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Version finale

33rd Legislature, 2nd Session
(March 8, 1988 au August 9, 1989)

Monday, March 21, 1988 - Vol. 30 N° 6

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultation générale sur le document intitulé 'Pour une politique de sécurité du revenu'


Journal des débats

 

(Quinze heures douze minutes)

Le Président (M. Laporte): À l'ordre, s'il vous plaît! Les travaux de la commission recommencent. J'aimerais seulement rappeler le mandat de la commission qui est de procéder à une consultation générale et de tenir des auditions publiques afin d'étudier le document intitulé: "Pour une politique de sécurité du revenu". Y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Joly (Fabre) sera remplacé par M. Poulin (Chauveau).

Organisation des travaux

Le Président (M. Laporte): Merci. J'inviterais les représentantes du Regroupement des assistés sociaux d'Hébertville, Mme Carmen Deschênes et Mme Marie-Marthe Bouchard, à bien vouloir s'avancer ici, juste devant moi. C'est cela.

Je voudrais vous rappeler brièvement la procédure que la commission suit. Vous avez 20 minutes pour faire la présentation de votre mémoire. Par la suite, il y a aura échanges avec les parlementaires pendant 40 minutes, dont 20 minutes au parti ministériel et 20 minutes au parti de l'Opposition.

Très brièvement, nous vous remercions d'avoir accepté cette invitation et nous vous prions de bien vouloir commencer.

Une voix: Merci.

Le Président (M. Laporte): Oui, Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Si les invitées me le permettent, juste une petite seconde pour rappeler au ministre que je le remercie pour le document qui vient de son ministère. J'attendais et j'attends encore des chiffres plus complets portant sur des thèmes différents. Nous en sommes à notre cinquième semaine - est-ce bien cela, Mme Lamontagne? - de commission, à notre douzième séance, à notre soixante-neuvième organisme, malgré que ce soit toujours aussi intéressant. Le ministre - je pense que c'était au moment où on examinait le mémoire du vingt-septième organisme - a promis qu'il déposerait ici, en commission, des chiffres dont on a absolument besoin pour comprendre la situation. Si tant était que ces chiffres seraient prêts, comme on semble le signaler, et seraient déjà en sa possession, je ne peux pas comprendre qu'il ne les dépose pas. Qu'attendez-vous, M. le ministre?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): On pense être en mesure d'avoir possiblement, quant à toutes les questions que vous avez posées, l'ensemble des réponses au courant de cette semaine.

Mme Harel: D'ici la fin de la semaine?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'ici la fin de la semaine.

Mme Harel: C'est-à-dire avant jeudi?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je ne sais pas. Je ne veux pas entrer dans les dates, mais il y a certains documents qui...

Mme Harel: Parlons du document concernant les moins de 30 ans, de leur taux de participation aux différents programmes. Ce document doit comprendre aussi normalement l'incidence du partage du logement et de la contribution parentale sur le nombre des moins de 30 ans en les catégorisant, de manière à pouvoir...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...identifier qui va...

Mme Harel: C'est cela.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Les statistiques...

Mme Harel: Avoir en main les chiffres qui vont nous permettre d'avoir une...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Progressivement, voici ce que je peux faire.

Mme Harel: ...vue véritable de la situation.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je peux vérifier et vous les déposer de façon progressive, si vous ne désirez pas attendre d'avoir la totalité au cours de la semaine. À mesure qu'ils sont prêts, je peux les déposer ici. Il y en a un ce matin qui semblait être prêt. Je pourrai vous le communiquer demain.

Le Président (M. Laporte): Nous prenons bonne note que vous fournirez à la commission l'ensemble des informations qui pourraient être utiles à l'avancement de ses travaux.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Finalement, toutes les questions que vous avez posées devraient obtenir des réponses écrites d'ici la fin de la présente semaine.

Le Président (M. Laporte): Est-ce que la députée de Maisonneuve a des informations supplémentaires à demander aux membres de la

commission?

Mme Harel: Je pense que le député de Sainte-Marie avait quand même manifesté son intérêt - j'ai pu le lire dans les journaux de vendredi dernier - concernant le partage du logement. Il doit avoir aussi hâte que moi, il doit être aussi impatient que moi d'obtenir les chiffres qui vont lui permettre d'identifier combien de bénéficiaires vont être victimes de cette mesure.

Le Président (M. Laporte): Je n'ai pas à interpréter vos paroles et j'imagine que, de même, vous laisserez à la présidence et au député de Sainte-Marie le soin de pouvoir s'expliquer plus longuement. Est-ce qu'il y a d'autres informations que les membres de la commission aimeraient obtenir? Si non, je voudrais souhaiter la bienvenue au Regroupement des assistés sociaux d'Hébertville qui est devant nous actuellement, tout en demandant à ses représentantes de bien vouloir s'identifier au début pour les fins de l'enregistrement, lorsqu'elles prendront la parole. La parole est à vous.

Auditions

Regroupement des assistés sociaux d'Hébertville

Mme Deschênes (Carmen): Carmen Deschênes, Notre-Dame-d'Hébertville, Lac-Saint-Jean. Je suis prête à commencer.

Le Président (M. Laporte): Qui vous accompagne?

Mme Bouchard (Marie-Marthe): Marie-Marthe Bouchard, Notre-Dame-d'Hébertville, Lac-Saint-Jean.

Mme Deschênes: En prenant connaissance de certains documents sur la réforme de l'aide sociale du gouvernement, il est facile de constater que rien n'a été fait ni pensé pour les jeunes et la famille, comme semble le laisser croire le ministre Paradis dans le document d'orientation "Pour une politique de sécurité du revenu".

La réforme de l'aide sociale et le programme APTE ne tiennent pas compte du travail d'une femme à la maison. La reconnaissance de la place d'une mère près d'un enfant est limitée à deux ans. Est-ce qu'un enfant arrête de vivre à deux ans? Pourtant, c'est à partir de cet âge qu'il demande de plus en plus une présence, une surveillance presque sans répit. Le travail à la maison augmente et les besoins grandissent avec les enfants.

Quand arrive l'âge scolaire, principalement au primaire, ces enfants redemandent encore plus d'attention, car bien souvent la mère de famille devient professeur. On ferme les écoles secondaires pour les centraliser, sans tenir compte des difficultés des parents qui n'ont aucune sécurité d'emploi, risquant, peut-être, de se retrouver un jour ou l'autre à l'aide sociale. Quand il est question de fermeture d'écoles, même si les parents s'opposent à une telle fermeture, ils n'ont pratiquement jamais gain de cause. Les parents qui se retrouvent aujourd'hui à l'aide sociale en paient la note avec une qualité de vie inhumaine. En surplus, il ne faut pas oublier qu'incombe à la mère de famille la lourde tâche de boucler un budget déjà sous le seuil de la pauvreté.

Le gouvernement, dans sa politique de sécurité du revenu et sa réforme de l'aide sociale qui se veut une amélioration du traitement des jeunes et qui vient favoriser l'aide aux parents pour leurs revenus de travail, n'a rien d'incitatif pour la famille, puisqu'il ne reconnaît que deux enfants aux assistés sociaux. Le troisième et les autres n'ont pas le droit de vivre quand, pour une raison ou une autre, les parents se retrouvent à l'aide sociale. Où est la justice du gouvernement quand les enfants d'assistés sociaux doivent dîner a l'école et que les parents sont dans l'obligation de débourser tous les matins douze à seize dollars, sinon plus, pour le dîner des enfants? Pourquoi seulement deux ont-ils besoin de nourriture et de vêtements?

Le ministre Paradis, en voulant appliquer sa réforme de l'aide sociale et classer tous les assistés sociaux aptes au travail sans reconnaître les exigences d'une famille, agit d'une façon inacceptable, puisqu'il ne laisse pas le libre choix aux femmes qui auront à subir un double emploi quand bien souvent la santé ne permet pas un tel surplus de travail.

De plus, même si une femme a travaillé depuis un certain nombre d'années à la maison et malgré l'expérience acquise, M. le ministre n'est-il pas bien informé que l'employeur ne reconnaît pas le travail fait à la maison? Par conséquent, les salaires proposés et les conditions de travail ne valent pas le déplacement.

Le ministre Paradis est-il informé ou renseigné sur le fait que, pour éplucher des pommes de terre dans un restaurant, simplement avec un couteau, on demande de I expérience dans la restauration? Même si une femme a donné quarante ans de travail à la maison, sans jamais manquer de travail, on ne lui reconnaît pas cette expérience.

Il est inacceptable que le ministre Paradis inscrive masssivement les femmes mères de famille au programme APTE sans laisser le libre choix. Il faut tout de même être réaliste. Les gains de travail ne sont pas tellement encourageants pour un double travail, puisque celui à la maison restera toujours à faire. Personne parmi ces femmes ne pourra se payer une femme de ménage.

Messieurs, mesdames du gouvernement, quand vous rentrez à la maison, avant de nasser

à table devant un bon repas, est-ce que vous vous souciez qu'il y a au Québec 100 000 familles pauvres qui sont mal nourries et mal logées?

Pourtant, lorsqu'il a été question de voter une augmentation de salaire aux députés, aux ministres et au premier ministre, personne n'a riposté. On n'a pas entendu dire qu'il s'agissait de deniers publics ou qu'il fallait tenir compte du déficit québécois. Mais, quand il s'agit des assistés sociaux, on ne sait que faire, que dire, quoi inventer en publicité de toutes sortes pour rabaisser au plus bas niveau un groupe de gens de notre société d'aujourd'hui qui ont déjà été des travailleurs et qui le sont encore. Il ne suffit que d'avoir du travail, avec des salaires, pour être en mesure de vivre.

Le ministre Paradis a tendance à garder de plus en plus la vieille idée que les assistés sociaux ne veulent rien tenter pour s'en sortir. Il semble bien que cette notion est encore bien vivace, même chez des gens bien informés.

Mme Bouchard: Une vie de couple sans distraction. Si l'on regarde du côté de la vie de couple des assistés sociaux, on a tendance à croire que démuni veut dire simplement mal logé et mal nourri. Mais est-il possible de pénétrer dans chaque foyer et de constater qu'il y a d'autres besoins tout aussi grands et tout aussi importants?

Avons-nous déjà pensé que le tête-à-tête dans la vie d'un couple est très important? Les rencontres avec des amis, le partage des goûts et les échanges deviennent un besoin. Inutile de dire que la télévision est le divertissement des pauvres. Est-ce une nécessité pour les plus démunis de se vêtir, d'avoir des loisirs et de pourvoir aux imprévus?

Devant les problèmes qui ne cessent de s'aggraver, la vie de couple est menacée, car le terrain devient propice aux petites querelles. Les problèmes deviennent de plus en plus gros, si gros que l'amour seul peut permettre de ne pas laisser de crevasses quand les heures sont longues où rien ne brille à l'horizon. Imaginons un couple, 24 heures sur 24, enfermé entre les quatre murs d'un logement, à chercher des solutions sans réponse à ses problèmes. Cela attaque les nerfs de temps à autre.

Les difficultés des assistés sociaux sont à un point tel qu'il leur arrive même d'être trop pauvres pour aller travailler. Si on nous offre un travail d'environ deux semaines et qu'il faut alors se déplacer sur une distance de quinze milles, il faudra au préalable renouveler sa plaque d'auto, le permis de conduire, les assurances pour l'auto, acheter de l'essence, puisque les détaillants n'acceptent pas de faire crédit aux assistés sociaux. Un point de plus qui s'ajoute aux préjugés en les traitant comme un monde à part.

Perdre son emploi, devenir assisté social et perdre son nom. Il faut toujours bien être conscient et voir les choses telles qu'elles sont et telles qu'elles se présentent. Une personne qui travaille à un salaire normal possède une maison, une auto bien passable, voire même récente et, bien d'autres choses encore. Mais voilà, un beau jour plus d'emploi! Un an est bien vite passé. L'assurance-chômage s'écoule et la perte d'un emploi n'est pas facile à accepter. Du jour au lendemain, on devient un assisté social. Là, plus aucun droit de posséder des acquis sans que l'on soit puni pour avoir déjà été un travailleur.

L'espoir de redevenir un travailleur devient un tourment sans fin. Les responsabilités d'une famille, où bien souvent le souffle manque pour joindre les deux bouts, ne donnent rien d'autre que d'accumuler et d'augmenter les problèmes.

Présentement, sommes-nous en mesure de pouvoir déterminer avec justesse que de rendre aptes au travail tous les assistés sociaux est la solution miracle pour régler tous les problèmes?

Il faut penser que le marché du travail n'est pas toujours facile pour certains. Les petites municipalités ne sont pas non pius équipées pour offrir tous les emplois nécessaires, quand on pense à l'absence d'un système de garderies et de transport et que les assistés sociaux n'ont pas d'auto ou que celles-ci sont tellement "minounes" que personne n'ose s'aventurer trop loin. La femme elle-même est encore plus défavorisée, car son accès au travail n'est pas priviligié pour différentes raisons. Le désir peut être extrêmement grand, mais cela n'est pas accessible en toute liberté.

Mme Deschênes: Voilà, mesdames et messieurs, à quoi ressemble le quotidien d'un assisté social et voilà comment on perd son nom du moment que l'on devient assisté social.

Quand les gouvernements ont eu besoin des jeunes pour gagner leurs élections, on a avancé l'âge majeur de 21 ans à 18 ans. À partir de là, les jeunes ont pris la place qui leur appartenait et nous avons évolué avec le temps. Ils sont là pour la relève, mais de moins en moins nombreux seront-ils si rien n'est fait à court terme pour encourager ces jeunes à fonder un foyer et à avoir des enfants.

Le gouvernement d'aujourd'hui, avec la refonte de l'aide sociale telle que présentée, semble dire que les enfants des assistés sociaux sont embarrassants et que tous les jeunes de 18 ans à 30 ans le sont encore plus.

M le ministre, quand vous aviez cet âge, disons entre 20 et 30 ans, vous étiez peut-être marié et sans doute aviez-vous déjà des enfants. Les jeunes d'aujourd'hui ont les mêmes ambitions que vous à cette époque pas si lointaine, sauf que le coût de la vie a plus que triplé et que les emplois ont diminué. Depuis 20 ans qu'on utilise les jeunes pour gagner des élections, on profite de cette main-d'oeuvre à bon marché et les travaux communautaires le démontrent bien. Faut-il souligner, M. le ministre, que le jeune assisté social, même si ce n'est que pour un travail de quelques heures, doit se préoccuper du

transport? Car, bien souvent, il est obligé de se déplacer sur une distance de 20 milles pour courir les occasions quand le déplacement n'est pas centré, de quoi décourager un jeune qui a le coeur de travailler.

M. le ministre croit peut-être qu'il donne la lune à ces jeunes, alors qu'il verse 170 $ par mois. Il y a là à peine les petites dépenses de fin de semaine d'un mois courant et peut-être un seul vêtement de temps à autre. Si ces jeunes ont la chance d'obtenir un emploi temporaire, ils penseront à l'achat d'une automobile, car ces jeunes vivent dans l'espoir, mais à quel prix. Il y a le cours de conduite obligatoire, le permis de conduire, l'achat de l'auto qui demandera beaucoup de réparations, les plaques d'immatriculation, les assurances, sans compter l'essence et le reste. Que reste-t-il à ces jeunes qui ne peuvent pas tous compter sur leurs parents? Il y a 40 000 de ces jeunes.

M. le ministre, dans la réforme de l'aide sociale quand il est question d'abolir l'aide sociale pour les jeunes de 18 à 25 ans, cela signifie-t-il que vous n'avez plus besoin du vote de ces jeunes pour gagner vos prochaines élections? Si oui, vous avez du travail à temps plein!

Est-ce nécessaire de rappeler que, même de nos jours, il y a encore des familles de quatre à sept enfants qui, même avec un revenu modeste, ne seront pas en mesure de répondre favorablement aux besoins de leurs jeunes de 18 ans et plus, et encore moins quand ils ne seront plus que deux?

M. le ministre, pourquoi les assistés sociaux, les gens à faible revenu doivent-ils déployer tant d'efforts pour n'obtenir que des miettes de l'ordre de 4, 5 %, alors que, pour vous du gouvernement, il devenait urgent de vous accorder des augmentations de 21 % avant même la période des fêtes? (15 h 30)

Nous vous recommandons: la reconnaissance du travail de la femme au foyer; le libre choix du travail à l'extérieur du foyer; l'augmentation des barèmes de l'aide sociale pour les femmes ayant plus de deux enfants, y compris l'allocation scolaire; la reconnaissance que les assistés sociaux ont déjà été des travailleurs et qu'ils le sont encore; des emplois plus décents pour vivre dans la dignité simplement et humainement; le minimum vital à 70 % du seuil de la pauvreté; des gains permis jusqu'au seuil de la pauvreté sans impôt; les revenus basés sur l'individu avec ou sans enfant à charge; l'augmentation du salaire minimum; la parité aux jeunes de moins de 30 ans; l'émission des chèques aux 15 jours; la reconnaissance que les assistés sociaux ont déjà été des travailleurs et qu'ils ont le droit d'avoir des acquis autant que les chômeurs. Merci.

Le Président (M. Laporte): Nous tenons à vous remercier pour votre présentation.

Nous passons maintenant à la période de questions. J'aimerais préciser, pour le bénéfice des membres de la commission, l'expérience qui a été vécue ces dernières semaines. S'il y avait possibilité, pour le bon déroulement de la commission, pour une bonne partie, de faire les adresses de la fin à l'intérieur de l'enveloppe de temps qui vous est impartie, cela faciliterait les travaux et aiderait les membres de la commission à respecter l'horaire que nous avons.

M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. nous avons pris note de vos remarques, M. le Président.

Dans un premier temps, vous me permettrez de remercier le regroupement pour la qualité de son mémoire. Mme la députée de Maisonneuve a indiqué que vous étiez le soixante neuvième groupe, cela n'enlève rien a la qualité des arguments que vous avez avancés, et par écrit et verbalement. La commission parlementaire débute une nouvelle semaine d'auditions II es! toujours à propos de rappeler quelle est cette fameuse clientèle que l'on retrouve à l'aide sociale ou que l'on retrouvait, si on utilise le dénombrement de mars 1987.

Tout près de 400 000 chefs de menage au Québec n'avaient, à cette époque - heureusement, cela a diminué depuis ce temps - pour seul moyen de subsistance que le chèque de l'aide sociale. Parmi ces 400 000 chefs de ménage au Québec, environ 100 000 sont considérés comme incapables, étant affectés d'un handicap, de subvenir à leurs besoins de base sur une longue période; soit 25 % de la clientèle.

Mais quelle est cette autre clientèle dite apte au travail? Les 300 000 autres chefs de ménage, on les dit aptes au travail, mais est-ce qu'ils peuvent, demain matin, comme vous l'avez si justement souligné dans votre mémoire, se trouver un emploi? Cette clientèle-là est composée de 36 % d'individus que l'on considère comme étant des analphabètes fonctionnels, 60 % de cette clientèle dite apte au travail n'a pas terminé son cours secondaire et 40 % de cette même clientèle n'a aucune expérience de travail reconnue, soit comme ayant occupé un emploi. Votre exemple de la dame, dans le cas de l'emploi pour éplucher des patates est très valable et très vrai. C'est un exemple que vous pouvez nous donner à répétition devant cette commission.

Le gouvernement a le choix dans une telle situation. Abandonner ces gens a leur sort en se libérant la conscience, comme les gouvernements l'ont fait dans le passé, et en mettant à la poste un chèque mensuel en se disant: Bon, on a fait ce qu'on avait à faire envers ces gens. Ou le gouvernement peut, avec la collaboration des groupes communautaires comme le vôtre, avec la collaboration du patronat, des syndicats, de tout ce qui bouge dans la société, relever le défi et tenter d'améliorer l'employabilité de ces gens-

là - pour ceux et celles qui ont le talent de le faire, compléter leur cours secondaire; pour ceux et celles qui ont d'autres talents, participer à d'autres types de mesures - de façon que ces gens ne soient pas marginalisés dans la société. C'est le débat que nous avons présentement et dans lequel nous nous retrouvons.

Vous nous arrivez comme représentant les gens d'Hébertville. Moi, j'ai une petite note et je voudrais préciser si les informations qu'on m'a communiquées sont exactes ou si elles sont suffisantes quant à l'action dans le milieu de votre groupe. Moi, on me dit que, comme moyen d'action chez vous, dans votre communauté, vous avez un vestiaire public, vous faites des démarches pour obtenir de la nourriture, vous redistribuez cette nourriture aux personnes défavorisées du milieu, et on me dit également que vous rejoignez mensuellement de 200 à 300 personnes de votre milieu. S'agit-il là essentiellement des activités que vous menez ou si est-ce plus complet que cela?

Mme Deschênes: Ce sont des services qu'on offre. Combien disiez-vous?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est 200 à 300.

Mme Deschênes: Par mois, c'est environ 200 à 300, cela dépend. Nous autres, une paroisse s'est ajoutée encore la semaine dernière, nous desservons 21 paroisses autour du lac Saint-Jean; ce qui fait au total quelque 180 familles défavorisées. On est sûr que ce sont des assistés sociaux.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Quand vous me dites cela, rendez-vous des services aussi à des gens qui bénéficient de l'assurance-chômage ou à des gens qui sont de bas salariés au salaire minimum?

Mme Deschênes: Non. Disons qu'il n'y en a pas qui se sont présentés. C'est sûr que, s'il en venait, on ne les rejetterait pas non plus.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mais la totalité de votre clientèle, ce sont des...

Mme Deschênes: À l'heure actuelle, oui. ce sont des assistés sociaux.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Cela fait combien de temps que vous fonctionnez dans le milieu?

Mme Deschênes: Cela a été fondé en 1984, mais on est dans une municipalité très petite. Nous avions un grand manque de locaux. Là, cela fait deux ans - cela va faire deux ans - qu'on a des locaux. Avant, cela se faisait chez moi dans ma demeure. Disons que ce n'était pas aussi facile. Je ne sais pas si vous savez ce que c'est que de descendre des caisses de nourriture dans une cave et de les remonter. Quand même, à l'heure actuelle, on a encore un problème de locaux. Cela ne le règle pas pareil, parce que c'est trop petit.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Avez-vous de la permanence, si je peux utiliser l'expression, des permanents...

Mme Deschênes: On a de la "permanence" en bénévolat.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'accord. Mais il n'y a personne...

Mme Deschênes: Mais c'est fantastique ce qui se fait.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): II n'y a personne de rémunéré dans...

Mme Deschênes: Non, personne.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Avez-vous des travaux communautaires ou des choses du genre?

Mme Deschênes: Oui, on a un projet de travaux communautaires. On a une personne qui vient d'Alma, parce que, disons qu'à Hébertville cela fait trop longtemps que le programme existe et il n'y avait plus de filles admissibles pour venir travailler au local. On a réussi à en prendre une d'Alma. Elle vient travailler au local, elle doit faire de 15 à 20 milles pour se déplacer et cela ne lui donne même pas les 100 $ de plus par mois. Elle a 23 ans et elle est en train de perdre ses yeux; elle ne voit presque plus d'un oeil et l'autre commence à être affecté. Alors, ce n'est pas tellement payant pour elle. Mais on voit quand même que les jeunes ont à coeur de travailler.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous avez soulevé deux points que j'aimerais aborder plus spécifiquement avec vous: la question qui rejoint un peu la disponibilité de la femme à la maison et les enfants en bas âge...

Mme Deschênes: Oui.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...et la question des jeunes. Je vais peut-être commencer à l'inverse de l'ordre où vous me les avez soumises. Vous m'avez parlé du...

Mme Deschênes: Je les ai pris un peu plus vieux et, à la longue, je les ai rajeunis.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Bon. Je vais commencer par les plus jeunes. Vous avez mentionné à un moment donné dans votre mémoire ceci: Vous ne devez plus en avoir besoin

électoralement, parce que les jeunes de 18 à 25 ans, vous les éliminez, si je peux...

Mme Deschênes: Bien oui, c'est quasiment ce que cela veut dire, M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Bien là, moi, j'ai un problème avec cela.

Mme Deschênes: Oui, lequel?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vais vous dire pourquoi. Nous prétendons accorder la parité aux jeunes de 18 à 30 ans et on a ajouté une contribution alimentaire parentale pour se comparer aux prêts et bourses aux étudiants et pour ne pas que cela devienne plus payant d'être à l'aide sociale et inciter nos jeunes à quitter...

Mme Deschênes: Mais vous n'avez pas besoin d'avoir peur. À l'aide sociale, aucun ne va se ramasser de l'argent.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, non. À 178 $, comme vous l'avez dit, ou à environ 180 $, il n'y a pas de danger.

Mme Deschênes: Non.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Quand on accorde la parité, on s'en va vers un minimum, même durant les neuf premiers mois proposés, en haut de 400 $ et, là, il y a un petit risque. Mais, quand vous avez parlé d'exclusion, je me suis dit: Elles se sont peut-être mélangées, parce qu'un autre politicien a parlé d'exclusion. Il y a une semaine et demie, M. Parizeau a fait une déclaration à savoir que tous les jeunes de 18, 19 et 20 ans devraient être exclus de l'aide sociale complètement. Pas un sou! Pas de contributions alimentaires parentales! Cela ferait 30 000 jeunes de moins à l'aide sociale. Je me dis: Est-ce que les gens dans le champ, confondent cette déclaration de M. Parizeau avec ce que l'on propose? Je voulais seulement clarifier cela comme il faut. Nous proposons la parité pour les jeunes de 18 à 30 ans, mais avec une contribution alimentaire parentale de façon qu'ils ne quittent pas les études pour s'en aller à l'aide sociale qui ne sera plus à 180 $ par mois, comme vous le disiez, qui suffisent à peine pour les petites dépenses...

Mme Deschênes: Oui.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...mais qui va être paritaire avec les autres. La déclaration de M. Parizeau qui veut exclure, lui, tous ceux qui ont 18, 19 et 20 ans de l'aide sociale, cela sortirait 30 000 jeunes de l'aide sociale d'un coup sec. Je voulais seulement qu'il n'y ait pas de confusion là-dedans entre nous.

Mme Deschênes: Non, je ne peux pas dire qu'il y en a. Cela dépend du montant que les parents auront, hé? Après cela, je vous dirais bien que j'avais deux garçons...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'accord

Mme Deschênes: Quand mon mari travaillait, disons qu'il avait un bon salaire. C'était un travailleur de la construction. On en avait assez besoin qu'on n'aurait pas été capables de donner de l'argent à nos enfants pour sortir. Aujourd'hui, on se ramasse à l'aide sociale. Ce n'est pas voulu. Je peux vous apporter les preuves qu'on se cherche de l'ouvrage et que ce n'est pas facile. J'ai deux lettres: une de la municipalité et une autre du centre de main-d'oeuvre, que je voudrais bien vous montrer, parce que c'était mon intention À ce moment-là, on n'aurait pas été capables de donner de l'argent à nos enfants et encore moins aujourd'hui en étant bénéficiaires de l'aide sociale. Cela fera bientôt sept ans que mon mari ne travaille pas On a une vieille maison qu'on a rénovée et, si on n'avait pas eu nos enfants, avec leur argent pour garder, je pense qu'on ne l'aurait plus, notre maison Ils gardaient à 0,25 $ l'heure pour mettre du manger sur la table.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'accord Si je comprends bien, vous êtes pour la parité pour les jeunes.

Mme Deschênes: Oui.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous ne seriez pas d'accord avec cela, qu'on exclue les jeunes de 18, 19 et 20 ans de l'aide sociale, comme M. Parizeau le propose, et vous avez des réserves quant à la contribution alimentaire parentale.

Mme Deschênes: Cela dépend du salaire que les parents gagnent. Mais je vous dis que, même avec 21 000 $ ou 23 000 $, je ne vois pas comment un couple va s'en sortir avec un montant comme ça. Même s'ils ont des jeunes, les jeunes ne seront pas capables de leur donner de l'argent.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'accord Donc, il ne faudrait pas les exclure, les jeunes de 18, 19 et 20 ans, d'un coup sec, comme ça

Mme Deschênes: Bien non

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ce serait faire une erreur, d'après vous.

Mme Deschênes: Oui.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Donc, on va essayer d'envoyer le message à qui de droit. Maintenant, quant à la contribution alimentaire parentale, pensez-vous qu'elle devrait être la même ou différente de celle qu'ils ont aux prêts

et bourses aux étudiants?

Mme Deschênes: Disons que les prêts et bourses, on n'a jamais été assez argentés pour avoir affaire à ça. Là-dessus, ce serait plutôt ma...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'accord.

Mme Deschênes: Parce que les miens n'étaient pas assez intelligents pour se rendre à l'université.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ce n'est pas une question d'intelligence, se rendre à l'université, je pense. Est-ce que voulez compléter sur...

Mme Deschênes: Es-tu bonne pour répondre?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Avez-vous vécu l'expérience avec les prêts et bourses aux étudiants, ou connaissez-vous quelqu'un qui l'a vécue de près?

Mme Bouchard: Disons que, pour moi, les prêts et bourses, ce n'est pas encore arrivé, mais ça va commencer l'automne prochain.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): II arrive à l'âge.

Mme Bouchard: Mon premier garçon s'en va au cégep. J'ai quatre enfants et mon premier s'en va au cégep l'automne prochain. C'est là que je vois - ou que je ne vois pas - qu'on est six à la maison, et je ne sais pas comment on va faire pour lui payer ses études. Mon mari ne travaille pas; il est bénéficiaire de l'aide sociale. C'est pour ça que je dis que...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Avez-vous vérifié s'il était admissible aux prêts et bourses aux étudiants, votre premier qui va aller aux études collégiales?

Mme Bouchard: Non, pas encore, parce que je n'ai pas eu la...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Les formules pour tout ça encore. Cela va, d'accord.

Mme Bouchard: Je n'ai pas eu assez d'information à ce sujet encore.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Le deuxième élément que vous avez touché, c'est toute la question de la femme au foyer, de la reconnaissance de la valeur du travail qu'elle effectue et de sa présence auprès des enfants jusqu'à, au moins, l'âge préscolaire. Votre mémoire est peut-être le soixante-neuvième. Je n'ai pas le décompte mathématique, mais je pense que tous ceux et toutes celles qui ont touché à cette question nous ont pratiquement recommandé soit le maintien du statu quo en ce qui concerne cette situation, soit l'amélioration ou la bonification de la situation actuelle, en considérant le travail que la femme fait au foyer, jusqu'au moment où l'enfant atteigne l'âge scolaire, comme une mesure de participation ou que leur travail soit reconnu comme tel. Est-ce que c'est dans ce sens que vos propos ou vos représentations vont?

Mme Bouchard: Si je vous disais que, lorsqu'un enfant commence l'école, c'est encore là, pour la mère un mosus de surplus d'ouvrage. Quand arrive l'heure de la vaisselle, il faut qu'elle montre les leçons. Si elle a deux, trois ou quatre enfants et qu'elle est obligée de les aider, je vous dis qu'en plus, si elle travaille, dès qu'elle arrive chez elle, il va falloir qu'elle montre les leçons à ses enfants.

Son travail reste là. Il n'y en a pas un qui saute dessus. Le lendemain matin, ça demande encore de la mangeaille et ça devient compliqué quand il n'y a pas d'argent. Quand même que tu vas travailler, avec les projets de travaux communautaires comme vous en avez aujourd'hui, c'est le plus beau programme niaiseux qu'il ne peut pas y avoir.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vais insister pour vous questionner sur le fonctionnement de Travaux communautaires chez vous, parce qu'on a eu d'autres personnes qui sont venues d'autres milieux nous dire qu'elles avaient connu, dans le cadre de Travaux communautaires, des expériences qui les ont enrichies comme promoteurs, qui ont fait en sorte que la majorité des participants se sont trouvé des emplois à temps plein lorsqu'ils sont sortis, et qui ont fait en sorte que les gens qui ont reçu des services, je pense surtout à des cas de personnes âgées, si je me souviens bien des témoignages devant la commission... Donc, dans leur cas, leur analyse était complètement différente de la vôtre.

Cela ne veut pas dire que, dans votre cas, vous n'avez pas raison. Pouvez-nous nous décrire quel type de travaux communautaires vous avez chez vous et qui vous amènent à les qualifier comme vous l'avez fait? (15 h 45)

Mme Deschênes: Je ne peux pas vous dire que ce n'est pas bon à notre local. Cela donne un petit surplus par mois pour quelques-uns. Mais prenez la personne qui part d'Alma pour venir, c'est parce qu'elle veut travailler. Elle est couturière, elle vient à notre local et fait ce qu'on a à faire. Il faut que nous nous financions de temps en temps, même si nous sommes des organismes. Elle coud pour nous financer. Les autres s'occupent du linge et s'occupent de recevoir les gens. On a un petit jeune homme qui passe la balayeuse, vide les poubelles et les

met au chemin.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous avez combien de participants dans ce...

Mme Deschênes: On en a trois.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Trois, d'accord.

Mme Deschênes: Imaginez-vous, de trois à quatre heures par jour... Celle qui vient d'Alma fait deux jours entiers pour éliminer le transport. Cela serait bien plus intéressant s'ils avaient des salaires pour être capables de vivre, qu'ils puissent venir travailler et avoir un salaire à la fin de la semaine. C'est sûr que nous n'aurons pas de subvention pour les organismes, car nous ne sommes pas des créateurs d'emploi.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Est-ce que c'est votre première expérience de Travaux communautaires? Est-ce que c'est la première fois que vous avez un projet dans lequel vous êtes...

Mme Deschênes: De Travaux commautaires? Oui. On en a eu un autre plus intelligent que celui-là, par exemple.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Comment s'appelait-il?

Mme Deschênes: C'était de la création d'emplois. Il était tellement intelligent... Pour avoir droit à l'assurance-chômage, il faut travailler vingt semaines. Le projet était de seize semaines. Quand ils partaient, après le projet, où allaient-ils? Ils étaient dehors, "rembarques sur le BS". Moi, je ne pouvais pas travailler. Mon mari ne travaille pas depuis six ans et je n'étais pas admissible pour travailler au projet. Cela faisait six ans que je présentais des projets avec espoir. Je n'ai pas une santé très forte, non plus, je n'ai pas la santé pour laver des planchers, des plafonds et des murs.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Pourquoi vous disaient-ils que vous n'étiez pas admissible

Mme Deschênes: Parce que l'organisme est à but non lucratif. Je suis membre du conseil d'administration de l'organisme. Quand je présentais les projets... Oui, oui. Quand je présentais les projets, je me disais: Au pis aller, si je ne peux pas travailler, on n'a pas besoin de deux emplois, un suffit, mon mari pourra sûrement travailler au pis aller et on pourra vivre. Il n'a pas été accepté non plus, parce que c'était mon mari. Il aurait fallu que je le mette dehors. Je l'aime trop, donc, je le garde.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Gardez le. Cela va pour le moment; en vertu de la règle de l'alternance, Mme la députée...

Le Président (M. Laporte): On pourrait peut être souligner, avant de donner la parole à Mme la députée de Maisonneuve, que, conformément à une décision qui a été rendue ici antérieurement sur la télédiffusion des débats à la commission parlementaire, chacun des médias a la possibilité, au début des travaux, de faire des prises de vue. Par la suite, on demande toujours aux cameramen comme aux autres médias - c'est ce dont on m'informe en ce moment... Lorsque les travaux ne sont pas télédiffusés, qu'il n'y a pas eu d'autorisation à cet effet, une permission est accordée aux médias afin de leur permettre de prendre des parties de film ou des séquences au début de la séance. Il faut permettre aux témoins de s'exprimer dans la plus grande liberté et la plus grande aisance. En conséquence, les cameramen ne peuvent filmer l'ensemble des travaux de la commission. C'est simplement un bref rappel que je voulais faire avant le début de l'intervention de Mme la députée de Maison-neuve.

Mme la députée de Maisonneuve

Mme Harel: Mme Deschênes, je pense que vous seriez plutôt d'accord, vous, que la télévision vous enregistre et que l'ensemble de l'opinion publique sache ce que vous vouliez dire.

Mme Deschênes: Oui, parce que, quand une personne vit une situation, c'est pareil ailleurs. ce sont les mêmes problèmes qu'on vit dans toutes les familles.

Mme Harel: Alors, quand on dit que c'est en pleine liberté, c'est pour ne pas réduire la pleine liberté des personnes qui viennent devant vous. Je pense qu'au contraire c'est plutôt assez malvenu, cette décision qui a été prise de ne pas permettre la télédiffusion et nos travaux...

Mme Deschênes: Oui

Mme Harel: ...si tant est qu'il n'y avait pas télédiffusion, tout au moins, ne pas permettre à des postes qui voulaient le faire...

Le Président (M. Laporte): Mme la députée de Maisonneuve, si vous le permettez, sans nécessairement entrer dans un débat de procédure, je suis persuadé que...

Mme Harel: Pourquoi est ce que je vais vous le permettre, M. le Président?

Le Président (M. Laporte): C'est simplement pour vous rappeler que c'est une décision qui a déjà été rendue antérieurement, des us et coutumes et je

Mme Harel: C'est une décision qui a déjà été rendue antérieurement et que je conteste

toujours. Je pense avoir toujours la possibilité, tout au cours de nos travaux, jusqu'à la fin de nos travaux, de le répéter.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Question de règlement.

Le Président (M. Laporte): M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): II faut établir, devant les gens qui sont ici, qu'il y avait eu une demande unanime de la commission pour que les travaux soient télédiffusés. Moi aussi, j'aimerais contester la décision sauf que cela fait sept ans que je suis ici et à chaque fois que j'ai voulu contester la décision d'un président de commission, on m'a dit: II y a des procédures prévues au règlement, tu n'as qu'à t'en prévaloir. J'aimerais faire de beaux discours aussi, M. le Président...

Mme Harel: M. le Président...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...et aller en appel.

Mme ,Harel: Cela, M. le Président, j'espère que ce n'est pas du temps que le ministre va me gruger sur le temps de ma formation politique.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, c'est seulement pour vous dire que la demande de télédiffusion était unanime et si vous désirez, Mme Harel, que l'on conteste conjointement...

Mme Harel: Alors, Mme Bouchard.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...je suis prêt à contester conjointement.

Mme Harel: Mmes Deschênes et Bouchard, juste pour conclure. C'est le président de l'Assemblée nationale qui a décidé. Moi, j'avais contesté par écrit cette décision et il a décidé que c'était la télédiffusion des travaux et, s'il n'y avait pas de télédiffusion des travaux, en l'occurrence comme ce n'était pas possible, que les télévisions privées ne pouvaient pas venir, si elles le souhaitaient, filmer pendant que les gens nous parlaient.

Mme Deschênes: J'aimerais vous dire de ne pas rester surpris parce que les assistés sociaux sont la classe la plus basse de toutes. Il ne faut pas que cela aille à la télévision. Il ne faut pas que les gens sachent qu'on est là.

Mme Harel: Mais cela vient quand même, Mmes Deschênes et Bouchard. Je suis contente que vous soyez là. Je me rappelle, à la fin de janvier, il me semble que c'est un des premiers mémoires qui nous sont arrivés. Vous avez fait cela quasiment dans les tourtières du Jour de l'an. Il me semble que vous nous l'avez fait parvenir dès...

Mme Deschênes: Le tout début. Mme Harel: ...le tout début.

Mme Deschênes: Justement, j'ai travaillé tout le temps de la période des fêtes. Je n'ai pas arrêté. Les fêtes, c'est minime.

Mme Harel: Je me rappelle, je crois que c'est le premier des mémoires que j'ai lus. Cela m'intéressait de voir que cela venait d'Hébert-ville. J'ai pensé que, d'une certaine façon, comme les alouettes, vous annonciez... Comme les alouettes annoncent le printemps, vous, vous annonciez qu'il allait y avoir, dans tout le Québec, beaucoup de protestations contre le projet du ministre Paradis, puisque cela venait de Lac-Saint-Jean, cela venait d'un comité. Vous étiez déjà très bien informés. Vous aviez donc dû avoir toute l'information. Je me suis donc dit: II va y avoir une levée de boucliers que le ministre ne pouvait même pas imaginer avant Noël, mais dont il se rend compte maintenant.

Tantôt vous disiez: On n'est pas toujours bien couverts, nous, les assistés sociaux. Je pense que la commission parlementaire, elle, est bien couverte. Comme c'est la première occasion que l'on a de se parler depuis la fin de nos travaux, la semaine passée, je veux simplement dire au ministre le message qui m'a été dit durant toute la fin de semaine, par plein de monde, y compris quelques journalistes de la région de Montréal: Le ministre, est-ce qu'il continue à rire du monde comme cela en prenant tout le temps des séances de chaque groupe pour leur raconter de quoi sont composés les bénéficiaires de l'aide sociale?

On m'a dit de lui communiquer que c'était une sorte de gramophone avec un disque usé. Pour les gens qui lisent les journaux au Québec, cela fait cinq semaines qu'ils l'ont lu abondamment. Il n'est même plus noté, le ministre, parce qu'il n'a rien d'autre à dire que ce qu'il dit depuis cinq semaines et que tout le monde sait. Les gens m'ont dit de lui faire le message que c'est su. Maintenant, on attend les solutions. Ce sont surtout les solutions, dans son document, qui sont contestées. C'est là-dessus qu'il devrait s'expliquer.

Mme Deschênes: Par exemple, Mme la députée, j'aimerais lui faire une offre, au ministre Paradis. Qu'il vive trois mois avec mon chèque de bien-être et moi, je vais prendre le sien pendant trois mois. Lui, ce sera son chèque de paie, et moi, je vais lui donner mon bien-être. Avec cela, je vais être capable de me faire une épicerie, au moins.

Mme Harel: Mme Deschênes et Mme Bouchard, si vous me permettez, on va examiner la question des jeunes.

Mme Deschênes: Oui.

Mme Harel: Tantôt, le ministre voulait faire son fin-fin en vous parlant de M. Parizeau. Vous avez dû le penser. C'était de la politique politicienne.

Mme Deschênes: Oui, oui.

Mme Harel: Le ministre sait très bien que ce qui était proposé, ce n'est pas tout à fait ce dont il vous a parlé. Ce qui était proposé, c'est que, pour les 18-20 ans, ce soit selon les revenus des parents. Je ne vous en parle pas pour vous dire que je suis d'accord avec cela, je vous en parle pour vous dire que c'est ce que proposait M. Parizeau, quand il était ministre des Finances.

Est-ce une bonne idée, pour avoir relu sa proposition? Ce dont on peut se rendre compte, c'est qu'à 18 ans, quand on est adulte, on ne devrait plus être sur le rapport d'impôt de ses parents parce que, ce qu'il proposait, c'est que, selon le revenu, il y ait une exemption pour enfant à charge. Je ne sais pas si, de ce temps-ci, vous avez vu le rapport d'impôt. Avez-vous pris connaissance...

Mme Deschênes: II est malaisé à remplir, le nôtre, hé?

Mme Harel: Très.

Mme Deschênes: Vous devez le savoir aussi.

Mme Harel: Oui. Très malaisé, Mme Deschênes, et, plus encore, un des observateurs les plus chevronnés, M. Dubuc, écrit dans La Presse: C'est bien plus compliqué de faire un rapport d'impôt quand on n'a rien que quand on en a trop. Et c'est tellement vrai que plein d'annexés... Et je suis en train d'en faire le décompte pour le montrer aux journalistes d'ici. Les annexes, c'est quand on n'a rien qu'il faut les remplir. Quand on a beaucoup, on peut s'abstenir.

Mme Deschênes: Je voudrais vous dire un petit secret là-dessus: Quand on se présente à l'aide sociale, on forme un couple. Un homme et une femme qui restent ensemble, on est un couple. On ne peut pas avoir l'aide sociale de la personne toute seule, seulement mon mari, mais quand on nous envoie le petit T-4, ce n'est même pas ton numéro d'assurance sociale qui est écrit, c'est ton petit numéro de BS avec ta date de naissance. Ils savent quand tu es né. Ils nous séparent: il y en a un qui a la moitié du chèque et l'autre a l'autre moitié. Cela fait qu'on est égal. C'est ce que je me demande: Comment se fait-il que, sur le rapport d'impôt, il faut se séparer, puis on n'a même pas de rapport d'impôt à faire?

Mme Harel: Faites-vous votre crédit d'impôt, par exemple, pour le crédit de taxes de vente?

Mme Deschênes: Oui.

Mme Harel: Maintenant, au contraire, c'est quand vous avez beaucoup de biens que vous en avez moins, puis quand vous n'en avez plus qu'il vous faut faire des rapports d'impôts qui n'en finissent plus.

Mme Deschênes: Oui, c'est cela.

Mme Harel: Je voudrais simplement vous dire ceci concernant les jeunes. M. le ministre faisait son fin-fin en vous parlant de M. Parizeau. La question est: Est-ce qu'il vaut mieux en arriver à une fiscalité individuelle et à une aide sociale individuelle?

Mme Deschênes: Oui.

Mme Harel: J'imagine que vous avez l'air d'avoir des idées sur la question des couples ou la question des personnes seules.

Mme Deschênes: Oui. Cela réglerait bien des problèmes par individu.

Mme Harel: C'est-à-dire que vous préféreriez, par exemple, même en étant un couple...

Mme Deschênes: Oui, c'est cela.

Mme Harel: Vous êtes mariée depuis des années, je pense?

Mme Deschênes: Oui.

Mme Harel: Vous préféreriez que chacun ait son chèque...

Mme Deschênes: Oui, c'est cela.

Mme Harel: ...et que ce chèque soit à votre nom?

Mme Deschênes: Oui.

Mme Harel: C'est une des recommandations qui sont faites, entre autres, par le front commun, par le Conseil du statut de la femme, par de nombreux groupes qui recommandent, à ce moment-là, que l'on voie totalement différemment la conception et le modèle que l'on se fait jusqu'à maintenant de la famille. Finalement, quand on regarde l'aide sociale, on se rend compte que c'est un peu comme la fiscalité. Le modèle de la fiscalité, c'est que c'est bien plus généreux quand vous êtes conjoints de fait que quand vous êtes mariés.

Mme Deschênes: On se punit quasiment

parce qu'on est mariés.

Mme Harel: Dans la fiscalité et à l'aide sociale, deux personnes seules ont ensemble plus qu'un couple.

Mme Deschênes: C'est cela.

Mme Harel: Ce qui fait que l'État est entré dans les chambres à coucher, surtout depuis deux ans...

Mme Deschênes: Oui.

Mme Harel: ...pour essayer de réunifier ce qui n'avait pas été décidé par les gens qui n'avaient pas conclu...

Mme Deschênes: Aussi, il y a une affaire qui est insupportable: Une personne qui reçoit de i'assurance-cnômage, elle va faire une petite "binerie", elle essaie de poigner deux ou trois petites "jobs", il n'y en a pas un qui va parler. Si un assisté social se présente avec quelque chose, là tout de suite...

Mme Harel: Vous voulez dire que la pression du milieu, de l'opinion publique est défavorable?

Mme Deschênes: Oui.

Mme Harel: Est-ce que cela va en augmentant? Pensez-vous que, toute la question des enquêtes et de ce dont le ministre a parlé depuis deux ans, cela a changé ou que c'est le même état d'esprit qu'il y avait avant?

Mme Deschênes: Cela a empiré même. Ceux qui ont des belles "jobs", ils nous regardent encore bien moins, mais ils surveillent s'il y en a un qui fait une petite vesse de travers.

Mme Harel: Mais vous, Mme Deschênes, avez-vous l'impression que cela s'applique à vous aussi?

Mme Deschênes: Oui. C'est à tout le monde. Cette pression-là on la reçoit tous.

Mme Harel: Par ailleurs, vous êtes quelqu'un de connu et, j'imagine, d'apprécié à Hébertville, pour le travail que vous faites, votre dévouement.

Mme Deschênes: Non, c'est un déshonneur de dire qu'il y a des assistés sociaux.

Mme Harel: Mais vous, en tant que personne à Hébertville, les gens connaissent votre dévouement, et ils vous en sont reconnaissants? Quelle est leur attitude à votre égard? (16 heures)

Mme Deschênes: A notre égard, on est un déshonneur. Je vous le dis, on a de la misère à percer. On n'est pas capables d'avoir l'appui de la municipalité pour avoir des locaux, et on n'est pas capables d'avoir l'appui de la caisse populaire pour avoir un prêt pour acheter une maison pour se loger, en tout cas, pour offrir nos services dans une ambiance... Mais là on est empilés. J'aimerais que vous voyiez cela.

Mme Harel: L'organisme, le regroupement? Mme Deschênes: Oui.

Mme Harel: Vous avez de la difficulté, comme regroupement, à aller chercher de l'appui dans le milieu?

Mme Deschênes: Oui. Parce que c'est un déshonneur que d'être des assistés sociaux. Et c'est cela que je ne supporte pas. Aujourd'hui, c'est le rêve de ma vie de dire quelque chose en dehors des quatre murs de ma maison, pour être entendue et dire qu'on a des besoins! C'est le temps que cela change! Mais pour mieux et pas pour pire!

Mme Harel: Vous avez parlé, tantôt, des jeunes, des jeunes femmes surtout qui étaient allées travailler avec vous au regroupement pour des travaux communautaires.

Mme Deschênes: On a des femmes. On a mon mari qui fait autant de bénévolat que moi, à 100 %. Je suis là le matin à neuf heures. On dîne là. Mon mari vient me trouver. Il y a des soirs qu'on soupe là et qu'on part de là à onze heures.

Mme Harel: Les jeunes personnes qui sont allées pour les travaux communautaires, est-ce que c'étaient surtout des femmes ou des...

Mme Deschênes: On a deux femmes et un jeune homme.

Mme Harel: Un jeune homme. Vous aviez d'abord dit qu'il y en avait d'Hébertville, mais là...

Mme Deschênes: Oui. Mme Harel: ...comme... Mme Deschênes: C'est cela.

Mme Harel: ...ils avaient terminé leur année...

Mme Deschênes: Oui.

Mme Harel: ...il fallait aller les chercher ailleurs.

Mme Deschênes: Ailleurs.

Mme Harel: Que sont devenues ces personnes qui avaient fait les travaux communautaires?

Mme Deschênes: Disons qu'elles travaillent encore à des travaux communautaires. Cela va se terminer en octobre. C'est pour un an.

Mme Harel: Qu'est-ce qu'il y a comme entreprises à Hébertville?

Mme Deschênes: II n'y en a pas... Mme Harel: Comme jobs?

Mme Deschênes: ...en général. C'est une petite municipalité, ce n'est pas une ville. On se trouve à être une paroisse voisine de Québec. On est en banlieue.

Mme Harel: De quoi les gens vivent-ils?

Mme Deschênes: Ce sont surtout des agriculteurs. Et il y a Alcan.

Mme Harel: Est-ce qu'il y en a plusieurs qui vont à Alcan? Alcan n'embauche plus là.

Mme Deschênes: Non, elle n'en prend plus. Mais ce sont surtout des agriculteurs.

Mme Harel: Les bénéficiaires de l'aide sociale sont-ils en général des familles ou des jeunes...

Mme Deschênes: Ce sont des familles, des familles monoparentales. On a quelques jeunes. Mais il y en a encore, vous savez... C'est gênant de dire qu'on est un assisté social parce qu'on sait qu'on n'est pas accepté. Il y en a encore, dans notre milieu même, de ces gens-là, dans notre paroisse, qui ne se sont pas encore décidés à venir.

Mme Harel: Qui sont encore anonymes? Mme Deschênes: C'est cela.

Mme Harel: Dites-moi, est-ce que... Vous avez parié des dîners, des lunchs et de la fermeture de l'école secondaire...

Mme Deschênes: Oui.

Mme Harel: ...pour quelle raison? Cela a l'air de vous préoccuper beaucoup.

Mme Deschênes: Cela a commencé avec les petites écoles de rang. On a commencé par fermer les petites écoles de rang. Je viens de là, moi, d'une petite école de rang. En passant, j'ai deux ans et demi d'études. Cela fait que j'ai une belle grosse instruction! Mais, en tout cas, disons que je me débrouille assez bien parce qu'avec ma gueule je ne fais pas de faute. Je dis peut-être des choses que je ne devrais pas dire, mais personne ne les voit, en tout cas. Quand même ils les voient, partout où je me suis adressée, j'ai toujours eu une réponse. J'ai même déjà écrit au ministre Paradis.

Mme Harel: Avez-vous eu une réponse?

Mme Deschênes: Non, lui, il ne m'a pas comprise, par exemple. Il m'aurait peut-être comprise quand il était dans l'Opposition.

Mme Harel: II est devenu plus sourd. Mme Deschênes: Oui.

Mme Harel: Si j'ai bien compris votre mémoire, ce qui est pour vous un tracas, c'est que les enfants doivent manger à l'école...

Mme Deschênes: Oui, c'est cela.

Mme Harel: Vous voulez dire qu'ils peuvent apporter leur repas.

Mme Deschênes: Oui, c'est cela.

Mme Harel: Et vous pensez que c'est plus coûteux?

Mme Deschênes: Quand les miens sont allés à Aima, ce n'était pas mêlant, ils ne mangeaient pas le midi parce que je ne pouvais par leur donner d'argent. Cela coûtait 4 $.

Mme Harel: Vous voulez dire le repas chaud.

Mme Deschênes: Oui, un repas chaud ou... Mme Harel: Un repas convenable.

Mme Deschênes: ...pour dîner à l'école. Un repas convenable. Comment voulez-vous faire des sandwichs? Toujours des sandwichs aux oeufs? On sait que les repas des assistés sociaux sont composés à 95 % d'oeufs. Je vous dis que leur donner des sandwichs aux oeufs pour dîner quand ils savent qu'en entrant le soir ils vont peut-être manger des crêpes... Encore pour faire des crêpes... On dit que c'est le repas le plus niaiseux, mais cela prend de la graisse et il y a des fois qu'on n'en a même pas de la mosus de graisse!

Mme Harel: En vertu de l'alternance, je vais...

Mme Deschênes: C'est dur de donner des crêpes dans des lunchs, pour dîner.

Le Président (M. Laporte): M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Combien de

temps me reste-t-il?

Le Président (M. Laporte): Combien reste-t-il de temps aux diverses formations?

Une voix: Quatre.

Le Président (M. Laporte): Quatre pour M. le ministre et... Merci. M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vais tenter, madame, de nous replacer un petit peu dans le débat parce que, d'un côté comme de l'autre de la table, on s'accuse souvent de choses et cela fait partie du jeu politique. Mais il y a des éléments qui transcendent le jeu politique.

On ne peut pas accuser un gouvernement, un ministre ou un député de l'Assemblée nationale de tenter de véhiculer une fausse image de l'assisté social et, en même temps, l'inviter à se taire sur cette véritable image, comme l'a fait Mme la députée de Maisonneuve.

Je pense qu'il existe dans la société de fausses perceptions des assistés sociaux et l'une des façons de rétablir ces perceptions, est d'en donner le vrai portrait à la population. Tant que ce vrai portrait n'a pas pénétré, je pense que le devoir d'un membre de l'Assemblée nationale, d'un ministre et d'un gouvernement est de répéter ce message. Il n'y a pas beaucoup de gens, dans la société, qui pensent que les assistés sociaux ne se trouvent pas d'emploi à cause des carences qu'on a mentionnées tantôt: la question de l'alphabétisation, la question de la scolarisation et la question de l'expérience antérieure de travail. Beaucoup de gens pensent que les assistés sociaux ne sont généralement pas des analphabètes, des gens qui ont besoin d'une scolarisation plus poussée ou qui n'ont pas d'expérience antérieure de travail. Je pense qu'il est de notre devoir, à vous dans votre communauté, auprès de la mairie et des autres gens de la municipalité, à Mme la députée de Maison-neuve dans sa communauté et au ministre... Et qu'on souhaite me bâillonner là-dessus lorsque je décris le portrait de l'assisté social dans le but de dire que ce n'est pas facile pour cette personne-là de se trouver un emploi, que dans certains cas c'est impossible... Quand Alcan publie des offres d'emplois chez vous, est-ce qu'elle exige au moins un secondaire?

Mme Bouchard: Elle demande l'équivalent d'un secondaire V.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): L'équivalent d'un secondaire V? Elle demande au moins cela. C'est impossible pour un assisté social chez vous qui n'a pas son secondaire V de solliciter un emploi même si cette personne veut aller travailler chez Alcan.

Tantôt, dans votre exposé du début, vous parliez de la dame qui voulait aller travailler à éplucher des patates.

Mme Deschênes: C'est moi.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ah, bon! C'est vous, en plus de ça.

Mme Deschênes: Vous l'avez. Elle est en face de vous.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Bon.

Mme Deschênes: Quand mon mari a arrêté de travailler, je me suis dit: Je ne suis pas capable de laver des murs parce que ma santé ne me le permet pas. Mais j'ai dit: "Câline", éplucher des patates avec des couteaux, cela fait 40 ans que j'en épluche, je suis capable. Je téléphone; on me demande: Avez-vous de l'expérience? Je lui dis: Ça fait 40 ans que j'épluche des patates. Elle me demande: Avez-vous déjà travaillé dans des restaurants? Je lui ai dit: Non, mais je cuisine à la maison depuis 40 ans. Cela ne comptait pas. On raccroche le téléphone. Alors, j'ai dit: Envoie, Carmen! Assois-toi à table et écris! C'est là que j'ai continué à fonder l'association.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Écoutez, madame, ce que je vous dis...

Mme Deschênes: On s'appelle les Gens oubliés de Notre-Dame-d'Hébertville. Disons que le Regroupement des assistés sociaux est un petit à-côté. Ce sont les Gens oubliés parce que c'est vrai qu'on est oubliés, nous, les assistés sociaux.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ce que je vous dis, c'est que je vais continuer à répéter votre message et je vais peut-être ajouter votre exemple qui m'a frappé: Avez-vous une expérience antérieure? Je vais dire: La dame d'Hébertville à qui on a demandé une expérience antérieure de travail a dit: J'en ai, mais elle n'est pas reconnue parce que j'ai travaillé à la maison toute ma vie.

Je ne me tairai pas; je vais continuer à le répéter au grand dam de ceux et celles qui ont une fausse image. Ils apprendront à vivre avec la véritable image. Quant aux jeunes, par exemple, madame, de 18, 19 ou 20 ans, c'est une autre altercation à laquelle vous avez assisté; je ne sais pas ce qui s'est passé en fin de semaine, j'ai appris, en lisant le livre blanc de M. Parizeau sur la fiscalité, bien des choses là-dedans.

J'ai également suivi la campagne et le couronnement qui s'est terminé la semaine passée et j'ai appris, il y a dix ou quinze jours, que ce que M. Parizeau souhaiterait, c'est d'exclure les jeunes de 18, 19 et 20 ans de l'aide sociale. Je ne l'invente pas. Je l'ai pris dans une entrevue qu'il a donnée au Soleil, aux journalistes Michel David et André Forgues, à moins qu'ils n'aient également rien compris. On a fait les projections

et cela exclut 30 000 jeunes.

On est contre cela. Quand Mme la députée de Maisonneuve m'accuse de ne pas vous dire la vérité...

Mme Deschênes: Oui, mais vous étiez capable de le faire aussi bien. Prouvez-leur que vous faites aussi bien qu'eux.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Pire!

Mme Deschênes: C'est tout. Faites mieux pour voir. Essayez d'améliorer notre situation. Prenez des jeunes; mes enfants ne sont pas allés au cégep et à l'université. En tout cas, ils ont quand même fini leurs études. J'en ai un qui est sorti cuisinier...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Quand vous dites qu'ils ont fini leurs études, c'est le secondaire technique, ces choses-là?

Mme Deschênes: Oui, c'est cela, avec leur cours.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'accord.

Mme Deschênes: J'en ai un qui est cuisinier. En cuisine, le salaire minimum n'est pas tellement élevé. Ce n'est pas dans notre place qu'il aurait été capable de se trouver un emploi. Alors, il fallait qu'il aille à Aima. Là, il ne lui restait absolument rien. Il s'était acheté une "minoune", comme c'est bien spécifié dans le mémoire, mais, à un moment donné, la "minoune" demande des réparations et il n'est pas capable. Là, il dit: Je vais changer de métier parce que, dans son cours de cuisine, il y avait autre chose aussi; il y avait la boucherie. Il a postulé un emploi dans un abattoir et il est rendu là. Savez-vous qu'on le demandait à une heure et demie de chez nous pour aller travailler? Cela lui prenait de vingt minutes à une demi-heure pour monter travailler à Saint-Coeur-de-Marie, pour finir à 16 heures. Est-ce que cela vaut la peine? Il a dit: En tout cas, je vais y aller; cela va prouver que je veux travailler. Aujourd'hui, il est collé là, mais il l'a gagné en liti", par exemple. On n'était pas capables de l'aider, on n'était même pas capables de vivre dans la maison.

Le Président (M. Laporte): Je m'excuse, M. le ministre. Le temps étant malheureusement écoulé...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Juste pour une information. À l'abattoir, combien est-il payé?

Mme Deschênes: Eh bien, maintenant, il est parti de chez nous...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Rapidement.

Mme Deschênes: ...je ne m'informe pas de ses salaires, mais il n'a pas tellement encore.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'accord

Le Président (M. Laporte): Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: M. le Président, vous savez, demain matin à 11 heures, je pense, la CEQ, la Centrale de l'enseignement du Québec, va venir présenter son mémoire devant la commission. D'une certaine façon, je pense que cela va être une minute de vérité parce que le ministre me fait tellement penser - je ne sais pas si vous vous rappelez les litanies de la Fête-Dieu, dans le temps des grandes processions...

Mme Deschênes: Oui.

Mme Harel: ...où vous invoquiez tous les problèmes du monde en disant: Ora pro nobis, sans avoir aucun moyen de trouver les solutions.

Mme Deschênes: Je peux même les lui chanter, parce que je me le rappelle.

Mme Harel: C'est exactement cela qu'il fait. Une sorte de litanie qu'il continue. D'abord, il y a des faits dont il doit tenir compte et dont il ne parle jamais. Il y a 33,5 % des bénéficiaires qui ont complété leur secondaire, qui l'ont déjà terminé totalement; cela veut dire un sur trois. À eux et à elles, que propose-t-il comme qualification professionnelle? Que leur propose-t-il comme plan de formation professionnelle? Un véritable accès à de la vraie formation: il n'en parle pas.

Mme Deschênes: Non.

Mme Harel: Ceux dont il parle... Que fait-il pour qu'il y ait un vrai plan de campagne de scolarisation pour l'autre tiers qui est en difficulté d'analphabétisme? Il n'en parle pas. Oui, c'est grave et c'est assez grave qu'on ne peut pas juste répéter cela, mine de rien, sans mettre sur la table un plan de scolarisation. Savez-vous ce qui se passe, Mme Deschênes et Mme Bouchard? Le ministère de l'Éducation a même annoncé une réduction de ses crédits au chapitre de l'éducation des adultes.

Vous comprenez qu'à un moment donné cela devient... On a l'impression que le ministre vit dans un monde complètement imaginaire et que, dans ce monde, les solutions vont venir comme par magie. C'est une sorte de Pentecôte qui va s'installer. On ne sait pas comment cela va se passer. Entre-temps, il y a un problème qu'il pourrait régler, celui de l'équivalence des femmes. On retrouve cela dans votre mémoire.

Mme Deschênes: Oui

Mme Harel: L'équivalence de l'expérience. Vous en avez parlé dans votre mémoire. J'ai rencontré, en fin de semaine, une dame qui me disait avoir été famille d'accueil avec des enfants difficiles qu'elle a même adoptés, avoir mis sur pied la garderie en milieu scolaire de son école, avoir mis sur pied le comité de parents et n'avoir jamais pu se faire embaucher, non pas comme directrice de la garderie, mais comme simple employée, parce que la commission scolaire lui a dit: On regrette beaucoup...

Mme Deschênes: II faut être formé.

Mme Harel:... vous ne l'avez pas. Alors, pourquoi ne pas pousser le dossier des équivalences scolaires, notamment, à l'égard de l'expérience que les femmes ont acquise, qui est une expérience considérable très souvent? C'est l'autre aspect. Vous comprenez, avec l'expérience que vous avez, c'est certain qu'il n'est pas dit qu'il n'y aurait pas lieu d'aller vous chercher des équivalences. Les équivalences, on ne sait pas trop ce que cela donnerait, mais cela pourrait être intéressant pour vous.

Mme Deschênes: II n'a pas pensé non plus - il a pensé au monde de la ville aussi - que, dans les municipalités, il n'y a absolument rien. Il n'y a rien.

Mme Harel: Vous voulez dire rien comme formation.

Mme Deschênes: Quand bien même je dirais: Demain matin, je veux travailler... Dans notre municipalité, c'est impossible pour une femme de travailler à part que d'aller travailler dans les maisons privées. Il faut que tu te déplaces vers Alma, et de l'emploi il n'y en a pas, et il n'y en aura pas plus l'année prochaine, et il n'y en aura pas plus en 1989, quand la réforme de l'aide sociale arrivera.

Mme Harel: Par exemple, voudriez-vous pouvoir vous faire reconnaître des équivalences en termes d'expérience?

Mme Deschênes: C'est cela, et qu'il y ait des choses aussi d'organisées...

Mme Harel: Est-ce que vous pouvez aller présentement...

Mme Deschênes:... pour les paroisses.

Mme Harel:... à la commission scolaire? Pouvez-vous aller présentement suivre des cours?

Mme Deschênes: Pas à Hébertville. Il faut aller à Alma.

Mme Bouchard: II faut toujours se déplacer.

Mme Deschênes: II faut toujours se déplacer.

Mme Bouchard: II faut toujours se déplacer, tout le temps, tout le temps. Même nos jeunes, s'ils veulent travailler, il faut qu'ils se déplacent à l'extérieur.

Mme Deschênes: ils ne pensent pas à cela du tout, du tout.

Mme Harel: Le bureau d'aide sociale est-il... Mme Deschênes: II est à Alma. Mme Harel: À Alma.

Mme Bouchard: II est à Alma. Encore là, il faut se déplacer.

Mme Deschênes: Là, tu ne marches que par numéros encore, et si tu n'as pas de rendez-vous, tu ne peux pas passer. Quand bien même tu irais... J'ai une lettre ici, justement des centres de main-d'oeuvre, et je veux vous la montrer. C'est mon mari qui a demandé un emploi depuis l'année passée. Il y avait la construction d'un centre communautaire à Hébertville. On a dit: De l'ouvrage proche. C'est de la construction, et mon mari avait toutes ses cartes. Il est allé donner son nom au centre de main-d'oeuvre et, au centre de main-d'oeuvre, les gens ne savaient même pas encore qu'il y avait une construction d'annoncée quand il est arrivé. Il a donné son nom. Là, depuis le mois de juin qu'on attendait. Il a donné son nom à la municipalité. Cela a été remis de mois en mois à aller virer jusqu'au mois de février. Au mois de février, deux appels de la municipalité pour avoir les renseignements. L'espoir était rendu au bout. On a dit: Enfin, on va être capables de manger. Mais, au bout de quelques jours, je n'avais pas eu de nouvelles. J'ai téléphoné à la municipalité et ont m'a dit qu'il n'avait pas été choisi, qu'il y en avait trop. (16 h 15)

Mme Harel: Voulez-vous lire la lettre?

Mme Deschênes: J'aimerais autant vous la donner. Je peux vous la laisser en cadeau. "La présente a pour but de vous confirmer que M. Jean-Marc Deschênes s'était bien inscrit à la municipalité d'Hébertville de même qu'au centre d'emploi du Canada pour travailler sur un programme de PDE du gouvernement fédéral. "Cependant, M. Deschênes ne fut pas retenu lors de la sélection effectuée par le conseil. Le nombre imposant de candidats ayant postulé pour ces emplois a malheureusement conduit le conseil municipal à mettre de côté certaines personnes qui possédaient tout de même du bon potentiel. "Espérant ces renseignements à votre entière satisfaction, veuillez me croire, monsieur, madame... "

C'est Sylvain Lemay, notre secrétaire-trésorier.

Mme Harel: C'était un programme-Le Président (M. Laporte): Malheureusement, Mme la députée de Maisonneuve...

Mme Harel: ...c'était un programme fédéral.

Le Président (M. Laporte): ...le temps est terminé.

Mme Harel: C'est cela? C'est un programme PDE.

Mme Deschênes: Oui, mais cela ne fait rien. C'était de l'emploi qu'on espérait et qu'on mûrissait.

Mme Harel: Bien sûr.

Le Président (M. Laporte): Malheureusement, le temps est écoulé.

Au nom des membres de la commission, j'aimerais remercier le Regroupement des assistés sociaux d'Hébertville pour la présentation de leur mémoire, tout en leur souhaitant un bon retour dans leur région. Merci beaucoup.

J'aimerais inviter maintenant les représentants de la Maison des jeunes Saint-Jean-Baptiste à bien vouloir s'avancer.

La commission suspend pour une minute et quart.

Maison des jeunes Saint-Jean-Baptiste

Nous tenons à souhaiter la bienvenue aux représentants de la Maison des jeunes Saint-Jean-Baptiste inc. Par la présente, j'aimerais vous réitérer très brièvement la procédure de la commission. Vous étiez présents lorsque je mentionnais le mandat de la commission. Vous avez 20 minutes pour la présentation de votre mémoire. Par la suite, il y aura 40 minutes d'échanges avec les parlementaires.

J'inviterais le porte-parole, à tout le moins, à bien vouloir s'identifier et, par la suite, chacune des personnes qui l'accompagnent. La parole est à vous.

M. McKay (Sandy): C'est parfait Bienvenue et bonjour. Cela va être une présentation collective, ce qui fait que cela va changer de côté vite. Le bonhomme à la lumière, j'espère qu'il va être bon pour suivre.

Je me présente. Je suis Sandy McKay. Je suis responsable du projet 16-22 ans au sein de la Maison des jeunes Saint-Jean-Baptiste. ...À gauche...

Mme Lavoie (Raymonde): Je suis Raymonde Lavoie. Cela fait sept ans que je travaille comme animatrice à la Maison des jeunes Saint-Jean-

Baptiste.

Mme Partarrieu (Viviane): Je suis Viviane Partarrieu. Je suis présidente du conseil d'administration de la Maison des jeunes Saint-Jean-Baptiste.

M. Trépanier (Vincent): Je suis Vincent

Trépanier. Je suis animateur contractuel pour le moment à la Maison des jeunes Saint-Jean-Baptiste.

M. Morel (Jean-Louis): Je suis Jean-Louis Morel, de la Maison des jeunes Saint-Jean-Baptiste, travailleur.

M. Roy (Stéphane): Je suis Stéphane Roy Je suis en stage en milieu de travail à la Maison des jeunes Saint-Jean-Baptiste.

Le Président (M. Laporte): Merci.

M. McKay: La façon dont on veut procéder, c'est simplement qu'au lieu de lire le texte que vous avez tous en main on va procéder au résumé. Ensuite, chacun de nous va présenter un petit discours très court, une présentation pour vous donner une idée très claire de ce qu'on peut représenter.

Le Président (M. Laporte): Vous avez toute la liberté pour la présentation de vos exposés.

M. McKay: Parfait. Pour commencer, je pense qu'il est important de souligner la présentation de Mmes Deschênes et Bouchard. Ce n'était pas seulement poignant, pertinent, mais je pense qu'elles-mêmes ont démontré clairement jusqu'à quel point ce n'est pas vrai que, parce qu'on est bénéficiaire d'aide sociale, on n'est pas intelligent.

La question qui vient à nos têtes, c'est comment peut-on proposer une réforme où ces personnes seront pénalisées après avoir travaillé des années et avoir élevé une famille dans des conditions, parfois, épouvantables? Comment peut-on prévoir une réforme où elles seront coupées? On pourrait revenir à cette question à la fin.

Pour commencer, c'est Raymonde qui va vous expliquer un peu notre travail.

Mme Lavoie: Le projet de la Maison des jeunes existe depuis plus de dix ans et nous travaillons également dans un HLM. Nous avons une salle. Le projet s'adresse à des jeunes de 12 à 18 ans. On ouvre du mardi au samedi, de 14 heures à 22 heures et, les fins de semaine, jusqu'à 23 heures. C'est un endroit où les jeunes ont un sentiment d'appartenance, parce qu'ils participent, ils s'impliquent, à l'intérieur de la maison. Cela s'adresse à des garçons et à des filles. Nos objectifs sont l'autonomie des jeunes et leur prise en charge par eux-mêmes, ce qui

fait que tout ce qu'on fait comme activité, c'est pour qu'ils arrivent à être autonomes. La situation physique: on est dans le quartier Saint-Jean-Baptiste et la salle est au HLM de Bour-lamaque. La majorité des familles sont des familles sur le bien-être social.

Pour atteindre nos objectifs, on a différentes activités. On fait des fins de semaine de groupes à la campagne, où il y a partage des tâches - de bouffe, de vaisselle, de ménage - et des discussions. Ensuite, il y a différents ateliers qui se donnent à la Maison des jeunes: l'atelier de menuiserie, de musique, de vidéo, de cuir. On fait beaucoup d'autofinancement aussi pour avoir des projets spéciaux avec les jeunes, parce qu'on paie toujours la moitié des activités pour leur permettre d'y assister.

On intervient beaucoup également; on vient en situation d'aide. Ce qui différencie notre travail de celui des travailleurs sociaux, c'est qu'on est en lien direct avec les jeunes et partout: dans la rue, à l'école, à la maison, dans les familles également. On aide beaucoup les familles monoparentales. Dans la majorité des cas, ce sont des femmes qui sont seules avec leurs jeunes. Notre disponibilité est très large. À chaque fois qu'un problème se présente, on est disponible pour aider. Par exemple, les problèmes de suicide, d'inceste, de drogue, de prostitution, les problèmes de communication avec les parents, les problèmes à l'école. On les appuie tout le temps et on est toujours présent auprès des jeunes et des parents.

Nous sommes en mesure de parler des problèmes que vivent les jeunes sur le bien-être social, parce qu'on les côtoie quotidiennement. Ce qui nous inquiète aussi beaucoup, c'est que nous risquons de nous ramasser sur le BS également, parce qu'à chaque année on doit refaire nos demandes de subvention et chercher de l'argent pour continuer. Il y a beaucoup de bénévoles qui travaillent également avec nous.

En tout cas, vous me poserez des questions si vous voulez en savoir plus. Je pense que j'ai fait un peu le tour de dix ans.

M. McKay: Maintenant, c'est Vincent qui vous donnera le résumé du mémoire qu'on a déposé.

M. Trépanier: Pour préparer notre mémoire, d'abord, l'analyse qu'on a faite du document d'orientation "Pour une politique de sécurité du revenu", cela a été d'essayer de comparer les différentes réformes à des cas concrets, à des gens qui existent, pour voir dans quelle mesure ça affecterait vraiment leur vie. Finalement, il y a des gens qui vont témoigner là-dessus. Cela nous a amenés à proposer certaines corrections à des situations qu'on trouve inacceptables.

Pour commencer, l'indépendance des personnes. Nous exigeons que les trois mesures: responsabilités parentales, partage des logements et responsabilités solidaires des conjoints soient retirées et que l'indépendance des personnes à partir de 18 ans soit réaffirmée.

Le travail au foyer. Cela rejoint un peu les groupes qui témoignaient avant nous. Nous exigeons que le travail au foyer soit reconnu, que les parents aient droit aux prestations maximaies de l'aide sociale et que les démarches qu'ils ou elles entreprennent pour entrer sur le marché du travail ou retourner aux études s'effectuent sur une base volontaire et soient soutenues par l'État.

Les besoins spéciaux. Nous exigeons que les besoins spéciaux soient maintenus et que les montants alloués soient conformes à la réalité. On a ajouté: surtout dans le cas des enterrements, parce que cela a l'air que les bénéficiaires d'aide sociale n'ont même pas les moyens de mourir.

Stages en milieu de travail. Nous demandons que les stages en milieu de travail soient associés à l'obligation de l'employeur de garder les personnes avec salaire pour une période minimum de deux ans. Il est illogique et discriminatoire que les personnes admissibles à un programme et désireuses de s'y inscrire, mais qui ne peuvent le faire, reçoivent des prestations moindres que les personnes participant à de tels programmes. Pour corriger cette situation, nous demandons à l'État de s'engager à fournir un stage à toute personne qui s'inscrit dans le programme APTE ou à lui payer les mêmes montants que la personne qui participe déjà.

En ce qui concerne le rattrapage scolaire, nous demandons que le gouvernement du Québec s'engage à fournir toutes les ressources scolaires nécessaires pour répondre à ces besoins nouveaux. Nous demandons que les cours aux adultes favorisent une approche globale intégrée et comprehensive du vécu des bénéficiaires, de leurs besoins spécifiques, et que les professeurs soient choisis en fonction de cette approche.

La parité. Nous exigeons que le gouvernement accorde immédiatement la parité pour les moins de 30 ans et ceci aux barèmes en vigueur avec indexation.

Pour terminer, le projet de réforme a été préparé sans aucune véritable consultation populaire. Donc, nous demandons qu'après le dépôt de la Loi sur l'aide sociale à l'Assemblée nationale soit tenue une vraie consultation populaire, sur une base régionale.

M. McKay: Maintenant, Jean-Louis va vous raconter sa vie, en deux minutes.

M. Morel: Je suis allé à l'école comme tout le monde. À l'école secondaire, j'ai suivi jusqu'en secondaire IV, et cela allait très bien. À un moment donné, je me suis dit: Tout le monde va dans les mêmes branches, et, moi, ce que je voulais faire, c'était plus aller dans la construction, ce que je voulais faire, c'était un métier professionnel. Donc, je suis sorti du secondaire IV pour redescendre en secondaire I. J'ai tout

repris pour suivre le métier de briqueleur maçon. J'ai fait cela pendant quatre ans. Je suis reparti du secondaire I, mais professionnel I, II, III, IV. Puis, je suis sorti. On suit tout le cours et tout le long, c'est la romance: Tu vas avoir tes cartes et tu vas travailler plus tard. Cela a bien été dans mon cas. Je suis sorti avec mon diplôme. J'ai fait un stage en construction. L'employeur était prêt à me garder parce qu'il n'y avait pas beaucoup de jeunes dans ce métier. À trois reprises, on a fait les démarches pour obtenir mes cartes d'apprenti. À trois reprises, cela a été négatif de la part de l'Office de la construction; on disait qu'il n'y avait pas d'ouvrage. J'avais l'emploi déjà, mais cela a été bloqué carrément. L'employeur a dû me congédier à cause de cela. Dans le métier que j'avais, c'était la même histoire pour la plupart des gens qui ont suivi le cours, sauf pour ceux dont le père était déjà briqueleur.

La question que je pose est celle-ci. Pourquoi ne pas m'avoir donné mes cartes d'apprenti? Je pouvais travailler, j'avais la chance, j'avais l'employeur qui était là pour me soutenir. Comment voulez-vous qu'on soit stimulé à suivre des cours professionnels quand on est toujours face à des situations de refus et de blocage? Quand ce n'est pas de la part du patron, c'est de la part du gouvernement? Est-ce la faute des jeunes ou celles du système s'il n'y a pas de travail?

Il y a aussi présentement des usines de chaussures qui sont fermées pour au moins trois semaines ou peut-être plus. Je connais des gens qui travaillent là. Avec le libre-échange, c'est une tout autre histoire: l'usine est fermée complètement pour trois semaines ou plus. Tout le monde se retrouve mis à pied. Ce sont toujours des cas comme cela.

Moi, après mon stage, je me suis retrouvé sur le bien-être social. Quand j'étudiais, je travaillais en plus dans un restaurant pour arriver, payer mes petites sorties et tout cela. J'ai fait mon bout, je pense.

M. McKay: Jean-Louis il représente la première génération des jeunes chez nous. La deuxième génération devait être représentée par Stéphane Paradis, qui est malheureusement à l'école, en travail scolaire. Le problème vécu par Stéphane et certains autres chez nous, que ce soit Graig, Jeff et d'autres, c'est qu'ils font le cours professionnel court ou long, mais ils sont repoussés au primaire à cause du français. C'est très bien de vouloir améliorer le français. Qu'est-ce que cela veut dire concrètement pour des jeunes en cours professionnel court, qui ont de 18 à 21 ans, donc qui sont admissibles à l'aide sociale? C'est qu'ils sont repoussés, vous pouvez le vérifier, au primaire à cause du français à peu près comme le mien. Cela c'est la deuxième génération actuellement, chez nous, c'est le problème qu'ils vivent et pourquoi ils sont sur l'aide sociale.

(16 h 30)

Nous allons passer à Stéphane Roy qui va nous parler plus spécifiquement des stages en milieu de travail.

M. Roy: Je suis en stage à la Maison des jeunes et j'aimerais qu'on améliore les stages pour que le gouvernement exige que l'employeur, à la fin du stage, offre un emploi de deux ans avec un bon d'emploi. Présentement, de la façon que cela fonctionne, le jeune est en stage pendant un an. Après, il se trouve à revenir sur le bien-être à 178 $. Je pense qu'on devrait donner la possibilité... En plus, le jeune n'a pas la possibilité de faire un autre stage. Tu as un an et c'est fini. Le jeune se retrouve encore sur le BS, sans emploi. Je pense que ce genre de stage n'est pas bon pour le jeune. C'est mieux pour l'employeur, parce qu'il donne moins de salaire. Bien des fois, on a de la misère à avoir ce qu'on veut, notre paye.

Le jeune, en plus, quand il sort de là, il est obligé de se trouver une "job" comme plongeur. Moi, cela ne me valorise pas trop d'aller travailler comme plongeur. Je pense qu'on n'est pas supposé laisser un jeune dans une situation pareille.

Il y a une expérience que je suis en train de vivre présentement. J'habite un 3 1/2 pièces avec deux amis parce que je ne suis pas capable de me payer un appartement tout seul. Avec la réforme que vous proposez, je perdrais 115 $ par mois parce que j'habite avec deux amis. On ne serait pas supposé enlever 115 $ à un jeune qui se débrouille à sa façon à lui, pour payer moins cher de loyer.

Le jeune n'est pas incité à se lancer dans la vie pour devenir plus autonome. En s'en allant, il est perdant, on lui enlève 115 $. Le jeune va demeurer chez sa mère. Comme je ne suis pas trop intéressé à demeurer chez mes parents, à cause des conditions de vie qu'il peut y avoir... Avec la réforme que vous proposez, ce n'est pas très intéressant. Je perdrais 115 $. Pensez-vous que...

On ne devrait pas toucher au bien-être social d'un jeune qui se débrouille pour payer moins cher. Cela n'a pas de bon sens. J'espère que vous allez retenir ce que je viens de dire. C'est important. La situation est dramatique pour les jeunes au Québec. Quand on vit des problèmes de survie, on se retrouve seul à les affronter. Merci.

M. McKay: On va passer à notre présidente, Viviane Partarrieu.

Mme Partarrieu: Depuis six mois, je travaille à temps partiel, c'est-à-dire sur appel. Vu que j'ai un enfant, j'ai droit à un montant de 45 $ de plus par mois. Si je travaille, disons, un jour par mois, je peux rentrer dans mon argent, mais, quand on travaille cinq, six jours, des fois sept, huit, à ce moment-là, mes 45 $ ne sont

plus là. J'emprunte encore en plus sur mon chèque d'aide sociale. Ce qui fait que j'ai encore moins que ceux qui sont réellement sur le bien-être social. Je voudrais savoir depuis combien de temps cela n'a pas été indexé au coût de la vie, le fameux supplément. Je pense que cela doit faire plus d'une dizaine d'années, à peu près. Tout augmente. Les transports en commun aussi ont augmenté. Mais cela n'a jamais bougé. C'est tout.

M. McKay: Excellent, Viviane. En plus d'être présidente de notre CA, elle est mère de trois enfants, en plus de faire le travail qu'elle fait, dans un hôtel ici en bas de la côte. Je veux souligner son travail auprès de nous, à soutenir les démarches qu'on fait. On la remercie énormément.

Savez-vous que si jamais elle laissait savoir au bien-être social qu'elle faisait trop de bénévolat, dans le cadre d'un projet, elle pourrait se faire sévèrement réprimandée? Parce qu'elle fait trop de bénévolat et qu'elle n'a pas nécessairement le droit. Pour terminer, on va passer à Vincent, qui va parler de...

Une voix: ...contribution alimentaire.

M. Trépanier: Moi, j'ai une formation en électronique appliquée aux micro-ordinateurs. Je n'ai pas reçu mon DEC. Il me manque un cours de français et un cours de philo. Présentement, je n'ai pas le temps de les faire non plus, ce qui fait que je n'ai pas réussi à me trouver un emploi permanent dans ce domaine. Je travaille à contrat, d'un bord et de l'autre. Présentement, je suis à contrat avec la Maison des jeunes et cela ne va pas vraiment dans le sens de ma formation non plus.

Pour le moment, cela va, j'ai des contrats. Mais si à un moment donné je me retrouve sur l'aide sociale, avec ma situation, avec la réforme, mes parents auraient une contribution alimentaire à payer. Mon père est à la retraite. Il a quand même une maison à payer. Je me vois très mal arriver et lui annoncer qu'il a un montant à payer parce que je n'ai pas réussi à me trouver de l'ouvrage. Je ne vois pas non plus pourquoi, lui, il aurait un montant à payer là-dessus.

M. McKay: Pour le moment, cela termine nos présentations. Juste une question avant de se lancer dans la période de questions. On a réussi à avoir des informations du bureau du ministre Paradis en rapport avec les chiffres. C'est Mme Dussault qui nous a répondu. Je ne sais pas si elle est là. Je souligne que c'est après trois appels téléphoniques très difficiles desquels on n'a pas eu satisfaction que l'on est finalement tombé sur Mme Dussault, qui était très coopérative et qui nous a donné de très bonnes informations, claires et précises. Elles ont été bien appréciées. Si le bureau de l'aide sociale est aussi difficile d'accès que vos bureaux, M. le ministre, vous comprenez les problèmes que peuvent vivre les bénéficiaires de l'aide sociale quand ils téléphonent au bureau. Alors, chapeau à Mme Dussault.

Selon les chiffres du mois de novembre, on aura 46 000 personnes de moins de 30 ans à 188 $ par mois. C'est vrai, c'est ce qu'on avait dit. Seulement 18 % sont dans des programmes. Mais c'est 18 % de l'ensemble des 115 000 personnes de moins de 30 ans qui sont bénéficiaires de l'aide sociale: il y a 21 000 personnes qui sont dans les programmes. Alors, où passent toutes les autres personnes? Il y a une différence de 30 000 personnes, des jeunes qui ne sont pas dans les programmes et qui sont à 188 $. Avec Mme Dussault on a eu une bonne discussion et elle m'a répondu que ce sont des personnes au foyer. C'est possible qu'une partie d'entre elles soient au foyer, mais il y en a un bon nombre qui ne sont pas au foyer, qui veulent travailler et qui veulent entrer dans les programmes. Ce que Stéphane n'a pas souligné, c'est qu'il est resté un an et demi à attendre avant d'entrer dans le programme Stage en milieu de travail. Il est entré seulement quand il est arrivé au bureau de l'aide sociale ici à Québec, dans un grand centre, avec son employeur. Alors, on a de la difficulté à comprendre et à accepter que toute personne, tout jeune de moins de 30 ans qui désire travailler dans un programme puisse le faire aujourd'hui. C'est simplement cela avant d'entrer dans la période de questions.

Le Président (M. Laporte): Merci bien.

M. McKay: Une question de procédure, M. le Président.

Le Président (M. Laporte): Oui.

M. McKay: On revient avec une conclusion?

Le Président (M. Laporte): Pour vous expliquer brièvement, vous avez 20 minutes pour la présentation et, lors de l'échange avec les membres de la commission, vous pouvez, à l'intérieur du délai qui vous est imparti, faire valoir l'ensemble des arguments que vous avez.

M. McKay: Parfait.

Le Président (M. Laporte): M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je remercie la Maison des jeunes Saint-Jean-Baptiste inc. et pour son mémoire écrit et pour ses témoignages concrets qui nous décrivent une situation avec laquelle les gens pour qui vous oeuvrez sont aux prises dans leur quotidien. Ce n'est pas à la demande de Mme la députée de Maisonneuve, mais je ne vous brosserai pas le tableau de l'assisté social. Vous étiez présents dans la salle et vous le possédez bien.

J'ai quelques questions précises, dans un

premier temps, sur le fonctionnement de votre organisme. J'ai retrouvé deux données: le projet 16-22 ans dans votre maison des jeunes et j'ai également, à moins que mon oreille m'ait trahi un peu, compris que vous vous occupiez des jeunes de 12 à 18 ans. C'est quoi exactement, pour que j'en possède bien l'image, votre clientèle chez vous?

Mme Lavoie: La maison que les jeunes fréquentent - parce que c'est un lieu de rencontre et un lieu où les jeunes peuvent organiser des activités - s'adresse aux jeunes de 12 à 18 ans. Mais on aide les jeunes, on a un projet qui s'appelle Logis autonome pour les jeunes de 16 à 22 ans qui veulent être autonomes, avoir leur chambre ou leur appartement. Alors, on a ce projet-là pour les aider à avoir... C'est une maison d'hébergement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Depuis combien de temps oeuvrez-vous?

Mme Lavoie: La maison des jeunes oeuvre depuis 1976.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Depuis 1976. Donc, vous avez une bonne profondeur d'expertise, si vous me permettez le commentaire.

Mme Lavoie: Oui.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'aimerais... Oui, M. McKay.

M. McKay: Normalement, une maison de jeunes c'est pour les jeunes de 12 à 18 ans. Chez nous, la politique est que, si le jeune, homme ou femme, désire s'impliquer et faire une démarche positive, il reste membre en acceptant de prendre des responsabilités. Il y a deux dossiers dans lesquels nous nous sommes impliqués beaucoup depuis 1978, soit celui du rattrapage scolaire et, maintenant, toute la question du logement. Parce que vous pouvez comprendre qu'avec 188 $ la question du logement est critique. Dans un quartier comme le nôtre, à la haute ville... Saint-Jean-Baptiste, c'est un quartier qui était dit populaire, mais cela a changé, c'est sûr. Les loyers, vous pouvez imaginer...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'aimerais m'étendre davantage, mais je pense que je suis un peu comme vous, encarcané par le temps. Il y a des révélations qui m'ont - je le dirai le plus modestement possible - stupéfait. Je ne mets pas en doute ce que vous m'avez dit, mais mes questions vont s'adresser à M. Morel. Toute la question de la construction, votre ascenseur de haut en bas dans le secondaire, le choix de votre orientation et vos demandes auprès de l'Office de la construction du Québec. Cela m'a surpris parce que là il y a conjugaison et de mes respon- sabilités comme ministre du Travail, d'un côté, et comme ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, de l'autre côté, et cela semble être un dossier catastrophique à première vue.

Quand avez-vous fait vos demandes auprès de...? Quand, finalement, avez-vous terminé votre cours secondaire en construction?

M. Morel: Je suis sorti de l'école en 1980. M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'accord.

M. Morel: J'ai fait un stage au mois de juin, avant la fin de l'école. J'ai fait un stage de trois semaines sur un chantier de construction au complexe Saint-Amable, ici, tout près. Pendant mes trois semaines, l'employeur m'a dit: Bon, tu es pas pire. J'aimerais bien cela te garder. Il n'y a plus de jeunes dans ce métier-là. C'est la relève...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mais tu n'avais pas le droit.

M. Morel: II a dit: On va faire la démarche ensemble pour sortir les cartes. Parce qu'il fallait qu'il me garantisse un certain nombre d'heures. Il me les a garanties et...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Et tu n'as pas eu de carte.

M. Morel: ...à trois reprises...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Est-ce que vous vous êtes ré, ré, ré, ré-essayé au cours de l'été passé?

M. Morel: Au cours de l'été passé? Non. M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'accord.

M. Morel: Mais je me suis essayé à nouveau en 1983.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vais vous dire que cela me soulage un peu que ce que vous m'avez décrit comme situation ne soit pas survenue au cours de l'été passé. Parce que le gouvernement a changé la loi dans la construction. L'Office de la construction a été remplacé par une Commission de la construction du Québec et un des objectifs visés par la loi était de permettre à des jeunes comme vous d'avoir accès aux métiers de la construction. Vous avez complètement raison de décrier le système. Vous n'aviez pas droit au travail dans ce système-là. On l'a changé. Maintenant, on m'a informé, comme ministre, que tous les jeunes diplômés de l'an passé y ont eu accès. Et, dans le métier que vous mentionnez - je le cite presque par coeur - briqueteur, il y a des pénuries. Je pense qu'il n'y a pas une région au Québec où

on en a suffisamment. Je ne veux pas m'étirer sur votre cas. Ce que je vous incite à faire... Je pense que les bassins sont, dans chacune des régions, en bas de 10 %. Vous y avez droit aujourd'hui, grâce à une loi qui a été adoptée sur division, si je me souviens bien, à l'Assemblée nationale, en décembre de l'an passé. Cela vous donne votre droit au travail dans ce domaine-là. C'est un domaine, si vous le trouvez intéressant, où il y a pénurie et où vous rendriez service à la société, si cela fait encore votre affaire. Maintenant, si vous aviez des difficultés, je vous prierais de m'en tenir informé, mais normalement, si le système administratif fonctionne bien, depuis le mois de juin cette année, les difficultés que vous avez décrites n'existent plus et c'est pour cela que j'ai un petit peu sursauté quand vous m'avez décrit cette expérience-là. Mais elle était vrai de 1978 à 1986. La situation que vous avez décrite a été vécue par plusieurs jeunes au Québec.

La deuxième question - et j'espère que cela va être aussi facile dans ce cas-là, mais j'en doute - s'adresse à Mme la présidente. Vous m'avez décrit une situation que je n'ai pas complètement saisie. J'ai saisi que vous travaillez à temps partiel...

Mme Partarrieu: Oui.

(16 h 45)

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...c'est la question des 45 $ que je n'ai pas complètement saisie. Vous avez fait illusion, à un moment donné, à un montant de 45 $, soit pour des frais de garderie ou pour quelque chose. Je n'ai pas bien saisi sur le plan technique votre...

Mme Partarrieu: Non, c'est un supplément qu'on a le droit de gagner en étant sur le bien-être social.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'accord. Les 40 $ par famille plus 5 $ pour l'enfant.

Mme Partarrieu: Plus 5 $ par enfant.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'accord. Parce que rien ne vous est remboursé, au moment où on se parle, quand vous travaillez sur le marché du travail comme tel.

Mme Partarrieu: Non.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): On parle des exemptions des gains de travail. Ce que la réforme propose, c'est de haussera 140 $...

M. McKay: 140 $.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Le minimum, c'est 100 $ par mois; le hausser de...

M. McKay: 140 $, pour une femme seule avec enfant; 140 $.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): En tout cas, cela vous donnerait une marge additionnelle de 95 $. Sans prétendre que c'est parfait, disons qu'il s'agit là d'une des bonifications que nous tentons d'apporter. De plus - et je ne sais pas si vous l'avez vérifié dans votre cas personnel - si vous devenez admissible au programme APPORT, il y a possibilité de couvrir jusqu'à 50 % des frais de gardiennage, quel que soit le mode que vous choisissez.

Mme Partarrieu: Oui, mais elle a plus de deux ans. Elle est rendue à onze ans. Je ne suis pas prête quand même, à la laisser seule à onze ans, de 8 heures le matin à 17 heures le soir. Je ne paie pas une gardienne à temps complet, mais je paie quelqu'un pour la surveiller un petit peu. Je ne peux pas la laisser toute la journée toute seule vu que je travaille les fins de semaine surtout.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Surtout les fins de semaine?

Mme Partarrieu: Oui.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Est-ce que vous avez vérifié si vous étiez admissible, dans le cadre du programme APPORT, entre autres, au supplément de revenu?

Mme Partarrieu: Je ne suis pas au courant de cela.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous ne l'avez pas vérifié? D'accord, cela va.

M. McKay: On va la mettre au courant, mais elle ne travaille que de petites heures en vue d'avoir une place dans un grand hôtel ici. Par contre, sous la réforme, elle tombera au barème minimum auquel on ajoutera l'argent qu'elle va gagner jusqu'à équivalence de 140 $.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ce qu'il faut comprendre, c'est qu'il y a passage entre le programme APTE et le programme APPORT. Lorsqu'il y a participation sur le marché du travail, même si c'est à temps partiel, et qu'un minimum est gagné, le programme APPORT entre en supplément du programme APTE et c'est ce qui est important de vérifier pour avoir son portrait exact, et pour voir si on sera ou non avantagé. Si on ne regarde pas le programme APPORT, il se peut qu'on se pense désavantagé, mais, lorsqu'il y a revenu de travail minimum, le programme APPORT embarque et, à ce moment-là, on peut passer d'une situation de désavantagé à une situation d'avantagé. Je le souligne comme cela, tout simplement.

En vertu de la règle de l'alternance, peut-être Mme la députée de Maisonneuve?

Le Président (M. Laporte): Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Certainement, M. le Président. J'ai assisté à la présentation de votre mémoire avec beaucoup d'intérêt. Je trouve qu'il va nous amener à un échange extrêmement intéressant, parce que votre mémoire va au coeur de Popé-rationalisation" de la réforme. Je pense que vous êtes vraiment allés à l'essentiel. Par exemple, à la page 7, une des recommandations que l'on retrouve, et je la lis, est la suivante: "Nous exigeons que ces trois mesures - et là vous faites référence à la dépendance auprès des parents, soit la contribution parentale, le partage du logement et la responsabilité des conjoints - soient retirées et que le principe de l'indépendance des personnes de plus de 18 ans soit réaffirmé." J'aimerais beaucoup qu'on reparte de cette recommandation que vous faites.

De nombreux groupes se sont présentés devant la commission. Entre autres la Ligue des droits et libertés a fait tout un travail sur la question du statut marital. Ils sont venus devant la commission et ils ont exposé le fait que les barèmes d'aide sociale sont actuellement plus avantageux, économiquement, pour des adultes considérés comme des personnes seules. Ils ont, par exemple, établi que deux personnes seules reçoivent présentement 466 $ fois deux, soit 932 $ et que, un couple ou l'entité qui forme un couple - cela ne veut pas nécessairement dire marié, mais ce qui est présumé l'être - reçoit 741 $; que la différence est de 191 $ et donc que les efforts ont été investis de manière à présumer le plus possible que des personnes vivant en couple, tout au moins quand elles sont de sexe différent, de manière, dit-on au ministère et répète le ministre, à ne pas être inéquitable à l'égard des couples.

Tantôt, j'entendais le ministre dire qu'il y avait eu une mauvaise perception de la part de la population. Il faut dire que cette mauvaise perception a été beaucoup alimentée avec les enquêtes. D'ailleurs, j'aimerais savoir - puisque vous vivez dans le quartier Saint-Jean-Baptiste, qui est un peu l'équivalent du quartier dans lequel je vis a Montréal - si vous avez l'impression que cette perception, ces perceptions fausses ont été aggravées par toute la question des enquêtes, toute la question de la vie maritale, si cela vous a été rapporté, si l'expérience vécue vous a été communiquée.

Tantôt, - j'ai juste ton nom, c'est M. Roy - vous disiez je pense que vous étiez trois à habiter ensemble. Donc, c'est chacun de vous qui perdriez 115 $.

M. Roy: Non, c'est juste moi qui suis bénéficiaire de l'aide sociale présentement.

Mme Harel: Alors, ce ne serait que toi, à ce moment-là, qui perdrait. Tes deux autres compagnons ou compagnes travaillent. C'est cela? M. Roy: Oui.

Mme Harel: Mais imagine des cas qui se sont présentés devant la commission où il y a finalement trois jeunes qui s'entraident en partageant un logement; pour chacun cela veut dire un montant de 115 $. Donc, cela peut vouloir dire, à la limite, 445 $ en moins pour le mois. Oui, vous vouliez...

M. McKay: Je voudrais souligner, concernant les amis dont Stéphane parle - les trois vivent ensemble - que les deux autres sont un livreur de poulet, et justement il a livré du poulet au bureau de M. Paradis, il y a quelques semaines et le deuxième - on est bien informé, nous autres - c'est un aide-cuisinier dans un restaurant. Donc, ce sont de très petits travailleurs, susceptibles d'être bénéficiaires de l'aide sociale un jour. Ils risquent de perdre 445 $ avec la réforme.

Mme Harel: J'ai l'impression que le coeur de tout le débat que la société doit faire sur cette question de sécurité du revenu, il est sur la question de considérer ou de ne pas considérer des personnes comme indépendantes. Parce qu'après cela c'est comme un échaffaudage et, si on le construit sur un terrain argileux, quoi que l'on fasse il enfoncera. Par exemple, après cela, tous les autres programmes, même ceux qui partent des intentions les plus généreuses, comme APPORT, pour les personnes qui vont sur le marché du travail, les chiffres révèlent qu'APPORT va décourager le travail de la deuxième personne, la femme mariée en fait, puisque les chiffres de subventions d'APPORT vont faire en sorte que, tout calculé, ce deuxième travail ne sera pas vraiment assez bénéfique pour être réalisé.

Tout est centré sur le revenu familial. Là où il n'y a pas de famille, il faut comme en recomposer une. Alors, là, par exemple, où deux chefs de famille monoparentale et les enfants habitent ensemble pour pouvoir s'entraider, ou là où des personnes seules, des jeunes ou des personnes âgées qui n'ont pas encore 65 ans, mettons à 58 ans, qui sont veuves habitent ensemble, on va reconstituer l'équivalent des personnes qui habitent ensemble, et le moyen trouvé sera le partage du logement de façon que la réduction vienne faire l'équivalent de ce qu'un couple recevrait s'ils étaient considérés comme un couple, si vous voulez.

Quelle que soit leur orientation sexuelle, ils vont de toute façon être présumés comme étant réduits parce que partageant un logement. C'est cela la logique, si vous voulez, le "rationnel", comme on dit, qui fait que cela a été introduit. Donc, votre recommandation est extrêmement importante parce que par rapport à cette recommandation de baser l'ensemble de notre politique

sur l'indépendance des personnes à partir de 18 ans, à partir du moment où c'est retenu, c'est tout à fait une autre logique qui est appliquée. Mais, si cela ne l'est pas, il ne faut pas s'étonner que cela s'en aille tout croche. Ce que j'aimerais beaucoup, c'est de vous entendre par rapport à la page 11. Peut-être rappeler ce que vous dites et peut-être vous expliquer quand vous dites: "La distinction actuelle qui est maintenue dans la réforme entre "admissible" et "participant" est discriminatoire. Pour être logique, l'État doit s'engager à fournir un stage à toute personne qui s'inscrit dans le programme APTE ou lui payer les mêmes montants que la personne qui travaille déjà." C'est la catégorie "admissible". C'est la plus incompréhensible, parce que c'est celle où quelqu'un dit: Je veux, mais quand, où, comment? et où l'État dit: Attends. Et attends en étant coupé à ce moment-là. Vous avez dit que vous - Stéphane, je crois, ou vous, M. Trépanier, je pense. Je ne sais pas si... C'est vous qui avez tardé à obtenir un stage? . M/Trépanier: Non, c'est Stéphane. I

Mme Harel: Ah, c'est vous. Je pense que c'est vous, M. McKay, qui avez dit qu'il avait fallu qu'il vienne à Québec pour pouvoir obtenir, avec son propre employeur... Quels ont été les démêlés, les difficultés pour obtenir... C'est un stage en milieu de travail ou ce sont des travaux communautaires?

M. McKay: C'est un stage en milieu de travail. C'est le premier qu'on a chez nous. On n'a jamais accepté cela. C'est une grande occasion. On annonce que pour la première fois on a un stage. On est contre cela. Par contre, c'est un stage où on s'engage, M. le ministre, à accepter M. Roy sur un bon d'emploi. C'est un engagement de deux ans et demi pour nous. C'est la seule condition sous laquelle on l'accepte. On vous défie de faire de même, dans le sens d'accepter un stage seulement quand il y a un bon d'emploi. Cela va?

Mme Harel: Et M. Roy peut-il nous expliquer toutes les difficultés qu'il a rencontrées pour obtenir son stage?

M. Roy: C'est cela. Cela me tentait de travailler. Je restais chez ma mère. Alors, j'avais 170 $ par mois avant. Cela ne m'intéressait pas de rester à 170 $ par mois. Cela m'intéressait d'aller travailler et d'avoir un peu plus d'argent, mais les "jobs" sont dures à trouver. Comme je l'ai dit tantôt, une "job" de plongeur, cela ne m'intéresse pas. J'ai été voir mon agent.

Mme Harel: Où cela? Ici à Québec?

M. Roy. Oui. Sur la rue Saint-Jean - 50, rue Saint-Jean. Je suis allé voir mon agent.

J'avais entendu dire que des stages se donnaient à la SPA cet été. J'ai été pour en avoir un mais mon agent m'a dit que je n'étais pas admissible parce que cela ne faisait pas partie de ce bureau. Il aurait fallu que je demeure dans le secteur de la SPA pour avoir droit à ce stage. Cela m'a enragé un peu. Je lui ai dit: En tout cas, essayez de faire quelque chose. Je m'en suis retourné. Je suis allé voir à la Maison des jeunes. Je me tenais là. Cela fait cinq ans que je me tiens là. Je lui ai demandé s'ils seraient prêts à me prendre en stage. Ils ont dit qu'ils étaient d'accord. Alors, je suis retourné voir mon agent. Je lui ai dit: J'ai trouvé un employeur, faites pour que j'aie mon stage. Ils ont dit: OK, on va tout faire, on va demander à l'employeur qu'il nous appelle et qu'il nous dise ce qui va se passer. En fin de compte, je l'ai eu et j'en suis bien content.

Mme Harel: Alors quand tu es allé, tu es allé avec la proposition de l'employeur. Mais la première fois que tu es allé et que ton agent t'a dit: Ce n'est pas possible avec la SPA, est-ce qu'elle t'a proposé autre chose?

M. Roy: De retourner à l'école. Mme Harel: De retourner à l'école? M. Roy: Oui.

Mme Harel: De terminer ton secondaire? Et elle n'avait pas de travaux communautaires ou de stages à te proposer?

M. Roy: Non.

Mme Harel: Lui as-tu demandé si elle avait quelque chose à te proposer?

M. Roy: Oui, je lui ai demandé. Je lui ait dit: N'y aurait-il pas autre chose? Elle a dit: Non, pour le moment, il n'y a rien. Mais, de toute façon, la première chose que nos agents nous proposent quand on va les voir c'est de retourner à l'école. Mais moi, aller à l'école pour apprendre quelque chose je n'aime pas cela. J'aime mieux travailler et apprendre en travaillant. Je trouve que c'est mieux en pratique qu'en théorie.

Mme Harel: Lui avais-tu expliqué cela quand tu es allé la voir?

M. Roy: Oui, je lui ai dit.

Mme Harel: Et qu'a-t-elle répondu?

M. Roy: Elle a dit: Je vais essayer de faire quelque chose, mais pour l'instant il n'y a rien. Quand j'ai vu qu'il n'y avait rien, je savais que cela prendrait peut-être un an avant qu'elle ne m'appelle.

Mme Harel: Est-ce qu'il y a longtemps de cela?

M. Roy: Cela fait six mois. Mme Harel: Cela fait six mois? M. Roy: Oui.

Mme Harel: Cela veut dire que c'était à l'automne dernier. Alors, il s'agit de s'interroger sur la possibilité d'étendre cette mesure aux 243 000 ménages, n'est-ce pas? Si même pour une personne à Québec... Remarquez que ce n'est pas juste à Québec. Les groupes qui vous ont précédés nous ont dit que c'était comme cela à Nicolet, à Trois-Rivières, à Longueuil et à Brossard. Vous avez quelque chose à dire là-dessus, McKay?

M. McKay: Oui. C'est vraiment sur la question des stages. On a une certaine expérience du moment qu'on fart beaucoup de travail de rue qui fait qu'on a un contact avec des jeunes qui sont en stage et qui, après un an, n'ont plus accès, ou après deux ans il y a une limite. Après cela, ils n'ont plus accès au stage. Cela est certain.

Nous savons aussi que, depuis quelque temps, il y a une réponse au bureau de l'aide sociale dans laquelle ils disent aux jeunes: Les stages sont finis, allez chercher du travail, et au plus vite, sorter de l'aide sociale. On sait cela parce qu'on vit la situation qu'il vit. On sent une espèce de rage depuis quelque temps, les programmes sont finis, il y a des coupures partout et on dit: Trouvez donc du travail.

Un autre exemple...

Mme Harel: Cela vous a été rapporté, M. McKay?

M. McKay: Oui, oui. Un jeune de 20 ans qui travaillait pour les soeurs Blanches, ici en bas de la côte, au carré d'Youville. Il préparait les soupers communautaires. Il a été là un an. Il était reconnu et aimé par les soeurs. Cela allait bien, mais son stage s'est terminé. Plus question de stage. On lui a répondu, au même bureau - et cela, c'est un bureau très gentil sur la rue Salaberry parce qu'il y en a d'autres qui sont beaucoup plus sévères que cela, sur la rue Saint-Vallier, par exemple: Va chercher un travail au plus sacrant, Daniel, parce que c'est fini pour toi.

Mme Harel: Parce qu'il avait complété son stage?

M. McKay: Une année de stage chez les soeurs Blanches, ici, au souper populaire.

Mme Harel: C'était comme un stage en milieu de travail ou c'étaient des travaux communautaires?

M. McKay: Stage en milieu de travail. Mme Harel: En milieu de travail.

M. McKay: Oui. (17 heures)

Mme Harel: Vous avez parlé de L'Islet dans votre mémoire, à la page 10 je crois. C'est une expérience qui semble avoir été assez malheureuse, celle de la "shop" de couture dans le comté de L'Islet où des jeunes ont été engagés pour remplacer des travailleurs à temps plein. Est-ce qu'il y a quelqu'un du groupe qui a vécu cette expérience? Cela vous avait-il été rapporté par des jeunes qui vont à la maison?

M. McKay: Cela nous a été rapporté par des jeunes qui vivent dans ce coin-là. C'est un vrai cas. C'était en 1985, à une "shop" de jeans à L'Islet. Je pense que le centre de main-d'œuvre a été obligé d'intervenir pour arrêter ce qui se passait. C'était trop gênant.

Mais un autre exemple plus pertinent, c'est celui de la compagnie Alex Coulombe, ici, où un stage a été fait en 1985 avec quatorze ou quinze jeunes qui ont tous quitté après quelques semaines à cause du type de travail qu'ils devaient faire et parce qu'ils n'avaient aucune formation. C'est chez Alex Coulombe, ici, à Québec.

Quand le jeune retourne au bureau de l'aide sociale et qu'il dit: Je n'accepte pas ce travail-là, c'est carrément de l'exploitation, je n'ai aucune formation, qu'est-ce que l'agent répond? Tu n'as pas le choix, mon cher bonhomme, tu vas continuer. Souvent, c'est la réponse. Parfois, on peut tomber sur un agent qui est sympathique et qui n'a pas d'ordre d'en arrière de serrer la vis, mais je pense que c'est plutôt rare.

Vérifiez donc ce cas avec Alex Coulombe: quatorze jeunes. Ils ont duré environ cinq semaines. Au lieu d'apprendre à faire marcher la machine d'embouteillage, ils lavaient les caisses; ils faisaient marcher des machines, des grosses "lifts", et tout ça.

Mme Harel: Vous avez dit dans votre mémoire que vous recommandiez, en général, aux jeunes à la Maison des jeunes Saint-Jean-Baptiste, de retourner compléter leurs études. Vous donnez quelques exemples de jeunes qui, en partant avec le programme Rattrapage scolaire, ont terminé leur cours universitaire, je crois.

M. McKay: Oui.

Mme Harel: Et ce sont là des jeunes qui allaient fréquemment à la maison et qui ont bénéficié du programme Rattrapage scolaire, c'est ça?

M. McKay: Oui, dans les premiers temps de

ce programme-là.

Mme Harel: Dans quelles conditions cela s'est-il fait? Dans quelles conditions est-ce que des projets... On sait que, pour vous, l'une des conditions du stage, c'est qu'il faut qu'il y ait un engagement de l'employeur de garder le stagiaire. Mais les conditions de rattrapage scolaire... Vous parlez aussi du vécu dans lequel on doit prendre en considération les jeunes qui ont décroché précédemment. Alors, peut-être pouvez-vous nous parler des conditions dans lesquelles doit s'effectuer ce retour à l'école.

M. McKay: Nous faisons une espèce de suivi avec les jeunes qui retournent aux études. On a parlé tantôt du problème d'un jeune qui a 18 ou 19 ans et qui est repoussé au niveau primaire, en français. C'est assez dégradant et difficile. C'est une question d'humilité et de dignité. Donc, tout de suite, il a besoin d'attention, parce qu'il va s'écoeurer et va laisser tomber. C'est fondamental d'apprendre à parler français. La peur et la crainte... Et la question qu'on pose, c'est: Est-ce qu'ils vont être contingentés? Qu'est-ce qui va arriver quand il y aura 50 000 personnes qui arriveront en rattrapage scolaire, parce qu'elles y sont obligées pour avoir un minimum d'aide sociale? Est-ce qu'on va sortir des crédits, des millions de dollars nécessaires pour assurer un enseignement de qualité?

Moi, j'ai eu l'expérience d'un rattrapage scolaire cette année. J'ai vu ce que c'était; de l'éducation, de la pédagogie individuelle. Cela coûte de l'argent. Ce ne sont pas des classes magistrales. Ce sont des classes où le professeur, s'il y a un nombre raisonnable d'étudiants, va donner une attention spécifique et un suivi spécifique.

Il y a tout un système. Maintenant, il y a un cours donné spécialement à une des écoles de décrocheurs, ici, où quinze femmes avec enfants ont ce type d'attention. Je devine, et je peux parier, qu'elles vont aller loin dans leurs études, parce que ce système de rattrapage scolaire ne doit pas simplement viser le Secondaire V, pour ainsi être diplômé pour aller laver la vaisselle. Cela peut et cela doit viser l'accès à l'éducation collégiale et universitaire. L'expérience qu'on a vécue avec des femmes... Mais il faut remarquer que c'étaient des femmes avec de jeunes enfants, celles qui étaient dans le programme spécial qui existe au niveau de l'aide sociale, et elles avaient accès à la première année. Cela a donné des résultats. Elles avaient accès à la garderie. Savez-vous où la plupart sont rendues? En travail social. Elles vont devenir des agentes de bien-être social. Chapeau!

Mme Harel: Malheureusement, les agents ne sont pas des travailleurs sociaux, en général. Mais on en bénéficierait si la formation était certainement haussée. C'est Mme Partarrieu, je crois?

Mme Partarrieu: Oui.

Mme Harel: C'est bien cela? C'est sûr que votre situation est peut-être un peu difficile. Vous êtes chef de famille avec trois enfants.

Mme Partarrieu: Non, il ne m'en reste qu'une, les autres sont majeurs.

Mme Harel: Actuellement, vous avez un revenu qui est régulier.

Mme Partarrieu: Non, ce n'est pas régulier, c'est sur appel. Je peux travailler un jour dans le mois comme je peux travailler huit jours. Quelquefois, je ne travaille pas. Ce n'est pas régulier.

Mme Harel: D'accord. Le problème avec le programme APPORT, dont le ministre parlait tantôt, c'est qu'il y aurait un écart dans les revenus de travail, en ce sens que la personne ne pourra bénéficier du programme que si elle gagne plus de 3700 $ par année. Le programme APTE permet, au maximum, de gagner 2460 $. C'est comme s'il allait ne rien avoir entre les deux.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Cela ne porte pas à conséquence. Si vous voulez une précision...

Mme Harel: À cause de SUPRET?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non. Pour cette année, cela ne porte pas à conséquence parce que APTE n'est pas en vigueur, mais pour l'an prochain et les années ultérieures, vous avez raison de le souligner, il y a là un trou qu'il faut ajuster avec la fiscalité.

Mme Harel: Le problème c'est que pour obtenir un gain de 155 $ - cela peut aller jusqu'à 155 $ - par mois, à ce moment-là il faut être dans la catégorie Refus de participer. Dans la catégorie Refus de participer, pour une chef de famille avec un enfant, avec le système indexé - ce sont les chiffres de 1989 - cela serait 684 $ en 1989. Ces 684 $ deviennent 585 $. Il y a une perte mensuelle de 99 $ sur le chèque pour pouvoir aller chercher les 155 $ de revenu d'emploi. Ce revenu d'emploi, c'est parfois, comme vous le dites, plus incertain que le chèque mensuel. C'est ce que j'ai retenu de vos propos. C'est avoir le goût de travailler, parce qu'il n'est pas sûr que cela soit nécessairement plus rentable.

Mme Partarrieu: Non, ce n'est pas plus rentable, mais j'ai espoir de pouvoir travailler à temps plein à un moment donné, si cela ne prend pas trop de temps. Je ne suis pas bien encouragée à travailler.

Mme Harel: Ou!, parce que cela vous ferait 56 $. Si on réduit de 155 $, si on diminue de 99 $ sur le chèque en 1989, c'est un total de 56 $ pour le mois que vous donneraient tous les déplacements pour faire le maximum de gains permis à l'emploi. Au-delà de ces 56 $, chaque dollar gagné est nécessairement déduit sur le chèque. C'est le plus haut taux d'imposition qu'on puisse imaginer, le taux d'imposition qui frappe totalement tout gain d'une personne qui reçoit de l'aide sociale. C'est la trappe de pauvreté. C'est là qu'elle se situe. Si vous voulez en faire un peu plus, vous en perdez de l'autre côté.

Le Président (M. Laporte): ...M. McKay, en soulignant que le temps est malheureusement écoulé. M. McKay.

M. McKay: En plus, c'est la réception qu'elle va avoir à son bureau d'aide sociale quand ils vont apprendre qu'elle accepte du travail. Avec la réforme, est-ce qu'elle sera reçue avec: Bonjour, bienvenue, nous sommes très contents pour vous et on veut que vous continuiez. On va être patients pendant des années en attentant que vous trouviez un travail à l'Auberge des Gouverneurs à plein temps, etc.? Je ne crois pas. C'est ce qui est très décourageant dans cette réforme.

Mme Harel, vous avez parlé tantôt de la mauvaise perception des jeunes depuis les boubous macoutes. Je tiens à terminer avec le moins d'agressivité possible en disant que le HLM où nous travaillons, ce sont des appartements à loyer modique avec 200 familles. Les ravages faits par l'opération boubous macoutes, les dénonciations faites, le vécu avec lequel nous travaillons, la tension qui existe dans ce bloc d'appartements à la suite de l'opération boubous macoutes, c'est écoeurant et sans dignité.

Le Président (M. Laporte): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Thuringer: Merci, M. le Président. On a eu, dans un autre type de réunion, l'occasion de rencontrer Mme Lavoie et M. Morel, et je suis bien impressionné par le travail qu'ils font et aussi par l'engagement personnel que vous apportez. Je trouve aussi fort intéressants les commentaires que vous avez faits, surtout dans un domaine qui me préoccupe beaucoup. Il y a un certain nombre d'années... Je pense que c'est M. McKay qui a parlé d'une question de niveau de langue qui a posé des problèmes. Est-ce que vous pouvez...

M. McKay: Je ne comprends pas la question.

M. Thuringer: La question concerne, je pense, la formation des stagiaires, si j'ai bien compris. À un moment donné, le niveau de connaissance de la langue française était... Est-ce que vous pouvez me parler un peu de cela?

M. McKay: La plupart de nos jeunes sont en professionnel court ou long, dans des écoles de métiers. Jusqu'à il y a deux ans, je crois, ce n'était pas obligatoire d'avoir des cours de français ni de mathématiques. C'était intensif dans le métier. Mais maintenant, depuis deux ans. ils sont obligés de passer leur examen de niveau secondaire V en français. La majorité sont repoussés. Ils sont chez nous. Ils sont repoussés au niveau de la fin du primaire en français et en mathématiques, ce qui fait que le défi de se scolariser devient énorme. L'importance dans le rattrapage scolaire, c'est qu'il n'y ait pas de limite. Pour ces jeunes, ils reprennent leurs études depuis le début. C'est la vérité.

M. Thuringer: Cela pose bien des problèmes. Cela doit être pas mal décourageant pour les jeunes.

M. McKay: Le problème, c'est l'âge. Pour le moment, nous, on les incite à rester aux études. Ils vivent cet obstacle et ils lâchent. Mais ils vont revenir à 20 ans, 19 ans. Mais, s'ils ne sont pas admissibles au bien-être social, ils n'ont pas accès aux programmes. Qu'est-ce qui se passe avec ceux qui sont coupés à 18 ou 20 ans?

Je veux souligner que l'idée de couper les jeunes de 18 ou 20 ans est basée sur un mythe. Le mythe c'est que parce qu'une famille a beaucoup d'argent, cela va très bien dans les relations adultes-jeunes adolescents. Ce qui n'est pas le cas. Si ce jeune n'a pas accès aux mêmes possibilités que d'autres jeunes... Ce n'est pas parce qu'il vient de Sillery, Ancienne-Lorette ou d'autres milieux qu'il doit être pénalisé et ne pas avoir accès. C'est intéressant, c'est rentable financièrement pour l'État. C'est rentable en termes d'argent, parce que c'est ce qui stimule le monde d'aujourd'hui. Au pouvoir, c'est l'argent. Ce jeune, s'il est frustré à 18 ou 20 ans, il va être bénéficiaire de l'aide sociale pendant des années.

Le Président (M. Laporte): M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, je veux strictement rappeler à M. McKay que la proposition que les jeunes de 18 ou 20 ans ne reçoivent aucune aide sociale ne vient pas du gouvernement. Elle vient de quelqu'un d'autre que j'ai nommé tantôt. Je pense que le modèle sur lequel c'est calqué - je fais peut-être de l'extrapolation et je le dis avec prudence - c'est l'Ontario. En Ontario, vous n'avez pas droit à l'aide sociale avant l'âge de 21 ans. C'est peut-être là qu'on a voulu, pour ceux qui en ont parlé...

Oui, M. McKay?

M. McKay: Oui, mais, M. Paradis, cela adonne bien, vendredi dernier, j'étais en Ontario.

Je suis allé au bureau du bien-être social. De 18 à 21 ans, on a droit à l'aide sociale, comme n'importe quelle personne, sauf si on reste chez des parents. Dans ce cas, il y un dossier qui s'ouvre. Une travailleuse sociale fait enquête pour déterminer les besoins de la famille et ceux du jeune. Dès l'âge de 16 ans, il peut avoir l'aide sociale, si c'est déterminé. Mais de 18 à 21 ans, s'il est en dehors de chez lui, il y a droit. Il n'a qu'à faire une demande.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Cela va. J'aurais des questions à poser à Mme Lavoie, qui a parlé tantôt d'une certaine part d'autofinancement de votre maison. C'est dans quel pourcentage?

Mme Lavoie: ...pourcentage...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): À peu près?

Mme Lavoie: Je ne sais pas... Ce n'est pas beaucoup.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): En bas de 10 %?

Mme Lavoie: Je peux parler... En autofinancement, on réussit à se ramasser environ 1500 $ à 2000 $ par année, en faisant des lave-autos, en vendant du chocolat, en faisant des bercethons, en faisant du porte-à-porte dans les quartiers et dans nos familles. C'est ce qu'on fait sauf qu'on ne veut pas mettre toutes nos énergies là-dessus parce que les jeunes ont besoin de monde.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Dans vos clientèles, est-ce que vous avez une clientèle composée de bas salariés et de chômeurs? Est-ce que c'est exclusivement une clientèle de gens qui dépendent de l'aide sociale?

Mme Lavoie: La majorité sont des gens sur le bien-être social. Il n'y en a que quelques-uns dont les parents travaillent. La majorité sont des familles monoparentales.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous n'avez pas tellement de chômeurs? (17 h 15)

Mme Lavoie: Non, pas tellement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): De travailleurs au salaire minimum non plus?

Mme Lavoie: Non.

M. McKay: Mais le salaire minimum, ceux qui travaillent comme plongeurs sont au saiaire minimum et même en bas du minimum. Le salaire minimum n'est pas respecté à être plongeur.

Mme Lavoie: Mais la majorité des parents sont des familles monoparentales.

M. McKay: Oui.

Mme Lavoie: Elles sont sur le BS.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est M. Trépanier qui a parlé des stages en milieu de travail. J'ai retenu deux éléments sur la critique que l'on adresse aux stages tels qu'ils existent présentement. J'ai marqué: qualité du stage et longueur du stage. Est-ce que les stages offerts présentement sont des stages qui, sur le plan de la qualité, ne répondent pas, dans à peu près tout ce que vous avez vu comme exemples, à ce dont vous vous attendez du contenu formation?

M. Roy: Pouvez-vous reposer la question?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. Les expériences de stages en milieu de travail, il est censé théoriquement avoir ce qu'on appelle un contenu formation, c'est-à-dire que tu es censé apprendre quelque chose comme individu plus qu'un contenu production, c'est-à-dire le travail de produire des choses à la chaîne, des expériences que tu as vécues personnellement ou dont tu as eu connaissance chez les gens que tu connais. Est-ce que ce contenu formation, apprentissage était présent ou s'il s'agissait plus de production à la chaîne?

M. Roy: Dans mon cas, c'est plus une formation qu'un travail. À la Maison des jeunes, on n'exploite pas le monde. Ils m'encouragent à avoir une formation et non à travailler au noir, comme on dit.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Sur la longueur du stage, est-ce que tu penses que, dans ton cas ou dans les autres cas que tu connais, un stage de douze mois c'est suffisant, c'est trop long ou c'est trop court?

M. Roy: Un stage de douze mois, c'est suffisant, sauf qu'il faudrait avoir un emploi sûr après. Comme on le disait tantôt: un emploi de deux ans tout de suite après, avec un contrat. Le jeune finit son stage, il retombe sur le bien-être et il faut qu'il se retrouve un job comme plongeur. Comme je le disais tantôt, ce n'est pas intéressant pour moi de travailler comme plongeur.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous êtes combien présentement en stage en milieu de travail à la maison?

M. Roy: Je suis le seul pour l'instant.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): La question s'adresse à M. McKay: Est-ce que vous avez l'intention de répéter cette expérience avec d'autres jeunes?

M. McKay: C'est une question très chaude et politique, dans le sens que nous essayons d'être le plus honnêtes et intègres possible dans les démarches que l'on fait. Nous sommes contre ces stages aussi longtemps que ça ne débouche pas sur quelque chose de concret et à long terme pour les jeunes. On ne sait pas, on verra ce que vous voulez faire avec la réforme, avec tout ce qui se passe... Dans le cadre d'une formation solide qui aboutit sur un travail, ce serait malhonnête de notre part face à nos jeunes... Stéphane, c'est parce qu'il nous a donné un maudit cas de conscience parce que cela fait des années que l'on dit: Si on a des demandes en masse, par téléphone et autres, parce qu'ils cherchent des employeurs... On dit: On ne peut pas. Cela ne donne rien, on ne peut pas. Par contre, sur la condition d'un bon d'emploi, on va y aller cette fois-ci, en espérant que cela tombera dans un contexte plus global où il y aura des bons d'emploi pour tout le monde.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. Il y a la question de servir de plateau de travail. Si - et je dis bien si - les programmes sur te plan formation avaient des contenus comme tels et qui débouchent, est-ce qu'un groupe comme le vôtre accepterait de participer dans le cadre d'un programme de ce type-là, amélioré, ou si le gouvernement devrait se passer de vos services et continuer à tenter de les administrer strictement à partir des centres Travail-Québec?

M. McKay: Cela, M. Paradis, serait une longue discussion chez nous. Alors, on verra ce que vous ferez avec le projet de réforme qui est sur la table, et après on va en discuter chez nous avec les jeunes.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Sur le plan des programmes, il y a différentes façons pour un gouvernement d'aborder la question. Le gouvernement peut arriver et dire: Voici ce que mes technocrates, fonctionnaires ou politiciens...

Le Président (M. Laporte): En conclusion, M. le ministre, s'il vous plaît!

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...ont pondu. On vous demande si vous embarquez. L'autre façon de dire: On entreprend une discussion et on vous demande quelles sont vos suggestions quant à l'amélioration des programmes existants et à la création de nouveaux programmes. Quelle est votre réponse?

M. McKay: C'est simple. On verra ce qu'on offrira comme revenu décent minimum dans le cadre de la réforme sur la table et après on viendra discuter des programmes étape par étape. Il faut assurer un revenu décent minimum, qui n'est pas dans le cadre de cette réforme-là, avant de discuter des programmes. Après avoir acquis cela - parce que je pense qu'on va l'acquérir facilement, j'espère que oui - on viendra discuter le besoin de formation de nos jeunes, qui reste un problème dans lequel on est impliqués. Cela fait cinq ou six ans qu'on discute du rattrapage scolaire, et on est impliqués dans ce dossier avec les personnes qui étaient là avant vous, et on va continuer à l'être parce que c'est notre rôle, notre devoir, et on va continuer à remplir ce rôle face à nos jeunes et à nos familles, mais étape par étape.

Le Président (M. Laporte): On tient... La commission...

M. McKay: Excusez-moi, M. le Président, juste..

Le Président (M. Laporte): Brièvement, oui.

M. McKay: ...en guise de conclusion. On veut déposer à M. le ministre une série de questions - on sait qu'il n'aura pas le temps d'y répondre aujourd'hui - qui peut résumer un peu où s'en vont les choses, parce qu'on vit beaucoup d'inquiétudes par rapport a cela. Alors, officiellement... Et, si possible, on prendra deux minutes pour lire les questions. Est-ce possible, M. le Président?

Le Président (M. Laporte): Malheureusement, je pense que la meilleure procédure sera par le biais du secrétariat pour qu'on puisse en prendre copie et la remettre aux personnes concernées, membres de la commission et, par la suite, voir à l'acheminer à l'intérieur de cela.

M. McKay: Mais, M. le ministre, est-ce que vous vous engagez à répondre aux questions?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je souhaite généralement prendre connaissance des questions Je suis un peu comme vous: étape par étape.

Mme Harel: S'il y a consentement du ministre, on peut en prendre connaissance.

M. McKay: On va les déposer.

Le Président (M. Laporte): D'accord. Avec le consentement des deux partis, si vous voulez faire lecture brièvement de...

Mme Harel: De vos questions.

Le Président (M. Laporte): ...de vos questions.

M. McKay: Les questions, mais on va vous donner...

Le Président (M. Laporte): Tout en comprenant très bien qu'on les prend sous forme de réserve et que par la suite le débat sera clos.

M. Mckay: Oui, oui, alors...

Le Président (M. Laporte): Très brièvement, merci.

M. McKay: ...c'est Vincent qui lira la première question.

M. Trépanier: À son congrès, le 28 février, le Parti libéral du Québec a rejeté le principe de contribution alimentaire obligatoire dans le programme des prêts et bourses. Un peu plus tard, en entrevue à Radio-Canada, le 29 février, M. Bourassa affirmait que son gouvernement respecte toujours les décisions prises démocratiquement par ses militants et militantes et qu'il reverrait la notion de contribution alimentaire. À la lumière de ces événements et en tant que ministre du gouvernement libéral, M. Paradis, serez-vous conséquent avec les décisions de votre parti et retirerez-vous de votre réforme le principe de la contribution alimentaire obligatoire?

M. McKay: Stéphane.

M. Roy: M. le ministre, nous vous demandons de rendre publics les chiffres précis, fournis par votre ministère, de la Commission de formation professionnelle sur le nombre de stages en milieu de travail, la qualité de la formation de ces stages, combien de stagiaires réussissent à trouver un emploi permanent et le nombre de jeunes qui attendent pour participer à un stage, et ce, depuis combien de mois. Notre corporation de la Maison des jeunes Saint-Jean-Baptiste accepte des stages en milieu de travail seulement lorsque cela aboutit à un bon d'emploi de deux ans pour le jeune travailleur ou la jeune travailleuse.

M. le ministre, êtes-vous prêt à vous engager à une politique semblable pour tout employeur, c'est-à-dire un bon d'emploi garanti et obligatoire de la part de l'employeur pour toute personne en stage dans le milieu de travail?

M. McKay: Viviane.

Mme Partarrieu: M. le ministre, vous engagez-vous, dès aujourd'hui, à rendre publique, dans les plus brefs délais, une liste complète des besoins spéciaux qui seront éliminés dans le cadre de votre réforme, que ce soit pour les aptes participants, participantes ou non participants, non participantes?

M. Morel: La distinction entre aptes et inaptes, et la distinction entre admissibles et participants ou participantes sont discriminatoires. M. le ministre, est-ce que vous et votre gouvernement, vous engagez à fournir les crédits nécessaires pour obtenir des places à l'intérieur des programmes pour toute personne qui en fait la demande, c'est-à-dire ne pas contingenter les programmes comme c'est le cas actuellement?

Mme Lavoie: M. le ministre, pensez-vous sincèrement que nos enfants, à partir de deux ans, n'ont plus besoin de leur mère qui les éduque au foyer; que c'est plus valorisant de faire du ménage dans nos beaux hôtels de Québec et, avec nos maigres salaires, payer une personne qui gardera nos enfants? Ainsi, dans quel sens votre réforme encourage-t-elle nos familles à faible revenu à avoir des enfants pour assurer la relève au Québec?

M. Morel: Des 125 mémoires qui sont et qui seront présentés dans le cadre de cette commission, plus de 80 % sont contre votre projet de réforme. M. le ministre, nous demandons un revenu décent pour tous les Québécois. Sans doute cette tâche nécessitera-t-elle pour vous et votre gouvernement une longue période de réflexion. Entre-temps, 45 000 jeunes de 30 ans et moins survivent avec 187 $ par mois. Le problème a été maintes fois soulevé dans les médias et a fait l'objet de nombreuses représentations de la part du public et des groupes concernés, y compris la Commission jeunesse du Parti libéral, livre vert, page 13. Êtes-vous d'accord, M. le ministre, pour répondre aux requêtes de la majorité des groupes que vous avez entendus, en instaurant la parité pour les moins de 30 ans et ce, sans baisse, sans condition et le plus tôt possible?

Le Président (M. Laporte): La commission tient...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, maintenant que je les ai vues, je m'engage à y répondre.

Le Président (M. Laporte): Merci, M. le ministre.

Je tiens à remercier les représentants de la Maison des jeunes Saint-Jean-Baptiste pour la présentation de leur mémoire.

J'invite The Action Committee of Disabled Persons à bien vouloir se présenter en avant. M. Burkhard Gburek.

On suspend pour une minute.

Le Président (M. Thuringer): Nous reprenons nos travaux. Bienvenue à The Action Committee of Disabled Persons, Côte-des-Neiges. Est-ce que vous pourriez vous présenter tous les deux? Merci.

Mme Harel: M. le Président, si le groupe me le permet, je veux simplement prendre l'occasion qui m'est donnée pour vérifier avec le ministre s'il entend convoquer à nouveau la commission parlementaire au mois de mai prochain. Peut-être peut-on demander à la secrétaire de la commission si elle a reçu une demande de la ville de

Montréal pour faire entendre son désaccord sur de nombreux aspects de la réforme, ici, devant la commission.

La Secrétaire: Pour le moment, je n'ai pas encore reçu une telle demande. ( 17 h 30)

Mme Harel: La ville de Montréal n'a pas du tout communiqué avec quiconque de la commission parlementaire?

La Secrétaire: Non.

Mme Harel: M. le ministre, je ne sais pas si vous avez pris connaissance de l'article paru dans Le Devoir de samedi dernier, le 19 mars, à savoir que la ville entendait exprimer son désaccord sur de nombreux aspects de la réforme en se présentant à la commission parlementaire qui devrait se tenir en mai prochain. Je me demandais, compte tenu des négociations qui se poursuivent entre la ville et Québec sur l'administration du programme, s'il avait été résolu qu'il y ait à nouveau une commission parlementaire en mai.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Lorsque je l'ai lu dans le journal, j'ai fait comme vous. C'étaient les premières nouvelles que j'en avais.

Le Président (M. Thuringer): Bon. On va procéder. Merci.

The Côte-des-Neiges Action Committee of Disabled Persons

M. Gburek (Burkhard): M. le Président de la commission, M. le ministre Paradis, messieurs et mesdames les membres de l'Assemblée nationale, bonsoir. Mon nom est Burkhard Gburek et je travaille comme agent de liaison pour le Comité d'action des personnes handicapées de Côte-des-Neiges. Je veux vous présenter M. Frederic Hazan qui va prendre des notes pour moi, parce que j'ai un problème auditif et je lui ai demandé d'écrire les questions que vous aurez après. Je suis le seul représentant de notre comité présent ce soir parce que des problèmes de transport et de logement pour les membres handicapés de notre comité ont empêché les autres membres de venir aujourd'hui. Par exemple, la coordonnatrice de notre comité est atteinte d'un handicap qui s'appelle dystonie. Elle n'est pas capable physiquement le même jour de voyager et de faire une présentation. Prenez en considération que notre comité cherche toujours le financement régulier. Notre comité était incapable d'envoyer plus d'une personne, ce soir. Je pense que, pour l'avenir, ce serait préférable que les groupes handicapés soient invités à faire leur présentation plus tôt dans la journée. Votre compréhension serait appréciée.

Maintenant, je vais juste faire un bref commentaire sur notre comité. Le Comité d'ac- tion des personnes handicapées de Côte-des-Neiges existe depuis trois ans. Le but de ce comité est de promouvoir et de défendre les droits des personnes handicapées dans le domaine de l'accessibilité aux transports, aux loisirs et au logement et cela, à des prix abordables. Aussi, notre comité a comme but d'aider toutes les personnes handicapées à vivre à part égale. Nous pensons que nos membres, qui sont toutes des personnes handicapées, sont capables de contribuer à la société canadienne et québécoise, même si parfois ils ont besoin de plus de temps pour atteindre leur but. Alors, j'espère que le gouvernement québécois fera tout pour aider les personnes handicapées à avoir les mêmes opportunités que les autres citoyens québécois.

Je vais maintenant lire le mémoire que notre comité a fait. C'est un mémoire en anglais. Je vais le présenter en anglais et je vais faire les commentaires à part.

M. Hazan (Frederic): II a de très gros problèmes à parler le français. C'est pour cela que je suis là pour lui donner un coup de main. Même son discours, il l'a écrit en anglais et c'est moi qui l'ai traduit en français.

Le Président (M. Thuringer): Allez-y.

M. Gburek: O. K. The C. D. N Action Committee of Disabled Persons has been informed by the City of Montreal that a committee has been established to study the Income Security Policy, recently introduced by the Québec Minister of Manpower and Income Security, Mr Paradis. The recommendations of the committee will determine the city's position on the reforms policy which the city will then address during the provincial hearing schedwed to begin February 22, 1988.

The Action Committee of Disabled Persons is a group of disabled residents residing in Côte-des-Neiges. Our group provides varied information, including welfare rights, advocacy and referrals to other available resources in the community. Aside from the above services, the C. D. N. Action Committee of Disabled Persons also addresses such problems as accessible and affordable housing, equal opportunity in attaining employment, etc.

Historical background. In 1971, the Quebec's Castonguay and Nepveu report acknowledged that: 1) handicapped (persons) were not recognized as full-fledged citizens; 2) the handicapped (persons) endured very low standards of living; 3) there was no access to the labour market.

Although today there are different opinions as to how much real change has occurred in this area, we would all agree that the majority of disabled persons are still among the people with lowest standards of living in our society.

At different times, social reforms dealing with overall social conditions in Québec mentioned disabled persons; as well in recent years

attempts have been made to create social integration of disabled persons in educational, employment and social milieu, but integration and is advocates have found environmental and attitudinal difficulties.

The position paper Towards an Income Security" appears oblivious to these realities. If the spirit of this paper is reflected in the language used as "les personnes invalides", on page 11, we can be assured that history as mentioned in the above Castonguay-Nepveu report will undoubtedly repeat the injustice and demeaning treatment of our community. "Les invalides" mirrors socio-economic images of disabled persons as being incapable of self-supporting, as inferiors and as people who deserve pity. It leans towards a patronizing overview of disabled persons.

This image in turn translates itself in the application of the policy in unintentional systematic discrimination. The focus of unintentional discrimination avoids having to discern what was in the heart or mind of the person accused of discriminating. Intent motivation are no longer the key-factors in determining the existence of discrimination. Rather, it is the harmful effect that a program, policy or practice may have on a group of individuals, which becomes important."

I would like to add them: Implication that when disabled persons enter social welfare, they will most likely not only need to prove that they are indeed unable to work, but they must degrade themselves to stating that it is for health reasons rather than for lack of access to work force. A lot of times a person who is handicapped wants to work and is able to work but, because of the lack of physical access to a building or an employer not willing to hire handicapped persons, because of prejudice saying that this person might not be able to perform the job, might be sick more often, just because of these prejudices, the handicapped do not have equal access to the job force.

Implication, as I said before, that when disabled persons enter social welfare, they will most likely not only need to prove that they are indeed unable to work, but they have to degrade themselves and say: Hey! This is for health reasons. But this is not the truth. They also need to prove that they are capable of working if they want to participate in the Work Incentive Program. Whereas it may not be intentional discrimination, the policy tends to create subgroups of persons without understanding individual needs of persons with disabilities. 1) Our group agrees with the position paper that, as a result of social and economic changes in Québec, Quebec's policy on Income Security is in need of reforms. 2) However, we strongly disagree with this statement: The Financial Support Program is designed for households where one of the consorts is, or for people who are, suffering from a significantly irregular state of mental and physical health likely to persist for a relatively long period and consequently unable to meet their needs." This statement puts all disabled persons in the unemployable category, further promoting the continuation of discrimination. We believe that cases should be treated on an individual basis. We should not create a definition and say: Ail handicapped are going to be put in this category. This statement appears to categorize all people with disabilities, such as paraplegics, like myself, in the unemployable category, therefore continuing to advocate discrimination based on mental and physical disabilities.

This definition does not reflect realities of the unemployment situation of disabled persons. We believe that this definition should be eliminated and that each case should be treated individually when determining the category which she or he will be placed in. One must take into account: a) disabled persons who are able and/or wish to work; b) disabled persons who may be physically able to work but for lack of appropriate support services, such as home care, transportation, within the time frame required by employers, will be unable to work; c) disabled persons whom for lack of education cannot find work that they can do for a required period of time which would permit adequate finances; d) disabled persons who cannot work for physical, mental or intellectual disabilities. 3) We disagree with the provision for a $ 100 per month job income exemption. This exemption, we feel, is useless to persons who are declared unemployable and will not be able to obtain work for physical, mental or environmental reasons. All other types of job income would further encourage cheap labour. What we are saying in this particular point is that if the person has been declared unemployable, then, it is unrealistic and there is a contradiction somewhere to say: We are allowing you to earn $ 100 per month. But if you cannot work, it does not make sense. If I cannot work, then, why are you saying suddenly that I am allowed to earn $ 100? It is very unlikely, because of a physical or a mental handicap that I would then be able to earn these $ 100. 4) There is no clear provision in this paper regarding the amount provided for special needs. As well, special needs subsidies have not been indexed in proportion to the to rising costs of living nor to the amount that the regular cheques have been indexed. Thus, the actual funds for special needs, at present, are insufficient. We propose full indexation of all special needs.

Just to cite a couple of examples: the $100 special needs for a paraplegic, for the last few years, has not been indexed. As a result, the paraplegics who have medical supplies to buy today are not receiving a fair value. There is also, for example, people who are hearing impaired. The actual cost of batteries at present

is $ 5.50 per month. That is for a set of twelve batteries. The Québec welfare system allows 3,50 $ per month, also for a set of batteries. What is not realized is that these twelve batteries often do not last the entire month. So they are actually spending somewhere in the neighbourhood of 8 $ to 9 $ a month, when they are only receiving 3,50 $.

In the section on Employment Incentive program, the paper mentions disabled persons as an example of persons with "exceptional difficulties" and it attempts to shift the responsability of resolving the problems by referring them into the SEMO programs. In so doing, the policy paper further segregates disabled persons from the rest of society. It assumes that the responsibility of high unemployment among the disabled persons is related to some faults of their own. In recent years, we have seen the SEMO'S agencies, which are separate forms of employment agencies, perform some positive work in placing disabled persons in the job markets, however these are not able to eliminate the real problems, for example, architectural, technical, attitudinal barriers in the place of work, nor can these better the job skill, educational level of the said group. Data available tell us that between 80 % to 90 % of disabled persons are presently unemployed. (17 h 45)

One of the ironic points of this position paper is that although it claims that it is aimed at assisting the unemployable, it creates a double bind situation for everybody who applies for social assistance. In its applications the policy implies that it will use a means test tp determine if one is to be placed under the employable or unemployable category. Whereas the able-bodied persons must prove that they are unemployable to get full benefits, the disabled persons must prove that they are capable of working in order to be eligible to inter the Employment Incentive program. Due to the vagueness of this paper, it is unclear if disabled persons who qualify for this program will still be eligible for special benefits or for the health care card.

The paper implies that the socio-economic agents will be empowered to determine who is and who is not unemployable. Due to the lack of clear selective mechanisms to determine these, there is room for yet another arbitrary definition of "disabled persons" and "deserving poors".

We feel that one of the major problems with this paper is that socio-economic agents, first of all, are not properly qualified to make these judgments. We also feel that they are being given too much power in making such decisions. We know as a fact, right now, that there are very few disabled socio-economic agents. We would like to see, first of all, that more disabled persons are not only hired as socio-economic agents, but within the government. O.k.?

But, certainly, if somebody is going to make a decision about whether a disabled person can work or not, at least, the disabled community should somehow be involved in deciding. We are proposing, rather than having one person who decides if this person can work or not that a group or a committee decides if a person can work or not. And it is imperative to have disabled persons on this committee. I saw it from the recommendation...

Le Président (M. Thuringer): Just excuse me, sir. You have about two minutes left. Maybe in the discussion following.. We all have seen the brief, but maybe if you want to bring together a little bit and summarize in conclusion, is that possible?

M. Gburek: O.K.

M. Hazan: Vous voulez poser vos questions tout de suite?

Le Président (M. Thuringer): II peut continuer. Les deux côtés ont donné leur consentement pour qu'il continue.

M. Hazan: Pas de problèmes, continuez. Continue, but just make it brief.

M. Gburek: There are just two more pages. I saw Côte-des-Neiges it from the recommendations made in other sections of this report. The Action Committee of Disabled Persons reminds the ministry that at present the government uses an arbitrary list of what it is considers as di-sabilitries. That list is and has been inaccurate and often missed some newly diagnosed or less well known disabilities such as dystonia. This has created difficulties for the individuals involved. Recommendation: That whatever mechanism will be used to determine the unemployable, it must be one whereby individual cases be looked at by a committee, as I just mentioned, and not be left to the power and subjectivity of one person - in this case a socio-economic agent - who may or may not be qualified to understand such things as mental or physical disabilities and the details of it, nor must it be an arbitrany list such as the present one. We recommend that individual consumers be involved in these procedures, be it through hearing or as members of a committee.

In this paper, the government implies that it wishes to improve the standard of living of the unemployable. We commend the government's intentions. However, it must: a) as stated on page 3 of our report index special benefits to the real costs as of 1988, b) recognize disabilities expenses of non medical or technical nature. For example, persons using a wheelchair may consume more clothing due to wheelchair formats. Persons with most forms of neurological disabilities that have difficulties walking, because their feet scrape, will consume more shoes œr

year. Persons whose body size does not meet commercial sizes must, like in the example of the shoes, endure the cost of two pairs of shoes. Blind persons who have a guide-dog will need to endure the cost of food and care for that dog.

We propose: a) hiriing a respectable number of disabled persons as socio-economic agents; b) greater consultation with consumers; c) recognizing that unemployability is not always related to health reasons, that is, for some disabled persons, it may be a combination of health, environmental and attitudinal realities. That despite health reasons, some individuals may wish to attempt to become employable on part time basis and thus this choice should be accommodated.

We also recommend, very strongly, that the Personalized Action Plan be implemented in the first 9 months cycle, in order to best assist and be of utmost support to the individual who will need to understand the employability profile. As well it will permit the individual who is still of good self-esteem to maximize his motivation and interest to continue to search for a job.

We must recognize that, in the last decade, job opportunities have become fewer and the unemployment of all has increased dramatically; this has contributed to lowering of individuals self-esteem and consequently her or his chances to find work.

We emphasize that wages of individuals must be in tune with standards of living to ensure that the poverty cycle does not continue to increase.

Last, we demand that spouses of unemployable persons not be penalized as implied in the paper: social assistance is reduced of the employable spouse or the person that shares accommodations with an unemployable person. This is economically and socially unjust and will further build gaps between people.

We believe that, especially with the high cost of housing today, it is very important to allow people on welfare to have an opportunity - by sharing an apartment, for example, - to have a half-way decent living that they can eat for the entire month. We know, for example, that in Montreal the rents have increased enormously and that it is sometimes very difficult. Especially if you are handicapped, you need apartments with elevators. The minute you have an elevator in an apartment, you have a higher cost and most of the time if you are looking for a 400 $ apartment, it is just not affordable to have food the rest of the month.

I would just like to close. We have a couple of questions on our committee, coming out of your report, which were not clear and we would like to have those answered. First of all, in the matter of health care cards: Which goods and services will the health care card include? Will home care, personal care, etc., now provided by the CLSC be provided for by this card to social aid recipients?

We contest this as being discriminatory on the ground that these individuals may be given inferior goods and services which affect their health, well-being and personal security. We demand a clearer statement as to what goods and services will be provided. We would like to have an assurance, for example, that with this health care card, if you present it, you will be getting equal service and not a second rate service. Thank you very much.

Le Président (M. Thuringer): Thank you very much. Avant de procéder, il faudrait demander le consentement de la commission pour poursuivre au-delà de 18 heures. Merci. Consentement.

Mme Harel: Consentement.

Le Président (M. Thuringer): M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): I would like to thank the Action Committee of Disabled Persons of Côte-des-Neiges and their representatives, Mr Gburek, for the presentation and Mr Hazan, for the assistance in the presentation.

I would like, first to know a little bit more about your group, your organization. How long has it been established? To how many people does it render services? And, what is the situation of those people? Are they, most of them, on welfare, are some of them low income earners? What is the clientele that you mender services to in Montreal? You can answer right away, I guess.

M. Gburek: Our committee started, three years ago, as a result of a research project made by the present co-ordinator whose name is Maria Burelle. She found that in the Côte-des-Neiges area there was a large number of disabled residents. O.K.? In the last survey that we have done, there were a minimum of approximately 400 to 500 disabled persons. We are talking of different disabled and we found that there were no services, very poor services and very little accessibility to public buildings, for example, to the medical buildings, these kinds of things, the essential services. We found that grouping ourselves together and pushing for these services would effect a quicker change.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): What are your sources of financing for your group to be able to give those services to the community?

M. Gburek: At present, we have received the Canada Job Development program for six months, for 50 000 $. I have just received, this past week, word from Mr Fortier's office that he will be giving us some form of aid. We have not received the letter yet as to the amount or anything. We are presently making applications

to all the different agencies that are available. We have made an application to the CRSSS-MM and, hopefully, we would receive some positive answers. (18 heures)

M. Paradis (Brome-Missisquoi): You have mentioned in your brief, I think it's on page 2, that "Disabled persons - I am reading from the second paragraph - are still among the people with lowest standards of living in our society. " So you are telling us practically that disabled people have, even financially speaking, greater needs than able people to be able to survive. Am I reading you correctly? O. K.

We have that part of the problem, O. K. ? When we try, as government or you try as an organization to involve your disabled people in job activities, you need specific programs for them. You cannot use the same programs that you use for so-called able people and, without adjustment, offer them to the people you represent. Do you agree that we need a different approach with the disabled people as far as their formation is concerned?

M. Gburek: What I believe, I do not think that the disabled should get special treatment, as per se. What I believe is that the disabled should be allowed to achieve equally as you or as anybody else in this room. OK? For example, in my case, I have had an accident twelve years ago and I returned to university after that. When I went to university, I needed to have buildings accessible. That was my special need. If another person who's blind, for example, need a note taker, that should be provided. I am not saying to pamper the disabled. I am saying: Give them the opportunity to achieve equally. Just because a person is physically disabled does not mean that there is something wrong with his brain. Just because they are physically disabled that does not mean that they cannot go to university. It does not mean that they cannot work. OK?

What the Québec and the Canadian governments have to do is to make the buildings accessible, number one that we can get into the buildings, that we can apply for the jobs, that we can go to the universities to learn. I will give you a very good example of somethings that go on in Montréal or in Québec. They have a ramp, for example, at a bank; they do not clean it in the winter. The persons cannot go to do their banking. That sounds serious. What is even more serious, this winter, when I applied for this particular position, I had to go to the Manpower Center on Ferrier, which has a giant beautifully built ramp. It had not been cleaned all winter, there was four feet of snow. I had to get somebody to bring me up the stairs. Now, I have been out twelve years in a wheelchair and I have learned to accept these things. I am not shy. But what happens is when a person is newly disabled as I know from passed experience, you become withdrawn. If I would have seen that twelve years ago, I would have gone back home and I would not have applied for the job and I would not have gotten the job.

What I am saying is just because there is a ramp there that does not always mean that you are thinking of disabled. To think of the disabled, it is a daily process. We are not asking anything special. I am sure you have heard of the term "à part égale", which means we want to be treated equally. We pay taxes like everybody else. We have our faults like everybody else. We are humans like everybody else. We just want to be able to contribute to Québec's society.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): We had a group here, the other night, who represented disabled persons, too. And they said: The people we represent are usually productive people, but they have a problem on the regular job market about being competitive, the problem that you have raised in your brief that an employer might give advantage to the person who is more competitive than the other one. And one of the suggestions they have made to the commission was to supplement that competitive aspect of the disabled persons so they get an equal chance on the job market.

How would you react to such a proposition?

M. Gburek: If I understand the question correctly, thinking to this report, I am not saying that it is a negative report, I am saying it has faults, Specially like right now, we have still a fairly high unemployment rate. When you have two people qualified for a job, at present, what the employer would do is take the non disabled person. With this particular program, specially the way you have worded the definition for the unemployables, what we believe is going to happen is that: if I would go on welfare and I would come in front of the socio-economic agent, he would see me as disabled. He would look at your report and he would say: You are unemployable. He would not look at the fact that I have a university degree. First, he would look at my physical disability, number one. Now, ideally, my disability would not come into play and he would look at my university degree and say: Yes, we can do something with you. We can get you back into working. But the prejudices that occur unfortunately are preventing the disabled from gaining this employment, even his chance to employment.

The impression that I get what will happen is that, if I word to want to go into the Employment Incentive program, I would be at the bottom of the list rather than at the top of the list of people being hired, you see? If I am on welfare, for myself, I would not want to stay there. First of all, let's face it, the amount of money that you get per month, you are not going to buy a Cadillac on it. I have always been a person, I feel, I have to contribute. I am

sure that I am not the only disabled person like that. But if I am not given an equal chance to get to this point... You see, the disabled people, they need that little extra help because of the prejudices that society has at present.

I mean, upon till last year, this is one of the achievements of our committee, it was written, in the jury duty, that people with physical handicaps could not serve on a jury. When we read this, we made a representation to the Minister of Justice asking for a change in the wording, because it promoted discrimination, because these are old laws, a lot of times they do not take into account changes in society. But this just illustrates some of the prejudices that we have to face everyday.

I push down the street and there is this mother walking with her child and the child looks at me or the child wants to have my chair and the mother would pull her away as if I'm somebody with a disease. You see? These are prejudices, O.K.? What happened is that you might not think that an employer has these things in the back of their minds, but it is unbelievable the amount of obstacles that a disabled faces in attaining employement.

The building where we rented our office base does not have an accessible washroom. We want to make it accessible. We have to fight for it. When we approached the owner of the building, who happens to be a doctor, the first question he asked was: Could you not have the person be put into a smaller wheelchair rather than enlarging the door? He was an elderly gentleman and he did not understand the needs of the disabled. But this kind of little problems illustrate the general attitude that the people have towards disabled. In order for us to be able to benefit from this program, people out there would not have to be prejudiced against us. So, what we are saying is: If we are to benefit from this program, we are going to need a little extra help in here. We are going to need something extra to say, for example, to the disabled people who are able to work, that they are going to be given at least equal consideration when jobs open up within this welfare program.

Le Président (M. Thuringer): M. le ministre, j'aimerais céder...

Mme Harel: Oui, M. le Président. Je vous remercie. M. Gburek et vous, M. Hazan, vous travaillez régulièrement avec le comité des personnes handicapées de Côte-des-Neiges.

M. Hazan: Vous vous adressez à moi? Mme Harel: Oui.

M. Hazan: Non, je l'ai accompagné aujourd'hui parce qu'il n'avait personne pour l'accompagner et il m'a dit que, s'il ne venait pas aujourd'hui, ce serait annulé et ce ne serait pas reporté.

Mme Harel: Ce ne serait pas...

M. Hazan: ...renouvelé. Je l'ai accompagné ici. Comme il ne parle pas bien le français, je l'ai aidé dans son "speech". Cela me fait plaisir. Cela ne me dérange pas.

Mme Harel: Êtes-vous un membre actif au sein du comité?

M. Hazan: Non. C'est un bon ami, à moi.

Mme Harel: Avez-vous étudié avec M. Gburek?

M. Hazan: Non.

Mme Harel: C'est intéressant, parce que, comme il a poursuivi ses études à l'université, il est possible qu'il ait fait là des contacts. Je trouve extrêmement intéressante, notamment, une des recommandations que l'on retrouve à la page 9, la première d'ailleurs, qui dit: "Hiring a respectable number of disabled persons as socio-economic agents". Est-ce qu'il y a plusieurs agents actuellement, à la connaissance de M. Gburek, qui ont un handicap et qui travaillent dans les bureaux?

M. Hazan: Ils sont exactement quatre.

Mme Harel: Vous voulez dire quatre à Côte-des-Neiges, au comité?

M. Gburek: Nous sommes quatre qui travaillons au projet. Nous sommes toutes des personnes handicapées. (18 h 15)

Mme Harel: Et, à votre connaissance, est-ce qu'il y a des agents d'aide sociale, dans les bureaux d'aide sociale, qui sont des personnes handicapées?

M. Hazan: À ma connaissance?

Mme Harel: À la connaissance de M. Gburek.

M. Gburek: Au centre d'emploi, je ne connais personne qui ait un handicap. Pas du tout.

M. Hazan: C'est pour cela que la rampe n'est pas...

M. Gburek: La rampe est là pour faciliter l'accès aux handicapés. Mais je suis allé là une couple de fois et je n'ai jamais vu une personne handicapée travailler là. Peut-être y a-t-il une personne avec un problème de surdité, quelque chose qu'on ne peut pas voir. Mais un handicap physique, une personne aveugle ou en fauteuil

roulant ou avec des béquilles, je n'ai pas vu cela.

Mme Harel: C'est au centre d'emploi. Vous voulez dire au centre fédéral, au centre d'emploi du Canada? Est-ce que dans les bureaux d'aide sociale, à la connaissance de M. Gburek, là où il y a des agents d'aide sociale, il y a des personnes qui ont un handicap?

M. Gburek: II n'y a personne d'handicapé qui travaille au bureau de l'aide sociale de Côte-des-Neiges. Je peux peut-être mentionner un petit problème. Une de nos membres handicapés va suivre des traitements en physiothérapie chaque jour. Maintenant, son agent du bien-être social lui a dit qu'ils vont couper ses prestations parce qu'ils ne la trouvent pas chez elle quand ils viennent la visiter. D'accord? Ils ont essayé de rejoindre cette dame une couple de fois, chez elle mais parce qu'elle suit des traitements de physiothérapie presque toute la journée dans un centre de réadaptation, c'est sûr qu'elle n'est pas là. L'agent a dit: Puisque tu n'es pas là, c'est peut-être parce que tu travailles. Cette personne a aussi des problèmes émotionnels et cela lui fait très mal. C'est juste un cas qui montre que, s'il n'y a pas d'agent handicapé pour comprendre exactement la vie des handicapés, ils vont prendre des décisions qui ne sont pas bonnes pour les handicapés.

Mme Harel: Dans le cas que vous nous citez, une fois que l'agent a obtenu la confirmation qu'il s'agissait bien de traitements phsysio-thérapeutiques, est-ce qu'il a maintenu la pleine prestation à la personne?

M. Gburek: Même si elle l'a déjà dit à l'agent, jusqu'à maintenant, il n'a pas dit exactement ce qu'il va faire. La personne a très peur de son agent parce qu'elle ne sait pas si un jour prochain elle sera privée de l'aide sociale ou non.

Mme Harel: Elle se sent menacée. M. Gburek: C'est de l'insécurité.

Mme Harel: Elle se sent menacée parce qu'elle est sous traitement. Elle a confirmé, par écrit peut-être, qu'elle avait des traitements et, malgré tout, elle se sent menacée.

M. Gburek: Tout cela a déjà été fait. Elle a mentionné qu'elle avait reçu une lettre du centre de réadaptation. Elle n'a pas encore reçu une réponse absolue lui disant: Oui, vous continuez à recevoir votre aide sociale.

Mme Harel: Cela fait combien de temps?

M. Gburek: Elle l'aura peut-être reçue dans une couple de semaines, mais c'est de l'insécurité pour elle, entre-temps. C'est très difficile. Cette situation d'insécurité dure depuis plus de deux mois.

Mme Harel: Si elle suit des traitements physiothérapeutiques, est-ce à cause d'un handicap permanent ou à la suite d'un accident récent?

M. Gburek: C'est pour un handicap physique causé par son arthrite. Elle a des problèmes à marcher et elle a reçu des traitements dans les os pour l'aider à marcher. Elle a aussi des douleurs dans les jambes à cause de l'arthrite et la thérapie est supposée l'aider.

Mme Harel: Est-ce que vous avez fait des représentations auprès de la ville de Montréal qui annonçait l'embauche de 300 nouveaux fonctionnaires pour administrer le programme de sécurité du revenu du ministre? La ville disait avoir ses propres critères d'embauché, ne pas s'engager à prendre à son service les fonctionnaires actuellement affectés au programme. Quant aux critères d'embauché, est-ce que vous avez pu vérifier, ou allez-vous le faire, auprès de la ville de Montréal ou auprès du ministre pour savoir si le ministre recommandera à la ville d'avoir comme critère d'embaucher un pourcentage de personnes qui ont un handicap?

M. Gburek: Je pense seulement, comme je l'ai dit tout à l'heure dans la présentation, qu'il est très important pour les handicapés d'avoir un emploi. L'emploi, pour les handicapés, c'est très important aussi au plan émotionnel. S'ils travaillent, ils savent qu'ils contribuent à la société québécoise. Je pense que toute personne, handicapée ou non, veut contribuer.

Il y a des postes disponibles, spécialement au gouvernement, qui pourraient être comblés par les handicapés. Il y a des personnes handicapées qualifiées pour faire ce travail. Alors, je pense que, même si le gouvernement a déjà fait un peu de progrès en ce sens, il devrait prendre plus d'initiatives pour trouver du travail pour les personnes handicapées qui sont qualifiées.

Mme Harel: Une dernière question...

M. Gburek: C'est une chose très importante. Je ne veux pas qu'on donne du travail à une personne handicapée seulement parce qu'elle est handicapée. Je dis que, si une personne handicapée est qualifiée et qu'une autre personne est qualifiée, pour le moment, on devrait donner l'avantage à la personne handicapée. C'est la même chose qu'on a faite pour les femmes parce qu'elles ont des besoins spéciaux. Si le gouvernement n'agit pas... If the government does not act by example, the private sector employer wHI not follow and the handicapped will never be employed.

M. Hazan: Deux petits mots pour vous expliquer quelque chose parce que je crois qu'il a de la difficulté. À ce que j'ai compris, ce qu'il veut dire exactement par émotionnel, c'est que les gens qui ne sont pas handicapés peuvent se réveiller le matin, vers 8 heures et demie, 9 heures, et aller faire dix, quinze demandes d'emploi, tandis qu'eux doivent appeler un taxi spécial quatre heures à l'avance pour l'avoir à telle heure. C'est par la STCUM. S'ils ne font qu'une demande par jour et qu'ils sont refusés, cela les déprime déjà. Une personne qui n'est pas handicapée, elle, pourra se rattraper, aller chercher le deuxième, le troisième, le quatrième emploi, jusqu'à ce qu'elle ait sa "job". C'est ce qu'il veut vous dire exactement.

Mme Harel: Je vous remercie de vous être déplacés. Je souhaite que cet effort que vous avez fait devant la commission porte fruit, et que vos recommandations soient entendues et retenues, notamment celles qui concernent l'engagement de personnes handicapées. Je crois qu'à l'occasion d'une réforme, qui devrait être différente de celle-là, mais qui s'impose également, il devrait y avoir embauche de personnel nouveau. Ce serait l'occasion de faire de la place à des personnes handicapées dans les bureaux. Je vous remercie.

Le Président (M. Thuringer): M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Peut-être brièvement. You have mentioned, M. Gburek, that you would like to contribute. I can assure you that you have contributed very positively to the work of this commission. À M. Hazan, merci de l'avoir accompagné. Je souhaite à tout le monde des amis comme vous.

M. Hazan: C'est moi qui vous remercie.

Le Président (M. Thuringer): J'aimerais aussi remercier The Côte-des-Neiges Action Committee of Disabled Persons. La commission suspend ses travaux jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 18 h 28)

(Reprise à 20 h 17)

Le Président (M. Laporte): À l'ordre, s'il vous plaît! MM. les membres de la commission, je vous prie de bien vouloir prendre place!

Une voix: Mesdames aussi.

Le Président (M. Laporte): MM. et Mmes de la commission. Merci, M. le ministre, de me rappeler à l'ordre. La commission reprend ses travaux afin de continuer sa consultation générale et de tenir des auditions publiques afin d'étudier \e document intitulé "Pour une politique de sécurité du revenu".

Coalition sur l'alimentation dans Hochelaga-Maisonneuve

En tout premier lieu, j'aimerais souhaiter la bienvenue à Québec aux membres de la Coalition sur l'alimentation dans Hochelaga-Maisonneuve et leur rappeler brièvement la procédure à suivre en ce qui concerne la commission parlementaire qui, d'une part, vous laisse vingt minutes pour la présentation de votre mémoire pour que, d'autre part, nous puissions, pendant quarante minutes, avoir un échange avec les membres de la commission.

Pour l'enregistrement des débats, je vous demanderais de bien vouloir, tant le porte-parole que les membres qui l'accompagnent, vous identifier et, par la suite, faire la présentation de votre mémoire. La parole est à vous.

M. Primeau (Jean-Robert): M. le Président, M. le ministre, Mmes et MM. les députés, nous tenons à vous remercier de l'occasion que vous nous donnez de venir ce soir vous présenter notre mémoire et notre point de vue sur le document d'orientation intitulé Tour une politique de sécurité du revenu". La Coalition sur l'alimentation dans Hochelaga-Maisonneuve est un regroupement de dix organismes du quartier Hochelaga-Maisonneuve qui a été mise sur pied en mai 1987 pour faire face aux difficultés socio-économiques de notre population soulignées par de nombreuses informations fusant de toutes parts dans le quartier et indiquant une incapacité des groupes de répondre à tous les besoins. J'aimerais souligner que notre coalition n'a pas de charte. Elle est composée de représentants et représentantes le plus souvent responsables d'organismes communautaires et dûment mandatés par leur groupe pour favoriser une action sur l'alimentation. La coalition a une existence publique et fonctionne par consensus.

Je voudrais vous présenter les personnes qui m'accompagnent ce soir et qui sont membres de la coalition. Vous avez, à ma gauche, Mme Lucie Lépine, directrice du Carrefour familial Hochelaga; à sa gauche, Mme Johanne Dupuis, travailleuse sociale à la Marie Debout, qui est un centre de femmes; à l'extrême gauche, Mme Hélène Whiting, présidente du Comptoir alimentaire de rencontres, de références et d'entraide. À ma droite, vous avez Mme Annie Vidal, directrice générale du Resto-Pop et, à droite, Mme Louise Lépine, nutritionniste au CLSC Hochelaga-Maisonneuve. Pour ma part, mon nom est Jean-Robert Primeau et je suis secrétaire de la coalition.

Comme vous n'êtes pas, tous et toutes familiers avec le territoire où nous intervenons, je vous informe que le quartier Hochelaga-Maisonneuve est un quartier urbain du sud-est de Montréal qui comprend 47 000 résidents et résidentes. Les personnes qui dépendent de l'aide

sociale y sont au nombre d'environ 12 000. Les prestataires d'assurance-chômage sont plus de 4000. En incluant les personnes âgées, on considère que près de 50 % de la population vit sous le seuil de la pauvreté. Selon une enquête effectuée par la Société canadienne d'hypothèques et de logement en octobre 1987, les prix moyens des logements étaient les suivants dans notre quartier: 287 $ pour un studio, 380 $ pour un logement d'une chambre, 502 $ pour deux chambres et 576 $ pour trois chambres. Pendant la période couverte par l'enquête, d'avril à octobre 1987, les prix d'un loyer de trois chambres ont grimpé de 20 % dans Hochelaga-Maison-neuve. Les prix des loyers de deux et trois chambres sont d'environ 9 % plus élevés que dans le Montréal métropolitain. Ces quelques données prouvent à l'évidence que les prestataires d'aide sociale doivent se priver de manger pour avoir un toit et se vêtir. Elles font aussi comprendre pourquoi les organismes du milieu reçoivent de plus en plus de personnes qui ne peuvent pas s'alimenter tous les jours du mois, ni en qualité ni en quantité. Dans notre mémoire, nous soulignons que le ménage québécois moyen a dépensé 26 % de ses revenus pour l'alimentation en 1987. Pour se maintenir en santé, les ménages récipiendaires de l'aide sociale devaient consacrer de 40 % à 55 % de leurs revenus pour la nourriture et ce, sans aucune gâterie ni repas des fêtes. S'H y en a dans la salle qui sont allés prendre leur souper à deux personnes au restaurant du Hilton, il vous en a coûté environ ce qui est recommandé pour un adulte pour tout un mois et ceci, encore une fois, pour une alimentation minimale si on veut rester en santé.

Quand on sait que le coût des loyers gruge 50 % des revenus de plusieurs ménages, on comprend vite qu'on doive se priver de manger pour s'habiller, payer le téléphone, etc. Le pourcentage des bébés de petit poids à la naissance était de 9,7 % en 1981 dans le quartier Hochelaga-Maisonneuve, alors qu'il était de 6 % en Chine en 1982. Une des causes identifiées de ce phénomène est le fait que les mères manquent de nourriture trop souvent et trop longtemps. Un sondage fait en octobre 1987 dans une école primaire de notre quartier révèle que 10 % des enfants se présentent en classe sans rien dans le ventre. Quand on a entre 18 et 30 ans et qu'on reçoit le minimum d'aide sociale, on en est souvent réduit à la mendicité ou à la criminalité. Les conséquences de cette situation, dont on pourrait énumérer les faits encore longtemps, sont une plus grande incidence de maladies physiques et mentales qui coûtent énormément cher à la société et qui privent les personnes de s'épanouir et de contribuer au développement de cette société. On dirait que cette réforme a été élaborée isolément sans tenir compte des coûts à moyen et long termes pour les autres ministères et la société tout entière. Les bébés trop petit poids risqueront d'avoir divers handicaps dès leurs premiers jours et coûteront très cher à la société. On sait, par exemple, qu'un patient en unité postnatale spécialisée coûte environ 1000 $ par jour. C'est chez ces enfants qu'on retrouve le plus haut taux de mortalité et de handicaps majeurs. Le manque de nourriture crée des tensions dans beaucoup de familles, tensions qui peuvent aboutir à des actes violents. Les femmes écopent souvent les premières du manque de nourriture. Quand un enfant doit sauter un repas, cela fait déjà plusieurs repas que la mère n'a pas mangés.

Nous croyons qu'il ne procède pas d'une saine gestion des affaires publiques de ne pas tenir compte des conséquences à long terme de la pauvreté. Nous croyons que des correctifs importants devraient être apportés à cette réforme pour qu'elle n'aggrave pas, dans plusieurs cas, des problèmes de pauvreté contre lesquels nous luttons.

La pyramide des besoins, de Maslow, maintenant très largement connue, présente une hiérarchie des besoins humains. Au bas de la pyramide, on retrouve les besoins de première nécessité. Maslow nous démontre comment l'humain, dans le développement de soi, doit combler les besoins primaires avant d'être en mesure d'accéder aux autres niveaux. C'est l'image la plus significative que nous ayons trouvée pour expliquer notre vision du projet de réforme. On va à l'encontre de l'analyse que Maslow fait de la nature humaine si on pense que les personnes vont être en mesure de réintégrer le marché du travail si leurs besoins essentiels ne sont pas satisfaits. Nous croyons que plusieurs des barèmes proposés ne permettent pas cette satisfaction. D'autres l'ont peut-être dit avant nous, mais nous croyons important de le réitérer, la parité pour les jeunes de 18 à 30 ans ne saurait être retardée sans l'approfondissement de conséquences graves pour plusieurs de ces jeunes: prostitution, polytoxicomanie, itiné-rance, etc.

Je vais maintenant céder la parole à Mme Lucie Lépine, du Carrefour familial Hochelaga, qui va nous donner d'autres exemples qui viennent du vécu de cette personne à l'intérieur d'un groupe dans le quartier Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Lépine (Lucie): Le Carrefour familial Hochelaga accueille quelque 500 familles par année; 80 % de ces familles sont des familles monoparentales dont la femme est responsable. Dans notre organisme circulent, chaque année, des milliers de personnes bénéficiaires de l'aide sociale ou à très modeste revenu. Comme nous voulions rejoindre les familles les plus démunies, les plus isolées, depuis cinq ans notre organisme fait systématiquement du porte à porte dans les rues du quartier, non par intérêt politique, mais pour devenir si près des gens qu'ils fassent part de la situation réelle. Les exemples suivants vont peut-être vous sembler un peu sensationnels. Nous aurions pensé la même chose si notre

organisme ne s'était pas déplacé pour voir.

Ce que nous avons vu? Nous avons vu des hommes qui ont perdu leur emploi à cause de nombreuses fermetures d'usines et qui se sentent dévalorisés. Nous avons vu des femmes, mères de famille, considérées comme non compétentes pour travailler dans une garderie. Nous avons vu des femmes très isolées parce qu'elles n'ont pas l'argent nécessaire pour faire garder les enfants. Des personnes qui paniquent lorsque le chèque d'aide sociale retarde d'une journée. Nous essayons de nous imaginer la situation lorsqu'il y aura coupures, enquêtes, 53 catégories; la réforme voulait, nous a-ton dit, simplifier. Nous avons vu des gens qui font le tour des poubelles, des adolescents, des adolescentes qui ont toujours faim et qui prennent dans le réfrigérateur les derniers repas du mois, des familles où les enfants mangent à tour de rôle, des enfants qui piquent des contenants de caramel, de confiture, de biscuits dans les épiceries et les restaurants, des femmes qui se partagent les restes à la fin du mois, une femme qui cache la nourriture dans la neige pour répartir l'épicerie durant tout le mois, une autre qui cache la nourriture dans le haut de l'armoire pendant qu'elle prend son bain afin d'éviter que les enfants mangent pendant ce temps-là, un cadenas sur la porte du réfrigérateur. Nous l'avons vu.

Vous comprendrez pourquoi une telle réforme qui ne tient pas compte des besoins, nous inquiète. Les conséquences de mauvaises conditions économiques sont déjà très désastreuses: culpabilité des mères, honte, dépression, dévalorisation personnelle, isolement, tension dans les familles lorsqu'un adolescent ou une adolescente prend, le soir, le repas du lendemain, tension à cause du regroupement des familles dans des logements étroits, ce qui entraîne querelles et violence. Les familles se regroupent parce qu'elles ne parviennent pas à boucler leur budget. Nous comprenons mal pourquoi les familles seraient pénélisées pour ces contraintes. Exploitation. Une femme qui fait la vaisselle dans un restaurant toute la journée pour son repas du midi. Renforcement des préjugés vis-à-vis des assistés sociaux. Pourtant, l'expérience nous démontre que les bénéficiaires de l'aide sociale ne sont pas des paresseux. Ils sont plutôt très actifs: 70 bénévoles soutiennent le Carrefour familial Hochelaga avec quelques permanents à salaire très modeste. Je n'oserais pas dire le salaire des permanents de peur de faire rougir les députés qui seraient trop sensibles. Des femmes se regroupent pour faire des achats et des repas économiques.

Ce ne sont là que quelques exemples. Alors, pourquoi ne pas tenir compte de ces besoins dans la réforme? Pourquoi vouloir économiser sur le dos des plus faibles économiquement? Est-ce une véritable économie? Pourquoi ne pas tenir compte des seuils de pauvreté? Pourquoi remettre à l'individu la responsabilité de l'emploi? Pourquoi une incitation négative à l'emploi? Pourquoi ne pas soutenir les groupes qui incitent, de façon positive et graduée, le retour sur le marché du travail? Des conditions de vie décentes ne sont-elles pas la meilleure façon d'inciter les gens au travail? Où sont les emplois pour les femmes peu scolarisées? Quels types d'emploi? Et pour quand? (20 h 30)

Le projet nous inquiète. Un langage économique qui ne tient pas compte des conditions de vie nous heurte. Nous aurions applaudi à une politique du plein emploi, à une incitation positive au travail.

M. Primeau: Si vous le permettez, M. le Président, j'aimerais céder la parole à Mme Louise Lépine, qui est nutritionniste au CLSC Hochelaga-Maisonneuve et qui va présenter des exemples de budgets. Je voudrais souligner que Mme Lépine a préparé un document qui a été remis à la secrétaire de la commission.

Mme Lépine (Louise): Nous ne disposons pas des ressources humaines et financières de votre ministère, M. Paradis, mais nous avons tenu à vous démontrer, chiffres à l'appui, que les barèmes proposés dans votre document d'orientation sont gravement insuffisants et que les participants à la majorité de vos programmes ne pourront pas se nourrir adéquatement, la nourriture étant le seul poste compressible de leur budget. Nous avons utilisé les enquêtes sur les immeubles locatifs de la SCHL dans Hochelaga-Maisonneuve, en octobre 1987, et les budgets de subsistance et de confort minimum du Dispensaire diététique de Montréal, de 1987, ces budgets étant les seuls qui soient utiles, à notre avis. En effet, nous croyons essentiel que les barèmes soient fondés sur les besoins et non sur les dépenses des plus pauvres. Leurs dépenses ne peuvent pas répondre à leurs besoins minimums.

En première page du document, vous constaterez la frugalité du budget. Je vous fais noter tout de suite que ce qu'on appelle les loisirs et la récréation représentent 10 $ au total pour un adulte. Cela veut donc dire qu'une femme ne peut même pas aller au cinéma, une fois dans le mois, si elle doit faire garder ses enfants pour se distraire.

Voyons donc rapidement quelques exemples de budgets. Le crédit d'impôt foncier n'y apparaît pas parce que nous ne disposions pas des données moyennes à ce sujet pour notre quartier. Alors, nous avons calculé les revenus potentiels de travail de 155 $ au programme APTE dans les neuf premiers mois, mais nous croyons que, quand on recherche un emploi, on doit le faire à temps plein et que, quand on est mal nourri, on n'a pas l'énergie pour faire des heures supplémentaires; 155 $ représentent, par exemple, 77 heures et demie de gardiennage, c'est-à-dire 15 soirs d'un peu plus de 5 heures chacun.

Alors, voyons les budgets. Un premier

exemple: une femme et son garçon de onze ans, bénéficiant du programme APTE pendant les neuf premiers mois. J'ai utilisé le budget de confort minimum parce que l'enfant va à l'école et parce que la mère devrait être en recherche intensive d'emploi. Ses revenus sont de 655,39 $; ses dépenses de 889,14 $, soit un déficit de 233,75 $. Deuxième exemple: une femme avec un adolescent de 17 ans et une adolescente de 14 ans bénéficiant du programme APTE, toujours pendant les neuf premiers mois: revenus de 856,83 $, dépenses de 1270,22 $; un déficit de 413,39 $. Troisième exemple: deux adultes non disponibles, une femme enceinte de sept mois et un homme convalescent à la suite d'une intervention chirurgicale bénéficiant du programme APTE. Au budget de subsistance, le plus petit, j'ai ajouté le téléphone et des billets d'autobus parce que, quand on est malade ou enceinte, on doit aller chez le médecin, à la clinique ou à l'hôpital. On obtient des revenus de 720 $, des dépenses de 795,16 $ et un déficit de 75,16 $. Nous n'avons même pas ajouté ici le coût des vêtements et des meubles requis pour le futur bébé, mais nous savons que cette recherche de biens essentiels est un grand facteur de stress chez les femmes enceintes pauvres et contribue à la naissance de bébés de petit poids. En effet, le stress à lui seul empêche l'utilisation maximum des aliments, même s'ils étaient de bonne qualité et suffisants. Enfin, un quatrième exemple du programme APTE pendant les neuf premiers mois: un homme seul, avec un revenu de 405 $; des dépenses de 596,66 $ et un déficit de 191,66 $.

Enfin, j'aimerais vous souligner qu'on demande toujours aux assistés sociaux d'être d'excellents administrateurs. Qui d'entre nous, dans cette salle, est obligé comme eux de savoir exactement combien il peut dépenser pour manger et combien de jours il mangera dans le mois? Enfin, pour ma part, je dois m'assurer que mes clients ont l'argent nécessaire avant de leur donner certaines informations sur l'alimentation saine. Sinon, je ne ferai qu'augmenter leur sentiment de culpabilité et d'incompétence face à leur famille. Je vous remercie.

M. Primeau: Je voudrais terminer par une série de questions auxquelles nous trouvons qu'il est impératif de répondre. Comment va-t-on faire pour créer des emplois en nombre suffisant pour les 286 622 ménages aptes et les 300 000 chômeurs et chômeuses au Québec? S'il va en coûter 7 500 000 000 $ pour créer 40 000 emplois à la Baie James, l'État va-t-il injecter 112 500 000 000 $ pour en créer 600 000? Nous ne posons pas cette question sur le ton de l'insolence, mais sur celui de l'inquiétude.

Quels seront les coûts sociaux de cette réforme si, comme nous l'estimons, elle va appauvrir de larges blocs de la population? Quels seront, dans cinq, dix, quinze ou vingt ans, les coûts sociaux d'une réforme qui va accentuer les problèmes de santé physique et de santé mentale d'une bonne partie de la population?

Comment va-t-on faire pour créer des emplois permettant à leurs détenteurs de vivre dignement, c'est-à-dire des emplois non précaires, des emplois permanents? Est-ce que l'emploi qu'un individu détenait pourra être maintenu, une fois son programme terminé? Est-ce que ces emplois vont tenir compte des capacités, des expériences et des formations des futurs travailleurs? Quelles seront les conséquences de l'arrivée de travailleurs et de travailleuses que l'employeur n'aura pas à payer dans les petites entreprises non syndiquées? Va-t-on, comme société, voir augmenter le nombre de chômeurs et de chômeuses pour compenser le placement d'assistés sociaux et d'assistées sociales? Va-t-il y avoir suffisamment de garderies pour les enfants des femmes ou des hommes qui ne seront plus disponibles pour les garder? Les barèmes sont plafonnés à des situations familiales où il y a deux enfants. Comment les familles qui en ont quatre se débrouilleront-elles? Nous connaissons des femmes, à l'aide sociale, qui sont retournées aux études, mais qui ont des horaires antifamiliaux; de 15 h 30 à 22 h 30 par exemple. Quel est ou quel sera l'effet sur les enfants de l'absence des parents pour le repas du soir et pour les devoirs scolaires? Il est démontré que l'intérêt et le support des parents sont essentiels au succès scolaire des enfants. Or, les enfants des milieux socio-économiques défavorisés sont ceux qui ont le plus de difficultés. Ne va-t-on pas aggraver ce problème?

Le gouvernement va-t-il reconnaître la contribution majeure des organismes communautaires pour aider les personnes à réintégrer graduellement le marché du travail? Cette reconnaissance se traduira-t-elle par un soutien financier approprié? Ce n'est là, mesdames et messieurs de l'Assemblée nationale, qu'un faible échantillonnage des questions que cette réforme soulève pour nous.

En terminant, nous voudrions vous dire que, si vous avez des doutes quant à la situation des familles que nous décrivons, nous sommes prêts à accueillir une délégation de la commission dans notre quartier. Nous pourrions vous faire rencontrer des familles qui vivent les problèmes et qui s'attendent à mieux d'une réforme de l'aide sociale. Merci.

Le Président (M. Laporte): Merci, M. Primeau. Je vais maintenant céder la parole à M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous me permettrez de remercier la coalition, dans un premier temps, pour son mémoire écrit, sa présentation orale ainsi que l'information additionnelle qui nous a été distribuée ce soir.

Vous me permettrez, en ce début de soirée - bien que vous soyez plus que notre 70e groupe, vous êtes notre premier ce soir - de partager avec vous le profil de l'assisté social au

Québec, tel qu'on le retrouvait en mars 1987. Pour une clientèle de tout près de 400 000 bénéficiaires de l'aide sociale, on prétendait à l'époque que 25 % de la clientèle, soit quelque 100 000 ménages, était considérée comme incapable de subvenir à ses besoins sur une période régulière, et on parle des besoins de base.

On parlait de 300 000 chefs de ménage aptes au travail. Mais aptes au travail dans quelles conditions ou avec quelles barrières à franchir? Je pense que vous les connaissez aussi bien que les membres de la commission, mais globalement et peut-être pour vous permettre de constater qu'on retrouve ailleurs aussi, en province, des problèmes qui peuvent être communs, bien qu'il y ait des différences de région en région: sur le plan de l'alphabétisation, on considère que 36 % de la clientèle est composée d'analphabètes fonctionnels, et vous savez quelles difficultés éprouvent ces gens pour se trouver un emploi, même pour prendre connaissance de l'offre d'emploi; 60 % de cette clientèle n'a pas terminé son cours secondaire et on sait combien d'entreprises exigent aujourd'hui de détenir un diplôme d'études secondaires pour pouvoir poser sa candidature à un emploi; 40 % de la clientèle n'a aucune expérience de travail reconnue; je dis bien reconnue parce qu'il s'agit, dans la majorité des cas, des femmes qui ont peut-être une expérience de travail, mais qui n'est pas reconnue au sens commun du marché du travail.

Dans ce contexte, le gouvernement a des choix à faire et des décisions à prendre. Le gouvernement peut faire comme il l'a fait traditionnellement, soit poster un chèque mensuel et abandonner les gens en marge du développement économique. Si vous n'investissez pas dans l'employabilité de ces gens, ils vont demeurer à perpétuité en marge de tout développement économique qui peut se produire au Québec. C'est un peu ce que nous tentons avec le programme APTE. On pourrait parler du programme Soutien financier; on en a parlé avec des groupes dont la clientèle était composée plus spécifiquement de gens admissibles à ce programme. On pourrait parler du programme APPORT; je pense qu'il y a des gens chez vous qui y seraient admissibles. Mais les critiques ont surtout porté sur le programme APTE: Actions positives pour le travail et l'emploi.

Avant de vous poser des questions spécifiques, j'aimerais - parce que je suis désavantagé ce soir, je ne vous connais pas aussi bien que celle qui est en avant de moi - avoir quelques renseignements additionnels, peut-être en commençant par Mme Lucie Lépine, quant au fonctionnement du Carrefour familial Hochelaga. Vous m'avez expliqué brièvement que 70 bénévoles y travaillaient. De quelle façon est-il financé? Combien de personnes rejoint-il dans votre milieu? Depuis combien de temps opère-t-il?

Mme Lépine (Lucie): Le carrefour familial existe depuis onze ans. Votre autre question, c'était...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Combien de personnes rejoint-il?

Mme Lépine (Lucie): II rejoint environ 500 familles par année. Cela veut dire des milliers de personnes: hommes, femmes et enfants. Comme je l'ai dit, la plupart sont bénéficiaires de l'aide sociale ont de très modestes revenus.

Comment est-on soutenu? On l'est très peu. Vous disiez tantôt que les femmes et leur expérience étaient très peu reconnues sur le marché du travail. Je pense que les organismes communautaires sont aussi très peu reconnus. On vit de dons et de subventions qui sont toujours très chancelants d'une année à l'autre, et il y a des coupures. C'est pour cela qu'on a besoin de beaucoup de bénévoles et même les permanents sont presque bénévoles.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Combien avez-vous de permanents presque bénévoles?

Mme Lépine (Lucie): Disons l'équivalent de cinq parce qu'il y en a qui travaillent dix heures, quinze heures, et le reste.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'accord. Vous avez parlé d'une clientèle composée surtout de personnes qui vivent de l'aide sociale. Combien en avez-vous, si vous le savez, grosso modo qui vivent de l'aide sociale? Combien vivent de l'assurance-chômage, si c'est le cas? Et combien de bas salariés avez-vous, si c'est le cas?

Mme Lépine (Lucie): En pourcentage?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, si vous l'avez.

Mme Lépine (Lucie): Je pense qu'au carrefour famillial il y a environ 70 % de femmes chefs de famille bénéficiaires de l'aide sociale.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Avec ou sans enfants?

Mme Lépine (Lucie): Avec enfants.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'accord.

Mme Lépine (Lucie): Disons que la famille type, c'est une femme, âgée de 18 à 35 ans, avec deux enfants.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'accord.

Mme Lépine (Lucie): Et il y a 20 % de chômeurs et 10 % de très petits salariés. C'est la clientèle du carrefour.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Le temps va me manquer, mais si vous pouvez le passer en

réponse à des questions, j'aurais sans doute des informations un peu semblables à demander aux dirigeants de Resto-Pop, de Marie Debout, etc. Pouvez-vous me les donner rapidement?

Mme Vidal (Annie): Le Resto-Pop fonctionne depuis trois ans. Nous formons des jeunes qui sont à l'aide sociale. Nous travaillons à les intégrer au travail par le biais des travaux communautaires. Nous servons 150 repas par jour à la population du quartier Hochelaga, des repas préparés à partir d'aliments récupérés.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Combien avez-vous de participants?

Mme Vidal: II y a 27 travailleurs dont 20 jeunes entre 18 et 30 ans, en travaux communautaires et en stages en entreprise.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Depuis combien de temps est-ce que cela fonctionne?

Mme Vidal: Depuis trois ans. (20 h 45)

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Faites-vous un certain suivi des gens qui participent à vos travaux communautaires pour savoir si...

Mme Vidal: Nous faisons un suivi certain.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est mieux qu'un certain suivi. Et qu'arrive-t-il à ces gens lorsqu'ils terminent leur stage ou leurs travaux communautaires chez vous?

Mme Vidal: Nous travaillons principalement avec la première génération de jeunes qui ont été élevés sur le bien-être social. Nous travaillons donc avec des jeunes qui n'ont aucune projection vers l'avenir, qui n'ont aucun métier et qui ont en moyenne un secondaire 2. Nous avons donc tout à reconstruire à cause des conditions dans lesquelles ils ont vécu, sur le bien-être social.

Les conséquences? Quand on travaille avec eux, c'est une "job" à temps plein, c'est-à-dire que nous avons cinq permanents dont la principale "job" est l'encadrement de ces personnes. Le résultat que cela donne, c'est que ce travail dure un an. Il y a effectivement des résultats: une remotivation au retour aux études, à travailler, à essayer... Les conditions dans lesquelles nous faisons ce travail à peu près les mêmes que celles du carrefour familial puisque, principalement pour les travaux communautaires, il n'y a aucun support quant à la formation qu'on donne, c'est-à-dire qu'on donne cette formation parce qu'on le veut bien. On pourrait aussi ne pas la donner et utiliser ces personnes comme "cheap labor" dans une entreprise. Ce qui nous inquiète, nous, particulièrement dans cette réforme, c'est que vous parlez de développer l'employabilité. On applaudit à cela parce qu'on en est bien cons- cients, on le vit depuis trois ans, sauf qu'on ne sait pas ce que c'est, comment vous allez l'encadrer ni ce que vous allez mettre là-dedans. D'autre part, on se pose d'autres questions, c'est-à-dire que, nous, nous faisons notre propre recrutement. Pourquoi? Parce que vos services ne sont pas capables de nous référer des gens et c'est nous qui allons chercher les gens pour travailler à ces travaux communautaires, c'est-à-dire que les services qui existent à l'heure actuelle, qui sont minimes par rapport à ce qui devrait exister selon la réforme, n'offrent même pas ces services aux gens qui voudraient y participer.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Me permettez-vous de vous interrompre là-dessus et de vous demander des applications pratiques de ce que vous venez de dire? Je comprends que vous procédiez à votre propre recrutement et que le service de Travail-Québec ne soit pas adéquat, mais avez-vous - comment dirais-je - épuisé ou vous êtes-vous vous-mêmes épuisés à requérir ces services de Travail-Québec?

Mme Vidal: Dans les premières années. Après un an, on ne s'en est plus occupés.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Donc, il y a trois ans, vous vous en êtes occupés. Racontez-nous comment cela s'est passé.

Mme Vidal: D'accord. Par exemple, dans un contrat, quand on va chercher un programme de travaux communautaires, on dit: Pas de problème. Le centre Travail-Québec va vous référer du monde; parfait! Nous, nous avons 20 postes, ce qui est énorme, par rapport à d'autres programmes. On attend. Rien ne se présente. Ce que je veux dire, c'est que, très souvent, les services qui existent, d'abord, les gens ne s'y réfèrent pas, c'est-à-dire qu'on n'a pas spontanément confiance dans les centres Travail-Québec et ce n'est pas la première place où on va aller pour se trouver une "job". Ensuite, les personnes qui y travaillaient ne connaissaient pas nécessairement ces programmes. Imaginez-vous, il y a deux sortes de programmes actuellement, principalement, les stages en entreprise et les travaux communautaires pour les...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Les 18-30...

Mme Vidal: Oui, c'est ça, pour les 18-30 ans. La plupart des fonctionnaires ne sont pas au courant. Cela a pris deux ans avant qu'ils sachent ce que c'était et ils sont encore moins capables de convaincre les jeunes d'y participer.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous faites affaires ou vous faisiez affaires avec quel centre Travail-Québec, juste, pour mon information?

Mme Vidal: On a fait affaires avec plusieurs

parce que cela s'est transformé, cela a changé. Je ne voudrais pas...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, non.

Mme Vidal: Je pense que ce n'est pas seulement notre cas. En tout cas, on connaît plus la situation de la région métropolitaine. C'est le cas de la plupart des projets...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Nous sommes ici pour cela.

Mme Vidal: ...dans Hochelaga-Maisonneuve.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Imaginez-vous que, si vous ne nous le dites pas, on ne le saura pas. Finalement, moi, je peux le dire, pour la région chez nous parce que je fais du bureau de comté, mais je n'en fais pas dans Hochelaga-Maisonneuve; c'est quelqu'un d'autre qui fait cela. Il y a trois ans, il n'y a eu aucune plainte à l'Assemblée nationale sur le mauvais fonctionnement du centre Travail-Québec de votre coin. J'étais là et je ne me souviens pas de plaintes.

Mme Vidal: Parce que, nous, nous sommes habitués à nous organiser par nos propres moyens. À ce moment, on s'est organisés en fonction de cela. C'est le moindre dé nos problèmes, ça.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous réussissez votre recrutement quand même.

Mme Vidal: Oui, c'est nous-mêmes qui le faisons à ce moment.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'accord. Le taux de succès, les gens qui terminent soit le stage en entreprise ou les travaux communautaires chez vous... Moi, je qualifierais de succès le fait qu'ils se trouvent un emploi raisonnable ou qu'ils retrouvent cette motivation de poursuivre leurs études, de compléter leurs études. Quel pourcentage...

Mme Vidal: Parlons plutôt de motivation... M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'accord.

Mme Vidal: ...parce que se trouver une "job", ce n'est pas aussi évident et ce ne serait pas un critère de réussite pour notre travail. Les "jobs" à trouver ne dépendent plus de nous, à ce moment-là; alors, parlons plutôt de motivation.

La motivation, on pourrait dire que cela peut être de 80 %, sauf que leur problème, c'est "ensuite". De chez nous ne sortent pas des cuisiniers trois étoiles. Nous, on est un service de première ligne. On réapprend simplement au monde à travailler. On a adapté l'éducation sur le tas.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Est-ce que la durée du stage, qui est fixée présentement à un an, vous apparaît trop courte, adéquate ou trop longue, dans certains cas?

Mme Vidal: II faudrait parler principalement des gens qu'on rejoint. Pour nous, elle est trop courte parce que la question... On part de très loin et il y a non seulement un encadrement aux plans pratique, technique, mais il y a un suivi personnel qui doit être fait. C'est la reconstruction d'une personne qu'on doit faire et, un an, c'est très court. D'autre part, il y a les conditions dans lesquelles les personnes le font et, aussi, le soutien au groupe qui est inadéquat.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Est-ce que, depuis trois ans, malgré le système en place, vous avez eu des périodes d'inactivité causées par le manque de soutien à votre groupe ou si, malgré tous les obstacles qui s'érigeaient, vous avez réussi à maintenir une vitesse de croisière?

Mme Vidal: Si on y a réussi, ce n'est pas parce que les problèmes n'ont pas été là...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'accord, à bout de bras.

Mme Vidal: ...c'est principalement parce que le groupe est composé à 100 % de personnes qui ont été sur le bien-être ou qui le sont encore et parce que, pour elles, c'est une question de survie de pouvoir sortir du bien-être, de travailler à la création de leur propre emploi. C'est pour cela que le groupe a survécu. Le manque d'argent, on y a passé partout, quoi. Ce n'est pas le soutien du gouvernement qui nous a sauvés, c'est la volonté des personnes de s'en sortir.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Merci. En vertu de ia règle de l'alternance, Mme la députée de Maisonneuve.

Le Président (M. Laporte): Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Merci, M. le Président. Alors, c'est d'autant plus intéressant que j'ai l'impression que cela va permettre au ministre de mieux comprendre la réalité d'un quartier urbain ouvrier du bas de la ville comme le nôtre. Je pense que c'est intéressant qu'il comprenne que, lorsqu'un projet comme Resto-Pop a été mis sur pied, il l'a été, d'une certaine façon, envers et contre la structure institutionnelle. J'aimerais que vous puissiez expliquer les difficultés qui se sont présentées, notamment avec le milieu institutionnel, la résistance que vous avez affrontée dans le milieu institutionnel, de même... Vous, Mme Dupuis - en fait, d'habitude, je vous appelle par vos prénoms - j'aimerais bien que vous expliquiez au ministre les difficultés que

vous avez pour obtenir un projet de travaux communautaires. Des groupes sont venus ici - il les connaît - d'autres régions et il a été surpris d'apprendre qu'ailleurs cela se passait comme cela. Il a réglé le problème pour ailleurs. Peut-être qu'en lui expliquant le vôtre, il pourra régler les problèmes pour le bas de la ville. C'est depuis le mois de septembre, finalement, que vous attendez, je pense. Peut-être pourriez-vous nous expliquer tout de suite.

Mme Dupuis (Johanne): Oui. Je pourrais vous présenter un petit peu ce qu'est la Marie Debout. La Marie Debout, c'est un centre de jour pour les femmes. On fait de l'accueil et de la référence pour les femmes et on intervient aussi - cela est assez particulier par rapport aux 80 centres de femmes qui existent au Québec - auprès des enfants par le biais d'une école primaire dans le quartier. Le profil de l'école, c'est qu'il y a 750 enfants et il y en a 350 qui ont un dossier ouvert avec la travailleuse sociale qui est là deux jours par semaine.

La Marie Debout, ce sont quatre permanentes; cela existe depuis six ans. Les permanentes travaillent à des projets de création d'emplois temporaires, des articles 38, des développement de l'emploi, une petite période avec les subventions du MAS, un article 38, un développement de l'emploi. Cela fait six ans qu'on existe comme cela. On rejoint à peu près 500 femmes par année, soit que les femmes se présentent à la Marie Debout, mais on a aussi beaucoup d'interventions téléphoniques de femmes qui sont en dépression ou qui sont en situation de crise.

On fait aussi de l'intervention familiale auprès de familles qui vivent des situations très difficiles. Il y a des personnes qui nous sont référées par la direction de l'école. On fait un suivi de ces familles. On intervient aussi auprès des enfants par le biais d'ateliers de prévention de la violence. Voilà un peu le portrait de la Marie Debout.

Mme Harel: Oui, oui. Mme Dupuis, concernant vos projets de travaux communautaires?

Mme Dupuis: Pour les projets communautaires, cette année, on a décidé d'ouvrir une halte-garderie parce que le profil de la clientèle, c'étaient des femmes entre 35 et 60 ans. On se posait la question: Pourquoi n'a-t-on pas des femmes plus jeunes? La réponse, c'était que les femmes n'avaient pas l'argent pour faire garder les enfants à la maison, donc elles ne se permettaient pas de sortir et de venir à Marie Debout. Il est difficile de suivre une session de relations parents-enfants de dix semaines quand le "flo" est à côté de toi. Elles ne se permettaient pas de venir aux activités. On a décidé de mettre sur pied une halte-garderie pendant les activités.

J'ai appelé au Programme de travaux communautaires et on m'a dit qu'il n'y avait plus de budget disponible, que je pouvais envoyer un formulaire, mais qu'on ne savait pas trop quand je pourrais avoir des personnes pour travailler à la halte-garderie de la Marie Debout. C'est ce qui s'est produit il y a un mois.

Mme Harel: Je ne sais pas s'il serait possible d'examiner... Chic Resto-Pop est en exploitation depuis quand exactement?

Mme Vidal: Depuis novembre 1985. Mme Harel: Novembre 1984. Mme Vidal: 1984, c'est cela.

Mme Harel: C'était au départ des travaux communautaires.

Mme Vidal: Oui. On a débuté en même temps que le Programme de travaux communautaires et on a existé à cause de cela.

Mme Harel: Oui, je me rappelle bien. Vous aviez eu, des problèmes avec entre autres, le CRSSS. Ce serait peut-être important d'en parler.

Mme Vidal: On a eu principalement deux sortes de problèmes. D'une part, c'est la non-confiance parce qu'on était un organisme non parrainé, composé uniquement d'assistés sociaux et d'assistées sociales. Horreur! Cela ne pouvait pas marcher. On a fait face, et cela a fonctionné. D'autre part, l'autre problème, c'est le stage ne durant qu'un an, des personnes sont venues annoncer aux stagiaires qu'après un an cela allait être fini, qu'il allait falloir qu'ils se retrouvent sur le marché du travail, etc., et puis sans aucune préparation - on était à nos tout débuts à ce moment-là - et cela a causé du découragement chez les gens. Les gens pensaient avoir trouvé une "job" enfin! On expliquait que cela ne durait qu'un an, qu'ils allaient se trouver face au même problème ensuite. Je pense qu'il ne s'agit pas seulement de mettre des stages sur pied, mais aussi de mettre une articulation autour de cela. Après avoir encadré quelqu'un pendant un an, l'avoir bien protégé, lui avoir montré tout cela, il faut aussi lui montrer comment on retourne dans la jungle du marché du travail et ce qu'on fait.

Mme Harel: Terminé? Mme Vidal: Oui.

Mme Harel: En vertu de la règle de l'alternance, j'aimerais qu'on puisse revenir aux questions du ministre et je reviendrai avec vous par la suite. l| vous reste encore du temps? Il reste cinq minutes pour le ministre. Il ne me reste que cinq minutes à moi aussi?

Le Président (M. Laporte): Non... (21 heures)

Mme Harel: Ah bon! Je pense qu'il serait intéressant, surtout avec le "holding"... J'appelle cela le "holding". C'est un véritable holding maintenant, le Chic Resto-Pop. Vous parliez des 150 repas par jour, mais peut-être faut-il rappeler que toutes les écoles primaires du quartier, sans exception, comptent une majorité d'enfants qui viennent de familles monoparentales. Il n'y a plus une seule école primaire dans le quartier où une majorité d'enfants seraient de famille, disons, de modèle traditionnel. Donc, cela veut dire que le modèle en vigueur est le modèle monoparental... je pense, sans me tromper.

Vous avez des expériences intéressantes, notamment avec les femmes enceintes. Ici, souvent, on a entendu parler du Dispensaire diététique, mais le dispensaire n'opère pas dans notre quartier. Peut-être pouvez-vous expliquer quelles sont les activités que vous faites et parler de la cuisine collective? Que je sache, il y a tout le problème de la sous-alimentation. Je pense que cela serait important d'en entendre parler.

Mme Lépine (Louise): Vous avez raison de mentionner que le Dispensaire diététique de Montréal, pour les gens de notre quartier, est très, très loin. Il est situé en arrière du Forum. Grâce au Chic Resto-Pop, on a trouvé un autre moyen d'aider les femmes à se nourrir davantage.

Mme Harel: Vous dites très loin. Les gens des régions éloignées s'imaginent qu'à Montréal on est tous à côté les uns des autres. Peut-être que ce serait important d'expliquer ce qu'est la non-mobilité à Montréal.

Mme Lépine (Louise): Quand je vous disais très loin, c'était peut-être un peu à la blague. C'est relativement proche: en métro, c'est en ligne directe. Mais il y a des gens qui sont dans notre quartier et qui n'en sortent jamais, qui ne savent pas comment fonctionne le métro, qui prennent l'autobus, mais il ne faut pas qu'ils en prennent plusieurs l'un après l'autre, car cela devient trop compliqué.

Nous savons - nous l'avons dit dans notre mémoire et nous l'avons répété encore ce soir - que c'est vital pour les femmes enceintes de bien se nourrir. On leur offre des conditions très avantageuses: avoir un repas complet et nutritif, cinq jours par semaine, au Resto-Pop, pendant toute la durée de leur grossesse, si elles veulent bien venir. Le service continue aussi quatre mois après qu'elles ont accouché. C'est notre petit dispensaire pour les femmes enceintes avec, évidemment, tout le suivi psychosocial qui entoure cette démarche.

Mme Harel: Postnatal, parce que c'est quatre mois après l'accouchement. Elles peuvent venir avec le bébé. Il y a des activités aussi.

Mme Lépine (Louise): Oui, c'est cela.

Mme Harel: C'est bien. Est-ce que la coalition a des projets comme tels à réaliser pour les mois qui viennent?

M. Primeau: II y en aurait beaucoup. Entre autres, cette année, on a obtenu une subvention de 10 000 litres de lait de la Fédération des producteurs de lait du Québec. On essaie de voir comment prolonger cela et multiplier cela pour l'année prochaine. Cela, c'est une chose. Une autre...

Mme Harel: À part le lait qui est distribué dans les écoles?

M. Primeau: C'est à part, c'est en plus. C'est distribué dans les groupes actuellement, au Resto-Pop, au carrefour, dans les groupes qui composent la coalition. On est en pourparlers. Le Resto-Pop est dans l'ouest du quartier; il y a aussi des besoins dans la partie est du quartier. C'est vraiment à l'état de projet encore, mais on est en pourparlers avec des personnes dans l'est pour mettre sur pied une cuisine communautaire qui serait un peu l'équivalent du Resto-Pop, mais pour la partie est du quartier.

Il y a un projet qui s'appelle le CARRE. Ce n'est plus un projet parce que c'est commencé. C'est une structure où les gens vont pouvoir venir travailler, s'organiser, s'entraider, développer leurs capacités, et qui utilise le biais de l'alimentation. Il est difficile de faire participer les gens quand ils ont faim, quand ils ont des problèmes causés par cette situation. Le CARRE se cherche actuellement des locaux. Il a des locaux temporaires. Il se cherche des moyens pour fonctionner. Je pourrais en nommer d'autres. Si on faisait le tour de chacun des organismes de la coalition, on verrait qu'il y a des projets qui sont en marche. Mais on manque d'argent pour les mettre en marche, les faire démarrer.

Mme Harel: Est-ce que le problème de l'alimentation... Tantôt, vous disiez: Cela peut sembler sensationnaliste. Mais vous êtes tous des intervenants. Vous êtes au CLSC, vous, M. Primeau. Les chiffres de 10 000 personnes qui ont été dévoilés dans les journaux, cela a donné lieu à de gros titres; 10 000 personnes qui, dans le quartier Hochelaga-Maisonneuve, ont des problèmes d'alimentation. C'est pour vous une réalité qui est perceptible. C'est une réalité que vous avez pu chiffrer, que vous avez évaluée en fonction d'indicateurs qui seraient lesquels?

M. Primeau: Si on regarde l'ensemble des groupes qui, actuellement, font du dépannage et apportent de l'aide alimentaire, si on prend l'ensemble du réseau Saint-Vincent-de-Paul dont certains distribuent même des paniers alimentaires, si on regarde...

Mme Harel: Les paniers alimentaires du

CARRE sont distribués pas seulement à Noël, ils sont distribués aux fins de mois, c'est cela?

M. Primeau: C'est cela.

Mme Harel: Ils sont actuellement distribués?

M. Primeau: Par le CARRE?

Mme Harel: Oui.

M. Primeau: Oui. C'est un peu une estimation à partir du nombre de gens qui sont à l'aide sociale présentement dans le quartier en regardant les budgets, en regardant, par exemple, les gens qui sont venus chercher des paniers de Noël au CARRE, à Noël 1986, il y a eu 600 familles qui ont reçu des paniers. Il y a un sondage qui a été fait auprès de ces familles pour voir ce qu'étaient leurs besoins, comment ils arrivaient à se débrouiller. La plupart nous ont dit: Quand on coupe, on coupe dans les aliments. C'est un peu à partir de cela qu'on a extrapolé et, à partir de la connaissance sensible qu'on a du milieu, ce ne sont pas 10 000 personnes que l'on retrouve au coin des rues, qui jonchent les rues, mais on estime qu'il y a 10 000 personnes qui, à un moment donné dans le mois, ne se nourrissent pas suffisamment.

Mme Harel: J'ai le café Ozanam à côté de mon bureau et je suis à même de voir, chaque jour, d'où je suis, des files de personnes sur le trottoir qui attendent d'entrer pour avoir leur repas. Tantôt, vous nous avez donné des chiffres très éloquents. Je vous en remercie, ils sont très à jour finalement ces chiffres, suite de la SCHL du coût des loyers, de la cherté des loyers dans le quartier.

Par alternance, je vais laisser parler le ministre et je reviendrai sur cette question.

Le Président (M. Laporte): M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. Il me reste cinq minutes. Je vais tenter de faire cela rapidement. En ce qui concerne l'alimentation, je comprends le type d'action que vous menez, mais est-ce que ce type d'action inclut ce qu'on appelle, ou ce qui a déjà été appelé devant cette commission, de l'information sur la façon de se nourrir le mieux possible à partir des disponibilités budgétaires, de l'information que j'appelle qualitative sur ce qu'on mange? On s'est fait dire par des groupes qui connaissaient cela aussi que ce n'est pas nécessairement l'argent qui règle tous les problèmes dans ce domaine-là et qu'il y aurait des députés qui se nourriraient mal et pas par manque d'argent. Est-ce que l'information est véhiculée et par quel moyen?

Mme Vidal: II y a un projet qui existe au Resto-Pop qui est la cuisine collective. Le principe, c'est le regroupement de personnes, de familles, qui accorderont un budget de 75 $ par mois et, à partir de cela, vont apprendre à planifier, à faire leurs repas d'une façon équilibrée. Elles vont préparer, pour 75 $ par mois, des repas pour environ trois personnes une fois par jour.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Cette information vous vient d'où?

Mme Vidal: D'où elle vient? Cette information, nous l'avons d'abord par l'expertise de ces femmes et par l'expertise et les connaissances de Mme Louise Lépine qui travaille avec nous. D'autre part, je voudrais souligner que ce n'est pas seulement une question de mauvaise alimentation, c'est une question de sous-alimentation qui est prioritaire dans le quartier. Principalement, au Resto-Pop, on peut le voir régulièrement. Quand vous voyez des enfants de cinq à huit ans qui viennent en cachette prendre des repas au Resto-Pop, quand normalement on ne doit pas accepter les enfants sans les parents, des enfants qui arrivent sans souliers... Le Pakistan, ce n'est pas si loin que cela. Ce n'est pas seulement l'éducation, c'est la sous-alimentation.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): La question visait strictement... Cet élément-là avait été apporté par d'autres groupes qui nous ont parlé d'alimentation et je voulais être certain que chez vous cela se faisait.

J'aurais une dernière question parce que mes cinq minutes vont s'épuiser également. Mme Dupuis, vous avez terminé avec Mme la députée de Maisonneuve très rapidement et vous en étiez à une réponse du centre Travail-Québec de votre coin où on vous aurait dit, il y a un mois: Pour les Travaux communautaires, il n'y a plus d'argent, ou quelque chose du genre.

Mme Dupuis: Oui.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'aimerais obtenir des précisions un peu sur ce qui vous est arrivé. Quand avez-vous fait votre demande?

Mme Dupuis: II y a environ un mois, on m'a dit: On va vous envoyer les formulaires, mais il n'y a pas présentement de fonds disponibles pour les projets communautaires et on ne sait pas quand on aura des fonds pour cela.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Avez-vous déjà eu dans le passé le même type de réponse?

Mme Dupuis: Non, on n'a jamais fait affaires avec les Travaux communautaires avant.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'accord. Il y a peut-être Mme Vidal qui a déjà fait affaires avec les Travaux communautaires. Est-ce que vous avez déjà eu ce type de réponse quant au

manque de fonds? Mme Vidal: Oui. M. Paradis (Brome-Missisquoi): Quand?

Mme Vidal: L'année passée, nous avons été coupés de 24 à 7 postes parce qu'il n'y avait plus de fonds, en septembre 1986.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): En septembre 1986. Et vous êtes dans le même centre Travail-Québec?

Mme Vidal: Oui.

Mme Dupuis: Cela doit. On est dans le même quartier.

Mme Harel: Pas vraiment, non. Parce que c'est le centre Travail-Québec sur Sherbrooke...

Mme Vidal: Ah oui!

Mme Harel:... avec la Marie Debout et le centre Travail-Québec sur Sainte-Catherine...

Mme Vidal: Oui, mais cela ne dépend pas, de toute façon, du centre Travail-Québec parce qu'on ne demande pas les projets au centre Travail-Québec, on demande...

Mme Harel: Ah! Vous les demandez au centre de services sociaux...

Mme Vidal:... les projets directement au ministère.

Mme Dupuis: Ce sont les Travaux communautaires.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous les demandez au ministère de la Santé et des Services sociaux,

Mme Vidal: Au CRSSS. C'est cela.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Et est-ce que vous avez fait un suivi de votre demande aux Travaux communautaires. On vous a dit: Pas tout de suite. Mais dans combien de temps? Est-ce qu'on vous a donné des indications?

Mme Dupuis: Non, on ne m'a pas donné d'indication. On m'a seulement dit qu'il n'y avait pas de fonds disponibles et de présenter un projet. Et là, on est allé présenter le projet pour une halte-garderie à la Marie Debout. Mais on n'a pas eu de nouvelles. J'ai laissé mon nom pour des travaux communautaires.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Dans un premier temps, on vous a dit: II n'y a pas d'argent. Dans un deuxième temps, on vous a dit de présenter un projet?

Mme Dupuis: On m'a dit: Je vais vous envoyer les formulaires - qu'on a reçus à peu près une semaine après - présentez-les et, quand on aura de l'argent, on vous répondra à ce moment-là.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Et quand avez-vous présenté vos formulaires?

Mme Dupuis: On les a reçus il y a à peu près deux semaines. On les présente pour une halte-garderie.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'accord.

Le Président (M. Laporte): Mme la députée de Maisonneuve?

Mme Harel: Je souhaiterais que, à une occasion que le ministre aura d'être à Montréal, il aille dîner au Resto-Pop. Ce serait vraiment une bonne idée.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, madame.

Mme Harel: Je trouve que ce serait vraiment une bonne idée. D'abord, cela va beaucoup l'étonner de voir ce que cela a pu devenir, finalement. Avez-vous toujours votre système de traiteur?

Mme Vidal: Nous avons mis sur pied deux petites entreprises dont un service de traiteur et une entreprise d'entretien ménager pour créer des emplois pour les jeunes qui avaient reçu une formation là.

Mme Harel: Avez-vous toujours votre projet de cuisine sous vide...

Mme Vidal: Oui.

Mme Harel:... avec le fédéral?

Mme Vidal: Notre projet, qui doit se concrétiser cette année, c'est la préparation de mets préparés avec livraison pour les personnes âgées.

Mme Harel: C'est vraiment quelque chose d'absolument... Moi, évidemment, vous savez comme je suis emballée de voir que cela s'est consolidé au fil des années. Cela sert aussi de lieu de rassemblement. Je crois que c'est chez vous que le front commun des 163 groupes a lancé le projet Justice et équité pour les femmes assistées sociales?

Mme Vidal: Oui, c'est bien cela.

Mme Harel: C'est bien cela. La question du partage du logement. Je pense qu'on ne peut pas

se quitter... Vous êtes une coalition sur l'alimentation, mais ce que vous avez réussi à faire comprendre aux intervenants montréalais... Je lisais d'ailleurs dans les journaux cette semaine que, si Montréal représente 15 % de la population du Québec, elle compte 40 % des familles assistées sociales du Québec. Vous avez réussi à faire comprendre que c'est le coût du logement qui est en grande partie responsable de la sous-alimentation, puisque c'est une dépense fixe et que cette dépense-là on n'y peut rien. Cela vaut pour le chauffage. Cela vaut pour l'électricité.

J'aimerais, avant qu'on se quitte, que vous nous parliez de la question du partage du logement et des conséquences que cela peut avoir. Vous avez parlé des logements exigus. Je pense que c'est vous, Mme Lépine, qui avez parlé des logements exigus qui sont partagés souvent par des familles monoparentales. Je crois que c'est une réalité dont il faudrait faire part à la commission.

Mme Lépine (Lucie): Oui, mais je pense que de plus en plus de familles se regroupent parce que, justement, elles n'arrivent pas à boucler leur budget.

Mme Harel: Un peu comme nos parents le faisaient après la deuxième guerre, parce qu'il n'y avait pas de logement?

Mme Lépine (Lucie): C'est cela.

Mme Harel: Parce qu'ils n'ont pas d'argent.

Mme Lépine (Lucie): Parce qu'ils n'ont pas d'argent. Alors, on comprend mal pourquoi les familles seraient pénalisées. Elles le font justement parce qu'elles n'arrivent pas. Ce sont des contraintes, parce que ce n'est agréable pour personne d'être obligé de s'entasser dans des logements qui sont trop étroits. Cela entraîne de la violence, du stress, et le reste. Alors, les familles le font justement pour réussir à manger quelques repas de plus à la fin du mois.

Une voix: C'est une preuve de débrouillardise. (21 h 15)

Mme Lépine (Lucie): Tantôt, on demandait des exemples montrant que les gens n'arrivent pas à la fin du mois. Le Carrefour familial, on n'est pas la Saint-Vincent-de-Paul, on est un groupe d'éducation, mais on rend service à un groupe de la Saint-Vincent-de-Paul qui n'a pas de local et on prend les appels. Je pense qu'on aurait dû noter le nombre d'appels qu'on a reçus les deux dernières semaines. C'est aberrant. Cela veut dire que les gens ont beaucoup recours à la Saint-Vincent-de-Paul, durant les dernières semaines pour venir à bout d'avoir quelques repas.

Mme Harel: Certains ici peuvent penser:

Mais si c'est si cher que cela, pourquoi ne s'en vont-ils pas ailleurs?

Mme Lépine (Lucie): Ce sont des choses qui arrivent aussi. Il y a des gens qui vont rester chez leur soeur, en banlieue ou ailleurs, où cela coûte un peu moins cher. Je pense que, dans le quartier, il y a aussi des familles qui se déplacent et qui vont ailleurs.

Le Président (M. Laporte): Oui, Mme Lépine, je crois que vous vouliez ajouter quelque chose.

Mme Harel: Non, vous pouvez y aller.

Le Président (M. Laporte): Non, Mme Lépine a demandé la parole.

Mme Harel: Ah! Excusez-moi.

Mme Dupuis: Je voudrais seulement ajouter quelque chose.

Le Président (M. Laporte): Pas Mme Lépine, Mme Oupuis, excusez-moi.

Mme Dupuis: II y a de la gentrification qui se fait dans certains secteurs du quartier comme les secteurs de la rue Moreau. Les logements y sont plus détériorés, les propriétaires demandent un loyer moins cher, mais les conditions de logement sont vraiment insalubres. Il y a même des maisons, dans ce quartier, qui n'ont pas de système de chauffage intégré. Les personnes chauffent avec le fourneau ouvert. Il n'y a pas de baignoire. Les conditions de logement sont vraiment dégueulasses. C'est ce qui se passe. Les gens se déplacent, mais dans certains secteurs du quartier.

Mme Harel: Évidemment, il y a eu la construction de HLM et de coopératives. Je crois qu'on est le quartier où il y a le plus grand nombre de logements coopératifs. Combien y en a-t-il maintenant? Presque 500 logements, 480 logements coopératifs dans notre secteur?

Mme Dupuis: Je pense que c'est l'un des secteurs de Montréal où il y a le plus de logements coopératifs. Mais la liste d'attente pour être dans une coopérative d'habitation est assez impressionnante.

Mme Harel: Certains peuvent se demander: Est-ce que ces coopératives sont habitées par des personnes à faible revenu? Selon votre expérience, dans notre quartier, le type de logement coopératif... Je pense que vous y avez travaillé, M. Primeau, au moment du dixième anniversaire. Non, c'est avec l'association des locataires.

M. Primeau: Non, je n'ai pas été dans le...

Mme Harel: Non, pas directement non plus.

Mme Dupuis: Je peux parler un peu des coopératives.

Le Président (M. Laporte): Je veux simplement vous rappeler que le temps est écoulé pour vous permettre de terminer la question.

Mme Harel: Quelques-uns d'entre vous avez peut-être un pourcentage de personnes à faible revenu qui habitent les coopératives. Avez-vous des chiffres là-dessus?

Mme Dupuis: Ce que je peux dire des coopératives d'habitation puisque j'en fais partie, c'est qu'au début, quand on a créé les coopératives, elles étaient accessibles aux assistés sociaux, sauf que là, le prix des loyers dans les coopératives n'est pas abordable quand on n'a pas l'aide de dernier recours et c'est environ 15 % des gens qui font partie des coopératives qui peuvent embarquer dans ce programme. Donc, quand tu vas dans une coopérative d'habitation où on t'offre un quatre et demi à 400 $ par mois, tu ne peux pas te le payer. Alors, ce sont les gens à revenu moyen qui ont plus accès aux coopératives d'habitation dans le quartier.

Mme Harel: Je vous remercie.

Le Président (M. Laporte): La commission...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Exceptionnellement, M. le Président, il s'agit d'un groupe du comté de Mme la députée. Je pense qu'on devrait prendre une minute chacun pour les remercier, même si on va à rencontre de vos directives.

Le Président (M. Laporte): J'imagine qu'il y a consentement des partis. Je vais laisser à Mme la députée de Maisonneuve le soin de faire les adresses de...

Mme Harel: Je pensais à vous et je me disais: En plus, c'est un lundi soir. Pour savoir ce que chacun de vos groupes représentait dans le quartier, je pense qu'autant on peut expliquer le volume des problèmes, autant aussi il faut reconnaître le très haut niveau d'implication, d'engagement, de participation et d'organisation communautaires. Je dis souvent qu'il y a autant d'organisations que de problèmes, ce qui fait qu'il y en a beaucoup. Mais cela nous permet d'être un quartier qui, malgré tous ses problèmes, n'est pas en désintégration. Je vous en remercie.

Le Président (M. Laporte): M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Pour la qualité de votre présentation qui est sans doute égale à la qualité de votre implication dans le milieu et au nom des bénéficiaires que vous desservez, je vous dis merci.

Le Président (M. Laporte): Avec la même latitude, vous me permettrez sûrement de vous remercier pour la présentation de votre mémoire, mais aussi pour avoir eu l'occasion de nous rencontrer à plusieurs reprises, étant donné le rapprochement des divers comtés, de vous féliciter pour le travail que vous effectuez dans ces quartiers. Je tenais à vous remercier encore pour la présentation du mémoire de votre coalition tout en vous souhaitant un bon voyage de retour à Montréal. Je vous remercie bien.

J'aimerais demander au Programme action-revitalisation Hochelaga-Maisonneuve, à M. Desrosiers ainsi qu'à M. Goulet, de bien vouloir s'approcher. La commission suspend ses travaux deux petites minutes.

(Suspension de la séance à 21 h 21)

(Reprise à 21 h 24)

Le Président (M. Laporte): À l'ordre, s'il vous plaît!

Je voudrais souhaiter la bienvenue à M. Desrosiers et M. Goulet du PARHM. Vous m'avez entendu tantôt rappeler brièvement que vous avez 20 minutes pour l'exposé de votre mémoire pour, par la suite, avoir un échange de 40 minutes avec les parlementaires. Pour les fins d'identification, j'aimerais que vous puissiez vous présenter et, par la suite, faire la présentation de votre mémoire. Je vous remercie.

Programme action-revitalisation Hochelaga-Maisonneuve

M. Desrosiers (Gaétan): Merci. M. le Président. M. le ministre, Mmes, MM. de la commission, mon nom est Gaétan Desrosiers du PARHM, Programme action-revitalisation Hochelaga-Maisonneuve. Je suis accompagné de M. Gilles Goulet qui est responsable de notre comité "Employé habilité", comité financé, entre parenthèses, par le ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu.

Permettez-moi de vous remercier, au nom du conseil d'administration du PARHM, de nous accorder quelque temps pour exposer notre mémoire. Le PARHM est une corporation de développement économique et communautaire qui couvre le territoire sud-est de Montréal, là où on retrouve près de 11 000 bénéficiaires de l'aide sociale considérés aptes et disponibles au travail. Le PARHM s'est fixé un double mandat: stimuler la création d'emplois stables par un ensemble de services à l'entreprise et assurer l'accessibilité de ces emplois nouveaux à la main-d'oeuvre sans emploi de la région. À cet effet, le PARHM a regroupé l'ensemble des organismes institution-

nels et communautaires intervenant dans le domaine du développement de l'employabilité, de la formation et du placement de la main-d'œuvre locale.

Un plan d'action a été récemment adopté qui vise, d'une part, à mieux cerner les besoins des sans-emploi en ce qui concerne leur insertion ou leur réinsertion professionnelle, d'autre part, à promouvoir les compétences de cette main-d'oeuvre et à inciter les employeurs locaux à privilégier l'embauche locale. Le PARHM souhaite aujourd'hui faire connaître son point de vue sur le document d'orientation soumis par le ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu et proposer un certain nombre de recommandations. Nous devons cependant souligner que ce mémoire s'attarde plus particulièrement au deuxième volet de la réforme, soit le programme APTE.

Nous aimerions, dans un premier temps, nous pencher sur un certain nombre de principes qui se dégagent du document d'orientation.

La réforme propose aux bénéficiaires de l'aide sociale âgés de moins de 30 ans une nette amélioration de leur condition économique. Nous croyons que cet aspect de la nouvelle politique est bénéfique et stimulera les jeunes dans leurs démarches en vue d'intégrer ou de réintégrer le marché du travail.

La nouvelle politique de sécurité du revenu, pour être pleinement justifiée et efficace, doit s'accompagner d'une ferme intention de la part du gouvernement d'oeuvrer à la mise en place d'une politique de plein emploi.

Il nous semble que le meilleur incitatif en ce qui concerne le retour sur le marché du travail des sans-emploi demeure la création d'emplois en nombre suffisant.

Tous les efforts concernant la mise en place et l'application de programmes de formation, de développement de l'employabilité et d'incitation à l'embauche prendront vraiment leur sens dans la mesure où les usagers de ces programmes peuvent espérer obtenir un emploi stable, satisfaisant et rémunérateur au terme de leur cheminement.

L'importance d'une politique de plein emploi est éloquente quand on examine la situation de la région est de Montréal. Depuis quelques années déjà, le nombre des sans-emploi oscille autour de 30 000, alors que la création d'emplois stables ne dépasse pas quelques milliers par année. De plus, nous devons souligner qu'actuellement des milliers d'emplois sont précaires à cause de la situation difficile de certaines entreprises.

La nouvelle politique est proposée au moment où nous profitons d'une conjoncture économique favorable. Toutefois, elle ne doit pas se justifier par cette conjoncture actuelle. Qu'adviendrait-il, en effet, si nous devions, au Québec, subir les contrecoups d'une période de récession plus ou moins profonde, plus ou moins prolongée? Une telle hypothèse ne doit pas être écartée. Nous prenons à témoin l'est de Montréal où des grandes entreprises ont procédé à des licenciements définitifs à l'automne de 1987 et en janvier 1988. Il nous semblerait utopique de viser le développement de l'employabilité des bénéficiaires aptes et disponibles au travail dans une situation où leur rang risquerait de grossir de façon dramatique et le marché de l'emploi irait en se rétrécissant. De plus, un appauvrissement général de la société conduirait, selon la nouvelle structure de barèmes proposée, à un appauvrissement des bénéficiaires de l'aide sociale, ce qui nous semble inacceptable, car une grande pauvreté engendre des maux sociaux (sous-éducation, santé physique et mentale déficiente, délinquance) dont les coûts sont élevés.

Il nous apparaît primordial que tous les bénéficiaires, quels que soient leur âge et leur catégorie, aient droit à un seuil de revenu acceptable, qui couvre l'ensemble de leurs besoins à court et à long terme. Ce principe est d'autant plus important que les personnes qui bénéficient de l'aide sociale subissent une situation non désirée, dont elles ne doivent pas porter la responsabilité, et qui les place dans une situation délicate qui nécessite un soutien particulier.

Les barèmes actuels indexés, basés sur la méthode reconnue du budget établi d'après les données du Dispensaire diététique de Montréal, devraient s'appliquer à toutes les catégories de bénéficiaires. À partir de ce seuil de revenu acceptable, ceux et celles qui participent aux mesures propres au développement de l'employabilité devraient recevoir des allocations supplémentaires, incitatives et nécessaires.

La catégorisation des bénéficiaires peut sembler utile pour élaborer des programmes adaptés à leurs besoins. Il nous semble, toutefois, extrêmement difficile d'appliquer avec exactitude la notion d'aptitude au travail telle qu'elle est présentée dans le document d'orientation. Aussi, selon les barèmes proposés par la nouvelle politique, les bénéficiaires jugés non disponibles en regard des programmes de développement de l'employabilité nous semblent pénalisés malgré les raisons valables qui peuvent justifier leur situation.

En ce qui concerne les bénéficiaires considérés aptes au travail, la nouvelle politique propose de considérer deux périodes distinctes: une première période de neuf mois consacrée à la recherche intensive d'un emploi serait assortie de mesures légales et adéquates; après les neuf premiers mois, le bénéficiaire serait soutenu par des mesures plus spécifiques de maintien ou de développement de l'employabilité en participant à l'un ou l'autre des programmes offerts.

Nous nous questionnons sur la pertinence d'attendre neuf mois avant d'offrir à tout bénéficiaire qui le désire le plein soutien financier et technique dont il a besoin. Faut-H rappeler qu'un individu qui dépose une demande d'aide sociale ou bien n'a jamais ou peu travaillé,

ou a quitté le marché de l'emploi depuis déjà un an? Dans quelle mesure une personne qui a cherché activement à réintégrer le marche du travail depuis douze mois aurait-elle plus de possibilités de se trouver un emploi sans un soutien actif, sans les neuf premiers mois qui suivent?

Nous désirons, enfin, attirer votre attention sur les programmes de développement de l'em-ployabilité et sur les ressources qui y sont affectées. Le document d'orientation ne mentionne que d'une façon succincte les mesures propres au développement de l'employabilité. Or, la nature, la qualité et la diversité des programmes, leur pertinence en regard des besoins des clientèles, sont essentielles pour garantir le succès des objectifs visés qui sont au coeur de la réforme. Ainsi, les coûts et les ressources qui y seront affectés ne sont pas indiqués dans le document.

Dans le sud-est de Montréal, plusieurs organismes oeuvrent au développement de l'employabilité et de la réinsertion professionnelle des sans-emploi. L'expérience de ces organismes et la démarche du PARHM montrent qu'il s'agit là d'un type d'intervention complexe qui exige beaucoup de souplesse et de patience. Il doit s'appuyer sur une volonté marquée de concertation de tous les agents de développement économiques et sociaux. À ce titre, nous aimerions souligner l'importance, dans une telle démarche, de la complicité des employeurs. L'entreprise créatrice d'emplois doit marquer sa volonté de permettre à des bénéficiaires de l'aide sociale d'intégrer le monde du travail en leur offrant le soutien nécessaire.

Quelques recommandations. Dans la foulée des commentaires qui précèdent, nous désirons formuler à la commission des affaires sociales quelques recommandations sur la réforme.

Que la nouvelle politique de sécurité du revenu s'accompagne d'une politique de plein emploi afin d'assurer aux bénéficiaires, au terme de leurs démarches, des emplois stables, satisfaisants et rémunérateurs.

Que tous les bénéficiaires, quelle que soit leur catégorie, aient droit à un seuil de revenu garanti pour couvrir leurs besoins à court ou à long terme. Ce seuil devrait être établi en fonction d'une évaluation globale des besoins réels des bénéficiaires, en se basant sur les données budgétaires telles que celles calculées par le Dispensaire diététique de Montréal.

Qu'à partir de ce seuil garanti les prestataires, à qui seront reconnus des besoins vitaux spéciaux, tels les handicapés physiques Ou mentaux et ceux qui participent au programme de développement de l'employabilité, se voient accorder des suppléments incitatifs.

Que le ministère assure la mise en place de programmes de développement de l'employabilité adaptés aux besoins des clientèles visées et du marché du travail, ainsi que les ressources nécessaires à leur apfUication.

Que ces programmes fassent preuve de souplesse, qu'ils soient novateurs et qu'ils reposent sur les ressources du milieu, institutions, organismes et entreprises.

Que soient reconnus et soutenus les organismes du milieu qui oeuvrent au développement de l'employabilité et au placement des sans-emploi et qui font la preuve de leur efficacité dans ce domaine.

Que soit encouragée et soutenue la concertation des agents de développement socio-économique du milieu afin de maximiser la réinsertion professionnelle des sans-emploi.

Que les employeurs et les entreprises soient stimulés à oeuvrer à la réinsertion sur le marché du travail des bénéficiaires de l'aide sociale. À ce sujet, nous encourageons le ministère à étudier sérieusement la possibilité de recourir au système "Grant diversion" américain ou à tout autre programme, tel le crédit d'impôt à la création d'emploi nette et à l'embauche locale.

Qu'en ce qui concerne le secteur est de la région de Montréal, le gouvernement donne suite aux recommandations contenues dans le rapport du Comité pour la relance de l'économie et de l'emploi, le CREEEM, en particulier sur les mesures suivantes concernant la main-d'oeuvre: un fonds spécial de formation à l'intention de la main-d'oeuvre des entreprises engagées dans la mise en place de restructuration ou de diversification des entreprises; des mesures particulières pour favoriser l'embauche des résidents de l'est par les entreprises qui créent de l'emploi dans l'est.

Nous espérons que ce court mémoire répond aux attentes de la commission et qu'il apporte un éclairage suffisant sur nos préoccupations en regard de l'action du PARHM et de la situation particulière de l'est de Montréal.

Pour relancer de façon significative l'emploi dans l'Est de Montréal, une concertation permanente, jumelée à une volonté d'agir et de se prendre en main s'avère indispensable.

Nous espérons que la réforme proposée par le ministère saura appuyer la démarche en cours et le travail effectué depuis des années par les organismes du milieu oeuvrant au niveau de la formation, de l'employabilité, de l'insertion et de la réinsertion professionnelle.

La réforme se doit d'être essentiellement motivante et incitative pour les bénéficiaires qui ont besoin d'un support financier et technique adéquat dans une période difficile de leur vie.

Avant de terminer, j'aimerais souligner que la recommandation qui touche le CREEEM a été depuis annoncée par le gouvernement ces derniers mois.

Le Président (M. Laporte): Je vous remercie de votre présentation.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je tiens également à vous remercier, et de votre mémoire écrit et de votre présentation verbale. Comme

vous l'avez vous-même mentionné, certaines parties du mémoire, dans ses conclusions, ont déjà reçu une réponse favorable du gouvernement. Peut-être dans l'intention d'accorder des réponses favorables à d'autres éléments de votre mémoire, j'aurais quelques questions précises à vous adresser. Dans un premier temps, vous me permettrez d'indiquer que l'est de Montréal représente bien ce défi de l'employabilité. On se souviendra de la dernière campagne électorale fédérale, de la dernière campagne électorale provinciale et de la dernière campagne électorale municipale où l'ensemble des gouvernements se sont engagés moralement et par écrit, dans certains cas, à créer dans l'est de Montréal - c'est quasiment devenu un symbole politique - des emplois. On constate, quelque deux ans après l'ensemble de ces engagements électoraux, qu'effectivement, il s'est créé plus d'emplois - je parle de création nette d'emplois malgré les pertes de l'est de Montréal - que dans le reste de la grande région métropolitaine.

On constate également que le gouvernement n'a peut-être pas visé le milieu de la cible. Il demeure qu'il y a autant d'assistés sociaux et autant de chômeurs dans l'est de Montréal, et que les emplois qui ont été créés, on me dit que, dans la majorité des cas, ils ont été occupés par des gens qui provenaient d'autres régions de Montréal, de la rive sud ou de la rive nord. Donc, il fallait que le gouvernement ait comme cible l'amélioration de l'employabilité des gens de l'est de Montréal pour qu'ils profitent des nouveaux emplois créés chez eux.

Ce qui m'amène à vos recommandations, à la page 9: Que la nouvelle politique de sécurité du revenu s'accompagne d'une politique de plein emploi afin d'assurer aux bénéficiaires, au terme de leur démarche des emplois stables, satisfaisants et rémunérateurs. Le gouvernement prétend qu'une politique de plein emploi s'accompagne d'une stabilité politique, de certitudes économiques, d'incitatifs fiscaux, et d'un climat social. On prétend également que, sans employa-bilité, le plein emploi devient quelque chose d'utopique ou d'irréaliste. Il y a des gens en commission qui nous disent: Attendez d'avoir le plein emploi et après cela, vous investirez dans l'employabilité. D'autres nous disent: Investissez immédiatement dans l'employabilité en vue d'avoir le plein emploi.

Votre définition d'une politique de plein emploi touche quoi, exactement?

M. Desrosiers: Justement, je dirais que c'est une médiane à ce que vous venez de dire. Je dirais plutôt que c'est un vase communicant. Vous venez de dire qu'il y a des gens qui disent: Commençons par l'employabilité, commençons par le plein emploi. Moi, je dirais: Commençons par les deux plutôt. Ce doit être un incitatif.

Nous, ce qu'on a constaté en travaillant avec des assistés sociaux, c'est que, s'il semble que cela puisse déboucher sur un emploi, c'est un incitatif majeur. Il ne faut pas sentir que les gens sont dans un cul-de-sac. Tantôt, vous avez souligné qu'il y avait eu beaucoup de création d'emplois dans l'est. Je ne doute pas de cela. Mais il y a eu également beaucoup de déplacements d'emplois dans Rh/ière-des-Prairies et dans Pointe-aux-Trembles. C'est surtout l'installation de ces entreprises dans le parc industriel de Pointe-aux-Trembles qui a donné naissance à du déplacement, à de la rétention, mais également à de la création d'emplois mais qui sont complètement dans une poche qui est beaucoup plus à l'aise que le sud-est de Montréal. Cela répond peut-être en partie à l'interrogation que, nous aussi, nous nous sommes posée dernièrement, quand on a vu qu'il se créait de l'emploi dans une partie de l'est.

C'est pour cela qu'on souligne dans notre rapport d'inciter les employeurs à faire confiance aux assistés sociaux également. Ce côté nous apparaît primordial.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): On parle, dans votre paragraphe 2 - je n'en ferai pas la lecture parce que je suis un peu encarcané, moi aussi, par le temps qu'on m'accorde - d'un seuil de revenu garanti pour couvrir les besoins à court ou à long terme. Il y a deux méthodes qui ont principalement fait l'objet des discussions devant la commission: les besoins tels qu'établis par le Dispensaire diététique de Montréal ou les dépenses de consommation des travailleurs à faible revenu, le premier ou le dernier, dépendant où on se place, les 10 % de Statistique Canada.

Comment voyez-vous les prestations d'aide sociale versus le salaire minimum? Avec participation dans une mesure d'employabilité, est-ce que les prestations d'aide sociale doivent être inférieures, égales ou supérieures au salaire minimum?

M. Desrosiers: Elles doivent être égales au salaire minimum. Si le salaire minimum est calculé à partir d'un revenu minimal pour vivre dans la société, on préconise que les prestations d'aide sociale devraient rejoindre le salaire minimum.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vais poser une question et je ne conteste pas votre opinion, je la respecte avec tout le professionnalisme avec lequel vous me la donnez. Ne craignez-vous pas que, si les prestations d'aide sociale sont égales au salaire minimum, l'on vive comme expérience un peu ce qui s'est vécu en d'autres endroits en Amérique du Nord - pour ne pas le nommer, l'État de New York - où, finalement, les gens se créent une espèce de sous-système d'emplois et passent leur vie sur des programmes d'employabilité jusqu'à la retraite s'il n'y a pas cet incitatif entre le salaire minimum et les prestations?

M. Desrosiers: Malheureusement, je n'ai pas l'expertise de ce qui s'est passé à New York. Il faut dire que notre démarche se veut beaucoup plus une démarche de concertation et de mobilisation de l'est et, comme vous le disiez tantôt, ce que l'on veut réellement changer dans l'est, c'est une image négative. C'est pour cela qu'on essaie de trouver, avec le peu de moyens qu'on a, des solutions à court et à moyen terme. Une des choses dont on se rend compte, c'est qu'une partie de la population est dans un état de pauvreté et de dépendance incroyable. C'est pour cela qu'on n'a quand même pas l'expertise, au PARHM, pour faire une analyse de chiffres et de débats de comparaison. À tout le moins, ce qu'on se dit, c'est qu'il faut que ce soit un minimum vital. Que ce soit 10 % de moins ou égal, si le salaire minimum, c'est le minimum vital, je dis oui au salaire minimum dans le cas de l'assisté social.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Dans la troisième recommandation, finalement, je ne ferai pas la lecture des paragraphes a, b, c, d et e, on parle d'une implication du milieu à partir des groupes communautaires jusqu'aux travailleurs et aux employeurs des entreprises. Est-ce que vous favoriseriez une accréditation des groupes communautaires? J'explique un peu ce que le gouvernement pourrait proposer que les groupes communautaires qui oeuvrent dans le quartier où vous oeuvrez également soient accrédités par le ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu comme un agent d'intervention, et qu'ils puissent, dans le cadre des programmes mis à leur disposition, devenir les interlocuteurs privilégiés entre le ministère et sa population.

M. Desrosiers: J'irais jusque-là à tout le moins. La réforme... Déjà que, par l'expérience que l'on vit au comité "Employé habilité", on se rend compte que, s'il n'y a pas un intervenant entre l'institution et l'assisté social, il n'y a rien à faire, c'est un leurre d'arriver en contact avec l'assisté social. C'est pour cela que l'on préconise une mobilisation de cette forme. Actuellement, le comité "Employé habilité" auquel on travaille regroupe 25 intervenants, autant syndicaux qu'institutionnels, que groupes communautaires et autres. Je crois que ces gens-là devraient avoir un rôle primordial dans une réforme comme cela.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Cela va pour le moment. Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Laporte): Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Je vous salue, M. Desrosiers et M. Goulet. M. Goulet, vous êtes toujours l'adjoint, je crois, au directeur général de la CECM; c'est bien le cas? Ce n'est pas à ce titre-là que vous siégez au comité "Employé habilité"?

M. Goulet (Gilles): Non.

Mme Harel: Vous y siégez comme ancien directeur du CLSC Hochelaga-Maisonneuve. Non plus? Comme personne-ressource?

M. Goulet: Entre autres, mais je pense que c'est davantage par mon implication et mon engagement dans le milieu. Je ne représente ni la CECM, ni le CLSC.

Mme Harel: Je le conçois. Vous ne représentez pas l'institutionnel.

M. Goulet: Non, pas du tout. Mme Harel: Pas du tout.

M. Goulet: C'est à titre de coordonnateur du comité "Employé habilité" que je suis ici ce soir. (21 h 45)

Mme Harel: D'ailleurs, c'était là le pari le plus important qu'a remporté PARHM, de réussir, dans un milieu du bas de la ville, à faire travailler ensemble des milieux qui avaient été, on peut dire, historiquement antagoniques: le milieu de la très grande entreprise... Je pense entre autres à Bombardier, à Hershey's ou à Johnson & Johnson. Je crois que leurs dirigeants participent au comité ou sont actifs au sein du PARHM.

M. Desrosiers: Ils sont actifs dans les conseils d'administration et ils sont actifs dans un de nos autres comités également.

Mme Harel: Alors, il y a là des dirigeants de très hauts niveaux en même temps que des gens du milieu communautaire et des gens du milieu des affaires professionnelles et commerciales. Disons que c'était comme la quadrature du cercle, d'une certaine façon. C'est certainement ce qui a donné au PARHM la crédibilité et la légitimité qu'il a maintenant et la consolidation de cet appui venant d'un peu tous les milieux.

Dans votre mémoire, vous nous rappelez notamment qu'il y a un coût relié à l'appauvrissement et que ce coût se calcule aussi en termes économiques, que le coût de la sous-éducation, que le coût de la santé physique, que le coût de la santé mentale et de la délinquance se calculent également. Ce n'est pas simplement en renvoyant des gens dans la marginalité comme si c'étaient des exceptions à la règle qu'on peut jauger ce qui se passe dans notre société. Il y a là des coûts importants pour les 30 000 personnes. Vous nous rappelez d'ailleurs que, quelles que soient les créations d'emplois, il y a toujours plus ou moins 30 000 personnes qui sont en inactivité. C'est une question à laquelle je ne

sais pas si vous pouvez répondre mieux que tous les organismes avec lesquels j'ai communiqué un peu, y compris l'OPDQ dans la région de Montréal. Ils ne sont pas capables de me dire exactement quelle a été la création nette d'emplois dans l'est. Je ne sais si vous avez eu l'occasion de vous pencher sur cette question, parce qu'ils considèrent qu'il y a eu beaucoup de transferts, des transferts de zones plus vétustés le long de l'avenue du Parc et autres dans le centre-ville vers les parcs industriels ouverts à Pointe-aux-Trembles et Rivière-des-Prairies et que ces transferts ont consolidé et permis parfois une création d'emplois, mais relativement peu importante en regard des grands licenciements qu'on vient de connaître encore dernièrement. Est-ce que vous avez eu des chiffres là-dessus?

M. Desrosiers: Non. Nous n'avons pas de chiffres précis. Nous aussi, nous avons des impressions. Mais, par contre, on a peut-être certains bras sur le terrain. Si je prends l'exemple du parc Moreau, qui est pratiquement rempli à pleine capacité, il y a eu très peu de création d'emplois. Ce sont des imprimeries qui sont parties, soit de la ville de Saint-Laurent ou du comté de M. Laporte et qui se sont rapprochées dans le parc Moreau, par exemple, l'imprimerie Paradis. Quant au parc de ...

Mme Harel: Vous faites de la rétention quand même, à Montréal, parce que, sinon, on s'en allait vers des parcs industriels sur la rive sud...

M. Desrosiers: Cela a quand même un effet d'entraînement positif.

Mme Harel: ...ou à Anjou.

M. Desrosiers:... ne serait-ce que sur les commerces environnants.

Mme Harel: Mais ce n'est pas nécessairement... C'est cela.

M. Desrosiers: De fa création nette. Non.

Mme Harel: De la création nette. Vous menez présentement des actions en regard de l'employabilité. Vous avez parlé du comité. C'est impressionnant. C'est vous, M. Goulet, je pense, qui le présidez. Il y a au-delà de 22 personnes qui y participent avec de nombreux dirigeants d'entreprises et des gens du milieu communautaire.

Vous avez, je pense, confié à une maison de psycho-éducation, je ne sais trop, le soin de faire des recherches. J'aimerais que vous nous en partiez, que vous nous fassiez part des premiers résultats obtenus et de ceux que vous attendez. Je crois que ce sont là des recherches extrêmement importantes sur la question de l'employabilité et elles devraient être fournies, d'ailleurs. aux gens de la commission.

M. Goulet: D'abord, je vais peut-être me permettre de vous parler un petit peu de la composition du comité "Employé habilité". On en parle depuis tout à l'heure. Il y a effectivement 22 personnes qui siègent au comité "Employé habilité". Il y a des représentants du monde syndical et du monde des affaires, des représentants des réseaux institutionnels et du réseau communautaire. Et ce qu'on a réalisé, dans le fond, à ce comité-là, c'est qu'il y avait un urgent besoin d'asseoir tout ce beau monde autour d'une table. Cela a été le premier des constats. Il existe une pléthore de programmes rattachés à l'employabilité, que ce soit au provincial, au fédéral ou dans les groupes communautaires. Déjà, le premier constat que l'on fait, c'est qu'il y a un net besoin de faire un peu de ménage là-dedans, de clarifier les rôles et les responsabilités et de rendre plus explicitement accessibles et visibles ces programmes aux personnes concernées. Quant à nous, on s'est donné un plan d'action. Dans ce plan d'action, il y a un premier volet; cela ressemble un peu au mandat donné au bureau consultatif sur l'employabilité, dans le cadre des mesures adressées à l'est de Montréal.

Ce qu'on voulait, dans un premier temps, c'était de savoir qui étaient ces 32 000 personnes, les 10 000 chômeurs et les 22 000 assistés sociaux, en gros. Qui sont-ils? Quel est le profil d'employabilité de ces personnes-là? C'était donc une démarche de connaissance de la clientèle, avant de mettre en place un certain nombre de mesures pour faciliter l'employabilité, tant en termes de réinsertion sociale qu'en termes de réinsertion professionnelle. On a confié au Centre de psycho-éducation de l'Université de Montréal le mandat de tenter de rencontrer de ces personnes afin de bien identifier les conditions dont elles ont besoin pour favoriser et faciliter leur réinsertion. Entre autres, la première difficulté qu'on a rencontrée... J'écoutais Mme Vidal tout à l'heure et, assez curieusement, on a vécu la même chose. Je me disais que, sur 32 000 personnes, ce serait très facile d'aller en chercher une centaine, mais on a eu toutes les difficultés du monde à en recruter 40. Là-dessus, je dois dire que, même s'il y a une table de concertation, on a eu certaines difficultés à faire débloquer la collaboration du réseau institutionnel.

Mme Harel: Y compris le centre Travail-Québec!

M. Goulet: Le centre Travail-Québec aussi bien que le centre d'emploi et d'immigration du Canada, pour toutes sortes de bonnes raisons.

Mme Harel: Quelles sont les raisons?

M. Goulet: Le respect de la confidentialité

des données plus particulièrement. On pensait qu'il y avait moyen de rejoindre au moins une centaine de personnes, mais finalement nos 40 personnes, on a réussi à les rejoindre davantage par le biais des groupes communautaires qui sont en contact vraiment très direct avec elles et c'est grâce à eux qu'on a réussi à les rejoindre. Là, on les a rencontrées par petit groupe pour tenter d'identifier leurs besoins. Ce qui en ressort - je ne veux pas faire une longue histoire, on pourrait déposer éventuellement le dossier - c'est principalement le besoin, et je pense que cela a dû être dit ici en commission, de briser l'isolement de ces personnes.

Les groupes que nous avons rencontrés sont composés de gens qui sont aux prises avec des problèmes sérieux de santé et de santé mentale, d'équilibre au niveau de la santé mentale. Ce que ça nous amène à inférer en termes de mesures, c'est que, si on veut penser à l'employabilité, il y a d'abord une espèce de démarche de préem-ployabilité à faire avec ces gens-là pour leur permettre de retrouver... Cela peut se faire en collaboration avec les institutions; je pensais au CLSC où j'ai déjà été directeur général et au centre de crise qu'on a mis sur pied dans le temps avec Mme Lavoie-Roux. Il y a des collaborations à aller chercher là pour favoriser la réinstauration de cet équilibre dans la santé mentale. Après, on pourra mettre en place des mesures d'employabilité proprement dites. Donc, c'est pour cela que je parle de réinsertion sociale et de réinsertion professionnelle.

Ce qui s'est également dégagé...

Mme Harel: II va falloir que vous me parliez aussi de la Commission de formation professionnelle.

M. Goulet: D'accord. Ce qui s'est également dégagé, c'est le souhait d'une mesure qu'on pense essayer de mettre en place, je ne sais pas trop comment. C'est une espèce de mesure comme SOS Suicide, un SOS Emploi. Ce serait, pour une personne qui perd son emploi, qui ne sait pas trop où s'adresser, qui est perdue et paniquée un tout petit peu, une espèce de lieu où elle pourrait communiquer rapidement, et un lieu où on pourrait faire de l'accueil et donner des références.

Les jeunes nous ont également dit qu'ils souhaitent un genre de lieu un peu différent du réseau institutionnel qu'on trouve froid, bureaucratique et qui est débordé. Je ne veux pas porter un jugement négatif là-dessus, mais on nous dit souvent que cela tient plus à la qualité de la personne qui nous accueille qu'au réseau proprement dit de services. Cela m'amène à penser qu'il y aurait peut-être lieu, si ce n'est pas fait déjà, de penser à toute une série de mesures. On parle d'ajouter du personnel dans le projet pour favoriser l'employabilité. Je pense qu'il y aurait d'abord une sensibilisation et une formation à donner à tout le personnel qui travaille à l'accueil, dans les centres Travail-Québec. Je ne peux pas parler pour le fédéral, mais ce qu'on a déploré essentiellement, c'est la froideur bureaucratique des personnes qui accueillent dans les centres Travail-Québec.

Mme Harel: C'est sûr. Par ailleurs, compte tenu du nombre de dossiers - on dit dans nos circonscriptions que c'est au-delà de 500 ou 550 dossiers par agent - la froideur est certainement inversement proportionnelle au volume. Cela doit quand même jouer sur les relations, d'une certaine façon. Cela dépend quelle est l'attente que le milieu ou l'employeur a à l'égard de la performance. Je ne pense pas que l'attente soit en termes de relation d'aide, mais plus en termes de volume de dossiers traités. Cela doit quand même jouer beaucoup, quelles que soient les bonnes dispositions des personnes.

M. Goulet: Oui. Tout cela s'explique. Ce sont simplement les perceptions qui nous ont été exprimées telles qu'elles sont vécues par les personnes que l'on a rencontrées.

C'est là un premier volet. Je passe rapidement à l'autre, qui m'apparait tout aussi important parce qu'il est complémentaire. On entreprend maintenant la même démarche auprès d'une cinquantaine d'entreprises. C'est sensiblement la même, avec un canevas semblable d'entrevues, de rencontres avec les responsables de ces entreprises, afin de vérifier auprès d'eux quelle perception ils ont de la main-d'oeuvre dans le sud-est, les besoins de main-d'oeuvre ressentis, le profil de la main-d'oeuvre attendue et de tenter avec eux également d'identifier s'il y a des besoins ou si on prévoit soit de l'expansion, soit du développement, et, si on prévoit de la création d'emplois, d'essayer de s'entendre avec eux pour tenter de développer des mécanismes qui permettraient aux personnes qu'on a identifiées, qui sont à la recherche d'un emploi, avec les conditions d'employabilité, de faire en sorte qu'on puisse faire l'arrimage entre les besoins de l'entreprise et les besoins exprimés par la main-d'oeuvre.

Le Président (M. Laporte): J'imagine qu'on a le consentement des membres de la commission pour dépasser 22 heures.

Mme Harel: Oui, certainement. Le Président (M. Laporte): Merci.

Mme Harel: Alors, il me reste seulement sept minutes. M. Goulet, M. Desrosiers, vous comprendrez que j'aimerais en plus vous entendre parler du fonds spécial de formation. Dans les recommandations du CREEEM, il y avait le fonds spécial de formation. Le ministre a annoncé 12 000 000 $ sur une période de trois ans. Y a-t-il déjà des mesures mises en place pour ropérationnalisation" de ce fonds de formation à

l'intention de la main-d'oeuvre locale? Quelles sont les relations actuellement entretenues avec la Commission de formation professionnelle qui est très loin?

D'autre part, la recommandation du CREEEM concernant les mesures particulières pour favoriser l'embauche des résidents de l'est par les entreprises qui créent les emplois. Vous nous rappelez la recommandation d'un crédit d'impôt a l'embauche locale lors de la création nette d'emplois. "Grant diversion". Je suis surprise que vous nous le proposiez. Cela a été très décrié par les groupes qui vous ont précédés parce que cela ne permet pas à quelqu'un de quitter l'étiquette d'assisté social". Finalement, du moment que les gens acceptent quasiment de travailler pour un peu plus que l'aide sociale, mais du moment qu'ils n'en sont plus... Le fait de continuer à en être est une sorte d'état de dévalorisation à tel point qu'un emploi exercé avec cette étiquette n'est pas une vraie "job". Je ne sais pas comment vous perceviez ce projet de "Grant diversion" américain.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je m'excuse. J'aurais peut-être une précision à apporter, Mme la députée de Maisonneuve. Je n'ai pas le même... quand je l'ai, je me sens à l'aise, quand cela a été bien critiqué, je le dis comme tel, mais "Grant diversion" n'a pas fait l'objet de critiques comme telles, parce que "Grant diversion" sort quelqu'un de l'aide sociale. Il y a peut-être là...

Mme Harel: Oui. Je fais plutôt référence au groupe de Québec qui est venu nous...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Parce que "Grant diversion" sort une personne de l'aide sociale. Elle travaille et, par l'entremise de l'entreprise, on transforme ses prestations d'aide sociale en salaire. À ce moment-là...

Mme Harel: Mais elle est toujours sous le contrôle d'un bureau d'aide sociale. Elle a toujours ses formulaires. Elle est toujours un assisté social.

M. Desrosiers: Sur ce point, je peux répondre. Nous, ce que nous trouvions intéressant, c'était le modèle. En ce qui nous concerne, cela ressemble un peu à un crédit d'impôt déguisé, mais jusqu'à un certain point, car on n'ose pas l'appeler comme cela. C'est sûr que si c'est pour conserver un chapeau d'assisté social, on n'est pas favorable à cela. Mais si c'est réellement pour aider une entreprise à engager quelqu'un et le sortir de l'aide sociale, pour qu'il travaille et se réinsère dans le marché du travail, c'est cette vision qu'on partage.

Mme Harel: D'accord. Mais il y a des choses à clarifier. Je me rappelle un groupe de Québec dont la porte-parole était une femme exceptionnelle, une infirmière psychiatre, très connue de M. Leclerc, qui l'a félicitée à maintes reprises, d'ailleurs, pour sa bonne collaboration.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Elle a félicité M. Leclerc aussi.

Mme Harel: Oui, oui. C'est cela. Oui. C'était mutuel. C'est le député de Taschereau.

M. Desrosiers: On ne se connaissait pas, M. Leclerc. (22 heures)

Mme Harel: C'est important, parce que je pense que cela peut créer de la confusion. C'est évident qu'il faudrait que ce soit un emploi payé au moins au salaire, disons, légal et non pas simplement quelqu'un qui est embauché avec ses...

M. Desrosiers: Non, non. Écoutez...

Mme Harel: ... ses prestations d'aide sociale, comme assisté social.

M. Desrosiers: Non, non. On a même pris la peine de souligner que pour nous...

Mme Harel: D'accord.

M. Desrosiers: ... l'assisté social devrait avoir, à tout le moins, l'équivalent à peu près d'un salaire minimum. Naturellement, s'il retourne travailler en entreprise, ce n'est pas du "cheap labour". C'est très clair.

Mme Harel: En l'occurrence, vous dites, et c'est peut-être intéressant: Pourquoi ne pas envisager, à ce moment, de verser ce qui serait l'équivalent? On verse presque 165 000 000 $ dans l'est, je pense, en assurance-chômage et en aide sociale. Pourquoi ne pas essayer des projets qui verseraient l'équivalent à des employeurs qui offriraient de vrais jobs?

M. Desrosiers: En ce qui concerne notre territoire, ce qu'on se dit, nous, c'est qu'il y en a tellement qu'on aimerait essayer différents projets, différentes techniques pour avancer, pour donner des chances aux assistés sociaux de réintégrer le marché du travail.

Mme Harel: Qui sélectionnerait de tels projets pour bien s'assurer qu'ils ne soient pas les victimes, finalement, d'emplois sous-classés, dévalorisés? Qui pourrait faire en sorte qu'il y ait un certain encadrement?

M. Desrosiers: Nous, écoutez, on n'a pas poussé...

Mme Harel: Vous allez dire vous, peut-être?

M. Desrosiers: Non, on va être plus modeste, disons.

Mme Harel: Pourquoi pas?

M. Desrosiers: Justement, cela m'amène peut-être à parler d'une certaine vision qu'on peut avoir. On cherche de l'information plus précise sur le bureau consultatif qui va être formé très bientôt, qui concerne l'est de Montréal. On sait que Mme Michèle Jean, je pense, pilote le dossier. Bon. On a appris, parce qu'il y a des gens de la CFP qui siègent auprès de nous, entre autres, qu'il va y avoir douze ou treize postes, je crois. Peut-être que certaines mesures concernant l'est, autant celles qu'on vient d'énumérer que d'autres, sur l'aide sociale pourraient être, dans un premier temps... On pourrait demander au bureau consultatif de donner des avis sur certaines politiques concernant l'est pour voir comment certaines mesures pourraient s'appliquer avant d'aller trop loin, autant d'un bord que de l'autre, dans une démarche de réforme de l'aide sociale ou de politique d'incitation à retourner sur le marché du travail.

Mme Harel: Avez-vous été contactés, au PARHM, pour faire partie du comité consultatif?

M. Desrosiers: On n'a pas été contactés pour en faire partie. On a été contactés pour savoir quels sont tous les groupes qui travaillent à l'employabilité, y compris nous-mêmes. Personne, je crois, n'a été présenté comme tel. Mais on sent que notre nom circule. On n'a pas plus d'information.

Mme Harel: À la Commission de formation professionnelle, dites-moi un peu comment les choses vont se passer. Ces gens sont censés engager un adjoint au directeur général qui va s'occuper de l'est. Comment sera l'arrimage avec le PARHM?

M. Desrosiers: Gilles pourra compléter. On a commencé... Le Centre de formation professionnelle siégeait à notre comité "employé habilité".

Mme Harel: Commission? Oui, c'est cela. Oui.

M. Desrosiers: ... siégeant au comité "employé habilité". Depuis les annonces, l'intervenant a changé. On a constaté, depuis les annonces du bureau consultatif et tout cela, un rapprochement assez positif de la Commission de formation professionnelle. Jusqu'où cela peut aller? Je crois que le représentant a pu voir que notre travail était réellement assez impliqué sur le terrain...

Mme Harel: II me reste juste une minute. J'aimerais que vous me disiez votre évaluation du travail de la Commission de formation professionnelle dans l'est. Je ne veux pas que ce soit une évaluation de ce que vous pensez d'elle.

Mais, est-ce que les gens que vous avez contactés, l'enquête qui est menée, par exemple, savent ce qu'est la Commission de formation professionnelle? Fait-on appel à ses services?

M. Desrosiers: Non. Il n'y a personne, je l'avoue, qui semble la connaître beaucoup. Même nous. Disons que c'est à travailler avec elle qu'on apprend à la connaître. C'est une grande méconnue, je trouve, dans l'est, cette commission.

Le Président (M. Laporte): Le temps est malheureusement écoulé. M. le ministre.

Mme Harel: M. Goulet voulait peut-être dire quelque chose, si vous me permettez.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, allez-y. M. Goulet: Non, cela va.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Sur le temps écoulé de Mme la députée, pas sur mon temps!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'aurais quelques précisions a vous demander, non pas dans le nouvel encadrement qui vous est proposé, mais dans ce que vous avez vécu dans le passé, par rapport a la Commission de formation professionnelle. Ma question est bien directe, bien simple: Sentiez-vous que dans le milieu dans lequel vous oeuvrez maintenant, la Commission de formation professionnelle était présente et active?

M. Desrosiers: En ce qui concerne PARHM, je réponds non. Par contre, lorsqu'on a mis sur pied le comité, on a demandé à la commission de siéger. Elle a accepté, mais on n'a jamais senti que c'était une présence qui avait un suivi constant. Elle participait. À part cela, non.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vous pose la question parce que j'ai senti que, quand le milieu nous a réclamé un directeur adjoint au directeur général, c'est parce qu'il sentait que c'était un outil qui ne servait pas aux fins auxquelles il devait servir dans le passé. Est-ce que j'ai tort ou raison dans cette interprétation que j'ai faite de cet aspect du dossier?

M. Desrosiers: Est-ce que vous pouvez répéter votre interprétation?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Lorsqu'on nous a demandé de nommer un adjoint au directeur responsable de votre région et du programme spécial qui était mis sur pied, j'ai eu l'impression qu'on me disait: La Commission de formation professionnelle n'a pas fait chez nous, dans le passé, le travail qu'elle devait y faire.

Peut-être qu'en l'impliquant plus directement avec quelqu'un de responsable et ayant l'autorité, ce travail va être effectué. C'est ce que j'ai senti. Est-ce que j'ai eu un bon "feeling"?

M. Desrosiers: C'est peut-être un bon "feeling", mais pour exposer plus précisément ce qu'on peut ressentir dans l'est vis-à-vis des outils... Le ministre Johnson a annoncé - comme vous le savez sûrement - quelques millions pour l'est avec une énorme table de concertation. On a été surpris de voir qu'en parallèle il y avait un bureau consultatif avec la CFP d'un côté. La crainte, c'est qu'on aimerait beaucoup qu'il y ait un arrimage de tout cela. La réputation de la CFP dans l'est, c'est effectivement quelque chose d'éloigné, qui est à part. Je trouve que les dernières annonces ont un peu confirmé cela. Au niveau de la formation, on n'a pas précisé encore - peut-être que cela va venir - que cela faisait partie de la table de concertation de l'est qui est annoncée par Montréal et Québec. On crée un bureau consultatif, sans trop savoir quelle est la relation avec la table de concertation. Cela a semé la même appréhension.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Donc, on est parti - si on peut aller rapidement - de l'appréhension: "je ne vois pas le rôle que la CFP était supposée y jouer", à, maintenant qu'il y a eu rapprochement de la CFP, l'appréhension: "comment on va arrimer cela avec la table de concertation?"

M. Desrosiers: Oui. C'est cela.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vous dirai que, sur le plan de l'employabilité, j'avais pris la peine - c'était aussi un peu par obligation - de tout lire ce que vous avez pu produire comme document et comme demande au ministère avant d'arrêter les décisions qui vous ont été annoncées dernièrement. Je vous dirai également qu'on mise beaucoup sur votre implication et la réussite de ce que vous avez entrepris. Je vous dirai encore que l'approche très pratique que vous avez développée, en évaluant 1° la clientèle et ses besoins, 2° les entreprises et leur cheminement, est une approche qui peut paraître bien simple mais, lorsqu'elle n'est pas au dossier, on peut commettre beaucoup d'erreurs. Lorsque de telles données sont consignées au dossier, ce n'est pas une garantie qu'on va viser juste, mais c'est une garantie qu'on va être au moins quelque part dans la cible. Il s'agit, pour le ministère, d'une expérience-pilote. Est-ce que cette expérience va être répétée ailleurs, dans d'autres régions qui subissent un petit peu le même sort que la région de l'est de Montréal? Cela dépend de la qualité du travail que vous allez accomplir. Je sais que vous êtes des gens responsables et que vous avez envie de réaliser professionnellement les choses dans lesquelles vous vous êtes engagés, mais je vous dirai qu'au ministère on a besoin de cette collaboration que vous nous avez offerte.

Au sujet du comité consultatif dont on parlait tantôt, je tiens à vous dire que la qualité de votre approche va inciter le ministère à retenir pour le comité consultatif, je ne dirai pas les deux candidatures, parce qu'il ne faut pas placer dans les comités des gens qui proviennent nécessairement des mêmes groupes d'action... Il s'agit d'en choisir une des deux. Une des deux candidatures sera retenue pour le comité consultatif comme tel. Cela vous donnera un tremplin de plus pour faire fonctionner ce que vous avez entrepris comme projet.

Je n'ai pas de question précise à vous adresser à ce moment-ci. Mais si vous aviez, de votre côté, des remarques précises à m'adresser, c'est le moment propice de le faire sans intermédiaire. Cela s'adresse possiblement plus à M. Goulet qu'à M. Desrosiers, que je n'ai pas eu l'occasion d'interroger.

Le Président (M. Laporte): M. Goulet.

M. Goulet: Je suis simplement très heureux d'apprendre que quelqu'un du PARHM siégera au bureau consultatif. Vous posiez des questions tout à l'heure au sujet de la perception qu'on pouvait avoir de la CFP. Assez curieusement, à la dernière rencontre du comité de l'employabilité, le représentant de la CFP a été beaucoup plus actif. Il est arrivé avec des propositions beaucoup plus pratiques et qui allaient plus dans le sens de la planification qui avait été mise sur pied par notre comité. Donc, il y a un rapprochement. Je suis très content, très heureux d'apprendre qu'il y a une volonté réelle de faire jouer à la CFP son rôle. Si on est obligés nous-mêmes, avec peu de moyens, d'entreprendre une démarche pour une meilleure connaissance de la clientèle à desservir, il me semble que cela aurait pu être fait et que cela entre dans les attributions de la CFP, sauf qu'on l'a entrepris. Je suis très heureux maintenant de réaliser... Aux dernières rencontres - Gaétan peut le confirmer - le représentant de la CFP est arrivé et j'avais l'impression qu'il avait des mandats beaucoup plus clairs.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vous dirai également qu'au cours de votre expérience, il peut survenir des moments où il peut vous sembler, à tort ou à raison, que la volonté gouvernementale n'est pas aussi articulée, aussi présente qu'elle devrait l'être. Dans ces cas, compte tenu de l'importance du projet-pilote que vous avez constitué, je vous invite à nous en faire part directement.

Une des voies les plus directes pour nous atteindre, lorsque vous avez épuisé toutes vos ressources à l'intérieur de la machine - parce que c'est là qu'il faut d'abord travailler - ce sont les membres de l'Assemblée nationale qui représentent vos circonscriptions électorales.

d'un côté comme de l'autre, du parti au pouvoir comme du parti de l'Opposition. Étant donné la rapidité avec laquelle ces messages peuvent être véhiculés, je vous incite à profiter de la présence des députés pour les acheminer; cela me vient rapidement, habituellement, lorsque c'est acheminé par les députés. C'est une autre avenue que je vous suggère d'employer; pas d'en abuser mais d'employer, après avoir utilisé la machine.

Le Président (M. Laporte): On vous remercie. Avez-vous autre chose à ajouter, M. Desrosiers? Je vous remercie de la présentation de votre mémoire. Comme je sais pertinemment que vous venez pratiquement juste d'arriver et que vous retournez directement à Montréal, je vais vous souhaiter un bon voyage. Nos remerciements au nom de la commission pour la présentation de votre mémoire.

Je rappelle aux membres de la commission que la commission se réunira le 22 mars, de 10 heures à midi trente, dans cette salle, afin de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi 94, Loi sur le Conseil de la famille.

Je déclare les travaux de la commission ajournés sine die. Merci.

(Fin de la séance à 22 h 14)

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