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Version préliminaire

42nd Legislature, 2nd Session
(October 19, 2021 au August 28, 2022)

Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.

Pour en savoir plus sur le Journal des débats et ses différentes versions

Wednesday, February 23, 2022 - Vol. 46 N° 3

Special consultations and public hearings on Bill 21, an Act mainly to end petroleum exploration and production and the public financing of those activities


Aller directement au contenu du Journal des débats

Intervenants par tranches d'heure

  • 11 h

    • Lemay, Mathieu
  • 11 h 30

    • Lemay, Mathieu
    • Julien, Jonatan
    • Girard, Éric
    • Campeau, Richard
    • Arcand, Pierre
  • 12 h

    • Arcand, Pierre
    • Lemay, Mathieu
    • Massé, Manon
    • Gaudreault, Sylvain
  • 14 h 30

    • Lemay, Mathieu
  • 15 h

    • Lemay, Mathieu
    • Julien, Jonatan
    • Girard, Éric
    • Campeau, Richard
    • Arcand, Pierre
  • 15 h 30

    • Arcand, Pierre
    • Lemay, Mathieu
    • Massé, Manon
    • Gaudreault, Sylvain
  • 16 h

    • Lemay, Mathieu
    • Julien, Jonatan
    • Girard, Éric
    • Arcand, Pierre
    • Massé, Manon
  • 16 h 30

    • Massé, Manon
    • Lemay, Mathieu
    • Gaudreault, Sylvain
    • Julien, Jonatan
  • 17 h

    • Julien, Jonatan
    • Lemay, Mathieu
    • Arcand, Pierre
    • Massé, Manon
  • 17 h 30

    • Massé, Manon
    • Lemay, Mathieu
    • Gaudreault, Sylvain
    • Julien, Jonatan
  • 18 h

    • Julien, Jonatan
    • Lemay, Mathieu
    • Arcand, Pierre
    • Massé, Manon
    • Lemieux, Louis
    • Gaudreault, Sylvain

 

Journal des débats

11 h (version révisée)

(Onze heures vingt-six minutes)

Le Président (M. Lemay) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources naturelles ouverte. Et je demande à toutes les personnes présentes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

Alors, aujourd'hui, nous sommes réunis afin de poursuivre les consultations particulières et les auditions publiques sur le projet de loi n° 21, la Loi visant principalement à mettre fin à la recherche et à la production d'hydrocarbures ainsi qu'au financement public de ces activités.

Et, M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

Le Secrétaire : Oui, M. le Président, un seul remplacement : M. Tanguay (LaFontaine) est remplacé par M. Arcand (Mont-Royal—Outremont).

Auditions (suite)

Le Président (M. Lemay) : Merci, M. le secrétaire. Aujourd'hui, nous entendrons l'Institut national de la recherche scientifique, et d'ailleurs je les salue de ce pas, qui sont avec nous. Alors, je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour faire votre exposé, et, par la suite, il y aura une période d'échange avec les membres de la commission.

Mais d'abord, je vous invite à vous présenter, et ensuite vous pouvez y aller avec votre exposé.

Institut national de la recherche scientifique (INRS)

Mme Hénault-Ethier (Louise) : Bien, bonjour, M. le Président. M. le ministre, Mmes, MM. les députés et membres de la CAPERN, je vous remercie pour l'invitation à témoigner aujourd'hui, accompagnée d'experts du Centre Eau Terre Environnement de l'Institut national de la recherche scientifique dont j'assume la direction. Donc, je suis accompagnée de Louis-César Pasquier, Jasmin Raymond et Violaine Gascuel.

Donc, selon l'Agence internationale de l'énergie, aucune nouvelle exploitation d'hydrocarbures ne doit voir le jour pour atteindre la carboneutralité en 2050. L'interdiction d'exploiter les hydrocarbures au Québec s'aligne avec les connaissances scientifiques. Signal fort en matière de lutte aux changements climatiques, elle démontre l'engagement du Québec dans la transition énergétique.

Un puits duquel du méthane fuit ou qui menace l'eau souterraine doit être fermé. Mais, si les évaluations environnementales sont satisfaisantes, il pourrait être un allié dans la lutte aux changements climatiques en donnant accès à des réservoirs permettant la production ou le stockage d'énergies alternatives ou de carbone. L'usage des réservoirs souterrains sans exploitation des hydrocarbures sont compatibles avec une économie faible en carbone.

Je céderai d'abord la parole à la doctorante Violaine Gascuel, qui a travaillé sur l'évaluation du potentiel géothermique de l'île d'Anticosti et de la région de Bécancour.

Mme Gascuel (Violaine) : Merci, Louise. Alors, tout d'abord, j'aimerais rappeler qu'au Québec il est nécessaire de chauffer les bâtiments environ sept mois par an. En 2013, les besoins en chaleur représentaient 76 % de la consommation énergétique des bâtiments résidentiels et une part substantielle de celle des autres bâtiments. L'exploitation des ressources géothermiques québécoises permettrait de répondre à cette demande en chaleur. Une utilisation à grande échelle permettrait d'éviter les GES associés au chauffage et permettrait également de diminuer drastiquement la quantité d'électricité nécessaire, notamment en période de pointe hivernale.

Des systèmes géothermiques de faible profondeur sont déjà utilisés dans certains bâtiments de la province, notamment à l'Assemblée nationale. Cependant, la température du sous-sol augmente avec sa profondeur. L'exploitation de la chaleur contenue dans les formations rocheuses plus profondes serait donc plus efficace d'un point de vue énergétique. Son utilisation permettrait de répondre à la demande de gros consommateurs, comme des réseaux de chaleur urbains ou de grandes serres agricoles, le tout avec des coûts compétitifs.

Les systèmes les plus efficaces pour exploiter cette chaleur seraient les systèmes en boucle ouverte. Ceux-ci pompent directement l'eau souterraine vers la surface puis la réinjectent en profondeur après en avoir extrait la chaleur. Ils nécessitent néanmoins l'utilisation de formations rocheuses poreuses et perméables en profondeur, sans quoi ils ne peuvent pas fonctionner.

Or, ces caractéristiques, qui font d'une formation rocheuse une bonne cible pour les systèmes, en feraient également un réservoir souterrain, tel que défini dans le projet de loi proposé. En effet, il serait possible, d'un point de vue technique, d'y stocker du gaz naturel, justement à cause de sa porosité et perméabilité. L'interdiction de rechercher des réservoirs <souterrains...

Mme Gascuel (Violaine) : ...de sa porosité et perméabilité. L'interdiction de rechercher des réservoirs >souterrains dans le cadre d'un projet pilote interdit donc de fait la mise en oeuvre des systèmes géothermiques profonds en boucle ouverte.

Les systèmes géothermiques en boucle ouverte pourraient, par ailleurs, être combinés à l'extraction de minéraux critiques et stratégiques de l'eau souterraine, appelée saumure, si la présence de ceux-ci en concentration exploitable et démontrée. L'extraction de minéraux pourrait avoir lieu juste avant la réinjection de la saumure. Ce procédé éviterait d'avoir recours à des mines à ciel ouvert ou excavations. Bien sûr, pour que ce soit possible, il faudrait que l'exploitation de la saumure soit autorisée.

Je céderais ensuite la parole à Louis-César Pasquier, professeur agréé au Centre Eau Terre Environnement de l'INRS, qui s'intéresse depuis 10 ans à la capture, au stockage et à l'utilisation du carbone, notamment par le développement de procédés de carbonatation misant sur l'économie circulaire et permettant de réduire les émissions de CO2des industries.

• (11 h 30) •

M. Pasquier (Louis-César) : Merci, Violaine, pour l'introduction. Le Québec s'est donné des objectifs de réduction de ses émissions de gaz à effet de serre ambitieux. En 2030, les émissions qui sont actuellement à 2,6 % en dessous des niveaux de 1990 devront atteindre 37,5 %. Nous avons donc huit ans pour atteindre la cible que nous nous sommes fixée. Les outils dont nous disposons sont nombreux et aucun ne sera de trop dans ce défi.

Plus spécifiquement, le secteur industriel québécois représente 29,4 % du bilan des émissions de 2019. Ces émissions peuvent être scindées en deux parties, soit les émissions de combustion industrielle et les émissions de procédés.

Grâce à d'importants investissements en matière d'efficacité énergétique, les émissions de combustion sont en large baisse et vont continuer de baisser. Les émissions de procédés sont également à la baisse, mais grâce à la fermeture, il y a quelques années maintenant, des cuves Söderberg dans la production d'aluminium ou la fermeture de l'usine de magnésium Magnola, les principales catégories aux émissions... associées aux émissions de procédés sont la production de métaux non ferreux, l'aluminium, les métaux ferreux, l'acier, et les minéraux non métalliques, le ciment et la chaux.

Ces industries, qui sont un moteur économique important pour la province, ont pour la plupart des émissions incompressibles. On peut également mentionner la production d'énergies renouvelables permettant l'économie circulaire de matières organiques, comme la biométhanisation, qui, malheureusement, émettent également du CO2.

En résumé, malgré tous nos efforts de modernisation, de transition énergétique et de réduction de nos émissions à la source, une période de transformation sera nécessaire. La capture et le stockage du carbone, comme vous le savez peut-être, propose de retirer le CO2de flux gazeux ou même de l'air pour l'injecter dans des formations géologiques adéquates à plusieurs kilomètres de profondeur. Au Québec, des travaux antérieurs ont démontré un potentiel de stockage de plusieurs milliards de tonnes de CO2, notamment dans des régions où se trouvent les puits dont le texte de loi fait objet.

En ce sens, bon nombre de nos recommandations visent à assurer la pérennité des travaux de recherche et de développement nécessaires à un possible développement de cette filière au Québec tout en maintenant l'interdiction de fermer et d'exploiter les hydrocarbures de...

Je vous passe maintenant la parole à mon collègue Jasmin Raymond, professeur au Centre Eau Terre Environnement, hydrogéologue de formation et spécialisé dans l'énergie géothermique, qui s'est notamment intéressé à des applications en contexte de production agricole en serre au Québec.

M. Raymond (Jasmin) : Merci, Louis-César. Tous les acteurs du développement énergétique s'entendent pour dire que l'hydrogène, c'est le carburant du futur. Le Québec est particulièrement bien positionné pour produire de l'hydrogène vert compte tenu de son potentiel hydroélectrique. Mais, pour devenir un vrai leader dans le domaine, il faudra inévitablement développer une capacité de stockage, qui risque d'être un défi important pour la province.

Le stockage est essentiel pour arrimer la production d'hydrogène à la consommation, qui ne sont pas toujours en phase, surtout si l'on veut que l'hydrogène remplace de façon significative les hydrocarbures pétroliers que nous consommons, qui représentent, pour le moment, près de 40 % de notre bilan énergétique. Pour y arriver, il faudra développer des technologies de stockage souterrain, qui sont la seule option sécuritaire pour arriver à du stockage grand volume effectué à un coût compétitif, le stockage d'hydrogène effectué en surface étant réalisé avec un petit volume et des coûts beaucoup plus importants.

En ce moment, le stockage d'hydrogène effectué dans des cavités aménagées dans des roches constituées de sel est l'alternative privilégiée pour le stockage à grand volume. Le Québec est donc désavantagé puisque l'unique endroit dans la province où l'on compte des formations adéquates constituées de sel est dans le sous-sol des Îles-de-la-Madeleine, un endroit éloigné des consommateurs, où il serait illogique de faire du stockage.

Le sud de la province est toutefois constitué de bassins sédimentaires, les basses terres du Saint-Laurent, qui contiennent des réservoirs souterrains. Ces réservoirs, qui ont été par le passé des cibles pour l'exploration pétrolière, vont devenir des cibles pour l'exploration du stockage souterrain d'hydrogène dans le futur. Le projet de loi ouvre la porte à des projets pilotes qui permettraient l'utilisation des réservoirs souterrains pour des fins de stockage d'hydrogène en adéquation avec les objectifs de la transition énergétique sur autorisation du ministre.

Comme pour les autres technologies mentionnées <précédemment, le projet de loi demeure toutefois...

>


 
 

11 h 30 (version révisée)

<       M. Raymond (Jasmin) : Comme pour les autres technologies mentionnées >précédemment, le projet de loi demeure toutefois flou sur la démarche à entreprendre pour obtenir une autorisation ministérielle. Il est, bien entendu, comprenable que cette démarche ne soit pas encore définie pour le secteur de l'hydrogène puisque les technologies ne sont pas à maturité. Les technologies géothermiques permettent... précédemment décrites par ma collègue Violaine Gascuel permettent... pourraient être déployées sur le terrain à l'heure actuelle... et qu'il n'y a pas encore de cadre réglementaire au Québec. Il ne faudrait pas reproduire la même erreur et développer, avec quelques années de retard, ce cadre réglementaire pour le stockage souterrain d'hydrogène.

Il est donc temps de s'investir et de développer des projets de recherche, des projets pilotes sur le stockage souterrain d'hydrogène, et les autres technologies mentionnées par mes collègues, qui aideront à définir cette réglementation. Pour favoriser une réelle transition énergétique, il ne suffit pas de mettre fin à l'exploration des hydrocarbures pétroliers. Il faut favoriser l'essor des technologies propres, qui mettront en valeur le potentiel des réservoirs souterrains, et c'est ce qui mérite d'être amélioré, selon moi, dans le projet de loi.

Mme Hénault-Ethier (Louise) : Alors, nos recommandations se déclinent en trois axes, celles spécifiques aux articles du projet de loi, celles visant l'élaboration d'une stratégie nationale de reconversion des puits, comprenant des évaluations environnementales et un partage public des données d'exploration, de même que celles visant l'élaboration d'un cadre réglementaire clair tant pour l'exploration et l'exploitation des sources géothermiques profondes, du stockage d'hydrogène vert, de la séquestration du CO2 découplée de l'exploitation des hydrocarbures, de même que l'extraction écoresponsable de minéraux critiques et stratégiques à partir des saumures.

Les réservoirs souterrains peuvent contribuer à une réduction significative des émissions de GES, et il ne faudrait pas priver le Québec de leur potentiel. Le financement de projets pilotes permettrait au Québec d'assumer un leadership fort dans les domaines des énergies vertes. Le déploiement de ces technologies représenterait également une opportunité de création d'emplois. Grâce à son expertise en géologie, le Centre Eau Terre Environnement de l'Institut national de la recherche scientifique est stratégiquement positionné pour accompagner le Québec dans une vaste campagne d'acquisition de données sur le potentiel stratégique des réservoirs souterrains visant la réduction massive des GES.

Il nous fera plaisir de répondre à l'appel du gouvernement pour mettre en oeuvre les recommandations contenues dans le présent mémoire. Alors, messieurs dames, M. le Président, nous sommes disposés à prendre vos questions.

Le Président (M. Lemay) : Très bien. Merci, Mme Hénault-Ethier, ainsi que tous les représentants, pour cet exposé. Nous allons maintenant passer à la période d'échange avec les membres de la commission. M. le ministre, la parole est à vous pour environ 16 min 30 s.

M. Julien : Oui, merci. Merci beaucoup, M. le Président. Bien, bonjour, chers collègues, tout le monde. Premièrement, bien, merci à vous quatre. Honnêtement, là, on en voit de toutes sortes, des présentations, mais la vôtre était certainement bien structurée avec le temps à chacun et vos sujets bien étoffés. Donc, c'est très intéressant de vous écouter. Et également, bien, ça m'amène à plusieurs réflexions et questionnements, justement, pour faire évoluer potentiellement le projet de loi qu'on a devant nous lors des discussions qu'on aura avec les collègues, là, l'article par article.

Je comprends que, pour vous, les projets pilotes, c'est des éléments qui ont retenu beaucoup votre attention à l'intérieur du projet de loi, et à la fois pour la géothermie, captation de CO2, hydrogène, gestion de la saumure, MCS. Dans les discussions qu'on a eues jusqu'à présent, tous les groupes qui nous ont parlé de la notion de projet pilote l'ont amenée en disant... parce qu'il semble y avoir des flous dans le projet de loi sur à la fois les consultations, un BAPE, etc., puis moi, je suis assez ouvert, là, à venir renforcer ça. Moi, comme ministre, là... discrétionnaire ou quelque chose qui est pas mal plus encadrant, peut-être, puis j'essaie de voir votre proposition, parce que ma volonté, quand même, c'est de venir dire : Si on peut capter des potentiels de projets pilotes qui vont dans ces voies-là, qui sont des voies de transition énergétique et qui sont très positives, je ne voudrais pas que le parcours du combattant pour y arriver fasse en sorte que tout le monde dise : Bien, en fin de compte, on va recaper le trou puis on va s'en aller.

Donc, j'essaie de trouver le bon niveau, justement, pour permettre qu'un projet pilote, sur ces 62 puits potentiels des 182 licences, voit le jour sans être trop contraint... au bénéfice des Québécois. C'est quoi, votre proposition que vous voyez, là, pour y arriver?

Mme Hénault-Ethier (Louise) : Merci, M. le Président. Merci beaucoup, M. le député, pour la question. Donc, premièrement, il s'agit, pour nous, de ne pas fermer la porte à la recherche. Donc, quand on parle que le Québec se positionne stratégiquement pour permettre le développement bien encadré de projets pilotes, c'est pour permettre à nos chercheurs, justement, d'optimiser les technologies et d'évaluer les potentiels. Ceci dit, évidemment, on ne fait pas de la recherche en mettant en danger la <santé...

Mme Hénault-Ethier (Louise) : ...danger la >santé environnementale, la santé publique, et on ne veut pas le faire sur des technologies qui ne seraient pas publiquement acceptables. Quand nous, on parle de projets pilotes, ce n'est surtout pas des projets pilotes qui visent à perpétuer l'exploration ou l'exploitation des hydrocarbures. C'est vraiment bien délimité dans le cadre des technologies propres, là, qu'on vous a présentées.

Ceci étant dit, un projet pilote, bien, il y a toutes sortes de choses qui sont contraignantes. Dans notre mémoire, on fait état notamment de la durée des projets pilotes. Est-ce qu'une durée peut vraiment être délimitée en amont ou si on doit pouvoir avoir la possibilité d'étirer la durée d'un projet pilote en fonction de l'évolution d'un projet? Mais, avant même de se lancer dans des projets pilotes, je pense, la première chose à faire, c'est de s'assurer, selon les caractérisations qui sont déjà à la disponibilité du ministère ou des caractérisations complémentaires, que les puits concernés ne fuient pas du méthane ou qu'il n'y a pas d'enjeu de risque pour l'approvisionnement en eau potable des municipalités puisqu'il y a quand même la moitié des municipalités au Québec qui s'approvisionnent de sources souterraines.

Donc, c'est dans cette optique-là qu'on voit les projets pilotes. Je ne sais pas si mes collègues veulent compléter.

• (11 h 40) •

M. Julien : Il va y avoir d'autres sous-questions puis peut-être qu'il y aura des complémentaires sur les autres éléments. Alors, vous comprenez un peu l'objectif qu'on a. Alors, pour moi, je ne veux pas repousser... Dans l'éventualité qu'il y a adoption du projet de loi, je ne veux pas repousser aux calendes grecques, en réalité, l'obligation de réhabiliter les puits puis, après ça, faire les versements d'indemnisation, le cas échéant. Et je veux surtout éviter que quelqu'un trouve une voie de passage pour ne pas faire son travail en prétendant... un projet pilote.

D'un autre côté, si un projet pilote en vaut la peine, je veux qu'on puisse saisir cette opportunité-là, comme société, pour, justement, dans les volets que vous avez énoncés... de faire avancer le Québec en termes de cette transition qui a été mentionnée par un de vos collègues. On ne peut pas se permettre, par rapport à nos objectifs ambitieux, de ne pas additionner les solutions.

Donc, si je reviens sur le terrain des vaches, là, qu'est-ce qui me permettrait d'être efficient dans l'objectif que j'ai, justement, pour identifier en amont ou pour éviter de trop longs délais d'attente pour des prétendus projets pilotes? Tu sais, j'essaie de voir comment je vais réussir à être efficient pour choisir le bon grain des projets pilotes ou des potentiels que j'ai sur les 62 puits observés.

Mme Hénault-Ethier (Louise) : Bien, je pense, la première chose à faire, c'est vraiment une caractérisation rapide. S'il y a des puits qui nécessitent une attention immédiate et urgente, on les ferme de façon immédiate et urgente. Un puits qui fuit du méthane ou qui expose les sources d'eau souterraine à une contamination qui proviendrait de la surface, là, définitivement, il faut que ce soit fermé de façon rapide. Donc, déjà là, les projets pilotes ne peuvent pas se réaliser sur des puits qui ont mal été conçus et qui doivent être fermés.

Ceci étant dit, la deuxième chose, c'est que, dans le cadre de projets pilotes, on peut s'inspirer de d'autres pans de la réglementation québécoise. Notamment, dans le traitement des sols, ça prend un certificat d'autorisation pour démarrer un projet pilote. Alors, vous pourriez avoir un levier, un mécanisme pour vous assurer que les projets pilotes proposés sont responsables, ont une véritable fonction scientifique, et possiblement que les projets pilotes, vous pourriez les encadrer en favorisant un accompagnement par les institutions universitaires ou les centres de recherche, les CCTT, parce que c'est là qu'on va pouvoir réellement voir si le milieu de la recherche soutient de façon crédible l'avancée d'un projet pilote.

Donc, dans ce contexte-là où on a un maillage avec une équipe scientifique robuste d'une institution d'enseignement supérieur ou d'un centre de recherche reconnu par le gouvernement du Québec, accompagné d'un certificat d'autorisation, je pense que ce sont des balises qui vont nous permettre de ne pas repousser aux calendes grecques la fermeture de puits. De toute façon, les puits problématiques, ils ont été fermés en amont à cause des évaluations environnementales rapides, et les autres puits, on évite de pousser par en avant trop longtemps dans le temps, là, pour leur fermeture.

M. Julien : Une petite dernière question avant de passer la parole à mes collègues. Il y a deux volets. Premièrement, vous êtes le deuxième groupe qui mentionnez clairement que le trois ans plus deux ans n'est pas en pleine cohérence, parce qu'à la limite il pourrait y avoir des délais comme ça pour obliger certaines étapes, mais, à terme... puis certains projets pilotes, s'ils sont positifs, pourraient gagner à être pérennisés, puis, pour vous, ça ne fait pas de sens nécessairement d'avoir ces délais-là. Alors... Puis mon autre sous-question, c'est... Quand vous parlez de saumure, MCS, naturellement, pour vous, c'est toujours sans exploitation d'hydrocarbures de toutes sortes. Alors, c'est mes deux dernières questions.

Mme Hénault-Ethier (Louise) : Peut-être que ma collègue Violaine peut entreprendre la première partie de la réponse à propos des durées de projets pilotes et des saumures, et on complétera par la suite, au besoin.

Mme Gascuel (Violaine) : Oui, c'est ça. Donc, en préparant le mémoire, j'ai regardé quelles ont pu être les durées <pour...

Mme Gascuel (Violaine) : ...les durées >pour des projets pilotes qui ont permis le développement de nouvelles technologies, et on voit plusieurs exemples où il a pu y avoir des projets pilotes qui ont duré pendant 20 ans pour développer vraiment des nouveaux procédés qui ont aidé la science et qui ont aidé ces technologies à se développer. Donc, évidemment, ça ne durerait pas toujours 20 ans. Si on met en place des technologies qui sont mieux connues, ça pourrait durer beaucoup moins de temps, mais je pense qu'il faut laisser la porte ouverte. Et c'est pour ça qu'à mon avis il devrait plutôt y avoir un suivi de la part du ministère pour s'assurer que c'est réellement un projet pilote en cours et pas quelque chose qui évite à la compagnie d'avoir à fermer le puits tout de suite, mais c'est très important de laisser du temps et puis aussi de laisser le projet devenir pérein si jamais il démontre un bon potentiel.

M. Raymond (Jasmin) : En complément d'information ici, là, pour répondre à une des questions qui a été soulevée, ce qu'on propose concrètement, là... On comprend qu'à court terme le gouvernement veut aller de l'avant avec son projet de loi, mais ce qu'on propose dans notre mémoire, c'est que, suite à l'adoption du projet de loi, il faudrait définir le cadre réglementaire pour les projets pilotes, question de savoir quelles sont les règles à suivre pour obtenir une autorisation, qui détient les droits sur la ressource, comment peut-elle être exploitée dans un cadre environnemental responsable. En ce moment, c'est un peu ce qui manque au projet de loi et qui va devoir être défini dans la suite des choses si on veut bien valoriser le potentiel de nos réservoirs souterrains pour qu'ils profitent à la transition énergétique.

M. Julien : Parfait. Et, pour la saumure, l'opinement du bonnet disait que... ça confirmait ce que je vous disais?

M. Pasquier (Louis-César) : Oui, c'est peut-être... tout à fait, effectivement, c'est... Il y a un potentiel. Il y a des exemples d'utilisation de saumure comme source de minéraux critiques et stratégiques. Violaine l'a bien expliqué aussi. On peut combiner ce type d'exploitation avec des processus de géothermie. Donc, c'est dans ce principe-là qu'on mentionne une utilisation de la saumure.

M. Raymond (Jasmin) : Dans un contexte géothermique aussi, l'idée de réinjecter la saumure sous terre, tout ce qui est tombé en surface est retourné sous terre. Et, si on peut en même temps profiter pour extraire des minéraux, des minéraux qui seront utiles, par exemple, à la fabrication de batteries, comme le lithium, bien, pourquoi ne pas faire une pierre deux coups, en fait, pour rendre ces technologies encore plus rentables? Nous, c'est ce qu'on souhaite et c'est sur quoi on aimerait travailler dans le futur pour aider le Québec, vraiment, à se tourner vers une transition énergétique efficace.

Mme Hénault-Ethier (Louise) : D'ailleurs, si je peux compléter, au niveau des minéraux critiques et stratégiques, il y a des projets en Europe puis aux États-Unis qui ont démontré qu'on pouvait faire de la géothermie avec la récupération de lithium, par exemple, dans la saumure, là, pour les batteries des voitures électriques, disons, et ça permet donc de cofinancer les infrastructures pour la géothermie parce qu'on réussit à rentabiliser en faisant de l'extraction de minéraux critiques et... en fait, ces infrastructures-là, puis il faut penser...

Le Président (M. Lemay) : Mme Hénault-Éthier, son son a coupé, mais elle va sûrement se rejoindre à nous autres. En attendant, on va passer la parole au député de Lac-Saint-Jean, qui va y aller avec une nouvelle question.

M. Girard (Lac-Saint-Jean) : Alors, bonjour, tout le monde. Bonjour à vous quatre. Écoutez, c'est intéressant de vous entendre. Vous êtes quand même un institut de recherche, des spécialistes beaucoup plus spécialisés que moi dans toute la question de recherche. Puis moi, je ne sais pas si vous l'avez mentionné ou je ne l'ai pas bien saisi, mais peut-être de façon très simple, comment voyez-vous, là, la façon de combiner, exemple, vos projets de recherche et les projets pilotes qui pourraient être autorisés par le gouvernement? De quelle façon voyez-vous ça pour... d'une façon assez simple, de les combiner ensemble?

M. Raymond (Jasmin) : Bien, écoutez, à prime abord, je dirais, les projets pilotes, nous, dans le milieu universitaire, ce n'est pas notre rôle, vraiment, de les réaliser, mais c'est d'accompagner ceux qui voudront bien les réaliser, que ce soient les entreprises privées ou le gouvernement, pour s'assurer que, dans le cadre de ces projets pilotes là, on développe des bases scientifiques solides qui vont démontrer s'il y a rentabilité ou non des projets pilotes et s'ils peuvent être réalisés dans un cadre, là, qui répond aux normes environnementales. C'est là que nous, on a un rôle à jouer et c'est pour ça qu'aujourd'hui on met l'emphase, justement, sur ces projets pilotes.

M. Girard (Lac-Saint-Jean) : O.K., merci. Et comment voyez-vous, là, les projets pilotes dans des puits qui ont fait l'objet de fracturation?

M. Raymond (Jasmin) : Bien, c'est sûr que ce n'est <pas...

M. Raymond (Jasmin) : ...ce n'est >pas tous les puits pétroliers qui peuvent être réutilisés pour les projets pilotes, même que, dans la plupart des puits qui existent, là, probablement que c'est une minorité, mais l'idée, nous, ce qu'on voit, c'est que, si on peut réutiliser des puits existants... D'accord, ces puits-là ont coûté très cher à aménager. On parle de l'ordre du million de dollars par kilomètre de profondeur de forage. Et ne serait-ce que, si on peut en réutiliser un seul pour démontrer la viabilité, par exemple, d'un système géothermique, on fait une avancée qui, peut-être, dans le futur, pourra nous permettre de réaménager de nouveaux puits qui n'auraient pas été utilisés précédemment dans un cadre d'exploitation pétrolière et qui n'auraient pas fait sujet de fracturation hydraulique.

Mais évidemment, je pense qu'on a été clairs, ce qu'on propose, c'est d'évaluer si on peut les réutiliser dans un contexte environnemental sécuritaire. Évidemment, un puits qui aurait pu être, disons, endommagé, ce qui pose... problématique, ce n'est pas tellement la fracturation, mais c'est souvent le coffrage d'acier... pas le coffrage d'acier, mais le coffrage autour du puits, le coffrage de béton, qui n'est pas intègre et qui amène des fuites de méthane. Donc, dans un cadre où il y aurait un puits qui ne serait pas sécuritaire, bien, évidemment, là, qu'on... Je ne pense pas que ça vaut le risque de mener un projet pilote dans un puits qui n'est pas adéquat, là. Ça, c'est hors de question, bien entendu.

• (11 h 50) •

Le Président (M. Lemay) : Je vais passer la parole au député de Bourget.

M. Campeau : Merci pour votre présentation, présentation à quatre, dans les temps, pratique, sur le sujet. Merci. Ça fait du bien. Ce n'est pas ça... toujours ça qu'on a. Hier, en particulier, ce n'est pas toujours ça qu'on a eu.

Question très terre à terre. Ça me ressemble pas mal, ça. Le potentiel de géothermie, je sais que plus on va au creux, plus c'est chaud. Je suis très familier avec ça. Maintenant, ça va prendre combien de puits pour que ça fasse un effet sur la pointe? Vous avez dû regarder cet aspect-là. Si c'est juste une phase de développement, il faudrait-tu faire... creuser partout au Québec pour que ça vaille la peine, pour affecter la pointe? Avez-vous regardé cet aspect-là, économique?

M. Raymond (Jasmin) : Bien, je te laisse répondre en premier, Violaine, et je compléterai s'il y a besoin.

Mme Gascuel (Violaine) : D'accord. Donc, on ne l'a pas regardé de façon globale pour l'ensemble du Québec. Par contre, ça se voit, donc, au niveau d'un système. C'est déjà le cas, finalement, avec les systèmes de faible profondeur et ce sera également le cas avec les systèmes plus profonds. On va réduire la demande en pointe. Je pense qu'il y a assez peu de bâtiments comme résidentiels ou commerciaux au Québec qui se chauffent encore avec du gaz ou du mazout. Ils seraient à remplacer en priorité, mais on peut quand même... Et donc je pense que c'est quand même important de développer autant que possible cette technologie. Selon les endroits, on pourrait soit faire des systèmes profonds en boucle ouverte là où les roches sont appropriées, par exemple, et où il y a une forte demande et puis faire des systèmes peut-être moins profonds dans d'autres endroits.

M. Raymond (Jasmin) : Ce que je dirais pour compléter, c'est qu'en ce moment, bon, les systèmes de pompe à chaleur géothermique sont utilisés au Québec pour à la fois les résidences, les bâtiments institutionnels, commerciaux. Ça représente une très petite fraction de tout ce qui est le marché chauffage de la province. C'est peut-être 1 %, 2 %, je n'ai pas le chiffre exact, mais c'est très faible. Donc, évidemment, la quantité de systèmes installés n'est pas suffisante pour avoir un effet sur la consommation d'électricité en période de pointe. Si on favorise l'essor de la technologie, ça pourrait le devenir. On peut se tourner vers d'autres endroits. On peut prendre la Suède qui est le leader mondial des pompes à chaleur géothermique, la ville de Stockholm qui a fait le marché résidentiel... Oui?

Le Président (M. Lemay) : M. Raymond, je dois vous interrompre parce que le temps de la formation politique du gouvernement est écoulé. Je passe maintenant la parole au député de Mont-Royal—Outremont, porte-parole de l'opposition officielle.

M. Arcand : Merci infiniment, M. le Président. Alors, bienvenue parmi nous. Je vais essayer de faire en sorte qu'on puisse se parler dans un langage que les gens vont comprendre, parce qu'on est vraiment dans un niveau assez technique ce matin. Puis merci pour votre présentation qui est une présentation importante.

On va tout de suite essayer de régler une première affaire. Ce que vous dites, finalement, c'est que le projet pilote... les projets <pilotes...

M. Arcand : ... projets >pilotes, bon, doivent être contrôlés, qu'il y ait vraiment des règlements, mais vous voulez qu'il y ait quand même, en bout de ligne, dans le projet de loi, plus de flexibilité sur les projets pilotes. Est-ce que c'est ça que j'ai compris? Parce que vous dites : Écoutez, il est impératif qu'on se donne un cadre pour que la recherche aille de l'avant le plus rapidement possible, parce que, dans le cadre de la lutte aux changements climatiques, on lutte un peu contre la montre actuellement. Alors, est-ce que j'ai bien saisi ce que vous avez dit à ce niveau-là?

Mme Hénault-Ethier (Louise) : Bien oui, tout à fait. Les projets pilotes sont vraiment essentiels dans toute forme de recherche. En fait, notre société doit investir tant dans le développement de nouvelles technologies... mais, pour y arriver, il faut des essais, de la recherche, et, en fait, les projets pilotes sont la seule façon de faire des essais de mise à l'échelle. Donc, si on développe une technologie de façon théorique, en laboratoire, mais qu'on n'a pas le terrain pour les tester, bien, cette technologie-là ne maturera jamais.

Donc, les projets pilotes, là, sont tout à fait essentiels. Et oui, effectivement, il y a certains ajustements, dans le cadre du projet de loi, qui pourraient faire en sorte que les projets pilotes soient plus favorisés, mais qu'ils soient aussi mieux encadrés, juste simplement de clarifier les niveaux d'encadrement qu'il y a, mais aussi c'est au niveau de la facilité, c'est superimportant. Quand on essaie de faire des projets pilotes, il va y avoir toutes sortes de formes d'embûches. Les délais sont parfois longs. Donc, le délai... surtout si on veut avoir du cofinancement du privé, par exemple, pour les développements de projets pilotes, si les délais d'autorisation prennent, tu sais, des mois, voire des années, à être obtenus, on risque de perdre des opportunités de financement.

Donc, ça, c'est un des enjeux, là, si on veut vraiment faciliter la science pour faire des «fast track» de façon tout à fait encadrée, dans le respect de la Loi sur la qualité de l'environnement, mais donc se donner cette latitude-là au sein du projet de loi.

M. Raymond (Jasmin) : De façon très pragmatique, là, je rajouterais que, nous, ce qu'on a peur, c'est que, suite à l'adoption du projet de loi... c'est qu'il n'y a pas de projet pilote. Donc, ce qu'on dit et le message qu'on veut passer, c'est qu'il faut mettre les conditions gagnantes pour qu'il se passe quelque chose suite à l'adoption du projet de loi et qu'il y en ait, des projets pilotes.

M. Arcand : Donc, vous trouvez que c'était...

Mme Hénault-Ethier (Louise) : Un des éléments...

M. Arcand : Oui, tel que c'est présenté actuellement., c'est trop rigide, là. C'est ça?

M. Raymond (Jasmin) : J'aurais tendance à dire que ce n'est peut-être pas assez bien défini. En fait, il n'y a pas de règle claire entourant la mise en place des projets pilotes. On comprend que, dans le projet de loi actuel, ça peut peut-être être difficile de bien le définir parce que ce n'est peut-être pas l'objet du projet de loi, mais, suite à l'adoption du projet de loi, ça va prendre un cadre réglementaire clair, si on veut avoir des projets pilotes.

Mme Hénault-Ethier (Louise) : Et un élément complémentaire aussi, c'est au niveau de l'accessibilité des données. C'est beau, faire des projets pilotes, c'est beau, faire des projets de recherche subventionnés par l'État dans différents endroits, sur des terres du domaine public parfois, mais les données qui sont compilées doivent être accessibles. Ça pourrait être l'occasion, dans le cadre de ces projets pilotes là, d'aller mieux comprendre ce qui se passe sous terre, donc la géologie qui est déjà présente autour des puits existants, et ces données-là devraient être dans un repositoire accessible sur Internet facilement. Il y a déjà des repositoires qui existent sur les systèmes géologiques, sur les systèmes d'information hydrogéologiques au Québec. Ils méritent d'être modernisés. On mérite de détourner l'angle, qui est plutôt gazier, pétrolier, actuellement, de ces bases de données là, pour les rendre accessibles. Les bases de données publiquement accessibles, ça permet aux entreprises aussi de développer leurs modèles, leurs plans d'affaires et de savoir s'ils vont faire des investissements, de calculer le niveau de risque pour des investissements dans des technologies durables.

M. Arcand : J'aimerais vous poser une question, parce qu'on veut tous, évidemment, trouver la meilleure façon de réduire les GES, là, tout le monde, et, très évidemment, il y a vraiment une urgence. J'écoutais hier l'Association pétrolière et gazière. On parlait des nouvelles façons de faire. Bon, les biocarburants, c'est difficile parce que coûteux, c'est compliqué. On parlait du solaire. Les gens là-bas n'avaient pas l'air à voir grand potentiel d'avenir du solaire. Vous, vous avez dit : Écoutez, l'hydrogène peut être une voie qui est plus pratico-pratique, etc.

Je voulais juste voir si, demain matin, là, vous étiez la personne en charge de réduire les GES au Québec... vous feriez quoi. Qu'est-ce que vous essaieriez de développer? Quel est le secteur que vous seriez en train de prioriser actuellement?

M. Raymond (Jasmin) : Personnellement...

Mme Hénault-Ethier (Louise) : Peut-être...

M. Raymond (Jasmin) : Bien, vas-y, Louise.

Mme Hénault-Ethier (Louise) : J'allais dire : En ouverture, je mettrais...

M. Arcand : C'est une <longue...

M. Arcand : C'est une >longue question, mais vous comprenez ce que je veux dire.

Mme Hénault-Ethier (Louise) : Je crois que Jasmin et possiblement Louis-César vont vouloir rebondir là-dessus, mais personnellement, je ne mettrais pas tous mes oeufs dans le même panier. C'est un des enjeux qu'on a eu depuis la révolution industrielle, de n'avoir misé que sur les hydrocarbures, et une façon de diminuer le risque associé à ces technologies-là, parce qu'il y a toujours des risques qui peuvent y être associés, c'est de continuer les investissements dans le développement de multiples technologies. Donc, on ne peut pas tout mettre nos oeufs dans le même panier.

Un des enjeux qu'on voit en ce moment, tu sais, il y a des technologies, par exemple, de séquestration du CO2 dans lesquelles on essaie de faciliter, si on veut, l'extraction pétrolière, là, puis de se distancer, là, de l'arrêt de l'exploitation des hydrocarbures en disant : On va séquestrer le CO2. Ça, c'est dangereux, ça, c'est... On garde encore les oeufs dans le même panier. Ce qu'on doit faire, à l'heure actuelle, c'est investir tant du côté des énergies renouvelables, que ce soit l'éolien, le solaire, l'hydrogène, mais aussi des procédés biologiques, la biométhanisation.

C'est en ayant un portefeuille de solutions qu'on va être capables d'être plus résilients. Si on parle d'adaptation aux changements climatiques ou de résilience au sein d'un écosystème, ça, ça passe par la diversité qu'on a, d'organismes, dans ce système-là. En termes de grille énergétique, c'est la diversité des sources d'énergie qui vont faire en sorte qu'on va diminuer le risque, et non seulement ça, c'est aussi d'avoir un approvisionnement énergétique local. Vous voyez ce qui se passe en ce moment avec la Russie. C'est un grand fournisseur gazier pour l'Europe, ça entraîne des risques géopolitiques.

• (12 heures) •

Donc, si, au Québec, on était capables de continuer notre élan vers un approvisionnement énergétique local en se départissant de notre dépendance aux énergies fossiles qui viennent de l'extérieur... Évidemment, l'hydroélectricité, on l'a vu, ne peut pas solutionner tout. Maintenant, il faut se tourner vers une diversification du portefeuille, et c'est là qu'entre en jeu de soutenir vraiment la recherche dans tous les domaines et de ne pas fermer la porte en nommant spécifiquement des technologies dans lesquelles on s'enclave sans faciliter les autres.

Donc, je vais laisser Jasmin prendre la balle au bond là-dessus.

M. Raymond (Jasmin) : Oui, bien, moi, en fait, tout ce que je voulais dire, c'est qu'effectivement il n'y a pas une solution, mais des solutions. Et, si j'avais la chance de décider, bien, j'investirais en ce moment dans les solutions qui visent les réservoirs souterrains, comme l'énergie géothermique profonde, la séquestration du CO2, le stockage souterrain d'hydrogène, puisqu'en ce moment ce sont les solutions qui ne sont pas exploitées au Québec et qui sont en retard par rapport aux autres domaines. Donc, on doit rattraper ce retard-là si on veut que... bien mettre à profit nos réservoirs souterrains qui pourraient jouer un rôle dans la transition énergétique.

M. Arcand : Et ces trois solutions-là que vous mentionnez, est-ce qu'il y a des endroits à l'extérieur du Québec où ils sont plus avancés que nous, où, vraiment, ce que vous prônez semble donner des résultats intéressants, ou si c'est un cheminement qui risque d'être assez long?

M. Raymond (Jasmin) : Bien, moi, je suis ici, bon, pour parler du stockage souterrain d'hydrogène, et il y en a en ce moment, là. J'expliquais... Dans les dômes de sel, les cavités salines, c'est quelque chose qui se fait, par exemple, en Angleterre. Et, pour ce qui est de la géothermie, de la séquestration du CO2, je vais laisser Violaine, ensuite Louis-César, répondre.

Mme Gascuel (Violaine) : Alors, pour la géothermie, donc, c'est réalisé à un certain nombre d'endroits dans le monde, notamment dans le bassin de Paris, où il y a plus d'une dizaine de systèmes qui fonctionnent depuis les années 80. Donc, c'est quelque chose de bien connu et bien maîtrisé dans ce cadre-là. Bien sûr, il faut bien connaître les formations profondes. Donc, ça commencerait par de l'exploration pour pouvoir faire la même chose au Québec.

Donc, je laisserais la parole à...

M. Pasquier (Louis-César) : Pour ce qui est du CO2, effectivement, il y a de nombreux projets de séquestration du CO2 dans divers domaines qui se retrouvent un peu partout dans le monde. On en trouve en Alberta, entre autres. Ce qu'il faut garder en tête, c'est que, oui, il y a un potentiel qui avait été identifié au Québec, mais justement, ce que Violaine mentionnait, la caractérisation du réservoir est vraiment essentielle et importante... débutant. Donc, il faut effectivement se remettre à la tâche rapidement, si on veut rattraper le retard.

Mme Hénault-Ethier (Louise) : Puis, pour le stockage du CO2, il faut le découpler le plus possible de l'industrie de l'extraction et de l'exploitation des hydrocarbures. Comme M. Pasquier l'a précisé dans son exposé, c'est simplement pour les grandes industries qui ont une intensité énergétique difficile à combler autrement ou encore pour pallier à des émissions qui proviennent de sources fixes, donc d'une cheminée, par exemple, sur les usines de biométhanisation ou, quand on brûle le biogaz qui sort de nos sites d'enfouissement. Plutôt que de relarguer le CO2 dans l'atmosphère, on devrait rapidement le capturer, le séquestrer et <l'injecter sous terre...

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12 h (version révisée)

<       Mme Hénault-Ethier (Louise) : ...le capturer, le séquestrer, >l'injecter sous terre. Et il y a aussi une notion de dispersion à l'échelle du paysage, notamment en région. On voudrait bien faire la transition de nos serres agricoles, qui dépendent largement des hydrocarbures actuellement, vers l'électricité, mais ce n'est pas toutes les régions qui ont l'électricité triphasée, en ce moment, au Québec. La géothermie pourrait être un complément de chaleur vraiment essentiel qui est dispersé sur le territoire.

M. Arcand : D'accord. Je pense, je n'ai plus de temps, alors merci infiniment d'avoir répondu.

Le Président (M. Lemay) : Très bien, merci, le député de Mont-Royal—Outremont. Maintenant, je cède la parole au deuxième groupe d'opposition, Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.

Mme Massé : Oui. Bonjour, tout le monde. Merci de votre présentation. En deux minutes, il y a peu de choses qu'on peut faire. Je vais poser mes trois questions, puis vous ferez votre possible après ça.

On s'entend, là, d'entrée de jeu, que l'objectif premier, c'est de diminuer l'utilisation de ce qui cause... Oui, vous me faites... O.K., on se comprend. C'est parce que je ne l'ai pas beaucoup entendu dans votre discours et, pour moi, c'est fondamental qu'on réaffirme que la première chose à faire, c'est la sobriété énergétique et non pas d'inventer toutes sortes de bébelles pour capter nos affaires. On s'entend là-dessus. Bien.

Alors, vous avez parlé de conditions gagnantes pour les projets pilotes. Parce qu'il y en a d'autres qui nous ont parlé de projets pilotes hier, puis je ne suis pas sûre qu'ils avaient les mêmes objectifs que vous. Quelles sont ces conditions gagnantes là, succinctement?

Et mon autre question, si vous avez un peu de temps, c'est, séquestrer le carbone, O.K., mais comment on s'assure qu'effectivement ce qui est dans le sol, à cause de la fragilité des sols, à cause des glissements de terrain, à cause des tremblements de terre, «name it», des tsunamis, «I don't know», comment on peut s'assurer que ça ne repartira pas en haut, ça?

Mme Hénault-Ethier (Louise) : Bien, peut-être, au niveau de ce qu'il y a dans la terre, là, quand on parle de séquestration, c'est à des kilomètres de profondeur au fond de la terre, là. Donc, ce n'est pas simple de relarguer, là, ça ne ressortira pas tout d'un coup, si on fait de la séquestration profonde, c'est...

Le Président (M. Lemay) : Très bien. Vous pouvez continuer.

M. Pasquier (Louis-César) : Bon, bien, je vais prendre la balle au bond, mais c'est... effectivement, comme Louise le mentionnait, on est vraiment dans une séquestration profonde. Il faut aussi savoir que le CO2, lorsqu'il est injecté, s'il est en présence d'une saumure, va se dissoudre dans la saumure et va, par la suite, se minéraliser. Je prendrais un exemple. En Islande, il y a eu un projet de... Ah! je pense qu'on s'est fait tous couper, là… ou c'est Louise qui...

Le Président (M. Lemay) : Non, non, on vous entend. Allez-y, continuez.

M. Pasquier (Louis-César) : O.K. Parfait. Ça fait que, oui, en Islande, après deux années et demie, en fait, le CO2a été complètement minéralisé. Donc, c'est des conditions spécifiques particulières, mais c'est important de le mentionner.

Effectivement, la question du devenir du CO2est aussi... fait l'objet de nombreuses études depuis des années, et, entre autres, des outils de suivi postinjection ont été développés et sont très nombreux.

Puis, dernier élément, si jamais fuite il y avait, il faut comprendre que ce ne sera pas un relargage, en une fraction de seconde, de tout ce qui aurait pu être injecté, mais une fuite lente. Donc, on peut la détecter avec des moyens et ensuite, bien, on peut effectivement trouver des solutions pour éventuellement la régler.

M. Raymond (Jasmin) : Oui. Les puits profonds sont munis de valves de sécurité, là. Ça fait que, s'il arrivait, par exemple, je ne sais pas, une attaque terroriste sur une tête de puits en surface, bien, la valve serait automatiquement fermée. Donc, on n'aurait pas de fuite massive en surface, même que ça serait plus sécuritaire, je crois, de stocker, par exemple, pour le cas de l'hydrogène, des grands volumes d'hydrogène sous terre que dans des réservoirs en surface. Donc, au niveau de la sécurité, je crois qu'on... il y a des possibilités de le faire de façon à minimiser les risques.

Pour ce qui est de ce qu'on a besoin dans le projet de loi, je reviens là-dessus, c'est le cadre réglementaire. Quelles sont les normes environnementales à respecter pour...

Le Président (M. Lemay) : M. Raymond, je dois encore vous interrompre puisqu'on doit maintenant céder la parole au député de Jonquière pour environ 2 min 45 s.

M. Gaudreault : Oui. Alors, bonjour, merci beaucoup d'être ici. Vous êtes la démonstration qu'on a tellement tout ce qu'il faut, en termes de savoir-faire et de connaissances, au Québec, pour être des leaders mondiaux en énergies renouvelables, en transition énergétique, en transition écologique, et c'est ça qu'il faut mettre en avant.

Moi, il y a quelque chose que je constate, dans la lutte contre les changements climatiques, c'est que plusieurs s'en remettent beaucoup à ce que j'appelle le fantasme technologique, en pensant qu'on va trouver la machine, là, le bouton à quatre trous, on va réinventer l'attache de pain qui va tout régler puis que ça va être la meilleure invention au monde. Alors, il faut vraiment qu'on soit prudents puis qu'on trouve les bonnes technologies.

Et hier, on en a entendu de toutes sortes, là, hier soir. Oui ou non, le gaz naturel de source conventionnelle, venant entre autres du gaz de schiste, sans émission, est-ce que ça existe?

M. Pasquier (Louis-César) : Si je peux me permettre de commencer une réponse, il y a quelques <années...

M. Pasquier (Louis-César) : Si je peux me permettre de commencer une réponse, il y a quelques >années, j'ai été le premier surpris d'apprendre qu'en France, dans les années 1995, le groupe Total a réalisé la capture du CO2d'une de ses usines, en fait, de production de gaz naturel et a injecté le CO2dans les Pyrénées. Ça n'a absolument pas été connu, diffusé. Bref, ça a été fait, on parle de 1995.

Ce qui était proposé hier, bien, on le retrouve ailleurs dans le monde. Il y a des projets qui visent l'exploitation de gaz naturel avec du stockage de carbone. Par contre, si la question est par rapport à la faisabilité au Québec, bien, on n'a pas la réponse, nécessairement. Donc, ça se fait dans le monde, c'est la réponse assez courte à la question.

M. Gaudreault : Mais est-ce que ça se fait à grande échelle? Et quel est le prix?

M. Pasquier (Louis-César) : Bien, c'est une excellente question. Effectivement, il y a un projet, actuellement, au Brésil, qui est en cours, on parle de quelques millions de tonnes par année de CO2qui vont être injectées dans un réservoir. À quel coût, à quel prix, c'est une excellente question. Je pense que le tout est vraiment dépendant du contexte dans lequel il est fait, et on ne peut pas vraiment mettre un chiffre clé sur le...

• (12 h 10) •

M. Raymond (Jasmin) : Je n'ai pas de prix fixe à amener, mais, dans le cas de certaines solutions, comme l'énergie géothermique, par exemple, bien, nous, on a évalué que convertir un ancien puits pétrolier en échangeur de chaleur géothermique à boucle fermée pour chauffer des bâtiments pourrait être plus compétitif que chauffer avec l'hydroélectricité, mais moins compétitif que chauffer avec du gaz naturel. Donc, on est dans une fourchette de prix qui peut être réaliste.

Mais on ne se cachera pas... tu sais, on ne se contera pas de menteries, ce genre de projet là qu'on décrit, c'est des projets qui demandent des coûts d'investissement importants. Si on regarde le cycle de vie des systèmes, les prix sont compétitifs, mais on a besoin d'investissements et d'appuis financiers des gouvernements pour démarrer ce type de technologie.

Le Président (M. Lemay) : Merci beaucoup, M. Raymond, Mme Hénault-Ethier, Mme Gascuel et M. Pasquier, pour votre présentation. Je vous remercie pour la contribution aux travaux de la commission.

Et je dois maintenant suspendre les travaux jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 12)


 
 

14 h 30 (version révisée)

(Reprise à 15 h 02)

Le Président (M. Lemay) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! La Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources naturelles reprend ses travaux. Et je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leur appareil électronique.

Nous allons poursuivre les consultations particulières et les auditions publiques sur le projet de loi n° 21, la Loi visant principalement à mettre fin à la recherche et à la production d'hydrocarbures ainsi qu'au financement public de ces activités. Et, cet après-midi, nous entendrons les témoins suivants : la professeure Annie Chaloux; Équiterre, conjointement avec la Fondation David-Suzuki; Eau Secours!; ainsi que Mères au front.

Mais, tout d'abord, je souhaite la bienvenue à Mme Annie Chaloux, professeure à l'Université de Sherbrooke. Bienvenue avec nous à cette commission. Je vous rappelle que vous aurez 10 minutes pour faire votre exposé, et, par la suite, il y aura une période d'échange avec les membres de la commission. Alors, vous pouvez débuter avec votre exposé. Bienvenue.

Mme Annie Chaloux

Mme Chaloux (Annie) : Merci beaucoup. Donc, bien, merci à vous tous, membres de la commission, de me permette d'intervenir aujourd'hui à titre de chercheure et de codirectrice du Groupe d'études et de recherche sur l'international et le Québec. J'interviens aujourd'hui à titre personnel en tant que... (panne de son) …des politiques climatiques québécoises et des négociations climatiques internationales. Mon intervention va porter principalement sur deux aspects, le premier, bien sûr, les aspects politiques climatiques qui sont associés à ce projet de loi, et je vais vous faire part ensuite de mes principales recommandations et avis concernant le projet de loi en l'état dans un contexte d'urgence climatique à l'échelle mondiale. Mais, avant toute chose, je tiens à vous remercier d'avoir offert, donc, cette opportunité d'intervenir aujourd'hui.

D'abord, il est important de rappeler que ce projet de loi là s'inscrit dans une série d'actions et stratégies qui visent à réduire les émissions de gaz à effet de serre à l'échelle mondiale et à répondre à l'objectif de l'Accord de Paris qui a été adopté en 2015. Et cet objectif, c'est de contenir l'élévation des températures nettement sous la barre des deux degrés et, idéalement, les 1,5 °C.

Pour nous, au Québec, cet engagement-là de mettre fin à l'exploration et à l'exploitation des hydrocarbures est donc aussi très important. D'abord, le Québec s'est déclaré lié à l'Accord de Paris et s'est engagé à mettre en oeuvre cet accord dans ses champs de compétence, mais aussi il faut se rappeler que le Québec a une longue histoire de participation à l'édification du régime climatique international qu'on connaît aujourd'hui. Le Québec fait partie des États fédérés les plus actifs internationalement. Il a mis en place une série d'engagements climatiques internationaux de grande envergure, que ce soit le marché du carbone avec la Californie, son plan d'action régional avec les partenaires de la <Nouvelle-Angleterre et de l'Est du Canada...

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15 h (version révisée)

<       Mme Chaloux (Annie) : ...son plan d'action régional avec les partenaires de la >Nouvelle-Angleterre et de l'Est du Canada, son programme de coopération climatique internationale, et ce plus récent engagement qui est fait via le Beyond Oil and Gas Alliance, dans lequel s'inscrit ce projet de loi.

Bref, ça fait longtemps qu'au Québec on cherche à faire notre part et à lutter contre les changements climatiques, à la fois sur le territoire du Québec, mais aussi internationalement, parce qu'on a une responsabilité, bien sûr, historique à cet égard-là. Le Québec et le Canada sont parmi les grands émetteurs de gaz à effet de serre à l'échelle mondiale, et, dans ce contexte, on doit faire notre juste part pour contribuer fortement à réduire notre empreinte carbone. Et aussi, il faut rappeler que l'Accord de Paris réitère l'importance à ce que tous les paliers de gouvernement, que ce soient les villes, les États fédérés ou les gouvernements nationaux, doivent contribuer à leur hauteur à la lutte contre les changements climatiques.

Je me permets aussi de vous rappeler le fait que ce projet de loi là s'inscrit dans une réalité scientifique qui est maintenant sans équivoque : l'activité humaine est responsable des changements climatiques, et, bien sûr, la production et la consommation des hydrocarbures en est la principale responsable.

À ce sujet, on se rappellera sans doute qu'en août dernier, le GIEC publiait son rapport et qu'on voyait que la trajectoire du 1,5 °C est encore possible, mais pour cela, il faut faire des virages majeurs et urgents. Il faut se rappeler aussi que l'Agence internationale de l'énergie a été très, très claire dans son rapport paru en mai 2021 et elle dit clairement que, dans un scénario où on souhaite limiter la hausse des températures à 1,5 °C, tous les gouvernements devraient cesser d'approuver l'ouverture de nouvelles mines de charbon ou de nouveaux champs pétroliers et gaziers et planifier une réduction rapide mais ordonnée des activités existantes. Donc, du côté de l'Agence internationale de l'énergie, le message est aussi très clair.

Et finalement, dans le Production Gap Report, donc un rapport produit par le Programme des Nations unies pour l'environnement, on voit qu'il y a aussi un très grand écart entre la trajectoire de 1,5 °C, qui est actuellement souhaitée, et ce que les gouvernements ont promis de faire. Donc, on doit accélérer la transformation, et mettre fin à la production de nouveaux hydrocarbures maintenant, et ensuite infléchir drastiquement la tendance.

Bref, si on veut vraiment jouer sur ces grandes tendances là, on doit transformer notre manière de gérer nos ressources naturelles et éliminer les comportements qui permettent de produire et de consommer davantage d'hydrocarbures. C'est donc dans ce contexte-là qu'est née cette alliance qu'on appelle BOGA, donc Beyond Oil and Gas Alliance, auquel le Québec s'était déclaré lié lors de la dernière COP à Glasgow. Cette initiative-là avait été initiée par le Costa Rica et le Danemark, et depuis, quelques juridictions, dont le Québec, s'y sont liées, et chaque juridiction s'engage donc à adopter des mesures concrètes pour restreindre la production de pétrole et de gaz sur leur territoire.

Il faut donc... Ici, je me permets, là, de saluer le dépôt de ce projet de loi dans ce contexte-ci, parce que c'est un pas vraiment dans la bonne direction, dans la lutte contre les changements climatiques, mais aussi parce que ça va constituer réellement un modèle pour les autres juridictions dans le monde qui voudront faire de même, d'où l'importance d'avoir un très bon projet de loi qui soit à la hauteur de nos attentes et de nos capacités. À la lumière, donc, de ce que je vous mentionne, je me permets, donc, de vous donner quelques avis et recommandations à la commission.

D'abord, il y a plusieurs éléments qui ont pu être véhiculés sur la question de la réputation du Canada sur la scène internationale. D'abord, si on regarde sur le plan commercial et des investissements, donc, mon collègue de l'Université Laval, hier, vous en a sans doute parlé, mais tel que rédigé, ce projet-là, ce projet de loi là ne pose pas de risque grave ou majeur pour les investisseurs.

Il faut se rappeler que, sur le plan de notre réputation sur la scène internationale, sur le plan commercial, eh bien, la prospection des hydrocarbures subit des pressions depuis très, très longtemps dans le monde. Les rapports scientifiques sont clairs sur le fait qu'il faut arrêter tout nouveau projet, si on veut réduire nos émissions.

Il faut se rappeler aussi qu'au Québec, mais comme partout ailleurs, l'acceptabilité sociale n'est plus au rendez-vous, et ce, depuis fort longtemps. Et donc, ce secteur d'activité là est bien au fait des risques que suscitaient des investissements dans tout le volet d'exploration et d'exploitation des hydrocarbures.

Si on regarde, maintenant, le volet réputationnel, mais dans une perspective de lutte contre les changements climatiques sur la scène internationale, il faut voir que ce projet-là est ambitieux et fort intéressant, parce qu'il nous montre que le Québec peut toujours être à l'avant-scène. Et il faut savoir qu'un projet de loi comme celui-là va bien sûr être scruté par plusieurs juridictions ensuite. Donc, c'est important d'avoir un projet de loi qui soit robuste en ce sens-là, et il s'agit donc d'un aspect très positif sur le plan réputationnel. Il va positionner le Québec dans une bonne position dans les prochaines négociations, dans les prochaines années, évidemment.

Je me permets aussi de parler... prendre quelques instants pour parler du programme d'indemnisation. En ce qui concerne le programme, tel qu'il est présenté à l'heure actuelle, c'est un <programme...

Mme Chaloux (Annie) : ... d'indemnisation. En ce qui concerne le programme, tel qu'il est présenté à l'heure actuelle, c'est un >programme d'indemnisation qui s'astreint surtout à fournir des indemnisations sur les dépenses fournies et non pas sur les revenus potentiels. Et ça, c'est une chose qui est perçue de manière très positive parce que, sinon, ça aurait pu entraîner une perception de subvention déguisée à un secteur qui est problématique dans la lutte contre les changements climatiques et où le Canada et le Québec se sont déjà engagés à mettre fin aux subventions à cette industrie-là.

Aussi, je tiens à réitérer le fait que les indemnisations prévues doivent être le plus faibles possible. Elles doivent certes minimalement répondre au remboursement des dépenses, tel que prévu, mais il faut qu'on s'assure aussi de ne pas laisser une marge de manoeuvre possible pour que les entreprises cherchent à aller chercher beaucoup plus que ça et que ça devienne, donc, des subventions déguisées.

D'ailleurs, le montant de 100 millions qui est prévu ici, dans ce projet de loi là, devrait donc être un plafond et même être potentiellement le plus bas possible. Et là je me permets ici de m'inscrire dans, aussi, notre responsabilité sur la scène internationale, parce que ce projet de loi là, ce texte législatif là va servir de modèle par la suite à d'autres juridictions. Donc, je pense qu'on a, là aussi, une responsabilité supplémentaire à cet égard.

• (15 h 10) •  

En ce qui concerne… Un troisième point, ça concerne la période qui est couverte par le programme d'indemnisation, c'est-à-dire qu'actuellement, donc, le programme couvre six ans, donc du 19 octobre 2015 au 19 octobre 2021. Je pense qu'il faut éviter d'étirer davantage, donc, ces périodes-là, parce qu'il faut... au-delà des volets prescriptifs de certains éléments fiscaux, il faut comprendre que les industries étaient conscientes dans quoi elles investissaient.

C'est-à-dire que, d'abord, on sait depuis 2015… bon, il y a l'adoption de l'Accord de Paris, le Québec s'est déclaré lié à l'Accord de Paris. Il y a eu des rapports scientifiques, dont le rapport du GIEC de 2018 et celui de 2021, qui réitèrent l'urgence d'agir, ces rapports qui nous montrent également qu'on assiste à une accélération des températures mondiales. Et donc les entreprises et les investisseurs qui font le choix d'investir dans ces secteurs-là depuis longtemps savent qu'ils le font en toute connaissance de cause et le savent qu'ils le font dans un contexte où il y a urgence de lutter contre les changements climatiques. Et donc le risque était connu de la part des investisseurs.

Dernier élément, et qui est, selon moi, un élément qui est très, très important, ça concerne le préambule. J'ai entendu, donc, notamment le Pr Ouellet parler de ce volet-là, et je tiens à appuyer en ce sens-là, c'est-à-dire que le projet... le préambule du projet de loi devrait être beaucoup plus étoffé que ce qu'il est en ce moment et devrait mettre l'accent, selon moi, sur trois volets. Premier volet, c'est le volet de la lutte contre les changements climatiques. Donc, la lutte contre les changements climatiques devrait être au cœur du préambule, faire partie des valeurs intrinsèques à celui-ci et devrait aussi mettre l'accent sur l'importance d'être proactif dans ce contexte-là.

Le préambule devrait aussi rappeler les grands engagements du Québec envers l'Accord de Paris et sa responsabilité dans la lutte contre les changements climatiques.

Et finalement, un autre volet dont le préambule devrait tenir compte, c'est l'accent... l'importance de mettre l'accent sur la science comme guide et explication à ce projet de loi, dans le sens où la science nous dicte qu'on doit agir beaucoup plus drastiquement dans la lutte aux changements climatiques, et c'est ce qui guide, donc, l'établissement d'un tel projet de loi.

Donc, en somme, je considère qu'il s'agit ici vraiment d'un très bon projet de loi qui est très important pour le Québec. Et je vais être très heureuse de répondre à toutes vos questions dans les prochaines minutes. Merci.

Le Président (M. Lemay) : Merci, Mme Chaloux, pour votre exposé. Et maintenant nous allons céder la parole au ministre pour la période d'échange d'environ 16 min 30 s.

M. Julien : Oui. Merci infiniment. Merci infiniment, Mme Chaloux, pour vos commentaires, là. J'ai pris plusieurs notes. Je vais parcourir certains des éléments, soit par des questionnements ou des affirmations que vous pourrez corriger, si je me trompe.

Donc, pour le préambule, bien, vous êtes la deuxième à parler du préambule, honnêtement, moi, je ne déteste pas ça, mais je suis plutôt humble dans nos réalisations. Mais, puisque ce sera certainement une réalisation commune de tous les collègues, je pense qu'on gagnerait dans le préambule, ce n'est pas faire preuve d'audace ou de vantardise, mais de venir mentionner clairement ce positionnement de manière fière pour le Québec, naturellement, si on y adhère tous ensemble. Je pense que c'est une idée qui va faire son chemin, et on aura l'occasion d'en discuter entre collègues, là, pour que la forme soit à la bonne place.

Rapidement, quelques éléments pour... à discuter avec vous. Vous nous dites, Mme Chaloux, puis j'ai entendu ça aussi, puis je vais encore entendre ça dans d'autres groupes, je pense, qui vont suivre : Écoutez, l'industrie le savait depuis longtemps que c'est en «phasing-out», il n'y a plus d'acceptabilité, ils sont conscients de ces risques-là, puis, bon. Mais en même temps, là, peut-être que… Moi, ça fait un an, là, un peu plus d'un an qu'on travaille, à mon ministère, sur ce projet de loi là, alors je vais prendre une partie du <blâme...

M. Julien : ...à mon ministère, sur ce projet de loi là, alors je vais prendre une partie du >blâme puis je blâmerai mes prédécesseurs. Mais, en même temps que vous dites ça, qu'ils en sont conscients, nous, on n'a pas agi pour faire en sorte, en fin de compte, de ne pas le permettre, de ne pas fournir les licences, de ne pas fournir une réglementation, une loi. Donc, pour moi, là, il y a une espèce de... je vais faire attention, une responsabilité partagée, là, parce que toute cette prise de conscience là que vous mentionnez, si on était si conscients que ça, au gouvernement, on aurait dû agir bien avant. Puis, quand je parle de bien avant, c'est… Si vous dites que depuis six ans, c'est clair pour tout le monde, bien, ça aurait dû être agi en conséquence.

Donc, on a comme, pour moi, une part de responsabilité, puis les signaux ou le signal qu'on a transmis n'étaient pas à cet effet-là puisque, si tout le monde en était aussi conscient, les actions gouvernementales n'ont pas nécessairement suivi. J'aimerais ça vous entendre là-dessus.

Mme Chaloux (Annie) : Merci, M. le ministre, pour cette question. En fait, vous avez tout à fait raison de dire qu'on a une part de responsabilité, comme État québécois, quand on modifie des lois, comme on a fait la modification lorsque l'on a adopté la Loi sur les hydrocarbures en 2018. Et c'est dans ce contexte-là que les indemnisations qui sont prévues, à l'heure actuelle, répondent en partie à cette reconnaissance-là qui a été faite dans le passé par le secteur industriel.

Ceci étant dit, quand on dit qu'effectivement, bon, le manque d'acceptabilité sociale, il est relativement connu, bon, depuis longtemps... mais il reste que l'industrie, je pense que pendant très longtemps, elle a aussi joué à l'aveugle, et c'est à cet égard-là, je pense, qu'il ne faut pas non plus surestimer la part d'indemnisation qui serait faite. Et là, avec ce qui est présenté actuellement sur le 100 millions, je pense que ça répond à cette idée de reconnaissance à la fois d'une part de responsabilité, mais aussi à une reconnaissance que cette industrie-là a fait aussi des choix et que ces choix-là, donc, seront finalement indemnisés à la hauteur de ce qui est réel et non pas des anticipations de revenus possibles, alors que le monde... en fait, la situation en termes de changements climatiques a beaucoup changé depuis cette période-là.

Donc, je pense qu'il y a quand même un équilibre. Vous avez abordé cette notion-là d'équilibre, et je pense qu'avec le projet… avec les indemnisations actuelles, on est dans cette notion-là d'équilibre que vous évoquez.

M. Julien : Parfait. J'aime également beaucoup entendre votre préoccupation puis je pense que c'est celle qui nous a guidés dans la rédaction du projet de loi, peut-être qui gagnera à être bonifié, le cas échéant, là, je ne saurais prétendre du contraire, mais il ne faut pas non plus qu'il y ait des... Tu sais, ce que je souhaite, puis ce que mon ministère souhaitait, quand on discutait du projet de loi, puis ce que je souhaite discuter avec mes collègues aussi, c'est... on veut quelque chose d'assez, malheureusement pour certains, mais pas pour nous, d'assez encadré, c'est-à-dire que ça n'apporte pas nécessairement un arbitrage complexe, c'est-à-dire que le plan d'indemnisation, là, doit être assez binaire, sur présentation de pièces justificatives, et, après ça, pas trop interprétatif. Bon, je sais qu'il y a un petit article qu'on discutera, là, au moment venu, à l'article par article, qui mentionne des sommes qui pourraient être... je ne me souviens plus du terme exact, là, mais je pense que c'est assez bien encadré.

C'est sûr que le projet de loi, dans sa forme actuelle, ne comprend pas le programme d'indemnisation. Quand on parle de 100 millions, c'est à cause qu'on a un estimé… quand je dis un estimé, c'est assez clair, là, on a déjà des pièces justificatives qui nous permettent de fixer ce montant-là. Est-ce que vous pensez qu'on doit révéler le plus rapidement possible la nature même du programme d'indemnisation sur ce critère-là pour justement être sûr que tout le monde est conscient de la méthodologie exacte du plan d'indemnisation?

Mme Chaloux (Annie) : Je pense que c'est intéressant, ce que vous évoquez, parce que ça permet d'ajouter une notion de transparence par rapport à certaines perceptions que pourrait avoir un programme d'indemnisation, à la fois pour ceux et celles qui souhaitent qu'il y ait le moins possible d'indemnisations et ceux et celles qui en veulent le plus. Donc, les cartes sont mises sur table. Donc, à cet effet-là, je pense que la transparence est de mise pour pouvoir comprendre, donc, sur quels justificatifs l'indemnisation aura lieu. Donc, ça, c'est le premier volet.

J'ajouterais aussi le fait que... et c'est hier, lors de l'intervention de M. Ouellet aussi, que j'abonde dans le même sens, qu'il mentionnait notamment le fait que, en vertu de la Loi sur les hydrocarbures, les entreprises étaient dans l'obligation de fournir, lorsqu'il y avait des... des gisements, pardon, exploitables, de fournir l'information. Et, à l'heure actuelle, donc, il n'y aurait qu'une entreprise qui l'aurait fait. Donc, ça permet, là aussi, d'éviter la surenchère de certaines entreprises à vouloir avoir accès à davantage d'indemnisations.

Donc, je pense que plus qu'il y a d'information qui est rendue publique, plus ça permet de faire la part des choses dans ce projet-là et de voir là où il y a ou pas marge de manoeuvre pour intervenir.

M. Julien : Parfait. Une dernière question pour moi, avant de passer la parole à mes <collègues...

Mme Chaloux (Annie) : ...pour intervenir.

M. Julien : Parfait. Une dernière question pour moi, avant de passer la parole à mes >collègues, mais qui est assez importante. Vous mentionnez, en réalité, qu'on devrait renforcer le préambule pour noter clairement le positionnement du Québec, qu'on est chef de file avec aussi notre adhésion au BOGA, que ça va être quelque chose qui va être beaucoup lu, beaucoup étudié. Donc, il faut faire preuve de rigueur, et moi, je pense, d'équilibre, en même temps, mais on en discutera avec les collègues.

Donc, je voudrais vous entendre, parce que certains prétendent que le projet de loi qu'on a devant nous, c'est un outil marketing puisqu'il ne se faisait pas d'exploration et d'exploitation au Québec, bien qu'il y avait des licences de permis. Mais moi, je ne le vois pas du tout comme un outil marketing, je le vois comme un positionnement assez courageux de notre État pour faire la chose. Donc, pourquoi, selon vous… Est-ce un outil marketing ou c'est vraiment un positionnement courageux du Québec?

Mme Chaloux (Annie) : Je me permettrais de dire que c'est un peu toutes ces réponses, c'est-à-dire que d'abord...

M. Julien : Du marketing courageux.

Mme Chaloux (Annie) : Dans le sens où c'est un symbole fort. Et moi, je ne parlerais pas de marketing, mais je pense que c'est un symbole fort que l'on envoie. Effectivement, le Québec, ce n'est pas un territoire qui est reconnu pour avoir une quantité d'hydrocarbures qui est majeure. Mais, plus on arrive dans un contexte où on veut avoir accès à ces ressources-là, bien, plus que les sources non traditionnelles peuvent devenir intéressantes. Donc, on vient quand même freiner tout futur projet, ce qui est en soi, donc, une avancée majeure.

• (15 h 20) •

Ce que je dirais, et c'est là où la notion du préambule revient, c'est qu'il y a cette idée que le projet de loi, oui, va être étudié ailleurs dans le monde, et on espère qu'il soit appliqué aussi ailleurs dans le monde, mais il y a des juridictions... Pensons à un projet de loi de cette nature-là qui serait adopté, par exemple, en Alberta, avec un programme d'indemnisation comme celui-là. Ce ne serait pas jouable pour l'État albertain, parce qu'ils ont, bien sûr, un développement d'hydrocarbures qui est beaucoup plus important. D'où le fait que, plus on réduit les possibilités d'étendre les indemnisations, plus on est très, très, très spécifique, plus on est transparent, plus on est clair sur ce qu'on peut ou pas permettre, bien, on permet d'éviter des leviers potentiels à ce que l'industrie puisse utiliser à la fois au Québec et peut-être, par la suite, dans d'autres juridictions.

C'est sûr qu'on n'est pas responsable, non plus, ultimement, de tous les projets de loi qui seront adoptés ailleurs dans le monde, évidemment, mais il reste que ça doit fournir des signaux qui sont importants. D'où le fait que, dans le préambule, ce doit être... ces éléments-là doivent être pris en compte, et que ce n'est pas parce qu'un projet de loi a une part de symbolisme qu'il n'est pas nécessaire, et ça, je pense que c'est un élément qu'il faut souligner ici.

M. Julien : Parfait. Donc, juste en conclusion, avant de passer la parole, donc, c'est la première fois qu'on nous amène cette réflexion-là de dire, bien, si on voulait faire un «copy and paste» ailleurs, on serait en mesure de le faire. Je pense, justement, que le programme d'indemnisation qui est prévu ici, qui parle seulement des frais de licence et des frais d'exploitation liés au maintien d'une conformité, eu égard à partout, c'est des frais, somme toute, qui sont à la marge par rapport aux revenus potentiels d'exploitation, qui ailleurs pourraient être complètement différenciés, là. Mais j'aime ce que j'entends.

Le Président (M. Lemay) : Donc, M. le député de Lac-Saint-Jean, la parole est à vous.

M. Girard (Lac-Saint-Jean) : Merci, M. le Président. Bonjour. Très intéressant de vous entendre et de faire aussi un parallèle avec M. Richard Ouellet, qui a passé hier, au niveau du programme d'indemnisation.

Moi, j'aimerais ça vous entendre au niveau de l'alliance BOGA, avoir votre point de vue un peu, tu sais. Pour le Québec, ça peut être utile au niveau de nous positionner dans le monde, avec notre volonté de devenir un leader mondial au niveau des énergies vertes. J'aimerais vous entendre, avoir votre position là-dessus.

Mme Chaloux (Annie) : Merci. L'alliance BOGA, c'est une alliance qui vise à se sortir, finalement, du pétrole, de l'extraction, de l'exploitation des hydrocarbures. Il y a déjà près d'une dizaine d'États ou d'États fédérés qui se sont joints à cette initiative-là, et elle prendra de l'ampleur avec le temps, étant donné qu'à la COP26, c'est quand même la première fois où il y a une décision qui a été prise, où on nomme la question des hydrocarbures, on parle du charbon, on parle des hydrocarbures comme étant source du problème. On le sait depuis longtemps, mais c'est très difficile, dans le contexte des négociations climatiques internationales, d'accepter cet élément-là dans les négociations.

Donc, le fait que le Québec soit parmi les premiers à adopter et à faire partie de ce genre d'engagement là, bien, ça envoie des symboles, des signaux clairs, et le Québec est assez bien perçu sur la scène internationale. Il a très souvent accès à un réseau que peu d'États fédérés peuvent se targuer d'avoir. Donc, oui, ça envoie un symbolisme et une notoriété pour le Québec pour la suite des choses.

M. Girard (Lac-Saint-Jean) : Bien, merci de votre réponse. C'est quand même assez clair, votre point de vue, puis je vais laisser mon collègue...

Le Président (M. Lemay) : Alors, M. le député de Bourget, la <parole

M. Girard (Lac-Saint-Jean) : ...votre point de vue, puis je vais laisser mon collègue...

Le Président (M. Lemay) : Alors, M. le député de Bourget, la >parole est à vous.

M. Campeau : Merci pour votre présentation, Mme Chaloux. J'ai aimé, tantôt, l'idée de marketing courageux. Je la trouve pas pire comme expression, celle-là, là. Je suis d'accord avec vous, ce que vous avez mentionné, que c'est la responsabilité de tous les pays de s'occuper des changements climatiques et suite à l'Accord de Paris, entre autres. Puis, comme vous avez dit, si l'Alberta faisait un tel projet de loi, ça serait extraordinaire ou ça serait catastrophique, tout dépendant comment on le regarde, là. Et nous, on a l'air d'un bien petit joueur par rapport à ça, et certaines personnes sont tentées de dire : Bon, bien, c'est facile, ils ne produisaient pas, de toute façon.

Après ça, vous nous dites qu'on est un leader par rapport à ça parce qu'on est les premiers. Mais juste par curiosité, c'est vraiment de la curiosité, est-ce que vous entendez ça de d'autres législations qui cherchent à copier, qui vraiment... ils veulent s'inspirer ou c'est une idée que vous pensez qui va arriver?

Mme Chaloux (Annie) : Bien, c'est intéressant, là, comme question que vous évoquez, c'est-à-dire que, d'abord, je tiens à dire que tous les gestes comptent. Et quand le Québec, par exemple, dans les années 2000, et avec la Californie, ont choisi de développer ensemble un marché du carbone, bien, au départ, on n'en parlait pas tant. Ça s'est popularisé beaucoup, puis aujourd'hui, bien, l'expertise québécoise, elle est souvent demandée à l'étranger pour qu'on regarde comment, par exemple, le marché du carbone s'est développé.

À l'heure où on se parle, pour ce qui est de cette initiative-là, l'initiative BOGA, bien, c'est sûr qu'actuellement il va y avoir des juridictions… celles qui se sont engagées vont devoir adopter des textes législatifs et vont s'inspirer de ce qui se fait ailleurs. Et le Québec étant dans les premiers à le faire, évidemment, donc, ils vont pouvoir regarder ce que le Québec fait.

Donc, c'est plus à terme que je pourrais répondre à votre question, à savoir est-ce que, maintenant, on regarde ce que le Québec fait sur ce projet de loi là. Mais je pense que, dans les prochains mois, dans les prochaines années, plus d'acteurs vont regarder des projets de loi, que ce soit à travers BOGA, mais à travers d'autres initiatives analogues. Ils vont regarder ces modèles-là, et c'est justement l'importance d'avoir un bon programme qui est très fort maintenant pour aider et faciliter aussi le travail de ceux qui suivront.

M. Campeau : Moi, je n'ai pas d'autre question, M. le Président.

Le Président (M. Lemay) : Très bien. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Julien : Oui, merci. Donc, à votre lecture, puis vous avez… comme mentionné précédemment, vous avez entendu d'autres intervenants, donc, en regardant le projet de loi, êtes-vous satisfaite de ce projet de loi là dans sa forme et spécifiquement... je reviens, là, puis je sais que ce n'est pas votre position, mais sur l'équilibre des indemnisations, parce que, bon, ça va être l'enjeu de beaucoup de discussions, hein? Certains prétendent qu'il faudrait donner, là, des milliards basés sur des revenus potentiels qu'on ne connaît pas trop. D'autres disent qu'on ne devrait rien donner parce que les joueurs étaient au courant. Puis nous autres, on se positionne, comme vous le dites, là, responsable et équitable, là, mais on s'entend, là, qu'il n'y a pas de folie là-dedans, là. C'est les frais pour les licences puis… hein? Bon. Votre évaluation, c'est... du projet de loi dans sa forme actuelle, vous diriez quoi?

Mme Chaloux (Annie) : Je pense qu'à l'heure actuelle c'est un projet de loi qui est équilibré dans la mesure où, oui, il faut lutter contre les changements climatiques, et ça, ça doit demeurer la priorité d'un tel projet de loi. On a aussi des engagements puis on a une responsabilité vis-à-vis des investisseurs puis vis-à-vis des compagnies ou des personnes morales qui investissent au Québec. Ça fait qu'il faut s'assurer aussi que, quand on fait des choix qui laissent des gens derrière, qu'on opte pour un mécanisme qui n'est pas simplement d'appuyer une industrie qui est problématique, mais qui va aussi soutenir notre crédibilité sur d'autres volets d'investissements. Et M. Ouellet, c'est un peu ce qu'il évoquait hier.

Donc, oui, c'est sûr qu'un monde idéal, c'est bien sûr de n'avoir aucune indemnisation. En même temps, on est dans un contexte où on a des partenaires d'affaires, où il y a des investisseurs, où on a aussi une part de responsabilité, puis qu'un projet de loi serait... qui irait trop dans une veine de zéro indemnisation porterait flanc, finalement, à plusieurs poursuites de la part des industries et, au final, probablement qu'on n'y serait pas du tout gagnant, alors que d'avoir une approche ou un modèle qui vise sur le remboursement des dépenses, tel que préconisé, qui met un plafond sur les montants qui seront attribués, bien, ça montre, du moins, le sérieux dans notre démarche et la volonté, après ça, de passer à autre chose.

M. Julien : Avez-vous une idée? Parce que je comprends très bien, là, parce qu'on a beaucoup mentionné les poursuites, etc., mais en terminant, au-delà de ça, pour moi, il y a aussi un risque que je qualifierais réputationnel, puis je vais faire attention à mes mots, mais c'est réputationnel, là, parce que, quand on disait : Mais nous, comme État, on avait des <responsabilités...

M. Julien : ...réputationnel, là, parce que, quand on disait : Mais nous, comme État, on avait des >responsabilités, puis à partir du moment où on prend une décision, on assume nos responsabilités, notre part de responsabilité, est-ce qu'il y a un risque réputationnel pour le Québec?

Mme Chaloux (Annie) : Je pense... Actuellement, il n'y a pas de risque réputationnel. Je pense qu'on est un lieu où les investissements étrangers... en fait, les investisseurs étrangers sont intéressés à venir sur le territoire du Québec, et ce n'est pas un projet de loi de cette nature-là qui viendrait compromettre, par exemple, les investissements étrangers dans d'autres secteurs névralgiques de notre activité économique.

Le Président (M. Lemay) : Nous allons maintenant passer la parole au député de Mont-Royal—Outremont pour environ 11 minutes.

M. Arcand : Merci, M. le Président. Mme Chaloux, j'ai lu, évidemment, votre présentation, une excellente présentation, et je voudrais vous poser quelques questions, premièrement, en rapport avec certains des témoignages qu'on a entendus et avoir vraiment votre opinion là-dessus. Parce qu'aujourd'hui, entre autres, l'INRS est venu pour expliquer que, dans ce projet de loi, il fallait plus de flexibilité pour les projets pilotes, en disant : Écoutez, c'est trop limitatif. Si on décide de faire de la recherche puis on décide de faire de l'innovation, bien, il faut qu'on se donne la flexibilité nécessaire pour le faire. Tout le monde reconnaissait que ça prend un certain nombre de contrôles pour s'assurer, là, qu'il n'y a pas une tentative des entreprises de faire des projets pilotes, je dirais, qui sont bidons. Juste avoir votre position, dans ce projet de loi. Est-ce que vous pensez qu'il faudrait, disons, être plus flexible au niveau des projets pilotes?

• (15 h 30) •

Mme Chaloux (Annie) : C'est une excellente question que vous évoquez. Quand j'ai lu cette section-là dans le projet de loi, il ne m'est pas apparu qu'il était peu flexible. Je pense qu'il laisse quand même un certain espace, mais je n'oserais pas me prononcer sur est-ce que cet espace-là, qui est déjà octroyé, est suffisant ou pas. Je pense qu'il y a d'autres experts qui sont beaucoup plus qualifiés que moi qui répondraient à ce volet-là. Ça fait que je n'oserais pas non plus m'aventurer sur ce terrain-là. Mais tout projet pilote, quel qu'il soit, il ne faut pas qu'il permette une exploration déguisée ou une exploitation déguisée des hydrocarbures. C'est ce qu'on doit mettre de l'avant. Après ça, s'il y a d'autres projets pilotes qui concernent d'autres éléments rattachés à des fracturations, mais qui ne visent pas l'exploitation ou l'exploration des hydrocarbures, là, il faudrait voir avec les experts de ce domaine-là qu'est-ce qu'ils pensent : Est-ce que, en l'état, le projet de loi permettrait ces projets-là?

M. Arcand : Si j'ai bien compris, vous avez dit... vous étiez d'accord avec le Pr Ouellet, hier, qui est intervenu pour parler… que, selon les accords internationaux, on pouvait... on devait compenser, dans une certaine mesure. Vous, vous dites : D'accord, mais le 100 millions, c'est un plafond. Est-ce que j'ai bien compris ça?

Mme Chaloux (Annie) : Actuellement, avec ce qu'on a comme information, je dirais que oui, mais plus on aura d'information de disponible sur la nature des remboursements qui sont prévus, ce chiffre-là pourrait être appelé à varier. Mais il ne faudrait pas qu'il soit appelé à varier vers la hausse, étant donné qu'il y a aussi cette... comme je l'expliquais tout à l'heure à M. le ministre, il y a quand même une responsabilité que le secteur des hydrocarbures connaît depuis longtemps, et, à ce moment-là, le risque de l'investissement… le risque de l'acceptabilité sociale fait partie des éléments qui sont présents depuis plus de 10 ans maintenant. Donc, il ne faut pas qu'on aille vers une logique de compensation à la hausse et tenter d'éviter autant que possible certaines poursuites... j'imagine qu'on n'en évitera pas, évidemment, certains vont tenter de le faire, mais il faut trouver un programme qui, quand même, soit suffisamment intéressant pour éviter que les entreprises optent pour la voie des poursuites judiciaires plutôt que l'acceptation de l'état de fait.

M. Arcand : Est-ce que vous avez certaines idées qui nous permettraient de partir du plafond puis d'aller vers le plancher?

Mme Chaloux (Annie) : Il faudrait voir les chiffres. Évidemment, c'est toujours ça, l'élément. Là où on peut jouer, c'est sur les fameuses dates, mais là, ça reste à voir, le pourquoi que ces dates-là ont été mises en place. J'entendais les gens du CQDE parler de réduire cette période-là de couverture à partir du moment où la Loi sur les hydrocarbures, en 2018, a été adoptée. Ça fait qu'il faudrait voir qu'est-ce que ça impliquerait d'avoir une période de conformité plus faible. Ça ferait en sorte qu'il y aurait peut-être moins de remboursement possible. Mais néanmoins, il y a aussi une logique qui explique que, pour ce secteur-là de l'industrie, ça peut prendre plusieurs années quand on fait de l'exploration. Donc, il ne faudrait pas non plus surpénaliser certains acteurs. Donc, l'importance de l'équilibre, encore une fois, est à présenter.

M. Arcand : Si je comprends bien, vous seriez d'accord pour rembourser au minimum, en tout cas, les coûts directs d'obtention des permis d'exploration, <sachant...

>


 
 

15 h 30 (version révisée)

<421 M. Arcand : ...au minimum, en tout cas, les coûts directs d'obtention des permis d'exploration, >sachant qu'un permis d'exploration qui débouche sur une exploitation, à toute fin pratique, désormais interdite n'a plus de valeur, alors il y a... c'est au moins le minimum. C'est ce que je comprends de ce que vous dites?

Mme Chaloux (Annie) : Effectivement.

M. Arcand : Vous êtes d'accord avec ça?

Mme Chaloux (Annie) : Oui.

M. Arcand : Est-ce que vous avez une idée... parce que, ce matin, on a eu des discussions, sur le plan technique, que le Québec devait se lancer de façon beaucoup plus évidente dans le domaine de la géothermie, dans le domaine de ce qu'on appelle la captation du carbone, du stockage d'hydrogène, etc. Est-ce que vous avez vous-même une opinion où est-ce que le Québec devrait aller? Est-ce que vous avez une idée que vous pourriez nous soumettre par rapport à ça?

Mme Chaloux (Annie) : Bien, c'est sûr que, dans un contexte de lutte contre les changements climatiques, les meilleurs outils pour réduire les émissions, c'est de trouver des avenues où on consomme, à la base, moins d'énergie, et ensuite opter pour les énergies renouvelables, et donc à aller dans cette méthode de réduction et ensuite de transferts lorsque ce n'est pas possible.

Pour les projets plus particuliers de géothermie, d'hydrogène, etc., bien, c'est sûr que ça s'écarte un peu de ce projet de loi là sur les hydrocarbures. C'est sûr qu'on ne peut pas non plus penser qu'on peut faire des transitions énergétiques aussi rapides en évitant d'utiliser ces autres stratégies-là, mais il faut voir dans quelle mesure elles répondent réellement à notre responsabilité et à notre juste part en termes de contribution à la lutte contre les changements climatiques à l'échelle mondiale.

M. Arcand : J'ai été étonné il y a quelques semaines. J'écoutais une dame, je crois que c'était Mme Whitmore, qui vient des... je ne sais pas si c'est l'École des hautes études commerciales, le HEC, ou le... mais qui parlait, entre autres... qui disait, entre autres, que, bon, les autos électriques, ce n'est pas une solution très valable à ce niveau-là, qu'il faudrait vraiment changer, de façon assez importante, le mode de vie, il faut que les gens apprennent à moins se déplacer, et ainsi de suite. Est-ce que... Jusqu'où vous allez dans ce domaine-là? Avez-vous une idée précise par rapport à ce qu'il faut faire?

Mme Chaloux (Annie) : Bien, c'est sûr qu'il y a de plus en plus d'études qui montrent que, d'abord, ce qu'il faut avoir, il faut avoir l'approche : éviter, déplacer puis transférer lorsque possible. C'est-à-dire que, dans un modèle de développement comme on a actuellement au Québec, il faut d'abord opter pour : Est-ce qu'il y a une nécessité, par exemple, de déplacement? Est-ce que, comme individu ou est-ce que comme État, on peut encourager, finalement, l'évitement de certains déplacements inutiles? Lorsque c'est impossible, bien, comment on offre des alternatives qui ne soient pas l'auto individuelle, quelle qu'elle soit? Donc, est-ce qu'on peut accroître l'offre de transport collectif, que ce soit par des transports traditionnels ou des modes de transport d'autopartage, par exemple, qui sont innovants, qui feraient en sorte de réduire, finalement, notre contribution aux émissions de gaz à effet de serre? Et lorsque ce troisième... ce deuxième créneau là, pardon, n'est pas possible et qu'on doit quand même opter, par la suite, par un déplacement qui ne peut pas se faire par des modes de transport qui soient actifs ou collectifs, bien, est-ce qu'on peut opter pour des solutions de remplacement?

La voiture électrique rentre dans ce troisième créneau là, mais il faut quand même continuer toujours à réfléchir, pas simplement à faire les modifications à la marge en fin de parcours, mais d'abord revoir les premières étapes pour finalement limiter les émissions de gaz à effet de serre en changeant nos modèles, comme Mme Whitmore l'expliquait. Et ultimement, lorsqu'impossible, bien là, c'est sûr que la voiture électrique devient une alternative à la voiture à essence.

Mais il ne faut pas penser que simplement remplacer une voiture à essence par une voiture électrique va solutionner les problèmes. Ça va continuer à promouvoir l'étalement urbain. Il y a, bien sûr, des minéraux rares qui sont utilisés dans les batteries. Donc, il ne faut pas voir ça, effectivement, comme une panacée, mais ça doit faire partie du bouquet d'instruments dont on dispose pour réduire nos émissions, mais peut-être changer notre approche de tout miser sur une électrification qui ne change pas les comportements vers une approche plus transformationnelle qui nécessite, évidemment, des nouvelles façons de voir notre aménagement du territoire et notre conception du bien-être. Mais ça peut passer par la promotion du télétravail.

Donc, il y a plein de modèles qui peuvent nous aider à réduire les premiers créneaux pour, par la suite, en fin de parcours, réduire nos émissions via les voitures électriques.

M. Arcand : Vous savez, quand je discutais avec le Pr Pineault, entre autres, lui, pas très, très... pas très, très «hot», si vous me permettez l'expression, sur le solaire, par exemple. Il dit que, bon, au Québec, le <solaire...

M. Arcand : ...lui, pas très, très... pas très, très «hot», si vous me permettez l'expression, sur le solaire, par exemple. Il dit que, bon, au Québec, le >solaire, ce n'est pas évident. Lui, il dit que, si on veut vraiment... et, là-dessus, on est un cancre dans ce domaine-là, que si véritablement on veut faire une différence, c'est évidemment les économies d'énergie. Et, quand on se promène, par exemple, un peu partout... et moi, j'utilise la 20, le lundi soir, pour venir à Québec, et mon Dieu qu'il y a des camions. Quand on sait que les camions polluent de façon assez importante, beaucoup plus que des automobiles, on s'aperçoit qu'il y a certainement une espèce... des façons de faire qui pourraient certainement améliorer la situation et réduire considérablement les gaz à effet de serre. Et lui, évidemment, prône aussi des économies d'énergie substantielles.

Est-ce que vous voyez des façons pour le Québec d'aller de ce côté-là, d'être comme d'autres pays européens qui sont certainement beaucoup plus avancés que nous à ce niveau-là?

Mme Chaloux (Annie) : Oui. Je pense qu'une des choses les plus importantes, c'est d'utiliser les mesures écofiscales, et ça, je pense que c'est un aspect qui est très, très important. Par exemple, au Québec, on opte pour une stratégie qui est les subventions aux voitures électriques. Bien, il faut aussi développer pas simplement la carotte, mais aussi opter pour des stratégies de bâton, c'est-à-dire, si on subventionne à la hauteur de 8 000 $ une voiture électrique, bien, on doit aussi mettre en place des surtaxes pour les gros cylindrés, par exemple. Donc, ça peut être des taxes à l'immatriculation des voitures. On pourrait mettre en place des taxes kilométriques qui feraient en sorte que même les voitures électriques, qui contribuent à l'étalement urbain, seraient aussi taxées par ça. Donc, il y a une panoplie de mesures.

• (15 h 40) •

Parce qu'il ne faut pas se leurrer qu'au Québec le plus grand secteur émetteur de gaz à effet de serre, c'est bien sûr le secteur des transports. C'est 44 % des émissions de la province. Donc, c'est là où on peut le plus agir et utiliser des mesures écofiscales efficaces qui feraient en sorte à la fois de jouer, donc, sur l'offre et sur la demande et accroître, finalement, les changements qui feraient en sorte qu'on diminue véritablement nos émissions de gaz à effet de serre.

Donc, vous avez tout à fait raison, quand on parle...

Le Président (M. Lemay) : Merci beaucoup, Mme Chaloux, pour cette réponse. Et nous allons maintenant céder la parole au deuxième groupe d'opposition, Mme la députée de Sainte-Marie-Saint-Jacques, pour environ 2 min 45 s.

Mme Massé : Merci, M. le Président. Bonjour, Mme Chaloux. Merci pour votre présentation. J'ai deux, trois petites questions. Je comprends bien qu'on a à inscrire un préambule. J'entends l'ouverture du ministre. Je pense, c'est une bonne idée. Je pense que ça mettrait le niveau de l'engagement qu'on est prêts à prendre et le sens de cet engagement-là.

Ceci étant dit, vous dites... vous avez répété à plusieurs reprises que les investisseurs, dans cette industrie, depuis plusieurs années — vous avez nommé 2015, mais, entre vous et moi, c'est bien avant ça — savaient très bien dans quoi ils s'embarquaient, mais, malgré tout, vous prônez une compensation. Je comprends que rembourser les frais de licence, les frais des remboursements de dépenses, vous êtes d'accord avec ça. Est-ce qu'on devrait y soustraire tout l'argent qu'on y a mis aussi?

Mme Chaloux (Annie) : Vous évoquez là une question qui est intéressante. Donc, il faudrait voir, de manière publique, quelles sont les sommes qu'on a investies pour appuyer ce secteur-là d'activité.

Ceci étant dit, puis la manière que j'avais compris le projet de loi, il y avait quand même ces calculs-là, de subvention, qui étaient aussi reconnus dans le parcours. Je pense qu'il faut aussi être conscient de notre responsabilité comme État, dans la mesure où... j'entends bien ce que vous dites par rapport aux compensations, mais reste qu'on a la Loi sur les hydrocarbures, qui a été adoptée par l'Assemblée nationale et qui nous a liés à cette industrie-là en continuant de permettre l'exploration et l'exploitation des hydrocarbures, même si le cadre était plus restrictif. Donc, on a cette responsabilité-là, tout de même, à tenir en compte.

Mme Massé : Donc, vous êtes d'accord que tout l'argent, que ce soit en crédit d'impôt, en subvention, coût du claim, ça, ils devraient nous le rembourser parce qu'on leur a donné. Mais moi, j'ai une autre question plus profonde. Tout l'argent que le public a payé pour les inondations, les berges qui s'écroulent en Gaspésie, est-ce qu'ils n'ont pas une part de responsabilité, puisque la science nous démontre qu'ils ont une part de responsabilité et que vous nous rappelez qu'ils le savaient depuis longtemps?

Mme Chaloux (Annie) : Je me permets ici, simplement, par contre, de faire la nuance, à savoir que ce n'est pas nécessairement cette industrie, par exemple, une entreprise qui travaillait au Québec, qui était, elle, la responsable des inondations, hein? Il y a la question, toujours, des préjudices et de poursuites, par la suite, aussi auprès des grands émetteurs de gaz à effet de serre. Donc, les industries qui ont investi au Québec ne sont pas nécessairement celles qui ont contribué, aujourd'hui, aux impacts concrets. Je comprends ce que vous dites, parce qu'effectivement on est dans une situation mondialisée d'interdépendance.

Ceci étant <dit...

Mme Chaloux (Annie) : ...dans une situation mondialisée d'interdépendance.

Ceci étant >dit, ce n'est pas ces petits joueurs là qui sont ceux qui sont imputables des catastrophes climatiques que l'on vit exactement sur le territoire, et ça serait difficilement, bien sûr, démontrable dans une perspective de droit et en cour, par exemple.

Le Président (M. Lemay) : Merci, Mme Chaloux. Alors, nous allons maintenant passer la parole au troisième groupe d'opposition. M. le député de Jonquière, pour la même chose, environ 2 min 45 s.

M. Gaudreault : Oui. Merci beaucoup, Mme Chaloux. Merci de votre présence. Bon, j'aime beaucoup le récit que vous faites de l'insertion, je dirais, du Québec dans BOGA et que ce récit doit faire en sorte que le Québec, au fond, s'inscrive dans une démarche historique de diminution des gaz à effet de serre, de lutte contre les changements climatiques. Les membres fondateurs de BOGA, bon : Danemark, Costa Rica, France, Groenland, bon, avec le Danemark, l'Irlande, la Suède, le pays de Galles. Il y a des membres associés : la Californie, la Nouvelle-Zélande, le Portugal. Il y a des amis : le Luxembourg, la Finlande et l'Italie. Je sais que le Costa Rica, du côté du Parlement, le projet de loi n'a pas passé, mais, si on regarde les autres membres du BOGA, est-ce qu'il y a des exemples qui pourraient nous inspirer? Par exemple, le Danemark, est-ce qu'ils ont intégré BOGA dans leur législation ou on est vraiment les premiers?

Mme Chaloux (Annie) : Je ne pourrais pas vous dire là où ils en sont, au Danemark, de manière concrète, là, dans l'état d'adoption de leur projet... du projet de loi. Je sais qu'il y a eu des discussions, mais je n'ai pas vu la sortie. Puis évidemment c'est que c'est une initiative qui a été lancée en octobre, hein? Ça fait qu'on est, bien sûr, dans les premiers, si on n'est pas le premier à cet égard-là. Celui du Costa Rica, effectivement, le projet de loi n'a pas été adopté, donc reste à voir comment la suite se fera pour cette juridiction-là. Mais je ne pourrais pas vous donner d'autres détails que ça parce qu'on est vraiment dans le début du parcours et non pas... ça ne fait pas plusieurs mois.

M. Gaudreault : Parce que le Danemark avait quand même de l'exploitation d'hydrocarbures sur son territoire, en haute mer ou... donc, j'imagine qu'il y aura une procédure, peut-être, d'indemnisation aussi. Je ne sais pas s'il y a un calendrier qu'on peut connaître pour s'en inspirer.

Mme Chaloux (Annie) : Ça pourrait être un élément que je pourrais surveiller puis informer, là, la commission, le cas échéant, là, si je vois quelque chose à cet effet-là, parce qu'effectivement ils sont dans une situation très différente du Québec de par l'exploitation des hydrocarbures qu'ils ont sur leur territoire. Eux, je pense qu'ils avaient l'horizon 2050... une réduction, mais je n'ai pas le détail, là, de ces réductions-là, puis ces retraits-là de permis, et là où ça en est au niveau du projet de loi.

M. Gaudreault : O.K. En tout cas, si jamais vous voyez passer des choses là-dessus, on va garder un oeil également, mais je pense ça serait bienvenu de transmettre ça au Québec. Merci beaucoup, Mme Chaloux.

Le Président (M. Lemay) : Très bien. Merci beaucoup, Mme Chaloux, pour votre contribution aux travaux de la commission.

Alors maintenant, je vais suspendre les travaux quelques instants pour permettre au prochain groupe de prendre place. Merci.

Mme Chaloux (Annie) : Merci à vous.

(Suspension de la séance à 15 h 48)

> (Reprise à 15 h 55)

Le Président (M. Lemay) : Alors, la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources naturelles reprend ses travaux, et je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants d'Équiterre et de la Fondation David-Suzuki. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, et, par la suite, nous procéderons à une période d'échange avec les membres de la commission. Alors, je vous invite à vous présenter, et vous pouvez y aller avec votre exposé.

Équiterre et Fondation David-Suzuki

M. Viau (Marc-André) : Bonjour, M. le Président, M. le ministre, députés, membres de la commission. Je m'appelle Marc-André Viau, je suis directeur des relations gouvernementales chez Équiterre, et je suis accompagné de mon collègue Émile Boisseau-Bouvier et de Charles Bonhomme, de la Fondation Suzuki.

Équiterre existe depuis bientôt 30 ans et peut compter sur l'appui de plus de 150 000 membres et sympathisants. La Fondation Suzuki, elle, a été créée en 1990 et compte sur l'appui de plus de 300 000 sympathisants, dont près de 100 000 au Québec.

Merci de nous recevoir et de nous donner l'opportunité de nous exprimer et d'échanger sur le projet de loi n° 21, qui va nous permettre de mettre fin aux velléités de quelques compagnies pétrolières et gazières qui sont incompatibles avec la crise climatique et les choix historiques du Québec en matière énergétique. On est heureux de constater que nos efforts et ceux de toutes les autres organisations citoyennes et environnementales ont contribué à créer un climat, sans faire de mauvais jeu de mots, où le gouvernement québécois peut présenter un projet de loi comme celui-là et jouer un rôle de leader à l'international.

Le député de Jonquière le soulignait hier, les choses ont beaucoup évolué au cours des dernières années, et c'est ce qui rend ce projet de loi là possible. On tient d'ailleurs à féliciter le ministre d'avoir saisi cette opportunité.

Mais, comme le ministre le disait hier, on ne va pas s'entendre sur tout, et c'est là qu'on doit dire que ce projet de loi là est imparfait et vague à certains égards. Il offre, entre autres, la possibilité d'indemniser les compagnies pétrolières et gazières. Le problème avec la compensation, c'est qu'on compense pour quelque chose qu'on sait volontairement nuisible pour l'environnement et la santé. Il y aura toujours une bonne raison juridique de compenser, mais ce n'est pas une obligation. Et la position de nos organisations, c'est qu'on va toujours préférer le concept de pollueur-payeur à celui de pollueur payé. Nos organisations ont proposé certaines recommandations dans notre mémoire, que mes collègues vont détailler, et on encourage les membres de la commission à les intégrer au cours de l'étude article par article, parce qu'on aimerait ça, avoir une loi dont on est vraiment fiers.

Je cède maintenant la parole à Charles Bonhomme de la Fondation David-Suzuki.

M. Bonhomme (Charles) : Merci, Marc-André. D'entrée de jeu, il est important de rappeler le contexte climatique dans lequel s'inscrit le projet de loi n° 21. En août 2021, le rapport du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat, le GIEC, a lancé un code rouge au monde entier concernant les émissions de GES, rappelant que l'humanité est sans équivoque responsable de la crise climatique, en grande partie due à sa dépendance aux combustibles fossiles. Il existe un consensus scientifique à travers le monde sur l'importance de cesser rapidement l'utilisation des combustibles fossiles.

Outre le rapport accablant du GIEC, on dénombre de nombreux autres rapports récents qui vont dans le même sens et qui réitèrent l'importance d'agir maintenant. Premièrement, le rapport de l'Agence internationale de l'énergie paru en mai 2021 est clair : aucun nouveau projet pétrolier et gazier ne doit être accepté si nous voulons limiter l'augmentation de la température mondiale à 1,5 degré Celsius. Deuxièmement, une étude parue dans la revue Nature en septembre 2021 évalue que, pour avoir 50 % de chances de limiter le réchauffement planétaire à 1,5 degré Celsius, 60 % du pétrole et du méthane fossile et 90 % du charbon doivent rester dans le sol. Troisièmement, le Production Gap Report d'octobre 2021 montre que non seulement la production mondiale d'hydrocarbures doit décroître immédiatement, mais aussi que les plans des pays sont en totale inadéquation avec cette réalité. Puis rappelons également que le gouvernement du Québec s'est lié par décret à l'Accord de Paris.

Équiterre et la Fondation David-Suzuki accueillent favorablement le dépôt du projet de loi n° 21. Le gouvernement fait un pas important dans le sens exigé par l'urgence climatique, la science et la population. Le dépôt du projet de loi signe l'arrêt de mort des projets d'exploration et d'exploitation de gaz et de pétrole proposés par le passé et récemment par l'industrie. Le projet de loi déposé est entre autres le résultat d'une vigilance et de la mobilisation inlassable de groupes citoyens partout au Québec. Depuis des décennies, les citoyennes et citoyens de même que de nombreuses communautés et organisations environnementales d'un bout à l'autre de la province ont dépensé ressources, énergie et temps pour lutter contre les projets dangereux de cette <industrie...

M. Bonhomme (Charles) : ...de la province ont dépensé ressources, énergie et temps pour lutter contre les projets dangereux de cette >industrie. C'est donc avec soulagement et enthousiasme que plusieurs militantes et militants se sont battus pour protéger notre santé, notre sécurité, et la nature accueille cette importante avancée.

Pour que le projet de loi n° 21 soit à la hauteur de l'urgence climatique et qu'il permette de répondre avec ambition à la crise climatique, Équiterre et la Fondation David-Suzuki recommandent aux législateurs que le projet de loi soit amendé pour fermer la porte aux cadeaux sous forme d'indemnisations que le gouvernement compte octroyer à l'industrie; également, que le gouvernement soustraie les appuis financiers fiscaux obtenus par les entreprises des indemnisations si le gouvernement décide de maintenir ces dernières. Nous recommandons aussi que le gouvernement priorise ce projet de loi, le renforce et l'adopte rapidement puis que le gouvernement saisisse cette opportunité pour prouver aux Québécoises et Québécois qu'il compte sérieusement atteindre ses cibles climatiques et que ce projet de loi soit un outil pour y arriver.

Je cède maintenant la parole à mon collègue Émile Boisseau-Bouvier.

M. Boisseau-Bouvier (Émile) : Merci, Charles. Donc, en déposant ce projet de loi, le gouvernement envoie un message puissant aux autres gouvernements à travers le monde : l'ère des combustibles fossiles est terminée, et ils doivent, eux aussi, adopter de tels projets de loi. C'est un message qui avait également été lancé cet automne à la COP26, lors du lancement de la Beyond Oil and Gas Alliance, la BOGA, et nous espérons que ce momentum concrétise et accélère les changements dans d'autres juridictions. Après tout, la BOGA n'est que la traduction diplomatique du consensus scientifique croissant dont il était question précédemment. Mettre fin à l'exploration, à l'exploitation des hydrocarbures est le minimum de ce qui est nécessaire pour atteindre les objectifs de l'Accord de Paris. Le Québec défriche donc un chemin que tous les États devront emprunter, et il est de notre devoir de nous assurer que nous tracions la bonne voie et que tous puissent nous suivre.

• (16 heures) •  

L'octroi d'indemnisations pourrait cependant nous barrer la route. À l'échelle domestique, d'autres industries devront être complètement transformées ou simplement interdites si le Québec veut atteindre son objectif de carboneutralité d'ici 2050. Ces industries réclameront, elles aussi, des indemnisations, si le projet de loi est adopté tel quel. Le Québec se retrouverait alors avec une facture qui rendrait extrêmement complexes et difficiles le financement de la transition énergétique et l'adaptation à la crise climatique. L'argent public doit servir à financer la transition et non pas à perpétuer des investissements dans des industries qui contribuent à alimenter la crise climatique.

Sur le plan international, le projet de loi n° 21 constitue un précédent qui sera étudié attentivement par les autres juridictions ainsi que par les compagnies fossiles y opérant. Si le Québec accorde 100 millions de dollars, comme cela est estimé par le ministre de l'Énergie, alors que la province ne produit aucun hydrocarbure, combien cela en coûtera-t-il à l'Alberta, par exemple, pour se sortir de sa dépendance? Une facture trop élevée rendrait cette approche beaucoup moins attirante pour d'autres juridictions qui veulent et qui doivent emboîter le pas.

Équiterre et la Fondation David-Suzuki recommandent aux législateurs de procéder à l'adoption du projet de loi sans offrir de compensation aux compagnies pétrolières et gazières afin d'éviter de freiner la transition énergétique au Québec et ailleurs dans le monde. Nous lui recommandons également de saisir cette opportunité pour accentuer l'implication du Québec au sein de la BOGA et pour faire la promotion de ses engagements climatiques ailleurs au Canada et dans le monde.

Sur un tout autre plan, je pense qu'il est important de rappeler les bienfaits de ce projet de loi sur les écosystèmes et les communautés avoisinant les sites d'exploration et de production d'hydrocarbures, qui sont les premiers à subir les impacts environnementaux de ces activités. En adoptant le projet de loi n° 21, le gouvernement mettrait finalement fin aux risques et aux effets délétères subis par les communautés et les écosystèmes du Québec lors du développement de l'industrie pétrolière et gazière. Dans le cas contraire, le statu quo continuerait de laisser ces populations aux prises avec des impacts environnementaux nocifs pour leur santé, leur qualité de vie et la biodiversité, ce qui serait contraire aux objectifs de développement durable du Québec.

Par ailleurs, nous sommes surpris de remarquer qu'aucun groupe autochtone ne sera entendu lors de ces consultations. Cette absence est d'autant plus étonnante que les risques associés aux impacts environnementaux de l'industrie des hydrocarbures sont particulièrement dévastateurs au sein des communautés autochtones, pour lesquelles la conservation et la gestion durable des ressources naturelles est un enjeu économique et culturel, mais surtout un élément essentiel à leur subsistance.

Équiterre et la Fondation David-Suzuki estiment que les communautés autochtones font partie des principaux intéressés de ce projet de loi. C'est pourquoi nous recommandons que le gouvernement s'engage à rencontrer les groupes autochtones, dans le cadre de ses consultations publiques sur le projet de loi, dans l'optique de favoriser une relation plus étroite entre le gouvernement et les peuples autochtones. Nous recommandons que les groupes autochtones soient invités aussi pour les prochains projets de loi similaires.

Je cède maintenant la parole à Charles Bonhomme.

M. Bonhomme (Charles) : Merci, Émile. En conclusion, M. le Président, il n'y a plus aucun doute que l'urgence climatique est un enjeu planétaire majeur auquel doit faire face la communauté internationale, particulièrement les États qui, comme le Québec, ont contribué à une part plus importante des émissions de GES dans l'atmosphère. Au-delà d'un simple calcul comptable des GES domestiques, faire un virage rapide vers une économie sobre en carbone nécessite de faire une révision cohérente des lois, des politiques et des orientations stratégiques qui touchent l'ensemble des secteurs d'activité du Québec.

En ce sens, le projet de loi n° 21 est une étape essentielle à l'atteinte de cet objectif et des engagements climatiques du Québec. Nous espérons que cette étape sera la première d'une série d'actions significatives et concrètes dans cette <direction. En plus de...

>


 
 

16 h (version révisée)

<       M. Bonhomme (Charles) : ...la première d'une série d'actions significatives et concrètes dans cette >direction. En plus de savoir mobiliser et sensibiliser les citoyennes et les citoyens sur les questions environnementales, Équiterre et la Fondation David-Suzuki peuvent être des alliés stratégiques du gouvernement pour communiquer au grand public ses actions environnementales qui s'alignent avec notre vision et, par conséquent, en augmenter l'acceptabilité sociale. C'est pourquoi nous tenons à ouvrir la porte à une plus grande collaboration entre nos organisations et le gouvernement. Merci à tous, et nous serons disponibles pour prendre vos questions avec plaisir.

Le Président (M. Lemay) : Alors, merci pour cet exposé. Nous allons débuter de ce pas avec la partie gouvernementale, M. le ministre, pour environ 16 min 30 s.

M. Julien : Oui, merci. Merci, M. le Président. Merci beaucoup, messieurs, pour votre participation aujourd'hui, puis pour vos commentaires, et les documents que vous nous avez transmis.

Écoutez, on est dans la deuxième journée, là, des consultations, et j'ai toujours l'impression que le meilleur endroit est toujours un peu dans la nuance. Et on a entendu des personnes qui sont venues se présenter... parce que j'entends quand même vos commentaires, là. Premièrement, je pense que ce n'est pas un premier pas qu'on fait, mais c'est un pas important. Je pense qu'on fait plusieurs autres pas, là, actuellement au Québec, peut-être qu'ils sont insuffisants, mais on a cette préoccupation-là. Je pense que c'est un pas important, mais, quand on dit : de mettre fin à l'exploration et l'exploitation des hydrocarbures par un geste légal comme celui-là, moi, pour moi, c'est quand même un geste majeur. Vous disiez : Ça, c'est un strict minimum. Quel autre État a fait ça?

M. Boisseau-Bouvier (Émile) : En fait, pour répondre à votre question, ce serait une première mondiale, donc, mais c'est un strict minimum au sens de la science climatique. Et puis, quand on parle de premiers pas, effectivement, vous l'avez dit, il y a d'autres actions gouvernementales en termes de réduction de nos gaz à effet de serre. Par contre, il faut admettre que, pour l'instant, ils sont largement insuffisants. On a 2,7 % de réduction de gaz à effet de serre depuis 1990. On sait que notre cible est de 37,5 %, d'ici 2030, et, selon nous aussi, il faudrait la rehausser si on veut faire notre juste part, dans l'effort climatique, pour limiter le réchauffement climatique à 1,5°C.

Donc, quand on parle de strict minimum, c'est un strict minimum au sens de la science, qui est... c'est un strict minimum qui devra être suivi par toutes les autres juridictions. Et donc c'est pour ça que c'est très important que le gouvernement du Québec trace la bonne voie et n'empêche pas d'autres de nous suivre dans cette bonne direction là.

M. Julien : Parfait. Donc, pour bien, bien comprendre, je comprends mieux la notion de strict minimum que vous employez, parce que, sinon, il n'y aurait personne qui aurait fait le moindre... le strict minimum, actuellement, dans ce qui doit être fait. Je pense, encore une fois, que ce n'est pas le cas, mais je pense que c'est un geste qui est probant. Et j'ai bien aimé, là, justement, l'intervention, juste avant vous, de Mme Annie Chaloux, qui mentionnait clairement que, dans le préambule... puis je pense que Richard Ouellet aussi l'a mentionné hier, les professeurs, a dit, dans le préambule, il faut peut-être démontrer plus de fierté et être plus explicatif sur ce geste concret qu'on pose, justement, pour que celui… excusez-moi, là, fasse tache d'huile, fasse tache de je ne sais pas quoi, de spaghetti, on va dire, plutôt que l'huile, pour la suite des choses.

Alors, ceci étant, comme je dis, j'aime beaucoup la nuance. Puis, tu sais, à la fin, il y a des groupes qui sont aux extrêmes, en réalité, puis je ne dis pas que vous êtes des groupes extrêmes, mais qui sont aux extrêmes du pôle de discussion sur ce qu'on discute aujourd'hui. Et, quand on dit : Il ne faut pas donner de cadeau, alors je réitère, là, tu sais, nous autres, le principe d'indemnisation… Puis on essaie de trouver l'équilibre, dans le projet de loi, pour aussi que ce projet de loi soit à la fois crédible et également pour qu'il puisse amener des réflexions dans d'autres États sur, justement, les engagements.

Je le réitérais tantôt, avec Mme Chaloux, oui, c'est vrai que, les entreprises, peut-être certaines, on peut prétendre qu'ils voient bien que les hydrocarbures, ce n'est pas la voie de l'avenir, là. On comprend ça. Puis probablement qu'ils voient également qu'il y a un risque lié à s'embarquer dans ces projets-là. D'un autre côté, je réitère la responsabilité, comme État avec un processus légal... on a des lois, on a des règlements qui n'ont, somme toute, certainement pas découragé les gens d'y aller puisque c'était permis. Donc, c'est pour cette responsabilité un peu qu'on doit indemniser.

Puis, quand on parle de cadeau, là, c'est : on va rembourser certains éléments qui ont été payés pour être conformes. On parle des licences, des frais d'exploitation qui ont été nécessaires pour démontrer la conformité aux exigences que l'État a mises en place. Donc, on n'est pas du tout sur des gains potentiels, sur des taux de rendement, puis on n'est pas là du tout, là, alors. Et, pour terminer, là, ma question, c'est... Mme Chaloux, je ne voudrais pas qu'elle soit mise à l'index, là, mais elle est <membre...

M. Julien : Mme Chaloux, je ne voudrais pas qu'elle soit mise à l'index, là, mais elle est >membre du C.A. d'Équiterre, puis elle, elle trouve que ça fait bien du sens, mais elle amène la nuance, là. Elle n'est pas : Non, non, il faut vraiment indemniser. Il faut indemniser le moins possible, selon certains critères bien établis, parce qu'effectivement il y a une responsabilité de l'État par rapport à ce qui a été permis. Donc, vous semblez être très, très affirmatifs, sans nuance, vous, de votre côté. Pourquoi?

M. Viau (Marc-André) : Il y a beaucoup de... il y a des profils qui sont très diversifiés sur le C.A. d'Équiterre. Donc, vous allez retrouver plusieurs opinions. Je pense qu'on a apporté beaucoup de nuances dans notre présentation et dans notre mémoire également. On trace une ligne sur la question des compensations. Et on s'entend que ces compensations-là sont... à tout le moins, il y a certaines balises qui sont identifiées, là, dans les articles, là... à partir de l'article... je ne me rappelle plus exactement quel article, là, mais oui... à partir de l'article 32, pardon. Il va quand même y avoir un projet de règlement qui va définir un programme ou un programme qui va être… qui va s'accompagner de ça, le programme… c'est juste parce que ça dit que ça allait être défini par voie réglementaire.

Donc, il va y avoir un programme. Les détails de ce programme-là vont être importants pour voir, justement, quelle sera les compensations qui seront accordées. Il y a l'article 36, là, qui prévoit que le programme peut prévoir des versements d'un montant forfaitaire à titre d'indemnité pour certains frais. Donc, il y a des précisions à obtenir dans ce programme-là.

• (16 h 10) •

Il reste que notre position d'organisation, c'est que ces compagnies... l'industrie pétrolière est une industrie qui a... qui est la principale responsable de la crise climatique dans laquelle on se trouve. De fermer cette... les possibilités d'exploitation et d'exploration, vous l'avez dit tantôt, vous en avez parlé tantôt, c'est un strict minimum. Et donc il n'y a pas nécessairement besoin d'avoir... même pour fermer ces choses-là, pas nécessairement besoin, dans notre perspective, des compensations, parce que, justement, à cause des incidences de cette industrie-là sur la crise climatique.

M. Julien : Soyez assuré, M. Viau, qu'ici l'addition qu'on a, là, c'est... Je veux juste comprendre bien les motifs, là. Je ne porte pas de jugement, bien au contraire, là, puis je ne suis pas étonné de la position de votre groupe, là, par rapport à ce que vous prônez, là, alors... Mais j'essaie juste de cheminer avec vous. Bon, c'est un strict minimum, ça, on l'a mentionné tantôt, vous dites : C'est un strict minimum, on est les premiers à le faire. Donc, on pave, actuellement, là, on ouvre le chemin, puis on est les premiers à le faire, puis c'est un strict minimum.

Et le fait qu'on le fasse, moi, je réitère qu'actuellement on a une part de responsabilité. Puis tous les États ont une part de responsabilité, puis puisque personne ne le fait actuellement… c'est-à-dire que, puisqu'on a laissé faire, on a permis, on a encadré, et ces gens-là ont respecté l'encadrement qu'on a mis. Tu sais, je trouve ça un peu particulier qu'il n'y ait pas de reconnaissance de nos responsabilités, dans ce qui a été permis et, en plus, qu'on est les premiers à cesser de le permettre. Donc, somme toute, moi, je pense que c'est courageux.

Encore là, les indemnités, ce que j'entends, c'est... Est-ce que vous dites : À tout le moins, les indemnités, le programme d'indemnisation devrait être très précis pour être certain, là, des volets qu'on indemnise? Parce que vous avez parlé d'un article qui amène un peu de flou, mais, si c'était hyperprécis puis que les intentions du programme d'indemnisation étaient claires sur certains frais, comme des licences, comme d'autres objets qui ont été payés pour se rendre conforme à une loi, qui était sous notre responsabilité, est-ce que, malgré ça, vous seriez fermés à l'idée des indemnisations?

M. Viau (Marc-André) : Comme je l'ai dit, notre position, on trace la ligne à pas d'indemnisation, parce que, comme je l'ai dit en allocution, il y aura toujours une bonne raison d'avoir des indemnités, et l'industrie va toujours demander certaines indemnisations, puis ils vont gratter à gauche, à droite et ils vont aller chercher des indemnisations ou, à tout le moins, ils vont le demander. Donc, à un moment donné, il faut tracer la ligne. Nous, on la trace là. Vous la tracez ailleurs, dans ce projet de loi là, avec un programme d'indemnités. <Au final...

M. Viau (Marc-André) : ...trace là. Vous la tracez ailleurs, dans ce projet de loi là, avec un programme d'indemnités. >Au final, je suis pas mal certain que tout le monde va finir par applaudir ce projet de loi là en disant : Bien, on l'a fait. Et il y aura peut-être certains éléments que nous trouverons imparfaits, d'autres trouveront imparfaits, mais on sera... on aura avancé dans ce dossier-là.

M. Julien : Permettez, M. Viau...

M. Viau (Marc-André) : Nous, c'est là qu'on met la ligne.

M. Julien : Parfait. Alors, si vous permettez, M. Viau, rien que pour être certain, parce que vous avez ramené un thème qui m'a aussi interpelé quand vous l'avez mentionné, vous l'avez rappelé maintenant, toutes les industries vont venir faire des demandes d'indemnisation, puis on ne sait pas où est-ce que ça va terminer, puis etc. Mais moi, si ça termine, en réalité, qu'on indemnise, au Québec, quand on enlève un droit sur les frais qui ont été payés pour être conforme à ce droit-là, n'importe quelle industrie, moi, je vais être prêt à la compenser, à tous égards, parce qu'on vient fixer d'une manière claire qu'on a permis... Nous-mêmes, on était responsables de donner un droit, ces gens-là s'y sont conformés, et on rembourse, en fin de compte, les frais qui ont nécessité une conformité à notre responsabilité. Donc, je vois difficilement, dans n'importe quelle industrie, quelle dérive qu'il pourrait y avoir dans un geste qui pourrait être similaire, à tous égards, pour d'autres industries. On a exigé des paiements, des licences et des frais pour être conforme.

Alors, j'entends que vous dites… mais ça pourrait… Non, je ne le vois pas. Alors, expliquez-moi comment ça pourrait faire en sorte que, soudainement, les industries demandent n'importe quoi, puisqu'on le met uniquement sur des éléments pour le maintien… qui étaient nécessaires pour le maintien d'une conformité, qu'on a nous-mêmes, comme État, exigés.

M. Viau (Marc-André) : Il y a… je pense que… je veux dire, la CQDE en a parlé hier, il n'y a rien qui empêche une compagnie... ce n'est pas parce qu'on fait des indemnités qu'une compagnie ne peut pas, après ça, décider de dire… puis de venir faire des poursuites. Donc, il n'y a rien qui garantit quoi que ce soit en procédant de cette façon-là.

Donc, à ce titre-là, je veux bien croire qu'on a donné une conformité, mais on a donné une conformité à une industrie, à des compagnies qui travaillent dans une industrie qui est dommageable pour l'environnement, qui est dommageable pour la santé. C'est tellement dommageable pour l'environnement et dommageable pour la santé que les investisseurs enlèvent leurs investissements de ces portefeuilles-là. C'est tellement dommageable pour la santé et l'environnement qu'on rejette des projets comme GNL. C'est tellement dommageable pour l'environnement et la santé qu'on décide de mettre fin, par exemple, à la vente de véhicules à essence. Donc, on le sait qu'on ne doit plus le faire, et on est plus loin que là où on aurait dû arrêter, normalement, parce qu'on est dans un état de crise et on n'aurait pas dû se rendre à cet état de crise là. Donc, on essaie de se rattraper, là.

M. Julien : Vous avez parfaitement raison, M. Viau, mais je persiste quand même à dire qu'on est quand même les premiers. Ça doit vouloir dire quelque chose, et je pense qu'on doit le mentionner. Justement, vous m'amenez sur une autre piste, le projet de loi… puis je pense qu'on n'a pas encore parlé de cet élément-là, mais c'est la fin du financement, par le gouvernement du Québec, dans les hydrocarbures, là. Il est prévu à l'intérieur du projet de loi. C'est une bonne mesure pour vous? C'est adéquat?

M. Viau (Marc-André) : Est-ce que c'est la fin du... Bien, je veux dire, on ouvre la porte à la question du… de ce qui va se passer aussi du côté de la biénergie. Est-ce que les compensations offertes à Énergir peuvent être considérées comme du financement aux hydrocarbures?

M. Julien : C'est un distributeur d'énergie, ce n'est pas un exploitant, là.

M. Viau (Marc-André) : Oui, mais... pas dans l'exploitation, mais c'est…

M. Julien : Tu sais, encore 50 %... plus de 50 % de l'énergie au Québec, c'est fossile, là, quand même. Il faut...

M. Viau (Marc-André) : … ça reste de l'énergie fossile. Donc, on compense pour de la perte de revenus d'une industrie qui fait de la distribution, d'une entreprise qui fait de la distribution de fossile. Donc, il y a des nuances, là, je dirais qu'il y a des nuances à apporter, mais oui, vous avez un point sur la question de l'exploitation et de l'exploration.

M. Julien : Parfait. Maintenant, une fois qu'on a discuté de l'indemnisation, c'est un bon projet de loi qu'on a devant nous?

M. Viau (Marc-André) : C'est un bon projet de loi, s'il est combiné avec d'autres actions environnementales fortes. Ce n'est pas un projet de loi qui réduit les émissions de gaz à effet de serre. Donc, oui, c'est un bon projet de loi. Comme on dit, c'est un projet de loi qui, à notre avis, pourrait être perfectible, mais c'est un bon projet de loi. C'est un projet de loi qui doit passer, et, comme je l'ai dit <tantôt…

M. Viau (Marc-André) : ...c'est un bon projet de loi. C'est un projet de loi qui doit passer, et, comme je l'ai dit >tantôt, je pense que ça va être un projet de loi qui va être applaudi par tout le monde, vos collègues de l'Assemblée nationale et également l'ensemble des intervenants qui sont venus, peut-être pas l'association pétrolière, mais ça, c'est évidemment...

M. Julien : Est-ce qu'il va être salué par vous, même si les indemnisations demeurent de manière très stricte, avec un plan… une planification, un programme d'indemnisation très clair sur les éléments que j'ai mentionnés?

M. Viau (Marc-André) : Vous avez parlé de nuances, tantôt. On va sûrement faire une réaction nuancée, mais... c'est ça.

M. Julien : Parfait. Je vais laisser mes collègues poser d'autres questions.

Le Président (M. Lemay) : M. le député de Lac-Saint-Jean, allez-y, il reste environ un peu moins que deux minutes.

M. Girard (Lac-Saint-Jean) : Bonjour à vous. On a eu la chance de vous voir lors du mandat d'initiative sur les pesticides. Je ne sais pas si c'était vous qui étaient là, à ce moment-là, mais ce fut fort intéressant. Juste... je veux quand même aller rapidement puis je veux revenir un peu, justement, au niveau des indemnisations, parce que c'est fort intéressant, ces discussions-là.

Puis on a eu aussi M. Ouellet qui a passé ici, et il avait beaucoup d'arguments concernant toute la question au niveau, là, des droits des investissements, les règles internationales et aussi où est-ce que le Québec se situe au niveau mondial, parce qu'on est regardés, en ce moment, à ce niveau-là, avec ce projet de loi là. On est des leaders aussi, toute la question de la transition énergétique, parce qu'on est en train de développer les énergies renouvelables. On avance rapidement là-dedans, on a tout l'éolien, le solaire. Et on a besoin aussi... bien entendu qu'il y a des projets que je ne vous énumérerai pas, mais que ça prend des capitaux aussi étrangers pour venir investir pour aller plus rapidement dans ce domaine-là.

• (16 h 20) •

Et vous ne croyez pas que, sans avoir dans... parce que le projet de loi, qui est bien équilibré, avec un plan d'indemnisation, en n'ayant pas ça, vous ne croyez pas que ça envoie un message négatif aux investisseurs étrangers? Et que, s'il n'y aurait pas ces programmes-là, bien, vous savez ce qui va arriver, on nous l'a mentionné, les contestations juridiques. Donc, je voudrais... au niveau du message que ça envoie au niveau mondial.

M. Boisseau-Bouvier (Émile) : Oui. Merci pour votre question, M. le député. Je pense que les investisseurs étrangers sont amplement capables de faire la distinction entre le secteur fossile, qui est une énergie du passé, et le secteur renouvelable, qui est une énergie du futur, où, comme vous l'avez très bien souligné, le Québec est un leader.

Donc, les investissements... les investisseurs étrangers, qui vont vouloir revenir investir en énergies renouvelables au Québec, sont capables de voir que le contexte est complètement différent. On n'a pas de moratoire, depuis une décennie, sur l'exploitation des énergies renouvelables. En fait, on est un leader, on en exporte, de l'énergie renouvelable. On a des centres de recherche qui ont des renommées internationales et on a...

Le Président (M. Lemay) : M. Boisseau-Bouvier, je dois vous interrompre parce que le temps est écoulé. On va passer au député de Mont-Royal—Outremont pour environ 11 minutes.

M. Arcand : Merci infiniment. Bonjour, messieurs, bienvenue à cette rencontre. Là, je voyais, là, que le ministre est en mal d'amour actuellement, là. Il a besoin de se faire dire, par les gens d'Équiterre, que son projet de loi est fantastique. Alors...

M. Julien : ...

M. Arcand : ...bien, ils ont mis beaucoup de nuance, mais, en tout cas, c'est clair que ça s'en allait dans cette direction-là. Il y a une chose, cependant, qui est très bonne, c'est qu'évidemment nous sommes quatre formations politiques à l'Assemblée nationale, qui sommes ici, on a tous voté en faveur du principe, bien sûr, de ce projet de loi là. Là, évidemment, l'échiquier politique risque de changer, au Québec, dans les prochains mois. Il y a un nouveau parti politique qui a été lancé, qui, lui, en tout cas, est en faveur des hydrocarbures, d'après ce que j'ai entendu de la part de son chef, là. C'est le Parti conservateur, où M. Duhaime a déjà dit qu'il fallait faire des hydrocarbures au Québec.

Ma question est bien simple. Comment vous expliquez le fait que, si vous faites un sondage, demain matin, puis que vous êtes dites : Écoutez, êtes-vous en faveur de maintenir ça, êtes-vous en faveur de la loi, probablement qu'il y a 80 % du monde qui vont dire qu'ils sont passablement en faveur de la loi? Puis malheureusement, sur le plan énergétique, en particulier sur le plan des ventes d'automobiles, de quatre par quatre, le Québec est un des plus mauvais à ce niveau-là. Comment vous expliquez cette espèce de dichotomie qui arrive actuellement?

M. Boisseau-Bouvier (Émile) : Oui. Merci beaucoup pour votre question. Je peux même vous donner un scoop, il y aura un sondage de cette nature qui sortira demain matin. Donc, votre question est très d'adon.

Comment est-ce qu'on peut expliquer cette différence-là? <Bien…

M. Boisseau-Bouvier (Émile) : ...votre question est très d'adon.

Comment est-ce qu'on peut expliquer cette différence-là? >Bien, il y a plusieurs facteurs. Les gens aiment leur confort, les gens n'ont… aiment leurs habitudes aussi. Les gens n'aiment pas se faire dire ce qu'ils doivent faire. Par contre, il y a une réalité qui est inchangeable, il y a une réalité climatique dont on a parlé en profondeur plus récemment. Et puis le Québec a toutes les cartes dans ses mains pour vraiment être un leader et accélérer cette transition énergétique là.

En ce moment, vous l'avez bien dit, on ne produit pas des produits pétroliers. C'est une occasion en or, pour nous, de se sortir de notre dépendance aux produits pétroliers. Pour ça, comme on l'a dit, on veut travailler avec le gouvernement, on veut travailler avec les oppositions aussi. Ça nous fera plaisir de discuter avec vous de toutes les options qui sont dans notre coffre à outils pour réduire notre dépendance aux hydrocarbures. Merci beaucoup.

M. Arcand : Est-ce que…

M. Bonhomme (Charles) : Si je pouvais compléter...

M. Arcand : Est-ce qu'il y a un domaine, actuellement, que vous privilégiez, par exemple, pour lutter contre les GES? Est-ce qu'il y a vraiment quelque chose qui vous apparaît plus évident, pour le Québec, que d'autres? Tu sais, par exemple, on disait, tout à l'heure, que... Le Pr Pineau, lui, le solaire, ce n'est pas trop sa tasse de thé. Actuellement, les gens voient d'autres choses. Est-ce que... Chez vous, est-ce qu'il y a des pistes de solution, pour réduire les gaz à effet de serre, que vous voyez?

M. Bonhomme (Charles) : Oui, bien, merci, M. le député, pour votre question. C'est effectivement une excellente question car il y a plein de chantiers importants, hein, pour atteindre nos cibles climatiques. Tout d'abord, s'attaquer au secteur des transports, comme on le sait, qui représente 44 % des GES, le secteur de l'énergie... Donc, avec ce projet de loi là, ce serait justement un pas incroyable dans la bonne direction.

J'aimerais revenir aussi sur l'importance, je crois, de proposer des projets de loi où on créerait une acceptabilité sociale auprès des Québécois. Et ce projet de loi là, comme vous le disiez tantôt, a été accueilli par les quatre partis politiques, et c'est un élément clé. Lorsqu'on a rédigé notre mémoire, on parle de... que le gouvernement saisisse cette opportunité-là, justement, pour prouver aux Québécoises et Québécois qu'il compte sérieusement atteindre ses cibles et que ce projet de loi là est un outil pour y arriver. Donc, je salue, tout d'abord, le projet de loi dans ce sens-là.

Lorsqu'on parle de secteur de transport, Équiterre et la Fondation David-Suzuki, on travaille justement sur des rapports sur les véhicules zéro émission. On propose d'ailleurs de diminuer notre dépendance à l'auto solo, de revoir nos modes de vie et de la façon qu'on se transporte, mais également de la façon qu'on consomme. Donc, elle se veut face au transport, face à l'énergie, mais face aussi à la responsabilité de chacun. Donc, nos organisations sont de grandes organisations qui cherchent également à sensibiliser les gens à ces efforts-là et de travailler avec le gouvernement pour que leurs projets soient acceptés socialement. Donc, voilà.

M. Arcand : Très bien. Je vais vous poser une question qui touche, entre autres, les communautés autochtones, parce que vous en avez parlé dans votre mémoire. Et je voudrais que vous nous expliquiez un peu ce que vous voulez dire, particulièrement au fait qu'hier on a entendu, évidemment, le fait qu'une compagnie qui s'appelle Questerre essaie d'avoir… ou a une entente avec des communautés autochtones d'Abénaquis, qui... pour un projet possible. Alors là, on s'embarque dans une situation qui est quand même assez délicate, quand on touche les communautés autochtones, et la possibilité qu'elles pourraient décider en disant : Écoutez, c'est sur notre... dans notre secteur, et donc vous n'avez pas un mot à dire, et ainsi de suite, là.

J'essaie juste de voir comment vous voyez ces relations-là en particulier, parce qu'il n'est pas exclu que d'autres communautés fassent la chose… la même chose, même si l'ensemble des communautés autochtones, en général, est d'accord, évidemment, avec le fait qu'il ne doit plus y avoir d'hydrocarbures au Québec. Mais juste nous expliquer un peu votre point de vue à ce niveau-là.

M. Bonhomme (Charles) : Oui, merci. Je pense que c'est une excellente question puis c'est un point important de notre mémoire, hein? Pour répondre précisément à votre question, par rapport au projet pilote qui se passe, là, à Wôlinak… puis il y a clairement des personnes, là, au sein de cette communauté-là, qui sont en accord avec le projet, alors que d'autres, non. Donc, ça prouve que notre recommandation, justement, de les contacter puis de s'asseoir avec eux afin d'obtenir leurs recommandations, leurs revendications, leurs soucis... Donc, d'où l'importance de s'asseoir avec eux puis de voir, bien, justement, à quel point il y a une acceptabilité sociale. Est-ce que c'est une partie infime de cette communauté-là qui est d'accord, <alors…

M. Bonhomme (Charles) : Est-ce que c'est une partie infime de cette communauté-là qui est d'accord, >alors qu'il y a, justement, une plus grande partie de la communauté qui n'est pas d'accord? Donc, je pense que ça vaudrait la peine, justement, de les inviter à ces consultations-là, de s'asseoir avec eux pour avoir leurs revendications.

Nous, pour Équiterre et la Fondation David-Suzuki, on utilise, dans le fond, cette plateforme-là pour vraiment mettre le doigt sur l'importance de collaborer avec eux puis d'augmenter la collaboration entre le gouvernement et les peuples autochtones pour un projet de loi comme celui-ci sur une industrie qui touche à leur culture et à leur subsistance. Donc, je crois également qu'il y a un manque de collaboration entre les communautés autochtones et le gouvernement pour plusieurs projets de loi, mais, pour celui-ci, c'est d'autant plus important que l'industrie pétrolière et gazière a eu des impacts énormes sur leur mode de vie, leur culture et leur subsistance. Alors, je crois que c'est important, là, vraiment, de les inviter puis d'avoir une bonne conversation avec eux pour avoir, justement, leurs revendications et leurs recommandations précises.

M. Arcand : D'accord. On a parlé des remboursements, du fait que vous disiez : Écoutez, il ne faut pas rembourser personne. Évidemment, on a eu plusieurs personnes qui sont intervenues. Il y en a qui ont cette position-là, il y en a d'autres qui nous disent : Écoutez... Il y a eu, hier, un professeur, qui est un avocat, qui fait du commerce international, qui dit : Écoutez, on ne peut ne pas compenser, en tout cas, en partie. Il est clair que, si on rembourse zéro, un des arguments, c'était de dire : Les détenteurs de permis n'ont aucune raison de ne pas, maintenant, poursuivre le gouvernement, si la décision était de ne rembourser rien.

• (16 h 30) •

Alors, ma question, c'est... Il y a clairement un risque que cette transition s'avère encore plus incertaine et dispendieuse encore. Est-ce que, vous, vous êtes prêts? Vous maintenez cette position-là en disant : Bon, bien, moi, je pense qu'il est nécessaire de gérer ce risque-là, de... on est prêts à vivre avec le risque.

M. Viau (Marc-André) : Oui, je pense que... et comme le… j'y ai fait référence un peu plus tôt, mais le CQDE l'a exprimé hier, ce n'est pas parce qu'on compense qu'on se met à l'abri d'éventuelles poursuites. Et le résultat de ces poursuites, dans huit, 10 ans, 12 ans, si poursuites il y a, sont très incertaines étant donné l'évolution de la crise climatique et l'évolution des perceptions par rapport à l'industrie fossile. Donc, c'est pour ça que nous, on trace la ligne à pas d'indemnisation, parce qu'à un moment donné il faut la tracer, la ligne. Et, encore là, on fait… on parle du précédent juridictionnel, du fait que le Québec est la première juridiction à le faire. Si nous le faisons, faisons-le bien et soyons ambitieux, soyons fiers de ce projet de loi.

M. Bonhomme (Charles) : Si je pouvais compléter, il faut se le dire aussi, là, c'est une industrie particulière, hein? Ça fait des années qu'ils sont conscients des torts qu'ils causent aux communautés, aux écosystèmes. Donc, pour eux, ils savaient tout ça, là. Donc, on croit également aussi que l'industrie pétrolière a les sous pour se sortir de son propre trou. Alors, il faut se le dire, c'est une industrie qui a coûté cher à la population en argent, mais moralement aussi. Donc, je crois qu'il faut, oui, la comparer aux industries, c'est correct, mais il faut vraiment la mettre au bas du mur puis leur dire : Bien, écoutez, votre industrie, elle a causé des torts que d'autres industries n'ont pas causés. Donc, vous êtes responsables de la crise climatique en grande partie, donc payez en grande partie.

M. Arcand : Moi, j'avais une question simple pour vous. Étant donné qu'il y a eu quand même, au fil des dernières années... Vous avez parlé de l'importance pour vous, vous avez dit : Le Québec doit avoir une influence dans le monde. Ce n'est peut-être pas en Russie ou en Chine que vous auriez une influence. Expliquez-moi à quel endroit vous pensez avoir une influence.

Le Président (M. Lemay) : ...s'il vous plaît.

M. Boisseau-Bouvier (Émile) : Oui, donc, il y a plusieurs forums où c'est possible, pour le Québec, d'avoir une influence. Entre autres, on a parlé de la Beyond Oil and Gas Alliance. On va avoir des alliés au sein de cette coalition-là qui vont vouloir apprendre de notre cheminement. Il y a aussi des forums internationaux, comme les conférences des parties, les COP, qui existent à chaque année. Et puis, comme on l'a dit, peut-être que ce ne sera pas la Russie, peut-être que ce ne sera pas la Chine qui va devoir bouger... qui va bouger en premier, mais tout le monde va devoir bouger. Si on veut globalement, si on veut mondialement limiter le réchauffement climatique à 1,5 °C, il va falloir que toutes les autres juridictions suivent la voie du Québec, et c'est pour ça que c'est d'autant plus important qu'on trace la bonne voie.

Le Président (M. Lemay) : Merci. Merci, M. Boisseau-Bouvier. Et nous allons maintenant céder la parole à Mme la députée Sainte-Marie—Saint-Jacques pour environ 2 min 45 s.

Mme Massé : On va continuer dans le même sens, monsieur de la fondation Suzuki. Le ministre est très, très, très préoccupé que l'État du Québec soit… reconnaisse sa responsabilité dans… avec son projet <d'indemnisation, et tout ça. Nous traçons…

>


 
 

16 h 30 (version révisée)

<15421 Mme Massé : ...la responsabilité avec son projet >d'indemnisation, et tout ça. Nous traçons la même ligne... la ligne à la même place que vous. Il ne devrait pas y en avoir. Ceci étant dit, l'industrie, et vous venez de le nommer, ignore, elle, ferme les yeux sur leurs responsabilités depuis plus de 25 ans.

Alors, est-ce que vous êtes au courant s'il y a des recours juridiques, à travers la planète, contre des pétrolières et des gazières, pour réclamer, justement, des dommages climatiques qu'elles ont causés à l'humanité depuis des décennies?

M. Boisseau-Bouvier (Émile) : Oui. Bien, un exemple qui pourrait être intéressant pour celui du Québec, c'est la France qui a mis fin à la fracturation hydraulique, et puis il y a eu des compensations mais des compensations qui ont été minimes. En fait, il y a une seule société qui a reçu des compensations, une société texane qui demandait 117 millions d'euros à la France et qui, finalement, a reçu 1 million d'euros. Et donc ça pourrait être un exemple du genre de compensation que les compagnies québécoises pourraient recevoir, si jamais on décidait d'aller de l'avant avec cette avenue que nous ne privilégions pas.

Mme Massé : O.K. Mais, de l'autre côté, est-ce qu'il y a des États, des citoyens qui ont porté des accusations contre les pétrolières et gazières pour les impacts, les dommages climatiques qu'elles ont causés à travers les années, à votre connaissance? Je vois que...

M. Bonhomme (Charles) : C'est une excellente question. Par contre, on devrait retourner étudier ça. Je n'ai pas la réponse pour vous en ce moment.

Mme Massé : C'est parfait. Je profitais de votre présence, peut-être juste une autre question, il nous reste quelques secondes. Vous avez la conviction que l'État québécois est souverain et légitime de dire aux pétrolières et aux gazières : Non, vous allez arrêter d'exploiter, d'explorer, et non, vous n'aurez plus d'argent de notre part? Vous pensez qu'on a cette légitimité-là, comme État souverain? Bien, pas encore, mais...

M. Boisseau-Bouvier (Émile) : Tout à fait. Oui, on pense que le Québec a la légitimité de dire non aux industries pétrolières, aux industries gazières et de ne pas aller de l'avant avec des compensations, mais de mettre fin à leurs activités.

Le Président (M. Lemay) : Merci. Donc, nous allons maintenant passer au troisième groupe d'opposition. M. le député de Jonquière.

M. Gaudreault : Oui. Je ne suis pas toujours d'accord avec QS, mais, sur la souveraineté, évidemment, je suis d'accord. Et merci d'être là.

Moi, je voudrais savoir... On entend quand même ici, à plusieurs reprises, par rapport aux indemnisations... Puis nous sommes contre les indemnisations, mais il faut calculer, dans le fond, le risque d'avoir des poursuites ou de ne pas avoir de poursuite. On a posé un peu la question hier à M. Beaulieu... pas Beaulieu, mais M. Ouellet. Donc, est-ce que, pour vous, ça doit peser dans la balance ou, de toute façon, les entreprises, qu'il y ait une indemnisation minimale ou qu'il n'y ait pas d'indemnisation, vont se revirer de bord puis vont poursuivre le Québec ou le gouvernement? Donc, est-ce qu'on doit tenir compte de ces avantages puis ces inconvénients dans la balance, là?

M. Viau (Marc-André) : Bien, je pense qu'il faut surtout... puis c'est notre position, je pense qu'il faut surtout, à un moment donné, juste prendre une décision puis dire : C'est là qu'on trace la ligne. Donc, oui, on pourrait toujours dire : Bien, on a moins de risques, si on met tant, puis, si on en met plus, on a encore moins de risques, puis on a moins, tu sais... Puis on peut aussi dire qu'on a les outils législatifs pour dire : Non, c'est ça, le cadre, puis c'est fini comme ça. Puis il y a des exemples, dans d'autres industries, l'industrie de l'uranium, l'industrie de l'amiante, vous en avez parlé hier avec d'autres intervenants, où c'est possible de le faire. C'est ça.

M. Gaudreault : Merci. Donc, au fond, c'est un choix politique et c'est un choix politique de s'assumer à cet égard. Je pense que c'est votre recommandation 6 qui suggérait que le Québec s'implique davantage dans BOGA. Comment on pourrait s'impliquer davantage dans BOGA, comme État subnational, là — j'aimerais bien aussi qu'on soit souverains, mais... — comme État subnational, avec les autres membres de BOGA? Qu'est-ce qu'on peut faire de plus pour être encore plus actifs dans BOGA, selon vous?

M. Boisseau-Bouvier (Émile) : Oui, bien, il y a des pressions politiques qui peuvent être faites, il y a du partage de connaissances qui peut être fait aussi. Le Québec a déjà beaucoup de liens internationaux, donc, pas nécessairement juste dans la fin de l'exploration et l'exploitation des hydrocarbures. C'est un travail qui se fait déjà, pour le <Québec...

M. Boisseau-Bouvier (Émile) : ... l'exploitation des hydrocarbures. C'est un travail qui se fait déjà, pour le >Québec, sur d'autres plans, et puis on va pouvoir le faire au sein de la BOGA. C'est partager nos expériences, voir comment ça s'est passé, quels recours juridiques il y a eu au Québec ou il n'y a pas eu au Québec et puis expliquer aux autres juridictions qu'elles doivent nous suivre si on veut globalement limiter le réchauffement climatique à 1,5 degré Celsius.

M. Gaudreault : Donc, c'est bon. Merci. Merci beaucoup.

Le Président (M. Lemay) : Alors, merci, M. le député de Jonquière. Ceci termine cette période d'échange avec les membres de la commission. Je vous remercie à tous pour votre contribution aux travaux de la commission.

Et je vais suspendre quelques instants pour permettre au prochain groupe de prendre place. Merci.

(Suspension de la séance à 16 h 40)

> (Reprise à 16 h 50)

Le Président (M. Lemay) : Alors, la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources naturelles reprend ses travaux.

Et je souhaite maintenant la bienvenue à Mme Pétrin d'Eau Secours! Alors, bienvenue à ces travaux. Alors, vous allez avoir un exposé d'environ 10 minutes, suivi d'une période d'échange avec les membres de la commission. Et je vous cède la parole de ce pas.

Eau Secours!

Mme Pétrin (Rébecca) : Merci beaucoup. Donc, bonsoir à tous. Une petite présentation de notre organisme Eau Secours! Donc, ça a été fondé en 1997. Eau Secours! a pour mission de promouvoir la protection et la gestion responsable de l'eau dans une perspective de santé environnementale, d'équité, d'accessibilité et de défense collective des droits de la population. Nous nous opposons à toute forme de commercialisation, privatisation, gaspillage et appropriation à des fins privées, pour en assurer le caractère collectif. Nous luttons également pour en protéger sa qualité contre diverses sources de contamination qui sont encore nombreuses aujourd'hui, malheureusement.

Au cours des 10 dernières années, nous avons participé activement, et étudié, et dénoncé tous les risques liés à l'eau potable en lien avec les projets d'énergies fossiles. Avec nos membres, nous avons dit non au gaz de schiste, nous avons dit non au projet d'Énergie Est, nous avons dit non à GNL Québec, tout en participant aux différentes audiences publiques de 2010, 2014, 2016 sur ce sujet. Nous avons mis en garde le gouvernement du Québec en 2016, lors du projet de loi n° 606, qu'à chaque projet de forage s'ajoutent des conséquences qui seront irréversibles sur la qualité de nos eaux du Québec.

Mais, malgré tout ça, c'est avec une fébrilité et une satisfaction débordantes que je présente aujourd'hui notre mémoire et nos recommandations sur le projet de loi n° 21 pour la fermeture de cette filière qui n'aurait jamais dû être ouverte. Merci à la commission de nous recevoir.

Donc, la première partie de notre mémoire parle un peu de l'état des puits au Québec. Vous pouvez voir dans le tableau, en fait, qui est présenté, qui... en fait, ce sont des données qui sont tirées de SIGPEG qui est la base de données du ministère de l'Énergie et des Ressources naturelles. Il y a 132 puits sur 961 qui ne sont pas fermés définitivement. Ils sont donc actifs ou temporairement fermés. Le tableau présenté fait état de la conformité, en fait, de ces 132 puits. On remarque qu'il y a beaucoup de puits qui sont sans information. Donc, 86 puits sont sans information, 29 puits sont non conformes et 17 puits conformes.

Je cite également, dans la première section de notre rapport, un document, en fait, de l'association québécoise de la lutte pour la pollution atmosphérique, datant de 2006, sur des inspections de terrain qui ont eu lieu, et ces inspections-là étaient, en fait, à la demande du MERN. Les auteurs du rapport parlaient de puits enfouis, de puits abîmés, avec des traces visibles d'émanations de gaz, des coordonnées géographiques étaient erronées, bref, multiples problèmes. Malheureusement, ce projet-là n'a pas pu être complété, et, depuis, nous ignorons toujours l'état des puits n'ayant pas reçu de visite.

Quelquefois, également, on entend parler de vieux puits refaisant surface, comme ce matin même, dans un article de Mathieu Lamothe paru dans Le Nouvelliste, qui relate l'histoire d'un couple qui a acheté une maison en Mauricie. Je suis désolée, je n'ai pas pu l'inclure au mémoire, là, l'article a paru trop dernièrement, en fait, mais je vais quand même vous en lire un extrait. «Le puits abandonné chez M. Laflamme, qui s'est révélé lors de la démolition d'une grange, au tournant des années 2000, entraîne depuis l'affaissement de plusieurs parcelles de son terrain. La situation empire année après année. Trois trous remplis d'eau et de boue grisâtre, desquels s'échappent les bulles produites par un gaz s'apparentant à du méthane, ont également fait leur apparition. L'été, le gazon qui recouvre les endroits où le terrain s'affaisse est d'une couleur jaunâtre. Une substance huileuse remonte régulièrement à la surface du sol.»

Ceci est malheureusement l'héritage forcé de l'industrie des énergies fossiles, auquel le Québec doit maintenant faire face. Plus de 900 puits aux conditions inconnues, partout dans le sud du Québec... Certains sont encore sous la responsabilité des entreprises, mais la majorité, abandonnés, fermés, relèvent maintenant du ministère.

La bonne nouvelle, en fait, avec l'arrivée du projet de loi n° 21, c'est qu'il n'y aura plus de nouveaux puits qui s'ajouteront à cette liste. Mais la mauvaise nouvelle, c'est que, de tous ces puits existants, ils ne disparaîtront pas, et c'est maintenant à nous de s'en préoccuper.

Donc, en lien avec l'état de situation des puits, nos recommandations, en fait, vis-à-vis le ministère, c'est de procéder au <recensement...

Mme Pétrin (Rébecca) : ... situation des puits, nos recommandations, en fait, vis-à-vis le ministère, c'est de procéder au >recensement et à l'inspection de tous les puits fermés n'ayant pas été inspectés récemment. Afin d'évaluer leur qualité de fermeture, l'inspection doit comprendre l'évaluation de l'étanchéité et la conformité de leur bouchon de ciment, ou «kill mud».

Nous recommandons également au ministère qu'il maintienne l'obligation aux entreprises de soumettre un rapport d'inspection annuel pour les puits fermés temporairement, en vertu de l'article 60, paragraphe 8°, du règlement sur le pétrole, les gaz et les réservoirs souterrains de la Loi sur les mines. Donc, on ne voudrait pas que cette obligation-là soit retirée dans le projet de loi, étant donné que les entreprises qui sont encore propriétaires de leurs puits peuvent très bien quand même continuer à effectuer ces évaluations-là.

La deuxième section de notre rapport concerne la contamination des eaux suite aux forages. Dans cette section-ci, on présente des composés chimiques utilisés dans le forage de 18 puits dont la toxicité a été démontrée et qualifiée dans différents rapports. Ces rapports font aussi état d'un manque de connaissances sur les informations relatives aux intrants chimiques utilisés par l'industrie du shale au Québec, puisque ces dernières, donc les industries, ne les ont pas rendues publiques, ce qui laisse planer un sérieux doute sur l'écotoxicologie des eaux souterraines des milieux avoisinants des puits de gaz.

Les données sont détenues par les exploitants, mais elles ne sont pas rendues publiques auprès des autorités et des chercheurs. C'est donc vraiment difficile de connaître exactement c'est quoi, les produits qui ont été injectés dans le sol. Et, en effet, ce sont jusqu'à 62 composés chimiques qui ont pu être utilisés dans les 18 puits de fracturation. À l'heure actuelle, et bien que plusieurs de ces composés chimiques ont été caractérisés comme étant toxiques pour l'environnement et la santé humaine, nous ne pouvons toujours pas confirmer avec certitude le nombre exact des composés chimiques qui ont été utilisés, ni leur volume ni leur concentration, puisqu'on n'a pas les données.

On cite également, dans cette section, un passage du MDDEFP, en 2013, qui mentionnait que nous connaissons mal la composition des intrants utilisés et comment ces intrants-là se comportent dans le milieu récepteur. Donc, c'est très limité, finalement, nos connaissances sur les interactions une fois que les produits chimiques sont injectés.

Tel qu'il a été présenté également dans le mémoire de Pascal Bergeron, un cas de contamination a été recensé au Québec, et c'est le puits Bourque en Gaspésie. Ça ne veut pas dire qu'il y a un seul cas de contamination au Québec. Comme je l'ai rappelé avant, il y a énormément de puits qui n'ont pas fait office d'études plus poussées. Mais le fait qu'il y ait un cas défini, c'est malheureusement suffisant pour douter de l'intégrité des sources d'eau pour l'ensemble des sites de forage non conformes ou sans suivi.

Il faut savoir aussi que l'obligation de faire des études hydrogéologiques lors des forages ne relève que depuis l'adoption, en fait, du règlement de protection et de prélèvement des eaux potables... protection des eaux potables de 2014. Donc, tous les puits de forage qui ont eu lieu avant cette date-là n'ont pas eu d'étude hydrogéologique en amont. Et malheureusement, même les meilleures pratiques vendues par les représentants de l'industrie génèrent des déversements qu'on ne peut pas dire anecdotiques. Donc, nous voici devant la situation où l'industrie a l'obligation de remettre en état des sites forés, mais on ne connaît pas vraiment l'état en amont des sites et on ne connaît pas vraiment non plus l'état de situation des sites aujourd'hui.

Donc, dans nos recommandations, nous recommandons au gouvernement du Québec, pour une fermeture des puits transparente, sécuritaire et réussie, de procéder à des évaluations environnementales de sites de production susceptibles d'avoir fait usage de produits chimiques, donc d'aller plus en profondeur dans les 18 sites où il y a eu de l'injection et de rendre publique la liste des composés chimiques utilisés, d'évaluer l'impact de ces produits sur l'environnement, les milieux de vie et la santé humaine.

Nous recommandons aussi au ministère de procéder à des analyses supplémentaires sur les interactions de ces produits chimiques là.

Nous recommandons également au ministère d'exiger une étude hydrogéologique systématique pour l'ensemble des puits actifs ou temporairement fermés afin de connaître le nombre de puits contaminés, les types de contamination et l'état écotoxicologique de ces eaux. Donc, à l'article 13, alinéa deux, on ne stipule pas directement cette obligation, donc on devrait bonifier cet article-là.

Et puis je veux juste rappeler, Pascal Bergeron avait bien spécifié dans son mémoire la technique d'échantillonnage d'eau en amont, donc d'aller suffisamment en amont des prélèvements d'eau pour avoir, en fait, l'échantillonnage d'eau, sans l'impact du forage, pour vraiment comparer puis pouvoir quantifier quel est l'impact du forage sur la qualité des eaux souterraines et de surface, <évidemment.

Mme Pétrin (Rébecca) : ...qualité des eaux souterraines et de surface, >évidemment.

Et nous demandons également au ministère de faire référence à la LQE, dans le cadre de la restauration des sites, afin que les obligations de décontamination s'appliquent.

Nous demandons également qu'un avis du ministre de l'Environnement soit remplacé par un avis de conformité officiel. Donc, même si les entreprises de forage ont l'obligation de souscrire à la LQE, le projet de règlement... le projet de loi serait bonifié, en fait, de... qu'il y ait une mention spécifique à cet effet-là, et puis ça permettrait de définir mieux aussi à qui reviennent les coûts de ces travaux-là.

Le Président (M. Lemay) : En conclusion.

Mme Pétrin (Rébecca) : Oui?

Le Président (M. Lemay) : En conclusion. Allez-y.

Mme Pétrin (Rébecca) : Donc, en conclusion, Eau secours! s'oppose fermement à ce qu'un centime soit versé à l'industrie ou à l'un des représentants — remboursements de frais et d'indemnités — avant que la fermeture et la restauration du site ne soient complètes et qu'un avis de conformité ne soit rendu par le ministère de l'Environnement. Donc, on considère que ça va coûter extrêmement cher à l'État de décontaminer les sites et on ne voudrait pas que les indemnisations soient remises avant la fermeture complète des travaux. Merci.

Le Président (M. Lemay) : Merci, Mme Pétrin, pour votre exposé. Nous allons maintenant procéder à la période d'échange avec les membres de la commission. M. le ministre, la parole est à vous.

• (17 heures) •

M. Julien : Oui, merci. Merci, Mme Pétrin, pour vos commentaires et vos travaux. Je fais quand même la distinction, si vous permettez, des éléments du projet de loi et des éléments qui sont plus, pour moi, les fameux puits orphelins, là.

Puis je vous écoutais tantôt, mais moi, à chaque année, là, je dépose un état sur les fameux puits orphelins, ou bien je ne sais pas comment on les qualifie, c'est-à-dire les puits qui ne sont pas concernés par le projet de loi, pas les 62 puits, mais les éléments que vous mentionnez, puis un état assez... en tout cas, assez précis, parce que je me fais beaucoup questionner quand je le dépose. Et de mémoire, quand je suis arrivé en fonction, de plus... en plus, il y avait au-dessus de 200 puits qui n'étaient pas localisés, là, qui dataient, en fin de compte, de documentations qui dataient de 150 ans, 160 ans, qui étaient : On a entendu dire ou on a vu quelque part qu'il y avait peut-être un puits puis on le cherche, là. Puis je disais : O.K., bien, cherchez-le. Puis ils allaient sur le terrain puis ils ne le trouvaient pas.

Mais bref, on donne un état, là, de mémoire, c'est à peu près 700 puits, qu'on a réduits à 500, puis l'état des niveaux de fermeture, un peu le tableau que vous dressez à l'intérieur de votre mémoire, puis j'ai l'impression qu'on fait le travail. Peut-être qu'on ne le fait pas à votre pleine satisfaction, puisque vous émettez des commentaires, que j'ai bien lus, puis je pense qu'on va regarder ces commentaires-là, là, à la face même de ces puits orphelins là... Ça ne veut pas dire que vos commentaires ne s'appliquent pas aux 62 puits qui sont couverts à l'intérieur du projet de loi pour les 182 licences actives.

Mais moi, je comprenais, là, que les études hydrogéologiques, là, elles allaient être faites, elles sont exigées puis, en plus, elles allaient être rendues publiques, là, selon l'article 63. Alors, votre crainte par rapport aux études hydrologiques, c'est que...

Mme Pétrin (Rébecca) : En fait, notre crainte, c'est que les études et la décontamination des sites prennent, en fait... En fait, c'est ce qu'on ne voudrait pas, c'est qu'il y ait des indemnités qui soient remises à des entreprises avant que l'ensemble des études, des évaluations environnementales soient faites. Donc, on considère que l'argent qu'on peut remettre aux entreprises, c'est à peu près le seul argument qu'on a, valable, pour que les entreprises souscrivent à leurs obligations légales.

On le sait que le plus gros de la facture risque d'être les factures pour la décontamination des sites. Donc, on a vu facilement un puits... Le puits, en fait, qui est contaminé, il y a des factures de 10 millions de dollars, simplement pour la décontamination de ce puits-là, alors que le ministère avait budgété 44 millions pour l'ensemble de la fermeture. Donc, les prix sont franchement plus hauts, et ça serait vraiment dommage, en fait, que l'industrie n'ait pas les fonds nécessaires pour procéder à ces travaux-là suite au versement des indemnités.

Donc, nous, c'est vraiment le point qu'on tient, c'est qu'on veut vraiment s'assurer que l'ensemble des évaluations environnementales soient faites, que l'ensemble des processus de décontamination soient faits avant qu'il y ait une seule indemnisation qui soit donnée.

M. Julien : Mme Pétrin, je vous rejoins totalement là-dessus puis je vous dirais que cette idée, là, qu'on a discutée, le projet de loi, je l'ai amenée assez rapidement, là. C'est mon petit côté stratégique de dire : Écoutez, on ne mettra pas une cent d'indemnisation tant qu'il n'y aura pas... démontré clairement que la réhabilitation est adéquate, avec un système où le MELCC, le ministère de l'Environnement, et le MERN a posteriori, là, n'aura pas validé le caractère adéquat de la réhabilitation.

Alors, j'entends bien que, pour vous, vous êtes confortables avec le fait qu'on <n'indemnise...

>


 
 

17 h (version révisée)

<17855 M. Julien : ...réhabilitation. Alors, j'entends bien, pour vous, vous êtes confortable avec le fait qu'on >n'indemnise aucun montant, tant et aussi longtemps qu'il n'y a pas eu cette démonstration-là. Et je lis et j'entends, dans votre discours, que vous souhaiteriez qu'il y ait certains renforcements par rapport aux mesures pour faire la démonstration que la réhabilitation est adéquate. Parlez-moi un peu plus, là, par rapport... Vous avez parlé de la LQE. Je voudrais voir, physiquement, là, c'est quoi, la distinction que vous faites entre ce qui prévu au projet de loi, avec une espèce d'attestation du ministre de l'Environnement qui va être basée sur des éléments probants, et ce que vous proposez.

Mme Pétrin (Rébecca) : Bien, en fait, ma principale inquiétude, c'est que, jusqu'à présent, puis je le détaille plus dans mon mémoire en parlant des lagunes de Mercier, c'est qu'on n'a jamais vu ça, en fait, une contamination de nappes souterraines qui a été décontaminée, ne serait-ce qu'à un certain pourcentage. Donc, mon inquiétude, c'est... C'est certain qu'il va y en avoir des nappes souterraines qui sont contaminées. Comment est-ce qu'on va réglementer ça? Comment est-ce qu'on va imposer, en fait, des critères aussi à l'industrie? J'imagine que ce sera inscrit dans un futur règlement, parce que, jusqu'à présent, au Québec, on n'a pas... on a une loi, une politique sur la décontamination des terrains, mais rien sur les eaux souterraines. Peut-être qu'on est rendus là, en fait, mais je me demande, en fait, comment le ministère de l'Environnement, probablement, avec le ministère des Ressources naturelles, vont arriver enfin à amener les industries à ramener ça à l'état initial.

Donc, en fait, ça me sécurise beaucoup que vous dites que les indemnités ne seront pas données avant ce temps-là, mais il n'en reste pas moins que je suis peu confiante qu'on puisse ramener la qualité des eaux à celle qu'elles étaient avant les forages. Le manque d'information aussi me préoccupe beaucoup. Le fait qu'il n'y ait pas d'études hydrogéologiques qui ont été faites en amont des forages, c'est difficile aussi de retrouver la qualité des eaux qui étaient là avant. Donc, j'ai hâte de voir, en fait, ce que ce sera, les protocoles pour faire ces évaluations-là.

M. Julien : Parfait. Mais encore, juste pour faire du pouce un peu sur ce que vous mentionnez puis les préoccupations que vous amenez, nous, quand on dit que les... Puis je vous dis, je ne suis pas spécialiste, là, dans le domaine hypertechnique, là, mais je connais ça un peu. Nous, quand on dit : Les 62 puits doivent être fermés adéquatement, actuellement, dans la liste, là, des 700 quelques puits qui avaient été considérés comme inactifs, certains d'entre eux sont... plusieurs d'entre eux sont comme fermés définitivement. Pour arriver à cette classification de fermer définitivement, bien, ils ont dû répondre, en fin de compte, à certains critères, dont des critères environnementaux.

C'est quoi, la distinction que vous faires entre la fermeture de ces puits-là, à un autre temps, et la fermeture projetée des 62 existants, par rapport à la façon que c'est fait et que c'est conclu? Puisque c'est sûr que je n'amène pas, si ce n'est la transparence, plus, plus de documentation rendue publique, qu'est-ce qui doit être renforcé de ce qu'on faisait dans le passé, quand on fermait un puits, de ce qu'on veut faire, dans le futur, par rapport aux 62 qui nous occupent?

Mme Pétrin (Rébecca) : Bien, en fait, dans le passé, c'est... il y a quand même plusieurs puits qui ont été fermés. Là, les 62, je n'ai pas les dates de fermeture, malheureusement, là, je n'ai pas l'ensemble des détails des puits, sauf qu'avant l'arrivée du règlement pour la protection de l'eau potable, il n'y avait pas d'obligation de faire des études hydrogéologiques. Donc, comment les puits ont été fermés? Est-ce qu'il y avait déjà une contamination, qu'on a fermé le puits par-dessus? Je ne pourrais pas dire, sauf que, quand on va voir la base de données, en fait, du ministère, on n'a pas le détail par puits de tout ce qui a été fait puis des résultats non plus des analyses.

M. Julien : Mais pour le projet de loi, avec les 62 puits actifs actuels, on garantit qu'il y a une étude hydrogéologique qui va être rendue publique à l'intérieur de l'article 63. O.K. Alors, je conçois cet élément-là. Selon vous, le projet de loi n° 21, c'est un bon projet de loi? J'ai besoin d'amour. C'est mon collègue de l'opposition qui dit ça, donc, j'aimerais que vous m'en donniez.

• (17 h 10) •

Mme Pétrin (Rébecca) : Je pense que c'est une excellente initiative de mettre fin aux hydrocarbures. Comme je vous l'ai répété, nous, ça fait 10 ans qu'on lutte contre le marché des hydrocarbures. Si vous saviez le nombre de personnes qui ont été dans cette lutte-là au Québec, c'est monstrueux. Entre nous, on se dit que ce n'est pas les industries qui devraient recevoir des indemnités, c'est les citoyens qui se sont mobilisés, pendant 10 ans de temps, pour leur faire front.

Mais oui, je pense que c'est un bon projet de loi. Je crois que c'est une excellente initiative puis qu'on est rendus là, en fait. Comme M. Boudreau l'avait dit hier, il y a cinq ans, ça aurait été illusoire de s'imaginer... me semble incontournable. On doit mettre fin aux hydrocarbures <au Québec...

Mme Pétrin (Rébecca) : ...me semble incontournable. On doit mettre fin aux hydrocarbures >au Québec. Ça a été tellement de temps, et d'énergie, et d'argent dépensés pour rien. On va pouvoir maintenant se concentrer sur le développement de nouvelles filières plus vertes. Mais c'est certain que nous, le côté des indemnités... En fait, on a tellement donné beaucoup d'argent dans le passé à cette industrie-là. Ils nous ont laissé aussi un héritage de contamination vraiment marquant au Québec. Donc, moi, je voudrais m'assurer qu'on essaie de faire le maximum avec eux pour faire la décontamination avant que les sommes soient versées. C'est là où le point est plus sensible, disons.

M. Julien : Bien, merci, Mme Pétrin. Votre réponse est quand même assez positive. Alors, j'en prends acte.

Quand vous dites : On a donné beaucoup d'argent, bien, j'entends souvent ça, là. Je peux concevoir les effets communautaires, les enjeux, les revendications, les soucis que ça peut amener. Alors, j'entends bien ce volet-là, mais je le réitère, là, puis je le redis, et, pour moi, c'est essentiel, le remboursement des indemnités sont faites au net de tout crédit d'impôt, toute aide financière sur la même période, là. Pour nous, là, ce n'est pas l'investissement total qui a été effectué qu'on rembourse, c'est l'investissement, et on est déjà estimé à 12 millions, à peu après, les montants d'aide gouvernementale qui vont être obligés d'être remboursés.

Donc, de quels frais l'argent qu'on a mis... puisqu'on rembourse seulement sur six ans, puis c'est net, de l'aide reçue sur cette période-là, à tous égards, par le gouvernement. Donc...

Mme Pétrin (Rébecca) : Bien, en fait, les frais, c'était surtout... Si on parle spécifiquement des forages, c'était surtout les claims qui ont été vendus à un faible coût. On ne parle pas là de frais donnés. Quand j'ai mentionné les frais, c'était beaucoup plus l'ensemble de la filière des hydrocarbures. Donc, on a donné énormément de subventions et autres, si on pense aux autres projets. C'est sûr que, dans les forages, moi, je n'ai pas le détail, je ne peux malheureusement pas me substituer à mes collègues qui sont plus spécifiques... plus spécialisés dans ça. Je me contente de protéger l'eau souterraine.

M. Julien : Parfait. Un autre élément, vous savez que le projet de loi prévoit, là, qu'on accepte... Encore là, on a eu des bonnes discussions quand on a bâti le projet de loi sur cet élément-là. On a dit : On va accompagner les entreprises jusqu'à la hauteur de 75 % des frais de décontamination, réhabilitation, fermeture des puits. L'objectif qu'on avait derrière ça, c'était, bon, si... Bien, puisque c'est notre décision, puis on veut que ce soit fait, puis on veut que ce soit fait rapidement et bien fait, bien, on dit : On va mettre un montant. Mais on ne veut pas mettre non plus la totalité pour éviter... Si on disait : Bien, on va rembourser 100 % des frais, on comprend bien qu'il y aurait des risques, le cas échéant, là, que ces frais-là, il n'y ait personne qui veuille les contraindre parce qu'on veut que les travaux soient faits.

Qu'est-ce que vous pensez de cette approche-là? Êtes-vous confortable avec l'approche que le gouvernement participe à payer une partie des frais pour la réhabilitation? Et naturellement, aucuns frais d'exploitation ne sera remboursé tant que ça ne sera pas fait à pleine satisfaction.

Mme Pétrin (Rébecca) : En fait, là, je suis un peu confuse, parce que ce qu'on nous avait dit auprès du ministère, c'est que le 44 millions de dollars ne comprenait pas les frais de décontamination. Là, ce que je comprends, ça les comprend?

M. Julien : Bien, écoutez, peut-être, en réalité, que, quand je dis : Ces éléments-là, je vais préciser avec le ministère, parce que, pour moi, c'est les frais pour réhabiliter et fermer le puits. Donc, maintenant, quelle nature de décontamination qu'on discute ici, je ne saurais trop m'avancer. Et vous êtes plus spécialiste que moi, donc ne me prenez pas au mot, mais je veux que ces frais-là permettent la fermeture de manière conforme aux exigences, en fin de compte, du ministre de l'Environnement. Alors...

Mme Pétrin (Rébecca) : Bien, moi, c'est un peu la même chose que les indemnités, je préférerais nettement que les frais soient à zéro pour la nation québécoise qui n'a subi que des impacts négatifs de ça. Puis, dans le fond, les profits de cette entreprise-là, ça n'a pas été réinjecté directement ici. Donc, je ne vois pas pourquoi qu'on paierait pour la fermeture de ces sites-là. Sauf que ce qu'on a compris en échangeant avec les gens de votre ministère, c'est que c'est un moindre mal... un peu accepter de force, si on voulait enfin avoir la collaboration des industries.

Donc, est-ce que je suis pour? Non. Mais est-ce que je serais prête à l'accepter? Oui. Par contre, je ne comprends pas d'où vient le 75 %. Peut-être qu'on pourrait détailler un peu plus pourquoi à 75 %, plutôt que 50 %, là, si... ou 25 %. Donc...

M. Julien : Effectivement, on aura l'occasion d'en discuter, je pense, quand on va étudier, article par article, le quantum. Naturellement, il faut bien comprendre qu'ici c'est un peu la même notion que j'amenais tantôt dans les discussions, une notion de responsabilité, c'est-à-dire que, si on n'adoptait pas le projet de loi et si on ne mettait pas un terme aux hydrocarbures, exploration, exploitation momentanément, actuellement, il y aurait... les entreprises n'auraient pas d'obligation <de réhabiliter...

M. Julien : ...momentanément, actuellement, il y aurait... les entreprises n'auraient pas d'obligation >de réhabiliter et de fermer des puits.

Donc, on prend une décision qui oblige à un geste immédiat, ou très rapidement, puis c'est pour ça qu'on y participe. Mais, encore là, c'est comme l'espèce de responsabilité partagée, parce que c'est vrai que tout le monde dit que l'industrie, ce n'était pas l'industrie de l'avenir. D'un autre côté, comme État, on s'est comporté en donnant des licences et des droits sans prétendre que ce ne l'était pas. Donc, c'est l'aspect, un peu, responsabilité conjointe qu'on essaie de mettre... Oui.

Mme Pétrin (Rébecca) : Mais je voudrais peut-être faire un parallèle avec la politique, justement, de réhabilitation des sols contaminés qu'on a adoptée dans les années 90. Quand cette politique-là est arrivée, en fait, il n'y a pas de programme d'aide de fermeture ou de décontamination des sites qui avait été donné, et pourtant c'était à peu près un cas similaire où on a passé une loi, en fait, des nouveaux règlements avec... le barème est respecté. Pardon. Donc, je ne comprends pas pourquoi, cette fois-ci, alors que ça s'applique seulement à des gens de l'industrie... Dans l'autre cas, on avait des citoyens, on avait des petites entreprises qui étaient aux prises avec des problèmes de contamination. Ils n'ont pas eu, en fait, d'aide, justement, à la fermeture et à la décontamination, puis, dans ce cas-ci, on parle de neuf, 10 grandes industries qu'on va accompagner, en fait, dans ce nouveau règlement là.

Donc, je suis un peu d'accord que, oui, c'est bien, parce qu'on veut vraiment en finir, une fois pour toutes, avec les hydrocarbures, sauf que, si on regarde dans l'histoire du Québec, c'est déjà arrivé qu'on a passé des règlements comme ça sans accompagnement, là.

M. Julien : O.K. Mais naturellement, c'est à cause qu'aussi on met un terme... alors, ces notions-là, c'est... on met un terme momentanément à un potentiel de droit quasi immobilier puis on dit : Vous réhabilitez maintenant. Mais j'entends ce que vous dites, puis on aura l'occasion d'en discuter à l'article par article.

Combien qu'il reste de temps? Il n'y a plus de temps?

Le Président (M. Lemay) : 30 secondes.

M. Julien : Mme Pétrin, je vous remercie infiniment, c'est... Vous amenez des éléments qui sont raffinés et d'une complexité, que j'aurai l'occasion de discuter certainement avec mes collègues du ministère pour pouvoir voir toutes les nuances qu'il y a là-dedans, pour voir comment qu'on peut justement bonifier, le cas échéant, le projet de loi.

Mme Pétrin (Rébecca) : Merci beaucoup.

Le Président (M. Lemay) : Très bien. Merci, M. le ministre. Alors, je cède maintenant la parole à l'opposition officielle... oui, c'est ça, exactement, et le député de Mont-Royal—Outremont, pour une période d'environ 11 minutes.

M. Arcand : Merci. Bonjour, Mme Pétrin. Je vais vous laisser le temps de reprendre votre souffle un peu suite à ces nombreuses questions. Ma première question : Eau secours!, ça, c'était... c'est le groupe dans lequel Martine Ouellet était, à une certaine époque, il y a quelques années. Est-ce que je me trompe en disant ça? Est-ce qu'elle est encore...

Mme Pétrin (Rébecca) : Effectivement, elle a...

M. Arcand : ...est-ce qu'elle vous a aidés dans la présentation de ce mémoire, étant donné que c'est l'ex-ministre... c'est une ex-ministre de l'Énergie et des Ressources naturelles?

Mme Pétrin (Rébecca) : Oui, elle a siégé au même siège que vous avez vous-même siégé. Non, effectivement, Martine Ouellet n'est plus chez Eau secours! depuis de nombreuses années déjà.

M. Arcand : O.K. Mais vous travaillez avec l'Association québécoise de la lutte à la pollution? Ça, c'est le groupe de M. Bélisle, si je ne m'abuse.

Mme Pétrin (Rébecca) : J'ai juste mis la main sur un de ses rapports, qui date de 2016, là, pour le citer dans mon mémoire uniquement. On n'a pas l'habitude de collaborer. On n'est pas vraiment sur les mêmes enjeux. Il travaille sur la pollution atmosphérique, alors que nous, on travaille sur la pollution des eaux.

M. Arcand : O.K. Et, juste pour que je comprenne bien, l'eau... pour vous, votre position, évidemment, touche beaucoup les puits. Est-ce que vous avez d'autres enjeux, au niveau de l'eau, juste pour ma gouverne? Est-ce que vous touchez aux lacs, aux rivières, aux aqueducs, enfin, juste pour que je comprenne?

Mme Pétrin (Rébecca) : On touche à beaucoup de choses au Québec, on touche... Cette année, on va toucher à l'analyse de la Politique nationale de l'eau, qui célèbre ses 20 ans, donc l'impact que ça aura eu au fil des dernières années. On parle de l'implication aussi des différents ministres en Environnement dans cette politique-là, comment ils ont su protéger notre eau. On parle de gestion intégrée, de surconsommation. Donc, non, nos sujets sont assez divers, et on parle également de la commercialisation sous toutes ses formes.

• (17 h 20) •

M. Arcand : O.K. Très bien. Si on revient au projet de loi, Mme Pétrin, si je comprends bien votre position sur les indemnisations, vous dites : Si l'inspection des puits à fermer révèle la présence de contamination, la décontamination des sites doit être faite aux frais du détenteur de permis. Ça, c'est... De toute façon, c'est en vertu de la loi québécoise de l'environnement. Après ça, on dit : Si un détenteur de permis, pour l'un des 132 puits visés par l'article 10, détient des permis pour d'autres puits qui ne sont pas visés, qui ont été fermés temporairement, les coûts de fermeture et... ou même de contamination de ces puits doivent être déduits de l'indemnisation <à 75 %...

M. Arcand : ...contamination de ces puits doivent être déduits de l'indemnisation >à 75 %.

Alors, est-ce que c'est exact, ce que je lis actuellement, ça reflète votre pensée? Maintenant...

Mme Pétrin (Rébecca) : Oui. En fait, c'est que, même si un propriétaire de puits a fermé des puits, ces puits-là devraient être considérés, en fait, même s'ils ne font pas partie des 62 puits. Donc, en fait, ce qu'on répète, c'est que, malgré le fait qu'il y a seulement 62 puits qui sont considérés dans le projet de loi, si une entreprise a d'autres puits ailleurs qui sont fermés ou temporairement fermés, ils devraient être considérés dans les évaluations environnementales. On ne peut pas remettre des indemnités à une entreprise s'il y a d'autres puits à l'extérieur de ceux qui sont évalués, qui sont non conformes.

M. Arcand : D'accord. Ma question également, c'est : Est-ce qu'il y a lieu de déduire d'autres montants de l'indemnisation envisagée?

Mme Pétrin (Rébecca) : Bien, en fait, moi, je considère que tous les montants doivent être déduits de l'indemnisation, tant et aussi longtemps que les normes environnementales ne sont pas respectées. Et donc, je veux dire, il y a des nappes d'eau souterraines... sont, jusqu'à présent, impossibles à décontaminer. Donc, j'ai du mal à comprendre comment qu'une entreprise qui a des puits, qui a généré de la contamination des eaux souterraines, pourrait se voir toucher une indemnisation. Parce qu'il y a certains...

M. Arcand : D'accord, mais ça, selon votre expertise, est-ce que c'est un processus qui risque quand même d'être très long et qui risque de durer quand même un certain temps, d'après votre expertise?

Mme Pétrin (Rébecca) : Bien, en fait, je ne veux pas me situer en ingénieure en hydrogéologie qui serait spécialisée dans la décontamination, chose que je ne suis pas. C'est juste que, jusqu'à présent, c'est une expertise qui mériterait à être développée au Québec, puisqu'on n'en a pas encore réussi à grande échelle, la décontamination de nappes d'eau souterraines. Si on prend le cas des lagunes de Mercier, ça fait depuis les années 60 que ça persiste dans l'environnement.

Donc, je pense que c'est une chance en or qu'on a, au Québec, de développer une expertise dans la décontamination des eaux souterraines, là, d'utiliser ces puits-là, sauf que, oui, je pense que ça va être quand même des défis techniques qui vont être à relever. Je ne pourrais pas m'avancer à dire combien de temps que ça va prendre, sauf que je ne crois pas que ça se fera en quelques mois, là.

M. Arcand : Donc, ce que j'essaie de comprendre, c'est que vous n'êtes pas, par principe, fermés à une forme quelconque d'indemnisation, mais il faut que le dossier soit vraiment plus blanc que blanc, si je me permets l'expression. C'est ça?

Mme Pétrin (Rébecca) : Exactement.

M. Arcand : Très bien. Dans votre mémoire, vous faites référence à des produits chimiques que le ministère de l'Environnement qualifie de problématiques, qui ont été utilisés dans des opérations de fracturation hydraulique. Pouvez-vous me dire, sans entrer dans des détails trop techniques, là, parce que j'imagine que c'est des noms assez compliqués au niveau de ces produits chimiques là, mais ces produits chimiques là, qu'est-ce que c'est? Et quels sont ses effets, en termes d'ennuis de santé, par exemple? Est-ce que vous savez un peu de quoi il s'agit?

Mme Pétrin (Rébecca) : Bien, en fait, on sait que le ministère, le... avait confirmé qu'il y en avait trois, produits chimiques, qui étaient plus problématiques que les autres. Donc, pour les noms compliqués, là, on a un solvant au naphta aromatique lourd, je vous épargne le nom scientifique en long. On a un chlorure d'ammonium aussi, et puis... Donc, ce sont des produits, en fait, qu'il y a un gros potentiel de bioaccumulation dans les organismes aquatiques et qui persistent gravement dans l'environnement. Donc, c'est des produits qui sont un peu à l'image des BPC de l'époque, qui sont très persistants et difficiles à se biodégrader. Et le problème, en fait, c'est qu'à partir du moment où ça se retrouve dans l'eau, bien, la bioaccumulation va faire que ça va se retrouver dans nos poissons et autres puis qu'on va les consommer via la consommation des produits de la mer et des lacs et rivières.

On n'a pas encore tout, on n'a pas... très peu d'études, en fait, ont été faites sur vraiment les conséquences sur la santé humaine. C'est un peu comme les interactions avec le milieu récepteur, c'est que, justement, on manque de données là-dessus. Donc, ça fait partie des choses que moi, je pense que le ministère de l'Environnement devrait mettre l'emphase dans la fermeture des puits, ça serait également de pousser un peu le volet de recherche, là, sur les impacts que ça a sur l'environnement puis sur la santé humaine.

M. Arcand : D'accord. Mais quand vous vous parlez de ces puits-là, les puits orphelins, vous arrivez avec un chiffre, là, qui parle des coûts pour changer la situation. Vous parlez de 54 millions. Vous dites que ça exclut 67 puits que le ministère sait être des sources de contamination, mais que le ministère ne sait pas encore <tout à fait...

M. Arcand : ...des sources de contamination, mais que le ministère ne sait pas encore >tout à fait ce qu'il en coûterait pour les nettoyer et les sécuriser de façon définitive. Juste m'expliquer votre 54 millions, ça vient d'où exactement.

Mme Pétrin (Rébecca) : En fait, c'était une étude qu'avait révélée Alexandre Shields, dans un de ses articles dans Le Devoir, une estimation qui avait été faite par rapport à... Je vous retrouve le document, mon ordinateur ne veut pas me le rendre. Donc, je pourrais vous la... avec plus de détails, mais c'est des estimations qui avaient été faites avec des puits qui avaient déjà entamé une décontamination de...

M. Arcand : O.K. Donc, c'est ce qui vous permet de parler de ça comme tel. Est-ce que...

Mme Pétrin (Rébecca) : Bien, en fait, c'est que la phase initiale... la facture finale est actuellement impossible à préciser, parce que, jusqu'à présent, c'est ça, le gros problème, c'est pareil... la même problématique que le 44 millions qui a été avancé, et qu'au final, si on comprend la décontamination des sites dans le 44 millions, c'est une très grosse estimation parce qu'il n'y a pas de source fiable qui arrive à définir combien peut coûter la décontamination d'un site.

Déjà, le portrait d'une décontamination peut prendre différentes formes. Ça dépend de la quantité des produits chimiques qui se retrouvent dans la nappe phréatique. Ça dépend de la grosseur de la nappe phréatique. Ça dépend de la profondeur de la nappe phréatique. Ça dépend de tellement de facteurs qu'on ne peut pas arriver à un montant vrai. Ça prend des études en profondeur pour arriver à dire quelles technologies on va mettre en place, sur combien de temps puis les coûts qui vont être liés à ça. Mais, chose certaine, c'est que c'est des factures qui sont très élevées parce que ce n'est pas des technologies qui sont si simples, là, à déployer.

M. Arcand : Est-ce que vous avez une explication... Dans vos discussions que vous avez eues avec le ministère, est-ce que vous avez une explication sur le fait qu'il faut autant de temps pour faire un diagnostic complet? Parce qu'on ne parle pas d'un si grand nombre de puits et on sait que la plupart sont dans le paysage depuis des décennies. Est-ce que vous vous avez fait une tête là-dessus, vous avez une explication de ce côté-là?

Mme Pétrin (Rébecca) : Bien, je pense qu'on a un gros retard à rattraper, parce que je pense que, vous devez être au courant, mais, suite à l'entrée en matière des gaz de schiste en 2010, il aura fallu attendre, en 2014, pour avoir un règlement sur la protection des eaux potables au Québec. Donc, de 2010 à 2014, il y a eu absence de collecte de données sur, justement, des relevés hydrogéologiques. C'est simplement en 2015 qu'on a commencé à collecter des données. Donc, on est en 2022, ça fait sept ans. Je pense que les gouvernements ont tablé à essayer d'accumuler un maximum d'informations, essayer de recenser aussi la grosseur de nos nappes phréatiques, les eaux souterraines, les cartographier, mais ça tarde, et il y a beaucoup d'informations où on parle... C'est vrai que là, ici, on parle de 62 puits dans le cas du projet de loi, sauf que, dans les faits, il y a 900 puits au Québec. Puis ce n'est pas parce que des puits sont fermés qu'ils ne sont pas non plus dangereux. Puis, même s'ils ne font pas partie de la liste des 62 puits, si on détecte un puits, sur le territoire, qui fuit, il faut quand même s'y attarder, il faut dépenser puis il faut mettre des ressources en place pour aller chercher ces données-là.

Donc, je pense qu'on est bien partis. On a commencé à collecter des données, encore faut-il qu'elles soient accessibles au public. Ça, c'est un autre enjeu que M. Bergeron a soulevé dans son mémoire, c'est que la société civile veut également aider le ministère de l'Environnement à faire des travaux puis des recherches sur... encore faut-il qu'on ait accès à ces données-là. Donc, peut-être de bonifier un registre unique, où l'ensemble des citoyens auraient accès aux relevés et puis aux études hydrogéologiques, aiderait grandement, en fait, à avancer notre niveau de connaissance, là, sur la contamination.

Le Président (M. Lemay) : Merci, Mme Pétrin pour cette réponse. Nous allons maintenant céder la parole au deuxième groupe d'opposition, Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.

Mme Massé : Oui. Nous avons deux minutes, Mme Pétrin, alors on va aller à l'essentiel. J'ai bien entendu que vous avez dit que si, toutefois, des entreprises, qui possèdent un ou plusieurs des 62 puits à l'étude dans le projet de loi, avaient d'aventure des puits ailleurs, qui ne font pas partie de ces 62 là, il faut qu'on tienne en compte, si toutefois on allait vers de l'indemnisation de ces puits-là qui sont à l'extérieur, de les réhabiliter aussi. Est-ce que j'ai bien compris ça?

Mme Pétrin (Rébecca) : Exactement.

• (17 h 30) •

Mme Massé : Bien, merci. Je me demandais, dans votre mémoire, vous... Et vous l'avez fait mention tantôt, vous nous avez parlé des... de la lagune, pardon, de Mercier. Qu'est-ce qu'on peut retenir, qu'on doit retenir de l'expérience de la lagune de Mercier, qui pourrait nous être utile à rendre plus <fort...

>


 
 

17 h 30 (version révisée)

<15421 Mme Massé : ...plus >fort, le projet de loi actuel, ou toutes les questions d'indemnisation, là, parce qu'il me semble que ça nous coûte cher, ça, les lagunes de Mercier.

Mme Pétrin (Rébecca) : Bien, c'est la principale leçon à en tirer. C'est qu'en 1994, quand on a fait le BAPE sur des plans de restauration des lagunes de Mercier, on était déjà à 13 millions de dollars injectés dans cette catastrophe-là. Je n'ai pas réussi à mettre la main sur les chiffres de 1994 à aujourd'hui. Donc, on a dû encore mettre des fonds, ne serait-ce que pour approvisionner en eau potable les communautés qui sont locales à cette lagune-là. Mais là il y a un projet pour une usine de traitement des eaux qui devrait voir le jour en 2025. Ce projet-là, à lui seul, coûte 25 millions de dollars.

Donc, la leçon à tirer, c'est que contaminer une nappe d'eau souterraine, qui est un approvisionnement en eau potable, ça nous coûte excessivement cher. Nous, chez Eau Secours!, pendant des années, depuis le début des hydrocarbures, c'est le clou qu'on martèle. Il n'y a pas d'action en hydrocarbures qui ne risque pas de contaminer notre eau potable, et c'est irréversible, et ça coûte cher. Donc, s'il y a une leçon qu'on peut prendre, c'est de faire attention avant de donner des sous aux entreprises, parce que la facture, c'est nous qui allons la payer. On va la payer pendant des années et des années, et c'est nous qui restons avec la contamination pour...

Mme Massé : Et donc, vous nous invitez à être très prudents, que lorsqu'on parle... le projet de loi parle de réhabilitation, il faut absolument tenir compte de la question de la contamination des sols et des eaux.

Mme Pétrin (Rébecca) : Absolument. C'est indéniable.

Mme Massé : Oh! il me reste 30 secondes. Est-ce que vous voulez utiliser ce 30 secondes-là pour nous dire autre chose d'important?

Mme Pétrin (Rébecca) : Vous me prenez au dépourvu.

Le Président (M. Lemay) : Merci beaucoup, Mme Pétrin. Alors, nous allons maintenant passer la parole au député de Jonquière.

M. Gaudreault : Oui. Merci beaucoup pour votre présence. Je constate que vous avez déposé un mémoire conjoint, au fond, avec l'Association québécoise des médecins pour l'environnement. J'aimerais ça que vous m'en parliez un petit peu, quel est le lien que vous faites entre les deux associations. On sait que, bon, disons, on répète souvent, l'eau est source de vie. Je pense que c'est certainement la ressource la plus importante que nous avons au Québec. Il y a des pays qui se battent pour avoir accès à de l'eau potable. Nous, on en a. Il faut la protéger.

Et le lien que je veux faire également avec l'Association des médecins pour l'environnement, c'est... Est-ce que je comprends bien, si ça vous amène aussi à nous dire, à nous, les législateurs, de vraiment détailler davantage le projet de loi n° 21 en ce qui concerne les garanties, je dirais, entre autres, sur le recensement, l'inspection des puits? C'est comme si je sens une forme d'inquiétude de votre part là-dessus.

Mme Pétrin (Rébecca) : Oui, en fait, le lien avec l'Association québécoise, c'est évident, bien, des médecins pour l'environnement, c'est évidemment l'aspect de la santé humaine avec tous les cas de contamination. Ils ont abordé plus l'orientation sur les relâchements des gaz. Ils auraient pu aussi également parler de l'impact sur l'eau. Comme je l'ai répété plus tôt, on manque énormément de données, là, sur l'impact des produits chimiques dans l'eau parce que ça a été peu étudié jusqu'à présent. Ça fait partie aussi des coûts. On parle des coûts, des coûts, des millions et des millions, sur des coûts vraiment réels de qu'est-ce qu'il va en coûter autant aux entreprises qu'au gouvernement du Québec pour fermer puis réhabiliter des puits. Sauf que le point intéressant de l'AQME, c'est vraiment les coûts sociaux, en fait, qu'on ne chiffre jamais assez dans des projets comme ici, donc, la santé humaine puis la perte aussi de pouvoir user des ressources qui entourent nos communautés.

Donc, c'était l'aspect intéressant, en fait, pourquoi on leur a donné une section dans notre mémoire. Donc, on a décidé de collaborer. C'est vraiment pour tenter de faire le pont entre la perte d'utilisation d'une ressource comme l'eau, qui est vitale, et les coûts qui sont liés à ça. Effectivement, on ramène toujours une grande inquiétude par rapport aux études. C'est quand même arrivé dans le passé, là. Comme je l'ai répété, ça fait 10 ans qu'on se bat contre l'industrie des hydrocarbures. Puis, à chaque fois qu'on dépose un mémoire à un BAPE ou à une autre analyse, on ramène toujours le risque, en fait, à quel point on doit faire attention en amont, de faire des études en amont pour éviter des contaminations. Puis là on se retrouve 10 ans plus tard à constater qu'il y a eu des contaminations, constater qu'il a manqué de suivi, qu'il a manqué d'analyse en amont. Donc, je ne peux pas passer à côté du fait de retaper là-dessus. Il faut absolument... En fait, s'il y a un risque, si minime soit-il, il faut pousser les analyses pour s'assurer que l'industrie, en fait, n'a pas la liberté de faire ce qu'elle veut.

Le Président (M. Lemay) : Merci beaucoup, Mme Pétrin, pour votre contribution à nos travaux. C'est ce qui complète la période d'échange avec les <membres de la commission...

Le Président (M. Lemay) : ...complète la période d'échange avec les >membres de la commission. Donc, je vous remercie. Nous allons maintenant suspendre pour permettre au prochain groupe de prendre place.

(Suspension de la séance à 17 h 35)

(Reprise à 17 h 38)

Le Président (M. Lemay) : Alors, la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources naturelles reprend ses travaux. Et je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants de Mères au front. Alors, je vous rappelle que vous disposez d'un temps de parole de 10 minutes pour faire votre exposé, et, par la suite, il y aura une période d'échange avec les membres de la commission. Tout d'abord, je vous invite à vous présenter ainsi que la personne qui vous accompagne, et vous pouvez y aller avec votre exposé.

Mouvement Mères au front

Mme Waridel (Laure) : Merci. Mmes et MM. députés, commissaires, citoyens et citoyennes, bonsoir. Merci d'être là. Je m'appelle Laure Waridel, je suis écosociologue, Ph. D., et mère au front pour tous les enfants, notamment mon fils Colin, ma fille Alphée et ma petite-fille par alliance, Théodora, qui, en 2070, aura seulement 49 ans. Bon.

• (17 h 40) •

Mme Gagnon (Catherine Alexandra) : Bonsoir. Je m'appelle Catherine Gagnon, je suis biologiste. J'ai un doctorat en sciences de l'environnement et je suis une mère au front pour tous les enfants, incluant Élie, Blanche et Ambroise. En fait, nous sommes mères au front pour tous les enfants d'ici et d'ailleurs, incluant les enfants qui ne sont pas encore nés et qui seront affectés par les décisions que vous prenez aujourd'hui.

Nous parlons aujourd'hui au nom de 24 groupes de mères au front des lieux suivants : les Laurentides, ville de Québec, Abitibi-Ouest, Arthabaska-Érable, Laval, Rouyn-Noranda, Vaudreuil-Soulanges, Montréal, Saint-Jean-sur-Richelieu, des Cantons-de-l'Est, Memphrémagog, la MRC les Moulins, Rive-Sud, Rosemère et les environs, Saguenay, Outaouais, Lac-Saint-Jean, Rimouski, Val-d'Or, Sherbrooke, la MRC de Maskinongé, Baie-des-Chaleurs, les MRC de Drummond et Matane.

Le Mouvement Mères au front est né au <printemps 2020 d'un sentiment...

Mme Gagnon (Catherine Alexandra) : Le Mouvement Mères au front est né au >printemps 2020 d'un sentiment d'urgence partagé par de nombreuses mères et grands-mères quant à l'ultime nécessité de protéger l'avenir de nos enfants et des générations futures contre l'inaction climatique. Nous sommes un mouvement décentralisé qui relie plus de 7 000 personnes. 30 groupes d'action se sont formés au Québec, dans le Canada francophone ainsi qu'en Belgique. Au Canada anglais, nous faisons alliance avec For Our Kids afin de maximiser notre impact sur la scène fédérale. Nous vous demandons de penser aux enfants qui sont présents dans votre coeur, dans vos vies, aujourd'hui, pour éclairer vos décisions, toutes vos décisions.

Mme Waridel (Laure) : Nous tenons d'abord à féliciter le gouvernement Legault d'avoir décidé de mettre fin à la recherche et à la production d'hydrocarbures ainsi qu'au financement public de ces activités. Un projet de loi comme ça était nécessaire depuis longtemps. Il était donc temps.

À titre de mères, de grand-mères et de nombreux alliés de notre mouvement, nous tenons à remercier tous ceux et celles qui travaillent à améliorer ce projet de loi. Nous souhaitons que ce geste législatif ne soit que l'amorce d'une série d'autres à venir, encore plus ambitieux, nous libérant le plus rapidement possible de notre dépendance aux énergies fossiles. Même si le potentiel économique et pétrolier... Même si le potentiel économique, pétrolier et gazier est extrêmement faible sur notre territoire, la symbolique est tout de même forte et nécessaire. L'avenir économique du Québec et de la planète passe par les énergies vertes. En prenant part à la Beyond Oil and Gas Alliance, BOGA, le Québec se place du bon côté de l'histoire. Nous pouvons en être fiers.

Mme Gagnon (Catherine Alexandra) : Pour accélérer la transition sociale et écologique, l'implémentation de programmes et de politiques doit être cohérente avec les prédictions des scientifiques et les cibles ambitieuses qui s'y rattachent, et ce, sans compromis. L'élimination de l'exploitation et de l'exploration pétrolière et gazière au Québec est une de ces mesures cohérentes, mais à condition qu'elle s'exprime clairement et sans compromis. Les pseudoprojets pilotes, les compensations financières proposées sont, en effet, inacceptables. Soyons clairs, l'argent public doit servir à financer une transition véritable et non à enrichir davantage les compagnies d'énergies fossiles.

L'industrie pétrolière et gazière est déjà aux abois pour demander des compensations financières à l'État québécois. Or, légalement, il n'est pas obligé de le faire. L'Assemblée nationale est souveraine. Comme l'a démontré le Centre québécois du droit de l'environnement dans un rapport publié en juin, l'Assemblée nationale peut adopter une loi mettant un terme à l'industrie des hydrocarbures sur son territoire sans indemnité pour les entreprises concernées, et ce, même rétroactivement. Si le gouvernement Legault va de l'avant avec des indemnisations, il s'agira donc d'un choix politique et non d'une obligation juridique.

Nous souhaitons rappeler qu'au cours des 10 dernières années le gouvernement du Québec a reçu environ 12 millions pour les permis d'exploration, mais a versé plus de 120 millions en subventions pour des projets pétroliers qui n'ont jamais été réalisés.

Mme Waridel (Laure) : Que dire des dizaines de millions devant être dépensés par les contribuables pour les 775 puits gaziers et pétroliers abandonnés par l'industrie sur notre territoire? Comment peut-on tolérer une telle irresponsabilité corporative au Québec? En bon comptable, nous demandons à François Legault et à toute son équipe, incluant cette commission, de faire tous les calculs en tenant compte des coûts environnementaux et sociaux générés par l'industrie pétrolière et gazière. Vous serez alors forcés de constater que, si des indemnisations sont à verser, elles devraient sortir des poches de l'industrie des hydrocarbures pour être versées à nos enfants qui devront assumer la facture immense de la crise climatique, une facture qui ne se payera pas seulement en dollars, mais aussi en souffrance pour des vies humaines, des vies qui ont tellement de valeur qu'elles n'ont pas de prix.

L'industrie pétrolière et gazière ne devrait pas tomber en bas de sa chaise en apprenant qu'en tant que contribuables nous considérons qu'elle a déjà eu plus que sa part du gâteau. Elle savait, depuis les années 70, que ses pratiques contribuaient à la dégradation de la vie sur Terre et qu'une transition énergétique était plus que nécessaire. Elle a préféré semer le doute et continuer à engranger un maximum de <profits tout en discréditant les alternatives aux combustibles fossiles.

Mme Waridel (Laure) : ...maximum de >profits tout en discréditant les alternatives aux combustibles fossiles.

Mme Gagnon (Catherine Alexandra) : L'idée des projets pilotes inscrits dans le projet de loi nous semble ici douteuse puisqu'elle semble provenir directement de l'influence des lobbyistes de l'industrie. Rappelons que, le 19 janvier dernier, 400 universitaires canadiens signaient une lettre pour condamner le projet de crédit d'impôt fédéral à l'investissement pour le captage, l'utilisation et le stockage de carbone, ce qu'on appelle le CUSC. Le projet de loi n° 21, qui ouvre la porte à de tels projets pilotes de CUSC, offre ici un cadeau potentiel à l'industrie des hydrocarbures pour des projets qui leur permettraient de contourner les objectifs de la loi. Il est temps que le gouvernement du Québec se tienne debout face à une industrie qui nous a coûté beaucoup plus cher collectivement qu'elle ne pourra jamais rapporter.

Nous demandons au gouvernement de reconnaître, dans cette loi, sa responsabilité à l'égard de nos enfants et des générations futures en y reconnaissant le principe de l'équité intergénérationnelle. Ceci est particulièrement important, considérant que les changements climatiques, dont l'industrie des énergies fossiles est la plus grande responsable, auront des conséquences sur plusieurs générations. Nous refusons de laisser une dette écologique de cette ampleur à nos enfants. À vous qui déciderez de l'issue de ce projet de loi, à vous ici présents ce soir, nous vous demandons de penser à tous les enfants que vous connaissez et à ceux que vous croisez d'ici et d'ailleurs. En tant que mères au front, nous vous demandons de protéger leur santé et leur sécurité qui, nous le savons maintenant, dépendent de la protection de l'environnement et qu'au lieu de compensation financière que cet argent serve à réimaginer nos collectivités et l'économie pour construire des systèmes résilients qui respectent les limites écologiques de notre planète pour créer un futur plus juste et équitable pour les générations à venir, mais aussi tous les habitants du territoire, incluant les plus marginalisés. Et j'entends ici, entre autres, les autochtones qui ont des droits sur ces territoires.

Mme Waridel (Laure) : Les bonnes comme les mauvaises décisions se prennent une à la fois, elles déterminent l'avenir. Considérant l'état d'urgence climatique dans laquelle nous nous trouvons, nous n'avons plus le temps de prendre de mauvaises décisions. Notre argent doit être mis au service d'une transition juste et écologique. C'est pourquoi nous appuyons les demandes exprimées dans les mémoires présentés par le Centre québécois du droit de l'environnement, Équiterre, Nature Québec, la Fondation David-Suzuki, le Front commun pour la transition énergétique, la coalition étudiante Arrêtons GNL, ainsi que par Éric Pineault, professeur à l'Institut des sciences de l'environnement de l'UQAM, ainsi que Marc Durand, professeur retraité du Département sciences et Terre... pardon, sciences de la Terre et atmosphère de l'UQAM. Nous vous attendons tous au front. Nos enfants ont besoin de vous. Merci.

Le Président (M. Lemay) : Merci beaucoup pour votre exposé. Nous allons maintenant passer à la période d'échange avec les membres de la commission, et je cède la parole à M. le ministre.

M. Julien : Oui, merci. Merci beaucoup pour votre présentation, Mme Waridel et Mme Gagnon. Écoutez, bien, j'avais eu l'occasion de lire le document que vous avez produit puis, essentiellement, qui est conforme à ce que vous venez de dire, essentiellement. Puis je comprenais assez bien que le volet indemnisation, ce n'était pas votre tasse de thé puis qu'à la fin vous nommez les groupes qui, également, ont amené ces discussions-là. Et bien honnêtement, bien, on a eu ces discussions-là avec tous les groupes, et, si vous avez écouté, bien, vous connaissez un peu la perspective qu'on y donne, à ces indemnisations-là.

• (17 h 50) •

Naturellement, Mme Waridel, quand vous mentionnez... Quand vous mentionnez l'industrie, bien, tu sais, vous faites un tout d'une industrie, mais il faut bien comprendre ici que ceux et celles, là, qui ont participé à ces 182 licences, 62 puits, bien, ce n'est pas les grandes pétrolières du monde, là, mais c'est des gens qui ont accepté... À part ça, on peut leur prêter des intentions, là, mais ils ont accepté de travailler dans un cadre légal où on a une responsabilité comme gouvernement. On a autorisé ça. Alors, il y avait une loi, des règlements, puis ils s'y sont conformés. Donc, c'est là, un peu, notre part de responsabilité, comme gouvernement, comme État, c'est de venir dire : Oui, on peut prétendre qu'ils le savaient, mais nous aussi, on le savait. Et juste pour terminer cet <élément-là pour vous entendre par la suite...

M. Julien : ...juste pour terminer cet >élément-là pour vous entendre par la suite, tu sais, quand vous dites : il était temps, bien, pour moi, oui, peut-être qu'il était temps, mais nous sommes les premiers à le faire. Nous sommes les premiers à le faire. Et alors, c'est vrai qu'on peut intellectuellement dire qu'il était temps, mais c'est quand même surprenant qu'on soit les premiers à le faire et c'est un peu... Le volet indemnisation, je ne pense pas qu'on va convenir ensemble de cette opportunité-là, mais c'est dans cette perspective-là qu'on l'amène à un minimum parce que j'ai l'impression qu'on... mettons, on a pris une responsabilité en l'autorisant de manière claire.

Mme Waridel (Laure) : Bien, merci pour votre question, M. le ministre, et puis... Bien, d'abord, on a commencé en vous félicitant. Donc, ça demeure tout entier. On est très heureux d'être le Québec... que le Québec soit le premier.

Ceci dit, bien, vous savez à quel point l'industrie a été gourmande par le passé. Vous savez qu'elles avaient, la plupart d'entre elles, des études qui démontraient que le potentiel était extrêmement bas puis que, dans bien des cas, c'était une opportunité pour aller chercher des subventions pour alimenter différents volets. Mais, bon, je ne vais pas me lancer dans ce débat-là, mais certains articles dans Le Devoir ont été assez éloquents à cet égard-là, mettant en lumière qu'ils avaient eu, effectivement, énormément de subventions déjà jusqu'à présent et puis que, comparativement, puis on le dit dans notre présentation, au prix qu'ils ont payé pour les permis... Moi, je vous dirais effectivement : que leur permis soit remboursé. Moi, je serais prête à laisser aller ça parce que c'est vrai qu'ils perdent ce droit-là, mais ce qu'ils demandent en ce moment est beaucoup trop. Quand ils parlent du... C'est un peu le même problème qu'on a avec la Loi sur l'expropriation, sur les terrains, quand on regarde les municipalités qui veulent avoir accès à des espaces verts et qui doivent payer le prix anticipé. Ça, ça n'a juste pas de bon sens.

Et l'autre chose, en fait, dans laquelle on vous invite à être, c'est dans un autre paradigme économique, dans le sens où on doit tenir compte des coûts environnementaux et sociaux. Et ça, c'est indéniable. On le sait depuis le rapport Stern, il y a déjà plus d'une décennie, que la crise climatique va coûter une fortune et que ce sont d'abord nos enfants et petits-enfants qui vont devoir payer. Et on n'est pas en train de budgéter ça, et ça, c'est inacceptable. Il faut qu'on fasse nos devoirs collectivement et qu'on mette l'industrie aussi face à ces coûts-là parce qu'on a une responsabilité collective.

Donc, je dirais que la position que le mouvement a prise, c'est de dire non fermement. Mais maintenant, après ça, bien, c'est vous les politiciens, puis on sait que votre tendance est plutôt à donner une écoute assez importante à l'industrie. Donc, on est convaincus que l'industrie ne restera pas en reste.

M. Julien : J'ai une question là-dessus, Mme Waridel.Quelle démonstration par rapport à cette phrase-là vous avez de ma part?

Mme Waridel (Laure) : Ah! pas de... En fait de...

M. Julien : C'est parce que je suis surpris parce que j'ai été reproché par l'industrie de ne pas les avoir rencontrés, puis je ne les ai pas rencontrés.

Mme Waridel (Laure) : Ah! O.K. Bien, en fait, il y a eu... Écoutez, M. le ministre, il y a eu tout le débat sur GNL et on se rappelle les rencontres qui ont été permises. Je pensais à ça. Je pense à ce qui se passe dans le secteur des forêts aussi, votre collègue qui a exactement le même discours que l'industrie. Donc, je ne pense pas que... ce n'est pas une surprise pour personne en fait de savoir qu'ils disposent d'une bonne écoute à votre égard... de votre part.

M. Julien : Bien, vous en parlerez avec M. Tetrault qui est venu ici cette semaine, mais je ne pense pas qu'il a la même perception que vous, Mme Waridel, mais c'est correct. À la fin, sur cet élément-là, je vous entends.

Mme Waridel (Laure) : Bien, je suis ravie que M. Tetrault soit insatisfait aussi. Ça me rassure, je vous dirais.

M. Julien : O.K. L'élément qui me surprend, puis honnêtement, là, qui me surprend beaucoup, c'est quand madame... excusez moi, Mme Catherine Gagnon, Mme Gagnon, les projets pilotes. Honnêtement, on met les projets pilotes dans ce projet de loi là, là, parce qu'on veut que, pour les perspectives environnementales, les puits qui ont été forés... Puis on avait l'INRS qui disait : Ça coûte 1 million du kilomètre, ces puits-là, là. S'il y a des projets... puis ça va être très peu de puits qui vont pouvoir même avoir ces capacités-là par leur nature, mais si, par grande chance, il y avait des projets qui viennent faciliter la transition énergétique de manière scientifique, on dit : Bien, on n'est pas fermés à l'idée. Puis on a... un pseudoprojet, puis vous pensez que les projets... C'est ça. C'est ça, un pseudoprojet <découlant d'une pression...

M. Julien : ...un pseudoprojet, puis vous pensez que les projets... C'est ça. C'est ça, un pseudoprojet >découlant d'une pression de lobbyistes pétroliers. Écoutez, là, ça, là, je vous le dis, pour moi, c'est n'importe quoi, là. C'est marqué dans l'article qu'il n'y aura pas de possibilité de recherche des hydrocarbures ni d'exploitation des hydrocarbures. Puis là il y en a qui disent : Oui, mais si je fais de la captation, peut-être que je pourrais... Non. C'est non. C'est non. Les seuls projets pilotes, c'est marqué noir sur blanc dans la loi, c'est des projets pilotes qui vont permettre d'additionner des gestes dans notre volonté, parce qu'il va falloir en additionner parce que les cibles sont audacieuses, dans notre volonté de réduire les GES et de décarboner le Québec le plus rapidement possible.

Alors, moi, si vous me dites que vous n'aimez pas les projets pilotes parce que c'est des pseudoprojets de lobbyistes pétroliers, bien, je vais être ouvert pour ne pas les mettre, bien honnêtement. Mais ce n'est pas du tout l'intention qu'on a, aucunement. Et je vous assure qu'il n'y a personne, actuellement, de vos lobbyistes pétroliers, qui trouve que les projets pilotes qui sont inscrits ici, là, c'est à leur satisfaction.

Mais exprimez-moi un peu vos craintes, considérant que c'est écrit noir sur blanc dans l'article 42 qu'il n'y a pas d'exploitation, pas d'exploration d'hydrocarbures qui est permise. Puis l'INRS parlait ce matin... En réalité, ça peut être de l'hydrogène qui serait vert, qui serait mis dans des fonds des puits, ça pourrait être de la géothermie. Puis on avait des spécialistes, des gens du domaine qui disaient que ça prendrait plus de flexibilité parce qu'on aimerait ça pouvoir bénéficier de ces projets-là, comme universitaires, justement, pour accélérer la transition énergétique. Puis vous le dites, là, des lobbyistes pétroliers pour des pseudoprojets pilotes... sur quelle base?

Mme Gagnon (Catherine Alexandra) : Bien, d'abord, je suis contente de vous entendre dire...

Mme Waridel (Laure) : Vas-y puis après je continuerai.

Mme Gagnon (Catherine Alexandra) : Oui. Bien, d'abord, je suis contente de vous entendre dire que vous voyez, vous, dans le projet de loi, que c'est clair que ces projets pilotes là ne pourraient pas servir à blanchir certaines émissions de gaz par certaines compagnies, parce que, dans l'Ouest, c'est le cas. Ça a été très décrié par certains scientifiques que de pouvoir capter du carbone et le stoquer, ce serait une manière de blanchir un peu l'industrie, les industries sales, en disant : Bien oui, on en capte en utilisant des puits, ça nous permet d'émettre un peu plus, donc, tu sais, pour atteindre une certaine carboneutralité. Mais je suis contente de vous entendre dire que vous, tel qu'il est écrit, vous jugez que c'est très clair, noir sur blanc, que ce ne serait pas possible. Mais Laure peut rebondir là-dessus.

M. Julien : Bien, Mme Gagnon, vous me... Mme Gagnon, si vous me permettez, ça a trois lignes. Donc, je vais le lire puis vous me direz en quoi ce n'est pas clair : «Un projet pilote mis en oeuvre en vertu du présent chapitre ne peut avoir pour effet de permettre la recherche d'hydrocarbures ou de réservoirs souterrains, la production d'hydrocarbures ou l'exploitation de la saumure.» Trois lignes limpides comme de l'eau. Alors, c'est où qu'on a un enjeu?

Mme Gagnon (Catherine Alexandra) : Vas-y, Laure.

Mme Waridel (Laure) : Si vous me permettez, en fait, je vous inviterais à lire, on vous l'a mis en référence dans notre mémoire, la lettre des 400 universitaires qui s'opposent à l'aide fédérale de stockage du carbone, parce que la dynamique qu'on craint, elle est très, très bien exprimée en détail dans ce... dans cette lettre-là, pardon, parce que c'est des éléments... Et là, effectivement, c'est très bien rédigé,, clairement dans la lettre. Mais après, il y a toutes sortes d'exceptions qui, possiblement, pourraient être un risque. Si on se fie à ce qui s'est passé au fédéral, donc, ça serait d'éviter les écueils. Il y a quand même... La manière dont... Ce que vous avez lu est assez clair, mais après, les autres éléments, il y a quand... Dans l'annexe, il y a quand même des éléments qui sont moins clairs. Ça fait que...

• (18 heures) •

M. Julien : Oui, mais juste là-dessus, Mme Waridel, si vous permettez,je comprends puis je partage même les craintes par rapport à certaines prétentions de producteurs d'hydrocarbures de venir contrebalancer ces productions-là par du captage de carbone. Mais ici, au Québec, le projet de loi dit : Vous ne pouvez pas exploiter. S'il est adopté, là, pas d'exploitation, pas d'exploration. Donc, ça n'existe plus. Et les projets pilotes ne doivent pas, même pas permettre, de manière pilote, une exploitation et une exploration. Donc, je peux comprendre que certains prétendent autre chose, par exemple, dans l'Ouest canadien, mais si on réfère au projet de loi du Québec, là, qui est devant vous, il n'y a pas de substance aux prétentions que ces éléments-là sont amenés par des <lobbyistes pétroliers...

>


 
 

18 h (version révisée)

<17855 M. Julien : ...ces éléments-là sont amenés par des >lobbyistes pétroliers. Un lobbyiste pétrolier qui nous dirait qu'il ne peut pas faire d'exploitation puis de l'exploration au Québec, je ne comprends pas son objectif.

Mme Waridel (Laure) : D'accord, M. le ministre. Ici, dans le fond, le plus... le projet pilote est donc de récupérer le méthane qui est émis des puits, mais que l'intérêt le plus grand serait, en fait, de le fermer. Vous, vous allez envoyer des inspecteurs pour voir si ce qu'ils font, en fait... vous aurez l'expertise pour dire : Bien, dans le fond, on aurait pu complètement le caper au lieu d'exploiter le méthane que, dans le fond, on peut quand même tirer? Parce qu'on voit, hein, les inspecteurs en environnement qu'on a en ce moment sur le terrain... On n'est même pas capable d'identifier exactement où sont les 775 puits qui ont été abandonnés par l'industrie. Ça fait qu'il y a un suivi qui est à faire à ce niveau-là, et moi, ce qui m'inquiète, c'est de voir à quel point on n'a pas tendance à faire les suivis adéquats. Et, en fait, tant mieux qu'il y ait cette disposition dans le projet de loi, que ce ne soit pas votre intention, mais assurons-nous après qu'on met les ressources nécessaires pour le suivi et qu'effectivement il n'y a pas des sous qui, finalement, servent à maintenir des puits sous prétexte de récupération de méthane, alors qu'ils pourraient être complètement fermés.

M. Julien : Mais je réitère, Mme Waridel, je m'excuse, mais le projet de loi dit qu'il ne peut pas y avoir d'exploration et d'exploitation d'hydrocarbures. Donc, les projets méthane que vous mentionnez, non, ce n'est pas possible.

À la fin, je veux juste mentionner, si vous avez une suggestion pour mettre dans la loi un projet pilote qui, à l'aide des puits déjà forés, favorisera la transition énergétique et que la formulation que vous souhaitez y apporter est plus limpide que la mienne, je souhaite l'écouter.

Mme Waridel (Laure) : Je vous remercie pour votre ouverture, M. le ministre. Je ne suis pas une juriste, mais je suis convaincue que nos collègues du centre québécois de l'environnement auront peut-être des propositions plus intéressantes que nous à vous faire. Mais, écoutez, vous semblez tellement habité par cette envie de ne pas subventionner des projets pilotes qui seraient nuisibles à l'environnement, je suis absolument ravie d'entendre ça. Puis ce que je souhaite, c'est que le gouvernement mette à disposition vraiment les ressources nécessaires pour s'assurer après de la bonne utilisation des sous pour ces projets pilotes là. Parce que c'est sûr que le mouvement Mères au front est en faveur de solutions, c'est là-dessus qu'on travaille, c'est notre message clé, mais assurons-nous qu'on fait les choses vraiment, vraiment correctement. Ça fait que je suis contente de voir à quel point vous êtes convaincu.

M. Julien : Bien, vous êtes bien aimable. Effectivement, vous touchez des cordes sensibles, parce que moi aussi, je suis un comptable. Mais ce n'est pas parce qu'on est comptable qu'on est con, et bien au contraire. Et honnêtement, quand on mentionne que l'industrie est proche de nous, bien, moi, je ne les rencontre pas. Et, des intentions comme ça, je ne souhaite pas qu'on m'en fasse, sauf si on peut les démontrer, parce que ce n'est pas mon cas.

Moi, mon cas ici, là, moi, c'est Mathilde et Arnaud. C'est le nom de mes enfants. J'ai la même perspective que vous puis je pense que le projet de loi qu'on a devant nous est un pas, un excellent pas dans une direction qu'on doit emprunter. Je pense qu'on peut le bonifier, mais je ne voudrais pas prétendre que des lobbys pétroliers nous ont aidés à écrire cette loi-là. Je vous le dis, là, il n'y a pas beaucoup de lobbys pétroliers qui aiment la loi actuellement.

Mme Gagnon (Catherine Alexandra) : Bon, bien, on est heureuses de l'entendre.

Mme Waridel (Laure) : Bien, je suis vraiment ravie d'entendre ça. Puis ça veut dire que vous avez pris... espérons que ça restera une bonne habitude, pour la suite, avec d'autres types d'industries potentiellement polluantes, parce que, là, on n'a plus le temps, comme on le disait dans notre mémoire, de prendre des mauvaises décisions. L'heure est à l'urgence. Les rapports du GIEC sont chaque fois plus alarmants et ils imposent un changement de paradigme aussi économique pour tenir compte des coûts environnementaux et sociaux, et ça, ça demande de l'audace.

Et on souhaite que votre gouvernement l'ait, cette audace-là. Et on pense que ce projet de loi là, en fait, puis on a commencé en vous félicitant, est justement le début de quelque chose qu'on souhaite encore plus grand.

M. Julien : Parfait. Il reste combien de temps?

Le Président (M. Lemay) : C'est la fin de ce bloc d'échange.

M. Julien : Mesdames, merci. Merci infiniment pour votre présentation. C'est très apprécié.

Mme Gagnon (Catherine Alexandra) : Merci. Bonne soirée.

Mme Waridel (Laure) : Merci pour votre écoute.

Le Président (M. Lemay) : Très bien. Alors, nous allons passer maintenant à l'opposition officielle, M. le député de Mont-Royal—Outremont, pour une période d'environ 11 minutes.

M. Arcand : Merci infiniment, Mme Gendron, Mme Waridel. Bonjour. C'est un plaisir. Mme Waridel, on s'est vus dans une vie antérieure et on est donc très heureux de vous retrouver aujourd'hui.

Vous avez vu que le ministre aimerait beaucoup avoir une cérémonie de reconnaissance, à un moment donné, là. Est-ce que ce sera possible? Mais je vais vous donner, au moins au début, une assez bonne nouvelle. C'est que ce projet de loi, même s'il y a des choses à ajuster dans le projet de loi, on s'est tous dit que, sur le principe... tous les partis <politiques...

M. Arcand : ...on s'est tous dit que, sur le principe... tous les partis >politiques à l'Assemblée nationale, sur le principe, on dit : On est d'accord avec le projet de loi dans l'ensemble de ce côté-là. Alors, vous n'avez pas tellement d'enjeux sur le fait que ce projet de loi là va sûrement, éventuellement, être adopté pour la suite des choses.

Ma question, évidemment, va un peu dans le même sens que les questions que le ministre a posées. Et je comprends qu'il y a des entreprises qui, certainement, profitent d'une situation. Vous avez parlé du crédit d'impôt fédéral, etc., mais nous, on a eu aujourd'hui des interventions de différents groupes mais on a eu aussi, il y a quelques heures, des interventions de l'INRS, qui est intervenu, puis ils avaient l'air à avoir, d'une part, une position extrêmement, je dirais, positive sur les projets pilotes. Parce qu'eux autres, ils disent même : Écoutez, on veut étendre même la limite par rapport à ça, on veut des projets pilotes beaucoup plus flexibles. Et je vais vous dire, ils nous ont parlé de géothermie, ils nous ont parlé évidemment du captage de carbone, le stockage d'hydrogène, etc.

J'essaie de voir, là. Je comprends la méfiance que vous pouvez avoir par rapport à certaines industries qui se servent de ça pour essayer de calmer le jeu actuellement, mais, si on parlait de projets pilotes à caractère scientifique, qui seraient financés par des fonds publics et qui seraient, dans une certaine mesure, contrôlés par le gouvernement, est-ce que c'est quelque chose qui est, à vos yeux, inacceptable?

Mme Waridel (Laure) : Oui. Bien, en fait, évidemment que si les projets pilotes permettent de contribuer à développer des solutions, notamment en recherche... puis j'ai beaucoup de collègues scientifiques, effectivement, qui travaillent à des alternatives, notamment des chercheurs à Polytechnique, à l'ETS, et autres. C'est juste le contrôle qui parfois est manquant pour s'assurer qu'on atteint effectivement nos objectifs par la suite. Donc, si la loi est bien rédigée, si on s'assure qu'il n'y a pas de... si on veut, de faille par laquelle on peut passer pour finalement servir à financer autre chose que l'intention première, évidemment qu'on est en faveur de solutions.

Puis il y a beaucoup d'innovations technologiques qui vont être nécessaires pour trouver des solutions. Mais, en même temps, nous, ce qu'on souhaite dans le mouvement, c'est appeler à une réflexion plus large parce qu'on ne pense pas que c'est la technologie qui va nous sauver, loin de là. Ça fait des années et des années qu'on parle de captation de carbone, qu'on parle de toutes sortes de stratégies puis on n'y arrive pas. Puis je trouve que l'image la plus claire pour ça, c'est comme on est face à un bain qui déborde, là. Le robinet, il coule. On continue à extraire des énergies... des hydrocarbures sous différentes formes, à les utiliser, puis, au lieu de fermer le robinet, on travaille à développer des nouvelles manières, des nouveaux... des nouvelles chaudières, des nouveaux plats pour essayer d'extraire l'eau du bain autrement alors qu'il déborde. Tu sais, à un moment donné, il faut aller vers l'essence du problème, avoir ce courage-là.

• (18 h 10) •

C'est sûr qu'on a des sociétés qui dépendent des énergies fossiles de manière claire et nette, mais le Québec se trouve dans une position privilégiée pour être la locomotive de la transition écologique au Québec. Puis je vous dirais, ce n'est pas juste à cause de notre hydroélectricité, loin de là. C'est plutôt parce qu'on a un tissu social qui est très serré. Au Québec, on peut faire les choses très rapidement. On l'a vu pendant la Révolution tranquille. En six ans, il y a eu des changements majeurs, des transformations sociales qui caractérisent encore le Québec d'aujourd'hui, qui se sont pris dans une période de six ans. Donc, on a besoin d'avoir ce même élan pour protéger l'avenir de nos enfants.

Et, à cet égard-là, le Québec ressemble à beaucoup de sociétés scandinaves, c'est-à-dire, c'est des plus petites populations qui partagent une langue, donc avec un tissu social très fort. Ça fait que profitons de cet avantage-là, social, qui n'est pas juste hydroélectrique, pour inventer une nouvelle société qui soit plus écologique et plus équitable aussi parce que ça va ensemble. Et ce sera une société qui sera plus saine <aussi...

Mme Waridel (Laure) : Ça fait que profitons de cet avantage-là, social, qui n'est pas juste hydroélectrique, pour inventer une nouvelle société qui soit plus écologique et plus équitable aussi parce que ça va ensemble. Et ce sera une société qui sera plus saine >aussi. Parce que vous savez que beaucoup des alternatives qui permettent de réduire nos émissions de gaz à effet de serre amènent davantage de partage dans la société et amènent aussi des conditions qui sont favorables à une meilleure santé, qu'on pense au transport actif, qu'on pense à la réduction de la consommation de viande, qu'on pense aux espaces verts en milieu urbain, et autres, au verdissement, à la...

On est tellement privilégiés d'avoir autant de solutions à notre ...(panne de son)... On a besoin d'avoir des élus ...(panne de son)... nous mènent dans la bonne direction et qui permettent de développer une architecture des choix qui fera en sorte que les citoyens seront amenés à prendre des meilleures décisions, c'est-à-dire que les choix les plus écologiques soient aussi les choix qui coûtent le moins cher parce qu'on aura des politiques d'écofiscalité, seront les choix les plus faciles et les plus agréables à faire. Comme c'est le cas, si vous allez passer un temps à Copenhague ou dans d'autres villes de Scandinavie, vous verrez comment c'est facile de faire les bons ...(panne de son)... Puis on a ce potentiel-là au Québec, puis c'est pour ça que l'argent, là, qu'on veut... que l'industrie quémande, on pense qu'il faut le mettre dans le développement de ces transformations-là, qui sont aussi sociales et pas juste technologiques. Merci.

Puis c'est un plaisir de vous revoir, M. Arcand, en passant.

M. Arcand : Bien oui, bien oui. Très bien.

Moi, vous savez, on est quatre partis politiques ici présents aujourd'hui, hein? Dans quelques mois, on est en campagne électorale, tout le monde a besoin d'un programme. Alors, pendant que vous êtes là, Mme Gendron, Mme Waridel, vous avez dit, dans votre commentaire, vous avez dit : Nous avons besoin que les politiciens posent des gestes plus ambitieux encore, alors guidez-nous dans nos futurs programmes de campagne électorale. Quels sont les gestes plus ambitieux que vous aimeriez que l'on pose au cours de la prochaine année ou des prochaines années?

Mme Gagnon (Catherine Alexandra) : Bien, déjà là, le projet de loi, on doit le réitérer, là, c'est vraiment, pour nous, déjà un pas dans la bonne direction. Mais je pense qu'il va falloir imaginer toutes sortes de choses pour continuer. On pourrait embrayer sur toute la question forestière, mais je ne sais pas si c'est une tangente qu'on souhaite prendre maintenant. Oui, d'abord lire le livre de Laure Waridel, mais de réimaginer l'utilisation de notre territoire d'une manière où on cesse d'empiéter, de créer une dette écologique qui va être léguée à nos enfants, de toutes sortes de manières.

Je pense qu'on peut être très innovants, entre autres, sur comment qu'on aborde l'industrie forestière. On pourrait en discuter peut-être une autre fois, mais ça, c'est un sujet nécessairement qu'il va falloir aborder, je pense. Parce qu'on l'a... on voit que cet empiétement sur notre vaste territoire du Nord a des conséquences écologiques, a des conséquences sur des populations autochtones. Donc, ça, ça pourrait être un point qui est très fort et très cher à Mères au front, je pense, l'utilisation et les coupes forestières, la manière qu'on a orienté l'industrie forestière pendant les dernières années.

Pistes de solution... Je ne sais pas, Laure... Il y a mille choses dont on pourrait discuter, mais je ne sais pas...

Mme Waridel (Laure) : Oui. Bien, en fait, une des bases... un des livres qu'on... bien, en fait, c'est le résumé de ma thèse de doctorat, La transition, c'est maintenant, puis qui met en lumière, justement, énormément de solutions qui sont déjà en train d'émerger au Québec. Il y a beaucoup de gens qui font un travail extraordinaire, qui est dans l'ombre et qui pourrait être amplifié et devenir les nouvelles normes.

M. Arcand : C'est ça. Écoutez, il me reste peu de temps, je pense. Alors, il me reste deux minutes. J'avais une question, évidemment, sur un sujet que vous avez abordé. Vous savez que Questerre a une entente, semble-t-il, avec les Abénaquis pour des projets. Comment vous traiteriez ça, si vous étiez en politique? Est-ce que vous donnez un permis? Est-ce qu'au nom de l'autodétermination... enfin, peu importe ce qu'on peut appeler, vous, ça représente quand même une certaine difficulté, s'il y a des communautés autochtones qui décident, par exemple, de faire affaire directement avec des compagnies pétrolières?

Mme Waridel (Laure) : Veux-tu... Bien, je peux peut-être donner un début de réponse puis tu compléteras, Catherine.

En fait, pour nous, la capacité de décider des communautés autochtones, elle est fondamentale, puis c'est à eux de décider. Après ça, il faut voir quelles sont les entités au sein des communautés qui ont vraiment le pouvoir de décision parce que... Bien là, cette partie-là, sur notre mémoire, je dois dire que ce n'est pas nous qui l'avons rédigée, c'est Marie St-Arnaud. On pourrait vous mettre en lien pour des réponses plus détaillées sur cette question-là. Mais, pour nous, évidemment, la question des communautés autochtones, elles doivent être écoutées. Mais après ça, il y a d'autres fondements plus larges liés au développement <durable...

Mme Waridel (Laure) : Mais après ça, il y a d'autres fondements plus larges liés au développement >durable, d'ailleurs, que vous connaissez du temps où votre gouvernement a fait adopter la Loi sur le développement durable, qui devraient... donc qui cherchent un équilibre entre le social, l'économique et l'environnemental, qui devraient être au cœur du processus de décision, mais aussi qui touchent l'ensemble de la communauté.

Je ne sais pas, Catherine, si tu veux...

Mme Gagnon (Catherine Alexandra) : Non, ça va. Tu as fait le résumé de ce que j'aurais dit. Oui.

Le Président (M. Lemay) : ...complète ce bloc d'échange. Alors, nous allons maintenant céder la parole...

M. Arcand : Alors, merci. Merci beaucoup. C'est un plaisir.

Le Président (M. Lemay) : ...au deuxième groupe d'opposition avec la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques pour environ 2 min 45 s.

Mme Massé : Oui. Bonjour, mesdames. Bonjour, mes soeurs de lutte de Mères au front.

En fait, vous avez abordé la question de la transparence, de l'importance d'avoir des données qui sont accessibles aux citoyens et citoyennes, citoyens et citoyennes d'ailleurs qui font en sorte qu'aujourd'hui l'État québécois est devant la nécessité de déposer un projet qui interdit l'exploration et l'exploitation. C'est une façon de lever un chapeau à vos luttes de longue date.

Ce que... Donc, cette question-là d'avoir accès aux données, qu'est-ce que, dans... Parce que là, vous êtes là comme citoyennes, là, comme ça aurait pu être n'importe quelles citoyennes des autres groupes de Mères au front. Alors, qu'est-ce qui fait... pourquoi c'est si important, pour les citoyens et citoyennes, d'avoir ce genre de données là? Ça fait que ça, c'est une question. Moi, j'ai juste deux minutes, alors...

Et l'autre, c'est... on s'est fait dire que, dans le fond, les droits des investisseurs, bien, il fallait respecter ça, parce qu'on avait pris des engagements, on leur avait permis d'explorer, etc. Vous en pensez quoi, vous, par rapport à ces droits-là des investisseurs?

Mme Gagnon (Catherine Alexandra) : Bien, si je peux répondre, Laure, là, bien, un, les deux questions, une ne va pas sans l'autre, c'est-à-dire que, pour que le citoyen soit en mesure de juger si les indemnisations, par exemple, face à l'industrie sont justifiées ou pas, on doit avoir accès aux données, quels sont les niveaux de subventions. C'est extrêmement difficile, avoir accès à ces données-là, quels sont les niveaux de subventions qui ont été données exactement aux compagnies, quelles étaient les ententes claires. Je pense que, pour prendre un choix éclairé, les citoyens doivent avoir accès à ces données-là.

Ça m'amène à la deuxième question, qui est, bon, si on sait exactement les chiffres, on va être vraiment en mesure de se dire : Bon, bien là, vous avez eu assez votre part du gâteau. Mais, tu sais, si on vous a donné... si vous avez payé 12 millions pour vos permis d'exploitation, comme disait Laure, nous serions, à la limite, d'accord que ce soit remboursé, pour être donnant-donnant puis pour être bons joueurs. Mais, si, en plus, on vous a donné 120 millions de subventions, je pense que, pour l'instant, comme je le dirais, on considère que, bien, c'est ça, vous avez fait... vous avez pris votre part du gâteau, puis de partir avec plus, ce serait comme l'enfant qui veut sortir de la fête avec le gâteau puis les jouets au complet.

Mais pour ça, il faut les données, tu sais, pour pouvoir prendre les choix... Même si on est à titre de citoyens, nous autres, on est quand même des universitaires assez formées, mais je pense que tout citoyen est capable, quand il a accès aux données, de voir les chiffres et de voir ce qui a du sens et pas de sens au niveau de nos contributions.

Est-ce que tu veux rajouter quelque chose, Laure?

Mme Waridel (Laure) : Bien, je dirais que trop souvent, puis ça, je le dis aussi à titre de chroniqueuse, il y a des... quand on veut faire sortir l'information, on doit faire appel à la loi d'accès à l'information, puis là, ça demande énormément de temps pour avoir les données, des données qui devraient être rendues publiques. Ça fait que, quand même, les journalistes, je pense à mes collègues, ont de la difficulté à trouver des données, alors qu'ils doivent être ce qui permet à la société de prendre des décisions. Imaginez quand c'est un simple citoyen ou une simple citoyenne qui essaie d'avoir de l'information. Ce n'est vraiment pas évident. Puis je pense qu'une saine démocratie...

Le Président (M. Lemay) : Merci, Mme Waridel. Je dois vous interrompre à ce stade-ci...

Mme Waridel (Laure) : Oh! pardon.

Le Président (M. Lemieux) : ...et maintenant céder la parole au député de Jonquière.

• (18 h 20) •

M. Gaudreault : Oui. Alors, bonjour, merci beaucoup d'être là.

Vous savez, si vous avez suivi nos travaux depuis quelques jours, on se questionne beaucoup, un peu le dilemme, là, de l'oeuf ou la poule, jusqu'où on doit aller dans les indemnités pour éviter peut-être des poursuites des compagnies, où, si on donne une indemnité, on achète la paix, on n'a pas de poursuite.

Moi, j'aimerais ça vous entendre sur la reconnaissance d'un préjudice écologique pour les générations futures. Tu sais, on ne se pose pas ces questions-là, dans le fond, pour nos enfants. Et je sais que ça a été reconnu dans certains pays, Pays-Bas, France, Irlande, récemment, à la suite de procès ou en tout cas de... puis En Jeu qui s'en va aussi de ce côté-là. Peut-être qu'on s'éloigne un petit peu du projet de loi, mais pas tant que ça. Qu'est-ce qu'on pourrait faire, comme parlementaires, pour reconnaître le préjudice écologique aux générations futures?

Mme Gagnon (Catherine Alexandra) : Bien, d'abord, commencer par le calculer. Mais, Laure, c'est ça sûrement que tu voudrais< dire...

Mme Gagnon (Catherine Alexandra) : Bien, d'abord, commencer par le calculer. Mais, Laure, c'est ça sûrement que tu voudrais >dire, c'est-à-dire que le préjudice écologique est toujours externalisé quand on analyse des projets, alors qu'on sait maintenant qu'il y a des coûts immenses que la société doit payer, là. Ce matin, dans le journal — moi, je suis de Rimouski — à Sainte-Luce, on a mis 12 maisons en vente aux enchères à 3 000 $ parce qu'elles doivent être déplacées à cause de l'érosion côtière causée par les changements climatiques. Il y a un coût énorme à notre société, mais ces coûts sont toujours externalisés dans la prise de décision envers des projets. Mais moi, je pense que le truc numéro un qui devrait être fait, c'est de toujours considérer ces coûts-là à chaque décision qu'on prend pour un développement x.

Tu peux rajouter, Laure.

Mme Waridel (Laure) : Mais, de manière générale, en fait, le gouvernement devrait se donner un filtre dans sa prise de décision, c'est-à-dire que toutes les décisions prises par le gouvernement du Québec puis aux autres instances aussi devraient passer le crible de leur impact sur l'avenir de nos enfants. Et donc, ça, c'est de regarder le coût climatique, ce qui nous amène plus... vers plus d'émissions de gaz à effet de serre devrait d'emblée être rejeté, alors que les investissements qui nous permettent de réduire nos émissions de gaz à effet de serre, de réduire notre empreinte écologique, au contraire, devraient être encouragés. On n'a pas ce filtre-là. On fait des budgets, puis vous le savez bien, financiers, mais on ne fait pas de budget carbone. On devrait se doter d'un budget carbone. Puis ça, il y a longtemps que les groupes écologistes le demandent, et ça nous aiderait à justement respecter le droit des futures générations à un environnement sain.

Puis la poursuite se fait au niveau fédéral par Environnement Jeunesse, mais, je veux dire, d'un point de vue moral, on a une question à se poser. Puis, si la première responsabilité de nos élus, ce n'est pas de veiller à protéger la sécurité de ses enfants, qu'est-ce que c'est? Je veux dire, l'histoire, le développement des premières sociétés, les premiers types de gouvernance sont nés de ce besoin-là, de confier une partie de notre liberté en échange d'une protection sur notre sécurité, notre santé. En ce moment, on sait qu'il y a une menace qui est existentielle...

Le Président (M. Lemay) : Alors, merci beaucoup, Mme Waridel. C'est tout ce qui complète le temps qu'on avait. Donc, merci, Mme Waridel et Mme Gagnon, de votre contribution à nos travaux.

Et la commission ajourne ses travaux jusqu'à demain jeudi le 24 février 2022, après les affaires courantes, où elle poursuivra les auditions publiques sur le projet de loi n° 21. Au revoir.

(Fin de la séance à 18 h 23)


 
 

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