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Version finale

35th Legislature, 2nd Session
(March 25, 1996 au October 21, 1998)

Wednesday, April 9, 1997 - Vol. 35 N° 18

Consultations particulières sur la Proposition de principes généraux relatifs à la gestion des odeurs, du bruit et des poussières en milieu agricole


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Table des matières

Auditions


Intervenants
Mme Cécile Vermette, présidente
M. Guy Julien
M. Georges Farrah
M. Rémy Trudel
Mme Margaret F. Delisle
M. David Cliche
M. Robert Benoit
M. Norman MacMillan
M. André Chenail
M. Benoît Laprise
M. Léandre Dion
M. Michel Morin
*M. Mario Laframboise, UMQ
*M. Jean-Marie Dionne, Meunerie J.-B. Dionne & Fils ltée
*M. Bertrand Maheux, idem
*Mme Martine Savard, idem
*M. André Bélisle, Comité de restauration de la rivière Etchemin
*M. Yves Corriveau, CQDE
*M. Pierre Aubry, Groupe DEC
*M. Philippe Varvat, idem
*M. Gilles Lachance, UCMR
*Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats


(Neuf heures neuf minutes)

La Présidente (Mme Vermette): À l'ordre, s'il vous plaît! Je déclare ouverte la séance de la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation. Je rappelle que le mandat de la commission est de procéder à des consultations particulières et de tenir des auditions publiques sur la Proposition de principes généraux relatifs à la gestion des odeurs, du bruit et des poussières en milieu agricole dans le cadre de la Loi modifiant la Loi sur la protection du territoire agricole et d'autres dispositions législatives afin de favoriser la protection des activités agricoles.

Je demande au secrétaire s'il y a des remplacements.

Le Secrétaire: Oui, Mme la Présidente. M. Brien (Rousseau) est remplacé par Mme Robert (Deux-Montagnes); Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata) est remplacée par M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine); M. Lafrenière (Gatineau) est remplacé par Mme Delisle (Jean-Talon); et M. Vallières (Richmond) est remplacé par M. Benoît (Orford).

La Présidente (Mme Vermette): Merci. On peut demander au premier groupe de bien vouloir s'installer, s'il vous plaît. C'est l'Union des municipalités du Québec. Veuillez prendre place.

En attendant, on rappelle que les gens ont 20 minutes pour exposer leur mémoire.

Monsieur et madame de l'Union des municipalités, vous êtes représentés, si vous voulez bien vous nommer, s'il vous plaît, pour fins d'identification, pour les membres de la commission.


Auditions


Union des municipalités du Québec (UMQ)

M. Laframboise (Mario): Mario Laframboise, premier vice-président de l'Union des municipalités du Québec; Mme Denise Auger, conseillère en environnement et aménagement.

La Présidente (Mme Vermette): Je vous remercie. Vous avez un temps de parole de 20 minutes qui vous est alloué.

(9 h 10)

M. Laframboise (Mario): Merci, Mme la Présidente. M. le ministre de l'Agriculture, M. le ministre de l'Environnement, M. le ministre des Affaires municipales, mesdames et messieurs de la commission, je prends aujourd'hui la parole au nom des membres de l'Union des municipalités du Québec, principal regroupement municipal au Québec, et quelque 250 municipalités membres de l'Union, qui représentent près de 80 % de la population du Québec et gèrent 88 % des budgets municipaux.

L'Union des municipalités est heureuse de pouvoir donner son opinion sur la proposition de principes généraux relatifs à la gestion des odeurs, du bruit et des poussières en milieu agricole dans le cadre de la Loi modifiant la Loi sur la protection du territoire agricole du Québec.

L'Union est d'avis que les mesures réglementaires visant à réduire la pollution d'origine agricole doivent être actualisées, et ce, dans les plus brefs délais.

En effet, il a été démontré que les activités agricoles affectent grandement la qualité de nos cours d'eau, ce qui risque d'occasionner éventuellement des problèmes de santé. De plus, les activités agricoles sont de plus en plus ciblées comme source d'irritants, d'inconvénients et de nuisances pour les populations avoisinantes.

Nous sommes donc heureux de constater que le gouvernement entend mettre en vigueur d'ici la fin de la session parlementaire le projet de loi n° 23 de même que le projet de Règlement sur la réduction de la pollution d'origine agricole, le règlement sur le bruit et les poussières ainsi que les orientations gouvernementales sur les distances séparatrices en vue de diminuer les odeurs. Il ne faudrait surtout pas oublier que l'enjeu principal qui guide la mise en vigueur de ces multiples mesures est la protection de l'environnement.

Étant donné que nous avions participé aux discussions de la table de concertation portant sur le Règlement sur la réduction de la pollution d'origine agricole et que certains éléments de ce projet de règlement n'avaient pas obtenu consensus, nous aurions apprécié que la commission nous transmette les conclusions auxquelles ont mené les discussions bilatérales entre le gouvernement et l'Union des producteurs agricoles du Québec. Nous faisons notamment référence à celles concernant la formation qui sera requise des producteurs agricoles pour qu'ils puissent réaliser eux-mêmes leur plan agroenvironnemental de fertilisation.

Abordons tout d'abord la question de la gestion des odeurs, des bâtiments et des structures d'entreposage. L'UMQ a toujours soutenu qu'il était de la responsabilité des municipalités de gérer les nuisances, donc les odeurs. Le gouvernement soutient ce principe dans la proposition qu'il présente. Le gouvernement indique qu'il définira des valeurs minimales et maximales de facteur d'usage qui constitueront les limites que les municipalités pourront insérer dans leurs règlements. Malheureusement, on ne précise pas quelles sont ces valeurs.

La proposition soumise ne présente, en effet, comme son titre l'indique, que des principes généraux. Le gouvernement indique aussi que les municipalités conserveront le pouvoir de réglementer selon les particularités locales. On dit que le facteur d'usage pourra être différent dans les cas de conditions entraînant une exposition accrue aux odeurs. Comment ces conditions locales seront-elles mesurées et intégrées à la méthode de calcul proposée? On n'a pas encore de réponse. Il est également spécifié que les municipalités auront la possibilité d'imposer des normes de distance plus sévères que celles proposées dans les orientations gouvernementales suite à un avis du comité consultatif agricole.

L'Union a toujours soutenu la constitution des comités consultatifs agricoles qui seront mis en place suite à l'entrée en vigueur du projet de loi n° 23. Cela favorisera une meilleure concertation au niveau régional des intervenants municipaux et agricoles. L'implantation de ces comités aidera les municipalités à adopter des règlements qui prendront en considération les particularités locales et qui ne seront pas trop restrictifs pour les activités agricoles.

Je me dois de vous préciser que je suis préfet de la MRC de Papineau et que nous avons, chez nous, un comité consultatif agricole qui est en vigueur depuis voilà plus d'un an.

Autre point à soulever. l'Union ne comprend pas pourquoi on imposerait des exigences moins sévères pour l'expansion et l'agrandissement d'exploitations existantes. Il n'y a pourtant pas de droits acquis en matière de pollution dans aucun secteur d'activité. Pourquoi serait-ce différent avec les agriculteurs?

De plus, selon le principe de l'équité, il ne serait pas justifiable que les promoteurs de nouveaux projets soient assujettis à des normes plus sévères. L'entreprise devra, à notre avis, respecter les distances séparatrices telles que calculées en incluant l'augmentation de la production. Les distances pourraient être moindres si le producteur utilise des techniques d'exploitation qui permettent de réduire l'émission d'odeurs, tel que l'élevage sur litière, la modification du régime alimentaire des animaux, la transformation du lisier.

Pour ce qui est de l'épandage, le gouvernement a décidé de ne pas imposer de normes de distances minimales et maximales. Pourtant, les odeurs provenant de l'épandage du fumier constituent une des principales nuisances qui affectent le bien-être des citoyens avoisinants. La décision du gouvernement est à notre avis absolument inacceptable et dénote une totale absence de préoccupation environnementale.

L'UMQ propose que l'utilisation des meilleures techniques d'épandage disponibles soit rendue obligatoire. Par exemple, lorsque le lisier est étendu directement sur le sol ou incorporé à celui-ci, cela permet de diminuer sensiblement les odeurs. Nous nous questionnons à savoir s'il ne serait pas pertinent d'interdire l'utilisation de systèmes d'aéroaspersion au moyen d'épandeurs et canons.

Le gouvernement devrait, par ailleurs, interdire toute forme d'épandage lors de la période automnale. En cette période de l'année, les plantes n'assimilent pas les fertilisants. De plus, les pluies sont fréquentes et abondantes, entraînant par le fait même le lisier directement dans les cours d'eau.

Pour ce qui est du bruit, le ministère de l'Environnement et de la Faune devrait prescrire les mêmes normes qui sont appliquées aux activités industrielles assujetties à une autorisation. Les normes sur les poussières devraient refléter les normes en vigueur dans les milieux comparables. Nous pensons que le gouvernement aurait dû proposer les normes qu'il entend prescrire afin de les soumettre à la consultation par le biais de cette commission.

Mentionnons finalement que l'UMQ aurait apprécié que soit déposé dans le cadre de cette consultation un guide des bonnes pratiques agricoles. Ce guide devrait colliger les principales règles de l'art relatives à l'agriculture afin que les producteurs puissent s'en inspirer pour réduire au maximum la pollution et les nuisances que leur activité occasionne.

En conclusion, notre Union est excessivement déçue d'avoir à se prononcer sur des grands principes seulement. Nous pensions que le débat porterait sur les paramètres de distances qui seront prescrites dans les orientations gouvernementales autant pour les bâtiments que pour l'épandage. Nous comprenons que le gouvernement dictera des normes suite aux travaux de la commission et que celles-ci entreront en vigueur sans que les divers intervenants concernés n'aient pu se prononcer sur leur pertinence. Nous espérons que les normes seront assez sévères pour apporter une réelle solution aux désagréments que doivent subir les résidents voisins de terrains à caractère agricole.

Étant donné que les bâtiments existants ne seront pas soumis aux futures distances séparatrices et que, bien souvent, ceux-ci sont actuellement source d'émission d'odeurs, il serait pertinent que le gouvernement incite les producteurs à modifier leur façon de faire et à utiliser les technologies plus performantes au niveau environnemental.

On vous remercie beaucoup. On est prêts à répondre à vos questions.

La Présidente (Mme Vermette): Merci, M. Laframboise. Alors, d'entrée de jeu, est-ce que...

M. Julien: Je peux poser les premières questions, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Vermette): Oui.

M. Julien: Alors, M. le vice-président, merci d'être venu présenter votre point de vue. Comme vous savez, c'est un document qui a été déposé pour fins de consultation sur les principes, mais aussi qui demandait aux différents participants de nous proposer, eux, comment ils voyaient la question des paramètres.

J'aimerais revenir, parce que vous avez présenté ça assez rapidement, à votre point de vue, quand vous dites à la page 2, dans le bas de la page: «Il ne faudrait surtout pas oublier que l'enjeu principal qui guide la mise en vigueur de ces multiples mesures réglementaires est la protection de l'environnement.» Je me permets de différer un petit peu d'opinions là-dessus. L'objectif qu'on vise, c'est le développement durable, donc de permettre le développement de l'agriculture, son droit de produire, mais en cohabitation harmonieuse. Et, effectivement, dans le cadre de développement durable, comme les producteurs sont en train de le faire, par exemple, par le biais de leurs différentes fédérations qui se dotent de plans agroenvironnementaux. J'aimerais vous entendre là-dessus parce que je trouve ça très restrictif quand vous dites que c'est uniquement relié à des questions de l'environnement.

M. Laframboise (Mario): Bon, écoutez, on a osé avancer cette formulation-là étant donné que le gouvernement n'ayant pas réglementé, c'est le monde municipal qui, par le biais de leurs règlements sur les nuisances, qui l'a fait au cours des dernières années. Donc, en quelque part, si le gouvernement du Québec décide de modifier les règles, c'est parce que vous avez probablement jugé que l'intervention municipale n'était pas appropriée ou adéquate. Étant donné que les municipalités, dans ces secteurs-là, n'ont, en grande majorité, qu'intervenu sur les nuisances, il est convenu de dire que le règlement qui est véritablement en discussion aujourd'hui, les différents règlements, ce sont pour discuter des nuisances. Donc, nous, évidemment, le problème de la production, surtout la production porcine, c'est un problème environnemental. Donc, nous, les odeurs, le bruit, pour nous, c'est une question environnementale.

(9 h 20)

Vous pouvez toujours nous dire que c'est le droit de produire des agriculteurs que vous voulez défendre, mais, en quelque part, les agriculteurs se doivent de respecter l'environnement environnant. Là-dessus, nous, on l'a fait. Les municipalités du Québec ont adopté différents règlements qui, parfois, font l'affaire; parfois ne le font pas. C'est probablement pourquoi vous avez décidé d'adopter des réglementations, pour un peu nous empêcher de faire la réglementation. On le sent, on le sait, et c'est pourquoi on vous dit que si vous faites des nouvelles réglementations, soyez assuré de respecter l'environnement.

M. Julien: Il est sûr, M. le vice-président, qu'il y a eu, pas dans toutes les municipalités mais dans certaines municipalités, je dirais, des règlements plutôt sévères, je dirais même abusifs dans certains cas. Ce qui fait en sorte que, lorsqu'on parle de l'environnement, moi, j'aime bien en parler dans le cadre du développement durable. Je pense que tout le monde est conscient qu'il faut s'adapter aux règles de jeu, puis ça, j'appelle ça du développement durable. Donc, c'est tout un contexte, autant agricole, environnemental que municipal, parce que vous parlez de l'environnement, mais c'est aussi la cohabitation harmonieuse.

Vous m'avez parlé de votre comité agricole. Hier, on voyait le comité qui a été réuni avec la MRC, dans la région de Valleyfield, qui ont réussi à s'entendre avec la Fédération des producteurs et la MRC sur des paramètres qu'on avait déposés lors de la dernière commission parlementaire le 23 juin.

Donc, il y a moyen de définir des moyens pour faire en sorte de permettre aux gens de produire en cohabitation harmonieuse avec les municipalités, j'en conviens, et aussi dans les règles de l'art de la protection de l'environnement. L'environnement, ce n'est pas rien qu'une question de paramètres, c'est aussi un outil de développement par rapport au marché extérieur. Donc, je pense que les producteurs sont conscients.

J'aimerais ça, quand vous me dites... C'est pour ça que ça me... je ne dis pas que ça me choque, mais ça m'irrite un peu quand je vois ça.

M. Laframboise (Mario): Écoutez, si ça vous irrite, ces propos-là, quand vous me dites qu'on a adopté des règlements abusifs, je vous dirai qu'on a adapté un remède de cheval à une fièvre de cheval. Pour certains, c'était comme ça. Donc, pour le reste, évidemment, on est ici pour vous témoigner de notre intérêt à ce qu'on puisse s'entendre. Là-dessus, le fait qu'on supporte les comités consultatifs agricoles, que l'Union ait toujours défendue... J'étais présent lors de la commission Ouimet; j'ai participé et j'ai signé le rapport Ouimet. Donc, à quelque part, il y a un intérêt certain pour que le monde municipal puisse s'entendre avec les agriculteurs. Mais il faut régler les vrais problèmes, et un des problèmes, ce sont les questions environnementales. Il faut arrêter de détourner le problème. Il faut l'affronter de front – excusez la redondance – le problème. Et, là-dessus, je pense que vous avez tout le paramètre; tous les points sont dans tous les textes que vous nous avez déposés. Je pense qu'on a tout ciblé pour en arriver à une solution. Mais il faut vraiment, quand on parle de distance, ça en prend, des distances, il faut les mettre. Il faut arrêter de dire que, oui, ça en prendra, et il faut en discuter.

Pourquoi il a eu des règlements qui ont été, comme vous dites, peut-être abusifs? C'est parce qu'il y avait des situations qui étaient abusives, autant de la part des agriculteurs, probablement, que de la part des municipalités. Si on affronte les vrais problèmes, si on apporte des solutions directes, je pense qu'on va en arriver à une conclusion qui va être intéressante. Ça ne fera pas l'affaire de tout le monde, autant pour le monde municipal que pour le monde agricole. Et ça, il faut se le mettre dans la tête avant de commencer. Il y aura des mécontents des deux côtés. Sauf que, je pense, on est capables d'en arriver à une solution mitoyenne qui est très intéressante.

M. Julien: Le seul point que je voulais juste vous souligner, M. le vice-président, c'est de l'aborder toujours dans le cadre du développement durable. Quand on parle de développement durable, à mon point de vue, c'est une approche plus positive. C'est une approche qui est plus large, qui tient compte des différents éléments de la dynamique. C'est dans ce sens-là, mon commentaire. Je souhaiterais que ça soit un petit peu dans ce sens-là qu'on le perçoive.

M. Laframboise (Mario): On pourrait rajouter «et développement durable» après environnement. On n'a pas de problème avec ça.

La Présidente (Mme Vermette): En vertu de l'alternance, je vais vous revenir. Je vais rappeler un peu les règles du jeu, à ce moment-ci, on a 20 minutes chaque groupe parlementaire pour questionner.

M. Farrah: C'est l'alternance, c'est ça?

La Présidente (Mme Vermette): C'est l'alternance.

M. Farrah: Merci, Mme la Présidente. M. Laframboise, Mme Auger, bienvenue à la commission, au nom des membres de notre formation politique. Dans la poursuite des discussions que nous avons, je pense que c'est important aussi que les balises soient objectives, parce que, au niveau municipal, vous le savez peut-être mieux que quiconque compte tenu de votre implication, il y a aussi le poids politique qui joue. Alors, avec l'urbanisation, et ces choses-là, évidemment, plus les citoyens mettent de la pression sur les conseils municipaux contre les agriculteurs ou contre peu importe qui, on ne veut pas antagoniser le débat, évidemment, par conséquent, si tu n'as pas des balises qui sont objectives, ça peut être dangereux, compte tenu que les élus – et ça, on en est, nous aussi – on agit souvent dans ce sens-là. C'est dans le sens où la majorité veut aller, où la grosse pression est faite. Par conséquent, il est important que les balises soient le plus objectives possible pour faire en sorte que ces dossiers soient traités de façon objective et non pas uniquement au gré des groupes de pression dépendamment du nombre qu'ils sont.

On sait ce qui se passe dans les conseils municipaux, quand tu as ta réunion de conseil puis que tu en as une bonne gang qui est présente, par conséquent, ça peut influencer souvent à l'encontre d'un groupe, peu importe de quel bord il est, ce groupe-là. Je ne sais pas si vous en convenez.

M. Laframboise (Mario): Bien, écoutez, on en convient, d'autant plus que... Pourquoi les municipalités ont légiféré dans le domaine des nuisances? C'est parce qu'il n'y avait pas de normes provinciales ni même fédérales qui pouvaient les forcer à agir autrement. D'ailleurs, les jugements en sont conséquents, c'est-à-dire que les tribunaux ont avalisés les règlements municipaux justement parce que, quelque part, il n'y avait pas de normes supralocales qui pouvaient les modifier. Donc, là-dessus, évidemment, les municipalités ont légiféré au gré des pressions des différents mouvements. Et ça, on vous l'accorde. Je vous le disais d'emblée tantôt, il y aura des mécontents partout. Mais, en quelque part, ça prend des normes claires, parce que tant qu'il n'y aura pas de normes claires, ça donnera le pouvoir – et les municipalités vont demander de l'avoir – de légiférer. Si vous ne mettez pas de normes spécifiques sur les odeurs, sur le bruit, et tout ça, les municipalités auront toujours le pouvoir, par le biais de leurs règlements sur les nuisances, de légiférer. Et même, ça ne tiendra pas la route, c'est-à-dire que les tribunaux donneront sûrement une réponse favorable aux municipalités parce que, justement, vous n'avez pas osé véritablement indiquer les normes et les mesures. Parce que ça en prend.

Il faut arrêter autant les groupes de pression qui pourraient provenir du public, autant les groupes de pression qui peuvent venir du milieu agricole. Il faut s'entendre sur des normes spécifiques et objectives. Je suis d'accord avec vous. Qu'elles soient là et, par la suite, les municipalités devront les respecter.

M. Farrah: Dans la poursuite, Mme la Présidente. Maintenant, êtes-vous d'accord avec la proposition de règlement qui est soumise, le cadre de référence, à l'effet qu'au niveau des distances par rapport aux odeurs, compte tenu que ce serait évalué selon une fourchette, avec un minimum et un maximum, ces normes-là pourraient varier d'une municipalité à l'autre? Qu'est-ce que vous en pensez?

M. Laframboise (Mario): Oui, évidemment, on peut être d'accord avec ça, sauf qu'on n'a pas vu les normes, les minima et les maxima, donc il n'y en a pas présentement. Mais, en principe, quand on parle des odeurs, avec la question des vents dominants, et tout ça, je peux comprendre qu'on peut arriver avec une échelle de minima et de maxima, étant donné les vents dominants..

M. Farrah: Qui peut varier d'une municipalité à l'autre.

M. Laframboise (Mario): Qui peut varier. Parce qu'il y a eu des décisions quand même assez importantes. J'ai eu des faits relatés par mes spécialistes. Donc, évidemment, on peut être d'accord avec ça, sauf qu'il faut connaître le minimum et le maximum. Il faut être capables, nous, de l'interpréter, de regarder si c'est raisonnable, compte tenu de la jurisprudence et de toutes les décisions qui sont rendues. C'est-à-dire qu'on a quand même un bagage de décisions et de discussions qui se sont prises. On ne peut pas faire fi de ça demain matin parce que ça ne fait pas notre affaire. Il y a quand même des normes qui ont eu tendance à s'installer, qui respectaient les milieux. Donc, il faut avoir la capacité de les analyser. Le principe de minima et de maxima, on n'est pas contre. La seule chose, c'est qu'il faut connaître les règles.

M. Farrah: Alors, en terminant, parce que je vais passer la parole tantôt à ma collègue la critique des Affaires municipales, votre inquiétude aussi, c'est, évidemment, que vous ne soyez pas consultés, après que la commission aura terminé ses travaux, sur le vrai règlement qui va être déposé. C'est ça votre inquiétude parce qu'on ne sait pas vers où on s'en va.

M. Laframboise (Mario): Bien, oui. Qu'on ait eu des discussions bilatérales qui ont eu lieu, qui ont préparé le projet de loi... C'est-à-dire que l'Union des municipalités du Québec a toujours été présente dans toutes les discussions, dans les dossiers environnementaux concernant le droit de produire. Quand vous avez préparé le projet de loi, vous avez formé un comité bilatéral entre le gouvernement et l'Union des producteurs agricoles, et le monde municipal n'est pas là. Donc, quelque part, oui, on espère au moins qu'on sera là par après pour être sûr qu'on va respecter les intérêts de nos citoyens.

M. Farrah: Je vous remercie.

La Présidente (Mme Vermette): Alors, M. Laframboise, je vous remercie de l'échange que vous avez eu. Maintenant, on va passer la parole au ministre des Affaires municipales. C'est ce que je voulais vous dire, il est présent aujourd'hui.

M. Trudel: Merci, Mme la Présidente. Je souhaite aussi, à mon tour, la bienvenue aux représentants de l'UMQ, l'Union des municipalités du Québec, et les remercier de leur présentation et de l'intérêt qu'ils ont pour la question, parce que, effectivement, c'est une question cruciale pour les communautés locales. Qu'elles soient plus urbaines ou plus rurales, il y a des enjeux extrêmement importants, et il faut bien positionner le débat.

(9 h 30)

D'abord, je pense qu'il y a une remarque, effectivement, qui doit être faite dans la lignée de ce que vient d'affirmer le ministre de l'Agriculture. La loi n° 23 et les règlements afférents ne portent pas que sur la protection de l'environnement. Ils portent également sur la protection des activités agricoles et leur développement. Et ça, ce sont trois éléments qui doivent être intimement liés. On ne fait pas une loi uniquement pour s'assurer de la protection au niveau de l'environnement. C'est une composante essentielle, mais il y a aussi la protection des activités et le développement au niveau de l'agroalimentaire, parce qu'on l'a vu hier, en particulier avec le premier groupe qui s'est présenté devant nous, qui était du monde municipal, du secteur d'activité concerné, et des producteurs dans une région donnée. Et c'est le cas pour un très grand nombre de régions au Québec. On est à travailler sur la protection du jardin et le développement de ce jardin, et c'est extrêmement important que les trois éléments soient présents dans le débat. D'ailleurs, et je vous en sais gré, M. le vice-président, vous indiquez donc dans votre texte, dans votre commentaire surtout, que, oui, on pourrait ajouter les notions de protection de développement des activités agricoles. Il faut bien retenir cela.

Deuxièmement, je pense qu'il faut bien éclairer le débat. Ce qui est proposé, ce qui a été mis sur la table le 20 mars dernier, ce sont les principes généraux qui devraient guider l'élaboration de normes au plan de la gestion d'un certain nombre de nuisances, en particulier au niveau des odeurs, puisque, sur la question du bruit et des poussières, le ministre de l'Environnement aura certainement l'occasion d'y revenir, nous avions décidé, nous avions pris la décision – c'est toujours la décision – d'avoir une réglementation nationale, puisqu'il est possible de gérer au niveau national avec efficacité ces deux éléments-là. Quant à la gestion des odeurs, par les distances séparatrices, il faut être capable de tenir compte des particularités locales et de s'appuyer sur le dynamisme, l'intelligence et le jugement au niveau local avec nos municipalités.

Donc, on ne peut pas dire, ici, que le gouvernement a décidé de ne pas imposer de normes de distance minimale et maximale. Dans le document que vous nous remettiez ce matin, à la page 7, vous nous indiquez, en ce qui concerne la section sur l'épandage: «Le gouvernement a décidé de ne pas imposer de normes de distance minimale et maximale.» Et c'est là que je veux insister avant d'aller à la question. L'exercice que nous réalisons présentement, c'est que nous avons présenté un certain nombre de principes fondamentaux, des orientations générales, et c'est à chacun des intervenants de nous faire des propositions sur le contenu. C'est pour ça que vous indiquiez à la fin de votre intervention, il y a quelques minutes, que vous souhaitez que nous soyons du débat. Nous appelons l'UMQ, effectivement, à nous dire avant la conclusion du débat lui-même, de nous faire parvenir, quant à votre point de vue, comment nous devrions, à l'intérieur des principes généraux, fixer les distances, les paramètres en termes de gestion des odeurs et que ce soit gérable sur le plan local et régional.

Maintenant, à cet égard-là, donc, M. Laframboise, qui êtes aussi préfet d'une MRC, je comprends mal et j'aimerais avoir plus de commentaires quand vous dites: On est d'accord avec les comités consultatifs agricoles qui vont nous permettre de bien gérer tout ce phénomène au plan local. Mais vous dites: «On est en désaccord avec les règles de fonctionnement prescrites au projet de loi n° 23. L'Union ne peut que s'opposer au fait que le comité consultatif agricole soit constitué en majorité de producteurs agricoles, ce qui signifie que les décisions ne reviendront plus aux élus municipaux, mais aux membres désignés de l'UPA.» Je dois vous dire que je trouve ça un peu fort. Je trouve ça un peu fort parce que ce n'est pas l'esprit qui est dans la loi, me semble-t-il. Puis pourquoi vous en arrivez à cette conclusion-là?

M. Laframboise (Mario): C'est parce que, à la lecture même de l'article... Moi, je vais vous dire que j'en ai un comité consultatif agricole qui est représenté à 50 % par le monde agricole, à 50 % par le monde municipal et des citoyens qui se sont joints à ce qu'on appelle la représentativité municipale. Moi, je n'ai pas de difficultés. C'est que, à la lecture du texte, votre texte est complexe. C'est que, dans le sens où, quand vous dites: La municipalité régionale nomme les membres du comité parmi l'ensemble des personnes suivantes: les membres du conseil municipal, les producteurs agricoles au sens de la loi sur les producteurs qui résident sur le territoire et qui sont inscrits sur une liste et qui ne sont pas visés au paragraphe 1°, ça veut dire que, s'il y avait des producteurs agricoles qui étaient nommés par les MRC, bien, là, ça ne ferait pas partie des agriculteurs.

C'est pour ça que je vous dis que votre texte aurait pu être un petit peu plus clair. Nous ce qu'on dit, c'est: Écoutez, il ne faut pas non plus tendre à vouloir qu'il y ait plus d'agriculteurs sur ces comités-là que de représentants des municipalités et du milieu. C'est juste ça. C'était ça, le but de l'intervention. Donc, le principe du 50-50, nous, on est d'accord avec ça, mais, quand on lit l'interprétation, c'est comme si, bon, il y avait des agriculteurs qui venaient du monde municipal, il ne faut pas que tu les calcules ceux-là, tu vas calculer juste les agriculteurs qui vont venir... Donc, là, tu risquerais d'avoir des comités agricoles où ils sont supérieurs en nombre, et tout ça, puis je pense que ce n'était pas le but, parce que j'ai participé aux discussions sur l'avant-projet, et tout ça, et je pense que ce n'était pas le but. Le texte, comme je vous dis, s'il y avait une bonification à y faire, ça serait de s'assurer qu'il y ait une représentativité 50-50 – ça, on est d'accord avec ça – sur ce comité-là. Bon.

M. Trudel: Bien, moi, je suis heureux d'entendre votre réaction, là, que c'est plutôt l'esprit. Il faut que le monde agricole, on soit ensemble, que nous soyons avec le monde agricole et le monde agricole avec nous au niveau municipal, parce que c'est au plan du développement des collectivités locales que la situation se présente en termes de protection et de développement. Et c'est une activité – prenons-le au plan économique – tellement importante pour une grande partie du territoire québécois qu'il faut absolument que nous joignions les efforts et non pas que nous soyons en mesure... J'apprécie votre façon de répondre à la question. Ce n'est pas le contrôle d'un groupe sur les autres, c'est ensemble. C'est ça, le principe fondamental de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, et c'est ce qui fait qu'on a une telle réussite au Québec depuis 20 ans. L'occupation harmonieuse du territoire à partir des différents usages sur ce territoire-là, on a réussi cela, et là, en matière de développement agricole, on est capable de relever ce défi-là, j'en suis persuadé, à partir de l'esprit sur lequel vous vous appuyez.

Deuxièmement...

M. Laframboise (Mario): Si je peux me permettre, M. le ministre, vous savez que, à la MRC Papineau, à même notre comité consultatif agricole, on a adopté un règlement de contrôle intérimaire sur la production porcine. Vous en avez copie, parce qu'on vous l'a fait signifier, mais ça a été adopté et ça a été approuvé par notre comité consultatif agricole. Donc, on a un règlement de contrôle intérimaire sur la production porcine qui va entrer en vigueur dès sa proclamation, là, on espère, dans les plus brefs délais.

M. Trudel: Ça m'amène directement – justement, ça adonne très bien – à la deuxième question, mais, auparavant, je vais quand même noter que, sitôt qu'il y a un deuxième préfet, et par ailleurs vice-président de l'UMQ, qui se présente devant nous, on voit très bien que, sur le terrain, ça fonctionne. On peut s'entendre. Hier, on a eu devant nous, en ouverture de la commission, des gens qui sont venus nous dire: Voilà, nous, on s'est mis à travailler ensemble, producteurs agricoles, monde municipal, les producteurs, et on est arrivé à déterminer des normes sur lesquelles on peut s'entendre et avec lesquelles on peut très bien vivre en termes de protection et de développement. Vous nous dites, vous, à titre de préfet de la MRC de Papineau: Eh bien, nous, au comité consultatif agricole, on a adopté un règlement de contrôle intérimaire, on a pu s'entendre sur le territoire. C'est de même qu'on va en arriver, je pense, oui, à supporter le développement.

Dernière question, M. Laframboise, mais extrêmement importante, sur le processus. Au niveau de la révision des schémas d'aménagement qui vont éventuellement devoir inclure les nouvelles normes en termes de distances séparatrices qui seront contenues dans les orientations que nous émettrons avant le 20 juin prochain, il est évident que, donc, les MRC sont à réviser leur schéma d'aménagement. Ce que vous nous dites ce matin par le biais d'une autre question, c'est qu'on n'aura pas besoin d'attendre une période de deux ans pour l'application. Il est possible, donc, pour les MRC d'adopter ce qu'on appelle des règlements de contrôle intérimaire pour faire entrer en vigueur, immédiatement après l'émission des orientations gouvernementales en pareille matière, les normes en matière de distances séparatrices en ce qui concerne les établissements, les bâtiments et la gestion des odeurs. C'est possible de faire cela à l'intérieur, actuellement, de la réglementation?

M. Laframboise (Mario): Oui. Comme vous savez, M. le ministre, quand on est en processus de schéma d'aménagement, la loi nous permet de déposer des règlements de contrôle intérimaire s'il y a des normes ou des réglementations pour lesquels on veut qu'ils s'appliquent tout de suite, parce que, pour les schémas d'aménagement, c'est vrai de dire que tu as deux ans de leur adoption pour que les municipalités puissent inclure les normes. Mais, par contre, une MRC qui désire que des normes s'appliquent tout de suite, si elle passe par un règlement de contrôle intérimaire, le seul temps où elle peut le faire, c'est quand elle est en processus de révision, et j'ai l'impression que la plupart des MRC du Québec sont en processus de révision, là.

(9 h 40)

M. Trudel: C'est ça. La plupart des MRC du Québec sont en processus de révision, et l'intention gouvernementale, ce n'est pas d'étendre la période d'application des décisions que nous prendrons avant le 20 juin prochain en matière de distances séparatrices. Nous allons donc demander à nos MRC d'adopter, s'il y a lieu... c'est-à-dire que, si, pour le schéma, il y a trop de travail à réaliser encore, d'adopter des règlements de contrôle intérimaire pour en arriver à une application rapide. Pourquoi? Parce que nous avons fait consensus sur cette question au Québec, que le gouvernement a décidé non seulement d'adopter la loi n° 23 en matière de protection et de développement des activités agricoles, mais également de promulguer la pleine application de cette loi en collaboration avec les municipalités et leurs responsabilités à l'intérieur de l'année qui suit l'adoption de cette loi. Et nous avons dit que nous allons adopter ces orientations avant le 20 juin, et elles vont s'appliquer dès lors par les mécanismes qu'on vient d'évoquer à travers les règlements de contrôle intérimaire.

M. Laframboise (Mario): À condition, M. le ministre, que vous ayez des distances qui soient incluses dans le règlement, et, s'il n'y en a pas, que vous permettiez aux MRC, elles, de s'en donner. Donc, quelque part, si vous ne vous entendez pas et que vous ne réussissez pas à inclure des normes objectives et spécifiques, il faut que vous permettiez aux MRC d'adopter des normes, elles, qui iront dans leur règlement de contrôle intérimaire, et, à ce moment-là, on pourra être plus sévère que la loi parce que vous n'avez pas réussi à vous entendre.

M. Trudel: On peut faire une chorale, là?

M. Laframboise (Mario): Oui, oui.

M. Trudel: On va s'entendre, ne vous inquiétez pas. Avant le 20 juin, il va y en avoir, des distances séparatrices, ne vous inquiétez pas. Merci de votre présentation, M. Laframboise. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Vermette): Merci, M. le ministre. Alors, je passerais la parole à la députée de Jean-Talon.

Mme Delisle: Merci, Mme la Présidente. Alors, bienvenue. Bonjour. Je vois que l'épaisseur des lunettes roses du ministre des Affaires municipales, ça épaissit de jour en jour et que, à l'entendre parler, tout va bien dans le meilleur des mondes. C'est vrai que, hier, on a entendu les gens de ce qu'on appelle la Convention Saint-Valentin. Aujourd'hui, vous êtes devant nous à la fois comme vice-président de l'UMQ et préfet de votre région, de votre MRC. Moi, c'est drôle, je vous ai écouté parler, j'ai lu votre mémoire, et, à moins qu'il ne se soit passé quelque chose entre les premières minutes où le ministre vous a questionné, vous n'êtes pas si satisfait que ça. Au contraire, l'UMQ est excessivement déçue d'avoir à se prononcer sur des grands principes. L'UMQ est en désaccord avec les règles de fonctionnement prescrites au projet de loi n° 23. Vous faites remarquer également que le gouvernement a une nette tendance à vouloir diminuer le rôle et la responsabilité des élus.

Moi, je dénote dans le mémoire de l'UMQ – et vous me direz si je me trompe – qu'il y a évidemment des éléments avec lesquels vous êtes d'accord, mais qu'il y en a d'autres avec lesquels vous n'êtes pas d'accord et que vous souhaitez des aménagements majeurs au cadre de référence. Vous souhaitez qu'il y ait davantage de clarification au niveau des éléments qu'on ne retrouve pas encore dans la réglementation, puisqu'on est en consultation, et vous déplorez, si j'ai bien compris, le fait que vous aurez ou que les municipalités, les MRC auront à travailler par la suite avec une réglementation sur laquelle les municipalités n'auront même pas pu être consultées, puisque ça va se faire, semble-t-il, dans un temps record. Mais, moi, je connais mon vis-à-vis, Mme la Présidente, et tout va bien dans le meilleur des mondes pour le ministre des Affaires municipales. Ça va tellement bien qu'on a une réforme Landry qui a réussi à délester 625 000 000 $ de responsabilités dans la cour des municipalités, puis ça, ça va super bien.

Maintenant, moi, je voudrais qu'on revienne sur la question de la composition du comité consultatif. Vous avez relevé tout à l'heure, à partir du cadre de référence, certains agacements que vous avez, certaines préoccupations, devrais-je dire – je pense que ce serait mieux d'utiliser ce terme-là – parce que vous n'êtes pas convaincus, finalement, que ce sera, dans l'application, 50-50. Et je sais que vous-même, M. le préfet, avez un comité consultatif, vous pourriez peut-être nous en parler un petit peu, mais aussi, à partir de ça, nous expliquer pourquoi vous craignez justement une dilution du rôle des élus, de la responsabilité, finalement, des élus dans ce dossier-là.

M. Laframboise (Mario): Écoutez, d'abord, vous avez des interventions qui sont drôlement pertinentes, dans le sens où le fait qu'on n'ait pas été impliqué dans la rédaction, évidemment, de cette proposition-là... On a beau nous dire, et j'en conviens, qu'on veut nous impliquer par la suite, mais il reste que j'ai obtenu version des discussions qui ont eu lieu en novembre entre l'UPA et le gouvernement du Québec, j'en ai copie devant moi, et je dois vous dire que c'est drôlement plus intéressant, le document qui est là, que celui qu'il nous présente aujourd'hui, c'est-à-dire que les normes sont pas mal plus sévères. En tout cas, peut-être que ça va rester les mêmes, sauf que les documents qui nous ont été donnés sont beaucoup plus intéressants au point de vue réglementation à respecter.

Donc, tout est dans la teneur du contenu des règlements. Donc, nous, on peut s'opposer vivement à toute réglementation. Ce n'est pas ça qui est le but. La seule chose, c'est que, si les normes, les distances, et tout ça respectent une certaine intégralité du territoire puis une protection de la vie de nos citoyens, même si c'est le droit de produire, il faut quand même protéger nos citoyens aussi. Donc, là-dessus, tout est là, et c'est pour ça qu'on demande d'être impliqué, qu'on déplore qu'on n'ait pas été impliqué lors des négociations bilatérales entre le gouvernement et l'Union des producteurs agricoles et qu'on dit: Écoutez, quelque part, ça va prendre quand même des normes. On peut bien vous les signifier, on va vous en envoyer copie de ce pas. On va se mettre là-dessus, et, demain, vous allez le recevoir, ce que, nous, on jugera en termes de distance, et tout ça.

C'est comme mon règlement de contrôle intérimaire chez nous, je ne suis pas sûr que ça va faire l'affaire de tout le monde au Québec. Je vous le dis, là, je ne l'ai pas lu encore. Personne ne me l'a demandé, mais je ne suis pas sûr que ça va faire l'affaire de tout le monde. Donc, quelque part, on est capable de s'entendre. Il y a, présentement, sur mon territoire, une grosse assemblée, et, même si on s'est entendu avec le monde agricole, quelque part, il y a quelqu'un dont ça ne fait pas l'affaire. Et, aujourd'hui, où on se parle, à Buckingham, dans le comté de M. MacMillan, il y a une réunion sur les principes de mon règlement de contrôle intérimaire, et c'est pour ça que j'espère qu'on va le maintenir. On s'est entendu avec le monde agricole, mais ça ne veut pas dire que ça fait l'affaire, et c'est sur ce même principe là que je vous dis: Tant qu'on n'a pas les normes, ça ne veut pas dire que ça va faire l'affaire. On est tous d'accord avec le principe, on veut qu'il y en ait une norme, mais il faut qu'elle soit respectueuse des intérêts qu'on défend. Et, je vous l'ai dit au début, on ne gagnera pas tout ce qu'on veut, mais ce n'est pas vrai que, de l'autre côté, ils vont gagner tout ce qu'ils veulent non plus, et c'est là-dessus qu'il faut vraiment être capable de discuter ouvertement puis de mettre des normes qui seront connues, au su de tout le monde, sinon, bien, qu'ils laissent le pouvoir aux municipalités de continuer ce qu'elles font aujourd'hui.

Donc, s'ils ne sont pas capables, on va le faire. On l'a fait jusqu'à date, ça ne fait pas l'affaire, mais on a le pouvoir, en tant qu'élus municipaux, par notre règlement sur les nuisances, de faire des règlements et, si le gouvernement ne veut pas les faire, on va les faire, et c'est ce qu'on vient de vous dire aujourd'hui. On n'est pas d'accord avec le processus, on est prêt à attendre les normes et, on vous l'a dit tantôt, le minima, le maxima, oui, on en avait des données, on avait des chiffres, on a tout ça. On est prêt à regarder ça. Il n'y a pas de problème, on est prêt à tout pour en arriver à des mesures objectives qui vont aider les communautés à adopter des réglementations adéquates, respectueuses de l'environnement durable. Moi, je suis d'accord avec ça, sauf que ça en prend. Sinon, laissez les municipalités faire des règlements dans le cadre des nuisances. On en a fait aujourd'hui, on en fera pour l'avenir. C'est un département qui nous revient, on a le droit de faire de la réglementation en matière de nuisances. Et c'est ça, c'est le message qu'on vous laisse.

Mme Delisle: Est-ce que vous croyez ça, M. le maire, M. le préfet et M. le vice-président – parce que vous portez trois chapeaux, mais je pense qu'ils se confondent très bien – qu'il y aura accélération au niveau du processus puis que c'est facile, finalement... Puis là je ne minimise pas l'importance des contrôles intérimaires, mais on connaît toute la mécanique d'adoption des schémas d'aménagement. Il ne faut pas vivre dans une tour d'ivoire. Sur le terrain, il y a des gens qui sont immédiatement concernés par ces schémas-là, il y a d'autres maires qui sont interpellés par ces schémas-là. Ça ne se fait pas comme ça. Que ce soit en milieu rural ou en milieu urbain – on ne se contera pas fleurette, ici, puis le ministre devrait peut-être descendre de sa tour d'ivoire puis aller voir ce qui se passe – croyez-vous ça, vous, que le processus va être accéléré d'ici le 20 juin pour permettre à tout le monde de vivre dans la plus grande harmonie possible? Il y a quelque chose qui ne marche pas, là.

M. Laframboise (Mario): Bien, écoutez, ce que je peux vous dire, par contre, c'est qu'une communauté qui vit des problèmes et qui aurait une réglementation adéquate a la chance, avec les règlements de contrôle intérimaire, d'aller rapidement. Ça, je ne peux pas être contre ça. Il faut quand même que je rende à César ce qui appartient à César, on peut, avec les règlements de contrôle intérimaire, si la réglementation proposée est juste et adéquate...

Mme Delisle: Si elle arrive avant le 20 juin, si on l'a, là.

M. Laframboise (Mario): Tu n'as pas de limite concernant le règlement de contrôle intérimaire, c'est-à-dire que, plus elle retarde... si elle arrive avant le 20 juin, les MRC pourront adopter leur règlement de contrôle intérimaire le plus rapidement possible, dès le début juillet, mais, par contre, si jamais le gouvernement reporte à l'automne l'étude, bien, là, ça va retarder encore d'un an.

Mme Delisle: C'est à ça que je fais référence.

(9 h 50)

M. Laframboise (Mario): Donc, c'est ça. C'est sûr que les règlements... Mais, par contre, ça n'empêche pas une communauté d'adopter un règlement de contrôle intérimaire en attendant. On pourrait le faire, peu importe le règlement ou la façon dont... sauf que les MRC ne veulent pas étant donné que tout le monde attend la norme gouvernementale. Pourquoi vous n'avez pas vu de MRC adopter des règlements de contrôle intérimaire tout de suite? C'est parce qu'on attend. Tout le monde est en attente, finalement, parce que, si jamais tu es pour discuter un règlement et puis qu'il y a des débats publics là-dessus, tu aimes mieux que ce soit une norme qui soit précisée.

Donc, vous avez raison de dire que c'est important que le gouvernement dépose le plus tôt possible pour que les MRC puissent adopter le plus rapidement possible des règlements de contrôle intérimaire. Et c'est peut-être le malaise. Chez moi, moi, j'ai eu la chance de m'entendre avec les agriculteurs, mais, en quelque part, quand tu ne peux pas t'entendre, c'est parce qu'il y a des normes que tu n'acceptes pas. Donc, si le gouvernement donne les normes, bien, là, à ce moment-là, ça va aller plus vite pour les communautés pour adopter leurs règlements de contrôle intérimaire.

Mme Delisle: Je terminerais mon intervention juste par un commentaire. Si ça allait si bien que ça entre le monde agricole et le monde municipal, on n'aurait certainement pas la possibilité d'avoir des manifestations du monde agricole devant le parlement le 16 avril. Alors, le monde rose, là... Je pense qu'il faut sortir de sa tour d'ivoire.

M. Trudel: Ça fait deux fois qu'il dit qu'il vient de s'entendre, là. On voudrait que vous vous chicaniez. Je ne sais pas comment on va faire ça, là.

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Vermette): Alors, comme on est dans la bonne harmonie, que c'est bien débuté ce matin, on va continuer dans l'alternance. Alors, je vais vous dire, il nous reste deux minutes du côté ministériel et il reste six minutes du côté de l'opposition. J'ai plusieurs intervenants du côté ministériel encore. Alors, il y a déjà le ministre de l'Environnement qui veut prendre la parole de même que trois intervenants du côté de la députation et il y a le ministre, aussi, de l'Agriculture qui aimerait faire ses conclusions. Alors, il faudrait être succinct le plus possible pour permettre à tout ce monde-là de pouvoir s'exprimer. Je pense qu'il y en a qui vont être éliminés d'emblée. Alors, M. le ministre de l'Environnement et de la Faune.

M. Cliche: Oui, je vais essayer d'être succinct. D'abord, juste rétablir des faits. Dans vos interventions, vous mélangez un peu, à mon point de vue, le règlement au sol, le règlement sur la réduction de la pollution agricole et les questions relatives aux nuisances. Vous déplorez le fait que vous n'ayez pas pris connaissance du contenu du règlement sur la réduction de la pollution agricole, et je tiens à rappeler certains faits parce que c'est important. Il y a eu une table de concertation, à laquelle vous avez participé, qui a fait son rapport en février 1996 et il y avait certains éléments en ce qui concerne un projet de règlement sur la réduction de la pollution agricole qui n'avait pas fait consensus, et vous demandiez au ministre, à ce moment-là, de trancher et de prendre des décisions, ce que nous avons fait. Mais, comme c'est notre pratique d'aller voir le principal intéressé lorsque nous préparons un nouveau règlement, nous sommes allés voir l'UPA et nous nous sommes entendus sur la façon d'appliquer une application de ce règlement-là, et il y a eu à cet effet des échanges de correspondance entre mon sous-ministre adjoint, M. Denis Jean, qui est ici, et M. Lafleur qui est le D.G. de l'UPA. Après ça, je suis allé vous rencontrer pour vous expliquer le contenu du règlement. Or, lorsque je suis arrivé à cette réunion, vous et d'autres avez tout simplement fermé vos mallettes, fermé vos valises et avez refusé de m'entendre, disant que vous vous sentiez offusqués et outrés que j'aie parlé à l'UPA sur l'application d'un règlement. Alors, si vous ne connaissez pas le contenu du règlement, c'est parce que, en début de rencontre, vous avez, de façon assez cavalière, fermé vos mallettes et quitté une réunion où je m'étais rendu pour vous expliquer le contenu du règlement. Ça, ce sont les faits.

Deuxième chose. En ce qui concerne les distances séparatrices, oui, on va s'entendre, et, oui, il y aura des distances séparatrices. En ce qui concerne les lieux de production et les lieux d'entreposage, il y aura des propositions sur un facteur d'usage. Comme vous savez, il va y avoir, donc, une fourchette au niveau des distances. Au niveau des distances eu égard à l'épandage, il va y avoir une distance minimale, et nous allons suggérer également une distance maximale. La question que j'ai pour vous, c'est la suivante. Dans plusieurs régions du Québec, les producteurs agricoles – je complète une tournée de plusieurs régions du Québec – sont terrorisés par l'attitude de certaines municipalités et vivent sans doute des cauchemars toutes les nuits de tomber dans les griffes des municipalités et ils ont peur que les municipalités exagèrent et, par des distances séparatrices exagérées, se trouvent en sorte à bannir la production agricole des zones vertes.

Ma question est la suivante et elle reprend des commentaires qui ont été faits hier: Si on y va avec une proposition de distance minimale qui va être basée beaucoup sur la santé, sur des questions de santé humaine, mais une distance maximale pour donner une fourchette, une flexibilité pour les municipalités de protéger des zones touristiques, de protéger des monastères, je ne sais pas, des choses qu'elles jugent importantes au niveau de l'usage, au niveau du territoire, les producteurs agricoles nous disent que vous allez toujours vous plaquer sur le maximum, que vous allez mettre de côté le minimum et que vous allez immédiatement aller au maximum pour prescrire le plus possible, réduire le plus possible la producteur agricole, est-ce que c'est le cas ou, selon vous, les comités mixtes, municipal-producteurs agricoles, vous allez les entendre? Et, selon vous, vous allez jouer dans la fourchette ou vous allez toujours aller au maximum? Parce que c'est ce que les producteurs agricoles sont venus nous dire hier.

M. Laframboise (Mario): Bien, écoutez, moi, je ne pense pas qu'on va toujours aller au maximum. Vous dire que ça va être un monde parfait, ça, je ne peux pas vous le garantir. Ce que je peux vous dire, c'est qu'il y a une volonté du monde municipal. Ne serait-ce que par l'acceptation des comités consultatifs agricoles, il y a une volonté probante d'entente. Vous dire qu'on va s'entendre dans toutes les régions du Québec, ça serait probablement de présumer de quelque chose qu'on ne peut garantir, sauf que, en quelque part, le dossier des comités consultatifs agricoles – parce qu'il ne faut pas oublier que c'est le seul comité consultatif qui est dans la loi, sauf la Commission d'aménagement et d'urbanisme – c'est, déjà là, de donner à une partie de nos citoyens un pouvoir que les autres n'ont pas, et ça, là-dessus, je pense que ç'a été bien accueilli.

Ça a pris beaucoup d'efforts de la part des unions municipales pour faire comprendre ça à leurs communautés de dire: Écoutez, vous allez donner aux agriculteurs, parce que, quelque part, au Québec, on veut protéger les territoires agricoles, on veut être capable de remettre en valeur l'agriculture, on veut donner à ces gens-là un pouvoir que les autres n'ont pas, et, là-dessus, je pense que ça a été très bien accepté. Il n'y a plus de commentaires négatifs de la part de nos membres là-dessus sauf de quelques-uns. Je vous le dis, on ne fait pas toujours des heureux, sauf que, en quelque part, le principe est là, et, sur ce même principe là, je pense qu'on va arriver, dans la majeure partie des régions du Québec, à une entente avec le monde agricole. Et, si vous allez avec un principe de minima et maxima, je pense que vous ne vous trompez pas. En autant que ça donne la latitude suffisante, je pense qu'on est capable d'arriver avec ça, et les premiers scénarios qu'on avait vus, qui avaient été probablement proposés par le ministère de l'Environnement, étaient raisonnables pour nous. Les premiers, je dis bien.

La Présidente (Mme Vermette): Alors, M. Laframboise, je vous remercie. M. le ministre, je vous remercie. Je passerais la parole à l'opposition, au député d'Orford.

M. Benoit: Oui, M. le maire. Pour avoir suivi ce débat-là depuis tout le début, un peu comme le député de Saint-Jean, je veux remettre les choses dans leur perspective ici. J'écoutais le ministre des Affaires municipales et le ministre de l'Environnement qui nous disaient: Oui, mais ça va bien dans une région, la région de Saint-Valentin, puis ils sont venus nous voir hier. Oui, ça va bien dans la région de Saint-Valentin, et on s'en réjouit de ce côté-ci. Puis, tant mieux, si, dans toutes les MRC du Québec, partout, ça allait bien. Nous, on va souscrire à ça 100 milles à l'heure. Mais, dans la vraie vie, je peux lui donner des pages complètes de régions ou de MRC – ça va me faire plaisir de lui donner – dans les trois voyages que j'ai faits à la grandeur du Québec, d'endroits où le monde ne s'entend pas. Et là je comprends pourquoi le premier groupe qu'on a entendu hier – je me demandais, je n'avais jamais entendu parler de ça, cette histoire, l'entente de Saint-Valentin – c'était le premier groupe qu'on entendait. Ce matin, je réalise pourquoi. C'est qu'ils essaient de nous charrier ça pendant trois jours pour nous dire que ça va bien à Saint-Valentin. Je suis très heureux que ça aille bien à Saint-Valentin, et la journée de Saint-Valentin aussi, j'aimerais ça que tout le monde s'entende bien, mais, dans la vraie vie, je vais lui donner des pages complètes d'endroits, de citoyens... Je vais juste lui en nommer quelques-uns au ministre.

Par exemple, Sainte-Luce. Sainte-Luce, là, on va déposer une pétition jeudi s'ils nous donnent la permission. Le village complet ne veut plus payer les taxes municipales. Ça ne doit pas s'entendre très, très bien dans ce coin-là. Grandes-Piles. Il y a des pancartes, c'est à peu près 15 milles de long, à Grandes-Piles quand vous vous promenez. Les citoyens ont fait des vigiles pascales, «c'est-u» assez fort? Une semaine à ne pas dormir sur le bord de la route. Marieville. Marieville, ce n'est pas loin, ça, de l'entente de Saint-Valentin. Ils ne s'entendent pas, ça a l'air. Ils ne s'entendent pas. Danville. Bic. La région de Bic. Le ministre est découragé. Je peux lui en donner pendant deux heures, des régions, des villes, des citoyens qui disent que ça ne fonctionne pas. Alors, ne nous parlez pas d'une entente au Québec où ça fonctionne.

Ceci dit, M. le maire, dans votre mémoire, que j'ai bien apprécié, je pense que vous faites un bon tour de la problématique. Vous nous dites: «Il n'y a pourtant pas de droits acquis en matière de pollution dans aucun secteur d'activité. Pourquoi n'en serait-il pas de même avec les agriculteurs?» Et là on parle des agrandissements des installations. J'aimerais vous entendre sur ce point-là en particulier.

M. Laframboise (Mario): Bien, écoutez, je pense que c'est clair. Vous savez, pour nous, le monde municipal, qui vivons avec les industriels à coeur de jour, on n'a jamais autorisé ou donné de statut spécifique à tout type d'industrie. Quand on adopte une norme, on la respecte intégralement peu importe les agrandissements ou pas. Je pense que c'est clair, que ça va dans la logique des choses, que, si jamais vous adoptez des normes, s'il y a des agrandissements, on doit respecter les nouvelles normes. Je veux dire, en quelque part, on le fait avec les industries du Québec. Pourquoi on donnerait, encore une fois, aux producteurs de porc un statut particulier? Je pense que c'est la logique même. On a adopte une réglementation, tout le monde doit la suivre une fois qu'elle est adoptée. Moi, je suis d'accord avec ça.

La Présidente (Mme Vermette): Merci, M. le député d'Orford. Il reste trois minutes pour une question du député de Papineau.

(10 heures)

M. MacMillan: Juste un petit commentaire et une question. Pour commencer, j'aimerais le remercier et je suis très fier que mon préfet soit ici et qu'il représente l'Union des municipalités. Et j'aimerais souligner qu'il vient d'un des plus beaux comtés du Québec, Papineau, comté semi-rural et rural, mais très bien organisé, comme vous pouvez le voir.

M. le préfet, il y a quelque chose qui me fatigue depuis le début dans ce dossier du droit de produire, la loi n° 23. J'ai siégé à presque toutes les rencontres qu'on a eues, les consultations puis les discussions entre la commission et... Moi, je me rappelle la première année où j'ai été élu, en 1983, comme conseiller municipal, les Affaires municipales nous donnaient un cours Élus pour décider. Je ne sais pas si vous avez eu la chance de prendre ce cours-là; je ne sais pas si le ministre a pris le cours Élus pour décider, mais, moi, je sais...

M. Trudel: Je l'ai donné, le cours, à l'université.

M. MacMillan: Ah oui! C'est pour ça qu'il y en a bien qui n'ont pas compris de votre bord.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. MacMillan: Mais, il y a une affaire qui est importante pour moi dans tout ça. Vous, vous représentez la MRC de Papineau et les maires de chacune des municipalités, qui sont élus pour décider eux aussi. Depuis deux ans qu'on parle de ça, le droit de produire, il y a des groupes, sans les nommer, qui ne sont pas satisfaits. C'est drôle que dans certaines régions il y a eu des accords et dans d'autres régions il n'y a pas d'accord. Mais là, on va venir au Parlement, on va revirer le monde à l'envers pendant que, vous, vous avez été élu par les gens de chacune des régions pour prendre des décisions, mais vous n'avez pas les outils pour les prendre. Le comité consultatif se réunit chez nous, comme vous l'avez dit, depuis un an, ça va bien, il y a des producteurs qui siègent là-dessus, qui sont d'accord, puis qui décident entre eux autres. Mais, «bout de bonyeu», quand est-ce qu'on va lâcher de faire des consultations, prendre position puis mettre des règlements sur la table, conditionnels à ce que les élus dans les comtés... On parle, de ce côté-là, de décentralisation, de prendre des décisions. Ça fait deux ans qu'on n'en prend pas dans ce dossier-là.

Alors, ça, M. le préfet, je pense que vous devriez le dire au ministre. Si vous voulez, je peux le dire, moi. Qu'il lâche donc de niaiser puis qu'il vous laisse donc prendre vos décisions où vous êtes élus dans vos régions. Il prône la décentralisation, mais ce n'est pas ça qu'on fait dans ce projet de loi là. C'est ça que je voulais dire. Merci.

La Présidente (Mme Vermette): Oui, M. Laframboise.

M. Laframboise (Mario): Bien, si je peux me permettre un commentaire, on peut toujours y aller en boutade, mais il reste une chose, il y a une réalité: si jamais les normes et les réglementations qui vont être déposées n'ont pas de mesures respectueuses des intérêts des citoyens, n'en prenez pas et laissez le pouvoir aux municipalités de le faire. On va le faire. Ne soyez pas inquiet, on est élus pour décider, puis on en passe, des règlements. Ça, là-dessus, c'est comme ça. Ça fait que j'espère que vous ne tomberez pas dans l'autre réalité qui sera d'empêcher les municipalités de réglementer. Si vous n'êtes pas capable d'avoir une mesure qui fera l'affaire de tout le monde, laissez le pouvoir aux municipalités de réglementer. On va le faire. On l'a fait jusqu'à date et on va continuer de le faire. Et ça, là-dessus, je pense que c'est le meilleur message que je peux vous laisser.

Mais, pour le reste, on est intéressé en tant qu'Union à discuter avec vous pour les normes les plus respectueuses du développement durable – ça va plaire au ministre.

La Présidente (Mme Vermette): Je vous remercie, M. Laframboise. Alors, je laisserais quelques minutes au ministre et, après, au représentant de l'opposition pour les remerciements.

M. Julien: Alors, Mme la Présidente, d'abord dire à mon bon ami de Papineau qui dit que ça prend du temps que ça fait quand même depuis 18 ans qu'on attend après la loi et on l'a adoptée l'année passée. Et là on avait pris comme engagement de régler la question de la pollution d'origine... les inconvénients pour le mois de juin.

M. le préfet, d'abord, je vous remercie d'utiliser maintenant le terme développement durable, ça m'apparaît moins restrictif et beaucoup plus global.

Ce que je veux vous dire, c'est, un, vous féliciter d'avoir fait des ententes avec les producteurs agricoles et, deux, j'aime mieux un verre à moitié plein qu'à moitié vide. Donc, je suis content de ce qu'il s'est passé, de voir que, dans Saint-Valentin, il y a moyen de s'entendre sur des cadres raisonnables qui permettent le droit de produire aux producteurs et qui permettent aux municipalités une cohabitation harmonieuse. Ça, je veux le respecter.

Moi, ce que je vais défendre, c'est le cadre du développement durable. Je vais vous dire pourquoi je vais le défendre. Au Québec, l'agriculture, c'est 370 000 emplois; le bioalimentaire, le chiffre d'affaires, c'est 10 000 000 000 $. C'est 2 000 000 000 $ d'exportation cette année; c'est 10 % du produit intérieur brut. Ça fait que vous comprendrez que, moi, je vais m'assurer qu'on continue, qu'on maintienne, qu'on développe l'agriculture dans un cadre de relations harmonieuses, comme on le voit avec la multitude de comités agricoles qui sont en train de se créer puis qui sont en train de se faire. C'est dans ce sens-là qu'on va le voir, mais dans le cadre d'un développement durable. Pas pour empêcher une économie de se développer, surtout pas. Quand on se situe dans une crise dans laquelle on passe actuellement, vous comprendrez, M. le préfet, avec tout le respect que je vous dois, qu'on devra tenir compte de cette réalité-là, mais, je suis d'accord avec vous, dans une cohabitation harmonieuse.

C'est pour ça que je vous dis que je trouve ça intéressant les démarches que vous avez faites. Je trouve ça intéressant les démarches qui ont été faites dans Valleyfield, dont mon collègue de Saint-Jean en a dirigé les débats. Je regarde dans ma région, chez nous, les comités agricoles sont en train de se mettre sur pied. Dans Maskinongé, ça fait deux ans qu'ils fonctionnent. Ils n'ont pas de chicane, ça va bien. Au début, il y en a eu, des problèmes, vous avez raison, mais ça a fini. C'est là-dessus que je me fie. Donc, la loi, c'est une chose, mais ça ne gère pas le gros bon sens. Et le gros bon sens, c'est les gens du milieu qui vont le gérer, et on va donner des balises et le cadre pour le faire. Voilà.

La Présidente (Mme Vermette): Alors, M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Farrah: Oui, merci, Mme la Présidente. À mon tour de vous remercier pour la présentation de votre mémoire. Je pense que ça nous éclaire, en quelque sorte, et ça nous indique aussi qu'il faut être vigilants compte tenu qu'on aura peut-être moins de contrôle après que la commission va avoir terminé sur, justement, la réglementation qui va être à décider par le gouvernement.

Ceci étant dit, je pense qu'il ne faut pas – parce que, là, le débat s'enligne – faire en sorte que la réglementation antagonise davantage les parties; qu'elle fasse en sorte qu'on puisse retrouver un consensus à l'intérieur de ça, justement pour qu'on puisse vivre de façon harmonieuse dans l'ensemble des régions du Québec. Il ne faut pas oublier que le dossier dont on traite, c'est le droit de produire; ce n'est pas le droit de ne pas produire. Moi, je vois le débat évoluer puis, des fois, je me demande si on ne discute pas du droit de ne pas produire.

Ceci étant dit, on ne doit pas non plus donner carte blanche à la production agricole. Il faut faire attention, compte tenu de l'impact qu'il peut y avoir au niveau des différentes communautés. Mais, essentiellement, aussi, il faut clarifier tout ce dossier-là, pour faire en sorte que, oui, il y a une réglementation, mais aussi permettre en zone verte, que l'activité agricole puisse s'effectuer de la façon la plus efficace et optimale possible dans le respect de l'environnement et des citoyens qui les entourent.

Alors, je pense que vos commentaires et votre mémoire nous ont éclairés dans ce sens-là et, surtout, nous indiquent qu'il faut être vigilant face à l'inaction de ce gouvernement jusqu'à présent. Je vous remercie.

La Présidente (Mme Vermette): Alors, M. Laframboise, Mme Auger, on vous remercie de votre présentation.

Alors, on suspendrait quelques minutes, le temps de changer.

(Suspension de la séance à 10 h 7)

(Reprise à 10 h 10)

La Présidente (Mme Vermette): Alors, nous accueillons actuellement la Meunerie J.-B. Dionne & Fils ltée, qui est représentée par Jean-Marie Dionne, directeur général. Si vous voulez bien présenter les gens qui vous accompagnent, s'il vous plaît.


Meunerie J.-B. Dionne & Fils ltée

M. Dionne (Jean-Marie): Je suis Jean-Marie Dionne, J.-B. Dionne & Fils ltée à Mont-Joli. Je vous présente Mme Martine Savard, qui est agronome à l'Université du Québec; et Bertrand Maheux, de l'Université du Québec, qui est chargé de projet.

La Présidente (Mme Vermette): Alors, on vous donne la parole, vous avez 20 minutes pour exprimer...

M. Cliche: Mme la Présidente, si vous me permettez un point d'ordre.

La Présidente (Mme Vermette): Oui.

M. Cliche: On commence le Conseil des ministres et, malheureusement, ou heureusement pour moi, j'ai des dossiers qui sont discutés avec mes collègues du Conseil des ministres. Alors, certains d'entre nous vont devoir s'absenter, comme je vais devoir le faire dans les prochaines minutes. Ce n'est pas par manque de respect de votre présentation, c'est parce que le Conseil des ministres commence et j'ai des dossiers, projet de règlement, projet de loi, que je dois discuter avec mes collègues. Aussitôt que ça c'est fait, on va revenir.

Alors, si vous voyez des ministres qui manquent, c'est parce qu'on a un Conseil des ministres et qu'on va participer aux parties qui nous concernent directement. Ce n'est pas par manque de respect pour votre présentation. Mes gens sont ici, les gens de mon cabinet sont ici et les gens du ministère sont ici.

La Présidente (Mme Vermette): Alors, c'est ce que je voudrais ajouter moi aussi pour l'ensemble des ministres qui sont ici. Il y a le ministre de l'Agriculture, bien, il est ici présent; le ministre des Affaires municipales sera ici dans une dizaine de minutes. Leurs cabinets, de toute façon, sont ici, les gens pour les représenter, leurs oreilles sont ici. Alors, il ne faut pas s'en faire.

Une voix: Les députés sont là aussi.

La Présidente (Mme Vermette): Les députés sont là aussi; les collègues aussi d'ailleurs. Les commissions parlementaires – ça, il faudrait le rappeler – c'est aussi une bonne partie des députés ministériels et de l'opposition. Alors, si vous voulez commencer votre présentation.

M. Dionne (Jean-Marie): Alors, Mme la Présidente, M. Julien, mesdames et messieurs, merci de l'opportunité que vous nous offrez de vous présenter le compostage du lisier de porc. Ce projet a été retenu dans le cadre du Sommet économique par le CRCD Bas-Saint-Laurent au niveau de la région. Le projet a fait consensus.

L'implantation et le développement de l'industrie porcine soulève, dans l'ensemble du Québec et plus particulièrement chez nous dans le Bas-Saint-Laurent, certaines inquiétudes voire, trop souvent, une vive opposition. Ces réactions, justifiées ou non – il ne nous appartient pas aujourd'hui d'en juger – témoignent d'une préoccupation profonde de nos concitoyens pour la qualité de leur environnement. Et cette notion inclut autant la protection des cours d'eau que celle de l'air par l'odeur.

À titre de producteur, Meunerie J.-B. Dionne a dû et doit toujours composer, comme tous les intervenants, avec une situation sociale délicate. Comme toute entreprise, nous avions le choix d'aller de l'avant en nous limitant au simple respect des normes en vigueur. Cependant, la teneur actuelle du débat sur le porc au Québec indique clairement que cela ne suffit pas. La gestion du lisier alimente la controverse, mettant ainsi en évidence la pertinence de pousser plus avant les efforts de recherche susceptibles de mener l'industrie vers des solutions permettant l'atteinte d'un équilibre entre la protection de l'environnement et la rentabilisation d'une production à la fois légitime et nécessaire.

Cette commission accueille les suggestions destinées à modifier la législation relative à la protection du territoire et des activités agricoles. Nous ne prétendons pas que le projet, dont vous nous vous soumettons aujourd'hui les détails, constitue l'unique solution à la problématique complexe de la gestion du lisier, mais un bref inventaire des alternatives disponibles à ce jour pour les producteurs nous laisse avec une liste brève. Aussi, croyons-nous que le concept de compostage du lisier de porc et des résidus de scierie représente une ouverture à étudier avec attention. Nous nous permettons de rappeler que des coûts importants sont reliés à la pratique d'épandage de même qu'à la gestion des résidus du bois, que des investissements considérables accompagnent l'installation des immenses fosses à lisier et que le marché du compost de qualité offre d'intéressantes perspectives. Ces éléments doivent être sérieusement considérés dans l'établissement du rapport coûts-bénéfices de la mise en application de notre concept.

Par ailleurs, bon nombre de spécialistes vous entretiendront de correctifs à apporter au modèle de gestion des odeurs, en intervenant au niveau des distances d'épandage ou de la charge d'odeur totale comptabilisable. Notre proposition diminue grandement l'importance de ces considérations, puisque nous intervenons à la source. Les effets du compostage ne se limitent pas à la problématique des odeurs, mais entraînent également des retombées positives en ce qui concerne la protection de la qualité de l'eau.

C'est sur la base des résultats concluants obtenus lors d'une première phase de recherche que nous passons à celle de la mise à l'échelle du projet. Voilà qui représente un investissement de 685 000 $ auquel contribuent les ministères québécois des Ressources naturelles et celui de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Le CRCD Bas-Saint-Laurent contribue aussi, alors que les intervenants régionaux versent 339 000 $ pour la réalisation du projet.

Un bref résumé des aspects techniques. En 1994, Meunerie J.-B. Dionne a entrepris, avec l'Université du Québec, un projet de recherche pour, en fait, régler le problème du lisier. Agro Bio Tech est une équipe de chercheurs de l'Université du Québec qui a mis au point le procédé de compostage de recherche.

Pour ce faire, un partenariat avec deux entreprises de la région oeuvrant dans des secteurs complémentaires a été préconisé. Ainsi, Félix Huard inc., un industriel forestier majeur de Luceville, assumera un approvisionnement continu en intrant de très bonne qualité, soit des sciures et des écorces, à partir de sa scierie de Luceville. Le Groupe Berger ltée de Saint-Modeste dispose d'une expertise reconnue dans le développement des produits servant à l'horticulture et à leur commercialisation. L'entreprise possède un très bon réseau de distribution pour sa tourbe de même que l'ensemble de ses produits horticoles, tant au Canada que dans le nord-est des États-Unis. Le Groupe Berger utilise actuellement du compost avec de la tourbe pour développer de nouveaux mélanges servant à l'horticulture.

Au-delà des considérations financières, le projet revêt une grande importance, puisqu'il laisse entrevoir de sérieuses possibilités de régler à la base les problèmes de gestion du lisier de porc. Le concept a été élaboré de façon à être implanté directement à la ferme, ce qui signifie la fin du transport du lisier. Le producteur n'aura plus besoin d'une fosse à purin aux dimensions de celles que l'on retrouve présentement, alors que le compost produit sera utilisé comme amendement et fertilisant. Quant à l'aspect des coûts de mise en place du procédé, tout indique actuellement qu'ils seront équivalents à ceux inhérents à la méthode traditionnelle d'épandage, moins les inconvénients.

Je vais céder la parole à M. Maheux qui va continuer avec des diapositives.

M. Maheux (Bertrand): Alors, si vous nous le permettez, on voudrait vous présenter sur diapositives l'autre partie de la présentation, qui se fait en deux temps. La première partie, qui est un peu au niveau de l'aspect du concept, et la deuxième partie, on veut vous montrer des travaux expérimentaux qui ont été faits sur le terrain, pour vous permettre de voir visuellement ce que c'est le compostage.

Je vais tenter de me placer pour permettre aux gens de voir. Comme ça?

On parle actuellement, au début de ma présentation, du projet de mise à l'échelle. On a commencé par une phase expérimentale, en 1994, d'essais de compostage du lisier de porc. Avec une équipe de recherche – il manque une personne, ce matin, un professeur qui est docteur en chimie, qui fait partie de notre équipe aussi – on a développé en collaboration un protocole expérimental de recherche. Alors, c'est le groupe de M. Jean-Marie Dionne, auquel s'est jointe, au cours de la phase de mise à l'échelle, l'entreprise Félix Huard, qui a une scierie qui va fournir environ le tiers de sa production de résidus pour le projet de compostage de mise à l'échelle, et le Groupe Berger qui est intéressé à utiliser le compost dans des mélanges avec la tourbe, qui a un marché nord-américain.

Alors, c'est un procédé biologique. On utilise l'activité bactérienne de la biologie pour transformer le lisier de porc, auquel on ajoute des sciures, la partie carbonique, et qui, finalement, nous donne un compost. Vous pouvez voir des échantillons de ce compost à l'autre bout, ici. Il n'y a aucune senteur de lisier de porc. Et vous allez voir plus tard que ce compost a une très bonne valeur agronomique.

(10 h 20)

Alors, ce que nous disons, c'est que ce compost est un complément écologique. Il a une odeur de terreau, des éléments fertilisants naturels – nous allons vous démontrer ou vous montrer que la quantité d'éléments fertilisants, et c'est là que le compost a une valeur substantielle, une qualité élevée – puis une quantité importante de matières organiques; ce qui est aussi très important dans le cas de l'utilisation du compost pour l'agriculture, ça permet de réduire les utilisations de l'engrais qui est remplacé, en partie, par le compost.

Ça réduit les odeurs à la porcherie parce qu'on élimine les réservoirs. Une source d'odeurs autour des porcheries, évidemment, ce sont les réservoirs. On a travaillé sur le terrain, Martine et moi, pendant plusieurs mois, on sait de quoi on parle. Surtout lorsqu'on fait l'épandage, évidemment, les réservoirs sont brassés, et là, à notre point de vue, c'est une partie importante des émissions d'odeurs à la ferme. Évidemment, ça élimine les odeurs découlant de l'épandage.

Alors, les utilisations. Il y a beaucoup de questionnement à l'effet que, oui, vous allez faire du compost puis ce que vous allez faire avec ça. On va tenter de vous démontrer ce qu'on va faire avec le compost et quel est le marché pour ce compost ou les applications: on élimine aussi les risques de contamination des cours d'eau; ça n'augmente pas significativement les coûts – on va vous parler des coûts un peu plus tard – si on prend l'ensemble des facteurs à considérer; il y a des utilisations variées, l'agriculture, la sylviculture, l'horticulture, la culture maraîchère, la culture biologique et les mélanges avec de la tourbe.

Un élément important, c'est que le compost qu'on produit avec du lisier de porc, il y a un avantage, compte tenu qu'on a un lisier qui a beaucoup de matières fertilisantes. Alors, on arrive à fabriquer un compost qui a une quantité d'azote de 2 %, 3 % qu'on peut, à toutes fins pratiques, garantir, parce qu'on contrôle les intrants. Il y a toujours les mêmes intrants, ce sont des sciures, des planures ou des écorces puis du lisier. Alors, on contrôle les doses. Le phosphore, le potassium, calcium et, en matières organiques, 65 % de matières organiques, ce qui est aussi une valeur très intéressante pour l'agriculture, et un pH de 6.5 à 7.5.

Au niveau des coûts – on va parler des coûts tout à l'heure – ce compost, en équivalent de matières fertilisantes, d'engrais, au prix du marché, ça représente, dans un cas, 44 $ du mètre cube d'équivalent de matières fertilisantes: azote, phosphore, potassium, calcium, magnésium. Lorsqu'on parle du marché, on a aussi un élément fort important, ici.

Au niveau des coûts, on a l'évaluation des coûts de production du compost. D'abord, le travail sur le terrain, 7 $ du mètre cube; les intrants carbonnés, c'est des sciures, des planures, et ainsi de suite, 2 $ du mètre cube; l'amortissement des installations physiques, ici, il faudrait ajouter... et on en arrive à un coût de 12,38 $ pour produire un mètre cube de compost. Il faudrait soustraire, on a indiqué, ici, les amortissements sur les investissements, et il faudrait ajouter aussi les économies sur les investissements des fosses à purin et on en arrive à un coût équivalent. Parce que, M. Dionne, par exemple, pourrait doubler sa production porcine – actuellement, il produit environ 11 000 m³ de lisier – et ne pas ajouter de fosse, de réservoir, donc des économies équivalentes de 3 $. Donc, on arrive ici à un coût de l'ordre de 7,62 $ du mètre cube additionnel, moins le 3 $. Alors, c'est 4 $ du mètre cube additionnel. Nous avons une valeur au marché du compost de 5 $ à 10 $ du mètre cube. Actuellement, le marché, au Québec, pour du compost de première qualité... un ministère, actuellement, dans les pépinières, paie 15 $ du mètre cube.

Alors, au niveau du marché, on se sent assez confortable, d'autant plus qu'un producteur, le Groupe Berger, est intéressé à ce compost pour en faire des mélanges avec sa tourbe. Parce que de plus en plus la tourbe doit être enrichie avec des composts – c'est là la demande du marché actuel – et cette entreprise est intéressée à acheter une bonne partie du compost.

Alors, voici un résumé des aspects environnemental, agronomique et économique, pour aller rapidement, vous l'avez dans le texte.

Évidemment, on élimine l'épandage sur les terres agricoles et on le remplace par du compost.

En passant, je pense qu'on va faire une nuance qui est assez importante, puis on l'a répétée lorsqu'on a été invité par la municipalité de Saint-Anaclet, avec un public d'environ 200 personnes. On ne prétend pas, ici, qu'on élimine l'épandage, on prétend qu'on pourrait utiliser du compost dans des zones plus critiques, des zones où c'est plus près des propriétés, c'est plus près des cours d'eau ou des terrains accidentés. Alors, c'est important, c'est une façon de faire, mais on ne prétend pas éliminer l'épandage, au contraire, ce serait une combinaison des deux.

On élimine les odeurs, les risques de pollution des sols et de l'eau, réduction des odeurs à la porcherie, élimination des réservoirs à purin, réduction des plaintes et des pressions sociales.

Vous savez, quand on parle du coût, tout à l'heure, on pourrait ajouter le fait qu'il y a une industrie actuellement importante au Québec, l'élevage du porc – l'industrie et tout ce qui est en amont et en aval – qui retarde son développement actuellement à cause des tensions qui existent. Alors, je pense qu'on pourrait réduire ces tensions-là et procéder plus rapidement au développement de cette industrie.

L'élimination du transport par camion du lisier, c'est une autre source où il y a des critiques.

La transformation se fait à 55 °C, donc c'est un produit qui est hygiénisé au niveau des pathogènes ou des mauvaises herbes.

Au niveau agronomique, on peut utiliser de l'équipement de ferme traditionnel au lieu d'avoir des camions qui ont tendance à compacter le sol.

On pourrait réduire les herbicides, réduction des engrais minéraux, il y a une économie là dont on ne fait pas état dans l'utilisation du compost.

Il n'y a pas de problèmes environnementaux. Un fertilisant de qualité qui se libère lentement dans le sol, donc il n'y a pas d'écoulement, de percolation ou de ruissellement.

Une matière organique ajoutée au sol. Prenez le cas de la culture de la pomme de terre, par exemple, c'est une culture qui est exigeante pour les sols, qui emploie beaucoup d'engrais minéraux. L'utilisation du compost permettrait d'aider cette culture-là.

Au niveau économique, on élimine les coûts de transport, d'épandage; au lieu d'élimination, on aurait dû peut-être utiliser réduction des investissements dans les fosses à purin. On va investir dans un procédé de compostage qui nous donne un produit à valeur ajoutée, au lieu de faire des investissements qui sont passifs. Dans le cas des fosses à purin, ce n'est que pour retenir temporairement le produit. Alors, on fait un produit à valeur ajoutée qui est complètement écologique, d'une valeur marchande du compost.

Nous, on dit, finalement, que le compostage du lisier de porc pourrait s'avérer une solution rentable si on tient compte de l'ensemble des facteurs qui sont discutés présentement et de l'aspect strictement économique.

Je vais demander à Martine de procéder à la deuxième partie, qui est une démonstration. Ce n'est pas du travail d'éprouvette que nous avons fait, c'est du travail sur le terrain, à assez grands volumes, pour dire que nos résultats sont concluants. On peut les prouver.

Mme Savard (Martine): Alors, je vais tenter d'être brève, je sais que le temps qui reste est court. Alors, la voie qu'on a préconisée pour le traitement du lisier, c'est le compostage, qu'on va définir comme un procédé biologique contrôlé qui va nous permettre de transformer, d'hygiéniser nos substrats organiques et, dans notre cas, aussi de désodoriser, c'est très important, et on va obtenir un produit qui est semblable à un terreau.

La notion de contrôler pour nous est importante, parce que, pour avoir un compostage efficace, il faut avoir le contrôle de certains paramètres, notamment la teneur en eau, l'oxygène qui est fourni aux bactéries et aussi les températures qui nous permettent la dégradation optimum.

Ici, on a une vue de notre banc d'essai qui est, en fait, quatre compartiments bétonnés complètement étanches qui nous permettent de composter des piles d'environ 18 m³ chacune, ce qui est quand même des volumes intéressants.

Ici, c'est le système de soufflante. Alors, chaque cubicule est alimenté par un ventilateur indépendant qui, par un réseau souterrain, va envoyer de l'air dans les piles. Les quantités d'air, on les contrôle par un automate programmable qui nous permet d'ajuster la fréquence d'aération de chacune des piles. Cet automate-là aussi nous donne des lectures de température permanentes de l'activité dans les piles.

Ici, ce n'est pas très clair, c'est la fosse de rétention qu'il y a directement dessous la grille d'aération. On voit le tuyau, ici, d'amenée d'air. Cette fosse-là est complètement étanche et permet de retenir aussi les lixiviats, c'est-à-dire l'excédent de liquide qui va être formé avec le mélange du lisier. Ce lixiviat est repompé dans la pile, alors il n'y a aucun écoulement, aucun rejet dans l'environnement.

(10 h 30)

Au début, on a brassé de différentes façons. On a fait nos essais. On y allait avec la pelle du tracteur, initialement, mais on s'est aperçu que, pour être efficace, ça nous prenait un mélange beaucoup plus homogène, beaucoup plus uniforme. Alors, on s'est dirigé vers la technique avec l'épandeur à fumier conventionnel, l'épandeur de ferme. Les substrats carbonés étaient déposés directement dans l'épandeur à fumier et, avec le boyau d'amenée, le lisier, qui est connecté directement à la préfosse, donc ce qui nous permet d'économiser 5 % à 6 % d'eau par rapport à la fosse extérieure, est ajouté aux sciures dans les proportions connues, et le tout est éjecté avec l'épandeur dans les cubicules.

Bon, ici, on a une vue de cubicules qui sont remplis. Il y a une toile géotextile qui est placée sur des piles en compostage. On voit la sonde thermique qui est insérée au milieu de la pile qui nous permet de contrôler les températures. Cette toile-là a l'avantage de laisser passer les évaporations d'eau mais empêche de l'autre sens les entrées d'autres précipitations dans la pile.

Ici, c'est la mise en maturation. Après le compostage actif, qui dure, dans notre cas, de six à huit semaines, à la fin de cette période-là, justement, le compost est désodorisé. Le compost, qui est encore jeune, mais qui, déjà là, n'a plus aucune odeur de lisier, est mis en maturation pour une période de trois mois. Cette période-là permet le raffinage, la fin des opérations. On a vu ici différents andains de maturation. À la fin de cette période, on a effectué des tests de phytotoxicité, des tests de germination et de croissance sur des plantes sensibles. C'est un test qui est reconnu par la norme sur les composts, et tous nos composts ont passé les tests de façon satisfaisante.

Peut-être rapidement, juste pour montrer un peu une courbe typique de température, ici, c'était un essai avec des sciures de tremble et le lisier, et on voit que, très peu de temps après le mélange, les températures atteignent 70 °C, ce qui est très élevé, et cette température-là se maintient pour des périodes de 60 à 70 jours. Les pics que vous voyez font référence aux ajouts de lisier. On a fait différents tests avec retournements et ajouts en cours de compostage, et ces pics-là, c'est jusqu'à 5 °C.

La Présidente (Mme Vermette): En conclusion, s'il vous plaît.

M. Savard (Martine): Bien, là, elle est à l'envers, ça va accélérer. En conclusion, c'est que, pour le compost qu'on a produit, nos derniers essais, en tout cas, nous montrent, comme M. Maheux l'a dit tout à l'heure, que le taux de phosphore, azote, potassium est très élevé. On obtient aussi des taux de matière organique qui sont très, très intéressants pour un compost qui pourrait être utilisé comme amendement. Le pH est neutre, et les métaux qu'on a testés sont tous en deçà de la norme, ce qui nous donne des composts de qualité. Merci.

La Présidente (Mme Vermette): Donc, je vous remercie de votre présentation. Alors... Oui.

M. Dionne (Jean-Marie): Simplement, je voulais conclure en mentionnant que de nombreux intervenants au niveau régional, chez nous, ont cru à notre projet puis y ont participé tant au niveau de la municipalité que de la MRC, que du CRCD et de l'Université du Québec. Alors, nous vous remercions puis nous sommes disponibles pour tenter de répondre à vos questions.

La Présidente (Mme Vermette): On vous remercie. Alors, M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

M. Julien: Alors, M. Dionne, je vous remercie beaucoup de votre présentation avec vos collègues. Une des raisons pourquoi je voulais avoir, justement, des gens avec des nouvelles technologies, c'était pour démontrer que, évidemment, on parle beaucoup de normes, de paramètres, mais qu'il peut y avoir aussi une autre façon de gérer cette question-là dans le cadre d'un développement durable. Et vous avez fait une présentation, que vous m'aviez déjà faite, d'ailleurs, il y a quelques temps, que je trouve extraordinaire. D'ailleurs, mon ministère s'y est impliqué financièrement parce qu'on y croit. Je pense que vous avez une approche intéressante.

Peut-être comme première question, j'aimerais savoir où vous en êtes rendus. Actuellement, c'est en opération chez vous. Face, par exemple, à d'autres producteurs ou face au gouvernement, vous en êtes rendus où?

M. Dionne (Jean-Marie): Actuellement, on est à l'étape de mise à l'échelle. Dès le printemps, à la fonte des neiges, on va construire les plateformes de compostage pour la réalisation du projet comme prévu: 685 000 $ pour la mise à l'échelle et pour traiter les 11 000 m³ que produisent annuellement nos installations. À ce moment-là, c'est qu'on va fabriquer du compost dès juin ou juillet pour qu'à l'automne ce compost-là soit disponible. Il va être rendu à maturité, puis on va en faire le traitement. C'est un traitement qui peut fonctionner à l'année. Ça fait que, avec ces résultats-là, on va être capable de déterminer les coûts de construction pour faire un modèle qui peut varier, être modulable, en fait, selon la grosseur de la porcherie et la quantité de lisier produite, la gestion qu'on veut en faire aussi, parce qu'on peut faire un mélange d'épandage de lisier et de compostage selon l'utilisation qu'on veut en faire et la période d'année d'épandage.

M. Julien: O.K. Et les vérifications en laboratoire, et autres, j'imagine, ont été faites concernant les normes – je ne connais pas toutes les normes techniques d'environnement – puis ça correspond, là?

M. Dionne (Jean-Marie): Oui, toutes les vérifications ont été faites par l'Université, et aussi on veut continuer les recherches, utiliser d'autres produits carbonés qui serviraient comme mélange. Parce qu'il n'y a pas seulement des résidus de scierie, il peut y avoir d'autres produits qui peuvent être utilisés en mélange avec le lisier. On veut continuer aussi des recherches. On a des essais et expérimentations qu'on va faire au cours de l'été avec de la pomme de terre, de la céréale aussi, puis on pense qu'il y a d'autres possibilités dans l'horticulture.

M. Julien: Il y a certains éléments que je remarquais et, peut-être que vous pourrez me corriger, est-ce qu'il y a beaucoup de manutention? Il semble y avoir beaucoup de phases de... Actuellement, on va dans la citerne, et, après ça, les gens l'épandent. Il semble y avoir beaucoup de manutention pour un producteur, par exemple, pour travailler dans ce domaine-là.

M. Maheux (Bertrand): Je serais peut-être porté à répondre... Nous, on a l'impression qu'il n'y a pas beaucoup de manutention par rapport à d'autres types de compostage comme des andains, par exemple, des retournements, parce que, sur une période de six semaines, on ne manipule la pile que deux fois. On fait un départ de la pile, on fait un retournement avec ajout de lisier, et, après ça, c'est prêt pour aller en maturation. Et, effectivement, sur la mise à l'échelle, on a conçu ou prévu un système de machinerie qui nous permet d'aller très rapidement et qui fait le mélange, le brassage et la mise en place par des convoyeurs. Et, à plus petite échelle, je pense, notre opinion, c'est que ce n'est pas tellement lourd en termes de manipulation. Ça demande de la précision et une méthode de travail, un procédé à respecter, mais je pense que ce n'est pas tellement lourd au niveau de la manipulation.

M. Julien: O.K. En tout cas, moi, ce qui m'intéresse, la dernière chose, c'est le coût pour un producteur par rapport au traitement qu'on a, actuellement, du lisier ou d'autres éléments. C'est la comparaison. Puis est-ce que c'est plus rentable pour un producteur d'utiliser cette technologie-là que ce qui existe actuellement? Ça, je pense que c'est un élément important. On me dit que vous allez le savoir peut-être plus cet été, après les opérations, là.

M. Maheux (Bertrand): Sur cet aspect-là, on ne travaille pas complètement dans l'ignorance parce que, compte tenu des essais qu'on a faits sur le terrain, on a pu faire des observations sur la manipulation, sur le temps, et les coûts qu'on a démontrés tout à l'heure, ce sont évidemment des projections de coûts, des évaluations, et notre coût – entre 10 $ et 12 $ – de fabrication du compost correspond actuellement à peu près – même si on ne s'est pas référé à ça – au coût actuel, ailleurs, pour faire du compost. Et, compte tenu que ça va être des gros volumes, je pense que nos coûts pourraient être réduits.

M. Julien: Et j'imagine que, lorsque vous allez faire cette évaluation-là, vous allez faire l'évaluation en fonction de l'entreprise déjà existante qui a déjà un système et, évidemment, l'autre qui s'implante, qui va utiliser carrément le nouveau procédé.

M. Maheux (Bertrand): Oui.

M. Julien: Et est-ce que l'hiver influence au niveau du traitement?

M. Maheux (Bertrand): On a fait des expériences l'hiver, et ça fonctionne. Je pense que Martine peut aller davantage...

Mme Savard (Martine): Il y a des piles qu'on a débutées en février avec des gros froids, puis on a eu quand même des températures de 60 °C. C'est possible de fonctionner autant en hiver qu'en été. La période de compostage va peut-être s'allonger d'une semaine ou deux, mais il est possible de passer au travers du procédé quand même.

M. Julien: Peut-être en conclusion, Mme la Présidente. Autrement dit, si c'est ce que vous dites pour les odeurs, le contenu respectueux de l'environnement, ça veut dire que le bon voisinage pourrait être assuré sans nécessairement tout normer puis avec des paramètres. C'est ce que je comprends.

M. Dionne (Jean-Marie): Oui, en fait, le procédé qu'on vous propose est un traitement global. Tout le lisier est traité au complet. Il n'y a pas de rejets dans la nature de quoi que ce soit. On fait le mélange et on prend le produit par la suite pour en disposer.

M. Julien: La municipalité a-t-elle été voir ça?

M. Dionne (Jean-Marie): La municipalité, oui. Elle est au courant. Elle participe au projet. Il y avait une quinzaine d'intervenants régionaux lors des essais préliminaires.

M. Maheux (Bertrand): M. le ministre, je vous dirais qu'on a été invité il y a un mois, peut-être, par la municipalité de Saint-Anaclet. Tout à l'heure, on a fait allusion, je pense, aux pressions, aux tensions qui existent dans les municipalités comme Sainte-Luce, Bic, et le conseil municipal de Saint-Anaclet nous a demandé de faire une présentation du procédé. Il y avait des gens de Sainte-Luce, de Luceville, et, finalement, les gens ont dit, à toutes fins pratiques, à la fin: Si on nous proposait ce genre d'arrangement là, il nous semble que ça serait beaucoup plus facile de s'entendre.

M. Julien: Merci.

La Présidente (Mme Vermette): Alors, je vous remercie. Merci, M. le ministre. M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

(10 h 40)

M. Farrah: Merci, Mme la Présidente. Premièrement, c'est pour vous remercier de votre présentation. Je pense que ça démontre nettement qu'il peut y avoir des solutions pratiques qui correspondent vraiment à la réalité sur le terrain et je pense que c'est les voies de l'avenir en termes de production, notamment de la production porcine. Je pense que c'est les voies de l'avenir, et, compte tenu des impacts économiques de cette production-là, c'est important de regarder ces éléments-là pour faire en sorte, justement, qu'on puisse progresser au niveau de cette production-là.

Moi, je vais juste poser une question, et mon collègue de Beauharnois-Huntingdon continuera. Compte tenu que, lui, finalement, c'est un fermier, c'est un vrai, alors il aura des questions peut-être plus techniques. Mais, juste au niveau de votre procédé, peut-être nous expliquer comment vous arrivez du lisier au compost, l'eau, ce qui se passe, puis tout ça, parce que, hier, on a eu un organisme qui est venu nous présenter un concept au niveau d'une petite usine d'épuration dans chaque ferme, etc. Ça fait que ça m'apparaît peut-être, ça, un peu la continuité du concept d'hier. Hier, on avait le traitement à partir de l'eau puis peut-être qu'on avait des problèmes au niveau du compost à la fin. Alors, peut-être que les deux ensemble généreraient une solution globale. Peut-être nous expliquer comment vous en arrivez là, au niveau du processus comme tel.

M. Dionne (Jean-Marie): O.K. Tout simplement, le lisier est produit à l'intérieur de la porcherie par les porcs. On fait une gestion liquide, on le récupère dans une préfosse à l'intérieur du bâtiment. De là, on sort du bâtiment pour aller à un mélangeur qui fait un mélange uniforme avec des résidus, un produit carboné, pour, par la suite, s'en aller sur des piles qui ont un système d'aération forcée où on contrôle les températures, les débits d'air. En fait, tout est vérifié pour ne pas avoir de combustion. Puis, par la suite, le mélange reste trois semaines. On le ramène dans le mélangeur pour ajouter du lisier. Comme la température se situe entre 60 °C et 70 °C, l'eau s'évapore, et, comme on a une couche biofiltre qui sert de biofiltre, en fait, c'est l'eau qui s'en va dans l'atmosphère, puis tous les éléments, sauf l'eau, qui composent le lisier demeurent emprisonnés dans la pile qui va devenir du compost. Par la suite, le compost, au bout de six semaines, il est placé en maturation, puis on en dispose. C'est quelque chose qui est relativement simple comme opération, mais il y a un paquet de contrôles qu'on doit maintenir.

La Présidente (Mme Vermette): Oui. Alors, si vous avez terminé...

M. Farrah: Bien, c'est dans la continuité, là, c'est une question technique.

La Présidente (Mme Vermette): O.K. Dans la continuité. Alors, je passerais la parole au député de Beauharnois-Huntingdon.

M. Chenail: Dans le purin, en pourcentage, d'eau et de matière solide, il y en a combien?

M. Dionne (Jean-Marie): Il y en a 90 %, environ, liquide, puis peut-être 5 % à 10 % solide.

M. Chenail: Parce que, depuis le commencement de votre présentation, vous nous avez présenté le facile, d'après moi, parce que c'est assez facile, quand même, de faire du compost. Le 90 %, vous ne nous en avez pratiquement pas parlé, puis, quand mon collègue vous en parle, vous semblez aller vite pour passer, parce qu'on met, on peut dire, en tas et puis qu'on attend de six à huit semaines. J'aimerais ça que vous nous disiez comment vous allez filtrer l'eau, parce que c'est le 90 % qui est, je pense, le plus important, qui est le plus compliqué.

M. Maheux (Bertrand): Je voudrais peut-être répondre à ça que, effectivement, on n'a pas voulu passer ou montrer ce qui est facile, on a montré le total d'après l'opération. Vous savez, quand on a commencé le projet, plusieurs personnes nous ont dit qu'on était à peu près sautés de s'attaquer au compostage du lisier de porc. Et, dans les revues de littérature que nous avons faites – ça fait partie du travail de recherche – il n'y a pas eu de résultats concrets des gens qui ont fait des essais ou des groupes qui ont fait des essais pour le compostage du lisier de porc pour les raisons que vous mentionnez, la quantité liquide ou la quantité d'eau dans le compost.

J'avais une autre diapositive que je n'ai pas montrée tout à l'heure qui est le procédé. Vous comprendrez qu'on n'a pas l'intention de l'étaler en détail, c'est une percée technologique qu'on a faite dans le système. Mais on peut vous dire qu'on prend l'ensemble du lisier qui sort de la porcherie avec l'eau qu'il y a dedans, qu'on l'insère avec des produits carbonés, qu'on lui donne de l'oxygène, qu'on le garde à une température, puis qu'on en arrive à un compost après. Il n'y a pas d'autre rejet puis il n'y a pas trop de liquide. S'il y a un écoulement de lixiviat, de liquide, il est renvoyé dans la pile graduellement. Alors, on ne dispose pas du liquide, ou on n'a pas besoin de jeter le liquide ailleurs, ou de le traiter autrement. C'est un traitement complet.

M. Chenail: Oui, mais l'eau de ça, vous l'envoyez où?

M. Maheux (Bertrand): Elle est évaporée. L'activité bactériologique... Martine a mentionné tout à l'heure qu'on a des piles qui se maintiennent à 60 °C et plus pendant un mois. Alors, la transformation bactériologique qui se fait a pour effet d'évaporer le liquide et de ramener le compost à un contenu liquide...

M. Chenail: Donc, vous ne séparez pas la matière solide et liquide dès le départ?

M. Maheux (Bertrand): Non, on n'a pas besoin de faire ça.

Mme Savard (Martine): On utilise le lisier comme tel de la pré-fosse, vraiment à son état naturel.

M. Maheux (Bertrand): Et c'est là qu'est la percée.

M. Chenail: Puis le 90 % est évaporé dans l'espace?

M. Maheux (Bertrand): Une partie du 90 % parce qu'il reste de l'humidité dans le compost encore.

M. Chenail: Oui, d'accord, mais, à longue échéance, le 90 % va être évaporé au complet?

Mme Savard (Martine): Non, pas vraiment, c'est-à-dire qu'on utilise de la sciure qui va avoir peut-être 40 % d'humidité puis on sort avec un compost de 65 %. Faites la différence. On va évaporer quelque chose comme 70 % de l'eau qu'il y avait de contenue dans le lisier.

M. Chenail: Il va rester une certaine humidité dans le compost qui va faire que, mais qu'ils l'étendent dans le sol, ou qu'ils l'incorporent au sol, ou dans le compost...

M. Maheux (Bertrand): Est-ce que vous sous-tendez dans votre question que ça pourrait contaminer le sol?

M. Chenail: Non, au contraire. Non.

M. Maheux (Bertrand): Bien, il est fixé dans la matière puis il va être disponible aux plantes au moment où il va y avoir de l'activité bactériologique dans le sol, et c'est ce qui en fait un produit complètement écologique.

M. Chenail: O.K.

La Présidente (Mme Vermette): Est-ce que ça va?

M. Chenail: Ça va.

La Présidente (Mme Vermette): Merci, M. le député de Beauharnois. Alors, M. le député de Roberval.

M. Laprise: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je pense que c'est un pas dans la bonne direction au niveau de la recherche. Pour une fois, on sent que les responsables de l'environnement, ceux qui sont conscients de l'importance de la qualité de l'environnement s'orientent vers de la recherche pour proposer des choses. Il ne s'agit pas de seulement condamner des choses, mais il faut en proposer d'autres, et je crois que c'est un pas dans la bonne direction.

Maintenant, concernant le mélange, là, un m³ de sciure de bois absorbe combien de m³ de liquide? Est-ce que c'est un pour un?

Mme Savard (Martine): Non, en fait, c'est deux pour un...

M. Laprise: Deux pour un.

Mme Savard (Martine): ...mais c'est fait en séquence. On a fait plusieurs essais puis on en est arrivé avec le mélange initial avec peut-être 75 % du lisier, 60 %, 75 %. Trois semaines après, on fait un ajout. On ressort, on mélange, on fait un ajout qui va amener à du deux pour un.

M. Laprise: Deux liquides, un solide?

Mme Savard (Martine): Deux solides, un liquide.

M. Laprise: Deux solides, un liquide. Alors, considérant l'importance de la production porcine, face aux sciure de bois, est-ce qu'on aurait suffisamment de sciure de bois considérant que la sciure est très utilisée aujourd'hui? Très utilisée à d'autre chose. La sciure et les écorces.

M. Maheux (Bertrand): Je voudrais répondre sur ça parce que, vous savez, M. le député, ça a fait partie d'un long débat, et il y a des fonctionnaires qui font leur job, c'est normal, puis ils nous ont dit: Ça ne marchera pas, il n'y a pas assez de sciure. Bon. On s'est associé à un producteur qui a une scierie, qui fait du feuillu présentement, et, pour lui – le besoin de M. Dionne est quand même important. C'est à peu près 20 000, 22 000 m³ de sciure par année – ça ne représente que le tiers de sa production sur un chiffre.

M. Laprise: Mais est-ce que la paille...

M. Maheux (Bertrand): D'autre part, il y a de la sciure de résineux qui existe en grande quantité, et, là-dessus, on a mentionné dans notre rapport et on le constate dans nos expériences que le résultat n'est pas le même, mais c'est tout de même un produit qui peut être utilisable directement. Et, lorsqu'on a commencé, les gens du MAPAQ au bureau régional du Bas-Saint-Laurent nous ont dit: Si vous pouvez arriver à faire un produit qu'on peut étendre ou utiliser directement sur les terres, sans odeur, déjà, ce serait un gain très important. Et nous l'avons ce gain-là avec de la sciure de résineux, mais nous avons quelque chose de beaucoup mieux avec des feuillus. Et, dans l'autre partie du projet, nous avons des hypothèses concernant le résineux parce que, au Québec, il existe beaucoup plus de résineux, et nous avons des hypothèses de travail qui pourraient nous mener à des pistes intéressantes.

Une voix: Il y a les autres produits carbonés aussi.

M. Maheux (Bertrand): Oui. Il y a les autres produits carbonés. On pourrait mêler du foin, de la paille et d'autres produits. Vous savez, les papetières, au Québec, ont énormément de résidus qui sont très intéressants.

M. Laprise: Très bien.

La Présidente (Mme Vermette): Je vous remercie, M. le député de Roberval. Alors, M. le député d'Orford.

M. Benoit: Oui. Bien, j'ai été heureux et je pense, comme le député de Roberval le disait, que c'est dans la bonne direction, la recherche que vous faites, et ça me plaît beaucoup. Je pense que c'est simple, que c'est peu coûteux et que c'est efficace. Au niveau du coût, le coût qu'on a vu, c'était 4 $ la tête de porc, est-ce que c'est le coût qu'on doit comprendre? Est-ce que c'est ça que je dois comprendre de vos diapositives?

M. Maheux (Bertrand): Le coût additionnel qu'on a montré sur les diapositives est d'environ 4 $ du mètre cube.

M. Benoit: Mètre cube.

M. Maheux (Bertrand): Oui, additionnel, par rapport à la disposition traditionnelle, sans tenir compte de la valeur du marché, de la valeur fertilisante du compost. Et mettez simplement le plus bas prix pour la valeur du marché à 5 $, et, déjà, l'entreprise fait ses frais.

M. Benoit: O.K.

M. Maheux (Bertrand): On arrive à l'équilibre par rapport aux coûts traditionnels, aux coûts de l'épandage.

(10 h 50)

M. Dionne (Jean-Marie): Il y a un élément que je voudrais rajouter, c'est que, pour la gestion solide d'un produit, au niveau du compostage, on contrôle les coûts par les équipements. On connaît les investissements, on connaît l'opération puis on sait ce que ça va coûter. La gestion liquide est quelque chose. C'est du transport, c'est des équipements qui sont de plus en plus sophistiqués. Il y a un paquet de normes et de contrôles, ce qui fait que, aujourd'hui, d'accord, on dit que ça coûte un peu plus cher à produire, du compost si tu ne le vends pas. Si tu en disposes de façon économique, tu peux rencontrer tes frais, sauf que, dans l'avenir, avec toutes les réglementations, quel sera le coût de disposition du lisier? Ça, c'est une inconnue, tandis que, avec notre façon de le faire, bien, on fixe le prix.

M. Benoit: Très bien. Est-ce que cette formule-là, elle fonctionnerait dans ce qu'on vient de voir? C'est artisanal un peu, je comprends, c'est une recherche. Si on le faisait sur une base beaucoup plus grande, là, on parle de porcheries américaines où on a 250 000 porcs dans la même installation, si on allait sur des installations industrielles majeures, est-ce que... On sait que, souvent, en laboratoire, ces affaires-là fonctionnent, que, en petites expériences, ça fonctionne, mais, quand on arrive dans des grandes quantités, ça fonctionne beaucoup moins bien. Dans le secteur des mines, par exemple, on a eu des surprises quand on s'est mis à lancer les bebites là-dedans puis qu'on pensait que ça mangerait toutes les montagnes où il y avait des produits... Ça n'a pas fonctionné, finalement. On a beau continuer à faire de la recherche, on s'aperçoit qu'on est après se buter, finalement. Alors, la question que je vous pose, c'est: Est-ce que, dans les quantités, ça fonctionnerait aussi bien que dans des moins grandes quantités?

M. Dionne (Jean-Marie): Pour répondre, la mise à l'échelle qu'on fait va nous permettre de traiter le lisier produit par environ 800 à 900 unités animales. 800 à 900 unités animales, ça représente 3 600 à 4 000 places-porcs, ce qui représente quand même une production annuelle assez substantielle. Tout ça pour vous dire que ce qu'on va faire, c'est qu'on va traiter 11 000 m³ chez nous, mais qu'on produit l'équivalent de 18 000 porcs par année chez nous dans notre production. Ça fait que, pour quelqu'un qui va en produire moins, on a émis des hypothèses qu'il y a moyen de construire des plateformes un peu moins grandes puis des équipements en conséquence, ce qui va réduire les coûts, les mettre à la dimension des élevages. C'est sûr que, si vous arrivez avec 250 000 porcs et plus, là, bien, moi, je vous répondrais qu'il s'agit de mettre des piles une à côté de l'autre puis que vous allez obtenir les mêmes résultats.

M. Benoit: Ici, on s'entend que c'est pour faire de l'épandage sur vos terres, hein? Ce n'est pas pour mettre en sacs, ce n'est pas pour revendre, c'est pour faire de l'épandage sur vos propres terres, sur les terres adjacentes. Ce n'est pas pour faire de l'ensachage. Est-ce que c'est exact? Est-ce que ça pourrait être ensaché? Je veux dire...

M. Dionne (Jean-Marie): Ça peut être ensaché.

M. Benoit: L'humidité, là, il n'y aurait pas de problèmes?

M. Dionne (Jean-Marie): Le groupe Berger va utiliser le compost parce qu'il fait partie de notre consortium. On a un consortium, un réseau, en fait, avec le groupe Berger et Félix Huard, qui est la scierie, l'Université et notre entreprise, mais Berger va utiliser le compost qu'on produit pour faire des mélanges avec de la tourbe ou le mettre en marché.

M. Benoit: Une dernière question. Si on l'étend, là, on sait qu'il y a des règles au Québec, qu'on ne peut pas étendre à certaines périodes de l'année, etc. Dans le cas d'un produit qui est stabilisé comme celui-là, est-ce qu'on pourrait l'étendre en tout temps, incluant sur la neige? C'est comme étendre de la terre, finalement.

M. Dionne (Jean-Marie): Ça équivaut à de la terre. Je n'ai pas de...

Une voix: ...ça ne sent pas.

M. Dionne (Jean-Marie): Vous l'avez vu, tout le monde l'a vu, puis il n'y a personne qui a perdu ses doigts dedans, là. C'est un mélange qui a les deux tiers en produits forestiers puis un tiers en lisier, puis il n'y a aucune odeur. C'est un produit qui est comme ça, il est stable.

M. Benoit: Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Vermette): Merci, M. le député d'Orford. Alors, je demanderais au député de...

M. Farrah: Lors de l'évaporation pour la réduction en eau, pour enlever l'eau, est-ce que ça sent, ça?

M. Dionne (Jean-Marie): Non, il n'y a aucune odeur. De toute façon, ça se fait sur le site de la ferme même, mais il n'y a pas d'odeur parce que, lorsque le mélange est fait, tout le mélange est fait, puis la sciure, en fait, emprisonne toute l'ammoniaque. Ça fait qu'il n'y a pas de dégagements.

La Présidente (Mme Vermette): Si vous voulez remercier.

M. Farrah: Bien, en tout cas, nous, de notre côté, au niveau de la formation politique, c'est de vous remercier infiniment de votre présentation. Ça nous démontre – c'est ça que je disais tantôt – qu'il y a de l'avenir au niveau des nouvelles technologies puis qu'on doit se diriger vers ça, justement, pour faire en sorte qu'on puisse avoir des productions, notamment au niveau du porc. Alors, merci infiniment. Ça nous éclaire beaucoup, puis on espère que vous aurez beaucoup de succès avec ce nouveau procédé.

M. Julien: Alors, M. Dionne et votre équipe, je tiens à vous remercier beaucoup et je pense que l'avenir est dans les nouvelles technologies, mais, évidemment, en tenant compte du coût pour le producteur, de combien ça va lui coûter. Je pense que ça m'apparaît fondamental, et, à mon point de vue, c'est une des clés de succès pour le développement, parce que, en plus, c'est que, si cette technologie-là est vraiment réaliste puis qu'elle répond vraiment, elle va être exportable. Donc, ça a un impact sur le plan de l'économie régionale, et ça nous positionne, comme Québec, sur une base internationale avec des nouvelles technologies, et ça, ça m'apparaît très important. Merci beaucoup.

(11 heures)

La Présidente (Mme Vermette): On vous remercie. Alors, je demanderais au prochain groupe de bien vouloir se présenter, le Comité de restauration de la rivière Etchemin. Je fais appel au Comité de restauration de la rivière Etchemin, s'il vous plaît. Je pense qu'ils ne sont pas ici.

Alors, M. André Bélisle. Je sais que c'est un organisme qui a été ajouté, qui devait être entendu hier soir. Peut-être qu'ils ont un peu de retard. Alors, je vais les rappeler pour une deuxième fois. Alors, je demande au Comité de restauration de la rivière Etchemin, M. André Bélisle, de bien vouloir se présenter, s'il vous plaît.

Écoutez, compte tenu que l'organisme mentionné n'est pas présent dans cette salle, nous allons suspendre nos travaux à cet après-midi, 15 heures.

(Suspension de la séance à 11 h 1)

(Reprise à 11 h 9)

La Présidente (Mme Vermette): Avec le consentement de l'opposition, nous revenons à nos travaux. Le groupe, tel que demandé, le Comité de restauration de la rivière Etchemin, est arrivé. M. André Bélisle est présent. Je vous demanderais, dans les circonstances, de présenter votre mémoire ou de nous faire votre présentation, s'il vous plaît. Vous avez 20 minutes.


Comité de restauration de la rivière Etchemin

M. Bélisle (André): Merci beaucoup. Je vous demande d'excuser les deux minutes de retard que j'ai eues, mais il y avait un accident juste à côté, et on ne peut pas prévoir ça.

Je représente le Comité de restauration de la rivière Etchemin, qui est un organisme à but non lucratif, fondé il y a maintenant un peu plus de quatre ans, dont le mandat est de restaurer la rivière Etchemin en vue d'y introduire le saumon atlantique, vis-à-vis d'un objectif de développement économique pour une région qui est, entre guillemets, classée défavorisée au Québec.

Mon propos tiendra, en fait, sur le besoin d'une cohabitation harmonieuse. On espère, par cette présentation, lancer des ponts entre deux milieux qui, curieusement, dans les médias, nous disent tout à fait séparés. Pourtant, on est tous des voisins et on vit ensemble. On espère pouvoir partager des visions d'avenir et de développement ensemble.

(11 h 10)

Je vais commencer par la lecture d'un sommaire et j'ajouterai des commentaires au fur et à mesure. Pour débuter, j'aimerais remercier la commission de nous accorder cette occasion de présenter notre vision de la situation. Le Comité de restauration de la rivière Etchemin reconnaît et appuie le droit de produire des producteurs agricoles. Cependant, le droit de produire doit, selon nous, être pondéré par des principes de responsabilité et un souci de cohabitation harmonieuse.

Nous croyons que pour régler les problèmes environnementaux liés aux productions agricoles, il faut les considérer tels qu'ils sont. Il ne faut ni les exagérer ni les minimiser et il faut surtout agir de façon progressiste. Si vous me permettez, j'ajouterai ici qu'agir de façon progressiste, c'est proposer des solutions plutôt que d'alimenter les confrontations ou la paralysie. Donc, nous, du Comité de restauration de la rivière Etchemin, nous nous faisons un devoir, chaque fois qu'on arrive vis-à-vis un problème quelconque, de proposer des solutions afin de faire avancer les choses.

Tout d'abord, nous voulons faire part de notre étonnement suite à la lecture du document Proposition de principes généraux relatifs à la gestion des odeurs, du bruit et des poussières en milieu agricole. Le fait de séparer les nuisances environnementales comme la contamination des nappes d'eau souterraines et des cours d'eau, l'érosion des berges de cours d'eau et la surfertilisation des sols de ces autres nuisances environnementales que sont les odeurs, les bruits et les poussières empêche d'établir des liens nécessaires à une bonne compréhension des enjeux. Cette situation impose une vision séparée de questions liées étroitement.

Donc, nous pensons que pour vraiment pouvoir apporter des solutions et des correctifs, il serait souhaitable de prendre toutes les nuisances environnementales qu'on connaît pour les considérer ensemble, puisqu'il y a des liens – je vais tenter d'en démontrer tantôt – entre chacune de ces nuisances. Mais aussi, par rapport aux solutions, on peut établir des liens et on va vous proposer différents scénarios qui simplifient et qui allègent, si on veut, la problématique.

Premièrement, les odeurs proviennent, lorsqu'on parle des odeurs de fumier, de lisier, de gaz émis par les fumiers et les lisiers. Par exemple, le purin de porc émet du méthane et de l'azote ammoniacal potentiellement nocifs pour l'environnement et la santé. Dans certaines conditions, les retombées de ces gaz peuvent détruire des écosystèmes comme des tourbières ou encore des frayères. Ces mêmes gaz peuvent nuire à la santé humaine et animale.

Le fait de considérer ces gaz et leurs odeurs ensemble donne une meilleure perspective pour la recherche de solutions. Cela permet de viser la réduction des émissions de gaz par une gestion différente – bien entendu, une gestion des fumiers et lisiers – et de réduire la propagation des odeurs par le fait même. Si on agit sur le lisier ou le fumier, on peut réduire la production de gaz, d'où la réduction des odeurs.

On peut pousser plus loin et penser à l'utilisation d'écrans d'arbres pour circonscrire davantage la propagation des odeurs. Personnellement, je travaille depuis de nombreuses années maintenant en environnement et je représente une autre organisation qui s'appelle la Société de l'arbre du Québec. On a suivi avec intérêt le déroulement de la problématique et on s'est posé une question: Comment se fait-il que personne, nulle part, n'a encore pensé que les écrans d'arbres pourraient servir, premièrement, comme écrans, si on veut, pour les odeurs, mais il y a plein d'autres choses?

On aimerait, s'il y a quelque chose qui est retenu de notre passage ce matin, que ce soit peut-être ceci: Si on utilisait les arbres un peu plus, on pourrait limiter les distances qu'on impose aux producteurs agricoles. Ça a aussi plein d'autres valeurs environnementales. Ça réduit les odeurs ou ça les circonscrit, mais aussi ça recueille des milieux de vie. Tantôt, j'expliquerai un peu plus ce qu'on peut faire avec ça.

Donc, on peut pousser plus loin et penser à l'utilisation d'écrans d'arbres pour circonscrire davantage la propagation des odeurs. Dans bien des cas, ces écrans d'arbres pourraient permettre de faire d'une pierre cinq coups. Ces écrans d'arbres pourraient réduire la propagation des odeurs, stabiliser les berges de cours d'eau, favoriser la biodiversité, améliorer l'apparence du paysage et réduire les distances de séparation pour les bâtiments et les structures d'entreposage, tel que discuté dans le document Proposition de principes généraux .

Nous croyons que le gouvernement doit aider les agriculteurs à assurer que les quantités de fumier et de lisier entreposées ne dépassent pas les capacités d'entreposage. Cette aide pourrait venir d'une amélioration des fosses d'entreposage.

Ici, j'ai fait un très court résumé pour dire: Il y a quelques années déjà, en 1988, le gouvernement du Québec avait proposé un programme d'aide financière pour les agriculteurs – dont, si je me souviens bien, l'acronyme était quelque chose du genre P-A-G-F – un programme qui permettait aux producteurs agricoles d'obtenir des fonds.

Comme je demeure dans un milieu agricole, mes voisins sont agricoles, je suis moi-même producteur forestier et j'élève différentes choses, je me tiens pas mal au courant de ces choses-là et on m'en parle souvent. Il y a plusieurs choses qui sont apparues, disons, drôles, quand on n'est pas dans le milieu qui prend les décisions, à savoir: Il y avait un fonds de quelque 300 000 000 $ ou 400 000 000 $ mis à la disposition des agriculteurs, puis on n'arrivait pas à le dépenser. Ça, c'est déjà drôle en partant. Quand tu dis qu'il y a de l'aide pour quelqu'un ou pour quelque organisation puis qu'on ne dépense pas ces sous-là, on peut se poser des questions. Maintenant, en posant des questions, on apprend du côté des agriculteurs que c'est bien beau qu'il y ait des fonds de disponibles, mais ça exige des déboursés qui, dans bien des cas, sont incompatibles avec l'avancement, si on veut, des travaux agricoles ou de modification des fermes. Donc, il y aurait sûrement moyen de revoir un programme du genre, de le rendre plus accessible et de favoriser, par le fait même, le contrôle de problèmes qui, on l'espère, vont disparaître le plus rapidement possible.

Donc, le Comité de restauration appuierait avec beaucoup d'enthousiasme un programme qui permettrait justement d'aider les agriculteurs à mieux contrôler les situations. Le Comité de restauration de la rivière Etchemin préconise le respect des normes en matière d'entreposage et l'aide de l'État pour les agriculteurs désireux d'entreprendre le virage vert. Nous – encore ce matin, avant de partir, je discutais avec différents directeurs du Comité – on ne veut pas agir en tant que police et dire: Nous, on est les protecteurs de la rivière Etchemin et on va agir comme des policiers. Pas du tout. Nous, ce qu'on demande, c'est qu'on se serve de conscience et qu'on respecte les normes qui sont appliquées – et ça, bien sûr, ça s'adresse aux producteurs agricoles – mais, pour respecter les normes, ce n'est pas évident. Je parle en connaissance de cause, ça fait 15 ans que je travaille tous les jours en environnement. Avoir en tête toutes les normes de tous les sujets qui nous intéressent pour chacune des décisions, ce n'est pas évident. On doit simplifier la tâche pour les agriculteurs et aussi pour les gens qui ont affaire à quelque forme de développement que ce soit qui est liée aux productions agricoles ou autrement. Il faut simplifier la situation et, dans ce sens-là, nous, on aimerait que les normes soient clarifiées et très bien publicisées, de façon à ce que tous les gens puissent se comprendre dans ça. On pense que des gens bien informés, autant les agriculteurs que des gens de tout autre domaine, vont agir comme des personnes conscientes et des personnes adultes et faire de leur mieux pour respecter ces normes-là.

Donc, déjà on voit que, comme je le disais tantôt, quand on est un agriculteur ou un producteur forestier, on a affaire à un fouillis de normes – et je dis bien «fouillis», parce que ce n'est pas bien facile de s'y retrouver – et là on espère que ces gens-là vont agir de façon conséquente par rapport à l'environnement, sans rien comprendre ou en comprenant un minimum. Donc, il y a vraiment beaucoup à faire pour aider les producteurs agricoles.

Là, je parlais des capacités d'entreposage; il y a des normes, je pourrais vous donner des exemples dans la région chez nous. Présentement, si vous alliez faire un tour dans le coin de Saint-Henri, si vous alliez faire un tour dans le rang Bélair et les rangs du genre, vous verriez qu'il y a de nombreuses fosses à purin qui débordent et même qui inondent le rang ou les routes dans le coin. Et ça, ce n'est pas parce que les gens, ça leur tentait de faire ça, il y a trop de purin pour la capacité d'entreposage. Et ça, ça amène les problèmes que vous connaissez et que je n'ai pas envie de documenter plus qu'il ne faut. Donc, on pense qu'il faut vraiment faire un effort à ce niveau-là et il revient au gouvernement de donner un coup de main.

(11 h 20)

En fait, si vous me permettez un aparté, le Québec, sans la production agricole ou sans les agriculteurs, n'aurait pas le même visage, ne serait pas le Québec qu'on connaît, il faut reconnaître ça. Mais reconnaître ça, ce n'est pas juste dire: Ah! on est bien content qu'il y ait de l'agriculture. Il faut le reconnaître dans les faits. Il faut aider les producteurs agricoles et, nous, on adhère à ça à 100 % en autant qu'on respecte les normes minimales qui permettent la protection de l'environnement.

Maintenant, un autre point qui apparaît dans le document a trait à l'épandage des fumiers. L'épandage des fumiers et lisiers est au coeur des préoccupations du Comité de restauration de la rivière Etchemin. Bien que les odeurs aient une influence non négligeable sur la qualité des cours d'eau et, par conséquent, de la pêche, le plaisir des pêcheurs, l'impact sur les cours d'eau du surépandage et du ruissellement inquiète davantage les comités comme le nôtre. Le respect des normes en matière de distance d'épandage par rapport aux cours d'eau est essentiel. La création d'écrans d'arbres le long des berges de cours d'eau l'est tout autant, quant à nous.

Pour faire une image simple, si on pense à une distance qui devrait être respectée par rapport aux cours d'eau, bien, elle le serait d'autant plus si cette distance ou si cette parcelle de terrain ou cette bande était boisée. On ne pourrait pas l'oublier, ce serait impossible. Ça permettrait aussi de régler peut-être, par le fait même, un autre problème qui est l'érosion des sols, et, pour nous, ça se traduit en stabilisation des berges. Donc, encore là, les écrans d'arbres ou la plantation d'arbres pourrait certainement être très utile à plusieurs niveaux et aider aussi à améliorer les relations entre voisins.

Le bruit et les poussières d'origine agricole sont beaucoup mieux circonscrits par l'utilisation de ces écrans d'arbres. Qu'on regarde un peu partout – j'ai fait très rapidement un survol de la littérature par rapport à la production agricole en Europe et aux États-Unis – on s'aperçoit que c'est réglementaire. Il faut planter des arbres, il faut s'assurer que les arbres améliorent l'apparence, mais aussi que les arbres puissent servir à des fonctions comme j'ai mentionné depuis tantôt. Nous, bien, on espère qu'au Québec on prendra racine et on pourra peut-être copier un peu ce qui se fait de bon ailleurs. Donc, nous proposons que le gouvernement favorise financièrement les producteurs agricoles dans l'établissement de ces écrans d'arbres. Pour régler les problèmes environnementaux liés aux productions agricoles, comme nous le disions précédemment, il faut les considérer tels qu'ils sont et il faut surtout proposer des solutions là où c'est possible. Nous encourageons la recherche de solutions guidée par des principes de responsabilité et un souci de cohabitation harmonieuse.

Tantôt, en entrant dans la salle, j'ai rencontré un monsieur de l'UPA avec qui j'ai le plaisir de collaborer sur le Conseil régional de l'environnement de Chaudière-Appalaches, M. Martin – je ne sais pas s'il est encore là, je le salue encore s'il est là – Eh bien, il faudrait justement favoriser des rencontres, des échanges entre le milieu environnemental, si vous voulez, et le milieu agricole. Mais, quelque part dans la vie, j'ai l'impression que bien souvent on a besoin de créer du spectaculaire dans les médias, où il faudrait que les producteurs agricoles et les écologistes se poignent aux cheveux et se tiraillent sur la place publique toujours. Ça fait vendre des journaux, toujours, mais, dans le fond, ça ne fait pas nécessairement avancer les dossiers que, tous les deux, on mène de façon légitime. Je pense, encore là, que ça revient au gouvernement de favoriser, d'encourager ces échanges-là et je sais – parce que je travaille avec les gens de l'UPA régulièrement depuis fort longtemps – que c'est possible. Mais il faut aussi apprendre à le faire dans le respect les uns des autres et il faut comprendre que des gens qui travaillent sur une terre sont des gens qui ont toute leur attention et toute leur énergie canalisées vers leur travail. Il ne faut pas demander à ces gens-là de devenir écolos ou de passer leur temps dans des réunions, ça ne sert à rien.

Mais on peut travailler, on peut harmoniser, si on veut, nos visions dans nos communautés, et ça, bien, je pense que – puis je n'ai pas de recette magique, là – le gouvernement peut vraiment agir et intervenir à ce niveau-là, en créant des occasions de rencontre et d'échange, mais basées sur l'idée de trouver des solutions à des problèmes locaux. Bien souvent, les gens, chez eux, ont des solutions rapides qu'ils pourraient apporter, mais on ne les entend pas parce qu'ils sont perdus dans la cacophonie médiatique de la vie de tous les jours. Si on revenait un petit peu plus à terre, un peu plus proche du plancher des vaches, en mettant ces gens-là ensemble, on verrait qu'il y a possiblement beaucoup de choses qui peuvent se faire.

Une image que j'ai en tête. Je parlais, il n'y a pas tellement longtemps, avec un producteur de porc qui s'adonne à être mon voisin pas tellement loin. On parlait de la situation au niveau de la production de porc. Les chiffres que j'avais en tête étaient finalement des chiffres qui correspondaient à la réalité que mon voisin me disait. Quand on regarde les producteurs de porc, je n'en connais pas beaucoup qui se lèvent le matin en disant: Bon, c'est au bout, c'est le temps ce matin, je vais scraper la rivière. Ou: C'est le temps ce matin, je vais empoisonner tout le monde. On ne connaît pas de monde comme ça, mais on sait que ça existe. Il y a des problèmes importants. Mais, quand on regarde en termes relatifs, on peut dire qu'au moins 90 % des producteurs agricoles font un bon travail. Ils font des efforts. Mais l'autre 10 %, ils causent des moyens problèmes, et c'est là que les odeurs dont vous parlez dans votre document prennent toute leur importance. Quand ça pue, il n'y a pas grand monde qui est content et ça chiale fort, autant que ça peut sentir.

Maintenant, je vous ai donné quelques exemples de solutions qui pourraient être appliquées rapidement. Comme je vous disais tantôt, si c'était une chose que vous pouviez retenir, d'intégrer la plantation d'arbres pour aider à circonscrire la propagation des odeurs, bien, vous feriez quatre autres coups avec cette même pierre là. Donc, le Comité de restauration de la rivière Etchemin ne veut pas limiter le droit de produire des agriculteurs. Il ne prétend pas connaître de solutions miracle. Mais nous croyons que des solutions simples et concrètes comme celles que nous vous avons présentées sommairement pourraient servir à améliorer le rendement environnemental du secteur agricole et soulager les tensions dans les communautés concernées. Là-dessus, je vous remercie d'avoir pris le temps de nous entendre.

La Présidente (Mme Vermette): M. Bélisle, on vous remercie. Alors, je passerai la parole au ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

M. Julien: Je vous remercie d'être venu ce matin. J'aurais aimé ça avoir un petit document, mais... En tout cas, j'ai essayé de suivre un petit peu.

D'abord, ce que je retiens dans votre présentation, j'ai trouvé que vous aviez une approche très positive de la façon dont on va voir le développement durable – parce que, moi, j'appelle ça le développement durable – que ce soit par le biais de l'environnement ou par le développement de la productivité chez nos producteurs, le droit de produire. Ça, c'est le premier constat que je fais. Je vous en félicite. Je trouve que vous avez une approche qui est dynamique et qui est même, je dirais, sécurisante dans un sens et qui ne crée pas d'antagonismes inutiles.

À un moment donné, vous avez parlé, au tout début, de responsabilité ou de responsabilisation. Pouvez-vous élaborer un petit peu plus là-dessus? Parce que vous revenez souvent au gouvernement, mais aussi, au début, vous dites: Il faut responsabiliser, mais il faudrait que le gouvernement fasse ça, ça et ça. J'aimerais ça que vous me cadriez ça.

M. Bélisle (André): Bien, premièrement, ça part d'un principe que j'ai personnellement. On regarde dans notre société aujourd'hui, on a des chartes des droits et on a bien, bien des droits. Mais quelque part il manque quelque chose. Tu ne peux pas juste avoir des droits, dans la vie. Tu as des responsabilités aussi. Que tu sois producteur agricole ou que tu sois politicien ou que tu exerces quelque fonction que ce soit, il faut toujours pondérer nos droits par nos responsabilités pour harmoniser notre vie à la vie de l'ensemble, ou de ce qu'on fait dans la vie. Dans ce sens-là, bien, je reviens à ce que je disais tantôt, pour un producteur agricole, connaître toutes les normes et toutes les lois, ce n'est pas évident en partant. Donc, on a besoin d'un coup de main de ce côté-là. Mais, si on peut aider les producteurs agricoles ou le milieu agricole à ce niveau-là, bien, ces gens-là vont agir de façon responsable, on pense. On part du principe que ce n'est pas parce que tu es agriculteur ou que tu as une autre vocation que tu es plus ou moins responsable. On pense que tous les Québécois et les Québécoises sont à peu près aussi responsables, en règle générale, et, si on leur fournit les outils, vont agir de façon responsable.

(11 h 30)

Maintenant, ce n'est pas évident non plus quand on regarde, si on veut, le développement de l'agriculture. On sait que, par exemple dans le domaine du porc, il y a un marché très intéressant qui se développe et c'est comme compréhensible et légitime pour les gens qui vivent de ce domaine-là d'essayer d'en tirer le meilleur profit possible. Maintenant, il arrive qu'on se retrouve face à des productions qui sont trop importantes pour notre capacité de gérer, si on veut, les fumiers ou les problèmes que ça peut causer, et là on agit d'une façon irresponsable, entre guillemets, parce qu'on cause des problèmes. Maintenant, pour agir de façon responsable, comme je disais tantôt, il faut connaître les normes, mais il faut aussi vouloir passer à l'action, faire ou mettre en place les dispositifs ou les équipements nécessaires pour régler ce problème-là. Donc, pour nous, le souci de responsabilité, si je le traduis pour les gens qui représentent le milieu agricole, bien, c'est de connaître aussi les impacts de chacun de ces problèmes-là sur les écosystèmes, sur la santé et d'agir en conséquence. Maintenant, on ne peut pas tourner sur un dix-cents, comme on dit, puis dire que tout va être régler parce qu'on a envie que ce soit réglé. Il faut comprendre que ça va prendre un certain temps. Il ne faut pas que ça s'éternise. C'est en mettant tous les éléments en place qu'on pourra favoriser la responsabilisation ou la prise en charge des responsabilités du milieu agricole.

M. Julien: En tout cas, concernant certaines mesures, vous parliez, par exemple, au niveau des arbres, je trouve ça intéressant. C'est la première fois qu'on me mentionne ça. Effectivement, ça serait peut-être une approche qu'on pourrait regarder. On a des programmes, vous savez, qui sont régionaux, qui sont décidés en région, des moyens financiers qui pourraient facilement... Je pense que ce genre d'initiative là pourrait être regardé à travers le biais de ces programmes-là.

Un autre élément que je voulais vérifier avec vous. Vous, vous avez travaillé sur l'aménagement de la rivière, c'est ça?

M. Bélisle (André): La rivière Etchemin, oui.

M. Julien: Et vous êtes associé, j'imagine, avec les producteurs agricoles pour cet aménagement-là. Je voudrais savoir comment ça a été, l'expérience?

M. Bélisle (André): Deux solitudes. Malheureusement, si je vous faisais la description du Comité de restauration, on englobe tout le monde, sauf le milieu agricole. Il y a toutes les municipalités, toutes les MRC, les écoles, les organisations en tout genre, sauf le milieu agricole. Et ça, je peux vous dire personnellement que c'est, à quelque part, des choses qui sont dites.

Comme je le dis souvent, parce que je représente d'autres organisations environnementales, si j'avais l'air de ce qu'on dit que les écolos sont, je serais vert, je mangerais du foin puis je dormirais accroché après une branche. Donc, c'est vous dire, quand je rencontre un producteur agricole, à quelque part, qui ne me connaît pas, parce que ce n'est pas mon voisin, et qu'il sait que je suis un écolo, en partant, ça part mal, bien souvent.

Je peux vous dire qu'il n'y a pas tellement longtemps, au Lac- Etchemin, il y avait la rencontre de Solidarité rurale, j'ai rencontré différents agriculteurs qui étaient tout surpris de rencontrer André Bélisle, la personne qu'ils pensaient qui avait l'air d'une chauve-souris ou je ne sais pas quoi, et de savoir que je suis producteur forestier, que j'étais monteur de lignes, que j'ai travaillé sur la construction tout le temps, que je partage les mêmes valeurs, puisque, si je demeure dans ce milieu-là, c'est parce qu'on a des valeurs communes à quelque part, et que, moi, je n'avais pas vraiment de problème majeur avec l'agriculture, sauf qu'il y avait des problèmes plates. Quand la rivière devient verte puis qu'elle pue, ça ne me donne pas le goût d'aller à la pêche ou d'aller me promener dehors. Ça, je pense, comme je le disais tantôt, je n'en connais pas, moi, dans mes voisins qui se lèvent le matin avec le grand sourire puis qui disent: C'est à matin que je la scrape, la rivière.

Donc, il faut travailler à se comprendre et à se connaître, mais il faut aussi effacer le spectaculaire qu'il y a autour de ça qui fait que des représentants des deux milieux vont plus souvent marcher sur des préjugés que sur des réalités. Et là, ça n'aide pas à se comprendre.

M. Julien: Exactement. C'est le commentaire que je voulais faire, parce que, si je me fie à ce que je vis depuis un an, tout ce qui s'est dit dans les journaux provenant de certains milieux de l'environnement, il n'y a rien pour rapprocher les partenaires. Puis, c'est un peu normal que les producteurs aient des préjugés. C'est pour ça que je vous dis que le discours que vous aviez ce matin, ce n'est pas un discours que j'ai entendu souvent.

M. Bélisle (André): Oui, mais ça marche sur les deux bords, ça, vous savez, M. le ministre.

M. Julien: Je suis d'accord. Je vous ai parlé de développement durable et, quand on a parlé de développement durable, je l'ai mentionné ce matin à l'UMQ, puis je l'ai toujours mentionné, c'est les deux, oui, mais pas un au détriment de l'autre. Il faut que l'agriculture se développe avec son droit de produire. Mais, ce dont vous avez parlé ce matin, je le répète, ce n'est pas un discours que j'ai entendu souvent.

Au niveau des municipalités, je regarde avec les comités agricoles qui se créent de plus en plus entre le monde municipal et le monde agricole, on sent qu'il commence à se créer cette espèce de tradition de collaboration puis, peut-être, une meilleure compréhension, parce qu'on vise la cohabitation harmonieuse des deux.

M. Belisle (André): Bien, vous voyez, M. le ministre, je vous donnerais un autre exemple. En mai dernier, je représentais – je représente toujours – ÉcoSommet 1996 qui visait à produire un plan d'action, des projets précis pour régler des problèmes bien identifiés, bien documentés en environnement, et l'agriculture avait une large part là-dedans. Nous, on voulait travailler sur justement faire avancer ces questions-là, c'est les médias qui nous ont nui le plus, parce que ce n'est pas spectaculaire de parler qu'on va régler un problème. C'est spectaculaire de dire qu'on vient de trouver le problème. Mais «c'est-u» plate, ça?

M. Julien: Ils le règlent.

M. Bélisle (André): Tu trouves un problème, mais tu ne le règles pas parce que ce n'est pas spectaculaire. Bien, c'est là-dessus que, nous, on voulait faire un peu à part ou différent des autres, ramener le message que, ensemble, on peut les régler. Mais, étant donné la conjoncture, on a besoin d'un coup de main; un coup de main qui vient, bien sûr, des gouvernements, qui vient, bien sûr, du milieu de l'agriculture. Et il faut faire l'effort supplémentaire de dire: On va passer par-dessus les préjugés puis on va viser à régler les problèmes plutôt que d'alimenter la controverse qui nuit à tout le monde finalement et qui coûte cher à l'État.

M. Julien: Il y a un élément important aussi que vous avez souligné, c'est les mesures concernant l'entreposage. Effectivement, depuis 10 ans, on aurait dû dépenser 388 000 000 $ et on a dépensé 117 000 000 $. Même à l'intérieur de mon enveloppe fermée, je l'ai bonifiée chaque année. Ce qui fait qu'on met sur pied un nouveau plan, mais qui ne concerne pas uniquement les fosses. Les fosses, c'est une chose, mais je pense aussi qu'il faut avoir en tête l'utilisation de nouveaux traitements de lisier. C'est prévu dans le programme. Il faut prévoir aussi de permettre aux producteurs d'acquérir ou de modifier leurs équipements. C'est prévu dedans. Il faut permettre aussi aux producteurs d'avoir des sommes d'argent pour pouvoir s'engager quelqu'un, sur formule de club d'encadrement ou autre, pour pouvoir, ensemble, gérer ce développement-là. Alors, ça, ça en est une façon de faire, malgré le problème d'assainissement des finances publiques. C'est sûr qu'on n'a pas beaucoup d'argent, mais on réussit à le faire. Je ne dis pas que c'est parfait, mais au moins on part avec ça.

Alors, tranquillement, je regarde aussi les clubs d'encadrement, qu'on finance dans les régions, les gens commencent à se regrouper. Quand vous parliez tout à l'heure... Donc, c'est des interventions qu'on fait.

Moi, je veux revenir aussi aux producteurs, dans le sens que, dans le fond, le développement durable, ils l'ont pris. Quand je regarde ce que la Fédération des producteurs de porc a fait avec son plan agroenvironnemental, je ne suis pas sûr que ça a marché tout seul, ça, cette affaire-là. Il a dû s'en brasser des affaires, puis ça a dû se parler. Je regarde le plan au niveau de la Fédération des producteurs de bovins. Je regarde les fédérations spécialisées dans les oeufs, dans le poulet, qui s'en viennent avec les normes de contrôle de qualité et autres. Ce virage-là est en train de se faire. Vous avez peut-être raison, peut-être que ça va bien, donc on n'en parlera pas dans les médias, mais je constate que même la loi n° 23 qui va être adoptée le 20 juin – parce que c'est ça qui va arriver – avec les normes correctes, ça n'a pas empêché les gens de commencer à faire des mouvements. Moi, c'est ce que j'appelle la responsabilisation. Dans ce sens-là, comme gouvernement, tu ne peux pas ne pas accompagner ces gestes-là et les défendre, parce qu'ils l'ont fait. Ils n'ont pas attendu après papa, pendant 30 ans, qui a toujours réglé les problèmes, ils l'ont fait eux autres mêmes. Notre job, c'est de les accompagner.

M. Bélisle (André): Bien, vous voyez, M. le ministre, pour peut-être ajouter à ce que vous dites, dans ÉcoSommet – j'ai été le premier vice-président, en fait, le gars qui a eu l'idée d'ÉcoSommet – une des choses qui me tenait beaucoup à coeur, c'était de citer des exemples de réussite dans tous les domaines. En agriculture, on en a sorti, puis on a sorti des choses remarquables.

Un exemple qui me vient en tête – il y en avait des dizaines, pardonnez-moi de ne pas me souvenir de tous. Il y a un bonhomme, à Saint-Victor, un producteur agricole, M. Champagne, qui, lui, a hérité de la terre ancestrale. C'est un bonhomme un petit peu plus jeune que moi qui, à un moment donné, m'a dit: Tu sais, André, quand j'ai hérité de la terre, j'ai hérité de la terre comme elle était. Ce n'était pas un beau rêve, c'est que mon père y a travaillé, puis son père, puis son arrière... toute la famille a travaillé pendant des générations. Mon père me disait quand j'étais jeune: Tu sais, là, sur le bord des criques, rase-moi ça à blanc, il ne faut plus qu'il y ait rien. De la broussaille, ça fait laid, ce n'est pas beau, tout ça. Il dit: Lui, il faisait pour bien faire, mais, moi, je vois bien au fil des années, parce qu'on a fait ça, chacune des criques apporte beaucoup de terre. Et ce bonhomme-là cherchait des moyens de trouver des arbres. Là, je vous donne un exemple bien, bien précis. Il n'avait pas envie de planter rien que des épinettes. Il avait envie de recréer le milieu naturel, comme il aurait dû être. Il s'est arraché les cheveux sur la tête pour réussir à trouver des arbres.

Ce qu'il a fait sur sa terre, c'est un exemple. Si tous les agriculteurs voyaient ça et si on publicisait ça plus, bien, ça donnerait une autre image de l'agriculture. On verrait concrètement qu'il y a des choses qui se font.

Malheureusement, des organisations comme la nôtre – je parle d'ÉcoSommet – on n'était pas assez appuyé, on n'avait pas assez de sous pour faire connaître toutes ces choses-là qui donnent une autre dynamique, finalement.

C'est un peu encore dans ce sens-là notre appel au gouvernement de dire: Aidez-nous à faire valoir le bon sens, mais pas de cachette, pas de faire semblant que c'est beau quand on sait que ça ne l'est pas. Objectif: il faut avoir un jugement qui est concret, qui est réaliste, mais avec une vision pour régler les problèmes, avec un objectif, un élan dans ce sens-là. Si les ministères de l'Agriculture, de l'Environnement, de la Santé et d'autres ministères nous donnaient un coup de main là-dessus, peut-être qu'on pourrait accélérer, si on veut, le règlement de ces problèmes-là.

M. Julien: Merci.

La Présidente (Mme Vermette): Alors, M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Farrah: Oui, merci, Mme la Présidente. Brièvement. Salutations, M. Bélisle. C'est rafraîchissant de vous entendre ici, dans le sens que vous avez une approche très positive de coexistence, de cohabitation entre les différents groupes au niveau de l'ensemble des régions du Québec.

(11 h 40)

Vous avez raison qu'un des gros problèmes qu'on doit affronter, c'est la perception dans le dossier du droit de produire. Là, c'est une manchette, L'odeur du cochon rend dingue , ça ne veut pas dire que c'est agréable l'odeur du cochon, mais je pense qu'il faut avoir une juste mesure. C'est ça, un peu, le problème qu'on a.

Dans ce sens-là, quelles seraient les solutions que vous pourriez nous suggérer pour faire en sorte que ces perceptions-là soient ramenées à des choses plus acceptables et plus réelles, en fin de compte? Parce que, ça, il y a une incidence très importante pour en arriver à avoir une cohabitation, une coexistence idéale, entre guillemets. C'est bien évident qu'il faut qu'on puisse se parler, puis s'entendre, puis que chacun doit mettre de l'eau dans son vin, si vous me permettez l'expression. Par conséquent, des perceptions négatives comme celles-là n'aident pas au niveau de l'ensemble de nos milieux à favoriser justement cette cohabitation-là.

En fin de compte, vous l'avez démontré quelque peu: Est-ce que c'est un groupe qui est plus fort qu'un autre par rapport au niveau des médias? C'est quoi qu'on devrait faire? Le problème, on le connaît, mais c'est quoi qu'on devrait faire pour justement atténuer cette mauvaise perception?

M. Bélisle (André): Je pense qu'il faut, comment je peux dire, unir les positifs ou les points positifs pour qu'ils soient plus forts. Vous parlez de l'odeur. Tantôt, je faisais un exemple que les odeurs, en fait, ce sont des gaz qui peuvent être nocifs. Donc, ça, il ne faut pas se cacher ça. Il ne faut pas juste parler des odeurs parce que ça évacue le côté nocif.

J'ai amené ici, si jamais ça vous tentait d'en prendre connaissance, des recherches qui ont été faites sur des problèmes bien documentés, que ce soit en Angleterre, en Allemagne ou en Hollande, où ces gaz-là, l'azote ammoniacale, ont fait disparaître des tourbières. Donc, il faut prendre l'odeur comme étant un de nos cinq sens qui est mis en jeu. La réalité, c'est que ces gaz-là sont graves. Donc, il faut prendre le problème, le considérer très objectivement.

Maintenant, qu'est-ce qu'on peut faire pour ça? Il y a moyen, si on veut, de régler au niveau de la gestion des fumiers. Ensuite, si on reprend l'exemple de la plantation d'arbres, bien, l'odeur va être de beaucoup diminuée ou, si on veut, contrôlée. À partir du moment où vous effacez l'odeur, si vous me permettez, vous allez faire disparaître un peu et beaucoup des tensions parce que, finalement, si vous me permettez un langage de gars de bois, ce qui écoeure le monde, c'est l'odeur: moins ça va sentir, plus le monde va être content; plus le monde va être content, plus ça va être facile de travailler ensemble et moins ça va permettre justement aux médias de créer ou d'exagérer des problèmes.

Ceci dit, je ne voudrais pas que vous pensiez que ce qui a été rapporté dans les journaux je ne suis pas d'accord avec ça. Au contraire, je pense que oui. Pour vivre dans la région, je peux vous dire que, à Saint-Lambert puis à Saint-Bernard, à ces périodes-là, c'est vrai que le monde regarde le nez par à terre et ils s'en vont de même. Tu n'en vois pas bien, bien qui se promènent le long des champs. C'est vrai.

Mais, maintenant, c'est un problème. Si on reste là, on n'a rien fait. Il faut considérer le problème et dire: Qu'est-ce qu'on fait pour améliorer la situation? Et je vous ramène l'idée de planter des arbres et de gérer efficacement les fumiers-lisiers.

M. Farrah: Au niveau de la réglementation, vous semblez relativement d'accord avec la proposition.

M. Bélisle (André): En principe, oui, sauf que, pour nous, ça faisait vraiment incongru de dire qu'on sépare différentes nuisances environnementales en deux quand elles sont bien liées.

Maintenant, nous, ce qu'on veut encourager, c'est la volonté de prendre les problèmes en considération et d'arriver à parler concrètement de solutions et de voir des choses se faire sur le terrain. O.K. Un exemple. On sait que les canons à purin, quand ils envoient le purin dans les airs, répandent l'odeur sur beaucoup plus grand. Qu'est-ce qu'on va faire comme société ou comme gouvernement pour encourager et accélérer le recours à des méthodes d'épandage qui, si vous me permettez, vont envoyer le purin plus au sol pour réduire les odeurs? Dans ce sens-là, il faut penser à cela. Qu'est-ce qu'on peut faire, nous, gouvernement, population, pour accélérer ça, pour justement réduire les tensions et encourager les gens vers les solutions?

M. Farrah: En terminant. Maintenant, comment voyez-vous le rôle des municipalités dans ces dossiers-là au niveau de l'application de la réglementation?

M. Bélisle (André): Là, vous entrez vraiment dans le domaine du tricotage serré, comme je l'appelle. Quand on est dans les municipalités... je vais vous donner la mienne en exemple, Frampton, belle petite municipalité dans les montagnes, beaucoup de production agricole, beaucoup de production forestière, la municipalité doit faire bouillir son eau au moins 10, 12 fois par année, parce que la source de la municipalité est sur la terre d'un des conseillers qui s'adonne à être un producteur de porc et qui, en faisant le mieux possible son ouvrage, ne peut pas aplatir le terrain. Donc, quand il fait son épandage, ça coule dans le puits de la municipalité. Trois, quatre jours après, tout le monde a ce qu'on appelle «les maux qui courent».

Alors, là, vous me dites: Comment on va s'organiser avec les municipalités? Bien, je pense qu'il va falloir travailler au niveau de la conscience, au niveau de la responsabilisation. C'est des frais de santé que ça coûte, ça là. Je peux vous nommer des cas, de gens qui ont été bien malades à cause de ça, et on a dit: Bien, c'est probablement à cause du purin qui s'en va dans... Mais personne ne fait rien, parce que c'est dans la famille, c'est le voisin d'à côté, c'est le monde bien proche.

Je ne suis pas sûr, moi, que les municipalités soient les plus placées pour, comment je peux dire, dédramatiser ou défamiliariser les relations. Puis même les MRC, à ce niveau-là. Les pouvoirs de lobby, vous connaissez ça, vous le vivez à tous les jours, bien, ça se vit à ce niveau-là aussi.

Ça fait que je ne suis pas sûr, moi, que le gouvernement ferait une bonne affaire de dire: On redonne, si on veut, le contrôle à ce niveau-là. Je reprends ma municipalité, mais je pourrais vous en nommer 50 comme ça, ce n'est pas demain la veille qu'une plainte va être portée puis défendue par le conseil municipal quand le beau-frère du maire c'est le propriétaire du terrain ou quand la soeur de... tu sais.

M. Farrah: Donc, ce que vous dites, c'est que le gouvernement devrait garder une certaine mainmise comme arbitre objectif au-dessus de tout ça.

M. Bélisle (André): Absolument. Et assurer qu'on prenne les problèmes réellement et concrètement en main, pas juste en parler puis que ça ne change rien demain matin, qu'on agit concrètement. On n'a pas besoin d'être en guerre, on a juste besoin de dire: Ensemble, on va faire ce qu'il faut pour améliorer la situation. Et là, je pense qu'il y a des exemples. On peut les décrier, on peut les... Les perceptions des gens, vous savez, ce n'est pas tout le monde qui voit les choses de la même façon, mais le simple fait de voir le ministre de l'Environnement, le ministre de l'Agriculture et le ministre de la Santé adresser cette question-là, c'est déjà un bon pas dans la bonne direction. Mais, maintenant, il faut livrer la marchandise. Il ne faut pas juste en parler, il faut que ça change. Il faut que ça change pour le mieux, non seulement par rapport à l'environnement, mais aussi pour les producteurs agricoles. Il ne faut pas que, eux autres, ils se retrouvent avec une facture qu'ils ne sont pas capables de rencontrer, parce qu'on n'aura pas avancé d'un pas.

Je comprends très bien, comme je vous disais tantôt, parce que ça fait 15 ans que je travaille en environnement, que les producteurs agricoles prennent en exemple l'aide qu'on a apportée aux compagnies forestières ou aux papetières pour améliorer leur rendement environnemental. Maintenant, je ne peux pas arriver avec une équation magique qui va vous dire combien on devrait leur verser puis comment, mais on peut certainement, si on a été capable de le faire pour les compagnies forestières, les compagnies papetières, trouver des manières de les aider et d'accélérer l'évolution là-dedans. Et ça, c'est la responsabilité des élus. Je pense qu'il y a pas mal de monde, rien que dans la salle ici aujourd'hui, si on regarde dans tous les ministères, il doit y avoir assez de jugeote là-dedans pour trouver des moyens d'accélérer l'évolution.

M. Farrah: Merci.

M. Bélisle (André): Ça me fait plaisir.

La Présidente (Mme Vermette): Alors, il y avait le député de Roberval qui voulait poser une question et, après, on viendra aux remerciements.

M. Laprise: Oui. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je pense que votre discours est rafraîchissant pour les producteurs agricoles qui, à un moment donné, se demandaient s'ils ne devraient pas vendre leur entreprise puis s'en aller se tenter dans le bois sur le bord d'un lac vivre de chasse et de pêche. Parce que c'était rendu difficile de vivre cette situation-là qui semblait vouloir se dramatiser. Je pense que c'est important.

Je crois que – moi, en tout cas – l'exercice qu'on fait là nous prouve hors de tout doute que c'est chanceux, M. le ministre, que la loi n'ait pas été appliquée au mois de juin l'année passée. Je pense que ça va nous permettre d'améliorer les relations entre tout ce beau monde là et également d'améliorer le projet de loi. Je pense que ça nous fait voir des choses de façon différente et que ça va permettre une médiation beaucoup plus simple, beaucoup plus ouverte les uns envers les autres vers des solutions. Je pense que c'est vers ça qu'il faut s'en aller: c'est de l'action vers des solutions.

M. Bélisle (André): Absolument. Et notre but, finalement, c'était d'encourager ça. Mais pas de cinéma, pas de bande dessinée, c'est la réalité. Le purin ou les fumiers, c'est un gros problème, il faut l'adresser comme un gros problème, et tous les problèmes liés aux productions agricoles, mais il ne faut pas en rester aux problèmes, il faut mettre notre énergie sur les solutions.

La Présidente (Mme Vermette): Alors, M. le ministre, des remerciements?

(11 h 50)

M. Julien: Alors, M. Bélisle, je ne regrette pas pantoute qu'on ait repris la commission parlementaire, même si elle avait été terminée.

Comme je le vous mentionnais précédemment, je pense que vous avez une vision qui est intéressante, qui n'est pas antagoniste, en tout cas, qui me semble au moins ouvrir des pistes de solutions. Comme vous l'avez bien mentionné, plutôt que de chercher des problèmes aux solutions, chercher des solutions aux problèmes, dans le fond. Et ça, moi, j'aime ça. Je pense que c'est important, parce que je pense qu'il n'y a pas de solution miracle. Ça va être basé beaucoup sur l'espèce de cohabitation qui va se faire, cette compréhension mutuelle des intérêts des producteurs, comme de l'autre côté, au niveau municipal. Moi, je suis convaincu de ça. Je le disais ce matin, la loi, dans le fond, ne gère pas le gros bon sens. Ça peut donner des balises, mais ça ne le gérera pas. Moi, je pense qu'avec tout ce qui se fait actuellement le temps est mûr.

M. Bélisle (André): M. le ministre, si vous me permettez, d'en pluguer une, comme on dit. Je représente deux organisations qui ont amené, ont préparé, ont aidé à documenter la position du CRRE, la Société de l'arbre du Québec et l'Association québécoise de lutte contre la pollution atmosphérique. On a débuté des recherches pour vraiment arriver avec des données très, très pertinentes et très concrètes en matière d'utilisation d'écran d'arbres pour diminuer la propagation des odeurs. On n'a pas assez de fonds. On n'en trouve pas, de fonds. Je ne sais pas si, quelque part, vous pourriez intégrer ça dans la machine, mais ça pourrait certainement aider. Ça pourrait certainement aider, parce que, comme je vous le dis, c'est prouvé sur papier, théoriquement, de toutes les façons que vous voulez. Maintenant, il faut faire des calculs. Je vous lance le message. C'est une façon d'accélérer le processus.

M. Julien: Moi, je suis prêt à regarder ça, puis je suis sûr que tous les budgets discrétionnaires de tous mes collègues ici...

Une voix: Vous passez de la parole aux actes.

Une voix: Vous l'avez dit.

M. Julien: Puis, je suis sûr que tous mes collègues aussi, avec leur budget discrétionnaire, ça va leur faire plaisir de collaborer.

Une voix: ...

M. Julien: Non, non, mais c'est pour ça qu'on en parle.

La Présidente (Mme Vermette): Alors, sur ces bons propos et cette belle note d'harmonie, je mettrai fin à nos travaux. Nous suspendons nos travaux à 15 heures cet après-midi.

(Suspension de la séance à 11 h 52)

(Reprise à 15 h 16)

La Présidente (Mme Vermette): Est-ce qu'on pourrait demander, s'il vous plaît, aux gens des formations politiques des deux côtés de vouloir prendre place?

Alors, je déclare la séance de la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation ouverte. Je rappelle le mandat de la commission. Le mandat de la commission est de procéder à des consultations particulières et de tenir des auditions publiques sur La proposition de principes généraux relatifs à la gestion des odeurs, du bruit et des poussières en milieu agricole dans le cadre de la Loi modifiant la Loi sur la protection du territoire agricole et d'autres dispositions législatives afin de favoriser la protection des activités agricoles.

Alors, à ce moment-ci, j'aimerais inviter nos premiers intervenants de l'après-midi, c'est-à-dire le groupe Centre québécois du droit de l'environnement, s'il vous plaît. Vous êtes seul, M. le président?


Centre québécois du droit de l'environnement (CQDE)

M. Corriveau (Yves): Oui.

La Présidente (Mme Vermette): Alors, si vous voulez bien vous identifier, s'il vous plaît.

M. Corriveau (Yves): Mon nom est Yves Corriveau. Je suis avocat et directeur du Centre québécois du droit de l'environnement.

La Présidente (Mme Vermette): Je vous remercie. Si vous voulez bien procéder, s'il vous plaît, et nous faire valoir votre point de vue.

M. Corriveau (Yves): Merci. Mmes, MM. les députés, merci d'avoir accepté d'entendre les représentations du Centre dans le cadre de vos travaux. Juste un petit mot pour vous parler du Centre. C'est une bebite que nous n'avez peut-être pas vue souvent dans le cadre de cette commission-ci. On est davantage habitués à la commission de l'aménagement et des équipements.

Le Centre du droit de l'environnement, c'est une corporation sans but lucratif qui a pour fonction de promouvoir le droit comme outil de protection de l'environnement. Le Centre est composé d'environ 125, 130 membres, qui sont des professionnels dans le domaine de l'environnement. Ce n'est pas un ghetto d'avocats. Il y a plusieurs types de professionnels, des biologistes, des ingénieurs, des comptables, et le Centre regroupe également certains groupes de protection en environnement.

Le Centre poursuit ses objectifs de trois façons. Il donne de l'information juridique aux citoyens qui ont des problèmes environnementaux pour les aider à trouver une solution. Dans ce cadre-là, l'été dernier, j'ai reçu un appel d'un agriculteur qui avait une ferme laitière et qui se plaignait des déversements illégaux de purin de son voisin qui avait une porcherie. On est sensibilisés à la question de par notre clientèle. Le Centre intervient également devant les tribunaux – on l'a fait à plusieurs reprises – soit pour défendre le droit du public à un environnement sain, soit pour défendre la juridiction du gouvernement du Québec en matière de protection de l'environnement, soit pour éclairer les tribunaux sur l'interprétation qu'on doit donner à la loi. Dans le cadre de ces activités-là, on est intervenus devant la Cour d'appel pour défendre un agriculteur qui prétendait que son droit à la qualité de l'environnement était mis en cause parce qu'une municipalité déversait ses eaux usées dans son ruisseau, ce qui rendait son troupeau malade; il avait une perte de production importante. On est allés avec lui au front, en Cour d'appel.

Plus communément, le Centre – c'est ce qui nous fait surtout connaître – est intervenu, devant cette Assemblée et au fédéral aussi, pour faire connaître son point de vue sur les impacts des projets de loi et des projets de règlement sur la protection de l'environnement. On est intervenus sur le projet de loi n° 123; on avait pour principal grief la création d'une immunité. Selon nous, à part les juges puis les parlementaires, il n'y a pas de place pour de l'immunité dans notre société. Deuxièmement, on avait un petit problème avec la commission consultative agricole. Non pas qu'on ne pense pas que les municipalités et les MRC n'ont pas besoin de conseils. À ce niveau-là, on pense que cet organe-là doit être plus vaste, que son mandat doit être plus vaste et que sa composition doit être plus vaste et plus équitable.

(15 h 20)

Plus récemment, en fait très récemment, la semaine dernière, on a reçu votre document de consultation sur les orientations en matière de bruit, poussières, odeurs. Disons-le dès le départ, pour nous, c'est la pointe de l'iceberg en matière agricole; le principal problème, c'est celui de l'érosion des sols, la contamination des sols par la surfertilisation et l'utilisation d'engrais chimiques. On n'a pas fait de longues études agronomiques pour déterminer ça, on se fie à ce que les autres nous disent là-dessus. Notre compétence, nous, c'est le droit. On n'est pas là pour vous dire aujourd'hui quels sont les seuils acceptables, c'est hors de notre domaine de compétence. On est là pour vous dire qu'il y a un sérieux problème en région, qu'il y a des tensions incroyables dans les communautés rurales et qu'il serait peut-être temps de porter une oreille plus attentive à ces revendications-là.

Ce gouvernement a fait preuve de beaucoup de sagesse et d'intelligence lorsque, en matière de gestion des déchets solides, il se rendait compte que c'était sur le point d'exploser dans les régions. Il y avait des tensions incroyables; la Sûreté du Québec enquêtait sur des menaces de mort, et des histoires comme ça. On savait que la gestion des déchets solides au Québec, c'était problématique, qu'on ne rencontrerait pas les enjeux qu'on s'était fixés en 1989. Qu'est-ce que le gouvernement a fait? Il a imposé un moratoire et il a dit: Là, on va se calmer, on va respirer par le nez et on va discuter ensemble. On va faire un bilan de la situation de la gestion des déchets, on va tenir une audience publique qui va durer un an. On va faire le tour du Québec et le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement va faire des recommandations au gouvernement là-dessus. Ces recommandations ont été déposées au mois de février et votre collègue de l'Environnement y travaille actuellement. Je pense que ce gouvernement va certainement accoucher d'une solution acceptable pour tout le monde d'ici à la fin de l'année, en matière de gestion de déchets.

Ça, ça a permis de dégonfler des ballounes, de permettre aux gens de penser rationnellement aux problèmes, de regarder les impacts économiques, sociaux, de santé publique et d'environnement que pose la question de la gestion des déchets. Bien, le dossier de la production porcine est similaire à celui de la gestion des déchets. Ce sont des enjeux criants et urgents. On a juste à regarder la situation de la production porcine au Québec: de 1991 à 1995, la croissance de la production porcine était de 45 %. Nos partenaires commerciaux étrangers ont doublé: on est passé de 22 pays importateurs de porc québécois à plus de 44. Il y a un marché à développer, il y a une place à occuper, et les gens ici sont anxieux de l'occuper, on les comprend. Mais il ne faudrait pas que l'explosion de l'industrie agricole québécoise sur les marchés internationaux se fasse au détriment de la santé publique, de la protection de l'environnement, de la pérennité du sol et des ressources qui sont utilisés par les agriculteurs pour nourrir le Québec.

On invite la commission parlementaire et le gouvernement ainsi que le ministre de l'Environnement à ordonner la tenue d'une audience générique sur la gestion des déchets. On n'est pas les seuls à le faire, plusieurs groupes environnementaux l'ont fait. Même des académiques l'ont fait. Le professeur Michel Morissette, directeur du Groupe de recherche en économie et politiques agricoles, lors d'une conférence qu'il donnait l'été dernier à la Fédération des producteurs de porc, leur disait: Écoutez, il y a un problème. Il posait la question comme ceci, et moi, je l'élargirais peut-être: Est-ce le rôle de l'État de subventionner la pollution porcine ou le jambon que mangent les Japonais? Je ne vous apporte pas la réponse aujourd'hui, mais je dis: Posons-la aux citoyens et qu'on réponde de façon sensée à cette question-là. M. Morissette a dit: Il faudrait que les producteurs se prennent en main et qu'ils établissent eux-mêmes leur bilan. Il y a quelque chose qui est commencé à ce niveau-là, mais il faut que l'information soit crédible, qu'elle soit vérifiable.

Quant aux orientations, on les a regardées et on en est venus à deux conclusions principales. C'est que ces orientations-là ne tranchent pas et ne régleront pas le problème de la question plus restreinte des bruit, odeurs et poussières.

En matière de poussières et de bruit, c'est vite tranché, on regarde et le document ne nous apprend pas grand-chose. On nous dit: On va faire quelque chose éventuellement, vous le saurez à ce moment-là. Alors, j'ai peu de commentaires à vous faire là-dessus. En ce qui concerne les odeurs, le problème que l'on retrouve est de deux ordres. Premièrement, comment est-ce qu'on va déterminer la distance pour rendre les odeurs acceptables, afin que ce soit intégré dans les règlements municipaux avec une formule qui tient compte de plusieurs paramètres? Notamment, par exemple, le nombre d'animaux, la façon dont ils sont alimentés, le type de gestion qu'on fait de leur fumier, la structure du bâtiment, les équipements qui peuvent être utilisés pour diminuer les impacts au niveau des odeurs, etc., toutes ces informations-là sont, en général, contenues dans le certificat d'autorisation du producteur. C'est déjà bien, sauf que le problème, c'est que, suite à plusieurs décisions de la Cour du Québec et de la Commission d'accès à l'information, les informations de caractère technique qui sont détenues dans le certificat d'autorisation sont confidentielles. Alors, comment le commun des justiciables peut-il déterminer si son voisin est conforme, s'il n'a même pas le droit de savoir les paramètres qu'on a utilisés pour déterminer la distance?

Un deuxième problème que l'on retrouve – et c'est chronique au ministère de l'Environnement, le Centre en a fait une démonstration avec 17 autres groupes environnementaux aujourd'hui – on a de la misère à faire respecter notre réglementation en environnement en général, en agriculture plus particulièrement, puis, dans le dossier porcin, c'est flagrant. Ce que l'on a constaté, c'est que, si le ministère avec les ressources dont il disposait n'était pas capable de la faire respecter, comment les municipalités qui disposent de moins de ressources, qui ne disposent pas de l'expertise requise, vont-elles s'assurer que les activités sont conformes aux normes réglementaires qu'on les a forcées à adopter pour se rendre conformes aux orientations gouvernementales et à la Loi sur la protection du territoire agricole? On va avoir un problème d'application encore plus aigu.

En droit municipal, plusieurs règlements sont contestés parce qu'on les dit vagues, imprécis. Parce que, aux yeux du tribunal, il est difficile pour le justiciable, lorsqu'il regarde le règlement, de savoir là où est la limite qu'il lui est fixée. L'intégration de cette formule-là en réglementation municipale pour déterminer les distances rend pratiquement incompréhensible pour le justiciable moyen la façon dont on procède pour établir les droits de chacun quant à l'usage de son terrain pour des fins d'exploitation agricole. Ce n'est pas une invitation que je fais, mais moi, ma crainte, lorsque j'ai vu cette formule-là... Puis je comprends le besoin d'avoir une formule réglementaire qui soit flexible, qui soit adaptable aux besoins de la communauté agricole en zone agricole. Je comprends tout ça. Mais il reste qu'il est possible que quelqu'un conteste la validité, la constitutionnalité de ces règlements municipaux, sous prétexte qu'ils sont vagues et imprécis.

Évidemment, l'idéal, ce serait d'avoir des normes qui seraient égales d'une ville à l'autre. Pour ça, il faudrait que vous, messieurs, mesdames, tranchiez, que vous disiez: La norme, c'est ça. C'est peut-être difficile, mais je pense qu'il va falloir le faire.

Regardons maintenant les impacts au point de vue... Ça, c'est simplement au niveau de la dynamique de l'administration de la loi. Mais regardons les impacts au niveau des justiciables. Vous êtes un producteur de porc. Vous devez respecter certaines distances qui ont été imposées par le gouvernement à la municipalité. La municipalité bénéficie d'une certaine marge de manoeuvre en autant que le comité consultatif agricole soit d'accord, mais il reste qu'il va y avoir une disparité d'une région à l'autre au niveau des normes. Il reste donc qu'il va y avoir des avantages compétitifs pour certains et surtout des désavantages compétitifs pour d'autres. Je ne suis pas convaincu, mais c'est à l'avantage des producteurs de porc que les normes ne soient pas uniformes à l'étendue du Québec.

Le mandat du comité consultatif agricole, qui va avoir un rôle important à jouer en conseillant les municipalités sur les distances acceptables en matière d'odeurs, il double: premièrement, s'assurer qu'on ne crée pas d'entraves inutiles au développement des exploitations agricoles, ce qui est correct, mais c'est également de conseiller la municipalité relativement aux impacts environnementaux. Malheureusement, il n'y a rien, dans le projet de loi n° 23, qui garantit que sur ces comités vont siéger des experts en environnement. La seule garantie qu'on a, c'est que 50 % des membres du Comité vont avoir été choisis parmi des membres en règle de l'UPA.

Pour nous, juristes et personnes intéressées par la question de la protection de l'environnement, c'est un petit peu chatouilleux qu'un groupe de pression se voie consacré, comme ça, comme conseiller d'une municipalité sans qu'il y ait un contrepoids établi par la réglementation.

Alors, c'est en gros le message qu'on avait à vous livrer aujourd'hui.

(15 h 30)

La Présidente (Mme Vermette): Alors, je vous remercie, M. Corriveau. Je laisse maintenant la parole au ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

M. Julien: Alors, Me Corriveau, il me fait plaisir de vous voir cet après-midi. Avant de questionner un petit peu sur ce dont vous venez de parler, j'aimerais peut-être vous ajouter quelques chiffres pour vous démontrer l'évolution de l'industrie porcine.

M. Corriveau (Yves): Oui. Ce sont des chiffres que je...

M. Julien: Mais je vais vous les donner, ça va me faire plaisir. Statistique Canada.

M. Corriveau (Yves): D'accord.

Une voix: Canada?

M. Julien: Oui, oui, Canada. C'est bon, ça?

Une voix: C'est bon.

M. Julien: Au Québec, en 1984, 4 760; en 1996, 5 000...

M. Corriveau (Yves): On parle de quoi, là?

M. Julien: ...6,6 % d'augmentation. Dans les Prairies... Bien, c'est ce que j'ai dans les chiffres de Statistique Canada. Dans les Prairies, 36 % d'augmentation. Alors, quand on dit qu'au Québec il y a une croissance exagérée...

M. Corriveau (Yves): Je n'ai pas dit ça, M. le ministre.

M. Julien: Non, non. Si vous me permettez, je vais terminer.

M. Corriveau (Yves): Je vous en prie.

M. Julien: Je vous dirais que c'est une croissance même pas normale, compte tenu, puis vous l'avez bien expliqué, de toute la question des marchés et autres.

Il y a un autre petit élément que je veux vous apporter. Hier, nous avons eu une excellente discussion, entre autres, avec Dr Gosselin. Dans son tableau – vous avez des tableaux; je pourrais vous donner des copies – on a: Évolution de la charge d'odeurs reliées à l'élevage agricole au Québec. Puis, si vous prenez la ligne Porcine, elle est ici, puis regardez ce qu'elle fait, elle est en train de diminuer, elle s'en va à une croissance en diminution. Ça, ce n'est pas des chiffres qui viennent de mon ministère, en passant.

Alors, moi, je pense qu'il faut essayer aussi de cadrer dans sa juste réalité. Parce que, vous savez, des propos, depuis un an, j'en ai entendu beaucoup que je considérais peut-être un peu, même pas mal alarmants.

D'autres éléments que je voudrais porter à votre attention, puis j'aimerais ça avoir votre réflexion là-dessus. Par exemple, vous me parlez beaucoup de réglementation. Tout est basé sur des normes, des règlements, des paramètres, la loi, le gouvernement, le monde municipal. Vous ramenez ça beaucoup à ce concept-là. Mais, quand on parle de responsabilisation puis d'imputabilité dans le milieu, ça, vous ne l'abordez pas beaucoup. Puis je vais vous donner des cas que j'aimerais que vous me commentiez.

M. Corriveau (Yves): Ça va me faire plaisir.

M. Julien: La Fédération des producteurs de porc s'est dotée de son propre plan d'agroenvironnemental. Le président est ici; je suis sûr qu'il va me dire puis qu'il va vous dire que ça n'a pas dû se faire tout seul. Il a dû y en avoir, des négociations, pour arriver à quelque chose qui fait que les producteurs ont décidé de s'autoresponsabiliser. Dans le bovin, c'est la même chose.

Vous avez parlé des comités agricoles, c'est la même chose. Et, soit dit en passant, oui, il y a 50 %, parce qu'il ne faut pas oublier que ça se situe dans le cas du droit de produire, donc du monde agricole. Il y a 50 % qui est nommé par le monde municipal. Le monde municipal, qui il peut nommer, c'est son choix. Ça peut être des gens de l'environnement. Ça peut être des conseillers municipaux. Il pourrait même nommer un agriculteur, s'il voulait. Ça, c'est son choix. La latitude est là. La loi n° 23, il faut se rappeler c'est quoi, la fin de la loi n° 23.

Ça fait que, moi, j'aimerais avoir un petit peu vos commentaires lorsqu'on parle de responsabilisation. Parce que l'État – je termine là-dessus – a toujours été le papa qui réglait tous les dossiers, et ce n'est plus ça. Aujourd'hui, on fonctionne beaucoup plus comme étant accompagnateur puis en termes de responsabilisation. J'aimerais avoir vos commentaires là-dessus.

M. Corriveau (Yves): Votre collègue de l'Environnement partage ce point de vue là. M. Bouchard, qui est un ancien ministre de l'Environnement fédéral, a également ce point de vue là. Moi, je vais vous dire, évidemment, il y a toujours des limites aux comparaisons. Je sais que les agriculteurs sont fiers de leur métier. Je sais qu'ils sont fiers de ce qu'ils font. Il y a une identité au patrimoine agricole qui est importante. Mais c'est aussi des hommes d'affaires de plus en plus, puis ils pensent en termes d'affaires. Ils voient un marché, ils veulent l'exploiter. C'est normal puis il n'y a pas personne qui va le leur reprocher. À ceci, ils s'approchent un petit peu des autres entrepreneurs québécois. Ils se rapprochent aussi des autres entrepreneurs canadiens. Ils ne sont pas différents, ils sont là pour prendre des décisions d'affaires.

Il y a une firme d'experts-comptables canadiens, une des plus grandes firmes d'experts-comptables canadiens, qui a fait une étude, en 1996, qui suivait une autre de 1994 et qui la confirme, où on a examiné, au plan de la gestion environnementale, quelles sont les préoccupations des administrateurs, des dirigeants des 1 000 entreprises canadiennes les plus prospères. On avait une grille de critères. Vous aviez là-dedans, par exemple, ce que les consommateurs demandent, ce que les employés demandent, ce que les institutions prêteuses demandent, ce que l'assureur demande, ce que les groupes environnementaux demandent. Les programmes à caractère volontaire, la responsabilité pénale des administrateurs et l'existence de normes réglementaires. Je vous dis les chiffres de mémoire, je pourrai vous les fournir. Pour 96 % des dirigeants d'entreprises, des gens d'affaires, ce qui avait motivé leur investissement en matière de protection de l'environnement, c'est l'existence de normes. Je suis content de vous dire ça parce que je n'oserai plus le répéter devant le ministre de l'Environnement, il doit être tanné de m'entendre avec ça.

Le deuxième facteur qui venait en importance, pour à peu près 76 %, c'était la possibilité qu'un administrateur soit condamné personnellement à une amende ou à une peine d'emprisonnement parce qu'on a contrevenu à une norme environnementale. Les programmes à caractère volontaire venaient sur le même pied que les groupes de protection de l'environnement, les groupes de pression en environnement: 16 %. C'est décevant pour nous, mais c'est aussi décevant pour vous.

L'approche volontaire, ça n'entre pas dans le cadre d'une décision d'affaires. Si vous me dites que c'est une question d'honneur, on pense que les cultivateurs sont ouverts et qu'ils tiennent à leur terre, qu'ils ne veulent pas endommager leur patrimoine pour que leurs enfants, leurs petits-enfants, etc. puissent continuer à l'exploiter, je vais vous suivre là-dessus. Mais il reste que, quand on parle de décisions d'affaires, la réglementation demeure l'incitatif numéro un et l'approche volontaire motive seulement 16 % des décideurs.

M. Julien: J'aimerais vous faire un commentaire, Me Corriveau.

M. Corriveau (Yves): Je vous en prie.

M. Julien: Je pense, au contraire, que c'est une question d'affaires, et je vais vous dire pourquoi. Parce qu'on parle de plus en plus de la mondialisation des affaires et, dans le cadre de la mondialisation des affaires, une des barrières tarifaires qu'on va avoir à rencontrer dans les prochaines années, ça va être quoi? La qualité de l'environnement. Les pâtes et papiers, qu'est-ce qu'ils ont été obligés de faire pour aller dans certains États américains? Ils ont été obligés de faire du papier recyclé et de l'intégrer dans leurs pâtes pour pouvoir entrer dans des États. Ça, c'est une décision d'affaires. Quand le maire est venu parler de 50 000 000 $, au Cap-de-la-Madeleine, pour faire cette usine-là, je vais vous dire une affaire, j'ai rarement vu un gars me parler d'un investissement en pleurant. Mais il n'avait pas le choix. Strictement business.

Ça, c'est la même chose. Et je vais aller plus loin que ça. Les chaînes d'alimentation aujourd'hui s'en vont avec les normes HACCP, contrôle de qualité. Les normes HACCP, c'est un peu comme la norme ISO. Ça veut dire qu'il y a tout un processus de contrôle, et ça va toucher aussi ces éléments-là. Que la réglementation soit forcée, c'est possible. Mais ce que je vous dis, c'est que ce qui s'en vient aujourd'hui, c'est beaucoup plus une question d'affaires. Puis, quand vous jaserez avec les entreprises, c'est de ça qu'elles vont vous parler. Parce qu'elles n'ont pas le choix et elles le savent. Même si vous aviez raison. je pense qu'on doit amener nos gens à se responsabiliser, et ils sont capables de le faire. S'ils sont capables de gérer des business d'une couple de millions, ils sont capables de se responsabiliser et ils se donnent les outils en conséquence.

M. Corriveau (Yves): Oui. Puis ça coûte moins cher à l'État par que l'État n'a pas à policer les gens. Ça, c'est la motivation gouvernementale numéro un: couper dans les dépenses, les inspections, les enquêtes, les contrôles. À ce compte-là, pourquoi est-ce qu'on n'enlève pas la SQ sur les routes du Québec? Les gens le savent que, s'ils conduisent trop vite, ils vont avoir un accident. Ils ont juste à se responsabiliser.

M. Julien: M. Corriveau, on a fait des changements dans la santé et ce n'était pas une question d'argent. C'était une question de technologie et d'adaptation. Je veux juste faire ce commentaire-là et j'aimerais ça que vous reveniez là-dessus un peu plus tard. Vous avez parlé tout à l'heure aussi des paramètres. Les paramètres d'odeurs, je comprends que vous ne les connaissiez pas, ils vont être dans les orientations gouvernementales une fois acceptés. Là, les municipalités, c'est le ministre des Affaires municipales qui verra à s'assurer de les transmettre aux MRC. Alors, c'est dans ce sens-là que je pense qu'il faut voir la question des paramètres au niveau des odeurs.

Je vais laisser mon collègue, mais je reviendrai un peu plus tard.

La Présidente (Mme Vermette): En vertu de l'alternance, je laisserai la parole au critique de l'opposition officielle, M. le député de Îles-de-la-Madeleine.

M. Farrah: Merci, Mme la Présidente. Bonjour, Me Corriveau.

M. Corriveau (Yves): Bonjour.

M. Farrah: C'est la première fois qu'on entend quelqu'un sur l'aspect légal. Évidemment, vous êtes avocat, ça fait que, forcément... Si je vous ai bien compris, le fait que l'application des règlements soit faite par les municipalités, ça peut faire en sorte que ce soit contestable. Donc, par conséquent, la réglementation pourrait plus ou moins s'appliquer. Est-ce que je vous ai bien compris?

(15 h 40)

M. Corriveau (Yves): Oui et non. Je pense que, si c'était un règlement provincial qui reposait sur la même formule, il serait également sujet à contestation parce que, en vertu de la Charte des droits et libertés, le justiciable a droit d'avoir à faire face à des normes qui sont prévisibles et compréhensibles pour lui. J'ai peur, moi, qu'une norme déterminée avec une formule qui est supportée par des paramètres, qui sont souvent des inconnus, à moins que ce ne soit le principal intéressé, soit déclarée invalide parce que floue et imprécise.

M. Farrah: Je ne veux pas tomber dans un débat légaliste, là, mais c'est bien évident que c'est fondamental, c'est bien important. Tu as bien beau avoir la meilleure réglementation du monde puis qu'elle fasse l'objet d'un consensus au niveau de l'ensemble des parties, mais si effectivement elle n'est pas blindée... C'est peut-être difficile qu'elle soit blindée à 100 %, mais... Parce que c'est notre travail aussi de faire en sorte de nous assurer que, lorsque la réglementation est connue, elle soit le plus blindée possible pour qu'elle puisse s'appliquer de façon adéquate.

M. Corriveau (Yves): Au lieu d'introduire une formule avec des paramètres comme ça, on pourrait peut-être procéder selon une grille de distances en fonction des technologies qui sont utilisées, avec à peu près les mêmes facteurs, si vous voulez, mais où on déterminerait à l'avance puis de façon fixe pour tout le monde, peu importe le nombre de personnes qui avoisinent. Ça, c'est le facteur qui, à mon avis, est le plus flou. Je ne me rappelle pas comment on appelle ce...

Une voix: Le facteur d'usage.

M. Corriveau (Yves): Le facteur d'usage. Ça, ça me semble très problématique.

M. Farrah: L'autre élément que je voulais aborder aussi, Me Corriveau, c'est que, dans votre intervention, vous avez noté qu'en fin de compte la société n'était peut-être pas prête encore, que le débat devrait peut-être se poursuivre, ou ça semblait peut-être improvisé un peu. Alors, pour faire en sorte de s'assurer que ce soit bien compris, peut-être qu'il faudrait prendre davantage de temps. De l'autre côté, on a un gouvernement qui a promis, lors de la dernière élection, le droit de produire. Quatre ministres sont allés au congrès de l'UPA 1994. Donc, ça devait être en juin 1995. Nous sommes rendus un an et demi plus tard et il n'y a rien de fait encore. Alors, dans toute cette conjoncture-là, comment interprétez-vous cette dynamique-là et comment votre opinion là-dessus, ou votre suggestion, va faire en sorte de s'assurer que ça va régler le problème ou, du moins, l'améliorer de façon sensible?

M. Corriveau (Yves): Il faut comprendre que les décisions que l'on prend maintenant, les gens vont devoir vivre avec pour peut-être les 10, 20 prochaines années. Moi, si j'étais producteur de porc puis je voulais doubler ma production... Je passais, tantôt, puis j'entends quelqu'un dire: Ah! je vais m'associer avec mon gars puis on va doubler notre production. C'est bon, excellent. C'est un mode de production qui est probablement plus facile à gérer, moins contraignant pour le cultivateur qu'une ferme laitière. Mais il reste que ça, ça va avoir des impacts à long terme puis que les investissements qui sont nécessaires, lorsqu'on va les avoir déterminés comme ça, sans qu'il y ait eu de consensus social là-dessus, quand ça va exploser, quand on va se rendre compte qu'on a un problème qui n'est pas gérable, qu'est-ce qu'on va faire? On va revenir voir les gens pour leur dire: Bien, là il va falloir que vous installiez tel et tel équipement, ou: Là, vous ne pouvez plus étendre sur plus que telle surface parce qu'on ne le savait pas à l'époque, là, mais les impacts environnementaux ou les impacts de santé sont trop importants.

Je pense que les décisions qu'on prend au niveau du développement de l'agriculture québécoise doivent être prises à long terme. Il faut envisager 10, 15, 20 prochaines années, de manière à ne pas demander aux exploitants, chaque fois qu'on découvre une petite catastrophe, des choses qu'on n'avait pas prévues parce qu'on n'avait pas pris le temps de le regarder, des investissements nouveaux. C'est une question de sécurité pour les justiciables, une question de développement durable aussi.

M. Farrah: Donc, à votre point de vue, on n'a pas suffisamment d'information, il n'y a pas un consensus assez large ou il n'y a pas...

M. Corriveau (Yves): Ça, le consensus, c'est clair qu'il n'y en a pas. C'est clair. Je vous invite à participer, peut-être, à des réunions de conseils municipaux. Vous allez voir comme c'est tendu, c'est incroyable! Et, malheureusement, l'attitude du gouvernement, lorsqu'on est revenus sur le consensus qu'il y avait à la table de concertation sur l'agriculture, lorsque, sur le projet de loi n° 23, on a décidé de n'entendre personne, sauf les représentations en coulisse de l'UPA, ça a aiguisé davantage, ça a polarisé davantage les confrontations, puis j'ai peur que ça mène à des choses qui soient dommage.

M. Farrah: Donc, vous confirmez que l'attitude gouvernementale a fait en sorte d'antagoniser les parties.

M. Corriveau (Yves): Bien, je pense que ça a jeté de l'huile sur le feu. Puis le baume à apporter, ce serait une audience générique.

M. Farrah: Je vous remercie.

La Présidente (Mme Vermette): M. le député de Saint-Hyacinthe, s'il vous plaît.

M. Dion: Oui, Mme la Présidente. Je vous remercie d'être ici pour venir stimuler notre sensibilité aux problèmes de la production du porc et des odeurs et des conflits sociaux qui en résultent. C'est très gentil de votre part. Bien que vivant avec les producteurs agricoles de façon régulière, je suis toujours très disposé à être encore plus sensible, si c'est possible. Je ne voudrais tout de même pas attraper la chair de poule, quand même, parce qu'il faut que la vie continue. Quant à reconnaître qu'il y a un problème, vous nous avez certainement aidés à le reconnaître, peut-être pas parce que ça n'existait pas, mais enfin de se le faire redire, ce n'est jamais un abus parce que le problème est vraiment grave. Vous avez raison.

Je pense que les abus de langage et les arguties oratoires auxquels on assiste parfois n'aident pas toujours à régler le problème. Parfois, ils jettent plus d'huile sur le feu qu'ils n'aident à le résoudre. Le gouvernement a pris une position de développer une approche de concertation parce qu'il y a deux intérêts indispensables en jeu: il y a celui de vivre et de manger. C'est important, ça. Et l'économie agricole, c'est 10 % de notre produit intérieur brut. Donc, ça, c'est important. Il y a aussi celui de protéger le milieu de l'environnement, notre santé, mais aussi une certaine joie de vivre. Donc, toute la question des inconvénients. Donc, c'est important. Et il y a un conflit social potentiel et, à certains endroits, ça éclate. Vous avez raison. Mais il y a une chose que j'ai trouvée un peu exceptionnelle dans votre présentation et j'aimerais que vous m'expliquiez ça. Vous, vous êtes un avocat. Vous savez un tas de choses que je ne sais pas.

M. Corriveau (Yves): C'est vrai aussi.

M. Dion: Oui, probablement. On a pensé à une mécanique qui ferait en sorte qu'étant donné qu'on reconnaît que les municipalités, comme administrations locales, ont un rôle important à jouer pour gérer les problèmes locaux, donc, elles puissent intervenir. Ç'a été admis dans la loi qu'elles puissent intervenir pour décider, d'une certaine façon, des conditions de pratique d'une profession qu'est l'agriculture. Pour améliorer les chances que cette décision-là se fasse sur une base de concertation, on a mis un conseil consultatif. Ce conseil consultatif doit conseiller la municipalité sur les conditions de pratique de l'agriculture. Les producteurs agricoles ont accepté que seulement la moitié des membres du comité consultatif soient des représentants de la pratique agricole. Moi, j'ai trouvé ça extraordinaire comme effort pour vouloir arriver à une entente raisonnable. Et, vous, vous dites: Ça n'a pas de bon sens qu'il y en ait la moitié sur le conseil. Ils n'ont qu'un pouvoir consultatif dans ce qui est le plus important pour eux: la rentabilité de leur profession. Vous dites: C'est bien trop. Est-ce qu'il y a une autre profession qui a de telles contraintes pour se pratiquer au Québec? Pouvez-vous m'en nommer une seule autre? Ça nous aiderait et ça aiderait les producteurs à dire: Bien, c'est vrai, on n'a pas fait trop de sacrifices. On est corrects.

M. Corriveau (Yves): Ce que j'essaie de vous dire, ce n'est pas que la discussion de l'aménagement du territoire et des conflits entre les usages ne doit pas se passer au niveau municipal. Je pense que c'est là que ça doit se passer. Mais je pense qu'il faut qu'il y ait un certain équilibre au niveau de la représentation des intérêts. Vous pouvez vous ramasser dans une municipalité qui a seulement 25 % de son territoire qui est utilisé pour des fins agricoles et sur le conseil, sur le comité qui est capable de faire des représentations sur les problèmes des bruit, odeurs, poussières qui vont affecter les trois quarts de la municipalité, bien, vous avez au moins 50 % qui sont des agriculteurs. Moi, je pense qu'il y a un problème. Il y a aussi le fait que c'est inédit. Donnez-moi un exemple où, au niveau d'un comité consultatif municipal, le législateur a dit: Tel groupe de pression a un statut privilégié. La loi prévoit leur représentation.

Si la municipalité a besoin d'avoir 100 % d'agriculteurs sur son comité consultatif, qu'elle nomme 100 % d'agriculteurs, je n'ai pas de problème avec ça. Mais laissez-lui le choix de le faire et laissez-lui le choix de décider qui elle veut. Il n'y a pas que les agriculteurs. Il y a des agronomes qui auraient des choses intéressantes à dire là-dessus. Il n'y a rien qui nous garantit qu'il va y avoir un représentant.

(15 h 50)

Évidemment, ce n'est qu'un rôle consultatif, mais, entre vous et moi, une municipalité est mal venue de ne pas suivre les conseils donnés par un organe créé par la loi et expert en la matière. Le problème avec les comités consultatifs, je l'ai souligné, c'est que le mandat est double: il est agricole puis il est environnemental.

Ce que je demande, c'est que si on pourvoit qu'un intérêt soit là, par voie statutaire, il faut prévoir que d'autres intérêts puissent aussi être représentés. Le comité ne va pas juste donner des conseils sur l'agriculture, il va en donner sur l'environnement également.

M. Dion: Alors, juste un petit...

La Présidente (Mme Vermette): Très brièvement, parce que je voudrais aussi laisser la parole au ministre de l'Environnement et de la Faune.

M. Dion: O.K. Alors, j'en conclus que la réponse, c'est non, vous n'avez pas d'autres exemples pour d'autres professions qui ont de pareilles contraintes. Je vous remercie.

M. Corriveau (Yves): Je n'ai pas d'exemples d'autres professions qui ont de pareils avantages non plus.

La Présidente (Mme Vermette): Alors, en vertu de l'alternance, M. le député d'Orford.

M. Benoit: Oui. Me Corriveau, deux questions. La première, vous avez dit que le bon gouvernement qui avait été là en 1989, dans le secteur des déchets, avait pris ses responsabilités, avait mis...

Une voix: ...

M. Benoit: C'est ce qu'il a dit.

M. Corriveau (Yves): Je ne voulais pas vous chatouiller, là, mais c'est ce que j'ai dit.

M. Benoit: Il a peut-être oublié le mot «bon» gouvernement, mais...

Une voix: ...

M. Benoit: Il a dit: Le gouvernement en place en 1989 a mis un moratoire dans le secteur des déchets.

M. Corriveau (Yves): Ce n'est pas tout à fait vrai. C'est le gouvernement actuel qui l'a mis, en 1994 ou en 1995. Continuons. Mais le bon gouvernement de 1989 avait aussi établi une politique de gestion des déchets.

M. Benoit: Non, non. On ne s'obstinera pas, là. La loi 101 a été votée par le Parti libéral et c'est la loi 101 qui a fait le moratoire dans le secteur des sites de déchets. Et ça, vous vérifierez vos informations après.

M. Corriveau (Yves): D'accord.

M. Benoit: De là, il y a eu effectivement la consultation. Ce que vous dites, c'est: Le moratoire, ça a été une bonne chose dans le secteur des déchets et, après ça, on est allé avec une générique. Ça a été une bonne chose, et on y a collaboré. On pense qu'effectivement, dans le secteur des déchets, on va arriver à un consensus québécois. Et tout le monde y a participé: des centaines de mémoires, un rapport qui a 800 pages avec les annexes.

On voit là qu'il y a eu vraiment une volonté de trouver une solution très large. Moi, je pensais que c'était l'approche à prendre dans la production porcine, au début. Après ça, je me suis dit: La différence entre le secteur des déchets et la production porcine, c'est que, dans le cas de la production porcine, en ce moment il y a énormément de croissance dans un secteur de l'économie où on a besoin de jobs. Et puis, en allant vers une générique, est-ce qu'on ne va pas tout arrêter cette histoire-là, où on crée des jobs – on en crée en tout cas dans mon comté – pour les jeunes particulièrement, c'est une nouvelle relève agricole qui va là-dedans?

Alors, j'ai un peu ralenti sur l'idée de la générique. Mais plus on avance, plus je me dis: Finalement, la solution, c'était peut-être un moratoire puis une générique.

J'aimerais vous entendre deux minutes là-dessus, parce que j'ai une autre question ensuite dont je veux vous parler.

M. Corriveau (Yves): La question de l'impact économique d'un moratoire versus les gains que ça va apporter une fois qu'on aura pris de bonnes décisions, ça prendrait un économiste branché sur le bon Dieu pour vous donner la réponse. Je n'en ai pas, de réponse. Puis je ne pense pas qu'on puisse demander au Centre québécois du droit de l'environnement de donner cette réponse-là. Je ne pense pas que l'UPA l'ait non plus.

M. Benoit: Vous avez parlé, dans votre présentation – et le ministre de l'Agriculture, bien sûr, en a parlé aussi – du plan agronomique où chacun des agriculteurs va devoir suivre un cours et ensuite appliquer un plan, sur ses terres, de la façon dont il étendra ses purins et ses engrais. Ça, c'est ce qui est proposé et c'est dans le projet.

Les agronomes viennent nous voir, les agronomes nous écrivent – et ce n'est pas d'aujourd'hui – et ils nous disent: Écoutez, nous, on est des gradués universitaires, on a étudié là-dedans, c'est notre formation, on est connectés sur le milieu, on connaît ça. Pourquoi ce ne serait pas nous qui ferions ça?

Bon, première réaction, il y a un petit côté mercantiliste à tout ça, on comprend ça aussi, mais il y a quelque chose là-dedans. La question que je vous pose, c'est: Entre les plans que le ministre nous propose et le discours des agronomes, qui a raison dans ces deux discours-là?

M. Corriveau (Yves): Je ne mettrai pas ma tête sur le billot, mais je vais vous donner les éléments de réflexion suivants. L'approche volontaire, à mon avis, on n'est pas prêt, pas plus dans le domaine de l'agriculture, que dans le domaine industriel, que dans la sécurité routière, ou même que dans la fiscalité.

En ce qui concerne l'avantage, si vous voulez, de faire affaire avec un agronome, c'est qu'il a une responsabilité professionnelle et il y a un contrôle à la fois de la probité du professionnel, d'une part, et de sa compétence qui est faite par la Corporation. Ça, c'est les avantages que j'y vois. Les inconvénients, c'est que ça coûte des sous. Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu, par exemple, d'établir des plans qui seraient certifiés par un agronome? Un processus de certification, ça pourrait être le cas.

Une chose est certaine – et je vais revenir brièvement sur quelque chose qui a été soulevé tout à l'heure – c'est que la certification des produits agricoles québécois n'est pas une garantie de la protection de l'environnement, pas plus que ISO 9002 et ISO 14000 ne sont des garanties que l'environnement est protégé. Ce sont des mécanismes qui permettent d'établir un seuil maximum, un plafond, pour les procédés qui sont utilisés. On peut ne pas respecter les lois environnementales et être certifié ISO.

Par ailleurs, la mondialisation des marchés. L'Accord de libre-échange nord-américain, l'ALENA, l'accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis, le GATT, toutes ces instances-là respectent un principe développé par les tribunaux de commerce internationaux à l'effet que les normes environnementales doivent être le moins contraignantes possible pour survivre à l'interdiction de poser des entraves au libre-échange, d'une part.

D'autre part, ces normes-là ne peuvent viser que la qualité du produit et non pas le mode de production. Alors, ce qu'on va se demander aux États-Unis, sur le porc québécois, c'est: Est-ce qu'il rencontre nos normes au niveau de la santé? Au niveau du «Food Act»? O.K. Mais on ne se demandera pas: Est-ce que le porc québécois, quand on l'a produit, on a pollué les terres québécoises? Ça, c'est une juridiction nationale qu'il faut que vous assumiez. Les Américains n'ont rien à voir là-dedans. On ne peut pas, ici, au Québec, reprocher au Mexique l'existence des «maquiladoras», la pollution, l'exploitation des travailleurs.

On peut dire: Vos produits ne rencontrent pas nos normes de distribution. Mais on ne peut pas leur imposer nos normes environnementales. On ne peut pas leur imposer l'obligation de faire respecter leurs normes environnementales. On essaie de le faire, parce qu'il y a un mécanisme de prévu pour ça. Mais, réalistement, si l'État ne vote pas les budgets pour ou s'il y a une tradition culturelle qui fait qu'on est plus «lax» sur l'application des lois, entre vous et moi, on peut difficilement s'ingérer dans les affaires d'un État au point de le forcer à contrôler la sécurité de la fabrication des produits.

M. Benoit: Très bien. Merci, Me Corriveau.

La Présidente (Mme Vermette): Oui...

M. Julien: Bien, peut-être juste un petit commentaire. Je veux corriger ça tout de suite parce que là, quand on regarde les principaux critères, Maître, dont on tient compte dans les accords de commerce intérieur, ou à l'ALENA, ou dans le dossier de l'office de mondialisation de la commercialisation, on tient compte de l'environnement, de la salubrité et de la qualité. C'est des critères de base sur lesquels on se base. Ce n'est plus une question d'argent. Je veux juste mettre un bémol. Je m'excuse de vous avoir interrompu.

La Présidente (Mme Vermette): Oui. Alors, M. le ministre de l'Environnement et de la Faune.

M. Cliche: Quelques commentaires et deux questions fondamentales. D'abord, reprendre l'affaire de l'ALENA. Vous affirmez des choses qui m'étonnent, compte tenu de la connaissance que vous avez de ces dossiers-là. Les critères de l'environnement, dans le libre-échange, sont pris en compte. La preuve, c'est qu'il y a une commission au niveau de la coopération de l'environnement. C'est une des deux commissions qui ont été mises en place spécifiquement pour s'assurer que le libre-échange ne se fasse pas au détriment de l'environnement.

Tous les environnementalistes disaient que ça allait être le nivellement par le bas. Or, ce qui se passe en ce moment, c'est que le Mexique est en train de faire des pas de géant en matière de protection de l'environnement et c'est un nivellement par le haut qu'il y a. Alors, c'est faux de dire que le libre-échange amène une réduction dans les critères environnementaux. Au contraire, c'est de plus en plus exigeant parce que c'est souvent l'État qui a le critère environnemental le plus élevé ou le niveau de performance le plus élevé qui exige des autres producteurs, dans des états voisins, de se monter, eux aussi, à un niveau égal.

Alors, votre analyse, à mon point de vue, là-dessus, est erronée. Excusez-moi de vous dire ça sur des choses aussi...

M. Corriveau (Yves): Je vous en prie, M. le ministre. Je peux répondre à ça?

M. Cliche: Oui, mais, écoutez, je vais continuer. Et là il y a quelque chose qui m'inquiète, dans ce propos-là. D'une part, vous dites que l'ALENA et l'environnement amènent un nivellement par le bas, mais là je viens de prendre connaissance d'une communication que vous venez de faire à la Commission sur l'environnement de l'ALENA, où vous demandez à la Commission sur l'environnement de l'ALENA de faire enquête sur le fait que le Québec ne respecterait pas ses lois et ses règlements en matière de pollution agricole.

(16 heures)

Et là ça me pose deux problèmes. D'abord, une question: Pourquoi n'avez-vous pas fait une telle revendication devant nos tribunaux locaux, nationaux? Vous savez très bien que vous avez toutes sortes de disponibilités, notamment en vertu de l'article 20 de la LQE, de la Loi sur la qualité de l'environnement, qui est une véritable charte. Deuxièmement, s'il y a des gens, des citoyens qui pensent que leur santé est mise en jeu et que les règlements ne sont pas respectés, qu'ils se fassent entendre devant les tribunaux locaux.

Donc, question: Pourquoi n'avez-vous pas fait ça? Et, deuxième question: Est-ce que vous êtes conscient, au moment où on est en train de mettre en place une nouvelle réglementation sur la réduction de la pollution agricole, une réglementation qui va porter sur l'encadrement des nuisances, que vous prenez le risque d'attirer l'attention internationale sur des problèmes qui, selon nous, n'existent pas? Est-ce que vous êtes conscients du jeu?

M. Corriveau (Yves): Je suis conscient que, selon vous, ces problèmes n'existent pas. J'en suis conscient que, selon vous, ces problèmes n'existent pas. Selon moi, le Vérificateur général, des groupes en matière de santé publique, des groupes environnementaux au Québec, plus de 17 groupes, le problème existe.

M. Cliche: Non, non, écoutez-moi bien.

M. Corriveau (Yves): Mais je vais vous répondre systématiquement, si vous le voulez bien. L'Accord de libre-échange nord-américain prévoit qu'il est possible pour des organismes non gouvernementaux de communiquer à la Commission le fait qu'un État refuse systématiquement d'appliquer ses normes. Est-ce que l'un ou l'autre des 17 plaignants avait les ressources financières nécessaires pour faire appliquer la réglementation que le ministère omet de faire appliquer? La réponse, c'est non. On était donc dans une situation d'impossibilité d'exercer quelque recours que ce soit pour faire respecter, nous mettre dans les souliers du ministère de l'Environnement.

Deuxièmement, je pense que ça serait un petit peu odieux de prétendre le contraire, de dire aux gens: Écoutez, si vous n'êtes pas contents, vous avez juste à faire la job du ministère puis ne pas vous plaindre à la Commission. Je pense que, rationnellement, là, c'est difficile à défendre. En ce qui concerne l'impact de ce que ces groupes ont fait, je pense que ce que ces groupes ont fait, c'est de dire: Écoutez, on a, plusieurs d'entre nous, l'Union québécoise pour la conservation de la nature, les groupes locaux à l'échelle locale, tenté de discuter avec le gouvernement, puis on a été écarté et on en est rendu où notre dernier recours, c'est la Commission de coopération en environnement. Puis, nous, au Québec, on n'est pas les seuls. On ne dit pas que c'est l'enfer ici et que c'est le paradis de l'autre bord de la frontière. Ce n'est pas le cas. Il y a des groupes américains qui veulent imiter notre démarche, ils le feront s'ils le jugent bon.

M. Cliche: En tout cas, je vous signale que ce que vous faites est dangereux. Je ne vous nie pas le droit d'aller à la commission environnementale de l'ALENA, ce que je vous dis, c'est que, nous, nous reconnaissons qu'il y a un problème à la fois au niveau de la pollution agricole au niveau de l'environnement physique et qu'il y a un problème au niveau de l'environnement social. Et c'est pour ça qu'on passe un règlement sur la réduction de la pollution agricole et c'est pour ça qu'on tient à une commission qui vise à encadrer. Donc, je trouve que c'est injuste pour ce qui se passe en ce moment dans la société québécoise de porter cette question-là sur la scène internationale et, moi, je trouve que vous ameutez pour rien l'opinion internationale à un problème qui existe, mais qu'on est en train de régler localement. Et, quand on joue dans ces jeux-là au niveau du commerce international et d'ameuter l'international par rapport au fait que nous n'appliquons pas nos règlements, c'est très grave. Alors, je veux juste que vous soyez conscients de ce que vous faites et je comprends que vous l'êtes. Alors, qui vivra verra. Deuxième chose.

La Présidente (Mme Vermette): Vous allez y aller rapidement parce que nous avons terminé sur le temps.

M. Cliche: Rapidement, oui. J'ai terminé, mais j'ai une question et là je m'adresse aux spécialistes en droit environnemental. Vous revenez encore une fois... Et je comprends que, pour les avocats, le fait qu'il y ait une réglementation qui, dans son application, puisse varier d'une région et d'une MRC à l'autre, c'est un crime de lèse-majesté.

M. Corriveau (Yves): Pas nécessairement.

M. Cliche: Ça fait deux fois que je vais devant le Barreau canadien et devant le Barreau québécois et que, là, je leur explique que notre nouvelle approche en matière de réglementation environnementale, c'est d'accepter qu'une réglementation soit modulée eu égard à la capacité d'absorption du milieu récepteur et qu'une réglementation eu égard à l'environnement social soit modulée en fonction de la capacité du milieu social et de son niveau de tolérance par rapport à des nuisances qui ne sont pas souvent des sources de pollution directement physiques. Et je sais que, pour les avocats, c'est un crime de lèse-majesté. J'aimerais comprendre pourquoi. Est-ce que c'est parce que c'est trop compliqué pour les avocats de s'informer, dans la MRC Robert-Cliche, c'est quoi, le réglementation applicable? Est-ce que, pour vous, c'est le mur-à-mur? Sans le mur-à-mur, vous allez mourir? J'aimerais comprendre c'est quoi, l'objection des avocats au fait qu'il y ait une réglementation qui puisse être différente dans la MRC de Laval par rapport à la MRC Robert-Cliche dans le même domaine d'intervention.

M. Corriveau (Yves): Le problème qu'on a, ce n'est pas que la réglementation soit adaptée aux besoins des régions ou à l'objectif de protection de l'environnement. On est tout à fait favorable à ça. Et c'est difficile pour moi de parler pour les juges de la Cour suprême, ou pour les juges de la Cour d'appel, ou pour l'ensemble de la communauté juridique, je vais vous donner le point de vue du Centre là-dessus. Ce que le Centre souhaite, c'est que la législation soit prévisible et facilement identifiable et par les personnes qui sont sujettes à cette réglementation-là et par les personnes qui sont victimes du non-respect de cette réglementation-là. Ça, c'est ma réponse à votre dernière question.

En ce qui concerne l'Accord de libre-échange nord-américain, je pense que, si les gens en sont rendus là, c'est parce qu'il y a un constat d'échec qui a été dressé sur les relations entre les groupes de protection de l'environnement, le bureau du premier ministre, qu'on avait demandé de rencontrer, le bureau du ministre de l'Agriculture et votre bureau, M. le ministre, sur le dossier de l'agriculture. Heureusement, ce n'est pas comme ça dans tous les dossiers, mais, sur le dossier de l'agriculture, il faut constater qu'on a demandé à plusieurs reprises – la question de l'audience générique, ce n'est pas nouveau – d'être consulté sur la question de l'élaboration des règlements pour la qualité des sols et la contamination des eaux, et, à brève échéance, je n'ai pas entendu écho à ces demandes-là.

M. Cliche: Je m'excuse, Mme la Présidente, mais je veux rectifier des faits. On a tenu une table de concertation pendant deux ans où vous étiez membre, M. Corriveau, sur la réduction de la pollution agricole. Deux ans de travail avec vous.

M. Corriveau (Yves): Erreur, M. le ministre, c'est l'Union québécoise pour la conservation de la nature qui était membre, d'une part, mais continuez.

M. Cliche: Dont vous êtes membre. Enfin, tous les groupes environnementaux, tous les groupes étaient là, premièrement. Deuxièmement, vous avez conclu certaines choses, et il y a d'autres choses sur lesquelles vous n'avez pas pu conclure. Vous avez dit: Là-dessus, on n'est pas capable d'établir des consensus et on demande au ministre de l'Environnement et de la Faune de trancher, ce que je fis. Après, je suis allé demander à vous rencontrer pour vous informer de mes décisions dans les choses que vous n'aviez pas pu décider et, au moment d'aller vous rencontrer à cette réunion, je suis arrivé et, comme j'avais discuté de l'application de ce règlement avec les principaux intéressés, les producteurs agricoles, vous avez grossièrement fermé votre valise au moment où j'allais vous informer des décisions que j'avais prises. Vous avez dit: Vous l'avez fait sans nous. Et vous étiez incapables de prendre ces décisions-là, je l'ai fait. Vous avez dit la même chose qu'hier. Ils se plaignent de la même chose. Vous avez fermé vos valises et vous avez refusé de m'entendre. Alors, ne venez pas vous plaindre aujourd'hui, le 9 avril 1997, en commission parlementaire, que mes portes sont fermées. Je vous rencontre comme pas un ministre de l'Environnement ne vous a jamais rencontré, ma porte est toujours ouverte, alors rappelons les faits tels qu'ils sont.

La Présidente (Mme Vermette): Est-ce que les correctifs sont apportés? C'est terminé, M. le ministre de l'Environnement et de la Faune?

M. Cliche: Oui.

La Présidente (Mme Vermette): Alors...

M. Farrah: Le débat peut se poursuivre. On est d'accord, nous.

La Présidente (Mme Vermette): Non, je pense qu'il y a d'autres intervenants et, comme on doit suivre notre horaire, je pense qu'on va terminer ici. Alors, je vous remercie, Me Corriveau, de votre présentation et, maintenant, je voudrais suspendre quelques...

(Suspension de la séance à 16 h 8)

(Reprise à 16 h 9)

La Présidente (Mme Vermette): Je demanderais au Groupe DEC de bien vouloir s'avancer en avant, s'il vous plaît. Bien. Alors, je demanderais aux deux formations politiques de bien vouloir trouver leurs sièges. S'il vous plaît, nous allons procéder.

Oui. Ah, c'est une cassette, oui. Alors, en attendant, est-ce que vous aimeriez bien vous identifier, s'il vous plaît?


Groupe DEC

M. Aubry (Pierre): Alors, bonjour tout le monde. Je veux d'abord remercier MM. les ministres et les responsables de cette commission de nous avoir invités, de nous avoir permis de venir nous exprimer sur un sujet qui nous tient à coeur, parce que la technologie dont on va vous parler, on l'a d'abord développée...

La Présidente (Mme Vermette): Je m'excuse, monsieur, avant d'aller un peu plus loin, pourriez-vous vous identifier, s'il vous plaît?

M. Aubry (Pierre): Oui, j'étais pour arriver à ça, mais je peux le faire tout de suite. Il n'y a pas de problèmes.

La Présidente (Mme Vermette): Bon. Parfait. C'était pour...

(16 h 10)

M. Aubry (Pierre): Oui. Alors, on est du Groupe DEC. Je m'appelle Pierre Aubry, je suis directeur du marketing, et, à ma gauche, c'est M. Philippe Varvat, qui est président du Groupe et qui est inventeur de la technologie dont on va parler un peu plus tard.

Alors, je disais que c'était une technologie qui nous tient à coeur parce qu'on l'a mise au point, d'abord, sur le fumier de porc, le purin de porc et, même si c'est une technologie qui peut traiter d'autres types de déchets organiques, on va surtout vous parler ici du purin de porc. Non pas qu'on pense que cette matière-là pollue plus que d'autres, mais c'est juste parce qu'on a d'abord un certificat d'autorisation du ministère de l'Environnement pour opérer avec cette matière-là et, donc, on va vous parler de cette matière-là surtout.

Ce qu'on va suivre comme processus, c'est qu'on va vous faire une présentation qui est en trois parties. La première partie va vous donner un petit peu d'historique de notre entreprise et va vous parler des intérêts que l'on a développés à date. La deuxième partie va expliquer la technologie, et, pour ce faire – on dit souvent qu'une image vaut mille mots – on a apporté un petit vidéo qui a servi à notre lancement de presse. Ce vidéo-là est d'une durée de quatre minutes. Alors, ça va vous donner, je pense, une très belle idée de ce à quoi ressemble la technologie. Et, finalement, on va aussi émettre nos commentaires quant à notre vision par rapport aux enjeux de cette commission-là.

Alors, je vais céder tout de suite la parole à Philippe qui va vous parler de l'historique de la compagnie. Il est avec cette compagnie-là depuis beaucoup plus longtemps que moi.

La Présidente (Mme Vermette): Alors, M. Varvat, on vous écoute.

M. Varvat (Philippe): Merci. Mesdames, messieurs, bonjour. Alors, pour vous parler du Groupe DEC, je vais commencer par vous dire que la mission principale de cette entreprise était de mettre au point un procédé de déshydratation thermique qui nous permettrait de valoriser certaines matières qui sont considérées comme des déchets aujourd'hui puis des matières à forte teneur en matières organiques pour être commercialisées par la suite soit vers les produits fertilisants, soit vers l'alimentation animale.

Donc, le Groupe DEC a créé, en 1993, un centre de recherche qui a fonctionné pendant quatre ans à la mise au point de ce procédé de déshydratation thermique. C'est une opération qui a coûté d'ailleurs plus de 2 000 000 $ et qui a été financée par des fonds privés exclusivement, et nous avons annoncé en conférence de presse, au mois de novembre, ici, à Montréal et à Toronto, donc, la mise au point et puis la mise sur le marché de ce procédé de traitement. Nous avons, parallèlement à ça, fait une demande au ministère de l'Environnement pour installer ici, au Québec, le premier centre de traitement et de valorisation des purins de porc. Comme vous le disait Pierre tout à l'heure, nous avons obtenu, d'ailleurs, cette autorisation, il y a quelques semaines, d'installer à Sainte-Brigide-d'Iberville, sur la rive sud de Montréal, le premier centre de traitement, donc, des purins de porc. Ce centre sera opérationnel dans quelques mois. Vous allez voir, tout à l'heure, sur la vidéo comment fonctionne ce procédé, et puis on parlera, si vous voulez, par la suite de son efficacité.

Donc, le Groupe, aujourd'hui, est structuré avec, en dehors de son équipe de direction, d'une quinzaine d'ingénieurs et de techniciens qui sont prêts à mettre en route ces centres de traitement, qui sont prêts à fabriquer ces machines et puis à les mettre en exploitation. On vous parlera surtout des matières agricoles, puisque c'est l'objet de notre présence ici, mais tout en sachant que ce procédé de déshydratation thermique, nous l'avons mis au point, toujours avec l'autorisation du ministère de l'Environnement, également sur le traitement des boues d'épuration et de toutes sortes d'autres matières.

Alors, je vais peut-être laisser Pierre vous parler un petit peu, très rapidement, du développement du Groupe. C'est important de savoir qu'aujourd'hui le Groupe DEC a mis au point cette machine. Elle est connue à la grandeur du Canada, mais dans toute l'Amérique du Nord et en Europe. Il y a beaucoup d'intérêt à l'utilisation de cette technologie outre-Atlantique et en Amérique du Nord, et je vais laisser Pierre vous en parler un peu plus en détail, mais très rapidement malgré tout.

M. Aubry (Pierre): Alors, juste pour vous donner une idée, au point de vue géographique, suite à nos deux lancements de presse, on a eu de l'intérêt de manifesté par le Québec, par l'Ontario, par le Manitoba et la Colombie-Britannique au niveau du Canada. Je ne les ai pas donnés nécessairement par ordre d'importance parce que, à date, je pense que l'intérêt majeur qui a été manifesté envers notre technologie vient du Manitoba, entre autres dans la production porcine. Je pense que leur volonté est de tripler la production porcine au cours des 10 prochaines années là-bas, alors donc, ils sont très intéressés par la technologie dont on va vous parler. Du côté international, on a eu aussi des intérêts des États-Unis, du Japon, de la Pologne, qui est un gros producteur porcin aussi, et de la France et de la Hollande, aussi, qui est un gros producteur.

Au niveau des applications, on a eu des demandes au niveau des applications possibles, entre autres au niveau des purins de porc, des fientes de volaille, des déchets d'abattoirs, de la drêche de bière, des pâtes et papiers, des boues d'épuration des villes et même des déchets domestiques enfouissables des villes.

Je vais aussi vous parler des niveaux d'intervention, de quelle façon on pense commercialiser notre technologie. Cette technologie-là, disons, on veut l'offrir de la façon dont les producteurs vont se sentir le plus à l'aise de l'utiliser, en ce sens que, oui, on est prêt à opérer des centres de traitement entièrement moyennant un forfait du producteur pour faire traiter les matières. On est aussi prêt à opérer ces centres de traitement là sur une base de partenariat avec certains producteurs, ou même des regroupements de producteurs, ou même des firmes qui pourraient être intéressées au produit fini. On peut aussi offrir tout simplement le système, les machines aux producteurs qui voudraient les opérer eux-mêmes ou aux regroupements de producteurs et on s'engage évidemment à faire le service après-vente, à ce moment-là, des systèmes.

Alors, on va passer, si vous le voulez bien, au visionnement du vidéo. Comme je vous l'ai dit, ça dure quatre minutes. C'est un peu technique, mais ça vous démontre quand même de quoi il en retourne. Alors, on pourra continuer avec nos commentaires par après.

(Présentation audiovisuelle)

M. Aubry (Pierre): Est-ce qu'on peut recommencer au début? C'est possible? Je vous remercie.

(Présentation audiovisuelle)

M. Varvat (Philippe): La machine, au départ, c'est une machine qui a été prévue assez compacte. Elle fait 30 pi de long par 8 pi de large et 8 pi de haut. Elle est assez compacte parce qu'on avait l'intention de la mettre sur un véhicule pour pouvoir l'amener directement sur les lieux de production. Par la suite, compte tenu des volumes à traiter, on a décidé de l'implanter dans les centres de traitement pour pouvoir amener la matière, les concentrations étant suffisamment élevées pour justifier l'implantation de centres allant de 10 à 20 machines.

La machine est un déshydrateur thermique qui permet de déshydrater, stériliser, désodoriser un certain nombre de matières, l'essentiel de ces matières étant qu'elles contiennent de l'eau pour pouvoir nous permettre de les traiter. Elle est équipée en ce moment pour traiter les purins de porc, mais elle pourrait tout aussi bien sécher les boues d'épuration, diverses autres matières d'origine agricole ou industrielle.

Cette machine est équipée de deux parties bien distinctes qui sont des échangeurs de chaleur: un premier échangeur qui est l'échangeur air-air sur lequel on a adapté un brûleur qui produit l'énergie et des ventilateurs qui produisent de l'air dans les circuits secondaires; la deuxième partie de la machine est un échangeur air-eau. On va considérer que la partie liquide est en fait le produit qu'on aura à traiter dans cette machine-là. Cet échangeur air-eau est équipé de sept étages sur lesquels nous avons disposé des vis sans fin. Elles sont installées dans des auges ouvertes. Le produit arrive par des pompes qui nous permettent de doser la matière dans chacune des vis, sur chacun de ces étages, et le produit va avancer d'un étage à l'autre au moyen de ces vis, va descendre par gravité aux étages inférieurs pour se retrouver enfin au septième étage, en sortie, sec. Ça, c'est la partie qui permet de transporter la matière et qui permet également d'assécher.

Pour l'assécher on a un deuxième échangeur, un échangeur de chaleur air-air qui, lui, va produire de l'énergie au moyen d'un brûleur. Ce brûleur est équipé actuellement pour fonctionner au propane. Il peut produire jusqu'à 3 500 000 BTU. Il est indispensable pour deux raisons: produire l'énergie, mais aussi brûler les vapeurs que nous rejetterons plus tard dans l'atmosphère. Nous avons trois ventilateurs sur le circuit secondaire. Ces ventilateurs produisent de l'air en débit contrôlé et suffisant pour pouvoir transporter la chaleur en contact avec la matière. Cet air doit se saturer en vapeur et conduire ces vapeurs à l'intérieur de la chambre de combustion. C'est à ce moment-là que les vapeurs sont traitées, brûlées avant d'être rejetées dans l'atmosphère.

Ces vapeurs, comme vous allez le constater, sont absolument exemptes de produits nocifs et sans danger pour l'environnement. Les analyses que nous avons produites démontrent qu'aucun produit nocif n'est présent dans ces vapeurs. Le résultat de cette opération, c'est un produit sec, que l'on voit à la sortie de la machine en ce moment. C'est un produit qui est en dessous de 15 % d'humidité. Comme vous le constatez, c'est un produit qui peut se manipuler facilement, qui peut se stocker facilement en sac et qui peut se transporter également très facilement. L'intérêt, c'est qu'il est devenu un produit non polluant. Aucune nuisance du point de vue des odeurs, on l'a complètement neutralisé. Il va pouvoir être utilisé soit comme matière première, soit comme produit fini.

(16 h 20)

L'approvisionnement, comme vous l'avez vu, se fait à partir des camions-citernes déjà utilisés pour l'épandage du purin. Au lieu d'étendre, il suffira de transporter par ces mêmes véhicules la matière jusqu'au centre de traitement. Le déchargement se fait dans des conditions de sécurité maximums. La matière n'est pas exposée à l'extérieur du bâtiment. N'étant pas exposée, elle ne risque pas de contamination de l'environnement, de l'air, de l'eau ou du sol. Cette matière, qui est très, très liquide, est stockée en citerne, des citernes de 57 000 L, et va subir une manipulation qui va nous permettre de l'homogénéiser, de débrouiller toutes les matières en suspension.

Le Groupe DEC est fier, aujourd'hui, d'installer les premiers centres de traitement destinés notamment au traitement de déchets de l'agriculture et plus particulièrement des fumiers et des lisiers de porc, de mettre en place un procédé économiquement rentable qui permettra de produire des matières destinées à la fabrication d'engrais – les matières issues de la production de ces centres sont, en grande majorité, composées de matières organiques dont on a besoin pour l'agriculture – en outre, fier, également, de proposer un procédé qui permet de résoudre un problème environnemental, que ce soit au niveau des matières traitées que du procédé lui-même, puisqu'il ne procure aucune nuisance, ni aucun déchet, ni aucun risque pour l'environnement dans son exploitation.

La Présidente (Mme Vermette): Merci. Alors, c'est intéressant de constater qu'on a plusieurs nouveaux procédés qui nous permettront d'envisager l'avenir d'une façon plus souriante et odorante.

M. Aubry (Pierre): Donc, c'est ça. C'était un peu technique, mais, comme je le disais tout à l'heure, une image vaut mille mots, et ça nous aurait pris pas mal de temps à vous l'expliquer de cette façon-là. J'ai aussi apporté un dépliant corporatif qui donne des renseignements techniques, les photos de la machine, etc., ainsi qu'un document qui résume un petit peu ce qu'on va vous dire aujourd'hui et une photocopie de notre certificat d'autorisation, aussi, d'opération là-dedans. Alors, il y en a pour tout le monde. Je vais passer la parole à Philippe. Il est l'inventeur, il pourra vous en dire un petit peu plus sur la technologie. Alors, Philippe.

M. Varvat (Philippe): O.K. S'il était besoin de le préciser, l'intérêt de la déshydratation thermique – et vous avez vu sur le vidéo que Sainte-Brigide-d'Iberville est le lieu où nous allons installer les premières machines pour traiter en production à grande échelle les purins de porc – c'est qu'elle permet de transformer en vapeur toutes les parties liquides. On règle ainsi le problème des pollutions liées à l'utilisation en trop grande quantité des ammoniaques, des nitrates, etc.

L'autre intérêt, c'est que les matières sont traitées à des températures supérieures à 100 °C pendant plusieurs heures, ce qui fait que toute activité bactériologique, ou microbienne, ou virale est absolument détruite. On ressort de ça un produit sec qu'on peut manipuler, qu'on peut stocker, qui est absolument sans risque pour l'environnement, qui ne génère pas d'odeurs, etc. Ce qu'il faut savoir aussi – puis vous l'avez peut-être remarqué sur le vidéo – c'est qu'il n'y a pas d'odeurs autour de l'usine. Toutes ces odeurs sont neutralisées au moment où on traite les vapeurs à l'intérieur de la chambre de combustion du brûleur. C'est traité à des températures de l'ordre de 600 °C à 650 °C, et on sait que, chimiquement, la molécule d'ammoniaque est transformée, etc. Les analyses qui ont été faites sur ces vapeurs, qui ont été fournies au ministère de l'Environnement, démontrent qu'il n'y a absolument aucun danger pour l'environnement à utiliser ce procédé puis à le mettre en place en production intensive.

Alors, voilà pour ce qui concerne le procédé. Aujourd'hui, il a été testé sur le purin de porc. Nous l'avons testé également sur d'autres matières qui sont valorisables en alimentation ou en produits fertilisants, et, encore une fois, les premières machines sortent de production et doivent être installées à Sainte-Brigide pour démarrer officiellement, d'ici un mois et demi à deux mois, le centre de traitement pour le traitement des purins de porc.

La Présidente (Mme Vermette): Est-ce que votre présentation est terminée?

M. Aubry (Pierre): Peut-être quelques minutes...

La Présidente (Mme Vermette): Ça va. Vous avez encore le temps.

M. Aubry (Pierre): ...encore, surtout sur les enjeux de la commission, voir notre point de vue là-dessus. Je veux aussi dire que, quand on a fait le lancement de presse, on avait apporté sur place des échantillons de purin desséché, puis les journalistes se sont amusés à les faire circuler là-bas puis à se mettre carrément le nez dedans, et je pense que, si c'était tolérable à l'hôtel Inter-Continental à Montréal, ce serait sûrement tolérable en campagne au niveau de ce que ça pouvait dégager comme odeur.

Maintenant, c'est au niveau des enjeux de la commission, face à ce qu'on pense de ça. Peut-être que je peux laisser Philippe finir là-dessus. On avait des choses à vous dire.

M. Varvat (Philippe): En fait, nous, ce qu'on pense au niveau du problème généré par la pollution, etc., l'utilisation des fumiers en agriculture, c'est que, pour nous, le problème des odeurs s'intègre beaucoup plus dans une vision globale au niveau de la pollution. On n'a pas seulement voulu traiter le problème des odeurs, mais on s'est dit que l'utilisation de certaines matières dans des zones de surplus ou à travers des moyens de stockage, etc., pouvait générer des nuisances et des pollutions. Donc, on a envisagé, nous, de traiter ces matières-là à partir du moment où, j'allais dire, elles sont produites, c'est-à-dire prélever les purins directement dans les porcheries pour pouvoir les transporter dans les centres de traitement. Ça permettrait d'éviter tous les moyens mis en oeuvre pour stocker ces matières et ensuite pour les épandre. Donc, on essaie de supprimer la source de nuisance ou de pollution directement au départ de la production des matières.

Les centres de traitement, dans la mesure où nous souhaitons les installer ici, sur la région du Québec, vont être installés dans des zones où les concentrations sont suffisamment importantes pour justifier l'implantation de plusieurs machines. À ce moment-là, les matières seraient prises directement dans les préfosses, dans les porcheries pour être amenées dans les centres de traitement. Vous l'avez vu, il n'y a aucun contact avec l'air extérieur sur ces matières-là, ce qui fait qu'on arrive de cette façon-là à supprimer directement le problème des odeurs liées à l'épandage ou au stockage des matières à l'air libre.

Donc, cette vision, nous l'avions dans un cadre beaucoup plus global qui s'insérait évidemment aussi dans le fait qu'on souhaitait valoriser très rapidement des matières qui avaient une valeur sur le marché et qui nous permettaient de rentabiliser ces opérations de traitement, de façon à ce que le coût lié à l'opération ne soit pas répercuté en totalité sur les éleveurs, ce qui était impossible. Donc, en fait, on pourra en parler un petit peu plus tard si vous voulez, mais cette opération est rentable dans la mesure où toute cette matière organique a une valeur sur le marché et que nous pouvons la commercialiser, ce qui est le cas pour le premier centre de traitement qui va opérer à Sainte-Brigide. La totalité de la matière organique qui va être séchée, qui va être stockée est commercialisée par la suite et vendue.

Alors, on sait, aujourd'hui, qu'on achète ici, au Québec, des produits qui sont issus du traitement des boues municipales, des déchets qui se retrouvent en produits finis et qui sont commercialisés un peu partout dans le monde. On s'est dit qu'on pouvait peut-être commencer à traiter les nôtres et puis essayer de les vendre aux autres aussi. Donc, c'est ce que nous essayons de faire avec le déshydrateur.

La Présidente (Mme Vermette): Alors, on vous remercie de votre présentation. Je suis convaincue qu'il y aura des collègues qui vont vous poser des questions aussi pour avoir plus d'information. Alors, M. le ministre.

M. Julien: Alors, M. le président, je vous remercie d'être venu nous présenter cette technologie-là. Je trouve ça important de voir qu'il y a autre chose qui existe au Québec pour régler certains problèmes qu'on vit actuellement. Moi, ce qui m'intéresse particulièrement, là – je pense que, au niveau de la démonstration, ça m'allait – c'est évidemment la question des coûts. Pour les producteurs par exemple, ça peut s'élever à combien? Puis, peut-être – pas par ironie – je me disais que, comme vous allez vendre votre produit, y «a-tu» une ristourne au producteur qui va réussir à vous vendre son lisier? Ça m'intéresse de voir s'il y un «in and out», excusez, une entrée ou une sortie dans...

M. Varvat (Philippe): On l'avait envisagé comme ça au départ, de ristourner, effectivement, les éleveurs, mais, finalement, ce n'était pas possible. Donc, on va demander une participation aux éleveurs qui va varier entre 1 $ et 3 $ par tête de porc. Tout ça va être évidemment fonction de la teneur en matières sèches – j'allais dire de la qualité des purins. Ce n'est pas un vain mot, puisque ces matières ont une valeur en produits finis – et puis de la qualité des purins. Donc, en fait, c'est une analyse, au départ, de ce qui se passe dans des élevages spécifiques et bien déterminés, et, à partir de là, on détermine leur participation qui, encore une fois, va varier entre 1 $ et 3 $ par tête de porc. La commercialisation des matières sèches derrière, au-delà de cette participation, nous permet de rentabiliser l'opération.

M. Aubry (Pierre): Je pense, M. Julien, pour revenir peut-être à votre commentaire sur une ristourne possible, que, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, on est très prêt à prendre des producteurs en association ou des groupes de producteurs en partenaires dans nos usines. Alors, c'est évident que, s'ils sont intéressés à participer à la rentabilité de ces usines-là, on n'a aucune objection à le faire.

M. Julien: Merci.

La Présidente (Mme Vermette): Je vous remercie. Alors, en vertu de la règle d'alternance, M. le député de Beauharnois-Huntingdon.

M. Chenail: Bien, on s'est rencontré déjà, puis je vous félicite d'être en commission pour nous présenter votre projet. Je pense que c'est un beau projet, mais pourriez-vous nous dire le coût d'une installation pour une ferme de 3 000 porcs si elle décidait d'acheter votre machine?

(16 h 30)

M. Varvat (Philippe): Il faut savoir que le déshydrateur thermique est capable de traiter la production annuelle d'un élevage de 15 000 porcs. Donc, il est clair que, pour un élevage de 3 000 porcs, la machine n'est pas forcément accessible. C'est la raison pour laquelle, comme vous le disait Pierre tout à l'heure, on voulait installer des centres de traitement, soit seuls – et puis on est prêt à en prendre la responsabilité – soit en partenariat avec des éleveurs qui s'intéresseraient à ce que pourrait être la rentabilité d'une telle entreprise. Mais ça suppose effectivement des regroupements d'éleveurs pour pouvoir alimenter une entreprise qui serait capable de traiter... Une machine traite le purin de 15 000 porcs. On a l'intention de monter des centres, et l'autorisation du ministère de l'Environnement pour le premier centre est sur une base de cinq machines. Donc, ça suppose des élevages de 60 000 à 70 000 porcs.

M. Chenail: On «pourrait-u» penser que l'agriculteur va vous le porter chez vous en liquide et que vous lui revendez son solide ou que vous lui chargez un montant x pour traiter sa production, si on peut appeler ça comme ça?

M. Varvat (Philippe): Tout est envisageable, surtout à partir du moment où les éleveurs sont partie prenante dans l'exploitation de ces centres. C'est clair qu'ils vont amener le purin liquide dans les centres de traitement que nous allons opérer, et ensuite cette matière sèche est sur le marché des matières premières pour la fabrication des engrais. Donc, elle peut soit être vendue aux éleveurs directement, soit être vendue à des fabricants d'engrais que ça intéresse déjà de toute façon, puisque le purin de porc, c'est beaucoup de matière organique, et on sait que la matière organique, on en a besoin pas seulement au Canada, mais partout ailleurs dans le monde.

M. Chenail: Pensez-vous que vous pourriez en venir à faire des centres d'engrais chimiques avec les composants que vous avez et d'autres composants que vous pourriez acheter et développer des centres pour les engrais chimiques?

M. Varvat (Philippe): Il est clair que cette matière va probablement être utilisée en mélange avec des engrais chimiques. Donc, c'est sûr que le purin de porc ne sera probablement jamais utilisé comme produit fini directement. Je pense, d'abord parce qu'il est très, très riche en matière organique, qu'il va être utilisé avec des engrais chimiques. On a rencontré certains ingénieurs-agronomes du Manitoba qui disaient: Mais, dans l'état dans lequel vous le sortez, on peut peut-être même envisager de le mettre dans le sol en même temps qu'on va mettre les semences, donc supprimer une opération au moment de la semence et de la pose des engrais, etc., mais, vraisemblablement, il va être utilisé en mélange avec des engrais chimiques. C'est ce que comptent faire les clients qui nous achètent aujourd'hui cette production, l'utiliser comme une matière première et non pas un produit fini. Maintenant, encore une fois, c'est une opération qui va se décider avec des partenaires, et ces partenaires, c'est aussi bien le Groupe DEC que les gens qui vont approvisionner le centre de traitement, que ceux qui y participeront, et ça peut être aussi les éleveurs, d'ailleurs.

M. Chenail: Là, vous avez déjà un centre en production?

M. Varvat (Philippe): C'est très récent, hein? Le ministère de l'Environnement nous a donné l'autorisation de démarrer ce centre il y a quelque deux semaines. Ça a pris beaucoup de temps, mais c'est parce qu'ils nous ont surveillés de très près. Ça fait quatre ans qu'ils nous surveillent pour voir... Mais c'est un petit peu normal. On les a tenus informés de ce que nous faisions, et puis ils sont venus vérifier dernièrement qu'il n'y avait pas d'odeurs autour du centre, qu'il n'y avait pas de risque de pollution à l'exploitation de ces procédés, et l'autorisation, on l'a obtenue il y a deux à trois semaines, je pense.

M. Chenail: Donc, on peut s'attendre, les membres de la commission, à être invités chez vous à aller faire une visite pour voir sur place.

M. Varvat (Philippe): Nous nous ferons un plaisir de vous inviter. Probablement d'ici un mois, un mois et demi, le temps de terminer la fabrication des premières machines qui vont entrer au centre.

Une voix: En autobus.

M. Varvat (Philippe): En autobus.

La Présidente (Mme Vermette): On va attendre qu'il y ait un petit peu moins de neige dans les champs. On vous remercie. Alors, je passerais la parole au député de Saint-Hyacinthe.

M. Dion: Merci, Mme la Présidente. Le fait d'arriver le troisième fait en sorte que la plupart de mes questions ont été posées et que j'ai eu des réponses. J'ai eu l'occasion, d'ailleurs, la chance d'avoir connaissance de votre projet il y a déjà quelques mois, mais il reste toujours un petit problème. Dans le contexte réel de la production du porc au Québec, si on tient compte du fait qu'il y a un nombre important, 80 %, je crois, des producteurs qui sont des petits producteurs, qui produisent 2 000, 4 000 porcs par engraissement, par cycle, évidemment, ils n'ont pas la quantité de porcs qu'il faut pour bénéficier de ces services-là, sauf à l'intérieur d'un regroupement. Un regroupement, ça veut dire qu'on transporte le lisier sur les routes et qu'il y a tous les dangers de renversement et de tout ce qui s'ensuit. Alors, je ne sais pas, est-ce que c'est impensable d'arriver à un procédé, une machine qui soit moins considérable et qui pourrait éviter... Parce que le transport du lisier, je pense que vous convenez avec moi que non seulement c'est dispendieux, mais que ça représente certains dangers.

M. Varvat (Philippe): C'est vrai, vous avez raison, l'inconvénient vient du transport de la matière. On transporte de l'eau. Donc, le centre de recherche du Groupe DEC a mis au point un procédé qui, dans un premier temps – rentabilité oblige – devait faire face au traitement des surplus et des quantités relativement importantes, parce que le Groupe DEC n'a pas la prétention de traiter tout le purin de porc du Québec. Donc, on a dit qu'on allait d'abord s'intéresser à ce qui était des surplus. Mais c'est vrai que la recherche continue pour nous pour mettre au point des procédés qui soient efficaces et rentables à des capacités inférieures et même à des capacités supérieures, parce qu'on sait qu'il y a des élevages aussi, des zones de concentration où les quantités sont énormes et des zones où on peut effectivement trouver des petits élevages.

On s'est posé la question de savoir s'il fallait fabriquer une machine dont la capacité serait inférieure ou s'il valait mieux mettre une machine sur la route, la déplacer vers les centres de traitement puis opérer pendant 24 ou 48 heures et redéplacer la machine. En fait, on a mis au point le procédé qui permet de traiter deux tonnes-heure et d'arriver, donc, à une capacité de 15 000 tonnes ou 15 000 m³ par an et on est en train de travailler sur les procédés qui nous permettront de traiter des quantités inférieures, des quantités moindres. Mais c'est vrai que le Groupe DEC est une jeune entreprise qui a des moyens relativement limités, puis on va être obligé de passer d'abord par la rentabilité de l'entreprise, le profit, pour arriver à mettre au point les technologies suivantes. Mais le centre de recherche continue à opérer et à travailler sur ces procédés. Alors, ce sont les profits des centres d'exploitation qui vont nous permettre de continuer à financer la recherche, et puis, même si, pour ça, il faut partager les profits avec les éleveurs qui participent – M. le ministre Julien n'est plus là pour entendre ce que j'ai à dire. C'est dommage – en fait, on continue la recherche pour répondre aux besoins de toute une catégorie de clients. Absolument.

M. Dion: Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Vermette): Alors, je passerais la parole au député de Nicolet-Yamaska.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Oui. Merci, Mme la Présidente. Juste une petite question technique. Le traitement, par exemple, d'une fosse à purin. Une énorme fosse à purin qui peut avoir des milliers de gallons, quel est le temps requis pour y traiter le purin et pour en avoir un produit fini, si vous voulez, et être capable de le mettre dans des sacs?

M. Varvat (Philippe): Écoutez, ce que je vous disais tout à l'heure, je ne l'ai pas en tête, en mémoire. Je sais que les fosses font 96 pi de diamètre par 12 pi ou 15 pi de profond. Je n'ai pas en mémoire tout de suite le chiffre exact de la contenance d'une grande fosse, mais ce que je sais, c'est que ce déshydrateur thermique est capable de traiter 2 tonnes métriques à l'heure. Donc, 48 000 litres par 24 heures de purin de porc, ça fait déjà une quantité relativement importante. La quantité de matière sèche qui ressort de ça dépend essentiellement de ce qu'il y a à l'intérieur des purins. Pourquoi est-ce que nous ne voulons pas les traiter à partir des grandes fosses? C'est parce que, là, cet hiver on a rajouté de l'eau dans les grandes fosses, et l'ennemi du déshydrateur thermique, c'est l'eau. Alors, ce que l'on veut, nous, c'est de prendre le purin directement dans les préfosses, dans les porcheries. L'intérêt, c'est qu'on évite tous les systèmes de stockage qui génèrent aussi des odeurs, et puis on évite aussi d'avoir à traiter des produits qui ont été surchargés encore en liquide. Et évaporer un litre d'eau, ça coûte très, très cher, et puis, donc, on souhaite prendre la matière directement dans les porcheries. C'est aussi une façon de lutter contre l'émission des odeurs et toutes les nuisances dues aux odeurs. Donc, c'est 15 000 tonnes, 15 000 000 de litres par an pour un déshydrateur. Quelle est la contenance d'une grande fosse en litres ou en gallons? Je n'ai pas ce chiffre exactement en tête, mais ce qu'il y a de sûr, c'est qu'avec un déshydrateur on peut traiter les purins de porc annuels d'un élevage de 15 000 porcs, ce qui est quand même déjà respectable.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Avec un appareil?

M. Varvat (Philippe): Avec un appareil. L'appareil qui vous avez vu sur le vidéo traite les purins de porc d'un élevage de 15 000 porcs.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Puis le coût d'un appareil? Imaginons-nous que 10 éleveurs de porc décident de s'en acheter un, c'est combien?

M. Varvat (Philippe): Ils vont payer 50 000 $ chacun, 500 000 $.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): O.K.

M. Varvat (Philippe): C'est la raison pour laquelle, j'allais dire, le prix de cette machine peut dissuader certains investisseurs. C'est la raison pour laquelle nous, on s'implique dans l'exploitation de ce procédé, c'est-à-dire que, aujourd'hui, le financement des premières machines pour installer à Sainte-Brigide-d'Iberville, nous l'avons obtenu, nous, directement par l'intermédiaire de la Banque Royale, du BFDRQ et on s'implique aussi dans l'exploitation, dans le financement et dans la gestion des centres de traitement, parce qu'on sait pertinemment que les petits éleveurs de 2 000, 3 000 porcs ne pourront pas acheter un appareil de 500 000 $, justifier l'utilisation d'un tel appareil pour traiter leur purin.

Par contre, on parle aujourd'hui avec des grandes entreprises du Québec qui ont des élevages de porc. On parle aussi avec des associations d'éleveurs, et puis il est question également d'étudier avec eux la possibilité de monter ces centres en association pour le traitement des purins de porc. Maintenant, il faut passer à travers beaucoup de choses, que ce soit des problèmes financiers, des problèmes d'autorisation, des problèmes techniques, etc., pour éviter les trop grandes distances de transport des matières. Mais je pense que c'est probablement comme ça que ça va se faire, en association avec les éleveurs, pour le traitement de purins.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Merci.

(16 h 40)

La Présidente (Mme Vermette): Merci. Je demanderais au ministre de l'Environnement et de la Faune, s'il vous plaît, de vous faire des remerciements. Même il a une question à vous poser. Et je voudrais juste, avant de lui donner la parole, mentionner que le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation est allé faire un point de presse. Alors, c'est pourquoi il n'est pas ici présentement.

M. Cliche: On voit le génie des gens à trouver de solutions aux problèmes, et je vous en félicite. Je veux vous remercier de nous avoir présenté ça, mais j'aurais une question. J'ai été surpris du bas coût que vous estimez par tête de porc pour traiter le lisier. Un porc, si ma mémoire est bonne, dans sa courte vie stressée, ça fait 1 m³, à peu près?

M. Varvat (Philippe): Oui.

M. Cliche: Et vous estimez à combien traiter 1 m³? Indépendamment de la question des profits que vous allez faire ou des bénéfices que vous allez faire en vendant le lisier concentré, le compost, là, c'est combien pour le traiter? Parce que ça doit prendre de l'énergie passablement pour déshydrater et monter à 600° C le liquide. Ça prend pas mal de joules.

M. Varvat (Philippe): En principe, ça prend beaucoup d'énergie pour évaporer un litre d'eau. On ne va pas rentrer dans les détails techniques, mais c'est 957 BTU pour une livre d'eau, etc., ce qui prouve l'efficacité du déshydrateur. L'air chaud qui circule dans cette machine repasse, en fait, plusieurs fois à l'intérieur de la machine, ce qui fait qu'on a une efficacité qui est très, très grande. Il ne faut pas oublier aussi qu'on travaille des matières organiques dont on élève la température, et c'est vrai que l'efficacité de cette machine est grande. C'est vrai aussi qu'on vous parlait d'une participation des éleveurs de 1 $ à 3 $ par m³ ou par porc, parce que c'est vrai qu'on a considéré qu'un porc, dans sa vie, produit à peu près 1 m³ ou une tonne métrique de purin. Par contre, le coût de traitement, en fonction des teneurs en matières sèches, peut varier de 10 $ jusqu'à 25 $ la tonne.

La rentabilité s'établit ensuite lorsque l'on vend cette matière organique, lorsqu'on la commercialise. Alors, je ne veux pas vous donner ici, aujourd'hui, des prix de vente du produit sec qui sort de l'entreprise. Tout ce que je peux vous donner comme indication, c'est que, aujourd'hui, on trouve sur le marché des engrais qui sont faits à base de boues d'épuration et d'autres matières qui sont des déchets qui se vendent au prix de détail à 2 000 $ la tonne. Ça ne veut pas dire que le Groupe DEC va vendre sa production 2 000 $ la tonne. Ce n'est pas ça, ce serait trop beau. On offrirait les machines aux éleveurs. Mais c'est que, aujourd'hui, la rentabilité se fait parce que cette matière organique, on en a besoin en agriculture, c'est clair, les ingénieurs agronomes le disent tous.

Prenez l'exemple des grandes prairies. On le sait, il faudrait y inclure très, très vite beaucoup de matière organique si on voulait éviter l'érosion des sols, etc. Donc, le marché de la matière organique, aujourd'hui, il existe, surtout pour un produit qui est sec, en dessous de 15 % d'humidité, qui est stabilisé, qui n'a plus d'odeur, qu'on peut granuler, qu'on peut stocker, etc. Donc, la valeur de ce produit sec est aussi due au fait qu'il est stabilisé. Il est sec, on peut le granuler, on peut le mélanger, on peut en faire ce qu'on veut. Et les marchés que nous avons trouvés nous permettent d'affirmer aujourd'hui que c'est une opération rentable et nous permettent aujourd'hui de dire surtout que la participation des éleveurs peut se limiter entre 1 $ et 3 $ par tête, parce que c'est vrai que ça coûte cher de traiter du purin de porc. C'est vrai que la quantité d'eau...

Et c'est peut-être plus facile pour du purin que pour des boues d'épuration parce qu'il y a du métal à l'intérieur. On utilise aussi cette énergie gratuite, mais c'est vrai que ça coûte cher de traiter du purin de porc, vous avez raison. La rentabilité se fait aujourd'hui – ce n'aurait peut-être pas été valable il y a cinq ou six ans – parce qu'il y a un besoin d'utilisation de la matière organique. Je ne sais pas si j'ai répondu à votre question?

M. Cliche: Merci beaucoup. Merci d'être venus.

La Présidente (Mme Vermette): Alors, on vous remercie de votre présentation.

M. Varvat (Philippe): Merci beaucoup de nous avoir reçus.

La Présidente (Mme Vermette): Ça nous fait plaisir. Alors, on suspendrait jusqu'à 17 heures et on reprendrait nos travaux à 17 heures.

(Suspension de la séance à 16 h 45)

(Reprise à 17 h 2)

La Présidente (Mme Vermette): Alors, je demanderais à l'Union des citoyens du monde rural de vouloir prendre place, s'il vous plaît, ainsi que les membres de la commission. J'imagine que vous êtes représentés. Gilles Lachance, qui est le président... Est-ce que vous avez un document?

M. Lachance (Gilles): On en a un.

La Présidente (Mme Vermette): Oui. Si vous avez un document, on apprécierait...

M. Lachance (Gilles): Je préférerais vous le donner après. Est-ce que ça changerait quelque chose pour vous?

La Présidente (Mme Vermette): Bien, c'est parce que c'est plus facile pour suivre, pour les gens, alors... On vous remercie.

Donc, M. Lachance, vous êtes le président de l'Union des citoyens du monde rural. Est-ce que vous aimeriez nous présenter, s'il vous plaît, les gens qui vous accompagnent?


Union des citoyens du monde rural (UCMR)

M. Lachance (Gilles): Avec moi, il y a Mme Christiane Parent, de Bic, dans la région de Rimouski; M. Pierre Lapointe, de Pintendre; M. Denis Erpicum, de La Pocatière. Moi, je suis de Saint-Jean-Chrysostome.

La Présidente (Mme Vermette): Bien. Alors, M. Lachance, vous avez 20 minutes pour exprimer votre point de vue.

M. Lachance (Gilles): Je vous remercie. J'aimerais connaître les gens qui représentent le ministère des Affaires municipales. Il n'y a personne? Le ministère de la Santé?

La Présidente (Mme Vermette): Oui. Tantôt, il y avait... Je viens justement de parler avec... Oui.

M. Lachance (Gilles): Merci.

La Présidente (Mme Vermette): D'accord. Le monde municipal, ils ont été là toute la journée.

M. Lachance (Gilles): C'est juste pour savoir à qui je parle. Merci.

La Présidente (Mme Vermette): D'accord.

M. Lachance (Gilles): Alors, comme notre organisation est très jeune, tout de suite au début, je vais prendre quelques secondes, une minute ou deux, pour vous présenter notre organisation. Je pense que c'est excessivement important pour comprendre toute notre démarche.

Alors, l'UCMR a été incorporée selon la troisième partie de la loi des compagnies du Québec, le 4 juillet dernier. Donc, c'est récent.

Elle origine du regroupement d'individus et de groupes locaux aux prises avec des projets de porcheries de grande taille dans les communautés suivantes – et je vous laisse le soin de les lire, il y en a plus de 20, presque une trentaine.

Le regroupement est venu du sentiment d'impuissance individuelle devant les actions proposées par de grandes entreprises. Cette naissance dans l'action, sous la direction de M. Grégoire Tanguay, a amené une réflexion sur l'évolution des milieux ruraux. Nous avons dépassé rapidement les seuils d'opposition – et j'insiste là-dessus – pour arriver à une réflexion sur le développement durable.

Un des éléments qui nous a poussés à approfondir un peu la situation est le constat obligatoire mais malheureux que d'aucuns présentaient la question de façon outrageusement simplifiée en termes de ruraux versus citadins, laissant ainsi entendre que les seuls citadins pouvaient être malheureux devant la situation actuelle reliée aux porcheries.

Or, il nous était évident que le milieu rural est depuis longtemps beaucoup plus complexe que ces réductionnistes ne le laissent entendre. Dans le milieu rural, il y a plusieurs sortes de propriétaires privés: il y a des agriculteurs qui ont des entreprises familiales; il y a des agriculteurs qui sont industriels; il y a des commerçants établis en campagne; il y a des industriels établis en campagne; il y a des villégiateurs; des gentlemen-farmers; des exploiteurs de la forêt, des résidents qui aiment la campagne, etc. Même parmi les agriculteurs, il y a des différences aussi: certains exercent des activités d'élevage; d'autres des activités de culture maraîchère qui exigent des pratiques différentes les uns des autres.

À côté du domaine privé, il y a aussi le patrimoine public qui touche tous les citoyens d'un milieu donné. On pense à l'eau, les rivières, les routes, les sites naturels, les forêts publiques, etc. Reconnaître l'existence de tous ces groupements différents, c'est reconnaître d'emblée leur droit de s'exprimer sur quelle sorte de milieu ils favorisent.

Il nous semble que la notion de développement durable permet de promouvoir un développement économique important tout en l'encadrant dans un ensemble plus large d'intérêt tel que social, familial, écologique, esthétique, etc.

Nous allons déposer devant vous tantôt le texte de notre mission. Il s'agit d'une ébauche. Il sera adopté ces jours-ci. L'UCMR se consacre à promouvoir le concept et la pratique du développement durable en milieu rural. Son action sera pratique et se déroulera sur le terrain, à la base même de ses origines, chez les citoyens locaux.

L'UCMR compte des membres de toutes les catégories de ruraux – que je nommais tantôt – donc des agriculteurs aussi. Elle souhaite un milieu rural en santé tant du point de vue économique que social et environnemental. Elle est donc opposée à tout genre de développement qui ne tiendra pas suffisamment compte de la qualité de vie des gens du milieu rural, qualité qui comporte de multiples facettes et qui est trop souvent oubliée par ceux dont les entreprises sont de grande taille.

En somme, l'Union des citoyens du monde rural est née dans l'action et oriente son programme vers une aide aux gens qui sont sur le terrain et cherchent un développement durable pour leur milieu. Elle privilégie une approche qui aide les citoyens à trouver eux-mêmes les solutions qui leur conviennent. Enfin, elle intervient, dans un premier temps, partout à la grandeur de la province.

Vous avez une page 4 qui est de trop, tout simplement.

Alors, je commence nos commentaires sur le document proposé. Nous sommes persuadés que le document qui nous est proposé est le résultat d'une longue démarche de la part de ses concepteurs et qu'il est un compromis parmi plusieurs solutions envisagées. Ce document dégage un premier élément que nous trouvons positif en ce qu'il reconnaît certains problèmes qui peuvent survenir et qui ont déjà mobilisé ou du moins attiré l'attention de beaucoup de monde. De plus, il est une tentative d'améliorer un peu la situation par rapport à celle qui prévaut actuellement.

Par contre, il nous est difficile d'apprécier un tel document à sa juste valeur, puisqu'il se trouve isolé d'autres éléments essentiels concernant la pollution de l'eau, de la nappe phréatique, les puits artésiens, etc. On sait que ce règlement complète d'autres considérations établies sous forme d'orientations. Nous pensons comprendre pourquoi vous procédez ainsi, mais nous sommes néanmoins en désaccord avec cette façon de procéder. Ce document n'apporte pas une solution intégrée des problèmes qui le sous-tendent. Dans ce contexte, l'étude de la façon avec laquelle toutes les parties, réglementaires ou non, seront coordonnées et effectivement appliquées sur le terrain nous apparaît essentielle avant d'autoriser l'application de ce règlement ou la poursuite des travaux sur le règlement sur les odeurs, et donc, de la loi sur le droit de produire.

De plus, nous, de l'UCMR, travaillons au développement d'une société. Le document qui nous est proposé semble travailler d'abord pour protéger une industrie, l'agriculture. Les deux peuvent très bien trouver convergence dans leurs actions et se développer harmonieusement. C'est ce que nous croyons. Cependant, le document que vous avez soumis nous pose plusieurs questions de fond à cet égard.

Pour nous, le développement durable, c'est le résultat d'un processus décisionnel de tous les citoyens. C'est un élément majeur d'une unité de voisinage ou d'un milieu donné qui prend en compte les trois volets fondamentaux suivants: le volet économique, oui, mais aussi le volet social et le volet environnemental. Il nous propose de vivre à même les fruits du capital de la nature sans en entamer le capital lui-même, de protéger l'héritage que nous avons reçu et de développer pour répondre aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre à leurs besoins.

(17 h 10)

Nous nous demandons si la proposition qui est sur la table aujourd'hui participe véritablement à ce principe de développement durable.

Premièrement, je parle de la participation des citoyens au processus décisionnel. D'abord, pour nous, le développement durable nécessite que les citoyens soient au centre du processus décisionnel sur des projets concernant leur milieu. La population refuse de plus en plus de se faire imposer des projets et des activités qui ont des effets néfastes pour elle et son environnement et elle s'organise pour faire face à ces agressions. Le développement durable repose sur un consensus des citoyens qui auront à vivre avec les conséquences de tels projets ou de telles activités. Selon ce règlement, ne continue-t-on pas plutôt à imposer à des citoyens des projets qui ont des effets hautement indésirables sur eux et l'avenir de leur milieu? Le projet de règlement prévoit-il des mécanismes suffisants, assurant aux citoyens concernés, par un projet agricole ou autre, toute la place qui doit leur revenir dans le processus décisionnel? Nous pensons que non.

Deuxième point, protection du patrimoine. Selon nous, le développement durable nécessite qu'on protège l'héritage reçu, qu'on le développe pour répondre aux besoins du présent, sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs.

L'application de la loi adoptée en juin est reliée, dans le texte même de la loi, à l'adoption d'un règlement sur l'atténuation des odeurs. Dans cette optique, le projet de règlement vise à atténuer les inconvénients dus aux odeurs. Mais est-ce que cette approche de compromis règle vraiment les problèmes de fond? Nous pensons que non. Le projet qui nous est présenté est une amélioration par rapport au système en vigueur, mais il est un minimum, à notre avis, bien bas.

Les odeurs qui font litige sont surtout un effet de la gestion sur lisier liquide. Les odeurs inacceptables sont dues à la présence et à la manipulation du lisier liquide. Non seulement le lisier liquide est la cause de la pollution de l'air et de problèmes de santé mentale, mais il est aussi la cause de la pollution de l'eau, des nappes phréatiques et de répercussions néfastes possibles sur la santé physique elle-même des citoyens. Même en contrôlant les quantités d'épandage, les pertes sont inévitables et les déjections peuvent empoisonner l'eau des puits, et donc constituer un danger pour la santé publique.

Par ce règlement, ne cherche-t-on pas à éliminer l'effet plutôt que la cause? On va accepter de continuer à produire et à développer de telles sources de pollution et de telles odeurs, et même de les augmenter considérablement en acceptant des projets de plus en plus nombreux et de plus en plus gros, et on va les gérer par des distances. En augmentant en même temps juste un peu les distances, ne pense-t-on pas qu'on aura un développement acceptable pour la population? On aura peut-être atténué les inconvénients dus à l'odeur, mais la pollution inhérente à la technologie employée ne sera pas éliminée par le fait même. On augmente toujours le purin. Avec ce projet de règlement, la municipalité ne devient-elle pas une fosse à purin, tout simplement, sans odeur?

À notre avis, l'odeur doit être éliminée, mais non de façon cosmétique seulement. Autrement, pourquoi se donner tant de mal avec des règlements compliqués sur les distances et limiter les promoteurs dans l'expansion de leur industrie sur le plan économique? On fait tout simplement les écoeurer. Mettons du parfum dans le purin et tout sera réglé tout simplement. Non. Le problème est que le lisier est encore liquide.

Le problème, c'est celui du fumier liquide. C'est lui qui génère l'odeur et toute la pollution, avec tous les risques qu'il comporte sur la santé publique. Les deux sont intimement liés. Le développement durable suppose que les promoteurs éliminent les effets indésirables que les activités de leur entreprise ont sur des tiers, comme la société et l'environnement. Seulement les camoufler, ces effets-là, ou les éloigner n'est pas suffisant. À notre avis, le projet de réglementation veut trop timidement dissuader les promoteurs d'employer des technologies néfastes à l'environnement. Dans un contexte où la loi a décidé de renverser le fardeau de la preuve – l'immunité dont on parle dans la loi – ce qui est une entorse au droit commun dans notre société et un privilège certain, la seule solution logique et juste, à notre avis, serait que les normes devraient être beaucoup plus sévères en compensation.

De plus, peut-on prétendre évoluer dans un processus de développement durable quand on évolue sur régie liquide? Des experts nous affirment que, de toutes les régies, celle sur le fumier liquide est la moins riche en termes d'amendement du sol. Elle s'avère très peu avantageuse parce qu'elle ne lui apporte que très peu de matières organiques. La régie liquide ne serait-elle pas plutôt une solution de facilité? N'est-on pas en train de grever notre patrimoine pour le futur? Le projet de règlement contient-il vraiment les dispositions suffisantes qui obligeront les promoteurs à concevoir dès le départ des projets ou des processus agricoles qui respectent le développement durable?

Nous sommes étonnés que, dans ce contexte du renversement de la preuve et où tout le monde sait qu'il y a des alternatives à la régie liquide, on prenne tant de soin à essayer de régler le problème par des distances. On aurait espéré, dans ce contexte, que le règlement décourage beaucoup plus franchement la cause elle-même de la pollution, la régie liquide.

Troisième point, la protection de l'agriculture. La loi mentionne, et le document reprend cette mention à deux reprises, que la présente démarche est faite dans la perspective de protection de l'agriculture. Nous sommes tous d'accord pour protéger l'agriculture, mais non au détriment du développement durable.

La meilleure protection de l'agriculture et d'un promoteur sera celle du consensus social que leur accorderont les citoyens quand ils verront que leurs projets respectent leurs droits et leur environnement. Dans ce contexte, les citoyens rechercheront même les bons promoteurs, parce qu'ils contribueront de façon durable au développement de leur patrimoine. Actuellement, même le développement économique des uns nuit au développement économique des autres.

Par leur choix actuel de la régie liquide, les promoteurs démontrent, à notre avis, qu'ils n'ont d'autre finalité qu'un rendement financier à court terme. L'exploitation rentable, dans ce cadre, est une affaire de quelques années. Les retombées négatives locales, elles, économiques, sociales, de santé publique et de pollution physique de l'eau sont réellement de très longue durée. C'est le pays qui est pénalisé.

À court terme, pour le promoteur, rendre son projet conforme à un développement durable risque de lui occasionner des coûts supplémentaires, de réduire sa marge bénéficiaire et de le désavantager sur le plan concurrentiel. Toutefois, très souvent, les avantages à long terme – puis ils sont nombreux – justifient ces pertes initiales.

Nous acceptons que l'agriculture soit protégée dans la zone verte. Le législateur a choisi de la protéger en lui donnant une immunité. Dans le contexte du présent projet de règlement, nous pensons que cette immunité est plutôt gênante. Encore une fois, nous sommes étonnés que le projet de règlement ne soit pas plus contraignant pour forcer les promoteurs à choisir résolument la voie d'une protection réelle de l'agriculture, basée sur l'entente avec les citoyens qui les entourent plutôt qu'une protection simplement légale qui peut se faire au détriment de toute la société. Avec le projet actuel de règlement, nous croyons que les citoyens risquent de subir encore des préjudices. Selon notre Code civil, le droit à la propriété privée et à sa jouissance constitue le fondement de notre droit. Cet énoncé de loi vient de renverser un droit acquis. Il devrait y avoir normalement une compensation que les mesures de ce règlement n'assument pas du tout.

Un autre point sur l'agriculture versus l'industrie. Toujours dans le contexte où on persiste à conserver la régie liquide comme pratique, où l'on connaît la nature peu agricole des activités des intégrateurs et où l'on sait que les surplus viennent de leurs activités, on est amené à se demander à partir de quelles limites on arrête de parler d'agriculture et on commence à parler d'industrie, avec de tels projets. Ce sont plutôt les intégrateurs ou leur homme de paille qui s'installent et qui nuisent à un milieu, à cause de la grosseur et du nombre de leurs projets. Ce ne sont pas les agriculteurs qui causent tellement le problème. L'activité de ces intégrateurs semble bien peu agricole. Ne devrait-on pas les classifier dans une industrie à part, leur donner toutes les chances de se développer, leur donner des normes bien à eux, industrielles, et où ils devraient démontrer devant un groupe d'experts indépendants rendant des comptes publics que leur projet est avantageux pour la population, tant au point de vue économique, social qu'environnemental?

Encore une fois, dans un cadre d'immunité complète, les normes rattachées au règlement ne nous semblent pas adéquates pour l'industrie. Elles sont plutôt faites pour l'agriculture familiale. Pourquoi ne pas reconnaître le caractère industriel des porcheries et des intégrateurs et exiger d'elles les mêmes normes et règlements que pour les autres industries? C'est toujours dans le contexte où on persiste à vouloir employer la régie liquide. D'ailleurs, il n'est pas si loin le temps où ces producteurs devront détenir la norme ISO pour pouvoir exporter leurs projets. Cette norme évolue. Ils devront tenir compte de la qualité de leur produit, de leur gestion, de leur environnement physique et social. Vos projets de règlement ne sont-ils pas déjà désuets devant cette imminente éventualité? Attend-on seulement la pression de l'extérieur pour prendre les décisions qui s'imposent?

Ce sont les points majeurs que nous voulions commenter.

(17 h 20)

Quelques points plus secondaires. Personnes grandement affectées et facteur d'usage. Il semble que ce soit le facteur d'usage qui détermine le nombre de personnes affectées, et non le nombre de personnes affectées qui détermine le facteur d'usage. Ce n'est pas clair. On se demande qui va faire ces déterminations. Seront-elles objectives, scientifiques, simplement mathématiques, indépendantes, faites par des experts ou des comités représentatifs de tous les groupes de citoyens du territoire ou seront-elles simplement des opinions? Quel recours aura le citoyen s'il s'estime lésé, s'il estime n'avoir pas été consulté ou entendu suffisamment? Par quel mécanisme aura-t-il ce recours?

Un autre point plus secondaire. Ce sont les municipalités qui établiront des règlements dans le cadre fixé par ce document et qui les appliqueront. Ce projet nous apparaît instaurer des détails infimes qui vont compliquer la vie des municipalités. Elles seront encore plongées dans une logique purement mathématique qui exclut toutes sortes de contingences locales qui ne sont pas statiques. Elles n'ont pas déjà les compétences, les municipalités, pour faire appliquer les règlements actuels en vigueur. On a plusieurs exemples. On leur complique encore la vie. On augmentera sûrement les problèmes de la vie municipale et la faisabilité de votre projet.

En plus, dans le contexte des coupures budgétaires que l'on connaît, les municipalités risquent de ne pas pouvoir appliquer adéquatement ce règlement. Avec l'immunité, peut-être qu'on risque l'injustice, dans ce contexte-là.

Un dernier point, un plus secondaire. L'agrandissement: les limites raisonnables. La détermination est laissée aux municipalités. Est-ce que vous prévoyez une limite plus précise? Est-ce qu'une limite de 50 % des établissements déjà existants ne serait pas indiquée? Je vous laisse le soin de le déterminer.

En termes de conclusion. Par l'approche poursuivie avec le document proposé, on ne traite pas du problème de la pollution dans son ensemble. De ce fait, on semble minimiser le problème réel qui lui est sous-jacent. Surtout, si le projet de règlement inclut les projets des intégrateurs, ces normes nous semblent totalement insuffisantes et ne conduiront pas à un développement durable.

Comme, en outre, une immunité est accordée à des citoyens qui dégradent leur patrimoine, le climat social risque de se dégrader rapidement. Il est déjà très tendu à certains endroits. Il incite même des gens à des actes qui portent atteinte à la liberté et à l'intégrité physique des gens. Je pense que vous le savez. Il faut prendre les bons moyens pour relever le climat social. Ce règlement ne doit laisser aucun doute ou zone d'ombre sur les points fondamentaux des réclamations des citoyens en faveur d'un développement durable. C'est la condition qui permettra à notre société de retrouver son harmonie d'antan.

Tout projet de développement devrait apporter dans un milieu local une plus-value et non, comme dans le contexte actuel, une moins-value. Comme le législateur a décidé de protéger l'agriculture et de restreindre certains droits de jouissance de la propriété privée et de la population en général, il devrait en contrepartie être beaucoup plus sévère dans les règlements de l'application de la loi. Pour décourager la venue de projets néfastes, non pas pour décourager l'agriculture, non pas pour l'arrêter et lui enlever la possibilité de se développer, sur la population et son environnement, il me semble que le législateur devrait même songer à des pénalités par lesquelles un promoteur devrait réinvestir une partie acceptable des profits générés par son projet dans le milieu, s'il est nuisible.

Le développement durable, c'est une vision. Il implique une planification à long terme qui prend en compte tous les aspects et toutes les conséquences à court, à moyen et à long terme des options que l'on fait dans un projet, tant sociales et environnementales qu'économiques. Il faut comptabiliser tous les coûts attachés à ces conséquences à long terme dans une analyse coûts-avantages des options que nous envisageons. Enfin, tout cela doit se faire dans un dialogue avec les citoyens qui auront à vivre avec le projet de développement. Si on se réclame du développement durable, comme vous le faites, comme nous le faisons, normalement, on est pour le développement harmonieux de la planète, le développement harmonieux de notre milieu et de notre agriculture. Les principes du règlement proposé devraient engager d'emblée notre agriculture dans cette vision et dans les bons virages qui doivent s'ensuivre.

Finalement, nous voulons vous dire que nous sommes heureux d'avoir été consulté aujourd'hui sur les principes qui régiront le règlement futur. On vous remercie. Toutefois, devant l'importance de l'enjeu que nous avons signalé, nous vous recommandons qu'une nouvelle consultation soit faite avant l'adoption du ou des règlements comme tels et que, cette fois, elle soit vraiment plus large, publique de préférence, afin que rien ne soit imposé au public sans qu'il n'ait pu se prononcer. Je vous remercie de votre écoute.

La Présidente (Mme Vermette): Alors, M. Lachance, je vous remercie pour cet exposé. Je passe la parole au ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

M. Julien: Bonjour, M. Lachance, et les gens qui vous accompagnent. Je vous remercie d'avoir pris le temps de venir présenter votre perception du cadre de référence et aussi un petit peu de la situation dans laquelle on vit. Je serais porté à penser que, à un moment donné, je vais vous dire franchement, quand j'écoute tout ça, les règles, les normes et la façon dont même certains textes, quand vous dites «agresser», je trouve ça fort un peu, je me demande des fois, dans le fond, si on éliminait complètement l'activité de production porcine si on ne réglerait pas le problème. Mais, moi, ça m'en causerait un.

J'aimerais revenir à votre page 6. À la page 6, vous laissez sous-entendre qu'il faut que les citoyens soient au centre du processus décisionnel. Dans la loi n° 23, on parle d'un comité agricole qui est composé de 50 % des producteurs et de 50 % de représentants du monde municipal qui, eux, peuvent déléguer d'autres personnes. Vous réagissez comment à ça lorsque vous dites que les gens doivent être au coeur du processus décisionnel?

M. Lachance (Gilles): C'est un comité consultatif à ce que j'ai compris.

M. Julien: Oui.

M. Lachance (Gilles): C'est un moyen pour la population de s'exprimer. C'est un moyen qui à lui seul ne sera pas suffisant, dans le sens que la population, depuis quelques années, s'est faite imposer des projets sans même qu'elle le sache, puis elle l'apprenait après que les certificats étaient émis ou encore assez loin pour qu'elle ait beaucoup de difficultés à maîtriser la venue de ces projets-là dans leur milieu, en tout cas, à les influencer dans le sens de leur développement, de ce qu'ils veulent.

Donc, ce comité-là, est-ce qu'il va leur apporter un élément de force supplémentaire où ils pourront dire: On peut se fier à ce comité-là, et, ce qui va sortir de là, ça devrait fonctionner? Je pense que les citoyens veulent être impliqués eux-mêmes d'une manière ou d'une autre dans la consultation, indépendamment de ces moyens-là. Ils veulent être d'abord informés. Ils veulent que, dans le processus, ils soient convoqués, par exemple, dans une assemblée publique pour donner leur avis, etc. Ils veulent être au bout de l'information pour pouvoir contrôler leur affaire, que ça ne leur soit pas imposé à leur insu. Alors, si on crée un comité comme celui-là, c'est quelque chose de bien, je pense.

Maintenant, il faudrait au moins que les citoyens, dès qu'il y a une possibilité de projet comme ça, ils soient informés pour qu'ils puissent venir écouter, poser des questions et voir l'évolution de ces ressources-là qu'on met à leur disposition. C'est dans ce sens-là qu'on dit que les citoyens veulent être au courant de ce qui se passe et ils veulent être consultés. Mais ça en est une forme de consultation. Il faudra voir la composition. Il faudra voir si les citoyens, dans un milieu donné, se voient dans cette composition-là, parce que, s'ils ne se voient pas dedans, ils vont tout de suite réagir. Ils vont dire: C'est inutile pour nous autres. Il faut qu'on soit encore plus proche, puis il faut qu'on écoute encore davantage, puis il faut qu'on intervienne encore davantage.

Comme on veut protéger le climat social, on veut que les gens se sentent impliqués dans le processus décisionnel, bien, il va falloir prendre des moyens pour qu'ils se sentent à l'aise dans ça, qu'ils ne se sentent pas floués, mais qu'ils sentent qu'ils peuvent intervenir puis qu'ils peuvent donner leur accord. Si l'accord est sur une condition d'un projet qui est très valable pour leur milieu, il n'y aura jamais de problème.

M. Julien: Quand on parle des comités agricoles, je regarde les expériences qui ont été vécues dans la région de Valleyfield, je regarde les expériences dans Papineau, je regarde les expériences dans ma propre région, lorsqu'il y a des documents comme ça qui arrivent ou des projets, ces comités-là sont consultés pour faire le lien vraiment entre le monde municipal et le monde agricole pour s'assurer qu'il y a une cohérence, au moins une cohabitation harmonieuse. À date, ce que j'en ai comme information, c'est que ça donne d'excellents résultats. La loi va le cadrer encore mieux, effectivement, sauf que le rôle du comité agricole permet un processus pour faire en sorte que les gens peuvent discuter entre eux autres et favoriser cette cohabitation harmonieuse là.

Dans ce sens-là, je pense que le comité agricole répond... En tout cas, quand vous parlez de la participation des citoyens au processus décisionnel, ça en est une façon de faire. Alors, je pense que, là-dessus, il faudrait que ce soit clair.

À votre page 7, vous parlez de problème de santé mentale. J'aimerais ça que vous reveniez là-dessus. Est-ce que vous associez le problème de santé mentale à la détresse psychologique?

M. Lachance (Gilles): Aussi. Malgré que ce n'est pas un des points majeurs. On n'affirme pas des choses. On n'est pas des médecins, on n'est pas des spécialistes. Alors, il y a des risques. La population croit qu'il y a des risques sur sa santé. Il y a beaucoup de gens qui ont confirmé qu'il y avait des risques sur sa santé. Pour nous, ça suffit, pour le moment, pour avancer des choses comme ça.

M. Julien: Moi, je pense qu'il faut faire attention quand vous dites ce genre de choses là. Hier, on a eu une discussion avec deux médecins où ils nous ont tout expliqué: les possibilités, les peut-être que. Mais, quand ils concluent, ils disent: On doit donc rester prudent face à ces résultats. Comme nous l'avons signalé plus haut, ces résultats ne nous permettent pas d'établir de relation de cause à effet entre l'activité porcine et la détresse psychologique.

(17 h 30)

Quand on met ça dans les journaux ou quand on le dit publiquement, évidemment, ça peut provoquer ce que j'appellerais une espèce de psychose. Là, le monde vont dire: C'est vrai. Moi, je pense qu'on joue avec des éléments, des termes. Juste à aller à la commission parlementaire sur la problématique mentale, vous allez voir qu'on fait attention à la façon dont on utilise ces termes-là. Et, quand vous utilisez ces expressions-là, je vous avoue que je trouve ça menaçant pour les gens, et ça, ça peut créer effectivement des problèmes lorsqu'on le dit. Surtout quand on n'est pas capable de le démontrer.

M. Lachance (Gilles): Nous, on amène ici des situations qui sont vécues par les citoyens. S'il faut relativiser des choses, relativisons-les, mais notre préoccupation, c'est qu'on ne tasse pas sur la table, du revers de la main, des risques qui sont quand même, d'après beaucoup de monde, là. Alors, faites la part des choses si vous voulez, mais ne balayez pas ça, un risque comme ça. S'il vaut 5 % pour vous, considérez-le comme tel, mais, si la population décide qu'on n'a pas considéré suffisamment un aspect qu'elle juge important, bien, vous vous le ferez dire. Nous autres, on vous véhicule ce qu'on entend dire et ce que les gens s'acharnent à dire encore, même si on temporise beaucoup de choses.

M. Julien: Je comprends qu'il y a des gens qui véhiculent ça, mais, moi, je pense que, lorsqu'on est en autorité dans une organisation, il faut faire attention de ne pas tout véhiculer ce qui se dit. Parce que, si je véhiculais tout ce qu'on me dit, j'en véhiculerais en crime, puis des affaires qui ne seraient pas toujours correctes.

M. Lachance (Gilles): On est obligé de dire quand même qu'il y a des risques qui n'ont pas tous été mesurés complètement et qu'il faudrait qu'on considère ça. Quand il y a la moitié de la population qui dit une chose puis qu'il y a deux médecins qui disent une chose, même s'ils ne s'entendent pas, il y a quelque chose. Quand ça ne sent pas bon, quelque chose, on dit: Il y a un problème, regardons.

M. Julien: En tout cas. Moi, j'ai posé la question aux deux médecins hier, à savoir s'ils connaissaient des producteurs qui avaient des problèmes avec ça, puis semble-t-il que non. En tout cas. Puis ils vivent là-dedans, eux autres.

À la page 8, j'aimerais ça – parce que vous parlez beaucoup de normes, d'immunité et autres – avoir votre perception sur différents éléments. Je ne ferai pas toutes les pages parce qu'il y a d'autres personnes qui vont parler aussi. On parle de réglementation, puis ça, c'est la grosse force. Je reconnais chez vous... C'est toujours la question très normative, la façon de faire la pratique.

J'aimerais avoir vos commentaires sur certains éléments. D'abord, l'approche avec toutes les nouvelles technologies où on va traiter directement à la source, un. Deux, vous parlez de l'importance de la participation des citoyens au processus décisionnel. Moi, je vais vous parler de l'importance que les producteurs sont en train d'accorder en se dotant de plan agroenvironnemental. Et ça, c'est un exercice qui n'est pas facile à faire, même au sein de la Fédération. Alors, le processus du développement durable, il est amorcé.

J'aimerais avoir vos commentaires là-dessus parce que, ça, vous n'en parlez pas beaucoup dans vos termes. Vous parlez de normes, vous parlez d'exigences – comme on donne l'immunité, il faudrait être plus réglementaire – mais, par contre, vous dites: Il faut absolument responsabiliser nos citoyens, il faut leur permettre d'aller dans le processus décisionnel. Mais les producteurs, qu'est-ce qu'ils font? Ils se responsabilisent actuellement par ces façons de faire.

M. Lachance (Gilles): On a remarqué, comme on l'a dit, qu'il y avait une amélioration non seulement dans le projet de règlement, mais il y en a une aussi dans la société des agriculteurs. Il y a un effort qui est fait.

Vous dites qu'on parle de normes, et tout. Tout ce qu'on veut, dans le fond, c'est s'assurer que, si on perd des droits de jouissance sur nos propriétés, les gens, que ce soit un autre agriculteur qui fait une autre culture, que ce soit un citadin qui est en campagne, que ce soit un autre industriel, etc., bien, il faudrait s'assurer qu'il n'y a pas d'injustice, en fait, sur ces citoyens-là, et ça devrait se compenser, il me semble, par une assurance que le milieu ne se dégradera pas. Si vous prenez des mesures qui améliorent l'affaire puis que le milieu ne se dégrade pas, on ne peut pas être contre ça, on doit être pour ça.

Ce qu'on vous dit, c'est que le développement durable, ça se pense à long terme et on doit déjà, tout de suite, prendre des mesures qui vont nous assurer qu'à long terme on va l'atteindre, le développement durable. Il faut poser des actes déjà, tout de suite. Il ne faut pas dire toujours que c'est très rentable, qu'il faut qu'on y aille, qu'il ne faut pas qu'on arrête la production.

M. Julien: Non. Moi, je pense que, si vous avez lu mes déclarations, j'ai toujours parlé de développement durable. Mais, quand vous parlez de bien privé, de jouissance, à ma connaissance le producteur, c'est un bien qui est privé puis c'est à lui. Il est chez lui. On va parler de cohabitation harmonieuse; moi, ça me va. Des méthodes pour arriver à ça, les nouvelles technologies; ça, ça me va. Alors, tout le monde a un bien privé, puis ce n'est pas sa faute s'il y a eu de l'étalement urbain puis que le monde est allé s'installer là. Ce n'est pas la faute du producteur, ça, là.

La Présidente (Mme Vermette): S'il vous plaît, je demanderais de retenir votre enthousiasme et vos acclamations au niveau du ministre. On n'a pas le droit à des applaudissements.

M. Julien: Mais je pense qu'on partage le même point de vue dans le sens du développement durable. Ça, là-dessus, je vous rejoins, M. le président. Je pense que c'est la façon dont on veut le réaliser. Il faut protéger notre économie, je suis d'accord. Vous l'avez dit: économie, social, environnement. Je suis bien d'accord avec ça. C'est sur la façon de le faire et sur la façon dont on le dit. C'est ça qu'il est important de retenir. Parce que, vous savez, quand on arrive avec des règlements qu'on a vus dans l'Acadie, ça n'a pas de maudit bon sens. Je ne dis pas que toutes les municipalités le font, mais ça n'a pas de bon sens. Il faut trouver un moyen. Votre rôle, ce à quoi je m'attendrais de vous... Est-ce que je peux vous dire ce que j'attendrais de vous? C'est de favoriser cette cohabitation harmonieuse, mais pas en disant... en faisant attention à ce qu'on dit.

M. Lachance (Gilles): Vous avez parlé de normes, tantôt. On n'est pas pour la multiplication des normes. On vous a dit qu'on ne voulait pas que ce soit compliqué pour les municipalités. On est pour que, s'il y a une norme, elle soit plus sévère pour décourager les projets qui détruisent le patrimoine. C'est juste ça. Si vous jouez là-dedans dans un délai de temps x et qu'on sait qu'après peu de temps ça va se réaliser, on est déjà dans une avenue où on s'en va vers le développement durable. Il s'agit de savoir si ce qu'on fait actuellement, ça va conduire à ça et si on est assez garantis que ça va conduire à ça. L'élément qui nous fait dire ça, c'est surtout la multiplication des projets et surtout celle des gros projets. C'est juste ça qui fait problème. Parce que, si on avait une agriculture familiale comme on en a toujours eu, il n'y aurait peut-être pas de problème. Donc, on attire votre attention sur des points où, si vous nous dites que vous nous donnez la garantie, on ne la perçoit pas nécessairement, nous autres, quand on voit le nombre de projets qui s'ouvrent, puis la grosseur, puis l'endroit où ils vont se construire et les technologies qu'ils emploient. Il faut que vous pensiez à la population, à ce qu'elle voit et à ce qu'elle pense, elle.

M. Julien: Je vais laisser parler mes collègues, mais je voudrais juste vous donner deux chiffres, en partant. La progression depuis 1984 jusqu'à aujourd'hui, c'est 6 % au Québec et 36 % dans les Prairies. Je voudrais que vous reteniez ça. Comparez nos projets par rapport à ce qu'on voit dans certains États américains, vous allez vous apercevoir qu'on est bien petit.

M. Lachance (Gilles): Ça, c'est un autre élément, les États américains. On n'est pas obligés de calquer sur ceux qui font mal.

M. Julien: Ce n'est pas ça que j'ai dit, mais il faut faire les comparaisons correctement.

La Présidente (Mme Vermette): Je passerais la parole au représentant de l'opposition officielle et critique en matière d'agriculture.

M. Farrah: Merci, Mme la Présidente. M. Lachance, madame, messieurs, bienvenue à la commission. Je commencerais par la page 14 et je poserais la question au ministre, parce que le ministre n'a pas répondu à votre conclusion. Qu'est-ce qui se dégage de plus en plus depuis le début de la commission? On ne va pas en tirer des conclusions encore, parce qu'il reste d'autres groupes qui doivent venir demain et la semaine prochaine, mais il semble y avoir une méfiance, et je pense que c'est légitime, à l'égard du gouvernement, peu importe de quel bord, à savoir qu'est-ce que vous allez accoucher comme règlement? Ça va être quoi, ces règlements-là? Autant au niveau du milieu agricole qu'au niveau du milieu municipal ou au niveau des citoyens ordinaires, il y a une inquiétude immense, compte tenu de votre attitude depuis peut-être deux ans, deux ans et demi. Alors, ces gens-là, comme plusieurs, vous demandent: Est-ce que vous avez l'intention de tenir une commission parlementaire sur les règlements précis qui vont être décrétés par le gouvernement pour, justement, faire en sorte qu'on puisse discuter de façon très large de choses concrètes, réelles et sur quoi on va se baser précisément? Je pose la question à M. le ministre. Vous permettez?

M. Julien: Ce n'est pas notre intention. On fait une consultation justement pour connaître le point de vue des gens. On s'entend sur des facteurs. Je pense que, là-dessus, on partage complètement le point de vue sur le développement durable. Ce qu'ils veulent savoir, c'est comment on va le traduire. Mon intérêt, c'est de m'assurer que les gens vont avoir le droit de produire.

M. Farrah: Parce que là, à la page 14...

M. Lachance (Gilles): Oui, mais pas le droit de produire n'importe quoi.

M. Julien: Je viens de vous dire qu'on était d'accord sur le développement durable.

M. Lachance (Gilles): O.K.

M. Farrah: Parce que vous dites bien, dans votre mémoire: «Toutefois, devant l'importance de l'enjeu que nous avons signalé, nous vous recommandons qu'une nouvelle consultation soit faite avant l'adoption du ou des règlements comme tels et que, cette fois, elle soit vraiment plus large.» Alors, c'est la raison pour laquelle j'abordais ça. Donc, vous nous confirmez que vous n'avez aucunement l'intention de consulter suite à la parution de ces règlements-là.

M. Julien: Non. Mais j'aimerais ça, par exemple, que vous posiez des questions à nos gens qui sont là. Ce serait important.

M. Farrah: Par ailleurs, vous dites, à la page 11, que vous trouvez que les municipalités ne sont pas équipées ou même n'ont pas la compétence requise pour appliquer la réglementation. On sait que l'intention du gouvernement est de se désengager, en quelque sorte, et de donner le pouvoir aux municipalités d'appliquer cette réglementation-là. Par contre, ce discours-là va vraiment à l'encontre des unions municipales. Entre autres, l'UMQ est venue ce matin alors qu'eux autres revendiquent, oui, c'est important pour eux, ils devraient récupérer ce droit-là.

(17 h 40)

D'autre part, également, l'UMRCQ va venir – je pense que c'est demain, si ma mémoire est fidèle – et elle s'aligne sur la même démarche que l'UMQ. Pouvez-vous expliciter davantage? Est-ce que vous avez des cas concrets au niveau de vos municipalités respectives qui démontrent nettement que les municipalités sont incapables de bien gérer ou d'appliquer un règlement qui leur sera octroyé par le gouvernement?

M. Lachance (Gilles): Nous, toute notre opinion est basée sur l'analyse des milieux, tout ce qu'on a su des milieux. Ça fait six mois, huit mois qu'on se promène dans la province pour essayer de connaître les problèmes et de savoir comment les gens voient à leur affaire. On a vu des petites municipalités puis on a vu des municipalités un petit peu plus grosses, de 15 000 à 20 000 habitants, qui ont donc des conseils de ville mais qui n'ont pas le même niveau d'expertise dans leurs conseils. Il y a même des municipalités de 15 000, 20 000 habitants qui ne savaient pas comment appliquer les règlements concernant le problème des porcheries. Elles ont donné des informations à des gens qui posaient des questions, des informations sur trois, quatre jours qui ont fait que tout se contredisait et les gens n'étaient pas capables de savoir la réalité. Et là ils avaient à se prononcer, ils avaient à voter. Il y en a même qui sont allés voter avec l'information qu'ils avaient et l'information était fausse. Ils se sont révoltés contre ça. On parle de climat social, là. Ça va jusque-là.

Donc, toutes les municipalités ne sont pas au même niveau, mais même des municipalités moyennes ont de la difficulté avec leur greffier, par exemple, à donner de l'information. Puis le maire n'est pas capable de répondre non plus, il se retourne vers le greffier, puis le greffier ne le sait pas. On a vu des municipalités dépenser de grosses fortunes à aller consulter des experts, les trois, quatre, cinq experts en réglementations municipales puis en lois municipales, payer de gros frais pour essayer d'avoir des réponses, puis on avait un greffier-avocat qui était là, puis il n'était pas capable. Ça lui prenait son expertise. Ça prenait des semaines avant qu'on ait des réponses, puis, quand on les avait, ça modifiait les choses qui avaient déjà été dites par le greffier.

Alors, on dit: C'est peut-être normal que ça se passe comme ça, mais ce n'est pas normal, dans un autre sens, que la municipalité ne soit pas capable, dans des choses de fond comme ça, chez elle, de donner des réponses claires et nettes sur l'application de tel article et de telle autre chose. Puis ce n'est pas normal de faire un règlement, puis qu'on mette tant d'argent pour aller chercher des consultants à l'extérieur parce qu'il n'est pas gérable. Ce serait peut-être important qu'on pense que notre règlement devrait être plus simplifié pour que les gens soient capables de vivre avec. Si on leur donne des responsabilités supplémentaires, il ne faut pas les écraser avec des affaires encore. C'est un peu ça, notre optique.

M. Farrah: Alors, vous pensez que, de façon pratique, là, la proposition gouvernementale va faire en sorte de semer la confusion. Ce serait pratiquement inapplicable, quoi?

M. Lachance (Gilles): Je n'irais pas jusque-là, mais je dirais... Comme il y a déjà beaucoup de difficultés dans certains milieux, surtout dans les plus petites municipalités rurales, bien, on se dit qu'il faudrait peut-être penser à simplifier plus qu'à empirer. Peut-être que ça pourrait aider. Surtout si on veut décentraliser, bien, je pense qu'il ne faudrait pas rendre leur situation pire. On pense que ce règlement-là, avec toutes les décisions qu'ils vont avoir à prendre, il nous semble que ça n'améliorera pas la situation chez eux. C'est une opinion, mais on se base sur ce qu'on voit.

M. Farrah: Maintenant, au niveau de la cohabitation dans le milieu rural, c'est bien évident qu'il faut travailler pour dégager une harmonie, en tout cas le plus possible, pour faire en sorte que tout le monde puisse occuper le territoire et pour les fins de leurs activités propres également, toujours en respectant les autres, ça, j'en conviens. Sauf qu'à la lumière de la lecture que j'ai faite de votre mémoire, et je vous ai entendus, au niveau des odeurs, entre autres, vous, est-ce que votre position comme telle... Parce que, dans une situation comme celle-là, je pense que c'est inévitable qu'il faille que chacun mette de l'eau dans son vin également. Si on veut en arriver à avoir une cohabitation acceptable, il faut que chacun mette de l'eau dans son vin. À la lumière des commentaires qu'on a entendus, est-ce que je comprends bien à l'effet qu'au niveau des odeurs la norme, vous, c'est zéro?

M. Lachance (Gilles): C'est-à-dire que, pour nous, là, on peut bien atténuer les odeurs. Ça va être mieux pour les citoyens, on ne peut pas dire le contraire.

M. Farrah: On en convient.

M. Lachance (Gilles): Maintenant, on se dit: Il ne faudrait pas que ce soit juste une façon cosmétique de régler les problèmes de fond qui sont beaucoup plus gros que ça, qui sont en dessous de toute notre affaire de porcheries et autres du même genre. C'est ça qu'on dit. Si on réussit à atténuer les odeurs, c'est déjà mieux. Maintenant, on ne voudrait pas que ça s'arrête là, parce qu'on se dit qu'on ne réglera pas le problème de fond. Alors, c'est juste ça, la question des odeurs. On a déjà vécu avec pendant un bout de temps, puis on est capables de vivre encore avec en général. Sauf que les gens, ils doivent avoir la conviction, nos citoyens doivent avoir la conviction que le problème, on va le régler. Et, si on leur dit qu'on règle les odeurs, là, puis que le problème va être réglé, bien, c'est perçu comme ça et il ne faut pas que ce soit perçu comme ça.

Il faut qu'on dise: O.K., les odeurs, c'est une étape. On règle ça, mais tout de suite après on fait autre chose. Et le règlement devrait prévoir ce qu'on va faire en supplément, ou encore l'ensemble des règlements que vous essayez... On a un problème dans l'évaluation de vos affaires. C'est que là on ne parle que des odeurs puis on n'a pas d'autre règlement qui s'en vient régler le problème de la pollution. Donc, on se dit: Comment ça va se faire? On se pose des questions dans ce sens-là.

Si on l'abordait dans l'ensemble, bien, on vous dit: Il y a des éléments qui devraient être, dans l'ensemble, pour le développement durable. Si vous ne les mettez pas tout de suite, vous avez vos raisons, il va falloir que vous les mettiez à un moment donné parce que la population va guetter ça. Nous autres, on se charge, avec la population, de dire: Écoutez, là, votre qualité de vie «est-u» correcte, là, suffisante, avec les règlements qui s'en viennent? Là-dessus, nous autres, on va vous poser des questions, puis on va les poser autant aux agriculteurs qu'aux autres. On a des membres agriculteurs, comme les autres, dans notre organisation. On va continuer notre travail là-dessus.

Notre idée, c'est de dire: Pourquoi on n'en viendrait pas, tous les citoyens, justement, à l'harmonie, en disant: Mais écoutez, là, si on développait des projets qui sont bons pour nos milieux, on va être en harmonie.

Notre intervention, elle veut aider les producteurs en les éveillant à développer des projets qui vont faire une plus-value dans notre milieu. Elle veut aider le ministre, pour ses agriculteurs, à s'en aller dans ce sens-là. On veut aider celui de l'Environnement en lui disant: Écoute, on pense qu'il y a des difficultés à régler les problèmes de l'environnement, de la façon dont on le fait. Mais on veut lui donner des idées ou des éléments auxquels on tient beaucoup pour qu'il améliore son projet.

Bien, je pense qu'on va l'avoir, l'harmonie, si tout le monde se met ensemble puis qu'on arrive à quelque chose. Mais les gens, notre population, dans l'état actuel des choses, aigrie comme elle l'est – parce qu'on vous dit que c'est tendu, il y a des endroits où c'est très tendu – bien, on vous dit: Il va falloir que les gens perçoivent qu'on avance vraiment et que ce n'est pas juste superficiel, ce qu'on fait.

M. Farrah: C'est bien évident que les odeurs peuvent peut-être engendrer la déprime, mais, quand tu ne travailles pas, puis que tu es sur le BS, ça engendre pas mal la déprime aussi. Ça fait qu'il y a un équilibre à avoir de ce côté-là.

Moi, en terminant, quand vous parlez de réglementation, donc, compte tenu que vous dites que les municipalités ne sont peut-être pas les mieux habilitées pour l'appliquer, qui devrait l'appliquer, ce règlement-là?

M. Lachance (Gilles): Moi, je n'aime pas cette question-là parce que ce n'est pas sûr que ce n'est pas les municipalités qui sont les meilleures pour gérer ça, parce qu'elles sont proches de la population. Je vous dis: Ne leur donnez pas des choses difficiles à gérer plus qu'elles ne sont capables d'en prendre aujourd'hui, déjà.

M. Farrah: Bien là, si c'est difficile, qui doit...

M. Lachance (Gilles): Bien là, si c'est difficile, c'est vous autres qui avez le choix, pitchez-leur des choses difficiles. Mais on n'est pas d'accord avec ça.

M. Farrah: Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Vermette): Oui. Alors, je passerais la parole au ministre de l'Environnement et de la Faune. M. le ministre.

M. Cliche: Oui. Quelques notes, quelques points d'information avant de soulever certaines questions de fond avec vous. D'abord, il y a un Règlement sur la réduction de la pollution d'origine agricole. On traite aujourd'hui des nuisances, mais il ne faut pas oublier qu'il y a un Règlement sur la réduction de la pollution d'origine agricole qui, lui, va porter sur l'environnement physique.

Aujourd'hui, on traite de l'environnement social. Il n'y a pas que l'environnement physique. Ce Règlement sur la réduction de la pollution d'origine agricole a fait l'objet d'une prépublication, il y a de ça deux ans. Donc, comme période de consultation, deux ans, ça commence à être long. Il y a eu une table de concertation qui a duré plusieurs mois. Alors, il ne faut pas dire qu'on arrive avec un règlement qui ne sort de nulle part et qui n'a pas fait l'objet d'une vaste consultation.

Il est faux également de penser qu'on veut juste traiter du cosmétique et qu'on ne veut pas s'attaquer à la question de la pollution agricole dans les nappes phréatiques et dans les cours d'eau.

Ceci étant dit, également la notion qu'à un certain moment donné, à la grosseur d'une unité de production, il y aurait un passage de l'agriculteur à l'industriel. La notion d'agriculteur industriel, ce n'est pas clair dans mon esprit, ce que vous voulez dire. Peut-être que si vous pouviez être plus explicite, j'apprécierais.

Mais il y a deux choses fondamentales que je veux soulever avec vous: c'est lorsque vous dites que vous voulez être au coeur du centre de processus décisionnel et, la deuxième chose que je veux soulever avec vous, c'est vos relations par rapport aux municipalités.

Abordons la première. Je pense que ce sont deux choses fondamentales, en tout cas, qui, pour moi, sont importantes. J'essaie en ce moment de mettre en place un comité de vigilance à Sainte-Luce et au Bic, justement. Les gens de mon ministère pensent que ces projets-là de porcherie pourraient s'implanter dans le respect de l'environnement physique et de l'environnement social. Ils sont convaincus de ça, plan de fertilisation à l'appui, volonté du promoteur – Purdel, dans ce cas-ci – de faire toutes sortes de choses pour s'en assurer, respecter la réglementation actuelle, et ça respecterait même la réglementation sur laquelle on travaille en ce moment.

(17 h 50)

J'essaie de mettre en place un comité de vigilance. Les producteurs sont prêts, les municipalités semblent prêtes et, chaque fois qu'on demande aux citoyens que vous êtes, il y a toujours une réticence. J'ai l'impression que vous voulez être au coeur du processus décisionnel, mais, lorsqu'on vous offre la possibilité d'y être vraiment, vous avez des difficultés. Est-ce que vous percevez votre rôle comme étant plus celui de gens qui disent des choses publiquement, qui alertent les gens, si je peux m'exprimer ainsi? Vous avez dit: On est là pour appuyer les gens là où il y a des problèmes. J'aimerais ça, avant d'aborder l'autre question de vos relations avec le monde municipal, vous entendre sur qu'est-ce que vous voulez dire quand vous dites être au coeur du centre de processus décisionnel et comment, dans ce cas-là, expliquer votre réticence à embarquer dans de véritables comités de vigilance qui seraient une vigile par rapport à l'implantation de projets?

M. Lachance (Gilles): Notre relation avec le monde municipal... Le monde municipal, c'est un niveau de décision, dans toute l'affaire. Donc, on est en relation avec eux autres et, de plus en plus, on va entrer en relation avec le municipal. Notre idée, ce n'est pas de tirer en l'air des choses que les citoyens nous disent, c'est de prendre conscience des problèmes qu'il y a en dessous des problèmes que les citoyens ont, c'est de nous en faire une tête et c'est de voir comment on peut régler ce problème-là, nous, de notre côté, en allant voir les instances municipales, les instances provinciales, etc. D'un autre côté, c'est d'amener les citoyens eux autres mêmes à se donner des instruments pour évaluer les choses comme il faut, de sorte qu'ils ne partiront pas en peur puis qu'ils n'iront pas dire des choses qui ne sont pas valables puis qui sont vides de sens, etc. Ils vont voir la réalité de leur problème puis ils vont essayer de le régler avec leurs propres moyens. On les respecte jusqu'au point de leur montrer à pêcher et non pas de pêcher pour eux autres. Maintenant, s'ils ont besoin... On n'est pas des gens supérieurs, on ne se croit pas de même.

Ça, c'est pour la partie de nos relations avec les autres. Donc, notre idée, c'est la conciliation de tout le monde et on pense que la conciliation va se faire sur le développement durable. Si toutes les parties s'impliquent dans le sens du développement durable, en présentant des projets qui sont une plus-value, une amélioration de la situation dans le monde rural et non pas une dégradation, on se dit que tout le monde va être d'accord, on va faire cohésion et là les gens vont pousser ensemble les projets.

Aujourd'hui, ce n'est pas le cas, ce n'est pas la situation. Donc, on essaie de dire aux gens: Écoutez, vous avez raison, d'une certaine façon, parce que les projets qui se présentent sont nuisibles d'une certaine façon. On est d'accord. On se fait une tête. Ce n'est pas juste vous qui nous le dites. On ne fait pas juste se laisser emplir par vous autres. On est sûrs de ça, nous autres aussi. Donc, on travaille cet aspect-là et c'est pour ça qu'on est ici aujourd'hui puis qu'on dit aux citoyens: Patientez, patientez, faites ce que vous pouvez faire dans votre milieu, essayez de comprendre la situation puis tous les autres qui sont dans le décor, puis, nous autres, on va faire notre travail, nous autres aussi, de notre bord puis peut-être qu'on va arriver finalement à des consensus qui vont faire qu'on va pouvoir avancer. C'est notre position concernant les différents...

M. Cliche: Donc, c'est de l'information à la population que vous faites.

M. Lachance (Gilles): On fait dans les deux sens. On va chercher de l'information de la population. Parce que ces gens-là nous voient comme, entre guillemets, des gens qui ont l'expérience de tout le monde dans la province, qui ont les mêmes problèmes, puis ils nous voient un petit peu comme des experts de problèmes comme ça. On peut rire de ça, je l'ai mis entre guillemets. On est habitués de parler, de recevoir des problèmes comme ça.

M. Cliche: Rapidement, moi, c'est la notion d'imputabilité. Regardez le problème que ça peut nous poser. Nous, nous sommes élus, nous sommes donc imputables devant la population. Ultimement, celui qui autorise les projets de développement au Québec, c'est le ministre de l'Environnement et de la Faune. Les bonnes choses avec les ministres, c'est qu'on peut les aimer, on peut les haïr, on peut les défaire aux élections et on est imputables devant la population dans notre processus démocratique.

La même chose pour les élus municipaux, les conseillers. En ce moment, dans des projets de vigile – je reviens à mon affaire de vigile – la municipalité, elle est prête à assumer ses responsabilités et à être imputable devant la population d'une vigile, la population qui l'a élue.

Alors, moi, c'est la notion d'imputabilité. Vous êtes imputables devant qui? Qui vous élit? Qui vous nomme? Vous êtes imputables devant qui? C'est ça, ma...

Je prenais connaissance hier d'un communiqué de presse de M. Grégoire Tanguay, qui était votre prédécesseur, si je comprends bien.

M. Lachance (Gilles): Non.

M. Cliche: Non?

M. Lachance (Gilles): Il était le directeur payé à temps plein.

M. Cliche: O.K. Il était chez vous, en tout cas.

M. Lachance (Gilles): Payé à temps plein pour faire des démarches de recherche, pour faire des contacts.

M. Cliche: O.K. Je ne veux pas entrer dans le détail. Mais il n'est plus là, puis, dans son communiqué de presse, ce n'est pas clair pourquoi, puis comment. J'aimerais que vous m'expliquiez votre réflexion, votre perception de l'imputabilité de votre processus décisionnel, à vous, qui vous amène à dire que vous parlez au nom des citoyens du monde rural. Comment vous voyez ça? Versus les municipalités, on a beau haïr le maire ou dire que le conseiller, il ne connaît rien, il est élu tous les quatre ans.

M. Lachance (Gilles): Non. C'est que notre organisme est issu des gens de la base qui avaient des problèmes puis qui ne voyaient pas le moyen de s'en sortir, qui se sentaient démunis devant la grosse machine pour régler les problèmes. La grosse machine, pour eux, c'est la municipalité, c'est ce qui se passe à l'extérieur pour prendre les décisions. Donc, ils se sentaient démunis. Ils ont décidé de se rencontrer puis de dire: On «peut-u» faire quelque chose ensemble pour régler nos problèmes? Ils se sont nommés des représentants, qui sont nous et d'autres, qui viennent de partout dans la province. Il y en a de Montréal. Il y en a de l'Estrie. Il y en a de Québec. Il y en a de la Gaspésie, etc. Donc, nous sommes nommés, élus, et l'assemblée générale, à la fin du mois, qui va élire les administrateurs et... Pour le moment, c'est nous qui sommes élus.

M. Cliche: Parfait.

M. Lachance (Gilles): Et on doit rendre nos comptes à notre assemblée générale.

Le cas de M. Grégoire Tanguay, c'est un cas très particulier, interne, où il est choqué qu'on ait pris des décisions le concernant. Alors, il vous a donné un communiqué. Je viens de l'apprendre en entrant ici, à 16 h 50. Je ne le savais pas. Ça ne me dérange pas plus que ça.

M. Cliche: O.K. Donc, vous répondez à ma question. Vous êtes un regroupement québécois, si je peux m'exprimer ainsi, de citoyens qui, au-delà des frontières des municipalités, vivez les mêmes problèmes et vous avez un processus qui vous permet d'avoir une instance représentative de ces gens-là, ce que vous êtes. C'est ça? O.K. C'est juste pour comprendre comment vous vous situez par rapport à des territoires municipaux.

La Présidente (Mme Vermette): Alors, très brièvement, parce que votre temps est écoulé.

M. Lachance (Gilles): Il faut dire qu'on est jeunes et qu'on se développe de plus en plus.

M. Cliche: O.K. Correct.

La Présidente (Mme Vermette): Alors, je vous remercie. M. le député de Beauharnois-Huntingdon.

M. Chenail: Oui. Mme la Présidente, dans la même ligne de pensée de M. le ministre, combien vous avez de membres? De quelle façon vous pensez fonctionner dans l'avenir? Pensez-vous devenir une union comme l'UPA? De quelle façon vous pensez fonctionner?

M. Lachance (Gilles): On est une organisation de la base et on espère s'autofinancer et répondre aux besoins de notre assemblée générale. Donc, on n'est pas un organisme qui s'en vient lutter contre d'autres organismes. On ne s'en vient pas se mettre en face de l'UPA, puis des choses comme ça.

M. Chenail: Je comprends votre bonne foi puis votre bonne volonté, mais ça ne nous dit pas combien vous avez de membres au Québec. Vous parlez de certains dossiers qu'on connaît tous, qu'on a vécus, chacun dans nos comtés. Mais de quelle façon vous en êtes...

M. Lachance (Gilles): Si vous avez regardé le début du document, le petit bout que je n'ai pas lu, il y a une trentaine de comités locaux, qui ont des statuts soit corporatifs, soit non corporatifs, auxquels on est rattachés, là, nous autres. En plus, on a actuellement – ça fait rien que six mois qu'on existe, là – 235 membres qui viennent de partout dans la province et des différentes couches de la société rurale.

M. Chenail: Dans ces membres-là que vous avez, les 235 membres, la plupart, c'est des gens qui se sont sentis...

M. Lachance (Gilles): Ce sont des membres des comités locaux, bien souvent, qui ont décidé de participer, de prendre une part et de s'occuper de son association.

M. Chenail: Dans les mois à venir, de quelle façon vous pensez gérer votre union, si on peut appeler ça comme ça?

M. Lachance (Gilles): Bien, on a une assemblée générale qui s'en vient. On va présenter un plan d'action à l'assemblée générale. Le plan d'action va porter sur le membership, le développement de l'organisation. Il va porter sur la démarche du développement durable. Notre travail, c'est d'aider les citoyens sur le terrain à régler leurs problèmes. S'ils considèrent qu'ils ne sont pas capables de les régler eux-mêmes, on va les aider, et on va essayer d'apporter aux dirigeants, dans n'importe quel domaine de développement, des propositions qui vont aider à régler les problèmes de la base. Donc, on va se garder un contact avec vous, on va se garder un contact avec les MRC, les municipalités, et on va se garder un contact avec nos citoyens.

M. Chenail: Votre organisation, en fait, va être bâtie d'après des membres, mais ne sera pas reconnue officiellement, que ce soit par le gouvernement ou par le monde municipal, ou ces choses-là.

(18 heures)

M. Lachance (Gilles): Ça, c'est à venir. Il faut qu'on se développe étape par étape. La prochaine étape, c'est de dire: On consolide notre membership. La deuxième étape, c'est: On veut être libres, donc il faut s'organiser sur le plan de l'autofinancement. On a des contacts de faits pour qu'on soit capables de vivre. Si on peut être appréciés, dans notre démarche pour aider la communauté à se développer, au point que quelqu'un veuille nous offrir son appui, on le regardera.

M. Chenail: Vous savez que l'UPA a quand même des bureaux régionaux qui donnent un service assez bien à la population rurale. Il faut tenir compte de ça aussi.

M. Lachance (Gilles): Oui. Ce qu'on a constaté, c'est que la population rurale demande actuellement une représentation aussi sous l'aspect du développement durable qu'on fait pour eux. On est nés d'un besoin. On n'est pas nés d'en haut, là. On n'est pas parachutés pour faire, par exemple, du développement économique ou faire autre chose. C'est la base qui a dit: On a besoin de vous, on a des problèmes.

M. Chenail: Vous êtes en train de me dire que vous passez un message à l'UPA qu'il faudrait peut-être qu'il y ait d'autres personnes qui travaillent dans un autre domaine qui pourraient travailler avec eux autres.

M. Lachance (Gilles): Mais, en passant, si on peut dire, la couverture de nos activités puis de notre mandat couvre une partie de la couverture de l'UPA, nécessairement. On a des agriculteurs avec nous autres puis ils en ont, eux autres aussi. Mais ça ne sera pas pour les mêmes buts, les mêmes objectifs qu'on va être là-dedans, puis ça ne sera pas pour nous opposer à l'UPA.

Quand on aura quelque chose à dire à l'UPA qu'ils n'aiment pas, bien, on le dira. Mais ce sera passager, ce sera un point dans nos activités.

M. Chenail: À date, avez-vous tenté de vous asseoir avec l'UPA puis de discuter avec eux autres?

M. Lachance (Gilles): Il y a eu des démarches de notre directeur général dans les six mois, depuis qu'on est nés. Mais, comme je vous dis, on a une très courte vie encore, là.

M. Chenail: O.K. Je vais passer la parole à mon collègue.

La Présidente (Mme Vermette): M. le député d'Orford. Il reste quatre minutes.

M. Benoit: D'accord. Pour les fins de compréhension de nos concitoyens ici, les groupes d'environnement souvent sont venus au monde quand il y a eu une agression. L'Union des citoyens du monde rural est un cas exemplaire, typique de ce qui se passe.

Dans un beau petit rang du Québec, à trois quarts d'heure d'auto d'ici, qui s'appelle L'Hêtrière-Ouest, dans la maison d'un médaillé d'or en agriculture, on apprend soudainement qu'il y a déjà une porcherie dans le rang, un beau rang. On apprend qu'un producteur de porc va s'installer là et qu'il y a eu des magouilles. C'est un peu ça qui s'est passé entre la ville puis le ministère, puis des officiers, puis plein de monde qui a de la misère à répondre à bien des questions. Instantanément, dans la maison de cet agriculteur-là, médaillé d'or – ce n'est pas un gars qui a un chalet – s'est bâti...

M. Julien: Mme la Présidente, je m'excuse...

M. Benoit: M. le ministre, vous parlerez quand ce sera votre tour.

La Présidente (Mme Vermette): Question de règlement.

M. Julien: Question de règlement.

La Présidente (Mme Vermette): Oui, M. le ministre.

M. Julien: Je pense qu'il faut faire attention aux expressions que vous utilisez, là.

M. Benoit: Ah! il s'est passé plein de choses là, comme ailleurs. Et est venu au monde un groupe de citoyens qui a décidé de se prendre en main, et je reprends la phrase de Gilles Lachance quand il dit: «Des citoyens qui ne voulaient pas se faire imposer...» Et c'est ça, le cas, M. le ministre, c'est des citoyens.

Tantôt, vous avez dit: «C'est-u» la faute aux agriculteurs s'il y a des gens qui ont des chalets à côté de chez eux? Ils se sont mis à applaudir. Mais, dans la vraie vie, c'est des agriculteurs qui ont vendu ces terres-là, un bon jour, pour qu'il y ait des chalets à côté de chez eux. Ce n'est peut-être bien pas leur faute, mais il y en a quelque part qui ont dû avoir une responsabilité là-dedans, dans l'étalement urbain aussi. Moi, chez nous, je n'ai personne sur mon terrain. Je n'en ai pas vendu, de bouts de mon terrain. Si j'en vends un, je vais avoir un voisin. Or, il faut faire attention, M. le ministre, quand vous dites que les groupes d'environnement charrient. Vous essayez d'insinuer ça depuis deux jours. Je pense que tantôt vous avez charrié allégrement.

Ceci dit, je prends ce que l'Union des citoyens du monde rural, le citoyen...

M. Julien: Mme la Présidente, j'aimerais que le député d'Orford fasse attention à ses propos, d'abord.

M. Benoit: Il n'a pas la permission de me couper, Mme la Présidente.

M. Julien: J'aimerais ça que vous fassiez attention à vos propos.

La Présidente (Mme Vermette): M. le député d'Orford, on avait commencé sur une bonne note. J'espère qu'on va pouvoir terminer sur une bonne note. On a parlé beaucoup d'harmonie et de coopération, alors...

M. Benoit: Oui. Moi, je suis toujours sur une très bonne note, Mme la Présidente, où j'essaie de faire valoir que ce groupe-là regroupe un certain nombre de groupes. Et je suis surpris de l'agressivité de la part du ministre à leur égard. Je pense qu'ils viennent nous donner un message qu'on doit écouter. Il y a des groupes au Québec qui se sont fait imposer des choses. Là comme ailleurs, pas plus que si c'était une compagnie qui voulait couper du bois sans aller chercher les permis, faire de la coupe à blanc, je serais d'accord avec ça. Moi aussi, comme citoyen, je me battrais si ça se passait chez nous. C'est ça, leur réalité. Ce sont des citoyens à qui on a essayé d'imposer des choses.

Je finirai en vous disant qu'un bon jour il y a un journaliste d'un journal de Coaticook qui m'a appelé – je vais vous le nommer – Christian Caron, qui est fils d'agriculteur. Il a dit: J'essaie de comprendre comment ça marche, cette histoire-là. Bien, j'ai dit: Embarque avec un citoyen qui a de la misère puis suis-le dans toute sa démarche pour voir comment c'est compliqué. Et, au bout d'un an ou de six mois ou de neuf mois, il m'a dit: C'est absolument incroyable, c'est à n'y rien comprendre. Tu vas à l'hôtel de ville, ils te disent que c'est le ministère, ils te disent que c'est la MRC, tu reviens... Finalement, c'est à n'y rien comprendre. Or, que ces gens-là, aujourd'hui, soient un peu frustrés, qu'ils nous disent qu'ils regroupent des gens qui sont frustrés, bien, moi, je comprends ça. Parce que, dans la vraie vie, on a un bon groupe.

Et la pétition de 573 citoyens de Sainte-Luce qu'on a déposée aujourd'hui... Savez-vous combien il y de citoyens à Sainte-Luce? Il y en a 900. Il y en a 573 qui ont dit qu'ils n'en voulaient pas, de la porcherie. J'espère que, sur votre comité que vous allez créer, M. le ministre, il va y avoir au moins la moitié de ces citoyens-là qui va pouvoir s'exprimer là-dedans. Il y a un problème, au Québec, là. Puis, vous, vous êtes après agresser ces gens-là qui viennent d'essayer de défendre l'environnement. Ça n'a pas d'allure! Alors, j'arrête ici.

La Présidente (Mme Vermette): M. le député d'Orford, c'est terminé. Vous avez pris vos quatre minutes. Malheureusement, les gens ne pourront pas intervenir là-dessus. J'espère que nous allons pouvoir, à la suite de la fin de nos travaux, nous reposer et reprendre le débat d'une façon beaucoup plus harmonieuse, demain.

M. Cliche: Si vous permettez, les questions que j'ai posées sur comment ils fonctionnaient... Je le savais, comment ils fonctionnaient. Et je tiens à souligner leur travail. C'est important qu'il y ait des citoyens, dans différentes régions du Québec, qui vivent les mêmes problèmes, qui puissent se regrouper et partager ça. Ils font un bon travail là-dessus. Moi, les questions que j'ai posées, à titre de ministre de l'Environnement et de la Faune, pour connaître comment ils fonctionnaient et comment ils en arrivaient à dire: Je représente le regroupement des citoyens du monde rural, ce n'est pas pour essayer de miner le bon travail qu'ils font. Au contraire, ils font...

La Présidente (Mme Vermette): Je regrette, c'est terminé. Nous ajournons nos travaux à demain, 9 heures.

(Fin de la séance à 18 h 7)


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