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Version finale

36th Legislature, 1st Session
(March 2, 1999 au March 9, 2001)

Thursday, January 20, 2000 - Vol. 36 N° 9

Audition de l'Association des industries forestières du Québec et de la Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec dans le cadre du mandat de surveillance des organismes publics


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Table des matières

Journal des débats


(Neuf heures quarante minutes)

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, je salue tout le monde. Je déclare la séance de la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation ouverte. Je vous rappelle le mandat de la commission: le mandat de la commission pour cette séance est de procéder à l'audition de l'Association des industries forestières du Québec et de la Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec dans le cadre d'un mandat de surveillance d'organismes.


Organisation des travaux

Je me permettrai de faire une petite mise au point, entre guillemets. Dans le cadre d'un mandat de surveillance, l'organisme qu'on va recevoir en deuxième, qui est la Régie des marchés agricoles et alimentaires, se situe dans le cadre précis de la loi des organismes qui sont sous notre gouverne, là, des cinq, comme j'ai parlé hier. Par contre, le premier groupe qu'on reçoit, c'est beaucoup plus pour discuter sur la loi n° 23 qui découle beaucoup plus de toute la question au niveau de l'agriculture, des terrains, etc., comme on l'a vu hier. Je fais la petite mise au point parce que, quand on recevra le deuxième groupe, je ne crois pas qu'il va être question de la 23, tandis que, hier, quand on a reçu le groupe de la protection du territoire, évidemment qu'on le recevait dans l'ordre de notre mandat. Ces gens-là venaient nous voir pour discuter avec nous autres de ce qu'ils ont réalisé dans leur mandat.

Mais, compte tenu qu'on attache actuellement... Puis je le dis pour la commission, mais, parce que c'est télévisé, il y a beaucoup de gens qui, à la maison, prennent ça, et, évidemment, c'est important, je pense, que ces gens-là comprennent ce qui se passe. C'est que, compte tenu de ce qui se passe dans l'industrie de l'agriculture à l'heure actuelle, la loi qui avait été révisée et amendée, la loi n° 23, en 1997, il est normal qu'après un certain temps on analyse ce que cette loi-là donne. Et, dans ce cas-là, le ministre lui-même, le gouvernement a reconnu qu'il y avait des éléments qui ne marchaient peut-être pas de la façon dont ça avait été prévu, et les membres de la commission ont cru bon, suite à des informations, suite à des demandes qu'on a eues de groupes, d'intervenir immédiatement pour faire une analyse de ce qui se passe concernant la 23.

Alors, ce matin, pour les gens qui nous regardent, la première séance traitera exclusivement de la 23, traitera exclusivement de ce qui se passe avec les amendements qui ont été faits depuis deux ans et demi, de ce qui se passe réellement sur le terrain, et répondra aux questions des membres de la commission, des députés des deux côtés, de façon à ce que, nous, un peu plus tard, on décide. On va avoir une rencontre cet après-midi. Hier, on a eu une demande de la Fédération québécoise des municipalités pour nous rencontrer, dans le même ordre, sur l'agriculture, la 23. On décidera peut-être cet après-midi d'en rencontrer d'autres. Ce qu'on veut, nous, les membres de la commission, c'est être bien saisis de la situation et faire des recommandations, comme commission, au gouvernement.

Alors, je voulais faire cette mise au point là pour que ce soit clair pour celles et ceux qui nous écoutent, mais en même temps pour que les gens qui viennent devant nous ne soient pas non plus mal à l'aise, parce que, hier, je l'ai réalisé à la fin, avec le dernier groupe, on était tous dans une position assez difficile parce que eux autres venaient dans leur mandat, je le répète, puis que, nous, on était beaucoup tentés de questionner en fonction de la 23 parce qu'on a une préoccupation. On ne s'en cache pas, c'est ouvert à tout le monde, on a une préoccupation très, très forte sur ce que vit l'industrie de l'agriculture, particulièrement évidemment les producteurs agricoles.

Alors, cette mise au point là faite, M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Lafrenière (Gatineau) est remplacé par M. Vallières (Richmond).

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci. Alors, j'invite M. Duchesne à présenter d'abord les gens qui l'accompagnent et, M. Duchesne, à faire votre présentation de 20 minutes.


Auditions


Association des industries forestières du Québec (AIFQ)

M. Duchesne (André): Merci, M. le Président. Alors, mon nom est André Duchesne, je suis le président-directeur général de l'Association des industries forestières du Québec. J'ai avec moi M. André Mallette, qui est le surintendant des achats de bois pour la compagnie Bowater, dans l'Outaouais. Il est ici à titre de président du Comité des approvisionnements de l'AIFQ. Et, à ma droite, Guy Larochelle, qui est le directeur approvisionnement à l'Association.

On voudrait d'abord vous remercier, M. le Président, de nous donner l'occasion de vous parler de notre point de vue sur l'application de la Loi de la mise en marché et le rôle de la Régie là-dedans. Vous avez en main un mémoire qui a été transmis en juin dernier au ministre de l'Agriculture, avec copie au ministre des Ressources naturelles. Le ministre, pour le moment, est encore en cogitation par rapport aux demandes formulées dans le mémoire. On espère que vous pouvez l'aider à réfléchir.

Je voulais juste vous signaler qu'en page 6 de ce mémoire-là il y a une coquille: l'AIFQ est bien accréditée en vertu de l'article 111 et non pas de l'article 110. Le texte est très clair. M. Busque me le faisait remarquer tantôt, là, il n'y a pas de confusion possible, c'est juste qu'il y a une erreur de frappe.

Ce matin, M. le Président, je veux juste vous rappeler ce qu'il y avait comme essentiel dans ce mémoire-là, parce que j'ai autre chose à vous raconter. Le mémoire du mois de juin démontre, à notre point de vue, que l'examen périodique des plans conjoints, tel qu'effectué par la Régie des marchés agricoles jusqu'à maintenant, ça ne donne pas les résultats escomptés, ce n'est pas efficient, ce n'est pas efficace, et nous avons cité dans le mémoire l'avis du Vérificateur général qui a émis à peu près la même opinion en termes très clairs.

Le deuxième point qui était le point essentiel pour nous, c'est que la Régie, au cours des dernières années, n'a pas réussi à préserver quelque chose qui est essentiel à sa crédibilité comme tribunal d'arbitrage, c'est-à-dire son apparence d'impartialité. Pour nous autres, on a l'impression qu'il y a de la connivence. Et, dès le moment où on n'a pas plus confiance que ça dans un tribunal, évidemment ça pose toutes sortes de difficultés. On a donc demandé, pas de renverser le système, on a demandé que l'arbitrage des litiges, quand il y en a qui se rendent là, soit fait en vertu du Code de procédure civile, ce qui est déjà possible en vertu de l'article 116, alinéa deux de la loi. Donc, on n'est pas en train de révolutionner le système, d'aucune façon.

Depuis le dépôt du mémoire, il s'est produit un certain nombre d'événements dont on vous fait part en détail ce matin dans le document qu'on vient de vous déposer et que vous pourrez lire à tête reposée. Je vais passer au travers rapidement. Nous, on pense essentiellement que, dans les six derniers mois, la Régie s'est mis les pieds dans les plats à quelques occasions. La Fédération des producteurs de bois, dont plusieurs représentants sont ici ce matin, de son côté a entrepris une campagne pour dénoncer les intentions de l'industrie de détruire le système de mise en marché. Bien, si ce qu'on a demandé, M. le Président, que l'arbitrage soit impartial de façon patente, de façon très visible, si, en demandant ça, on détruit le système de mise en marché, bien, je pense qu'ils viennent de confirmer qu'ils se sentent capables d'influencer les décisions de la Régie, puis c'est exactement ce qui nous inquiète. Alors, le mémoire, ce matin, parle essentiellement de ça.

Il y a un chapitre sur le portrait de l'industrie, sur les standards; on n'en parlera pas. Il y a un deuxième chapitre, en page 8, qui discute du système actuel de mise en marché et des déficiences qu'on a relevées dans le fonctionnement actuel. C'est essentiellement ce que vous aviez au mois de juin. Mais je vous amène en page 16, au chapitre 3. On a réclamé puis on réclame encore un système de mise en marché indépendant, neutre puis impartial. En novembre 1999, la Régie a déposé son document de planification stratégique où elle identifie trois orientations fondamentales. En fait, elle reprend les éléments de sa mission qui sont inscrits à l'article 5 de la loi. Donc, il n'y a rien de nouveau là-dedans. Et, nous, quand on regarde ça, on a l'impression que la Régie est déficiente dans la réalisation de ces trois orientations-là.

(9 h 50)

La première, c'est de favoriser une mise en marché efficace et ordonnée. La Régie prévoit là-dessus de faire trois choses: s'occuper de réglementation, des conventions de mise en marché puis des examens périodiques de plans conjoints. Alors, ce sont des démarches qui sont orientées exclusivement vers les producteurs et qui essentiellement tendent à établir cette relation harmonieuse entre la Régie puis les syndicats et offices de producteurs de bois qui nous inquiètent tant.

On a participé aux révisions des plans conjoints au début des années quatre-vingt-dix. Nos recommandations ont été systématiquement écartées, à tel point qu'on se demandait des fois si on avait été là. Alors, quand on a voulu faire une deuxième phase de révision des plans conjoints en 1998, on a parlé longuement avec la Régie et on n'a pas pu obtenir l'assurance que la situation serait changée. On a refusé d'y aller. Il y a quelques rapports qui sont sortis déjà de cette deuxième phase de révision, puis je pense qu'on est contents de ne pas y être allés. Entre autres, la Régie n'a aucunement proposé aux syndicats et aux offices de regarder comment on pourrait faire évoluer les mécanismes de mise en marché actuels pour répondre à nos préoccupations puis pour répondre finalement au consensus qui avait été développé au Sommet sur la forêt privée.

Il y a un exemple, c'est celui du plan conjoint des producteurs de bois de l'Estrie. L'Association des scieurs de l'Estrie a participé, a exprimé plusieurs mécontentements, a suggéré des pistes de solution, il y a des producteurs de bois qui sont venus tenir des propos qui appuyaient essentiellement ceux de l'ADSE, mais la Régie n'en tient pas compte dans ses recommandations; elle recommande, au contraire, au syndicat de renforcer et de consolider son plan conjoint plus de la même chose.

La deuxième orientation, contribuer aux relations harmonieuses entre les intervenants. Bien, la Régie prévoit pour ça des séances publiques puis le suivi des plans conjoints. Encore une fois, ça s'adresse aux producteurs. Nous, on ne peut absolument pas voir comment ça va contribuer à améliorer les relations harmonieuses entre le vendeur puis l'acheteur. Il n'y a rien là-dedans.

La troisième orientation: solutionner les différends. Bien, notre mémoire parlait, au mois de juin, de cette apparence de partialité de la Régie, à tout le moins qu'elle n'a pas préservé au moins son apparence d'impartialité. Depuis ce temps-là, nous, de la façon dont on voit la situation, la Régie a contribué à détériorer les relations entre les vendeurs puis les acheteurs. Puis le cas qui s'est passé à Domtar, Windsor, je pense que ça démontre l'inefficacité de la Régie. Les producteurs se retrouvent avec un marché moindre parce qu'ils ont, je pense, de bonne foi – puis je ferais la même chose à leur place – utilisé les mécanismes pour essayer de forcer la main à la compagnie et que la Régie, là-dedans, n'a pas décidé, en tenant compte de la réalité économique qui est propre au marché du produit concerné... puis il est essentiel, je pense, de tenir compte de ça pour tenir compte des intérêts des deux parties, puis c'est dans sa loi, c'est dans l'article 5 de la loi. Alors, si une balise comme ça n'est pas respectée, on peut s'attendre justement à des conséquences négatives pour tous les participants dans le système.

Le chapitre 4 de notre mémoire, M. le Président, vous parle de négociation, de conciliation et d'arbitrage tel qu'on le voit, tel qu'on le vit, nous autres, puis je fais juste citer rapidement certaines choses, une citation du président du Syndicat des producteurs de bois de la Mauricie qui disait à ses gens, à toutes fins pratiques: On peut se fier sur la Régie pour nous donner raison; soyons solidaires, puis la Régie va nous donner raison. On regarde au niveau administratif lors de... puis la Régie n'a pas l'air de procéder de façon impartiale. Encore une fois, à Windsor, la compagnie a appris par les journaux qui avait été nommé comme conciliateur. Elle a demandé l'arbitrage en vertu de 116, alinéa deux, la Régie a accepté de faire ce que les syndicats demandaient – 116, alinéa un – avant d'entendre la compagnie, avant d'entendre ses arguments. Une fois qu'on a eu brassé la cage beaucoup de ce côté-là, le président de la Régie a accepté d'entendre les représentations de la compagnie, mais, au début de l'audience pour entendre ces représentations-là, il a dit tout simplement que, une fois qu'on les aurait entendus puis qu'on aurait délibéré, on commencerait selon 116, alinéa un. Alors, c'était tout décidé d'avance. Là, on s'est aperçus que la compagnie n'avait même pas reçu le rapport de conciliation. Alors, il y a un canal de communication privilégié entre les syndicats puis la Régie, puis il n'existe pas entre les clients, les papetières et la Régie.

À Portage-du-Fort, on l'avait rapporté, il y a eu une première séance de conciliation. La compagnie attendait la deuxième séance, elle a fini par recevoir un avis du conciliateur qui disait que M. Marcheterre, qui est un employé de la Fédération des producteurs de bois, l'avait avisé que la conciliation était reportée. Il y a au moins une formulation qui était, mettons, inadéquate de façon assez sérieuse. Même chose pour Forex, à Chambord. Le président du comité d'arbitrage a parlé de partage de la richesse. Ça allait bien dans le dossier des panneaux, donc il fallait partager la richesse. Alors, c'est pour ça, M. le Président, que l'industrie papetière a perdu confiance, finalement, et insiste pour avoir une autre forme d'arbitrage qui est possible dans la loi.

C'est vrai qu'on est convaincus de bien plus que ça. On pense qu'on a besoin d'une évolution importante du système de mise en marché. On en a discuté au Sommet de la forêt privée, ça a fait consensus. Et puis il ne se passe rien là-dessus. Mais on n'a jamais demandé l'abolition du système, tel que la Fédération des producteurs de bois puis les syndicats ont dit à leurs membres depuis le début de l'été. Pour nous, le regroupement des producteurs, c'est avantageux pour tout le monde.

Où on a quelque chose qui nous accroche, c'est l'exclusivité des syndicats. On l'a dit ça fait très longtemps. Mais ce n'est même pas le point sur lequel on voudrait qu'il se passe quelque chose de façon unilatérale. On pense que, si ça, c'est pour changer, ça fait partie de l'évolution dont on devra discuter ensemble. Ce qui doit changer, à notre sens, c'est de rétablir la confiance dans les décisions arbitrales, et, pour ça, le deuxième alinéa de l'article 116 est déjà disponible. À date, la Régie a toujours refusé d'accorder ça, à moins qu'il n'y ait consensus. Alors, les consensus sont rares. Nous, on demande, je ne sais pas par quel mécanisme, peut-être tout simplement une instruction du ministre à la Régie, que, dès le moment que quelqu'un, une des parties, demande l'application du deuxième alinéa de 116, ce soit automatique puis que ça se fasse comme ça.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): L'avez-vous devant vous, le 116?

M. Duchesne (André): «Si la conciliation n'a pas permis de parvenir à une entente, la Régie arbitre le différend à la demande de l'un des intéressés.

«La Régie peut établir un mode d'arbitrage différent si elle le juge opportun dans les circonstances; en ce cas, elle peut nommer un ou plusieurs arbitres et fixer le délai dont ils disposent pour prendre leur décision.»

C'est tout ce qu'on demande, M. le Président. Alors, voilà, c'est le résumé que je voulais vous faire de notre mémoire. Si vous avez des questions, ça nous fera plaisir de tenter d'y répondre.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie. Parfois, dans notre métier, on dit: On efface tout puis on recommence. On veut corriger certaines choses. Au tout début, je croyais de mon droit d'orienter la discussion de ce matin, mais je me suis rendu compte, en lisant votre lettre, que j'avais totalement erré, et je m'en excuse, parce que ce n'est pas sur la 23, c'est carrément dans le cadre – encore une fois, je le répète pour les gens qui regardent – de notre règlement à nous, et je vais me permettre simplement de le lire pour que ce soit très clair pour tout le monde, parce que, tout à l'heure, j'ai malheureusement erré.

(10 heures)

En vertu de l'article 294 du règlement, la commission a l'obligation – la commission, c'est nous – d'examiner chaque année les orientations, les activités et la gestion d'un organisme public soumis à son pouvoir de contrôle de l'administration publique. Nous, on a décidé cette année de ne pas en recevoir seulement un mais les cinq, qui sont la Commission de protection du territoire, qu'on a reçue hier, la Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec, la Régie des assurances, qu'on a déjà reçue, la Société de financement agricole, qu'on a déjà reçue, et le Fonds d'assurance-prêts agricoles. La Régie des marchés, on va la recevoir après.

Donc, vous, vous êtes inscrits carrément dans ça, au lieu de ce que j'ai dit, et, dans le fond, vous amenez des éléments que, nous, on aura à penser, réfléchir et discuter par rapport à la rencontre qu'on aura avec les gens de la Régie et aux recommandations qu'on fera. Alors, je m'en excuse auprès de tout le monde.

M. le député de Richmond, vous avez la première intervention.

M. Vallières: Oui. Alors, merci, M. le Président. En premier lieu, je voudrais souhaiter la bienvenue aux représentants de l'Association des industries forestières du Québec, leur indiquer que c'est avec beaucoup d'intérêt que nous avons pris connaissance du premier rapport, j'imagine, dont on retrouve l'essentiel dans le document que vous nous avez déposé ce matin. Celui que nous avions en main était celui de juin 1999.

Je pense qu'il est important, M. le Président, de se rendre compte de ce qu'on est en train de faire présentement. À partir du moment où on a un organisme qui, jusqu'à tout récemment, s'appelait toujours un tribunal administratif, qu'on considère comme un tribunal administratif ou, à tout le moins, un organisme de régulation très important, un organisme qui s'appelle la Régie des marchés agricoles et qui est là pour s'assurer de la mise en marché ordonnée de nos produits dans le domaine agricole et dans le domaine forestier dont on parle ce matin, alors c'est un organisme qui joue et a toujours joué dans le passé un rôle très important et qui historiquement a mis de l'ordre dans des secteurs où ce n'était pas nécessairement facile. Je pense que c'est depuis 1957 que la Régie joue un rôle de façon importante.

C'est donc dire que c'est important, là, la démarche que vous faites ce matin, parce que, dans le fond, de plein front, vous avez décidé de vous en prendre... tout en indiquant qu'il s'agit peut-être d'une perception de partialité, de non-transparence de la Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec. Bien, nous, comme parlementaires, on a à vérifier s'il s'agit bien d'une perception ou si c'est de la réalité. Après ça, on aura à se gouverner en conséquence. Mais, chose certaine, c'est qu'un organisme comme la Régie des marchés agricoles se doit d'avoir toute la crédibilité dont elle a nécessairement besoin pour s'acquitter adéquatement du mandat que le législateur lui a donné.

À partir du moment où un représentant d'une des parties, dans un dossier comme celui-là, décide d'aller, dans le fond, sur la place publique pour traduire son insatisfaction, ça soulève évidemment toute la question de confiance qu'on doit avoir, et, vous le disiez vous-même, M. Duchesne, c'est que vous n'avez plus confiance. Nous, si ça existe chez vous, comme parlementaires, on va essayer de savoir qu'est-ce qui fait que vous n'avez plus confiance. Il y a votre version que vous nous présentez, on aura la Régie tantôt qui pourra infirmer ou corroborer certains des points dont vous nous faites part.

Moi, je vais essayer avec vous ce matin d'avoir quelques questions de précision par rapport au travail de la Régie dans le secteur d'activité qui vous concerne. À l'intérieur du document de juin que j'ai en main, il y a une affirmation que vous faites, qui pourrait être à la base de cette perception que vous avez. J'aimerais qu'on vérifie un peu votre point de vue là-dessus, parce que, quand la Régie rend des décisions, évidemment c'est des régisseurs qui sont là pour écouter. D'abord, vous vous en prenez très clairement, là, au niveau des régisseurs, vous dites: Il y a quelque chose qui ne fonctionne pas, il y a de la partialité quelque part. Deuxièmement, vous dites: Quand la Régie rend des décisions, on dirait, à lire les textes, ou bien qu'on n'a pas été entendu ou bien qu'il manque des éléments pour justifier la décision. Alors, c'est sûr que, si la Régie rend des décisions puis qu'il vous semble que ces décisions-là ne sont pas suffisamment appuyées au plan des arguments qui sont fournis par la Régie pour justifier la décision, ça peut créer du doute dans l'esprit des gens. Ça ne veut pas dire que la Régie a tort, mais ça peut vouloir dire que la Régie ne donne pas suffisamment d'éléments qui permettent aux gens de comprendre pourquoi ils se sont rendus à cette décision-là.

Dans votre premier mémoire, à la page 20, vous nous indiquez que, dans le cas des décisions arbitrales... Et toutes vos récriminations portent autour de ça, hein, parce que vous nous dites, ce matin, là: Nous, on ne dit pas que ça ne prend plus une régie des marchés agricoles et alimentaires; ce qu'on dit, c'est que, quand il y a un contentieux, quand il y a un conflit puis qu'il y a une décision qui doit être prise, à ce moment-là on voudrait que ça se passe autrement pour qu'une décision intervienne. Et vous dites que, dans le cas des décisions arbitrales de la Régie, alors là elle joue vraiment un rôle d'arbitre.

Il faut que les gens qui nous écoutent sachent ce que ça représente. Quand tu nommes un arbitre, tu as confiance en l'arbitre, là. Tu ne mets pas un arbitre sur la glace puis les parties n'ont pas confiance en l'arbitre. Ça veut dire qu'il y a toujours une des parties qui va se plaindre et qui va contester, et ça va créer un climat qui va être loin de l'harmonie qu'on recherche, parce que, quand on parle d'organiser les secteurs pour que ça fonctionne bien pour la mise en marché, il faut qu'il y ait de l'harmonie quelque part. Et un des mandats que reçoit la Régie, c'est de s'assurer que les parties agissent en harmonie le plus possible.

Vous nous dites, et je cite, à la page 20 de votre mémoire: «Dans le cas des décisions arbitrales de la Régie, le cheminement paraît beaucoup plus nébuleux. Généralement, les représentations des parties sont bien résumées, mais l'analyse est très peu élaborée et fait souvent appel à des considérations non évoquées lors des auditions – donc, des éléments nouveaux. À la lecture des décisions arbitrales, il est difficile de savoir à quoi la Régie se réfère pour conclure de telle ou telle autre façon. Par ailleurs, les représentants des usines papetières ont souvent l'impression que les analyses de la Régie négligent des éléments importants qui lui sont présentés lors des séances d'arbitrage, laissant croire que les dés sont déjà jetés dès le début du processus.»

Bon, vous l'avez confirmé tantôt, vous dites: Nous autres, on s'en va là puis on a l'impression que les décisions sont déjà prises d'avance. Puis, en plus, quand on lit les décisions, les arguments en faveur de la décision, on ne les retrouve pas. Donc, comment vous voulez qu'on comprenne ces décisions-là?

Ma question – et je vais la poser à la Régie tantôt aussi: Est-ce que le climat de non-confiance qui est en tain de se créer ou qui est déjà créé n'émane pas en bonne partie du processus ou des façons de faire de la Régie plus que du fait que ce soit la Régie elle-même qui arbitre? Je ne sais pas si vous comprenez la nuance, là, mais, si, à l'intérieur de tout un processus, il y a des choses qui ne font pas votre affaire comme partie prenante, ça peut contribuer à dire: À un moment donné, on a notre voyage puis là on dételle. On dételle. Nous autres, on ne marche plus dans cette affaire-là. Mais est-ce qu'il n'y a pas moyen, si des mécanismes sont améliorés et qu'on travaille davantage à la satisfaction de toutes les parties, de recréer une confiance qui est nécessaire pour l'exercice du mandat de la Régie?

M. Duchesne (André): Il y a probablement moyen, M. le Président. Il y a même un nouveau président à la Régie qui va certainement être saisi de cette difficulté-là. Je lui en ai parlé personnellement au moment de sa nomination. Mais ça va certainement prendre du temps. Entre-temps, on a l'impression, pour reprendre ce que vous disiez, M. Vallières, qu'on s'en va jouer au hockey sur la patinoire du village voisin puis que c'est lui qui fournit l'arbitre. On se sent pas mal à l'aise.

Encore une fois, que la Régie prenne des dispositions pour corriger ça, tant mieux; mais, entre-temps, on a un mécanisme qui va nous assurer que, qu'on ait tort ou qu'on ait raison, on va avoir un mécanisme impartial. C'est juste ça qu'on veut. Si la Régie change ses façons de faire et parvient à rétablir le climat de confiance qui est essentiel, on n'aura même pas changé la loi, on n'aura rien changé, finalement.

(10 h 10)

Tout ce dont on a besoin à ce moment-ci, c'est de changer, comme vous l'avez très bien indiqué, la carence qui nous apparaît évidente puis dont vous aurez à déterminer si vous partagez cette opinion-là dans le fonctionnement. Puis ça ne veut pas dire que la Régie n'est pas capable de corriger ça, comme ça ne veut pas dire qu'un jour, si on se met à rediscuter avec les producteurs d'évolution du système, on n'en arrivera pas à recommander au législateur, conjointement, des amendements à la loi. Mais, encore une fois, c'est un autre dossier.

M. Vallières: Vous indiquez, dans le mémoire de juin 1999, que certaines entreprises forestières auraient réussi à convenir avec les syndicats et offices des producteurs de bois de prévoir dans leurs contrats un mécanisme d'arbitrage des litiges indépendant de la Régie, puis là vous dites: Dans ces cas-là, c'est drôle que ça s'est mis à marcher mieux. Il nous semble que c'est à notre satisfaction, puis toutes les parties sont heureuses de ça. D'abord, pourriez-vous nous indiquer c'est avec quels syndicats que ça a été possible de le faire? Ensuite, dans quelles régions ça a été fait et pourquoi, si c'est possible quelque part, ce n'est pas possible ailleurs?

M. Duchesne (André): Si vous me permettez, M. le Président, M. Larochelle va commenter celle-là.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. Larochelle.

M. Larochelle (Guy): O.K. Bien, ce qu'on remarque des événements qui sont survenus, c'est que, d'abord, il s'agit, dans ce cas-là, du Syndicat des producteurs de bois de l'Estrie. Ils se sont entendus avec les membres de l'ADSE dont on a fait part tout à l'heure, qui est l'Association des droits pour les scieurs de l'Estrie. Dans le cadre de négociations, après beaucoup de négociations, justement, ils en sont venus à un consensus à ce niveau-là. L'ADSE en question demandait d'avoir dans son contrat d'achat de bois une clause qui stipule que, s'il y a arbitrage entre une scierie membre de l'ADSE et le syndicat visé, ça se produirait selon un mécanisme qui est indépendant de la Régie. Alors, après beaucoup de discussions, les deux parties, c'est-à-dire l'ADSE et le Syndicat des producteurs de bois de l'Estrie, en sont venues à une entente à ce niveau-là, et la Régie a homologué cette entente de principe là pour ce mécanisme d'arbitrage.

Alors, nous autres, ce qu'on fait comme lecture des événements puis par rapport à d'autres événements qui sont survenus depuis ce temps-là, où il y a eu de telles demandes puis que ça n'a pas été accepté de la part de la Régie, c'est que, d'une part, il y a eu consensus entre les parties. Alors la Régie a satisfait les deux parties. D'autre part, où ça a été refusé, c'est que l'industrie impliquée demandait un tel mécanisme puis que, du côté du monde syndical, du syndicat, il refusait carrément, il tenait à l'article 116, alinéa un de la loi. Alors, la Régie, coup sur coup, a toujours refusé la demande de l'industrie pour que l'arbitrage procède devant elle.

M. Vallières: Vous nous parlez de l'article 116, vous avez fait allusion à l'article 116, alinéa deux de la loi. L'article 116 prévoit que la Régie peut établir un mode d'arbitrage différent si elle le juge opportun. Dans les cas dont vous venez de nous parler, où est-ce que ça a été relativement bien, vous nous indiquez que les décisions n'ont pas été rendues en vertu des dispositions qui sont prévues dans le Code de procédure civile, que ça a été une autre façon de faire. Mais, dans ces cas-là qui fonctionnent assez bien, vous nous dites – et même très bien dans certains cas – que la voie qui a été choisie, ce n'est pas celle que vous nous recommandez.

On voit qu'une des recommandations dans votre rapport, c'est que «les membres de la l'AIFQ recommandent que les règlements des litiges s'effectuent selon les dispositions prévues au Code de procédure civile traitant de l'arbitrage». Donc, ça veut dire que ce que vous nous proposez, dans le fond, c'est une avenue de solution, mais il en existe d'autres. Est-ce que je me trompe en disant ça? Parce que, dans certaines régions puis avec certaines entreprises forestières et certains syndicats, il a été possible d'établir un traitement des litiges qui est différent de celui du règlement qu'on connaît par le biais du Code de procédure civile. En autres mots, je vous demande: Est-ce que c'est une obligation de s'en aller vers le Code de procédure civile ou si on ne peut pas trouver un modus vivendi pour l'ensemble des gens, puisque la Régie, rappelons-le, a la possibilité, si elle le juge opportun, de trouver une autre façon d'arbitrer, dans certains cas, en vertu de la loi actuelle?

M. Duchesne (André): La demande, M. le Président, est basée sur le fait que, un, le Code, tout le monde sait comment ça fonctionne. Donc, c'est une procédure qui est connue, qui est reconnue pour être neutre et impartiale. Et, deux, les exemples qu'on a où il y a eu entente justement sur quelque chose comme ça, à notre connaissance, sont tous calqués sur le Code de procédure. Alors, c'est la solution simple, si vous voulez, ce qui n'exclut pas des variantes, comme vous proposez. Mais, pour nous, la solution la plus simple, c'est le Code de procédure. C'est facile, c'est connu, c'est réglé.

M. Vallières: M. le président, est-ce que, dans les autres secteurs où il y a des plans conjoints, d'autres secteurs que le bois, à votre connaissance, on retrouve d'autres récriminations comme celles que vous faites sur l'incapacité de la Régie à agir de façon impartiale et transparente?

M. Larochelle (Guy): Bien, à notre connaissance, c'est des ententes qui, semble-t-il, ne sont pas finalisées, en tout cas de ce qu'on en sait. Mais il semblerait que, au niveau des pommes de terre, dans le plan conjoint des pommes de terre, il y aurait une entente de principe qui irait dans ce sens-là. En tout cas, je ne crois pas que tout le processus est finalisé, là, mais c'est ce qu'on a, à notre connaissance, actuellement.

M. Duchesne (André): Encore une fois, M. le Président, c'est difficile, de l'extérieur, d'avoir toute l'information justement sur les difficultés dont on entend parler de temps à autre dans les autres secteurs. Ce secteur-ci, on le vit, donc on est en mesure de vous en parler précisément. Sur les autres, on entend dire des choses, mais je pense que c'est bien plus le rôle de la commission que notre rôle à nous que d'aller enquêter là-dessus. Vous avez accès aux mêmes nouvelles de journaux que nous, vous avez peut-être les mêmes soupçons que nous. Là, ça dépasse notre mandat.

M. Vallières: Vous n'êtes pas obligés de le savoir, mais vous auriez pu le savoir. Chose certaine, c'est que, nous, on a au moins le devoir de se poser la question, parce que c'est la première fois, à ma connaissance, qu'à la commission – en tout cas, je suis député depuis longtemps – la Régie est prise à partie de façon aussi rude par un organisme, et on sait que la Régie a à trancher des litiges, a aussi à faire en sorte que les plans conjoints fonctionnent bien. Mais c'est comme dans un mariage, hein, ça marche à deux, cette affaire-là. Donc, on essaie de voir...

Dans d'autres plans conjoints, on en entend parler. Ce n'est pas toujours le bonheur total d'amener des parties à convenir, à civiliser aussi leurs relations. Donc, ce n'est pas un concours de popularité qu'a, dans son mandat, à exercer la Régie. On entend donc parler, dans certains autres secteurs, que ça brasse de temps en temps. Mais, que de plein front comme ça, on dise qu'il y a soupçon de partialité de la part de la Régie, de la part de ses régisseurs, ça vaut la peine que, nous, on essaie de vérifier si c'est un phénomène qui est en train de se généraliser. Là, c'est sûr que le législateur aurait un rôle à jouer si c'était le cas. Si ça arrive uniquement dans votre secteur, là aussi on aura à regarder qu'est-ce qui occasionne ça. C'est les mêmes régisseurs, c'est le même monde, c'est la même Régie, c'est les mêmes mécanismes, de façon générale. Il y a des secteurs qui sont tout aussi complexes que celui du bois, sauf que, vous autres, il y a combien de plans conjoints déjà? Ça varie. Une quinzaine?

M. Larochelle (Guy): Oui, 15.

M. Vallières: Alors, ça, c'est mon autre question, si le temps me le permet toujours, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ce sera la dernière question.

M. Vallières: La dernière, oui.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Votre 20 minutes est écoulé. Ça va vite.

(10 h 20)

M. Vallières: J'essaie de voir, parce que la Régie, elle rend des décisions où il y a convention entre les gens dans chacune des régions. Sur les mêmes essences de bois, par exemple, est-ce qu'il arrive que les ententes diffèrent énormément? Et, si tel est le cas, comment ça peut s'expliquer, si on exclut peut-être certains phénomènes de distance dans le transport? La question, dans le fond, c'est de savoir: Est-ce que c'est nécessaire d'avoir autant de plans conjoints pour chacune des régions concernées?

M. Larochelle (Guy): Bien, c'est clair que la distance de transport est un des facteurs importants à considérer parce que, pour ce qui est du bois à pâte, à l'heure actuelle, il y a 65 usines au Québec mais il n'y a pas 65 usines qui utilisent du bois rond. Il y a certaines usines pour qui c'est l'approvisionnement principal, mais il y en a d'autres pour qui c'est très marginal. Ces usines-là sont réparties, je dirais, inégalement au travers du territoire québécois. Donc, le facteur transport est un facteur excessivement important pour, par exemple, la compétitivité entre les usines pour acheter du bois des différents syndicats et offices, et entre les syndicats et offices aussi pour tenter d'obtenir des contrats des différentes usines. Il y a des contraintes qui sont en place, là.

L'équilibre, à notre point de vue, n'est pas parfait, mais il est relativement adéquat entre justement les usines consommatrices et les syndicats de producteurs tels qu'ils sont répartis. Les gens ont, en général, une option, et on l'a vu à plusieurs reprises, des syndicats plus éloignés qui tenaient compte des frais de transport pour négocier leurs prix avec des usines et qui créaient un certain contexte de compétition, au niveau des fournisseurs, qui est parallèle au contexte de compétition qui s'exerce entre les usines.

S'il y avait juste un plan conjoint, bien là les usines n'auraient pas le choix, et vous auriez une situation de déséquilibre entre des usines qui sont en compétition et un plan conjoint qui détient à toutes fins pratiques un monopole pour le 11 %, 12 % du volume qui vient de la forêt privée. Encore une fois, l'impact de ça serait fort différent pour une usine qui n'en consomme pas par rapport à une usine qui consomme 90 % de son approvisionnement. Alors, cette usine-là serait carrément prise en otage, à toutes fins pratiques. Dans le système actuel, je peux vous garantir que vous entendriez rouspéter pas mal fort de la part de l'industrie.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie. Je vous ferai remarquer que le 20 minutes de l'opposition est pris au total.

M. Vallières: Avec votre permission, c'est parce que j'aimerais que mes autres collègues... Parce qu'on a parlé de monopole. Moi, je n'ai plus le temps de le toucher, mais j'aimerais bien qu'on le touche parce que c'est un langage qui est utilisé et qui n'est pas partagé par tous. Il y aurait peut-être bien lieu qu'on s'entende sur c'est quoi, un monopole.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Vous êtes d'accord? Allez-y. Vous voulez...

M. Vallières: Bien, que vous puissiez...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): D'accord.

M. Vallières: Parce que mon 20 minutes est écoulé.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Alors, allez-y donc tout de suite.

M. Vallières: Oui? O.K. Alors, vous nous parlez de monopole, mais je veux vous indiquer que, évidemment, l'UPA nous a, hier, entrouvert la porte un petit peu. Et je lisais également que la Régie, en réaction au rapport du Vérificateur général qui utilisait le terme «monopole» à quelques reprises, se défend bien du fait que les producteurs soient en situation monopolistique. Puis il y en a même qui disent également: S'il y a perception d'un monopole du côté des producteurs, que dire de tous ces regroupements de grandes entreprises auxquels on assiste et qui s'organisent pour être capables de négocier des prix puis être capables de faire face à la compétition? Alors, je pense bien qu'on ne peut pas reprocher non plus à une autre partie de s'organiser puis de se donner les moyens de négocier les meilleures conventions possible. Alors, c'est sûr qu'autour de la notion de «monopole»... Quand vous l'utilisez, c'est parce que je me dis: Peut-être que vous êtes en train de nous dire que notre loi a créé des monopoles.

M. Duchesne (André): Je pense que, tant qu'il existe, M. le Président, une quinzaine de syndicats et d'offices de producteurs et une quinzaine de compagnies acheteuses dans le secteur des pâtes et papiers, plus probablement un 75 compagnies acheteuses dans le secteur du sciage, sachant que le bois à pâte puis le bois de sciage, ce n'est pas nécessairement interchangeable mais qu'il y a un certain mouvement qui peut se faire de l'un à l'autre, on n'est pas, ni d'une part ni de l'autre, dans une situation de monopole. Si, par contre, l'ensemble des syndicats et des offices se regroupent ensemble et ne font qu'une négociation vis-à-vis de chacune de ces entreprises-là qui sont isolées, moi, je peux vous garantir qu'il y a un paquet d'entreprises qui non seulement ont l'impression, mais, dans les faits, font face à un monopole. Je parle des entreprises qui s'approvisionnent majoritairement, évidemment, de la forêt privée.

Alors, la situation à ce niveau-là, à mon sens, à ce moment-ci n'est ni critique dans un sens ni dans l'autre, mais il ne faudrait pas que, par sa concentration puis la consolidation que la Régie valorise auprès des syndicats et des offices, en passant, en crée un.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie. M. le député de Gaspé, tout en vous faisant remarquer que les députés de Saint-Hyacinthe et de Roberval ont des questions aussi et que vous avez 20 minutes à vous partager. M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Je vous remercie, M. le Président. J'ai lu votre premier mémoire. Vous nous pardonnerez si on n'a pas eu le temps de lire le deuxième, ce matin, que vous nous avez déposé. Malheureusement, notre attention a été portée sur les échanges que vous avez eus tout à l'heure avec le député de Richmond.

Moi, j'ai un peu de difficultés à me situer comme un tribunal. Je ne pense pas que ma fonction de député soit de juger si vous avez tort, si vous avez raison, et vous nous placez dans une position où on devrait peut-être le faire, dans la mesure où vous nous amenez des faits prétendant qu'il y a eu des injustices, apparence de partialité puis impression de connivence entre un tribunal ou un organisme quasi judiciaire chargé d'appliquer une loi... d'entendre des parties, d'écouter l'argumentation, de soupeser et de réfléchir et, ensuite, de rendre une décision. Donc, ce dont on parle, on parle de règles de justice naturelle. Vous nous dites que ces règles-là ont été violées. D'autre part, moi, comme député, ma fonction, c'est de savoir si, par exemple, le fonctionnement de la loi permet d'en arriver aux buts pour lesquels elle a été adoptée par l'Assemblée nationale.

Dans ma région, on a eu à plusieurs reprises des débats très, très, très forts entre une papetière qui devait acheter du bois... Ça a été même jusqu'à l'injonction. Je suis persuadé que vous êtes au courant. Tout ça pour en arriver à dire que le tribunal a dit: Écoutez, éventuellement, il y aura achat, mais on ne peut pas dire quand la compagnie va l'acheter.

Il y a une question qui me brûle les lèvres depuis le début. Vous connaissez très bien la Loi sur les forêts, l'article 43 qui dit, comme principe, qu'on doit d'abord s'approvisionner en forêt privée. Sur le terrain, ce qu'on constate, en tout cas les griefs qui sont soulevés, c'est qu'on fait tout pour d'abord s'approvisionner en forêt publique et ensuite s'approvisionner en forêt privée. Et, d'autre part, sur le mécanisme de fixation des prix, je ne peux pas juger de la qualité des preuves qui ont été soumises parce que le rôle de la Régie, c'est de trancher les différends, les litiges qui peuvent survenir dans le cadre des négociations des mises en marché avec un acheteur. Donc, cette convention traite des prix, des volumes, des normes de façonnement du bois, des calendriers de livraison, des modalités de paiement, des livraisons, etc., et de tout autre aspect.

Alors, moi, je ne peux pas me prononcer là-dessus parce que je ne sais pas qu'est-ce que vous avez proposé, je ne sais pas qu'est-ce que les industriels ont proposé à l'Office, je ne sais pas qu'est-ce que l'Office a proposé aux industriels et je ne sais pas qu'est-ce qui a été soumis devant la Régie. Alors, quand vous me faites une affirmation qu'il y a une apparence de connivence, j'ai un peu de difficultés à vous suivre là-dedans et je dois vous dire que, malheureusement, je devrai attendre d'avoir plus d'éléments d'information et des choses potables. Mais on n'est pas une commission d'enquête, donc on ne peut pas vous demander de comparer ou de nous étaler tout ce qui a été soumis pendant des années devant la Régie.

(10 h 30)

Par ailleurs, je voulais attirer votre attention sur la page 9 du premier mémoire que vous avez déposé. Il me semble que la problématique ne se situe pas au niveau de la Régie, en lisant ça, mais plutôt dans la mécanique de la loi, parce que, dans votre mémoire, vous dites, au dernier paragraphe de la page 9: «La mise en marché fait intervenir également des vendeurs et des acheteurs de bois. Comme les articles 65 et 112 de la loi déterminent les règles que l'industrie papetière a l'obligation de respecter lors des négociations visant à conclure des conventions d'achat de bois avec la SOPB, il semblerait normal que cette même loi – et non pas la Régie; on parle de la loi – tienne compte autant des intérêts de l'industrie des pâtes et papiers, qui est confrontée à un monopole, que de ceux des producteurs de bois lorsque vient le temps de procéder aux examens périodiques d'une intervention des plans conjoints. Tel n'est pourtant pas le cas, puisque la loi impose de ne tenir compte que des intérêts des producteurs.»

Votre argumentation à l'égard de la Régie, moi, je comprends qu'elle découle de l'interprétation que vous faites de la loi, parce que vous dites: La loi est appliquée de telle sorte que la Régie penche toujours du même bord – comme la Tour de Pise, pour ne pas la nommer – et, moi, je pense qu'il y a une distinction à faire entre l'application d'une loi, les décisions qui sont rendues et, d'autre part, l'interprétation qu'on peut faire d'une loi. Mais je pense qu'il y a comme un moyen, là. J'essaie de comprendre et j'aimerais connaître votre interprétation. Est-ce que vous visez la loi, par ce moyen-là, en disant: Bien, écoutez, là, la Régie est obligée de rendre ces décisions-là parce qu'elle applique une loi qui est mal faite? J'aimerais vous entendre là-dessus.

M. Duchesne (André): O.K. Sur votre première question, à savoir que l'industrie fait tout pour éviter d'acheter le bois de la forêt privée, c'est comme ça que j'ai compris, là, le...

M. Lelièvre: ..représente.

M. Duchesne (André): Je pense qu'effectivement, si vous voulez vous faire un portrait complet de la situation quant à cette question-là, vous allez vous transformer en tribunal. Vous avez effectivement beaucoup de situations où les essences, le type de produit, le type de fonctionnement d'usine sont complètement différents, et c'est une situation qui est difficile à décortiquer. Mais, en général, il y a un paramètre qui est toujours le même: malgré les avantages au point de vue coût de la forêt privée face à la forêt publique, le bois de la forêt privée, il est à peu près toujours plus cher que le bois de la forêt publique, et ça, ça crée la pression qui résulte dans le sentiment dont vous avez fait part. Le responsable de l'approvisionnement de l'usine, s'il a le choix entre deux sources de fibres puis qu'il y en a une qui est plus chère que l'autre, il va choisir la moins chère le plus possible de façon automatique.

Il y a quelques années, j'ai fait un relevé puis je m'étais donné pas mal de trouble pour établir une comparaison là-dessus sur une base qui soit valable, comparer des prunes avec des prunes. On m'a dit, quand j'ai parlé des résultats de cette comparaison-là, que j'étais un menteur. Bon, je me trompe des fois, mais j'essaie de ne pas mentir. Et la démonstration était que, dans 22 cas sur 23, je pense, le bois de la forêt privée, en forme équivalente, était plus cher à l'usine que le bois de la forêt publique. Alors, voilà la pression, voilà la tendance. Nous autres, on pense que ce bois-là, en général, il est plus près des usines, il jouit d'un réseau de chemins qui est entretenu par l'État, il est dans des zones où la croissance est meilleure et, logiquement, il devrait coûter moins cher. Ça, c'est la réponse à votre première question.

Pour ce qui est de la deuxième: «Est-ce que ce n'est pas la loi qu'il faut changer plutôt que le comportement de la Régie?», je pense que, depuis le mémoire du mois de juin, la Régie a déposé son document de planification stratégique, puis, dans son document de planification stratégique, elle reconnaît l'interprétation que l'on donnait à la loi, où on disait: Ça n'a pas l'air clair, on va demander au législateur peut-être de changer ça. Elle reconnaît notre interprétation, donc il n'y a plus besoin de la changer. Et son interprétation, c'est que ces fonctions doivent être exercées en tenant compte de la réalité économique propre au produit concerné. Alors, c'est ce que ça veut dire, la fin de l'article 5. C'est comme ça qu'on le comprenait, c'est comme ça que la Régie le comprend. À notre sens, on n'a pas besoin de changer la loi, c'est clair, sauf que ce n'est pas comme ça que c'est appliqué. Ah, ça, c'est moins clair. Alors, on demande tout simplement encore une fois que la Régie, au moment de l'arbitrage, cède la place à un tribunal en vertu du Code civil.

M. Lelièvre: M. le Président, permettez...

Le Président (M. Maciocia): Allez-y.

M. Lelièvre: Peut-être une dernière pour permettre à mes collègues aussi d'intervenir. Je comprends que vous dites que la Régie, en vertu de l'article 5, là, a donné son avis sur sa fonction, mais vous parlez des obligations que la loi crée et des règles que la loi détermine aux articles 65 et 112. Moi, c'est là-dessus que ma question portait, hein, les articles 65 et 112 de la loi, à la page 9 de votre mémoire du mois de juin 1999. Vous dites que la loi impose de ne tenir compte que des intérêts des producteurs, donc vous faites une interprétation de la loi. Mais, moi, j'aimerais bien pouvoir comprendre, par cette affirmation, pourquoi vous dites que la Régie a une apparence de partialité. Si elle est partiale, elle est partiale; si elle n'est pas partiale, bien, à ce moment-là... Puis, s'il y a une apparence de partialité, soit qu'elle ne vous a pas entendus, soit que vous n'avez pas été avisés des dates d'audition, ou elle n'a pas respecté les règles de justice naturelle, puis ça, ça s'applique en matière administrative, et le Tribunal administratif, éventuellement, ou la Cour supérieure... S'il y a des brefs d'évocation à prendre pour casser des décisions qui ont été rendues sans l'audition d'une des parties, automatiquement la Cour va casser ça tout de suite.

Si les arguments que vous avez soumis n'ont même pas été débattus par la Régie, n'ont même pas été évalués par la Régie, le Tribunal est en mesure de pouvoir les casser en matière d'évocation. Alors, à ce moment-là, il y a de la jurisprudence à cet effet-là. Alors, je comprends difficilement, toujours parce que c'est le coeur de votre mémoire, hein, l'apparence de partialité de la Régie et également la connivence que vous avez rajoutée aujourd'hui. Moi, la connivence, je ne vous ai pas entendus là-dessus, mais, sur la partialité, j'ai de la difficulté parce qu'on attaque un tribunal qui a une crédibilité établie dans d'autres secteurs, et c'est pour ça que j'essaie de vous comprendre.

M. Duchesne (André): Encore une fois, M. le Président, vous pourrez prendre connaissance du détail des exemples qu'on vous soumet ce matin aux pages 22 et suivantes où, à tout le moins, on a fait preuve d'ineptie administrative dans le traitement des dossiers. Je suis bien prêt à dire que c'est juste ça, mais vous comprendrez que, de notre point de vue, ça a l'air bizarre. C'est vrai que l'article 62, par rapport à l'interprétation qu'on donne à l'article 5, est biaisé et incomplet, mais l'article 5, c'est celui qui donne les fonctions, le mandat à la Régie. Il nous apparaît plus important que l'article 62, maintenant. Puis c'est le seul commentaire que je peux faire sur votre remarque à ce moment-ci. Mais ce qu'on a dit sur l'article 62... C'est clair qu'il est juste d'un côté. C'est peut-être ça qui a teinté l'attitude de la Régie.

M. Lelièvre: J'arrêterai là pour permettre mes collègues... malgré que j'aie encore beaucoup de questions qui me viennent à l'esprit.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Si vos collègues vous laissent un peu de temps, on pourra y revenir. M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Dion: Merci, M. le Président. Je remercie l'Association des industries forestières du Québec d'être devant nous aujourd'hui pour discuter de cette question très, très difficile. On sait très bien que, dans le commerce, on n'a jamais totalement raison, hein? C'est qui qui gagne, et c'est le jeu normal des rapports de force, et tout ça.

Et puis là, ce matin, il semblerait qu'on est devant un gros problème, hein? Quand on remet en cause l'existence même d'un mécanisme qui a été mis en place par le législateur, évidemment c'est un gros problème. Et puis, généralement, je suis porté à croire, moi, que, lorsqu'il y a un gros problème, bien, il peut y avoir des torts des deux côtés. C'est possible. Alors, on va essayer de voir clair là-dedans, sauf que vous remettez en cause, dans votre document – et j'ai lu avec attention le premier, bien moins longuement le deuxième parce qu'on vient de l'avoir, mais ça correspond – deux choses principalement face à la Régie, la transparence et l'impartialité. C'est les deux points, que j'ai trouvé, qui ressortent le plus.

(10 h 40)

Et, pour prouver vos dires, évidemment, vous avez dit plusieurs choses, mais, entre autres, vous avez dit: Nous autres, on n'a plus confiance; c'est pour ça qu'on veut que vous changiez ça. Et peut-être que j'interprète mal vos paroles, mais je vous les soumets. Si je les interprète mal, vous me corrigez. Vous avez dit tout à l'heure: On n'est pas allés à la deuxième révision. Je pense que c'est à la page 20 ou 22. Alors, on n'est pas allés à la deuxième révision parce qu'on n'avait pas confiance; maintenant que c'est fait, que la Régie a rendu sa décision, on se rend compte qu'on a bien fait de ne pas y aller. Alors, c'est fort. Vous dites: On n'y est pas allés, on n'est pas allés défendre nos intérêts, puis ils n'en ont pas tenu compte, de nos intérêts, donc on avait raison de ne pas y aller. Alors, évidemment, j'interprète peut-être mal– j'espère bien – mais c'est l'impression que ça laisse.

Deuxième chose, pour prouver la partialité de la Commission, à la page 21, entre autres, vous référez à un président du syndicat, celui de la Mauricie, qui disait à ses gens ceci: «De plus, toute l'industrie remet en question la place de la Régie des marchés agricoles, et alimentaires, et de la pêche, tribunal administratif nommé par le législateur pour s'assurer que la mise en marché des bois se fasse de façon ordonnée et efficace. Dans ce contexte, vous comprendrez, producteurs et productrices – et c'est le président qui parle – l'importance capitale de soutenir votre organisme dans ses revendications pour maintenir et même améliorer les conditions de mise en marché.» Et vous concluiez, tout à l'heure, en vous référant à ce passage-là: Vous voyez bien qu'on a raison, là. Ils savent bien d'avance que la Régie va leur donner raison, donc ils vont devant la Régie.

Écoutez, c'est une interprétation possible, mais l'autre interprétation qui est aussi possible, au moins autant, c'est qu'on sait que les producteurs de bois ont travaillé pendant des années pour qu'il existe une régie. Alors, c'est normal qu'ils disent: On va aller devant la Régie. Alors, ça ne prouve pas, je pense, ce que vous avancez. Mais ça, c'est pour vous dire que je me pose des questions. L'impression que j'ai eue tout le long du mémoire, c'est que votre intention, c'était que vous ne voulez plus de ce système-là, et vous l'avez un peu confirmé tout à l'heure, si je n'exagère pas, en disant: Mettez un arbitre; que la Régie nomme un arbitre chaque fois qu'on la conteste, puis, nous autres, on va la contester régulièrement – du moins, c'est ce qui ressort de votre document – de façon qu'on ait un arbitre indépendant, puis on réglera ça autrement. Bon, c'est une possibilité, évidemment. C'est votre demande, et puis je pense bien que la commission doit prendre vos représentations pour ce qu'elles sont et essayer de les comprendre et d'en décider le mieux possible.

Mais, moi, je veux vous proposer une autre solution. La Régie, dans des documents que vous avez sans doute, en tout cas qui nous ont été soumis et qui seront commentés tout à l'heure – et vous allez sans doute être là – propose, pour qu'il y ait plus de transparence, de publier et de diffuser régulièrement ses règles de régie interne, un guide d'accès à ses services, et tout ça, donc de rendre publiques et plus facilement accessibles par vous ses procédures, et tout ça. Première chose. Ça, c'est pour qu'il y ait plus de transparence. Deuxième chose, moi, je dis: J'ai vu quelque part que vous avez demandé des rapports à la Régie et qu'elle tardait à vous les donner – puis, en passant, par je ne me souviens plus quelle instance.

Une voix: L'accès à l'information?

M. Dion: Oui, la Commission d'accès à l'information. Vous avez fini par l'avoir, mais il vous manquait le verbatim de ce qui s'était passé devant la Régie. Et la Régie répond qu'il n'y avait pas eu d'enregistrement parce que ça n'avait pas été demandé. Donc, les dépositions, les débats devant la Régie n'ont pas été enregistrés. Peut-être que, si, en plus de rendre publiques ses procédures, elle enregistrait systématiquement tous les débats devant elle, bien, ça deviendrait plus facile pour elle de plaider l'impartialité ou, en tout cas, pour chacun d'entre nous, de nous en rendre compte. Est-ce que ces deux procédures-là seraient des choses qui pourraient vous permettre de supporter l'existence de la Régie?

M. Duchesne (André): Encore une fois, M. le Président, il y a deux questions. Nous, on n'est pas allés devant la Régie, au moment de la révision des plans conjoints, comme vous le mentionnez, mais il y a des gens qui y sont allés, notamment, dans le cas de l'Estrie, une association qui représente 25 et quelques scieries et qui a fait des représentations, je pense, substantielles, et, ces représentations-là, on ne les retrouve pas dans le rapport de la Régie. Alors, c'est dans ce sens-là qu'on dit: Ça ne nous donnait rien d'y aller, il y a des gens qui l'ont fait, l'exercice, et ça a donné les mêmes résultats que ça avait donné quand, nous, on y était allés. C'est pour ça qu'on se sent confortables avec notre décision.

Pour ce qui est des procédures que vous suggérez, ce qui nous a tarabustés profondément, ce n'est pas qu'à la fin on nous dise: Il n'y a pas eu d'enregistrement sur cette séance-là en particulier – ç'aurait été le fun s'il y en avait eu, je suis d'accord – mais c'est que, avant d'obtenir la documentation qu'on a demandée, ça a pris une éternité. Et pourtant je pense qu'on est solvables. Si c'est une question de payer tant de la page, là, on n'a pas trop de problèmes avec ça. On a eu nettement l'impression qu'on était enlisés dans un système, à tout le moins, où peut-être que quelqu'un ne voulait pas qu'on ait des copies, je ne sais pas. Alors, ça ne changera pas automatiquement, ça. Ce n'est pas quelque chose où demain matin le nouveau président sera en mesure de dire: Ça ne se reproduira plus jamais, parce que ça a continué de se produire quand il est arrivé. Il va falloir qu'il prenne sa main puis il va falloir que quelqu'un – vous, vraisemblablement, ou le ministre – donne des instructions justement pour assurer cette apparence d'impartialité qui est essentielle à la crédibilité de la Régie.

Là, je réitère que, pour le moment, cette crédibilité-là, pour nous, elle est perdue. Je n'ai jamais dit qu'elle ne pourrait pas la regagner, mais ça ne se fera pas du jour au lendemain. Puis, entre-temps, si on est pour se sentir à l'aise dans le système et non pas venir demander au ministre de tout bouleverser, comme on nous a dit qu'on voulait faire, bien, on vous demande de faire en sorte qu'on applique le deuxième alinéa de 116 avec une procédure qui est simple, qui est connue, qui est celle du Code civil. Alors, ça nous apparaît une demande raisonnable dans les circonstances. Et l'ouverture de discuter avec les syndicats et offices en présence ou avec la bénédiction éventuellement de la Régie pour faire évoluer le système de mise en marché demeure.

On a des convictions que nos interlocuteurs connaissent. Alors, on n'a pas l'intention de les imposer, mais nos convictions demeurent. Nous autres, on pense que le système actuel ne sert pas les producteurs comme il le devrait. Mais ça, c'est aux producteurs eux-mêmes d'en juger, puis on est bien prêts à argumenter. Mais, encore une fois, là, ce n'est pas à vous d'agir comme juge de cette question-là.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Dernière courte question, M. le député de Saint-Hyacinthe. Notre temps est écoulé.

M. Dion: Vous avez parlé tout à l'heure d'une étude de prix comparables entre le privé et le public. Évidemment, ce n'est pas l'objet de nos débats ce matin, mais, si cette étude-là que vous avez faite est publique et qu'on pourrait en avoir une copie, on en serait très heureux. Et je pense que vous avez exprimé très clairement votre point de vue. Je vous remercie.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Est-ce que c'est possible, M. Duchesne, de...

M. Duchesne (André): Au moment où je l'ai fait, M. le Président, les données étaient chaudes et, évidemment, les compagnies étaient un peu gênées de mettre sur la place publique leurs coûts d'approvisionnement. Donc, le document n'a même pas circulé à l'intérieur de mes membres, il est resté pour mon information. L'information m'avait été fournie sur une base personnelle. Là, ça fait cinq ans ou six ans, alors peut-être que... Je peux vérifier comment les gens se sentent chatouilleux avec ça, puis, si l'information est assez vieille pour ne pas les gêner, elle vous fournira une information historique.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ou, si vous décidez de la mettre à jour, la commission apprécierait en recevoir la copie, si évidemment votre groupe le veut.

M. Duchesne (André): On va faire face aux mêmes difficultés, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): On est très conscients de ça.

M. Duchesne (André): Vous pouvez demander à mon ami...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): On comprend ce que c'est, la gêne. Alors, au nom des membres de la commission, je vous remercie d'être venus ce matin nous rencontrer et je demande immédiatement aux gens de la Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec de se présenter à la table. Merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 10 h 49)

(Reprise à 10 h 53)

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): À l'ordre! À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, nous recevons maintenant les représentants de la Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec.

M. Busque, je vous demanderais de présenter les gens qui vous accompagnent et de faire votre présentation de 20 minutes.


Exposé du président de la Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec


M. Gaétan Busque

M. Busque (Gaétan): Alors, merci, M. le Président. Mmes, MM. les députés, c'est avec intérêt que je réponds à l'invitation faite à mon prédécesseur de discuter avec les membres de la commission des orientations, activités et gestion de la Régie, et ceci, pour la période des cinq dernières années, 1994-1995 à 1998-1999. Vous comprendrez qu'à titre de nouveau président depuis juin dernier seulement il pourrait m'être difficile de répondre à certaines questions. C'est pour cette raison que je suis accompagné, ce matin, de M. Jean-Claude Blanchette, vice-président, de Me Claude Régnier, secrétaire de la Régie, et de M. Pierre Fortin, directeur des services à la gestion.

On va utiliser une projection par micro-ordinateur parce que, comme vous avez eu l'occasion de recevoir plutôt cette semaine un document plus complet et détaillé, avec statistiques, j'aurais préféré aller un peu plus vite aujourd'hui et présenter les points principaux sur acétate. D'ailleurs, je pense qu'une des demandes qui m'avaient été faites par M. Arsenault, c'est de bien expliquer le fonctionnement de la Régie. Nous allons faire ça dans un premier temps, et je vais insister d'abord sur la raison d'être de la Régie, ses grandes fonctions, l'environnement dans lequel elle opère. Par la suite, nous ferons ressortir les faits saillants des cinq dernières années et parlerons de la gestion des activités et des ressources. Finalement, si vous nous le permettez, nous présenterons la planification stratégique de la Régie pour les années 1999-2003. Notre présentation se fait par informatique, et M. André Bélanger, que j'ai oublié de vous présenter, nous accompagne pour nous supporter.

Donc, c'est un bilan et c'est un exercice pour vous exprimer, à la commission, ce que la Régie a pu faire dans les cinq dernières années. Nous allons débuter la présentation sur le plan légal parce que je pense qu'il est important de rappeler ici c'est quoi qui gouverne la Régie, c'est quoi, notre loi constitutive, et c'est quoi, les lois habilitantes.

La Régie, d'abord, sa loi principale, c'est la Loi sur la mise en marché des produits agricoles, des produits alimentaires et de la pêche. Bien sûr, il y a d'autres lois que la Régie a comme mandat d'appliquer, dont la Loi sur les grains, la Loi sur les produits laitiers et leurs succédanés, la Loi des producteurs agricoles et la Loi sur le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

Vous allez remarquer que, dans la présentation, nous traitons séparément de la Loi sur les grains et des dispositions de la Loi sur les produits laitiers et leurs succédanés malgré les modifications législatives de novembre 1999 qui ont conduit à l'abolition de la Loi sur les grains et au transfert de pouvoirs réglementaires à la Loi sur la mise en marché. D'autres modifications ont d'ailleurs été apportées à la même occasion. Notamment, la gestion des permis dans le secteur laitier a été transférée au ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, et la fixation des prix du lait et l'administration du régime de garantie de solvabilité des acheteurs de lait ont été regroupées avec les dispositions semblables dans la Loi sur la mise en marché. La reddition de comptes, vous comprendrez, sur une période de cinq ans nous justifie cette structure de présentation là.

Nous allons maintenant voir, à partir des différentes lois, un peu c'est quoi, les mandats de la Régie. On fait souvent référence, comme principaux mandats, principales fonctions, à l'article 5 de la Loi sur la mise en marché qui est reproduit ici. Je pense qu'au cours de vos débats vous avez souvent l'occasion d'entendre parler des grandes fonctions de la Régie, qui sont la mise en marché efficace et ordonnée des produits agricoles et alimentaires, le développement de relations harmonieuses entre les différents intervenants, la résolution des difficultés qui surviennent dans le cadre de la production et de la mise en marché de ces produits, et tout ça en tenant compte des intérêts des consommateurs et de la protection de l'intérêt public.

Les autres lois, soit la Loi sur les produits laitiers et leurs succédanés, la Loi sur les grains, la Loi sur les producteurs agricoles et la Loi sur le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, confient des rôles variés à la Régie. Notamment, la Loi sur les produits laitiers confère à la Régie le rôle de régulation et de surveillance de la production et de la mise en marché des produits laitiers et de leurs succédanés quant à la délivrance de permis, à la surveillance et à l'utilisation du lait, à la gérance d'un fonds de garantie de paiement aux producteurs et à la fixation du prix du lait de consommation. D'ailleurs, vous avez eu un exemple hier où la Régie a rendu une décision sur les prix du lait au niveau du détail.

En fonction de la Loi sur les producteurs agricoles, la Régie est l'instance chargée d'accréditer les associations de producteurs agricoles, de décider du statut des producteurs agricoles, de surveiller certains aspects de fonctionnement de ces associations, d'approuver les règlements sur les contributions et les cotisations obligatoires adoptés par l'association accréditée, l'UPA, et de tenter de régler tout différend pouvant survenir entre les associations accréditées et les producteurs ou les syndicats et les fédérations qui les représentent. On pourra y revenir peut-être un peu plus tard dans le questionnement, parce que le rôle de la Régie dans le règlement des différends n'est pas uniquement entre des producteurs, et des associations accréditées de transformateurs, et des transformateurs, mais il y a aussi un rôle de régler des différends au sein même des associations.

La Loi sur les grains. Dans cette loi-là, la Régie a pour fonction de favoriser l'amélioration de la qualité du grain, notamment par un système de classification et des normes de qualité, en visant aussi un approvisionnement régulier en grain de qualité. Aussi, on a une protection financière avec des cautionnements pour la solvabilité des marchands de grains, des centres régionaux et des centres de séchage. Dans le système des grains, il y a tout un système de permis que la Régie doit délivrer, renouveler, suspendre, révoquer et qui sont visés par la loi.

Au niveau de la Loi sur le ministère de l'Agriculture, la Régie agit comme tribunal d'appel, et là je fais référence aux cinq dernières années parce qu'il y avait deux points dans la Loi du ministère où la Régie intervenait: c'était dans les questions où il y avait refus d'une demande de remboursement des taxes foncières par le ministère et refus ou révocation de l'enregistrement des exploitations agricoles. Là-dessus, vous noterez que cette fonction qui relevait de la Régie a été confiée au Tribunal administratif, au TAQ, au cours de l'année 1998.

(11 heures)

En synthèse, ce qu'on pourrait résumer comme principaux objectifs conférés par les lois citées précédemment, c'est que la Régie doit favoriser une mise en marché efficace et ordonnée des produits agricoles, alimentaires et de la pêche, favoriser un développement de relations harmonieuses entre les diverses parties en cause, contribuer au règlement des différends tout en assurant la protection de l'intérêt public et des consommateurs, favoriser un approvisionnement régulier et l'amélioration de la qualité du grain, et veiller à la protection financière des producteurs en s'assurant notamment de la solvabilité des différents intervenants dans certaines productions.

Ceci m'amène à vous présenter la Régie comme un organisme de régulation économique. On entend divers propos sur la Régie: tribunal, tribunal quasijudiciaire, organisme de régulation. Je vais vous présenter ici la Régie comme organisme de régulation économique avec deux fonctions fondamentales et distinctes dont une, c'est une présence. La Régie doit être présente dans le milieu et intervenir afin de favoriser la croissance des différents secteurs de l'agroalimentaire, de la pêche et de la forêt privée, et la Régie est un tribunal administratif avec pouvoir d'adjudication. Donc, c'est des pouvoirs de décision dans tous les litiges qui lui sont confiés.

Ici, j'ai préparé une diapositive pour ceux qui seraient moins familiers avec la notion d'organisme de régulation économique. C'est une définition que je vais vous présenter ici et c'est une définition qui a été donnée par Me Patrice Garant dans un traité de droit administratif où, en parlant de la Régie, vous voyez, on dit aussi: «La mission des organismes de régulation économique est d'appliquer une politique gouvernementale en prenant des décisions suivant un pouvoir discrétionnaire quelquefois très étendu. Ainsi, par exemple – et je cite Me Garant en parlant de la Régie – la Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec est responsable de la surveillance et du contrôle de la mise en marché des produits agricoles. La Régie a pour fonction générale», et là on reprend l'ensemble de l'article 5 et on met l'emphase sur la collaboration avec les producteurs, organisations coopératives ou professionnelles d'agriculteurs, associations de consommateurs, représentants de l'industrie et du commerce et autres personnes engagées dans la mise en marché de produits agricoles. Donc, on voit que c'est un environnement avec beaucoup d'intervenants.

Dans son travail, j'aimerais souligner les principaux outils que la Régie utilise. En simple, on utilise beaucoup de conciliation, d'arbitrage, de séances publiques; c'est les séances où on invite les intéressés à venir faire des représentations. On a des séances administratives ou séances régulières où on décide de différents sujets: réglementation, approbation, homologation de conventions, etc. Ensuite, on a bien sûr les examens périodiques des plans conjoints. Je pense que c'est une notion dont vous avez entendu parler assez récemment.

Avant d'aborder la revue des activités, j'aimerais rappeler certains éléments de contexte que je présente dans la prochaine diapositive. Il faut se rappeler que la Régie, dans les cinq dernières années, a opéré dans un environnement où, au plan gouvernemental, on devait composer avec les programmes de départ à la retraite, la tarification des services et la réduction des dépenses gouvernementales. On a pu également observer des tendances au niveau de l'externe où on peut parler de recherche d'une meilleure concertation. Il y a eu bien sûr l'évolution des accords internationaux et des ententes nationales qui sont constamment en évolution, le phénomène de concentration des entreprises. Il y a aussi accentuation de la concurrence, donc création de petites entreprises actives dans des marchés niches, augmentation du nombre de concurrents provenant de l'extérieur, réduction du nombre de concurrents locaux, goûts changeants des consommateurs. On se rappellera d'ailleurs de l'importance des forums sur l'agriculture et l'agroalimentaire québécois, en mars 1998 et 1999, où des consensus ont été atteints et des plans d'action ont été adoptés.

La Régie a été interpellée directement par le thème Tirer partie d'une nouvelle réalité économique , qui traitait du développement des marchés et de la mise en marché collective, et ici je vous rappellerais que, au sujet de la mise en marché, les consensus de ces forums-là ont été que l'ensemble des participants reconnaissent que les systèmes de mise en marché collective incluant la gestion de l'offre constituent des piliers de la politique agricole et agroalimentaire québécoise.

Et, pour les secteurs autres que celui du lait, qui a fait l'objet d'un consensus spécifique, et afin de tirer profit des nouvelles possibilités offertes par les marchés, les producteurs, les transformateurs, les détaillants et les distributeurs conviennent de travailler en partenariat à la définition ou à la mise en oeuvre d'une stratégie de développement du marché intérieur et de pénétration du marché international afin que ce soit rentable pour tous les maillons. De plus, ils conviennent de prendre en considération ces stratégies dans la gestion des plans conjoints. C'est un rappel, mais c'est une notion qui est très importante parce que ça vient influencer l'action de l'ensemble des partenaires, y compris ceux de la Régie.

Nous allons maintenant aborder les faits saillants des cinq dernières années des activités de la Régie. Dans l'objectif d'une mise en marché efficace et ordonnée de la Régie, les principaux gestes posés, il s'agit de l'approbation des plans conjoints, de l'approbation de règlements, de l'homologation de conventions de mise en marché, d'examens périodiques de plans conjoints, du suivi des plans conjoints et de l'émission du permis. En termes de statistiques, j'ai souligné tout à l'heure que vous avez en main un recueil sur les statistiques pour chacune des années, et je me permettrai ici de vous souligner de façon regroupée le total de ces activités-là pour les cinq dernières années.

Au niveau des plans conjoints, vous comprenez qu'il n'y en a pas eu, la Régie n'a pas eu à approuver de nouveaux plans conjoints dans les cinq dernières années. Il y a toujours des discussions pour certains dossiers, notamment au niveau de la fourrure des animaux sauvages qu'on a approuvé récemment. Le processus est en marche.

Au niveau de l'approbation des règlements, ici j'ai une période de quatre ans; on parle de 162 règlements. On parle de conventions, la Régie est appelée à homologuer entre 225 et 250 conventions par année. On en totalise 1 228 pour la période. Examens périodiques: 33. Mon vice-président dirait plutôt 34. C'est une erreur de ma part d'en avoir oublié. J'ai oublié les pommes de terre, et c'était d'intérêt.

Au niveau du suivi des plans conjoints, bien, il y a une multitude d'actions, de gestes qui sont posés. C'est difficile de quantifier. En termes de permis, on parle d'approximativement 2 300 permis qui sont renouvelés continuellement. Et sessions de Régie – c'est des sessions internes de la Régie – 276. Ça équivaut pratiquement à une session par semaine pour tenir compte... puis prendre des décisions sur les différents sujets qui nous sont soumis.

Au plan de l'objectif de développement des relations harmonieuses entre intervenants et de la résolution de difficultés, la Régie intervient principalement, comme je l'ai souligné, par le mécanisme de conciliation, d'arbitrage, et je voudrais ajouter le traitement de statuts de producteur agricole et les séances publiques parce que c'est une façon d'aborder, ou de favoriser, des relations harmonieuses. On peut également souligner plusieurs autres activités qui contribuent à ce même objectif, et je parlerais aussi des travaux qui ont été faits dans les derniers cinq ans au niveau de la déjudiciarisation des séances publiques. On a tenté de simplifier le cadre juridique et de favoriser l'équité procédurale. Il y a eu bien sûr des travaux d'amorcés au niveau des règles de régie interne. On parle à l'occasion de transparence, et vous pouvez comprendre que je suis particulièrement préoccupé là-dessus.

On est à compléter un ensemble de règles de régie interne et de développement de règles de pratique, et c'est sûr que ce sera diffusé. On va le publier dans un règlement, et ça va donner le cadre dans lequel la Régie opère. Mais ça va aussi imposer aux gens qui font affaire avec la Régie de suivre aussi une procédure aussi stricte que celle qu'on exige de la Régie. On a participé à des tables filières, aux rencontres des tables filières, procédé à de l'allégement réglementaire et aux modifications législatives dont j'ai parlé tout à l'heure, avec le projet de loi n° 41 d'ailleurs qui a été débattu ici, à cette commission.

Comme allégement réglementaire, je pourrais souligner la simplification d'ordonnances sur les prix du lait. Dans la dernière ordonnance – qui est maintenant règlement plutôt qu'ordonnance – vous allez remarquer qu'on ne fixe que ce que communément on appelle une fourchette, des écarts entre un prix minimum et un prix maximum, ce qui permet une marge de manoeuvre pour des négociations avec les différents intervenants à l'intérieur de la chaîne.

(11 h 10)

On a allégé la procédure de délivrance des permis, notamment dans le secteur laitier où on tenait des séances publiques avant l'émission de chacun des permis – maintenant, on a une procédure plus simple où on contacte les intervenants, on examine attentivement les points de vue soulevés et ensuite on prend une décision sur le permis – transféré au ministère la gestion des permis du secteur laitier, ce qui est en train de se faire progressivement maintenant avec l'approbation de la modification de la loi au début de novembre 1999.

On a également modifié au niveau de la tenue des séances, où tout régisseur peut être appelé par le président à présider une séance publique. On a également simplifié la conduite des séances. Ce qu'on vise, c'est l'équité procédurale. À ce moment-là, la question de processus, de fonctionner comme un tribunal où on assermente les témoins, on est beaucoup moins formels là-dessus, et le point important pour nous, c'est que toutes les personnes intéressées puissent faire valoir leur point de vue.

Bon, en termes d'amendements législatifs, on a un petit peu parlé de l'intégration de la Loi sur les grains à la Loi sur la mise en marché et d'autres dispositions de loi au niveau de la loi constitutive de la Régie. Au plan statistique dans ces domaines, la Régie a entendu 552 affaires en séance publique dans les cinq dernières années, c'est-à-dire un peu plus de 120 affaires par année, traité de 28 différents statuts de producteur agricole, 48 cas d'intérêts commerciaux – c'est les questions d'intérêts commerciaux des administrateurs de plans conjoints, je pense, qui sont un point très important dans la transparence du processus prévu par la loi – la question d'arbitrage où on souligne...

Une voix: ...

M. Busque (Gaétan): Il me reste 10 minutes? La Régie elle-même a arbitré 11 différends, et, dans plusieurs cas, on a nommé un arbitre. On souligne ici 40 cas pour la période, questions d'enquête, 111, et 74 conciliations.

Le second grand volet des activités de la Régie, c'est le suivi des activités opérationnelles, qu'on appelle d'habitude «activités opérationnelles», et on regroupe là-dedans la question de la protection financière des producteurs, les activités dans le secteur des grains et des services à la clientèle. En termes de protection financière des producteurs, la Régie inclut là-dedans les approbations de plans conjoints, qui sont une sorte de protection financière indirecte, le Fonds de garantie de paiement du lait, qui a d'ailleurs fait l'objet de commentaires du Vérificateur général, les polices de garantie de paiement, les cautionnements de garantie et de responsabilité financière pour les secteurs du grain et des bovins et, enfin, la vérification et l'utilisation du lait où on s'assure du paiement correct des producteurs.

Par l'ensemble de la statistique que je vous ai fournie plus tôt cette semaine, vous pouvez constater que la Régie n'a pas approuvé de nouveaux plans conjoints. Dans les garanties financières, la Régie gère un fonds de garantie de paiement du lait dont la valeur atteint actuellement 3 500 000 $, et la Régie émet actuellement pour environ 405 000 000 $ de polices à 66 entreprises laitières dans le secteur laitier. Les réclamations dans les dernières années ont été au nombre de huit, pour une valeur de 1 400 000 $.

Dans le secteur des bovins et des veaux d'embouche, ce sont des cautions pour une valeur de 5 000 000 $ que la Régie détient, et ça, pour 76 acheteurs, et les maisons d'enchères, pour leur part, fournissent 541 000 $ en caution. Au niveau des réclamations dans le bovin, on a eu deux réclamations au cours de la période et des déboursés de 43 000 $. Au niveau des enchères, aucune réclamation.

Dans le secteur des grains, les garanties et cautions sont au niveau de 19 400 000 $, et on a deux réclamations dans ce secteur. C'est un petit peu particulier, on a une réclamation qui dépasse le 2 000 000 $, et c'est un cas actuellement en procédure judiciaire sur lequel je n'irai pas plus loin. Au niveau de la vérification et de l'utilisation du lait, bien, c'est de s'assurer auprès des usines que les différents ingrédients du lait sont adéquatement ou correctement payés à la Fédération. Dans le secteur des grains, les principales activités des cinq dernières années, ça a été la formation pour réaliser les classements, de l'assistance aux classements en cas de différends, de l'émission de permis, de la gestion des systèmes de cautionnement et de l'inspection pour s'assurer de la conformité avec la loi.

En matière de services à la clientèle, j'aimerais souligner que la Régie a visé à rendre ses services beaucoup plus accessibles, notamment par la mise en place d'un site Web sur lequel se retrouvent la programmation des séances publiques, les décisions rendues, les formulaires pour l'application des différents règlements, les entreprises qui détiennent des cautionnements, etc. Je vous inviterais à le consulter, et on pourra vous fournir l'adresse plus tard.

Il me serait difficile de parler des cinq dernières années sans parler des travaux du Vérificateur général effectués en 1997-1998. Le Vérificateur s'est penché sur quatre thèmes principaux, soit la surveillance des plans conjoints, la gestion de la Régie, le Fonds d'assurance-garantie dans le lait et la reddition de comptes. Les conclusions du Vérificateur général, j'aimerais le souligner, ont été utilisées à plusieurs fins – et j'aimerais mettre de l'emphase – et, à l'occasion, hors contexte. Compte tenu que la Régie a déjà rendu des comptes à ce chapitre auprès de la Commission de la fonction publique à l'automne 1998 et que le rapport déposé était en annexe au document que je vous ai fourni, je résumerai sur un plan positif que les travaux du Vérificateur général ont grandement stimulé la Régie dans la réforme de son administration.

Quelques mots maintenant sur la gestion des ressources humaines informationnelles et financières, pour vous souligner que les effectifs de la Régie sont passés de 97 en 1994-1995 à 43 en 1998-1999. C'est une réduction de 25 %. Une réduction d'effectifs de cette ampleur a été compensée par des ententes de services avec le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation surtout et par l'abandon de services, notamment dans le secteur des grains, et ceci a été fait en consultation avec les intéressés.

La question des ressources informationnelles. Je pense qu'on a été un peu comme tout le monde, on s'est préparés pour le bogue de l'an 2000 – on est passés correct – et on a vu à des politiques internes. En ce qui concerne les ressources financières, on vous présente deux tableaux qui vous donnent le budget autorisé de la Régie, qui est un budget de 3 000 000 $, et là-dessus il y a 2 300 000 $ qui vont à la masse salariale.

En termes de revenus de tarification, que j'apporte ici, qui sont quand même intéressants à considérer, la Régie a des revenus de tarification qui dépassent légèrement le 700 000 $ par année. Là-dessus, il y a 270 000 $ qui proviennent des permis, et le reste de services que la Régie rend, donc de services que la clientèle apprécie et qu'on considère que la Régie devrait continuer de réaliser, notamment dans le secteur du lait, pour un montant de 368 000 $. Au niveau du grain également, suite au comité de travail, les gens ont accepté de payer une proportion d'environ 60 % des coûts des services rendus par la Régie.

Enfin, la planification stratégique, que je voudrais aborder rapidement pour vous parler des ambitions de la Régie. Je suis un nouveau président, donc j'ai toujours de l'ambition, et je dois souligner que les membres de l'ensemble de la Régie aussi partagent ces grandes ambitions là. C'est qu'on veut contribuer à la croissance des secteurs visés par la Loi de la mise en marché, notamment en offrant à la clientèle des services de qualité dispensés par des ressources compétentes et en développant une organisation dynamique.

Au niveau du plan stratégique, vous retrouvez nos grandes orientations. Il y a bien sûr les trois orientations de base qui découlent de la mission première de la loi: il y a la contribution de la Régie au niveau du groupe agriculture, pêcheries et alimentation, avec des orientations sur l'accroissement de la présence des produits québécois sur les marchés, aider les entreprises à se préparer un environnement plus concurrentiel et affirmer les intérêts québécois sur la scène nationale et internationale. Vous verrez notamment que c'est au niveau des ententes nationales que la Régie intervient. Enfin, on s'est réservé deux orientations au niveau de la gestion interne: d'accroître l'efficacité des façons de faire et d'optimiser les modes de gestion de l'organisation.

Vous avez notre projet en main, nos orientations, nos objectifs jusqu'en 2003. Vous avez même les moyens que nous entendons privilégier et les indicateurs de suivi. Le défi est grand pour la Régie, et nous entendons le relever. Je termine en vous invitant à visiter le site Internet de la Régie et en vous disant merci.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Nous vous remercions. Effectivement, nous avons reçu hier l'ensemble des documents que vous nous avez fait parvenir, et c'est avec beaucoup de soin, je pense bien, que tout le monde va en prendre connaissance.

(11 h 20)

Pour l'information de tout le monde, compte tenu de l'importance de cette rencontre, j'avais accordé deux heures au lieu d'une heure, donc 30 minutes de présentation et 45 minutes chaque côté pour des échanges.


Discussion générale

M. le député de Roberval, vous avez le privilège de commencer les échanges.


Critères de fixation du prix du lait

M. Laprise: Merci beaucoup, M. le Président. On s'aperçoit, avec la présentation de la documentation qui nous a été fournie et également la présentation que nous avons ce matin, que les responsabilités de la Régie sont très grandes, et je m'interroge quand même sur cette responsabilité-là concernant la partie que vous défendez et le consommateur. On s'aperçoit, dans la loi que vous avez... On prenait connaissance d'ailleurs ce matin, lorsque nous avons rencontré le Syndicat des producteurs de bois et les entreprises également qui représentaient les acheteurs du bois des producteurs, que vous avez une responsabilité face au vendeur et non à l'acheteur. Alors, je fais le lien: Est-ce que, lorsque vous avez à décider, par exemple, du prix du lait, vous avez à entendre des consommateurs, la voix des consommateurs aussi là-dedans? Est-ce que ça fait partie des responsabilités, que vous avez de tenir compte à la fois des besoins du producteur, des coûts de production du producteur et aussi de la protection du consommateur, comme première question?

M. Busque (Gaétan): Oui. Pour répondre à cette question, je pense que ça fait partie du mandat de la Régie d'entendre les intéressés, et les intéressés dans le secteur particulier du prix du lait incluent les consommateurs, qui sont la plupart du temps représentés par des associations de consommateurs. Je dois malheureusement signaler que, lors des dernières séances publiques où on a entendu le dossier qui touchait des ajustements possibles au prix du lait, on avait formellement invité et informé l'Association des consommateurs de la tenue d'une telle audience, et elle ne s'est pas présentée aux audiences.

Il faut considérer que, déjà dans son document, à la Régie, qu'elle avait expédié en décembre, on avait beaucoup explicité la procédure qu'on entendait suivre, et on avait parlé de coûts d'indexation. À ce moment-là, on peut assumer que les consommateurs étaient déjà très au fait de ce qui pourrait arriver ou de la signification de l'utilisation d'une formule d'indexation dans les prix du lait, par exemple.

M. Laprise: Autre question, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Allez-y.


Vente de bleuets à des producteurs transformateurs

M. Laprise: Concernant le plan conjoint des producteurs de bleuets, dans une région qui me touche de très près, qui est ma région, on a eu à négocier et à attendre pendant quelques mois sinon quelques années la décision de la Régie concernant une entente entre les producteurs transformateurs et les producteurs de bleuets de ma région, et, lorsque la décision a été rendue, on a constaté après coup que les acheteurs de la région, les transformateurs de la région qui achètent le bleuet des producteurs de la région – c'est bien évident, et les transformateurs sont à la fois également des producteurs – avaient des exigences face au Syndicat des producteurs, à savoir qu'on collectait sur la livre de bleuets 0,005 $ et qu'on avait des exigences également de qualité et de protection des maladies.

Mais, par contre, dans la même décision, on a laissé ouverte la porte à des acheteurs de l'extérieur, puis, remarquez bien, ce n'est pas mauvais en soi, mais on ne leur exige pas les mêmes conditions qu'aux acheteurs de la région, à savoir que les acheteurs de l'extérieur peuvent venir acheter dans la région et partir avec notre produit à l'état brut, sans aucune transformation, sans même de congélation. Alors, moi pour un, d'ailleurs, j'ai fait des interventions à ce niveau-là, j'ai interpellé la Régie à ce niveau-là. Mais j'aimerais savoir sur quoi on se base pour établir des règles du jeu qui sont différentes avec des acheteurs de l'extérieur alors que les acheteurs de la région transforment beaucoup dans la région, créent des emplois dans la région. Je peux vous dire qu'actuellement ça marche sur trois chiffres, toute la transformation du bleuet dans la région. Alors, quand tu sors du bleuet à l'état brut, il sort également une activité économique importante, il sort également de la création d'emplois dans notre milieu.

Et également il y a un facteur très important: dû au fait que nous sommes une région quand même éloignée, l'autre bord de la talle d'épinettes, il y a moins de maladies, il y a moins de danger de contamination, et on veut se protéger justement contre la mouche du bleuet qui peut entrer par des gens venant de l'extérieur, qui peut entrer dans la région et contaminer peut-être notre production de bleuets qui est quand même à l'état pur, actuellement.

M. Busque (Gaétan): M. le député, j'aimerais peut-être débuter avec une boutade. Quand vous dites «de l'autre bord de la talle d'épinettes, un endroit éloigné», j'ai un de mes copains qui me disait: Ça dépend toujours de l'endroit d'où l'on part. On peut être très près, et je vois que vous êtes très près de votre comté. Dans le secteur du bleuet, je pense qu'on pourrait parler de nombreuses péripéties dans les cinq dernières années, mais je me limiterai à votre point de vue sur les exigences versus les acheteurs. J'aimerais souligner que, pour la Régie, les exigences sont les mêmes pour tous les acheteurs.

Et vous soulevez une question spécifique au niveau de la protection du territoire avec la mouche du bleuet. C'est une problématique sur laquelle il faut réfléchir, et je pense que la Régie, dans sa décision, permet aux intervenants de se poser la question: Est-ce que le fait de congeler le bleuet avant qu'il sorte de la province empêcher une protection du territoire de production du bleuet contre la mouche du bleuet? Autrement dit, si vous avez un produit qui est contaminé et que vous l'éliminez de l'endroit où il y a risque de contamination, est-ce que la contamination va perdurer? Je pense que c'est une question où on a soulevé un besoin de réflexion additionnel, et on attendra le retour là-dessus.

Mais, quant aux conditions, je pense que vous avez fait référence à un acheteur qui achetait des produits, je pense, à la satisfaction de plusieurs producteurs de bleuets, et la Régie, dans sa décision, veut tenir compte de tous les intéressés par la question avant de rendre une décision finale. Mais il y a justice entre intervenants.

M. Laprise: Remarquez bien, M. le président, je ne suis pas contre le principe que d'autres acheteurs viennent de l'extérieur, mais qu'ils aient au moins les mêmes conditions, parce que, quand les acheteurs de chez nous vont à l'extérieur, dans d'autres provinces, on exige la congélation avant de partir. Alors, il faudrait peut-être que la Régie.. En tout cas, dans la décision de la Régie, on a remarqué cette insuffisance de rigueur qui était différente de la part de nos acheteurs chez nous et des acheteurs de l'extérieur. C'est un point de vue qui... considérant quand même qu'on avait mis là deux ans à négocier, à asseoir les deux parties ensemble pour trouver un terrain d'entente.

D'ailleurs, on a réussi à en trouver un puis je peux vous dire qu'on a fait plusieurs interventions à nouveau avec l'UPA de la région, les producteurs, les transformateurs. On a fait plusieurs tables rondes autour de ce sujet-là. Quand même, ça a pris au-delà de deux ans avant d'avoir une décision définitive là-dessus. Actuellement, ça va bien, il y a une très bonne entente et on a réussi à accrocher toutes les ficelles qui avaient besoin d'être accrochées. Mais il reste que, de notre côté, quand on voyait la décision de la Régie, ça nous a interpellés énormément sur l'équité dans l'acquisition et la transformation du bleuet de même que la commercialisation du bleuet.

M. Busque (Gaétan): Bien, peut-être un commentaire pour compléter là-dessus. Vous avez parlé de consensus entre les intervenants régionaux, et je dois souligner que la Régie a considéré que les intéressés dépassaient la région, dans ce cas-ci.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie. Si j'ai bien compris M. le député de Roberval, quand vous parlez d'extérieur, vous ne parlez pas à l'extérieur de la région mais à l'extérieur du Québec.

M. Busque (Gaétan): À l'extérieur du Québec.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Juste pour être bien sûr que tout le monde a compris, quand vous parlez d'extérieur, c'est l'extérieur du Québec et non de votre région. Merci.

M. Laprise: À l'extérieur du Québec, oui; puis même des États-Unis et de l'Ontario.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je demanderais la collaboration des membres...

M. Busque (Gaétan): M. le Président, je pense qu'«extérieur», dans certains cas, pourrait signifier aussi «extérieur de la région».

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ah oui?

M. Busque (Gaétan): Oui, et le mandat de la Régie et l'obligation d'équité pour la Régie, c'est de considérer l'ensemble des intervenants ou des intéressés dans la question.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Surtout du Québec, mais ça peut être aussi au niveau de la région. Je vous remercie.

Je demanderais la collaboration des députés pour qu'on respecte l'alternance autant que possible. Maintenant, M. le député de Richmond, qui sera suivi du député de Lotbinière.


Processus d'arbitrage des litiges

M. Vallières: Merci, M. le Président. Je voudrais souhaiter une cordiale bienvenue aux représentants de la Régie des marchés agricoles et alimentaires, et en particulier au nouveau président, M. Busque. Nos questions ce matin seront nombreuses à l'endroit de la Régie, et vous me permettrez, M. le président, puisque le dossier est encore chaud, de commencer par des interventions qui ont eu lieu juste avant votre comparution. Comme vous savez, dans l'application de plusieurs plans conjoints, en fait, l'Association des industries forestières du Québec attaque vivement votre crédibilité dans votre rôle d'arbitre en particulier. Il y a aussi le Vérificateur général – vous en avez glissé un mot tantôt – qui a déjà parlé du manque de transparence de la Régie.

(11 h 30)

Ça contribue – je le crois pour eux, en tout cas – quelque peu à attaquer en même temps la confiance que les intervenants doivent avoir en votre organisme, et ça s'inscrit aussi, faut-il le rappeler, au même moment où le Tribunal administratif du Québec, le TAQ, est aussi pris à partie parce qu'il agirait avec partialité. Alors, vous comprendrez, à ce moment-ci, notre inquiétude. C'est un organisme qui représente quand même des éléments importants dans le secteur du bois qui vient, là, en commission parlementaire, de façon très publique, nous indiquer qu'il n'a plus confiance en votre organisme pour traiter des litiges et vous voir agir comme arbitre à l'intérieur des causes qui le concernent.

Afin de vous mettre à l'abri de tout soupçon de partialité et par souci de transparence, est-ce que vous avez, depuis le rapport du Vérificateur général et depuis les allégations qui sont faites par les industriels dans le secteur du bois, établi des règles de pratique qui viennent modifier vos façons de faire? Je pense particulièrement au déroulement des audiences, à toute la question de la formation des bancs quand vous auditionnez des causes.

Et, sur, entre autres, le libellé de vos décisions arbitrales, on sait que tantôt les industriels du bois nous ont indiqué... Je vais lire une partie de leur mémoire que vous avez très certainement déjà lu, et ça, ça me paraît fondamental. On a dit: «À la lecture des décisions arbitrales, il est difficile de savoir à quoi la Régie se réfère pour conclure de telle ou telle autre façon. Les représentants des usines papetières ont souvent l'impression que les analyses de la Régie négligent des éléments importants qui lui sont présentés lors des séances d'arbitrage, laissant croire que les dés sont déjà jetés dès le début du processus.» Ça, ce que ça veut dire, M. le président, en clair, ça veut dire que, quand ces gens-là se présentent devant la Régie, devant vous, donc, ils ont l'impression que la décision est déjà prise. Vous comprendrez qu'il est important de répondre à ça, à mon sens, puisque, à mon avis, ce qui vous permet d'effectuer votre travail de façon adéquate, c'est très certainement votre crédibilité, et la confiance que les gens doivent avoir à votre endroit, et l'apparence d'impartialité que vous devez donner aux gens qui transigent avec la Régie. Alors, à partir du moment où un organisme de l'ampleur de celui qu'on a reçu ce matin décide de venir sur la place publique énoncer de pareils propos, je pense que ça mérite... En tout cas, moi, j'ai hâte de vous entendre là-dessus, et on pourra, par la suite, passer à d'autres questions sur le fonctionnement de la Régie. Mais je pense que la Régie a le devoir de ne pas laisser passer...

Je l'indiquais tantôt, vous êtes, en vertu de notre loi, un organisme de régulation très important pour la bonne mise en marché de nos produits puis l'harmonie entre les secteurs concernés. À mon sens, un débat doit certainement être tenu là-dessus et des précisions doivent être données aux parlementaires par rapport aux allégations qui sont faites à votre sujet. Alors, est-ce qu'on peut vous entendre ce matin là-dessus?

M. Busque (Gaétan): Merci. M. Vallières, je pense que, au départ, j'aimerais peut-être clarifier une interprétation du contenu du rapport du Vérificateur général. Quand le Vérificateur général a parlé de transparence au niveau de la Régie, ce n'était pas la question de transparence dans les décisions, c'était une question de transparence dans le processus. De fait, la Régie, encore aujourd'hui, n'a pas de guide de procédure et de pratique qui a été reconnu formellement – par une publication, par exemple, à la Gazette officielle . Je vous ai souligné tout à l'heure qu'on est à compléter ce guide-là. Je prévois qu'au cours de février il devrait être possible de le publier à la Gazette officielle .

Les deux guides en développement sont un guide de procédure qui va spécifier les règles de fonctionnement de la Régie et les règles qui touchent tout le déroulement des séances publiques. Souvent, si vous avez déjà eu l'occasion d'assister à des séances publiques, je pourrais vous dire que – en tout cas, ça a été une surprise un peu pour moi – plusieurs intervenants arrivent de façon un petit peu désordonnée aussi. Les règles de procédure vont nous permettre d'être clairs pour la Régie et d'être clairs pour les intervenants, les intéressés qui vont venir aux sessions.

Au niveau interne, je pense que vous pouvez avoir l'assurance que, pour moi, l'éthique, et particulièrement l'éthique au niveau des régisseurs, est excessivement importante. D'ailleurs, le législateur la considère importante. Dans la loi, vous avez, à l'article 10, qu'un régisseur qui aurait des intérêts qui le mettraient en conflit d'intérêts personnel, son activité de régisseur et les activités de production ou de mise en marché peut être déchu de ses fonctions. C'est déjà là, et c'est énorme, et c'est une question que, nous autres, on va traiter à l'intérieur en établissant un code d'éthique interne. Et on le rendra public, il n'y a pas de cachette là-dessus. C'est en processus. Dans notre planification, on compte pouvoir réaliser cela au cours de février.

Je pense que vous m'avez demandé si j'ai lu le mémoire de l'Association forestière. Bien, on m'en a envoyé une copie, je l'ai lue avec intérêt, d'autant plus que c'est arrivé au tout début de mon mandat. J'ai lu des choses. Maintenant, au cours des derniers six mois, j'ai été plus à même de les comprendre. Il y a beaucoup de choses là-dedans qu'il faudrait appuyer par des faits. Il y a des choses, je pense, dans la première version – je ne sais pas, ce matin c'est peut-être un document différent qui vous a été remis – où on questionnait l'intégrité de plusieurs régisseurs, et je pense qu'il est important de voir que le travail qui est effectué par le régisseur de la Régie, au-delà du code d'éthique, est appelable. Il y a plusieurs décisions de la Régie qui peuvent être appelées au Tribunal administratif du Québec et il y a des décisions...

Si on dit que quelqu'un est en conflit d'intérêts ou qu'il pourrait y avoir partialité, ça peut être amené devant les tribunaux, et on a des cas de jurisprudence. Donc, il y a, à l'occasion, des choses de citées, mais je pense qu'il y a des obligations de la part du régisseur. Il a des obligations. Aussi, il y a des possibilités de s'assurer de ça par d'autres mécanismes judiciaires en place.

C'est bien sûr que, outre tout ça, il y a des questions qui ont été soulevées, dont les remises de documents, les rapports de conciliation. Je pense qu'il y a beaucoup à faire à l'interne, au niveau de la Régie, en termes de procédure. Je pense qu'on n'est pas une grosse équipe, vous avez vu le nombre d'effectifs qu'on a. Il y a des moyens informatiques modernes aujourd'hui qu'on peut instaurer. On a commencé, on n'a pas terminé, mais je pense qu'on est partis dans une démarche où on veut que les intervenants, tous les intéressés soient informés au bon moment, en même temps, et je peux vous assurer que tout le processus, notamment au niveau des décisions... On expédie, le fax est programmé pour envoyer à toutes les personnes qui étaient intéressées... Vous avez des décisions récentes qui viennent à l'appui de tout ça.

Mais, au-delà de tout ça, il faudra se rappeler que la Régie est encadrée par une loi et qu'elle doit faire son travail dans le cadre des pouvoirs qui lui sont confiés par la loi. Il ne faudrait pas demander à la Régie de prendre des décisions qui outrepassent son pouvoir, et ça, à l'occasion, on va le rappeler dans les décisions.

M. Vallières: M. le président, est-ce que, par rapport au libellé de vos décisions... Quand vous avez à trancher, vous agissez comme arbitre, là. Dans les décisions arbitrales, on vous reproche très clairement de ne pas les justifier suffisamment. Est-ce que vous avez l'intention de changer vos façons de faire à ce niveau-là afin que les gens qui lisent vos décisions et qui sont partie prenante se reconnaissent davantage dans la nature des décisions que vous prenez? Parce que, tantôt je le mentionnais, ça me paraît quelque chose d'important. Si les gens ne trouvent pas que les décisions sont suffisamment épaulées par des arguments solides, ils ont peut-être l'impression de se faire avoir, puis ils disent: Bien, pour quoi faire qu'on est là? Dans le fond, la décision était prise avant qu'on y aille. Est-ce que vous avez reçu ce message et est-ce que vous avez l'intention d'en tenir compte?

M. Busque (Gaétan): Oui. M. Vallières, je pense que le message est très clair. Je me questionne à savoir si l'interprétation qui est donnée de l'absence de motivation des décisions de la Régie est pour des décisions récentes ou des décisions qui datent de 10 ou 15 ans. Si on se réfère spécifiquement à l'Association des industries forestières, on a fait une revue sur une période qui dépasse 10 ans. Ça a pu évoluer dans le temps, mais je pense qu'on a une préoccupation...

(11 h 40)

Depuis l'arrivée de la Loi sur l'application de la justice administrative, on a l'obligation de motiver les décisions et la Régie s'applique à motiver les décisions. Je pense qu'on pourrait prendre connaissance des récentes décisions de la Régie, ne serait-ce que dans le secteur du poulet, ou dans le secteur du porc, ou même dans le secteur du lait, décision qui est sortie hier. Il m'apparaît que déjà il y a un grand bout de chemin de fait si on n'a pas satisfait à cette demande-là. Là-dessus, j'aimerais peut-être, si M. Blanchette désire compléter...

M. Blanchette (Jean-Claude): Oui.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. Blanchette.

M. Blanchette (Jean-Claude): M. le Président, MM. les députés, je voudrais confirmer que, au moins depuis les deux dernières années, on s'est donné comme discipline, au niveau des régisseurs, d'améliorer la motivation des décisions. Évidemment, toute la partie où on essaie de rendre compte des représentations qu'on a faites, c'est important, mais la motivation de la décision nous apparaît stratégique et importante. C'est sûr qu'il peut toujours y avoir amélioration, on est en processus d'ailleurs pour continuer d'améliorer ça, mais, depuis deux ans, c'est une préoccupation particulière des régisseurs et des bancs de bien expliquer et motiver la décision à laquelle on en arrive dans les cas d'arbitrage, et je dirais que ça s'est renforcé, depuis même la nomination du nouveau président. On se donne plus de discipline pour arriver à plus de résultats de ce côté-là.

M. Vallières: Quant aux règles de procédure dont vous nous faisiez mention tantôt, est-ce que vous vous êtes donné un échéancier précis?

M. Busque (Gaétan): ...qu'on est à l'étape finale. J'entends faire la discussion avec les régisseurs la première semaine de février. Ensuite de ça, normalement, on devrait enclencher le processus d'adoption du règlement, la soumission à la Justice du projet, et tout ça, et on le publiera comme un règlement de la Régie sur les procédures internes de la Régie.

M. Vallières: Bien. On a beaucoup...

M. Busque (Gaétan): Et il sera diffusé, d'ailleurs, comme on a fait une démarche particulière, à l'automne. On a distribué à tous les intéressés et intervenants connus – personnes accréditées, plans conjoints – la planification stratégique de la Régie, les grands objectifs. C'est bien sûr peut-être qu'on ne rencontre pas l'ensemble des demandes ou des attentes spécifiques des intervenants mais ce qui nous a semblé, après réflexion, les régisseurs et tout le personnel de la Régie, être les meilleures orientations qui devraient guider la Régie pour les prochaines années.


Rotation dans les équipes de régisseurs

M. Vallières: En ce qui concerne les régisseurs, on en a beaucoup parlé. On l'a vu, là, ce matin, il y a des gens qui remettent en cause leur impartialité. Évidemment, ce n'est pas vous qui choisissez les régisseurs, mais c'est vous qui déterminez la façon dont ils vont travailler. Entre autres choses, pourriez-vous nous indiquer: Au niveau des plans conjoints dans le bois, est-ce qu'il y a une rotation des régisseurs qui s'effectue?

Je sais que le Vérificateur général, sur la question de la formation des bancs, vous faisait une remarque là-dessus. Vous avez indiqué que c'était volontairement que vous n'indiquiez pas qui serait sur certaines causes. Est-ce que vous pourriez nous indiquer, grosso modo, comment vous fonctionnez quand arrive, par exemple, la négociation de la convention dans le secteur du bois en Estrie? Prenons celle-là parce que c'est une convention de chez nous. À chaque année, quand on négocie ça, est-ce que c'est... D'abord, c'est un banc de trois régisseurs, j'imagine, dont un qui préside, puis il y en a deux autres qui l'assistent. Est-ce qu'il y a rotation? Est-ce que, ces gens-là, on les retrouve dans d'autres régions, puis ceux d'autres régions qui viennent chez nous, inversement? Peut-être pourriez-vous nous préciser le fonctionnement au niveau du banc comme tel.

M. Busque (Gaétan): Oui. M. Vallières, là-dessus, je pense que vous touchez un point qui m'intéresse particulièrement. Depuis ma nomination, j'ai mis... Parce que, vous l'avez dit, ce n'est pas la prérogative du président de nommer les régisseurs mais de faire la direction. Ma préoccupation ou mes points d'intervention ont été surtout pour faire en sorte que tous les régisseurs puissent participer activement à la vie entière de la Régie. Par ça, ce que je veux souligner, c'est que chacun doit, même en dehors d'un secteur d'activité qu'on pourrait lui confier, être capable de comprendre ce qui se passe et être capable d'intervenir et de questionner, ne serait-ce que pour avoir une meilleure interaction au niveau des réunions de la Régie.

Pour la création des bancs, si on faisait la revue des derniers six mois, je pense que j'ai permis à beaucoup de personnes de travailler avec des équipes différentes. Donc, j'ai varié les équipes, j'ai varié les domaines et varié les secteurs. Il y a des règles qui sont là, comme les personnes qui font la conciliation, ce n'est pas les personnes qui vont sur le banc, la personne qui a fait l'arbitrage, elle ne peut pas être nommée sur le banc non plus. On a quand même un ensemble de règles, là, qui permettent à chacun des régisseurs de toucher à tous les domaines, qui permettent aussi un échange de pensées ou d'opinions entre les régisseurs plutôt que de se concentrer spécifiquement sur le régisseur qui serait responsable d'un secteur d'activité, par exemple, et ça, on va continuer à mettre l'accent là-dessus.

C'est évident qu'on ne tient pas, et ça, on ne le fera pas... Mais je vous ai même parlé du Web interne où on annonce les séances de la Régie. Vous allez remarquer, là-dessus, qu'on n'annonce pas d'avance qui sera sur le banc, pour des raisons bien simples, on veut que les intervenants arrivent puis on veut qu'on reconnaisse que le banc, c'est la Régie qui siège et c'est non une personne X, Y, Z, et ça, je vais mettre tous les efforts pour arriver à ce qu'on comprenne que, quand la Régie siège, peu importe qui siège, ce sera une décision équitable qui sera rendue.


Règles de fonctionnement entourant les audiences

M. Vallières: À ce sujet, vous répondiez au Vérificateur général, sur le fonctionnement des bancs, ou vos règles de fonctionnement, que la Régie a des règles de régie interne. Elles sont brèves et simples, elles sont connues de tous et scrupuleusement observées. Est-ce que ces règles sont écrites? Est-ce que vous avez des règles écrites qui portent justement sur la formation des bancs, la préparation des audiences et la prise de décision? Est-ce que ces règles sont écrites et est-ce qu'on peut les obtenir?

M. Busque (Gaétan): Je vais laisser Me Régnier répondre à ça. Ça fait partie de sections que, j'ai mentionné, je n'ai pas vécues, donc ça m'est un peu difficile de répondre.

M. Vallières: Très bien.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Me Régnier.

M. Régnier (Claude): Merci, M. le Président. À l'époque de la rédaction des réponses au rapport du Vérificateur général, à laquelle j'ai collaboré, effectivement, les règles de régie interne étaient tellement simples qu'elles n'étaient pas écrites. C'est le travail qu'il a fallu faire: se doter de règles écrites pour qu'elles soient connues de tout le monde dans un souci de transparence. Et M. Busque, tout à l'heure, vous a fait référence au calendrier qui nous attend. Elles sont presque prêtes, il reste à les peaufiner, à regarder ce qui se passe ailleurs pour ensuite vraiment faire des choses intéressantes.

M. Vallières: Bien, et le plus tôt sera le mieux, compte tenu du climat auquel on assiste présentement. C'est pour ça que vous me verrez beaucoup insister, tout au long de mon questionnement, M. le président, sur la capacité que doit se donner la Régie d'agir de façon transparente, et je ne le dis pas de façon négative, là. Le geste que vous allez poser au niveau de vos règles de procédure, ça fait partie de ça. Donc, ça ne veut pas dire que nécessairement vous cachez des choses, mais je pense qu'à l'intérieur du processus dans lequel vous êtes – et ce n'est pas toujours un concours de popularité – il faut asseoir votre responsabilité sur des règles suffisamment précises et qui sont les mêmes pour tous et toutes, et des règles que les gens vont accepter d'emblée, puis ils vont vivre avec après. Je veux dire, tout le monde va vivre sur la même longueur d'onde. Alors, pour moi, ça, c'est important. Donc, possiblement qu'au cours d'un autre exercice, au niveau de nos travaux parlementaires, on aura l'occasion de revenir sur cette question que, pour un, je trouve très importante.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député, on a au-delà de 20 minutes d'accordées à vous. Alors, avec votre permission, je vais accorder la parole au député de Lotbinière et revenir de votre côté, si évidemment vous le désirez. M. le député de Lotbinière.

M. Vallières: M. le Président, je vous indique d'ores et déjà que j'ai l'intention de revenir, puisque je suis loin d'avoir terminé avec la Régie.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Oui? D'accord. Peut-être juste pour l'information des membres, je rappelle l'article 173: «Temps consacré aux auditions. Le président partage entre les députés de la majorité et ceux de l'opposition le temps que la commission consacre à chaque personne ou organisme. Sous réserve de l'alternance – ce qu'on a choisi – chaque député peut parler aussi souvent qu'il le désire, sans excéder dix minutes consécutives.» Vous admettrez que je n'ai pas été trop sévère depuis hier sur le 10 minutes. M. le député de Lotbinière.


Convention de la mise en marché du porc

M. Paré: Merci, M. le Président. Donc, bienvenue, M. Busque, félicitations, puis bienvenue aussi à votre état-major. Ma première question, c'est celle-ci, ça vise la convention de la mise en marché du porc. Vous savez que, dans le comté de Lotbinière comme dans le comté de Beauce-Nord, les producteurs de porc, la production porcine est très importante. Vous avez une décision toute chaude qui a été rendue, vendredi, publique. J'aimerais que vous m'en parliez et que vous nous énonciez les principaux changements que vous avez apportés à l'intérieur de cette décision-là.

(11 h 50)

On se rappelle aussi que les intérêts étaient fort variés, quand on parle des transformateurs, des coopérateurs puis des indépendants. Donc, on aimerait vous entendre sur les principaux changements à l'intérieur de votre décision concernant la convention de mise en marché du porc, parce qu'on sait aussi que l'entente de principe sur ce renouvellement-là avait été très discutée, et on a bien hâte justement d'en connaître la teneur. On a lu quelques articles, mais, d'emblée, lorsqu'on dit que même la Fédération des producteurs de porcs a demandé deux jours pour donner ses commentaires, pour l'analyser, est-ce qu'elle était si complexe, cette décision-là? Si vous pouvez, d'une façon pédagogique, nous la rendre la moins compliquée possible.

M. Busque (Gaétan): Écoutez, je pense qu'il n'y a pas beaucoup de situations simples. C'est une situation complexe, on pourrait la qualifier comme ça, puisque, depuis 1995, toutes les parties en cause, il y en avait plusieurs appuyées par plusieurs avocats, donc plusieurs capacités d'interprétation des litiges ou des questions en discussion. Et, 1995-1997, conciliation par la Régie, médiation spéciale par Me Jules Brière, rapport de médiation, différents intervenants.

Nous autres, on a été saisis officiellement... Ou on a dit: Bien, allez-y, arbitrez; on fait confiance à la Régie, arbitrez. En fait, j'ai reçu la demande un peu comme ça, au mois d'août. On a dit: On est prêts. Je vous dirais, comme complexité, ça a même pris deux mois avant qu'on réussisse à s'entendre sur une date pour entendre les parties, ce qui a retardé un petit peu le processus. Mais je pense que les gens ne se sont pas plaints du retard.

M. Paré: Quand vous parlez d'entendre les parties, vous parlez des trois journées que vous avez tenues...

M. Busque (Gaétan): On parle des trois journées, oui, mais, les parties, on parle de l'ensemble des intervenants: les huit abattoirs, la Fédération des producteurs et différents autres intervenants qui se sont annoncés ou qui ont demandé d'être entendus par la Régie.

C'est assez complexe. Vous me demandez de résumer, je vais vous résumer quelques éléments et M. Blanchette pourra me supporter là-dessus ou compléter. Mais je vous rappellerai que la décision de la Régie a une cinquantaine de pages. Donc, il y a quand même certains détails qu'on peut retrouver là-dedans quant à l'argumentation des parties, les éléments qui ont conduit à la décision qu'on a prise.

On a parlé beaucoup de consensus. L'industrie du porc a beaucoup cheminé ensemble. Il y a des grandes lignes d'orientation qui pouvaient être dégagées du travail qui avait déjà été fait par les intéressés, les parties intéressées, et la Régie a dû trancher dans un cas qui est très important – c'est la question des préattributions, la question d'encans résiduels et la question de contrats – a pu trancher à partir d'informations qui ont été soumises par les gens et sur lesquelles on différait d'opinions sur les quantums. Donc, la Régie, ce qu'elle a statué – rapidement – c'est que, au niveau des préattributions, actuellement c'est au niveau de 72 % des porcs qui sont préattribués à des entreprises, à des abattoirs, et 28 % va à l'encan résiduel. Donc, la Régie a introduit un mécanisme qui lui avait été proposé par les intervenants, un mécanisme de contrat par soumissions.

Pour introduire ce contrat-là, la Régie a réduit les préattributions de 72 % à 60 %, la première année, et réduit aussi l'encan résiduel de 28 % à 25 %, ce qui nous laissait un espace de 15 % pour les contrats par soumissions, et ces contrats-là par soumissions, ils seront accessibles à l'ensemble des acheteurs qui sont visés par la convention, ce qui veut dire que des abattoirs qui auraient besoin de volume ou qui auraient des marchés spécifiques, ça leur permet une ouverture qui n'était pas présente au niveau de la convention. Donc, pour ces contrats-là, on comprend que le prix devrait se situer à quelque part entre le prix des préattributions puis le prix de l'encan résiduel, donc un prix qui pourrait satisfaire beaucoup plus les besoins qui nous avaient été exprimés en termes de disponibilité de porcs pour des marchés spécifiques ou avec des caractéristiques particulières. Ça, c'est un élément important.

Un autre élément important à souligner, il y avait la question du transport interrégional où l'idée est que, si on se promène sur l'autoroute avec des porcs, parfois on les échappe, mais il y a aussi le fait que ça affecte la qualité de la viande et que ça affecte le retour possible aussi au niveau des producteurs. Donc, l'industrie, globalement, pour son intérêt, devrait tendre, pour une meilleure efficacité, à avoir des abattoirs le plus près possible des lieux de production, et il y a comme un incitatif en ce sens-là en augmentant ou en faisant supporter davantage le coût du transport interrégional au niveau des acheteurs, des abattoirs parce que, à ce moment-là, ils vont avoir tendance à vouloir diminuer éventuellement ces frais-là et à s'installer plus près de la production.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. Blanchette, vous avez des renseignements additionnels?

M. Blanchette (Jean-Claude): Peut-être deux éléments, oui, complémentaires. Au niveau des contrats, on introduit la notion que les contrats peuvent avoir des durées variables et peuvent contenir aussi des spécifications particulières. «Durées variables», ça veut dire qu'il pourrait éventuellement y avoir des contrats d'offerts pour une durée de plus qu'un mois. Au départ, c'est un mois, mais ça pourrait être plus qu'un mois. Un abattoir, par exemple, qui voudrait s'approvisionner pendant un certain temps parce qu'il doit répondre à un besoin particulier pourrait le faire de cette façon-là.

Au niveau des spécifications, bien, de plus en plus, il semble se développer dans le marché des besoins pour des porcs avec des spécifications particulières pour répondre à des marchés particuliers. Les contrats pourraient ouvrir la porte à ça. Évidemment, dans la décision, on n'a pas tout élaboré ce que pourraient vouloir dire la durée et les spécifications; les parties pourront s'entendre là-dessus. Au départ, c'est des contrats d'une durée d'un mois, mais les parties peuvent s'entendre sur autre chose pour compléter cette notion de contrats.

Je dirais qu'un autre élément de la décision qui est important, c'est la notion de producteur transformateur. C'est une notion qui est véhiculée depuis un certain temps, qui a fait l'objet d'ailleurs de discussions dans le cadre de la médiation de Me Brière qui a eu lieu l'automne passé. Or, la Régie, là-dessus, dans son analyse, en vient à la même conclusion que Me Brière – que le rapport, en tout cas, de Me Brière – à l'effet que c'est difficilement conciliable, cette notion de producteur transformateur, avec un système de mise en marché collectif parce que ce qui est sous-jacent à la notion de producteur transformateur, c'est le fait que des producteurs qui sont en même temps propriétaires d'abattoir pourraient avoir le droit de faire transformer tous leurs porcs par leur abattoir. Donc, c'est conflictuel avec l'agence collective qui, pour être efficace, doit mettre en vente l'ensemble des porcs.

Un autre argument qu'on apporte par rapport à cet élément-là, c'est que la Loi sur la mise en marché des produits agricoles précise clairement que, lorsque vous faites deux opérations, vous êtes soumis aux obligations des deux, donc aux obligations des producteurs et aux obligations des acheteurs. Alors, c'était difficile pour nous d'entrer dans cette argumentation-là, d'autant plus qu'on croit que, par les contrats, ceux qui ont des besoins particuliers peuvent se servir des contrats pour justement répondre aux besoins qu'ils ont manifestés en tant que producteurs transformateurs. Alors, je pense que c'est les éléments, M. le Président, qui s'ajouteraient. Il y en a évidemment beaucoup d'autres dans 50 pages, là, mais c'est...

Une voix: ...

M. Blanchette (Jean-Claude): Oui, les contrats à des fins spécifiques.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ça va? M. le député, est-ce qu'il y a d'autres questions?

M. Paré: Oui. D'abord, je suis très heureux, M. le président, que vous nous ayez confirmé que les autoroutes, ce n'est pas l'endroit pour élever du porc. Deuxièmement, je voudrais vous féliciter parce que je fais partie aussi de la commission de l'administration publique puis que les informations que vous nous avez rendues ici sur les points, et à partir aussi du rapport du Vérificateur général, toute l'information est fort précieuse, et c'est même la première fois que je vois ça dans une autre commission, qu'on ait toutes ces informations-là. C'est très transparent. Donc, on peut poser toutes les questions sur la reddition de comptes, sur le rapport du Vérificateur général, qu'est-ce que vous avez fait pour corriger ce qui vous était reproché. Je voudrais vous féliciter là-dessus. Si c'est votre initiative, là, c'est une très bonne initiative.

(12 heures)

Toujours au niveau de la convention de la mise en marché, au niveau des intérêts, vous avez entendu aussi des producteurs. J'en ai un de mon comté qui est allé devant vous, et il parlait justement, bien sûr, des transformateurs, des éleveurs, des producteurs transformateurs, tout ce que vous venez d'expliquer très brièvement. Parce que, si le rapport a 50 pages, donc ça doit être aussi complexe qu'on le dit dans certains articles de journaux présentement. Pour bien comprendre, quand vous parlez de producteurs transformateurs, est-ce que vous parlez aussi de la coopérative principale qui a un abattoir et aussi des... C'est quoi, vos...

M. Busque (Gaétan): Bon, là-dessus, M. Paré, je pense qu'on en fait état de la motivation de notre décision. Je pense que la grande orientation de la Régie, c'était, dans ce dossier-là, de ne pas créer des artifices de propriété, par exemple, où on aurait dit: Bien, moi, je suis actionnaire à 0,5 % de telle entreprise, X, Y, Z, donc mes porcs doivent être transformés par cette entreprise-là. Je pense qu'on voulait éviter ce genre de chose là.

D'ailleurs, vous avez fait référence à une entreprise coopérative. L'entreprise coopérative, on pourrait retomber dans toute la discussion de l'article 1 et de l'article 2 de la loi. Je pense que ça fait longtemps qu'on le brandit comme étant en existence, mais on l'utilise, je pense, modérément parce que l'objectif de la loi, c'est d'arriver à un fonctionnement modéré. Je pense qu'il y a modération entre les différents modes, là, complémentaires; on parle de complémentarité. Puis, dans le cas particulier de la coopérative, on n'a aucunement eu de revendications de statut de producteur transformateur. Donc, la coopérative, ou la grande coopérative visée par la convention, est assujettie aux règles de mise en marché collective et elle achète ses préattributions, puis ça, c'est un élément excessivement important à souligner, qui a influencé, disons... On ne peut pas parler de délibérations, mais disons qu'on pourrait constater que, du fait que la Régie a baissé de 72 % à 60 % pour une première année et ensuite à 55 % les préattributions plutôt que de partir de 72 % et de les ramener à 40 %, 20 % ou 0 %, on pourrait dire que la Régie a dû tenir compte que les préattributions étaient attachées avec une obligation. Donc, chez les acheteurs qui ont des préattributions, il y a une obligation de recevoir les porcs, alors qu'on voit que la production porcine était en croissance au Québec. Donc, les entreprises qui ont une préattribution élevée ont peut-être des avantages, peut-être des droits, mais ont aussi des obligations, une contrepartie d'obligation.

Je pense que ça pourrait être important de se questionner, sur un encan à 0 %, par exemple, qu'est-ce qui pourrait arriver dans le cas où quelqu'un n'appliquerait pas à l'encan. Est-ce qu'on aurait assez de porcs pour satisfaire l'encan? Est-ce que, dans certaines occasions, on n'en aurait pas de trop? Puis on parle beaucoup de favoriser du développement, M. Laprise a parlé de développement d'entreprises québécoises. Je pense que, dans le domaine du porcs, c'est un excellent exemple où les entreprises de transformation et de surtransformation sont très, très actives et présentes au niveau du Québec et exportent des produits à valeur ajoutée. On regarde la valeur de la transformation et la main-d'oeuvre, et on spécialise notre main-d'oeuvre, et on est compétitifs.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. Blanchette, vous avez quelque chose à ajouter?

M. Blanchette (Jean-Claude): Oui. On le mentionne dans la décision puis ça nous a été confirmé lors des audiences que, dans ces cas-là de producteurs transformateurs, les abattoirs qui veulent avoir leurs propres porcs ou les porcs de leurs propriétaires qui sont producteurs, le fonctionnement de l'agence privilégie l'approvisionnement de ces abattoirs par ces porcs-là. Ça nous a été confirmé et par l'agence et par les abattoirs.

M. Paré: Mais est-ce que c'est aussi vrai pour la coopérative?

M. Blanchette (Jean-Claude): On n'a pas eu de représentations à cet effet-là de la part de la coopérative, de la part d'Olymel.

M. Paré: O.K. Parce qu'on sait qu'ils ont besoin annuellement d'à peu près 3 000 000 de porcs.

M. Blanchette (Jean-Claude): Oui, mais ils ne nous ont pas signalé le problème en audience.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ça va? M. le député de Richmond.


Délais dans la publication des rapports d'évaluation périodique des plans conjoints

M. Vallières: Oui, M. le Président. Je vais continuer un peu dans ce que j'avais entrepris tantôt. J'ai fait un petit exercice au niveau de certaines auditions que la Régie a menées pour vérifier quel était le délai de traitement entre le moment où vous avez des auditions et puis le moment où la décision est rendue par la Régie. C'est ainsi que, dans le secteur des légumes de transformation, les auditions ont été tenues à quelque part en mars 1999, décision rendue en octobre 1999. Pour ce qui est de toute la question du bois en Estrie, les auditions en avril 1999, pour décision en décembre 1999, donc des délais respectifs de sept mois et de huit mois dans le cas de ces deux décisions-là. Pour ce qui est des cultures commerciales, un délai de six mois pour la prise de décision. Pour ce qui est du bois Centre-du-Québec, cinq mois. Pour ce qui est, bon, de la question des oeufs de consommation, ça a pris quelque trois mois.

Ma question à la Régie, c'est de savoir: Qu'est-ce qui justifie de pareils délais? En tout cas, quand on parle de huit mois, de sept mois, ça paraît des délais qui sont très longs. Est-ce que vous vous êtes fixé des objectifs mesurables quant aux délais de traitement pour rendre vos décisions, dépendamment évidemment du secteur qui est visé, parce qu'on sait qu'il y a des secteurs qui peuvent être plus longs que d'autres? Mais est-ce que ça fait partie de vos objectifs? Et est-ce que vous comptez incorporer ce genre d'objectifs ou le procédé qui est suivi à l'intérieur de vos règles de pratique dont on parlait tout à l'heure?

M. Busque (Gaétan): Là-dessus, j'aimerais peut-être avoir une clarification. Quand vous parlez de décisions, avec les dossiers que vous avez cités, je crois que vous parlez d'évaluations périodiques, des rapports d'évaluation périodique plutôt que des décisions du genre, par exemple, dans le porc, ou dans le lait, ou dans la volaille, des décisions où on a des séances publiques. Est-ce que ça s'applique beaucoup plus... En tout cas, les dossiers que vous m'avez soulevés...

M. Vallières: Que je vous ai suggérés, oui.

M. Busque (Gaétan): ...semblent s'appliquer aux examens périodiques.

M. Vallières: Aux examens périodiques.

M. Busque (Gaétan): Là-dessus, j'aurais peut-être deux volets. Je demanderais à M. Blanchette, qui est responsable de...

M. Vallières: Mais l'autre partie de ma question, le volet par rapport à toutes les décisions que vous avez à prendre, est-ce que vous avez des objectifs? Je me souviens qu'on avait rencontré la CPTAQ il y a quatre, cinq ans, puis qu'on avait dit: Vous avez des délais qui sont trop longs, et qu'ils se sont donné des objectifs, puis qu'ils ont fini par ramener ça. Puis là à chaque année on les rencontre puis on est capable de mesurer s'il y a eu amélioration ou s'il n'y a pas eu amélioration dans le traitement des demandes. C'est un peu ça, l'objet de ma demande.

M. Busque (Gaétan): Oui. Je vais répondre à cette première partie-là, M. Vallières. C'est évident, je pense, qu'on retouche la question de la reddition de comptes. Et, pour bien mesurer l'efficacité – puis ça, ça fait partie des objectifs qu'on a mis dans le plan stratégique – il faut s'établir un point de départ, et après ça regarder où on arrive, et faire la différence entre les deux, puis ça nous donne un petit peu une évaluation de l'efficacité. Il y a bien sûr plusieurs dossiers qui arrivent à la Régie, des dossiers différents, puis notre intervention est conditionnée par beaucoup d'interventions extérieures. Mais, dans nos orientations, nos objectifs à nous autres, on va viser à amenuiser le plus possible les délais que la Régie pourrait prendre dans le traitement des dossiers dont les délais relèvent uniquement de sa responsabilité. Parce que je pourrais vous amener des dossiers... On pourrait parler du poulet, par exemple, où on a commencé les sessions au mois de mars, puis, avec différentes interventions, différents modes qui sont accessibles aux gens, aux intéressés, aux parties dans le cadre de la démocratie, bien, ça a retardé grandement les dossiers. Mais, à la Régie, nous autres, on fonctionne dans ce contexte-là.

Puis c'est sûr que, dans nos objectifs, on va retenir ce qui nous revient et on rendra compte de ça. Idéalement, on devrait le faire dans le rapport annuel de la Régie, qu'on a tenté, dans les dernières années, d'améliorer pour que les députés puissent en mieux comprendre les activités, mais on va mettre encore un accent de plus là-dessus. Avec notre planification stratégique, on est à développer des plans annuels. C'est sûr qu'à l'interne on a déjà un objectif de fixé pour certains éléments, dont l'examen périodique, mais tout n'est pas en place dans le moment. Ça fait que j'aimerais peut-être laisser compléter, là...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. Blanchette.

M. Blanchette (Jean-Claude): Oui. Concernant en particulier les évaluations périodiques, là il faut peut-être comprendre qu'en 1998, après un premier tour de roue d'évaluation... Parce que cette disposition-là a été introduite en 1991 dans la loi. Donc, à partir de 1992, il y a eu des évaluations, et l'article 62 nous précise qu'on doit faire les évaluations au plus tard tous les cinq ans. Donc, après un premier tour de roue, on a fait une évaluation globale, on a consulté les principaux intervenants et on s'est donné un document d'orientation que vous avez en annexe, je pense, relativement à l'évaluation des plans conjoints. Alors, tout ça a fait qu'on a accumulé un certain retard. Pour la dernière année, on avait planifié de faire 13 évaluations périodiques; on en a réalisé 12. Il y en a une qu'on a dû remettre à cette année.

(12 h 10)

L'autre élément important, c'est qu'on avait une équipe de professionnels qu'il fallait réorienter et affecter davantage à ces évaluations-là. Ces deux éléments ont fait en sorte qu'il y a eu des retards, disons, anormaux dans la publication des rapports des évaluations au cours de la dernière année. Pour cette année, dans l'orientation qu'on s'est donnée, on se propose de publier le rapport 60 jours après la tenue de l'évaluation.

M. Vallières: Ces rapports d'examens périodiques, c'est des documents qui sont publics?

M. Blanchette (Jean-Claude): Oui.

M. Vallières: Est-ce que c'est possible de faire parvenir aux membres de la commission, en passant par la présidence, les rapports qui sont disponibles à ce jour, ceux que vous avez déjà publiés? Ce serait intéressant de pouvoir les consulter.

M. Busque (Gaétan): O.K. Est-ce qu'on pourrait vous demander quelle période vous visez?

M. Vallières: Je pense en particulier à l'examen périodique concernant le Syndicat des producteurs de bois de l'Estrie. Je sais que celui-là était en décembre 1999. Prenons, par exemple, ceux que vous avez de...

M. Busque (Gaétan): Vous avez parlé de cultures commerciales puis des oeufs de consommation?

M. Vallières: Oui, cultures commerciales. Le bois Centre-du-Québec également, les oeufs de consommation.

M. Blanchette (Jean-Claude): C'est ceux qu'on a réalisés depuis la dernière orientation. Ça, on peut vous les...

M. Vallières: Oui, c'est ça. Oui, 1998-1999.

M. Blanchette (Jean-Claude): Ils sont sur notre site Internet, sur notre site Web, ils sont déjà là, accessibles, mais on pourrait vous les faire parvenir.

M. Busque (Gaétan): Il n'y a aucune difficulté là-dessus.

M. Vallières: Bien. Mon autre question...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je m'excuse, je crois comprendre que M. le secrétaire de la commission peut les prendre.

M. Busque (Gaétan): Je voudrais juste ajouter, pour répondre plus complètement à la question de M. Vallières: la Régie va prendre votre remarque en considération d'inclure dans ses guides de procédure des cibles de réalisation, par exemple pour rendre des décisions ou de publication des rapports. D'ailleurs, M. Blanchette vous a déjà donné un chiffre, donc ça vous donne une indication qu'on réfléchit là-dessus dans le moment sur ce que pourraient être nos dates cibles pour annoncer...


Suivi des objectifs du plan quinquennal

M. Vallières: C'est l'objet de mon autre question, ça va dans la continuité de ce que vous venez de me mentionner. J'ai pris connaissance globalement du plan stratégique que vous nous avez présenté, qui porte, je pense, sur une période de cinq ans, 1999 à 2003. Quand la commission se réunit, comme elle le fait ce matin, sur un mandat de surveillance d'un organisme – on le fait sur une base annuelle – il m'apparaît important que, pour exercer le contrôle requis comme législateur, on puisse avoir un plan quinquennal mais aussi un plan annuel. Même si vous nous présentez le rapport annuel, moi, ça ne me semble pas suffisant.

Ce que j'aimerais avoir, comme législateur, c'est un plan de travail avec vos objectifs, les cibles que vous vous donnez, les échéances que vous vous donnez pour qu'on puisse, après ça, tenter avec vous de mesurer un petit peu le niveau d'efficacité puis de vérifier l'atteinte des objectifs que vous vous êtes donnés et, année après année, revenir sur vos rapports afin qu'on puisse, au bout d'une certaine période, constater un peu le cheminement, le chemin qu'on a pu parcourir. Alors, est-ce que, dans votre esprit, c'est possible d'arriver à nous fournir un outil qui va nous permettre, comme législateurs, quand on se verra sur une base annuelle, de pouvoir travailler ensemble à comment vous avez réussi à atteindre, peut-être même à dépasser, certains objectifs que vous vous étiez donnés?

M. Busque (Gaétan): Là-dessus, M. Vallières, je pense qu'on doit dire que la démarche que la Régie a entreprise, c'est bien sûr, c'est une première étape. On n'a pas déposé puis on n'a pas complété, je dois dire, l'ensemble les documents qui vont nous supporter dans la réalisation de nos grandes orientations. On veut y arriver. J'ai dit tout à l'heure qu'on avait des grandes ambitions, et on va sûrement cheminer à l'intérieur de nos ambitions.

C'est un mouvement qui se fait globalement au niveau de l'ensemble de l'administration publique, et la Régie chemine, comme beaucoup d'organismes. Je pense qu'il a été souligné que le ministère de l'Agriculture avait cheminé peut-être de façon très intéressante avant d'autres en produisant les rapports annuels sur la base des objectifs. C'est sûr que, dans notre projet, on vise pour l'an prochain à pouvoir avoir le rapport annuel de la Régie basé sur des indicateurs plus précis, et ça va nous supporter aussi. Je pense qu'il y a beaucoup de travail à faire au niveau du suivi des plans conjoints et du suivi de l'ensemble des activités de la Régie si on veut arriver à avoir de l'amélioration de façon progressive.


Rôle et fonctions de la Régie

M. Vallières: Peut-être une question très rapide, M. le Président, parce que mes autres collègues ont des questions aussi à adresser. Je remarquais, dans les réponses que vous avez faites au Vérificateur général, que, quand le Vérificateur vous parlait de la Régie comme étant un tribunal administratif, à plusieurs reprises dans vos réponses, vous lui indiquiez que vous n'êtes pas un tribunal administratif, en tout cas dans l'esprit de... Moi, quand je parle à des députés, quand on se parle entre nous, quand on parle à des gens un petit peu partout, les gens considèrent que vous êtes un tribunal administratif. Êtes-vous en mesure ce matin de nous indiquer peut-être avec un peu plus de détails comment il se fait que vous ne vous considérez pas comme un tribunal administratif?

Et tantôt vous référiez à Me Patrice Garant qui vous a aidés dans la réalisation de certains travaux – j'avais l'occasion de le relire ce matin avant de quitter mon bureau – puis, lui, il vous intègre à l'intérieur de la mission des tribunaux administratifs, puis il vous donne même en exemple en indiquant, en faisant part de votre mission – puis pour lui c'est bien clair – que vous êtes un tribunal administratif. Alors, comment vous expliquez que... En tout cas, dans la perception et dans la coutume, on a toujours cru que la Régie des marchés agricoles était un tribunal administratif. En quoi maintenant elle ne le serait plus?

M. Busque (Gaétan): O.K. Je pense que, ce matin, dans les premières diapositives, on a utilisé la même référence que vous avez, un organisme de régulation économique à deux volets, deux fonctions. C'est sûr que, pour la fonction dite tribunal, il y a des critères particuliers qui s'appliquent, mais, là-dessus, au niveau légal ou sémantique, pour les années passées, j'aimerais laisser ça à Me Régnier.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ça fait plus que six mois qu'il est là, lui. Me Régnier.

M. Régnier (Claude): Merci beaucoup. Oui, je suis en train de devenir un secrétaire perpétuel, comme on dit à l'Académie française. Effectivement, M. le professeur Garant nous rentrait dans la catégorie des tribunaux administratifs, après quelques hésitations, faut dire. Il y a une autre plaquette que je n'ai pas malheureusement avec moi, une étude que Me Garant avait réalisée au Laboratoire d'administration publique de l'Université Laval, à l'époque, où il nous qualifiait effectivement plutôt d'un organisme de régulation économique mais dont le mode de fonctionnement se rapproche des tribunaux administratifs, en soulignant la grande simplicité de fonctionnement, cependant.

Les remarques au Vérificateur général, où la Régie se défendait bien d'être un tribunal administratif, tenaient compte de la réforme des tribunaux administratifs enclenchée voilà presque deux ans, où on réserve le terme «tribunal administratif» aux organismes adjudicateurs de droits entre l'État et les citoyens. Or, la Régie n'intervient pas dans ce secteur-là. La Régie, vous avez vu sa mission à l'article 5 et vous pouvez constater aussi ses pouvoirs un peu partout dans le texte de la loi. La Régie encadre la mise en marché de produits agricoles, la Régie surveille le fonctionnement d'organismes qui appliquent les plans conjoints mais intervient pour trancher des litiges, trancher des griefs, approuver des choses. C'est dans ce sens-là que la Régie est un organisme de régulation économique. Elle n'a pas de pouvoir de trancher, elle n'a plus de pouvoir de trancher quoi que ce soit entre l'État et les citoyens. Elle l'avait un petit peu en vertu de la Loi sur le ministère de l'Agriculture, la réforme des tribunaux administratifs lui a enlevé, si je peux me permettre l'expression, ce pouvoir pour le transférer à la section des affaires économiques du TAQ.

Ce qu'il lui reste à trancher entre des organismes neutres et indépendants – ce sont des organismes totalement indépendants – ce sont des litiges pour des conventions de mise en marché, ce sont des griefs quant à l'application de règlements ou de conventions de mise en marché, ce sont aussi des griefs relativement à l'application des statuts de producteur agricole en vertu de la Loi sur les producteurs agricoles. Même les permis de fabrique qu'elle délivrait après audience et qu'elle pouvait révoquer après audience, maintenant c'est transféré à l'administration des permis au ministre de l'Agriculture, son rôle se limitant à faire des recommandations quant à la délivrance de permis d'exploitation d'usines laitières. C'est tout. Alors, dans ce sens-là la Régie est encadrée par une loi hyperspécialisée dans un secteur économique. C'est dans ce sens-là que l'organisme est à l'origine d'un organisme de régulation économique et non pas un tribunal administratif au sens où on l'entend aujourd'hui, après la réforme des tribunaux administratifs, d'où les longues remarques auprès du Vérificateur général.

Je sais que circule dans le milieu depuis très longtemps un vocabulaire différent qu'il va falloir adapter, comme on a adapté notre vocabulaire. On ne parle plus d'audience mais on parle de séance publique, par exemple. On ne parle plus de requérant auprès de la Régie, mais on parle de demandeur, ainsi de suite. Il y a eu un fonctionnement à adapter suite à cette réforme. Il va y avoir un vocabulaire. Peut-être que nos enfants parleront d'organisme de régulation économique, si nous sommes encore là.

M. Vallières: Ha, ha, ha! Oui. Alors, c'est sûr qu'il y a une certaine culture, là, qui doit être modifiée.


Non-ingérence du pouvoir exécutif dans les décisions

Par ailleurs, on sait jusqu'à quel point la coutume veut qu'au Québec, à partir du moment où on s'adresse à un tribunal administratif, le niveau politique demeure très prudent par rapport aux décisions qui ont à intervenir à l'intérieur de ces organismes. Est-ce que, dans votre perception, le changement de langage et le changement de culture vont nous amener à devoir modifier aussi cette approche qui est demandée, à une très grande prudence du politique, voire à donner l'obligation de ne pas s'adresser à vous autres, à des tribunaux administratifs, dans le but d'obtenir des décisions dans un sens ou dans un autre? Est-ce que, selon vous, ça risque, ce nouveau vocabulaire, d'avoir des incidences à ce niveau?

(12 h 20)

M. Régnier (Claude): Je ne pense pas parce que la Régie aurait pu être citée en modèle, citée en exemple. C'est Me Garant, le professeur Garant, qui nous disait en boutade: La réforme des tribunaux administratifs aurait pu vous prendre en exemple quant à la simplicité du fonctionnement de la Régie. Si les gens qui veulent obtenir une décision dans un sens ou dans l'autre sont parties intéressées à cette décision-là, ils peuvent le faire dans le cadre des séances publiques que la Régie tient.

Vous faites référence – j'ai peut-être mal compris – à l'influence gouvernementale. Je n'en jamais senti en 27 ans de Régie. Je n'ai jamais senti d'influence gouvernementale, de quelque sorte que ce soit, pour obtenir une décision dans un sens ou dans l'autre. J'ai senti, après que les décisions eurent été rendues, des besoins d'explications, des besoins factuels sur les circonstances qui ont amené soit un litige soit la résolution d'un litige, mais jamais de questions avant qu'une décision soit rendue. Et pourtant la plupart des demandes sinon 99,99 % des demandes d'information passent par moi ou par mon service. Jamais il n'y a eu de demande de décision dans un sens ou dans l'autre de l'appareil politique, de quelque niveau que ce soit.

M. Vallières: L'objet de ma question, c'est de m'assurer que cette coutume qu'on a de ne pas avoir d'ingérence politique à l'intérieur des prises de décision de la Régie est maintenue malgré le changement de vocabulaire et avec l'arrivée du TAQ également. Et vous me dites qu'il n'y en a pas eu, vous n'avez pas senti ça. Tant mieux, tant mieux. Évidemment, à mon sens, mon interprétation, c'est que ce n'est pas parce qu'on change le vocabulaire et puis qu'il y a une façon différente de procéder que ça devrait permettre maintenant au niveau politique d'intervenir dans vos prises de décision quand vous jouez le rôle d'arbitre entre des parties.

M. Régnier (Claude): Vous avez raison quant au changement de vocabulaire, ce n'est pas garant du changement des mentalités, ça. C'est exact. Mais il n'y aura pas d'intervention si les gens se donnent le mot pour ne pas intervenir. Les interventions de l'extérieur ne nous appartiennent pas, elles appartiennent à l'extérieur.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Par contre, demander des explications sur une décision vous êtes d'accord que c'est tout à fait correct?

M. Régnier (Claude): Ah oui, absolument. Oui, c'est même souhaitable.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ça va? M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Dion: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord m'associer au député de Lotbinière pour vous féliciter pour la documentation qui nous a été fournie, qui est très intéressante et qui nous fournit beaucoup de choses, beaucoup d'objets de réflexion. Peut-être que, si on avait pu l'avoir un peu plus tôt, on aurait pu la fouiller davantage, mais enfin probablement que, la prochaine fois, ce sera le cas.


Processus d'arbitrage des litiges (suite)

Je reviendrai d'abord sur la question qui a été soulevée cet avant-midi dans le domaine de l'industrie forestière où la transparence de la Régie a été mise en cause et, par effet de conséquence, la partialité, ou l'impartialité, de la Régie. Évidemment, j'étais très intéressé à toutes les questions qui ont été posées par le député de Richmond, il m'a enlevé les mots de la bouche à plusieurs reprises, ce qui fait que vous avez répondu à un tas de choses.

Moi, ce que je retiens de cela, c'est qu'il y a au moins trois règles ou trois gestes précis qui sont commencés pour assurer une plus grande transparence et donc une plus grande apparence d'impartialité. Premièrement, la publication des procédures et des règles de régie interne, et donc les rendre plus facilement abordables, accessibles pour tout le monde. Deuxièmement, l'enregistrement systématique de tous les débats. Vous n'en avez pas parlé, mais, si ce n'est pas déjà fait, je pense que c'est un point très important. Même si ce n'est pas tous les jours qu'on demande la transcription du verbatim des débats, il reste que c'est un élément qui peut souvent être très important pour démontrer qu'on a tenu compte de l'ensemble des choses qui se sont dites. Donc, je pense que c'est un élément qui serait important pour assurer la transparence du fonctionnement de la Régie que d'assurer l'enregistrement de tous les débats.

Troisièmement, vous avez parlé que vous aviez commencé un travail systématique d'amélioration des décisions. Ça me semble aussi un élément très important parce que, même si la loi rend obligatoire la motivation des décisions, on sait très bien que la tentation pourrait être parfois, quand on a trop de travail, d'y aller un peu rapidement, puis que ça ait l'air de lieux communs, et que les gens ne s'y retrouvent pas. Donc, le fait d'améliorer la motivation de la décision, c'est un élément très important, je pense, pour assurer une perception adéquate de l'impartialité de la Régie.

Dans ce sens-là, pour ma part, moi, je me sentirais assez satisfait de ces trois gestes si on pouvait y ajouter celui-ci, que vous n'avez pas dit mais que j'ai cru comprendre, c'est que, pour ce qui est de la publication des procédures et des règles de régie interne, de même que de l'autre aspect, l'amélioration des motivations, ce soit dans votre plan annuel. Évidemment, on ne connaît pas votre plan annuel parce qu'on connaît votre plan quinquennal, mais vous êtes en train de planifier tout cela et, même si vous fonctionnez au rythme de l'ensemble de l'appareil d'État, s'il y a un problème grave à un endroit, peut-être que, si c'était dans votre planification annuelle, moi, je me sentirais rassuré. Alors, je vous remercie.


Modifications à la Loi sur la mise en marché des produits agricoles, alimentaires et de la pêche

Il me reste peut-être deux petites questions, mais, comme le temps passe, je pense que je vais en poser juste une. La première: Est-ce que vous croyez qu'il y a des modifications importantes – importantes ou moins importantes – à apporter à la loi pour assurer cette apparence d'impartialité et cette transparence? Pourquoi je pose la question? Parce que vous avez dit, tout à l'heure: Vous savez, nous autres, on fonctionne avec la loi que vous nous avez donnée. Vous n'avez pas dit ça comme ça, mais ça revenait à la même chose. Vous fonctionnez évidemment avec les dispositions de la loi. Alors, est-ce qu'il y aurait des modifications importantes à apporter à la loi pour assurer ce travail et cette transparence?

M. Busque (Gaétan): Merci, M. Dion. J'aimerais peut-être ajouter un point sur la question de l'enregistrement systématique des séances publiques de la Régie. J'aimerais souligner qu'aussi, à l'occasion, ce qui se produit, c'est qu'une des parties intéressées fait appel à un sténographe. Donc, à l'occasion, on n'a pas d'enregistrement mais il y a présence d'un sténographe commandé par une partie, et, généralement, la partie qui commande rend disponible, peut-être moyennant rémunération, tarification, comme tous les services maintenant... Mais il n'y a pas totalement absence d'information accessible.

L'autre point que j'aimerais apporter, c'est que, quand j'ai souligné les modifications, que la Régie se devait de fonctionner dans le cadre de sa loi habilitante, ça n'avait absolument pas du tout pour intention de signifier qu'on décelait par là qu'il y avait des tares à la loi actuelle. La loi est claire, il y a des mécanismes, ils sont connus de tout le monde, il y a des mandats qui sont confiés à la Régie et qui sont clairs. Je pense que, même lors de la modification de la loi avec le projet de loi n° 41, il y a des précisions qui ont été apportées sur le rôle de la Régie.

J'aimerais ici signaler l'article 26.1 de la loi dans lequel... Bien, on va commencer avec 26. L'article 26 disait: «La Régie peut résoudre les différends qui surviennent dans le cadre de l'application d'un plan conjoint ou du fonctionnement d'une chambre de coordination et de développement.» Donc, la Régie peut régler. Et ensuite on a rajouté: «La Régie peut, si les signataires d'une convention homologuée ou les personnes visées par une sentence arbitrale y consentent, désigner une personne pour entendre et disposer d'un grief né de l'application de cette convention.» Donc, je pense qu'il y a une notion qui ressort, qui pourrait guider la Régie. Il y a une question d'entente, là, de consensus.

La mission de la Régie, ce n'est pas de remplacer les participants à une entente; je pense que le devoir premier – puis ça, c'est prévu dans la loi – c'est aux parties de négocier. La loi a donné des pouvoirs aux plans conjoints de pouvoir se regrouper puis d'arriver à négocier des conditions, a donné aussi une obligation aux acheteurs de négocier avec le plan conjoint qui couvre le produit visé, mais tout ça, dans tout le processus, dans la loi, la Régie intervient en dernier, et la Régie est là à la toute fin. Ce n'est pas notre fonction première de régler le différend, c'est aux parties de régler leurs différends. Si elles n'y arrivent pas, à ce moment-là...

Bien, on a l'exemple du porc que je pourrais mentionner. Il y a même eu entente entre les parties pour aller chercher un médiateur spécial, spécialisé, avec compétence, puis je pense qu'à la toute fin du rapport on dit: Bien, il restera à la Régie de prendre la décision, puis on nous a demandé d'arbitrer.

(12 h 30)

Et il y a autre chose que je voulais rajouter là-dessus. Il me semble que j'avais... Enfin, j'espère que je réponds à... Ah, O.K. En termes de modifications à la loi, moi, depuis que je suis arrivé, j'observe beaucoup, puis on le lit à l'occasion, on dit: Bien, la Régie est près des producteurs, puis, en même temps qu'on nous dit ça, on nous l'adresse comme un reproche puis on nous le donne comme une obligation. Le Vérificateur général dit: Vous devez suivre les plans conjoints. On a plusieurs décisions où on a dit: Bien, c'est un devoir que vous avez de participer à des assemblées générales, c'est une façon de faire des suivis de plans conjoints. Donc, on nous reproche à l'occasion d'être près des producteurs. Mais, si j'avais à souligner quelque chose qui m'apparaît peut-être un petit peu plus faible au niveau de la loi, c'est qu'on a une loi avec beaucoup d'articles, je ne sais pas, 200, 225 articles. On en a peut-être 95 %, si ce n'est pas 97 %, qui touchent les producteurs, et les organismes accrédités n'ont pas l'équivalent de devoirs qu'on peut demander aux producteurs.

Pourquoi on ne penserait pas, dans un avenir, à spécifier que, pour quelqu'un qui est accrédité en vertu de 110 ou en vertu de 111, il devrait y avoir des devoirs et il devrait peut-être y avoir une obligation de déposer le résultat à l'Assemblée et de voir à avoir un suivi? À ce moment-là, peut-être que la Régie, dans le futur, pourrait s'occuper des deux parties, puis ça donnerait peut-être une apparence qu'on porte intérêt davantage aux deux parties.

M. Dion: Je vous remercie, c'est une suggestion qui me semble très intéressante. Mais je suis moins satisfait que je l'étais tout à l'heure de la première partie de votre réponse concernant la question de l'enregistrement.

M. Busque (Gaétan): O.K. Oui.

M. Dion: Parce que, moi, ça me semblait quelque chose de simple, de pas compliqué et de facile à appliquer. Ce qui joue beaucoup dans l'effet que ça peut donner concernant la transparence, c'est le fait que l'enregistrement soit là, systématique et toujours. C'est le phénomène lui-même de l'enregistrement. Et j'ai cru comprendre que vous disiez: Bon, bien, en fait, c'est vrai, il y a parfois des choses, des sténographes, et tout ça. Sans doute, mais vous savez bien que ce n'est pas la même chose, que parfois il y a des enregistrements, d'autres fois il n'y en a pas. C'est là que le problème d'apparence devient un peu plus...

M. Busque (Gaétan): O.K. Là-dessus, M. Dion, je vais essayer de vous satisfaire. J'ai aussi une préoccupation qu'on se souvienne des vraies choses. Question d'enregistrement, oui, je suis disposé à mettre ça en application au niveau des séances publiques de la Régie.

M. Dion: Je vous remercie.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie. M. le député de Beauharnois-Huntingdon.


Plan conjoint des producteurs d'oignons jaunes

M. Chenail: Merci, M. le Président. Je voudrais que vous nous parliez du plan conjoint des oignons jaunes qu'on voit à la page 32 et puis des montants d'argent qui sont dans les statistiques générales, plans conjoints, par rapport au même plan conjoint. Ces argents-là qui sont là servent à quoi, viennent de qui et vont à qui?

M. Régnier (Claude): Je m'excuse, mais vous faites référence à quel document?

Une voix: C'est l'annexe sur les statistiques, M. Chenail?

M. Chenail: C'est ça.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Le numéro de la page?

M. Chenail: Page 32 de votre rapport.

Une voix: Du rapport annuel.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Page 32 du rapport annuel, le rapport bleu.

M. Chenail: Là, on s'en va vraiment sur le terrain.

M. Blanchette (Jean-Claude): O.K. On va regarder ça, ce ne sera pas long.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. Blanchette.

M. Blanchette (Jean-Claude): Oui. Relativement à ce plan conjoint là, suite à une assemblée générale, des producteurs couverts par le plan se sont adressés à la Régie pour demander de suspendre l'application du plan parce qu'ils ne croyaient plus nécessaire d'utiliser les pouvoirs qu'il y avait dans le plan. Alors, si je me souviens bien, la décision de la Régie, ça a été d'accepter de suspendre, de demander à l'Office, dans ce cas-là, de continuer de nous faire rapport annuellement sur les sommes qui restaient disponibles et de garder ces sommes-là en fiducie ou en fidéicommis tant que le plan serait suspendu.

M. Chenail: Mais, en fait, ces sommes d'argent là, c'est des sommes d'argent qui appartiennent aux producteurs.

M. Blanchette (Jean-Claude): Qui ont été versées par les producteurs et qui pourraient éventuellement retourner aux producteurs.

M. Chenail: O.K. Mais, quand on regarde dans votre article, vous dites que, bon, les producteurs, en fait, se sont occupés de leur mise en marché. En fait, ils se débrouillent avec leurs problèmes, ça va bien.


Plan conjoint des producteurs de pommes de terre

Ma deuxième question, ce serait sur le Plan conjoint de la production des pommes de terre. Quand on regarde ce qui est écrit puis quand on regarde les montants, qu'on va à la même page pour les montants, j'aimerais ça que vous m'expliquiez des montants qui sont là. On parle de 420 producteurs, on parle des recettes. J'aimerais que vous m'expliquiez ces chiffres-là. De quelle façon ça fonctionne par rapport à ces chiffres-là? Puis qu'est-ce qu'on fait avec ces argents-là?

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. Blanchette.

M. Blanchette (Jean-Claude): Ce qu'il faut comprendre, M. le Président, c'est que les statistiques qui sont là, en particulier concernant le producteur de pommes de terre, ce sont des statistiques sur le nombre de producteurs et sur la valeur à la ferme de la production. Là, le plan conjoint n'encaisse pas tous ces revenus-là. Alors, c'est la valeur à la ferme de production de pommes de terre qui est évaluée à 68 000 000 $ par année.

M. Chenail: Mais, quand on parle des contribution à l'UPA de 120 112 $, c'est quoi, ça?

M. Blanchette (Jean-Claude): Ça, c'est la contribution du Plan conjoint des producteurs de pommes de terre à l'UPA en vertu de la Loi sur les producteurs agricoles.

M. Chenail: O.K. Et la contribution à l'administration du plan, 736 000 $?

M. Blanchette (Jean-Claude): C'est ce que généralement ça coûte pour tenir les réunions, faire les négociations et administrer le plan.

M. Chenail: J'aimerais que vous m'expliquiez, pour un producteur agricole qui produit mais qui vend à l'extérieur, mettons aux États-Unis, toute sa production, en quoi le plan conjoint peut être bon pour ce producteur-là qui est obligé de payer quand même. Puis est-ce qu'il est obligé de payer quand même?

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Me Régnier.

M. Régnier (Claude): La plupart des plans conjoints dont les producteurs vendent des produits à l'extérieur négocient des conventions de mise en marché avec les acheteurs même s'ils sont à l'extérieur; je pense aux bovins, je pense au bois, je pense au lait. Il y a des conventions de mise en marché qui sont conclues avec ces acheteurs-là. Le cadre des conventions s'applique. Le cadre du plan, ça vise la production et la mise en marché d'un produit ici, peu importe où est située la...

M. Chenail: Là, je pense que vous ne comprenez pas la question. Quand le producteur produit, fait sa mise en marché, fait son emballage et vend à l'extérieur du pays, sa production totale...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Tous ses produits?

M. Chenail: En quoi le plan conjoint peut servir à ces gens-là? Et puis est-ce que ces gens-là sont obligés de participer à un plan conjoint qui ne leur rapporte rien? Parce qu'on revient souvent sur le fameux Sommet qu'on a eu, qu'on parle de doubler les exportations, que, de plus en plus, les marchés, on va vers l'extérieur, et puis je ne vois pas l'utilité de faire payer un plan conjoint à quelqu'un qui ne lui sert pas. C'est un peu ça, ma question. C'est là-dessus, je pense, que...

M. Régnier (Claude): Et votre question est très pointue sur une production en particulier, la pomme de terre. C'est ça?

M. Chenail: Bien, on parle de la pomme de terre, oui.

M. Régnier (Claude): O.K. Le Plan conjoint des producteurs de pommes de terre s'applique à tous les producteurs, quel que soit le lieu où ils mettent en marché leurs produits. Je suis obligé de vous répondre, comme avocat, une réponse bête et méchante, vous allez peut-être trouver: Le plan conjoint s'applique à tout le monde, que le produit soit mis en marché au Québec ou à l'extérieur. Le producteur, dans le cas de la pomme de terre, peut faire sa mise en marché lui-même, il n'y a pas d'agence de vente de la pomme de terre. Alors, quel que soit le lieu de la mise en marché, quel que soit l'emballeur avec qui il fait affaire, le plan conjoint s'applique à ce producteur-là. Je m'excuse, il n'y a pas d'exception au plan.

M. Chenail: Mais est-ce que vous trouvez ça normal? Si on allait dans les producteurs de lait, où c'est complètement différent, où vous avez des quotas, puis tout ça, je pourrais comprendre la situation. Mais est-ce que vous trouvez ça normal, vous, de la Régie, que des gens qui travaillent à développer des marchés à l'extérieur, qui font leur mise en marché, qui font toute leur production, leur emballage, soient obligés de payer un plan conjoint?

M. Régnier (Claude): La Régie n'a pas à décider si une situation est normale ou pas, la Régie a à décider: Est-ce que le plan conjoint et le texte de la loi s'appliquent ou pas à cette situation-là? Je suis obligé de constater qu'il n'y a pas d'exception au Plan conjoint des producteurs de pommes de terre pour les gens qui mettent en marché eux-mêmes leur propre production à l'extérieur du Québec. Il n'y a pas d'exception non plus dans la loi pour cette situation-là. Le Plan conjoint des producteurs de pommes de terre et la Loi sur la mise en marché s'appliquent à tout le monde qui met en marché le produit visé par un plan conjoint, quel que soit le lieu de sa production.

Une voix: De la destination.

M. Régnier (Claude): La destination finale du produit, effectivement.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Il reste 45 secondes pour votre 45 minutes.

M. Chenail: À ce moment-là, si je comprends bien, c'est que les gens qui travaillent pour développer des marchés à l'extérieur sont pénalisés.

M. Régnier (Claude): Pas nécessairement. Les marchés à l'extérieur sont développés en concurrence par rapport au marché intérieur. Il y a un développement de marché intérieur, il y a un développement de marché extérieur. La décision de faire affaire sur un marché extérieur se prend par rapport à la qualité ou à la non-qualité du marché intérieur, par rapport au produit, par rapport à un tas de facteurs qui entrent en ligne de compte.

M. Chenail: Mais vous savez très bien que, si on comparait ça aux producteurs laitiers avec les quotas de lait puis s'ils allaient sur un libre marché pas de quota de lait, ce ne serait pas le même coût de production. Donc, ça se ressemble un peu, là.

M. Régnier (Claude): Je n'entrerai pas dans les coûts de production des producteurs de lait, ce n'est pas tout à fait ma branche. Il y a des gens derrière moi qui sont plus compétents pour le faire.

(12 h 40)

M. Chenail: O.K. Je vous remercie.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. Busque, une courte réponse.

M. Busque (Gaétan): Oui. Je voudrais juste compléter la réponse. Si on examine, par exemple, le secteur du porc où on exporte tout près de 50 %, puis ça, à l'intérieur d'une mise en marché collective et de l'application d'un plan conjoint, je pense que c'est un autre exemple qui pourrait venir contrebalancer des exemples spécifiques. Il faut regarder chacune des situations, puis je pense qu'il ne faut pas attribuer non plus des effets à l'un ou l'autre des éléments d'une façon trop catégorique, là.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie. Ça termine la partie de temps allouée à l'opposition. Maintenant, M. le député de Roberval.


Pouvoirs d'application des décisions rendues

M. Laprise: Suite à une décision rendue par la Régie, est-ce que vous avez certains pouvoirs d'application de la décision que vous rendez ou si ça fait partie, à ce moment-là, des tribunaux qui peuvent imposer à une partie ou à l'autre l'application d'une décision?

M. Busque (Gaétan): ...le plan légal.

M. Régnier (Claude): Oui. En fait, c'est la décision de la Régie mais qui est demandée par des gens. Concernant l'application de la décision, il y a deux ou trois recours qui sont prévus déjà à la Loi sur la mise en marché et qui relèvent en général des gens qui bénéficient au sens très large de la décision. Je vous réfère, entre autres, à l'article 43 de la Loi sur la mise en marché qui permet à la Régie d'ordonner à quelqu'un de faire ou de ne pas faire quelque chose qui nuirait à l'application d'une convention, ou d'une décision, ou d'un texte, ou d'un plan conjoint, ou d'un règlement. Il y a la possibilité, pour la personne qui veut voir une décision de la Régie appliquée, de recourir aussi à la procédure d'injonction des tribunaux de droit commun, il y a les recours de nature pénale aussi qui sont toujours possibles en vertu de la Loi sur la mise en marché. Donc, selon les circonstances et selon les besoins, la personne qui veut voir l'application d'une décision peut recourir à l'un ou l'autre de ces moyens-là.

M. Laprise: Merci beaucoup.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ça va? Alors, au nom de tous les membres de la commission, merci beaucoup, et j'ajourne les travaux sine die.

(Fin de la séance à 12 h 42)


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