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(Onze heures vingt-deux minutes)
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, messieurs!
La commission élue permanente des affaires municipales reprend ses
travaux pour étudier, article par article, le projet de loi 38, Loi sur
la participation gouvernementale au financement des municipalités.
Les membres de la commission, ce matin, sont: M. Laplante (Bourassa), M.
LeMay (Gaspé), M. Middlemiss (Pontiac), M. Ciaccia (Mont-Royal), M.
Fallu (Groulx), M. Lachance (Bellechasse), M. Léonard (Labelle), M.
Rochefort (Gouin), M. Rocheleau (Hull), M. Saintonge (Laprairie), M. Tremblay
(Chambly).
Les intervenants: M. Maciocia (Viger), M. Bisaillon (Sainte-Marie), M.
Lincoln (Nelligan), M. Dauphin (Marquette), M. LeBlanc (Montmagny-L'Islet), M.
Leduc (Saint-Laurent), M. Léger (Lafontaine), M. Paré
(Shefford).
Nous en étions à l'article 2. Il y avait un amendement du
député de Laprairie, qui se lisait ainsi: "Que l'article 2 soit
modifié en remplaçant, dans la première ligne, les mots
"au jugement du gouvernement" par les mots "de l'avis de la Commission
municipale". M. le député de Jean-Talon...
M. Saintonge: II avait la parole, mais il n'est pas ici ce
matin.
Le Président (M. Desbiens): ...avait la parole.
M. Saintonge: M. le Président...
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Laprairie.
M. Saintonge: ...sans en faire une formalité ou un
sous-amendement, rajouter, après "Commission municipale", "du
Québec". Est-ce qu'il y a des objections à cela? Ou tout
simplement la commission...
Le Président (M. Desbiens): Alors, consentement...
M. Saintonge: La Commission municipale, cela va de soi. Mais je
pense que le titre c'est: Commission municipale du Québec.
Une voix: Oui.
M. Saintonge: D'accord.
Le Président (M. Desbiens): Alors, de consentement, la
motion se lirait donc: "Que l'article 2 soit modifié en
remplaçant, dans la première ligne, les mots "au jugement du
gouvernement" par les mots "de l'avis de la Commission municipale du
Québec".
M. Saintonge: C'est cela. M. Fallu: M. le
Président...
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Groulx.
M. Fallu: ...si nous acceptons cette modification de pure forme,
à notre avis nous n'engageons pas le fond au moment du vote sur
l'amendement.
M. Léonard: Non, non.
M. Saintonge: Non, non.
Une voix: Ce n'est qu'un commentaire.
M. Fallu: C'est essentiel, cela.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Laprairie.
Motion d'amendement à l'article 2
(suite)
M. Jean-Pierre Saintonge
M. Saintonge: En fait, M. le Président, le but de
l'amendement à l'article 2, à la première ligne, quand on
dit de remplacer les termes "au jugement du gouvernement" par "de l'avis de la
Commission municipale du Québec", le but, tel que nous avons pu en
discuter brièvement hier, est de contrer d'une certaine façon le
caractère discrétionnaire de la loi. On sait que, dans un tel
cas, le ministre des Affaires municipales pourra sûrement influencer
d'une importante façon la décision du Conseil des ministres;
c'est lui ni plus ni moins qui aura la responsabilité de l'application
de la loi. En conséquence, c'est la discrétion absolue du
ministre et du gouvernement qui fait en sorte que ce caractère
discrétionnaire qu'on retrouve à l'article 2 amène, en fin
de compte, son caractère abusif de la loi, le caractère
discriminatoire et déraisonnable. À
ce sujet, M. le Président, vous me permettrez de citer un extrait
du mémoire de l'Union des municipalités du Québec, lequel
a été déposé. On sait que l'Union des
municipalités du Québec n'a pas été entendue devant
cette commission. Donc, il y a une différence, M. le
Président.
M. Léonard: C'est une autre affaire. C'est
différent.
M. Saintonge: Je voudrais quand même présenter mon
point de vue. Le ministre n'a pas voulu entendre en commission... L'Union des
municipalités du Québec avait présenté de
façon formelle au ministre des Affaires municipales une demande pour
être entendue avant l'adoption du projet de loi en deuxième
lecture, puisqu'à ce moment-là on se prononce effectivement sur
le principe même de la loi. L'expérience précédente
a démontré qu'il est toujours assez difficile d'obtenir des
amendements majeurs à un projet de loi après l'adoption en
deuxième lecture. Je devrais dire, comme je le notais hier, que c'est
une situation que j'ai pu remarquer personnellement depuis deux ans et demi. Je
suis convaincu que mon confrère de Hull, à ma gauche ici, qui
était le porte-parole des affaires municipales avant moi et qui est
maintenant le porte-parole pour les dossiers de l'aménagement qui
touchent également le monde municipal, sera sûrement d'accord avec
mes propos, à savoir que, depuis les deux ans et demi que nous sommes
tous les deux ici, nous avons rarement vu des modifications majeures
apportées à un projet de loi après son adoption en
deuxième lecture au niveau du ministère des Affaires municipales
et du ministre actuel des Affaires municipales.
Donc, c'était le fait que l'Union des municipalités du
Québec avait refusé de venir à cette commission
parlementaire, puisqu'on mentionnait que l'Union des municipalités du
Québec considérait, dans un télégramme
adressé le 9 décembre au président de l'Assemblée
nationale, que cette chose devenait une parodie de la démocratie et
avait spécifié qu'à moins que le gouvernement ne revienne
sur sa décision et fasse entendre l'Union des municipalités avant
l'adoption du projet de loi en deuxième lecture, l'UMQ tenait à
informer le président que: "Le conseil d'administration de l'UMQ tient
à vous informer que les représentants de cette dernière ne
participeront à aucune autre commission parlementaire d'ici à
l'ajournement de la session." Donc, c'était assez clair comme message.
Ce n'était pas que l'UMQ n'était pas intéressée au
projet de loi, mais elle considérait la démarche comme tout
à fait inutile.
Dans ce sens-là, je pense que je vais dire au ministre, avant de
citer le mémoire de l'UMQ, puisqu'il a soulevé le sujet... Ce
matin, dans la Presse, Jean-Guy Dubuc a fait un éditorial où on
parle de l'imposture du projet de loi 38. À ce moment-là, sans
aller dans l'entité de l'éditorial, je vais citer un passage
où on mentionne: "Les maires s'y opposent de toutes leurs forces, au
moins ceux de l'Union des municipalités du Québec qui sont assez
lucides pour se rendre compte de la fourberie qu'on leur impose. D'autres, de
l'Union des municipalités régionales de comté, ont
déjà démissionné, se satisfaisant d'un amendement
leur offrant un préavis de 80 jours et un droit de défense devant
la Commission municipale, comme si le droit de se défendre
protégeait contre l'arbitraire d'un pouvoir discrétionnaire."
À ce moment-là, il est clair que M. Dubuc reconnaissait d'une
certaine façon le bien-fondé de l'Union des municipalités
du Québec en disant lui-même que ces gens-là ont
été assez lucides pour se rendre compte de la fourberie qu'on
leur impose.
Je suis tout à fait d'accord, en fin du compte, comme l'UMQ l'a
mentionné, que c'est une parodie de la démocratie de venir ici
pour tenter d'amender un projet de loi qui est totalement
discrétionnaire. Et de toute façon, les articles fondamentaux, de
l'aveu même du ministre, dans ce projet de loi, sont les articles 1 et 2.
Et qu'est-ce qu'on a connu comme amendements fondamentaux à un projet de
loi décrié unanimement par le monde municipal, y compris les deux
unions, l'UMQ et l'UMRCQ? Même l'UMRCQ a décrié le projet
de loi dans sa forme originale et a tenté de venir ici simplement pour
qu'on crée certaines balises pour empêcher les
municipalités d'être trop pénalisées, pour tenter de
jouer le jeu, comme on a dit. Cela a été tellement bien de jouer
le jeu que le ministre n'a donné, jusqu'à maintenant, aucun
amendement aux deux articles fondamentaux. Il y a un amendement à
l'article 1, qui est très minime, qui ne concerne pas le pouvoir
discrétionnaire du ministre. Actuellement, on se retrouve devant la
situation où, fondamentalement, le ministre conserve son pouvoir
discrétionnaire. Il ne veut absolument pas - d'après ce que je
peux comprendre -en céder quelque pouce que ce soit. Nous
espérons que le gouvernement apportera des amendements à
l'article 3 - nous y reviendrons tantôt - puisque le ministre semblait
annoncer que la demande du président de l'UMRCQ à l'article 3
pourrait possiblement avoir certaines suites. Nous attendons avec impatience
ces choses.
L'UMQ, dans son mémoire, disait, sous la rubrique Les
dispositions du projet de loi 38: "Tel que les lignes qui suivent l'expliquent,
l'Union des municipalités du Québec considère inacceptable
la rédaction du projet de loi. "Si l'État est souverain, ses lois
se doivent, dans un État démocratique, de
respecter un minimum de règles afin de préserver les
éléments d'une saine justice. "La rédaction du projet de
loi invite au discrétionnaire, au discriminatoire, au
déraisonnable et à l'abusif. L'imprécision qui s'en
dégage laisse toute municipalité dans le doute quant à ses
droits et ses obligations. Devant le caractère exorbitant de cette
rédaction, les règles les plus élémentaires de la
justice naturelle sont absentes."
Premièrement, le caractère discrétionnaire. Une
citation ici de MM. Pépin et Ouellet, Principes de contentieux
administratif. MM. Pépin et Ouellet disaient: "...la discrétion
absolue n'existe pas dans un pays respectueux de la primauté du
droit."
Le mémoire de l'UMQ continue: "La rédaction du projet de
loi crée un dangereux précédent laissant la porte ouverte
à des décisions ministérielles discrétionnaires et
inéquitables. "Les termes "au jugement du gouvernement", à
l'article 2, "à sa discrétion", aux articles 3 et 7, "selon
l'estimation qu'en fait le ministre", aux articles 8 et 9 et "le gouvernement
peut se prévaloir de la présente loi", à l'article 16,
confèrent une discrétion des plus absolues au ministre et au
gouvernement. "L'Union des municipalités du Québec ne peut que
dénoncer cette rédaction qui confère un pouvoir aussi
illimité qui peut être utilisé selon le bon vouloir du
ministre et sans justification. Une telle rédaction rend la notion de
justice et d'équité fort vulnérable et invite à
l'arbitraire."
C'est assez clair au niveau de la position de l'Union des
municipalités du Québec sur cet article. Je dirai, effectivement,
que cela rejoint un peu, quand on parle de l'imposture du projet de loi 38,
l'éditorial de M. Dubuc ce matin; on peut retrouver certains
éléments qui parlent justement de ce caractère totalement
discrétionnaire du projet de loi. On rejoint également, à
ce niveau, les commentaires qui avaient été faits par M.
Jean-Louis Roy dans son éditorial: "Le projet de loi 38, c'est non", en
date du 12 décembre dans le Devoir. Je pense qu'au niveau des
éditorialistes dans les principaux journaux, on semble faire une
certaine unanimité jusqu'à maintenant sur le caractère
tellement discrétionnaire du projet de loi.
Je reprends dans le mémoire de l'Union des municipalités
du Québec un peu plus loin, à la page 5, l'alinéa 3,
où on parle du caractère déraisonnable. "Un texte est
jugé déraisonnable lorsqu'il est discriminatoire, arbitraire et
qu'il conduit à des situations insolites et absurdes. "L'étendue
des articles 2 et 12, par exemple, peut mener à des situations absurdes
et injustes. Une municipalité de bonne foi et respectueuse de la loi
pourrait se voir punir par le geste d'un tiers sur son territoire."
C'est clair à ce moment que la décision étant
seulement au niveau du ministre... Nous avons vu hier, à l'analyse du
projet, à l'article 1, à la suite de certaines questions qui
avaient été posées au ministre, que celui-ci confirmait
lui-même que, dans certains cas... Par exemple, est-ce qu'un club
d'âge d'or, c'est couvert, un club de loisirs ou quoi que ce soit? Et le
ministre de dire: On verra si c'est possible, ce sera à décider.
On vous émettra des bulletins d'interprétation. C'est clair que,
dans un tel cas, c'est totalement discrétionnaire pour un ministre.
À ce moment, dans un tel cas, c'est tellement discrétionnaire,
c'est tellement imprécis - non seulement c'est discrétionnaire,
mais c'est imprécis - que les municipalités ne savent absolument
pas sur quel pied danser et le ministre le confirme lui-même: On verra,
on interprétera, on avisera les municipalités et toujours de
l'avis du gouvernement. Donc, dans un tel cas, il m'apparaît assez clair
que le ministre ne veut absolument pas céder d'un pouce et c'est la
tradition usuelle qu'on a connue, comme je l'ai mentionné, depuis deux
ans et demi au niveau des pouvoirs qu'il veut s'accorder par cette loi. En
conséquence, il m'apparaît fondamental de modifier le projet de
loi, et c'est le sens de notre amendement, pour éviter que le pouvoir
politique - puisque c'est une question purement politique qui nous occupe - ne
vienne décider lui-même de ces situations.
Donc, on a un projet de loi avec lequel, du côté de
l'Opposition, nous sommes nullement en accord de quelque façon, mais,
quand même, la disposition d'amendement que nous voulons introduire dans
ce projet de loi, à l'article 2, c'est d'enlever une partie du
discrétionnaire qui revient au gouvernement et de la confier à un
organisme administratif neutre, et ce serait la Commission municipale du
Québec. Donc, cette commission pourrait être saisie de la
situation et décider si, oui ou non, une municipalité a
bénéficié d'une participation du gouvernement du Canada
selon l'article 1.
Cela me paraîtrait beaucoup plus équitable pour les
diverses municipalités du Québec de soumettre le litige à
une autre autorité. Fondamentalement, le projet de loi 38 est
carrément à caractère politique entre deux ordres de
gouvernement: le gouvernement provincial et le gouvernement
fédéral, dans ce cadre. Le ministre mentionnait que par l'article
1 on retouchait au principe... Ce sont les termes mêmes, c'est la
réaffirmation d'un principe qui était dans la loi des affaires
intergouvernementales. Mais la réaffirmation qu'on introduit ici,
à l'article 1, dans le projet de loi 38, du principe en question
-reconnu dans l'article 20 des affaires intergouvernementales - va seulement au
niveau
du gouvernement du Canada. On ne touche d'aucune façon le
gouvernement d'une autre province, un gouvernement étranger ou un
ministère ou un organisme de l'un de ces gouvernements.
Donc, le ministre mentionnait expressément hier que dans une
telle situation l'article 20 des affaires intergouvernementales s'appliquera
toujours. On veut éclaircir une situation, mais pas l'ensemble de la
situation. On limite le débat au caractère politique des
relations fédérales-provinciales qui sont la
spécialité du gouvernement actuel. Dans ce sens, il
m'apparaît essentiel, à tout le moins, qu'on puisse au minimum,
par cet amendement à l'article 2, soustraire du discrétionnaire
au gouvernement et confier à un organisme administratif neutre la
décision, dans un tel cas, de voir si oui ou non une municipalité
a bénéficié, autrement que selon l'article 1, d'une
participation du gouvernement du Canada ou de l'un de ses ministres ou
organismes.
Évidemment, à l'article 2 - et nous pourrons y revenir
directement ou indirectement et sous quelque forme que ce soit; on laisse la
discrétion au gouvernement et au ministre des Affaires municipales dans
un tel cas - on est dans un champ extrêmement large qui, à toutes
fins utiles, ne permet pas aux municipalités de savoir sur quel pied
danser et où exactement les municipalités s'en vont
puisqu'à tout moment, dans quelque acte qu'elles auront à
accomplir, dans quelque relation qu'il pourra y avoir sur leur territoire -
entre le gouvernement fédéral et un quelconque organisme,
pratiquement même des individus, cela pourra créer des
problèmes pour l'autorité municipale.
Fondamentalement, il y a un autre point qui m'inquiète par
rapport au fait qu'on veut tellement toucher "at large" dans la
municipalité toute intervention du fédéral. C'est à
se demander si on ne se trouvera pas dans la situation où le conseil
municipal, dans une ville, n'aura plus de poids, se sentira pratiquement
démuni de tout pouvoir. On veut arriver avec quoi? Avec un conseil
municipal, un maire, des conseillers qui, en matière de relance
économique... On est censé être des partenaires, le
gouvernement du Québec et les municipalités du Québec. On
interdit aux municipalités, actuellement, de participer à tout
programme de relance économique et on menace même les
municipalités, si le fédéral vient donner une subvention
à quelque organisme que ce soit, de pénaliser la
municipalité. Qu'arrivera-t-il? Les directeurs d'organismes, les
personnes dans la municipalité qui sont les leaders de la
communauté, qu'est la municipalité, on ne retrouvera plus,
éventuellement, ces leaders au sein des conseils municipaux, on les
retrouvera au sein d'organismes qui, dans la municipalité, pourront
participer au développement économique et à la relance
économique. Ce sont ces gens qui vont avoir un poids vis-à-vis de
leurs citoyens. Ce seront des pouvoirs qu'on encourage presque finalement. Ce
seront des gens qui détiendront certains pouvoirs complémentaires
à l'autorité municipale. On va favoriser l'émergence de
nouveaux leaders dans la municipalité, dans le gouvernement local ou
dans une communauté locale autre que les dirigeants municipaux reconnus,
qui sont les maires et les conseillers des municipalités.
Généralement, dans les municipalités, le maire et les
conseillers sont ceux qui imprègnent à la municipalité une
espèce de vivacité ou de tendance à un
développement de la communauté pour le bien-être de leurs
citoyens. Aujourd'hui, «avec une telle intervention, par le projet de loi
38, qu'est-ce qu'on fera à ce niveau-là? On va pratiquement
mettre de côté le rôle de leadership que ces gens doivent
assumer et on va ainsi permettre que ce leadership soit exercé par
d'autres individus.
Quant aux relations entre le fédéral et l'ensemble de la
population, puisque les populations des municipalités sont aussi membres
du pays qu'on appelle le Canada, dans lequel on se situe toujours, les conseils
municipaux devront être très prudents dans leurs relations avec
ces gens, par crainte d'être considérés comme des
partenaires de ceux-ci et d'être pénalisés par le
gouvernement, selon les dispositions du projet de loi 38.
C'est en ce sens qu'il me paraît essentiel, à tout le
moins, dès le début de l'étude de cet article 2, de faire
la modification suggérée pour faire en sorte que les termes "au
jugement du gouvernement" soient changés pour amener la décision
à l'étape de la Commission municipale du Québec et ainsi
lui demander son avis sur un tel sujet.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Germain Leduc
M. Leduc (Saint-Laurent): On parcourt les journaux tous les jours
et c'est toujours la même unanimité. Je suis député
ici depuis un an et jamais je n'ai vu une unanimité aussi
générale. Qu'il suffise de regarder encore ce matin les journaux,
par exemple le Soleil: "Léonard mène une lutte solitaire". Il est
encore seul. Dans son éditorial de ce matin, Jean-Guy Dubuc - je pense
qu'il est bon de le citer - dit: "II est vraiment incompréhensible que
le gouvernement péquiste cède aussi facilement à la
panique et s'accorde des droits réservés aux régimes
totalitaires. Il n'y a que dans des pays qui renient la démocratie que
l'on peut trouver
autant de pouvoirs livrés à l'arbitraire d'une personne
tout en étant protégés par la loi -cet arbitraire est
sanctionné par la loi. L'an dernier, le Barreau du Québec avait
violemment dénoncé le procédé. Mais le gouvernement
a fait la sourde oreille pour n'entendre que sa colère."
Il est bien évident que, si on veut jouer le jeu, d'ailleurs,
comme l'a fait un représentant, le président de l'UMRCQ, M.
Asselin, qui a dit: On est pris avec la loi, il va falloir vivre avec elle,
nous sommes bien prêts à faire l'exercice également, mais
on voudrait tout de même que la loi soit au moins bonifiée. On
propose quelque chose qui est élémentaire à mon sens. On
demande que la discrétion, en ce qui concerne l'article 2 au moins, soit
appliquée par la Commission municipale. À ce* que l'on sache,
à la Commission municipale, on pourrait penser que ce pourrait
être un amendement formidable ou très important. Mais tout le
monde sait que la Commission municipale est un organisme dont les membres sont
nommés par le gouvernement et, que je sache, M. Robidas n'est
sûrement pas un libéral...
Une voix: Mais c'est un bon maire.
M. Leduc (Saint-Laurent): C'est un péquiste reconnu. Tout
de même, je suis prêt à faire confiance à cet
organisme. C'est dans cette optique, en fait, qu'on demande la modification. On
veut au moins qu'il y ait plus qu'une personne qui décide. Il est
possible, vous savez, qu'une personne se trompe. Peut-être que l'ensemble
des membres de cette Commission municipale pourrait ne pas se tromper. Je
préférerais faire confiance à plusieurs personnes.
D'ailleurs, je pense que ce serait peut-être une sécurité
pour le ministre. Ce ne serait peut-être pas se décharger de sa
responsabilité, mais maintenir une certaine distance entre les
décisions qui pourraient être prises par la Commission municipale.
(11 h 45)
Alors, je le répète, c'est un minimum qu'on demande. Si on
regarde l'article 2, la Commission municipale aurait à décider de
toutes les discrétions mentionnées à cet article. C'est un
bijou, quand on regarde l'article 2. On dit: De l'avis du gouvernement,
directement ou indirectement et sous quelque forme que ce soit. À mon
sens, c'est nettement trop. On voudrait que cela soit ramené à
des dimensions plus restreintes. On voudrait qu'il y ait un organisme qui soit
une créature, il faut bien le reconnaître, du gouvernement.
J'opterais, dans ces conditions, pour faire confiance à la
Commission municipale à cet égard. On a beaucoup parlé,
évidemment, de cette loi. Si on avait eu au moins une voix, un organisme
important dans la province qui nous avait convaincus, on aurait peut-être
eu un son de cloche différent. Je dois dire qu'en aucun moment - je l'ai
dit tantôt - depuis un an et demi que je suis à l'Assemblée
nationale, on a eu une loi palliant l'unanimité à ce point. De
temps à autre, bien sûr, on nous accuse, nous, du parti de
l'Opposition, de prendre une attitude contraire. C'est peut-être normal.
On dit: Ce sont les règles du jeu. C'est normal que le parti de
l'Opposition ne soit pas du même avis que le parti ministériel. Je
veux bien, mais quand on constate que des instances aussi importantes que
l'UMRCQ, que l'Union des municipalités, tout le monde qui a quelque
chose à dire dans le domaine municipal, tout ce monde s'est
prononcé et a indiqué qu'il n'acceptait pas cette loi, parce que
c'était de la méconnaissance, de la non-reconnaissance du droit
des municipalités... Qu'on ait des chicanes avec le gouvernement
fédéral, on est habitué à cela avec ce
gouvernement. Je le répète, cela fait à peine un an et
demi que je suis ici; on a eu quoi?
Je me rappelle la demande de motion d'octobre 1981; je n'y étais
pas. Je me rappelle le fameux corridor électrique, la motion Duhaime.
À ce moment-là, je pense que beaucoup de gens se sont
levés au Québec pour dire: Le gouvernement n'a pas
complètement raison, ce n'est pas si clair que cela; peut-être que
le fédéral va loin. Ensuite, on a eu le projet de loi 62 sur la
Loi constitutionnelle de 1982; encore là, les avis étaient
partagés. Il y en avait qui étaient dans un clan, d'autres dans
l'autre.
Je pense qu'il fallait faire la part des choses. Ici, c'est
l'unanimité générale. Je vous le dis, on parcourt les
journaux, les éditoriaux, on écoute les médias. Je pense
qu'il serait temps que le ministre se rende à cette évidence,
qu'il n'écoute peut-être pas le parti de l'Opposition, mais qu'il
écoute les municipalités, les 1600 municipalités au
Québec, surtout les gens qui investissent des efforts et du temps, ces
personnes, la population du Québec.
Le président est venu l'autre jour, il s'est
déplacé. Il a dit: Si j'avais l'impression que cela ne donnerait
rien, je ne serais pas venu. J'ai nettement l'impression, jusqu'à
maintenant toujours, que cela n'a rien donné. On perd notre temps ici,
c'est très clair. On nous propose des amendements, de mettre "ou",
d'ajouter un troisième paragraphe à l'article 1. Comme le
mentionnait mon collègue de Mont-Royal, qui est un expert en cette
matière: C'est absolument inutile, tout cela est prévu par la loi
constitutionnelle, la loi sur les affaires intergouvernementales, la loi
constitutive des Affaires intergouvernementales.
C'est de la poudre aux yeux. On nous lance quelques modifications qui
n'apporteront rien, qui ne veulent rien dire du tout. Je ne suis pas prêt
à participer à ce simulacre de démocratie. Si le
gouvernement veut absolument imposer ses volontés, si le ministre
veut décider de tout, qu'il décide. Mais, il en portera l'odieux.
Je vous dirais que, jusqu'à présent, il s'est mis beaucoup de
monde à dos. Je regardais... On a constaté que ces gens-là
avaient ce projet de loi depuis le mois de juin... En passant,
également, encore là, on donne un effet rétroactif; non
content de donner à peu près toutes les discrétions au
ministre, on va encore plus loin, on donne un effet rétroactif à
ce projet de loi: en juin, lors du dépôt. Ils ont peut-être
eu des leçons, mais j'ai l'impression qu'ils ne comprennent pas. Je me
demande quand est-ce qu'ils vont comprendre. On a eu deux élections
partielles. Apparemment, il y avait eu un sondage d'effectué dans
Mégantic-Compton; il n'y avait pas de surprise, apparemment vous
étiez à 16%. Alors, tout cela ne nous surprend pas du tout, cela
ne devrait pas vous surprendre...
Une voix: Bien non.
M. Leduc (Saint-Laurent): Tant que vous adopterez des lois
iniques, inutiles, qui provoquent des affrontements stériles, qui
n'apportent rien, à ce moment-là, vous allez en perdre, des
élections partielles. Ce n'est pas fini. Et attendez les prochaines
élections générales, il va y avoir des distorsions
terribles dans la province!
Une voix: Oui.
M. Leduc (Saint-Laurent): II va falloir changer beaucoup de
lois.
Une voix: Ah!
M. Leduc (Saint-Laurent): En tout cas, on est en train de parler
de réforme parlementaire, on parle de créer des commissions; je
me demande où est-ce qu'on va prendre les députés de
l'Opposition pour les insérer dans ces commissions parlementaires; cela
va être le néant.
Une voix: ...c'est vrai, cela.
M. Leduc (Saint-Laurent): Alors, continuez avec des projets.
J'avertis le ministre: À mon sens, c'est un minimum. Parce que l'article
capital, c'est l'article 2, l'article le plus important de ce projet de loi.
Nous disons: Écoutez, on se rend à l'évidence, apparemment
le bulldozer s'en vient - et cela va être ce soir - et cela va passer. On
dit au ministre: Soyez raisonnable et, au moins, imposez à la Commission
municipale de décider ce qui va arriver de ces subventions, sous quelque
forme que ce soit, directement ou indirectement. Alors, je pense que c'est
à peu près tout ce que j'ai à dire là-dessus. En
fait, on a tout dit, il n'y a plus grand-chose à dire, sauf de constater
que c'est un blocage total, c'est une barrière qui a été
placée. C'est impossible de faire entendre le bon sens...
Une voix: Oui, oui.
M. Leduc (Saint-Laurent): ...au parti ministériel et
surtout au ministre.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Mont-Royal.
M. John Ciaccia
M. Ciaccia: Je vous remercie, M. le Président. On a
suggéré un amendement à l'article 2. On commence, avec
l'article 2, à vraiment en venir au coeur du projet de loi. L'article 1,
c'est un article qui n'a pas vraiment ajouté à la loi; cela
existait dans la loi des affaires intergouvernementales. Et même,
l'amendement que le ministre a apporté au sujet des autochtones
n'était pas absolument nécessaire pour deux raisons:
premièrement, la loi des affaires intergouvernementales, article 22,
prévoyait que, s'il y avait d'autres ententes, le gouvernement pouvait
les soustraire de l'application de l'article 20. Alors, l'entente de la Baie
James est une entente de ce genre, qui est à soustraire de l'application
de l'article 20. Ce n'était pas nécessaire d'inclure dans le
présent projet de loi que les subventions que le gouvernement
fédéral pourrait donner au gouvernement régional Kativik
et aux municipalités locales cries, étaient soustraites des
pénalités du présent projet de loi.
L'autre raison pour laquelle ce n'était pas nécessaire,
c'est parce qu'il y a aussi un article dans l'entente de la Baie James qui
prévoit que l'entente a préséance sur toute autre loi qui
pourrait venir à l'encontre de l'entente de la Baie James. Alors,
l'article 1 n'était pas vraiment nécessaire.
Mais l'article 2, par exemple, ajoute quelque chose; cela donne des
droits au gouvernement et des droits qui vont assez loin. Je ne sais pas si le
ministre est conscient que, par ce projet de loi, il ne se donne pas seulement
un pouvoir, mais il est en train de modifier nos institutions, de modifier la
façon d'agir, la façon de procéder. C'est comme si
quelqu'un regardait cela et disait: Voici un "social engineering", de
l'ingénierie sociale - je ne sais pas si cela se traduit ainsi -
où on veut changer le mode de fonctionnement de nos institutions. Parce
que vous avez deux principes. Il y a le principe de maintenir le droit du
Québec sur les affaires municipales qui est contenu dans le "British
North America Act", dans notre constitution canadienne. Mais ce principe,
personne ne le conteste, il est admis par tous. Alors, dans le souci que vous
avez de
vouloir maintenir ce principe, vous introduisez des mesures qui vont
tellement loin que vous avez un choix à faire en mesurant la
conséquence de cette loi. Est-ce que le maintien du principe - notre
constitution donne la juridiction au gouvernement du Québec en
matière d'affaires municipales - si le principe n'est pas
contesté, est-ce que cela vaut les conséquences que vous
causerez, par votre projet de loi, aux institutions, aux principes
démocratiques, aux institutions qui sont élues par la population
dans tout le Québec, est-ce que vraiment - si vous considérez les
conséquences de ce que vous faites - cela en vaut la peine? Est-ce que
cela vaut le chambardement, le changement des principes fondamentaux de notre
démocratie pour vouloir renforcir la constitution canadienne? C'est cela
que vous voulez.
Pour renforcir un article de la loi 92 dans la constitution canadienne,
vous apportez des précédents très dangereux. C'est vrai,
le ministre pourrait dire: Ce n'est pas notre intention d'abuser, nous voulons
seulement mettre en vigueur et vous assurer que la constitution est maintenue.
Mais une fois que vous introduisez un principe dans un projet de loi, c'est
cela qui cause les précédents. La perte de nos libertés,
la perte de notre façon d'agir, cela n'arrive pas du jour au lendemain.
Cela est une érosion graduelle. Et cette érosion, vous la causez
par ce projet de loi. Je voudrais citer l'éditorial de ce matin de M.
Jean-Guy Dubuc, dans la Presse, au sujet de l'article 2 du projet de loi, et je
cite: "La municipalité qui acceptera une aide jugée
discrétionnaire du gouvernement d'Ottawa se verra donc privée de
la contribution financière du gouvernement du Québec. Selon
quelle appréciation? Celle du ministre ou selon les termes inscrits dans
le projet de loi: "à sa discrétion" et "selon l'estimation du
ministre"? Lui seul ou un fonctionnaire sera donc seul pour apprécier la
responsabilité de la municipalité dans un octroi qui peut venir
de mille et une façons, dont quelques-uns passent par un
ministère ou un organisme fédéral mal identifié. Et
il sera seul pour décider de la punition méritée."
Déjà, vous voyez un abus.
Et même, dans le libellé de votre article 2, vous parlez
d'une taxe municipale ou une compensation en tenant lieu, vous parlez d'une
subvention et, après cela, au cas où vous auriez oublié
quelques petits montants, vous allez encore plus loin: une autre somme
constituant un élément de participation gouvernementale à
son financement. Vous voulez tellement prendre tout le contrôle que vous
voulez qu'aucun montant, même pas cinq cents, n'échappe, au cas
où cette municipalité aurait bénéficié de
ces montants. Quand vous regardez l'esprit de la loi, quelle sorte
d'atmosphère une telle loi va-t-elle créer au niveau municipal,
au niveau de ceux qui sont élus dans les municipalités? (12
heures)
Je voudrais attirer l'attention du ministre sur un autre aspect de son
projet de loi. Je continue de citer l'éditorial de M. Dubuc qui dit: "II
est évident qu'on a là un cas type de loi discrétionnaire
qu'un gouvernement aux prétentions démocratiques ne peut
accepter. Une telle loi permet tous les chantages et abus d'anciens
systèmes qu'on croyait avoir délogés pour toujours."
Hier, à la suite de certains propos que j'ai tenus, le ministre a
répondu que la réforme fiscale - et je crois que c'était
la question des taxes, les montants à payer en "en lieu" de taxes par le
gouvernement fédéral et la réforme fiscale municipale du
gouvernement - avait été adoptée principalement pour
enlever la discrétion au gouvernement. C'était pour redonner
l'autonomie fiscale aux municipalités. C'était l'objectif de la
réforme fiscale. Avec ce grand principe de la réforme fiscale,
vous voici avec un projet de loi qui va totalement à l'encontre de cette
autonomie fiscale qui était visée dans la loi 57 que vous avez
portée à notre attention hier. Vous changez complètement
le principe de cette loi, parce que vous vous donnez une discrétion
totale. Comme l'éditorial le souligne, cela ouvre la porte à des
abus d'anciens systèmes qu'on croyait avoir délogés pour
toujours.
M. le Président, je ne sais pas si le ministre est vraiment...
Parfois, on perd la perspective ou les conséquences de certains de nos
actes. Parfois, c'est naturel; on veut tellement, dans le but de
protéger un certain principe... On voit certains abus, et on
prétend que les députés fédéraux vont donner
des subventions partout au Québec. On est tellement
préoccupé par le principe de protéger la juridiction du
Québec en matière municipale - et c'est humain, c'est naturel
-qu'on a tendance parfois à oublier les conséquences de l'autre
geste qu'on va poser pour protéger ce premier principe. Je voudrais que
le ministre réalise les conséquences du geste qu'il pose avec le
présent projet de loi au nom du principe de la protection de la
juridiction du Québec en matière municipale. Les
conséquences vont bien au-delà de la protection de ce principe.
C'est dangereux. Cela ouvre la porte à des abus et, parfois, il faut se
faire ramener à la raison. Ce n'est pas seulement l'Opposition qui
souligne les conséquences de votre projet de loi. C'est l'ensemble des
intervenants au Québec, les municipalités et les
éditorialistes. On ne peut pas continuer de mettre constamment de
côté les principes fondamentaux de nos lois et s'attendre qu'on
pourra promouvoir un genre de société où on protège
les droits des individus, où on a un climat social qui est acceptable
pour tout le
monde.
Ce sont des choses qu'il faut porter à l'attention du
gouvernement. On voudrait que le gouvernement trouve d'autres moyens pour
protéger les droits qu'il a dans la constitution. L'amendement du
député de Laprairie est franchement un moindre mal. Si on doit
choisir entre l'article 2 et l'amendement suggéré par le
député de Laprairie, naturellement, c'est mieux de dire: On va
faire juger cela par la Commission municipale, selon l'avis de la Commission
municipale. Mais quant à moi, M. le Président, cela ne
règle pas le problème. L'amendement du député de
Laprairie est fait pour essayer de réduire la discrétion du
ministre. Cela ne règle pas le problème. Ne nous faisons pas
d'illusion là-dessus. Cela ne règle pas le problème. Que
ce soit l'avis de la Commission municipale ou que ce soit le jugement du
gouvernement, c'est le principe, l'article 2 qui n'a pas de bon sens. C'est
tout le principe de cette loi qui n'a pas de bon sens. Ce sont toutes les
conséquences de cette loi qui font plus de mal que de bien. Des fois,
c'est mieux de tolérer certaines infractions à notre constitution
que, dans le but d'enlever le mal, de causer plus de mal. Il y a toutes sortes
de choses qui se passent aujourd'hui dans notre société. On ne
peut pas avoir une loi pour tout. Il y a certains abus qu'on ne peut pas
prévenir.
On peut faire le mieux possible. On peut imposer des lois, on peut
rendre des choses illégales, la loi sur les affaires
intergouvernementales le prévoyait, on aurait pu prendre des
procédures pour déclarer ces ententes illégales. Mais il y
a une limite à tout. Si on pense qu'on va arrêter tous les abus
dans notre société par des lois, je pense qu'on va avoir un
gouvernement central au Québec qui va être tellement puissant, qui
va avoir tellement de droits, qui va avoir tellement de discrétion, qui
va pouvoir nous dire tellement de choses, ce ne sera pas tolérable de
vivre dans une telle société. C'est contre cela qu'on
s'élève dans ce projet de loi. Cela va être une
société qui va avoir donné tellement de droits au
gouvernement du Québec qu'on ne pourra plus se tourner la tête ni
faire quelque chose sans demander la permission au gouvernement du
Québec. Ce sont ces principes du projet de loi 38 auxquels nous nous
opposons. On ne s'oppose pas, et cela ne sert à rien de le
répéter et de le redire, aux principes et aux droits du
Québec en matière municipale. Mais le remède est de
beaucoup pire que le mal.
Le remède, M. le Président, cela enlève des droits,
cela ouvre la porte à toutes sortes d'abus. Pour ces raisons, on
suggère un amendement à l'article 2. Mais c'est tout l'article 2
qui devrait être enlevé, l'article 3, l'article 4, c'est tout le
projet de loi qui devrait être retiré.
Le Président (M. Desbiens): M. le
député...
M. Léonard: Je voudrais quand même faire quelques
remarques parce que cela fait deux ou trois orateurs, deux ou trois
députés qui interviennent. Je voudrais d'abord rappeler que le
projet de loi parle du gouvernement et non du ministre. C'est d'ailleurs repris
dans l'éditorial de M. Dubuc où on dit, au troisième ou au
quatrième paragraphe: "Selon quelle appréciation? Celle du
ministre." Bien non, c'est le gouvernement qui prend la décision. Je
pense qu'elle est de taille, cette différence. C'est parce qu'il ne faut
pas fausser les prémisses, arriver à des conclusions qui sont
basées sur de fausses prémisses. On est à l'article 2, M.
le député. Laissez-moi parler moi aussi. Quand vous avez fait vos
erreurs, je ne vous ai pas interrompu. Ici, il s'agit du gouvernement, à
l'article 2. C'est de cela qu'il s'agit. Arrêtons de parler du ministre
là-dedans. En termes de discrétion, c'est "au jugement du
gouvernement".
Donc, il y a une institution derrière tout cela. Cela veut dire
que cela implique tout le gouvernement et tout l'Exécutif.
Au-delà de cela, maintenant, on dit: C'est quoi le problème?
C'est le projet de loi, c'est la discrétion dans le projet de loi. Je
pense qu'il ne faudrait pas oublier que le problème, c'est qu'il y a des
relations qui se sont établies entre les municipalités et le
gouvernement et des représentants du gouvernement fédéral,
directement ou indirectement. C'est cela le problème fondamentalement,
parce que, si cela ne s'était pas fait, on n'en serait pas là. On
aurait dit: Tout le monde respecte l'article 92.8, l'article 20 de la loi sur
les Affaires intergouvernementales et il n'y aurait pas de problème. Il
y en a un, et fondamentalement c'est l'intervention du fédéral.
Il ne faudrait pas l'oublier. On ne parle jamais de cela, et c'est une
intervention de caractère strictement discrétionnaire au moment
où on se parle, strictement discrétionnaire. De cela, on n'en
parle jamais. Les gens de l'Opposition n'en parlent jamais. Non. On dit: Oui,
on veut respecter la constitution. Mais dans les faits, on fait le contraire:
on dit blanc et on fait noir. C'est exactement ce qui se passe et c'est cela le
problème. Comment allez-vous corriger cela? Est-ce que vous avez quelque
chose à mettre sur la table? Jamais je n'ai entendu même une
idée. C'est le désert complet. Quand on parle de
négociations... M. le député, s'il vous plaît...
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre!
Une voix: Lesage l'a fait.
M. Léonard: ...tout de suite, le
bénéfice
du doute est donné à l'autre partie. Tout le temps. Tout
de suite. Alors, les valets, cela va faire. L'autre élément, en
termes de critique à l'heure actuelle, on parle...
Une voix: La vérité sort bien de l'autre
côté.
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre!
M. Tremblay: Le jour où vous aurez des idées...
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, M. le
député de Chambly. Le ministre a la parole.
Une voix: ...qui sont vides de sens. Le Président (M.
Desbiens): À l'ordre!
Une voix: Ce n'est pas seulement nous qui le disons. C'est tout
le monde...
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre! Le ministre
a la parole.
M. Léonard: On ne fait pas de distinction...
Une voix: Vous, votre cage.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Chambly, le ministre a la parole et vous l'interrompez.
M. Saintonge: M. le Président, vous laissez le
député de Chambly agir de cette façon en commission.
M. Rocheleau: Vous interrompez votre maître.
M. Saintonge: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Laprairie, sur une question de règlement.
M. Saintonge: Est-il permis, en termes parlementaires, dans le
cadre d'une commission, de lancer des insultes d'une voix aussi forte à
un collègue en face de soi? Je vous pose la question, M. le
Président.
Le Président (M. Desbiens): Le député de
Chambly n'a pas le droit de parole et...
M. Saintonge: Peu importe, M. le Président. Il l'a fait.
Hier, on a sorti quelqu'un qui insultait une autre personne dans l'assistance.
Là, c'est un député qui insulte un autre
député d'une façon inacceptable.
M. Rocheleau: II l'a mis dans une cage et on veut qu'il en
sorte.
M. Tremblay: En quoi vous ai-je insulté?
M. Rocheleau: II l'a mis dans une cage.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Chambly, comme à tous les députés, depuis trois
jours...
M. Ciaccia: Vous êtes sorti de votre cage pour insulter mon
collègue.
Le Président (M. Desbiens): Alors, on continue. À
l'ordre! S'il vous plaît! À l'ordre! M. le ministre.
M. Léonard: M. le Président, je vois, quand on
commence à parler, qu'on nous interrompt de l'autre côté.
Tout à l'heure, j'ai entendu le député de Mont-Royal dire
que nous avions perdu le sens des perspectives là-dedans. Il faudrait
voir où est le véritable problème. À ce
moment-là, on retrouve le sens des perspectives. Si on parle du
discrétionnaire, on va aussi parler du discrétionnaire de ceux
qui interviennent à l'encontre de la constitution. C'est là le
mal.
Je pense qu'il est quand même important de faire un certain nombre
de distinctions sur le plan des décisions que le gouvernement aura
à prendre à l'intérieur de l'article 2.
Présentement, je pense qu'il s'agit de droit institutionnel dont nous
devons parler. Ce qui est différent de la Charte des droits et
libertés de la personne qui concerne la personne physique.
Le droit institutionnel là-dessus se situe à
l'intérieur d'un cadre institutionnel qui comprend le gouvernement
fédéral, le gouvernement du Québec et qui comprend, dans
le cas qui nous occupe, les municipalités. Les municipalités
possèdent un cadre juridique par la Loi sur les cités et villes,
par le Code municipal et d'autres chartes de villes qui sont de même
nature. Elles doivent respecter ces règles du jeu. Elles doivent
respecter elles-mêmes l'article 92.8 de la constitution et l'article 20
de la loi sur le ministère des affaires intergouvernementales. Le
fédéral doit le faire aussi. Quand cela ne se fait pas, je pense
que le Québec doit intervenir. Il intervient. Sur ce plan, le
gouvernement prend ses responsabilités.
S'il y a des fautes qui peuvent être commises sur d'autres plans,
le recours aux tribunaux ordinaires continue d'exister. Sur le plan
administratif, par contre, cela fonctionne comme la loi le dit. Il y a des
responsabilités qui sont exercées par le gouvernement. Je veux
toujours vous rappeler que nous sommes sur le plan des institutions et non pas
sur l'application de la Charte des
droits et libertés de la personne, ce qui motive d'ailleurs un
certain nombre d'écrits à l'heure actuelle. On fausse donc les
choses à la base là-dessus. Je voudrais qu'on revienne sur ce
plan.
Ce sont les quelques remarques que j'avais à faire.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Nelligan.
M. Laplante: C'est un droit de réplique que le ministre
donne continuellement. J'ai demandé mon droit de parole. Il y a
l'alternance, M. le Président.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Bourassa. (12 h 15)
M. Patrice Laplante
M. Laplante: Merci, M. le Président. Il y a des paroles de
la part du député de Saint-Laurent, je pense, qui étaient
très justes. Lorsque vous avez fait vos remarques sur l'amendement
proposé par le député de Laprairie, vous avez dit,
à un moment donné, que vous n'aviez plus rien à dire sur
le projet de loi, que c'était une perte de temps qu'il y avait ici. Je
pense que cela justifie justement le retour de ce projet de loi à
l'Assemblée nationale pour le vote et la prise en considération
d'un rapport selon lequel vous n'avez plus rien à dire sur ce projet de
loi et que c'est une perte de temps, à cette commission.
Vous parlez abondamment de l'éditorial de M. Roy, du Devoir. Mais
vous faites attention, par exemple, de ne pas parler de l'éditorial de
juin de M. Jean-Claude Leclerc.
Une voix: Elle est vieille, celle-là.
M. Laplante: Non, même là, le Devoir, je pense, a
dans ses coutumes une certaine continuité d'idée.
Une voix: Un équilibre.
M. Laplante: Elle peut avoir échappé à M.
Roy qui, dans la complexité de son travail, n'a peut-être pas lu
ce que M. Jean-Claude Leclerc écrivait le 23 juin 1983. À moins
qu'on ne puisse considérer le nouvel éditorialiste du Devoir au
même titre que votre ancien chef, cest-à-dire qu'il change
d'idée rendu sous un autre chapeau.
Mais il écrivait à ce moment-là, c'est la
déclaration de M. Leclerc: "Le ministre des Affaires municipales, M.
Jacques Léonard, semble enfin avoir trouvé une bonne façon
de mettre un terme aux ravages du renard fédéral dans les
poulaillers municipaux." Il continue: "Les villes, qui ouvrent leurs portes aux
subventions d'Ottawa, aux dépens de celles qui respectent l'ordre
constitutionnel, vont cesser de manger à tous les râteliers. Et
les cités qui, respectant la saine gestion des affaires locales,
refusaient de toucher les chèques fédéraux ne seront plus
pénalisées."
Je vous ferais remarquer qu'on n'aurait pas eu besoin de l'article 2,
justement, si les municipalités avaient respecté la loi que vous
avez adoptée, avec de bonnes intentions, en 1974. Je ne doute pas de
cela. Vous n'y avez pas mis de dents à ce moment-là, probablement
parce que vous n'en avez pas senti le besoin ou que vous aviez l'ordre d'en
haut de ne pas faire cela, que vous étiez déjà
allés assez loin avec vos freins. Tout de même, il reste qu'on a
été obligé d'en faire une nouvelle pour appliquer
justement ces dents-là pour celles qui n'ont pas respecté votre
loi de 1974. Toutes celles qui ont respecté votre loi, qui ont
refusé l'argent, les municipalités, on n'a pas vu...
M. Saintonge: M. le Président, une question de
règlement.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Laprairie, sur une question de règlement.
M. Saintonge: Je voudrais simplement faire remarquer - et je
pense que c'est important pour la commission - que, quand le
député de Bourassa dit "de respecter votre loi de 1974", c'est la
loi du Parlement du Québec, de l'Assemblée nationale, de 1974. Ce
n'est donc pas notre loi, mais c'est la loi du Québec.
M. Laplante: Je suis complètement d'accord avec vous, M.
le député de Laprairie...
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Bourassa.
M. Laplante: ...on ne fera pas de sémantique...
M. Léonard: II voulait interrompre parce qu'il
avait...
M. Laplante: ...on ne jouera pas sur la sémantique
là-dedans, on va dire que c'est la loi du gouvernement libéral de
1974. Si elle avait été respectée au cours des
années... Aujourd'hui, il arrive que des municipalités ne veulent
plus la respecter. On adopte ce projet de loi 38, auquel je suis très
favorable parce que j'ai un maire chez nous qui respecte les lois. Pourtant,
c'est un maire libéral - il n'a pas à s'en cacher...
Une voix: Comment s'appelle-il?
M. Laplante: ...un très bon
administrateur - le maire Ryan. Une voix: Ah!
M. Laplante: On ne partage pas la même idéologie,
mais il faut aussi que je lui rende ce qu'il est.
M. Ciaccia: Vas-tu lui envoyer une copie de ton intervention?
M. Laplante: Oui, je peux lui en envoyer une copie parce qu'on se
parle franchement. C'est un homme qui est réceptif. Lorsqu'on se parle,
il n'a pas peur de ses idées; je n'ai pas peur des miennes non plus.
C'est ce qui fait que, probablement, on s'entend assez bien dans notre vie
montréalaise du nord.
Je ne l'ai jamais entendu critiquer ce projet de loi. Il a
déjà répondu à son député
fédéral que les priorités de sa ville, c'est lui qui les
ferait et qu'il n'avait pas besoin de lui. Il a voulu lui imposer des choix par
un organisme censément apolitique, dont le député
fédéral est membre. Ils sont environ 35 membres dans le Club
optimiste. Le député fédéral dit qu'il n'est pas
là pour faire de la politique, mais, en même temps, il leur a
offert de construire, avec une subvention de 500 000 $, un centre
communautaire. Cela a choqué un peu mon maire; il lui a dit qu'il
était capable d'établir ses priorités lui-même et
que sa priorité était l'agrandissement d'un poste de
pompiers.
J'appelle cela un maire qui s'est tenu debout. Il ne s'est pas
laissé attirer par l'appât de l'argent.
M. Ciaccia: II n'avait pas besoin de votre loi pour le faire.
M. Laplante: Mais, cette loi...
M. Ciaccia: II n'a pas eu besoin de votre loi pour le faire.
M. Laplante: ...ne fait pas mal au maire de Montréal-Nord,
parce qu'il a respecté la loi de 1974. Ce que vous essayez de
défendre, actuellement, c'est cela qui est grave dans le système
parlementaire. Ce sont des illégaux, qui ont refusé
systématiquement, au nom d'une politique partisane, de satisfaire aux
exigences de votre loi 59 de 1974. Ils ont bafoué le Parlement, ces
gens. Ce sont eux que vous protégez actuellement.
Je vous comprends. Dans le fond, je ne peux pas non plus jeter tout le
blâme sur l'Opposition libérale actuelle au Québec. Vous
êtes conscients qu'il faut absolument que vous vous enleviez des jambes
des députés fédéraux, parce qu'ils sont vos
frères. Ils ont à passer par une élection avant vous et
vous essayez de les sortir du guêpier dans lequel ils sont tombés
pour essayer d'en récupérer quelques-uns après leur
défaite au niveau fédéral; il y en a un certain nombre
parmi eux qui lorgnent vers vous comme candidats à une éventuelle
élection provinciale. Ce sont des choses que vous ne niez pas. Elles
sont écrites dans plusieurs journaux de quartier. La grande presse n'en
fait pas état très largement actuellement, mais les faits sont
là. Éventuellement, votre parti sera noyauté, comme il
l'est actuellement, mais de façon beaucoup plus visible face aux
citoyens, de candidats fédéraux qui seront sur les rangs pour
devenir des députés provinciaux, de la même façon
que cela s'est produit en 1981...
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Bourassa, la pertinence.
M. Laplante: Oui, mais c'est parce que c'est un sujet tellement
large, l'autonomie municipale, l'autonomie du gouvernement du Québec,
avec le Canada Act, qu'on est presque obligé d'aller jusque-là,
car ce sont ces mêmes personnes, sans l'approbation du Québec, qui
ont voté pour le Canada Act. Ces gens essaient aujourd'hui de nous
l'imposer en se promenant dans les comtés avec l'argent du
déficit...
Une voix: de 31 000 000 000 $.
M. Laplante: ...de 32 000 000 000 $ pour lequel on aura à
payer 8 000 000 000 $, et ces personnes se promènent avec environ 200
000 000 $ ici, au Québec. Ce n'est pas moi qui ai dit cela. C'est mon
député fédéral qui m'a dit qu'il avait 500 000 $
à donner, de manière discrétionnaire, à qui on
voulait.
Une voix: Ils sont chanceux.
M. Laplante: Oui, ils sont chanceux. Si le gouvernement du
Québec, les députés péquistes, avaient fait la
même chose, qu'auriez-vous dit?
M. Ciaccia: Venez dans mon comté. Vous êtes
invités à le faire dans mon comté, n'importe quand.
M. Laplante: Boswell! Que cela aurait été un gros
scandale! On aurait eu des questions de privilège tous les jours.
M. Ciaccia: Écoutez, je vous invite à le faire dans
mon comté.
M. Laplante: À part cela, vous auriez eu le droit de le
faire. Ce n'est pas une façon de gouverner, mais c'est la façon
de gouverner, j'oserais dire, qui est aussi la marque typique des
libéraux du Québec.
Souvenez-vous de 1976. Vous étiez là, M. le
député de Mont-Royal. Je ne peux pas accuser les autres
députés qui n'étaient pas là, mais il y a un
témoin autour de la table qui y était. Vous savez fort bien que,
dans le domaine municipal, vous avez, rien que par des lettres, par votre
ministre des Affaires municipales, pris des engagements pour près de 1
000 000 000 $ sans passer par le Conseil des ministres, sans passer par le
Conseil du trésor, sans décret.
Notre gouvernement a été obligé d'en respecter 300
000 000 $, parce que les travaux étaient déjà
commencés. C'est votre façon de gouverner. Vous laissez vos
frères libéraux actuellement dans le paysage
québécois distribuer des montants comme bon leur semble, en se
foutant de la constitution adoptée par eux, en se foutant à peu
près de tout le monde, pour autant qu'on puisse accrocher des votes un
peu partout.
Je poursuis la lecture de l'éditorial du 23 juin:
"Désormais, si le projet de loi 38 est adopté, une nouvelle
péréquation va remettre un peu d'équité, sinon de
l'ordre, dans cette foire nationale." Je pense que vous ne l'avez pas lu.
Écoutez cela comme il faut. Elle est bonne. N'écoutez pas
seulement ce qui fait votre affaire.
M. Ciaccia: Je l'ai déjà lu.
M. Laplante: Cela ne fait pas votre affaire parce que vous n'en
citez jamais.
M. Leduc (Saint-Laurent): Je l'ai lu avant vous.
M. Laplante: Cela ne paraît pas parce que vous ne l'avez
jamais lu ici.
M. Rocheleau: Non, non. Lisez-le.
M. Laplante: Je le lis pour le journal des Débats,
à cause du nombre d'abonnements important au journal des Débats.
"La mesure est astucieuse. Au lieu de faire perdre des fonds
fédéraux aux citoyens québécois en interdisant
à leur municipalité de passer des ententes avec Ottawa,
Québec permet la venue de ces subsides aux travaux locaux - c'est clair,
c'est vrai - mais dans le cadre d'ententes
fédérales-provinciales". Lui, il l'a compris, le projet de loi,
Jean-Claude Leclerc.
Il poursuit: "Ottawa pourra, certes, continuer de mépriser ces
ententes et dépenser à sa guise, mais alors, on ne pourra plus,
pour le faire, compter sur la pauvreté ou la cupidité de
certaines municipalités, car les coupables perdront à
Québec ce qu'elles pensaient gagner à Ottawa."
Déjà, le Devoir était sensibilisé à la chose
le 23 juin. Essayez de coller les deux éditoriaux aujourd'hui, cela ne
tient pas debout. C'est le même journal qui s'exprime. Cela ne tient pas
debout. On ne peut pas être blanc une journée, noir le lendemain,
quand on n'a rien fait. Écoutez un peu!
II poursuit: "Cette discipline déplaît à la
direction actuelle de l'Union des municipalités du Québec. Mais
l'UMQ n'était en mesure ni d'imposer une ligne commune à ses
membres ni d'amener le gouvernement central et ses dispensateurs de
chèques à mieux se comporter dans les affaires municipales et
locales, lesquelles, jusqu'à nouvel ordre, relèvent de la
compétence exclusive des provinces. L'UMQ craint que le ministre n'use
arbitrairement des pouvoirs que lui confère la loi 38." C'est seulement
leur part. "Il sera toujours temps de combattre les abus de M. Léonard."
S'il y en avait, mais les abus de M. Léonard seraient les abus du
gouvernement, parce que c'est une loi gouvernementale. M. Léonard n'a
pas seul ces pouvoirs. Ce sont les pouvoirs du gouvernement qui va régir
cette loi. S'il y avait des abus, les municipalités accuseront le
gouvernement et non pas M. Léonard. Il est là pour appliquer,
pour parrainer une loi de son ministère avec les pouvoirs du
gouvernement. "Pour le moment, il s'agit de contrer le triste patronage
fédéral dans l'administration locale." C'est toujours M. Leclerc
qui parle. C'est toujours M. Leclerc, le 23 juin 1983, qui avait en main le
projet de loi vis-à-vis duquel le Devoir d'aujourd'hui n'a plus la
même réaction. "Une réserve - oui, parce que M. Leclerc est
honnête - s'impose néanmoins. Si nous avons bien compris le projet
de loi, le gouvernement québécois retiendrait à même
les subsides dus à une municipalité l'équivalent des
subventions fédérales qu'elle aurait touchées en
contravention de la loi. Jusque-là, la sanction est juste et
probablement efficace." Il n'y a pas tellement de restrictions. Je n'en ai vu
aucune avec Jean-Claude Leclerc, dans son éditorial du 23 juin 1983. (12
h 30)
II va falloir que vous arrêtiez, vous aussi, de jouer à la
politique partisane. Il va falloir que vous vous penchiez sur le rôle de
l'Opposition qui est aussi d'aider un gouvernement dans l'application de ses
lois, dans la construction et dans l'étude article par article de ses
lois, pour donner des idées de temps en temps. Vous ne devez pas
être vides au point d'être qualifiés de "cruches". Je ne le
crois pas. Il y a aussi des gens intelligents chez vous, mais, à un
moment donné, vous allez essayer de moins personnaliser vos
interventions, d'apporter des choses constructives, des idées nouvelles.
Le Québec s'attend aujourd'hui d'un parti de l'Opposition aussi bien que
d'un parti au pouvoir... L'Opposition, c'est son rôle, je pense, de dire
qu'un parti au pouvoir est usé, n'a plus d'idée; on est d'accord
là-dessus.
Mais, quand une Opposition est là et qu'elle ne donne jamais
d'idée nouvelle, cela veut dire que, pendant les sept ans que ces gens
ont été dans l'Opposition, ils n'ont jamais été
capables de se recycler dans aucun diable de domaine.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Hull.
M. Rocheleau: M. le Président, le député de
Bourassa, on l'entend depuis une quinzaine de minutes. Je souhaiterais qu'il
s'en tienne à la pertinence du débat, simplement pour une raison:
J'aimerais savoir si le député de Bourassa est d'accord avec
l'amendement proposé par le député de notre formation
politique, celui de Laprairie.
Le Président (M. Desbiens): C'est cela. Alors, je rappelle
que la proposition d'amendement qu'on étudie présentement, c'est
que l'article 2 soit modifié en remplaçant, dans la
première ligne, les mots "au jugement du gouvernement" par les mots "de
l'avis de la Commission municipale du Québec". Oui, M. le
député de Bourassa, sur l'amendement.
M. Laplante: C'est toujours dans l'esprit, M. le
Président, de l'amendement proposé par le député de
Laprairie que je fais mon intervention. J'ai fait des écarts pour
essayer de faire comprendre, au même titre que le député de
Mont-Royal l'a fait tout au long de son intervention, que j'ai
écoutée religieusement, et j'invite même les membres de
l'Opposition à la relire... Ils vont voir que je suis exactement dans la
foulée de l'intervention du député de Mont-Royal pour en
arriver à cet amendement et je voudrais leur prouver que, dans un esprit
constructif, ils n'auraient jamais dû présenter un tel amendement.
Il faut faire le tour du plateau pour enlever une pomme de temps en temps et
voir ce qu'il y a dans le fond. Et les pommes, actuellement, à la minute
qu'on en enlève une du plateau, on s'aperçoit que tout est
dirigé d'Ottawa vers Québec, ce qui est anormal. On a un
Parlement ici très bien érigé de par la constitution.
D'autant plus que le Québec, dans la constitution canadienne, lorsqu'on
a fait la fédération canadienne, Ottawa est devenu une
créature du Québec. Cela a pris des provinces pour former un
gouvernement central qu'on appelait, à ce moment-là, la
Confédération. J'ai toujours entendu parler d'une
Confédération jusqu'à ce qu'en 1980 on nous dise: C'est
une fédération. Cela m'a mêlé complètement.
Dans une Confédération, je pensais qu'on pouvait avoir des
pouvoirs parce que, lorsqu'on analyse par le dictionnaire le mot
"confédération" par rapport à "fédération",
c'est complètement différent. Aujourd'hui, on est pris dans une
fédération avec un Canada Act sur lequel le Québec n'a
rien eu à dire. Cela s'est voté...
Une voix: Parce qu'il n'a pas voulu.
M. Laplante: ...les résolutions se sont prises en
l'absence du Québec. Mais tout de même, il faut vivre avec cela
jusqu'à ce que le peuple québécois reconnaisse, une fois
pour toutes, son indépendance, son programme, sa
souveraineté.
Je voterai donc contre cet amendement, M. le Président, pour
toutes les raisons que j'ai données et j'espère que l'Opposition
en prendra une leçon.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Nelligan.
M. Clifford Lincoln
M. Lincoln: M. le Président, je ne pense pas que je vais
m'attarder au bazar, à la salade russe que nous a servie le
député de Bourassa. Je pense que sa réputation est faite
depuis des années dans le Parlement. Il parle ici des affaires
municipales. Cela a été une salade russe, la même petite
popote péquiste qu'on nous sert chaque fois, qui n'a ni queue ni
tête.
M. Laplante: Je ne vous ai pas insulté...
M. Lincoln: Je pense que les gens...
M. Laplante: Question de règlement, M. le
Président.
M. Lincoln: M. le Président, j'ai le droit de parole.
Le Président (M. Desbiens): Le député de
Bourassa, sur une question de règlement.
M. Laplante: Je pense que je n'ai insulté personne, M. le
député de Nelligan.
M. Lincoln: Personne...
M. Laplante: Et si vous voulez continuer sur un sujet un petit
peu plus creux, on peut en continuer un autre qu'on a déjà
commencé. Si ce sont dans ces termes-là que vous voulez commencer
votre discours, on ira ailleurs, M. le député de Nelligan.
M. Lincoln: M. le Président...
M. Laplante: La gentilhommerie existe de part et d'autre.
M. Lincoln: ...je n'ai pas insulté le député
de Bourassa.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Nelligan.
M. Lincoln: Je n'ai pas insulté le député de
Bourassa. Je n'ai l'intention de faire aucun débat avec lui parce que,
vraiment, cela ne m'intéresse pas du tout. Tout ce que j'ai dit, c'est
qu'il nous a servi la même petite popote péquiste, dont les gens
sont tannés maintenant, que ce soit de la part du ministre des Affaires
municipales, du ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation de tous les ministres qui parlent de questions
fédérales-provinciales. Ils font référence à
cela à chaque fois qu'on leur parle. Les gens sont fatigués des
querelles stériles entre Ottawa et Québec. Ils ne veulent pas
prendre part à cette bagarre qu'on provoque d'un côté ou de
l'autre, et surtout de ce côté-ci, je veux dire de l'autre
côté de la salle, des gouvernements du Québec et d'Ottawa.
Les gens sont fatigués d'entendre parler de cette bagarre
stérile. Je pense que l'indication la plus claire a été
celle des deux dernières élections partielles où cela a
été la question cruciale. Les gens votent pour que ces bagarres
fédérales-provinciales cessent.
Je voudrais m'adresser au ministre à la suite de certaines
remarques qu'il a faites. Tout d'abord, cette histoire de valets d'Ottawa. S'il
y a quelque chose à laquelle je m'oppose fondamentalement, c'est cette
espèce de slogan qui dit qu'on est des valets d'Ottawa. Personnellement,
je sais que je parle pour mes collègues, on n'est le valet de personne.
Pas le valet d'Ottawa et sûrement pas les valets du gouvernement
québécois ou de personne. On se tient sur nos jambes. Il n'y a
pas un fédéraliste qui va me dire - quoique je sois
fédéraliste moi-même - ce que je dois faire dans mon
comté. Je veux suggérer au ministre d'aller lire les
galées des discours des députés du Parti libéral du
Québec sur la loi 38 où il verra ce que nous avons dit. Je me
souviens très bien que le député de Lac-Saint-Jean
-j'oublie sa circonscription - M. Brassard, a admis que moi et le
député de Roberval avions fait presque la même intervention
concernant les subventions qui sont données par les
députés fédéraux à des organismes au sein
des municipalités. En fait, tous les intervenants ont dit: On est tout
à fait d'accord sur le principe que les municipalités du
Québec dépendent du gouvernement fédéral.
Deuxièmement, on a dit: On est tout à fait contre le
principe que des subventions soient données de façon tout
à fait inefficace...
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Chambly, sur une question de règlement.
M. Tremblay: Oui, sur une question de règlement. Pour
rendre service au député, c'est parce qu'il vient de faire un
lapsus épouvantable qui a dépassé son idée. Il a
dit qu'il était d'accord pour que les municipalités
relèvent du gouvernement fédéral et je suppose qu'il
voulait dire du gouvernement provincial.
M. Lincoln: Oui, exactement. Je remercie...
M. Laplante: ...qu'un valet ne peut pas dire.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Nelligan. M. le député de Bourassa, à l'ordre!
M. Lincoln: En tout cas, j'espère que les gens qui liront
ces débats verront toutes ces accusations de valets d'Ottawa, de
fermeture de cage, etc. Ils sauront tout ce que cela fait. Cela souligne,
encore une fois, la stérilité de toutes ces bagarres
inutiles.
En fait, ce n'est pas du tout cela qu'on a dit dans nos interventions.
On a dit qu'on était tout à fait contre la distribution
inefficace, la distribution sans raison de ces subventions de la façon
que cela est fait maintenant. En même temps nous avons dit ceci au
ministre: Un mal n'en engendre pas un autre. Ce n'est pas la façon de
régler un problème que d'adopter une loi. Lorsqu'on voit les lois
qui ont été adoptées au cours de cette session qui a
commencé un mois en retard pour soi-disant préparer une relance
économique... Cela est la "joke" de l'année, la relance
économique du Parti québécois. J'ai regardé les
lois qui ont été adoptées depuis l'ouverture, en retard,
de cette session soi-disant pour faire la relance économique.
On va adopter la loi 38 qui est une loi constitutionnelle, une loi de
bagarre et d'affrontement d'un côté et de l'autre où les
municipalités, clairement, ne sont pas contentes, où tout le
monde n'est pas content, excepté le ministre qui veut encore user de ses
grands pouvoirs pour montrer qu'il est un macho. Oa va adopter la loi 48 qui
est également un affrontement constitutionnel, qui va créer
toutes sortes de bagarres juridiques entre le fédéral et le
provincial. On va adopter la loi 49, et l'UPA dit qu'elle ne veut pas de cette
loi. Le conseil des viandes du Canada dit: On ne veut pas de cette loi 49. On
va adopter cette loi, encore une espèce de loi semi-constitutionnelle.
On va adopter la loi 43; tous les restaurateurs disent: On ne veut pas de la
loi 43. Tous les gens au pourboire disent: On ne veut pas de la loi 43. C'est
nous qui avons, encore une fois, raison. Le peuple a toujours tort.
Le premier ministre, au lieu de
s'occuper de la relance économique, a été en
Italie, il s'est encore chamaillé. C'est le gouvernement de la bagarre,
de la chamaille continuelle. La relance économique. Cela est la plus
grande "joke". C'est de cette façon qu'on fait la relance
économique, en adoptant des lois. Si vous adoptez votre loi 38, vous
finissez par avoir raison, parce que la loi du plus fort, selon vous, est
toujours la meilleure. Parce que vous avez la majorité, vous parlez de
valets. Qui est plus grand valet que toute la bande qui se lève pour
voter toutes les lois que vous présentez ici? Ils votent presque
automatiquement toutes les lois, sans même tenir compte de la population
qu'ils représentent. Ce qui arrive avec votre gouvernement aujourd'hui,
c'est un gouvernement qui est au pouvoir depuis trop longtemps.
Vous dites qu'il y a une différence entre le gouvernement et les
ministres, mais je vais vous dire ceci, M. le ministre. Un de nos
collègues qui ne vous connaît pas très bien me disait - moi
non plus, je ne vous connais pas très bien, je vous vois de temps en
temps - que vous étiez un type tout à fait accommodant,
sympathique, intelligent, et tout cela est sans doute vrai. Mais quand il
s'agit d'une loi où tous les gens sont contre vous, presque toute la
population est contre vous, malgré cela, vous vous entêtez parce
que vous avez décidé que votre pouvoir passe avant tout. C'est la
même chose pour le ministre de l'Agriculture, c'est la même chose
pour beaucoup de ministres. Vous dites qu'il y a une distinction entre le
gouvernement et les ministres, mais lisons l'article 14, car on ne peut pas
regarder l'article 2 sans regarder l'article 14. L'article 14 dit: "Le ministre
des Affaires municipales est responsable de l'application de la présente
loi." Tout ce que le gouvernement a besoin de faire...
Une voix: Franchement.
M. Lincoln: Bien oui, bien oui. Franchement... Ce qui va arriver,
c'est que le gouvernement va déléguer tous ses pouvoirs. C'est
vous qui allez exercer ces pouvoirs. "Au jugement du gouvernement", ce sera
votre jugement. Je me demande qui dans le gouvernement va contredire votre
interprétation des choses, si personne n'a contredit le principe
même de la loi 38. Jusqu'à présent, personne ne s'est
opposé à la loi 38 dans le gouvernement, malgré l'Union
des municipalités, malgré l'Union des municipalités
régionales de comté, malgré tout ce qui a
été dit dans la population. Personne ne vous contredit, vous
êtes l'homme fort du gouvernement. Personne ne contredit le ministre de
l'Agriculture, qui gagne toutes ses causes au sein du gouvernement. Le
gouvernement, en agriculture, c'est lui. Le gouvernement, en affaires
municipales, c'est sûrement vous. Il n'y a personne qui a l'air de vous
contredire, il n'y a personne qui vous dit: Regardez l'éditorial de
Jean-Louis Roy, regardez l'éditorial de Dubuc aujourd'hui, faites un peu
attention. Il n'y personne au gouvernement qui vous a dit: Écoutez un
peu ce que l'Union des municipalités régionales de comté
dit. Il n'y a personne qui vous a dit: Écoutez un peu ce que l'Union des
municipalités dit. Il y a certainement quelqu'un au gouvernement qui se
tracasse du fait que toutes ces municipalités disent quelque chose ici.
Le fait même que le fédéral ait tort en essayant de donner
des subventions directement ne vous donne pas raison.
Tout ce que vous trouvez à dire c'est: II est stérile en
idées, le Parti libéral. Certes, le Parti libéral aurait
trouvé une façon plus constructive que celle de présenter
une loi à l'encontre des municipalités. Sûrement qu'on
aurait essayé de dialoguer avec les municipalités. Dans son
programme, le Parti libéral s'engage - c'est l'une des clauses du
programme du Parti libéral - à consulter les municipalités
lors de la présentation de tout projet de loi ou de règlement qui
concerne l'exercice des responsabilités municipales, à adopter
une approche ministérielle concertée par rapport à la
solution des problèmes urbains et à faire en sorte que le
ministère des Affaires municipales agisse comme agent de concertation et
de coordination dans les actions des ministères sectoriels et des
organismes gouvernementaux qui interviennent dans les affaires municipales.
Au Parti libéral, on est toujours parti du principe qu'on ne peut
pas dire que le gouvernement fédéral est un gouvernement
centralisateur et qu'on s'oppose à toutes ses politiques de
centralisation et faire exactement la même chose avec les
municipalités. C'est comme si c'était votre petit toutou, votre
petit jouet avec lequel vous pouvez faire comme vous voulez.
Vous vous opposez au gouvernement centralisateur, mais,
vous-mêmes, vous faites de la centralisation avec les
municipalités en leur imposant des choses qu'elles ne veulent pas. On
vous demande de consulter, on vous demande d'écouter ce qu'elles ont
à dire.
M. Laplante: On ne connaît pas le système encore. On
ne connaît pas le système québécois. Le
député...
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre! À
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Laplante: ...
M. Lincoln: Écoutez...
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, à
l'ordre, M. le député! M. le député de
Nelligan.
(12 h 45)
M. Lincoln: Ce que je veux vous dire, c'est que vous devriez
vous-mêmes être un peu plus à l'écoute des gens. Vous
devriez être moins autoritaires, vous devriez être moins
dictateurs, cesser de penser que les pouvoirs que vous avez sont des pouvoirs
qui vous sont transmis par la main de Dieu pour toujours. Les gens qui vont
vous élire sont les mêmes gens qui vous ont élus la
dernière fois, ce sont eux qui sont au sein de ces municipalités.
Ils commencent à passer des messages: par exemple, la dernière
fois, en 1981, on a perdu dix ou onze élections partielles, je ne sais
pas trop, mais on a été réélus. Cette fois-ci,
c'est un cycle qui va beaucoup plus loin parce que les dernières
élections partielles étaient dans des comtés de cinq
ministres de votre gouvernement. Cela ne s'était pas passé avant
1981. Il y a eu cinq ministres qui ont été défaits.
Ce qui est arrivé, la population vous le dit de plus en plus
clairement: Vous, les ministres, qui vous croyez le gouvernement, qui ne faites
pas la différence entre les deux, qui vous croyez omnipotents, qui
êtes tellement imbus de votre propre importance, de votre propre sagesse
et de votre propre intelligence, qui croyez tout savoir pour les gens, les gens
vous demandent de les écouter. Commencez par écouter ce que le
milieu lui-même dit. Par exemple, la loi 38 ressemble exactement à
la loi 48, que le ministre de l'Agriculture est en train de faire adopter,
où il dit: Le milieu est avec moi. Pourtant, on reçoit plein de
télégrammes nous disant que le milieu ne veut pas de sa loi.
Comme dans ce cas, vous recevez des télégrammes. Ces gens
sont-ils bornés, sont-ils imbéciles, sont-ils fous,
n'écoutent-ils pas, ne savent-ils pas, ne lisent-ils pas?
Comment pouvez-vous adopter des projets de loi qui sont tout à
fait à l'encontre des voeux des municipalités que ce projet de
loi est supposé protéger? Qu'arriverait-il si votre projet de loi
n'était pas adopté avant le mois de décembre? Est-ce que,
si vous le retardiez d'une semaine, deux semaines, trois semaines, quatre
semaines, cela ferait une grande différence? Les subventions du
gouvernement fédéral sont en train d'être
distribuées, sans doute qu'elles sont déjà
dépensées dans les municipalités.
Allez revoir le ministre Roberts, il a accepté de dialoguer avec
vous. Maintenant, le fait que vous ayez introduit ce projet de loi 38, cela
vous donne un pouvoir de négocier beaucoup plus grand. Si, par exemple,
vous faisiez un geste beaucoup plus constructif, si vous suspendiez le projet
de loi, vous servant du fait que vous l'avez introduit pour dire au ministre
fédéral: On fait une dernière négociation; si cela
n'aboutit pas, au début de mars - aussitôt que la session va
recommencer; espérons qu'ils vont respecter la date cette fois-ci, au
lieu de la reporter d'un mois ou plus - quand la session recommencera, on va
sanctionner le projet de loi, on va l'adopter en troisième lecture. Mais
là, tout ce que vous allez faire, ce sera une querelle. Cette fois-ci,
ce ne sera pas une querelle entre vous et le fédéral, ce sera
entre vous et les municipalités. Comment pouvez-vous, comme ministre,
fonctionner d'une façon constructive, d'une façon
coopérative avec les municipalités si elles ne veulent pas de
votre projet de loi et considèrent que vous êtes beaucoup trop
autoritaire, dictatorial? Si ces municipalités, de la façon que
vous agissez, constatent cela elles-mêmes, comment, après,
pourrez-vous fonctionner de façon constructive au sein de votre
ministère?
Je trouve que la proposition de mon collègue de Laprairie - de
changer "au jugement du gouvernement" pour "de l'avis de la Commission
municipale du Québec" -est une façon d'indiquer, encore une fois,
que ce que nous voulons, c'est une concertation avec le milieu. Vous parlez
toujours de concertation. Dans ce cas, vous dites: J'ai vu toutes les
municipalités. Mais vous n'avez pas voulu convoquer une commission
parlementaire où vous auriez écouté ces gens avant
d'adopter votre projet de loi. Vous avez invité, pendant deux heures,
l'Union des municipalités de comté, et ce, après avoir
adopté le projet de loi en deuxième lecture, ce qui donnait un
signal que, de toute façon, vous n'alliez rien changer. Parce que, si
vous aviez voulu réellement écouter ce que ces gens avaient
à dire, si vous aviez voulu réellement changer d'idée,
vous les auriez écoutés avant la deuxième lecture du
projet de loi. Vous n'avez même pas écouté l'Union des
municipalités, qui a refusé de venir, parce qu'elle a
réalisé que c'était une chose factice, que vous ne
changeriez jamais d'idée. Vous êtes tellement borné et
têtu sur cette question que votre décision est prise depuis
longtemps: le projet de loi 38 va rester tel quel, quoi qu'il arrive. Cela
prouve le genre d'amendements que vous allez apporter, des petites virgules
à droite et à gauche, rien de substantiel.
Je ne vois pas pourquoi vous n'accepteriez pas qu'on dise: "Une
municipalité qui, de l'avis de la Commission municipale du
Québec". Si vous êtes tellement à l'écoute de la
Commission municipale du Québec, pourquoi vous opposer à cela?
Vous êtes toujours le ministre responsable du projet de loi. Si ces
municipalités, comme l'a dit le député de Bourassa, sont
tellement de votre côté, si le maire Ryan, par exemple, voit cela
d'un oeil
positif, lui qui a tellement d'influence sur les autres, il me semble
que le gouvernement n'aurait rien à perdre, n'aurait rien à
craindre du changement qu'on demande d'apporter.
Le problème, c'est celui-ci. Si vous voulez essayer de nous
prouver que le gouvernement et le ministre des Affaires municipales sont deux
choses différentes, ce sont peut-être deux choses
différentes légalement, c'est sûr, mais c'est certainement
la même chose du point de vue pratique. Il serait intéressant de
connaître un projet de loi important, un projet municipal où vous
n'avez pas eu raison chaque fois. Qu'on pense à la loi 46, de la CUM,
où il y avait toutes sortes de gens du gouvernement, de votre caucus,
qui venaient de Montréal et qui voyaient la loi d'un côté.
Vous avez réussi à avoir raison là aussi. Dans toutes les
questions qui ont une incidence municipale, c'est certainement vous qui aurez
un droit de regard, le dernier mot, la façon de pouvoir convaincre le
gouvernement que vous avez raison.
Si un ministre a une certaine autorité sur un dossier, c'est
sûr que le gouvernement et le ministre sont équivalents. Je
voulais vous demander la raison pour laquelle vous vous opposez à ce que
la Commission municipale du Québec soit celle qui a un droit de regard.
La Commission municipale du Québec, c'est sûrement un organisme
impartial, qui va voir les choses d'une façon tout à fait
objective, ce qui ne sera peut-être pas le cas pour le gouvernement qui
verra la chose de son point de vue, d'une façon tout à fait
étriquée par rapport à sa politique.
On ne peut pas nier que la politique du gouvernement, dans le projet de
loi 38 comme dans le projet de loi 48, comme dans le projet de loi 49, est
inévitablement reliée à toute la question de la politique
principale de l'indépendance du Québec. Il ne peut en être
autrement: Comment voulez-vous négocier à l'intérieur d'un
système que vous reniez au premier abord? C'est un système dans
lequel vous ne voulez pas travailler.
Si vous vouliez travailler, comment expliquez-vous, par exemple, qu'en
Ontario, en Alberta ou en Colombie britannique, des provinces qui sont aussi
jalouses de leur autorité locale... Il y a un député qui a
cité le ministre des Finances de l'Ontario qui s'opposait à
l'ingérence fédérale dans les municipalités. On
peut voir que l'Ontario aussi s'oppose à l'ingérence
fédérale dans les municipalités, mais, au moins, ces gens
en arrivent à un modus vivendi; au moins, ils ne publient pas de projet
de loi pour forcer les choses. C'est ce qu'on vous demande, c'est-à-dire
de retirer votre projet de loi et de vous servir de la plate-forme que cela
constitue pour une dernière négociation avec le gouvernement
fédéral avant d'imposer quelque chose que les
municipalités considèrent tout à fait autoritaire et
arbitraire.
Pour ces raisons, je vais certainement appuyer la motion de mon
collègue.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Léonard: M. le Président, je voudrais faire un
certain nombre de remarques qui vont d'ailleurs toucher ce qu'a dit un peu
auparavant M. le député de Mont-Royal. Le député de
Nelligan a parlé de centralisation et vous avez parlé de la loi
sur la fiscalité, qu'on s'écartait des principes de la loi sur la
fiscalité.
M. Ciaccia: En termes d'autonomie.
M. Léonard: En termes d'économie, oui.
M. Ciaccia: D'autonomie.
M. Léonard: En termes d'autonomie, oui. Je pense que c'est
le contraire. C'est que, si on laisse aller... Nous avons d'abord bâti le
système fiscal municipal, qui donne de l'autonomie financière aux
municipalités. Je pense qu'on doit convenir, que les
municipalités pouvant décider du niveau de leurs services en
arrivent aussi à décider du niveau de leurs taxes. C'est une
mesure très précise sur ce plan-là. Elles ne
dépendent pas de subventions du gouvernement, sauf peut-être, en
gros, pour 10% de leur budget, selon que ce sont des municipalités
rurales ou urbaines. Il y a des villes qui n'ont pratiquement pas de
subventions du gouvernement, donc elles sont pratiquement autonomes. Le
système fonctionne.
Si un autre gouvernement intervient par un système de subventions
discrétionnaires, on revient à ce qu'il y avait avant. Donc, il
intervient en mettant des subventions et c'est là une attaque à
l'autonomie municipale, à l'autonomie fiscale de la municipalité.
Il intervient et en arrive, de ce fait, à modifier les priorités
de la municipalité. Nécessairement, il va influencer les
priorités. Peut-être que dans un cas cela va aller dans le sens
des priorités municipales, peut-être que dans l'autre cas cela ne
va pas du tout dans le sens des priorités municipales. On pourrait vous
citer des exemples. J'ai fait la revue de presse là-dessus; un
député, par exemple, dit: Je ne finance que les centres
communautaires, etc.
Le système qu'on a monté est un système très
décentralisé, et on y tient. Dès la minute, cependant,
où il y a des programmes ou des subventions qui sont accordés par
un autre gouvernement, qui touchent aux différentes priorités,
à ce moment, cela n'est plus décentralisé. Là, vous
introduisez un élément de centralisation.
Si on laisse aller les choses, finalement, vous venez de démolir
le système. Si vous laissez aller des interventions des
fédéraux dans le dossier des municipalités, vous venez de
remettre en cause notre propre système. Et la pression - si vraiment on
dit qu'on ne peut rien faire contre cela - va être que, pour contrer ces
priorités, on en arrivera du côté du gouvernement du
Québec, quel que soit le gouvernement qui sera au pouvoir, à
faire la même chose que ce qui se fait par les
fédéraux.
Donc, vous introduisez un élément de pression qui va aller
dans le sens de la centralisation, si on laisse aller les choses telles
qu'elles sont. C'est inévitable. Je me dis: Qu'est-ce qu'on fait
présentement par rapport à la situation? Je vois bien des
critiques. D'ailleurs, on pourrait y répondre en disant: Le gouvernement
est discrétionnaire, mais que faisons-nous pour réagir contre une
telle situation? Je n'ai pas vu d'idées; là est la question.
Est-ce qu'on a proposé que, si le gouvernement fédéral a
des fonds, il transfère un point d'impôt, l'équivalent? On
pourrait distribuer cela aux municipalités sur une base per capita ou
par un système de péréquation quelconque. Jamais on n'a
proposé cela.
On dit: Négociez. Sur le plan de la négociation, nous
avons tenté de négocier depuis longtemps. Je ne voudrais pas
refaire tout l'historique de cela. Ce qui a été fait est
considérable et les efforts sont là. En fait, les
fédéraux sont revenus à la table seulement après le
dépôt du projet de loi 38 et, après, le canal par lequel
l'argent va pouvoir transiter vers les municipalités, c'est l'article 1
que nous avons voté hier et que vous avez défait hier.
M. Ciaccia: Est-ce que le ministre... Et les moyens?
M. Léonard: À un moment donné, il va falloir
savoir où on va. Ne m'interrompez pas, je ne vous ai pas interrompu, M.
le député.
M. Ciaccia: C'est parce qu'il est presque 13 heures. On va
suspendre les travaux. Je voulais juste poser une question. Est-ce que vous
nous dites, par le projet de loi, que la fin justifie les moyens? Est-ce cela
votre approche?
M. Léonard: Vous venez de m'interrompre parce que
l'argumentation que je développais vous faisait très mal, M. le
député.
M. Ciaccia: Non.
M. Léonard: On remet en cause tout le système de
l'équité fiscale au niveau municipal, tout le système
décentralisé que nous avons mis en place, le système de la
fiscalité municipale. Je voudrais revenir à autre chose. On dit
que les municipalités ne nous appuient pas. Au contraire, les
municipalités nous appuient, règle très
générale, à preuve, par exemple, sur la rive sud,
où les gens nous ont appuyés.
M. Saintonge: M. le Président.
M. Léonard: II n'y a personne qui a levé la main
contre.
M. Saintonge: Cela est faux, complètement faux.
M. Léonard: Je dirais juste une chose en concluant. M. le
Président, j'avais la parole...
Le Président (M. Desbiens): II est 13 heures, la
commission suspend ses travaux jusqu'à 15 heures.
(Suspension de la séance à 13 heures)
(Reprise de la séance à 15 h 34)
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre! La
commission des affaires municipales reprend ses travaux pour étudier
article par article le projet de loi 38. Il y a une proposition pour demander
une suspension des travaux jusqu'à 16 h 15.
M. Rocheleau: M. le Président...
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Hull.
M. Rocheieau: ...est-ce que je pourrais poser une question,
étant donné que les travaux devaient commencer à 15 heures
et que l'Opposition officielle se fait accuser actuellement de faire un
"filibuster"?
M. Fallu: Question de règlement, M. le
Président.
M. Rocheieau: M. le Président, si vous me le
permettez...
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Groulx, sur une question de règlement.
M. Fallu: Oui, puisqu'il y a une motion de suspension, je
voudrais tout simplement vous faire valoir que nous ne pouvons d'aucune
façon continuer nos conversations, étant donné que nous
n'avons pas quorum.
Une voix: Ah!
M. Rocheieau: Mais, de toute façon...
Le Président (M. Desbiens): Alors, la commission suspend
ses travaux jusqu'à 16 h 15.
(Suspension de la séance à 15 h 35)
(Reprise de la séance à 16 h 23)
Le Président (M. Desbiens): La commission élue
permanente des affaires municipales reprend ses travaux pour poursuivre
l'étude article par article du projet de loi 38, Loi sur la
participation gouvernementale au financement des municipalités. M. le
député de Hull.
M. Rocheleau: Si vous me le permettez, M. le Président,
avant que je commence, on vient d'appeler M. Saintonge, le député
de Laprairie; il doit être ici dans quelques instants, étant
donné qu'il y a eu un retard dont nous n'étions pas responsables.
Les autres membres de notre équipe sont sur le point d'arriver. Si vous
voulez nous accorder une ou deux minutes.
Le Président (M. Desbiens): On suspend quelques
instants?
Une voix: Cela va. (Suspension de la séance à 16 h
24)
(Reprise de la séance à 16 h 30)
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission des affaires municipales reprend ses travaux pour
poursuivre l'étude article par article du projet de loi 38. Nous en
étions à discuter de l'amendement du député de
Laprairie qui se lit ainsi: Que l'article 2 soit modifié en
remplaçant dans la première ligne les mots "au jugement du
gouvernement" par les mots "de l'avis de la Commission municipale du
Québec".
M. le député de Hull avait demandé la parole.
Une voix: Adopté.
M. Saintonge: M. le Président, sur une question de
règlement.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Laprairie.
Ordre des travaux
M. Saintonge: M. le Président, je veux simplement faire
remarquer que les travaux de la commission devaient reprendre à 15
heures. Nous étions prêts à commencer vers 15 heures, 15 h
5. Il est maintenant 16 h 30 et ce n'est pas l'Opposition qui a fait perdre une
heure et trente minutes à la commission, malgré qu'on nous ait
souvent reproché de faire certaines interventions pour étirer le
temps. Le bâillon est prévu pour demain matin, avant 13 heures,
et, à notre connaissance, la commission devrait siéger
jusqu'à minuit ce soir seulement. Il y a donc une heure et trente
minutes qui ont été perdues et ce n'est pas dû à
quelque manoeuvre que ce soit de l'Opposition. Nous étions
présents pour commencer en temps utile.
Le Président (M. Desbiens): M. le leader du
gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, je voudrais donner raison au
député. Effectivement, c'est le leader du gouvernement qui a pris
la responsabilité d'indiquer à la commission parlementaire que
les travaux ne reprendraient qu'à 16 h 15 ou, en fait, pratiquement
à 16 h 30, pour la bonne compréhension du dossier. La raison en
est très simple. Dans quelques heures, les membres de la commission
trouveront probablement matière à se réjouir d'un certain
nombre de décisions que nous avons prises pendant cette heure et demie
où la commission, effectivement, n'a pas siégé. Nous
étions effectivement en réunion quelques ministres du
gouvernement - sur le projet de loi 38.
Il y a eu rencontre un peu plus tôt dans la journée entre
le président de l'Union des municipalités régionales de
comté du Québec et le premier ministre du Québec; à
cette rencontre, le président de l'Union des municipalités
régionales de comté du Québec a fait part au chef du
gouvernement d'un certain nombre d'amendements qu'il souhaitait voir apporter
au projet de loi 38, au-delà des amendements déjà soumis
ici même à la commission parlementaire, sur lesquels le ministre
lui-même avait fourni un certain nombre de réponses. Nous avons,
sur la base de ce que M. Asselin a communiqué au premier ministre,
travaillé pendant environ une heure et demie. Le fruit de ce travail,
qui, bien sûr, prendra la forme de certains amendements au projet de loi
38, pourra être communiqué aux membres de la commission fort
probablement à la reprise des travaux ce soir, à 20 heures,
à la commission parlementaire.
Donc, dans ce contexte, je veux indiquer que nous sommes d'avis,
à ce moment-ci, que cette heure et demie, enfin, ces 90 minutes pendant
lesquelles la commission n'a pas siégé auront été
fort utiles pour faire progresser les travaux de la commission parlementaire.
Nous verrons un peu plus tard comment tout cela prendra forme puisqu'il revient
effectivement à la commission parlementaire de faire son travail
sur la base de ce qui sera proposé.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Laprairie.
M. Saintonge: M. le Président, vous me permettrez de
m'étonner et d'être absolument renversé d'une attitude
aussi peu soucieuse du droit parlementaire. Nous sommes en commission
parlementaire pour étudier ce projet de loi, c'est la troisième
journée, et le leader du gouvernement vient nous annoncer qu'à la
suite des propositions présentées par le président de
l'UMRCQ, lors des audiences tenues mardi après-midi, le ministre a
apporté un certain nombre de réponses. Ce que le leader du
gouvernement vient de dire est absolument faux dans le cadre actuel puisque le
ministre n'a apporté aucun amendement, n'a pris aucun engagement, n'a
fait preuve d'aucune ouverture sur les remarques qui ont été
faites par le président de l'UMRCQ.
Plus que cela, nous avons même demandé au ministre à
deux reprises, par une motion, de nous fournir les amendements qui pourraient
être faits au projet de loi à la suite des demandes faites par
l'UMRCQ. D'aucune façon il n'a été possible d'avoir les
amendements.
Troisièmement, les deux articles fondamentaux du projet de loi,
les articles 1 et 2, ont pratiquement été couverts, le ministre a
fait des interventions là-dessus et, à ce jour, à cette
heure, aucun amendement n'a été apporté à un de ces
deux articles qui aurait pu permettre d'entrevoir une possibilité de
flexibilité du ministre vis-à-vis des demandes que l'Union des
municipalités régionales de comté avait
présentées, des remarques faites dans le mémoire que l'UMQ
a présenté et aussi des demandes que l'Opposition a
présentées dans certains amendements que nous avons pu
suggérer au ministre. D'aucune façon, on n'a pu faire cela.
On nous apprend aujourd'hui qu'à la suite d'une rencontre entre
le président de l'UMRCQ et le premier ministre on a travaillé
à certains amendements qu'on va apporter, qui seraient au-delà du
processus établi dans le cadre de cette commission parlementaire,
après avoir entendu le président de l'UMRCQ faire valoir ses
points de vue et après que l'Opposition a pu faire valoir ses points de
vue de quelque façon que ce soit. C'est une discussion entre le bureau
du premier ministre ou le ministère des Affaires municipales. J'imagine
que le ministre des Affaires municipales devait être présent. Je
le souhaite pour lui, en tout cas. D'après ce que je peux comprendre,
mais je n'en suis pas sûr, il semble que le premier ministre ait
rencontré M. Asselin, le président de l'UMRCQ en l'absence du
ministre des Affaires municipales.
M. Rivest: Un désaveu!
M. Saintonge: C'est donc un désaveu, comme le dit mon
confrère de Jean-Talon, exactement, du ministre des Affaires
municipales. Je ne comprends plus ce qui arrive dans ce dossier et surtout
depuis le discours qu'on entend ici à cette commission du
côté ministériel par rapport au contenu du projet de loi,
par rapport à ce qu'on veut garder dans ce projet de loi, par rapport
à la discrétion absolue que le ministre veut garder
là-dessus et que le gouvernement veut garder dans ce cadre-là.
C'est de la foutaise par rapport au rôle que l'Opposition peut jouer.
On nous annonce, aujourd'hui à 16 h 30 - le bâillon est
pour minuit ce soir - Mes chers amis, vous allez avoir quatre heures. On va
vous remettre, à 20 heures, ce soir les amendements qui sont
proposés à ce projet de loi. Vous en ferez ce que vous voulez.
Cela ne nous intéresse pas, votre travail. C'est aussi simple que cela.
On nous ridiculise purement et simplement. C'est le genre d'attitude que le
leader du gouvernement a adoptée tout le long de l'étude de ce
projet de loi. C'est tellement vrai que, même pas après deux
heures de discussions valables dans le cadre de cette commission parlementaire,
il convoquait une réunion des leaders pour mettre le bâillon sur
ledit projet de loi. Après à peine une heure trente - je
répète mes paroles - si mes souvenirs sont bons, la
réunion des leaders était appelée pour 11 heures mardi
soir dernier. La commission était ouverte depuis trois heures
simplement. Dans l'avant-midi du mardi, nous avons entendu le président
de l'UMRCQ d'une façon positive jusqu'à 18 heures. À 20
heures, à notre grand étonnement, il n'était plus
là. On n'a jamais eu la vraie réponse pour savoir qui avait
libéré le président de l'UMRCQ. Mon confrère de
Jeanne-Mance et mon confrère de Viger étaient inscrits pour
intervenir, pour poser des questions au président de l'UMRCQ, mais,
à notre grande surprise, à 20 heures, il n'était pas
là. On ne nous a pas dit pourquoi, mais il semble qu'on l'avait
libéré du côté ministériel. C'est ce qu'on
nous a dit.
M. Rochefort: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Gouin, sur une question de règlement.
M. Rochefort: M. le Président, c'est seulement pour la
bonne marche de nos travaux. Je voudrais être certain que le
député de Laprairie ne refera pas à ce moment-ci tous les
discours vides et creux qu'il a faits depuis le début de la
commission.
M. Saintonge: Ce n'est pas une question de règlement, M.
le Président. C'est une question d'opinion aussi vide de sens que ce
qu'il vient de dire.
Une voix: Elle a porté fruit. Vous reculez.
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre! À
l'ordre! À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de
Laprairie.
M. Saintonge: La remarque du député de Gouin - je
me souviens de son comté -est aussi vide de sens que toutes ses
interventions depuis le début.
M. Rochefort: Vous progressez. C'est un bon signe quand on
commence à évoluer.
M. Saintonge: Donc, M. le Président, je
répète que l'étude du projet de loi a commencé
mardi soir vers 21 h 30, 9 h 20, si mes souvenirs sont exacts. J'ai
présenté une première motion qui a été en
discussion. Le lendemain, on a simplement demandé quels amendements le
ministre était prêt à apporter. On a refusé, de
toute façon de nous donner quelque amendement que ce soit. Vous verrez
en cours de route. C'est la réponse qu'on a eue. On est maintenant rendu
à l'article 2. Le ministre n'a apporté aucun amendement à
cet article. Il n'a fait preuve d'aucune flexibilité - je le
répète -par rapport au contenu du projet de loi et aujourd'hui,
après une heure et trente de suspension, de 15 heures à 16 h 30,
on vient nous dire: C'est profitable pour la commission. C'est dans le cadre de
nos travaux. On n'était pas là, mais cela n'a pas d'importance.
Continuez jusqu'à 18 heures...
Une voix: Le Conseil des ministres.
M. Saintonge: Non, ce n'est pas une question de Conseil des
ministres. On étudie le projet de loi. Vous allez nous donner vos
amendements à 20 heures ce soir. Faites-en ce que vous voulez et vous
imposez un bâillon, M. le leader. C'est une attitude complètement
irresponsable.
M. Bertrand: M. le Président, comme leader parlementaire,
je me dois de répondre à quelques aspects de l'intervention du
député qui est ulcéré. Je reprends le titre de
l'Argus que je lis ce matin. Il faudrait faire attention, parce que ce genre de
stress, même s'il est sans détresse, pourrait être
dommageable au député. Il doit savoir une chose, le
député, c'est que - et j'ai un bel exemple pour l'illustrer - il
est toujours possible de retirer un avis qui a été inscrit au
feuilleton. C'est toujours possible. Cela a été fait au mois de
juin dernier. Je m'en souviens très bien. C'était dans le cas du
projet de loi créant le ministère de la Science et de la
Technologie. À ce moment-là, nous avions effectivement, pour
terminer l'étude du projet de loi, utilisé l'article 156, mais,
à la suite de discussions que nous avions eues, nous avions
retiré, si ma mémoire est bonne, le chapitre VI du projet de loi
créant le ministère de la Science et de la Technologie, le
chapitre créant l'Agence québécoise de valorisation
industrielle de la recherche. À la suite de l'entente, nous avions
retiré l'avis qui avait été fait en vertu de l'article
156. Le député ne peut donc pas présumer à ce
moment-ci de quelque décision que ce soit qui pourrait être prise
par l'Assemblée nationale au moment où effectivement l'avis
serait appelé.
Deuxième chose, le député, à mon avis, M. le
Président, est tout à fait malvenu de reprocher au gouvernement
de ne pas faire son travail sur la base de représentations qui lui sont
faites, qui peuvent provenir des députés de l'Opposition, qui
peuvent provenir des groupes de notre société, dans
l'étude d'un projet de loi. C'est, d'ailleurs, toujours ce qu'on demande
du côté de l'Opposition: Faites preuve de souplesse;
écoutez-nous; essayez de voir s'il n'y aurait pas possibilité
d'améliorer ceci ou cela. Le gouvernement doit faire son travail. Il ne
peut pas le faire comme gouvernement en séance de commission
parlementaire. Il peut peut-être faire rapport à la commission
parlementaire, mais ce travail, sauf le respect que je dois au
député, se fait à une réunion des ministres et je
regrette, mais l'Opposition ne fait pas partie du Conseil des ministres.
M. Saintonge: Je suis d'accord, M. le Président.
M. Bertrand: On a donc le droit de faire ce travail. Tout ce que
j'ai voulu dire au député tout à l'heure - je le faisais,
parce que je voulais lui donner l'information, point à la ligne - c'est
que l'heure et demie pendant laquelle la commission n'avait pas
siégé a été utilisée par des membres du
gouvernement pour travailler à ce projet de loi 38 afin d'être en
mesure de proposer, le cas échéant, des amendements au projet de
loi. Il n'y a là, M. le Président, que des choses tout à
fait normales. Je suis très surpris de voir comment le
député réagit alors que notre façon de nous
comporter est une bonne indication que nous avançons positivement dans
l'étude de ce projet de loi. Et c'est comme cela que nous avons
travaillé depuis le début. Il n'y a rien au feuilleton qui soit
nécessairement coulé dans le béton.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Laprairie.
M. Saintonge: M. le Président, sans rien présumer,
il reste un fait, c'est que la motion est là et que le bâillon est
là. C'est cela que j'ai voulu mentionner.
Deuxièmement, vis-à-vis du fait que le ministre rencontre
les intervenants municipaux, je n'ai jamais mis en doute que vous aviez le
droit de le faire, mais ne dites pas que cela fait avancer les travaux de la
commission. C'est absolument ridicule de dire cela concernant la commission.
Cela peut faire avancer votre travail au niveau du projet de loi.
Présentez les amendements; on va en discuter et on verra ce qu'il en
est. Vous nous faites travailler pour rien présentement.
M. Rochefort: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Gouin, sur une question de règlement.
M. Rochefort: Si le député de Laprairie
prétend qu'il a travaillé pour rien jusqu'à maintenant,
c'est parce qu'il a refusé d'amorcer l'étude article par article.
À chaque article, le ministre s'est engagé à
déposer les amendements. Il n'aurait pas travaillé pour rien.
Une voix: Voyons donc.
M. Rochefort: C'est un aveu extraordinaire, très
éloquent de la qualité et de l'évaluation du travail que
vous avez fait jusqu'à maintenant en commission.
M. Saintonge: Où sont les amendements à l'article
2?
M. Rochefort: Vous refusez d'étudier les articles.
À chacun des articles, ils seront présentés, comme cela a
toujours été dit.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Hull, sur une question de règlement.
M. Rochefort: Je comprends, le jugement sur votre travail est
maintenant porté par le député de Laprairie. On en prend
bonne note.
M. Rocheleau: M. le Président...
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre! À
l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre! À l'ordre! M. le
député de Jean-Talon! M. le député de Hull. Vous
empêchez M. le député de Hull d'intervenir. À
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Maciocia: Est-ce que...
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, M. le
député de Viger!
Une voix: Vous avez dit oui au ministre.
M. Maciocia: Question de règlement.
M. Rocheleau: Je l'ai fait.
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre!
M. Tremblay: Question de règlement. M. le
Président, il faudrait que le député...
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre! À
l'ordre! M. le député de Hull a demandé la parole. C'est
le seul qui a demandé la parole et qui n'a pas parlé! (16 h
45)
Des voix: Ah! Ah! Ah!
M. Rocheleau: Je vous remercie, M. le Président. Je me
suis habitué au silence. M. le Président, je n'accepte absolument
pas les énoncés de notre collègue d'en face, le
député de Gouin, indiquant que c'est l'Opposition qui a
retardé les travaux. L'exemple le plus frappant à cette heure-ci
est que cette commission parlementaire vient d'être retardée d'une
heure et demie par le gouvernement. Nous n'avons aucunement retardé les
travaux. Au contraire, M. le Président, je pense que nous avons
été objectifs dans chacun des points que nous avons
soulevés. Nous tentons de traiter le plus sérieusement possible
ce projet loi qui est d'une importance capitale pour les municipalités.
Je n'accepte pas, M. le Président, que le député de Gouin
nous dise, à nous, de l'Opposition, que nous avons été
ceux qui ont retardé les travaux, alors qu'on s'est même fait
bâillonner à peine deux heures et demie après avoir
commencé.
Le Président (M. Desbiens): J'appelle l'étude de
l'amendement proposé à l'article 2 par le député de
Laprairie.
M. Léonard: M. le Président, je demande la
parole.
M. Rivest: Le ministre veut parler, M. le Président, quand
même. Je ne sais pas si le ministre est au courant de tout ce qui arrive,
mais ce serait peut-être intéressant qu'il vienne nous le
dire.
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre! Une voix:
S'il ne l'était pas, il l'est. M. Saintonge: A-t-il
été consulté?
M. Rivest: Parce qu'il faut qu'il écrive à M.
Roberts.
Une voix: Oui, mais vous avez dit qu'il était un
dictateur, lui.
M. Rivest: Bien non, non. Je me suis trompé si j'ai dit
cela.
Des voix: Ah! Ah! Ah!
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre! À
l'ordre! À l'ordre, s'il vous plaît! Bon, je suspends les
travaux.
(Suspension de la séance à 16 h 47)
(Reprise de la séance à 16 h 48)
Le Président (M. Desbiens): La commission des affaires
municipales reprend ses travaux. M. le député de Hull,
c'était sur l'amendement.
M. Rocheleau: Oui, question de règlement.
Le Président (M. Desbiens): Alors, M. le ministre.
M. Léonard: M. le Président, je pense que je vais
rectifier un certain nombre de choses qui ont été dites tout
à l'heure. Lorsque j'ai fait mon discours de deuxième lecture,
j'ai bien dit que nous étions ouverts à des amendements qui
pourraient bonifier la loi, la baliser, et c'est mon attitude depuis le
début.
Depuis le début de la commission parlementaire, nous avons
entendu le président de l'UMRCQ, Me André Asselin. Il nous a fait
valoir son point de vue et déposé un certain nombre de projets
d'amendements; il y en avait huit et je me suis engagé à les
faire regarder. J'ai indiqué tout de suite qu'il y en avait qui me
paraissaient, à première vue, acceptables; je les ai fait
étudier par mon ministère. Nous avons étudié un
certain nombre de projets d'amendements. J'ai communiqué avec Me
Asselin, hier, et, ce matin, il a effectivement rencontré le premier
ministre, à ma demande.
M. Rivest: Ah!
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre! M. le
ministre.
M. Léonard: À ma demande. Nous avons tenu
immédiatement, avant de venir ici, une réunion qui a duré
environ une heure et demie sur tout ce sujet. Un certain nombre de
décisions ont été prises. On va pouvoir les transmettre
à la commission à la reprise de la séance, au début
de la soirée, je pense bien.
M. Rivest: En soupant ici?
M. Léonard: M. le Président, ce qui a
été fait l'a été pour tenir compte de ce que nous
demandait l'UMRCQ. Il y a des choses intéressantes qui avaient
été dites et que j'avais signalées au moment où
nous avons entendu Me Asselin.
M. le Président, je pense que c'est dans le processus normal du
fonctionnement d'une commission qu'à un moment donné, par rapport
à l'étude de certains articles ou au témoignage d'un
représentant comme l'UMRCQ qui représente 1200
municipalités au Québec et qui est venu ici témoigner, on
tienne compte de son témoignage et de ce qu'il a dit. C'est ce que nous
avons fait. Je ne crois pas que l'Opposition puisse nous reprocher quoi que ce
soit en la matière. On sait que, pour faire un travail sérieux,
cela peut prendre quelques heures; effectivement, depuis mardi, mercredi et
aujourd'hui, je pense qu'on arrive au bout et qu'on aura des choses
significatives et intéressantes à déposer devant la
commission ici.
L'article 1 a été adopté. Nous sommes en train
d'étudier l'article 2. Je pense que nous pouvons continuer
l'étude de l'article 2 à l'heure actuelle.
Le Président (M. Desbiens): II y a un amendement sur la
table concernant l'article 2, qui est celui du député de
Laprairie et qui est de modifier...
M. Léonard: II y a des légistes...
Le Président (M. Desbiens): Excusez-moi, je pensais que
vous aviez terminé.
M. Léonard: ...si vous me le permettez, qui travaillent
à l'heure actuelle. Si jamais il y avait des modifications, nous y
viendrons, mais, pour l'instant, je ne le pense pas.
Motion d'amendement (suite)
Le Président (M. Desbiens): L'amendement: "Que l'article 2
soit modifié en remplaçant dans la première ligne les mots
"au jugement du gouvernement" par les mots "de l'avis de la Commission
municipale du Québec". M. le député de Hull avait la
parole sur l'amendement.
M. Gilles Rocheleau
M. Rocheleau: Merci, M. le Président. Mon collègue
de Laprairie a déposé un amendement visant à recourir
à la Commission municipale plutôt qu'au jugement du gouvernement
et, plus particulièrement, au jugement du ministre des Affaires
municipales. Je demanderais, M. le Président, s'il y a
possibilité de m'entretenir avec mon collègue durant une minute.
Serait-il possible de suspendre?
Le Président (M. Desbiens): On suspend les travaux pour
une minute.
(Suspension de la séance à 16 h 52)
(Reprise de la séance à 16 h 54)
Le Président (M. Desbiens): La commission reprend ses
travaux. M. le député de Hull, sur l'amendement?
M. Rocheleau: Sur l'amendement, M. le Président.
Effectivement, j'ai noté tantôt que nous devions, dans cet
amendement, demander à la Commission municipale d'intervenir. Mais je
suis quelque peu consterné par l'attitude de ce gouvernement qui semble,
à la minute, improviser. Remarquez, M. le Président, que ce n'est
pas surprenant que ce gouvernement improvise, il improvise depuis qu'il est
là et davantage depuis la dernière élection provinciale de
1981.
Si nous avons proposé cet amendement, c'est pour sortir des
griffes du ministre des Affaires municipales l'application de la loi,
même si celui-ci, par son patronage éhonté, a nommé
lui-même les commissaires à la Commission municipale ou, par son
intervention ou par ses représentations, y a fait nommer
l'ex-vice-présidente de l'Assemblée nationale,
ex-députée de...
Une voix: Vaudreuil-Soulanges.
M. Rocheleau: ...Vaudreuil-Soulagnes, Mme Cuerrier, ainsi que
l'ex-maire défait aux élections de Longueuil, M. Robidas, ami
intime du premier ministre du Québec.
Nous aurions, quand même, concédé le fait qu'une
telle commission est censée être impartiale alors que le ministre
démontre sa partialité à l'intérieur d'une loi
aussi inacceptable, aussi inique. Et, avec l'arrogance, il y a quelques
instants, après avoir reporté l'étude article par article
de cette commission, qui devait commencer à 15 heures, à 14 h
30...
Une voix: À 16 h 30.
M. Rocheleau: ...à 16 h 30, pardon, le
député de Gouin nous disait que c'était l'Opposition qui
semblait vouloir faire un "filibuster". C'est l'Opposition qui retarde! Nous ne
retardons pas parce que l'article 1 a déjà été
adopté; l'article 2, nous en discutons présentement. Nous
tentons, même si nous sommes totalement contre ce projet de loi, au moins
de le faire bonifier pour que, dans l'application, ce soit plus acceptable aux
municipalités du Québec, partenaires de ce gouvernement.
M. le Président, je ne peux m'empêcher de lire quelques
paragraphes d'un éditorial que notre collègue, le
député de Bourassa, lisait ce matin aux applaudissements des gens
du côté ministériel, éditorial publié dans le
Devoir du jeudi 23 juin, une journée à peine après que le
ministre eut déposé ce projet de loi, Un bon coup de
Léonard, signé de Jean-Claude Leclerc.
Le député de Bourassa a fait valoir les points qui
semblaient favoriser le gouvernement en vertu de l'aspect constitutionnel qui
donne tous les droits légitimes au Québec d'intervenir au niveau
des affaires municipales dans sa compétence, ce que, M. le
Président, personne ne conteste au Québec. Même les
fédéraux ne contestent pas ce point, même M. Trudeau, le
premier ministre du Canada, l'a fait valoir dans une lettre qu'il faisait
parvenir au premier ministre du Québec, M. Lévesque; personne ne
conteste ce point, si ce n'est le gouvernement qui tente de
bénéficier de tous les aspects pour essayer de briser tous les
liens avec la population du Québec.
M. le Président, notre amendement, qui référait
à la Commission municipale le soin de porter un certain jugement et de
donner certains avis, avait justement pour but - et je l'ai dit tantôt -
d'éviter que le ministre qui a à appliquer cette loi ne soit juge
et partie. On retrouve cela à l'article 14 qu'on aura à
étudier éventuellement en soirée, si le côté
ministériel peut éventuellement nous laisser travailler. À
l'article 14, à toutes fins utiles, on dit: "Le ministre des Affaires
municipales est responsable de l'application de la présente loi". On
connaît son arrogance, on connaît son mépris à
l'égard des municipalités par le dépôt de projets de
loi semblables. Quand on bafoue complètement son partenaire, on brise
l'ensemble des liens.
Quand on parle des cadeaux des députés
fédéraux, quand on parle des cadeaux du fédéral
dans nos municipalités, dans nos organismes afin d'aider à
créer des emplois, afin d'éliminer effectivement le
chômage, je ne pouvais m'empêcher de penser, M. le
Président, au premier ministre du Québec qui est allé
faire un petit voyage en Italie et qui a rencontré le président
de l'Italie alors que la juridiction des relations internationales est
dévolue effectivement au fédéral. Je me demandais si le
premier ministre du Québec avait le droit de donner trois pipes au
président de l'Italie, de lui faire ce cadeau. (17 heures)
Une voix: II avait un chaperon.
M. Rocheleau: Le fédéral aurait pu adopter une loi
pour empêcher les premiers ministres provinciaux de distribuer des
cadeaux payés par les citoyens de leurs provinces respectives. On aurait
pu se poser cette question. Ce projet de loi est aussi bête que cela.
Je voudrais vous lire quelques paragraphes de l'éditorialiste
Jean-Claude
Leclerc que le côté ministériel applaudissait ce
matin à la suite de la lecture de certains énoncés faits
par le député de Bourassa. "Le beau désordre actuel risque
de prendre des formes inusitées. Les fonds que les municipalités
ne voudront plus dépenser, Ottawa trouvera des associations de citoyens
pour les gaspiller à leur place. Ces associations-là,
Québec sera bien mal venu de leur imposer des sanctions. Voilà
pourquoi il faut souhaiter avec l'UMQ qu'un débat ait lieu sur ce
problème. Là où des ministres québécois trop
séparatistes ne peuvent plus sentir les fédéraux et sont
devenus aussi des pestiférés pour le gouvernement central,
peut-être des municipalités pourraient-elles faire valoir encore
un minimum de bon sens et de respect pour les citoyens et pour la gestion juste
et ordonnée des programmes publics qui leur sont destinés. "Ces
querelles ont coûté des millions aux Québécois dans
le passé; malgré la crise des budgets gouvernementaux, des
millions risquent encore d'être ou bien gaspillés en
dédoublement de travaux ou bien perdus faute d'entente
intergouvernementale."
Nous persistons à souhaiter qu'il y ait entente entre le
gouvernement fédéral et le gouvernement du Québec. Nous
avons souhaité, tout au long du débat, qu'il y ait entente.
Malheureusement, le ministre des Affaires municipales, qui est reconnu comme un
grand souverainiste, tente aujourd'hui par tous les moyens de briser les liens
qui existent entre le gouvernement central et le gouvernement du Québec
en faisant croire à la population du Québec que rien ne va plus.
Tout irait bien si un autre gouvernement était à cette table. Un
gouvernement...
Une voix: Libéral.
M. Rocheleau: ...libéral, sûrement, un gouvernement
qui défend l'option fédéraliste, lui, pourrait s'entendre,
comme on s'est entendu dans le passé. Malheureusement, avec ce
gouvernement, un gouvernement totalement défaitiste, on ne peut pas
s'entendre.
Je cite un autre éditorialiste, Jean-Guy Dubuc, dans la Presse du
jeudi 15 décembre. Ce n'est pas loin dans le temps. On peut lire ici:
"II est vraiment incompréhensible que le gouvernement péquiste
cède aussi facilement à la panique - eh oui, c'est la panique -
et s'accorde des droits réservés aux régimes
totalitaires." Le ministre des Affaires municipales pratique le totalitarisme,
c'est ce qu'il fait. "Il n'y a que dans des pays qui renient la
démocratie que l'on peut trouver autant de pouvoirs livrés
à l'arbitraire d'une personne tout en étant
protégés par la loi. L'an dernier, le Barreau du Québec
avait violemment dénoncé le procédé, mais le
gouvernement fait la sourde oreille pour n'entendre que sa colère."
Quand j'entends le ministre des Affaires municipales - je fais toujours
référence à l'amendement de mon collègue, le
député de Laprairie, sur la Commission municipale -chanter
à qui veut l'entendre et sur tous les toits l'autonomie municipale, je
ne sais pas si le ministre des Affaires municipales -pourtant, c'est un gars
qui est connaissant, qui a vécu, qui a eu des expériences, qui a
sûrement fait de la vérification, à un moment donné,
car, par sa profession, il est CA - connaît la définition du mot
"autonomie". L'autonomie, c'est la liberté de se gouverner par ses
propres lois. On sait que les gouvernements municipaux qui sont élus
démocratiquement par la population ont à être jugés
par celle-ci. On sait que les municipalités ont à adopter, en
vertu de la Loi sur les cités et villes ou du Code municipal, des
règlements pour leur propre gestion, pour offrir le meilleur des
services à leurs citoyens respectifs. On sait tout cela, mais, quand on
adopte des lois aussi arbitraires et discrétionnaires, que le projet de
loi 38, on peut se demander si le ministre des Affaires municipales ne se fout
tout simplement pas des mots "autonomie municipale".
Il est malheureux de constater qu'on peut aller aussi bas pour
dénigrer le gouvernement central que de dire, comme on l'entendait du
côté ministériel ce matin, qu'on aura à subir les
déficits de fonctionnement du gouvernement central, qui se situent
à environ 30 000 000 000 $ actuellement. Mais si on prenait simplement
le temps d'examiner les faits, on apprendrait qu'en 1982 les citoyens du
Québec ont reçu en péréquation 5 000 000 000 $ de
plus qu'ils n'ont payé au gouvernement central. Si nous avions à
l'heure actuelle un gouvernement souverainiste, indépendantiste,
séparatiste, séparé du Canada, cela voudrait dire que nos
Québécois et nos Québécoises, en 1982, en plus des
impôts qu'ils supportent actuellement, qui sont à peu près
à 15% supérieurs à ceux des autres provinces canadiennes,
auraient eu à supporter un fardeau additionnel de 5 000 000 000 $. C'est
cela, le prix de la souveraineté. C'est de s'enliser et de continuer
à s'enliser, de continuer à s'endetter et de continuer à
laisser ce gouvernement faire ses mauvais rêves. Ce n'est plus un
rêve que le gouvernement actuel fait. C'est un cauchemar, en vertu de son
attitude négative, de son attitude séparatiste. C'est devenu pour
lui une obsession.
Ce que je comprends mal de ce même gouvernement, c'est qu'on vient
se foutre de l'Opposition en nous disant - je disais tantôt qu'on
improvisait du côté du gouvernement -qu'on va déposer ce
soir, à 20 heures, des amendements qui pourraient répondre aux
objectifs de l'Union des municipalités régionales de
comté. Vous vous fichez de la
gueule de l'Union des municipalités, qui a refusé - et je
respecte son refus - d'être entendue après la deuxième
lecture, parce qu'effectivement le principe de la loi venait d'être
adopté et qu'on discutait de modalités à ce
moment-là. J'aimerais savoir, d'autre part, si les perroquets du
côté ministériel ont été consultés
à cette minute sur les amendements qui vont être
déposés à 20 heures ce soir, alors que tout le monde
semble être d'accord pour suivre, encore une fois, le ministre des
Affaires municipales dans le ravin ou dans le fossé qu'il creuse de plus
en plus et vers lequel il dirige le Québec. Je me pose fortement cette
question. Je vois ces perroquets avec le sourire en coin. Je vois le ministre
des Finances qui nous rend visite. Sûrement qu'il est bienvenu à
cette commission parlementaire, mais je me demande si le ministre des Finances
est au courant, parce que cela touche la fiscalité.
Une voix: Oui, oui, il est certainement au courant.
M. Rocheleau: II doit sûrement être au courant, parce
que c'est un des dauphins possibles, apparemment, à ce qu'on nous
dit.
M. le Président, même s'il me reste quelques minutes, je
vais m'arrêter là-dessus, parce que, personnellement, je n'accepte
plus d'être bafoué par ce gouvernement. Je n'accepte plus
d'être charrié par le ministre des Affaires municipales. Je
n'accepte plus qu'on nous utilise, qu'on utilise l'Opposition, qui
représente actuellement au Québec plus de 70% de la population,
parce que le taux de popularité de ce gouvernement est en dessous de 30%
actuellement.
Une voix: C'est 20%.
M. Rocheleau: C'est 20%? Si vous voulez, 20%, mais, à ce
que je peux comprendre, on peut lui donner encore 30% de gens qui n'ont pas
terminé leur réflexion. Quand ils auront terminé cette
réflexion, il n'y aura plus de séparatistes qui vont suivre ce
gouvernement, parce que même les séparatistes nous disent
aujourd'hui, M. le Président, qu'ils n'acceptent plus d'être
dirigés par un gouvernement qui fait fi de toute la population du
Québec et qui fait fi aussi de l'ensemble de ses militants. On l'a vu
dans le "rénérendum". On l'a vu à d'autres conseils
généraux du PQ. Là-dessus, je ne peux plus me permettre de
parler et je vais prendre quelques instants de réflexion uniquement pour
vous observer, observer ces perroquets que j'ai en face de moi.
M. Léonard: M. le Président, j'avais demandé
la parole.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Jacques Léonard
M. Léonard: Je voudrais quand même reprendre un peu
ce qui vient d'être dit. Un instant! M. le député de Hull,
comme d'habitude, a fait son grand périple. Il a parlé de
patronage, parce qu'il y a eu des représentants nommés à
Commission municipale du Québec, des gens qui avaient de
l'expérience comme le maire Robidas, comme Mme Cuerrier. Je pense que
là-dessus il charrie, évidemment. Il dit, en plus, à un
autre endroit que je suis juge et partie parce que je suis responsable du
projet de loi. Il nous semble bien que cela ne peut pas être autrement;
c'est un projet de loi qui touche le monde municipal, les municipalités.
C'est le ministre qui est responsable de son administration. C'est tout
à fait normal. On retrouve cela dans toutes les lois qui touchent le
monde municipal. Je suis responsable du Code municipal et de la Loi sur les
cités et villes.
M. le Président, on a dit aussi que les députés
n'avaient pas été consultés. Je voudrais simplement vous
rappeler une chose qui a été faite hier: de 16 heures à 16
h 35, il y a eu suspension de la commission justement afin qu'il y ait
consultation des députés.
M. Rivest: Question de règlement concernant la
dernière affirmation du ministre. Si ce que le ministre dit est exact -
je présume que c'est exact - cela veut dire, M. le Président, que
certains membres de la commission connaissent déjà les
amendements que le ministre refuse de faire connaître aux autres membres
de la commission et vous demandez à la commission de travailler dans des
conditions normales! C'est complètement inadmissible. Si les membres de
la commission qui sont en face de nous connaissent les amendements,
répondez à la demande du député de Laprairie et
donnez-nous vos amendements immédiatement. Vous venez de nous dire
qu'ils ne sont pas tout à fait complétés.
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre! À
l'ordre! M. le député de Jean-Talon, c'est une motion qui a
déjà été faite et qui a été
rejetée.
Une voix: C'était une belle tentative.
M. Rivest: Ce n'est pas une motion, M. le Président, c'est
une question de règlement. Est-ce que tous les membres de la
commission...
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Jean-Talon, à l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre!
M. Rivest: J'ai une question de règlement, j'ai
l'intention de la faire.
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous
plaît! C'est la première motion qui a été faite au
début de nos travaux, que les amendements soient déposés,
et c'est une motion qui a été rejetée. M. le ministre.
M. Léonard: M. le Président, nous venons d'accorder
une suspension de quelques minutes aux gens d'en face.
Des voix: Trois minutes!
M. Léonard: II y en a eu de cela. Hier soir, vous
êtes arrivés à 20 h 45 aussi. Je pense que cela fait partie
des travaux. Je ne sais pas si vous vous êtes consultés sur le
projet de loi, de 20 heures à 20 h 45. Je vous dis simplement qu'hier,
lorsque la commission a suspendu ses travaux de 16 heures à 16 h 35,
nous nous sommes consultés sur le projet de loi et sur des amendements
possibles. Ce n'était pas définitif.
M. le Président, il y a eu encore le bout de l'Opposition sur
l'autonomie municipale. J'ai déjà eu l'occasion de l'expliquer,
mais je vais reprendre l'explication parce qu'elle m'apparaît importante.
Les municipalités existent par une législation
déléguée. Elles s'administrent dans le cadre de lois
votées ici par le gouvernement du Québec. C'est dans ce cadre
qu'elles exercent leur autonomie.
Une voix: Elles n'en ont plus.
M. Léonard: Une des mesures importantes de l'autonomie, ce
sont les finances, les sources de revenus et, dans ce secteur en particulier,
au Québec, les municipalités sont pratiquement
complètement autonomes. Des villes sont même autonomes à
100%. Elles ne reçoivent pratiquement pas de subventions, même pas
des subventions dans le cadre de programmes normés, parce qu'elles ont
assez de fonds pour s'administrer elles-mêmes. En général,
au Québec, elles ont 90% d'autonomie. Je pense que c'est cela la mesure
d'autonomie et c'est dans ce sens qu'il faut la comprendre. Il me semble que
là-dessus M. le député de Hull devrait quand même
faire amende honorable, parce que notre système est un des meilleurs
systèmes. C'est nous qui l'avons bonifié. Historiquement, c'est
un bon système le système, municipal du Québec, mais nous
l'avons singulièrement bonifié.
Je dirai aussi, d'autre part, que l'autonomie des municipalités
se situe aussi dans le cadre de l'autonomie du Québec. Plus le
Québec sera autonome, plus les municipalités risquent
d'être autonomes, d'exercer plus de pouvoirs, d'avoir plus de fonds. J'ai
aussi dit, à l'occasion d'un congrès le printemps dernier, que,
si on est deux niveaux d'institutions politiques... (17 h 15)
M. Rocheleau: Aidez-nous à faire l'indépendance et
on va vous donner des pouvoirs!
M. Léonard: ...à se partager le gâteau des
taxes, la tarte fiscale, les deux en auront plus, en termes financiers comme en
termes de pouvoirs. Je pense que c'est une évidence. Je voudrais, quand
même, dire au député de Hull que cette loi se situe dans le
cadre du fédéralisme et qu'elle a comme objectif, finalement, de
défendre le fédéralisme, imaginez-vous! Vous, les
apôtres du fédéralisme, vous devriez comprendre qu'à
l'intérieur du fédéralisme chaque niveau d'institutions
doit respecter les pouvoirs et devoirs des uns et des autres.
M. Rocheleau: Le ministre est rendu
fédéraliste.
M. Léonard: Nous sommes encore à l'intérieur
du système et, quand il y en a qui jouent dans les plates-bandes d'un
autre, ils jouent contre le système lui-même. Vous devriez
être les premiers à dénoncer ce qui se fait
présentement. Vous devriez écrire, vous plaindre, envoyer des
articles dans les journaux, faire n'importe quoi, il me semble, pour
protéger le fédéralisme. Finalement, on est en train
d'essayer de vous protéger à votre place. Il me semble que vous
avez une notion très étriquée du
fédéralisme.
Une voix: Ah! Ah! Ah!
Une voix: C'est donc gentil!
M. Léonard: C'est ce que j'avais à dire.
Après leur couplet sur la souveraineté, on est obligé de
leur donner des leçons car je pense qu'ils ne comprennent même pas
le fédéralisme dans lequel ils sont.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Chambly.
M. Luc Tremblay
M. Tremblay: Le député de Hull a terminé son
intervention en disant: En terminant, je vais réfléchir. Je lui
suggère humblement de le faire dorénavant avant de parler.
Une voix: Ah! Ah! Ah!
M. Rocheleau: Les bibites lui ont mangé la cervelle!
Une voix: Hé, du respect!
M. Tremblay: On a beaucoup dialogué tout à l'heure
sur le fait que le ministre avait retardé les travaux de la commission
justement parce qu'il travaillait au projet de loi.
M. Rivest: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Jean-Talon, sur une question de règlement.
M. Rivest: Je m'excuse auprès de mon collègue de
Chambly...
Une voix: De quoi on parle?
M. Rivest: ...mais je demanderais au député de
parler sur l'amendement du député de Laprairie; c'est cela, la
pertinence du débat.
Le Président (M. Desbiens): La pertinence du débat.
M. le député de Chambly, sur l'amendement.
M. Tremblay: Je trouve normal, dans le cadre d'une commission
comme celle-ci, qu'on réponde d'abord aux objections qui ont
été faites.
Des voix: Non.
M. Tremblay: Si ce n'est pas pertinent de répondre aux
objections, les objections elles-mêmes n'étaient pas
pertinentes.
M. Rivest: C'est cela, c'était illégal. M. Rocheleau:
Je vais recommencer.
M. Tremblay: Si vous avez reçu ces objections, c'est
qu'elles étaient pertinentes. Le député de Hull a aussi
dit tout à l'heure, dans une envolée oratoire, que l'Opposition
était ici pour bonifier la loi, que son travail visait à bonifier
la loi. Je vous soumets très humblement qu'on ne peut pas bonifier une
chose alors qu'on est contre son principe même. C'est cela, la
réalité.
M. Rivest: Qu'est-ce que le président de l'Union des
municipalités a fait, à ce compte-là?
M. Tremblay: L'Opposition a voté contre le principe en
deuxième lecture et, maintenant, ces gens viennent nous dire,
après de multiples méthodes dilatoires pour retarder les travaux
de la commission, qu'ils veulent bonifier une chose alors qu'ils sont contre
son principe même.
M. Rocheleau: Le président de l'Union des
municipalités régionales de comté, qu'est-ce qu'il est
venu faire ici?
Le Président (M. Desbiens): Avez-vous terminé, M.
le député de Chambly?
M. Tremblay: Non, M. le Président.
Une voix: Cela fait longtemps qu'il devrait avoir fini.
M. Tremblay: Si les gens de l'Opposition peuvent être aussi
silencieux que nous le sommes quand ils parlent...
Une voix: La pertinence!
M. Tremblay: ...nous pourrons parler et ils pourront prendre la
parole plus rapidement. Ce matin, un député de l'Opposition a
parlé sur l'amendement en citant un extrait du programme du Parti
libéral qui disait: Nous allons consulter les municipalités.
Une voix: Cela devait être beau.
M. Tremblay: Est-ce que consulter veut dire donner aux
municipalités tout ce qu'elles demandent? Je pense bien que non. Si
jamais nous avons un gouvernement libéral, cela voudrait dire qu'il
donnerait automatiquement à l'Union des municipalités tout ce
qu'elle demande. Je prétends que ce n'est pas cela, consulter. Si c'est
ce qu'ils veulent faire, cela veut dire que le ministre des Affaires
municipales sera le président de l'Union des municipalités du
Québec.
M. Rocheleau: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Desbiens): Question de règlement,
M. le député de Hull.
M. Rocheleau: M. le Président, je voudrais que le
député de Chambly nous dise s'il est d'accord ou non avec
l'amendement que nous avons déposé et qu'il s'en tienne à
la pertinence du débat.
Le Président (M. Desbiens): Après ce nouveau
rappel, M. le député de Chambly.
M. Tremblay: M. le Président, j'ai l'impression qu'on a le
droit de faire notre développement et d'essayer d'arriver à une
conclusion.
M. Rivest: Justement, on ne voit pas )e développement
poindre.
M. Leduc (Saint-Laurent): On ne voit pas du tout où il
s'en va.
Le Président (M. Desbiens): Allez-y. J'espère que
vous allez arriver à une
conclusion qui est celle de l'amendement.
M. Tremblay: Ce matin aussi, dans le même débat sur
le même amendement, le député de Nelligan, qui a fait un
lapsus terrible - d'ailleurs, un lapsus dévoile souvent, comme vous le
savez, notre vraie pensée - a dit: Nous voulons que les
municipalités du Québec soient sous la juridiction du
gouvernement fédéral. Ce ne sont pas ses termes exacts, mais,
c'est un lapsus. J'ai dû lui suggérer de reconsidérer cela
parce que j'avais compris que ce n'était pas ce qu'il voulait dire ou ce
qu'il voulait admettre. Il disait aussi que nous devrions suspendre l'adoption
du projet de loi de façon à permettre une négociation. Il
a admis que, depuis le dépôt du projet de loi 38, le gouvernement
fédéral avait entrepris des négociations
sérieuses.
C'est pour cette raison qu'il faut adopter ce projet de loi, rejeter
l'amendement qui nous est proposé parce qu'il enlève la
flexibilité qui nous est nécessaire et, par le fait même,
rend le projet de loi moins pertinent.
En terminant, on a dit tout à l'heure que le projet de loi
pénalisait les municipalités, ce qui n'est pas le cas, car
l'objectif ultime est de faire en sorte que les municipalités
reçoivent les sommes d'argent qui sont données par le
gouvernement du Canada, mais que ce soit fait dans le cadre de la
Confédération canadienne.
Le Président (M. Desbiens): Merci. M. le
député de Jean-Talon.
M. Rivest: M. le Président, je voudrais proposer que
l'amendement formulé par mon collègue de Laprairie soit un
sous-amendement.
Le Président (M. Desbiens): Un instant, s'il vous
plaît! On va commencer par régulariser la situation parce que,
dans le brouhaha, une chose a été oubliée. Il y avait des
demandes de modifications qui ont été faites au tout début
de la séance pour remplacer M. Ciaccia (Mont-Royal) par M. Leduc
(Saint-Laurent) comme membre de la commission, M. Rivest (Jean-Talon)
remplaçant M. Lincoln (Nelligan) et Mme Bacon (Chomedey)
remplaçant M. Leduc (Saint-Laurent) comme intervenant. C'était
pour régulariser la situation selon l'entente qui a été
répétée de jour en jour.
M. Fallu: II y a un deuxième aspect de l'entente. Il
s'agit du temps. Pourriez-vous indiquer à ces nouveaux intervenants ou
membres le temps dont ils disposent?
Le Président (M. Desbiens): Oui. M. Rivest
(Jean-Talon)...
M. Rivest: Je dispose de peu de temps. Il faut que j'aille au
garage. C'est à 17 h 30. C'est vrai.
Le Président (M. Desbiens): ...remplaçant M.
Lincoln (Nelligan).
M. Rivest: Combien de temps me reste-t-il?
Le Président (M. Desbiens): II vous reste deux
minutes.
M. Rivest: Oh, mon Dieu! J'ai deux pages.
Le Président (M. Desbiens): Ensuite, Mme Bacon (Chomedey)
dispose de 20 minutes. Comme M. Leduc (Saint-Laurent) était
déjà intervenant, il a encore dix minutes.
M. le député de Jean-Talon.
M. Rivest: M. le Président, je voudrais proposer que
l'amendement du député de Laprairie soit modifié de la
façon suivante.
Le Président (M. Desbiens): Vous avez un
sous-amendement.
M. Rivest: C'est cela. "Que l'article 2 - c'est l'amendement du
député de Laprairie soit modifié en remplaçant dans
la première ligne les mots "au jugement du gouvernement" par les mots
"de l'avis de la Commission municipale"...
Le Président (M. Desbiens): Commission municipale du
Québec.
M. Rivest: Commission municipale du
Québec, bien sûr, parce que c'est de juridiction
provinciale, n'est-ce pas, les affaires municipales.
Le Président (M. Desbiens): Cela a été
précisé ce matin.
Motion de sous-amendement
M. Rivest: Je voudrais faire un sous-amendement en ajoutant
après "Commission municipale du Québec" les mots "après
audition des parties". Deuxièmement, que ledit article 2 soit, en outre,
modifié en enlevant à la quatrième ligne, les mots "ou
indirectement" et les mots "sous quelque forme que ce soit" et, finalement, en
changeant à cette même ligne le mot "perd" par le mot "peut
perdre".
Le Président (M. Desbiens): Voulez-vous apporter une copie
de votre amendement?
M. Rivest: Voilà, M. le Président.
Le Président (M. Desbiens): Sur la
recevabilité.
M. Léonard: Faudrait l'écrire puisque
là...
Une voix: C'est pas mal sur le bras!
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Gouin, vous voulez intervenir à quel titre?
M. Rochefort: M. le Président, dans un premier temps,
j'aimerais qu'on...
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député de Gouin.
M. Rochefort: ...nous distribue la proposition de sous-amendement
pour qu'on puisse vérifier si on le juge recevable et intervenir s'il y
a lieu.
Le Président (M. Desbiens): D'accord.
M. Rivest: On va vous le distribuer de la même
manière que le ministre a distribué ses amendements à
votre caucus.
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre!
M. Rochefort: Est-ce que vous êtes maintenant
président de la commission, M. le député de Jean-Talon?
Cherchez l'adresse de votre garage et cela va aller.
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre! Je vais
suspendre quelques instants, le temps de faire faire les photocopies.
(Suspension de la séance à 17 h 27)
(Reprise de la séance à 17 h 34)
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous
plaît! À l'ordre! La commission des affaires municipales reprend
ses travaux. L'amendement, d'abord, et le sous-amendement, ensuite, ont
été remis à chaque membre de la commission.
M. Rochefort: Non, M. le Président. Une voix:
J'étais à ta place.
M. Rochefort: Ah, c'est toi. Cela va, M. le Président.
Le Président (M. Desbiens): Maintenant, j'entendrai les
interventions, s'il y en a qui le désirent, sur la recevabilité
de cette motion de sous-amendement.
M. Rivest: M. le Président, très
brièvement...
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Jean-Talon, le proposeur.
M. Jean-Claude Rivest
M. Rivest: ...sur la recevabilité. Tout ce que le
sous-amendement fait, c'est qu'il restreint la portée de l'article 2. Le
principe et la nature de l'article 2, c'est le régime de sanctions. Une
municipalité les enfreint aux dispositions de l'article 1 encourt un
certain nombre de sanctions.
Nous avons introduit l'élément, par l'amendement qui
parlait de la Commission municipale; nous ajoutons l'audition des parties.
Deuxièmement, nous restreignons la portée de l'article 2 en
enlevant le vocable "ou indirectement". Troisièmement, pour être
davantage conséquent avec l'amendement proposé, puisque c'est
à la suite d'un processus judiciaire, on ne peut pas dire dans la loi
"perd" mais "peut perdre" pour bien établir que la Commission municipale
est la dépositaire de la décision. C'est simplement cela.
Quelque part dans notre règlement, il y a un article qui parle
des exigences que doivent respecter les sous-amendements et je suis d'avis,
comme sans doute vous-même, M. le Président, que ces exigences
sont pleinement satisfaites par le sous-amendement proposé par moi
à l'amendement du député de Laprairie. Voilà.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Groulx, sur la recevabilité. Oui?
M. Rivest: J'ajoute simplement, M. le Président, que je
serais étonné que des gens puissent contester d'une
manière ou d'une autre l'argumentation que je viens de formuler.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Groulx, entendez-vous la contester?
M. Fallu: Deux remarques techniques, si vous le permettez. La
première, je la ferai sous forme de demande de directive. Le
député de Jean-Talon remplace à cette table, cet
après-midi, un autre député qui, je crois - c'est ce que
je vous demande de me confirmer - avait épuisé son droit de
parole. Si tel est le cas...
Une voix: II lui restait deux minutes.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Groulx, d'abord, pour répondre à la première partie de
votre intervention, le député de Jean-Talon - je l'avais
mentionné tantôt - remplaçant le député de
Nelligan, avait encore deux minutes à sa disposition.
M. Fallu: Merci de ce renseignement. Il
avait donc deux minutes pour présenter, en fin d'intervention, un
avis de motion avant de partir pour son garage. Il semble qu'il l'ait
oublié depuis ce temps. Il va être en panne sèche.
Le Président (M. Desbiens): Sur la recevabilité de
la motion.
M. Fallu: Oui. Deuxième remarque à sa face
même, la motion de sous-amendement qui nous est présentée
est irrecevable puisqu'elle inclut la motion d'amendement qui a
déjà été présentée et c'est
présenté comme un tout et non pas simplement en
référence. M. le Président, vous avez deux façons
de régler le problème, soit de demander au proposeur de changer
la forme de sa motion ou encore le règlement vous donne
l'autorité - puisqu'il s'agit d'une question de forme ici - de changer
vous-même la forme de la motion.
M. Rivest: M. le Président, je ne suis pas
péquiste, alors je n'accorde pas beaucoup d'importance à la
forme..
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Jean-Talon, sur la recevabilité toujours.
M. Rivest: C'est cela. Sur la forme, M. le Président,
n'étant pas péquiste, je laisse cela à nos
collègues. Ce qui nous intéresse, c'est le fond, la substance;
c'est de rencontrer ce que les municipalités veulent qui nous
préoccupe.
Le Président (M. Desbiens): Ce n'est pas sur la
recevabilité, M. le député. Y a-t-il d'autres
interventions sur la recevabilité de la motion? Cela va?
M. Rochefort: J'aurais peut-être une question technique, M.
le Président.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Gouin.
M. Rochefort: Cela va? Merci, M. le député de
Jean-Talon de votre tolérance sans limite.
M. le Président, n'est-ce pas automatique, si on demande l'avis
de la Commission municipale, qu'elle doive entendre les parties avant de rendre
sa décision? Est-ce que le ministre pourrait nous informer
là-dessus? M. le Président, c'est parce que la loi ne doit pas
parler pour ne rien dire.
Une voix: Simplement, on a voulu le spécifier.
M. Rochefort: Non, non. Je m'excuse, je ne m'adresse pas à
vous. M. le Président, si, effectivement, d'office, quand le
gouvernement prend avis de la Commission municipale celle-ci doit tenir des
auditions, je ne crois pas que ce soit utile de le rappeler. Une loi ne doit
pas parler pour ne rien dire. Alors, techniquement, je voudrais avoir une
réponse au départ là-dessus.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Léonard: Normalement, si la commission émet un
avis, elle émet un avis éclairé, c'est-à-dire
qu'elle le fait après avoir entendu les parties.
Le Président (M. Desbiens): S'il n'y a pas d'autres
interventions sur la recevabilité de la motion comme telle, je vais
suspendre une minute pour m'assurer d'une chose.
(Suspension de la séance à 17 h 40)
(Reprise de la séance à 17 h 44)
Le Président (M. Desbiens): En vertu de l'article 70 que
je relis: "Un amendement doit se rapporter directement au sujet de la motion
proposée et ne peut avoir que les objets suivants: retrancher, ajouter
des mots ou les remplacer par d'autres". Ici, la motion de sous-amendement se
rapporte à l'amendement qui visait à remplacer "au jugement du
gouvernement" par les mots "de l'avis de la Commission municipale du
Québec", en ajoutant les mots "après audition des parties". Que
ledit article 2 soit en outre modifié en enlevant, à la
quatrième ligne, les mots "ou indirectement" et les mots "sous quelque
forme que ce soit" et en changeant à cette ligne le mot "perd" par les
mots "peut perdre". Dans ces conditions et selon l'article 70, je juge le
sous-amendement recevable.
M. Rivest: J'ai deux minutes?
Le Président (M. Desbiens): II y aurait peut-être la
forme, pour compléter ma pensée, qui aurait pu être
différente, mais l'amendement est recevable quand même, parce
qu'il se rapporte...
M. Rivest: Alors, M. le Président...
Le Président (M. Desbiens): ...à l'amendement,
selon l'article 70.
M. Rivest: ...parlant sur le sous-amendement, mon collègue
de Nelligan...
Le Président (M. Desbiens): Sur le sous-amendement
maintenant, M. le député de Jean-Talon.
M. Rivest: Oui. M. le Président, j'ai 20 minutes, je
crois.
Le Président (M. Desbiens): C'est cela.
M. Rivest: Alors, l'objet du sous-amendement que j'ai
apporté, pour l'entendement de nos collègues ministériels
qui m'écoutent...
Une voix: On vous écoute.
M. Rivest: Je ne voulais pas induire la commission en erreur,
parce qu'ils ne m'écoutaient pas. M. le Président, je pense que
l'ensemble du milieu municipal s'est inquiété, comme plusieurs
éditorialistes, du caractère discrétionnaire du ministre
qui pourrait l'entraîner, dans certains cas, à poser, comme
l'évoquait mon collègue le député de Hull, des
gestes ou des jugements qui laisseraient rapidement le champ du
discrétionnaire pour tomber dans l'arbitraire.
Une voix: Comme dans le temps des libéraux.
Une voix: Je comprends, mais laisse-le parler.
M. Rivest: M. le Président, je pense que
l'évocation que l'on fait par l'amendement du député de
Laprairie à savoir que la Commission municipale soit inscrite dans
l'ensemble du processus du projet de loi est déjà une
amélioration de substance. Les municipalités auront beaucoup plus
de garanties que cela se fera dans la stricte légalité et en
conformité avec les sains principes d'une administration publique et
également d'une administration de la justice, puisque c'est un processus
quasi judiciaire. Alors, c'était l'amendement du député de
Laprairie.
Maintenant, je pense que l'on doit également ajouter, pour
être bien sûr, probablement; comme l'a souligné, je pense,
le député de Gouin, que la Commission municipale
procéderait normalement par une audition des parties,
c'est-à-dire en respectant les principes de justice naturelle. Mais on a
voulu ajouter cette garantie additionnelle pour bien montrer qu'on
s'éloignait de la prise de position du gouvernement qui
privilégiait la voie discrétionnaire.
Par ailleurs, comme mes collègues, le député de
Saint-Laurent, le député de Viau et le député de
Pontiac l'ont souligné d'abondance hier lors de l'étude de
l'article 1, ainsi que lors du débat de deuxième lecture, nous
croyons que le gouvernement risque de pénaliser les municipalités
pour des choses qui se produiraient, par exemple une subvention
fédérale, en dehors de leur connaissance. C'est la raison pour
laquelle nous enlevons, de l'article 2 l'expression "ou indirectement et sous
quelque forme que ce soit". Nous croyons que l'essence de ce projet de loi, le
principe déterminant de ce projet de loi, c'est d'être un projet
de loi fondamentalement punitif contre certains gestes que les
municipalités pourraient prendre à l'encontre des directives ou,
enfin, du point de vue du gouvernement.
Alors, si tel est l'objet, si telle est la crainte, si telle est la
préoccupation du gouvernement, il faudrait quand même prendre dans
la rédaction du projet de loi tous les moyens nécessaires pour
que les municipalités ne soient pas punies pour des gestes ou des faits
qui se seraient produits en dehors de leur connaissance. Dans ce
sens-là, étant donné que c'est un projet de loi punitif,
vous savez qu'en droit statutaire on doit être assez rigoureux dans la
rédaction des textes, raison de plus lorsque l'on crée une
infraction. Même si cette infraction est d'ordre statutaire, je pense que
c'est un principe élémentaire de rédaction en
législation de faire en sorte que les sanctions qu'une personne ou
qu'une municipalité en l'occurrence, risque d'encourir soient
très claires.
Or, comme je l'indiquais, l'ensemble, des préoccupations du monde
municipal ont montré qu'elles ne savaient même pas, à la
lecture du projet de loi, ce qu'il voulait dire, c'est-à-dire que, dans
l'article 2 tel que rédigé, on ne pouvait pas déterminer
où commençait et où finissait l'application du projet de
loi. En plus, la détermination des tenants et aboutissants du projet de
loi était laissée au jugement du ministre. C'est ce qui a fait
dire, M. le Président, à l'éditorialiste du Devoir, M.
Jean-Louis Roy, que ce projet de loi était non seulement
discrétionnaire, mais qu'il ouvrait très largement la porte
à l'arbitraire.
Finalement, j'ai présenté le sous-amendement à des
fins de cohérence, parce qu'il y avait un certain automatisme qui
était introduit à l'article 2 du projet de loi 38 où l'on
disait: "Une municipalité qui, au jugement du gouvernement, a
bénéficié autrement que selon l'article 1 d'une
participation du gouvernement du Canada ou de l'un de ses organismes,
directement ou indirectement ou sous quelque forme que ce soit, perd ainsi..."
Il y avait donc un automatisme. En vertu de l'amendement du
député de Laprairie, comme nous introduisons la Commission
municipale, il faudrait laisser à la Commission municipale le soin de
juger.
Je comprends, le ministre vient de m'indiquer que la Commission
municipale pourrait agir comme un juge, sauf qu'il y a des garanties. Il y a,
d'abord, la garantie que la Commission municipale, qui est un organisme quasi
judiciaire, premièrement, interprétera restrictivement,
conformément aux règles d'interprétation du droit
statutaire, l'article 2, garantie qu'elle ne possède pas si c'est
simplement au jugement du ministre. Deuxièmement, si jamais la
Commission municipale s'écartait de ces principes, il y a une garantie
juridique, formelle, vérifiable par les tribunaux supérieurs, par
la Cour supérieure, d'un respect des règles de justice naturelle,
au niveau du "bias" comme au niveau du principe de l'audi alteram partem,
c'est-à-dire que nul ne peut être condamné sans avoir
été entendu. C'est bien sûr que la Commission municipale
exercera la discrétion, au fond, que n'importe quel tribunal exerce
lorsqu'il entend une cause, sauf que la personne ou la municipalité qui
sera accusée d'une infraction à la loi 38, en l'occurrence, aura
les garanties d'un "due process of law". C'est fondamental et c'est dans ce
sens qu'on dit que, si la Commission municipale trouve qu'une
municipalité a bénéficié d'une participation
financière du gouvernement fédéral non conforme à
l'article 1 du projet de loi, la municipalité en question peut perdre
ainsi, conformément à l'article 4, le droit d'exiger du
gouvernement du Québec ou de l'un de ses ministres les taxes municipales
et les subventions.
M. le Président, nous essayons par ce sous-amendement de bonifier
le texte même de l'article 2. Nous essayons de rejoindre du mieux que
nous le pouvons la préoccupation majeure, je pense, du monde municipal
et il n'est nullement exclu qu'à ce stade-ci de nos travaux nous ayons
d'autres amendements ou d'autres sous-amendements à apporter à ce
projet de loi, parce que nous pouvons avoir, de ce côté-ci comme
dans le milieu municipal, de très sérieuses réserves sur
le régime de sanctions qui est imposé à l'article 2: une
municipalité peut perdre une taxe municipale ou une compensation qui en
tient lieu, une subvention ou une autre somme constituant un
élément de participation gouvernementale à son
financement. Ce sont là des sanctions extrêmement
sévères, des sanctions qui relèvent d'un automatisme, si
on prend l'article 2 tel que rédigé, qui est très
largement inadmissible. Peut-être que mes collègues de ce
côté-ci de la table pourront songer à l'amender dans un
sens de justice, d'équité et de respect - peut-être que
c'est le grand péché, finalement, de ce projet de loi - de ce
qu'il est raisonnable de faire pour atteindre les objectifs.
Je pense que ce qui frappe, à la lecture comme à la prise
de connaissance des modalités du projet de loi 38, c'est son
caractère profondément déraisonnable, finalement. Il
témoigne, à tout le moins, si on le regarde simplement sans faire
de procès d'intention, d'un manque de confiance de la part du ministre
des Affaires municipales envers les municipalités. Si le ministre des
Affaires municipales avait véritablement confiance dans le jugement des
élus municipaux, je pense bien qu'il ne craindrait pas car les
municipalités sont aussi conscientes que lui de la
nécessité qu'il y a pour l'ensemble du milieu municipal de
fonctionner et de respecter l'ordre constitutionnel canadien. Comme on le sait,
comme elles l'ont affirmé elles-mêmes, comme nous l'avons
affirmé et comme le ministre l'a également affirmé, la
responsabilité première en matière municipale doit
être, dans l'ordre constitutionnel présent, au gouvernement du
Québec.
Le ministre devrait avoir confiance, comme moi personnellement, dans le
bon jugement des municipalités, tout comme mon collègue, le
député de Laprairie, et comme nous tous de ce côté.
Nous croyons que les municipalités, que les élus municipaux sont
assez responsables pour savoir que, dans l'accomplissement des fonctions qui
leur sont dévolues et qui leur reviennent, ils doivent agir dans le
respect du cadre constitutionnel du pays, qui s'applique à l'ensemble du
territoire québécois. C'est dans ce sens que mon collègue,
le député de Hull, soulignait avec clarté et
fermeté et, à mon avis, avec combien de raison que cet article 2,
comme l'ensemble du projet de loi, témoigne de la part du ministre des
Affaires municipales d'un manque de confiance à l'endroit des
municipalités.
Les municipalités l'ont dit ici à la barre, lorsque
l'Union des municipalités régionales de comté s'est
présentée, M. Asselin l'a dit, l'Union des municipalités
l'a dit, j'ai entendu personnellement le maire de Québec le dire aussi
très clairement sur les ondes d'un poste de la région de
Québec, ce qu'ils déploraient le plus, c'était l'attitude
paternaliste du ministre des Affaires municipales à l'endroit des
municipalités. C'est ce que nous essayons de démontrer par
l'objection totale que nous avons à ce projet de loi.
Mais, puisque le gouvernement s'entête, malgré toutes les
interventions, à vouloir par une motion de bâillon, imposer
à l'Assemblée nationale l'adoption de ce geste tout à fait
condamnable et même odieux face à l'ensemble du monde municipal,
nous avons proposé cet amendement à l'article 2.
En terminant, je voudrais qu'on procède immédiatement au
vote sur cette motion, M. le Président.
Le Président (M. Desbiens): Y a-t-il d'autres intervenants
sur la motion de sous-amendement? M. le ministre.
M. Léonard: Comme il n'est pas tout à fait 18
heures, je voudrais simplement, avant qu'on suspende nos travaux, informer la
commission que j'ai demandé à rencontrer M. Johnston et M.
Roberts dans le cadre des
négociations. En ce qui concerne M, Roberts, j'ai demandé
à le rencontrer le 22 décembre prochain, évidemment, s'il
est disposé à le faire le même jour.
M. Rivest: On peut voter là-dessus.
Le Président (M. Desbiens): Est-ce que le sous-amendement
est adopté?
M. Léonard: Rejeté.
M. Rivest: Vote nominal, M. le Président.
M. Fallu: M. le Président...
Le Président (M. Desbiens): M. le député,
oui.
M. Rivest: M. le Président, le vote est appelé.
M. Fallu: Le vote est demandé, mais...
Le Président (M. Desbiens): Le vote a été
demandé.
M. Fallu: Oui, il a été demandé, mais cela
ne veut pas nécessairement dire que je perds mon droit de parole parce
que quelqu'un de l'Opposition demande le vote.
Des voix: Bien oui. Bien oui.
Une voix: On a demandé le vote nominal.
Une voix: M. le Président, il est 18 heures.
Une voix: Non, il n'est pas 18 heures. Il reste au moins 20
secondes.
M. Fallu: M. le Président, est-ce que, parce que quelqu'un
de l'autre côté demande, comme cela au hasard, que l'on vote, que
ce soit un vote enregistré ou quoi que ce soit, je perds automatiquement
mon droit de parole? Il n'y a qu'un seul intervenant qui a pris la parole sur
ce sujet. Il n'y a eu aucune réplique du côté
ministériel.
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre! À
l'ordre, s'il vous plaît!
Une voix: Comment, du côté ministériel?
M. Saintonge: Question de règlement, M. le
Président. Le vote a été appelé. Vous devez,
à ce moment-là, procéder au vote. Quand vous nous avez
demandé si la motion était adoptée, le ministre a dit
rejeté. On a demandé un vote nominal à ce
moment-là.
Une voix: C'est cela.
M. Saintonge: Donc, vous aviez appelé le vote et le
ministre a dit rejeté. Vous devez donc maintenant procéder au
vote nominal avant la suspension de la séance.
M. Léonard: Mais on dépasse 18 heures.
Le Président (M. Desbiens): Je suspends quelques secondes
parce que je dois vérifier le règlement à ce sujet.
(Suspension de la séance à 18 heures)
(Reprise de la séance à 18 heures)
Le Président (M. Desbiens): Je voulais vérifier de
façon précise quel était le règlement sur la
question du vote. Automatiquement, dès que 18 heures arrivent, la
commission suspend ses travaux. Donc, on votera à 20 heures. La
commission suspend ses travaux jusqu'à 20 heures.
(Suspension de la séance à 18 h 01)
(Reprise de la séance à 20 h 30)
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous
plaît! La commission élue permanente des affaires municipales
reprend ses travaux pour poursuivre l'étude article par article du
projet de loi 38, Loi sur la participation gouvernementale au financement des
municipalités. On avait demandé un vote à la suspension de
nos travaux à 18 heures. Le vote enregistré avait
été demandé; alors, nous allons procéder à
ce vote sur le sous-amendement du député de Jean-Talon, à
une motion d'amendement du député de Laprairie.
M. le député de Jean-Talon.
M. Rivest: Si j'en vois un voter contre mes sous-amendements,
"watch out" aux amendements qui viennent!
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre! M. Ciaccia
(Mont-Royal)?
M. Ciaccia: Pour.
Le Président (M. Desbiens): Pour. M. Leduc
(Saint-Laurent)?
M. Leduc (Saint-Laurent): Pour.
Le Président (M. Desbiens): Pour. M. Fallu (Groulx)?
M. Fallu: Contre. Des voix: Ah!
Le Président (M. Desbiens): Contre. M. Lachance
(Bellechasse)?
M. Lachance: Contre, M. le Président.
Le Président (M. Desbiens): Contre. M. Léonard
(Labelle)?
M. Léonard: Contre.
Le Président (M. Desbiens): Contre. M. Rochefort
(Gouin)?
M. Rochefort: Contre.
Le Président (M. Desbiens): Contre. M. Saintonge
(Laprairie)?
M. Saintonge: Pour.
Le Président (M. Desbiens): Pour. M. Tremblay
(Chambly)?
M. Tremblay: Contre.
Le Président (M. Desbiens): II m'en manque un, lequel?
Une voix: Nous autres?
Le Président (M. Desbiens): Oui, Rocheleau.
Une voix: Lui as-tu demandé?
Le Président (M. Desbiens): Je pense. Est-ce que je lui ai
demandé? M. Rocheleau (Hull)?
M. Rocheleau: Pour.
Une voix: Oui, cela fait quatre.
Le Président (M. Desbiens): La motion de sous-amendement
est rejetée, cinq voix contre quatre. Est-ce que la motion d'amendement
est adoptée?
Une voix: Rejetée, M. le Président.
Le Président (M. Desbiens): La motion d'amendement est
rejetée. Vote enregistré sur l'amendement du député
de Laprairie. M. Ciaccia (Mont-Royal)?
M. Ciaccia: Pour.
Le Président (M. Desbiens): Pour. M. Leduc
(Saint-Laurent)?
M. Leduc (Saint-Laurent): Pour.
Le Président (M. Desbiens): Pour. M. Fallu (Groulx)?
M. Fallu: Contre.
Le Président (M. Desbiens): Contre. M. Lachance
(Bellechasse)?
M. Lachance: Contre.
Le Président (M. Desbiens): Contre. M. Léonard
(Labelle)?
M. Léonard: Contre.
Le Président (M. Desbiens): Contre. M. Rochefort
(Gouin)?
M. Rochefort: Contre.
Le Président (M. Desbiens): Contre. M. Rocheleau
(Hull)?
M. Rocheleau: Pour.
Le Président (M. Desbiens): Pour. M. Saintonge
(Laprairie)?
M. Saintonge: Pour.
Le Président (M. Desbiens): Pour. M. Tremblay
(Chambly)?
M. Tremblay: Contre.
Le Président (M. Desbiens): Contre. Alors, la motion
d'amendement du député de Laprairie est rejetée. M. le
ministre.
M. Rivest: M. le Président, est-ce que j'ai le droit de
présenter d'autres sous-amendements, M. le Président?
Le Président (M. Desbiens): Je suis toujours aux prises
avec le même problème. Il y a la question des changements. Une
modification avait été faite.
Une voix: Encore?
Le Président (M. Desbiens): II va falloir
régulariser la situation.
M. Saintonge: Question de règlement.
Le Président (M. Desbiens): II y a M.
Ciaccia qui remplaçait M. Middlemiss (Pontiac).
Une voix: C'est bien.
Le Président (M. Desbiens): Alors, c'est d'accord et il y
a consentement pour que le vote soit considéré comme valable.
Cela va?
M. Léonard: M. le Président...
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Léonard: ...nous avions fait une
suspension au cours de l'après-midi et j'avais dit à ce
moment que, probablement en début de soirée, j'aurais des
annonces à faire.
Une voix: À 20 heures.
M. Rivest: II est 20 h 30.
M. Rocheleau: Non, non, non, non. Il n'est pas question
d'être "cheap" là-dedans.
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous
plaît!
Lecture et distribution d'amendements
M. Léonard: M. le Président, il y a effectivement
des décisions fort importantes pour le milieu municipal qui ont
été prises et que je vais annoncer maintenant. On
s'inquiétait, dans le milieu municipal, au sein de l'Opposition et chez
certains observateurs, de la façon dont on exercerait le pouvoir
discrétionnaire que se réserve et doit se réserver le
gouvernement en la matière qui sous-tend le projet de loi 38. Pour
l'essentiel, les opposants au projet de loi 38 voulaient, premièrement,
des balises à l'exercice de notre pouvoir discrétionnaire et,
deuxièmement, participer à la définition de ces balises.
Je voudrais donc, M. le Président, annoncer les amendements suivants que
je vous fais remettre dès après la lecture que je voudrais vous
faire maintenant.
M. Saintonge: Question de règlement, M. le
Président, juste une seconde.
Le Président (M. Desbiens): Question de règlement,
M. le député de Laprairie.
M. Saintonge: Je comprends que le ministre veuille déposer
ses amendements...
M. Léonard: Oui.
M. Saintonge: ...d'une part, mais je comprends également
que l'article 2 n'a pas été adopté. Si des amendements
sont prévus, supposons, à l'article 2, on va les discuter, mais
s'ils sont prévus à un autre article que l'article 2, nous
reprendrons l'article 2 avant d'arriver à quelque autre amendement par
le ministre.
M. Léonard: Oui, oui, d'accord. M. Saintonge:
D'accord.
M. Rivest: M. le député de Laprairie, vous avez
dit: Si les amendements sont discutés?
M. Saintonge: Oui, oui.
M. Rivest: Parce qu'il est possible qu'ils ne soient pas
discutés.
M. Saintonge: Non, mais j'ai voulu dire que, avant de discuter
tout amendement qui se rapportait à l'article 2, par exemple, à
l'article 2.1, nous reviendrons à l'article 2.
M. Léonard: Oui.
Le Président (M. Desbiens): C'est cela.
M. Saintonge: D'accord.
M. Léonard: M. le Président, il avait
été bien entendu que nous poursuivions le vote qui avait
été entamé juste avant 18 heures et que c'était la
seule chose que nous faisions...
M. Saintonge: D'accord.
M. Léonard: Donc, nous n'avons pas adopté
l'article.
M. Saintonge: Je voulais faire spécifier que l'article 2
sera en discussion quand nous reprendrons après.
Le Président (M. Desbiens): Oui, il n'est pas
adopté.
M. Saintonge: Merci.
M. Léonard: D'accord. Ces amendements, les voici. Article
2.1. Le projet de loi 38 est modifié par l'insertion, après
l'article 2, du suivant: "2.1 Le gouvernement précise par
règlement les actes ou les catégories d'actes posés par
une municipalité ou par un tiers qui placent une municipalité
dans la situation visée à l'article 2. "Le ministre des Affaires
municipales fait publier un projet de règlement à la Gazette
officielle du Québec avec un avis mentionnant qu'à l'expiration
d'un délai de 30 jours ce projet sera soumis au gouvernement pour
adoption. "Le règlement entre en vigueur, avec ou sans modification, le
jour de sa publication à la Gazette officielle du Québec ou
à la date ultérieure qui y est fixée."
Article 3. L'article 3 du projet de loi 38 est modifié par
l'addition, à la fin, des alinéas suivants: "Le décret a
effet à compter du début de l'exercice financier municipal qui
suit celui au cours duquel il est pris. "Le premier alinéa a effet
à compter de l'entrée en vigueur du règlement visé
à l'article 2.1."
Article 3.1. Le projet de loi 38 est modifié par l'insertion,
après l'article 3, du suivant: "3.1 Le ministre des Affaires
municipales doit donner à la municipalité un avis
écrit de son intention de recommander au gouvernement la prise d'un
décret constatant qu'elle se trouve dans la situation visée
à l'article 2. "La municipalité peut faire connaître par
écrit au ministre son opposition à la prise du décret et
les motifs de son opposition dans les 60 jours de la transmission de l'avis du
ministre. "Le ministre ne peut recommander au gouvernement la prise du
décret avant l'expiration du délai mentionné au
deuxième alinéa."
Le projet de loi 38 est modifié par l'insertion, après
l'article 5, du suivant: "5.1 Dans les 30 jours de la transmission de la copie
du décret à la municipalité, celle-ci peut adresser une
requête à la Cour supérieure afin de faire annuler le
décret sur une question de droit ou de compétence."
Une voix: Ah!
M. Léonard: "La requête est instruite et
jugée d'urgence." "La requête suspend l'exécution du
décret jusqu'à jugement final."
L'article 16 du projet de loi 38 est modifié par l'insertion,
après le premier alinéa, du suivant: "Le règlement
adopté en vertu de l'article 2.1 s'applique à un acte qui y est
visé et qui a été posé après cette
date."
Alors, M. le Président, j'annonce également la tenue d'une
commission parlementaire pour étudier le projet de règlement dont
j'ai parlé à l'article 2.1. Le monde municipal sera invité
à participer en février à l'élaboration de ce
règlement. D'ici là, nous poursuivrons ici l'étude du
projet de loi 38 article par article et, après, son étude en
troisième lecture pour adoption et sanction avant les fêtes.
Je souligne que le président de l'UMRCQ, qui était venu
ici et qui avait déposé ses projets d'amendements devant la
commission, que nous avions d'ailleurs discutés, s'est dit très
satisfait des amendements que nous avons déposés.
M. Saintonge: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Desbiens): Le député de
Laprairie.
M. Saintonge: Une précision, M. le ministre.
M. Léonard: Oui.
M. Saintonge: Vous mentionnez que le président de l'UMRCQ
avait déposé ces amendements devant la commission?
M. Léonard: Non, les amendements -pas ces
amendements-là - ses projets...
M. Saintonge: Certaines demandes d'amendements qu'il avait
proposées...
M. Léonard: Oui, c'est celles qu'il nous a
déposées mardi après-midi.
M. Saintonge: ...mais qui ne sont pas nécessairement ces
amendements-là, précisément.
M. Léonard: Pas nécessairement, mais je dis qu'il
avait déposé...
M. Saintonge: Des amendements. M. Léonard: ...des
projets... M. Saintonge: Des projets. M. Léonard:
...d'amendement. M. Saintonge: Des demandes.
M. Léonard: II s'est dit très satisfait de ceux que
nous proposons ici.
M. Saintonge: D'accord.
M. Rocheleau: Une question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Viger avait demandé la parole d'abord.
M. Maciocia: M. le Président...
Le Président (M. Desbiens): Est-ce une question de
règlement, M. le député de Viger?
M. Maciocia: Non.
Le Président (M. Desbiens): Alors, sur une question de
règlement, M. le député de Hull.
M. Rocheleau: M. le Président, simplement une
précision du ministre. Est-ce que le ministre a retenu certains des
amendements que le président de l'Union des municipalités
régionales de comté a déposés ou a demandés?
Est-ce qu'il a retenu intégralement certaines de ces propositions?
M. Léonard: Je pense que, pour l'essentiel, tout a
été retenu, M. le Président. Quand je regarde les
délais, ensuite la requête à la Cour supérieure, si
vous comparez les textes, vous constaterez. En fait, lui-même s'est dit
très satisfait.
Le Président (M. Desbiens): M. le
député de Viger.
M. Maciocia: Deux choses, M. le Président, au ministre. La
première, si j'ai bien compris, le projet de loi va être
adopté avant les fêtes.
M. Léonard: Oui.
M. Maciocia: Mais est-ce que...
M. Léonard: Pardon?
M. Maciocia: ...étant donné qu'il y a une
commission...
M. Léonard: C'est l'Assemblée nationale qui est
souveraine en la matière, remarquez bien.
M. Maciocia: Oui, mais c'est cela que vous avez dit tantôt,
si j'ai bien compris.
M. Léonard: Oui, c'est bien sûr.
M. Maciocia: Vous avez dit: Adopté avant les
fêtes.
M. Léonard: Oui.
M. Maciocia: Mais, étant donné qu'il y a une
commission parlementaire au mois de février, est-ce que vous voulez dire
par cela qu'elle sera sanctionnée après la commission
parlementaire?
M. Léonard: Non.
M. Maciocia: Ou avant?
M. Léonard: Ce sont les règlements que nous allons
étudier en commission parlementaire en février.
M. Maciocia: Ce qui veut dire que la loi entrera en vigueur tout
de suite après son adoption.
M. Léonard: M. le Président, si vous me le
permettez, la loi s'applique depuis le jour de son dépôt.
M. Maciocia: D'accord. Ma deuxième question. Voulez-vous
dire par cela que la loi n'est plus rétroactive au 21 juin?
M. Léonard: Non. Elle n'a jamais été
rétroactive. Elle s'applique à compter du jour de son
dépôt.
M. Saintonge: Dès la sanction de la loi, celle-ci
s'appliquera à compter du 21 juin dernier.
Une voix: Comme toutes les lois.
M. Saintonge: Non, cela est absolument faux.
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre s'il vous
plaît! M. le député de Viger avait la parole.
M. Maciocia: Pourriez-vous me confirmer cela, j'ai mal compris,
M. le ministre. Je veux seulement le saisir.
M. Léonard: La loi s'applique à compter du jour de
son dépôt. Les règlements, précisant le champ
d'application et tout cela, vont avoir le même effet que la loi;
c'est-à-dire qu'ils s'appliquent à compter du jour du
dépôt.
M. Maciocia: Vous voulez dire le 21 juin 1983. Est-ce bien
cela?
M. Léonard: C'est exact. M. Maciocia: D'accord.
M. Léonard: Les règlements précisent la
loi.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Jean-Talon.
M. Rivest: M. le Président, comment est-il possible, dans
quelle mesure, où les amendements que le ministre nous a lus et qu'il
est difficile à en comprendre toute la portée quand on ne les a
pas, la loi pourrait être efficacement appliquée, depuis son
dépôt au mois de juin, alors que les règlements vont
être étudiés en commission parlementaire au mois de
février et que ce sont les règlements qui vont déterminer
les modalités d'application de ladite loi? Je vous suggérerais,
M. le ministre - je ne sais pas, comme cela, encore une fois sous
réserve d'avoir pris connaissance en détail des règlements
- que vous songiez à regarder le moment de l'application de la loi, le
dernier article du projet de loi?
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Laprairie.
M. Léonard: Je comprends qu'on veuille suspendre la
séance.
M. Saintonge: Oui, si vous le désirez.
M. Léonard: Effectivement, je le désire. Je
demanderais qu'on suspende la séance jusqu'à 22 heures et
à ce moment, on pourra considérer une suspension plus longue.
M. Rivest: II se passe toutes sortes de choses que je ne
comprends pas concernant les suspensions et tout. Nous, les parlementaires,
sommes laissés complètement
dans le vide. Ils suspendent, ils déposent, les affaires qui
n'étaient pas possibles hier, elles seront maintenant possibles.
Qu'est-ce qui se passe?
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre s'il vous
plaît?
M. Rivest: ...
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Laprairie a la parole.
M. Rivest: II doit y avoir des tractations que j'ignore. Encore
une fois nous, les parlementaires, ne sommes pas au courant.
Une voix: Laisse les leader "dealer".
M. Rivest: Nous ne sommes pas les députés
ministériels pour accepter de ...
M. Léonard: On suspend jusqu'à 22 heures.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Laprairie a la parole. M. le ministre.
M. Léonard: Oui, je vais répondre au
député de Laprairie, M. le Président. Effectivement, nous
sommes d'accord pour accepter la demande de l'Opposition, on va suspendre la
séance jusqu'à 22 heures.
M. Saintonge: On ne l'a pas demandé, il était
convenu. Vous avez suggéré de suspendre.
M. Léonard: De convenance, d'accord.
Le Président (M. Desbiens): La commission suspend ses
travaux jusqu'à 22 heures.
(Suspension de la séance à 20 h 45)
(Reprise de la séance à 22 h 12)
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre! La
commission élue permanente des affaires municipales reprend ses travaux.
Il y aurait une proposition de modification...
M. Saintonge: M. le Président, c'est que... M. le
ministre, je voudrais, à la place de... tantôt, je n'ai pas
remarqué, lorsqu'on a repris à 20 heures, je voulais remplacer M.
Dauphin (Marquette), par M. Middlemiss (Pontiac) qui était d'ailleurs
présent ici à 20 heures, mais je ne l'avais pas indiqué
sur la feuille.
M. Léonard: Cela va. Il n'y a pas de problème.
Le Président (M. Desbiens): Alors, il y a eu les
amendements déposés par le ministre, avant la suspension des
travaux. M. le député de Laprairie, vous avez demandé la
parole.
Commentaires sur les amendements déposés
M. Jean-Pierre Saintonge
M. Saintonge: M. le Président, j'ai un droit de parole sur
le dépôt des amendements. Je voudrais simplement exprimer la
réaction de l'Opposition après que nous ayons regardé les
modifications déposées par le ministre. Ma première
réaction à ce sujet, M. le Président, c'est que je
constate que, d'aucune façon, le projet de loi 38, tel que
déposé le 21 juin dernier, n'est modifié dans son contenu
par l'un quelconque des amendements déposés, c'est-à-dire
qu'on a là, intégralement, le même texte de loi avec les
mêmes dispositions que dans le texte original. Nous y retrouvons les
mêmes caractères: discrétionnaire, discriminatoire,
déraisonnable, abusif, imprécis que nous retrouvions dans le
texte. Il n'a nullement, d'aucune façon, été
modifié.
À l'article 2.1, les amendements apportés par le ministre,
on se rend compte, M. le Président, que les actes jugés
dérogatoires, au sens de l'article 2 de la loi et dans l'article 2 de la
loi, je rappellerai que c'est au gouvernement que la décision appartient
de juger si une municipalité a bénéficié d'une
participation du gouvernement du Canada ou l'un de ses ministres ou organismes,
directement ou indirectement et sous quelque forme que ce soit. Cet article
n'est aucunement modifié. La seule chose que le règlement fait,
tel qu'amené par l'article 2.1, c'est qu'il suspend dans le temps, la
décision, le jugement du gouvernement, qui sera manifesté par un
ou des règlements éventuels qui pourront être
adoptés éventuellement et qui seront publiés à la
Gazette officielle et qui entreront en vigueur lors de la publication ou
à une date ultérieure qui sera fixée. En d'autres mots,
avec l'article 2.1, on revient exactement à ce qui avait
été discuté hier à cette commission, quand on
parlait du dépôt de certains avis pour démontrer si, oui ou
non, tel acte était conforme ou non.
Je rappellerai ici, M. le Président, que, lors de la
séance d'hier, lorsque nous demandions au ministre, dans certains cas,
si tel ou tel point pouvait être couvert par l'article 2, le ministre a
dit: Je ne sais pas, nous verrons, nous émettrons des avis. On en est
exactement au même point. Je dirai là-dessus que je trouve, d'une
certaine façon, assez peu respectueuse l'attitude du
gouvernement, sa façon d'agir avec les municipalités du
Québec au niveau de ce règlement qui devrait être
adopté au mois de mai. On vient simplement mettre un peu de velours sur
le fer en disant aux municipalités: Nous allons convoquer une commission
parlementaire au mois de février, nous vous y entendrons et nous
pourrons discuter avec vous de certains actes qui nous donneront le
règlement. La décision ultime, au niveau du contenu du
règlement, peu importent les représentations que les
municipalités pourront faire, le contenu du règlement, ce sera
entièrement, encore une fois, et totalement à la
discrétion du gouvernement et du ministre des Affaires municipales.
À ce point de vue, on ne modifie d'aucune façon la loi. On
retarde simplement jusqu'au mois de février, d'une certaine
façon, les actes qui seront prévus comme étant
dérogatoires. Ce sont toujours les mêmes actes, les actes directs
ou indirects. Quand j'entendais le ministre des Affaires municipales, lors du
dépôt des amendements proposés, mentionner que, dans ces
amendements, on retrouvait en principe les demandes faites par le
président de l'UMRCQ, au début de cette commission, le mercredi
suivant, j'avouerai que je trouve absolument aberrant cette chose parce que
l'un des points majeurs que le président de l'UMRCQ exigeait dans les
amendements à apporter, c'était qu'au sujet de la participation
financière fédérale qui pourrait être tenue comme
non régulière au niveau d'une municipalité; il fallait
que, dans ce cas, la municipalité ait participé directement.
Dans ce cas-ci, si j'y regarde bien, il faudrait que la
municipalité ait prêté son concours de façon directe
uniquement. Ici, il n'est pas question de cela. "Que la municipalité ait
prêté son concours de façon directe ou indirecte ou sous
quelque forme que ce soit." La municipalité est toujours visée
par ce règlement. Elle sera toujours tenue, elle pourrait toujours
être tenue responsable au sens du règlement éventuel et de
la loi 38. À ce point de vue, on ne tient compte d'aucune façon
d'une des prescriptions fondamentales que le président de l'UMRCQ
exigeait pour rendre la loi plus acceptable pour les municipalités qu'il
représentait. J'avouerai là-dessus que je n'ai pu d'aucune
façon rejoindre, dans le court délai qui nous était
donné, le président de l'UMRCQ pour avoir sa version de cette
chose.
Également, au niveau du règlement, il n'est nullement
spécifié, de quelque façon que ce soit, qu'une
municipalité, tel que l'exigeait le président de l'UMRCQ, puisse
demander au ministre des Affaires municipales d'être exemptée de
l'imputation de la loi pour un projet ou un programme particulier impliquant
une participation financière fédérale sur son territoire.
La seule chose qui va demeurer, c'est que même si la municipalité
adoptait une résolution, cela ne changerait absolument rien. Dans le
règlement, le ministre ou le gouvernement pourra toujours, d'une
façon quelconque, décider, à la limite, si oui ou non cela
est couvert. Également, il n'est prévu dans aucun des amendements
apportés par le ministre que le gouvernement puisse par décret
exempter tout programme fédéral d'aide financière. Je
comprendrai toutefois que le ministre se conserve toujours - je dirai le
ministre ou le gouvernement, je vais vérifier pour être exact -
que le ministre ou le gouvernement à sa discrétion - soit le
ministre ou le gouvernement à l'article 7 -puisse décider de ne
pas appliquer une sanction, puisque l'article 7 du projet de loi disait:
"Malgré l'inexigibilité d'une somme visée à
l'article 2, le gouvernement peut, à sa discrétion,
décider de verser tout ou partie d'une telle somme et, s'il y a lieu,
fixer le montant et les modalités du versement." Le deuxième
paragraphe de l'article 7 dit que le gouvernement peut déléguer
au ministre des Affaires municipales le pouvoir mentionné au premier
alinéa. Dans un tel cas, cela reste toujours à l'entière
et unique discrétion du ministre. C'est à mon point de vue un
acte tout à fait totalitaire du gouvernement. Je soulignerai aussi que
l'article 14 où on mentionne que le ministre des Affaires municipales
est responsable de l'application de la présente loi confirme un peu les
données que je viens de mentionner.
Un autre commentaire, M. le Président, sur les modifications
déposées. À l'article 3, évidemment, je comprends
qu'on a donné satisfaction ici à une demande de l'UMRCQ,
étant donné que le décret trouvera application seulement
au début de l'exercice suivant. Encore une fois, c'est du velours sur le
fer ou sur l'épée puisque de toute façon cela semblerait
assez aberrant pour une municipalité d'être
pénalisée en plein exercice financier sans avoir pu faire des
prévisions budgétaires à cet effet. C'est bien normal que
la pénalité ou la subvention à venir soit imposée
sur le budget financier de la municipalité qui suivra celui où
l'infraction sera constatée.
Maintenant, on arrive à l'article 3.1 où le ministre des
Affaires municipales doit donner à une municipalité un avis
écrit de son intention de recommander au gouvernement la prise d'un
décret constatant qu'elle se trouve dans un état visé
à l'article 2. Je suis d'accord que l'Union des municipalités
régionales de comté avait fait une telle demande d'un
préavis d'au moins 60 jours. On la retrouve dans le paragraphe 2
où la municipalité peut faire connaître par écrit...
Cependant, je comprenais et je suis convaincu que le ministre avait compris
que
la demande du président de l'UMRCQ n'était pas une
présentation par écrit, mais était sûrement de faire
valoir les motifs pour lesquels elle ne devrait pas être l'objet d'un tel
décret. J'avais compris des représentations de Me Asselin, le
président de l'UMRCQ, qu'une telle demande s'appliquait pour pouvoir
faire valoir au ministre, verbalement, ses arguments. Je me souviens
pertinemment que le ministre avait mentionné à cette
époque: On pourra toujours considérer la situation et, par
écrit, cela pourrait être possible. Je me souviens fort bien de
cela.
Dans le domaine de l'application du droit municipal où les
municipalités sont concernées, mais également tous les
citoyens du Québec, il y a certaines régies, et je pense entre
autres à la Commission de protection du territoire agricole où
justement les citoyens et même les municipalités sont pris dans
une situation semblable, c'est-à-dire que les citoyens qui doivent
s'adresser à la Commission de protection du territoire agricole
présentent une demande. Ladite demande dans un tel cas fait foi de la
preuve devant la commission. C'est un plaidoyer par écrit. La commission
n'a pas besoin d'entendre le citoyen ou le demandeur. À cet
égard, elle peut juger simplement sur la demande écrite qui lui
est présentée. Donc, on considère le dossier complet. Dieu
sait que beaucoup de citoyens, beaucoup d'avocats se plaignent d'une telle
façon de procéder par la Commission de protection du territoire
agricole, puisqu'on ne peut pas répondre d'une certaine façon aux
arguments et faire valoir en discussion des arguments qui pourraient permettre
de démontrer vraiment le point de vue qu'on veut soutenir. On n'a pas de
contre-argumentation à ce moment-là de la commission, et dans ce
cas-ci ce serait la contre-argumentation du ministre, pour démontrer
qu'on est bien couvert dans tel cas. On ne pourra pas se justifier sur
l'argumentation que le ministre pourrait invoquer de lui-même pour
intégrer ou pas, l'acte visé dans le cadre illégal de la
loi.
Donc, de cette façon, M. le Président, encore une fois,
cela ne change absolument rien au principe fondamental de la loi. Que la
municipalité soit avisée, qu'elle ait 60 jours pour donner son
opinion par écrit ou donner ses arguments par écrit, cela ne
change absolument rien au caractère discriminatoire de la loi, au
caractère abusif, excessif de la loi.
Finalement, on arrive à l'article 5.1, où on
prévoit la possibilité pour une municipalité visée
par un décret d'adresser une requête à la Cour
supérieure afin de faire annuler le décret, sur une question de
droit ou une question de compétence. Cela est...
M. Rivest: C'est le chef-d'oeuvre.
M. Saintonge: ...vraiment, comme mon confrère de
Jean-Talon le mentionne, un chef-d'oeuvre, c'est le summum au point de vue
juridique. Parce que, de toute façon, à mon point de vue, cela
confirme simplement un recours de droit commun qui existait, d'une part.
Évidemment, on pourra répondre que, dans un tel cas, la
municipalité n'aura pas à plaider devant un tribunal que c'est
bien le seul recours qui puisse s'appliquer -cela prenait un bref
d'évocation, par exemple, et il n'y a pas d'autre recours qui puisse
s'appliquer. Cela peut faciliter, d'une certaine façon, l'accès
direct, dans un temps plus rapide, à la cour, pour une
municipalité. Et le fait, aussi, que la requête sera instruite et
jugée d'urgence. Mais je vous ferai remarquer là-dessus, M. le
Président, que la requête soit inscrite et jugée d'urgence,
non seulement cela favorise la municipalité, mais cela favorise
également grandement le gouvernement qui, dans un tel cas, pourra
imposer sa pénalité d'une façon plus rapide.
Devant un tribunal de droit commun, en présence d'un tel projet
de loi où la discrétion accordée au ministre est tellement
grande, où le jugement du gouvernement a préséance sur
tout, quel juge pourrait, d'une quelconque façon, venir modifier une
telle décision à moins qu'on n'ait pas respecté de
façon éclatante un principe de justice naturelle? C'est donc
dire, à toutes fins utiles, que c'est un recours complètement
inutile, puisque le tout est tellement concentré, tellement
minimisé, que le droit d'appel qui est prévu par cet article,
à mon point de vue, n'équivaut pratiquement à rien pour la
municipalité qui s'adressera à la cour pour le faire valoir.
Finalement, l'article 16: Le règlement adopté en vertu de
l'article 2.1 s'applique à un acte qui est visé et qui a
été posé après cette date. L'article 16 ne change
quand même pas la rétroactivité du projet de loi. Le projet
de loi reste toujours avec effet rétroactif au 21 juin dernier. On
pourra, par règlement, délimiter les genres d'infractions qui
pourront être couverts, mais étant donné que les
municipalités vivent déjà sous l'épée de
Damoclès, qui est suspendue depuis le 21 juin, cette prescription du
projet de loi n'est pas modifiée et reste exactement la même.
Combien me reste-t-il de temps?
Le Président (M. Desbiens): Ah, il n'y a pas de temps de
déterminé. Vous parlez sur consentement parce que ce n'est pas
une procédure régulière qu'on utilise là; c'est
tout simplement parce qu'il y a consentement que vous pouvez vous exprimer de
cette façon.
M. Saintonge: Donc, en fin de compte,
les amendements que nous avons vus et qui ont été soumis
ici ce soir par le ministre des Affaires municipales, dans le peu de temps que
j'ai eu pour les évaluer avec mes confrères, me démontrent
que le projet de loi, en aucune façon, n'a été
modifié quant au caractère qu'on lui reconnaissait au tout
départ, c'est-à-dire un caractère discrétionnaire,
un caractère discriminatoire, un caractère abusif, un
caractère absolument contre tout principe de respect de l'autonomie
municipale et contre le principe de tout respect d'un partenaire sur lequel le
gouvernement est censé compter dans l'administration du Québec,
dans l'administration valant pour l'ensemble des citoyens du Québec au
niveau municipal, évidemment, qui concerne les municipalités.
Je voudrais également, M. le Président, vous mentionner
ici que j'ai eu le temps de contacter par téléphone le
président de l'Union des municipalités du Québec, qui
s'est déclaré non satisfait des amendements apportés par
le ministre au projet de loi. Et, de ce côté-là, j'avais
l'assentiment du président en question pour déclarer qu'il
était non satisfait et que, quant à lui, cela ne changeait
vraiment pas les principes mêmes du projet de loi. Et les principes du
projet de loi, M. le Président, qui sont les mêmes... Tel que nous
l'avons défini antérieurement, c'est un projet de loi où
le principe n'est nullement d'établir la compétence du
Québec au niveau des affaires municipales, c'est un projet de loi
à un seul caractère, qui vise une seule chose, un
caractère punitif à l'égard des municipalités du
Québec. Encore une fois, ce n'est nullement un projet de loi à
caractère fiscal, puisque le seul caractère fiscal qu'on lui
reconnaît, c'est une façon pour le gouvernement du Québec
d'aller puiser des fonds dans les municipalités du Québec. (22 h
30)
Quant à moi, M. le Président, je vous mentionnerai qu'au
niveau du projet de loi 38, je trouverai toujours absolument aberrant qu'un
gouvernement, pour tenter de faire valoir et de faire appliquer sa
compétence en matière de lois municipales, soit obligé de
prendre les dispositions contenues dans le projet de loi 38 pour attaquer
directement les municipalités du Québec. Dans le cadre d'un
conflit entre deux ordres de gouvernement supérieurs, le gouvernement
fédéral et le gouvernement provincial, on pénalise une
partie qui n'est pas présente à toute discussion entre les deux
intervenants principaux et les deux seuls intervenants. Ce sont les
municipalités du Québec qui subissent l'odieux, finalement, de
tout ce contentieux. Comme je l'ai déjà
répété, le proverbe dit: Avec un ami de ce genre, on n'a
pas besoin d'ennemi. Je pense que, pour les municipalités du
Québec, c'est vraiment le caractère répressif de ce projet
de loi qui nous fait dire que, avec un tel gouvernement et un tel ministre des
Affaires municipales, on n'a pas besoin d'ami de ce
côté-là. Je suis convaincu de ce que j'ai avancé
quant à ce point-là.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Saintonge: Donc, en terminant... Le Président (M.
Desbiens): Oui.
M. Saintonge: C'est simplement pour noter que l'Opposition se
déclare absolument insatisfaite et trouve absolument irrespectueuse
l'attitude du ministre à l'égard des 1600 municipalités du
Québec. Il vient, à la dernière minute, après une
suspension durant l'après-midi d'au-delà d'une heure et demie et
une suspension, ce soir, de 30 minutes... Nous avons revu la commission et nous
avons demandé une suspension d'une heure et quart pour l'Opposition,
afin de prendre connaissance des amendements. Nous trouvons que c'est un manque
total de respect envers les municipalités du Québec d'avoir
présenté, dans le cadre actuel, de tels amendements en soulignant
que ces amendements, en plus, remplissaient pratiquement la commande
donnée par le président de l'Union des municipalités
régionales de comté du Québec relativement aux amendements
désirés au projet de loi 38. Je maintiendrai que l'Opposition
gardera la même attitude vis-à-vis du projet de loi 38, et nous le
combattrons de toutes nos forces jusqu'à la fin.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre, quelques
remarques et nous reviendrons à l'article 2 du projet de loi.
M. Léonard: M. le Président, j'ai bien entendu, je
crois, le représentant de l'Opposition. Les amendements étant
déposés, je voudrais quand même savoir si, par
exemple, vous êtes prêts au moins à étudier
l'article 2.1 comme un minimum de balises. Est-ce que cela vous satisfait au
moins? Est-ce qu'on est prêt à prendre cela comme un minimum des
balises? Je voudrais poser la question à M. le représentant de
l'Opposition.
M. Rivest: ...de répondre.
M. Saintonge: Non, M. le Président.
M. Léonard: L'article 2.1, quand même, est un
article qui modifie beaucoup.
M. Saintonge: Oui.
M. Léonard: J'ai annoncé la tenue d'une commission
parlementaire pour étudier le règlement qui établissait
les actes ou les
catégories d'actes visées par la loi. Est-ce qu'au moins
cela...
M. Saintonge: M. le Président, je vais répondre au
ministre là-dessus. Quant à l'attitude que l'Opposition va
adopter à ce sujet, vis-à-vis des amendements à l'article
2.1, je vais vous dire que celle-ci, en aucune façon, ne voudra se faire
la complice de l'adoption d'une telle réglementation, car, à
notre point de vue, une telle réglementation ne change absolument rien
au caractère abusif et discriminatoire du projet de loi. La seule chose
que cela change, c'est de reporter la décision dans le temps.
L'épée de Damoclès va demeurer pour les
municipalités du Québec pendant deux mois de plus. C'est la seule
chose que cela va amener. On verra bien si les municipalités viendront,
seront d'accord pour participer à une telle commission parlementaire.
Possiblement. On attendra. On verra ce que les unions décideront. Si la
commission parlementaire est convoquée, vous pouvez être certain
que les représentants de l'Opposition seront présents, mais, de
là à vous dire que nous pouvons accepter de discuter de ces
amendements, d'y donner notre consentement et d'être pour de tels
amendements, jamais nous ne voudrons être les complices d'un tel manque
de respect à l'égard des municipalités du Québec
où, encore une fois - je vais le répéter - vous mettez du
velours sur le glaive, M. le ministre.
M. Léonard: Merci. Cet article, c'est quand même
mieux que pas d'article.
M. Saintonge: Pas nécessairement. Vous avez la même
chose. Cela ne change rien. Cela reporte dans le temps.
M. Léonard: Donc, vous ne voulez pas l'étudier?
M. Saintonge: On y arrivera. On l'étudiera et on vous
donnera nos commentaires au fur et à mesure, comme dans tout autre
projet de loi. Nous devons étudier tous les articles qui sont
appelés dans un projet de loi.
Le Président (M. Desbiens): Pas d'autres commentaires, M.
le ministre?
M. Rivest: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Desbiens): Question de
règlement.
M. Rivest: Oui, en ce qui concerne l'organisation de nos travaux.
Ce que le député de Laprairie a indiqué au ministre, c'est
que l'Opposition, face aux propositions...
Une voix: Ce n'est pas une question de règlement.
M. Rivest: Oui, c'est sur l'ordre des travaux. Vous allez voir
que je vais vous faire une proposition intéressante. Étant
donné que nous sommes sous le coup d'une motion de clôture, qui
est toujours présente avec les amendements, l'Opposition, pour les
raisons de fond évoquées par le député de
Laprairie, va continuer, pendant tout le temps que nous permet le leader du
gouvernement, d'étudier article par article le projet de loi. Nous en
sommes à l'article 2, nous avons présenté un amendement,
un sous-amendement et nous allons continuer d'examiner l'article 2.
Si vous voulez qu'on en arrive à vos amendements afin qu'on
puisse les examiner, allez voir votre leader parlementaire pour qu'il
lève la guillotine. À ce moment-là, on y arrivera.
Le Président (M. Desbiens): Est-ce que l'article 2 est
adopté?
M. Saintonge: M. le Président, juste un point,
auparavant.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Laprairie, rapidement.
M. Saintonge: Une minute, rapidement. Je voudrais simplement
spécifier une chose aux membres de cette commission. L'Opposition, dans
le cadre de son travail sur le projet de loi, n'est nullement
représentative d'une quelconque union. Nous travaillons pour tous - nous
ne représentons pas l'Union des municipalités régionales
de comté du Québec ni l'Union des municipalités du
Québec - nous représentons l'ensemble des municipalités du
Québec suivant ce que nous croyons être dans leur
intérêt. Je pense que c'est un point important à
spécifier et les commentaires que nous faisons sur ledit projet de loi
n'engagent que nous et non le président qui est venu déposer ici.
S'il s'est déclaré satisfait des amendements, cela ne regarde pas
l'Opposition. L'Opposition a porté un jugement sur les demandes faites,
comme le président de l'UMRCQ pourrait porter un jugement sur les
demandes par rapport aux amendements qu'on nous propose, de la même
façon que l'UMQ peut porter un jugement sur les amendements
proposés.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre, vous aviez des
commentaires à faire sur l'ensemble, et on clôturerait cela.
M. Jacques Léonard
M. Léonard: Oui, M. le Président. Bien entendu,
nous aussi, nous représentons toutes les municipalités du
Québec, je suis ministre
des Affaires municipales de toutes les municipalités du
Québec, mais nous avons quand même enregistré la
réaction du président de l'UMRCQ qui s'est dit très
satisfait des amendements qui étaient proposés.
Il y a des choses nouvelles dans les amendements que nous avons
déposés. On voulait des balises, on les donne, et on invite de
plus le monde municipal à participer à la définition de
ces balises. Je pense que c'est un geste important. Une commission
parlementaire, c'est important. Un règlement sera publié
officiellement et les municipalités pourront venir donner leur point de
vue là-dessus. Il me semble que c'est un des gestes qu'on retrouve dans
l'article 2.1 et qui était particulièrement important comme
amendement.
Dans tout cela, il ne faudrait pas perdre l'objectif de la loi. Il y a
des fédéraux qui ne respectent pas la constitution, à
l'heure actuelle, qui se promènent dans le réseau municipal...
Aujourd'hui même, le 15 décembre, dans le Nouvelliste, on peut
lire: subvention à l'aréna de Champlain, 1 700 000 $. C'est cela,
les fédéraux!
Une voix: La semaine passée, c'était 800 000 $!
Une voix: Vous n'avez qu'à vous promener et à faire
la même chose.
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre!
M. Léonard: Au-delà de la question
constitutionnelle, il y a une question de saine gestion, de bonne
administration des fonds publics. En même temps, nous recherchons une
entente avec Ottawa: j'ai proposé au ministre Roberts de le rencontrer
dès le 22 décembre, j'espère qu'il sera disponible, de
même que M. Johnston; j'espère aussi qu'il sera disponible parce
que nous avons des choses à discuter là-dessus.
Je crois qu'il y a des choses nouvelles, le nouvel article 2.1
transforme passablement la loi. Vous avez aussi l'article 3 qui répond
à une demande de l'UMRCQ. En ce qui concerne l'article 3.1, que nous
avons déposé et qui oblige le ministre à donner un avis
écrit à la municipalité, on peut se demander pourquoi il
doit donner un avis écrit à la municipalité; c'est parce
qu'on veut lui donner l'occasion de faire valoir son point de vue; sinon, cela
n'aurait aucun sens. Son point de vue étant donné, cela permettra
aussi de faire intervenir la Commission municipale du Québec, par les
articles 91 et 95 de la Loi sur la Commission municipale du Québec.
Alors, déjà la commission peut intervenir, parce que le ministre
peut demander un avis à la Commission municipale du Québec. Donc,
les municipalités seront entendues.
Maintenant, il y a la requête à la Cour supérieure;
c'est une demande de l'UMRCQ qui est à peu près
intégralement respectée en ce qui me concerne, et vous avez
l'article 16 qui est un article de concordance. Je pense que, dans l'essentiel,
nous avons respecté les demandes de l'UMRCQ. Je propose, M. le
Président, qu'on passe à l'étude de l'article 2 pour
l'adopter.
Le Président (M. Desbiens): L'article 2 est sur la table.
Est-ce que l'article 2 est adopté? M. le député de
Hull?
Des voix: Adopté.
Des voix: Un instant!
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Hull.
M. Rocheleau: Non, non, je n'ai pas parlé encore
là-dessus, moi. J'ai mon droit de parole, M. le Président.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Hull. S'il vous plaît, à l'ordre!
M. Rocheleau: M. le Président, est-ce que je pourrais
avoir mon droit de parole, s'il vous plaît?
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Hull, je vous l'ai donné.
M. Rocheleau: Merci.
Une voix: Sur l'article 2.
Le Président (M. Desbiens): Sur l'article 2.
M. GiUes Rocheleau
M. Rocheleau: Merci, M. le Président. On a bloqué,
effectivement, notre amendement, celui que le député de Laprairie
avait déposé, pour se référer à la
Commission municipale pour éviter, justement, que le ministre ne soit
juge et partie. Cette commission, nous le pensions, avait les
compétences pour pouvoir examiner attentivement les cas selon les
éléments énoncés dans le projet de loi. Mais non,
encore une fois, M. le Président, le côté
ministériel a systématiquement bloqué un amendement qui,
pourtant, était fort valable. Je trouve cela très malheureux de
la part du ministre qui vient de nous déposer des amendements et qui a
tenté de nous faire croire qu'on était dans le plus beau des
mondes, qu'on venait de régler tout le problème et que
c'était une acceptation massive, plus particulièrement de l'Union
des municipalités régionales de comté. Je me
permets d'en douter, M. le Président. D'autre part, l'Union des
municipalités du Québec a donné la permission à
notre député responsable du dossier de poser les mêmes
objections que celles qu'elle avait antérieurement.
M. le Président, je trouve absolument aberrant que ce
gouvernement persiste à vouloir faire adopter ce projet de loi inique,
projet de loi qui est absolument inacceptable et qui va à l'encontre des
principaux partenaires de ce gouvernement, c'est-à-dire l'ensemble des
municipalités du Québec, tout ceci pour entretenir, encore une
fois, des chicanes entre le gouvernement fédéral et le
gouvernement provincial. Cela revient constamment dans le portrait.
Connaissant le ministre des Affaires municipales, qui est probablement
l'un des plus souverainistes de son parti, on ne pouvait pas s'attendre
à autre chose. La modification que nous avions proposée à
l'article 2... Encore une fois, on voudrait nous proposer des amendements
à l'article 1; il est bien évident, M. le Président,
qu'une taxe municipale ou une compensation en lieu de taxe, c'est cela. C'est
cela une compensation en lieu de taxe; et on pourrait en parler longuement.
Je trouve cela d'autant plus malheureux que c'est un coup à
l'autonomie municipale que l'on porte ce soir, une fois de plus; c'est un
mauvais coup à l'autonomie. On nous parle de démocratie, de
démocratie dans nos municipalités. Avec l'attitude que prend le
ministre des Affaires municipales vis-à-vis de ses partenaires, on vient
nous demander, à nous de l'Opposition, comme le disait le
député de Laprairie tantôt, d'être complice de ce
projet de loi. Jamais! Jamais, on ne pourra accepter d'être complice, M.
le Président, jamais. Qu'on nous dise que c'est du ressort du
gouvernement du Québec, les municipalités, tout le monde a
concouru à cela. Les deux unions ont concouru à cela. Les
municipalités aussi ont concouru à cela. (22 h 45)
Dans le contexte actuel, on nous dit qu'on sort de la crise
économique. Chacun des projets de loi que ce gouvernement nous
dépose actuellement, ce sont justement des projets de loi pour
restreindre cette relance que nous souhaiterions tous. Je trouve terriblement
malheureux que le ministre des Affaires municipales ne veuille pas comprendre.
C'est de l'aberration aux yeux de l'Opposition, qui est utilisée ou que
le côté ministériel voudrait utiliser pour en arriver
à ses fins. Des fins semblables, on ne souscrira jamais à cela.
Pour autant que je suis concerné, je pense que toute notre formation
politique a tenu compte du fait que les municipalités au Québec,
nos maires, nos conseillers, ne sont pas des gens en culottes courtes. On n'est
pas pour les déshabiller tranquillement. On n'est pas pour leur enlever
le petit peu de pouvoirs qu'il leur reste. On n'est pas pour leur enlever le
peu d'autonomie que le monde municipal a encore aujourd'hui.
Quand on tient compte de l'article 2... Le ministre a voulu tantôt
nous parler de ses amendements par lesquels il prétendait bonifier le
projet de loi, alors que ce projet est sur la table depuis le 21 juin dernier,
alors qu'on a eu le bâillon. On a eu à peine quelques heures pour
en discuter. C'est ce même gouvernement aujourd'hui... Si on appelle cela
faire un "filibuster", c'est le gouvernement qui fait un "filibuster" puisqu'il
nous a arrêtés de travailler deux fois aujourd'hui pour aller
faire ses petits caucus, ses petites rencontres. Je suis convaincu que, si on
avait une machine à vérité, un détecteur de
mensonge, j'aimerais cela le braquer sur certaines têtes du
côté ministériel pour savoir s'ils sont au courant,
premièrement, du projet de loi et deuxièmement, des amendements
qui ont été soumis par le ministre. C'est la
majorité...
M. Tremblay: M. le Président, la pertinence.
M. Rocheleau: ...c'est très pertinent...
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Tremblay: Question de règlement, M. le
Président.
M. Rivest: Vous devriez voir...
M. Rocheleau: Ne viens pas me beurrer, toil
M. Rivest: Juste par votre intervention, l'aiguille du
détecteur vient de tourner à 180 degrés.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Chambly, sur une question de règlement.
Mme Bacon: Cela vous inquiète? On a tout ce qu'il faut.
Vous pensez qu'on vient ici non préparés? Il y a juste vous qui
êtes intelligents!
M. Tremblay: Oui, de toute évidence le
député s'est éloigné de la pertinence puisqu'on
discute présentement de l'article 2.
M. Rivest: L'aiguille vient de "swinger" en dehors du cadran.
Mme Bacon: Quelle arrogance!
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Hull.
M. Rocheleau: Est-ce qu'on pourrait
demander au député de Chambly de se reposer calmement,
étant donné que, de toute façon, son vote ne changera pas
même si je lui parlais pendant deux heures? Il est déjà
engagé en arrière de cette majorité servile.
M. Tremblay: Question de règlement, M. le
Président.
M. Rocheleau: Et il va sûrement, dans quelques instants,
donner son vote.
M. Tremblay: Question de règlement, M. le
Président.
M. Rocheleau: M. le Président, à l'article 1,
c'est-à-dire à l'article 2...
M. Tremblay: Question de règlement.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Chambly, sur une question de règlement.
M. Tremblay: M. le Président, de toute évidence,
l'Opposition nous a déjà servi toute sa salade. Si on avait eu
à changer d'idée, cela ferait longtemps qu'on l'aurait fait.
Mme Bacon: Attendez la vinaigrette.
Le Président (M. Desbiens): II n'y a pas de question de
règlement là-dessus, M. le député. M. le
député de Hull, vous avez la parole.
M. Rocheleau: M. le Président, premièrement, le
député de Chambly ne comprend pas le projet de loi.
Deuxièmement, il ne connaît pas les conséquences de ce
projet de loi. Troisièmement, à chaque fois qu'il parle, il me
dérange. J'aimerais qu'il me laisse aller un peu. Quand on parle d'une
taxe municipale...
M. Tremblay: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous
plaît! À l'ordre, s'il vous plaît, M. le
député de Chambly. M. le député de Hull a la
parole.
M. Rocheleau: Je vais vous faire sortir comme on l'a fait pour
moi l'autre jour.
M. Tremblay: Jamais je ne pourrais être aussi impoli que
vous.
M. Rocheleau: Le deuxième coup, vous allez l'avoir.
Tranquille!
M. Tremblay: M. le Président, voulez-vous rappeler
à l'ordre le député "dull"?
Une voix: De Hull.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Hull, à l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre! À
l'ordre! M. le député de Hull, vous avez la parole encore une
fois sur l'article 2.
M. Rocheleau: Je vous remercie, M. le Président. À
l'article 2, on dit qu'une municipalité perd une taxe municipale ou une
compensation tenant lieu de taxe. Savez-vous ce que c'est cela? Je ne sais pas
si le ministre sait ce que c'est. Quand une municipalité a
préparé, au mois de décembre de l'année courante,
son budget pour l'année suivante, a préparé ses
prévisions budgétaires, a accepté son budget, au cours de
cette même année, advenant le cas que le ministre, par
décret, déterminerait qu'une municipalité, directement ou
indirectement, a reçu les bénéfices d'une subvention
quelconque versée à quelque organisme que ce soit, il pourrait
soustraire les "en lieu" de taxes à cette municipalité et, par le
fait même, il obligerait cette municipalité à imposer une
taxe spéciale équivalant au montant qui aurait été
retiré sous forme d'"en lieu" de taxes par le gouvernement du
Québec. Advenant le cas que son budget... On sait que le budget de nos
municipalités du Québec accuse, habituellement, de légers
surplus, n'accuse pas de déficits comme le gouvernement du
Québec. Elles ne peuvent pas, en vertu de la Loi sur les cités et
villes ou du Code municipal, accuser des déficits. Les administrateurs
municipaux doivent travailler en fonction du budget qu'ils ont approuvé
au mois de décembre pour l'année qui vient. Voyez-vous la
complexité, l'ambiguïté et le problème que vous
pouvez créer à une municipalité en ayant toujours cette
épée de Damoclès sur la tête des maires et des
conseillers du Québec? C'est absolument impensable et incroyable que ce
gouvernement, ce ministre des Affaires municipales ait pu inventer un projet de
loi aussi ridicule, stupide, incohérent, abusif,
incompréhensible.
Là, on va demander à l'ensemble de nos
municipalités du Québec de se conformer à cela. L'Union
des municipalités du Québec, qui représente les plus
importantes municipalités, qui sont gérées à
l'intérieur de structures administratives, de compétences parce
que ce sont d'importants organismes, peut venir à bout de se comprendre
davantage. Avez-vous pensé aux petites municipalités, aux
villages, aux paroisses, aux petites municipalités de 300, 400, 700
personnes, où le secrétaire trésorier travaille bien des
fois le soir, sur le coin de la table, pour rafistoler les résolutions
du conseil qui ont été adoptées durant le mois ou
la semaine? Avez-vous pensé à cela? À la complexité
que vous allez créer. Vous allez
obliger chacune des municipalités du Québec, les 1600,
à avoir en permanence un conseiller juridique à gros salaire.
Est-ce que c'est un projet de loi fait uniquement pour encourager nos avocats
au Québec? Est-ce que les municipalités vont pouvoir aller
visiter les cliniques juridiques? Elles n'auront peut-être plus d'argent
pour payer leurs comptes. C'est absolument aberrant, M. le
Président.
J'ai été maire d'une municipalité quand même
durant plusieurs années. On a déjà donné des
leçons de gestion au gouvernement. Après 1976. Pour
l'intérêt de mon collègue de Jean-Talon, c'est qu'on avait
été la première municipalité au Québec
à adopter un plan quinquennal tenant compte de nos revenus, de nos
dépenses et des immobilisations prévues, si la ville était
en mesure de les faire, si notre capacité de payer était de
taille à faire face aux immobilisations ou aux règlements
d'emprunt que nous adoptions. Et c'est peut-être une des raisons pour
lesquelles la ville de Hull, aujourd'hui, au point de vue de la richesse, est
la deuxième au Québec. Et on pourrait en montrer d'autres au
ministre des Affaires municipales. On pourrait l'informer, lui qui n'a jamais
été près du monde municipal, lui qui est reconnu,
plutôt que d'être l'interlocuteur valable entre le monde municipal
et l'appareil gouvernemental, l'ensemble des ministères, comme le
bourreau. C'est le bâton. Marche, avance, ou je te tape dessus. C'est
cela. C'est un gouvernement qui frise le régime totalitaire, je me
demande si on pourrait faire la différence. C'est vers cela qu'on se
dirige. Des décrets'. L'an passé, on pensait qu'avec les lois 70,
105, 111, où on nous a déboulé un paquet de
décrets, cela était fini. On pensait que le gouvernement avait
capoté sur le coup et qu'il allait finir cela. Bien non, le ministre des
Affaires municipales recommence.
Une voix: Des décrets.
M. Rocheleau: On n'a pas eu assez de tracas avec notre fonction
publique et avec nos enseignants et là, on recommence avec les maires et
les conseillers.
M. Rivest: Bien, regardez donc cela!
M. Rocheleau: Cela se peut-il qu'un gouvernement,..
Une voix: Tout le monde va...
M. Rocheleau: ...se donne des coups de pied au derrière
comme cela et semble aimer cela? De notre côté, l'autre jour, en
commission parlementaire, j'ai dit: Savez-vous, à vous voir aller, vous
allez nous créer des problèmes aux prochaines élections.
Il n'en restera plus un seul de vous!
Une voix: II essaie de faire confiance...
M. Rocheleau: Gardez-nous-en un au moins, pour qu'on vous parle
dans la face tous les matins! Gardez-nous-en au moins un! Ne faites pas cette
bêtise de partir tous! Je comprends qu'avec des articles comme cela,
qu'avec les problèmes que l'on va créer par l'article 2, pour
rester dans la pertinence...
Des voix: Voilà, voilà!
M. Rocheleau: ...il ne restera plus un député
péquiste, séparatiste, indépendandiste au Québec.
Ils vont "fouter" le camp, ils vont tous être partis. Ce n'est pas
correct, cela, gardez-en un au moins. Et je ne sais pas le comté qu'on
va pouvoir choisir pour en garder un, il n'y a plus personne qui veut vous
avoir.
Une voix: Labelle!
M. Rocheleau: Non, non, le député de Labelle va
partir! Ah! lui, il va partir!
Une voix: Le maire de Saint-Nazaire!
M. Rocheleau: Et ne vous en faites pas, M. le Président,
pour le bénéfice de mon collègue de Jean-Talon, je m'en
occupe personnellement.
Des voix: ...
M. Rocheleau: Oui, oui. Il ne faut pas tuer la peau de l'ours
avant de l'avoir... Il ne faut plutôt pas vendre la peau de l'ours avant
de l'avoir tué. Mais j'ai déjà commencé à
vendre la peau du ministre des Affaires municipales, parce qu'il n'est pas
mieux que mort!
M. le Président, quand on tient compte... M. le ministre des
Affaires municipales, écoutez-moi, il reste encore un peu de temps pour
tenter de vous convaincre. Pour cela, franchement, je me fais une illusion
parce que, depuis que je suis à cette Assemblée nationale, cela
fait exactement 973 jours que je suis ici... Et, avant la prochaine
élection générale, à moins que je ne fasse erreur,
il reste exactement 753 jours à vous endurer, si vous allez tout
à fait au bout de votre mandat, le 13 avril 1986; du train où
vous allez, avec vos petites pensions et tout cela, et des "jobs" à
chercher, vous allez vouloir coller à vos bancs jusqu'au 13 avril 1986.
Mais, de toute façon, cela fait déjà assez de temps que je
les endure et, quand je vois des projets de loi comme celui-là, comme le
projet de loi 38, je regarde les articles, l'article 1, l'article 2, et
là on entre dans la viande tranquillement, c'est de l'aberration.
Comment? Ce sont qui, vos fonctionnaires? C'est qui? Lequel de vos
fonctionnaires, M. le ministre, vous a pondu cela? Pourrait-on connaître
son nom? Pour moi, ce n'est pas un fonctionnaire, cela ne se peut pas! Cela ne
se peut pas que ce soit un fonctionnaire qui ait pondu cela, parce que les
fonctionnaires du gouvernement du Québec, je pense, sont plus
intelligents que cela.
Une voix: II est parti!
M. Rocheleau: Oui, ou il a été
transféré, je ne sais pas, ou il est parti, ou on l'a
nommé à un poste quelconque, avec une promotion et un contrat de
cinq ans! Peut-être.
M. Rivest: II est en voyage en Italie!
M. Rocheleau: Mais je suis convaincu que cela est l'oeuvre du
ministre des Affaires municipales avec la - voyons donc, je ne suis plus
capable de le dire -complicité de sa majorité servile. La
majorité servile va approuver, M. le Président...
M. Léonard: M. le Président, est-ce qu'on me
permettrait une question de règlement, étant donné...
Le Président (M. Desbiens): S'il y a une question de
règlement.
M. Léonard: ...qu'on a parlé de mes
fonctionnaires?
Des voix: Oui, oui.
Le Président (M. Desbiens): Question de règlement.
(23 heures)
M. Léonard: II a été dit qu'il ne faut pas
vendre la peau de l'ours avant de l'avoir tué. On me fait savoir qu'il
ne faut pas traiter les crocodiles de grande gueule avant d'avoir
traversé la rivière.
M. Rocheleau: M. le Président, simplement pour
répondre...
Le Président (M. Desbiens): Ce n'était pas une
question de règlement.
M. Rocheleau: Non, sûrement pas.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Hull, vous avez la parole.
M. Rocheleau: Je me souviens, M. le Président - pour le
bénéfice du ministre -quand je suis allé faire un petit
voyage en Jamaïque, il y a quelques années, que je suis justement
allé à la chasse aux crocodiles.
Le Président (M. Desbiens): On est loin de l'article 2, M.
le député de Hull.
M. Rocheleau: C'était pour répondre au ministre des
Affaires municipales. Je connais cela moi aussi les crocodiles.
À toutes fins utiles et dans une conclusion qui tiendra compte
des minutes qu'il me reste, M. le Président, le ministre nous informait
- et cela est dans la pertinence de cet article comme de tous les articles du
projet de loi 38 - qu'il devait rencontrer M. Roberts le 22 décembre,
ainsi que M. Johnston. Je me pose la question: Pourquoi ne met-il pas son
projet de loi 38 de côté, pourquoi ne va-t-il pas rencontrer MM.
Roberts et Johnston et ne tente-t-il pas de conclure une entente? Cela serait
beaucoup plus facile de conclure une entente que d'imposer l'article 2 aux
municipalités et de leur soutirer des "en lieu" de taxes si elles ont le
malheur d'avoir bénéficié, directement ou indirectement,
d'une subvention fédérale.
Je trouve que la logique serait là, dans le sens qu'il y aurait
sûrement une ouverture. Il y a déjà une date de
fixée pour une rencontre et c'est le 22 décembre. Le ministre des
Affaires municipales, de toute façon, ne pourra pas appliquer cela avant
le mois de février parce qu'il nous a dit qu'au mois de février
il y aurait une commission parlementaire pour établir les
règlements ou les règles du jeu. Plus rien ne presse. Je
comprends que le gouvernement semble vouloir capituler tranquillement, semble
vouloir repousser cela parce qu'il y en a qui, dans ce gouvernement, ont
réalisé que cela n'avait plus de bon sens.
M. Rivest: Des gens haut placés.
M. Rocheleau: Et ce soir, apparemment, il y aurait eu des petites
rencontres en haut lieu, mais celles-ci ne semblent pas avoir donné ce
que nous aurions souhaité, dans le sens que le ministre aurait pu nous
annoncer: Tenant compte de tous ces facteurs, tenant compte des
impondérables, tenant compte de l'ambiguïté, tenant compte
du fait que les municipalités ne comprennent pas, parce qu'elles ne
peuvent pas comprendre, on va retirer notre projet de loi. On va aller
négocier avec le ministre fédéral et on va voir si, tenant
compte que c'est encore chaud, on ne peut pas conclure une entente.
J'ose espérer que, même si le bâillon va nous tomber
dessus à minuit, le ministre pourra toujours, d'ici à minuit,
tenter de le considérer. M. le ministre - et je termine
là-dessus, M. le Président - je comprends que vous êtes
orgueilleux - tout le monde est un peu orgueilleux - je comprends qu'il y en a
qui font des erreurs et qui n'aiment pas les admettre. On ne le dira à
personne que vous avez fait une erreur, M. le ministre, parce
que, s'il fallait dire aux gens que vous avez fait une erreur, on
passerait notre temps à dire aux gens que vous faites des erreurs. On ne
le dira pas, mais retirez votre projet de loi et allez, comme un gentil
garçon, négocier.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Mont-Royal, il vous reste 18 minutes.
M. John Ciaccia
M. Ciaccia: II me reste 18 minutes. Merci, M. le
Président.
Dans l'article 2, je voudrais porter à l'attention du ministre
les mots suivants: une municipalité, au jugement du gouvernement, sans
aucune restriction, directement ou indirectement, ce qui ouvre la porte
à toutes sortes d'interprétations, à toutes sortes de
sommes, et aussi aux mots "sous quelque forme que ce soit". Ce n'est pas
nécessaire que ce soit un bénéfice direct, ce n'est pas
nécessaire que ce soit de l'argent, ce n'est pas nécessaire que
ce soit une subvention. Cela peut être n'importe quelle
interprétation du ministre - on dit du gouvernement, mais la loi, c'est
le ministre qui va l'appliquer - et il n'y a aucune balise, il n'y a aucun
critère, il n'y a aucune façon de restreindre ou de donner une
interprétation pour qu'une municipalité ait quelque forme que ce
soit de protection.
Dans les amendements que vous avez apportés - je sais que ce
n'est pas le temps d'en discuter - juste l'amendement que vous avez
apporté à l'article 2, je ne vois pas du tout les restrictions
que cela peut faire. Qu'est-ce que cela va donner aux municipalités?
Quand vous dites que le gouvernement précise par règlement les
actes ou les catégories d'actes posés par une
municipalité, c'est tellement vaste, c'est tellement large. Vous ne les
restreignez pas. Les actes, ce peut être une catégorie d'actes qui
ne peuvent être interprétés directement par la
municipalité, ce peut être bien des choses, c'est tellement large
et vaste; je ne vois pas ce que cela va ajouter, ce que cela va restreindre ou
ce que cela va donner de plus aux municipalités.
Vous dites que vous allez préciser par règlement. Je crois
que l'amendement que vous avez proposé vous donne encore plus de droits
ou autant de droits que vous en aviez sans l'amendement; vous pouvez toujours
les préciser par règlement. Vous auriez pu dire qu'un tel acte va
résulter dans le fait que telle municipalité ou les
municipalités qui participent à tel acte seront assujetties, vont
perdre une subvention ou une taxe municipale...
M. Rivest: Le ministre est bien gréé avec un
article comme celui-là!
M. Ciaccia: Vous en parlerez plus tard, cher collègue.
Je ne vois pas que la tenue d'une commission parlementaire, au mois de
février, vienne changer quoi que ce soit. Vous aurez votre projet de loi
et le règlement que vous allez soumettre en commission parlementaire,
vous pouvez le changer tout de suite après. Je ne vois pas quelle sorte
de balises cela peut donner. Je ne vois pas vraiment.
Si vous aviez restreint les pouvoirs du gouvernement, si vous en aviez
enlevé de quelque façon que ce soit, si vous aviez dit qu'il faut
que ce soit une subvention directe que la municipalité reçoive,
là, au moins, on aurait vu une forme de restriction, quelque chose qui
peut être contrôlé par la municipalité. Je ne vois
pas quel contrôle une municipalité peut avoir d'après le
libellé de l'article 2 et quelle sorte de protection additionnelle vous
pourriez donner à la municipalité avec ce pouvoir de
réglementation.
L'amendement que le ministre suggère à l'article 2.1 ne
restreint pas du tout la portée de l'article 2 et le but de nos
interventions sur cet article est de vous démontrer que vous avez trop
de droits, que vous vous donnez trop de droits, que vous êtes trop
discrétionnaire, ce qui peut porter à des abus. Ce matin, on a
souligné l'esprit de la loi. C'est vrai qu'il est possible qu'il y ait
des abus de la part du gouvernement fédéral, on ne le nie pas,
mais est-ce que la façon de remédier à cet abus, c'est de
vous donner le genre de droits que vous prétendez avoir dans l'article
2? Nous disons que non, parce que cela peut se traduire par un abus encore
pire, en termes de principes, que ce que le gouvernement fait actuellement.
Vous dites que vous avez essayé de répondre aux
représentations qui vous ont été faites par le
président de l'UMRCQ. Quand il est venu en commission parlementaire, il
avait suggéré d'autres articles en plus de la question d'un droit
d'appel à la Cour supérieure. Par exemple, il a demandé
d'inclure dans le projet de loi, par un article additionnel, qu'une
municipalité peut, par résolution...
M. Rivest: Ha! Ha! Ha!
M. Ciaccia: M. le Président, voulez-vous rappeler à
l'ordre mon collègue de Jean-Talon?
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, M. le
député de Jean-Talon!
M. Ciaccia: Merci.
M. Rivest: Je pense aux bills 48 et 49. Ha! Ha! Ha!
M. Ciaccia: Une municipalité peut, par résolution,
demander au ministre des Affaires municipales d'être exemptée de
l'application de la loi 38 pour un projet ou un programme particulier
impliquant une participation financière fédérale sur son
territoire. Je ne vois aucunement, dans les articles que vous avez
proposés, un article de ce genre. Vous allez me dire que vous pourriez
toujours le faire, mais c'est encore à la discrétion du
gouvernement. Si vous aviez inclus un droit pour la municipalité de le
demander, une fois inclus dans le projet de loi, il va falloir que cela veuille
dire quelque chose. Cela voudra dire qu'en termes d'interprétation, vous
ne pourriez pas toujours dire non; éventuellement, une
municipalité va savoir, d'après le projet de loi, qu'elle peut,
par résolution, demander une telle exemption. C'est une protection que
je pourrais qualifier de morale plutôt que légale parce que,
légalement, on pourrait toujours la refuser, mais, en termes de
façons de faire des demandes au gouvernement, les municipalités
savent au moins que c'est possible pour elles d'être exemptées.
Cela ouvrirait la porte et ce serait toujours le pouvoir du gouvernement de
refuser ou non.
Un autre article qu'elles ont demandé était dans le sens
que le gouvernement pourra, par décret, exempter tout programme
fédéral d'aide financière de l'application de la
présente loi s'il le juge à propos. Encore une fois, cela donne
une protection ou un droit au gouvernement de refuser, mais, en l'incluant dans
le projet de loi, cela supposait que, dans certains cas, le gouvernement
pourrait donner ce genre de consentement ou d'exemption.
L'interprétation que j'ai donnée aux représentations qui
avaient été faites pour inclure ces articles dans le projet de
loi était de diminuer un peu la discrétion du ministre ou de
réduire son pouvoir discrétionnaire et l'esprit de la loi qui
semble dire: Cela va être complètement sous le contrôle du
gouvernement sous quelque forme que ce soit. Au moins, cela ouvrait la porte.
Non seulement vous n'ouvrez pas la porte de cette façon, mais
l'amendement que vous apportez à l'article 2.1 - je pense bien que cela
va même être difficile pour vous, M. le ministre, de le nier - ne
réduit aucunement le pouvoir discrétionnaire. Cela ne
protège pas les municipalités, dans le sens... Par exemple,
directement ou indirectement, s'il s'agit d'une subvention accordée
à une industrie dans la municipalité, subvention qui pourrait
être vue comme ayant bénéficié indirectement
à la municipalité, elle pourrait être assujettie à
votre pouvoir, en vertu de l'article 2.
M. le Président, l'esprit de l'article 2 et ses pouvoirs
discrétionnaires demeurent, la tutelle possible et les pressions
politiques demeurent. On ne parle pas seulement des municipalités qui
ont une force politique pour se protéger. On ne parle pas de
Montréal ou de Québec, mais on parle pour les
municipalités plus petites qui n'ont pas de pouvoir politique. Cela
pourrait créer des pressions politiques énormes pour elles. Elles
seraient complètement - si ce n'est pas sous une tutelle légale -
sous la tutelle morale du gouvernement. C'est à ce genre d'esprit qu'on
s'oppose. Cela aurait été très facile pour le ministre
d'amender l'article 2 pour définir vraiment ce que le gouvernement
voulait et quelle sorte de protection il pouvait donner aux
municipalités. C'est la façon de traiter les municipalités
au moyen de cet article - après tout, les municipalités ont
été élues au niveau local par les contribuables - et de
les placer dans cette situation où elles sont totalement à la
merci du gouvernement. (23 h 15)
Je pense que cela dessert ces municipalités et c'est une des
raisons, je présume, pour laquelle l'Union des municipalités du
Québec et même l'Union des MRC se sont opposées à
votre projet de loi. C'est ce genre de pouvoirs dont vous vous appropriez qui
sont trop ouverts à des abus et ce sont de mauvais
précédents à établir dans une loi,
précédents où vous dirigez totalement l'avenir et le
pouvoir d'agir des municipalités. Cela crée un pouvoir
complètement discrétionnaire et possiblement arbitraire de votre
part. On ne peut pas accorder notre consentement à ce genre de loi, que
ce soit pour une municipalité ou dans d'autres domaines. Je crois que
l'esprit de l'article 2 est totalement contre, je dirais, l'esprit ouvert et
démocratique qu'on devrait retrouver dans le projet de loi. C'est vrai.
C'est ce que j'ai remarqué dans plusieurs des projets de loi du
gouvernement. Vous essayez tellement d'avoir le contrôle de tout ce qui
peut se passer que vous dépassez vraiment les limites de ce qui est
vraiment permis. Vous voulez tellement éviter qu'on puisse, par quelque
moyen que ce soit, par exemple, trouver une façon d'échapper
à la loi que vous outrepassez complètement les pouvoirs que vous
devriez exercer. Nous sommes contre ce genre d'approche, en plus des
problèmes très pratiques qui pourraient être causés
aux municipalités.
M. le Président, je trouve que les amendements à l'article
2 que le ministre nous a suggérés ne vont aucunement dans la
direction que nous aurions espérée. Il s'agissait de donner un
genre de protection à ces municipalités, d'établir
certains critères et non pas de laisser l'article tellement ouvert que
cela donne vraiment un pouvoir excessif au gouvernement sur les
municipalités. Pour ces raisons, M. le Président, je ne peux pas
accepter que le gouvernement se donne ce genre de pouvoirs et je ne pourrai pas
voter pour cet article.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Léonard: M. le Président, je voudrais quand
même faire une remarque. Il reste que l'article 2 est balisé par
2.1 présentement. C'est de cela qu'il s'agit. "Le gouvernement
précise par règlement les actes ou les catégories d'actes
posés." Il le fait après une commission parlementaire,
après publication d'un règlement, donc, que les gens vont lire.
Ils vont pouvoir savoir ce dont il s'agit, les actes dont il s'agit. Il y aura
une commission parlementaire qui est publique. Les unions et les
municipalités vont pouvoir venir se faire entendre là-dessus.
J'ai confiance à l'avance au processus là-dessus. Les
municipalités viennent, comme on a vu l'UMRCQ venir cette semaine. Je
pense qu'elle nous a fait de bonnes suggestions. Les amendements qui sont
déposés tiennent compte de ce qu'elle nous a dit. Je pense que,
quand l'Opposition dit: Ce n'est pas valable, c'est du paternalisme de sa part.
Je pense que les municipalités sont assez grandes pour savoir ce
qu'elles ont à dire en commission parlementaire puisqu'elles vont
pouvoir venir le dire. C'est la remarque que je voulais faire après ce
que le député a dit.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Germain Leduc
M. Leduc (Saint-Laurent): M. le Président, il est
évident que je ne peux pas être d'accord avec l'article 2, car
c'est tout le principe de la loi, cet article. On avait pensé, à
un moment, nous de ce côté-ci, que certaines modifications
pourraient peut-être changer le principe de la loi. Pour cela, il aurait
fallu changer complètement la loi. En fait, on l'a dit dès le
départ, cette loi était inutile. C'est tellement vrai que les
modifications ne changent rien. Ce sont des ajouts. On ne modifie pas les
articles. On ne fait que préciser les articles. Toutes les modifications
- c'est assez révélateur - sont des ajouts. C'est 2.1, 3.1, 5.1.
Le principe reste intégral. On ne modifie d'aucune façon le
principe de la loi. Tous les articles sont maintenus.
Il est bien évident que, dans ces conditions, nous ne pouvons
accepter ni l'article, ni, bien sûr, les modifications, les amendements.
Je regardais l'article 2.1 où on dit qu'on va "préciser par
règlement les actes ou les catégories d'actes posés par
une municipalité ou par un tiers." C'est évident qu'il fallait
préciser cela. Je ne vois pas comment on aurait pu appliquer la loi sans
d'abord avoir absolument une réglementation, une législation
déléguée. Cela n'ajoute absolument rien. On ne fait que
préciser, qu'indiquer des choses qui, de toute façon, auraient
été insérées. On aurait dû certainement
adopter des règlements à cet effet. Les modifications n'ajoutent
absolument rien à la substance de la loi. C'est toujours la même
loi inutile.
Mon collègue de Hull en a fait état, je pense que ce
serait une bonne idée de suggérer au ministre des Affaires
municipales de rencontrer les ministres au niveau fédéral. On a
dit qu'il y avait eu plusieurs échanges entre le ministre des Affaires
municipales et M. John Roberts, ainsi que M. Johnston. Je pourrais lui
suggérer de rencontrer, comme l'a évoqué tantôt mon
collègue, ces ministres, de discuter avec eux, de suspendre la loi et
peut-être ensuite de ramener la loi. Au moins on pourrait dire: Ils ont
fait des efforts. Peut-être qu'il faudrait ramener la loi, mais, bien
sûr, la ramener dans un autre esprit. Je dirais que c'est une loi
oligarchique, c'est une loi qui a été concoctée par un
petit groupe de gens coupés de la réalité, coupés
du monde municipal.
Je ne crois pas - je regarde mon collègue de l'autre
côté de la table, l'ex-maire de Saint-Nazaire - qu'il est d'accord
avec cette loi. C'est très évident. L'article 2, je l'ai
mentionné, c'est un bijou de discrétion, de discrimination,
d'arbitraire. On retrouve dans six lignes "au jugement", "directement ou
indirectement", "le droit d'exiger". C'est un article qui est rempli de
discrétion, d'arbitraire, de discrimination. Ce qui m'a surpris,
dès le départ, dans cette loi 38, c'est qu'on s'attaque
directement aux municipalités. C'est un changement d'attitude de la part
de ce gouvernement; auparavant, le gouvernement s'attaquait au
fédéral. C'était peut-être compréhensible;
quand on veut séparer le Québec du Canada, on trouve des
arguments. On établit une stratégie, des moyens, des
prémisses pour arriver à justifier une séparation.
Cette fois-ci, c'est là que ça blesse, on s'attaque
directement à des créatures du gouvernement, les
municipalités. Je pense que pour la première fois, à ce
niveau, le gouvernement a erré. À un moment donné, on a
voulu avoir l'appui du Parti libéral. On a pensé, de l'autre
côté, que le Parti libéral pourrait appuyer le
gouvernement. Nous, on vous a dit - d'ailleurs, on vous l'a dit lors de
l'étude en deuxième lecture - que jamais on ne vous appuierait.
Ne cherchez pas, je vous le répète, des boucs émissaires
de ce côté-ci. Vous avez préparé votre loi. Vous
l'avez appuyée. Vous l'avez votée. Maintenant, vous allez vivre
avec. Je ne vous cache pas que cela va être assez difficile de vivre avec
cette loi. Ne cherchez pas de boucs émissaires de ce
côté-ci. Cela vous a surpris, vous aviez tellement voulu qu'on
appuie le fédéral.
Une voix: Le fédéral?
M. Leduc (Saint-Laurent): Oui, vous auriez tellement voulu qu'on
appuie le fédéral. Oui.
Une voix: C'est ce que vous faites.
M. Leduc (Saint-Laurent): Qu'on donne notre appui au
fédéral, qu'on dise qu'en fait le fédéral avait
raison de donner des subventions. On a dit non et on va continuer de dire
non.
Une voix: Qu'est-ce que vous allez faire?
M. Leduc (Saint-Laurent): Je vais en parler tantôt. On a
dit non et on va continuer de dire non. Quand le fédéral va
demeurer dans son champ de juridiction, nous allons appuyer le
fédéral. Mais quand il va se mêler des affaires du
Québec, particulièrement en ce qui concerne l'article 92,
paragraphe 8, jamais on ne cédera. D'ailleurs, ce n'est pas le Parti
libéral qui a cédé là-dessus. C'est le Parti
libéral qui a adopté la Loi sur le ministère des Affaires
intergouvernementales en 1974. C'est le Parti libéral qui a
stipulé l'article 20 de cette loi. Alors, je ne pense pas qu'on ait de
leçon à recevoir de l'autre côté.
Nous avons dit et nous le répétons que nous sommes
d'accord avec la juridiction provinciale en matière municipale. Nous ne
pouvons accepter le saupoudrage de subventions au niveau des
municipalités. C'est un procédé - nous l'avons dit, nous
le répétons - qui est inacceptable. Je pense qu'il faut qu'il y
ait de la coordination. Il faut que cela se fasse avec de la consultation.
M. Léonard: Vous me permettez une question?
M. Leduc (Saint-Laurent): Oui.
M. Léonard: Si Ottawa continuait, qu'est-ce que vous
feriez?
M. Leduc (Saint-Laurent): Je vais y arriver'. Cela fait partie,
justement, de la négociation.
Une voix: Vous ne perdez rien pour attendre.
M. Leduc (Saint-Laurent): Mais "batêche"...
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre!
M. Leduc (Saint-Laurent): ...essayez de vous entendre. Discutez,
rencontrez-vous.
M. Rivest: On l'a réglé en 1972.
M. Leduc (Saint-Laurent): Je l'ai mentionné, d'ailleurs,
ce matin: Duplessis, avec sa fameuse autonomie, savez-vous ce qu'il a
coûté à la province? Je l'ai mentionné pour la route
transcanadienne: Pas d'entente possible. Les universités: Pas d'entente
possible. Qu'est-ce qu'a fait le gouvernement Lesage quand il est arrivé
au pouvoir? Il a négocié.
M. Rivest: C'est cela.
M. Leduc (Saint-Laurent): Alors, je réponds à votre
question.
M. Rivest: C'est cela.
M. Leduc (Saint-Laurent): Mais vous n'êtes pas capables de
négocier et je comprends pourquoi.
Une voix: Ils ne veulent pas.
M. Leduc (Saint-Laurent): C'est très évident. Vous
voulez établir, vous voulez montrer que c'est impossible de fonctionner
à l'intérieur du Canada. À ce moment-là, ne me
posez pas la question, M. le ministre. Vous avez la réponse. C'est
très évident.
D'ailleurs, j'y arrrive. C'est sûr qu'il faudrait négocier.
Vous avez vu, il y a eu des efforts de faits, il y a eu des échanges de
lettres entre les premiers ministres: le premier ministre du Québec, le
premier ministre du Canada. Également, il y a eu des lettres qui ont
été échangées entre le ministre des Affaires
municipales et le ministre John Roberts, ainsi que le ministre Johnston. Je
pense que, tout de même, il y a eu du chemin de fait; on a reconnu un
droit de veto au Québec. Alors, servez-vous-en. Vous avez perdu l'autre,
peut-être que là vous pourriez en trouver un droit de veto.
M. Léonard: Perdu, perdu!
M. Leduc (Saint-Laurent): Alors, ce serait peut-être, je
pense, en tout cas, une occasion d'essayer. Vous n'avez pas essayé
jusqu'à présent. D'ailleurs, je voudrais savoir, M. le ministre -
c'est une question que je vous pose - combien de rencontres vous avez eues avec
ces ministres-là.
M. Léonard: Combien?
M. Leduc (Saint-Laurent): Combien de rencontres avez-vous eues
avec les ministres? Des rencontres, je ne parle pas de lettres.
M. Léonard: John Roberts, je l'ai rencontré le 4
octobre. Je lui ai écrit de nouveau le 28 octobre. Je lui ai
réécrit le 9 décembre. Là, on veut le rencontrer le
22 décembre.
M. Leduc (Saint-Laurent): Vous l'avez rencontré une
fois.
M. Léonard: Bien, les fonctionnaires se sont
rencontrés...
M. Leduc (Saint-Laurent): Oui, vous pensez que vous allez
régler un problème...
M. Léonard: ...plusieurs fois.
M. Leduc (Saint-Laurent): ...aussi majeur en le rencontrant une
fois.
M. Léonard: ...qu'il réponde.
M. Leduc (Saint-Laurent): Là, vous arrivez tout de suite
avec un projet de loi. La matraque immédiatement!
M. Léonard: Le projet de loi est arrivé avant cela.
Un instant, là!
M. Leduc (Saint-Laurent): Vous parlez de décret.
M. Léonard: Ils sont venus s'asseoir parce qu'il y avait
un projet de loi.
M. Leduc (Saint-Laurent): D'ailleurs, je dois dire que c'est la
méthode que vous avez utilisée jusqu'à présent.
Chaque année, on retrouve dans la législation des motions, des
lois à saveur anticanadienne, à saveur séparatiste. C'en
est vraiment une autre, mais là vous vous êtes trompés.
Vous avez attaqué les municipalités et vous vous êtes
aperçus que cela fonctionnait très mal. Là, vous essayez
de vous en sortir et vous voudriez peut-être qu'on vous aide à
vous en sortir. Je dis: Vous vous êtes mis les deux pieds
là-dedans et c'est à vous de vous en sortir. D'ailleurs, il y a
une seule façon de vous en sortir, c'est de retirer le projet de
loi.
Une voix: Oui.
M. Leduc (Saint-Laurent): Retirez le projet de loi...
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre!
M. Leduc (Saint-Laurent): ...et là vous allez vous en
sortir. On n'expliquera pas aux gens, à la population...
Une voix: On va être discret!
M. Leduc (Saint-Laurent): ...on ne dira rien. On va dire: Ils ont
compris! Ils se sont trompés, ils ont fini par comprendre et ils ont
accepté de retirer le projet de loi. Je pense que c'est la seule
façon.
Alors, manifestez donc une volonté de négocier. En ce qui
vous concerne, ce ne sera pas facile. D'ailleurs, vous avez dit: On est
d'accord pour vous donner plus de pouvoirs pour autant que vous nous aidiez
à faire l'indépendance. Je vous vois arriver à Ottawa avec
cette prémisse-là. Vous avez établi, au départ, que
votre option, c'était une option de séparation, une option
séparatiste. (23 h 30)
Vous avez dit aux municipalités: Aidez-nous à faire
l'indépendance et on va vous donner des pouvoirs de taxation.
Imaginez-vous, quand vous arrivez à Ottawa avec cela, c'est fort! C'est
évident qu'ils vont être empressés de s'asseoir et de
discuter avec un ministre qui veut se séparer, qui veut diviser le
Canada. Je les comprends, ce n'est peut-être pas facile. Votre travail
n'est pas facile, il est même impossible. Je vous le dis: Vous allez
avoir un travail énorme, une crédibilité à
établir face au fédéral. C'est une côte, à
mon sens, qui n'est pas facile à remonter. Dans ces conditions, je vous
dirais bonne chance.
Nous, nous disons que c'est possible d'arriver à des ententes.
L'article 2, c'est toute la loi. Nous, nous disons que c'est possible et que
cela a été fait, Lesage l'a fait.
Une voix: Ce n'était pas Trudeau qui était
là à ce moment.
M. Leduc (Saint-Laurent): C'était le même
fédéral. Vous cherchez encore des coupables, vous cherchez
toujours des coupables. Vous cherchez Trudeau comme coupable. Ne cherchez pas
les coupables; cherchez à vous entendre, c'est différent.
D'ailleurs, je l'ai dit, M. le ministre, il est encore temps non pas de sauver
la face, mais de sauver votre crédibilité face aux
municipalités. C'est peut-être le point le plus important, je
pense, de respecter ces entités, de respecter les gens qui oeuvrent au
niveau municipal, qui se dépensent, qui sont peut-être, dans
certains cas, rémunérés d'une façon très
modeste. Je pense que ces gens ont droit à beaucoup d'égards. Ils
ont droit à ce qu'on les respecte, à ce qu'on considère
qu'ils ont un rôle important à jouer au niveau municipal.
Bien sûr, je ne peux pas être d'accord avec l'article 2, pas
plus, d'ailleurs...
M. Léonard: II vous reste six minutes pour nous dire ce
que vous feriez si Ottawa continue.
M. Leduc (Saint-Laurent): Je vous le dis exactement, je vous l'ai
dit, M. le ministre. Allez négocier, allez vous entendre mais faites-le
de bonne foi.
M. Léonard: Mais s'il continue pareil.
M. Leduc (Saint-Laurent): Faites des efforts, faites un peu ce
que Lesage a fait. Faites comme lui. C'était impensable d'accepter des
subventions du fédéral pour les universités.
J'étais relativement jeune à ce moment, mais c'était
impensable. Imaginez-vous donc que Lesage l'a fait! La Transcanadienne, alors
que l'Ontario se développait, alors que nous, on attendait qu'ils
fassent la Transcanadienne pour peut-être obtenir notre part de
développement, ce qui nous revenait au Québec. Alors, M. Lesage a
prouvé que c'était possible de négocier. Faites la
même chose. Mais je vous le répète, je vous souhaite bonne
chance. Je ne pense pas que vous puissiez le faire. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Léonard: Une remarque là-dessus.
C'est parce qu'on dit négociez, discutez; c'est exactement ce
qu'on fait depuis longtemps.
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Léonard: Ce sont eux qui se sont retirés du
programme d'aide aux équipements communautaires le 12 novembre 1980. Ce
sont eux qui se sont retirés.
M. Leduc (Saint-Laurent): Combien de fois les avez-vous
rencontrés? Une fois.
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre!
M. Léonard: Ce n'est pas le Québec; tous les
ministres des Affaires municipales des autres provinces n'ont pas
été d'accord avec cela, ils l'ont dit au ministre. Ce n'est pas
parce qu'il y avait un gouvernement du Parti québécois ici, au
Québec, que cela s'est fait. M. Smishek de la Saskatchewan aussi, l'a
dit.
M. Leduc (Saint-Laurent): Est-ce qu'il va présenter un
projet de loi 38, le M. Smishek dont vous parlez?
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre! M. le
ministre a la parole, s'il vous plaît.
M. Léonard: Ce que je veux dire, c'est qu'eux-mêmes
ont recommencé à intervenir dans le paysage municipal au cours du
mois d'août 1982, précisément. Je suppose qu'ils se sont
fait une stratégie et qu'à partir de ce moment ils ont dit: On
intervient dans les municipalités malgré la constitution. Nous
avons immédiatement protesté. Et même à ce moment,
à la fin du mois d'août -d'ailleurs, j'ai eu l'occasion de lire un
extrait de la lettre de M. Francis Dufour à tous les membres de l'Union
des municipalités du Québec - il y a eu des choses
là-dessus. On a toujours dit et écrit au fédéral:
II faut négocier une entente, cela n'a pas de sens de continuer ainsi.
Il ne s'est rien fait. Ils n'ont pas bougé. Ils ont commencé
à bouger seulement après le dépôt de la loi 38 et
c'est là que M. Trudeau a répondu à M. Lévesque,
pas avant. Avant, ce n'était pas important, il n'y avait rien.
La question que je vous ai posée est réelle: Si,
malgré que vous vouliez leur parler, que vous leur dites des petits
boujours et qu'au fond ils continuent à mal faire quand même dans
le paysage, qu'est-ce que vous allez faire?
Une voix: Qu'est-ce qu'a fait Lesage?
M. Leduc (Saint-Laurent): J'ai une question, si vous le
permettez.
M. Léonard: En tout cas, je vous pose la question
là-dessus. Je pense que vous n'avez pas répondu. Ce que nous
avons fait jusqu'ici, après le dépôt du projet de loi 38,
j'ai rencontré M. John Roberts le 4 octobre et j'espère le
rencontrer le 22 décembre. Il y a eu des échanges de
correspondance. Il y a eu cinq rencontres de fonctionnaires au niveau des
sous-ministres, plus, évidemment, des échanges
téléphoniques sûrement très fréquents. Il
s'est fait des choses là-dessus. Il s'en est fait. Quand vous venez nous
dire négociez, nous négocions. Durant tout ce temps, ils
continuent. Regardez, ils continuent.
Une voix: C'est aujourd'hui, cela?
M. Léonard: C'est aujourd'hui. Il y s des choses qui vont
se passer. On ne laissera pas faire les choses comme cela.
M. Leduc (Saint-Laurent): On n'est pas d'accord avec cela, pas du
tout.
M. Léonard: Non, vous n'êtes pas d'accord, mais
qu'allez-vous faire?
M. Leduc (Saint-Laurent): Mais imaginez-vous donc qu'avec
Duplessis cela bloquait bien dur.
Le Président (M. Desbiens): Non, non! À l'ordre,
s'il vous plaît!
M. Leduc (Saint-Laurent): Quand Duplessis est parti, qu'est-il
arrivé? Alors, il va falloir que vous partiez!
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre!
M. Leduc (Saint-Laurent): II va falloir que vous partiez.
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Leduc (Saint-Laurent): Le Parti libéral va mettre de
l'ordre. Mais je voudrais peut-être vous poser une question, si vous le
permettez.
M. Léonard: Oui, oui.
M. Leduc (Saint-Laurent): Je voudrais que vous me disiez si vous
pensez que le fait d'avoir une option séparatiste,
indépendantiste, cela vous nuit dans vos négociations avec le
gouvernement fédéral. Qu'en pensez-vous? Pensez-vous que cela n'a
aucun effet?
M. Léonard: Je pense que ce n'est pas notre option qui
intervient là-dedans. C'est l'attitude des fédéraux.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Viger.
M. Léonard: J'ai négocié des ententes avec
M. Marcel Lessard. J'ai eu l'occasion de le dire très souvent. Je ne
veux pas revenir là-dessus. C'est connu de tout le monde.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Viger, vous avez la parole.
M. Maciocia: M. le Président, je voudrais bien prendre la
parole, si...
Le Président (M. Desbiens): Oui, si on veut bien vous
écouter.
M. Maciocia: C'est cela.
M. Rivest: Vas-y, Cosmo! Les Italiens, c'est votre semaine.
Allez-y, mon ami!
Des voix: Ah! Ah!
M. Maciocia: Je voudrais intervenir... M. Rivest:
Avez-vous votre passeport? M. Maciocia: Oui, je l'ai.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Viger, sur l'article 2 du projet de loi, s'il vous plaît.
M. Rivest: Parlez-nous. On ne répétera pas à
tout le monde ce que vous nous avez dit.
M. Cosmo Maciocia
M. Maciocia: Oui, M. le Président. Je veux parler sur
l'article 2, parce que je crois que c'est le coeur du projet de loi 38. Le
ministre, après une absence hier de 35 minutes - apparemment, il a eu un
caucus avec ses députés membres de la commission pour parler,
soi-disant, des amendements à apporter, mais qu'il n'a jamais
apportés hier - et après une absence aujourd'hui d'une heure et
demie, de 15 heures à 16 h 30, est venu nous dire qu'il avait aussi des
amendements et qu'on les recevrait probablement dans la soirée, à
20 heures. C'est vrai, on a reçu les amendements vers 18 h 30. On a
dû attendre un peu pour les avoir, parce qu'ils n'étaient pas
imprimés. À ma grande surprise, au moment où nous avons
reçu les amendements, nous avons constaté que les premiers
amendements étaient sur l'article 2.
M. Léonard: 2.1.
M. Maciocia: 2.1. C'est juste après l'article 2. Et c'est
quoi, l'amendement que le ministre des Affaires municipales nous a
proposé? C'est: "Le gouvernement précise par règlement les
actes ou les catégories d'actes posés par une municipalité
ou par un tiers qui placent une municipalité dans la situation
visée à l'article 2." M. le Président, si c'est une
amélioration à l'article 2, je ne comprends plus rien
là-dedans, absolument rien. Qui fait les règlements? Je crois que
c'est le gouvernement. Les actes et les catégories d'actes, cela change
quoi? Avez-vous mis des balises autour de "directement ou indirectement, sous
quelque forme que ce soit"? Absolument pas. Pis encore, vous dites "par un
tiers", mais "un tiers", c'est qui? Un tiers, c'est n'importe qui,
d'après moi. Cela pourrait être un organisme. Cela pourrait
être une association de criminels. Cela pourrait être un club de
l'âge d'or. Cela pourrait être je ne sais trop quoi. Cela peut
être tout le monde, un tiers.
À la fin, il nous arrive, toujours dans le même amendement,
avec la phrase suivante: "Le règlement entre en vigueur avec ou sans
modification, le jour de sa publication à la Gazette officielle du
Québec ou à la date ultérieure qui y est fixée." Le
ministre nous a dit qu'il y aura une commission parlementaire en février
avec les intervenants, les associations qui représentent les
municipalités. C'est clair que le gouvernement va faire des
règlements et qu'il va probablement les proposer à ces
associations. Si ces associations ne sont pas d'accord ou si elles ont des
revendications à faire, je ne vois pas dans l'article ou dans le
règlement que le gouvernement va les prendre en considération.
C'est toujours "avec ou sans modification". Cela ne change rien à
l'arbitraire du projet de loi.
M. Rivest: Rien.
M. Maciocia: Absolument rien. Je ne
suis pas un juriste. Je crois, quand même, que les
municipalités ne sont pas assez - je devrai employer le mot
"dépourvu" dépourvues pour tomber dans le piège du
ministre des Affaires municipales. En vérité, avec les
amendements qu'il nous a amenés, il nous fait rire complètement.
Non seulement il ne met pas de balises autour des articles, et de l'article 2
en particulier, car c'est le point vital du projet de loi, mais je dirais
plutôt qu'il se donne plus de pouvoirs discrétionnaires avec le
règlement. M. le Président, c'est au jugement du
gouvernement.
Je disais hier dans mon intervention qu'on voulait savoir ce
qu'était une municipalité. Le ministre ne nous a jamais
répondu à cela. Il nous a dit que c'était dans la Loi sur
les cités et villes, que c'était le Code municipal et je ne sais
trop quoi. Il ajoute même "par un tiers". Hier, je lui soumettais un
simple cas qui peut arriver n'importe quand: un club de loisir ou un club de
l'âge d'or qui fait une demande au gouvernement fédéral,
comme ils en font au ministre ou à tous les députés
provinciaux, pour obtenir une subvention. Sûrement que tout le monde lui
donne une subvention à ce moment-là, que ce soit 500 $, 1000 $ ou
2000 $. On sait que ce club de l'âge d'or occupe un local de la
municipalité. En occupant ce local, automatiquement la subvention qui
est octroyée par un organisme, par un député, par un
ministre ou par le gouvernement fédéral tombe sous la loi 38.
Cela veut dire que la municipalité serait pénalisée parce
que le club de l'âge d'or de cette municipalité a fait une demande
de subvention de 1000 $ ou de 2000 $. Il ne peut pas bénéficier
de ce montant parce qu'il occupe un local de la municipalité. C'est
ridicule. C'est complètement stupide.
M. Rivest: Le député me permet-il une question?
M. Maciocia: Oui, M. le Président.
M. Rivest: Selon l'analyse du projet de loi que vous venez
d'illustrer avec l'exemple que vous avez donné, est-ce que ce projet de
loi et les amendements qui nous sont proposés vous semblent aller dans
le sens des recommandations du comité Vaugeois-French pour
précisément limiter l'abus du pouvoir de réglementation
unilatéral par l'exécutif?
M. Maciocia: Je crois que la réponse, même le
député de Trois-Rivières pourrait la donner. C'est
complètement à l'encontre de la réforme parlementaire.
M. Rivest: Puis, il ne dit rien.
M. Maciocia: Cela me surprend qu'il ne soit pas membre de cette
commission. On peut vous donner la parole, M. le député, parce
qu'on accepte tout le monde. On a pris une entente au début. Cela me
surprend beaucoup. Est-ce qu'il y a des raisons pour lesquelles le
député de Trois-Rivières n'est pas membre de cette
commission?
M. Rivest: Ah, oui!
M. Maciocia: C'est en raison du projet de loi et de l'article 2
qui va exactement à l'encontre de la réforme que le
député de Trois-Rivières voulait au Parlement.
M. Rivest: C'est cela.
M. Maciocia: Deuxièmement, tout le monde sait qu'il a des
prétentions et qu'éventuellement il voudrait encore se
présenter comme maire de Trois-Rivières.
M. Rivest: II est doublement concerné.
M. Maciocia: II ne voudrait jamais tomber sous la Loi 38.
M. Rivest: II va aller au fédéral et il va donner
des subventions. (23 h 45)
M. Maciocia: Là, je crois, si on retourne vraiment
à ce projet de loi et à l'article 2, qu'on est
complètement dans une situation où le gouvernement est en dehors
de la réalité, est complètement déboussolé,
complètement écarté de la réalité
quotidienne, de la réalité qu'on vit tous les jours. Comment
peut-on se permettre de faire un article qui dit: "Une municipalité qui,
au jugement du gouvernement, a bénéficié autrement que
selon l'article 1 d'une participation du gouvernement du Canada ou de l'un de
ses ministres ou organismes, directement ou indirectement et sous quelque forme
que ce soit, perd ainsi, conformément à l'article 4, le droit
d'exiger du gouvernement du Québec ou de l'un de ses ministres ou
organismes: 1° une taxe municipale ou une compensation en tenant lieu, 2
une subvention, 3 une autre somme constituant un élément de
participation gouvernementale à son financement et 4 la partie de sa
quote-part des revenus provenant de l'application de l'article 221 de la Loi
sur la fiscalité municipale, qui est attribuable aux taxes payées
en vertu de cet article par une société mandataire de la couronne
du chef du Québec"? Il faut vraiment être complètement en
dehors de la réalité, comme je disais tantôt, pour arriver
à mettre un article aussi arbitraire à l'intérieur d'un
projet de loi. "Directement ou indirectement et sous quelque forme que ce
soit", M. le Président, cela veut dire que rien, absolument rien ne peut
empêcher le ministre des Affaires municipales de dire
qu'un verre qui a été acheté par un organisme
fédéral et qui est donné à un organisme municipal,
que ce soit, je le répète, pour des loisirs, que ce soit pour un
club artistique, que ce soit pour n'importe quoi, un verre acheté par un
organisme fédéral et donné à un organisme municipal
automatiquement tombe sous cette loi. Est-ce qu'on est réaliste? Est-ce
qu'on a vraiment la volonté d'être des gens responsables?
C'est sûr, on l'a dit, au Parti libéral on est contre, des
abus qui peuvent être commis par le gouvernement fédéral ou
par les députés du gouvernement canadien. C'est sûr. Mais
de là à arriver à être aussi arbitraire et aussi
totalitaire que le projet de loi 38 le propose, actuellement, il y a une marge,
M. le Président. Le ministre nous a dit tantôt qu'il y a eu, vers
15 heures, un mini-Conseil des ministres pour prendre des décisions sur
les amendements à apporter.
M. Rivest: Pas vrai?
M. Maciocia: Je me pose la question si vraiment il y a eu une
volonté de proposer des amendements, parce qu'il n'y a aucune
volonté manifeste dans les règlements, dans les amendements que
nous propose actuellement le gouvernement.
Je pourrais parler pendant probablement une heure, une demi-heure, mais
j'ai de la répugnance à continuer de parler d'un article que tout
le monde rejette, que ce soit les municipalités, que ce soit les
associations qui représentent les municipalités, que ce soit des
éditorialistes, que ce soit les journaux, que ce soit l'homme de la rue.
Tout le monde est contre ce projet de loi. Jusqu'à maintenant, le
ministre des Affaires municipales n'a pas été capable de nous
dire et de nous prouver qui, au Québec, était en faveur de ce
projet de loi. On lui a posé cette question plusieurs fois: Qui est en
faveur de ce projet de loi? Personne. Il nous dit seulement: Oui, j'ai l'appui
de l'Union des municipalités du Québec. C'est complètement
faux. C'est clair, l'Union des municipalités du Québec a
envoyé un mémoire pour dire qu'elle n'est pas d'accord avec ce
projet de loi. Elle a même été convoquée à
venir mardi dernier pour nous dire pourquoi elle était contre ce projet
de loi. Elle a refusé de venir parce qu'on l'invitait après que
le projet eut été adopté en deuxième lecture.
M. le Président, étant un homme responsable, un homme
consciencieux, je ne pourrai jamais me permettre de voter en faveur d'un projet
de loi aussi arbitraire et immoral. Merci.
M. Rivest: Vous avez raison, c'est tout en votre honneur.
Le Président (M. Desbiens): Est-ce que l'article 2 est
adopté? Mme la députée de Chomedey.
Mme Lise Bacon
Mme Bacon: M. le Président, je n'ai pas l'intention de
faire de grands discours.
Une voix: On n'est pas sexiste, vous voyez, on la laisse
parler.
Mme Bacon: II y a suffisamment de mes collègues qui ont
démontré ce soir que le projet de loi que nous avons devant nous
est vraiment une mesure punitive, un projet de loi qui vise à
pénaliser les municipalités et qui est, à mes yeux,
inacceptable.
Je pense que le ministre qui nous parle de négociation ou
d'intervention aurait avantage, selon la tradition, à vraiment vivre ce
qu'est une négociation. On sait que le Parti libéral respecte le
principe même de la juridiction des provinces en matière
municipale et là n'est pas, je pense, le discours que nous voulons
entreprendre au cours de cette étude du projet de loi. On n'a pas
à revenir là-dessus. Dans cette tradition de la
négociation, alors que nous avions les responsabilités
gouvernementales, nous avons démontré le respect que nous avions
à l'égard des négociations
fédérales-provinciales.
Où j'ai des inquiétudes - et l'article 2 est, à mes
yeux, criant d'improvisation -c'est sur cette autorité que veut se
donner le ministre. Je pense que tout ce projet de loi 38, non seulement
l'article 2, est démesuré. Ce sont les maires des
municipalités qui, en étudiant le projet de loi 38, ont dit que
c'était pour eux une loi totalitaire, une loi immorale et une loi qui
était aussi démesurée.
On parle de rencontres en haut lieu et le ministre nous dit qu'il y en a
une de planifiée, mais je ne pense pas qu'avec ce projet de loi 38, avec
cette autorité qu'il se garde, cette discrétion qu'il se garde
comme ministre responsable, il puisse arriver, d'une façon sereine,
à négocier avec le gouvernement fédéral.
Quand on considère cet article 2 et qu'on nous indique, à
ce moment, que c'est selon le jugement du gouvernement, selon aussi cette
autorité du ministre en place, je pense que cela augure très mal
quant à une possibilité de négociation. Et même avec
les amendements qui nous sont déposés ce soir, cela
m'apparaît encore très arbitraire. Je ne pense pas, en tout cas,
que cela prépare un terrain d'entente, un terrain qui soit favorable
à des négociations sereines. J'irais jusqu'à dire que ce
projet de loi, à mes yeux, est inutile si l'on suit, encore une fois,
cette tradition de négocier qui a été celle des
gouvernements qui nous ont précédés. Je pense que le
ministre devrait tenter au
moins de continuer cette tradition et de négocier de bonne foi
avec les autorités fédérales afin de faire respecter la
juridiction des provinces en matière municipale.
C'est ce trop grand pouvoir décisionnel du ministre qui fait en
sorte que les municipalités sont inquiètes, à la suite du
dépôt du projet de loi en juin dernier. Le ministre devrait
être davantage à l'écoute des maires, des responsables des
municipalités, et retirer son projet de loi tout simplement. Pour avoir
rencontré des conseillers municipaux, des maires, des gens qui sont
responsables de municipalités, dernièrement, on a l'impression
que le ministre ne les a même pas rencontrés ou ne les a pas
écoutés, ne les a pas entendus. S'il était davantage
à l'écoute de la population -c'est le regret que je dois
formuler, j'ai déjà eu l'occasion, d'ailleurs, de le dire - il
pourrait voir de quelle façon ce gouvernement est coupé de la
population. Je peux le dire avec beaucoup de modestie, parce que j'ai aussi
été membre d'un gouvernement, on paie le prix, M. le ministre,
d'être coupé de la population. Cette autorité qui vous est
donnée, c'est pour essayer d'apporter des lois qui répondent
à des aspirations ou à des besoins de la population et non pas
pour se faire plaisir, pour pénaliser ou pour improviser une certaine
autorité. Tout cela fait en sorte qu'on se demande bien souvent si le
ministre a vraiment écouté le milieu, s'il s'est vraiment assis
avec le milieu pour traduire dans des projets de loi les besoins de ce
milieu.
Je ne sache pas que ce projet de loi soit nécessaire pour
négocier. On s'imagine qu'on va faire peur à un autre palier de
gouvernement. Ce n'est pas la meilleure façon, M. le Président,
de négocier. Des mesures de persuasion ou de négociation sont
beaucoup plus valables. De toute façon, il y a déjà des
lois existantes, on n'a qu'à penser à l'article 20 de la loi des
affaires intergouvernementales, par exemple, le respect des juridictions, qui
protège d'une façon suffisante la juridiction municipale. Je ne
sache pas qu'on ait besoin d'une loi comme le projet de loi 38 pour continuer
à tenter de mettre le bâillon aux municipalités ou,
ensuite, à tenter d'apporter une autorité qui, à mes yeux,
encore une fois, est démesurée.
Le ministre aurait tout avantage à écouter davantage aussi
la population, à écouter les maires que nous avons la
possibilité de rencontrer. Cela amuse le leader de la Chambre, M. le
Président, mais lui aussi a affaire à certains maires qui sont
loin d'accepter le projet de loi 38 et lui aussi devra payer le prix un
jour...
M. Rivest: Oui, cela ne sera pas long.
Mme Bacon: ...de cette grande démonstration
d'autoritarisme de la part de ce gouvernement.
Le Président (M. Desbiens): Mme la députée
de Chomedey, je dois vous interrompre. Il est 24 heures et la commission
ajourne ses travaux sine die.
(Fin de la séance à minuit)