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Version finale

35th Legislature, 2nd Session
(March 25, 1996 au October 21, 1998)

Wednesday, April 16, 1997 - Vol. 35 N° 21

Consultations particulières sur la Proposition de principes généraux relatifs à la gestion des odeurs, du bruit et des poussières en milieu agricole


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Table des matières

Documents déposés

Auditions

Remarques finales


Autres intervenants
M. Jean Rochon
M. Daniel Johnson
M. Léandre Dion
*M. Luc Ménard, AQINAC
*M. André J. Pilon, idem
*M. Marc Landry, idem
*M. Christian Breton, idem
*M. Laurent Pellerin, UPA
*M. Marcel Chagnon, idem
*Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats


(Neuf heures vingt-trois minutes)

Le Président (M. Vallières): La commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation reprend ses travaux. Le mandat de notre commission est de poursuivre les consultations particulières et audiences publiques sur la proposition des principes généraux relatifs à la gestion des odeurs, du bruit et des poussières en milieu agricole dans le cadre de la loi n° 23.


Documents déposés

Vous me permettrez, avant que ne débutent nos travaux, de vous déposer deux documents, l'un qui nous a été expédié et qui sera distribué aux membres de la commission, par Agridès-Perkins, et qui porte sur le traitement des résidus de papetières et du lisier de porc, document d'avril 1997 qui a été distribué hier, document, donc, déposé. Je dépose également une lettre qui m'a été expédiée par le Protecteur du citoyen, M. Daniel Jacoby, et qui va être distribuée aux membres de la commission, M. Jacoby faisant état de son regret de ne pas avoir été entendu en commission parlementaire. La lettre qu'il me joint est accompagnée d'une lettre au ministre de l'Environnement et de la Faune, du 8 avril 1997, portant sur le même sujet.

Nous disposons à partir de maintenant d'une heure avec l'organisme qui va se présenter devant nous. Mais, juste avant, on m'indique qu'il y aurait modification à la composition des membres de la commission.

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Poulin (Beauce-Nord) est remplacé par M. Sirros (Laurier-Dorion).

Le Président (M. Vallières): Très bien. Alors, ce matin, dans l'ordre, l'Association québécoise des industries de nutrition animale et céréalière et l'Union des producteurs agricoles, et nous allons terminer par quelques remarques finales par les membres, les représentants des groupes parlementaires autour de la table.

Alors, M. Luc Ménard, la parole est à vous pour environ une vingtaine de minutes.


Auditions


Association québécoise des industries de nutrition animale et céréalière (AQINAC)

M. Ménard (Luc): Moi, je vais vous présenter nos membres: Mme Couture, de Alfred Couture ltée, Marc Landry, de Agri-marché. C'est M. André Pilon, notre directeur général de l'AQINAC, qui va faire la lecture de notre mémoire. Puis, à droite, j'ai Christian Breton, des Aliments Breton. Je laisse la parole à André.

M. Pilon (André J.): Alors, avant tout, nous voulons vous exprimer notre appréciation d'être entendus à cette commission parlementaire dont la résultante devrait – du moins nous l'espérons – se traduire en prospérité accrue pour le Québec tout entier. De fait, dans son discours sur le budget, le vice-premier ministre Bernard Landry disait: «L'industrie agroalimentaire contribue pour près de 10 % à la production intérieure au Québec et procure de l'emploi à plus de 370 000 personnes. Mais la cohabitation des agriculteurs avec les autres citoyens des milieux agricoles est parfois problématique. Il n'est pas convenable que le Québec ne soit pas en harmonie avec la puissante agriculture qui contribue tant à sa prospérité et qui lui permet d'occuper de façon équilibrée et humaine son vaste domaine rural. Les femmes et les hommes du monde agricole méritent notre respect et notre appui.

«On sait que les producteurs agricoles investissent déjà dans la protection de l'environnement et la réduction des nuisances. Il faut les aider à aller plus loin en leur facilitant l'accès à de nouvelles méthodes, par exemple celle développée par Centre de recherche industrielle du Québec.

«Pour s'y conformer, les agriculteurs devront réaliser des investissements de plus de 500 000 000 $ sur cinq ans. L'aide gouvernementale devrait permettre que près de 200 000 000 $ soient investis au cours de deux prochaines années».

Le vice-premier ministre reconnaît donc que son gouvernement doit soutenir l'effort d'adaptation que nous imposent les contraintes environnementales et les exigences des nouveaux marchés, et nous assumons que tous les autres ministres et députés du parti au pouvoir endossent ses vues.

Il est à noter que déjà depuis quelques années, et plus spécifiquement présentement, nos membres ont et vont continuer à investir pour maintenir la conformité et même aller au-delà des normes environnementales. Il va sans dire également que nous supportons entièrement les plans de fertilisation intégrée supervisés par des professionnels, comme les agronomes, les techniciens agricoles ou toute autre personne ayant reçu la formation requise, de façon à obtenir toutes les compétences nécessaires.

Pour éviter la redondance, nous élaborerons davantage sur des aspects autres que ceux qui ont déjà été présentés par la Fédération des producteurs de porcs du Québec, et de celui de l'Union des producteurs agricoles, qui sera déposé immédiatement après le nôtre. Nous en resterons donc à commenter sur le potentiel et les aspects économiques et d'emploi d'une réglementation logique et vivable sur le droit de produire.

Nous voulons également démontrer qu'on peut sinon renverser, du moins atténuer les prévisions économiques, à savoir que le Québec connaîtra une croissance économique plus faible que le reste du Canada en 1997 et 1998. Ces prévisions sont basées principalement sur les mises à pied massives annoncées par le gouvernement et sur le fait qu'on prévoit également que les investissements privés devraient être plus faibles au Québec. On a joint une annexe à cet effet: Les perspectives économiques de la Banque Royale.

L'AQINAC regroupe plus de 200 entreprises. Également, en annexe, nous avons inclus la liste de nos membres. Une très récente enquête interne révèle qu'elles génèrent, en agroalimentaire au Québec, près de 20 000 emplois. On réfère ici à nos membres.

Nos membres actifs, les fabricants et associés, fournisseurs d'intrants et/ou de toute la gamme des services, sont donc au service des producteurs agricoles. Bien plus, un certain pourcentage des membres actifs sont également impliqués eux-mêmes dans les productions animales, principalement le porc et la volaille, dans le cadre de partenariats avec des naisseurs et des finisseurs situés dans toutes les régions du Québec.

Nous croyons à propos de mentionner que nos membres du secteur privé fabriquent environ les deux tiers de toutes les moulées fabriquées au Québec. Le total pour toute l'industrie excède les 3 500 000 de tonnes, dont la valeur se chiffre à plus de 1 000 000 000 $. Il va sans dire que les fabricants d'alimentation animale sont toujours à l'affût de nouvelles technologies, de nouveaux équipements et de nouveaux intrants. Il se fait constamment beaucoup de recherche et de développement en fabrication et en nutrition.

Notre regroupement a célébré en 1996 ses 35 années d'activités professionnelles. Nos membres ont grandement contribué, au fil des ans, autant sur le plan technique, génétique, financier et environnemental, au développement de toutes les productions animales, et principalement dans les industries avicoles et porcines.

Vous comprendrez donc notre intérêt dans le présent débat non seulement pour le maintien des emplois actuels, mais également pour la création de plusieurs milliers de nouveaux emplois. Le potentiel est à nos portes et il ne nous reste qu'à l'exploiter. À cet effet, nos commentaires porteront surtout sur l'industrie porcine, qui est et devrait demeurer le fer de lance des exportations agricoles.

Les données statistiques que nous vous présentons ont été préparées en collaboration avec d'autres organismes, comme la Fédération des producteurs de porcs, l'Association des banquiers canadiens, section Québec, le Conseil des viandes du Canada, section Québec, et Canada Porc International.

Alors, le premier tableau vous donne un portrait de l'industrie porcine québécoise en 1996, soit une production de 5 200 000, des activités économiques de 2 700 000 000 $, des exportations de 136 000 tonnes métriques, ce qui est l'équivalent de 2 000 000 de porcs, d'une valeur de 447 000 000 $, et 5 850 emplois directs et 25 800 emplois indirects. En fait, on peut affirmer sans crainte d'exagération que l'industrie porcine québécoise constitue, dans tous les sens du terme, un secteur économique de très grande envergure. Ceci mérite d'être illustré de trois façons. Premièrement, le nombre et la variété des intervenants qui gravitent autour de l'industrie sont étonnamment significatifs; deuxièmement, l'industrie porcine occupe le premier rang parmi les secteurs de l'industrie agroalimentaire du Québec sur le plan des exportations; et, troisièmement, l'industrie porcine se classe très avantageusement parmi les activités d'exportation les plus importantes du Québec, juste après le secteur de l'électricité.

Alors, à la figure 1, vous avez un portrait, en fait, de tout le secteur. Sans aller dans les détails, il y a, ce qui est en amont, les aliments, les médicaments, en aval, évidemment, l'abattage, les coupes, les découpes, ainsi de suite, et à l'intérieur, évidemment, tous les services s'y rattachant. Notons par exemple que, à elles seules, les institutions financières, qui détiennent présentement pour près de 742 000 000 $ de prêts en cours dans ce secteur, déclarent y affecter expressément et à plein temps 147 personnes.

Les exportations du Québec. Quelques secteurs au sein de l'agroalimentaire comparés en valeurs et par rang à quelques secteurs les plus internationalisés de l'économie, et les statistiques, c'est pour 1994-1995 et en millions de dollars. Alors, au premier rang, on a l'aluminium et les alliages, évidemment, avec, en 1995, 4 545 000 000 $; les pâtes de bois et pâtes: 1 369 000 000 $, qui sont en septième rang; l'électricité au 22e rang, avec 488 000 000 $. Et, finalement, porcs vivants et porcs produits, viande porcine, au 23e rang, pour 343 000 000 $, c'était pour l'année d'avant, c'est 437 000 000 $ maintenant. Alors, comme vous pouvez le constater, les produits laitiers ne sont même pas parmi les premiers 25.

(9 h 30)

Toutes dimensions confondues, l'industrie porcine représente près de 2 700 000 000 $ d'activités économiques de toutes natures. De plus, on estime qu'elle occupe bon an mal an plus de 32 000 personnes dans une large variété de tâches, et ça, de façon de plus en plus stable. Si la création d'emplois, c'est-à-dire l'objectif prioritaire déclaré par le gouvernement du Québec et le gouvernement du Canada, d'ici le tournant des années 2000, passe d'abord par la sauvegarde des emplois qui existent déjà, il faut donc croire que l'industrie porcine mérite sa part de considération, et ce, même par des partenaires moins traditionnels tels que les ministres de l'Emploi du développement économique régional ainsi que de l'Industrie et du Commerce.

Sur les marchés internationaux, le porc a toujours été le principal produit agroalimentaire exporté par le Québec tout au long de la période 1986-1995. En générant entre 20 % à 25 % des recettes québécoises de l'exportation perçues, bon an mal an, de tout le secteur agroalimentaire, le secteur porcin a été sans contredit le bateau amiral du commerce international agroalimentaire du Québec. Compte tenu de sa performance passée, il vaut vraiment la peine de se demander de façon réaliste quelles sont les perspectives d'expansion de l'industrie porcine pour répondre à des demandes croissantes des marchés internationaux.

Agriculture agroalimentaire Canada publie à chaque année une perspective à moyen terme, soit de cinq ans, des principaux secteurs agricoles ainsi qu'une projection à long terme, pour l'année 2005. Selon cette prévision, les exportations nettes de produits porcins, pour le Canada, passeraient de 274 000 tonnes en 1994, à 333 000 tonnes en l'an 2000, puis à 366 000 tonnes en l'an 2005. Vous avez ça au tableau 6 qui est plus bas. On a évidemment supposé, dans cette projection, que le Québec maintiendrait la même part du volume total des exportations canadiennes que celle qu'il détenait en 1995, parce qu'à partir de 1997, vous voyez, c'est des prévisions.

Les défis environnementaux. Toutes les zones de grande production porcine à travers le monde se trouvent confrontées à la perspective de devoir ajuster les conditions d'opération de leurs élevages porcins à un nouvel objectif collectif des sociétés occidentales, en l'occurrence celui de la protection de l'environnement. Ainsi, le Danemark, les États-Unis et les régions de la Bretagne, en France, de même que les Pays-Bas se trouvent face à cet état de fait, mais à des degrés divers. Notons que la situation au Québec apparaît nettement plus tolérable que dans certains pays ou régions concurrents tels que le Danemark et les Pays-Bas. En effet, aux Pays-Bas, le nombre de porcs par hectare est 13 fois plus élevé qu'au Québec. Alors, vous avez dans le tableau les normes, la production de porcs en milliers dans les différents pays. Vous avez les États-Unis, l'Iowa, la Caroline du Nord, puis, production de porcs par hectare. Alors, on peut noter que le Québec, à 1,51 %, sans être le plus bas dans le tableau, porcs par hectare de terre arable, et on peut constater que les Pays-Bas sont à 19,46 %.

Pour les zones qui sont des exportateurs nets de porcs, tels que le Québec, cela pose toutefois une série de défis qui sont beaucoup plus complexes que pour les zones qui se restreignent à approvisionner leur marché domestique. Le Québec se trouve donc confronté au défi de s'assurer que ces normes environnementales qui, pour le moment, ne font pas encore consensus, seront réalistes en ce qui concerne l'élevage porcin et qu'elles soient équitables pour les producteurs québécois face aux autres provinces et aux États-Unis. On a mis des points de réflexion ici: les provinces de l'Ontario, du Nouveau-Brunswick, et même certaines provinces de l'Ouest canadien, beaucoup plus souples en matière d'administration environnementale, courtisent assidûment les investisseurs québécois pour y développer l'industrie porcine. Il est à noter que certains ont déjà répondu à l'invitation en Ontario, au Nouveau-Brunswick et même au Vermont. Bien plus, dans l'Ouest canadien, on a même des incitatifs fiscaux pour les investisseurs en industrie porcine. Un autre constat de grande importance, c'est que, peu importe l'ampleur des projets nouveaux ou d'agrandissement de porcheries, les toutes dernières technologies sont appliquées et dépassent souvent les normes exigées par le ministère de l'Environnement.

Le cheptel québécois – bovins laitiers, de boucherie et les porcs – produit annuellement 35 000 000 m³ d'engrais naturels dont la valeur fertilisante est de l'ordre de 175 000 000 $, ce qui permet de réduire d'autant l'utilisation d'engrais chimiques; le Québec importe environ 430 000 000 de tonnes d'engrais chimiques à chaque année, pour une valeur de 150 000 000 $, soit l'équivalent en azote et en phosphore de plus de 10 000 porcheries de 1 000 porcs chacune, ce qui équivaut à deux fois la production annuelle de porcs produits au Québec actuellement. Seulement pour répondre à la demande de l'exportation, il nous faudrait augmenter la production de près de 1 000 000 de porcs au cours des prochaines années et créer ainsi plus de 6 000 nouveaux emplois. On réfère ici à un ensemble d'organismes et d'entreprises – y inclus évidemment les institutions financières et les détaillants en alimentation – le Centre de développement du porc; l'Association québécoise des industries de nutrition animale et céréalière; Canada Porc International; et, finalement, des fournisseurs de services et d'expertise de plusieurs types: ingénieurs, agronomes, médecins vétérinaires, technologistes agricoles, superviseurs d'élevage, comptables, nutritionnistes des animaux, conseillers légaux, communicateurs, relationnistes, chercheurs, généticiens, transporteurs, etc.

Tous ces gens et ces capitaux gravitent autour de l'éleveur lui-même, de ses fournisseurs d'intrants et des transformateurs du porc d'abattage. Pour ce faire, l'industrie possède déjà le financement nécessaire et ne demande aucune subvention pour les projets de nouvelles constructions et d'agrandissements. Cependant, il est primordial de maintenir et même d'améliorer le Programme d'aide à l'amélioration de gestion des fumiers en considération des besoins d'entreposage exigés d'une plus longue durée. Il faut également que l'industrie soit supportée par un programme d'assurance-stabilisation des coûts de production pour maintenir l'équité avec les autres pays producteurs et exportateurs. En tentant seulement de maintenir le statu quo, nous serions vite considérés comme un dépanneur pour les pays importateurs et nous affaiblirions à court et à moyen terme nos marchés d'exportation.

D'ici l'an 2020, il faudra doubler la production agricole; d'ici 2050, la terre devra produire autant de nourriture qu'elle en a produite pendant les dernières 12 000 années. Sans la volonté de faire plus et mieux, on se dirige vers la catastrophe. Comme il y a toujours plus de 800 000 000 de personnes souffrant de malnutrition, seule une augmentation de la production rapide et durable pourra assurer une sécurité alimentaire pour tous. N'oublions pas que la population augmente au rythme de 165 personnes à la minute, mais que la terre arable diminue. C'est le défi de trouver des techniques de production intensive. Aujourd'hui, chaque producteur nourrit environ 140 personnes, comparativement à 27 en 1950. En 1940, aux États-Unis, on a produit 252 000 000 de tonnes de grain sur 129 000 000 d'hectares, comparativement à 600 000 – pratiquement trois fois plus – de tonnes sur 119 000 000 d'hectares en 1990. Les engrais sont responsables de plus de 50 % de cette production. La personne la plus importante sur la terre, c'est le producteur agricole, et ceci, c'est des déclarations de Dennis T. Avery, qui est directeur du Center for Global Food Issues, Hudson Institute, Indianapolis, Indiana.

Conclusion. On demande donc au gouvernement du Québec de mettre en place dans les plus brefs délais l'application de principes logiques et viables sur le droit de produire. De fait, la réglementation actuelle, bien appliquée, répond très bien aux exigences environnementales. Nous réitérons à nouveau que nous supportons entièrement les plans de fertilisation intégrée supervisés par des personnes qualifiées. Présentement, c'est au Québec que les exigences environnementales sont les plus sévères en Amérique. De plus, en Angleterre, en Allemagne, au Japon, au Danemark, en Belgique et surtout dans les Pays-Bas, la production de porcs par hectare arable est de deux à 13 fois plus élevée qu'au Québec.

Dans le même ordre d'idées, les municipalités ne doivent pas être impliquées dans la gestion environnementale en ruralité, parce qu'elles n'ont ni les effectifs nécessaires, en regard de leur budget, et encore moins les compétences professionnelles pertinentes pour bien évaluer les situations, d'autant plus que l'agriculture n'est pas de leur ressort. À notre avis, c'est plutôt la responsabilité du gouvernement qui doit l'assumer entièrement en collaboration avec les producteurs agricoles, qui ont la capacité de le faire et le désir de s'autodiscipliner.

L'industrie a déjà démarré plusieurs projets de recherche visant à protéger l'environnement, et nous demandons également le support du gouvernement pour les faire avancer le plus rapidement possible et ainsi les concrétiser et pouvoir les commercialiser dans les plus brefs délais. Le Québec a les terres et l'eau et surtout les producteurs agricoles anxieux de relever le défi et de saisir les opportunités. Qu'on nous permette de produire dans le respect de l'environnement et nous continuerons d'investir au Québec. Dans le cheminement de la réglementation sur le droit de produire, il faudrait toujours se rappeler que «la personne la plus importante sur la terre, c'est le producteur agricole. Les femmes et les hommes du monde agricole méritent notre respect et notre appui», citation de Bernard Landry, vice-premier ministre. Merci.

(9 h 40)

Le Président (M. Vallières): Nous vous remercions. Je voudrais tout simplement vous indiquer que c'est intéressant de voir la présentation d'un mémoire qui met l'accent sur le potentiel de développement de l'industrie porcine au Québec.

Vous me permettrez de peut-être lancer les discussions en vous posant une question, parce que vous insistez beaucoup sur le potentiel de développement, mais en même temps, dans votre mémoire, vous nous dites en conclusion: «De fait, la réglementation actuelle, bien appliquée, répond très bien aux exigences environnementales.» Vous demandez également «l'application de principes logiques et viables sur le droit de produire». Est-ce que vous trouvez réaliste, dans le contexte actuel, que le statu quo réglementaire, celui qu'on connaît présentement, serait suffisant pour faire face à toute cette possibilité de développement du secteur porcin au Québec?

Ce que je veux vous dire, c'est que ça me semble un peu antagoniste, ce que vous nous proposez. Vous avez beaucoup de développement possible, mais en même temps, dans votre mémoire, vous dites bien: «Les exigences agroenvironnementales actuelles, si elles étaient appliquées, ça répondrait à cette possibilité qu'on a de développer le secteur en tenant compte de l'environnement». Est-ce – parce que vous-même, dans votre mémoire, vous dites que vous voulez des solutions viables et réalistes – que votre propre position sur le statu quo réglementaire vous paraît réaliste, dans le contexte actuel au Québec, que je n'ai pas besoin de vous décrire?

M. Pilon (André J.): N'étant pas moi-même producteur, je préférerais que les quatre personnes qui m'accompagnent, qui le sont, et intensément, peut-être répondent à cette question.

M. Ménard (Luc): Bien, en premier, on ne dit pas qu'on est pour le statu quo, on parle de plan de fertilisation géré par des agronomes ou toute personne qui a été vraiment rendue compétente à le faire. Ça, c'est un gros changement dans notre livre à nous. Un agronome, c'est un professionnel qui est capable de faire la différence entre c'est quoi polluer et c'est quoi fertiliser. Je pense que le fait qu'on importe 430 000 t de fertilisants chimiques à chaque année, ça nous laisse une possibilité. Si c'est bien géré par des agronomes ou par des techniciens agricoles ou par des agriculteurs qui sont vraiment compétents à le faire, je pense qu'il y a une possibilité; et avec les lois actuelles, il faut bien se rappeler qu'on a déjà des normes qui sont très sévères – et qui sont les plus sévères en Amérique d'ailleurs – donc, je pense qu'il y a des possibilités, avec les plans de fertilisation... Parce que le plan de fertilisation, c'est sûr et certain qu'un agronome qui signe un papier et se rend responsable... Avec le plan de fertilisation, à mon avis, on règle l'eau et on règle le sol. Il reste les inconvénients à l'agriculture. Je ne sais pas s'il y en a d'autres qui ont de quoi à rajouter là-dessus...

Le Président (M. Vallières): Oui. Alors, je veux juste vous demander de préciser parce que, en tout cas, pour moi et pour les membres de la commission, ça me paraît important. Et ce que vous proposez, c'est des plans de fertilisation, qui seraient la solution. Mais ce que vous maintenez – parce que c'est marqué dans votre mémoire – c'est que la réglementation actuelle, bien appliquée, répond très bien aux exigences environnementales. Parce que vous savez qu'on s'adresse ici à la réglementation, alors, est-ce que vous continuez de croire que les règlements qui sont en place sont suffisants pour le développement anticipé du secteur?

M. Ménard (Luc): Je vais vous donner un exemple. Mettons, la date du 1er octobre, ça peut sembler être un règlement, mais si un agronome qui gère bien le plan de fertilisation décide... C'est même, d'ailleurs, prévu dans la réglementation. Si un agronome gère, signe un papier comme quoi que, dans le fond, on peut aller au 15 octobre dans la région de Saint-Hyacinthe, ce n'est pas la même région que Rimouski ou... Tu sais, c'est ça. Avec le plan de fertilisation, je pense qu'on règle vraiment le trouble de la réglementation.

Le Président (M. Vallières): Je vous remercie de l'intervention.

M. Landry (Marc): Je peux compléter par... Quand on parle de statu quo, on dit aussi que les distances, présentement, qui sont déjà existantes en tant que règlement, je pense qu'elles sont là et qu'on est capable de vivre avec si on en met. Et, comme on semble présenter un projet de distances plus élaboré, avec laisser un droit, peut-être, aux municipalités de légiférer quelque part à l'intérieur d'une enveloppe de distances, on calcule que ça, c'est... On les a présentement, qu'on respecte celles qu'on a, puis on est prêt alors. Je pense que c'est ça qu'on veut dire un petit peu par statu quo. On a besoin de ces distances-là présentement qui sont déjà là. Je pense que la Fédération y a fait allusion, et c'est excessivement important parce que là on vient de restreindre... deux fois plus sévère, peut-être, qu'on est présentement par rapport à d'autres. C'est ça qu'on dit, qu'on dénonce un petit peu.

Le Président (M. Vallières): Merci. J'ai plusieurs demandes d'intervention, je vous demanderais d'être courts dans vos réponses. Je sais que le ministre doit intervenir, et des gens à ma gauche et à ma droite à nouveau. Alors, à moins qu'il y ait des éléments nouveaux, peut-être une dernière intervention sur la question qui a été posée. M. le président.

M. Ménard (Luc): Sur la réglementation, on pense aussi... 600 unités animales. On n'a pas le droit de bâtir plus que 600 unités animales. C'est 3 000 cochons sur un site. Quand on pense qu'aux États-Unis il y en a qui mettent 80 000 cochons sur un site ou 100 000 cochons! On a déjà réglementé, puis je pense qu'on vit avec ces normes-là, puis le Québec s'est développé puis a acquis une réputation mondiale d'exportateurs avec ces normes-là. Puis je pense qu'on est capable de continuer dans ces normes-là.

Le Président (M. Vallières): M. le ministre.

M. Julien: Alors, M. le président et les gens qui vous accompagnent, d'abord, je vous remercie d'être venus nous rencontrer pour faire votre point de vue, particulièrement sur une activité économique, je pense, qui est de premier ordre au Québec, qui est l'activité porcine. Vous l'avez démontré dans vos textes et autres. Je tiens à vous remercier de vos commentaires.

J'ai deux questions. La première: Vous dites dans votre mémoire, à la page 9, vous laissez sous-entendre, par exemple, que, avec toute... Vous dites de façon peut-être un peu plus claire que, si on continue de cette façon-là, les gens vont aller s'installer dans d'autres provinces ou ailleurs. Est-ce que vous avez été capables de mesurer l'impact, ou qu'est-ce que pourrait devenir cet impact-là s'il y avait des gens qui quittaient le Québec et allaient s'installer ailleurs?

Le Président (M. Vallières): M. le président.

M. Pilon (André J.): Bien, surtout, en fait, ce à quoi on réfère, c'est que, définitivement, il y a des provinces canadiennes qui se sentent un peu écrasées dans l'industrie porcine, plus spécifiquement par le Québec, et voudraient connaître les mêmes succès. Et il n'y a pas à se le cacher, on est courtisé pour aller investir là-bas. Ça ne veut pas dire que l'industrie porcine au Québec ne continuera pas à vivre. Seulement, si c'est beaucoup plus facile et plus intéressant d'investir ailleurs parce qu'il y a peut-être des embâcles tellement fortes ici et tellement grandes, bien, je veux dire, ça pourrait peut-être, à un moment donné, faire en sorte que les investissements pourraient être partagés. Je ne sais s'il y en a qui ont...

M. Ménard (Luc): Oui. Au Sommet de l'industrie porcine, même, c'est votre sous-ministre là, M. Julien, qui a fait notre... qui disait: 1 000 000 de cochons équivaut à 6 000 emplois. Je pense que c'est ça, dans le fond, qu'on peut penser. Six millions de cochons, le potentiel qu'il nous reste à faire va se faire ailleurs, dans les autres provinces. Je pense que la vraie réponse, là, ça peut être 6 000 emplois par million de cochons.

Puis c'est sûr et certain, quand on voit, il y a d'autres provinces, quand on va se promener en Alberta, vous voyez, ça, c'est un haut fonctionnaire de l'Alberta, là, eux autres, leurs prévisions, c'est comme ça: ils sont à 2 800 000 cochons, ils veulent être à 10 000 000 de cochons d'ici les cinq prochaines années.

Ou bien non, en Saskatchewan, ils ont un comité d'implantation porcine, au gouvernement. Ça fait que vous voyez que ces gens-là sont très agressifs pour le prendre. Ils voient là la possibilité de marchés, eux autres aussi, dans le monde, puis ils veulent le prendre.

M. Julien: Le monsieur à côté.

M. Breton (Christian): Oui, bien, j'aimerais ajouter que j'ai ici un article dans le Western Producer qui disait aussi, qui parlait du ministre Doug Taylor, de l'Agriculture au Nouveau-Brunswick, qui disait: On veut plus de patates, on veut plus de grain, on veut plus de boeuf et on veut plus de porc aussi parce que, justement, on veut développer, on veut avoir des emplois. C'est pour ajouter à la suite. Merci.

M. Julien: Merci. À la page 11, j'aimerais ça savoir, ça rejoint peut-être un peu la question que le président vous posait: Ça représente quoi pour vous, les principes logiques et viables sur le droit de produire, les principes logiques?

Le Président (M. Vallières): M. Ménard.

M. Landry (Marc): Le premier point qui me vient à l'idée, c'est les fameuses distances, là. C'est l'enveloppe dont on parlait tantôt, 700 m au lieu de 150 m ou 300 m. Je pense qu'à partir de ce moment-là, ça, ce n'est presque pas vivable. D'ailleurs, on supporte la Fédération de ce côté-là et, éventuellement, probablement que l'UPA va y faire allusion. Mais, s'il ne nous reste plus de lopin de terre pour étendre l'engrais, à ce moment-là, je pense que ça devient excessivement dangereux, si on a des surplus, on va en créer davantage. Alors, ça, c'est un des premiers points, excessivement exigeant, qui est important, les fameuses distances par rapport au projet de loi n° 23. Et l'autre point qu'on a mentionné aussi, c'est les municipalités. On y a fait allusion dans la conclusion.

M. Julien: Oui, bien, c'est justement. Au niveau des municipalités, vous leur voyez quel rôle à celles-là? Parce que, dans le guide qui était déposé, on parlait du rôle des municipalités, par exemple, au niveau des odeurs. C'est quoi, votre perception à ce sujet-là?

M. Landry (Marc): Je pense que, nous autres, on supporterait davantage au niveau de la MRC que de la municipalité parce que ce serait unifié, ce serait plus uniforme que chacun ait chacun son petit gouvernement, à quelque part, dans chaque paroisse. Ça, ça devient difficile à administrer et à suivre, puis on va se réveiller avec une multitude de réglementations. Alors, si on réussit à centraliser à l'intérieur des MRC et que les MRC se parlent, je pense qu'on deviendrait plus uniforme dans la province de Québec au point de vue législation municipale.

(9 h 50)

M. Julien: Merci.

Le Président (M. Vallières): M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Farrah: Oui, merci, M. le Président. Alors bonjour, messieurs, et merci de votre présentation à cette commission. Je pense que vous avez démontré très clairement le potentiel qu'il peut y avoir au niveau du développement de l'industrie du porc, notamment à cause de l'exportation.

Et ma première question va dans le sens suivant, c'est que, compte tenu de la compétition qui est féroce aussi, vous l'avez démontré, par rapport aux autres provinces, ou même par rapport aux États-Unis notamment, si le gouvernement n'émet pas une réglementation qui va être, disons, favorable à ce développement-là dans une perspective à court terme, est-ce qu'il y a un danger au niveau concurrentiel? Parce que, évidemment, il y a un potentiel actuel, mais, s'il est comblé par nos compétiteurs, éventuellement, je présume qu'il va être davantage, plus difficile d'atteindre ces marchés-là. Et, par conséquent, on va s'en ressentir sur notre marché domestique, et, par conséquent, encore une fois, je me répète, mais c'est au niveau de la création d'emplois, etc...

Il est bien évident qu'il faut que tout ça se fasse dans le respect de l'environnement; je pense qu'on en convient tous. Et, d'ailleurs, on pourrait faire état aussi – vous n'en avez pas fait état – que la Fédération des producteurs de porcs a mis de l'avant un programme agro-environnemental très intéressant. Alors, il y a une question de timing, excusez-moi l'expression, dans le sens que, si on n'accapare pas ces marchés dans le temps qu'ils sont disponibles et si d'autres les occupent à ce moment-là, on n'aura bien beau avoir une réglementation dans un temps x, mais à ce moment-là au niveau compétitif on va manquer le bateau. J'aimerais vous entendre là-dessus.

M. Landry (Marc): Oui. Moi, je dis, on le mentionne d'ailleurs dans notre mémoire, c'est qu'on devient un pays dépanneur. C'est ce qui se dessine dans le marché de l'exportation. Ce qu'ils veulent, c'est du volume. Ils ne veulent pas acheter 56 livres ici puis deux tonnes de l'autre bord. Ils veulent avoir un approvisionnement sécuritaire en quantité puis quand ils ont besoin. Alors, si on n'est pas capables d'intervenir quand c'est le temps, c'est malheureux mais on va manquer le bateau, puis c'est notre compétiteur qui va arriver sur le marché avec des volumes qu'il va être capable de faire. C'est le premier point.

Puis, définitivement, le respect de l'environnement, je pense qu'on le prône, on l'encourage et on participe, autant qu'on est concernés. Tous nos membres ont vraiment collaboré au plan agro-environnemental, par la Fédération, qui est mis en marche. Définitivement qu'on veut aller à fond de train en support et dans le respect de l'environnement.

M. Farrah: L'autre élément, c'est que, en fin de compte, au niveau de la réglementation, vous nous indiquez que vous souhaitez le statu quo, à peu près, là, de la réglementation actuelle. Beaucoup de groupes environnementalistes sont venus nous dire que, au niveau du futur, au niveau de l'avenir, une des variables importantes qui va être considérée au niveau de l'exportation, ça va être le respect de l'environnement dans la production et, par conséquent, on nous disait que les normes actuelles sont peut-être insatisfaisantes, et ça pourrait faire en sorte que les marchés d'exportation pourraient être bloqués parce qu'au niveau environnemental nos normes ne seront pas ce que les pays importateurs souhaitent. J'aimerais vous entendre là-dessus.

Ils nous disent qu'évidemment il faut avoir une vision à long terme là-dedans. Ça ne veut pas dire qu'ils ont raison, loin de là. Mais je voudrais vous entendre parce qu'ils nous disent que les normes actuelles pourraient faire en sorte que le marché pourrait être bloqué éventuellement en regard qu'on ne respecte pas suffisamment l'environnement. Ça sera une exigence du marché au niveau de l'avenir.

M. Breton (Christian): Moi, je dirais qu'au contraire ceux qui affirment ça, ils ne connaissent pas l'industrie puis ils ne connaissent pas ça. Puis je vais vous dire pourquoi: parce qu'on a les normes les plus sévères en Amérique. Nos compétiteurs, il ne faut pas se le cacher, c'est les Américains principalement, mais beaucoup d'autres pays d'Europe aussi, le Danemark, les autres pays d'Europe. Mais, bien sûr, quand on arrive pour entrer au Japon ou aux États-Unis, eh bien, on rencontre des Américains, on rencontre les Australiens, et nos normes sont parmi les plus sévères. Donc, au contraire, c'est plutôt les autres qui auraient du rattrapage à faire sur nous autres. Il n'y a pas de danger, au point de vue mondial, qu'on se fasse bloquer sur les normes qu'on a déjà actuellement, parce qu'on est déjà les plus sévères, parce qu'on est déjà les plus exigeants en Amérique, si on veut. Donc, on ne voit pas pourquoi on aurait... Les facilités sont déjà là pour rencontrer ces normes-là. Donc, il n'y a rien à ajouter sur les normes. Principalement, on est déjà en avance. Alors, je pense que les gens qui parlent de ça, c'est qu'ils ne connaissent pas qu'est-ce qui se fait aux États-Unis ou ils ne connaissent pas qu'est-ce qui se fait ailleurs, parce qu'ils ne diraient pas ça.

M. Landry (Marc): Un des meilleurs exemples, les plus concrets, qui confirme qu'on est sévères, c'est qu'aux États-Unis les structures d'entreposage, c'est des «lagoons». Ici, elles sont toutes en place, c'est cimenté avec du fer et il y a un paquet d'exigences que le ministère de l'Environnement a mises en place et qui sont là. Ils sont de plus en plus sévères. C'est supervisé par des ingénieurs, ce qui n'est pas nécessairement exigé aux États-Unis. Un premier exemple seulement et, si on fait le tour, on pourrait vous en trouver bien d'autres.

M. Farrah: M. le Président, c'est bon au niveau de la perception, parce que la perception de cette industrie-là au Québec, c'est perçu comme des producteurs qui ne respectent pas l'environnement; et on a vu des titres: Les barons du cochon , etc. Non, mais c'est vrai!

Alors, je pense qu'il faut remettre tout ça dans une perspective, mais de ne pas avoir eu des abus, il ne faut pas non plus être d'accord avec les abus qu'il y a eu. Au contraire, et je pense que la Fédération, comme telle, va s'en occuper. Mais il est important de ramener ça dans une juste perspective, dans le sens que dès qu'il y a un potentiel, en respectant les normes environnementales acceptables pour l'ensemble de la population, pour qu'il y ait une cohabitation aussi dans l'ensemble des régions du Québec qui soit viable pour l'ensemble des parties...

M. Ménard (Luc): C'est sûr que l'environnement fait partie de ce potentiel-là. Nos normes environnementales font partie de ce potentiel-là. C'est sûr et certain que les groupes environnementalistes qui ont été déposer une plainte à l'ALENA, moi, je pense qu'on pourrait aussi bien aller déposer une plainte à l'ALENA pour dire: Regardez qu'est-ce qui se fait au Mexique et regardez ce qui se fait aux États-Unis, puis on est mieux placés, je pense, pour produire du cochon, en environnement. L'Environnement a les lois les plus sévères en Amérique. Ça fait partie du potentiel.

Il y a bien plus de potentiel que ça. La réputation mondiale du Canada au niveau de l'inspection des viandes, aussi de la qualité des produits, de l'inspection des viandes, du contrôle des résidus, la viande maigre, aussi, c'est tout le potentiel qu'il y a au Canada et au Québec. Puis l'environnement en fait partie aussi: la main-d'oeuvre, les techniques agricoles, les agronomes, les fabricants d'équipement qui s'est développé ici, toute l'ingénierie, les entrepreneurs de la construction, la structure de financement est déjà toute là.

Les tailles disponibles, on s'est comparés: 2,26 pour le Québec à 20,33 pour la Hollande, à 8,65 pour le Danemark, on parle de cochons par hectare cultivable, et là on ne prend pas les territoires du Grand Nord quand on fait ça. La viande de porc est la plus consommée au monde. 44 % de la viande, c'est du porc qui se mange. La croissance continue des pays asiatiques, tout ça, ça fait partie du potentiel. Ce n'est pas juste l'environnement, mais l'environnement va nous servir, je pense, à court terme.

M. Farrah: L'autre élément, M. le président. Les municipalités. Moi, je n'ai jamais vu une unanimité de la sorte. Au-delà des unions municipales, l'ensemble des intervenants, autant au niveau des producteurs agricoles qu'au niveau des différents groupes environnementalistes qui sont venus nous rencontrer, et vous allez dans le même sens en disant que les municipalités ne sont pas les organismes qui devraient appliquer et faire respecter cette réglementation-là.

Élaborez encore là-dessus. Vous, c'est dans votre quotidien, c'est selon votre expérience que vous avez vécue dans l'ensemble des régions où vous avez des activités, ou que vous avez vu que les municipalités ne sont pas, quoi, assez objectives pour appliquer cette réglementation-là? Elles n'ont pas les capacités financières, vous dites, avec le pelletage du gouvernement. Élaborez un peu plus là-dessus, parce que c'est vrai qu'il y a une unanimité à l'égard de cela au niveau des groupes – autres que les unions municipales – que effectivement ce n'est pas le forum approprié pour appliquer cette réglementation-là.

Le Président (M. Vallières): Alors, M. Ménard.

M. Farrah: Donc, ça va être le bordel.

M. Ménard (Luc): Je pense qu'en premier – il y en a 1 400 municipalités, là – il ne faudrait pas avoir un règlement par municipalité et avoir le droit de chaque municipalité qui commence à réglementer. Ça dépend des pressions dans chaque municipalité, je pense, puis les municipalités n'ont pas les compétences techniques. Ils n'ont pas d'agronome pour venir voir c'est quoi, ton plan de fertilisation. Ils ont de la misère à avoir des inspecteurs municipaux. Comment tu veux que ces gars-là commencent à faire des plans de fertilisation ou commencent à gérer des règlements dans une loi du droit de produire? C'est impossible. C'est invivable.

M. Farrah: O.K. Dernière question en ce qui me concerne, M. le Président. Ce qui se dégage de votre mémoire, c'est à peu près le statu quo par rapport à la réglementation.

M. Ménard (Luc): Il faut faire attention. Le plan de fertilisation, c'est loin d'être un statu quo. Ça gère les engrais chimiques, ça gère aussi les engrais organiques. Là, je n'aime pas ça qu'on nous attribue que c'est le statu quo. Le plan de fertilisation, c'est ultra important dans la loi.

M. Farrah: Oui, j'en conviens.

M. Ménard (Luc): Je ne comprends pas pourquoi. Ça ne fait pas un an depuis qu'on en parle qu'il est déjà passé. On est prêt à ça. Plusieurs de nos membres en font déjà. N'allez pas sortir que c'est le statu quo pour l'AQINAC, ce n'est pas vrai. C'est le plan de fertilisation qui est là.

M. Farrah: O.K. Au niveau des paramètres de distance, c'est ça que je veux dire. Je m'excuse, là.

M. Ménard (Luc): Paramètres de distances, on est déjà les plus sévères.

M. Landry (Marc): Le plan de fertilisation y fait allusion, monsieur, quand vous parlez d'épaisseur ou de distances. Le plan de fertilisation est obligé quasiment d'y toucher indirectement, même directement. Ça fait que, à partir de ce moment-là, je pense qu'on s'engage dans un nouveau défi.

(10 heures)

M. Farrah: O.K., alors, comment vous voyez la situation au niveau de l'avenir par rapport à une meilleure cohabitation entre les différentes parties dans les régions du Québec? Parce qu'on sait qu'en fin de compte l'inaction gouvernementale a fait en sorte, depuis deux ans, d'antagoniser les parties. Veux veux pas, ça s'amplifie de plus en plus, et, veux veux pas, je pense que le développement de cette industrie-là, comme pour toutes les autres industries, passe par une plus grande harmonie, aussi, au niveau des régions.

Alors, comment vous voyez, dans l'avenir... quelles sont les possibilités à cet effet-là pour que l'ensemble de cette industrie-là puisse se développer de façon beaucoup plus harmonieuse, au niveau de l'ensemble de la population au Québec?

M. Ménard (Luc): Bien, je pense que ça fait partie du mandat du gouvernement de s'impliquer activement et non négativement pour créer, justement, ce climat d'insatisfaction... puisque l'on fait des déclaration «anticochon» ou qu'on traite les producteurs de porc de pollueurs, c'est un peu comme si on disait: À cause qu'il y a certains individus dans la société qui fraudent l'impôt, tout le monde fraude l'impôt. Il faut arrêter de dire en partant, de la part du gouvernement, que les producteurs sont des pollueurs. Ça, je pense que ce n'est pas vrai. En partant, il devrait y avoir un peu plus d'harmonie. Si le gouvernement est d'accord que les producteurs de porc puissent s'autogérer, puissent... La bataille, elle part de là aussi. C'est le gouvernement qui dirige un peu la bataille, comme c'est là.

M. Farrah: Je vous remercie.

Le Président (M. Vallières): Bien. Alors, je demande l'intervention du député de Saint-Hyacinthe, suivi du ministre de l'Environnement et de la Faune, à moins que vous vouliez inverser, là, l'ordre des intervenants.

M. Cliche: Il me reste combien de temps, M. le Président?

Le Président (M. Vallières): Il vous reste une quinzaine de minutes, de votre côté.

Alors, M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Dion: M. le Président, je vais être très court parce que je sais que le temps est précieux. Mais je suis... Bon! Vous avez un document, vous avez présenté un document qui est très intéressant du point de vue de la production du porc, l'importance et tout ça. Je pense que personne ne va contester ça. On est assez convaincus de cela. On l'était d'ailleurs avant.

Mais ce qui nous intéresse, au fond, c'est le problème qu'on vit actuellement. Avec des nuances, vous dites que vous proposez, vous souhaitez qu'on en reste au statu quo actuel. Or, le statu quo actuel, qu'est-ce que ça donne? Ça donne des règlements abusifs à l'Acadie, ça donne des gens qui se font tirer dans leur réservoir un peu partout au Québec; un peu partout, c'est peut-être exagéré, mais à quelques endroits. Ça donne la nécessité, pour les producteurs agricoles, de faire une manifestation de 10 000 personnes devant la colline parlementaire. Ça ne doit pas être ça que vous proposez, le statu quo. Vous voulez certainement qu'il y ait des changements, et des changements importants!

On a deux problèmes, le problème de la pollution et le problème des nuisances. Le problème de pollution, vous proposez qu'on insiste davantage sur les plans de fertilisation. Je pense que c'est la voie pour s'attaquer au problème de pollution.

Mais, pour ce qui est des nuisances, les odeurs en particulier, je note que vous êtes des spécialistes de la nutrition animale. Or, je me laisse dire constamment sur le terrain qu'on utilise de plus en plus des résidus de lait, comme la caséine ou le petit-lait ou les résidus d'abattoirs, pour introduire des protéines animales dans l'alimentation des porcs en particulier, que c'est excellent pour améliorer l'alimentation des porcs, mais que ça augmente aussi de beaucoup la charge d'odeurs. Ça peut même doubler la charge d'odeurs du lisier, des déjections animales.

Pouvez-vous, sans trahir vos secrets industriels, me donner l'heure juste là-dessus?

Le Président (M. Vallières): La réponse sera donnée par M. Breton.

M. Breton (Christian): Premièrement, j'aimerais vous dire – vous dites qu'il y a des problèmes, peut-être, dans les municipalités, un petit peu partout – que les problèmes sont peut-être dus parce que le gouvernement ne fait rien, il y a une inaction qui est faite en ce moment. Je pense que c'est pour ça qu'on est ici, mais je pense que c'est notre point de vue, la première des choses.

M. Dion: Donc, vous voulez qu'on change le statu quo.

M. Breton (Christian): Oui. Disons, on vous parle déjà des plans de fertilisation.

L'autre chose, au niveau de l'alimentation, les protéines de petit-lait ou de lactosérum ou les farines animales, ça existe depuis très, très longtemps dans l'alimentation. Ça, c'est la première des choses. Donc, c'est utilisé depuis très longtemps. Ce qu'on voit depuis assez longtemps quand même, et ce n'est pas toutes les entreprises qui l'utilisent, c'est la formulation sur base acides aminés et non plus sur protéines animales, ce qui vient baisser la protéine animale en utilisant des phythases ou d'autres ingrédients ou en formulant sur base d'acides aminés synthétiques. Donc, il diminue les rejets de phosphore et d'azote dans les lisiers de peut-être entre 30 %, 20 %, dépendamment de la formulation, dépendamment des choses. Ça, ça se fait, ça commence à se faire beaucoup depuis quelques années, d'ailleurs. Je soupçonne fortement les tables, des fois, bien souvent, d'analyses de lisier qui existent actuellement, qui sont un petit peu dépassées, parce que la technologie est rendue beaucoup plus avancée que ça. C'est, en gros, ce qui se fait actuellement et ce qui peut se faire.

Mais, avec les protéines animales et des choses optionnelles, ça, ça n'a aucun effet sur l'alimentation, les odeurs et ces choses-là.

M. Ménard (Luc): J'aimerais rajouter...

Le Président (M. Vallières): Oui, M. Ménard.

M. Ménard (Luc): Les nuisances, c'est sûr et certain que c'est la technologie qui va les diminuer. On pense à la façon d'étendre les purins: les rampes, au lieu de canons. Je pense qu'on devrait activer le changement, avoir des rampes qui étendent en postlevée. Aussi, il y a plusieurs projets de recherche où nos membres sont impliqués, avec le CRIQ, entre autres, avec l'Université Laval, l'Université McGill, tout ça, soit en alimentation ou dans des produits que tu ajoutes dans le purin pour réduire les odeurs. Il y a aussi, avec Agriculture Canada à Lennoxville, plusieurs projets de recherche qui se font pour diminuer, justement, le phosphore et l'azote dans le purin, et l'alimentation aussi – sans entrer dans nos secrets – l'alimentation multiphase répond aux besoins de l'animal en protéines, et c'est sûr et certain qu'il y a bien moins de rejets qu'il y en avait par le passé.

L'amélioration des conversions alimentaires, c'est sûr et certain que, quand ça prenait quatre livres de moulée pour faire une livre de viande, alors que ça t'en prend deux et demie, deux et trois quarts en 1997, c'est sûr et certain que ça fait pas mal moins de purin, aussi, dans les fosses. Tout ça, la technologie, je pense, va amener les nuisances à diminuer. Je pense, aussi, que les nuisances sont amplifiées, encore une fois, par la population.

Le Président (M. Vallières): Merci. Oui, M. Landry, vous voulez ajouter quelque chose?

M. Landry (Marc): Quand on fait allusion au statu quo, je pense qu'on fait allusion aux normes environnementales ou réglementaires qui sont là présentement et non au niveau des actions. Je pense que, là, il y a des actions à mettre en marche, et on a un défi à relever.

M. Dion: Mais qu'est-ce qu'on peut faire? Qu'est-ce que vous proposez pour améliorer l'acceptation sociale des conditions nécessaires au développement de la production du porc?

M. Landry (Marc): Je pense qu'il faut s'asseoir ensemble, comme on l'a fait jusqu'à date, et continuer à travailler ensemble, tous les partenaires de l'industrie. Il y a quelque chose à aller chercher là, définitivement. C'est déjà en marche, et je pense que le tournant est pris, je pense, actuellement. Mais je pense que le gouvernement doit supporter encore davantage ce tournant-là et les intervenants, ce qu'on n'a pas obtenu à date.

Le Président (M. Vallières): Merci. M. le député de Laurier-Dorion, en trois minutes, incluant la réponse.

M. Sirros: En trois minutes, incluant la réponse! Une question, en fait, un peu technique, juste pour comprendre un peu votre tableau à la page 8: vous faites une comparaison entre différents endroits dans le monde, par rapport à la production porcine, et la production de porcs par hectare de terre arable. Vous indiquez qu'au Québec on est à 1,5 par hectare arable. Nos compétiteurs sont aux États-Unis, vous avez fait mention des normes environnementales, etc. Est-ce que j'aurais raison de dire que, pour qu'on puisse vraiment comparer, il faudrait quand même comparer aussi des niveaux de production? C'est-à-dire que, si, au Québec, on augmentait notre production au niveau de, par exemple, de l'Iowa, il faudrait donc refaire le tableau de droite, et on serait à ce moment-là sur une base de comparaison plus équivalente?

Le Président (M. Vallières): Oui, la réponse va être fournie par M. Breton.

M. Breton (Christian): Oui, pour vous dire qu'en Iowa, d'abord, il se fait 24 000 000 de porcs en Iowa, plus que le Canada tout entier. Donc, je pense que, même si au Canada on s'en allait à 24 000 000 de porcs, on serait même en deça de l'Iowa encore. Nous, on ne parle jamais de se rendre à 24 000 000 de porcs au Québec. On a fait 5 300 000, on parle qu'on pourrait se rendre à 6 300 000 très facilement, en dedans des normes qui sont là.

M. Sirros: Mais c'est ce que j'essaie de voir, là. C'est parce que, si on faisait, par exemple, 24 000 000, on ne serait plus à 1,51 par hectare arable.

M. Breton (Christian): Ah bien, on serait à plus que ça, parce que là il faudrait rediviser avec le nombre d'hectares arables qu'on a, c'est bien certain.

M. Ménard (Luc): Mais il n'y a personne ici qui veut faire 25 000 000 de cochons au Québec, là.

M. Sirros: C'est correct, mais disons le double, vous visez quoi, vous? C'est quoi votre objectif?

M. Ménard (Luc): Bien, on pense qu'il y a un potentiel de 1 000 000 de cochons de plus au Québec actuellement.

M. Sirros: Un million de plus?

M. Ménard (Luc): Le potentiel, les abattoirs, tous ceux qui exportent, la demande est 1 000 000 de cochons de plus, et il y a un tableau où, justement, il y a ça dans les exportations québécoises ou canadiennes.

M. Sirros: Et si l'accent était mis plus sur un objectif d'élimination de la pollution par l'appui aux nouvelles technologies, etc., on pourrait donc absorber l'impact facilement, si je vous comprends bien?

M. Ménard (Luc): Bien oui, et il faut bien se rappeler qu'on importe des États-Unis 430 000 tonnes d'engrais chimiques, là. Il faut avoir 10 000...

M. Sirros: Oui, j'ai vu, c'est très intéressant, ça.

(10 h 10)

M. Ménard (Luc): ...porcheries de 1 000 cochons. C'est deux fois la production de cochons qu'on a déjà au Québec.

M. Sirros: Et l'engrais chimique et l'engrais naturel, c'est complètement interchangeable?

M. Ménard (Luc): Non, non, pas complètement interchangeable, mais c'est sûr et certain qu'on diminue beaucoup le volume d'engrais chimique quand on met de l'engrais organique.

Le Président (M. Vallières): Bien.

M. Sirros: J'ai l'impression que mes trois minutes sont terminées.

Le Président (M. Vallières): Elles sont écoulées, ce qui nous amène au ministre de l'Environnement et de la Faune.

M. Cliche: Madame, messieurs, bonjour. Je pense que vous êtes un exemple éloquent, lorsqu'on réfère à l'évolution rapide des mentalités dans le monde économique. Je pense que, lorsque je vous entends dire que l'environnement et l'économie, et surtout l'environnement et le respect des règles environnementales sont synonymes, sont un potentiel de développement économique et que, sans le respect de l'environnement, ça pourrait vous bloquer des marchés internationaux, je tiens à vous lever mon chapeau, parce que c'est vraiment là le coeur de la réflexion et, nous, c'est ce que nous pensons. Nous pensons que pour développer votre industrie il faut l'encadrer correctement. Et c'est ça, le sens du droit de produire. Vous avez cité M. Landry à plusieurs occasions. Le gouvernement partage l'appui aux producteurs agricoles, et c'est ça, le droit de produire. Le droit de produire, c'est à l'intérieur d'un encadrement, dans la zone verte. Vous allez avoir le droit de produire, vous allez pouvoir produire en paix. C'est ça, le droit de produire. Maintenant, l'exercice de cette commission, c'est de déterminer les balises d'encadrement à l'intérieur desquelles vous allez avoir la paix pour produire. Mais, lorsque je vous entends dire que, pour l'exportation, vous vous faites un honneur de dire que vous respectez les règles de l'environnement, je pense qu'on est sur la bonne voie.

Juste des faits, quelques faits, là, parce que vous avez soulevé des questions. Vous avez dit: On nous empêche de faire plus de 600 unités animales au Québec. Ce n'est pas ça, c'est qu'au-delà de 600 unités animales vous êtes tout simplement régi par un autre article de la loi de la qualité de l'environnement qui vous soumet à l'évaluation d'impact et aux audiences publiques. Donc, vous pouvez faire 5 000 unités animales si vous voulez, mais c'est seulement la façon dont le public participe qui évolue.

Au niveau de la date, vous avez fait référence à la date: que le règlement allait geler la date du 1er octobre pour terminer l'épandage. Encore là, c'est faux, c'est parce qu'on dit: le 1er octobre ou la date qui sera confirmée par un plan de fertilisation dûment formé par quelqu'un – soit un agronome ou un producteur agricole – correctement formé. Et, moi-même, hier, j'ai subi la foudre des groupes environnementaux qui me reprochaient d'avoir dégelé, si je peux m'exprimer ainsi, la date du 1er octobre. Mais je pense que vous avez raison: en Abitibi, au 1er octobre, on peut faire de la motoneige alors qu'on récolte de la luzerne dans la région de Saint-Hyacinthe. Alors, il faut reconnaître ça.

Sur vos chiffres sur les densités, il faut faire attention avec ces chiffres-là. Les chiffres, c'est la façon dont on les traite. Si on regarde la densité de la production porcine dans les trois bassins versants où est concentrée la production porcine en ce moment au Québec, Chaudière, Yamaska et L'Assomption, ce qu'on découvre, c'est que la production porcine dans ces trois bassins versants là nous met au troisième rang au niveau de la densité de production de porcs par hectare. Ça nous met à 67 porcs par hectare. Ça nous met au troisième rang, en avant du Danemark. Alors, c'est sûr que, si on étend les chiffres de production de porcs à la grandeur du Québec incluant Ivujivik et Akulivik, c'est sûr que ça donne cette idée-là. Mais, dans les trois bassins versants, il faut réaliser que la production de porcs est assez importante.

J'aimerais vous entendre sur la mutation; et, nous, on vise la mutation de l'utilisation des engrais inorganiques vers les organiques, bref, les engrais chimiques vers les fumiers. Vous avez des chiffres intéressants. Est-ce que vous avez des exemples concrets chez vos producteurs qui démontrent qu'il y a une économie à faire la transition du chimique vers l'organique? Est-ce que vous avez commencé à quantifier ça pour démontrer l'avantage économique pour les producteurs de se doter de plans de fertilisation comme on veut, ce que le règlement va prévoir? Et, nous, on veut, par une réglementation, forcer, entre guillemets, pousser la transition de l'inorganique vers l'organique. Est-ce que vous avez des chiffres là-dessus?

Le Président (M. Vallières): La réponse va être fournie par M. Breton?

M. Breton (Christian): Oui, la réponse à votre question: Au niveau d'une finition de 1 000 porcs, on parle d'une valeur d'engrais organique d'environ 2 500 $ à 3 000 $ de valeur fertilisante pour un engrais et pour une finition de 1 000 porcs en engrais. Donc, ça dépend toujours de ce que les gens font en culture: du maïs ou de l'orge ou «whatever» les grains qu'ils font.

Aussi, quand on dit nos chiffres, il faut bien vous dire que l'expansion, elle se fait dans les régions. Elle ne se fait pas dans les régions de bassins versants, l'expansion de la production du porc. Elle se fait bien souvent dans le Bas-du-Fleuve, sur la Rive-Nord, un peu partout. Donc, la production est en train de s'étendre actuellement et, même, elle se déconcentre graduellement des régions plus concentrées. Donc, je pense que, de cette façon-là, on respecte ce qui se fait dans le monde et on se dirige vers une déconcentration des régions. D'ailleurs, même, c'est moins souhaitable de les faire dans ces régions-là actuellement, pour diverses considérations économiques.

M. Cliche: Une dernière question, un commentaire.

Le Président (M. Vallières): M. le ministre.

M. Cliche: Régir l'utilisation des fertilisants avec des gens spécialisés comme vous, c'est relativement simple. On n'a qu'à mettre sur les sols les fertilisants dont les plantes et les sols ont besoin. Ça, on s'entend là-dessus. Ce qui est plus difficile – et c'est le coeur de notre commission – c'est comment encadrer les nuisances, parce que dans les nuisances, il y a la question de perception. Et là il y a un seuil minimal qui, selon nous, doit être respecté. Et là, ma question, c'est que je comprends que vous suggérez que ça soit une réglementation mur à mur, alors que nous pensons qu'au niveau des distances séparatrices on devrait mettre une fourchette minimale pour protéger le citoyen et maximale pour protéger les producteurs agricoles, parce qu'on ne voudrait pas que des municipalités exagèrent et, par une utilisation de distance d'épandage trop grande, viennent à bannir la production agricole sur les zones vertes.

Alors que vous, vous recommandez essentiellement une réglementation au niveau des distances d'épandage mur à mur, alors que nous, ce qu'on dit, c'est qu'on doit laisser une certaine flexibilité pour que dans la communauté il y ait une acceptation sociale de la production agricole et des odeurs qui viennent avec. Alors, là-dessus, on n'est pas sur la même longueur d'onde. Pourquoi, selon vous, on devrait avoir une réglementation mur à mur? Alors que nous prônons une certaine flexibilité, parce que pour nous c'est important de laisser l'option qu'une MRC fasse en sorte qu'elle soit plus, entre guillemets, tolérante par rapport aux nuisances inhérentes à la production agricole, tout en reconnaissant qu'il faut mettre un maximum pour éviter que les municipalités vous passent sur le corps.

Le Président (M. Vallières): Oui, alors, la réponse est fournie par M. Ménard ou M. Landry? M. Ménard.

M. Ménard (Luc): Bien, notre vision de la perception, c'est justement là qu'est le problème. Quand un citoyen décide que ça sent? Ou un agriculteur décide aussi que ça sent? C'est quoi la perception? Et la nuisance, il faut se rappeler que ce n'est pas de la pollution, la nuisance, et il y a des moyens technologiques pour la régler qui sont déjà là. Moi, je pense que c'est au gouvernement de gérer ça. Ce n'est surtout pas aux municipalités de gérer ça, parce que là on s'enligne dans des troubles de perception, justement, de village en village. Je ne sais pas si, Marc, tu peux rajouter?

M. Landry (Marc): Oui c'est parce qu'à ce moment-là on va créer des chicanes entre municipalités. C'est aussi simple que ça. Chaque municipalité, ou elle s'enligne complètement sur le minimum qu'on désire, tout le monde, et ça devient exactement mur à mur, ou celle qui va être dans la fourchette, elle va se faire chicaner parce que des voisins ou d'autres vont dire: «Aïe! la municipalité voisine, ils sont là. Nous autres aussi, on veut aller là». Là, à ce moment-là, on va se réveiller avec une multitude de problèmes, parce qu'on ne fait pas affaire juste dans une municipalité, on est dans plusieurs municipalités. On a notre clientèle dans différentes municipalités.

M. Cliche: Mais si c'est à l'échelle des MRC?

M. Landry (Marc): Bien, à ce moment-là, au moins les MRC, elles ont assez grand de territoire, c'est beaucoup plus facile. Mais habituellement elles se parlent plus entre MRC que municipal, d'après moi. Le monde dans les MRC est pas mal plus homogène qu'un monde municipal.

Le Président (M. Vallières): Bien, merci. Alors, ceci terminerait le bloc réservé à votre organisme. Nous vous remercions de votre participation à nos travaux.

J'inviterais maintenant l'Union des producteurs agricoles à bien vouloir prendre place.

La commission va suspendre pendant quelques minutes, le temps de permettre à l'Union des producteurs agricoles de s'installer.

(Suspension de la séance à 10 h 20)

(Reprise à 10 h 25)

Le Président (M. Vallières): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission de l'agriculture reprend ses travaux. Alors, j'invite les gens à prendre siège. M. Pellerin, bienvenue! Je vous inviterais à présenter les gens qui vous accompagnent et à procéder à la présentation de votre mémoire.


Union des producteurs agricoles (UPA)

M. Pellerin (Laurent): M. le Président de la commission, mesdames, messieurs, je vais d'abord vous présenter les gens qui m'accompagnent. À ma gauche, M. Chagnon, le premier vice-président de l'Union des producteurs agricoles, M. Gratien D'Amours, le deuxième vice-président de l'Union des producteurs agricoles, et, à ma droite, le directeur général, M. Claude Lafleur.

Je pense bien qu'on n'a pas besoin de vous faire une longue introduction sur ce qu'est l'UPA. L'UPA confédère aujourd'hui 21 fédérations ou syndicats spécialisés regroupant toutes les productions agricoles du Québec et 16 fédérations régionales, donc un grand conseil d'administration de 37 affiliés. Elle est présente partout sur le territoire, bien que le siège social de la confédération soit presque en ville, c'est-à-dire à Longueuil. Vous allez m'excuser de peut-être ne pas rester jusqu'à la fin de la période des questions. J'ai donné rendez-vous à quelques-uns de mes amis ce matin à Québec, et ils m'attendent vers 11 h 15, 11 h 20. Comme certains d'entre eux ont fait 20 heures de route depuis la Gaspésie, alors je vais me faire un devoir de faire le cinq minutes de déplacement pour aller les rencontrer et les recevoir. Si la période de questions dure au-delà de cette période-là, M. Chagnon, M. Lafleur et Mme Cloutier seront quand même là pour répondre aux questions.

Je ne lirai pas mot à mot le mémoire. Je pense que vous allez, dans vos travaux, avoir l'occasion de le parcourir, de le faire travailler par les personnes qui travaillent avec vous pour l'analyser dans chacun de ses paragraphes. Je vous dirais que nous sommes extrêmement fiers du travail que l'on dépose aujourd'hui devant vous à cette commission. Pour certains de nos producteurs plus âgés, la réalisation d'un cadre sur la protection des activités agricoles au Québec est un rêve vieux d'au-delà de 20 ans. Déjà, à la mise en application de la Loi sur la protection du territoire agricole, on demandait un chapitre sur la protection des activités agricoles. Certains de nos concitoyens et concitoyennes, certains des politiciens du Québec ne savent pas toujours d'où ça vient, la nécessité de doter l'agriculture du Québec d'un cadre sur la protection des activités agricoles. Je fais juste vous dire, ici, que ça existe, une loi sur ce que les Anglais appellent «right to farm», dans 40 États américains, et ça existe aussi dans huit provinces canadiennes. Alors, les producteurs agricoles québécois ne sont pas étrangers à ces mondes agricoles là, on vit en communication constante avec ces gens-là et on revendique les mêmes statuts que ces producteurs et ces productrices-là.

Dans l'histoire plus récente, on a vu le rapport Ouimet, la tentative d'arriver à une entente, avec la loi 123, la loi 23, les engagements électoraux qui ont été pris autour de ça, et la difficulté, bien qu'on se soit entendus sur les grands principes, d'arriver à s'entendre sur des paramètres de distance qui vont permettre la pratique de l'agriculture et le développement de l'agriculture au Québec. Quelques grandes considérations sur l'agriculture québécoise. D'abord, avec la conclusion de l'«Uruguay Round» de 1993, les producteurs agricoles du Québec, comme ceux du monde entier, sont conviés à une ouverture des frontières et à un commerce de plus en plus libre. Donc, les producteurs agricoles du Québec sont confrontés à une plus grande compétition, aussi, qui leur demande de faire des nouveaux investissements, ce à quoi ils ont répondu présents dans les dernières années par des investissements records dépassant les 600 000 000 $ annuellement.

(10 h 30)

Cette demande de compétition là aussi oblige une restructuration de plusieurs de nos entreprises et, dans certains cas, un élargissement de la taille de nos entreprises pour nous permettre, justement, de réaliser certaines économies de production qui vont faire en sorte que l'agriculture québécoise soit encore présente demain sur nos marchés à nous autres, qu'on ne soit pas nourris par des étrangers comme certains pays du monde le sont, entre autres les Japonais, qui se doivent aujourd'hui d'importer 55 % de leur alimentation d'un peu partout à travers le monde. Je pense que les Québécois peuvent se compter chanceux, heureux d'avoir des producteurs agricoles qui fournissent, en 1996, sur une base tous produits confondus, 100 % de nos besoins alimentaires; la balance commerciale du Québec, pour la première fois en 1996, a été positive. Alors, je pense qu'il faut retenir ça.

Deuxième caractéristique de l'agriculture québécoise, c'est une agriculture qui depuis des centaines d'années, particulièrement dans le dernier 100 ans, s'est spécialisée en production animale. Un développement fulgurant dans le secteur des produits maraîchers dans les récentes, récentes années, mais qui, somme toute, laisse encore 65 % du chiffre d'affaires de l'agriculture du Québec dans les productions animales.

Troisième caractéristique de l'agriculture québécoise, il faut se rappeler l'histoire du Québec. Certaines de nos familles sont sur les mêmes terres depuis six, sept, huit générations. Elles se sont établies dans ces rangs-là, sur des terres, en petites bandes étroites: un arpent et demi, un arpent, deux arpents de large, par des longueurs très longues parce que tout le monde à l'époque voulait avoir accès aux moyens de communication qui étaient les cours d'eau.

Alors, aujourd'hui, de vouloir appliquer au Québec une méthode de calcul des distances basée sur une structure d'un autre pays nie ces 400 ans-là d'histoire. Il faut les reconnaître, il faut reconnaître comment notre Québec a été bâti par les colonisateurs ici. Alors, les distances entre les maisons sont très rapprochées. Il faut se souvenir de ça.

Et quand certaines municipalités demandent à des familles expertes en production animale depuis plusieurs générations, dire: À l'avenir, vous ne pourrez plus développer vos entreprises sur vos fermes, dont vous êtes propriétaires, transmises de génération en génération, mais il faudra plutôt que vous vous déplaciez dans ce petit 5 % du territoire de la municipalité, pourtant zonée à 95 % vert.

Vous comprendrez qu'on a beaucoup de difficultés à expliquer ça à nos producteurs et nos productrices, et je ne vois pas comment on pourrait expliquer ça aux gens qui sont venus avant nous autres. On a une chance qu'ils soient tous disparus, parce que ce serait inexplicable de tenter de justifier auprès de ces gens-là que les terres qu'ils ont défrichées pour leurs enfants ne peuvent plus servir à faire vivre leur famille.

Quatrième caractéristique de l'agriculture québécoise, le choc des cultures. En 1978, on a mis en place une loi sur la protection du territoire agricole. Vingt ans après, on peut constater à plusieurs endroits le gâchis malgré l'imposition de cette loi-là. Qu'est-ce que ça aurait été si on n'avait pas eu la Loi sur la protection du territoire agricole au Québec?

Vous n'avez qu'à circuler sur l'autoroute 20, sur l'autoroute 40, pour voir les centaines de milliers d'acres qui ont été dézonés, qui ont été utilisés à d'autres fins que pour l'agriculture, dans les meilleurs sols du Québec. La seule ville de Montréal et ses banlieues est passée d'une concentration d'habitants, en 1970, d'au-delà de 700 au km² à aujourd'hui, à 350 habitants au km². Vous voyez l'étalement urbain, deux fois plus de surface pour loger la même population qu'il y a 25 ou 30 ans.

On n'a entendu personne se lever pour décrier la condamnation irréversible de ces milliers et milliers d'hectares au Québec, qui ne sont pas contaminés, qui ne sont pas pollués, qui sont à tout jamais perdus pour l'agriculture québécoise, et bientôt pour l'agriculture mondiale, les meilleures terres du Québec.

Cette loi sur le zonage agricole qu'on voulait la plus étanche possible a, malgré tout, permis l'étalement urbain. De sorte qu'aujourd'hui on se retrouve un peu partout au Québec avec un problème de cohabitation et la nécessité de doter l'agriculture du Québec d'une loi sur la protection des activités agricoles, parce qu'à bien des endroits c'est tout simplement plus vivable.

Je le disais avec un exemple un peu facile pour faire comprendre les gens. Sur la base d'un référendum, les producteurs agricoles dans leur village, concernant l'établissement des mesures de distance ou des normes concernant l'agriculture, nous allons tous les perdre, ces référendums-là.

On s'est battu dans plusieurs municipalités, 16 agriculteurs tout près de L'Islet, 800 de population, on est allé chercher quand même 200, 300 votes pour l'agriculture, on a perdu le référendum. À l'Acadie, 60 producteurs, 3 500 de population, on est allé chercher 500, 600 votes au référendum, on a perdu le référendum. Pourquoi on a besoin de la réglementation gouvernementale? Pour protéger l'intérêt supérieur de produire des biens agricoles au Québec, parce que, si on se fie juste à la volonté populaire locale, par village, on ne s'en sortira pas et on va perdre ces référendums, je vous le répète, un après l'autre et on va confiner l'agriculture à quelque chose que les gens veulent reléguer au bucolique, au patrimoine passé, et, malheureusement, l'agriculture n'en est plus là aujourd'hui.

Donc, cet étalement urbain et cette volonté de tout le monde de venir rester dans un milieu paisible où il ne se passe rien a conduit à cette difficulté de vivre avec nos concitoyens, d'où un excès de réglementations d'un trop grand nombre de municipalités.

J'ai dit à plusieurs occasions dans la dernière année qu'il y avait une multitude de règlements municipaux abusifs, illégaux dans certains cas. À chaque fois on me dit: Ah, ce n'est pas si grave que ça. Vous vous en faites un peu. J'en ai une liste de six pages ici, si vous voulez les consulter, six pages de municipalités qui ont passé des règlements que nous considérons abusifs, que nous devrons contester un par un devant les tribunaux si le gouvernement ne donne pas une indication qu'il faut réviser ces règlements-là à la lumière du paragraphe de la loi 23 qui dit: En zone verte, priorité aux activités agricoles. Nous demandons de réviser rétroactivement, par les comités consultatifs, ces règlements que nous jugeons abusifs.

Quand une municipalité zonée à 90 % vert passe un règlement municipal qui permet les élevages de toutes sortes à condition que ça ne soit pas plus gros qu'une unité animale, c'est chez nous, ça, au Québec, il y a nécessité que le gouvernement supérieur intervienne pour permettre le développement de l'agriculture du Québec.

Concernant le document d'orientation qui a été déposé, plus particulièrement, je vais faire quelques commentaires. Vous avez dans le document, à partir des pages 7, 8, 9 et suivantes, une série de recommandations et de prises de position de l'ensemble des producteurs agricoles du Québec sur ces questions-là. Quelques-unes sont nouvelles, d'autres sont plus historiques. Il y a quand même eu une évolution là-dedans, et nous vous les soumettons avec toute la fierté, comme je le disais tantôt, et avec tout le respect qu'on doit à cette commission.

Premier commentaire que je fais sur les orientations. Tout ce qu'on a vu depuis un an d'intentions, d'orientations gouvernementales, autant celles de l'été passé que celles plus récentes, même si on y a enlevé les chiffres, qu'on a laissé les principes, ne nous donne pas espoir, aucun espoir que l'agriculture aura gain de cause, que l'agriculture recevra un message positif, constructif, encourageant dans les travaux que le gouvernement a entrepris. Il a besoin d'un changement de cap important.

Si nous sommes d'accord pour doter les municipalités, parce que nous sommes très présents dans les municipalités rurales, d'un pouvoir de réglementation allant d'un maximum à un minimum d'une fourchette de possibilités de réglementations, on voudrait quand même que cette fourchette-là puisse permettre, dans ses limites supérieures, de pratiquer l'agriculture. On pense que toutes nos terres agricoles, dans un objectif d'agriculture durable, de recyclage des fumiers et lisiers qu'on produit au Québec, on devrait pouvoir être capables dans nos villes, dans nos villages ruraux, sur nos propriétés d'épandre au moins une fois l'an, de fertiliser au moins une fois l'an ces propriétés-là avec des fumiers et lisiers qu'on produit sur nos fermes, tout ça dans un objectif d'agriculture durable.

(10 h 40)

Les odeurs. Deuxième question sur laquelle on fait un commentaire. Si nous sommes prêts à reconnaître que les sources d'odeurs sont de différents niveaux, les sources permanentes et les sources ponctuelles, sur les sources permanentes d'odeurs, les statistiques du ministère de l'Environnement, même, parlent d'un très petit nombre de plaintes faites sur les sources permanentes, c'est-à-dire les bâtiments. Bien que dans les 20 dernières années au Québec on ait réglementé beaucoup la localisation des bâtiments, ce n'est essentiellement pas le problème en ce qui concerne les odeurs.

Le problème des odeurs est plus particulièrement relié aux sources ponctuelles, c'est-à-dire au moment des épandages. Deux commentaires sur ces sources ponctuelles. D'abord, que des fumiers et lisiers, avec tous les traitements qu'on pourra leur appliquer, avec toutes les précautions qu'on pourrait prendre, avec toute la technologie qu'on pourra trouver, vont toujours dégager une certaine odeur. Donc, conséquence de ça, nous demandons au gouvernement d'intercéder auprès de la population en faveur d'une tolérance des citoyens qui ont choisi de venir s'établir dans le milieu rural.

Si nous sommes prêts à des concessions plus importantes pour ceux qui ont décidé de s'établir dans le milieu mais de façon concentrée, c'est-à-dire dans les villages, dans les périmètres urbains, nous sommes moins prêts à faire des concessions pour ceux qui ont décidé de venir s'établir un peu partout à travers la campagne. Pour nous, les normes, les distances devraient être moindres à l'endroit de maisons isolées qui ont fait le choix de venir vivre dans le milieu rural, qu'ils doivent en quelque part être prêts à vivre avec la contre-partie, d'autant plus que les sources ponctuelles – le mot le dit – ce ne sont pas des sources d'odeurs qui sont là à l'année. Alors, il y a une tolérance qu'il nous semble qu'il faudrait que le gouvernement encourage.

Concernant les distances des bâtiments. Aux pages 13 et suivantes, nous sommes définitivement prêts à considérer un traitement différent pour les bâtiments qui sont existants de ceux qui sont à construire, complètement nouveaux. Pour ce qui est des bâtiments existants et de leur agrandissement jusqu'à une certaine limite, et tout ça, parce que l'agriculture du Québec, de façon très majoritaire, très nette, partout sur le territoire, est la propriété d'entreprises familiales, qu'on puisse permettre à ces familles ne serait-ce que le respect qu'on doit aux générations précédentes qui ont développé ces fermes-là, qui les ont défrichées, de leur permettre de développer leurs entreprises là où elles sont aujourd'hui.

Pour ce qui est des nouvelles constructions, complètement nouvelles constructions, qu'on soit prêts à considérer des normes différentes ou des caractéristiques différentes, on est prêts à regarder ça et on vous soumet une proposition là-dessus.

On vous fournit, dans les pages suivantes, un tableau de distances, que je ne lirai pas, mais, pour vous laisser sur l'essentiel de ce qu'on veut vous transmettre aujourd'hui, je lirai la conclusion qui est à la page 20.

Les producteurs et productrices agricoles vivent actuellement des changements importants tant au chapitre de l'environnement qu'au regard de la nouvelle donne économique qui se profile à l'aube du troisième millénaire. Il leur faut relever le défi d'une agriculture efficace et performante qui se comparera avantageusement à celle des autres pays et celui d'une agriculture respectant les principes du développement durable.

Les agriculteurs sont fiers de leurs terres et du formidable bond dans la modernité que l'agriculture a fait au cours des dernières décennies, de même que des efforts qu'il a fallu déployer pour accomplir cette tâche. Les agriculteurs ont à coeur que la société québécoise partage avec eux cette réussite et qu'elle les soutienne dans leurs efforts pour concilier agriculture et environnement. Le processus est déjà engagé avec l'intensification d'une stratégie agro-environnementale chez les producteurs agricoles et l'entrée en vigueur prochaine du projet de règlement sur la réduction de la pollution d'origine agricole ne fera qu'asseoir cette démarche.

Quant aux inconvénients de voisinage dont il a été question tout au long du présent document et pour lesquels l'Union a soumis diverses propositions de règlement, ce qui importe aux yeux des producteurs agricoles, c'est que: Premièrement, qu'on reconnaisse enfin de façon concrète, c'est-à-dire au-delà des principes, qu'en zone agricole c'est l'activité agricole qui est prioritaire et que les autres activités, sans être absentes, doivent à tout le moins lui être subordonnées. Jusqu'à présent, les producteurs et productrices agricoles ont la nette impression qu'il revient toujours à eux de s'éloigner. Il y a donc urgence de respecter l'esprit et la lettre de la loi 23.

Deuxièmement, qu'on reconnaisse qu'il est primordial que la marge de manoeuvre accordée aux municipalités soit explicitement encadrée par des orientations gouvernementales plus resserrées, primordial pour des questions d'équité entre les producteurs de tout le territoire dans l'exercice de leur profession, primordial pour une nécessaire clarté des règles de voisinage, tant à l'endroit des producteurs agricoles qu'à celui des autres résidents du milieu rural. Au surplus, les distances séparatrices proposées devront s'apparenter à celles déjà édictées dans la directive actuelle, du moins pour le bâti. En formulant ces exigences, nous signifions en fait une demande élémentaire mais impérieusement nécessaire, à savoir que le gouvernement fasse le choix de l'agriculture en zone verte, c'est-à-dire le choix d'un Québec agricole non seulement durable, mais aussi possible pour les 46 000 producteurs et productrices agricoles québécois.

Le Président (M. Vallières): Je vous remercie, M. Pellerin, pour votre présentation. Je veux simplement rappeler aux gens qui participent à nos travaux comme observateurs qu'ils n'ont d'aucune façon le droit de manifester leur approbation ou désapprobation face à ce qui se passe en cette Chambre.

Ceci nous amène à une quarantaine de minutes d'échange avec l'Union des producteurs agricoles. La parole sera d'abord donnée au ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

M. Julien: M. le président, MM. les vice-présidents, M. Lafleur, directeur général, d'abord, je dois vous dire que j'apprécie énormément le mémoire, la façon dont il est présenté, les différents éléments qu'on y retrouve. Ce que je tiens à vous dire, c'est que je trouve que vous amenez le débat à un niveau tel qu'on doit le discuter dans les prochaines semaines pour arriver à notre droit de produire dans le cadre d'un développement durable.

Je reviens à votre conclusion parce que je trouve que, dans votre conclusion, vous résumez vraiment les éléments importants. Si vous me permettez, j'aimerais en citer quelques-uns: D'abord, qu'il faut relever le défi d'une agriculture efficace et performante se comparant avantageusement avec celle des autres pays et celui d'une agriculture respectant les principes du développement durable. Un autre élément important, c'est que les agriculteurs ont à coeur que la société québécoise partage avec eux cette réussite et qu'elle les soutienne dans leurs efforts pour concilier agriculture et environnement. Quand vous dites ça, vous faites référence aussi à tous les efforts qui ont été faits depuis les derniers mois, les dernières années, soit par les fédérations, soit par l'UPA, et même la Fédérée, hier, qui nous déposait son plan à ce niveau-là. Ça, je pense que c'est, pour moi, un élément excessivement important. Je suis très heureux que vous l'ayez mentionné.

Dans les deux considérants, vous dites, premièrement, qu'on reconnaisse afin que, de façon concrète, c'est-à-dire au-delà des principes, qu'en zone agricole c'est l'activité agricole qui est prioritaire et que les autres activités, sans être absentes, doivent à tout le moins lui être subordonnées. L'autre, c'est qu'on reconnaisse qu'il est primordial que la marge de manoeuvre accordée aux municipalités soit explicitement encadrée par des orientations gouvernementales plus resserrées.

C'est des opinions que, moi, je partage, et, là-dessus, j'ai peut-être une question, parce qu'il va y avoir quatre ministres qui vont avoir des questions à poser et on a 20 minutes. Quand vous dites: Qu'on reconnaisse, en zone agricole, que c'est l'agriculture qui est prioritaire, que la marge de manoeuvre des municipalités soit explicitement encadrée par des distances séparatrices qui s'apparentent à celles édictées par les directives actuellement utilisées», moi, ce que je veux savoir: Pour vous, tel que c'est là, actuellement, est-ce que c'est possible aux producteurs agricoles de concilier ces principes-là avec la nécessité d'élaborer des consensus locaux? Ma question fait référence à la Convention Saint-Valentin qui vous a été présentée au tout début de cette commission. J'aimerais ça que vous nous fassiez un petit un lien à ce niveau-là.

Le Président (M. Vallières): M. Pellerin.

M. Pellerin (Laurent): D'abord, sur «est-ce qu'il est possible de travailler avec ce qui existe actuellement?», sûrement; c'est toujours possible. Je l'ai dit dans la présentation que j'ai faite, en ce qui concerne les bâtiments, en particulier. Ce avec quoi on a appris à vivre dans les 15 dernières années, c'est quelque chose qui est probablement encore bonifiable, mais sur lequel il y a une bonne base.

La problématique dans ce qui est sur la table, autant dans la directive nouvelle émise depuis l'été dernier, c'est la question des épandages à des distances qui, pour l'agriculture du Québec, pour la composition, la séparation des lots agricoles du Québec, priverait de 25 %, 30 %, 50 % dans certains cas, des capacités d'épandage, des possibilités d'épandage des producteurs agricoles. C'est pour ça que j'ai affirmé aussi que, à tout le moins, sur les terres dont nous sommes propriétaires, nous revendiquons la possibilité de les fertiliser au moins une fois l'an, dans les meilleures façons de faire possible, mais, une fois l'an, avec les fumiers et les lisiers que nous produisons sur nos fermes.

(10 h 50)

M. Julien: Peut-être préciser votre pensée, par ailleurs, ou votre réaction – c'est la dernière question – par rapport à la convention de Convention Saint-Valentin, parce qu'on nous a expliqué qu'il y avait eu vraiment un consensus, et j'aimerais ça avoir votre opinion là-dessus.

M. Pellerin (Laurent): Je pense que ce genre de travaux là, et nous avons supporté dans la loi 23 l'établissement des comités consultatifs agricoles même si – j'espère que vous le comprendrez – pour le monde agricole, avec les 46 000 producteurs – bientôt quelque mille de moins sur ce 46 000 parce que le nombre n'est jamais en croissance – la difficulté de fournir 500 ou 600 personnes qui vont aller travailler sur ces comités consultatifs agricoles, à la grandeur du Québec, compte tenu que nos gens travaillent déjà de nombreuses heures par jour, sept jours par semaine, et, malgré ça, on s'engage dans la démarche, doit illustrer la bonne foi ou l'espoir qu'on met dans ces comités consultatifs agricoles, à certaines conditions par ailleurs.

J'en ai énuméré une, condition: celle de pouvoir revenir rétroactivement sur des règlements qui sont passés et qui nous apparaissent inapplicables; celle de pourvoir travailler sur des règlements tant que les schémas d'aménagement ne seront pas révisés, sur des règlements qui ne viendront pas changer l'objectif de la loi; celle aussi d'avoir un cadre d'intervention pour les municipalités qui soit limité autant par le bas que par le haut, et toutes exceptions à ces limites par le haut vont devenir un précédent qui va être utilisé dans les autres MRC, dans les autres municipalités, et nous avons une extrême difficulté à comprendre comment on pourrait dépasser les limites supérieures à un endroit et que ça ne donne pas la tentation à la municipalité suivante... C'est pareil comme s'il n'y avait plus de maximum, la fois où tu donnes l'occasion de le dépasser.

Pour le producteur agricole qui a des lots contigus dans deux municipalités ou dans deux MRC voisines, vous imaginez-vous qu'il soit obligé de suivre des normes différentes dans une municipalités et dans l'autre? Pour le citoyen qui se promène à la grandeur du Québec, comment va-t-on lui expliquer que dans une municipalité, c'est x, et dans l'autre, c'est y, dans l'autre, c'est z, le règlement? Le citoyen producteur, comme citoyen en général, doit être en mesure de s'attendre à quelles lois, quels règlements vont être appliqués, et de se comporter en conséquence, et non pas une série de règlements qui sont différents d'une municipalité à l'autre.

M. Julien: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Vallières): Alors, merci. J'irai maintenant du côté du chef de l'opposition, M. le député de Vaudreuil.

M. Johnson: Oui, je vous remercie, M. le président, MM. les vices-présidents, M. le directeur général, il me fait extrêmement plaisir de vous voir ici aujourd'hui, de vous voir nombreux ici. Je crois que vous être assez nombreux dehors également pour aller manifester; selon nos règlements, M. le Président, je crois que ça se fait à l'extérieur de nos murs.

Je voulais signaler par ma présence aujourd'hui l'importance que j'accorde et que notre groupe parlementaire accorde aux demandes que vous formulez à la recherche, je dirais, à la défense que vous voulez entendre, quelque part ici, dans ces murs-là, des demandes que vous formulez.

Je suis un citadin, moi, je ne cacherai ça à personne, comme plusieurs d'entre nous, mais j'ai tâté de la politique j'avais deux ans et demi, dans le comté de Bagot, notamment – les Maskoutains s'en souviennent davantage – et j'ai appris rapidement qu'est-ce que ça signifiait au point de vue économique, la production agricole. Qu'est-ce que ça signifiait surtout – c'est ça que j'aimerais retenir, et je reviendrai là-dessus avec une question précise pour vous, M. Pellerin – qu'est-ce que ça représente comme facteur de stabilité sociale, également, la forme d'agriculture qu'on a développée au Québec. Vous avez fait un retour historique extrêmement pertinent sur l'organisation du territoire qui, évidemment, a résulté des concessions qui ont été faites en matière agricole aux premiers producteurs ici, sur le continent, dans le coin français du continent, à tout le moins.

Ce qui me frappe dans votre mémoire – et ce qui m'a frappé aussi dans ce que le ministre a dit – c'est qu'il dit qu'il partage certaines de vos opinions, mais j'aimerais aussi savoir si vous avez senti qu'il partageait la conclusion, qui est de faire le choix de l'agriculture en zone verte. Ça, c'est important, c'est une demande. Ça doit inquiéter l'UPA, s'ils sont obligés d'écrire noir sur blanc qu'ils aimeraient que le gouvernement fasse ce choix-là. Est-ce qu'il n'y a pas deux problèmes ici en réalité? Là, il y en a un qui est un problème environnemental, disons possible, à caractère scientifique, mesurable, bon, il y a des effluents, il y a des effets sur la nature, sur les gens, de certaines productions.

Mais c'est aussi un problème social que vous avez évoqué, davantage. J'ai trouvé que c'est un problème de coexistence, alors que la société se transforme et que les gens déménagent vers la campagne, entre guillemets, et ça, je le vis dans mon comté aussi, on dirait qu'il y a une attente de la part des «déménageux», que les bâtiments agricoles déménagent, que les terres arables déménagent, que la zone verte change de place, etc. Il y a quelque chose qui ne marche pas là-dedans au point de vue de la coexistence. Votre appel à la tolérance et à la compréhension est intéressant. Ce n'est pas suffisant, je le dis au ministre tout de suite, ce n'est pas suffisant, des appels à la compréhension et à la tolérance. Ça prend un cadre juridique quelque part.

Ce que vous dénoncez, ça, on vous appuie là-dedans: C'est qu'en se déchargeant d'une responsabilité vers le milieu local ça devient des luttes qui se règlent dans des salles de conseil surchauffées le premier ou le deuxième mardi, là, où vous êtes 60 puis les autres sont 3 500. On voit où ça finit dans ce temps-là. J'ai compris que vous ne voulez pas que la démocratie soit maintenant l'expression du vote selon la surface cultivée détenue par le contribuable. Ce n'est pas ça. La question est de savoir où doit s'exercer le choix politique de dire que la coexistence doit être encadrée. La coexistence doit être gérée. La tolérance doit être – c'est presque une contradiction – imposée. L'exercice de tolérance doit être imposé. À mon sens, c'est ce que je sens. Vous voulez préciser ça. Je trouve que c'est mieux logé au gouvernement du Québec, qui fait le choix de l'agriculture, que de dire aux municipalités: Voyez donc comment vous allez gérer la coexistence et la tolérance.

Les municipalités, les MRC ont leur mot à dire. Les gens du syndicat de base dans mon coin m'ont donné une photocopie d'un document que les agents d'immeubles dans certaines régions de l'État de Washington distribuent à des clients potentiels. Ils leur font signer un document comme quoi ils savent qu'ils sont en train de faire du magasinage pour une maison, une propriété dans une zone agricole, que c'est une priorité pour cette MRC là, le «county», le droit de produire, et qu'il y a des inconvénients 24 heures par jour quand tu t'installes, un citadin, tu t'imagines que tu vas déménager. Il y a donc des municipalités dans d'autres comtés, c'est évident, là, qui s'en sont mêlées et qui ont reconnu, comme vous l'avez souligné, le droit de produire.

Est-ce que vous sentez que nos élites, nos pouvoirs municipaux, les édiles, dis-je, municipaux sont habilités aujourd'hui – Est-ce que ça dépend des régions? Est-ce que c'est un phénomène général? – à exercer cette gestion de la tolérance et du respect de la coexistence alors que la société change, mais que l'agriculture, elle reste à la même place? Elle ne déménage pas. Elle est toujours à la même place. Ou est-ce que ça devrait être au niveau des MRC, ça devrait être au niveau dit régional, maintenant qu'on parle en termes de régionalisation, décentralisation, ou est-ce que ça ne devrait pas plutôt être le choix – je signale tout de suite mon préjugé – du gouvernement du Québec de dire: L'agriculture dans la zone verte, ça, c'est une bonne idée, c'est nous autres qui nous en occupons?

M. Pellerin (Laurent): Je pense que c'est une opportunité que vous nous donnez par votre question de rappeler clairement ce qu'on cherche dans cette situation-là. Les élus du monde municipal sont, dans de trop nombreuses occasions, sous une pression intense de la part de certains groupes de citoyens. Que les pressions soient justifiées ou non, ils sont sous une pression énorme et ils n'ont très souvent pas d'autre choix que de se rendre aux conclusions de cette pression-là. Notre premier choix aurait été sûrement d'avoir une réglementation provinciale uniforme. Ça, on ne s'en est jamais caché.

(11 heures)

Suite à des discussions avec l'UMRCQ auxquelles mon premier vice-président, M. Chagnon, a longuement participé et à l'entente qui a été signée au printemps 1995, on est prêts à concéder que les municipalités puissent faire un bout de travail là-dedans, mais c'est à la condition que le gouvernement supérieur les encadre de façon assez ferme et qu'on évite tout dépassement de ce cadre-là. Donc, à quelque part, ça ressemblera à un cadre provincial duquel découlera une certaine fermeté et une marge de manoeuvre aux régions qui ont des vocations agricoles premières mais qui, aussi, peuvent avoir développé des vocations autres au cours des ans et qu'on veut respecter aussi parce qu'elles nous aident à faire vivre le milieu rural.

Alors, je pense qu'il y a un dosage là-dedans. Je l'ai dit tantôt: L'espoir de voir un règlement qui va permettre ça, depuis un an, on ne l'a pas vu, cet espoir-là, parce que tous les règlements accompagnant la loi n° 23 ne nous ont pas donné espoir que ça se réaliserait. Au contraire, on a vu s'empiler un paquet de règlements municipaux qui sont allés totalement à l'encontre de ça. J'ai vu même des avis juridiques de certaines firmes d'avocats suggérant aux municipalités d'aller très vite avant le mois de juin pour passer un règlement général de zonage chez eux, parce qu'après la promulgation de la loi n° 23 ils ne pourront plus le faire. Alors, il y a une accélération, et quand c'est rendu, à ville Saint-Jean, à l'est du Lac-Saint-Jean, qu'une municipalité agricole passe un règlement de zonage de production, ou dans le fin fond de l'Abitibi, je pense qu'il y a exagération.

Le Président (M. Vallières): M. le député de Vaudreuil.

M. Johnson: Je vous écoute, et on dirait que le poids de la réglementation ne vise pas à encadrer un droit de produire mais à imposer une obligation de ne pas produire.

M. Pellerin (Laurent): Dans certains endroits, je l'ai dit tantôt, l'exemple d'une unité animale, il existe. C'est un règlement qui a passé, ça, là. Et celui-là, s'il n'empêche pas la production d'une unité animale, il n'y a personne qui va penser à regarder ça aujourd'hui. C'est ridicule. À d'autres endroits, c'est plus subtil que ça. Dans l'Abitibi, il y a une MRC qui a passé un règlement sur la construction des bâtiments, l'allure et les matériaux... que les bâtiments devront être faits, architecturaux. Les maires et les préfets connaissent bien ça. Ç'a l'air qu'ils contrôlent ça dans les centres-villes, l'histoire de Québec, et tout ça. Mais là, quand on est rendu à contrôler la construction des bâtiments agricoles de cette sorte-là, c'est parce qu'on veut empêcher la construction de certains types de bâtiments, certaines formes de bâtiments. Et on sait très bien ce qui est visé. Alors que dans d'autres régions, on a passé des règlements où, à 2 k de toute voie carrossable, on ne pouvait pas construire un bâtiment d'élevage porcin, veau et volaille.

On parle souvent du secteur porcin, mais, tant qu'à passer le règlement, on le passe pour couvrir l'ensemble. À 2 k de toute voie carrossable! Au Québec, on a grand de territoire, mais ça doit être un méchant trou! Ça n'existe pas. On ne dit pas qu'on ne peut pas. «Non, non, notre règlement est très permissif», à 2 k de toute voie carrossable! Ça existe, ce règlement-là, au Québec. Je ne vous fais pas de la fiction, ça existe.

Le Président (M. Vallières): M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: C'est intéressant, ce dont le ministre de l'Environnement, tout à l'heure, s'enquérait, avant qu'on commence nos travaux, s'il y avait des producteurs de porc dans mon comté. Je crois comprendre qu'avec ce règlement-là il n'y aurait aucune production animale dans mon comté, évidemment si c'était en vigueur. Mais ma question vise à voir comment vous croyez que le gouvernement du Québec devrait signaler aux milieux municipaux, locaux et régionaux cet encadrement que vous vous souhaitez? Que vous souhaitez. Ça été soulevé des deux côtés – tout le monde – la nécessité, au point de vue environnemental, de faire en sorte qu'on ait tellement un beau dossier que ça devienne une cote de vente à l'international, évidemment, où la sensibilité existe toujours davantage.

Vous êtes dans les loges ou dans les premiers rangs, évidemment, de ces réalisations-là en matière environnementale: atteinte d'objectifs environnementaux, mais, du point de vue de l'autre aspect, la coexistence – parce que c'est ça qui me frappe davantage, avec les changements sociaux, l'impact du changement de mode de vie des familles québécoises, littéralement, site qu'ils choisissent, les endroits où ils commencent à s'installer – crée une espèce d'impatience à l'endroit de ces nouveaux habitants de nos milieux agricoles, qui n'est pas fondée, qu'il faut absolument enrayer, mais il faut l'enrayer dans la compréhension, aussi, de ces changements-là. Comment le gouvernement, d'après vous, devrait agir de façon concrète pour signaler à nos instances municipales que les dépassements – on va les appeler comme ça, que vous signalez – n'ont pas leur place dans une société tolérante?

M. Pellerin (Laurent): Je l'ai dit tantôt, la difficulté qu'on a eu depuis un an et une des raisons principales pourquoi il y aura 10 000 producteurs ici aujourd'hui, c'est que depuis un an, ça s'accumule. Il n'y a aucun signal qui a été envoyé aux municipalités pour dire: Écoutez, c'est assez. Ça n'a pas d'allure, ces choses-là. On nous laisse devant l'obligation d'aller contester légalement ces règlements, ce qui est tout à fait – encore là à cause du nombre qu'on est – tout à fait impossible. Ça ne se peut pas qu'on ait l'obligation d'aller contester un par un ces règlements-là et un jugement sur un ne nous donnerait pas le précédent sur les autres, parce qu'ils sont de types différents. Alors, il faudrait y aller maintes et maintes fois et ça n'a aucun sens. Je pense que le temps de la concertation, le temps des discussions, le temps des négociations, pour nous, il est terminé. On a besoin d'une décision dans les prochains jours, dans les prochaines semaines et d'une décision qui va nous donner un signal que, au Québec, on peut continuer à investir parce que la pratique de l'agriculture, elle sera valorisée et reconnue. Si jamais c'était le signal contraire, on sera obligé de revenir à la charge.

Le Président (M. Vallières): Merci, M. Pellerin. M. le ministre de l'Environnement et de la Faune.

M. Cliche: Je vais essayer d'être bref, pas plus de cinq minutes en échange pour laisser la chance à mes collègues de s'exprimer. Bonjour aux gens de l'UPA. Bonjour à mon président, parce que je suis membre de l'UPA via le Syndicat des producteurs de bois de la Beauce, et ceux et celles qui voyaient un affrontement ce matin, bien, il n'y en aura pas, d'affrontement, parce que j'ai lu en diagonale votre rapport et on est sur la même longueur d'onde. Et pour répondre aux questions du chef de l'opposition qui sont, comme toujours, des questions pertinentes, il y a deux messages qu'on veut donner. Le message que j'ai le droit de produire, ça veut dire que les producteurs agricoles, à l'intérieur de balises sur la zone verte, vont avoir le droit de produire en paix, et c'est le sens même de la loi. Il ne faut pas oublier qu'il y a une loi qui a été adoptée par l'Assemblée nationale et qui va être en vigueur d'ici le 20 juin, et c'est un engagement du gouvernement. Il faut lire l'article, je lis, je cite: «Le régime de protection du territoire agricole institué par la loi a pour objet d'assurer la pérennité d'une base territoriale pour la pratique de l'agriculture et de favoriser, dans une perspective de développement durable, la protection et le développement des activités et des entreprises agricoles dans les zones agricoles dont il prévoit l'établissement.»

Alors, c'est plus qu'un message politique, c'est une loi. L'autre chose que je veux vous dire, c'est que les règlements que nous allons adopter, que nous allons passer d'ici le 20 juin, et M. le ministre des Affaires municipales, mon collègue, va parler du sens des règlements au niveau des municipalités, vont avoir préséance sur les règlements que vous jugez abusifs. Et c'est ça, le message clair qu'on veut vous passer: oui, nous sommes conscients que dans certaines municipalités il y a un abus au niveau de la réglementation qui fait en sorte que ça se trouve à vous exclure de la zone verte, mais les règlements qui vont sortir d'ici vont avoir préséance sur ceux des municipalités, et c'est ça, le droit de produire. Et tout le défi maintenant, c'est de déterminer la balise. Sur le fond de votre document, à titre de ministre de l'Environnement et de la Faune, je suis d'accord. On s'entend, il faut avoir un règlement qui réduise la pollution agricole, et vous êtes d'accord là-dessus. Tous vos prédécesseurs, vos associations affiliées ont dit oui au programme de fertilisation, oui, on va prendre le virage, et l'organisme avant vous a dit: Même, ça peut être des économies.

Sur l'encadrement des nuisances, on est d'accord sur le fond. Vous convenez qu'on doit encadrer les nuisances pour vous permettre de travailler en paix puis arrêter l'hystérie collective eu égard aux nuisances et la production agricole. Cependant, je vous signale que le tableau final qui va sortir du gouvernement va sans doute être différent, au niveau des chiffres, de ceux qu'on retrouve dans vos suggestions. Mais, sur le fond, on est d'accord. Parce qu'il y a eu d'autres organismes qui ont proposé d'autres tableaux et, nous, il va falloir faire un arbitrage là-dedans. Mais les chiffres qui vont sortir d'ici vont mettre fin à l'arbitraire, qui est souvent trop le cas dans les régions, vont mettre fin, espérons-nous, et c'est

ça notre objectif, à la crise qui en ce moment traverse le Québec eu égard à la production agricole. J'aurais deux questions essentiellement techniques, parce que je pense que sur le fond on est essentiellement sur la même longueur d'onde. Et lorsque vous dites que votre respect des règles de l'environnement est synonyme que vous puissiez continuer à développer votre secteur industriel et votre secteur économique, je pense que c'est fondamental et, là-dessus, je pense que tout le monde autour de cette commission et tous les gens qui sont passés ici disent la même chose.

Questions plutôt techniques, je m'excuse d'être au-delà de ces éléments, être plutôt technique. Je pensais qu'on s'était entendus, dans le cadre des multiples discussions qu'on a eues, notamment les discussions qui ont eu lieu entre mon sous-ministre, Marcel Jean, et votre directeur général, M. Lafleur, sur la réduction de la pollution agricole et les eaux, on s'était entendus d'interdire les gicleurs, les canons, là, qui sont vraiment source de problèmes dans les villages, parce qu'un canon ça peut porter l'odeur à 2 km. Et là je retrouve ça ici. Nous, notre intention, c'est d'interdire les canons, puis le ministre des Finances a prévu au budget de l'argent pour vous aider à en acheter d'autres. J'aimerais ça vous entendre là-dessus. Ça serait peut-être pas plus simple d'interdire les canons qui «pouichent» les odeurs à 2 km que laisser ça là?

(11 h 10)

M. Pellerin (Laurent): Je pense qu'on s'est positionnés, et vous me donnez l'occasion de faire la distinction entre deux choses fort importantes pour nous autres, un terrain sur lequel plusieurs personnes nous ont amenés au cours de la dernière année à mêler ensemble la question environnementale avec la question de la protection des activités agricoles. Je veux ici faire une distinction sur toute la question environnementale, les règlements environnementaux. Pour nous, c'est clair dans notre esprit, et même, l'UPA, représentant l'ensemble des producteurs agricoles du Québec, demande depuis un an la mise en application de ce règlement, protection aux sols. Et ça, c'est une question, pour nous, qui est claire. Les producteurs agricoles ont déjà donné des signes là-dessus, et les études mêmes du ministère de l'Environnement nous révèlent qu'il y a une réduction de 13 % de l'utilisation des pesticides dans les trois dernières années, 15 % des engrais chimiques, réduction, 100 000 tonnes métriques de moins.

Ce n'est pas quelque chose qui va commencer demain matin. Les producteurs ont déjà initié les changements depuis plusieurs années; la prise en charge de la Fédération des producteurs de porc pour bâtir le portrait des 3 500 entreprises porcines du Québec, ça n'existe pas, nulle part, dans aucun ministère, le portrait global. Les producteurs prennent la responsabilité de le faire et l'UPA, à son dernier conseil général, dans la foulée de la Fédération des producteurs de porc, on a décidé unanimement que d'ici au mois de septembre on mettrait en place un plan d'action pour faire le portrait des 25 000 fermes qui seront touchées par le prochain règlement aux sols.

Si cela n'est pas interprété et répété comme une responsabilisation des producteurs agricoles à l'endroit de la question environnementale et qu'on n'arrête pas de pointer du doigt les producteurs agricoles, je me demande ce qu'il faudra faire. On le fait même à la place du gouvernement. Il n'y a aucun portrait global des certificats qui ont été émis au Québec qui existe actuellement, ni au ministère de l'Environnement, ni au ministère de l'Agriculture, et les producteurs, on va le faire; on va payer pour le faire et on est prêt à le faire. Mais on voudrait que ce soit interprété dans le bon sens. Et, ces actions-là, je vous le dis, mois de septembre, l'année prochaine, le bilan de ça, les actions correctives, ça va tout suivre, et ça, c'est la question environnementale, mise en application du règlement aux sols, tout à fait d'accord.

D'un autre sujet, qui est celui sur la cohabitation harmonieuse dans le milieu rural, que les choses soient bien faites, dans les règles de l'art, mais après qu'elles sont bien faites dans les règles de l'art, qu'on ait la paix, la tranquillité, sur nos biens de productions, qui nous ont été transmis, je le répète, de génération en génération, plusieurs générations dans certains cas. Qu'on n'aille pas dire au monde: Attention! tu ne produis plus ici. Tu vas aller dans le cinquième rang, en arrière. Mais mes ancêtres sont ici. Non, non, tu vas aller dans le cinquième rang, en arrière. C'est là qu'on a décidé que se faisait tel type d'activité. Qu'on reconnaisse l'histoire du Québec. Et puis j'aimerais ça que, si, aujourd'hui, on était juste capable de retenir cette distinction entre la question environnementale et la question de la pratique des activités agricoles, on aurait fait un petit bout de chemin.

Le Président (M. Vallières): Merci.

M. Pellerin (Laurent): Pour les canons, c'est la période transitoire, en attendant que le règlement aux sols soit en place.

M. Cliche: O.K. Mais, après ça...

M. Pellerin (Laurent): Si le règlement l'interdit, on a donné notre accord là-dessus, on ne revient pas...

M. Cliche: O.K. On l'interdit. O.K.

M. Pellerin (Laurent): En plus, il prévoit, le règlement, ne pas l'interdire à la mise en application du règlement. Il prévoit l'interdire dans un certain délai de temps.

M. Cliche: Le 1er janvier 1998.

M. Pellerin (Laurent): C'est ça. Alors, d'ici au 1er janvier 1998, 300 m.

M. Cliche: O.K. On est d'accord.

M. Pellerin (Laurent): C'est ce qu'on suggère.

M. Cliche: On est d'accord.

M. Pellerin (Laurent): Période transitoire.

Le Président (M. Vallières): Merci. M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Farrah: Oui, merci, M. le Président. M. Pellerin, messieurs, bonjour et merci de votre présentation. C'est très intéressant, comme d'habitude.

J'écoutais le ministre de l'Environnement, et c'est là qu'est tout le débat. Alors qu'il nous dit: On s'entend sur le fond, production en zone verte; on s'entend sur le fond, pas de problème. On s'entend bien, mais avec des balises. Bien, il va falloir qu'il comprenne que le problème, ça peut être les balises. Il nous annonce déjà que la proposition, pensez-y pas. Il vient de nous le dire, là. Pensez-y pas, là, à votre proposition.

Une voix: ...

M. Farrah: Et c'est là que j'ai de la misère à suivre le ministre de l'Environnement au niveau de ce cheminement-là, parce que ça me semble incohérent. Parce que, effectivement, des balises – et c'est votre crainte – peuvent faire en sorte de diminuer, justement, l'agriculture en zone verte. La lecture est-elle exacte?

M. Pellerin (Laurent): Moi, aujourd'hui, je suis un porte-parole. Mais je viens vous porter le résultat de longues réflexions, des milliers d'heures de discussion avec nos producteurs partout à travers le Québec, et c'est le travail qu'on vient vous porter aujourd'hui.

Il y a 10 000 producteurs qui seront à l'extérieur bientôt, qui viennent vous dire que ce document-là, ce n'est pas le document à Pellerin. C'est le document largement partagé partout dans notre structure, par l'ensemble des producteurs agricoles du Québec.

Si on pense qu'il y a d'autres normes ou d'autres distances qui peuvent être mises en application, j'aimerais qu'on nous fasse la preuve qu'on pourra continuer de développer l'agriculture avec. Nous, on pense – j'espère qu'il n'y a personne qui nous contestera l'expertise d'être les producteurs, au Québec – que c'est avec des normes comme celles-là qu'on va être capable de développer l'agriculture. Des normes comme celles qu'on a entendues depuis un an ne permettent pas l'existence et encore moins le développement de l'agriculture.

Le Président (M. Vallières): M. le député des Îles-de-la-Madeleine, oui.

M. Farrah: Alors, dans la même foulée, ça veut dire que, compte tenu, pratiquement, de l'attitude gouvernementale depuis un an, si vous en êtes rendus à venir en avant pour manifester, ce n'est pas pour le plaisir de le faire. C'est que vous êtes à bout de souffle, et ça, on peut vous comprendre là-dessus.

Alors, compte tenu qu'il n'y a pas d'écoute à ce niveau-là, j'imagine que vous appréhendez le dévoilement du règlement, en juin prochain, compte tenu que, là, là, après la commission parlementaire, on a bien beau faire des bonnes discussions, en discuter de longues heures et à juste titre, mais il reste que la balle est dans le camp du gouvernement, qui va nous déposer... ça va tomber du ciel, là, un règlement le 20 juin, supposément, et on n'aura pas eu la chance d'en discuter, de ce règlement-là. Alors, est-ce que ça vous inquiète, cette attitude-là, compte tenu que vous ne serez pas mis à contribution face à l'éventuel décret du gouvernement qui va nous tomber sur la tête en juin prochain?

M. Pellerin (Laurent): Tout à fait. Je pense que, dans des mots les plus pondérés possibles tantôt, j'ai essayé d'exprimer nos craintes, notre manque d'espoir sur un message constructif à l'endroit de l'agriculture, et je vous dis que dans la dernière année, pour quelqu'un qui vit sur ses terres et qui rencontre ses voisins et rencontre des milliers de producteurs partout dans les réunions, les messages d'espoir, ils n'ont pas été entendus nombreux. C'est peut-être une question de perception, mais en tout cas, ils n'ont pas été perçus nombreux. On a eu le contraire à plusieurs occasions, et là, on a besoin d'un signe clair en faveur de l'agriculture, d'une décision.

Le Président (M. Vallières): M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Farrah: Oui. D'ailleurs, ça fait état de votre conclusion au dernier paragraphe, à savoir que le gouvernement fasse le choix de l'agriculture en zone verte, je pense.

Peut-être qu'un des problèmes que le chef de l'opposition a soulevés tout à l'heure à juste titre, c'est évidemment la coexistence, la cohabitation, l'aspect social. Est-ce que l'attitude gouvernementale depuis un certain temps a fait en sorte d'antagoniser les parties, fait en sorte d'éloigner les parties et, justement, à diminuer les chances d'en arriver à un consensus pour, justement, faire en sorte que vous puissiez, en zone verte, en tout respect de l'environnement, établir vos activités agricoles, et en paix et en tout respect de l'environnement? Est-ce que cette attitude-là a fait en sorte d'antagoniser les parties?

M. Pellerin (Laurent): Vous voulez m'emmener sur un terrain que j'avais choisi délibérément de ne pas aborder ce matin.

M. Farrah: Vous êtes libre d'y répondre, M. Pellerin.

M. Pellerin (Laurent): Les relations entre le monde agricole et les différents intervenants qui entourent l'agriculture, dans la dernière année, n'ont pas toujours été, malheureusement, des relations constructives comme on aurait pu le souhaiter dans l'évolution d'un dossier comme celui-là, et j'espère que notre position aujourd'hui et la façon dont on la présente mettra fin, pour le plus longtemps possible, à ce genre d'approche de déclarations non constructives.

M. Farrah: Peut-être que ma dernière question, M. le Président...

Le Président (M. Vallières): Oui, M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Farrah: ...serait au gouvernement. Compte tenu des propos qui ont été tenus, compte tenu qu'on demande que le gouvernement fasse le choix de l'agriculture en zone verte – on a quatre ministres du gouvernement ici devant nous – est-ce que le gouvernement entend faire ce choix-là?

M. Cliche: On a lu la loi, on vient de lire la loi.

Une voix: On l'a... Nous, on l'a...

M. Cliche: On a une loi adoptée, tu sais.

Une voix: Nous, on l'a adoptée, la loi.

M. Cliche: On n'a pas de leçons à avoir d'eux autres.

Une voix: Ils n'ont pas l'air satisfaits, par exemple.

Le Président (M. Vallières): Merci. S'il vous plaît.

M. Trudel: Il y en a qui placotent et il y en a qui emploient les lois.

Une voix: Il paraît que ce n'est pas assez.

Le Président (M. Vallières): Bon. Un à la fois, s'il vous plaît. Bien. Alors, je passe maintenant la parole au ministre de la Santé et des Services sociaux pour cinq minutes.

M. Rochon: Oui.

Le Président (M. Vallières): M. le ministre.

M. Rochon: Alors, merci, M. le Président. J'apprécie beaucoup de pouvoir participer à cette rencontre et à cette discussion ce matin. Soyez assurés que jusqu'à présent j'ai suivi de près tout ce débat en travaillant avec mes collègues de l'Agriculture, de l'Environnement et des Affaires municipales et en vous lisant par vos différentes productions.

C'est surtout un commentaire, M. le Président, que je voudrais faire, qui va peut-être susciter un commentaire aussi de votre part, parce qu'on est plutôt habitué, dans les débats publics, à voir le ministère de la Santé et des Services sociaux intervenir sous sa responsabilité de production de services. Mais dans la réalité, même si c'est moins souvent grand public, l'action, même sur le terrain, en santé publique est une mission fondamentale du ministère depuis longtemps. Mais dans ce type d'intervention, qui en est une de santé publique, justement, je pense que c'est important de bien voir qu'on vient sous l'angle non pas de la réparation du dommage ou d'un traitement d'un problème, mais sous un angle de prévention.

(11 h 20)

Ce qui veut dire que, quand on intervient, ça peut aider à clarifier et à comprendre comment on va rester associés et impliqués dans ce débat. Je veux dire que, souvent en santé publique, et plus souvent qu'autrement, on intervient sur des facteurs de risque, parce que je me réfère surtout à la page 10 de votre mémoire, où vous avez des commentaires dont j'ai bien pris note sur certains aspects du débat, surtout les paragraphes 2° et 3°.

C'est sûr que, quand les considérations de santé publique, par rapport surtout à la situation des odeurs, c'est ça qui a été beaucoup dans le débat, on ne travaille pas avec une cause connue d'un problème de santé réel. Par contre, on n'est pas à l'autre extrême non plus, où on travaille avec une pure corrélation statistique dont on ne peut pas analyser la signification. On est un peu entre les deux, sur ce qui est bien connu en santé publique, sur un facteur de risque, c'est-à-dire quelque chose où on peut mesurer de façon constante et avec un raisonnement, une explication possible, une relation, un lien avec une situation.

La situation, dans ce cas-ci, qui a été mesurée et ce concept de détresse psychologique, comme facteur de risque, ça, c'est quand même un indice qui est utilisé maintenant en épidémiologie de façon internationale, mais c'est un indice qui mesure une fréquence de certains phénomènes dans une population et qui essaie d'en mesurer aussi sa distribution. Alors, c'est de la nature d'un symptôme, en fait. Ça n'identifie pas comme tel un problème très défini, mais c'est un symptôme. Mais, en général, un symptôme, on veut s'assurer qu'il n'y a pas quelque chose d'important derrière ça.

Et on sait très bien maintenant, dans le domaine de la santé, qu'il y a des relations très étroites entre des réactions, des conditions qui affectent la partie psychologique de notre fonctionnement avec la partie biologique, la partie neurologique et même immunologique. Ça, c'est très bien documenté. Alors, c'est pour ça qu'on accorde quand même de l'importance à un symptôme qui peut être l'expression d'un facteur de risque qui peut peut-être déceler autre chose et le faisant de façon préventive, c'est-à-dire en tenant bien compte qu'il y a beaucoup de choses à apprendre et à comprendre encore. Mais, dans la mesure où on peut le faire en travaillant ensemble, ça permettra d'éviter des choses ou de faire des interventions avant que des dommages soient causés.

Je termine en précisant juste que, concrètement, ce que ça veut dire du point de vue du ministère, dans une intervention de santé publique, on est plus dans une situation de gérer la présence d'une nuisance. Et, en santé publique, «nuisance», ça veut dire quelque chose qui affecte la qualité de vie. Est-ce que c'est grave, c'est sérieux? On veut vivre avec la nuisance, on veut la diminuer ou qu'est-ce qu'on veut faire? Ça devient, dans cette gestion-là, une question d'analyse, de balance, d'équilibre entre les inconvénients et les risques, c'est ça qu'on veut, avec vous et tout le monde qui sont impliqués, essayer de mieux comprendre.

Alors, soyez assurés que notre contribution veut en être une qui va aider à avoir une connaissance suffisante de ce qui se passe et de ce qu'on peut voir évoluer pour l'avenir, de sorte qu'on puisse participer à un choix qui va être éclairé, aider à un choix éclairé et que ça nous conduise à une cohabitation harmonieuse dans tout ça et qu'on voudra autant éviter des exagérations, dans un sens ou l'autre, mais éviter aussi de banaliser, par exemple, des observations qui sont des observations réelles.

Alors, M. le Président, je pensais utile d'essayer de recamper notre situation là-dedans parce qu'on est dans le débat, on veut continuer à y être, mais on veut y être de façon positive. Merci.

Le Président (M. Vallières): Commentaires, M. Pellerin?

M. Pellerin (Laurent): On n'a pas souvent eu l'occasion d'entendre des commentaires nuancés sur cette question de la santé, j'apprécie les propos de M. Rochon, ils nous apparaissent plus nuancés que certains autres qu'on a entendus au cours de la dernière année. Pour qu'on étudie des phénomènes sous une approche scientifique, les producteurs agricoles vont acheter cette option-là. Pour qu'on publie, avec des titres accrocheurs, des conclusions auxquelles une étude n'est pas encore arrivée, on a plus de difficulté.

À la suite de ces études scientifiques, auxquelles on adhérera, qu'on soit en mesure de mettre en application des règles ou des comportements nouveaux, nous sommes d'accord. On voudrait être traités, à ce moment-là, comme les autres secteurs d'activité économique ou les autres secteurs d'activité humaine de notre société.

Je vous donnerais, à titre d'exemple, la norme de bruit dont on a entendu parler depuis un an, dans les orientations gouvernementales, de 40 décibels. Pour ce qui est des activités agricoles, ça nous apparaît en complète déchirure avec ce que le gouvernement lui-même applique, par exemple au ministère des Transports, ne répondant à la construction d'un mur anti-bruit que si la norme de décibels dépasse 65 décibels, jour et nuit, pas une source ponctuelle! Au moment où un séchoir à foin fonctionne, l'été, le gouvernement ne fait un investissement que lorsque la norme dépasse 65 décibels jour et nuit.

Alors, qu'on étudie le phénomène autour de l'agriculture, des bruits ou des risques pour la santé, d'accord. Mais qu'on ne le cible pas comme un secteur coupable d'avance et qu'on participe, possiblement, à la mesure de ces conditions-là.

Vous savez, les producteurs agricoles, s'il y a une détresse psychologique due aux odeurs, on doit être en mesure de participer à ces études-là, parce que j'imagine qu'on doit être, en quelque part, touché par ce phénomène-là, aussi. Je vous dirais que dans les dernières années, aux risques financiers que les producteurs prennent, on aurait aimé ça, mesurer ces détresses psychologiques là aussi sur les facteurs d'investissement, l'insécurité qu'on vit depuis quelques années. Et, sur des études, on achètera ça, et j'irais même jusqu'à dire qu'on participera, même, financièrement.

M. Rochon: Bon. Alors, je voudrais juste...

Le Président (M. Vallières): Très courte intervention, M. le ministre.

M. Rochon: Je ne pense pas que ce soit le temps de refaire un débat là-dessus, mais, je veux vous rassurer, là, qu'on va continuer. Je pense que jusqu'ici les interventions et les avis des spécialistes de la santé publique du ministère ont voulu être et ont été très rigoureux, et qu'on peut référer à quelles normes, à quelles études, à quelles autres expériences, quelles comparaisons on peut faire. Et on va continuer à le faire avec beaucoup de rigueur.

Qu'on va s'assurer que les titres de nos documents, qu'on met sur nos documents, sont rigoureux et reflètent bien ce qu'il y a dans le document. Mais vous comprendrez qu'on ne contrôle pas tous les titres.

M. Pellerin (Laurent): J'ai aussi l'impression que dans un ministère aussi large que le vôtre vous ne contrôlez pas tous les employés qui sont là, aussi. Alors, il peut très bien y avoir, quand il n'y a pas accord sur l'étude, il peut y avoir fuite aussi, mais je pense que c'est ce qu'on a vécu dans la dernière année.

Le Président (M. Vallières): M. le ministre des Affaires municipales, en quelques minutes.

M. Trudel: Merci beaucoup. Je voudrais souhaiter la bienvenue aussi, à mon tour, aux gens de l'UPA et à son vice-président, M. Chagnon, par ailleurs préfet d'une MRC.

Alors, vous avez ici deux chapeaux et il est important de faire quelques rappels, et à l'égard de votre présentation et de ce dont va être fait l'avenir au niveau des collectivités locales. Parce qu'il faut bien situer ce sur quoi on travaille actuellement. Là on peut bien dresser toutes sortes d'espèces de portraits, mais on va reconnaître une chose: Il y a un an, le choix de l'agriculture en zone verte il a été voté dans une loi. Ça, c'est comme le zonage agricole, il y a en a qui en ont parlé longtemps, il y en a d'autres qui l'ont fait.

Deuxièmement, il s'agit maintenant, à l'égard de l'application de la loi, d'adopter, oui, les règlements qui vont rendre applicables dans les communautés locales, dans les municipalités, non seulement maintenant la protection des terres, mais le développement de l'agriculture, le développement agricole en zone agricole. Et, vous avez bien raison, c'est à l'outil, aux instruments qu'on voit se dessiner, qu'on va voir l'application, la productivité de cette loi, en quelque sorte.

Mais il faut quand même, je pense, reconnaître, sur le plan de la réalité, que la loi n° 23, qui a été adoptée, et à son article le plus fondamental, à 79.1, où on dit bien, à l'égard de la zone agricole, donc quant à l'organisation du territoire, l'utilisation du sol: «À l'égard de la zone agricole faisant partie de son territoire, la municipalité régionale de comté ou la communauté urbaine exerce ses pouvoirs habilitants en matière d'aménagement et d'urbanisme avec l'objectif – dans la loi, là, ce n'est pas un souhait – de favoriser l'utilisation prioritaire du sol à des fins d'activités agricoles et en tenant compte de l'objet de la présente loi.» Et là il faut aller à l'objet de la présente loi: Une obligation de favoriser l'application de la loi dans une perspective de développement durable, la protection et le développement des activités des entreprises agricoles dans les zones agricoles dont il prévoit l'établissement.

(11 h 30)

Et, par ailleurs, troisièmement, à l'égard de l'application sur le terrain, il faut aussi, et c'est une loi, lire l'article 65 où, sans restreindre les généralités ni limiter l'application des autres éléments d'un schéma d'aménagement à l'égard de l'ensemble du territoire d'une municipalité régionale de comté, on doit déterminer les orientations d'aménagement et les affectations du sol que les MRC estiment appropriées pour assurer, dans la zone agricole faisant partie de son territoire, la compatibilité des normes d'aménagement et d'urbanisme avec l'objectif de favoriser, pas de respecter, de favoriser l'utilisation prioritaire du sol à des fins d'activités agricoles et, dans ce cadre, la coexistence harmonieuse des utilisations agricoles et non agricoles. Ça, c'est passé du souhait à la Loi sur la protection et le développement du territoire agricole. Je pense qu'il faut bien le noter.

M. Pellerin, je sais que vous allez être obligé de vous absenter pour les amis, puis je dirais que ça... On va vous souhaiter une bonne rencontre et je vais parler avec M. Chagnon. Vous savez pourquoi, M. Pellerin? Parce que, M. Chagnon, on va parler un tout petit peu de l'avenir à partir de sa perspective municipale, parce que, dans une trentaine de jours au maximum, là on va être sur la voie de faire et non plus du placotage. On va réaliser le choix de la production en zone verte à partir de règlements, de règles et de normes applicables. On a fait ce choix-là, mais je sens que vous voulez déjà faire un petit commentaire avant de partir.

M. Pellerin (Laurent): Pour l'essentiel, je vous ai transmis les préoccupations que les producteurs agricoles avaient. C'est rare qu'on a une personne qui peut incarner trois personnes. Ce n'est pas arrivé souvent dans l'histoire. Chez nous, M. Chagnon est maire, préfet et agriculteur, et je suis sûr qu'il est en mesure de répondre à cette question-là. J'espère que vous ne me tiendrez pas rigueur de vous fausser compagnie avant la fin de ce débat. Je souhaite de bons débats et une conclusion heureuse pour le monde agricole. Merci beaucoup.

Le Président (M. Vallières): Merci, M. Pellerin. Simplement pour rappeler à M. Chagnon et au ministre des Affaires municipales que le temps qui leur est imparti est terminé déjà depuis plus d'une minute et demie, deux minutes. M. Chagnon, vous allez pouvoir compléter la réponse donnée par M. Pellerin? Nous allons ensuite passer à une courte question du député de Beauharnois-Huntingdon.

M. Trudel: Mais, M. Chagnon, je veux que vous nous parliez de l'avenir en termes de coexistence entre le monde local et municipal comme de fait qu'on vous laisse une marge de manoeuvre, au niveau municipal, et non pas qu'on vous dicte littéralement ce qu'il faut faire. Est-ce que vous pensez que ça va marcher et est-ce qu'on peut faire confiance, à l'intérieur des paramètres, aux élus municipaux sur l'ensemble du territoire québécois?

M. Chagnon (Marcel): Bon. D'abord, j'aimerais vous dire que l'adoption de la loi 23 comporte des principes qui, je pense, sont fondamentaux, s'ils sont appliqués et s'ils se traduisent dans les orientations qui permettent le développement harmonieux de l'agriculture. Par contre, est-ce qu'ils vont avoir la force ou la capacité d'autogérer? Je ne suis pas sûr de ça, là, parce que je vous rappellerai que la Loi sur la protection du territoire agricole, qui a été adoptée en 1978, n'a pas empêché l'étalement, n'a pas arrêté le développement et la venue des citoyens en milieu rural. Ce qui n'est pas nécessairement mauvais, quand il y a une bonne cohabitation. Ça nous permet d'avoir et de maintenir dans notre ruralité des services et ça permet au monde d'être mieux géré.

Par contre, c'est très difficile, et ça a été souligné par mon président tout à l'heure, quand, comme maire, je suis assis à la table du conseil et que la salle est pleine de gens. Je vous dis qu'on a le fond de culotte pas mal proche du pied de ces citoyens-là, et ce n'est pas tellement facile à gérer.

Par contre, l'encadrement qui devrait être fourni par les orientations gouvernementales, si leur marge de manoeuvre est suffisamment condensée, proche, pour permettre à ces maires-là qui sont tous du bon monde, M. le ministre, tous du bon monde... D'ailleurs, tous les citoyens, presque, sont du bon monde. Ça fait qu'il n'y a pas de problème là.

M. Trudel: Ça dépend des règles pour définir le bon monde.

M. Chagnon (Marcel): Comment?

M. Trudel: Ça dépend des règles pour définir le bon monde.

M. Chagnon (Marcel): Mais il faut quand même que la marge de manoeuvre fasse en sorte, pour que l'agriculture puisse se développer, qu'on ne puisse pas étendre trop, trop des différences d'une municipalité à l'autre, d'une MRC à l'autre, et je pense que la proposition qu'on vous a faite de normes de distance est une proposition très valable qui devrait être achetée par le gouvernement.

M. Trudel: M. le Président, est-ce que c'est terminé?

Le Président (M. Vallières): Oui. Ça termine et on est déjà dépassés de quelques minutes, de quatre, cinq minutes. Alors, cette partie-là de nos travaux termine la comparution de l'Union des producteurs agricoles. Nous vous remercions. Alors, dans quelques instants, la commission va pouvoir passer aux remarques finales. Je veux simplement indiquer aux membres de la commission que nous disposons à partir de maintenant d'environ 25 minutes pour nous acquitter de cette dernière partie de ces travaux. Alors, si vous le permettez, nous pourrions suspendre quelques secondes, le temps d'organiser la fin de ces travaux.

(Suspension de la séance à 11 h 36)

(Reprise à 11 h 40)

Le Président (M. Vallières): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. Je demanderais aux députés de s'approcher, s'il vous plaît. Très bien! Alors, le premier intervenant... Nous allons procéder de la façon suivante. Chaque intervention durera environ cinq minutes; nous convenons pouvoir terminer nos travaux vers midi. La première intervention viendra du ministre de l'Environnement et de la Faune.

Une voix: Il y a combien d'orateurs?

Le Président (M. Vallières): Nous aurons trois présentations du côté gouvernemental et une intervention du côté de l'opposition, et, dans l'ordre, le ministre de l'Environnement et de la Faune, le ministre des Affaires municipales, suivi du ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.


Remarques finales


M. David Cliche

M. Cliche: Merci, M. le Président. Je vais être très bref. À vif et à chaud comme ça, je vais essayer de dégager les grandes lignes de ce qu'on a entendu. D'abord, moi, je pense qu'au niveau de l'approche générale, tant au niveau de la réduction de la pollution agricole, tout le monde est venu dire qu'ils attendaient les plans de fertilisation, ils attendent le règlement, ils ont hâte qu'il arrive, que les plans de fertilisation, c'est la voie à suivre. Ils sont tous bons. Ça, je pense que c'est de l'acquis.

Au niveau de l'approche générale, au niveau de l'encadrement des nuisances, avec la dernière présentation de l'UPA, je pense que ça confirme que, dans l'approche, on est sur la bonne voie. Mais il y a des choses qu'il va falloir regarder de façon plus spécifique. Naturellement, je pense que l'intervention de notre collègue de la Santé aussi était importante, dans la mesure où, au niveau de la santé publique, il faut faire de la prévention. Mais on ne peut parler des bruits, mais les commentaires des représentants de l'UPA sur les bruits, les normes-bruit eu égard au milieu urbain, au milieu de campagne, etc., ça, chez nous, il va falloir qu'on regarde ça attentivement, sur ces normes de bruit.

On a parlé seulement une fois des poussières et il n'y a pas eu de commentaires sur les poussières. Donc, il va falloir faire une lecture très attentive des documents sur la poussière.

Mais, au niveau des distances séparatrices, je pense qu'il y a deux choses qui ressortent. D'abord, l'approche est bonne. Ils nous ont tous dit qu'il fallait intégrer le plus rapidement possible dans les facteurs d'atténuation des technologies qui permettent de réduire les odeurs, et ça, c'est oui.

Les gens nous ont dit qu'au niveau des facteurs d'usage ils étaient très inquiets de la grandeur de la fourchette. Ça, je pense que c'est revenu un peu partout, sauf l'UMQ, l'UMRCQ... qu'il faudrait peut-être penser, pour reprendre les termes, d'avoir, à l'intérieur de la fourchette d'usages, des fourchettes segmentées. Je pense que les agronomes, là-dessus, ont un témoignage assez important au niveau de la segmentation de la fourchette. Tous, notamment l'UPA, à la fin, sont d'accord qu'il y a un débat au niveau MRC, mais les gens sont inquiets de se faire passer sur le corps par les municipalités qui pourraient exagérer. Le commentaire final, c'est de donner une fourchette mais de ne même pas donner la possibilité d'aller au-delà de la fourchette. Ça, je pense que c'est réfléchi, et il va falloir avoir une réflexion là-dessus.

Il va également falloir avoir une réflexion sur l'aspect intérimaire, et ça, c'est mon collègue des Affaires municipales qui va y voir, mais les gens ont mis l'importance sur le fait qu'il n'y ait pas de flottement. Les gens sont tannés du flottement, les gens veulent qu'on agisse.

Je vais terminer là-dessus, au niveau des techniques. J'ai été un peu déçu, je pensais qu'il y aurait plus de techniques prêtes. Au niveau de l'épandage, elles existent. On en a pas parlé ici, mais l'insertion dans le sol, le disque, le «splash disc» au ras du sol, on s'est entendu d'éliminer les canons. Mais, au niveau du traitement du lisier de porc, essentiellement, il y a seulement une technique qui est prête, qui est homologuée, c'est celle qu'on appelait DEC, là, qui vise essentiellement à concentrer... et on a parlé d'un coût, si vous vous en souvenez, de 10 $ à 25 $ du m³. Biosor, ce n'est pas encore homologué, ce n'est pas terminé, même si c'est très prometteur, et l'autre, l'osmose inverse, il y a encore beaucoup de travail à faire au niveau d'un projet-pilote pour voir ce que ça pourrait donner. Donc, oui aux techniques, mais il va falloir inciter, au niveau de notre aide financière, à ce qu'ils prennent ces techniques-là. Naturellement, l'utilisation de ces techniques-là va varier, va avoir un impact immédiat sur les distances séparatrices tant au niveau de l'entreposage, de la production qu'au niveau de l'épandage.

En terminant, je veux dire qu'on a encore du travail à faire de notre côté. Je ne veux pas répéter les déclarations que j'ai faites sur la nécessité de protéger le droit des producteurs dans un encadrement, je ne veux pas revenir là-dessus, mais peut-être à la fin, M. le Président, j'aimerais qu'on ait un échange aussi sur la façon dont on va continuer à travailler ensemble. C'est sûr que, au niveau des quatre ministres, on a un travail à faire, là, mais j'ai apprécié vraiment le caractère très productif de toutes les interventions qui sont venues, même du côté de l'opposition, qui a eu des interventions positives dans la plupart des cas, et productives. Peut-être qu'il y aurait lieu d'évaluer comment on pourrait s'arrimer une dernière fois pour qu'on puisse partager avec la commission le fruit de notre réflexion avant qu'on aille de l'avant avec les règlements qui vont être sortis d'ici le 20 juin.

Le Président (M. Vallières): Merci, M. le ministre de l'Environnement et de la Faune. M. le ministre des Affaires municipales.


M. Rémy Trudel

M. Trudel: Bon, M. le Président, merci beaucoup. En conclusion, rapidement, de cette commission parlementaire, nous avons mis sur la table un document édictant, énonçant les principes qui devraient présider à l'établissement de paramètres. On n'a point besoin d'ajouter beaucoup de mots pour préciser ce que c'est. Donc, ça a été une discussion, un échange qui partait d'une base zéro: chacun pouvait y mettre ses suggestions. Le gouvernement aura, par ailleurs, à réaliser ce qu'il a à réaliser, c'est-à-dire gouverner avec les suggestions qui nous ont été faites, en commençant peut-être par la dernière suggestion, très pratique, de l'UPA, des producteurs, de ceux et celles qui font l'activité, qui réalisent l'activité au niveau de l'agroalimentaire au Québec, de l'agriculture au Québec. C'est de ça qu'il faut partir.

Point besoin non plus d'insister trop longtemps pour dire qu'on n'est plus en matière de placotage. On a arrêté ça à partir de l'an passé. Il y en a qui en ont parlé pendant 10 ans, il y en a d'autres qui se sont mis au travail et qui on réalisé et adopté la loi n° 23. Le ministre de l'Agriculture l'a répété suffisamment souvent, mais il faut réinsister, on avait dit, on dit toujours, et c'est ce qui va se passer: un an plus tard, une année après, il y aura les règlements pour accompagner l'application de la loi.

Troisièmement, à l'égard de l'application de la loi, on vient, au niveau des producteurs et productrices agricoles, de bien resserrer l'angle sous lequel nous devons maintenant compléter le travail. Et on se rend compte que les éléments contentieux sont de plus en plus petits. Sur bruit, poussière, sur eau, sol, les règlements sont prêts. Les adaptations financières ont été annoncées dans le budget. Sur la protection de la zone agricole et ce que le vice-président de l'UPA disait ce matin à l'égard de la cohabitation et de l'aide que peut apporter ce phénomène de la cohabitation au maintien et au développement de la ruralité, tout ça, c'est dans le domaine du quasi réglé consensuellement.

Reste la question des distances séparatrices à l'égard et des établissements et des odeurs surtout reliées à l'épandage. Et, encore là, on aura tous noté ce matin que l'UPA a bien cerné la situation en disant: À l'égard des établissements agricoles, il n'y a pas grand trouble là-dedans. Il y a quelques cas de contestation, mais ce n'est pas majeur. C'est à l'égard des odeurs reliées à l'épandage. Donc, on rapetisse, on ramène à sa véritable dimension ce qui reste à régler comme élément. 10 % de la situation pour 90 % du monde qui sont affectés au niveau des odeurs, c'est ça qu'il nous reste à régler.

(11 h 50)

Et, quand on est rendu dans cette situation-là, il y aura – et ça, c'est décidé aussi – des paramètres de fixés par le gouvernement pour en arriver non seulement à protéger, mais à développer l'industrie agroalimentaire, les activités agricoles au Québec. Ça, c'est une décision prise. C'est la norme qu'il reste à fixer. La fourchette qui sera inscrite, donc, dans les orientations gouvernementales, voilà le tout petit bout de chemin qu'il reste à franchir, et quelle sera la grandeur de cette fourchette.

Quelle sera la grandeur de cette fourchette? Je dirais probablement la grandeur suffisante pour que l'intelligence, le sens commun, le jugement, par exemple, des élus municipaux et des producteurs puissent s'exercer dans chacune des régions du Québec, dans chacun des territoires concernés, les territoires de MRC. D'aucuns, comme on a vu ce matin, voudraient que ça soit très mince parce que ne s'appuyant pas sur l'intelligence, le jugement, la capacité d'occupation harmonieuse du territoire, d'autres prétendent qu'on pourrait élargir un petit peu plus pour faire rentrer toute l'intelligence, tout le jugement, tout le gros bon sens, toutes les capacités de gestion au niveau local, avec les notions de protection quant à des maxima, parce qu'il y a une question d'intérêt supérieur de protection de l'activité, et pour éviter ce qui peut se produire dans une société québécoise comme ailleurs: des abus. Donc, on est en termes de phénomènes très, très circonscrits, et d'ici le 20 juin ce sera réglé.

J'annonce aussi ce matin, comme ministre des Affaires municipales, suite aux consultations que nous venons d'avoir, qu'il y aura des directives d'émises à nos municipalités régionales de comté pour qu'elles adoptent dans les meilleurs délais, et dans des délais qui seront fixés, des règlements de contrôle intérimaires pour en arriver à l'application réelle de la fourchette dans les mécanismes qui sont prévus par la loi de façon à ce qu'il n'y ait pas de vide juridique et qu'on se retrouve non seulement maintenant en matière de protection de la zone agricole, mais de promotion et de développement de l'activité agricole au Québec, parce que les municipalités du Québec – les 1 393 municipalités – sont conscientes que, pour une très grande majorité d'entre elles, il s'agit de leur véritable parc de développement, et nous voulons en être et nous allons en être, au niveau du développement agricole au Québec, basé sur le principe fondamental – et je conclus, M. le Président – de la loi 125 sur l'aménagement et de l'urbanisme, l'occupation harmonieuse sur un territoire des différents usages, au niveau de l'occupation et des activités sur ce territoire. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Vallières): Merci, M. le ministre des Affaires municipales. M. le député de Laurier-Dorion, en quelques minutes, s'il vous plaît.


M. Christos Sirros

M. Sirros: Merci, M. le Président. M. le Président, je ne sais pas si je dois dire que le gouvernement, je trouve, souffre du virus de la réalité virtuelle. C'est vraiment un virus qui semble avoir infecté les membres du gouvernement, surtout les intervenants qui, après avoir écouté tous les intervenants ici leur dire que c'est le mauvais choix qu'ils sont en train de proposer par rapport à la remise entre les mains des municipalités ou possiblement même les MRC – d'après ce que je peux comprendre – de l'établissement de ces normes, M. le Président.

On a entendu le ministre de l'Environnement, le ministre des Affaires municipales nous dire que le problème est réglé. Tout le monde est pour les normes, et on va les donner aux municipalités, les normes. C'est incroyable! Moi, M. le Président, je constate que nous ne sommes pas ici en train de discuter d'un problème ou d'une question environnementale. Ce n'est pas une problématique environnementale qu'on a à examiner ici et qu'on examine ici. C'est une question sociale. Fondamentalement, ce que les agriculteurs nous disent: La question environnementale, on y est. Nous sommes contre la pollution. Nous sommes prêts à faire ce qu'il faut faire pour soit encadrer, mais surtout éliminer la pollution.

Mais il y a un autre domaine, le domaine de la cohabitation, qui produit des effets, des nuisances, si vous voulez. Et on a beau nous dire qu'on a adopté une loi sur le droit de produire – engagement électoral d'ailleurs pris par le Parti libéral du Québec en septembre 1994, malheureusement, que nous n'avons pas eu l'occasion de le mettre en application – mais la volonté était très bien exprimée. Elle était là. Mais, si on avait eu à le mettre en application, ce n'est sûrement pas de cette façon qu'on le ferait, parce qu'on aurait fait écho exactement à ce que les gens vous disent. Ponce Pilate... De votre côté, M. le Président, le gouvernement s'en lave les mains, ils disent finalement: On va refouler le problème aux municipalités, tout en essayant de tenir le discours de la reconnaissance du droit de produire.

Je répète, et j'étais très heureux d'entendre le président de l'UPA dire que, pour lui, ce qu'il voulait qu'on retienne de sa présentation – et je l'ai retenu parce que c'était évident même avant qu'il vienne ici – qu'il y a une distinction entre la question environnementale et la question de la cohabitation. Si on est sérieux, à ce moment-là, au niveau de l'évaluation environnementale, des impacts environnementaux de l'agriculture, on va effectivement se donner un cadre dans lequel on va pouvoir, ensemble comme société, avec les agriculteurs, avec tous ceux qui sont intéressés par le développement économique du Québec et par la protection et le maintien de notre qualité de vie au niveau environnemental, examiner le dernier bout, si vous voulez, qui reste à faire au niveau environnemental, la jonction entre agriculture et environnement. Mais, sur ça, je pense que les agriculteurs sont des alliés, parce que, effectivement, tout le monde réalise que c'est une carte de vente de pouvoir mettre sur nos marchés un produit en respectant les normes environnementales. Surtout, comme ici, que nous avons l'occasion d'être en une position meilleure que beaucoup d'autres endroits à travers le monde.

Mais, ça étant dit, reste le concret. Pourquoi on ne peut pas dire tout simplement qu'un producteur a effectivement le droit d'épandre sur son territoire, sur sa ferme, M. le Président? Moi, je suis un citadin également puis je trouve ça tout à fait logique que, si, moi, je veux aller vivre en campagne, j'accepte les inconvénients qui vont avec. Et le vrai test de la volonté de protéger le droit de produire n'est pas de faire des discours qui disent que le problème est réglé. Si c'était réglé, je suis sûr que les 10 000 personnes qu'on attend ici ne sont pas venues pour faire un pique-nique sur la colline parlementaire. On est en train de leur dire qu'ils sont stressés psychologiquement – et je pense que c'était le mot que le ministre de la Santé a utilisé – puis ils ont décidé de venir manifester juste pour le plaisir de manifester? Il doit y avoir un problème réel! Alors, si on est réellement sérieux pour ce qui est de la protection du droit de produire, je pense que le gouvernement prendra ses responsabilités en édictant des normes qui mettent en application concrète et réelle et pratique le droit de produire, M. le Président.

Le Président (M. Vallières): Merci, merci M. le député de Laurier-Dorion. La parole sera maintenant au ministre. Simplement convenir avec les membres de la commission que nous pourrions excéder midi de quelque cinq minutes. Ça permettra de ne pas interrompre le ministre, qui sera suivi par le député de Îles-de-la-Madeleine. Donc, j'accepterai deux interventions. M. le ministre de l'Agriculture.


M. Guy Julien

M. Julien: Alors, merci, M. le Président. Je ne ferai pas de la petite politique avec ça, sauf dire à mon ami, le collègue critique de l'environnement, que, s'il avait adopté la loi, tel que prévu, quand il était au gouvernement, il n'aurait pas eu besoin de la mettre dans le programme en 1994.

Alors, ceci étant dit, d'abord, M. le Président, pour commencer, j'aimerais d'abord remercier tous les membres de la CAPA. Je pense que ça a été une très bonne commission, qui n'était pas facile, on avait à gérer différents éléments, et je veux les remercier de leur excellente collaboration.

Du côté ministériel, nous avons eu des réunions tous les matins, et je tiens à vous remercier, mon collègue de Nicolet qui gérait ça, aussi. Alors, je tiens à le remercier. Je tiens aussi à remercier mon collègue de l'opposition, mon critique, député des Îles, qui, je pense, nous a donné une excellente collaboration, puis je tiens à vous remercier.

J'aimerais ça remercier les gens qui ont pris le temps de venir nous déposer des mémoires. Ce n'était pas évident, c'était rapide, on en est conscient, mais, comme on veut absolument régler le dossier pour le mois de juin, il fallait prendre des décisions en conséquence et on les a prises.

Et ça me permet de dire que, si je résume en gros ce qui s'est dit, je pense que ça répond pas mal à la mission qu'on s'était donnée dans la commission, d'aller chercher les différents points de vue concernant les différents problèmes soulevés dans le cadre des inconvénients et aussi des institutions.

(12 heures)

Ce que je retiens aussi, et c'est le message un peu que je veux passer, c'est qu'on est en train de se développer vraiment une vision d'une agriculture qui va être forte, économiquement forte, dans le cadre d'un développement durable pour l'an 2000. Puis c'est ça qu'on est en train de faire. Pas juste de parler des paramètres, M. le Président. C'est ça qu'on est en train de faire. Puis c'est commencé, parce que, je l'ai mentionné souvent soit à l'Assemblée nationale ou en commission, un, je pense, c'est fondamental, même plus important que ce que le gouvernement pourrait édicter, c'est que les gens se sont pris en main, se sont responsabilisés. Ils n'ont pas attendu que papa vienne régler le dossier. Ils ont dit: On va le prendre, mais on a besoin de vous autres. Pour ça, on va être là. Inquiétez-vous pas.

Donc, la responsabilisation des producteurs, on l'a vue par les plans d'agro-environnemental, par exemple avec la Fédération des producteurs de porcs, bovins, la Fédérée, les engagements que M. le président de l'UPA nous a mentionnés ce matin, son implication.

Donc, je pense qu'on est en train de travailler, quand j'écoute tout ça, vraiment la préparation d'une agriculture moderne, adaptée aux nouvelles règles du commerce international, adaptée à nos besoins régionaux, mais avec une façon de faire où ils vont avoir le droit de produire sur notre territoire. Donc, protéger notre zone verte.

Évidemment, la loi n° 23, puis je peux en parler un peu parce qu'en 1979, M. le Président, j'étais au cabinet de M. Léonard et on travaillait sur la loi 125, qui était la loi de l'aménagement et de l'urbanisme. Pendant ce temps-là il y avait la loi de zonage puis, si vous vous rappelez, il y a eu des tentatives d'harmoniser ces lois-là.

Il y a eu un autre gouvernement qui était là pendant 10 ans. Là, la loi, au moins on a un acquis. On n'est pas si méchants! Après deux ans, on a adopté la loi. Bon. Un. Puis M. Chagnon, que je vois dans la salle, a suivi les débats de très près puis il sait ce qu'on a vécu. Ça n'a pas été facile, mais c'est fait, puis on s'est donné une année, maintenant, je pense, pour s'entendre sur les questions de paramètres au niveau des inconvénients, bruits, odeurs et poussières.

Moi, je pense que l'autre chose, l'autre message dans ce cadre-là, ce que je retiens de la commission, c'est que personne ne conteste le fait que ça prend certaines règles. Mais ce qui est clair, c'est qu'il ne faut pas que ce soit un empêchement au droit de produire. Ça, c'est très clair dans ma tête à moi et, je pense, de tous mes collègues aussi, et autant au niveau de mes collègues de l'opposition.

Ce que je retiens ce matin dans le message, un peu, du président, puis ça m'apparaissait important de le mentionner, de le relever, c'est que dans le fond, oui, des lois, oui, une réglementation puis un cadre. C'est important. Mais il reste que le gros bon sens a toujours sa place. Donc, quand on pense à une cohabitation harmonieuse, dans le sens du développement durable, ça m'apparaît important de préserver et de donner les mécanismes pour que les gens du milieu puissent l'exercer, ce gros bon sens là, mais dans des paramètres. Je ne veux pas être débonnaire quand je dis ça. Je veux qu'il y ait des cadres. Ça, c'est clair.

Deux. Il y a certains points, je pense, qui vont mériter d'être revus et discutés. Je retiens un peu ce qui avait été dit par mon collègue des Affaires municipales. On a soulevé beaucoup la question du rôle ou de la municipalité ou de la MRC ou d'une réglementation mur à mur. Je pense que c'est les trois niveaux qui ont été abordés. Ça, je pense que c'est un des éléments très importants parce que, dans le fond, c'est une grosse partie de la gestion, ce qu'on appellerait des odeurs en terrain. Ça, je pense que c'est une question fondamentale.

La question des distances. Ce que je considère, je le répète, c'est que les gens sont d'accord, mais pas au détriment du droit de produire. Il faut absolument que ce soit fait pour permettre à nos gens de produire, mais aussi d'avoir accès à des marchés internationaux, parce qu'il y avait une question de mon collègue, le député de l'opposition: Est-ce qu'on est prêts à aller sur le marché international avec les normes d'environnement? Puis la personne a dit oui. Puis c'est vrai qu'on est prêts. Puis il faut être encore mieux organisés parce que, si on veut vraiment pénétrer tous ces marchés-là, il va falloir qu'on soit capables d'avoir des produits de qualité puis être capables de s'adapter à des règles environnementales, parce que c'est ça, des barrières tarifaires, on l'a vu dans les pâtes et papiers. On va le revoir dans d'autres domaines.

Alors, en résumé, M. le Président, je dois vous dire que je suis très satisfait. Le rapport va être déposé, si j'ai bien compris, à la fin avril à l'Assemblée nationale, selon la décision qui a été prise et les règlements et autres, il faut que tout soit adopté pour le 20 juin. Et les orientations gouvernementales, puis j'étais content d'entendre mon collègue le ministre des Affaires municipales dire, bien évidemment, de relancer et de noter aux gens toute la question, l'importance du contrôle intérimaire. Ça, je pense que c'est une de nos clés pour éviter ce genre de problème là.

Et j'ai retenu, peut-être, M. le président, si vous permettez, aussi l'élément que les règlements dits abusifs qui auraient été passés avant, qu'est-ce qu'on fait avec? Ça, je pense que ça mérite de notre part aussi une orientation. Je comprends que les municipalités sont autonomes puis c'est décentralisé. Il reste aussi que l'État a un rôle en termes de cadre général, a un rôle en termes de s'assurer de l'ensemble des activités, et, dans ce cadre-là, il m'apparaît important que ce soit aussi une question qu'on évalue.

Alors, M. le Président, je vous remercie beaucoup de vos bons offices et je remercie beaucoup tout le monde.

Le Président (M. Vallières): Merci, M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. M. le député des Îles-de-la-Madeleine.


M. Georges Farrah

M. Farrah: Oui, Merci, M. le Président. Alors, à mon tour de saluer tous les membres de la commission, le ministre et mon collègue aussi, le critique de l'environnement, le député de Laurier-Dorion, et tous ceux et celles qui ont participé, je pense, dans un objectif d'avancement et un objectif constructif, si je peux m'exprimer ainsi, M. le Président.

Nous avons entendu 23 groupes dans un laps de temps relativement court, à peu près en une semaine et demie de session parlementaire. Évidemment, moi, c'était mon baptême de feu aussi comme critique, et des fois on appréhende ça, mais je pense que c'est peut-être la meilleure des solutions que de se plonger très rapidement dans un dossier pour justement faire en sorte qu'on puisse assimiler les différentes tendances et assimiler les enjeux qui sont majeurs.

Le constat, M. le Président, c'est que c'est un dossier excessivement fragile et qu'il faut doser comme intervention. L'agriculture, je pense, on en a fait état à maintes reprises, au niveau du Québec, c'est très, très, très important en termes de retombées économiques, au niveau social également, au niveau d'occupation du territoire. Il y va de notre avenir aussi, en termes d'autosuffisance, etc. Par conséquent, il faut être très, très vigilants à l'égard de la protection de la pratique agricole.

Ceci étant dit, M. le Président, évidemment, on a bien beau se targuer de la loi n° 23. Bravo, la loi n° 23, mais l'essentiel, ça va être l'application de cette loi-là. C'est ça qui est l'enjeu présentement. Je pense que mon collègue de Laurier-Dorion a bien campé l'enjeu en disant que c'est un débat peut-être davantage social, social qu'environnemental, parce que la perception, moi, que j'avais au niveau de l'agriculture, c'est qu'étant extérieur à cela dans le passé, de façon beaucoup plus importante, alors on pouvait avoir la perception à l'effet que les principaux concernés, les agriculteurs et agricultrices, n'étaient peut-être pas concernés par le respect de l'environnement. C'est tout autre, hein, le débat est très clair ici. Je n'ai pas vu un groupe quelconque dire qu'il ne voulait pas se conformer aux normes environnementales. Ça fait que je pense pas qu'il y ait un agriculteur qui est d'accord et qui veut polluer un cours d'eau, qui veut polluer ses terres de façon délibérée. Ça, ce débat-là, je pense qu'il est fait.

Les nouvelles technologies, aussi, vont nous amener à pouvoir justement évoluer dans le bon sens. Mais le problème majeur, c'est un problème de coexistence, de cohabitation. C'est là que vos règlements – et c'est tout un défi pour le gouvernement; moi, j'en conviens, c'est tout un défi pour le gouvernement, mais c'est ça qui va faire en sorte que le climat social relatif à l'implantation d'industries agricoles dans l'ensemble du Québec va être facilité ou va antagoniser encore davantage. C'est là tout le défi que vous avez.

Moi, comme critique, je pourrais dire: J'espère que vous allez vous casser la gueule! Tu sais, ça va être avantageux. Mais, si on travaille dans un but de développement durable, dans un but de développement de l'agriculture et dans un but d'une coexistence, d'une cohabitation la plus harmonieuse possible, on ne peut pas souhaiter ça; on ne peut pas souhaiter ça; faire en sorte que les décisions qui vont être prises vont être les meilleures pour le Québec tout entier et pour le développement agricole.

Là, ça m'amène, dans un autre sens, à vous dire que mon inquiétude, c'est qu'évidemment on ne les connaît pas, les règlements. On ne les connaît pas, les règlements, et on aurait aimé les voir. On aimerait les voir avant qu'ils soient adoptés de façon définitive pour, justement, voir si ça peut faire en sorte de répondre aux objectifs que je viens d'énumérer. Je pense que c'est un constant aussi de l'ensemble des groupes qui sont venus devant nous, qu'ils avaient une inquiétude à cet égard-là. Par conséquent, je maintiens, moi, une pression au niveau gouvernemental et j'en fais une demande, que, dans la mesure du possible, même pas dans la mesure du possible, mais on devrait, on doit présenter ou publier ces règlements-là avant une adoption finale pour, justement, faire en sorte qu'on atteigne notre objectif de cohabitation. Je pense que c'est fondamental, et c'est très fragile comme dossier. M. le ministre disait: On vous dit qu'on a une vision agricole, on a une grande vision à long terme de l'agriculture, mais sur un terrain excessivement fragile. Cette vision agricole va dépendre de l'application de ces règlements. On a bien beau avoir la meilleure vision du monde, mais, si, sur le terrain, elle ne se concrétise pas, bien, je regrette, ça ne fonctionnera pas, le dossier.

(12 h 10)

Alors, moi, je vous dis que j'ai trouvé ça absolument très enrichissant. L'autre élément aussi, si vous me permettez, là, parce que vous voyez le constat qui s'est dégagé aussi, sauf les unions municipales, c'est que l'ensemble des intervenants ont une méfiance à l'égard de ce que les municipalités appliquent cette réglementation-là. Ça, je pense qu'il faut en tenir compte. Alors, par conséquent, il est du rôle du gouvernement, oui, O.K., les intervenants doivent se responsabiliser, ils l'ont démontré, et bravo, mais ceci ne doit pas se faire dans une optique de désengagement de l'État à l'égard de ses responsabilités propres. Il m'apparaît important que le gouvernement du Québec assume aussi son leadership, un leadership imposant pour faire en sorte que la cohabitation dans les milieux agricoles du Québec soit la plus harmonieuse possible.

Ça, c'est la responsabilité du gouvernement, et là, si le gouvernement se désengage, en fin de compte, et transfère cette responsabilité à d'autres parce qu'elle n'est pas facile – on en convient, qu'elle n'est pas facile, mais il a une responsabilité – alors, si on donne ça à d'autres et que le chiard pogne dans l'ensemble des municipalités du Québec, on n'est pas plus avancé, on va reculer. À la lumière des informations qu'on a eues ici, c'est peut-être possible. On ne le souhaite pas, personne, parce qu'on veut que ça se fasse de façon cohérente, cette chose-là, mais n'oubliez pas que, comme gouvernement, vous avez une responsabilité immense – et j'en conviens, qui est très difficile – à l'égard d'assumer un leadership pour faire en sorte que le dossier soit traité de façon objective, de façon équitable, parce qu'on sait aussi qu'il y a du politique au niveau municipal, et c'est normal, les élus, on a des pressions de tous bords et tous côtés. On a eu des exemples frappants, en disant que, d'un bord ou de l'autre, soit les environnementalistes ou les agriculteurs, s'il y a une pression majeure qui est faite sur un conseil municipal, bien, la décision est faite en fonction de la majorité dans la municipalité, et souvent ce n'est pas nécessairement rationnel. Ça, comme gouvernement, vous avez une responsabilité immense à ce point de vue.

Un autre élément qui n'a pas été amené et qui m'apparaît important, parce qu'un groupe nous l'a souligné – moi, je ne suis pas un avocat – mais s'assurer aussi que la réglementation soit... c'est sûr qu'on fait toujours une réglementation pour qu'elle soit le moins contestable possible, mais il y a des lumières qui nous ont été allumées à l'effet qu'un tiers applique cette réglementation, mais, si elle est contestée continuellement, ça peut être dangereux également. Alors, je pense que, au niveau du Comité de législation, on y verra à ce niveau-là, mais je pense que c'est important que vous en teniez compte pour faire en sorte, justement, que la situation fasse en sorte qu'on ait la meilleure cohabitation possible, parce que c'est la base de tout développement, à la lumière des informations que nous avons.

Alors, par conséquent, M. le Président, c'est pour vous dire que, évidemment, j'ai apprécié mon expérience. J'ai surtout appris beaucoup de choses. C'est unanime, là, que tout le monde veut défendre l'environnement, veut protéger l'environnement, si on s'en tient bien... Je pense que le débat est social, au niveau des nuisances, et il est bien évident que le gouvernement doit se camper clairement en disant: Écoute – mon collègue en faisait état tantôt – si tu vas t'établir en milieu agricole, bien, c'est bien évident, ce n'est pas le parfum tout le temps. Alors, ceci étant dit, il y a toujours un équilibre, là...

M. Sirros: Il n'y a pas juste des fleurs en campagne.

M. Farrah: Il y a un équilibre à prévoir à ce niveau-là, mais la responsabilité du gouvernement... Et je réitère au gouvernement, en terminant, M. le Président, que le gouvernement doit, je pense, dans un souci de transparence, nous transmettre la réglementation avant son adoption. Je vous remercie, M. le Président.


M. Yvon Vallières, président

Le Président (M. Vallières): Alors, je voudrais simplement, avant de terminer, rappeler peut-être aux membres de la commission cette ouverture dont nous a fait part le ministre de l'Environnement et de la Faune de peut-être rencontrer à nouveau les membres de la commission avec la réglementation. Je sais que le député Îles-de-la-Madeleine en fait la demande également. Et il faudrait se rappeler que c'était l'objet de la première commission que nous devions tenir sur le sujet: C'était de voir la réglementation. Alors, certainement que les membres auront à se pencher là-dessus au cours des prochains jours, nous l'espérons.

Rappeler également aux membres de la commission qu'en vertu des travaux précédents nous avions beaucoup insisté sur la possibilité qu'on doit se donner à appliquer tout un autre pan de la loi n° 23 que sont les activités en zone agricole, qui est en attente d'une mise en application. Donc, je pense qu'on se doit de relever aujourd'hui que tout le monde souhaite et exprime une volonté très ferme pour la mise en application de la loi n° 23. Et, là-dessus, face aux invitations qui nous sont faites, je pense que force nous est de constater qu'on a encore du travail à effectuer afin de rendre à bon port cette loi n° 23.

Je remercie la contribution de tous les membres de la commission, de toutes les personnes également qui sont venues y témoigner. Je pense que, sans l'ombre d'un doute, cette contribution va être importante pour une prise de décision finale de la part du gouvernement du Québec.

M. Cliche: M. le Président, juste un point d'ordre, ce que j'ai dit, c'est que j'ai démontré de l'ouverture à partager avec vous la suite de la réflexion chez nous, à notre ministère. Au niveau de partager les règlements, ça, c'est une autre question. Il y a des aspects légaux. On ne peut pas... Par exemple, la réduction sur la pollution agricole a été prépubliée il y a déjà deux ans. Donc, il faut aller à la publication. Donc, je n'ai pas dit que nous allions resoumettre les projets de règlement en consultation publique. J'ai montré de l'ouverture, c'est pour partager avec vous la suite de notre réflexion chez nous. Il y a une nuance importante là.

Le Président (M. Vallières): Merci de cette précision. Alors, la commission ayant réalisé ses travaux, elle ajourne sine die.

(Fin de la séance à 12 h 15)


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