Journal des débats (Hansard) of the Committee on Agriculture, Fisheries, Energy and Natural Resources
Version préliminaire
42nd Legislature, 2nd Session
(October 19, 2021 au August 28, 2022)
Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.
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Wednesday, February 23, 2022
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Vol. 46 N° 3
Special consultations and public hearings on Bill 21, an Act mainly to end petroleum exploration and production and the public financing of those activities
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11 h (version non révisée)
(Onze heures vingt-six minutes)
Le Président (M. Lemay) : Alors,
à l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de
la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources
naturelles ouverte. Et je demande à toutes les personnes présentes dans la
salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leur appareil électronique. Alors
aujourd'hui, nous sommes réunis afin de poursuivre les consultations
particulières et les auditions publiques sur le projet de loi numéro 21, la Loi
visant principalement à mettre fin à la recherche et à la production
d'hydrocarbures ainsi qu'au financement public de ces activités. Et, monsieur
le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?
Le Secrétaire : Oui, monsieur
le Président, un seul remplacement, M. Tanguay (LaFontaine) est remplacé
par M. Arcand (Mont-Royal-Outremont).
Le Président (M. Lemay) : Merci,
Monsieur le secrétaire. Aujourd'hui, nous entendrons l'Institut national de la
recherche scientifique, et d'ailleurs, je les salue de ce pas, qui sont avec
nous. Alors je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour faire
votre exposé et par la suite, il y aura une période d'échange avec les membres
de la commission. Mais d'abord, je vous invite à vous présenter, et ensuite
vous pouvez y aller avec votre exposé.
Mme Hénault-Ethier
(Louise) : Bien, bonjour, Monsieur le Président. Monsieur le Ministre,
Mesdames, messieurs les députés et membres de la CAPERN, je vous remercie pour
l'invitation à témoigner aujourd'hui en compagnie d'experts du Centre Eau,
Terre, Environnement de l'Institut national de la recherche scientifique dont
j'assume la direction. Donc, je suis accompagnée de Louis-César Pasquier,
Jasmin Raymond et Violaine Gascuel.
Donc, selon l'Agence internationale de
l'énergie, aucune nouvelle exploitation d'hydrocarbures ne doit voir le jour
pour atteindre la carboneutralité en 2050. L'interdiction d'exploiter les
hydrocarbures au Québec s'aligne avec les connaissances scientifiques. Signal
fort en matière de lutte aux changements climatiques, elle démontre
l'engagement du Québec dans la transition énergétique. Un puits duquel du méthane
fuit ou qui menace l'eau souterraine doit être fermé. Mais si les évaluations
environnementales sont satisfaisantes, il pourrait être un allié dans la lutte
aux changements climatiques en donnant accès à des réservoirs permettant la
production ou le stockage d'énergies alternatives ou de carbone. L'usage des
réservoirs souterrains sans exploitation des hydrocarbures sont compatibles
avec une économie faible en carbone. Je céderai d'abord la parole à la
doctorante Violaine Gascuel, qui a travaillé sur l'évaluation du potentiel géothermique
de l'île d'Anticosti et de la région de Bécancour.
Mme Gascuel (Violaine) : Merci,
Louise. Alors, tout d'abord, j'aimerais rappeler qu'au Québec, il est
nécessaire de chauffer les bâtiments environ sept mois par an. En 2013, les
besoins en chaleur représentaient 76 % de la consommation énergétique des
bâtiments résidentiels et une part substantielle de celle des autres bâtiments.
L'exploitation des ressources géothermiques québécoises permettrait de répondre
à cette demande en chaleur. Une utilisation à grande échelle permettrait
d'éviter les GES associés au chauffage et permettrait également de diminuer
drastiquement la quantité d'électricité nécessaire, notamment en période de
pointe hivernale. Les systèmes géothermiques de faible profondeur sont déjà
utilisés dans certains bâtiments de la province, notamment à l'Assemblée
nationale. Cependant, la température du sous-sol augmente avec sa profondeur.
L'exploitation de la chaleur contenue dans
les formations rocheuses plus profondes serait donc plus efficace d'un point de
vue énergétique. Son utilisation permettrait de répondre à la demande de gros
consommateurs, comme des réseaux de chaleur urbains ou de grandes serres
agricoles, le tout avec des coûts compétitifs. Les systèmes les plus efficaces
pour exploiter cette chaleur seraient les systèmes en boucle ouverte. Ceux-ci
pompent directement l'eau souterraine vers la surface, puis la réinjectent en
profondeur après en avoir extrait la chaleur. Ils nécessitent néanmoins
l'utilisation de formations rocheuses poreuses et perméables en profondeur,
sans quoi, ils ne peuvent pas fonctionner.
Or, ces caractéristiques, qui font d'une
formation rocheuse une bonne cible pour les systèmes, en feraient également un
réservoir souterrain, tel que défini dans le projet de loi proposé. En effet,
il serait possible, d'un point de vue technique, d'y stocker du gaz naturel,
justement à cause...
Mme Gascuel (Violaine) : ...sa
porosité et perméabilité. L'interdiction de rechercher des réservoirs
souterrains dans le cadre d'un projet pilote interdit donc de fait la mise en
oeuvre des systèmes géothermiques profonds en boucle ouverte. Les systèmes
géothermiques en boucle ouverte pourraient, par ailleurs, être combinés à
l'extraction de minéraux critiques et stratégiques de l'eau souterraine appelée
saumure si la présence de ceux-ci en concentration exploitable et démontrée.
L'extraction de minéraux pourrait avoir lieu juste avant la réinjection de la
saumure. Ce procédé éviterait d'avoir recours à des mines à ciel ouvert ou
excavations. Bien sûr, pour que ce soit possible, il faudrait que
l'exploitation de la saumure soit autorisée.
Je céderais ensuite la parole à
Louis-César Pasquier, professeur agréé au Centre Eau, Terre et Environnement de
l'INRS, qui s'intéresse depuis 10 ans à la capture, au stockage et à
l'utilisation du carbone, notamment par le développement de procédés de
carbonatation misant sur l'économie circulaire et permettant de réduire les
émissions de CO2 des industries.
• (11 h 30) •
M. Pasquier (Louis-César) : Merci,
Violaine, pour l'introduction. Le Québec s'est donné des objectifs de réduction
de ses émissions de gaz à effet de serre ambitieux. En 2030, les émissions qui
sont actuellement à 2,6 % en dessous des niveaux de 1990 devront atteindre
37,5. Nous avons donc huit ans pour atteindre la cible que nous nous sommes
fixée. Les outils dont nous disposons sont nombreux et aucun ne sera de trop
dans ce défi.
Plus spécifiquement, le secteur industriel
québécois représente 29,4 % du bilan des émissions de 2019. Ces émissions
peuvent être scindées en deux parties, soit les émissions de combustion
industrielle et les émissions de procédé. Grâce à d'importants investissements
en matière d'efficacité énergétique, les émissions de combustion sont en large
baisse et vont continuer de baisser. Les émissions de procédé sont également à
la baisse, mais grâce à la fermeture, il y a quelques années maintenant, des
cuves Söderberg dans la production d'aluminium ou la fermeture de l'usine de
magnésium Magnola, les principales catégories aux émissions... associées aux
émissions de procédés sont la production de métaux non ferreux, l'aluminium,
les métaux ferreux, l'acier, et les minéraux non métalliques, le ciment et la
chaux.
Ces industries, qui sont un moteur
économique important pour la province, ont pour la plupart des émissions
incompressibles. On peut également mentionner la production d'énergies
renouvelables permettant l'économie circulaire de matières organiques comme la
biométhanisation, qui, malheureusement, émettent également du CO2.
En résumé, malgré tous nos efforts de
modernisation, de transition énergétique et de réduction de nos émissions à la
source, une période de transformation sera nécessaire. La capture et le
stockage du carbone, comme vous le savez peut-être, proposent de retirer le CO2
de flux gazeux... de l'air pour l'injecter dans des formations géologiques
adéquates à plusieurs kilomètres de profondeur. Au Québec, des travaux
antérieurs ont démontré un potentiel de stockage de plusieurs milliards de
tonnes de CO2, notamment dans des régions où se trouvent les puits dont le
texte de loi fait objet.
En ce sens, bon nombre de nos
recommandations visent à assurer la pérennité des travaux de recherche et de
développement nécessaires à un possible développement de cette filière au
Québec tout en maintenant l'interdiction de fermer et d'exploiter les
hydrocarbures de... Je vous passe maintenant la parole à mon collègue Jasmin
Raymon, professeur au Centre Terre Environnement, hydrogéologue de formation et
spécialisé dans l'énergie géothermique. Il s'est notamment intéressé à des
applications en contexte de production agricole en serre au Québec.
M. Raymond (Jasmin) : Merci,
Louis-César. Tous les acteurs du développement énergétique s'entendent pour
dire que l'hydrogène, c'est le carburant du futur. Le Québec est
particulièrement bien positionné pour produire de l'hydrogène vert compte tenu
de son potentiel hydroélectrique. Mais pour devenir un vrai leader dans le
domaine, il faudra inévitablement développer une capacité de stockage, qui
reste d'être un défi important pour province.
Le stockage est essentiel pour arrimer la
production d'hydrogène à la consommation, qui ne sont pas toujours en phase,
surtout si l'on veut que l'hydrogène remplace de façon significative les
hydrocarbures pétroliers que nous consommons, qui représentent pour le moment
près de 40 % de notre bilan énergétique. Pour y arriver, il faudrait
développer des technologies de stockage souterrain, qui sont la seule option
sécuritaire pour arriver à du stockage grand volume effectué à un coût
compétitif, le stockage d'hydrogène effectué en surface étant réalisé avec un
petit volume et des coûts beaucoup plus importants. En ce moment, le stockage
d'hydrogène effectué dans des cavités aménagées dans des roches constituées
de... est l'alternative privilégiée pour le stockage à grand volume.
Le Québec est donc désavantagé puisque
l'unique endroit dans la province où l'on compte des formations adéquates
constituées de... est dans le sous-sol des Îles de la Madeleine, un endroit
éloigné des consommateurs, où il serait illogique de faire du stockage. Le sud
de la province est toutefois constitué de bassins sédimentaires, les basses
terres du Saint-Laurent, qui contiennent des réservoirs souterrains. Ces
réservoirs, qui ont été par le passé des cibles pour l'exploration pétrolière,
vont devenir des cibles pour l'exploration du stockage souterrain d'hydrogène
dans le futur.
Le projet de loi ouvre la porte à des
projets pilotes qui permettraient l'utilisation des réservoirs souterrains pour
des fins de stockage d'hydrogène en adéquation avec les objectifs de la
transition énergétique... d'autorisation du...
11 h 30 (version non révisée)
M. Raymond (Jasmin) : ...Comme
pour les autres technologies mentionnées précédemment, le projet de loi demeure
toutefois flou sur la démarche à entreprendre pour obtenir une autorisation
ministérielle. Il est bien entendu comprenable que cette démarche ne soit pas
encore définie pour le secteur de l'hydrogène puisque les technologies ne sont
pas à maturité. Les technologies géothermiques permettent... précédemment
décrites par ma collègue Violaine Gascuel, permettent... Pourraient être
déployées sur le terrain à l'heure actuelle et qu'il n'y a pas encore de cadre
réglementaire au Québec. Il ne faudrait pas reproduire la même erreur et
développer avec quelques années de retard ce cadre réglementaire pour le
stockage souterrain d'hydrogène. Il est donc temps de s'investir et de développer
des projets de recherche, des projets pilotes sur le stockage souterrain
d'hydrogène et les autres technologies mentionnées par mes collègues, qui
aideront à définir cette réglementation.
Pour favoriser une réelle transition
énergétique, il ne suffit pas de mettre fin à l'exploration des hydrocarbures
pétroliers, il faut favoriser l'essor des technologies propres qui mettront en
valeur le potentiel des réservoirs souterrains. Et c'est ce qui mérite d'être
amélioré, selon moi, dans le projet de loi.
Mme Hénault-Ethier
(Louise) : Alors, nos recommandations se déclinent en trois axes :
celles spécifiques aux articles du projet de loi, celles visant l'élaboration
d'une stratégie nationale de reconversion des puits comprenant des évaluations
environnementales et un partage public des données d'exploration, de même que
celles visant l'élaboration d'un cadre réglementaire clair tant pour
l'exploration et l'exploitation des sources géothermiques profondes, du
stockage d'hydrogène vert, de la séquestration du CO2 découplée de
l'exploitation des hydrocarbures, de même que l'extraction écoresponsable de
minéraux critiques et stratégiques à partir des saumures.
Les réservoirs souterrains peuvent
contribuer à une réduction significative des émissions de GES et il ne faudrait
pas priver le Québec de leur potentiel. Le financement de projets pilotes
permettrait au Québec d'assumer un leadership fort dans les domaines des
énergies vertes. Le déploiement de ces technologies représenterait également
une opportunité de création d'emplois.
Grâce à son expertise en géologie, le
Centre Eau, Terre, Environnement de l'Institut national de la recherche
scientifique est stratégiquement positionné pour accompagner le Québec dans une
vaste campagne d'acquisition de données sur le potentiel stratégique des
réservoirs souterrains visant la réduction massive des GES.
Il nous fera plaisir de répondre à l'appel
du gouvernement pour mettre en oeuvre les recommandations contenues dans le
présent mémoire. Alors, messieurs dames, monsieur le Président, nous sommes
disposés à prendre vos questions.
Le Président (M. Lemay) : Très
bien. Merci, Madame Hénault-Ethier ainsi que tous les représentants pour cet
exposé. Et nous allons maintenant passer à la période d'échange avec les
membres de la Commission. Monsieur le ministre, la parole est à vous pour
environ 16 minutes 30.
M. Julien : Oui. Merci,
merci beaucoup, monsieur le Président. Bien, bonjour, chers collègues, tout le
monde. Premièrement, bien, merci à vous quatre. Honnêtement, là, on en voit de
toutes sortes, des présentations, mais la vôtre était certainement bien
structurée, avec le temps à chacun, et vos sujets, bien étoffés. Donc, c'est
très intéressant de vous écouter. Et également, bien, ça m'amène à plusieurs
réflexions et questionnements, justement, pour faire évoluer potentiellement le
projet de loi qu'on a devant nous lors des discussions qu'on aura avec les
collègues, l'article par article.
Je comprends que pour vous, les projets
pilotes, c'est des éléments qui ont retenu beaucoup votre attention à
l'intérieur du projet de loi, et à la fois pour la géothermnie, captation de
CO2, hydrogène, gestion de la saumure, MCS. Dans les discussions qu'on a eues
jusqu'à présent, tous les groupes qui nous ont parlé de la notion de projet
pilote l'ont amenée en disant... Parce qu'il semble y avoir des flous dans le
projet de loi sur à la fois les consultations, un BAPE, etc. Puis moi, je suis
assez ouvert, là, à venir renforcer ça, tu sais. Moi, comme ministre, là, discrétionnaire
ou quelque chose qui est pas mal plus encadrant, peut-être. Puis j'essaie de
voir votre proposition. Parce que ma volonté, quand même, c'est de venir dire :
si on peut capter des potentiels de projets pilotes qui vont dans cette voie-là,
qui sont des voies de transition énergétique et qui sont très positives, je ne
voudrais pas que le parcours du combattant pour y arriver fasse en sorte que
tout le monde dise : Bien, en fin de compte, on va recaper le trou puis on
va s'en aller. Donc, j'essaie de trouver le bon niveau, justement, pour
permettre qu'un projet pilote, sur ces 62 puits potentiels des 182 licences,
voit le jour sans être trop contraint au bénéfice des Québécois. C'est quoi
votre proposition que vous voyez, là, pour y arriver?
Mme Hénault-Ethier
(Louise) : Bien, merci, monsieur le président. Merci beaucoup,
monsieur le député, pour la question. Donc, premièrement, il s'agit pour nous
de ne pas fermer la porte à la recherche. Donc, quand on parle que le Québec se
positionne stratégiquement pour permettre le développement bien encadré de
projets pilotes, c'est pour permettre à nos chercheurs, justement, d'optimiser
les technologies, d'évaluer les potentiels.
Ceci dit, évidemment, on ne fait pas de la
recherche en mettant en danger...
Mme Hénault-Ethier (Louise) : ...la
santé environnementale, la santé publique et on ne veut pas le faire sur des
technologies qui ne seraient pas publiquement acceptables. Quand nous, on parle
de projets pilotes, ce n'est surtout pas des projets pilotes qui visent à
perpétuer l'exploration ou l'exploitation des hydrocarbures. C'est vraiment
bien délimité dans le cadre des technologies propres, là, qu'on vous a
présenté.
Ceci étant dit, un projet pilote, bien, il
y a toutes sortes de choses qui sont contraignantes. Dans notre mémoire, on
fait état notamment de la durée des projets pilotes. Est-ce qu'une durée peut
vraiment être délimitée en amont ou si on doit pouvoir avoir la possibilité
d'étirer la durée d'un projet pilote en fonction de l'évolution d'un projet?
Mais, avant même de se lancer dans des
projets pilotes, je pense, la première chose à faire, c'est de s'assurer, selon
les caractérisations qui sont déjà à la disponibilité du ministère ou des
caractérisations complémentaires, que les puits concernés ne fuient pas du
méthane ou qu'il n'y a pas d'enjeu de risques pour l'approvisionnement en eau
potable des municipalités, puisqu'il y a quand même la moitié des municipalités
au Québec qui s'approvisionnent de sources souterraines. Donc, c'est dans cette
optique-là qu'on voit les projets pilotes. Je ne sais pas si mes collègues
veulent compléter.
• (11 h 40) •
M. Julien : Il va y avoir
d'autres sous-questions, peut-être qu'il y aura des complémentaires sur les
autres éléments. Alors, vous comprenez un peu l'objectif qu'on a. Alors, pour
moi, je ne vais pas repousser, dans l'éventualité qu'il y a adoption du projet
de loi, je ne vais pas repousser aux calendes grecques, en réalité,
l'obligation de réhabiliter les puits puis après ça faire les versements
d'indemnisation, le cas échéant. Et je veux surtout éviter que quelqu'un trouve
une voie de passage pour ne pas faire son travail en prétendant un projet
pilote.
D'un autre côté, si un projet pilote en
vaut la peine, je veux qu'on puisse saisir cette opportunité là, comme société,
pour justement, dans les volets que vous avez énoncés... de faire avancer le
Québec en termes de cette transition qui a été mentionnée par un de vos
collègues. On ne peut pas se permettre, par rapport à nos objectifs ambitieux,
de ne pas additionner les solutions.
Donc, si je reviens sur le terrain, le
terrain des vaches, là, qu'est-ce qui me permettrait d'être efficient, dans
l'objectif que j'ai, justement, pour identifier en amont ou pour éviter de trop
longs délais d'attente pour des prétendus projets pilotes? Tu sais, j'essaie de
voir comment je vais réussir à être efficient pour choisir le bon grain des
projets pilotes ou des potentiels que j'ai sur les 62 puits observés.
Mme Hénault-Ethier (Louise) : Bien,
je pense, la première chose à faire, c'est vraiment une caractérisation rapide.
S'il y a des puits qui nécessitent une attention immédiate et urgente, on les
ferme de façon immédiate et urgente. Un puits qui fuit du méthane ou qui expose
les sources d'eau souterraines à une contamination qui proviendrait de la
surface, là, définitivement, il faut que ça soit fermé de façon rapide. Donc,
déjà là, les projets pilotes ne peuvent pas se réaliser sur des puits qui ont
mal été conçus et qui doivent être fermés.
Ceci étant dit, la deuxième chose, c'est
que, dans le cadre de projets pilotes, on peut s'inspirer de d'autres pans de
la réglementation québécoise, notamment dans le traitement des sols, ça prend
un certificat d'autorisation pour démarrer un projet pilote. Alors, vous
pourriez avoir un levier, un mécanisme pour vous assurer que les projets
pilotes proposés sont responsables, ont une véritable fonction scientifique et
possiblement que, les projets pilotes, vous pourriez les encadrer en favorisant
un accompagnement par les institutions universitaires ou les centres de
recherche, les CCTT, parce que c'est là qu'on va pouvoir réellement voir si le
milieu de la recherche soutient de façon crédible l'avancée d'un projet pilote.
Donc, dans ce contexte-là, où on a un maillage avec une équipe scientifique
robuste d'une institution d'enseignement supérieur ou d'un centre de recherche
reconnu par le gouvernement du Québec, accompagné d'un certificat
d'autorisation, je pense que ce sont des balises qui vont nous permettre de ne
pas repousser aux calendes grecques la fermeture de puits. De toute façon, les
puits problématiques, ils ont été fermés en amont à cause des évaluations
environnementales rapides, et les autres puits, on évite de pousser par en avant
trop longtemps dans le temps, là, pour leur fermeture.
M. Julien : Une petite
dernière question avant de passer la parole à mes collègues. Il y a deux
volets. Premièrement, vous êtes le deuxième groupe qui mentionnez clairement
que le trois ans plus deux ans n'est pas en pleine cohérence parce qu'à la
limite il pourrait y avoir des délais comme ça pour obliger certaines étapes.
Mais à terme, certains projets pilotes, s'ils sont positifs, pourraient gagner
à être pérennisés. Puis, pour vous, ça ne fait pas de sens nécessairement
d'avoir ces délais-là, alors...
Puis mon autre sous-question, c'est :
Quand vous parlez de saumure, MCS, naturellement, pour vous, c'est toujours
sans exploitation d'hydrocarbures de toutes sortes? Alors, c'est mes deux
dernières questions.
Mme Hénault-Ethier (Louise) : Peut-être
que ma collègue Violaine peut entreprendre la première partie de la réponse à
propos des durées de projets pilotes et des saumures, et on complétera par la
suite au besoin.
Mme Gascuel (Violaine) : Oui,
c'est ça. Donc, en préparant le mémoire, j'ai regardé quelles ont pu...
Mme Gascuel (Violaine) : ...les
durées pour des projets pilotes qui ont permis le développement de nouvelles
technologies. Et on voit plusieurs exemples où il a pu y avoir des projets
pilotes qui ont duré pendant 20 ans pour développer vraiment des nouveaux
procédés, qui ont aidé la science et qui ont aidé ces technologies à se
développer. Donc, évidemment, ça ne durerait pas toujours 20 ans. Si on
met en place des technologies qui sont mieux connues, ça pourrait durer
beaucoup moins de temps. Mais je pense qu'il faut laisser la porte ouverte. Et
c'est pour ça qu'à mon avis, il devrait plutôt y avoir un suivi, de la part du
ministère, pour s'assurer que c'est réellement un projet pilote en cours, et
pas quelque chose qui évite à la compagnie d'avoir à fermer le puits tout de
suite. Mais c'est très important de laisser du temps, et puis aussi, de laisser
le projet devenir pérein si jamais il démontre un bon potentiel.
M. Raymond (Jasmin) : En
complément d'information ici, là, pour répondre à une des questions qui a été
soulevée, ce qu'on propose concrètement, là... On comprend qu'à court terme, le
gouvernement veut aller de l'avant avec son projet de loi, mais ce qu'on
propose dans notre mémoire, c'est que, suite à l'adoption du projet de loi, il
faudrait définir le cadre réglementaire pour les projets pilotes, question de
savoir quelles sont les règles à suivre pour obtenir une autorisation, qui
détient les droits sur la ressource, comment peut-elle être exploitée dans un
cadre environnemental responsable. En ce moment, c'est un peu ce qui manque au
projet de loi, et qui va devoir être défini dans la suite des choses si on veut
bien valoriser le potentiel de nos réservoirs souterrains pour qu'ils profitent
à la transition énergétique.
M. Julien : Parfait. Et pour
la saumure, l'opinement du bonnet disait que... ça confirmait ce que je vous
disais?
M. Pasquier (Louis-César) : Bien,
oui c'est peut-être... Tout à fait, effectivement. C'est... Il y a un
potentiel, il y a des exemples d'utilisation de saumure comme source de
minéraux critiques et stratégiques. Violaine l'a bien expliqué aussi. On peut
combiner ce type d'exploitation avec des processus de géotherme. Donc, c'est
dans ce principe-là qu'on mentionne une utilisation de la saumure.
M. Julien : Parfait. Merci.
M. Raymond (Jasmin) : Dans un
contexte géothermique aussi, l'idée de réinjecter la saumure sous terre. Tout
ce qui est tombé en surface est retourné sous terre. Et, si on peut, en même
temps, profiter pour extraire des minéraux, des minéraux qui seront utiles, par
exemple, à la fabrication de batteries comme le lithium, bien, pourquoi pas
faire une pierre deux coups, en fait, pour rendre ces technologies encore plus
rentables. Nous, c'est ce qu'on souhaite et c'est sur quoi on aimerait
travailler dans le futur pour aider le Québec, vraiment, à se tourner vers une
transition énergétique efficace.
Une voix : Merci.
Mme Hénault-Ethier (Louise) : D'ailleurs,
si je peux compléter, au niveau des minéraux critiques et stratégiques, il y a
des projets en Europe puis aux États-Unis qui ont démontré qu'on pouvait faire
de la géothermie avec la récupération de lithium, par exemple, dans la saumure,
là, pour les batteries des voitures électriques, disons. Et ça permet donc de
cofinancer les infrastructures pour la géothermie parce qu'on réussit à
rentabiliser en faisant de l'extraction de minéraux critiques. Et en fait ces
infrastructures-là, il faut penser...
Le Président (M. Lemay) : Mme
Hénault-Éthier, son son a coupé, mais elle va sûrement se rejoindre à nous
autres. En attendant, on va passer la parole au député de Lac-Saint-Jean qui va
y aller avec une nouvelle question.
M. Girard (Lac-Saint-Jean) : Alors,
bonjour, tout le monde. Bonjour à vous quatre. Écoutez, c'est intéressant de
vous entendre. Vous êtes quand même un institut de recherche, des spécialistes
beaucoup plus spécialisés que moi dans toute la question de recherche. Puis
moi, je ne sais pas si vous l'avez mentionné ou je ne l'ai pas bien saisi, mais
peut être de façon très simple : Comment voyez-vous, là, la façon de
combiner, exemple, vos projets de recherche et les projets pilotes qui
pourraient être autorisés par le gouvernement? De quelle façon, voyez-vous ça
pour... d'une façon assez simple de les combiner ensemble?
M. Raymond (Jasmin) : Bien,
écoutez, à prime abord, je dirais, les projets pilotes, nous, dans le milieu
universitaire, ce n'est pas notre rôle de vraiment des réaliser, mais c'est
d'accompagner ceux qui voudront bien les réaliser, que ce soit des entreprises
privées ou le gouvernement, pour s'assurer que, dans le cadre de ces projets
pilotes, là, on développe des bases scientifiques solides qui vont démontrer
s'il y a rentabilité ou non des projets pilotes et s'ils peuvent être réalisés
dans un cadre, là, qui répond aux normes environnementales. C'est là que nous,
on a un rôle à jouer et c'est pour ça qu'aujourd'hui on met l'emphase justement
sur ces projets pilotes.
M. Girard (Lac-Saint-Jean) : O.K.,
merci. Et comment voyez-vous, là, les projets pilotes dans des puits qui ont
fait l'objet de fracturation?
M. Raymond (Jasmin) : Bien,
c'est sûr que...
M. Raymond (Jasmin) : ...ce
n'est pas tous les puits pétroliers qui peuvent être réutilisés pour les
projets pilotes, même que dans la plupart des puits qui existent, là,
probablement que c'est une minorité. Mais l'idée, nous, ce qu'on voit, c'est
que, si on peut réutiliser des puits existants, d'accord, ces puits-là ont
coûté très cher à aménager, on parle de l'ordre du million de dollars par
kilomètre de profondeur de forage. Et ne serait-ce que, si on peut en
réutiliser un seul pour démontrer la viabilité, par exemple, d'un système
géothermique, on fait une avancée qui peut-être, dans le futur, pourra nous
permettre de réaménager de nouveaux puits qui n'auraient pas été utilisés
précédemment dans un cadre d'exploitation pétrolière et qui n'auraient pas fait
sujet de fracturation hydraulique.
Mais évidemment, je pense qu'on a été
clairs, ce qu'on propose, c'est d'évaluer si on peut les réutiliser dans un
contexte environnemental sécuritaire. Évidemment, un puits qui aurait pu être,
disons, endommagé, ce qui pose problématique, ce n'est pas tellement la
fracturation, mais c'est souvent le coffrage d'acier... pas le coffrage
d'acier, mais le coffrage autour du puits, le coffrage de béton qui n'est pas
intègre et qui amène les fuites de méthane. Donc, dans un cadre où il y aurait
un puits qui ne serait pas sécuritaire, bien, évidemment, là, qu'on... je ne
pense pas que ça vaut le risque de mener un projet pilote dans un puits qui
n'est pas adéquat, là, ça, c'est hors de question, bien entendu.
• (11 h 50) •
Le Président (M. Lemay) : Je
vais passer la parole au député de Bourget.
M. Campeau : Merci pour votre
présentation, présentation à quatre dans les temps, pratique, sur le sujet.
Merci, ça fait du bien. Ce n'est ça toujours ça qu'on a, hier, en particulier,
ce n'est pas toujours ça qu'on a eu. Question très très terre à terre, ça me
ressemble pas mal, ça, le potentiel de géothermie, je sais que, plus on creuse,
plus c'est chaud, je suis très familier avec ça être, maintenant, ça va prendre
combien de puis pour que ça fasse un effet sur la pointe? Vous avez toujours dû
regarder cet aspect-là. Si c'est juste une phase de développement, il
faudrait-u faire... creuser partout au Québec, pour que ça vaille la peine,
pour affecter la pointe, avez-vous regardé cet aspect-là économique?
M. Raymond (Jasmin) : Bien,
je te laisse répondre en premier, Violaine, et je compléterai s'il y a besoin.
Mme Gascuel (Violaine) : D'accord.
Donc, on ne l'a pas regardé de façon globale pour l'ensemble du Québec, par
contre, ça se voit donc au niveau d'un système, c'est déjà le cas finalement
avec les systèmes de faible profondeur et ce sera également le cas avec les
systèmes plus profonds, on va réduire la demande en pointe. Moi, je pense qu'il
y a assez peu de bâtiments, comme résidentiel ou commercial au Québec, qui se
chauffent encore avec du gaz ou du mazout, il serait à remplacer en priorité,
mais on peut quand même... Et donc je pense que c'est quand même important de
développer autant que possible cette technologie. Selon les endroits, on
pourrait soit faire des systèmes profonds en boucle ouverte, là où les roches
appropriées, par exemple, et où il y a une forte demande et puis faire des
systèmes peut-être moins profonds dans d'autres endroits.
M. Raymond (Jasmin) : Ce que
je dirais, pour compléter, c'est qu'en ce moment les systèmes de pompe à
chaleur et thermique sont utilisés au Québec pour, à la fois les résidences,
les bâtiments institutionnels, commerciaux, ça représente une très petite
fraction de tout ce qui est marché chauffage de la province, c'est peut-être
1%, 2%, je n'ai pas le chiffre exact, mais c'est très faible. Donc évidemment,
la quantité de systèmes installés n'est pas suffisante pour avoir un effet sur
la consommation d'électricité en période de pointe. Si on favorise l'essor de
la technologie, ça pourrait le devenir, on peut se tourner vers d'autres
endroits, on peut prendre la Suède, qui est le leader mondial des pompes à
chaleur géothermique. La ville de Stockholm, qui a fait le marché
résidentiel...
Le Président (M. Lemay) : Merci,
M. Raymond. M. Raymond, je dois vous interrompre, parce que le temps de la
formation politique du gouvernement est écoulé. Je passe maintenant la parole
au député de Mont-Royal-Outrement, porte-parole de l'opposition officielle.
M. Arcand : Merci infiniment,
monsieur le Président. Alors, bienvenue parmi nous. Je vais essayer de faire en
sorte qu'on puisse se parler dans un langage que les gens vont comprendre parce
qu'on est vraiment dans un niveau assez technique ce matin. Merci pour votre
présentation qui est une présentation importante. On va, tout de suite, essayer
de régler une première à faire, ce que vous êtes finalement, c'est que le
projet pilote, les projets pilotes...
M. Arcand : ...doivent
être contrôlés, qu'il y ait vraiment des règlements, mais vous voulez qu'il y
ait quand même, en bout de ligne dans le projet de loi, plus de flexibilité sur
les projets pilotes. Est-ce que c'est ce que j'ai compris parce que vous
dites : Écoutez, il est impératif qu'on se donne un cadre pour que la
recherche aille de l'avant le plus rapidement possible? Parce que, dans le
cadre de la lutte aux changements climatiques, on lutte un peu contre la montre
actuellement. Alors, est ce que j'ai bien saisi ce que vous avez dit à ce
niveau-là?
Mme Hénault-Ethier
(Louise) : Bien, oui, tout à fait. Les projets pilotes sont vraiment
essentiels dans toute forme de recherche. En fait, notre société doit investir
tant dans le développement de nouvelles technologies, mais pour y arriver, il
faut des essais, de la recherche, et en fait les projets pilotes sont la seule
façon de faire des essais de mise à l'échelle. Donc, si on développe une
technologie de façon théorique en laboratoire, mais qu'on n'a pas le terrain
pour les tester, bien, cette technologie-là ne maturera jamais. Donc, les
projets pilotes, là, sont tout à fait essentiels, eh oui, effectivement, il y a
certains ajustements, dans le cadre du projet de loi, qui pourraient faire en
sorte que les projets pilotes soient plus favorisés, mais qu'ils soient aussi
mieux encadrés, juste simplement de clarifier les niveaux d'encadrement qu'il y
a. Mais aussi c'est au niveau de la facilité. C'est super important. Quand on
essaie de faire des projets pilotes, il va y avoir toutes sortes de formes
d'embûches. Les délais sont parfois longs, donc le délai, surtout si on veut
avoir du cofinancement du privé, par exemple, pour les développements des
projets pilotes, si les délais d'autorisation prennent, tu sais, des mois,
voire des années, à être obtenus, on risque de perdre des opportunités de
financement. Donc, ça, c'est un des enjeux, là, si on veut vraiment faciliter
la science pour faire des FastTrack de façon tout à fait encadrée, dans le
respect de la Loi sur la qualité de l'environnement, mais donc se donner cette
latitude-là au sein de projet de loi
M. Raymond (Jasmin) : De
façon très pragmatique, là, je rajouterais que nous, ce qu'on a peur, c'est que
suite à l'adoption du projet de loi, c'est qu'il n'y a pas de projet pilote.
Donc ce qu'on dit, et le message qu'on veut passer, c'est qu'il faut mettre les
conditions gagnantes pour qu'il se passe quelque chose suite à l'adoption du
projet de loi et qu'il y en ait, des projets pilotes. C'est ça.
M. Arcand : Donc, vous trouvez
que...
Mme Hénault-Ethier
(Louise) : Un des éléments...
M. Arcand : Oui. Tel que
c'est présenté actuellement., c'est trop rigide, là. C'est ça?
M. Raymond (Jasmin) : J'aurais
tendance à dire que ce n'est peut être pas assez bien défini. En fait, il n'y a
pas de règles claires entourant la mise en place des projets pilotes. On
comprend que, dans le projet de loi actuel, ça peut peut-être être difficile de
bien le définir parce que ce n'est peut-être pas l'objet du projet de loi.
Mais, suite à l'adoption du projet de loi, ça va prendre un cadre réglementaire
clair si on veut avoir des projets pilotes.
Mme Hénault-Ethier
(Louise) : Et un élément complémentaire aussi, c'est au niveau de
l'accessibilité des données. C'est beau faire des projets pilotes, c'est beau
faire des projets de recherche subventionnés par l'État dans différents
endroits, sur des terres du domaine public parfois. Mais les données qui sont
compilées doivent être accessibles. Ça pourrait être l'occasion, dans le cadre
de ces projets pilotes là, d'aller mieux comprendre ce qui se passe sous terre,
donc la géologie qui est déjà présente autour des puits existants. Et ces
données-là devraient être dans un repositoire accessible sur Internet
facilement. Il y a déjà des repositoires qui existent sur les systèmes
géologiques, sur les systèmes d'information hydrogéologique au Québec. Ils
méritent d'être modernisés. On mérite de détourner l'angle qui est plutôt
gazier, pétrolier actuellement de cases de données, là pour les rendre
accessibles. Les bases de données publiquement accessibles, ça permet aux
entreprises aussi de développer leurs modèles, leurs plans d'affaires et de
savoir s'ils vont faire des investissements, de calculer le niveau de risque
pour des investissements dans des technologies durables.
M. Arcand : O. K.
J'aimerais vous poser une question parce qu'on veut tous, évidemment, trouver
la meilleure façon de réduire les GES, là, tout le monde. Et très évidemment il
y a vraiment une urgence. J'écoutais hier l'Association pétrolière et gazière,
on parlait des nouvelles façons de faire. Bon. Les biocarburants, c'est
difficile parce que coûteux, c'est compliqué. On parlait du solaire, les gens
là-bas n'avaient pas l'aire à voir grand potentiel d'avenir du solaire. Vous
avez dit : Écoutez, l'hydrogène peut être une voie qui est plus
pratico-pratique, etc. Je voulais juste voir si, demain matin, là, vous étiez
la personne en charge de réduire les GES au Québec, vous feriez quoi. Qu'est-ce
que vous essaieriez de développer? Quel est le secteur que vous seriez en train
de prioriser actuellement?
M. Raymond (Jasmin) : Bien,
personnellement...
Mme Hénault-Ethier
(Louise) : Peut-être...
M. Raymond (Jasmin) : Bien,
vas-y, Louise.
Mme Hénault-Ethier
(Louise) : Bien, j'allais dire...
M. Arcand : ...c'est une
longe question, mais vous comprenez ce que je veux dire.
Mme Hénault-Ethier
(Louise) : Je crois que Jasmin et possiblement Louis-César vont
vouloir rebondir là-dessus, mais personnellement je ne mettrais pas tous mes
oeufs dans le même panier. C'est un des enjeux qu'on a eu depuis la révolution
industrielle de n'avoir misé que sur les hydrocarbures. Et une façon de
diminuer les risques associés à ces technologies-là, parce qu'il y a toujours
des risques qui peuvent y être associés, c'est de continuer des investissements
dans le développement de multiples technologies. Donc, on ne peut pas tout
mettre nos oeufs dans le même panier.
Un des enjeux qu'on voit en ce moment, tu
sais, il y a des technologies, par exemple, de séquestration du CO2 dans
lesquelles on essaie de faciliter, si on veut, l'extraction pétrolière, là,
puis de se distancer, là, de l'arrêt de l'exploitation des hydrocarbures en
disant : On va séquestrer le CO2. Ça, c'est dangereux. Ça, c'est : on
garde encore les oeufs dans le même panier. Ce qu'on doit faire à l'heure
actuelle, c'est investir tant du côté des énergies renouvelables, que ce soit
l'éolien, le solaire, l'hydrogène, mais aussi des procédés biologiques, la
biométhanisation. C'est en ayant un portefeuille de solutions qu'on va être
capable d'être plus résilient. Si on parle d'adaptation au changement
climatique ou de résilience au sein d'un écosystème, ça, ça passe par la
diversité qu'on a d'organismes dans ce système-là. En termes de grille
énergétique, c'est la diversité des sources d'énergie qui vont faire en sorte
qu'on va diminuer le risque.
• (12 heures) •
Et non seulement ça, c'est aussi d'avoir
un approvisionnement énergétique local. Vous voyez ce qui se passe, en ce
moment, avec la Russie. C'est un grand fournisseur gazier pour l'Europe, ça
entraîne des risques géopolitiques. Donc, si, au Québec, on était capable de
continuer notre élan vers un approvisionnement énergétique local en se
débarrassant de notre dépendance aux énergies fossiles qui viennent de
l'extérieur, évidemment, l'hydroélectricité, on l'a vu, ne peut pas solutionner
tout, maintenant il faut se tourner vers une diversification du portefeuille,
et c'est là qu'entre en jeu de soutenir, vraiment, la recherche dans tous les
domaines et de ne pas fermer la porte en nommant spécifiquement des
technologies dans lesquelles on s'enclave sans faciliter les autres. Donc, je
vais laisser Jasmin prendre la balle au bond là-dessus.
M. Raymond (Jasmin) : Oui,
bien, moi, en fait, tout ce que je voulais dire, c'est qu'effectivement il n'y
a pas une solution, mais des solutions. Et si j'avais la chance de décider,
bien, j'investirais en ce moment dans les solutions qui visent les réservoirs
souterrains comme l'énergie géothermique profonde, la séquestration du CO2, le
stockage souterrain d'hydrogène puisqu'en ce moment ce sont les solutions qui
ne sont pas exploitées au Québec et qui sont en retard par rapport aux autres
domaines. Donc, on doit rattraper ce retard-là si on veut bien mettre à profit
nos réservoirs souterrains qui pourraient jouer un rôle dans la transition
énergétique.
M. Arcand : Et ces trois
solutions-là que vous mentionnez, est-ce qu'il y a des endroits à l'extérieur
du Québec où ils sont plus avancés que nous, où, vraiment, ce que vous prônez
semble donner des résultats intéressants ou si c'est un cheminement qui risque
d'être assez long?
M. Raymond (Jasmin) : Bien,
moi, je suis ici... bon, parler de stockage souterrain d'hydrogène, et il y en
a à ce moment, là. J'expliquais dans les dômes de sel, les cavités salines,
c'est quelque chose qui se fait, par exemple en Angleterre. Et, pour ce qui est
de la géothermique, de la séquestration du CO2, je vais laisser Violaine,
ensuite Louis-César répondre.
Mme Gascuel (Violaine) : Alors,
pour la géothermie, donc, c'est réalisé à un certain nombre d'endroits dans le
monde, notamment dans le bassin de Paris, où il y a plus d'une dizaine de
systèmes qui fonctionnent depuis les années 80. Donc, c'est quelque chose
de bien connu et bien maîtrisé dans ce cadre-là. Bien sûr, il faut bien
connaître les formations profondes, donc ça commencerait par l'exploration pour
pouvoir faire la même chose au Québec. Donc, je laisserais la parole à
Louis-César.
M. Pasquier (Louis-César) : Pour
ce qui est du CO2, effectivement, il y a de nombreux projets de séquestration
du CO2 dans divers domaines qui se retrouvent un peu partout dans le monde. On
en trouve en Alberta, entre autres. Ce qu'il faut garder en tête, c'est que,
oui, il y a un potentiel qui avait été identifié au Québec, mais justement, ce
que Violaine mentionnait, la caractérisation du réservoir est vraiment
essentielle et importante. Événement débutant, donc, il faut effectivement se
remettre à la tâche rapidement si on veut rattraper le retard.
Mme Hénault-Ethier
(Louise) : Puis, pour le stockage du CO2, il faut découpler le plus
possible de l'industrie de l'extraction de l'exploitation des hydrocarbures,
comme M. Pasquier l'a précisé dans son exposé. C'est simplement pour les
grandes industries qui ont une intensité énergétique difficile à combler
autrement ou encore pour pallier à des émissions qui proviennent de sources
fixes, donc d'une cheminée, par exemple, sur les usines de biométhanisation ou
quand on brûle les biogaz qui sort de nos sites d'enfouissement plutôt que de
larguer le CO2 dans l'atmosphère, on devrait...
12 h (version non révisée)
Mme Hénault-Ethier
(Louise) : ...Le capturer, le séquestrer, l'injecter sous terre. Et il
y a aussi une notion de dispersion à l'échelle du paysage, notamment, en
région. On voudrait bien faire la transition de nos terres agricoles, qui
dépendent largement des hydrocarbures actuellement, vers l'électricité. Mais ce
n'est pas toutes les régions qui ont l'électricité triphasée en ce moment au
Québec. La géothermie pourrait être un complément de chaleur vraiment essentiel
qui est dispersé sur le territoire.
M. Arcand : D'accord. Je
pense que je n'ai plus de temps, alors merci d'avoir répondu.
Le Président (M. Lemay) : Très
bien. Merci, le député de Mont-Royal-Outremont. Maintenant, je cède la parole
au deuxième groupe d'opposition, madame la députée de
Sainte-Marie-Saint-Jacques.
Mme Massé : Oui.
Bonjour, tout le monde. Merci de votre présentation. En deux minutes, il y a
peu de choses qu'on peut faire. Je vais poser mes trois questions puis vous
ferez votre possible après ça.
On s'entend, là, d'entrée de jeu, que
l'objectif premier, c'est de diminuer l'utilisation de ce qui cause... Oui,
vous me faites... O.K., on se comprend. C'est parce que je ne l'ai pas beaucoup
entendu dans votre discours et pour moi, c'est fondamental qu'on réaffirme que
la première chose à faire, c'est la sobriété énergétique et non pas d'inventer toutes
sortes de bébelles pour capter nos affaires. On s'entend là-dessus, bien.
Alors, vous avez parlé de conditions
gagnantes, pour les projets pilotes. Parce qu'il y en a d'autres qui nous ont
parlé de projets pilotes hier puis je ne suis pas sûre qu'ils avaient les mêmes
objectifs que vous. Quelles sont ces conditions gagnantes là, succinctement?
Et mon autre question, si vous avez un peu
de temps, c'est... Séquestrer le carbone, O.K. Mais comment on s'assure
qu'effectivement, ce qui est dans le sol, à cause de la fragilité des sols, à
cause des glissements de terrain, à cause des tremblements de terre, «name it»,
des tsunamis, «I don't know», comment on peut s'assurer que ça repartira pas en
haut, ça?
Mme Hénault-Ethier
(Louise) : Bien, peut être, au niveau de ce qu'il y a dans la Terre,
là, quand on parle de séquestration, c'est à des kilomètres de profondeur au
fond de la terre, là. Donc, ce n'est pas simple de relarguer, là, ça ne
ressortira pas tout d'un coup, si on fait de la séquestration profonde,
c'est...
Le Président (M. Lemay) : Très
bien. Vous pouvez continuer.
M. Pasquier (Louis-César) : Bon,
bien, je vais prendre la balle au bond. Mais c'est, effectivement, comme Louise
le mentionnait, on est vraiment dans une séquestration profonde. Il faut aussi
savoir que le CO2, lorsqu'il est injecté et s'il est en présence d'une saumure,
va se dissoudre dans la saumure et va par la suite se minéraliser. Je prendrais
un exemple. En Islande, il y a eu un projet de... Ah! je pense qu'on s'est fait
tous couper.. c'est Louise qui...
Le Président (M. Lemay) : Non,
non, on vous entend. Allez-y, continuez.
M. Pasquier (Louis-César) : O.K.
Parfait. Ça fait que, oui, en Islande, après deux années et demie, en fait, le
CO2 a été complètement minéralisé. Donc, c'est des conditions spécifiques
particulières, mais c'est important de le mentionner.
Effectivement, la question du devenir du
CO2 est aussi... fait l'objet de nombreuses études depuis des années. Et, entre
autres, des outils de suivi postinjection ont été développés et sont très
nombreux.
Puis, dernier élément, si jamais fuite il
y avait, il faut comprendre que ce ne sera pas un relargage en une fraction de
seconde de tout ce qui aurait pu être injecté, mais une fuite lente. Donc, on
peut la détecter avec des moyens et ensuite, bien, on peut effectivement
trouver des solutions pour... la régler.
M. Raymond (Jasmin) : Oui.
Les puits profonds sont munis de valves de sécurité, là. Ça fait que s'il arrivait
par exemple, je ne sais pas, une attaque terroriste sur une tête de puits en
surface, bien, la valve serait automatiquement fermée. Donc, on n'aurait pas de
fuite massive en surface, même que ça serait plus sécuritaire, je crois, de
stocker, par exemple pour le cas d'hydrogène, des grands volumes d'hydrogène
sous terre que dans des réservoirs en surface. Donc, au niveau de la sécurité,
je crois qu'on... il y a des possibilités de le faire de façon à minimiser les
risques.
Pour ce qui est de ce qu'on a besoin dans
le projet de loi, je reviens là-dessus, c'est le cadre réglementaire. Quelles
sont les normes environnementales à respecter pour...
Le Président (M. Lemay) : M. Raymond,
je dois encore vous interrompre puisqu'on doit maintenant céder la parole au
député de Jonquière pour environ 2 min 45 s
M. Gaudreault : Oui. Alors,
bonjour, merci beaucoup d'être ici. Vous êtes la démonstration qu'on a
tellement tout ce qu'il faut en termes de savoir-faire et de connaissances au
Québec pour être des leaders mondiaux en énergies renouvelables, en transition
énergétique, en transition écologique et c'est ça qu'il faut mettre en avant.
Moi, il y a quelque chose que je constate,
dans la lutte contre les changements climatiques. C'est que plusieurs s'en
remettent beaucoup à ce que j'appelle le fantasme technologique, en pensant qu'on
va trouver la machine, là, le bouton à quatre trous, on va réinventer la tache
de pain qui va tout régler puis que ça va être la meilleure invention au monde.
Alors, il faut vraiment qu'on soit prudent puis qu'on trouve les bonnes
technologies.
Et hier, on en a entendu de toutes sortes,
là, hier soir. Oui ou non, le gaz naturel de source conventionnelle venant
entre autres du gaz de schiste sans émission, est-ce que ça existe?
M. Pasquier (Louis-César) : Si...
M. Pasquier (Louis-César) : ...je
vais me permettre de commencer une réponse, il y a quelques années, j'ai été le
premier surpris d'apprendre qu'en France, dans les années 1995, le groupe Total
a réalisé la capture du CO2 d'une de ses usines, en fait, de production de gaz
naturel et a injecté le CO2 dans les Pyrénées. Ça n'avait absolument pas été
connu, diffusé. Bref, ça a été fait. On parle de 1995. Ce qui était proposé
hier, bien, on le retrouve ailleurs dans le monde. Il y a des projets qui
visent l'exploitation de gaz naturel avec du stockage de carbone. Par contre,
si la question est par rapport à la faisabilité au Québec, on n'a pas la
réponse, nécessairement. Donc, ça se fait dans le monde, c'est la réponse à la
question.
M. Gaudreault : Mais est-ce
que ça se fait à grande échelle? Et quel est le prix?
M. Pasquier (Louis-César) : Bien,
c'est une excellente question. Effectivement, il y a un projet, actuellement,
au Brésil, qui est en cours, on parle de quelques millions de tonnes par année
de CO2 qui vont être injectées dans un réservoir. À quel coût, à quel prix,
c'est une excellente question. Je pense que le tout est vraiment dépendant du
contexte dans lequel il est fait, et on ne peut pas vraiment mettre un chiffre
clé sur le...
• (12 h 10) •
M. Raymond (Jasmin) : Je n'ai
pas de prix fixe à amener, mais dans le cas de certaines solutions, comme
l'énergie géothermique, par exemple, bien, nous, on a évalué que convertir un
ancien puits pétrolier en échangeur de chaleur géothermique à boucle fermée
pour chauffer des bâtiments pourrait être plus compétitif que chauffer avec
l'hydroélectricité, mais moins compétitif que chauffer avec du gaz naturel.
Donc, on est dans une fourchette de prix qui peut être réaliste.
Mais on ne se cachera pas... tu sais, on
ne se contera pas de menterie, ce genre de projet là qu'on décrit, c'est des
projets qui demandent des coûts d'investissements importants. Si on regarde le
cycle de vie des systèmes, les prix sont compétitifs. Mais on a besoin
d'investissements et d'appuis financiers des gouvernements pour démarrer ce
type de technologie.
Le Président (M. Lemay) : Merci
beaucoup, M. Raymond, Mme Hénault-Ethier, Mme Gascuel et M. Pasquier, pour
votre présentation. Je vous remercie pour la contribution aux travaux de la
Commission et je dois maintenant suspendre les travaux jusqu'à 15 heures.
(Suspension de la séance à 12 h 12)
14 h 30 (version non révisée)
(Reprise à 15 h 2)
Le Président (M. Lemay) : Alors
à l'ordre, s'il vous plaît! La Commission de l'agriculture, des pêcheries, de
l'énergie et des ressources naturelles reprend ses travaux et je demande à
toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de
leurs appareils électroniques. Nous allons poursuivre les consultations
particulières et les auditions publiques sur le projet de loi numéro 21,
la loi visant principalement à mettre fin à la recherche et à la production d'hydrocarbures,
ainsi qu'au financement public de ces activités. Et cet après-midi, nous
entendrons les témoins suivants : la professeure Annie Chaloux, Équiterre,
conjointement avec la Fondation David Suzuki, Eau Secours ainsi que Mères au
front. Mais tout d'abord, je souhaite la bienvenue à Mme Annie Chaloux,
professeure à l'Université de Sherbrooke. Bienvenue avec nous à cette
commission. Je vous rappelle que vous aurez dix minutes pour faire votre exposé
et par la suite, il y aura une période d'échanges avec les membres de la
commission. Alors, vous pouvez débuter avec votre exposé. Bienvenue.
Mme Chaloux (Annie) : Merci
beaucoup. Donc, bien, merci à vous tous, au nom de la Commission de me permette
d'intervenir aujourd'hui à titre de chercheure et de codirectrice du Groupe
d'études et de recherche sur l'international et le Québec. J'interviens
aujourd'hui à titre personnel en tant que... des politiques climatiques
québécoises et des négociations climatiques internationales. Mon intervention
va porter principalement sur deux aspects. Le premier, bien sûr, les aspects
politiques climatiques qui sont associés à ce projet de loi et je vais vous
faire part ensuite de mes principales recommandations et avis concernant le
projet de loi en l'état dans un contexte d'urgence climatique à l'échelle
mondiale. Mais avant toute chose, je tiens à vous remercier d'avoir offert,
donc, cette opportunité d'intervenir aujourd'hui.
D'abord, il est important de rappeler que
ce projet de loi là s'inscrit dans une série d'actions et stratégies qui visent
à réduire les émissions de gaz à effet de serre à l'échelle mondiale et à
répondre à l'objectif de l'accord de Paris qui a été adopté en 2015. Et cet
objectif, c'est de contenir l'élévation des températures nettement sous la barre
des 2 degrés et idéalement, des 1.5 degré Celsius. Pour nous au
Québec, cet engagement-là de mettre fin à l'exploration et à l'exploitation des
hydrocarbures est donc aussi très important. D'abord, le Québec s'est déclaré
lié à l'accord de Paris et s'est engagé à mettre en oeuvre cet accord dans ses
champs de compétence, mais aussi, il faut se rappeler que le Québec a une
longue histoire de participation à l'édification du régime climatique
international qu'on connaît aujourd'hui. Le Québec fait partie des États
fédérés les plus actifs internationalement. Il a mis en place une série
d'engagements climatiques internationaux de grande envergure, que ce soit le
marché du carbone avec la Californie...
15 h (version non révisée)
Mme Chaloux (Annie) : ...son
plan d'action régional avec les partenaires de la Nouvelle-Angleterre et de l'est
du Canada, son programme de coopération climatique internationale, et ce plus
récent engagement, qui est fait via le Beyond Oil and Gas Alliance, dans lequel
s'inscrit ce projet de loi.
Bref, ça fait longtemps qu'au Québec, on
cherche à faire notre part et à lutter contre les changements climatiques, à la
fois sur le territoire du Québec, mais aussi internationalement, parce qu'on a
une responsabilité, bien sûr, historique à cet égard là. Le Québec et le Canada
sont parmi les grands émetteurs de gaz à effet de serre à l'échelle mondiale,
et dans ce contexte, on doit faire notre juste part pour contribuer fortement à
réduire notre empreinte carbone. Et aussi, il faut rappeler que l'Accord de
Paris réitère l'importance à ce que tous les paliers de gouvernement, que ce
soient les villes, les États fédérés ou les gouvernements nationaux, doivent
contribuer à leur hauteur à la lutte contre les changements climatiques.
Je me permets aussi de vous rappeler le
fait que ce projet de loi là s'inscrit dans une réalité scientifique qui est
maintenant sans équivoque: l'activité humaine est responsable des changements
climatiques, et, bien sûr, la production et la consommation des hydrocarbures
en est la principale responsable. À ce sujet, on se rappellera sans doute qu'en
août dernier, le GIEC publiait son rapport et qu'on voyait que la trajectoire
du 1,5 °C est encore possible, mais pour cela, il faut faire des virages
majeurs et urgents. Il faut se rappeler aussi que l'Agence internationale de
l'énergie a été très, très claire dans son rapport paru en mai 2021, et elle
dit clairement que dans un scénario où on souhaite limiter la hausse des
températures à 1,5 degré, tous les gouvernements devraient cesser
d'approuver l'ouverture de nouvelles mines de charbon ou de nouveaux champs
pétroliers et gaziers, et planifier une réduction rapide mais ordonnée des
activités existantes. Donc, du côté de l'Agence internationale de l'énergie, le
message est aussi très clair.
Et finalement, dans le prochain Production
Gap Report, donc un rapport produit par le programme des Nations unies pour
l'environnement, on voit qu'il y a aussi un très grand écart entre la
trajectoire de 1,5 degré, qui est actuellement souhaitée, et ce que les
gouvernements ont promis de faire. Donc, on doit accélérer la transformation et
mettre fin à la production de nouveaux hydrocarbures maintenant, et ensuite
infléchir drastiquement la tendance.
Bref, si on veut vraiment jouer sur ces
grandes tendances-là, on doit transformer notre manière de gérer nos ressources
naturelles et éliminer les comportements qui permettent de produire et de
consommer davantage d'hydrocarbures. C'est donc dans ce contexte-là qu'est née
cette alliance qu'on appelle BOGA, donc Beyond Oil and Gas Alliance, auquel le
Québec s'était déclaré lié lors de la dernière COP à Glasgow. Cette
initiative-là avait été initiée par le Costa Rica et le Danemark, et depuis,
quelques juridictions, dont le Québec, s'y sont liées, et chaque juridiction
s'engage donc à adopter des mesures concrètes pour restreindre la production de
pétrole et de gaz sur leur territoire.
Il faut donc... Ici, je me permets, là, de
saluer le dépôt de ce projet de loi dans ce contexte-ci, parce que c'est un pas
vraiment dans la bonne direction, dans la lutte contre les changements
climatiques, mais aussi parce que ça va constituer réellement un modèle pour
les autres juridictions dans le monde qui voudront en faire de même, d'où
l'importance d'avoir un très bon projet de loi qui soit à la hauteur de nos
attentes et de nos capacités. À la lumière, donc, de ce que je vous mentionne,
je me permets, donc, de vous donner quelques avis et recommandations à la
commission.
D'abord, il y a plusieurs éléments qui ont
pu être véhiculés sur la question de la réputation du Canada sur la scène
internationale. D'abord, si on regarde sur le plan commercial et des
investissements, donc, mon collègue de l'Université Laval, hier, vous en a sans
doute parlé, mais tel que rédigé, ce projet-là, ce projet de loi là ne pose pas
de risque grave ou majeur pour les investisseurs. Il faut se rappeler que, sur
le plan de notre réputation sur la scène internationale, sur le plan
commercial, eh bien, la prospection des hydrocarbures subit des pressions
depuis très, très longtemps dans le monde. Les rapports scientifiques sont
clairs sur le fait qu'il faut arrêter tout nouveau projet si on veut réduire
nos émissions. Il faut se rappeler aussi qu'au Québec, mais comme partout
ailleurs, l'acceptabilité sociale n'est plus au rendez-vous, et cela depuis fort
longtemps. Et donc, ce secteur d'activité là est bien au fait des risques que
suscitaient des investissements dans tout les volets d'exploration et
d'exploitation des hydrocarbures.
Si on regarde maintenant le volet
réputationnel, mais dans une perspective de lutte contre les changements
climatiques sur la scène internationale, il faut voir que ce projet-là est
ambitieux et fort intéressant, parce qu'il nous montre que le Québec peut
toujours être à l'avant-scène. Et il faut savoir qu'un projet de loi comme
celui-là va bien sûr être scruté par plusieurs juridictions ensuite, donc c'est
important d'avoir un projet de loi qui soit robuste en ce sens là. Et il s'agit
donc d'un aspect très positif sur le plan réputationnel. Il va positionner le
Québec dans une bonne position dans les prochaines négociations, dans les
prochaines années évidemment. Je me permets aussi de parler... prendre quelques
instants pour parler du programme...
Mme Chaloux (Annie) : ...en ce
qui concerne le programme tel qu'il est présenté à l'heure actuelle, c'est un
programme d'indemnisation qui s'astreint surtout à fournir des indemnisations
sur les dépenses fournies et non pas sur les revenus potentiels. Et ça, c'est
une chose qui est perçue de manière très positive parce que sinon, ça aurait pu
entraîner une perception de subvention déguisée à un secteur qui est
problématique dans la lutte contre les changements climatiques, et où le Canada
et le Québec se sont déjà engagés à mettre fin aux subventions à cette
industrie-là.
Aussi, je tiens à réitérer le fait que les
indemnisations prévues doivent être le plus faibles possible. Elles doivent
certes minimalement répondre au remboursement des dépenses, tel que prévu, mais
il faut qu'on s'assure aussi de ne pas laisser une marge de manoeuvre possible
pour que les entreprises cherchent à aller chercher beaucoup plus que ça et que
ça devienne donc des subventions déguisées. D'ailleurs, le montant de
100 millions qui est prévu ici dans ce projet de loi là devrait donc être
un plafond et même à être potentiellement le plus bas possible. Et là, je me
permets ici de m'inscrire dans... aussi notre responsabilité sur la scène
internationale parce que ce projet de loi là, ce texte législatif là, va servir
de modèle par la suite à d'autres juridictions. Donc, je pense qu'on a là aussi
une responsabilité supplémentaire à cet égard.
• (15 h 10) •
En ce qui concerne un troisième point, ça
concerne la période qui est couverte par le programme d'indemnisation,
c'est-à-dire qu'actuellement donc, le programme couvre six ans, donc du
19 octobre 2015 au 19 octobre 2021. Je pense qu'il faut éviter
d'étirer davantage, donc, ces périodes-là, parce qu'il faut... au-delà des
volets prescriptifs de certains éléments fiscaux, il faut comprendre que les
industries étaient conscientes dans quoi elles investissaient, c'est-à-dire que
d'abord, on sait depuis 2015, bon, il y a l'adoption de l'accord de Paris. Le
Québec s'est déclaré lié à l'accord de Paris. Il y a eu des rapports
scientifiques, dont le rapport du GIEC de 2018 et celui de 2021 qui réitèrent
l'urgence d'agir. Ces rapports qui nous montrent également qu'on assiste à une
accélération des températures mondiales. Et donc les entreprises et des
investisseurs qui font le choix d'investir dans ces secteurs-là depuis
longtemps savent qu'ils le font en toute connaissance de cause et le savent
qu'ils le font dans un contexte où il y a urgence de lutter contre les
changements climatiques, et donc le risque était connu de la part des
investisseurs.
Dernier élément, et qui est selon moi un
élément qui est très, très important, ça concerne le préambule. J'ai entendu,
donc, notamment le professeur Ouellet parler de ce volet-là, et je tiens à
appuyer en ce sens là, c'est-à-dire que le projet... le préambule du projet de
loi devrait être beaucoup plus étoffé que ce qu'il est en ce moment et devrait
mettre l'accent, selon moi, sur trois volets. Premier volet, c'est le volet de
la lutte contre les changements climatiques, donc la lutte contre les
changements climatiques devrait être au cœur du préambule, faire partie des
valeurs intrinsèques à celui-ci et devrait aussi mettre l'accent sur
l'importance d'être proactif dans ce contexte-là. Le préambule devrait aussi
rappeler les grands engagements du Québec envers l'accord de Paris et sa
responsabilité dans la lutte contre les changements climatiques. Et finalement,
un autre volet dont le préambule devrait tenir compte, c'est l'accent...
l'importance de mettre l'accent sur la science comme guide et explication à ce
projet de loi, dans le sens où la science nous dicte qu'on doit agir beaucoup
plus drastiquement dans la lutte aux changements climatiques. Et c'est ce qui
guide, donc, l'établissement d'un tel projet de loi. Donc, en somme, je
considère qu'il s'agit ici vraiment d'un très bon projet de loi qui est très
important pour le Québec. Et je vais être très heureuse de répondre à toutes
vos questions dans les prochaines minutes. Merci.
Le Président (M. Lemay) : Merci,
Mme Chaloux, pour votre exposé. Et maintenant nous allons céder la parole au
ministre pour la période d'échange d'environ 16 minutes 30.
M. Julien : Oui. Merci
infiniment. Merci infiniment, Mme Chaloux, pour vos commentaires. J'ai pris
plusieurs notes. Je vais parcourir certains des éléments, soit par des
questionnements ou des affirmations que vous pourrez corriger si je me trompe.
Donc, pour le préambule, vous êtes la deuxième à parler du préambule,
honnêtement, moi, je ne déteste pas ça, mais je suis plutôt humble dans nos
réalisations. Mais puisque ce sera certainement une réalisation commune de tous
les collègues, je pense qu'on gagnerait dans le préambule, ce n'est pas faire
preuve d'audace ou de vantardise, mais de venir mentionner clairement ce
positionnement de manière fière pour le Québec, naturellement, si on y adhère
tous ensemble. Je pense que c'est une idée qui va faire son chemin, et on aura
l'occasion d'en discuter entre collègues, là, pour que la forme soit à la bonne
place.
Rapidement, quelques éléments pour...
discuter avec vous. Vous nous dites, Mme Chaloux, puis j'ai entendu ça aussi,
puis je vais encore entendre ça dans d'autres groupes, je pense, qui vont
suivre. Écouter, l'industrie le savait depuis longtemps, que c'était en... out,
il n'y a plus d'acceptabilité. Ils sont conscients de ces risques-là, puis,
bon. Mais, en même temps, là, peut être que moi, ça fait un an, là, un peu plus
d'un an qu'on...
M. Julien : ...à mon
ministère sur ce projet de loi là. Alors, je vais prendre une partie du blâme,
puis je blâmerai mes prédécesseurs, mais en même temps que vous dites ça qu'ils
en sont conscients, nous, on n'a pas agi pour faire en sorte, en fin de compte,
de ne pas le permettre, de ne pas fournir les licences, de ne pas fournir une
réglementation, une loi, donc, pour moi, là, il y a une espèce de... je vais
faire attention, une responsabilité partagée, là, parce que toute cette prise
de conscience là que vous mentionnez, si on était si conscients que ça au
gouvernement, on aurait dû agir bien avant. Puis quand je parle de bien avant,
c'est si vous dites que depuis 6 ans, c'est clair pour tout le monde, mais
ça aurait dû être agi en conséquence. Donc, on a comme pour moi, une part de
responsabilité puis les signaux ou le signal qu'on a transmis n'étaient pas à
cet effet-là puisque si tout le monde en était aussi conscient, les actions
gouvernementales n'ont pas nécessairement suivi. J'aimerais ça vous entendre
là-dessus.
Mme Chaloux (Annie) : Merci
monsieur le ministre pour cette question. En fait, vous avez tout à fait raison
de dire qu'on a une part de responsabilité comme État québécois quand on
modifie des lois, comme on a fait la modification lorsque l'on a adopté la Loi
sur les hydrocarbures en 2018 et c'est dans ce contexte-là que les
indemnisations qui sont prévues à l'heure actuelle répondent en partie à cette
reconnaissance-là qui a été faite dans le passé par le secteur industriel. Ceci
étant dit, quand on dit qu'effectivement, bon, le manque d'acceptabilité
sociale, il est relativement connu, bon, depuis longtemps. Mais reste que
l'industrie, je pense que pendant très longtemps, elle a aussi joué à
l'aveugle, et c'est à cet égard là, je pense, qu'il ne faut pas non plus
surestimer la part d'indemnisation qui serait faite. Et là, avec ce qui est
présenté actuellement sur le 100 millions, je pense que ça répond à cette
idée de reconnaissance à la fois d'une part de responsabilité, mais aussi à une
reconnaissance que cette industrie là a fait aussi des choix et que ces choix
là, donc, seront, finalement, indemnisés à la hauteur de ce qui est réel et non
pas des anticipations de revenus possible, alors que le monde... en fait, la
situation en termes de changements climatiques ont beaucoup changé depuis cette
période-là. Donc, je pense qu'il y a quand même un équilibre, vous avez abordé
cette notion-là d'équilibre, et je pense qu'avec le projet, avec les
indemnisations actuelles, on est dans cette notion-là d'équilibre que vous
évoquez.
M. Julien : Parfait.
J'aime également beaucoup entendre votre préoccupation puis je pense que c'est
celle qui nous a guidés dans la rédaction du projet de loi, bataille peut-être
qui gagnera à être bonifiée le cas échéant, là, je ne saurais prétendre du
contraire, mais il ne faut pas non plus qu'il y ait des... tu sais, ce que je
souhaite, puis ce que mon ministère souhaitait quand on discutait du projet de
loi puis ce que je souhaite discuter avec mes collègues aussi, c'est on veut
quelque chose d'assez, malheureusement pour certains, mais pas pour nous,
d'assez encadré, c'est-à-dire que ça n'apporte pas nécessairement un arbitrage
complexe, c'est-à-dire que le plan d'indemnisation, là, doit être assez
binaire, sur présentation de pièces justificatives, et après ça, pas trop
interprétatif. Bon, je sais qu'il y a un petit article, on discutera, là, au
moment venu, à l'article par article, qui mentionne des sommes qui pourraient
être... je ne me souviens plus du terme exact, là, mais je pense que c'est
assez bien encadré.
C'est sûr que le projet de loi, dans sa
forme actuelle, ne comprend pas le programme d'indemnisation. Quand on parle de
100 millions, c'est à cause qu'on a un estimé, c'est... tu sais, c'est
assez clair, là, on a déjà des pièces justificatives qui nous permettent de
fixer ce montant-là. Est-ce que vous pensez qu'on doit révéler le plus
rapidement possible la nature même du programme d'indemnisation sur ce
critère-là pour justement être sûr que tout le monde est conscient de la
méthodologie exacte du plan d'indemnisation?
Mme Chaloux (Annie) : Je
pense que c'est intéressant ce que vous évoquez, parce que ça permet d'ajouter
une notion de transparence par rapport à certaines perceptions que pourraient
avoir un programme d'indemnisation à la fois pour ceux et celles qui souhaitent
qu'il y ait le moins possible d'indemnisations et ceux et celles qui en veulent
le plus. Donc, les cartes sont mises sur table, donc à cet effet là, je pense
que la transparence est de mise pour pouvoir comprendre, donc, sur quels
justificatifs l'indemnisation aura lieu. Donc, ça, c'est le premier volet.
J'ajouterais aussi le fait que... et c'est
hier, lors de l'intervention de M. Ouellet aussi, que j'abonde dans le
même sens, qu'il mentionnait notamment le fait que, en vertu de la Loi sur les
hydrocarbures, les entreprises étaient dans l'obligation de fournir, lorsqu'il
y avait... des gisements, pardon, exploitables, de fournir l'information. Et à
l'heure actuelle, donc, il n'y aurait qu'une entreprise qui l'aurait fait.
Donc, ça permet là aussi d'éviter la surenchère de certaines entreprises à
vouloir avoir accès à davantage d'indemnisations. Donc, je pense que plus qu'il
y a d'information qui est rendue publique, plus ça permet de faire la part des
choses dans ce projet-là et de voir là où il y a ou pas marge de manoeuvre...
Mme Chaloux (Annie) : ...pour
intervenir.
M. Julien : Parfait. Une
dernière question pour moi avant de passer la parole à mes collègues, mais qui
est assez importante. Vous mentionnez, en réalité, qu'on devrait renforcer le
préambule pour noter clairement le positionnement du Québec, qu'on est chef de
file, avec aussi notre adhésion au BOGA, que ça va être quelque chose qui va
être beaucoup lu, beaucoup étudié. Donc, il faut faire preuve de rigueur et
moi, je pense, d'équilibre, en même temps, mais on en discutera avec les
collègues.
Donc, je voudrais vous entendre, parce que
certains prétendent que le projet de loi qu'on a devant nous, c'est un outil
marketing puisqu'il ne se faisait pas d'exploration et d'exploitation au
Québec, bien qu'il y avait des licences de permis. Mais moi, je ne le vois pas
du tout comme un outil marketing, je le vois comme un positionnement assez
courageux de notre État pour faire la chose. Donc, pourquoi... Selon vous,
est-ce un outil marketing ou c'est vraiment un positionnement courageux du
Québec?
Mme Chaloux (Annie) : Je me
permettrais de dire que c'est un peu toutes ces réponses, c'est-à-dire que,
d'abord...
M. Julien : Du marketing
courageux.
Mme Chaloux (Annie) : Dans le
sens où c'est un symbole fort. Et moi, je ne parlerais pas de marketing, mais
je pense que c'est un symbole fort que l'on envoie. Effectivement, le Québec,
ce n'est pas un territoire qui est reconnu pour avoir une quantité
d'hydrocarbures qui est majeure. Mais, plus on arrive dans un contexte où on
veut avoir accès à ces ressources là, bien, plus que les sources non
traditionnelles peuvent devenir intéressantes. Donc, on vient quand même
freiner tout futur projet, ce qui est, en soi, donc, une avancée majeure.
• (15 h 20) •
Ce que je dirais, et c'est là où la notion
du préambule revient, c'est qu'il y a cette idée que le projet de loi, oui, va
être étudié ailleurs dans le monde, et on espère qu'il soit appliqué aussi
ailleurs dans le monde. Mais il y a des juridictions... Pensons à un projet de
loi de cette nature là qui serait adopté, par exemple, en Alberta, avec un
programme d'indemnisation comme celui-là, ça ne serait pas jouable pour l'État
albertain, parce qu'ils ont, bien sûr, un développement d'hydrocarbures qui est
beaucoup plus important. D'où le fait que, plus on réduit les possibilités
d'étendre les indemnisations, plus on est très, très, très spécifique, plus on
est transparent, plus on est clair sur ce qu'on peut ou ne pas permettre, bien,
on permet d'éviter des leviers potentiels à ce que l'industrie puisse
l'utiliser à la fois au Québec et peut être, par la suite, dans d'autres
juridictions. C'est sûr qu'on n'est pas responsable non plus, ultimement, de
tous les projets loi qui seront adoptés ailleurs dans le monde, évidemment,
mais il reste que ça doit fournir des signaux qui sont importants.
D'où le fait que dans le préambule, ce
doit être... ces éléments de loi là doivent être pris en compte et que ce n'est
pas parce qu'un projet de loi a une part de symbolisme qu'il n'est pas
nécessaire. Et ça, je pense que c'est un élément qu'il faut souligner ici.
M. Julien : Parfait. Donc,
juste en conclusion, avant de passer la parole. Donc, c'est la première fois
qu'on nous amène cette réflexion-là de dire, bien, si on voulait faire un «copy
and paste» ailleurs, on serait en mesure de le faire. Je pense justement que le
programme d'indemnisation qui est prévu ici, qui parle seulement des frais de
licence et des frais d'exploitation liés au maintien d'une conformité, eut
égard à partout, c'est des frais, somme toute, qui sont à la marge par rapport
aux revenus potentiels d'exploitation, qui ailleurs pourraient être
complètement différenciés, là. Mais j'aime ce que j'entends.
Le Président (M. Lemay) : Donc,
M. le député de Lac-Saint-Jean, la parole est à vous.
M. Girard (Lac-Saint-Jean) : Merci,
M. le Président. Bonjour. Très intéressant de vous entendre et de faire aussi
un parallèle avec M. Richard Ouellet, qui a passé hier, au niveau du programme
d'indemnisation.
Moi, j'aimerais ça vous entendre au niveau
de l'alliance BOGA, avoir votre point de vue un peu, tu sais. Pour le Québec,
ça peut être utile au niveau de nous positionner dans le monde avec notre
volonté de devenir un leader mondial au niveau des énergies vertes. J'aimerais
vous entendre, avoir votre position là-dessus.
Mme Chaloux (Annie) : Merci.
L'alliance BOGA, c'est une alliance qui vise à se sortir, finalement, du
pétrole, de l'extraction, de l'exploitation des hydrocarbures. Il y a déjà près
d'une dizaine d'États ou d'États fédérés qui se sont joints à cette
initiative-là, et elle prendra de l'ampleur avec le temps, étant donné qu'à la
COP26, c'est quand même la première fois où il y a une décision qui a été prise
où on nomme la question des hydrocarbures, on parle du charbon, on parle des
hydrocarbures comme étant source du problème. On le sait depuis longtemps, mais
c'est très difficile, dans le contexte des négociations climatiques
internationales, d'accepter cet élément-là dans les négociations.
Donc, le fait que le Québec soit parmi les
premiers à adopter et à faire partie de ce genre d'engagement là, bien, ça
envoie des symboles, des signaux clairs. Et le Québec est assez bien perçu sur
la scène internationale, il a très souvent accès à un réseau que peu d'États
fédérés peuvent se targuer d'avoir. Donc, oui, ça envoie un symbolisme et une
notoriété pour le Québec pour la suite des choses.
M. Girard (Lac-Saint-Jean) : Bien,
merci de votre réponse. C'est quand même assez clair...
M. Girard (Lac-Saint-Jean) : ...votre
point de vue. Puis je vais laisser mon collègue... Il va avoir des questions.
Le Président (M. Lemay) : Alors,
M. le député de Bourget, la parole est à vous.
M. Campeau : Merci pour votre
présentation à Mme Chaloux. J'ai aimé, tantôt, l'idée de marketing courageux.
Je trouve pas pire comme expression celle-là, là. Je suis d'accord avec vous,
ce que vous avez mentionné, que c'est la responsabilité de tous les pays de
s'occuper des changements climatiques, et suite à l'accord de Paris, entre
autres. Et, comme vous avez dit, si l'Alberta faisait un tel projet de loi, ça
serait extraordinaire ou ça serait catastrophique. Ça dépendrait comment on le
regarde, là. Et nous, on a l'air d'un bien petit joueur par rapport à ça, et
certaines personnes sont tentées de dire : Bon, bien, c'est facile, ils ne
produisaient pas de toute façon. Après ça, vous nous dites qu'on est un leader
par rapport à ça parce qu'on est les premiers. Mais juste par curiosité, c'est
vraiment de la curiosité, est-ce que vous attendez ça d'autres législations qui
cherchent à copier, qui veut vraiment... ils veulent s'inspirer ou c'est une
idée que vous pensez qu'il va arriver?
Mme Chaloux (Annie) : Bien,
c'est intéressant, là, comme question que vous évoquez. C'est-à-dire que,
d'abord, je tiens à dire que tous les gestes comptent. Et, quand le Québec, par
exemple, dans les années 2000, et avec la Californie, ont choisi de
développer ensemble un marché du carbone, bien, au départ, on n'en parlait pas
tant. Ça, c'est popularisé beaucoup. Puis aujourd'hui, bien, l'expertise
québécoise, elle est souvent demandée à l'étranger pour qu'on regarde comment,
par exemple, le marché carbone s'est développé. À l'heure où on se parle, pour
ce qui est de cette initiative-là, l'initiative BOGA, bien, c'est sûr
qu'actuellement il va y avoir des juridictions, celles qui se sont engagées
vont devoir adopter des textes législatifs et vont s'inspirer de ce qui se fait
ailleurs, et, le Québec étant dans les premiers à le faire, évidemment, donc
ils vont pouvoir regarder ce que le Québec fait.
Donc, c'est plus à terme que je pourrais
répondre à votre question à savoir : Est-ce que, maintenant, on regarde ce
que le Québec fait sur ce projet de loi là? Mais je pense que, dans les
prochains mois, dans les prochaines années, plus d'acteurs vont regarder des
projets de loi qui... ce soit à travers BOGA et à travers d'autres initiatives
analogues, ils vont regarder ces modèles-là, et c'est justement l'importance
d'avoir un bon programme qui est très fort maintenant pour aider et faciliter
aussi le travail de ceux qui suivront.
M. Campeau : Moi, je n'ai pas
d'autre question, M. le Président.
Le Président (M. Lemay) : Très
bien. Monsieur le ministre, la parole est à vous.
M. Julien : Oui. Oui, merci.
Donc, à votre lecture, puis vous avez comme mentionné précédemment, vous avez
entendu d'autres intervenants, donc, en regardant le projet de loi, êtes-vous
satisfaite de ce projet de loi là dans sa forme et spécifiquement... je
reviens, là, puis je sais que ce n'est pas ma position, mais sur l'équilibre
des indemnisations, parce que... pour savoir que l'enjeu a beaucoup... de
beaucoup de discussions, hein. Certains prétendent qu'il faudrait donner des
milliards basés sur des revenus potentiels qu'on ne connaît pas trop. D'autres
disent qu'on ne devrait rien donner parce que les joueurs étaient au courant.
Puis nous autres, on se positionne, comme vous le dites, là, responsable et
équitable, là, mais on s'entend, là, qu'il n'y a pas de folie là-dedans, c'est
les frais pour les licences puis, hein, bon. Votre évaluation, c'est... du
projet de loi, dans sa forme actuelle, vous diriez quoi?
Mme Chaloux (Annie) : Je
pense qu'à l'heure actuelle c'est un projet de loi qui est équilibré dans la
mesure où, oui, il faut lutter contre les changements climatiques, et ça, ça,
ça doit demeurer la priorité d'un tel projet de loi. On a aussi des engagements
puis on a une responsabilité vis-à-vis des investisseurs puis vis-à-vis des
compagnies ou des personnes morales qui investissent au Québec. Ça fait qu'il
faut s'assurer aussi que, quand on fait des choix qui laissent des gens
derrière, qu'on opte pour un mécanisme qui n'est pas simplement d'appuyer une
industrie qui est problématique, mais qui va aussi soutenir notre crédibilité
sur d'autres volets d'investissements, et M. Ouellet, c'est un peu ce qui
évoquait hier.
Donc, oui, c'est sûr qu'un monde idéal,
c'est bien sûr de n'avoir aucune indemnisation. En même temps, on est dans un
contexte où on a des partenaires d'affaires, où il y a des investisseurs, où on
a aussi une part de responsabilité, puis qu'un projet de loi serait... qui
irait trop dans une veine de zéro indemnisation portrait à flanc, finalement, à
de plusieurs poursuites de la part des industries. Et, au final, probablement
qu'on n'y serait pas du tout gagnant. Alors que d'avoir une approche ou un
modèle qui vise sur le remboursement des dépenses tel que préconisé, qui met un
plafond sur les montants qui seront attribués, bien, ça montre, du moins, le
sérieux dans notre démarche et la volonté, après ça, de passer à autre chose.
M. Julien : Avez-vous une
idée? Parce que je comprends très bien, là, parce qu'on a beaucoup mentionné
les poursuites, etc. Et en terminant, au-delà de ça, pour moi, il y a aussi un
risque que je qualifierais réputationnel, puis il faut faire attention à mes
mots, mais c'est...
M. Julien : ...réputationnel,
là, parce que, quand on disait : Bien, nous, comme État, on avait des
responsabilités, puis à partir du moment où on prend une décision, on assume
nos responsabilités, notre part de responsabilité. Est-ce qu'il y a un risque
réputationnel pour le Québec?
Mme Chaloux (Annie) : Je
pense... actuellement, il n'y a pas de risque réputationnel. Je pense qu'on est
un lieu où les investissements étrangers... en fait, les investisseurs
étrangers sont intéressés à venir sur le territoire du Québec, et ce n'est pas
un projet de loi de cette nature-là qui viendrait compromettre, par exemple,
les investissements étrangers dans d'autres secteurs névralgiques de notre
activité économique.
M. Julien : Parfait.
Le Président (M. Lemay) : Nous
allons maintenant passer de la parole au député de Mont-Royal Outremont pour
environ 11 minutes.
M. Arcand : Merci, monsieur
le Président. Madame Chaluoux, j'ai lu, évidemment, votre présentation, une
excellente présentation, et je voudrais vous poser quelques questions,
premièrement, en rapport avec certains des témoignages qu'on a entendus et
avoir vraiment votre opinion là-dessus, parce qu'aujourd'hui, entre autres,
l'INRS est venu pour expliquer que, dans ce projet de loi, il fallait plus de
flexibilité pour les projets pilotes, en disant : Écoutez, c'est trop
limitatif. Si on décide de faire de la recherche puis on décide de faire de
l'innovation, bien, il faut qu'on se donne la flexibilité nécessaire pour le
faire. Tout le monde reconnaissait que ça prend un certain nombre de contrôles
pour s'assurer, là, qu'il n'y a pas une tentative des entreprises de faire des
projets pilotes, je dirais, qui sont bidon. Juste avoir votre position, dans ce
projet de loi, est-ce que vous pensez qu'il faudrait, disons, être plus
flexible au niveau des projets pilotes?
• (15 h 30) •
Mme Chaloux (Annie) : C'est
une excellente question que vous évoquez. Quand j'ai lu cette section-là dans
le projet de loi, il ne m'est pas apparu qu'il était peu flexible. Je pense
qu'il laisse quand même un certain espace. Mais je n'oserais pas me prononcer
sur est-ce que cet espace-là, qui est déjà octroyé, est suffisant ou pas. Je
pense qu'il y a d'autres experts sont beaucoup plus qualifiés que moi qui
répondraient à ce volet-là. Ça fait que je n'oserais pas non plus m'aventurer
sur ce terrain-là. Mais tout projet pilote, quel qu'il soit, il ne faut pas
qu'il permette une exploration déguisée ou une exploitation déguisée des
hydrocarbures. C'est ce qu'on doit mettre de l'avant. Après ça, s'il y a
d'autres projets pilotes qui concernent d'autres éléments rattachés à des fracturations,
mais qui ne visent pas l'exploitation ou l'exploration des hydrocarbures, là,
il faudrait voir avec les experts de ce domaine-là qu'est ce qu'ils
pensent : Est-ce que, en l'état, le projet de loi permettrait à ces
projets-là?
M. Arcand : Si j'ai bien
compris, vous avez dit... vous étiez d'accord avec le professeur Ouellet, hier,
qui est intervenu pour parler que, selon les accords internationaux, on
pouvait... on devait compenser dans une certaine mesure. Vous vous dites :
D'accord, mais le 100 millions, c'est un plafond. Est-ce que j'ai bien
compris ça?
Mme Chaloux (Annie) : Actuellement,
avec ce qu'on a comme information, je dirais que oui, mais plus on aura
d'information de disponible sur la nature des remboursements qui sont prévus, ce
chiffre-là pourrait être appelé à varier. Mais il ne faudrait pas qu'il soit
appelé à varier vers la hausse, étant donné qu'il y a aussi cette... comme je
l'expliquais tout à l'heure à monsieur le ministre, il y a quand même une
responsabilité que le secteur des hydrocarbures connaît depuis longtemps, et à
ce moment-là, le risque de l'investissement, le risque de l'acceptabilité
sociale fait partie des éléments qui sont présents depuis plus de dix ans
maintenant. Donc, il ne faut pas qu'on aille vers une logique de compensation à
la hausse, et tenter d'éviter autant que possible certaines poursuites.
J'imagine qu'on n'en évitera pas, évidemment, certains vont tenter de le faire,
mais il faut trouver un programme qui, quand même, soit suffisamment intéressant
pour éviter que les entreprises optent pour la voie à des poursuites
judiciaires plutôt que l'acceptation de l'état de fait.
M. Arcand : Est-ce que vous
avez certaines idées qui nous permettraient de partir du plafond puis d'aller
vers le plancher?
Mme Chaloux (Annie) : Il
faudrait avoir les chiffres, évidemment. C'est toujours ça, l'élément. Là où on
peut jouer sur les fameuses dates, mais là, ça reste à voir, le pourquoi que
ces dates ont été mises en place. J'entendais les gens du CQDE parler de
réduire cette période-là de couverture à partir du moment où la Loi sur les
hydrocarbures, en 2018, a été adoptée. Ça fait qu'il faudrait voir qu'est-ce
que ça impliquerait d'avoir une période de conformité plus faible. Ça ferait en
sorte qu'il y aurait peut-être moins de remboursement possible. Mais néanmoins,
il y a aussi une logique qui explique que, pour ce secteur là d'industrie, ça
peut prendre plusieurs années quand on fait de l'exploration. Donc, il ne
faudrait pas non plus surpénaliser certains acteurs. Donc, l'importance de
l'équilibre, encore une fois, est à présenter.
M. Arcand : Si je comprends
bien, vous seriez d'accord pour rembourser...
15 h 30 (version non révisée)
M. Arcand : ...au
minimum, en tout cas, les coûts directs d'obtention des permis d'exploration,
sachant qu'un permis d'exploration qui débouche sur une exploitation, à toute
fin pratique, désormais interdite n'a plus de valeur, alors il y a... c'est au
moins le minimum. C'est ce que je comprends de ce que vous dites?
Mme Chaloux (Annie) : Effectivement.
M. Arcand : Vous êtes
d'accord avec ça. Est-ce que vous avez une idée... Parce que, ce matin, on a eu
des discussions sur le plan technique que le Québec devait se lancer de façon
beaucoup plus évidente dans le domaine de la géothermique, dans le domaine de
ce qu'on appelle la captation du carbone, du stockage d'hydrogène, etc. Est-ce
que vous avez vous-même une opinion où est-ce que le Québec devrait aller? Est-ce
que vous avez une idée que vous pourriez nous soumettre par rapport à ça?
Mme Chaloux (Annie) : Bien,
c'est sûr que, dans un contexte de lutte contre les changements climatiques,
les meilleurs outils pour réduire les émissions, c'est de trouver des avenues
où on consomme à la base moins d'énergie, et ensuite optez pour les énergies
renouvelables, et donc à allez dans cette méthode de réduction et ensuite de
transferts lorsque ce n'est pas possible. Pour les projets plus particuliers de
géothermie, d'hydrogène, etc., bien, c'est sûr que ça s'écarte un peu de ce
projet de loi là sur les hydrocarbures. C'est sûr qu'on ne peut pas non plus
penser qu'on peut faire des transitions énergétiques aussi rapides en évitant
d'utiliser ces autres stratégies-là. Mais il faut voir dans quelle mesure elles
répondent réellement à notre responsabilité, à notre juste part en termes de
contribution à la lutte contre les changements climatiques à l'échelle
mondiale.
M. Arcand : J'ai été
étonné. Il y a quelques semaines, j'écoutais une dame, je crois que c'était Mme Whitmore,
qui vient des... je ne sais pas si c'est l'École des Hautes études
commerciales, le HEC, ou le... mais qui parlait, entre autres... qui disait,
entre autres, que, bon, les autos électriques, ce n'est pas une solution très
valable à ce niveau-là, qu'il faudrait vraiment changer de façon assez
importante le mode de vie, il faut que les gens apprennent à moins se déplacer,
et ainsi de suite. Est-ce que... Jusqu'où vous allez dans ce domaine-là? Avez-vous
une idée précise par rapport à ce qu'il faut faire?
Mme Chaloux (Annie) : Bien,
c'est sûr qu'il y a de plus en plus d'études qui montrent que, d'abord, ce
qu'il faut avoir l'approche : éviter, déplacer puis transférer lorsque
possible. C'est-à-dire que, dans un modèle de développement comme on a
actuellement au Québec, il faut d'abord opter pour : Est-ce qu'il y a une
nécessité, par exemple, de déplacement? Est-ce que comme individu ou est-ce que
comme État on peut encourager, finalement, l'évitement de certains déplacements
inutiles? Lorsque c'est impossible, bien, comment on offre des alternatives qui
ne soient pas l'auto individuelle, quelle qu'elle soit? Donc, est-ce qu'on peut
accroître l'offre de transport collectif, que ce soit par des transports
traditionnels ou des modes de transport d'autopartage, par exemple, qui sont
innovants, qui ferait en sorte de réduire, finalement, notre contribution aux
émissions de gaz à effet de serre? Et, lorsque ce troisième... ce deuxième
créneau là, pardon, n'est pas possible et qu'on doit quand même opter, par la
suite, par un déplacement qui ne peut pas se faire par des modes de transport
qui soit actif ou collectif, bien, est-ce qu'on peut opter pour des solutions
de remplacement? La voiture électrique rentre dans ce troisième créneau-là.
Mais il faut quand même continuer toujours à réfléchir pas simplement à faire
les modifications à la marge en fin de parcours, mais d'abord revoir les
premières étapes pour, finalement, limiter les émissions de gaz à effet de
serre en changeant nos modèles, comme Mme Whitmore l'expliquait.
Et ultimement, lorsqu'impossible, bien là,
c'est sûr que la voiture électrique devient une alternative à la voiture à
essence, mais il ne faut pas penser que simplement remplacer une voiture à
essence par une voiture électrique va solutionner les problèmes. Ça va
continuer à promouvoir l'étalement urbain. Il y a, bien sûr, des minéraux rares
qui sont utilisés dans les batteries. Donc, il ne faut pas voir ça,
effectivement, comme une panacée, mais ça doit faire partie du bouquet
d'instruments dont on dispose pour réduire nos émissions, mais peut-être
changer notre approche de tout miser sur une électrification qui ne change pas
les comportements vers une approche plus transformationnelle qui nécessite
évidemment des nouvelles façons de voir notre aménagement du territoire et
notre conception du bien-être. Mais ça peut passer par la promotion du
télétravail. Donc, il y a plein de modèles qui peuvent nous aider à réduire les
premiers créneaux pour, par la suite, en fin de parcours, réduire nos émissions
via les voitures électriques.
M. Arcand : Vous savez,
quand je discutais avec le professeur Pineau, entre autres, lui, pas très,
très, très «hot», si vous me permettez l'expression, sur le solaire, par
exemple. Il dit que, bon, au Québec, le...
M. Arcand : ...ce n'est pas
évident, lui, il dit que, si on veut vraiment, et là-dessus, on est un cancre
dans ce domaine-là, que si véritablement on veut faire une différence, c'est
évidemment les économies d'énergie. Et, quand on se promène, par exemple un peu
partout et, moi, j'utilise la 20, le lundi soir, pour venir à Québec, et, mon
Dieu qu'il y a des camions, quand on sait que les camions polluent de façon
assez importante, beaucoup plus que des automobiles, on s'aperçoit qu'il y a
certainement une espèce... Des façons de faire qui pourraient certainement
améliorer la situation et réduire considérablement les gaz à effet de serre, et
lui, évidemment, prône aussi des économies d'énergie substantielles. Est-ce que
vous voyez des façons pour le Québec d'aller de ce côté-là, d'être comme
d'autres pays européens qui sont certainement beaucoup plus avancés que nous à
ce niveau-là?
Mme Chaloux (Annie) : Oui, je
pense qu'une des choses les plus importantes, c'est d'utiliser les mesures
écofiscales, et ça, je pense que c'est un aspect qui est très, très important.
Par exemple, au Québec, on opte pour une stratégie qui est les subventions aux
voitures électriques, mais il faut aussi développer pas simplement la carotte,
mais aussi opter pour des stratégies de bâton, c'est-à-dire si on subventionne
à la hauteur de 8000$ une voiture électrique, bien, on doit aussi mettre en
place des surtaxes pour les gros cylindrés, par exemple. Donc, ça peut être des
taxes à l'immatriculation des voitures, on pourrait mettre en place des taxes
kilométriques qui feraient en sorte que même les voitures électriques qui
contribuent à l'étalement urbain seraient aussi taxées par ça. Donc, il y a une
panoplie de mesures, parce qu'il ne faut pas se leurrer qu'au Québec le plus
grand secteur émetteur de gaz à effet de serre, c'est bien sûr le secteur des
transports, c'est 44 pour cent des émissions de la province.
• (15 h 40) •
Donc, c'est là où on peut le plus agir et
utiliser des mesures écofiscales efficaces qui feraient en sorte à la fois de
jouer donc sur l'offre et sur la demande et accroître finalement les
changements qui feraient en sorte qu'on diminue véritablement nos émissions de
gaz à effet de serre. Donc, vous avez tout à fait raison, quand on parle...
Le Président (M. Lemay) : Merci
beaucoup, Mme Chaloux, pour cette réponse. Et nous allons maintenant céder la
parole au deuxième groupe d'opposition, madame la députée de
Sainte-Marie-Saint-Jacques, pour environ 2 minutes 45.
Mme Massé : Merci, monsieur
le Président. Bonjour, Mme Chaloux. Merci pour votre présentation. J'ai deux,
trois petites questions. Je comprends bien qu'on a à inscrire un préambule,
j'entends l'ouverture du ministre, je pense, c'est une bonne idée, je pense que
ça mettrait le niveau de l'engagement, qu'on est prêt à prendre et le sens de
cet engagement-là. Ceci étant dit, vous dites... vous avez répété à plusieurs
reprises que les investisseurs, dans cette industrie, depuis plusieurs années,
vous avez nommé 2015, mais, entre vous et moi, c'est bien avant ça, savaient
très bien dans quoi ils s'embarquaient, mais, malgré tout, vous prônez une
compensation. Je comprends que rembourser les frais de licence, les frais des
remboursements de dépenses, vous êtes d'accord avec ça, est-ce qu'on devrait y
soustraire tout l'argent qu'on y a mis aussi?
Mme Chaloux (Annie) : Vous
évoquez là une question qui est intéressante, donc il faudrait voir, de manière
publique, quelles sont les sommes qu'on a investies pour appuyer ce secteur-là
d'activité. Ceci étant dit, puis la manière que j'avais compris le projet de
loi, il y avait quand même ces calculs-là de subvention qui étaient aussi
reconnus dans le parcours. Je pense qu'il faut aussi être conscient de notre
responsabilité, comme État, dans la mesure où j'entends bien ce que vous dites
par rapport aux compensations, mais reste que la Loi sur les hydrocarbures, qui
a été adoptée par l'Assemblée nationale et qui nous a liés à cette
industrie-là, en continuant de permettre l'exploration et l'exploitation des
hydrocarbures, même si le cadre était plus restrictif, donc on a cette
responsabilité-là tout de même à tenir en compte.
Mme Massé : Donc, vous êtes
d'accord que tout l'argent, que ce soit en crédit d'impôt, en subvention, coûts
du claim, ça, ils devraient nous le rembourser parce qu'on leur a donné. Mais
moi, j'ai une autre question plus profonde, tout l'argent que le public a payé
pour les inondations, les berges qui s'écroulent en Gaspésie, est-ce qu'ils
n'ont pas une bonne part de responsabilité, puisque la science nous démontre
qu'ils ont une part de responsabilité et que vous nous rappelez qu'ils le
savaient depuis longtemps?
Mme Chaloux (Annie) : Je me
permets ici simplement, par contre, de faire la nuance, à savoir que ce n'est
pas nécessairement cette industrie, par exemple une entreprise qui travaillait
au Québec, qui était, elle, la responsable des inondations, là il y a la
question toujours des préjudices et de poursuites, par la suite, aussi auprès
des grands émetteurs de gaz à effet de serre. Donc, les industries qui ont
investi, au Québec, ne sont pas nécessairement celles qui ont contribué aujourd'hui
aux impacts concrets. Je comprends ce que vous dites parce qu'effectivement, on
est dans une situation mondialisée d'interdépendance, ceci étant dit...
Mme Chaloux (Annie) : ...ce
n'est pas ces petits joueurs là qui sont ceux qui sont imputables des
catastrophes climatiques que l'on vit exactement sur le territoire. Et ça
serait difficilement, bien sûr, démontrable dans une perspective de droit et en
cour, par exemple.
Le Président (M. Lemay) :
Merci, Mme Chaloux. Alors, nous allons maintenant passer la parole au
troisième groupe d'opposition. M le député de Jonquière pour la même chose,
environ 2 min 45 s.
M. Gaudreault : Oui.
Merci beaucoup, Mme Chaloux. Merci de votre présence. Bon, j'aime beaucoup
le récit que vous faites de l'insertion, je dirais, du Québec dans Boga et que
ce récit doit faire en sorte que le Québec, au fond, s'inscrit dans une
démarche historique de diminution des gaz à effet de serre, de lutte contre les
changements climatiques. Les membres fondateurs de Boga, bon, Danemark, Costa
Rica, France, Groenland, bon, avec le Danemark, l'Irlande, la Suède, le pays de
Galles. Il y a des membres associés, la Californie, la Nouvelle-Zélande, le
Portugal. Il y a des amis, le Luxembourg, la Finlande et l'Italie. Je sais que
le Costa Rica, du côté du Parlement, le projet de loi n'a pas passé, mais, si
on regarde les autres membres du Boga, est ce qu'il y a des exemples qui
pourraient nous inspirer? Par exemple, le Danemark, est-ce qu'ils ont intégré
Boga dans leur législation ou on est vraiment les premiers?
Mme Chaloux (Annie) : Je
ne pourrais pas vous dire, là où ils en sont au Danemark de manière concrète,
là, dans l'état d'adoption du projet de loi. Je sais qu'il y a eu des
discussions, mais je n'ai pas vu la sortie. Puis évidemment c'est que c'est une
initiative qui a été lancée en octobre, hein, ça fait qu'on est, bien sûr, dans
les premiers, si on n'est pas le premier à cet égard là. Celui du Costa Rica,
effectivement, le projet de loi n'a pas été adopté. Donc, reste à voir comment
la suite se fera pour cette juridiction-là. Mais je ne pourrais pas vous donner
d'autres détails que ça parce qu'on est vraiment dans le début du parcours et
non pas... ça ne fait pas plusieurs mois.
M. Gaudreault : Parce
que le Danemark avait quand même l'exploitation d'hydrocarbures sur son
territoire en haute mer ou... Donc, j'imagine qu'il y aura une procédure,
peut-être, d'indemnisation aussi. Je ne sais pas s'il y a un calendrier qu'on
peut connaître pour s'en inspirer.
Mme Chaloux (Annie) : Ça
prête à un élément que je pourrais surveiller puis informer, là, la commission,
le cas échéant, là, si je vois quelque chose à cet effet là. Parce
qu'effectivement ils sont dans une situation très différente du Québec de par
l'exploitation des hydrocarbures qu'ils ont sur leur territoire. Eux, je pense
qu'ils avaient l'horizon 2050... une réduction, mais je n'ai pas le
détail, là, de ces réductions-là, puis ces retraits-là de permis, et là où ça
en est au niveau du projet de loi.
M. Gaudreault : O.K. En
tout cas, si jamais vous voyez passer des choses ;là-dessus, on va garder un
oeil également, mais je pense ça serait bienvenu de transmettre ça au Québec.
Merci beaucoup, Mme Chaloux.
Le Président (M. Lemay) : Très
bien. Merci beaucoup, Mme Chaloux, pour votre contribution aux travaux de
la commission.
Alors maintenant, je vais suspendre les
travaux quelques instants pour permettre au prochain groupe de prendre place.
Merci.
Mme Chaloux (Annie) :
Merci à vous.
(Suspension de la séance à 15 h 48)
(Reprise à 15 h 55)
Le Président (M. Lemay) : Alors,
la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources
naturelles reprend ses travaux, et je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants
d'Équiterre et de la Fondation David Suzuki. Je vous rappelle que vous disposez
de 10 minutes pour votre exposé et par la suite, nous procéderons à une période
d'échanges avec les membres de la commission. Alors, je vous invite à vous
présenter et vous pouvez y aller avec votre exposé.
M. Viau (Marc-André) : Bonjour,
Monsieur le Président, Monsieur le ministre, députés, membres de la commission.
Je m'appelle Marc-André Viau, je suis directeur des relations gouvernementales
chez Équiterre et je suis accompagné de mon collègue Émile Boisseau-Bouvier et
de Charles Bonhomme de la Fondation Suzuki. Équiterre existe depuis bientôt 30
ans et peut compter sur l'appui de plus de 150 000 membres et sympathisants. La
Fondation Suzuki, elle, a été créée en 1990 et compte sur l'appui de plus de
300 000 sympathisants, dont près de 100 000 au Québec.
Merci de nous recevoir et de nous donner
l'opportunité de nous exprimer et d'échanger sur le projet de loi 21 qui va
nous permettre de mettre fin aux velléités de quelques compagnies pétrolières
et gazières qui sont incompatibles avec la crise climatique et les choix
historiques du Québec en matière énergétique. On est heureux de constater que
nos efforts et ceux de toutes les autres organisations citoyennes et
environnementales ont contribué à créer un climat, sans faire de mauvais jeu de
mots, où le gouvernement québécois peut présenter un projet de loi comme
celui-là et jouer un rôle de leader à l'international. Le député de Jonquière
le soulignait hier, les choses ont beaucoup évolué au cours des dernières
années et c'est ce qui rend ce projet de loi là possible. On tient d'ailleurs à
féliciter le ministre d'avoir saisi cette opportunité.
Mais comme le ministre le disait hier, on
ne va pas s'entendre sur tout. Et c'est là qu'on doit dire que ce projet de loi
là est imparfait et vague à certains égards. Il offre entre autres la
possibilité d'indemniser les compagnies pétrolières et gazières. Le problème
avec la compensation, c'est qu'on compense pour quelque chose qu'on sait
volontairement nuisible pour l'environnement et la santé. Il y aura toujours
une bonne raison juridique de compenser, mais ce n'est pas une obligation, et
la position de nos organisations, c'est qu'on va toujours préférer le concept
de pollueur payeur à celui de pollueur payé. Nos organisations ont proposé
certaines recommandations dans notre mémoire, que mes collègues vont détailler,
et on encourage les membres de la commission à les intégrer au cours de l'étude
article par article, parce qu'on aimerait ça avoir une loi dont on est vraiment
fiers. Je cède maintenant la parole à Charles Bonhomme de la Fondation David
Suzuki.
M. Bonhomme (Charles) : Merci,
Marc-André. D'entrée de jeu, il est important de rappeler le contexte
climatique dans lequel s'inscrit le projet de loi 21. En août 2021, le rapport
du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat, le GIEC, a
lancé un code rouge au monde entier concernant les émissions de GES, rappelant
que l'humanité est sans équivoque responsable de la crise climatique en grande
partie due à sa dépendance aux combustibles fossiles. Il existe un consensus
scientifique à travers le monde sur l'importance de cesser rapidement
l'utilisation des combustibles fossiles.
Outre le rapport accablant du GIEC, on
dénombre de nombreux autres rapports récents qui vont dans le même sens et qui
réitèrent l'importance d'agir maintenant. Premièrement, le rapport de l'Agence
internationale de l'énergie, paru en mai 2021, est clair : aucun nouveau projet
pétrolier et gazier ne doit être accepté si nous voulons limiter l'augmentation
de la température mondiale à 1,5 degré Celsius. Deuxièmement, une étude parue
dans la revue Nature en septembre 2021 évalue que pour avoir 50 pour cent de
chances de limiter le réchauffement planétaire à 1,5 degré Celsius, 60 pour
cent du pétrole et du méthane fossile et 90 pour cent du charbon doivent rester
dans le sol. Troisièmement, le Production Gap Report d'octobre 2021 montre que
non seulement la production mondiale d'hydrocarbures doit décroître
immédiatement, mais aussi que les plans des pays sont en totale inadéquation
avec cette réalité. Puis rappelons également que le gouvernement du Québec
s'est lié par décret à l'accord de Paris.
Équiterre et la Fondation David Suzuki
accueillent favorablement le dépôt du projet de loi 21. Le gouvernement fait un
pas important dans le sens exigé par l'urgence climatique, la science et la
population. Le dépôt du projet de loi signe l'arrêt de mort des projets
d'exploration et d'exploitation de gaz et de pétrole proposés par le passé et
récemment par l'industrie. Le projet de loi déposé est entre autres le résultat
d'une vigilance et de la mobilisation inlassable de groupes citoyens partout au
Québec. Depuis des décennies, les citoyennes et citoyens, de même que de
nombreuses communautés et organisations environnementales d'un bout à l'autre
de la province, ont dépensé ressources, énergie et temps pour lutter contre les
projets dangereux de cette industrie...
M. Bonhomme (Charles) : ...C'est
donc avec soulagement et enthousiasme que plusieurs militantes et militants se
sont battus pour protéger notre santé, notre sécurité, et la nature accueille
cette importante avancée.
Pour que le projet de loi 21 soit à
la hauteur de l'urgence climatique et qu'il permette de répondre avec ambition
à la crise climatique, Équiterre et la Fondation David-Suzuki recommandent aux
législateurs que le projet de loi soit amendé pour fermer la porte aux cadeaux
sous forme d'indemnisations que le gouvernement compte octroyer à l'industrie.
Également, que le gouvernement soustrait les appuis financiers, fiscaux obtenus
par les entreprises des indemnisations si le gouvernement décide de maintenir
ces dernières.
Nous recommandons aussi que le gouvernement
priorise ce projet de loi, le renforce et l'adopte rapidement puis que le
gouvernement saisisse cette opportunité pour prouver aux Québécoises et
Québécois qu'il compte sérieusement atteindre ses cibles climatiques, et que ce
projet de loi soit un outil pour y arriver. Je cède maintenant la parole à mon
collègue Émile Boisseau-Bouvier
M. Boisseau-Bouvier (Émile) : Merci
Charles. Donc, en déposant ce projet de loi, le gouvernement envoie un message
puissant aux autres gouvernements à travers le monde. L'ère des combustibles
fossiles est terminée, et ils doivent, eux aussi, adopter de tels projets de
loi. C'est un message qui avait également été lancé, cet automne, à la
COP 26, lors du lancement de la Beyond Oil and Gas Alliance, la BOGA, et
nous espérons que ce momentum concrétise et accélère les changements dans
d'autres juridictions. Après tout, la BOGA n'est que la traduction diplomatique
du consensus scientifique croissant, dont il était question précédemment.
Mettre fin à l'exploration, à l'exploitation des hydrocarbures est le minimum
de ce qui est nécessaire pour atteindre les objectifs de l'accord de Paris. Le
Québec défriche donc un chemin que tous les États devront emprunter, et il est
de notre devoir de nous assurer que nous traçons la bonne voie, et que tous
puissent nous suivre.
• (16 heures) •
L'octroi d'indemnisations pourrait
cependant nous barrer la route. À l'échelle domestique, d'autres industries
devront être complètement transformées ou simplement interdites si le Québec
veut atteindre son objectif de carboneutralité d'ici 2050. Ces industries
réclameront, elles aussi, des indemnisations si le projet de loi est adopté tel
quel. Le Québec se retrouverait alors avec une facture qui rendrait extrêmement
complexes et difficiles le financement de la transition énergétique et
l'adaptation à la crise climatique. L'argent public doit servir à financer la
transition et non pas à perpétuer des investissements dans des industries qui
contribuent à alimenter la crise climatique.
Sur le plan international, le projet de
loi 21 constitue un précédent qui sera étudié attentivement par les autres
juridictions ainsi que par les compagnies fossiles y opérant. Si le Québec
accorde 100 millions de dollars, comme cela est estimé par le ministre de
l'Énergie alors que la province ne produit aucun hydrocarbure, combien cela en
coûtera-t-il à l'Alberta, par exemple, pour se sortir de sa dépendance? Une
facture trop élevée rendrait cette approche beaucoup moins attirante pour
d'autres juridictions qui veulent et qui doivent emboîter le pas. Équiterre et
la Fondation David-Suzuki recommandent aux législateurs de procéder à
l'adoption du projet de loi sans offrir de compensation aux compagnies
pétrolières et gazières afin d'éviter de freiner la transition énergétique au
Québec et ailleurs dans le monde. Nous lui recommandons également de saisir
cette opportunité pour accentuer l'implication du Québec au sein de la BOGA et
pour faire la promotion de ses engagements climatiques ailleurs au Canada et
dans le monde.
Sur un tout autre plan, je pense qu'il est
important de rappeler les bienfaits de ce projet de loi sur les écosystèmes et
les communautés avoisinant les sites d'exploration et de production
d'hydrocarbures, qui sont les premiers à subir les impacts environnementaux de
ces activités. En adoptant le projet de loi 21, le gouvernement mettrait
finalement fin aux risques et aux effets délétères subis par les communautés et
les écosystèmes du Québec lors du développement de l'industrie pétrolière et
gazière. Dans le cas contraire, le statu quo continuerait de laisser ces
populations aux prises avec des impacts environnementaux nocifs pour leur
santé, leur qualité de vie et la biodiversité, ce qui serait contraire aux
objectifs de développement durable du Québec.
Par ailleurs, nous sommes surpris de
remarquer qu'aucun groupe autochtone ne sera entendu lors de ces consultations.
Cette absence est d'autant plus étonnante que les risques associés aux impacts
environnementaux de l'industrie des hydrocarbures sont particulièrement
dévastateurs au sein des communautés autochtones pour lesquelles la
conservation et la gestion durable des ressources naturelles est un enjeu
économique et culturel, mais surtout un élément essentiel à leur subsistance.
Équiterre et la Fondation David-Suzuki estiment que les communautés autochtones
font partie des principaux intéressés de ce projet de loi. C'est pourquoi nous
recommandons que le gouvernement s'engage à rencontrer les groupes autochtones,
dans le cadre de ces consultations publiques sur le projet de loi, dans
l'optique de favoriser une relation plus étroite entre le gouvernement et les
peuples autochtones. Nous recommandons que les groupes autochtones soient
invités aussi pour les prochains projets de loi similaires. Je cède maintenant
la parole à Charles Bonhomme.
M. Bonhomme (Charles) : Merci
Émile. En conclusion, monsieur le Président, il n'y a plus aucun doute que
l'urgence climatique est un enjeu planétaire majeur auquel doit faire face la
communauté internationale, particulièrement les États qui, comme le Québec, ont
contribué à une part plus importante des émissions de GES dans l'atmosphère.
Au-delà d'un simple calcul comptable des GES domestiques, faire un virage
rapide vers une économie sobre en carbone nécessite de faire une révision
cohérente des lois, des politiques et des orientations stratégiques qui
touchent l'ensemble des secteurs d'activité du Québec. En ce sens, le projet de
loi 21 est une étape essentielle à l'atteinte de cet objectif et des
engagements climatiques du Québec. Nous espérons que cette étape sera...
16 h (version non révisée)
M. Bonhomme (Charles) : ...la
première d'une série d'actions significatives et concrètes dans cette
direction. En plus de savoir mobiliser et sensibiliser les citoyens et les
citoyens sur les questions environnementales. Équiterre et la Fondation David
Suzuki peuvent être des alliés stratégiques du gouvernement pour communiquer au
grand public ses actions environnementales qui s'alignent avec notre vision et,
par conséquent, en augmenter l'acceptabilité sociale. C'est pourquoi nous
tenons à ouvrir la porte à une plus grande collaboration entre nos
organisations et le gouvernement. Merci à tous, et nous serons disponibles pour
prendre vos questions avec plaisir.
Le Président (M. Lemay) : Alors,
merci pour cet exposé. Nous allons débuter de ce pas avec la partie
gouvernementale, M. le ministre, pour environ 16 min 30 s.
M. Julien : Oui, merci.
Merci, M. le Président. Merci beaucoup, messieurs, pour votre participation
aujourd'hui puis pour vos commentaires et des documents que vous nous avez
transmis.
Écoutez, on est dans la deuxième journée,
là, des consultations, et j'ai toujours l'impression que le meilleur endroit
est toujours un peu dans la nuance. Et on a entendu eu des personnes qui sont
venues se présenter... parce que j'entends quand même vos commentaires, là.
Premièrement, je pense que ce n'est pas un premier pas qu'on fait, mais c'est
un pas important. Je pense qu'on fait plusieurs autres pas, là, actuellement au
Québec, mais peut être qu'ils sont insuffisants, mais on a cette préoccupation-là.
Je pense que c'est parce que ce n'est pas important. Mais quand on dit de
mettre fin... de mettre fin à l'exploration et l'exploitation des hydrocarbures
par par un geste légal comme celui-là, moi, pour moi, ça que quand même un
geste majeur. Vous disiez : Ça, c'est un strict minimum. Quel autre État a
fait ça?
M. Boisseau-Bouvier
(Émile) : En fait, pour répondre à votre question, ce serait une
première mondiale donc, mais c'est un strict minimum au sens de la science
climatique. Et puis, quand on parle de premiers pas, effectivement vous l'avez
dit, il y a d'autres actions gouvernementales en termes de réduction de nos gaz
à effet de serre. Par contre, il faut admettre que, pour l'instant, ils sont
largement insuffisants. On a 2,7 % de réduction des gaz à effet de serre
depuis 1990. On sait que notre cible est de 37,5 % d'ici 2030 et, selon
nous aussi, il faudrait la rehausser si on veut faire notre juste part dans
l'effort climatique pour limiter le réchauffement climatique à 1,5 degré
Celsius. Donc, quand on parle de strict minimum, c'est un strict minimum... un
strict minimum au sens de la science, qui est... c'est un strict minimum qui
devra être suivi par toutes les autres juridictions, et donc c'est pour ça que
c'est très important que le gouvernement du Québec trace la bonne voie et
n'empêche pas d'autres de nous suivre dans cette bonne direction-là.
M. Julien : C'est
donc... donc, pour bien, bien comprendre, je comprends mieux la notion de
strict minimum que vous employez parce que, sinon, il n'y aurait personne qui
aurait fait le moindre... le strict minimum actuellement dans ce qui doit être
fait. Je pense, encore une fois, que ce n'est pas le cas, mais je pense que
c'est un geste qui est probant et j'ai bien aimé, là, justement, l'intervention
juste avant vous de Mme Annie Chaloux, qui mentionnait clairement que dans
le préambule... puis je pense que Richard Ouellette aussi l'a mentionné hier,
et les professeurs. Je veux dire, dans le préambule, il faut peut être
démontrer plus, plus de fierté et et être plus explicatif sur ce geste concret
qu'on pose justement pour que celui, excusez-moi, là, fasse tache d'huile,
fasse tache de je ne sais pas quoi, là, de spaghetti, on va dire, plutôt que
l'huile, pour la suite des choses.
Alors, ceci étant, comme je dis, j'aime
beaucoup la nuance. Mais, tu sais, à la fin, il y a des groupes qui sont... qui
sont aux extrêmes en réalité, puis je ne dis pas que vous êtes des groupes
extrêmes, mais qui sont aux extrêmes du pôle de discussions sur ce qu'on
discute aujourd'hui. Et quand on dit il ne faut pas donner de cadeaux, alors je
réitère, là, nous autres, le principe d'indemnisation, puis on essaye de
trouver l'équilibre dans le projet de loi pour aussi que ce projet de loi soit
à la fois crédible et également pour qu'il puisse amener des réflexions dans
d'autres États sur justement les engagements.
Je le réitérais tantôt avec Mme Chaloux,
oui, c'est vrai que les entreprises, peut-être certaines, on peut prétendre
qu'ils voient bien que les hydrocarbures, ce n'est pas la voie de l'avenir, là.
On comprend ça. Puis probablement qu'ils voient également qu'il y a un risque
lié à s'embarquer dans ces projets-là. D'un autre côté, je réitère la
responsabilité comme État avec un processus légal, on a des lois, on a des
règlements qui n'ont, somme toute, certainement pas de décourager les gens d'y
aller puisque c'était permis. Donc, c'est pour cette responsabilité un peu
qu'on doit indemniser. Puis, quand on parle de cadeaux, là, c'est on va
rembourser certains éléments qui ont été payés pour être conformes. On parle
des licences, des frais d'exploitation qui ont été nécessaires pour démontrer
la conformité aux exigences que l'État a mises en place. Donc, on n'est pas du
tout sûr des gains potentiels, sur des taux de rendement, puis on n'est pas là
du tout, là, alors. Et pour terminer, là, ma...
M. Julien : ...Mme Chaloux, je
ne voudrais pas qu'elle soit mise à l'index, là, mais elle est membre du C.A.
d'Équiterre, puis elle, elle trouve que ça fait bien du sens, mais elle amène
la nuance, là. Elle n'est pas : Non, non, il faut vraiment indemniser. Il
faut indemniser le moins possible, selon certains critères bien établis, parce
qu'effectivement il y a une responsabilité de l'État par rapport à ce qui a été
permis. Donc, vous semblez être très, très affirmatif, sans nuance, vous, de
votre côté. Pourquoi?
M. Viau (Marc-André) : Il y a
beaucoup de... il y a des profils qui sont très diversifiés sur le C.A.
d'Équiterre. Donc, vous allez retrouver plusieurs opinions. Je pense qu'on a
apporté beaucoup de nuances dans notre présentation et dans notre mémoire
également. On trace une ligne sur la question des compensations et on s'entend
que ces compensations-là sont... à tout le moins, il y a certaines balises qui
sont identifiées, là, dans les articles, là... à partir de l'article... je ne
me rappelle plus exactement quel article, là, mais, oui, à partir de
l'article 32, pardon. Il va quand même y avoir un projet de règlement qui
va définir un programme ou un programme qui va s'accompagner de ça? Le
programme, c'est juste parce que ça dit que ça allait être défini par voie
réglementaire. Donc, il va y avoir un programme. Les détails de ce programme-là
vont être importants pour voir justement quelles seront les compensations qui
seront accordées. Il y a l'article 36, là, qui prévoit que le programme
peut prévoir des versements d'un montant forfaitaire à titre d'indemnités pour
certains frais. Donc, il y a des précisions à obtenir dans ce programme-là.
• (16 h 10) •
Il reste que notre position
d'organisation, c'est que ces compagnies... l'industrie pétrolière est une
industrie qui a... qui est la principale responsable de la crise climatique
dans laquelle on se trouve. De fermer les possibilités d'exploitation et
d'exploration, vous l'avez dit tantôt, vous en avez parlé, tantôt, c'est un
strict minimum. Et donc, il n'y a pas nécessairement besoin d'avoir... même
pour fermer ces choses-là, pas nécessairement besoin, dans notre perspective,
des compensations, parce que, justement, à cause des incidences de cette
industrie-là sur la crise climatique,
M. Julien : Soyez assuré,
monsieur Viau, qu'ici l'addition qu'on a, c'est... je veux juste comprendre
bien les motifs. Je ne porte pas de jugement, bien au contraire, là, puis je ne
suis pas étonné de la position de votre groupe, là, par rapport à ce que vous
prônez, là, alors... Mais j'essaie juste de cheminer avec vous. Bon, c'est un
strict minimum, ça, on l'a mentionné tantôt, vous dites : C'est un strict
minimum, on est les premiers à le faire. Donc, on pave actuellement, là, on
ouvre le chemin, puis on est les premiers à le faire. Puis c'est un strict
minimum. Et le fait qu'on le fasse, moi, je réitère qu'actuellement on a une
part de responsabilité. Puis tous les États ont une part de responsabilité,
puis puisque personne ne le fait actuellement, c'est-à-dire que puisqu'on a
laissé faire, on a permis, on a encadré, et ces gens-là ont respecté
l'encadrement qu'on a mis, tu sais, je trouve ça un peu particulier qu'il n'y
ait pas de reconnaissance de nos responsabilités dans ce qui a été permis, et
en plus qu'on est les premiers à cesser de le permettre. Donc, somme toute,
moi, je pense que c'est courageux. Encore là, les indemnités, ce que j'entends,
c'est... est ce que vous dites... À tout le moins les indemnités, le programme
d'indemnisation devrait être très précis pour être certain, là, des volets
qu'on indemnise, parce que vous avez parlé d'un article qui amène un peu de
flou. Mais si c'était hyperprécis, puis que les intentions du programme
d'indemnisation étaient claires sur certains frais, comme des licences, comme
d'autres objets qui ont été payés pour se rendre conformes à une loi qui était
sous notre responsabilité, est ce que malgré ça, vous seriez fermé à l'idée des
indemnisations?
M. Viau (Marc-André) : Comme
je l'ai dit, notre position, on trace la ligne à pas d'indemnisation, parce
que, comme je l'ai dit en allocution, il y aura toujours une bonne raison
d'avoir des indemnités, et l'industrie va toujours demander certaines
indemnisations, puis ils vont gratter à gauche, à droite, et ils vont aller
chercher des indemnisations ou à tout le moins, ils vont le demander. Donc, à
un moment donné, il faut tracer la ligne. Nous...
M. Viau (Marc-André) : ...la
trace là. Vous la tracer ailleurs, dans ce projet de loi là, avec un programme
d'indemnités. Au final, je suis pas mal certain que tout le monde va finir par
applaudir ce projet de loi là en disant : Bien, on l'a fait et il y aura
peut-être certains éléments que nous trouverons imparfaits, d'autres trouveront
imparfaits. Mais on sera... on aura avancé dans ce dossier-là.
M. Julien : Permettez,
M. Viau.
M. Viau (Marc-André) : Nous,
c'est là qu'on met la ligne.
M. Julien : Parfait.
Alors, si vous permettez, M. Viau, rien que pour être certain, parce que
vous avez ramené un thème qui m'a aussi interpellé quand vous l'avez mentionné,
vous l'avez rappelé maintenant. Toutes les industries vont venir faire des
demandes d'indemnisation, puis on ne sait pas où ce que ça va terminer puis,
etc. Mais moi, si ça termine, en réalité, qu'on indemnise au Québec quand on
enlève un droit sur les frais qui ont été payés pour être conforme à ce
droit-là, n'importe quelle industrie, moi, je vais être prêt à la compenser à
tout égard parce qu'on vient fixer d'une manière claire qu'on a permis...
nous-même, on était responsable de donner un droit. Ces gens-là s'y sont
conformés et on rembourse, en fin de compte, les frais qui ont nécessité une
conformité à notre responsabilité. Donc, je vois difficilement, dans n'importe
quelle industrie, quelles dérives qui pourrait y avoir dans un geste qui
pourrait être similaire, à tout égard, pour d'autres industries. On a exigé des
paiements, des licences et des frais pour être conformes. Alors, j'entends que
vous dites : Oui, mais ça pourrait. Non, je ne le vois pas. Alors,
expliquez-moi comment ça pourrait faire en sorte que soudainement les
industries demandent n'importe quoi puisqu'on le met uniquement sur des
éléments pour le maintien qui était nécessaire pour le maintien d'une
conformité qu'on a nous-mêmes comme État exigée.
M. Viau (Marc-André) : Je
pense que je la CQDA en a parlé, hier, il n'y a rien qui empêche une compagnie,
ce n'est pas parce qu'on fait des indemnités qu'une compagnie ne peut pas,
après ça, décider de dire, puis de venir faire des poursuites. Donc, il n'y a
rien qui garantit quoi que ce soit en procédant de cette façon-là. Donc, à ce
titre là, je veux bien croire qu'on a donné une conformité, mais on a donné une
conformité à une industrie, à des compagnies qui travaillent dans une industrie
qui est dommageable pour l'environnement, qui est dommageable pour la santé.
C'est tellement dommageable pour l'environnement et dommageable pour la santé
que les investisseurs enlèvent leurs investissements de ces portefeuilles-là.
C'est tellement dommageable pour la Santé et l'environnement qu'on rejette des
projets comme GNL. C'est tellement dommageable pour l'environnement et la santé
qu'on décide de mettre fin, par exemple, à la vente de véhicules à essence.
Donc, on le sait qu'on doit plus le faire. Et on est plus loin que là où on
aurait dû arrêter normalement parce qu'on est dans un état de crise, et on
n'aurait pas dû se rendre à cet état de crise là. Donc, on essaye de se
rattraper, là.
M. Julien : Vous avez
parfaitement raison, M. Viau, mais je persiste quand même à dire qu'on est
quand même les premiers. Ça doit vouloir dire quelque chose, et je pense qu'on
doit le mentionner. Justement, vous m'amenez sur une autre piste. Le projet
loi, puis je pense qu'on n'a pas encore parlé de cet élément-là, mais c'est la
fin du financement par le gouvernement du Québec dans les hydrocarbures, là. Il
est prévu à l'intérieur du projet de loi. C'est une bonne mesure pour vous?
C'est adéquat?
M. Viau (Marc-André) : Est-ce
que c'est la fin du...? Bien, je veux dire, on ouvre la porte à la question de
ce qui va se passer aussi du côté de la biénergie. Est-ce que les compensations
offertes à Énergir peuvent être considérées comme du financement aux
hydrocarbures?
M. Julien : C'est un
distributeur d'énergie, ce n'est pas un exploitant, là.
M. Viau (Marc-André) : Oui,
mais... pas dans l'exploitation...
M. Julien : Encore plus
de 50 % de l'énergie au Québec, c'est fossile, là, quand même. Il faut...
M. Viau (Marc-André) : Ça
reste de l'énergie fossile. Donc, on compense pour de la perte de revenus d'une
industrie qui fait de la distribution, d'une entreprise qui fait de la
distribution de fossile. Donc, il y a des nuances, là. Je dirais qu'il y a des
nuances à apporter, mais oui vous avez un point sur la question de
l'exploitation et de l'exploration.
M. Julien : Parfait.
Maintenant, une fois qu'on a discuté de l'indemnisation, c'est un bon projet de
loi qu'on a devant nous?
M. Viau (Marc-André) : C'est
un bon projet de loi, s'il est combiné avec d'autres actions environnementales
fortes. Ce n'est pas un projet de loi qui réduit les émissions de gaz à effet
de serre. Donc, oui, c'est un bon projet de loi. Comme on dit, c'est un projet
de loi qui, à notre avis, pourrait être perfectible...
M. Viau (Marc-André) : ...c'est
un bon projet de loi, c'est un projet loi qui doit passer et, comme je l'ai dit
tantôt, je pense que ça va être un projet de loi qui va être applaudi par tout
le monde, vos collègues de l'Assemblée nationale et également l'ensemble des
intervenants qui sont venus, peu-être pas l'association pétrolière, mais ça,
c'est... Évidemment.
M. Julien : Est ce qu'il
va être salué par vous même si les indemnisations demeurent de manière très
stricte, avec un plan, une planification, un programme d'indemnisation très
clair sur les éléments que j'ai mentionnés?
M. Viau (Marc-André) : Vous
avez parlé de nuance, tantôt, on va sûrement faire une réaction nuancée.
Mais... c'est ça.
M. Julien : Parfait. Je
vais laisser mes collègues poser d'autres questions.
Le Président (M. Lemay) : M.
le député de Lac-Saint-Jean, allez-y, il reste environ un peu moins que
2 minutes.
M. Girard (Lac-Saint-Jean) :
Bonjour à vous. On a eu la chance de vous de voir lors du mandat
d'initiative sur les pesticides. Je ne sais pas si c'était vous qui était là à
ce moment-là mais ce fut fort intéressant. Juste... je veux quand même aller
rapidement puis je veux revenir un peu, justement, au niveau des
indemnisations, parce que c'est fort intéressant, ces discussions-là.
Puis on a eu aussi M. Ouellet qui a
passé ici. Et il avait beaucoup d'arguments concernant toute la question au
niveau, là, des droits des investissements, les règles internationales et aussi
où est-ce que le Québec se situe au niveau mondial. Parce qu'on est regardé, en
ce moment, à ce niveau-là avec ce projet de loi là. On est des leaders aussi.
Toute la question de la transition énergétique... Parce qu'on est en train de
développer les énergies renouvelables. On avance rapidement là-dedans, on a
tout l'éolien, le solaire. Et on a besoin aussi... Bien entendu qu'il y a des
projets que je ne vous énumérerai pas mais que ça prend des capitaux aussi
étrangers pour venir investir pour aller plus rapidement dans ce domaine-là.
• (16 h 20) •
Et vous ne croyez pas que, sans avoir,
dans... Parce que le projet de loi, qui est bien équilibré, avec un plan
d'indemnisation, en n'ayant pas ça, vous ne croyez pas que ça envoie un message
négatif aux investisseurs étrangers? Et que s'il n'y avait pas ces
programmes-là, bien, vous savez ce qui va arriver, on nous de l'a mentionné,
les contestations juridiques. Donc, je voudrais... Au niveau du message que ça
envoie au niveau mondial.
M. Boisseau-Bouvier
(Émile) : Oui. Merci pour votre question, monsieur le député. Je pense
que les investisseurs étrangers sont amplement capables de faire la distinction
entre le secteur fossile, qui est une énergie du passé, et le secteur
renouvelable, qui est une énergie du futur, où, comme vous l'avez très bien
souligné, le Québec est un leader.
Donc, les investissements... Les
investisseurs étrangers qui vont vouloir revenir investir en énergies
renouvelables au Québec sont capables de voir que le contexte est complètement
différent. On n'a pas de moratoire depuis une décennie sur l'exploitation des
énergies renouvelables. En fait, on est un leader, on en exporte, de l'énergie
renouvelable. On a des centres de recherche qui ont des renommées
internationales et on a...
Le Président (M. Lemay) : M. Bousseau-Bouvier,
je dois vous interrompre parce que le temps est écoulé.
M. Boisseau-Bouvier
(Émile) : Parfait.
Le Président (M. Lemay) : On
va passer au député de Mont-Royal Outremont pour environ 11 minutes.
M. Arcand : Merci
infiniment. Bonjour, Messieurs, bienvenue à cette rencontre. Là, je voyais, là,
que le ministre est en mal d'amour actuellement, là. Il a besoin de se faire
dire par les gens d'Équiterre que son projet de loi est fantastique. Alors...
Des voix : ...
M. Arcand : ...bien, ils
ont mis beaucoup de nuance mais, en tout cas, c'est clair que ça s'en allait
dans cette direction-là.
Il y a une chose cependant qui est très
bonne, c'est qu'évidemment, nous sommes quatre formations politiques à
l'Assemblée nationale, qui sommes ici. On a tous voté en faveur du principe, bien
sûr, de ce projet de loi là. Là, évidemment, l'échiquier politique risque de
changer au Québec dans les prochains mois. Il y a un nouveau parti politique
qui a été lancé, qui, lui, en tout cas, est en faveur des hydrocarbures,
d'après ce que j'ai entendu de la part de son chef, là. C'est le Parti
conservateur où monsieur Duhaime a déjà dit qu'il fallait faire des
hydrocarbures au Québec.
Ma question est bien simple. Comment vous
expliquez le fait que, si vous faites un sondage demain matin puis que vous
êtes dites : Écoutez, êtes vous en faveur de maintenir ça, êtes-vous en
faveur de la loi, probablement qu'il y a 80 pour cent du monde qui vont
dire qu'ils sont passablement en faveur de la loi? Puis, malheureusement, sur
le plan énergétique, en particulier sur le plan des ventes d'automobiles, de
quatre par quatre, le Québec est un des plus mauvais à ce niveau-là. Comment
vous expliquez cette espèce de dichotomie qui arrive actuellement?
M. Boisseau-Bouvier
(Émile) : Oui. Merci beaucoup pour votre question. Je peux même vous
donner un scoop : il y aura un sondage de cette nature qui sortira demain
matin. Donc...
M. Boisseau-Bouvier (Émile) : ...votre
question est très d'adon. Comment est-ce qu'on peut expliquer cette
différence-là? Bien, il y a plusieurs facteurs. Les gens aiment leur confort,
les gens aiment leurs habitudes aussi. Les gens n'aiment pas se faire dire ce
qu'ils doivent faire. Par contre, il y a une réalité qui est inchangeable, il y
a une réalité climatique dont on a parlé en profondeur plus récemment. Et puis
le Québec a toutes les cartes dans ses mains pour vraiment être un leader et
accélérer cette transition énergétique là.
En ce moment, vous l'avez bien dit, on ne
produit pas des produits pétroliers. C'est une occasion en or, pour nous, de se
sortir de notre dépendance aux produits pétroliers. Pour ça, comme on l'a dit,
on veut travailler avec le gouvernement, on veut travailler avec les
oppositions aussi. Ça nous fera plaisir de discuter avec vous de toutes les
options qui sont dans notre coffre à outils pour réduire notre dépendance aux
hydrocarbures. Merci beaucoup.
M. Bonhomme (Charles) : Si je
pouvais compléter...
M. Arcand : Est-ce qu'il y a
un domaine actuellement que vous privilégiez, par exemple, pour lutter contre
les GES? Est-ce qu'il y a vraiment quelque chose qui vous apparaît plus
évident, pour le Québec, que d'autres? Tu sais, par exemple, on disait, tout à
l'heure, que... Le Pr Pineau, lui, le salaire, ce n'est pas trop sa tasse de
thé. Actuellement, les gens voient d'autres choses. Est-ce que... Chez vous,
est-ce qu'il y a des pistes de solution, pour réduire les gaz à effet de serre,
que vous voyez?
M. Bonhomme (Charles) : Oui,
bien, merci, M. le député, pour votre question. C'est effectivement une
excellente question, car il y a plein de chantiers importants, hein, pour
atteindre nos cibles climatiques. Tout d'abord, s'attaquer au secteur des
transports, comme on le sait, qui représente 44 % des GES, le secteur de
l'énergie. Donc, avec ce projet de loi là, ce serait justement un pas
incroyable dans la bonne direction.
J'aimerais revenir aussi sur l'importance,
je crois, de proposer des projets de loi ou on créerait une acceptabilité
sociale auprès des Québécois. Et ce projet de loi là, comme vous le disiez
tantôt, a été accueilli par les quatre partis politiques, et c'est un élément
clé. Lorsqu'on a rédigé notre mémoire, on parle de... que le gouvernement
saisisse cette opportunité-là, justement pour prouver aux Québécoises et
Québécois qu'il compte sérieusement atteint ses cibles, et que ce projet de loi
là est un outil pour y arriver. Donc, je salue, tout d'abord, le projet de loi
dans ce sens-là.
Lorsqu'on parle de secteur de transport,
Équiterre et la Fondation David- Suzuki, on travaille justement sur des
rapports sur les véhicules zéro émission. On propose d'ailleurs de diminuer
notre dépendance à l'auto solo, de revoir nos modes de vie, et de la façon
qu'on se transporte, mais également de la façon qu'on consomme. Donc, elle se
veut face au transport, face à l'énergie, mais face aussi à la responsabilité
de chacun. Donc, nos organisations sont de grandes organisations qui cherchent
également à sensibiliser les gens à ces efforts-là, et de travailler avec le
gouvernement pour que leurs projets soient acceptés socialement. Donc, voilà.
M. Arcand : Très bien. Je
vais vous poser une question qui touche, entre autres, les communautés
autochtones, parce que vous en avez parlé dans votre mémoire. Et je voudrais
que vous nous expliquiez un peu ce que vous voulez dire, particulièrement au
fait qu'hier, on a entendu évidemment le fait qu'une compagnie qui s'appelle
Questerre essaie d'avoir actuellement, ou a une entente avec des communautés
autochtones d'Abénaquis, qui... pour un projet possible. Alors là, on
s'embarque dans une situation qui est quand même assez délicate, quand on
touche les communautés autochtones, et la possibilité qu'elles pourraient
décider, en disant : Écoutez, c'est sur notre... dans notre secteur, et donc
vous n'avez pas un mot à dire, et ainsi de suite, là.
J'essaie juste de voir comment vous voyez
ces relations-là en particulier, parce qu'il n'est pas exclu que d'autres
communautés fassent la même chose, même si l'ensemble des communautés
autochtones, en général, est d'accord, évidemment, avec le fait qu'il ne doit
plus y avoir d'hydrocarbures au Québec. Mais juste nous expliquer un peu votre
point de vue à ce niveau-là.
M. Bonhomme (Charles) : Oui,
merci. Je pense que c'est une excellente question, puis c'est un point
important de notre mémoire, hein? Pour répondre précisément à votre question,
par rapport au projet pilote qui se passe, là, à Wôlinak, il y a clairement des
personnes, au sein de cette communauté-là, qui sont en accord avec le projet,
alors que d'autres, non. Donc, ça prouve que notre recommandation, justement,
de les contacter, puis de s'asseoir avec eux afin d'obtenir leurs
recommandations, leurs revendications, leurs soucis... Donc, d'où l'importance
de s'asseoir avec eux, puis de voir, bien, justement, à quel point il y a une
acceptabilité...
M. Bonhomme (Charles) :
...est-ce que c'est une partie infime de cette communauté-là qui est d'accord,
alors qu'il y a justement une plus grande partie de la communauté qui n'est pas
d'accord? Donc, je pense que ça vaudrait la peine, justement, de les inviter à
ces consultations-là, de s'asseoir avec eux pour avoir leurs revendications.
Nous, pour Équiterre et la Fondation David
Suzuki, on utilise, dans le fond, cette plateforme-là pour vraiment mettre le doigt
sur l'importance de collaborer avec eux puis d'augmenter la collaboration entre
le gouvernement et les peuples autochtones pour un projet de loi comme celui-ci
sur une industrie qui touche à leur culture et à leur subsistance. Donc, je
crois également qu'il y a un manque de collaboration entre les communautés
autochtones et le gouvernement pour plusieurs projets de loi, mais pour
celui-ci, c'est d'autant plus important que l'industrie pétrolière et gazière a
eu des impacts énormes sur leur mode de vie, leur culture et leur subsistance.
Alors, je crois que c'est important, là, vraiment, de les inviter puis d'avoir
une bonne conversation avec eux pour avoir, justement, leurs revendications et
leurs recommandations précises.
M. Arcand : D'accord. On a
parlé des remboursements, du fait que vous disiez : Écoutez, il ne faut pas
rembourser personne. Évidemment, on a eu plusieurs personnes qui sont
intervenues. Il y en a qui ont cette position-là, il y en a d'autres qui nous
disent : Écoutez... Il y a eu, hier, un professeur qui est un avocat qui fait
du commerce international, qui a dit : Écoutez, on ne peut pas ne pas
compenser, en tout cas, en partie. Il est clair que si on rembourse zéro, un
des arguments, c'était de dire : Les détenteurs de permis n'ont aucune raison
de ne pas, maintenant, poursuivre le gouvernement si la décision était de ne
rembourser rien.
• (16 h 30) •
Alors, ma question, c'est : Il y a
clairement un risque que cette transition s'avère encore plus incertaine et
dispendieuse encore. Est-ce que, vous, vous êtes prêts? Vous maintenez cette
position-là en disant : Bon, bien, moi, je pense qu'il est nécessaire de gérer
ce risque-là, de... on est prêts à vivre avec le risque.
M. Viau (Marc-André) : Oui,
je pense que... et comme j'y ai fait référence un peu plus tôt, mais le CQDE
l'a exprimé hier, ce n'est pas parce qu'on compense qu'on se met à l'abri
d'éventuelles poursuites. Et le résultat de ces poursuites, dans 8, 10 ans, 12
ans, si poursuites il y a, sont très incertaines, étant donné l'évolution de la
crise climatique et l'évolution des perceptions par rapport à l'industrie
fossile. Donc, c'est pour ça que nous, on trace la ligne à pas d'indemnisation
parce qu'à un moment donné, il faut la tracer, la ligne. Et, encore là, on parle
du précédent juridictionnel, du fait que le Québec est la première juridiction
à le faire. Si nous le faisons, faisons-le bien et soyons ambitieux, soyons
fiers de ce projet de loi.
M. Bonhomme (Charles) : Si je
pouvais compléter, il faut se le dire aussi, là, c'est une industrie
particulière, hein? Ça fait des années qu'ils sont conscients des torts qu'ils
causent aux communautés, aux écosystèmes, donc, pour eux, ils savaient tout ça,
là. Donc, on croit également aussi que l'industrie pétrolière a les sous pour
se sortir de son propre trou. Alors, il faut se le dire, c'est une industrie
qui a coûté cher à la population en argent, mais moralement aussi. Donc, je
crois qu'il faut... Oui, la comparer aux industries, c'est correct, mais il
faut vraiment la mettre au bas du mur puis leur dire : Bien, écoutez, votre
industrie, elle a causé des torts que d'autres industries n'ont pas causés.
Donc, vous êtes responsables de la crise climatique en grande partie, donc
payez en grande partie.
M. Arcand : Moi, j'avais une
question simple pour vous. Étant donné qu'il y a eu quand même, au fil des
dernières années... Vous avez parlé de l'importance pour vous, vous avez dit :
Le Québec doit avoir une influence dans le monde. Ce n'est peut-être pas en
Russie ou en Chine que vous auriez une influence. Expliquez-moi à quel endroit
vous pensez avoir une influence.
Le Président (M. Lemay) : ...s'il
vous plaît.
M. Boisseau-Bouvier (Émile) : Oui,
donc, il y a plusieurs forums où c'est possible pour le Québec d'avoir une
influence, entre autres on a parlé de la Beyond Oil and Gas Alliance. On va
avoir des alliés au sein de cette coalition-là qui vont vouloir apprendre de
notre cheminement. Il y a aussi des forums internationaux comme les conférences
des parties, les COP, qui existent à chaque année. Et puis, comme on l'a dit,
peut-être que ce ne sera pas la Russie, peut-être que ce ne sera pas la Chine
qui va devoir bouger... qui va bouger en premier, mais tout le monde va devoir
bouger. Si on veut globalement, si on veut mondialement limiter le
réchauffement climatique à 1,5 degré Celsius, il va falloir que toutes les
autres juridictions suivent la voie du Québec. Et c'est pour ça que c'est
d'autant plus important qu'on trace la bonne voie.
Le Président (M. Lemay) : Merci.
Merci, M. Boisseau-Bouvier. Et nous allons maintenant céder la parole à madame
la députée de Sainte-Marie-Saint-Jacques pour environ 2 minutes 45.
Mme Massé : On va continuer
dans le même sens, monsieur de la Fondation Suzuki. Le ministre est très, très,
très préoccupé que l'État du Québec soit...
16 h 30 (version non révisée)
Mme Massé : ...la
responsabilité avec son projet d'indemnisation, et tout ça. Nous traçons la
même ligne... la ligne à la même place que vous: il ne devrait pas y en avoir.
Ceci étant dit, l'industrie, et vous venez
de le nommer, ignore, elle, ferme les yeux sur leurs responsabilités depuis
plus de 25 ans. Alors, est-ce que vous êtes au courant s'il y a des recours
juridiques, à travers la planète contre des pétrolières et des gazières pour
réclamer, justement, des dommages climatiques qu'elles ont causés à l'humanité
depuis des décennies?
M. Boisseau-Bouvier (Émile) : Oui.
Bien, un exemple qui pourrait être intéressant pour celui du Québec, c'est la
France, qui a mis fin à la fracturation hydraulique. Et puis il y a eu des
compensations, mais des compensations qui ont été minimes. En fait, il y a une
seule société qui a reçu des compensations, une société texane qui demandait
117 millions d'euros à la France et qui, finalement, a reçu un million d'euros.
Et donc ça pourrait être un exemple du genre de compensation que les compagnies
québécoises pourraient recevoir si jamais on décidait d'aller de l'avant avec
cette avenue que nous ne privilégions pas.
Mme Massé : OK, mais, de
l'autre côté, est-ce qu'il y a des États, des citoyens qui ont porté des
accusations contre les pétrolières et gazières pour les impacts, les dommages
climatiques qu'elles ont causés à travers les années, à votre connaissance?
M. Bonhomme (Charles) : C'est
une excellente question. Par contre, on devrait retourner étudier ça, je n'ai
pas la réponse pour vous en ce moment.
Mme Massé : C'est parfait. Je
profitais de votre présence. Peut être juste une autre question, il nous reste
quelques secondes. Vous avez la conviction que l'État québécois est souverain
et légitime de dire aux pétrolières et aux gazières: Non, vous allez arrêter
d'exploiter, d'explorer, et non, vous n'aurez plus d'argent de notre part. Vous
pensez qu'on a cette légitimité-là, comme État souverain? Bien, pas encore,
mais...
M. Boisseau-Bouvier (Émile) : Tout
à fait. Oui, on pense que le Québec a la légitimité de dire non aux industries
pétrolières, aux industries gazières et de ne pas aller de l'avant avec des
compensations, mais de mettre fin à leurs activités.
Mme Massé : Merci
Le Président (M. Lemay) : Merci.
Nous allons maintenant passer au troisième groupe d'opposition. M. le député de
Jonquière.
M. Gaudreault : Oui. Je ne
suis pas toujours d'accord avec QS, mais, sur la souveraineté, évidemment, je
suis d'accord. Et merci d'être là. Moi, je voudrais savoir, on entend quand
même, ici, à plusieurs reprises, par rapport aux indemnisations.... puis nous
sommes contre les indemnisations, mais il faut calculer, dans le fond, le
risque d'avoir des poursuites ou de ne pas avoir de poursuite. On a posé un peu
la question hier à M. Beaulieu... pas Beaulieu, mais M. Ouellet. Donc, est-ce
que, pour vous, ça doit peser dans la balance ou, de toute façon, les
entreprises, qu'il y ait une indemnisation minimale ou qu'il n'y ait pas
d'indemnisation, vont se revirer de bord puis vont poursuivre le Québec ou le
gouvernement? Donc, est-ce qu'on doit tenir compte de ces avantages puis ces
inconvénients dans la balance, là?
M. Viau (Marc-André) : Bien,
je pense qu'il faut surtout... puis c'est notre position, je pense qu'il faut
surtout, à un moment donné, juste prendre une décision puis dire: C'est là
qu'on trace la ligne. Donc, oui, on pourrait toujours dire: Bien, on a moins de
risques si on met tant, puis si on en met plus, on a encore moins de risques,
tu sais. Puis on peut aussi dire qu'on a les outils législatifs pour dire: Non,
c'est ça le cadre puis c'est fini comme ça. Puis il y a des exemples, dans
d'autres industries, l'industrie de l'uranium, l'industrie de l'amiante, vous
en avez parlé hier avec d'autres intervenants, où c'est possible de le faire.
C'est ça.
M. Gaudreault : Merci. Donc,
au fond, c'est un choix politique et c'est un choix politique de s'assumer à
cet égard. Je pense que c'est votre recommandation 6 qui suggérait que le
Québec s'implique davantage dans BOGA. Comment on pourrait s'impliquer
davantage dans BOGA, comme État subnational, là? J'aimerais bien aussi qu'on
soit souverain, mais comme État subnational, avec les autres membres de BOGA, qu'est
ce qu'on peut faire de plus pour être encore plus actif dans BOGA, selon vous?
M. Boisseau-Bouvier (Émile) : Oui,
bien, il y a des pressions politiques qui peuvent être faites, il y a du
partage de connaissances qui peut être fait aussi. Le Québec a déjà beaucoup de
liens internationaux, donc, pas nécessairement juste dans la fin de
l'exploration et l'exploitation des hydrocarbures. C'est un travail qui se fait
déjà pour le Québec...
M. Boisseau-Bouvier (Émile) :
...sur d'autres plans, et on va pouvoir le faire au sein de la... et partager
nos expériences, voir comment ça s'est passé, quels recours juridiques il y a
eu au Québec ou il n'y a pas eu au Québec, et puis expliquer aux autres
juridictions qu'elles doivent nous suivre si on veut globalement limiter le
réchauffement climatique à 1,5 degré Celsius.
M. Gaudreault : OK.
Le Président (M. Lemay) : Merci.
M. Gaudreault : Donc, c'est
bon. Merci, merci beaucoup.
M. Boisseau-Bouvier (Émile) : Merci.
Le Président (M. Lemay) : Alors
merci, monsieur le député de Jonquière. Ceci termine cette période d'échanges
avec les membres de la commission. Je vous remercie à tous pour votre
contribution aux travaux de la Commission et je vais suspendre quelques
instants pour permettre au prochain groupe de prendre place. Merci.
Des voix : Merci. Merci,
Monsieur le Président. Merci.
(Suspension de la séance à 16 h 40)
(Reprise à 16 h 50)
Le Président (M. Lemay) :
Alors, la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des
ressources naturelles reprend ses travaux. Et je souhaite maintenant la
bienvenue à Madame Pétrin d'Eau Secours! Alors, bienvenue à ces travaux. Alors,
vous allez avoir un exposé d'environ 10 minutes, suivi d'une période d'échange avec
les membres de la commission et je vous sorte de la parole de ce pas.
Mme Pétrin (Rébecca) : Merci
beaucoup. Donc, bonsoir à tous. Une petite présentation de notre organisme Eau
Secours! Donc, ça a été fondé en 1997. Eau Secours! a pour mission de promouvoir
la protection et la gestion responsable de l'eau dans une perspective de santé
environnementale, d'équité, d'accessibilité et de défense collective des droits
de la population. Nous nous opposons à toute forme de commercialisation,
privatisation, gaspillage et appropriation à des fins privées pour en assurer
le caractère collectif. Nous luttons également pour en protéger sa qualité
contre diverses sources de contamination qui sont encore nombreuses
aujourd'hui, malheureusement.
Au cours des dix dernières années, nous
avons participé activement et étudié et dénoncé tous les risques liés à l'eau
potable en lien avec les projets d'énergies fossiles. Avec nos membres, nous
avons dit non au gaz de schiste, nous avons dit non au projet d'énergie est, nous
avons dit non à GNL Québec, tout en participant aux différentes audiences
publiques de 2010, 2014, 2016 sur ce sujet. Nous avons mis en garde le
gouvernement du Québec en 2016 lors du projet de loi no 606, qu'à chaque projet
de forage s'ajoutent des conséquences qui seront irréversibles sur la qualité
de nos eaux du Québec. Mais, malgré tout ça, c'est avec une fébrilité et une
satisfaction débordante que je présente aujourd'hui notre mémoire et nos
recommandations sur le projet de loi 21 pour la fermeture de cette filière qui
n'aurait jamais dû être ouverte. Merci à la commission de nous recevoir.
Donc, la première partie de notre mémoire
parle un peu de l'état des puits au Québec. Vous pouvez voir dans le tableau,
en fait, qui est présenté qui ... en fait, ce sont des données, des données qui
sont tirées de... qui est la base de données du ministère de l'Énergie et des
Ressources naturelles. Il y a 132 puits sur 961 qui ne sont pas fermés
définitivement. Ils sont donc actifs ou temporairement fermés. Le tableau
présenté fait état de la conformité, en fait, de ces 132 puits. On remarque
qu'il y a beaucoup de puits qui sont sans information. Donc, 86 puits sont sans
Information, 29 puits sont non conformes et 17 puits conformes.
Je cite également, dans la première
section de notre rapport, un document, en fait, de l'Association québécoise de
la lutte pour la pollution atmosphérique datant de 2006 sur des inspections de
terrain qui ont eu lieu, et ces inspections-là étaient enfin à la demande du...
Les auteurs du rapport parlaient de puits enfouis, de puits abimés, avec des
traces visibles d'émanations de gaz, des coordonnées géographiques étaient
erronées, bref, multiples problèmes. Malheureusement, ce projet-là n'a pas pu
être complété et, depuis, nous ignorons toujours l'état des puits n'ayant pas
reçu de visite.
Quelquefois, également, on entend parler
de vieux puits refaisant surface, comme ce matin même dans un article de
Mathieu Lamothe, paru dans Le Nouvelliste, qui relate l'histoire d'un couple qui
a acheté une maison en Mauricie. Je suis désolé, je n'ai pas pu l'inclure au
mémoire, là, l'article a paru trop dernièrement, en fait, mais je vais quand
même vous en lire un extrait. «Le puits abandonné chez M. Laflamme, qui s'est
révélé lors de la démolition d'une grange au tournant des années 2000, entraîne
depuis l'affaissement de plusieurs parcelles de son terrain. La situation
empire année après année. Trois trous remplis d'eau et de boue grisâtre
desquels s'échappent les bulles produites par un gaz s'apparentant à du méthane
ont également fait leur apparition. L'été, le gazon qui recouvre les endroits
où le terrain s'affaisse est d'une couleur jaunâtre, une substance huileuse
remonte régulièrement à la surface du sol». Ceci est malheureusement l'héritage
forcé de l'industrie des énergies fossiles auxquelles le Québec doit maintenant
faire face. Plus de 900 puits aux conditions inconnues partout dans le sud du
Québec. Certains sont encore sous la responsabilité des entreprises, mais la
majorité a abandonné, fermé et relève maintenant du ministère. La bonne
nouvelle, en fait, avec l'arrivée du projet de loi 21, c'est qu'il n'y aura
plus de nouveaux puits qui s'ajouteront à cette liste. Mais la mauvaise
nouvelle, c'est que, de tous ces puits existants, ils ne disparaîtront pas et
c'est maintenant à nous de s'en préoccuper.
Donc, en lien avec l'état de situation des
puits, nos recommandations, en fait, vis-à-vis le ministère, c'est de procéder
au recensement...
Mme Pétrin (Rébecca) : ...l'inspection
de tous les puits fermés n'ayant pas été inspectés récemment. Afin d'évaluer
leur qualité de fermeture, l'inspection doit comprendre l'évaluation de
l'étanchéité et la conformité de leur bouchon de ciment ou...
Nous recommandons également au ministère
qu'il maintienne l'obligation aux entreprises de soumettre un rapport
d'inspection annuel pour les puits fermés temporairement en vertu de
l'article 60, paragraphe 8, du Règlement sur le pétrole, les gaz, les
réservoirs souterrains de la Loi sur les mines. Donc, on ne voudrait pas que
cette obligation-là soit retirée dans le projet de loi étant donné que les
entreprises qui sont encore propriétaires de leurs puits peuvent très bien
quand même continuer à effectuer ces évaluations-là.
La deuxième section de notre rapport
concerne la contamination des eaux suite aux forages. Dans cette section-ci, on
présente des composés chimiques utilisés dans le forage de 18 puits dont
la toxicité a été démontrée et qualifiée dans différents rapports. Ces rapports
font aussi état d'un manque de connaissances sur les informations relatives aux
intrants chimiques utilisés par l'industrie du... au Québec. Puisque ces
dernières, donc les industries, ne les ont pas rendus publics, ce qui laisse
planer un sérieux doute sur l'écotoxicologie des eaux souterraines des milieux
avoisinants des puits de gaz. Les données sont détenues par les exploitants,
mais elles ne sont pas rendues publiques auprès des autorités et des
chercheurs. C'est donc vraiment difficile de connaître exactement c'est quoi,
les produits qui ont été injectés dans le sol. Et, en effet, ce sont jusqu'à
62 composés chimiques qui ont pu être utilisés dans les 18 puits de
fracturation. À l'heure actuelle, et bien que plusieurs de ces composés
chimiques ont été caractérisés comme étant toxiques pour l'environnement et la
santé humaine, nous ne pouvons toujours pas confirmer avec certitude le nombre
exact des composés chimiques qui ont été utilisés, ni leur volume ni leur
concentration, puisqu'on n'a pas les données. On cite également, dans cette
section, un passage du MDDEFP en 2013, qui mentionnait que nous connaissons mal
la composition des intrants utilisés et comment ces intrants-là se comportent
dans le milieu récepteur. Donc, c'est très limité, finalement, nos
connaissances sur les interactions une fois que les produits chimiques sont
injectés.
Tel qu'il a été présenté également dans le
mémoire de Pascal Bergeron, un cas de contamination a été recensé au Québec, et
c'est le puits Bourque en Gaspésie. Ça ne veut pas dire qu'il y a un seul cas
de contamination au Québec. Comme je l'ai rappelé avant, il y a énormément de
puits qui n'ont pas fait office d'études plus poussées. Mais le fait qu'il y
ait un cas défini, c'est malheureusement suffisant pour douter de l'intégrité
des sources d'eau pour l'ensemble des sites de forage non conformes ou sans
suivi.
Il faut savoir aussi que l'obligation de
faire des études hydrogéologiques lors des forages ne relève que depuis
l'adoption, en fait, du Règlement de protection et de protection des eaux
potables de 2014. Donc, tous les puits de forage qui ont eu lieu avant cette
date-là n'ont pas eu d'étude hydrogéologique en amont. Et malheureusement même
les meilleures pratiques vendues par les représentants de l'industrie génèrent
des déversements qu'on ne peut pas dire anecdotiques. Donc, nous voici devant
la situation où l'industrie a l'obligation de remettre en état des sites forés,
mais on ne connaît pas vraiment l'état en amont des sites et on ne connaît pas
vraiment non plus l'état de situation des sites aujourd'hui.
Donc, dans nos recommandations, nous
recommandons au gouvernement du Québec, pour une fermeture des puits
transparente, sécuritaire et réussie, de procéder à des évaluations
environnementales de sites de production susceptibles d'avoir fait usage de
produits chimiques, donc d'aller plus en profondeur dans les 18 sites où
il y a eu de l'injection, et de rendre publique la liste des composés chimiques
utilisés, d'évaluer l'impact de ces produits sur l'environnement, les milieux
de vie et la santé humaine. Nous recommandons aussi au ministère de procéder à
des analyses supplémentaires sur les interactions de ces produits chimiques là.
Nous recommandons également au ministère d'exiger une étude hydrogéologique
systématique pour l'ensemble des puits actifs ou temporairement fermés afin de
connaître le nombre de puits contaminés, les types de contamination et l'état
écotoxicologique de ces eaux. Donc, à l'article 13, alinéa 2, on ne
stipule pas directement cette obligation, donc on devrait bonifier cet
article-là.
Et puis, je veux juste rappeler, Pascal
Bergeron avait bien spécifié, dans son mémoire, la technique d'échantillonnage
d'eau en amont, donc d'aller suffisamment en amont des prélèvements d'eau pour
avoir, en fait, l'échantillonnage d'eau sans l'impact du forage pour vraiment
comparer puis pouvoir quantifier quel est l'impact du forage sur la qualité des
eaux souterraines et de surface, évidemment. Et...
Mme Pétrin (Rébecca) : ...nous
demandons également, au ministère, de faire référence à la LQE dans le cadre de
la restauration des sites afin que les obligations de décontamination
s'appliquent. Nous demandons également qu'un avis du ministre de
l'Environnement soit remplacé par un avis de conformité officiel. Donc, même si
les entreprises de forage ont l'obligation de souscrire à la LQE, le projet de
règlement... le projet de loi serait bonifié... en fait, qu'il y ait une
mention spécifique à cet effet-là, et puis ça permettrait de définir mieux
aussi à qui revient les coûts de ces travaux-là.
Le Président (M. Lemay) : En
conclusion.
Mme Pétrin (Rébecca) : Oui?
Le Président (M. Lemay) : En
conclusion, allez-y.
Mme Pétrin (Rébecca) : Donc,
en conclusion, on s'oppose fermement à ce qu'un centime soit versé à
l'industrie ou à l'un des représentants, remboursements de frais d'indemnités
avant que la fermeture et la restauration du site ne soient complètes et qu'un
avis de conformité ne soit rendu par le ministère de l'Environnement. Donc, on
considère que ça va coûter extrêmement cher, à l'État, de décontaminer les
sites et on ne voudrait pas que les indemnisations soient remises avant la
fermeture complète des travaux. Merci.
Le Président (M. Lemay) : Merci,
Mme Pétrin, pour votre exposé. Nous allons maintenant procéder à la période
d'échange avec les membres de la commission. Monsieur le ministre, la parole
est à vous.
• (17 heures) •
M. Julien : Oui. Oui, merci.
Merci, Mme Pétrin, pour vos commentaires et vos travaux. Je fais quand même de
distinction, si vous permettez, des éléments du projet de loi et des éléments
qui sont plus, pour moi, les fameux puits orphelins, là. Puis je vous écoutais
tantôt, mais moi, à chaque année, là, je dépose un état sur les fameux puits
orphelins ou, bien, je ne sais pas comment qu'on les qualifie, c'est-à-dire les
puits qui ne sont pas concernés par le projet de loi, pas les 62 puits,
mais les éléments que vous mentionnez, puis un état assez, en tout cas, assez
précis, parce que je me fais beaucoup questionner quand je le dépose. Et de
mémoire, quand je suis arrivé en fonction, de plus... en plus, il y avait
au-dessus de 200 puits qui n'étaient pas localisés, là, qui dataient, en
fin de compte, de documentations qui dataient de 150 ans, 160 ans,
qui étaient : On a entendu dire ou on a vu quelque part qu'il y avait
peut-être un puits puis on le cherche, là. Puis je disais : O.K., bien,
cherchez-le, puis ils allaient sur le terrain puis ils ne le trouvaient pas.
Mais bref, on donne un état, là, de mémoire, c'est à peu près 700 puits
qu'on a réduits à 500, puis l'état avec des niveaux de fermeture. Un peu le
tableau que vous dressez à l'intérieur de votre mémoire.
Puis j'ai l'impression qu'on fait le travail, peut
être qu'on ne le fait pas à votre pleine satisfaction puisque vous émettez des
commentaires que j'ai bien lus, puis je pense qu'on va regarder ces
commentaires-là, là, à la face même de ces puits orphelins là. Ça ne veut pas
dire que vos commentaires ne s'appliquent pas aux 62 puits qui sont
couverts à l'intérieur du projet de loi pour les 182 licences actives.
Moi, je comprenais, là, que les études hydrogéologiques, là, elles allaient
être faites, elles sont exigées, puis en plus elles allaient être rendues
publiques, là, selon l'article 63. Alors, votre crainte par rapport aux études
hydrologiques, c'est que?
Mme Pétrin (Rébecca) : En
fait, notre crainte, c'est que les études et la décontamination des sites
prennent en fait... En fait, c'est ce qu'on ne voudrait pas, c'est qu'il y ait
des indemnités qui soient remises à des entreprises avant que l'ensemble des
études, des évaluations environnementales soient faites. Donc, on considère que
l'argent qu'on peut remettre aux entreprises, c'est à peu près le seul argument
qu'on a valable pour que les entreprises souscrivent à leurs obligations
légales. On le sait que le plus gros de la facture risque d'être les factures
pour la décontamination des sites. Donc, on a vu facilement un puits... Le
puits, en fait, qui est contaminé, il y a des factures de 10 millions de
dollars... pour la décontamination de ce puits-là, alors que le ministère avait
budgété 44 millions pour l'ensemble de la fermeture. Donc, les prix sont
franchement plus hauts et ça serait vraiment dommage, en fait, que l'industrie
n'ait pas les fonds nécessaires pour procéder à ces travaux-là suite au
versement des indemnités. Donc, nous, c'est vraiment le point qu'on tient,
c'est qu'on veut vraiment s'assurer que l'ensemble des évaluations
environnementales soient faites, que l'ensemble des processus de
décontamination soient faits avant qu'il y ait une seule indemnisation qui soit
donnée.
M. Julien : Mme Pétrin, je
vous rejoins totalement là-dessus puis je vous dirais que cette idée, là, qu'on
a discutée, le projet de loi, je l'ai amené assez rapidement, là. C'est mon
petit côté stratégique de dire : Écoutez, on ne mettra pas une cent
d'indemnisation tant qu'il n'aura pas démontré, clairement, la réhabilitation
est adéquate, avec un système où le MELCC, le ministère de l'Environnement et
le MERN, a posteriori, là, n'aura pas validé le caractère adéquat de la...
17 h (version non révisée)
M. Julien : ...réhabilitation.
Alors, j'entends bien, pour vous, vous êtes confortable avec le fait qu'on n'indemnise
aucun montant, tant et aussi longtemps qu'il n'y a pas eu cette
démonstration-là. Et je lis et j'entends dans votre discours que vous
souhaiteriez qu'il y ait certains renforcements par rapport aux mesures pour
faire la démonstration que la réhabilitation est adéquate. Parlez- moi un peu
plus, là, par rapport... Vous avez parlé de la LQE. Je voudrais voir,
physiquement, là, c'est quoi, la distinction que vous faites entre ce qui prévu
au projet de loi avec une espèce d'attestation du ministre de l'Environnement
qui va être basée sur des éléments probants et ce que vous proposez?
Mme Pétrin (Rébecca) : Bien,
en fait, ma principale inquiétude, c'est que, jusqu'à présent, puis je le
détaille plus dans mon mémoire en parlant des lagunes de Mercier, c'est qu'on
n'a jamais vu ça, une contamination de nappes souterraines qui a été
décontaminée, ne serait-ce qu'à un certain pourcentage. Donc, mon inquiétude,
c'est : c'est certain qu'il va y en avoir des nappes souterraines qui sont
contaminées. Comment est-ce qu'on va réglementer ça? Comment est-ce qu'on va
imposer, en fait, des critères, aussi, à l'industrie? J'imagine que ce sera
inscrit dans un futur règlement, parce que, jusqu'à présent, au Québec, on n'a
pas... on a une loi, une politique sur la décontamination des terrains, mais
rien sur les terres eaux souterraines. Peut-être qu'on est rendus là, en fait.
Mais je me demande, en fait, comment que le ministère de l'Environnement,
probablement avec le ministère des Ressources naturelles, vont arriver enfin à
amener les industries à ramener ça à l'état initial. Donc, en fait, ça me
sécurise beaucoup que vous dites que les indemnités ne seront pas données avant
ce temps-là, mais il n'en reste pas moins que je suis peu confiante qu'on
puisse ramener la qualité des eaux à celle qu'ils étaient avant les forages. Le
manque d'information aussi me préoccupe beaucoup. Le fait qu'il n'y ait pas d'étude
hydrogéologique qui ont été faites en amont des forages, c'est difficile aussi
de retrouver la qualité des eaux qui étaient là avant. Donc, j'ai hâte de voir,
en fait, ce que ce sera, les protocoles pour faire ces évaluations-là.
M. Julien : Parfait. Mais
encore, juste pour faire du pouce un peu sur ce que vous mentionnez puis les
préoccupations vous amener, nous, quand on dit que les... Puis, je vous dis, je
ne suis pas spécialiste, là, dans le domaine hypertechnique, là, mais je
connais ça un peu. Nous, quand on dit : Les 62 puits doivent être
fermés adéquatement, actuellement, dans la liste, là, des 700 quelques puits
qui avaient été considérés comme inactifs, certains d'entre eux sont...
plusieurs d'entre eux sont comme fermés définitivement. Pour arriver à cette
classification de fermer définitivement, bien, ils ont dû répondre, en fin de
compte, à certains critères, dont des critères environnementaux. C'est quoi la
distinction que vous faires entre la fermeture de ces puits-là, à un autre temps,
et la fermeture projetée des 62 existants, par rapport à la façon que
c'est fait et que c'est conclu? Puisque c'est sûr que je n'amène pas, si ce
n'est la transparence, plus de documentation rendue publique. Qu'est-ce qui
doit être renforcée de ce qu'on faisait dans le passé, quand on fermait un
puits, de ce qu'on veut faire dans le futur par rapport aux 62 qui nous
occupent?
Mme Pétrin (Rébecca) : Bien,
en fait, dans le passé, c'est il y a quand même plusieurs puits qui ont été
fermés. Là, les 62, je n'ai pas les dates de fermeture, malheureusement, là, je
n'ai pas l'ensemble des détails des puits. Sauf qu'avant l'arrivée du Règlement
pour la protection de l'eau potable, il n'y avait pas d'obligation de faire des
études hydrogéologiques. Donc, comment les puits ont été fermés? Est-ce qu'il y
avait déjà une contamination quand on a fermé le puits par-dessus? Je ne
pourrais pas dire. Sauf que quand on va voir la base de données, en fait, du
ministère, on n'a pas le détail par puits de tout ce qui a été fait puis les
résultats non plus, des analyses.
M. Julien : Mais pour le
projet de loi, avec les 62 puits actifs actuels, on garantit qu'il y a une
étude hydrogéologique qui va être rendue publique à l'intérieur de l'article 63.
O.K. O.K. Alors. Je conçois cet élément-là. Selon vous, le projet de loi 21,
c'est un bon projet de loi? J'ai besoin d'amour. C'est mon collègue de
l'opposition qui dit ça. Donc, j'aimerais que vous m'en donniez.
• (17 h 10) •
Mme Pétrin (Rébecca) : Je
pense que c'est une excellente initiative de mettre fin aux hydrocarbures.
Comme je vous l'ai répété, nous, ça fait 10 ans qu'on lutte contre le
marché des hydrocarbures. Si vous saviez le nombre de personnes qui ont été
dans cette lutte-là au Québec, c'est monstrueux. Entre nous, on se dit que ce
n'est pas les industries qui devraient recevoir des indemnités, c'est les
citoyens qui se sont mobilisés pendant 10 ans de temps pour leur faire
front. Mais, oui, je pense que c'est un bon projet de loi. Je crois que c'est
une excellente initiative, puis qu'on est rendu là, en fait. Comme M. Boudreau
de l'avenir. Il y a cinq ans, ça aurait été illusoire de s'imaginer...
Mme Pétrin (Rébecca) : ...un
incontournable. On doit mettre fin aux hydrocarbures au Québec. Ça a été tellement
de temps, et d'énergie, et d'argent dépensés pour rien. On va pouvoir
maintenant se concentrer sur le développement de nouvelles filières plus
vertes. Mais c'est certain que nous, le côté des indemnités... En fait, on a
tellement donné beaucoup d'argent dans le passé à cette industrie-là. Ils nous
ont laissé aussi un héritage de contamination vraiment marquant au Québec.
Donc, moi, je voudrais m'assurer qu'on essaie de faire le maximum avec eux pour
faire la décontamination avant que les sommes soient versées. C'est là où le
point est plus sensible, disons.
M. Julien : Bien, merci,
Mme Pétrin. Votre réponse est quand même assez positive. Alors, j'en
prends acte.
Quand vous dites : On a donné
beaucoup d'argent... bien, j'entends souvent ça, là. Je peux concevoir les
effets communautaires, les enjeux, les revendications, les soucis que ça peut
amener. Alors, j'entends bien ce volet-là. Mais je le réitère, là, puis je le
redis, et pour moi c'est essentiel, le remboursement des indemnités sont faites
au net de tout crédit d'impôt, toute aide financière sur la même période, là.
Pour nous, là, ce n'est pas l'investissement total qui a été effectué qu'on
rembourse, c'est l'investissement... et on est déjà estimé à 12 millions à
peu après les montants d'aide gouvernementale qui vont être obligés d'être
remboursés. Donc, de quels frais l'argent qu'on a mis... puisqu'on rembourse
seulement sur six ans, puis c'est net de l'aide reçue sur cette période-là, à
tout égard, par le gouvernement. Donc...
Mme Pétrin (Rébecca) : Bien,
en fait, les frais, c'était surtout... si on parle spécifiquement des forages,
c'était surtout les claims qui ont été vendus à un faible coût. On ne parle pas
là de frais donnés. Quand j'ai mentionné les frais, c'était beaucoup plus
l'ensemble de la filière des hydrocarbures. Donc, on a donné énormément de
subventions et autres, si on pense aux autres projets. C'est sûr que, dans les
forages, moi, je n'ai pas le détail, je ne peux malheureusement me... à mes
collègues qui sont plus spécifiques... plus spécialisés dans ça. Je me contente
de protéger l'eau souterraine.
M. Julien : Parfait. Un
autre élément, vous savez que le projet de loi prévoit, là, qu'on accepte...
encore là, on a eu des bonnes discussions quand on a bâti le projet de loi sur
cet élément-là. On a dit : On va accompagner les entreprises jusqu'à la
hauteur de 75 % des frais de décontamination, réhabilitation, fermeture
des puits. L'objectif qu'on avait derrière ça, c'était, bon, si... puisque c'est
notre décision, puis on veut que ce soit fait, puis on veut que ce soit fait
rapidement et bien fait, bien, on dit : On va mettre un montant, mais on
ne veut pas mettre non plus la totalité pour éviter... si on disait :
Bien, on va rembourser 100 % des frais. On comprend bien qu'il y aurait
des risques, le cas échéant, là, que ces frais-là, il n'y ait personne qui
veuille les contraindre parce qu'on veut que les travaux soient faits.
Qu'est-ce que vous pensez de cette
approche-là? Êtes-vous confortable avec l'approche que le gouvernement
participe à payer une partie des frais pour la réhabilitation? Et
naturellement, aucun frais d'exploitation ne sera remboursé tant que ça ne sera
pas fait à pleine satisfaction.
Mme Pétrin (Rébecca) : En
fait, là, je suis un peu confuse parce que ce qu'on nous avait dit auprès du
ministère, c'est que le 44 millions de dollars ne comprenait pas les frais
de décontamination. Là, de ce que je comprends, ça les comprend?
M. Julien : Bien,
écoutez, peut-être, en réalité, que quand je dis ces éléments-là, je vais
préciser avec le ministère parce que, pour moi, c'est les frais pour
réhabiliter et fermer le puits. Donc, maintenant, quelle nature de
décontamination qu'on discute ici, je ne saurais trop m'avancer. Et vous êtes plus
spécialiste que moi, donc ne me prenez pas au mot, mais je veux que ces
frais-là permettent la fermeture de manière conforme aux exigences, en fin de
compte, du ministre de l'Environnement. Alors...
Mme Pétrin (Rébecca) : Bien,
moi, c'est un peu la même chose que les indemnités. Je préférerais nettement
que les frais soient à zéro pour la nation québécoise qui n'a subi que des
impacts négatifs de ça puis, dans le fond, les profits de cette entreprise-là
ça n'a pas été réinjecté directement ici. Donc, je ne vois pas pourquoi qu'on
paierait pour la fermeture de ces sites-là. Sauf que ce qu'on a compris en
échangeant avec les gens de votre ministère, c'est que c'est un moindre mal...
un peu accepter de force si on voulait enfin avoir la collaboration des
industries. Donc, est ce que je suis pour? Non, mais est-ce que je serais prête
à l'accepter? Oui. Par contre, je ne comprends pas d'où vient le 75 %.
Peut être qu'on pourrait détailler un peu plus pourquoi à 75 % plutôt que
50 %, là, si... ou 25 %, donc...
M. Julien : Effectivement,
on aura l'occasion d'en discuter, je pense, quand on va étudier article par
article le quantum. Naturellement, il faut bien comprendre qu'ici, c'est un peu
la même notion que j'amenais tantôt dans les discussions, une notion de
responsabilité. C'est-à-dire que si on n'adoptait pas le projet de loi et si on
ne mettait pas un terme aux hydrocarbures, exploration, exploitation...
M. Julien : ...momentanément,
actuellement, il y aurait... les entreprises n'auraient pas d'obligation de
réhabiliter et de fermer les puits. Donc, on prend une décision qui oblige à un
geste immédiat, ou très rapidement, puis c'est pour ça qu'on y participe, mais
encore là c'est comme l'espèce de responsabilité partagée, parce que c'est vrai
que tout le monde dit que l'industrie, ce n'était pas l'industrie de l'avenir.
D'un autre côté, comme État, on s'est comporté en donnant des licences et des
droits sans prétendre que ce ne l'était pas. Donc, c'est l'aspect, un peu,
responsabilité conjointe qu'on essaie de mettre... Oui.
Mme Pétrin (Rébecca) : Mais
je voudrais peut-être faire un parallèle avec la politique, justement, de
réhabilitation des sols contaminés qu'on a adoptée dans les années 90. Quand
cette politique-là est arrivée, en fait, il n'y a pas de programme d'aide de
fermeture ou de décontamination des sites qui avait été donnée, et pourtant
c'était à peu près le... un cas similaire où on a passé une loi, on a fait des
nouveaux règlements avec... Pardon. Le barème est respecté. Pardon. Donc, je ne
comprends pas pourquoi cette fois-ci, alors que ça s'applique seulement à des
gens de l'industrie... Dans l'autre cas, on avait des citoyens, on avait des
petites entreprises qui étaient aux... pris avec des problèmes de
contamination. Ils n'ont pas eu, en fait, d'aide justement à la fermeture et à
la décontamination, puis dans ce cas-ci on parle de neuf, 10 grandes industries
qu'on va accompagner en fait dans ce nouveau règlement-là. Donc, je suis un peu
d'accord que, oui, c'est bien, parce qu'on veut vraiment en finir une fois pour
toutes avec les hydrocarbures, sauf que, si on regarde dans l'histoire du
Québec, c'est déjà arrivé qu'on a passé des règlements comme ça sans
accompagnement, là.
M. Julien : O.K. Mais,
naturellement, c'est à cause qu'aussi on met un terme - alors, ces notions-là,
c'est... - on met un terme momentanément à un potentiel de droit quasi
immobilier puis on dit: Vous réhabilitez maintenant. Mais j'entends ce que vous
dites, puis on aura l'occasion d'en discuter à l'article par article.
Est-ce... Combien qu'il reste de temps? Il
n'y a plus de temps?
Le Président (M. Lemay) : 30
secondes.
M. Julien : Mme Pétrin, je
vous remercie infiniment, c'est... Vous amenez des éléments qui sont raffinés
et d'une complexité que j'aurai l'occasion de discuter certainement avec mes
collègues du ministère pour pouvoir voir toutes les nuances qu'il y a
là-dedans, pour voir comment qu'on peut justement bonifier, le cas échéant, le
projet de loi.
Mme Pétrin (Rébecca) : Merci
beaucoup.
Le Président (M. Lemay) :
Très bien. Merci, M. le ministre. Alors, je cède maintenant la parole à
l'opposition officielle, est-ce... oui, c'est ça, exactement, et le député de
Mont-Royal-Outremont pour une période d'environ 11 minutes.
M. Arcand : Merci. Bonjour,
Mme Pétrin. Je vais vous laisser le temps de reprendre votre souffle, un peu...
Mme Pétrin (Rébecca) : Merci.
M. Arcand : ...suite à ces
nombreuses questions. Ma première question: Eau secours!, ça, c'était et c'est
le groupe dans lequel Martine Ouellet était à une certaine époque, il y a
quelques années. Est-ce que je me trompe en disant ça? Est-ce qu'elle est
encore...
Mme Pétrin (Rébecca) :
Effectivement, elle a été présente...
M. Arcand : Est-ce qu'elle
vous a aidés dans la présentation de ce mémoire, étant donné que c'est
l'ex-ministre... c'est une ex- ministre de l'Énergie et des Ressources
naturelles?
Mme Pétrin (Rébecca) : Oui,
elle a siégé au même siège que vous avez vous-même siégé. Non, effectivement,
Martine Ouellet n'est plus chez Eau secours! depuis de nombreuses années déjà.
M. Arcand : O.K. Mais vous
travaillez avec l'association québécoise de la lutte à la pollution? Ça, c'est
le groupe de M. Bélisle, si je ne m'abuse.
Mme Pétrin (Rébecca) : J'ai
juste mis la main sur un de ses rapports, qui date de 2016, là, pour le citer
dans mon mémoire uniquement. On n'a pas l'habitude de collaborer...
M. Arcand : O.K.
Mme Pétrin (Rébecca) : ...on
n'est pas vraiment sur les mêmes enjeux. Il travaille sur la pollution
atmosphérique, alors que, nous, on travaille sur la pollution des eaux.
M. Arcand : O.K. Et, juste
pour que je comprenne bien, l'eau... pour vous, les... vous... votre position,
évidemment, touche beaucoup les puits. Est-ce que vous avez d'autres enjeux au
niveau de l'eau, juste pour ma gouverne? Est-ce que vous touchez aux lacs, aux
rivières, aux aqueducs, enfin, juste pour que je comprenne?
Mme Pétrin (Rébecca) : On
touche à beaucoup de choses au Québec. On touche... Cette année, on va toucher
à l'analyse de la Politique nationale de l'eau, qui célèbre ses 20 ans, donc
l'impact que ça aura eu au fil des dernières années; on parle de l'implication
aussi des différents ministres en Environnement dans cette politique-là,
comment ils ont su protéger notre eau; on parle de gestion intégrée, de
surconsommation. Donc, non, nos sujets sont assez divers, et on parle également
de la commercialisation sous toutes les formes.
• (17 h 20) •
M. Arcand : O.K. Très bien.
Si on revient au projet de loi, Mme
Pétrin, si je comprends bien votre position sur les indemnisations, vous dites:
«Si l'inspection des puits à fermer révèle la présence de contamination, la
décontamination des sites doit être faite aux frais du détenteur de permis.»
Ça, c'est... De toute façon, c'est en vertu... c'est en vertu de la loi
québécoise de l'environnement. Après ça, on dit: Si un détenteur de permis pour
l'un des 132 puits visés par l'article 10 détient des permis pour d'autres
puits qui ne sont pas visés et qui ont été fermés temporairement, les coûts de
fermeture de... et/ou même de...
M. Arcand : ...contamination
de ces puits doivent être déduits de l'indemnisation à 75 pour cent.
Alors, est-ce que c'est exact, ce que je lis actuellement, ça reflète votre
pensée? Maintenant...
Mme Pétrin (Rébecca) : Oui.
En fait, c'est que même si un propriétaire depuis a fermé des puits, ces
puits-là devraient être considérés en fait, même s'ils ne font pas partie des
62 puits. Donc, en fait, ce qu'on répète, c'est que malgré le fait qu'il y
a seulement 62 puits qui sont considérés dans le projet de loi, si une
entreprise a d'autres puits ailleurs qui sont fermés ou temporairement fermés,
ils devraient être considérés dans les évaluations environnementales. On ne
peut pas remettre des indemnités à une entreprise s'il y a d'autres puits à
l'extérieur de ceux qui sont évalués, qui sont non-conformes.
M. Arcand : D'accord. Ma
question également, c'est : Est-ce qu'il y a lieu de déduire d'autres montants
de l'indemnisation envisagée?
Mme Pétrin (Rébecca) : Bien,
en fait, moi, je considère que tous les montants doivent être déduits de
l'indemnisation, tant et aussi longtemps que les normes environnementales ne
sont pas respectées. Et donc, je veux dire, il y a des nappes d'eau
souterraines... sont jusqu'à présent impossibles à décontaminer, donc j'ai du
mal à comprendre comment qu'une entreprise qui a des puits, qui a généré de la
contamination des eaux souterraines, pourrait se voir toucher une
indemnisation. Parce que c'est certain...
M. Arcand : D'accord. Mais
ça... selon votre expertise, est-ce que c'est un processus qui risque quand
même d'être très long et qui risque de durer quand même un certain temps,
d'après votre expertise?
Mme Pétrin (Rébecca) : Bien,
en fait, je ne veux pas me situer en ingénieure en hydrogéologie qui serait
spécialisée dans la décontamination, chose que je ne suis pas, c'est juste que
jusqu'à présent, c'est une expertise qui est qui mériterait à être développée
au Québec, puisqu'on n'en a pas encore réussi à grande échelle, la
décontamination de la nappe d'eau souterraine, si on prend le cas des lagunes
de Mercier, ça fait depuis les années 60 que ça persiste dans
l'environnement. Donc, je pense que c'est une chance en or qu'on a, au Québec,
de développer une expertise dans la décontamination des eaux souterraines, là,
d'utiliser ces puits-là. Sauf que oui, je pense que ça va être quand même des
défis techniques qui vont être à relever. Je ne pourrais pas m'avancer à dire
combien pas que ça va prendre, sauf que je ne crois pas que ça se fera en quelques
mois, là.
M. Arcand : Donc, ce que
j'essaie de comprendre, c'est que vous n'êtes pas, par principe, fermée à une
forme quelconque d'indemnisation. Mais il faut que le dossier soit vraiment
plus blanc que blanc, si je me permets l'expression. C'est ça?
Mme Pétrin (Rébecca) : Exactement.
M. Arcand : Très bien. Dans
votre mémoire, vous faites référence à des produits chimiques que le ministère
de l'Environnement qualifie de problématiques, qui ont été utilisés dans des
opérations de fracturation hydraulique. Pouvez-vous me dire, sans entrer dans
des détails trop techniques, là, parce que j'imagine que c'est des noms assez
compliqués au niveau de ces produits chimiques là, mais ces produits chimiques
là, qu'est ce que c'est? Et quels sont ses effets en termes d'ennuis de santé,
par exemple? Est-ce que vous savez un peu de quoi il s'agit?
Mme Pétrin (Rébecca) : Bien,
en fait, on sait que le ministère, le MBDEFP, avait confirmé qu'il y en avait
trois, produits chimiques qui étaient plus problématiques que les autres. Donc,
pour les noms compliqués, là, on a un solvant au naphta aromatique lourd. Je
vous épargne le nom scientifique en long. On a un chlorure d'ammonium aussi, et
puis... Donc ce sont des produits, en fait, qui a un gros potentiel de
bioaccumulation dans les organismes aquatiques et qui persistent gravement dans
l'environnement, donc c'est des produits qui sont un peu à l'image des BPC de
l'époque, qui sont très persistants et difficiles à se biodégrader. Et le
problème, en fait, c'est qu'à partir du moment où ça se retrouve dans l'eau,
bien, la bioaccumulation va faire que ça va se retrouver dans nos poissons et
autres puis qu'on va les consommer via la consommation des produits de la mer
et des lacs et rivières.
On n'a pas encore tout, on n'a pas... très
peu d'études, en fait, ont été faites sur vraiment les conséquences pour la
santé humaine. C'est un peu comme les interactions avec le milieu récepteur, ce
que justement, on manque de données là-dessus. Donc ça fait partie des choses
que moi, je pense que le ministère de l'Environnement devrait mettre l'emphase
dans la fermeture des puits, ça serait également de pousser un peu le volet de
recherche, là, sur les impacts que ça a sur l'environnement puis sur la santé
humaine.
M. Arcand : D'accord. Mais
quand vous vous parlez de ces puits-là, les puits orphelins, vous arrivez avec
un chiffre, là, qui parle des coûts pour changer la situation. Vous parlez de
54 millions. Vous dites que ça exclut 67 puits que le ministère sait
être des...
M. Arcand : ...des
sources de contamination, mais que le ministère ne sait pas encore tout à fait
ce qu'il en coûterait pour les nettoyer et les sécuriser de façon définitive.
Juste m'expliquer votre 54 millions, ça vient d'où exactement.
Mme Pétrin (Rébecca) : En
fait, c'était une étude qu'avait révélée Alexandre Shields dans un de ses
articles dans Le Devoir, une estimation qui avait été faite par rapport à...
Bien, je vous retrouve le document, mon ordinateur ne veut pas me le rendre.
Donc, je pourrais vous la... avec plus de détails, mais c'est des estimations
qui avaient été faites avec des puits qui avaient déjà entamé une
décontamination de... là.
M. Arcand : O.K. Donc,
c'est ce qui vous permet de parler de ça comme tel. Est-ce que...
Mme Pétrin (Rébecca) : Bien,
en fait, c'est que la phase initiale du... la facture finale est actuellement
impossible à préciser parce que jusqu'à présent, c'est ça le gros problème,
c'est pareil... la même problématique que le 44 millions qui a été avancé.
Et qu'au final, si on comprend la décontamination des sites dans le
44 millions, c'est une très grosse estimation parce qu'il n'y a pas de
source fiable qui arrive à définir combien peut coûter la décontamination d'un
site. Déjà, le portrait d'une décontamination peut prendre différentes formes.
Ça dépend de la quantité des produits chimiques qui se retrouvent dans la nappe
phréatique. Ça dépend de la grosseur de la nappe phréatique. Ça dépend de la
profondeur de la nappe phréatique. Ça dépend de tellement de facteurs qu'on ne
peut pas arriver à un montant vrai. Ça prend des études en profondeur pour
arriver à dire quelles technologies on va mettre en place, sur combien de temps
puis les coûts qui vont être liés à ça. Mais chose certaine, c'est que c'est
des factures qui sont très élevées parce que ce n'est pas des technologies qui
sont si simples, là, à déployer.
M. Arcand : Est-ce que
vous avez une explication... Dans vos discussions que vous avez eues avec le
ministère, est-ce que vous avez une explication sur le fait qu'il faut autant
de temps pour faire un diagnostic complet? Parce qu'on ne parle pas d'un si
grand nombre de puits et on sait que la plupart sont dans le paysage depuis des
décennies. Est-ce que vous vous avez fait une tête là-dessus, ou vous avez une
explication de ce côté-là?
Mme Pétrin (Rébecca) : Bien,
je pense qu'on a un gros retard à rattraper parce que je pense que, vous devez
être au courant, mais suite à l'entrée en matière des gaz de schiste en 2010,
il aura fallu attendre en 2014 pour avoir un règlement sur la protection des
eaux potables au Québec. Donc, de 2010 à 2014, il y a eu absence de collectes
de données sur justement des relevés hydrogéologiques. C'est simplement en 2015
qu'on a commencé à collecter des données. Donc, on est en 2022, ça fait
7 ans. Je pense que les gouvernements ont tablé à essayer d'accumuler un
maximum d'informations, essayer de recenser aussi la grosseur de nos nappes
phréatiques, les eaux souterraines les cartographier, mais ça tarde et il y a
beaucoup d'informations où on parle... C'est vrai que là, ici, on parle de
62 puits dans le cas du projet de loi, sauf que dans les faits, il y a
900 puits au Québec. Puis ce n'est pas parce que des puits sont fermés
qu'ils ne sont pas non plus dangereux. Puis, même s'ils ne font pas partie de
la liste des 62 puits, si on détecte un puits sur le territoire qui fuit,
il faut quand même s'y attarder, il faut dépenser puis il faut mettre des
ressources en place pour aller chercher ces données-là.
Donc, je pense qu'on est bien partis. On a
commencé à collecter des données. Encore faut-il qu'elles soient accessibles au
public. Ça, c'est un autre enjeu que M. Bergeron a soulevé dans son
mémoire, c'est que la société civile veut également aider le ministère de
l'Environnement à faire des travaux puis des recherches sur... encore faut-il
qu'on ait accès à ces données-là. Donc, peut-être de bonifier un registre
unique, où l'ensemble des citoyens auraient accès, aux relevés et puis aux
études hydrogéologiques, aiderait grandement, en fait, à avancer notre niveau
de connaissance, là, sur la contamination.
Le Président (M. Lemay) : Merci,
Mme Pétrin pour cette réponse. Nous allons maintenant céder la parole au
deuxième groupe d'opposition, madame la députée de Sainte-Marie-Saint-Jacques.
Mme Massé : Oui. Nous
avons deux minutes, Mme Pétrin, alors on va aller à l'essentiel. J'ai bien
entendu que vous avez dit que si toutefois des entreprises qui possèdent un ou
plusieurs des 62 puits à l'étude dans le projet de loi avaient d'aventure
des puits ailleurs qui ne font pas partie de ces 62-là, il faut qu'on tienne en
compte, si toutefois on allait vers de l'indemnisation, de ces puits-là, qui
sont à l'extérieur, de les réhabiliter aussi. Est-ce que j'ai bien compris ça?
Mme Pétrin (Rébecca) : Exactement.
• (17 h 30) •
Mme Massé : Bien, merci. Je
me demandais, dans votre mémoire, vous... Et vous l'avez fait mention tantôt,
vous nous avez parlé des légunes... de la lagune - pardon - de Mercier.
Qu'est-ce qu'on peut retenir, qu'on doit retenir de l'expérience de la lagune
de Mercier qui pourrait nous être utile à rendre...
17 h 30 (version non révisée)
Mme Massé : ...plus fort, le
projet de loi actuel, ou toutes les questions d'indemnisation, là, parce qu'il
me semble que ça nous cher, ça, les lagunes de Mercier.
Mme Pétrin (Rébecca) : Bien,
c'est la principale leçon à en tirer, c'est qu'en 1994, quand on a fait le BAPE
sur des plans de restauration des lagunes de Mercier, on était déjà à 13 millions
de dollars injectés dans cette catastrophe-là. Je n'ai pas réussi à mettre les
mains sur les chiffres de 1994 à aujourd'hui. Donc, on a dû encore mettre des
fonds, ne serait-ce que pour approvisionner en eau potable les communautés qui
sont locales à cette lagune-là. Mais là il y a un projet pour une usine de
traitement des eaux qui devrait voir le jour en 2025. Ce projet-là, à lui seul,
coûte 25 millions de dollars. Donc, la leçon à tirer, c'est que contaminer
une nappe d'eau souterraine, qui est un approvisionnement en eau potable, ça
nous coûte excessivement cher. Nous, chez Eau Secours!, pendant des années,
depuis le début des hydrocarbures, c'est le clou qu'on martèle. Il n'y a pas
d'action en hydrocarbures qui ne risque pas de contaminer notre eau potable. Et
c'est irréversible et ça coûte cher. Donc, s'il y a une leçon qu'on peut
prendre, c'est de faire attention avant de donner des sous aux entreprises
parce que la facture, c'est nous qui allons la payer, on va la payer pendant
des années et des années, et c'est nous qui restons avec la contamination
pour...
Mme Massé : Et donc, vous
nous invitez à être très prudents, que lorsqu'on parle... le projet de loi
parle de réhabilitation, il faut absolument tenir compte de la question de la
contamination des sols et des eaux.
Mme Pétrin (Rébecca) : Absolument.
C'est indéniable.
Mme Massé : Oh! il me reste
30 secondes. Est-ce que vous voulez utiliser ce 30 secondes-là pour
nous dire autre chose d'important?
Mme Pétrin (Rébecca) : Vous
me prenez au dépourvu.
15403
Le Président (M. Lemay) :Merci beaucoup, Mme Pétrin. Alors, nous allons
maintenant passer la parole au député de Jonquière.
M. Gaudreault : Oui, merci
beaucoup pour votre présence. Je constate que vous avez déposé un mémoire
conjoint, au fond, avec l'Association québécoise des médecins pour
l'environnement. J'aimerais ça que vous m'en parliez un petit peu, quel est le
lien que vous faites entre les deux associations. On sait que... bon, on répète
souvent : L'eau est source de vie. Je pense que c'est certainement la
ressource la plus importante que nous avons au Québec. Il y a des pays qui se
battent pour avoir accès à de l'eau potable. Nous, on en a un. Il faut la
protéger. Et le lien que je veux faire également avec l'Association des
médecins pour l'environnement, c'est... Est-ce que je comprends bien si ça vous
amène aussi à nous dire, à nous les législateurs, de vraiment détailler
davantage le projet de loi 21 en ce qui concerne les garanties, je dirais,
entre autres, sur le recensement, l'inspection des puits? C'est comme si je
sens une forme d'inquiétude de votre part là-dessus.
Mme Pétrin (Rébecca) : Oui,
en fait, le lien avec l'Association québécoise, c'est... bien, des médecins
pour l'environnement, c'est évidemment l'aspect de la santé humaine avec tous
les cas de contamination. Ils... plus l'orientation sur les relâchements des
gaz. Ils auraient pu aussi également parler de l'impact sur l'eau. Comme je
l'ai... tantôt, on manque énormément de données, là, sur l'impact des produits
chimiques dans l'eau parce que ça a été peu étudié jusqu'à présent. Ça fait
partie aussi des coûts. On parle des coûts, des coûts, des millions et des
millions, sur des coûts vraiment réels de qu'est-ce qui va en coûter autant aux
entreprises qu'au gouvernement du Québec pour fermer puis réhabiliter des
puits, sauf que le point intéressant de l'AQME, c'est vraiment les coûts
sociaux, en fait, qu'on ne chiffre jamais assez dans des projets comme ici,
donc la santé humaine, puis la perte, aussi, de pouvoir user des ressources qui
entourent nos communautés.
Donc, c'était l'aspect intéressant, en fait,
pourquoi on leur a donné une section dans notre mémoire. Donc, on a décidé de
collaborer. C'est vraiment pour tenter de faire le pont entre la perte
d'utilisation d'une ressource comme l'eau qui est vitale et les coûts qui sont
liés à ça. Effectivement, on ramène toujours une grande inquiétude par rapport
aux études. C'est quand même arrivé dans le passé. Comme je l'ai répété, ça
fait dix ans qu'on se bat contre l'industrie des hydrocarbures. Puis, à chaque
fois qu'on dépose un mémoire, à un BAPE ou à une autre analyse, on ramène toujours
le risque, en fait à quel point on doit faire attention en amont, de faire des
études en amont pour éviter des contaminations. Puis là on se retrouve 10 ans
plus tard à constater qu'il y a eu des contaminations, constater qu'il a manqué
de suivis, qu'il a manqué d'analyses en amont. Donc, je ne peux pas passer à
côté du fait de retaper là-dessus, il faut absolument, quand il y a un
risque... soit-il, pousser les analyses pour s'assurer que l'industrie, en
fait, n'a pas la liberté de faire ce qu'elle veut.
Le Président (M. Lemay) : Merci
beaucoup, Mme Pétrin, pour votre contribution à nos travaux. C'est ce qui...
Le Président (M. Lemay) : ...complète
la période d'échanges avec les membres de la commission, donc je vous remercie.
Nous allons maintenant suspendre pour permettre au prochain groupe de prendre
place.
Une voix : Merci.
(Suspension de la séance à 17 h 35)
(Reprise à 17 h 38)
Le Président (M. Lemay) : Alors,
la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources
naturelles reprend ses travaux, et je souhaite maintenant la bienvenue aux
représentants de Mères au front. Alors, je vous rappelle que vous disposez d'un
temps de parole de 10 minutes pour faire votre exposé et, par la suite, il
y aura une période d'échanges avec les membres de la commission. Tout d'abord,
je vous invite à vous présenter ainsi que la personne qui vous accompagne, et
vous pouvez y aller avec votre exposé.
Mme Waridel (Laure) : Merci.
Mmes et MM. députés, commissaires, citoyens et citoyennes, bonsoir, merci
d'être là. Je m'appelle Laure Waridel, je suis écosociologue, Ph.D., et mère au
front pour tous les enfants, notamment mon fils Colin, ma fille Alphée et ma
petite-fille par alliance, Théodora, qui, en 2070, aura seulement 49 ans.
Bon.
• (17 h 40) •
Mme Gagnon (Catherine
Alexandra) : Bonsoir, je m'appelle Catherine Gagnon, je suis
biologiste puis j'ai un doctorat en sciences de l'environnement et je suis une
mère au front pour tous les enfants, incluant Élie, Blanche et Ambroise. En
fait, nous sommes Mères au front pour tous les enfants d'ici et d'ailleurs,
incluant les enfants qui ne sont pas encore nés et qui seront affectés par les
décisions que vous prenez aujourd'hui. Nous parlons aujourd'hui au nom de
24 groupes de Mères au front des lieux suivants : les Laurentides,
ville de Québec, Abitibi-Ouest, Arthabaska-Érable, Laval, Rouyn-Noranda,
Vaudreuil-Soulanges, Montréal, Saint-Jean-sur-Richelieu, des Cantons de l'Est,
Memphrémagog, la MRC des Moulins, Rive-Sud, Rosemère et des environs ,
Saguenay, Outaouais, Lac-Saint-Jean, Rimouski, Val-d'Or, Sherbrooke, la MRC de
Maskinongé, Baie-des-Chaleurs, MRC de...
Mme Gagnon (Catherine
Alexandra) : ...et Matane, Le mouvement Mères au front est né au
printemps 2020 d'un sentiment d'urgence partagé par de nombreuses mères et
grands-mères quant à l'ultime nécessité de protéger l'avenir de nos enfants et
des générations futures contre l'inaction climatique. Nous sommes un mouvement
décentralisé qui relie plus de 7 000 personnes, 30 groupes d'action se sont
formés au Québec, dans le Canada francophone ainsi qu'en Belgique. Au Canada
anglais, nous faisons alliance avec For our Kids afin de maximiser notre impact
sur la scène fédérale. Nous vous demandons de penser aux enfants qui sont
présents dans votre coeur, dans vos vies, aujourd'hui, pour éclairer vos
décisions, toutes vos décisions.
Mme Waridel (Laure) : Nous
tenons d'abord à féliciter le gouvernement Legault d'avoir décidé de mettre fin
à la recherche et à la production d'hydrocarbures ainsi qu'au financement
public de ces activités. Un projet de loi comme ça était nécessaire depuis
longtemps. Il était donc temps.
À titre de mères, de grand-mères et de
nombreux alliés de notre mouvement, nous tenons à remercier tous ceux et celles
qui travaillent à améliorer ce projet de loi. Nous souhaitons que ce geste
législatif ne soit que l'amorce d'une série d'autres à venir encore plus
ambitieux nous libérant le plus rapidement possible de notre dépendance aux
énergies fossiles. Même si le potentiel économique, pétrolier et gazier est
extrêmement faible sur notre territoire, la symbolique est tout de même forte
et nécessaire. L'avenir économique du Québec et de la planète passe par les
énergies vertes. En prenant part à la Beyond Oil and Gas Alliances, BOGA, le
Québec se place du bon côté de l'histoire. Nous pouvons en être fiers.
Mme Gagnon (Catherine
Alexandra) : Pour accélérer la transition sociale et écologique,
l'implémentation de programmes et de politiques doit être cohérente avec les
prédictions des scientifiques et les cibles ambitieuses qui s'y rattachent, et
ce, sans compromis. L'élimination de l'exploitation et de l'exploration
pétrolière et gazière au Québec est une de ces mesures cohérentes, mais à
condition qu'elle s'exprime clairement et sans compromis. Les pseudoprojets
pilotes, les compensations financières proposées sont, en effet, inacceptables.
Soyons clairs, l'argent public doit servir à financer une transition véritable
et non à enrichir davantage les compagnies d'énergies fossiles.
L'industrie pétrolière et gazière est déjà
aux abois pour demander des compensations financières à l'État québécois. Or, légalement,
il n'est pas obligé de le faire. L'Assemblée nationale est souveraine. Comme
l'a démontré le Centre québécois du droit de l'environnement, dans un rapport
publié en juin, l'Assemblée nationale peut adopter une loi mettant un terme à
l'industrie des hydrocarbures sur son territoire, sans indemnité pour les
entreprises concernées, et ce, même rétroactivement. Si le gouvernement Legault
va de l'avant avec des indemnisations, il s'agira donc d'un choix politique et
non d'une obligation juridique.
Nous souhaitons rappeler qu'au cours des
10 dernières années le gouvernement du Québec a reçu environ 12 millions pour
les permis d'exploration, mais a versé plus de 120 millions en subventions pour
des projets pétroliers qui n'ont jamais été réalisés.
Mme Waridel (Laure) : Que
dire des dizaines de millions devant être dépensés par les contribuables pour
les 775 puits gaziers et pétroliers abandonnés par l'industrie sur notre
territoire? Comment peut-on tolérer une telle irresponsabilité corporative au
Québec? En bon comptable, nous demandons à François Legault et à toute son
équipe, incluant cette commission, de faire tous les calculs en tenant compte
des coûts environnementaux et sociaux générés par l'industrie pétrolière et
gazière. Vous serez alors forcés de constater que, si des indemnisations sont à
verser, elles devraient sortir des poches de l'industrie des hydrocarbures pour
être versées à nos enfants, qui devront assumer la facture immense de la crise
climatique. Une facture qui ne se payera pas seulement en dollars, mais aussi
en souffrance pour des vies humaines, des vies qui ont tellement de valeur
qu'elles n'ont pas de prix.
L'industrie pétrolière et gazière ne
devrait pas tomber en bas de sa chaise en apprenant qu'en tant que contribuable
nous considérons qu'elle a déjà eu plus que sa part du gâteau. Elle savait,
depuis les années 70, que ses pratiques contribuaient à la dégradation de la
vie sur Terre et qu'une transition énergétique était plus que nécessaire. Elle
a préféré semer le doute et continuer à engranger un...
Mme Waridel (Laure) : ...de
profits tout en discréditant les alternatives aux combustibles fossiles.
Mme Gagnon (Catherine
Alexandra) : L'idée des projets pilotes inscrits dans le projet de loi
nous semble ici douteuse puisqu'elle semble provenir directement de l'influence
des lobbyistes de l'industrie. Rappelons que, le 19 janvier dernier,
400 universitaires canadiens signaient une lettre pour condamner le projet
de crédit d'impôt fédéral à l'investissement pour le captage, l'utilisation et
le stockage de carbone, ce qu'on appelle le CUSC. Le projet de loi 21, qui
ouvre la porte à de tels projets pilotes de CUSC, offre ici un cadeau potentiel
à l'industrie des hydrocarbures pour des projets qui leur permettraient de
contourner les objectifs de la loi. Il est temps que le gouvernement du Québec
se tienne debout face à une industrie qui nous a coûté beaucoup plus cher
collectivement qu'elle ne pourra jamais rapporter.
Nous demandons au gouvernement de
reconnaître, dans cette loi, sa responsabilité à l'égard de nos enfants et des
générations futures en y reconnaissant le principe de l'équité
intergénérationnelle. Ceci est particulièrement important, considérant que les
changements climatiques, dont l'industrie des énergies fossiles est la plus
grande responsable, auront des conséquences sur plusieurs générations. Nous
refusons de laisser une dette écologique de cette ampleur à nos enfants. À vous
qui déciderez de l'issue de ce projet de loi, à vous ici présents ce soir, nous
vous demandons de penser à tous les enfants que vous connaissez et à ceux que
vous croisez d'ici et d'ailleurs. En tant que mères au front, nous vous
demandons de protéger leur santé et leur sécurité qui, nous le savons
maintenant, dépendent de la protection de l'environnement et qu'au lieu de
compensation financière que cet argent serve à réimaginer nos collectivités et
l'économie pour construire des systèmes résilients qui respectent les limites
écologiques de notre planète pour créer un futur plus juste et équitable pour
les générations à venir, mais aussi tous les habitants du territoire, incluant
les plus marginalisés. Et j'entends ici, entre autres, les autochtones qui ont
des droits sur ces territoires.
Mme Waridel (Laure) : Les
bonnes comme les mauvaises décisions se prennent une à la fois, elles
déterminent l'avenir. Considérant l'état d'urgence climatique dans laquelle
nous nous trouvons, nous n'avons plus le temps de prendre de mauvaises
décisions. Notre argent doit être mis au service d'une transition juste et
écologique. C'est pourquoi nous appuyons les demandes exprimées dans les
mémoires présentés par le Centre québécois du droit de l'environnement,
Équiterre, Nature Québec, la Fondation David Suzuki, le Front commun pour la
transition énergétique, la Coalition étudiante Arrêtons GNL, ainsi que par Éric
Pineault, professeur à l'Institut des sciences de l'environnement de l'UQAM,
ainsi que Marc Durand, professeur retraité du département Sciences et Terre...
pardon, Sciences de la Terre et atmosphère de l'UQAM. Nous vous attendons tous
au front. Nos enfants ont besoin de vous. Merci.
Le Président (M. Lemay) : Merci
beaucoup pour votre exposé. Nous allons maintenant passer à la période
d'échanges avec les membres de la commission. Et je cède la parole à monsieur
le ministre.
M. Julien : Oui, merci.
Merci beaucoup pour votre présentation, Mme Waridel et Mme Gagnon.
Écoutez, bien, j'avais eu l'occasion de lire le document que vous avez produit,
puis, essentiellement, qui est conforme à ce que vous venez de dire,
essentiellement. Puis je comprenais assez bien que le volet indemnisation, ce
n'était pas votre tasse de thé. Puis, à la fin, vous nommez les groupes qui,
également, ont amené ces discussions-là. Et bien honnêtement, bien, on a eu ces
discussions-là avec tous les groupes, et, si vous avez écouté, bien, vous
connaissez un peu la perspective qu'on y donne, à ces indemnisations-là.
• (17 h 50) •
Naturellement, Mme Waridel, quand
vous mentionnez l'industrie, bien, tu sais, vous faites un tout d'une
industrie, mais il faut bien comprendre ici que ceux et celles, là, qui ont
participé à ces 182 licences, 62 puits, bien, ce n'est pas les
grandes pétrolières du monde, là, mais c'est des gens qui ont accepté... Puis
après ça, on peut leur prêter des intentions, là, mais ils ont accepté de
travailler dans un cadre légal où on a une responsabilité, comme gouvernement,
on a autorisé ça. Alors, il y avait une loi, des règlements, puis ils s'y sont
conformés. Donc, c'est là, un peu, que ma part de responsabilité, comme
gouvernement, comme État, c'est de venir dire : Oui, on peut prétendre
qu'ils le savaient, mais nous aussi, on le savait. Et...
M. Julien : ...juste
pour terminer cet élément-là, pour vous entendre par la suite, tu sais, quand
vous dites il était temps, mais pour moi, oui, peut être qu'il était temps,
mais nous sommes les premiers à le faire. Nous sommes les premiers à le faire,
et alors c'est vrai qu'on peut intellectuellement dire qu'il était temps, mais
c'est quand même surprenant qu'on soit les premiers à le faire et c'est un peu
le volet indemnisation. Je ne pense pas qu'on va convenir ensemble de cette
opportunité-là, mais, mais dans cette perspective-là qu'on l'amène à un minimum
parce que j'ai l'impression que, mettons, on a pris une responsabilité en
l'autorisant de manière claire.
Mme Waridel (Laure) : Bien,
merci pour votre question, M. le ministre, et puis, bien d'abord, on a commencé
en vous félicitant, donc ça demeure tout entier. On est très heureux d'être le
Québec... que le Québec soit le premier. Ceci dit, mais vous savez à quel point
l'industrie a été gourmande par le passé. Vous savez qu'elles avaient, la
plupart d'entre elles, des études qui démontraient que le potentiel était
extrêmement bas, puis que, dans bien des cas, c'était une opportunité pour
aller chercher des subventions pour alimenter différents volets. Mais, bon, je
ne vais pas me lancer dans ce dans ce débat-là, mais certains articles dans Le Devoir
ont été assez éloquents à cet effet à cet égard là, mettant en lumière qu'il
avait eu effectivement énormément de subventions déjà jusqu'à présent et puis
que comparativement puis on le dit dans notre présentation, au prix qu'ils ont
payé pour les permis, moi, je vous dirais effectivement que leur permis soit
remboursé, moi, je serais prête à laisser aller ça parce que c'est vrai qu'ils
perdent ce droit-là, mais ce qu'ils demandent en ce moment est beaucoup trop. Quand
ils parlent du... c'est un peu le même problème qu'on a avec la Loi sur
l'expropriation sur les terrains, quand on regarde les municipalités qui
veulent avoir accès à des espaces verts et qui doivent payer le prix anticipé,
ça n'a juste pas de bon sens.
Et l'autre chose, en fait, dans laquelle
on vous invite à être, c'est dans un autre paradigme économique, dans le sens
où on doit tenir compte des coûts environnementaux et sociaux, et ça, c'est
indéniable. On le sait depuis le rapport Stern, il y a déjà plus d'une
décennie, que la crise climatique va coûter une fortune et que ce sont d'abord
nos enfants et petits-enfants qui vont devoir payer, on n'est pas en train de
budgéter ça, et ça, c'est inacceptable. Il faut qu'on fasse nos devoirs
collectivement et qu'on mette l'industrie aussi face à ces coûts-là parce qu'on
a une responsabilité collective. Donc, je dirais que c'est la position que le
mouvement a prise, c'est de dire non fermement. Mais maintenant, après ça,
bien, c'est vous les politiciens qui... puis on sait que votre tendance est
plutôt à donner une écoute assez importante à l'industrie. Donc, on est
convaincu que l'industrie ne restera pas en reste.
M. Julien : J'ai une
question là-dessus, Mme Waridel.
Mme Waridel (Laure) : Oui.
M. Julien : Quelle
démonstration par rapport à cette phrase-là vous avez de ma part? C'est parce
que je suis surpris parce que j'ai été reproché par l'industrie de ne pas les
avoir rencontrés, puis je ne les ai pas rencontrés.
Mme Waridel (Laure) : Il
y a eu... Écoutez, M. le ministre, il y a eu tout le débat sur GNL et on se
rappelle les rencontres qui ont été permises. Je pensais à ça. Je pense à ce
qui se passe dans le secteur des forêts, aussi votre collègue qui a exactement
le même discours que l'industrie. Donc, je ne pense pas que ce n'est une
surprise pour personne en fait de savoir qu'ils disposent d'une bonne écoute à
votre égard... de votre part.
1jul Bien, vous en parlerez avec
M. Tetreault qui est venu ici cette semaine, mais je ne pense pas qu'il a
la même perception que vous, Mme Waridel, mais c'est correct. À la fin,
sur cet élément-là, je vous entends
Mme Waridel (Laure) : Mais
je suis ravie que M. Tetreault soit insatisfait aussi. Ça me rassure, je
vous dirais.
M. Julien : O.K.
L'élément qui me surprend, puis, honnêtement, là, qui me surprend beaucoup,
c'est quand madame... excusez moi, Mme Catherine Gagnon, Mme Gagnon,
les projets pilotes. Honnêtement, on met les projets pilotes dans ce projet de
loi là, là, parce qu'on veut que, pour des perspectives environnementales, les
puits qui ont été forés, puis on avait l'INRS qui disait : Ça coût un
million de kilomètres, ces puits-là, là, s'il y a des projets, puis ça va être
très peu de puits qui vont pouvoir même avoir ces capacités-là par leur nature.
Mais si, par grande chance, il y avait des projets qui viennent faciliter la
transition énergétique de manière scientifique, on dit : Mais on n'est pas
fermé à l'idée. Mais...
M. Julien : ...un
pseudo-projet, puis vous pensez que les projets... c'est ça, c'est ça, un
pseudo-projet pilote découlant d'une pression de lobbyistes pétroliers.
Écoutez, là, ça, là, je vous le dis, pour moi, c'est n'importe quoi, là. C'est
marqué dans l'article qu'il n'y aura pas de possibilité de recherche des
hydrocarbures ni d'exploitation des hydrocarbures. Puis là, il y en a qui
disent : oui, mais si je fais de la captation, peut être que je
pourrais... Non, c'est non, c'est non. Des seuls projets pilotes, c'est marqué
noir sur blanc dans la loi, c'est des projets de pilotes qui vont permettre
d'additionner des gestes dans notre volonté, parce qu'il va falloir en
additionner parce que les cibles sont audacieuses, dans notre volonté de
réduire les GES et de décarboner le Québec le plus rapidement possible.
Alors, moi, si vous me dites que vous
n'aimez pas les projets pilotes parce que c'est des pseudoprojets de lobbyistes
pétroliers, bien, je vais être ouvert pour ne pas les mettre, bien honnêtement.
Mais ce n'est pas du tout l'intention qu'on a, aucunement. Et je vous assure
qu'il n'y a personne, actuellement, de vos lobbyistes pétroliers qui trouvent
que les projets de pilotes qui sont inscrits ici, là, c'est à leur
satisfaction.
Mais exprimez-moi un peu vos craintes,
considérant que c'est écrit noir sur blanc dans l'article 42 qu'il n'y a
pas d'exploitation, pas d'exploration d'hydrocarbures qui est permise. Puis
l'INRS parlait ce matin... En réalité, ça peut être de l'hydrogène qui serait
vert qui serait mis dans des fonds des puits, ça pourrait être de la
géothermie. Puis on avait des spécialistes, des gens du domaine qui disaient
que ça prendrait plus de flexibilité parce qu'on aimerait ça pouvoir bénéficier
de ces projets-là, comme universitaires, justement pour accélérer la transition
énergétique. Puis vous le dites, là, des lobbyistes pétroliers pour des
pseudo-projets pilotes. Sur quelle base?
Mme Gagnon (Catherine
Alexandra) : Laure. Bien, d'abord, je suis contente de vous entendre
dire...
Mme Waridel (Laure) : Vas-y
puis après je continuerai.
Mme Gagnon (Catherine
Alexandra) : Oui. Bien, d'abord, je suis contente de vous entendre
dire que vous voyez, vous, dans le projet de loi, que c'est clair que ces
projets pilotes là ne pourraient pas servir à blanchir certaines émissions de
gaz par certaines compagnies. Parce que, dans l'Ouest, c'est le cas. Ça a été
très décrié par certains scientifiques que c'est de pouvoir capter du carbone
et le storer, ce serait une manière de blanchir un peu l'industrie, les
industries sales en se disant : Bien oui, on en capte en utilisant des
puits, ça nous permet d'émettre un peu plus, donc, tu sais, pour atteindre une
certaine carboneutralité. Mais je suis contente de vous entendre dire que vous,
tel qu'il est écrit, vous jugez que c'est très clair, noir sur blanc, que ce ne
serait pas possible... de rebondir là-dessus.
M. Julien : ...Bien,
Mme Gagnon, si vous me permettez, ça a trois lignes, donc je vais le lire
puis vous me direz en quoi c'est pas clair : «Un projet pilote mis en
oeuvre en vertu du présent chapitre ne peut avoir pour effet de permettre la
recherche d'hydrocarbures ou de réservoirs souterrains, la production
d'hydrocarbures ou l'exploitation de la saumure.» Trois lignes limpides comme
de l'eau. Alors, c'est où, qu'on a un enjeu?
Mme Gagnon (Catherine
Alexandra) : Vas-y, Laure.
Mme Waridel (Laure) : si
vous me permettez, en fait, je vous inviterais à lire, on vous l'a mis en
référence dans notre mémoire, la lettre des 400 universitaires qui
s'opposent à l'aide fédérale de stockage de carbone. Parce que la dynamique
qu'on craint, elle est très, très bien exprimée en détail dans cette lettre-là,
pardon, parce que c'est des éléments... Et là, effectivement, c'est très bien
rédigé clairement dans la lettre. Mais après, il y a toutes sortes d'exceptions
qui, possiblement, pourraient être un risque, si on se fie à ce qui s'est passé
au fédéral, donc ça serait d'éviter les écueils. Il y a quand même... la
manière dont... ce que vous avez lu est assez clair, mais après, les autres
éléments, il y a comme, dans l'annexe, c'est quand même des éléments qui sont
moins clairs. Ça fait que...
M. Julien : Oui, mais
juste là-dessus, Mme Waridel, si vous permettez.
Mme Waridel (Laure) : Oui.
• (18 heures) •
M. Julien : Je comprends
puis je partage même les craintes par rapport à certaines prétentions de
producteurs d'Hydrocarbures de venir contrebalancer ces productions-là par du
captage de carbone. Mais ici, au Québec, le projet de loi dit : vous ne pouvez
pas exploiter, s'il est adopté, là, pas d'exploitation, pas d'exploration,
donc, ça n'existe plus. Et les projets pilotes ne doivent pas, même pas
permettre de manière pilote une exploitation et une exploration. Donc, je peux
comprendre que certains prétendent autre chose, par exemple, dans l'Ouest
canadien, mais si on réfère au projet de loi du Québec, là, qu'il y a devant
vous, il n'y a pas substance aux prétentions que...
18 h (version non révisée)
M. Julien : ...ces
éléments là sont amenés par des lobbyistes pétroliers. Un lobbyiste pétrolier
qui nous dirait qu'il ne peut pas faire d'exploitation puis de l'exploration au
Québec, je ne comprends pas son objectif.
Mme Waridel (Laure) :
D'accord, monsieur le ministre. Ici, dans le fond... le projet pilote est donc
de récupérer le méthane qui est émis des puits, mais que l'intérêt le plus
grand serait en fait de le fermer. Vous, vous allez envoyer des inspecteurs
pour voir si ce qu'ils font, en fait... vous aurez l'expertise pour dire: Bien,
dans le fond, on aurait pu complètement le caper au lieu d'exploiter le méthane
que, dans le fond, on peut quand même tirer. Parce qu'on voit, hein, les
inspecteurs en environnement qu'on a en ce moment sur le terrain. On n'est même
pas capable d'identifier exactement où sont les 775 puits qui ont été
abandonnés par l'industrie. Ça fait qu'il y a un suivi qui est à faire à ce
niveau-là. Et, moi, ce qui m'inquiète, c'est de voir à quel point on n'a pas tendance
à faire les suivis adéquats. Et, en fait, tant mieux qu'il y ait à sa
disposition dans le projet de loi, que ce ne soit pas votre intention, mais
assurons-nous après qu'on met les ressources nécessaires pour le suivi et
qu'effectivement il n'y a pas des sous qui, finalement, servent à maintenir des
puits sous prétexte de récupération de méthane, alors qu'ils pourraient être
complètement fermés.
M. Julien : Mais je
réitère, Mme Waridel, je m'excuse, mais le projet de loi dit qu'il ne peut
pas y avoir d'exploration et d'exploitation d'hydrocarbures. Donc, les projets
méthane que vous mentionnez, non, ce n'est pas possible. À la fin, je veux
juste mentionner, si vous avez une suggestion pour mettre dans la loi un projet
pilote qui, à l'aide des puits déjà forés, favorisera la transition énergétique
et que la formulation que vous souhaitez y apporter est plus limpide que la
mienne, je souhaite l'écouter.
Mme Waridel (Laure) :
...je vous remercie pour votre ouverture, monsieur le ministre. Je ne suis pas
une juriste, mais je suis convaincue que nos collègues du Centre québécois de
l'environnement auront peut-être des propositions plus intéressantes que nous à
vous faire. Mais, écoutez, vous semblez tellement habité par cette envie de ne
pas subventionner des projets pilotes qui seraient nuisibles à l'environnement,
je suis absolument ravie d'entendre ça. Puis ce que je souhaite, c'est que le
gouvernement mette à disposition vraiment les ressources nécessaires pour
s'assurer après de la bonne utilisation des sous pour ces projets pilotes là.
Parce que c'est sûr que le mouvement Mères au front est en faveur de solutions.
C'est là-dessus qu'on travaille, c'est notre message clé. Mais assurons-nous
qu'on fait les choses vraiment, vraiment correctement. Ça fait que je suis
contente de voir à quel point vous êtes convaincu.
M. Julien : Bien, vous
êtes bien aimable. Effectivement, vous touchez des cordes sensibles, parce que
moi aussi, je suis un comptable, mais ce n'est pas parce qu'on est comptable
qu'on est con, et bien au contraire. Et honnêtement, quand on mentionne que
l'industrie est proche de nous, bien, moi, je ne les rencontre pas. Et des
intentions comme ça, je ne souhaite pas qu'on m'en fasse, sauf si on peut les
démontrer, parce que ce n'est pas mon cas. Moi, mon cas ici, là, moi, c'est
Mathilde et Arnaud, c'est le nom de mes enfants. J'ai la même perspective que
vous. Puis, je pense que le projet de loi qu'on a devant nous est un pas, un
excellent pas dans une direction qu'on doit emprunter. Je pense qu'on peut le
bonifier, mais je ne voudrais pas prétendre que des lobbys pétroliers nous ont
aidés à écrire cette loi-là. Je vous le dis, là, il n'y a pas beaucoup de
lobbys pétroliers qui aiment la loi actuellement.
Une voix : On est heureuses
de l'entendre.
Mme Waridel (Laure) :
Bien, je suis vraiment ravie d'entendre ça. Puis ça veut dire que vous avez
pris... Espérons que ça restera une bonne habitude pour la suite avec d'autres
types d'industries potentiellement polluantes. Parce que là on n'a plus le
temps, comme on le disait dans notre mémoire, de prendre des mauvaises
décisions. L'heure est à l'urgence. Les rapports du GIEC sont chaque fois plus
alarmants et ils imposent un changement de paradigme aussi économique pour
tenir compte des coûts environnementaux et sociaux. Et ça, ça demande de
l'audace, et on souhaite que votre gouvernement l'ait, cette audace-là. Et on
pense que ce projet de loi là, en fait, on a commencé en vous félicitant, est
justement le début de quelque chose qu'on souhaite encore plus grand.
M. Julien : Parfait. Il
reste combien de temps?
Le Président (M. Lemay) :
C'est la fin de ce bloc d'échange.
M. Julien : Mesdames,
merci infiniment pour votre présentation. C'est très apprécié.
Le Président (M. Lemay) :
Très bien.
Une voix : Merci, bonne
soirée.
Une voix : Merci pour votre
écoute.
Le Président (M. Lemay) :
Alors, nous allons passer maintenant à l'opposition officielle. Monsieur le
député de Mont-Royal-Outremont, pour une période d'environ 11 minutes.
M. Arcand : Merci
infiniment, madame Gendron, madame Waridel. Bonjour. C'est un plaisir. Mme Waridel,
on s'est vus dans une vie antérieure. Et on est donc très heureux de vous
retrouver aujourd'hui. Vous avez vu que le ministre aimerait beaucoup avoir une
cérémonie de reconnaissance à un moment donné, là...
M. Arcand : ...est-ce que ce
sera possible? Mais je vais vous donner au moins, au début, une assez bonne
nouvelle, c'est que ce projet de loi, même s'il y a des choses à ajuster dans
le projet de loi, on s'est tous dit que, sur le principe, tous les partis
politiques à l'Assemblée nationale, sur le principe, on dit : on est
d'accord avec le projet de loi, dans l'ensemble, de ce côté-là. Alors, vous
n'avez pas tellement d'enjeux sur le fait que ce projet de loi là va sûrement,
éventuellement, être adopté pour la suite des choses.
Ma question, évidemment, va un peu dans le
même sens que les questions que le ministre a posées. Et je comprends qu'il y a
des entreprises qui, certainement, profitent d'une situation. Vous avez parlé
du crédit d'impôt fédéral, etc. Mais nous on a eu, aujourd'hui, des
interventions de différents groupes, mais on a eu aussi, il y a quelques
heures, des interventions de l'INRS qui est intervenu, puis ils avaient l'air à
avoir, d'une part, une position extrêmement, je dirais, positive sur les projets
pilotes, parce qu'eux autres ils disent même : Écoutez, on veut étendre
même la limite par rapport à ça. On veut des projets pilotes beaucoup plus
flexibles. Et je vais vous dire, ils nous ont parlé de géothermie. Ils nous ont
parlé évidemment du captage de carbone, le stockage d'hydrogène, etc. J'essaie
de voir, là, je comprends la méfiance que vous pouvez avoir par rapport à
certaines industries qui se servent de ça pour essayer de calmer le jeu
actuellement, mais si on parlait de projets pilotes à caractère scientifique
qui seraient financés par des fonds publics et qui seraient, dans une certaine
mesure, contrôlés par le gouvernement, est-ce que c'est quelque chose qui est,
à vos yeux, inacceptable?
Mme Waridel (Laure) : Oui.
Bien, en fait, évidemment que si les projets pilotes permettent de contribuer à
développer des solutions notamment en recherche, j'ai beaucoup de collègues
scientifiques, effectivement, qui travaillent à des alternatives, notamment des
chercheurs à Polytechnique, à l'ÉTS et autres. C'est juste le contrôle qui
parfois est manquant pour s'assurer qu'on atteint effectivement nos objectifs
par la suite. Donc, si la loi est bien rédigée, si on s'assure qu'il n'y a pas
de, si on veut, de faille par laquelle on peut passer pour finalement servir à
financer autre chose que l'intention première, évidemment qu'on est en faveur
de solutions. Puis il y a beaucoup d'innovations technologiques qui vont être
nécessaires pour trouver des solutions, mais en même temps, nous, ce qu'on
souhaite, dans le mouvement, c'est appeler à une réflexion plus large, parce
qu'on ne pense pas que c'est la technologie qui va nous sauver, loin de là. Ça
fait des années et des années qu'on parle de captation de carbone, qu'on parle
de toutes sortes de stratégies, puis on n'y arrive pas. Puis, je trouve que
l'image la plus claire pour ça, c'est comme on est face à un bain qui déborde,
là, le robinet il coule, on continue à extraire des énergies... des
hydrocarbures sous différentes formes, à les utiliser, puis au lieu de fermer
le robinet, on travaille à développer des nouvelles manières, des nouvelles
chaudières, des nouveaux plats pour essayer d'extraire l'eau du bain autrement,
alors qu'il déborde. Tu sais, à un moment donné, il faut aller vers l'essence
du problème, avoir ce courage-là.
• (18 h 10) •
C'est sûr qu'on a des sociétés qui
dépendent des énergies fossiles de manière claire et nette, mais le Québec se
trouve dans une position privilégiée pour être la locomotive de la transition
écologique au Québec. Puis je vous dirais, ce n'est pas juste à cause de notre
hydroélectricité, loin de là. C'est plutôt parce qu'on a un tissu social qui
est très serré. Au Québec, on peut faire les choses très rapidement. On l'a vu
pendant la Révolution tranquille. En six ans, il y a eu des changements
majeurs, des transformations sociales qui caractérisent encore le Québec
d'aujourd'hui, qui sont pris dans une période de six ans. Donc, on a besoin
d'avoir ce même élan pour protéger l'avenir de nos enfants. Et à cet égard-là,
le Québec ressemble à beaucoup de sociétés scandinaves, c'est-à-dire c'est des
plus petites populations qui partagent une langue, donc avec un tissu social
très fort...
Mme Waridel (Laure) : ...ça
fait que profitons de cet avantage-là social, qui n'est pas juste
hydroélectrique, pour inventer une nouvelle société qui soit plus écologique et
plus équitable aussi, parce que ça va ensemble et ça serait une société qui
sera plus saine aussi, parce que vous savez que beaucoup des alternatives qui
permettent de réduire nos émissions de gaz à effet de serre amènent davantage
de partage dans la société et amènent aussi des conditions qui sont favorables
à une meilleure santé, qu'on pense aux transports actifs, qu'on pense à la
réduction de la consommation de viande, qu'on pense aux espaces verts en milieu
urbain et autres, au verdissement, à la... On est tellement privilégiés d'avoir
autant de solutions à notre... On a besoin d'avoir des élus... nous mènent dans
la bonne direction et qui permettent de développer une architecture, des choix
qui feraient en sorte que les citoyens seront amenés à prendre des meilleures
décisions, c'est-à-dire que les choix les plus écologiques soient aussi les
choix qui coûtent le moins cher parce qu'on aura des politiques d'écofiscalité,
seront les choix les plus faciles et les plus agréables à faire. Comme c'est le
cas si vous allez passer un temps à Copenhague ou dans d'autres villes de
Scandinavie, vous verrez comment c'est facile de faire les bons... puis on a ce
potentiel-là au Québec. Puis c'est pour ça que l'argent, là, qu'on veut... que
l'industrie quémande, on pense qu'il faut la mettre dans le développement de
ces transformations-là qui sont aussi sociales et pas juste technologiques.
Merci. Puis c'est un plaisir de revoir, monsieur Arcand, en passant.
M. Arcand : Bien oui, bien
oui. Très bien. Moi, vous savez, on est quatre partis politiques ici présents
aujourd'hui, hein. Dans quelques mois, on est en campagne électorale. Tout le
monde a besoin d'un programme. Alors, pendant que vous êtes là, madame Gendron,
mme Waridel, vous avez dit, dans votre commentaire, vous avez dit :
Nous avons besoin que les politiciens posent des gestes plus ambitieux encore.
Alors, guidez-nous dans nos futurs programmes de campagne électorale. Quels
sont les gestes plus ambitieux que vous aimeriez que l'on pose au cours de la
prochaine année ou des prochaines années?
Mme Gagnon (Catherine
Alexandra) : Bien, déjà là, le projet de loi, on doit, on doit le
réitérer, là. C'est vraiment, pour nous, déjà un pas dans la bonne direction,
mais je pense qu'il va falloir imaginer toutes sortes de choses pour continuer.
On pourrait embrayer sur toute la question forestière, mais je ne sais pas si
c'est une tangente qu'on souhaite prendre maintenant. Oui, d'abord lire le
livre de Laure Waridel, mais de réimaginer l'utilisation de notre territoire
d'une manière où on cesse d'empiéter, de créer une dette écologique qui va être
léguée à nos enfants de toutes sortes de manières. Je pense qu'on peut être très
innovants entre autres sur comment qu'on aborde l'industrie forestière, on
pourrait en discuter peut-être une autre fois, mais ça, c'est un sujet
nécessairement qu'il va falloir aborder, je pense, parce que là, on voit que
cet empiétement sur notre vaste territoire du Nord a des conséquences
écologiques, a des conséquences sur des populations autochtones. Donc, ça, ça
pourrait être un point qui est très fort et très cher à Mères au front, je
pense, utilisation et les coupes forestières, la manière qu'on a orienté
l'industrie forestière pendant les dernières années. Pistes de solution. Je ne
sais pas, Laure, il y a mille choses dont on pourrait discuter, mais je ne sais
pas si tu es...
Une voix : Très bien.
Mme Waridel (Laure) : Oui.
Bien, en fait, une des bases... un des livres qu'on utilise... Bien, en fait,
c'est le résumé de ma thèse de doctorat, La transition, c'est maintenant, puis
qui met en lumière, justement, énormément de solutions qui sont déjà en train
d'émerger au Québec. Il y a beaucoup de gens qui font un travail
extraordinaire, qui est dans l'ombre et qui pourrait être amplifié et devenir
les nouvelles normes.
M. Arcand : C'est ça.
Écoutez, il me reste peu de temps, je pense. Alors, il me reste deux minutes.
J'avais une question, évidemment, sur un sujet que vous avez abordé. Vous savez
que Questerre a une entente, semble-t-il, avec les Abénakis pour des projets
communs. Comment vous traiteriez ça si vous étiez en politique? Est-ce que vous
donnez un permis? Est-ce qu'au nom de l'autodétermination, enfin, peu importe
ce qu'on peut appeler, vous, ça représente quand même une certaine difficulté
s'il y a des communautés autochtones qui décident, par exemple, de faire
affaire directement avec des compagnies pétrolières?
Mme Waridel (Laure) : Veux-tu...
Bien, je peux peut-être donner un début de réponse puis tu compléteras,
Catherine. En fait, pour nous, la capacité de décider des communautés
autochtones, elle est fondamentale puis c'est à eux de décider. Après ça, il
faut voir quelles sont les entités au sein des communautés qui ont vraiment le
pouvoir de décision parce que... Bien là, cette partie là sur notre mémoire, je
dois dire que ce n'est pas nous qui l'avons rédigée, c'est Marie... On pourrait
vous mettre en lien pour des...
Mme Waridel (Laure) : ...plus
détaillée sur cette question-là. Mais pour nous, évidemment, la question des
communautés autochtones... Elles doivent être écoutées. Mais après ça, il y a
d'autres fondements plus larges liés au développement durable, d'ailleurs, que
vous connaissez, du temps où votre gouvernement a fait adopter la Loi sur le
développement durable, qui devraient... donc, qui cherchent un équilibre entre
le social, l'économique et l'environnemental, qui devraient être au cœur du
processus de décision, mais aussi qui touchent l'ensemble de la communauté.
Je ne sais pas, Catherine, si tu veux...
Mme Gagnon (Catherine
Alexandra) : Non... le résumé de ce que j'aurais dit, oui.
Le Président (M. Lemay) : ...donc,
ceci complète ce bloc d'échange. Alors, nous allons maintenant céder la
parole...
M. Arcand : Alors, merci,
merci beaucoup, c'était un plaisir.
Le Président (M. Lemay) : ...au
deuxième groupe d'opposition, avec la députée de Sainte-Marie-Saint-Jacques,
pour environ 2 min 45 s.
Mme Massé : Oui, bonjour,
mesdames, bonjour, mes soeurs de lutte, de Mères au front. En fait, vous avez
abordé la question de la transparence, de l'importance d'avoir des données qui
sont accessibles aux citoyens et citoyennes, citoyens et citoyennes,
d'ailleurs, qui font en sorte qu'aujourd'hui, l'État québécois est devant la
nécessité de déposer un projet qui interdit l'exploration et l'exploitation.
C'est une façon de lever un chapeau à vos luttes de longue date, ce que... Donc,
cette question-là d'avoir accès aux données, qu'est-ce que, dans... Parce que
là, vous êtes là comme citoyennes, là, comme... ça aurait pu être n'importe
quelles citoyennes des autres groupes de Mères au front? Alors, qu'est-ce qui
fait... pourquoi c'est si important, pour les citoyens et citoyennes, d'avoir
ce genre de données là? Ça fait que ça, c'est une question.
Moi, j'ai juste deux minutes, alors. Et
l'autre, c'est... On s'est fait dire que, dans le fond, les droits des
investisseurs, bien, il fallait respecter ça, parce qu'on avait pris des
engagements, on leur avait permis d'explorer, etc. Etc. Vous en pensez quoi,
vous, par rapport à ces droits-là des investisseurs?
Mme Gagnon (Catherine
Alexandra) : Bien, si je peux répondre, Laure, là. Bien, un, les deux
questions, une ne va pas sans l'autre. C'est-à-dire que, pour que le citoyen
soit en mesure de juger si les indemnisations, par exemple, face à l'industrie,
sont justifiées ou pas, on doit avoir accès aux données. Quels sont les niveaux
de subvention? C'est extrêmement difficile, avoir accès à ces données-là. Quels
sont les niveaux de subvention qui ont été donnés exactement aux compagnies?
Quelles étaient les ententes claires? Je pense que pour prendre un choix
éclairé, les citoyens doivent avoir accès à ces données-là.
Ça m'amène à la deuxième question, qui
est, bon, si on sait exactement les chiffres, on va être vraiment en mesure de
se dire : Bon, bien là vous avez eu assez votre part du gâteau. Mais, tu sais,
si on vous a donné... si vous avez payé 12 millions pour vos permis
d'exploitation, comme disait Laure, nous serions, à la limite, d'accord que ce
soit remboursé, pour être donnant-donnant, puis pour être bon joueur. Mais si,
en plus, on vous a donné 120 millions de subventions, je pense que, pour
l'instant, comme je le dirais, on considère que, bien, c'est ça, vous avez
fait... vous avez pris votre part du gâteau, puis de partir avec plus, ce
serait comme l'enfant qui veut sortir de la fête avec le gâteau puis les jouets
au complet.
Mais pour ça, pour les données, tu sais,
pour pouvoir prendre les choix... Même si on est à titre de citoyens, nous
autres, on est quand même des universitaires assez formés. Mais je pense que
tout citoyen est capable, quand il a accès aux données, de voir les chiffres,
et de voir ce qui a du sens, et pas de sens, au niveau de nos contributions.
Est-ce que tu veux rajouter quelque chose,
Laure?
Mme Waridel (Laure) : Bien,
je dirais que, trop souvent, puis ça, je l'ai dit aussi à titre de chroniqueuse,
quand on veut faire sortir de l'information, on doit faire appel à la Loi
d'accès à l'information, puis là ça demande énormément de temps pour avoir les
données, des données qui devraient être rendues publiques. Ça fait que, quand
même les journalistes... je pense à mes collègues... ont la difficulté à
trouver des données, alors qu'ils doivent être... ce qui permet à la société de
prendre des décisions, imaginez quand c'est un simple citoyen ou une simple
citoyenne qui essaie d'avoir de l'information. Ce n'est vraiment pas évident.
Puis je pense qu'une saine démocratie....
Le Président (M. Lemay) : Merci,
Mme Waridel, je dois vous interrompre à ce stade-ci, et maintenant, céder la
parole au député de Jonquière.
• (18 h 20) •
M. Gaudreault : Oui, alors
bonjour, merci beaucoup d'être là. Vous savez, si vous avez suivi nos travaux
depuis quelques jours, on se questionne beaucoup, un peu le dilemme, là, de
l'oeuf ou la poule, jusqu'où on doit aller dans les indemnités pour éviter,
peut-être, des poursuites des compagnies, ou si on donne une indemnité, on
achète la paix, on n'a pas de poursuites. Moi, j'aimerais ça vous entendre sur
la reconnaissance d'un préjudice écologique pour les générations futures. Tu
sais, on ne se pose pas ces questions-là, dans le fond, pour nos enfants. Et je
sais que ça a été reconnu dans certains pays, Pays-Bas, France, Irlande,
récemment, à la suite de procès ou, en tout cas, de... Puis il y a Enjeux qui
s'en va aussi de ce côté-là.
Peut-être qu'on s'éloigne un petit peu du
projet de loi, mais pas...
M. Gaudreault : ...qu'est ce
qu'on pourrait faire, comme parlementaires, pour reconnaître le préjudice
écologique aux générations futures?
Mme Gagnon (Catherine
Alexandra) : Bien, d'abord, commencer par le calculer, mais... Laure,
c'est ça sûrement que tu voudrais dire. C'est-à-dire que le préjudice
écologique est toujours externalisé, quand on analyse des projets, alors qu'on
sait maintenant qu'il y a des coûts immenses que la société doit payer, là. Ce
matin, dans le journal... Moi, je suis de Rimouski. À Sainte-Luce, on a mis 12
maisons en vente aux enchères, à 3000 $, parce qu'elles doivent être déplacées
à cause de l'érosion côtière causée par les changements climatiques. Il y a un
coût énorme à notre société, mais ces coûts sont toujours externalisés dans la
prise de décision envers des projets. Moi, je pense que le truc numéro un qui
devrait être fait, c'est de toujours considérer ces coûts-là, à chaque décision
qu'on prend pour un développement x. Tu peux rajouter, Laure.
Mme Waridel (Laure) : Mais,
de manière générale, en fait, le gouvernement devrait se donner un filtre dans
sa prise de décision. C'est à dire que toutes les décisions prises par le
gouvernement du Québec, puis autres instances aussi, devraient passer le crible
de leurs impacts sur l'avenir de nos enfants. Et donc ça, c'est de regarder le
coût climatique. Ce qui nous amène vers plus d'émissions de gaz à effet de
serre devrait d'emblée être rejeté, alors que les investissements qui nous
permettent de réduire nos émissions de gaz à effet de serre, de réduire notre
empreinte écologique, au contraire, devraient être encouragés. On n'a pas ce
filtre-là. On fait des budgets, puis vous le savez bien, financiers, mais on ne
fait pas de budget carbone. On devrait se doter d'un budget carbone. Puis ça,
il y a longtemps que les groupes écologistes le demandent et ça nous aiderait à
justement respecter le droit des futures générations à un environnement sain.
La poursuite se fait au niveau fédéral par
Environnement Jeunesse, mais, je veux dire, d'un point de vue moral, on a une
question à se poser. Puis si la première responsabilité de nos élus, ce n'est
pas de veiller à protéger la sécurité de ces enfants, qu'est ce que c'est? Je
veux dire, l'histoire, le développement des premières sociétés, les premiers
types de gouvernance sont nés de ce besoin-là de confier une partie de notre
liberté en échange d'une protection sur notre sécurité, notre santé. En ce
moment, on sait qu'il y a une menace qui...
Le Président (M. Lemay) : Alors,
merci beaucoup, Mme Waridel. C'est tout ce qui complète le temps qu'on avait.
Donc, merci, Mme Waridel et Mme Gagnon, de votre contribution à nos travaux.
Et la commission ajourne ses travaux
jusqu'à demain, jeudi, le 24 février 2022, après les affaires courantes, où
elle poursuivra les auditions publiques sur le projet de loi no 21. Au revoir.
(Fin de la séance à 18 h 23)