Journal des débats (Hansard) of the Committee on Agriculture, Fisheries, Energy and Natural Resources
Version préliminaire
42nd Legislature, 2nd Session
(October 19, 2021 au August 28, 2022)
Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.
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Wednesday, February 23, 2022
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Vol. 46 N° 3
Special consultations and public hearings on Bill 21, an Act mainly to end petroleum exploration and production and the public financing of those activities
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Intervenants par tranches d'heure
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Lemay, Mathieu
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Julien, Jonatan
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Girard, Éric
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Campeau, Richard
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Arcand, Pierre
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Arcand, Pierre
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Lemay, Mathieu
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Massé, Manon
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Gaudreault, Sylvain
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Lemay, Mathieu
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Julien, Jonatan
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Girard, Éric
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Campeau, Richard
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Arcand, Pierre
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Arcand, Pierre
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Lemay, Mathieu
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Massé, Manon
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Gaudreault, Sylvain
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Lemay, Mathieu
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Julien, Jonatan
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Girard, Éric
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Arcand, Pierre
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Massé, Manon
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Massé, Manon
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Lemay, Mathieu
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Gaudreault, Sylvain
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Julien, Jonatan
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Julien, Jonatan
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Lemay, Mathieu
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Arcand, Pierre
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Massé, Manon
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Massé, Manon
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Lemay, Mathieu
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Gaudreault, Sylvain
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Julien, Jonatan
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Julien, Jonatan
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Lemay, Mathieu
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Arcand, Pierre
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Massé, Manon
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Lemieux, Louis
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Gaudreault, Sylvain
11 h (version révisée)
(Onze heures vingt-six minutes)
Le Président (M. Lemay) : Alors,
à l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de
la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources
naturelles ouverte. Et je demande à toutes les personnes présentes dans la
salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.
Alors, aujourd'hui, nous sommes réunis
afin de poursuivre les consultations particulières et les auditions publiques
sur le projet de loi n° 21, la Loi visant principalement à mettre fin à la
recherche et à la production d'hydrocarbures ainsi qu'au financement public de
ces activités.
Et, M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des
remplacements?
Le Secrétaire : Oui, M. le
Président, un seul remplacement : M. Tanguay (LaFontaine) est
remplacé par M. Arcand (Mont-Royal—Outremont).
Auditions (suite)
Le Président (M. Lemay) : Merci,
M. le secrétaire. Aujourd'hui, nous entendrons l'Institut national de la
recherche scientifique, et d'ailleurs je les salue de ce pas, qui sont avec
nous. Alors, je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour faire
votre exposé, et, par la suite, il y aura une période d'échange avec les
membres de la commission.
Mais d'abord, je vous invite à vous
présenter, et ensuite vous pouvez y aller avec votre exposé.
Institut national de la recherche scientifique
(INRS)
Mme Hénault-Ethier (Louise) :
Bien, bonjour, M. le Président. M. le ministre, Mmes, MM. les députés et
membres de la CAPERN, je vous remercie pour l'invitation à témoigner aujourd'hui,
accompagnée d'experts du Centre Eau Terre Environnement de l'Institut national
de la recherche scientifique dont j'assume la direction. Donc, je suis accompagnée
de Louis-César Pasquier, Jasmin Raymond et Violaine Gascuel.
Donc, selon l'Agence internationale de l'énergie,
aucune nouvelle exploitation d'hydrocarbures ne doit voir le jour pour
atteindre la carboneutralité en 2050. L'interdiction d'exploiter les
hydrocarbures au Québec s'aligne avec les connaissances scientifiques. Signal
fort en matière de lutte aux changements climatiques, elle démontre l'engagement
du Québec dans la transition énergétique.
Un puits duquel du méthane fuit ou qui
menace l'eau souterraine doit être fermé. Mais, si les évaluations
environnementales sont satisfaisantes, il pourrait être un allié dans la lutte
aux changements climatiques en donnant accès à des réservoirs permettant la
production ou le stockage d'énergies alternatives ou de carbone. L'usage des
réservoirs souterrains sans exploitation des hydrocarbures sont compatibles
avec une économie faible en carbone.
Je céderai d'abord la parole à la
doctorante Violaine Gascuel, qui a travaillé sur l'évaluation du potentiel géothermique
de l'île d'Anticosti et de la région de Bécancour.
Mme Gascuel (Violaine) : Merci,
Louise. Alors, tout d'abord, j'aimerais rappeler qu'au Québec il est nécessaire
de chauffer les bâtiments environ sept mois par an. En 2013, les besoins en
chaleur représentaient 76 % de la consommation énergétique des bâtiments
résidentiels et une part substantielle de celle des autres bâtiments. L'exploitation
des ressources géothermiques québécoises permettrait de répondre à cette
demande en chaleur. Une utilisation à grande échelle permettrait d'éviter les GES
associés au chauffage et permettrait également de diminuer drastiquement la
quantité d'électricité nécessaire, notamment en période de pointe hivernale.
Des systèmes géothermiques de faible
profondeur sont déjà utilisés dans certains bâtiments de la province, notamment
à l'Assemblée nationale. Cependant, la température du sous-sol augmente avec sa
profondeur. L'exploitation de la chaleur contenue dans les formations rocheuses
plus profondes serait donc plus efficace d'un point de vue énergétique. Son
utilisation permettrait de répondre à la demande de gros consommateurs, comme
des réseaux de chaleur urbains ou de grandes serres agricoles, le tout avec des
coûts compétitifs.
Les systèmes les plus efficaces pour
exploiter cette chaleur seraient les systèmes en boucle ouverte. Ceux-ci
pompent directement l'eau souterraine vers la surface puis la réinjectent en
profondeur après en avoir extrait la chaleur. Ils nécessitent néanmoins l'utilisation
de formations rocheuses poreuses et perméables en profondeur, sans quoi ils ne
peuvent pas fonctionner.
Or, ces caractéristiques, qui font d'une
formation rocheuse une bonne cible pour les systèmes, en feraient également un
réservoir souterrain, tel que défini dans le projet de loi proposé. En effet,
il serait possible, d'un point de vue technique, d'y stocker du gaz naturel,
justement à cause de sa porosité et perméabilité. L'interdiction de rechercher
des réservoirs <souterrains...
Mme Gascuel (Violaine) :
...de
sa porosité et perméabilité. L'interdiction de rechercher des réservoirs >souterrains
dans le cadre d'un projet pilote interdit donc de fait la mise en oeuvre des
systèmes géothermiques profonds en boucle ouverte.
Les systèmes géothermiques en boucle
ouverte pourraient, par ailleurs, être combinés à l'extraction de minéraux
critiques et stratégiques de l'eau souterraine, appelée saumure, si la présence
de ceux-ci en concentration exploitable et démontrée. L'extraction de minéraux
pourrait avoir lieu juste avant la réinjection de la saumure. Ce procédé
éviterait d'avoir recours à des mines à ciel ouvert ou excavations. Bien sûr,
pour que ce soit possible, il faudrait que l'exploitation de la saumure soit
autorisée.
Je céderais ensuite la parole à Louis-César
Pasquier, professeur agréé au Centre Eau Terre Environnement de l'INRS, qui s'intéresse
depuis 10 ans à la capture, au stockage et à l'utilisation du carbone,
notamment par le développement de procédés de carbonatation misant sur l'économie
circulaire et permettant de réduire les émissions de CO2des industries.
• (11 h 30) •
M. Pasquier (Louis-César) : Merci,
Violaine, pour l'introduction. Le Québec s'est donné des objectifs de réduction
de ses émissions de gaz à effet de serre ambitieux. En 2030, les émissions qui
sont actuellement à 2,6 % en dessous des niveaux de 1990 devront atteindre
37,5 %. Nous avons donc huit ans pour atteindre la cible que nous nous
sommes fixée. Les outils dont nous disposons sont nombreux et aucun ne sera de
trop dans ce défi.
Plus spécifiquement, le secteur industriel
québécois représente 29,4 % du bilan des émissions de 2019. Ces émissions
peuvent être scindées en deux parties, soit les émissions de combustion
industrielle et les émissions de procédés.
Grâce à d'importants investissements en
matière d'efficacité énergétique, les émissions de combustion sont en large
baisse et vont continuer de baisser. Les émissions de procédés sont également à
la baisse, mais grâce à la fermeture, il y a quelques années maintenant, des
cuves Söderberg dans la production d'aluminium ou la fermeture de l'usine de
magnésium Magnola, les principales catégories aux émissions... associées aux
émissions de procédés sont la production de métaux non ferreux, l'aluminium,
les métaux ferreux, l'acier, et les minéraux non métalliques, le ciment et la
chaux.
Ces industries, qui sont un moteur
économique important pour la province, ont pour la plupart des émissions
incompressibles. On peut également mentionner la production d'énergies
renouvelables permettant l'économie circulaire de matières organiques, comme la
biométhanisation, qui, malheureusement, émettent également du CO2.
En résumé, malgré tous nos efforts de
modernisation, de transition énergétique et de réduction de nos émissions à la
source, une période de transformation sera nécessaire. La capture et le
stockage du carbone, comme vous le savez peut-être, propose de retirer le CO2de flux gazeux ou même
de l'air pour l'injecter dans des formations géologiques adéquates à plusieurs
kilomètres de profondeur. Au Québec, des travaux antérieurs ont démontré un
potentiel de stockage de plusieurs milliards de tonnes de CO2,
notamment dans des régions où se trouvent les puits dont le texte de loi fait
objet.
En ce sens, bon nombre de nos
recommandations visent à assurer la pérennité des travaux de recherche et de
développement nécessaires à un possible développement de cette filière au
Québec tout en maintenant l'interdiction de fermer et d'exploiter les
hydrocarbures de...
Je vous passe maintenant la parole à mon
collègue Jasmin Raymond, professeur au Centre Eau Terre Environnement,
hydrogéologue de formation et spécialisé dans l'énergie géothermique, qui s'est
notamment intéressé à des applications en contexte de production agricole en
serre au Québec.
M. Raymond (Jasmin) : Merci,
Louis-César. Tous les acteurs du développement énergétique s'entendent pour
dire que l'hydrogène, c'est le carburant du futur. Le Québec est particulièrement
bien positionné pour produire de l'hydrogène vert compte tenu de son potentiel
hydroélectrique. Mais, pour devenir un vrai leader dans le domaine, il faudra
inévitablement développer une capacité de stockage, qui risque d'être un défi
important pour la province.
Le stockage est essentiel pour arrimer la
production d'hydrogène à la consommation, qui ne sont pas toujours en phase,
surtout si l'on veut que l'hydrogène remplace de façon significative les
hydrocarbures pétroliers que nous consommons, qui représentent, pour le moment,
près de 40 % de notre bilan énergétique. Pour y arriver, il faudra
développer des technologies de stockage souterrain, qui sont la seule option
sécuritaire pour arriver à du stockage grand volume effectué à un coût
compétitif, le stockage d'hydrogène effectué en surface étant réalisé avec un
petit volume et des coûts beaucoup plus importants.
En ce moment, le stockage d'hydrogène
effectué dans des cavités aménagées dans des roches constituées de sel est l'alternative
privilégiée pour le stockage à grand volume. Le Québec est donc désavantagé
puisque l'unique endroit dans la province où l'on compte des formations
adéquates constituées de sel est dans le sous-sol des Îles-de-la-Madeleine, un
endroit éloigné des consommateurs, où il serait illogique de faire du stockage.
Le sud de la province est toutefois
constitué de bassins sédimentaires, les basses terres du Saint-Laurent, qui
contiennent des réservoirs souterrains. Ces réservoirs, qui ont été par le
passé des cibles pour l'exploration pétrolière, vont devenir des cibles pour l'exploration
du stockage souterrain d'hydrogène dans le futur. Le projet de loi ouvre la
porte à des projets pilotes qui permettraient l'utilisation des réservoirs
souterrains pour des fins de stockage d'hydrogène en adéquation avec les
objectifs de la transition énergétique sur autorisation du ministre.
Comme pour les autres technologies
mentionnées <précédemment, le projet de loi demeure toutefois...
>
11 h 30 (version révisée)
< M. Raymond (Jasmin) :
Comme
pour les autres technologies mentionnées >précédemment, le projet de loi
demeure toutefois flou sur la démarche à entreprendre pour obtenir une
autorisation ministérielle. Il est, bien entendu, comprenable que cette
démarche ne soit pas encore définie pour le secteur de l'hydrogène puisque les
technologies ne sont pas à maturité. Les technologies géothermiques
permettent... précédemment décrites par ma collègue Violaine Gascuel
permettent... pourraient être déployées sur le terrain à l'heure actuelle... et
qu'il n'y a pas encore de cadre réglementaire au Québec. Il ne faudrait pas
reproduire la même erreur et développer, avec quelques années de retard, ce
cadre réglementaire pour le stockage souterrain d'hydrogène.
Il est donc temps de s'investir et de
développer des projets de recherche, des projets pilotes sur le stockage
souterrain d'hydrogène, et les autres technologies mentionnées par mes
collègues, qui aideront à définir cette réglementation. Pour favoriser une
réelle transition énergétique, il ne suffit pas de mettre fin à l'exploration
des hydrocarbures pétroliers. Il faut favoriser l'essor des technologies
propres, qui mettront en valeur le potentiel des réservoirs souterrains, et c'est
ce qui mérite d'être amélioré, selon moi, dans le projet de loi.
Mme Hénault-Ethier (Louise) :
Alors, nos recommandations se déclinent en trois axes, celles spécifiques
aux articles du projet de loi, celles visant l'élaboration d'une stratégie
nationale de reconversion des puits, comprenant des évaluations
environnementales et un partage public des données d'exploration, de même que
celles visant l'élaboration d'un cadre réglementaire clair tant pour l'exploration
et l'exploitation des sources géothermiques profondes, du stockage d'hydrogène
vert, de la séquestration du CO2 découplée
de l'exploitation des hydrocarbures, de même que l'extraction écoresponsable de
minéraux critiques et stratégiques à partir des saumures.
Les réservoirs souterrains peuvent contribuer
à une réduction significative des émissions de GES, et il ne faudrait pas
priver le Québec de leur potentiel. Le financement de projets pilotes
permettrait au Québec d'assumer un leadership fort dans les domaines des
énergies vertes. Le déploiement de ces technologies représenterait également
une opportunité de création d'emplois. Grâce à son expertise en géologie, le
Centre Eau Terre Environnement de l'Institut national de la recherche
scientifique est stratégiquement positionné pour accompagner le Québec dans une
vaste campagne d'acquisition de données sur le potentiel stratégique des
réservoirs souterrains visant la réduction massive des GES.
Il nous fera plaisir de répondre à l'appel
du gouvernement pour mettre en oeuvre les recommandations contenues dans le
présent mémoire. Alors, messieurs dames, M. le Président, nous sommes disposés
à prendre vos questions.
Le Président (M. Lemay) : Très
bien. Merci, Mme Hénault-Ethier, ainsi que tous les représentants, pour cet
exposé. Nous allons maintenant passer à la période d'échange avec les membres
de la commission. M. le ministre, la parole est à vous pour environ 16 min 30 s.
M. Julien : Oui, merci.
Merci beaucoup, M. le Président. Bien, bonjour, chers collègues, tout le monde.
Premièrement, bien, merci à vous quatre. Honnêtement, là, on en voit de toutes
sortes, des présentations, mais la vôtre était certainement bien structurée
avec le temps à chacun et vos sujets bien étoffés. Donc, c'est très intéressant
de vous écouter. Et également, bien, ça m'amène à plusieurs réflexions et
questionnements, justement, pour faire évoluer potentiellement le projet de loi
qu'on a devant nous lors des discussions qu'on aura avec les collègues, là, l'article
par article.
Je comprends que, pour vous, les projets
pilotes, c'est des éléments qui ont retenu beaucoup votre attention à l'intérieur
du projet de loi, et à la fois pour la géothermie, captation de CO2, hydrogène, gestion de la saumure, MCS. Dans
les discussions qu'on a eues jusqu'à présent, tous les groupes qui nous ont
parlé de la notion de projet pilote l'ont amenée en disant... parce qu'il
semble y avoir des flous dans le projet de loi sur à la fois les consultations,
un BAPE, etc., puis moi, je suis assez ouvert, là, à venir renforcer ça. Moi,
comme ministre, là... discrétionnaire ou quelque chose qui est pas mal plus
encadrant, peut-être, puis j'essaie de voir votre proposition, parce que ma
volonté, quand même, c'est de venir dire : Si on peut capter des
potentiels de projets pilotes qui vont dans ces voies-là, qui sont des voies de
transition énergétique et qui sont très positives, je ne voudrais pas que le
parcours du combattant pour y arriver fasse en sorte que tout le monde dise :
Bien, en fin de compte, on va recaper le trou puis on va s'en aller.
Donc, j'essaie de trouver le bon niveau,
justement, pour permettre qu'un projet pilote, sur ces 62 puits potentiels
des 182 licences, voit le jour sans être trop contraint... au bénéfice des
Québécois. C'est quoi, votre proposition que vous voyez, là, pour y arriver?
Mme Hénault-Ethier (Louise) :
Merci, M. le Président. Merci beaucoup, M. le député, pour la question.
Donc, premièrement, il s'agit, pour nous, de ne pas fermer la porte à la
recherche. Donc, quand on parle que le Québec se positionne stratégiquement
pour permettre le développement bien encadré de projets pilotes, c'est pour
permettre à nos chercheurs, justement, d'optimiser les technologies et d'évaluer
les potentiels. Ceci dit, évidemment, on ne fait pas de la recherche en mettant
en danger la <santé...
Mme Hénault-Ethier (Louise) :
...danger
la >santé environnementale, la santé publique, et on ne veut pas le
faire sur des technologies qui ne seraient pas publiquement acceptables. Quand
nous, on parle de projets pilotes, ce n'est surtout pas des projets pilotes qui
visent à perpétuer l'exploration ou l'exploitation des hydrocarbures. C'est
vraiment bien délimité dans le cadre des technologies propres, là, qu'on vous a
présentées.
Ceci étant dit, un projet pilote, bien, il
y a toutes sortes de choses qui sont contraignantes. Dans notre mémoire, on
fait état notamment de la durée des projets pilotes. Est-ce qu'une durée peut
vraiment être délimitée en amont ou si on doit pouvoir avoir la possibilité d'étirer
la durée d'un projet pilote en fonction de l'évolution d'un projet? Mais, avant
même de se lancer dans des projets pilotes, je pense, la première chose à
faire, c'est de s'assurer, selon les caractérisations qui sont déjà à la
disponibilité du ministère ou des caractérisations complémentaires, que les
puits concernés ne fuient pas du méthane ou qu'il n'y a pas d'enjeu de risque
pour l'approvisionnement en eau potable des municipalités puisqu'il y a quand
même la moitié des municipalités au Québec qui s'approvisionnent de sources
souterraines.
Donc, c'est dans cette optique-là qu'on
voit les projets pilotes. Je ne sais pas si mes collègues veulent compléter.
• (11 h 40) •
M. Julien : Il va y avoir d'autres
sous-questions puis peut-être qu'il y aura des complémentaires sur les autres
éléments. Alors, vous comprenez un peu l'objectif qu'on a. Alors, pour moi, je
ne veux pas repousser... Dans l'éventualité qu'il y a adoption du projet de
loi, je ne veux pas repousser aux calendes grecques, en réalité, l'obligation
de réhabiliter les puits puis, après ça, faire les versements d'indemnisation,
le cas échéant. Et je veux surtout éviter que quelqu'un trouve une voie de
passage pour ne pas faire son travail en prétendant... un projet pilote.
D'un autre côté, si un projet pilote en
vaut la peine, je veux qu'on puisse saisir cette opportunité-là, comme société,
pour, justement, dans les volets que vous avez énoncés... de faire avancer le
Québec en termes de cette transition qui a été mentionnée par un de vos
collègues. On ne peut pas se permettre, par rapport à nos objectifs ambitieux,
de ne pas additionner les solutions.
Donc, si je reviens sur le terrain des
vaches, là, qu'est-ce qui me permettrait d'être efficient dans l'objectif que j'ai,
justement, pour identifier en amont ou pour éviter de trop longs délais d'attente
pour des prétendus projets pilotes? Tu sais, j'essaie de voir comment je vais
réussir à être efficient pour choisir le bon grain des projets pilotes ou des
potentiels que j'ai sur les 62 puits observés.
Mme Hénault-Ethier (Louise) : Bien,
je pense, la première chose à faire, c'est vraiment une caractérisation rapide.
S'il y a des puits qui nécessitent une attention immédiate et urgente, on les
ferme de façon immédiate et urgente. Un puits qui fuit du méthane ou qui expose
les sources d'eau souterraine à une contamination qui proviendrait de la
surface, là, définitivement, il faut que ce soit fermé de façon rapide. Donc,
déjà là, les projets pilotes ne peuvent pas se réaliser sur des puits qui ont
mal été conçus et qui doivent être fermés.
Ceci étant dit, la deuxième chose, c'est
que, dans le cadre de projets pilotes, on peut s'inspirer de d'autres pans de
la réglementation québécoise. Notamment, dans le traitement des sols, ça prend
un certificat d'autorisation pour démarrer un projet pilote. Alors, vous
pourriez avoir un levier, un mécanisme pour vous assurer que les projets
pilotes proposés sont responsables, ont une véritable fonction scientifique, et
possiblement que les projets pilotes, vous pourriez les encadrer en favorisant
un accompagnement par les institutions universitaires ou les centres de
recherche, les CCTT, parce que c'est là qu'on va pouvoir réellement voir si le
milieu de la recherche soutient de façon crédible l'avancée d'un projet pilote.
Donc, dans ce contexte-là où on a un
maillage avec une équipe scientifique robuste d'une institution d'enseignement supérieur
ou d'un centre de recherche reconnu par le gouvernement du Québec, accompagné d'un
certificat d'autorisation, je pense que ce sont des balises qui vont nous
permettre de ne pas repousser aux calendes grecques la fermeture de puits. De
toute façon, les puits problématiques, ils ont été fermés en amont à cause des
évaluations environnementales rapides, et les autres puits, on évite de pousser
par en avant trop longtemps dans le temps, là, pour leur fermeture.
M. Julien : Une petite
dernière question avant de passer la parole à mes collègues. Il y a deux
volets. Premièrement, vous êtes le deuxième groupe qui mentionnez clairement
que le trois ans plus deux ans n'est pas en pleine cohérence, parce qu'à la
limite il pourrait y avoir des délais comme ça pour obliger certaines étapes, mais,
à terme... puis certains projets pilotes, s'ils sont positifs, pourraient
gagner à être pérennisés, puis, pour vous, ça ne fait pas de sens
nécessairement d'avoir ces délais-là. Alors... Puis mon autre sous-question, c'est...
Quand vous parlez de saumure, MCS, naturellement, pour vous, c'est toujours
sans exploitation d'hydrocarbures de toutes sortes. Alors, c'est mes deux
dernières questions.
Mme Hénault-Ethier (Louise) : Peut-être
que ma collègue Violaine peut entreprendre la première partie de la réponse à
propos des durées de projets pilotes et des saumures, et on complétera par la
suite, au besoin.
Mme Gascuel (Violaine) : Oui,
c'est ça. Donc, en préparant le mémoire, j'ai regardé quelles ont pu être les
durées <pour...
Mme Gascuel (Violaine) :
...les
durées >pour des projets pilotes qui ont permis le développement de
nouvelles technologies, et on voit plusieurs exemples où il a pu y avoir des
projets pilotes qui ont duré pendant 20 ans pour développer vraiment des
nouveaux procédés qui ont aidé la science et qui ont aidé ces technologies à se
développer. Donc, évidemment, ça ne durerait pas toujours 20 ans. Si on
met en place des technologies qui sont mieux connues, ça pourrait durer
beaucoup moins de temps, mais je pense qu'il faut laisser la porte ouverte. Et
c'est pour ça qu'à mon avis il devrait plutôt y avoir un suivi de la part du
ministère pour s'assurer que c'est réellement un projet pilote en cours et pas
quelque chose qui évite à la compagnie d'avoir à fermer le puits tout de suite,
mais c'est très important de laisser du temps et puis aussi de laisser le
projet devenir pérein si jamais il démontre un bon potentiel.
M. Raymond (Jasmin) : En
complément d'information ici, là, pour répondre à une des questions qui a été
soulevée, ce qu'on propose concrètement, là... On comprend qu'à court terme le
gouvernement veut aller de l'avant avec son projet de loi, mais ce qu'on
propose dans notre mémoire, c'est que, suite à l'adoption du projet de loi, il
faudrait définir le cadre réglementaire pour les projets pilotes, question de
savoir quelles sont les règles à suivre pour obtenir une autorisation, qui
détient les droits sur la ressource, comment peut-elle être exploitée dans un
cadre environnemental responsable. En ce moment, c'est un peu ce qui manque au
projet de loi et qui va devoir être défini dans la suite des choses si on veut
bien valoriser le potentiel de nos réservoirs souterrains pour qu'ils profitent
à la transition énergétique.
M. Julien : Parfait. Et, pour
la saumure, l'opinement du bonnet disait que... ça confirmait ce que je vous
disais?
M. Pasquier (Louis-César) : Oui,
c'est peut-être... tout à fait, effectivement, c'est... Il y a un potentiel. Il
y a des exemples d'utilisation de saumure comme source de minéraux critiques et
stratégiques. Violaine l'a bien expliqué aussi. On peut combiner ce type d'exploitation
avec des processus de géothermie. Donc, c'est dans ce principe-là qu'on
mentionne une utilisation de la saumure.
M. Raymond (Jasmin) : Dans un
contexte géothermique aussi, l'idée de réinjecter la saumure sous terre, tout
ce qui est tombé en surface est retourné sous terre. Et, si on peut en même
temps profiter pour extraire des minéraux, des minéraux qui seront utiles, par
exemple, à la fabrication de batteries, comme le lithium, bien, pourquoi ne pas
faire une pierre deux coups, en fait, pour rendre ces technologies encore plus
rentables? Nous, c'est ce qu'on souhaite et c'est sur quoi on aimerait
travailler dans le futur pour aider le Québec, vraiment, à se tourner vers une
transition énergétique efficace.
Mme Hénault-Ethier (Louise) : D'ailleurs,
si je peux compléter, au niveau des minéraux critiques et stratégiques, il y a
des projets en Europe puis aux États-Unis qui ont démontré qu'on pouvait faire
de la géothermie avec la récupération de lithium, par exemple, dans la saumure,
là, pour les batteries des voitures électriques, disons, et ça permet donc de
cofinancer les infrastructures pour la géothermie parce qu'on réussit à
rentabiliser en faisant de l'extraction de minéraux critiques et... en fait,
ces infrastructures-là, puis il faut penser...
Le Président (M. Lemay) : Mme
Hénault-Éthier, son son a coupé, mais elle va sûrement se rejoindre à nous
autres. En attendant, on va passer la parole au député de Lac-Saint-Jean, qui
va y aller avec une nouvelle question.
M. Girard (Lac-Saint-Jean) : Alors,
bonjour, tout le monde. Bonjour à vous quatre. Écoutez, c'est intéressant de
vous entendre. Vous êtes quand même un institut de recherche, des spécialistes
beaucoup plus spécialisés que moi dans toute la question de recherche. Puis
moi, je ne sais pas si vous l'avez mentionné ou je ne l'ai pas bien saisi, mais
peut-être de façon très simple, comment voyez-vous, là, la façon de combiner,
exemple, vos projets de recherche et les projets pilotes qui pourraient être
autorisés par le gouvernement? De quelle façon voyez-vous ça pour... d'une
façon assez simple, de les combiner ensemble?
M. Raymond (Jasmin) : Bien,
écoutez, à prime abord, je dirais, les projets pilotes, nous, dans le milieu
universitaire, ce n'est pas notre rôle, vraiment, de les réaliser, mais c'est d'accompagner
ceux qui voudront bien les réaliser, que ce soient les entreprises privées ou
le gouvernement, pour s'assurer que, dans le cadre de ces projets pilotes là,
on développe des bases scientifiques solides qui vont démontrer s'il y a
rentabilité ou non des projets pilotes et s'ils peuvent être réalisés dans un
cadre, là, qui répond aux normes environnementales. C'est là que nous, on a un
rôle à jouer et c'est pour ça qu'aujourd'hui on met l'emphase, justement, sur
ces projets pilotes.
M. Girard (Lac-Saint-Jean) : O.K.,
merci. Et comment voyez-vous, là, les projets pilotes dans des puits qui ont
fait l'objet de fracturation?
M. Raymond (Jasmin) : Bien, c'est
sûr que ce n'est <pas...
M. Raymond (Jasmin) :
...ce
n'est >pas tous les puits pétroliers qui peuvent être réutilisés pour
les projets pilotes, même que, dans la plupart des puits qui existent, là,
probablement que c'est une minorité, mais l'idée, nous, ce qu'on voit, c'est
que, si on peut réutiliser des puits existants... D'accord, ces puits-là ont
coûté très cher à aménager. On parle de l'ordre du million de dollars par
kilomètre de profondeur de forage. Et ne serait-ce que, si on peut en
réutiliser un seul pour démontrer la viabilité, par exemple, d'un système
géothermique, on fait une avancée qui, peut-être, dans le futur, pourra nous
permettre de réaménager de nouveaux puits qui n'auraient pas été utilisés
précédemment dans un cadre d'exploitation pétrolière et qui n'auraient pas fait
sujet de fracturation hydraulique.
Mais évidemment, je pense qu'on a été
clairs, ce qu'on propose, c'est d'évaluer si on peut les réutiliser dans un
contexte environnemental sécuritaire. Évidemment, un puits qui aurait pu être,
disons, endommagé, ce qui pose... problématique, ce n'est pas tellement la
fracturation, mais c'est souvent le coffrage d'acier... pas le coffrage d'acier,
mais le coffrage autour du puits, le coffrage de béton, qui n'est pas intègre
et qui amène des fuites de méthane. Donc, dans un cadre où il y aurait un puits
qui ne serait pas sécuritaire, bien, évidemment, là, qu'on... Je ne pense pas
que ça vaut le risque de mener un projet pilote dans un puits qui n'est pas
adéquat, là. Ça, c'est hors de question, bien entendu.
• (11 h 50) •
Le Président (M. Lemay) : Je
vais passer la parole au député de Bourget.
M. Campeau : Merci pour votre
présentation, présentation à quatre, dans les temps, pratique, sur le sujet.
Merci. Ça fait du bien. Ce n'est pas ça... toujours ça qu'on a. Hier, en
particulier, ce n'est pas toujours ça qu'on a eu.
Question très terre à terre. Ça me
ressemble pas mal, ça. Le potentiel de géothermie, je sais que plus on va au creux,
plus c'est chaud. Je suis très familier avec ça. Maintenant, ça va prendre
combien de puits pour que ça fasse un effet sur la pointe? Vous avez dû
regarder cet aspect-là. Si c'est juste une phase de développement, il faudrait-tu
faire... creuser partout au Québec pour que ça vaille la peine, pour affecter
la pointe? Avez-vous regardé cet aspect-là, économique?
M. Raymond (Jasmin) : Bien,
je te laisse répondre en premier, Violaine, et je compléterai s'il y a besoin.
Mme Gascuel (Violaine) : D'accord.
Donc, on ne l'a pas regardé de façon globale pour l'ensemble du Québec. Par
contre, ça se voit, donc, au niveau d'un système. C'est déjà le cas, finalement,
avec les systèmes de faible profondeur et ce sera également le cas avec les
systèmes plus profonds. On va réduire la demande en pointe. Je pense qu'il y a
assez peu de bâtiments comme résidentiels ou commerciaux au Québec qui se
chauffent encore avec du gaz ou du mazout. Ils seraient à remplacer en
priorité, mais on peut quand même... Et donc je pense que c'est quand même
important de développer autant que possible cette technologie. Selon les
endroits, on pourrait soit faire des systèmes profonds en boucle ouverte là où
les roches sont appropriées, par exemple, et où il y a une forte demande et
puis faire des systèmes peut-être moins profonds dans d'autres endroits.
M. Raymond (Jasmin) : Ce que
je dirais pour compléter, c'est qu'en ce moment, bon, les systèmes de pompe à
chaleur géothermique sont utilisés au Québec pour à la fois les résidences, les
bâtiments institutionnels, commerciaux. Ça représente une très petite fraction
de tout ce qui est le marché chauffage de la province. C'est peut-être 1 %,
2 %, je n'ai pas le chiffre exact, mais c'est très faible. Donc,
évidemment, la quantité de systèmes installés n'est pas suffisante pour avoir
un effet sur la consommation d'électricité en période de pointe. Si on favorise
l'essor de la technologie, ça pourrait le devenir. On peut se tourner vers d'autres
endroits. On peut prendre la Suède qui est le leader mondial des pompes à
chaleur géothermique, la ville de Stockholm qui a fait le marché résidentiel...
Oui?
Le Président (M. Lemay) : M.
Raymond, je dois vous interrompre parce que le temps de la formation politique
du gouvernement est écoulé. Je passe maintenant la parole au député de Mont-Royal—Outremont, porte-parole de l'opposition officielle.
M. Arcand : Merci infiniment,
M. le Président. Alors, bienvenue parmi nous. Je vais essayer de faire en sorte
qu'on puisse se parler dans un langage que les gens vont comprendre, parce qu'on
est vraiment dans un niveau assez technique ce matin. Puis merci pour votre
présentation qui est une présentation importante.
On va tout de suite essayer de régler une
première affaire. Ce que vous dites, finalement, c'est que le projet pilote...
les projets <pilotes...
M. Arcand :
...
projets
>pilotes, bon, doivent être contrôlés, qu'il y ait vraiment des
règlements, mais vous voulez qu'il y ait quand même, en bout de ligne, dans le
projet de loi, plus de flexibilité sur les projets pilotes. Est-ce que c'est ça
que j'ai compris? Parce que vous dites : Écoutez, il est impératif qu'on
se donne un cadre pour que la recherche aille de l'avant le plus rapidement
possible, parce que, dans le cadre de la lutte aux changements climatiques, on
lutte un peu contre la montre actuellement. Alors, est-ce que j'ai bien saisi
ce que vous avez dit à ce niveau-là?
Mme Hénault-Ethier (Louise) :
Bien oui, tout à fait. Les projets pilotes sont vraiment essentiels dans
toute forme de recherche. En fait, notre société doit investir tant dans le
développement de nouvelles technologies... mais, pour y arriver, il faut des
essais, de la recherche, et, en fait, les projets pilotes sont la seule façon
de faire des essais de mise à l'échelle. Donc, si on développe une technologie
de façon théorique, en laboratoire, mais qu'on n'a pas le terrain pour les
tester, bien, cette technologie-là ne maturera jamais.
Donc, les projets pilotes, là, sont tout à
fait essentiels. Et oui, effectivement, il y a certains ajustements, dans le
cadre du projet de loi, qui pourraient faire en sorte que les projets pilotes
soient plus favorisés, mais qu'ils soient aussi mieux encadrés, juste
simplement de clarifier les niveaux d'encadrement qu'il y a, mais aussi c'est
au niveau de la facilité, c'est superimportant. Quand on essaie de faire des
projets pilotes, il va y avoir toutes sortes de formes d'embûches. Les délais
sont parfois longs. Donc, le délai... surtout si on veut avoir du cofinancement
du privé, par exemple, pour les développements de projets pilotes, si les
délais d'autorisation prennent, tu sais, des mois, voire des années, à être
obtenus, on risque de perdre des opportunités de financement.
Donc, ça, c'est un des enjeux, là, si on
veut vraiment faciliter la science pour faire des «fast track» de façon tout à
fait encadrée, dans le respect de la Loi sur la qualité de l'environnement,
mais donc se donner cette latitude-là au sein du projet de loi.
M. Raymond (Jasmin) : De
façon très pragmatique, là, je rajouterais que, nous, ce qu'on a peur, c'est
que, suite à l'adoption du projet de loi... c'est qu'il n'y a pas de projet pilote.
Donc, ce qu'on dit et le message qu'on veut passer, c'est qu'il faut mettre les
conditions gagnantes pour qu'il se passe quelque chose suite à l'adoption du
projet de loi et qu'il y en ait, des projets pilotes.
M. Arcand : Donc, vous
trouvez que c'était...
Mme Hénault-Ethier (Louise) :
Un des éléments...
M. Arcand : Oui, tel que
c'est présenté actuellement., c'est trop rigide, là. C'est ça?
M. Raymond (Jasmin) : J'aurais
tendance à dire que ce n'est peut-être pas assez bien défini. En fait, il n'y a
pas de règle claire entourant la mise en place des projets pilotes. On comprend
que, dans le projet de loi actuel, ça peut peut-être être difficile de bien le
définir parce que ce n'est peut-être pas l'objet du projet de loi, mais, suite
à l'adoption du projet de loi, ça va prendre un cadre réglementaire clair, si
on veut avoir des projets pilotes.
Mme Hénault-Ethier (Louise) :
Et un élément complémentaire aussi, c'est au niveau de l'accessibilité des
données. C'est beau, faire des projets pilotes, c'est beau, faire des projets
de recherche subventionnés par l'État dans différents endroits, sur des terres
du domaine public parfois, mais les données qui sont compilées doivent être
accessibles. Ça pourrait être l'occasion, dans le cadre de ces projets pilotes
là, d'aller mieux comprendre ce qui se passe sous terre, donc la géologie qui
est déjà présente autour des puits existants, et ces données-là devraient être
dans un repositoire accessible sur Internet facilement. Il y a déjà des
repositoires qui existent sur les systèmes géologiques, sur les systèmes d'information
hydrogéologiques au Québec. Ils méritent d'être modernisés. On mérite de
détourner l'angle, qui est plutôt gazier, pétrolier, actuellement, de ces bases
de données là, pour les rendre accessibles. Les bases de données publiquement
accessibles, ça permet aux entreprises aussi de développer leurs modèles, leurs
plans d'affaires et de savoir s'ils vont faire des investissements, de calculer
le niveau de risque pour des investissements dans des technologies durables.
M. Arcand : J'aimerais
vous poser une question, parce qu'on veut tous, évidemment, trouver la
meilleure façon de réduire les GES, là, tout le monde, et, très évidemment, il
y a vraiment une urgence. J'écoutais hier l'Association pétrolière et gazière.
On parlait des nouvelles façons de faire. Bon, les biocarburants, c'est
difficile parce que coûteux, c'est compliqué. On parlait du solaire. Les gens
là-bas n'avaient pas l'air à voir grand potentiel d'avenir du solaire. Vous,
vous avez dit : Écoutez, l'hydrogène peut être une voie qui est plus
pratico-pratique, etc.
Je voulais juste voir si, demain matin,
là, vous étiez la personne en charge de réduire les GES au Québec... vous
feriez quoi. Qu'est-ce que vous essaieriez de développer? Quel est le secteur
que vous seriez en train de prioriser actuellement?
M. Raymond (Jasmin) : Personnellement...
Mme Hénault-Ethier (Louise) :
Peut-être...
M. Raymond (Jasmin) : Bien,
vas-y, Louise.
Mme Hénault-Ethier (Louise) :
J'allais dire : En ouverture, je mettrais...
M.
Arcand
:
C'est une <longue...
M. Arcand :
C'est
une >longue question, mais vous comprenez ce que je veux dire.
Mme Hénault-Ethier (Louise) :
Je crois que Jasmin et possiblement Louis-César vont vouloir rebondir
là-dessus, mais personnellement, je ne mettrais pas tous mes oeufs dans le même
panier. C'est un des enjeux qu'on a eu depuis la révolution industrielle, de n'avoir
misé que sur les hydrocarbures, et une façon de diminuer le risque associé à
ces technologies-là, parce qu'il y a toujours des risques qui peuvent y être
associés, c'est de continuer les investissements dans le développement de
multiples technologies. Donc, on ne peut pas tout mettre nos oeufs dans le même
panier.
Un des enjeux qu'on voit en ce moment, tu
sais, il y a des technologies, par exemple, de séquestration du CO2 dans lesquelles on essaie de faciliter, si on
veut, l'extraction pétrolière, là, puis de se distancer, là, de l'arrêt de l'exploitation
des hydrocarbures en disant : On va séquestrer le CO2.
Ça, c'est dangereux, ça, c'est... On garde encore les oeufs dans le même
panier. Ce qu'on doit faire, à l'heure actuelle, c'est investir tant du côté
des énergies renouvelables, que ce soit l'éolien, le solaire, l'hydrogène, mais
aussi des procédés biologiques, la biométhanisation.
C'est en ayant un portefeuille de
solutions qu'on va être capables d'être plus résilients. Si on parle d'adaptation
aux changements climatiques ou de résilience au sein d'un écosystème, ça, ça
passe par la diversité qu'on a, d'organismes, dans ce système-là. En termes de
grille énergétique, c'est la diversité des sources d'énergie qui vont faire en
sorte qu'on va diminuer le risque, et non seulement ça, c'est aussi d'avoir un
approvisionnement énergétique local. Vous voyez ce qui se passe en ce moment
avec la Russie. C'est un grand fournisseur gazier pour l'Europe, ça entraîne
des risques géopolitiques.
• (12 heures) •
Donc, si, au Québec, on était capables de
continuer notre élan vers un approvisionnement énergétique local en se départissant
de notre dépendance aux énergies fossiles qui viennent de l'extérieur... Évidemment,
l'hydroélectricité, on l'a vu, ne peut pas solutionner tout. Maintenant, il
faut se tourner vers une diversification du portefeuille, et c'est là qu'entre
en jeu de soutenir vraiment la recherche dans tous les domaines et de ne pas
fermer la porte en nommant spécifiquement des technologies dans lesquelles on s'enclave
sans faciliter les autres.
Donc, je vais laisser Jasmin prendre la
balle au bond là-dessus.
M. Raymond (Jasmin) : Oui,
bien, moi, en fait, tout ce que je voulais dire, c'est qu'effectivement il n'y
a pas une solution, mais des solutions. Et, si j'avais la chance de décider,
bien, j'investirais en ce moment dans les solutions qui visent les réservoirs
souterrains, comme l'énergie géothermique profonde, la séquestration du CO2, le stockage souterrain d'hydrogène, puisqu'en
ce moment ce sont les solutions qui ne sont pas exploitées au Québec et qui
sont en retard par rapport aux autres domaines. Donc, on doit rattraper ce
retard-là si on veut que... bien mettre à profit nos réservoirs souterrains qui
pourraient jouer un rôle dans la transition énergétique.
M. Arcand : Et ces trois
solutions-là que vous mentionnez, est-ce qu'il y a des endroits à l'extérieur
du Québec où ils sont plus avancés que nous, où, vraiment, ce que vous prônez
semble donner des résultats intéressants, ou si c'est un cheminement qui risque
d'être assez long?
M. Raymond (Jasmin) : Bien,
moi, je suis ici, bon, pour parler du stockage souterrain d'hydrogène, et il y
en a en ce moment, là. J'expliquais... Dans les dômes de sel, les cavités
salines, c'est quelque chose qui se fait, par exemple, en Angleterre. Et, pour
ce qui est de la géothermie, de la séquestration du CO2,
je vais laisser Violaine, ensuite Louis-César, répondre.
Mme Gascuel (Violaine) : Alors,
pour la géothermie, donc, c'est réalisé à un certain nombre d'endroits dans le
monde, notamment dans le bassin de Paris, où il y a plus d'une dizaine de
systèmes qui fonctionnent depuis les années 80. Donc, c'est quelque chose
de bien connu et bien maîtrisé dans ce cadre-là. Bien sûr, il faut bien
connaître les formations profondes. Donc, ça commencerait par de l'exploration
pour pouvoir faire la même chose au Québec.
Donc, je laisserais la parole à...
M. Pasquier (Louis-César) : Pour
ce qui est du CO2, effectivement, il y a de
nombreux projets de séquestration du CO2
dans divers domaines qui se retrouvent un peu partout dans le monde. On en
trouve en Alberta, entre autres. Ce qu'il faut garder en tête, c'est que, oui,
il y a un potentiel qui avait été identifié au Québec, mais justement, ce que
Violaine mentionnait, la caractérisation du réservoir est vraiment essentielle
et importante... débutant. Donc, il faut effectivement se remettre à la tâche
rapidement, si on veut rattraper le retard.
Mme Hénault-Ethier (Louise) :
Puis, pour le stockage du CO2, il faut le
découpler le plus possible de l'industrie de l'extraction et de l'exploitation
des hydrocarbures. Comme M. Pasquier l'a précisé dans son exposé, c'est
simplement pour les grandes industries qui ont une intensité énergétique
difficile à combler autrement ou encore pour pallier à des émissions qui
proviennent de sources fixes, donc d'une cheminée, par exemple, sur les usines
de biométhanisation ou, quand on brûle le biogaz qui sort de nos sites d'enfouissement.
Plutôt que de relarguer le CO2 dans l'atmosphère,
on devrait rapidement le capturer, le séquestrer et <l'injecter sous
terre...
>
12 h (version révisée)
< Mme Hénault-Ethier (Louise) :
...le capturer, le séquestrer, >l'injecter sous terre. Et il
y a aussi une notion de dispersion à l'échelle du paysage, notamment en région.
On voudrait bien faire la transition de nos serres agricoles, qui dépendent largement
des hydrocarbures actuellement, vers l'électricité, mais ce n'est pas toutes
les régions qui ont l'électricité triphasée, en ce moment, au Québec. La
géothermie pourrait être un complément de chaleur vraiment essentiel qui est
dispersé sur le territoire.
M. Arcand : D'accord. Je
pense, je n'ai plus de temps, alors merci infiniment d'avoir répondu.
Le Président (M. Lemay) : Très
bien, merci, le député de Mont-Royal—Outremont. Maintenant,
je cède la parole au deuxième groupe d'opposition, Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Mme Massé : Oui.
Bonjour, tout le monde. Merci de votre présentation. En deux minutes, il y a
peu de choses qu'on peut faire. Je vais poser mes trois questions, puis vous
ferez votre possible après ça.
On s'entend, là, d'entrée de jeu, que l'objectif
premier, c'est de diminuer l'utilisation de ce qui cause... Oui, vous me
faites... O.K., on se comprend. C'est parce que je ne l'ai pas beaucoup entendu
dans votre discours et, pour moi, c'est fondamental qu'on réaffirme que la
première chose à faire, c'est la sobriété énergétique et non pas d'inventer
toutes sortes de bébelles pour capter nos affaires. On s'entend là-dessus. Bien.
Alors, vous avez parlé de conditions
gagnantes pour les projets pilotes. Parce qu'il y en a d'autres qui nous ont
parlé de projets pilotes hier, puis je ne suis pas sûre qu'ils avaient les
mêmes objectifs que vous. Quelles sont ces conditions gagnantes là,
succinctement?
Et mon autre question, si vous avez un peu
de temps, c'est, séquestrer le carbone, O.K., mais comment on s'assure qu'effectivement
ce qui est dans le sol, à cause de la fragilité des sols, à cause des
glissements de terrain, à cause des tremblements de terre, «name it», des
tsunamis, «I don't know», comment on peut s'assurer que ça ne repartira pas en
haut, ça?
Mme Hénault-Ethier (Louise) :
Bien, peut-être, au niveau de ce qu'il y a dans la terre, là, quand on
parle de séquestration, c'est à des kilomètres de profondeur au fond de la
terre, là. Donc, ce n'est pas simple de relarguer, là, ça ne ressortira pas
tout d'un coup, si on fait de la séquestration profonde, c'est...
Le Président (M. Lemay) : Très
bien. Vous pouvez continuer.
M. Pasquier (Louis-César) : Bon,
bien, je vais prendre la balle au bond, mais c'est... effectivement, comme
Louise le mentionnait, on est vraiment dans une séquestration profonde. Il faut
aussi savoir que le CO2, lorsqu'il est
injecté, s'il est en présence d'une saumure, va se dissoudre dans la saumure et
va, par la suite, se minéraliser. Je prendrais un exemple. En Islande, il y a
eu un projet de... Ah! je pense qu'on s'est fait tous couper, là… ou c'est
Louise qui...
Le Président (M. Lemay) : Non,
non, on vous entend. Allez-y, continuez.
M. Pasquier (Louis-César) : O.K.
Parfait. Ça fait que, oui, en Islande, après deux années et demie, en fait, le CO2a été complètement
minéralisé. Donc, c'est des conditions spécifiques particulières, mais c'est
important de le mentionner.
Effectivement, la question du devenir du CO2est aussi... fait l'objet
de nombreuses études depuis des années, et, entre autres, des outils de suivi
postinjection ont été développés et sont très nombreux.
Puis, dernier élément, si jamais fuite il
y avait, il faut comprendre que ce ne sera pas un relargage, en une fraction de
seconde, de tout ce qui aurait pu être injecté, mais une fuite lente. Donc, on
peut la détecter avec des moyens et ensuite, bien, on peut effectivement
trouver des solutions pour éventuellement la régler.
M. Raymond (Jasmin) : Oui.
Les puits profonds sont munis de valves de sécurité, là. Ça fait que, s'il
arrivait, par exemple, je ne sais pas, une attaque terroriste sur une tête de
puits en surface, bien, la valve serait automatiquement fermée. Donc, on n'aurait
pas de fuite massive en surface, même que ça serait plus sécuritaire, je crois,
de stocker, par exemple, pour le cas de l'hydrogène, des grands volumes d'hydrogène
sous terre que dans des réservoirs en surface. Donc, au niveau de la sécurité,
je crois qu'on... il y a des possibilités de le faire de façon à minimiser les
risques.
Pour ce qui est de ce qu'on a besoin dans
le projet de loi, je reviens là-dessus, c'est le cadre réglementaire. Quelles
sont les normes environnementales à respecter pour...
Le Président (M. Lemay) : M. Raymond,
je dois encore vous interrompre puisqu'on doit maintenant céder la parole au
député de Jonquière pour environ 2 min 45 s.
M. Gaudreault : Oui. Alors,
bonjour, merci beaucoup d'être ici. Vous êtes la démonstration qu'on a
tellement tout ce qu'il faut, en termes de savoir-faire et de connaissances, au
Québec, pour être des leaders mondiaux en énergies renouvelables, en transition
énergétique, en transition écologique, et c'est ça qu'il faut mettre en avant.
Moi, il y a quelque chose que je constate,
dans la lutte contre les changements climatiques, c'est que plusieurs s'en
remettent beaucoup à ce que j'appelle le fantasme technologique, en pensant qu'on
va trouver la machine, là, le bouton à quatre trous, on va réinventer l'attache
de pain qui va tout régler puis que ça va être la meilleure invention au monde.
Alors, il faut vraiment qu'on soit prudents puis qu'on trouve les bonnes
technologies.
Et hier, on en a entendu de toutes sortes,
là, hier soir. Oui ou non, le gaz naturel de source conventionnelle, venant
entre autres du gaz de schiste, sans émission, est-ce que ça existe?
M. Pasquier (Louis-César) : Si
je peux me permettre de commencer une réponse, il y a quelques <années...
M. Pasquier (Louis-César) :
Si
je peux me permettre de commencer une réponse,
il y a
quelques
>années, j'ai été le premier surpris d'apprendre qu'en France, dans les
années 1995, le groupe Total a réalisé la capture du CO2d'une de ses usines, en fait, de production de gaz naturel
et a injecté le CO2dans
les Pyrénées. Ça n'a absolument pas été connu, diffusé. Bref, ça a été fait, on
parle de 1995.
Ce qui était proposé hier, bien, on le
retrouve ailleurs dans le monde. Il y a des projets qui visent l'exploitation
de gaz naturel avec du stockage de carbone. Par contre, si la question est par
rapport à la faisabilité au Québec, bien, on n'a pas la réponse,
nécessairement. Donc, ça se fait dans le monde, c'est la réponse assez courte à
la question.
M. Gaudreault : Mais est-ce
que ça se fait à grande échelle? Et quel est le prix?
M. Pasquier (Louis-César) : Bien,
c'est une excellente question. Effectivement, il y a un projet, actuellement,
au Brésil, qui est en cours, on parle de quelques millions de tonnes par année
de CO2qui vont être
injectées dans un réservoir. À quel coût, à quel prix, c'est une excellente
question. Je pense que le tout est vraiment dépendant du contexte dans lequel
il est fait, et on ne peut pas vraiment mettre un chiffre clé sur le...
• (12 h 10) •
M. Raymond (Jasmin) : Je n'ai
pas de prix fixe à amener, mais, dans le cas de certaines solutions, comme l'énergie
géothermique, par exemple, bien, nous, on a évalué que convertir un ancien
puits pétrolier en échangeur de chaleur géothermique à boucle fermée pour
chauffer des bâtiments pourrait être plus compétitif que chauffer avec l'hydroélectricité,
mais moins compétitif que chauffer avec du gaz naturel. Donc, on est dans une
fourchette de prix qui peut être réaliste.
Mais on ne se cachera pas... tu sais, on
ne se contera pas de menteries, ce genre de projet là qu'on décrit, c'est des
projets qui demandent des coûts d'investissement importants. Si on regarde le
cycle de vie des systèmes, les prix sont compétitifs, mais on a besoin d'investissements
et d'appuis financiers des gouvernements pour démarrer ce type de technologie.
Le Président (M. Lemay) : Merci
beaucoup, M. Raymond, Mme Hénault-Ethier, Mme Gascuel et M. Pasquier,
pour votre présentation. Je vous remercie pour la contribution aux travaux de
la commission.
Et je dois maintenant suspendre les
travaux jusqu'à 15 heures.
(Suspension de la séance à 12 h 12)
14 h 30 (version révisée)
(Reprise à 15 h 02)
Le Président (M. Lemay) : Alors,
à l'ordre, s'il vous plaît! La Commission de l'agriculture, des pêcheries, de
l'énergie et des ressources naturelles reprend ses travaux. Et je demande à
toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leur
appareil électronique.
Nous allons poursuivre les consultations
particulières et les auditions publiques sur le projet de loi n° 21, la Loi
visant principalement à mettre fin à la recherche et à la production d'hydrocarbures
ainsi qu'au financement public de ces activités. Et, cet après-midi, nous
entendrons les témoins suivants : la professeure Annie Chaloux; Équiterre,
conjointement avec la Fondation David-Suzuki; Eau Secours!; ainsi que Mères au
front.
Mais, tout d'abord, je souhaite la
bienvenue à Mme Annie Chaloux, professeure à l'Université de Sherbrooke.
Bienvenue avec nous à cette commission. Je vous rappelle que vous aurez 10
minutes pour faire votre exposé, et, par la suite, il y aura une période d'échange
avec les membres de la commission. Alors, vous pouvez débuter avec votre
exposé. Bienvenue.
Mme Annie Chaloux
Mme Chaloux (Annie) : Merci
beaucoup. Donc, bien, merci à vous tous, membres de la commission, de me
permette d'intervenir aujourd'hui à titre de chercheure et de codirectrice du
Groupe d'études et de recherche sur l'international et le Québec. J'interviens
aujourd'hui à titre personnel en tant que... (panne de son) …des politiques
climatiques québécoises et des négociations climatiques internationales. Mon
intervention va porter principalement sur deux aspects, le premier, bien sûr,
les aspects politiques climatiques qui sont associés à ce projet de loi, et je
vais vous faire part ensuite de mes principales recommandations et avis
concernant le projet de loi en l'état dans un contexte d'urgence climatique à l'échelle
mondiale. Mais, avant toute chose, je tiens à vous remercier d'avoir offert,
donc, cette opportunité d'intervenir aujourd'hui.
D'abord, il est important de rappeler que
ce projet de loi là s'inscrit dans une série d'actions et stratégies qui visent
à réduire les émissions de gaz à effet de serre à l'échelle mondiale et à
répondre à l'objectif de l'Accord de Paris qui a été adopté en 2015. Et cet
objectif, c'est de contenir l'élévation des températures nettement sous la
barre des deux degrés et, idéalement, les 1,5 °C.
Pour nous, au Québec, cet engagement-là de
mettre fin à l'exploration et à l'exploitation des hydrocarbures est donc aussi
très important. D'abord, le Québec s'est déclaré lié à l'Accord de Paris et s'est
engagé à mettre en oeuvre cet accord dans ses champs de compétence, mais aussi
il faut se rappeler que le Québec a une longue histoire de participation à l'édification
du régime climatique international qu'on connaît aujourd'hui. Le Québec fait
partie des États fédérés les plus actifs internationalement. Il a mis en place
une série d'engagements climatiques internationaux de grande envergure, que ce
soit le marché du carbone avec la Californie, son plan d'action régional avec
les partenaires de la <Nouvelle-Angleterre et de l'Est du Canada...
>
15 h (version révisée)
< Mme Chaloux (Annie) :
...son
plan d'action régional avec les partenaires de la >Nouvelle-Angleterre
et de l'Est du Canada, son programme de coopération climatique internationale,
et ce plus récent engagement qui est fait via le Beyond Oil and Gas Alliance,
dans lequel s'inscrit ce projet de loi.
Bref, ça fait longtemps qu'au Québec on
cherche à faire notre part et à lutter contre les changements climatiques, à la
fois sur le territoire du Québec, mais aussi internationalement, parce qu'on a
une responsabilité, bien sûr, historique à cet égard-là. Le Québec et le Canada
sont parmi les grands émetteurs de gaz à effet de serre à l'échelle mondiale,
et, dans ce contexte, on doit faire notre juste part pour contribuer fortement
à réduire notre empreinte carbone. Et aussi, il faut rappeler que l'Accord de
Paris réitère l'importance à ce que tous les paliers de gouvernement, que ce
soient les villes, les États fédérés ou les gouvernements nationaux, doivent
contribuer à leur hauteur à la lutte contre les changements climatiques.
Je me permets aussi de vous rappeler le
fait que ce projet de loi là s'inscrit dans une réalité scientifique qui est
maintenant sans équivoque : l'activité humaine est responsable des
changements climatiques, et, bien sûr, la production et la consommation des
hydrocarbures en est la principale responsable.
À ce sujet, on se rappellera sans doute
qu'en août dernier, le GIEC publiait son rapport et qu'on voyait que la
trajectoire du 1,5 °C est encore possible, mais pour cela, il faut faire
des virages majeurs et urgents. Il faut se rappeler aussi que l'Agence
internationale de l'énergie a été très, très claire dans son rapport paru en
mai 2021 et elle dit clairement que, dans un scénario où on souhaite
limiter la hausse des températures à 1,5 °C, tous les gouvernements
devraient cesser d'approuver l'ouverture de nouvelles mines de charbon ou de nouveaux
champs pétroliers et gaziers et planifier une réduction rapide mais ordonnée
des activités existantes. Donc, du côté de l'Agence internationale de
l'énergie, le message est aussi très clair.
Et finalement, dans le Production Gap
Report, donc un rapport produit par le Programme des Nations unies pour
l'environnement, on voit qu'il y a aussi un très grand écart entre la
trajectoire de 1,5 °C, qui est actuellement souhaitée, et ce que les
gouvernements ont promis de faire. Donc, on doit accélérer la transformation,
et mettre fin à la production de nouveaux hydrocarbures maintenant, et ensuite
infléchir drastiquement la tendance.
Bref, si on veut vraiment jouer sur ces
grandes tendances là, on doit transformer notre manière de gérer nos ressources
naturelles et éliminer les comportements qui permettent de produire et de
consommer davantage d'hydrocarbures. C'est donc dans ce contexte-là qu'est née
cette alliance qu'on appelle BOGA, donc Beyond Oil and Gas Alliance, auquel le
Québec s'était déclaré lié lors de la dernière COP à Glasgow. Cette
initiative-là avait été initiée par le Costa Rica et le Danemark, et depuis,
quelques juridictions, dont le Québec, s'y sont liées, et chaque juridiction
s'engage donc à adopter des mesures concrètes pour restreindre la production de
pétrole et de gaz sur leur territoire.
Il faut donc... Ici, je me permets, là, de
saluer le dépôt de ce projet de loi dans ce contexte-ci, parce que c'est un pas
vraiment dans la bonne direction, dans la lutte contre les changements
climatiques, mais aussi parce que ça va constituer réellement un modèle pour
les autres juridictions dans le monde qui voudront faire de même, d'où
l'importance d'avoir un très bon projet de loi qui soit à la hauteur de nos
attentes et de nos capacités. À la lumière, donc, de ce que je vous mentionne,
je me permets, donc, de vous donner quelques avis et recommandations à la
commission.
D'abord, il y a plusieurs éléments qui ont
pu être véhiculés sur la question de la réputation du Canada sur la scène
internationale. D'abord, si on regarde sur le plan commercial et des
investissements, donc, mon collègue de l'Université Laval, hier, vous en a sans
doute parlé, mais tel que rédigé, ce projet-là, ce projet de loi là ne pose pas
de risque grave ou majeur pour les investisseurs.
Il faut se rappeler que, sur le plan de
notre réputation sur la scène internationale, sur le plan commercial, eh bien,
la prospection des hydrocarbures subit des pressions depuis très, très
longtemps dans le monde. Les rapports scientifiques sont clairs sur le fait
qu'il faut arrêter tout nouveau projet, si on veut réduire nos émissions.
Il faut se rappeler aussi qu'au Québec,
mais comme partout ailleurs, l'acceptabilité sociale n'est plus au rendez-vous,
et ce, depuis fort longtemps. Et donc, ce secteur d'activité là est bien au
fait des risques que suscitaient des investissements dans tout le volet
d'exploration et d'exploitation des hydrocarbures.
Si on regarde, maintenant, le volet
réputationnel, mais dans une perspective de lutte contre les changements
climatiques sur la scène internationale, il faut voir que ce projet-là est
ambitieux et fort intéressant, parce qu'il nous montre que le Québec peut
toujours être à l'avant-scène. Et il faut savoir qu'un projet de loi comme
celui-là va bien sûr être scruté par plusieurs juridictions ensuite. Donc,
c'est important d'avoir un projet de loi qui soit robuste en ce sens-là, et il
s'agit donc d'un aspect très positif sur le plan réputationnel. Il va
positionner le Québec dans une bonne position dans les prochaines négociations,
dans les prochaines années, évidemment.
Je me permets aussi de parler... prendre
quelques instants pour parler du programme d'indemnisation. En ce qui concerne
le programme, tel qu'il est présenté à l'heure actuelle, c'est un <programme...
Mme Chaloux (Annie) :
...
d'indemnisation.
En ce qui concerne le programme, tel qu'il est présenté à l'heure actuelle,
c'est un >programme d'indemnisation qui s'astreint surtout à fournir des
indemnisations sur les dépenses fournies et non pas sur les revenus potentiels.
Et ça, c'est une chose qui est perçue de manière très positive parce que,
sinon, ça aurait pu entraîner une perception de subvention déguisée à un
secteur qui est problématique dans la lutte contre les changements climatiques
et où le Canada et le Québec se sont déjà engagés à mettre fin aux subventions
à cette industrie-là.
Aussi, je tiens à réitérer le fait que les
indemnisations prévues doivent être le plus faibles possible. Elles doivent
certes minimalement répondre au remboursement des dépenses, tel que prévu, mais
il faut qu'on s'assure aussi de ne pas laisser une marge de manoeuvre possible
pour que les entreprises cherchent à aller chercher beaucoup plus que ça et que
ça devienne, donc, des subventions déguisées.
D'ailleurs, le montant de
100 millions qui est prévu ici, dans ce projet de loi là, devrait donc
être un plafond et même être potentiellement le plus bas possible. Et là je me
permets ici de m'inscrire dans, aussi, notre responsabilité sur la scène
internationale, parce que ce projet de loi là, ce texte législatif là va servir
de modèle par la suite à d'autres juridictions. Donc, je pense qu'on a, là
aussi, une responsabilité supplémentaire à cet égard.
• (15 h 10) •
En ce qui concerne… Un troisième point, ça
concerne la période qui est couverte par le programme d'indemnisation,
c'est-à-dire qu'actuellement, donc, le programme couvre six ans, donc du
19 octobre 2015 au 19 octobre 2021. Je pense qu'il faut éviter
d'étirer davantage, donc, ces périodes-là, parce qu'il faut... au-delà des
volets prescriptifs de certains éléments fiscaux, il faut comprendre que les
industries étaient conscientes dans quoi elles investissaient.
C'est-à-dire que, d'abord, on sait depuis 2015…
bon, il y a l'adoption de l'Accord de Paris, le Québec s'est déclaré lié à l'Accord
de Paris. Il y a eu des rapports scientifiques, dont le rapport du GIEC de 2018
et celui de 2021, qui réitèrent l'urgence d'agir, ces rapports qui nous
montrent également qu'on assiste à une accélération des températures mondiales.
Et donc les entreprises et les investisseurs qui font le choix d'investir dans
ces secteurs-là depuis longtemps savent qu'ils le font en toute connaissance de
cause et le savent qu'ils le font dans un contexte où il y a urgence de lutter
contre les changements climatiques. Et donc le risque était connu de la part
des investisseurs.
Dernier élément, et qui est, selon moi, un
élément qui est très, très important, ça concerne le préambule. J'ai entendu,
donc, notamment le Pr Ouellet parler de ce volet-là, et je tiens à appuyer
en ce sens-là, c'est-à-dire que le projet... le préambule du projet de loi
devrait être beaucoup plus étoffé que ce qu'il est en ce moment et devrait
mettre l'accent, selon moi, sur trois volets. Premier volet, c'est le volet de
la lutte contre les changements climatiques. Donc, la lutte contre les
changements climatiques devrait être au cœur du préambule, faire partie des
valeurs intrinsèques à celui-ci et devrait aussi mettre l'accent sur
l'importance d'être proactif dans ce contexte-là.
Le préambule devrait aussi rappeler les
grands engagements du Québec envers l'Accord de Paris et sa responsabilité dans
la lutte contre les changements climatiques.
Et finalement, un autre volet dont le
préambule devrait tenir compte, c'est l'accent... l'importance de mettre
l'accent sur la science comme guide et explication à ce projet de loi, dans le
sens où la science nous dicte qu'on doit agir beaucoup plus drastiquement dans
la lutte aux changements climatiques, et c'est ce qui guide, donc,
l'établissement d'un tel projet de loi.
Donc, en somme, je considère qu'il s'agit
ici vraiment d'un très bon projet de loi qui est très important pour le Québec.
Et je vais être très heureuse de répondre à toutes vos questions dans les
prochaines minutes. Merci.
Le Président (M. Lemay) : Merci,
Mme Chaloux, pour votre exposé. Et maintenant nous allons céder la parole
au ministre pour la période d'échange d'environ 16 min 30 s.
M. Julien : Oui. Merci
infiniment. Merci infiniment, Mme Chaloux, pour vos commentaires, là. J'ai
pris plusieurs notes. Je vais parcourir certains des éléments, soit par des
questionnements ou des affirmations que vous pourrez corriger, si je me trompe.
Donc, pour le préambule, bien, vous êtes
la deuxième à parler du préambule, honnêtement, moi, je ne déteste pas ça, mais
je suis plutôt humble dans nos réalisations. Mais, puisque ce sera certainement
une réalisation commune de tous les collègues, je pense qu'on gagnerait dans le
préambule, ce n'est pas faire preuve d'audace ou de vantardise, mais de venir
mentionner clairement ce positionnement de manière fière pour le Québec,
naturellement, si on y adhère tous ensemble. Je pense que c'est une idée qui va
faire son chemin, et on aura l'occasion d'en discuter entre collègues, là, pour
que la forme soit à la bonne place.
Rapidement, quelques éléments pour... à discuter
avec vous. Vous nous dites, Mme Chaloux, puis j'ai entendu ça aussi, puis
je vais encore entendre ça dans d'autres groupes, je pense, qui vont suivre :
Écoutez, l'industrie le savait depuis longtemps que c'est en «phasing-out», il
n'y a plus d'acceptabilité, ils sont conscients de ces risques-là, puis, bon.
Mais en même temps, là, peut-être que… Moi, ça fait un an, là, un peu plus d'un
an qu'on travaille, à mon ministère, sur ce projet de loi là, alors je vais
prendre une partie du <blâme...
M. Julien :
...à
mon
ministère, sur ce
projet de loi là, alors je vais prendre une
partie du >blâme puis je blâmerai mes prédécesseurs. Mais, en même temps
que vous dites ça, qu'ils en sont conscients, nous, on n'a pas agi pour faire
en sorte, en fin de compte, de ne pas le permettre, de ne pas fournir les
licences, de ne pas fournir une réglementation, une loi. Donc, pour moi, là, il
y a une espèce de... je vais faire attention, une responsabilité partagée, là,
parce que toute cette prise de conscience là que vous mentionnez, si on était
si conscients que ça, au gouvernement, on aurait dû agir bien avant. Puis,
quand je parle de bien avant, c'est… Si vous dites que depuis six ans, c'est
clair pour tout le monde, bien, ça aurait dû être agi en conséquence.
Donc, on a comme, pour moi, une part de
responsabilité, puis les signaux ou le signal qu'on a transmis n'étaient pas à
cet effet-là puisque, si tout le monde en était aussi conscient, les actions
gouvernementales n'ont pas nécessairement suivi. J'aimerais ça vous entendre
là-dessus.
Mme Chaloux (Annie) : Merci,
M. le ministre, pour cette question. En fait, vous avez tout à fait raison de
dire qu'on a une part de responsabilité, comme État québécois, quand on modifie
des lois, comme on a fait la modification lorsque l'on a adopté la Loi sur les
hydrocarbures en 2018. Et c'est dans ce contexte-là que les indemnisations qui
sont prévues, à l'heure actuelle, répondent en partie à cette reconnaissance-là
qui a été faite dans le passé par le secteur industriel.
Ceci étant dit, quand on dit
qu'effectivement, bon, le manque d'acceptabilité sociale, il est relativement
connu, bon, depuis longtemps... mais il reste que l'industrie, je pense que
pendant très longtemps, elle a aussi joué à l'aveugle, et c'est à cet égard-là,
je pense, qu'il ne faut pas non plus surestimer la part d'indemnisation qui
serait faite. Et là, avec ce qui est présenté actuellement sur le 100 millions,
je pense que ça répond à cette idée de reconnaissance à la fois d'une part de
responsabilité, mais aussi à une reconnaissance que cette industrie-là a fait
aussi des choix et que ces choix-là, donc, seront finalement indemnisés à la
hauteur de ce qui est réel et non pas des anticipations de revenus possibles,
alors que le monde... en fait, la situation en termes de changements
climatiques a beaucoup changé depuis cette période-là.
Donc, je pense qu'il y a quand même un
équilibre. Vous avez abordé cette notion-là d'équilibre, et je pense qu'avec le
projet… avec les indemnisations actuelles, on est dans cette notion-là
d'équilibre que vous évoquez.
M. Julien : Parfait.
J'aime également beaucoup entendre votre préoccupation puis je pense que c'est
celle qui nous a guidés dans la rédaction du projet de loi, peut-être qui
gagnera à être bonifié, le cas échéant, là, je ne saurais prétendre du
contraire, mais il ne faut pas non plus qu'il y ait des... Tu sais, ce que je
souhaite, puis ce que mon ministère souhaitait, quand on discutait du projet de
loi, puis ce que je souhaite discuter avec mes collègues aussi, c'est... on
veut quelque chose d'assez, malheureusement pour certains, mais pas pour nous,
d'assez encadré, c'est-à-dire que ça n'apporte pas nécessairement un arbitrage
complexe, c'est-à-dire que le plan d'indemnisation, là, doit être assez
binaire, sur présentation de pièces justificatives, et, après ça, pas trop
interprétatif. Bon, je sais qu'il y a un petit article qu'on discutera, là, au
moment venu, à l'article par article, qui mentionne des sommes qui pourraient
être... je ne me souviens plus du terme exact, là, mais je pense que c'est
assez bien encadré.
C'est sûr que le projet de loi, dans sa
forme actuelle, ne comprend pas le programme d'indemnisation. Quand on parle de
100 millions, c'est à cause qu'on a un estimé… quand je dis un estimé,
c'est assez clair, là, on a déjà des pièces justificatives qui nous permettent
de fixer ce montant-là. Est-ce que vous pensez qu'on doit révéler le plus
rapidement possible la nature même du programme d'indemnisation sur ce
critère-là pour justement être sûr que tout le monde est conscient de la
méthodologie exacte du plan d'indemnisation?
Mme Chaloux (Annie) : Je
pense que c'est intéressant, ce que vous évoquez, parce que ça permet d'ajouter
une notion de transparence par rapport à certaines perceptions que pourrait
avoir un programme d'indemnisation, à la fois pour ceux et celles qui
souhaitent qu'il y ait le moins possible d'indemnisations et ceux et celles qui
en veulent le plus. Donc, les cartes sont mises sur table. Donc, à cet effet-là,
je pense que la transparence est de mise pour pouvoir comprendre, donc, sur
quels justificatifs l'indemnisation aura lieu. Donc, ça, c'est le premier
volet.
J'ajouterais aussi le fait que... et c'est
hier, lors de l'intervention de M. Ouellet aussi, que j'abonde dans le
même sens, qu'il mentionnait notamment le fait que, en vertu de la Loi sur les
hydrocarbures, les entreprises étaient dans l'obligation de fournir, lorsqu'il
y avait des... des gisements, pardon, exploitables, de fournir l'information.
Et, à l'heure actuelle, donc, il n'y aurait qu'une entreprise qui l'aurait
fait. Donc, ça permet, là aussi, d'éviter la surenchère de certaines
entreprises à vouloir avoir accès à davantage d'indemnisations.
Donc, je pense que plus qu'il y a
d'information qui est rendue publique, plus ça permet de faire la part des
choses dans ce projet-là et de voir là où il y a ou pas marge de manoeuvre pour
intervenir.
M. Julien : Parfait. Une
dernière question pour moi, avant de passer la parole à mes <collègues...
Mme Chaloux (Annie) :
...pour
intervenir.
M. Julien : Parfait. Une
dernière
question pour moi, avant de passer la parole à mes >collègues,
mais qui est assez importante. Vous mentionnez, en réalité, qu'on devrait
renforcer le préambule pour noter clairement le positionnement du Québec, qu'on
est chef de file avec aussi notre adhésion au BOGA, que ça va être quelque
chose qui va être beaucoup lu, beaucoup étudié. Donc, il faut faire preuve de
rigueur, et moi, je pense, d'équilibre, en même temps, mais on en discutera
avec les collègues.
Donc, je voudrais vous entendre, parce que
certains prétendent que le projet de loi qu'on a devant nous, c'est un outil
marketing puisqu'il ne se faisait pas d'exploration et d'exploitation au
Québec, bien qu'il y avait des licences de permis. Mais moi, je ne le vois pas
du tout comme un outil marketing, je le vois comme un positionnement assez
courageux de notre État pour faire la chose. Donc, pourquoi, selon vous… Est-ce
un outil marketing ou c'est vraiment un positionnement courageux du Québec?
Mme Chaloux (Annie) : Je me
permettrais de dire que c'est un peu toutes ces réponses, c'est-à-dire que
d'abord...
M. Julien : Du marketing
courageux.
Mme Chaloux (Annie) : Dans le
sens où c'est un symbole fort. Et moi, je ne parlerais pas de marketing, mais
je pense que c'est un symbole fort que l'on envoie. Effectivement, le Québec,
ce n'est pas un territoire qui est reconnu pour avoir une quantité
d'hydrocarbures qui est majeure. Mais, plus on arrive dans un contexte où on
veut avoir accès à ces ressources-là, bien, plus que les sources non traditionnelles
peuvent devenir intéressantes. Donc, on vient quand même freiner tout futur
projet, ce qui est en soi, donc, une avancée majeure.
• (15 h 20) •
Ce que je dirais, et c'est là où la notion
du préambule revient, c'est qu'il y a cette idée que le projet de loi, oui, va
être étudié ailleurs dans le monde, et on espère qu'il soit appliqué aussi
ailleurs dans le monde, mais il y a des juridictions... Pensons à un projet de
loi de cette nature-là qui serait adopté, par exemple, en Alberta, avec un programme
d'indemnisation comme celui-là. Ce ne serait pas jouable pour l'État albertain,
parce qu'ils ont, bien sûr, un développement d'hydrocarbures qui est beaucoup
plus important. D'où le fait que, plus on réduit les possibilités d'étendre les
indemnisations, plus on est très, très, très spécifique, plus on est
transparent, plus on est clair sur ce qu'on peut ou pas permettre, bien, on
permet d'éviter des leviers potentiels à ce que l'industrie puisse utiliser à
la fois au Québec et peut-être, par la suite, dans d'autres juridictions.
C'est sûr qu'on n'est pas responsable, non
plus, ultimement, de tous les projets de loi qui seront adoptés ailleurs dans
le monde, évidemment, mais il reste que ça doit fournir des signaux qui sont
importants. D'où le fait que, dans le préambule, ce doit être... ces éléments-là
doivent être pris en compte, et que ce n'est pas parce qu'un projet de loi a
une part de symbolisme qu'il n'est pas nécessaire, et ça, je pense que c'est un
élément qu'il faut souligner ici.
M. Julien : Parfait. Donc,
juste en conclusion, avant de passer la parole, donc, c'est la première fois
qu'on nous amène cette réflexion-là de dire, bien, si on voulait faire un «copy
and paste» ailleurs, on serait en mesure de le faire. Je pense, justement, que
le programme d'indemnisation qui est prévu ici, qui parle seulement des frais
de licence et des frais d'exploitation liés au maintien d'une conformité, eu
égard à partout, c'est des frais, somme toute, qui sont à la marge par rapport
aux revenus potentiels d'exploitation, qui ailleurs pourraient être
complètement différenciés, là. Mais j'aime ce que j'entends.
Le Président (M. Lemay) : Donc,
M. le député de Lac-Saint-Jean, la parole est à vous.
M. Girard (Lac-Saint-Jean) : Merci,
M. le Président. Bonjour. Très intéressant de vous entendre et de faire aussi
un parallèle avec M. Richard Ouellet, qui a passé hier, au niveau du
programme d'indemnisation.
Moi, j'aimerais ça vous entendre au niveau
de l'alliance BOGA, avoir votre point de vue un peu, tu sais. Pour le Québec,
ça peut être utile au niveau de nous positionner dans le monde, avec notre
volonté de devenir un leader mondial au niveau des énergies vertes. J'aimerais
vous entendre, avoir votre position là-dessus.
Mme Chaloux (Annie) : Merci.
L'alliance BOGA, c'est une alliance qui vise à se sortir, finalement, du
pétrole, de l'extraction, de l'exploitation des hydrocarbures. Il y a déjà près
d'une dizaine d'États ou d'États fédérés qui se sont joints à cette
initiative-là, et elle prendra de l'ampleur avec le temps, étant donné qu'à la
COP26, c'est quand même la première fois où il y a une décision qui a été prise,
où on nomme la question des hydrocarbures, on parle du charbon, on parle des
hydrocarbures comme étant source du problème. On le sait depuis longtemps, mais
c'est très difficile, dans le contexte des négociations climatiques
internationales, d'accepter cet élément-là dans les négociations.
Donc, le fait que le Québec soit parmi les
premiers à adopter et à faire partie de ce genre d'engagement là, bien, ça
envoie des symboles, des signaux clairs, et le Québec est assez bien perçu sur
la scène internationale. Il a très souvent accès à un réseau que peu d'États
fédérés peuvent se targuer d'avoir. Donc, oui, ça envoie un symbolisme et une
notoriété pour le Québec pour la suite des choses.
M. Girard (Lac-Saint-Jean) : Bien,
merci de votre réponse. C'est quand même assez clair, votre point de vue, puis
je vais laisser mon collègue...
Le Président (M. Lemay) :
Alors, M. le député de Bourget, la <parole…
M. Girard (Lac-Saint-Jean) :
...votre
point de vue, puis je vais laisser mon
collègue...
Le Président (M. Lemay) :
Alors,
M. le député de
Bourget,
la >parole est à
vous.
M. Campeau : Merci pour votre
présentation, Mme Chaloux. J'ai aimé, tantôt, l'idée de marketing
courageux. Je la trouve pas pire comme expression, celle-là, là. Je suis
d'accord avec vous, ce que vous avez mentionné, que c'est la responsabilité de
tous les pays de s'occuper des changements climatiques et suite à l'Accord de
Paris, entre autres. Puis, comme vous avez dit, si l'Alberta faisait un tel
projet de loi, ça serait extraordinaire ou ça serait catastrophique, tout
dépendant comment on le regarde, là. Et nous, on a l'air d'un bien petit joueur
par rapport à ça, et certaines personnes sont tentées de dire : Bon, bien,
c'est facile, ils ne produisaient pas, de toute façon.
Après ça, vous nous dites qu'on est un
leader par rapport à ça parce qu'on est les premiers. Mais juste par curiosité,
c'est vraiment de la curiosité, est-ce que vous entendez ça de d'autres
législations qui cherchent à copier, qui vraiment... ils veulent s'inspirer ou
c'est une idée que vous pensez qui va arriver?
Mme Chaloux (Annie) : Bien,
c'est intéressant, là, comme question que vous évoquez, c'est-à-dire que,
d'abord, je tiens à dire que tous les gestes comptent. Et quand le Québec, par
exemple, dans les années 2000, et avec la Californie, ont choisi de
développer ensemble un marché du carbone, bien, au départ, on n'en parlait pas
tant. Ça s'est popularisé beaucoup, puis aujourd'hui, bien, l'expertise
québécoise, elle est souvent demandée à l'étranger pour qu'on regarde comment,
par exemple, le marché du carbone s'est développé.
À l'heure où on se parle, pour ce qui est
de cette initiative-là, l'initiative BOGA, bien, c'est sûr qu'actuellement il
va y avoir des juridictions… celles qui se sont engagées vont devoir adopter
des textes législatifs et vont s'inspirer de ce qui se fait ailleurs. Et le
Québec étant dans les premiers à le faire, évidemment, donc, ils vont pouvoir
regarder ce que le Québec fait.
Donc, c'est plus à terme que je pourrais
répondre à votre question, à savoir est-ce que, maintenant, on regarde ce
que le Québec fait sur ce projet de loi là. Mais je pense que, dans les
prochains mois, dans les prochaines années, plus d'acteurs vont regarder des
projets de loi, que ce soit à travers BOGA, mais à travers d'autres initiatives
analogues. Ils vont regarder ces modèles-là, et c'est justement l'importance
d'avoir un bon programme qui est très fort maintenant pour aider et faciliter
aussi le travail de ceux qui suivront.
M. Campeau : Moi, je n'ai pas
d'autre question, M. le Président.
Le Président (M. Lemay) : Très
bien. M. le ministre, la parole est à vous.
M. Julien : Oui, merci. Donc,
à votre lecture, puis vous avez… comme mentionné précédemment, vous avez
entendu d'autres intervenants, donc, en regardant le projet de loi, êtes-vous
satisfaite de ce projet de loi là dans sa forme et spécifiquement... je
reviens, là, puis je sais que ce n'est pas votre position, mais sur l'équilibre
des indemnisations, parce que, bon, ça va être l'enjeu de beaucoup de
discussions, hein? Certains prétendent qu'il faudrait donner, là, des milliards
basés sur des revenus potentiels qu'on ne connaît pas trop. D'autres disent
qu'on ne devrait rien donner parce que les joueurs étaient au courant. Puis
nous autres, on se positionne, comme vous le dites, là, responsable et
équitable, là, mais on s'entend, là, qu'il n'y a pas de folie là-dedans, là. C'est
les frais pour les licences puis… hein? Bon. Votre évaluation, c'est... du
projet de loi dans sa forme actuelle, vous diriez quoi?
Mme Chaloux (Annie) : Je
pense qu'à l'heure actuelle c'est un projet de loi qui est équilibré dans la
mesure où, oui, il faut lutter contre les changements climatiques, et ça, ça
doit demeurer la priorité d'un tel projet de loi. On a aussi des engagements
puis on a une responsabilité vis-à-vis des investisseurs puis vis-à-vis des
compagnies ou des personnes morales qui investissent au Québec. Ça fait qu'il
faut s'assurer aussi que, quand on fait des choix qui laissent des gens
derrière, qu'on opte pour un mécanisme qui n'est pas simplement d'appuyer une
industrie qui est problématique, mais qui va aussi soutenir notre crédibilité
sur d'autres volets d'investissements. Et M. Ouellet, c'est un peu ce qu'il
évoquait hier.
Donc, oui, c'est sûr qu'un monde idéal,
c'est bien sûr de n'avoir aucune indemnisation. En même temps, on est dans un
contexte où on a des partenaires d'affaires, où il y a des investisseurs, où on
a aussi une part de responsabilité, puis qu'un projet de loi serait... qui
irait trop dans une veine de zéro indemnisation porterait flanc, finalement, à
plusieurs poursuites de la part des industries et, au final, probablement qu'on
n'y serait pas du tout gagnant, alors que d'avoir une approche ou un modèle qui
vise sur le remboursement des dépenses, tel que préconisé, qui met un plafond
sur les montants qui seront attribués, bien, ça montre, du moins, le sérieux
dans notre démarche et la volonté, après ça, de passer à autre chose.
M. Julien : Avez-vous une
idée? Parce que je comprends très bien, là, parce qu'on a beaucoup mentionné
les poursuites, etc., mais en terminant, au-delà de ça, pour moi, il y a aussi
un risque que je qualifierais réputationnel, puis je vais faire attention à mes
mots, mais c'est réputationnel, là, parce que, quand on disait : Mais
nous, comme État, on avait des <responsabilités...
M. Julien :
...réputationnel,
là,
parce que, quand on disait : Mais nous, comme État, on avait
des >responsabilités, puis à partir du moment où on prend une décision,
on assume nos responsabilités, notre part de responsabilité, est-ce qu'il y a
un risque réputationnel pour le Québec?
Mme Chaloux (Annie) : Je
pense... Actuellement, il n'y a pas de risque réputationnel. Je pense qu'on est
un lieu où les investissements étrangers... en fait, les investisseurs
étrangers sont intéressés à venir sur le territoire du Québec, et ce n'est pas
un projet de loi de cette nature-là qui viendrait compromettre, par exemple,
les investissements étrangers dans d'autres secteurs névralgiques de notre
activité économique.
Le Président (M. Lemay) : Nous
allons maintenant passer la parole au député de Mont-Royal—Outremont
pour environ 11 minutes.
M. Arcand : Merci, M. le
Président. Mme Chaloux, j'ai lu, évidemment, votre présentation, une
excellente présentation, et je voudrais vous poser quelques questions,
premièrement, en rapport avec certains des témoignages qu'on a entendus et
avoir vraiment votre opinion là-dessus. Parce qu'aujourd'hui, entre autres,
l'INRS est venu pour expliquer que, dans ce projet de loi, il fallait plus de
flexibilité pour les projets pilotes, en disant : Écoutez, c'est trop
limitatif. Si on décide de faire de la recherche puis on décide de faire de
l'innovation, bien, il faut qu'on se donne la flexibilité nécessaire pour le
faire. Tout le monde reconnaissait que ça prend un certain nombre de contrôles
pour s'assurer, là, qu'il n'y a pas une tentative des entreprises de faire des
projets pilotes, je dirais, qui sont bidons. Juste avoir votre position, dans
ce projet de loi. Est-ce que vous pensez qu'il faudrait, disons, être plus
flexible au niveau des projets pilotes?
• (15 h 30) •
Mme Chaloux (Annie) : C'est
une excellente question que vous évoquez. Quand j'ai lu cette section-là dans
le projet de loi, il ne m'est pas apparu qu'il était peu flexible. Je pense
qu'il laisse quand même un certain espace, mais je n'oserais pas me prononcer
sur est-ce que cet espace-là, qui est déjà octroyé, est suffisant ou pas. Je
pense qu'il y a d'autres experts qui sont beaucoup plus qualifiés que moi qui
répondraient à ce volet-là. Ça fait que je n'oserais pas non plus m'aventurer
sur ce terrain-là. Mais tout projet pilote, quel qu'il soit, il ne faut pas
qu'il permette une exploration déguisée ou une exploitation déguisée des
hydrocarbures. C'est ce qu'on doit mettre de l'avant. Après ça, s'il y a
d'autres projets pilotes qui concernent d'autres éléments rattachés à des
fracturations, mais qui ne visent pas l'exploitation ou l'exploration des
hydrocarbures, là, il faudrait voir avec les experts de ce domaine-là qu'est-ce
qu'ils pensent : Est-ce que, en l'état, le projet de loi permettrait ces
projets-là?
M. Arcand : Si j'ai bien
compris, vous avez dit... vous étiez d'accord avec le Pr Ouellet, hier,
qui est intervenu pour parler… que, selon les accords internationaux, on
pouvait... on devait compenser, dans une certaine mesure. Vous, vous
dites : D'accord, mais le 100 millions, c'est un plafond. Est-ce que
j'ai bien compris ça?
Mme Chaloux (Annie) : Actuellement,
avec ce qu'on a comme information, je dirais que oui, mais plus on aura
d'information de disponible sur la nature des remboursements qui sont prévus,
ce chiffre-là pourrait être appelé à varier. Mais il ne faudrait pas qu'il soit
appelé à varier vers la hausse, étant donné qu'il y a aussi cette... comme je
l'expliquais tout à l'heure à M. le ministre, il y a quand même une
responsabilité que le secteur des hydrocarbures connaît depuis longtemps, et, à
ce moment-là, le risque de l'investissement… le risque de l'acceptabilité
sociale fait partie des éléments qui sont présents depuis plus de 10 ans
maintenant. Donc, il ne faut pas qu'on aille vers une logique de compensation à
la hausse et tenter d'éviter autant que possible certaines poursuites... j'imagine
qu'on n'en évitera pas, évidemment, certains vont tenter de le faire, mais il
faut trouver un programme qui, quand même, soit suffisamment intéressant pour
éviter que les entreprises optent pour la voie des poursuites judiciaires
plutôt que l'acceptation de l'état de fait.
M. Arcand : Est-ce que vous
avez certaines idées qui nous permettraient de partir du plafond puis d'aller
vers le plancher?
Mme Chaloux (Annie) : Il
faudrait voir les chiffres. Évidemment, c'est toujours ça, l'élément. Là où on
peut jouer, c'est sur les fameuses dates, mais là, ça reste à voir, le pourquoi
que ces dates-là ont été mises en place. J'entendais les gens du CQDE parler de
réduire cette période-là de couverture à partir du moment où la Loi sur les
hydrocarbures, en 2018, a été adoptée. Ça fait qu'il faudrait voir qu'est-ce
que ça impliquerait d'avoir une période de conformité plus faible. Ça ferait en
sorte qu'il y aurait peut-être moins de remboursement possible. Mais néanmoins,
il y a aussi une logique qui explique que, pour ce secteur-là de l'industrie,
ça peut prendre plusieurs années quand on fait de l'exploration. Donc, il ne
faudrait pas non plus surpénaliser certains acteurs. Donc, l'importance de
l'équilibre, encore une fois, est à présenter.
M. Arcand : Si je comprends
bien, vous seriez d'accord pour rembourser au minimum, en tout cas, les coûts
directs d'obtention des permis d'exploration, <sachant...
>
15 h 30 (version révisée)
<421
M. Arcand :
...au minimum, en tout cas, les coûts directs d'obtention des permis
d'exploration, >sachant qu'un permis d'exploration qui débouche sur une
exploitation, à toute fin pratique, désormais interdite n'a plus de valeur,
alors il y a... c'est au moins le minimum. C'est ce que je comprends de ce que
vous dites?
Mme Chaloux (Annie) : Effectivement.
M. Arcand : Vous êtes d'accord
avec ça?
Mme Chaloux (Annie) : Oui.
M.
Arcand
: Est-ce
que vous avez une idée... parce que, ce matin, on a eu des discussions, sur le
plan technique, que le Québec devait se lancer de façon beaucoup plus évidente
dans le domaine de la géothermie, dans le domaine de ce qu'on appelle la
captation du carbone, du stockage d'hydrogène, etc. Est-ce que vous avez
vous-même une opinion où est-ce que le Québec devrait aller? Est-ce que vous
avez une idée que vous pourriez nous soumettre par rapport à ça?
Mme Chaloux (Annie) : Bien,
c'est sûr que, dans un contexte de lutte contre les changements climatiques,
les meilleurs outils pour réduire les émissions, c'est de trouver des avenues
où on consomme, à la base, moins d'énergie, et ensuite opter pour les énergies
renouvelables, et donc à aller dans cette méthode de réduction et ensuite de
transferts lorsque ce n'est pas possible.
Pour les projets plus particuliers de
géothermie, d'hydrogène, etc., bien, c'est sûr que ça s'écarte un peu de ce
projet de loi là sur les hydrocarbures. C'est sûr qu'on ne peut pas non plus
penser qu'on peut faire des transitions énergétiques aussi rapides en évitant d'utiliser
ces autres stratégies-là, mais il faut voir dans quelle mesure elles répondent
réellement à notre responsabilité et à notre juste part en termes de
contribution à la lutte contre les changements climatiques à l'échelle
mondiale.
M. Arcand : J'ai été
étonné il y a quelques semaines. J'écoutais une dame, je crois que c'était Mme Whitmore,
qui vient des... je ne sais pas si c'est l'École des hautes études
commerciales, le HEC, ou le... mais qui parlait, entre autres... qui disait,
entre autres, que, bon, les autos électriques, ce n'est pas une solution très
valable à ce niveau-là, qu'il faudrait vraiment changer, de façon assez
importante, le mode de vie, il faut que les gens apprennent à moins se
déplacer, et ainsi de suite. Est-ce que... Jusqu'où vous allez dans ce
domaine-là? Avez-vous une idée précise par rapport à ce qu'il faut faire?
Mme Chaloux (Annie) : Bien,
c'est sûr qu'il y a de plus en plus d'études qui montrent que, d'abord, ce qu'il
faut avoir, il faut avoir l'approche : éviter, déplacer puis transférer
lorsque possible. C'est-à-dire que, dans un modèle de développement comme on a
actuellement au Québec, il faut d'abord opter pour : Est-ce qu'il y a une
nécessité, par exemple, de déplacement? Est-ce que, comme individu ou est-ce
que comme État, on peut encourager, finalement, l'évitement de certains
déplacements inutiles? Lorsque c'est impossible, bien, comment on offre des alternatives
qui ne soient pas l'auto individuelle, quelle qu'elle soit? Donc, est-ce qu'on
peut accroître l'offre de transport collectif, que ce soit par des transports
traditionnels ou des modes de transport d'autopartage, par exemple, qui sont
innovants, qui feraient en sorte de réduire, finalement, notre contribution aux
émissions de gaz à effet de serre? Et lorsque ce troisième... ce deuxième
créneau là, pardon, n'est pas possible et qu'on doit quand même opter, par la
suite, par un déplacement qui ne peut pas se faire par des modes de transport
qui soient actifs ou collectifs, bien, est-ce qu'on peut opter pour des
solutions de remplacement?
La voiture électrique rentre dans ce
troisième créneau là, mais il faut quand même continuer toujours à réfléchir, pas
simplement à faire les modifications à la marge en fin de parcours, mais d'abord
revoir les premières étapes pour finalement limiter les émissions de gaz à
effet de serre en changeant nos modèles, comme Mme Whitmore l'expliquait. Et
ultimement, lorsqu'impossible, bien là, c'est sûr que la voiture électrique
devient une alternative à la voiture à essence.
Mais il ne faut pas penser que simplement
remplacer une voiture à essence par une voiture électrique va solutionner les
problèmes. Ça va continuer à promouvoir l'étalement urbain. Il y a, bien sûr,
des minéraux rares qui sont utilisés dans les batteries. Donc, il ne faut pas
voir ça, effectivement, comme une panacée, mais ça doit faire partie du bouquet
d'instruments dont on dispose pour réduire nos émissions, mais peut-être
changer notre approche de tout miser sur une électrification qui ne change pas
les comportements vers une approche plus transformationnelle qui nécessite,
évidemment, des nouvelles façons de voir notre aménagement du territoire et notre
conception du bien-être. Mais ça peut passer par la promotion du télétravail.
Donc, il y a plein de modèles qui peuvent
nous aider à réduire les premiers créneaux pour, par la suite, en fin de
parcours, réduire nos émissions via les voitures électriques.
M. Arcand : Vous savez,
quand je discutais avec le Pr Pineault, entre autres, lui, pas très, très...
pas très, très «hot», si vous me permettez l'expression, sur le solaire, par
exemple. Il dit que, bon, au Québec, le <solaire...
M. Arcand :
...lui,
pas très, très... pas très, très «hot», si vous me permettez l'expression, sur
le solaire, par exemple. Il dit que, bon, au Québec, le >solaire, ce n'est
pas évident. Lui, il dit que, si on veut vraiment... et, là-dessus, on est un
cancre dans ce domaine-là, que si véritablement on veut faire une différence, c'est
évidemment les économies d'énergie. Et, quand on se promène, par exemple, un
peu partout... et moi, j'utilise la 20, le lundi soir, pour venir à Québec, et
mon Dieu qu'il y a des camions. Quand on sait que les camions polluent de façon
assez importante, beaucoup plus que des automobiles, on s'aperçoit qu'il y a
certainement une espèce... des façons de faire qui pourraient certainement
améliorer la situation et réduire considérablement les gaz à effet de serre. Et
lui, évidemment, prône aussi des économies d'énergie substantielles.
Est-ce que vous voyez des façons pour le
Québec d'aller de ce côté-là, d'être comme d'autres pays européens qui sont
certainement beaucoup plus avancés que nous à ce niveau-là?
Mme Chaloux (Annie) : Oui. Je
pense qu'une des choses les plus importantes, c'est d'utiliser les mesures
écofiscales, et ça, je pense que c'est un aspect qui est très, très important.
Par exemple, au Québec, on opte pour une stratégie qui est les subventions aux
voitures électriques. Bien, il faut aussi développer pas simplement la carotte,
mais aussi opter pour des stratégies de bâton, c'est-à-dire, si on subventionne
à la hauteur de 8 000 $ une voiture électrique, bien, on doit aussi
mettre en place des surtaxes pour les gros cylindrés, par exemple. Donc, ça
peut être des taxes à l'immatriculation des voitures. On pourrait mettre en
place des taxes kilométriques qui feraient en sorte que même les voitures
électriques, qui contribuent à l'étalement urbain, seraient aussi taxées par
ça. Donc, il y a une panoplie de mesures.
• (15 h 40) •
Parce qu'il ne faut pas se leurrer qu'au
Québec le plus grand secteur émetteur de gaz à effet de serre, c'est bien sûr
le secteur des transports. C'est 44 % des émissions de la province. Donc,
c'est là où on peut le plus agir et utiliser des mesures écofiscales efficaces
qui feraient en sorte à la fois de jouer, donc, sur l'offre et sur la demande
et accroître, finalement, les changements qui feraient en sorte qu'on diminue
véritablement nos émissions de gaz à effet de serre.
Donc, vous avez tout à fait raison, quand
on parle...
Le Président (M. Lemay) : Merci
beaucoup, Mme Chaloux, pour cette réponse. Et nous allons maintenant céder la parole
au deuxième groupe d'opposition, Mme la députée de Sainte-Marie-Saint-Jacques,
pour environ 2 min 45 s.
Mme Massé : Merci, M. le
Président. Bonjour, Mme Chaloux. Merci pour votre présentation. J'ai deux,
trois petites questions. Je comprends bien qu'on a à inscrire un préambule. J'entends
l'ouverture du ministre. Je pense, c'est une bonne idée. Je pense que ça
mettrait le niveau de l'engagement qu'on est prêts à prendre et le sens de cet
engagement-là.
Ceci étant dit, vous dites... vous avez
répété à plusieurs reprises que les investisseurs, dans cette industrie, depuis
plusieurs années — vous avez nommé 2015, mais, entre vous et moi, c'est
bien avant ça — savaient très bien dans quoi ils s'embarquaient, mais,
malgré tout, vous prônez une compensation. Je comprends que rembourser les
frais de licence, les frais des remboursements de dépenses, vous êtes d'accord
avec ça. Est-ce qu'on devrait y soustraire tout l'argent qu'on y a mis aussi?
Mme Chaloux (Annie) : Vous
évoquez là une question qui est intéressante. Donc, il faudrait voir, de
manière publique, quelles sont les sommes qu'on a investies pour appuyer ce
secteur-là d'activité.
Ceci étant dit, puis la manière que j'avais
compris le projet de loi, il y avait quand même ces calculs-là, de subvention,
qui étaient aussi reconnus dans le parcours. Je pense qu'il faut aussi être
conscient de notre responsabilité comme État, dans la mesure où... j'entends
bien ce que vous dites par rapport aux compensations, mais reste qu'on a la Loi
sur les hydrocarbures, qui a été adoptée par l'Assemblée nationale et qui nous
a liés à cette industrie-là en continuant de permettre l'exploration et l'exploitation
des hydrocarbures, même si le cadre était plus restrictif. Donc, on a cette
responsabilité-là, tout de même, à tenir en compte.
Mme Massé : Donc, vous êtes d'accord
que tout l'argent, que ce soit en crédit d'impôt, en subvention, coût du claim,
ça, ils devraient nous le rembourser parce qu'on leur a donné. Mais moi, j'ai
une autre question plus profonde. Tout l'argent que le public a payé pour les
inondations, les berges qui s'écroulent en Gaspésie, est-ce qu'ils n'ont pas
une part de responsabilité, puisque la science nous démontre qu'ils ont une
part de responsabilité et que vous nous rappelez qu'ils le savaient depuis
longtemps?
Mme Chaloux (Annie) : Je me
permets ici, simplement, par contre, de faire la nuance, à savoir que ce n'est
pas nécessairement cette industrie, par exemple, une entreprise qui travaillait
au Québec, qui était, elle, la responsable des inondations, hein? Il y a la
question, toujours, des préjudices et de poursuites, par la suite, aussi auprès
des grands émetteurs de gaz à effet de serre. Donc, les industries qui ont
investi au Québec ne sont pas nécessairement celles qui ont contribué, aujourd'hui,
aux impacts concrets. Je comprends ce que vous dites, parce qu'effectivement on
est dans une situation mondialisée d'interdépendance.
Ceci étant <dit...
Mme Chaloux (Annie) :
...dans
une situation mondialisée d'interdépendance.
Ceci étant >dit, ce n'est pas
ces petits joueurs là qui sont ceux qui sont imputables des catastrophes
climatiques que l'on vit exactement sur le territoire, et ça serait
difficilement, bien sûr, démontrable dans une perspective de droit et en cour,
par exemple.
Le Président (M. Lemay) :
Merci, Mme Chaloux. Alors, nous allons maintenant passer la parole au
troisième groupe d'opposition. M. le député de Jonquière, pour la même chose,
environ 2 min 45 s.
M. Gaudreault : Oui.
Merci beaucoup, Mme Chaloux. Merci de votre présence. Bon, j'aime beaucoup
le récit que vous faites de l'insertion, je dirais, du Québec dans BOGA et que
ce récit doit faire en sorte que le Québec, au fond, s'inscrive dans une
démarche historique de diminution des gaz à effet de serre, de lutte contre les
changements climatiques. Les membres fondateurs de BOGA, bon : Danemark,
Costa Rica, France, Groenland, bon, avec le Danemark, l'Irlande, la Suède, le
pays de Galles. Il y a des membres associés : la Californie, la
Nouvelle-Zélande, le Portugal. Il y a des amis : le Luxembourg, la
Finlande et l'Italie. Je sais que le Costa Rica, du côté du Parlement, le
projet de loi n'a pas passé, mais, si on regarde les autres membres du BOGA,
est-ce qu'il y a des exemples qui pourraient nous inspirer? Par exemple, le
Danemark, est-ce qu'ils ont intégré BOGA dans leur législation ou on est
vraiment les premiers?
Mme Chaloux (Annie) : Je
ne pourrais pas vous dire là où ils en sont, au Danemark, de manière concrète,
là, dans l'état d'adoption de leur projet... du projet de loi. Je sais qu'il y
a eu des discussions, mais je n'ai pas vu la sortie. Puis évidemment c'est que
c'est une initiative qui a été lancée en octobre, hein? Ça fait qu'on est, bien
sûr, dans les premiers, si on n'est pas le premier à cet égard-là. Celui du
Costa Rica, effectivement, le projet de loi n'a pas été adopté, donc reste à
voir comment la suite se fera pour cette juridiction-là. Mais je ne pourrais
pas vous donner d'autres détails que ça parce qu'on est vraiment dans le début
du parcours et non pas... ça ne fait pas plusieurs mois.
M. Gaudreault : Parce
que le Danemark avait quand même de l'exploitation d'hydrocarbures sur son
territoire, en haute mer ou... donc, j'imagine qu'il y aura une procédure,
peut-être, d'indemnisation aussi. Je ne sais pas s'il y a un calendrier qu'on
peut connaître pour s'en inspirer.
Mme Chaloux (Annie) : Ça
pourrait être un élément que je pourrais surveiller puis informer, là, la
commission, le cas échéant, là, si je vois quelque chose à cet effet-là, parce
qu'effectivement ils sont dans une situation très différente du Québec de par l'exploitation
des hydrocarbures qu'ils ont sur leur territoire. Eux, je pense qu'ils avaient
l'horizon 2050... une réduction, mais je n'ai pas le détail, là, de ces
réductions-là, puis ces retraits-là de permis, et là où ça en est au niveau du
projet de loi.
M. Gaudreault : O.K. En
tout cas, si jamais vous voyez passer des choses là-dessus, on va garder un
oeil également, mais je pense ça serait bienvenu de transmettre ça au Québec.
Merci beaucoup, Mme Chaloux.
Le Président (M. Lemay) : Très
bien. Merci beaucoup, Mme Chaloux, pour votre contribution aux travaux de
la commission.
Alors maintenant, je vais suspendre les
travaux quelques instants pour permettre au prochain groupe de prendre place.
Merci.
Mme Chaloux (Annie) :
Merci à vous.
(Suspension de la séance à 15 h 48)
>
(Reprise à 15 h 55)
Le Président (M. Lemay) : Alors,
la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources
naturelles reprend ses travaux, et je souhaite maintenant la bienvenue aux
représentants d'Équiterre et de la Fondation David-Suzuki. Je vous rappelle que
vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, et, par la suite, nous
procéderons à une période d'échange avec les membres de la commission. Alors,
je vous invite à vous présenter, et vous pouvez y aller avec votre exposé.
Équiterre et Fondation David-Suzuki
M. Viau (Marc-André) : Bonjour,
M. le Président, M. le ministre, députés, membres de la commission. Je m'appelle
Marc-André Viau, je suis directeur des relations gouvernementales chez
Équiterre, et je suis accompagné de mon collègue Émile Boisseau-Bouvier et de
Charles Bonhomme, de la Fondation Suzuki.
Équiterre existe depuis bientôt 30 ans et
peut compter sur l'appui de plus de 150 000 membres et sympathisants. La
Fondation Suzuki, elle, a été créée en 1990 et compte sur l'appui de plus de
300 000 sympathisants, dont près de 100 000 au Québec.
Merci de nous recevoir et de nous donner l'opportunité
de nous exprimer et d'échanger sur le projet de loi n° 21, qui va nous
permettre de mettre fin aux velléités de quelques compagnies pétrolières et
gazières qui sont incompatibles avec la crise climatique et les choix
historiques du Québec en matière énergétique. On est heureux de constater que
nos efforts et ceux de toutes les autres organisations citoyennes et
environnementales ont contribué à créer un climat, sans faire de mauvais jeu de
mots, où le gouvernement québécois peut présenter un projet de loi comme
celui-là et jouer un rôle de leader à l'international.
Le député de Jonquière le soulignait hier,
les choses ont beaucoup évolué au cours des dernières années, et c'est ce qui
rend ce projet de loi là possible. On tient d'ailleurs à féliciter le ministre
d'avoir saisi cette opportunité.
Mais, comme le ministre le disait hier, on
ne va pas s'entendre sur tout, et c'est là qu'on doit dire que ce projet de loi
là est imparfait et vague à certains égards. Il offre, entre autres, la
possibilité d'indemniser les compagnies pétrolières et gazières. Le problème avec
la compensation, c'est qu'on compense pour quelque chose qu'on sait
volontairement nuisible pour l'environnement et la santé. Il y aura toujours
une bonne raison juridique de compenser, mais ce n'est pas une obligation. Et
la position de nos organisations, c'est qu'on va toujours préférer le concept
de pollueur-payeur à celui de pollueur payé. Nos organisations ont proposé
certaines recommandations dans notre mémoire, que mes collègues vont détailler,
et on encourage les membres de la commission à les intégrer au cours de l'étude
article par article, parce qu'on aimerait ça, avoir une loi dont on est
vraiment fiers.
Je cède maintenant la parole à Charles
Bonhomme de la Fondation David-Suzuki.
M. Bonhomme (Charles) : Merci,
Marc-André. D'entrée de jeu, il est important de rappeler le contexte
climatique dans lequel s'inscrit le projet de loi n° 21. En août 2021, le
rapport du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat, le
GIEC, a lancé un code rouge au monde entier concernant les émissions de GES,
rappelant que l'humanité est sans équivoque responsable de la crise climatique,
en grande partie due à sa dépendance aux combustibles fossiles. Il existe un
consensus scientifique à travers le monde sur l'importance de cesser rapidement
l'utilisation des combustibles fossiles.
Outre le rapport accablant du GIEC, on
dénombre de nombreux autres rapports récents qui vont dans le même sens et qui
réitèrent l'importance d'agir maintenant. Premièrement, le rapport de l'Agence
internationale de l'énergie paru en mai 2021 est clair : aucun nouveau
projet pétrolier et gazier ne doit être accepté si nous voulons limiter l'augmentation
de la température mondiale à 1,5 degré Celsius. Deuxièmement, une étude parue
dans la revue Nature en septembre 2021 évalue que, pour avoir 50 %
de chances de limiter le réchauffement planétaire à 1,5 degré Celsius, 60 %
du pétrole et du méthane fossile et 90 % du charbon doivent rester dans le
sol. Troisièmement, le Production Gap Report d'octobre 2021 montre que non seulement
la production mondiale d'hydrocarbures doit décroître immédiatement, mais aussi
que les plans des pays sont en totale inadéquation avec cette réalité. Puis rappelons
également que le gouvernement du Québec s'est lié par décret à l'Accord de
Paris.
Équiterre et la Fondation David-Suzuki
accueillent favorablement le dépôt du projet de loi n° 21. Le gouvernement
fait un pas important dans le sens exigé par l'urgence climatique, la science
et la population. Le dépôt du projet de loi signe l'arrêt de mort des projets d'exploration
et d'exploitation de gaz et de pétrole proposés par le passé et récemment par l'industrie.
Le projet de loi déposé est entre autres le résultat d'une vigilance et de la
mobilisation inlassable de groupes citoyens partout au Québec. Depuis des
décennies, les citoyennes et citoyens de même que de nombreuses communautés et
organisations environnementales d'un bout à l'autre de la province ont dépensé
ressources, énergie et temps pour lutter contre les projets dangereux de cette <industrie...
M. Bonhomme (Charles) :
...de
la province ont dépensé ressources, énergie et temps pour lutter contre les
projets dangereux de cette >industrie. C'est donc avec soulagement et
enthousiasme que plusieurs militantes et militants se sont battus pour protéger
notre santé, notre sécurité, et la nature accueille cette importante avancée.
Pour que le projet de loi n° 21 soit
à la hauteur de l'urgence climatique et qu'il permette de répondre avec
ambition à la crise climatique, Équiterre et la Fondation David-Suzuki
recommandent aux législateurs que le projet de loi soit amendé pour fermer
la porte aux cadeaux sous forme d'indemnisations que le gouvernement compte
octroyer à l'industrie; également, que le gouvernement soustraie les appuis
financiers fiscaux obtenus par les entreprises des indemnisations si le
gouvernement décide de maintenir ces dernières. Nous recommandons aussi que le
gouvernement priorise ce projet de loi, le renforce et l'adopte rapidement puis
que le gouvernement saisisse cette opportunité pour prouver aux Québécoises et
Québécois qu'il compte sérieusement atteindre ses cibles climatiques et que ce
projet de loi soit un outil pour y arriver.
Je cède maintenant la parole à mon
collègue Émile Boisseau-Bouvier.
M. Boisseau-Bouvier (Émile) : Merci,
Charles. Donc, en déposant ce projet de loi, le gouvernement envoie un message
puissant aux autres gouvernements à travers le monde : l'ère des
combustibles fossiles est terminée, et ils doivent, eux aussi, adopter de tels
projets de loi. C'est un message qui avait également été lancé cet automne à la
COP26, lors du lancement de la Beyond Oil and Gas Alliance, la BOGA, et nous
espérons que ce momentum concrétise et accélère les changements dans d'autres
juridictions. Après tout, la BOGA n'est que la traduction diplomatique du
consensus scientifique croissant dont il était question précédemment. Mettre
fin à l'exploration, à l'exploitation des hydrocarbures est le minimum de ce
qui est nécessaire pour atteindre les objectifs de l'Accord de Paris. Le Québec
défriche donc un chemin que tous les États devront emprunter, et il est de
notre devoir de nous assurer que nous tracions la bonne voie et que tous
puissent nous suivre.
• (16 heures) •
L'octroi d'indemnisations pourrait
cependant nous barrer la route. À l'échelle domestique, d'autres industries
devront être complètement transformées ou simplement interdites si le Québec
veut atteindre son objectif de carboneutralité d'ici 2050. Ces industries
réclameront, elles aussi, des indemnisations, si le projet de loi est adopté
tel quel. Le Québec se retrouverait alors avec une facture qui rendrait
extrêmement complexes et difficiles le financement de la transition énergétique
et l'adaptation à la crise climatique. L'argent public doit servir à financer
la transition et non pas à perpétuer des investissements dans des industries
qui contribuent à alimenter la crise climatique.
Sur le plan international, le projet de
loi n° 21 constitue un précédent qui sera étudié attentivement par les
autres juridictions ainsi que par les compagnies fossiles y opérant. Si le
Québec accorde 100 millions de dollars, comme cela est estimé par le
ministre de l'Énergie, alors que la province ne produit aucun hydrocarbure,
combien cela en coûtera-t-il à l'Alberta, par exemple, pour se sortir de sa
dépendance? Une facture trop élevée rendrait cette approche beaucoup moins
attirante pour d'autres juridictions qui veulent et qui doivent emboîter le
pas.
Équiterre et la Fondation David-Suzuki
recommandent aux législateurs de procéder à l'adoption du projet de loi sans
offrir de compensation aux compagnies pétrolières et gazières afin d'éviter de
freiner la transition énergétique au Québec et ailleurs dans le monde. Nous lui
recommandons également de saisir cette opportunité pour accentuer l'implication
du Québec au sein de la BOGA et pour faire la promotion de ses engagements
climatiques ailleurs au Canada et dans le monde.
Sur un tout autre plan, je pense qu'il est
important de rappeler les bienfaits de ce projet de loi sur les écosystèmes et
les communautés avoisinant les sites d'exploration et de production d'hydrocarbures,
qui sont les premiers à subir les impacts environnementaux de ces activités. En
adoptant le projet de loi n° 21, le gouvernement mettrait finalement fin
aux risques et aux effets délétères subis par les communautés et les
écosystèmes du Québec lors du développement de l'industrie pétrolière et
gazière. Dans le cas contraire, le statu quo continuerait de laisser ces
populations aux prises avec des impacts environnementaux nocifs pour leur
santé, leur qualité de vie et la biodiversité, ce qui serait contraire aux
objectifs de développement durable du Québec.
Par ailleurs, nous sommes surpris de
remarquer qu'aucun groupe autochtone ne sera entendu lors de ces consultations.
Cette absence est d'autant plus étonnante que les risques associés aux impacts
environnementaux de l'industrie des hydrocarbures sont particulièrement
dévastateurs au sein des communautés autochtones, pour lesquelles la
conservation et la gestion durable des ressources naturelles est un enjeu
économique et culturel, mais surtout un élément essentiel à leur subsistance.
Équiterre et la Fondation David-Suzuki
estiment que les communautés autochtones font partie des principaux intéressés
de ce projet de loi. C'est pourquoi nous recommandons que le gouvernement s'engage
à rencontrer les groupes autochtones, dans le cadre de ses consultations publiques
sur le projet de loi, dans l'optique de favoriser une relation plus étroite
entre le gouvernement et les peuples autochtones. Nous recommandons que les
groupes autochtones soient invités aussi pour les prochains projets de loi
similaires.
Je cède maintenant la parole à Charles
Bonhomme.
M. Bonhomme (Charles) : Merci,
Émile. En conclusion, M. le Président, il n'y a plus aucun doute que l'urgence
climatique est un enjeu planétaire majeur auquel doit faire face la communauté
internationale, particulièrement les États qui, comme le Québec, ont contribué
à une part plus importante des émissions de GES dans l'atmosphère. Au-delà d'un
simple calcul comptable des GES domestiques, faire un virage rapide vers une
économie sobre en carbone nécessite de faire une révision cohérente des lois,
des politiques et des orientations stratégiques qui touchent l'ensemble des
secteurs d'activité du Québec.
En ce sens, le projet de loi n° 21
est une étape essentielle à l'atteinte de cet objectif et des engagements
climatiques du Québec. Nous espérons que cette étape sera la première d'une
série d'actions significatives et concrètes dans cette <direction. En
plus de...
>
16 h (version révisée)
< M. Bonhomme (Charles) :
...la
première d'une série d'actions significatives et concrètes dans cette >direction.
En plus de savoir mobiliser et sensibiliser les citoyennes et les citoyens sur
les questions environnementales, Équiterre et la Fondation David-Suzuki peuvent
être des alliés stratégiques du gouvernement pour communiquer au grand public
ses actions environnementales qui s'alignent avec notre vision et, par
conséquent, en augmenter l'acceptabilité sociale. C'est pourquoi nous tenons à
ouvrir la porte à une plus grande collaboration entre nos organisations et le
gouvernement. Merci à tous, et nous serons disponibles pour prendre vos
questions avec plaisir.
Le Président (M. Lemay) : Alors,
merci pour cet exposé. Nous allons débuter de ce pas avec la partie
gouvernementale, M. le ministre, pour environ 16 min 30 s.
M. Julien : Oui, merci.
Merci, M. le Président. Merci beaucoup, messieurs, pour votre participation
aujourd'hui, puis pour vos commentaires, et les documents que vous nous avez
transmis.
Écoutez, on est dans la deuxième journée,
là, des consultations, et j'ai toujours l'impression que le meilleur endroit
est toujours un peu dans la nuance. Et on a entendu des personnes qui sont
venues se présenter... parce que j'entends quand même vos commentaires, là.
Premièrement, je pense que ce n'est pas un premier pas qu'on fait, mais c'est
un pas important. Je pense qu'on fait plusieurs autres pas, là, actuellement au
Québec, peut-être qu'ils sont insuffisants, mais on a cette préoccupation-là.
Je pense que c'est un pas important, mais, quand on dit : de mettre fin à
l'exploration et l'exploitation des hydrocarbures par un geste légal comme
celui-là, moi, pour moi, c'est quand même un geste majeur. Vous disiez :
Ça, c'est un strict minimum. Quel autre État a fait ça?
M. Boisseau-Bouvier (Émile) :
En fait, pour répondre à votre question, ce serait une première mondiale,
donc, mais c'est un strict minimum au sens de la science climatique. Et puis,
quand on parle de premiers pas, effectivement, vous l'avez dit, il y a d'autres
actions gouvernementales en termes de réduction de nos gaz à effet de serre.
Par contre, il faut admettre que, pour l'instant, ils sont largement insuffisants.
On a 2,7 % de réduction de gaz à effet de serre depuis 1990. On sait que
notre cible est de 37,5 %, d'ici 2030, et, selon nous aussi, il faudrait
la rehausser si on veut faire notre juste part, dans l'effort climatique, pour
limiter le réchauffement climatique à 1,5°C.
Donc, quand on parle de strict minimum, c'est
un strict minimum au sens de la science, qui est... c'est un strict minimum qui
devra être suivi par toutes les autres juridictions. Et donc c'est pour ça que
c'est très important que le gouvernement du Québec trace la bonne voie et n'empêche
pas d'autres de nous suivre dans cette bonne direction là.
M. Julien : Parfait. Donc,
pour bien, bien comprendre, je comprends mieux la notion de strict minimum que
vous employez, parce que, sinon, il n'y aurait personne qui aurait fait le
moindre... le strict minimum, actuellement, dans ce qui doit être fait. Je
pense, encore une fois, que ce n'est pas le cas, mais je pense que c'est un
geste qui est probant. Et j'ai bien aimé, là, justement, l'intervention, juste
avant vous, de Mme Annie Chaloux, qui mentionnait clairement que, dans le
préambule... puis je pense que Richard Ouellet aussi l'a mentionné hier, les
professeurs, a dit, dans le préambule, il faut peut-être démontrer plus de
fierté et être plus explicatif sur ce geste concret qu'on pose, justement, pour
que celui… excusez-moi, là, fasse tache d'huile, fasse tache de je ne sais pas
quoi, de spaghetti, on va dire, plutôt que l'huile, pour la suite des choses.
Alors, ceci étant, comme je dis, j'aime
beaucoup la nuance. Puis, tu sais, à la fin, il y a des groupes qui sont aux
extrêmes, en réalité, puis je ne dis pas que vous êtes des groupes extrêmes,
mais qui sont aux extrêmes du pôle de discussion sur ce qu'on discute aujourd'hui.
Et, quand on dit : Il ne faut pas donner de cadeau, alors je réitère, là,
tu sais, nous autres, le principe d'indemnisation… Puis on essaie de trouver l'équilibre,
dans le projet de loi, pour aussi que ce projet de loi soit à la fois crédible
et également pour qu'il puisse amener des réflexions dans d'autres États sur, justement,
les engagements.
Je le réitérais tantôt, avec Mme Chaloux,
oui, c'est vrai que, les entreprises, peut-être certaines, on peut prétendre qu'ils
voient bien que les hydrocarbures, ce n'est pas la voie de l'avenir, là. On
comprend ça. Puis probablement qu'ils voient également qu'il y a un risque lié
à s'embarquer dans ces projets-là. D'un autre côté, je réitère la
responsabilité, comme État avec un processus légal... on a des lois, on a des
règlements qui n'ont, somme toute, certainement pas découragé les gens d'y
aller puisque c'était permis. Donc, c'est pour cette responsabilité un peu qu'on
doit indemniser.
Puis, quand on parle de cadeau, là, c'est :
on va rembourser certains éléments qui ont été payés pour être conformes. On
parle des licences, des frais d'exploitation qui ont été nécessaires pour
démontrer la conformité aux exigences que l'État a mises en place. Donc, on n'est
pas du tout sur des gains potentiels, sur des taux de rendement, puis on n'est
pas là du tout, là, alors. Et, pour terminer, là, ma question, c'est... Mme
Chaloux, je ne voudrais pas qu'elle soit mise à l'index, là, mais elle est <membre...
M. Julien :
Mme
Chaloux, je ne voudrais pas qu'elle soit mise à l'index, là, mais elle est >membre
du C.A. d'Équiterre, puis elle, elle trouve que ça fait bien du sens, mais elle
amène la nuance, là. Elle n'est pas : Non, non, il faut vraiment indemniser. Il
faut indemniser le moins possible, selon certains critères bien établis, parce
qu'effectivement il y a une responsabilité de l'État par rapport à ce qui a été
permis. Donc, vous semblez être très, très affirmatifs, sans nuance, vous, de
votre côté. Pourquoi?
M. Viau (Marc-André) : Il y a
beaucoup de... il y a des profils qui sont très diversifiés sur le C.A. d'Équiterre.
Donc, vous allez retrouver plusieurs opinions. Je pense qu'on a apporté
beaucoup de nuances dans notre présentation et dans notre mémoire également. On
trace une ligne sur la question des compensations. Et on s'entend que ces
compensations-là sont... à tout le moins, il y a certaines balises qui sont
identifiées, là, dans les articles, là... à partir de l'article... je ne me
rappelle plus exactement quel article, là, mais oui... à partir de l'article 32,
pardon. Il va quand même y avoir un projet de règlement qui va définir un
programme ou un programme qui va être… qui va s'accompagner de ça, le programme…
c'est juste parce que ça dit que ça allait être défini par voie réglementaire.
Donc, il va y avoir un programme. Les
détails de ce programme-là vont être importants pour voir, justement, quelle
sera les compensations qui seront accordées. Il y a l'article 36, là, qui
prévoit que le programme peut prévoir des versements d'un montant forfaitaire à
titre d'indemnité pour certains frais. Donc, il y a des précisions à obtenir
dans ce programme-là.
• (16 h 10) •
Il reste que notre position d'organisation,
c'est que ces compagnies... l'industrie pétrolière est une industrie qui a...
qui est la principale responsable de la crise climatique dans laquelle on se
trouve. De fermer cette... les possibilités d'exploitation et d'exploration,
vous l'avez dit tantôt, vous en avez parlé tantôt, c'est un strict minimum. Et
donc il n'y a pas nécessairement besoin d'avoir... même pour fermer ces
choses-là, pas nécessairement besoin, dans notre perspective, des
compensations, parce que, justement, à cause des incidences de cette
industrie-là sur la crise climatique.
M. Julien : Soyez assuré, M.
Viau, qu'ici l'addition qu'on a, là, c'est... Je veux juste comprendre bien les
motifs, là. Je ne porte pas de jugement, bien au contraire, là, puis je ne suis
pas étonné de la position de votre groupe, là, par rapport à ce que vous
prônez, là, alors... Mais j'essaie juste de cheminer avec vous. Bon, c'est un
strict minimum, ça, on l'a mentionné tantôt, vous dites : C'est un strict
minimum, on est les premiers à le faire. Donc, on pave, actuellement, là, on
ouvre le chemin, puis on est les premiers à le faire, puis c'est un strict
minimum.
Et le fait qu'on le fasse, moi, je réitère
qu'actuellement on a une part de responsabilité. Puis tous les États ont une
part de responsabilité, puis puisque personne ne le fait actuellement… c'est-à-dire
que, puisqu'on a laissé faire, on a permis, on a encadré, et ces gens-là ont
respecté l'encadrement qu'on a mis. Tu sais, je trouve ça un peu particulier qu'il
n'y ait pas de reconnaissance de nos responsabilités, dans ce qui a été permis
et, en plus, qu'on est les premiers à cesser de le permettre. Donc, somme
toute, moi, je pense que c'est courageux.
Encore là, les indemnités, ce que j'entends,
c'est... Est-ce que vous dites : À tout le moins, les indemnités, le
programme d'indemnisation devrait être très précis pour être certain, là, des
volets qu'on indemnise? Parce que vous avez parlé d'un article qui amène un peu
de flou, mais, si c'était hyperprécis puis que les intentions du programme d'indemnisation
étaient claires sur certains frais, comme des licences, comme d'autres objets
qui ont été payés pour se rendre conforme à une loi, qui était sous notre
responsabilité, est-ce que, malgré ça, vous seriez fermés à l'idée des
indemnisations?
M. Viau (Marc-André) : Comme
je l'ai dit, notre position, on trace la ligne à pas d'indemnisation, parce
que, comme je l'ai dit en allocution, il y aura toujours une bonne raison d'avoir
des indemnités, et l'industrie va toujours demander certaines indemnisations,
puis ils vont gratter à gauche, à droite et ils vont aller chercher des
indemnisations ou, à tout le moins, ils vont le demander. Donc, à un moment
donné, il faut tracer la ligne. Nous, on la trace là. Vous la tracez ailleurs,
dans ce projet de loi là, avec un programme d'indemnités. <Au final...
M. Viau (Marc-André) :
...trace
là. Vous la tracez ailleurs, dans ce projet de loi là, avec un programme
d'indemnités. >Au final, je suis pas mal certain que tout le monde va
finir par applaudir ce projet de loi là en disant : Bien, on l'a fait. Et
il y aura peut-être certains éléments que nous trouverons imparfaits, d'autres
trouveront imparfaits, mais on sera... on aura avancé dans ce dossier-là.
M. Julien : Permettez,
M. Viau...
M. Viau (Marc-André) : Nous,
c'est là qu'on met la ligne.
M. Julien : Parfait.
Alors, si vous permettez, M. Viau, rien que pour être certain, parce que
vous avez ramené un thème qui m'a aussi interpelé quand vous l'avez mentionné,
vous l'avez rappelé maintenant, toutes les industries vont venir faire des
demandes d'indemnisation, puis on ne sait pas où est-ce que ça va terminer, puis
etc. Mais moi, si ça termine, en réalité, qu'on indemnise, au Québec, quand on
enlève un droit sur les frais qui ont été payés pour être conforme à ce
droit-là, n'importe quelle industrie, moi, je vais être prêt à la compenser, à
tous égards, parce qu'on vient fixer d'une manière claire qu'on a permis... Nous-mêmes,
on était responsables de donner un droit, ces gens-là s'y sont conformés, et on
rembourse, en fin de compte, les frais qui ont nécessité une conformité à notre
responsabilité. Donc, je vois difficilement, dans n'importe quelle industrie,
quelle dérive qu'il pourrait y avoir dans un geste qui pourrait être similaire,
à tous égards, pour d'autres industries. On a exigé des paiements, des licences
et des frais pour être conforme.
Alors, j'entends que vous dites… mais ça
pourrait… Non, je ne le vois pas. Alors, expliquez-moi comment ça pourrait
faire en sorte que, soudainement, les industries demandent n'importe quoi, puisqu'on
le met uniquement sur des éléments pour le maintien… qui étaient nécessaires pour
le maintien d'une conformité, qu'on a nous-mêmes, comme État, exigés.
M. Viau (Marc-André) : Il
y a… je pense que… je veux dire, la CQDE en a parlé hier, il n'y a rien qui
empêche une compagnie... ce n'est pas parce qu'on fait des indemnités qu'une
compagnie ne peut pas, après ça, décider de dire… puis de venir faire des
poursuites. Donc, il n'y a rien qui garantit quoi que ce soit en procédant de
cette façon-là.
Donc, à ce titre-là, je veux bien croire
qu'on a donné une conformité, mais on a donné une conformité à une industrie, à
des compagnies qui travaillent dans une industrie qui est dommageable pour l'environnement,
qui est dommageable pour la santé. C'est tellement dommageable pour l'environnement
et dommageable pour la santé que les investisseurs enlèvent leurs
investissements de ces portefeuilles-là. C'est tellement dommageable pour la santé
et l'environnement qu'on rejette des projets comme GNL. C'est tellement
dommageable pour l'environnement et la santé qu'on décide de mettre fin, par
exemple, à la vente de véhicules à essence. Donc, on le sait qu'on ne doit plus
le faire, et on est plus loin que là où on aurait dû arrêter, normalement,
parce qu'on est dans un état de crise et on n'aurait pas dû se rendre à cet
état de crise là. Donc, on essaie de se rattraper, là.
M. Julien : Vous avez
parfaitement raison, M. Viau, mais je persiste quand même à dire qu'on est
quand même les premiers. Ça doit vouloir dire quelque chose, et je pense qu'on
doit le mentionner. Justement, vous m'amenez sur une autre piste, le projet de loi…
puis je pense qu'on n'a pas encore parlé de cet élément-là, mais c'est la fin
du financement, par le gouvernement du Québec, dans les hydrocarbures, là. Il
est prévu à l'intérieur du projet de loi. C'est une bonne mesure pour vous? C'est
adéquat?
M. Viau (Marc-André) : Est-ce
que c'est la fin du... Bien, je veux dire, on ouvre la porte à la question du…
de ce qui va se passer aussi du côté de la biénergie. Est-ce que les
compensations offertes à Énergir peuvent être considérées comme du financement
aux hydrocarbures?
M. Julien : C'est un distributeur
d'énergie, ce n'est pas un exploitant, là.
M. Viau (Marc-André) : Oui,
mais... pas dans l'exploitation, mais c'est…
M. Julien : Tu sais, encore
50 %... plus de 50 % de l'énergie au Québec, c'est fossile, là, quand
même. Il faut...
M. Viau (Marc-André) : …
ça reste de l'énergie fossile. Donc, on compense pour de la perte de revenus d'une
industrie qui fait de la distribution, d'une entreprise qui fait de la
distribution de fossile. Donc, il y a des nuances, là, je dirais qu'il y a des
nuances à apporter, mais oui, vous avez un point sur la question de l'exploitation
et de l'exploration.
M. Julien : Parfait.
Maintenant, une fois qu'on a discuté de l'indemnisation, c'est un bon projet de
loi qu'on a devant nous?
M. Viau (Marc-André) : C'est
un bon projet de loi, s'il est combiné avec d'autres actions environnementales
fortes. Ce n'est pas un projet de loi qui réduit les émissions de gaz à effet
de serre. Donc, oui, c'est un bon projet de loi. Comme on dit, c'est un projet
de loi qui, à notre avis, pourrait être perfectible, mais c'est un bon projet
de loi. C'est un projet de loi qui doit passer, et, comme je l'ai dit <tantôt…
M. Viau (Marc-André) :
...c'est
un bon projet de loi. C'est un projet de loi qui doit passer, et, comme je l'ai
dit >tantôt, je pense que ça va être un projet de loi qui va être
applaudi par tout le monde, vos collègues de l'Assemblée nationale et également
l'ensemble des intervenants qui sont venus, peut-être pas l'association
pétrolière, mais ça, c'est évidemment...
M. Julien : Est-ce qu'il
va être salué par vous, même si les indemnisations demeurent de manière très
stricte, avec un plan… une planification, un programme d'indemnisation très
clair sur les éléments que j'ai mentionnés?
M. Viau (Marc-André) : Vous
avez parlé de nuances, tantôt. On va sûrement faire une réaction nuancée, mais...
c'est ça.
M. Julien : Parfait. Je
vais laisser mes collègues poser d'autres questions.
Le Président (M. Lemay) : M.
le député de Lac-Saint-Jean, allez-y, il reste environ un peu moins que deux minutes.
M. Girard (Lac-Saint-Jean) :
Bonjour à vous. On a eu la chance de vous voir lors du mandat d'initiative sur
les pesticides. Je ne sais pas si c'était vous qui étaient là, à ce moment-là,
mais ce fut fort intéressant. Juste... je veux quand même aller rapidement puis
je veux revenir un peu, justement, au niveau des indemnisations, parce que c'est
fort intéressant, ces discussions-là.
Puis on a eu aussi M. Ouellet qui a
passé ici, et il avait beaucoup d'arguments concernant toute la question au
niveau, là, des droits des investissements, les règles internationales et aussi
où est-ce que le Québec se situe au niveau mondial, parce qu'on est regardés,
en ce moment, à ce niveau-là, avec ce projet de loi là. On est des leaders
aussi, toute la question de la transition énergétique, parce qu'on est en train
de développer les énergies renouvelables. On avance rapidement là-dedans, on a
tout l'éolien, le solaire. Et on a besoin aussi... bien entendu qu'il y a des
projets que je ne vous énumérerai pas, mais que ça prend des capitaux aussi
étrangers pour venir investir pour aller plus rapidement dans ce domaine-là.
• (16 h 20) •
Et vous ne croyez pas que, sans avoir
dans... parce que le projet de loi, qui est bien équilibré, avec un plan d'indemnisation,
en n'ayant pas ça, vous ne croyez pas que ça envoie un message négatif aux
investisseurs étrangers? Et que, s'il n'y aurait pas ces programmes-là, bien,
vous savez ce qui va arriver, on nous l'a mentionné, les contestations
juridiques. Donc, je voudrais... au niveau du message que ça envoie au niveau
mondial.
M. Boisseau-Bouvier (Émile) :
Oui. Merci pour votre question, M. le député. Je pense que les
investisseurs étrangers sont amplement capables de faire la distinction entre
le secteur fossile, qui est une énergie du passé, et le secteur renouvelable,
qui est une énergie du futur, où, comme vous l'avez très bien souligné, le
Québec est un leader.
Donc, les investissements... les
investisseurs étrangers, qui vont vouloir revenir investir en énergies
renouvelables au Québec, sont capables de voir que le contexte est complètement
différent. On n'a pas de moratoire, depuis une décennie, sur l'exploitation des
énergies renouvelables. En fait, on est un leader, on en exporte, de l'énergie
renouvelable. On a des centres de recherche qui ont des renommées
internationales et on a...
Le Président (M. Lemay) : M. Boisseau-Bouvier,
je dois vous interrompre parce que le temps est écoulé. On va passer au député
de Mont-Royal—Outremont pour environ 11 minutes.
M. Arcand : Merci
infiniment. Bonjour, messieurs, bienvenue à cette rencontre. Là, je voyais, là,
que le ministre est en mal d'amour actuellement, là. Il a besoin de se faire
dire, par les gens d'Équiterre, que son projet de loi est fantastique. Alors...
M. Julien : ...
M. Arcand : ...bien, ils
ont mis beaucoup de nuance, mais, en tout cas, c'est clair que ça s'en allait
dans cette direction-là. Il y a une chose, cependant, qui est très bonne, c'est
qu'évidemment nous sommes quatre formations politiques à l'Assemblée nationale,
qui sommes ici, on a tous voté en faveur du principe, bien sûr, de ce projet de
loi là. Là, évidemment, l'échiquier politique risque de changer, au Québec,
dans les prochains mois. Il y a un nouveau parti politique qui a été lancé,
qui, lui, en tout cas, est en faveur des hydrocarbures, d'après ce que j'ai
entendu de la part de son chef, là. C'est le Parti conservateur, où M. Duhaime
a déjà dit qu'il fallait faire des hydrocarbures au Québec.
Ma question est bien simple. Comment vous
expliquez le fait que, si vous faites un sondage, demain matin, puis que vous
êtes dites : Écoutez, êtes-vous en faveur de maintenir ça, êtes-vous en
faveur de la loi, probablement qu'il y a 80 % du monde qui vont dire qu'ils
sont passablement en faveur de la loi? Puis malheureusement, sur le plan
énergétique, en particulier sur le plan des ventes d'automobiles, de quatre par
quatre, le Québec est un des plus mauvais à ce niveau-là. Comment vous
expliquez cette espèce de dichotomie qui arrive actuellement?
M. Boisseau-Bouvier (Émile) :
Oui. Merci beaucoup pour votre question. Je peux même vous donner un scoop,
il y aura un sondage de cette nature qui sortira demain matin. Donc, votre
question est très d'adon.
Comment est-ce qu'on peut expliquer cette
différence-là? <Bien…
M. Boisseau-Bouvier (Émile) :
...votre
question est très d'adon.
Comment est-ce qu'on peut expliquer
cette différence-là? >Bien, il y a plusieurs facteurs. Les gens aiment
leur confort, les gens n'ont… aiment leurs habitudes aussi. Les gens n'aiment
pas se faire dire ce qu'ils doivent faire. Par contre, il y a une réalité qui
est inchangeable, il y a une réalité climatique dont on a parlé en profondeur
plus récemment. Et puis le Québec a toutes les cartes dans ses mains pour
vraiment être un leader et accélérer cette transition énergétique là.
En ce moment, vous l'avez bien dit, on ne
produit pas des produits pétroliers. C'est une occasion en or, pour nous, de se
sortir de notre dépendance aux produits pétroliers. Pour ça, comme on l'a dit, on
veut travailler avec le gouvernement, on veut travailler avec les oppositions
aussi. Ça nous fera plaisir de discuter avec vous de toutes les options qui
sont dans notre coffre à outils pour réduire notre dépendance aux
hydrocarbures. Merci beaucoup.
M.
Arcand
:
Est-ce que…
M. Bonhomme (Charles) : Si je
pouvais compléter...
M. Arcand : Est-ce qu'il y a
un domaine, actuellement, que vous privilégiez, par exemple, pour lutter contre
les GES? Est-ce qu'il y a vraiment quelque chose qui vous apparaît plus
évident, pour le Québec, que d'autres? Tu sais, par exemple, on disait, tout à
l'heure, que... Le Pr Pineau, lui, le solaire, ce n'est pas trop sa tasse de
thé. Actuellement, les gens voient d'autres choses. Est-ce que... Chez vous,
est-ce qu'il y a des pistes de solution, pour réduire les gaz à effet de serre,
que vous voyez?
M. Bonhomme (Charles) : Oui,
bien, merci, M. le député, pour votre question. C'est effectivement une
excellente question car il y a plein de chantiers importants, hein, pour
atteindre nos cibles climatiques. Tout d'abord, s'attaquer au secteur des
transports, comme on le sait, qui représente 44 % des GES, le secteur de l'énergie...
Donc, avec ce projet de loi là, ce serait justement un pas incroyable dans la
bonne direction.
J'aimerais revenir aussi sur l'importance,
je crois, de proposer des projets de loi où on créerait une acceptabilité
sociale auprès des Québécois. Et ce projet de loi là, comme vous le disiez
tantôt, a été accueilli par les quatre partis politiques, et c'est un élément
clé. Lorsqu'on a rédigé notre mémoire, on parle de... que le gouvernement
saisisse cette opportunité-là, justement, pour prouver aux Québécoises et
Québécois qu'il compte sérieusement atteindre ses cibles et que ce projet de
loi là est un outil pour y arriver. Donc, je salue, tout d'abord, le projet de
loi dans ce sens-là.
Lorsqu'on parle de secteur de transport,
Équiterre et la Fondation David-Suzuki, on travaille justement sur des rapports
sur les véhicules zéro émission. On propose d'ailleurs de diminuer notre
dépendance à l'auto solo, de revoir nos modes de vie et de la façon qu'on se
transporte, mais également de la façon qu'on consomme. Donc, elle se veut face
au transport, face à l'énergie, mais face aussi à la responsabilité de chacun.
Donc, nos organisations sont de grandes organisations qui cherchent également à
sensibiliser les gens à ces efforts-là et de travailler avec le gouvernement
pour que leurs projets soient acceptés socialement. Donc, voilà.
M. Arcand : Très bien. Je
vais vous poser une question qui touche, entre autres, les communautés
autochtones, parce que vous en avez parlé dans votre mémoire. Et je voudrais
que vous nous expliquiez un peu ce que vous voulez dire, particulièrement au
fait qu'hier on a entendu, évidemment, le fait qu'une compagnie qui s'appelle
Questerre essaie d'avoir… ou a une entente avec des communautés autochtones d'Abénaquis,
qui... pour un projet possible. Alors là, on s'embarque dans une situation qui
est quand même assez délicate, quand on touche les communautés autochtones, et
la possibilité qu'elles pourraient décider en disant : Écoutez, c'est sur
notre... dans notre secteur, et donc vous n'avez pas un mot à dire, et ainsi de
suite, là.
J'essaie juste de voir comment vous voyez
ces relations-là en particulier, parce qu'il n'est pas exclu que d'autres
communautés fassent la chose… la même chose, même si l'ensemble des communautés
autochtones, en général, est d'accord, évidemment, avec le fait qu'il ne doit
plus y avoir d'hydrocarbures au Québec. Mais juste nous expliquer un peu votre
point de vue à ce niveau-là.
M. Bonhomme (Charles) : Oui,
merci. Je pense que c'est une excellente question puis c'est un point important
de notre mémoire, hein? Pour répondre précisément à votre question, par rapport
au projet pilote qui se passe, là, à Wôlinak… puis il y a clairement des
personnes, là, au sein de cette communauté-là, qui sont en accord avec le
projet, alors que d'autres, non. Donc, ça prouve que notre recommandation,
justement, de les contacter puis de s'asseoir avec eux afin d'obtenir leurs
recommandations, leurs revendications, leurs soucis... Donc, d'où l'importance
de s'asseoir avec eux puis de voir, bien, justement, à quel point il y a une
acceptabilité sociale. Est-ce que c'est une partie infime de cette communauté-là
qui est d'accord, <alors…
M. Bonhomme (Charles) :
Est-ce que c'est une partie infime de cette communauté-là qui est d'accord,
>alors qu'il y a, justement, une plus grande partie de la communauté qui
n'est pas d'accord? Donc, je pense que ça vaudrait la peine, justement, de les
inviter à ces consultations-là, de s'asseoir avec eux pour avoir leurs
revendications.
Nous, pour Équiterre et la Fondation David-Suzuki,
on utilise, dans le fond, cette plateforme-là pour vraiment mettre le doigt sur
l'importance de collaborer avec eux puis d'augmenter la collaboration entre le
gouvernement et les peuples autochtones pour un projet de loi comme celui-ci
sur une industrie qui touche à leur culture et à leur subsistance. Donc, je
crois également qu'il y a un manque de collaboration entre les communautés
autochtones et le gouvernement pour plusieurs projets de loi, mais, pour
celui-ci, c'est d'autant plus important que l'industrie pétrolière et gazière a
eu des impacts énormes sur leur mode de vie, leur culture et leur subsistance.
Alors, je crois que c'est important, là, vraiment, de les inviter puis d'avoir
une bonne conversation avec eux pour avoir, justement, leurs revendications et
leurs recommandations précises.
M. Arcand : D'accord. On a
parlé des remboursements, du fait que vous disiez : Écoutez, il ne faut
pas rembourser personne. Évidemment, on a eu plusieurs personnes qui sont
intervenues. Il y en a qui ont cette position-là, il y en a d'autres qui nous
disent : Écoutez... Il y a eu, hier, un professeur, qui est un avocat, qui
fait du commerce international, qui dit : Écoutez, on ne peut ne pas
compenser, en tout cas, en partie. Il est clair que, si on rembourse zéro, un
des arguments, c'était de dire : Les détenteurs de permis n'ont aucune
raison de ne pas, maintenant, poursuivre le gouvernement, si la décision était
de ne rembourser rien.
• (16 h 30) •
Alors, ma question, c'est... Il y a
clairement un risque que cette transition s'avère encore plus incertaine et
dispendieuse encore. Est-ce que, vous, vous êtes prêts? Vous maintenez cette
position-là en disant : Bon, bien, moi, je pense qu'il est nécessaire de
gérer ce risque-là, de... on est prêts à vivre avec le risque.
M. Viau (Marc-André) : Oui,
je pense que... et comme le… j'y ai fait référence un peu plus tôt, mais le
CQDE l'a exprimé hier, ce n'est pas parce qu'on compense qu'on se met à l'abri
d'éventuelles poursuites. Et le résultat de ces poursuites, dans huit, 10 ans,
12 ans, si poursuites il y a, sont très incertaines étant donné l'évolution de
la crise climatique et l'évolution des perceptions par rapport à l'industrie
fossile. Donc, c'est pour ça que nous, on trace la ligne à pas d'indemnisation,
parce qu'à un moment donné il faut la tracer, la ligne. Et, encore là, on fait…
on parle du précédent juridictionnel, du fait que le Québec est la première
juridiction à le faire. Si nous le faisons, faisons-le bien et soyons
ambitieux, soyons fiers de ce projet de loi.
M. Bonhomme (Charles) : Si je
pouvais compléter, il faut se le dire aussi, là, c'est une industrie
particulière, hein? Ça fait des années qu'ils sont conscients des torts qu'ils
causent aux communautés, aux écosystèmes. Donc, pour eux, ils savaient tout ça,
là. Donc, on croit également aussi que l'industrie pétrolière a les sous pour
se sortir de son propre trou. Alors, il faut se le dire, c'est une industrie
qui a coûté cher à la population en argent, mais moralement aussi. Donc, je
crois qu'il faut, oui, la comparer aux industries, c'est correct, mais il faut vraiment
la mettre au bas du mur puis leur dire : Bien, écoutez, votre industrie,
elle a causé des torts que d'autres industries n'ont pas causés. Donc, vous
êtes responsables de la crise climatique en grande partie, donc payez en grande
partie.
M. Arcand : Moi, j'avais une
question simple pour vous. Étant donné qu'il y a eu quand même, au fil des
dernières années... Vous avez parlé de l'importance pour vous, vous avez dit :
Le Québec doit avoir une influence dans le monde. Ce n'est peut-être pas en Russie
ou en Chine que vous auriez une influence. Expliquez-moi à quel endroit vous
pensez avoir une influence.
Le Président (M. Lemay) : ...s'il
vous plaît.
M. Boisseau-Bouvier (Émile) : Oui,
donc, il y a plusieurs forums où c'est possible, pour le Québec, d'avoir une
influence. Entre autres, on a parlé de la Beyond Oil and Gas Alliance. On va
avoir des alliés au sein de cette coalition-là qui vont vouloir apprendre de
notre cheminement. Il y a aussi des forums internationaux, comme les conférences
des parties, les COP, qui existent à chaque année. Et puis, comme on l'a dit,
peut-être que ce ne sera pas la Russie, peut-être que ce ne sera pas la Chine
qui va devoir bouger... qui va bouger en premier, mais tout le monde va devoir
bouger. Si on veut globalement, si on veut mondialement limiter le
réchauffement climatique à 1,5 °C, il va falloir que toutes les autres
juridictions suivent la voie du Québec, et c'est pour ça que c'est d'autant
plus important qu'on trace la bonne voie.
Le Président (M. Lemay) : Merci.
Merci, M. Boisseau-Bouvier. Et nous allons maintenant céder la parole à Mme la
députée Sainte-Marie—Saint-Jacques pour environ 2 min 45 s.
Mme Massé : On va continuer
dans le même sens, monsieur de la fondation Suzuki. Le ministre est très, très,
très préoccupé que l'État du Québec soit… reconnaisse sa responsabilité dans… avec
son projet <d'indemnisation, et tout ça. Nous traçons…
>
16 h 30 (version révisée)
<15421
Mme
Massé :
...la responsabilité avec son projet >d'indemnisation,
et tout ça. Nous traçons la même ligne... la ligne à la même place que vous. Il
ne devrait pas y en avoir. Ceci étant dit, l'industrie, et vous venez de le
nommer, ignore, elle, ferme les yeux sur leurs responsabilités depuis plus de
25 ans.
Alors, est-ce que vous êtes au courant s'il
y a des recours juridiques, à travers la planète, contre des pétrolières et des
gazières, pour réclamer, justement, des dommages climatiques qu'elles ont causés
à l'humanité depuis des décennies?
M. Boisseau-Bouvier (Émile) : Oui.
Bien, un exemple qui pourrait être intéressant pour celui du Québec, c'est la
France qui a mis fin à la fracturation hydraulique, et puis il y a eu des
compensations mais des compensations qui ont été minimes. En fait, il y a une
seule société qui a reçu des compensations, une société texane qui demandait
117 millions d'euros à la France et qui, finalement, a reçu 1 million
d'euros. Et donc ça pourrait être un exemple du genre de compensation que les
compagnies québécoises pourraient recevoir, si jamais on décidait d'aller de l'avant
avec cette avenue que nous ne privilégions pas.
Mme Massé : O.K. Mais, de l'autre
côté, est-ce qu'il y a des États, des citoyens qui ont porté des accusations
contre les pétrolières et gazières pour les impacts, les dommages climatiques
qu'elles ont causés à travers les années, à votre connaissance? Je vois que...
M. Bonhomme (Charles) : C'est
une excellente question. Par contre, on devrait retourner étudier ça. Je n'ai
pas la réponse pour vous en ce moment.
Mme Massé : C'est parfait. Je
profitais de votre présence, peut-être juste une autre question, il nous reste
quelques secondes. Vous avez la conviction que l'État québécois est souverain
et légitime de dire aux pétrolières et aux gazières : Non, vous allez
arrêter d'exploiter, d'explorer, et non, vous n'aurez plus d'argent de notre
part? Vous pensez qu'on a cette légitimité-là, comme État souverain? Bien, pas
encore, mais...
M. Boisseau-Bouvier (Émile) : Tout
à fait. Oui, on pense que le Québec a la légitimité de dire non aux industries
pétrolières, aux industries gazières et de ne pas aller de l'avant avec des
compensations, mais de mettre fin à leurs activités.
Le Président (M. Lemay) : Merci.
Donc, nous allons maintenant passer au troisième groupe d'opposition. M. le
député de Jonquière.
M. Gaudreault : Oui. Je ne
suis pas toujours d'accord avec QS, mais, sur la souveraineté, évidemment, je
suis d'accord. Et merci d'être là.
Moi, je voudrais savoir... On entend quand
même ici, à plusieurs reprises, par rapport aux indemnisations... Puis nous
sommes contre les indemnisations, mais il faut calculer, dans le fond, le
risque d'avoir des poursuites ou de ne pas avoir de poursuite. On a posé un peu
la question hier à M. Beaulieu... pas Beaulieu, mais M. Ouellet. Donc, est-ce
que, pour vous, ça doit peser dans la balance ou, de toute façon, les
entreprises, qu'il y ait une indemnisation minimale ou qu'il n'y ait pas d'indemnisation,
vont se revirer de bord puis vont poursuivre le Québec ou le gouvernement?
Donc, est-ce qu'on doit tenir compte de ces avantages puis ces inconvénients
dans la balance, là?
M. Viau (Marc-André) : Bien,
je pense qu'il faut surtout... puis c'est notre position, je pense qu'il faut
surtout, à un moment donné, juste prendre une décision puis dire : C'est
là qu'on trace la ligne. Donc, oui, on pourrait toujours dire : Bien, on a
moins de risques, si on met tant, puis, si on en met plus, on a encore moins de
risques, puis on a moins, tu sais... Puis on peut aussi dire qu'on a les outils
législatifs pour dire : Non, c'est ça, le cadre, puis c'est fini comme ça.
Puis il y a des exemples, dans d'autres industries, l'industrie de l'uranium, l'industrie
de l'amiante, vous en avez parlé hier avec d'autres intervenants, où c'est
possible de le faire. C'est ça.
M. Gaudreault : Merci. Donc,
au fond, c'est un choix politique et c'est un choix politique de s'assumer à
cet égard. Je pense que c'est votre recommandation 6 qui suggérait que le
Québec s'implique davantage dans BOGA. Comment on pourrait s'impliquer
davantage dans BOGA, comme État subnational, là — j'aimerais bien
aussi qu'on soit souverains, mais... — comme État subnational, avec
les autres membres de BOGA? Qu'est-ce qu'on peut faire de plus pour être encore
plus actifs dans BOGA, selon vous?
M. Boisseau-Bouvier (Émile) : Oui,
bien, il y a des pressions politiques qui peuvent être faites, il y a du
partage de connaissances qui peut être fait aussi. Le Québec a déjà beaucoup de
liens internationaux, donc, pas nécessairement juste dans la fin de l'exploration
et l'exploitation des hydrocarbures. C'est un travail qui se fait déjà, pour le
<Québec...
M. Boisseau-Bouvier (Émile) :
... l'exploitation des hydrocarbures. C'est un travail qui se fait déjà, pour
le >Québec, sur d'autres plans, et puis on va pouvoir le faire au sein
de la BOGA. C'est partager nos expériences, voir comment ça s'est passé, quels
recours juridiques il y a eu au Québec ou il n'y a pas eu au Québec et puis
expliquer aux autres juridictions qu'elles doivent nous suivre si on veut
globalement limiter le réchauffement climatique à 1,5 degré Celsius.
M. Gaudreault : Donc, c'est
bon. Merci. Merci beaucoup.
Le Président (M. Lemay) : Alors,
merci, M. le député de Jonquière. Ceci termine cette période d'échange avec les
membres de la commission. Je vous remercie à tous pour votre contribution aux
travaux de la commission.
Et je vais suspendre quelques instants
pour permettre au prochain groupe de prendre place. Merci.
(Suspension de la séance à 16 h 40)
>
(Reprise à 16 h 50)
Le Président (M. Lemay) :
Alors, la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des
ressources naturelles reprend ses travaux.
Et je souhaite maintenant la bienvenue à Mme
Pétrin d'Eau Secours! Alors, bienvenue à ces travaux. Alors, vous allez avoir
un exposé d'environ 10 minutes, suivi d'une période d'échange avec les
membres de la commission. Et je vous cède la parole de ce pas.
Eau Secours!
Mme Pétrin (Rébecca) : Merci
beaucoup. Donc, bonsoir à tous. Une petite présentation de notre organisme Eau
Secours! Donc, ça a été fondé en 1997. Eau Secours! a pour mission de
promouvoir la protection et la gestion responsable de l'eau dans une
perspective de santé environnementale, d'équité, d'accessibilité et de défense
collective des droits de la population. Nous nous opposons à toute forme de
commercialisation, privatisation, gaspillage et appropriation à des fins
privées, pour en assurer le caractère collectif. Nous luttons également pour en
protéger sa qualité contre diverses sources de contamination qui sont encore
nombreuses aujourd'hui, malheureusement.
Au cours des 10 dernières années,
nous avons participé activement, et étudié, et dénoncé tous les risques liés à
l'eau potable en lien avec les projets d'énergies fossiles. Avec nos membres,
nous avons dit non au gaz de schiste, nous avons dit non au projet d'Énergie Est,
nous avons dit non à GNL Québec, tout en participant aux différentes audiences
publiques de 2010, 2014, 2016 sur ce sujet. Nous avons mis en garde le
gouvernement du Québec en 2016, lors du projet de loi n° 606,
qu'à chaque projet de forage s'ajoutent des conséquences qui seront irréversibles
sur la qualité de nos eaux du Québec.
Mais, malgré tout ça, c'est avec une
fébrilité et une satisfaction débordantes que je présente aujourd'hui notre
mémoire et nos recommandations sur le projet de loi n° 21 pour la
fermeture de cette filière qui n'aurait jamais dû être ouverte. Merci à la
commission de nous recevoir.
Donc, la première partie de notre mémoire
parle un peu de l'état des puits au Québec. Vous pouvez voir dans le tableau,
en fait, qui est présenté, qui... en fait, ce sont des données qui sont tirées
de SIGPEG qui est la base de données du ministère de l'Énergie et des
Ressources naturelles. Il y a 132 puits sur 961 qui ne sont pas fermés
définitivement. Ils sont donc actifs ou temporairement fermés. Le tableau
présenté fait état de la conformité, en fait, de ces 132 puits. On
remarque qu'il y a beaucoup de puits qui sont sans information. Donc, 86 puits
sont sans information, 29 puits sont non conformes et 17 puits
conformes.
Je cite également, dans la première
section de notre rapport, un document, en fait, de l'association québécoise de
la lutte pour la pollution atmosphérique, datant de 2006, sur des inspections
de terrain qui ont eu lieu, et ces inspections-là étaient, en fait, à la
demande du MERN. Les auteurs du rapport parlaient de puits enfouis, de puits abîmés,
avec des traces visibles d'émanations de gaz, des coordonnées géographiques
étaient erronées, bref, multiples problèmes. Malheureusement, ce projet-là n'a
pas pu être complété, et, depuis, nous ignorons toujours l'état des puits n'ayant
pas reçu de visite.
Quelquefois, également, on entend parler
de vieux puits refaisant surface, comme ce matin même, dans un article de
Mathieu Lamothe paru dans Le Nouvelliste, qui relate l'histoire d'un
couple qui a acheté une maison en Mauricie. Je suis désolée, je n'ai pas pu l'inclure
au mémoire, là, l'article a paru trop dernièrement, en fait, mais je vais quand
même vous en lire un extrait. «Le puits abandonné chez M. Laflamme, qui s'est
révélé lors de la démolition d'une grange, au tournant des années 2000,
entraîne depuis l'affaissement de plusieurs parcelles de son terrain. La
situation empire année après année. Trois trous remplis d'eau et de boue
grisâtre, desquels s'échappent les bulles produites par un gaz s'apparentant à
du méthane, ont également fait leur apparition. L'été, le gazon qui recouvre
les endroits où le terrain s'affaisse est d'une couleur jaunâtre. Une substance
huileuse remonte régulièrement à la surface du sol.»
Ceci est malheureusement l'héritage forcé
de l'industrie des énergies fossiles, auquel le Québec doit maintenant faire
face. Plus de 900 puits aux conditions inconnues, partout dans le sud du
Québec... Certains sont encore sous la responsabilité des entreprises, mais la
majorité, abandonnés, fermés, relèvent maintenant du ministère.
La bonne nouvelle, en fait, avec l'arrivée
du projet de loi n° 21, c'est qu'il n'y aura plus de nouveaux puits qui s'ajouteront
à cette liste. Mais la mauvaise nouvelle, c'est que, de tous ces puits
existants, ils ne disparaîtront pas, et c'est maintenant à nous de s'en
préoccuper.
Donc, en lien avec l'état de situation des
puits, nos recommandations, en fait, vis-à-vis le ministère, c'est de procéder
au <recensement...
Mme Pétrin (Rébecca) :
...
situation des puits, nos recommandations, en fait, vis-à-vis le ministère,
c'est de procéder au >recensement et à l'inspection de tous les puits
fermés n'ayant pas été inspectés récemment. Afin d'évaluer leur qualité de
fermeture, l'inspection doit comprendre l'évaluation de l'étanchéité et la
conformité de leur bouchon de ciment, ou «kill mud».
Nous recommandons également au ministère
qu'il maintienne l'obligation aux entreprises de soumettre un rapport d'inspection
annuel pour les puits fermés temporairement, en vertu de l'article 60,
paragraphe 8°, du règlement sur le pétrole, les gaz
et les réservoirs souterrains de la Loi sur les mines. Donc, on ne voudrait pas
que cette obligation-là soit retirée dans le projet de loi, étant donné que les
entreprises qui sont encore propriétaires de leurs puits peuvent très bien
quand même continuer à effectuer ces évaluations-là.
La deuxième section de notre rapport
concerne la contamination des eaux suite aux forages. Dans cette section-ci, on
présente des composés chimiques utilisés dans le forage de 18 puits dont
la toxicité a été démontrée et qualifiée dans différents rapports. Ces rapports
font aussi état d'un manque de connaissances sur les informations relatives aux
intrants chimiques utilisés par l'industrie du shale au Québec, puisque ces
dernières, donc les industries, ne les ont pas rendues publiques, ce qui laisse
planer un sérieux doute sur l'écotoxicologie des eaux souterraines des milieux
avoisinants des puits de gaz.
Les données sont détenues par les exploitants,
mais elles ne sont pas rendues publiques auprès des autorités et des
chercheurs. C'est donc vraiment difficile de connaître exactement c'est quoi,
les produits qui ont été injectés dans le sol. Et, en effet, ce sont jusqu'à
62 composés chimiques qui ont pu être utilisés dans les 18 puits de
fracturation. À l'heure actuelle, et bien que plusieurs de ces composés
chimiques ont été caractérisés comme étant toxiques pour l'environnement et la
santé humaine, nous ne pouvons toujours pas confirmer avec certitude le nombre
exact des composés chimiques qui ont été utilisés, ni leur volume ni leur
concentration, puisqu'on n'a pas les données.
On cite également, dans cette section, un
passage du MDDEFP, en 2013, qui mentionnait que nous connaissons mal la composition
des intrants utilisés et comment ces intrants-là se comportent dans le milieu
récepteur. Donc, c'est très limité, finalement, nos connaissances sur les
interactions une fois que les produits chimiques sont injectés.
Tel qu'il a été présenté également dans le
mémoire de Pascal Bergeron, un cas de contamination a été recensé au Québec, et
c'est le puits Bourque en Gaspésie. Ça ne veut pas dire qu'il y a un seul cas
de contamination au Québec. Comme je l'ai rappelé avant, il y a énormément de
puits qui n'ont pas fait office d'études plus poussées. Mais le fait qu'il y
ait un cas défini, c'est malheureusement suffisant pour douter de l'intégrité
des sources d'eau pour l'ensemble des sites de forage non conformes ou sans
suivi.
Il faut savoir aussi que l'obligation de
faire des études hydrogéologiques lors des forages ne relève que depuis l'adoption,
en fait, du règlement de protection et de prélèvement des eaux potables...
protection des eaux potables de 2014. Donc, tous les puits de forage qui ont eu
lieu avant cette date-là n'ont pas eu d'étude hydrogéologique en amont. Et
malheureusement, même les meilleures pratiques vendues par les représentants de
l'industrie génèrent des déversements qu'on ne peut pas dire anecdotiques. Donc,
nous voici devant la situation où l'industrie a l'obligation de remettre en
état des sites forés, mais on ne connaît pas vraiment l'état en amont des sites
et on ne connaît pas vraiment non plus l'état de situation des sites aujourd'hui.
Donc, dans nos recommandations, nous recommandons
au gouvernement du Québec, pour une fermeture des puits transparente,
sécuritaire et réussie, de procéder à des évaluations environnementales de
sites de production susceptibles d'avoir fait usage de produits chimiques, donc
d'aller plus en profondeur dans les 18 sites où il y a eu de l'injection
et de rendre publique la liste des composés chimiques utilisés, d'évaluer l'impact
de ces produits sur l'environnement, les milieux de vie et la santé humaine.
Nous recommandons aussi au ministère de procéder
à des analyses supplémentaires sur les interactions de ces produits chimiques
là.
Nous recommandons également au ministère d'exiger
une étude hydrogéologique systématique pour l'ensemble des puits actifs ou
temporairement fermés afin de connaître le nombre de puits contaminés, les
types de contamination et l'état écotoxicologique de ces eaux. Donc, à l'article 13,
alinéa deux, on ne stipule pas directement cette obligation, donc on
devrait bonifier cet article-là.
Et puis je veux juste rappeler, Pascal
Bergeron avait bien spécifié dans son mémoire la technique d'échantillonnage d'eau
en amont, donc d'aller suffisamment en amont des prélèvements d'eau pour avoir,
en fait, l'échantillonnage d'eau, sans l'impact du forage, pour vraiment
comparer puis pouvoir quantifier quel est l'impact du forage sur la qualité des
eaux souterraines et de surface, <évidemment.
Mme Pétrin (Rébecca) :
...qualité
des eaux souterraines et de surface, >évidemment.
Et nous demandons également au ministère
de faire référence à la LQE, dans le cadre de la restauration des sites, afin
que les obligations de décontamination s'appliquent.
Nous demandons également qu'un avis du
ministre de l'Environnement soit remplacé par un avis de conformité officiel.
Donc, même si les entreprises de forage ont l'obligation de souscrire à la LQE,
le projet de règlement... le projet de loi serait bonifié, en fait, de... qu'il
y ait une mention spécifique à cet effet-là, et puis ça permettrait de définir
mieux aussi à qui reviennent les coûts de ces travaux-là.
Le Président (M. Lemay) : En
conclusion.
Mme Pétrin (Rébecca) : Oui?
Le Président (M. Lemay) : En
conclusion. Allez-y.
Mme Pétrin (Rébecca) : Donc,
en conclusion, Eau secours! s'oppose fermement à ce qu'un centime soit versé à
l'industrie ou à l'un des représentants — remboursements de frais et d'indemnités — avant
que la fermeture et la restauration du site ne soient complètes et qu'un avis
de conformité ne soit rendu par le ministère de l'Environnement. Donc, on
considère que ça va coûter extrêmement cher à l'État de décontaminer les sites
et on ne voudrait pas que les indemnisations soient remises avant la fermeture
complète des travaux. Merci.
Le Président (M. Lemay) : Merci,
Mme Pétrin, pour votre exposé. Nous allons maintenant procéder à la période d'échange
avec les membres de la commission. M. le ministre, la parole est à vous.
• (17 heures) •
M. Julien : Oui, merci.
Merci, Mme Pétrin, pour vos commentaires et vos travaux. Je fais quand même la distinction,
si vous permettez, des éléments du projet de loi et des éléments qui sont plus,
pour moi, les fameux puits orphelins, là.
Puis je vous écoutais tantôt, mais moi, à
chaque année, là, je dépose un état sur les fameux puits orphelins, ou bien je
ne sais pas comment on les qualifie, c'est-à-dire les puits qui ne sont pas
concernés par le projet de loi, pas les 62 puits, mais les éléments que
vous mentionnez, puis un état assez... en tout cas, assez précis, parce que je
me fais beaucoup questionner quand je le dépose. Et de mémoire, quand je suis
arrivé en fonction, de plus... en plus, il y avait au-dessus de 200 puits
qui n'étaient pas localisés, là, qui dataient, en fin de compte, de
documentations qui dataient de 150 ans, 160 ans, qui étaient :
On a entendu dire ou on a vu quelque part qu'il y avait peut-être un puits puis
on le cherche, là. Puis je disais : O.K., bien, cherchez-le. Puis ils
allaient sur le terrain puis ils ne le trouvaient pas.
Mais bref, on donne un état, là, de
mémoire, c'est à peu près 700 puits, qu'on a réduits à 500, puis l'état
des niveaux de fermeture, un peu le tableau que vous dressez à l'intérieur de
votre mémoire, puis j'ai l'impression qu'on fait le travail. Peut-être qu'on ne
le fait pas à votre pleine satisfaction, puisque vous émettez des commentaires,
que j'ai bien lus, puis je pense qu'on va regarder ces commentaires-là, là, à
la face même de ces puits orphelins là... Ça ne veut pas dire que vos
commentaires ne s'appliquent pas aux 62 puits qui sont couverts à l'intérieur
du projet de loi pour les 182 licences actives.
Mais moi, je comprenais, là, que les
études hydrogéologiques, là, elles allaient être faites, elles sont exigées
puis, en plus, elles allaient être rendues publiques, là, selon l'article 63.
Alors, votre crainte par rapport aux études hydrologiques, c'est que...
Mme Pétrin (Rébecca) : En
fait, notre crainte, c'est que les études et la décontamination des sites
prennent, en fait... En fait, c'est ce qu'on ne voudrait pas, c'est qu'il y ait
des indemnités qui soient remises à des entreprises avant que l'ensemble des
études, des évaluations environnementales soient faites. Donc, on considère que
l'argent qu'on peut remettre aux entreprises, c'est à peu près le seul argument
qu'on a, valable, pour que les entreprises souscrivent à leurs obligations
légales.
On le sait que le plus gros de la facture
risque d'être les factures pour la décontamination des sites. Donc, on a vu
facilement un puits... Le puits, en fait, qui est contaminé, il y a des
factures de 10 millions de dollars, simplement pour la décontamination de
ce puits-là, alors que le ministère avait budgété 44 millions pour l'ensemble
de la fermeture. Donc, les prix sont franchement plus hauts, et ça serait
vraiment dommage, en fait, que l'industrie n'ait pas les fonds nécessaires pour
procéder à ces travaux-là suite au versement des indemnités.
Donc, nous, c'est vraiment le point qu'on
tient, c'est qu'on veut vraiment s'assurer que l'ensemble des évaluations
environnementales soient faites, que l'ensemble des processus de
décontamination soient faits avant qu'il y ait une seule indemnisation qui soit
donnée.
M. Julien : Mme Pétrin, je
vous rejoins totalement là-dessus puis je vous dirais que cette idée, là, qu'on
a discutée, le projet de loi, je l'ai amenée assez rapidement, là. C'est mon
petit côté stratégique de dire : Écoutez, on ne mettra pas une cent d'indemnisation
tant qu'il n'y aura pas... démontré clairement que la réhabilitation est
adéquate, avec un système où le MELCC, le ministère de l'Environnement, et le
MERN a posteriori, là, n'aura pas validé le caractère adéquat de la
réhabilitation.
Alors, j'entends bien que, pour vous, vous
êtes confortables avec le fait qu'on <n'indemnise...
>
17 h (version révisée)
<17855
M.
Julien :
...réhabilitation. Alors, j'entends bien, pour vous,
vous êtes confortable avec le fait qu'on >n'indemnise aucun montant,
tant et aussi longtemps qu'il n'y a pas eu cette démonstration-là. Et je lis et
j'entends, dans votre discours, que vous souhaiteriez qu'il y ait certains
renforcements par rapport aux mesures pour faire la démonstration que la
réhabilitation est adéquate. Parlez-moi un peu plus, là, par rapport... Vous
avez parlé de la LQE. Je voudrais voir, physiquement, là, c'est quoi, la
distinction que vous faites entre ce qui prévu au projet de loi, avec une
espèce d'attestation du ministre de l'Environnement qui va être basée sur des
éléments probants, et ce que vous proposez.
Mme Pétrin (Rébecca) : Bien,
en fait, ma principale inquiétude, c'est que, jusqu'à présent, puis je le
détaille plus dans mon mémoire en parlant des lagunes de Mercier, c'est qu'on n'a
jamais vu ça, en fait, une contamination de nappes souterraines qui a été
décontaminée, ne serait-ce qu'à un certain pourcentage. Donc, mon inquiétude, c'est...
C'est certain qu'il va y en avoir des nappes souterraines qui sont contaminées.
Comment est-ce qu'on va réglementer ça? Comment est-ce qu'on va imposer, en
fait, des critères aussi à l'industrie? J'imagine que ce sera inscrit dans un
futur règlement, parce que, jusqu'à présent, au Québec, on n'a pas... on a une
loi, une politique sur la décontamination des terrains, mais rien sur les eaux
souterraines. Peut-être qu'on est rendus là, en fait, mais je me demande, en
fait, comment le ministère de l'Environnement, probablement, avec le ministère
des Ressources naturelles, vont arriver enfin à amener les industries à ramener
ça à l'état initial.
Donc, en fait, ça me sécurise beaucoup que
vous dites que les indemnités ne seront pas données avant ce temps-là, mais il
n'en reste pas moins que je suis peu confiante qu'on puisse ramener la qualité
des eaux à celle qu'elles étaient avant les forages. Le manque d'information
aussi me préoccupe beaucoup. Le fait qu'il n'y ait pas d'études hydrogéologiques
qui ont été faites en amont des forages, c'est difficile aussi de retrouver la
qualité des eaux qui étaient là avant. Donc, j'ai hâte de voir, en fait, ce que
ce sera, les protocoles pour faire ces évaluations-là.
M. Julien : Parfait. Mais
encore, juste pour faire du pouce un peu sur ce que vous mentionnez puis les
préoccupations que vous amenez, nous, quand on dit que les... Puis je vous dis,
je ne suis pas spécialiste, là, dans le domaine hypertechnique, là, mais je
connais ça un peu. Nous, quand on dit : Les 62 puits doivent être
fermés adéquatement, actuellement, dans la liste, là, des 700 quelques puits
qui avaient été considérés comme inactifs, certains d'entre eux sont...
plusieurs d'entre eux sont comme fermés définitivement. Pour arriver à cette
classification de fermer définitivement, bien, ils ont dû répondre, en fin de
compte, à certains critères, dont des critères environnementaux.
C'est quoi, la distinction que vous faires
entre la fermeture de ces puits-là, à un autre temps, et la fermeture projetée
des 62 existants, par rapport à la façon que c'est fait et que c'est
conclu? Puisque c'est sûr que je n'amène pas, si ce n'est la transparence, plus,
plus de documentation rendue publique, qu'est-ce qui doit être renforcé de ce
qu'on faisait dans le passé, quand on fermait un puits, de ce qu'on veut faire,
dans le futur, par rapport aux 62 qui nous occupent?
Mme Pétrin (Rébecca) : Bien,
en fait, dans le passé, c'est... il y a quand même plusieurs puits qui ont été
fermés. Là, les 62, je n'ai pas les dates de fermeture, malheureusement, là, je
n'ai pas l'ensemble des détails des puits, sauf qu'avant l'arrivée du règlement
pour la protection de l'eau potable, il n'y avait pas d'obligation de faire des
études hydrogéologiques. Donc, comment les puits ont été fermés? Est-ce qu'il y
avait déjà une contamination, qu'on a fermé le puits par-dessus? Je ne pourrais
pas dire, sauf que, quand on va voir la base de données, en fait, du ministère,
on n'a pas le détail par puits de tout ce qui a été fait puis des résultats non
plus des analyses.
M. Julien : Mais pour le
projet de loi, avec les 62 puits actifs actuels, on garantit qu'il y a une
étude hydrogéologique qui va être rendue publique à l'intérieur de l'article 63.
O.K. Alors, je conçois cet élément-là. Selon vous, le projet de loi n° 21, c'est
un bon projet de loi? J'ai besoin d'amour. C'est mon collègue de l'opposition
qui dit ça, donc, j'aimerais que vous m'en donniez.
• (17 h 10) •
Mme Pétrin (Rébecca) : Je
pense que c'est une excellente initiative de mettre fin aux hydrocarbures.
Comme je vous l'ai répété, nous, ça fait 10 ans qu'on lutte contre le
marché des hydrocarbures. Si vous saviez le nombre de personnes qui ont été
dans cette lutte-là au Québec, c'est monstrueux. Entre nous, on se dit que ce n'est
pas les industries qui devraient recevoir des indemnités, c'est les citoyens
qui se sont mobilisés, pendant 10 ans de temps, pour leur faire front.
Mais oui, je pense que c'est un bon projet
de loi. Je crois que c'est une excellente initiative puis qu'on est rendus là,
en fait. Comme M. Boudreau l'avait dit hier, il y a cinq ans, ça aurait été
illusoire de s'imaginer... me semble incontournable. On doit mettre fin aux
hydrocarbures <au Québec...
Mme Pétrin (Rébecca) :
...me
semble incontournable. On doit mettre fin aux hydrocarbures >au Québec.
Ça a été tellement de temps, et d'énergie, et d'argent dépensés pour rien. On
va pouvoir maintenant se concentrer sur le développement de nouvelles filières
plus vertes. Mais c'est certain que nous, le côté des indemnités... En fait, on
a tellement donné beaucoup d'argent dans le passé à cette industrie-là. Ils
nous ont laissé aussi un héritage de contamination vraiment marquant au Québec.
Donc, moi, je voudrais m'assurer qu'on essaie de faire le maximum avec eux pour
faire la décontamination avant que les sommes soient versées. C'est là où le
point est plus sensible, disons.
M. Julien : Bien, merci,
Mme Pétrin. Votre réponse est quand même assez positive. Alors, j'en
prends acte.
Quand vous dites : On a donné
beaucoup d'argent, bien, j'entends souvent ça, là. Je peux concevoir les effets
communautaires, les enjeux, les revendications, les soucis que ça peut amener.
Alors, j'entends bien ce volet-là, mais je le réitère, là, puis je le redis, et,
pour moi, c'est essentiel, le remboursement des indemnités sont faites au net
de tout crédit d'impôt, toute aide financière sur la même période, là. Pour
nous, là, ce n'est pas l'investissement total qui a été effectué qu'on
rembourse, c'est l'investissement, et on est déjà estimé à 12 millions, à
peu après, les montants d'aide gouvernementale qui vont être obligés d'être
remboursés.
Donc, de quels frais l'argent qu'on a
mis... puisqu'on rembourse seulement sur six ans, puis c'est net, de l'aide
reçue sur cette période-là, à tous égards, par le gouvernement. Donc...
Mme Pétrin (Rébecca) : Bien,
en fait, les frais, c'était surtout... Si on parle spécifiquement des forages,
c'était surtout les claims qui ont été vendus à un faible coût. On ne parle pas
là de frais donnés. Quand j'ai mentionné les frais, c'était beaucoup plus l'ensemble
de la filière des hydrocarbures. Donc, on a donné énormément de subventions et
autres, si on pense aux autres projets. C'est sûr que, dans les forages, moi,
je n'ai pas le détail, je ne peux malheureusement pas me substituer à mes
collègues qui sont plus spécifiques... plus spécialisés dans ça. Je me contente
de protéger l'eau souterraine.
M. Julien : Parfait. Un
autre élément, vous savez que le projet de loi prévoit, là, qu'on accepte... Encore
là, on a eu des bonnes discussions quand on a bâti le projet de loi sur cet
élément-là. On a dit : On va accompagner les entreprises jusqu'à la
hauteur de 75 % des frais de décontamination, réhabilitation, fermeture
des puits. L'objectif qu'on avait derrière ça, c'était, bon, si... Bien, puisque
c'est notre décision, puis on veut que ce soit fait, puis on veut que ce soit
fait rapidement et bien fait, bien, on dit : On va mettre un montant. Mais
on ne veut pas mettre non plus la totalité pour éviter... Si on disait :
Bien, on va rembourser 100 % des frais, on comprend bien qu'il y aurait
des risques, le cas échéant, là, que ces frais-là, il n'y ait personne qui veuille
les contraindre parce qu'on veut que les travaux soient faits.
Qu'est-ce que vous pensez de cette
approche-là? Êtes-vous confortable avec l'approche que le gouvernement
participe à payer une partie des frais pour la réhabilitation? Et naturellement,
aucuns frais d'exploitation ne sera remboursé tant que ça ne sera pas fait à
pleine satisfaction.
Mme Pétrin (Rébecca) : En
fait, là, je suis un peu confuse, parce que ce qu'on nous avait dit auprès du
ministère, c'est que le 44 millions de dollars ne comprenait pas les frais
de décontamination. Là, ce que je comprends, ça les comprend?
M. Julien : Bien,
écoutez, peut-être, en réalité, que, quand je dis : Ces éléments-là, je
vais préciser avec le ministère, parce que, pour moi, c'est les frais pour
réhabiliter et fermer le puits. Donc, maintenant, quelle nature de
décontamination qu'on discute ici, je ne saurais trop m'avancer. Et vous êtes
plus spécialiste que moi, donc ne me prenez pas au mot, mais je veux que ces
frais-là permettent la fermeture de manière conforme aux exigences, en fin de
compte, du ministre de l'Environnement. Alors...
Mme Pétrin (Rébecca) : Bien,
moi, c'est un peu la même chose que les indemnités, je préférerais nettement
que les frais soient à zéro pour la nation québécoise qui n'a subi que des
impacts négatifs de ça. Puis, dans le fond, les profits de cette entreprise-là,
ça n'a pas été réinjecté directement ici. Donc, je ne vois pas pourquoi qu'on
paierait pour la fermeture de ces sites-là. Sauf que ce qu'on a compris en
échangeant avec les gens de votre ministère, c'est que c'est un moindre mal...
un peu accepter de force, si on voulait enfin avoir la collaboration des
industries.
Donc, est-ce que je suis pour? Non. Mais
est-ce que je serais prête à l'accepter? Oui. Par contre, je ne comprends pas d'où
vient le 75 %. Peut-être qu'on pourrait détailler un peu plus pourquoi à
75 %, plutôt que 50 %, là, si... ou 25 %. Donc...
M. Julien : Effectivement,
on aura l'occasion d'en discuter, je pense, quand on va étudier, article par
article, le quantum. Naturellement, il faut bien comprendre qu'ici c'est un peu
la même notion que j'amenais tantôt dans les discussions, une notion de
responsabilité, c'est-à-dire que, si on n'adoptait pas le projet de loi et si
on ne mettait pas un terme aux hydrocarbures, exploration, exploitation
momentanément, actuellement, il y aurait... les entreprises n'auraient pas
d'obligation <de réhabiliter...
M. Julien :
...momentanément, actuellement, il y aurait... les entreprises n'auraient pas d'obligation
>de réhabiliter et de fermer des puits.
Donc, on prend une décision qui oblige à
un geste immédiat, ou très rapidement, puis c'est pour ça qu'on y participe. Mais,
encore là, c'est comme l'espèce de responsabilité partagée, parce que c'est
vrai que tout le monde dit que l'industrie, ce n'était pas l'industrie de l'avenir.
D'un autre côté, comme État, on s'est comporté en donnant des licences et des
droits sans prétendre que ce ne l'était pas. Donc, c'est l'aspect, un peu,
responsabilité conjointe qu'on essaie de mettre... Oui.
Mme Pétrin (Rébecca) : Mais
je voudrais peut-être faire un parallèle avec la politique, justement, de
réhabilitation des sols contaminés qu'on a adoptée dans les années 90.
Quand cette politique-là est arrivée, en fait, il n'y a pas de programme d'aide
de fermeture ou de décontamination des sites qui avait été donné, et pourtant c'était
à peu près un cas similaire où on a passé une loi, en fait, des nouveaux
règlements avec... le barème est respecté. Pardon. Donc, je ne comprends pas
pourquoi, cette fois-ci, alors que ça s'applique seulement à des gens de l'industrie...
Dans l'autre cas, on avait des citoyens, on avait des petites entreprises qui
étaient aux prises avec des problèmes de contamination. Ils n'ont pas eu, en
fait, d'aide, justement, à la fermeture et à la décontamination, puis, dans ce
cas-ci, on parle de neuf, 10 grandes industries qu'on va accompagner, en fait,
dans ce nouveau règlement là.
Donc, je suis un peu d'accord que, oui, c'est
bien, parce qu'on veut vraiment en finir, une fois pour toutes, avec les
hydrocarbures, sauf que, si on regarde dans l'histoire du Québec, c'est déjà
arrivé qu'on a passé des règlements comme ça sans accompagnement, là.
M. Julien : O.K. Mais
naturellement, c'est à cause qu'aussi on met un terme... alors, ces
notions-là, c'est... on met un terme momentanément à un potentiel de droit
quasi immobilier puis on dit : Vous réhabilitez maintenant. Mais j'entends
ce que vous dites, puis on aura l'occasion d'en discuter à l'article par
article.
Combien qu'il reste de temps? Il n'y a
plus de temps?
Le Président (M. Lemay) : 30
secondes.
M. Julien : Mme Pétrin, je
vous remercie infiniment, c'est... Vous amenez des éléments qui sont raffinés
et d'une complexité, que j'aurai l'occasion de discuter certainement avec mes
collègues du ministère pour pouvoir voir toutes les nuances qu'il y a
là-dedans, pour voir comment qu'on peut justement bonifier, le cas échéant, le
projet de loi.
Mme Pétrin (Rébecca) : Merci
beaucoup.
Le Président (M. Lemay) :
Très bien. Merci, M. le ministre. Alors, je cède maintenant la parole à l'opposition
officielle... oui, c'est ça, exactement, et le député de Mont-Royal—Outremont,
pour une période d'environ 11 minutes.
M. Arcand : Merci. Bonjour,
Mme Pétrin. Je vais vous laisser le temps de reprendre votre souffle un peu suite
à ces nombreuses questions. Ma première question : Eau secours!, ça, c'était...
c'est le groupe dans lequel Martine Ouellet était, à une certaine époque, il y
a quelques années. Est-ce que je me trompe en disant ça? Est-ce qu'elle est
encore...
Mme Pétrin (Rébecca) :
Effectivement, elle a...
M. Arcand : ...est-ce qu'elle
vous a aidés dans la présentation de ce mémoire, étant donné que c'est l'ex-ministre...
c'est une ex-ministre de l'Énergie et des Ressources naturelles?
Mme Pétrin (Rébecca) : Oui,
elle a siégé au même siège que vous avez vous-même siégé. Non, effectivement,
Martine Ouellet n'est plus chez Eau secours! depuis de nombreuses années déjà.
M. Arcand : O.K. Mais vous
travaillez avec l'Association québécoise de la lutte à la pollution? Ça, c'est
le groupe de M. Bélisle, si je ne m'abuse.
Mme Pétrin (Rébecca) : J'ai
juste mis la main sur un de ses rapports, qui date de 2016, là, pour le citer
dans mon mémoire uniquement. On n'a pas l'habitude de collaborer. On n'est pas
vraiment sur les mêmes enjeux. Il travaille sur la pollution atmosphérique,
alors que nous, on travaille sur la pollution des eaux.
M. Arcand : O.K. Et, juste
pour que je comprenne bien, l'eau... pour vous, votre position, évidemment,
touche beaucoup les puits. Est-ce que vous avez d'autres enjeux, au niveau de l'eau,
juste pour ma gouverne? Est-ce que vous touchez aux lacs, aux rivières, aux
aqueducs, enfin, juste pour que je comprenne?
Mme Pétrin (Rébecca) : On
touche à beaucoup de choses au Québec, on touche... Cette année, on va toucher
à l'analyse de la Politique nationale de l'eau, qui célèbre ses 20 ans,
donc l'impact que ça aura eu au fil des dernières années. On parle de l'implication
aussi des différents ministres en Environnement dans cette politique-là,
comment ils ont su protéger notre eau. On parle de gestion intégrée, de
surconsommation. Donc, non, nos sujets sont assez divers, et on parle également
de la commercialisation sous toutes ses formes.
• (17 h 20) •
M. Arcand : O.K. Très bien. Si
on revient au projet de loi, Mme Pétrin, si je comprends bien votre position
sur les indemnisations, vous dites : Si l'inspection des puits à fermer
révèle la présence de contamination, la décontamination des sites doit être
faite aux frais du détenteur de permis. Ça, c'est... De toute façon, c'est en
vertu de la loi québécoise de l'environnement. Après ça, on dit : Si un
détenteur de permis, pour l'un des 132 puits visés par l'article 10,
détient des permis pour d'autres puits qui ne sont pas visés, qui ont été
fermés temporairement, les coûts de fermeture et... ou même de contamination de
ces puits doivent être déduits de l'indemnisation <à 75 %...
M. Arcand :
...contamination
de ces puits doivent être déduits de l'indemnisation >à 75 %.
Alors, est-ce que c'est exact, ce que je
lis actuellement, ça reflète votre pensée? Maintenant...
Mme Pétrin (Rébecca) : Oui.
En fait, c'est que, même si un propriétaire de puits a fermé des puits, ces
puits-là devraient être considérés, en fait, même s'ils ne font pas partie des
62 puits. Donc, en fait, ce qu'on répète, c'est que, malgré le fait qu'il
y a seulement 62 puits qui sont considérés dans le projet de loi, si une
entreprise a d'autres puits ailleurs qui sont fermés ou temporairement fermés,
ils devraient être considérés dans les évaluations environnementales. On ne
peut pas remettre des indemnités à une entreprise s'il y a d'autres puits à l'extérieur
de ceux qui sont évalués, qui sont non conformes.
M. Arcand : D'accord. Ma
question également, c'est : Est-ce qu'il y a lieu de déduire d'autres
montants de l'indemnisation envisagée?
Mme Pétrin (Rébecca) : Bien,
en fait, moi, je considère que tous les montants doivent être déduits de l'indemnisation,
tant et aussi longtemps que les normes environnementales ne sont pas
respectées. Et donc, je veux dire, il y a des nappes d'eau souterraines... sont,
jusqu'à présent, impossibles à décontaminer. Donc, j'ai du mal à comprendre
comment qu'une entreprise qui a des puits, qui a généré de la contamination des
eaux souterraines, pourrait se voir toucher une indemnisation. Parce qu'il y a
certains...
M. Arcand : D'accord, mais ça,
selon votre expertise, est-ce que c'est un processus qui risque quand même d'être
très long et qui risque de durer quand même un certain temps, d'après votre
expertise?
Mme Pétrin (Rébecca) : Bien,
en fait, je ne veux pas me situer en ingénieure en hydrogéologie qui serait
spécialisée dans la décontamination, chose que je ne suis pas. C'est juste que,
jusqu'à présent, c'est une expertise qui mériterait à être développée au
Québec, puisqu'on n'en a pas encore réussi à grande échelle, la décontamination
de nappes d'eau souterraines. Si on prend le cas des lagunes de Mercier, ça
fait depuis les années 60 que ça persiste dans l'environnement.
Donc, je pense que c'est une chance en or
qu'on a, au Québec, de développer une expertise dans la décontamination des
eaux souterraines, là, d'utiliser ces puits-là, sauf que, oui, je pense que ça
va être quand même des défis techniques qui vont être à relever. Je ne pourrais
pas m'avancer à dire combien de temps que ça va prendre, sauf que je ne crois
pas que ça se fera en quelques mois, là.
M. Arcand : Donc, ce que j'essaie
de comprendre, c'est que vous n'êtes pas, par principe, fermés à une forme
quelconque d'indemnisation, mais il faut que le dossier soit vraiment plus
blanc que blanc, si je me permets l'expression. C'est ça?
Mme Pétrin (Rébecca) : Exactement.
M. Arcand : Très bien. Dans
votre mémoire, vous faites référence à des produits chimiques que le ministère
de l'Environnement qualifie de problématiques, qui ont été utilisés dans des
opérations de fracturation hydraulique. Pouvez-vous me dire, sans entrer dans
des détails trop techniques, là, parce que j'imagine que c'est des noms assez
compliqués au niveau de ces produits chimiques là, mais ces produits chimiques
là, qu'est-ce que c'est? Et quels sont ses effets, en termes d'ennuis de santé,
par exemple? Est-ce que vous savez un peu de quoi il s'agit?
Mme Pétrin (Rébecca) : Bien,
en fait, on sait que le ministère, le... avait confirmé qu'il y en avait trois,
produits chimiques, qui étaient plus problématiques que les autres. Donc, pour
les noms compliqués, là, on a un solvant au naphta aromatique lourd, je vous
épargne le nom scientifique en long. On a un chlorure d'ammonium aussi, et
puis... Donc, ce sont des produits, en fait, qu'il y a un gros potentiel de
bioaccumulation dans les organismes aquatiques et qui persistent gravement dans
l'environnement. Donc, c'est des produits qui sont un peu à l'image des BPC de
l'époque, qui sont très persistants et difficiles à se biodégrader. Et le
problème, en fait, c'est qu'à partir du moment où ça se retrouve dans l'eau,
bien, la bioaccumulation va faire que ça va se retrouver dans nos poissons et
autres puis qu'on va les consommer via la consommation des produits de la mer
et des lacs et rivières.
On n'a pas encore tout, on n'a pas... très
peu d'études, en fait, ont été faites sur vraiment les conséquences sur la
santé humaine. C'est un peu comme les interactions avec le milieu récepteur, c'est
que, justement, on manque de données là-dessus. Donc, ça fait partie des choses
que moi, je pense que le ministère de l'Environnement devrait mettre l'emphase
dans la fermeture des puits, ça serait également de pousser un peu le volet de
recherche, là, sur les impacts que ça a sur l'environnement puis sur la santé
humaine.
M. Arcand : D'accord. Mais
quand vous vous parlez de ces puits-là, les puits orphelins, vous arrivez avec
un chiffre, là, qui parle des coûts pour changer la situation. Vous parlez de
54 millions. Vous dites que ça exclut 67 puits que le ministère sait
être des sources de contamination, mais que le ministère ne sait pas encore <tout
à fait...
M. Arcand :
...des
sources de contamination, mais que le ministère ne sait pas encore >tout
à fait ce qu'il en coûterait pour les nettoyer et les sécuriser de façon
définitive. Juste m'expliquer votre 54 millions, ça vient d'où exactement.
Mme Pétrin (Rébecca) : En
fait, c'était une étude qu'avait révélée Alexandre Shields, dans un de ses
articles dans Le Devoir, une estimation qui avait été faite par rapport à... Je
vous retrouve le document, mon ordinateur ne veut pas me le rendre. Donc, je
pourrais vous la... avec plus de détails, mais c'est des estimations qui
avaient été faites avec des puits qui avaient déjà entamé une décontamination
de...
M. Arcand : O.K. Donc, c'est
ce qui vous permet de parler de ça comme tel. Est-ce que...
Mme Pétrin (Rébecca) : Bien,
en fait, c'est que la phase initiale... la facture finale est actuellement
impossible à préciser, parce que, jusqu'à présent, c'est ça, le gros problème,
c'est pareil... la même problématique que le 44 millions qui a été avancé,
et qu'au final, si on comprend la décontamination des sites dans le
44 millions, c'est une très grosse estimation parce qu'il n'y a pas de
source fiable qui arrive à définir combien peut coûter la décontamination d'un
site.
Déjà, le portrait d'une décontamination
peut prendre différentes formes. Ça dépend de la quantité des produits
chimiques qui se retrouvent dans la nappe phréatique. Ça dépend de la grosseur
de la nappe phréatique. Ça dépend de la profondeur de la nappe phréatique. Ça
dépend de tellement de facteurs qu'on ne peut pas arriver à un montant vrai. Ça
prend des études en profondeur pour arriver à dire quelles technologies on va
mettre en place, sur combien de temps puis les coûts qui vont être liés à ça.
Mais, chose certaine, c'est que c'est des factures qui sont très élevées parce
que ce n'est pas des technologies qui sont si simples, là, à déployer.
M. Arcand : Est-ce que
vous avez une explication... Dans vos discussions que vous avez eues avec le
ministère, est-ce que vous avez une explication sur le fait qu'il faut autant
de temps pour faire un diagnostic complet? Parce qu'on ne parle pas d'un si
grand nombre de puits et on sait que la plupart sont dans le paysage depuis des
décennies. Est-ce que vous vous avez fait une tête là-dessus, vous avez une
explication de ce côté-là?
Mme Pétrin (Rébecca) : Bien,
je pense qu'on a un gros retard à rattraper, parce que je pense que, vous devez
être au courant, mais, suite à l'entrée en matière des gaz de schiste en 2010,
il aura fallu attendre, en 2014, pour avoir un règlement sur la protection des
eaux potables au Québec. Donc, de 2010 à 2014, il y a eu absence de collecte de
données sur, justement, des relevés hydrogéologiques. C'est simplement en 2015
qu'on a commencé à collecter des données. Donc, on est en 2022, ça fait sept ans.
Je pense que les gouvernements ont tablé à essayer d'accumuler un maximum d'informations,
essayer de recenser aussi la grosseur de nos nappes phréatiques, les eaux
souterraines, les cartographier, mais ça tarde, et il y a beaucoup d'informations
où on parle... C'est vrai que là, ici, on parle de 62 puits dans le cas du
projet de loi, sauf que, dans les faits, il y a 900 puits au Québec. Puis
ce n'est pas parce que des puits sont fermés qu'ils ne sont pas non plus
dangereux. Puis, même s'ils ne font pas partie de la liste des 62 puits,
si on détecte un puits, sur le territoire, qui fuit, il faut quand même s'y
attarder, il faut dépenser puis il faut mettre des ressources en place pour
aller chercher ces données-là.
Donc, je pense qu'on est bien partis. On a
commencé à collecter des données, encore faut-il qu'elles soient accessibles au
public. Ça, c'est un autre enjeu que M. Bergeron a soulevé dans son
mémoire, c'est que la société civile veut également aider le ministère de l'Environnement
à faire des travaux puis des recherches sur... encore faut-il qu'on ait accès à
ces données-là. Donc, peut-être de bonifier un registre unique, où l'ensemble
des citoyens auraient accès aux relevés et puis aux études hydrogéologiques,
aiderait grandement, en fait, à avancer notre niveau de connaissance, là, sur
la contamination.
Le Président (M. Lemay) : Merci,
Mme Pétrin pour cette réponse. Nous allons maintenant céder la parole au
deuxième groupe d'opposition, Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Mme Massé : Oui. Nous
avons deux minutes, Mme Pétrin, alors on va aller à l'essentiel. J'ai bien
entendu que vous avez dit que si, toutefois, des entreprises, qui possèdent un
ou plusieurs des 62 puits à l'étude dans le projet de loi, avaient d'aventure
des puits ailleurs, qui ne font pas partie de ces 62 là, il faut qu'on tienne
en compte, si toutefois on allait vers de l'indemnisation de ces puits-là qui
sont à l'extérieur, de les réhabiliter aussi. Est-ce que j'ai bien compris ça?
Mme Pétrin (Rébecca) : Exactement.
• (17 h 30) •
Mme Massé : Bien, merci. Je
me demandais, dans votre mémoire, vous... Et vous l'avez fait mention tantôt,
vous nous avez parlé des... de la lagune, pardon, de Mercier. Qu'est-ce qu'on
peut retenir, qu'on doit retenir de l'expérience de la lagune de Mercier, qui
pourrait nous être utile à rendre plus <fort...
>
17 h 30 (version révisée)
<15421
Mme Massé :
...plus >fort, le projet de loi actuel, ou toutes les questions d'indemnisation,
là, parce qu'il me semble que ça nous coûte cher, ça, les lagunes de Mercier.
Mme Pétrin (Rébecca) : Bien,
c'est la principale leçon à en tirer. C'est qu'en 1994, quand on a fait le BAPE
sur des plans de restauration des lagunes de Mercier, on était déjà à 13 millions
de dollars injectés dans cette catastrophe-là. Je n'ai pas réussi à mettre la
main sur les chiffres de 1994 à aujourd'hui. Donc, on a dû encore mettre des
fonds, ne serait-ce que pour approvisionner en eau potable les communautés qui
sont locales à cette lagune-là. Mais là il y a un projet pour une usine de
traitement des eaux qui devrait voir le jour en 2025. Ce projet-là, à lui seul,
coûte 25 millions de dollars.
Donc, la leçon à tirer, c'est que
contaminer une nappe d'eau souterraine, qui est un approvisionnement en eau
potable, ça nous coûte excessivement cher. Nous, chez Eau Secours!, pendant des
années, depuis le début des hydrocarbures, c'est le clou qu'on martèle. Il n'y
a pas d'action en hydrocarbures qui ne risque pas de contaminer notre eau
potable, et c'est irréversible, et ça coûte cher. Donc, s'il y a une leçon qu'on
peut prendre, c'est de faire attention avant de donner des sous aux entreprises,
parce que la facture, c'est nous qui allons la payer. On va la payer pendant
des années et des années, et c'est nous qui restons avec la contamination
pour...
Mme Massé : Et donc,
vous nous invitez à être très prudents, que lorsqu'on parle... le projet de loi
parle de réhabilitation, il faut absolument tenir compte de la question de la
contamination des sols et des eaux.
Mme Pétrin (Rébecca) : Absolument.
C'est indéniable.
Mme Massé : Oh! il me
reste 30 secondes. Est-ce que vous voulez utiliser ce 30 secondes-là
pour nous dire autre chose d'important?
Mme Pétrin (Rébecca) : Vous
me prenez au dépourvu.
Le Président (M. Lemay) : Merci
beaucoup, Mme Pétrin. Alors, nous allons maintenant passer la parole au député
de Jonquière.
M. Gaudreault : Oui. Merci
beaucoup pour votre présence. Je constate que vous avez déposé un mémoire
conjoint, au fond, avec l'Association québécoise des médecins pour l'environnement.
J'aimerais ça que vous m'en parliez un petit peu, quel est le lien que vous
faites entre les deux associations. On sait que, bon, disons, on répète souvent,
l'eau est source de vie. Je pense que c'est certainement la ressource la plus
importante que nous avons au Québec. Il y a des pays qui se battent pour avoir
accès à de l'eau potable. Nous, on en a. Il faut la protéger.
Et le lien que je veux faire également
avec l'Association des médecins pour l'environnement, c'est... Est-ce que je
comprends bien, si ça vous amène aussi à nous dire, à nous, les législateurs,
de vraiment détailler davantage le projet de loi n° 21 en ce qui concerne
les garanties, je dirais, entre autres, sur le recensement, l'inspection des
puits? C'est comme si je sens une forme d'inquiétude de votre part là-dessus.
Mme Pétrin (Rébecca) : Oui,
en fait, le lien avec l'Association québécoise, c'est évident, bien, des
médecins pour l'environnement, c'est évidemment l'aspect de la santé humaine
avec tous les cas de contamination. Ils ont abordé plus l'orientation sur les
relâchements des gaz. Ils auraient pu aussi également parler de l'impact sur l'eau.
Comme je l'ai répété plus tôt, on manque énormément de données, là, sur l'impact
des produits chimiques dans l'eau parce que ça a été peu étudié jusqu'à
présent. Ça fait partie aussi des coûts. On parle des coûts, des coûts, des
millions et des millions, sur des coûts vraiment réels de qu'est-ce qu'il va en
coûter autant aux entreprises qu'au gouvernement du Québec pour fermer puis
réhabiliter des puits. Sauf que le point intéressant de l'AQME, c'est vraiment
les coûts sociaux, en fait, qu'on ne chiffre jamais assez dans des projets
comme ici, donc, la santé humaine puis la perte aussi de pouvoir user des
ressources qui entourent nos communautés.
Donc, c'était l'aspect intéressant, en
fait, pourquoi on leur a donné une section dans notre mémoire. Donc, on a
décidé de collaborer. C'est vraiment pour tenter de faire le pont entre la
perte d'utilisation d'une ressource comme l'eau, qui est vitale, et les coûts
qui sont liés à ça. Effectivement, on ramène toujours une grande inquiétude par
rapport aux études. C'est quand même arrivé dans le passé, là. Comme je l'ai
répété, ça fait 10 ans qu'on se bat contre l'industrie des hydrocarbures.
Puis, à chaque fois qu'on dépose un mémoire à un BAPE ou à une autre analyse,
on ramène toujours le risque, en fait, à quel point on doit faire attention en
amont, de faire des études en amont pour éviter des contaminations. Puis là on
se retrouve 10 ans plus tard à constater qu'il y a eu des contaminations,
constater qu'il a manqué de suivi, qu'il a manqué d'analyse en amont. Donc, je
ne peux pas passer à côté du fait de retaper là-dessus. Il faut absolument... En
fait, s'il y a un risque, si minime soit-il, il faut pousser les analyses pour
s'assurer que l'industrie, en fait, n'a pas la liberté de faire ce qu'elle
veut.
Le Président (M. Lemay) : Merci
beaucoup, Mme Pétrin, pour votre contribution à nos travaux. C'est ce qui
complète la période d'échange avec les <membres de la commission...
Le Président (M. Lemay) :
...complète
la période d'échange avec les >membres de la commission. Donc, je vous
remercie. Nous allons maintenant suspendre pour permettre au prochain groupe de
prendre place.
(Suspension de la séance à 17 h 35)
(Reprise à 17 h 38)
Le Président (M. Lemay) : Alors,
la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources
naturelles reprend ses travaux. Et je souhaite maintenant la bienvenue aux
représentants de Mères au front. Alors, je vous rappelle que vous disposez d'un
temps de parole de 10 minutes pour faire votre exposé, et, par la suite,
il y aura une période d'échange avec les membres de la commission. Tout d'abord,
je vous invite à vous présenter ainsi que la personne qui vous accompagne, et
vous pouvez y aller avec votre exposé.
Mouvement Mères au front
Mme Waridel (Laure) : Merci.
Mmes et MM. députés, commissaires, citoyens et citoyennes, bonsoir. Merci d'être
là. Je m'appelle Laure Waridel, je suis écosociologue, Ph. D., et mère au front
pour tous les enfants, notamment mon fils Colin, ma fille Alphée et ma
petite-fille par alliance, Théodora, qui, en 2070, aura seulement 49 ans.
Bon.
• (17 h 40) •
Mme Gagnon (Catherine Alexandra) :
Bonsoir. Je m'appelle Catherine Gagnon, je suis biologiste. J'ai un
doctorat en sciences de l'environnement et je suis une mère au front pour tous
les enfants, incluant Élie, Blanche et Ambroise. En fait, nous sommes mères au
front pour tous les enfants d'ici et d'ailleurs, incluant les enfants qui ne
sont pas encore nés et qui seront affectés par les décisions que vous prenez
aujourd'hui.
Nous parlons aujourd'hui au nom de
24 groupes de mères au front des lieux suivants : les Laurentides,
ville de Québec, Abitibi-Ouest, Arthabaska-Érable, Laval, Rouyn-Noranda,
Vaudreuil-Soulanges, Montréal, Saint-Jean-sur-Richelieu, des Cantons-de-l'Est,
Memphrémagog, la MRC les Moulins, Rive-Sud, Rosemère et les environs, Saguenay,
Outaouais, Lac-Saint-Jean, Rimouski, Val-d'Or, Sherbrooke, la MRC de
Maskinongé, Baie-des-Chaleurs, les MRC de Drummond et Matane.
Le Mouvement Mères au front est né au <printemps 2020
d'un sentiment...
Mme Gagnon (Catherine
Alexandra) :
Le Mouvement Mères au front est né au >printemps 2020
d'un sentiment d'urgence partagé par de nombreuses mères et grands-mères quant
à l'ultime nécessité de protéger l'avenir de nos enfants et des générations
futures contre l'inaction climatique. Nous sommes un mouvement décentralisé qui
relie plus de 7 000 personnes. 30 groupes d'action se sont formés au
Québec, dans le Canada francophone ainsi qu'en Belgique. Au Canada anglais,
nous faisons alliance avec For Our Kids afin de maximiser notre impact sur la
scène fédérale. Nous vous demandons de penser aux enfants qui sont présents
dans votre coeur, dans vos vies, aujourd'hui, pour éclairer vos décisions,
toutes vos décisions.
Mme Waridel (Laure) : Nous
tenons d'abord à féliciter le gouvernement Legault d'avoir décidé de mettre fin
à la recherche et à la production d'hydrocarbures ainsi qu'au financement
public de ces activités. Un projet de loi comme ça était nécessaire depuis
longtemps. Il était donc temps.
À titre de mères, de grand-mères et de
nombreux alliés de notre mouvement, nous tenons à remercier tous ceux et celles
qui travaillent à améliorer ce projet de loi. Nous souhaitons que ce geste
législatif ne soit que l'amorce d'une série d'autres à venir, encore plus
ambitieux, nous libérant le plus rapidement possible de notre dépendance aux
énergies fossiles. Même si le potentiel économique et pétrolier... Même si le
potentiel économique, pétrolier et gazier est extrêmement faible sur notre
territoire, la symbolique est tout de même forte et nécessaire. L'avenir
économique du Québec et de la planète passe par les énergies vertes. En prenant
part à la Beyond Oil and Gas Alliance, BOGA, le Québec se place du bon côté de
l'histoire. Nous pouvons en être fiers.
Mme Gagnon (Catherine Alexandra) :
Pour accélérer la transition sociale et écologique, l'implémentation de
programmes et de politiques doit être cohérente avec les prédictions des
scientifiques et les cibles ambitieuses qui s'y rattachent, et ce, sans
compromis. L'élimination de l'exploitation et de l'exploration pétrolière et
gazière au Québec est une de ces mesures cohérentes, mais à condition qu'elle s'exprime
clairement et sans compromis. Les pseudoprojets pilotes, les compensations
financières proposées sont, en effet, inacceptables. Soyons clairs, l'argent
public doit servir à financer une transition véritable et non à enrichir
davantage les compagnies d'énergies fossiles.
L'industrie pétrolière et gazière est déjà
aux abois pour demander des compensations financières à l'État québécois. Or, légalement,
il n'est pas obligé de le faire. L'Assemblée nationale est souveraine. Comme l'a
démontré le Centre québécois du droit de l'environnement dans un rapport publié
en juin, l'Assemblée nationale peut adopter une loi mettant un terme à l'industrie
des hydrocarbures sur son territoire sans indemnité pour les entreprises
concernées, et ce, même rétroactivement. Si le gouvernement Legault va de l'avant
avec des indemnisations, il s'agira donc d'un choix politique et non d'une
obligation juridique.
Nous souhaitons rappeler qu'au cours des
10 dernières années le gouvernement du Québec a reçu environ 12 millions
pour les permis d'exploration, mais a versé plus de 120 millions en
subventions pour des projets pétroliers qui n'ont jamais été réalisés.
Mme Waridel (Laure) : Que
dire des dizaines de millions devant être dépensés par les contribuables pour
les 775 puits gaziers et pétroliers abandonnés par l'industrie sur notre
territoire? Comment peut-on tolérer une telle irresponsabilité corporative au
Québec? En bon comptable, nous demandons à François Legault et à toute son
équipe, incluant cette commission, de faire tous les calculs en tenant compte
des coûts environnementaux et sociaux générés par l'industrie pétrolière et
gazière. Vous serez alors forcés de constater que, si des indemnisations sont à
verser, elles devraient sortir des poches de l'industrie des hydrocarbures pour
être versées à nos enfants qui devront assumer la facture immense de la crise
climatique, une facture qui ne se payera pas seulement en dollars, mais aussi
en souffrance pour des vies humaines, des vies qui ont tellement de valeur qu'elles
n'ont pas de prix.
L'industrie pétrolière et gazière ne
devrait pas tomber en bas de sa chaise en apprenant qu'en tant que contribuables
nous considérons qu'elle a déjà eu plus que sa part du gâteau. Elle savait,
depuis les années 70, que ses pratiques contribuaient à la dégradation de
la vie sur Terre et qu'une transition énergétique était plus que nécessaire.
Elle a préféré semer le doute et continuer à engranger un maximum de <profits
tout en discréditant les alternatives aux combustibles fossiles.
Mme Waridel (Laure) :
...maximum
de >profits tout en discréditant les alternatives aux combustibles
fossiles.
Mme Gagnon (Catherine Alexandra) :
L'idée des projets pilotes inscrits dans le projet de loi nous semble ici
douteuse puisqu'elle semble provenir directement de l'influence des lobbyistes
de l'industrie. Rappelons que, le 19 janvier dernier,
400 universitaires canadiens signaient une lettre pour condamner le projet
de crédit d'impôt fédéral à l'investissement pour le captage, l'utilisation et
le stockage de carbone, ce qu'on appelle le CUSC. Le projet de loi n° 21,
qui ouvre la porte à de tels projets pilotes de CUSC, offre ici un cadeau
potentiel à l'industrie des hydrocarbures pour des projets qui leur
permettraient de contourner les objectifs de la loi. Il est temps que le
gouvernement du Québec se tienne debout face à une industrie qui nous a coûté
beaucoup plus cher collectivement qu'elle ne pourra jamais rapporter.
Nous demandons au gouvernement de
reconnaître, dans cette loi, sa responsabilité à l'égard de nos enfants et des
générations futures en y reconnaissant le principe de l'équité
intergénérationnelle. Ceci est particulièrement important, considérant que les
changements climatiques, dont l'industrie des énergies fossiles est la plus
grande responsable, auront des conséquences sur plusieurs générations. Nous
refusons de laisser une dette écologique de cette ampleur à nos enfants. À vous
qui déciderez de l'issue de ce projet de loi, à vous ici présents ce soir, nous
vous demandons de penser à tous les enfants que vous connaissez et à ceux que
vous croisez d'ici et d'ailleurs. En tant que mères au front, nous vous demandons
de protéger leur santé et leur sécurité qui, nous le savons maintenant,
dépendent de la protection de l'environnement et qu'au lieu de compensation
financière que cet argent serve à réimaginer nos collectivités et l'économie
pour construire des systèmes résilients qui respectent les limites écologiques
de notre planète pour créer un futur plus juste et équitable pour les
générations à venir, mais aussi tous les habitants du territoire, incluant les
plus marginalisés. Et j'entends ici, entre autres, les autochtones qui ont des
droits sur ces territoires.
Mme Waridel (Laure) : Les
bonnes comme les mauvaises décisions se prennent une à la fois, elles
déterminent l'avenir. Considérant l'état d'urgence climatique dans laquelle
nous nous trouvons, nous n'avons plus le temps de prendre de mauvaises
décisions. Notre argent doit être mis au service d'une transition juste et
écologique. C'est pourquoi nous appuyons les demandes exprimées dans les
mémoires présentés par le Centre québécois du droit de l'environnement,
Équiterre, Nature Québec, la Fondation David-Suzuki, le Front commun pour la
transition énergétique, la coalition étudiante Arrêtons GNL, ainsi que par Éric
Pineault, professeur à l'Institut des sciences de l'environnement de l'UQAM,
ainsi que Marc Durand, professeur retraité du Département sciences et Terre...
pardon, sciences de la Terre et atmosphère de l'UQAM. Nous vous attendons tous
au front. Nos enfants ont besoin de vous. Merci.
Le Président (M. Lemay) : Merci
beaucoup pour votre exposé. Nous allons maintenant passer à la période d'échange
avec les membres de la commission, et je cède la parole à M. le ministre.
M. Julien : Oui, merci.
Merci beaucoup pour votre présentation, Mme Waridel et Mme Gagnon.
Écoutez, bien, j'avais eu l'occasion de lire le document que vous avez produit
puis, essentiellement, qui est conforme à ce que vous venez de dire,
essentiellement. Puis je comprenais assez bien que le volet indemnisation, ce n'était
pas votre tasse de thé puis qu'à la fin vous nommez les groupes qui, également,
ont amené ces discussions-là. Et bien honnêtement, bien, on a eu ces
discussions-là avec tous les groupes, et, si vous avez écouté, bien, vous
connaissez un peu la perspective qu'on y donne, à ces indemnisations-là.
• (17 h 50) •
Naturellement, Mme Waridel, quand
vous mentionnez... Quand vous mentionnez l'industrie, bien, tu sais, vous
faites un tout d'une industrie, mais il faut bien comprendre ici que ceux et
celles, là, qui ont participé à ces 182 licences, 62 puits, bien, ce
n'est pas les grandes pétrolières du monde, là, mais c'est des gens qui ont
accepté... À part ça, on peut leur prêter des intentions, là, mais ils ont
accepté de travailler dans un cadre légal où on a une responsabilité comme
gouvernement. On a autorisé ça. Alors, il y avait une loi, des règlements, puis
ils s'y sont conformés. Donc, c'est là, un peu, notre part de responsabilité,
comme gouvernement, comme État, c'est de venir dire : Oui, on peut
prétendre qu'ils le savaient, mais nous aussi, on le savait. Et juste pour
terminer cet <élément-là pour vous entendre par la suite...
M. Julien :
...juste
pour terminer cet >élément-là pour vous entendre par la suite, tu sais,
quand vous dites : il était temps, bien, pour moi, oui, peut-être qu'il
était temps, mais nous sommes les premiers à le faire. Nous sommes les premiers
à le faire. Et alors, c'est vrai qu'on peut intellectuellement dire qu'il était
temps, mais c'est quand même surprenant qu'on soit les premiers à le faire et c'est
un peu... Le volet indemnisation, je ne pense pas qu'on va convenir ensemble de
cette opportunité-là, mais c'est dans cette perspective-là qu'on l'amène à un
minimum parce que j'ai l'impression qu'on... mettons, on a pris une responsabilité
en l'autorisant de manière claire.
Mme Waridel (Laure) : Bien,
merci pour votre question, M. le ministre, et puis... Bien, d'abord, on a
commencé en vous félicitant. Donc, ça demeure tout entier. On est très heureux
d'être le Québec... que le Québec soit le premier.
Ceci dit, bien, vous savez à quel point l'industrie
a été gourmande par le passé. Vous savez qu'elles avaient, la plupart d'entre
elles, des études qui démontraient que le potentiel était extrêmement bas puis
que, dans bien des cas, c'était une opportunité pour aller chercher des
subventions pour alimenter différents volets. Mais, bon, je ne vais pas me
lancer dans ce débat-là, mais certains articles dans Le Devoir ont
été assez éloquents à cet égard-là, mettant en lumière qu'ils avaient eu,
effectivement, énormément de subventions déjà jusqu'à présent et puis que,
comparativement, puis on le dit dans notre présentation, au prix qu'ils ont
payé pour les permis... Moi, je vous dirais effectivement : que leur
permis soit remboursé. Moi, je serais prête à laisser aller ça parce que c'est
vrai qu'ils perdent ce droit-là, mais ce qu'ils demandent en ce moment est
beaucoup trop. Quand ils parlent du... C'est un peu le même problème qu'on a
avec la Loi sur l'expropriation, sur les terrains, quand on regarde les
municipalités qui veulent avoir accès à des espaces verts et qui doivent payer
le prix anticipé. Ça, ça n'a juste pas de bon sens.
Et l'autre chose, en fait, dans laquelle
on vous invite à être, c'est dans un autre paradigme économique, dans le sens
où on doit tenir compte des coûts environnementaux et sociaux. Et ça, c'est
indéniable. On le sait depuis le rapport Stern, il y a déjà plus d'une décennie,
que la crise climatique va coûter une fortune et que ce sont d'abord nos
enfants et petits-enfants qui vont devoir payer. Et on n'est pas en train de
budgéter ça, et ça, c'est inacceptable. Il faut qu'on fasse nos devoirs
collectivement et qu'on mette l'industrie aussi face à ces coûts-là parce qu'on
a une responsabilité collective.
Donc, je dirais que la position que le
mouvement a prise, c'est de dire non fermement. Mais maintenant, après ça,
bien, c'est vous les politiciens, puis on sait que votre tendance est plutôt à
donner une écoute assez importante à l'industrie. Donc, on est convaincus que l'industrie
ne restera pas en reste.
M. Julien : J'ai une
question là-dessus, Mme Waridel.Quelle démonstration par rapport à
cette phrase-là vous avez de ma part?
Mme Waridel (Laure) : Ah!
pas de... En fait de...
M. Julien : C'est parce
que je suis surpris parce que j'ai été reproché par l'industrie de ne pas les
avoir rencontrés, puis je ne les ai pas rencontrés.
Mme Waridel (Laure) : Ah!
O.K. Bien, en fait, il y a eu... Écoutez, M. le ministre, il y a eu tout le
débat sur GNL et on se rappelle les rencontres qui ont été permises. Je pensais
à ça. Je pense à ce qui se passe dans le secteur des forêts aussi, votre
collègue qui a exactement le même discours que l'industrie. Donc, je ne pense
pas que... ce n'est pas une surprise pour personne en fait de savoir qu'ils
disposent d'une bonne écoute à votre égard... de votre part.
M. Julien : Bien, vous
en parlerez avec M. Tetrault qui est venu ici cette semaine, mais je ne
pense pas qu'il a la même perception que vous, Mme Waridel, mais c'est
correct. À la fin, sur cet élément-là, je vous entends.
Mme Waridel (Laure) : Bien,
je suis ravie que M. Tetrault soit insatisfait aussi. Ça me rassure, je
vous dirais.
M. Julien : O.K. L'élément
qui me surprend, puis honnêtement, là, qui me surprend beaucoup, c'est quand madame...
excusez moi, Mme Catherine Gagnon, Mme Gagnon, les projets pilotes.
Honnêtement, on met les projets pilotes dans ce projet de loi là, là, parce
qu'on veut que, pour les perspectives environnementales, les puits qui ont été
forés... Puis on avait l'INRS qui disait : Ça coûte 1 million du
kilomètre, ces puits-là, là. S'il y a des projets... puis ça va être très peu
de puits qui vont pouvoir même avoir ces capacités-là par leur nature, mais si,
par grande chance, il y avait des projets qui viennent faciliter la transition
énergétique de manière scientifique, on dit : Bien, on n'est pas fermés à
l'idée. Puis on a... un pseudoprojet, puis vous pensez que les projets... C'est
ça. C'est ça, un pseudoprojet <découlant d'une pression...
M. Julien :
...un
pseudoprojet, puis vous pensez que les projets... C'est ça. C'est ça, un
pseudoprojet >découlant d'une pression de lobbyistes pétroliers.
Écoutez, là, ça, là, je vous le dis, pour moi, c'est n'importe quoi, là. C'est
marqué dans l'article qu'il n'y aura pas de possibilité de recherche des
hydrocarbures ni d'exploitation des hydrocarbures. Puis là il y en a qui disent :
Oui, mais si je fais de la captation, peut-être que je pourrais... Non. C'est
non. C'est non. Les seuls projets pilotes, c'est marqué noir sur blanc dans la
loi, c'est des projets pilotes qui vont permettre d'additionner des gestes dans
notre volonté, parce qu'il va falloir en additionner parce que les cibles sont
audacieuses, dans notre volonté de réduire les GES et de décarboner le Québec
le plus rapidement possible.
Alors, moi, si vous me dites que vous n'aimez
pas les projets pilotes parce que c'est des pseudoprojets de lobbyistes
pétroliers, bien, je vais être ouvert pour ne pas les mettre, bien honnêtement.
Mais ce n'est pas du tout l'intention qu'on a, aucunement. Et je vous assure qu'il
n'y a personne, actuellement, de vos lobbyistes pétroliers, qui trouve que les
projets pilotes qui sont inscrits ici, là, c'est à leur satisfaction.
Mais exprimez-moi un peu vos craintes,
considérant que c'est écrit noir sur blanc dans l'article 42 qu'il n'y a
pas d'exploitation, pas d'exploration d'hydrocarbures qui est permise. Puis l'INRS
parlait ce matin... En réalité, ça peut être de l'hydrogène qui serait vert,
qui serait mis dans des fonds des puits, ça pourrait être de la géothermie.
Puis on avait des spécialistes, des gens du domaine qui disaient que ça
prendrait plus de flexibilité parce qu'on aimerait ça pouvoir bénéficier de ces
projets-là, comme universitaires, justement, pour accélérer la transition
énergétique. Puis vous le dites, là, des lobbyistes pétroliers pour des
pseudoprojets pilotes... sur quelle base?
Mme Gagnon (Catherine Alexandra) :
Bien, d'abord, je suis contente de vous entendre dire...
Mme Waridel (Laure) : Vas-y
puis après je continuerai.
Mme Gagnon (Catherine Alexandra) :
Oui. Bien, d'abord, je suis contente de vous entendre dire que vous voyez,
vous, dans le projet de loi, que c'est clair que ces projets pilotes là ne
pourraient pas servir à blanchir certaines émissions de gaz par certaines
compagnies, parce que, dans l'Ouest, c'est le cas. Ça a été très décrié par
certains scientifiques que de pouvoir capter du carbone et le stoquer, ce
serait une manière de blanchir un peu l'industrie, les industries sales, en
disant : Bien oui, on en capte en utilisant des puits, ça nous permet d'émettre
un peu plus, donc, tu sais, pour atteindre une certaine carboneutralité. Mais
je suis contente de vous entendre dire que vous, tel qu'il est écrit, vous
jugez que c'est très clair, noir sur blanc, que ce ne serait pas possible. Mais
Laure peut rebondir là-dessus.
M. Julien : Bien, Mme Gagnon,
vous me... Mme Gagnon, si vous me permettez, ça a trois lignes. Donc, je
vais le lire puis vous me direz en quoi ce n'est pas clair : «Un projet
pilote mis en oeuvre en vertu du présent chapitre ne peut avoir pour effet de
permettre la recherche d'hydrocarbures ou de réservoirs souterrains, la
production d'hydrocarbures ou l'exploitation de la saumure.» Trois lignes
limpides comme de l'eau. Alors, c'est où qu'on a un enjeu?
Mme Gagnon (Catherine Alexandra) :
Vas-y, Laure.
Mme Waridel (Laure) : Si
vous me permettez, en fait, je vous inviterais à lire, on vous l'a mis en référence
dans notre mémoire, la lettre des 400 universitaires qui s'opposent à l'aide
fédérale de stockage du carbone, parce que la dynamique qu'on craint, elle est
très, très bien exprimée en détail dans ce... dans cette lettre-là, pardon,
parce que c'est des éléments... Et là, effectivement, c'est très bien rédigé,,
clairement dans la lettre. Mais après, il y a toutes sortes d'exceptions qui,
possiblement, pourraient être un risque. Si on se fie à ce qui s'est passé au
fédéral, donc, ça serait d'éviter les écueils. Il y a quand même... La manière
dont... Ce que vous avez lu est assez clair, mais après, les autres éléments,
il y a quand... Dans l'annexe, il y a quand même des éléments qui sont moins
clairs. Ça fait que...
• (18 heures) •
M. Julien : Oui, mais
juste là-dessus, Mme Waridel, si vous permettez,je comprends puis
je partage même les craintes par rapport à certaines prétentions de producteurs
d'hydrocarbures de venir contrebalancer ces productions-là par du captage de
carbone. Mais ici, au Québec, le projet de loi dit : Vous ne pouvez pas
exploiter. S'il est adopté, là, pas d'exploitation, pas d'exploration. Donc, ça
n'existe plus. Et les projets pilotes ne doivent pas, même pas permettre, de
manière pilote, une exploitation et une exploration. Donc, je peux comprendre
que certains prétendent autre chose, par exemple, dans l'Ouest canadien, mais
si on réfère au projet de loi du Québec, là, qui est devant vous, il n'y a pas de
substance aux prétentions que ces éléments-là sont amenés par des <lobbyistes
pétroliers...
>
18 h (version révisée)
<17855
M. Julien :
...ces éléments-là sont amenés par des >lobbyistes pétroliers. Un
lobbyiste pétrolier qui nous dirait qu'il ne peut pas faire d'exploitation puis
de l'exploration au Québec, je ne comprends pas son objectif.
Mme Waridel (Laure) : D'accord,
M. le ministre. Ici, dans le fond, le plus... le projet pilote est donc de
récupérer le méthane qui est émis des puits, mais que l'intérêt le plus grand
serait, en fait, de le fermer. Vous, vous allez envoyer des inspecteurs pour
voir si ce qu'ils font, en fait... vous aurez l'expertise pour dire :
Bien, dans le fond, on aurait pu complètement le caper au lieu d'exploiter le
méthane que, dans le fond, on peut quand même tirer? Parce qu'on voit, hein,
les inspecteurs en environnement qu'on a en ce moment sur le terrain... On n'est
même pas capable d'identifier exactement où sont les 775 puits qui ont été
abandonnés par l'industrie. Ça fait qu'il y a un suivi qui est à faire à ce
niveau-là, et moi, ce qui m'inquiète, c'est de voir à quel point on n'a pas
tendance à faire les suivis adéquats. Et, en fait, tant mieux qu'il y ait cette
disposition dans le projet de loi, que ce ne soit pas votre intention, mais
assurons-nous après qu'on met les ressources nécessaires pour le suivi et qu'effectivement
il n'y a pas des sous qui, finalement, servent à maintenir des puits sous
prétexte de récupération de méthane, alors qu'ils pourraient être complètement
fermés.
M. Julien : Mais je
réitère, Mme Waridel, je m'excuse, mais le projet de loi dit qu'il ne peut
pas y avoir d'exploration et d'exploitation d'hydrocarbures. Donc, les projets
méthane que vous mentionnez, non, ce n'est pas possible.
À la fin, je veux juste mentionner, si
vous avez une suggestion pour mettre dans la loi un projet pilote qui, à l'aide
des puits déjà forés, favorisera la transition énergétique et que la
formulation que vous souhaitez y apporter est plus limpide que la mienne, je
souhaite l'écouter.
Mme Waridel (Laure) : Je
vous remercie pour votre ouverture, M. le ministre. Je ne suis pas une
juriste, mais je suis convaincue que nos collègues du centre québécois de l'environnement
auront peut-être des propositions plus intéressantes que nous à vous faire.
Mais, écoutez, vous semblez tellement habité par cette envie de ne pas subventionner
des projets pilotes qui seraient nuisibles à l'environnement, je suis
absolument ravie d'entendre ça. Puis ce que je souhaite, c'est que le
gouvernement mette à disposition vraiment les ressources nécessaires pour s'assurer
après de la bonne utilisation des sous pour ces projets pilotes là. Parce que c'est
sûr que le mouvement Mères au front est en faveur de solutions, c'est là-dessus
qu'on travaille, c'est notre message clé, mais assurons-nous qu'on fait les
choses vraiment, vraiment correctement. Ça fait que je suis contente de voir à
quel point vous êtes convaincu.
M. Julien : Bien, vous êtes
bien aimable. Effectivement, vous touchez des cordes sensibles, parce que moi
aussi, je suis un comptable. Mais ce n'est pas parce qu'on est comptable qu'on
est con, et bien au contraire. Et honnêtement, quand on mentionne que l'industrie
est proche de nous, bien, moi, je ne les rencontre pas. Et, des intentions
comme ça, je ne souhaite pas qu'on m'en fasse, sauf si on peut les démontrer,
parce que ce n'est pas mon cas.
Moi, mon cas ici, là, moi, c'est Mathilde
et Arnaud. C'est le nom de mes enfants. J'ai la même perspective que vous puis
je pense que le projet de loi qu'on a devant nous est un pas, un excellent pas
dans une direction qu'on doit emprunter. Je pense qu'on peut le bonifier, mais
je ne voudrais pas prétendre que des lobbys pétroliers nous ont aidés à écrire
cette loi-là. Je vous le dis, là, il n'y a pas beaucoup de lobbys pétroliers
qui aiment la loi actuellement.
Mme Gagnon (Catherine Alexandra) :
Bon, bien, on est heureuses de l'entendre.
Mme Waridel (Laure) :
Bien, je suis vraiment ravie d'entendre ça. Puis ça veut dire que vous avez
pris... espérons que ça restera une bonne habitude, pour la suite, avec d'autres
types d'industries potentiellement polluantes, parce que, là, on n'a plus le
temps, comme on le disait dans notre mémoire, de prendre des mauvaises
décisions. L'heure est à l'urgence. Les rapports du GIEC sont chaque fois plus
alarmants et ils imposent un changement de paradigme aussi économique pour
tenir compte des coûts environnementaux et sociaux, et ça, ça demande de l'audace.
Et on souhaite que votre gouvernement l'ait,
cette audace-là. Et on pense que ce projet de loi là, en fait, puis on a
commencé en vous félicitant, est justement le début de quelque chose qu'on
souhaite encore plus grand.
M. Julien : Parfait. Il
reste combien de temps?
Le Président (M. Lemay) :
C'est la fin de ce bloc d'échange.
M. Julien : Mesdames,
merci. Merci infiniment pour votre présentation. C'est très apprécié.
Mme Gagnon (Catherine Alexandra) :
Merci. Bonne soirée.
Mme Waridel (Laure) : Merci
pour votre écoute.
Le Président (M. Lemay) :
Très bien. Alors, nous allons passer maintenant à l'opposition officielle, M.
le député de Mont-Royal—Outremont, pour une période d'environ
11 minutes.
M. Arcand : Merci
infiniment, Mme Gendron, Mme Waridel. Bonjour. C'est un plaisir. Mme Waridel,
on s'est vus dans une vie antérieure et on est donc très heureux de vous
retrouver aujourd'hui.
Vous avez vu que le ministre aimerait
beaucoup avoir une cérémonie de reconnaissance, à un moment donné, là. Est-ce
que ce sera possible? Mais je vais vous donner, au moins au début, une assez
bonne nouvelle. C'est que ce projet de loi, même s'il y a des choses à ajuster
dans le projet de loi, on s'est tous dit que, sur le principe... tous les
partis <politiques...
M. Arcand :
...on
s'est tous dit que, sur le principe... tous les partis >politiques à l'Assemblée
nationale, sur le principe, on dit : On est d'accord avec le projet de loi
dans l'ensemble de ce côté-là. Alors, vous n'avez pas tellement d'enjeux sur le
fait que ce projet de loi là va sûrement, éventuellement, être adopté pour la
suite des choses.
Ma question, évidemment, va un peu dans le
même sens que les questions que le ministre a posées. Et je comprends qu'il y a
des entreprises qui, certainement, profitent d'une situation. Vous avez parlé
du crédit d'impôt fédéral, etc., mais nous, on a eu aujourd'hui des
interventions de différents groupes mais on a eu aussi, il y a quelques heures,
des interventions de l'INRS, qui est intervenu, puis ils avaient l'air à avoir,
d'une part, une position extrêmement, je dirais, positive sur les projets pilotes.
Parce qu'eux autres, ils disent même : Écoutez, on veut étendre même la
limite par rapport à ça, on veut des projets pilotes beaucoup plus flexibles.
Et je vais vous dire, ils nous ont parlé de géothermie, ils nous ont parlé
évidemment du captage de carbone, le stockage d'hydrogène, etc.
J'essaie de voir, là. Je comprends la
méfiance que vous pouvez avoir par rapport à certaines industries qui se
servent de ça pour essayer de calmer le jeu actuellement, mais, si on parlait
de projets pilotes à caractère scientifique, qui seraient financés par des
fonds publics et qui seraient, dans une certaine mesure, contrôlés par le
gouvernement, est-ce que c'est quelque chose qui est, à vos yeux, inacceptable?
Mme Waridel (Laure) : Oui.
Bien, en fait, évidemment que si les projets pilotes permettent de contribuer à
développer des solutions, notamment en recherche... puis j'ai beaucoup de
collègues scientifiques, effectivement, qui travaillent à des alternatives,
notamment des chercheurs à Polytechnique, à l'ETS, et autres. C'est juste le
contrôle qui parfois est manquant pour s'assurer qu'on atteint effectivement
nos objectifs par la suite. Donc, si la loi est bien rédigée, si on s'assure qu'il
n'y a pas de... si on veut, de faille par laquelle on peut passer pour
finalement servir à financer autre chose que l'intention première, évidemment
qu'on est en faveur de solutions.
Puis il y a beaucoup d'innovations
technologiques qui vont être nécessaires pour trouver des solutions. Mais, en
même temps, nous, ce qu'on souhaite dans le mouvement, c'est appeler à une
réflexion plus large parce qu'on ne pense pas que c'est la technologie qui va
nous sauver, loin de là. Ça fait des années et des années qu'on parle de captation
de carbone, qu'on parle de toutes sortes de stratégies puis on n'y arrive pas.
Puis je trouve que l'image la plus claire pour ça, c'est comme on est face à un
bain qui déborde, là. Le robinet, il coule. On continue à extraire des énergies...
des hydrocarbures sous différentes formes, à les utiliser, puis, au lieu de
fermer le robinet, on travaille à développer des nouvelles manières, des
nouveaux... des nouvelles chaudières, des nouveaux plats pour essayer d'extraire
l'eau du bain autrement alors qu'il déborde. Tu sais, à un moment donné, il
faut aller vers l'essence du problème, avoir ce courage-là.
• (18 h 10) •
C'est sûr qu'on a des sociétés qui
dépendent des énergies fossiles de manière claire et nette, mais le Québec se
trouve dans une position privilégiée pour être la locomotive de la transition
écologique au Québec. Puis je vous dirais, ce n'est pas juste à cause de notre
hydroélectricité, loin de là. C'est plutôt parce qu'on a un tissu social qui
est très serré. Au Québec, on peut faire les choses très rapidement. On l'a vu
pendant la Révolution tranquille. En six ans, il y a eu des changements
majeurs, des transformations sociales qui caractérisent encore le Québec d'aujourd'hui,
qui se sont pris dans une période de six ans. Donc, on a besoin d'avoir ce même
élan pour protéger l'avenir de nos enfants.
Et, à cet égard-là, le Québec ressemble à
beaucoup de sociétés scandinaves, c'est-à-dire, c'est des plus petites
populations qui partagent une langue, donc avec un tissu social très fort. Ça
fait que profitons de cet avantage-là, social, qui n'est pas juste
hydroélectrique, pour inventer une nouvelle société qui soit plus écologique et
plus équitable aussi parce que ça va ensemble. Et ce sera une société qui sera
plus saine <aussi...
Mme Waridel (Laure) :
Ça
fait que profitons de cet avantage-là, social, qui n'est pas juste
hydroélectrique, pour inventer une nouvelle société qui soit plus écologique et
plus équitable aussi parce que ça va ensemble. Et ce sera une société qui sera
plus saine >aussi. Parce que vous savez que beaucoup des alternatives
qui permettent de réduire nos émissions de gaz à effet de serre amènent
davantage de partage dans la société et amènent aussi des conditions qui sont
favorables à une meilleure santé, qu'on pense au transport actif, qu'on pense à
la réduction de la consommation de viande, qu'on pense aux espaces verts en
milieu urbain, et autres, au verdissement, à la...
On est tellement privilégiés d'avoir
autant de solutions à notre ...(panne de son)... On a besoin d'avoir des élus
...(panne de son)... nous mènent dans la bonne direction et qui permettent de
développer une architecture des choix qui fera en sorte que les citoyens seront
amenés à prendre des meilleures décisions, c'est-à-dire que les choix les plus
écologiques soient aussi les choix qui coûtent le moins cher parce qu'on aura
des politiques d'écofiscalité, seront les choix les plus faciles et les plus
agréables à faire. Comme c'est le cas, si vous allez passer un temps à
Copenhague ou dans d'autres villes de Scandinavie, vous verrez comment c'est
facile de faire les bons ...(panne de son)... Puis on a ce potentiel-là au
Québec, puis c'est pour ça que l'argent, là, qu'on veut... que l'industrie
quémande, on pense qu'il faut le mettre dans le développement de ces
transformations-là, qui sont aussi sociales et pas juste technologiques. Merci.
Puis c'est un plaisir de vous revoir, M.
Arcand, en passant.
M. Arcand : Bien oui, bien
oui. Très bien.
Moi, vous savez, on est quatre partis politiques
ici présents aujourd'hui, hein? Dans quelques mois, on est en campagne
électorale, tout le monde a besoin d'un programme. Alors, pendant que vous êtes
là, Mme Gendron, Mme Waridel, vous avez dit, dans votre commentaire,
vous avez dit : Nous avons besoin que les politiciens posent des gestes
plus ambitieux encore, alors guidez-nous dans nos futurs programmes de campagne
électorale. Quels sont les gestes plus ambitieux que vous aimeriez que l'on
pose au cours de la prochaine année ou des prochaines années?
Mme Gagnon (Catherine Alexandra) :
Bien, déjà là, le projet de loi, on doit le réitérer, là, c'est vraiment,
pour nous, déjà un pas dans la bonne direction. Mais je pense qu'il va falloir
imaginer toutes sortes de choses pour continuer. On pourrait embrayer sur toute
la question forestière, mais je ne sais pas si c'est une tangente qu'on
souhaite prendre maintenant. Oui, d'abord lire le livre de Laure Waridel, mais
de réimaginer l'utilisation de notre territoire d'une manière où on cesse d'empiéter,
de créer une dette écologique qui va être léguée à nos enfants, de toutes
sortes de manières.
Je pense qu'on peut être très innovants,
entre autres, sur comment qu'on aborde l'industrie forestière. On pourrait en
discuter peut-être une autre fois, mais ça, c'est un sujet nécessairement qu'il
va falloir aborder, je pense. Parce qu'on l'a... on voit que cet empiétement
sur notre vaste territoire du Nord a des conséquences écologiques, a des
conséquences sur des populations autochtones. Donc, ça, ça pourrait être un
point qui est très fort et très cher à Mères au front, je pense, l'utilisation
et les coupes forestières, la manière qu'on a orienté l'industrie forestière
pendant les dernières années.
Pistes de solution... Je ne sais pas,
Laure... Il y a mille choses dont on pourrait discuter, mais je ne sais pas...
Mme Waridel (Laure) : Oui.
Bien, en fait, une des bases... un des livres qu'on... bien, en fait, c'est le
résumé de ma thèse de doctorat, La transition, c'est maintenant, puis
qui met en lumière, justement, énormément de solutions qui sont déjà en train d'émerger
au Québec. Il y a beaucoup de gens qui font un travail extraordinaire, qui est
dans l'ombre et qui pourrait être amplifié et devenir les nouvelles normes.
M. Arcand : C'est ça.
Écoutez, il me reste peu de temps, je pense. Alors, il me reste deux minutes. J'avais
une question, évidemment, sur un sujet que vous avez abordé. Vous savez que
Questerre a une entente, semble-t-il, avec les Abénaquis pour des projets. Comment
vous traiteriez ça, si vous étiez en politique? Est-ce que vous donnez un
permis? Est-ce qu'au nom de l'autodétermination... enfin, peu importe ce qu'on
peut appeler, vous, ça représente quand même une certaine difficulté, s'il y a
des communautés autochtones qui décident, par exemple, de faire affaire
directement avec des compagnies pétrolières?
Mme Waridel (Laure) : Veux-tu...
Bien, je peux peut-être donner un début de réponse puis tu compléteras,
Catherine.
En fait, pour nous, la capacité de décider
des communautés autochtones, elle est fondamentale, puis c'est à eux de
décider. Après ça, il faut voir quelles sont les entités au sein des
communautés qui ont vraiment le pouvoir de décision parce que... Bien là, cette
partie-là, sur notre mémoire, je dois dire que ce n'est pas nous qui l'avons
rédigée, c'est Marie St-Arnaud. On pourrait vous mettre en lien pour des réponses
plus détaillées sur cette question-là. Mais, pour nous, évidemment, la question
des communautés autochtones, elles doivent être écoutées. Mais après ça, il y a
d'autres fondements plus larges liés au développement <durable...
Mme Waridel (Laure) :
Mais
après ça, il y a d'autres fondements plus larges liés au développement >durable,
d'ailleurs, que vous connaissez du temps où votre gouvernement a fait adopter
la Loi sur le développement durable, qui devraient... donc qui cherchent un
équilibre entre le social, l'économique et l'environnemental, qui devraient
être au cœur du processus de décision, mais aussi qui touchent l'ensemble de la
communauté.
Je ne sais pas, Catherine, si tu veux...
Mme Gagnon (Catherine Alexandra) :
Non, ça va. Tu as fait le résumé de ce que j'aurais dit. Oui.
Le Président (M. Lemay) : ...complète
ce bloc d'échange. Alors, nous allons maintenant céder la parole...
M. Arcand : Alors, merci. Merci
beaucoup. C'est un plaisir.
Le Président (M. Lemay) : ...au
deuxième groupe d'opposition avec la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques pour
environ 2 min 45 s.
Mme Massé : Oui. Bonjour, mesdames.
Bonjour, mes soeurs de lutte de Mères au front.
En fait, vous avez abordé la question de
la transparence, de l'importance d'avoir des données qui sont accessibles aux
citoyens et citoyennes, citoyens et citoyennes d'ailleurs qui font en sorte qu'aujourd'hui
l'État québécois est devant la nécessité de déposer un projet qui interdit l'exploration
et l'exploitation. C'est une façon de lever un chapeau à vos luttes de longue
date.
Ce que... Donc, cette question-là d'avoir
accès aux données, qu'est-ce que, dans... Parce que là, vous êtes là comme
citoyennes, là, comme ça aurait pu être n'importe quelles citoyennes des autres
groupes de Mères au front. Alors, qu'est-ce qui fait... pourquoi c'est si
important, pour les citoyens et citoyennes, d'avoir ce genre de données là? Ça
fait que ça, c'est une question. Moi, j'ai juste deux minutes, alors...
Et l'autre, c'est... on s'est fait dire
que, dans le fond, les droits des investisseurs, bien, il fallait respecter ça,
parce qu'on avait pris des engagements, on leur avait permis d'explorer, etc. Vous
en pensez quoi, vous, par rapport à ces droits-là des investisseurs?
Mme Gagnon (Catherine Alexandra) :
Bien, si je peux répondre, Laure, là, bien, un, les deux questions, une ne
va pas sans l'autre, c'est-à-dire que, pour que le citoyen soit en mesure de
juger si les indemnisations, par exemple, face à l'industrie sont justifiées ou
pas, on doit avoir accès aux données, quels sont les niveaux de subventions. C'est
extrêmement difficile, avoir accès à ces données-là, quels sont les niveaux de
subventions qui ont été données exactement aux compagnies, quelles étaient les
ententes claires. Je pense que, pour prendre un choix éclairé, les citoyens
doivent avoir accès à ces données-là.
Ça m'amène à la deuxième question, qui
est, bon, si on sait exactement les chiffres, on va être vraiment en mesure de
se dire : Bon, bien là, vous avez eu assez votre part du gâteau. Mais, tu
sais, si on vous a donné... si vous avez payé 12 millions pour vos permis
d'exploitation, comme disait Laure, nous serions, à la limite, d'accord que ce
soit remboursé, pour être donnant-donnant puis pour être bons joueurs. Mais,
si, en plus, on vous a donné 120 millions de subventions, je pense que,
pour l'instant, comme je le dirais, on considère que, bien, c'est ça, vous avez
fait... vous avez pris votre part du gâteau, puis de partir avec plus, ce
serait comme l'enfant qui veut sortir de la fête avec le gâteau puis les jouets
au complet.
Mais pour ça, il faut les données, tu
sais, pour pouvoir prendre les choix... Même si on est à titre de citoyens,
nous autres, on est quand même des universitaires assez formées, mais je pense
que tout citoyen est capable, quand il a accès aux données, de voir les
chiffres et de voir ce qui a du sens et pas de sens au niveau de nos
contributions.
Est-ce que tu veux rajouter quelque chose,
Laure?
Mme Waridel (Laure) : Bien,
je dirais que trop souvent, puis ça, je le dis aussi à titre de chroniqueuse, il
y a des... quand on veut faire sortir l'information, on doit faire appel à la loi
d'accès à l'information, puis là, ça demande énormément de temps pour avoir les
données, des données qui devraient être rendues publiques. Ça fait que, quand
même, les journalistes, je pense à mes collègues, ont de la difficulté à
trouver des données, alors qu'ils doivent être ce qui permet à la société de
prendre des décisions. Imaginez quand c'est un simple citoyen ou une simple
citoyenne qui essaie d'avoir de l'information. Ce n'est vraiment pas évident.
Puis je pense qu'une saine démocratie...
Le Président (M. Lemay) : Merci,
Mme Waridel. Je dois vous interrompre à ce stade-ci...
Mme Waridel (Laure) : Oh! pardon.
Le Président (M. Lemieux) : ...et
maintenant céder la parole au député de Jonquière.
• (18 h 20) •
M. Gaudreault : Oui. Alors,
bonjour, merci beaucoup d'être là.
Vous savez, si vous avez suivi nos travaux
depuis quelques jours, on se questionne beaucoup, un peu le dilemme, là, de l'oeuf
ou la poule, jusqu'où on doit aller dans les indemnités pour éviter peut-être
des poursuites des compagnies, où, si on donne une indemnité, on achète la
paix, on n'a pas de poursuite.
Moi, j'aimerais ça vous entendre sur la
reconnaissance d'un préjudice écologique pour les générations futures. Tu sais,
on ne se pose pas ces questions-là, dans le fond, pour nos enfants. Et je sais
que ça a été reconnu dans certains pays, Pays-Bas, France, Irlande, récemment,
à la suite de procès ou en tout cas de... puis En Jeu qui s'en va aussi de ce
côté-là. Peut-être qu'on s'éloigne un petit peu du projet de loi, mais pas tant
que ça. Qu'est-ce qu'on pourrait faire, comme parlementaires, pour reconnaître
le préjudice écologique aux générations futures?
Mme Gagnon (Catherine
Alexandra) : Bien, d'abord, commencer par le calculer. Mais, Laure,
c'est ça sûrement que tu voudrais< dire...
Mme Gagnon (Catherine
Alexandra) :
Bien, d'abord, commencer par le calculer. Mais,
Laure, c'est ça sûrement que tu voudrais >dire, c'est-à-dire que le
préjudice écologique est toujours externalisé quand on analyse des projets,
alors qu'on sait maintenant qu'il y a des coûts immenses que la société doit
payer, là. Ce matin, dans le journal — moi, je suis de Rimouski — à
Sainte-Luce, on a mis 12 maisons en vente aux enchères à 3 000 $
parce qu'elles doivent être déplacées à cause de l'érosion côtière causée par
les changements climatiques. Il y a un coût énorme à notre société, mais ces
coûts sont toujours externalisés dans la prise de décision envers des projets.
Mais moi, je pense que le truc numéro un qui devrait être fait, c'est de
toujours considérer ces coûts-là à chaque décision qu'on prend pour un
développement x.
Tu peux rajouter, Laure.
Mme Waridel (Laure) : Mais,
de manière générale, en fait, le gouvernement devrait se donner un filtre dans
sa prise de décision, c'est-à-dire que toutes les décisions prises par le
gouvernement du Québec puis aux autres instances aussi devraient passer le
crible de leur impact sur l'avenir de nos enfants. Et donc, ça, c'est de
regarder le coût climatique, ce qui nous amène plus... vers plus d'émissions de
gaz à effet de serre devrait d'emblée être rejeté, alors que les
investissements qui nous permettent de réduire nos émissions de gaz à effet de
serre, de réduire notre empreinte écologique, au contraire, devraient être
encouragés. On n'a pas ce filtre-là. On fait des budgets, puis vous le savez
bien, financiers, mais on ne fait pas de budget carbone. On devrait se doter d'un
budget carbone. Puis ça, il y a longtemps que les groupes écologistes le
demandent, et ça nous aiderait à justement respecter le droit des futures
générations à un environnement sain.
Puis la poursuite se fait au niveau
fédéral par Environnement Jeunesse, mais, je veux dire, d'un point de vue
moral, on a une question à se poser. Puis, si la première responsabilité de nos
élus, ce n'est pas de veiller à protéger la sécurité de ses enfants, qu'est-ce
que c'est? Je veux dire, l'histoire, le développement des premières sociétés,
les premiers types de gouvernance sont nés de ce besoin-là, de confier une
partie de notre liberté en échange d'une protection sur notre sécurité, notre
santé. En ce moment, on sait qu'il y a une menace qui est existentielle...
Le Président (M. Lemay) : Alors,
merci beaucoup, Mme Waridel. C'est tout ce qui complète le temps qu'on avait.
Donc, merci, Mme Waridel et Mme Gagnon, de votre contribution à nos travaux.
Et la commission ajourne ses travaux jusqu'à
demain jeudi le 24 février 2022, après les affaires courantes, où elle
poursuivra les auditions publiques sur le projet de loi n° 21. Au revoir.
(Fin de la séance à 18 h 23)