(Douze
heures)
Le
Président (M. Lemay) : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de
la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et
des ressources naturelles ouverte. Je
demande à toutes les personnes présentes dans la salle de bien éteindre
la sonnerie de leurs appareils électroniques.
Aujourd'hui, la commission est réunie afin de procéder à des auditions
publiques dans le cadre des consultations
particulières sur le projet de loi n° 34, la Loi visant à simplifier le
processus d'établissement des tarifs de distribution d'électricité.
M. le secrétaire, y
a-t-il des remplacements?
Le Secrétaire :
Oui, M. le Président. M. Tardif (Rivière-du-Loup—Témiscouata) sera remplacé
par M. Skeete (Sainte-Rose); M. Kelley (Jacques-Cartier) remplacera
M. Ciccone (Marquette); Mme Ghazal (Mercier) remplacera Mme Lessard-Therrien (Rouyn-Noranda—Témiscamingue); et M. Ouellet
(René-Lévesque) remplacera M. Roy (Bonaventure).
Le Président
(M. Lemay) : Parfait. Merci beaucoup.
Auditions (suite)
Alors,
cet avant-midi, nous entendrons L'Union des producteurs agricoles. Alors, je souhaite donc la bienvenue
aux représentants de L'Union des
producteurs agricoles. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes
pour votre exposé. Je vous demande...
Ensuite, on aura une période d'échange avec les membres de la commission. Je
vous invite à vous présenter, ainsi que les personnes qui vous
accompagnent, puis à débuter votre exposé. La parole est à vous.
L'Union des producteurs
agricoles (UPA)
M. Doyon
(Paul) : Bonjour...
Le
Président (M. Lemay) : Oh! Juste un instant. Juste un instant.
Oui, allez-y, M. le député de Laval-des-Rapides.
M. Polo :
Juste une question de règlement. Juste une question de règlement. C'est parce
que, là, on est plus de membres de l'opposition que de membres du gouvernement
autour de la table.
Le Président
(M. Lemay) : Alors, M. le député de Laval-des-Rapides...
M. Polo :
Je sais qu'il ne faut pas signifier l'absence, mais c'est parce que...
Le
Président (M. Lemay) : ...on ne signifie pas les absences de nos
collègues. Et le quorum indique cinq membres pour avoir le quorum. Donc,
j'ai constaté le quorum, nous débutons la séance. Monsieur, la parole est à
vous.
M. Doyon (Paul) : Bonjour. Mon nom est Paul Doyon, je suis deuxième
vice-président à L'Union
des producteurs agricoles. Et j'invite mes collègues à se présenter.
Mme Bouffard (Isabelle) : Bonjour. Isabelle Bouffard, Union des producteurs agricoles, je suis la directrice de la direction
Recherches et politiques.
M. Tougas
(David) : Bonjour. David
Tougas, je suis coordonnateur Économie et commerce à la direction Recherches
et politiques à L'Union des producteurs agricoles.
M. Doyon
(Paul) : L'UPA tient à remercier la Commission de l'agriculture, des
pêcheries, de l'énergie et des ressources
naturelles de lui donner l'occasion
de présenter les commentaires et les préoccupations du secteur agricole relatifs au projet de
loi n° 34, Loi visant à simplifier le processus d'établissement des tarifs
de distribution d'électricité.
L'énergie est un
intrant essentiel à la production de biens agricoles. Tout comme les autres
intrants, le coût des différentes sources d'énergie, notamment l'électricité, a
un impact direct sur la rentabilité des fermes.
Cet élément
est l'une des principales raisons pour lesquelles l'UPA s'implique dans
plusieurs dossiers touchant à des enjeux relatifs à l'énergie. Suivant
cette logique, l'UPA a agi à titre d'intervenant auprès de la Régie de
l'énergie dans de nombreux dossiers d'établissement des tarifs d'électricité au
cours des dernières années.
Tout d'abord, l'UPA accueille favorablement
la remise de 500 millions de dollars annoncée par le gouvernement lors du dépôt du projet de loi n° 34. Sans
se prononcer sur l'enjeu de la provenance de cette somme, l'UPA accueille
malgré tout positivement cette mesure
qui reflète l'intention du gouvernement de remettre une partie des sommes
perçues en trop par Hydro-Québec au cours des dernières années et qui tend à améliorer les liens avec
ses consommateurs d'électricité. Cette décision simple et concrète du
gouvernement contribue ainsi à une certaine équité entre la société d'État et
ceux-ci.
Le projet de loi à
l'étude propose de modifier, entre autres, la Loi sur Hydro-Québec et la Loi
sur la Régie de l'énergie afin de simplifier
le processus d'établissement des tarifs de distribution d'électricité. L'UPA
tient à mentionner qu'elle adhère aux objectifs du gouvernement dans le
cadre de ce projet de loi.
Dans le cadre du processus de consultation actuel,
l'UPA juge qu'il est pertinent de se remémorer les principes sur lesquels s'est appuyé le projet de loi menant à la
création de la Régie de l'énergie, ces principes se résumant ainsi :
assurer aux Québécois les services
énergétiques requis, au meilleur coût possible, promouvoir de nouveaux moyens
de développement économique et garantir l'équité et la transparence.
Lorsqu'on
analyse la portée du projet de loi, force est de constater que celui-ci
s'éloigne de certains des objectifs ayant
mené à la création de la Régie de l'énergie. Tout d'abord, le fait de modifier
la fréquence de fixation des tarifs aux cinq ans plutôt qu'annuellement,
comme c'est le cas actuellement, réduit grandement la transparence de
l'information disponible par rapport à la situation actuelle.
Nous soulignons que
l'abolition proposée du MRI s'éloigne du principe de l'un des objectifs ayant
mené à la création de la Régie de l'énergie, soit d'assurer une tarification
équitable, au meilleur coût possible.
Malgré
ce qui précède, l'UPA accueille favorablement le gel des tarifs de distribution
d'électricité en 2020, suivi d'une
indexation des composantes des tarifs à l'inflation pour les quatre années
subséquentes. L'effet combiné du gel et de l'indexation fera en sorte
que la facture totale d'électricité de la majorité des clients d'Hydro-Québec
augmentera d'un taux annuel équivalent à 33 % de moins que l'inflation pour les cinq
prochaines années. Considérant que la hausse cumulée des tarifs au cours
des cinq dernières années a été équivalente à l'inflation, nous jugeons que
cette proposition aidera certainement les
ménages et les entreprises agricoles à diminuer à court terme leurs dépenses
liées à l'énergie, ce qui est apprécié.
L'un des objectifs du
gouvernement dans le cadre de ce projet de loi est de réduire les ressources
humaines et financières consacrées aux
dossiers tarifaires qui sont actuellement traités sur une base annuelle. Par
contre, la fixation de la fréquence
de ces dossiers aux cinq ans pourrait occasionner un choc tarifaire dans le cas
où la régie aurait à corriger un écart
de rendement, par rapport à l'inflation, qui se serait accumulé durant cette période.
Rappelons que les décisions antérieures
de la régie sur la fixation des tarifs de distribution d'électricité ont mené à
une variation plus importante des taux
fixés par rapport à la variation de l'inflation, et ce, malgré le fait que le
processus de fixation était fait sur une base annuelle.
À
cet égard, l'UPA appuierait une position plus équilibrée dans laquelle la régie
procéderait, à compter de 2025, à la
tenue d'une audience publique pour établir les tarifs de distribution
d'électricité, dans le cadre d'une demande tarifaire déposée par Hydro-Québec, et ce, tous les trois
ans. Cette proposition a l'avantage de diminuer les ressources investies, tout
en limitant la possibilité des chocs tarifaires.
Tout
comme les différents secteurs de l'économie, la société d'État doit travailler
à améliorer son efficience. Le secteur
de la production agricole québécois doit composer avec des concurrents qui
proviennent de partout sur la planète. Afin de rester compétitives, les
entreprises agricoles doivent constamment améliorer leur productivité, car le
prix de plusieurs produits agricoles suit une tendance inférieure à
l'inflation. L'électricité étant un intrant non négligeable en production agricole, les gains d'efficience
d'Hydro-Québec favoriseront le maintien de la compétitivité des entreprises du
secteur dans le futur.
Ainsi,
à compter de 2025, l'UPA demande que le processus d'établissement et
d'indexation des tarifs comprenne un
mécanisme permettant d'inciter Hydro-Québec à générer des gains d'efficience et
de s'assurer que ceux-ci sont reflétés dans les tarifs.
L'UPA juge que
la fixation des tarifs par la régie à une fréquence de trois ans combinée à
l'application d'un mécanisme favorisant les
gains d'efficience contribueront certainement à favoriser la transparence et à
assurer une fourniture d'électricité
au meilleur coût possible. Ces deux principes, si chers au législateur lors de
la mise en place de la régie, doivent nécessairement être pris en compte
dans l'élaboration de la version finale du présent projet de loi.
Finalement,
l'UPA est également préoccupée par les modifications que souhaite apporter le
législateur à l'article 25 de la
Loi sur la Régie de l'énergie. À l'heure actuelle, la fixation ou la
modification des tarifs d'électricité d'Hydro-Québec est soumise de façon obligatoire au processus de
consultation publique en vertu des articles 25 et 48 de la Loi sur la
Régie de l'énergie. Avant de rendre sa décision en cette matière, la
régie bénéficie de tous les avantages que lui offre le processus de
consultation publique, soit celui d'apprécier non seulement la preuve écrite,
mais aussi celle entendue en audience, témoignage
des témoins d'Hydro-Québec et des intervenants, sur les enjeux du dossier
tarifaire. Cet arbitrage nécessaire et important permet de s'assurer que
les tarifs justes et raisonnables sont fixés en conformité avec l'ensemble des
critères prévus dans la loi, dont celui plus
central d'assurer la conciliation entre l'intérêt public, la protection du
consommateur et un traitement équitable du transporteur d'électricité et
des distributeurs.
Les
modifications apportées à l'article 25 sont importantes puisque la régie
ne sera plus dans l'obligation de tenir une audience publique
lorsqu'elle sera appelée à fixer les tarifs d'Hydro-Québec. Le maintien du
processus obligatoire de la tenue d'une
audience publique doit demeurer la règle, surtout si on souhaite espacer dans
le temps la période de fixation par la régie des tarifs selon ce qui est
prévu au projet de loi n° 34.
• (12 h 10) •
Bien que l'on
puisse penser que la régie souhaite maintenir le processus d'audience publique,
il faut éviter qu'elle ne choisisse
de se satisfaire du processus dit de consultation par lequel une demande se
déroule par écrit seulement, et ce, pour des impératifs économiques ou autres.
Certains pourraient croire que ce choix permet de réaliser des économies. Il appert au contraire qu'il risque d'entraîner un
alourdissement des échanges écrits entre les parties, demandes
de renseignements et
réponses plus élaborées, preuves écrites plus détaillées, etc., puisqu'ils
souhaitent compenser l'absence d'audience publique. En fin de compte, c'est la régie qui se trouvera
pénalisée puisqu'elle aura été privée d'une explication verbale fournie en audience et du contre-interrogatoire d'un témoin
sur un sujet d'importance faisant l'objet d'une contestation, pour ne nommer
que ces exemples. Les décisions de la régie pourraient en souffrir, et ce, au
détriment de l'ensemble des consommateurs d'électricité.
Pour ces
motifs, l'UPA demande que l'article 25 de la Loi sur la Régie de l'énergie ne fasse l'objet d'aucune modification, afin que
la régie soit encore soumise à la tenue d'une audience publique lorsqu'elle
fixera les tarifs d'électricité
d'Hydro-Québec. Merci.
Le
Président (M. Lemay) :
Merci. Donc, ceci complète votre exposé. Je cède maintenant la parole au ministre pour la période d'échange avec
la partie gouvernementale.
M. Julien :
Oui, merci, M. le Président. Alors, merci, M. Doyon et vos collègues, de
vous présenter aujourd'hui, et c'est
très apprécié. Donc, si je résume rapidement les éléments que vous mentionnez,
puis corrigez-moi a posteriori si je me
trompe, donc vous êtes confortables avec le mécanisme qui dirait : Gel
tarifaire, inflation jusqu'en 2025, et, après ça, a posteriori de ça, vous souhaitez plutôt que ce
soit une obligation et non pas, en fin de compte, une possibilité que la régie
ait. Et, a posteriori, 2025, vous
souhaiteriez que ce soit aux trois ans que la cause tarifaire soit faite. Je
comprends probablement que, pour
vous, jusqu'à 2025, le gel de tarifs et les quatre ans d'inflation sur la base
du gel, c'est ça qui vous conforte d'accepter la période, mais, a posteriori,
vous préféreriez une période de trois ans. C'est ça que je dois comprendre?
M. Doyon (Paul) : Exactement
ça.
M. Julien : Parfait. Vous avez
mentionné, puis plusieurs intervenants nous ont mentionné ça également... On regarde l'historique, on peut l'interpréter, mais
nous autres, on l'a pris sur 15 ans parce qu'on voulait... parce qu'il y
avait une notion également de
mécanisme d'écart de rendement ou de calcul d'écart de rendement. Donc, on a
essayé de suivre la même période pour
dire : Bien, il y a une corrélation inflation et hausse tarifaire, avec
soubresauts, mais, à terme, sur une période de 15 ans, là, on voit
que l'augmentation tarifaire a été légèrement supérieure à l'inflation. Quand
on dit «légèrement», c'est que, quand on prend la somme des éléments, c'est
quand même des revenus substantiels au-dessus de l'inflation qu'on a observés.
Et les gens
nous disent : Nous, on pense... quand on leur propose l'inflation :
On pense qu'on risque de payer trop cher
et, en même temps, on pense qu'on risque d'avoir un choc tarifaire après cinq
ans. Pour moi, c'est comme, oui, vous mentionnez
les deux risques du choc tarifaire qui serait... puis qu'on n'a pas payé assez
cher et de la constance qu'on paierait trop
cher. C'est sûr que, quand on vient fixer sur une période de quatre ans à
l'inflation, c'est comme si on vient se positionner. Puis effectivement le
tarif basé sur une cause tarifaire annuelle aurait pu faire en sorte... un peu
supérieur, un peu inférieur, mais on pense que la corrélation passée
avec l'inflation est démontrée.
Est-ce que vous pensez que l'inflation, bien
qu'elle n'est pas parfaitement représentative, est quand même conséquente avec
les augmentations tarifaires du passé?
M. Doyon
(Paul) : Bien, l'inflation,
ça, c'est une bonne mécanique pour mesurer des choses du passé. Ce que c'est
qui s'en vient dans l'avenir, il y a bien
des éléments qui font en sorte... qui peuvent venir influencer l'inflation,
différentes... et effectivement on considère que c'est intéressant, mais,
pour l'avenir, cinq ans, ça peut être long.
M. Julien :
Donc, je réitère que, vous, votre position, puis corrigez-moi si je me trompe,
c'est le gel, comme vous mentionnez,
qui donne, en fin de compte, un effet combiné, vous avez mentionné 33 %.
Je suis curieux pour le 33 %, mais tant mieux si c'est 33 %, parce que je pensais plus que c'était une
vingtaine de pour cent, mais ça doit être l'indexation sur l'indexation,
là, qui donne le 33 %.
M. Tougas
(David) : Le fait que le gel est appliqué la première année, il y a un
effet cumulatif. Donc, si on regarde la
facture payée sur cinq ans, donc, il faudrait avoir un taux de croissance
équivalant à 33 % inférieur à l'inflation pour obtenir la même
facture.
M. Julien : Alors, c'est là où
je vous rejoins, c'est l'effet de la première année qui a plus de poids.
M. Tougas (David) :
Effectivement.
M. Julien :
Alors, c'est ça qui vous rassure par rapport à cet objet-là, c'est-à-dire que
ça vient mitiger fortement le risque
sur cette période-là. Et, puisqu'il y aurait une cause tarifaire après cinq
ans, bien, on aurait l'heure juste, mais ce n'est pas très risqué. Si ce
n'est pas très risqué, c'est quoi, l'avantage? Est-ce que vos membres ou les
gens que vous représentez... l'effet de prévisibilité, est-ce que ça vaut quelque
chose pour eux?
M. Tougas
(David) : En fait, oui, mais
ce qui est plus d'importance, selon nous, là, c'est l'aspect variabilité. Ce
qui est amené dans le projet de loi, c'est intéressant pour la période qui serait située entre les
causes tarifaires. Donc, au niveau de la variabilité, ce qu'on a constaté, c'est :
effectivement, l'inflation a eu moins de soubresauts, par le
passé, que les causes tarifaires.
Par contre,
le risque, pour nous, c'est ce choc potentiel là, tarifaire, qui pourrait
survenir aux périodes de trois ou cinq
ans, et donc cette variabilité, pour nous, elle est importante
sur une période qui peut être... qui est plus longue, sur une plus longue
période en fait, qui ne serait pas juste de trois ans ou de cinq ans, qui
inclurait la période... l'année de fixation des tarifs.
Donc, c'est
pour ça que, nous, la position est comme mitoyenne ou équilibrée. On dit :
Oui, cinq ans la première... comme
vous le mentionnez, le premier cinq ans avec le gel de la première année, on
est prêts à vivre avec ça, mais, pour la suite, on serait plus à l'aise
avec une révision aux trois ans.
Mme Bouffard (Isabelle) :
L'élément...
Le Président (M. Lemay) :
Mme Bouffard, allez-y.
Mme Bouffard
(Isabelle) : Excusez.
L'élément que David vous amène, c'est : comme la variabilité est importante...
Parce que vous parlez beaucoup de prévisibilité, là, c'est intéressant, mais,
tu sais, c'est les soubresauts, là, qu'on tente d'amenuiser, en tout cas, nous, pour la clientèle, pour notre clientèle.
La cause tarifaire aux trois ans, en audience publique avec toute l'information requise, permettrait de minimiser cette variabilité-là dans le temps,
c'est ce qu'on a comme position.
M. Julien : Parfait. Donc, juste pour être sûr, là, de bien
comprendre, c'est : si la période de cinq ans avec le gel, pour vous, ça vous convient, a posteriori peut-être
qu'elle est un peu trop longue, considérant que... là, je me projette, mais
je n'ai pas le gel au début, donc j'assume une partie du risque, qui pourrait
être bénéfique, mais qui pourrait être négatif puisque, bon, historique.
Mais vous préférez cette situation-là à une situation qui, sur une période, admettons, de cinq ans,
a effectivement donné l'inflation. Si on prend les cinq dernières
années, l'inflation, 5,2 %, la
hausse tarifaire, 5,6 %, ça s'y rapproche, mais la première année,
c'était peut-être deux fois l'inflation, puis, les années subséquentes, trois
quarts d'inflation. Vous préférez donc quelque
chose qui serait plus lissé avec corrections périodiques. Pour vos membres, ce
serait préférable?
Mme Bouffard (Isabelle) : Bien,
on trouve ça intéressant.
M. Julien : Intéressant. O.K.
Le 500 millions, ça, de remise, ça fait l'affaire de vos membres?
M. Doyon (Paul) : Bien sûr,
c'est une bonne nouvelle.
M. Julien : Pardon?
M. Doyon (Paul) : C'est une
bonne nouvelle.
M. Julien :
C'est une bonne nouvelle. Parfait. Maintenant, vous, vous participez... bon an,
mal an, vous participiez quand même
aux hausses tarifaires. Le fait qu'ils soient dorénavant sur une période plus
longue, est-ce que ça a des enjeux pour vous?
Mme Bouffard (Isabelle) : Bien,
écoutez...
Le Président (M. Lemay) :
Mme Bouffard.
Mme Bouffard
(Isabelle) : Excusez-moi. Un
dossier tarifaire, c'est sûr que ça nécessite du travail. Nous, on y a
toujours participé pleinement, ça fait cinq ans qu'on participe davantage au
dossier tarifaire. Parce qu'il y a eu des gros changements, notamment dans
l'élaboration de certains tarifs, là, donc c'est important que la clientèle
agricole soit là. Puis, tu sais, pourquoi on
y va, là, c'est important de la savoir, c'est que la clientèle agricole a des
particularités, puis on veut s'assurer que ce soit pris en compte dans
l'élaboration des tarifs.
Donc, nous,
là-dessus, c'est de dire : Bien, écoutez, on va y participer pleinement,
puis, que ce soit dans trois ans, on
va y participer pleinement aussi, mais pour ça il va falloir avoir l'ensemble
de la documentation requise pour faire un bon dossier tarifaire.
M. Julien : Quand vous
mentionnez la possibilité, puis je l'ai entendu beaucoup, d'ailleurs ça m'amène
des réflexions, là, la possibilité d'un choc
tarifaire, par exemple, dans cinq ans... puis je le sais, que le passé ne peut
pas être garant du futur, là, toutes
choses étant égales par ailleurs, mais quand même, sur une très longue période,
quand on regarde le passé, là, est-ce qu'effectivement il y aurait eu un
choc tarifaire si on avait appliqué ce mécanisme-là dans n'importe quelle
période de cinq ans dans le passé?
Le Président (M. Lemay) : Oui,
M. Tougas.
• (12 h 20) •
M. Tougas
(David) : Oui. Bien, on ne l'a pas regardé spécifiquement. Par contre,
comme je le mentionnais tantôt, puis
c'est écrit dans notre mémoire, la variabilité des hausses tarifaires annuelles
était supérieure à l'inflation. Donc, on était sur une révision annuelle des tarifs, et,
malgré ça, on avait quand même des soubresauts dans l'historique. Donc, le
fait de les porter à cinq ans ou à trois
ans, on peut penser qu'il y a un risque que ces soubresauts-là soient un peu
plus importants, peut-être pas, il y a un risque. On est dans le
potentiel, on ne connaît pas l'avenir, mais il y a un risque.
Donc, c'est pour ça qu'on réitère notre
position. Cinq ans, on trouve ça un peu long. L'annuel, on comprend qu'il y a
beaucoup de... Ça demande beaucoup d'énergie, ces
dossiers tarifaires là. Donc, c'est pour ça que, notre position de trois
ans, bien, on la trouve équilibrée par rapport à ça.
Le Président (M. Lemay) :
Mme Bouffard, allez-y.
Mme Bouffard
(Isabelle) : Puis, tu sais,
on parle pour notre secteur d'activité, on représente les agriculteurs du Québec, mais
les marges de manoeuvre des entreprises agricoles ne sont pas très importantes. Donc,
advenant qu'une année il y aurait une croissance importante des coûts
d'électricité, pour des bonnes raisons, là, donc on doit ajuster parce qu'on est en dossier tarifaire, bien, ça peut avoir des impacts importants
pour les entreprises. Donc, nous, c'est là où on pense que, tu
sais, c'est une position mitoyenne.
Vous parlez
de cinq ans. Nous, on parle de trois ans, on n'est pas dans le... pas du tout, mais ça va permettre aux entreprises de s'ajuster, le cas échéant. S'ils ont trop payé, bien, ils auront un rabais, puis, s'il faut qu'ils
paient un petit peu plus,
bien, ce ne sera pas au bout de la cinquième année, puis nos entreprises vont
être capables de faire face à cette variation-là.
Le Président (M. Lemay) :
Parfait. M. le ministre.
M. Julien : Oui. C'est Mme Bouffard, hein? M. Doyon
également, là, vous avez mentionné dans votre
allocution : Il faudrait qu'il y ait des mesures d'efficience, là, d'Hydro-Québec,
puis après ça on parle aussi de choc tarifaire. Puis, naturellement, là, quand on a
regardé un peu les éléments qui variaient, là, le projet de loi, qu'est-ce qu'il amenait comme responsabilités de la régie...
Pour nous, la régie garde les mêmes responsabilités. On change une périodicité par
rapport à la cause tarifaire, mais on a quand même
une liste, dans le projet de loi, là, à l'article 17, de tous les éléments, en réalité,
qui devront être déposés comme information. Parce que vous avez mentionné la transparence, où on y
perdait. Quand je vois tous ces éléments-là, les résultats financiers,
les investissements, etc., là, la somme des informations remises par Hydro-Québec... Est-ce que cette information-là, selon vous, permettrait de voir venir la
prochaine cause tarifaire avec vos analyses que vous faites actuellement?
Le Président (M. Lemay) :
Alors, est-ce que c'est M. Doyon, madame... Mme Bouffard, allez-y.
Mme Bouffard
(Isabelle) : Bien, nous, là,
dans le cadre des dossiers tarifaires, on ne vous le cache pas, il y a
plein de gens avec... Tu sais, on tente de diviser le pourquoi on est
là. Nous, on regarde les effets pour les agriculteurs. Donc, il y a
des éléments, dans des causes tarifaires... Puis c'est l'objectif,
là. S'il y a des gens qui se penchent sur des domaines puis qui ont la connaissance fine, on ne va pas
dupliquer le travail, on va rendre la chose plus efficace. Donc, est-ce qu'on regarde tous les papiers tout
le temps? Il y a
certains papiers qu'on regarde plus que d'autres parce que c'est ceux qui
touchent davantage les agriculteurs.
Nous, les
papiers que vous semblez emmener, nous, selon nous, il y a
un bon bout de travail qui est fait. Est-ce
qu'il y a des éléments supplémentaires? Puis c'est là où, comme c'est peut-être
l'Union des consommateurs ou option des consommateurs qui font ce bout d'analyse là, tu sais, il faut voir, eux
autres, leurs besoins. Mais, par
rapport au travail des agriculteurs, la plupart des papiers sont
là. Nous, ce qu'on souhaite, cependant, c'est que ces documents-là... Ce qui
serait intéressant, c'est que... pas
juste au bout de la troisième année ou de la cinquième année. Est-ce qu'on peut
voir venir le coup? Est-ce qu'ils
peuvent être disponibles annuellement, pour que, quand on arrive au dossier
tarifaire, bien, plutôt que de se
taper la cuite, là, puis de travailler, là, à regarder le passé... Si
annuellement on peut faire cette analyse-là, on pense que ce serait
intéressant.
Le Président (M. Lemay) : M. le
ministre.
M. Julien :
Mais je comprends quand même que, dans le projet de loi, c'est prévu que tous
ces documents-là soient déposés sur
base annuelle. Naturellement, c'est le principe de la cause tarifaire qui, à
l'aide de tous ces documents-là, se fait actuellement sur base annuelle.
Dorénavant, on va la faire aux cinq ans, mais tout... Puis ça, il y a toujours
la notion de transparence. On
dit : La transparence, la transparence. L'information est là, elle est
rendue publique, elle est disponible. On
vient juste dire qu'on va venir fixer, dans un principe de cause tarifaire, les
tarifs aux cinq ans, puis, dans l'intervalle, en réalité, on va appliquer l'inflation, qui semble être corollaire de
ce qu'on a vu dans le passé, qui pourrait effectivement avoir un écart
mais qui, dans le passé... Quand je regarde le cinq ans par cinq ans, là, on
n'aurait pas eu de choc, là, c'est-à-dire
c'est toujours à la marge, là. Puis je retourne en arrière, quelqu'un pourrait
me dire : Oui, mais ce n'est pas garant du futur, mais on n'en a
pas vu, de potentiel de choc tarifaire, dans le passé.
Le Président (M. Lemay) :
Allez-y, Mme Bouffard.
Mme Bouffard
(Isabelle) : Mais, tu sais, M. le ministre, là, vous travaillez
présentement à mettre en place le PECC, là,
le Plan d'électrification et de changements climatiques. Moi, je ne présume
pas, mais c'est quelque chose d'intéressant qui est en route, là, puis ça peut changer la
donne passablement sur la consommation d'électricité au Québec. Donc, cet
élément-là, pour nous, là, de dire :
Est-ce que le passé est garant du futur, est-ce que cinq ans, c'est
suffisamment long, est-ce que ça
devrait être trois ans?, moi, je fais juste vous dire qu'avec ce que vous êtes
en train de développer et mettre en place avec le gouvernement du Québec, le PECC, là, ça peut changer quand même
pas mal passablement, là, en tout cas c'est l'impression qu'on a, la consommation d'électricité au Québec. Donc,
d'aller sur des longues périodes, avec les initiatives que vous avez en place, je vous dirais : On
va regarder aller, puis c'est là où on voit vraiment un avantage à rapetisser
ce délai-là.
M. Julien :
Ce délai-là. Je pense qu'il y a un de mes collègues...
Le Président
(M. Lemay) : Oui, parfait. M. le député de Dubuc, pour environ
deux minutes.
M. Tremblay : Oui, rapidement. Merci,
M. le Président. Merci pour l'engagement, merci pour la contribution à la réflexion.
J'aimerais
savoir, on a récemment fait des visites, entre autres à Brossard, sur
des fermes dans la cadre de la CAPERN, on
parle d'industriel, de virage technologique au
niveau des fermes : Est-ce que
vous y voyez l'opportunité, en tout
cas, du ministre, du gouvernement,
d'avec davantage de prévisibilité... Est-ce que vous y voyez un apport au
projet puis aux ambitions innovantes
de vos membres, des fermes qui travaillent, justement, pour davantage
d'économies, en ce sens-là?
Le Président
(M. Lemay) : M. Doyon.
M. Doyon (Paul) : C'est
sûr que plus on peut créer de la prévisibilité pour les investissements agricoles, d'autres investissements aussi, mais les investissements agricoles entre autres, c'est quelque chose qui est intéressant. Mais ça reste que vous avez devant vous, là, des gens qui vivent avec le climat, avec
la température à tous les jours, et les consommations d'électricité, comment que... On chauffe beaucoup
à l'électricité au Québec,
on peut avoir des surprises, là. Ça fait que c'est là-dedans qu'on
dit : Bien, il faut y aller plus prudemment, là.
Mme Bouffard (Isabelle) : L'audience, il faut qu'elle se fasse... Selon
nous, l'audience doit se faire aux trois ans. Ça fait le bout de dire : Est-ce que les entreprises vont... Est-ce
qu'il va y avoir... Il va y avoir moins de variabilité, c'est intéressant, mais est-ce que c'est le juste coût?
Puis c'est l'objectif de la législation aussi, qu'on paie le juste coût. Bien,
c'est là où il faut aller vérifier, là.
Le
Président (M. Lemay) :
Parfait. C'est bon, merci. Ceci complète la période avec la partie
gouvernementale. Je cède maintenant la parole au député de Laval-des-Rapides
pour sa période d'échange.
M. Polo : Merci
beaucoup, M. le Président. Merci à vous tous, merci de vous être déplacés, d'avoir soumis votre
mémoire.
Je
vais commencer par quelques questions, effectivement, sur votre mémoire, au niveau,
là, de la section 3, je pense, c'est
à la page 9, Régie de
l'énergie. Au dernier paragraphe,
vous mentionnez que «l'utilisation de l'indice des prix à la consommation
pour indexer les prix des tarifs d'électricité ne garantit pas nécessairement
aux Québécois l'accès à un tarif d'électricité au meilleur coût possible». Puis, on s'entend, le travail de la régie,
malgré ce qu'Hydro-Québec est venue nous dire, que ça coûte des millions, puis que ça prend du temps, puis que ça mobilise
des grandes ressources, etc., le travail de la régie comme chien de
garde, c'est d'aboutir, en écoutant non seulement les demandes d'Hydro-Québec,
mais en écoutant également
les demandes des différents types de clients d'Hydro-Québec, c'est d'arriver à un juste prix.
Et
là, à travers ce projet de loi là, le ministre martèle depuis mardi... en fait,
depuis le dépôt du projet de loi, que le
facteur de prévisibilité va permettre aux familles, va permettre aux
entreprises, va permettre aux consommateurs d'Hydro-Québec d'avoir, si
je peux dire, une meilleure... non seulement une prévisibilité, mais d'être
rassurés quant aux tarifs qu'ils vont payer,
puisqu'ils vont être indexés sur le prix des biens à la consommation. Vous,
vous dites ici, noir sur blanc : Ça ne garantit pas l'atteinte du
juste prix. Pouvez-vous élaborer sur ça, s'il vous plaît?
Le Président
(M. Lemay) : Oui, est-ce que c'est M. Tougas? C'est ça?
M. Tougas
(David) : Oui, je peux y
aller. En fait, on l'a bien résumé tantôt dans les discussions, c'est que le
fait... On est à l'aise avec le
premier cinq ans justement à cause du gel tarifaire la première année. Donc,
on évalue que l'inflation, ce n'est
pas l'indice ou... oui, l'indice qu'il faut utiliser pour nécessairement
indexer les prix des tarifs annuellement. Donc, ce qu'on dit dans le
mémoire, c'est que, oui, pour le premier cinq ans, on est prêts à, entre
guillemets, jouer le jeu parce qu'il y a un
gel tarifaire la première année. Par la suite, on veut qu'il y ait des
mécanismes en place pour inciter le distributeur, Hydro-Québec, à faire
des gains d'efficience puis que ces gains d'efficience là se retrouvent dans
les tarifs.
M. Polo :
J'aimerais savoir si, parmi vous, il y a un économiste. Êtes-vous économiste de
formation, monsieur?
M. Tougas
(David) : Je pourrais dire ça. Agroéconomiste, oui.
M. Polo :
Oui? Parfait. En tant qu'économiste, pouvez-vous faire les prévisions sur
l'indice des prix à la consommation sur un horizon de cinq ans?
M. Tougas
(David) : Non, c'est extrêmement difficile. Non.
M. Polo :
C'est extrêmement difficile.
M. Tougas
(David) : Je pense qu'il n'y a personne qui se risque sur une aussi
longue période.
M. Polo :
Voilà. Au-delà de 12 à 18 mois, gros maximum...
M. Tougas
(David) : Oui.
• (12 h 30) •
M. Polo : ...c'est presque impossible. Donc, la prévisibilité sur un horizon de 60 mois, comme le dit le ministre,
à part les cinq premières années, comme vous l'avez dit, c'est caduc.
M. Tougas
(David) : Bien, la
prévisibilité est seulement liée au fait qu'on va indexer à l'inflation. Donc,
on sait sur quoi on va indexer. Comme
on le mentionnait tantôt, l'aspect variabilité... L'inflation peut varier
passablement d'une année à l'autre, et donc cet élément-là n'est pas
tenu en compte nécessairement en indexant à l'inflation.
M. Polo :
Donc, pour une famille qui a des emplois stables, qui essaie de se budgéter
année après année, c'est impossible de
prévoir sur un horizon de cinq ans, à part peut-être les cinq premières
années, et de dire : Bien, on sait que les prix vont demeurer stables parce
qu'ils sont collés à l'inflation.
C'est ce que vous êtes en train de nous dire. Et soit une famille, soit
une entreprise, soit un client industriel ou peu importe.
M. Tougas
(David) : Bien, je pense que, dans le projet de loi, on n'a pas parlé
de stabilité, là, on parlait de prévisibilité.
Il y a quand même une nuance, mais, oui, effectivement, comme on vient de le dire, l'inflation est difficile à prévoir
sur une plus longue période.
Mme Bouffard
(Isabelle) : Bien, je veux juste...
Le Président (M. Lemay) :
Mme Bouffard.
Mme Bouffard (Isabelle) : Tu sais, moi, je veux juste vous dire, là :
Il n'y a rien de parfait dans la vie. L'élément d'aller à l'IPC amène
moins de variabilité. Ça, dans les dernières années... Puis, tu sais, le passé
est-u garant du futur? Écoutez, si on le savait puis si on avait su que le prix
du baril de pétrole, ce serait à 145 $ en 2008, on serait tous riches, tu sais. Ça fait que cet élément-là de savoir ce qui
s'en vient, c'est toujours difficile. Il y en a qui s'essaient, puis ça,
bon, chacun ses choix. Mais ce qu'on
constate dans le passé... puis ce n'est pas pour défendre, là, mais c'est qu'il y a
eu moins de variabilité, puis
là on n'est pas dans la prévisibilité, avec l'IPC.
Mais
on revient avec notre trois ans, là. Moi, je vous le dis, le trois ans, pour
nous, ça prend... puis c'est une audience publique, là.
Le Président
(M. Lemay) : ...Mme Bouffard. M. le député de
Laval-des-Rapides, allez-y.
M. Polo :
J'ai une autre question. C'est parce que j'ai moins de temps que le ministre...
Mme Bouffard
(Isabelle) : Excusez-moi.
M. Polo :
...donc c'est pour ça que... Je vous amène au début de la page 11. Parce
que vous avez répondu à la question du
ministre : Qu'est-ce que vous pensez du 500 millions de dollars qui
va être remboursé en 2020? Et je pense que c'est monsieur qui a
dit : Ah! c'est une bonne affaire pour nos membres. En effet.
Mais
ce que je trouve ici particulier, puis c'est ce que j'ai donné hier comme
exemple, notamment dans une entrevue de radio... L'anniversaire de mon garçon,
moi, c'est le 29 juin... le 29 octobre, excusez, et, si je lui donne
un cadeau demain, là, il sait bien que
je suis... en fait, je suis en train de devancer le cadeau que je lui aurais de
toute façon donné le 29 octobre.
On s'entend. Donc, en réalité, ça peut créer un certain élément de surprise,
mais, pour lui, même à 10 ans, il n'est pas dupe, il comprend que
c'est son cadeau qui est juste devancé de cinq semaines.
Je
vous donne cet exemple-là pour illustrer ce que vous dites ici, dans vos
propres propos. C'est que le mécanisme de
remboursement appliqué à partir de 2017... Le montant de la remise de
500 millions de dollars annoncée était déjà destiné à être remboursé aux consommateurs d'électricité
au cours des prochaines années, selon les mécanismes actuels de fixation des
tarifs. Donc, d'essayer de se lancer des fleurs en disant : On redonne
500 millions de dollars aux Québécois, comme si c'était un élément nouveau, en fait, il n'y a pas
d'élément nouveau à part qu'ils vont le recevoir en 2020 plutôt qu'au cours
des trois à cinq prochaines années. On s'entend sur ça.
Le Président
(M. Lemay) : M. Doyon.
M. Doyon
(Paul) : Oui, oui.
M. Polo :
Parfait. Vous avez évoqué avec le ministre, là, le concept de choc tarifaire,
notamment en parlant du fait qu'au-delà des
cinq premières années il est difficile, à ce moment-là, d'anticiper... En fait,
vous dites ici : «...la fixation de la fréquence de ces dossiers
aux cinq ans pourrait occasionner un choc tarifaire — je
sais que le ministre n'était pas d'accord
avec l'utilisation du mot "choc tarifaire" parce que je l'utilise
également — dans le
cas où la régie aurait à corriger un
écart de rendement par rapport à l'inflation qui se serait accumulé durant
cette période.» Et, vous, ce que vous proposez, notamment, c'est de raccourcir cette période à trois ans, et notamment
vous proposez que la régie conserve une bonne partie de ses pouvoirs pour pouvoir exiger de la part
d'Hydro-Québec, en tant que monopole d'État, à déposer un dossier tarifaire
en bonne et due forme et à continuer d'avoir
des audiences, donc, non seulement auprès d'Hydro-Québec, mais auprès des
différents types de consommateurs. C'est ce que vous demandez.
Le Président (M. Lemay) :
M. Doyon.
M. Doyon
(Paul) : Oui. Le trois ans,
là, c'est facilement explicable, dans le sens que, la première année, s'il se
passe quelque chose, bien, on a la deuxième année pour voir comment
que ça va... si ça se continue ou si ça se résorbe, et là, dès la
troisième année, bien là, c'est là qu'on intervient.
Le Président (M. Lemay) :
Mme Bouffard, vous voulez ajouter quelque chose.
M. Polo : Allez-y, allez-y.
Mme Bouffard (Isabelle) : Je
sais que j'embarque dans votre temps à vous, là, mais...
M. Polo : Non, non, allez-y,
allez-y.
Mme Bouffard
(Isabelle) : Tu sais, pour
nous, la régie, là, c'est une mémoire institutionnelle, là. C'est important, là, c'est... Elle est là de
façon pérenne. Elle amène de l'intelligence, elle amène du savoir. Donc, c'est important
qu'elle conserve ses pouvoirs.
Est-ce qu'on doit moduler les façons de faire pour
emmener de l'efficience dans le système? Bien, regardez, nous, on n'est
pas fermés, mais c'est important qu'elle conserve ses pouvoirs. Ça, pour l'UPA,
là, on est là.
M. Polo :
En effet. Un autre élément qui nous a été rapporté hier par M. Sylvain
Audette, de la Chaire de recherche en
gestion du secteur de l'énergie, c'est qu'il est faux de prétendre qu'il n'y
aura plus de trop-perçus avec le projet de loi n° 34 parce que, tout
simplement, les trop-perçus seront cachés ou invisibles pendant une période de
cinq ans avec le projet de loi. Qu'en dites-vous?
Le Président (M. Lemay) :
M. Tougas, allez-y.
M. Tougas
(David) : Oui, merci. En
fait, notre mémoire, le fait de... la combinaison d'avoir une période plus
courte, donc aux trois ans, avec, on
l'indique, là, des facteurs quand
même... de garder des facteurs
d'efficience autant dans la fixation que dans l'indexation entre la
période de trois ans, bien, nous, on pense que ça va corriger ce problème-là.
M. Polo : Mais sur cinq ans? Restons sur le cinq ans qui
est proposé dans le projet de loi n° 34. Sur cinq ans, est-ce que vous considérez qu'il y a un manque de transparence,
disons-le comme ça?
M. Tougas (David) : Moi, je ne
serais pas prêt à me prononcer là-dessus, là, mais...
Mme Bouffard (Isabelle) : Bien,
manque de transparence...
Le Président (M. Lemay) :
Mme Bouffard.
Mme Bouffard (Isabelle) : Il
faut qu'on ait le matériel pour être en mesure de regarder s'il y a des trop-perçus.
Il existe des mécanismes. Ces mécanismes-là, est-ce qu'ils peuvent fonctionner?
Il y a plein de monde intelligent, Hydro-Québec,
ils ont une boîte avec plein de monde intelligent, la Régie de l'énergie
également, donc je suis certaine qu'on peut
s'asseoir puis trouver des mécanismes afin de s'assurer que, s'il y a des
trop-perçus de la société d'État, les contribuables puis les consommateurs, ça revienne dans leurs
poches, là. Moi, je considère que c'est possible de le faire. Il faut juste
s'asseoir, boire du café, puis trouver les solutions.
M. Polo : Parfait.
Le Président (M. Lemay) : M. le
député.
M. Polo :
À la page 12 de votre mémoire, au milieu de la page, l'avant-dernier
paragraphe de la section 4, vous dites :
«L'UPA juge que la fixation des tarifs par la régie à une fréquence de trois
ans combinée à l'application d'un mécanisme favorisant les gains d'efficience contribueront certainement à favoriser
la transparence et à assurer une fourniture d'électricité au meilleur coût
possible.» Donc, je vais dans la même... je poursuis votre raisonnement, en
fait, vos propos, madame, mais je replace ces propos-là dans un contexte de
cinq ans et donc j'interprète le contraire. C'est qu'actuellement, tel que
le projet de loi est rédigé, sur cinq ans,
avec les pouvoirs qu'on retire à la Régie de l'énergie pour pouvoir appliquer
un vrai mécanisme de contrôle auprès d'Hydro-Québec, il y a clairement
un manque de transparence.
Le Président (M. Lemay) :
Mme Bouffard.
Mme Bouffard
(Isabelle) : Nous, ce qu'on
dit, c'est... Puis j'entends que le projet de loi ait ça. Je comprends que
vous allez travailler article par article,
puis il va y avoir des travaux parlementaires qui vont suivre la commission.
Nous, ce qu'on demande, c'est que ce soit trois ans pour atténuer les
chocs tarifaires, puis mettre des mécanismes en place afin que, s'il y a des trop-perçus, ils soient captés,
puis de s'assurer que la transparence, à travers les documents qui seront remis
annuellement à la régie, soit là. Donc,
c'est ça qu'on vous demande, puis que ça apparaisse dans le projet de loi.
Donc, après ça, c'est dans vos mains, ça vous appartient, mais c'est
notre demande en ce moment.
Le Président (M. Lemay) : Merci
beaucoup. Ceci complète la période d'échange avec la partie de l'opposition
officielle. Je cède maintenant la parole au député de René-Lévesque.
M. Ouellet : Merci, M. le Président. Considérant le temps qui
m'est alloué, est-ce qu'il est possible de récupérer le temps de la
deuxième opposition?
Le Président (M. Lemay) : Oui,
est-ce qu'il y a consentement?
Des voix : Consentement.
Le Président (M. Lemay) :
Consentement. Allez-y, M. le député.
M. Ouellet : Merci beaucoup, M. le Président. Donc, à mon tour
de vous saluer. Juste d'entrée de jeu, j'aimerais savoir... Il s'est signé plusieurs ententes à
l'international, et je crois comprendre, dans l'immédiat, que ça a eu un impact
du côté de l'UPA, chez les producteurs, pour
l'avenir. Donc, est-ce qu'il est faux de prétendre que, dans le nouveau
contexte actuel, il y a eu des
pertes, dans le secteur agricole, qui doivent être compensées par une façon
différente de travailler ou, du moins, d'augmenter ces revenus d'une
autre façon, telle que vous le connaissiez par le passé?
Le Président (M. Lemay) :
M. Doyon.
M. Doyon
(Paul) : Bien,
effectivement, il y a eu des ententes de signées avec... des ententes
commerciales qui ont fait en sorte
qu'ils ont fragilisé certains secteurs de notre agriculture, et on se fie sur
des institutions comme Hydro-Québec, comme
la Régie de l'énergie pour faire en sorte que les producteurs agricoles, les
fermes ne paient pas leur énergie trop cher.
M. Ouellet : Donc, si je comprends bien, l'industrie, ce
qu'elle a besoin, ce n'est pas tant de la prévisibilité, c'est surtout
des tarifs plus bas?
M. Doyon (Paul) : Les deux.
M. Ouellet : Une prévisibilité
sur un an serait suffisante pour vous?
M. Doyon
(Paul) : Bien, nous autres,
on dit que... Bien, un an, c'est ce qu'on connaît déjà. Là, il y a une
suggestion de cinq ans. On dit, nous autres, trois ans, ça fait que
c'est... on pense qu'à trois ans on pourrait y arriver.
M. Ouellet : Comment vos
entreprises fixent leurs tarifs, leurs prix de vente pour arriver à faire des
revenus?
Le Président (M. Lemay) :
Mme Bouffard.
• (12 h 40) •
Mme Bouffard
(Isabelle) : Tu sais, nous,
on est des preneurs de prix, là. Donc, la plupart du temps, il y a certains
secteurs où il y a de la mise en marché collective, les producteurs se sont
organisés entre eux pour se mettre ensemble pour mettre en marché leurs
produits. On est unique au Québec. Par rapport à la mise en marché, il y a la
gestion de l'offre également. Mais, de façon générale, on est des preneurs de
prix. Puis c'est là où, quand on parle de l'inflation puis qu'on est confortables avec l'inflation moins 33 %, nous, on pense que la société d'État est
capable de faire mieux que l'inflation. Elle l'a dit, elle veut être
efficiente, elle veut travailler fort, elle est capable d'être en bas. Ça fait
qu'il faut qu'elle travaille là-dessus puis
c'est là où les mécanismes qu'on souhaite qui soient mis en place puissent
attraper ces gains d'efficience là.
M. Ouellet : O.K. Vous dites que vous voulez que la société
d'État fasse mieux. Si on retourne par le passé, donc avant l'adoption de ce projet de loi là, la
fixation des tarifs chez Hydro-Québec était basée sur le coût que ça coûtait
pour Hydro-Québec de procéder à des
installations, et après ça la régie fixait ces coûts-là en fonction du coût
d'Hydro-Québec. Lorsqu'on
regarde le tableau soumis par le ministre sur la variabilité des hausses de
coûts versus l'inflation, il faut se rappeler aussi : au tournant des
années 2000, il y a le projet de La Romaine qui a commencé. Donc,
d'énormes sommes d'argent ont été
investies par la société d'État pour augmenter sa capacité de production.
Alors, des Romaines suivantes, je n'en vois pas dans les cartons d'Hydro-Québec. Donc, je présume, je ne suis pas un
devin, qu'il n'y aura pas d'investissement aussi massif dans le futur
pour ce qui est d'Hydro-Québec.
Donc,
la prétention que nous avons, c'est que la régie aurait pu, dans le futur,
considérant deux choses, l'augmentation des besoins, donc l'augmentation de la demande dans certains cas, le
retour d'ABI sur le marché, le 500 mégawatts offert en cryptomonnaie...
Bref, tout ça aurait augmenté les revenus d'Hydro-Québec, avec des dépenses
moindres. Donc, on aurait pu peut-être, même, dans certains cas, ne pas voir
aucune hausse acceptée par la régie, et donc l'inflation aurait été plus
élevée.
Donc,
ma question que j'ai pour vous : Préférez-vous les tarifs plus bas, ou,
dans ce cas-là, une prévisibilité qui est pure spéculation? Puis vous l'avez dit tout à l'heure, votre économiste
l'a dit, on n'est pas capable de se lancer dans le temps, sur cinq ans, sur qu'est-ce que sera l'inflation.
On ne le sait pas. Là, on a des tendances. On sait que ça a varié. Mais là le
ministre nous dit : On offre de la prévisibilité. Moi, je veux
savoir : L'industrie, ce qu'elle veut, est-ce que c'est de la
prévisibilité, avoir le moins de coûts possible avec le meilleur mécanisme
possible?
Le Président
(M. Lemay) : M. Doyon.
M. Tougas
(David) : Je peux...
Le Président
(M. Lemay) : M. Tougas, allez-y.
M. Tougas
(David) : Mais, en fait, peut-être qu'on se répète, là, mais, le
premier cinq ans, avec la proposition dans le projet de loi, on est à l'aise avec ce risque-là, c'est-à-dire
inflation moins 33 %. Ça nous convient, on est prêts à prendre ce risque-là. Pour l'avenir, on a des bémols. On a
de la misère, effectivement, à prévoir ce que va être le marché d'électricité, là, au Québec dans cinq ans, et l'inflation
également. Donc, c'est là qu'on dit : Bien, trois ans avec un facteur
d'efficience, là on serait prêts à vivre avec ça pour le futur.
M. Ouellet : O.K. Dites-moi si mon raisonnement est faux, puis je vais être très
bref, là. Je comprends bien que, dans
le fond, vous êtes à l'aise avec ça, et donc les gens vont fixer les prix en
fonction de cette variable-là qui est le coût. Cette année, en 2020, ça
ne coûtera pas plus cher d'électricité, mais ça va coûter plus cher dans les
années subséquentes. Est-ce qu'on pourrait
penser que l'industrie va augmenter ses prix cette année pour éviter que, par
le futur, ses prix soient plus
élevés, considérant que cette année, il n'y a pas d'augmentation de coûts
prévue pour 2020 et qu'il y a des augmentations qui pourraient être
relatives à l'inflation?
Le Président
(M. Lemay) : M. Tougas.
M. Tougas
(David) : Vous parlez d'industrie, vous faites allusion...
M. Ouellet :
À l'industrie agricole.
Le Président
(M. Lemay) : Mme Bouffard.
Mme Bouffard (Isabelle) : Je m'excuse, je ne comprends pas votre question.
C'est quoi que vous voulez savoir?
M. Ouellet : Pour fixer les prix, comme les tarifs d'énergie vont être gelés puis
qu'ils vont augmenter dans le futur, est-ce
que l'industrie ne serait pas tenue de commencer à augmenter aujourd'hui un petit peu ses prix, considérant qu'elle sait que, dans le
futur, ils vont augmenter?
Mme Bouffard (Isabelle) : Nous autres, les prix, là, c'est fixé sur la
bourse de Chicago.Tu sais, on vous le disait, on est des preneurs de prix. Ça
fait qu'à partir de là, nous, le bout de variabilité, de ne pas pouvoir
anticiper, on vit avec des changements, les changements climatiques, les aléas
climatiques, les aléas des prix. Il y a une chicane entre la Chine puis les États-Unis, on se ramasse avec une baisse de
prix. Donc, c'est sûr que le bout d'assurer une certaine stabilité dans les
prix...
Le
Président (M. Lemay) : Merci beaucoup, Mme Bouffard. Je suis
désolé, je dois vous interrompre. M. Doyon, M. Tougas,
Mme Bouffard, je vous remercie pour votre contribution à nos travaux.
La commission suspend
ses travaux jusqu'à 13 heures, où elle se réunira en séance de travail.
(Suspension de la séance à
12 h 45)
(Reprise à 15 h 01)
La Présidente (Mme Weil) : À
l'ordre, s'il vous plaît! La Commission de
l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources naturelles
reprend ses travaux. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien
vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.
Cet
après-midi, nous entendrons l'Association québécoise de la production d'énergie renouvelable, l'Institut de
recherche et d'informations
socioéconomiques, la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante et le
Regroupement des organismes environnementaux en énergie.
Alors, monsieur... Donc, nous avons avec nous...
Association québécoise de la production
d'énergie renouvelable (AQPER)
M. Samray (Jean-François) :
Samray.
La
Présidente (Mme Weil) :
...M. Jean-François Samray. Alors, à vous la parole, M. Samray, pour
une présentation de 10 minutes.
M. Samray
(Jean-François) : Oui. Merci, Mme la Présidente. Mmes, MM. les députés, les attachés et les sous-ministres,
bonjour.
Donc, avant de commencer, j'ai porté à
l'attention du secrétaire de la commission que nous avons constaté trois petites coquilles, dans le délai... Donc, à
la page 7, nous avons retiré «un suivi de correction». À la page 9,
la dernière phrase se termine... le
point va après «appel d'offres», hein? Et, à la dernière phrase de la
page 31 et début de page 32, on met le point après «appel
d'offres» et on biffe le reste, hein?
C'est un peu comme vos projets de loi, c'est la même
chose, là. Donc, on y va.
Donc, les membres du conseil d'administration de
l'AQPER tiennent à saluer d'entrée de jeu le maintien de la mission de la Régie de l'énergie dans le projet de loi n° 34, une entité neutre et spécialisée dont la tâche
est d'entendre toutes les parties,
d'analyser les informations et les expertises reçues et d'en tirer les
conclusions qui s'imposent. Lors des débats parlementaires de 1996, le consensus
sur la nécessité de recourir à des équipes d'experts neutres s'est imposé.
Notre association se réjouit ainsi de constater
qu'aucune modification n'a été apportée aux procédures d'achat d'électricité
postpatrimoniale ou à la compétence de la régie dans ce domaine.
Nous appuyons également le maintien de la reconnaissance
d'un statut particulier pour les approvisionnements servant à combler les besoins des réseaux autonomes. Les 23 agglomérations et villages de ce réseau sont des entités politiques
distinctes et sont disséminés sur un immense
territoire. Chaque cas est un cas d'espèce. Il ne saurait y
avoir de modèle unique comme sur le réseau continental.
Parlons maintenant
de la modification qui a pour effet de retirer au distributeur l'obligation
de se faire approuver ses programmes
commerciaux par la régie. Dans le cas de marchés dotés de monopole, le rôle
d'un régulateur est de s'assurer que
les programmes mis en place procurent la plus grande efficience économique.
C'est exactement le rôle qu'a joué la régie.
Après avoir analysé les dernières causes
tarifaires, on constate que la portion des frais reliés au remboursement des intervenants est insignifiante, de l'ordre du millième de pour
cent par rapport à l'ensemble des charges de la cause tarifaire. C'est fort peu pour avoir un débat démocratique sain permettant à l'ensemble des parties prenantes de comprendre les tenants
et aboutissants des tarifs qu'ils auraient à payer.
Autre exemple,
le projet GDP Affaires, actuellement entendu par la régie, vise à instaurer un mécanisme
d'effacement de la demande de
puissance auprès de la clientèle d'affaires en échange d'un support monétaire.
Selon la réponse, HQD modulera ses
achats de court terme en puissance. Or, une fois déréglementé, il sera facile pour
le distributeur de passer une entente
gré à gré avec son entreprise soeur, Hydro-Québec
Production, dans le cadre d'un programme
commercial. Pareille situation est préjudiciable pour les membres de l'AQPER ainsi
que pour les consommateurs puisqu'elle évacue toute notion de compétition garante
de l'obtention du meilleur service au meilleur prix.
L'AQPER recommande donc au législateur de
retirer l'article 12 du projet de loi, ce dernier ayant des impacts
négatifs beaucoup plus importants que les bénéfices qui pourraient en
bénéficier.
L'article 8
du projet introduit les articles 48.2 à 48.6 dans la Loi sur la Régie.
L'AQPER est d'avis que le législateur se
donne une marge de manoeuvre salutaire en ce qui a trait aux circonstances
exceptionnelles qui pourraient affecter le distributeur. Il importe au gouvernement de porter une attention particulière aux dépenses
liées au contrôle de la végétation ou
au remplacement des équipements de distribution, tout retard
pouvant avoir des conséquences douloureuses pour le consommateur.
Néanmoins,
soyons bien clairs, et pour les raisons qu'elle a expliquées dans son mémoire,
l'AQPER est d'avis que le délai de cinq ans est beaucoup trop long et
recommande de ramener cet intervalle à deux ans.
L'AQPER est également
d'avis que la fixation de nouveaux tarifs devrait être une prérogative qui
demeure à la régie suite à une
audience distincte. Cette recommandation prend pour exemple le tarif... la demande de
modifier... la tentative de modification du tarif de mesurage net au réseau intégré menée par le distributeur
lors de la cause tarifaire 2018-2019. Suite
aux arguments mis de l'avant par divers intervenants, dont notre association,
la régie a été d'avis que la fixation dudit tarif s'avère suffisamment importante pour faire l'objet d'une cause distincte. Elle a
donc enjoint le distributeur d'agir en ce sens.
Certes, le gouvernement, par l'introduction de l'article 48.5,
pourra demander toute information requise par le distributeur pour analyser tout rapport lui demandant une modification tarifaire. D'apparence rassurante, cette disposition occulte toutefois
une réalité bien présente : l'asymétrie de l'information entre le
distributeur et les équipes du MERN, combinée à un déséquilibre du
nombre et de l'expertise fine. Cette réalité est bien présente, et nous l'avons
vécue lors de récentes discussions ou négociations relatives aux baux des forces
hydrauliques. Notre association a dû colliger, compiler rendre
disponibles certaines informations détenues par Hydro-Québec mais non partagées
par celle-ci avec le ministère.
Pour cette raison, l'AQPER recommande fortement
au législateur de retirer l'article 48.4 du projet.
La
conjonction des articles 8 et 11 du projet de loi permettent au
distributeur de restructurer son réseau d'unidirectionnel à bidirectionnel, par exemple, soit un réseau dans
lequel le client retire et injecte de l'électricité à des conditions qui
pourraient ne pas être les plus
profitables pour l'ensemble de la société québécoise. Hydro-Québec est, certes,
le vaisseau amiral de l'économie
québécoise, elle n'en constitue pas pour autant l'ensemble de la flotte. La
théorie économique est unanime sur le manque d'innovation propre aux
monopoles naturels, ce qui est le fondement du besoin d'un régulateur économique.
La volonté du
distributeur à introduire un tarif dissuasif pour les clients résidentiels
branchés au réseau principal faisant
de l'autoproduction, ainsi que son intérêt à se doter d'un mécanisme ou d'un
programme lui permettant d'avoir recours à l'électricité emmagasinée dans les batteries des autos électriques, ne
peut se faire en catimini. Pour être porteurs de progrès social, ces débats ont besoin de transparence dans
un environnement neutre, un environnement où des experts internationaux viendront présenter leur évaluation de la
situation, des expertises vécues sur d'autres marchés et des avenues
envisageables pour répondre aux enjeux de la distribution électrique de
demain.
L'AQPER est
d'avis que le Québec n'a pas besoin de moins de régie, mais, bien au contraire,
de plus de régie pour débattre des
questions fondamentales pour les décennies à venir. C'est pourquoi elle est
d'avis que le législateur serait fort avisé de retirer l'article 11
du projet de loi n° 34.
Ne faisant
aucune mention au plan directeur de Transition énergétique Québec, le projet de
loi conserve à la régie le devoir de
suivre l'évolution dudit plan et d'en approuver toute modification ou mise à
jour. La régie doit également donner son avis sur la capacité du plan directeur
d'atteindre les cibles fixées par le gouvernement ainsi que sur les programmes
qui sont sous la responsabilité dudit distributeur d'énergie, donc HQD.
Or, la régie pourra-t-elle s'acquitter de cette
responsabilité si elle n'a pas droit de regard sur les programmes commerciaux du distributeur? L'article 17 du
projet de loi introduit, certes, une obligation de présenter une liste de suivi
des interventions en efficacité énergétique,
des coûts liés à TEQ, mais une telle approche ne permet aucunement de
questionner les actions et programmes ou de demander un redressement, si
besoin est.
C'est pourquoi l'AQPER est d'avis que le dépôt
d'une cause tarifaire complète à intervalles de cinq ans s'avère beaucoup trop espacé pour faire la lumière sur
l'efficacité de différentes actions menées par le distributeur, notamment en
matière de programmes commerciaux ou
d'investissement. Une telle démarche placerait la régie devant un fait accompli
et pour lequel le coût de sortie pourrait s'avérer prohibitif. L'AQPER
recommande au législateur de ramener cet écart à deux ans.
Finalement,
l'AQPER est convaincue que, dans sa volonté d'instaurer une réforme simplifiant
l'établissement des tarifs, le
gouvernement du Québec a cherché à éliminer les calculs rodés au fil des années
et non à éliminer des débats lourds de
conséquences pour lesquels l'audition d'experts internationaux est une
nécessité. Elle croit également que le législateur cherche à utiliser toute l'expertise de ce
tribunal administratif là où cela crée de la valeur, la preuve en est que le
législateur a jugé que le Québec
serait mieux servi en laissant à la Régie de l'énergie, une instance neutre, le
soin de gérer les appels d'offres. Mme la Présidente, nous avons
terminé.
• (15 h 10) •
La Présidente (Mme Weil) :
Merci. Merci beaucoup, M. Samray, pour votre exposé. Nous allons
maintenant commencer la période d'échange. M. le ministre, la parole est à
vous.
M. Julien :
Oui, merci, Mme la Présidente. M. Samray, grand plaisir de vous revoir.
Merci pour votre énoncé et votre
analyse, c'est très apprécié. D'entrée de jeu, vous avez mentionné, là, assez
rapidement dans votre allocution, la nature insignifiante des frais...
je ne sais pas si c'était «insignifiante» ou bien très peu élevés en
pourcentage, des frais liés au processus de
cause tarifaire. Pouvez-vous aller plus loin sur le volume ou sur la hauteur de
ces frais et pourquoi ils seraient, selon vous, insignifiants ou... Ce
n'est pas le bon terme, là, c'est très...
M. Samray
(Jean-François) : Bien,
écoutez, on a fait, dans notre mémoire... il faut que je retrouve la page, mais
nous avons, à la figure 2, si je ne
m'abuse, le tableau où on a pris l'ensemble des frais qui ont été demandés et
alloués par la régie. Et on a pris ce
montant par rapport à l'ampleur de la cause, et ça nous donne le ratio qui est
dans les dix-millièmes de pour cent.
Et on s'est dit que... Bien, disons qu'Hydro-Québec a une plus grosse équipe.
Il faut préparer les dossiers. Donc, multiplions
ça par 10. On arrive quand même à quelque chose d'insignifiant sur l'ensemble
de la cause tarifaire. Et, si on enlève le coût des achats d'électricité et le
coût des ressources humaines, on ramène ça, bien là, on arrive dans des
dixièmes de pour cent.
Et, pour l'AQPER, je pense que la démocratie québécoise
ne peut pas faire le frais d'économie d'un principe fondamental de la démocratie, c'est-à-dire le débat ouvert et l'accès
aux chiffres. C'est la raison pour laquelle on se dit que toute hausse tarifaire fait l'objet de
différents éditoriaux, de différents questionnements, et donc, pour ça, on
pense que c'est important que les causes soient entendues.
M. Julien :
Parfait. Depuis les dernières journées, on a eu l'occasion de discuter avec
plusieurs, plusieurs groupes. Naturellement, là, la volonté du
gouvernement, à l'intérieur du projet de loi... il y a certains aspects, mais
on veut une simplification du processus. On
veut une prévisibilité ou une stabilité, le cas échéant, des hausses dans le
temps. Je le réitère, là, parce que
j'aimerais, là... Puis je me répète, mais on prend des blocs de cinq ans dans
les dernières années. Comme par exemple
les cinq dernières années, la hausse à l'inflation a été de 5,2 %, la
hausse tarifaire a été de 5,6 %. Mais effectivement, là, quand on prend une à une, on voit que ce n'est
pas nécessairement... la hausse, et l'inflation, n'est pas parfaitement
corrélée. Mais, cinq ans par cinq ans, on voit une corrélation un peu
supérieure, dans les 15 dernières années, que l'inflation.
Donc, ce
qu'on vient faire, nous autres, c'est augmenter la période de temps, que vous
suggérez, vous, qui serait peut-être
mieux à deux ans, à cinq ans, avec un gel première année. C'est-à-dire qu'un
gel, inflation... puis on va venir faire une cause tarifaire qui serait sur base annuelle,
avec des frais, somme toute, que vous qualifiez de non importants, mais,
pour nous, c'est une simplification, une
stabilité, dans l'évolution des tarifs, qui nous apparaît opportune, opportune
pour la clientèle. Naturellement, on
parle de la clientèle résidentielle mais industrielle, institutionnelle. Cette
stabilité-là, est-ce qu'elle a de la valeur pour vous?
M. Samray (Jean-François) : Bien, écoutez, je pense que, les dernières trois
ou quatre décennies, on a vu, au Québec, arriver... Pour obtenir une cible... d'avoir des coûts les moins... les
augmentations les plus faibles possible, il y a eu du travail qui a été fait chez Hydro-Québec. Et Vest arrivé
des retards d'investissement sur certains enjeux. Et est arrivée, bang! une
crise, ça a été le verglas, ça a été
d'autres éléments. Et il a dû y avoir des programmes de rattrapage et c'est au
courant de ces années-là où on a vu
des sauts de 6 %, 7 %, et par la suite, une fois que ces
programmes-là ont été terminés, ça a été ramené plus ou moins à un écart
lié avec l'inflation.
Mais,
pour nous, je pense que ce qui est important, c'est la prévisibilité, mais
c'est également la compréhension par le public. Et de dire que c'est
l'inflation aujourd'hui... puis je pense que c'est également la notion,
d'abord, pour le citoyen, de payer le
juste prix. Et dans le juste prix, il y a un ensemble de facteurs. Et, si on
fait les causes aux cinq années et si on ajoute les éléments de retirer certains investissements, de les faire
aux cinq ans... Bien, tout distributeur, qu'il soit gazier, électrique, a une part de ses tarifs qui est fixée
par la rémunération des actifs qui sont possédés. Donc, si on me donne carte
blanche pendant cinq ans pour faire
installer tout ce que je veux et que je n'ai plus à le présenter, je me
présente cinq ans après devant la
régie, et, voyez, mes actifs sur rémunération ont augmenté de 5 %,
10 %, 15 %, 20 %, 30 %, 35 % depuis la dernière cause. Et j'ai eu beaucoup d'années
pour les installer et, ce faisant, quand je reviens devant la nouvelle cause tarifaire, bien là, je vous demande une rémunération des actifs qui va
être sensiblement comme elle est, sauf que mes actifs auront été
énormément élargis. Donc, de là la notion de ramener ça sur une base plus... un
intervalle plus rapproché.
Et, de l'autre côté,
je pense que la société québécoise ne peut pas se permettre le luxe de ne pas
faire un débat éclairé, ouvert, transparent.
On obtient, sur certains autres réseaux, certaines autres juridictions, une information que... Je pourrais remplir
mon ordinateur, là... puis, même, j'ai une dernière génération, donc avec une
très grosse mémoire, là, mais je
pourrais remplir l'ordinateur de données sur combien, à titre d'exemple, de
mégawattheures éoliens sont injectés aux cinq minutes près, quel est le
pourcentage de la production hydraulique, quel est le prix constant, quel est
le niveau d'interconnexion sur chacune des
interconnexions. Il y a une panoplie d'informations qui sont absolument
absentes du débat et qui sont importantes
pour la compréhension du citoyen, et ça, cet élément-là, cette absence de
statistiques là fait en sorte qu'il y a uniquement lors de la cause
tarifaire qu'on peut obtenir cette information-là.
Et,
si on voulait encore plus le simplifier, je vous dirais qu'avoir une plus
grande transparence, avoir un registre, à la régie, où tous les documents sont indexés, avec des moteurs de recherche
et qu'on peut reculer 15 ans en arrière dans les recherches, ça aiderait
beaucoup tout le monde et ça mettrait le climat beaucoup plus en confiance.
M. Julien : Alors, deux petits éléments, M. Samray. Les
principaux investissements passent, là, tout de même par HQT,
là, qui va passer à la régie, là, les investissements majeurs, là.
M. Samray (Jean-François) : Bien, il
y a des investissements majeurs qui
sont faits là. Mais prenons l'exemple
des compteurs intelligents. Ça a été un
dossier qui a été suivi par la régie, par vos collègues également.
Ça a fait l'objet de bon nombre de
discussions à l'Assemblée nationale, basées sur de l'information qui... Cause
tarifaire après cause tarifaire, la régie
a posé des questions sur où s'en va le projet des compteurs intelligents. Ça,
c'est quelque chose qui est dans le périmètre du distributeur,
et, n'eût été de la régie qui eût posé des questions, bien, on n'aurait pas su.
Donc,
avoir un programme similaire sur lequel le distributeur n'a pas de reddition de
comptes à donner ou sur lequel il se
présente pendant cinq ans, on arrive au bout de cinq ans et on se fait
dire : Bien, regardez, oui, ça a coûté pas mal plus cher que prévu,
mais, regardez, on a fait notre possible.
Donc,
la notion de pouvoir amener des correctifs puis le sentiment pour le
distributeur de dire : Aïe, l'année prochaine, on passe au bat, on
retourne à la régie, il faut être... il faut que les chiffres soient là puis il
faut que ça arrive, donc, cet élément-là, on ne l'aurait pas eu dans une cause
aux cinq ans.
M. Julien : Quand on regarde, M. Samray, là, à
l'annexe II du projet de loi, l'ensemble des informations qui devront
être produites sur base annuelle, parce qu'on a quand même prêté une attention particulière, là, dans
l'élaboration du projet de loi,
pour dire : L'information... Pour
moi, il y a deux choses. On parle de transparence, de fournir de l'information,
pour moi, ça, c'est une chose. Et,
après ça, de participer à des discussions, ça, pour moi, ça reste autre chose,
là, mais c'est-à-dire que... d'avoir
une espèce de tribune sur base annualisée, là. Mais, dans l'information qui est
transmise... qui est prévue à être transmise sur base annuelle, il n'y a
pas matière, pour vous, à avoir l'information suffisante?
M. Samray (Jean-François) : Bien, l'information va être présentée comme dans
la plupart des documents, de façon excessivement
agrégée, et sur laquelle la seule façon, lors des audiences à la régie, d'avoir
une mouture plus fine est d'aller demander des questions complémentaires et que
ces questions... Souvent, quand on fait notre liste de questions, la régie
elle-même les a posées avant, là. Donc,
avoir des informations très agrégées élimine la possibilité de poser en
profondeur des questions.
M. Julien :
O.K. Et, si je vous amène, M. Samray, sur le... parce qu'on a eu beaucoup
de discussions également là-dessus. Il me reste combien de temps, madame?
La Présidente
(Mme Weil) : 7 min 40 s.
• (15 h 20) •
M. Julien : Merci, Mme la Présidente. On a beaucoup dit, en
fin de compte... Par la cause tarifaire, les gens prétendent qu'on paie le juste prix, contrairement à
l'inflation qui serait une estimation que, oui, sur une longue période, il y a
une corrélation mais qui n'est pas parfaite.
D'un autre
côté, ce que j'observe... Par exemple, là, si on prend une année, là, 2014,
pour nommer celle-là, avec une hausse
de tarifs à 4,3 %, donc cause tarifaire, on discute puis on fixe la hausse
à 4,3 %, à terme, quand vient le processus de reddition de comptes, a posteriori, des résultats, on constate des
écarts de rendement, des écarts de rendement qui, pour cette année-là...
ici, 2015, 77 millions. Donc, quand on dit qu'on paie le juste prix avec
processus d'écart de rendement, a
posteriori, alors, moi, je vois une tendance qui est corrélée à l'inflation, je
vois une cause tarifaire du juste prix puis encore une imperfection dans
le résultat. Parce qu'à la fin ça reste des estimations.
En quoi
l'estimation à l'inflation corrigée sur base de 60 mois est une estimation
qui ne vaut pas la même, en réalité, qu'un
mécanisme, somme toute, assez lourd? Parce que, quand vous dites : Bien,
c'est vrai qu'en termes de valeur... mais, si ça coûte 1 million
par année juste les frais liés à la cause tarifaire... Si c'est 100 $
l'heure, bien, c'est quand même 10 000 heures
de passées. Donc, beaucoup, beaucoup d'analyses et de questionnement pour
arriver, de manière pas très juste, sur
ce qui se passe réellement. Alors, c'est quoi, la distinction, c'est quoi,
notre risque qu'on a à faire ce choix-là sur 60 mois, par rapport à
la tarification?
M. Samray
(Jean-François) : Bien,
comme je vous dis, dans une partie de la cause tarifaire, il y a, oui, les
achats en électricité, il y a les
ressources humaines, il y a les programmes d'investissement dans les
infrastructures et les autres programmes.
Regardez, derrière ça, il est évident, comme... je le répète, que de
dire : On fait une cause aux cinq ans, on peut arriver cinq ans plus tard, où le programme d'investissement, du
côté du distributeur, va être nettement plus élevé que ce qui aurait
peut-être été nécessaire.
M. Julien :
Mais, d'un autre côté, vous mentionnez... Les grands investissements se font
via HQT, qui passe à la régie.
M. Samray (Jean-François) :
Bien, oui, je suis d'accord avec vous, mais néanmoins on se comprend que le
déploiement des compteurs intelligents, ça n'a pas été un petit investissement
non plus, là. Je pense que, du côté des consommateurs...
Si c'est pour avoir une hausse une année et puis une baisse l'année suivante,
je pense que les consommateurs, ce
qu'ils veulent... il y a une prévisibilité, certes, ils ne veulent pas voir un
«swing» de 50 % dans leurs factures d'électricité, ça n'a jamais été le cas au Québec, mais c'est
d'avoir, vraiment, une information juste, basée sur l'ensemble des chiffres.
Et, derrière
ça, je vous donne en mille le fait qu'il y a du retard, à titre d'exemple, dans
le contrôle de la végétation. Et ça,
dans les politiques gouvernementales de lutte aux changements climatiques,
bien, peut-être est-ce qu'il faudrait le discuter plus à fond et faire plus d'investissements. Parce que la zone
de verglas grossit, le taux de croissance de la végétation augmente, puis on sait très bien que la plupart
des black-out sont venus d'une branche qui est tombée sur un fil de
distribution, qui a amené que le
système s'est protégé, et tout a tombé. Ce qui fait que, tantôt, de la même
chose, si on maintient le fait de dire : On veut absolument l'inflation,
et qu'on ne fait pas des investissements en contrôle de la végétation, qui sont
nettement en retard par rapport à ce qui
devrait être, ou on fait une gestion de la pérennité des actifs pour limiter,
être le plus sur le gain efficace maximal
par rapport... puis qu'on étire la durée de vie de certains équipements, bien,
peut-être aussi est-ce qu'on...
M. Julien : Alors, vous pensez
qu'Hydro-Québec pourrait être tentée de faire ça, autrement? O.K.
M. Samray
(Jean-François) : Bien, moi,
ce que je vous dis, M. le ministre, c'est : Si ça fait six ans qu'on
constate qu'il y a un retard puis que
le retard ne s'améliore pas, tantôt, tout ce qui va arriver, c'est que l'indice
de continuité va chuter parce qu'il
va y avoir les conséquences liées avec les tornades et les verglas, les autres
événements climatiques extrêmes.
La Présidente (Mme Weil) :
3 min 31 s.
M. Julien :
M. Samray, le 500 millions de remboursement en première facturation de
2020, j'entends les gens dire : Oui,
mais on aurait obtenu ça de toute façon, c'est de l'argent qui était dû, qu'on
aurait eu sur les trois à cinq, sept prochaines années de toute façon. D'un autre côté, ça, c'est un compte d'écart qui,
selon l'ancienne loi, si le projet de loi n° 34 rentre en vigueur, n'a plus à être fait. Ça fait
qu'effectivement le 500 millions qui est là, c'est un remboursement qui
aurait été fait dans le temps, mais naturellement, puisque l'ancienne
législation l'exigeait, d'autres comptes d'écart auraient dû être créés. Moi, j'appelle ça, en fin de compte,
une espèce de montant qui suit toujours Hydro-Québec, qui aurait toujours
eu en ses coffres un montant approximatif de
ces soldes-là pour faire face à des éventualités. Donc, en réalité, en
changeant, le projet de loi
n° 34 fait en sorte qu'on peut éliminer ce compte d'écart là, qui
autrement se serait toujours reproduit. Oui, on aurait payé, mais on
aurait raccumulé. Vous en pensez quoi?
M. Samray (Jean-François) :
Regardez, moi, je vais vous dire que je suis d'accord avec une partie de votre raisonnement, sur le fait que de dire : Au
fil des années, les causes tarifaires, et les experts vous le diront, ça
devient de plus en plus compliqué. On y rajoute des cavaliers, on y
rajoute des comptes d'écart, on y rajoute... et la liste des documents s'allonge, s'allonge. Et là on nous annonce, à
titre d'exemple : Oui, mais il va y avoir la spirale de la mort qui s'en
vient à cause de l'énergie solaire,
c'est terrible, et autres. Peut-être est-ce qu'effectivement on est dus pour
faire une refonte des tarifs. Peut-être est-ce qu'on est dus pour revoir le fait de dire qu'il
y a une dimension pour la redevance quotidienne pour le réseau, parce que, le réseau, tout le monde
s'en sert. Si j'ai des panneaux solaires, je me sers du réseau comme batterie,
ou je produis ma propre électricité, puis peut-être que ça vaut plus que le
montant actuel de la redevance tarifaire, puis peut-être qu'il faut, pour des mesures
d'efficacité énergétique, mettre des compteurs intelligents, mettre une tarification
différenciée ou faire que le consommateur
paie sur la puissance puis mettre une tarification autre sur l'énergie. Ça, regardez, nous, on en convient qu'il y a peut-être...
Avec les avancées technologiques, avec ce qui s'en vient, on est peut-être
dû pour faire un grand chantier de
révision, en profondeur, de la fixation des tarifs, mais pas en allant donner
des cartes blanches au distributeur sur ses investissements ou sur ses programmes
commerciaux.
M. Julien : Les investissements, quand
même, majeurs de HQT passent à la
régie. C'est là, les gros investissements, n'est-ce pas?
M. Samray
(Jean-François) : Bien, moi,
je vous rappelle encore une fois qu'il y en a eu, des investissements importants du distributeur. Les compteurs intelligents, ça n'a pas été
quelque chose de minime, ça a eu un impact dans la société québécoise. Puis, à chaque fois que je venais à Québec, je prends le poste que
tout Montréalais veut entendre, de Québec, il n'y a pas une journée que je suis venu à Québec...
Vous m'invitez souvent, puis ça me
fait souvent plaisir de venir, mais il n'y a pas une journée que je n'ai
pas entendu parler des compteurs intelligents, pendant quatre ans.
M. Julien : Merci.
La Présidente (Mme Weil) : Il
reste 35 secondes. M. le ministre.
M. Julien : Oui. Bien, alors,
pour terminer, M. Samray...
La Présidente (Mme Weil) :
30 secondes.
M. Julien : ...le transfert du
risque et de l'imputabilité, que nous, on observe potentiellement, par le p.l. n° 34, auprès de la
société d'État, vous avez le risque, vous vous gouvernez, parce que nous, on a
fixé ce que ça va coûter à la clientèle, vous ne croyez pas à ça?
M. Samray
(Jean-François) : Moi, je
crois que... Les membres de l'AQPER qui ont préparé le dossier en collégialité
croient qu'il y a une immense asymétrie d'information.
M. Julien : Merci.
La Présidente (Mme Weil) :
Merci beaucoup. Alors, je cède la parole au député de Laval-des-Rapides.
M. Polo :
Merci beaucoup, Mme la Présidente. M. Samray, merci de vous êtes présenté,
merci pour votre mémoire. Écoutez, je
tiens à saluer, quand même, l'indépendance de vos propos. Je trouve que vous
faites quand même une lecture assez...
je veux dire, assez transparente, là, si on peut dire, du projet de loi n° 34. Vous utilisez même des mots assez durs dans votre mémoire.
Une des
choses que le ministre, à travers le dépôt du projet de loi, nous a répétées,
là, depuis mardi, c'est que le projet
de loi n° 34 vise à simplifier le processus, vise à apporter
un élément de prévisibilité, vise à donner... à présenter une certaine,
si on peut dire, stabilité auprès de la population en leur disant : Bien,
écoutez, vous le saurez, que les tarifs n'augmenteront...
seront collés sur la croissance de l'inflation sur une période de cinq ans. Et
vous, à la page 10, sur le résumé exécutif, là, à la conclusion,
vous utilisez le mot «simpliste». Vous commencez par dire : «En définitive
notre association est d'avis que c'est du
choc des idées que jaillit la lumière et que c'est de la transparence que naît
l'adhésion. L'AQPER croit également
que le législateur a cherché à instaurer une simplification administrative
plutôt que l'instauration de pratiques simplistes par le dépôt du présent
projet de loi.»
Un des
éléments qu'on a pu constater, c'est... Et il y a eu d'autres groupes qui sont
passés, là, avant vous, et j'aimerais reprendre
ici les propos d'Option Consommateurs, lorsque je leur ai demandé si cette
supposée simplification était à l'avantage des consommateurs, et ils nous ont
répondu : «Nous sommes d'avis que non.» Vous également, vous proposez
ici de ramener ça à une période de deux ans
plutôt que cinq ans, alors que d'autres groupes avaient déjà commencé à
proposer de ramener ça sur trois ans.
Je pense qu'il y a eu trois groupes, à date, sur 12, qui ont... trois
présentations sur 12 qui ont proposé trois ans plutôt que cinq ans. Vous
êtes le premier à proposer deux ans.
En quoi le
projet de loi... Et vous proposez de retirer les articles 8, 11 et 12 du
projet de loi parce qu'ils représentent, c'est une interprétation que je fais, une pratique simpliste dans
l'application, là, si on peut dire, de cette supposée prévisibilité.
• (15 h 30) •
M. Samray
(Jean-François) : Bien,
écoutez, nous, on demande le retrait de ces articles-là, comme on l'a
mentionné, d'abord, dans un premier
lieu parce qu'il y a une information asymétrique, puis ça a été... En préparant
le rapport, on a relu l'ensemble des travaux depuis qu'il y a une loi sur la
Régie de l'énergie, et je pense que ça a fait l'unanimité de l'ensemble des élus, il y en a qui ont siégé à la Chambre,
aux travaux des commissions, de venir discuter de cette asymétrie d'information
là. Et ce sont souvent des mots qu'on
lit dans une discussion entre des élus, et on se dit : Bon, bien, O.K.,
mais, quand on le vit dans des
discussions, des négociations avec les fonctionnaires du ministère des
Ressources naturelles, qui sont extraordinaires, qui ont une connaissance assez fine, mais, par
rapport à une société d'État qui possède l'ensemble de l'information et qui la
partage au compte-goutte, qui la partage sur
des éléments que ça fait son affaire pour obtenir la fin qu'elle attend...
Regardez, c'est pour ça que nous, parfois, on trouve que... et qu'on
l'indique, qu'il y a des éléments qu'on ne peut pas laisser au distributeur une carte blanche, que le
distributeur a besoin d'être réglementé et a besoin d'avoir une reddition de
comptes, parce
que, le système de traitement d'information et la possession de l'information,
plus des analyses complètes, elle, elle l'a, mais le personnel, qui n'est pas nombreux au ministère, il
mériterait d'en avoir plus.
Regardez, ils ne sont pas équipés pour faire cette analyse-là. Donc,
pour nous, je pense que, dans un premier temps, c'est un élément.
L'autre
élément est de dire que, d'avoir une cause aux deux ans ou d'avoir une cause
aux trois ans, ce qui importe, c'est
d'avoir toute l'information, et d'être capable de la retracer dans le temps, et
de mettre en place à la régie un registre dans lequel on a l'information facile. Parce que, pour faire des
recherches, actuellement, il faut se rappeler que, ah, il y a trois ans, c'était tel groupe qui avait posé la
question, puis c'était dans telle pièce, et autres, et autres, donc il n'y a
pas moyen de s'y retrouver. Donc, si on veut faire toute la transparence
puis si on veut faire un débat de société et qu'à un moment donné... un débat adulte et un débat où est-ce que
c'est l'inflation ou est-ce que, cette année, ça coûte plus cher et, l'autre
année, ça coûte moins cher, bien, ça prend ça.
M. Polo :
Donc, vous dites clairement qu'il y a une atteinte à la transparence, tel que
le projet de loi n° 34 le présente, là, en mettant ça aux cinq ans. Ce
matin, l'économiste de l'UPA nous disait que, clairement, essayer de prévoir,
ou de définir, ou de laisser
sous-entendre que, parce qu'on colle la hausse des tarifs d'hydroélectricité à
l'inflation sur une période de cinq
ans, ça amène une prévisibilité, alors que très peu d'économistes sont capables
d'essayer de prédire la hausse des taux d'intérêt... la hausse de l'inflation au-delà d'une période de 12 à
18 mois. Donc, cet argument-là, pour vous, ne tient pas la route.
M. Samray (Jean-François) : Bien, je vais vous dire, derrière ça, derrière la
fixation des tarifs, il y a de multiples variables, dont les aléas climatiques, dont la croissance économique.
Est-ce qu'on est capable avec précision de savoir quel sera le taux de croissance dans quatre ans? Est-ce
qu'on sera capable de savoir si on va avoir un hiver terrible, qu'il va falloir
acheter l'électricité à 3 000 $ le mégawattheure un mardi matin, à
6 heures ou à 7 heures le matin, ou le soir? Ça, ça fait partie des éléments où il y a... ça fait
partie de l'imprécision. Donc, avoir une zone, c'est une chose, mais avoir un
chiffre précis à la virgule près, là, c'en est une autre, là.
M. Polo :
En effet. Vous avez expliqué également que vous considérez que la régie perd...
En fait, depuis mardi, le ministre
essaie de nous expliquer que la régie ne perd pas de pouvoir, en fait les
pouvoirs qui lui sont octroyés vont lui permettre de se concentrer, de poursuivre son travail sur l'essentiel du
mandat qui lui a été donné. Vous nous dites qu'une révision à chaque cinq ans du dossier tarifaire
est clairement une perte de pouvoir importante. Et je pense que vous dites
même : On ne devrait pas avoir moins de
régie, sinon même plus de régie dans l'application ou dans le débat qu'on a à
travers le projet de loi n° 34.
M. Samray (Jean-François) : Bien, je pense qu'on l'a dit d'entrée de jeu, ce
qu'on constate, c'est : l'article ne change pas la mission puis le rôle de la régie. Ce que le projet de loi
n° 34 vient faire, c'est que, son rôle, elle va l'appliquer moins
souvent sur les causes tarifaires. Donc, c'est cet élément-là.
Puis
l'autre, «ça prend plus de régie», bien, je pense que ça prend plus
d'informations, et faciliter la vie à
l'ensemble des intervenants par des documents bien indexés, puis être capable de se retrouver
avec de l'information avec une mouture beaucoup plus fine, qu'on ne
soit pas obligé de perdre une éternité de temps par questions-réponses
pour finalement arriver à deux semaines de l'audience,
puis il faut déposer votre mémoire, puis tu viens juste d'avoir l'information.
M. Polo : Les gens d'Hydro-Québec, lorsqu'ils sont venus nous voir, mardi matin, ont répété
dans leurs mots ce que le ministre a répété ou a présenté lorsqu'il a
expliqué le projet de loi, c'est qu'en ayant une prévisibilité au niveau de la
hausse des tarifs ça va aussi les challenger, eux, de respecter... ou, en
fait, de devenir plus performants, O.K.? En ayant des tarifs qui sont
prévisibles sur une période de cinq ans, eux, ça va les mettre, si on peut
dire... ça va leur donner un benchmark à
partir duquel ils vont se dire... Ils doivent développer des nouveaux projets
ou des nouveaux programmes, mais
ils doivent tenir compte qu'ils ont déjà une
prévisibilité au niveau de la hausse des tarifs, mais ça va les aider à devenir
plus performants.
Est-ce
que vous pensez qu'en instaurant, justement, une hausse des tarifs basée sur
l'inflation sur une période de cinq ans ça va aider Hydro-Québec à
devenir plus performante?
M. Samray (Jean-François) : Bien, vous savez, il y a une chose qui est
certaine, c'est que la théorie économique va dire que je vais être performant jusqu'au moment où j'ai atteint mon
objectif, puis après ça, bien, on va aller jouer au golf, hein?
M. Polo :
Élaborez.
M. Samray (Jean-François) :
Bien, en ce sens que j'ai beau impliquer... j'ai beau mettre en place certaines
mesures, quand j'ai atteint ma cible, si je
suis déjà rendu au mois de juillet, bon, bien, je ne suis pas obligé... il n'y
a rien qui me force à la poursuivre du mois d'août au mois de décembre,
là. Vous voyez? Donc, à un moment donné, je peux également faire en sorte que... est-ce que je veux y aller à fond, comme
on dit dans le monde sportif, mon 110 % pendant tout le match, ou
je veux jouer un «Hail Mary» sur le dernier jeu du match, là, tu sais, pour
atteindre l'inflation?
M. Polo : Donc,
clairement, là, d'attendre à chaque cinq ans pour essayer d'avoir un semblant
de dossier tarifaire pour évaluer la
performance d'Hydro-Québec, pour vous, c'est clairement insuffisant? D'avoir un
monopole d'État, il faut le suivre à
la trace, il faut bien l'encadrer pour s'assurer que, justement, le fait que
c'est un monopole ne devient pas complaisant, mais plutôt qu'il cherche
continuellement à être de plus en plus performant?
M. Samray (Jean-François) : Moi, je vous dirais que les entreprises qui sont
membres chez nous innovent, innovent beaucoup,
et, si elles ne peuvent pas le faire ici, elles vont ailleurs. Donc, le Québec
a tout ce qu'il faut pour innover, mais il arrive que des innovations sont amenées ici, puis c'est : Bof!
on n'en a pas besoin, va voir le voisin, là. Ce qui fait que ces
innovations-là sont essayées dans d'autres réseaux, mais pourtant ce sont des
innovations québécoises.
Donc,
dans votre phrase, ce qui est, je pense, important, c'est d'avoir une véritable
cause tarifaire avec l'ensemble, avec toute transparence et d'avoir toute
l'information. Le danger de l'avoir aux cinq ans, c'est que, quand on
arrive avec les actifs prudemment acquis, on
le sait juste aux cinq ans, s'ils ont été acquis, puis, entre-temps, ils ont
été payés, puis ils sont passés dans la base des actifs, puis il va
falloir passer à la base tarifaire puis demander une rémunération. Entre-temps,
si on se dit : Bien, regarde, retourne-le au fournisseur, là, bien il va
dire : Bien, je ne peux pas, regarde, ça fait trois ans qu'il a été acheté puis il est installé, ça fait que je ne
peux pas le retourner. Mais il a-tu été prudemment acquis? Merci.
La Présidente (Mme Weil) : Il reste 10 secondes. Alors, je vous
remercie, M. Samray, pour votre contribution aux travaux de la
commission.
Je suspends les
travaux quelques instants afin de permettre au prochain groupe de prendre
place.
(Suspension de la séance à
15 h 38)
(Reprise à 15 h 40)
La Présidente (Mme Weil) : Alors, nous reprenons nos travaux, et je souhaite
la bienvenue à l Institut de recherche et d'informations
socioéconomiques, M. Bertrand Schepper.
Institut de recherche et
d'informations socioéconomiques (IRIS)
M. Schepper
(Bertrand) : Bonjour.
La Présidente
(Mme Weil) : Je vous rappelle que vous disposez de
10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons
à la période d'échange avec des membres
de la commission. Je vous invite donc
à vous présenter, ainsi... bon, de vous présenter. La parole est à vous.
M. Schepper
(Bertrand) : Donc, bonjour, merci de l'invitation. Je me nomme
Bertrand Schepper. Je travaille à l'Institut de recherche et d'informations
socioéconomiques, l'IRIS, qui est un institut de recherche qui analyse des politiques publiques en santé, en éducation mais
aussi en environnement et en énergie. L'institut va exister bientôt dans...
va avoir 20 ans l'année prochaine. Et, dans le cadre de mes travaux à
l'IRIS, j'ai souvent dû étudier les politiques d'Hydro-Québec. J'ai travaillé
sur l'histoire et l'historique de diverses sociétés d'État et participé à des
audiences tarifaires de la Régie de
l'énergie, à la fois pour Énergir et, par exemple... des audiences tarifaires
d'Énergir et d'Hydro-Québec, mais aussi, plus récemment, dans le dossier
de Transition énergétique Québec, par exemple.
En
fait, je viens vous présenter l'analyse que nous avons du projet de loi
n° 34. Le mémoire a été déposé. En fait, les grandes lignes que je voudrais qu'on retienne de notre analyse,
c'est qu'en fait on pense qu'il y a... le projet de loi n° 34 a tendance à envoyer beaucoup plus de risques à la
clientèle et à améliorer la situation d'Hydro-Québec de manière indue,
et c'est pourquoi on vous appelle à le rejeter.
Les cinq grands
risques qu'on a identifiés, en fait, il y en a trois qui sont des risques
qu'ils ont, financiers ou tarifaires, un risque institutionnel et un risque
environnemental.
Sur
le premier risque, je voudrais parler du gel en 2020 ainsi que du retour de
500 millions de dollars qui est amené dans le projet de loi. En fait, sur
le retour de 500 millions de dollars, de notre point de vue, ce n'est pas
un cadeau ou un rabais, en fait.
C'est, en fait, le retour de ce qui était déjà prévu dans les projets de la
régie. En fait, c'est un 500 millions de dollars qui provient des comptes
d'écart. Donc, les comptes d'écart, on estime qu'ils sont environ à
500 millions de dollars, mais,
en fait, ici, la clientèle assume un certain risque supplémentaire puisque, si,
par exemple, ce montant était supérieur, bien, à ce moment-là, en fait, la clientèle ne le recevrait pas, ne
recevrait pas la différence, et, pour nous, en fait, il y a déjà une
part de risque.
La
deuxième partie de risque est sur le gel, c'est-à-dire qu'alors qu'on prétend
que le gel serait une situation enviable, présentement, dans les tarifs
d'Hydro-Québec, on peut supposer qu'à très court terme, en fait, les revenus
d'Hydro-Québec augmentent beaucoup
plus que ses dépenses, notamment avec la reprise des travaux d'ABI, qui compte
pour à peu près 4,3 térawattheures
d'énergie patrimoniale, donc ça a un effet d'environ moins 0,15 % sur les
tarifs, les nouveaux tarifs qui vont être amenés sur les cryptomonnaies,
qui amènent 5,5 térawattheures de plus de ventes avec, je dirais, des
coûts et des dépenses assez faibles, on
pense que ça pourrait avoir un effet d'environ 1 % sur la tarification. Il
y a une croissance de la demande puis
il y a une croissance éventuelle de demandes liées à la voiture électrique.
Donc, à notre avis, il y a une assez grande impression qu'il va y avoir
des coûts plus faibles chez Hydro-Québec.
D'ailleurs,
il y a une coalition, je pense que vous les recevrez, de clients qui ne sont
pas... qui n'ont pas une habitude de
travailler au jour le jour ensemble sur tous les dossiers, de clients
industriels, d'entrepreneurs et de petits... et de résidentiels qui demandent une baisse de 4,91 %. Donc, à
notre avis, la régie devra statuer sur cette question-là. Et, dans tous les cas,
même si elle statuait avec une baisse plus
faible que les 4,91 %, c'est une situation plus enviable que le projet de
loi tel qu'il est actuellement présenté.
Le deuxième
risque est lié à l'inflation, c'est-à-dire que, si effectivement il y aurait
une baisse qui serait décidée par la
régie cette année, d'indexer les tarifs d'Hydro-Québec serait déjà, au départ,
une hausse tarifaire par rapport à ce que la régie pourrait déterminer à
terme. D'autre part, les ventes dont on a parlé il y a quelques instants ne vont
pas s'effacer en 2021 ou en 2022. Donc, on
peut supposer qu'il y aura quand même une hausse des ventes et une bonne
situation pour Hydro-Québec. En ce
sens, présentement, la clientèle d'Hydro-Québec prend le risque que la
situation serait... En fait, si la situation
est meilleure pour eux que d'augmenter ou de geler à l'inflation, en fait,
c'est la clientèle qui supporte ce risque-là.
J'ai vu
aussi, en fait, qu'on parle que les tarifs d'Hydro-Québec ont augmenté plus
vite que l'inflation. En fait, c'est vrai, mais il ne faut pas oublier
qu'une part importante de l'augmentation des tarifs est basée sur les coûts de
production d'Hydro-Québec, qui ne sont pas déterminés par la régie, et les
hausses les plus importantes, en fait, ont été liées aux décisions passées du gouvernement, à la fois, par
exemple, les barrages privés, l'éolienne ou l'indexation du bloc patrimonial.
Donc, en fait, la régie a certainement
permis de diminuer cet écart-là entre l'inflation et les coûts
d'Hydro-Québec... les tarifs d'Hydro-Québec, pardon, en agissant sur
Hydro-Québec Distribution.
D'autre part,
si, dans le projet de loi, tel qu'il est présenté, aux cinq ans, il y a une
cause tarifaire aux cinq ans, en fait, si les clients n'ont pas vraiment
de possibilité de revenir devant la régie en cas de nécessité, à ma
compréhension, l'article 48.3 va
permettre, en fait, à Hydro-Québec de revenir en cas... devant la régie si la
situation est à son désavantage. Donc,
on avantage ici la possibilité pour Hydro-Québec d'améliorer sa situation,
tandis que la clientèle n'a pas cette possibilité-là.
Troisième
risque tarifaire que je vois, c'est l'établissement d'une cause aux cinq ans,
en fait. Et, sans prétendre de la mauvaise
foi d'Hydro-Québec, on voit que, dans différents mécanismes tarifaires, en
fait, plus on augmente la latitude des distributeurs,
plus il y a des risques pour la clientèle. Un exemple qui pourrait être fait,
c'est, supposons... Supposons, par exemple,
qu'Hydro-Québec voudrait diminuer ses dépenses à l'année quatre, de manière à
augmenter sa marge de profit, elle pourrait déterminer qu'elle repousse
certaines dépenses à l'année six ou à l'année sept. À l'année quatre, elle
aurait augmenté sa marge de profit. Ceci dit, à l'année cinq... à l'année sept,
elle arriverait devant la régie, elle aurait dit : Bien, vous voyez, nous, voici nos prévisions, nos prévisions pour nos
coûts, en fait, qui sont augmentés à cause d'un service qui n'aurait pas
été rendu à l'année quatre. Et, à ce compte-là, on demanderait des tarifs plus
élevés que la valeur des services qui
auraient été offerts dans l'ensemble. Et donc, à notre avis, ça, ça peut mener,
en fait, à une situation qui est gagnante pour Hydro-Québec, puisqu'elle
augmente ses profits à l'année quatre, tout en gardant une marge de profit
importante à l'année six ou sept.
Finalement, aussi... en fait pas finalement,
pardon, quatrième risque qu'on voit, c'est un risque institutionnel. Présentement, la Régie de l'énergie est un des
seuls chiens de garde dont la clientèle d'Hydro-Québec peut avoir... et même,
à la limite, la société civile peut avoir
devant Hydro-Québec. Et j'ai entendu, là, qu'on s'est... différentes
estimations des coûts de la Régie de
l'énergie par rapport aux revenus d'Hydro-Québec, que ce soit 0,1 % pour
l'ensemble des activités de la régie versus l'ensemble des profits
d'Hydro-Québec, ou du moins les revenus d'Hydro-Québec, ou l'apport de
10 millions de dollars par
rapport à 300 millions de dollars pour Hydro-Québec Distribution. En fait,
ce que je voudrais vous dire ici, c'est que c'est le coût à peu près,
là, du salaire de Carey Price, là. Donc, je pense que ça vaut la peine d'avoir,
pour ce salaire-là, je dirais, une protection, comme société civile, face à
Hydro-Québec, qui est une société d'État, et qui a une capacité de produire beaucoup de données, et peut rendre les choses
complexes. Par exemple, supposons un budget qu'on doit analyser dans le détail. Les données
budgétées sur une période de cinq ans sont beaucoup plus difficiles à analyser
ou, du moins, à prévoir... et à prévoir les différents coûts que sur une cause
annuelle. Et donc, en ce sens, on pense que la société québécoise perd beaucoup en n'ayant pas une cause
tarifaire annuelle, et, à notre avis, la clientèle perd aussi, en quelque part,
un chien de garde nécessaire au bon fonctionnement.
Et finalement
j'irais avec un risque environnemental. C'est-à-dire que, présentement, si on
accepte l'idée que le gel tarifaire
n'est pas suffisant et qu'en fait la Régie de l'énergie n'accepterait pas des
hausses aussi grandes que celles qui sont
présentées dans le projet de loi n° 34, en fait, on met la
situation où des gens comme chez Énergir... où les tarifs de chez Énergir
pourraient être plus intéressants et rester dans une situation plus compétitive
encore qu'ils ne le sont. Et donc, à
ce compte-là, on favorise, finalement, une utilisation de l'énergie du gaz
naturel plutôt qu'une transition vers l'hydroélectricité. Considérant que le gaz naturel d'Énergir provient
en très grande partie des gaz de schiste des États-Unis, je nous invite, au
moment d'une économie sobre en carbone, à
travailler à rendre moins compétitive cette énergie-là par rapport à l'énergie
hydroélectrique.
Finalement,
la Régie de l'énergie a quand même une forme d'expertise envers les programmes
d'efficacité énergétique d'Hydro-Québec.
Suite à ce qui va arriver avec Transition énergétique Québec, c'est à voir, là,
comment la régie va encore, ou non,
devoir gérer ces programmes-là... c'est à voir. Mais, ceci étant dit, il y a
une expertise, puis, année après année, on peut parler de certains enjeux environnementaux touchant à Hydro-Québec,
et, à notre avis, la régie a cette expertise-là, qu'elle doit continuer
à exercer.
Bref,
finalement, puisqu'on considère que la clientèle prend la vaste majorité des
risques dans le projet de loi qui est ici,
nous vous invitons à laisser tomber ce projet de loi là, qu'on ne considère pas
à l'avantage des contribuables québécois. Merci.
• (15 h 50) •
La Présidente (Mme Blais,
Abitibi-Ouest) : Je vous remercie, M. Schepper, pour votre
exposé. Nous allons maintenant commencer la période d'échange. M. le ministre,
la parole est à vous.
M. Julien :
Oui. Merci, Mme la Présidente. Merci, M. Schepper, pour votre exposé. Je
comprends que vous avez travaillé votre dossier avec
M. Jean-François Blain et j'aurai également l'occasion de le
réentendre demain. J'espère qu'il aura les mêmes conclusions que vous
nous énoncez aujourd'hui.
Alors,
d'entrée de jeu, il y a certains éléments que je voudrais quand même élaborer
avant de poser ma question. Donc, pour
vous, le risque est transféré à la clientèle. Et, encore là, j'analyse les
dernières années, puis je le sais, là, je suis tannant, là, mais... les chiffres qui parlent, hein? La
hausse des 15 dernières années est supérieure, la hausse tarifaire, à
l'inflation, et ponctuellement, bien,
il y a des variations, il y a moins de stabilité parce que c'est basé sur un
processus très robuste de cause tarifaire qui, par exemple... par
exemple, en 2014, un processus de cause tarifaire où, en réalité, des frais,
pour l'ensemble des intervenants, ont été
payés à hauteur de près de 1 million pour que tout le monde puisse
clarifier avec la régie la bonne hausse tarifaire, celle qui, selon les
dires des intervenants qu'on rencontre depuis quelques jours, est le tarif juste. Et le tarif juste, au sorti de ce
processus-là, par la décision de la régie : une augmentation de
4,30 %. Et, a posteriori, il y a un mécanisme d'écart de rendement,
donc il y a une mesure d'écart de rendement, parce que le rendement accepté de 8,2 % est considéré dans l'élaboration de
la base tarifaire, et là l'écart de rendement donne un montant de
160 millions. Ça représente 1,8 %, 1,9 %. Donc, tout un
processus pour trouver le juste prix a fait en sorte qu'on s'est trompés à peu près de 50 % de ce qu'on aurait dû
effectivement faire, considérant l'ensemble des données puis les discussions
qu'on a faites. Bref, la véritable
hausse, pour cette année-là, aurait été mieux, même, à l'inflation, aurait été
plus juste que tout ce qui a découlé des travaux.
Mais, à
terme, nous, on pense que ça vaut la peine de se requestionner, d'avoir toute
l'information. Puis le projet de loi
permet, à l'article... à l'annexe, de donner toute l'information sur base
annualisée. Puis on pense qu'on doit avoir une cause tarifaire pour
éviter, sur une période plus longue, qu'on a fixée ici à cinq ans pour
s'assurer de toujours maintenir, en réalité,
le caractère adéquat de la tarification, qui... dans le passé sur base d'inflation,
belle corrélation. On fait un gel, puis
on s'en va sur l'inflation. Sur une longue durée, c'est une belle corrélation.
Alors, tu sais, le prix juste, pour moi, quand je regarde les résultats,
il n'est pas plus édifiant.
Mais revenons
sur le 500 millions, aussi, que vous avez mentionné parce que c'est
également... Là, dans vos faits saillants,
vous mentionnez, puis ça a été répété plusieurs fois, mais moi, je suis un
maudit comptable : «Les 500 millions qui seront redistribués
en 2020 selon les modalités du projet de loi n° 34 ne sont ni un cadeau ni
un rabais offert aux consommateurs, mais plutôt de l'argent qui est dû à ses
clients par Hydro-Québec [...] qui leur aurait été remis de toute façon.» Oui. Le 500 millions qui est là,
c'est un compte d'écart qui est cumulé, en fin de compte, pour des
éventualités, et, à chaque année,
effectivement, on le redistribue au fur et à mesure, mais on en recrée un
autre. Le p.l. n° 34, quand il vient, en réalité, redonner le risque de gestion à Hydro-Québec, dit : Ça
va être à l'inflation, là, et c'est à toi de gérer tes risques. Donc, effectivement que ce montant-là,
éventuellement, spécifiquement, aurait été redonné, mais d'autres montants
auraient été créés pour la même
finalité que l'existence de ce montant-là. Et, quand vous dites que
500 millions risquent de ne pas être
la valeur suffisante, naturellement il y aura fermeture de compte, et le bon
montant sera redistribué à la clientèle. Le montant juste, c'est ça,
c'est minimalement 500 millions. Mais, au terme, ce sera fixé de manière
juste.
Alors, pour
revenir à ma question, M. Schepper, quels sont les risques pour la clientèle, les risques véritables en
termes de tarification, quand on a un gel et
l'inflation quatre ans, quand on regarde l'historique et quand on regarde après
ça l'acuité du processus tarifaire, qui, a posteriori, avec des écarts
de rendement, montre des écarts, somme toute, assez importants? Quel est le
risque pour la clientèle d'aller sur une base de 60 mois?
M. Schepper
(Bertrand) : Tout d'abord,
comme je l'ai dit, je voudrais spécifier que la grande partie des coûts de
votre 4 %, ça inclut 4,33 %, si je ne me... 4,32 %, en tout cas,
peu importe, sont, en grande partie, basés sur les coûts d'Hydro-Québec
Production, sur lesquels la régie,
elle n'a aucune, aucune juridiction, d'une part. D'autre part, la plupart
des hausses des coûts qui ont eu lieu à Hydro-Québec Production ne proviennent pas des décisions de la régie,
d'une manière ou d'une autre, elles proviennent, avant toutes choses,
des décisions gouvernementales ou des projets d'Hydro-Québec Production
qui ont été là, et, selon les années, la part d'Hydro-Québec Production dans
les coûts généraux a passé, si je ne me
trompe pas, dans les 15 dernières années, d'à peu près... entre 42 % et 53 %, en tout cas dans ces
eaux-là. Donc, c'est sûr qu'à partir de ce moment-là c'est là qu'il y a
le plus d'impact.
Ensuite,
votre question, à savoir... sur quel est le risque de passer de l'inflation
vers... en fait, de suivre l'inflation plutôt que d'aller vers la régie, en fait, pour moi, est assez clair, c'est-à-dire que, présentement, la situation dans laquelle on est pour les cinq prochaines
années, par exemple, laisse croire, au contraire, qu'il va y avoir
une hausse de revenus et une baisse
des dépenses. Alors, dans cette situation-là, présentement, les tarifs seraient plus faibles, plus faibles
que l'inflation. La clientèle court
le risque, présentement, d'avoir à payer plus cher que qu'est-ce qu'elle
le ferait s'il y avait la Régie
de l'énergie, 1 million de dollars de frais d'intervenant, ou non,
en lien.
M. Julien : Donc, si je vous entends... Parce que, quand même,
on avait vu certaines de vos conclusions, je pense que vous l'avez
redit, là, puis une baisse de 4,91 %, potentiellement, selon les analyses des trois groupes qui se sont mis
ensemble, dont vous ne faites pas partie, mais que M. Blain fait partie,
lui...
M. Schepper (Bertrand) : Pas à
ma connaissance.
M. Julien : O.K. Alors, moins 4,91 %, ce qui me rassure quand vous dites ça... Parce qu'aussi,
qu'est-ce qu'on a vu dans les dernières journées, c'est... Il y a des
gens qui nous ont dit : On risque de payer trop cher sur la période. Ce
que vous nous mentionnez, c'est un gel plus
inflation quatre ans... ce matin, on avait un intervenant qui disait : Ça
représente, donc, à peu près
33 % sous l'inflation sur cette période-là à cause du gel la première
année, à cause qu'il est indexé sur indexation. Lui, il ne trouvait pas ça trop
risqué, mais il disait... Vous nous dites : Peut-être qu'on va payer trop
cher pour ça. De l'autre côté, les
gens nous disent, a contrario : Il pourrait y avoir un choc tarifaire dans
cinq ans. C'est comme le double risque :
je pense qu'on va payer trop cher, ce que vous nous dites, puis en plus je
pense qu'on va avoir un choc tarifaire.
Donc,
si je vous entends bien, vous, ce que vous voyez dans le futur, c'est : on
va payer trop cher, donc, le cas échéant, dans 60 mois, quand on va
retourner à la régie pour une cause tarifaire, il ne devrait pas y avoir de
choc tarifaire négatif.
M.
Schepper (Bertrand) : Pour
ma part, j'estime... je serais étonné qu'il
y en ait un. Ceci dit, différentes
raisons pourraient mener à ce que les tarifs soient plus élevés. En
fait, ce que je comprends, c'est aussi que... Supposons, pour différentes raisons, que les tarifs devaient
exploser, Hydro-Québec devait, par
exemple, avoir des revenus beaucoup,
beaucoup plus grands, pourrait retourner devant la Régie de
l'énergie. Donc, à la limite, si on pense que ça a un impact si grand,
j'imagine qu'Hydro-Québec aurait cette possibilité-là, mais vous avez
écrit le projet de loi, et j'imagine que...
Ceci
étant dit, est-ce que je pense qu'il pourrait y avoir un choc tarifaire?
Dépendamment. En fait, ce que vous vous enlevez présentement, et c'est
un risque évident pour la clientèle, vous vous enlevez la possibilité d'enrayer
ce choc tarifaire là. Si, supposément, je me
trompais, puis j'admets que je n'ai pas la science infuse, c'est possible, en
fait, que vous vous placiez dans une situation
où est-ce qu'il y a un choc tarifaire, à ce compte-là, je ne vois pas
en quoi s'enlever un chien de garde est une manière d'éviter ça. Donc, je ne
pense pas que... dans l'une ou l'autre des situations, faire une cause
tarifaire aux cinq ans favorise le risque pour la clientèle.
M. Julien :
Parfait. Et, attention, ici on n'enlève pas un chien de garde, pour nous, je le
réitère...
M. Schepper
(Bertrand) : Je comprends, mais...
• (16 heures) •
M. Julien : ...on augmente la périodicité, en fin de compte,
de 12 à 60 mois, on divulgue une panoplie d'informations sur base annualisée, qui permet de voir, en
réalité, c'est quoi, l'information financière des investissements. Des investissements de HQT continuent, en
réalité, d'être sous la régie. On a la liste, en réalité, des responsabilités de la régie et ceux qui sont faits sur base 60 mois, la
grande majorité des responsabilités de la régie sont maintenues.
Mais
ce que j'entends quand même, c'est... Vous nous dites : On aurait connu probablement une baisse importante au cours des prochaines années, selon votre
modalisation et votre vision, et les trois groupes qui connaissent bien ça
arrivent à cette conclusion-là. Donc,
au pire aller, la clientèle, en ayant un gel et l'inflation quatre ans, au pire
aller, c'est... Il n'y aura pas de
choc tarifaire puisque vous convenez que les tarifs seront trop élevés sur
cette période-là. Donc, moi, quand je parle à la clientèle, quand je rencontre des gens, des citoyens puis qu'ils nous
disent : Un gel puis l'inflation quatre ans, on trouve ça bien parce que ça nous donne une stabilité puis
une prévisibilité... Selon votre évaluation, au pire, dans cinq ans, ce sera
une baisse.
M. Schepper
(Bertrand) : Bien, en fait,
puis, personnellement, je parle de mon expérience à moi, et donc, dans la totalité, ça fait maintenant
10 ans que j'ai passé par les différentes causes à la régie, je n'ai
jamais entendu de groupe préférer la stabilité à une baisse tarifaire
actuelle. Ça, je n'ai jamais...
M. Julien :
Mais il faudrait aller vois les citoyens parce que...
M. Schepper
(Bertrand) : Après ça... Et je pense que, si je parle...
M. Julien :
Dans le secteur résidentiel, c'est des citoyens qui paient, hein?
M. Schepper
(Bertrand) : Oui. Mais, si
je parle à mon voisin, si je lui propose une baisse tarifaire ou la
prévisibilité, je suis pas mal sûr qu'il va me proposer une baisse
tarifaire aussi.
M. Julien :
O.K., la baisse tarifaire, qui s'est produite quand la dernière fois?
M. Schepper
(Bertrand) : En 2013. 2013‑2014, si je ne me trompe pas.
M. Julien :
En 2012. 2012.
M. Schepper
(Bertrand) : Bien, 2012-2013.
Donc, à ce compte-là... Et, présentement, ce que les indicateurs montrent et ce qu'on voit présentement, c'est que la situation
mènerait à ça. Et, au moment où elle mènerait... vous nous dites : Non,
non, on va suivre l'inflation. Je pourrais comprendre mon voisin d'être fâché.
M. Julien :
O.K. Vous avez une question?
M. Girard
(Lac-Saint-Jean) : Oui, j'ai une question.
La Présidente
(Mme Blais, Abitibi-Ouest) : Cinq minutes. Il vous reste cinq
minutes.
M. Girard
(Lac-Saint-Jean) : Merci, Mme la Présidente. Dans votre dépôt de document,
à la page 4, là, la proposition 5, vous dites que limiter le rôle de la régie aurait pour effet de
favoriser le gaz, alors qu'on sait que le gaz est considéré comme une énergie de
transition. Mais moi, j'aimerais avoir un
petit peu plus d'éclairage sur cette
proposition, cette hypothèse que vous soulevez.
M. Schepper (Bertrand) : Bien,
en fait, au départ, le gaz qui est utilisé chez Énergir provient en bonne
partie des gaz de schiste qui est des États-Unis,
le bassin de Marcellus, donc c'est un gaz qui est déjà
plus polluant que le gaz naturel conventionnel,
disons, voyons ça comme ça. Et, présentement, si... On a un tarif de gaz naturel qui est
plutôt concurrentiel par rapport à Hydro-Québec, en fait, et, si Hydro-Québec augmente ses
tarifs plus qu'elle ne devrait, en fait, ce qu'on fait, c'est : par un simple effet de marché, on rend
plus difficile la transition des personnes au gaz naturel, à aller vers
l'hydroélectricité ou vers... qui est quand même... Que vous considériez
ou non le gaz naturel comme une énergie de transition,
l'hydroélectricité est quand même plus propre que les gaz naturels, surtout si c'est
un gaz naturel qui provient des gaz de schiste. Donc, à ce compte-là,
c'est de là qu'on fait cette conclusion-là.
De plus, présentement... Et on pourrait débattre du fait que le gaz naturel est une énergie
de transition. Est-ce qu'elle l'est pour cinq ans, pour 10 ans, pour... ça,
c'est à voir, mais, si ce l'était pour cinq ans, par exemple, déjà là, votre
mécanisme pourrait avoir un effet, à terme, qui aurait un impact sur la
transition.
M. Girard (Lac-Saint-Jean) :
Mais ça reste sur des suppositions, sur des hypothèses, vos conclusions.
M. Schepper
(Bertrand) : En fait, c'est sur un effet de marché. Si vous rendez
l'hydroélectricité plus chère, le gaz naturel va être plus compétitif.
La
Présidente (Mme Blais, Abitibi-Ouest) : Merci. Députée de
Laviolette—Saint-Maurice.
Vous disposez... il vous reste 3 min 15 s.
Mme Tardif :
Merci, Mme la Présidente. Merci, Mme la Présidente. C'est intéressant. Et vous
êtes quand même assez brave de venir.
Je vous félicite, premièrement, parce que, de ce que je lis, je comprends, et
c'est quand même assez complexe... Et je me mets à la place de M., Mme
Tout-le-monde, aussi, aujourd'hui, c'est un domaine qui est complexe, et il y a plusieurs intrants, dans le calcul,
qu'il faut mettre, donc, pour arriver à une bonne conclusion. Mais ce que j'en
conclus, c'est que vous êtes contre
toute modification de ce qui se fait actuellement et que vous voudriez que la
régie demeure telle quelle et qu'Hydro-Québec demeure telle quelle.
Parce que, là, je n'ai pas été capable de ressortir...
Et j'aimerais
que vous nous parliez, parce que nous, on fait ça pour améliorer les choses,
pour remettre de l'argent aux citoyens. Et, de la façon que vous nous le
représentez, notre bonne action, on pense qu'on fait une bonne action, ça
a l'air négatif. Ça a l'air de dire :
De toute façon, vous l'auriez donné quand même, ça nous était dû. De toute
façon, c'est la régie qui doit gérer
Hydro-Québec. Est-ce qu'Hydro-Québec est si épeurante que ça? Est-ce
qu'Hydro-Québec a besoin autant de
chien de garde que ça? Est-ce que vous ne faites pas confiance? Est-ce que vos
hypothèses de départ, pour la recherche, sont parties d'une façon... je ne dirais pas biaisée, mais tendancieuse
par rapport à un haut risque? Est-ce que, si on ramène ça à la réalité...
Alors, je veux vous entendre, là. Je suis M., Mme Tout-le-monde, là, parce que
j'ai un peu peur, là, en vous entendant, là.
M. Schepper
(Bertrand) : En fait, vous me demandez si... En fait, je vois deux
questions dans ce que vous me posez.
D'une part, la première, c'est : Est-ce qu'Hydro-Québec, à elle seule,
peut s'autoréguler, d'une certaine manière? Et l'autre question serait un peu : Comment on pourrait
améliorer la Régie de l'énergie? Voyons ça comme ça, là, c'est ce que
j'entends.
Mme Tardif : Exact, exact.
M. Schepper (Bertrand) : Pour
ce qui est d'est-ce qu'Hydro-Québec peut s'autoréguler, et c'est vrai partout
dans le monde et dans toutes les juridictions, je vous dirais non. Je veux
dire, c'est une société d'État, c'est un monopole d'État. Et, bien qu'avec toutes les bonnes intentions du monde, c'est un
dossier... c'est extrêmement complexe, vous l'avez dit vous-même.
Historiquement, si on a créé la Régie
de l'énergie, c'est justement parce qu'Hydro-Québec était capable de dire tout et son contraire devant les
parlementaires et que les parlementaires, pour différentes excellentes raisons,
n'ont pas le temps ou la capacité...
Mme Tardif : Et, par rapport à
la régie, comment faire pour qu'elle devienne...
M. Schepper (Bertrand) : Et par
rapport à la régie... En fait, j'ai commenté le projet de loi ici...
Mme Tardif : ...plus agile, ou
plus malléable, ou plus adaptée?
M. Schepper (Bertrand) : Il y a
certainement des choses à faire, qu'on peut faire avec la Régie de l'énergie. Pour être franc, je n'ai pas réfléchi dans cette
manière-là, puisque je commentais le projet de loi. Il faudrait que j'y
réfléchisse, mais il y a certainement
des manières. À la limite, vous voulez diminuer des frais, je peux peut-être
comprendre, je trouve que les frais ne sont pas très élevés par rapport
à ce que la régie fait, mais...
La Présidente (Mme Blais,
Abitibi-Ouest) : Je vous invite à conclure, il reste 15 secondes.
M. Schepper
(Bertrand) : O.K. Mais, en fait, il y aurait moyen de réfléchir et
faire un projet de loi sur la régie, et je pense qu'il y a une commission qui
va s'y pencher avant longtemps, donc, à ce moment-là, peut-être que là il y
aura manière de réfléchir à la chose un peu plus différemment. Je suis
désolé...
Mme Tardif : Merci.
La Présidente (Mme Blais,
Abitibi-Ouest) : J'invite l'opposition officielle.
M. Polo : Merci.
La Présidente (Mme Blais,
Abitibi-Ouest) : Député...
M. Polo : De Laval-des-Rapides.
La Présidente (Mme Blais,
Abitibi-Ouest) : ...de Laval-des-Rapides, merci, monsieur...
M. Polo : Merci beaucoup.
Merci, M. Schepper, c'est bien ça?
M. Schepper (Bertrand) : Oui.
M. Polo : Bon, écoutez, je vais
poursuivre sur la question de ma collègue de Saint-Maurice, effectivement, peut-être vous laisser, peut-être, élaborer un peu
plus sur pourquoi on en est rendus là, où les gens se questionnent, justement,
sur la pertinence... mais, en fait, pas sur
la pertinence, sur l'érosion des pouvoirs de la régie et qu'est-ce qui est
peut-être tendancieux, disons, dans
le projet de loi n° 34, où la révision à chaque cinq ans est, en fait, une
atteinte même, un, à la transparence
du processus, à l'accès à l'information et, si on peut dire, à rassurer le
public sur encadrer un monopole d'État qui,
comme on le sait, bon, c'est un monopole, n'a pas de concurrence. Donc,
peut-être élaborer un peu plus pour que ma collègue de Saint-Maurice
puisse également se faire une tête.
M. Schepper (Bertrand) : Bien,
en fait, historiquement, on a mis la régie en place, entre autres, parce qu'on voulait... Comme je le disais, les
parlementaires... on avait l'impression que, parfois, on politisait un peu trop
les questions des tarifs d'hydroélectricité. Notamment, on pouvait faire
des promesses électorales de baisser ou diminuer les tarifs plutôt que les impôts, il y avait des enjeux. Les
tarifs d'hydroélectricité sont plus régressifs, en fait, que l'imposition. Donc,
il y avait ces enjeux-là.
Et, à terme, pour réussir à faire des
exportations d'énergie, dans les années 90 on a décidé de mettre en place la Régie de l'énergie, qui devait statuer sur
Hydro-Québec, plus principalement dans le cas de faciliter les exportations, le
transport. Or, à travers les années... en
fait assez rapidement, on a retiré d'Hydro-Québec... du statut de la régie
Hydro-Québec Production, et, en fait,
aujourd'hui, le rôle de la régie est de vérifier si les tarifs sont justes et
raisonnables chez Hydro-Québec Transport et Distribution. Or, ce qui
arrive, et comme je l'explique dans mon mémoire, lorsqu'on donne trop de
latitude à Hydro-Québec, et ce n'est pas...
ou n'importe quel autre distributeur d'énergie, hein, ce n'est pas Hydro-Québec
en soi le problème. Je crois en leur
bonne foi, malgré qu'il faut l'admettre, en termes de transparence, ils n'ont
pas toujours gagné des prix, et même au contraire. Et donc, à ce
compte-là...
• (16 h 10) •
Et, veux veux
pas, ils en connaissent plus que la vaste majorité d'entre nous sur leurs
propres activités, de manière évidente,
en fait. Et, si on faisait à chaque cinq ans des causes annuelles... «des
causes annuelles», des causes tarifaires, pardon, en fait, à ce moment-là, ce qu'on vient faire,
c'est rendre encore plus facile pour Hydro-Québec de jouer dans les différents
tarifs et dans les différentes dépenses. Et
ensuite la régie, qu'elle le veuille ou qu'elle ne le veuille pas, ne pourra
pas déceler l'ensemble des enjeux qui sont là comme elle le fait
aujourd'hui.
Est-ce que la
Régie de l'énergie est parfaite aujourd'hui? Certainement pas, comme aucune
institution qu'on a, mais elle a l'avantage de pouvoir, un, avoir une forme
d'expertise qui se renouvelle année après année, mais aussi être capable
de tenir... faire face à Hydro-Québec, qui,
bien... que ce soit de la bonne ou de la mauvaise foi, je pense que c'est de la
bonne foi, a comme principal intérêt réussir
à vendre le plus d'énergie possible et d'augmenter ses marges le plus possible.
Et à la limite, en tant qu'actionnaire, le gouvernement a ce même intérêt là.
Donc, la juridiction de la régie, qui est indépendante, à mon avis, est
primordiale.
M. Polo :
Merci. À la page 3, vous dites... vous titrez : La prévisibilité
cache des hausses non nécessaires. D'autres groupes sont venus dire que, justement, ils craignent que le fait que
les causes tarifaires seraient étudiées seulement aux cinq ans non seulement n'élimine pas la
possibilité d'avoir des trop-perçus, mais au contraire vient, si on peut dire,
brouiller les cartes et vient empêcher ou même rendre presque impossible
de déceler ou de déterminer s'il y a des trop-perçus. Vous faites à peu près la même conclusion, là. C'est que la supposée
prévisibilité sur cinq ans en réalité vient avec des vices cachés.
M. Schepper
(Bertrand) : Bien, en fait, elle le rend beaucoup plus complexe, ça,
c'est certain, en fait. Et, à ce moment-là,
ça ne veut pas nécessairement dire... je ne parlerais pas de vice caché ou de
danger à ce niveau-là. Ce que je pense,
c'est que c'est plus compliqué pour un... n'importe quelle institution, en
fait, de bien comprendre si, par exemple... Supposons qu'on est dans la... en 2025 ou en 2024,
disons, on est en 2024, cause tarifaire, la régie doit statuer si les données
présentées pour 2029 sont les meilleures, si
les dépenses demandées par Hydro-Québec sont les bonnes. À mon sens, c'est
presque impossible d'être capable d'être «pinpoint» sur le bon montant et
d'être capable de déterminer si, par exemple...
Pour
prendre un exemple, prenons le contrôle de la végétation, par exemple, là. Si
le travail, en 2022 ou 2023, de contrôle de la végétation, même si on a les
données, a été suffisamment bien fait de sorte à ce que, si en 2028, on me
demande, en contrôle de la végétation, je ne sais pas, moi, le même montant
qu'en 2024 plus 1,25... plus 125 %, disons, comment statuer ce qui est
juste et raisonnable et comment statuer que, si on demande ici 125 %, ce
n'est pas parce qu'il y a trois ans on n'a
pas fait suffisamment? Ça, pour une régie, ça va être à peu près impossible à
faire sur une question de cinq ans comme ça.
Et, pour être franc,
ce n'est pas de la mauvaise... bien, en fait, c'est une manière de fonctionner.
C'est vrai dans plusieurs juridictions. J'ai
travaillé à négocier, par exemple, des mécanismes incitatifs chez Gaz Métro à
l'époque où il y en avait un, qui est un petit peu un système similaire pour
essayer de faire un allègement réglementaire, et, en fait, il était impossible de bien travailler, de bien assurer. Et
la régie a statué la même chose, que, finalement, la société civile était bien
représentée dans ce type d'événement là et
dans ce type de manière de faire, parce qu'il y a, veux veux pas, une asymétrie
d'information dans ce qui est présenté, et c'est le distributeur qui a le gros
bout du bâton, à ce niveau-là.
M. Polo :
Excellent. Vous parlez, là, du 500 millions de dollars, et d'autres l'ont
mentionné avant. En fait, c'est juste
un devancement d'un retour aux consommateurs d'un montant d'argent qui allait
de toute façon être remboursé au cours
des trois à cinq prochaines années. Donc, ça vient un peu démonter, là,
l'argument que les trop-perçus, le 1,5 milliard des trop-perçus
allait être remboursé ou va être remboursé grâce au projet de loi n° 34.
Vous,
est-ce que vous croyez... Parce qu'il y a un autre groupe, ici, qui a dit
que... Je vais vous le citer, là, la Fédération canadienne des contribuables a dit : «Le raisonnement selon lequel
le gel tarifaire proposé pour [...] 2020 signifierait une épargne de 1 milliard de dollars sur cinq
ans — ce
raisonnement — repose
sur des prémisses boiteuses.» Est-ce que vous, vous considérez... Quelle
est votre interprétation, votre analyse sur cet argument que le
1 milliard, compte tenu du gel tarifaire
en 2020 et étiré sur une période de quatre ans supplémentaires, finalement, ça
s'additionne à 1 milliard de dollars qui est retourné aux
consommateurs?
M. Schepper
(Bertrand) : Bien, en fait, pour le 1 milliard, j'aurais tendance
à dire qu'il n'y a rien... la démonstration ne m'apparaît pas valide, en fait.
Je ne comprends pas comment on peut arriver de manière... Avec les
démonstrations, avec ce qui a été
présenté par Hydro-Québec aussi, en fait, c'est des prétentions plus que toute
autre chose, à ce compte-ci. À mon avis, il n'y a rien qui démontre
correctement que c'est bien fait.
M. Polo :
O.K. Parfait. Donc là, on est rendu où l'argument de la prévisibilité ne tient
plus la route. Le 1 milliard est,
par certains groupes, basé sur des prémisses boiteuses. Dans votre cas à vous,
vous soutenez, vous appuyez cet argument-là également. Et, d'une part, le ministre nous explique, à travers son
projet de loi, que de le coller à l'indice des... ou, si on peut dire, à l'inflation, ça va permettre aux familles
d'avoir... la prévisibilité va leur permettre de pouvoir mieux planifier leur
budget sur une base annuelle. Vous, qu'est-ce que vous en pensez?
M. Schepper
(Bertrand) : Bien, en fait, comme j'ai dit plus tôt, en fait, à mon
avis, je doute que n'importe qui, ici
ou ailleurs, préfère de la prévisibilité à une baisse tarifaire dans le cas
d'Hydro-Québec, qui est, je le rappelle, une des rares énergies... Au Québec, on est en bonne partie au chauffage,
l'énergie résidentielle, du moins, est au chauffage, est une des données... On a moins de capacité à diminuer
nos coûts en diminuant la consommation d'énergie, vu que l'élasticité prix
n'est pas particulièrement élevée, à ce compte-là. Donc, en fait, les gens ont
une facture qui est reliée assez rapidement à
leur facture d'électricité, et, à ce compte-là, je vois très... je ne vois pas
comment on pourrait préférer la prévisibilité, du moins en résidentiel
et en petit commercial, à une baisse de tarifs.
M. Polo :
Et, au-delà de l'échéance de cinq ans, selon vous, pensez-vous qu'on pourrait
vivre, dans certains scénarios, là, comme
vous l'avez dit, soit des hivers plus rigoureux, soit des phénomènes
environnementaux... Pensez-vous qu'on pourrait subir des chocs tarifaires?
M. Schepper
(Bertrand) : Bien, en fait,
comme j'ai dit, je ne vois pas l'avenir, mais dans la... Si j'ai raison, à ce
compte-là, il n'y aura pas nécessairement
de choc tarifaire, mais, je veux dire, si je me trompe, ça pourrait arriver. Si
je suis complètement dans l'erreur, ce n'est pas impossible que, dans
cinq ans, finalement, il y ait des chocs importants. En fait, le mécanisme,
tel qu'il est présenté ici, ne permet pas d'enlever cette éventualité-là. C'est
ce que je dis, c'est ce qui est
amené. Ça ne veut pas dire qu'il n'y a pas moyen de faire autrement. Mais, dans
le cas qui nous occupe ici, il pourrait y avoir un choc tarifaire.
Pour
revenir sur la prévisibilité, en fait, je ramènerais à l'idée que les raisons
pourquoi les tarifs d'Hydro-Québec
ont le plus augmenté dans les... je dirais
au moins dans les sept ou huit dernières années, mais disons dans les
15 dernières années pour
l'argument ici, c'est à cause des décisions gouvernementales. Si vraiment
on veut être le plus prévisible possible tout en maintenant, disons, des
baisses de tarifs... ou, du moins, aider la clientèle, on pourrait très bien
déterminer que l'actionnaire
principal diminue la contribution qu'il reçoit reliée au choc tarifaire ou à l'augmentation des tarifs qui serait non volontaire. Et à ce compte-là, il y a
d'autres moyens pour essayer de faciliter la prévisibilité. Je vous
soumettrais, personnellement, que je ne pense pas que le statu quo est problématique,
et donc, à mon sens, je ne vois pas pourquoi...
La Présidente (Mme Blais,
Abitibi-Ouest) : Il reste 15 secondes.
M. Schepper
(Bertrand) : Je ne vois pas pourquoi on souhaiterait la prévisibilité
sur la baisse des tarifs.
La
Présidente (Mme Blais, Abitibi-Ouest) : Merci. Maintenant, j'invite le deuxième groupe de l'opposition,
la députée de Mercier. Vous
disposez de 2 min 45 s.
Mme Ghazal : Merci, Mme
la Présidente. Merci pour votre
présentation. Vous avez, tout à
l'heure, dit qu'il ne faut pas
présumer de la mauvaise foi d'Hydro-Québec, puis, tout à fait, j'en suis, ce n'est pas ça,
l'objectif. Mais le ministre
est comptable, moi aussi, j'ai étudié en
comptabilité, puis un des points, c'est qu'on peut être tenté par cette façon de faire, au lieu qu'il y ait
des causes tarifaires chaque année, de les faire aux cinq ans. Hydro-Québec pourrait être tentée, pour répondre à ses intérêts, de ne pas investir et de ne pas augmenter les dépenses
au moment opportun, dépendamment... en fonction des projets.
Puis là j'essaie de
comprendre, ici, la partie où vous dites, dans votre mémoire, que... J'aimerais
que vous nous expliquiez cette tactique, c'est-à-dire de mettre les dépenses... d'estimer où est-ce qu'ils vont mettre les
dépenses, dépendamment... avant ou
après les cinq ans. «Cette tactique lui permettrait d'empocher une plus grande
part de profits à l'année 5 et de justifier, lors de la cause tarifaire de
la Régie de l'énergie, des tarifs plus élevés [...] à l'année 6
[et] 7», et les clients ne pourraient,
après ça, bénéficier de la correction qu'encore cinq ans plus tard. Donc,
j'aimerais que vous nous expliquiez cet aspect-là et ce risque-là.
M. Schepper
(Bertrand) : Bien, en fait,
supposons, d'une année 1 à l'année 10, là, pour que ce soit plus
simple, et la cause tarifaire se ferait à l'année 5. Donc, supposons qu'Hydro-Québec a des dépenses, comme elle en a toujours, donc prenons le
contrôle de la végétation, là, pour le plaisir, c'est si passionnant,
supposons, le contrôle de la végétation, on aurait besoin de, je dis
n'importe quoi, 1 million de dollars en contrôle de la végétation à chaque
année, mais...
Mme Ghazal :
Ou pensons même aux bornes électriques, aux bornes électriques, par exemple,
pour l'environnement, l'électrification des transports, admettons.
M. Schepper
(Bertrand) : Oui. Je ne suis pas certain que ça rentrerait dans ces
comptes-là.
Mme Ghazal :
Non? O.K.
• (16 h 20) •
M. Schepper
(Bertrand) : Mais, disons,
supposons qu'on a besoin de 1 million
de dollars, à peu près,
donc, par année. Des fois, ce serait
900 000 $, des fois ce serait 1,2 million, par exemple, c'est à voir. Mais supposons qu'à l'année 4 on arrive avec 900 000 $, alors qu'on
aurait dû donner 1 million de
dollars, c'est très difficile à
déceler, la différence qui est là. Il y aurait
des justifications qui seraient données par Hydro-Québec lors des
différentes... des lieux où ils ont à déposer des explications. Ce serait bien compliqué de déceler pourquoi ce
900 000 $ là cette année, alors que c'était 1 million l'année
dernière, puis... C'est à voir.
Or,
Hydro-Québec, si, par exemple, ces besoins-là, ça devrait être fait, en fait, à
l'année 4, mais on dit... En fait, on va arriver à l'année 6, on va
dire : On veut 1,1 million pour cette année 6 là, en fait, c'est des dépenses qui n'auraient pas
été faites à l'année 4 qu'on va passer à l'année 6. Or, qu'est-ce qui
arriverait à l'année 4, Hydro-Québec aurait une augmentation de ses revenus...
aurait des revenus et une baisse de ses dépenses, aurait donc augmenté sa marge...
La Présidente
(Mme Blais, Abitibi-Ouest) : Je vous invite à conclure.
M. Schepper
(Bertrand) : ...et, à
l'année 6, en fait, pour arriver devant la régie et demander plus de
tarifs pour être capable d'égaler ses
besoins de 1,6 million, et donc augmenterait les tarifs, ce qui, à
terme, lui permet d'avoir la même marge que qu'est-ce qu'elle aurait, et,
au final, c'est la clientèle...
Mme Ghazal :
Qui est perdante.
M. Schepper
(Bertrand) : ...qui est perdante là-dedans.
La
Présidente (Mme Blais, Abitibi-Ouest) : Merci. Maintenant, j'invite le troisième groupe de l'opposition,
le député de René-Lévesque.
M. Ouellet : Merci beaucoup. À mon tour. Vous connaissez ce graphique-là?
C'est ce qui justifie un peu le projet
de loi en question, c'est-à-dire de promettre au bout de cinq ans 1 milliard de retour d'argent dans les poches des Québécois plus le 500 millions, donc ce qui fait le 1,5 milliard de trop-perçus. Elle est basée sur une prémisse
qui dit que les prévisions d'inflation
sont à 1,7 %. Si l'inflation est en bas de 1,7 %,
êtes-vous d'accord avec moi qu'il n'y
aura pas d'économie de 1 milliard avant cinq ans?
M. Schepper
(Bertrand) : Oui.
M. Ouellet :
Ça va être plus tard que cinq ans?
M. Schepper (Bertrand) :
Bien, en fait, ça dépend comment le projet de loi pourrait être mené, si c'est
1 milliard qui est enchâssé ou
non. Mais, si c'est seulement, strictement basé là-dessus... En fait, si
l'inflation est plus basse que 1,7 %, effectivement, oui. Et, si
c'était dans le statut actuel, bien, en fait, il y aurait une baisse de tarif
plus rapidement.
M. Ouellet :
Une autre question très rapide. Dans les couloirs, les gens jasent sur ce
projet de loi là, et ça donne l'impression...
en tout cas, on essaie de nous le vendre en disant : Écoutez,
Hydro-Québec, dans la fixation des tarifs pour la régie, ce n'est pas
compliqué, voici ce que ça a coûté en termes d'investissement, on applique le
montant plus une augmentation pour arriver à un certain niveau de revenus
acceptable. Là, on nous dit : Non, non, maintenant qu'ils sont fixés, ils vont connaître leurs revenus, et
ils devront être de meilleurs gestionnaires, et ils vont moins demander
d'argent, pour, finalement, économiser
au bout de la ligne. Donc, le Québécois moyen va voir sa société d'État plus
efficace. Êtes-vous d'accord avec cette affirmation-là?
M. Schepper
(Bertrand) : Bien, non, si, par exemple, justement, on aurait une
tendance avec une inflation qui est plus faible que 1,7 %.
M. Ouellet : O.K. Dans ce calcul-là, évidemment, on ne fait pas mention... Parce
qu'on dit : Écoutez, on le met à l'inflation.
Mais on sait que, par le passé, sur ce graphique-là, lorsqu'on faisait la
comparaison de l'inflation par rapport aux hausses d'Hydro-Québec... On
oublie qu'au tournant des années 2003, 2004, 2005, il y avait de gros
investissements, notamment le projet de La
Romaine. Donc, si Hydro-Québec n'a pas de grands projets d'investissement, on
aurait pu s'attendre à ce que les demandes auraient été plus basses
quant à l'augmentation des tarifs. Est-ce que c'est faux de penser ça?
M. Schepper
(Bertrand) : Bien, en fait, on pourrait effectivement croire ça,
puisque les coûts proviennent d'Hydro-Québec Production à peu près à 50 %.
Effectivement, on pourrait se dire ça.
Ceci
dit, j'ajouterais aussi que, si la régie n'avait pas été là lors de ces
années-là, en fait, les demandes d'Hydro-Québec supplantaient de beaucoup les décisions qui ont été prises par la régie
et que les tarifs auraient augmenté de manière plus rapide.
M. Ouellet : Selon vous, avec l'arrivée du bloc de 500 mégawatts disponibles
pour la cryptomonnaie, avec le retour d'ABI,
grand consommateur, plusieurs térawattheures, entre autres, est-ce que ça, ça
va augmenter les revenus d'Hydro-Québec?
M. Schepper
(Bertrand) : Ça va augmenter les...
La Présidente
(Mme Weil) : Il reste 20 secondes.
M. Schepper
(Bertrand) : Ça va augmenter les revenus d'Hydro-Québec et diminuer,
en fait... et ses dépenses n'augmenteront pas de manière équivalente. Donc, il
va y avoir plus de revenus que de dépenses qui vont être générés.
M. Ouellet :
Et de quelle façon on a la certitude que ce sera un meilleur gestionnaire?
M. Schepper
(Bertrand) : Je n'en vois pas.
M. Ouellet :
Merci.
La Présidente
(Mme Weil) : Alors, je vous remercie, M. Schepper, pour
votre contribution aux travaux de la commission.
Je suspends les
travaux quelques instants afin de permettre au prochain groupe de prendre
place.
(Suspension de la séance à
16 h 24)
(Reprise à 16 h 26)
La Présidente (Mme Weil) : Alors, nous reprenons nos travaux pour entendre
la Fédération canadienne de
l'entreprise indépendante. Alors, je vous souhaite la bienvenue. Je vous
rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, et nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous
présenter, ainsi que les personnes qui vous accompagnent, et à procéder
à votre exposé. La parole est à vous.
Fédération canadienne de
l'entreprise indépendante (FCEI)
M. Jeyabalaratnam (Gopinath) : Merci, Mme
la Présidente. M. le ministre de l'Énergie et des Ressources naturelles, Mmes
et MM. les députés, permettez-moi tout d'abord de remercier la commission d'avoir invité la FCEI
à faire entendre la voix des PME dans le cadre des audiences sur le projet
de loi n° 34.
Je
me présente, Gopinath Jeyabalaratnam, conseiller aux affaires économiques et gouvernementales de la Fédération
canadienne de l'entreprise indépendante. Depuis maintenant six mois, j'ai le
privilège de représenter 24 000 membres PME dans toutes les industries et toutes les régions du Québec.
Comme vous le savez, les PME jouent un rôle inestimable à la création de la richesse au Québec.
99 % de nos entreprises sont des PME, et plus d'un emploi sur deux sont
dans les PME.
Aujourd'hui,
je suis accompagné par M. André Turmel, avocat spécialisé en droit de
l'énergie chez Fasken Martineau DuMoulin, et
M. Antoine Gosselin, économiste spécialisé sur les questions de l'énergie.
Ces deux personnes représentent la
FCEI sur différents dossiers à la Régie
de l'énergie depuis maintenant
plusieurs années. Étant moi-même nouveau dans le dossier de l'énergie,
MM. Turmel et Gosselin m'appuieront dans mon intervention devant vous aujourd'hui.
La FCEI a porté une
grande attention au projet de loi n° 34, car le coût
de l'énergie demeure parmi les premières préoccupations
de nos chefs d'entreprise. Les PME, qui paient déjà plus cher pour leur
électricité que d'autres groupes tarifaires en raison de l'interfinancement que la loi nous empêche de corriger,
voient d'un très mauvais oeil les dispositions prévues dans le projet de loi n° 34. D'ailleurs, quatre chefs d'entreprise sur cinq demandent au gouvernement de donner plus de pouvoirs de surveillance d'Hydro-Québec à la Régie
de l'énergie, pas moins.
La FCEI a soumis une
analyse détaillée à cette commission et nous souhaitons aujourd'hui vous
partager nos inquiétudes et offrir nos pistes de solution.
D'emblée,
nous souhaitons mentionner que la FCEI appuie l'intention poursuivie par le projet de loi de retourner les trop-perçus
aux PME et aux autres consommateurs. Après tout, c'est leur argent et ça leur
appartient. Cependant, nous nous
questionnons sur la manière de le faire et sur les conséquences qu'elle aura
sur la transparence d'Hydro-Québec et sur
le processus d'établissement des tarifs d'électricité. En effet, notre analyse
du projet de loi n° 34
nous a permis de réaliser qu'une demi-douzaine de mesures qui assurent depuis plus de 20 ans
la transparence, l'indépendance et la rigueur de la gestion
d'Hydro-Québec dans l'établissement des tarifs d'électricité seront
possiblement évacuées.
La proposition de remplacer le processus annuel d'examen et
de fixation des tarifs d'électricité devant la régie par un examen tous les
cinq ans et une indexation annuelle des tarifs à l'inflation entre les examens
ne nous rassure pas. Nous évaluons qu'elle entraînera des coûts additionnels de 124 millions
pour les clients dès l'année prochaine et de 560 millions pour la période de 2020 à 2024. Cette proposition présente
un risque beaucoup plus important pour les clients en termes de rendement
excessif et de qualité de service, par exemple en éliminant le mécanisme de
partage des trop-perçus, en éliminant les
pénalités financières associées à la dégradation de qualité de service et en
réduisant la flexibilité de la stratégie tarifaire par l'introduction de
nouvelles contraintes.
Malgré sa dénomination, le projet de loi n° 34 a une
portée qui va bien au-delà de la simplification de la tarification de l'électricité. En effet, les
différentes dispositions qu'il contient réduisent considérablement les projets
de surveillance qu'exerce la régie sur les activités de distribution et
dans des dimensions qui dépassent largement la fixation de tarifs.
De plus, le projet de loi soustrait Hydro-Québec d'un examen
externe indépendant de ses investissements, de ses
programmes commerciaux et de sa performance autant financière qu'au niveau de
sa qualité de service.
Enfin, il élimine les garde-fous mis en place par la régie
pour éviter que le trop-perçu excessif observé ces dernières années soit remis aux clients.
Si
l'intention sérieuse est d'améliorer la prévisibilité des tarifs d'électricité
et de remettre les trop-perçus de 1,5 milliard
de dollars aux clients, la meilleure manière, selon nous, d'y parvenir est de
le faire à travers la régie en lui partageant ces préoccupations avant qu'elle l'intègre dans ses services... dans ses
activités de fixation de tarifs. Merci de votre attention. Je cède la
parole à M. Antoine Gosselin.
• (16 h 30) •
M. Gosselin
(Antoine) : Bonjour. Il a été question ces derniers jours de la
comparaison entre l'inflation et la croissance des tarifs historiques.
J'aimerais revenir sur ce sujet.
D'emblée,
je vous dirai que, selon nous, la comparaison simple de l'inflation et de la
croissance des tarifs passée est très
peu informative quant à l'évolution future des tarifs et doit être considérée
avec beaucoup de prudence. En effet, l'évolution de tarifs est affectée à travers le temps par
toutes sortes de facteurs ponctuels qui faussent la comparaison et son
utilité pour prédire le niveau de croissance appropriée des tarifs dans le
futur.
Prenons,
par exemple, l'évolution des tarifs depuis 2003, qui a été mentionnée à plusieurs
reprises dans le cadre de cette commission.
Le graphique qui se trouve à la dernière page de notre rapport montre... de
notre mémoire, montre la croissance des tarifs, c'est la ligne bleue pleine, et l'inflation, qui
est la ligne rouge, depuis 2004. Donc, c'est semblable à ce qui vous a été présenté cette semaine. On y a
ajouté l'information sur le rendement d'Hydro-Québec, qui montre notamment une perte de 105 millions en
2003 et un bénéfice de 254 millions en 2004.
Lorsqu'Hydro-Québec s'est présentée pour la
première fois devant la régie en 2003, il lui a évidemment demandé de rétablir un rendement raisonnable selon les
normes de la réglementation. Ce rattrapage de 359 millions représente la
quasi-totalité de la hausse tarifaire
observée en 2004. La situation déficitaire de 2003 n'était pas étrangère au gel
des tarifs de 1998 à 2003, et, de
toute évidence, nous sommes dans une situation très différente aujourd'hui,
alors qu'Hydro-Québec réalise, ces dernières années, des rendements plus
qu'appréciables.
La
ligne pointillée sur le graphique représente la croissance des tarifs depuis
2003 corrigée de cet effet. On peut voir que la situation est très différente
une fois cette correction appliquée, alors que les tarifs auraient entraîné des
coûts moindres que l'inflation. C'est
probablement pour cette raison qu'Hydro-Québec, dans ses dossiers tarifaires et
son rapport annuel, utilise
l'évolution des tarifs et de l'inflation à partir de 1998 pour démontrer que
ses tarifs évoluent moins vite que l'inflation.
Un
autre facteur qui a affecté de manière considérable l'évolution des tarifs sur
cette période est l'imposition par le gouvernement d'approvisionnements
postpatrimoniaux non requis qui, selon nous... qui, selon la Vérificatrice
générale, auraient entraîné des coûts
supplémentaires à la clientèle de 2,5 milliards de dollars. L'arrivée de
ces approvisionnements a eu des
effets particulièrement importants en 2006, 2013, 2014 et 2015. La ligne bleue
en tirets représente l'évolution des tarifs excluant l'impact de ces
approvisionnements sur la hausse tarifaire pour ces quatre années. D'autres
facteurs faussant la comparaison pourraient également être identifiés,
dont notamment les trop-perçus.
Ce graphique
démontre bien que la comparaison historique simple entre l'inflation et les
tarifs ne peut pas servir de base sérieuse pour établir une croissance
anticipée des tarifs. C'est pour cette raison que la manière la plus fiable
de se projeter vers
l'avant, c'est d'utiliser l'information disponible grâce au processus
réglementaire actuel et qui nous informe sur l'évolution anticipée des coûts et des ventes, ce que nous avons
fait, et qui permet de démontrer l'avantage financier du modèle actuel.
La ligne en tirets bleue montre aussi que
l'évolution des tarifs est beaucoup plus stable et prévisible lorsque l'on
élimine l'effet des interventions politiques. En fait, ce sont les
interventions politiques qui ont historiquement été la cause du manque de
stabilité et de prévisibilité tarifaires.
Je passe la parole à Me Turmel.
M. Turmel (André) : Bonjour.
La Présidente (Mme Weil) : Vous
avez deux minutes.
M. Turmel
(André) : Comme juriste
pratiquant dans le domaine de l'énergie depuis plus de 20 ans au Québec et
à l'étranger, j'aimerais vous offrir mes perspectives sur ce projet de loi.
J'ai été un
des premiers avocats recrutés à l'interne de la régie en 1998. La raison de mon
embauche? À titre de procureur qui provenait de la couronne, l'objectif
était de pouvoir challenger avec une équipe d'experts financiers, économistes
et ingénieurs à l'interne les témoins et les
prétentions d'Hydro-Québec. Puis j'ai continué à faire de même en cabinet
privé pour la FCEI et d'autres
clients. Et j'oeuvre maintenant à l'international, notamment en rédigeant des projets de loi dans d'autres pays, sur des lois qui créent des autorités comme
la Régie de l'énergie.
M. le ministre, le projet de loi n° 34 que vous avez déposé n'est pas nécessaire
pour l'objectif que tous partagent, soit le retour des trop-perçus.
Il est toutefois déraisonnable pour les cinq raisons qui suivent.
Il vient tuer dans l'oeuf l'ingrédient essentiel
à la fameuse prévisibilité que vous cherchez tant, je parle de la transparence. La transparence, dans un domaine
aussi technique que la régulation économique,
ne peut se faire seulement qu'avec un
beau rapport annuel ou des séances de photos où tous se déclarent satisfaits
sans avoir posé les vraies questions. On le fait plutôt en posant des
questions et en exigeant des réponses. C'est ce que fait la régie depuis
20 ans.
Dans la
plupart des pays de l'OCDE et des pays où je travaille pour la Banque mondiale,
le seul modèle qui est retenu et
souhaitable est une régie de l'énergie indépendante, qui peut poser les vraies
questions de manière répétée et en toute
transparence. C'est ce qui mène à la prévisibilité, car l'information, la bonne, elle, circule. Personne ne gagne si on se
contente de la prévisibilité simpliste, qui
est celle de fixer à l'avance une hausse des taux, à l'inflation ou autre, mais
qui cache en réalité... qui pourrait
amener une baisse des tarifs, comme démontreront la Régie de l'énergie dans le
dossier qui a été déposé récemment devant elle.
Le projet de
loi n° 34 va à contre-courant de manière inexpliquée, sauf pour la
question des trop-perçus, qui peut se régler
avec les pouvoirs actuels, va à contre-courant du sens commun qui est d'exiger
des redditions de comptes clairs et nets à Hydro-Québec . Je vous
remercie.
La
Présidente (Mme Weil) :
Alors, je vous remercie pour votre exposé. Nous allons maintenant commencer la
période d'échange. M. le ministre, la parole est à vous.
M.
Julien : Oui. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci pour votre
présentation. M. Turmel, quand vous parlez de trop-perçus, vous
parlez d'écarts de rendement?
M. Turmel (André) : Notamment.
M. Julien : Il y a d'autres choses,
dans les trop-perçus, que vous mentionnez?
M. Turmel (André) : Non.
M. Julien : Merci. Donc, on parle de
mécanismes d'écart de rendement. O.K. Ici, il y a marqué, dans votre document : «Contrairement à ce que semblent
suggérer les communications d'Hydro-Québec et du gouvernement, le projet
de loi n° 34 — c'est en haut de la page 10 — ne rembourse pas aux Québécois le
1,5 milliard d'excédents de rendement accumulés entre 2005 et
2017.» Quand est-ce qu'on a eu cette prétention-là, au
gouvernement?
M.
Gosselin (Antoine) : Bien,
moi ce que je comprends, là, des communiqués que le gouvernement a émis, de
ce qu'Hydro-Québec a émis, c'était que le projet de loi permettait de
rembourser les trop-perçus de 1,5 milliard aux consommateurs
d'électricité.
M.
Julien : Donc, vous avez eu des communiqués à cet effet-là. O.K. Nous,
ce qu'on mentionne, c'est qu'on fait, en fin de compte, un projet de loi n° 34 qui vise à retourner, effectivement, 1,5 milliard à la clientèle
d'Hydro-Québec via deux mesures,
comme on a mentionné : le remboursement de 500 millions, qui sera
remboursé à la fermeture des comptes selon
la valeur exacte, et après ça le gel tarifaire, qui, effectivement, j'entendais
mon collègue tantôt questionner, est sur une base de 1,7 % d'inflation. Alors, toutes choses étant égales,
par ailleurs, si c'était 2,3 %, ce serait beaucoup plus, si c'était 1,3 %, ce serait moins.
Naturellement, c'est projeté sur cinq ans, pour la fin de l'exercice. Un gel
tarifaire qui se répercute ad vitam
aeternam fait toujours des petits parce que ça vise à corriger essentiellement
l'écart observé dans le passé entre l'inflation et le tarif réellement
chargé.
Quand
vous mentionnez également... J'ai bien entendu, puis je ne dis pas que c'est
faux, ce que vous dites, c'est que
l'évolution tarifaire de la clientèle est due à plein de facteurs, plein de facteurs
qui ne sont pas nécessairement corrélés parfaitement avec l'inflation : les décisions politiques, que vous
avez mentionnées, les choix d'investissement, effectivement. Mais à terme, moi, là, quand je parle à la
clientèle, la clientèle, elle, ce qu'elle vit, là, elle vit une hausse
tarifaire, malgré tous les facteurs
que vous mentionnez, qui est légèrement supérieure à l'inflation. Mais vous
dites que... puis je voudrais vous
entendre là-dessus, vous dites que la fixation à l'inflation corrigée aux
60 mois, ce n'est pas une façon sérieuse de faire. La façon sérieuse de faire, c'est la cause tarifaire, avec toutes
les discussions qu'il y a. À titre d'exemple, là, je sais que, dans les dernières années, vous, la FCEI, là,
pour les cinq dernières années, là, c'est au-dessus... près de
540 000 $ de frais, c'est
un peu plus de 100 000 $ par année, pour aller discuter de la cause
tarifaire. Ça, c'est la méthode sérieuse que vous mentionnez. Mais ce qu'on observe, c'est... Je reviens avec cette
idée-là, comment ça se fait, si c'est la meilleure façon de fixer une tarification, qu'on peut arriver, une
année, à dire : Ça va être 4,3 %, parce qu'il y a eu des
investissements puis l'effet
corollaire, puis après ça un écart de rendement, a posteriori, de 1,5 % à
2 % sur cette même période là? Puis là on s'interroge : Oui, mais, tant qu'à faire, on aurait pu prendre, en
fin de compte, l'inflation puis corriger a posteriori sur une base de 60 mois. Tu sais, les écarts, à
chaque année, un plus, un moins, effectivement plus souvent plus que moins,
mais des écarts de rendement, somme
toute, assez importants à travers le temps, puis, à chaque année, on vient
fixer une cause tarifaire, une augmentation de tarification, mais on ne
frappe jamais «bull's-eye», là, bien au contraire.
Alors, en quoi le risque qu'on aurait de venir le
fixer pour une période plus longue que 12 mois, pour donner, en fin de
compte, une stabilité dans le temps,
et de venir le corriger, le cas
échéant, par une cause tarifaire de manière ponctuelle, mais sur un plus
long délai, entraînerait des risques?
• (16 h 40) •
M. Gosselin (Antoine) : Pour plusieurs
raisons. D'abord, il faut comprendre que, quand la régie fixe les tarifs, effectivement, comme vous dites, on n'arriverait jamais pile, hein, c'est des
prévisions, mais elle essaie de le faire le plus précisément possible. Et c'est
un des objectifs premiers, là, de la fixation des tarifs, c'est
d'essayer de les fixer au niveau qui va représenter le plus justement
possible les coûts.
Évidemment,
comme je disais, il arrive qu'il y a des écarts. Vous dites... vous pointez sur un
exemple pour une année donnée où il y
a un écart pour, en quelque sorte, discréditer un peu tout l'ensemble du processus, devant la régie, de
fixation des tarifs. Je vous dirais que, si
on veut mesurer la performance d'un modèle versus l'autre, hein, le projet de loi n° 34 versus
le modèle actuel, en termes de capacité à bien prédire les tarifs, on ne peut
pas juste pointer sur une donnée spécifique, probablement la pire, j'imagine,
au cours des 15 dernières années, d'un des modèles, il faut comparer les
deux. Alors, à ce titre-là, si on veut faire
cette comparaison-là, il faudrait prendre le modèle de prévision en fonction de l'inflation puis aller voir
ça aurait été quoi, les écarts qu'on aurait observés, et je vous... je ne
serais absolument pas étonné qu'on observe des écarts sensiblement
plus importants. D'ailleurs, le graphique... bien, le graphique qu'on a à la
dernière page de notre présentation, on voit bien ici que, si on prend
l'inflation puis où les tarifs ont été réellement, on observe des écarts très
importants un peu partout à travers cette période-là.
Effectivement, on a observé, certaines années, des écarts très importants, et c'est
un peu ce qui a donné lieu à toute cette
question des trop-perçus de 1,5 milliard, là, qui a pris quand même une certaine
ampleur, et, ce genre d'écarts là, c'est sûr que ce n'est pas nécessairement normal et ce n'est pas tout à fait normal, ce n'est pas ce à quoi on s'attend normalement, et ça suggère qu'il y a
quelque chose qui ne va pas. Une année, ça peut arriver, mais
surtout quand ça arrive trois, quatre, cinq années de suite, là c'est certain
que, comme régulateur, vous vous posez des questions sérieuses. Et c'est ce
que la régie a fait. Et la réponse que la
régie, elle a trouvée à ce problème-là, c'est de mettre en place un mécanisme
de traitement des écarts de rendement
justement pour éviter de se retrouver à la fin d'une année
où on se rend compte que finalement on en a demandé beaucoup trop aux clients par
rapport à ce qui était nécessaire pour leur offrir le service.
Mais, sur le
fait qu'il y a effectivement des écarts importants qui sont observés en fin
d'année, je vous soulignerais quand
même que, même en étudiant un dossier
de façon exhaustive, il y a des limites à l'examen
que la régie peut faire puis à ce qu'elle peut voir dans le dossier,
hein?
M. Julien : Est-ce que je peux...
La Présidente (Mme Weil) : M. le
ministre, oui.
M.
Julien : Je ne veux pas non
plus avoir une période trop longue. Je reviens sur la question : Quel est
le risque qu'on aurait... Parce que,
vous avez raison, on ne peut pas tomber «bull's-eye», puis je ne demande pas à
tomber «bull's-eye». Mais, effectivement, là, si je prends les cinq dernières années, 182 millions, 90 millions, 37 millions, 77 millions, 160 millions
d'écart de rendement... puis nous autres, on
vient dire : Bien, il y a des écarts qui sont cumulés, qui sont toujours
là, on dit que le gel tarifaire avec
une inflation de 1,7 %
représente 195 millions, c'est ça qui vient corriger. Puis après ça on
passe sur le bord de l'inflation,
mais on va retourner à la régie en cause tarifaire aux 60 mois. C'est quoi, le
risque pour la clientèle d'utiliser ce modèle-là? Comment qu'il se
matérialise? Et qu'est-ce que ça voudrait dire?
M. Turmel
(André) : M. le ministre, je peux répondre là-dessus. Le risque, c'est une question légitime, effectivement. Nous représentons des
consommateurs depuis plus de 20 ans. On travaille pour les consommateurs,
que ce soient les PME ou les petits
consommateurs résidentiels. Le risque, c'est l'absence de reddition de comptes. On vit à une époque où la reddition
de comptes, vous en serez d'accord
avec moi, elle est plus souhaitable que moins souhaitable. Le projet de loi vient alléger cette reddition
de comptes là, vient mettre une
période très longue. Et tout à
l'heure je vous entendais parler...
l'article 17, l'annexe II du projet de loi, la somme d'information
qui sera demandée. Écoutez, ça fait 20 ans que je suis devant des régies ici et ailleurs
dans le monde, ce n'est pas en demandant des bilans, des suivis, des
évolutions, donc de l'information statique, que vous allez obtenir plus de
rendement, plus de productivité de la part du distributeur. C'est là où notre problème,
on le voit grand. On est d'accord pour le trop-perçu, on est tous d'accord
ensemble, le trop-perçu doit retourner
aux consommateurs d'électricité. C'est ce que vous souhaitez faire, c'est
l'objectif premier. Mais vous prenez un canon pour tuer une mouche. Et
on pense que vous enlevez... vous déplumez la régie...
M. Julien :
Juste là-dessus, les écarts de rendement, les écarts de rendement dans le
passé, nous, on dit : Il faut corriger cette situation-là. Puis les gens disaient : Est-ce qu'il va se
produire encore des écarts de rendement? L'écart de rendement, comment qu'il est calculé, c'est un rendement
attendu qu'on donne à Hydro-Québec de 8,2 %, et tout ce qui est en écart
constitue un écart de rendement. Et nous, on vient dire : On ferme les
comptes d'écart. Quand les gens disent : Oui, ce 500 millions là, vous le devez à la clientèle, oui, mais il se
reconduit un nouveau montant d'écart. Ça n'existe plus, ce compte d'écart là. Donc, on retourne 500 quelques
millions, on verra à la fermeture, et après ça on vient dire : Ce sera à
l'inflation après une période de gel d'un an et ce sera à Hydro-Québec de se
gouverner en conséquence en donnant le maximum de rendement.
Mais la clientèle,
puis je récidive, là, la clientèle, les citoyens, les résidents et les
entreprises sauront, de manière stable, ce qu'ils devront payer. Alors, sur
cette base-là, c'est quoi, le risque, pour la clientèle?
M. Turmel (André) : Pour la clientèle, en termes de prévisibilité,
nos clients PME nous disent : Ça vaut la peine sur cinq ans d'essayer de battre la prévision
d'Hydro-Québec. Quand Hydro-Québec demande 2 % ou 3 % et
qu'ultimement, avec le travail de
l'ensemble des intervenants, la régie reconnaît finalement qu'Hydro-Québec n'a
pas droit à 2 % mais à 1,3 %, ça semble peu, 0,7 %, mais c'est, dans l'ensemble des Québécois,
environ 100 millions de dollars, souvent. Alors, on a tendance à dire qu'une fraction de pourcentage,
c'est peu, mais c'est énormément d'argent qui sort de la poche des PME et
qui retourne à Hydro-Québec et ultimement à l'État.
M. Gosselin (Antoine) : J'ajouterais, si vous me le permettez, sur la
question des risques. Le premier risque du projet de loi, c'est que les clients vont payer trop cher pendant les
cinq prochaines années. Ça, d'ailleurs, on a des analyses, et c'est ce qu'on évalue. Et en fait ils paieraient
trop cher avant même d'avoir reçu un sou du 1,5 milliard de remise qui est
présumé.
M. Julien :
En 30 secondes.
M. Gosselin (Antoine) : L'autre risque, c'est... eh bien, un des autres
risques, c'est évidemment le risque qu'il y ait des trop-perçus importants qui soient... qui se perpétuent pendant une période
de cinq ans. Aujourd'hui, la régie, elle fixe un tarif une année et elle en fixe un les autres années. Si elle observe
qu'il y a des trop-perçus importants qui se font, elle peut corriger le
tir rapidement.
La Présidente (Mme Weil) : Monsieur... excusez-moi de vous interrompre, il y
a une autre question. Donc, le député de Sainte-Rose.
M. Skeete :
Merci, Mme la Présidente. Combien de temps qu'il me reste?
La Présidente
(Mme Weil) : Il reste 4 min 9 s.
M. Skeete :
Parfait. Merci beaucoup. Bonjour. Mais, premièrement, félicitations, je suis un
ancien membre de la FCEI et puis j'ai
adoré mon temps quand j'étais membre. En fait, votre mission est importante,
mais je ne suis pas certain de comprendre votre désaccord, alors vous allez
me permettre quelques questions.
Vous
dites, ici, dans votre deuxième paragraphe, ici : Le projet de loi
n° 34 : pourquoi et pour qui? Vous dites qu'il n'y a personne qui se plaint de la complexité du
processus de fixation des tarifs. Je peux vous dire, il n'y a personne, je
pense, au Québec, qui est heureux avec la
complexité des factures qu'on voit chez Hydro-Québec, avec la complexité de
comprendre vraiment d'où vient les prix et pourquoi qu'ils changent.
Vous parlez,
monsieur, de reddition de comptes. Je me demande si la prévisibilité d'une
indexation comprise d'avance peut battre ce
qu'essentiellement, vous dites, est un processus qui ne me semble pas très
démocratique et accessible pour la majorité des gens.
M. Gosselin (Antoine) : Bien, d'abord, je pense qu'il y a une distinction
à faire entre la facture, le papier que les gens reçoivent à la maison, et la fixation des tarifs. Ce sont des
choses complètement différentes, là. Le... je m'excuse, j'ai perdu le
fil.
• (16 h 50) •
M.
Skeete : Mais, en fait, je faisais le lien. Et vous dites : Pour
qui, pour qui, puis pourquoi, pour qui? Puis, moi, ce qu'il me semble, c'est
important de donner à la clientèle la prévisibilité. Moi, ce que j'entends,
c'est : On ne comprend rien sur
nos factures. On ne sait pas d'où
vient le prix. Historiquement, il y a eu des augmentations drastiques qui ont
fait mal aux Québécois. Alors, vous
parlez de reddition de comptes, vous parlez de transparence, en quoi ce que le
gouvernement propose ce n'est pas transparent?
M. Turmel (André) : Simplement
mentionner : Dans tous les pays industrialisés et dans tous les pays où la
Banque mondiale intervient, le sens commun, en ce moment, c'est d'avoir une
reddition de comptes par une autorité spécialisée, qu'on appelle la régie, qui pose des
questions en audience ou hors audience. Et vous dites... Oui, c'est complexe,
mais il n'y a pas une personne individuelle
qui peut se présenter devant un tribunal ou devant les avocats d'Hydro et leur
équipe. Alors, c'était ça, la logique que les législateurs avant vous ont
déployée, c'était justement pour s'assurer de la transparence derrière les coûts. Hydro-Québec est un monopole de
distribution. Un monopole, ici ou ailleurs... Hydro-Québec fait un bon travail en général, mais il y a
toujours un peu une force d'inertie. C'était le travail de la régie, travail
qui a été généralement bien fait. Et pourquoi? En représentant les
consommateurs.
Tout à
l'heure, on a fait allusion aux frais que certains ont... Écoutez,
1 million de dollars, par année, de frais sur 2 point quelques milliards, c'est une
poussière. Mais nous, on fait ça pour les consommateurs. C'est sûr que c'est
compliqué, mais est-ce que c'est
parce que c'est compliqué qu'on doit abandonner la lutte économique, et courtoise,
et en plaidoirie devant le tribunal?
Ça se fait ailleurs dans le monde. Là, le Québec va reculer de 20 ans,
parmi les seules juridictions au Canada et parmi les seuls en Amérique
du Nord.
M.
Skeete : Vous dites «reculer», ce n'est pas un choix de société? Moi,
je regarde ça et je me dis... En quelque part, je compare ça comme étant le choix d'un consommateur de prendre un taux
d'hypothèque fixe versus variable, pour des raisons distinctes. On peut être d'accord ou pour. Puis, oui, on peut
essayer de battre le marché, peut-être, là. Puis ce que je comprends, c'est... Vous, vous êtes dans cette
logique-là : à toutes les années, on va aller voir vraiment. Mais, à la
longue, cette prévisibilité-là aussi a une valeur, n'est-ce pas?
La Présidente (Mme Weil) : Il vous
reste 27 secondes.
M.
Gosselin (Antoine) : Bien,
en fait, rapidement, ce que je vous dirais, c'est que la prévisibilité, il n'y
a pas de... Comme on le disait tout à
l'heure, là, si on évacue les interventions gouvernementales dans le processus
de fixation des tarifs de la régie,
la prévisibilité, il n'y en a pas, il n'y en a pas vraiment. La courbe en
pointillé qu'on a sur notre graphique, la hausse la plus importante...
La
Présidente (Mme Weil) :
Merci, le temps est écoulé, mais vous aurez d'autres occasions. Alors, je cède
maintenant la parole au député de Laval-des-Rapides.
M. Polo : Merci beaucoup. Merci, Mme
la Présidente. Merci, représentants de la FCEI. J'aimerais commencer par vous inviter à nous expliquer quels sont les
intrants... peut-être en résumé, là, mais quels sont les intrants que considère
ou qu'utilise la Régie de l'énergie,
lorsqu'elle fait l'évaluation du juste prix, pour déterminer annuellement le
juste prix, juste pour... C'est
dommage, mon collègue qui vous a posé la question précédente, là... mais je
voulais quand même vous inviter à peut-être faire l'élaboration, s'il
vous plaît.
M. Gosselin (Antoine) : Bien, la
régie, d'abord, ce qu'elle reçoit, c'est un dossier complet d'Hydro-Québec, qui détaille les coûts, qui sont par rubriques,
qui détaille les coûts qui vont être nécessaires pour fixer les tarifs de l'année
à venir. Il y a aussi l'information sur les coûts équivalents pour l'année en
cours. Et vous avez l'information également pour la dernière année
historique complétée. Donc, vous êtes capable de comparer ce qui est proposé
avec ce qui s'est vraiment passé deux ans auparavant, une prévision de ce qui
est en cours également. Donc, vous avez toute cette information-là pour les
coûts.
Vous avez
également beaucoup... bien, bon nombre d'explications sur la prévision de la
demande par secteur, par tarif, comment était la demande historique, qu'est-ce
qui se passe dans l'année courante puis qu'est-ce qu'on anticipe pour l'année à venir. Et, pour la prévision des ventes,
bien, évidemment, il y a toute une série de paramètres économiques, de
prévisions qui sont tirées de sources généralement indépendantes, parfois c'est
les prévisions internes d'Hydro-Québec. Et tout ça permet, dans le fond, d'évaluer les coûts et les ventes pour
ensuite fixer les tarifs, dans le fond, de façon globale, là, diviser
l'un par l'autre.
Donc,
évidemment, le fait d'avoir l'information historique, de pouvoir faire une
comparaison, là, ça nous permet de porter un jugement. Puis évidemment, après
ça, il y a tout le processus de questions-réponses et d'audience où on
peut, là, creuser les informations puis essayer de valider ce qui est présenté.
M.
Polo : En quoi le panier des produits, là, qui est utilisé pour
déterminer l'indice des prix à la consommation... en quoi le panier des
produits a une certaine corrélation, un certain lien, selon l'argument du
ministre et du gouvernement, qui aiderait justement à déterminer une
hausse raisonnable, une hausse... un juste prix selon ce critère-là?
M.
Gosselin (Antoine) : Bien, écoutez,
il y a tout un ensemble de coûts qui varient, hein, il y a beaucoup
de rubriques, plein de coûts varient.
Puis ils ne varient pas tous nécessairement en fonction de l'inflation, c'est évident. Et
il peut y en avoir quelques-uns, effectivement, qui peuvent suivre une tendance qui n'est pas différente de l'inflation
de façon générale, mais il y a beaucoup de variations très importantes qui n'ont, c'est
évident, strictement rien à voir avec l'inflation. Bien, les plus évidents, c'est évidemment
toutes ces questions de compte d'écart sur... pour les aléas climatiques, hein,
la température, le coût de retraite.
En tout cas, on pourrait en nommer beaucoup, mais il y a beaucoup
d'éléments de coût qui, évidemment,
n'ont rien à voir avec l'inflation.
M. Turmel
(André) : J'ajouterais peut-être
que, dans la composante du prix, globalement, dans la facture d'électricité,
il y a le coût de production qui n'est plus réglementé par la régie depuis
l'an 2000, le coût de transport qui, semble-t-il, demeurerait réglementé à
la régie, et là le coût de distribution qui était réglementé mais qui ne le
serait plus. Donc, la facture du
consommateur avait trois grandes composantes, une seule sera scrutée à la loupe
dorénavant, c'est le coût de
transport.
M.
Polo : Écoutez, moi, avant de procéder avec ma prochaine question, là,
j'invite, des fois, le ministre à peut-être partager un peu plus d'informations avec ses collègues qui viennent
poser des questions, comme mon collègue de Sainte-Rose, parce que,
sincèrement, de prétendre que simplifier le processus de détermination des
tarifs et de le rendre simpliste... «Simpliste» ne veut pas dire «simplifié».
Et je m'insurge contre le propos, là, du collègue de Sainte-Rose, parce que, sincèrement, ça porte atteinte, si on peut dire,
au travail qu'on essaie de faire ici, à l'information qui est diffusée. Je
voulais juste amener ce point-là.
La Présidente (Mme Weil) : M. le
député...
M.
Polo : Ceci dit, Mme la Présidente, ce que je comprends, messieurs de la FCEI, ce que je comprends de
votre mémoire, c'est que, selon vous, le gouvernement échoue dans tous
les objectifs annoncés, et là je vais à la conclusion
de votre mémoire, tous les objectifs
annoncés dans le projet de loi, et je vais les citer ici, là :
simplification du processus de fixation des tarifs d'électricité, remboursement
des trop-perçus de 1,5 milliard et l'amélioration de la prévisibilité des
variables tarifaires... des variations tarifaires.
M.
Gosselin (Antoine) :
Définitivement, je pense qu'au niveau du remboursement du 1,5 milliard de
trop-perçus cet objectif-là n'est pas atteint, c'est très, très clair.
L'amélioration de la prévisibilité, je ne pense pas, aussi, que ce soit un
objectif qui soit atteint. Pour ce qui est de la simplification, bien,
c'est sûr qu'on peut imaginer une formule très, très simple, hein, puis n'avoir aucune régie, et faire augmenter les tarifs
d'une façon extrêmement simple, mais ça ne veut pas dire que c'est mieux
parce que c'est plus simple.
Vous savez,
la régie, elle se penche depuis déjà trois, quatre ans sur la mise en place
d'un mécanisme incitatif. Tous les
débats qu'on a ici, ils se sont faits devant la régie, et il y a eu des
experts, il y a toute la compétence du personnel de la régie qui a étudié ces questions-là. Il y a eu
plusieurs personnes qui sont venues faire des propositions. Il y a Hydro-Québec
qui est venue faire également des
propositions, qui, soit dit en passant, allaient à l'encontre du projet de loi n° 34.
Alors, la réglementation, je ne sais pas pourquoi on semble avoir l'impression
que, tout à coup, la réglementation, c'est quelque chose de très simple puis qui peut être simplifié.
La réglementation, c'est quelque chose de très complexe, ça fait des centaines
d'années que ça existe. Il y a des gens qui ont fait des recherches poussées
là-dessus et ça demande une certaine rigueur dans
la façon dont on l'analyse. Ce n'est pas quelque chose que l'on peut simplifier
et n'est pas souhaitable de simplifier à outrance la réglementation
comme le fait le projet de loi n° 64.
Alors, je ne
vous dis pas nécessairement que l'objectif de simplification est atteint ou
pas, ce que je vous dis, c'est que c'est un mauvais objectif. Essayez de
rendre... de traiter un problème complexe qui demande de la rigueur puis
qui demande de la réflexion d'une manière trop simple, c'est problématique.
M. Polo : Merci. Voyez-vous un
problème à ce qu'en cours d'exercice Hydro-Québec puisse demander une modification de la tarification et est-ce que
c'est une politisation du processus de tarification? On se rappelle
qu'Hydro-Québec devra faire approuver ses demandes par le ministre, par
le gouvernement.
• (17 heures) •
La Présidente (Mme Weil) : Il reste
trois minutes, pour que vous sachiez un peu...
M. Gosselin (Antoine) : Certainement.
Ce que ça implique, c'est que le ministre peut appliquer un filtre à une
demande qu'Hydro-Québec, sinon, adresserait à la régie. Donc, oui. Oui.
M. Polo : Parfait. Merci.
La Présidente (Mme Weil) :
D'autres questions?
M. Polo :
Vous avez demandé à Hydro-Québec de déposer un dossier tarifaire pour 2020 et
2021. Et vous dites qu'une période de
cinq ans entre les dossiers tarifaires est trop longue. Vous avez donc peur d'une
perte de transparence dans le processus de tarification.
M. Gosselin
(Antoine) : Oui, absolument.
Il y a plusieurs risques, hein, avec le projet de loi puis cette période de
cinq ans là, là. Évidemment, si jamais il s'adonnait que, l'année où la régie a
le mandat d'étudier les tarifs et de fixer les tarifs, pour une raison ou pour
une autre, il y a certains éléments de coûts qui, de façon ponctuelle, sont
très élevés, bien, la régie a le
devoir d'appliquer... de fixer des tarifs qui vont permettre à Hydro-Québec de
récupérer ces coûts-là et de faire son
rendement. Alors, maintenant, si ces coûts-là disparaissent les cinq années
suivantes, bien, évidemment, les sommes vont, malgré tout, être récupérées dans les tarifs, alors que le coût
n'existe plus. En 2018, le mécanisme... Il y a un mécanisme présentement
en vigueur, qui a été mis en place, et on voit déjà, là, qu'il y a eu, dès la
première année, d'importants trop-perçus.
Alors, si le projet de loi avait été en place dès 2018, on aurait ces sommes-là
qui se répercuteraient dans le temps...
M. Polo : Quel impact pourrait
avoir une perte de contrôle, par la régie, des programmes commerciaux sur une
période de cinq ans?
M. Gosselin
(Antoine) : Bien, écoutez,
les programmes commerciaux, chacun a ses particularités propres, hein, alors il faut les regarder un par un. Mais
Hydro-Québec a ses objectifs en ce qui concerne les programmes commerciaux, et, à notre avis, ces objectifs-là ne sont pas
nécessairement toujours alignés avec les meilleurs intérêts de la clientèle ou,
en tout cas, de tous les segments de la
clientèle. Un exemple que je peux vous donner, c'est le programme de gestion de
la demande en puissance de la
clientèle affaires, où Hydro dit... Bien, ce programme-là, en deux mots, là,
permet aux gens de réduire leur consommation de puissance à la pointe,
là, ce qu'Hydro-Québec leur demande, puis ils reçoivent une compensation financière en échange de ça. Alors,
ce qu'Hydro-Québec dit, bien : On va... Ils ont mis en place ce modèle-là,
mais il y a des restrictions sur l'accessibilité, qui fait que, les plus petits
clients, c'est beaucoup plus difficile pour eux d'accéder à ce programme-là. Et
en plus, bien, l'aide financière peut être très intéressante pour des grands
clients, qui réduisent énormément leur
consommation, mais pas nécessairement adaptée à des petits clients, qui, eux,
peuvent enregistrer des...
La Présidente (Mme Weil) :
Conclusion, M. Gosselin.
M. Gosselin (Antoine) : ...des
réductions plus faibles.
M. Polo : Merci.
La Présidente (Mme Weil) : Très
bien, merci. Alors, je cède la parole au député de René-Lévesque.
M. Ouellet : Oui, Mme la Présidente. Considérant l'opportunité
de prendre le temps de la deuxième opposition, est-ce que j'ai le
consentement pour utiliser le temps libre de la deuxième opposition?
La Présidente (Mme Weil) :
Est-ce qu'on a le consentement?
Des voix : Consentement.
M. Ouellet : Merci, M. le ministre. Merci, bonjour à vous.
Messieurs, j'aurais quelques questions en rafale. La première, puis j'aimerais vous entendre là-dessus,
bon, on a un mécanisme qui existait, qui existe encore, la régie. Vous l'expliquiez tout à l'heure, qu'on va perdre
certains contrôles sur un des trois volets que nous avions. Et, le projet de
loi en question, on parle d'un nouveau
mécanisme qui va fixer des prix en fonction de l'inflation. On jase, là. Il
pourrait-u y avoir un autre indicateur que l'inflation, outre utiliser
la régie, pour fixer les prix? Est-ce que ça, ça existerait? Quel autre
indicateur qu'on pourrait utiliser pour dire : Ça, là, si on prend cet
indicateur-là, on est vraiment sur le bon picot, les entreprises vont payer le juste prix, et les consommateurs vont être
satisfaits? Est-ce qu'il existerait autre chose que l'inflation?
M. Gosselin
(Antoine) : Je ne pense pas
qu'il n'y a rien qui peut remplacer l'examen pour fixer les tarifs, là, de
façon la plus précise possible. Je ne pense pas qu'il n'y a rien qui puisse
faire mieux qu'un examen par la régie. Donc, je
vous dirais, que ce soit l'inflation ou que ce soit un autre indicateur, si on
essaie de mettre en place un système qui est mécanique, hein, sur lequel on n'a essentiellement plus de contrôle
parce qu'on applique une formule, puis, si elle dérape, on ne peut plus
rien faire parce qu'on est pris par notre législation, on évacue le jugement
des gens qui sont face à cette situation-là puis qui sont capables de
dire : O.K., bien, d'une part, on peut essayer d'évaluer le mieux possible
le coût de rendre le service, mais, d'autre
part, aussi, on peut porter un jugement sur, justement, les considérations de
stabilité, les considérations de prévisibilité et puis d'équité entre
les clients.
Donc, la régie, elle a beaucoup d'outils dans
son coffre pour s'assurer que l'évolution des tarifs est stable. Elle utilise ça régulièrement pour déplacer... devancer
ou retarder certaines dépenses pour s'assurer qu'on n'ait pas des baisses
fortes de tarifs suivies d'une hausse forte
de tarifs ou l'inverse. Et ça, une formule, ça ne peut pas, évidemment, porter
de jugement là-dessus, ça prend des
gens qui voient la situation puis qui peuvent dire : Bon, bien, écoutez,
là, on va s'assurer qu'on assure une prévisibilité, une stabilité à
l'aide de notre jugement.
M. Ouellet : Vous êtes économiste, M. Gosselin. Juste
pour le bénéfice de nos auditeurs qui nous écoutent, est-ce que
l'inflation, c'est stable?
M. Gosselin (Antoine) : Bien,
l'inflation, c'est... non, ce n'est pas stable. Évidemment, ce n'est pas non
plus... L'inflation, ça passe rarement de 10 %, une année, à moins
2 % l'année suivante, là, on s'entend.
M. Ouellet : Au Québec, mais il
y a des pays...
M. Gosselin
(Antoine) : Bien, oui,
effectivement, il peut y avoir des situations où ça arrive, là, que... Je
parlais dans le contexte du Québec. Mais, cela étant dit, malgré ça, ça peut
quand même varier, là. Tantôt, j'allais dire, quand il m'a manqué de temps, que la variation tarifaire la
plus importante, dans notre graphique, là, une fois qu'on a corrigé pour les
interventions gouvernementales, sur la période de 15 ans, c'est
2,9 %. Puis, après ça, la deuxième plus importante, c'est en bas de 2 %. Alors, est-ce que c'est possible
que, sur une période de 15 ans, l'inflation, elle aille une fois jusqu'à
3 % puis que, le reste du temps, elle se maintienne? C'est tout à
fait possible. On ne peut absolument pas exclure quelque chose comme ça.
M. Ouellet : Et on le vit avec, peut-être, la crise du
pétrole, avec ce qui se passe à l'international, ça pourrait avoir,
effectivement, une incidence.
M. Gosselin
(Antoine) : Ça peut avoir
une incidence, et une variation du taux de change pour les importations peut
avoir une incidence.
M. Ouellet : Effectivement. Les
guerres commerciales. O.K., beaucoup de chose qu'on ne contrôle pas et qui
amèneraient les gouvernements à avoir des mécanismes pour contrôler l'effet
d'une hausse de l'inflation. D'accord.
J'aimerais vous entendre, pourquoi cinq ans? Le
ministre nous dit : C'est important d'avoir de la prévisibilité, on offre de la stabilité. Pourquoi cinq ans?
Pourquoi pas trois, pourquoi pas quatre, pourquoi pas 10? Tu sais, si on est
des gens férules de prévisibilité, là, regarde, pendant 10 ans, vous allez
savoir ce que ça va coûter, les entreprises vont être heureuses, ils
vont savoir... ils vont pouvoir calculer ce que ça va coûter. Pourquoi, selon
vous, on fixe ça à cinq ans?
La Présidente (Mme Blais,
Abitibi-Ouest) : Vous avez 1 min 16 s pour répondre à
la question.
M. Gosselin
(Antoine) : C'est une bonne
question, puis je vais y répondre sans y répondre. Cette question-là, au
cours des trois dernières années, la régie, elle se l'est posée. La régie, dans
le processus qu'elle a fait pour en venir au mécanisme incitatif qui est entré
en vigueur en 2018 puis qui est en place aujourd'hui, toutes ces questions-là,
elle se les ai posées. Et la régie, elle
avait toute la latitude de choisir le modèle qui lui plaisait. Elle aurait pu
choisir le modèle du projet de loi n° 34 si elle avait jugé
que c'était le modèle qui était approprié pour la situation d'Hydro-Québec.
Elle n'a pas choisi ce modèle-là
après avoir consulté experts, et tous les intervenants, et Hydro-Québec. Alors,
on peut, vous et moi, débattre est-ce que ça devrait être deux ans,
trois ans, cinq ans, un an pendant des années, mais ce débat-là a été fait. Il a été fait dans un forum qui est adapté à ça,
qui a les compétences pour ça, en tout respect pour la commission, et qui a
été éclairé de façon beaucoup plus importante...
La Présidente (Mme Blais,
Abitibi-Ouest) : En terminant.
M. Gosselin
(Antoine) : ...que ce qu'on
peut faire dans un forum comme celui-ci. Et sa décision, ça a été : le bon
modèle, c'est celui de la...
La
Présidente (Mme Blais, Abitibi-Ouest) : Merci. Merci beaucoup.
Alors, je vous remercie beaucoup pour votre contribution aux travaux de
la commission.
Je suspends les travaux quelques instants afin
de permettre au prochain groupe de prendre place.
(Suspension de la séance à 17 h 09)
(Reprise à 17 h 14)
La Présidente (Mme Blais,
Abitibi-Ouest) : Bienvenue aux représentants du Regroupement des organismes
environnementaux en énergie. Je vous rappelle
que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons
à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter, ainsi que
les personnes qui vous accompagnent, et procéder à votre exposé. La parole
est à vous.
Regroupement des organismes environnementaux en énergie
(ROEE)
M. Simard (Christian) : Oui.
Bonjour. Merci, Mme la Présidente. Merci, les membres de la commission. Je suis accompagné de Jean-Pierre Finet, qui est
analyste. Moi, je me nomme Christian Simard, je suis le directeur général de Nature Québec et un des membres du regroupement.
Le Regroupement des organismes environnementaux en énergie a été fondé en 1997.
Il est constitué de sept groupes ayant
des intérêts marqués en énergie et représentant des milliers de membres individuels, et de multiples organisations au Québec en font partie. On va des Îles-de-la-Madeleine, avec l'Association madelinienne pour la sécurité énergétique et environnementale, Écohabitation, la Fédération
québécoise du canot et du kayak, la Fondation Rivières, Nature Québec, le Regroupement pour la surveillance du nucléaire et le Regroupement
Vigilance Hydrocarbures Québec. Donc, notre regroupement est unique,
réunissant des organismes d'envergure nationale, une importante association
réseau autonome et une ONG experte sur tous les aspects concrets de l'énergie
et de l'habitation.
Le ROEE prône
le développement énergétique durable par la planification intégrée des
ressources dans le contexte de ressources limitées et de menaces impératives à
l'équilibre planétaire posées par la surexploitation des ressources dont
nous disposons. Mais le ROEE considère que
les enjeux environnementaux ne peuvent pas être relégués à des préoccupations
d'ordre secondaire. Il priorise l'efficacité
énergétique à toute production énergétique, même de source renouvelable. On
s'inscrit également en faveur d'une transition énergétique rapide, transparente
et équitable.
Maintenant,
on intervient aujourd'hui sur le projet de loi n° 34 qui a été déposé par
le ministre ici. On croit que, malheureusement,
le projet de loi n° 34 manque la cible, hein? Il veut simplifier le
processus, mais, en ce faisant, il risque d'induire des erreurs dans des calculs et provoquer des effets indirects
qui peuvent avoir des effets pervers qui coûteraient... en
bout de ligne, qui risquent de coûter plus cher à la société que
d'hypothétiques gains à court terme. Donc, c'est une ingérence politique qui
semble contraire à l'esprit dans lequel la Régie de l'énergie a été créée.
Moi, j'ai un
certain âge et j'ai assisté à toutes sortes... du temps de Mme Bacon, je
ne sais pas s'il y en a qui sont assez
vieux ici, où, à un moment donné, il y avait un échange, c'était une vraie
commedia dell'arte, la façon d'établir les tarifs, ici, c'était la demande d'Hydro très forte, le non
gouvernemental sonore et la petite discussion en coulisse, puis on arrive avec un chiffre magique, qui généralement
n'était pas si magique que ça et pas mal établi au départ de la commedia
dell'arte. On n'est pas là, mais on revient
à une certaine fixation par le politique via un projet de loi, c'est différent
qu'à chaque année... via un projet de
loi, mais il y a une fixation assez arbitraire des tarifs, qui risque d'avoir
des effets pervers.
Donc, une ingérence politique est contraire dans
l'histoire de la régie, on cite dans le... Jean-Thomas Bernard, ici : «C'est le grand débat de l'énergie en
1996 qui a amené la régie à s'impliquer dans les tarifs. La mise en place d'une
régie de l'énergie, ayant la compétence
requise pour réglementer le secteur de l'électricité, répond à une nécessité.
[...]il sera possible de
contre-expertiser de façon satisfaisante les demandes tarifaires
d'Hydro-Québec, selon un mécanisme garantissant la transparence et la
participation du public.»
C'est majeur. On ne l'aura plus pendant cinq
ans. Cette régie, donc... je te laisse, Jean-Pierre...
M. Finet
(Jean-Pierre) : Alors, en
choisissant de fixer les tarifs sur une donnée non pertinente, c'est-à-dire
l'inflation, le gouvernement élimine
du même coup les trop-perçus ou les manques à gagner, car les tarifs ne
seraient plus fixés par rapport aux
coûts, du moins, pour une période de cinq ans. Ce faisant, il créerait un
précédent dangereux et laisserait au prochain gouvernement le problème
d'avoir à rectifier, ou non, cette situation.
Il nous
semble que la prémisse derrière ce projet de loi est un souhait de couper dans
des dépenses exagérées et inutiles.
Cependant, cette décision a été prise sur de mauvais calculs. Non seulement les
frais associés aux interventions sont faibles, plusieurs intervenants vous ont parlé, là, d'un
millième de pour cent, mais le travail de vigilance effectué à la Régie
de l'énergie par les intervenants représentant les groupes environnementaux et
les consommateurs permet d'identifier et de
corriger des lacunes dans les projets proposés et fait économiser, par le fait
même, énormément à la société. Cela n'est possible qu'avec la garantie
d'un processus rigoureux soutenu financièrement par l'État.
Par ailleurs,
la Régie de l'énergie fait un travail très serré de restriction des coûts. Elle
évalue les interventions au mérite et rembourse les frais des
intervenants en conséquence.
Notre
intervention à la Régie de l'énergie a notamment permis d'éviter la conversion
et la réouverture de la centrale thermique de Bécancour en 2015-2016. Ce
projet, dont Hydro-Québec n'avait pas besoin, aurait impliqué le déplacement
de moult camions véhiculant du gaz naturel
liquéfié ainsi que des dépenses d'au moins 1 milliard de dollars sur la
durée du contrat, de 20 ans, que
cette énergie ait été utilisée ou non, et ce, sans annuler d'aucune manière les
pénalités de l'ordre de
150 millions de dollars, annuellement, que nous payons déjà à TransCanada
pour garder la centrale fermée, alors que des alternatives plus intéressantes,
tant au niveau économique qu'aux niveaux environnemental et social, existaient.
• (17 h 20) •
M. Simard (Christian) : Il est
clair que c'est l'intervention de notre organisation qui a permis d'éviter
cette erreur, que tout le monde a reconnu
qui était une erreur par la suite. Mais, si on n'avait pas pu intervenir à la
régie ou devant la régie et faire...
montrer l'incongruité de cette décision contractuelle, bien... Je pense qu'on a
justifié beaucoup, beaucoup notre présence et la présence d'un faible
programme de financement des intervenants.
Des
conséquences négatives sur nos possibilités d'exportation aux États-Unis. Il
peut y avoir des effets pervers induits par le prochain... le projet de loi qui nous est présenté. Puis il y en
a un qui est quand même majeur. Hydro-Québec désire augmenter ses exportations, particulièrement vers
les États-Unis. Le retrait des audiences devant la Régie de l'énergie semble
risqué. Les Américains, nous a expliqué, entre autres, dans une communication
qu'on a eue avec le Pr Normand Mousseau, qui est professeur de physique
à l'Université de Montréal et directeur de l'Institut énergie Trottier à la
Polytechnique... Donc, «les Américains ont — je le cite — des
régies fortes et des processus très ouverts depuis longtemps. Le projet de loi n° 34, en gonflant
artificiellement les revenus locaux, ouvre donc la porte à des attaques et même
des poursuites de la part de promoteurs et de producteurs [américains]
d'électricité en compétition avec l'offre d'Hydro-Québec.» Fin de la citation. Ils pourraient alors plus facilement
accuser la société d'État de dumping, de subvention déguisée à l'exportation
ou de manipulation des tarifs d'électricité, et ça risque de nuire.
Quand on a un
«body», une régie transparente et claire, on ne peut pas se faire accuser de
manipuler les tarifs intérieurs pour favoriser l'exportation de
l'électricité. Il ne faut pas oublier qu'une des raisons de la création de la
Régie de l'énergie, il y a plus de 20 ans,
visait à faciliter l'accès au marché américain pour Hydro-Québec. C'est un
élément quand même qui est fort important.
M. Finet (Jean-Pierre) : Il
nous semble probable que le gouvernement n'ait pas apprécié le refus de la
régie d'autoriser la demande d'approbation
d'un programme pour la conversion à l'électricité des équipements fonctionnant
au mazout ou au propane dans les
marchés commercial, institutionnel et industriel pour une raison de
non-rentabilité. Il est vrai que ce
programme est souhaitable et qu'il aurait pu contribuer au désir
d'électrification des bâtiments du gouvernement du Québec.
Par ailleurs, nous notons une incohérence entre
la décision du gouvernement d'utiliser le Fonds vert pour financer jusqu'à 75 % des coûts des projets
d'extension de réseau de gaz naturel et son refus de s'en servir pour améliorer
la rentabilité de ce programme de conversion. Même son de cloche par rapport à
la décision du gouvernement d'avoir choisi
de ne pas injecter de fonds pour le déploiement, par Hydro-Québec, de bornes
électriques à recharge rapide. Nous soulignons
ici le manque de vision et les incohérences du gouvernement, qui ne devrait non
pas affaiblir la régie, mais lui donner les moyens de prendre pleinement
en compte le développement durable dans ses décisions.
M. Simard
(Christian) : Oui. Maintenant, on va aller aux recommandations. On
recommande d'apporter des amendements majeurs au projet de loi n° 34,
là, majeurs, parce qu'on pense qu'il est mal orienté.
Plutôt que de mettre
en place des modifications qui visent à réduire la marge de manoeuvre de la
régie, nous croyons que celle-ci a besoin
d'une réforme qui lui redonne ses pleins pouvoirs afin... d'agir et confirme
son indépendance et ainsi ses
compétences en matière de développement durable dans une optique de
planification intégrée des ressources.
Nous
pensons qu'il faut apporter des amendements majeurs au projet de loi n° 34 en mettant en place une réforme de la Régie de l'énergie qui
lui permettra réellement de remplir sa mission.
M. Finet (Jean-Pierre) : La régie doit disposer de pouvoirs décisionnels
et d'une pleine autorité sur les tarifs, la production, le transport et
la distribution d'énergie afin que toutes les options envisageables soient
analysées, y compris l'efficacité énergétique. La mouture originale de la Loi
sur la Régie de l'énergie, en 1996, créait un tel régime.
Nous
recommandons la réinstauration des pleines compétences de la Régie de
l'énergie, tel que stipulé dans la première mouture de la Loi sur la
Régie de l'énergie.
M. Simard (Christian) : Afin de préparer l'avenir, il faut pouvoir
compter sur une gestion efficiente et éclairée de nos ressources et se
doter d'une vision porteuse à long terme. En Nouvelle-Angleterre.
La Présidente
(Mme Blais, Abitibi-Ouest) : Je m'excuse, il vous reste une
minute.
M. Simard (Christian) : Oui. En Nouvelle-Angleterre et en Ontario, par
exemple, la logique mise sur la place d'une économie... d'économiser,
et, en tout premier lieu, on dit : «Conservation first», économie d'abord.
Recommandation 4,
rapidement, Jean-Pierre.
M. Finet (Jean-Pierre) : Oui. Nous recommandons, en plus d'approuver les
budgets en efficacité énergique, que la
régie puisse exiger l'augmentation des budgets et le maintien et de la
modification de programmes. La régie devrait avoir le pouvoir d'intervenir en matière de sources de
production d'électricité, en matière d'économie d'énergie, d'étendre sa compétence au stockage d'électricité au GNL et de
rendre explicites les compétences et les responsabilités de la régie quant
au transport et à l'aménagement de territoire.
M. Simard (Christian) : Et en une seconde dire que, finalement, on
devrait bonifier, là, le mode de nomination des commissaires. Je pense que la régie doit avoir des commissaires encore
plus professionnels, nommés sur une base de processus plus rigoureux qu'actuellement, je pense que ça,
il y a une place à l'amélioration, et, naturellement, maintenir, je pense, le
financement adéquat pour les interventions d'organisations comme les nôtres.
Merci.
La
Présidente (Mme Blais, Abitibi-Ouest) : Je vous remercie,
M. Pinet... M. Finet, pardon, et M. Simard, pour votre exposé. Nous allons maintenant commencer la
période d'échange. M. le ministre, la parole est à vous, et vous disposez
de 16 minutes.
M. Julien :
Oui. Merci, Mme la Présidente. Merci, messieurs, de vous présenter ici et
d'exposer les différents éléments de votre
analyse. Sur certaines des recommandations, quand même, on est assez loin du
p.l. n° 34 et de ses objectifs, mais j'entends bien
que ça pourrait être des bonifications lors d'une révision sur d'autres
aspects.
Vous avez mentionné les enjeux par rapport à l'exportation d'électricité, qui naturellement relève de HQP, qui n'est pas réglementé. J'aimerais savoir, en fin de compte, le lien que vous faites avec le
p.l. n° 34 et HQP, qui n'est pas réglementé, par
rapport à vos conclusions.
M. Simard (Christian) : Bien, en fait, je pense que ce qui est important,
puis il y a eu tout un... Vous savez, pour accéder au marché, dans le cadre du libre-échange... Et on a même fait HQP,
Hydro-Québec Distribution, Transport, donc on a créé un peu une compétition à l'intérieur d'Hydro-Québec. Ça
demeure Hydro-Québec, la propriété de tous les Québécois, un monopole d'État, mais avec des règles qui
imitent un peu le marché et avec des structures d'établissement des tarifs. La
régie fait partie... ça fait partie d'un grand ensemble.
Et,
si, par exemple, pour des compétiteurs américains qui pourraient être tentés,
c'est ce qu'on a dit, on ne dit pas que ça va arriver de façon certaine... On
pense qu'on met à risque... À partir du moment où c'est un tout... Les
compétiteurs, sur les marchés
américains, regardent, observent ce qu'on fait. On est dans une situation de
monopole d'État, mais on s'est donné
des structures indépendantes d'analyse des tarifs. Et, lorsqu'on est dans un
marché ouvert ou régi, là, par un accord de libre-échange, eh bien, il est clair que l'ensemble des éléments sont
analysés. Même si c'est HQP qui exporte, il demeure que les tarifs qui sont donnés, que HQP est
capable de donner et que le Québec offre à l'extérieur... est-ce qu'il peut
être influencé par les tarifs
domestiques? Si ceux-ci sont plus forts ou si la clientèle résidentielle
absorbe plus grand et qu'on puisse peut-être exporter des surplus à un tarif
moindre, bien, on ouvre la porte à cette critique-là. Tandis que, quand c'est une régie qui établit annuellement les
tarifs, selon non pas l'inflation ou un processus arbitraire, mais une analyse
des coûts, on évite une contestation
potentielle, peu importe si c'est HQP, HD, pour les... on se comprend, là. Mais
c'est une analyse qui est globale et
qui risque de faire l'objet de contestations. Ce n'est pas une certitude, là,
on ne prétend pas connaître l'avenir, mais on pense qu'on met à
risque... et c'est un danger du projet de loi n° 34.
Et je vous
invite à inviter Normand Mousseau de vous en parler plus à même. C'est
l'expertise qu'on a eue, mais je
pense que ce serait vraiment intéressant que vous l'entendiez et vous
l'écoutiez. Je pense qu'il désirait aller devant la commission.
M. Julien :
M. Simard, je vous entends bien, mais naturellement ce risque-là a été
particulièrement analysé à travers le
temps, et c'est certainement... Pour nous, il n'y a pas de risque à cet
effet-là, d'aucune manière, par le p.l. n° 34,
quoi qu'en dise M. Mousseau. Mais on aura peut-être l'occasion un
jour de discuter avec M. Mousseau.
Je
reviens sur... Vous avez mentionné que, comme si c'était un de nos objectifs,
nous autres... puis ça a été mentionné à
deux, trois reprises après-midi, comme si on avait un objectif de venir dire
que les frais liés à la cause tarifaire étaient un enjeu important pour nous. L'enjeu important pour
le gouvernement, dans le processus ici, c'est de faire en sorte de, oui,
retourner de l'argent à la clientèle, le 500 millions, c'est de donner de
la stabilité, de la prévisibilité.
Et
on ne prétend pas non plus... Parce que j'ai entendu deux, trois questions
tantôt, dire : Oui, mais l'inflation n'est pas parfaite. Non, non, il n'y a pas de perfection dans la fixation.
Puis on veut pouvoir, sur une période plus longue que le 12 mois... Parce que quelqu'un a dit
tantôt : Pourquoi 60 mois? Bien, je rétorquerais : Pourquoi 12
mois? Alors, on essaie de se trouver,
en fin de compte, une gestion de risques, de se dire : Bon, le passé n'est
pas garant du futur, on veut que ça demeure
réglementé, on veut maintenir une cause tarifaire, mais on veut se donner, en
fin de compte, une stabilité plus longue que 12 mois.
Dans cette
perspective-là, j'étends un peu la question que j'ai posée au groupe
précédent : Considérant le passé, considérant
qu'il y a un gel l'an prochain, qu'on augmente à l'inflation quatre ans, c'est
quoi, le risque réel pour le consommateur dans cette perspective-là,
contrairement à la perspective précédente?
• (17 h 30) •
M. Simard (Christian) : Je vais me permettre, puis mon collègue pourra
compléter. En fait, c'est comme un mantra, là, ce que vous dites, «la
prévisibilité». Et j'avoue que moi, j'ai... J'habite dans la région de Québec,
comme vous, M. le ministre... comme M. le ministre habite, et j'ai déjà vu
bien, bien des tribunes radiophoniques sur la hausse des tarifs de pétrole, très régulièrement. Mais, sur l'écart
des tarifs d'électricité d'une année sur l'autre, puis des bonds, la
prévisibilité... Alors, en tout
respect, ça me semble être une problématique, un mantra un peu inventé, c'est-à-dire qu'il n'y avait pas de problématique de prévisibilité, mais il peut y avoir une problématique d'inflation. C'est-à-dire que le fait, là, que les tarifs soient
établis par la régie annuellement n'a jamais, je pense, créé de véritable
problème, de débat de société sur le fait que
les écarts, d'une année sur l'autre, étaient énormes. On sait que, globalement,
c'est assez... il n'y a pas des écarts énormes. Par contre, le fait de fixer à
l'inflation peut être à la fois trop, beaucoup trop. Si, par exemple, on a cinq années
de période favorable, on pourrait même, à la limite, penser avoir des diminutions
de tarifs dans les années 2, 3, 4 ou 5, ou en bas de l'inflation. Il pourrait y avoir, par contre,
des scénarios complètement contraires ou une catastrophe, mettons,
météorologique, la crise du verglas,
ou des trucs comme ça, où on s'enlève une possibilité d'augmenter en
fonction d'une problématique qui est réelle, donc, en fixant
arbitrairement selon l'inflation.
Puis
l'inflation, selon nous, n'est pas un bon indicateur, c'est l'analyse de la
réalité, c'est plus équitable, c'est plus... Quel est l'autre facteur... je pourrais laisser Jean-Pierre continuer,
mais ça nous apparaît tout à fait raisonnable d'analyser année après année la réalité de la température, la
réalité du marché, la réalité du coût des services, et, à ce moment-là, on peut. Tandis que, là, ça semble être un peu un
«give-and-take», on donne un gel des tarifs avec un crédit et on va se
reprendre dans les quatre années avec un
taux d'inflation, parce qu'éventuellement ça va générer des revenus que peut-être
la régie n'aurait pas octroyés.
M.
Julien : Oui, bien, je ne
suis pas nécessairement d'accord avec ce que vous mentionnez là,
parce que ce n'est pas un
«give-and-take», en réalité. Le gel tarifaire vise à venir corriger une situation
où est-ce qu'on observe des écarts de rendement
sur une période, en fin de compte... Si on regarde les 15 dernières années, à peu près
94 millions, en moyenne, par année, d'écart de rendement. Ça, ça veut dire, en réalité, là...
Encore là, quand on regarde la courbe de l'inflation puis la hausse
tarifaire sur 15 ans, il s'est créé des écarts, puis on observe des écarts
de rendement.
Quand
vous dites... Encore là, je suis toujours curieux quand les gens disent que le mécanisme
de cause tarifaire, c'est le mécanisme
du juste prix. En 2013, la hausse des tarifs, 2,41 % après un processus
de cause tarifaire avec l'ensemble des
intervenants, tout
le monde y participe, puis on
convient que c'est 2,41 %, écart de rendement total, 279 millions. Ça représente même plus que la hausse. À la fin, sur une période x,
moi, ce que j'observe, c'est souvent 150 points de base, plus que la moitié de l'augmentation, en fin de compte, qui est en écart. Alors, c'est comme de dire que
ce mécanisme-là, sur
base annuelle, qui donne des variations importantes année après année...
C'est comme si on disait : Oui, mais, si on le faisait sur 60 mois,
on encourrait beaucoup plus de risques. Tandis qu'on voit que, même si
l'inflation n'est pas l'indication, en
fin de compte, du cumul de tous les
coûts... Quelqu'un pourrait dire : Oui, mais ce n'est pas tout
à l'inflation. Si on prend un grand panier
de coûts, c'est peut-être la meilleure mesure. Si quelqu'un
a une meilleure mesure, là, fixe, là, qu'on me la donne.
Mais
après ça, de venir sur 60 mois... Je réitère ma question. Pour
le consommateur, de manière concrète, quel risque aura-t-il à avoir un
gel et l'inflation aux quatre ans, le consommateur, son risque, là, qui va se
matérialiser, qu'il va se dire : Eh mon Dieu! j'en ai mangé toute une?
M. Finet
(Jean-Pierre) : Son risque, ça va être de payer trop cher.
M. Julien :
Combien?
M. Finet (Jean-Pierre) :
Bien, ça va dépendre. C'est un risque, justement, c'est une hypothèse. C'est la
même hypothèse que celle que vous faites, là, l'hypothèse...
M.
Julien : Je rejoins votre
risque. Donc, en 2013, en fin de
compte, il a payé 279 millions trop cher, malgré, en fin de compte, un processus de cause tarifaire. C'est arrivé, là. Puis,
l'année suivante, il a payé 160 millions trop cher malgré un mécanisme de cause tarifaire. L'année suivante, 77 millions trop cher malgré un mécanisme de cause tarifaire.
M. Finet
(Jean-Pierre) : Mais savez-vous pourquoi il a payé trop cher?
M. Julien : Bien, vous allez me le
dire.
M. Finet
(Jean-Pierre) : Bien, il y a
un paquet de facteurs, dont, entre
autres, le fait que... Je vais vous
donner un exemple. Systématiquement, Hydro-Québec, à chaque année, dit... À un moment donné, le budget d'efficacité
énergétique était un peu plus que
200 millions de dollars. Chaque année, il laissait 30, 40,
50 millions de dollars sur la table. Bien, ça fait partie des trop-perçus, ça, entre guillemets,
là, mais ça ne doit pas venir bonifier le rendement d'Hydro-Québec, le fait
qu'il ne dépense pas l'argent qu'il devait dépenser en efficacité énergétique.
Puis l'autre
affaire, quand vous parlez aussi de l'inflation, l'inflation, tu sais, je veux
dire... Écoutez, les tarifs suivent plus
ou moins l'inflation. Au cours des dernières années, Hydro-Québec a fait
énormément de gains de productivité. Donc, s'il n'y avait pas eu
d'ingérence du gouvernement pour faire en sorte qu'on achète, par exemple, de
l'énergie dont elle n'avait pas de besoin, et tout ça, bien, la courbe n'aurait
pas nécessairement suivi l'inflation.
Puis
l'inflation, c'est... On a beau dire : Écoute, on va le prévoir en
fonction de l'inflation, mais l'inflation, ce n'est qu'une des
variables, là. La température, les aléas climatiques, c'en est une autre,
variable, puis le...
Donc, c'est
ça, si on fixe les tarifs, puis on ne contrôle pas l'inflation, puis on ne
contrôle pas les aléas climatiques, ça
ne me sert à rien. Si vous me dites : Je gèle les tarifs, ça ne veut pas
dire que ma facture va être la même l'année prochaine que ce qu'elle a
été l'année dernière.
M. Simard
(Christian) : Mais là vous
condamnez, M. le ministre, les consommateurs à une certaine... Vous êtes
sûr et certain que, pendant quatre ans, vous
allez avoir des augmentations chaque année, alors que vous pourriez être
tenté, avec une position où Hydro-Québec est en bonne condition financière, d'avoir éventuellement, suite à une analyse par la régie, des tarifs, même, qui
pourraient théoriquement être négatifs, négatifs d'augmentation.
M.
Julien : M. Simard, en
théorie, on peut dire ça et n'importe quoi. Quand on regarde l'historique, on
observe une tendance qui est là. Et tantôt
on avait un représentant qui était là qui disait : Moi, j'aime bien
l'idée. Pourquoi il l'aime bien, cette idée-là? Parce qu'il disait : La première année, le gel, quand je
vais prendre sur le cinq ans... Puisqu'il est en première année, le gel, en taux indexé, toutes choses étant égales par ailleurs, la même inflation cinq ans, il dit : C'est comme si on payait à
peu près 66,6 % de l'inflation sur cette période-là. Puis
il dit : Moi, je suis rassuré parce que, quand on va faire la cause tarifaire dans cinq ans, de toute façon on
va le réévaluer. Puis d'autres personnes ont mentionné de réduire la
périodicité.
Je
reviens : un gel première année avec augmentation à l'inflation, moi, là,
je prends n'importe quelle période de cinq ans dans le passé, là, on n'a
pas bien, bien fait mieux que ça. Pourquoi vous dites qu'on va faire pire, là?
M. Simard
(Christian) : Oui, mais,
regardez, il y a beaucoup de facteurs. Puis, d'origine, malheureusement... Puis ça, c'est ce qu'on dit. Ce n'est pas pour rien qu'on vous demande de
réfléchir à plutôt bonifier des instances comme la Régie de l'énergie ou Transition énergétique
Québec plutôt que... Des fois, on les
fait disparaître, les fait réapparaître au gré des gouvernements puis, à un
moment donné, on manque de stabilité
puis d'équipement. Mais, si on fait ça puis si on ne manipule pas trop, bien... Il y a
des décisions, à un moment donné, gouvernementales qu'on a imposées à Hydro, de l'achat.
Et on a joué beaucoup, que ce soit pour le programme des petites centrales, le programme
des éoliennes, qui a influencé directement. Donc, il faut comparer les pommes
avec les pommes.
Là, actuellement, on a un équipement qui est la... qui permet aussi de savoir les choix d'Hydro-Québec puis de questionner les choix d'Hydro-Québec. Pendant une
période de cinq ans, c'est Hydro-Québec qui va un
peu manipuler ses chiffres. Je
ne pense pas qu'elle baisse nécessairement les bonus à ses cadres, mais elle va éventuellement... peut-être
pour, éventuellement, payer la première année de gel, il va peut-être y
avoir des investissements qui vont être retardés, il va peut-être y avoir des
choses...
M.
Julien : Je vous arrête, M.
Simard. Qu'est-ce que vous voulez dire, qu'Hydro-Québec va manipuler ses chiffres? Expliquez-moi ça.
M. Simard (Christian) : Bien, ce que
je veux dire, c'est qu'à partir du moment donné...
M.
Julien : Non, mais juste un
instant. Dans la liste des documents qui sont déposés en annexe, il y a
des documents qui sont vérifiés, il y a des budgets.
Vous nous dites qu'Hydro-Québec va manipuler les chiffres?
M. Simard
(Christian) : Bien, écoutez,
elle doit arriver. C'est elle qui va, à
un moment donné, faire ces choix.
Elle fait des choix pour arriver dans
un... face au gel budgétaire imposé la
première année et le crédit. Et
ensuite, pour établir les tarifs à
l'inflation, elle va regarder son budget interne puis elle va faire des choix,
qui sont des choix qui peuvent se justifier mais qui ne seront pas amenés année
après année pendant la régie... qui
ne seront pas discutés à la régie, qui ne seront pas questionnés
comme choix, ce qu'elle dépense en efficacité
énergétique, ce qu'elle va dépenser
dans d'autres fonctions, ce qu'elle
va mettre au niveau de l'entretien. À ce moment-là, c'est des
choix d'entreprise qui se font pendant une durée de cinq ans
sans aucune transparence au niveau de ça.
M.
Julien : Parfait. D'un autre côté,
quand on amène cette notion-là où on transfère une partie du risque à Hydro-Québec pour qu'elle se gouverne mieux... Puis là vous dites : Elle ferait
des choix, alors ce serait, encore là, de présumer qu'elle ferait des mauvais choix, mais je serais,
encore là, curieux de voir pourquoi elle ferait les mauvais choix. Mais, d'un
autre côté, il y a
des revenus qui sont, en fin de
compte, connus par Hydro-Québec. Et, après ça, quand elle dépose ses chiffres, bien, il
y a un «bottom line», il y a
un rendement, il y a... En
fin de compte, l'information qui est publiée, dans l'ensemble
de l'information de l'annexe II, permet de voir ce qui se
passe chez Hydro-Québec. Je ne
pense pas qu'elle va manipuler
les chiffres. Je n'ai jamais entendu qu'Hydro-Québec manipulait ses chiffres.
• (17 h 40) •
M. Finet
(Jean-Pierre) : Non, bien, peut-être
que le mot «manipuler» n'était pas exact, là, mais il reste que... Je vais vous donner un bon exemple. Puis, quand vous
parlez... D'ailleurs, ça fait allusion aussi quand vous dites :
La régie va quand même...
tu sais, Hydro-Québec va être obligée de faire une reddition de comptes auprès de la Régie de
l'énergie, puis il
n'y a pas de problème. Une reddition de comptes, en passant, là, c'est de mettre la régie devant
les faits accomplis. Puis je vais
vous donner un bon exemple. Hydro-Québec, en 2014, a fait un déversement de 100 000 litres de diesel aux
Îles-de-la-Madeleine. Ça coûte 35 millions de dollars. La régie a refusé
une première partie de... je pense, le premier 15 millions de dollars, parce que, justement, elle n'aime pas être
mise devant un fait accompli. Et nous, on s'oppose à ce qu'Hydro-Québec
verse... Hydro-Québec mette dans la base tarifaire ce 35 millions de
dollars là pour faire payer les clients pour son erreur, pour une erreur dont
elle a reconnu la responsabilité.
M. Julien : Je vous arrête...
La Présidente (Mme Blais,
Abitibi-Ouest) : ...il vous reste une minute.
M. Julien : Ce fait accompli là, Hydro-Québec
aurait pu, en fin de comte, l'anticiper...
M. Finet (Jean-Pierre) : Non, non.
Ça va dans un compte, là, vous avec le compte d'évènements imprévisibles en réseaux autonomes. C'en est un, ça. Bon, là, Hydro-Québec, avec le projet de loi
n° 34, pourrait le mettre dans
la base tarifaire à notre insu puis sans qu'on puisse dire un mot. Et ce
35 millions là, là, va impacter, là... parce que vous gelez les tarifs au 1er avril, ça fait qu'il va falloir qu'ils coupent ailleurs
pour le 35 millions. Ils ne couperont pas dans les bonus, là, ils vont couper dans l'entretien ou ils vont
retarder l'entretien du réseau et ils vont faire... retarder d'autres
investissements, etc. Ils ne peuvent
pas... Tu ne peux pas... C'est de la pensée magique de penser qu'on transfère
le risque à Hydro-Québec puis qu'on s'en lave les mains, puis tout est
réglé.
M. Julien : Donc, ils vont moins
entretenir volontairement leur réseau?
M. Finet (Jean-Pierre) : Pardon?
M. Julien : Ils vont moins bien
entretenir le réseau volontairement?
M. Finet
(Jean-Pierre) : C'est déjà
arrivé dans le temps, pour augmenter les dividendes au gouvernement, c'est
déjà arrivé.
M. Simard (Christian) : ...ça a été
reconnu.
M. Finet (Jean-Pierre) : Ça a été
reconnu. Guy Coulombe, dans le temps...
M. Simard
(Christian) : Ça a été
reconnu, dans la crise du verglas, de façon évidente, là. Et c'est de
l'histoire, là.
M. Finet
(Jean-Pierre) : Bien oui. Ce
n'est pas magique, ça, Hydro-Québec. Le risque, là... Il n'y a pas une boîte
à risques, là.
La
Présidente (Mme Blais, Abitibi-Ouest) : Messieurs, je vous remercie
pour votre exposé. Nous allons maintenant commencer la période
d'échange.
M.
Polo : Mme la Présidente, je vous demanderais, si c'est possible, de
récupérer le temps des deux autres oppositions, compte tenu qu'ils sont
absents.
La Présidente (Mme Blais,
Abitibi-Ouest) : Consentement?
Une voix : Pas de
consentement.
La Présidente (Mme Blais,
Abitibi-Ouest) : Pas de consentement.
M.
Polo : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Ceci dit, merci, messieurs,
pour votre exposé. Je vais commencer par
vous poser la question sur la question du 1 milliard. Bon, on s'entend,
là, le 500 millions, selon le projet de loi n° 34, va être remboursé
en début d'année 2020, mais il ne s'agit pas d'un nouveau cadeau. Et fait,
il s'agit d'un montant qui devait de toute façon être remboursé au cours
des trois à cinq prochaines années. Qu'est-ce que vous, vous dites du
1 milliard, selon
le mécanisme présenté, là, par le projet de loi n° 34, là, donc le
gel 2020, puis une indexation sur quatre ans? Est-ce que les consommateurs vont réellement, si on peut
dire, recevoir ou bénéficier d'un supposé remboursement des trop-perçus
pour le total de 1 milliard?
M. Finet (Jean-Pierre) : Nous, on dit... Premièrement, on l'a déjà dit que
c'est de la poudre aux yeux. Premièrement, ce premier 500 millions, c'est notre argent, donc, si vous me
remettez mon argent, je vais être très content, mais vous ne m'avez pas rien donné, là. Les trop-perçus, en
passant, Hydro-Québec ne les a plus. À 75 %, à tout le moins, ils les ont
retournés au gouvernement sous forme de dividendes. Donc, ce n'est pas à
Hydro-Québec à remettre quoi que ce soit. Hydro-Québec,
moi, je calcule qu'ils ne doivent rien à la population. Et cet argent-là est
allé, bien, entre autres, là, dans le fond consolidé, qui a servi à
payer un paquet d'autres affaires.
Donc,
premièrement, c'est un faux problème, Hydro-Québec ne doit pas rien à personne.
L'argent, c'est vous qui l'avez. Si vous voulez faire un chèque... si le
gouvernement veut faire un chèque aux gens, moi, je les invite... puis ça ferait mon affaire parce que ma situation
personnelle où... j'avais un logement où je payais mon électricité puis là j'en
ai un où je ne paie pas l'électricité. Moi, je n'en aurais pas, de
remboursement, avec la formule actuelle. Donc, c'est inéquitable. Si
vous voulez me faire un chèque, là, je vais vous donner mon adresse.
Donc, c'est ça. Donc,
premièrement, le gouvernement... Hydro-Québec ne doit pas une cent à personne.
Puis, deuxièmement, bien, c'est ça, le
1 milliard, bien, ça demeure hypothétique. Le 1 milliard que nous, on
a sauvé en faisant une demande de
révision à la régie pour stopper Bécancour en période de pointe, ça, c'est de
la vraie argent. Puis vous pouvez demander à Hydro-Québec.
M. Simard (Christian) : Tandis que l'autre, ça va dépendre des scénarios
qu'il y aurait eu ou non avec le système d'inflation. Est-ce qu'on va
battre l'inflation, pas battre l'inflation? Et c'est vraiment ces éléments-là.
Et donc on a un processus qui est là, qui nous garantit quelque chose de
beaucoup plus flexible. Je ne dis pas que les tarifs n'ont pas été influencés
au cours des années puis qu'il n'y a pas eu des écarts, on les voit, mais
souvent ça a été des interventions d'obligation
d'achat, de... Il y a eu quand même... L'actionnaire, quand même, pèse beaucoup
sur les intentions d'Hydro.
Puis
Hydro eux-mêmes vont reconnaître, à long terme, aussi que, des fois, ils n'ont
pas toujours, mettons, une boule de
cristal particulièrement claire, puis ils font des erreurs, puis il y a eu des
erreurs. Puis d'ailleurs c'est pour ça, puis les consommateurs vous l'ont dit
tantôt, quand on intervient à la régie, il y a une coconstruction avec
Hydro-Québec, il y a des échanges.
Puis, des fois, ils admettent, puis ils recalculent, puis ils doivent justifier
devant la régie, puis ils admettent qu'on a parfois raison, puis il y a des
correctifs qui se font. On a plein d'autres exemples. Il y a toute la question
de l'abandon de la centrale du Suroît, là. Je pense qu'on a fait une
maudite économie en n'allant pas là, là. Puis ça a été beaucoup des
interventions chez nous.
M. Finet (Jean-Pierre) : Vous vous rappellerez aussi, après la question de
Bécancour, Hydro-Québec est arrivée puis elle nous a dit que, finalement, on avait
trop économisé d'énergie. Finalement, tout le monde, en moyenne, avait baissé
son thermostat de 1,5 %, et donc c'est... puis que, finalement, il y a eu
une perte de ventes de 945 mégawatts, je pense.
M. Polo :
Alors, je vous reprends sur l'expression «c'est de la poudre aux yeux». Alors,
pourquoi on est rendus ici? Qu'est-ce qu'on fait ici? Ça avantage qui?
C'est pour qui?
M. Finet (Jean-Pierre) : Bien, c'est pour Hydro-Québec. Moi, je vais
reprendre un peu les propos de Viviane de Tilly, qui était ici, de l'Union des consommateurs. Là, je pense que, quand M.
le premier ministre a demandé à Hydro-Québec des suggestions de quoi faire... je pense qu'Hydro-Québec a vu la porte
entrouverte, puis a rentré dedans, puis a fait part de ses doléances, et entre
autres des choses qui, je ne sais pas, vous ont été soulevées pendant les
audiences. Mais, bon, là, on voit les
programmes commerciaux, là, finalement c'était une épine dans le pied d'Hydro,
mais c'est un peu, comme je disais, la faute du gouvernement qui n'a pas
soutenu non plus, là.
Puis
je pensais à la fameuse spirale de la mort. Quand je regarde, justement, dans
la liste des tarifs du projet de loi n° 34, il y a un tarif
qui est disparu, le mesurage net en réseau intégré, celui qui fait en sorte que
les gens qui remettent leur... qui
vendent de l'électricité de surplus à Hydro-Québec, sur le réseau
d'Hydro-Québec, avec leurs panneaux photovoltaïques,
par exemple, là ils vont avoir 0,00 $ du kilowattheure à partir du
1er avril. Eux autres, ils vont être dans... ils vont être fâchés.
M. Simard
(Christian) : Oui. Puis c'est quand même des choses qui sont modernes
et intéressantes, qui a une souplesse qui permet aussi la spirale de la mort,
là, pour dire... c'est quand on fait des équipements sur trop long terme, maintenant, alors que l'évolution technologique,
avec les batteries, avec les éoliennes, avec des façons de donner de l'énergie
autrement que par des infrastructures financées sur 50, 60 ans... Puis, de
plus en plus, il y a des façons d'autoproduire. Puis c'est intéressant, quand tu autoproduis un peu
plus que tu as besoin dans ta maison, que tu puisses le revendre à Hydro-Québec
pour au moins baisser un peu ta facture, pas
plus, mais une portion de. À des endroits, ils peuvent même faire de l'argent,
et c'est un peu triste, là. Puis ça, c'est
des choses qu'on ne peut pas... Le projet de loi introduit du discrétionnaire
puis de l'arbitraire dans un processus dynamique à la régie, qui permet,
justement, de s'adapter à la réalité du mouvement en énergie, de l'efficacité énergétique, des grandes
tendances mondiales puis des nouvelles percées technologiques dans le
domaine des batteries, par exemple.
M. Polo :
Excellent. Avant de céder la parole à mon collègue de Jacques-Cartier, ce que
je comprends de vos propos, c'est un peu l'interprétation que j'ai faite en début de semaine, c'est que, comme
Québécois, on est fiers, O.K., on est fiers d'avoir nationalisé, là, l'hydroélectricité, là,
on est fiers de l'expertise qu'on a développée à travers toutes ces décennies,
on est fiers de pouvoir exporter cette
expertise-là également à l'international. Mais là, aujourd'hui, là, on est en
train d'essayer de nous vendre l'idée
que ça va bénéficier les Québécois, mais ce qu'on est en train de voir et ce
que vous confirmez, c'est qu'en réalité, là, il y a juste Hydro-Québec qui va
bénéficier du projet de loi n° 34, alors que c'est un monopole, alors qu'ils
ont déjà la mainmise totale sur le marché, et, en plus de ça, on essaie de leur
donner d'autres avantages.
M. Finet
(Jean-Pierre) : Ça donne au moins une apparence de conflit d'intérêts.
M. Simard (Christian) : Puis il y a un élément qu'il faut dire, ça me
fait penser... Tu sais, on parlait de la question des tarifs, monsieur
tout à l'heure, ça me fait penser un peu... On sait que, quand on prend des
tarifs hypothécaires à l'année, là, ou aux
six mois, on paie moins cher que le tarif sur cinq ans. Pour se rassurer sur le
tarif sur cinq ans, on prend une cote. Là, ici, c'est la cote de
l'inflation. Mais moi, je fais le pari qu'actuellement on aurait sans doute eu,
pour les quatre prochaines années, des tarifs moindres que l'inflation.
Maintenant,
là, ce qui est intéressant aussi, c'est que ça peut être questionné à chaque
année, puis on peut... mais je pense
qu'on se prive de ça, on met un peu trop d'arbitraire. Puis la participation du
public, pour le ROEE, c'est fondamental. On pense que, dans le contexte actuel de l'urgence climatique, des défis
importants, tous les gouvernements, Hydro-Québec, tout le monde a à gagner de travailler dans la
transparence, dans le débat public, dans la participation du public puis dans
des structures comme la régie, qui sont des structures démocratiques
intéressantes, et non de suspendre leur application pendant cinq ans pour mettre plus d'arbitraire. C'est ça, nos principes
d'intervention. Puis on pense qu'on se prive d'un outil majeur, puis pour une raison qui aurait peut-être
pu être solutionnée autrement si on voulait donner un crédit spécial aux
Québécois.
La Présidente
(Mme Blais, Abitibi-Ouest) : J'invite le député de
Jacques-Cartier.
M. Kelley :
Nous avons combien de temps?
La Présidente (Mme Blais,
Abitibi-Ouest) : Il vous reste 3 min 15 s.
• (17 h 50) •
M. Kelley : O.K. Parfait. Merci. Juste une question concernant... Dans votre mémoire, vous avez
mentionné... parlé de l'urgence
climatique. Et aussi, dans les échanges avec le ministre, vous avez mentionné
la réalité que peut-être avec ça Hydro-Québec pourrait être obligée de
faire des différents choix. Alors, vous autres, en lien avec l'urgence
climatique, l'efficacité de notre réseau,
est-ce que vous avez des idées ou des suggestions sur comment on peut améliorer
la distribution et la transmission de
notre énergie? Parce que, pour moi, ça, c'est très, très important. Alors, je
ne sais pas si vous avez des commentaires là-dessus.
M. Finet (Jean-Pierre) : Oui, c'est-à-dire que... Bien, écoutez, notre problème...
Comme vous savez, on a énormément de surplus, mais on a un problème
de puissance, de gestion de la demande en puissance. Et Hydro-Québec a supposément développé une
batterie avec Sony, l'Esstalion, qui a été rebaptisée, je pense,
depuis. Où elle est, cette batterie-là? Je pense, c'est essentiel, là,
écoutez, de plus en plus... Bien, Hawaii, avec Innergex, même une
entreprise québécoise, a fait un projet solaire avec stockage.
Ici, on n'en a pas, on est les pionniers, on est les leaders, mais ça se fait
partout ailleurs sauf ici.
Là,
dans les réseaux autonomes, on met encore des centrales thermiques et on
fait... Puis là on a une centrale au fil
de l'eau qu'on est en train de planifier pour... qu'Hydro-Québec est en train de
planifier à Inukjuak, puis on veut rebâtir une autre centrale thermique. Pourquoi pas du stockage? Le stockage,
c'est la solution pour lisser la demande, pour faire une meilleure utilisation de notre réseau de
transport puis de distribution d'électricité, au lieu, là... Parce que, là, à
chaque fois qu'il nous manque un petit peu d'électricité, on va faire un
barrage pour 100 à 300 heures par année. C'est illogique, là. Il
faut mieux gérer ce qu'on a avec... Et on
est capables de faire une meilleure gestion avec, justement,
les programmes comme Gestion
de la demande en puissance, dont parlait la FCEI tout à l'heure, avec des tarifications d'électricité interruptible, avec du stockage.
M. Simard
(Christian) : On a beaucoup, beaucoup d'idées. Puis d'ailleurs, là-dessus,
ce qui est important...
La Présidente (Mme
Blais, Abitibi-Ouest) : Il vous reste une minute.
M. Simard (Christian) : ...nous, à Nature Québec, par exemple... Très rapidement, Nature
Québec, c'est sûr que de faire un barrage puis de faire un suréquipement pour
répondre à une demande de pointe, ça ne nous apparaît pas logique. Donc, on aimerait beaucoup plus de créativité puis
d'augmenter... d'aller au bout de notre potentiel d'économie d'énergie, à la limite on en exportera plus aux États-Unis,
M. Julien... ou M. le ministre, on pourra... Cette efficacité énergétique là,
elle va nous profiter éventuellement.
Mais
on n'est pas très bons en efficacité énergétique, on a des objectifs trop
faibles dans notre politique énergétique, qui sont beaucoup trop faibles, donc on a lieu à beaucoup
d'améliorations. Et une société de monopole, une société d'État, ça a beaucoup, beaucoup de qualités, mais, parfois,
c'est comme un éléphant, ça se déplace très lentement. Et souvent, avec l'aide d'instances comme la Régie de l'énergie ou
des débats qui se font avec le public, peut-être qu'on peut pousser l'éléphant
à danser un peu différemment.
La
Présidente (Mme Blais, Abitibi-Ouest) : Je vous invite à conclure...
Je vous remercie pour votre contribution à nos travaux.
La commission suspend ses travaux jusqu'à
vendredi 20 septembre, à 9 h 30, et elle poursuivra son mandat.
(Fin de la séance à 17 h 53)