changé de cycle. Pourquoi se lever comme nous à 4 heures du matin ou a 7 ou 8 heures quand il n'a pas de but précis dans la journée? On en a vu sortir des bars à 16 heures à la fin de la journée. On connaît ceux qui sortent à cette heure-là, c'est parce qu'ils n'ont pas de but précis dans la journée, surtout un mardi soir. Donc, les organismes seraient beaucoup plus à but non lucratif pour ne pas être en compétition avec l'entreprise privée. C'est la réponse. Il faut qu'ils aient une responsabilité. Il ne faut pas que les gens embarquent dans ces organismes, dans ces programmes et y passent 50 ans de leur vie.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): La question additionnelle, dans quel domaine d'activité... Des gens de chez vous nous ont dit: On a deux richesses dans la région, la jeunesse et la forêt.

M. Gagné: II y a beaucoup d'autres choses.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est un organisme de cette région qui nous avait dit cela. Est-ce que vous voyez davantage de travail effectué sur le plan de santé et services sociaux: maintien à domicile? J'aimerais vous entendre un peu sur le plan de l'environnement, sur le plan de la forêt, sur le plan des particularité de votre région?

M. Gagné: D'accord, M. le ministre. Je vais répondre à cela en vous disant d'abord que tout à l'heure j'aimerais vous remettre à vous et à la représentante de l'Opposition un projet qu'on va déposer dans le cadre du sommet socio-économique du Bas-Saint-Laurent et qui donne des pistes à explorer. J'aimerais qu'on vous le donne pour que vous puissiez le regarder et qu'on puisse avoir des nouvelles. On vous donne un exemple, cela pourrait être dans le tourisme. Il y a beaucoup de choses à faire en tourisme dans la région de Matane. Cela pourrait être dans la forêt. On a fait faire une recherche par la Société d'exploitation des ressources des monts où plusieurs travaux forestiers pourraient être faits, dans la forêt publique et la forêt privée. On pourrait en venir à donner le statut d'ouvrier sylvicole à un certain nombre de jeunes qui demeurent dans les paroisses près de larrière-pays. Dans la protection de la faune également. Dans l'aménagement et la préservation de l'environnement, un groupe nous a fourni un plancher de travail. Sur le plan de développement municipal, la MRC de Matane nous a donné un ensemble de travaux qui pourraient être exécutés, surtout dans les milieux ruraux, pour permettre à ces petits villages de pouvoir se maintenir. L'amélioration du réseau routier, bien sûr. La santé et les services sociaux. Le CLSC de Matane, dont certains de ses représentants étaient ici hier, je crois, pour la fédération des CLSC, nous a préparé également un panier de travaux qui pourraient être faits par des personnes qui pourraient s'occuper des personnes âgées. On a un potentiel bassin d'emplois de ce domaine. Sur le plan du développement communautaire, on sait combien les organismes communautaires ont de la difficulté à maintenir un tant soit peu leur permanence, par manque de fonds. Avec un peu d'encadrement et de la formation adaptée, les organismes communautaires pourraient faire participer un certain nombre de personnes du milieu au maintien de leurs activités. C'est un exemple parmi d'autres.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous étiez préparée pour la réponse en vertu de la règle de l'alternance.

Le Président (M. Thuringer): Mme la députée de Maisonneuve, s'il vous plaît.

Mme Harel: Merci, M. le Président. Cela me fait vraiment plaisir de vous accueillir à la commission. C'est intéressant parce que, M. Côté et M. Gagné, M. Asselin du CLSC de Matane, qui était ici hier, nous a parlé des travaux d'utilité

collective en utilisant les mêmes termes que vous utilisez. Je pense que, dès la première semaine de la commission, ou la deuxième, le groupe de Kamouraska-Témiscouata est venu également. C'est lui qui avait parlé des deux richesses, la forêt et les jeunes. Il reste que, de votre région, on sent qu'il y a eu énormément de réflexion sur toute cette question, c'est-à-dire toutes celles qui concernent le développement et le sous-développement, comment se sortir de l'aide sociale en essayant de s'en sortir, non pas pour être plus dans la misère mais pour avoir un nouveau statut. Il y a deux aspects qui m'intéressent beaucoup dans ce que vous nous avez apporté. Le premier, c'est sur la question du statut de travailleur. Le second, c'est sur les conditions de succès d'une entreprise comme celle-là. Le premier sur l'insistance, tout au long de votre mémoire, sur l'importance d'un statut dans notre société. À la page 12 de votre mémoire, vous dites: Serait-il possible de mettre sur pied un programme spécifique qui aurait comme objectif l'adhésion et l'association des milieux régionaux et locaux à la réinsertion des bénéficiaires par la création d'emplois collectifs qui permettait aux bénéficiaires d'obtenir enfin le statut de travailleur? Tout au début du mémoire, vous insistez beaucoup sur le fait que dans notre société, c'est fondamental, cela fait partie de sa propre identité d'être humain dans une société comme la nôtre, d'avoir un statut qui soit présentable d'une certaine façon. Admettons qu'il y aurait un tel statut de travailleur, cela suppose que la personne ne soit plus contrôlée par son étiquette de bénéficiaire de l'aide sociale. Est-ce cela que je dois comprendre? Cela veut dire qu'on change carrément, totalement. Actuellement, si tu veux profiter de mesures de développement de l'employabilité, il faut que tu ailles t'inscrire au bureau du bien-être. Si tu n'es pas inscrit au bureau du bien-être, tu ne peux pas. Une femme qui reçoit sa pension alimentaire qui serait généreuse supposons et qui n'aurait pas d'aide sociale, elle ne peut pas avoir les mesures d'employabilité. Un jeune de moins de 30 ans dont les parents seraient trop fiers ou qui auraient les moyens de ne pas le mettre sur le bien-être il n'y aurait pas les mesures. Donc, présentement aussi absurde que cela puisse être, malgré les préjugés que l'on ait sur les personnes qui sont a l'aide sociale, la réalité c'est que si tu veux t'en sortir, il faut que tu sois sur le bien-être d'une certaine façon si tu veux t'en sortir et être soutenu et avoir des mesures d'accompagnement dans les SEMO et ailleurs, c'est bien plus facile. C'est une clientèle, non pas exclusivement mais principalement le statut de travailleur. Je vous pose la question. J'ai demandé à un messager d'aller me chercher les comptes publics. Je me rappelle avoir lu en 1982 les comptes publics du Québec. C'était assez aride. J'avais compris que lorsqu'on n'est plus dans des programmes à frais partagés entre Québec et Ottawa, comme l'est le programme d'aide sociale avec le RAPC (régime d'assistance publique du Canada) qui est payé moitié-moitié, quand on se trouve à utiliser de l'argent frais, par exemple pour créer le même argent que Québec met dans l'actuel chèque de bien-être, il y a un cinquante sous pour chaque dollar qui vient d'Ottawa. Là, le même dollar que Québec mettrait, il le mettrait tout seul et non seulement il le mettrait tout seul mais ce dollar pour créer un vrai travailleur avec un statut de travailleur, il y a une partie de l'argent qui s'en irait à Ottawa sous forme d'impôt fédéral sur ce salaire éventuellement ou, enfin, sous forme de toutes sortes d'autres cotisations. (12 heures)

Je n'ai pas les chiffres avec moi; j'espère les avoir avant la fin de notre échange. Mais c'était de l'ordre des vases communicants. Plus on en mettait, plus il en sortait. Je ne sais pas si vous avez eu l'occasion d'examiner cette question qui n'est pas innocente, qui est importante?

M. Côté (Pierre): Je pourrais vous donner quelques commentaires là-dessus, Mme la députée. Il est bien sûr qu'on fait confiance aux deux paliers de gouvernement dans une entreprise de la sorte et on pense que peut-être l'accord du lac Meech qui semble être l'accord du siècle pourrait permettre ce type d'entente fédérale-provinciale, par exemple, comme le préconisent les sénateurs du Comité sénatorial pour l'utilisation des sommes de l'assurance-chômage et de l'aide sociale par une entente fédérale-provinciale pour créer des emplois plutôt que de donner des allocations.

Alors, pour nous, c'est extrêmement important. Je pense que ce document, comme je disais, ce serait dommage qu'il reste sur les tablettes. Il y a eu une réflexion intéressante de faite là-dedans qui devrait être fouillée. Le ministre, de son côté, fait une certaine ouverture pour changer - en tout cas, on a compris cela un peu - les allocations d'aide sociale en prestations ou en subventions salariales.

On sent un certain nombre d'ouvertures. Nous aimerions regarder ça avec vous. C'est dans ce sens-là qu'on a déposé un projet au sommet économique, au colloque de zones de Matane. C'était un concept nouveau, mais je me dis que si on n'essaie rien ensemble, on n'arrivera à rien. Alors, c'est une proposition que l'on vous fait. Cela nous donne l'impression que les jeunes chez nous et également les personnes de plus de 30 ans, bien sûr, préféreraient avoir le statut de travailleur que d'avoir un statut continuel et ad vitam aeternam, parce qu'on ne voit pas d'aboutissement au bout des mesures d'employabilité pour un certain nombre d'individus. Il y en a pour un certain nombre mais, pour d'autres, il n'y a pas d'aboutissement et c'est comme les confiner ad vitam aeternam dans un statut de bénéficiaire d'aide sociale.

M. Gagné: C'est ceîâ. Comme je vous disais tout à l'heure, je ne crois pas qu'un jeune serait gêné d'envoyer un peu d'impôt au fédéral en ayant un statut de travailleur, en fin de compte. Cela ne le dérangerait pas du tout. Je comprends bien que, politiquement, le gouvernement met une piastre et qu'on n'en retire pas autant. Mais au point de vue des humains, je pense que cela vaut le coup. J'espère que le gouvernement fédéral va mettre un peu d'argent là-dedans.

Mme Harel: M. Gagné, c'est évident que c'est là la voie, d'une certaine façon, d'une société qui voudrait prendre vraiment en main ce problème, d'une société comme le Québec qui voudrait vraiment prendre en main ce qui est majeur. Là, de penser que tout cela... Je voulais simplement attirer votre attention sur le fait que c'est fondamental. Pour 0,50 $ que le Québec met actuellement, le gouvernement fédéral en met 0,50 $. Mais il en met 0,50 $ dans le cadre du régime d'assistance publique du Canada qui détermine que cela ne peut pas aller pour supplémenter des revenus de travail. Il va peut-être nous parler des négociations qu'il fait présentement. Cela va être intéressant mais, actuellement, concernant le programme APPORT, le ministre va avoir à nous dire si le gouvernement fédéral va mettre de l'argent dans APPORT, parce que cela supplémente un revenu de travail.

Est-ce qu'on pourrait récupérer... C'est cela, le fond de la question, parce que c'est un programme à frais partagés, le récupérer entièrement et en faire, selon nos besoins à nous qui ne sont pas ceux d'ailleurs... Parce que l'Ontario a un taux de chômage qui n'est même pas de 6 %. Alors, vous comprendrez qu'on n'a pas des situations pareilles. Mais je trouve intéressant de voir qu'il y a des solutions, des vraies.

Je retiens de ce que vous disiez que le programme APTE est inapte à faire face aux vrais problèmes. Par ailleurs, j'aimerais vous entendre sur les conditions de réalisation. Est-ce que vous pensez que ce vrai statut serait suffisamment valorisant, serait une motivation suffisante? Ce statut doit-H s'accompagner de l'équivalent du salaire minimum? Serait-il suffisamment motivant pour ne pas qu'on ait à avoir des attitudes punitives pour les gens qui choisiraient d'être au programme Soutien financier? J'aimerais vous entendre là-dessus.

M. Gagné: Ce serait un pas en avant, finalement. Il est sûr et certain qu'on l'aurait intitulé comme ceia. Si on adoptait ce projet, comment vous dirais-je donc? J'essaie de trouver des mots assez précis pour nous résumer. J'ai de la difficulté avec mes synthèses. Ah! J'ai de la difficulté avec cela. Reposez-moi votre question directement, je l'ai oubliée.

Mme Harel: Parfait. Pour vous, pour avoir un vrai statut de travailleur, est-ce qu'il faut avoir l'équivalent du salaire minimum?

M. Gagné: D'accord. Là-dessus, ce qu'on entend, quand vous dites qu'un jeune est apte au travail, il y a des lois qui disent qu'il y a un salaire minimum au Québec. On ne veut pas le limiter au salaire minimum. Je connais très bien la forêt et il n'y a personne chez nous qui va aller planter des arbres à 4,55 $ l'heure. Tout de suite, il en coûte 100 $ par semaine pour aller en forêt. Je parle des coûts fixes pour aller à 40 milles en forêt, etc. Il y a donc certains secteurs à respecter selon les conventions. Il ne faut pas non plus confronter les syndicats. On ne peut pas remplacer les emplois existants. Au contraire, on les convoite ces emplois. On ne commencera pas à aller se battre contre eux. C'est très important.

Le projet est tout simplement un projet en situation d'apprentissage où des jeunes vont être dans un milieu dynamique et seront fiers d'aller passer une entrevue pour avoir un emploi à la CIP, par exemple, à 16 $ l'heure. Mais un jeune bénéficiaire de l'aide sociale, qui a perdu sa dignité, va faire une demande d'emploi, mais il y a de la concurrence assez forte. Ce qu'on veut, c'est de lui donner un milieu dynamique pour qu'il soit digne d'être travailleur finalement, d'avoir un chèque et de payer des impôts.

L'autre jour, devant les journalistes, on parlait de la santé mentale et physique des jeunes bénéficiaires aptes au travail. Ils vont devenir inaptes, et j'en suis convaincu, si on les tient à la gorge parce qu'on les contrôle. En tout cas, ils font de la paranoïa. C'est sûr et certain, à un moment donné, ils font de la paranoïa. On disait tout à l'heure qu'il y a des situations où ils deviennent paranoïaques. C'est un peu la santé mentale qui est concernée.

Mme Harel: Oui. Je m'en voudrais, parce qu'il me reste si peu de temps, de ne pas terminer notre échange en vous posant une question sur le projet d'apprentissage. Celui-ci se conçoit bien pour les jeunes, en particulier, dont vous vous occupez depuis cinq ans à Action-Travail de Matane. Mais on sait maintenant que c'est beaucoup plus la catégorie d'âge des travailleurs de 35 ans et plus qui, à la suite de fermetures de postes, de licenciements ou autres, arrivent à l'aide sociale. Souvent, je pense à mes travailleurs dans l'est, qui ont plus de 45 ans et qui ont des métiers dont ils étaient fiers pour la plupart, soit au chantier naval de Vickers à Montréal, soit à la Canadian Steel ou ailleurs, mais quand vous parlez de projets d'apprentissage, ce sont des projets d'apprentissage qui se conçoivent, disons, pour des jeunes qui n'ont pas d'expérience ou qui n'ont pas eu l'occasion d'en avoir, mais comment les faire accepter à des personnes qui ont vécu leur vie d'adulte en étant fiers de leur métier? Quelles sont les propositions que vous avez à ce moment-là, pour cette catégorie d'âge?

M. Gagné: Permettez-moi de ne pas être compétent là-dedans. Je n'ai pas...

Mme Harel: Non, non, M. Gagné. Ce serait juste intéressant...

M. Gagné: Je n'ai pas travaillé avec cela. On ne réglera pas tous les problèmes de ce projet. C'est un projet pilote qu'on veut demander. Tu peux compléter, Pierre...

M. Côté (Pierre): D'abord, je pense que cela pourrait arriver dans des situations comme celles dont on parle où deux personnes dans la même famille gagneraient un revenu minimum qui pourrait leur permettre d'avoir une vie un peu normale. Il n'est pas exclu que la dame ne serait pas intéressée, par exemple, à aller travailler auprès d'une personne âgée de sa municipalité, que le monsieur fasse des travaux forestiers et ait droit à son chômage saisonnier ou quelque chose comme cela. On pense, bien sûr, que cela serait plus facilement accessible à des jeunes qui accepteraient d'être payés au salaire minimum pour un bout de temps afin de se donner une façon d'apprendre des choses afin d'être éventuellement plus en mesure de faire une offre de service pour un emploi plus rémunérateur. Il est bien certain aussi que pour les autres, des mesures fiscales bien adaptées, selon moi et comme l'ont mentionné certains groupes, pourraient permettre de combler le manque à gagner du salaire minimum par exemple.

Mme Harel: Je pense que je n'ai plus de temps, M. le Président.

Le Président (M. Thuringer): Non. Malheureusement, le temps est écoulé...

Mme Harel: Je le regrette parce que j'aurais vraiment eu plusieurs autres questions à vous poser. Mais, de toute façon, on va attendre la proposition que vous allez faire au sommet.

Le Président (M. Thuringer): Mme la députée de Matane.

Mme Hovington: Merci, M. le Président. Je sais qu'il ne me reste que deux minutes... Oui, le ministre a pris de mon temps, je dois dire. Je dois remercier les membres de la commission de me permettre d'intervenir.

Mme Harel: On va consentir à un supplément.

Mme Hovington: Merci. Permettez-moi d'abord de vous souhaiter la bienvenue à la commission, en tant que représentante du comté de Matane. Il me fait plaisir de voir que vous avez pris le temps de préparer un mémoire que je trouve extraordinaire et bien fait. C'est un mémoire que je trouve bien fait et une approche vraiment dynamique et le ministre me soufflait tout à l'heure: Mon Dieu! ils sont bons. Ils ont un mémoire bien fondé. Je vous dis cela confidentiellement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est trop tard.

Mme Hovington: II est vrai et je dois vous féliciter aussi le groupe Action-Travail de Matane pour le travail que vous effectuez dans la région de Matane justement vis-à-vis des jeunes. J'ai beaucoup de témoignages à mon bureau de comté. On sait que dans nos régions, il est très difficile pour un jeune de sortir de l'aide sociale. Cela, vous le soulignez très bien. Il y a un manque d'emplois flagrant. Les statistiques ne sont peut-être pas tout à fait adaptées à nos régions, parce que c'est beaucoup plus de 16 % que nous avons en chômage et a l'aide sociale. Je vous dirai, par contre, que nous avons plus de deux richesses dans nos régions: plus que les jeunes et la forêt. Nous avons un dynamisme parmi nos ressources humaines extraordinaires, nous avons de la qualité de nos cerveaux aussi que l'on retrouve au cégep de Matane, par exemple, où on a une qualité d'enseignement extraordinaire chez nos jeunes.

Mais nos jeunes se heurtent toujours, et vous le cernez très bien, à un problème. Souvent j'ai de la visite à mon bureau de comté où les jeunes me disent: On est étiqueté assisté social. C'est vrai que c'est un problème, parce qu'ils ne peuvent pas emprunter aux caisses et aux banques, parce qu'ils n'ont pas de crédit. Souvent, les parents sont aussi assistés sociaux, donc ils ne peuvent pas signer pour eux dans les institutions bancaires et institutionnelles parce qu'ils n'ont pas le crédit nécessaire ou la crédibilité nécessaire non plus. Alors c'est tout un enchaînement qui fait qu'un jeune ne s'en sort jamais, que ce soit pour lancer sa propre entreprise ou pour travailler ailleurs, on retrouve le cercle vicieux: il n'a pas d'expérience, donc il ne peut pas travailler, il ne peut pas travailler parce qu'il n'a pas d'expérience. C'est pour cela que je trouve que votre PACTE est extraordinaire dans le sens d'une préparation de cette main-d'oeuvre à l'intégration dans les différentes entreprises privées pour les années ultérieures.

Je dois vous dire aussi que nous avons cette richesse et ce dynamisme chez les jeunes. J'ai eu l'occasion de m'en rendre compte moi-même lors du colloque de zone de la MRC Denis-Riverin qui est la voisine de la MRC de Matane et je m'en rendrai sûrement compte lors du colloque de zone de la MRC de Matane qui aura lieu le 12 avril prochain. Il y a des projets présentés là par des jeunes qui sont extraordinaires, des projets qui font face à une nouvelle technologie, des projets qui font face à une spécialisation de la main-d'oeuvre et ce sont des jeunes de moins de 30 ans qui présentent ces

projets-là. Alors nous avons cette richesse en région.

Je voudrais en dehors de tout cela - je pense que mes deux minutes sont déjà écoulées - que vous me parliez encore de l'employa-bilité. À la page 6, vous dites: Que l'établissement de l'employabilrté ne soit plus sujet à l'arbitraire et à la discrimination. Cette discrimination, vous la sentez et vous la percevez où, quand, comment? J'aimerais que vous précisiez votre pensée.

M. Gagné: La discrimination, on n'a jamais assez de revenu, peu importe... Je pense que personne ne peut vivre décemment, même en participant à un programme de stage en milieu de travail, avec 400 $ par mois. Premièrement, quand tu travailles dans une région, si tu pars de Saint-Jean-de-Cherbourg, vous connaissez la région, ou Saint-Ad el me, H y a un coût tout de suite là qui est de 25 $, 30 $, 40 $ par semaine: Tu n'as pas mangé encore et tu ne t'es pas logé. Donc, dans notre région, le salaire minimum est de 4,55 $. C'est même ridicule en fin de compte, parce qu'on n'a pas de transport en commun. Donc, on dit qu'il y a un seuil de pauvreté qui existe, il a été établi à 9000 $ ou 10 000 $, je ne voudrais pas être... Et il n'y a pas longtemps, il gagnait à peu près 1800 $ par année. Le seuil de pauvreté, parce qu'on avait 167 $ par mois pour les jeunes assistés sociaux et on a accepté cela pendant longtemps et là on veut l'augmenter à environ 5000 $ ou 6000 $. On est encore à 30 % de l'objectif. C'est le seuil de pauvreté. Si le seuil de pauvreté est là pour le commun du citoyen, où est le seuil de l'autre? C'est ce qu'on dit quand on parle d'équité. Pour quelqu'un d'inapte au travail, le peuple québécois devrait en mettre encore un peu plus. C'est officiel. Mais pour ceux qui sont aptes au travail, ce n'est pas à l'aide sociale qu'on va parce que, comme je le disais tout à l'heure, on les rendra inaptes. C'est là-dessus qu'on statue. Excusez-moi si je répète souvent cela, mais j'ai peur de cela. J'ai 30 ans et, à un moment donné, je vais vivre encore 45 ans ou 50 ans, j'espère, et cette génération me suit. Il y en a beaucoup parmi eux - je ne voudrais pas tes qualifier - qui manquent de motivation. On retrouve beaucoup de toxicomanes à cause de cela. Comme je vous le disais tout à l'heure: Pourquoi se lever, pourquoi faire ça? L'objectif? Le but? Un jeune me disait: Mon but c'est de retirer ma retraite le plus vite possible à 65 ans. J'ai dit: Tu la retires déjà et tu as 20 ans. (12 h 15)

Mais c'est ce qu'il fait en fin de compte, si on tient compte du système. Donc, je trouve que c'est un problème social. Et ce n'est pas seulement au Québec; les États-Unis commencent à avoir des problèmes, et là on l'a vu longtemps, l'Europe aussi. On a vu des projets en Europe qu! ressemblent à notre projet, des plateaux de travail H y en a, ce n'est pas vrai qu'il n'y a pas d'emploi, je ne crois pas cela. Qu'il n'y ait pas de volonté politique de le faire, je vous comprends là-dessus, parce que cela coûte vraiment cher de contrôler tout cela par une législature. On l'a dit tout à l'heure qu'on n'était pas des hauts fonctionnaires, mais c'est très compliqué. Mais si vous avez une ouverture là-dessus, on apprécierait beaucoup.

Mme Hovington: Merci. Il est vrai.. Toutes ces mesures, dans le fond, feraient partie aussi des mesures d'une politique de développement régional, c'est-à-dire que chaque programme gouvernemental doit s'adapter aux besoins des régions et non pas les régions s'adapter à un programme gouvernemental. Je pense que cela rejoint aussi cet aspect-là du développement régional qui est très important.

Quand vous dites que le jeune qui part de Ste-Adèle pour venir travailler à Matane - je connais la route - c'est vrai que cela prend de l'argent...

Une voix: C'est même dangereux.

Mme Hovington: ...parce qu'il n'y a pas d'autobus, même s'il fait du pouce, il n'y a pas de voiture qui passe.

Une voix: C'est cela.

Mme Hovington: Alors il reste là.

Des voix: Ah! ah! ah!

Mme Hovington: Même le salaire minimum ne peut pas... Et c'est un argument qui coûte cher au gouvernement justement, les prestations de bien-être social dans notre regroupement de la papeterie régionale de Matane. Quand on avait présenté au premier ministre le fait qu'en 1983, ce qu'il en coûtait au fédéral et au provincial comme prestation d'aide sociale et de chômage, cela avait coûté en 1983, aux deux paliers de gouvernement, tout près de 400 000 000 $, 398 000 000 $ et des sous. Donc c'était le prix du projet de la papeterie de Matane, à ce moment-là, qui générait 300 emplois directs, donc qui était un projet-moteur, créateur d'emplois pour toutes les PME existantes autour. Ce qui réglerait le problème du sous-emploi et du chômage et du bien-être social pour une bonne partie, en tout cas, de la région de Matane.

M. Gagné: J'aimerais vous dire que le projet qu'on présente dans la MRC coûterait environ 5 000 000 $ par année et à peu près un projet pour cinq ans de 25 000 000 $. On peut juste dire que l'aide sociale dans la MRC de Matane - ce n'est pas grand, ce n'est pas régional beaucoup - juste la MRC de Matane, coûte environ 1 300 000 $ par mois. Cela veut dire que, dans six mois,...

Mme Hovington: C'est cela.

M. Gagné: ...on défraie le projet global. Donc c'est juste pour vous dire. Et il faut dire, dans notre projet aussi, que les jeunes vont produire une richesse, un produit. Cela veut dire que dans ce 5 000 000 $ là, il y a beaucoup d'argent aussi qui va être généré. Cela peut valoir 4 000 000 $. Donc le risque est de 1 000 000 $. Vous le donnez déjà dans un mois. C'est cela qu'on dit dans notre projet.

Mme Hovington: Et on récupère au moins notre jeunesse.

M. Gagné: Puis il y a une dignité. Puis le gars va être fier, en fin de compte, c'est cela...

Mme Hovington: Alors moi, je sais que mes deux minutes sont écoulées, M. le Président.

Je veux, encore une fois vous féliciter pour votre mémoire qui est bien fait, qui est dynamique, positif et vous pouvez vous assurer de mon suivi auprès du ministre pour vos demandes.

Le Président (M. Thuringer): Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: ...en terminant en vous disant que c'est un peu en vous écoutant que je pensais à cet adage qui disait: Ma mère ne travaille pas, elle a trop d'ouvrage. S'il n'y a pas assez de travail au sens traditionnel, comme on l'entendait, il y a quand même beaucoup d'ouvrage à faire dans notre société et il faut faire reconnaître cet ouvrage-là comme étant un vrai travail.

C'est trop court, certainement, parce qu'autant cela peut être souhaitable, autant, lorsqu'on examine comment le rendre réalisable, là on se rend compte des contraintes comme celles que vous énonciez tantôt concernant les... en fait, ce ne sont pas nécessairement des contraintes mais ce sont des règles du jeu, à établir avec les syndicats, avec le patronat, etc. Mais tout cela est certainement beaucoup plus positif que de penser garder les gens sur de l'occupationnel qui, de toute façon, va finir par être un échec et pour eux et pour la société.

Je vous remercie.

Le Président (M. Thuringer): Merci. M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): En pensant aux remerciements - et je veux vous laisser le mot de la fin - il y aussi un adage qui m'est passé par la tête: L'avenir appartient aux gens qui se lèvent tôt. En quittant Matane à 4 heures, ce matin, vous étiez des bâtisseurs de l'avenir de la région... Je vous remercie pour la qualité de votre témoignage oral et de votre mémoire écrit, un mémoire qui s'inspire du vécu d'une région sur le terrain.

Au nom de la commission, de ses membres et du gouvernement du Québec, pour une contribution très positive, merci.

Le Président (M. Thuringer): La commission des affaires sociales remercie le groupe Action-travail région de Matane.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'avais offert un dernier mot...

Mme Hovington: Je pense qu'il y ... M. le Président.

Le Président (M. Thuringer): Ah! Excusez. Madame, il y a consentement, oui? Merci.

M. Côté (Pierre): Nous voulons vous remettre une suite logique à notre mémoire, c'est une demande de financement pour l'élaboration d'une expérience pilote de travaux d'utilité collective dans la MRC de Matane et, bien sûr, c'est conditionnel, selon nous, à quelque chose, à une entente, peut-être fédérale-provinciale, qui pourrait permettre d'ajuster tout cela. Et on vous remet cela en guise de conclusion.

Le Président (M. Thuringer): Merci. Mme la députée de Matane.

Mme Hovington: Voilà. Moi, ma conclusion, elle était faite.

Le Président (M. Thuringer): Ah! Elle était faite. Bon.

Mme Hovington: C'est parce que vous arrivez, M. le Président.

Le Président (M. Bélanger): La commission des affaires sociales remercie donc le groupe Action-travail région de Matane et invite à la table des témoins le groupe Plate-forme des groupes populaires de la région de Châteauguay, groupe qui sera représenté par Mme Rolande Desjardins, Mme Marie Day, Mme Mireille Moran, M. Pierre Lagrenade et M. Carlos Borges.

Bonjour au groupe Plate-forme des groupes populaires de la région de Châteauguay. Je vais vous expliquer un peu nos règles de procédure. Vous avez un maximum ferme de 20 minutes pour présenter votre mémoire ou son résumé. Par la suite, il y aura échange avec les parlementaires. Je vous demanderais de bien vouloir vous identifier, au départ, puis identifier les représentants de votre groupe. Chaque fois que vous aurez à prendre la parole, veuillez donner votre nom auparavant, cela pour les fins de la transcription au Journal des débats.

Je vous prierais donc de présenter le parle-parole de votre équipe et de faire la présentation de votre mémoire. Merci.

Plate-forme des groupes populaires de la région de Châteauguay

Mme Desjardins (Rolande): Rolande Desjardins. Je suis travailleur communautaire dans Valleyfield.

Mme Poirier (Lise): Lise Poirier. Je suis le porte-parole aujourd'hui. Je représente la coalition des groupes populaires. Ce n'est pas de la région de Châteauguay, mais de la région du sud-ouest qui comprend Châteauguay, Valleyfield, Huntingdon et Beauharnois.

Le Président (M. Bélanger): Bien. Monsieur?

M. Borges (Carlos): M. Carlos Borges. Je travaille comme organisateur communautaire au CLSC de Châteauguay.

Le Président (M. Bélanger): Bien

Mme Day (Marie): Marie Day, personne ressource.

Le Président (M. Bélanger): Oui.

M. Lagrenade (Pierre): Pierre Lagrenade, du conseil central du sud-ouest, les syndicats nationaux du sud-ouest.

Le Président (M. Bélanger): Bien. J'invite votre porte-parole à nous présenter le mémoire.

Mme Desjardins: M. le ministre, mesdames et messieurs de la commission, nous vous remercions d'abord de nous avoir permis d'être entendus même si notre demande a été quelque peu tardive. Comme bien d'autres groupes, nous aussi, nous avons été un petit peu chambardés dans nos horaires étant donné que cela a changé à plusieurs reprises. Mais, on va passer là-dessus.

Comme madame le disait tout à l'heure, il y aurait un changement à faire en ce qui regarde la présentation. C'est la Plate-forme des groupes populaires de la région du sud-ouest du Québec.

En ce qui nous concerne, je voudrais d'abord vous dire que nous avons apprécié une partie de la présentation de la réforme puisqu'il y a quand même des choses très bonnes, surtout en ce qui concerne les personnes inaptes. Notre travail s'est plutôt porté sur le reste de cette réforme. Nous avons décidé de ne pas lire notre document ici. D'abord, il était très bref et nous savons que nous nous présentons après une centaine de groupes. Donc, vous en avez entendu de toutes les sortes et de toutes les couleurs. Nous avons choisi d'être assez brefs. Nous nous contenterons tout simplement de souligner ce qui nous tient à coeur en ce qui a trait aux principes, parce que je sais que vous êtes parfaitement bien organisés dans la fonction publique pour être capables de faire les projets qui sous-tendent les principes qui nous tiennent à coeur.

Comme principes pour une réforme juste et équitable, nous avons souligné d'abord le droit à un emploi dans des conditions décentes, le droit à un revenu minimum, quelle que soit la cause du besoin, la reconnaissance du droit à l'autonomie financière de chaque personne, particulièrement . pour les femmes et pour les jeunes, un régime basé sur des incitations positives au travail plutôt que des mesures coercitives, favoriser un soutien social adéquat aux familles avec enfants et, particulièrement aux femmes monoparentales, favoriser la solidarité sociale. Aux groupes signataires de cette proposition s'ajoutent cinq autres groupes puisque nous sommes dans une période très active et que les groupes viennent s'additionner. Je ne sais pas si vous aimeriez qu'on vous donne les cinq autres groupes, qu'on les mentionne. Il y aurait à ajouter l'Association coopérative d'économie familiale du Haut-Saint-Laurent, le Café des deux pains, de Valleyfield, le Centre d'actions bénévoles de Valleyfield, les étudiants de la Nouvelle École de Châteauguay et le Regroupement option verte, un regroupement environnemental de Châteauguay.

Afin de pouvoir donner un peu de poids aux principes que nous sous-tendons, nous avons pensé vous faire entendre des personnes directement impliquées dans les régions d'assistance sociale. Je laisserai la parole à Mme Lise Poirier.

Mme Poirier: J'ai trois cas ici que je veux présenter à M. le ministre. On me dit que la réforme sociale est supposée être très bonne pour tout le monde. J'ai trois cas typiques ici et j'aimerais avoir des réponses à ces cas. Ce sont trois cas que j'ai pris au hasard dans toute la région. Cela se répète à des milliers d'exemplaires, non pas seulement en région du sud-ouest mais partout en province. Il y a le cas d'une femme battue. Une dame qui a 34 ans, qui a trois enfants: deux ans et demi, quatre et cinq ans et demi. Elle demeure en banlieue depuis six mois. Son mari est alcoolique et en chômage. Elle a été sortie de chez elle tout récemment par les policiers qui ont été avertis par les voisins. On va voir ses antécédents. Son père est incestueux. Sa mère l'a battue. Son mari la bat aujourd'hui. Elle s'adonne quelque peu à la boisson pour essayer d'oublier ses problèmes. Elle n'a aucun soutien de la part d'amis ou de parents. Selon le portrait qui a été fait de cette personne qui est venue à notre local, elle a terminé son école secondaire et ensuite elle s'est mariée. Elle a eu ses enfants. Elle n'a jamais travaillé à l'extérieur. Pour le moment, elle est démolie psychologiquement. On la comprend. Elle n'a aucune source de revenu. C'est difficile de s'orienter elle-même. Elle est très dépressive. Elle a besoin de calmants pour dormir. Elle a besoin de se reconnaître parce qu'elle a été démolie par son mari sans cesse. Elle n'est pas consciente de ses possibilités. Elle manque de confiance en elle. Elle est incapable de se prendre en main et elle

a besoin de thérapie qui, d'après les intervenants, devrait durer très longuement. Elle ne sait pas faire un budget. Elle a besoin d'aide pour éduquer ses trois enfants. Elle n'a aucun logement présentement et elle ne peut s'en offrir à cause d'un manque de soutien. Présentement, elle est en maison d'hébergement mais seulement pour quinze jours. Actuellement, elle reçoit 164,43 $ d'allocations familiales, disons 165 $ pour faire un chiffre rond. Elle pourrait faire une demande d'aide sociale, ce qui lui ferait à 686 $, un total avec ses allocations de 851 $. Supposons qu'elle se trouve un logement, ce devra être le plus rapidement possible, vu qu'elle est seulement quinze jours en maison d'hébergement. Un loyer dans la région, pour un 4 1/2 monte à 385 $. Son électricité et son chauffage en la mettant sur le plan budgétaire d'Hydro-Québec, 75 $, sa nourriture à 75 $ par semaine, pour quatre personnes, 300 $, son téléphone 15 $, son transport qui devra être utile à certains moments, 60 $, et les autres imprévus 70 $. Ce qui fait un total de 905 $. Elle aura donc un déficit de 24 $. (12 h 30)

Si elle retourne chez elle et qu'elle décide de ne pas porter plainte, elle devra continuer à subir les sévices de son mari. Nous nous sommes informés pour un médecin qui pourrait lui donner un certificat de non disponibilité ou de non aptitude et les médecins, maintenant, ont un peu peur de donner des certificats. Il y a eu une mauvaise publicité de ce côté-là et ils sont très réticents. Maintenant, si on passe à la réforme telle qu'elle sera en 1989, elle aura un minimum parce que là, dans le moment, elle ne serait pas apte et non admissible à cause de tous les chambardements de sa démolition psychologique et tout cela. 687 $, avec ses allocations, 165 $, ce qui fera 852 $. Elle pourrait avoir un maximum si elle est déclarée, même avec tout ce qu'elle a enduré, apte, disponible et admissible, de 822 $ avec ses allocations, qui sont toujours la même chose, 165 $, pour un total de 987 $. En enlevant son budget à 905 $, elle aurait un surplus de 82 $ pour s'habiller et habiller ses enfants, payer une garderie parce qu'elle est apte, disponible et admissible sur les plans, donc elle elle doit aller travailler. Apte, disponible et admissible, c'est toujours en vue de son portrait psychologique dans le moment. Une femme battue est diminuée terriblement; elle n'a pas de certificat médical parce que les médecins sont réticents. C'est un cas et aussi si elle devient bénéficiaire de l'aide sociale, avec la réforme, elle est pénalisée les neufs premiers mois. Ensuite de cela... Pour ce cas, je vais arrêter là.

Je demande à M. le ministre: est-ce que je vous lis les trois cas et vous allez commenter après ou si...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est normalement la façon de procéder. Moi, je n'ai pas d'objection à la modifier si c'est souhaitable que ce soit modifié.

Mme Poirier: Comme vous voulez.

Mon deuxième cas: un jeune sans emploi, sans emploi pour le moment. C'est un jeune qui a 23 ans aujourd'hui. À 16 ans, il quitte l'école secondaire, en secondaire IV. À 18 ans, après une chicane familiale, il sort de la maison et fait une demande d'aide sociale. À 20 ans, il retourne à l'école, donc du bien-être et un supplément. À 21 ans, à l'école cela n'a pas duré, cela n'a pas marché, il n'était pas plus studieux à ce moment qu'il ne l'était avant, il retourne au bien-être social, à 170 $. Il reste en chambre à 25 $ par semaine, c'était le montant dans le temps. Les filles avaient les chambres les plus passables. À 22 ans, on le place en stage en milieu de travail pendant six mois. Son travail est d'apprendre à dépecer le poisson, le congeler, le fumer. Il fait cela pendant six mois. Mais, le stage en milieu de travail fini, il n'a aucune reconnaissance. Je serais curieuse de savoir si, aujourd'hui, il se présentait à un emploi annoncé dans le journal pour un poissonnier, travail qu'il a fait, s'il serait reconnu comme poissonnier. Dans le stage en milieu de travail, il apprend la méthode de a à z. Il n'est là que pour ça. C'est une autre chose à vérifier.

Le stage en milieu de travail fini, il retourne sur le bien-être à 176 $. Il trouve un enploi saisonnier pour les mois d'hiver qui dure quatre mois. Il n'a plus de bien-être parce qu'il est employé à la ville, gardien dans le parc pour la patinoire et la glissoire. Donc, il a droit à l'assurance-chômage au bout de quatre mois. Mais son assurance-chômage qui a été accumulée pour le stage en milieu de travail et les quatre mois où il a travaillé monte à 56 $ par mois, donc, pas assez et le supplément au bien-être social.

La nourriture - entendons-nous - ce n'est pas ce qu'on appelle bien se nourrir. Il se nourrit quand il peut, parce que c'est un monsieur qui fume en plus de cela. Alors, cela lui coûte cher pour cela. Il va au Café des deux pains - on en a parlé; c'est une oeuvre de la soupe, ni plus ni moins - pour souper de temps en temps ou il va chez ses parents. Il arrive un peu avant l'heure des repas, traîne sa sortie pour se faire inviter à souper jusqu'à temps que sa mère l'invite.

Dans le moment, il en a plus que par-dessus la tête de ce "jouage" et il pense retourner chez ses parents. Il a 23 ans. On ne peut pas dire que c'est un jeune qui ne veut pas travailler. Il a même eu sa job saisonnière; il espère l'avoir pour l'été prochain. Il a accepté le stage en milieu de travail. Ce n'est pas qu'il ne veut pas travailler. Il veut, mais, nous, dans la région du sud-ouest, surtout à Valleyfield, c'est une région d'usines. On en a une présentement en grève; on en a une qui est fermée depuis le coton qui a fermé l'été dernier.

Pour tous ceux qui sortent de l'école et qui

ont les diplômes ou tout ce qu'il faut pour trouver un job, il reste trois ou quatre compagnies qui les emploient. Alors, quand on a beaucoup de monde comme ça... À Valleyfield, 13 % de la population sont bénéficiaires d'aide sociale. C'est plus haut que la moyenne du Québec qui est à quelque 9 %.

Avec la réforme, il aurait la parité à 405 $. Il aurait également, s'il retourne à la maison, la contribution parentale qu'on enlèvera sur ses 405 $. On ne l'enlève pas...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vous répondrai tantôt. Excusez-moi, je répondrai.

Mme Poirier: Oui, excusez. C'est 915 $ qu'on enlèvera, parce qu'il habitera avec ses parents. Il aura, 190 $ en tout, un peu plus que ce qu'il a dans le moment. Son travail n'est pas reconnu. C'est un jeune homme qui essaie beaucoup, mais qui ne peut pas.

Mon troisième cas, c'est une femme d'âge mûr. Elle est dans la quarantaine avancée. Elle est divorcée depuis quinze ans. Elle a trois enfants qui ont 22, 24 et 25 ans. Elle a un cours commercial. Elle a travaillé quatre ans avant son mariage. Elle a été mariée et est restée à la maison pendant douze ans. Elle a fait du bénévolat dans tout ce qu'elle a pu trouver depuis. Elle a travaillé dans une école à la bibliothèque. Elle a donné des cours de crochet. Elle a travaillé comme secrétaire pour les scouts et guides, les groupes populaires. Elle a travaillé sur des projets provinciaux et fédéraux qui aidaient les bénéficiaires d'aide sociale.

Après les projets, elle est devenue prestataire d'assurance-chômage et depuis deux ans, elle ne travaille plus. Elle est bénéficiaire du bien-être social. Il y a une cause de maladie aussi. En ce moment, elle reçoit 497 $ par mois. Son budget comprend un logement de quatre pièces et demie à 300 $ par mois, l'électricité et le chauffage, 150 $ par mois, le téléphone, 30 $, soit un total de 480 $, sans compter sa nourriture. Il lui reste donc 17 $ par mois pour manger, s'habiller et sortir.

Récemment, elle a postulé un emploi qui était affiché dans le journal comme secrétaire pour Centraide. Elle s'est présentée à l'entrevue. Soixante-six personnes s'étaient présentées pour un poste. Avec la réforme, elle aura 405 $ les neuf premiers mois parce qu'elle subira une réduction. De plus, en ce moment, elle a un de ses enfants qui habite avec elle. Il y a donc un montant de 115 $ qui lui est enlevé pour cohabitation. Cette personne - je n'ai pas honte de le dire - c'est moi.

Le Président (M. Bélanger): Est-ce que vous pourriez conclure, s'il vous plaît?

Mme Poirier: C'est la fin de mon troisième cas. Je terminais. J'attends des réponses à ces trois cas et j'aimerais bien savoir comment on va se débrouiller avec ces cas.

Le Président (M. Bélanger): Bien. M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. Je tiens à remercier le groupe. Je vais tenter de procéder rapidement et obtenir, sur le plan des procédures, le consentement pour que Mme la députée de Châteauguay puisse intervenir si elle le souhaite. Cela réglé, je vais tenter d'être bref pour lui laisser un peu de temps.

Mme Desjardins a dit: On va tenir compte des principes parce que si on s'entend sur les principes, dit-elle, au gouvernement, vous disposez des fonctionnaires capables de trouver les méthodes pour appliquer les principes. Dans la mécanique, il y a des principes qui se recoupent un peu. C'est peut-être sans doute ce que Mme Poirier a tenté de faire avec les trois cas qu'elle nous a amenés et pour lesquels elle suscite de notre part des réponses.

Quand on touche à l'aide sociale, on touche à la fiscalité provinciale, fédérale ainsi qu'aux barèmes comme tels. Ce qui fait qu'il faut toujours se méfier des calculs. J'ai vu plusieurs personnes, même un groupe de CLSC, hier soir, qui avait fait un travail de calculs qui était impressionnant mais qui n'arrivait pas, sur le plan des chiffres, avec les chiffres que les fonctionnaires du ministère et le dispensaire diététique de Montréal avaient réussi à arrimer ensemble. Ce n'est pas parce que le groupe était de mauvaise foi, mais c'est parce que c'est complexe et compliqué. Je vous dirai que le ministre lui-même, et c'est sans doute le cas de Mme la députée de l'Opposition, doit se fier sur des experts lorsqu'on arrive aux chiffres.

Je vous dirai que le premier cas dont vous m'avez parlé, tel que proposé dans la réforme actuelle, et j'insiste pour dire que tous les groupes de femmes, entre autres, qui se sont présentés devant nous, ont insisté pour que la question de la présence d'enfants au foyer ne soit pas considérée seulement jusqu'à deux ans mais qu'elle soit augmentée, on n'a pas donné de réponse encore sauf que des journalistes ont cru dénoter une ouverture dans notre attitude.

Prenons le cas tel qu'il existe actuellement sans tenir pour acquis qu'il y aura des amendements possibles. On me dit que cette personne, dans le système actuel, pourrait recevoir, si on considère la question des impôts fonciers, des allocations familiales provinciale et fédérale, des crédits d'impôt pour enfant, du remboursement de taxes sur l'huile à chauffage, etc., enfin, tous les éléments de votre premier cas, dans le système actuel, font que la personne pourrait recevoir 1010 67 $ par mois, en tenant compte de tous les éléments, alors qu'avec ce que propose la réforme, la même personne recevrait 1181 67 $ par mois. Maintenant, sur le plan des chiffres, si vous voulez que je vous facilite une rencontre avec le fonctionnaire qui a fait le calcul, pen-

dant que vous nous livriez le cas, je pourrai vous organiser cela immédiatement, dès qu'on aura terminé nos échanges. (12 h 45)

Mme Harel: Afin qu'on puisse se comprendre, je crois qu'il serait préférable qu'on le fasse sur une base mensuelle, d'une part. D'autre part, il serait préférable aussi de prendre la même année. On ne peut pas comparer le système actuel en 1988 avec la proposition du ministre en 1989, sans indexer le système actuel pour 1989 sinon on compare des choux avec des carottes. Il faut donc tenir compte de l'indexation.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je peux ajouter l'indexation. Vous ajoutez 40 $.

Mme Harel: Oui. Je pense que c'est important sinon, on ne parle plus des mêmes affaires.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Si le taux d'inflation se maintient à 4 %, vous parlez de 40 $ sur 1000 $.

Mme Harel: Prenez tout simplement votre propre proposition, M. le ministre avec le système actuel indexé...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je m'excuse, mais je ne veux pas, M. le Président...

Mme Harel: D'accord. La dernière chose, M. le Président, c'est que je demanderais au ministre de toujours nous indiquer à quelle catégorie il fait référence, quand il fait référence à son programme, étant donné qu'il y a neuf catégories pour le programme APTE.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, je ne veux pas que ce soit compilé sur mon temps. Madame est venue ici pour demander des réponses pratiques à ces cas.

Mme Harel: Oui.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je lui indique que les informations qui me sont...

Mme Harel: II ne faut pas que ce soit tronqué.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...transmises par les fonctionnaires qui ont fait les calculs à partir des cas que vous avez soumis donnent les résultats suivants: 1010,67 $, mais Mme la députée de Maisonneuve a raison d'indiquer que cela n'est pas indexé. Si vous indexez de 4 %, vous ajoutez 40 %. Cela donnerait dans le système actuel, mais en 1989, 1040,67 $, ce que proposent les barèmes en tenant compte de tous les ajustements que j'ai mentionnés sur le plan de l'impôt foncier, des allocations familiales et des crédits d'impôt, soit 1181,67 $.

Mme Harel: Pour quelle catégorie?

Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Soutien financier.

Mme Harel: Ah! D'accord. Inapte.

Le Président (M. Bélanger): ...si vous le permettez, on va laisser M. le ministre terminer. Vous aurez tout le loisir de critiquer sa position ou de...

Mme Harel: Je ne critique pas, je veux juste la connaître.

Le Président (M. Bélanger): ...la connaître ou de l'apprécier par la suite. On va laisser M. le ministre aller avec sa...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Quant au deuxième cas, le cas du jeune, si je peux utiliser l'expression, que vous avez décrit, avec les informations que vous nous avez données, le jeune passerait du petit barème, si on peut utiliser l'expression, à cause de la notion de parité à un minimum de 420 $ qui est la catégorie de admissible à des mesures à ce moment-là, même s'il y avait chez lui partage du logement parce qu'il a acquis son indépendance, d'après l'historique que vous nous avez fait de son cas. Le partage du logement s'appliquerait présentement à un niveau de 85 $. J'espère qu'on ne me demandera pas de l'indexer en 1989. Si on l'indexait en 1989 ou en 1990, cela serait à peu près 115 $. Donc, il n'y a pas de changement à ce niveau. Pour lui, ce serait une obtention de la parité avec les gens qui sont plus âgés.

En ce qui concerne le troisième cas, vous aviez raison sur le plan des chiffres sauf qu'on n'applique pas dans le cas de la personne les neuf premiers mois, parce qu'elle est déjà à l'aide sociale. Donc, ce serait le barème d'après les neuf premiers mois. C'était là sur le plan de la mathématique, la réponse que je peux apporter rapidement aux cas que vous m'avez soumis.

Mais comme je vous l'indique, il y a plusieurs composantes. Il s'agit d'avoir tous les éléments au dossier pour rendre une réponse qui soit la plus honnête et la plus juste possible. Je ne prétends pas qu'il n'y a pas une possibilité d'erreur d'interprétation de notre part des faits que vous m'avez donnés. Je vous dis que, spontanément, à partir des éléments que vous nous avez donnés, ce sont les réponses que l'on peut apporter, mais je vous avoue également qu'il ne s'agit pas d'une question qui est simple lorsqu'on tient compte du barème de l'aide sociale, des allocations familiales et des crédits d'impôt pour présence d'enfants. Cela devient quelque chose qui demande un calcul qui est raffiné et sur lequel on a vu des groupes possédant une expertise certaine effectuer même certaines

erreurs de calcul.

On m'indique qu'il me reste trois minutes. Si je veux...

Une voix: Non, allez-y, M. le ministre. C'est important.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est la réponse que je voulais apporter aux trois cas que vous m'avez donnés. Je vous réitère l'offre, si vous avez d'autres détails, après la commission, on peut vérifier les chiffres avec les fonctionnaires.

Oui, madame?

Mme Poirier: Est-ce que cela veut dire que, d'après mon interprétation de votre livre, j'aurais mal compris?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): La notion des neuf premiers mois, entre autres, si on revient...

Mme Poirier: Oui.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...à celle-là. Je ne sais pas à quelle page elle est expliquée comme telle. Je peux la retrouver, mais la question que les bénéficiaires actuels ne perdent pas d'acquis et automatiquement, cela fait plus de neuf mois qu'ils sont à l'aide sociale s'ils le sont actuellement au moment où la réforme entre en vigueur, je pense qu'il y a une question d'interprétation. Ce n'est peut-être pas suffisamment clair dans le document vert. Je vous indique quelle est l'intention qui se cache derrière la rédaction si ceJa n'est pas suffisamment clair. Mais je peux tenter de la retrouver.

Mme Desjardins: Ce que j'ai compris, moi, c'est que cela s'adressait à de nouveaux bénéficiaires.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Exactement. Les neuf mois, oui.

Mme Desjardins: Bon. Je voudrais seulement prendre la parole quelques minutes. D'abord, je veux vous remercier de l'intervention que vous avez faite en ce qui concerne les deux ans, parce que cela faisait partie de nos préoccupations majeures. Étant donné la dénatalité d'abord, pour commencer, et ensuite le peu de garderies qu'on retrouve au Québec et les conditions dans les garderies, un enfant qui vient à peine d'atteindre deux ans, c'est très difficile pour la mère d'entrer dans un programme, parce que l'enfant n'est pas accepté en garderie quand il n'est pas propre et quantité d'autres choses. En plus de cela, dans les programmes d'études, quand cela fait deux jours que la personne a manqué, elle est coupée à l'aide sociale. Un enfant, même s'il a trois ans, peut être malade souvent et demander beaucoup plus d'absences que cela. Ce qui nous...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je veux seulement vous indiquer qu'il s'offre plusieurs avenues. Nous avons indiqué une ouverture. Nous n'avons pas déterminé - j'aimerais vous entendre là-dessus - le niveau de l'âge et le barème, si on le change, auquel devrait avoir droit cette personne qui est responsable d'enfant en bas âge. J'aimerais que vous nous donniez, de votre organisme, ce que vous en pensez sur le plan du niveau de l'âge, jusqu'à quel âge et quel devrait être le barème pour cette personne.

Mme Desjardins: Dans les endroits où il y a une prématernelle, nous disons que l'enfant sort d'âge à fréquenter la prématernelle ou la mater nelle dans le cas où il n'existe pas de prémater nelle. On pense que c'est raisonnable On n'ira pas jusqu'à six ans.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Maintenant, est-ce que vous considéreriez le barème, finalement il reste trois options, de non-disponible, le barème de participante ou le barème du programme Soutien financier?

Mme Desjardins: Admissible et participante

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Participante? Cela va.

Mme Desjardins: En ce qui concerne l'autre cas, c'est un cas qui se présente actuellement. Cette personne-là, ce qu'on avait de la difficulté à établir c'est que, selon les critères, elle devrait être apte parce qu'elle ne souffre pas de maladie mentale. Elle est en dépression, mais la dépression, actuellement, c'est quelque chose de temporaire. Donc, elle serait probablement inapte pour un très court temps. À ce niveau-là, on ne savait pas trop comment on se démêlerait avec l'imbroglio d'apte et inapte, disponible et non disponible, admissible et non admissible, participante et non participante. On trouve que c'est très compliqué pour essayer de faire quelque chose de raisonnable avec cela.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Les définitions sont floues. Vous avez raison de le mentionner. Elles sont floues, non pas de façon accidentelle, mais de façon exprès pour entendre des groupes, justement, sur ce que les groupes, à la suite de leurs expériences vécues sur le terrain, nous suggèrent comme définition dans le temps, la durée de l'inaptitude ou la durée pour une personne apte de non admissible, etc. C'est dans ce sens-là que, volontairement, le vocabulaire a été élargi pour ne pas que le gouvernement détermine unilatéralement, avant d'entendre les groupes, quelles sont ces définitions précises.

Mme Desjardins: C'est cela. J'imagine que

ce serait souple aussi. Il y aurait une possibilité de passage de l'un à l'autre, par exemple, après avoir été inapte de redevenir apte. Mais une des préoccupations majeures aussi, c'était dans le domaine du développement de l'emploi et du développement de l'emploi chez les jeunes parce que, actuellement, ils sont, comme tous les bénéficiaires de l'aide sociale, marqués au fer rouge. Une fois assisté social, toujours assisté social. Cela nous préoccupe énormément, au point où on se disait: est-ce que c'est prioritaire que le centre Travail-Québec soit accolé directement à l'aide sociale? Est-ce qu'il n'y a pas moyen, parce que j'ai bien compris ce que vous avez dit tout à l'heure à l'autre groupe, qu'il y avait une question de juridiction provinciale et de juridiction fédérale, mais il me semble qu'il devrait y avoir un moyen terme, parce qu'on a l'impression que quand les gens vont faire application au centre de main-d'oeuvre, c'est pour du bon travail. Quand tu vas au centre Travail-Québec, c'est pour du "cheap labour". Ce n'est pas...

Mme Poirier: Et à Valleyfield, les deux sont dans la même bâtisse et ont le même directeur. En plus...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Fédéral et provincial?

Mme Poirier: Non, non, non. Le centre de main-d'oeuvre, le centre Travail-Québec et l'aide sociale.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'accord. Parce que là, fédéral et provincial...

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Poirier: Pas à ce point-là!

Mme Desjardins: Pour ce qui est des programmes d'implication communautaire, on est bien d'accord. Simplement, moi je peux vous dire que j'en ai fait des demandes et que cela fait huit mois que j'attends une réponse, parce qu'il n'y a pas d'argent.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): À Valleyfield? Au bureau de Valleyfield.

Mme Desjardins: On passe par Longueuil, la Montérégie, le...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Le CRSSS? Mme Desjardins: Le CSS de la Montérégie.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Le CSS, d'accord.

Mme Desjardins: Puis, bon...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Est-ce que c'est au niveau...?

Mme Desjardins: J'espère qu'avec le nouveau budget, il va y avoir quelque chose de...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est intéressant ce que vous dites. Est-ce que c'est au niveau du CSS qu'on vous a dit qu'il n'y avait pas de disponibilité financière ou si c'est au niveau du centre Travail-Québec? Je sais que le résultat est le même, vous n'avez pas de travaux, mais...

Mme Desjardins: Non, c'est au niveau du CRSSS...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'accord, du CRSSS.

Mme Desjardins: L'ancien CRSSS.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'accord.

Mme Desjardins: Mais à Valleyfield, on nous a dit la même chose, évidemment.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Au centre Travail-Québec de Valleyfield, on vous a dit qu'il n'y avait plus de disponibilité financière pour des travaux communautaires?

Mme Desjardins: Oui.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Et on vous a dit cela quand?

Mme Desjardins: Ah! Cela peut faire sept à huit semaines.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Merci!

Le Président (M. Bélanger): Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Merci, M. le Président! Alors il me fait plaisir de vous accueillir, la Plate-forme des groupes populaires de la région du Sud-Ouest et de Châteauguay. Le ministre disait qu'il était disposé à entendre les suggestions qui lui sont faites sur les définitions des catégories. Et je pense, en lisant votre mémoire, que vous lui faites la suggestion de ne pas catégoriser à des fins de réduction des prestations de certains, je dois comprendre que c'est cela, finalement, la suggestion qui est incluse dans votre mémoire... Vous dites non à la discrimination entre apte et inapte au travail pour les fins de définir les besoins essentiels qui vont être moins couverts pour les uns et plus couverts pour les autres. Je ne me trompe pas, hein? ,

Je pense que c'est très important qu'on revienne avec vos trois exemples. Vous ne les avez pas apportés pour qu'on fasse de la prestidigitation avec,...

Une voix: Non, non.

Mme Harel: ...puis que, d'une main le rat blanc devienne un lapin. Alors on va reprendre peut-être le premier exemple de cette chef de famille avec tous les malheurs qui lui sont arrivés, du père au mari, et ses trois enfants.

Pour que le ministre... pour qu'on se comprenne bien, on ne va pas additionner les crédits d'impôt pour enfants, etc., ils vont être les mêmes.

Une voix: C'est cela.

Mme Harel: Alors cela fait juste cela, troubler un peu nos calculs, parce que, que ce soit dans le système actuel indexé 1989 ou que ce soit dans la réforme proposée, c'est finalement des montants - des crédits d'impôt pour enfant - qui seront ajoutés dans un cas comme dans l'autre.

Alors, pour les fins de bien se comprendre, on ne prendra pas des calculs savants que je sortirais de n'importe où, on va prendre le document présenté par le ministre, à la page 28, et on va regarder ce qu'une chef de famille monoparentale avec deux enfants reçoit avec le système actuel indexé en 1989: c'est 740 $. Si on lui ajoute le 165 $ d'allocation familiale - même si c'est pour 1988 - mais ajoutons-lui, pour les fins de notre comparaison... elle va recevoir, à ce moment-là, 740 $ plus 165 $, 905 $, en 1989, avec le système actuel.

Avec la réforme du ministre, la question est: Dans quelle catégorie va-t-elle se trouver?

Bon, là on peut penser qu'elle pourrait se trouver dans la catégorie des neuf premiers mois, parce qu'elle va quitter, puis elle n'a pas encore fait de demande. On peut penser qu'il y aura une exception pour les femmes qui sont victimes de violence conjugale, puis qu'elle se trouverait dans une autre catégorie, mais laquelle? La catégorie participant: non. Parce que, sans doute - Mme Desjardins, vous fartes bien de nous le rappeler - il y a tellement peu d'offres de participation qu'il y a encore des groupes qui sont en attente. Alors vous vous rendez compte - c'était simplement pour les moins de 30 ans - quand on va élargir à l'ensemble des ménages et des familles du Québec, cela va être des centaines de milliers qui vont être en file d'attente. Où vont-ils être en attente? Dans fa catégorie "admissible". Admissible, c'est la catégorie de la salle d'attente. Elle peut au mieux être considérée comme admissible à des mesures et là, c'est au mieux, parce que si l'agent considère qu'avec ses trois enfants, puis si elle lui raconte en étant dépressive qu'elle ne se porte pas bien, elle ne sera pas assez pour être considérée inapte mais pas suffisamment pour que l'agent la considère comme disponible. Elle pourrait fort bien se retrouver dans la catégorie non-disponible. Mais ce serait encore mieux la catégorie non-disponible. Et il est peu vraisemblable qu'elle s'y retrouve parce que ses enfants ont quel âge, là?

Mme Poirier: Deux ans et demi, quatre ans et cinq ans et demi.

Mme Harel: Deux ans et demi, quatre ans et cinq ans et demi. Alors cela va dépendre de ce que le ministre aura finalement de pressions qui viendront de l'opinion pubique, mais dans la catégorie où elle pourrait se retrouver, disons qu'elle puisse être dans la catégorie admissible, c'est 722 $ plus 165 $, c'est 887 $, parce que dès que l'enfant aura l'âge d'être à une prématernelle, s'il en existe une dans Châteauguay, donc dans deux ans à peine, en 1989 parce que c'est à 4 ans la prématernelle, elle ne sera plus capable de se faire considérer comme non disponible. Là c'est indépendamment de son état de nervosité, de non-confiance en elle ou de dépression, elle se retrouverait dans la catégorie admissible qui est 887 $. On aurait beau ajouter par la suite tous les autres crédits, quand on compare ce qui se compare, toutes choses étant égales aux allocations familiales et aux crédits, quand on compare les barèmes en 1989 du sytème actuel et celui dans lequel elle peut se retrouver avec la réforme en 1989, elle perd. Il faut se rendre compte qu'elle perd. On aurait beau faire n'importe quelle prestidigitation, elle perd.

En vous écoutant tantôt, j'ai compris une autre chose: On sait ce que les mots disent, mais c'est rien de mieux que de mettre sur des humains pour comprendre les effets que cela peut avoir. Le jeune dont vous parliez tantôt, finalement il a déjà participé à des mesures. Donc, H est vraisemblable que ces mesures les ayant déjà utilisées, il ne sort pas considéré comme admissible. Je regardais à nouveau la page 28 et je me disais: Une fois qu'ils seront allés faire un travail communautaire ou un stage à l'entreprise - c'est le cas de votre jeune - ou qu'ils auront tenté vainement de poursuivre les études, ils ne pourront plus être admissibles ni participants, puis ils n'auront pas refusé de participer, mais ils vont se retrouver où? Cela tombe où en fin de compte? Cela tombe à 405 $ par mois. Ces 405 $ par mois, finalement quand on pense à ce jeune, c'est 115 $ s'H partage son logement.

Votre exemple m'a donné à penser qu'H y a des familles qui vont dire aux jeunes qui seraient partis depuis un an et demi: Reste deux ans pour que quand tu reviendras à la maison, tu puisses avoir le plein montant. Si tu reviens avant deux ans, tu vas perdre, mon jeune. Imaginez-vous les effets pervers de politique de l'État comme celle-là? Lui, ce jeune, je ne sais pas si le fait d'avoir été en dehors du mHieu familial pour des raisons d'études, ce temps-là ne sera pas comptabilisé. C'est juste le fait d'avoir été deux ans continus en dehors de la famille pour des raisons autres que l'étude. S'il l'a été

pour l'étude, ce ne sera pas comptabilisé. Je ne sais pas combien de temps il l'a été avec l'échec qu'il a connu, mais imaginez-vous que cela ferait un an et six mois qu'il aurait été à l'extérieur de son foyer, qu'il serait dans la situation où vous êtes, les parents seraient prêts à le recevoir, mais les deux conviendraient que cela va les marquer pour longtemps parce qu'il va toujours avoir 100 $ de moins par mois pour les années qu'il va passer au foyer sans s'en aller, tout simplement parce qu'il n'aura pas complété ses six mois.

Évidemment, c'est majeur de se rendre compte et je pense que Mme Desjardins, vous êtes organisatrice communautaire, n'est-ce pas...

Mme Desjardins: Travailleur communautaire.

Mme Harel: Travailleur communautaire au CLSC?

Mme Desjardins: J'ai travaillé au CLSC de Sherbrooke. Actuellement je travaille pour un organisme à but non lucratif.

Mme Harel: Ah bon! Mais c'est quand même intéressant, malgré que ce soit inquiétant, de se rendre compte qu'il y a une sorte d'apparence trompeuse que toute la réforme repose sur une offre de participer à des mesures d'employabilité. La population a retenu que cela allait être du bon, sauf que ces mesures d'employabilité, jamais jusqu'à maintenant un groupe est venu devant la commission qui travaille avec les mesures d'employabilité, il y en a aucun qui ne nous a pas dit les difficultés à obtenir des fonds. Celui qui vous a précédés a raconté que le nombre de participants avait même baissé avec les restrictions de l'année dernière. On sait que les taux d'échec sont élevés. Il y a des lacunes que le ministre connaît et qu'on connaît. Jusqu'à maintenant, il y a des résultats mis sur la table des taux de participation qui sont vraiment très inquiétants et, à partir de là, d'un coup de baguette magique, le ministre va distinguer les aptes et les inaptes, en plus d'appauvrir les aptes, il va faire porter l'échec de programmes qu'il ne peut pas leur offrir. Cela commence à être inquiétant.

Le Président (M. Bélanger): Est-ce que j'ai le consentement des deux côtés pour qu'on continue les travaux? Consentement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Rétroactivement, il y a cinq minutes.

Mme Harel: Je ne sais pas, Mme Desjardins, si vous voulez réagir?

Mme Desjardins: Je réagirai juste à la fin.

Mme Harel: D'accord. M. le Président, en vertu de l'alternance, je passerais la parole à la députée de Châteauguay.

Le Président (M. Bélanger):Mme la députée de Châteauguay. M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'ai strictement une seule précision à apporter à Mme Poirier. Tantôt, sur les neuf premiers mois, je vous l'ai dit par coeur. Je cherchais cela dans le document, la précision sur les neuf premiers mois vous allez la retrouver à la page 45, au troisième paragraphe. C'est peut-être parce que c'est à la toute fin que, à un moment donné, cela peut empêcher sur le plan.

Mme Poirier: 45?

Le Président (M. Bélanger): Au troisième paragraphe.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): 45. C'est sous le chapitre "Mise en oeuvre de la politique de sécurité du revenu" le troisième paragraphe.

Mme Poirier: 45 dans notre livre. Cela arrête à la page 43.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): On me dit que ce n'est pas la même...Moi, j'ai la première édition.

Mme Poirier: Ah!

M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est le chapitre 7.5 "Mise en oeuvre de la politique de sécurité du revenu". "Caractéristiques du programme APTE. "La contribution alimentaire". "Déclaration mensuelle". 7.5 "Mise en oeuvre de la politique de sécurité du revenu". Là, vous avez l'application pendant la période de transition. Le quatrième petit point indique: "Durant cette transition, aucun bénéficiaire du régime actuel d'aide sociale, s'il demeure admissible, ne verra sa prestation réduite". Est-ce que vous l'avez trouve? D'accord, cela va. L'important, c'est de le trouver.

Le Président (M. Bélanger): C'est terminé, M. le ministre. Est-ce que Mme la députée de Maisonneuve veut remercier le groupe?

Mme Harel: Oui. Il y a un élément aussi, puisqu'on en est à vous faire des références, à la page 39, non attendez. Je ne sais plus laquelle des éditions. Je crois que c'est important, c'est sur la question des besoins spéciaux. On n'en a pas beaucoup parlé encore, mais en plus, Mme Poirier, c'est que les personnes qui sont déclarées aptes... je vais vous le lire pour ne pas confondre personne. Voilà: Le participant pourra conserver certains avantages du programme APTE, exemple, la carte-santé, pendant une période limitée si sa situation le justifie. On

parie du participant. Qu'en est-il du non-participant au programme APTE? Le participant, c'est si sa situation le justifie pour une période limitée que la carte-santé... On ne parle pas nécessairement des autres besoins spéciaux. Cela se chiffre aussi.

Alors, je veux vous remercier d'avoir contribué à nos travaux, autant par votre mémoire écrit, votre présence, que par votre participation avec les exemples que vous nous avez transmis et également par votre implication dans le milieu. Je pense que cela est extrêmement important que vous mainteniez, non pas seulement dans les groupes de personnes assistées sociales mais avec les forces dynamiques du milieu, un échange sur ce que doit être une véritable sécurité du revenu dans notre société. Je vous remercie.

Le Président (M. Bélanger): M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vais céder mon droit de parole à Mme la députée de Châteauguay pour vous remercier. Tout en profitant de l'occasion pour vous dire, merci pour les cas spéciaux parce que c'est souvent à partir de cas pratiques qu'on peut juger des effets d'une politique. Mme la députée de Châteauguay.

Le Président (M. Bélanger): On a le consentement pour permettre à Mme la députée de Châteauguay. Merci. Mme la députée.

Mme Cardinal: Merci, M. le ministre, merci, M. le Président. Tout d'abord, je dois remercier la commission d'avoir accepté de vous recevoir compte tenu des délais. Deuxièmement, je veux aussi vous remercier d'être présents parce que je sais très bien, pour avoir travaillé à peu près avec la plupart de vos organismes dans le passé, et je continue à le faire maintenant comme députée, qu'il est important de continuer votre travail comme vous le faites actuellement. J'aurai sûrement l'occasion d'en discuter plus profondément, puisque j'ai préféré laisser la majorité du temps à M. le ministre, afin que vous puissiez échanger des avis. Donc, si vous me le permettez, je continuerai nos échanges dans chacune de nos municipalités et vous êtes toujours les bienvenus pour continuer à le faire comme par le passé. Merci.

Le Président (M. Bélanger): Alors la commission des affaires sociales remercie la Plateforme des groupes populaires de la région sud-ouest du Québec - pas du Québec mais du sud-ouest, oui, de la province, dans un sens, c'est vrai, géographiquement, c'est vrai - pour son apport à la commission.

Les travaux sont suspendus jusqu'à 16 heures. Merci.

(Suspension de la séance à 13 h 11)

(Reprise à 16 h 23)

Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il vous plaît!

S'il vous plaît, je demanderais à chacun de bien vouloir prendre sa place afin que la commission des affaires sociales puisse procéder à une consultation générale et tenir ses auditions publiques afin d'étudier le document intitulé "Pour une politique de sécurité du revenu".

Parrainage civique de la banlieue ouest West Island Citizen Advocacy

J'invite à la table des témoins le Parrainage civique de la banlieue ouest, le West Island Citizen Advocacy, Mme Joanne Farley, directrice.

Vous connaissez nos règles de procédure. Vous avez 20 minutes, Mme Farley, pour présenter votre mémoire et il y a ensuite une période de discussion avec les parlementaires. Je vous prierais donc de procéder à la présentation de votre mémoire dans les 20 minutes qui vous sont allouées. Je vous remercie, madame. Je vous en prie, assoyez-vous.

Mme Farley (Joanne): Alright? Le Président (M. Bélanger): Yes.

Mme Farley: Okay. I am awfully pleased to be here this afternoon. I had an earlier appointment a week or so ago, but I was too ill to be able to come and I really...

Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît. Il serait préférable que vous soyez assise, on va vous entendre mieux dans le micro.

Mme Farley: Here?

Le Président (M. Bélanger): Yes. If you want to sit, it is better.

Mme Farley: Okay. Is that alright? Le Président (M. Bélanger): Sure.

Mme Farley: All right. Well, as I was saying, I had an appointment to come earlier but I could not come because I was ill. I am still not really better but I am here. I do not want to bore you all by reading through this document, it is not a very long one, but I hope you have all studied it. However, I was personally quite pleased with the Paper, not only as the director of an organization but also as a parent, a mother of a handicapped man 38 years of age, who is both intellectually handicapped and psychiatric, and on social welfare.

In our organization, which has been in place now for twelve years, our main work is to recrute volunteer advocates to work on a one-to-one basis with a person with a handicapping

condition. We have at this time about 300 advocates working on a one-to-one basis, 50 working in teams, 7 working in crisis intervention. I started this organization after having worked as a volunteer for, at the time, about 30 years, mostly with handicapped people and mostly with intellectually handicapped people because of my son. I started this organization because I knew that there was a lot of need for advocacy, people who could be trained to get through this absolutely incredibly insane bureaucracy we have and who could get help for people when they needed it, to be able to get to the right people and know how to do it. I think we have done a pretty good job with that.

We have also organized with Churches a residential program for psychiatric patients and around each one of the apartments that have been set up, we have a team of 12 advocates who support 3 patients in each one of the apartments. We have 5 now; we will have 7 by summer, and so we will be looking after, on a 24-hour basis, 21 psychiatric patients in housing. This, to our mind, has been a very successful project. It has been evaluated. It came out very positive and it is a very cost-effective program. We have one staff person who has done all the work around this project with myself.

We have developed a curriculum for the schools, from grade 1 through grade 11, by which we are trying to instill in students a more caring attitude towards society in general and the handicapped in particular. This program has been approved by the Ministry of Education as a local Moral Values curriculum and I fought tooth and nail to get it compulsory. However, I failed and it is really too bad that happened because if our children could have this kind of program in school from the time they start, I can tell you we would not need a whole lot of things that we have now because we would end up with a society caring about one another and loving one another, understanding one another. We would have a very different kind of society and we sure need a different kind of society, because this one we have is pretty bad news, I think.

I have worked hard on education, I have worked hard in industry, doing an education program in industry where we have a comprehensive presentation we make to companies, just to try to educate them to the problems of the handicapped on the job market. I have seen so many handicapped people get put into jobs that they should never been put into because: a) they cannot do them, b) they do not want to be there, and c) some person has been told by his or her boss: "Now, you get out there and get 18 handicapped people into a job this year or you will not have your job. " And this is no way to put handicapped people into jobs. It is a disaster and every time they fail, which they do often, they are more damaged than they were when they started and they are going to need social assistance longer than they did before.

You are not helping to get rid of giving people social assistance by a lot of the things that are happening today in your Ministry, Mr. Paradis. I am here to tell you, from my own personal experience, that I know a lot of stuff is not working. It is terrible.

I started an organization a few years ago which I have called Connexion III. Connexion III stands for the employer, the employee and the agency and the melding together of those three components to be able to place a person, if the person is job ready, into a job and follow him up properly. We want to make sure, first of all, that they get into the right job, that they are properly trained, that they are ready psychologically and skillwise to do a job and that they are able to stay in the job, that they have the supports they need.

One of the things we suggest when we do our program, our presentation to companies, is this: if, as a company, you are going to hire a handicapped person, then please have one of your other staff members be that person's advocate on the job. That advocate on the job can watch how that person is doing, what kind of help he needs, help integrate him into the company, have coffee with him, have lunch with him, just all the kinds of things anybody needs when one goes into a new job, but handicapped people need it a lot more, because they tend to become very isolated and consequently, depressed and oftentimes break down.

So, we have been doing citizen advocacy in industry for five years and now, I have switched that over to Connexion III. I put that into that organization because I want that to be a very important component of Connexion III.

It is getting boring, is it not?

The Financial Support System that is proposed in your Paper looked awfully good to me. I hope there are no catches in it. I think that... I have asked the question here on dental care, for instance. This is supposed to be something that is going to be free. Just explain to me how that is going to work, because you would not believe how many people I have tried to get dental care for. No dentist will take them, except my own dentist who takes one or two once in a while for free, because he knows the kind of work I am doing and he has offered to do that. But I am pushing very hard right now to get dental care into our local CLSC, specifically 'for people on social assistance, because none of them get their teeth fixed. They all have their teeth rotting in their head, because no dentist will touch them.

Anyway, on the private consultation there are some questions I would have. Maybe I had better ask them after.

I would like to talk a little bit about the needs of the families who have handicapped persons living at home. I am one of those families. My son has now been living with us for 38 years. He has a lot of big problems. He is

intellectually handicapped, he is psychiatric. We have not minded having our son at home, we have loved having him at home because we love him and he is our child and I have no problem with that, but I have a problem on his behalf that his social welfare is less than the guy next door. I think it is an injustice to my son and I would like to speak on his behalf right now and I would like to see that changed.

As a matter of fact, the families who are keeping handicapped people at home should be getting money instead of having it taken away from them. What in the hell are we doing? Why can I not have money given to me the same way a foster family gets money? Why should foster families be getting money and we get nothing? It is just upside down and stupid and crazy. You cannot believe what is happening. And I am here today. My husband drove me up. He is now retired. I have to hire somebody to come in and stay with Paul overnight and wait until we get back there tomorrow. I should not have to do that. That kind of service should be there for me. I have saved this Government thousands and thousands and thousands of dollars over the years. Incredible! Get your pencils out and put down some numbers and figure out what it is costing and who is paying for it.

Not only that, but when you have your handicapped person at home with you, with your family, they miss out on all kinds of services because they are not an intricate part of the system. So, you know, all of the things that are happening for all the other handicapped people who are living in institutions, in group homes or wherever, they get all the services. They get everything. My son who is now 38 has never ever even had a social worker, ever. He has never had one at all. I find that very hard to take. On his behalf, I think he has been done in by the system, both in services, monetarily and in every other way. But, he has been very fortunate that he has been very well loved. But he has not been loved by the Government, that is for sure.

I would like to speak also just a little bit about the kinds of changes I would like to see not only me, but for a lot of people who have to deal with your centres. There is very little understanding, caring and a lot of officialdom in your centres. I think that the staff people, for the most part, that I have had to deal with need to have some training. I have offered the manager of our local centre, I have even offered to come in and do it for him free. I said: I will come in and train these people to teach them something about handicapped people, so that they know how to deal with them and they are not afraid of them. They scare them half to death! For instance, I have asked the agent at our centre, because my son Is quite paranoid and really terrified of officialdom, of any kind of officialdom, and because I am out working - and my husband was working then - specifically:

Would you please not send anybody to my house unless I am there or my husband is there? Would you be good enough to call us? Let us know when you are going to come and we will be there. Never ever have they done it. They go in, terrify him to death. By the time I get home, he is freeked out. Now that is not necessary to have that happen. The last person who came could not speak one single word of English and he, obviously, cannot speak any French.

These are the things that have to change. You have got to have people in your centres who can deal with English-speaking people and give them the kind of care and needing services, not scaring them to death. These people are very, very vulnerable, sensitive people who are suffering and we are treating them like dirt. A tremendous amount of work needs to be done, training work with your staff, especially if you are going to put all this new work stuff you have in this paper. If you are going to implement that... I have no problem with that, I think it is terrific, but if you are going to do it, you have to take an awful lot of care in how you do it or it is not going to work. You are going to need a lot of people, a lot of staff.

On the Employment Incentive Program, I have talked a little bit about that and about the organization that I have started. I have never been able to get it funded. I have been running now for about four years on Federal job developing grants. I have applied to the Government of Québec for money for this organization and I have never even gotten as much as a response saying no. I have never gotten anything. I have never gotten an answer. I find that very rude and very bad news.

So, that is what I have got to say. I have some questions. I would be very happy to hear any questions that you might have. I also have a letter here that a man came and brought to my office yesterday, who has tried umpteen times to get somebody on the phone to talk about his son who is both intellectually handicapped and physically handicapped. And he has not been able to get anyone who could speak to him in English. I would like to deposit this letter.

Le Président (M. Bélanger): D'accord. M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): I am taking for granted that the letter has been officially presented.

Mme Farley: No, I have not officially presented it and here it is.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): But you wish to do so?

Mme Farley: Yes, I would like to do so.

Le Président (M. Bélanger): Okay. It is

accepted. Mr. Minister.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Yes. I would like to thank the West Island Citizen Advocacy Inc. represented by Mrs. Farley. It is not an easy memoir to tackle for a minister.

Mme Farley: I guess not.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): It is a memoir where you are telling us that you have done and that you are doing all you can. And it is a memoir where you are telling us the system has failed you.

Mme Farley: Not just me, not me. I am not on Social Welfare.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ha, ha, ha!

Mme Farley: Not yet.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ha, ha, ha!

Mme Farley: But I get the Old Age Pension. Ha, ha, ha!

M. Paradis (Brome-Missisquoi): But the people you talk on behalf of, the system has failed them.

Mme Farley: Yes.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): You have mentioned the case of your son and you have said - I noted it - "He has not been loved by the system. "

Mme Farley: No.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): I do not want you to set your expectations too high. I do not know if the system can ever love.

Mme Farley: It could if it wanted to and if it had the right kind of direction and philosophy.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Maybe the system can care and that would be a step in the right direction.

Mme Farley: Right.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): I am not saying that it is an impossible goal. I am just saying that, starting from where we start, it seems a very high step to achieve in one motion.

Mme Farley: I have been accused many times of being an idealist.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): You have to stay like that.

Mme Farley: And I have no problem with it because I feel very strongly about everything I have said and I could say a lot more.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): And if you stay like that, you might end up in politics.

Mme Farley: Too old.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Meanwhile, you have addressed some specific remarks to the system and I have not found out which office is supposed to service your people. Which centre Travail-Québec is it? I need that as basic information.

Mme Farley: Saint-Laurent.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Saint-Laurent?

Mme Farley: During the month of December, in our apartment program, at that time, we had twelve patients. Six of those twelve patients, in December, were notified that they would not receive their social assistance cheque. Six out of twelve.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): On what grounds? Do you have...

Mme Farley: They do not give you any grounds. When they send this notice around, they do not give you a reason.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): But did you follow it up and try to...

Mme Farley: Well, of course, we had to follow up on everyone of them. That takes a tremendous amount of our time. You should be paying us!

M. Paradis (Brome-Missisquoi): I am going to get to that later on, but was it re-established after you followed it up?

Mme Farley: Oh yes! Of course! There was nothing really wrong. It was just stupid mistakes.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Okay.

Mme Farley: And these people have to have this money to live. (16 h 45)

M. Paradis (Brome-Missisquoi): You have mentioned and used the expression "stupid and crazy" about the fact that people like you and in your situation, who keep one of their relatives at home, are being penalized.

Mme Farley: That is right.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Right now, it

is 85 $ a month that is being... Mme Farley: That is right.

M. Paradis (Brome-Missisquoi):... cut off on the cheque. I want to make it clear that that was brought to my attention as a minister by a lot of Members on both sides of the House and, sharing the same opinion as you, what we are proposing is that there are no cuts if you are eligible under the Financial Support Program. That will not exist if the reform comes into force. It will exist under the Employment Incentive Program for those who are able to work, but it will not exist for those who are eligible under the first program, the one we are talking about.

The second problem I would like to tackle with you is the lack of personal services. It affects the language issue and the approach. You have told us that we would need an army of well-trained or well-formed people to apply the reform. How would you react if we were to answer you that we do not intend to have an army of public servants to do so, but we intend to get the collectivity, groups like yours, involved in giving those services to people who need it?

Mme Farley: Well, I would be... I would drop dead, I guess. I do not want to do that today! I have got to go home.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Please, not in front of this Commission, I would be accused of something else. We believe that...

Mme Farley: I think that... I do not know, you see, I am not a person who is going to say to you: Every nonprofit organization that exists is good, because a lot of them are not any better than the Government. Okay. Some of them are, but... Well, go on, tell me more.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Well, I am just trying to tell you that from other groups - I think that you are the 104th group to come in front of us - it appears quite clearly that the system can function up to a point and, after that, if we do not get the complicity or the action of community groups, we will not reach the target we are aiming at. We are not going to get to the people we want to serve because there is a certain level of "méfiance" between the user of the system and the governmental machine or the Government as such, whatever. And we feel that if we can establish a link or if the community groups can serve as a link and can be put in between the person who needs the service and the Government, we can have a much more personalized approach and give more personal care, linguistically and humanely, call it as you wish, but we have a much better chance to help that person.

Mme Farley: Well, I think that it would be certainly worth a try.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Okay.

Mme Farley: I think... I would like to just speak, while we are on this, a little bit about who is going to decide whether or not a person is able to work. Now, this is the problem, as you probably well know. At this point, it seems to me, from all I can gather from dealing with a lot of handicapped people, one must have a letter from one's doctor stating: "I am not able to work". Personally, for the most part, I do not think doctors are the. people who should be deciding that.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Can you repeat that?

Mme Farley: I said that I do not think that, in all cases, doctors are the people to decide. So, you go and see this doctor, once every three months; you take a psychiatric patient. Okay. Now, my son - we will use him as an example - goes to see his psychiatrist. He is in there all of about three minutes. He gets whatever kind of dope they are going to pump into him. That is the last he ever sees of him for another three months, or maybe six months. My Paul was on some pretty heavy medication. I used to keep phoning this doctor up, saying: Paul is a zombie. I cannot get him out of bed. He is in bed all the time. You know, like he is getting too much medication. Okay, cut it down. We went through that three times, got the medication cut, cut, cut. The fourth time I phoned, I said: Well, he is a little bit better, but he Is still useless, you know? He said: Well, Mrs. Farley, if I give him any less, I will not give him any. I said: Well, then, let us give him none, you know, let us try it. He has been quite good without any for quite some time, you know.

Now how is that doctor ever going to be able to state whether or not my Paul is able to work or not. He only sees him for three minutes every three months. And when he sees him, you see all these people get themselves kind of up when they go to the doctor. You know, we all do that. We get done up and we look as good as we can and we put on a good front. I can tell you that I know patients whose doctors have written them letters saying they are able to work. They would not be able to walk from there to there, they are so doped up. You see? But they are all able to work, able to work, able to work. They really not have the knowledge of the person to make those decisions.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Who, in your opinion, should...

Mme Farley: I think each person may be... If a person is physically unable, that is one

thing. Intellectually handicapped people, you see, it is not only the doctors, but it is a lot of the professionals too, you see? They know everything, because they have read books. Doctor so-and-so said this in 1984 and that is like the Gospel. No matter what anybody says, if Mary can run from here to there five times, Mary can work. I mean, those are the kinds of silly things that go on. Professional people, you see...

I think, first of all, one of the key persons would be the family of the person. If the person is with the family, living with the family, then those are the people who know their child best in the whole world. There are two ways about that. As far as I am concerned, that is a given. I think that people who are working with the person on a regular basis... For instance, I would say that any of our handicapped people who have an advocate, a person who is matched with them, on a one-to-one basis, who is helping them get through all their problems, and so on and so forth, that person would have a good knowledge of the person. Maybe it should be done in concert with a few people working with that person, the way we do with curatorship, for instance. Because, you know, one of the things that I am insisting on having in this corporation Connexion III would be... In my opinion, the key person on the job is someone who would have the skills to be able to do psychological and skill testing so that, before we accept a person and try to find him a job, we know whether or not he is really ready to work. If they are not ready to work, then we would be able to, hopefully, put them, get them somewhere where they would be trained to work, if they are going to be able to ever work. But this putting people into jobs just to say they are working is unreal. It is so damaging for the people, the handicapped people, just incredibly damaging for them.

Le Président (M. Bélanger): Mr. MNA for

NDG.

M. Thuringer: Thank you, Mr. President. Again I would like to offer my congratulations to Joanne Farley for the work she does with her group in the community.

I think you have underlined a good many problems that have been cited during the past month or so in these hearings. The aspect of caring, however, is an, important one and I think there have been some criticisms of the current system. But one of the things that is coming out - I think that the Minister has pointed it out - is the utilizing of community groups. We had this morning a group "Auberge sous mon toit", who came here and they were working not necessarily with handicapped people but people on social assistance who had, for other reasons, difficulty in getting employment. And that same advocacy role that you are talking about with the handicapped was part of their essence. That is why they succeeded and I think that it is a very key factor. We could so easily, with our "agents économiques", designate people in this to go through a system whereby people are treated as numbers or general eligibility.

I guess the thing is, with a large system like this, how would you even begin to train such a number of outlets or a number of staff to bring that on? You dedicated your life to that.

Mme Farley: You just go into each centre and do it; I mean, what is so difficult about that?

M. Thuringer: Well.

Mme Farley: I have done that at a Canada Manpower Centre, and we have gone up before the people would start to work and given them courses. You can do anything if you want to badly enough.

And I would like to also say that our Connexion III, this organization is not only for handicapped people, it is also for disadvantaged people. It is also for older people who find themselves without jobs. Battered women. All the people who have a rough time getting into the job market.

M. Thuringer: So as I understand it, you made the offer to the Manpower Training but you would also be prepared to go larger if you were asked to do some of that. Is that right?

Mme Farley: Well, we would do everything that we could in the time we have, which is not very much. You know what, I mean.

You have to remember that we are six little people in this little crummy office that you can hardly move around in. We have no money and, as a matter of fact, I think that although I have been paid for the last twelve years, which is absolutely marvellous because I have never been paid before in my life, however, I think this year, if I do not find some money, I am going to have to stop paying myself. I am going to go back to being a volunteer, because we do not have enough money to pay me.

M. Thuringer: One other question, quickly: How much of the - we talked a little bit about the deposit of a letter, but you raised the issue of the language... How often does that come up, because it is a key element, I think, in the anglophone community? Just from your experience, how often is that an issue in terms of training or retraining?

Mme Farley: You mean of the personnel? M. Thuringer: The problem of language.

Mme Farley: Of the personnel. Well, I think that it comes up a lot, because we are of course in a very anglophone

part of the city. And so, we have a lot of people who are English-speaking, handicapped and disadvantaged people.

But you see, it is not only for the English-speaking people, be they handicapped or not. If they do not have French, they are all handicapped. I am handicapped, I feel I am terribly handicapped. (17 heures)

Because I think that if I was able to speak French, which I wish I could, and I did try, I could be doing an awful lot more for this Province than I am doing, because most of the time, I cannot get anybody even to listen to me, you see, because I do not speak French. So, in lots of ways, I think that this Province is losing a tremendous amount because of the language laws and because of the attitudes, they are losing an awful lot of expertise that is around in the English speaking community and that is very frustrating for us.

So, I do not know exactly what you are saying here and I do not know whether you are saying to go in... Are we willing to go into Manpower places, centres and train people? We can go in and train people. We have French-speaking people working for us. We served everybody. I would not turn down anybody and I have spoken with some of the people who had a SEMO and I always asked them directly: Do you serve English-speaking people? I never heard one of them say yes. We do not serve English-speaking people.

Le Président (M. Bélanger): Mr. Minister, if you want to thank Madam.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Yes. I was just taking a note from the final words of madam. You know, she said: a SEMO never served an English-speaking person.

Mme Farley: I did not, I said the ones I have spoken to. I have asked specifically.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): But service is not available, that is your message.

Mme Farley: Serving English speaking people for jobs.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Okay.

Mme Farley: However, we are working very closely with a paraplegic organization and I know they have one.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): I would like to thank the group and Mrs. Farley and come back, maybe, to the conclusion of your written presentation. You have said in the conclusion that you are pleased to have been able to present to the Commission some of your views on the Social Assistance Program for our Provin- ce. You state, and I quote: " We know that they will be received with the same spirit as they are presented. Our conclusions spring for many years of experience at the grass roots level, and we are hopeful that they will be given serious consideration".

As the Minister responsible for that Department, I want to thank you for giving us that experience and, as far as I am concerned and the Department is concerned, we will take very good note both of the positive aspect that you have mentioned verbally and in writing to us and the things that have to be corrected, if we want to know a system that is fairer to people who just were forgotten in the past by the system. I want to thank you for reminding us of that and on behalf of the Commission and of the Québec Government, many thanks for your positive cooperation.

Mme Farley: You are very welcome. I am open to help you in any way I can.

Le Président (M. Bélanger): Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Oui, M. le Président. You know, Mrs. Farley, it is often a handicap not to be able to speak English fluently and I would like to thank you for your brief. Is the West Island Advocacy a member of the mouvement du parrainage civique too?

Mme Farley: Oh yes! I started it. You mean the regroupement?

Mme Harel: Yes.

Mme Farley: Yes, sure, I started that group.

Mme Harel: Did you ever meet Sister Lise Vincent...

Mme Farley: No.

Mme Harel:... from the East Advocacy?

Mme Farley: Yes, I did. My daughter is on that. She works with me and she speaks French.

Mme Harel: Okay.

Mme Farley: So, I put up with that. I started that group and I sat through those meetings for I do not know how many years all day in French. I used to have to bring somebody with me who could interprete for me and, honest to God, I would be exhausted, you know, by the end of the day. So, when my daughter came to work with me, I immediately gave her that job. So, she is involved with the regroupement.

Mme Harel: Yes, I met her.

Mme Farley: Marie-Claire Tanguay.

Mme Harel: I would like to thank you for your brief.

Mme Farley: Thank you.

Le Président (M. Bélanger): Thank you, madam.

J'appelle à la table des témoins le groupe social' Norlac inc. représenté par M. Robert Bussières et Mme Suzanne Moreau. Je les invite à prendre place à la table des témoins.

Le Président (M. Joly): Je vous rappellerais les règles de procédure qui vous accordent 20 minutes pour livrer votre mémoire et après, cha-cun des membres ici présents, autant du côté ministériel que de l'Opposition, aura aussi un temps de 20 minutes pour vous poser des questions.

En fait, je vais nommer chacun des membres à cette commission pour le bénéfice de M. Bussières. Ici, M. le ministre, M. Pierre Paradis; M. Jean Leclerc, député de Taschereau; M. Latulippe, député de Chambly; Mme Harel, députée de Maisonneuve; ainsi que moi-même, Jean Joly, député de Fabre. Alors, vous avez les 20 minutes comme je vous le mentionnais tantôt.

S'il vous plait, allez.

M. Bussières (Robert): Est-ce que je suis assez proche? Vous m'entendez bien?

Le Président (M. Joly): Oui, très bien. Club social Norlac inc.

M. Bussières: Pour commencer, je vous remercie de vous être nommés. Je m'étais proposé de vous le demander. Je vous remercie d'avoir été au-devant. Vous avez sans doute lu notre court mémoire. Serait-ce important qu'on le relise?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, il veut savoir s'il faut qu'il relise le mémoire. Il choisit le mode de présentation.

Le Président (M. Joly): Non, vous n'êtes pas obligé de lire votre texte. Vous pouvez aller librement, tel que votre coeur le commande.

M. Bussières: Je suis le président du club Norlac de Dolbeau, club social pour personnes handicapées. Depuis dix ans, on oeuvre auprès de la clientèle handicapée en se débattant de toutes les façons inimaginables pour arriver à apporter un support quelconque et faire acquérir de l'autonomie à tous nos membres. À travers cela on vit beaucoup de difficultés financières, comme toutes les autres associations, mais depuis presque quatre ans, depuis 1983, on a eu recours au programme de travaux communautaires.

Comme notre mémoire vous le souligne, ces programmes pour des organismes comme le nôtre sont très importants, très valables aussi, mais il y a souvent des lacunes qui existent dans ces programmes. Par exemple, pour un organisme comme le nôtre qui travaille avec des personnes handicapées, ce n'est pas donné à tout le monde d'être capable de fréquenter, de partager, d'aider, de travailler avec des personnes handicapées, c'est donc dire que le choix des candidats est limité. À partir de ce choix limité et du moment où les candidats après douze mois doivent quitter l'emploi, si on peut appeler cela un emploi, compte tenu du temps qu'une jeune personne... D'abord, vous savez tous que ces programmes sont assujettis à des personnes vivant de l'aide sociale, donc des jeunes en bas de 30 ans, puis si on regarde un peu, logiquement c'est pour la plupart des jeunes qui n'ont pas une grosse scolarité, donc, peut-être pas beaucoup d'aptitudes ou de compétences ou de connaissances face à un travail comme celui-là, donc, cela prend des fois trois, quatre, cinq ou six mois avant qu'ils puissent devenir un peu fonctionnels, un peu rentables. À partir des douze mois qu'ils ont à travailler à ce niveau-là sur ce programme, il reste six mois où ils peuvent apporter plus de choses.

Notre intervention se situe justement surtout sur la durée de ces programmes. Si, dans notre esprit, le jeune pouvait être inséré dans ce milieu de travail, les centres Travail-Québec appellent cela un outil de travail et c'est vrai que c'est un bon outil pour redonner le goût à des jeunes qui l'ont perdu ou qui ne l'ont jamais eu, peu importe... si ces programmes, au lieu d'être d'une durée de douze mois, pouvaient s'échelonner pendant 24 mois, j'entends par là pas nécessairement tous les programmes de travaux communautaires, mais les programmes qui sont rattachés plus spécifiquement à une clientèle comme la nôtre, une clientèle qui est peut-être plus difficile à desservir, non pas à cause d'un manque de vouloir des personnes handicapées, mais, à cause d'un manque de capacité d'absorption, aussi de connaissances et de capacité physique et intellectuelle, à partir de cela, si ces programmes étaient - dans certains cas bien précis évidemment - échelonnés sur 24 mois au lieu de 12, je pense que ce serait une chose vraiment plus adéquate pour les organismes comme le nôtre. Il est évident que ces jeunes, comme je l'ai mentionné tout à l'heure n'ont, pour la plupart, pas beaucoup de formation et de connaissances. À partir de ce manque de connaissances ils sont, pour la plupart, très lents à pouvoir rendre des bons services. Il est très important pour un organisme comme le nôtre d'avoir recours à ces jeunes, étant donné qu'on ne peut pas avoir de budget pour se payer des personnes spécialisées ou compétentes en la matière. Un autre facteur qui est encore plus important, je pense, c'est aussi du fait de la clientèle qui doit, après chaque année, recom-

mencer l'adaptation à de nouvelles personnes. Si on compte l'adaptation du travailleur ou du stagiaire, si on compte l'adaptation de la personne handicapée, cela fait encore d'autres personnes à s'habituer ensemble. Je pense que c'est un facteur très important. L'organisme en question est toujours confronté à de nouveaux choix de candidats. Ensuite, on doit leur donner un apprentissage pour pouvoir obtenir de ces jeunes des services qui peuvent être assez adéquats. C'est pour nous un gros support quand ils sont vraiment rentables et on peut dire: Nous sommes tous des bénévoles qui donnons, pour certains cinq, pour d'autres dix, pour d'autres vingt, pour d'autres quarante heures de temps par semaine. Avec tous ces facteurs, quand les jeunes commencent à avoir un certain temps d'expérience - deux, trois, quatre, cinq mois -qu'ils sont vraiment fonctionnels, on peut plus leur donner des responsabilités, leur faire confiance et permettre à certains de nos bénévoles de pouvoir se reposer un peu. Travailler c'est toujours fatigant, travailler avec une clientèle comme celle-là, ce n'est pas nécessairement plus fatigant qu'ailleurs mais il y a une multiciplicité de nos handicaps, parce qu'on ne s'occupe pas d'une clientèle spécifique, mais de tout genre de handicapés... Dans nos secteurs, d'après un dernier recensement, il y en a entre 1200 et 1300. Cela ne veut pas dire qu'ils viennent tous chez nous. Par contre, on a une grosse banque de personnes à desservir. Les travailleurs, plus le nombre peut être grand, plus la durée peut être longue, plus leur expérience est meilleure, donc de meilleur service. La clientèle y gagne beaucoup plus. Avant les travaux communautaires, il est évident qu'on jouait encore avec certains petits projets de trois, quatre, cinq, six mois. C'était toujours l'éternel recommencement. C'est la grosse lacune pour les organismes comme le nôtre, au moment où on est parti de l'avant, où cela semblerait vouloir bien fonctionner, les personnes qui ont fait X temps chez nous, s'en vont, c'est normal quand ils ont trouvé un autre emploi. Il nous reste à recommencer, à reformer, à rééduquer et à sensibiliser d'autres jeunes à la clientèle qu'on dessert.

Je ne sais pas si mon explication est suffisante. Je ne sais pas si vous préféreriez passer à des questions tout de suite. Il n'y a pas de problème. Je pense que, pour ma part, je pourrais aborder beaucoup de points, mais qui ne toucheraient pas uniquement aux travaux communautaires. Je pense que le but de notre visite, aujourd'hui, ce sont les travaux communautaires. Je ne voudrais pas m'étendre davantage et risquer de répéter les choses dont vous êtes peut-être conscients. Notre but, notre raison d'être ici, c'était peut-être... je savais que vous liriez sûrement le petit mémoire qu'on vous a envoyé, des fois, lire une chose et en discuter, ce n'est pas tout à fait la même chose. C'est peut-être qu'étant présent devant vous, parmi vous, avec Suzanne, la preuve est peut-être plus..., ou on peut débattre peut-être mieux le besoin, la sincérité et l'honnêteté de la valeur d'avoir des gens plus longtemps que douze mois parce que lorsqu'on dit douze mois, c'est peut-être beaucoup pour certaines personnes, mais il faut regarder que ces jeunes-là ne font pas tous douze mois. Cela veut dire que si durant l'année, tu en perds un ou deux, tu es tout le temps dans une rotation où tu as toujours un réaménagement à faire et une rééducation auprès de ces nouveaux jeunes.

Donc, à partir de là, c'est pour cela que pour nous, c'est vraiment important. (17 h 15)

Le Président (M. Joly): Merci, M. Bussières. Je vais maintenant reconnaître M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je m'appelle Pierre Paradis. Je suis le responsable du ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. Je tiens à vous remercier, M. Bussières et Mme Moreau, pour la qualité de votre mémoire. Le fait que vous vous attaquiez à un point précis facilite un peu la discussion. Cela va nous permettre, avec vous, sur le plan de l'échange, de bien creuser cet aspect des mesures d'em-pioyabilité que sont les travaux communautaires

II y a plusieurs organismes qui, en plus de se plaindre de la durée limitée à douze mois, nous ont manifesté des problèmes dans le recrutement de candidats pour travailler dans les travaux communautaires. Est-ce que vous avez connu le même type de problèmes? Si c'est le cas. est-ce que vous pouvez nous expliquer vos expériences?

M. Bussières: On a connu, évidemment, un peu le même problème, peut-être... Pardon?

Mme Moreau (Suzanne): Pour l'âge.

M. Bussières: Pour l'âge, disons qu'à un moment donné, c'est peut-être une lacune qui est là, étant donné que les jeunes qui ont en bas de 25 ans, si ma mémoire est bonne, s'ils n'ont pas leur secondaire V, ils ne sont pas admissibles aux 100 $. À partir de là, s'ils ont plus de 25 ans, même s'ils n'ont pas leur secondaire V, ils sont admissibles. Disons que c'est un problème Vous avez dit qu'on touchait peut-être seulement un point, le fait de la durée; H y a peut-être un point que j'aurais voulu toucher, mais je n'ai pas osé en me disant que vous penseriez peut-être qu'on est exigeant. On calcule qu'un petit montant de 100 $ pour ces jeunes, parfois cela nous gêne de trop leur en demander. Par contre, s'ils avaient au lieu de 100 $, 125 $ ou 150 $ de plus, peut-être que cela nous gênerait moins de leur en demander plus et eux seraient peut-être plus disposés à nous en donner davantage.

Pour revenir au problème de recrutement, on l'a vécu, plus ou moins, dans le sens qu'on n'était peut-être pas aussi sélectifs que bien d'autres. Compte tenu de la clientèle, comme je

l'ai dit tout à l'heure, ce n'est peut-être pas tous les jeunes qui ont les qualités ou la volonté de travailler avec une clientèle handicapée. À partir de ce critère, on essayait de regarder la personne, pas nécessairement dans ses capacités ou dans ses apprentissages économiques, mais plutôt dans son apprentissage personnel ou dans ses qualités personnelles face au côté humain; ce sont des choses qui, pour nous, sont très importantes. La clientèle, la personne handicapée, j'imagine que vous n'êtes pas sans l'ignorer, est une personne qui a des besoins comme tout le monde. Le besoin humain, le besoin attentif, le besoin affection, le besoin attention est peut-être une chose qui est beaucoup négligée chez eux, dans leur milieu, dans leur famille, dans le foyer d'accueil. À partir de là, pour nous, chez nous, on veut que les personnes qui travaillent chez nous soient proches d'eux; je ne veux pas dire de passer les journées à les caresser, je ne veux pas que vous pensiez cela, mais d'être attentifs à eux autres et de leur parier comme on parle à du monde et non à des animaux, à des chiens, parce qu'on a vécu cela beaucoup. On a vu que cela se vivait à bien des places, qu'on parle à une personne handicapée comme à un animal - vous excuserez mes termes s'ils sont clairs et secs et pas des mots de 50 $. Je pense que plus on est clair, plus on est simple, mieux on peut comprendre. À partir de ce moment-là, notre sélection se fait surtout sur ces qualités et non sur la base économique. C'est évident que si on trouve une secrétaire, qu'elle a un cours en secrétariat et qu'elle est bien bonne, on ne la mettra pas de côté. Pour le reste, supposons qu'elle manque de patience, je pense à une secrétaire que j'ai déjà eue, elle était très bonne au niveau du secrétariat mais quand c'était pour parler avec les personnes handicapées, elle manquait beaucoup de patience. À ce moment, je les rencontre seul. Je leur parle et leur explique un peu ce que je viens de vous dire, que ce n'est pas des animaux à qui on a affaire, etc.. À partir de là, étant donné, justement, qu'on est moins sélectifs sur les qualités, les apprentissages à la vie, on trouve moins de problèmes face à cela. C'est évident qu'en cours de route, il y en a quelques-uns qui ont quitté pour un autre emploi, par exemple. À ce moment, il faut recommencer, mais comme j'essaie toujours de prévenir, parce que je vous disais tantôt que j'étais le président mais je suis tout le temps là pas mal en permanence, cela fait qu'à partir de là quand une personne commence a dire qu'elle veut s'en aller, qu'elle a un travail en vue quelque part, tout de suite je commence à faire des recherches, cela peut prendre un mois, deux mois. J'en ai une qui se termine le 13 avril et cela fait deux mois que j'ai commencé à chercher. J'en ai trouvé une qui va la remplacer avec les qualités qu'on recherche. On passe par le centre de main-d'oeuvre du Québec et on n'attend pas tout le temps après lui. C'est peut-être pour cela qu'on trouve un petit peu moins de difficultés face au recrutement parce qu'on cherche nous autres mêmes, toujours en passant par le centre de main-d'oeuvre, mais on essaie de trouver des candidats les plus valables possible avec les critères qu'on demande.

Aussi, plusieurs de ces jeunes voudraient continuer. Je pense à ceux qui ont quitté en octobre 1987. Ils auraient aimé continuer mais du fait que c'était fini, il fallait qu'ils s'en aillent et ils sont partis avec regret. Il y en a justement une qui m'a rappelé hier soir. C'est pour vous donner une idée. Parfois, on frappe des candidats ou des candidates qui sont vraiment intéressés à travailler pour la personne handicapée, qui ne pensent pas nécessairement qu'à l'argent qu'il y a au bout mais à donner ou à apporter quelque chose. Ceux-là, on serait intéressés à les garder et, à partir d'une durée plus longue, c'est évident qu'on aurait plus de chance.

Est-ce que cela répond à votre question?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Cela répond précisément à ma question. Maintenant, j'en ai une autre étant donné que vous répondez précisément aux questions. Vous avez un taux de succès dans le placement qui est de combien? Cela fait trois ans que vous fonctionnez avec vos travaux communautaires. Quel pourcentage, à peu près, de personnes qui sont passées par chez vous dans les travaux communautaires occupent aujourd'hui des emplois, soit à temps plein, soit à temps partiel, dans la société?

M. Bussières: Je dirais peut-être 60 %, sans faire de calcul précis. J'arriverais peut-être 5 ou 10 points plus haut si je calculais précisément, ou 5 points plus bas, mais cela ne varierait pas tellement plus que cela.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Est-ce à dire que le milieu chez vous est ouvert à employer des gens qui ont un handicap ou est-ce que vous préparez le milieu à bien recevoir ces gens?

M. Bussières: Oui, c'est évident. À travers notre organisme qui est un organisme d'abord de promotion. À travers cette promotion, je me dis que l'office n'est peut-être pas tout le temps d'accord avec mes idées là-dessus mais quand eux parlent de promotion, c'est un peu des coups d'éclat, c'est de la sensibilisation. Je me dis: Comment mieux sensibiliser une population avec une clientèle qui vit à travers cette population? À travers les bains, la piscine, j'entends, à travers le conditionnement physique, à travers les visites dans les magasins, les lieux publics, ces choses-là. Comment mieux préparer les employeurs éventuels? En faisant se côtoyer des personnes handicapées quotidiennement et je suis, justement, un de ceux qui fonctionnent à peu près partout dans tous les milieux de la ville chez nous, y compris à l'extérieur, pour justement changer cette mentalité un peu. Hier, j'étais encore à la radio et je rencontrais une

dame qui avait flâné une partie de la journée en ville, au Continental. Elle avait entendu parler des femmes, elle avait parlé avec elles de l'entrevue que j'avais eue à la radio et que cela leur avait appris quelque chose. À partir de cela, comme je vous le dis, je pense que c'est une façon de sensibiliser les gens en plaçant des personnes handicapées dans leur milieu.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Merci beaucoup de votre réponse. On vient de changer de président. C'est maintenant M. Bélanger, qui est le député de Laval-des-Rapides, qui préside nos travaux.

On a des règles d'alternance; peut-être qu'en vertu de ces règles, Mme la députée de Maisonneuve,...

Le Président (M. Bélanger): Alors Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Merci, M. le Président. M. Bussières, je suis contente de vous accueillir à la commission avec Mme Moreau. Mme Moreau est directrice - c'est bien cela - du projet de stage des travaux communautaires.

Est-ce que je dois comprendre que vous, Mme Moreau, vous vous occupez plus particulièrement des personnes qui sont en travaux communautaires. Non.

Mme Moreau: Non.

Mme Harel: Vous vous occupez de...

Mme Moreau: Je suis directrice au sein du conseil d'administration. C'est M. Bussières qui est le président.

Mme Harel: Mais vous, Mme Moreau, vous êtes bénévole ou vous êtes employée par le club social?

Mme Moreau: Présentement, je travaille à un programme de développement de l'emploi.

Mme Harel: Un PDE? Mme Moreau: Oui.

Mme Harel: D'accord. Avez-vous plusieurs PDE, M. Bussières au Club social Norlac?

M. Bussières: On en avait demandé quatre puis on n'en a eu qu'un.

Mme Harel: Vous êtes-vous fait offrir des articles 38?

M. Bussières: On a déjà essayé de s'en servir, puis...

Mme Harel: Cela ne vaut pas cher?

M. Bussières: Non. Je ne vous le fais pas dire. Je n'osais pas le dire. Mais vous le dites pour moi.

Mme Harel: Alors à Dolbeau. Il y a combien d'années, maintenant, que le club social existe?

M. Bussières: Depuis 1978. On a commencé à l'automne 1977 et on est incorporé depuis le 4 du huitième mois 1978. Et depuis ce temps-là que je suis là; c'est pour cela qu'à un moment donné, je suis au courant de beaucoup de choses dans notre club, puis dans le milieu et puis au niveau de l'office un peu. Un peu à beaucoup d'endroits et puis c'est peut-être la raison de mon intérêt que je suis ici aujourd'hui. Parce que je me dis que, bon j'en reviens un petit peu à la conversation qui se passait au Continental, hier, une madame n'était pas d'accord tellement: Ah!, les personnes handicapées, on leur donne toutes sortes de....

Mme Harel: Est-ce le Continental à Dolbeau ou à Québec?

M. Bussières: Oui c'est cela, c'est cela. Mme Harel: À Dolbeau.

M. Bussières: La madame disait: Les personnes handicapées, on leur donne bien trop de choses pour rien; elles ont un gros chèque de bien-être, elles sont correctes; elles n'ont pas d'affaire à demander rien en personne. Tu sais? Mais la madame qui me racontait ça, disons que c'est une ex-bénévole du club, elle travaille encore de plus loin un petit peu avec nous autres. Puis elle disait: Ces personnes-là, faut pas regarder l'argent qu'elles reçoivent mais faut regarder le fait qu'il faut qu'elles vivent avec un handicap.

Et puis comme je vous le disais tout à l'heure, justement, ces personnes-ià n'ont jamais eu la chance que tout le monde en général a, y compris que moi j'ai eue, de travailler, de fonctionner longtemps dans la vie avant de devenir comme je le suis aujourd'hui. Et puis, c'est peut-être pour cela, ma capacité d'être disponible à eux autres - bon, du fait que c'est un accident de travail, vous savez le reste - que je me permets de donner beaucoup de temps au club Norlac pour la personne handicapée, parce que, étant donné que je vis un handicap, donc je peux peut-être comprendre beaucoup mieux que bien des gens, ce que chacun peut vivre. La personne qui est rendue à 30, 35 et 40 ans et qui n'est jamais sortie de chez elle, qui a tout le temps été renfermée dans la maison chez elle, quelquefois dans sa chambre pour ne pas dire pour certains dans la cave. Eh bien là, je pense que c'est important que des organismes se penchent sur leurs besoins et puis que le gouvernement aussi fasse sa part face à cela.

Mme Harel: Vous avez eu des travaux

communautaires dès le début, en 1984 ou si c'est venu plus tard?

M. Bussières: Cela a commencé au début. Mme Harel: Au tout début de 1984?

M. Bussières: Oui, aussitôt que le programme a sorti, j'en ait fait la demande.

Mme Harel: Et à ce moment-là, c'est via le CRSSS ou...

M. Bussières: Oui.

Mme Harel: ...les services sociaux que vous avez ?...

M. Bussières: Via le CRSSS, parce que je suis en communication constante avec le CRSSS: Marie-Josée Levasseur, par exemple, Michel Côté.

Mme Harel: Et puis, depuis le début, vous avez le même nombre de participants ou si cela a diminué ou augmenté?

M. Bussières: Cela a augmenté à partir de septembre cette année, parce qu'on a demandé une addition, étant donné qu'a Dolbeau-Mistas-sini, l'année passée, il y avait un projet de l'Arche, qu'il s'appelait...

Mme Harel: L'Arche?

M. Bussières: De l'Arche, oui.

Mme Harel: Ah! Oui, d'accord, c'est pour les personnes...

M. Bussières: Pour les personnes âgées. Mme Harel: Ah! Oui.

M. Bussières: Et puis, ce projet-là, disons que le groupe a arrêté de le faire fonctionner et nous avons demandé d'ajouter deux personnes sur notre profit de travaux communautaires pour pouvoir aller à domicile, pour les personnes handicapées qui avaient besoin de services.

Mme Harel: Avez-vous pu obtenir les deux postes?

M. Bussières: Un poste seulement.

Mme Harel: Puis pourquoi vous a-t-on dit qu'on ne pouvait pas vous offir le deuxième?

M. Bussières: Pas d'argent.

Mme Harel: Et, tantôt vous parliez du fait que vous recrutiez vous-même, hein, j'ai l'impression M. Bussières?

M. Bussières: Oui, oui.

Mme Harel: Vous recrutez... Certains sont venus nous dire qu'ils mettaient quelques annonces, comme à Granby dans La Voix de l'est, ils mettaient des petites annonces classées. Vous, comment faites-vous votre recrutement?

M. Bussières: Disons que Dolbeau, ce n'est pas Québec. Donc, je connais beaucoup de monde, beaucoup de monde me connaît, je rencontre beaucoup de gens, je m'informe si on connait des jeunes qui sont prestataires d'aide sociale, en bas de 30 ans, ainsi de suite. À partir de ces personnes-là qui en connaissent, on me dit: Cette personne-là pourrait être intéressée; elle est vraiment bonne, elle est ceci, elle est cela. Là, je fais le contact direct. Je rencontre la personne. Si cela fait, je l'envoie au centre Travail-Québec pour dire qu'elle est intéressée à travailler au travaux communautaires, ainsi de suite. (17 h 30)

Mme Harel: Est-ce que vous préférez ce recrutement que vous faites vous-mêmes?

M. Bussières: Oui.

Mme Harel: Vous préférez continuer à le faire comme cela?

M. Bussières: Oui, parce qu'on peut continuer les deux, évidemment.

Mme Harel: Est-ce que le centre Travail-Québec vous en a envoyé jusqu'à maintenant?

M. Bussières: Oui. Mais ce qui arrive, justement, c'est que le centre Travail-Québec, quand il nous envoie quelqu'un, il ne le connaît pas tout le temps. Supposons que je demande une personne, un homme par exemple, et qu'il en trouve un dans sa banque à lui et que cette personne-là qu'il m'envoie n'est pas vraiment ce que je voudrais mais que, dans sa liste, ce que la personne a répondu sur son dossier, elle se dit compétente, elle se dit valable, elle se dit pleine de choses mais qu'elle arrive chez nous et qu'elle n'est pas pleine de chose... Bien souvent, je me dis que c'est justement créer des illusions à cette personne-là et peut-être de la démolir un peu plus. Tu es obligé de la renvoyer, par exemple, ou de ne pas la prendre.

Mme Harel: Je comprends que vous faites une sélection en fonction des qualités que vous attendez d'une personne que vous intégrez avec le groupe du club social, n'est-ce pas?

M. Bussières: Oui, mais...

Mme Harel: Votre sélection, est-ce que cela vous a amené, par exemple, à dire à des personnes, avant de les intégrer comme stagiaires: Non, je pense que tu ne feras pas l'affaire.

Avez-vous déjà été obligé de le faire?

M. Bussières: Oui, à quelques reprises.

Mme Harel: Dans une entrevue? Cela se fait comment? Par entrevue?

M. Bussières: Oui, cela se fait par entrevue.

Mme Harel: Et là vous dites à la personne: Je ne peux pas te prendre.

M. Bussières: Bien, là, on ne leur dit pas "carré de même". On leur dit... Évidemment, tu sais, ce n'est pas facile de dire à quelqu'un: bon, je ne te prends pas, tu n'es pas bon. Tu ne peux pas dire cela mais, par contre, assez souvent, on dit qu'on en a trois, par exemple, et qu'on en prend un. À partir de là, le comité de sélection les évalue, si on peut dire, et cela va être celui qui est le mieux coté qui va être choisi. C'est comme vous, je n'arriverai pas pour vous dire: Madame, vous n'êtes pas bonne pour faire cela, j'en prends un autre. Vous savez, si vous ne me plaisez pas, supposons. Vous savez?

Mme Harel: La politique est bien plus impitoyable. Ce sont nos concitoyens qui nous le disent une fois à tous les quatre ans.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Harel: C'est plus carré que cela.

M. Bussières: Nous autres, on n'est pas méchants comme cela.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Harel: C'est pour cela que nous... Ils ne peuvent pas congédier les fonctionnaires, alors quand ils ne sont pas contents, c'est nous qu'ils congédient. C'est pour cela qu'il ne faut pas les laisser faire n'importe quoi. M. Bussières, vous avez eu une expérience avec combien de stagiaires, jusqu'à maintenant?

M. Bussières: Cela fait quatre projets. Cela fait à peu près seize personnes.

Mme Harel: Seize personnes depuis le début?

M. Bussières: Depuis 1983.

Mme Harel: Sur ces seize personnes, c'étaient des hommes, des femmes, moitié-moitié?

M. Bussières: Souvent, cela était moitié-moitié, mais cela a été plus de femmes que d'hommes, parce que souvent les hommes ne restaient pas. Bon, ils trouvaient un travail ailleurs. Certains partaient pour, justement, aller ailleurs, aller à l'école, retourner à l'école.

Mme Harel: Est-ce que vous pensez que, au tout début, les personnes que vous recrutiez étaient plus scolarisées, peut-être plus expérimentées que celles que vous recrutez maintenant? Avez-vous l'impression que c'était, d'une certaine façon, plus facile il y a trois ou quatre ans de trouver des personnes qui convenaient plus rapidement à ce que vous leur demandiez, que maintenant l'apprentissage est plus lent ou vous pensez que c'est pareil?

M. Bussières: Oui, je pense que c'est pareil. Cela dépend des personnes, justement. Comme je vous le disais tantôt, il y en a qui l'ont pour travailler avec des personnes handicapées et d'autres qui ne l'ont pas. Quand quelqu'un ne l'a pas et qu'il n'est pas intéressé à l'avoir, il ne l'acquerra jamais. Tandis que quand la personne arrive et qu'elle l'a, tu n'as pas besoin de lui pousser dans le dos. Elle sait où elle va et elle sait ce qu'elle veut et elle sait ce qu'elle veut leur faire faire ou leur apprendre à faire. C'est toute la différence. Il y en a un qui est parti à la fin de février. Celui-là, disons qu'il fallait quasiment l'attacher avec une laisse et le traîner partout pour lui faire faire des choses. Je l'ai remplacé par un autre et lui, tu ne le vois pas. Il fonctionne, il travaille, il veut, il est intéressé et il aime cela.

Mme Harel: Celui qui est parti en février, est-ce que vous lui avez demandé de quitter ou s'il est parti de lui-même?

M. Bussières: Non, non, mais je l'avais rencontré; cela faisait déjà quelques fois que je le rencontrais. On me reprochait d'être direct et sélectif, si on peut dire, dans le sens que je lui disais qu'il ne voulait pas vivre. Remarquez bien que je suis bien franc avec vous autres et que je vous dis clairement comment cela se passe. Je lui ai dit: On dirait que tu ne veux pas vivre. J'ai dit: Quand on reste à peine à un mille de son travail, qu'on a quatre heures pour venir et qu'on le fait en taxi et qu'on est bénéficiaire de l'aide sociale, c'est parce qu'on ne veut pas vivre. J'ai dit: Je te donne quinze jours, si tu ne changes pas, tu n'auras plus besoin de te promener en taxi. Il n'a pas attendu la fin des quinze jours, il s'est organisé pour se trouver un job à Québec, ici. Il m'a remercié. Il m'a appelé, il y a quinze jours dimanche pour me remercier de l'avoir brassé et de lui avoir ouvert les yeux.

Mme Harel: Quel âge avait-il?

M. Bussières: 28 ans, père de deux enfants.

Mme Harel: Pour vous, un des critères pour la réussite du projet, c'est que vous ne soyez pas obligé de prendre automatiquement les personnes que le centre Travail-Québec vous

envoie. Si on arrivait à changer les règles pour que vous preniez automatiquement les personnes qui vous sont référées et que les personnes qui vous sont référées soient obligées d'accepter, à défaut de quoi elles vont baisser leur chèque chaque mois, vous pensez que cela pourrait changer la façon dont cela fonctionne chez vous présentement?

M. Bussières: Je ne le sais pas. Je ne sais pas si j'ai bien compris votre question. Je vais la répéter, vous me direz si c'est bien cela.

Mme Harel: D'accord.

M. Bussières: Vous voulez dire que, supposons qu'on nous réfère une personne de centre Travail-Québec et que nous sommes prêts à la prendre mais que cela l'intéresse plus ou moins?

Mme Harel: C'est-à-dire, admettons que le centre Travail-Québec vous oblige à prendre les personnes qu'il vous envoie, sans les choisir par entrevue, donc à les prendre parce qu'il vous les a envoyées, sans avoir la possibilité de décider.

M. Bussières: On ne veut pas cela. Qu'ils nous en envoient, d'accord, mais qu'on ait le choix. C'est beau de dire aux jeunes: Tu vas aller travailler là. Le centre de main-d'oeuvre va nous l'envoyer. Il va venir chez nous. On va te donner tant par semaine et si tu n'acceptes pas de travailler là on te coupe des prestations d'aide sociale. Cela serait peut-être bien de la couper pour l'envoyer au travail, mais de là à nous obliger à le prendre pour ne pas être coupé, si on est obligé de le remorquer tout le temps, ce ne sera pas mieux.

Mme Harel: Est-ce qu'il y a de l'ouvrage par chez vous à Dolbeau de ce temps-ci? Cela va bien en Abitibi, je pense?

M. Bussières: C'est au Lac-Saint-Jean.

Mme Harel: C'est au Lac-Saint-Jean, c'est vrai. C'est entre les deux, non?

M. Bussières: II n'y a pas plus d'ouvrage à Dolbeau qu'ailleurs. Mais je dis que quand quelqu'un veut du travail, il finit pas s'en trouver.

Mme Harel: Est-ce que cela veut dire qu'il faut qu'il quitte Dolbeau, à ce moment-là?

M. Bussières: Pas nécessairement. Mme Harel: Qu'est-ce qu'il peut faire?

M. Bussières: Travailler au salaire minimum, au moins.

Mme Harel: II y a des emplois actuellement à Dolbeau?

M. Bussières: Je n'ai pas fait le tour, mais j'imagine que celui qui voudrait en trouver en trouverait peut-être.

Mme Harel: La majorité des personnes handicapées est bénéficiaire de l'aide sociale?

M. Bussières: Oui.

Mme Harel: Ces personnes pourraient travailler si elles avaient un appui pour retourner au travail au salaire minimum?

M. Bussières: II y en a sûrement qui seraient intéressés.

Mme Harel: Qu'est-ce qui les empêche d'y retourner?

M. Bussières: Vous me posez des questions, vous là. Ce n'est pas moi qui travaille pour le SEMO.

Mme Harel: Non, mais vous me dites qu'il y a des emplois au salaire minimum et qu'elles seraient intéressées.

M. Bussières: J'imagine qu'il y en a. Mais beaucoup de jeunes ne veulent pas travailler au salaire minimum. Ils voudraient commencer plus haut.

Mme Harel: Et les personnes handicapées?

M. Bussières: Les personnes handicapées, ce n'est pas tout le monde qui veut les engager.

Mme Harel: Le problème se pose pour les employeurs, vous dites, Mme Moreau? Ce sont les employeurs qui freinent.

Mme Moreau: Absolument.

Mme Harel: Vous avez des exemples. Vous avez eu des employeurs qui refusent d'engager des personnes handicapées?

Mme Moreau: J'en ai un qui est frais. Hier après-midi, j'ai rencontré une personne handicapée qui aurait trouvé un emploi dans le secteur. Elle a laissé l'emploi parce qu'elle passait ses journées à ne rien faire. On ne lui donnait pas de responsabilité. L'employeur l'a engagée parce que c'était un programme.

Mme Harel: Quel programme? Fédéral?

M. Bussières: C'était donné par le service externe de main-d'oeuvre.

Mme Harel: Le SEMO.

M. Bussières: Le SEMO, c'est cela.

Mme Harel: Vous avez un SEMO à Dotbeau.

Mme Moreau: Oui, le secteur Lac-Saint-Jean.

Mme Harel: Pour Dolbeau ou pour...

M. Bussières: Secteur Lac-Saint-Jean. Dolbeau, Alma, Roberval, Saint-Félicien et les environs.

Mme Harel: Vous travaillez avec le SEMO? M. Bussières: On a déjà travaillé. Mme Harel: Et puis?

M. Bussières: D'ailleurs, j'étais là quand on l'a parti.

Mme Harel: Et maintenant?

M. Bussières: Maintenant, je ne suis plus là.

Mme Harel: Qu'est-ce qu'il faut comprendre?

M. Bussières: Qu'est-ce qu'il faut comprendre? J'étais embarqué depuis 1977. Quand on a formé le comité régional pour l'année internationale, M. Leblond était à l'office d'ailleurs, j'ai parti le comité régional - pas tout seul, évidemment - avec Robert Lavoie, un agent de développement de l'office. On a monté le comité régional, on a fait l'année internationale. J'ai continué la présidence du CRAPH après le comité régional. En 1983 on a mis le SEMO sur pied, toujours avec Robert Lavoie et d'autres, évidemment.

Mme Harel: C'est un SEMO pour personnes handicapées?

M. Bussières: C'est cela. J'avais rencontré Robert Lavoie, les trois directeurs des centres Travail-Québec de Dolbeau, Roberval et Alma, puis on a monté le programme et on a lancé le projet. À ce moment-là cela a fonctionné et en 1984 j'ai lâché le CRAPH puis la présidence a été prise par M. Maurice Bonneau, qui travaillait au centre Travail-Québec à Roberval. Maurice Bonneau a été là un an, mais à un moment donné, il avait des problèmes que je n'ai pas vécus. Je n'étais pas là, je ne peux pas vous les énumérer. Il a lâché, puis la présidence du CRAPH est allée entre les mains d'une autre personne qui gère le SEMO. C'est à partir de là, à mon avis remarquez bien, que le SEMO a commencé à devenir boiteux.

Mme Harel: II est intéressant cet échange. Je voudrais juste terminer, M. Bussières, en demandant ceci à Mme Moreau: II y a combien de temps que vous êtes au Club social Nortac?

Mme Moreau: Moi?

Mme Harel: Oui

Mme Moreau: Cela fera cinq ans.

Mme Harel: Cinq ans? Vous y êtes...

Mme Moreau: En tant que bénévole et directrice du conseil d'administration. Cette année, j'ai pris un projet pour le développement de Nortac.

Mme Harel: L'année passée, vous aviez une rémunération?

Mme Moreau: Non. J'allais à l'école aussi à mi-temps, puis j'allais passer quelques heures au club.

Mme Harel: Votre revenu venait de l'assurance-chômage ou d'un prêt bourse?

Mme Moreau: Je suis mariée. Cela répond à votre question?

Mme Harel: Oui. Ce n'est pas cet aspect dont je voulais traiter, mais pour une femme, je voulais savoir si, à Dolbeau, c'était possible de se trouver un emploi.

Mme Moreau: Oui.

Mme Harel: On m'a dit que cela posait un grave problème, que les niveaux de salaires payés, par exemple, à l'Alcan, à la dernière convention, je crois que c'est un plancher de 40 000 $.

Mme Moreau: À l'Alcan? Mme Harel: Oui.

Mme Moreau: L'Alcan, ce n'est pas notre secteur, c'est au Saguenay.

Mme Harel: Mais cela a des incidences, m'a-t-on dit, dans toute la région où très souvent il y a peu d'implantations de PME, du fait des hauts salaires industriels qui sont payés. C'est ce que pense, en tout cas, le Conseil régional de développement, à tort ou à raison. Mais je voulais savoir s'il y avait de l'embauche de l'industrie dans votre secteur.

Mme Moreau: La seule industrie qu'il y a dans notre secteur, c'est les produits forestiers Domtar.

Mme Harel: Est-ce qu'ils engagent des femmes?

Mme Moreau: Dans l'administration.

Mme Harel: Des services d'emplois dits féminins, mais pas dans la production?

Mme Moreau: De secrétariat. De production, non.

Mme Harel: II n'y a pas de femmes engagées dans la production?

Mme Moreau: Pas à ma connaissance.

Mme Harel: À part cette entreprise de papier, qu'est-ce qu'il y a d'autre?

Mme Moreau: C'est assez restreint. Il y a quand même les commissions scolaires régionales.

Mme Harel: Vous voulez dire les réseaux de l'éducation et de la santé. Très bien, je vous remercie.

Le Président (M. Bélanger): Merci. M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. Je veux remercier le club social et ses porte-parole pour avoir pris la peine de venir communiquer avec nous de façon bien vivante. Vous aviez raison de le souligner, ce n'est pas la même chose que de recevoir un mémoire écrit, le fait de discuter de façon vivante avec des porte-parole qui ont une expérience vécue sur le terrain. Vous nous avez communiqué cette expérience. Vous nous avez adressé certaines recommandations quant à certaines modalités. La question des moins de 25 ans qui n'ont pas complété leur secondaire, la question de la durée des travaux communautaires. Je prends bonne note des remarques que vous avez faites sur ces deux éléments du programme des travaux communautaires. Si un jour il y avait de la part du gouvernement des ouvertures ou des assouplissements, vous pourrez vous dire que vous n'étiez pas étrangers à ces assouplissements. Merci de la contribution positive à la commission.

Le Président (M. Bélanger): La commission des affaires sociales remercie le Club social Norlac inc. et ses deux représentants, M. Bus-sières et Mme Moreau, et suspend ses travaux jusqu'à 20 heures. Merci.

(Suspension de la séance à 17 h 45)

(Reprise à 20 h 6)

Le Président (M. Bélanger): La commission des affaires sociales se réunit afin de procéder à une consultation générale et de tenir des auditions publiques pour étudier le document intitulé "Pour une politique de sécurité du revenu".

Ce soir nous recevons l'Association coopé- rative d'économie familiale de Laval - ACEF, représentée par monsieur... j'ai quatre noms et il n'y a que deux personnes, alors je vous laisse le soin de vous présenter. Je vous explique un peu nos règles de procédure. Vous avez vingt minutes fermes pour présenter votre mémoire et il y a par la suite une période d'échanges avec les parlementaires. Je vous prierais à chaque fois que vous devez prendre la parole de vous identifier, pour les fins de transcription au Journal des débats. Alors si vous voulez ktentrfer votre porte-parole et vous présenter, et nous présenter votre mémoire, nous vous écoutons. Merci.

Association coopérative d'économie familiale de Uval - ACEF

M. Jauvin (Pierre): Pierre Jauvin, président de l'ACEF de Laval. Voici, M. Louis Poitras.

L'ACEF de Laval se spécialise notamment dans les consultations budgétaires, y compris les assistés sociaux, où nos constatations, nos chiffres nous disent que leurs revenus sont actuellement insuffisants, sans calculer les moins de trente ans avec lesquels il est impossible de faire des budgets pour qu'ils puissent arriver. Donc ils vivent continuellement dans la misère. On peut s'expliquer aussi pourquoi le taux de suicide peut être si élevé parmi la jeunesse. Et le document d'orientation que vous présentez, c'est un document d'orientation qui va aussi occasionner des suicides, des problèmes au niveau de la psychiatrie notamment. On s'occupe aussi des cours sur le budget, pour renseigner différents organismes, comment organiser leur budget pour arriver. Encore une fois, au niveau des assistés sociaux, on est obligé de couper sur la nourriture, sur le linge, alors c'est presque impossible de faire un budget avec eux sur ces choses-là. On a des conseils aux consommateurs, on a des comités qui s'occupent de la protection des consommateurs et consommatrices, et on a à peu près, par année, deux mille personnes au moins qui nous consultent pour des conseils ou des différentes lois de la protection du consommateur, ou comme la loi de la faillite, ou la loi du dépôt volontaire, etc.

Il y a un journal, aussi, qu'on publie, il s'appelle "Le droit de vivre sans s'endetter". On sait que les ACEF ont fait une étude en I974, de plus de 600 pages, pour démontrer effectivement qu'on ne vit pas dans un État d'abondance, qu'on vit dans une société qui devient plus restrictive par rapport aux plus démunis, par rapport à ceux de l'autre échelle sociale, qui sont les plus élevés, et eux bénéficient de la manière dont les organisations de l'État fonctionnent, au niveau des intérêts. Il n'y a pas vraiment des choix qui sont pris en faveur des plus défavorisés. Donc on se spécialise, nous aussi, dans la défense des droits des consommateurs, et éventuellement, on peut aller en cour ou on peut les conseiller sur les différentes lois.

Aussi, on s'est toujours prononcé contre la

police du Ministère des affaires sociales, c'est-à-dire ceux qualifiés de "boubous macoutes". On considère que c'est une campagne de salissage des assistés sociaux, quand on sait que ce sont peut-être les gens les plus honnêtes qui peuvent exister dans la société. Les assistés sociaux n'ont pas de comptables pour dévier la loi de l'impôt, par exemple, pour se faire exempter pour de la dépréciation d'équipement ou pour des frais de voyage; il y a des frais pour des chalets dans le nord qui sont déductibles pour les hommes d'affaires, etc. Les assistés sociaux n'ont absolument pas cela. Des enquêtes récentes, que ce soit aux États-Unis, en Europe et même au Canada, disent que chez les assistés sociaux, il y a environ 1% de ceux-ci qui pourraient frauder, ce qui est très minime. Concernant le dernier sondage, je ne suis pas sûr du tout que la population du Québec appuie la réforme que le gouvernement veut mettre en place actuellement. Il y a beaucoup de critiques à faire sur ce sondage, quand on sait que la moitié de la population ou des répondants qui ont été interrogés ont dit ne même pas être au courant de la réforme de l'aide sociale. Donc, il faut faire attention quand on avance des chiffres pour dire que la population est d'accord pour faire une réforme à la baisse, une réforme qui va créer encore plus de problèmes économiques, qui va baisser le pouvoir d'achat, c'est-à-dire... Si vous vous rappelez de la crise des années trente, comment elle a été réglée, c'est justement en introduisant des programmes sociaux pour relancer l'économie américaine.

Donc, aujourd'hui, on rentre dans une époque où je dirais qu'on revient au libéralisme du XIXe siècle. C'est incroyable. Avec le libre-échange où les Américains ont commencé à dire, à un moment donné, quand ils essayaient de négocier "vos programmes sociaux au Canada, vous devriez commencer à les couper", quand on sait que l'assurance-santé n'existe même pas aux États-Unis, que les gens sont aussi mal pris qu'avant que cela existe ici - l'aide sociale, l'assurance-chômage - on voit les gens dans la misère, plus de 60 000 000 d'Américains vivent dans la misère, et on va prendre des modèles sur un pays comme cela, je n'en reviens pas.

On a développé des préjugés sur les assistés sociaux, à grand renfort de publicité. On s'oppose à cela, on trouve que c'est de s'attaquer aux plus démunis de la société. C'est le pire vice qu'on ne peut pas faire. Plus de 50 % des assistés sociaux et assistées sociales ont des médicaments qui contrôlent directement le système nerveux central. Je vais vous donner un exemple. En psychiatrie, par exemple, ce ne sont pas tous les médecins qui vont faire des certificats médicaux d'inapte en permanence au travail; ils vont signer pour trois ou six mois. La personne, après cela, si le médecin dit - même si elle prend 16 ou 17 médicaments par jour - je ne vous signe pas de certificat médical, celle-ci est considérée apte au travail. Si cette personne reçoit un travail, elle va essayer de travailler, si elle est obligée de lâcher, elle est coupée. Cela n'a aucun sens. À ce moment-là, cette personne, qu'est-ce qu'elle fait? Elle est coupée, elle a de la misère à arriver; elle a pris un logement et vous savez que les logements ne sont pas gratuits aujourd'hui. Nous autres aussi, nous nous battons pour les HLM, que le gouvernement s'apprête à couper presque dans toutes ses politiques, ce qu'on trouve insensé. Il devrait y en avoir énormément, surtout à Laval où on se bat contre la ville, actuellement, où les députés fédéraux et provinciaux ont réagi par rapport à cela. On trouve que les assistés sociaux n'ont pas de protection sur ce plan.

Il y a les droits acquis des assistés sociaux dont on fait fi, qu'on bloque finalement en les leur enlevant graduellement par le projet de loi 26 qui a été adopté. L'année suivante, on commençait à couper dans les besoins spéciaux, c'est-à-dire qu'on considérait que, finalement, c'est un droit de bien vivre dans notre société et qu'on n'a pas voulu reconnaître. On est rendu qu'on parle des seuils de subsistance; ils sont encore plus bas que les seuils de pauvreté de Statistique Canada qui sont conservateurs, où la majorité des assistés sociaux sont à 50 % et même à 60 % sous le seuil de pauvreté, ce n'est pas suffisant, on veut les couper. Je trouve cela aberrant.

Je vais vous donner un exemple de quelque chose d'aberrant. Je ne sais pas si vos fonctionnaires vous renseignent bien. Quelqu'un qui est hospitalisé dans une institution psychiatrique, vous le coupez à 115 $ actuellement, dans votre projet à 125 $ vous allez le remonter, à ce moment-là, cette personne se loue un logement, elle est obligée, à un moment donné, de mettre ses choses carrément en vente parce qu'elle n'a plus assez d'aide sociale pour pouvoir garder son appartement qui lui coûte de 250 $ à 350 $, souvent pour des 3 1/2 ou pour des 1 1/2. Donc, cette personne, plutôt que de retourner en appartement, on l'encourage à s'en aller dans une famille d'accueil ou dans un foyer. Avant de trouver une famille d'accueil ou un foyer, ces personnes peuvent attendre de trois à six mois, entre 300 $ et 400 $ par jour de dépenses, plutôt que de leur donner leur chèque complet, par exemple, qui leur permettrait de se ramasser un peu d'argent et de repartir plus vite de l'hôpital psychiatrique.

Je vais vous donner un exemple dont les fonctionnaires ne sont même pas au courant. Les abris fiscaux. Je ne sais pas si les autres vous en ont parlé mais, selon les chiffres canadiens plus officiels, il y aurait environ 45 000 000 000 $ d'abris fiscaux qui se font au Canada. Au Québec, pas loin de 15 000 000 000 $. À ce moment-là, H y aurait moyen d'aller chercher l'argent, en prendre un peu aux plus riches, ce qui ne les dérangerait pas fondamentalement, et de donner la parité de l'aide sociale au seuil de la pauvreté, selon

Statistique Canada. On ne demande même pas le seuil de pauvreté du Conseil du bien-être du Canada qui est un peu plus élevé. Mais il faut se rappeler que le Conseil du bien-être a fait un livre vert qui condamne partout la grande injustice que crée inapte et apte, qui met en ghetto les inaptes et qui met les aptes en punition parce qu'ils sont incapables de faire un travail quelconque. Il y a toutes sortes de raisons qui font... Arriver avec une femme monoparentale, après que son enfant de deux ans la rende apte au travail, c'est quelque chose d'insensé. Il faut qu'elle élève son enfant; il faut qu'elle ait des garderies. On connaît l'insuffisance de garderies. Vous venez d'adopter un petit budget supplémentaire pour les garderies, la ministre Thérère Lavoie-Roux. Donc, on voit qu'il y a une insuffisance; les garderies devraient être gratuites pour les femmes assistées sociales, pour donner un exemple, ou les hommes qui gardent leurs enfants. Il y a toutes sortes de choses, de politiques sociales qu'on pourrait faire. Vous voulez faire une politique sociale pour la famille et vous matraquez les assistés sociaux. Comment allez-vous voir? Les travailleurs au salaire minimum, ils devraient recevoir au minimum 8 $ de l'heure. Ce n'est pas en baissant les assistés sociaux que vous allez trouver une main-d'oeuvre encore plus à bon marché au niveau du travail.

La main-d'oeuvre à bon marché, qu'est-ce que ça fait? Ça crée des troubles émotionnels de plus en plus grands. Quand on est à 20 % ou 25 % de la société qui suit des thérapies de tout genre, en psychologie, en psychiatrie, en psychanalyse, etc., et que la plupart de ces gens-là ne vivent pas très très à l'aise, soit le petit travaillant, les assistés sociaux ou les chômeurs, il y a un problème là. Ce serait facile d'accorder la parité de l'aide sociale aux assistés sociaux à partir du seuil de pauvreté, comme je le disais tout à l'heure, à partir de Statistique Canada, cela ne coûterait pas plus de 2 000 000 000 $ de plus ou même moins que ça. Donc, c'est discutable en "mosus". Plutôt que de pénaliser les plus pauvres de notre société. La majorité des assistés sociaux ne touchent pas 10 000 $ par année. Comment pensez-vous, vous autres qui touchez déjà beaucoup plus que les assistés sociaux, qui touchez une augmentation de 10 000 $ par année et vous ne vous posez même pas de question sur les plus faibles, les plus pauvres qu'on essaie de rendre encore plus dans la misère? Il y a quelque chose qui cloche quelque part.

Vous savez que l'aide sociale coûte actuellement entre 2 000 000 000 $ et 2 200 000 000 $. De toute façon, une grande partie est payée par le gouvernement fédéral. Donc, cela ne coûterait pas si cher au gouvernement du Québec d'éliminer la pauvreté. Si vous donniez au seuil de pauvreté, à ce moment-là, vous élimineriez, et cela ne coûte pas si cher que ça, la pauvreté au Québec. On serait peut-être le seul endroit en

Amérique du Nord à oser faire cela. Plutôt que de faire l'inverse et d'arriver dans les provinces comme en Colombie britannique ou ailleurs, à des situations où les assistés sociaux n'auront pas le choix de faire des dépressions nerveuses, des suicides et d'aller, si on veut, jusqu'à la criminalité.

À ce moment-là, on crée encore plus de problèmes sociaux. Plus la réforme sera appliquée, plus le réveil sera rakJe chez les assistés sociaux et le réveil sera raide aussi quand les travailleurs vont s'apercevoir que les assistés sociaux travaillent à rabais comme chez Hyundai par exemple, juste pour recevoir leur chèque et qu'ils n'auront même pas le salaire minimum. On ne respecte même pas les normes minimales de travail et le salaire minimum. On ne respecte même pas cela avec ce qu'on veut faire à l'aide sociale. Je ne suis pas d'accord avec cela. Les monoparentales, par exemple, les programmes de retour au travail, comme le DÉCLIC, on ne donne pas le salaire minimum. Le patron a le beau jeu avec ça. Les organismes qui sont dans ces programmes, que peuvent-ils faire? Si vous vous adressez aux organismes communautaires qui déjà sont défavorisés par rapport au gouvernement, si je prends le domaine de la santé, par exemple, ou les alternatives en santé mentale, comment pensez-vous lorsqu'ils reçoivent les gens qui sont sur le DÉCLIC, ils ne sont pas capables d'ajuster cela au salaire minimum eux autres mêmes ils manquent de subventions pour fonctionner.

Il y a de l'illogisme quelque part. Les chômeurs, on connaît l'expérience qu'il y a eue avec l'assurance-chômage. La recherche de l'emploi et ces choses. Même le gouvernement fédéral actuel évite de faire une réforme comme la réforme Forget voulait faire concernant l'assurance-chômage pour appauvrir davantage les chômeurs. On forçait les chômeurs, on les force encore à chercher du travail, mais à un moment donné, il y a une saturation. Il ne faut pas se cacher que trouver du travail, même au salaire minimum, ce n'est pas une sinécure. Un travail qui va aller dans le sens des besoins des gens, pas nécessairement dans le sens des besoins des employeurs toujours. Le rendement est augmenté. L'automation grandit et demande plus de spécialisation. Vous connaissez certainement les chiffres. Combien il y a d'assistés sociaux qui n'ont même pas terminé leur secondaire V. En plus de cela, vous voulez couper les assistés sociaux qui restent chez leurs parents.

C'est plus de 25 000 assistés sociaux, des jeunes qui sont coupés. C'est vraiment pour les rendre complètement dépendants. Quand on sait que dans le domaine de la psychiatrie il y a un problème véritable entre la famille et le jeune ou la personne qui est en psychiatrie. Donc, il y a des choses qu'il faut considérer à un moment donné. Je pense que les chiffres que je peux vous citer, les répartitions des revenus au Canada, que 20 % des ménages les plus pauvres

ne disposent que de 4, 4 % de la richesse. C'est assez élevé 20 %. Il y a 20 % des plus riches, 44 % de la richesse. Il y a quelque chose qui cloche par rapport à cela. Donc, 60 % de la population n'a que 32 % de la richesse. Mais les deux pôles, ça pourrait se réajuster, c'est-à-dire si on en prend un peu aux riches et on en donne aux pauvres, on est capable d'éliminer les principales contradictions dans une société qui est capable de se payer le fait qu'il n'existe plus de gens défavorisés dans notre société. On est capable de le faire.

C'est la volonté politique qui manque dans une politique de sécurité du revenu où on a toujours dénoncé nous autres qu'on voulait s'en aller sur le dos des plus pauvres, et on trouve cela épouvantable. Après cela, on va aller vers les travailleurs ou on va négliger, ou on va augmenter à la pièce et même parfois retarder d'augmenter le salaire minimum. Les travailleurs syndiqués, cela va être la même chose. À un moment donné, on va leur donner... C'est bien juste si on ne les bloquera pas dans l'augmentation ou même les baisser. C'est-à-dire que c'est une attaque généralisée contre ceux qui ne sont pas capables de se défendre plus ou moins parce qu'il y a des lois matraques et toutes sortes de choses. Les "boubous macoutes", cela a été une loi matraque. J'aimerais que le ministre nous dise, à un moment donné, combien cela a coûté au niveau du fonctionnariat les "boubous macoutes par rapport à ce que cela a rapporté et je ne suis pas sûr que ce soit vraiment égal et qu'il y ait plus de dépenses.

Inaptes au travail et aptes au travail, cela va être les travailleurs sociaux qui vont devenir des agents d'emploi, qui vont régler ces affaires là. Imaginez-vous la bureaucratie qui va s'installer dans cela. Je me rappelle, avant que le bill 26 soit adopté qu'on rencontrait... Il y a un ministre de l'Union Nationale qui a osé venir nous rencontrer à un moment donné dans le centre ville de Montréal où il y avait plus de 1000 assistés sociaux qui étaient là. Les assistés sociaux - il avait amené sa batterie de fonctionnaires - qui étaient là leur ont démontré noir sur blanc qu'ils ne pouvaient pas arriver avec le système d'aide sociale qui fonctionnait à cette époque. À un moment donné, le gouvernement s'est décidé à la faire la réforme à cette époque. Mais le fait que je considère, par rapport à la réforme qui est proposée là, c'était plus juste dans ce temps-là que faire et établir des barèmes fixes pour ne pas qu'il y ait des abus parce qu'il y avait eu même des abus sexuels de certains fonctionnaires par rapport à des femmes. On va te donner tant, etc. Il y avait de l'injustice.

Imaginez-vous ce qui va se passer avec les inaptes et les aptes au travail. Vous allez avoir des éclatements à un moment donné qui vont se produire dans la population. N'en soyez pas surpris. On reçoit des appels téléphoniques à chaque jour; les gens commencent à craindre. Il y a aussi beaucoup de gens qui sont en psychia- trie qui ont peur. Quand on pense qu'il y en a plus de 100 000. On sait que la majorité, comme je vous le disais, ont des médecins pour contrôler leur système nerveux central. On sait que la majorité des assistés sociaux sont des femmes. Ça non plus, ce n'est pas un hasard, et cela doit être considéré. Donc, provoquer la mise à pied de travailleurs. J'entendais dernièrement un responsable de manufacture dire: Nous autres, cela va faire notre affaire ce que la réforme va faire parce qu'on va économiser de l'argent; le gouvernement va nous en payer une partie, etc., sinon envoyer les assistés sociaux travailler juste pour leur chèque ou des choses comme cela. Ce n'était pas clair et ce n'est pas encore clair, mais, effectivement, seulement le fait de ne pas respecter les normes minimales de travail, on brise finalement la structure sociale qui était établie depuis les années soixante qui faisait en sorte qu'un certain équilibre existait dans la société. Là, on est en train de le briser avec la pire réforme qui n'a jamais pu se passer au Québec au niveau de l'aide sociale. On s'attaque déjà aux plus pauvres et je me demande ce qui va se passer. On arrive à un contrôle social plus grand des plus faibles.

Le Président (M. Bélanger): Est-ce que vous pourriez conclure, s'il vous plaît? Vos 20 minutes sont écoulées.

M. Jauvin: Oui, c'est cela que je fais. Je conclus. Donc, nous autres, on s'appuie sur pas grand-chose, mais sur le Conseil national de bien-être social du Canada quand on fait la critique au niveau de l'aide sociale. On est d'accord avec cet organisme du gouvernement fédéral. Une récente étude qui vient de sortir en France remet en question le fait que des barèmes ne soient plus respectés dans l'octroi de certaines mesures sociales, y compris l'assurance-chômage en France. Cela a fait beaucoup de tapage parce qu'on a parlé de droits. On est en train d'étudier ces documents. On est en train de faire venir ces documents. Il y a des gens qui vont venir nous visiter. Comment va-t-on lutter juridiquement, s'H le faut jusqu'au bout, par rapport à une réforme qui enlève des droits? On étudie la charte canadienne des droits comme la charte québécoise des droits si on ne peut pas avoir des recours. Aussi, au niveau de l'emploi, c'est-à-dire que c'est le droit au travail qu'on devrait pousser plutôt que carrément du 'cheap labour" au niveau de l'aide sociale qu'on veut faire avec les gens qui sont censés être aptes au travail. Merci beaucoup.

Le Président (M. Bélanger): Merci. M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, j'aimerais remercier l'Association coopérative d'économie familiale de Laval, l'ACEF, et ses porte-parole dont son président, M. Pierre

Jauvin, ainsi que M. Louis Poitras, membre du conseil d'administration. J'aurais essentiellement, dans un premier temps, deux questions à poser soit au président ou au représentant du conseil d'administration. Vous avez évoqué dans votre exposé oral le cas des 200 bénéficiaires de l'aide sociale qui, en vertu d'une entente, vont trouver de l'emploi chez Hyundai. Vous avez semblé dénoncer vigoureusement cette approche gouvernementale. Quant aux conditions de travail de ces gens, d'où tenez-vous vos informations? De quel endroit ou de quelle source?

M. Jauvin: II y a eu beaucoup d'articles de journaux qu'on a découpés qui traitaient de cette entente.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Quant aux conditions de travail.

M. Jauvin: C'est pour cela que j'ai été ambigu quand je vous ai répondu. J'aimerais avoir des informations précises. Par exemple, est-ce qu'ils vont avoir le droit de se syndiquer? Est-ce qu'ils vont avoir le droit de toucher les mêmes salaires que les autres travailleurs de l'usine? Ce sont mes deux questions, M. le ministre. Est-ce que vous êtes capable de me répondre clairement?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, je peux vous répondre très clairement. Ils auront les mêmes droits que tous les autres travailleurs, ce qui inclut les droits garantis par la charte canadienne, par la charte québécoise et par le Code du travail du Québec.

M. Jauvin: Merci.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Est-ce que vous êtes encore contre?

M. Jauvin: Je prends votre parole, mais quand cela va arriver, c'est là qu'on va voir. Je ne sais pas si vous voyez ce que je veux dire. On préfère se baser sur les faits, à savoir comment cela va se produire et comment cela va se dérouler. On va en entendre parler, etc. (20 h 30)

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Tout bonnement je vous posais la question: Quelle était votre source d'information? Parce que vous avez dit, devant cette commission parlementaire qu'ils étaient pour ne pas être payés suivant les normes minimales mêmes, etc.

M. Jauvin: Oui.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est pour cela que je vous ai demandé... Vous ne devez pas inventer cela. Vous devez avoir une source d'information.

M. Jauvin: Oui, oui, cela c'est...

M. Poitras (Louis): Je pense que la question qui se pose c'est que c'est face aussi au programme APTE, face aux programmes qu'il peut y avoir. C'est-à-dire que les gens n'auront pas le salaire minimum. Les revenus vont être selon APTE. À mesure que les gens vont travailler, on pense que le salaire minimum devrait être le minimum qui devrait être donné. C'est dans ce sens-là, je pense... Il ne faut pas confondre les choses.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je ne voulais pas confondre non plus. C'est parce que vous avez parlé du programme APTE particulièrement. Vous avez parlé du cas Hyundai particulièrement et je me demandais si vous n'aviez pas une source d'information gouvernementale ou para-gouvernementale qui vous aurait dit des choses contraires à celles que je viens d'affirmer comme ministre responsable devant cette commission.

M. Jauvin: Non, non. Je suis d'accord. Je suis d'accord avec Louis, c'est-à-dire le programme APTE c'est... Ou comme les programmes DÉCLIC que j'avais mentionnés parce qu'ils existaient à ce moment-là. C'est...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'ai une deuxième question qui touche - parce que je pense que vous êtes le premier groupe, en tout cas, à l'attaquer aussi directement; d'autres y ont fait référence mais je ne pense pas qu'ils y ont consacré autant de temps ou d'énergie -toute la question des abris fiscaux. Vous vous êtes prononcés, à la page 3 de votre mémoire, sur l'abolition comme telle, à tous les niveaux, de cette politique d'abris fiscaux qui est fédérale-provinciale. Est-ce que l'abolition de ces abris fiscaux vise également, par exemple, toute la question des actions accréditives dans le domaine minier qu'on a connue en Abitibi?

M. Poitras: On n'est pas allés si loin que cela. La question qu'on voyait c'est qu'il fallait avoir une politique pour lutter contre la pauvreté. De fait, je veux dire, aux États-Unis, entre autres, ce qui est moins facile ici, on considère les abris fiscaux comme des dépenses fiscales. Donc, nos informations sur l'ensemble des abris fiscaux tant au niveau fédéral qu'au niveau provincial, bien entendu nous ne sommes pas des superspécialistes, mais généralement, à qui est-ce que cela bénéficie? Je ne veux sûrement pas dire aux plus démunis. On peut évaluer, à partir d'experts qu'on a consultés, que ce soient des économistes de la CEQ, que ce soient des gens du conseil du bien-être social du Canada qu'au Québec cela varie entre 12 000 000 000 $ et 15 000 000 000 $. Même pour le Québec on n'a pas réussi à avoir des chiffres clairs là-dessus. Au niveau fédéral, on évalue cela à 45 000 000 000 $. On pourrait ajouter qu'il y a certains types de politiques au

fédéral qu'on considère un peu amorales: les dépenses militaires de l'ordre de 10 000 000 000 $. On dit qu'il y a de l'argent. 11 y a une façon de lutter contre la pauvreté. Et je veux dire que c'est à partir de ces moyens-là.

Quant à la spécificité des actions accréditives minières, on n'est pas allés jusque-là. De toute façon, on n'a pas eu de tableaux. C'est un peu, d'ailleurs...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Prenons d'abord, si vous voulez bien, le cas le plus généreux sur le plan d'abri fiscal, si je peux utiliser l'expression, au Québec présentement c'est sans doute le Fonds de solidarité des travailleurs du Québec, administré par la FTQ. Je pense que c'est l'abri fiscal qui est le plus intéressant sur le plan financier. Est-ce que vous nous suggéreriez d'interdire ce type d'abri fiscal?

M. Poitras: À un moment donné, s'il faut faire un choix social... Nous pensons qu'il y a de l'argent à aller chercher au niveau de la fiscalité. Je veux dire que s'il faut aller en chercher un peu là, un petit peu partout... Mais je veux dire que la priorité d'une société c'est qu'il n'y ait pas de gens qui vivent dans la misère. Je pense que c'est notre priorité parce qu'on la voit tous les jours et on considère qu'un abri fiscal versus... C'est un peu éhonté des gens qui peuvent bénéficier d'abris fiscaux pendant que les autres vivent dans la misère. Je pense qu'a un moment donné c'est de donner des privilèges à certains par rapport à ceux qui sont les plus démunis. Ce ne sont pas les plus démunis... On pariait de privilèges.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Des démunis qui se prévalent des abris fiscaux, parce qu'ils n'ont pas les moyens de s'en prévaloir.

M. Poitras: C'est cela. Ils n'ont pas les moyens. D'ailleurs à un moment donné quand on partait de l'étude européenne, c'est à la suite d'un article dans Le monde diplomatique. La pauvreté pose un problème de marginalisation, pose un problème du fait que - on peut même se poser la question - en tant que sujet de droit démocratique, entre autres, on pariait de la question des soupes populaires qui étaient à profusion... Finalement l'État se retirait et finançait les soupes populaires. Cela veut dire le droit à la nourriture, le droit aux vêtements, le droit aux choses essentielles sont de moins en moins reconnus. On allait jusqu'à dire qu'avec les itinérants, entre autres, le droit de vote... Ce sont toutes des questions démocratiques qu'on peut voir à un moment donné dans notre pratique à l'ACEF à tous les jours et qui nous inquiètent.

Il faut aussi rajouter que globalement pariant c'est clair que la réforme... Il y a un article ici de Gilbert Brunet qui avait été publié dans La Presse: "... autofinancement de la réforme de l'aide sociale." C'est clair que le sujet de l'appauvrissement d'une grande partie des assistés sociaux avec le projet de réforme apparaît totalement inacceptable.

M. Jauvin: Je voudrais donner un exemple. À l'Alcan - ce sont des chiffres officiels du gouvernement canadien - pas un cent de taxe. Il y a quelque chose qui ne va pas là-dedans. Cette compagnie fait plus de 200 000 000 $ si ce n'est pas 280 000 000 $ ou 250 000 000 $, je ne me souviens pas du chiffre exact. Pourtant, cette compagnie est située sur le territoire québécois. Elle a son électricité gratuitement parce que lorsqu'est venu le temps de nationaliser l'électricité le Saguenay-Lac-Saint-Jean a passé à côté, c'est-à-dire que cela a resté à l'Alcan On lui donne toutes sortes d'avantages.

C'est un peu comme un certain ministre fédéral qui dit: II y a 60 000 compagnies au Canada qui ne paient aucune cent d'impôt, y compris plusieurs au Québec. À un moment donné, il dit: Bien oui, mais si on leur faisait payer de l'impôt, ils fermeraient boutique ou congédieraient du monde. Oui mais on a dit. Les autres compagnies qui en paient, est-ce qu'elles congédient du monde pour cette raison? Voyons donc! On est dans une société qui fonctionne pour le profit maximal dans l'entreprise privée. À ce moment, les autres compagnies paient des impôts aussi. Si ce n'était pas rentable, cela ferait longtemps qu'elles auraient fermé boutique.

À un moment donné, ce n'est pas juste une question de contribuer ou non à l'État. C'est une question d'équité et de justice qui se fait même aussi entre compagnies par rapport à l'État. C'est comme pour les pollueurs, c'est exactement la "christie" de même affaire.

Je voulais aussi rajouter quelque chose. Sur le plan individuel, on parie des compagnies. Je ne me souviens pas pour le Québec mais entre autres, au fédéral, à chaque année if y a toujours à peu près 7000 à 8000 contribuables qui, en fait, ne sont pas des contribuables puisqu'ils ne contribuent pas, en haut de 100 000 $. Ce sont des faits. C'est ce genre de choses.

On parie souvent de chiffres. Je ne sais pas si le ministre s'en souvient mais à un moment donné il nous pariait selon le taux de participation - j'étais venu pour Solidarité populaire Québec. J'aimerais savoir s'il a trouvé une réponse à la question que je lui avais posée à ce moment qui était la partie que les assistés sociaux recevraient entre autres quant aux écarts - on parlait d'augmentation de budget - ce qui pourrait être attribué aux assistés sociaux comme tels en plus la partie qui était...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je me souviens de votre question. C'était la partie qui était en frais de gestion ou d'administration...

M. Poitras: De gestion et aussi en frais de

programmes.

M. Paradis (Brome-Missisquoi):...par rapport aux transferts.

M. Poitras: Et en frais de programmes aussi.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vais essayer d'avoir la réponse d'ici la fin de notre commission. Cela va? J'avais passé la commande à la machine.

M. Poitras: À un moment donné, c'était un autre de mes confrères. On avait fait une rectification. Peut-être que M. le ministre avait mal compris...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Avec quel groupe étiez-vous venus déjà?

M. Poitras: Solidarité populaire Québec. M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'accord.

M. Poitras: Un de mes confrères était venu avec un autre groupe qui s'appelait Solidarité contre la réforme d'aide sociale à Paradis, discret de Paradis... À un moment donné, M. le ministre, vous l'aviez interrompu lorsqu'il avait dit qu'un apte qui demeurait avec un inapte serait coupé dans le partage du loyer de 115 $. On a vérifié dans le document si ce n'était pas un couple. De fait, on voudrait avoir l'assurance que, dans ce cas, mon confrère s'était bien trompé. À la lecture et à la relecture, il nous semblait qu'une personne apte qui allait vivre avec une personne inapte mais qui ne vivait pas en couple serait bien coupée de 115 $ par mois pour le logement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je me souviens exactement de la question. Je maintiens la réponse. Il ne sera pas coupé.

M. Poitras: II ne sera pas coupé?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non. C'est la jonction de deux paragraphes dans le mémoire au début et au milieu qui fait en sorte que cela vous apporte la certitude; un paragraphe pris isolément avec l'autre vous permet de vous poser l'interrogation légitime, mais la réponse est formelle: il ne sera pas coupé.

M. Poitras: Cela va.

M. Jauvin: J'aurais une question à poser à M. le ministre. Si vous étiez capable de garder le même montant avec apte et inapte, si la personne était obligée de lâcher ou si elle n'était plus capable, de considérer cela non pas comme le fait que la personne ne veuille pas travailler, mais elle peut vivre des contradictions émotionnelles qui l'empêchent de travailler, cela ne veut pas dire qu'elle peut avoir un certificat médical avec ça.

Vous savez, vous avez fait une lutte qu'on considère... Vivre avec environ 100 $, je ne sais pas si le ministre est d'accord avec ça, mais ça n'a pas d'allure. La clinique de Pointe-Saint-Charles, finalement, donnait des certificats médicaux pour que les jeunes reçoivent au moins le minimum d'environ 400 $ aujourd'hui et qui pourrait être 500 $ pour vivre. Si, plutôt que d'être punitif en coupant, on continuait au moins de donner le maximum à tout le monde, quitte à faire un effort plus grand pour trouver des emplois plus décents qui répondront aux besoins plus particuliers de certaines personnes. Là, on ne parle plus des jeunes de moins de 30 ans; on va jusqu'aux gens de moins de 55 ans. Cela va poser des problèmes en "mosus" à votre ministère. Cela va être un casse-tête. J'aimerais que vous essayiez de vivre un mois avec le montant d'aide sociale, comme des sénateurs américains ont essayé de faire, à un moment donné, pas juste voir comment organiser un budget, mais comment arriver avec ça.

J'appartiens à une autre organisation qui est obligée de donner des repas à partir du 15 du mois pour faire vivre ses membres dont la plupart sont en psychiatrie. Si on ne leur faisait pas ça, ils y retourneraient. À un moment donné, on a fermé six mois parce qu'on manquait de revenus gouvernementaux. Il y a eu cinq suicides et 21 personnes ont été hospitalisées dans une moyenne de trois mois. À un moment donné, c'est donc dire qu'il y a des choix à faire et vos fonctionnaires ont l'air à ne pas vous conseiller ou, selon les rapports que vous faites, à mal vous conseiller dans des choses du genre. Avec apte et inapte, cela va se produire en "mosus". Je ne sais pas si M. le ministre pourrait expliquer un peu.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je pourrais répondre que vous avez comme prémisse le fait que la seule attestation médicale sert de définition, alors que plusieurs groupes sont venus devant la commission parlementaire indiquer qu'ils privilégieraient peut-être des approches beaucoup plus multidisciplinaires et que strictement l'approche médicale ne répondrait peut-être pas à l'ensemble de la problématique, qu'il y avait d'autres caractéristiques, comme celles que vous avez mentionnées, sur lesquelles on pouvait baser une évaluation et une opinion. C'est délibérément que, dans le livre vert, la définition est très floue, de façon à provoquer chez l'ensemble des intervenants devant la commission des réactions dans le but de prendre note des suggestions qui nous sont apportées pour finalement prendre les décisions les plus éclairées possible quant à la définition, etc.

Il me reste très peu de temps en vertu de la règle de l'alternance, M. le Président. Si Mme la députée de Maisonneuve peut procéder...

Le Président (M. Bélanger): Alors, Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Merci, M. le Président. M.

Jauvin et M. Poitras, bienvenu à cette quasi veillée d'armes étant donné que nous terminons demain des travaux entrepris le 22 février dernier.

Il me semble, M. Jauvin, qu'on ait déjà eu l'occasion de se rencontrer sur un dossier de désinstitutionnalisation, je crois?

M. Jauvin: Oui, c'est cela. (20 h 45)

Mme Harel: C'est cela? Bon. En écoutant l'échange avec le ministre sur la question de la fiscalité, j'ai pensé qu'il ne serait pas opportun de poursuivre sur ce terrain et qu'il serait sans doute ut He de faire un approfondissement que notre société ne connaît pas présentement sur ces questions fondamentales. Je ne pense pas que ce soir soit plus indiqué qu'H le faut pour le faire. C'est évident que le gouvernement fédéral s'apprête à introduire une réforme qui, sans avoir passé inaperçue, n'a pas vraiment été connue dans toutes ses composantes malgré les critiques qui en ont été faites par les organismes familiaux, entre autres, le Conseil des affaires sociales et de la famille, sur son aspect antifamilial. Je m'attends qu'il y ait des harmonisations dans le budget que Gérard D. Levesque, le ministre des Finances du Québec, devrait déposer. Sans qu'on ait remis en question les fondements de notre fiscalité - je les caricature un peu; je les appelle des fondements pater familias - on a une sécurité qui repose sur un modèle qui est dépassé, celui d'un homme pourvoyeur, d'une femme à la maison et de grands enfants qui sont inscrits sur le rapport d'impôt du père en l'occurrence: les garçons jusqu'à ce qu'ils commencent à travailler et les filles jusqu'à ce qu'elles aillent se marier, disons jusqu'à 18 ans ou à peu près. Il y avait même...

Une voix:...

Mme Harel: ...après 18 ans maintenant, avec les exemptions de frais de scolarité. If y avait môme d'autres propositions d'exemptions pour enfants adultes majeurs s'ils étaient a la charge de leurs parents. Sur ce terrain-là, d'une certaine façon, "the sky is the limit" quand on part de ce modèle parce qu'on est obligé de se contorsionner pour le faire adapter à une réalité qui n'est plus celle de laquelle il provient en grande partie. Cela veut donc dire découragement du travail à l'extérieur pour les femmes mariées puisque l'homme va perdre l'exemption de conjointe à charge et il n'y a plus l'exonération pour gains de travail qui existait auparavant, comme il n'y a plus l'exonération pour les adolescents parce qu'avant, H y avait un montant d'environ 1200 $ qui était possiblement gagné par un adolescent sans que cela touche l'exemption pour l'enfant mineur. Cela permettait à un jeune d'aller livrer des commandes ou de faire des choses du genre sans que cela soit pour autant déduit de l'exemption. Tout cela, c'est comme une sorte de désincitation à faire des gains de travail pour ces deux catégories. Après, on s'étonne que, dans les maisons d'hébergement, ce soit 70 % des femmes qui étaient au foyer, mais qui n'ont pas été préparées parce que, de toute façon, si elles y étaient retournées, cela aurait sans doute été en moins sur l'exemption du mari. Si tant est qu'il y avait des problèmes de violence conjugale, il devait y en avoir aussi dans le domaine des exemptions fiscales. On peut présumer que - sans que l'un soit la cause de l'autre - s'il y avait violence, il pouvait y avoir mésentente, disons, au sujet de bien d'autres choses aussi, entre autres du budget. Je ne veux pas trop...

M. Jauvin: Qu'est-ce que vous voulez poser exactement?

Mme Harel: Ce que je veux vous poser exactement...

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Harel: Corriger la fiscalité, ce n'est pas juste...

M. Jauvin: Mais par rapport aux assistés sociaux, parce que la majorité des assistés sociaux sont des femmes.

Mme Harel: C'est cela, exactement.

M. Jauvin: II y a beaucoup de femmes qui sont monoparentales, qui ont leurs enfants. Nous autres, on serait d'accord, plutôt que de donner des exemptions ou de tomber dans la fiscalité des assistés sociaux, de leur donner des montants décents au seuil de pauvreté pour vivre, c'est-à-dire de ne pas entrer dans la complexité de l'impôt par rapport aux assistées sociales ou aux femmes monoparentales qui vivent de l'aide sociale. Elles ont besoin d'argent à chaque mois pour vivre. Elles n'attendront pas un an avant de manger. Elles vont mourir avant. À un moment donné, il faut qu'il y ait des montants suffisants d'aide sociale pour que ces femmes puissent vivre. La famille, c'est un autre aspect. On aura probablement quelque chose à dire sur la famille, mais quand on sait le problème de la dénatalité au Québec, accepter les immigrants, etc., c'est-à-dire que les gens n'ont plus d'argent pour faire des enfants. C'est là le vrai problème.

Mme Harel: M. Jauvin, j'aimerais pouvoir, comme vous, penser qu'on peut régler le problème de la sécurité du revenu sans aller du côté de la fiscalité.

M. Jauvin: Oui, pour ce qui est du seuil de la pauvreté. Qu'est-ce que vous en pensez, vous, du seuil de la pauvreté de Statistique Canada, de mettre les gens les plus pauvres au seuil de la pauvreté au moins et de suivre le seuil de la pauvreté d'année en année? Je trouverais cela beaucoup plus logique que de dire, à la fin de l'année: Vous allez retirer ceci et vous allez retirer cela, etc.

Mme Harel: C'est intéressant, M. Jauvin, parce que c'est possible d'utiliser la fiscalité comme un instrument de redistribution. C'est utilisé et vous-même en avez parlé tantôt. Je pense bien qu'il y avait des slogans dans les années soixante-dix qui consistaient à dire: Faisons payer les riches et c'était sur une forme de litanies. Cela n'a pas, pour autant, amené des propositions claires au niveau de l'ensemble de l'opinion publique qui allait acheter, d'une certaine façon, les solutions en disant: Voilà, c'est comme cela qu'il faut aller. Vous dites vous-même: La fiscalité, c'est un instrument injuste de redistribution. J'ai bien compris.

M. Jauvin: Actuellement, oui.

Mme Harel: C'est un instrument injuste et même le très conservateur Reagan aux États-Unis a quand même modifié dans le sens que tout le monde aux États-Unis doit payer de l'impôt maintenant. Ce n'est même pas le cas ici. Donc, il y a quelque chose à faire en ce sens, sûrement. Vous avez raison. Par ailleurs, il ne faut pas oublier que les abris fiscaux dont vous parlez, dont parlait M. le ministre, sont parfois utilisés par des travailleurs pour corriger l'absence de sécurité sociale, entre autres, au niveau de la retraite. Le Fonds de solidarité est surtout utilisé comme régime d'épargne retraite pour des travailleurs qui, sinon, auraient peu accès à une protection à la retraite. Il en va quand même comme cela pour certaines autres lacunes. Je pense à l'exemption pour mettre de côté des fonds pour les études universitaires de vos enfants ou de vos petits-enfants.

M. Jauvin: On n'est pas pour la vertu des abris fiscaux. Vous me parlez de la vertu des abris fiscaux, c'est-à-dire ce qu'il y a de plus beau, de plus social, finalement. Mais il y a les abris fiscaux qui ne sont pas justes, qui sont plus ou moins désintéressés de ces choses.

J'avais une question précise. Que pensez-vous des seuils de pauvreté et comment pourrait-on les respecter pour permettre que la pauvreté soit éliminée une fois pour toutes au Québec? Donnez l'exemple. Pour une fois que le Québec serait d'avant-garde, tu sais, sur quelque chose de social, quelque chose d'essentiel pour sa population.

Mme Harel: Je vais vous répondre que cela me fait plaisir. Comme c'est la fin de la commis- sion... C'est demain, c'est sûr. Juste avant, je ne veux pas me chicaner avec vous, parce que je crois qu'il y a des domaines, je pense au logement où on prétend toujours que c'est le logement qui coûte le plus cher, sans se rendre compte que les exemptions au chapitre des revenus garantis au niveau des logements locatifs ou encore les exemptions versées pour l'accès à la propriété sont de loin supérieurs... Ils sont de loin, annuellement, supérieurs au total de ce que l'État, non pas débourse nécessairement, mais en manque à gagner de l'État, de loin supérieurs. D'ailleurs, j'ai des chiffres assez éloquents là-dessus.

M. Jauvin: N'oubliez pas les seuils de pauvreté. Si vous voulez me donner une réponse sur cela.

Mme Harel: Oui. C'est fort intéressant sur les seuils de pauvreté, M. Jauvin, parce que la question que l'on peut se poser, c'est: Sommes-nous dans la bonne direction en pensant que la solution serait un revenu minimum garanti idéal?

M. Jauvin: Pas 3000 $ par année. Au seuil de pauvreté.

Mme Harel: Le seuil de pauvreté, vous me parlez de celui de Statistique Canada, j'imagine.

M. Jauvin: C'est cela.

Mme Harel: Celui qui fait qu'à 999 $ par mois...

M. Jauvin: Le conseil du bien-être monte à 1200 $ à peu près.

Mme Harel: Cela dépend des catégories. Il y a des catégories où Statistique Canada est plus élevé et des catégories où c'est le conseil canadien.

M. Jauvin: Cela dépend des villes, cela dépend du nombre de personnes.

Mme Harel: C'est .cela. Prenons le cas d'une personne seule, avec Statistique Canada. Dans le programme d'aide sociale actuel, ce n'est certainement pas cela que vous préconisez, le statu quo de l'aide sociale actuelle. Dans le programme actuel, une personne seule, prenons-là au mieux, à 30 ans, va recevoir l'équivalent d'à peu près 6000 $ par année en 1988, c'est bien cela, et ne peut pas augmenter ses gains. Dans le cas de la réforme du ministre telle que proposée, c'est relativement plus bas parce que même s'il participe à des mesures, la catégorie des participants, ne dure pas toute la vie.

M. Jauvin: C'est ça.

Mme Harel: Cela dure vraiment momentané-

ment.

M. Jauvin: D'accord.

Mme Harel: II est vraisemblable que la situation plus permanente, ce ne soit ni admissible, parce qu'à un moment donné, il les aura toutes faites, ni participant pour la même raison et que ce sera la catégorie qui sera "neuf premiers mois, refus de participer" ou je ne sais trop quelle autre. Alors, pour cela, c'est 405 $ par mois. C'est celle-là où devrait se retrouver une grande majorité de personnes et là on descend à 5000 $ plutôt que 6000 $, pour faire des chiffres ronds, si vous voulez...

M. Jauvin: À presque 60 % sous le seuil.

Mme Harel: Sous le seuil. Là, il y a des gains de travail, par exemple, qui peuvent être gagnés sans que l'État vienne les confisquer.

M. Jauvin: Oui, mais on développe le marché noir du travail avec cela, le travail au noir.

Mme Harel: Là, il y a une autre...

M. Jauvin: C'est à cela qu'il faut penser.

Mme Harel: ...solution qui semble être la vôtre, qui est un revenu minimum garanti idéal; j'imagine que votre solution, ce serait l'équivalent du seuil de pauvreté, comme j'ai pu voir dans le mémoire. Est-ce bien cela?

M. Jauvin: Oui, mais là on s'oppose, jusqu'à un certain point, à la question de répandre dans la population un espoir avec un revenu minimum garanti qui, finalement, serait aussi à la baisse que l'aide sociale dans la réforme de l'aide sociale qui est en train de se faire, c'est-à-dire que c'est ridicule. La complexité d'un revenu minimum garanti déborderait le cadre des assistés sociaux.

Mme Harel: Alors, vous comprendrez...

M. Jauvin: Cela irait vers les femmes qui sont à la maison et qui n'ont pas de revenu; cela irait... D'ailleurs, ce serait intéressant sur le plan d'une politique familiale, par exemple; il y aurait des choses à faire par rapport à cela.

Mme Harel: Là, cela met presque tout le monde sur le bien-être.

M. Jauvin: Cela est une autre histoire.

Mme Harel: Cela met presque tout le monde sur le bien-être parce qu'avec 12 000 $, parce que c'est de cela dont on parle, le seuil de pauvreté, 999 $ par mois pour une personne seule, 12 000 $ par année de transfert, d'une certaine façon, cela met le double des gens qui y sont sur le contrôle du bien-être social...

M. Jauvin: Bien, pas tout à fait.

Mme Harel: ...puisqu'il y a toujours un test de revenu. Il ne faut jamais oublier que ce qui est fondamental dans un programme de garantie de revenu, c'est le test de revenu. Il faut un test de revenu pour pouvoir le compenser...

M. Jauvin: Le fédéral le fait.

Mme Harel: ...pour pouvoir le substituer

M. Jauvin: On n'a pas besoin de se substituer au fédéral par rapport à cela, c'est lui qui est le mieux équipé pour te faire.

Mme Harel: Qu'est-ce qu'il fait, M. Jauvin?

M. Jauvin: Pour ce qui est des tests par rapport à cela.

Mme Harel: Non...

M. Jauvin: Louis Poitras

Mme Harel: ...on ne parie pas de la même chose, on parle d'un test de revenu d'un programme de transfert.

M. Jauvin: Oui, oui, un test de revenu. M. Poitras: Mme Harel. .

Mme Harel: On parle d'un programme de transfert, là.

M. Poitras: La question, à un moment...

Mme Harel: Le fédéral ne fait pas le test de revenu, M. Jauvin, ce sont les provinces qui le font avec le programme d'aide sociale.

M. Poitras: La question du test de revenu, je pense qu'il faut regarder l'ensemble de nos revendications, entre autres dans le mémoire, qui est une hausse du salaire minimum. C'est ce qui fait que, à un moment donné, quand on parle du coût de 1 000 000 000 $ ou de 2 000 000 000 $, bien entendu, la hausse du salaire minimum ne coûte pas un sou comme tel à l'État. Déjà, vous savez que s'il avait été indexé à partir de 1981, il serait passablement plus haut qu'actuellement. Je pense que le point de vue qu'on défend, c'est que ce ne sera peut-être pas du jour au lendemain qu'on va l'avoir, la question du seuil de pauvreté; il faut que ce soit un objectif social. Dans ce sens-là, il y a déjà des moyens. On a parié d'abris fiscaux sur lesquels on peut compter. Vous avez parlé, entre autres, des abris fiscaux par rapport au logement; on pourrait nommer d'autre chose D'un

autre côté, il y a aussi une politique de revenu, une politique sur laquelle il faut faire des pressions. Dans ce sens-là, je pense qu'à l'ACEF, on fait partie d'un mouvement qui fait des pressions.

Mme Harel: Vous allez me permettre, M. Poitras, de vous dire mon étonnement du fait que l'ACEF de Laval, je ne sais pas si c'est le cas pour le Mouvement des ACEF, n'ait pas examiné plus à fond ou exploré une proposition qui est très souvent reprise et étudiée même dans les instances des centrales syndicales, des mouvements populaires, soit sur toute la question de la réforme fiscale et du crédit d'impôt.

M. Poitras: Je m'excuse, on a commencé à l'étudier. Premièrement, on a la question de la réforme, à l'heure actuelle. Par rapport aux revendications et aux urgences, on pense qu'il ne faut pas mettre deux débats dans un. Entre autres, on va sûrement développer des revendications face à une réforme de la fiscalité. Mais à un moment donné, mettre de l'avant, entre autres, le crédit d'impôt, comme solution dans le cadre actuel, ce n'est pas clair que... On a vu différentes études et on voyait à travers ces différentes études qu'on ne comblait pas l'insuffisance de revenu des assistés sociaux et des assistées sociales. Finalement, le principe du crédit pour une fiscalité était plus juste, en théorie. En pratique, cela maintenait la pauvreté. Ce qu'on tente... Ce qu'on veut, c'est une lutte... C'est-à-dire qu'on a comme objectif d'éliminer la pauvreté. Je pense que c'est dans ce sens-là que M. Jauvin a posé la question. Est-ce qu'on doit avoir comme objectif social de lutter contre la pauvreté? Avec quelle échéance doit-on le faire? Est-ce qu'à un moment donné la question du régime fiscal ne pourra pas y contribuer? Cela pourrait certainement le faire. Actuellement on est devant une réforme qui tend à baisser les assistées sociales et les assistés sociaux. Je pense que c'est là-dessus qu'on se prononce.

Mme Harel: Je pense bien, M. le Président, qu'en vertu de l'alternance je vais laisser... Il me reste deux minutes. Bon, écoutez, malheureusement, il ne me reste que deux minutes. C'est très intéressant parce que l'objectif, vous l'avez bien indiqué, en est un de lutte aux inégalités et de lutte à la pauvreté que l'on doit proposer à l'ensemble de la société. Et, une fois cela dit, il faut ensuite trouver les moyens pour y arriver et non pas en rester juste au niveau de répéter un objectif sans fin. Les moyens pour y arriver... Il faut penser, comme beaucoup de groupes sont venus nous le dire, que ce ne sont pas simplement des programmes de transfert. Un des moyens pour y arriver, c'est aussi d'être des créateurs d'emplois, ce que n'est plus tant que cela l'entreprise privée compte tenu de l'absorption de la nouvelle main-d'oeuvre qui s'en vient sur le marché du travail et qui nous amène un taux de chômage qui reste autour des 10 .%. Et cela peut vouloir dire qu'une lutte à la pauvreté ne passe pas simplement par des hausses de programmes de transfert. Cela peut aussi passer par la création d'emplois socialement utiles dans des secteurs comme les services de garde, comme l'environnement, comme la foresterie, etc. Alors il ne faut pas juste penser combler les besoins au seuil de pauvreté par des programmes de transfert. Il faut essayer de le penser aussi par des programmes d'emplois.

M. Poitras: Je pense que c'était lié, dans le mémoire et dans l'exposé, à ce qu'on appelait le droit au travail, c'est-à-dire avoir des emplois décents avec des conditions de travail, etc., etc. Je pense qu'on savait aussi qu'il y avait des groupes qui avaient déjà développé davantage cet aspect-là. Je pense que la question du droit au travail est un aspect central qu'on appuie. On s'est un peu appuyé aussi sur les connaissances, je dirais empiriques, qu'on pouvait avoir dans certains cas, entre autres, tous ceux qui ont des problèmes sociaux émotionnels. Je pense qu'il y a eu, à un moment donné, des illustrations de cela qui sont quand même assez éloquentes.

M. Jauvin: J'aurais une question à poser. C'est-à-dire que je travaille aussi dans le domaine de la psychiatrie. À un moment donné, le gouvernement avait adopté, avec l'Office des personnes handicapées, des programmes d'intégration au niveau industriel, au niveau des fonctionnaires et au niveau de l'État aussi pour les personnes handicapées. Mais, à un moment donné, un autre groupement avait présenté un mémoire disant que de laisser les compagnies libres, pendant trois ans, de présenter un programme d'intégration et que si l'État n'a aucune date pour faire respecter ces programmes d'intégration, cela conduit à l'échec et cela amène les compagnies à faire ce qu'elles voulaient dans ce domaine-là. Donc, à un moment donné, les personnes handicapées étaient furieuses. Elles sont furieuses encore. Parce que cela n'a pas marché. On l'avait dit dès le début. Il faut que le gouvernement - comme pour l'action positive par rapport aux femmes - ait sa loi, quelque chose qui oblige les compagnies à le faire, d'engager ces gens-là. Donc, cela ne se fait pas. Pour répondre à la question des assistés sociaux, ce qu'il faut penser, ce n'est pas pour dans 50 ans. C'est aujourd'hui qu'il faut penser que des gens vivent dans la misère dans notre société. Il faut régler cela le plus vite possible et, le plus vite possible, ce sont des déplacements d'argent des plus riches, comme vous l'avez dit un peu tout à l'heure, certains abris fiscaux des plus injustes, déplacer pour donner de l'argent aux plus démunis plutôt que de les couper. Cela ne coûterait pas plus cher de donner l'aide sociale à ceux qui vivent sur le seuil de la pauvreté. Cela reviendrait à un montant entre 2 000 000 000 $ et 3 000 000 000 $ de plus fondamentalement

dont une partie serait payée par le gouvernement fédéral. Donc, il faut aller au plus pressant.

Après cela, toute la structure fiscale est à réviser. Je suis parfaitement d'accord avec cela. Cela va toucher aussi aux politiques familiales, cela va toucher beaucoup de choses. Mais les assistés sociaux n'ont pas le temps d'attendre un an pour avoir 2000 $ ou un petit montant de 50 $ après un an comme le fait le fédéral pour les assistés sociaux quand on sait qu'il y a une partie des assistés sociaux qui ne le font pas.

C'est comme la question du supplément de revenu. Comment là publicité a-t-elle été faite au gouvernement par rapport au petit travaillant qui avait droit au supplément de revenu? Cela est resté mais au moins il y a beaucoup de petits travaillants qui ne savent même pas que cela existe. Cela a été la même chose pour la réforme de l'aide sociale avec le sondage de M. Paradis, c'est-à-dire que 50 % de la population n'étaient même pas au courant qu'il y avait une réforme. Ils ne le savaient pas. Donc, à un moment donné il faut prendre des moyens pour informer la population pour qu'elle sache la vérité sur ces choses.

Le Président (M. Leclerc): Mme la députée de Maisonneuve, comme votre temps est écoulé, je vous demanderais de conclure, s'il vous plaît.

Mme Harel: Oui, M. le Président. Je veux vous remercier, l'ACEF de Laval. Il faut évidemment penser que parfois autant on peut s'entendre sur les objectifs, autant il peut parfois y avoir l'effet exactement inverse à celui qu'on recherche dans les moyens que l'on retient. Je me garde bien toujours de jouer aux apprentis-sorciers dans le domaine qui nous intéresse. Je pense qu'il y a des solutions innovatrices qui sont possibles. Cela ne veut pas dire attendre le rapport d'impôt à la fin de l'année pour pouvoir avoir un crédit remboursable à chaque mois. Cela peut vouloir dire ne pas attendre dans cinq ans pour créer des emplois socialement utiles maintenant, ne pas attendre que les mesures soient offertes pour débloquer les 445 000 000 $ qui seraient nécessaires si tout le monde participait. Cela aussi peut être fait immédiatement.

Je veux simplement vous dire que c'est certainement important pour l'ACEF de continuer son travail. La commission était déjà sensibilisée aux questions que contenait votre mémoire. Je vous remercie.

Le Président (M. Leclerc): M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. Je vais vous donner une réponse un peu plus précise quant aux chiffres que vous avez demandés sur le coût d'administration du ministère. Les coûts demeureraient variablement ou sensiblement les mêmes. Actuellement, le coût d'administration de l'aide sociale coûte entre 6 % et 8 % du budget qui y est alloué mais cela inclut la ville de

Montréal également ou c'est administré par la ville de Montréal comme telle. La réforme n'augmente ni ne diminue ce pourcentage de coût qui va à l'administration.

Donc, si vous avez un budget de 2 200 000 000 $, vous faites le calcul. Si le budget monte à 2 800 000 000 $, c'est la même chose. Sauf que, elle n'est pas tout à fait signée mais, nous avons une entente avec la ville de Montréal comme quoi ils s'engagent sur une période de trois ans à diminuer leurs coûts d'administrations qui sont supérieurs à ceux du gouvernement du Québec.

Rapidement, quant à l'aspect d'injection d'argent qui est un peu l'idée sur laquelle vous avez terminé votre exposé. Cela me rappelait la mise en garde que nous a faite hier un organisme qui s'appelle L'Association des amis d'ATD Quart-Monde qui témoignait devant la commission ici hier soir et qui évoquait devant nous l'exemple de la Suède. La Suède a agi un peu dans le sens des revendications que vous exposez ce soir devant la commission parlementaire, mais avec un effet boomerang où on a donné de l'argent sans programme, où on a rejoint, aux dires des amis d'ATD Quart-Monde, quasiment le seuil de la pauvreté. On s'est dit: Le problème est réglé maintenant. On a connu un effet boomerang qui a suscité plus de problèmes qu'il y en avait avant. On a demandé à cet organisme de comparer les programmes que l'on propose avec ceux qui existent ailleurs, autant sur le continent nord-américain que sur le continent européen et nous comptons vérifier les expériences vécues ailleurs pour éviter les effets négatifs de ce qui a pu être vécu ailleurs et pour tenter de bonifier ou de maximiser la bonification des effets positifs des programmes qui ont été vécus ailleurs dans le monde.

Pour votre mémoire et l'échange que nous avons eu ensemble ce soir, pour le temps que vous y avez consacré et pour le travail que vous effectuez, au nom de la commission parlementaire du gouvernement du Québec, je vous remercie.

M. Poitras: Merci.

Le Président (M. Leclerc): M. Poitras et M.

Jauvin, au nom de la commission parlementaire, j'aimerais vous remercier de vous être déplacés pour nous présenter ce mémoire. Je vous souhaite un bon retour à la maison.

Les travaux de la commission sont ajournés sine die.

(Fin de la séance à 21 h 12)

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