(Neuf heures quarante minutes)
Le
Vice-Président (M. Benjamin) : Alors, bonjour à toutes, bonjour à tous. Nous
allons débuter nos travaux. Je vous invite à prendre place, donc, afin
de pouvoir commencer.
Affaires
courantes
Déclarations
de députés
Nous sommes
rendus à la rubrique Déclarations des députés, et, comme première déclaration,
je cède maintenant la parole à M. le député de Blainville.
Souligner le 100e anniversaire de Mme Albina
Lemay
M.
Mario Laframboise
M.
Laframboise : Merci, M. le Président. C'est le 25 février
dernier, à la résidence Le Nobilis, de Blainville, que l'on soulignait
le centenaire de Mme Albina Lemay en présence de membres de sa famille et
d'amis.
Née à
Montréal en 1924, marié à Raymond Mérineau pendant 70 ans, mère de deux
filles, elle est la troisième enfant d'une
famille de sept frères et soeurs. Mme Lemay a été une des premières
inhalothérapeutes du Québec, métier qu'elle a exercé pendant
17 ans.
On a peine à
imaginer toutes les transformations dont Mme Lemay a été témoin durant sa
vie. Pensons à la crise de 1929, les premières apparitions, les photos,
téléphones, radios, télévisions, ainsi que la Révolution tranquille.
Femme encore
très active et en santé, elle s'est intéressée au bridge en 1969, à l'âge de
45 ans, et continue d'y jouer depuis
tout ce temps. Elle a fréquenté plusieurs clubs de bridge, entre autres celui
de Radio-Canada, Hydro-Québec, Dupuis Frères, et a participé à une
partie qui a eu lieu dans le mât du Stade olympique lors de son inauguration.
Permettez-moi
de vous adresser, Mme Albina Lemay, mes plus sincères félicitations pour
votre 100e anniversaire et vous souhaiter encore de très nombreux
printemps en santé. Merci.
Le
Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, M. le député de Blainville. Et je
reconnais, la prochaine déclaration, Mme la députée de Rivière-du-Loup—Témiscouata.
Souligner le travail de
l'organisme Ligne de vie du Témiscouata
Mme Amélie
Dionne
Mme
Dionne : Merci, M. le Président. Des organismes de ma
circonscription travaillent chaque jour à offrir la meilleure qualité de
vie possible aux personnes atteintes d'une maladie grave et incurable et leurs
proches. C'est le cas de l'organisme Ligne de vie du Témiscouata, qui peut
compter annuellement sur sa source de financement majeure, le Quillethon
Lorraine-Ouellet-Castonguay.
La
30e édition de l'événement, qui se tenait en février dernier, a permis de
dépasser le million de dollars en dons à
Ligne de vie. M. le Président, je tiens à souligner devant cette Chambre toute
la solidarité des gens du Témiscouata et à saluer également l'engagement de sa présidente, Gerry-Ann Thériault, des
organisateurs, Michel Ruest et sa famille, ainsi que les nombreux
bénévoles impliqués.
Depuis
30 ans, plusieurs porte-parole, participants, partenaires et bénévoles se
sont succédé, et je tiens également à
les remercier. Vous faites une réelle différence dans la vie des personnes
atteintes d'une maladie incurable et leurs familles. Au nom de tous les
citoyens du Témiscouata, merci du fond du coeur. Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, Mme la députée. Et je cède maintenant la
parole à M. le député de Jean-Lesage.
Demander la rémunération des stages dans le secteur public
M.
Sol Zanetti
M.
Zanetti : Merci, M. le Président. Il y a un an, on votait
ici une motion unanime pour dénoncer le fait que les stages dans le secteur public sont non rémunérés.
Depuis, rien n'a été fait, pas une cent dans le dernier budget, un an
d'inaction de la part du gouvernement.
Les stages
non rémunérés, là, ça n'a pas de bon sens, ça crée une injustice
intergénérationnelle importante. Et là il
y a, cette semaine, des étudiantes et des étudiants de partout à travers le
Québec qui sont en grève pour souligner cette injustice-là, et je tiens
à souligner leur travail et leur mobilisation remarquables. Je salue
aujourd'hui la présence des représentantes et représentants de différentes associations étudiantes
de Québec. J'irai manifester avec elles et eux, tout à l'heure, afin de
faire savoir notre mécontentement et j'espère que le gouvernement va être à
l'écoute.
Merci de vous
mobiliser et merci pour le travail remarquable que vous faites. La lutte n'est
pas terminée, et vous pouvez compter sur Québec solidaire pour être un
allié à vos côtés dans cette lutte. Merci.
Le
Vice-Président (M. Benjamin) : Merci. Donc, je dois rappeler qu'il n'y a pas de
bravo dans l'assistance, s'il vous plaît, donc, au moment des
interventions des députés de l'Assemblée nationale ici, en cette enceinte.
Merci.
Je reconnais maintenant Mme la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré.
Rendre hommage à Mme Julie
Gauthier
Mme Kariane
Bourassa
Mme
Bourassa : Merci beaucoup, M. le Président. Je prends la
parole aujourd'hui pour saluer une fierté de Saint-Irénée, Mme Julie
Gauthier.
Mme Gauthier vient tout juste d'être
honorée comme Maître de traditions vivantes, un honneur décerné par le Conseil québécois du patrimoine vivant. Et
pourquoi cet honneur, me demandez-vous? Parce qu'elle maîtrise un art peu
commun, celui de la pêche à la fascine. Et
qu'est-ce que c'est? C'est une technique de pêche traditionnelle, unique,
écologique. En fait, les pêcheurs
créent, avec des branches et des végétaux, des habitats temporaires pour que
les poissons s'y logent, et, par la suite, on va retirer cet amas de branches,
et c'est ainsi que se crée la pêche de la fascine. C'est une méthode douce,
respectueuse de l'environnement et qui témoigne d'une grande connaissance du
comportement des poissons.
Merci, Julie,
pour votre talent mais aussi pour votre passion, que vous transmettez aux
prochaines générations pour garder cet héritage bien vivant. Merci.
Le
Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, Mme la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré. Et au tour, maintenant, de M. le député de l'Acadie.
Rendre hommage à M. Philippe
Rachiele
M. André
Albert Morin
M.
Morin : Merci, M. le Président. Alors, je tiens à
souligner la retraite d'un grand citoyen de la circonscription de
l'Acadie, M. Philippe Rachiele.
C'est en 2012
que M. Rachiele a cofondé le Journal des voisins. M. Rachiele
était déjà un citoyen engagé dans sa communauté.
Cependant, il trouvait que les médias locaux de l'époque ne couvraient pas
suffisamment l'actualité régionale. Il fonde le Journal des voisins
avec son épouse, Mme Christiane Dupont, qui était journaliste de carrière.
Le premier
numéro du journal a été tiré à 3 000 exemplaires. Malgré ses modestes
débuts, le journal a suscité un vif
intérêt auprès de la communauté, autant des citoyens que celle du monde des
affaires. Aujourd'hui, le Journal des voisins tire à 48 000 exemplaires
et est devenu un incontournable dans le comté de l'Acadie, sans oublier que le
journal a maintes fois été primé au gala de l'Association des médias
écrits communautaires du Québec.
M. Rachiele, au nom des citoyens de
l'Acadie, je vous remercie et je vous souhaite une excellente retraite.
Le
Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, M. le député de l'Acadie. Et je reconnais
maintenant Mme la députée de Saint-François.
Souligner l'engagement bénévole de la famille Thivierge
Mme
Geneviève Hébert
Mme Hébert : M. le Président, je
tiens à saluer M. Thivierge et sa conjointe qui sont dans nos tribunes.
Alain
Thivierge et sa famille ont été honorés récemment par l'organisation de la
Classique Pif, une compétition de balle
lente dont il est vice-président depuis 2001. Le plaisir d'aider motive ce
grand bénévole dont l'implication a commencé, il y a 35 ans, dans plusieurs groupements sportifs. Ses débuts
comme entraîneur sont reliés au hockey et au baseball que pratiquaient
son fils Patrick et sa fille Isabelle à la fin des années 80.
Sa passion
s'est transformée en affaire de famille. Depuis 30 ans, sa conjointe Lise,
leurs enfants et, maintenant, leurs petits-enfants se joignent à lui. En 1994,
M. Thivierge a été l'un des fondateurs du tournoi de baseball pee-wee
de Fleurimont, qu'il a piloté durant
15 ans. Il a aussi présidé Baseball Fleurimont pendant sept ans. M. le
Président, chaque année, les
bénévoles de la Classique Pif se rapportent à lui, parce qu'ils forment une
communauté. Le moins qu'on puisse dire, pour la famille Thivierge, le
bénévolat est un mode de vie. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Et
bienvenue parmi nous. Bienvenue parmi nous, M. Thivierge, ainsi que votre
épouse.
Je reconnais
maintenant M. le député... ou plutôt... oui, c'est bel et bien M. le député de Saint-Jean...
M. le député de Joliette, pardon, M. le député de Joliette.
Souligner l'inauguration de la Maison de la musique
René-Charette
M. François St-Louis
M. St-Louis :
Merci, M. le Président. Se
rassembler autour de la musique classique et de la culture, telle est la
devise de la nouvelle Maison de la musique René-Charette.
Créée
et réalisée par les dirigeants du festival de Lanaudière, la Maison de la
musique, inaugurée le 12 décembre dernier,
se veut un endroit de prédilection pour l'enrichissement culturel, individuel
et collectif. Des espaces vastes et lumineux, une insonorisation impressionnante, un emplacement au coeur du
centre-ville de Joliette confirment en tous points le rôle de carrefour
musical exceptionnel que joue le festival de Lanaudière ici, au Québec, et de
par le monde.
Cette
maison, qui porte fièrement le nom de l'un des fondateurs, vient souligner le
travail et l'engagement de ce fier
mélomane. Administrateur du festival pendant 43 ans, ce visionnaire aura
contribué de façon... de grande et de belle façon, pardon, à la
diffusion de la culture.
Déjà
consacrée quartier général de la musique dans Lanaudière, la Maison de la
musique René-Charette deviendra, j'en suis certain, un incontournable,
un haut lieu de la culture lanaudoise et québécoise. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci,
M. le député de Joliette. Au tour, maintenant, de M. le député de Saint-Jean.
Souligner
le travail du comité vert du bloc opératoire
de l'Hôpital du Haut-Richelieu
M. Louis Lemieux
M. Lemieux : M. le Président, vous le saviez déjà, je le
soupçonne, mais je vous confirme haut et fort, aujourd'hui, que mon
autre tâche connexe préférée, dans le travail de député, c'est le privilège de
pouvoir saluer et féliciter mes concitoyens en déclaration de député.
Aujourd'hui,
c'est le comité vert du bloc opératoire à l'Hôpital du Haut-Richelieu et celle
qui a mené le projet, la Dre Geneviève Lalumière, que je salue et
remercie d'avoir persévéré pour changer les choses et les vieilles habitudes en convainquant le CISSS de la Montérégie-Centre,
avec l'appui de la Fondation Santé Haut-Richelieu—Rouville et leur partenaire, Desjardins, d'adopter un nouveau système innovant et
écologique pour le bien-être et la sécurité des patients en salle d'opération. En
quelques mots, c'est un système réutilisable de réchauffement des patients.
C'est tout simple et moins cher, avec
moins d'empreinte écologique, tout en étant plus confortable pour les patients.
Alors, adieu les jaquettes jetables
en salle d'op, comme ils disent, et bienvenue les couvertures et les matelas
lavables. Ça mérite un gros coup de chapeau vert. Merci,
Dre Lalumière. Et merci, M. le Président.
• (9 h 50) •
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci,
M. le député de Saint-Jean. La parole revient maintenant à Mme la
députée de Bellechasse.
Rendre
hommage à Mme Simone Laflamme
Mme Stéphanie Lachance
Mme
Lachance : Merci, M. le Président. La semaine dernière, une grande
dame, Mme Simone Laflamme, de Buckland,
nous a malheureusement quittés. Je salue ses proches qui nous regardent en ce
moment et ceux qui sont avec nous dans les tribunes.
À
Buckland, tout le monde connaissait Mme Laflamme. Elle s'impliquait
partout. Présidente du Club FADOQ pendant 25 ans, elle a organisé de nombreuses activités pour nos aînés.
C'est sans compter les nombreux organismes locaux qui ont toujours pu compter sur son aide. Elle a cofondé
le Centre de l'amitié, un groupe qui offrait bénévolement la préparation
de repas aux personnes endeuillées.
M.
le Président, c'est toute une communauté qui est endeuillée aujourd'hui. À tous
les proches de Mme Simone Laflamme, j'aimerais offrir mes plus sincères condoléances. C'est une femme
d'exception, qui nous manque déjà, un legs d'altruisme qui nous
encourage à être meilleurs. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci
beaucoup, Mme la députée de Bellechasse. Et la parole revient maintenant
à M. le député de Portneuf.
Souligner
le Mois du patrimoine irlandais
M. Vincent Caron
M. Caron : M. le Président, le mois de mars, c'est le Mois du
patrimoine irlandais. L'Irlande et les Irlandais ont laissé au Québec une empreinte forte qui perdure
jusqu'à aujourd'hui. L'héritage irlandais est bien vivant ici comme dans
ma circonscription de Portneuf, où de nombreuses familles irlandaises se sont
établies dès le XIXe siècle.
Récemment,
nous avons participé aux traditionnelles festivités de la Saint-Patrick, avec
toujours des défilés impressionnants et
remplis de joie, et nous avons été honorés par la visite du vice-premier
ministre et ministre des Affaires étrangères de l'Irlande, venu annoncer
l'arrivée de deux nouvelles entreprises irlandaises en sol québécois.
De
plus, le gouvernement de l'Irlande a nommé un nouveau consul honoraire pour le
Québec, Me Bryan O'Gallagher, présent parmi nous ce matin avec son épouse, Mme Marceau. Je les
salue chaleureusement. Le consul honoraire sera basé dans la capitale
nationale, une première.
Alors,
ensemble, continuons d'écrire, en bleu et en vert, l'histoire des relations
irlando-québécoises au profit des citoyennes et citoyens de nos deux
nations. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci,
M. le député de Portneuf. Et la parole revient maintenant à Mme la
députée de Bertrand.
Souligner
le 150e anniversaire de la municipalité de Saint-Donat
Mme France-Élaine Duranceau
Mme
Duranceau : Merci, M. le Président. Le 7 mai prochain marquera un
jalon important de l'histoire de la municipalité
de Saint-Donat. En effet, ça fait plus, maintenant, de 150 ans que les
premiers Donatiens se sont établis à la pointe nord de ce qui est
aujourd'hui la circonscription de Bertrand.
Au
fil du temps, le village s'est développé, notamment grâce au sens
entrepreneurial des gens de la place. J'en veux pour preuve le
centenaire de la Boulangerie Saint-Donat, dont les produits de pâtisserie sont
reconnus bien au-delà des frontières
lanaudoises. Je souligne aussi le 60e anniversaire de Ski Garceau, qui
offre parmi les plus belles vues du Québec sur les montagnes et les lacs
de notre territoire.
Dans
le cadre de ces célébrations, avec une programmation alliant culture, histoire,
loisirs, plein air, agrotourisme et
activités familiales, qu'on soit citoyen de la place, villégiateur ou visiteur,
tout le monde est convié à Saint-Donat, cette année, pour célébrer au
coeur d'un véritable parc naturel habité. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci,
Mme la députée de Bertrand. Et, pour la prochaine déclaration, je reconnais
Mme la députée de Chomedey.
Souligner
la fête de Norouz
Mme Sona Lakhoyan Olivier
Mme Lakhoyan Olivier : Merci, M. le Président.
En ce jour de l'équinoxe du printemps, diverses communautés célèbrent leur Nouvel An, y compris la communauté
kurde. En effet, le Norouz, terme kurde signifiant littéralement «le jour nouveau», marque le début d'une nouvelle
année en synchronie avec le renouveau de la nature après les mois rudes
et sombres de l'hiver. Cette célébration est ponctuée de festivités pouvant
s'étendre sur plusieurs jours.
J'ai eu le privilège,
vendredi dernier, à Chomedey, de participer à ces célébrations en compagnie de
nombreux citoyens de ma circonscription.
Au-delà de symboliser le renouveau, le Norouz incarne également la quête de
liberté chère à la mythologie kurde. Ces festivités rassemblent des
personnes de tous âges et toutes confessions autour de chants.
J'adresse
mes meilleurs voeux à tous les Québécois qui célèbrent le Norouz. (S'exprime dans une langue étrangère). Merci.
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci,
Mme la députée de Chomedey. Alors, voilà qui met fin à la rubrique
Déclarations de députés.
Je
suspends les travaux quelques instants, mais non sans remercier chacun et
chacune de vous pour vos déclarations. Nous suspendons les travaux.
(Suspension de la séance à
9 h 56)
(Reprise à 10 h 03)
La Présidente :
Bonjour, tout le monde. Bienvenue
chez vous. Mmes, MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques
instants.
Je vous remercie.
Veuillez vous asseoir.
Alors, nous
poursuivons les affaires courantes. Les portes sont maintenant fermées.
Aujourd'hui, il n'y a
pas de déclarations ministérielles.
Présentation de projets de loi
À la rubrique
Présentation de projets de loi, M. le leader du gouvernement.
M.
Jolin-Barrette : Oui. Bonjour, Mme la Présidente. Je vous demande
d'appeler l'article a du feuilleton, s'il vous plaît.
Projet de loi n° 56
La
Présidente : À l'article a du feuilleton, M. le ministre
de la Justice présente le projet de loi n° 56, Loi portant sur la réforme du droit de la
famille et instituant le régime d'union parentale. M. le ministre.
M.
Simon Jolin-Barrette
M.
Jolin-Barrette : Mme la Présidente, il me fait plaisir de déposer
le projet de loi n° 56, Loi
portant sur la réforme du droit de la famille et instituant le régime
d'union parentale.
Ce projet de
loi vise à instituer l'union parentale pour les conjoints de fait qui sont les
parents d'un même enfant né ou adopté après l'entrée en vigueur de la présente
loi. Ainsi, il modifie le Code civil, notamment afin de prévoir que la formation de l'union parentale emporte la
constitution d'un patrimoine d'union parentale formé de certains biens des
conjoints, dont la résidence familiale. En
outre, il modifie le Code civil afin d'y prévoir les règles applicables au
partage de ce patrimoine dans les cas
où l'union prendrait fin. Le projet de loi prévoit que les conjoints peuvent,
d'un commun accord, modifier la composition du patrimoine d'union
parentale ou se soustraire complètement de son application.
Le projet de loi propose diverses protections en
cas de séparation des conjoints en union parentale. Il prévoit notamment de rendre les règles de protection et
d'attribution de la résidence familiale prévues pour les conjoints mariés ou
unis civilement applicables aux conjoints qui sont en union parentale.
Le projet de loi prévoit également accorder aux
conjoints, après la fin de l'union parentale, le droit de faire une demande de prestation compensatoire au tribunal
s'ils estiment s'être appauvris après avoir contribué à l'enrichissement
du patrimoine de l'autre conjoint.
Le projet de
loi propose aussi que le délai de prescription ne coure pas entre les conjoints
pendant l'union parentale.
En matière successorale, le projet de loi
propose notamment de modifier les règles de la dévolution légale pour permettre au conjoint qui était en union parentale
d'hériter de son conjoint décédé lorsque ces derniers faisaient vie commune
depuis plus d'un an au moment du décès.
Le projet de loi prévoit confier au Service
administratif de rajustement des pensions alimentaires pour enfants, administré par la Commission des services
juridiques, le mandat d'offrir aux parents un service de calcul de pensions
alimentaires pour enfants pour les aider à fixer, sans l'intervention du
tribunal, le montant d'une pension alimentaire pour enfants.
Le projet de
loi propose de modifier le Code de procédure civile afin de permettre au
greffier spécial d'homologuer toute entente entre les conjoints en union
parentale qui porte sur les conséquences de la fin de leur union.
Le projet de loi propose d'imposer au juge
l'obligation d'accorder des dommages-intérêts lorsqu'il y a violence judiciaire. Il prévoit aussi que le tribunal doit
prendre en compte l'historique des procédures entre les parties, l'impact de la
nature répétitive et litigieuse sur
l'ex-conjoint et sur l'enfant ainsi que l'équilibre des forces en présence,
notamment en raison de l'existence de violence familiale, y compris de
violence conjugale.
Le projet de
loi propose que les juges en chef de la Cour supérieure et de la Cour du Québec
doivent favoriser la prise en charge des dossiers par un seul et même
juge, et ce, dans l'intérêt des parties et de l'enfant.
Le projet de
loi propose de permettre aux juges de la Cour supérieure d'un dossier en
matière familiale d'obtenir, entre autres, copie de la décision rendue
en matière de protection de la jeunesse à la Cour du Québec.
Enfin, le projet de loi prévoit une disposition
transitoire et une disposition finale. Merci, Mme la Présidente.
La Présidente : Et je reconnais le
leader de l'opposition officielle.
M. Derraji : Mme la Présidente, nous
souhaitons la tenue de consultations sur ce projet de loi. Merci.
La Présidente : M. le leader du
gouvernement.
M.
Jolin-Barrette : Mme la Présidente, très certainement, il y aura
des consultations, on va entendre les groupes de nos collègues des oppositions.
Mise
aux voix
La Présidente : Alors, est-ce
que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?
Des voix : Adopté.
La Présidente : Adopté.
Dépôt
de documents
À la rubrique Dépôt de documents, M. le premier
ministre.
M.
Legault : Oui. Mme la Présidente, permettez-moi de déposer
le plan stratégique 2023-2027 du ministère du Conseil exécutif.
Merci.
La
Présidente : Ce document est déposé. Mme la ministre des Transports et
de la Mobilité durable.
Mme Guilbault : Oui. Mme la Présidente, permettez-moi de déposer le plan
stratégique 2023-2027 de la Commission des transports du Québec.
Merci.
La
Présidente : Ce document est déposé.
Dépôt de rapports de commissions
À
la rubrique Dépôt de rapports de commissions, M. le président de la Commission
des finances publiques et député de Montmorency.
Poursuite du débat sur le discours sur le budget
M. Simard : Oui.
Mme la Présidente, c'est avec plaisir que je dépose le rapport de la Commission
des finances publiques qui, les 21 et 26 mars 2024, a siégé afin de
procéder à la poursuite du débat sur le discours du budget. Je vous remercie.
La
Présidente : Ce rapport est déposé.
Il n'y a pas de dépôt
de pétitions.
Il n'y a pas de
réponses orales aux pétitions ni d'interventions portant sur une violation de
droit ou de privilège.
Questions et réponses orales
Nous
en sommes maintenant rendus à la période de questions et de réponses orales, et
je cède la parole, en question principale, au chef de l'opposition
officielle.
Aide
aux producteurs agricoles
M. Marc Tanguay
M. Tanguay : Merci beaucoup, Mme la Présidente. L'agriculture
est au coeur de l'économie du Québec et plus particulièrement au coeur du
développement économique de nos régions. L'agriculture, c'est 7,4 % de
l'économie du Québec et très majoritairement des PME. C'est
10,3 milliards de nos exportations.
Présentement, au
Québec, nous vivons une crise agricole. Les revenus nets des agriculteurs, en
2022, étaient de 959 millions. En 2023,
ça a chuté à 487 millions, et, cette année, les prévisions 2024 sont
à 66 millions, du jamais-vu en 86 ans. Les enjeux, les défis
sont majeurs : pénurie de main-d'oeuvre, explosion des coûts des intrants,
programmes mésadaptés, manque de relève, qui engendre, évidemment, des enjeux
de santé mentale.
Il
y a, au Québec, des mobilisations d'agriculteurs : le 8 mars, à
Rimouski, 500 producteurs ont manifesté; 15 mars, à La Malbaie,
200 producteurs; 15 mars, à Baie-Comeau, autre manifestation.
Aujourd'hui, Mme la Présidente, ils vont converger à Alma, ils vont
partir de Saguenay, ils vont partir de Dolbeau-Mistassini, de Saint-Félicien.
Le
premier ministre a nié pendant trois ans la crise de la pénurie de
main-d'oeuvre et pendant quatre ans la crise de l'habitation. Va-t-il
nier aujourd'hui la crise agricole?
• (10 h 10) •
La
Présidente : La réponse du premier ministre.
M. François Legault
M. Legault : Oui. Mme la Présidente, il y a effectivement des
productions, actuellement, en agriculture qui souffrent, pour plusieurs raisons. D'abord, rappelons-nous de
l'été dernier, l'été 2023 : à certains endroits, des pluies trop
abondantes; à certains autres endroits,
sécheresse. S'est ajoutée à ça, Mme la Présidente, l'inflation dans les
intrants, pour les agriculteurs. S'est
ajouté aussi des taux d'intérêt. On sait que les producteurs agricoles ont des
prêts qui ont été faits soit par des institutions financières soit par
La Financière agricole, et donc, quand les taux d'intérêt augmentent, les
dépenses des agriculteurs augmentent.
Mme
la Présidente, mon collègue le ministre de l'Agriculture n'a pas attendu pour
agir. Je vous donne juste un ordre de
grandeur. Habituellement, La Financière agricole donne en moyenne
440 millions par année; cette année, on est rendus à plus de
1 milliard qui est donné, donc, aux producteurs agricoles.
Vendredi dernier,
j'ai rencontré, avec le ministre de l'Agriculture, les producteurs maraîchers,
et il y avait aussi le D.G. de l'UPA qui
était là. Ce qu'ils m'ont dit, c'est qu'on a un problème avec les produits qui
sont importés de d'autres pays où il
n'y a pas des normes, entre autres, environnementales aussi élevées qu'au Québec.
Donc, ils nous ont demandé, avec le gouvernement fédéral, de revoir ces
normes ou d'exiger...
La
Présidente : En terminant.
M.
Legault : ...pour les produits importés, des normes équivalentes.
La
Présidente : Première complémentaire.
M. Marc Tanguay
M. Tanguay : Mme la Présidente, le président de l'UPA, Martin
Caron, dit : «Le gouvernement du Québec doit [...] intervenir de façon musclée face à
l'endettement croissant des entreprises, l'inefficacité des programmes de
gestion des risques, le soutien
insuffisant à la relève, la surenchère réglementaire [...] le fardeau
administratif», etc. C'est ce qui est demandé.
Alors,
ma question, je reviens là-dessus, deux choses : Va-t-il aujourd'hui
reconnaître la crise agricole? Puis qu'est-ce qu'il va faire eu égard à
ces problèmes?
La Présidente :
La réponse du premier ministre.
M. François Legault
M. Legault : Oui, Mme la Présidente, quand j'ai rencontré, avec
le ministre de l'Agriculture, les représentants des producteurs maraîchers, je leur ai demandé c'est
quoi, le principal problème, et ils m'ont dit : Le principal problème,
c'est les normes qui sont plus élevées au Québec que pour les produits
importés. Je vous donne un exemple. Il y avait le président des regroupements, donc, des producteurs de fraises et de
framboises. Il me disait : Il y a 90 % des fraises et des
framboises qui sont importées, mais avec des normes beaucoup plus basses, donc on
n'est pas compétitifs. Donc, c'est important, avec le fédéral, de travailler le
dossier...
La
Présidente : En terminant.
M. Legault : Je
vais continuer tantôt.
La
Présidente : Deuxième complémentaire.
M. Marc Tanguay
M. Tanguay : Mme la Présidente, je comprends le premier ministre.
Je comprends, le premier ministre, pourquoi, ce matin, il ne veut pas
reconnaître qu'il y a une crise agricole, parce qu'il dit : Il y a
une seule source au problème, puis il parle
des normes. Martin Caron, lui, il parle des programmes insuffisants, mal
adaptés, des réalités économiques et climatiques d'aujourd'hui et de
demain. L'UPA a dit : Dans le dernier budget, déception et frustration.
Les causes sont
multiples, et, quand on reconnaît ça, on doit reconnaître la crise. Va-t-il
reconnaître la crise?
La
Présidente : La réponse du premier ministre.
M. François Legault
M. Legault : Bien,
Mme la Présidente, je m'excuse de contredire le chef de l'opposition
officielle, mais les producteurs maraîchers
ont été très clairs. Quand je leur ai demandé c'est quoi, la cause première de
leurs problèmes, ils m'ont dit :
C'est les normes qui ne sont pas les mêmes au Québec qu'à l'étranger. J'en ai
d'ailleurs parlé avec Justin Trudeau
en fin de semaine, parce qu'évidemment, quand on parle d'importation de
produits puis de normes, ça relève du gouvernement fédéral.
Donc, Mme la
Présidente, à l'intérieur de nos responsabilités, on a augmenté à plus de
1 milliard l'aide aux agriculteurs, puis on va continuer. Le ministre de l'Agriculture...
La Présidente :
En terminant.
M. Legault :
...est en continuelle discussion avec eux.
La
Présidente : Troisième complémentaire.
M. Marc Tanguay
M. Tanguay : Mme
la Présidente, en tout respect, c'est la marque du premier ministre, de
dire : Ce n'est pas de ma faute, c'est
de la faute des autres. Puis là vous l'avez vu, comment il a ramené le fédéral
sur la table. Il dit : Le seul problème,
unique, de nos maraîchers, c'est les normes puis c'est le fédéral. Il n'entend
pas ce que leur dit les gens de l'UPA, Mme
la Présidente. On parle de programmes mésadaptés. On parle d'une aide
gouvernementale du Québec qui est insuffisante sous plusieurs aspects.
Que
répond-il à Nathalie Lemieux, de l'UPA du Bas-Saint-Laurent, qui lance un cri
du coeur, qui dit que la situation est critique? Il lui répond quoi?
La
Présidente : La réponse du premier ministre.
M. François Legault
M. Legault : Bien, Mme la Présidente, j'invite le chef de
l'opposition officielle à rencontrer les représentants des producteurs
maraîchers, ils vont lui répéter exactement ce qu'ils nous ont dit vendredi
dernier. Le problème principal vient des
normes, entre autres, environnementales, qui sont beaucoup plus élevées au
Québec que dans les pays où on importe des produits.
Donc, que propose le
Parti libéral? Encore rien, juste du chialage.
La Présidente :
On demeure polis. En question
principale, je reconnais le député de Pontiac. La parole est à vous.
Aide
aux producteurs agricoles
M. André Fortin
M.
Fortin : Il y a plus qu'une raison pour
laquelle les agriculteurs sont dans la rue à matin, là, puis on n'a pas à regarder bien, bien plus loin que le bilan de la
CAQ pour savoir c'est quoi. Son bilan, c'est d'avoir décimé la production
porcine. Son bilan, c'est de refuser l'aide
d'urgence aux producteurs horticoles. Son bilan, c'est que plus que jamais,
plus que jamais les agriculteurs de
la relève sont obligés d'avoir une deuxième job pour payer les dettes de la ferme.
Son bilan, c'est des producteurs qui mettent leurs terres en garantie
parce qu'ils n'ont pu une cent. Son bilan, c'est des abattoirs de proximité qui ferment, un prix des terres en
hausse fulgurante, des délais hors contrôle pour avoir des travailleurs
agricoles. Son bilan, là, c'est le
président de l'UPA qui dit que, le premier ministre, ça ne fonctionne juste
plus, une relève qui dit qu'il y a un
désintérêt flagrant de la part du premier ministre pour l'agriculture puis des
manifs d'agriculteurs aux quatre coins du Québec.
Est-ce qu'ils peuvent
aujourd'hui se réveiller puis avoir des actions concrètes pour les
agriculteurs?
La
Présidente : La réponse du ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et
de l'Alimentation.
M. André Lamontagne
M. Lamontagne :
Merci, Mme la Présidente. En lien
avec les questions du chef de l'opposition officielle, on peut parler
d'une crise, on peut parler d'une tempête, on peut parler d'années très, très
difficiles, mais on a deux certitudes. La
première, là : c'est certainement une période de grande turbulence en
agriculture. Puis la deuxième certitude qu'on a, là, c'est qu'on est mobilisés et 100 % en arrière, puis en
collaboration, puis en travail avec nos producteurs, nos productrices.
Quand
j'entends mon collègue déposer une motion à l'Assemblée nationale pour demander,
exiger que le gouvernement s'engage
pour la modernisation des programmes d'assurance récolte, bien, je dis :
Communique avec les gens du secteur, puis ils vont te dire que c'est engagé
depuis le mois d'octobre, que tout le
monde travaille ensemble. Puis ces travaux-là, Mme la Présidente, se font en
collaboration avec les producteurs des différentes filières, qui fait en sorte
que, le 8 mars, il y a eu une rencontre de travail, tout le secteur. Les
échos que j'ai eus étaient très, très favorables.
Alors,
les enjeux, là, mon collègue en a fait une longue liste, et puis ces enjeux-là,
ils sont réels, les défis qu'on a. On les prend un par un, à tous les
jours...
La
Présidente : En terminant.
M.
Lamontagne : ...puis soyez assurés qu'on est en soutien auprès de nos
producteurs et nos productrices.
La
Présidente : Première complémentaire.
M. André Fortin
M. Fortin : Ils
n'ont absolument rien compris, Mme la Présidente. Puis je vais vous dire à quel
point le gouvernement est déconnecté de la réalité des producteurs, là. La
Financière agricole a dépensé des fonds publics pour lancer une belle publicité avec comme slogan Je choisis la
tranquillité d'esprit, j'adhère à l'assurance récolte. S'ils voulaient
offusquer les producteurs, ils
n'auraient pas pu faire mieux, Mme la Présidente. Ils n'ont pas eu une pluie de
commentaires, ils ont eu un déluge,
un déluge de commentaires. Je voudrais vous en lire juste un : «Assuré? Bien
oui, assuré de ne pas être indemnisé à la hauteur des pertes. Ça devrait
être ça, leur slogan.»
La
Présidente : La réponse du ministre.
M. André Lamontagne
M. Lamontagne : On va revenir, Mme
la Présidente, là, concrètement, là, au-delà des commentaires de mon collègue, là... Première des choses, on a mis en
place un fonds d'urgence dès le mois de mai, l'an passé, pour accompagner
les entreprises qui étaient en difficulté,
qui génère 167 millions de dollars de liquidités. Au moment où
on se parle, là, on a
1 150 entreprises, là, qui y ont accès, qui ont demandé... qui y ont
accès, puis on a encore 300 ou 400 entreprises, là, qui sont susceptibles d'utiliser le programme. On a lancé
la modernisation de l'assurance récolte. On est en chantier, présentement,
pour des allègements réglementaires...
La Présidente : En terminant.
M. Lamontagne : ...avec toutes les
filières, Mme la Présidente. Je vais continuer en troisième réponse.
La Présidente : Deuxième
complémentaire.
M.
André Fortin
M. Fortin : La réponse du ministre, elle ressemble beaucoup à celle de
La Financière agricole : «Nous sommes sensibles
aux réactions qu'a pu occasionner notre récente publication...» Mais ce n'est
pas de la sensibilité que les agriculteurs, ils veulent, là. Ils ne sont pas... ils n'ont pas sorti leurs tracteurs
dans les rues d'Alma, à matin, là, pour que La Financière leur dise qu'ils sont sensibles puis que le
ministre leur dise qu'il y a des temps turbulents. Ils veulent des actions
concrètes de la part de leur gouvernement.
Si le premier
ministre est désintéressé puis le ministre de l'Agriculture, il ne veut pas
bouger, il y en a-tu un, parmi les 89, qui va se lever avec nous, avec
les agriculteurs, puis dire : Assez, c'est assez?
• (10 h 20) •
La Présidente : La réponse du
ministre.
M.
André Lamontagne
M.
Lamontagne : Mme la Présidente, je veux quand même souligner à
mon collègue, là, qu'il y a 167 millions de liquidités mis à la disposition des producteurs et des productrices,
1 050 000 000 $, à ce jour, qui a été déboursé en soutien
pour nos producteurs, nos productrices de tous les secteurs, versus
440 millions, en moyenne, l'engagement qu'on a vis-à-vis la réforme des
programmes d'assurance récolte. Parallèlement à ça, là, on a identifié plus de
2 000 entreprises, Mme la
Présidente, là, qui peuvent avoir des enjeux soit au niveau de leur
financement, soit au niveau de la façon dont ils utilisent les outils de
soutien de revenus. On est dans un programme de sensibilisation puis de
contact...
La Présidente : En terminant.
M.
Lamontagne : ...avec toutes
ces entreprises-là pour faire en sorte qu'ils utilisent au maximum tous les
leviers qui sont à leur disposition, Mme la Présidente.
La
Présidente : En question principale, je reconnais maintenant la
députée de Westmount—Saint-Louis. On vous écoute.
Création de places en service
de garde
Mme
Jennifer Maccarone
Mme Maccarone : Merci,
Mme la Présidente. Je nous ramène au 19 août 2022. Il n'y a même pas
deux ans, l'ancien ministre de la
Famille et la vice-première ministre ont annoncé la fin des garderies non
subventionnées. La CAQ s'engageait à
convertir 56 500 places non subventionnées en places subventionnées.
L'ex-ministre disait, et je le cite : «D'ici cinq ans, chaque
tout-petit québécois pourra avoir une place subventionnée à 8,70 $...»
Pour y
arriver, le gouvernement devrait convertir environ 11 000 places par année.
Voyons ce qui a été fait. L'an dernier,
le gouvernement a converti 5 000 places. Cette année, ce sera
1 000 places. Mme la Présidente, à ce rythme-là, ça va prendre
encore 50 ans pour la CAQ à réaliser son engagement.
Les images,
pendant la campagne électorale, étaient belles, mais, aujourd'hui, l'image
craque, et les familles ont compris. Et, comme disait Gerry Boulet, vous
leur avez monté un beau grand bateau.
La Présidente : La réponse de la
ministre de la Famille. On l'écoute.
Mme Suzanne
Roy
Mme Roy
(Verchères) : Alors, merci, Mme la Présidente. J'avoue que je
suis particulièrement surprise de cette question. Je vous dirais même
que... Je pense qu'une image, ça vaut mille mots. Voici ce qui a été fait
en conversions.
Maintenant, le Parti libéral a à coeur
les conversions. Alors, voici. Ça, ici, là, c'est l'électrocardiogramme. Il est
plat. Mort cérébrale. Oups! Il y a eu un
choc, par exemple, la CAQ, et on voit très bien ce qui s'est produit. Au
31 mars, pour Pâques, il y aura
9 000 places converties. Alors, c'est 9 000 fois plus que
les oppositions ont fait dans les dernières années.
Alors,
je reste extrêmement surprise, contente de voir, quand même, que ma collègue,
maintenant, s'intéresse à la conversion
pour qu'on puisse continuer de faire ce que l'on fait, donc offrir des places à
contribution réduite pour les familles du Québec...
La
Présidente : En terminant.
Mme Roy
(Verchères) : ...pour les enfants du Québec, Mme la Présidente.
Des voix : ...
La Présidente : Je suis debout. Article 32,
article 37. Je suis debout. Vous gardez le silence. Première
complémentaire.
Mme Jennifer Maccarone
Mme
Maccarone : Je suis particulièrement surprise de la réponse de la
ministre, parce qu'en commission parlementaire, hier, le ministre des Finances
nous a avoué qu'il n'a pas répondu aux demandes de la ministre de la Famille
parce que son gouvernement n'a pas priorisé la famille. La ministre a demandé
10 000 places, on lui a donné 1 000.
Mme
la Présidente, cette année, la CAQ va investir deux fois plus d'argent pour
deux matchs des Kings, au lieu de 1 000... puis au lieu de pour 1 000
enfants. Pour reprendre les propos du premier ministre, est-ce que c'est ça, un
bon deal?
La Présidente :
La réponse de la ministre.
Mme Suzanne Roy
Mme Roy (Verchères) : Merci, Mme la Présidente.
Doublement surprise, hein, doublement surprise, aujourd'hui. Voici quel est l'état des faits des places
subventionnées, au Québec, qui ont été créées. Alors, on voit ici la longue,
longue descente aux enfers avec le Parti libéral dans la création des places subventionnées. C'est donc ça, j'imagine,
la priorité des familles du Parti libéral. Mais celle de la CAQ, elle
est claire, elle monte. Merci, Mme la Présidente.
La Présidente :
Deuxième complémentaire. Je suis
debout. 32, 37. Vous connaissez la règle. On garde le silence. Deuxième
complémentaire. Il n'y a que la députée qui a un droit de parole. On vous
écoute.
Mme Jennifer Maccarone
Mme Maccarone :
Vous savez qui est surpris, Mme
la Présidente? Toutes les familles du Québec. Hier, le ministre des
Finances nous l'a confirmé, ça ne se
fera pas d'ici la fin du mandat, ça va être plus lent. La promesse, elle était
pourtant très, très claire : plus de places non subventionnées
d'ici la fin du mandat.
Mme la Présidente,
les familles fredonnent une chanson de Félix Leclerc :
«La veille des
élections
Il t'appelait son
fiston
Le lend'main, comme
de raison
Y avait oublié ton
nom.»
La
Présidente : La réponse...
Des voix :
...
La Présidente :
Et, voilà, sur ces paroles de Félix Leclerc, la réponse de la ministre, et on
l'écoute.
Mme Suzanne Roy
Mme Roy (Verchères) : Alors, merci, Mme la
Présidente. Alors, je pense que le ministre
des Finances a aussi répondu qu'on démontrait bien notre intention de continuer
la conversion. Mais c'est sûr qu'on n'ira pas à la vitesse des libéraux, parce
qu'à zéro ça reste à zéro, ça n'avance pas vite. Ça, c'est clair.
D'ailleurs,
ça me permet de vous inviter à aller voir le tableau de bord, tableau de bord
où vous voyez, justement, l'évolution
des places créées par notre gouvernement pour les familles du Québec. Et c'est
du jamais-vu dans les 25 dernières années.
Et
nous allons continuer à créer des places, à convertir et à faire des places à
contribution réduite pour les enfants du Québec, pour les familles du
Québec, Mme la Présidente.
La
Présidente : En question principale, je reconnais maintenant le
chef du deuxième groupe d'opposition. La parole est à vous.
Protection des droits des locataires aînés
M. Gabriel Nadeau-Dubois
M.
Nadeau-Dubois : Merci, Mme la Présidente. On dit souvent qu'on juge
une société à la manière dont elle traite
ses aînés. Je suis certain que le premier ministre est d'accord avec moi, et je
n'ai même aucun problème à reconnaître qu'il a posé des gestes, depuis
qu'il est premier ministre, pour aider les aînés du Québec.
En
2016, tous les partis avaient travaillé ensemble pour protéger les aînés du
Québec contre les spéculateurs qui veulent
les mettre à la rue pour faire plus d'argent plus vite. C'était la loi
Françoise David. Huit ans plus tard, la situation s'est détériorée, il y
a des dizaines de milliers d'aînés qui, chaque année, sont menacés d'éviction.
Ce
matin dans La Presse, Françoise David joint sa voix à deux ex-ministres du Parti québécois et à une ancienne députée
libérale pour lancer un appel à tous les députés en cette Chambre, tous partis
confondus : Il y a urgence. Travaillez ensemble, mettez la
partisanerie de côté, renforcez la loi.
Demain,
le Parlement va avoir l'occasion de répondre à cet appel. Comme en 2016, le Parti libéral et le Parti québécois
ont accepté de répondre présent.
Au
milieu de la pire crise du logement en 40 ans, est-ce que le premier
ministre est ouvert à discuter avec les autres partis pour mieux
protéger les locataires aînés au Québec?
La
Présidente : La réponse du premier ministre.
M. François Legault
M. Legault : Oui. Mme la Présidente, je suis absolument
d'accord avec ce que vient de dire, dans la première partie de son
intervention, le chef de Québec solidaire, on juge une société à la façon dont
on traite nos aînés. Bien, Mme la Présidente,
rappelons-nous les maisons des aînés. On a des partis d'opposition qui nous ont
dit : Ça coûte trop cher, c'est trop beau, vos maisons des aînés.
Ça, c'est incroyable, trois partis qui ont dit ça.
Mme la Présidente,
lors de la dernière campagne électorale, on s'est engagés à donner
2 000 $ de crédit d'impôt remboursable
aux personnes de 70 ans et plus qui ont un faible revenu. Encore une fois,
les trois partis d'opposition étaient contre ça.
Mme la Présidente,
parlons de logement. On a, avec la loi n° 31,
changé le fardeau de la preuve. Avant, quand il
y avait une éviction, c'est le locataire qui avait le fardeau de la preuve.
Maintenant, c'est le propriétaire qui a le fardeau de la preuve devant
le tribunal.
Donc, Mme la
Présidente, le vrai problème du logement, c'est qu'il manque de logements par
rapport à la forte demande, entre autres à
cause des immigrants temporaires, qui ont augmenté de plus de 230 000
depuis deux ans. Québec solidaire
refuse de voir ce problème puis pense encore que c'est en mettant plus de
contraintes aux propriétaires qu'on va régler le problème. On n'est pas
d'accord avec cette approche-là.
La
Présidente : Première complémentaire.
M. Gabriel Nadeau-Dubois
M. Nadeau-Dubois : Le premier ministre parle
des maisons des aînés. Ce que souhaitent avant tout les aînés, au Québec, c'est pouvoir vieillir dans la dignité
puis de manière paisible dans leur maison. Puis la crise du logement, chaque
année, menace de mettre des dizaines de
milliers d'aînés à la rue parce que les spéculateurs veulent les jeter à
l'extérieur de leurs maisons. On ne devrait pas traiter nos aînés comme
ça au Québec.
Je
tends la main au premier ministre : Veut-il travailler avec nous pour
protéger les locataires aînés du Québec?
La
Présidente : La réponse du premier ministre.
M. François Legault
M. Legault : Bien, Mme la Présidente, encore une fois, je suis
d'accord avec la première partie de ce qu'a dit le chef de Québec solidaire.
Idéalement, nos aînés veulent rester à la maison. C'est pour ça qu'on a investi
massivement. Je sais que, pour Québec
solidaire, l'argent pousse dans les arbres, mais, Mme la Présidente, quand on
est arrivés, le budget, c'était
1,5 milliard par année; maintenant, c'est 2,9 milliards, Mme la
Présidente. Jamais on n'a vu une augmentation aussi grande du soutien à
domicile. Donc, comment Québec solidaire...
La
Présidente : En terminant.
• (10 h 30) •
M. Legault :
...peut-il banaliser cette augmentation du soutien à domicile?
La
Présidente : Deuxième complémentaire.
M. Gabriel Nadeau-Dubois
M.
Nadeau-Dubois : Je ne banalise rien, Mme la Présidente. Mais, pour
recevoir des soins à domicile, il faut avoir un domicile. C'est ce que je
propose au premier ministre, qu'on travaille ensemble pour s'assurer que les
aînés du Québec ne soient pas évincés
de leurs domiciles. Tous les députés ici ont des cas dans leur circonscription,
je le sais, d'aînés menacés d'éviction,
puis ça nous brise le coeur parce qu'on ne voudrait pas que ça n'arrive ni à
nos parents ni à nos grands-parents.
Est-ce que le premier ministre accepte de
travailler avec nous pour protéger les locataires aînés du Québec?
La Présidente : La réponse du
premier ministre.
M. François
Legault
M.
Legault : Bien, Mme la Présidente, Québec solidaire semble
dire que le problème du logement, c'est seulement un problème d'évictions. Le problème du logement,
Mme la Présidente, puis ce n'est pas seulement à Montréal, c'est partout,
c'est qu'il manque de logements. Le ministre
des Finances a investi 6,3 milliards de dollars. On est en train,
actuellement, de former plus de gens en construction, rapidement, pour
pouvoir construire ces logements. C'est ça, les vraies solutions.
La Présidente : En question
principale, je reconnais maintenant la députée de Sherbrooke.
Accès à l'information sur la
situation
dans certains centres jeunesse
Mme
Christine Labrie
Mme Labrie : La semaine dernière, au
centre jeunesse de Val-du-Lac, il y a eu une mutinerie. Quatre jeunes ont pris
le contrôle de leur unité jusqu'à ce que la police arrive, il y a eu pour
20 000 $ de dommages. Ça, c'est un signal d'alarme. Les employés qui
ont eu le courage de parler publiquement ont dit que personne n'était surpris,
parce qu'il y a tellement de personnel
d'agence que ça crée un manque de stabilité. Ils ne sont pas capables de faire
les interventions qu'ils devraient
faire pour aider les jeunes. Il y a même une intervenante qui dit que ça fait
des mois qu'ils se battent pour plus de collations parce que les jeunes
ont faim.
J'ai demandé
à aller voir ce qui se passe. En 22 minutes, j'ai eu un refus de la part
du CIUSSS. Et ce n'est pas parce que c'est dans la circonscription d'à côté. Je suis convaincue que, si le député de Richmond avait fait
la demande, il se serait fait refuser,
lui aussi. On ne veut pas nous laisser aller voir ce qui se passe. La seule
manière d'y arriver, ce serait avec le ministre.
Est-ce que le ministre veut accepter d'aller
avec moi visiter Val-du-Lac pour voir ce qui se passe là?
La Présidente : La réponse du
ministre responsable des Services sociaux.
M. Lionel Carmant
M.
Carmant : Oui, merci, Mme la Présidente. Écoutez, ce qui s'est
passé à Val-du-Lac, c'est quelque chose de tout à fait regrettable, et je pense
que c'est quelque chose qui... basé sur l'importance dont on met sur
l'amélioration des soins pour les jeunes en centre de réadaptation.
Maintenant, je sais que la députée de Sherbrooke
a visité un site. On m'a dit qu'elle a visité le site Bowen du centre jeunesse.
Donc, je pense que c'est... il ne faut pas dire qu'on ne peut pas visiter les
centres jeunesse. Maintenant, qu'est-ce
qui... qu'est-ce que... la question que j'aurais, c'est de savoir qu'est-ce
qu'elle veut aller voir au centre jeunesse de Val-du-Lac. Elle a entrée aux
intervenantes. Elle peut parler à la direction. Elle peut parler aux familles
des jeunes qui sont là. Donc, la
question, c'est : Pourquoi vouloir aller dans une circonscription qui
n'est pas la sienne? Si elle me répète... Si elle m'explique bien la
situation, moi, je suis quand même ouvert à aller visiter le site.
J'ai
cependant demandé deux choses, Mme la Présidente, qui est important. J'ai demandé
à la directrice nationale de faire le tour des centres jeunesse du Québec. J'ai
demandé également au P.D.G. du CIUSSS de l'Estrie d'aller voir la
situation à Val-du-Lac, et ça, je pense, c'était l'intervention la plus urgente
à faire dans la situation...
La Présidente : En terminant
M. Carmant : ...qui a été nommée
récemment.
La Présidente : Première
complémentaire.
Mme Christine Labrie
Mme
Labrie : «Tu veux savoir si on échappe des jeunes? Oui. On le nomme
à nos chefs de service, d'ailleurs, clair comme ça. Ils connaissent notre réalité, ils y sont sensibles, on a leur
appui, mais ils sont pris entre l'arbre et l'écorce. Et que font la
direction et le gouvernement? Rien. Ils sont complètement déconnectés de la
réalité d'un centre jeunesse.»
Ça,
c'est les mots d'une intervenante de Val-du-Lac. Et moi, je refuse qu'on soit
déconnectés à ce point-là. C'est le point de service pour les jeunes de ma
circonscription. Bowen aussi, c'était dans une autre circonscription. Il n'y
avait pas un jeune là, quand je suis allée, ce n'était même pas aménagé encore.
Je
veux aller voir ce qui se passe à Val-du-Lac. Je veux que le ministre vienne
avec moi, parce que lui aussi, il doit voir ça.
La
Présidente : La réponse du ministre.
M.
Lionel Carmant
M. Carmant : ...pointer
du doigt, Mme la Présidente. La question, là, c'est une question de
confidentialité. Est-ce que je dois
comprendre que la députée veut parler aux jeunes? Est-ce que c'est ça, la
question? Est-ce qu'elle veut parler
aux jeunes? Est-ce que les parents veulent qu'elle parle à leurs jeunes, Mme la
Présidente? C'est une question à se poser, là.
Le but, c'est
d'améliorer les services à nos jeunes. On est en train de former les
éducatrices en centre jeunesse. Depuis 2015,
la formation avait été cessée, dans les centres jeunesse, depuis la fusion des
établissements. On a reparti ça l'an passé, Mme la Présidente. On est en
train de former les éducateurs à l'impact de l'attachement de...
La
Présidente : En terminant.
M. Carmant : ...pour
diminuer les contentions, améliorer les pratiques en centre jeunesse. C'est ça,
la priorité, Mme la Présidente.
La
Présidente : Deuxième complémentaire.
Mme
Christine Labrie
Mme Labrie : Les
intervenants, les parents des jeunes qui sont là m'écrivent en ce moment pour
me dire de continuer de pousser pour aller voir. Je vais vous en lire un autre,
témoignage : «Les jeunes, on les maintient en vie, mais sinon on ne fait pas les interventions qu'il faudrait parce qu'on
ne se sent pas backés. Le système est malade.» Quand le système est malade, les intervenants partent. Les
jeunes, on les échappe. À Val-du-Lac, le système est tellement malade
que la coordonnatrice des services, elle a démissionné dans les derniers jours.
Est-ce
que le ministre va avoir le courage de venir voir avec moi ce qui se passe là,
puis, oui, rencontrer des jeunes, s'ils veulent nous parler, puis, oui,
rencontrer les intervenants, s'ils veulent nous parler?
La
Présidente : La réponse du ministre.
M.
Lionel Carmant
M. Carmant : Bien,
je pense que, les intervenantes, on y a accès, de toute... actuellement, Mme la
Présidente. Puis parler aux jeunes, ce n'est pas nécessairement quelque chose
qu'on doit faire. Ce n'est pas quelque chose que moi-même, je désire faire. On parle de jeunes qui sont en protection de
la jeunesse. Ce n'est pas des jeunes qu'on croise dans la rue, Mme la
Présidente. Je pense qu'il faut vraiment mettre les choses en perspective ici.
Cependant,
ce qui est important, là, c'est, effectivement, améliorer les conditions. On
vient de le faire lors de la dernière
convention. On va attendre que tout soit signé, mais, effectivement, on va
avoir des meilleures conditions d'emploi pour nos personnes en centre
jeunesse. Mais, encore une fois, la chose la plus importante...
La
Présidente : En terminant.
M. Carmant : ...c'est
d'améliorer les soins pour nos jeunes, Mme la Présidente, puis c'est là-dessus
qu'on se concentre actuellement.
La
Présidente : En question principale, je reconnais maintenant le député
de Rosemont.
Gestion des effectifs au CIUSSS du Centre-Sud-de-l'Île-de-Montréal
M.
Vincent Marissal
M. Marissal :
Merci, Mme la Présidente. Ce
matin, l'urgence Notre-Dame, à Montréal, le taux d'occupation est à 123 %. Il y a neuf personnes sur des civières
depuis plus de 24 heures. Ça, c'est juste aux urgences. Pourtant, c'est ce
matin qu'on apprend que le CIUSSS du Centre-Sud a eu la brillantissime idée de
couper 11 postes d'infirmières auxiliaires et de préposés aux urgences de Notre-Dame. Le CIUSSS,
qui a reçu une commande de diminuer son déficit, 117 postes abolis dans le CIUSSS du Centre-Sud de Montréal. Ce n'est
pas le plus riche du Québec, ça, le ministre le sait. Pourtant, pendant ce temps-là, les besoins ne disparaissent pas. Il y a des
préposés qui sont à l'emploi du CIUSSS depuis des années qui disparaissent,
remplacés comme par magie par des agences.
Est-ce que le ministre peut nous expliquer la
logique de tout ça? J'hallucine, à matin.
La Présidente : La réponse du
ministre de la Santé.
M. Christian Dubé
M. Dubé : Bien, je vais essayer de
vous ramener sur terre un peu, Mme la Présidente, parce que, si le député hallucine, c'est peut-être qu'il n'a pas la bonne
information. Alors, je vais essayer de préciser, de corriger les faits. Je vais
essayer de corriger les faits, Mme la Présidente.
Ici, là, de
faire le lien avec un programme d'austérité ou de coupure de postes, c'est
totalement inexact. Voici la situation.
On s'est
retrouvé, durant la pandémie, à augmenter certains postes dans certains
départements, et on se retrouve, après
avoir maintenant un meilleur contrôle sur nos opérations, de voir des endroits,
dans l'hôpital ou dans des CHSLD, où il
y a un surplus de personnel à certaines heures durant la semaine, à certaines
journées, et un manque ailleurs. Ça, là, c'est la réalité. Et on l'a vu, que c'est souvent notre problème, qu'on a plus
de difficultés à combler certaines heures ou certaines journées.
Le travail
qui est fait en ce moment avec nos gestionnaires, c'est de rééquilibrer ces
postes-là, ce n'est pas de couper des
postes, ce n'est pas de couper des services, comme l'allègue ici le député,
c'est de faire un travail de gestion de proximité...
La Présidente : En terminant.
M. Dubé : ...et c'est exactement ce
que nos gestionnaires sont en train de faire.
La Présidente : Première
complémentaire.
M. Vincent Marissal
M.
Marissal : Bon, parlant de revenir sur terre, là, il y a des
employés loyaux qui restent dans le réseau, qui veulent rester dans le réseau, qui reçoivent des lettres
comme celle-ci : «Monsieur, par la présente, nous tenons à vous informer
que votre poste d'auxiliaire infirmier — il
y a un beau petit numéro de huit chiffres — que vous occupez actuellement sera aboli le
21 avril 2024.»
Je répète,
là, je répète, là : Qu'est-ce que c'est, le message, en ce moment, que le
ministre et que le réseau essaient d'envoyer? On essaie de garder du
monde, on leur envoie des lettres de licenciement.
La Présidente : La réponse du
ministre.
M. Christian Dubé
M.
Dubé : J'aimerais ça que le député, Mme la Présidente,
puis ce n'est peut-être pas possible, là, fasse attention à ses commentaires, parce qu'il y a eu des
discussions, je n'irai pas dans le détail, où les gestionnaires ont tenté de
s'entendre avec le syndicat pour faciliter ce rééquilibrage-là, et ça n'a pas
fonctionné. Je vais m'arrêter là pour ce matin. Entendre les faits, c'est une chose. Il y a eu une tentative
d'entente entre le syndicat et les gestionnaires qui n'a pas fonctionné. À ce
moment-là, ce qu'on s'est assuré, c'est que,
dans ce processus-là, la question de service aux patients est importante, toute
la question d'ancienneté va être protégée.
On a essayé de faire quelque chose qui n'a pas fonctionné. Moi, je voudrais
juste que le député...
La Présidente : En terminant.
M. Dubé : ...soit au courant de tous
les faits. Merci beaucoup, Mme la Présidente.
La Présidente : Deuxième
complémentaire.
M. Vincent Marissal
M.
Marissal : J'aimerais ça que le ministre réponde à la
question puis réponde à cet infirmier auxiliaire puis à sa collègue de 11 ans d'ancienneté, mais ce
n'est peut-être pas possible, comme il vient de le dire lui-même. Tapez, là,
sur Google : CIUSSS du Centre-Sud de Montréal. Savez-vous ce qui sort? On
engage, engagez-vous, on embauche, avec un beau vidéo corporatif. Pendant ce temps-là, le ministre, avec des
faux-fuyants, nous explique que ça n'a pas marché sur le terrain. Notre-Dame, c'est le meilleur exemple
d'autogestion des horaires, c'est ça qu'il vante. Pendant ce temps-là, on
met du monde à pied. Allo?
• (10 h 40) •
La Présidente : La réponse du
ministre.
M. Christian Dubé
M. Dubé : Mme
la Présidente, beaucoup de respect pour le député de Rosemont, là, mais je
pense qu'il fait... il coupe les coins ronds
un petit peu ce matin. Je ne sais pas si j'ai le droit de dire ça, dans le
langage parlementaire, là, mais je
pense qu'il coupe les coins ronds un peu. Je l'ai dit, ce n'est pas le temps de
mettre de l'huile sur le feu. On a essayé de trouver une entente avec nos syndicats. Ce n'est pas toujours
possible de le faire. Nos gestionnaires ont un travail à faire, il faut qu'ils s'assurent que les patients sont bien
suivis, qu'on va avoir les bonnes personnes dans les bons postes, qu'on va
respecter les critères d'ancienneté. Il y a
amplement de postes disponibles pour que ces gens-là puissent continuer à travailler
dans le réseau de la santé. Merci beaucoup, Mme la Présidente.
La
Présidente : En question principale, je reconnais maintenant le chef
du troisième groupe d'opposition.
Rapatriement des pouvoirs en matière d'immigration
M. Paul
St-Pierre Plamondon
M. St-Pierre Plamondon : Mme la Présidente, les
chiffres à jour de l'année 2023 pour l'immigration temporaire viennent
d'être publiés par l'Institut de la
statistique du Québec. C'est encore
pire que ce qu'avait publié Statistique
Canada. Donc, on parle désormais de
565 000 temporaires sur le territoire du Québec présentement. C'est
une croissance record et surtout insoutenable de 217 600 personnes
nouvelles en seulement un an, du jamais-vu dans notre histoire, et tout cela
grâce et sous la gouverne du gouvernement de la CAQ. Avec les conséquences qu'on connaît
sur la crise du logement, le recul du français et la difficulté à livrer les
services équitablement pour tout le monde, on a perdu complètement le contrôle
de notre immigration parce qu'on se
fait imposer par le fédéral, sans notre consentement, une politique faite sur
mesure par des idéologues.
Rapatrier
tous les pouvoirs en immigration est une question de survie de la nation, pour
éviter la louisianisation, nous disait le
PM. Où en sommes-nous? Et là je l'invite à ne pas me donner comme réponse qu'il
est en train de préparer quelque chose avec Justin Trudeau, parce qu'il est déjà trop tard. Après
six ans de pouvoir, il y aura des effets irréversibles sur le logement, le
français et les services, et ce, pour
plusieurs années. D'ailleurs, Marc Miller a déclaré n'avoir aucune ouverture à
céder quoi que ce soit au Québec.
Que va faire le
premier ministre? Quelles sont ces fameuses options qu'il refuse de nous dire?
La
Présidente : La réponse du premier ministre.
M. François
Legault
M. Legault : Oui. Mme la Présidente, d'abord, le chef du Parti québécois et moi sommes tout à fait d'accord qu'à maintenant
560 000 immigrants temporaires au Québec, une augmentation de plus de
200 000 depuis deux ans, pas depuis six
ans, depuis deux ans... Et donc, bon, le choix du Parti québécois, c'est de faire un référendum sur la souveraineté, un référendum que les Québécois ne veulent pas. Nous,
notre approche, c'est de négocier avec le premier ministre du Canada. Et
le chef du Parti québécois vient de nous dire : Je ne veux rien entendre
parler de ça. Puis effectivement, quand les journalistes
lui ont demandé, deux fois, si, à l'avenir, les travailleurs puis même les
immigrants temporaires devaient être préapprouvés d'abord par le
gouvernement du Québec, est-ce que ce serait un gain important pour le Québec,
vous avez vu, Mme la Présidente, le patinage
artistique : Oui, mais... je ne suis pas contre ça, mais... Le Parti québécois ne veut pas faire de gains
avec le fédéral. Il veut préparer un référendum sur la souveraineté. Il ne veut
pas que ça marche avec Ottawa.
Donc,
Mme la Présidente, on va continuer de discuter avec Ottawa, puis je pense qu'on
va arriver à des résultats.
La
Présidente : Première complémentaire.
M. Paul
St-Pierre Plamondon
M. St-Pierre Plamondon : Mme la Présidente, en
matière de patinage artistique, je dois vous avouer que je ne comprends
rien de la réponse du premier ministre.
La
question est supersimple : Quelles sont vos fameuses options? Vous vous
faites dire non, vous n'avez pas le contrôle
sur l'immigration temporaire. Quelles sont vos prédictions pour le premier
trimestre de 2024? Quelles sont les prédictions
du premier ministre? Est-ce que ça va continuer d'augmenter? Est-ce qu'on va
atteindre un quelconque résultat auprès d'Ottawa? C'est une question
très simple à répondre.
La
Présidente : La réponse du premier ministre.
M. François
Legault
M. Legault : Bien,
Mme la Présidente, c'est assez simple à comprendre. Est-ce que le Parti
québécois serait d'accord que les immigrants
temporaires soient d'abord préapprouvés par le gouvernement du Québec? Ça, ça
veut dire le nombre, ça veut dire les conditions, est-ce qu'ils doivent
parler français ou non.
Mme la Présidente,
pendant que le PQ s'occupe d'une monnaie québécoise, nous, on s'occupe de la
vraie vie.
La
Présidente : Deuxième...
Des
voix : ...
La Présidente :
M. le député de Matane-Matapédia,
je vous ai entendu jusqu'ici. Je voudrais entendre le chef du troisième
groupe d'opposition. Deuxième complémentaire.
M. Paul
St-Pierre Plamondon
M. St-Pierre Plamondon : Le chef répétera que ça
ressemble étrangement au discours de Jean Charest, en effet. Et je vais
simplement dire qu'en effet ce n'est pas difficile à comprendre. Le premier
ministre a obtenu un mandat fort, et c'était
censé nous permettre de rapatrier tous les pouvoirs en immigration. On n'a
aucun rapport de force avec Ottawa. La
situation de l'immigration temporaire, on a perdu le contrôle. Et, quand on
demande c'est quoi, le plan de match, au premier ministre, la réponse,
Mme la Présidente, c'est qu'il n'y en a pas.
La
Présidente : La réponse du premier ministre.
M. François
Legault
M. Legault : Bien, Mme la Présidente, ça ne peut pas être plus
clair. Nous, de notre côté, ce qu'on veut, c'est de faire des gains, entre
autres que les immigrants temporaires soient préapprouvés par le gouvernement
du Québec. Du côté du Parti québécois, bien, ils veulent préparer un référendum sur la souveraineté que les
Québécois ne veulent pas. Donc, les Québécois auront à choisir,
éventuellement.
La
Présidente : Question principale, je reconnais maintenant la députée
de Bourassa-Sauvé.
Rémunération
des stages étudiants
Mme Madwa-Nika
Cadet
Mme Cadet : Mme la Présidente, en octobre dernier, j'ai
présenté une motion demandant la mise sur pied de la rémunération des
stages dans le secteur public. Ma motion a été adoptée à l'unanimité, j'étais
contente.
Depuis,
il n'y a absolument rien qui s'est produit. Le dossier, il n'a pas avancé.
Pourtant, la ministre de
l'Enseignement supérieur, elle a répété à de nombreuses reprises que les
stagiaires, bien, ils méritaient d'être rémunérés, dans le secteur public. Elle
a dit qu'elle était d'accord avec ça, qu'elle travaillait là-dessus. Mais il
n'y avait rien dans le budget sur la rémunération des stages dans le
secteur public.
Est-ce que
j'ai besoin de rappeler à la ministre qu'est-ce
que ça représente, pour les étudiants
stagiaires, de ne pas être rémunérés?
Je vous donne l'exemple de Julie, qui va être dehors aujourd'hui, devant
l'Assemblée nationale, aujourd'hui, qui,
elle, est étudiante au baccalauréat en travail social, qui est obligée de
travailler 60 heures, dont la moitié non rémunérées.
J'ai
demandé hier à la CAQ de dévoiler un échéancier sur la mise sur pied des
stages. Quand est-ce qu'on va l'avoir, la rémunération des stages?
Est-ce que ça va venir cette session parlementaire?
La
Présidente : La réponse de la ministre de l'Enseignement supérieur.
Mme Pascale
Déry
Mme Déry : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci beaucoup
pour cette question. Alors, je sais qu'on a des étudiants ici, dans les tribunes, et je veux les saluer. Je suis très
sensible aux revendications des étudiants, depuis le début du mandat je
les rencontre, très sensible au contexte actuel aussi.
Ceci
dit, comme vous le savez et comme on l'a mentionné ici, en Chambre, à plusieurs
reprises, on a fait des choix, des
choix exigeants, mais des choix nécessaires, qui viennent soutenir nos
étudiants. On a décidé d'investir massivement dans nos services publics, en santé et en éducation, et ça, ça va
permettre, justement, aux étudiants, après leur parcours, d'avoir des salaires
nettement plus élevés, d'avoir des conditions de travail nettement plus
favorables que ce qu'on a actuellement.
Il
y a aussi dans ce budget, et je ne veux pas l'occulter, puis on a tendance à
l'occulter, un enjeu principal sur lequel on s'est penchés, qui est le logement étudiant. C'était un des enjeux
principaux du... revendiqué par les établissements et par les associations étudiantes également. On vient
donner, aujourd'hui, 200 millions, investir 200 millions pour être
capables d'accélérer les projets en logement étudiant.
Donc,
non seulement on vient valoriser, bonifier, évidemment, tout ce qui est le
secteur public, les salaires et les conditions de travail, on investit
énormément d'argent, également, dans tout ce qui est logement étudiant. On
va...
La
Présidente : Première complémentaire.
Mme Madwa-Nika
Cadet
Mme Cadet : ...j'écoute la ministre
de l'Enseignement supérieur, puis on dirait que son discours, il a changé. Avant le budget, elle nous disait : Oui, on
travaille là-dessus, ça s'en vient, la rémunération des stages. La motion que
j'ai présentée en octobre, elle a été adoptée à l'unanimité par les
personnes ici présentes, dont la ministre de l'Enseignement supérieur. Aujourd'hui, elle nous dit : On a
fait des choix. Des choix au détriment des étudiants stagiaires, qui demandent
encore aujourd'hui, présents dans les tribunes, à être rémunérés pendant leurs
stages dans le secteur public.
Alors, je repose la question : Est-ce
qu'elle est en train de nous dire, en fait, là, qu'il n'y en aura pas...
La Présidente : La réponse de la
ministre.
Mme Pascale Déry
Mme
Déry : Alors, comme je l'ai mentionné, oui, on a fait des
choix, dans le dernier budget, et, dans le contexte actuel, à ce
moment-ci, il n'est pas possible pour le gouvernement d'emprunter cette
voie-là.
Ceci dit, on
vient soutenir les étudiants comme on ne l'a jamais fait au cours des dernières
années. Nous sommes le gouvernement qui avons le plus investi pour soutenir les
étudiants, avec plusieurs mesures. Je vous donne un exemple rapidement.
À notre arrivée au gouvernement, en 2018, une étudiante en enseignement qui
terminait son baccalauréat avait
3 900 $ en poche, elle entrait sur le marché du travail à
45 000 $ par année. Là, avec les bourses Perspective, elle vient
avoir en poche 20 000 $ de bourse et elle vient entrer sur le marché
du travail à 60 000 $ par année.
On vient soutenir nos étudiants, on va continuer
de le faire de cette manière-là. Merci, Mme la Présidente.
• (10 h 50) •
La Présidente : Deuxième
complémentaire, M. le chef, allez-y.
M. Marc Tanguay
M.
Tanguay : Là, on veut entendre le premier ministre. Il y
avait un engagement clair, pas il y a cinq ans, trois ans, un
engagement clair, par une motion, pour faire en sorte, Mme la Présidente, qu'il
y ait une rémunération des stages. Il trouve
ça bien drôle. Ma question, je ne sais pas s'il va la trouver drôle : Que
vaut sa parole? Il y avait un engagement clair de rémunérer les stages, ils ont fait le choix budgétaire de renier leur
parole. Ils sont ici, en haut, dans les tribunes, d'autres dehors qui
manifestent, et ils se demandent la même question : Que vaut la parole du
premier ministre?
La Présidente : La réponse du
premier ministre.
M. François Legault
M. Legault : Mme la Présidente, le
chef de l'opposition officielle est revenu à plusieurs reprises avec le déficit
du dernier budget. Ce que j'ai essayé de lui expliquer, c'est
qu'essentiellement les augmentations de déficit viennent d'investissements massifs en éducation et en
santé. Donc, comment, d'un côté, son porte-parole dit : Le déficit est
trop gros, puis là le chef, il dit : Il faudrait en faire un plus
gros, déficit?
Donc, on a commencé à agir sur la rémunération
des stages puis on va continuer de le faire.
La
Présidente : ...principale, je reconnais maintenant le député
de Jean-Lesage. La parole est à vous, juste à vous. On l'écoute.
Rémunération des stages
étudiants
M. Sol Zanetti
M.
Zanetti : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, j'avais
une question très similaire à celle qui vient d'être posée, et on n'a pas eu de réponse. Je ne vais pas
poser la même question. Mais, sur la rémunération des stages, là, il y a un
enjeu économique important. Je ne sais pas
qui va répondre, le ministre de l'Emploi, du Travail, de l'Économie, des
Finances ou la ministre de
l'Enseignement supérieur. Il y a des étudiantes puis des étudiants partout au
Québec, là, 57 000 en grève cette
semaine, qui seront devant l'Assemblée nationale tantôt. Il y a des étudiantes
et étudiants qui sont en stage, et ils ne sont pas rémunérés, et ils
vivent une pression économique extraordinairement décourageante. Et on est en
pénurie de main-d'oeuvre, dans les secteurs publics en particulier, mais dans
plein d'autres secteurs extrêmement stratégiques. Est-ce que vous allez traiter
ça avec le niveau d'urgence que ça requiert? Rémunérer les stages, là, c'est
favoriser la diplomation. C'est faire en
sorte que les gens qui s'engagent là-dedans pour servir le Québec, ils vont être
plus nombreux à compléter, à aller sur le marché du travail puis à
pouvoir donner les services aux Québécoises et Québécois.
Est-ce que vous le voyez, que c'est un enjeu
économique? Est-ce que vous allez agir maintenant?
La
Présidente : Je vous rappelle, M. le député, que vous vous
adressez à la présidence. La réponse, maintenant, de la ministre de
l'Enseignement supérieur.
Mme Pascale Déry
Mme
Déry : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Et je poursuis,
justement. D'ailleurs, c'est ce que je partageais avec les étudiants de la FECQ au cours des
derniers jours. J'ai rencontré les étudiants du collégial et je leur ai bien
expliqué qu'on a fait des choix, mais des choix qui vont être bénéfiques
justement pour les étudiants.
Mais, pendant plusieurs années, là, au
cours des dernières années, tout ce qu'on a fait, en enseignement supérieur,
c'est de venir bonifier toutes les mesures
en aide aux étudiants : 400 millions à l'AFE depuis 2020, le plan
d'action sur la persévérance et la
réussite, le Plan d'action sur la santé mentale, le plan d'action de lutte
contre les violences à caractère sexuel, les bourses Perspective, jusqu'à
20 000 $ de bourses pour des jeunes qui vont dans les baccalauréats,
ou, encore une fois, au collégial, ont droit à 1 500 $ de
bourse par session réussie.
Il
y a plusieurs mesures qui ont été mises sur pied. On va continuer de les
bonifier quand on sera capables de le faire. Les étudiants sont bien au
fait.
Je
vous l'ai dit, on a fait des choix, et ces choix-là sont les bons choix. Ce
sont les choix nécessaires pour leur permettre d'accéder à un marché du
travail qui va leur donner de meilleures conditions. Merci, Mme la Présidente.
La Présidente :
Vous vous adressez à la
présidence. Maintenant, cela met fin à la période de questions et de réponses
orales.
Comme
il n'y a pas de votes reportés, nous allons passer à la rubrique Motions sans
préavis, et, pour ce faire, je cède la place au troisième vice-président de
l'Assemblée nationale. Merci beaucoup pour votre attention. Bonne fin de
journée.
Motions
sans préavis
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Alors,
à la rubrique des motions sans préavis, en fonction de nos règles et de
l'ordre de présentation des motions sans préavis, je reconnais maintenant un
membre du troisième groupe d'opposition. M. le député des Îles-de-la-Madeleine.
M. Arseneau :
Merci, M. le Président. Je
sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter,
conjointement avec la députée de La Pinière, la députée de Sherbrooke, la
députée de Vaudreuil, la motion suivante :
«Que
l'Assemblée nationale prenne acte du rapport de la Commissaire à la santé et au
bien-être déposé le 23 janvier 2024 et commandé par le
gouvernement;
«Qu'elle fasse siens
les 4 constats émis dans le rapport concernant les soins à domicile :
«Le système de
soutien à domicile est construit sur des assises fragiles;
«Le système est
complexe, peu intégré et peu performant;
«Les mesures et [les]
programmes de soutien à domicile ont des conditions d'éligibilité variables qui
répondent imparfaitement aux besoins de la population;
«Le système est peu
soutenable financièrement;
«Finalement,
que l'Assemblée nationale demande au gouvernement de mettre en oeuvre
l'ensemble des recommandations du rapport dans les plus brefs délais.»
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Y
a-t-il consentement pour débattre de cette motion? Il n'y a pas de consentement.
Pour
la prochaine motion, j'invite maintenant un membre du groupe formant le
gouvernement. M. le député de Maskinongé.
Rendre
hommage à la sergente Maureen Breau
M. Allaire : Merci,
M. le Président. Je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter
la motion suivante conjointement avec la
députée de Westmount—Saint-Louis, le député de Laurier-Dorion, le député de Jean-Talon et la
députée de Vaudreuil :
«Que l'Assemblée
nationale souligne, en ce 27 mars, le premier anniversaire du triste décès
de la sergente Maureen Breau, qui a tragiquement perdu la vie dans l'exercice
de ses fonctions;
«Que
les élus de cette Assemblée reconnaissent les sacrifices qu'exercent les
policières et les policiers pour servir et protéger la société, un
engagement que la sergente Breau a incarné avec courage et un sens du devoir
inégalé;
«Que cette Assemblée
profite de cette journée pour se souvenir que depuis 1852, nous avons perdu au
Québec 190 policiers et policières décédés dans l'exercice de leurs
fonctions;
«Qu'elle rappelle le
caractère dangereux et imprévisible de ce métier et qu'il est de notre devoir
de reconnaître et d'honorer leur immense
sacrifice, tout en cherchant continuellement à améliorer la sécurité de celles
et ceux qui assurent notre protection au quotidien;
«Qu'elle reconnaisse
l'importance de la concertation de tous les acteurs concernés pour faire en
sorte de mieux protéger nos agents de la paix qui accomplissent leur mission
avec beaucoup d'altruisme;
«Qu'enfin,
elle observe une minute de silence pour honorer sa mémoire afin que son immense
dévouement et son courage ne soient jamais oubliés.»
(Applaudissements)
Le Vice-Président
(M. Benjamin) : Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?
M. Lévesque
(Chapleau) : Il y a consentement, sans débat, M. le Président.
Mise aux voix
Le Vice-Président
(M. Benjamin) : Il y a consentement, sans débat. Cette motion est-elle
adoptée?
Des voix : Adopté.
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Alors,
nous allons maintenant observer une minute de silence à la mémoire du
sergent Maureen Breau.
• (10 h 59 — 11 heures)
•
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Je
vous remercie. Et, pour la prochaine motion, c'est un membre de... formant
l'opposition officielle, et c'est Mme la députée de Robert-Baldwin.
Demander au gouvernement l'octroi du financement requis et
la
concrétisation rapide des projets de maisons d'hébergement
pour femmes victimes de violence conjugale
Mme Garceau :
Merci beaucoup, M. le Président.
Je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante conjointement avec la députée
de Mercier, le chef du troisième groupe d'opposition et la députée de Vaudreuil :
«Que
l'Assemblée nationale prenne acte que plusieurs projets de maisons
d'hébergement pour femmes victimes de violence conjugale sont
présentement en attente d'autorisation et de financement gouvernemental;
«Qu'elle
déclare que ces projets doivent être envisagés dans une optique beaucoup plus
large qu'un simple coût par porte et être priorisés notamment en raison de leur
impact important pour la vie et la sécurité des femmes et des enfants;
«Qu'elle souligne l'urgence
d'agir pour augmenter l'offre en maison d'hébergement;
«Qu'enfin,
elle exige du gouvernement caquiste la concrétisation rapide de ces projets et
l'octroi du financement requis.»
Merci.
Le Vice-Président
(M. Benjamin) : Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?
M. Lévesque
(Chapleau) : Il y a consentement, sans débat, M. le Président.
Le Vice-Président
(M. Benjamin) : Il y a consentement, sans débat. M. le leader de
l'opposition officielle.
M. Derraji : Je
vous demande un vote électronique, s'il vous plaît.
Mise
aux voix
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Alors,
qu'on appelle les députés. La période de vote est maintenant ouverte.
La période de vote
est terminée. M. le secrétaire général.
Le
Secrétaire : Pour : 106
Contre :
0
Abstentions :
0
Le Vice-Président
(M. Benjamin) : Cette motion est donc adoptée. M. le leader de
l'opposition officielle.
M. Derraji : Merci,
M. le Président. J'aimerais qu'une copie de cette motion soit envoyée à
Alliance MH2, Regroupement des maisons
pour femmes victimes de violence conjugale, SOS Violence conjugale, Fédération
des maisons d'hébergement pour femmes. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président
(M. Benjamin) : Ce sera fait, M. le leader.
Et,
pour la prochaine motion, c'est un membre du groupe formant... du deuxième
groupe d'opposition. M. le député de Saint-Henri—Sainte-Anne.
Souligner
la Semaine des travailleuses sociales et
des travailleurs sociaux du Québec
M.
Cliche-Rivard : Merci, M. le Président. Je sollicite le consentement
de cette Assemblée pour présenter la motion
suivante conjointement avec le ministre responsable des Services sociaux, la
députée de D'Arcy-McGee, le député des Îles-de-la-Madeleine et la
députée de Vaudreuil :
«Que
l'Assemblée nationale souligne la Semaine des travailleuses sociales et des
travailleurs sociaux qui se tient du 24 au 30 mars sous le thème T.S. :
au coeur de toutes les transitions;
«Qu'elle
rappelle le rôle essentiel des plus de 16 000 TS au Québec en
prévention, ainsi que d'intervention auprès des enfants et des personnes, des couples, des familles, des groupes et
des communautés qui traversent des périodes difficiles ou qui amorcent
de nouvelles étapes de leur vie;
«Qu'elle
encourage le gouvernement à continuer de valoriser les services sociaux comme
maillon essentiel et distinct dans le filet social de nos communautés;
«Qu'enfin,
l'Assemblée nationale félicite les [travailleurs sociaux] et les [travailleuses
sociales] pour leur dévouement et leur apport inestimable malgré un
contexte de travail souvent difficile.»
Le Vice-Président
(M. Benjamin) : Y a-t-il consentement pour débattre de cette
motion?
M. Lévesque
(Chapleau) : ...il y a consentement, sans débat.
Mise
aux voix
Le Vice-Président
(M. Benjamin) : Il y a consentement, sans débat. Cette motion
est-elle adoptée?
Des voix :
Adopté.
Le Vice-Président
(M. Benjamin) : Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.
Avis
touchant les travaux des commissions
M. Lévesque
(Chapleau) : Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Et donc nous sommes
à la période des avis touchant les travaux
des commissions. Et donc j'avise cette Assemblée que la Commission des
transports et de l'environnement va poursuivre l'étude détaillée du
projet loi n° 48, la Loi modifiant
principalement le Code de la sécurité routière afin d'introduire des
dispositions relatives aux systèmes de détection et d'autres dispositions en
matière de sécurité routière, aujourd'hui, après...
Des voix :
...
Le Vice-Président (M. Benjamin) : M.
le leader adjoint du gouvernement, un instant. S'il vous plaît! Collègues, je
vous demanderais de quitter avec un peu plus de discrétion, s'il vous plaît.
Merci. Poursuivez, M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Lévesque
(Chapleau) : ...à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine;
La Commission de l'aménagement
du territoire va poursuivre les consultations particulières et les auditions
publiques sur le projet de loi n° 45, Loi modifiant la Loi sur la sécurité
dans les sports afin principalement de renforcer la protection de l'intégrité des personnes dans les loisirs et les
sports, aujourd'hui, après les avis
touchant les travaux des commissions jusqu'à 12 h 50 et de
15 heures à 18 h 15, à la salle Pauline-Marois;
La
Commission de l'économie et du travail va entreprendre l'étude détaillée du
projet de loi n° 51, la Loi
modernisant l'industrie de la
construction, aujourd'hui, après les
affaires courantes jusqu'à 13 heures, à la salle Marie-Claire-Kirkland;
La
Commission de l'économie et du travail va poursuivre les consultations
particulières sur le projet de loi n° 44, la Loi modifiant
principalement la Loi sur le ministère de l'Économie et de l'Innovation en
matière de recherche, de 15 heures à 17 h 25, à la salle
Marie-Claire-Kirkland;
La
Commission des finances publiques va entreprendre les consultations
particulières et les auditions publiques sur le projet de loi n° 53, la Loi
édictant la Loi sur la protection contre les représailles liées à la
divulgation d'actes répréhensibles et modifiant d'autres dispositions
législatives, aujourd'hui, après les avis touchant les travaux des commissions
jusqu'à 13 h 05 et de 15 heures à 18 h 15, à la salle
Louis-Joseph-Papineau.
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Y
a-t-il consentement pour déroger à l'article 143 du règlement concernant
l'horaire des travaux des commissions? Consentement.
Pour
ma part, je vous avise que la Commission de l'économie et du travail se réunira
en séance de travail demain, le
jeudi 28 mars 2024, de 8 heures à 8 h 30, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine, afin de statuer sur la possibilité que la
commission se saisisse des pétitions portant sur la modernisation de la notion
de vie maritale sur les prestataires de l'aide sociale.
Je vous avise
également que la Commission des relations avec les citoyens se réunira en
séance de travail demain, le
jeudi 28 mars 2024, de 8 heures à 8 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papineau, afin de statuer sur la possibilité que la
commission se saisisse de la pétition concernant la participation du Québec au
Programme humanitaire familial pour les Colombiens, les Haïtiens et les
Vénézuéliens.
Renseignements
sur les travaux de l'Assemblée
Avis
de sanction de projets de loi
Je
vous informe aussi, à la rubrique Renseignements sur les travaux de
l'Assemblée, qu'il y aura sanction des projets de loi suivants aujourd'hui, au bureau de son honneur le
lieutenant-gouverneur... la lieutenante-gouverneure : le projet de loi n° 42, Loi visant à prévenir et à combattre le harcèlement psychologique et la
violence à caractère sexuel en milieu de travail, à 15 heures; le projet de loi n° 41, Loi édictant la Loi sur la performance
environnementale des bâtiments et modifiant diverses
dispositions en matière de transition énergétique, à 15 h 30; et le
projet de loi n° 46, Loi sur l'amélioration de la protection des enfants
dans les services de garde éducatifs, à 16 heures.
Affaires
du jour
La
période des affaires courantes étant terminée, nous allons maintenant passer
aux affaires du jour. M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Lévesque (Chapleau) :
Oui. Merci beaucoup, M. le Président...
(Consultation)
Le Vice-Président
(M. Benjamin) : M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Lévesque
(Chapleau) : Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Et nous sommes maintenant au discours du budget.
Aux affaires prioritaires, à l'article 1 du feuilleton, l'Assemblée
reprend le débat ajourné à l'Assemblée le 20 mars 2024 sur la motion de M. le ministre des Finances proposant
que l'Assemblée approuve la politique budgétaire du gouvernement ainsi
que sur les motions formulant un grief.
Affaires
prioritaires
Reprise
du débat sur la motion du ministre des Finances proposant que
l'Assemblée approuve la politique budgétaire du gouvernement
et sur les motions formulant un grief
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Alors,
nous sommes bel et bien — merci,
M. le leader adjoint du gouvernement — à
cet article 1. Donc, aux affaires prioritaires, l'Assemblée reprend le
débat ajourné le 20 mars 2024 sur la motion de M. le ministre des
Finances proposant que l'Assemblée approuve la politique budgétaire du
gouvernement ainsi que sur les motions
formulant un grief présentées par M. le député de Marguerite-Bourgeoys, M. le
député de Maurice-Richard, M. le député
de Jean-Talon, M. le chef de l'opposition officielle, M. le député de
Jean-Lesage, Mme la députée de
D'Arcy-McGee, Mme la députée de Sherbrooke, Mme la députée de
Notre-Dame-de-Grâce, Mme la députée des
Mille-Îles, M. le député de Laurier-Dorion, Mme la députée de La Pinière, Mme
la députée de Verdun, M. le député de Jacques-Cartier,
M. le député de Taschereau, M. le député de Nelligan, Mme la députée de
Robert-Baldwin, Mme la députée de Mercier, Mme la députée de Bourassa-Sauvé, M.
le député de Rosemont, Mme la députée de Mont-Royal—Outremont,
M. le député de Hochelaga-Maisonneuve, M. le
député de Pontiac, M. le député de Saint-Henri—Sainte-Anne, M. le député des Îles-de-la-Madeleine et M. le député de
Marquette.
• (11 h 10) •
Conformément
aux dispositions de l'article 276 du règlement, je vous rappelle qu'une
intervention de 30 minutes est réservée aux représentants de l'opposition
officielle et que ce débat se terminera par la réplique d'une heure
accordée au ministre des Finances. Je
comprends qu'il y aura toutefois... qu'il y aurait toutefois consentement pour
permettre au porte-parole du deuxième
groupe d'opposition de faire une intervention d'une durée maximale de
10 minutes. Y a-t-il consentement? Consentement.
Je cède donc
maintenant la parole à M. le député de Maurice-Richard.
M. Haroun
Bouazzi
M. Bouazzi : Merci, M. le Président. Je
pense que beaucoup, beaucoup de choses ont été dites, depuis déjà deux semaines,
concernant le budget qui a été déposé par le gouvernement.
Force est de
constater que, si la situation est aussi difficile, évidemment, c'est parce que
le gouvernement avait, à la base, prévu
d'appauvrir les travailleuses et travailleurs qui nous servent des services
essentiels dans... de l'État, et, de l'autre côté, évidemment qu'il a
tenu à faire une baisse d'impôt qui profite très, très majoritairement aux plus
nantis et qui, une fois devant le constat...
une fois devant le constat de ses... du déficit, a continué à penser que
baisser les impôts, entre autres, des
personnes qui gagnent 100 000 $ et plus, et qui nous prive de
600 millions de dollars, et annuelles, récurrentes, ad vitam
aeternam, est une bonne chose.
Ce
qu'on a vu aussi, M. le Président, c'est une... On est, en fait, en train de
vivre la continuité idéologique des 25 dernières années en matière de
finances publiques. Et puis le gouvernement s'est retrouvé devant une
contradiction, une propre
contradiction, qui, d'un côté... il est, évidemment, héritier de ce qui s'est
passé dans... à la fin des années 2000 dans le gouvernement de M. Bouchard, et qui, ensuite, a été continué
évidemment par le Parti libéral, qui est toute la question obsessive de
la question du déficit zéro.
Dans
nos échanges avec le ministre, nous avons... Nous sommes tous les deux d'accord,
je pense, pour dire que, si on se retrouve dans une configuration où le
pourcentage de la dette par rapport au PIB diminue, malgré le fait que
le déficit n'est pas effacé, c'est une
meilleure posture en soi. Et donc le dogme, en tant que tel, juste
théoriquement, ne tient pas la route.
Ça ne veut pas dire évidemment qu'il ne faut pas s'assurer que les finances de
l'État sont en bonne situation.
Ce
qui nous a étonnés, par exemple, et puis c'est peut-être quelque chose de
nouveau dans nos échanges avec le ministre
des Finances, c'est une... plus qu'une nonchalance, je dirais, mais une... En
tout cas, ce qui nous a vraiment étonnés, c'est la
question d'à qui devrait appartenir notre dette souveraine. Et, vous savez peut-être,
M. le Président, qu'une des raisons
pourquoi des pays sont capables de s'endetter de manière immense, comme...
prenez l'exemple du Japon, qui dépasse de
150 % de son PIB en dette, c'est parce que la dette souveraine appartient
aux Japonaises et aux Japonais. Et, au Québec, d'ailleurs, si notre situation est, en fait, très bonne d'un point de
vue dette publique, le gouvernement a rappelé à plusieurs reprises qu'en
pourcentage du PIB par rapport à il y a quatre ans, nous sommes quand même
baissés en matière de quantité de dettes par rapport à notre PIB, c'est bien
aussi parce que la dette souveraine appartient en majorité à des institutions québécoises, canadiennes, évidemment,
les institutions financières, la Caisse de dépôt, les différentes banques,
la Caisse Desjardins, etc. Et puis évidemment, nous, à travers nos
investissements, nos REER aussi, nous pouvons être propriétaires de la dette du
Québec. Et ça, ça fait une grosse différence.
Et
puis ce sera peut-être important de s'assurer qu'il y ait des mécanismes qui
puissent privilégier que cette dette-là reste au Québec. Parce que, M. le Président, quand on arrive à négocier,
si, advenant une situation plus compliquée, économiquement, que celle
qu'on a actuellement... et qu'on arrive à négocier avec les différentes
institutions qui nous prêtent de l'argent,
bien, évidemment, si on s'assoit avec la Banque Nationale, la Banque Royale,
Desjardins ou la Caisse de dépôt,
bien, il va y avoir des solutions qui évitent de faire tomber l'économie
québécoise dans un chaos. Parce que, par la bande, ces institutions-là perdraient au change, dans d'autres
investissements qu'ils ont faits, et ça n'intéresserait personne de vivre une crise économique. Alors que, dans
d'autres pays, si les institutions qui détiennent ces dettes-là sont des
institutions étrangères, évidemment,
elles ne vivent pas les conséquences des resserrements économiques, parfois
absolument colossaux, que des pays peuvent vivre. On peut penser à la Grèce, il
n'y a pas si longtemps, ou même à l'Argentine, en ce moment, qui est, rappelons-le, un pays qui a vécu 250 %
d'inflation l'année dernière, entre autres parce que les institutions
financières qui prêtaient de l'argent
ont tiré leurs billes. Et donc c'est, entre autres, pour ça que, je me suis
dit, c'est... après tout ce qui a été
dit depuis le début, c'est peut-être un argument qui nous semblait important et
qui, malheureusement, ne prend pas assez de place dans le débat public.
Maintenant,
évidemment, peut-être pour les quelques minutes qui me restent, il faudrait
quand même rappeler les critiques que
nous avions de ce budget-là : le manque d'investissement en matière de
logement; le 1,8 milliard qui a été annoncé, il y a seulement
quelques mois, dont 900 millions viennent du fédéral, ne commenceront pas
à être dépensés avant 2025-2026, et non pas
cette année fiscale qui s'en vient; le fait que nous avions demandé un fonds
qui permette aux différents... aux
agriculteurs, principalement, mais pas seulement, de pouvoir résister aux
crises climatiques qui nous attendent, de pouvoir s'adapter à ces crises
climatiques, on pense aussi qu'il y a un manque évident à ce niveau-là.
Et
puis, par ailleurs, encore une fois, un budget, ça permet de prévoir pour
l'avenir, et malheureusement l'exercice est beaucoup trop restreint, comme vision, et ne peut pas... Je veux
dire, je vous parlerais, par exemple, de la question du vieillissement
de la population, qui est quand même quelque chose d'assez incroyable, parce
que c'est une des choses les plus simples à
prévoir, hein, on est capable de savoir où on sera dans 20 ans, d'un point
de vue démographique, et on sait que
le vieillissement de la population va avoir une pression énorme sur nos
services de l'État et principalement sur les services de santé. Et on sait
aussi qu'il y a toutes sortes d'études qui montrent que chaque dollar investi
aujourd'hui en matière de prévention,
c'est-à-dire non pas pour faire en sorte que nos malades reviennent en bonne
santé, mais pour éviter aux personnes
malades de... aux personnes en bonne santé de tomber malades, bien, chaque
dollar investi en rapporte six, en
fait, parce qu'évidemment ça prévient la pression qu'on pourrait avoir sur
notre système de santé. Et, dans ce genre de situation, malheureusement, les investissements de l'État sont très,
très largement insuffisants. Et, d'un point de vue finances publiques, c'est des investissements qui,
pourtant, seraient salutaires pour les années à venir, pour prévenir des
problèmes financiers des années à venir.
Évidemment, on a parlé particulièrement de la question des soins à domicile,
des différents services à domicile
pour les personnes aînées, où la Vérificatrice
générale expliquait qu'on ne couvrait
pas plus que... moins que 11 %,
si mes souvenirs sont bons, des besoins actuels et qui, avec ce qui va être
investi... ça ne changera pas au fait que 90 % des besoins ne sont
toujours pas couverts.
Et
enfin il y a des investissements qui ne sont pas vraiment des dépenses mais qui
sont, en fait, des investissements pour l'avenir, et on nommera
particulièrement la question du transport en commun. On est dans une situation
où il y a maintenant un phénomène nouveau, du côté du gouvernement, M. le
Président, où on commence à admettre ce que Québec
solidaire dit depuis longtemps, c'est
que nous devons repenser nos modes de transport et que le «tout à l'auto» n'est
pas une option d'avenir pour réussir la transition écologique dont la
planète a besoin. Et, malheureusement, pour une sixième année consécutive, il n'y a pas le début d'un commencement d'un
nouveau projet de transport en commun qui est initié et encore moins exécuté par... actuellement au Québec. Et puis,
évidemment, c'est très triste et puis c'est un manque de vision évident.
• (11 h 20) •
En
conclusion, M. le Président, nous allons continuer à être vigilants, parce que,
comme le gouvernement ne compte pas revenir sur les baisses d'impôt des
plus riches, et même peut-être va augmenter les baisses d'impôt, monsieur... L'économiste... Il y a des économistes qui nous
parlent de la quadrature du cercle, par rapport aux finances publiques, ce
sera ou l'austérité ou des augmentations de
revenus. Le gouvernement nous dira que ce n'est ni l'un ni l'autre. Nous nous
assurerons que l'austérité restera à l'extérieur des options devant nous.
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci,
M. le député, donc, merci pour votre intervention. Et je cède maintenant
la parole à M. le député de Marguerite-Bourgeoys. M. le député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Frédéric Beauchemin
M. Beauchemin : Merci beaucoup,
M. le Président. Déficit record, mais pire, déficit de crédibilité. On est face
à un gouvernement qui a décidé de pelleter
par en avant. On est face à un gouvernement qui, l'an dernier, a décidé de
piger dans les contributions au Fonds des générations. On est face à un gouvernement que leur objectif
premier est de, si on peut dire,
créer l'inégalité intergénérationnelle. Actuellement, on fait face à un
gouvernement qui a décidé que ce n'était pas grave si nos jeunes vont se
retrouver avec une carte de crédit complètement remplie.
Une des
premières choses qu'on a réalisées, lors du budget de mardi, il y a deux
semaines déjà, c'est que ça allait vraiment
être différent par rapport à la perception que les marchés allaient avoir, ça
allait être différent par rapport à la perception que les agences de
crédit, les agences de notation vont avoir de ce qui se passe ici, à Québec.
J'ai passé
quelques années dans ce domaine-là. Pour vous dire que c'est tout dans la
subtilité, normalement, lorsque les
écrits de ces agences-là sortent publics. Et leurs commentaires, normalement,
font des changements de cap. Et ils vont, de façon douce, vers une correction de la trajectoire pour dire que,
bon, le gouvernement aurait pu s'améliorer ici, il aurait pu s'améliorer là.
Mais, cette année, par rapport à l'an dernier, c'est un 90 degrés qu'on a
eu de la part de DBRS, c'est un
90 degrés qu'on a eu de la part de Moody's. Ce n'est pas encore un
180 degrés, mais c'est la première fois depuis le gouvernement du
PQ, c'est la première fois que les agences de crédit parlent avec autant de
fermeté par rapport à leur vision négative,
si on peut dire, de ce qui semble s'en venir de la part de ce
gouvernement-là : une perte de contrôle des finances publiques
remarquée par les agences de crédit.
Et je vais
vous la simplifier en termes de... comme, qu'est-ce que ça veut dire, pour
nous, de façon quotidienne, O.K.? De
façon quotidienne, ça va nous coûter plus cher pour financer le Québec. C'est
simple. Pour comprendre, il faut savoir que, de 2014 à 2018, l'effort que tous les Québécois ont fait, l'effort
que le Parti libéral a mis en place pour éliminer le déficit structurel, qui avait été mis en place par
le gouvernement précédent, ont fait en sorte que les marchés, les participants
dans le marché ont valorisé plus ce que le
Québec faisait comme emprunts, et donc déterminaient que ça coûterait, donc,
moins cher, au Québec, emprunter, par
rapport à ce que paie l'Ontario. Et donc on a vu, tranquillement, avec le
temps, un écart se creuser en faveur du Québec, où, pour le Québec, ça
coûtait, donc, moins cher, se financer, que l'Ontario.
Lundi,
avant... En fait, je vais recommencer. À partir de 2018, l'amélioration de cet
écart-là a arrêté, et, tranquillement, pas
vite, on a vu une détérioration de l'avantage qu'on avait. Donc, on est passés
de vraiment moins cher, à moins cher, à un peu moins cher sous la gouverne de la CAQ. Lundi, avant le budget, on
était encore moins cher que l'Ontario pour se financer. Le jour du budget, les marchés ont réagi. Quand les marchés
réagissent, il faut comprendre que c'est un message qu'ils nous
envoient, et, normalement, dans ce genre de marché là, le marché du coût
d'emprunt relatif du Québec par rapport au
coût d'emprunt de l'Ontario, c'est des marchés qui sont stables. Lorsque ça, ça
bouge, c'est des plaques tectoniques qui bougent. Et ce qu'on a compris,
c'est que le marché disait : On n'est pas certains de ce qu'on entend à
Québec. Le lendemain, mercredi, le premier
ministre parle, et là les marchés ont vraiment changé de cap. On est passé de
moins cher de l'Ontario à plus cher que l'Ontario.
Le ministre
des Finances s'est félicité : Il n'y a pas de souci, on a été capable de
financer 5 point quelques milliards de dollars, tout va bien, les investisseurs sont au rendez-vous. Et
c'est normal, on les paie plus maintenant. C'est tout à fait normal qu'ils soient présents, on les motive
encore plus pour financer le Québec, en les payant plus cher que l'Ontario.
Donc, note de passage : échec.
Puis on parle
souvent de vouloir se comparer, de façon relative, puis le premier ministre
nous a dit : Moi, là, 1,5 % du produit intérieur brut comme
déficit, là ça ne me dérange pas, c'est gérable, il n'y a pas de souci, vous
allez voir, l'Ontario va sortir, ce ne sera
pas bien plus beau que nous autres. Correct. L'Ontario est sorti hier. Le
Québec a fait un déficit de
1,5 % de son PIB mardi dernier... il y a deux semaines. L'Ontario, c'était
1,1 % du PIB. Ça a l'air d'une petite différence, là, mais, en chiffres absolus, c'est des milliards
de dollars, là, ça, des dizaines de milliards de dollars. Puis la réalité,
c'est qu'encore une fois le premier ministre s'est trompé à prévoir
comme quoi qu'on allait être aussi bien, sinon mieux que l'Ontario. Bien, force
est de constater qu'encore une fois les prévisions de la CAQ se sont trouvées
erronées.
Une des pires
choses qu'on aura pu remarquer dans ce déficit-là, c'est le retour en force des
déficits structurels. Ici, on parle
de 4 milliards de dollars, M. le Président,
4 milliards de dollars qui vont être récurrents, qui vont être
présents dans le financement
quotidien des Québécois. Ce 4 milliards là va faire en sorte qu'il va
falloir, à un moment donné, que des décisions
difficiles se prennent. Il va falloir aussi, peut-être, penser à améliorer les
revenus. Nous, on a fait des propositions dans le sens de l'amélioration des revenus. Nous, on a fait des
propositions dans le sens qu'il fallait penser, peut-être, augmenter la productivité des entreprises québécoises. On a
pensé que ce serait intéressant d'essayer de résorber la pénurie de logements.
On a aussi pensé que, pour retourner des...
majoritairement, des femmes et des parents sur le marché du travail, il serait
intéressant et peut-être, même, très
opportun de convertir des places en garderies non subventionnées à des places
subventionnées. Bien, on n'a eu aucune ou presque aucune de ces réponses
de la part du gouvernement.
On a eu à peine 1 000 places en
garderies subventionnées. Comme l'a dit ma collègue, ça va prendre plus de 50 ans avant de résorber le déficit qu'on a
en places de garderie. Au niveau de l'habitation, rien d'additionnel, aucun
nouvel argent.
Puis, au niveau de la productivité, puis c'est
le point que je veux vraiment mettre une emphase là-dessus, c'est qu'au niveau de la productivité, hier, j'ai
entendu le ministre de l'Économie nous dire que, depuis cinq ans, au Québec, on
a une amélioration de 5,2 % de
notre productivité. Bien, de toute évidence, il y a un problème à
l'intérieur... de communication à
l'intérieur du gouvernement, parce que, si on va à la page... — puis je vais la retrouver, là, excusez-moi, je
l'avais, puis le livre s'est fermé — la page de la productivité, je l'ai ici, un
instant, il y a eu zéro gain de productivité au Québec depuis cinq ans,
zéro, là. Puis ça, c'est dans le livre du ministre des Finances, dans son
budget, Priorités : santé et éducation. Zéro gain de productivité en cinq ans. Mais pourtant, hier, on a entendu
le ministre de l'Économie nous parler comme quoi que, bon, il y a eu une
amélioration de 5,2 %, ou quelque chose du genre, de la productivité au
Québec.
Alors, je ne
comprends pas le manque de coordination. Je ne comprends pas pourquoi on fait
la promotion de réalités alternatives
lorsque, de façon évidente, tous les Québécois, actuellement, font des efforts
pour essayer de se sortir du pétrin économique
dans lequel on est actuellement grâce à ce gouvernement-là, un quatrième...
excusez, un troisième trimestre, le quatrième, le dernier trimestre de 2023,
négatif, confirmé hier par Statistique Québec. Ça fait trois trimestres
consécutifs qu'on a du recul de notre
produit intérieur brut. C'est la définition classique d'une récession
technique. On s'obstine à nous dire :
Non, ce n'est pas comme ça qu'on voit les choses, nous, il n'y a rien à voir,
tout est beau, ça continue à progresser dans l'économie du Québec. Bien, je m'excuse, les Québécois font des choix difficiles.
Les Québécois sont en train de rationaliser leurs dépenses. Pendant ce
temps-là, bien, on a un gouvernement qui continue à nous faire des déficits
extraordinairement structurels.
• (11 h 30) •
Une
des choses qui a été la plus, comment pourrais-je dire, donc, déstabilisante,
c'est que, l'an passé, le ministre des Finances nous avait parlé d'une
prévision économique de 0,6 % du produit intérieur brut, puis que ça, ça
allait être réaliste, et facile à obtenir,
et tout. Bon, à ce moment-là, nous, on était déjà sortis, quelques instants
après le huis clos, pour le
dire : On porte ici des lunettes roses. Ce n'est pas ce que l'ensemble des
institutions financières nous disent. Ce qu'on voit, c'est que, de façon très optimiste, on serait peut-être à
l'équivalent de 0,3 %, mais il y a des gens qui sont même en récession
pour l'année au complet. Bien, hier, on a eu la confirmation que, finalement,
l'année au grand complet aura été zéro.
Donc, on s'entend, prévision, disons, un peu champ gauche, de la part du
ministre des Finances, l'an passé. Et, cette année, bien, on récidive
avec une prévision au niveau des revenus autonomes, et j'ai fait l'analyse, j'ai
posé des questions, hier, au ministre des
Finances, on a fait l'analyse. Dans un contexte économique où notre prévision
pour l'année qui s'en vient, qui,
maintenant, est de 0,6 %, le ministre a augmenté ses prévisions de revenus
autonomes par rapport à ce qu'il
disait l'an passé. Et, l'an passé, le contexte économique sous-jacent, pour le
chiffre qu'il avait donné pour les revenus autonomes de l'an passé, le
contexte économique était plus optimiste que celui qui est dans le budget de
cette année.
On
est donc rendus à se poser la question : Comment se fait-il qu'on récidive
encore avec de mauvaises prévisions? Puis je ne suis pas le seul à le dire.
L'institut du Québec a publié un papier la semaine dernière pour dire comme
quoi que, selon eux, les revenus
autonomes, ça allait être beau si c'est 3 %. Bien, ce différentiel-là, M.
le Président, là, de 4,7 % à 3 %, c'est 1,7 % fois les revenus autonomes anticipés. On parle de
2 milliards de dollars approximativement. Ce n'est pas un
arrondissement, là. C'est beaucoup de sous. On a un déficit de
11 milliards de dollars. Et puis, si les revenus autonomes ne sont pas au rendez-vous et que ça se trouve à être
plus ce que l'institut du Québec mentionne qui se réalise, bien, est-ce que ça va être 13 milliards, le déficit? On ne
peut pas le savoir, on n'a pas la conversation sur le sujet actuellement dans
la place publique. Rien pour aider nos PME,
rien pour aider en habitation, rien pour aider, évidemment, comme je disais
tantôt, les familles pour les places non subventionnées en garderie.
Nous, on avait
proposé d'avoir des objectifs libéraux, courageux, d'amélioration de la
productivité. La Banque du Canada est sortie
hier, en fait, avec un commentaire qui était très précis sur les conséquences
de ce manque de vision, de ne pas
vouloir améliorer notre productivité, en disant que le manque de productivité va
créer un cercle vicieux où est-ce qu'on va se retrouver à continuer à stimuler
l'inflation en n'étant pas productifs. Et donc le cercle vicieux va continuer
où est-ce qu'on ne pourra pas stimuler les
entreprises à vouloir investir dans leur modèle d'affaires, à vouloir se
moderniser, à vouloir, donc, améliorer leur productivité.
Donc,
quand on regarde l'ensemble de ce qui a été offert dans le budget pour pouvoir
aider nos PME, bien, c'est triste, parce qu'on a passé les cinq dernières
années... on va avoir passé les cinq dernières années à avoir zéro gain en
productivité. La réponse devrait être, normalement : Bon, bien, O.K.,
revisitons les programmes, faisons de quoi qui va être optimal pour aider nos entreprises à avancer,
faisons en sorte, en fait, que la productivité devient un objectif, suivons les
recommandations de la chaire en productivité du HEC, qui disent qu'un objectif
de 2 % devrait être raisonnable pour le
Québec. Faisons les actes qui sont nécessaires pour atteindre cet objectif.
Mais rien, rien, de la part du gouvernement, sur la productivité.
On
a de besoin d'avoir plus de propriété intellectuelle. On a de besoin d'avoir
plus de recherches faites au Québec pour que les Québécois puissent avoir plus
de propriété intellectuelle. On devrait se donner un objectif d'avoir
l'ensemble de recherches qui se fait
au Québec en pourcentage de notre produit intérieur brut, puis que ce ratio-là
soit de 3 %. Je vous parle de
ça, là, c'est... Tout le monde parle de ça sur la planète parce que c'est le facteur
compétitif qui fait en sorte qu'on peut diviser les pays qui vont gagner
versus ceux qui ne vont pas gagner. Je ne peux pas concevoir qu'un gouvernement
qui se dit un gouvernement de l'économie
n'entre même pas ça dans ses calculs lorsqu'il nous présente, sans plan de
retour à l'équilibre budgétaire, un déficit record de
11 milliards de dollars.
Moi, il me semble
qu'à ce moment-là je me serais dit : O.K., correct, là, ça ne va pas bien.
Qu'est-ce qu'on peut faire pour remettre le bateau dans la bonne direction?
Qu'est-ce qu'on peut faire pour s'assurer qu'on va permettre aux prochaines
générations d'avoir une économie au rendez-vous? Bien, on se donne des
objectifs, des objectifs nobles. Faisons de
la productivité un objectif de société, faisons de la recherche un objectif par
rapport à notre produit intérieur brut, qui va faire en sorte qu'on va avoir de la propriété intellectuelle ici,
au Québec, plus de propriété intellectuelle, ce qui va faire qu'on va
être en contrôle de notre avenir. Diversifions notre économie. Utilisons le
levier qu'est nos 262 000 PME à travers les 17 régions
économiques du Québec. Servons-nous du courage des Québécois et Québécoises,
tout partout à travers le Québec, pour
justement faire en sorte qu'on puisse faire des revenus autonomes au-delà de ce
qu'on a de besoin. Augmentons les revenus. Je ne comprends pas pourquoi
qu'on n'a pas eu ça de la part du gouvernement de la CAQ.
Ce
qui est important de comprendre aussi dans le message qu'autant le marché
obligataire nous a envoyé, que les agences
de crédit, que l'ensemble des journalistes ont pu promouvoir sur leurs
plateformes, de l'ensemble des commentaires qu'on a entendus, c'est qu'il y a un dérapage qui est en train d'être
fait en ce moment, là. On a perdu le contrôle des finances publiques. Puis c'est ça qui est triste dans tout
ça, parce qu'on a gaspillé notre marge de manoeuvre, on a fait des chèques
électoralistes, on a invité les Kings, à fort prix, à venir nous voir. On n'est
pas capables d'avoir une vision d'avenir au niveau du développement
économique. On fait des promesses, on ne les livre pas. On disait qu'on allait
réduire la taille de l'État, on l'a
augmentée au plus haut niveau jamais existant. Ce gouvernement-là devrait
faire, au minimum, preuve... faire preuve d'humilité et choisir la
transparence.
Mon
collègue de Nelligan a parlé de proposer un projet de loi pour le
parlementaire... le directeur parlementaire du budget — merci,
j'avais un blanc de... j'avais une crampe. Et donc ça, c'est un instrument qui
serait utile pour toute la société
québécoise. Et une des choses qui serait utile dans le mandat qu'on pourrait
donner au directeur du budget, c'est de s'assurer de nous faire un rapport sur
l'équité intergénérationnelle. Et je suis certain, M. le Président, que, si le
directeur du budget existait maintenant, le
rapport de l'an passé aurait été atroce sur l'équité intergénérationnelle et le
rapport, cette année, aurait été aussi atroce sur l'équité intergénérationnelle.
On ne peut pas penser être capable de regarder l'ensemble des messages envoyés par ce gouvernement-là puis
se dire que c'est vraiment une vision très court terme de la classe politique,
actuellement, d'agir de la sorte.
Le ministre des Finances a été capable, en décembre, de passer une loi lui
permettant de faire en sorte que, maintenant, on allait avoir une fourchette pour notre objectif de ratio dette nette
PIB qui, maintenant, a été repoussé de plusieurs années, l'objectif
étant, avant la loi, d'atteindre 30 % de dette nette PIB, ratio dette
nette PIB 30 %. Maintenant, on a un... un écart entre 27,5 % à 32,5 %. J'ai posé la question spécifique
hier au ministre. J'ai dit : O.K., donc, si je comprends bien, là, aujourd'hui, pour respecter la loi, là, vous, là,
il faut que vous touchiez le 32,5 % pour respecter la loi, puis c'est ça,
maintenant, l'objectif. Et le ministre me l'a confirmé : Oui, c'est
ça mon objectif, respecter la loi.
Donc, on est dans une situation où est-ce que,
déjà ici, on avait dit qu'on allait atteindre 30 %, mais là on a dit
maintenant : Bien, 32,5 %, ça va faire mon affaire. Encore une fois,
on pellette par en avant. Un directeur du budget aurait sonné l'alarme lors du dépôt de ce projet de loi, l'an passé, en
décembre, aurait dit : Non, non, non, ce que vous faites là, là, vous êtes en train de vous donner un
objectif moins courageux, disons. Je ne sais pas comment qu'il l'aurait
verbalisé, mais ça aurait été quand même remarqué de la part d'un
directeur du budget.
• (11 h 40) •
Donc, c'est
une très belle proposition du Parti
libéral d'avoir un directeur du
budget. C'est essentiel pour les finances publiques. C'est essentiel pour notre crédibilité. C'est essentiel pour
tous les Québécois maintenant puis c'est essentiel pour les prochaines
générations.
Donc, en
conclusion, on a tout le temps eu un premier ministre qui veut se comparer à
l'Ontario. On a eu des prévisions économiques qui étaient roses. On a eu
des propositions qui étaient inéquitables pour nos jeunes. On a oublié de
vouloir aider le coeur de notre économie. On
n'a pas voulu penser plus loin que juste 1 000 places pour aider nos
parents en services de garde non
subventionnés. Puis, en habitation, bien, on est en train de manquer le bateau.
Pendant que les grues lèvent en Ontario, nous autres, on n'en a pas ici,
au Québec.
Donc, vous
comprendrez, M. le Président, qu'on n'est pas satisfaits, aucunement, de ce
budget-là, un budget qui aussi oublie, on en parlait ce matin avec mon chef,
oublie d'aider nos agriculteurs, les premières PME du Québec. Aucune aide concrète pour l'investissement dans cette
industrie, qui a, elle aussi, les mêmes besoins d'améliorer... d'améliorer sa
productivité. Rien au rendez-vous là-dessus. Rendez-vous manqué, promesses
brisées.
Donc, M. le
Président, je ne peux dire autre chose que je suis déçu de ce budget-là. C'est
un budget qui manque de vision et
c'est un budget qui va malheureusement passer à l'histoire comme ayant été
celui avec le plus grand déficit du Québec. Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, M. le député. Je cède maintenant la parole
à M. le ministre des Finances. Je vous rappelle, M. le ministre, que
vous disposez d'une heure pour votre réplique.
M. Eric Girard (réplique)
M. Girard (Groulx) : Oui. M. le Président,
je ne pense pas que je vais avoir besoin d'une heure, mais je vous remercie de me l'offrir. Puis c'est un plaisir
d'être avec vous aujourd'hui. Et j'aimerais d'abord dire que j'ai entendu
plusieurs choses, certaines sont inexactes, d'autres sont douteuses, mais je
vais m'en tenir à un commentaire général, M. le Président : Nous n'avons pas perdu le contrôle des finances
publiques, et, oui, ce budget est un budget exigeant et responsable dans
un contexte économique extrêmement difficile.
Alors, j'aimerais remercier d'abord tous les
employés du ministère des Finances qui ont travaillé avec un professionnalisme
exceptionnel, les membres de mon cabinet. J'aimerais remercier tous ceux qui
ont participé à la Commission des finances
publiques, notamment les oppositions, mais aussi les membres du gouvernement.
Et j'aimerais remercier toute la société civile, notamment les journalistes,
qu'on ne remercie pas si souvent que ça, M. le Président, mais pour leur... je vais le faire aujourd'hui, là,
pour leur intérêt dans les finances publiques. Les finances publiques
appartiennent aux Québécois, et c'est
un sujet important. Alors, merci de vous y intéresser, et continuons de nous y
intéresser. C'est nos finances publiques, celles des Québécois.
Alors,
l'objectif de ce... l'objectif central de ce budget, c'était quoi, M. le
Président? C'était la priorité à la santé et l'éducation. Et ce n'est pas par
hasard, M. le Président, puisque ce sont les deux missions principales de
l'État québécois. Et nous voulons
tous... On est certainement en harmonie avec ce que les Québécois souhaitent,
c'est-à-dire une amélioration de la
qualité, de l'accessibilité des services publics de santé et d'éducation. Nous
voulons tous une école publique dont nous sommes fiers. Nous sommes déjà
fiers de celle-ci, mais nous voulons l'accompagner à un autre niveau. Nous
voulons tous un système de santé qui est
moderne, accessible. Et donc ces priorités-là, M. le Président, ce sont celles
des Québécois.
Et pour
arriver là, eh bien, le gouvernement investit pour améliorer les conditions de
travail des employés de l'État afin de se doter d'avancées significatives en
organisation du travail. Alors, c'est important de le dire parce que c'est un
budget qui a été réalisé dans le cadre de
négociations de conventions collectives. Et là on a plusieurs ententes, et tout
ça a des impacts sur les finances publiques, mais c'est un choix qu'on fait
ensemble d'investir dans nos ressources humaines pour se doter
d'avancées en organisation du travail et de flexibilité.
Et, des avancées, M. le
Président, il y en a plusieurs qui sont nommées à la page B.5. Par
exemple, il y a la reconnaissance de l'ancienneté du personnel provenant du
bassin de main-d'oeuvre indépendante; la possibilité de convenir d'un horaire atypique; la fermeture — puis
ça, je vais regarder mon collègue, parce que je pense qu'il va l'apprécier,
celle-là — du processus d'affectation des classes au plus
tard le 8 août, ce qui permettra une meilleure planification scolaire,
une stabilité dans l'organisation des classes; l'implantation de l'autogestion
des horaires en santé; la révision des statuts du personnel de soutien pour
créer davantage de stabilité dans les équipes-écoles; la révision des primes en
santé afin d'inciter et de reconnaître le
personnel qui travaille à temps complet de soir, de nuit et de fin de semaine, parce
que le service de santé, M. le
Président, il est ouvert 24 heures sur 24, sept jours sur sept,
365 jours par année, c'est toute une responsabilité, ça, M. le Président; une mesure favorisant le
déplacement volontaire afin d'éviter les ruptures de services. Bon, j'arrête
là. Mais est-ce que c'est tout ce
qu'on fait? Est-ce que priorité en santé, c'est uniquement ressources humaines? Bien sûr que non,
M. le Président, mais il
n'y a rien de ce qu'on veut faire en
santé et en éducation qui est possible sans personnel. C'est la base.
Alors, on
fait quoi aussi, M. le Président? Bien, on a investi 4,9 milliards en
santé et en éducation dans ce budget, et
j'aurai l'occasion d'y revenir. On a aussi investi... On n'a pas réalisé ça
aujourd'hui, qu'il fallait investir en santé et en éducation. Puis, lorsqu'on regarde derrière nous,
bien sûr, il y a la pandémie là-dedans, là. On ne peut pas comparer les
époques sans tenir compte du fait que le niveau de dépenses a augmenté. Mais,
en santé, c'est plus de 7 %, la croissance des dépenses en santé qui est
derrière nous, 6,6 % en éducation. Le PQI, M. le Président, il est passé
de 100 milliards à 153 milliards.
En éducation, c'est plus de 100 % d'augmentation du PQI en éducation. Bien
sûr, on veut en faire plus pour le
maintien d'actif. Bien sûr, on a besoin de construire de nouvelles écoles. Non,
toutes les nouvelles écoles qu'on a besoin n'ont pas été construites, mais on a toujours bien augmenté le budget du
PQI en éducation de plus de 100 %, M. le Président.
Et puis on fait des changements au niveau de la
gouvernance aussi. Santé Québec, il y a eu beaucoup de débats là-dessus. L'Institut national d'excellence en
éducation, M. le Président, pour que les meilleures pratiques de pédagogie en
éducation soient diffusées, qu'elles soient
connues, et ça, c'est exceptionnel. Les données probantes. On parle beaucoup
des tableaux de bord, tableaux de bord en
santé. Puis là on parle de Christian Dubé, puis on voit un tableau de bord,
puis on voit des chiffres. Mais
savez-vous, M. le Président, qu'on n'a pas ces données-là en éducation? Et donc
ça nous prend des données probantes pour faire des analyses de qualité
qui amènent à des politiques publiques de grande qualité.
• (11 h 50) •
Puis, en
santé, M. le Président, ce serait quoi, un élément, là, que vous, vous
penseriez qu'il serait nécessaire pour améliorer le réseau de la santé?
Bien, probablement que vous me répondriez la transformation numérique de la
santé. Mais on fait ça aussi, M. le
Président, avec le Dossier de santé numérique. Alors, quand je parle de
transformation numérique, infrastructures,
gouvernance, données probantes, investissement dans les opérations,
investissements dans nos ressources humaines,
c'est tout ça qui va permettre, M. le Président, d'améliorer la qualité et
l'accessibilité des services en santé. Bon.
Puis là je
vais vous dire quelques éléments du budget qu'il y a en santé. J'y arrive. Je
prends mon discours du budget, M. le
Président. Alors, nous avons annoncé 1,8 milliard pour améliorer l'accès
aux soins et aux services, accroître la fluidité hospitalière, et puis ça,
c'est 1,8 milliard sur cinq ans pour accélérer le virage numérique, pour
assurer le maintien et le développement
des mesures alternatives à l'hospitalisation, pour ajouter des lits, pour
répondre à l'évolution démographique et
poursuivre le déploiement du guichet d'accès pour rendre la première ligne plus
performante. Pour les aînés, M. le Président, c'est 1,1 milliard.
Pourquoi? Pour poursuivre le virage majeur entamé depuis six ans afin d'appuyer
les services de soutien à domicile. On peut être fiers de ça, M. le
Président.
Vous savez, des fois...
Des voix : ...
M. Girard
(Groulx) : Je vais vous
conter une anecdote, M. le Président. Des fois, je marche mon chien. Je me
promène dans la rue, je croise l'ancien
député de La Pinière, sympathique, des discussions de coin de rue, là. La
députée de Mont-Royal rit parce qu'elle... La députée de Mont-Royal est
ma députée, et l'ancien député de La Pinière était aussi membre de la circonscription de la députée de
Mont-Royal. Puis il me dit quoi, M. le Président? Il me dit : C'est
incroyable, tout ce que vous avez
investi en soins à domicile, M. le Président. C'est ça qu'il me dit, que c'est
incroyable, ce qu'on a fait en soins à domicile pour les Québécois, pour
nos aînés, soutenir le déploiement des maisons des aînés et des maisons
alternatives, poursuivre le conventionnement des centres d'hébergement et de
soins de longue durée.
Pour les services sociaux, on a un ministre des Services
sociaux exceptionnel, il connaît ça, il est passionné. Depuis six ans, il est engagé. Eh bien, M. le Président, on y va des
mesures suivantes : on bonifie l'appui aux organismes communautaires oeuvrant dans le domaine de la
santé et des services sociaux, on augmente les services en santé mentale,
en itinérance et en dépendance et on
renforce les services pour les jeunes en difficulté. Et ça, c'est donc
738 millions de dollars pour
répondre aux besoins croissants dans les services liés à la protection de la
jeunesse et renforcer les services en santé mentale.
Alors, je
continue. Au niveau de la réussite éducative des jeunes,
819 millions de dollars, M. le Président, pour soutenir la réussite des élèves en mettant à leur
disposition les outils nécessaires, par exemple avec le plan de rattrapage;
favoriser l'attraction et la rétention
du personnel scolaire en attendant que nous ayons les bénéfices des ententes
qui ont été négociées; soutenir les
organismes partenaires de l'éducation; poursuivre l'entretien du parc
immobilier. Parce que, malheureusement, tantôt je vous ai parlé de nouvelles écoles, de maintien d'actif, mais
ça, ça n'inclut pas l'entretien. Il faut, en plus, entretenir le parc
immobilier scolaire.
Pour les études supérieures, c'est
421 millions, M. le Président, favoriser la réussite, la rétention des
étudiants universitaires; soutenir l'offre
de formation dans les domaines prioritaires, la filière batterie, la
transformation numérique; accroître le nombre de logements étudiants.
Bon, ça, c'est santé et éducation.
Il
y avait une mesure dans le budget, M. le Président, dont je suis extrêmement
fier : l'élimination, à compter du
1er janvier 2025, de la réduction de la rente de retraite pour les aînés
en situation d'invalidité de plus de 65 ans, M. le Président.
En 1996, M. le Président, le Régime des rentes
était en extrême difficulté. Et c'est facile de juger aujourd'hui des décisions qui ont été prises en 1996 et de
dire : Il ne fallait pas faire ça, c'est ci, c'est ça; juger. On a une
continuité dans le rôle des
gouvernements. En 1996, le Régime des rentes était en extrême difficulté. Ils
ont augmenté les cotisations, ils ont coupé
les prestations et ils ont réduit la rente pour les personnes invalides. Depuis
ce jour, les personnes en situation d'invalidité se battent contre ce
choix.
En 2021, nous
avons choisi la réduction de la rente à 65 ans. L'ordre de grandeur, c'est
36 % par rapport à la rente maximale.
Alors, vous avez une rente d'invalidité entre 60 et 65 ans, et puis là, à
65 ans, vous perdez votre rente d'invalidité, mais votre régime des rentes, lui, il est réduit
de 36 %. En 2021, on a fait le tiers du chemin. Aucun gouvernement, depuis
1996, ne s'était attaqué à cette problématique.
Suite. Le
2 janvier 2024, M. le Président, j'étais sur téléphone et je cherchais les
rendements des actifs du RRQ à la Caisse
de dépôt pour l'année 2023. Pourquoi? Parce que j'avais besoin de la
valeur présente, actif, passif, du Régime des rentes pour faire ce geste que nous faisons aujourd'hui,
c'est-à-dire le deux tiers qui manquait pour avoir une élimination complète,
en date du 1er janvier 2025, de la réduction de la rente de retraite. Et
ça, M. le Président, ça va bénéficier 70 000 aînés, et il y en a
20 000 autres, entre 60 et 65 ans, qui en bénéficieront. On peut
être extrêmement fiers de cela.
Bon, le
gouvernement investit aussi 3,9 milliards sur cinq ans pour les Québécois,
les collectivités et l'économie québécoise.
Je vais vous en parler un peu, M. le Président, je vais me... Je vais aller
dans le... C'est un peu ironique, je fais un discours sur le budget et
je m'inspire du discours sur le budget. C'est quand même un excellent document.
Alors, il y
avait plus de 2 milliards sur six ans pour répondre aux enjeux des
Québécois, 1,3 milliard de dollars pour consolider le soutien
aux Québécois, 441 milliards pour soutenir les collectivités,
128 millions de dollars pour protéger l'environnement,
187 millions pour mettre en valeur la culture et promouvoir la langue
française.
Alors, je
vous détaille qu'est-ce qu'il y a là-dedans. D'abord, il y a 483 millions
pour aider les plus démunis et favoriser l'intégration sociale. Alors, on
assure la continuité des services de transport pour les personnes à mobilité
réduite. On soutient l'aide alimentaire grâce à un investissement de
40 millions dans les banques alimentaires. On introduit un supplément de
revenu de travail pour les prestataires d'aide financière de dernier recours.
On investit aussi 441 millions pour
promouvoir la pratique durable des loisirs et des sports dans un environnement
sécuritaire. Et on comprend, avec tout ce
qui s'est dit depuis les deux dernières années, que la pratique des sports dans
un environnement sécuritaire, ce n'est pas donné, M. le Président, il faut s'en occuper. Consolider la capacité
d'intervention en sécurité publique, renforcer l'accompagnement judiciaire et les services aux personnes
vulnérables, les tribunaux spécialisés en matière de violence conjugale, M. le
Président. Bon, il y a aussi... il
faut bonifier la sécurité dans les palais de justice, il y a les actions du Curateur public, toutes des choses, des responsabilités du gouvernement du
Québec.
• (12 heures) •
Au niveau de l'environnement, il y a
102 millions pour assurer la sécurité dans le contexte des changements climatiques, c'est-à-dire 61 millions pour
agir face à la hausse des sinistres majeurs, notamment en mettant en place une
équipe d'intervention disponible en tout
temps, comme une force de volontaires. Puis là, si mon collègue était ici, il
se lèverait puis il me serrerait la
main, il serait emballé, M. le Président, puis il me parlerait aussi du
29 millions pour accroître la
capacité de la SOPFEU. Il serait très heureux de ça. Puis le ministre de
l'Environnement, il vous dirait que 9,3 milliards pour le prochain Plan pour une économie verte, le
plan de mise en oeuvre 2024‑2029, c'est excellent, que ça a augmenté de
39 %, 39 % depuis le plan de mise en oeuvre 2021‑2026.
Et, oui, nous réduisons les subventions au
programme Roulez vert, M. le Président, mais pourquoi? Bien, parce qu'on est rendu à une maturité où le prix des
voitures à essence et le prix des voitures électriques convergent. Et là ce
qu'on a de besoin, M. le Président... Je pense que vous êtes député de
l'île de Montréal. Avez-vous déjà essayé de faire Québec-Montréal avec une voiture électrique? Ça prend des
bornes, M. le Président, puis ça prend des bornes de recharge performantes.
À quand le jour où charger sa voiture
prendra le même temps que faire un plein? À ce moment-là, on aura atteint une
situation d'équivalence où avoir une voiture électrique, ce sera comme
une voiture à essence. Alors, on réduit les subventions à Roulez vert, mais soyez certain que toutes les sommes seront
investies dans la réduction des gaz à effet de serre, dans l'achat de
bornes, dans l'adaptation aux changements climatiques, dans la protection de la
biodiversité.
Au niveau des
priorités économiques, 1,9 milliard de dollars pour appuyer les
secteurs stratégiques, accroître la main-d'oeuvre
disponible et la productivité dans l'industrie de la construction, contribuer à
la prospérité des régions, favoriser l'intégration économique des
personnes immigrantes.
Les secteurs
stratégiques au Québec, c'est quoi, M. le Président? On met 443 millions
là-dedans, c'est l'aluminium, les
sciences de la vie, l'aérospatial, l'intelligence artificielle, la filière
batterie. Et puis on a des zones d'innovation, et puis on aura
maintenant des labs industriels avec des infrastructures partagées pour la
recherche et l'innovation.
On a besoin
de plus d'employés dans le secteur de la construction, alors on a une... on a
126 millions pour poursuivre l'Offensive formation en
construction, encourager l'innovation et la productivité.
Les régions, il y a plusieurs députés des
régions ici, M. le Président, 889 millions pour les régions, appuyer le secteur forestier, soutenir la mobilité et le
dynamisme des régions — ça
va chercher le député de Sept-Îles, il s'est battu pour sa mesure, je peux vous le dire — favoriser
le développement du secteur bioalimentaire — c'est peut-être Baie-Comeau, là, je suis mêlé... mes centres, mes puissances
régionales — favoriser
le développement du secteur bioalimentaire, continuer à soutenir le
secteur touristique; renforcer les partenariats avec les Premières Nations,
soutenir les entreprises grâce à Accès entreprise Québec.
Le secteur
forestier, M. le Président, plus de 300 millions pour les travaux
sylvicoles, les feux de forêt historiques. On a perdu de la superficie,
et donc il faut faire des plantations dans la forêt publique et privée, plus de
300 millions. On
a aussi 100 millions pour le secteur bioalimentaire avec un nouveau fonds
pour la relève, aussi, pour l'agriculture durable. On a 45 millions pour notre partenariat avec
la nation innue de Pessamit. Et puis finalement on a 400 millions pour
l'intégration et l'apprentissage du français par les immigrants, dont
320 millions pour Francisation Québec.
Alors, au
total, M. le Président, dans ce budget, il y a 8,8 milliards d'initiatives
sur cinq ans. Ça, c'est à la page A.5 du budget. Vous devez savoir que
c'est un budget qui est raisonnable et responsable, c'est-à-dire qu'on a réduit
le total des mesures. Pourquoi, M. le
Président? Bien, parce qu'on a un déficit, en 2024‑2025, qui est plus
important. Et là je vais vous en parler un peu, du déficit.
Alors, c'est
une situation extrêmement difficile. Pourquoi? Parce qu'on a un ralentissement
économique présentement au Québec,
c'est-à-dire que la Banque du Canada... On a eu une pandémie en 2020. On a eu
une relance synchronisée en 2021 et
en 2022. Puis, en 2022, on a touché 8,8 % d'inflation au Québec, M. le
Président. Puis là la banque centrale réduit... augmente les taux d'intérêt jusqu'à 5 % pour modérer
la demande et faire baisser l'inflation, et ça fonctionne. Alors, on a un
ralentissement économique, stagnation économique, 0 %, pas une
récession, stagnation, en 2023.
On a aussi...
En raison de la grande sécheresse, on a une faible hydraulicité dans nos
réservoirs, et puis ça a baissé les
exportations d'Hydro-Québec. Or, les exportations se font à des tarifs plus
élevés que la consommation domestique. Donc, on est touchés, pour près de 3 milliards sur trois ans, dans nos
revenus d'Hydro-Québec. Et puis j'ai parlé de l'augmentation de nos
dépenses associées à l'investissement dans nos ressources humaines.
Alors, tout
ça, ça fait quoi, M. le Président? Ça fait que nous avons un déficit de
8,8 milliards au sens des comptes publics,
puis ça, ça se compare aux 10 milliards de l'Ontario. Nous, c'est
1,5 % du PIB; eux, c'est 0,9 %; pour la Colombie-Britannique,
c'était 1,9 %. Après contribution au Fonds des générations, c'est
11 milliards.
Et les critiques de l'opposition sont
nombreuses, sont légitimes. La société civile, on dit souvent : Comment êtes-vous passés d'un déficit de 3 milliards,
à la mise à jour ou au budget 2023, à 11 milliards? Puis là on essaie
de dire, là, que c'est vraiment...
c'est dramatique, une erreur de prévision. On dit que les économistes du
ministère font des erreurs de prévision,
que le ministre est jovialiste. Puis, en passant, l'Ontario, eux, ils avaient
prévu l'équilibre budgétaire puis ils ont fait un déficit de
10 milliards. Je dis ça comme ça. Je dis ça comme ça.
Mais moi, je vous amène... Je suis un homme de
chiffres. J'aime donner l'heure juste. Alors, je vous amène à la page G.19,
puis là on explique comment on passe de 3 milliards de déficit à 11.
Alors, on va y aller ensemble. Bien, premièrement,
M. le Président, il y a 2 milliards moins de revenus. Pourquoi? En raison
de la faible hydraulicité dans les réservoirs
d'Hydro-Québec et du ralentissement économique. Donc, 3 milliards,
j'ajoute 2 milliards moins de revenus, je suis rendu à 5, M. le Président. Ensuite, j'ai parlé de l'investissement
dans les ressources humaines, puis ça, ça augmente les dépenses de portefeuille de combien, M. le
Président? Bien, c'est écrit en toutes lettres, parce qu'on est transparents
puis qu'on donne juste aux Québécois, plus de 3 milliards par
année. Si vous allez à la page G.19, en fait, c'est 3,2 milliards.
Alors, je
suis rendu où, M. le Président? Bien, je suis rendu à 8 :
3,2 milliards de revenus, 3 milliards de dépenses
d'investissement dans nos ressources humaines, je suis rendu à 8. Bien là, vous
dites, ça ne fait pas 11, M. le Président. Bien,
vous avez raison, ça ne fait pas 11, mais là il y a un budget, là, puis on
investit dans les soins à domicile puis dans la transformation, puis ça,
ça coûte 2 milliards, M. le Président. Ça fait que, là, on est pas mal
rendus à 10.
Mais là
mettons que vous vous dites : Mais oui, mais c'est 11, là, vous n'êtes pas
transparents, vous ne donnez pas l'heure juste. Bien, c'est parce qu'on a
augmenté les provisions pour éventualités, M. le Président, puis ça, bien,
c'est une marge de prudence. Ça fait
que, là, 3 plus 2, plus 3, plus 2, plus 1, on y est arrivés, M. le Président,
on est à 11. Et là on n'a rien caché, on n'a pas menti, on n'est pas
jovialistes, on donne l'heure juste, à la page G.19.
Alors, il
faut s'occuper de ça, M. le Président. Le déficit, il est important. Les
conditions économiques sont difficiles. Ça va nécessiter des gestes réels, mais c'est gérable, M. le Président.
Et qui va le gérer, M. le Président? Bien, c'est nous. On s'en occupe et
on s'en occupe immédiatement en posant des gestes importants pour améliorer
l'efficience de nos interventions sur le plan du régime fiscal et de la
performance des sociétés d'État.
Alors, si
vous allez à la page E.4, M. le Président, puis vous dites : Mais que
faites-vous maintenant? 2,9 milliards sur cinq ans, dont 1 milliard
est une révision des aides fiscales aux entreprises. Pourquoi, M. le Président?
Parce que les crédits d'impôt dans le
secteur de la technologie, du cinéma, ces crédits d'impôt là ont été créés
lorsque le taux de chômage était, au
Québec, à plus de 10 %, M. le Président. Or, nous sommes au plein-emploi,
aujourd'hui. Puis il y avait des enjeux d'intégrité. Je m'arrête là.
Dans certains crédits d'impôt, il y avait aussi des enjeux d'équité,
c'est-à-dire que ce n'est pas optimal, pour
une économie, de favoriser un secteur avec un crédit d'impôt qui est plus
important qu'un autre secteur. Alors, on va chercher 1 milliard là,
sur cinq ans.
Nos sociétés
d'État, M. le gouvernement, c'est lesquelles, là? Hydro-Québec, Loto-Québec, la Société
des alcools, Investissement Québec, les entreprises du gouvernement, la SQDC. On va
leur demander 1 milliard de plus sur cinq ans aussi. C'était une promesse de 2018, la pandémie a
mis ça de côté. Loto-Québec a été fermée durant la pandémie, on ne pouvait pas leur demander des mesures
d'efficience. La SAQ devait garder ses succursales ouvertes, alors qu'il
fallait minimiser les contacts. C'était un exploit. Je salue le travail de la
SAQ. Et puis, s'il y a une chose qu'on a appris de la pandémie, c'est que les conditions sanitaires, là, des produits, c'est
important. Alors, toute l'importance de la SQDC... Alors, il y a des opportunités au niveau des sociétés
d'État, monsieur. Loto-Québec peut prendre sa place et remplacer tous ces
jeux illégaux qui sont annoncés, et
diffusés, et disponibles sur le Web, illégaux. Alors, ils vont nous donner
1 milliard de plus sur cinq ans, M. le Président. C'est commencé,
ça, c'est maintenant, là, parce qu'on a un déficit, on s'en occupe.
Ensuite, quelle est la meilleure façon de lutter
contre le tabagisme? Quelle est la meilleure mesure de santé publique pour
atteindre notre objectif collectif de moins de 10 % de tabagisme au
Québec? Bien, c'est monter le prix, M. le
Président. Alors, on a des augmentations modérées parce qu'on ne veut pas
favoriser la contrebande puis on veut toujours avoir moins de taxes qu'en Ontario. Et donc on a une légère augmentation
pour lutter contre le tabagisme, bon, puis on demande beaucoup à Revenu Québec de combattre les cryptomonnaies puis de
s'assurer des locations temporaires. On a donné de
nouvelles missions à Revenu Québec. Ils ont besoin de ressources pour leurs
principales missions. Alors, on leur donne des ressources pour faire ça.
Bon,
alors, ça, c'est ce qu'on fait maintenant, 2,9 milliards sur cinq ans,
mais il va falloir faire plus, parce que vous comprenez qu'on a un
déficit de 11 milliards, descend à huit, puis là, la troisième année, on
est très près de l'équilibre budgétaire au
sens des comptes publics, avant contribution au Fonds des générations. Mais,
lorsqu'on regarde l'horizon, on a un déficit structurel de
4 milliards de dollars dont on doit s'occuper.
Et donc j'ai annoncé
un examen complet des dépenses fiscales et gouvernementales, les dépenses
budgétaires. Il y a 277 mesures
fiscales au Québec, un total de 74 milliards de dépenses fiscales, et puis
on va les examiner, M. le Président, puis
ça, ça va être dirigé par le ministère des Finances. On va aller chercher des
économies. On va ordonner nos dépenses fiscales en fonction de l'efficacité
économique, en fonction de l'efficacité des finances publiques puis en fonction
du bénéfice social de celles-ci. On a
136 milliards de dépenses budgétaires, M. le Président. Tous les experts
nous disent : Vous devez réviser vos programmes, vos dépenses, pour
réévaluer leur performance. On va faire ça.
• (12 h 10) •
Alors,
j'arrive... M. le Président, ça, j'ai mes gestes immédiats. J'ai mon examen des
dépenses fiscales et budgétaires. Puis
là il faut que je vous parle des transferts fédéraux, parce que, lorsque vous
allez à la page G.7 du budget, M. le Président, le cadre financier, bien là, vous constatez qu'en
moyenne, sur cinq ans, les revenus autonomes augmentent de 4 %, que
les dépenses, elles vont... augmentent de
3 %, puis vous dites : Ça fait du sens, 4 % en croissance de
revenus, 3 % de croissance de dépenses, c'est logique.
Qu'est-ce
qui est étrange, quand vous regardez, M. le Président, en détail, c'est que les
transferts fédéraux, qui totalisent 31 milliards
en 2023‑2024, vont être à 32 milliards en 2028‑2029.
Ça, c'est 0,5 % de croissance en moyenne par année, 0,5 %. Il y a un désengagement du gouvernement fédéral
dans les transferts fédéraux. Le gouvernement fédéral est en train de
tenter de résorber son déficit en réduisant le taux de croissance des
transferts fédéraux.
Et,
en plus de sous-financer les programmes existants, la santé, on se permet de
créer des nouveaux programmes, M. le
Président, des soins dentaires et de l'assurance médicaments. Mais, vous le
savez, vous, M. le Président, on en a déjà un, programme d'assurance médicaments, et il nous coûte plusieurs
milliards de dollars par année. Alors, si le gouvernement fédéral a des fonds à nous allouer dans le cadre
de l'assurance médicaments, bien, on va prendre un retrait inconditionnel.
Ça, ça veut dire sans condition. C'est
tellement important que je dis deux fois la même chose, O.K., puis on va prendre
toutes les sommes qu'il avait l'intention de mettre là-dedans. Alors, on veut
un transfert de la totalité des sommes sans condition parce qu'on a déjà
un régime d'assurance médicaments au Québec. Alors là, le fédéral découvre ça,
que c'est important, l'assurance médicaments. Bien, nous, on n'est pas
satisfaits du 0,5 % de croissance des transferts fédéraux.
On
va aussi prendre... M. le Président, on va poursuivre tous nos efforts pour
augmenter le PIB potentiel du Québec, puis, oui, ça passe par la productivité,
puis, oui, ça passe par l'investissement des entreprises, mais ça passe aussi
par des entreprises plus grandes, par
plus de compétition. Et ça, c'est tout le travail qu'on a fait avec les experts
dans le cadre de la consultation publique à l'automne. J'invite tous les
gens qui sont ici à relire cet excellent document.
Bon,
alors, lorsqu'on regarde le taux de croissance des revenus puis
des dépenses, en moyenne, les revenus, 3,3 %, en moyenne, les dépenses, 2,9 %. C'est
0,4 % de différence. Bien, ça, M. le Président, ça nous laisse un déficit
structurel de 4 milliards.
Alors, pour résorber ça, il faut pousser l'écart de 0,4 % à 1,1 %.
Vous me dites : C'est technique, M. le Président. Non, ce n'est pas technique, c'est mathématique.
C'est écrit dans le budget, en toute clarté, ça doit passer de 0,4 % à
1,1 %, puis c'est pour ça qu'on
va regarder l'ensemble de nos dépenses. Alors, on va travailler sur le taux de
croissance des dépenses. Puis c'est
pour ça qu'on va pousser les revenus, au niveau de l'économie, en poussant le
PIB potentiel. Puis c'est pour ça qu'on aimerait avoir plus de revenus
en transferts fédéraux.
Alors, laissez-moi
vous parler un peu des cibles de dette. Avant la pandémie, nous étions à
41 % de dette nette. Aujourd'hui, nous sommes
à 39 %, mais il y a un astérisque dans l'histoire, M. le Président.
D'abord, c'est tout simplement exceptionnel qu'on ait un niveau de
dette, aujourd'hui, inférieur à ce que nous avions avant la pandémie, parce que
la pandémie, elle a frappé fort dans les
finances publiques. Mais c'était un élément secondaire, parce qu'on sait que la
pandémie, c'était d'abord un enjeu de santé publique, puis, après ça, il
y avait l'économie. Mais, après ça, là, il y avait les finances publiques. Mais l'astérisque, c'est quoi, M. le
Président? Bien, c'est qu'on a pris un ajustement de 4 % de dette nette
par rapport au PIB, parce que le
gouvernement précédent nous avait laissé des états financiers avec une note de
la Vérificatrice générale qui disait que les états financiers ne
reflétaient pas adéquatement le niveau de dette du Québec. On a pris cet ajustement-là, et mon ex-collègue de
Robert-Baldwin l'a reconnu, et puis on a aussi pris un ajustement, au niveau
des normes comptables, pour la
réalisation des passifs des bâtiments construits avec de l'amiante. Alors, en
tout, non seulement on est inférieurs à ce qu'on était avant la
pandémie, mais ça, c'est en ayant absorbé un ajustement de 4 %.
Alors,
on est à 39 % de dette nette par rapport au PIB. M. le Président, est-ce
que j'aimerais être à 38 %, à 37 %, à 36 %? Bien sûr que oui,
mais 39 %, ce n'est pas mauvais. On était à 41 % avant la pandémie
puis on était à 53 % dans le milieu
des années 2010. Et puis l'Ontario est sortie, hier, à 38 %. Alors,
j'aurais aimé que... je ne souhaite pas de malheur à mes collègues... j'aurais aimé qu'on soit égal à
l'Ontario. On est à 39 %, ils sont à 38 %. Mais regardez-nous aller
dans les cinq prochaines années, M. le Président. On s'en occupe, on va
le... on la gère, la situation, puis on verra où on sera dans cinq ans. Mais je peux vous dire où on va
être dans 15 ans, parce qu'on a des cibles de dette, 30 % en 2037‑2038.
Et ça, c'est une loi qu'on s'est
donnée, 30 % de dette nette. On vient de l'adopter, cette loi-là, en
janvier, tous les membres de cette Assemblée ont voté, et puis on va y
arriver ensemble, M. le Président. On va y arriver ensemble.
Il
faudrait que je vous parle un peu de l'économie, M. le Président. 2023 puis le
premier semestre de 2024, la situation est extrêmement difficile.
J'aimerais vous dire autrement, mais vous prenez des taux d'intérêt à
0,5 %, vous les montez à 5 % en 18
mois, votre objectif, c'est de ralentir l'économie, et, bien, n'importe qui qui
a une hypothèque, une marge de crédit,
un fonds de roulement pour son entreprise, n'importe... peu importe l'entité,
les individus, les entreprises, qui sont sensibles aux taux d'intérêt,
l'économie ralentit. C'est brutal, M. le Président.
Alors,
le Québec, en plus, a fait face à des feux de forêt et une période de
sécheresse, qui a réduit la production d'électricité. Alors, on a une période
de stagnation économique. Puis, si vous pensez que les malheurs arrivent seuls,
M. le Président, bien non. En plus, on a eu
des grèves au mois de novembre puis décembre. Ça fait que là, les feux de
forêt, la réduction de la production
d'électricité, les grèves, bien, tout ça, ça donne les taux d'intérêt à
5 %, ça donne 0,0 % de croissance, c'est-à-dire stagnation économique
sous le poids du resserrement de crédit. Mais est-ce que l'économie est en
récession, M. le Président? Bien sûr que non. On a créé plus de 2 %
d'emplois dans l'année. Il y a des secteurs que la consommation est toujours
positive.
Alors,
pour avoir une récession, il faut que le ralentissement soit généralisé et
qu'il soit profond. 0,0 %, ce n'est pas profond, là. On n'a même pas... On n'est même pas dans le négatif.
Et puis il faut que ce soit généralisé, il faut que ce soit l'ensemble des secteurs, mais ce n'est pas
généralisé. Alors, on n'est pas en récession, mais c'est extrêmement difficile.
Mais
une chose est certaine, M. le Président, nous sommes extrêmement bien
positionnés pour la relance en synchronisation
avec la baisse de l'inflation et la baisse de taux d'intérêt. Pourquoi je dis
que nous sommes extrêmement bien positionnés? Parce que le revenu réel
disponible — ça,
c'est ajusté pour l'inflation — depuis
2018, avec les hausses de salaire
puis les gestes posés par le gouvernement, est en hausse de 17 %, puis ça,
ça se compare à 13 % pour le Canada. Et puis, au niveau du ratio d'endettement, le niveau de dette par
rapport au revenu, on est à 148 %. Au Canada, c'est 190 %.
Alors, on a moins de dettes puis on a plus de revenus, toutes choses étant
égales, par ailleurs.
Donc,
on est bien positionnés. Lorsqu'il y aura baisse de l'inflation ou réduction
des taux d'intérêt, l'économie va amorcer
sa relance, et tous les efforts qu'on fait depuis 2018 pour amener le Québec à
un autre niveau, on a des objectifs extrêmement ambitieux, bien, ça va
se concrétiser puis ça va amener une relance dynamique.
• (12 h 20) •
En
conclusion, M. le Président, il s'agit d'un budget exigeant et responsable. La
priorité de l'État québécois, c'est de
livrer des... Livrer, ce n'est peut-être pas... c'est peut-être un anglicisme.
La priorité, c'est de donner accès à des services de qualité en santé et en éducation. Notre régime
de santé publique, notre école publique, dans ce budget-là, c'est la priorité.
Et c'est ce que les Québécois veulent et c'est la responsabilité du
gouvernement du Québec.
Alors, M. le
Président, c'est avec des investissements en infrastructures dans nos
ressources humaines, dans la gouvernance,
dans la technologie qu'on va y arriver. Ça prend plusieurs éléments pour amener
des améliorations notables dans nos
services publics. On commence à voir des améliorations, M. le Président,
mais un de mes souhaits, ce serait qu'on aurait une... que nous aurions
une rentrée scolaire de qualité au mois de septembre, différente que celle que
nous avons connue. Tout ça, M. le Président,
devra être fait en respectant un engagement ferme envers le retour à
l'équilibre budgétaire après
contribution au Fonds des générations. Il y aura le dépôt d'un plan au prochain budget
dans des meilleures conditions économiques.
Nous nous engageons au retour à l'équilibre budgétaire après contribution au Fonds des générations. Nous nous engageons à atteindre notre
cible de dette de 30 %, plus ou moins 2,5 %, en 2037‑2038.
Des meilleurs
services en santé et en éducation, en respectant la capacité de payer des
Québécois, en protégeant les générations futures, en gardant des marges de
manoeuvre pour lutter aux changements climatiques, faire face au vieillissement de la population, c'est ce que les
Québécois veulent, M. le Président. C'est ce que nous leur donnons avec
ce budget. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci,
M. le ministre des Finances. Cela met donc fin au débat sur le discours
du budget prononcé le 12 mars 2024.
Décision de la présidence sur la recevabilité
des motions formulant un grief
Je
vous informe que les motions formulant un grief présentées dans le cadre de ce
débat sont toutes recevables, sauf celles présentées par M. le député de
Jean-Lesage, M. le député de Taschereau et M.
le député d'Hochelaga-Maisonneuve.
Conformément à l'article 191 de notre règlement, s'il est permis d'indiquer des motifs
dans une motion de grief, l'argumentation, elle, n'est pas permise.
La jurisprudence
parlementaire a expliqué par le passé qu'on entend par «exposé de motif» les
raisons pour lesquelles on blâme le gouvernement, alors que «l'argumentation»
consiste en tout ce qui tend à appuyer la conclusion recherchée dans la motion. La jurisprudence démontre que l'explication
des conséquences du geste visé par le blâme est également assimilable à
de l'argumentation.
À la lumière de ces
critères, les motions de grief présentées par les députés de Jean-Lesage, de
Taschereau et d'Hochelaga-Maisonneuve doivent être considérées comme contenant
de l'argumentation.
D'ailleurs,
elles sont similaires dans leur forme et dans leur libellé à d'autres motions
de grief déclarées irrecevables par
la présidence dans le passé, notamment dans les décisions qu'elle a rendues les
11 juin 2003, 21 avril 2015, 20 avril 2021 et
8 décembre 2022.
Cela
étant dit, conformément à l'article 277 du règlement, nous allons
maintenant procéder au vote sur les motions formulant un grief présentées à l'occasion du débat sur le discours sur
le budget et sur la motion du ministre des Finances proposant que
l'Assemblée approuve la politique budgétaire du gouvernement.
• (12 h 30) •
Je
mets d'abord aux voix la motion formulant un grief présentée par M. le
député de Marguerite-Bourgeoys. Cette motion se lit comme suit :
«Que
l'Assemblée nationale blâme sévèrement le gouvernement caquiste d'avoir annoncé
un déficit record de 11 G$ dans son budget sans avoir présenté de
plan de retour à l'équilibre budgétaire.»
Cette motion est-elle adoptée?
Une voix : ...
Le
Vice-Président (M. Benjamin) : Un vote électronique a été demandé. M. le leader
adjoint du gouvernement.
M. Lévesque (Chapleau) : Oui. Je
vous demanderais de bien vouloir reporter ce vote et l'ensemble des votes à la
prochaine période des affaires courantes, s'il vous plaît.
Votes reportés
Le
Vice-Président (M. Benjamin) : Alors, conformément à la demande du leader du
gouvernement, les votes sur les motions formulant un grief et sur la motion du
ministre des Finances seront tenus à la période des affaires courantes de
demain.
Pour la suite de nos travaux, M. le leader adjoint
du gouvernement.
M. Lévesque (Chapleau) : Oui, merci
beaucoup,M. le Président. Je vous demanderais de bien vouloir appeler
l'article 55 du feuilleton, s'il vous plaît.
Motions du gouvernement
Motion proposant que
l'Assemblée approuve les recommandations du rapport
du Comité de la rémunération des procureurs aux poursuites
criminelles et pénales pour la période 2023‑2027
Le
Vice-Président (M. Benjamin) : À l'article 55 du feuilleton, aux motions du
gouvernement, M. le ministre de la Justice présente la motion
suivante :
«Que l'Assemblée nationale :
«Fasse siennes les réserves du gouvernement
exposées dans sa réponse, déposée devant l'Assemblée nationale le 21 mars 2024, au rapport du Comité de
la rémunération des [procédures] aux poursuites criminelles et pénales pour la
période 2023‑2027, déposé devant l'Assemblée nationale le
17 octobre 2023;
«Approuve les
23 recommandations mentionnées aux sections I à V du rapport du
Comité de la rémunération des procureurs aux poursuites criminelles et
pénales pour la période 2023‑2027.»
Y a-t-il des interventions? Mme la députée de...
Une voix : ...
Le Vice-Président (M. Benjamin) : ...Charlevoix—Côte-de-Beaupré.
Mme Kariane Bourassa
Mme
Bourassa : Merci beaucoup, M. le Président. Ça me fait
plaisir de prendre la parole en cette Chambre afin de débattre de la réponse du gouvernement au rapport
du Comité de la rémunération des procureurs aux poursuites criminelles et
pénales pour la période 2023‑2027, qui a été déposée jeudi dernier, conformément à
la loi, par mon collègue le ministre de la Justice.
Ce comité, qui a été institué le
14 décembre 2022, est composé, outre la présidente Me Joëlle
L'Heureux, de deux maîtres... de deux
membres, Me Yves Morin et M. Gilles Paquin, lesquels ont
été désignés d'un commun accord par le gouvernement et l'Association des
procureurs aux poursuites criminelles et pénales.
Ce comité a
pour fonction d'évaluer, tous les quatre ans, si la rémunération, les régimes
collectifs, les conditions de travail qui ont des incidences pécuniaires,
celles qui concernent les accidents du travail, et les maladies
professionnelles, et l'aménagement du travail... du temps de travail
sont adéquats.
Il doit ensuite faire la recommandation qu'il
juge appropriée en se basant sur différents facteurs, et je vais vous en énumérer quelques-uns : d'abord, les
particularités de la fonction de procureur; ensuite, la nécessité d'attirer des
avocats ayant les aptitudes et les
qualités requises pour exercer la fonction de procureur; trois, les conditions
de travail des procureurs au Québec
et ailleurs au Canada, en tenant compte des différences quant au coût de la vie
et quant à la richesse collective; quatre,
les responsabilités des procureurs au Québec et ailleurs au Canada, leur charge
de travail, les exigences requises par les
employeurs, les structures salariales et les problématiques d'attraction et de
rétention; cinq, la conjoncture économique du Québec, la situation générale de l'économie québécoise et l'état des
finances publiques du Québec; six, les conditions de travail et la
rémunération des avocats du secteur privé québécois et d'autres salariés de
l'État.
Ensuite, M. le Président, il appartient à l'Assemblée
nationale, par résolution, d'approuver, de modifier ou de rejeter, en tout ou en partie, les recommandations
du comité. Comme il est indiqué dans la motion présentement débattue, le
gouvernement propose d'approuver les
23 recommandations du rapport du comité L'Heureux, tout en émettant
certaines réserves concernant les justifications du comité, qui sont
parfois plutôt ténues, principalement en ce qui concerne les paramètres
généraux d'augmentation salariale.
En plus d'améliorer les conditions de travail
des procureurs aux poursuites criminelles et pénales, certaines recommandations du rapport permettront également
d'améliorer l'accès à la justice. Et, on le sait, c'est une priorité pour
notre gouvernement également. Pensons
notamment à la recommandation du comité, telle que proposée par le gouvernement,
de hausser la prime
offerte aux procureurs affectés sur une base régulière à la cour itinérante de
5 % à 15 % et d'éliminer la notion
de port d'attache. Il était nécessaire, M. le Président, de revoir la notion de
port d'attache et les primes associées, afin de compenser les procureurs
pour les exigences et les défis inhérents à la desserte de la cour itinérante.
Si
l'expérience de la cour itinérante est particulièrement formatrice pour les
procureurs, elle comporte également son
lot de difficultés. Pensons notamment à la barrière de la langue, aux moyens
technologiques limités en régions éloignées, aux absences répétées et prolongées de leur domicile. Ces nouvelles
conditions de travail permettront d'améliorer l'attraction et la
rétention des procureurs affectés à la cour itinérante afin de mieux desservir
ces communautés.
Par
ailleurs, soulignons également le rôle crucial que les procureurs aux
poursuites criminelles et pénales jouent auprès des personnes victimes
d'actes criminels, dont plusieurs se trouvent en situation de grande
vulnérabilité. Ceux-ci sont, d'ailleurs,
formés aux réalités et aux besoins des personnes victimes, notamment dans le
cadre de projets pilotes de tribunal spécialisé
en matière de violence conjugale et sexuelle, afin de pouvoir créer un lien de
confiance et réduire leurs craintes face au processus judiciaire. Être
confronté à ce type de dossiers au quotidien peut s'avérer difficile.
Nous accueillons,
donc, favorablement la recommandation du comité de confier à un forum dédié le
mandat d'identifier les enjeux observés en
matière de santé mentale et de formuler des recommandations visant à agir en
prévention et en intervention afin d'améliorer le bien-être des procureurs dans
leur environnement de travail. Un montant de 750 000 $ sera
réservé à cette fin annuellement, comme le proposait notre gouvernement.
En
terminant, nous tenons à souligner le travail réalisé jour après jour par
l'ensemble des procureurs aux poursuites criminelles et pénales du
Québec. Ils contribuent à protéger la population, à maintenir la confiance du
public envers le système de justice
criminelle et pénale et permettent aux Québécoises et aux Québécois de
bénéficier d'un système de justice intègre
et équitable. Leurs conditions se doivent de refléter l'importance de leur
fonction au sein de notre société. Merci...
Oh!
Non, je n'ai pas terminé. Ce ne sera pas long. C'est pourquoi j'invite mes
collègues de l'Assemblée à adopter la motion qui a été déposée et à
faire sienne la proposition du gouvernement.
Je
termine en remerciant la présidente, Me Joëlle L'Heureux, et les membres
du comité d'avoir accepté ce mandat important, ainsi que tous ceux et
celles qui ont contribué à l'analyse de ce rapport.
Ainsi, M. le
Président, je propose l'adoption de la motion suivante :
«Que l'Assemblée
nationale :
«Fasse siennes les
réserves du gouvernement exposées dans sa réponse, déposée devant l'Assemblée
nationale le 21 mars 2024, au rapport
du Comité de la rémunération des procureurs aux poursuites criminelles et
pénales pour la période 2023‑2027, déposé devant l'Assemblée
nationale le 17 octobre 2023;
«Approuve
les 23 recommandations mentionnées aux sections I à V du rapport du Comité
de la rémunération des procureurs aux poursuites criminelles et pénales
pour la période 2023‑2027.»
Voilà.
Le Vice-Président
(M. Benjamin) : Merci. Merci, Mme la députée. Donc, je reconnais,
pour une annonce, M. le ministre de la Culture.
M. Mathieu Lacombe
M. Lacombe : M. le Président, je vous
informe que l'honorable lieutenante-gouverneure a pris connaissance de
la présente motion et qu'elle en recommande l'étude à cette Assemblée. Merci.
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci,
M. le ministre. Et est-ce qu'il y a d'autres interventions? Je reconnais
M. le député de l'Acadie.
M. André
Albert Morin
M. Morin :
Merci, M. le Président. Moi, je suis heureux de prendre la parole
aujourd'hui sur cette motion du gouvernement
en lien avec le rapport du Comité de la rémunération des procureurs aux
poursuites criminelles et pénales.
Comme
vous le savez sans aucun doute, les procureurs, donc, les procureurs du DPCP,
jouent un rôle très important, fondamental au Québec. C'est un ensemble
de procureurs qui sont chargés évidemment des poursuites criminelles et pénales, notamment l'ensemble des crimes que l'on
retrouve au Code criminel, en plus des infractions, pour la plupart, dans les
lois du Québec. C'est un travail qui est excessivement exigeant. Ce sont des
gens qui sont terriblement dévoués.
Et, au fil de leur
carrière, plusieurs auront à plaider des dossiers très importants, que ce
soient des dossiers suite au dépôt
d'accusations en matière d'agressions sexuelles, ça peut être des infractions
ou des crimes contre la grande criminalité,
contre des organisations criminelles. Il y a des procureurs qui, évidemment,
plaident des dossiers de meurtre, avec
tout ce que ça comporte. Et ces procureurs-là, sur l'ensemble du territoire
québécois, sont excessivement dévoués, font preuve d'un grand dévouement, sont là pour, évidemment, travailler et
conseiller la police. Et, dans plusieurs cas, on y a fait référence tout à l'heure, ils travaillent à
la cour itinérante, et donc ils sont appelés à voyager dans des conditions qui
sont souvent difficiles.
• (12 h 40) •
Les
procureurs sont régis, évidemment, par une loi, des directives du Directeur des poursuites criminelles et pénales, et ils ont également une loi qui régit la
détermination de la rémunération. Et la façon dont ça procède, c'est qu'il y a
un comité qui est choisi, qui est nommé et qui, donc, entend des témoins,
reçoit de la documentation, reçoit différents éléments et, après ça, fait un rapport, rapport qui a été
complété le 23 septembre 2023, et qui traite évidemment de toute la
question de la rémunération des procureurs.
Ce travail-là est
excessivement important, parce que, bon, les procureurs, évidemment, n'ont pas
droit de grève. Donc, ils se fient au comité
de rémunération. Ils se fient, bien sûr, à la loi qui règle la détermination de
leur rémunération. Le rapport de ce
comité-ci, c'est le troisième, M. le Président, je tiens à le souligner, parce
qu'évidemment, pour que ça fonctionne
rondement, il faut que les deux parties puissent se parler, échanger et en
arriver rapidement à des conclusions pour faire en sorte que les
procureurs soient payés adéquatement.
Le premier comité avait été présidé par Me
Bouchard, Me Bouchard, qui a eu une carrière exceptionnelle au ministère de la Justice du Québec comme
sous-ministre, avec d'autres experts, et il n'y a pas eu de souci. Deuxième
comité, bien là on est encore en contestation judiciaire, alors je n'en
parlerai pas davantage. On va attendre que les tribunaux tranchent la question. Et on arrive maintenant
avec le troisième rapport, qui, lui, est quand même bien, bien étoffé et qui
souligne un ensemble de recommandations
pour, le plus rapidement possible, déterminer la rémunération des procureurs
aux poursuites criminelles et pénales.
Quand on regarde comment le rapport a été fait,
quand on regarde, à la fin, l'horaire des audiences, parce que le rapport et puis le document du comité... Ce
comité était composé de Me L'Heureux, présidente, Me Yves Morin,
avocat, et M. Gilles Paquin. Donc, quand on regarde le travail
qu'ils ont fait, le rapport étoffé qu'ils ont déposé, on voit aussi, à la fin, l'horaire des audiences, parce que le
comité peut entendre les parties pour être capable, évidemment, de faire un
rapport qui est, bien sûr, branché sur la
réalité de ce que vivent les procureurs. Puis, quand on regarde ce qui a été
fait, là, on voit qu'il y a un nombre
important de témoins qui ont été entendus pendant des heures et des heures,
notamment au Palais de justice de Montréal. Des procureurs sont venus
expliquer ce qu'ils vivaient, que ce soient des procureurs du bureau du
service-conseil, des procureurs du Nord-du-Québec, de la cour itinérante,
procureurs au Bureau de la grande criminalité,
procureurs qui travaillent aux violences sexuelles et maltraitance. Il y a eu
évidemment des représentations de l'Association des procureurs, les
représentations du gouvernement, et ceci a duré pendant des heures et des
heures. Évidemment, les parties ont eu le droit à une représentation et à une
réplique.
Donc, c'est
vous dire que ce comité a travaillé, après avoir entendu un ensemble important
de personnes puis aussi avoir reçu
une somme considérable de documents, pour être capable de produire le rapport
qui a été soumis. Par la suite, le
gouvernement doit présenter une réponse à ce rapport pour qu'évidemment le
cheminement puisse continuer, et, dans la réponse du gouvernement et
dans la motion qui est devant l'Assemblée aujourd'hui, le gouvernement
recommande d'accepter les recommandations
qui ont été faites, notamment en ce qui a trait à la rémunération. Je vous le
dirai d'emblée, nous sommes en accord avec le rapport, avec la réponse
du gouvernement.
Cependant, je
dois vous souligner que je trouve particulièrement dommage que, dans sa
réponse, le gouvernement aurait très
bien pu dire : Écoutez, on a étudié le rapport, on a vu qu'est-ce qui
était proposé pour la rémunération des procureurs et on est d'accord avec les recommandations. Le
gouvernement ne s'est pas contenté de répondre ça. À différentes reprises,
pendant plusieurs pages de sa réponse, le gouvernement critique, d'une certaine
façon, le comité, son travail, souligne à
différents endroits qu'il y a des explications qui sont ténues, principalement
en ce qui concerne les paramètres généraux d'augmentations salariales,
qu'il y a des éléments qui ne sont pas suffisamment précis, que ce n'est pas
toujours très étoffé. Et je vous dirais que
c'est un peu... c'est un peu malheureux, même pas mal malheureux, parce
qu'après ça, dans sa motion, le gouvernement nous demande de faire
siens, évidemment, son document et les critiques qu'il apporte aux travaux du
comité.
Quand on regarde, en plus, la réponse du
gouvernement, on ignore complètement la section VI du rapport, qui s'intitule Autres recommandations. Puis ces autres
recommandations, M. le Président, ne sont pas directement en lien avec
la rémunération, mais les personnes qui ont siégé prennent la peine de faire
des recommandations dans une optique... Et
permettez-moi de lire l'extrait du rapport du comité à la page 110 :
«Dans une optique de favoriser un déroulement plus fluide des travaux du
comité de la rémunération[...], le comité formule [des] recommandations
additionnelles.»
Donc, au
fond, la façon dont ça fonctionne, c'est que le gouvernement doit s'asseoir
avec les procureurs puis être capable
de trouver un terrain d'entente le plus possible pour en arriver à une
rémunération qui est juste pour les procureurs. Le comité prend la peine de faire certaines recommandations. Dans sa
réponse, le gouvernement n'en parle pas, mais moi, je pense que ça vaut la peine d'en parler, parce
qu'au fond il y aura d'autres comités qui seront formés, et, éventuellement,
ils devront se pencher aussi sur la rémunération des procureurs.
Le comité recommande un meilleur partage de
données sur la rémunération globale, et on dit : «...en vue des travaux du
prochain comité de rémunération, que le gouvernement et l'association partagent
les données factuelles à la base de la
comparaison [ou] de la rémunération horaire globale, selon [ces] engagements pris
envers le prochain comité [à] un échéancier fixé par ce dernier.» Je
pense que c'est tout à fait normal, et c'est logique, parce que ça permettrait,
effectivement, aux parties de comparer ce qui est comparable et donc de faire
leur travail plus efficacement.
Le comité
fait aussi d'autres recommandations — et
ça, je pense que c'est important — pour
un meilleur déroulement. Et puis,
évidemment, on dit ici : «...le comité faisait un suivi sur la demande
[notamment] pour [des] congés familiaux, qu'il a appris que de nombreux
sujets dont il était saisi faisaient aussi l'objet [d'un] arbitrage en cours.
«Cette situation — comme le souligne le
comité — non
souhaitable, peut conduire à des recommandations contradictoires...» Donc, en fait, j'invite les parties à collaborer
davantage et à faire en sorte que, lorsqu'il y aura un prochain comité,
les parties puissent en arriver rapidement à une entente.
Et, à la
toute fin, le comité recommande ceci : «La mise en place d'un comité de
rémunération ne devrait pas empêcher les
parties de discuter entre elles et de présenter des propositions communes à ce
dernier.» Dans n'importe quelle négociation dans le domaine du travail
et des relations de travail, M. le Président, il est évident que, quand les
parties se parlent, quand il y a une
fluidité dans les échanges, échanges de documents, échanges d'opinions et
échanges de positions, bien, c'est
sûr que ça permet de se comprendre plus vite et d'aller plus rapidement. C'est
fort important, puis je tiens à le souligner.
• (12 h 50) •
Le
comité traite, évidemment, de la rémunération, mais, je le mentionnais plus
tôt, il y a plein d'autres éléments qui
restent à régler dans le normatif, et j'espère qu'évidemment les parties pour
en arriver à une entente, parce que ce n'est pas bon pour personne de
voir cette situation-là perdurer, d'autant plus, comme je le soulignais lors du
début de mon allocution, M. le Président,
que les procureurs aux poursuites criminelles et pénales, ce sont des
professionnels, ils travaillent excessivement
fort, dans des dossiers qui sont, souvent, très difficiles, qui peuvent avoir
un impact sur eux. Je pense, entre autres,
à des dossiers de meurtre, des dossiers d'agression sexuelle, quand des
accusations sont déposées et que les victimes sont des mineures. Et, ça, M. le Président, je peux vous en parler,
parce qu'au début de ma carrière j'ai plaidé ces dossiers-là, donc je peux très bien vous dire ce que ça fait.
Puis je pense que le gouvernement devrait accorder une attention particulière
au bien-être de leurs procureurs puis, évidemment, les rémunérer adéquatement.
Le
comité a fait des recommandations, je vous le disais, on va les accepter, mais,
quand vous comparez la rémunération des procureurs du DPCP avec d'autres
procureurs à travers le Canada, que ce soient les fédéraux, ou encore d'autres provinces, bien, vous allez vous rendre compte
très rapidement que les procureurs du DPCP ne sont pas en tête de liste, loin de là. Donc, il y aura, effectivement,
puisque la loi existe, d'autres comités, en espérant que les deux parties
puissent se parler et en arriver à
des ententes rapidement, pour s'assurer que les procureurs du DPCP auront une
rémunération adéquate.
C'est
la raison pour laquelle, quand je regardais la motion du ministre de la
Justice, quand j'écoutais ma collègue députée,
Charlevoix—Côte-de-Beaupré, faire son allocution, et que je regardais la motion où le gouvernement
et le ministre invitent l'Assemblée nationale à voter, je trouvais
particulièrement dommage qu'au lieu d'indiquer simplement ou de demander à l'Assemblée, par une motion, d'appuyer
la réponse du gouvernement, bien, on met l'accent sur, évidemment, des réserves que le gouvernement a émises à propos
du rapport. Personnellement, je ne trouve pas ça constructif. Je pense que ce
qui est important ici, c'est qu'on puisse voter rapidement pour faire en sorte
que des employés de l'État qui ont un
travail excessivement difficile puissent avoir une rémunération qui est
adéquate. Comme je vous le disais d'emblée, le gouvernement, dans sa réponse, accepte les 23 recommandations,
souligne qu'il y a des éléments qui auraient pu être plus précis, mais
dans le cadre de la motion, met, évidemment, l'accent là-dessus. Je trouve ça
dommage.
Motion
d'amendement
Et
c'est la raison pour laquelle, M. le Président, à ce stade-ci, je veux procéder
et je veux présenter un amendement à la motion du ministre de la
Justice, conformément à l'article 196 et suivants du règlement :
Que la motion du
ministre de la Justice soit amendée de la manière suivante :
Remplacer,
à la deuxième ligne, les mots «les réserves» par les mots «la réponse» — c'est
de ça dont on parle — ainsi
que supprimer les mots «exposées dans sa réponse,».
La motion, telle
qu'amendée, se lirait ainsi :
«Que l'Assemblée
nationale :
«Fasse
sienne la réponse du gouvernement — on
biffe "exposées dans sa réponse" — déposée devant l'Assemblée nationale le 21 mars 2024, au rapport du
Comité de la rémunération des procureurs aux poursuites criminelles et pénales
pour la période 2023‑2027, déposé devant l'Assemblée nationale le
17 octobre 2023;
«Approuve
les 23 recommandations mentionnées aux sections I à V du rapport du
Comité de la rémunération des procureurs aux poursuites criminelles et
pénales pour la période 2023‑2027.»
Et, comme je le
mentionnais, M. le Président, cette motion-là, l'amendement que je propose,
décrit très bien la situation sur laquelle
l'Assemblée doit se prononcer aujourd'hui, c'est-à-dire la réponse du
gouvernement, mais tient compte de la
réponse dans son entier sans mettre nécessairement l'accent sur les réserves
que le gouvernement, de toute façon, écrit dans sa réponse. Alors, appelons une
réponse une réponse, c'est le but de mon amendement, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci,
M. le député. Votre amendement est bel et bien déposé. Y a-t-il des interventions sur l'amendement? Il n'y a pas
d'intervention sur l'amendement. Donc, il faudra statuer sur l'amendement.
Mise
aux voix
Donc, l'amendement
est-il adopté? Rejeté. Votre amendement, malheureusement, n'a pas été retenu.
Donc,
alors, nous allons poursuivre, donc, sur la proposition principale qui est
devant nous, à savoir... telle que je l'ai lue précédemment, donc, sur
la motion du gouvernement, de M. le ministre de la Justice. Est-ce qu'il y a
d'autres interventions? Il n'y a pas d'autre intervention.
Mise
aux voix de la motion
Donc, alors, cette
motion est-elle adoptée? Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Lévesque (Chapleau) : ...le
Président, là, je vous demanderais peut-être d'appeler l'article 52 du
feuilleton, à ce stade-ci... ou nous pourrions aller dîner tous ensemble
et suspendre les travaux pour bien reprendre à notre retour.
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Je
suis à la disposition de cette Chambre. Donc, si telle est la volonté...
Consentement?
Alors, nous allons
donc suspendre nos travaux, donc, jusqu'à 15 heures.
(Suspension de la séance à 12 h 57)
(Reprise à 15 heures)
Le Vice-Président (M. Lévesque) : Alors,
bon après-midi, chers collègues. Je vous invite à vous asseoir.
Affaires
inscrites par les députés de l'opposition
Motion
proposant que l'Assemblée demande au gouvernement de déposer
un plan d'action numérique en éducation et en enseignement supérieur
bonifié pour mieux encadrer l'exposition des jeunes aux écrans
Nous en
sommes aux affaires inscrites par les députés de l'opposition, et, à
l'article 57 du feuilleton, aux affaires inscrites par les députés de
l'opposition, M. le chef du troisième groupe d'opposition présente la motion
suivante :
«Que
l'Assemblée nationale constate qu'une étude australienne publiée le 4 mars
dernier dans la revue scientifique JAMA Pediatrics confirme
l'effet nocif des écrans sur le développement des enfants en bas âge;
«Qu'elle
souligne que l'étude longitudinale sur le développement des enfants produit par
l'Institut de la statistique
du Québec a également démontré une corrélation entre l'exposition aux écrans en
bas âge et les performances scolaires au primaire;
«Qu'elle
prenne acte que la surexposition aux écrans a une incidence démontrée sur le
développement des capacités cognitives, sur la santé, notamment les
troubles de la vue, sur les troubles de l'attention et du comportement des
jeunes;
«Qu'elle
constate que de nombreux pays ont agi, dont la France, les Pays-Bas et des pays
scandinaves, notamment, pour corriger cette problématique;
«Qu'elle affirme que la surexposition des jeunes
aux écrans représente un enjeu de santé publique;
«Qu'elle
constate que le Plan d'action numérique en éducation et en enseignement
supérieur, échu depuis 2023, est insuffisant et doit être bonifié pour
lutter efficacement contre les effets nocifs de la surexposition des jeunes aux
écrans;
«Qu'en conséquence, l'Assemblée nationale demande
au gouvernement de déposer un nouveau plan d'action numérique en éducation et
en enseignement supérieur bonifié pour mieux encadrer l'exposition des jeunes
aux écrans avant la fin de la présente
période de travaux parlementaires, pour une mise en oeuvre dès la prochaine
rentrée scolaire.»
Je vous
informe que la répartition du temps de parole pour le débat restreint sur la
motion inscrite par M. le chef du troisième groupe d'opposition
s'effectuera comme suit : 10 minutes sont réservées à l'auteur, pour la
motion, pour sa réplique,
49 min 15 s sont allouées au groupe parlementaire formant le
gouvernement, 26 min 23 s sont allouées au groupe parlementaire formant l'opposition officielle,
16 min 40 s sont allouées au deuxième groupe d'opposition,
16 min 12 s sont allouées
au troisième groupe d'opposition, 1 min 30 s sont allouées à la
députée indépendante. Dans le cadre de ce débat, le temps non utilisé par la députée indépendante ou par l'un des groupes
parlementaires sera redistribué entre les groupes parlementaires selon les proportions établies
précédemment. Mis à part ces consignes, les interventions ne seront soumises
à aucune limite de temps. Enfin, je rappelle
à la députée indépendante que, si elle souhaite intervenir au cours de ce
débat, elle a 10 minutes à partir de maintenant pour en aviser la
présidence.
Je cède maintenant la parole à M. le chef du
troisième groupe d'opposition.
M. Paul
St-Pierre Plamondon
M. St-Pierre
Plamondon : Merci, M. le Président. Et donc aujourd'hui, je
veux prendre la parole à titre de chef du
Parti québécois et de député de Camille-Laurin, mais surtout en tant que
parent, un parent inquiet devant des phénomènes qui devraient tous nous amener à réfléchir à l'avenir de nos enfants
face à un bouleversement technologique qui se déroule devant nos yeux à
toute allure, avec des conséquences vraisemblablement très graves.
Donc, c'est
dans un esprit d'urgence que je présente la seule motion du mercredi avec
débat. Elle sera, au Parti québécois,
consacrée à cette notion de réduire le temps d'écran et de mettre fin à la
surexposition des enfants aux écrans, à la
lumière des données des études et des enquêtes, qui arrivent toutes aux mêmes
conclusions au cours des dernières années.
Et le hasard fait que, dans les deux derniers jours... ça ne fait pas partie de
la longue liste dans la motion, mais on a d'autres études, que je rajouterai de manière spontanée, qui nous
indiquent que la surexposition aux écrans a des effets majeurs sur la
santé mentale et physique des enfants, sur leurs capacités cognitives et sur la
socialisation des jeunes.
Nous avons le devoir, donc, comme société, et
particulièrement comme députés, de veiller à la protection et au plein épanouissement de tous les Québécois,
mais, au premier chef, de nos enfants, de notre avenir à travers eux. C'est
pour ça que je pense qu'il faut nommer,
avoir l'honnêteté et la lucidité de nommer que nous sommes en retard
présentement, au Québec, sur cette question.
Les faits sont pourtant connus. Chaque année, il
y a, notamment, l'Académie de la transformation numérique qui met à jour ses études sur le temps d'écran.
Donc, leur dernier bilan montre que 45 % des jeunes de six à 17 ans
passent plus de 10 heures à naviguer sur Internet chaque semaine.
Ça augmente à chaque année, parce qu'en 2022 c'était 42 % et ça ne cesse d'augmenter. Les parents sont
conscients de la situation. 52 % des parents ont observé que le temps
passé par les jeunes âgés de six à 17 ans à la maison avait augmenté. Plus
du quart de ces parents disent qu'il a beaucoup augmenté.
Et c'est
encore plus grave chez les tout-petits. Donc, quand on regarde là où c'est le
plus dommageable, à deux ans, à deux ans, M. le Président, le tout-petit, un
tout-petit, au Québec, passe en moyenne 2 h 4 min par jour... À
deux ans! J'ai de la misère à
concevoir que c'est le cas. À trois ans, ça passe à 3 h 6 min
par jour. Ça, c'est selon une étude canadienne, là, mais on est là. On peut peut-être trouver une
autre étude qui aura une virgule de moins ou de plus, là, mais il faut prendre
conscience que c'est parfaitement anormal et dangereux.
Selon
un rapport de l'Institut de la statistique du Québec, cette fois de 2022,
16 % des enfants de maternelle cinq ans
passent en moyenne deux heures et plus par jour devant les écrans. M. le
Président, j'ai dû intervenir pour que ma
fille, à la garderie, arrête d'être devant un écran pendant 30 minutes
presque à tous les jours. Ce n'est pas normal et c'est notre
responsabilité, parce que l'État se passe ici, à l'Assemblée nationale. Donc,
c'est notre responsabilité.
On
est toujours... dans toutes les données, puis je pourrais vous en sortir, là,
plusieurs autres, on est toujours très, très, très au-dessus des recommandations en matière de santé publique.
En d'autres termes, là, la très vaste majorité de nos jeunes, petite enfance comme adolescence, ne
respecte pas et ne passe pas proche de respecter les normes de santé publique
en la matière.
La
Direction de la santé publique de Montréal, la Société canadienne de
physiologie ou de pédiatrie, tous s'accordent pour dire que les enfants de deux
ans et moins ne devraient pas être exposés aux écrans, point final. C'est à ce
point toxique et dangereux. Les enfants de
moins de cinq ans devraient passer un maximum d'une heure devant un écran,
puis, encore là, ça devrait être du matériel pédagogique adapté à ce
qu'ils peuvent voir. On est loin du compte, et je suis inquiet.
Je
peux continuer la liste longuement, là, mais, selon le guide Naître et
grandir de la fondation Chagnon, une très grande exposition aux écrans en
bas âge entraînera une moins bonne motricité à l'entrée à l'école, de plus
faibles habiletés sociales, des
capacités cognitives moins élevées, un mauvais contrôle des émotions, des
difficultés d'attention, des problèmes du sommeil, une mauvaise estime
de soi et plein d'autres problèmes de santé. La liste est interminable.
Donc,
il est clair que nous avons le devoir d'agir, et ça adonne qu'on a les moyens
d'agir. Nous avons la responsabilité, en tant qu'État, d'initier des
changements durables et importants et de le faire rapidement. L'État a un rôle
à jouer pour fournir notamment des outils
aux parents qui se sentent aussi désemparés, ne sachant pas comment réagir à
des produits qui ont été conçus pour créer une dépendance très jeune. En
d'autres termes, tenter de réduire le temps d'écran s'inscrit dans la
vie des parents comme une bataille douloureuse avec son propre enfant. On en
est là.
Il
faut nommer le problème, également, parce que, si on n'outille pas les parents,
si on ne part pas de leur position, bien,
on a moins de chances de réussir. Si l'État remplit son rôle, toute
l'information, tous les outils vont être disponibles aux parents également, en plus que l'État va
commencer par donner l'exemple, lorsque c'est sa responsabilité, comme dans
les garderies, CPE, maternelles, écoles primaires, secondaires.
Et
là ça ne peut pas être un hasard, je ne crois pas en les hasards, mais on a
l'actualité qui nous parle, partout dans le monde, des États qui se responsabilisent et qui agissent, qui ne sont
pas dans l'attentisme. Donc, hier, c'était la Floride qui impose des
limites d'âge en matière d'accès aux réseaux sociaux. Mais ça s'ajoute à une
très longue liste d'États qui n'ont rien à
voir entre... tu sais, qui n'ont pas nécessairement la même posture, qui ne se
sont pas coordonnés mais qui ont décidé d'agir.
• (15 h 10) •
En
Suède, par exemple, après avoir tout misé sur les technologies à l'école, 180°,
la ministre responsable des Écoles a
constaté un recul des compétences des élèves en matière de lecture et de
compréhension, donc le gouvernement suédois a annoncé des
investissements massifs pour l'achat de livres, qui correspond au retrait de
ces technologies-là. Ça, c'est l'honnêteté intellectuelle de dire : On
s'est trompé, ça arrive, on s'ajuste maintenant, avant de courir à la
catastrophe.
Aux
Pays-Bas, à partir de 2024, les téléphones portables et les tablettes seront
interdits dans les écoles, dans la très grande majorité des écoles. En France,
on a banni, en 2018, les téléphones dans les cours d'école, dans les cours
d'école, là, donc partout, pour les moins de 15 ans, et là on apprend
qu'en janvier de cette année d'autres mesures interviendront pour limiter
le temps d'écran chez les jeunes. C'est un des débats de l'heure, d'ailleurs,
en France, mentionnons-le.
L'été dernier,
l'UNESCO lançait justement un avertissement contre l'usage intensif des
technologies dans l'éducation. J'aimerais citer une de ses conclusions, une des
conclusions de ce rapport-là. J'ouvre les guillemets : «On s'aperçoit que souvent les investissements ne sont
pas faits en toute connaissance de cause des coûts et de l'efficacité sur les
apprentissages. Ça peut donc constituer, dans une certaine mesure, un
gaspillage financier — fermez
les guillemets.»
Et
ça, c'est très important, M. le Président, parce que l'État québécois ne pourra
pas jouer à l'autruche encore très longtemps sur les causes profondes des
problèmes de santé mentale chez nos jeunes comme chez les adultes et tenter
de trouver un psychologue pour chaque citoyen, rajouter toujours des sommes en
disant : Oui, on va trouver plus de psychologues.
Il y a une limite à ce que l'État québécois peut faire, si on accepte que, de
manière endémique, les problèmes de
santé mentale et de santé physique se répandent dans la population. Il faut
aller à la source si on veut une solution durable.
Donc,
la conclusion que j'en tire, c'est que, partout dans le monde, on reconnaît
qu'il y a un problème très grave, on
reconnaît qu'on a fait des erreurs et on corrige le tir, on n'est pas dans
l'attentisme. C'est pour ça qu'on demande, au Parti québécois, un plan
immédiat et une mise en oeuvre rapide, dès cette année.
Parce
que, là, je comprends qu'on a colligé des données, là, puis qu'on a des groupes
de réflexion et d'observation. Je
comprends qu'on va me répondre que certaines mesures ont été faites. Ce à quoi
je réponds tout de suite : Tant que le temps d'écran chez les deux
ans, les trois ans, chez les adolescents, tant que toutes les statistiques que
je viens de vous mentionner demeurent à des
années-lumière des recommandations de santé publique, c'est parce que nous
échouons, nous échouons à notre responsabilité. Donc, je ne veux pas une liste
de mesures qu'on a faites à date ou de réflexions qui sont en cours. On veut des résultats quant au
respect des recommandations de santé publique pour ne pas préjudicier à long
terme toute une génération. C'est urgent, M. le Président.
Et c'est pour ça que
la motion, elle est accompagnée d'une date butoir : quelque chose de
concret d'ici la fin de l'année. On
considère que c'est un délai raisonnable, vu l'urgence de la situation, et on
constate que, partout dans le monde, d'autres gouvernements sont
capables de se prendre en main en temps utile. Je veux donc qu'on travaille ici
avec le sens de l'urgence et des
responsabilités. Si on a besoin d'une collaboration entre les parties,
évidemment qu'on est là, on tend la main, mais on veut ce sentiment
d'urgence partagé.
Je ne veux pas faire l'historique, là, de tout
le Plan d'action jeunesse 2021-2024, puis ensuite le Plan d'action interministériel en dépendances 2018-2028,
puis le plan stratégique du ministère de l'Éducation 2023-2027, où on ne
retrouve même
pas le mot «écran», mais ça ne correspond pas à l'autre plan stratégique, là.
Tout ça, les moyens de l'État permettent de centrer les efforts et de coordonner les efforts. Je comprends
également qu'il y a un plan d'action concerté pour prévenir et contrer
l'intimidation, la cyberintimidation, tout ça, là, mais la plupart des plans ne
comprennent pas le mot «écran». Et moi, je
vous dis, M. le Président, tant qu'on a des statistiques mesurées et
mesurables complètement inacceptables, qui mettent en danger la vie, la santé physique et mentale de nos enfants,
c'est que tous ces plans-là n'ont pas servi l'objectif qu'ils s'étaient
fixé. Donc, nous, on va surveiller les statistiques, les résultats.
J'aimerais aussi
ajouter la chose suivante : c'est un problème plus large, le temps
d'écran, lorsqu'on considère l'utilisation
des psychotropes, des médicaments et des antidépresseurs depuis la
période 2005-2010. On apprenait, ce matin dans La Presse, que l'utilisation des antidépresseurs, dans les
dernières années, a augmenté par cinq fois chez les jeunes. Or, quand on
regarde la période d'études puis on regarde la période durant laquelle les
médias sociaux et les téléphones intelligents
ont été introduits dans la vie des jeunes, on doit conclure qu'il y a une
corrélation, probablement un lien de cause à effet. Et il y a quand
même, aux États-Unis, 32 études qui confirment cela.
Il
y a des conséquences également sur la démocratie, il faut le dire, ça aussi. Il
y avait un texte très, très intéressant, dans Politico, je suis
prêt à le partager avec mon collègue et quiconque veut collaborer, qui décrit
l'impact des problèmes de santé mentale chez
les jeunes avec leur posture politique et la stabilité d'une démocratie.
Notamment, des problèmes d'anxiété et
d'estime de soi mènent, le plus souvent, à des conclusions antidémocratiques ou
autoritaires. Les gens qui ressentent de la peur, de l'anxiété, qui
n'ont plus confiance aux institutions, qui sont atomisés dans leur compréhension de la société vont avoir tendance à
recourir à des personnes fortes qui n'ont aucun intérêt pour les institutions,
aucun respect des institutions, aucun
respect de la démocratie, vont avoir tendance à verser dans l'autoritarisme.
Ça, c'est une menace déjà... qu'on constate déjà, mais très matérielle, très
réelle qui pèse contre tout le principe de démocratie, contre toute l'institution que nous incarnons ici, à
l'Assemblée nationale. Donc, c'est une question de santé, c'est une question de
paix sociale, mais c'est également une question de démocratie dont il est
question ici.
Donc,
en conclusion, si j'ai un message pour le ministre et pour le gouvernement,
c'est que je sais qu'il y a plusieurs crises
simultanées à gérer, mais il y en a peut-être une qui a des conséquences de
manière plus marquante à long terme pour notre société et qui a des
conséquences transversales dans tous les problèmes qu'on observe en ce moment,
et c'est ce changement très rapide d'une génération dont le cerveau aura été
construit et rebranché différemment que toutes les générations précédentes
depuis l'histoire de l'humanité. Et, le jour où on a une confirmation non
équivoque que les problèmes de santé
mentale, qu'on tente de corriger avec des programmes d'aide psychologique, de
soutien... puis je ne me plains pas de
ça, là, il faut réagir, mais, le jour où on comprend que l'épicentre du
problème, il est là et qu'il y a une partie
de ces problèmes-là qui seront irréversibles dans le développement de l'enfant,
là on est... on est en train de saboter le Québec de dans 20 ans puis dans 30 ans, avec des
conséquences épouvantables. Si les autres pays dans le monde sont
capables, on est capables, M. le Président. Il s'agit juste d'avoir le même
sentiment d'urgence, la même volonté.
Et
c'est pour ça que je demande formellement au gouvernement de saisir cette
opportunité-là, pas de blâme là-dedans, mais de déposer un plan d'action qui
regroupe tous les plans d'action dans le cadre duquel, lors de la prochaine
rentrée scolaire, il y a des mesures.
J'en ai nommé une dizaine dans la première intervention du Parti québécois sur ce sujet-là. Je ne prétends pas être expert, les moyens de
l'État permettront de faire la synthèse de ces mesures-là, mais que, dès la
rentrée scolaire, on ait un résultat puis un
changement des moeurs pour le bénéfice de ces jeunes-là, qui, je crois,
malheureusement, ont été laissés à eux-mêmes par rapport à une... vis-à-vis une
technologie qui est probablement plus dommageable
que même le tabac dans les
années 70, 80, 90, problème qu'on a fini par éradiquer. Faisons face à nos
responsabilités par rapport à ce problème de santé publique qui me
semble très grave. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lévesque) : Merci
beaucoup, M. le chef du troisième groupe d'opposition. Et je reconnais
maintenant M. le ministre responsable des Services sociaux.
M.
Lionel Carmant
M. Carmant : Merci beaucoup, M. le Président. Je pense qu'il
n'y aura pas de grand débat ici. Je pense que ce qu'on parle, c'est de l'importance d'éviter les écrans. Mais j'aurais
aimé, M. le Président, que le chef de la troisième opposition nomme au moins le document qui s'intitule Stratégie
québécoise sur l'utilisation des écrans et la santé des jeunes 2022‑2025,
qui est la base de notre document qu'on utilise au niveau du gouvernement.
• (15 h 20) •
Puis
je tiens à le remercier, puis je pense que l'intention est excellente, de nous
donner l'occasion d'échanger sur un sujet qui nous préoccupe tous. Puis
évidemment je suis sûr qu'il va comprendre qu'en tant que neuropédiatre qui
suis venu en politique pour améliorer le développement de nos jeunes,
c'est une priorité importante pour moi. Puis je pense qu'il faut aussi qu'il... il faut voir que... Le chef de la troisième
opposition a des jeunes enfants, est inquiet de leur devenir. Moi, je suis
grand-papa maintenant, mes enfants sont des jeunes adultes, mais je m'inquiète
également pour mon petit-fils. Puis ce qu'il est important de savoir,
c'est que nous, on a eu cette inquiétude-là dès 2019, M. le Président, puis on
a décidé qu'il fallait se pencher sur cette question. Il était, pour moi,
crucial de prendre les moyens d'agir pour offrir aux jeunes le meilleur environnement possible et pour mieux les guider dans
le choix des saines habitudes de vie à l'égard de leur utilisation des
écrans.
C'est
dans cette optique que, le 18 août 2019, le 18 août 2019, j'ai
annoncé la tenue d'un forum d'experts portant sur l'utilisation des écrans et
de la santé des jeunes. Puis ça, ça a été fait de façon non partisane. Puis je
suis heureux de voir la présence du
député des Îles-de-la-Madeleine, la présence du député de Pontiac et celle du
député de Jean-Lesage, qui ont participé
avec moi à cette stratégie-là. M. le Président, on a décidé de quel était le
type d'événement qu'on voulait tenir, quels étaient les invités et quels
étaient les sujets qu'on allait aborder à cette époque.
Puis
c'est là que je vais rentrer dans les petits détails, mais le premier
Forum sur l'utilisation des écrans et la santé des jeunes tenait sur les
deux à 25 ans. Et ça, ça s'est fait le 10 février 2020, juste, juste
avant la pandémie, le fameux 10 mars 2020, un mois avant. Il constituait la première étape de cette démarche
consultative concernant l'utilisation des écrans, menée en collaboration avec le ministère de l'Éducation
et l'Institut national de santé
publique du Québec.
Puis
pourquoi, à ce moment-là, on a dit : À partir de deux ans? Parce que,
pour nous, ça a toujours été clair, de zéro à deux ans,
c'est : pas d'écran au Québec. Il y a eu des campagnes Capsana là-dessus,
qu'on répète à chaque année. De zéro à
deux ans, c'est : pas d'écran pour nos jeunes. La seule petite
exception qui s'est décidée après ce forum-là, ça a été peut-être dans les interactions sociales avec
nos parents ou nos grands-parents. Puis moi, je vais avouer, M. le Président,
que j'en profite un petit peu, de ce temps
d'écran privilégié avec mon petit-fils. Mais, à part ça, c'est zéro temps
d'écran, puis je suis très fier de
dire que, mon petit-fils, il n'y a pas de télévision dans sa maison puis il
n'utilise aucun écran ni téléphone. Puis
ça, il faudrait que ce soient tous les Québécois qui comprennent ça. Puis, si
on veut travailler ensemble pour renforcer ce message-là, allons-y,
c'est urgent de le faire, tout à fait d'accord.
Maintenant,
il y avait une trentaine d'experts québécois, M. le Président, qui sont venus
nous voir, qui ont consenti à mettre en commun leurs connaissances
scientifiques relatives à l'utilisation des écrans et la santé des jeunes sous quatre
grands thèmes : le développement global de l'enfant, l'effet sur la santé
psychologique et sociale, les effets sur la santé physique, l'environnement et les milieux de vie, donc tous les points
qui ont été mentionnés auparavant, M. le Président.
Nous avons par la suite dû prendre une pause
forcée. Parce qu'il y avait un premier thème sur l'impact du développement puis
il y avait une deuxième composante qui était plus sur les bénéfices au niveau
de l'éducation, mais malheureusement, comme
je l'ai mentionné tantôt, à cause de la pandémie, on a dû prendre une pause de
plus d'un an sur les travaux.
Ça, ça a été
très important, parce que, vous vous en souvenez sûrement, la pandémie a fait
deux choses : elle nous a permis de mettre en évidence les avantages de
l'enseignement à distance, des écrans comme seul mode de communication qu'on a eu pendant longtemps avec nos aînés, avec
toute une situation qui était très compliquée, mais nous a aussi permis de
mettre en évidence, bien, les effets néfastes potentiels de l'isolement, de mon
ado qui est dans le sous-sol, etc., puis ces situations qu'on veut
éviter. Donc, on ne peut pas nier que la pandémie a amplifié la présence des
écrans dans notre quotidien, puis particulièrement
au niveau des jeunes. Puis, on le sait, les chiffres le disent, pendant la
pandémie, 75 % de nos jeunes ont augmenté leur consommation
d'écran, M. le Président.
Alors, quand
on est arrivés à la deuxième consultation, le 27 septembre 2021, puis on a
encore une fois regroupé plusieurs
organismes pour nous dire, bien, c'était quoi, la prochaine étape, il faut voir
dans quel état d'esprit on était à ce moment-là, qui était peut-être un
peu différent de celui de février 2020.
Donc, la
deuxième étape de cette démarche consistait à regrouper les représentants
d'associations professionnelles, d'organismes communautaires,
d'organismes gouvernementaux du réseau de la santé et des services sociaux
ainsi que du réseau de l'éducation pour nous
dire comment aller de l'avant au niveau de règlements ou des suggestions qu'on
pouvait faire à long terme, comment soutenir les jeunes, encadrer leur
utilisation des écrans de manière à réduire les méfaits, l'utilisation des écrans, quand est-ce que ça peut
être bénéfique, quels sont les enjeux par rapport à la gestion du temps, qui
est la grande question.
Plusieurs nous ont dit, à cette
consultation : C'est zéro en bas de deux ans, une heure jusqu'à l'entrée à
l'école, deux heures par la suite. Mais est-ce que c'est deux heures de six à
18 ans? Quand est-ce qu'on permet... À quel âge on permet aux jeunes d'intégrer les outils dans leur vie? Quand est-ce
qu'il faut leur apprendre à savoir utiliser les outils numériques? Parce que... pas vrai qu'ils ne vont
pas les utiliser dans leur vie. Donc, c'étaient toutes des questions qui
se sont invitées à la discussion dans le
contexte qu'on venait de vivre, que nos enfants ont passé une année à l'école à
la maison, M. le Président.
Donc, cette
deuxième journée de consultations, ça a permis de prendre connaissance de
plusieurs préoccupations concernant l'utilisation des écrans, et d'explorer des
pistes d'action au regard de celle-ci sous l'angle de la santé des
jeunes, et aussi de réaliser qu'on ne
connaît pas tout l'impact de l'apprentissage de la compétence numérique, sur
ses effets néfastes. Puis je vous
dirais que le message, pour ceux qui n'étaient pas là, c'était vraiment :
Est-ce que l'utilisation supervisée et académique des écrans doit être
incluse dans ces heures d'exposition à l'écran?
Puis je comprends le chef de la troisième
opposition de ne pas vouloir que son enfant soit devant un film à la garderie, là. Ça, je comprends. Ce n'est pas ça
qu'on veut. Mais quand est-ce que l'apprentissage de la compétence numérique
doit être inclus ou pas? Quel type de
matériel doit être inclus ou pas? C'étaient des décisions qu'on ne pouvait pas
prendre à l'époque, que, peut-être, on peut prendre maintenant avec une vision
plus différente, parce qu'effectivement il y a plusieurs données qui
sont sorties, mais nos conclusions, à l'époque, étaient très influencées par
ça.
Et, après
cette deuxième consultation, M. le Président, on a déposé la première Stratégie
québécoise sur l'utilisation des écrans et la santé des jeunes 2022‑2025.
Afin de réaliser cette stratégie, on a investi 16,5 millions de
dollars, soit 5,5 millions de
dollars par année, avec quatre grandes orientations et sept mesures. Toujours,
moi, j'essaie, quand on fait des
stratégies ou des plans d'action, d'avoir un nombre limité de mesures pour
avoir un impact réel dans la vie de tous les jours. On a déjà vu des plans
d'action avec des centaines de mesures. Nous, on se limite toujours avec
quelques axes puis quelques mesures d'impact qui vont faire une
différence, donc : la promotion de la santé et des saines habitudes de vie
avec des campagnes annuelles de
sensibilisation — je
pense que tout le monde ici connaît Pause ton écran, et ça, c'est nous qui finançons ça année après année — par
Capsana; l'information et la sensibilisation; produire et
diffuser de l'information pertinente
pour toute la population également; services intégrés et complémentaires;
mettre en place des conditions favorisant l'accès à un ensemble de
services diversifiés, cohérents et adaptés au regard de l'utilisation des
écrans.
Et évidemment
tout un volet a été investi dans la surveillance et la recherche, avec des gens
comme Magali Dufour, qui se
posent ces questions : Quand est-ce qu'on dépasse les bornes? Parce qu'il
y a des gens, par exemple, des jeunes qui vont... Ils
nous ont rapporté des jeunes qui allaient... qui avaient comme du sport-études
mais numérique, puis ça, ces jeunes-là, ils font de l'éducation physique tous
les jours, ils ont des diètes appropriées puis ils s'en sortent très bien. Donc, quand est-ce que c'est trop, ça
restait à définir à cette époque-là, M. le Président. Puis surtout une chose
dont j'étais très fier également, c'est la sensibilisation dans nos
milieux scolaires, puis ça, c'était très important également.
Donc, notre
but, c'était vraiment d'outiller les jeunes afin qu'ils intègrent à leur
quotidien une gamme d'activités alternatives aux écrans permettant de combler
leur besoin de socialiser, de se divertir, de s'évader, tout en leur donnant
envie, aux jeunes, de faire une pause des
écrans et de diminuer leur temps d'écran au bénéfice d'autres activités, dont
celles qui incluent un mode de vie physiquement actif, et surtout de guider les
parents afin qu'ils soient des modèles positifs pour leurs jeunes. Et ça, ce n'est pas toujours
évident. On serait peut-être les premiers à devoir montrer l'exemple, M. le
Président.
À travers la
stratégie, on a aussi appuyé sur le déploiement d'activités préventives
confiées à des organismes nationaux, comme je vous ai parlé tantôt, Capsana;
également, déploiement du programme des travailleurs numériques, de la
Fondation des Gardiens virtuels; encore un
projet, Enseigner dehors, de la fondation... par la Fondation Monique Fitz-Back;
et surtout le projet dont je vous parlais, dont je suis vraiment le plus fier,
c'est le projet qui a été remis, de prévention dans les écoles, à la fondation du Centre pour l'intelligence
émotionnelle en ligne, de mon... de M. Alexandre Champagne, que je connais
quand même assez bien, et qui a fait une énorme différence dans la vie de nos
jeunes.
• (15 h 30) •
D'ailleurs,
je viens de mettre sur ma plateforme X une entrevue que j'ai faite avec lui et
qui... comment ils vont maintenant dans les écoles primaires, dans les écoles
secondaires, comment leur intervention dans les milieux scolaires a explosé ces dernières années. Puis, la chose qui
m'a le plus frappé puis qu'il m'a dite spontanément, il m'a dit que la première chose... quand il demande à un
jeune : Comment je peux t'aider au niveau de ton utilisation des outils
numériques?, les jeunes, ce qu'ils
nous répondent, c'est : Demandez à mes parents de montrer l'exemple, dites
à mes parents de montrer l'exemple. Tu sais, on dit : Pas de
téléphone à table. Bien, il faut que... les parents, pas de téléphone à table.
On dit : Pas de téléphone... pas de télé dans la chambre. Il faut que les
parents ne fassent pas de télé dans la chambre. Puis ça, M. le Président, ça demeure un défi pour nous
tous. Il me dit qu'alors qu'il donnait une cinquantaine d'ateliers par année,
maintenant, avec le financement qu'on leur octroie dans notre stratégie, ils
parviennent à en donner des centaines par année.
Plus de 30 000 jeunes qui ont été touchés, c'est quand même
significatif, à travers le Québec, partout au Québec. Des initiatives
comme celle-là sont un réel outil pour nos jeunes, et on veut continuer à
appuyer ce type d'initiative.
Donc, je
pense qu'on est actuellement à un endroit... peut-être à un moment charnière.
On a des études qui nous montrent de plus en plus, je dirais, l'impact
des réseaux sociaux, qui a été mentionné. On a parlé beaucoup d'anxiété puis de... d'anxiété de performance, le fait
d'être observé 24 heures par jour avec... à cause de ces médias sociaux.
Je pense que c'est une très bonne
question qui se pose. La stratégie termine en 2025. Est-ce que c'est le temps
d'accélérer ou d'accentuer le pas? C'est peut-être un très bon moment
pour se poser la question.
C'était
important pour nous, par exemple, à l'époque, en 2021-2022, de surtout faire un
effort pour sensibiliser les parents.
Puis je vous dirais que cet effort a été partiellement atteint mais qu'il va
falloir l'intensifier. Puis j'espère qu'on va pouvoir travailler tout le monde
ensemble, comme on l'a fait la dernière fois, pour avoir... développer une
nouvelle stratégie à partir de 2026.
Puis, pour
terminer, M. le Président, je dirais qu'il existe des ressources pertinentes
qui sont à la disposition des familles. Pour la recommandation en
matière de temps d'écran pour le loisir, par groupes d'âge, il y a un site Web
qui s'appelle Utilisation saine des écrans chez les jeunes. Pour les outils
d'évaluation, des conseils d'encadrement pour les parents, ce que demandait le chef de la troisième opposition, le site
Web Pause ton écran est la ressource au Québec. Et, pour ceux qui démontrent des signes d'anxiété,
problèmes de santé mentale, bien, encore une fois, le 8-1-1 Info-Social demeure
la porte d'entrée. On parle directement à un
professionnel de la santé mentale qui connaît les ressources, qui connaît la
problématique et qui va nous diriger, parents et enfants, vers les bonnes
ressources, M. le Président.
Donc, je suis très fier de ce que... le travail
que ma formation politique a effectué jusqu'à présent sur le sujet. Je pense qu'on est à la bonne place. Il faut se
remettre dans le contexte. Est-ce qu'on peut en faire plus? Probablement que
oui, mais il faut le faire de façon harmonieuse puis sans vouloir politiser la
chose. Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Lévesque) : Merci beaucoup, M. le ministre. Et je cède
maintenant la parole à M. le député de Pontiac.
M. André Fortin
M.
Fortin : Tranche de vie, M. le Président. Demain soir, demain
soir, tous les députés vont retourner chez eux, dans leurs circonscriptions.
Moi, si je regarde mon horaire, demain, ça devrait me placer dans ma résidence,
là, vers 7 heures, 7 h 30 demain soir, si tout va bien,
s'il n'y a pas trop de trafic. Je vais arriver, je vais ouvrir la porte,
demain, à 7 h 30, les enfants vont être revenus de l'école vers
4 h 30, 5 heures, vont avoir passé quelques heures, vont avoir
soupé. Et, M. le Président, les chances sont
que je vais devoir demander à mes enfants où ils sont dans la maison, parce
qu'ils ne vont pas m'entendre ouvrir
la porte, ils ne vont pas accourir, comme ils le faisaient il y a quelques
années, pour venir me voir parce que savez-vous ce qu'ils vont faire, M. le
Président? Ils vont être en train d'écouter la télévision ou ils vont être
sur un écran, ils vont avoir le iPad, ils vont être... C'est ça qu'ils vont
faire, M. le Président. Et je ne dis pas ça pour porter le blâme à mon épouse, qui, déjà, en a des heures
et des heures de jouer au parent toute seule pendant que je ne suis pas
là, mais c'est la réalité chez nous comme
dans un paquet d'autres familles à travers le Québec, que les parents sont à ce
point fatigués, épuisés, peu importe,
qu'ils ont de la difficulté, M. le Président, et ça, ce n'est pas nouveau, là,
mais à gérer la vie de leurs enfants convenablement et à passer tout le
temps nécessaire pour limiter l'utilisation des écrans.
Puis
éventuellement ils vont venir me voir, M. le Président. Je vais les appeler,
ils vont venir me voir, on va jaser : Comment a été ta semaine, etc. Je
vais laisser mon sac par terre, je vais mettre mon téléphone sur le coin du
comptoir. Je vais continuer à
discuter. Puis, à un moment donné, savez-vous ce qu'il va arriver? Il y en a
une des deux qui ne sera plus là, puis
mon téléphone ne sera plus sur le coin de la table, M. le Président. Il va être
disparu. Il va être parti avec un enfant en quelque part, qu'il va falloir que je rappelle pour lui dire : Aïe!
je ne t'ai pas donné la permission de prendre mon téléphone, reviens
ici, on continue à discuter. Mais c'est ça, la réalité.
Puis quand le ministre, tantôt, parlait de
l'exemple des parents, bien, il a 100 % raison là-dessus, O.K.? Il a absolument raison. Mais ce n'est pas simple, parce
que, regardez autour, là, les écrans, ils sont partout. J'en vois cinq devant
moi, j'en vois trois sur la table, il y en a
cinq derrière moi. J'ai celui sur le coin du pupitre, ici. Nos vies sont
maintenant... et la vie de notre génération, la mienne et la vôtre, M. le Président,
elle tourne autour des écrans. On lit un livre, M. le Président. Comment on le
lit? On le lit avec un écran, un livre électronique maintenant, ce qui fait en
sorte que je n'ai plus besoin d'aller à la bibliothèque à tous les
quelques jours, j'ai autant de livres que je veux. Mais l'exemple que ma fille voit, c'est que je suis sur mon téléphone. Elle ne
le sait pas, si je suis en train de lire un livre, ou si je suis en train de me
divertir, ou si je suis sur un média social, ou si je suis en train de
travailler. Elle ne le sait pas. Tout ce qu'elle voit, c'est l'exemple
d'un parent qui est sur son téléphone.
Alors, moi,
j'applaudis la motion du Parti
québécois aujourd'hui parce qu'elle
nous force, les gens qui sont ici, les gens qui écoutent le débat et les gens
qui travaillent au ministère sur ces enjeux-là, elle nous force à dire qu'on
n'en fait pas assez en ce moment, que
ça ne se rend pas juste que dans les chaumières québécoises, les efforts qui
sont mis de l'avant.
Et, je dois
le dire, je veux quand même... pour tout le... tout le bien que je sais du
ministre responsable du dossier, là, il
y a une chose dans son allocution qui m'a marqué négativement, c'est que je ne
peux pas croire qu'on se satisfait des efforts
qui sont là en ce moment. Je ne peux pas croire. Si les efforts étaient
suffisants, bien, le chef du Parti
québécois n'aurait pas présenté une
motion comme ça aujourd'hui. Il se serait dit : Bien, ça va bien, on a un
plan, ça se rend jusque dans les maisons, les gens comprennent, les parents
prennent les actions nécessaires, puis les enfants ont une diminution du
temps d'écran. Moi, je ne crois pas qu'on
est là au Québec, à un endroit où on peut se dire : Tout est beau, on en
fait assez.
Et je ne crois pas non plus que le chef du Parti
québécois essaie de politiser l'enjeu. Je ne le pense pas parce que ce n'est pas un enjeu qui est nécessairement
gagnant. J'ai entendu, et, pour ça, je lui lève mon chapeau, là, j'ai entendu
certaines des baffes qu'il a reçues au cours des derniers jours, depuis qu'il
parle de cet enjeu-là, des gens qui lui disent : Aïe! tu ne viendras pas me dire comment gérer mes enfants chez nous,
dans ma maison. C'est une réaction naturelle de parent qui se sent un
peu attaqué. Et je le sais, M. le Président, moi-même, j'ai déposé une motion
qui ressemblait beaucoup à celle que le chef
du Parti québécois vient de déposer il y a cinq ans. Alors, je sais
qu'il va y avoir des... qu'il va y avoir des réactions comme celles-là.
Ce n'est pas un dossier qui va faire en sorte que le Parti québécois ou que le Parti libéral, à l'époque, pourrait gagner un comté de plus. Ce n'est pas un enjeu
politique à la base. Ce n'est pas un enjeu de définition des partis
politiques. C'est un enjeu d'essayer de faire la bonne chose pour les enfants
du Québec puis la génération d'enfants qui grandit avec des téléphones.
Puis ce n'est
pas nouveau, cet enjeu-là. Moi, je me souviens de ma mère, là, quand j'étais
jeune, qui, quand je me levais le
samedi matin puis j'écoutais les petits bonhommes, puis, rendu à midi, bien, il
y avait Pierrafeu, alors, pendant qu'on mangeait le lunch, on faisait
jouer Les Pierrafeu, puis, à l'heure du souper, il y avait Passe-Partout,
puis après ça je voulais écouter une
heure de hockey avec mon père avant d'aller me coucher, elle aussi, là,
était : Minute, bonhomme, là. Ça
fait... Tu ne peux pas faire les quatre en même temps, là, tu ne peux pas avoir
les quatre dans une journée. Il va falloir que tu fasses des choix dans
la vie, là.
Mais là la...
on est à un endroit complètement différent d'il y a 35 ans, quand ma mère
me disait ça. On n'est plus à la même
place du tout parce que les médiums, le contenu, l'accessibilité, elle
est complètement différente qu'à l'époque, et la difficulté, pour un parent, de gérer tout ça, elle est différente
qu'à l'époque. Ma mère avait juste à cacher la télécommande à l'époque,
puis c'était fini, là, il n'y avait pas grand-chose que je pouvais faire. Là,
ce n'est plus ça, on est ailleurs.
Je vous disais tantôt, M. le Président, on l'a
écrite, cette motion-là, il y a cinq ans. On a fait... On a demandé, il y a cinq ans, un mandat d'initiative au
gouvernement sur cette question-là, sur la question des dépendances aux écrans
puis de l'impact que ça a sur nos enfants,
et, pour tout le bien que je sais du ministre... mais, à l'époque, cette
motion-là, elle avait été refusée par le gouvernement. Et ce n'est que plus
tard que le gouvernement s'est dit : Ah! il faudrait faire quelque chose, quand même, parce qu'il y a une
pression, alors on va faire un forum sur la chose, forum. Puis effectivement
je suis allé, le député des Îles-de-la-Madeleine était là, il y avait d'autres collègues qui étaient là, et je ne peux
pas dire que c'était inutile, M. le Président. Ça nous a permis d'entendre des
experts en la matière. Mais je ne peux pas non plus dire que le sentiment d'urgence qui était... qui a
été partagé il y a quelques instants par le Parti québécois et que... et auquel
je souscris pleinement, auquel ma formation
politique souscrit pleinement, je ne peux pas dire qu'on avait ce sentiment-là
au moment du forum puis je ne peux
pas dire qu'on l'a senti par la suite, non plus, dans les différentes actions
du gouvernement.
Maintenant, à
l'époque, ce qu'on voulait, c'était de connaître les données scientifiques.
C'était ça, notre objectif. À ce moment-là, il y avait quelques études qui
sortaient à gauche, à droite, mais on ne connaissait pas l'étendue,
vraiment, de l'impact des écrans sur les
enfants. Aujourd'hui, on en a de plus en plus. On en a, des études, on le sait,
qu'est-ce qu'il faut faire. On le sait c'est quoi, l'impact que les écrans ont
sur nos enfants, puis le... on en a nommé, là, dans le débat des... dans
la dernière... dans le dernier
40 minutes, on en a nommé quelques-uns. Mais, M. le Président, l'impact,
il est tellement plus large qu'on peut penser.
Tu sais, moi,
je suis un père qui a reçu le bulletin de ses enfants aujourd'hui, là, puis
j'ai vu, chez un de mes enfants, une petite diminution de ses notes, puis je le
sais que ça a un impact avec le fait qu'au cours des dernières semaines,
des derniers mois, je la vois un petit peu
plus souvent sur les écrans. Je le sais, il y a un impact direct, parce que, si
elle n'a pas d'écran, bien, elle est en train soit de jouer dehors avec
ses amis puis de socialiser, ou elle est en train de lire un livre, ou elle est en train de
faire des devoirs, ou elle est en train de faire quelque chose qui a une valeur
éducative ou sociale. Mais le temps qu'elle passe sur les écrans, là, ce
n'est pas ça.
Mais ça a un
impact, oui, sur la réussite scolaire, on l'a mentionné, ça a un impact sur les
capacités cognitives, ça a un impact sur la santé mentale, et là je pense, pas
juste le temps d'écran, mais le contenu des réseaux sociaux, ce que ça a
comme impact, notamment sur les jeunes filles. Ça a un impact sur le sommeil,
ça a un impact sur les relations interpersonnelles, ça a un impact sur le
développement. Puis, tantôt, je parlais de la réussite scolaire. On n'a pas à
se cacher ici, je pense qu'on doit en parler
aussi souvent que possible, mais le taux de réussite scolaire des garçons,
c'est encore un enjeu majeur au
Québec, un enjeu majeur dont on ne peut pas... pour lequel on ne peut pas
simplement se mettre la tête dans le
sable. Le fait qu'il y ait tant de garçons qui ne réussissent pas à l'école, ça
va les affecter toute leur vie, ça, M. le Président, et ce n'est pas
quelque chose qu'on peut rattraper si facilement que ça.
• (15 h 40) •
Vous vous
souvenez, il y a quelques années, et le ministre en a parlé, on avait fait des
demandes pour des moratoires sur les
e-sports à l'école. Et, moi, comme parent, il n'y a rien de plus fâchant, là...
Ma fille, elle n'est pas dans un programme de e-sports, mes filles ne sont pas là-dedans, mais quand je ramasse ma
fille au service de garde, le soir, puis je lui demande : Tu étais où? Tu n'étais pas dans la cour d'école?
Ah! bien, c'était notre période d'ordinateur au service de garde de l'école.
Notre période d'ordinateur. Ah oui? Est-ce
qu'ils vous ont enseigné à faire du code? C'est-tu ça qu'ils vous enseignent?
Non, ce n'est pas ça, M. le Président. Vous le savez comme moi qu'ils
sont en train de jouer à des jeux sur l'ordinateur.
Alors, qu'on
demande, aujourd'hui à travers une motion, là, de proposer un nouveau plan
d'action numérique en éducation puis en enseignement supérieur, c'est la
moindre des choses. C'est la base de ce qu'on peut faire. C'est d'au moins se dire : On va avoir un plan, on va
avoir un vrai plan de match, on va avoir une feuille de route, puis non
seulement on va avoir, comme le
ministre le disait tantôt, une stratégie gouvernementale, mais on va trouver
des meilleurs moyens pour que ça se rende aux parents. Parce que je suis
convaincu... et c'est un peu triste à dire, là, mais il y a une grande partie
de ce qu'on fait ici, de ce que le
gouvernement publie, de toutes les stratégies, de toutes les... de tous les
papiers qu'il écrit, là, des plans de match qui ne se rendent pas aux citoyens.
Le grand défi dans cet enjeu-là, c'est ça, c'est de rendre cette
information-là aux citoyens. L'idée n'est pas de dire au citoyen quoi faire
avec ses enfants, ça lui appartient, ce sont des
décisions qui appartiennent à chaque famille, mais il faut qu'il ait toute
l'information. Et cette information-là, elle est en évolution constante, mais, si on veut que les gens prennent des
bonnes décisions, il faut qu'ils sachent tous les impacts que ça peut
avoir sur le développement de leurs enfants.
Comme État,
M. le Président, on met tellement de ressources, tellement, pour le bon
développement de nos enfants, que ce soit à travers les services de garde, que
ce soit à travers nos écoles, que ce soit à travers des programmes comme
Agir tôt, ou d'autres, on met des ressources
intarissables dans le développement positif de nos enfants, on fait tout ce
qu'on peut pour qu'ils se développent, comment dire, bien ajustés, avec toutes
les capacités possibles, avec un meilleur développement possible, avec des capacités cognitives
développées au maximum, avec une santé mentale qui est en bon état, avec des
habiletés d'avoir des relations
interpersonnelles de qualité. Mais, M. le Président, malgré ces
investissements-là, on a... dans le dossier des écrans, on a encore, au gouvernement du Québec, des oeillères. On ne
veut pas voir le fléau des écrans, on ne veut pas savoir ce que ça va avoir comme impact sur la
prochaine génération. Et pourtant, M. le Président, on se doit de s'y attarder.
Je reprends, je fais miens les propos du chef du
Parti québécois, parce que je les ai dits il y a cinq ans et je suis content qu'ils sont encore répétés dans la sphère
publique : Il faut agir, il faut agir maintenant, c'est un dossier qui
presse, puis on ne peut pas se permettre d'attendre. Je vous remercie,
M. le Président.
Le Vice-Président
(M. Lévesque) : Merci beaucoup, M. le député de Pontiac. Et je
reconnais maintenant Mme la députée de Mercier.
Mme Ruba Ghazal
Mme Ghazal : Merci, M. le Président.
Donc, à mon tour d'intervenir sur la motion du Parti québécois sur un problème extrêmement important, très, très
sérieux, les écrans pour les jeunes. C'est un problème, en fait, de santé
publique, carrément. Et c'est un problème très, très visible. Je ne vais
pas, moi aussi, raconter... tous les jeunes qui sont autour de moi, que ce soient mon beau-fils, mes neveux,
qui sont, tout le temps, tout le temps collés sur leurs écrans. Puis, comme
on dit, qui n'a jamais péché jette la
première pierre. Moi, je suis la pire de toutes par rapport aux écrans. Puis
c'est pour ça que c'est un sujet,
souvent, qui va nous rendre coupables, on se sent coupable par rapport à ça,
et... mais il ne faut pas. L'objectif
de cette motion-là est plutôt de nous sensibiliser. Ça fait quelques années...
Comme l'a dit mon collègue, il y a eu une
motion, aussi, de sa formation politique, ou un mandat d'initiative qui avait
été demandé. Ça fait cinq ans. Et ça va ne faire que s'empirer de plus en plus, de plus en plus, parce que toute
notre vie se passe sur ces écrans. Nous, comme adultes, ça pose problème,
donc, pour les enfants, encore plus.
Il y a eu des
données qui ont été mentionnées sur l'impact. Je ne vais pas tout énumérer,
mais je vais quand même en énumérer
certains, pour... surtout pour les enfants qui sont en plus bas âge.
L'exposition à la lumière bleue qui est émise par les écrans nuit à la
qualité du sommeil. Troubles de la vision, comme la sécheresse oculaire ou
carrément la myopie, hein? On va voir
beaucoup d'enfants, encore plus, en plus grand nombre, qui vont porter des
lunettes. Troubles de l'attention ou
du comportement chez les jeunes. On sait combien il y a d'enfants qui ont des
difficultés dans les écoles. Bien, les écrans viennent empirer cette
situation-là. Risque, aussi, de surpoids et d'obésité parce qu'ils bougent
moins, ils sortent moins jouer dehors, il y a une sédentarité plus
grande. Surexposition aux écrans, ça a aussi une incidence sur le développement
des capacités cognitives, sur la santé, de
façon générale, physique, mentale. Ça amène aussi une détresse psychologique chez
les enfants. On sait aussi que la santé
mentale est très préoccupante chez les jeunes. Bien, ça vient empirer ce
problème-là. C'est
donc, je le répète, un problème de santé publique. Donc, on ne peut pas le
traiter comme ça en disant : Bien, on fait quelques actions, on n'a
pas besoin d'aller plus loin. C'est impossible. C'est un problème vaste,
majeur, très important.
Je vais
parler aussi d'un élément plus particulier, c'est-à-dire qu'on parle des écrans
qui sont devant nos yeux, mais qu'est-ce
qu'on regarde dedans. Oui, on peut peut-être lire des livres. Ça, c'est dans le
meilleur des cas, lire un livre sur... peut-être pas sur le cellulaire,
moi, je ne serais pas capable, mais, par exemple, sur un iPad ou une tablette.
Mais je veux parler plutôt des plateformes.
On peut parler de TikTok, les jeunes sont beaucoup là-dessus, YouTube,
Instagram. Je veux parler du cas plus particulier de Facebook. Il y a
quelques années, il y a un scandale qui a frappé Facebook, une lanceuse
d'alerte, hein, on se rappelle tous de ça, qui est sortie puis qui a montré le
vrai visage de cette entreprise de Mark Zuckerberg.
Pour capter l'attention des utilisateurs le plus longtemps possible, hein,
qu'est-ce qui fait qu'on n'arrive pas
à lâcher notre application tout le temps, comme jeune ou même comme adulte,
mais les jeunes encore plus, bien, c'est parce qu'ils s'assurent d'avoir des choses, là, qui arrivent sur
l'écran, dans la plateforme, qui font qu'on n'est pas capable de la lâcher puis
qu'on veut tout le temps, tout le temps réagir. Ce n'est pas un hasard, c'est
vraiment parce que ça a été réfléchi
comme ça. Il y a aussi un documentaire, là, dont j'oublie le nom, qui a parlé
de ça puis qui... C'est fascinant à quel point on est allé chercher les failles, là, dans notre cerveau humain
puis de les exploiter. C'est comme ça que ces applications sont
réfléchies.
Puis une des
réactions qui est provoquée aussi beaucoup par ces applications-là, c'est
beaucoup la colère. C'est pour ça,
une des raisons, là, pourquoi on voit la désinformation, le complotisme, les
contenus haineux, ils sont très, très populaires sur les réseaux sociaux, et ça a un impact sur les enfants. Puis cette
lanceuse d'alerte disait que Facebook savait, donc, que sa plateforme,
par exemple, Instagram, hein, parce que c'est Meta, Instagram et Facebook,
savait qu'elle était nuisible à l'image
corporelle et la santé mentale des adolescentes, des jeunes filles plus
particulièrement, mais que rien n'a été fait pour corriger la situation.
La lanceuse
d'alerte a reproché à Facebook d'avoir toujours refusé de mettre en place des
politiques internes qui auraient visé à limiter les conséquences négatives de
ces applications-là, Instagram, Facebook, parce qu'évidemment l'entreprise, ce qui la préoccupe, ce n'est pas la
santé mentale, hein, ce n'est pas l'État, c'est une entreprise. Une multinationale,
tout ce qu'elle veut, c'est faire
fructifier, hein, l'argent qu'elle fait, les profits. Et donc comment est-ce
qu'elle le fait? C'est en engendrant
plus de statistiques, d'engagement et d'interactions pour ses utilisateurs et
ses utilisatrices. C'est comme ça qu'elle fait de l'argent. Et donc
toutes ces interactions sont à la base de la stratégie publicitaire de Meta.
Puis, dans le
fond, ce qu'il faut faire aujourd'hui par rapport à ces applications-là, il
faut les voir comme les entreprises des
cigarettes dans le temps. Avant, c'était... c'était cool, là, de fumer, c'était
bien vu, même, c'était un signe d'émancipation des femmes. Aujourd'hui, on sait à quel point, quand on s'est rendu
compte des impacts sur la santé, bien, ça a été pris à bras-le-corps par les gouvernements, par les États
pour légiférer. Bien, il faut faire la même chose. On ne peut pas dire que
c'est juste la libre entreprise, puis ce
qu'ils font, c'est juste avoir du plaisir sur les... sur nos écrans. Ça a un
impact, et c'est un problème de santé mentale, et c'est comme ça qu'il
faut... qu'il faut les traiter, ces plateformes-là.
• (15 h 50) •
Donc, aussi,
ce que les études nous démontrent, c'est que les jeunes filles, par exemple,
qui vont regarder Instagram, elles vont... et qui ont une insécurité
corporelle, tout ce que ça va faire, c'est que ça va les déprimer. Plus elles
regardent Instagram, plus elles sont déprimées parce qu'elles se comparent aux
modèles qu'on voit. En plus, avec l'intelligence artificielle, où on ne sait pas si c'est vrai... des vrais êtres
humains, là, bientôt, qui sont sur nos écrans, bien, ça va encore empirer cette situation-là. Puis plus elles sont
déprimées, les jeunes filles, plus... Qu'est-ce qu'elles font? Elles vont
encore plus aller sur Instagram puis
regarder ça. Donc, c'est vraiment, vraiment un enjeu extrêmement, extrêmement
préoccupant et urgent sur lequel il faut travailler rapidement, cette
dépendance aux écrans et aux plateformes qui sont dedans.
Donc, il y a
plusieurs solutions qui peuvent être mises en place, je vais en énumérer
quelques-unes. Par exemple, on peut insérer des messages de prévention,
comme on le fait pour les cigarettes sur les conséquences des cigarettes sur la santé, des messages de prévention sur les
emballages des ordinateurs, des tablettes, des téléphones : peut créer de
la dépendance. Évidemment, ça peut avoir l'air un peu risible parce
qu'on a l'impression qu'on le sait tous, mais non, quand on l'écrit, ça amène les gens peut-être à prendre conscience.
Quand un parent achète ces produits-là à ses enfants, bien, au moins, ça
peut peut-être lui rappeler les conséquences de ces produits-là.
Évidemment, c'est largement insuffisant. Il faut
aussi offrir obligatoirement des dispositifs et outils de contrôle parental sur les appareils. Il ne faut pas que ce
soit... Il y a des choix, là, qui peuvent être faits aujourd'hui, mais il faut
s'assurer que tous ces outils-là, bien, en contiennent puis que les
parents aussi savent comment les utiliser.
Les professionnels de la santé, de la petite
enfance, les profs devraient suivre des formations spécifiques sur les risques liés aux écrans numériques pour les
plus jeunes. Il faut vraiment viser une hygiène numérique. Il faut
parler de ce terme-là de plus en plus. Les jeunes eux-mêmes aussi doivent être
sensibilisés à ces écrans-là. Parce que, oui, on peut les interdire à l'école, par exemple, avec la
directive, ou aller plus loin, même dans les temps libres, et tout ça, mais
après ça, une fois qu'ils sortent de l'école, bien, ils vont les avoir entre
les mains. Il faut quand même donner cette éducation-là pour qu'ils
savent... ils sachent comment aussi s'autoréguler, les jeunes, éduquer les
parents, parce que ça a été dit tantôt, là,
les enfants imitent les parents beaucoup, beaucoup. Donc, comme nous-mêmes,
peut-être, notre hygiène numérique n'est pas parfaite, bien, il faut s'assurer aussi que les enfants, les... que
les parents aussi sachent comment limiter l'utilisation des écrans pour
leurs jeunes.
Il faut aussi encourager les parents à accorder
la priorité aux émissions éducatives à la télé. Avant, nous, nos parents, à notre époque, à mon époque, quand il
n'y avait pas tous ces écrans-là, il y avait juste la télévision, peut-être que
nos parents voulaient la limiter, cette...
ces émissions-là. Là, maintenant, il faut inciter nos enfants à regarder un peu
plus des émissions éducatives. On
pense, par exemple, à Télé-Québec. Donc, il faut faire tout ça pour s'assurer
d'avoir un effet protecteur pour les enfants.
Et
les écrans ne devraient pas représenter la méthode d'enseignement par défaut.
Il y a eu un projet de loi n° 23 pour avoir l'enseignement à
distance où, par exemple, quand il n'y a pas de prof, il y a des applications
qui existent. Ça peut être utilisé, mais il
faut s'assurer que ce soit utilisé avec parcimonie. Puis ça, ça rentre dans la
politique, là, qui doit être mise à jour, selon ce que la motion du
Parti québécois demande.
Mais peut-être
que la solution la plus structurante, c'est celle de réguler les algorithmes.
Parce que, si on est dépendant aux
écrans, ce n'est pas juste l'écran, c'est ce qu'il y a dans l'écran. Je parlais
des applications puis comment les entreprises les ont réfléchies pour nous affecter puis créer cette dépendance. Donc,
ça, ça vient aussi avec les algorithmes. Les États auraient très bien le droit
d'aller jouer dans les algorithmes des grandes entreprises numériques. On le
fait déjà pour les médicaments, on le
fait pour la nourriture, pourquoi est-ce qu'on ne le ferait pas aussi pour les
algorithmes? Évidemment, tout ça est
compliqué et complexe, mais il faut que les États et l'État québécois aussi
prennent ça, là, à bras-le-corps puis mettent de la réglementation pour
contrôler ces algorithmes-là.
On entend
déjà tout un discours qui dit... conservateur qui dit : Ah! on ne veut pas
que l'État s'ingère dans nos vies privées. Mais, si ce n'est pas l'État qui
régule les algorithmes puis le contrôle, là, qui est fait avec... par exemple
par ces applications-là, bien, il y a des entreprises, des géants du
numérique qui vont faire de la... qui veulent faire de l'argent, c'est leur seule préoccupation, qui, eux, vont de
toute façon contrôler nos vies privées, puis ils commencent à le faire déjà.
Donc, ça prend du courage politique, il faut
que l'État intervienne. Donc, pour moi, dans mon intervention, je voulais aller
plus largement que les écrans eux-mêmes, mais aussi tout le contenu, là, des
géants du numérique puis des plateformes qui sont utilisées.
En
conclusion, la demande du parti... la motion du Parti québécois demande un
nouveau plan d'action numérique en
éducation et en enseignement supérieur. Évidemment, ma formation politique,
Québec solidaire, on est d'accord avec ça,
on va appuyer la motion, c'est urgent d'agir. Puis, comme la science avance
très vite sur ces enjeux-là, on n'avait pas de données avant, là, on en
a de plus en plus, il faut qu'on se fie sur la recherche la plus à jour pour
mettre à jour, donc, cette politique-là.
Nous, on va... on est d'accord avec les deux partis d'opposition, on va
talonner le gouvernement pour s'assurer que cette politique-là soit mise
à jour, que plus de ressources soient mises en place que ce qui est fait à
date, et donc soit mise à jour en fonction
des dernières données, des connaissances de la recherche, mais aussi en
s'inspirant des meilleures pratiques
qui sont nommées, là, dans la motion, des pays qui ont décidé d'intervenir
beaucoup plus pour régler ce problème de santé publique chez nos jeunes.
Donc, voilà, alors nous allons appuyer cette
motion, puis j'espère que le gouvernement aussi puis qu'on puisse avoir une motion appuyée de façon unanime pour ce
problème de santé publique qui touche nos jeunes et qui touche la société
de façon générale. Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Lévesque) : Merci beaucoup, Mme la députée de Mercier. Je
reconnais maintenant Mme la députée de Les Plaines.
Mme Lucie Lecours
Mme
Lecours (Les Plaines) : Merci beaucoup, M. le Président. Bonjour. Je vais
commencer en remerciant le député de Camille-Laurin de nous permettre de
réfléchir au bien-être des jeunes dans une société, on l'a dit, résolument
numérique. Si le collègue a parlé que
lui est père, mon collègue a parlé qu'il est grand-père, bien, moi aussi, je
suis mère et grand-mère aussi, donc c'est une préoccupation de tous les
instants.
Alors,
approfondir notre compréhension et travailler ensemble sur des solutions, bien,
ça fait partie de notre ADN. En fait,
c'est un devoir aussi. Je vais remontrer... en tout cas moi, je peux me
permettre de remonter jusqu'au bogue de l'an 2000. Il n'y en a
peut-être pas beaucoup qui s'en souviennent. Moi, je m'en souviens. En fait, je
me souviens qu'il n'y avait pas eu grand-chose,
mais, finalement, l'analyse que moi, j'en fais, c'est que c'est à partir de ce
moment-là que notre rapport aux écrans a subi une transformation, puis
une grande transformation. Notre mode de vie et nos relations interpersonnelles ont énormément changé depuis ce
moment. L'Internet, la toile, comme on l'appelait, la toile d'araignée, comme on m'expliquait à l'époque, mais aussi la
prolifération des téléphones intelligents ont pavé la voie à une époque de
connectivité jamais connue auparavant. On vit dans cette époque en ce moment.
Puis je serais curieuse de savoir combien
d'entre nous, on a nos téléphones en ce moment, hein? Je pense qu'à peu près
tout le monde a son téléphone en ce moment, pour ne parler que de ce
type d'écran là.
On l'a à
portée de main, pourquoi? Parce que c'est une multitude d'informations qu'on
retrouve dans nos téléphones. C'est aussi, même, pour certains, notre
réveille-matin le matin. C'est aussi un appareil photo, bien évidemment.
Bref, c'est un moyen de communication qui est
indéniable. Il y en a même très peu, j'en suis persuadée, qui ont encore un
téléphone filaire à la maison. Moi, je n'en
ai plus depuis que mes parents ne vivent plus avec moi en intergénération, mais,
jusqu'à ce que ça arrive, cette coupure-là,
on avait encore un téléphone filaire parce que mes parents, qui sont d'une
autre génération, ne connaissaient
pas l'utilité grandiose du téléphone cellulaire, alors ils avaient besoin de
ça, puis, par sécurité, on leur a gardé. Mais, pour parler de ce petit instrument,
parce qu'il y a ce type d'écran là, mais il y en a bien d'autres, moi, je me plais, maintenant, à lire les messages
une fois... je pense, une fois par semaine, mais vous me corrigerez, quand
on reçoit un petit message qui dit :
Votre temps d'écran a baissé de 22 % cette semaine. Moi, je suis bien
contente de ça quand il baisse.
• (16 heures) •
Bref, on est dans un
univers numérique infini que nos jeunes, nos enfants, nos petits-enfants
naviguent... naviguent dans cet univers-là,
un univers où le réel et le virtuel se côtoient si proche qu'on peut parfois
les confondre. Puis ça, c'est important, parce que c'est une triste réalité.
Dans un monde où les écrans jouent un rôle central dans la vie des jeunes et des moins jeunes aussi, comme nous, il est crucial
de se questionner sur l'impact que les écrans de toutes sortes peuvent avoir
sur leur développement. Le nôtre est déjà pas mal entamé, mais on doit se
questionner sur le développement de
nos jeunes. Comme je le disais tantôt, je suis grand-mère, puis ça
m'interpelle, mais, heureusement, ça interpelle aussi mes enfants parce que c'est, on l'a dit tantôt,
une grande responsabilité parentale. On doit sensibiliser les parents à cette
réalité-là. Aujourd'hui, nos jeunes sont
exposés dès le plus jeune âge à une multitude de supports numériques, on l'a
dit tantôt, mais, en fait, là, on
parlait de responsabilité parentale, ils sont, dès leur naissance, sensibilisés
à ça. Pourquoi? Parce qu'ils
naissent, on prend des photos, on envoie ça, on fait même des... je m'excuse,
l'anglicisme, mais le mot anglais, le terme
anglais, on les FaceTime. Moi, je FaceTime mon petit-fils, là, une fois,
deux fois, trois fois par semaine, des fois. Bien, c'est
encore un écran. Donc, comme parent, on a une grande responsabilité aussi.
Par
contre, je me demande si on se rend compte combien de... c'est quoi, notre
perception, à quel point cette exposition peut mener à des répercussions
négatives sur la croissance physique, émotionnelle et cognitive, on en a
beaucoup parlé.
Petite tranche de
vie. Je le dis depuis tantôt, moi, je suis grand-mère, et mon petit-fils a
ceci, il appelle ça sa «tabouette», hein? En fait, je vais dire qu'il l'avait.
Il a quatre ans et demi, et puis on a beaucoup... On parlait tantôt de responsabilité parentale. On a beaucoup parlé, ses
parents et moi, c'est-à-dire son fils... mon fils, sa conjointe et moi, on
a beaucoup parlé lorsque mon collègue
ministre de la Santé a sorti Agir tôt, on a beaucoup parlé de cette réalité-là.
Bien, aujourd'hui, il ne l'a plus, sa
«tabouette». Puis, une petite tranche de vie, on était en vacances ensemble,
toute la famille, de mon côté, pas l'hiver dernier, l'hiver précédent,
puis, pour l'avion, pour prendre l'avion, les parents avaient pris la «tabouette» puis ils l'avaient donnée au petit.
C'était son premier voyage en avion, donc, hein, peut-être pour gérer un petit
peu le stress qu'il aurait pu avoir. Mais,
rendu à la maison ou chez moi, ils l'ont pris, puis on l'a serrée. C'est même
moi qui ai serré la «tabouette» dans une
armoire. Mais on est tous des adultes, seul petit enfant, un soir, on est en
train de préparer à souper, puis il
aide à préparer le souper, à mettre la table, et je dis : Jacob, viens
avec moi, on va... je vais te donner des assiettes. J'ouvre la porte de l'armoire, et la «tabouette» est dans
l'armoire, alors... Ah! elle est là, ma «tabouette»! Donc, on lui a donné, bien évidemment, mais c'est de le
gérer puis d'être conscient de la façon dont on gère, c'est ça, la
responsabilité parentale et
grand-parentale, si je puis m'exprimer ainsi. Donc, heureusement, mon fils et
sa conjointe ont décidé, comme je lui
disais, de lui enlever, d'encore beaucoup mieux la gérer, mais, à l'heure où on
se parle, ce n'est plus du tout une tablette.
Mais,
heureusement, aussi, pour l'ensemble de notre population, mon collègue ministre
délégué... ministre de la Santé a
lancé, il en a parlé tantôt, en 2019, une vaste consultation sur l'utilisation
des écrans et leur impact sur la santé des jeunes. Encore là, je l'ai sorti sur ma «tabouette», il est ici.
J'aurais pu l'imprimer, mais on va essayer d'économiser le papier. Mais ce plan vise à favoriser une
utilisation saine des écrans. Il s'appelle la Stratégie québécoise sur
l'utilisation des écrans et la santé
des jeunes 2022‑2025. C'est un forum d'experts et d'organismes
indépendants qui se sont réunis et qui nous
ont fait part de leur expertise et de leurs préoccupations, les nôtres aussi,
nos préoccupations. Puis, au terme de cette consultation, est née cette stratégie. Mon collègue l'a bien dit, à ce
plan a été rattaché un financement de 5,5 millions de dollars
par année, récurrent jusqu'en 2025.
Il
faut quand même se le dire, que, dans de nombreux domaines, les écrans se sont
avérés essentiels. Ils facilitent l'accès
à l'information, la communication instantanée et même l'enseignement à
distance. Mon collègue en a parlé aussi. On l'a vécu pendant la pandémie. Mais il importe de comprendre comment
intégrer les écrans de manière équilibrée pour ne pas... pour en tirer le meilleur
parti, tout en préservant le bien-être et le développement de nos jeunes, de
nos enfants.
L'État peut faire
beaucoup, c'est son devoir, mais, en tant qu'adultes, c'est à nous d'être et de
devenir de bons exemples en matière
d'utilisation des écrans. Ma consoeur en parlait tout à l'heure, hein, ici,
lorsqu'on est dans notre bulle, à l'Assemblée nationale, on utilise
énormément les écrans. Lorsqu'on est au bureau de circonscription, on va
chercher nos dossiers, tout ça. Mais j'ose
croire que, lorsqu'on est en famille, on diminue notre temps d'utilisation des
écrans. Il faut être conscient de nos
comportements. Il faut être conscient que ces comportements influencent nos
enfants et influencent directement les jeunes qui nous entourent. Bien
oui, il faut que l'État se penche sur le phénomène. Ça, nous en sommes convaincus, et, en tant que législateurs, on peut
prendre certaines... on peut certainement mieux outiller les jeunes et les
sensibiliser à leur propre utilisation des écrans.
La
directive du ministre de l'Éducation, entrée en vigueur le 31 décembre
dernier, c'est-à-dire celle d'interdire la présence des cellulaires en classe, en est une, et ça, c'est un bon
exemple, parce qu'on est bien conscients que les écrans prennent une proportion démesurée dans la vie des
jeunes, surtout dans les écoles secondaires. On parle d'en bas âge, mais, dans
les écoles secondaires aussi, c'est un phénomène qui est de plus en plus connu,
malheureusement, de plus en plus utilisé. C'est ce que... C'est pour ça
que le ministère de la Santé mène, en ce moment, des travaux de réflexion entourant l'élaboration possible d'un cadre de
référence qui va aider les acteurs de la santé publique à mieux outiller les
acteurs du milieu scolaire en matière
d'utilisation équilibrée des écrans, parce que, je le dis, c'est quand même des
outils, encore faut-il bien les utiliser.
Les constats du
rapport dont je vous parle sont évidents. Je vais vous en mentionner
quelques-uns. L'utilisation à des fins
personnelles des appareils numériques individuels en classe conduit vers une
multitâche numérique, ce qui nuit à
l'apprentissage. Même s'il n'est pas utilisé, la simple présence du cellulaire
en classe peut nuire au fonctionnement optimal de la mémoire de travail.
Alors que le support numérique ne semble apporter aucune valeur ajoutée à
l'apprentissage, il pourrait être mieux
entraîné... il pourrait même entraîner une diminution de la compréhension de
textes par rapport à la lecture papier. Moi, je déteste lire sur une
tablette, mais ça, c'est une bien question personnelle. Bien que les tablettes soient adaptées, j'aime encore beaucoup le papier.
Je fais peut-être partie d'une autre génération, mais il y aurait peut-être
des avantages à retrouver un bon livre aussi. Et, dernier constat, considérant
les risques de la cognition, il importe de se
questionner sur la valeur ajoutée à l'apprentissage de la présence et
l'utilisation des appareils numériques individuels en classe. Et tout ça, c'est sans dire et sans parler
de la surexposition aux écrans, qui comporte des risques importants, comme
la dépendance, ce qu'on appelle la cyberdépendance, mais je peux également
ajouter la désinformation, l'intimidation, l'exploitation, et j'en passe. On a
tous des bons exemples de ces risques importants.
Alors, oui, il est essentiel de mettre
en place pour nos jeunes des conditions favorisant l'accès à un ensemble de
services, des services diversifiés, cohérents et adaptés. Et, ici, je souligne,
donc, l'importance de la complémentarité entre le plan, la stratégie québécoise dont je vous ai parlé, mais également
le Plan d'action interministériel en dépendance. Les besoins sont diversifiés, et on... il doit y avoir
une multitude d'outils pour supporter les jeunes. Les organismes communautaires
en font partie, les centres de traitement
contre la cyberdépendance, également, les campagnes de sensibilisation, les
ressources en ligne. On en a mis
beaucoup, beaucoup, de ressources, en place, mais ce n'est pas tout, il faut
continuer à travailler. Les professionnels qui entourent nos jeunes
doivent acquérir des connaissances et développer des compétences dans ce
domaine. Ça, c'est impératif. Et, en collaboration avec le ministère de la
Santé et des Services sociaux, le ministère de l'Éducation s'assure de mettre en place des actions et des initiatives
pour accompagner le personnel scolaire dans l'utilisation du numérique.
• (16 h 10) •
Alors,
n'oublions pas non plus, parce que c'est un fait, l'évolution de la technologie
progresse à vitesse grand V, hein? On a tous vécu, là, le pas de... bien,
pas tous, pas tout le monde l'a vécu, mais presque sans télé, la noir et blanc,
moi, j'ai déjà... je faisais du
somnambulisme et je couchais sur la télé noir et blanc de mes parents, jusqu'à
aujourd'hui, où on a à peu près tout
sur écran, mais ça progresse à vitesse grand V, donc il faut en être
conscients. Ce sera un défi de garder tout
ce beau monde connecté, sur le terrain, mais on est capables. Et nous avons de
très bons plans en place. On va continuer à travailler en ce sens. Merci
beaucoup, M. le Président.
• (16 h 10) •
Le Vice-Président (M. Lévesque) : Merci
beaucoup, Mme la députée de Les Plaines. Je suis prêt à reconnaître le
prochain intervenant. Alors, je reconnais
Mme la députée de Bourassa-Sauvé. Il reste à votre groupe parlementaire
13 min 20 s.
Mme Madwa-Nika
Cadet
Mme Cadet : Merci
beaucoup, M. le Président. Comme bien de mes collègues qui sont intervenus
avant moi, je peux aussi partager, donc,
d'une certaine, donc, partie de ma réalité d'adulte, qui est le fait qu'une
bonne partie de celle-ci, donc, de ma vie, donc, se passe sur les
écrans.
Nous, comme élus,
bien, on le sait, hein, on se réveille le matin, on s'assure de vérifier... de
faire notre revue de presse, on regarde les
grands médias, on vérifie nos médias sociaux, on publie, on commence à
s'envoyer des textos dès potron-minet.
Il y a vraiment, donc, quelque chose qui se passe. Et, une fois qu'on est prêt
à dormir, bien, on met le téléphone, donc,
pas trop loin de soi. On a l'impression, bien souvent, que, quand on n'a pas
notre téléphone sur soi, bien, il nous manque un membre. On a souvent l'impression que, lorsqu'on n'a pas notre
téléphone sur soi, que notre quotidien est incomplet. Puis on la sent, cette différence-là, hein, au
point où, parfois, l'intrusion des écrans dans nos vies, bien, on la banalise,
hein, on a l'impression que c'est
tout simplement, donc, le fruit de la modernité, puis qu'il faut tout
simplement vivre avec, et puis que ça fait partie de nos vies.
Par
contre, M. le Président, quand on prend un petit pas de recul puis qu'on
réfléchit, bien, on réalise que, parfois, même nous, on a de la difficulté à
réguler notre relation avec ces écrans-là. Même nous, parfois, on la sent,
hein, cette anxiété, là, qui nous
traverse lorsqu'on n'a pas nos téléphones avec nous. Parfois, même, on ressent
de l'ennui, là. Lorsqu'on a terminé
de travailler ou qu'on a besoin d'une petite pause, notre premier réflexe,
souvent, c'est de se diriger vers nos écrans.
Donc
là, je vous parle de nos vies d'adulte, donc imaginez ce que ça peut
représenter, ces défis-là, pour un jeune, puis, bien souvent, donc, pour des
jeunes, dont ceux en bas âge, là, qui font l'objet de la motion de nos
collègues du Parti québécois, qui,
eux, n'ont jamais vécu une vie d'avant. Nous, comme adultes, c'est notre
quotidien, aujourd'hui, c'est un défi
de tous les instants de tenter d'équilibrer notre relation avec les écrans,
mais, nous, de notre côté, bien, on se souvient d'une vie où ce n'était pas
comme ça. Oui, oui, même moi, M. le Président. On se souvient. Mon collègue, en
fait, de Pontiac le mentionnait,
donc, parfois oui, donc, déjà dans nos générations, puis j'entendais tout le
monde, donc, on l'a tous vécu dans une perspective différente, à des
degrés variés, le fait, donc, d'avoir, donc, cet appétit-là pour les écrans.
Mais
au moins, nous, à un moment donné, ça se terminait quelque part, hein? Moi, je
suis de la génération où la programmation
de Canal Famille, bien, à un moment donné, elle se terminait puis le samedi
matin, bien, après Bouledogue... bien, après le Bouledogue Bazar, bien, on n'avait plus rien à
écouter, donc il fallait jouer dehors, il fallait faire autre chose.
Aujourd'hui, bien, ces écrans-là, ils sont omniprésents. La génération qui nous
suit puis celle qu'on élève aujourd'hui, parce
que moi aussi, à mon tour, je suis maman, bien, ils n'ont jamais connu autre
chose que l'omniprésence des médias sociaux, l'omniprésence d'Internet
et différents appareils, différents leviers pour nous exposer à ces écrans-là
qui sont multiples et qui parfois nous
isolent. C'est donc dans cette perspective-là que notre formation politique
appuie sans réserve la proposition,
la motion d'aujourd'hui, du Parti québécois, nous assurer de mettre sur place
un plan d'action numérique en éducation bonifié pour encadrer
l'exposition aux écrans de nos jeunes.
Vous
l'avez entendu de la part de mes collègues, donc, aujourd'hui, donc, ces
jeunes, ces jeunes qui, dès le bas âge, sont confrontés à ces écrans-là... puis
on les voit, ces conséquences, directement, puis on parle de ceux sur la santé
mentale. On l'a vu, avec la pandémie qui
s'est produite, bien, de plus en plus de jeunes, bien, pendant une période
prolongée, ont été confrontés à cette
surexposition aux écrans. On a donc eu de façon inédite, M. le Président,
l'opportunité de faire une étude, une étude scientifique avec des cas
réels et de voir la distinction ou la différence que ça faisait sur nos jeunes de ne pas avoir de rempart contre ces écrans, avec
le quotidien des écoles, le fait, donc, d'avoir des activités parascolaires,
puis de pouvoir, au moins, se distancer à
certaines reprises des écrans. Depuis la pandémie, ce qu'on a vu avec les
données qui nous ont été présentées puis qui ont été publiées à de nombreuses
reprises à travers différents périodiques, bien, c'est le fait qu'il y
ait, donc, certainement, donc, une croissance des enjeux de santé mentale chez
nos jeunes, chez nos jeunes adolescents. Et ce n'est pas difficile de faire une
corrélation entre ces enjeux en matière de santé mentale et l'exposition aux
écrans.
Mon collègue de Pontiac,
il a parlé, donc, de notre motion, donc, notre demande de mandat d'initiative
que nous avions formulée, dès 2019, pour
questionner le gouvernement, en fait, pour que l'ensemble des parlementaires
puissent obtenir plus de réponses sur
les liens à faire entre santé mentale, développement cognitif, habitudes de
sommeil des jeunes, et donc cette
exposition aux différentes, donc, nouvelles, donc, technologies et aux écrans.
Donc, en 2019, on se posait ces questions-là.
Ça fait cinq ans. Bien, depuis, je l'ai mentionné, bien, on a eu une pandémie,
on a aussi eu des grèves, où les jeunes,
malheureusement, donc, ont été à la maison, on a eu... Et ce qu'on a vu, c'est
que les questions qu'on soulevait à ce moment-là, elles sont encore
pertinentes. Puis c'est pour ça qu'on est ici... puis on l'entend, là, qu'il y
a un certain consensus, c'est pour ça qu'on est ici encore, donc, cinq
ans plus tard, à se dire : Aïe! on voit qu'il y a quelque chose qui se
passe.
Puis on a
déjà plus d'informations qu'il y a cinq ans. Dans cette perspective-là, parce
qu'on a plus d'informations, bien, je
pense que ça veut dire qu'on fait la bonne chose, aujourd'hui, en lançant cette
sonnette d'alarme puis en demandant au gouvernement de presser le pas et d'agir
pour protéger nos jeunes. Je le disais, bon, à cette époque-là, donc, on
se questionnait, on se disait : Bien,
on voit qu'il y a quelque chose, manifestement, donc, il y a des liens à faire.
Puis aujourd'hui on le sait, on le
sait que cette exposition-là... on les a, les données, là, qui nous permettent
de conclure que cette exposition-là aux écrans, elle joue sur le
développement cognitif de nos jeunes, sur les saines habitudes de vie. On
comprend, donc, les impacts que ça peut
avoir en matière, donc, de sédentarité de nos jeunes, donc, on comprend... on
comprend, donc, de plus en plus que ce qui se passe, bien, c'est sérieux. On a
donc... Je ne vois pas qu'est-ce qui nous empêcherait, aujourd'hui, M. le Président, nous, comme parlementaires, avec
les données scientifiques qui nous sont présentées, avec tout ce qu'on peut lire et tout ce qu'on peut voir aussi... je
ne vois pas qu'est-ce qui nous empêcherait d'aller plus loin et de franchir ce
pas.
Puis, quand
je vous dis, M. le Président, tout ce qu'on peut voir, c'est qu'aussi, tu sais,
à certains égards, puis on l'a entendu, il y en a qui sont parents, d'autres
grands-parents, bien, parfois, on n'a pas nécessairement besoin d'experts pour
constater de façon empirique les conséquences que ça peut avoir sur les jeunes
qui sont aujourd'hui dans notre entourage. Je vous le disais, moi-même, je suis maman aujourd'hui. J'ai un petit de
deux ans et, déjà, je le vois, là, je vois ses pupilles s'écarquiller
quand il voit un écran. Je vois l'empressement qu'il peut avoir. Je vois qu'il
y a quelque chose qui se passe. Ce n'est pas
nécessairement tous les parents qui peuvent le nommer, incluant moi-même, mais
je pense que tous les parents, puis
on en a vu, on a vu quelques tranches de vie être exposées plus tôt, bien, tous
les parents, bien, peuvent constater qu'il
y a définitivement quelque chose qui se passe chez leurs jeunes, puis il faut
qu'on soit capables de mettre de l'avant les différents leviers d'action pour
encadrer, bien, cet usage des écrans, puis sans les culpabiliser, hein, puisque
ça, on l'a entendu, puis mon collègue l'a mentionné, puis l'objectif, ce
n'est pas ça.
• (16 h 20) •
Je le disais
plus tôt, sur nous-mêmes, on le voit. On les voit, les effets. Puis nous-mêmes,
parfois, bien, souvent, on a
peut-être... Peut-être que, d'un côté, on veut un peu le banaliser, mais, parce
que les renseignements affluent, ça crée une certaine culpabilité parentale, hein? Puis, avec les vies qu'on mène, je
parlais de nos vies de députés aujourd'hui, mais les vies que les parents
mènent, qui sont plus que surchargées, bien, je pense que c'est sain, pour
nous, comme parlementaires, de
prendre ce pas de recul, de continuer à sensibiliser la population à
l'importance de cet enjeu dans le branle-bas de la vie, hein, dans les défis du quotidien, pour qu'on se
dise : Bien, comment est-ce qu'on attrape cet enjeu aujourd'hui pour nous
assurer que, dans cinq ans, on ne regarde pas la courbe puis qu'on se
dise : Bien, peut-être que ça aurait été bien d'agir à ce
moment-là, peut-être que ça aurait été bien d'utiliser des outils
parlementaires, des outils législatifs à notre disposition pour être capables d'encadrer cette pratique-là à
l'échelle du Québec puis de voir comment, nous, nos mesures, bien, peuvent
faire des petits, comme on a l'habitude de le faire, au Québec, d'être des
modèles, d'être des précurseurs en matière de politique sociale?
C'est donc
dans cette veine-là, M. le Président, donc, oui, qu'on appuie cette mesure. Puis,
je le mentionnais, donc, on avait fait une demande de mandat d'initiative il y
a cinq ans. On avait aussi, dans la même... à la même époque, réclamé un moratoire sur le support électronique à l'école.
Mais, même aujourd'hui, on continue. Et puis ma collègue de
D'Arcy-McGee, donc, a souvent l'occasion de poser des questions au ministre des
Services sociaux sur la question de la santé
mentale des jeunes. Parfois, on les pose ensemble, mais elle parraine aussi,
donc, en ce moment, donc, une pétition qui
porte aussi sur la question des conséquences, des liens à faire entre le temps
d'écran chez les jeunes et leur santé mentale.
Donc, on
comprend que, si cette question-là peut faire l'objet d'une pétition, c'est que
ça inquiète les parents, c'est que les parlementaires, ici, dans cette salle,
bien, on n'est pas les seuls à se poser des questions là-dessus. Ce sont des
enjeux qui, certainement, doivent faire
parler dans les chaumières, parce que, parfois, les gens ne savent pas par quel
bout le prendre, mais je pense qu'on
joue notre rôle d'élus puis on joue... On prend nos responsabilités de
parlementaire quand on s'assure de
faire avancer ce dossier-là sur la place publique, quand on s'assure de vouloir
recueillir plus de données, mais également, donc, étudier les mesures qui pourraient, de façon proactive, tant dans
le secteur de l'éducation, donc, dans le milieu scolaire, à l'école,
mais également, donc, à la maison, à... veiller au soutien de nos enfants.
Donc, en
terminant, M. le Président, je pense que ce qu'on a entendu dans le cadre de cet
échange sur cette motion du mercredi,
bien, c'est un consensus. C'est un consensus qu'il y a un problème. C'est un
consensus qu'on ne peut plus banaliser
cette question du... des conséquences que peuvent avoir le temps d'écran chez
les enfants. Il y a consensus aussi, bien, sur le fait que, oui, bien, ça a
un... ça joue, bon, sur les saines habitudes de vie de nos adolescents, mais
que nos enfants en bas âge, bien, ils
ne sont pas épargnés par ça, puis qu'au-delà des différentes recommandations
puis des signaux d'alarme qui sont lancés par les experts dans le domaine,
bien, que nous, comme élus, comme politiciens, bien, on a un rôle à
jouer.
Donc,
jouons-le aujourd'hui. On tend la main au gouvernement puis on lui demande,
nous aussi, qu'on puisse mettre sur pied un plan d'action. Merci, M. le
Président.
Le
Vice-Président (M. Lévesque) : Merci beaucoup, Mme la députée de Bourassa-Sauvé.
Je reconnais maintenant M. le député de Saint-Jean.
M. Louis
Lemieux
M. Lemieux : Merci beaucoup, M. le
Président. Vous conviendrez avec moi que le chef du troisième groupe d'opposition aura eu le mérite de nous présenter
un sujet particulièrement consensuel. Mais il ne faut pas se fier au consensus
tout le temps. Le vieux gars de télé et de
radio que je suis vous dira que c'est le genre de sujet qui fait bouger
l'aiguille puis qui fait jaser. Ça,
d'habitude, ça mène à une tribune téléphonique, puis les lignes sont rouges.
Mais on n'ouvrira pas les lignes ici, maintenant, ne craignez rien, M.
le Président.
D'ailleurs,
dans sa réponse, le ministre des Services sociaux a été très précis. Ça a été
ses premiers mots, puis je les entends
encore : Il n'y aura pas beaucoup de débats ici. On ne peut pas ne pas
être d'accord. On n'est pas personne contre la vertu, au contraire. Alors, on est d'accord en principe. C'est sur la
pratique et puis sur la motion en particulier, dont on va parler ou, en
tout cas, qui va retenir mon attention, si vous le permettez.
Cette motion,
aujourd'hui, nous interpelle tous d'une manière ou d'une autre. Grands-parents,
parents, enfant assez grand pour se rendre compte qu'il a un problème, enfant
accro qui ne sait pas qu'il a un problème : au final, tous les Québécois, toutes les Québécoises sont interpelés.
L'augmentation du temps d'écran chez nos jeunes et les effets sur leur
développement ne devraient d'ailleurs laisser personne indifférent.
J'entendais
d'ailleurs le pédiatre bien connu, le Dr Jean-François Chicoine, le fils
de l'autre Chicoine, à la radio, cette semaine, qui disait, en somme, qu'il est
évident que les enfants des 20 dernières années auront vécu quelque chose
de totalement nouveau comparativement aux
générations précédentes, c'est-à-dire d'avoir grandi avec une exposition, pour
ne pas dire une surexposition, aux écrans électroniques.
Et c'est de
ça dont il est question, dans cette motion du chef de la troisième opposition,
en général. Et je suis d'accord sur le fond, comme je le disais, de la motion,
mais je ne suis pas d'accord sur la forme trop politique, trop directive du
libellé de la motion et surtout sa finalité. Mais, puisqu'on est sur le sujet,
je suis content d'en parler, mais, par rapport à la motion, pas à
l'aise, parce que les effets des écrans sur le développement des jeunes vont
bien au-delà d'un plan d'action en enseignement qui arrive à échéance et
l'adoption d'un autre, comme on le demande dans la motion.
Et je vous
explique. Reculons de quelques années, parce qu'on se souvient encore très bien
des années de pandémie. Bon. Vous
allez dire : encore la pandémie, je veux bien, là, mais, pensez-y, ça a un
énorme rapport avec ce dont on parle, 2020‑2022, les années qui ont mis
à l'épreuve toute notre société et notre jeunesse, ne serait-ce que parce que
les changements soudains dans l'organisation
scolaire, qui se sont imposés dans les circonstances, ou la diminution des
activités sociales, personne à personne, menant à l'isolement de certains de
ces jeunes. Les conséquences de la pandémie chez les jeunes au regard de l'utilisation des écrans font
en sorte que nos jeunes, presque par défaut, ont dû consacrer une plus grande
part de leur temps devant un écran, notamment pour suivre des cours à distance
ou garder contact avec leurs amis via les réseaux sociaux.
En chiffres, l'augmentation du temps passé
devant les écrans est passée à 73 % pour les jeunes de 6 à 12 ans et
à plus de 80 %, quatre sur cinq, pour les 13-17 ans, selon les
dernières informations dont nous disposons.
Donc, la santé
et l'éducation sont bien sûr au coeur de nos priorités gouvernementales, que ce
soit dans nos orientations, depuis
notre arrivée au pouvoir, ainsi que dans nos mesures budgétaires. Et, si j'en
parle, c'est parce que c'était très évident dans le dernier budget.
D'ailleurs, dans la foulée de ce qui avait été
fait par les gouvernements qui nous ont précédés, le ministre des Services sociaux en a parlé, mais je veux y
revenir, nous avions compris l'importance d'agir auprès des jeunes et des
diverses problématiques en santé mentale auxquels ils sont confrontés. Et,
au-delà d'un plan, un plan en particulier ou d'un programme
en particulier, ce qu'il faut retenir, c'est l'action concertée
interministérielle, donc, de tout le gouvernement, des actions et des mesures sur plusieurs fronts
pour agir sur le même problème et les mêmes préoccupations. Un peu comme
l'expliquait le ministre des Finances hier, en commission parlementaire, il n'y
a pas souvent de solution simple, en administration
publique, à des problèmes complexes, qu'il me disait, il faut s'y prendre sur
plusieurs fronts avec plusieurs angles
d'attaque pour pouvoir espérer en venir à bout et infléchir des tendances
lourdes positives. Et je pense que c'est vrai autant pour une crise comme celle de l'inflation ou du logement, par
exemple, quand on parlait au ministre
des Finances, que pour le phénomène, puisque c'en est un, même,
c'est un épiphénomène qu'il faut contrer, quand on parle des écrans,
tout ce temps que passent nos jeunes devant leurs écrans et des conséquences
qui en découlent.
• (16 h 30) •
Alors, qu'est-ce qu'on fait dans toutes les
sphères d'action du gouvernement? Il y a le plan interministériel en dépendances 2018‑2028 qui concerne
plusieurs dépendances, dont notamment celles à Internet. Même si les individus
ne développent pas nécessairement
toute une dépendance, telle que nous la connaissons avec l'alcool ou la drogue,
les effets peuvent comporter des risques considérables sur les
utilisateurs, et pas juste les jeunes, mais aussi les très jeunes.
Il y a aussi le Plan d'action interministériel
en santé mentale 2022‑2026. L'importance de promouvoir la santé mentale, de prévenir les troubles mentaux,
d'intervenir précocement et d'offrir des services adaptés aux jeunes présentant
des difficultés et à leurs familles y est d'ailleurs très bien souligné et
expliqué.
Au Secrétariat à la jeunesse, le Plan d'action
jeunesse 2021‑2024 va lancer la campagne Pause ton écran, dont parlait le ministre tout à l'heure, dont il est
particulièrement fier, et pour cause, destinée aux jeunes et à leurs parents
afin de promouvoir une utilisation
équilibrée du temps d'écran et la prévision des risques liés à
l'hyperconnectivité. On nous aurait
dit ça il y a 30 ans, M. le Président, l'hyperconnectivité, puis on se
serait demandé ce qu'ils avaient mangé puis ce qu'ils avaient bu
surtout. En tout cas...
Dans le
contexte de la motion du chef du troisième groupe d'opposition, le Plan
d'action numérique en éducation et en enseignement supérieur couvrait la
période 2018‑2019 et 2022‑2023 et il était guidé par une intégration efficace
et une exploitation optimale du numérique au service de la réussite de toutes
les personnes, de façon à leur permettre de développer et de maintenir leurs compétences tout
au long de leur vie — parce
que c'est ça aussi, le numérique, c'est ça aussi, les écrans, c'est ça
aussi, le temps d'écran.
Il
y a aussi de grandes orientations qui sortent de la stratégie québécoise de
l'utilisation des écrans 2022‑2025 un autre outil mis sur pied par notre
gouvernement. La première orientation, c'est la promotion de la santé et des
bonnes habitudes de vie. L'importance de prendre soin de nous ne date pas
d'hier. On peut même remonter aussi loin qu'on est capables. Un esprit sain dans un corps sain, ça vous dit quelque
chose? Bien, les saines habitudes de vie sont au coeur de nos vies depuis des générations. Avec
l'avènement des technologies de l'information et des réseaux sociaux, nous
avons tous dû apprivoiser ce nouvel
élément dans nos vies. Plus les années avancent, plus ces technologies peuvent
prendre une place de plus en plus considérable et, pour certains,
devenir trop importantes. Étant donné les effets que l'exposition prolongée aux écrans peut avoir sur la santé
physique, psychosociale, développementale des jeunes, il apparaît essentiel
d'agir sur les environnements dans
lesquels ces jeunes évoluent. C'est clair qu'en enseignement il faut améliorer
ou rendre disponibles des
infrastructures polyvalentes et adaptées, en plus de proposer une vaste gamme
d'activités sans écran qui permettront de favoriser la pratique
d'activités physiques, sportives, culturelles et sociales pour nos jeunes.
Prendre
du temps sans écran, histoire de faire une coupure. Il faut prévenir la
sédentarité — on
parle de jeunes ici, la sédentarité — les
troubles de la vision et les effets négatifs sur la santé physique. On sait
tous que le fait de développer de bonnes et de saines habitudes de vie
pour les jeunes a un effet à long terme. Et on sait aussi qu'il faut encadrer l'utilisation des écrans dans les milieux de vie
en visant l'atteinte d'un équilibre numérique. Bien que tous les effets
négatifs sur la santé ne soient pas
tous connus ou n'ont pas encore donné tout ce qu'on a besoin comme statistiques
pour connaître vraiment la situation,
nous savons que le temps d'écran prolongé a bien évidemment des effets sur le
développement des enfants. Et ça nous inquiète et ça devrait continuer
de nous inquiéter parce que c'est essentiel.
Et
ce qui est essentiel dans le contexte, c'est de guider les parents, les adultes
et les autres intervenants à l'utilisation bénéfique des écrans dans
leur milieu de vie parce qu'on se doit aussi de prêcher par l'exemple. Je pense
que tout le monde qui s'est levé en Chambre
dans le cadre de ce débat a parlé de l'exemple, à commencer par le ministre.
L'utilisation des écrans par les
parents de même que par les personnes qui interviennent auprès des jeunes
exerce une influence indéniable, certaine
sur celle qu'en font les jeunes. Les adultes jouent le rôle de modèle, et, pour
cette raison, il est souhaitable qu'ils réfléchissent à leur propre
utilisation des écrans et qu'ils agissent en conséquence en donnant l'exemple.
On
dit souvent que la prévention est le début de la solution à long terme, et
c'est probablement vrai pour le problème de nos jeunes et de notre société scotchés, comme diraient les Français,
à l'un ou l'autre de leurs nombreux écrans. Et la prévention, c'est de
la sensibilisation et de l'information. Et il y en a.
Il
faut continuer de rejoindre les Québécois en produisant et en diffusant
l'information nécessaire pour, justement, sensibiliser la population à
une saine utilisation des écrans. Dans certains cas, il faut les éveiller aux
problèmes qu'ils n'avaient pas constatés, un peu comme la fameuse grenouille dans
l'eau chaude, qui finit... Vous connaissez l'histoire. On se doit de faire circuler de façon continue les informations justes
et crédibles en lien avec l'utilisation des écrans chez les jeunes là où
les gens s'informent.
Ces informations
doivent être facilement accessibles. C'est notre responsabilité en tant que
gouvernement et comme société. Et, pour ça, il faut mettre en place des
matières de... des manières de rejoindre directement les jeunes, le public cible dans les milieux et les
plateformes qu'ils utilisent eux-mêmes. Un peu vieillot, Facebook, j'en
conviens. Puis, TikTok, on trouve ça difficile à suivre, mais c'est là
où il faut aller. Malheureusement, je le dis comme ça, parce que TikTok... En tout cas, c'est une autre affaire.
Passons. On pense... On pense à, oui, les réseaux sociaux, donc, mais aussi les
plateformes de jeux vidéo en direct, comme Twitch, avec la Fondation les
Gardiens virtuels et ses travailleurs de rue numériques.
C'est
pour ça que je dis, parce que je le pense, que la discussion d'aujourd'hui va
bien au-delà d'un plan d'enseignement qui
venait à échéance l'an dernier. La préoccupation de notre gouvernement sur les
temps d'écran des jeunes touche plusieurs intervenants et fait partie des
actions prises par plusieurs de mes collègues depuis notre arrivée au pouvoir.
C'est une réalité qui nous interpelle
tous, pas seulement au gouvernement, mais tous autant que nous sommes, dans le
service public, se conscientiser,
agir en conséquence et donner l'exemple. Nous sommes en action et nous ne
lâcherons pas nos jeunes. Nous ne lâcherons pas la bataille pour qu'eux
lâchent un peu plus leurs écrans. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lévesque) : Merci
beaucoup, M. le député de Saint-Jean. Et je reconnais maintenant M. le
député de Beauce-Sud. Il reste environ un 10 minutes.
M. Samuel
Poulin
M. Poulin : Merci, M. le Président. J'ai une motion, tout
d'abord, à déposer, avant d'aller un peu plus loin sur ce sujet. Alors,
je lis notre proposition d'amendement à la motion qui a été présentée par le
chef du troisième groupe :
Supprimer les sixième
et septième alinéas et les remplacer par :
«Qu'elle
constate que le gouvernement a mis en place la Stratégie québécoise sur
l'utilisation des écrans et la santé des jeunes 2022‑2025;
«Qu'en
conséquence, l'Assemblée nationale demande au gouvernement de poursuivre son
travail dans le déploiement de la stratégie.»
La motion amendée se
lirait ainsi :
«Que
l'Assemblée nationale constate qu'une étude australienne publiée le 4 mars
dernier dans la revue scientifique JAMA Pediatrics confirme
l'effet nocif des écrans sur le développement des enfants en bas âge;
«Qu'elle
souligne que l'étude longitudinale sur le développement des enfants produit par
l'Institut de la statistique du
Québec a également démontré une corrélation entre l'exposition aux écrans en
bas âge et les performances scolaires au primaire;
«Qu'elle
prenne acte que la surexposition aux écrans a une incidence démontrée sur le
développement des capacités cognitives,
sur la santé, notamment les troubles de la vue, et [...] les troubles de
l'attention et du comportement des jeunes;
«Qu'elle
constate que de nombreux pays ont agi, dont la France, les Pays-Bas [...] des
pays scandinaves, notamment, pour corriger cette problématique;
«Qu'elle affirme que la surexposition des jeunes
aux écrans représente un enjeu de santé publique;
«Qu'elle
constate que le gouvernement a mis en place la Stratégie québécoise sur
l'utilisation des écrans et la santé des jeunes 2022‑2025;
«Qu'en
conséquence, l'Assemblée nationale demande au gouvernement de poursuivre son
travail dans le déploiement de la stratégie.»
Un très bon
amendement, M. le Président, qui est proposé par le gouvernement. Alors, je le
dépose. Et j'ai très hâte d'entendre le Parti québécois, à savoir s'ils
acceptent notre amendement.
Parlant du Parti québécois, M. le Président, je
salue ce travail et ce débat qui est amené aujourd'hui par le chef de la troisième opposition, d'amener cet enjeu de
société, ce débat de société qui est au carrefour, M. le Président, de la
santé publique et de la responsabilité
citoyenne. Et, de plus en plus, il y a des débats qui sont amenés ici, au salon
bleu, qui sont au carrefour de la science et de la responsabilité citoyenne.
J'ai entendu,
M. le Président, mes collègues, le député de Saint-Jean, la députée de
Les Plaines, entre autres, amener, de bon aloi et de façon très,
très précise, des réalités sur lesquelles nous sommes confrontés. La députée de
Les Plaines nous le rappelle, que,
comme grand-maman, elle était aussi confrontée à cette nouvelle réalité là. Le
député de Saint-Jean a, de bon aloi, bien expliqué également les
différentes actions de notre gouvernement, les différentes stratégies.
Moi, je me souviens, en 2019, M. le Président,
on venait d'être reportés au pouvoir. J'étais, à ce moment-là, l'adjoint parlementaire du premier ministre,
responsable des dossiers jeunesse, le député de Saint-Jean en a parlé, du plan
d'action jeunesse de notre gouvernement.
Je m'étais
rendu dans une école secondaire de Vanier, j'étais en compagnie, d'ailleurs, de
l'actuel député de Vanier, où nous
avions remis des sommes pour lancer la campagne de Capsana, la campagne Pause,
pour inciter les jeunes à faire une
pause de leurs écrans, M. le Président. Donc, ça ne date pas d'hier, cette
sensibilité-là, pour nous, cette sensibilité-là, pour les Québécois, pour la
société civile, envers une pause à avoir pour les écrans. Et on a lancé une
vaste campagne qui s'est retrouvée à
la télévision, M. le Président — je
me souviens d'avoir participé aux étapes d'approbation — qui
visait à mentionner aux parents l'importance d'une pause de l'écran et
l'importance de mettre de côté l'écran lors de moments précis, notamment lors
des repas, lors des fêtes familiales mais également sur une base quotidienne.
• (16 h 40) •
Vous savez,
ça ne date pas d'hier non plus, M. le Président, que nous parlons de
responsabilité parentale. Parce qu'on disait,
tout à l'heure, on peut se sentir un peu tous coupables, comme parents, dans
notre façon de faire, dans notre façon d'agir auprès de nos enfants.
Mais ça ne date pas d'hier, cette notion-là de responsabilité parentale.
On en parle
aujourd'hui à cause des écrans, mais, moi, M. le Président, ma mère, elle avait
un couvre-feu, là, puis elle se faisait juger, des fois, par les autres, parce
que moi, j'ai eu la mère la plus sévère de la Beauce, soit dit en passant,
puis je me souviens très bien du couvre-feu
puis que je devais quitter mes amis avant tout le monde. J'étais... Elle
pouvait être jugée par ça. Je me souviens qu'on n'avait pas le droit de liqueur
la semaine, M. le Président. Je me souviens de choix qu'on devait faire
à la maison, qu'elle a imposés à la maison, un code de conduite.
Ça ne date
pas d'hier, ça, M. le Président, des parents qui décident, dans leur maison,
d'imposer des règles et des règlements.
Et je suis de celles et ceux... Je n'ai pas d'enfant encore à ce jour, M. le
Président, mais il y a une chose que je sais, c'est que ça ne date pas d'hier,
les parents qui imposent des règles et des règlements à l'intérieur de leur
maison parce que, selon leurs valeurs
et leurs principes, c'est comme ça qu'ils se gouvernent, c'est comme ça qu'ils
souhaitent se gouverner.
Et je me souviens, moi, d'ordinateurs, entre
autres, où on était limités. Je me souviens du jeu Les Sims, M. le Président, où on devait être limités, parce qu'on
pouvait faire des maisons pendant des heures. Puis ma mère disait : Non,
non, tu retournes dehors, jouer.
Donc, ce
n'est pas d'hier, M. le Président, qu'il y a ce rôle parental là d'être sévère
envers leurs enfants et de porter cette responsabilité-là, qui est
important, qui est fondamental.
Et, dans tout
le débat sur les écrans, parce qu'on les connaît, les études sur le temps
d'écran qui est nocif, on ne dit pas qu'il faut éliminer, 100 %,
les écrans, là. Ce n'est pas ça qu'on dit. Mais on pense qu'il faut limiter.
Il faut aussi
parler de qualité à l'écran, M. le Président. Moi, j'ai écouté Passe-Partout
puis je pense que ça a eu un impact positif dans notre vie. J'ai écouté La
maison de Ouimzie, j'ai écouté Ramdam, M. le Président. Ma mère me
mettait Marie Quat'Poches, me mettait Fanfreluche, tous ces
grands succès de notre télévision, que vous avez tous écoutés ici, n'est-ce pas, hein, n'est-ce pas? Et je pense que, somme
toute, ça vous a fait bien cheminer dans la vie. Mais c'est important, ça, M. le Président, parce que
c'est des modèles, c'est la diction, c'est l'avenir de la langue française aussi.
On a investi
des sommes à Télé-Québec récemment, de façon importante, pour augmenter la
production de séries pour les
enfants, pour les jeunes au Québec, M. le Président, parce qu'on pense que,
plus qu'on mettra de culture québécoise dans nos télés, plus que nos jeunes seront attachés à la culture
québécoise. Bien, ça, inévitablement, M. le Président, c'est du temps d'écran. C'est du temps d'écran. De
s'asseoir, de prendre connaissance de notre culture, de prendre connaissance
de ce qui se fait de bon et de mieux à la télévision québécoise, c'est aussi du
temps d'écran.
Maintenant,
est-ce qu'il faut mieux le limiter? Est-ce qu'il faut mieux l'encadrer? C'est
des réflexions qu'on doit avoir. Et
c'est pour cette raison que le ministre délégué à la Santé... bien,
maintenant, il est ministre en titre, pardon, aux Services sociaux a bien
indiqué qu'il y avait une stratégie en place qui doit réfléchir, qui doit aussi
évoluer avec le temps, oui, dans la sensibilisation aux écrans et dans ce que
l'on peut faire et ce que l'on doit faire dans nos institutions publiques.
Je vous parle
de Télé-Québec, M. le Président, parce que c'est une entité tellement
importante, au Québec, qui offre des
outils à nos enseignants et à nos enseignantes pour mieux faire connaître la
culture québécoise, mieux faire connaître la langue française. Bien oui, par moments, ça passe par des écrans. C'est
inévitable, M. le Président. Et ça, je pense qu'il faut le mentionner.
Il faut aussi
faire une différence, et je pense que le gouvernement le fait bien, entre les
jeux vidéo et le temps d'écran, M. le Président, qu'on parle de qualité
de temps d'écran et les jeux vidéo.
C'est reconnu
également qu'une consommation élevée de jeux vidéo par semaine a un impact
aussi sur notre qualité de vie, sur
la vie familiale, par moments, même sur les résultats scolaires aussi, M. le
Président. Et ça, je pense qu'il faut porter une attention particulière.
Je ne crois
pas, et je me permets d'être corrigé, que, de façon majoritaire, dans des CPE,
dans des écoles primaires, il y a des jeux vidéo, présentement, M. le
Président, au Québec. Je ne pense pas qu'on en est là et je pense qu'on aurait,
de bon aloi, le temps de le questionner. Je
pense qu'il est aussi légitime pour le Parti québécois de questionner le temps
d'écran dans des centres de la petite enfance, dans des écoles
primaires, dans les écoles secondaires.
Je me
souviens aussi, M. le Président, qu'en anglais, entre autres, il y avait
beaucoup, beaucoup de temps d'écran en classe pour des films en anglais, pour
des ateliers en anglais. Ça en faisait partie. On sait qu'on a de plus en plus
de gens qui... il y a la TELUQ, aujourd'hui, là, on le sait, avec le télé-universitaire,
qui s'inscrivent et qui ont une grande partie de leur formation qui se
retrouve également sur des écrans, M. le Président.
Alors, on ne pourra pas passer à côté du fait
que les écrans font et feront partie de notre vie. Ça, c'est inévitable, M. le Président. Et, par moments, même si on a été
restreint plus jeune, à un moment ou à un autre de notre vie, par exemple,
pour les études, ça va continuer. Moi, j'ai été de la génération où on étudiait
avec des livres davantage, M. le Président. Souvenez-vous,
on était au Tim Hortons, la table était remplie de livres. Aujourd'hui, bien,
avec un iPad, avec un ordinateur, on est capables de faire nos études.
Alors, la vie
a changé, les temps ont changé, et il va falloir, d'une certaine façon,
apprendre à vivre avec et se demander jusqu'où le gouvernement peut agir,
jusqu'où le gouvernement doit intervenir et jusqu'où le gouvernement doit, à un
moment donné, se rendre à une certaine limite. Comme je vous dis, les
questionnements sont légitimes.
Les
stratégies sont mises en place, les enjeux sont importants, mais il y a aussi
une responsabilité citoyenne, une responsabilité
parentale et aussi une responsabilité pédagogique. On a de grands pédagogues
dans nos centres de la petite enfance, les éducateurs, les éducatrices,
également dans les écoles primaires, dans les écoles secondaires. Ce sont des
gens compétents. On a de grands conseillers pédagogiques également, M. le
Président, qui sont des gens qui, de bon aloi, doivent utiliser leur jugement sur ce qu'on retrouvera à
l'écran, sur la qualité à l'écran. Et ça, je pense qu'on doit être sensibles à
ça.
Et vous dire
aussi que c'est un travail qui sera de longue haleine dans les prochaines
années. Aujourd'hui, on parle des écrans, de la qualité à l'écran, il y
aura d'autres enjeux aussi dans les prochaines années.
Rappelons à nos
jeunes l'importance de jouer dehors, l'importance de la lecture avec un bon
livre, M. le Président. Et vous avez
vu les stats, les statistiques qui ont augmenté pendant la pandémie, les gens,
les jeunes sont retournés vers nos librairies, vers nos bibliothèques
scolaires, M. le Président.
On doit, comme gouvernement, investir dans tout
ce qui ne se retrouve pas à l'écran. On a ouvert un complexe multisports en Beauce, M. le Président. J'ai
promis qu'il n'y a pas un discours que je n'en parlerai pas. Bien, ce sont des
jeunes qui bougent. Pendant ce temps-là, ils
ne sont pas devant leurs écrans. Alors, ça, M. le Président... L'intervention
ne peut qu'être ciblée, l'intervention doit être globale. Merci
beaucoup.
Le
Vice-Président (M. Lévesque) : Merci beaucoup, M. le député de Beauce-Sud. Votre
motion d'amendement est déposée et,
là, sous réserve de l'acceptation de son auteur. Alors, nous le verrons
bientôt. Et je vais maintenant céder la parole à M. le député des Îles-de-la-Madeleine
pour 4 min 22 s.
M. Joël Arseneau
M.
Arseneau : 4 min 22 s? Ah! Bon. Donc, c'est un
temps de parole supplémentaire à celui de la conclusion. Excellent.
Bien, on va...
On commence à s'entendre au moins sur les constats, qui sont, évidemment, forts
et qui sont incontournables, c'est-à-dire que les changements
technologiques des dernières années ont fait en sorte que les jeunes sont aujourd'hui exposés aux écrans à la maison, à
l'école, avec leurs amis, et les effets nocifs sur le développement des
enfants, les effets nocifs sont documentés.
De nouvelles
études ont été faites ces dernières années, et, malheureusement, véritablement,
on est en train d'assister à une nouvelle façon, évidemment, de
développer la cognition chez les jeunes, et, malheureusement, ce n'est pas pour
le mieux. Les impacts sur la motricité, mon
chef en faisait... il faisait référence, tout à l'heure... toute la question
des habiletés sociales, des capacités
cognitives, bien entendu, le contrôle des émotions, donc tout ce qui est en
regard avec le comportement, les
difficultés d'attention, les troubles de l'attention, qui sont en progression
exponentielle, les problèmes de sommeil aussi, chez les jeunes comme chez les
moins jeunes, les problèmes d'estime de soi, bref, des problèmes de santé, de
santé physique, de santé psychique, de santé sociale également, parce qu'on a
aussi cet effet-là, on y faisait référence tout à l'heure.
Mais on parle
de l'exposition aux écrans. Bien, ce n'est pas simplement d'avoir un écran
devant soi, c'est ce qu'on y présente aussi.
Et j'ai noté que plusieurs des intervenants ont
parlé des outils numériques. Quand il est question des jeunes, et particulièrement des jeunes en bas âge, je pense
qu'on ne peut pas évoquer le fait qu'il s'agit d'outils numériques. Des outils
d'apprentissage
jusqu'à un certain point, mais je pense qu'on s'entendra sur le fait que, de
zéro à deux ans, ce ne sont pas des bons outils pour, justement,
l'éducation de nos jeunes. Et ce n'est pas davantage recommandé pour les jeunes
de deux à cinq ans. Donc, de parler d'outils
numériques, évidemment, ça nous donne à penser qu'il faut les utiliser et qu'il
y a une manière de le faire. On
parle, à l'heure actuelle, de surexposition, qui a un impact dommageable, et
une surexposition, vraisemblablement, avec des contenus qui sont, bien
souvent, très peu pédagogiques.
• (16 h 50) •
Et, pour ce qui est de la pédagogie en tant que
telle, pour l'enseignement, il faudra développer un encadrement. D'ailleurs, on y faisait référence tout à l'heure
également, d'autres pays, notamment des pays européens, comme la France,
les Pays-Bas, les pays de Scandinavie, ont
commencé, justement, à déchanter sur les nouvelles... l'intégration des
nouvelles technologies numériques,
qui ne sont pas si nouvelles que ça, d'ailleurs, dans le cadre de
l'enseignement, et qui reviennent à un enseignement plus traditionnel basé sur
les livres, sur le contact significatif avec l'enseignant, avec les pairs
également. Et ça, je pense que...
Il y a un pan
de notre proposition, de notre motion qui en parle, essentiellement, lorsqu'il
est question d'agir et d'agir rapidement. C'est pour l'adoption d'un
nouveau plan qui touche spécifiquement l'éducation et l'enseignement supérieur. Puis l'éducation, bien, ça commence en
bas âge, dès la petite enfance. Et j'aurai l'occasion d'y revenir, M. le
Président, tout à l'heure dans mes notes de conclusion.
Le Vice-Président (M. Lévesque) : Merci
beaucoup, M. le député des Îles-de-la-Madeleine.
Alors, je vais avoir besoin, tout d'abord, du
consentement des collègues pour permettre au député des Îles-de-la-Madeleine de
procéder à la réplique qui était prévue pour le chef du troisième groupe
d'opposition. Est-ce qu'il y a consentement? Il y a consentement.
Alors, je
vais demander également, avant de vous céder la parole, M. le député... vous
demander rapidement si, là, l'amendement
proposé par le député de Beauce-Sud est accepté ou non par votre groupe
parlementaire. Alors, je vous cède la parole pour un droit de réplique
de 10 minutes.
Oui, M. le député de Matane-Matapédia.
M. Bérubé : M. le Président, l'offre
est refusée.
Le
Vice-Président (M. Lévesque) : Alors, M. le député des Îles-de-la-Madeleine, pour
votre droit de réplique de 10 minutes.
M. Joël Arseneau
(réplique)
M.
Arseneau : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, tout à
l'heure, mon chef, le chef du Parti québécois, a exposé le problème de la surexposition aux écrans, de ses
impacts majeurs, délétères et pérennes sur les jeunes Québécoises et Québécois, et je pense qu'on a pu entendre
plusieurs des intervenants ici, en Chambre, dire essentiellement la même chose.
Nous sommes
dans un changement de paradigme extrêmement important face à un phénomène que
l'on ne contrôle pas et qui évolue à vive allure. Les impacts, on en a parlé,
sur la santé physique, psychique, cognitive, sociale sont évidents. Ils sont documentés. De plus en plus d'études nous
démontrent non seulement le phénomène, mais nous indiquent qu'il faut agir,
agir en amont pour justement s'assurer que, le bien-être de nos enfants, là, on
puisse s'en assurer. Et ça passe notamment par des actions quand même
importantes sur le phénomène de la surexposition aux écrans.
La
problématique est particulièrement importante — quand je parle d'agir en amont sur les
jeunes, les jeunes dans le plus jeune
âge, la petite enfance — lorsqu'on
sait qu'à peu près tous les experts recommandent, et c'est une question de
santé publique, recommandent de n'avoir
aucune exposition aux écrans jusqu'à l'âge de deux ans, alors que les
statistiques, malheureusement, nous
indiquent qu'il y a encore, en moyenne, un taux d'exposition, pour les
tout-petits, de l'ordre de 2,4 heures
par jour, M. le Président, alors qu'on ne devrait en avoir absolument aucune,
exposition, pendant les deux premières années de vie de nos tout-petits.
Puis on pourrait parler des trois à cinq ans,
l'autre catégorie, où, là, on dit : Pas plus qu'une heure, on s'entend à peu près tous là-dessus, pas plus qu'une heure
par jour, et, si on le fait, que ce soit à des fins éducatives. Eh bien, M. le
Président, une étude canadienne qui a été
utilisée par l'Institut de la
statistique du Québec nous démontre
que la réalité est semblable ici, chez nous, et que c'est 3,6 heures par
jour, d'exposition que l'on impose ou, en fait, que l'on accepte chez les
tout-petits de trois à cinq ans. C'est dire à quel point il est important
d'agir pour contrer cette tendance et ce phénomène.
On a une génération montante, les jeunes qui
sont actuellement, là, dans nos CPE, donc l'éducation à la petite enfance, et dans nos écoles. C'est une génération
qui est à risque. Il faut agir pour éviter que cela ne devienne une génération
sacrifiée, M. le Président.
C'est un
problème de santé publique. Je pense qu'on en est tous conscients. Et,
lorsqu'il est question de santé publique, mais il est de l'ordre et de la
responsabilité du gouvernement du Québec, de l'État du Québec, devrais-je dire,
d'agir, de prendre ses
responsabilités. C'est même un devoir d'agir pour, justement, améliorer les
conditions de santé de... particulièrement de nos jeunes, de nos
tout-petits.
Devant les
bouleversements technologiques extrêmes que l'on vit et extrêmement rapides,
nous devons agir, et nous devons agir
rapidement, nous ajuster, nous adapter presque en temps réel, comme le font,
évidemment, les développeurs de technologie.
Le ministre des Services sociaux nous a offert,
dans sa réplique, un petit retour sur les actions qui ont été prises depuis 2019. Il nous a rappelé la démarche des
deux forums qui avaient été tenus, un forum d'experts, un forum avec des
organisations indépendantes, un forum transpartisan
auquel j'ai eu le privilège de participer. C'était en 2019. Ça a débouché, évidemment, sur la Stratégie québécoise
sur l'utilisation des écrans, qui comporte certaines grandes orientations.
Puis je pense qu'on a fait notre travail,
surtout qu'il a été un peu bousculé par, évidemment, la pandémie, qui a frappé
au moment où on venait tout juste de finir le deuxième forum.
Mais ce qu'il
faut dire, c'est que les choses ont beaucoup évolué depuis ce temps et qu'on ne
peut pas se permettre de croiser les
bras et espérer que la stratégie se termine pour ensuite vérifier les
résultats. Parce que les résultats, j'en parlais tout à l'heure, ils
sont probants, et on ne va pas dans le bon sens.
On peut encore ramener le navire sur un cap
beaucoup plus intéressant, et c'est la raison pour laquelle on veut proposer un nouveau plan d'action rapide sur
toutes ces questions, parce que ce plan qui a été déposé, il réfère notamment
à d'autres plans, d'autres plans qui ont...
qui ont été élaborés à différents moments par l'État du Québec et qui ne sont
pas tout à fait à jour. Et c'est le moins qu'on puisse dire. C'est un
euphémisme. En d'autres mots, la Stratégie québécoise sur l'utilisation des écrans et la santé des jeunes, en large partie,
est devenue caduque, et nous ne pouvons plus attendre pour agir sur
certains éléments, à tout le moins, de la question.
On a
mentionné, par exemple, que... Il faisait référence au Plan d'action
interministériel en dépendance 2018‑2028. Mais, dans ce plan-là, on ne fait
absolument aucune référence à la surexposition aux écrans des jeunes.
On a parlé
également, dans ce plan stratégique... ou cette stratégie québécoise, d'un plan
stratégique du ministère de
l'Éducation 2023‑2027 où l'on ne retrouve même pas le mot «écran» et où
les actions en matière de technologie concernent surtout l'utilisation des données dans le réseau. Donc, ce n'est pas,
évidemment, un outil qui peut nous être utile aujourd'hui.
Il y a aussi
le Plan d'action concerté pour prévenir et contrer l'intimidation et la
cyberintimidation 2020‑2025, qui, lui, comprend quelques bonnes mesures pour
ce qui est de la sensibilisation et l'intervention mais pas de mesure
structurante pour le problème dont nous parlons aujourd'hui, la
surexposition aux écrans.
Donc, l'objet
de notre demande, plus spécifiquement, puis c'est important de le dire, puis ça
explique la raison pour laquelle on
est dans l'obligation de refuser d'amender la motion dans le sens de ce que
nous demandaient nos collègues du gouvernement,
c'est de revoir de fond en comble le Plan d'action numérique en éducation et en
enseignement supérieur, qui, lui, est échu depuis l'an dernier, un plan qui ne
comprenait même pas... en fait, qui ne comprenait le mot «écran» qu'une seule fois et qui ne portait absolument pas
sur les effets des écrans sur la santé des jeunes mais plutôt, et là c'est à
noter, plutôt sur l'utilisation responsable des outils numériques en
classe. Alors, on est loin du compte. Ce n'est pas du tout le cadre qu'on doit se donner pour justement diminuer l'exposition
aux écrans des jeunes, et particulièrement des tout-petits.
La recherche,
depuis, a beaucoup évolué. On a un plan qui est maintenant échu. Il faut y
travailler, il faut le développer et il faut agir rapidement.
• (17 heures) •
Je vous donne
un autre exemple. Sur... Dans ce plan-là, il n'a jamais été question, par
exemple, de l'utilisation des cellulaires. Et la question du téléphone
cellulaire, de l'utilisation du téléphone cellulaire à l'école a été portée par
le Parti québécois, par mon collègue député
de Matane-Matapédia, et, en l'espace de moins d'un an, nous avons réussi à
convaincre le gouvernement, malgré
une stratégie qui ne parlait pas du tout du téléphone cellulaire, à l'encadrer,
à encadrer son utilisation, évidemment, pour le réduire.
Bien, c'est
exactement ce qu'on demande aujourd'hui, d'agir plus rapidement que le plan,
qui, lui, au moment où il a été
développé, ne le prévoyait... d'agir, donc, rapidement, en amont, pour avoir
des gains qui nous permettent, justement, d'améliorer les choses sans attendre des grandes évaluations puis des
nouvelles discussions ou des grands forums qui nous projettent dans l'avenir, alors que les
technologies, elles, nous poussent dans le dos et poussent également les
parents face à des situations qui sont extrêmement difficiles et
délicates à gérer avec les jeunes.
Évidemment, nous ne voulons pas intervenir sur
la capacité des parents de choisir, mais il est impératif que le gouvernement du Québec, l'État du Québec, dans ce
qu'il contrôle, dont ses institutions, les institutions de la petite enfance,
les services de garde, les garderies,
qu'elles soient subventionnées ou non... Les services qui sont,
essentiellement, régis par le
gouvernement du Québec ou autorisés doivent avoir un cadre d'intervention face
à la surexposition des écrans, et c'est
évidemment la même chose dans les écoles primaires, secondaires et jusqu'à
l'enseignement supérieur. C'est exactement le sens de la proposition que l'on fait aujourd'hui, et une présentation
qui se veut, évidemment, constructive, positive et qui n'a pas de valeur
ou de connotation politique partisane.
Dans la
foulée du travail qui a été fait en 2019, au moment où le ministre nous a
invités à agir, nous lui tendons à nouveau la main pour agir prestement
d'ici la fin des travaux parlementaires. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président
(M. Lévesque) : Merci beaucoup, M. le député des
Îles-de-la-Madeleine. Alors, cela met fin à ce débat.
Je vais
maintenant mettre aux voix la motion de M. le chef du troisième groupe
d'opposition, qui se lit comme suit :
«Que
l'Assemblée nationale constate qu'une étude australienne publiée le 4 mars
dernier dans la revue scientifique JAMA Pediatrics confirme
l'effet nocif des écrans sur le développement des enfants en bas âge;
«Qu'elle
souligne que l'étude longitudinale sur le développement des enfants produit par
l'Institut de la statistique du Québec a également démontré une corrélation
entre l'exposition aux écrans en bas âge et les performances scolaires
au primaire;
«Qu'elle prenne acte que la surexposition aux
écrans a une incidence démontrée sur le développement des capacités cognitives, sur la santé, notamment les
troubles de la vue, et sur les troubles de l'attention et du comportement des
jeunes;
«Qu'elle
constate que de nombreux pays ont agi, dont la France, les Pays-Bas et des pays
scandinaves, notamment, pour corriger cette problématique;
«Qu'elle
affirme que la surexposition des jeunes aux écrans représente un enjeu de santé
publique;
«Qu'elle
constate que le Plan d'action numérique en éducation et en enseignement supérieur,
échu depuis 2023, est insuffisant et doit être bonifié pour lutter efficacement
contre les effets nocifs de la surexposition des jeunes aux écrans;
«Qu'en conséquence,
l'Assemblée nationale demande au gouvernement de déposer un nouveau plan d'action
numérique en éducation et en enseignement
supérieur bonifié pour mieux encadrer l'exposition des jeunes aux écrans avant
la fin de la présente période de travaux parlementaires, pour une mise en
oeuvre dès la prochaine rentrée scolaire.»
Est-ce que cette
motion est adoptée? M. le député de Matane-Matapédia.
M. Bérubé : M. le Président, nous sommes trois députés. Si on
a l'appui de deux autres députés, on aimerait avoir un vote
électronique.
Le Vice-Président
(M. Lévesque) : ...est demandé. Est-ce qu'il y a effectivement appui
de d'autres collègues?
Des voix : ...
Le Vice-Président (M. Lévesque) : Alors,
des collègues de l'opposition officielle vous appuient. Alors, le vote
électronique est demandé. M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Lévesque (Chapleau) : M. le Président, je vous
demanderais de bien vouloir reporter le vote à la prochaine période des
affaires courantes, s'il vous plaît.
Vote
reporté
Le Vice-Président
(M. Lévesque) : Alors, le vote sera reporté à la prochaine séance.
Et
maintenant nous passons à la poursuite des affaires du jour. M. le leader de
l'opposition officielle, pour la suite de nos travaux.
M. Lévesque (Chapleau) : Le leader du gouvernement
va se faire un plaisir, M. le Président, de vous répondre. Donc, oui,
effectivement, je vous demanderais de bien vouloir appeler l'article 14 du
feuilleton, s'il vous plaît.
Projet
de loi n° 54
Adoption
Le Vice-Président (M. Lévesque) : Alors,
à l'article 14 du feuilleton, M. le ministre de la Justice propose
l'adoption du projet de loi
n° 54, Loi donnant suite à la
Table Justice-Québec en vue de réduire les délais en matière criminelle et pénale
et visant à rendre l'administration de la justice plus performante.
Alors, y a-t-il des
interventions? Je reconnais Mme la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré.
Mme Kariane
Bourassa
Mme
Bourassa : Merci beaucoup, M. le Président. Ça fait plaisir de prendre
la parole aujourd'hui, malgré ma voix
enrouée, à l'étape de l'adoption du projet de loi n° 54, la Loi donnant
suite à la Table de Justice Québec en vue de réduire les délais en matière
criminelle et pénale et visant à rendre l'administration de la justice plus
performante.
Comme
il en a été question lors de l'étude de ce projet de loi, il est important que
notre système de justice soit plus performant et plus accessible pour tous les
Québécois et les Québécoises. Il doit permettre aux personnes victimes de
tourner la page le plus rapidement
possible. Le système de justice doit être en mesure de rendre un jugement
lorsqu'une personne victime a le
courage de dénoncer et de porter plainte. Dans les derniers mois, ça n'a
malheureusement pas toujours été le cas. En effet, la situation des délais judiciaires a pris de l'ampleur. Cette
situation a parfois mené à des arrêts de procédure et à des causes qui
doivent être malheureusement abandonnées. Ce n'est pas acceptable. On va
s'entendre là-dessus.
C'est
pourquoi, l'automne dernier, plusieurs acteurs du milieu de la justice se sont
réunis autour d'une même table pour trouver des solutions concrètes et
innovantes pour réduire les délais judiciaires en matière criminelle et pénale,
et parmi ces groupes : le ministère de
la Justice, le ministère de la Sécurité publique, le Directeur des poursuites
criminelles et pénales, la Commission des services juridiques, la Cour
d'appel, la Cour supérieure, la Cour du Québec, le Barreau du Québec, l'Association des avocats de la défense
de Montréal-Laval-Longueuil, l'Association québécoise des avocats et avocates de la défense, la Chambre des notaires
du Québec et le Réseau des centres d'aide aux victimes d'actes criminels.
De
ces rencontres, le plan d'action de la Table Justice-Québec a émergé. Suivant
le dépôt, le gouvernement s'était engagé à déposer un projet de loi le plus
rapidement possible pour permettre la mise en oeuvre de certaines mesures qui
nécessitent un changement législatif. C'est ainsi que, dès le 20 février,
mon collègue le ministre de la Justice a déposé le projet de loi n° 54, et je vous rappelle le titre, loi pour donner suite à la table de Justice Québec
en vue de réduire les délais en matière criminelle et pénale et visant à
rendre l'administration de la justice plus performante.
Au cours des derniers
jours, les parlementaires ont étudié et débattu de ce projet de loi. Nous en
sommes aujourd'hui à débattre de son adoption. Je tiens, donc, bon de rappeler
les actions-phares émanant de ce projet de loi.
Le projet de loi vient soutenir la mise en
oeuvre de trois actions-phares émanant de la table de Justice Québec. Premièrement, l'octroi de nouveaux pouvoirs aux
juges de paix magistrats afin qu'ils puissent présider des comparutions et des enquêtes sur
remise en liberté, des tâches normalement réservées aux juges de la Cour du
Québec. Cette mesure a le potentiel de libérer l'équivalent de 15 à
20 juges à temps plein en chambre criminelle et pénale. Ceux-ci pourront
donc consacrer davantage de leur temps à entendre des procès et des requêtes
complexes.
Il
serait, par ailleurs, désormais possible pour les juges de paix magistrats de
tenir les comparutions et les enquêtes sur
remise en liberté par visioconférence, et ce, sept jours sur sept. Ça va
permettre, notamment, d'éviter qu'un procès ne soit interrompu parce que la comparution ou l'enquête sur remise en
liberté doit être tenue dans un délai précis. Les journées d'audience
pourraient ainsi gagner en prévisibilité.
Nous proposons
également d'alléger le régime de preuve pour économiser du temps d'audience et
éviter les déplacements à la cour pour les
témoins. Actuellement, les règles de preuve sont très strictes. Par exemple,
pour un constat d'infraction au Code
de la sécurité routière, elles obligent le juge à faire venir un témoin, comme
un policier, par exemple, à la cour
pour relater ce qui se trouve dans sa déclaration écrite, tout ça même si le
présumé contrevenant ne se présente pas, lui, à son procès. En permettant le
dépôt en preuve de ce type de document, les dossiers pourraient cheminer plus
rapidement et donc plus efficacement.
Nous venons aussi
moderniser les règles pour la signification de certains constats d'infraction,
tout ça afin que davantage de dossiers
puissent être traités par les juges de paix fonctionnaires. Ça libérerait ainsi
du temps aux juges de paix
magistrats, ce qui permettrait, ultimement, de libérer du temps aux juges de la
Cour du Québec. Vous voyez, là, on vient de créer un effet de cascade.
Le
projet de loi prévoit, par ailleurs, d'autres mesures visant à rendre le
système de justice plus efficace, notamment l'ajout de sept postes de juges à la Cour supérieure afin d'améliorer
l'accès à la justice en région, où la majorité des postes additionnels seront situés. Il est également prévu
d'optimiser la procédure de confiscation des biens provenant d'activités
illégales, ce qui permettrait d'éviter la judiciarisation de nombreux dossiers.
• (17 h 10) •
Je
tiens à remercier, d'ailleurs, toutes les personnes qui ont travaillé sur ce
projet de loi. Je vois des collègues de tous les partis politiques, qui se
sont posé des questions, qui ont étudié, également, le projet de loi, ainsi,
bien sûr, que les partenaires de la
table de justice qui se sont rendus disponibles afin de trouver des solutions
concrètes pour améliorer les délais judiciaires en matière criminelle et
pénale.
Bien
entendu, la réduction des délais commande des efforts continus et ne sera pas
nécessairement... ne se fera pas nécessairement sentir du jour au
lendemain, mais ce projet de loi comprend des actions concrètes à mettre en
place immédiatement. Nous avons un projet de
loi, ici, qui est complet et qui va permettre de rendre l'administration de la
justice plus performante. J'invite donc mes collègues à voter en faveur
de ce dernier. Merci beaucoup.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci,
Mme la députée. Alors, je suis prête à entendre un autre intervenant sur
l'adoption du projet de loi n° 54. M. le député
d'Acadie, je vous cède la parole.
M. André
Albert Morin
M. Morin : Merci, Mme la Présidente. Alors, je suis heureux,
cet après-midi, de prendre la parole pour la dernière étape, finalement, du projet de loi n° 54, donc, son adoption, Loi donnant suite à la Table Justice-Québec en
vue de réduire les délais en matière criminelle et pénale et visant à
rendre l'administration de la justice plus performante.
Je
vous dirai d'emblée qu'il est très difficile d'être contre un projet de loi,
finalement, qui vise à réduire les délais en matière criminelle et pénale, ça, c'est certain, mais j'aurai quand
même plusieurs éléments à vous partager, à faire valoir, qui auraient,
quant à moi, pu améliorer davantage la situation et réduire davantage les
délais.
Disons, dans un
premier temps, que ce projet de loi est, finalement, la transcription
législative, si je peux m'exprimer ainsi,
d'un plan d'action de la Table Justice-Québec, plan d'action... et avec
certaines dispositions, qui fait en sorte
que le gouvernement se devait d'adopter un projet de loi. Quand on regarde le
plan d'action, c'est un plan ambitieux, que je salue, d'autant que, quand on
regarde l'ensemble des partenaires, évidemment, ce sont à peu près tous les
partenaires du système de justice
criminelle et pénale au Québec qui ont été convoqués. Mais, comme je l'ai
souligné précédemment, il en manquait quelques-uns.
Le ministre pourra,
s'il entend mes propos, éventuellement, en inviter davantage. Aucun
représentant des cours municipales, et donc,
pourtant, dans le projet de loi, il y a probablement des dispositions qui vont
toucher les cours municipales, et les
procureurs fédéraux, qui, pourtant, plaident un grand nombre de dossiers au
Québec, n'ont pas été invités non plus. Donc, important d'inviter l'ensemble des partenaires pour s'assurer,
évidemment, que la justice criminelle sera rendue d'une façon efficace
et, évidemment, dans des délais qui sont raisonnables. Donc, ça, je tenais à le
souligner.
Évidemment, dans le
plan d'action, on insiste beaucoup sur le dialogue, l'ouverture. C'est effectivement
très important, parce que, quand le poursuivant et la défense peuvent se
parler, collaborer, il est certain que ça va améliorer l'efficacité et réduire
les délais en matière criminelle et pénale.
Donc,
à partir de ce plan d'action, le ministre de la Justice dépose un projet de
loi, que nous avons regardé, étudié, bien sûr, en commission
parlementaire. Le premier constat que j'ai fait... quand j'ai lu le projet de
loi, je me suis dit : Bon, bien, ça ne
devrait pas être très compliqué. On augmente la compétence des juges de paix
magistrats, c'était indiqué dans le
plan d'action, certaines règles de preuve ont été modifiées, et voilà, ça
devrait être à peu près ça. Mais non, surprise, le projet de loi traite
d'une façon importante et apporte des amendements à la Loi sur la confiscation,
l'administration et l'affectation des
produits et instruments d'activités illégales. Donc, on a travaillé, en
commission parlementaire, sur ces dispositions-là,
et évidemment, je vais vous en parler dans les minutes qui suivent, j'aurai des
remarques à faire à ce sujet là.
Mais j'aimerais aussi souligner que, dans son
empressement, M. le ministre voulait que ça tourne rondement. Alors, on a eu
une convocation, on a suggéré des groupes, comme on le fait toujours, et les audiences
pour entendre ces
groupes sont arrivées très rapidement, ce qui fait que certains groupes n'ont
pas pu produire de mémoire. Je tiens à le souligner, Mme la Présidente, parce
que, quand on est législateur, bien, c'est important parfois de prendre son
temps pour éviter, évidemment, des erreurs, pour éviter de tourner des
coins ronds.
Et, dans ce
cas-ci, entre autres, et je le souligne, il y a un groupe qui est venu en
commission parlementaire, qui se sont préparés, mais qui n'ont
malheureusement pas pu déposer de mémoire, et je parle, je réfère à
l'association des poursuivants, donc des procureurs du Directeur des poursuites
criminelles et pénales. Au fond, ce qu'ils nous ont livré comme témoignage, c'est, je vous dirais, un cri du
coeur. Et ils nous ont dit, entre autres, que ce projet de loi là, évidemment,
c'est beau, bien sûr, on n'est pas contre favoriser l'accès au système de
justice puis que le système de justice fonctionne rapidement, mais encore faut-il avoir les moyens de nos ambitions, encore
faut-il avoir la possibilité puis avoir assez de procureurs pour faire en sorte qu'on puisse rendre effectivement viables
ces dispositions-là. C'est ce qu'on a entendu. Et donc je tenais à le souligner, parce qu'il faut
absolument que l'ensemble des partenaires puissent agir avec efficacité pour
être capables de rendre ce projet de loi et de lui permettre d'atteindre
l'objectif qui est fixé.
D'autres
groupes ont émis des réserves. Puis je souligne aussi, en parlant de
l'Association des procureurs, qu'ils nous
ont parlé de leur nombre de dossiers, de leur inventaire de dossiers puis
particulièrement de leur inventaire de dossiers quand vient le temps de plaider des dossiers d'agressions sexuelles avec
des victimes, et les efforts qu'ils sont obligés de poser et de faire pour être capables d'essayer de
rencontrer les victimes. Et c'est loin d'être évident, ça demande du temps,
puis, les victimes, on leur doit ça. Mais
effectivement ça demande une charge de travail, c'est important. Puis je
comprends qu'il y a des associations
qui s'en occupent, c'est très bien, mais évidemment, c'est important pour le
procureur d'avoir aussi l'impression
qu'il a pu remplir tout son travail, tout son devoir avec célérité puis avec
professionnalisme, ce qu'ils font toujours, mais a demande un effort
constant.
Et je peux
comprendre ce qu'ils disent, Mme la Présidente, les procureurs, parce qu'au
début de ma carrière j'ai été
moi-même un procureur au ministère de la Justice. À l'époque, il n'y avait pas
de DPCP, et j'en ai plaidé, des dossiers d'agression sexuelle. J'en ai
accusé, des abuseurs sexuels, j'ai accusé des abuseurs sexuels qui commettaient
des crimes d'agression sexuelle chez des... sur des enfants. Puis évidemment
c'est sûr que ça demande du tact, du doigté, mais ça demande du temps. Parce que, quand vous avez une victime, déjà,
dénoncer, c'est compliqué, dénoncer, ça demande un effort, puis après ça, bien, il y a le système de justice
pénale. C'est normal, c'est notre système, on vit dans un État de droit, mais ça
demande un effort considérable. Donc, il faut que les procureurs aient du temps
pour être capables de remplir leur mission, et je les comprends très bien.
Un autre
groupe qui est venu nous rencontrer, c'est les groupes qui s'occupent,
évidemment, de l'accompagnement des
victimes. Et ce groupe-là, je vous le dis bien humblement, se réjouit du projet
de loi, parce que, dans le projet de loi, il va y avoir, effectivement, plus de montants d'argent, quand quelqu'un
va être reconnu responsable ou condamné, pour la loi visant à aider les personnes... d'infractions criminelles ou le
Fonds Accès Justice. Mais encore, ce groupe nous rappelait qu'ils sont parfois inquiets, et ils espèrent
avoir les ressources nécessaires pour être capables de remplir leur mission qui
est effectivement d'accompagner des victimes d'actes criminels. Donc, ça
aussi, je tiens à le souligner.
Et le Barreau du Québec et l'Association du
Barreau canadien émettaient des réserves quant aux nouvelles dispositions qui vont traiter de la confiscation
administrative, en disant : Écoutez, le ministre veut aller très vite,
mais on espère que ça ne créera pas
un engorgement dans les tribunaux et que ça ne va pas créer, éventuellement,
plus de litiges que ce qu'on a là.
Donc, je prends la peine de le dire parce qu'il faut tenir compte de cette
réalité, puis, malheureusement, dans le cadre de ce projet de loi là,
bien, ça s'est passé à une vitesse... comme l'éclair.
• (17 h 20) •
Quand on
regarde, maintenant, le projet de loi, il y a des dispositions, effectivement,
qui sont en lien directement avec ce
qui est élaboré par la table et les partenaires de la Table Justice-Québec, et
je réfère... et je spécifie, particulièrement en ce qui a trait à l'article 37 du projet de loi, par la
compétence élargie des juges de paix magistrats. Évidemment, je salue le fait que, dorénavant, les juges de paix
magistrats pourront présider des comparutions en matière criminelle ainsi que
des enquêtes pour la remise en liberté. Ce n'est pas le cas, présentement.
Donc, effectivement, ça va permettre de libérer des juges de la Cour du Québec, qui pourront entendre éventuellement des
procès, mais qui continueront d'entendre des enquêtes préliminaires.
Pourquoi je
dis «continuer»? Bien, je vous explique brièvement pourquoi. Le projet de loi
permet désormais aux juges de paix magistrats d'accepter que les deux parties,
poursuivant, défense, veuillent sauter l'enquête préliminaire et se rendre directement à procès. C'est une
référence à l'article 549 du Code criminel, sauf que le ministre... et je
lui ai posé des questions, quand on a
fait l'analyse article par article. Mais pourquoi s'en remettre uniquement à
l'adoption de ce qu'on appelle, dans le jargon, un 549? Pourquoi le juge
de paix ne pourrait pas entendre des témoins à l'enquête préliminaire? Le ministre nous dit : C'est un choix
politique. Bon, soit, il a le droit, c'est le ministre, sauf que le problème,
pour moi, puis je vous le soumets, ça
a un impact direct sur, évidemment, les dossiers en matière criminelle, puis au
fait que ce ne sera peut-être pas si efficace que ça, puis on ne sera
peut-être pas en mode aussi accéléré. Pourquoi? Bien, parce que, dans un très grand nombre de cas, c'est vrai qu'on a
réduit les paramètres où on peut demander une enquête préliminaire. C'est
pour les crimes les plus graves. C'est
exact, sauf que, dans un bon nombre de cas, en pratique, ce que les parties
veulent ou ce que la défense veut,
c'est souvent entendre un témoin puis, comme on dit, faire un 549 pour le
reste. Or, avec la réforme du projet
de loi, le ministre n'accomplira pas ça. Tout ce qu'il faut, c'est que les deux
parties consentent et soient d'accord. Or,
dans les faits, il est rare d'avoir des rôles complets de cour où vous allez
avoir 42 dossiers, puis ça va être tous des 549. Ou bien on va demander une enquête préliminaire,
ou bien on va demander d'entendre un témoin. Eh bien, là, ce ne sera pas
possible. Je pense que ça, ça aurait été une amélioration. Je lui ai suggéré,
je lui ai tendu la main, ça n'a pas été retenu.
Alors, on verra. Peut-être qu'éventuellement, qui sait, on aura à modifier le
projet de loi puis qu'on pourra se rendre un peu plus loin, mais on n'est pas encore rendu là. Donc, ça, je pense
que c'est un élément qui aurait pu améliorer davantage.
Je
souligne également que j'ai rappelé au ministre l'importance aussi de nommer
des juges de paix magistrats dans différentes
régions du Nord québécois, parce que, là aussi, il manque de personnel, et je
pense qu'il faut également le souligner.
Le projet de loi, en ce qui a trait à
l'élaboration, par les partenaires de la Table Justice-Québec, de différentes recommandations, se limite à peu près à ça, donc.
Le projet de loi contient une foule d'autres dispositions dont j'aimerais,
évidemment, faire référence. Entre autres,
le projet de loi va maintenant mettre en place un régime complet de
confiscation pour l'affectation des produits et instruments d'activités
illégales. En soi, ce n'est pas une mauvaise chose, on parle de confiscation administrative. Il est certain qu'on
ne souhaite pas que des criminels qui, à la suite de la perpétration de leur
crime, obtiennent ou achètent des biens qui
sont des produits de la criminalité puissent en bénéficier. Puis évidemment on
veut enlever aussi aux criminels des biens
qu'ils utilisent pour la commission de leurs infractions et actes criminels.
Sauf que le régime qui est en place
va évidemment permettre aux ministres d'agir très rapidement, avec une série de
présomptions, puis je vais vous en
parler pendant quelques minutes, et qui va faire en sorte que... en fait, je
souhaite que ça fonctionne bien, mais
il y a un risque pour qu'il y ait évidemment, éventuellement, des
contestations. Et c'est d'ailleurs ce que le Barreau du Québec a soulevé
dans son mémoire. Permettez-moi d'y faire référence et de vous citer quelques
dispositions du projet de loi.
Présomption
qu'un immeuble est un instrument d'activités illégales lorsque le nombre de
plantes de cannabis qui y est cultivé est
supérieur au nombre de plantes de cannabis cultivé à des fins médicales. Dans
le cas de l'immeuble, c'est une
présomption, mais il n'y aura pas nécessairement de confiscation
administrative. Cependant, pour les biens meubles, on peut confisquer une somme
d'argent comptant trouvée à proximité de substances interdites. C'est un terme
qui est large. On nous dit que la jurisprudence l'a interprété, tant
mieux, espérons que ça n'entraînera pas des contestations.
On parle d'un
véhicule qui est présumé être un instrument d'activités illégales lorsqu'on y
trouve une arme à feu à autorisation restreinte ou une arme prohibée.
Évidemment, si vous trouvez une arme prohibée dans un véhicule, ce n'est
pas du tout une mauvaise idée que le
véhicule soit retranché de la sphère publique. Mais, par ailleurs, parmi les
questions que je posais au
ministre : Oui, mais qu'est-ce qui arrive, si c'est le véhicule de
quelqu'un d'autre, si c'est un véhicule loué? Le ministre nous dit qu'il
s'est inspiré de dispositions qui existent dans d'autres provinces. C'est vrai,
il y a d'autres provinces qui ont un régime
semblable, sauf qu'ils ont prévu des mécanismes beaucoup plus précis, beaucoup
plus complets, par exemple, dans le cas de véhicules loués.
«Un bien est
présumé être un instrument d'activités illégales lorsqu'une infraction de
nature sexuelle a été commise en
utilisant ce bien.» Eh bien, ça non plus, on ne veut pas, effectivement, que
quelqu'un qui commet une infraction de nature sexuelle avec un bien puisse le
conserver, sauf que le ministre nous disait que ça peut viser tous les biens,
donc c'est large. Espérons qu'il n'y aura pas de contestation et que
l'objectif visé, recherché par le projet de loi, sera atteint.
Et, là
encore, ce n'est pas tout à fait terminé, parce que, par la suite, il y a une
procédure qui est mise en place et qui va
permettre, finalement, au Procureur général de fonctionner rapidement avec une
procédure de confiscation administrative. Donc, lorsque le projet de loi
sera adopté, on aura trois mécanismes de confiscation.
Celui qui est
prévu au Code criminel, donc, dans le Code criminel, le poursuivant peut
déposer une accusation de produits de la criminalité. Si la personne est
reconnue coupable, à la fin, on pourra demander la confiscation des biens. Il est possible aussi d'accuser une personne de
différents crimes ou infractions, notamment en matière d'importation, de
trafic de stupéfiants, et, à la fin du
processus, de demander, moyennant des éléments de preuve, la confiscation des
produits de la criminalité. Ça, c'est pour le volet criminel.
Il est
possible de référer le dossier au Procureur général pour qu'il y ait une confiscation
civile, c'est-à-dire selon les règles qui sont énoncées dans le Code de
procédure civile et dans la loi qui traite de la confiscation.
Mais là, avec ce projet de loi, on va à une
étape supplémentaire où on parle d'une confiscation administrative. Et ma compréhension du régime que le ministre veut
mettre en place pour une confiscation administrative, c'est que, dans un premier temps, on ne s'adressera pas aux
tribunaux, et donc le ministre pourra donner un avis écrit à la personne entre les mains de qui le bien a été saisi, ou à
l'organisme public, ou à la personne qui a saisi le bien, ou à une personne qui
a un intérêt dans le bien. Et le ministre dit : Écoutez, il ne devrait pas
y avoir de problème, parce que, normalement, même dans le cas d'un véhicule, si
on prête notre véhicule, si, à un moment donné, le véhicule ne revient pas, on
va finir par se demander qui a le
véhicule. Soit, peut-être, mais, par la suite, on dit : «L'avis est
transmis par courrier ordinaire à la dernière adresse connue de la personne ou
de l'organisme public. Il peut faire également l'objet d'un avis public.» Et il
y a également une présomption, dans le projet de loi, à l'effet que
«l'avis de confiscation est présumé avoir été reçu cinq jours après sa
transmission».
• (17 h 30) •
Donc, on
envoie un avis par courrier ordinaire, puis le défendeur ou, en tout cas, la
personne qui est propriétaire du bien, là, pas nécessairement le défendeur, ça
peut être quelqu'un d'autre, est présumée avoir reçu l'avis. Or, j'ai
questionné M. le ministre là-dessus
en disant : Écoutez, vous risquez de vous ramasser avec des gens, des
citoyens, qui vont se réveiller puis
qui vont dire : Bien, écoutez, moi, je n'ai pas reçu l'avis, mais vous
êtes présumé l'avoir reçu. Donc, en plus, là, la personne intéressée est obligée de surmonter cette présomption-là. Et
évidemment, si personne ne dit rien, ça va bien aller et ça va aller
très vite, mais la minute où quelqu'un va lever la main, bien là, ça va être un
peu plus compliqué.
Et, quand on regarde les lois qui traitent de
confiscation administrative dans d'autres juridictions, dans d'autres
provinces, bien, on a effectivement un mécanisme de signification qui est
beaucoup plus élaboré. Je pense, notamment, à
l'Ontario où la confiscation administrative existe, mais où on doit, à tout le
moins, signifier cet avis-là par un mode de signification qui est plus élaboré, que ce soit par huissier ou
autrement. Donc, au moins, on a une preuve de signification, ce qui
permet évidemment de procéder à la confiscation administrative.
Bien sûr, le
projet de loi prévoit que la personne qui a un intérêt dans le bien peut
s'opposer à la confiscation en transmettant au Procureur général un avis de
contestation dans les 30 jours de la réception de l'avis. «Réception de
l'avis», il y a une présomption à
l'effet qu'il l'a reçu, mais vous comprendrez avec moi, Mme la Présidente, que
30 jours, ce n'est pas très, très long. Puis
évidemment, bien, quelqu'un pourrait être relevé du délai, mais vous
comprendrez que ça va occasionner,
sans aucun doute, des débats, alors qu'un mode de signification plus élaboré
aurait permis, évidemment, d'éviter ces situations-là.
Ma compréhension, c'est que, si jamais il y a
une contestation, on va se retrouver devant la cour civile, donc, avec le fardeau civil et la procédure civile.
Mais, s'il n'y en a pas, le bien sera confisqué et tout va arrêter de cette
façon-là. Donc, encore là, comme
idée, ce n'est pas une mauvaise idée. Je ne suis pas contre la confiscation
administrative, sauf qu'on aurait pu, à mon avis, procéder autrement, ce qui
fait qu'on se serait assuré que la personne aurait effectivement bien
reçu l'avis en question.
Je vous souligne également que le projet de loi
va élargir certaines règles de preuve. Ma collègue députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré
y faisait référence, et on parle, entre autres, de l'article 6 du projet
de loi, où le ministre va élargir
considérablement certaines exceptions à la règle qui interdisent le ouï-dire,
notamment en matière criminelle et pénale. On parle de fiabilité. Toutes
preuves pertinentes pourront être jointes au constat.
Alors,
évidemment, il y a un juge qui va entendre la décision ou, en fait, qui va
évaluer la preuve puis qui va rendre une décision. On se fie tout à fait à la
compétence. On a des juges très compétents, mais on comprend que, d'habitude,
une déclaration de témoin, ce n'est pas un
élément qui est admissible en preuve, s'il n'y a aucune garantie de fiabilité
qui a été démontrée. Donc, ça risque
d'accélérer le processus, mais en espérant, en espérant que ça n'entraînera pas
une série de contestations.
Je vous
souligne également, et ça, c'est une modification qui a été apportée par le
ministre, il y avait un autre problème avec le projet de loi, et
c'est... et je fais référence, ici, à l'article 32 du projet de loi, qui
parle de la Loi sur les renvois à la Cour d'appel. Alors, les renvois, bien,
c'est quand le gouvernement décide de soumettre une question à la Cour d'appel du Québec. Le ministre veut que ce soit désormais déposé à la Cour d'appel siégeant à Québec, qui les entend et les examine. L'Association du Barreau canadien a soulevé des craintes,
craintes qui pourraient avoir, évidemment, un impact sur l'indépendance de la
magistrature et sur la capacité de la juge en chef de la Cour d'appel de gérer la Cour. La bonne nouvelle,
c'est que M. le ministre a décidé de modifier cette disposition-là du projet de
loi pour s'assurer que tout va être fait conformément et qu'évidemment l'indépendance de la magistrature va être
respectée. Donc, le débat là-dessus n'a pas été... n'a pas été très,
très long, et c'est une bonne chose.
La Loi sur
les tribunaux judiciaires va être modifiée. Il y aura désormais plus de juges
de la Cour supérieure dans des
districts périphériques. Bon, avec ça, on n'avait pas... on n'avait pas de
commentaire particulier. Je pense que c'est également une bonne chose. Et, bon,
évidemment, il faudra que ces juges-là, éventuellement, soient nommés — parce
qu'on parle ici de la Cour supérieure — par
le gouvernement fédéral. Et évidemment, si le gouvernement fédéral agit avec
célérité, ce sera parfait.
Le ministre,
dans son projet de loi, va rendre la médiation obligatoire, bon, à la Cour des petites créances. On en avait déjà parlé dans d'autres projets de
loi. Il y a certains districts judiciaires qui ont été identifiés. Puis
éventuellement, bien, il y a aussi d'autres districts judiciaires qui sont...
qui sont problématiques. Donc, on verra ce que le gouvernement fera à ce
niveau-là.
Maintenant, j'aimerais vous parler, dans les
minutes qui suivent, d'un amendement que j'ai proposé au projet de loi. Le ministre nous a saisis du projet de loi
n° 54. Je comprends que le titre donne suite à la Table Justice-Québec pour
rendre la justice criminelle et pénale plus
performante. Vous aurez compris que, la confiscation administrative, on n'est
pas, comme tel, en matière criminelle et pénale. Donc, le projet de loi est
plus large que ce que recommandait ou ce qu'a étudié
la Table Justice-Québec. Donc, j'en ai profité, puisque l'opportunité m'était
donnée, de proposer, de présenter un amendement
en ce qui a trait aux victimes d'actes criminels. On a débattu de la question,
et j'ai proposé l'amendement parce que,
vous l'avez sans doute lu, Mme la Présidente, dans les dernières semaines,
l'IVAC et les victimes d'actes criminels ont évidemment fait entendre
leur voix. L'IVAC a été obligée de se défendre sur certains dossiers en ce qui
a trait à l'indemnisation des victimes d'actes criminels. La loi a été modifiée
par le ministre de la Justice pour élargir le nombre de victimes qui pouvaient recevoir une compensation il y a de cela
quelque temps, mais il y a des balises qui ont été fixées dans le temps. Donc, après trois ans, une victime
reçoit peu ou pas de compensation, et il y a plusieurs victimes qui se sont
retrouvées dans un état, évidemment, de crainte, de panique, puis je les
comprends, il y a eu des articles dans les journaux. Alors, je me suis dit : Puisqu'on parle du
système de justice criminelle et pénale, puisqu'on veut aider les victimes,
bien, pourquoi ne pas... ne pas en profiter? Pourquoi ne pas, évidemment,
permettre ou déposer, à tout le moins, un amendement?
Et ce que je voulais, par mon amendement, c'était, entre autres, dans la Loi
sur l'IVAC, remplacer les mots «pour une période maximale de trois ans
consécutifs», et donc de rajouter, par la suite, «deux ans consécutifs», pour
faire en sorte qu'il y ait une période plus longue qui permettrait aux victimes
de recevoir des prestations de l'IVAC.
Pourquoi je
l'ai proposé au ministre? Bien, c'est parce que, dans les journaux, au mois de
mars, au moment même où on étudiait ce projet de loi là, il y a des articles
qui ont été publiés, notamment dans Le Devoir, où on a fait référence à des témoignages de victimes, de mères d'enfants
assassinés, entre autres, entre autres, c'est ce que dit l'article, et qui,
maintenant, craignent de ne plus recevoir d'indemnisation ou d'aide de l'IVAC.
Parmi ces victimes, dans l'article en question,
on faisait référence à un témoignage de Mme Lemieux, Amélie Lemieux, qui,
récemment, a reçu une lettre de la part du gouvernement, en disant : Bien,
écoutez, après tant de temps, vous n'aurez plus d'aide, vous n'aurez plus de
prestation. Son témoignage, sa
phrase, et je la cite, c'est de dire : Bien, tabarouette, j'aurais dû me
suicider quand c'était le temps. Ce n'est quand même pas banal.
• (17 h 40) •
La même
personne voulait absolument rencontrer le ministre. Et, comme d'autres victimes
qui ont subi des actes criminels
aussi loin que dans les années 90, Mme Lemieux voit son dossier
basculer, et je cite l'article, «dans le nouveau régime d'indemnisation malgré les assurances du ministre[...]. La femme
a reçu à la mi-février une lettre l'avisant que l'aide financière à laquelle elle a actuellement droit prendra fin
le 13 octobre 2024.» Elle rajoute aussi dans son témoignage : «Je me sens lourde pour la société, lourde pour le
gouvernement. Je ne me sens pas bonne de ne pas être capable [de reprendre
le travail].» Ce n'est quand même pas rien.
Alors,
moi, je me suis dit : Bien, écoutez, on va tendre la main au ministre puis
on va voir s'il n'y aurait pas moyen de faire quelque chose avec le projet de
loi. Et je comprends que, quand que le ministre a fait sa réforme, il a permis
à un plus grand nombre de victimes d'avoir
accès à une indemnité. En soi, c'est bien, mais, moi, ce que je disais, c'est
qu'il ne faudrait quand même pas en oublier une, victime, il ne faudrait
pas oublier... parce qu'il y en a peut-être d'autres au Québec qui doivent
vivre avec les conséquences d'un crime, puis où ça ne va vraiment pas bien.
L'ennui avec la période
de trois ans, actuellement, c'est que, dans certains cas... j'espère que ça va
accélérer le système de justice pénale,
parce que, dans certains cas, entre la divulgation, le dépôt de l'accusation
puis le procès, dans la réalité, il
se passe plus que trois ans. Donc, théoriquement, vous pouvez avoir une victime
qui va se ramasser au procès... C'est
sûr qu'au palais de justice, ils vont l'accompagner, mais, quand on parle
d'indemnisation, ça pourrait être terminé, puis elle va avoir à revivre tout le traumatisme parce que, évidemment,
elle va avoir à témoigner, ça, c'est certain. Donc, c'est un peu ça que
je voulais corriger avec l'amendement.
D'autant plus que,
pendant la réforme — je
parle ici du projet de loi n° 84 qui était dans la législature précédente — mon
collègue le député de LaFontaine avait indiqué, à ce moment-là, au
ministre : Oui, mais faites attention, faites attention, il y a un
amendement qui a été déposé par ma formation politique, le Parti libéral, et
mon collègue disait : «...c'est là où
on demande au ministre de revenir au régime [...] dans la proposition qu'il [a
faite] et de ne pas limiter, pour
certaines catégories, à trois ans, et, pour d'autres[...], à deux ans, de ne
pas limiter à cela — et
je cite mon collègue — mais
pour la durée de la perte ou des incapacités, dans les deux cas.» Très
clairement, ça a été exprimé par les groupes et par des victimes.
Avant,
on avait un système où il y avait une rente viagère, donc une victime pouvait
recevoir un montant sa vie durant. Le ministre, avec sa réforme, a mis fin à
ça. Il y a plus de victimes qui sont compensées, il peut y avoir un montant
forfaitaire qui va être donné, sauf que,
tout dépendant du traumatisme, ce n'est pas suffisant. Mon collègue le député
de LaFontaine l'avait déjà souligné.
Ça avait déjà été dit clairement. Nous, au Parti libéral, on avait identifié ce
problème-là. Et là, aujourd'hui, on se ramasse avec du vrai monde qui
sont confrontés à la situation que mon collègue le député de LaFontaine avait
identifiée dans la législature précédente.
Ces
victimes-là, et je reviens à l'article qui a été publié dans Le Devoir le 14 mars, bien, elles s'imaginent le pire pour le mois d'octobre. Certaines disent : Ça
va se passer, on va avoir un crash au niveau de la santé mentale. Il pourrait y
avoir des suicides. «"S'ils
continuent [avec] cette réforme-là et [qu'ils] ne font pas marche arrière, ce
ne sera pas beau", prévient-elle.»
Pour
ne pas prendre le ministre par surprise, j'avais même eu la délicatesse de lui
écrire précédemment, lui soulignant l'impact
de sa réforme chez certaines victimes. Je ne sais pas exactement combien il y
en a, il ne doit pas y en avoir des centaines
de mille, du moins je l'espère, mais il me semble que, pour ces quelques
victimes là, on aurait pu faire quelque chose de plus, on aurait pu se
rendre un peu plus loin.
Et
je lui référais à ces victimes-là puis je lui demandais aussi de regarder ce
qui se passait à l'IVAC, parce qu'on a lu aussi dans les journaux que l'IVAC a
indemnisé un condamné agresseur plutôt que la victime, ce qui est quand
même loin d'être banal, là. Donc, je lui demandais de regarder tout ça,
d'apporter des correctifs, et je lui disais : D'ailleurs, nous étudierons, dans les prochains jours, le
projet de loi n° 54, ce qui constitue une excellente opportunité
d'apporter des correctifs à votre
réforme de l'IVAC, une occasion que nous vous invitons à saisir. Ensemble,
agissons afin que les victimes ne soient jamais victimes de l'IVAC.
Alors,
j'ai tendu la main au ministre. J'espérais qu'on puisse travailler ensemble
pour apporter une réforme, pour bonifier,
pour aider davantage ces victimes, mais malheureusement l'amendement a été
battu. Donc, cet amendement-là ne verra
pas... ne verra pas le jour. Et je le dis à nouveau, parce que ma formation
politique avait identifié le problème, j'ai tendu à nouveau la main au
ministre, et les audiences de la... de nos commissions sont publiques, donc les
gens peuvent nous regarder, moi, je
m'attendais à un débat, mais, à la place, j'ai eu droit à un long réquisitoire
contre le Parti libéral du Québec de la part du ministre, ce qui m'a
particulièrement déplu, je vous le dis.
Je
vous le dis parce que, et je vous le soumets avec respect, je ne crois pas que
le ministre de la Justice actuel ait le monopole de l'empathie des
victimes au Québec. Et je vous le dis parce que, puis je reviens à ce que je
vous disais au début, il y a plein
d'organismes qui s'occupent des victimes, et il est bien qu'il en soit ainsi,
et, dans ma carrière, j'ai eu à en
accompagner, puis aujourd'hui je parle à des victimes dans mon rôle de
porte-parole de l'opposition officielle en matière de justice, et je peux vous
le dire, il y a des gens qui sont très inquiets de la réforme et qui sont très
inquiets de ce qui va arriver dans
les mois qui viennent. Donc, je pense que le gouvernement, à cette étape-ci, a
raté, a raté une opportunité, et je tenais à le souligner dans le cadre
des travaux, je pense qu'on aurait pu... on aurait pu faire mieux. Cependant, cependant, on ne peut pas être contre le principe
du projet de loi, et évidemment c'est la raison pour laquelle on va être en faveur de son adoption.
Je
vais terminer et, dans les minutes qui suivent, j'aimerais remercier plusieurs
groupes ou personnes qui ont travaillé fort,
qui ont contribué, d'abord toute l'équipe gouvernementale, l'équipe de M. le
ministre de la Justice, parce que j'ai eu plusieurs questions que j'ai posées,
et à chaque fois, en commission parlementaire, que ce soit en matière de
justice ou dans d'autres domaines où
je suis porte-parole, le ou la ministre, ils sont toujours accompagnés de leurs
fonctionnaires qui, avec empressement, répondent aux questions. S'ils ne
sont pas capables de répondre, ils font des recherches. Ils sont excessivement dévoués et professionnels, et je
tiens à le souligner, je pense que c'est important. Souvent, ces personnes-là
travaillent dans l'ombre, mais, sans ces
personnes-là, on ne pourrait pas arriver aux travaux qu'on fait en commission,
en commission parlementaire.
Je tiens à remercier les
collègues de la banquette gouvernementale qui sont là, les collègues de
l'opposition également, qui ont siégé dans le cadre du travail... de ces
travaux-là et surtout de l'étude article par article.
• (17 h 50) •
Je veux également, Mme la Présidente, remercier
tout le personnel de l'Assemblée nationale, que ce soient présidents de commission, le personnel des
commissions, vous qui présidez nos travaux, parce qu'encore là, à chaque fois,
ce sont des gens excessivement professionnels, ils sont là pour nous aider,
puis, sans eux, sans elles, on aurait excessivement de difficultés à
accomplir notre travail.
Je remercie
aussi mes collègues de l'opposition officielle qui sont avec moi, qui vont
prendre la parole, qui m'appuient, qui
m'aident dans le travail, les recherchistes de l'aile parlementaire. Et je
tenais aussi à souligner l'apport de la stagiaire de la fondation Bonenfant,
Mme Florence Nadeau, qui travaille avec moi pour les semaines... les
semaines qui viennent. On est
privilégiés, Mme la Présidente, d'avoir la fondation Bonenfant et ses
stagiaires. Ce sont des gens excessivement brillants et dévoués, puis, je tiens à le souligner, on est
chanceux de les avoir. Puis, comme vous savez, bien, c'est une double chance,
parce que ce n'est pas nous qui les
choisissons, c'est eux qui nous choisissent. Alors, moi, je me sens privilégié,
évidemment. Mais de pouvoir
travailler avec ces gens-là qui sont toujours là avec empressement et qui nous
donnent des bonnes idées, qui font
d'excellents travaux, bien, je tiens à le souligner, c'est effectivement très
important, puis il faut reconnaître leur travail.
Ceci complète les remarques que je voulais faire
au niveau... au stade de l'adoption du projet de loi n° 54, Loi donnant
suite à la Table Justice-Québec en vue de réduire les délais en matière
criminelle et pénale et visant à rendre l'administration
de la justice plus performante. Je
souhaite vivement que ce soit le cas. Mais, comme je vous disais d'emblée,
Mme la Présidente, nous allons voter en faveur de l'adoption du projet de loi.
Je vous remercie pour votre attention.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Merci beaucoup, M. le député.
Alors, je suis prête à entendre un autre intervenant ou intervenante,
sur l'adoption du projet de loi n° 54, et je donne la parole à Mme la
députée de Robert-Baldwin.
Mme Brigitte B. Garceau
Mme Garceau : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Tout d'abord, j'aimerais remercier notre collègue
député de l'Acadie pour son travail acharné durant tous les travaux
concernant ce projet de loi.
Et également,
et particulièrement compte tenu que je suis porte-parole en matière de
condition féminine et aussi je fais le suivi concernant le rapport Rebâtir
la confiance, cette demande d'amendement concernant l'IVAC, le correctif
à la loi, qui est, d'après moi,
fondamental... Parce qu'au bout du compte il va y avoir beaucoup de victimes
d'actes criminels, beaucoup de
femmes, beaucoup de victimes de violence conjugale, beaucoup de victimes
d'agression sexuelle qui le... Les dommages,
les conséquences néfastes de ces crimes, il n'y a pas de durée, il n'y a pas de
durée. Et donc de mettre... de limiter à trois ans l'indemnisation,
j'ose croire que ce sera reconsidéré par le ministre.
Et
j'aimerais... je suis très heureuse de pouvoir prendre la parole aujourd'hui sur le projet de loi n° 54, en tant que, oui, porte-parole en matière de condition féminine, mais aussi je vais mettre un petit
élément personnel, aujourd'hui, dans
mes... dans mon intervention parce que, compte tenu que je suis avocate depuis
de nombreuses années en droit de la famille, mais aussi en tant
qu'ancienne présidente d'un refuge pour femmes... de violence conjugale, j'ai
pu constater personnellement l'ampleur des
défis dont les femmes confrontent au quotidien, particulièrement lorsqu'ils
se... lorsqu'elles trouvent le courage et la force non seulement de quitter un
conjoint violent, mais aussi de porter plainte, et c'est l'angoisse. L'angoisse qu'elles vivent est tellement intense
et palpable, et cette anxiété, malheureusement, est souvent exacerbée par leur
parcours à travers les différentes étapes du système judiciaire. Et plusieurs
m'ont exprimé leur désarroi, leur sentiment d'impuissance
face au système judiciaire. Et malheureusement ces constats découlent souvent
des délais, souvent des délais indus de notre système judiciaire. Et,
entre le dépôt d'une plainte et une date de procès où la victime va être
finalement entendue, on parle de délais souvent
d'au-delà de deux ans. Et, pour plusieurs victimes, le système de justice, en
raison de ces délais indus, équivaut à leur revictimisation.
Et je cite...
j'aimerais citer plus particulièrement, parce que les remarques de deux groupes
m'ont... m'ont vraiment... étaient
tellement pertinents au niveau de... des enjeux, en ce moment, dont les
victimes de violence conjugale et d'agression sexuelle, qu'est-ce qu'ils
font face, actuellement, dans le système judiciaire, et ça, c'est le réseau des
CAVAC et aussi l'Association des procureurs
aux poursuites criminelles et pénales. Et j'aimerais... j'ai mis certains de
mes commentaires liés à leurs
mémoires, parce que j'ai trouvé, vraiment, leurs commentaires extrêmement
pertinents. Et, un des groupes, plus particulièrement,
évidemment, les CAVAC confirment, dans leur mémoire, cette revictimisation et
constatent d'ailleurs que les
victimes subissent des impacts négatifs des délais judiciaires. Ces impacts
sont particulièrement dévastateurs lorsque survient... survient, évidemment, un
arrêt de procédure, notamment dans le cadre de l'application de l'arrêt Jordan,
et l'accusé est libéré. Et je voulais citer
un extrait du mémoire qui mérite vraiment d'être souligné, le mémoire du réseau
des CALACS : «Tel que stipulé dans le rapport Rebâtir la confiance
ainsi que dans la Charte canadienne des droits des [...] victimes, l'importance que ces dernières puissent
se faire entendre devant une instance judiciaire est primordiale. Dans le cas
d'un arrêt de procédure, les personnes victimes se voient dépossédées de ce
droit. Ainsi, il est entendu de tous que le système judiciaire ne doit pas avoir un effet de victimisation
secondaire pour les personnes victimes, ce qui malheureusement se produit actuellement devant l'accroissement des
délais judiciaires, tributaires de multiples facteurs. En somme, tous ces
éléments peuvent entacher la confiance de la
population à l'égard du système judiciaire et, qui plus est, sur le sentiment
de justice éprouvé par les personnes victimes durant leur parcours
judiciaire.»
Et malgré,
Mme la Présidente, les bonnes intentions du gouvernement par le dépôt de ce
projet de loi afin de réduire les
délais en matière criminelle et pénale et de rendre l'administration de la
justice plus performante, le p.l. n° 54, tel que proposé, ne rendra pas le système de justice québécois
significativement plus performant tant et aussi longtemps que le
gouvernement refuse de reconnaître la réalité du terrain, qu'est-ce qui se
passe actuellement sur le terrain.
Et
vraiment je dois citer l'Association des procureurs aux poursuites criminelles
et pénales, le président, Me
Guillaume Michaud, qui a vraiment fait un sommaire de la problématique en ce
moment et pourquoi il y a des délais indus.
Et il faut les... il faut les réparer, parce que, si on ne répare pas ces
délais, même si on a... on a des mesures plus concrètes en termes de l'administration de la procédure...
Il va falloir bonifier notre personnel. Il va falloir avoir plus de juges et
plus de procureurs.
Et
j'aimerais juste souligner quelques points, surtout en termes de la charge de
leur travail, et la charge de travail des procureurs est irréaliste, l'ajout
constant de responsabilités, de devoirs et d'obligations. De nombreuses
personnes dépendent de la capacité
des procureurs à gérer les dossiers, à commencer par les victimes, qui, de
façon légitime, voient le dénouement du processus judiciaire comme une
étape clé dans leur guérison ou leur cheminement.
Et
à plusieurs reprises... et c'est vraiment regrettable, parce qu'il parle, Me
Michaud, du fait que l'enjeu numéro un est simple et criant : faute de
ressources et de temps, les procureurs doivent souvent faire des choix très
déchirants, à leur grand désarroi. Et qui sont les principales victimes de ces choix?
Justement, c'est les victimes. Et combien de fois est-ce que des victimes en violence conjugale
m'ont exprimé le fait qu'ils ne s'en vont pas en procès, qu'ils ont été
conseillés de... Ils vont avoir un
autre «810», une autre interdiction de non-contact pour une autre année,
et ça, oui, il y a un symptôme lié au
fait que les procureurs, surtout, de la couronne ont des horaires trop chargés.
Et malheureusement c'est des victimes qui
subissent les conséquences. Et, vraiment, les «810» pour une autre année, est-ce
que c'est vraiment la solution? Non. C'est une solution temporaire qui,
au bout du compte, ne rend pas justice aux victimes.
• (18 heures) •
Et
donc je voulais partager également la recommandation de l'APPCP, qui est très,
très pertinente : «Un système de justice plus performant ne viendra pas
seulement [des] modifications législatives. Il faut injecter davantage de
ressources dans le système de justice
pour engager des procureurs, des juges, du personnel, en plus d'avoir des
locaux adéquats et en quantité
suffisante. Cela aura non seulement pour effet de faire diminuer les délais
judiciaires, mais aussi les délais inhérents à l'étude des dossiers. Nous le demandons parce que l'attente et
l'angoisse de la victime commencent dès le dépôt de sa plainte. Les
délais doivent être plus humains.»
Et je vais juste, Mme
la Présidente, soulever — j'ai
un petit peu de temps — deux
choses. C'est sûr et certain que le
financement au niveau des services dont offrent les CAVAC et les autres
organismes doit être bonifié, parce que les besoins sont criants. Et
aussi, compte tenu de l'élargissement du champ de compétence des juges de paix
magistrats, il sera absolument essentiel de
s'assurer que les CAVAC aient accès à l'information, le plus rapidement
possible, qui découle particulièrement
d'une remise en liberté d'un accusé en matière de violence conjugale ou
sexuelle afin d'informer la victime et de mettre en place le filet de
sécurité requis à sa situation. Merci beaucoup.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci,
Mme la députée. Maintenant, je cède la parole à M. le ministre pour son
droit de réplique. Donc, vous disposez de 20 minutes.
M. Simon
Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette :
Oui, Mme la Présidente. Écoutez, très heureux d'intervenir sur l'adoption
finale du projet de loi n° 54, ça fait
suite à la Table Justice. Et ce qui est important de se rappeler, Mme la
Présidente, c'est que tous les acteurs
du système de justice ont travaillé ensemble pour avoir des solutions. Alors,
je remercie la magistrature, le DPCP, l'aide juridique, les avocats de
la défense, les centres d'aide aux victimes d'actes criminels.
Je pense que c'est
important, Mme la Présidente. On est arrivés avec un produit final, avec un
projet de loi qui reprenait les conclusions de la Table Justice, et ça va nous
permettre d'avoir les outils, Mme la Présidente, pour faire en sorte de réduire les délais judiciaires en matière
criminelle et pénale. Il ne faut jamais oublier, Mme la Présidente, et ça,
c'est ce à quoi pense le gouvernement, Mme
la Présidente, à chaque fois qu'il y a un dossier que le DPCP est obligé de
faire un nolle prosequi ou un arrêt des procédures, il y a des victimes
derrière ça, Mme la Présidente.
Et,
je dois le dire, le gouvernement a mis beaucoup d'argent, a mis les ressources.
Les façons de faire doivent changer dans le système de justice. Ce n'est pas
uniquement au gouvernement à mettre des ressources, mais c'est aussi les façons
de travailler qui doivent changer, Mme la Présidente, et je pense que nous avons
la collaboration de tous les acteurs du système
de justice. Et le système de justice ne peut plus fonctionner comme il
fonctionnait il y a cinq ans, il y a 10 ans, il y a
15 ans où il y a 20 ans, Mme la Présidente, il doit se moderniser. Le
ministère de la Justice s'est mobilisé pour ça, et tous les acteurs
doivent se mobiliser dans ce sens-là. Ça doit changer et ça va changer au
bénéfice des personnes victimes, Mme la
Présidente. Alors, je suis heureux d'être à la conclusion de ce projet de loi
là. Je remercie l'ensemble des collègues de l'Assemble nationale pour
leur participation aux travaux.
Autre
point qui est important, la confiscation civile et administrative, Mme la
Présidente, ça va permettre d'aller chercher
de l'argent dans des gens... chez des gens qui contreviennent à la loi, des
gens qui sont des criminels. Je pense que c'est une avancée significative. On ne veut pas qu'ils bénéficient des
crimes qu'ils ont commis. Alors, on va pouvoir aller chercher ça pour le
trésor public et envoyer l'argent au bénéfice des victimes.
On ajoute des juges à
la Cour supérieure, Mme la Présidente. Il va falloir que le fédéral nomme des
juges à la Cour supérieure, parce qu'on voit
qu'il y a des sérieuses lacunes, il y a des postes qui n'ont pas été comblés depuis 2016,
et tous les acteurs du système de justice doivent participer.
Je
l'ai dit, Mme la Présidente, je ne suis pas plus long. Je tiens à remercier
l'ensemble des collègues, et c'est une nette
avancée pour le système de justice criminelle et pénale. Le gouvernement du
Québec a mis l'argent, a pris les moyens et on avance, Mme la
Présidente. Merci.
La Vice-Présidente (Mme
Soucy) : Merci, M. le ministre. Maintenant, je cède la parole à Mme la
députée de La Pinière.
Mme Linda Caron
Mme Caron : Merci,
Mme la Présidente. Alors, ça me fait plaisir d'intervenir sur l'adoption du
projet de loi n° 54, Loi
donnant suite à la Table Justice-Québec en vue de réduire les délais en matière
criminelle et pénale et visant à rendre l'administration de la justice
plus performante.
Alors,
d'entrée de jeu, le projet de loi donne suite, comme le dit la première partie
du titre, aux travaux des partenaires de la Table Justice-Québec. Et je
tiens à souligner l'importance d'assurer la suite des travaux de cette table,
qui visent notamment la réduction des délais judiciaires en matière criminelle
et pénale.
Et, vous me
permettrez, Mme la Présidente, d'évoquer ce que disait Stéphanie Vallée, alors
ministre libérale de la Justice, dans le plan d'action 2016-2017 de la
Table Justice-Québec, et je cite : «[Les longs] délais sont non seulement
de nature à miner la confiance du public
dans le système de justice, mais ils contribuent également à retarder le moment
où les victimes, souvent vulnérables, pourront se rétablir pleinement.»
Fin de la citation.
Alors, tout
projet de loi visant à réduire les délais judiciaires est accueilli avec
intérêt par notre formation politique, le
Parti libéral du Québec, et en plus d'être étudié sérieusement et rigoureusement,
comme l'a fait mon collègue député de l'Acadie et porte-parole de
l'opposition officielle en matière de justice.
Ce qui est
regrettable dans le cas de ce projet de loi, c'est le peu de temps qui a été
donné aux groupes pour se préparer, et
je m'explique ici. Quand la CAQ impose des délais à peu près impossibles à
respecter pour déposer un mémoire sur un projet de loi et venir le présenter en commission parlementaire, la CAQ
limite indirectement le nombre de groupes qui peuvent s'exprimer. Et la CAQ
nous prive ainsi d'opinions, de nuances, voire de recommandations qui peuvent
s'avérer judicieuses et pertinentes
pour atteindre les objectifs qui sont poursuivis par le projet de loi. Parce
qu'il faut le savoir, que tout groupe
qui dépose un mémoire, qui vient en commission parlementaire ou qui ne fait que
déposer un mémoire sans être invité à venir présenter les grandes lignes en
commission parlementaire et répondre aux questions, bien évidemment, chaque groupe doit prendre connaissance du projet
de loi, doit l'analyser, doit faire un travail qui est rigoureux, qui est
sérieux, pour produire un document cohérent, un document qui est aussi
collé à la réalité vécue sur le terrain. Parce que la réalité du terrain, Mme
la Présidente, j'en ai la conviction profonde, c'est ce qui doit nourrir nos
travaux législatifs et parlementaires, c'est
ce qui donne du sens à nos travaux législatifs et parlementaires. Alors, donner
suffisamment de temps, un délai
raisonnable aux groupes pour prendre connaissance du projet de loi, pour
l'analyser, pour préparer une réaction, pour préparer des recommandations,
c'est absolument nécessaire, sinon ça devient trop difficile. Et puis ça nous
permet... ça ne leur permet pas de mettre en lumière des faits qui sont
importants à considérer en ce qui concerne les politiques gouvernementales. Et puis ça nous... ça nous prive
de solutions, peut-être, que les groupes peuvent apporter, ou de formulations
qui visent, encore une fois, à bonifier le projet de loi.
Les mémoires
ne sont pas là que pour s'opposer. Certains, certains, effectivement,
s'opposent, mais d'autres, et la plupart,
je dirais, viennent en commission parlementaire vraiment pour bonifier les
projets de loi, pour prévenir les parlementaires de conséquences qu'ils
voient comme négatives, par exemple, et de solutions à apporter pour éviter les
effets négatifs d'un projet de loi. Parce
qu'évidemment le gouvernement, quel qu'il soit, ne tente pas d'adopter des
projets de loi qui aient des effets négatifs mais vraiment qui veulent
améliorer les choses. Et puis la démarche des groupes devient difficile quand parfois ils ont besoin de
consulter leurs membres sur certains points ou bien de consulter des experts
aussi.
• (18 h 10) •
Alors, on
constate que le projet de loi n° 54, qui fait présentement l'objet de nos travaux,
n'est malheureusement pas le seul
projet de loi où on constate ce modus operandi caquiste de restreindre le temps
de préparation. Je le redis, c'est particulièrement important dans le
cas de ce projet de loi spécifique, car il contient des éléments qui dépassent
ce qui était inclus dans les travaux de la
Table Justice-Québec, et j'ai nommé, là, tout le volet qui touche à
l'élargissement du champ d'application
de la Loi sur la confiscation, l'administration et l'affectation des produits
et instruments d'activités illégales.
Alors, je félicite les groupes qui ont réussi à produire un mémoire malgré le
temps limité qu'ils ont eu pour le faire et je les en remercie.
Certains
d'entre eux ont d'ailleurs formulé des réserves par rapport au projet de loi n° 54. Je pense, par exemple, à
l'association des procureurs de l'État qui a lancé, mon collègue l'a dit tout à
l'heure, ce qu'on pourrait qualifier de cri du coeur pour dénoncer le manque de
temps et la surcharge de dossiers qui font en sorte que ça devient difficile
pour eux d'assurer le suivi avec les victimes.
Les modifications législatives apportées par le
projet de loi n° 54 concernant la confiscation administrative,
les présomptions et les modes de
signification soulèvent également des inquiétudes, mon collègue député de
l'Acadie en a parlé. Selon le Barreau
du Québec, ces modifications risquent d'engorger davantage les tribunaux. Et,
si ça s'avère, bien, ça ira à contre-courant de l'objectif qui est
poursuivi par le projet de loi n° 54.
En revanche, ce projet de loi vient accorder de
nouveaux pouvoirs aux juges de paix magistrats, notamment de présider des
comparutions et des enquêtes sur remise en liberté. Et ces nouveaux pouvoirs
qui sont accordés aux juges de paix
magistrats permettront de libérer des juges de la Cour du Québec, qui, eux,
siègent aux enquêtes. Ils pourront donc présider plus de procès, ce qui
va dans le sens du projet de loi.
Mais je
souligne que le ministre aurait pu étendre la compétence des juges de paix
magistrats pour leur permettre de
présider les enquêtes préliminaires, comme le proposait mon collègue député de
l'Acadie. En effet, comme le processus qui
mène à la sélection d'un juge de paix magistrat est exactement le même que
celui qui s'applique aux juges de la Cour du Québec, on aurait pu...
pardon, qui s'applique aux juges de la Cour du Québec, disais-je, ainsi leur
permettre de siéger...
de présider, plutôt, aux enquêtes. Le ministre n'a pas retenu cette proposition
de mon collègue, car il a dit que c'est un choix politique, qu'il ne souhaitait pas que les juges de paix
magistrats entendent des témoins à l'enquête préliminaire. Alors, c'est dommage parce que ça aurait pu faciliter,
selon nous, l'accès à la justice, qui est un objectif poursuivi par le
projet de loi.
Le projet de loi aussi vise à ajouter sept
nouveaux postes de juge à la Cour supérieure et à ajuster la répartition des juges de cette cour dans les différents districts
judiciaires, ce qui est bien accueilli. Évidemment, le gouvernement fédéral
devra nommer ces juges.
En matière de confiscation administrative, le
projet de loi crée un nouveau régime. La réforme va s'étendre sur l'ensemble du corpus législatif et non pas
uniquement sur certaines lois. Mon collègue député de l'Acadie et porte-parole
en matière de justice l'a mentionné tout à l'heure, le mode de signification d'une confiscation administrative risque de venir engorger le
système s'il y a beaucoup de contestations de ce mode de fonctionnement.
Mon collègue
l'a dit aussi, puisque le projet ne visait pas uniquement le criminel et le
pénal, il s'est permis de proposer un amendement pour corriger des lacunes de
l'IVAC. Je déplore que cet amendement ait été rejeté, car il visait à corriger
la situation des victimes d'actes criminels dont le soutien financier accordé
par la Loi visant à aider les personnes victimes d'infractions criminelles et à favoriser leur rétablissement
vient à échéance après deux ou trois ans, alors qu'ils en auraient encore besoin pour fonctionner. Mon
collègue voulait prolonger ce délai jusqu'à cinq ans pour éviter qu'une victime
d'actes criminels perde son soutien financier avant même que toutes les
procédures judiciaires soient terminées. C'est vraiment triste parce qu'il faut pouvoir mettre ces procédures
derrière avant de pouvoir se rétablir pleinement. Merci beaucoup, Mme la
Présidente.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci,
Mme la députée. Est-ce qu'il y a d'autres interventions?
Mise aux voix
Comme il n'y
a pas d'autre intervention, je suis prête à mettre aux voix. Alors, le projet de loi n° 54, Loi
donnant suite à la Table
Justice-Québec en vue de réduire les délais en matière criminelle et pénale et
visant à rendre l'administration de la justice plus performante, est-il
adopté? Adopté.
Alors, M. le leader, pouvez-vous nous indiquer
la suite de nos travaux?
M.
Lévesque (Chapleau) : Oui. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je vous
demanderais de bien vouloir appeler l'article 13 du feuilleton,
s'il vous plaît.
Projet de loi n° 47
Adoption
La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Donc,
à l'article 13 du feuilleton, M. le ministre de l'Éducation propose l'adoption du projet de loi n° 47, Loi
visant à renforcer la protection des élèves concernant notamment les actes de
violence à caractère sexuel.
Donc, nous allons débuter avec l'intervention de
M. le ministre.
M. Bernard Drainville
M. Drainville : Merci beaucoup, Mme
la Présidente. Salutations aux collègues. Alors, nous en sommes rendus, Mme la Présidente, à l'étape de l'adoption finale,
donc, du projet de loi n° 47, projet de loi visant à renforcer la protection
des élèves dans les écoles. Dans les
prochaines minutes, Mme la Présidente, je vais vous rappeler les grandes lignes
de ce projet de loi qui vise essentiellement une chose, Mme la Présidente,
c'est-à-dire resserrer les mailles du filet de sécurité autour des élèves, donc, qui fréquentent nos
institutions scolaires, que ce soit dans le réseau public ou dans le réseau
privé.
Je vous
rappelle, Mme la Présidente, que ce projet de loi, il fait suite à un mandat
d'enquête que j'avais déclenché au terme d'une série d'affaires qui avaient été
médiatisées, pour certaines d'entre elles, et qui mettaient en cause,
effectivement, la sécurité des
élèves. Des gestes d'inconduite avaient été posés contre des élèves. Et il y en
avait eu tellement, Mme la Présidente, qu'à un moment donné on a décidé d'aller
au fond des choses, donc de demander au service des enquêtes du ministère
de l'Éducation d'aller sur le terrain. Et donc il y a un rapport qui a été
produit. Et ce rapport-là, donc, Rapport d'enquête de portée générale sur la
gestion administrative des inconduites sexuelles et des comportements
inadéquats, donc, ce rapport-là, je
m'étais engagé à le rendre public. Et, lorsque je l'ai rendu public, Mme la
Présidente, j'ai annoncé que nous allions
y donner suite. Et donc ce projet de loi n° 47, Mme la Présidente,
c'est la réponse à ce rapport d'enquête qui, donc, faisait suite à une
série d'affaires d'inconduite.
Et donc je
vais vous résumer, Mme la Présidente, les principaux éléments de ce projet de
loi. D'abord, je dois vous dire, le
concept central du projet de loi, Mme la Présidente, ce sont les comportements
ou les gestes qui peuvent raisonnablement faire craindre pour la sécurité physique ou psychologique des élèves.
Ça, c'est le thème central du projet de loi, Mme la Présidente. On veut donc s'assurer que de tels
comportements qui pourraient faire craindre pour la sécurité de nos élèves,
qu'elle soit physique ou psychologique, que ces comportements-là soient
découragés ou encore, lorsqu'ils se produisent, sanctionnés sévèrement. Et donc, Mme la Présidente, le projet de loi
prévoit que les actions qui peuvent raisonnablement faire craindre pour la sécurité physique ou
psychologique des élèves doivent rester au dossier des employés. Donc, une clause d'amnistie, Mme la Présidente, qui apparaît souvent
dans les conventions collectives, une clause d'amnistie ne pourra plus
permettre l'effacement de ces comportements. Ça, c'est extrêmement important,
Mme la Présidente. Donc, on va pouvoir
savoir si un employé a commis des gestes d'inconduite, et, s'il les a commis,
on pourra appliquer la gradation des sanctions.
Actuellement,
Mme la Présidente, les conventions collectives font en sorte que ces
manquements vont disparaître après un certain temps. Donc, la personne,
l'employé qui commet un geste de nature... pouvant faire craindre pour la
sécurité des élèves, après un certain temps, le geste disparaît. Donc, cette
personne-là pourrait commettre le geste une deuxième
fois, et on ne le saurait pas, ou, encore, on le saurait, mais, en vertu de la
convention collective, on ne pourrait pas appliquer la gradation parce qu'il a officiellement, ce geste-là,
disparu du dossier de l'employé. Bon, bien, dorénavant, ces gestes-là
vont rester au dossier de l'employé, Mme la Présidente.
• (18 h 20) •
Par
ailleurs, le projet de loi prévoit que les informations concernant ces
comportements devront être communiquées au nouvel employeur si un
employé change d'école publique ou encore d'école privée. Donc, Mme la
Présidente, tu changes d'employeur, tu vas devoir déclarer les gestes d'inconduite,
les gestes pouvant faire craindre pour la sécurité physique ou psychologique des élèves, à ton nouvel employeur. Et les
centres de services scolaires, Mme la Présidente, ou encore les écoles
privées vont devoir fournir ces renseignements, donc, qui auront été conservés
dans les dossiers, donc informations que les institutions vont détenir.
Et
non seulement ça, Mme la Présidente, mais, lorsque l'employé va informer le
centre de services scolaire de ses manquements, le centre de services scolaire,
donc, va pouvoir contacter l'employeur précédent, lui demander qu'est-ce que
contient le dossier de l'employé, et
l'employeur A, donc, l'employeur précédent, aura l'obligation de transmettre
l'information à l'employeur B, Mme la
Présidente. Donc, c'est fini, le temps où les employés, les enseignants, le
personnel scolaire, peu importe, se
poussent, passent d'une école à une autre, d'un centre de services scolaire à
un autre parce qu'ils commencent à sentir la soupe chaude. Eh bien, là,
on va pouvoir les suivre à la trace.
Et, si jamais, Mme la
Présidente, l'employé refuse de consentir à la transmission de l'information,
eh bien, à ce moment-là, le processus
d'embauche pourra être terminé. On pourra donc... On aura compris que cette
personne-là a des choses à cacher, et
donc l'employeur B, le centre de services scolaire, par exemple, pourra
dire : Bon, bien, très bien, tu refuses que l'information soit
transmise, eh bien, je mets fin au processus d'embauche.
Par
ailleurs, Mme la Présidente, la loi va également permettre un élargissement des
situations qui mènent à la mise en
place d'un comité d'enquête. Ça va être possible dorénavant, pour le ministre
de l'Éducation, de déclencher un comité d'enquête sur un enseignant ou
une enseignante même si le ministre ou le ministère n'a pas reçu une plainte
écrite et assermentée, ce qui pouvait, dans
certains cas, freiner les dénonciations ou les signalements. Les gens
disaient : Écoute, là, une plainte écrite, une plainte avec
assermentation devant l'avocat, devant le notaire, c'est trop. Alors,
dorénavant, le ministre qui entend des
choses, des informations crédibles, va pouvoir déclencher un comité d'enquête
même s'il n'y a pas une plainte assermentée.
Par
ailleurs, Mme la Présidente, tout employé du réseau scolaire va devoir signaler
au ministre toute situation qui est
susceptible de démontrer qu'un enseignant a eu un comportement pouvant faire
craindre pour la sécurité physique ou psychologique d'un élève. Cette
obligation est créée, donc, en vertu de cette loi.
Par
ailleurs, Mme la Présidente, la loi... le projet de loi n° 47 prévoit
l'obligation, pour les centres de services scolaires et les écoles
privées, de se doter d'un code d'éthique, code d'éthique, donc, qui indiquera
les pratiques et les conduites qui sont attendues des personnes qui travaillent
auprès des élèves mineurs ou des élèves handicapés. Ça peut inclure notamment
les conducteurs d'autobus également. Et on crée aussi, Mme la Présidente,
l'obligation de dénoncer les manquements au code d'éthique. Donc, dorénavant,
tu es témoin d'un manquement au code d'éthique de la part d'un membre du personnel scolaire, tu dois le dénoncer
en vertu du code d'éthique, et tu dois le faire sans délai. Et la personne, évidemment, qui a été fautive pourra éventuellement,
au terme des vérifications, faire l'objet d'une sanction en vertu, donc,
du régime de sanction disciplinaire.
D'autres
amendements, bonifications, améliorations ont été apportés au fil de nos
travaux, qui se sont très, très bien déroulés, dans un très bon climat, Mme la
Présidente. On a élargi, par exemple, les pouvoirs du ministre, qui pourra
dorénavant révoquer ou suspendre le droit
d'enseigner pour les personnes qui ont une tolérance d'engagement, donc ce
n'est pas seulement les personnes qui ont une autorisation d'enseigner qui
pourront faire l'objet d'une vérification ou même d'une enquête, et qui pourront se voir révoquer
leur tolérance d'engagement ou même retirer leur tolérance d'engagement.
Donc, ça s'étend dorénavant aux personnes qui ont une tolérance d'engagement.
On
resserre le processus de traitement des plaintes, Mme la Présidente. Le préavis
de 10 jours n'est plus nécessaire. Si le ministre considère qu'un
enfant pourrait être mis à risque par le comportement d'un enseignant, eh bien,
il pourra suspendre l'enseignant le temps que les vérifications sont faites.
Donc, le préavis n'est plus nécessaire.
On
donne également, Mme la Présidente, un pouvoir d'initiative au ministre pour
qu'il puisse déclencher une enquête, s'il
a des informations crédibles. Si des informations crédibles sont publiées dans
les médias, par exemple, eh bien, il pourra procéder à une vérification, procéder à une enquête. Il pourra même
nommer une personne qui sera chargée d'aller vérifier la teneur des
informations qui ont été portées à son attention.
On
crée un comité d'enquête permanent également, Mme la Présidente, c'est
important, plutôt que des personnes qu'on nomme de manière épisodique pour
chacune des enquêtes. Donc, meilleure expertise, constance, stabilité dans
la composition des comités d'enquête.
On
a élargi, Mme la Présidente, les mesures de protection non seulement aux élèves
mineurs, comme c'était prévu à
l'origine, mais également aux élèves handicapés, c'est important de le dire.
Ajout d'un pouvoir réglementaire également qui est donné au gouvernement pour déterminer diverses modalités et...
Enfin, ça pourrait être, par exemple, prévoir une fréquence dans les
vérifications des antécédents judiciaires.
On
a modifié également le titre du projet de loi, Mme la Présidente, pour préciser
le fait qu'il s'adresse en particulier aux violences à caractère sexuel.
Bon, je
pourrais parler également du fait que, dorénavant, les organisations scolaires
vont devoir se conformer au gabarit ministériel pour ce qui est du Plan de
lutte contre l'intimidation et la violence dans les écoles. Donc, on resserre
également cet aspect de la protection, donc, réservé aux élèves, destiné aux
élèves.
Il y a également un régime pour protéger les
personnes qui signalent ou qui dénoncent contre les représailles. Ça aussi, Mme
la Présidente, c'est un élément du projet de loi.
Il me reste
seulement deux minutes pour souligner, Mme la Présidente, que les membres de la
commission ont fait un excellent
travail. Je veux signaler, Mme la Présidente, la contribution de mes
collègues : la députée de Lotbinière-Frontenac, qui a fait de cette protection des élèves une
cause de son engagement politique — je
cherche ma feuille — le
député de Richelieu également,
formidable contribution, Mme la Présidente, le député de Vanier-Les Rivières,
lui aussi très engagé à la cause scolaire, le député de Côte-du-Sud,
député de Beauce-Sud également, qui a été là, très présent. Je signale la contribution des députés d'opposition, la députée
de Saint-Laurent, la députée de Mercier, M. le député de Marquette, qui
est venu nous rejoindre vers la fin, M. le Président, le député de Pontiac,
très bon travail.
Bref, Mme la
Présidente, c'est un gros plus pour la protection des élèves, pour la sécurité
des élèves. On est un gouvernement
qui en fait beaucoup pour protéger les élèves, avec l'adoption du Protecteur
national de l'élève, le plan de lutte
contre les violences faites aux élèves, ça a été déposé au mois d'octobre
dernier. On s'est engagés également à tenir une journée sur les violences et l'intimidation à l'école. Ça viendra.
On aura davantage d'informations là-dessus à vous communiquer
incessamment, Mme la Présidente.Mais, bref, on est très, très fiers,
nous, dans ce gouvernement de la Coalition
avenir Québec, d'en faire plus que n'importe quel gouvernement auparavant pour
assurer la sécurité des élèves dans nos écoles, Mme la Présidente. Merci
à tous les députés ici présents.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci,
M. le ministre.
Ajournement
Alors, compte tenu de l'heure, je vais ajourner
les travaux jusqu'à demain, jeudi 28 mars 2024, à 9 h 40.
Merci.
(Fin de la séance à 18 h 30)