(Neuf heures quarante minutes)
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Alors, bon jeudi à tous et toutes. Vous pouvez prendre place.
Affaires courantes
Déclarations de députés
Et nous
allons débuter notre séance avec la rubrique des déclarations de députés. Et la
première déclaration sera celle de Mme la députée de Lotbinière-Frontenac.
Féliciter les médecins de l'Hôpital de Thetford Mines pour
la création d'une
capsule vidéo éducative sur le respect des mesures sanitaires
Mme Isabelle Lecours
Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac) : Merci, Mme la Présidente. Je tiens à adresser mes plus sincères
félicitations et mes remerciements au
groupe de médecins de l'Hôpital de Thetford
Mines dans mon comté qui ont mis en ligne une vidéo pour sensibiliser la population au respect des mesures sanitaires.
Je les nomme : Dr Arata, Dre Lepire, Dr Gaudreau, Dr Piuze, Dre Laliberté, Dr Fréchette,
Dre Godbout et son fils Antoine, Dre Pruneau, Dr Breton, Dre Faucher,
Dre Andrews-Côté, Dr Veilleux, Dre Boutet,
Dre Laliberté, Dre Lessard et M. Cloutier, caméraman-monteur. Merci
pour votre mobilisation et pour ce message visant à préserver notre
système de santé et à sauver des vies.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la
députée de Lotbinière-Frontenac. Maintenant, je cède la parole à M. le
député de Marquette.
Souligner le 25e anniversaire de l'organisme
Les Productions Multisens inc.
M. Enrico Ciccone
M. Ciccone :
Merci, Mme la Présidente. J'aimerais rendre un bel hommage aux Productions
Multisens, un OBNL culturel d'économie sociale situé à Lachine.
Depuis 1995,
cet organisme est très ancré dans la vie culturelle de la circonscription de
Marquette, avec de nombreuses réalisations
à l'appui, 16 ans de théâtre et 10 ans de spectacles avec la Troupe
de danse Expression, plus de 100 spectacles et des dizaines de journées d'animation théâtrale. Leur mission : favoriser le rapprochement entre les
différentes générations par la création et la diffusion de
projets culturels multidisciplinaires auprès de notre collectivité.
L'organisme
permet, entre autres, aux jeunes d'exprimer leur côté artistique tout en
profitant du support d'une équipe talentueuse et passionnée. Les Productions Multisens offrent des cours et des activités pour enfants,
ados, adultes et aînés, où tous trouvent chaussure à leur pied.
Un gros bravo
et merci aux fondatrices France Lafontaine et Sylvie Blanchet pour
votre excellente contribution. Vous êtes, comme vous le dites si bien,
non seulement des gouttes d'art qui rassemblent, mais surtout des gouttes d'or
précieuses pour notre communauté. Félicitations pour votre 25e anniversaire
et bonne continuation! Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le
député de Marquette.
Et maintenant je reconnais Mme la députée de Huntingdon.
Remercier Mme Valérie Gagnon pour sa décision de
répondre
à l'appel face à la pénurie d'enseignants
Mme Claire IsaBelle
Mme IsaBelle : Mme la
Présidente, depuis huit ans, Valérie Gagnon, de Sainte-Martine,
pratique le métier de journaliste pour un
journal de la région lorsqu'en mars la crise sanitaire l'oblige à changer
d'orientation. Elle réalise qu'elle peut
faire une différence en mettant ses compétences au service des jeunes.
Bachelière, elle décide donc de sortir de sa zone de confort et de
répondre présente à l'appel du gouvernement.
Pour
Mme Gagnon, les enfants de la COVID vivent une période d'insécurité. Ces derniers ont
donc besoin d'être réconfortés et de
recevoir un enseignement de qualité afin qu'ils puissent atteindre leur plein
potentiel. Son plus grand désir, c'est
aussi d'enseigner aux jeunes les principes de l'analyse critique afin qu'ils
puissent prendre des décisions éclairées tout au long de leur vie.
Depuis quelques semaines, Mme Gagnon enseigne les sciences et l'univers
social à l'école primaire Louis-Lafortune, à Delson.
Merci à Mme Gagnon et à toutes
les personnes qui ont accepté et accepteront de répondre présentes à l'appel,
car le milieu de l'éducation est très stimulant et gratifiant.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la
députée de Huntingdon.
Et maintenant je cède la parole à Mme la députée de Verdun.
Rendre hommage à Mme Mary
Ann Davis, ex-commissaire scolaire
Mme Isabelle Melançon
Mme Melançon : Merci, Mme
la Présidente. Alors, aujourd'hui,
j'aimerais souligner le travail d'une femme remarquable, qui a su
laisser sa marque au sein du milieu scolaire anglophone de Verdun.
Le
27 septembre dernier, Mary Ann Davis a quitté ses fonctions de commissaire
à la commission scolaire Lester-B.-Pearson.
Mary Ann a été une voix forte pour les écoles verdunoises du secteur anglophone
pendant six ans. Portée par ses convictions et dévouée aux jeunes
de Verdun, on ne compte plus ses accomplissements.
Il
y a quelques années, alors que l'école Riverview Elementary annonçait sa fermeture,
elle s'est battue sans relâche et
avec succès pour la garder ouverte, tout comme elle l'a fait pour l'école
secondaire Beurling Academy en novembre dernier. Elle est aussi la cofondatrice du mouvement LGBTQ Rainbow Umbrella, qui
offre des services aux élèves de cette école.
Mary
Ann, thank you for everything.
Nous garderons à jamais le souvenir d'une femme passionnée, dont le
coeur est à la bonne place. Merci, chère amie. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée de Verdun. Et
maintenant je vais céder la parole à M. le député de Rivière-du-Loup—Témiscouata.
Féliciter Mme Sylvianne
Paré, fondatrice de l'entreprise Les Savons Kimi
M. Denis Tardif
M. Tardif : Merci, Mme la Présidente. En cette Semaine de sensibilisation
aux maladies mentales, j'aimerais souligner l'engagement de Mme Sylvianne
Paré pour offrir un travail à sa fille Kim, qui est atteinte d'une déficience
intellectuelle lourde.
En 2016, elle a fondé
Les Savons de Kimi, une entreprise de confection de savons artisanaux, qui a maintenant
pignon sur rue au centre-ville de Rivière-du-Loup. Au fil des ans, la petite
savonnerie s'est développée, et aujourd'hui ce
qui ne devait être qu'un milieu de travail pour Kim est devenu une véritable entreprise, offrant une dizaine de produits cosmétiques différents.
Mme Paré,
vous êtes une référence pour ce que vous faites chaque jour depuis plus de
21 ans et pour améliorer la qualité
de votre fille Kim. Vous lui avez offert beaucoup plus qu'un emploi, vous lui
avez donné l'envie d'entreprendre et de construire.
Continuez, les
filles, et merci beaucoup d'être là avec nous. Bonne fin de journée.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député. Et maintenant
je cède la parole à M. le député de Maskinongé.
Rendre hommage à Mme Denise
Desjarlais pour son
engagement social et communautaire
M. Simon Allaire
M. Allaire : Merci,
Mme la Présidente. Aujourd'hui, je souhaite souligner personnellement le grand dévouement d'une citoyenne de
Louiseville, pour qui aider son prochain est une valeur fondamentale,
Mme Denise Desjarlais.
Mme Desjarlais
compte maintenant 35 années d'implication au service des
résidents souffrant de pression artérielle dans les habitations à loyer modique de sa municipalité. Infirmière retraitée, elle a mis ses connaissances et ses compétences
au service des personnes vulnérables, ce qui lui permet d'assurer la prise en
charge des dossiers par le personnel soignant et de leur bon suivi, et ce,
avec énormément de respect et d'empathie.
Mme Desjarlais a
été aussi une des premières personnes à apporter son aide lors de l'évacuation
du Centre communautaire de Louiseville. Et, je m'en souviens très bien,
Mme la Présidente, on était en campagne électorale. Et, si
vous vous souvenez aussi, j'étais un des premiers à avoir une CAQ mobile.
Donc, ma CAQ mobile s'est rapidement transformée
en camion de déménagement. Mais Mme Desjarlais était la première sur les
lieux pour aider et soutenir les organismes communautaires.
Alors,
pour toutes ces raisons, vous méritez pleinement de vous faire honorer aujourd'hui. Je suis heureux de vous dire personnellement merci,
Mme Desjarlais. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Merci, M. le député de Maskinongé. Maintenant,
je cède la parole à M. le député de Mégantic.
Saluer
l'initiative Dans ma rue, on joue! de la municipalité de Frontenac
M. François Jacques
M. Jacques : Merci,
Mme la Présidente. Je tiens, aujourd'hui, à saluer l'initiative de la municipalité de Frontenac, l'une des 36 municipalités de
ma circonscription de Mégantic, qui a lancé dernièrement le projet Dans ma
rue, on joue!
Ce
projet, déjà en place dans quelques autres municipalités au
Québec, est une première en Estrie. Il vise à inciter les enfants et les
plus grands à jouer librement et de façon sécuritaire dans les rues de
quartiers où vivent de nombreuses familles.
Aujourd'hui, je suis
fier de savoir que le jeu est encouragé et encadré, parce qu'autant les
participants que les automobilistes doivent respecter un code de conduite. Il
m'importe également de souligner que c'est la mobilisation citoyenne qui a mené à la mise en place de cette
initiative, ce qui démontre que les autorités municipales sont proches de leur
population.
J'encourage
les citoyens de toutes les municipalités à lancer des projets semblables afin
que tous puissent jouer en toute sécurité. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Merci, M. le député de Mégantic. Et maintenant
je cède la parole à Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Demander la prolongation du
Programme de
soutien aux organismes communautaires
Mme Manon Massé
Mme Massé :
Merci, Mme la Présidente. Comme l'ensemble du Québec, le milieu communautaire
est sévèrement touché par la crise.
Ça fait plus de six mois que les travailleurs et travailleuses sont au
rendez-vous pour veiller sur les gens. Je les salue, je salue leur bienveillance
et surtout leur résilience.
Les
demandes ne cessent d'augmenter. Le virus impose de s'adapter alors que les
organismes subissent encore les contrecoups de l'austérité libérale. La
prolongation du PSOC d'urgence est essentielle pour leurs services.
Voici
quelques exemples de mon comté : information alimentaire Centre-Sud devra
diminuer le nombre paniers offerts
aux personnes à mobilité réduite, le PAS de la rue devra limiter le nombre de
places et de repas distribués pour itinérants, le Carrefour Saint-Eusèbe
ne pourra plus assurer les services offerts pour les aînés sans un financement
supplémentaire.
Prolonger
le PSOC d'urgence, c'est la façon de prévenir la détresse dans le réseau. Ne
pas le faire maintenant, c'est de la
négligence, et c'est perdant pour tous les groupes, mais surtout pour
l'ensemble de la population. Merci, Mme la Présidente.
• (9 h 50) •
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée de
Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Maintenant, je cède la parole à Mme la députée de Saint-Hyacinthe.
Rendre hommage au Journal
Mobiles, lauréat de cinq prix de
l'Association des médias écrits communautaires du Québec
Mme Chantal Soucy
Mme Soucy :
Mme la Présidente, ce matin, je vais vous parler d'un important média de la
grande région de Saint-Hyacinthe, le Journal Mobiles.
Le
Journal Mobiles s'est vu décerner cinq prix lors du gala virtuel de
l'Association des médias écrits communautaires du Québec. Depuis maintenant 16 ans, tant par leur talent que par leur engagement,
ces journalistes s'assurent de fournir une information de qualité à tous
les Maskoutains.
Le Journal Mobiles
est un média qui ne cesse d'innover et il se réinvente continuellement dans une
période particulièrement difficile pour les médias traditionnels.
Je
tiens donc à féliciter M. Alexandre D'Astous, Mme Catherine
Courchesne, M. Martin Rinfret et M. Guillaume Mousseau
pour leurs prix dans diverses catégories et, enfin, féliciter toute l'équipe pour leur deuxième place au classement général des journaux communautaires pour
l'année 2020. Je suis vraiment fière de votre équipe. Et merci de faire
rayonner la grande région de Saint-Hyacinthe. Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la
députée de Saint-Hyacinthe. Et maintenant, pour la dernière des
déclarations, je cède la parole à M. le député de Saint-Jérôme.
Saluer le partenariat entre les
policiers et les professionnels en
santé mentale dans la ville de Saint-Jérôme
M. Youri Chassin
M. Chassin : Merci, Mme la Présidente. Alors, samedi, c'est la Journée mondiale en santé mentale. Alors, j'aimerais souligner
un nouveau partenariat entre le CISSS des Laurentides et le Service de police
de la ville de Saint-Jérôme qui vise à ce que les policiers et
les professionnels en santé
mentale travaillent de concert lors
des interventions policières auprès des personnes en crise.
Les
problèmes de santé mentale sont bien présents à Saint-Jérôme, et les policiers sont bien souvent les premiers répondants auprès d'une personne agitée. Il était donc souhaitable
qu'ils soient soutenus dans ces interventions délicates. Concrètement, des intervenants psychosociaux vont
désormais travailler en tandem avec les patrouilleurs du service de police et jouer auprès d'eux un rôle conseil lors
d'interventions. Le service de police les accueillera même dans leurs propres
locaux.
Pour cette
initiative, je félicite donc Mme Rosemonde Landry, P.D.G., et toute son équipe
en santé mentale au CISSS des Laurentides et
M. Danny Paterson, directeur du Service de police de la ville de Saint-Jérôme, et toute son équipe. Je les
félicite pour leur volonté de travailler ensemble et je les félicite de prendre
à coeur le bien-être de ceux qui souffrent et qui ont besoin
d'aide. Merci.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le
député de Saint-Jérôme. Alors, ceci met fin à la rubrique des déclarations de députés.
Et je suspends nos
travaux quelques instants.
(Suspension de la séance à
9 h 52)
(Reprise à 10 h 4)
Le
Président : Mmes et
MM. les députés, bon jeudi à toutes et à tous. Nous allons nous recueillir
quelques instants.
Je vous remercie. Veuillez
vous asseoir.
Nous poursuivons les
affaires courantes.
Aujourd'hui, il n'y a
pas de déclarations ministérielles ni présentation de projets de loi.
Dépôt de documents
À la rubrique Dépôt
de documents, M. le leader du gouvernement.
M. Jolin-Barrette : Oui, merci,
M. le Président. Vous me permettrez
quelques mots, pour commencer, pour remercier, M. le Président, M. le député de René-Lévesque, qui... Ça fait deux ans qu'il est leader parlementaire,
qu'il travaille en collaboration avec nous. Et vous savez, M. le
Président, que le Parti québécois tiendra sa course... terminera sa course
à la chefferie aujourd'hui. Alors, je tenais à remercier le député de
René-Lévesque, à titre de leader du troisième groupe d'opposition, pour son travail au cours des deux dernières années. C'est
un parlementaire qui travaille fort, c'est un gentilhomme aussi. On a parfois des accrochages, mais on réussit
toujours à s'entendre, au salon bleu. Alors,
je le salue et je le remercie pour son travail au cours des deux
dernières années.
Rapports annuels du Tribunal administratif des marchés
financiers, des CIUSSS de l'Est-de-
l'Île-de-Montréal, du Saguenay—Lac-Saint-Jean,
du CISSS de l'Abitibi-Témiscamingue,
rapport sur l'application de la procédure d'examen des plaintes du CISSS de Chaudière-
Appalaches, rapport sur la mise en oeuvre de la Loi regroupant la Commission de
l'équité salariale, la Commission des normes du travail et la Commission de la
santé
et de la sécurité du travail et instituant le Tribunal administratif du travail
et
bilan de la mise en oeuvre du programme Objectif emploi
Alors, M. le
Président, pour les dépôts de documents, permettez-moi de déposer, au nom de
mes collègues, les documents suivants : le rapport
annuel 2019-2020 du Tribunal administratif des marchés financiers, le
rapport annuel 2019-2020 sur l'application
de la procédure d'examen des plaintes et de l'amélioration de la qualité des
services du CISSS de
Chaudière-Appalaches, les rapports annuels de gestion 2019-2020 des CIUSSS
de l'Est-de-l'Île-de-Montréal, du Saguenay—Lac-Saint-Jean et du CISSS de
l'Abitibi-Témiscamingue, le rapport sur la mise en oeuvre de la Loi regroupant
la Commission de l'équité salariale, la
Commission des normes du travail et la Commission de la santé et de la sécurité
au travail et instituant le Tribunal
administratif du travail, ainsi que le bilan de la mise en oeuvre du programme
Objectif emploi. Et ça complète, M. le Président. Merci.
Le Président :
Ces documents sont donc déposés. À nouveau la parole à vous, M. le leader du
gouvernement.
Réponse à une pétition
M. Jolin-Barrette : Oui, M. le Président. Je dépose la réponse du
gouvernement à la pétition présentée en Chambre le 15 septembre par
le député de D'Arcy-McGee. Merci, M. le Président.
Le Président :
Ces documents sont donc déposés.
Rapport annuel du Vérificateur
général
Pour
ma part, je dépose le rapport du Vérificateur général du Québec à l'Assemblée
nationale pour l'année 2020-2021, tome d'octobre 2020.
Rapport annuel du Comité de surveillance des activités
de l'Unité permanente anticorruption
Je
dépose également le rapport d'activité 2019-2020 du Comité de surveillance
des activités de l'Unité permanente anticorruption du Québec.
Il n'y a pas de dépôt
de rapports de commissions ni dépôt de pétitions.
Il n'y a pas de
réponses orales aux pétitions ni d'interventions portant sur une violation de
droit ou de privilège.
Questions et réponses orales
Nous en sommes
maintenant à la période de questions et de réponses orales, et je cède la
parole à la cheffe de l'opposition officielle.
Accès aux services en santé mentale
Mme Dominique Anglade
Mme Anglade :
M. le Président, alors que la pandémie de la COVID vient bouleverser plusieurs
habitudes de vie et entraîne des
effets psychologiques chez les Québécois, il est plus important que jamais que
tous nous soyons réunis pour nous assurer d'un accès des soins de santé
mentale.
Les conséquences de la COVID se font sentir
partout : nos enfants, nos jeunes au primaire, ceux qui voient leurs
parents anxieux, inquiets, développent eux-mêmes de l'anxiété; nos adolescents
dans les écoles secondaires, nos jeunes qui sont au cégep puis à l'université,
qui ont besoin de voir leurs amis pour bien se sentir mais qui ne peuvent pas
le faire, qui sont dans les cours à distance; les femmes, en première ligne, au
boulot à la maison, avec une charge mentale supplémentaire; les hommes, souvent
plus réticents à dire qu'ils ont besoin d'aide, même s'ils en ont réellement
besoin; nos aînés, qui ont dû quitter leurs amis, nos aînés qui parfois ont eu un conjoint qui est décédé, une
conjointe qui est décédée ou plusieurs personnes auxquelles ils n'ont pas pu
dire au revoir.
Après
avoir soumis 16 propositions au gouvernement, en voici une 17e. Nous
proposons aujourd'hui au gouvernement de mettre en place une couverture
publique universelle de la psychothérapie qui couvrirait les jeunes et les moins
jeunes. Nous souhaitons un vrai programme de
soins en santé mentale, accessible à tous. Pour nous, il s'agit d'un choix de
société.
Est-ce que le premier
ministre acceptera de mettre en oeuvre cette proposition?
• (10 h 10) •
Le Président :
M. le premier ministre.
M. François Legault
M. Legault : M. le
Président, effectivement, la situation de la santé mentale est préoccupante. Avec la pandémie,
beaucoup de gens se sont retrouvés plus seuls que jamais, plus stressés. Et,
alors qu'on avait, avant la pandémie, 2 %
des Québécois qui avaient des problèmes de santé mentale, il y en a
maintenant 15 %. Donc, c'est beaucoup.
M.
le Président, on a ajouté du financement. On a ajouté des ressources,
300 personnes qu'on est en train d'embaucher. Jusqu'à présent, on en a 254 de trouvées. Donc, on
a aussi rehaussé, M. le Président, les services, là, qui sont donnés par les
organismes communautaires. Évidemment, on y va selon nos moyens.
Moi, j'aurais
peut-être une petite addition à demander comme proposition à la cheffe de
l'opposition officielle : Combien ça coûte, sa proposition?
Le Président :
...complémentaire, Mme la cheffe de l'opposition officielle.
Mme Dominique Anglade
Mme Anglade : Merci, M.
le Président. Alors, dans le point de
presse qu'on a annoncé ce matin, cette proposition-là coûte 300 millions
de dollars, elle est estimée à 300 millions de dollars. Et il est temps que l'on puisse offrir des soins
de santé mentale à notre population.
Il est temps de considérer qu'une jambe cassée, c'est aussi important qu'avoir
un problème d'anxiété, et que tout le monde puisse avoir accès à ces
soins.
Est-ce que le premier
ministre accepte la proposition que nous lui faisons aujourd'hui?
Le Président :
M. le premier ministre.
M. François Legault
M. Legault : M. le
Président, on n'est pas fermés à la
proposition. Maintenant, il faut être prudents. Quand on parle d'une couverture universelle, il faut donner les
services appropriés à chacune des personnes. Actuellement, j'entends, entre
autres, l'Association des psychologues qui souhaiterait
qu'on utilise davantage leurs services. Oui, on est ouverts à ça. Mais
en même temps, il faut le dire, il y a
certaines personnes qui n'ont pas besoin de services de psychologue, donc il y
a d'autres employés qui peuvent faire
le même travail à un coût moins élevé. Donc, on a une responsabilité aussi de
bien gérer les fonds publics.
Le Président : Deuxième
complémentaire, Mme la cheffe de l'opposition officielle.
Mme Dominique Anglade
Mme Anglade : Hier, M.
le Président, nous avions une motion,
qui n'a pas reçu le consentement du gouvernement,
une motion sur la santé mentale. Alors,
j'entends l'ouverture du premier
ministre, mais, de manière très
concrète, il est urgent d'agir. Il
est urgent de poser des gestes concrets aujourd'hui, pas dans six
mois, parce que c'est maintenant que les gens ont besoin de ça.
Alors, 300 millions, M. le Président, c'est
de l'argent drôlement bien investi lorsqu'on regarde la situation dans laquelle
on se trouve. Est-ce que, oui ou non, le gouvernement est prêt à regarder une
couverture universelle?
Le Président : M. le premier
ministre.
M. François Legault
M. Legault : M. le
Président, je l'ai dit, on est
ouverts. Notre évaluation est pas mal plus élevée que 300 millions de dollars.
Mais, M. le Président, ce qu'il est important de dire, c'est qu'au mois de mars on avait 20 639 personnes qui étaient en
attente de services pour la santé mentale, on est rendus maintenant à
16 000. Donc, il y a eu une diminution, malgré l'augmentation du nombre de
cas, il y a eu une diminution sur la liste d'attente en santé mentale.
Donc, M. le
Président, on fait des efforts, on investit des montants importants. On y va
selon les moyens qu'on a.
Le Président : Troisième
complémentaire, Mme la cheffe de l'opposition officielle.
Mme Dominique Anglade
Mme Anglade : Nous n'avons surtout pas les moyens d'échapper
nos jeunes, nos moins jeunes, nos aînés, nous n'avons surtout pas les moyens de le faire. Et sérieusement, M. le Président, nous pensons que nous devrions aller de l'avant
maintenant.
Alors, ce
qu'on demande au premier ministre, c'est : Après 17 propositions que nous lui faisons, après 17 propositions,
est-ce que réellement il va regarder cette
proposition de manière attentive, nous revenir là-dessus, nous partons en
semaine de circonscription, et nous
revenir et nous dire si on est capables d'assurer ces soins universels pour
toute la population du Québec?
Le Président : M. le premier
ministre.
M. François Legault
M. Legault : M. le Président,
je suis prudent, quand j'entends la cheffe de l'opposition nous dire qu'elle a
fait 17 propositions, parce qu'hier
elle nous a dit qu'elle avait fait huit propositions, puis toutes les
propositions sont déjà faites ou en voie de l'être. Donc, M. le Président,
j'aimerais avoir une copie des 17 propositions.
Le Président : Question
principale, Mme la cheffe de l'opposition officielle.
Accès à l'information sur
l'évolution de la pandémie de COVID-19
Mme Dominique Anglade
Mme Anglade : M. le
Président, nous avons la conviction
qu'il existe des avis écrits de la Santé publique auxquels a accès le premier
ministre du Québec pour prendre ses décisions. Dans un souci de transparence,
le premier ministre pourrait-il rendre ces
avis disponibles à la population pour que nous en soyons informés, pour que l'on
fasse réellement preuve de transparence, pour que l'on
puisse savoir de quelle manière les décisions se prennent?
Le Président : M. le premier
ministre.
M. François Legault
M. Legault : M. le Président, ce n'est pas comme ça que ça se passe. La
majorité des recommandations du Dr Arruda sont amenées oralement à des rencontres qu'on a à chaque jour, sont
débattues, sont, comme je l'ai déjà dit, acceptées à 100 %.
Donc, M. le Président, je ne peux pas
déposer... Oui, il y a eu certains chiffres qui ont été déposés, puis qu'on
rend publics, d'ailleurs, à chaque
matin, pour prendre ces décisions sur les mesures qu'on annonce, mais, M. le Président,
la majorité des recommandations du Dr Arruda sont faites oralement.
Le Président :
Première complémentaire, Mme la cheffe de l'opposition officielle.
Mme Dominique Anglade
Mme Anglade :
La majorité, pas toutes, la majorité.
M. le Président, la
commissaire Castonguay enquête sur la gestion de crise du directeur de la santé
publique. Est-ce que, pour le premier ministre, le Dr Arruda sera le
prochain responsable de cette crise? Et qui enquêtera sur les décisions des
ministres du gouvernement?
Le Président :
M. le premier ministre.
M. François Legault
M. Legault : M. le Président, j'ai déjà dit que la Commissaire
à la santé, Joanne Castonguay, est totalement indépendante. Elle va pouvoir enquêter sur ce qui a été fait par tout le
monde, que ce soit dans les ministères, que ce soit à la Santé publique. Je
pense que c'est ce qu'on souhaite tous ici, à l'Assemblée nationale. Puis
elle va être capable de faire ça dans un délai qui est raisonnable pour
qu'on puisse ensuite agir, corriger, si c'est nécessaire.
Le Président :
Deuxième complémentaire, Mme la cheffe de l'opposition officielle.
Mme Dominique Anglade
Mme Anglade : M. le Président, les Québécois ont le droit de
savoir. On a le droit de savoir ce qui se passe et comment les décisions sont prises. Ils ont surtout le
droit de savoir comment on est en arrivés là aujourd'hui, dans la situation où
nous sommes, la pire des juridictions, présentement, au pays. Ils ont le
droit de savoir.
Est-ce que le premier
ministre peut mettre en place une commission d'enquête publique indépendante?
Le Président :
M. le premier ministre.
M. François Legault
M. Legault : M. le Président, j'invite encore la cheffe de
l'opposition officielle à la prudence. Quand on regarde les États de l'Est de
l'Amérique du Nord, que ce soit l'Illinois, le Michigan, le Massachusetts,
New York, New Jersey, Connecticut, Rhode Island, tous ces États ont un bilan qui est soit
équivalent soit pire que celui du Québec. Donc, j'invite la cheffe de
l'opposition officielle à ouvrir un petit peu ses recherches.
Le Président :
Question principale, Mme la députée de Maurice-Richard.
Ressources
allouées pour le dépistage du coronavirus
Mme Marie Montpetit
Mme Montpetit :
Je vous remercie, M. le Président. Les problèmes de dépistage et de retraçage
durent depuis des semaines. Les cliniques de
dépistage sont toujours débordées, les équipes de santé publique aussi. Les
délais pour avoir des résultats de test continuent de dépasser des
délais sécuritaires. Et, pendant ce temps-là, le nombre de cas continue
d'augmenter chaque jour.
Et
qu'est-ce qu'on apprend ce matin? Que le gouvernement du Québec boude l'aide du
gouvernement fédéral pour faire du retraçage. Depuis le mois de juillet,
ce sont 1 700 téléphonistes du fédéral qui prêtent main-forte aux
provinces, qui font 14 000 appels par jour, 13 000 en Ontario et
en Alberta. Et, des 14 000, combien au Québec? Seulement 1 000, parce
que le gouvernement du Québec n'en a pas demandé davantage.
Le
premier ministre, hier, pourtant, disait : On est à la recherche de
solutions. Le gouvernement fédéral nous offre de faire des milliers d'appels par jour pour aider à retracer puis à
limiter la propagation, et ils disent : Non, on n'en a pas besoin.
Donc, est-ce que le
ministre a vraiment jugé qu'ils n'en avaient pas besoin ou il va encore
embarquer avec deux trains de retard?
Le Président :
M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.
M. Christian Dubé
M. Dubé : Alors, M. le Président, oui, ça fait
effectivement plusieurs semaines que je parle de toutes les améliorations
que nous avons faites à notre système de
dépistage. Et je me rappelle, en Chambre, ici, il y a quelques semaines, que
j'ai expliqué comment il était important, M. le
Président, de travailler sur le bloc, par exemple, à l'entrée. Rappelez-vous, on avait des files d'attentes très, très
importantes. Et, à ce moment-là, ce qu'on a fait, c'est qu'on a demandé de
faire la gestion de la file.
Pour la question
centrale des laboratoires, on a augmenté notre capacité, qui était seulement,
il y a quelques mois, de 14 000,
15 000 tests par jour, on l'a montée à 25 000. On a été même
capables de faire 35 000 tests par mois, M. le Président. Quant aux contacts avec les gens, on s'est beaucoup améliorés.
Je suis conscient qu'il nous reste encore des
éléments d'amélioration, et ça, c'est pour la partie dépistage. Lorsqu'on a rencontré nos équipes, on a dit :
Maintenant, qu'est-ce qui se passe au niveau du traçage? Et, dans le traçage,
on sait qu'il y a encore des améliorations
importantes, autant de notre côté que du service à la clientèle, parce que
les gens répondent moins, et il faut
trouver une façon d'avoir un meilleur contact pour tracer plus rapidement
possible. C'est ce que nous faisons, M. le Président.
Le Président : Première
complémentaire, Mme la députée de Maurice-Richard.
Mme Marie Montpetit
Mme Montpetit : Moi, M. le
Président, là, je suis quelqu'un de bien patient, dans la vie, là, mais le
ministre, il commence à arriver au bout de ma patience. Aucune réponse. Des
centaines de nouveaux cas par jour, qui ont été en contact avec des milliers de personnes. S'il veut freiner la propagation,
s'il veut casser la deuxième vague, le retraçage, c'est un des éléments clés.
Pourquoi il
n'a pas demandé au gouvernement
fédéral un coup de main? Puis
pourquoi il n'accepte pas d'avoir ces appels-là du gouvernement fédéral?
Le Président : M. le ministre
de la Santé et des Services sociaux.
M. Christian Dubé
M. Dubé : M. le Président, dans
une crise comme on vit présentement, je pense qu'il faut garder notre calme. Il faut agir. Nous avons agi énormément, depuis
plusieurs mois, à se préparer pour être capables de contrer cette deuxième vague là. J'ai expliqué, et ce n'est pas une surprise,
que nous avions des éléments d'amélioration à faire autant au niveau du
dépistage, M. le Président, qu'au niveau du traçage.
Je vous donne
un exemple. Nous avons dit clairement, depuis quelques semaines, qu'il nous
manquait du personnel. Est-ce que la solution qui vient du fédéral, où l'entente
vient d'être signée avec eux dans les dernières semaines, fait partie de
la solution? La réponse, M. le Président, c'est oui...
Le Président : En terminant.
M. Dubé : ...et nous allons
continuer de faire nos améliorations sur ce point-là aussi.
Le Président : Deuxième
complémentaire, Mme la députée.
Mme Marie Montpetit
Mme Montpetit : Allo?
Anticipation, anticipation.
• (10 h 20) •
Des voix : ...
Le Président : S'il vous
plaît!
Mme Montpetit : La deuxième
vague, on est au courant depuis le
printemps qu'il allait y en avoir une. On n'arrête pas de leur dire qu'ils ne sont pas capables
d'anticiper. Ce n'est pas dans deux mois qu'il va falloir appeler le fédéral
puis leur demander de faire des appels, c'est depuis le mois de juillet
que ça aurait dû être fait.
Moi, ce que
je veux savoir, c'est combien de fois le ministre a parlé à la ministre
fédérale de la Santé depuis le mois de juillet sur ce dossier-là.
Le Président : M. le ministre
de la Santé et des Services sociaux. On s'adresse toujours à la présidence.
M. Christian Dubé
M. Dubé : M. le
Président, encore une fois, on va
rester très calmes, parce que ce que les Québécois s'attendent de
nous, c'est qu'on travaille ensemble au
niveau de cette pandémie-là. Et je pense que le ton que la députée de Maurice-Richard peut utiliser,
c'est son choix. Moi, je travaille avec les gens en Ontario, je travaille avec
le fédéral. Nous allons prendre, comme nous
l'avons fait lors de la première vague, toute l'aide qui est disponible, M. le
Président. Et nous sommes en train de faire des réorganisations à l'intérieur
de notre santé publique pour être capables d'être le plus efficaces possible, mais,
je le répète, M. le Président, le Parti libéral avait coupé, en santé publique, plus de 40 millions de dollars dans les dernières années. Nous sommes à
remettre...
Le Président : En terminant.
M. Dubé : ...la santé publique
en bon état. Merci.
Le Président : Question
principale...
Des voix : ...
Le Président : S'il vous
plaît! M. le chef du troisième groupe d'opposition.
Projet d'agrandissement du
collège Dawson
M. Pascal Bérubé
M. Bérubé : M. le
Président, on ne peut pas, d'un côté,
dire que le français, au Québec, c'est important pour nous et, de l'autre côté, appuyer énergiquement et vouloir accélérer
l'agrandissement de deux établissements d'enseignement supérieur anglophones à Montréal. On ne peut pas s'identifier comme nationaliste
quand on s'apprête à inviter des milliers d'étudiants francophones et
allophones à se joindre à McGill et à Dawson, qui, soit dit en passant, dépasse
le devis d'inscription. Ces deux choix, ils
ont été faits par le Parti libéral du
Québec. Ça me surprend que la CAQ
adopte exactement la même position. Sur 50 collèges publics au Québec,
le seul qui trouve grâce aux yeux de la CAQ, c'est le collège Dawson, le
plus controversé, le plus populeux, le plus riche.
Je demande au
premier ministre pourquoi, à travers son projet de loi n° 66, il accélère le financement de ce projet,
il accélère l'anglicisation de Montréal,
il accélère notre propre assimilation à travers un projet de loi qu'il a choisi lui-même.
Le Président : M. le premier
ministre.
M. François Legault
M. Legault : Oui. M.
le Président, je vais prendre deux,
trois secondes quand même pour souligner que c'est la dernière période
de questions du chef intérimaire du Parti québécois. Donc, je veux le remercier
pour sa collaboration, le féliciter pour son travail. Je sais que c'est
quelqu'un qui a été bien formé, M. le Président. Et, M. le Président,
même il y en a plusieurs dans son parti qui auraient voulu qu'il se présente à
la chefferie. Bon, il a choisi de ne pas le faire.
Maintenant,
M. le Président, concernant la loi 101 au cégep, j'ai été au Parti
québécois, j'ai participé plusieurs fois à ce débat, à savoir, actuellement, les francophones puis les allophones
n'ont pas le droit d'aller à l'école en anglais mais ont le droit
d'aller au cégep puis à l'université en anglais. Ça a toujours été très divisé
au Parti québécois.
Donc, évidemment,
on va attendre le nouveau chef, ce soir, pour savoir quelle est la position du
Parti québécois, mais, M. le
Président, je voudrais juste que le chef du Parti québécois... Je ne sais pas
s'il peut nous le dire, là, avant de savoir c'est qui, le nouveau chef.
Est-ce qu'il suggère que la loi 101 s'applique maintenant aux cégeps?
Le Président : Première
complémentaire, M. le chef du troisième groupe d'opposition.
M. Pascal Bérubé
M. Bérubé :
Je remercie le premier ministre pour ses bons mots. Je vais dire que son équipe
était très contente que je ne me présente pas. Ça, je le sais
assurément.
M. le Président, ce n'est pas de ça qu'il est
question. Le gouvernement de la CAQ pratique un nationalisme homéopathique, il n'en met pas trop. Et là ce
n'est pas l'accès aux collèges anglophones, c'est le financement. Alors, lui,
il a choisi, comme les libéraux : Dawson, on vous donne tout ce que vous
voulez pour accueillir des francophones, des allophones.
Puis, le Royal Vic, même affaire avec McGill. Moi, je suis convaincu que c'est
une mauvaise nouvelle, qui va venir à l'encontre des mesures que son...
Le Président : M. le premier
ministre, à vous la parole.
M. François Legault
M. Legault :
M. le Président, je suis d'accord que le chef du Parti québécois aurait
peut-être été meilleur que les candidats qui sont là. C'est lui qui le
dit, mais je suis un peu d'accord avec lui.
M. le Président, quand le chef du Parti
québécois nous dit qu'on mélange financement et accès, j'avoue que je ne le suis pas, là, parce que, si on veut continuer
de donner accès aux francophones puis aux allophones aux cégeps anglophones,
bien, des fois, ça veut dire qu'il faut les agrandir.
Donc,
est-ce qu'il nous dit, oui ou non, qu'il refuse, à partir de maintenant,
l'accès aux cégeps anglophones pour les francophones et les allophones
au Québec? Est-ce que c'est ça, sa proposition?
Le Président : Deuxième
complémentaire, M. le chef du troisième groupe d'opposition.
M. Pascal Bérubé
M. Bérubé :
M. le Président, ce que je refuse, c'est qu'on adopte des mesures comme il le
fait, qui vont accélérer l'assimilation
et l'anglicisation à Montréal. Il a bien choisi son collège pour le faire, le
cégep Dawson. Ça va à l'encontre de tous les efforts que son ministre va faire.
Puis vous savez quoi? Je suis convaincu qu'il est contre ce que vous annoncez,
votre ministre responsable de la langue. Sinon, laissez-lui se lever pour dire
qu'il est d'accord avec vous.
Le Président : M. le premier
ministre. On s'adresse toujours à la présidence, s'il vous plaît.
M. François Legault
M. Legault :
M. le Président, le chef intérimaire du Parti québécois vient de nous dire que
les francophones puis les allophones
qui veulent aller au cégep Dawson, avec le Parti québécois, ils ne pourront
plus le faire. C'est son choix. Je prends bonne note. Puis on va
attendre de voir quelle est la position du nouveau chef.
Le Président : Question
principale, Mme la cheffe du deuxième groupe d'opposition. La parole est à vous
et uniquement à vous.
Des voix : ...
Le
Président : S'il vous plaît! La parole appartient maintenant...
Et vous comprenez le système, hein, je n'invente rien. Mme la cheffe du
deuxième groupe d'opposition, à vous la parole pour votre question, s'il vous
plaît.
Gestion de la pandémie de
COVID-19
Mme Manon Massé
Mme Massé :
Merci, M. le Président. Lors de son assermentation, il y a deux ans, le premier
ministre a demandé à ses ministres de
faire preuve d'humilité. Je cite : «C'est vrai pour moi, c'est vrai pour
vous. Les Québécois ne s'attendent pas à ce qu'on soit parfaits, ils
s'attendent à ce qu'on les écoute...» Fin de citation.
Aujourd'hui,
on a les deux pieds dans la deuxième vague. On s'enfonce, même, M. le
Président. J'écoute le monde sur le
terrain. Ce qu'ils nous disent depuis des semaines, c'est que la stratégie du
gouvernement, bien, elle ne marche pas. Le premier ministre, lui, il a arrêté d'écouter. Il s'enferme dans sa
cellule de crise avec une poignée de conseillers, toujours les mêmes,
d'ailleurs, il refuse de dévoiler les avis de la Santé publique, il balaie
du revers de la main chacune des propositions
des oppositions, il blâme la discipline des Québécois et Québécoises. Dans mon
livre à moi, ce n'est pas ça, de l'humilité, M. le Président, c'est de
l'arrogance.
Pourtant, des
gens lui parlent, les gens lui disent. Québec
solidaire a des solutions. Les travailleuses de la santé ont des
solutions. Les professeurs, les enseignantes ont des solutions. Les éducatrices
ont des solutions.
Bref, est-ce que le premier ministre est vraiment
en train de nous écouter?
Le
Président : Juste avant de donner la parole, je vous rappelle
qu'il y a un mot qui a été utilisé qui fait partie des propos qui sont non parlementaires. Je vous
demanderais votre attention, si vous avez envie d'y revenir, parce que je ne
l'accepterai pas. M. le premier ministre.
M. François Legault
M. Legault :
M. le Président, je trouve ça assez particulier que la cheffe de Québec
solidaire pose une question sur la pandémie.
Actuellement, le plus grand défi qu'on a, c'est de réduire la propagation du
virus. Pour ça, ce qu'il faut faire, c'est de s'assurer le plus rapidement possible que, quand une personne a la
COVID, les personnes qui ont eu des contacts avec elle dans les deux semaines précédentes, on puisse
leur demander de se faire tester puis, au besoin, de s'isoler. M. le Président,
je le dis, là, je trouve ça totalement irresponsable, la position de Québec
solidaire...
Le Président : M. le leader
du deuxième groupe de l'opposition.
M. Nadeau-Dubois :
L'article 35.6° de notre règlement nous interdit d'imputer des motifs
indignes à un député. En qualifiant
les propos de ma collègue de Sainte-Marie—Saint-Jacques d'irresponsables, c'est ce qu'il
fait. Il n'y a pas un député ici qui ne veut pas lutter contre la
COVID-19 puis sauver des vies, mais nous avons le droit de débattre, en
démocratie, des moyens pour le faire. C'est ce que nous faisons en cette
Chambre. Je demande au premier ministre de respecter ça.
Le Président :
M. le leader du gouvernement, rapidement, et je compléterai. Vous pouvez
continuer.
M. Jolin-Barrette : Oui, M. le
premier ministre... M. le Président. Vous constaterez que ça ne remplit pas les
critères de l'article 35.5°. Le premier
ministre répond à la question et indique clairement que la position défendue
par Québec solidaire est irresponsable. Il n'attaque pas la conduite du
député et n'impute pas de motifs indignes.
Le
Président : Alors, les opinions sont émises. Je vous demande
quand même d'être prudents dans les échanges
que nous avons aujourd'hui. Mme la cheffe du deuxième groupe d'opposition, à
vous la parole.
Mme Manon Massé
Mme Massé : Alors, je lui parle de son manque d'écoute, puis
il m'attaque. Très révélateur. Ça fait une semaine qu'on alerte le gouvernement
que le monde a...
Le Président : M. le leader
du gouvernement.
M. Jolin-Barrette : Ça, c'est prêter des intentions au premier
ministre. Ce que la cheffe du deuxième groupe d'opposition vient de
faire, c'est totalement ce qu'il ne faut pas faire. Et c'est complètement faux.
Le Président : Je vais vous
demander, s'il vous plaît... M. le leader du deuxième groupe d'opposition.
M. Nadeau-Dubois :
La cheffe parlementaire de ma formation politique a le droit de dire en cette
Chambre qu'elle entend les propos du premier ministre et qu'elle les
considère comme une attaque. Ça s'appelle argumenter.
Une voix : ...
Le
Président : Non, je
vous remercie. Je pense
qu'on va arrêter. M. le leader du
gouvernement, j'ai bien entendu.
M. le leader du deuxième groupe, j'ai bien
entendu. On va poursuivre, maintenant, la période de questions. On arrête ces
échanges. Je pense que c'est clair pour tout le monde. Madame, je vous demande
de continuer.
• (10 h 30) •
Mme Massé :
Ça fait une semaine qu'on alerte le gouvernement que le monde a recours au
privé pour le dépistage. C'est rendu tellement
long, à recevoir des résultats, que les écoles ont recours à des entreprises
privées pour recevoir des résultats plus vite.
Le premier ministre veut des propositions? On ne fait rien que ça. Réquisitionner les
laboratoires privés, ce n'est pas compliqué, ça donne des réponses
rapides. Puis pourquoi le premier ministre, là-dessus, ne veut pas nous
écouter?
Le Président : M. le premier
ministre.
M. François
Legault
M. Legault : M. le
Président, Québec
fait, en date d'hier, deux fois plus de tests, toutes proportions gardées, que
dans le reste du Canada.
Je reviens
sur l'application COVID.
C'est simple, on s'inscrit. Quand on a la COVID, on le dit, et, comme ça, ça
informe toutes les personnes qui ont été à moins... proches des personnes qui
ont la COVID. On a fait toutes les vérifications,
il n'y a aucun risque pour les données personnelles. Et Québec solidaire ose
faire peur aux Québécois, en disant...
Des voix : ...
Le Président : On ne peut pas...
Non, mais je comprends... M. le leader du deuxième groupe d'opposition.
M. Nadeau-Dubois : M. le
Président, d'abord,
j'ai le droit de signaler une infraction au règlement. L'expression «faire
peur aux Québécois» est nommément dans le lexique des propos
interdits en cette Chambre. La seule option pour vous, c'est de demander
au premier ministre de les retirer.
Le Président : M. le leader
du gouvernement.
M. Jolin-Barrette : M. le
Président, on est sur une question
importante de sensibilisation de la population pour lutter contre la COVID-19, M. le
Président. L'approche qui est présentée par Québec solidaire n'est pas
responsable, M. le Président, pour permettre aux Québécois...
Des voix : ...
Le
Président : Bon, écoutez,
non, deux secondes. Je vais... On ne va pas commencer à qualifier tous les
propos tout au long de la séance. On
a une séance, je veux qu'elle se tienne de bonne façon. Ça a bien démarré, ça
doit bien se continuer.
M. le premier ministre,
sur ces propos, effectivement, ils ne sont pas permis au lexique. Je vais vous
demander de les retirer.
M. Legault : Je les retire, M. le Président. Québec solidaire refuse d'inciter les Québécois à s'inscrire à une application. C'est une question de vie ou de mort. Quand Québec
solidaire et le Parti québécois vont-ils prendre leurs responsabilités?
Des voix : ...
Le Président : Monsieur... Je pense, c'est... M. le leader du deuxième groupe d'opposition. Vous savez, là, on peut, là...
Des voix : ...
Le Président : S'il vous
plaît! M. le leader, rapidement.
M. Nadeau-Dubois : M. le
Président, en disant des choses comme
«c'est une question de vie ou de mort», le premier ministre prend un sous-entendu qui
est grave. Je pense que ça n'a pas sa place en cette Chambre.
Des voix : ...
Le
Président : Non,
c'est correct. Je pense que c'est clair, et on comprendra. Je pense qu'on va
continuer la séquence. On est en
deuxième complémentaire, également. Je vous demande maintenant d'aller en deuxième
complémentaire. Et je vous demande à tous votre grande collaboration
pour continuer de bonne façon cette période de questions, en évitant ce que
vous savez être plus sensible.
Mme la cheffe du deuxième groupe d'opposition,
deuxième complémentaire.
Mme Manon
Massé
Mme Massé :
Je vais le répéter, il ne l'a pas entendu : Si la Santé publique nous
transmet l'information à l'effet que
cette application ne congestionnera pas les tests de dépistage, et donc les
réponses à nos concitoyens concernant les résultats du dépistage, on l'a dit, qu'on serait prêts à le faire. Mais
on ne veut pas nous donner accès à ça. Je n'ai pas entendu la Santé publique
dire : Il n'y a pas de danger pour les dépistages, donc la
longueur des résultats. Ça aussi, c'est problématique.
Le Président : M. le premier
ministre.
M. François
Legault
M. Legault :
M. le Président, je vais prendre au
mot la cheffe de Québec solidaire. Si le directeur de la santé publique lui confirme qu'il n'y a aucun impact sur
le traçage, d'inciter les Québécois à s'inscrire, elle va le suggérer? C'est ça
qu'elle vient de nous dire? J'espère qu'elle va respecter sa parole.
Le Président : Question...
Une voix : ...
Le
Président : M. le leader du gouvernement... Non, écoutez, on ne va pas... M. le leader du gouvernement. Et rapidement.
M. Jolin-Barrette : M. le
Président, le premier ministre a exprimé un souhait.
L'autre
élément qui est fondamental, c'est que, lorsque la Santé publique et
que le gouvernement du Québec dit à la
population : Pour prévenir la contamination, on invite les
gens à se faire tester, on invite les gens à télécharger l'application de traçage...
Le
Président : M. le leader du gouvernement, je
pense, c'est clair, là. Je veux dire,
on n'est pas en réponse directement. Là, je vais vous demander...
Des voix : ...
Le
Président : Je vous
demande une attitude... À ce moment-ci, je pense que tout a été dit, tous
ont bien compris. Je vous demande une
attitude de collaboration, une attitude plus cordiale pour qu'on puisse
poursuivre cette période de questions comme elle a été entamée, dans un
contexte où tant les questions que les réponses, sur chacun des sujets, est extrêmement
important. Alors, faites attention à vos propos, soyez collaboratifs et
travaillons de façon cordiale.
Question principale, M. le député de Jacques-Cartier.
Mise
en oeuvre des recommandations de la Commission d'enquête sur
les relations entre les autochtones et certains services publics
M. Gregory Kelley
M. Kelley : Merci, M.
le Président. C'est plus comme un
débat entre Trump et Biden, ici, qu'une vraie période de questions.
Dans
le rapport Viens, il y a 142 appels à l'action. C'est la feuille de
route pour notre société afin de commencer une vraie réconciliation entre les peuples autochtones
et l'État québécois. Il y a des appels à l'action qui touchent la vie des
peuples autochtones : justice, éducation, santé, protection de la
jeunesse.
Un
an après le dépôt du rapport, les peuples autochtones et les Québécois
sont déçus avec l'absence de réels progrès de ce gouvernement. Les ex-membres de la commission
Viens ont exprimé leur déception hier dans une lettre adressée au gouvernement.
Ils ont demandé plus de transparence afin de bien suivre le progrès ou
l'absence de progrès.
Alors,
ma question est simple : Êtes-vous prêts à être plus
transparents dans le processus de suivi des 142 appels à l'action?
Le Président :
Mme la ministre responsable des Affaires autochtones.
Mme Sylvie D'Amours
Mme D'Amours :
Merci, M. le Président. Je remercie mon collègue de poser cette question, ça va
pouvoir me permettre de relater les faits.
Effectivement, ça fait un an que le rapport a été déposé, mais, tout comme d'autres
dossiers, ça fait sept mois qu'on est
en pandémie. Vous savez, il y a eu le rapport de la commission
royale, le rapport vérité de la réconciliation, l'Enquête nationale des femmes et des filles autochtones
disparues et assassinées et, le dernier, Viens. Le dernier rapport, M. le Président, c'est le miroir des 15 dernières années, et force est de constater
qu'il n'y a rien qui avait été fait, rien qui n'avait été fait de la façon... pour et par les autochtones. J'ai
voulu, par ce travail des deux rencontres, dont son collègue, de D'Arcy-McGee, était présent... j'ai voulu travailler d'une façon différente, qui prend
peut-être un peu plus de temps, mais qui va être faite
par et pour les Autochtones.
C'est
fini, la façon colonialisme de le faire. Il faut le faire avec eux et pour eux.
Et c'est un dossier qui est complexe,
ça prend du temps. Il faut s'assurer que tout le monde soit en place.
Maintenant, il y a eu
des retards un peu...
Le Président :
En terminant.
Mme D'Amours :
...sur le travail de l'APNQL, mais il y a d'autres groupes avec qui je
travaille.
Le Président :
Première complémentaire, M. le député de Jacques-Cartier.
M. Gregory Kelley
M. Kelley :
C'est vrai, il n'y a pas juste le rapport Viens qui explique la réalité des
peuples autochtones mais aussi le rapport sur les femmes et les filles
disparues ou assassinées. Les femmes et les filles autochtones sont
12 fois plus susceptibles d'être
assassinées ou portées disparues. 12 fois. 12 fois. Il y a 21 appels à
l'action dans le rapport sur les femmes disparues et assassinées qui ciblent le gouvernement du Québec. Je veux
savoir de la ministre des Affaires autochtones combien ont été mis en
oeuvre depuis un an.
Le Président :
Mme la ministre responsable des Affaires autochtones.
Mme Sylvie D'Amours
Mme D'Amours :
M. le Président, je vais continuer. J'ai travaillé avec l'Assemblée des
premières nations du Québec, qui sont en réflexion, mais probablement
qu'ils ont énormément de travail pendant la pandémie, et je ne juge pas ça.
Par
contre, j'ai travaillé avec le Regroupement des centres d'amitié autochtones,
qui existe depuis 40 ans. Nous avons continué nos travaux. Nous allons avoir quelques annonces à faire d'ici
quelques semaines. Il y a aussi Femmes autochtones du Québec avec qui je
travaille et le conseil des femmes autochtones élues, avec lesquelles je vais
avoir des rencontres éventuellement la semaine prochaine.
Donc, il y a des
appels à l'action, 21 appels à la justice, l'ENFFADA, et 142 appels à
l'action...
Le Président :
En terminant.
Mme D'Amours :
...de rapport Viens, et nous sommes en train de travailler de façon...
Le Président : Deuxième
complémentaire. Je vous demande d'être attentifs, s'il vous plaît, j'entends des bruits qui sont un peu dérangeants. S'il vous
plaît, M. le député, à vous la parole.
M. Gregory Kelley
M. Kelley : Mardi, c'étaient les funérailles de
Joyce Echaquan. La communauté de Manawan a le coeur brisé. Ils
demandent la justice pour Joyce. Mais la famille est claire, le chef Ottawa est
clair, la nation attikamek est claire, c'est impossible d'avoir justice pour
Joyce si le premier ministre et le gouvernement refusent de reconnaître que le
racisme systémique existe envers ces peuples autochtones.
Alors, une question
pour le premier ministre : Est-ce qu'il est prêt pour accepter et
reconnaître que le racisme systémique existe envers les peuples autochtones du
Québec?
Le Président :
Mme la ministre responsable des Affaires autochtones, à vous la parole.
Mme Sylvie D'Amours
Mme D'Amours :
M. le Président, le racisme existe, au Québec,
on en a la preuve à l'hôpital de Joliette. Le racisme, au Québec, ne doit pas être
toléré. On doit le dénoncer, on doit le... sévir et on doit aussi dire aux gens
que c'est tolérance zéro. On ne pourra pas accepter ça encore une fois.
On
est déjà à l'oeuvre. On a convenu, avec les chefs attikameks, de se rencontrer
la semaine prochaine, avec le ministre de la Santé, d'ailleurs, puis on a déjà
eu une rencontre avec eux. On va régler le problème de l'hôpital de Joliette et on va le prendre comme exemple pour
régler tous les hôpitaux qui desservent les autochtones au Québec.
Le Président :
En terminant.
Mme D'Amours :
C'est tolérance zéro, au Québec, pour le racisme.
Le Président :
Question principale, Mme la députée de Marie-Victorin.
Engorgement du service des
urgences dans les hôpitaux
Mme Catherine Fournier
Mme Fournier :
M. le Président, à l'heure où on se parle, présentement, à l'Hôpital
Pierre-Boucher, à Longueuil, il y a
une dame âgée de 96 ans qui attend maintenant depuis plus de 95 heures
sur une civière à l'urgence sans qu'aucun proche aidant ne soit admis à ses côtés parce que c'est le chaos dans les
directives. Je suis certaine que le
ministre sera d'accord avec moi pour dire que cette situation n'a
aucun sens.
Je
vois au moins deux options pour empêcher que de telles histoires crève-coeurs
ne se reproduisent. La première : mieux
circonscrire la directive concernant les proches aidants en zone rouge en les
permettant, même en cas de débordement, pour les patients âgés et
vulnérables. La seconde : réserver des chambres à ces patients pour qu'ils
y soient dirigés rapidement.
Est-ce que le
ministre peut s'engager à appliquer l'une ou l'autre de ces propositions?
• (10 h 40) •
Le Président :
M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.
M. Christian Dubé
M. Dubé : Alors, M.
le Président, j'apprécie beaucoup
la question de la
députée de Marie-Victorin parce que je souscris totalement à son point, que la situation
qui a été vécue à Pierre-Boucher, notamment par cette personne âgée là, est
totalement inacceptable. Il faut voir
comment on peut mieux organiser nos urgences. Ce n'est vraiment pas le genre de
patient qui aurait dû passer par les urgences, mais qui aurait dû être admis en
chambre plus rapidement. On en a fait un point dans notre discussion quotidienne sur la situation. Donc, je
souscris totalement à son commentaire, cette situation n'est pas
acceptable.
Maintenant,
plus largement, plus largement, comment on va faire pour améliorer? Moi, mon
plus grand défi que j'ai, en ce moment, c'est de travailler sur la crise, en ce
moment, mais faire avancer des dossiers qui ont traîné depuis des
années, comme les urgences.
Alors,
en ce moment, ce que l'on fait, c'est qu'on a fait énormément, dans les
dernières années, au niveau des soins à
domicile. On a mis, par exemple... on est en discussion avec la Montérégie pour
voir comment des infrastructures temporaires pourraient permettre, comme
on l'a fait dans d'autres hôpitaux...
Le Président :
En terminant.
M. Dubé :
...d'améliorer la capacité. Alors, je pourrai continuer, mais on a plusieurs
mesures partout.
Le Président :
Première complémentaire, Mme la députée de Marie-Victorin.
Mme Catherine Fournier
Mme Fournier :
M. le Président, j'ai cité le cas de cette dame, mais ce n'est pas la seule. Le
téléphone ne dérougit pas, on a
plusieurs situations de patients qui sont dans la même situation, en fait. Puis
le taux d'occupation à l'urgence, hier, à Pierre-Boucher, était de 203 %.
Il
me semble que c'est urgent de faire quelque chose pour le protocole de triage
des urgences pour tenir compte du niveau
de vulnérabilité des patients, dans le contexte actuel, puis s'assurer de
limiter le temps de séjour des patients dans ce contexte de milieu
hospitalier.
Alors, quel est le
plan précis du gouvernement?
Le Président :
M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.
M. Christian Dubé
M. Dubé :
Je voulais juste... Je n'ai peut-être pas eu le temps de terminer, M. le
Président, la première question, mais, sur
la question des proches aidants, moi, j'ai un appel tout à l'heure, comme je
vous ai dit souvent, on a un appel avec les P.D.G. à chaque semaine, et, la question des proches aidants, je veux
être certain que la directive qui a été émise, que les gens pouvaient avoir accès, les proches aidants
pouvaient aller soit à l'hôpital... Ce qui n'est pas toujours facile, parce que,
lorsqu'on est à l'urgence, dans le cas de la
dame dont la députée parlait, c'était un cas qui était difficile. Mais, la
directive que nous avons mise pour être sûrs que les proches aidants puissent
avoir accès à leurs personnes, on va la faire respecter. J'en ai un
point de discussion à l'heure du midi avec les P.D.G.
Le Président :
Rapidement.
M. Dubé :
Donc, je suis très sensible à cet élément-là.
Le Président :
Deuxième complémentaire, Mme la députée.
Mme Catherine Fournier
Mme Fournier :
M. le Président, je remercie le ministre pour cette réponse claire. On sait
que la situation dans les urgences, elle ne peut que s'aggraver avec la
deuxième vague, l'hiver qui s'en vient.
On
sait aussi que l'idée de louer des salles de réception puis des chambres
d'hôtel avait été retenue ce printemps. Est-ce que vous allez faire la
même chose pour cet automne? Et, si oui, quand?
Le Président :
M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.
M. Christian Dubé
M. Dubé :
On a la chance, Mme la députée... M. le Président, pardon, on a la chance, en
ce moment, d'avoir mis, depuis
quelques mois, une équipe en place avec tout le groupe, je dirais, de plusieurs
sous-ministres associés qui travaillent sur un plan pour améliorer nos urgences. Je l'ai dit, notre défi, c'est
de travailler sur la COVID mais en même temps sur un projet important comme ça. Ce groupe-là est mené
par la Dre Berger, qui est un médecin de l'Hôtel-Dieu de Lévis qui fait un
travail incroyable, en ce moment, pour nous arriver avec des recommandations.
Nous avons identifié 25 urgences dans 15 établissements sur
lesquels nous allons améliorer et...
Le Président :
En terminant.
M. Dubé :
...suivre l'amélioration des urgences au cours des prochains mois. Merci, M. le
Président.
Le Président :
Question principale, M. le député de D'Arcy-McGee.
Impact
de la pandémie de COVID-19 sur la santé mentale
M. David Birnbaum
M. Birnbaum :
M. le Président, l'anxiété, dépression, isolement, cyberintimidation, violence
conjugale, voilà la bombe à retardement qui
confronte les Québécois avec chaque jour qui passe de cette terrible pandémie.
Depuis le mois de mars, les signaux d'une crise de santé mentale se
multiplient.
43 groupes d'experts
et d'usagers nous ont écrit pour sonner l'alarme sur la crise émergente de
santé mentale; l'Ordre des psychologues du
Québec, l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec, pour n'en nommer que
deux. Chaque jour, ce gouvernement
nous parle de la crise sanitaire. Mais
un plan d'action, un diagnostic expert sur l'étendue du problème grave
de la santé mentale, de nouvelles ressources pour combattre le problème? Radio
silence. Déjà ce matin, de toute évidence, un refus du premier ministre de notre main tendue, de notre
proposition concrète et structurante sur l'accès public et universel à
la psychothérapie.
Donc, le ministre de
la Santé a-t-il une proposition sérieuse pour protéger la...
Le Président :
M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.
M. Christian Dubé
M. Dubé : Bon, je ne suis pas certain d'avoir tout compris
quelle était la question, mais, sur la question de la santé mentale, j'aimerais faire une mise en contexte qui
est importante. C'est toujours intéressant de voir que les questions sur la santé mentale viennent lorsque mon collègue
n'est pas là. Alors donc, je pense que je vais essayer de répondre, parce que
c'est important pour moi, M. le Président,
c'est important pour moi, M. le Président, d'expliquer comment, pour nous, la
santé mentale est importante, très importante.
Mon
collègue le député de Taillon et ministre délégué à la Santé a fait des efforts
incroyables depuis plusieurs mois. Le
premier ministre a cité des exemples très clairs, où on a baissé de plus de
40 % la liste des personnes qui étaient en attente. On a une collaboration, en ce moment, plus
qu'exemplaire, je dirais, avec l'opposition pour s'assurer que les organismes
communautaires vont pouvoir participer à une
consultation, cet automne, pour s'assurer que le plan, le plan qui va être mis,
maintenant, à jour entre 2020 et 2025, va se faire en collaboration avec
ces organismes communautaires.
Alors, je pense qu'on
est vraiment sur le dossier de façon active, M. le Président.
Le Président :
Première complémentaire. Mme la députée de Fabre.
Mme Monique Sauvé
Mme Sauvé : M. le Président, le printemps dernier, nos aînés ont été confinés
pendant des semaines, seuls, isolés, sans
famille, sans proche aidant. Deuxième vague, le même film recommence : nos
aînés seuls, isolés. Ils ne voient plus leurs amis, ils ne serrent plus dans leurs bras leurs enfants et
petits-enfants. C'est la solitude qui pèse, la tristesse et la détresse
qui s'installent.
Avec le COVID, la santé mentale de nos aînés est plus fragile
que jamais. Le gouvernement doit agir avant qu'il ne soit trop tard.
Le Président :
M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.
M. Christian Dubé
M. Dubé : Alors, je pense que les Québécois qui nous
écoutent ce matin doivent voir comment, pour nous, non seulement la santé mentale est importante, dans un
contexte de crise, comme l'a très bien expliqué le premier ministre tout à
l'heure, mais comment, pour nous, le traitement de nos aînés est important, et
de ce qu'on a appris de la première vague.
J'aimerais
rappeler aux Québécois, lorsqu'on était dans la première vague, la plupart des
décès ont été constatés dans les CHSLD. Ce n'est vraiment pas la
situation en ce moment, ce n'est vraiment pas cette situation-là.
Par contre, ce qu'on
doit s'assurer, puis c'est pour ça qu'on doit avoir la collaboration de
l'opposition...
Le Président :
En terminant.
M. Dubé :
...c'est que les Québécois comprennent les mesures sanitaires qu'on doit
appliquer pour que ça n'arrive pas.
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le député de Viau.
M. Frantz Benjamin
M. Benjamin : Démotivée, démoralisée, désabusée, découragée,
notre jeunesse a le vent de la pandémie en plein visage. Écoles fermées, cours à distance, arrêt des sports
interscolaires, premiers à être expulsés du marché du travail. On parle d'une génération qui est au moment de sa vie
où les risques de suicide sont les plus élevés. Avec la COVID,
la santé mentale des jeunes est plus fragile que jamais. Le gouvernement
doit agir avant qu'il ne soit trop tard.
M.
le premier ministre, vous êtes le responsable des dossiers jeunesse. Quelles
sont les mesures spécifiques que vous allez mettre en place pour protéger la
santé mentale des jeunes du Québec?
Le Président :
M. le ministre de l'Éducation.
M. Jean-François Roberge
M. Roberge :
Merci bien, M. le Président. Les mesures pour protéger le bien-être, la santé
mentale de nos jeunes, de nos
adolescents, on en a pris plusieurs. On a ajouté plus de
350 professionnels, qui oeuvrent dans notre réseau scolaire dès cette année, 350 de plus qui s'ajoutent aux
700 de l'an passé. Dans ces personnels-là, il y a des gens qui s'occupent
d'élèves, évidemment, plus vulnérables, il y a des psychologues, il y a
des psychoéducateurs.
On a aussi une entente particulière
avec notre Santé publique pour ajouter 30 millions d'argent neuf en
partenariat avec des organismes
communautaires et de l'embauche de professionnels qui vont venir soutenir nos
jeunes dans nos écoles secondaires dès cette année. On est très actifs.
On est conscients que
les temps sont difficiles. C'est pour ça qu'on en fait plus.
Le Président :
Question principale, Mme la députée de Verdun.
Impact
de la pandémie de COVID-19 sur la santé mentale des femmes
Mme Isabelle Melançon
Mme
Melançon : M. le Président, les premières études sur l'impact de la
COVID chez les femmes sont inquiétantes : pertes d'emploi, responsabilités familiales accentuées, donc charge
mentale supplémentaire pour les femmes, notamment lors de la fermeture des écoles et des garderies,
augmentation du taux de divorce, augmentation de la précarité financière,
augmentation de la violence conjugale. Et
ça, c'est sans compter que les anges gardiens de la COVID, qui sont ceux qui
ont mis leur propre santé à risque pendant
la crise, sont majoritairement des femmes. On pense aux infirmières, aux
préposées aux bénéficiaires, aux enseignantes, aux éducatrices en
service de garde.
Hier,
on parlait des victimes d'agression sexuelle laissées sans soutien, faute de
personnel dans les hôpitaux. Tout ça ensemble, c'est un cocktail
explosif pour la santé mentale des femmes.
Avec
la COVID, la santé mentale des femmes est plus fragile que jamais. Le
gouvernement doit agir avant qu'il ne soit trop tard.
• (10 h 50) •
Le Président :
M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.
M. Christian Dubé
M. Dubé :
Alors, M. le Président, j'apprécie la question de la députée de Verdun. Puis je
pense que les gens doivent être
rassurés que, pour nous, je le répète encore une fois, la santé mentale,
particulièrement dans une période difficile comme nous vivons, est
importante pour nous.
Je
vais donner un exemple de ce qu'on a fait au cours des derniers mois. On a
demandé à nos organismes de participer à
un appel collectif. Nous avons contacté, M. le Président, au cours des quatre
derniers mois, plus de 300 000 personnes
qui sont des bénéficiaires du ministère de la Santé, particulièrement les gens avec qui on travaille tous les jours,
que ce soit dans les soins à domicile, que ce soit dans les différentes interventions que l'on fait. Je pense
que ça, M. le Président, ça ne
s'était jamais fait, de demander à nos équipes de contacter directement nos bénéficiaires pour s'assurer qu'ils sont corrects.
Le Président :
...
M. Fortin : M. le Président, question de règlement. Le règlement est clair, le député répondre à la question... le ministre doit répondre à la question de la députée. La députée a posé
une question qui porte sur les femmes. Ça fait 51 secondes qu'il
répond, zéro fois il a utilisé mot «femmes».
Le Président :
M. le leader du gouvernement.
M. Jolin-Barrette : M. le Président, le leader de l'opposition
officielle sait très bien que vous n'êtes pas là pour juger de la qualité de la
réponse ou de la teneur de la réponse
qui est offerte par le gouvernement.
Le ministre a parlé de la santé
mentale, qui inclut également la santé mentale des femmes, qui sont
particulièrement éprouvées. Et le ministre de la Santé indique également très clairement qu'il y a des ressources et que
le gouvernement du Québec s'en occupe parce qu'on considère ça très
important, la santé mentale.
Surtout
dans la situation de pandémie actuelle, M. le Président, je pense que c'est
prioritaire de dire à tout le monde qui
souffre d'aller chercher de l'aide. Il y a des lignes, il y a des services qui
sont disponibles, M. le Président. Il faut rappeler ça à la population
de chaque côté.
Le
Président : On demande au ministre de poursuivre sa réponse,
s'il vous plaît, à ce moment-ci. M. le ministre.
M. Dubé :
Alors, merci, M. le Président. Puis j'apprécie mon leader pour ces précisions,
parce que, dans le fond, lorsque j'ai
répondu, tout à l'heure, M. le Président, j'ai dit qu'il y a eu un effort
concerté de rejoindre plus de 325 000 personnes.
Moi, je pourrais penser qu'il y a au moins... plus que 50 % des femmes qui
ont été contactées lorsqu'on a fait cet effort-là pour s'assurer qu'on
comprenait très bien notre clientèle, M. le Président. Merci.
Le Président :
Ceci met fin à la période de questions et de réponses orales.
Motions sans préavis
Nous passons
maintenant à la rubrique Motions sans préavis. En fonction de nos règles et de
l'ordre de présentation, je reconnais M. le chef du troisième groupe
d'opposition.
M. Bérubé :
M. le Président, je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée
afin de présenter, conjointement avec la députée de Marie-Victorin, la motion
suivante :
«Que
l'Assemblée nationale reconnaisse l'importance de protéger, de valoriser, de
promouvoir et de pérenniser la langue française au Québec;
«Que l'Assemblée nationale réitère sa profonde
préoccupation quant à l'effritement du français au Québec, particulièrement en
région métropolitaine;
«Qu'elle
demande au gouvernement de renoncer aux projets d'agrandissement du collège
Dawson et de l'Université McGill, contenus dans le projet de loi
n° 66;
«Qu'elle demande également au gouvernement de
renoncer à donner, sans contrepartie, une section de l'ancien Hôpital Royal Victoria à l'Université McGill, et
de procéder plutôt à location du site pour maintenir publique la propriété de cet édifice
patrimonial.» Merci, M. le Président.
Le Président : Y a-t-il
consentement pour débattre de cette motion?
M. Jolin-Barrette : Pas de
consentement, M. le Président.
Le Président : Pas de
consentement. Je reconnais maintenant M. le ministre de l'Éducation.
Souligner la Semaine pour
l'école publique
M. Roberge : M. le
Président, je sollicite
le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion
suivante conjointement avec la
députée Saint-Laurent, la députée de Sherbrooke, la
députée de Joliette,
le député de Chomedey et la
députée Marie-Victorin :
«Que l'Assemblée
nationale souligne la
11e Semaine pour l'école publique, organisée par la Fédération autonome de
l'enseignement, qui a pour thème Notre école publique, on l'aime... encore
plus!;
«Qu'elle
réitère l'importance capitale de la triple mission de l'école publique, soit
instruire, socialiser et qualifier;
«Qu'elle se
joigne au porte-parole de la Semaine pour l'école publique, Philippe Laprise,
pour reconnaître le travail colossal des personnels de l'école publique,
mais aussi la persévérance de tous les élèves, jeunes et adultes;
«Que
l'Assemblée nationale reconnaisse le rôle essentiel que doit jouer l'école
publique comme vecteur d'égalité des chances et de justice sociale au
Québec, en offrant une éducation gratuite, accessible et universelle;
«Qu'elle
reconnaisse la contribution exceptionnelle de l'école publique au développement
de la société québécoise.»
Le Président : Y a-t-il
consentement pour débattre de cette motion?
M. Jolin-Barrette :
Consentement, sans débat, M. le Président.
Mise
aux voix
Le
Président : Consentement, sans débat. Je vous demande de
m'indiquer le vote de vos groupes respectifs. D'abord, M. le leader du
gouvernement?
M. Jolin-Barrette : Pour.
Le Président : M. le leader
de l'opposition officielle?
M. Fortin :
Pour.
Le Président : M. le leader
du deuxième groupe d'opposition?
M. Nadeau-Dubois : Pour.
Le Président : M. le leader
du troisième groupe d'opposition?
M. Ouellet : Pour.
Le Président : M. le député
de Chomedey?
M. Ouellette : Pour.
Le Président : Mme la députée
de Marie-Victorin?
Mme Fournier : Pour.
Le Président : Cette motion
est donc adoptée. Et je reconnais maintenant M. le député de D'Arcy-McGee.
M. Birnbaum : M. le
Président, je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la
motion suivante conjointement avec le
député de Jean-Lesage, le député des Îles-de-la-Madeleine, le député de
Chomedey et la députée de Marie-Victorin :
«Que
l'Assemblée nationale reconnaisse que la pandémie de COVID-19 et tous les
bouleversements qu'elle a créés, ont
augmenté les seuils d'anxiété et de dépression dans toutes les couches de la
population et ont eu des effets néfastes chez un grand nombre de
Québécois et Québécoises;
«Qu'elle rappelle que
les problématiques de santé mentale, si elles ne sont pas prises en charge
rapidement, peuvent avoir de nombreuses conséquences tant sur le plan personnel
que professionnel et sociétal;
«Qu'enfin,
elle exige du gouvernement caquiste de mettre en place une couverture publique
universelle des soins de santé mentale dès maintenant.»
Le Président :
Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?
M. Jolin-Barrette :
Pas de consentement, M. le Président.
Le
Président : Pas de consentement. À ce moment-ci, je reconnais
M. le leader du deuxième groupe d'opposition.
Prendre
acte de la hausse rapide des cas de COVID-19 chez les aînés et demander
au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour protéger
ceux qui vivent en résidence privée pour aînés
M. Nadeau-Dubois :
Merci, M. le Président. Je demande le consentement de l'Assemblée pour débattre
de la motion suivante conjointement avec la
ministre responsable des Aînés et des Proches aidants, la députée de Fabre, le
député de Rimouski, la députée de Marie-Victorin et le député de
Chomedey :
«Que
l'Assemblée nationale prenne acte des chiffres dévoilés hier par la
Dre Mylène Drouin, qui font état d'une hausse rapide des cas
de COVID chez les aînés;
«Qu'elle
prenne acte du nombre de cas confirmés chez les 65 ans et plus qui est
passé en deux semaines d'un peu moins de 40 par jour à une centaine;
«Qu'elle
rappelle qu'au Québec, des dizaines de milliers d'aînés vivent dans des
résidences privées pour aînés (RPA);
«Que
l'Assemblée nationale demande au gouvernement de prendre toutes
les mesures nécessaires pour protéger les
aînés vivant en RPA, notamment en limitant au maximum le déplacement de
personnel entre ces résidences tout en s'assurant d'éviter les bris de
services.» Merci.
Le Président :
Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?
M. Jolin-Barrette :
Oui, M. le Président. Consentement, sans débat.
Mise aux voix
Le
Président :
Consentement, sans débat. Vos votes pour vos groupes parlementaires respectifs.
D'abord, par le leader du deuxième groupe d'opposition?
M. Nadeau-Dubois :
Pour.
Le Président :
M. le leader du gouvernement?
M. Jolin-Barrette :
Pour.
Le Président :
M. le leader de l'opposition officielle?
M. Fortin :
Pour.
Le Président :
M. le leader du troisième groupe d'opposition?
M. Ouellet :
Pour.
Le Président :
M. le député de Chomedey?
M. Ouellette :
Pour.
Le Président :
Mme la députée de Marie-Victorin?
Mme Fournier :
Pour.
Le
Président : Cette motion est donc adoptée. Une motion sans
préavis ayant été déjà présentée par le groupe parlementaire formant le gouvernement, je demande s'il y a le
consentement pour permettre la lecture d'une autre motion sans préavis.
Consentement? M. le leader de l'opposition officielle.
M. Fortin :
Avant de consentir, on aimerait simplement être informés du sujet de la motion
en question.
Le Président :
M. le leader du gouvernement.
M. Jolin-Barrette :
C'est la motion pour les consultations particulières sur le projet de loi
n° 65.
Le Président :
Donc, consentement? Je reconnais M. le leader du gouvernement.
Procéder
à des consultations particulières sur le projet de loi n° 65
M. Jolin-Barrette : Oui, M. le Président. Je fais motion,
conformément à l'article 146 du règlement de l'Assemblée nationale,
afin :
«Que la Commission
des transports et de l'environnement, dans le cadre de l'étude du projet de loi
n° 65, Loi modifiant principalement la Loi sur la qualité de
l'environnement en matière de consigne et de collecte sélective, procède à des consultations particulières et
tienne des auditions publiques le mardi 20 octobre 2020 de 10 heures
à 11 h 50, après les affaires courantes jusqu'à 17 h 55
et de 19 h 30 à 21 h 05, le mercredi
21 octobre 2020 après les affaires courantes
jusqu'à 13 h 05 et de 15 heures à 17 h 25 et le jeudi
22 octobre 2020 après les affaires courantes jusqu'à 13 h 05
et de 15 heures à 17 h 25 et le mardi 27 octobre 2020
de 10 heures à 11 h 35;
«Qu'à
cette fin, la commission entende les personnes et organismes suivants :
RECYC-QUÉBEC, la SAQ, L'Association
des brasseurs du Québec, le Conseil canadien du commerce de détail, l'Association
canadienne des boissons, Éco-Entreprise Québec, le Conseil des entreprises en
technologies environnementales du Québec, l'Union des municipalités du Québec, la Fédération québécoise des
municipalités, la Fondation David-Suzuki, le Front commun québécois pour
gestion écologique des déchets,
Boissons gazeuses Environnement, Les bouteilles recyclées du Québec, Coop Les
Valoristes, le Réseau [de l'environnement],
Conseil de la transformation alimentaire du Québec, Association des marchands
[de] dépanneurs et épiciers du Québec, Équiterre, l'Association des
détaillants en alimentation du Québec;
«Qu'une période de
12 minutes soit prévue pour les remarques préliminaires, répartie de la
manière suivante : 6 minutes au
groupe parlementaire formant le gouvernement, 4 minutes au groupe
parlementaire formant l'opposition officielle, 1 minute au deuxième
groupe d'opposition et 1 minute au troisième groupe d'opposition;
«Que
la durée maximale de l'exposé de chaque organisme soit de 10 minutes et
l'échange avec les membres de la commission
soit d'une durée maximale de 35 minutes partagées ainsi :
17 minutes 30 secondes pour le groupe parlementaire formant le gouvernement, 11 minutes 40 secondes pour l'opposition officielle, 2 minutes 55 secondes pour le deuxième groupe d'opposition et
2 minutes 55 secondes pour le troisième groupe d'opposition;
«Que les témoins
auditionnés puissent l'être par visioconférence;
«Qu'une suspension de
5 minutes soit prévue entre les échanges avec chaque personne et
organisme;
«Que le ministre de
l'Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques soit membre
de ladite commission pour la durée du mandat.»
• (11 heures) •
Le Président :
Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?
Une voix :
...
Mise aux voix
Le Président :
Je vous demande donc vos votes respectifs en fonction de vos groupes
parlementaires. M. le leader du gouvernement?
M. Jolin-Barrette :
Pour.
Le Président :
M. le leader de l'opposition officielle?
M. Fortin :
Pour.
Le Président :
M. le leader de deuxième groupe d'opposition?
M. Nadeau-Dubois :
Pour.
Le Président :
M. le leader du troisième groupe d'opposition?
M. Ouellet :
Pour.
Le
Président : M. le député de Chomedey?
M. Ouellette :
Pour.
Le Président :
Mme la députée de Marie-Victorin?
Mme Fournier :
Pour.
Le Président :
Cette motion est donc adoptée.
Avis
touchant les travaux des commissions
À la rubrique Avis touchant
les travaux des commissions, M. le leader du gouvernement.
M. Jolin-Barrette :
M.
le Président, j'avise cette Assemblée
que la Commission des finances
publiques poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 53, Loi
sur les agents d'évaluation du crédit,
aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 15 heures à
18 heures, à la salle du Conseil législatif;
La
Commission des institutions poursuivra l'étude détaillée du projet de loi
n° 45, Loi concernant principalement la nomination et le mandat des coroners et du coroner en chef,
aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures
et de 15 heures à 18 heures, à la salle Pauline-Marois;
La Commission des
relations avec les citoyens poursuivra l'étude détaillée du projet de loi
n° 56, Loi visant à reconnaître
et à soutenir les personnes proches aidantes et modifiant diverses dispositions
législatives, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à
13 heures et de 15 heures à 18 heures, à la salle Marie-Claire-Kirkland;
La
Commission des finances publiques entreprendra les consultations particulières
sur le projet de loi n° 66, Loi concernant l'accélération de
certains projets d'infrastructure, le mardi 20 octobre 2020, de
10 heures à 11 h 50, à la salle Pauline-Marois;
La Commission des
transports et de l'environnement entreprendra les consultations particulières
sur le projet de loi n° 65, Loi modifiant principalement la Loi sur la
qualité de l'environnement en matière de consigne et de collecte sélective, le
mardi 20 octobre 2020, de 10 heures à 11 h 50, à la salle
Marie-Claire-Kirkland.
Le Président : Et, pour ma part, je vous
avise que la Commission spéciale sur l'exploitation sexuelle des mineurs
se réunira en séance de travail virtuelle le
vendredi 9 octobre 2020, de 10 heures à midi, afin d'organiser les
travaux de la commission.
Je vous avise
également que la Commission des finances publiques se réunira en auditions
publiques le lundi 19 octobre 2020, à
14 heures, pour une durée de 90 minutes, à la salle Pauline-Marois,
afin d'entendre le ministre des Finances dans le cadre de l'étude de la
politique budgétaire du gouvernement et de l'évolution des finances publiques.
Renseignements
sur les travaux de l'Assemblée
Avis
de sanction de projets de loi
À
la rubrique Renseignements sur les travaux de l'Assemblée, je vous informe
qu'aujourd'hui, à 15 h 30, au bureau de Son Honneur le lieutenant-gouverneur, il y aura sanction du projet de
loi n° 35, Loi visant à moderniser certaines règles relatives à la publicité foncière et à favoriser
la diffusion de l'information géospatiale, ainsi que du projet de loi
n° 50, Loi concernant la location d'une partie des forces
hydrauliques de la rivière Shipshaw.
Je vous avise de plus
que l'interpellation prévue pour le vendredi 23 octobre 2020 portera sur
le sujet suivant : Propositions
concrètes visant à redresser la situation dans la gestion de la crise de la
COVID-19 dans le réseau de l'éducation par le gouvernement caquiste. Mme
la députée de Saint-Laurent s'adressera alors à M. le ministre de l'Éducation.
Affaires
du jour
La période des
affaires courantes étant terminée, nous allons maintenant passer aux affaires
du jour.
Et je suspends les
travaux pour quelques instants. Merci à toutes et à tous.
(Suspension de la séance à
11 h 3)
(Reprise à 11 h 12)
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Alors, nous reprenons nos travaux. Et je vais
céder la parole à M. le leader adjoint du gouvernement.
M.
Caire :
Merci, Mme la Présidente. Pourriez-vous appeler l'article 2 du feuilleton,
s'il vous plaît?
Projet
de loi n° 39
Adoption du principe
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Alors, à l'article 2 du feuilleton, Mme la ministre responsable des Institutions démocratiques et de la Réforme
électorale propose l'adoption du principe du projet de loi n° 39, Loi
établissant un nouveau mode de scrutin. Alors, Mme la ministre, je vous
cède la parole.
Mme Sonia LeBel
Mme LeBel :
Oui. Bien, alors, merci, Mme la Présidente. C'est vraiment un beau moment pour
moi de m'adresser à vous, là, à
l'occasion de l'adoption de principe du projet de loi n° 39, la loi,
effectivement, qui établit un nouveau mode de scrutin. Comme vous le savez, Mme la Présidente, le 25 septembre
2019, j'ai eu l'honneur et, je dirais, le bonheur de présenter ce projet de loi, auquel je crois très
profondément. Nous avions pris l'engagement de le faire dans la première année
de mon mandat, nous avons tenu parole.
Donc, le
projet de loi n° 39 est le premier projet de loi qui propose de réformer
le mode de scrutin à avoir été présenté à l'Assemblée nationale dans l'histoire du Québec. Aucun gouvernement
n'est allé aussi loin, je pense que c'est bon de le souligner à ce stade-ci. Avec le mode de scrutin
proposé, nous avons trouvé, je pense, un juste équilibre. D'une part, il
constitue une avancée significative vers un
système plus proportionnel et, d'autre part, il maintient la possibilité
d'élire des gouvernements stables.
Il faut le
dire, on traverse maintenant une crise sanitaire. Je pense qu'on n'a plus
besoin de le mentionner, malgré que
je pense qu'il est toujours important de répéter qu'on est toujours dans cette
période de pandémie. Peut-être que parce que ça fait plusieurs mois, on commence à penser que c'est une nouvelle
réalité, on s'y habitue. Mais il ne faut pas s'y habituer, c'est quelque chose qu'il faut combattre à tous
les jours et pour lequel il faut continuer à être vigilants. Mais cette crise,
elle est partout dans le monde, elle n'est pas simplement au Québec, Mme la
Présidente. Le Québec, par contre, n'y échappe pas. Puis, malgré la pandémie
qui a chamboulé notre calendrier, ma volonté et celle du gouvernement d'aller
de l'avant dans cette réforme du mode de scrutin demeure la même.
Étant donné
la pause forcée qu'on a vécue, Mme la Présidente, laissez-moi rapidement vous
rappeler les grandes lignes et
principes du mode de scrutin que nous proposons. Je pense que c'est important
de ramener sur l'avant‑plan quelles sont
les motivations derrière ce projet de loi et quels sont les intérêts et
bénéfices que les Québécois pourront en tirer au niveau démocratique
pour notre société.
Plusieurs
principes adoptés à l'unanimité à l'Assemblée nationale nous guident depuis le
début de l'élaboration de ce projet de loi, soit une meilleure représentation
du vote populaire, ce qu'on appelle la proportionnalité,
l'importance du lien entre la population et les élus — on en a beaucoup discuté en consultations,
ce lien important là qu'on voit maintenant, pendant la pandémie, de plus en plus chaque jour, ce lien important
qu'on a entre le député et ses citoyens sur le terrain pour faire le pont avec le gouvernement — le respect du poids politique des
régions — avec mon
collègue du Parti québécois, c'est un
point qui a été beaucoup mis de l'avant pendant les consultations et c'est
quelque chose qu'on partage, c'est des choix qu'il faut faire, mais je pense
que le fait de maintenir, dans le projet de loi, 17 régions
administratives, c'est un des compromis
qu'on peut faire pour, effectivement, maintenir le poids politique de nos
régions — la
stabilité du gouvernement, un système
accessible, un système où chaque citoyen verra son vote compter plus, pourra
trouver que son vote est de plus en plus pertinent.
Et je pense que, dans une crise comme celle que
nous traversons maintenant, la confiance des citoyens envers leur gouvernement, la confiance envers les élus de
l'Assemblée nationale est totalement importante. Donc, une réforme du
mode de scrutin comme ça, qui pourrait paraître secondaire en ces temps de
pandémie, devient de plus en plus cruciale, justement,
pour rétablir ce lien de confiance là entre le citoyen et ses élus, ainsi
qu'une plus grande représentation des femmes, des jeunes et des communautés ethnoculturelles, ce sont des notions
qu'on a également introduites dans le projet de loi, Mme la Présidente.
Donc, on
propose, de façon beaucoup plus technique, là, un mode de scrutin mixte avec
compensation régionale, qui va compter 80 députés de
circonscription, 45 députés de région pour un total de 125 députés,
comme c'est le cas aujourd'hui. Donc, la
stabilité aussi de notre Parlement est tenue compte dans notre réflexion et
dans le projet de loi que nous avons
déposé. Les électeurs disposeront de deux votes : un vote pour un député
dans une circonscription et un vote pour les députés qui les
représenteront au niveau régional. C'est important de souligner que la liste
n'est pas une liste nationale, c'est-à-dire
que ce n'est pas une liste de candidats qui se veut être à la grandeur du
Québec, mais chaque candidat qui se
verra mettre sur une liste pour être un député, ce qu'on appelle un député de
liste, pour compenser sera un candidat qui
sera choisi sur une liste dans une région. Le lien d'attachement à la région
doit demeurer, et on en a tenu compte dans notre proposition.
Mme la Présidente, le mode de scrutin est fondé
sur les 17 régions administratives du Québec, je l'ai mentionné, avec les
Îles-de-la-Madeleine et Ungava comme circonscriptions d'exception. C'est important
également de le préserver. Je vois
mon collègue qui me fait... qui fait signe. Donc, on a les Îles-de-la-Madeleine
à coeur, malgré ce qui peut se passer dans
l'actualité récemment, je pense qu'il faut le noter. On travaille très
fort — et je
fais un aparté — pour
maintenir ce lien terrestre et on va continuer de le faire.
Le Québec est formé de régions caractéristiques
distinctes et aux identités fortes qui doivent être représentées à l'Assemblée nationale. Donc, c'est, encore une
fois, un des critères qui a guidé notre réflexion et la proposition que nous
avons déposée dans le projet de loi n° 39. On souhaite également
contribuer à une meilleure représentation des femmes, des jeunes et des personnes issues de la
diversité, un sujet qui est encore plus criant aux heures sombres que nous vivons présentement. Ce principe est énoncé clairement dans le projet de loi.
Et, en ce qui concerne la parité, les partis politiques devront se doter, donc, d'objectifs clairs et en
rendre compte durant la période électorale. Ainsi, ce sont les électeurs qui
auront le dernier mot, et c'est eux qui pourront se prononcer en toute
connaissance de cause.
Enfin, il est
prévu que le nouveau mode de scrutin soit soumis au référendum et n'entre en
vigueur que s'il obtient l'aval d'une
majorité des électeurs. De cette manière, ce sont les Québécoises
et les Québécois, Mme la
Présidente, qui auront le
dernier mot quant à cette réforme sans précédent dans l'histoire du Québec.
Bien que nous avons toujours considéré avoir
la légitimité nécessaire, la légitimité parlementaire nécessaire
pour mettre de l'avant cette réforme, je pense qu'elle est trop importante pour les Québécois, elle a trop
d'impacts sur leur démocratie, sur leur vie citoyenne pour qu'on ne
leur pose pas la question avec un projet de loi qui est clairement identifié.
Au cours de
l'hiver dernier, des consultations particulières se sont tenues. On dirait que
c'est il y a un siècle, je dois vous l'avouer, mais
c'est l'hiver dernier. Je pense qu'on peut retenir de ces consultations que la
grande majorité des intervenants qui ont été entendus sont en faveur d'une
réforme du mode de scrutin.
Naturellement, plusieurs points plus
particuliers ont été abordés, pendant cette consultation, qui sont beaucoup
plus techniques : ce qui est de,
bon, la double candidature, le mode de calcul de la distribution des candidats
pour la proportionnalité. Je
n'entrerai pas dans tous les détails, mais, si on parle de l'objectif général
du projet de loi, qui est de réformer notre mode de scrutin actuel, notre
système parlementaire actuel pour en faire un système plus proportionnel, donc
injecter plus de proportionnalité
dans le système actuel, cette idée, cet objectif remporte l'adhésion de la très
grande majorité des gens que nous avons entendus.
• (11 h 20) •
Ils
souhaitent donc un mode de scrutin qui assure une meilleure représentation des
électeurs dans un modèle mixte avec
compensation régionale. C'est le compromis à faire entre une proportionnalité
pure et de garder, comme je vous le disais,
ce lien d'attachement qu'on a avec nos députés, d'être capables de garder
jusqu'à 80 députés de circonscription et d'être capables d'avoir encore ce lien si important, si étroit, je le
disais tantôt, qu'on voit, qu'on ressent avec beaucoup plus d'urgence et
de pertinence pendant cette crise que nous vivons tous. Pour les 125 députés
de l'Assemblée nationale, on a eu l'occasion
d'en discuter à plusieurs reprises, le lien avec les citoyens est extrêmement
important, et par le maintien de
circonscriptions de type traditionnel, si on peut dire, et le fait que la liste
des députés de liste soit bien ancrée dans une région donnée, on s'assure de
maintenir cette préoccupation-là de nos citoyens d'avoir un lien avec leurs
élus qui est beaucoup plus étroit.
Les différents intervenants entendus nous ont
fait, donc, des propositions, je le mentionnais, notamment en vue d'augmenter la proportionnalité du mode de scrutin
proposé. Plusieurs nous ont parlé du seuil de votes requis ou encore de la méthode
de calcul utilisée. Le nombre de régions a aussi été évoqué à plusieurs
reprises. La parité est aussi un sujet abondamment
abordé par de nombreux intervenants. Je tiens à le redire à mes collègues ici
présents, Mme la Présidente, tous
les projets de loi sont perfectibles. On a eu de belles discussions pendant les
consultations. Et je suis contente qu'on passe à l'adoption de principe aujourd'hui parce qu'on pourra aller de
l'avant, en commission parlementaire, à
l'étude article par article, et je suis convaincue qu'on pourra avoir
des discussions constructives.
Quand je parlais du point d'équilibre, tantôt,
qu'on a su trouver, c'est ce point d'équilibre là entre injecter une proportionnalité plus grande qui est crédible,
donc, qui fait en sorte que la... Parce que, de passer d'un mode de scrutin x à
un autre, si on n'a pas d'effet sur
l'aiguille de la proportionnalité, c'est changer, pour moi, quatre trente-sous
pour une piastre. Donc, il fallait
trouver la façon d'être capable de passer à un mode de scrutin beaucoup plus
proportionnel, qui a un effet probant sur cette proportionnalité-là, qui
donne effectivement à nos citoyens beaucoup plus de pouvoir pour leur vote individuel, tout en respectant les autres
caractéristiques que je vous disais. Et ce sont tous des vases communicants. Si
on ajoute plus de proportionnalité, nécessairement
on doit peut-être diminuer le nombre de régions, peut-être
on doit augmenter le nombre de députés de liste, on doit diminuer le
nombre de circonscriptions.
Alors, ce
sont tous des intérêts qui sont importants pour le gouvernement : le nombre de régions, le poids des régions, la proportionnalité, le lien avec le député, la
stabilité du gouvernement, être capable d'assurer que, malgré ce
changement-là, on réussit quand même
à avoir des gouvernements qui sont stables. Ce sont tous des facteurs qui
s'influencent entre eux. Et ce que
j'ai eu l'occasion de le dire à plusieurs reprises pendant les consultations,
trouver ce que j'appelais ce point de friction, ce point d'équilibre
entre tous ces facteurs-là, je pense qu'on a réussi à l'atteindre, mais ce
point-là demeure perfectible et je pense
qu'on a encore une certaine marge de manoeuvre pour respecter tous ces
critères-là, tout en ajustant encore notre projet de loi.
Donc, je suis
ouverte à le bonifier. Je ne sais pas si ça transparaissait de mes propos, mais
je vais le dire de façon très claire : Je suis ouverte, naturellement,
à bonifier et améliorer le projet de loi n° 39, des améliorations qui
pourraient permettre d'atteindre, donc,
notre objectif, comme je le disais, de proportionnalité, mais d'offrir aussi des
institutions plus représentatives, plus démocratiques et plus
accessibles.
Toutefois, je
le disais, il faut maintenir ce point d'équilibre là et c'est un des objectifs
de ce projet de loi. Il y a plusieurs, je le disais, plusieurs
facteurs dans notre entente, plusieurs facteurs qui sont interreliés, mais qui
aussi... pas interfèrent, mais ont un
effet les uns sur les autres. Donc, si on augmente d'un côté, on diminue de
l'autre, c'est nécessairement vrai. Si on augmente le nombre de circonscriptions, on diminue l'effet de la proportionnalité. Alors, c'est un jeu
d'équilibre pour trouver une réforme du mode de scrutin qui nous
permettra quand même d'atteindre l'objectif principal : injecter beaucoup
plus de proportionnalité dans notre système actuel. Et cet équilibre-là est
nécessaire, il est même essentiel pour conserver
le large consensus que je pense avoir su atteindre dans cette proposition de
réforme. Il est névralgique, ce point de
friction là, pour moi, et je le vois comme la voie de passage pour réussir à
faire cette réforme qui est tant attendue et, je le pense et je le crois
sincèrement, qui sera et qui est au bénéfice de nos citoyens.
Donc,
lorsqu'on regarde le projet de loi n° 39, avec
la compensation régionale, les 17 régions, le seuil
national, je considère qu'on doit aujourd'hui se réjouir. Il constitue
une avancée pour la représentation des intérêts des différentes régions du Québec à l'Assemblée nationale. Il
garantit un nombre de sièges minimal à chacune des régions, c'était important
pour nous. Il permettra également la fin des chevauchements des frontières de
circonscriptions sur plus d'une région administrative, ce qui est une demande
de plusieurs MRC dans tout le Québec. Ce sont tous des avantages qui me font dire que le projet de loi n° 39 va
nous permettre de mieux représenter nos citoyens, je ne peux pas le répéter
assez souvent, quelle que soit la région dont ils proviennent. Ça
démontre la recherche, là, de ce fragile équilibre.
Mme la Présidente, d'autres modifications sont
possibles, par contre, pour bonifier le projet de loi n° 39, des modifications qui n'ont pas nécessairement
d'impact sur la proportionnalité, ou la représentation des régions, ou
encore la stabilité du gouvernement, qui sont les trois principaux objectifs et critères qui guident notre
action dans ce dossier. La double
candidature en est un bon exemple. C'est une mesure qui a été largement
demandée lors des consultations
particulières et qui serait, donc, de
nature à favoriser un large consensus. La
question de la parité, également, est un autre
exemple. Lors des consultations
particulières, cette question
a occupé une place plus que prépondérante, et je considère que c'est un enjeu
très important dont on devra débattre, là, dans les études article par article
à venir.
Donc, on
propose de consolider les efforts des dernières élections, et il énonce,
d'ailleurs, l'importance de favoriser les
candidatures féminines. Il fixe la zone paritaire pour atteindre... pour les partis politiques et mentionne que tout parti
politique devra transmettre à Élections
Québec un énoncé au sujet des objectifs qu'il souhaite se fixer concernant la
parité. Un parti qui se fixe, donc, des objectifs qui sont trop bas ou
qui ne réussit pas à les atteindre aura à s'expliquer à la population et à répondre aux questions des médias.
Une forte pression politique, je pense que c'est la meilleure pression pour
faire bouger les partis politiques en
matière de parité et d'équité, c'est la pression populaire. On l'a vu aux
dernières élections, hein, tous les
partis confondus ici, à cette Assemblée nationale, ont présenté plus de
candidatures féminines que jamais. On a
maintenant une Assemblée nationale qui est paritaire, je dois le dire, un
Conseil des ministres qui est paritaire. Donc, je pense qu'il ne faut pas
nécessairement ne tabler que sur ces bons résultats, il faut se donner les
moyens de les conserver et continuer
à aller de l'avant, mais je pense que la meilleure motivation pour un parti
politique, c'est l'opinion publique, et c'est ce qu'on propose de mettre
de l'avant.
Le changement
du mode de scrutin actuel à un mode de scrutin proportionnel avec compensation régionale
a le potentiel d'avoir un impact
significatif sur nos institutions démocratiques et sur la culture politique
québécoise. Il y aura très
certainement une période d'adaptation, une période de changement, mais je pense
qu'au bout du compte c'est bénéfique pour
tous les citoyens. Donc, on croit toujours qu'il est essentiel que les citoyens
puissent se prononcer directement, donc,
sur la réforme du mode de scrutin à l'occasion d'un référendum. Je l'ai dit
tantôt, c'est une question pour laquelle le gouvernement est convaincu d'avoir
la légitimité politique nécessaire, compte tenu de l'adhésion aussi de deux
autres des partis politiques représentés
dans cette Chambre, d'aller de l'avant, mais ce n'est pas notre objectif.
Notre objectif est de
faire en sorte que les Québécois s'approprient ce nouveau mode de scrutin, le
comprennent, l'aiment parce qu'il est fait pour eux, et je suis
profondément convaincue qu'ils sauront l'apprécier. Et le fait d'avoir mis une
proposition qui est détaillée sur la table
et de ne pas demander aux citoyens dans l'abstrait, dans l'absolu :
Êtes-vous pour la réforme du mode de scrutin?, je pense que c'est un
atout considérable.
On en débat
présentement, on débat des technicalités à la commission parlementaire, mais ces technicalités-là ont, derrière elles, les objectifs que je vous ai
énoncés : plus de représentativité, un poids plus important du vote
individuel de nos citoyens, un
équilibre entre le poids des régions, le lien avec le député, les régions
administratives, la bonne représentativité à l'Assemblée nationale, la
diversité. Et ça, c'est quelque chose qui est demandé par les citoyens depuis
longtemps, et c'est ce qu'on est en train de
faire avec la réforme de mode de scrutin. Donc, le fait de demander un référendum,
pour moi, n'est qu'une évidence, demander aux citoyens de se prononcer. C'est
leur mode de scrutin, ils devront vivre avec pendant plusieurs années,
et je pense que c'est la chose à faire, donc elle doit leur revenir ultimement.
Donc, Mme la
Présidente, en terminant, j'ai bien hâte d'entrer dans les consultations
particulières... article par article, pardon.
C'est toujours un moment qui est très intéressant pour moi, où j'ai eu
l'occasion d'avoir, avec mon collègue d'en face, sur d'autres projets de loi, des débats éclairants, des débats qui
sont respectueux, je dois le dire, et des débats qui sont pertinents. Donc,
très bonne nouvelle pour moi de pouvoir faire l'adoption de principe et de
pouvoir enfin passer, le plus rapidement possible, je le souhaite, à la
prochaine étape. Merci, Mme la Présidente.
• (11 h 30) •
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la
ministre. Et maintenant
je vais céder la parole à M. le député de LaFontaine.
M. Marc Tanguay
M. Tanguay : Merci beaucoup,
Mme la Présidente. Alors, je tiens à rassurer la ministre, et ça, c'est un
message important... Vous allez voir que,
sur le projet de loi n° 39, nous ne partageons pas du tout, du tout la
même philosophie. Durant l'heure qui
m'est dévolue, Mme la Présidente, je vais tenter d'expliquer le plus clairement
possible tous les écueils, tous les risques que représente le projet de
loi n° 39. Et je tiens à assurer la ministre, et ça, c'est important,
d'entrée de jeu, de le dire, elle a raison,
on a déjà travaillé sur des projets
de loi, je pense qu'il y a une belle
relation de respect entre nous, entre
collègues, particulièrement avec la ministre
qui est chargée, ici, de ce dossier du p.l n° 39,
réforme du mode de scrutin. Nous
allons faire, de l'opposition officielle, le débat. Nous avons fait nos
devoirs, vous allez le constater durant l'heure qui m'est dévolue. Nous serons toujours respectueux des opinions contraires et nous
avancerons, c'est notre prétention, des arguments réfléchis, étayés,
documentés qui démontrent, par a plus b, que plusieurs éléments du projet de
loi n° 39 ne tiennent pas la route et
que, dans ses principes mêmes, j'aurai l'occasion de revenir, Mme la
Présidente, sur une motion qui avait été adoptée à l'Assemblée nationale, qui est
reprise dans l'entente de mai 2018 qui avait été signée par le chef de la
CAQ à l'époque, l'actuel premier ministre.
Les six principes, Mme la présidente, dans le projet de loi n° 39, ne sont
pas respectés.
Alors,
j'ai 60 minutes. Quand j'étais à l'école du Barreau, à l'université, quand
on avait des examens qui duraient trois
heures, je m'étais donné un code, Mme la Présidente, en disant : Si c'est
trois heures, on a 180 minutes. Si c'est une question à 10 points, je vais y consacrer
18 minutes. Si c'est une question à 20 points, je vais y consacrer
36 minutes. Il y a tellement
d'éléments à aborder que j'ai fait le même exercice ici, dans l'heure, pour
m'assurer de toucher à chacun des aspects le plus possible. Puis, honnêtement, des fois vous dites : Ah! le
député de LaFontaine va parler pendant une heure... Je n'en aurai pas de
trop, Mme la Présidente.
Vous
allez d'abord me permettre... Puis on peut subdiviser, mais ce n'est pas égal
un tiers, un tiers, un tiers. Mon intervention,
d'abord, on va faire un bref rappel historique, 2002 à aujourd'hui. Dans un
deuxième temps, Mme la Présidente, on
va parler de l'entente de mai 2018, signée à l'époque par le chef de la CAQ,
actuel premier ministre, qui faisait en sorte qu'ils se ralliaient à déposer un projet de loi sur le mode de scrutin,
selon certaines conditions. Donc, premier point : retour historique. Deuxième point : l'entente de mai
2018. Et troisième point : le projet de loi n° 39, notre
analyse, ce qu'on a entendu et ce que l'on doit décoder aussi derrière
tout ça.
Alors,
Mme la Présidente, dans un premier temps, bref rappel historique. D'où
venons-nous dans l'histoire récente du
Québec? D'abord, il est important de souligner d'où vient le Parti libéral du
Québec. À l'intérieur du mémoire présenté par le Parti libéral du Québec à la Commission des institutions en 2002,
on pouvait y lire ce qui suit : «Un gouvernement libéral procédera, dans les deux ans suivant l'élection et après consultation, à une
réforme du mode de scrutin afin d'introduire des modalités [d'ordre]
proportionnel.» Alors, il est important de souligner deux aspects — fin
de la citation : après consultation et
modalités d'ordre proportionnel. Ça, c'était dans le programme de 2002 du Parti
libéral du Québec. Qu'en a fait le
Parti libéral? Et la pertinence de ce point-là, c'est de voir que l'on ne vient
pas de nulle part. Il y a une réflexion, il y a un processus qui a été
fait, notamment lors du mandat de 2003 du Parti libéral du Québec.
Suite
aux élections générales de mars 2003,
le gouvernement a confié à
M. Louis Massicotte le mandat d'examiner les modalités possibles d'un mode
de scrutin mixte compensatoire adapté au Québec. Il y a eu le fameux rapport
Massicotte qui a été rendu public en
décembre 2004. En même temps, le gouvernement a déposé à l'Assemblée nationale
un avant-projet de loi remplaçant la Loi électorale. Ça, c'était un avant-projet de loi, Mme la Présidente, qui devait évidemment... et qui proposait un mode de scrutin mixte compensatoire,
qui allait faire l'objet de quoi? Ce que je vous ai dit du programme
du Parti libéral en 2002, d'une consultation, avant-projet de loi
destiné à la consultation.
En
juin 2005, le ministre Benoît Pelletier a présenté une motion à l'Assemblée nationale. Créant quoi? Une commission spéciale chargée
d'étudier l'avant-projet de loi. La commission spéciale était constituée de neuf députés de
tous les partis politiques, et je tiens à souligner qu'elle était présidée par
François Ouimet, notre collègue de Marquette à l'époque, et je tiens à saluer
le travail qu'il a fait là-dessus. Puis il m'en a parlé, François, puis il m'a
dit de l'intérieur comment ça s'était passé.
Ils avaient, vous allez voir, travaillé extrêmement fort. C'était la
phase nécessaire de consultation,
avant-projet de loi, consultations. Donc, neuf députés, huit citoyens ont participé à ces
consultations-là. Alors, vous voyez qu'on ne vient pas de nulle part.
Alors,
qu'a fait la commission? Puis vous allez me permettre de prendre le temps.
Un dépliant, excusez du peu, invitant
les citoyens à participer aux travaux de la commission a été distribué par
la poste dans 3 340 000 foyers
québécois. La commission a rencontré 1 170 citoyens qui
avaient choisi de s'exprimer. Elle a fait une tournée du Québec. Elle a reçu 371 mémoires et elle en a entendu,
ultimement, 379. Imaginez-vous, Mme la Présidente, imaginez-vous la
consultation. 379 groupes ont
été entendus lors de cette consultation-là. Et, je vous l'ai dit, ils avaient
fait une tournée du Québec, 17 villes avaient été rencontrées.
Donc,
d'où vient le Parti libéral? Engagement clair : Oui, on va l'étudier de
façon... la proportionnelle mixte, très sérieusement. C'est ce qu'on veut faire. Parole honorée. Dépôt d'un
avant-projet de loi, consultations. Je viens d'étayer ce qui avait été
effectué sur le terrain.
Alors,
Mme la Présidente, en avril et mai 2006, la commission a rendu publics
plusieurs rapports. Il y avait d'abord un premier rapport qui était
relatif aux modalités d'exercice du droit de vote, 25 avril 2006.
Par la suite,
deuxième rapport sur, notamment, le mode de scrutin et des mesures incitatives
pour le vote. Mode de scrutin, rapport du
31 mai 2006, les conclusions de ce rapport-là, Mme la Présidente, ne
pouvaient pas être mieux exprimées que
par Benoît Pelletier lorsqu'il a fait une déclaration ministérielle le
13 décembre 2006, et je vais le citer. Quelles étaient les conclusions de cette consultation-là? Je le
cite, il parlait de la Commission spéciale sur la Loi électorale qui avait
terminé ses travaux fin mai dernier : «...malgré ses appuis de principe,
la commission n'a pas été en mesure de dégager un consensus au regard des modalités précises d'un éventuel
système proportionnel mixte.» Et ça, c'est important, c'est un niveau de
distinction important.
Sur
le principe d'une proportionnelle, quand vous dites juste ça, Mme la
Présidente, ça peut être vendeur, ça peut être accrocheur. Êtes-vous
pour ça, la proportionnelle? Êtes-vous pour ça, pour que l'Assemblée nationale
soit plus représentative? Si vous arrêtez
là, c'est bien sûr que les gens vont dire : Bien, pourquoi pas? À prime
abord, oui. Sur les modalités, je
viens de vous faire montre, dans les faits, de l'énorme consultation qui avait
eu lieu. Le ministre Pelletier faisait le rapport, et
Francois Ouimet, qui présidait cette commission-là, m'en avait parlé,
tournée du Québec, et ainsi de suite. «...malgré
ces appuis de principe, la commission n'a pas été en mesure de dégager un
consensus au regard des modalités précises d'un éventuel système
proportionnel mixte.» Et il précisait : Les avis sont partagés au sujet
suivant : beaucoup d'intervenants
voulaient une compensation au niveau du Québec et, a contrario, un nombre
important voulaient une compensation régionale.
Le projet de loi, Mme la Présidente,
prévoit une compensation régionale. À l'époque, il n'y avait pas de consensus
et il n'y avait pas de consensus, Mme la
Présidente, en se disant : Oui, sur le principe, ça peut paraître une
bonne idée, mais les modalités ne sont pas des détails. S'il n'y a pas
consensus sur une répartition nationale ou régionale, ça, c'est un écueil.
Puis je vais vous
citer des extraits du rapport de la Fédération québécoise des municipalités qui
disent que la compensation régionale du
projet de loi n° 39 est un écueil majeur. Également, ils soulevaient que
l'agrandissement des circonscriptions fait craindre pour la disponibilité des
élus. On va y revenir. C'est un autre écueil qui vient dans le projet de loi n° 39. Et évidemment, les gens avaient
souligné qu'ils craignaient la stabilité gouvernementale et préféraient la
simplicité que confère un seul vote pour l'électeur. C'était un autre
écueil.
Donc,
sur le principe, on peut tous dire : Oui, ça a de l'allure, une meilleure
représentation, proportionnalité. Mais, après tout ce travail herculéen
qui a été fait, les constats sont, sur les modalités, qui ne sont pas des
détails et qui sont déterminants : Il n'y avait pas accord, il n'y avait
pas entente.
• (11 h 40) •
Alors,
ça, c'est le premier point que je voulais faire, Mme la Présidente, d'où on
vient. Et, par la suite, il est important de souligner que ce n'était pas resté là. Face à ça,
Benoît Pelletier avait mandaté le DGEQ pour qu'il donne son avis. Le
Directeur général des élections, il avait
rendu public son rapport en décembre 2007, dans lequel il ne prenait pas
position dans le dossier, mais
faisait l'inventaire des avantages et inconvénients des modalités du mode de
scrutin mixte compensatoire. Lors des
élections générales du 8 décembre 2008, au Québec, Mme la Présidente,
aucun parti politique, exception faite de Québec solidaire, n'avait inclus la réforme du mode de scrutin sur sa
plateforme électorale. Fin de cette histoire-là, Mme la Présidente. On
vient de là.
Donc,
sous un gouvernement libéral, 2003 à 2007, Mme la Présidente, il y a eu
cette réflexion, ces avancées au niveau collectif, qui ont eu lieu pour faire
avancer la réflexion.
Alors, je vais
poursuivre, Mme la Présidente, et je vais enchaîner sur l'entente de
mai 2018. L'entente de mai 2018,
je me rappelle, j'étais dans mon
bureau, quand je voyais défiler la conférence
de presse, entente de mai 2018 qui a été signée par, à l'époque, le chef de la Coalition avenir Québec,
l'actuel premier ministre, le chef du Parti québécois, Québec solidaire et le Parti vert. Il y avait trois
engagements fondamentaux. Mai 2018, c'est avant la dernière élection
d'octobre 2018. Les trois engagements
fondamentaux, je cite : «Attendu
que nous sommes arrivés à la conclusion que les député-e-s de l'Assemblée nationale du Québec devaient être élu-e-s, à partir de la 43e législature,
selon un mode de scrutin [proportionnel]...» Premier engagement, Mme la
Présidente. Bref, la 43e législature,
soit en 2022, devrait être élue selon un mode proportionnel. C'était le premier engagement fondamental. Le deuxième engagement de l'entente de mai 2018 : «Nous nous
engageons à déposer un projet de loi[...] — c'était
ça, l'engagement, Mme la
Présidente, puis je vais revenir sur
une modalité — au
plus tard le 1er octobre 2019.»
Retenez cette date. On s'engageait à déposer un projet de loi au plus tard le
1er octobre 2019, mais la
réforme qui devait faire en sorte que le mode de scrutin allait être en place en 2022 devait se faire. Donc,
premier engagement, c'était la
dernière élection sur le mode actuel en 2018; 2022, ce serait le nouveau mode
de scrutin. Deuxième engagement, ça
se ferait par une loi. C'est une loi votée à l'Assemblée nationale qui
déciderait et qui mettrait ça en oeuvre. Et le troisième aspect, Mme la Présidente : Ce projet de loi là
devrait rencontrer les six principes auxquels la ministre a fait référence un
peu plus tôt. Les six principes, elle
les a nommés, je vais y revenir en conclusion. Et vous verrez qu'à la conclusion, à la fin de mon intervention, aucun,
aucun des six principes de l'entente de mai 2018 ne sont rencontrés, ne
sont accomplis par le projet de loi n° 39. Puis je vais vous en faire la
démonstration par A plus B.
Alors,
face à cela, évidemment, les trois engagements, on les connaît,
ont été réitérés, notamment le 26 février 2019. La réforme du mode de scrutin ne fera pas l'objet d'un référendum, réitère la ministre. Ça, c'est l'engagement 2 de l'entente. On va le faire par loi, puis 2022, ça va
être le nouveau mode de scrutin puis on va respecter les six principes. Le 26 février 2019, Mme la Présidente, la ministre en charge avait spécifié qu'il n'y aurait pas de référendum
pour avaliser ce changement-là. Et la
logique était exprimée. «Lors des élections de 2018, ces partis ont récolté un
peu plus de 72 %[...] — ces partis,
c'est la CAQ, QS et PQ, qui, sur cet enjeu, marchent main dans la main — ont fait élire [ensemble les trois] 95 députés. Ce résultat offre — et je cite la ministre — "le consensus nécessaire pour aller de
l'avant et [légitimer] notre démarche".» Fin de la citation.
Bref,
il n'allait pas y avoir de référendum, elle le réitère le
26 février 2019. Et un acteur important, c'est Jean-Pierre Charbonneau,
qui est président du Mouvement Démocratie nouvelle, parce que le même jour,
évidemment, la ministre annonçait une subvention de 225 000 $ au
Mouvement Démocratie nouvelle. Lui, Jean-Pierre Charbonneau, portait un jugement très dur sur ceux qui auraient voulu un
référendum, et je le cite : «Au Québec, les gens qui, actuellement,
demandent un référendum sont ceux qui sont pour le statu quo.» Fin de la
citation. Il avait déjà étiqueté que ceux qui voulaient un référendum, c'était le statu quo. Puis la
ministre, le 26 février, elle dit : Non, non, non, il n'y aura pas de
référendum, ce sera au niveau d'une loi que l'on va procéder.
Il
y a eu, Mme la Présidente, bien évidemment, dépôt du projet de loi. Le projet
de loi n° 39 a été déposé à minuit moins cinq. Je vous ai dit que, dans l'entente de mai 2018...
disait que vous allez déposer un projet de loi, au plus tard, le 1er octobre 2019. Bien, le projet de
loi, Mme la Présidente, a été déposé quelques jours avant, le
25 septembre 2019. Puis pourquoi
expliquer ça, Mme la Présidente? Le 25 septembre 2019, le premier
ministre disait ce qui suit, je le cite : «C'est plus complexe que ce que
je pensais. On avait souhaité une mise en oeuvre plus tôt, mais on a
sous-estimé l'ampleur de la tâche.» Fin de la citation.
25 septembre 2019, minuit moins cinq, dépôt d'un projet de loi de
227 articles.
Les deux derniers
articles, juste pour vous montrer, Mme la Présidente, puis vous me permettrez...
En tout respect, ça fait un peu brouillon.
Les deux derniers articles, Mme la Présidente, excusez du peu, balayaient du
revers de la main une grande loi
québécoise, celle de 1978, la Loi sur les consultations populaires.
L'article 226 puis 227 disaient : Ça va se faire par référendum, puis, la Loi sur la consultation populaire,
on met ça de côté, elle ne s'applique pas, puis voici la question. Je vais vous lire peut-être tantôt,
si j'ai le temps, la question de 35 mots qui va être posée, puis c'est oui
ou non, il y aura un référendum.
Alors,
premier recul. Exit, mai 2012, l'engagement du premier ministre de faire
en sorte que ça se fasse par loi, réitéré
le 26 février par la ministre. Quelques mois après, ils disent : Non,
non, non, ça va se faire par référendum. Première déception chez Jean-Pierre Charbonneau, qui a
dit : Ceux qui veulent un référendum, c'est les tenants du statu quo.
Premier recul, premier reniement. Il y a eu un reniement, il a renié sa
parole sur cet aspect-là.
Poursuivons.
Donc, le dépôt du projet de loi, Mme la Présidente, 227 articles, le 25 septembre 2019.
On voyait que le premier ministre, de son aveu même, disait : C'est
plus complexe que ce que je pensais, on a sous-estimé l'ampleur de la tâche. Ça, Mme la Présidente, prenez
l'analogie des Dents de la mer. Ça, c'était Jaws 1, Les
dents de la mer 1. Jaws 2, «the return», le retour,
a eu lieu, Mme la Présidente, quelques mois après, deux mois après, le
5 décembre 2019.
Le
5 décembre 2019, les deux articles qui balayaient du revers de la main la
Loi sur les consultations populaires sont devenus 163 nouveaux articles, partie deux de Jaws 2
qui vient faire en sorte de gérer le référendum. 163 articles ont été
déposés, parce qu'ils ont voulu... vous l'avez compris, ils ont voulu presser
puis respecter l'engagement du 1er octobre, ils ont déposé ça le 25 septembre, 227 articles. Les deux
derniers : exit, la loi sur le référendum. La question, ce sera ça.
Mais la loi
sur les référendums, Mme la Présidente, qui est une grande loi québécoise,
stipule un principe extrêmement important
à son article 15. Depuis 1978, vous ne pouvez pas, au Québec, et c'est
fondamental dans notre démocratie, faire un référendum en même temps qu'une élection, parce qu'il y a mélange des
genres. Une élection générale, c'est des enjeux. Qui je veux comme député? Est-ce que je vais voter pour elle? Est-ce que
je vais voter pour lui? Est-ce que je vote pour tel parti, tel autre parti? C'est les idées, c'est les
débats, c'est les enjeux nationaux, régionaux, locaux. Vous le savez mieux
que moi, tout le monde ici ont fait une
campagne électorale, puis on n'a pas trop de 35 jours pour débattre puis
essayer de faire valoir notre point
puis, le jour du vote, d'essayer de sortir le vote, puis faire en sorte qu'on
puisse gagner, puis de faire en sorte
de représenter notre population. Puis là il y a des débats à travers ça, des
débats locaux, régionaux, nationaux. On en a tous fait, et c'est
important, c'est un enjeu.
Ajoutez à ça
un débat sur une modification d'un mode de scrutin ou, à l'époque, ça aurait pu
être un débat sur la souveraineté du Québec, vous venez de mélanger deux
sauces qui ne se mélangent pas. Je vous donne juste un exemple, puis je l'ai dit en consultation, mes chers amis
de Québec solidaire, durant la campagne électorale, si d'aventure, on
faisait ça en même temps que l'élection,
vont dire : Bien, votez pour Québec
solidaire à cause de ça, ça, ça qu'on
propose, puis à cause que nous, on va vouloir, évidemment, que le mode de
scrutin soit modifié, puis on vous encourage à voter oui sur le référendum. Bien, au niveau de la dépense
électorale, vous allez faire quoi sur cette publicité-là? Votez pour QS à cause
d'un, deux, trois arguments puis, de quatre, votez oui au référendum.
Il y est
prévu, et c'est la... fondamental de la loi de 1978, que vous ne pouvez pas
avoir deux campagnes en même temps,
parce que vous devez avoir deux administrations en même temps, vous devez avoir
un débat clair. Et les gens sont venus nous le dire, même les gens de
Démocratie nouvelle... Ça, c'était quasi-unanimité. 98 % de ceux qui sont
venus nous voir, Mme la Présidente, ont dit :
Non, non, un référendum... Bien, première des choses, Jean-Pierre Charbonneau,
il n'en veut pas, de référendum. Pas besoin de référendum, vous avez la
majorité. Ne consultez pas la population, pas de référendum. Les gens sont venus dire : Ne faites pas ça, ne faites
pas ça. Ceux qui n'en veulent pas, ceux qui en veulent, ils ont dit :
Ne faites pas ça en même temps que l'élection, ça ne permettrait pas d'avoir un
sain débat démocratique.
Donc, en ce
sens-là, Mme la Présidente, on l'a vu, dépôt de 227 articles le
25 septembre 2019 et, quelques mois après, octobre, novembre, décembre, deux mois et demi après,
5 décembre 2019, 163 nouveaux articles, ce qui fait en sorte
qu'à l'heure actuelle nous avons tout près de 400 articles sur la table.
Retenez bien ça parce qu'on va vous parler des délais d'exécution par la suite. Parce que le DGEQ, s'il
veut organiser un référendum en 2022, il faut qu'il ait le temps. Il faut
qu'il ait le temps d'organiser les camps du
Oui, les camps du Non. Il faut qu'il ait le temps de tout structurer ça et il
est venu nous le dire. Je vais vous
donner le punch un peu plus tard, si vous restez à l'écoute, Mme la Présidente,
du délai imposé par le DGEQ. Si le
DGEQ n'a pas la loi adoptée et sanctionnée avant telle date, il n'y aura pas de
référendum parce qu'il n'aura pas le temps de le dire. Puis celles et ceux qui
sont rapides, à la maison, allez voir dans son mémoire à la page 67,
vous allez avoir une avance sur les autres.
On va le dire tantôt, c'est quoi, ce délai-là pour que tout ça, là, les
227 articles, les 163 articles, près de 400 articles,
soient adoptés et sanctionnés.
Mais, Mme la
Présidente, vous allez me dire : Jaws, c'est un peu comme Rocky,
il n'y en avait pas juste deux, films, il
y en avait un troisième, film. La ministre l'a dit... Durant les auditions, là,
ceux qui sont pour, ceux qui sont contre ont soulevé : Ça, ça ne marche pas, ça, ça ne marche pas. Ça, ça ne
tient pas la route. Puis, dans les 40 minutes qu'il me reste, j'aurai l'occasion d'aborder certains de ces
amendements-là qui sont fondamentaux, qui sont majeurs. Je vois mon collègue
de La Pinière, il va en parler, entre
autres, d'un amendement qui est majeur, sur le 10 %. Je vais l'aborder
brièvement, mais mon collègue de
La Pinière va nous servir ça à sa sauce, puis vous allez voir qu'on va
comprendre ce qu'il veut dire très clairement.
• (11 h 50) •
Jaws 3, là, il y a énormément... Ah!
je peux monter les attentes, mon collègue de La Pinière, il va les
rencontrer, Mme la Présidente. Je me serais
attendu à ce qu'il applaudisse lui-même, rendu là, mais c'est correct. Il a une
certaine retenue parce
qu'indirectement... Alors, Mme la Présidente, Jaws 3, c'est quoi?
Je vous annonce, la ministre l'a déjà laissé entendre, il va y avoir des
dizaines, et des dizaines, et des dizaines d'amendements, très clairement.
Donc, d'un projet de loi qui est passé de
227 plus 63, près de 400, on va être près d'un projet de loi de près de
500 articles. Et ça, ça démontre un peu le patchage, si vous me permettez, en tout respect, l'expression,
l'aspect un peu brouillon de cette approche-là pour rencontrer, pour ne
pas directement renier un engagement électoral de mai 2018 : il n'y
aurait pas de référendum, ça ferait par loi. Il va y avoir un référendum.
Le deuxième
élément, autre élément important, Mme la Présidente, le premier ministre y
croit tellement au projet de loi qu'il a mis, à travers les amendements, la
batch, si vous me permettez l'expression en tout respect, du 5 décembre, il a mis un article 225.8. Il
faut aller le chercher, là. 225.8, qu'est-ce qu'il dit, cet article-là qui
traite du référendum puis des camps? «Une personne morale ne peut être désignée comme camp
référendaire si l'une des personnes suivantes est un administrateur, un
dirigeant ou le représentant financier...» Qui? Un membre de l'Assemblée
nationale ou un chef d'un parti autorisé
représenté à l'Assemblée nationale. Ça, c'est le premier ministre du Québec.
Ça, c'est le chef de la CAQ. Ça, c'est l'article 225.8 qui fait en
sorte que, lui, il ne présidera pas le camp du Oui à l'élection référendaire.
Il ne veut pas présider le camp du Oui. Il
ne pourra même pas être dirigeant, Mme la Présidente, du camp du Oui. Ça
démontre, Mme la Présidente, tout, je
dirais, le sérieux... en tout respect, le manque de sérieux qui est accordé à
ce dossier-là. Et ça, vous savez où on loge.
Je
vais y aller, avec le temps qui m'est dévolu, sur les éléments qui ne
fonctionnent pas. Puis je vais citer, entre autres, la fédération des
municipalités du Québec et d'autres, il y a des écueils majeurs. C'est un
bouleversement de notre démocratie. On va
voter contre le principe, de l'opposition officielle, parce que c'est un vote
responsable et raisonnable. Et
surtout, les six principes étayés dans l'entente de mai qui ont été repris dans
une motion à l'Assemblée nationale, voté à l'unanimité, on a voté pour ça, nous, vous allez voir que les six
principes non seulement ne sont pas épanouis par le projet de loi, mais
sont contredits, sont empêchés par le projet de loi.
Alors,
le premier ministre ne sera pas président du camp du Oui, oubliez ça, Mme la
Présidente. Et, en ce sens-là, c'est important de le souligner.
Alors,
vous allez me permettre maintenant, on va y aller, on va aborder le projet de
loi un peu plus d'avant. Là, c'est assez instructif. Il y a tellement de
matière, là, j'essaie de m'organiser, Mme la Présidente, pour être digestible,
mais surtout compréhensible.
Regardons les comparatifs. On se compare avec quoi? Beaucoup de gens sont venus
nous dire : On va se comparer à l'Écosse.
Ils sont venus nous dire... Puis là l'argument qu'ils disent : Aïe! nous
autres, les Québécois, là, on n'est
pas plus fous que les Écossais. Les Écossais, ils ont un système de même.
Pourquoi qu'on n'en aurait pas un, nous autres? C'est encore une fois le principe de base. Une fois qu'on a dit
ça, c'est clair. Moi, le premier, je dirais : Bien oui, c'est vrai, on
n'est pas plus fous que les Écossais, nous autres, là, pourquoi on ne pourrait
pas en avoir un de même? Mais, quand
on va voir dans les... 2002, les modalités ne sont pas des détails. Les
modalités sont des écueils majeurs, des bouleversements de notre
démocratie.
Alors,
on se compare à qui? On se compare à l'Écosse, Mme la Présidente. Parfait. L'Écosse entre 20 fois dans le
Québec, le territoire. Le Québec, c'est un
vaste territoire. L'Écosse entre 20 fois, on peut mettre 20 fois
l'Écosse dans le Québec. L'Écosse a
5,4 millions d'habitants. Au Québec, on en a 3 millions de plus,
c'est 8,4 millions d'habitants, j'arrondis. Nous avons 125 députés, les Écossais en ont
129. Alors, quand vous avez dit ça, Mme
la Présidente... Puis c'est
Napoléon qui disait : Il faut
avoir la politique de sa géographie. Quand vous dites que l'Écosse, qui est 1/20 du Québec...
l'ensemble du Québec, l'Écosse, c'est 1/20, une toute petite partie. Ils
sont 3 millions de moins puis ils ont quatre députés de plus. Ils n'en ont pas 125, ils en ont 129. Là, vous
pouvez vous amuser à faire une proportionnelle, parce que votre territoire
n'est pas immense puis parce que votre population est concentrée sur ce
territoire-là. Et, quand vous divisez le total de la population, 5,4 par 129, ça vous donne une proportion nettement moins
élevée de commettants, de citoyens à représenter que si vous prenez le
Québec, immense territoire, et que vous ne divisez pas par 129, par 125,
8,4 millions d'habitants.
Alors,
au Québec, on a l'écueil, on a l'avantage, mais qui n'est pas traduit et qui...
Cet avantage au Québec, Mme la Présidente, devient, dans le projet de loi
n° 39, des désavantages. C'est pour ça que ce n'est pas bon, c'est pour ça
qu'on va voter contre ça. Quand vous avez un
territoire immense, que vous représentez une population immense, vous ne pouvez
pas utiliser ça.
Je
vais vous donner un seul exemple, Mme la Présidente. L'Abitibi, à l'heure
actuelle, il y a trois comtés dans l'Abitibi. Ce qui est proposé par le projet de loi, c'est de faire en sorte qu'il y
ait toujours trois députés, mais deux circonscriptions, plus trois circonscriptions. L'Abitibi serait
divisée en deux, il y aurait un député pour chacun des comtés, donc, un, deux,
puis le troisième député serait représentant ou représentante de tout
l'Abitibi, Mme la Présidente. Bien, l'Abitibi, là, c'est 82 % de l'Écosse. L'Abitibi, vous voyez comment les gens...
puis ça, c'est la proximité qui est importante, la proximité de son
député, de son élu.
Les gens veulent
avoir accès à son député. Puis je suis certain que c'est la même chose pour les
124 collègues, Mme la Présidente, moi,
je m'enorgueillis d'une chose. Je m'enorgueillis d'une chose, d'être député, je
dis à mon monde : Je ne veux
jamais entendre parler, je ne veux jamais me faire dire, comme député :
Vous, là, M. le député de LaFontaine, j'ai
essayé de vous voir, j'ai essayé de vous parler, je n'ai pas été capable, je
n'ai pas été capable de vous voir, je n'ai pas été capable de vous parler. Ça,
vous le savez, puis les collègues le savent, si quelqu'un laisse entendre ça,
là, je deviens bleu. Puis ce n'est
pas arrivé à date, Mme la Présidente. Puis à toutes les fois qu'on me dit :
Ah! M. le député de LaFontaine — ils m'appellent
par mon nom, les collègues — un tel veut te parler, oui, je vais lui
parler, cédule-moi ça, oui, je vais le rencontrer. Avec la pandémie, on
fait du Teams puis on leur parle par téléphone.
Vous
créez trois victimes, avec le projet de loi n° 39, dans le cas de
l'Abitibi. L'Abitibi, à l'heure actuelle, c'est divisé en trois, ils ont
un tiers de la population puis un tiers du territoire. Là, avec le projet de
loi n° 39, vous allez faire que
l'Abitibi va être divisée en deux. Alors, il y aura deux députés qui vont avoir
encore une plus grande partie, qui va être assimilable à celle de l'Écosse divisée en deux, puis vous allez en
avoir un troisième, la grande
chanceuse, le grand chanceux, qui
devra être en proximité avec ses citoyens puis disponible, comme on prétend
tous l'être, pour toute l'Abitibi, un immense territoire. Juste à dire ça, Mme la Présidente, on voit que ça ne tient pas la route. Alors, quand on se compare à
l'Écosse, attention. Après ça, on va
se comparer à un des 16 länder allemands, dont la capitale est Munich. Qui
suis-je? La Bavière. Alors, la
Bavière, Mme la Présidente, excusez du peu, elle rentre, elle, 22 fois.
Pas 20 fois comme l'Écosse, 22 fois dans le Québec. La Bavière a plus de population, 12,9, et la
Bavière a, tenez-vous bien, pas 125, pas 129, 205 députés. Alors, la
Bavière, ce n'est pas le Québec, c'est un 1/22, une partie. Divisez le Québec
en 22, mettez, sur ce territoire-là, 12,9 millions d'habitants puis
dites : Vous allez être représentés pas par 125, par 205 députés.
Ça, c'est une
logique. La politique de sa géographie, ça tient la route, ça marche. Quand on
nous fait du copier-coller, Mme la
Présidente, je vous le dis, c'est un
bouleversement de la démocratie et ça bafoue l'un des six principes :
la proximité.
Et,
quand vous faites l'autre principe... le premier principe, Mme la Présidente, le premier principe, c'est de s'assurer d'une proportionnalité.
Quand vous essayez, on ne l'atteint pas, ce principe-là. Quand vous essayez de
faire une proportionnalité en Abitibi avec
un comté, pour représenter mieux le fait qu'il y a eu un
parti qui a eu, au niveau régional, 35 %,
l'autre en a eu 28 %, l'autre en a eu 26 % puis l'autre en a eu
12 %, quand vous faites une proportionnalité avec un
député, oubliez ça. Il y a un parti qui va
l'avoir, et, les autres, qu'ils soient un quart-un quart-un quart-un quart ou un tiers-un tiers-un tiers, il y en a deux autres
pour le tiers qui n'en auront pas, puis, pour le quart, il y en a trois autres
qui n'en auront pas. On ne peut pas faire, ça ne tient pas la
route, de proportionnalité avec un député. Puis on n'a
pas encore, Mme la Présidente, la capacité de saucissonner un député puis de le couper en deux,
trois. Le député va appartenir à une formation politique. Ça ne tient
pas la route.
Même chose, Mme la Présidente, avec la Nouvelle-Zélande.
On nous compare souvent à la Nouvelle-Zélande. Là, la Nouvelle-Zélande rentre six fois dans le Québec.
La Nouvelle-Zélande, ce n'est pas 8,4, mais c'est 4,9 millions
de citoyens, donc 3,6 millions
de citoyens de moins, et la Nouvelle-Zélande a 120 députés, mais avec 4,9 millions
de citoyens, 3,6 millions de
moins que le Québec, et ont cinq députés de moins seulement, et le
territoire est énorme... est un sixième, rentre six fois dans le Québec.
Ça, ça peut peut-être tenir la route, mais ça ne tient pas la route.
• (12 heures) •
Également, on
cite l'Écosse, un autre principe, la stabilité du gouvernement. Mme la
Présidente, on va aborder le sujet de la répartition régionale tantôt. Première
des choses, allô la complexité! Puis, je veux dire, il n'y a pas personne qui a dit que c'est facile à comprendre. Pas personne.
C'est unanime, personne n'a dit que c'est facile à comprendre. C'est
complexe, c'est complexe. Puis je vais
tenter... Puis probablement que je ne serai pas capable de l'expliquer, je ne
serai pas capable de le verbaliser
pour que les gens... pour que je puisse, moi, me faire comprendre, parce que
c'est excessivement complexe.
Il faut réellement avoir pris un bon café serré le matin même puis
se concentrer sur comment va se faire cette répartition régionale là.
J'y reviendrai tantôt.
Donc, un des
principes, c'est la stabilité des gouvernements. Bien, allons y voir. Dans les cinq dernières
élections, en Écosse, il y a
eu quatre gouvernements minoritaires. Quatre gouvernements... La manière dont le projet
de loi n° 39 est écrit et
la manière d'imposer ça au Québec, c'est de faire en sorte d'avoir une fabrique
de gouvernements minoritaires.
Et j'y
reviendrai tantôt, sur la façon dont on répartit... je vais vous donner un
avant-goût. Là, j'ai créé plusieurs attentes. La plus facile à rencontrer, ça va être le fait que mon collègue
de La Pinière va être extraordinaire tantôt. Ça, vous pouvez prendre pour
acquis que ça va être un fait.
La deuxième attente, je vais vous revenir avec
la date butoir du DGEQ pour que tout ça, là, quasi 500 articles, là, ce soit la vraie vie en 2022. Je vais vous
revenir. Page 67, mémoire du DGEQ. Allez voir, celles et ceux qui l'ont.
Sinon, inquiétez-vous pas, on va vous donner la réponse à la fin.
Pour que tout
ça tienne la route, on vient dire, entre
autres, Mme la Présidente, stabilité des gouvernements. On vient de démontrer qu'il n'y en avait
pas, de stabilité.
Autre
élément, on dit : On veut améliorer notre démocratie. On se compare à
l'Écosse. J'ai les chiffres de l'Écosse, Mme la Présidente. Je ne le
sais pas ce qui se passe, je ne le sais pas, ça doit être dans l'eau du Québec,
Mme la Présidente, mais on n'est pas si pire. On est même bons, pour
ne pas dire très bons, au niveau du taux de participation. Parce
que ce qui est sous-entendu, c'est : Ah! il va y avoir
les licornes, ça va être parfait. Avec un vote proportionnel, les gens vont
sortir voter. Mon vote, il vaut quelque chose. Parce que, là, vous voteriez pour votre député. Vous auriez
deux votes. Vous voteriez pour votre
député puis vous voteriez pour votre représentant, un parti politique régional. Après ça, je vais vous expliquer comment que les partis politiques vont se
diviser ça entre eux autres. Ce serait fantastique. Ça va augmenter la démocratie, le débat, puis on le fait
avec...
Allons voir
l'étalon de mesure. En Écosse, là, j'ai les taux... — je
ne vais pas vous assommer avec les taux — j'ai
les taux des cinq dernières années parce que, l'Écosse, ça fait depuis 1999
qu'ils ont ce système-là. J'ai cinq taux de participation pour l'Écosse puis j'ai les cinq taux de participation du Québec des cinq dernières élections. Roulement de tambour, Mme la Présidente. Au Québec, le taux de participation moyen des cinq dernières élections, c'est 68,23 %, on est près de 70 %. C'est 68,23 %. Il y a même eu une élection à
74 %, puis deux à 71 %. Alors, au Québec, les cinq dernières
élections, taux de participation : 68,23 %. Qu'en est-il de l'Écosse?
C'est merveilleux, ça va aider notre démocratie : moins 15 %, 68 %, Québec, 53 % à l'Écosse. Ça, c'est
l'étalon de mesure du grand bond démocratique qu'on ferait avec le mode
de scrutin. Ça, si on se compare à l'Écosse, il faut prendre les chiffres, il
faut les analyser.
Ça, Mme la
Présidente, c'est un autre élément qui démontre que l'appartenance... Vous
voyez la face. On se dit toujours : Avoir le courage de mettre sa
face sur le poteau. Vous savez pour qui vous votez. Lui, là, je l'aime ou elle,
je l'aime, puis elle, là, je ne veux pas
qu'elle soit élue pour le parti politique, pour sa personne, pour quoi que ce
soit, elle ne m'a jamais retourné mon
appel. Ah! bien, je ne voterai pas pour elle, elle n'a jamais retourné mon
appel. Je ne voterai pas pour lui, il a cancellé un rendez-vous. Il n'est
pas là. Il n'est pas là pour moi, je vais voter... Vous savez pour qui vous
votez.
Quand vous faites une proportionnelle, vous
votez pour votre député, qui va avoir un immense territoire, que vous allez moins voir, et vous votez les yeux
fermés pour un parti politique, sur une liste de candidats et de candidates qui,
comme par magie, vont être désignés gagnants
par rapport aux votes totaux que le parti aurait eus dans la région. Une fois
que vous avez dit ça, peut-être que ça explique des taux de participation à
53 %, puis qu'au Québec, on est 15 % meilleurs. Alors, pour le mode de scrutin, qu'on ne vienne
jamais dire, Mme la Présidente, qu'on va améliorer le taux de participation.
Comme on dit, la preuve est dans le pouding.
Alors, autre
élément, puis je vois le temps qui file, autre élément, puis là je vais prendre
le temps de faire des citations, Mme
la Présidente. Vous avez été témoin, j'ai été témoin, puis je ne veux pas
imputer de mauvais motifs, je ne veux pas badiner avec ça, c'était une question fondamentale. La collègue de
Québec solidaire, la cheffe, la cocheffe de Québec solidaire, la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques, quand elle a su, Mme la Présidente,
que son comté allait être fusionné à l'intérieur notamment de Westmount—Saint-Louis, qu'elle perdait son comté, c'est
arrivé le 7 février 2017, coup de tonnerre! Et là je me suis amusé... «amusé» est un grand mot, j'ai eu
la rigueur, je pense, sans trop de... sans fausse modestie, d'aller rechercher
tout ce qui s'était dit à l'époque. Et, il faut le dire, ce que la collègue de
Sainte-Marie—Saint-Jacques
voulait, c'est que, dans un premier
temps, sa population soit consultée. Parce que la Commission de représentation
électorale avait déposé un premier,
on s'en rappelle tous, avait déposé un premier rapport qui ne touchait pas à
son comté. Montréal à l'époque avait 28 comtés.
La Commission de représentation électorale, elle a dit : Il faut en
enlever un à Montréal pour en donner dans une autre région. Il fallait passer de 28 à 27. Il faut enlever un
comté. La Commission de représentation électorale avait dit, dans son premier rapport : Bien, on va aller
chercher une partie d'Outremont, partie de Westmount, puis avait joué là-dedans.
Dans le deuxième qu'elle avait déposé, ce
n'était pas ça. Dans le deuxième
rapport, c'était... Sainte-Marie—Saint-Jacques disparaissait, et il y avait un amalgame qui était fait avec les comtés
de Sainte-Marie—Saint-Jacques, Westmount—Saint-Louis et Saint-Henri—Sainte-Anne.
On enlevait ce comté-là, la collègue de Sainte-Marie—Saint-Jacques perdait son
comté.
Son premier
point, il faut le mentionner, sa population n'avait pas été consultée, elle
voulait que la population soit consultée puis elle se battait pour ça.
Mais aussi, du même souffle, elle se battait parce que son comté représentait
une communauté naturelle qui n'était pas du tout celle de Westmount—Saint-Louis.
Écoutez, j'ai des citations, mais je vois le temps qui file, je n'aurai pas le
temps de toutes les citer. Mais, Mme la Présidente, c'était un déni de
démocratie. Je reviens là-dessus, il faut
être honnête intellectuellement. Son premier point, c'était de dire : On
veut être consultés. Ce n'était pas dans le premier rapport, c'est dans
le deuxième rapport, puis là ça va passer à l'Assemblée nationale, et la Commission de représentation électorale a tous les
pouvoirs de déterminer, la circonscription, c'est ça, c'est ça, c'est ça.
Si elle ne bouge pas, c'est déposé à l'Assemblée nationale, il y a un débat de cinq heures, c'est publié à
la Gazette officielle, puis c'est ça, les comtés. Fin du débat. On ne
peut pas amender ça par motion, vous êtes présidente depuis plusieurs années,
vice-présidente, et vous connaissez le règlement, on ne peut pas amender ça.
La collègue avait parlé de déni de démocratie, Québec
solidaire. Carole Poirier du Parti québécois, Hochelaga-Maisonneuve à l'époque, avait
donné son appui. Les deux, main dans la main, avaient été participer à une
manifestation qui avait eu lieu dans son comté. Elle aussi avait dit que
c'était un deni de démocratie, Cri du coeur pour Sainte-Marie—Saint-Jacques :
«Quelques quelques centaines de personnes ont bravé le froid — dimanche
le 12 février — lors
d'un rassemblement citoyen dans le quartier...»
Et là on disait toutes les bonnes raisons pourquoi Sainte-Marie—Saint-Jacques, ce n'est pas Westmount—Saint-Louis, ne mélangez pas ça, ça ne se mélange pas. C'est du bon monde dans les
deux, mais ce n'est pas la même
réalité économique, ce n'est pas la même réalité, également, sociologique, sur
le terrain. Puis elle a débattu, elle
a débattu, elle a débattu. Elle a même déposé un projet de loi, n° 790,
projet de loi qui disait : On suspend le processus de la Commission de
représentation électorale. Il faut mettre un stop à ça, on veut être entendus
pour exprimer... Ce n'est pas pantoute la même chose.
Il y a même
eu, et là je passe, il y a même eu un recours en injonction, Mme la Présidente,
il y a eu un recours en injonction qui avait été pris par deux citoyens
de son comté, deux citoyens qui étaient liés à Québec solidaire. Ça, elle ne s'en cache pas, elle l'a dit, et avec un avocat
également qui participait avec Québec
solidaire. Ils ont déposé un recours
en Cour
supérieure pour une injonction pour
faire arrêter ça. La Cour supérieure a rejeté le recours en date du 21 février
2017, et il disait, le tribunal : «Les demandeurs sont deux
électeurs de la circonscription de Sainte-Marie—Saint-Jacques. Invoquant l'urgence, ils demandent au tribunal de
prononcer une ordonnance de sauvegarde pour suspendre le processus de délimitation des circonscriptions.» Je termine,
paragraphe 6° : «Le tribunal,
après analyse, est d'avis que les
demandeurs ne justifient pas un droit
apparent à obtenir la suspension du processus de délimitation[...]. Ils échouent
dans leur tentative de démontrer que le processus suivi par la CRE est
entaché d'irrégularités, cette dernière ayant suivi toutes les étapes [de la]
Loi électorale du Québec.»
• (12 h 10) •
Autre point
de presse. Il y en a eu six, points de presse, minimum. Un amendement...
Il y aurait un article... «En fait,
je vais vous le dire, là, simplement, on donne deux mois au DGE pour consulter
l'île de Montréal en reconnaissant que l'île
de Montréal doit perdre une circonscription. [...]Les gens se sont exprimés, la
population, les chroniqueurs, même la Chambre
de commerce de l'est de Montréal appuie l'idée du milieu naturel [de]
Sainte-Marie—Saint-Jacques,
qu'est le Centre-Sud de Montréal.». Et ainsi de suite.
Qu'est-ce qui
est arrivé, Mme la Présidente? Acte final de cette saga, le rapport final de
juin 2017, qui allait être le rouleau
compresseur puis qui faisait en sorte... Savez-vous quoi? 97 des
125 comtés ne changeaient plus, et, je vous le donne en mille, Sainte-Marie—Saint-Jacques continue à exister. Sainte-Marie—Saint-Jacques faisait partie des 80 %...
78 % des comtés qui n'avaient
aucune modification à leurs limites. Là, c'était l'euphorie, Mme la Présidente.
Évidemment, il y en a d'autres, plus
loin, qui ont perdu leur comté, je ne ferai pas ce débat-là, mais Montréal est
quand même passée de 28 à
27 comtés. Et ça avait été l'euphorie. Imaginez-vous, Sainte-Marie—Saint-Jacques, je le vois, là, j'ai marqué
«alléluia», pas de changement, il est parmi les 97 comtés sur les
125.
Ça, là, je ne
veux pas badiner. Ce débat-là de la collègue de Sainte-Marie—Saint-Jacques, elle l'a fait avec son coeur. Elle connaît son monde, elle sait ce que
c'est, Sainte-Marie—Saint-Jacques,
et ça, je la salue, je la félicite d'avoir... de s'être battue pour ça.
Le projet de
loi n° 39, Mme la Présidente, ne vient pas modifier ce processus de
détermination des comtés. Je vous ai dit que 28 des 125 comtés avaient
changé; 97 n'avaient pas changé. Là, la collègue a eu gain de cause, puis
c'était fondamental, tu ne pouvais
pas faire ça, mais savez-vous que la nouvelle carte électorale, qui devrait
être mise en place, ferait passer le
Québec de 125 à 80 comtés? Savez-vous que Montréal ne devrait pas
seulement perdre un comté; Montréal, Mme la Présidente,
perdrait 11 comtés.
Aujourd'hui, je suis surpris de voir la collègue de Québec
solidaire applaudir à ça puis dire :
Oui, on va voter pour ça. Sainte-Marie—Saint-Jacques va être noyé, veux veux pas, dans un autre comté, Mme la Présidente. Aussi fondamental... Et ce qu'elle exprimait,
là, c'était le lien très étroit qu'elle a avec sa population, la communauté
naturelle, et faire en sorte de défendre ça.
Le projet de loi fait en sorte que, oui, on
serait toujours 125 députés, mais il y en aurait 45 qui seraient élus au niveau régional. Ça veut dire que, pour Montréal,
il y en a huit qui représenteraient toute l'île de Montréal.
Ça, c'est plus de 1,3 million d'électeurs. Moi, Mme la
Présidente, là, représenter l'île de Montréal,
plus de 1,3 million d'électeurs... Vous ne pouvez pas être disponible pour 1,3 million d'électeurs, c'est impossible,
oubliez ça. Vous ne pouvez pas avoir la même nature de travail, le même lien. Vous ne pouvez pas donner à votre
population la disponibilité que vous vous enorgueuillez de leur donner. Moi, je ne pourrais pas faire sur
l'île de Montréal, si d'aventure j'étais élu député régional, je ne pourrais
pas être le même député que j'ai dans
rivière, Rivière-des-Prairies, qui est LaFontaine. Je dis à mon monde : À
toutes les fois que quelqu'un veut me
parler, veut me rencontrer, je veux que ça se fasse. Vous les rencontrez avant
pour préparer le dossier. C'est quoi
l'objet. Vous allez me briefer, si vous me permettez l'expression. Après ça, je
vais m'asseoir puis on va parler. Je n'en ai pas échappé un, Mme la
Présidente. Je n'en ai pas échappé un ou une depuis le début. Mais si je suis député de Montréal, je vais représenter 1,3 million d'électeurs, même plus. C'est les chiffres du
dernier... des derniers chiffres applicables. Ça ne tient pas la route.
Donc, Montréal
va passer de 27 à 24 comtés. Retirez les huit qui vont représenter toute
l'île de Montréal, vous allez avoir 16 comtés. On va
devoir fusionner de 27 à 16 tous les comtés de Montréal. Le non-sens que faisait
la fusion de Sainte-Marie—Saint-Jacques avec Westmount—Saint-Louis, ce sera copier-coller dans la carte électorale. Ce ne sera pas
juste Montréal, ça va être partout au Québec. Les communautés naturelles,
oubliez ça.
Ce qui fait
en sorte que la Fédération québécoise
des municipalités est venue le dire
dans son mémoire, est venue le verbaliser. Il y aura une perte de
proximité qui sera constatée. Je cite leur mémoire : «La proximité
entre l'élu municipal et son député
doit être garantie. Dans les modèles de scrutin mixte compensatoire avec ou
sans liste régionale, il y a une perte
de proximité avec le député puisque le territoire retenu pour la compensation
sera nécessairement plus grand, plus près
de l'échelle des régions administratives.» Plus loin, la fédération des
municipalités du Québec, Mme la
Présidente, eux représentent 1000 municipalités
locales, des MRC membres. Ils représentent plus de 7000 élus, des
mairesses, des maires, des conseillères, des conseillers, du monde très, très,
très «groundés», on en connaît tous. Ils disent, sur cet aspect, page 11
de leur mémoire : «Certaines circonscriptions couvrent déjà des
territoires aussi vastes que des États.» On en a parlé. «Certaines circonscriptions couvrent déjà des territoires aussi vastes que
des états. Alors, comment un député pourra remplir convenablement son mandat et répondre aux besoins
de ses citoyens si son territoire est encore une fois agrandi?» Là, ils soulignent ce que je vais vous lire,
ils le soulignent : «Pour le citoyen qui est loin de la Capitale nationale
et de la métropole, le député est souvent son seul lien avec le gouvernement et
l'État. Il en va de même pour l'élu municipal et sa relation avec son député. Il apparaît clair pour la FQM que la
proximité entre le citoyen et son député, telle que proposée dans le projet
de réforme du mode de scrutin, en sera
grandement affectée.» Alors, Mme la Présidente, «proximité» sera grandement
affectée par ce mode de scrutin.
Autre élément, également, dont je veux vous
parler, Mme la Présidente. J'ai parlé et je viens de citer la FQM, Fédération québécoise des municipalités, au niveau
de l'immense territoire, nombre très élevé de citoyens. Je vous ai parlé
de 1,3 million que représenteraient
huit députés pour toute l'île de Montréal et du fait que l'on perdrait, au
départ, trois comtés, de 27 à
24, 8 régionaux, 16 de comté. Ça veut dire que, moi, si je me représentais
dans un tel système, ça ne serait plus juste Rivière-des-Prairies, puis Rivière-des-Prairies a besoin de toute mon
attention, puis je le fais au meilleur de mes capacités, mais là, ce serait quoi? Ce serait la pointe est
de l'île. On fusionnerait Rivière-des-Prairies avec Pointe-aux-Trembles puis on
irait peut-être chercher d'Anjou—Louis-Riel également. Ça ferait un immense comté.
Vous devez passer de 27 à 16. Là, on
pousserait les mêmes hauts cris, puis ça, ce serait tout le monde, Mme la
Présidente, que vous soyez caquiste, péquiste, Québec solidaire, ou
Parti libéral, Mme la Présidente, toutes les candidates et les candidats
diraient — puis
les députés sortants : Ma population,
là, elle a un sentiment d'appartenance, c'est une communauté naturelle, puis il
ne faut pas toucher à ça. Bien, le projet de loi viendrait anéantir ça,
et ce n'est pas trop fort que de le dire de cette façon-là.
Autre élément, Mme la Présidente, le poids des
régions, baisse du poids politique des régions. La Fédération québécoise des municipalités, je vais prendre le
temps de la citer, le dit dans les mots suivants : «Dans son dernier bilan
sur les perspectives démographiques des
régions du Québec, paru en juillet 2019, l'ISQ — l'Institut de la statistique du Québec — prévoit une croissance démographique des
régions près de Montréal de 14 %. À l'inverse, les régions plus éloignées
comme le Bas-Saint-Laurent, [...]Gaspésie et
[...] Îles-de-la-Madeleine, Saguenay—Lac-Saint-Jean, l'Abitibi-Témiscamingue, la Côte-Nord, verront le poids de leurs
populations passer de 10,3 %, en 2016, à 8,6 % de la population
totale du Québec en 2041.
Malheureusement, force est d'admettre que malgré les efforts énormes des
régions pour lutter contre cette tendance, l'adoption de ce projet de
loi provoquera à moyen terme une baisse réelle du poids politique des régions
malgré les précautions prises par le
gouvernement. [...]Compte tenu de ce qui précède, le principe du maintien
politique du poids des régions n'est
donc pas rencontré par le projet de loi n° 39. [...]Le projet
n'est donc pas acceptable sur cette
question et devrait être revu.» Ça, ça ventile, ça démontre l'impact
négatif sur le poids des régions.
La répartition des députés, Mme la Présidente,
comment ça se ferait au niveau régional? La répartition des députés au niveau régional, premier élément, puis
mon collègue de La Pinière va en parler, au niveau de la règle du 10 %, on
dit : Ça, c'est fait pour que des petits partis puissent émerger puis
assister... être élus ici, à l'Assemblée nationale. Bien, dans le projet de loi, puis mon collègue pourra
parler plus en détail de la règle du 10 %, dans le projet de loi, il est
dit que, pour la redistribution des
sièges au niveau régional, vous devez être l'un des partis qui, au niveau
national, a 10 % ou plus des votes.
Ce qui veut
dire, si j'applique ça à la dernière élection, que les quatre, Mme la
Présidente, les quatre qui auraient droit
au chapitre, de se distribuer, entre eux autres, des députés au niveau
régional, bien, c'est la CAQ, c'est le Parti libéral, Parti québécois et
Québec solidaire. Les quatre seuls, selon cette logique-là, dans la dernière
élection, qui avaient 10 % ou plus, c'étaient eux autres. Le cinquième, parce qu'on fait tout ça
pour que les petits partis émergent, le cinquième, il n'est pas à
10 %, le cinquième est à 1,68 %, c'est le Parti vert; le sixième,
1,46 %, Parti conservateur du Québec; et le septième, c'est le Nouveau Parti démocratique du Québec, à 0,57 %.
Les trois sont venus en commission nous dire que ça ne tient pas la
route, ça n'a pas d'allure, vous passez à côté de la cible avec votre
10 %.
Une fois
qu'on a dit ça, comment ça fonctionnerait, Mme la Présidente, au niveau
régional? Au niveau régional, je vais
le dire de même, je vais essayer de l'expliquer, là, mais c'est complexe. Au
niveau régional, vous êtes dans Montréal, qui est une région, on peut prendre
la région de Québec, n'importe quelle région, vous avez deux bulletins de vote,
vous votez pour votre député dans
l'immense circonscription. Alors, Montréal, on n'en a plus 27, on en aurait 16.
Alors, mettons, moi, je suis candidat
dans toute la pointe est de l'île, alors je représente, par exemple,
Rivière-des-Prairies, Pointe-aux-Trembles, Anjou—Louis-Riel. Je
suis candidat, vous votez pour cette immense circonscription là pour le député.
Vous y voyez le visage, vous dites :
Elle, oui, lui, non, lui, oui, elle, non. Et vous avez un deuxième vote au
niveau régional pour Montréal. Alors,
dans le cas d'espèce où j'ai gagné la confiance d'un électeur, il vote
pour — j'allais
dire mon nom — dans le
supergros comté, l'est de Montréal, et il vote pour le Parti libéral
au niveau régional.
• (12 h 20) •
Si, sur les
16 comtés, vous avez, à titre d'exemple, 10 députés d'élus au niveau
des 16 circonscriptions, après, on va faire la répartition de qui va avoir huit députés au niveau régional.
Bien, vous allez être pénalisé, comme parti politique parce qu'on va diviser votre total de votes, au
niveau régional, par le nombre de députés que vous avez élus au niveau des
comtés. Ce qui fait en sorte que, si vous
avez 1 million de voteurs au niveau régional, puis vous avez
10 députés, on va prendre 1 million de votes, au niveau
régional, divisés par 10, ça va donner 100 000. Si un autre parti n'a
aucun député, mais qu'au niveau régional il
a 200 000 votes on va prendre 200 000 divisés par zéro,
plus un, divisés par un, ça va donner 200 000.
Le Parti libéral, dans ce contexte-là, avait 100 000. L'autre parti a
200 000. Qui qui a le député, Mme la Présidente, au niveau régional? Ce n'est pas le Parti libéral,
c'est le parti qui a eu 200 000 votes, pas le parti qui a eu
1 million de votes. C'est le parti qui a 200 000 votes au
niveau régional. C'est une fabrique à gouvernements minoritaires. Et ça crée,
là, Mme la Présidente, de façon très
inquiétante, une taxe, une peine pour les partis qui sont plus «groundés», qui
ont fait élire de plus grand nombre de députés parce qu'on diminue
d'autant, on divise d'autant leur total de votes.
Qu'est-ce que
ça donne? Ça donne qu'en Écosse, Mme la Présidente... Je vais vous donner ce
seul exemple-là. J'ai des exemples,
là, pour tous les comparatifs, de Nouvelle-Zélande puis de la Bavière. En
Nouvelle-Écosse, à la dernière élection
de 2016, vous allez tout comprendre, le parti SNP a eu, au niveau des
circonscriptions, 46 % des voix. Il a eu 59 sièges. Au niveau, toujours, des circonscriptions, le
Parti conservateur a eu 22 %, 7 sièges. Alors, je reviens. Le SNP, au
niveau national a eu 46 %, ça lui a donné 59 députés de comté.
Conservateur a eu 22 %, ça lui a donné sept députés.
Avec cette
proportionnelle-là, vous allez revirer ça de bord au niveau régional. Au niveau
régional, le SNP a eu 41 % des
votes. Il a eu quatre députés. Puis le Parti conservateur a eu 23 % des
votes. Il a eu 24 députés. Si vous additionnez 59 plus quatre, ça fait 63. Sept plus 24, ça fait
31. Bingo! Vous avez un gouvernement minoritaire, parce qu'ils sont 129;
pour être majoritaire, ça prend 65, ils sont 63. Une fois que vous avez dit ça,
on vient de démonter par a plus b que c'est une fabrique à gouvernements
minoritaires.
Et il y a des
gens, Mme la Présidente, qui sont venus très clairement nous exprimer le fait
que ça, c'était un danger. Ghislain Dufour nous a dit qu'au Québec... puis je
pense que je peux remettre la main sur son mémoire à ce stade-ci, est venu nous dire qu'à Québec ça ne tenait pas la route.
Ghislain Dufour, qui a écrit un livre, puis qui en a envoyé une copie à tous les députés. Il a écrit un livre : Le
pouvoir québécois menacé — Non à la proportionnelle! . Je le
cite. Pourquoi au Québec ce n'est pas
une bonne idée d'avoir minoritaire après minoritaire, après minoritaire? On en
a la preuve : «Tout le monde
admet [...] que l'adoption d'un mode de scrutin proportionnel rendra plus
fréquent, sinon systématique, pour le seul Québec au sein du Canada, la formation de gouvernements minoritaires de
coalition, avec les négociations, les compromis, les marchandages et les
délais que cela nécessitera.
«Il en résultera forcément des gouvernements
moins forts que les gouvernements majoritaires auxquels les Québécois sont
habitués. La réalité est qu'il n'y a rien de plus fort qu'un gouvernement
majoritaire dans un système parlementaire comme le nôtre.» Fin de la citation,
Ghislain Dufour.
Gouvernement
fragile, la Fédération québécoise des municipalités est venue l'exprimer de
façon très claire dans son dernier
bilan sur les perspectives démographiques des régions du Québec. Excusez-moi,
la bonne citation, elle est ici. Excusez-moi. J'en suis : «Par ailleurs,
les membres de la FQM craignent qu'un tel mode de scrutin favorise l'élection
de gouvernements minoritaires, et ainsi, une
instabilité dans la gouvernance de l'État québécois. Aurions-nous pu
nationaliser l'électricité, adopter
la Loi 101ou mettre en place le réseau des CPE dans un tel
contexte? Un gouvernement pourrait-il réaliser ses engagements phares, sans
compter le risque de vivre des élections à répétition qui sera bien réel? Quel
en sera l'impact pour les régions du Québec?» La FQM faisait écho des
propos de Ghislain Dufour quant à l'instabilité et à amenuiser l'État
québécois.
Donc, Mme la Présidente, c'est une fabrique à
gouvernements, une fabrique à gouvernements. Et même, les amis... Parce que, là, il faut ajouter un niveau
de complication. Jean-Pierre Charbonneau a dit que la CAQ a caché une prime
au vainqueur dans son projet de loi parce
que la CAQ ne prend pas l'entièreté, dans le projet de loi, des 10 députés
de mon exemple tantôt. Il divise ça
puis il en fait juste cinq. Ça va être une fabrique, pareil, à gouvernements
minoritaires, mais, même là... Ils
ont été capables d'éconduire Jean-Pierre Charbonneau, qui dit que ça n'a pas de
bon sens puis que c'est une prime au vainqueur. Mais, même là, ça
demeure une fabrique de gouvernements minoritaires.
Alors, Mme la
Présidente, au niveau de l'importante parité hommes-femmes, qui est un des six
principes énoncés, la parité dans le projet de loi, là, on n'y est pas du tout,
du tout. Ce qui est demandé dans le projet de loi, c'est aucune contrainte. Ce qui est demandé au projet de loi,
c'est l'article 73 qui impose ce qui suit : «[Les partis doivent
faire] un énoncé relatif aux
objectifs que se fixe [le] parti en ce qui concerne la parité entre les femmes
et les hommes.» Et ça va être envoyé au DGEQ, un énoncé, puis ça va être mis sur le
site Web du DGEQ. Bien, ça, Mme la présidente, ce n'est pas une véritable
politique contraignante de parité.
Et il y en a
d'autres qui sont venus nous dire... Le Conseil du statut de la femme est venu
nous dire que c'est des mesures qui
étaient trop timides, la CSN également. Et ultimement on a dit, Groupe de
Femmes, Politique et Démocratie, qu'on
ne devait pas lier la parité, l'importance de faire avancer le Québec dès 2022,
pas après un référendum, juste en 2026, mais travailler sur la parité femme-homme pour que l'Assemblée nationale
soit plus représentative de cette parité femme-homme, qu'on doit travailler maintenant, sortir ça du projet de
loi n° 39, l'adopter puis faire en sorte que ce soit des mesures contraignantes, pas juste un document
mis sur le site Internet du DGEQ, faire en sorte qu'il y ait plus de femmes
et d'hommes au Québec qui soient élus.
Alors, Mme la
Présidente, vous voyez, j'achève mon tour de piste. Je vais répondre à mes
points. Vous avez vu que, sur les six points, puis je vais faire une
remise en contexte, on ne rencontre pas les six principes de l'entente de
mai 2018, et on ne rencontre pas
les six principes de la motion que vous avez adoptée. La réponse, à la
page 67, du DGEQ, il faut, Mme la Présidente, que je vous le cite
la réponse à la page 67 du mémoire du DGEQ, Délai requis pour la tenue
d'un référendum. Pour le Directeur
général des élections — je cite son mémoire : «Pour
que le Directeur général des
élections soit en mesure de tenir le
référendum selon les dispositions prévues lors de la prochaine élection
générale, le 3 octobre 2022, le projet de loi n° 39 devra avoir été adopté et sanctionné au plus
tard le 1er février 2021.» Le 1er février prochain, fin de la citation, le projet de loi, les quelque
500 articles, Jaws 1, Jaws 2, Jaws 3,
devront avoir été débattus, adoptés, sanctionnés pour le 1er février 2021, sinon tout ça, ce beau château de cartes
là, va tomber, puis il n'y en aura pas de référendum. C'est le DGEQ qui
est venu le dire.
Mme la
Présidente, en date du 8 octobre 2020, il reste 105 jours pour faire
tout ce travail-là, puis là-dessus j'inclus Noël puis le jour de l'An. Alors, Mme la Présidente, puis il y a même
des éléments qui... La réforme du mode de scrutin divise la CAQ, il y a même des collègues de la
CAQ, je n'ai pas le temps de les citer, qui disent, finalement, que ce n'est
pas une priorité, loin de là.
Alors, quand
on regarde ça, Mme la Présidente, c'est important de souligner que le projet de
loi, le premier ministre du Québec
qui a signé l'entente à l'époque, ne rencontre pas les critères qui avaient été
mis à l'intérieur de l'entente de mai 2018.
Ce qu'il est important de noter, Mme la Présidente, c'est qu'il y aura un poids
réduit des régions du Québec. Le retour
sur les six principes fait en sorte que l'on ne peut pas atteindre cet
objectif-là. Sur ces principes même, on ne respecte pas les objectifs donnés. C'est pour ça qu'on va
voter contre le principe. Nous aurons une opposition intelligente, on ne va
pas, évidemment, faire en sorte de bloquer, Mme la Présidente, mais on fera le
débat, puis on est prêts à faire avancer le Québec pour la parité
hommes-femmes.
• (12 h 30) •
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Je vous remercie, M. le député de LaFontaine.
Et, avant de
céder la parole au prochain intervenant, je vous informe que deux débats de fin
de séance se tiendront aujourd'hui. Le premier débat portera sur une
question adressée par M. le député de D'Arcy-McGee au ministre de la Santé et des Services sociaux concernant l'impact
de la pandémie de COVID-19 sur la santé mentale des Québécois. Le deuxième
débat portera sur une question adressée par M. le député de Viau au premier
ministre et responsable des dossiers jeunesse concernant l'impact de la
pandémie de COVID-19 sur la santé mentale des jeunes.
Et maintenant je suis prête à reconnaître le
prochain intervenant, et ce sera M. le député de La Pinière.
M. Gaétan Barrette
M. Barrette : Au risque de décevoir mon collègue, évidemment,
de Rivière-des-Prairies, je vais faire mon intervention, qui ne sera pas si flamboyante que ça, là, mais,
ceci étant dit, je pense qu'il y a lieu de faire une intervention à cette
étape-ci sur ce qui doit être un projet de loi qui est important, je
vais le dire comme ça.
Je vais
commencer par souligner le fait que l'ex-ministre de la Justice, qui a été à
l'origine du projet de loi, soit venue défendre ledit projet de loi.
Je pense que c'est très honorable de sa part d'être venue ici aujourd'hui le
faire. Ce n'est pas ça qu'on a vu
régulièrement dans les derniers mois et dans les derniers projets de loi.
Alors, il y en a qui sont venus, il y en a qui sont moins venus, on va dire ça
comme ça, parce qu'on ne peut pas souligner les absences. Mais, ceci dit,
je souligne quand même le fait que
l'ex-ministre de la Justice, qui est maintenant présidente du Conseil du
trésor, soit venue défendre son projet de loi.
Je ne
reprendrai évidemment pas tous les éléments, les excellents éléments que
contenait la présentation de mon collègue,
qui vient de la faire avec beaucoup d'éloquence, beaucoup d'énergie, beaucoup
de précision, dans la dernière heure. Je
soutiens tous les arguments qu'il a mis de l'avant. Je vais prendre peut-être
un ou deux autres angles qui sont un petit peu différents, mais pas
complètement.
J'ai été
surpris de l'approche de l'actuelle présidente du Conseil du trésor, Mme la
députée de Champlain, hein, c'est
comme ça... je ne m'abuse, c'est ça, hein? Et il y a des éléments avec lesquels
je ne suis pas d'accord, et on va mettre les choses dans le contexte. Le
contexte est intéressant, Mme la Présidente, parce que, dans les derniers
jours, dans la dernière semaine, on a
une ex-première ministre du Québec qui a publié ses mémoires, et je m'étais
demandé s'il y avait un passage sur la réforme du scrutin, et il y en a
un. Et le passage est tout à fait en défaveur de la réforme du scrutin. Le passage n'est pas en défaveur du projet de loi
actuel, le passage est en défaveur d'une
réforme du scrutin. Et, sans citer mot à mot ce que l'ex-première ministre,
Mme Marois, a dit, elle dit que le système actuellement sert bien la
population québécoise. On reconnaît là la réserve de l'ex-première ministre.
Elle n'a pas parlé... elle n'a pas dit qu'elle servait bien le Parti québécois, ni le Parti libéral, ni la
CAQ. Elle a essentiellement dit que la population québécoise était bien servie
par le mode de scrutin actuel, ce qui nous
amène à conclure qu'une réforme, implicitement, pourrait les desservir. Et ça,
je pense que mon
collègue a vraiment, vraiment, vraiment fait la démonstration, pendant une
heure, qu'il y a des travers à ce projet de loi.
Et là, Mme la
Présidente, je ne vais certainement pas, certainement pas critiquer le fait
qu'on veuille améliorer les choses. Mais
on est tous ici, tous et toutes ici pour améliorer les choses, incluant le
processus démocratique qui est celui d'une élection.
Bon, là où
j'ai un problème, Mme la Présidente, c'est quand l'ex-ministre de la Justice
commence par nous dire que le
gouvernement de la CAQ a tenu parole. O.K. Mon collègue, il y a quelques
instants, a fait référence à l'entente solennelle,
historique de mai 2018. Elle était surprenante parce que, bien
honnêtement, Mme la Présidente, je ne m'attendais pas à ce que l'actuel premier ministre, qui, à
l'époque, était évidemment à l'opposition, signe cette entente-là. Je ne
m'attendais pas à ça. Bien, je n'ai
pas de problème à ce qu'il l'ait fait, mais vraiment pas. Il l'a fait, puis
c'est correct. On n'était pas partie prenante, pour toutes sortes de
raisons qui ont été évoquées dans la dernière heure. Mais le côté solennel... C'était
solennel, là, ils étaient tous ensemble, les
trois partis, bon, les députés indépendants, puis tout ça, à la caméra, là. Et
ce que la population a compris, là, à moins que je sois déconnecté de la
population, puis je peux vous dire que je me considère connecté, la population a compris que l'élection
de 2022 serait de facto sous un nouveau mode de scrutin. C'est ça que la
population a compris.
On a joué
dans le même film, et c'est rare que j'utilise cette expression-là, parce
qu'elle est tellement utilisée, utilisée, utilisée, là, que ça devient comme de dire qu'il fait soleil dehors, là,
mais là je pense que ça s'applique parce qu'on vient de le vivre au fédéral. Ce sera la dernière
élection selon le mode de scrutin
traditionnel, blablabla. La seule chose qu'il reste, évidemment,
c'est blablabla. C'est ça, là, qui a été dit, là. Le bon peuple, là, a
compris, là, en 2018, que, s'ils étaient élus, là... n'importe quel des
trois, là, bon, il y en a deux que c'était impossible, là, mais que c'est ça
qu'il allait arriver. C'est-u ça qu'il
arrive, Mme la Présidente? Non. Alors, quand l'ex-ministre de la Justice nous dit aujourd'hui que la CAQ a tenu parole, bien non, la CAQ n'a pas tenu parole. C'est plate, mais
c'est — vous connaissez mon expression — de même.
Mais il y a
plus là-dedans, Mme la Présidente. L'ex-ministre de la Justice nous a même
évoqué la pandémie. Bien, voyons
donc! Le projet de loi, il a été déposé avant que le virus apparaisse, n'est-ce
pas, et nous avons pu continuer nos travaux.
La pandémie, écoutez, ce n'est pas un facteur là-dedans, là. Mais c'est comme
un péché véniel, là. Je ne lui reproche pas, là, ce n'est pas un péché
mortel. Un péché mortel, là, c'est qu'il n'y aura pas d'élection selon le
nouveau mode de scrutin en 2022, là, ça
n'arrivera pas, Mme la Présidente. Là, l'ex-ministre de la Justice nous dit
qu'il y a une légitimité, je l'ai
noté, là, parce que, des fois, on écoute des gens pour être sûr qu'on puisse le
reprendre, on le note pour bien citer la personne que l'on veut critiquer amicalement... Parce que nous, les
parlementaires, nous sommes amicaux les uns envers les autres, n'est-ce pas? Alors, elle nous a dit
que c'était légitime de le faire. O.K. Parlons donc de la légitimité. Est-ce
que le gouvernement en place a la légitimité de faire un référendum? La
réponse, c'est oui. Est-ce que le gouvernement en place considère qu'un
référendum est un acte démocratique consultatif légitime? La réponse, c'est oui.
O.K.?
Maintenant,
évidemment, là, je viens de parler essentiellement de la définition du
dictionnaire, mais, comme tous les
mots ont une valeur, les mots ont aussi une valeur par le contexte dans
lesquels on l'applique. Alors, un référendum ne peut pas, à mon sens, être un acte complètement légitime s'il est mis
dans un contexte qui ne l'est pas à la base sur le plan politique, sur
le plan du geste, sur le plan de sa finalité.
Alors, c'est
quoi, un référendum, Mme la Présidente?
C'est une consultation populaire ciblée à un moment donné, en dehors, autant faire se peut, d'influence
externe. Quand je dis «influence externe», ça veut dire qu'au moment du référendum c'est le sujet pas noyé dans d'autres sujets, pas, je dirais, influencé
par d'autres sujets, c'est le sujet. Et qui dit référendum dit débat préalable. Et les conditions pour un référendum
qui aurait une légitimité pleine et entière valent pour le jour du vote, comme pour le chemin préparatoire au vote
et ce qui s'appelle une campagne. «Référendum», Mme la
Présidente, ça veut dire une question et deux réponses possibles :
oui ou non. Le citoyen accepte ou refuse la proposition qui aura été débattue suffisamment, correctement dans les semaines ou, peu importe, les mois, peu importe, précédents.
C'est ça, un référendum. Si j'avais à demander à mon collègue du Parti
québécois, que je vois du coin de l'oeil, s'il est d'accord avec ce que je viens de dire, il me répondrait
même des dates de référendums qui sont l'illustration de ce que je viens de
dire.
• (12 h 40) •
Alors, la question
de la légitimité d'un référendum dans le sens du Larousse, bien oui. Pris hors
contexte, bien non, puis, dans le
contexte qui est proposé, certainement pas. Je ne suis pas content de me lever, moi, là,
aujourd'hui, là. Je ne suis pas content parce que je considère que le travail qui a été fait a été
fait en vue de faire... je dirais, prendre une décision sur un projet
de loi et que ce projet de loi là, de la manière qu'il est présenté à la population,
devient ipso facto un projet mort-né.
On se
satisfait d'avoir déposé un projet de
loi pour lequel il va y avoir un référendum, qu'on situe, dans le temps, le jour de
l'élection de 2022, une élection. Et
là on dit que c'est légitime. Puis, en le faisant, bien, c'est sûr qu'on
ne peut qu'argumenter que de dire :
Bien oui, il y a un référendum. Regardez, je vous avais promis ça. Bien non, tu
avais promis des élections, ça n'arrivera pas. Un référendum, c'est
correct. Ce n'était pas dans la résolution solennelle, mais c'est correct. Moi, je suis en faveur de ça, pas de
problème avec ça. Mais on le met le jour de l'élection. Comment est-il
possible... Et là j'aimerais bien entendre n'importe qui, incluant l'ex-ministre
de la Justice, surtout elle, venir m'expliquer, là, et expliquer à la population générale que le citoyen moyen, moi, vous, ceux
qui nous écoutent, va réussir, là, mais réussir à se détacher du discours électoral ambiant. Quelles
sont les probabilités que M. Tout-le-monde, pendant six semaines, ou 10,
ou 12, si on ajoute un débat référendaire, se fasse une tête d'une façon
rigoureuse et qu'il arrive à l'élection, là, et qu'il n'y aura aucune influence dans sa décision du cheminement que le citoyen
aura fait pour l'élection, avec le référendum?
Qu'est-ce qui est le plus probable, là,
qu'un va influencer l'autre ou que l'un n'influencera pas l'autre? Rien que de
poser la question, c'est y répondre. Une autre lapalissade, mais
celle-là, elle s'applique en titi!
Le citoyen, là, hein, le citoyen qui va aller
voter, quel va être son réflexe le plus naturel? Je m'inclus là-dedans. Même si je me dis, là : Moi, là, je vais être
capable de faire la part des choses, bien non... en fait, c'est bien oui, je
peux la faire, mais, bien non, il va y avoir une
influence. Le citoyen moyen, là, mettons, là, Mme la Présidente, que les
sondages sont serrés entre trois partis.
Tiens, on va prendre le scénario le plus spectaculaire. Et là ils regardent ça,
là, puis ils se disent : Bon, si
je vote pour ce parti-là, O.K., là,
j'ai des chances de gagner, ça va être serré. Mais là, le référendum, de la
manière que c'est dessiné, là, bien,
la fois d'après, si je me retrouve dans la même situation, ça défait tout, là,
c'est sûr, sûr, sûr. Je peux même prendre le scénario inverse, à l'autre
extrême. Bien, voyons donc! Là, mon parti gagne aujourd'hui, là, je suis
content, moi, là, là, je ne vais pas... Je
vais-tu voter pour une affaire de même, qui risque, la prochaine fois, dans les
mêmes circonstances, de me faire perdre? C'est inévitable que n'importe
quel citoyen va se présenter, Mme la Présidente, à l'élection en considérant son vote référendaire avec son vote électoral
de l'élection provinciale de ce moment-là en 2022. L'un va influencer
l'autre. Et la bonne phrase, c'est : l'un va contaminer l'autre.
Or, c'est un
choix qui a été fait, Mme la Présidente. Mon collègue le dit, le gouvernement
avait le pouvoir, par sa majorité, de
faire la loi et de l'appliquer, élection au nouveau mode de scrutin nonobstant
qu'on soit d'accord ou non. Il avait ce
pouvoir-là. Non. Il a décidé, lui, unilatéralement, de faire un référendum et,
tout aussi unilatéralement, de déterminer la date du référendum le jour de l'élection. Ça, si ce n'est pas fait pour
le perdre, là, le référendum, je ne sais pas ce que c'est. Mais il y a une chose qui est certaine. Mettons,
Mme la Présidente, que ça n'a pas été fait pour que ce soit battu, bien, ça
n'a certainement pas été fait pour que ce soit indépendant, là, certainement
pas, c'est clair.
Quand on regarde les paramètres de ce qui est
leur nouveau mode de scrutin... Je suis sûr qu'il n'y en a pas, de parfait, hein, il n'y a pas... Changer les modes
scrutin, il n'y a rien de parfait. Mon collègue, dans la dernière heure, a pris
plusieurs exemples. Il a pris les bons
exemples. Le problème, c'est que ça va arriver. Et je vous dirais
qu'aujourd'hui, là, si on avait à
voter là-dessus, là, il y a à peu près 99 % de la population qui ne comprennent
absolument rien de ce qui va se passer.
Mais les cas de figure qui ont été déterminés... pas déterminés, mais relevés
par mon collègue sont bien réels et ils vont bien arriver.
Je vais faire
une petite remarque, Mme la Présidente, un petit fantasme que j'exprime ici,
là. Pour ce qui est de la représentativité
territoriale, pour être noyé, là, on peut être une goutte dans l'océan, oui, et
l'océan, ça peut être un océan de
kilomètres carrés ou ça peut être un océan de gens. Alors, un de mes fantasmes,
là, ce serait de pouvoir avoir cinq minutes, juste cinq minutes, là, un
débat de... une motion, là, avec débat où, trois minutes chacun, les députés
d'Ungava des trois derniers gouvernements
viennent nous expliquer c'est quoi, la vie d'être une goutte noyée dans des
kilomètres carrés, là. Et c'est là, là, que vous transposez ça, là, aux
députés de régions, là, puis «have fun». Et la transposition, elle est
100 % identique quand on est un député à Montréal ou dans la
Capitale-Nationale.
Ce n'est même pas un reproche que je fais, Mme
la Présidente. Je dis que ce qui est là, on va en débattre dans l'étude détaillée. Il y a des travers. Ce
travers-là en est un. Mon collègue faisait référence au seuil de 10 %.
Bon. Le seuil de 10 %, Mme la
Présidente, par définition, par définition, ça exclut du monde. Et là on se
promène ici en disant : On va faire une réforme de scrutin, là, du
mode de scrutin pour être sûrs d'inclure tout le monde et on met un seuil qui,
par définition, va exclure du monde. Bon. O.K. Est-ce que ça, c'est légitime
dans la... Bon, ça sort d'où, cette affaire-là?
Alors, c'est sûr que, là, on va me répondre que,
pour avoir tout le monde, bien, il faudrait la proportionnelle complète. Et ça, ça nous amène à des gouvernements
de coalition permanents. Je ne suis pas convaincu, moi, là, là, dans la présentation actuelle, mais pas du tout, qu'on
assure la stabilité, tel que ça a été évoqué par l'ex... la ministre de la
Justice. Mais ça, on aura la chance d'en débattre au fil de l'étude
détaillée.
Pas sûr non
plus... Vous avez remarqué qu'on n'est pas allé jusqu'à obliger d'avoir une
parité hommes-femmes, et ainsi de suite, là. On ne l'a pas obligé, on
propose des tendances, des engagements, et ainsi de suite.
Alors, je
vois, moi aussi, le temps qui file. Je vois qu'il me reste moins d'une minute,
Mme la Présidente. Alors, aujourd'hui,
là, je vais conclure là-dessus. Vraiment, là, pour moi, comme parlementaire,
c'est un mauvais moment, parce qu'on nous a présenté de la vertu alors
qu'au départ ça a été conçu pour que ça ne vive pas. Ça ne vivra pas. Et on va prendre beaucoup, beaucoup, beaucoup de temps pour
essayer d'améliorer quelque chose qui a beaucoup plus de chance d'être battu circonstanciellement, comme je l'ai
dit, que de quoi que ce soit d'autre. Si ça, ce n'est pas un écran de fumée,
Mme la Présidente, là, je ne sais pas ce que
c'est. Je suis déçu, très, très déçu de l'exercice. Et ça, c'est la
responsabilité du gouvernement en
place. Je le répète, ce sont des choix qu'ils ont faits. On aurait pu faire
d'autres choix. Et le choix qui a été fait, il mène là où je pense que
ça nous mène. Et j'exprime aujourd'hui ma déception, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député de La Pinière. M. le député de
LaFontaine, vous voulez intervenir?
M. Tanguay : Oui, Mme
la Présidente. J'aimerais que vous
vérifiiez, en vertu de l'article 213,
l'intérêt pour mon collègue de recevoir une question de ma part.
Des voix : ...
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Bien, attendez, je vais voir s'il y a une légitimité pour poser une question, puisque c'est une situation un peu
particulière. 213. Il n'y a pas de problème. Alors, j'imagine que c'est une
question courte et une réponse courte.
• (12 h 50) •
Une voix : ...
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Bien, c'est ça, là. Et c'est
pour ça que je spécifie, là. Alors, vous pouvez... Il faut que vous
acceptiez de dire... Est-ce que vous acceptez?
Une voix :
...
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Oui, oui, oui. Alors, voilà.
La question sera posée rapidement, et une réponse courte.
M. Tanguay : Alors, Mme
la Présidente, brièvement, le secrétariat a fait une simulation du projet de
loi n° 39 appliquée
à la dernière élection, ce qui ferait en sorte que la CAQ aurait 14 députés
de moins, ils seraient 60, il y aurait un gouvernement minoritaire. Question
à mon collègue de La Pinière : À la lumière de la façon de gouverner
du premier ministre, comment juge-t-il l'enthousiasme réel du premier ministre
à gouverner un gouvernement minoritaire?
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
M. le député de La Pinière.
M. Barrette : Mme la
Présidente, je ne répondrai que par une prescription de Gravol. Je pense que le
premier ministre, actuellement, n'a aucun
intérêt et aucun sentiment positif pour aller dans cette direction-là. Et, si
ça arrivait, je serais prêt à lui prescrire le bon médicament.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, je vous remercie de
cette courte réponse. Et maintenant je suis prête à reconnaître le
prochain intervenant, qui sera M. le leader du deuxième groupe d'opposition et
député de Gouin.
M. Gabriel Nadeau-Dubois
M. Nadeau-Dubois : Merci, Mme
la Présidente. Pour ma part, je n'ai pas de question spécifique pour le député de La Pinière. Je vais plutôt profiter du
temps qui m'est imparti aujourd'hui, en tout cas d'une partie de ce temps-là,
pour vous exposer les raisons qui motivent ma formation politique à
appuyer le principe du projet de loi n° 39.
Je vous
mentirais si je dirais que c'est un enthousiasme débordant qui nous habite. Je
dirais que c'est un enthousiasme prudent,
prudent parce que ce projet
de loi là, bien qu'on en appuie
l'intention première, est un projet
de loi sur lequel nous avons
l'intention de travailler avec beaucoup d'énergie en étude détaillée parce qu'il comporte des lacunes importantes. Il y a des trous, il y a
des gros problèmes dans le projet de
loi, même si je ne surprendrai
personne en disant que la réforme du mode de scrutin est un combat, une
bataille que nous menons, à Québec solidaire, depuis longtemps.
Et, par
déformation professionnelle, Mme la
Présidente, j'ai envie de faire un retour dans le temps. Je ne sais pas si les
gens qui m'écoutent ici aujourd'hui savent c'est quoi, le premier moment au
Québec dans notre histoire politique que
cette idée de réformer le mode de scrutin pour ajouter, disons, une composante
de proportionnalité a été évoquée. On me fait signe : Ça fait longtemps.
Mais ça fait vraiment, vraiment longtemps. En fait, la première trace écrite de
cette idée dans notre histoire
politique, on la retrouve en 1902 dans le journal Le Pionnier, un
certain Amédée Denault, qui évoquait, à
l'époque, cette idée de réformer le mode de scrutin pour une représentation
proportionnelle. C'est le premier moment dans notre histoire politique où cette idée est évoquée, et c'est le début
d'une longue conversation démocratique qui commence, donc, en 1902, et qui, plus d'un siècle plus tard,
nous occupe et nous mobilise encore aujourd'hui ici, à l'Assemblée nationale
du Québec.
Je ne ferai pas le résumé de tous les jalons de
cette longue conversation démocratique, je n'aurais pas assez de l'heure qui m'est impartie, mais, disons, dans
l'histoire politique récente, contemporaine du Québec, c'est une idée qui a
été, souvent, débattue. Puis je vais
commencer réellement mon historique en 1965, alors que le Rassemblement pour l'indépendance nationale, le RIN, l'ancêtre du
parti qui forme aujourd'hui la troisième opposition, est la première formation
politique à inscrire dans son programme un projet de réforme électorale qui
prévoit une part de proportionnalité.
À partir du
moment où le RIN inscrit ça dans son programme, beaucoup de gens se disent :
Ah! c'est une bonne idée, mais il
faudrait consulter pour être sûrs que les gens comprennent et que les gens
soient d'accord. Parce qu'un des arguments
qui a été invoqué par le député de La Pinière à l'instant, c'est que c'est
un enjeu qui est complexe, c'est vrai, et que, donc, il y a un défi que les gens, vraiment, comprennent de manière
pleine et entière quels sont les enjeux en question. Et donc on s'est dit dès le milieu des années 60,
au Québec : Il faut faire des consultations, pour être sûrs que tout le
monde comprenne bien.
Alors, voici
les consultations que nous avons faites depuis 1965. Donc, en 1970, d'abord,
Commission de l'Assemblée nationale,
qui étudie la réforme du mode de scrutin. 1979, livre vert sur la réforme du
mode de scrutin. 1981 à 1983, le gouvernement
de l'époque réalise une consultation sur le mode de scrutin. 2001, la
Commission des institutions de l'Assemblée
nationale se donne un mandat d'initiative concernant la réforme du mode de
scrutin. 2002 à 2003, se tiennent les états généraux sur la réforme des
institutions démocratiques. 2004, le Parti libéral du Québec dépose un
avant-projet de loi. 2005‑2006, il y
a une commission spéciale sur la Loi électorale. En 2007, le Directeur général
des élections du Québec dépose un
rapport. 2017, grande consultation pilotée par le MDN, intitulée Chaque voix
compte, des milliers de citoyens, citoyennes contribuent à cette
consultation. Et cette longue cascade de consultations populaires culmine le 9 mai
2018 sur une signature d'une entente, où
quatre des cinq principales formations politiques au Québec s'entendent sur un
principe élémentaire, fondamental,
c'est-à-dire il faut réformer le mode de scrutin pour y introduire des
composantes de proportionnalité, et
il faut le faire dès la prochaine législature, dès le prochain mandat, le
mandat qui est celui, actuellement, de la Coalition avenir Québec.
Vous
comprendrez, Mme la Présidente, qu'après cette longue, que dis-je, cette très
longue cascade de consultations, on a
été plutôt surpris de voir la Coalition avenir Québec, son gouvernement, faire
marche arrière sur une partie de la promesse électorale pour dire : Ah! finalement, on n'est pas sûrs qu'on a
assez consulté. On a consulté, quoi, une quinzaine de fois, là,
je n'ai pas compté, en tout cas, plusieurs fois depuis les années 70. Ce
n'est pas suffisant, il faut reconsulter à nouveau et il faut faire un
référendum.
C'était
d'autant plus surprenant que le premier ministre lui-même avait réitéré à
plusieurs reprises qu'un référendum n'était
pas nécessaire. En septembre 2018, l'actuel premier ministre disait, et je cite :
«Je pense qu'une campagne électorale, c'est
suffisant pour avoir la légitimité de changer le mode de scrutin. [Les
électeurs, ils] vont se prononcer le 1er octobre.» Quelques jours plus tard, toujours en septembre
2018, je cite à nouveau le premier ministre actuel du Québec : L'élection
qui s'en vient sera... En fait, non, je cite
d'abord la question du journaliste, parce que c'est important pour comprendre.
Le journaliste demande :
«L'élection qui vient sera donc la dernière du mode de scrutin actuel, sûr de
sûr?» Sûr de sûr? Et l'actuel premier
ministre de répondre : «Effectivement[...]. Sauf si les libéraux sont
élus. Mais [nous autres] on ne fera pas comme Justin Trudeau.» Vous comprendrez qu'après une telle séquence
consultative, après des déclarations aussi fermes de l'actuel premier ministre, à peu près tout le
monde qui a travaillé sur la question de la réforme du mode de scrutin dans
l'histoire du Québec est tombé des nues de
voir que, tout d'un coup, changement de cap, une réforme du mode de scrutin
était inimaginable sans référendum. C'est un changement de position radical.
Est-ce la
prise du pouvoir qui a assoupli les convictions du premier ministre en matière
de réforme du mode de scrutin? C'est
la question qui se pose, puis beaucoup de gens pensent que oui. Puis, à partir
du moment où on bénéficie d'un mandat
majoritaire qui nous est donné par un certain système électoral, ça nous rend
naturellement réticents à transformer ce système électoral. Et ça, ce
n'est pas seulement la responsabilité du premier ministre, Mme la Présidente,
c'est la responsabilité de l'ensemble des
députés de la Coalition avenir Québec, qui ont tous été élus sous la même
bannière, bannière sur laquelle il
était écrit : Nous réformerons le mode de scrutin si nous sommes élus. Et
la Coalition avenir Québec étant un parti unifié derrière son chef...
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, justement... Alors,
vous n'avez pas terminé votre intervention, M. le député. Je dois vous
inviter à poursuivre lors de la reprise de ce débat.
Et, d'ici là, je suspends nos travaux jusqu'à
15 heures.
(Suspension de la séance à 13 heures)
(Reprise à 15 heures)
Le
Vice-Président (M. Picard) : Veuillez vous asseoir, s'il
vous plaît. L'Assemblée poursuit les
débats sur l'adoption du principe du projet de loi n° 39, Loi établissant un nouveau mode de scrutin. Lorsque nous avons cessé nos
travaux pour aller dîner, c'était M. le député de Gouin.
Il avait 7 min 47 s. Vous pouvez poursuivre.
M. Nadeau-Dubois :
Merci, M. le Président. Lorsque j'ai été interrompu par l'horloge, je parlais
de la décision du gouvernement
d'inclure dans son projet de loi sur la réforme du mode de scrutin un référendum,
une décision qui a surpris beaucoup
de gens, notamment les gens qui depuis des années suivent le dossier du mode de
scrutin et qui militent en faveur de la réforme du mode de scrutin.
Ce
qui est surprenant dans cette stratégie, c'est que le peuple québécois a été,
au fil des ans, consulté à de nombreuses reprises sur cette question-là, et les
partis politiques qui avaient signé l'entente de 2018 sur la réforme du mode de
scrutin pensaient
vraiment que, cette fois-ci, on y était et que le scrutin de 2018 serait le
dernier à se dérouler sous l'actuel mode de scrutin. Ça a été vécu comme une énorme déception par les gens qui
militent en faveur de la réforme du mode de scrutin au Québec, que cette décision de promulguer un
référendum, parce qu'historiquement cette idée de référendum, généralement,
a été utilisée par les adversaires de la réforme du mode de scrutin.
Et
c'est questionnant d'autant plus que nous avons fait, au Québec, nous avons
posé beaucoup de gestes qui nous définissent aujourd'hui comme peuple... posé de nombreux gestes, donc,
sans procéder à des référendums, des décisions politiques qui n'avaient rien de banal, qui étaient déterminantes pour
la société québécoise, puis qu'on a mises de l'avant sans passer par ce
détour du référendum, par exemple la nationalisation de l'eau... de
l'hydroélectricité, pas une petite décision,
l'adoption de la Charte de la langue française, qui venait quand même... qui a
créé, c'est un euphémisme, de
nombreux débats, des débats constitutionnels. Ce n'était pas une petite
décision, ce n'était pas un petit projet de loi. Il y avait de l'opposition, à l'époque à l'Assemblée nationale,
à l'adoption de cette Charte de la langue française, et on est allé de l'avant
sans référendum.
La déconfessionnalisation des écoles, l'aide
médicale à mourir, il y a plein de décisions qu'on pourrait nommer au fil des ans, des décisions déterminantes pour
ce qui est le Québec d'aujourd'hui puis qu'on a mises de l'avant, des choix qu'on
a faits collectivement, que les gouvernements ont fait sans prendre le détour
du référendum parce qu'il y avait un consensus
social et politique assez fort pour aller de l'avant. Et, s'il y a bien un
consensus social sur un enjeu au Québec, c'est bien celui de la réforme
du mode de scrutin. Il y a une seule formation politique qui s'y oppose depuis
un moment. Cette formation politique, c'est celle qui constitue aujourd'hui l'opposition
officielle, c'est le Parti libéral du Québec. C'est
l'exception, M. le Président, à une coalition gargantuesque de partis
politiques et de forces de la société civile qui disent tous la même chose :
Il faut sortir de ce mode de scrutin problématique, ce mode de scrutin que René Lévesque décrivait comme démocratiquement infect, que d'autres politologues
décrivent comme étant un miroir déformant de la volonté populaire
qu'expriment les Québécois et les Québécoises quand ils vont voter lors des
élections.
Dommage,
donc, qu'on s'impose ce détour et ce délai qui n'est pas nécessaire.
Dommage qu'on suspende au-dessus de
la réforme du mode de scrutin cette épée de Damoclès qui n'a pas lieu d'être.
On aurait pu, on aurait dû aller de l'avant. Et c'est
dommage, à la lueur du débat politique et social qui a lieu au Québec depuis
des décennies sur le mode de scrutin, qu'on
ouvre cette possibilité qu'on n'y arrive pas une nouvelle fois et qu'on
revienne à cette triste tradition où on en parle pendant les élections, on en parle avant les élections, puis qu'une fois
ici au salon bleu, bien, on ne soit pas capable de livrer la marchandise pour une réforme qui est demandée
par une majorité nette, claire et maintes fois confirmée de Québécois puis de Québécoises.
Ceci étant
dit, le gouvernement a néanmoins pris la décision d'aller de l'avant
avec le référendum. Qu'est-ce qu'on
fait maintenant avec le reste du projet de loi? Un des éléments qui est inclus dans cette réforme du mode de scrutin,
c'est des dispositions en matière de
parité hommes-femmes en matière de représentation des femmes à l'Assemblée nationale. On
nous avait annoncé des mesures de parité. Finalement, ce qu'on a, c'est grosso
modo des souhaits de parité, puisque, dans le projet de loi, il n'y a qu'une obligation pour les formations
politiques de se donner des objectifs de parité. On demande aux formations
politiques que ces objectifs-là soient rendus publics. C'est bien, mais c'est
très, très, très peu.
Dans la
plupart des pays dans le monde où il y a des modes de scrutin proportionnel, on
met en place des mesures de représentation des femmes beaucoup plus
importantes, qui vont beaucoup plus loin, par exemple en obligeant les
formations politiques à avoir la parité sur leur liste de candidats et de
candidates. Dans d'autres pays, on module le financement électoral selon la
capacité des partis à atteindre des cibles de parité. Il y a toute une série de
mesures structurelles de parité qui sont
appliquées dans les pays où il y a des modes de scrutin à composante
proportionnelle, et, en fait, le choix
qu'à fait le gouvernement, c'est de prendre, dans tout cet éventail de
possibilités là, l'option la moins contraignante,
l'option qui va faire progresser le plus lentement la cause de la présence des
femmes en politique, alors qu'ils
avaient à leur disposition une panoplie d'options beaucoup plus ambitieuses, et
c'est dommage.
Pour vous
donner une idée, M. le Président, il y a 103 pays, 103 pays à travers
le monde, qui appliquent des mesures structurelles
dans leur mode de scrutin pour améliorer la représentation des femmes et des
minorités nationales. Et, dans ces 103 pays, en moyenne, devinez
quoi, bien, il y a plus de femmes élues que dans les autres. Alors, ce n'est
pas une proposition radicale, ce n'est pas
une proposition marginale, ce n'est pas une proposition saugrenue ou originale
que de demander des mesures
structurelles de parité dans un projet de loi comme celui-là. C'est en fait la
norme dans une centaine de
démocraties à travers le monde. Le gouvernement de la Coalition avenir Québec a fait le choix de l'exception et de se
contenter de mesures très timides en matière de représentation des femmes.
Un autre des
enjeux qui devra être amélioré dans ce projet de loi là, c'est la question du
seuil d'admissibilité. Une décision
très difficile à comprendre du gouvernement de fixer le seuil d'admissibilité,
pour participer à l'attribution des sièges
en région, à 10 %. M. le Président, après de nombreuses recherches, il y a
un seul pays dans le monde où un tel seuil est appliqué, c'est la Turquie, pas exactement une démocratie à laquelle
on aime se comparer. Et, quand on regarde quelles sont les réelles pratiques dans les pays où il y a
des modes de scrutin à dimension proportionnelle, on parle de seuils qui
sont généralement autour de 5 % ou inférieurs à 5 %. Il y a des pays
où il n'y a pas seuil. Nous, on juge que ce serait une erreur que d'aller dans un système électoral où il n'y a pas de
seuil de représentation. Ça génère trop d'instabilité. Donc, mon argument n'est pas celui-là, mais on aurait pu
puis on aurait dû opter pour un seuil beaucoup plus raisonnable puis beaucoup plus conforme à ce que font les autres
pays dans le monde où il y a des modes de scrutin à dimension proportionnelle.
Et ça,
également, ma formation politique va déposer des amendements, lors de l'étude
détaillée, pour qu'on ramène un seuil de représentation... un seuil
d'admissibilité beaucoup plus raisonnable, beaucoup plus démocratique.
10 %, M. le Président, ça aurait été
très long avant que ma formation politique fasse élire des députés, s'il y
avait eu un seuil de 10 %. C'est
un seuil beaucoup trop fort, ça ne peut se justifier par aucune pratique dans
aucune des démocraties à travers le monde. Il va absolument falloir que,
sur cette question-là spécifique, le gouvernement fasse un compromis, et, pour
nous, c'est absolument essentiel.
Autre élément
spécifique avant de me permettre un argument plus général, il y a
eu, dans ce projet de loi, l'introduction d'une petite, j'essaie de trouver un terme pour le décrire, d'une petite
particularité, d'une petite twist, d'un petit détail qui n'a l'air de rien et
qui est particulièrement technique,
mais qui vient bouleverser tout l'équilibre interne du projet de loi puis du mode de scrutin qui est proposé par le
projet de loi. C'est ce que certains experts ont appelé la prime au vainqueur,
qui a été incluse dans le calcul de distribution des sièges, puis c'est une
disposition qui vient tirer vers le bas le caractère représentatif, le
caractère proportionnel du mode de scrutin qui est proposé dans le projet de
loi n° 39.
• (15 h 10) •
C'est dur de ne pas y voir une mesure de
compromis, à l'interne de la Coalition avenir Québec, pour peut-être ménager certaines sensibilités ou, en tout cas,
rassurer certains députés qui craignent qu'un changement du mode de scrutin
ait une influence sur les résultats de la prochaine élection.
C'est cette
prime, donc, au vainqueur qui fait en sorte qu'on ne comptabilise que la moitié
des sièges de circonscription remportés
dans une région. C'est une petite entourloupe assez ingénieuse, mathématiquement,
mais qui vient vraiment tirer vers le bas le caractère représentatif du
mode de scrutin qui est proposé là. Et ça a l'air d'une technicalité, c'en est
une, en fait, mais elle a des conséquences
déterminantes sur les résultats des prochaines élections qui seront tenues sous
le mode de scrutin proposé par le projet de loi n° 39.
Je veux,
avant de passer à un argument plus général, vous parler de la question des
régions, parce que c'est l'argument qui
est utilisé par beaucoup des adversaires à la réforme du mode de scrutin pour
décrédibiliser ce projet. Et c'est un argument qui fonctionne parce qu'il rejoint des craintes légitimes des citoyens
et des citoyennes du Québec qui habitent en dehors des grands centres de
voir leur poids politique diminuer.
Il s'est
créé, à travers les années, une association mentale entre réforme du mode de
scrutin... Ça, cette affaire-là, ce n'est pas bon pour les régions. Puis c'est
une perception qui s'est enracinée dans beaucoup de régions du Québec et
c'est dommage parce que c'est faux. C'est
profondément faux et ça repose sur une conception de ce que c'est, le pouvoir
politique des régions, qui m'apparaît problématique, mais même nuisible pour le
dynamisme des régions du Québec.
Je vais prendre l'exemple des
Laurentides, une région administrative qu'on connaît tous bien et qui, en ce
moment, est représentée à 100 %
par des députés de la Coalition avenir Québec. Pourquoi? Parce qu'à l'intérieur
de chacune des circonscriptions des
Laurentides, le candidat ou la candidate qui a eu le plus de votes, c'est un
candidat de la CAQ. Est-ce que ça
veut dire que, dans les Laurentides, 100 % des gens ont voté pour la CAQ?
Bien sûr que non, tout comme, à l'intérieur de chacune de ces circonscriptions-là, ce n'est pas 100 % des gens
qui ont voté pour la CAQ. Pourtant, politiquement, la région administrative des Laurentides ne parle que
d'une voix à l'Assemblée nationale, celle d'un seul parti, la Coalition
avenir Québec.
Puis
là je prends la CAQ parce qu'ils ont eu de tels résultats aux dernières
élections que c'est l'exemple qui revient le plus souvent, mais ce serait le
même problème si c'étaient des régions entières qui auraient voté pour ma
formation politique, pour le Parti
libéral du Québec ou pour le Parti québécois. On a un mode de scrutin qui, en
ce moment, nuit à l'expression du pluralisme politique à l'intérieur des
régions. Le mode de scrutin actuel peint les régions d'une seule couleur,
et ça a des conséquences, ça, sur la
capacité de ces régions-là de s'exprimer politiquement puis d'avoir des débats
à l'intérieur d'elles-mêmes, parce que ça, c'est aussi un enjeu, là.
Déjà, les régions, ça n'existe pas. Il y a des régions qui sont toutes différentes les unes des autres, puis, à
l'intérieur de ces régions-là, il y a des débats politiques, il y a des
familles politiques, il y a des
conflits idéologiques. Ce n'est pas des entités monolithiques, d'un point de
vue politique, tout comme une métropole, comme Montréal ou une ville
comme la capitale nationale.
Et notre mode de
scrutin actuel, uninominal majoritaire à un tour, il enferme les régions du
Québec dans une monoreprésentation structurelle qui fait qu'il y a plein
d'électeurs des régions qui n'ont pas de voix au niveau politique, qui n'ont pas de voix au niveau politique parce que
le mode uninominal majoritaire à un tour donne tous les... souvent, et c'est une constante quand on regarde les résultats
électoraux depuis des décennies, donne systématiquement des résultats
monolithiques, quand on les prend région par région, à un seul parti.
Donc,
loin d'affaiblir la représentation politique des régions, une réforme bien
réfléchie du mode de scrutin, ça permet d'améliorer la représentativité des
régions puis d'améliorer, de permettre l'expression du pluralisme politique à
l'intérieur des régions. Pas juste à l'échelle du Québec, mais à l'intérieur de
chaque région, il faut qu'on ait un mode de
scrutin qui permet au pluralisme politique de s'exprimer, puis notre mode de
scrutin, en ce moment, il ne le permet pas, parce qu'il y a beaucoup de gens
qui ont voté pour la Coalition avenir Québec dans les Laurentides, puis ces
gens-là ont le droit d'être représentés à l'Assemblée nationale, mais la
majorité des gens, pour reprendre mon exemple
dans les Laurentides, qui n'ont pas
voté pour cette formation politique là ont droit aussi d'avoir des gens ici, au salon
bleu, qui parlent pour eux et pour elles. S'il y en a qui ont voté pour
le Parti québécois, tant mieux, mais pourquoi c'est un député de l'Est du Québec qui parle en leur nom? S'il y
en a qui ont voté pour les libéraux, pourquoi
c'est un député de Montréal qui parle
en leur nom? Puis, s'ils ont voté pour Québec solidaire, pourquoi c'est
un député d'une autre des régions qui parle en leur nom?
Les
électeurs de toutes les formations politiques à l'intérieur de chaque région
ont droit d'avoir une voix en politique québécoise, et une réforme du mode de scrutin, c'est ce que ça permet.
Et ce projet de loi, malgré ses écueils, il y en a, permet cette expression du pluralisme politique
des régions. Et il le fait sans diminuer le poids politique global des régions.
Parce que ça aussi, c'est quelque chose
qu'on entend : Le poids des régions va être diminué au sein de l'Assemblée
nationale avec un tel projet de loi.
C'est faux. En fait, en s'assurant que les régions du Québec se voient
attribuer un nombre fixe de sièges
régionaux, de sièges de compensation, ça vient au contraire verrouiller le
poids politique de certaines régions qui, par ailleurs, sont en déclin démographique et pourraient perdre des sièges à
l'intérieur du mode de scrutin actuel quand on révise la carte électorale, parce qu'il y a des régions
en ce moment, là, quand on révise la carte électorale, qui sont en voie des
perdre des circonscriptions. À partir du
moment où on met des sièges de région, des sièges de compensation régionale et
qu'on les verrouille dans le mode de
scrutin, ça crée un seuil en bas duquel on ne peut pas descendre et ça garantit
un poids politique à bien des régions
qui, dans le mode de scrutin actuel, voient leur poids politique diminuer.
Donc, loin d'être une menace au poids
politique des régions au Québec, cette réforme du mode de scrutin représente
une garantie que certaines régions ne perdront par davantage de poids.
D'ailleurs, d'un
point de vue strictement mathématique, la région qui, en vertu de ce mode de
scrutin, perd en proportion ici, à
l'Assemblée nationale, des représentants, il y en a une qui en perd le plus,
c'est laquelle? C'est la région de Montréal,
qui voit en toute proportion son nombre de députés diminuer. On pourrait... Je
viens d'une formation politique dont
les premières racines, plus maintenant, mais les premières racines sont à
Montréal. On pourrait se dire : Oh! ce n'est pas bon pour nous autres, ça.
Ce n'est pas bon pour nous autres, ça. Non, au contraire, M. le Président,
c'est une bonne chose. Je ne
m'inquiète pas pour le poids politique de la métropole. Je pense qu'elle est
bien représentée. Je pense que c'est correct. Et, si elle souffre de la
perte d'un ou de deux députés, c'est correct comme ça si c'est le prix à payer
pour une démocratie, au Québec, plus représentative de tous les Québécois puis
toutes les Québécoises.
Et ça, il faut le
dire, ce projet de loi là, ce n'est pas une attaque aux régions, ça défend en
grande partie le poids politique de plusieurs régions au Québec. Je vous cite
Louis Massicotte, qui est généralement considéré comme un des grands, sinon le grand spécialiste de la question
de la réforme du mode de scrutin au Québec, qui disait : «Un premier
constat s'impose d'emblée : le projet de loi ne préserve pas le
poids politique actuel des régions. Il fait plus que maintenir la
surreprésentation de certaines régions rurales éloignées, il l'accentue.»
Alors, ce que le spécialiste vient dire, c'est : Ça ne préserve pas le poids politique, ça l'améliore puis ça améliore
des phénomènes, en ce moment, de surreprésentation d'un point de vue
démographique. Donc, c'est un projet de loi qui est bon pour l'expression
politique des régions.
Maintenant,
M. le Président... J'ai voulu couvrir les aspects plus techniques d'abord, les
éléments qui nous apparaissent devoir être ajustés ou améliorés dans le projet
de loi. Je me permets de terminer en répondant à un argument que j'ai entendu beaucoup dans le cadre des débats
qui ont eu lieu lorsqu'on a discuté de ce projet de loi, ça nous apparaît
appartenir à un autre univers, hein, ça ne
fait que quelques mois seulement, et c'est cette idée qui convainc, je pense,
certaines personnes,
mais qui m'apparaît pernicieuse, cette idée que la réforme du mode de scrutin
constitue une attaque à ce que certains ont appelé le pouvoir
francophone.
• (15 h 20) •
On a entendu
de certains nationalistes, parfois indépendantistes, parfois fédéralistes, mais
des nationalistes, nous dire :
La réforme du mode de scrutin, ça va affaiblir la majorité historique
francophone, au Québec, dans sa capacité de s'exprimer politiquement
dans des majorités parlementaires. Il y a des gens par ailleurs bien
intelligents qui ont fait cet argument-là en
disant : Ça va brider la capacité de la majorité historique francophone à
s'exprimer politiquement puis à réaliser des choses pour ses intérêts. Bon,
je pourrais ouvrir une énorme parenthèse puis dire : C'est qui, ça, la
majorité historique francophone? Qui qui est
dedans? Qui qui n'est pas dedans? En tout cas, c'est une notion qu'on pourrait
remettre en question ou contester,
mais mettons qu'on la prend comme ça, qu'on l'accepte. Cette thèse-là, qui
présente la réforme du mode de scrutin comme une menace à l'égard du pouvoir
francophone, est problématique à plusieurs niveaux. La première, ça ne repose sur aucune démonstration
factuelle rigoureuse. Il n'y a aucune donnée nulle part dans le monde, dans les
pays où il y a des modes de scrutin à composante proportionnelle, qui appuie
cette thèse-là.
Puis je me
permets de m'adresser à des gens qui sont, comme moi, indépendantistes et qui
s'opposent à cette réforme du mode de scrutin là en disant que le pays qui est passé le plus près d'accéder à son
indépendance dans les dernières années, c'est l'Écosse, qui a un mode de scrutin proportionnel... à dimension
proportionnelle qui ressemble à plusieurs égards à celui qui est proposé dans ce projet
de loi là. Donc, de faire de la réforme du mode de scrutin une espèce de menace
à l'expression de la majorité
historique francophone et, pour certains, à l'accession à l'indépendance pour
le Québec, c'est factuellement non démontré. Il y a
même, un peu partout à travers le monde, des contre-exemples clairs à cette
idée.
Ce qu'on
croit comprendre dans cette thèse de la dilution du pouvoir francophone, c'est
qu'une réforme du mode de scrutin,
ça produirait, c'est ce que les gens qui défendent cette idée-là
soutiennent, une fragmentation du pouvoir politique,
et que, donc, ça va générer ce qu'eux appellent des gouvernements faibles, et que ça va rendre difficile l'accomplissement de gestes collectifs décisifs et importants,
ça va rendre le Parlement incapable de prendre des décisions et ça va... et on
a donné l'exemple,
par exemple, en disant : S'il y avait
eu une réforme du mode de scrutin, il n'y aurait jamais eu de loi sur la laïcité.
D'abord,
c'est très intéressant, cet argument-là, parce que ça révèle la
conception que ces gens-là ont de la démocratie.
Qu'est-ce que c'est, la démocratie? Et là je parle de la démocratie
représentative. Est-ce que c'est un
système politique qui doit avoir
comme objectif de représenter le plus fidèlement possible les choix politiques
des citoyens et des citoyennes ou est-ce
que la démocratie représentative, c'est un système qui doit avoir comme
objectif de constituer, de mettre sur pied une majorité claire qui gouverne? Si on pense que le critère qui définit
une bonne démocratie représentative, c'est sa capacité à générer des majorités fortes, qui sont décisives
et qui prennent des décisions, bien, il n'y a pas de raison d'être en faveur de
la réforme du mode de scrutin. Par contre, si on pense que la vertu principale
d'une démocratie représentative, c'est de représenter les choix politiques des citoyens et des citoyennes, bien,
en vertu de cette définition-là, notre mode de scrutin actuel, il est
hautement problématique, et il faut le transformer.
Ça parle
aussi de la conception de la nation qu'ont ces nationalistes-là. Ces gens-là
nous disent : La nation, elle est une,
elle est homogène, et l'expression du débat politique, l'expression du
pluralisme politique, ça menace l'unité de la nation. C'est ça, l'argument qui est sous-jacent à la
thèse de la dilution du pouvoir francophone par la réforme du mode de scrutin.
C'est l'idée selon laquelle le pluralisme
politique menace l'unité de la nation. Mais alors la question, c'est :
Mais de quelle unité s'agit-il? Si le fait de donner une représentation fidèle
des idées des citoyens et citoyennes, c'est une menace à cette nation-là, de quelle unité parle-t-on?
Certainement pas d'une unité réelle, puisque, si ce qui tient la nation
québécois ensemble, c'est un mode de scrutin qui trahit la volonté populaire,
on a des petits problèmes, là. Si la condition de notre capacité à faire des gestes collectifs décisifs,
c'est de surtout s'assurer de ne jamais représenter la volonté des électeurs,
bien, on a un problème.
Si ces gens-là nous disent : Pour accomplir
de grandes choses, il faut tordre la volonté populaire jusqu'au point, par exemple, de mettre au pouvoir, en 1998, un
parti qui a reçu moins de voix, dans l'absolu, qu'un autre, mais là ça veut
dire qu'on est en train de dire que la capacité des gouvernements de prendre
des décisions est moins importante que la légitimité
démocratique de ces gouvernements-là puis que ce qui prime, ce n'est pas
l'expression de la volonté populaire, c'est la capacité de prendre des
décisions, la capacité de gouverner. Ça, M. le Président, pour moi, c'est
une inversion fondamentale de la logique
démocratique. Personne n'est contre la capacité de gouverner, bien sûr, ce
n'est pas ça. Mais cette capacité-là, elle doit s'appuyer sur une
légitimité démocratique. Et que, dans notre échelle de valeurs, on mette au-dessus de la légitimité démocratique puis de
l'expression fidèle de la volonté populaire une simple capacité de gouvernance
efficace, pour moi, c'est une distorsion majeure de ce qu'est l'idéal
démocratique.
D'ailleurs,
quand on regarde ce qui se passe à travers le monde, on se rend compte que les
pays qui ont des modes de scrutin où il y a une composante de
proportionnalité ont en moyenne moins d'élections, ils ont des élections moins fréquentes que les pays avec des systèmes, avec des modes de scrutin uninominaux
majoritaires à un tour comme le nôtre. Donc,
même sur une base factuelle, c'est un argument qui est contredit par les faits.
Ça ne produit pas des gouvernements instables.
Ce que ça produit, c'est des gouvernements de collaboration, de coalition. Et ça, il y en a, je peux
comprendre, qui ne veulent pas ça, mais ce n'est pas la même chose que
de l'instabilité.
M. le Président, je vais m'arrêter bientôt, mais j'invite, en terminant, le gouvernement de la Coalition avenir Québec
à ne pas rater le moment historique qui est
le nôtre. J'ai commencé mon intervention plus tôt, aujourd'hui, en vous parlant de la longue
séquence de consultations, de mémoires, de commissions, de tournées, de
sondages, d'assemblées citoyennes qui
ont été faites sur la question de la réforme du mode de scrutin. Je pense qu'on
est arrivé au bout de ce chemin et qu'il faut maintenant passer à
l'action.
M. le Président, dans les 41 élections, O.K., nous sommes dans la 42e législature, dans les 41 élections
québécoises, il n'y en a pas une
seule, pas une, qui a donné naissance à une Assemblée nationale qui était
conforme aux voix exprimées par le peuple du Québec.
Puis, à cinq reprises, les élections au Québec, cinq reprises, les élections au
Québec ont mis au pouvoir un gouvernement qui avait obtenu moins de
votes que l'opposition officielle. Cette statistique-là à elle seule devrait
trancher le débat, parce qu'on ne peut pas défendre un système qui met au
pouvoir le deuxième. Je ne sais pas comment on peut défendre un système
démocratique qui met au pouvoir le deuxième. Ça m'apparaît juste injustifiable.
• (15 h 30) •
On
est arrivés, je l'espère, je le souhaite, dans les derniers milles de ce
système. Changeons-le. Réformons le mode de scrutin pour avoir une meilleure représentation des femmes en
politique, une meilleure représentation des régions, une expression plus
saine, plus complète et fidèle du pluralisme politique puis, en terminant, pour
s'assurer que, quand un Québécois ou une
Québécoise à Rimouski, à Blainville, à Westmount, en Abitibi-Témiscamingue,
quand ces gens-là votent, là, partout
au Québec, là, chaque personne qui met son vote dans l'urne ait le même poids
dans la composition de l'Assemblée nationale.
Ça, ce principe fondamental que chaque voix de chaque individu doit avoir le
même poids, c'est un idéal auquel il
ne faut pas renoncer. Aucun système politique ne permet de l'atteindre
parfaitement, cet idéal, soyons en paix avec ce fait, mais il y a des systèmes
qui contredisent ce principe-là de manière radicale. Notre mode de scrutin actuel trahit ce principe-là
complètement. Le mode de scrutin proposé par le projet de loi n° 39, bien
que largement imparfait, nous permet de faire un pas vers cet idéal-là, et
c'est pour cette raison-là que ma formation politique va voter en faveur du
principe du projet de loi. Merci.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député de Gouin. D'autres interventions? M. le député de Rimouski.
M. Harold
LeBel
M. LeBel :
Merci, M. le Président. En 1984, j'étais membre de l'exécutif national du Parti
québécois, et on m'avait... — ça
fait longtemps, hein, déjà? — et
on m'avait donné le mandat, là, je devais représenter l'exécutif au caucus
du parti. Puis je me souviendrai toujours, il y avait eu un caucus à Granby
avec M. Lévesque, Marc‑André Bédard, Jacques Parizeau que j'arrive, ti-cul, je m'assois à la table, et
là premier dossier à l'ordre du jour : la réforme du mode de scrutin. Ça fait que... Et je voyais
M. Lévesque essayer de défendre ça avec M. Bédard, mais là les
élections s'en venaient, M. Lévesque
partait un an après, bon, tout ça, en fin de compte, ça n'a jamais abouti. Mais
je me souviendrai toujours de ce
moment-là. Puis je me disais : Aïe! c'est 1984, puis là on est en 2020. Il
me semble qu'il y a un rendez-vous, à un moment donné, il faut qu'il soit là puis il faut que ça arrive. Et c'est ce que
j'espère par ce projet de loi là. J'espère que ce rendez-vous-là va finir
par aboutir.
Tantôt, je parlais
ici, puis il y a un député qui m'accroche, il dit : Harold, tu es-tu
certain que tu es pour ça, toi, tu es-tu
certain que tu es pour ça? Oui, je suis certain que je suis pour ça, je sais
qu'il y a des enjeux. Je sais qu'il y a des enjeux par rapport aux régions. Je le sais, la grandeur des
circonscriptions, je sais tout ça, je peux comprendre ça. Mais au plus
profond de moi-même je crois que les Québécois sont capables de changer leur
culture politique. Ils sont capables, peut-être, de voir ça autrement.
Ce
n'est pas vrai qu'on est enfargés dans ce système britannique pour toujours
comme ça, tu sais. Il me semble que...
Tu sais, dans les années 60, tu avais des rouges puis les bleus. Puis, si
tu étais rouge, puis le bleu prenait le pouvoir, tu perdais ta job. Puis, tu sais, c'était comme ça, dans ces temps-là.
Quand les bleus perdaient le pouvoir, bien, les rouges allaient brûler des tires devant les maisons des
organisateurs, puis c'était ça, la politique du temps. Puis là on appelait les
teindus, là, tu étais... On n'est plus là aujourd'hui. Ça a changé beaucoup. On n'est plus comme ça. Les gens regardent ça un
peu autrement. Puis les gens aiment aussi quand, aussi, on travaille ensemble.
Quand on réussit à faire des affaires transpartisanes,
là, les gens adorent ça, parce qu'on réussit à faire avancer des choses puis à
faire avancer des projets qui viennent les chercher. Ça fait que je
crois à ça, que la politique, la culture politique peut changer, peut être
différente.
C'est sûr que moi, un
nouveau mode démocratique, je le voyais beaucoup dans un Québec indépendant.
C'est sûr que je pense qu'on est... Un Québec
indépendant, on pourrait se donner quelque
chose qui colle plus à nos façons de
faire. Je vois une chambre des régions, plus
représentative des régions, une deuxième chambre, je vois des choses du genre.
On a déjà discuté ça longtemps, au parti. Il me semble qu'il y a des choses qui
pourraient être faites là-dessus.
Mais
là on a devant nous, quand même, quatre partis... plus que quatre, cinq partis,
la Coalition avenir Québec, le Parti
québécois, Québec solidaire, le Parti vert du Québec, le
Nouveau Parti démocratique du Québec, qui ont signé une entente ensemble pour dire : La prochaine
élection, essayons donc de faire ça sur un autre mode de scrutin qui va être
plus démocratique que celui actuel.
Puis l'engagement était clair : déposer un projet de loi au plus tard le
1er octobre 2019. Donc, nous
sommes engagés, la majorité des partis, parce que... la grande majorité des
partis, à ce que l'élection du 1er octobre 2018 soit la dernière dans le mode de scrutin actuel.
Bon, là, avec le projet de loi, il semble déjà acquis que le gouvernement a
décidé que la prochaine élection se tiendra
sur le mode de scrutin... celui-là actuel, aujourd'hui. L'entente 2018
nous semblait pourtant claire.
Le
projet de loi a bien été déposé avant le 1er octobre 2019, et nous
sommes un an plus tard, mais c'est seulement du 22 janvier au 6 février que se tiendront les consultations,
environ quatre mois après le dépôt du projet. Et c'est huit mois après
les consultations que le débat sur le principe du projet de loi débute. C'est
comme si on s'était dit : On se presse lentement, pas trop vite. C'est sûr
qu'il y a eu la pandémie, ça n'a pas aidé, tout ça. Mais, sur certains projets
de loi, le gouvernement a réussi des façons
de faire avancer ses projets de loi. Celui-là, j'ai l'impression qu'on s'est
dit : N'allons pas trop vite.
Soyons sincères, nous avons connu un leader parlementaire du gouvernement
beaucoup plus pressé de faire avancer d'autres
projets de loi malgré la pandémie de COVID-19. Beaucoup de temps a été perdu,
et nous demeurons convaincus qu'il était possible de travailler à ce que
la prochaine élection soit sous le nouveau mode de scrutin.
C'est sans compter sur la décision du
gouvernement de tenir un référendum en même temps que les prochaines élections.
Ça, j'aimerais bien ça être convaincu qu'un référendum en même temps que des
élections, ça peut marcher. Moi, s'il y avait un référendum, il faut le faire avant, pas en même
temps qu'une campagne électorale. Moi, ça, quand on a parlé... Quand les gens sont venus en
consultations, c'était aussi clair pour eux autres. Comment on peut commencer
en plein été... Parce que
c'est un peu ça, l'idée, là. Au mois de juin, on part un référendum. Quand tout le monde retourne sur le bord des plages puis est dans les barbecues, on fait un référendum
pendant l'été. Woups! Au mois de septembre, on arrête le référendum
puis on vire tout ça en élection générale. Je ne suis pas certain que c'est la
bonne façon pour informer les gens,
pour qu'ils comprennent bien ce qu'on est en train de faire là. Puis je me
dis... Comme je disais au début, si on parle de faire un changement culturel, bien, il faut prendre le temps aussi de
bien l'expliquer. Le référendum, ce n'est peut-être pas une mauvaise idée,
au contraire, mais faisons-le dans une façon optimale, là, pas en plein été,
autour de la plage puis avec les barbecues. Je ne pense pas que ce soit
la bonne façon, et pourtant c'est ce qu'on a devant nous.
Idéalement,
le gouvernement se serait senti assez solide pour ne pas tenir ce
référendum. Mais, maintenant qu'il a décidé,
nous pensons qu'un tel référendum devrait se tenir avant les prochaines élections,
pour une plus grande clarté du débat.
Et c'est sûr que plus on retarde dans l'adoption du projet de loi, moins on se donne cette marge
de manoeuvre là, et, à un moment donné, il y aura des décisions à prendre. Là, il est clair,
pour nous, que la volonté du gouvernement a toujours
été d'éviter que les prochaines élections se
tiennent sous un nouveau mode de scrutin, en repoussant toujours
ces éléments-là. Nous déplorons ces délais, mais le maître de l'agenda,
c'est toujours le gouvernement.
Sur la proportionnalité puis la
représentativité, le système actuel favorise une grande distorsion entre les
votes obtenus par une formation politique et les sièges qui lui sont octroyés en cette Chambre. Plusieurs
exemples existent, mais prenons les dernières élections générales :
la CAQ avec 37,5 % des votes, 60 % des sièges; le Parti libéral avec
24,8 % des votes, 24 % des sièges;
le Parti québécois avec 17 % des votes, 8 % des sièges; Québec
solidaire avec 16 % des votes, 8 %
des sièges. Quand je vous parlais de
M. Lévesque puis de Marc-André Bédard, eux autres, ce qu'ils avaient aussi
en mémoire, c'est les années 70,
là, où le Parti québécois ramassait 20 %, 25 % des voix et se ramassait ici avec sept députés
ou six députés, là. En 1970-1973, c'était ça, la situation.
Cette grande disproportion peut expliquer un
certain cynisme de la population et une perte de confiance envers la représentativité de cette Assemblée aux yeux
des citoyens. Réduire cette distorsion entre les suffrages exprimés et le
nombre de sièges pourra recontribuer à
améliorer la confiance des citoyens et leur sentiment d'être représentés à l'Assemblée et se traduire par un meilleur
taux de participation aux élections.
Un élément
que j'ai beaucoup insisté pendant les
consultations, c'est l'accès à son député. La proportionnalité et la
représentativité sont des principes importants, mais nous ne devons surtout pas
oublier le droit du citoyen à avoir accès à
son député, de pouvoir créer un lien avec son député. C'est un droit tout aussi
essentiel pour une vie démocratique
saine que représentativité
proportionnelle. À quoi bon avoir une plus grande représentativité de la
diversité politique si je ne suis pas en mesure d'approcher mon député
pour lui faire part de mes problèmes à régler et mes besoins d'avoir de l'aide?
• (15 h 40) •
Si je regarde du coin de l'oeil le député de
Rivière-du-Loup—Témiscouata,
lui, il a un immense comté, de Trois-Pistoles
à aller virer dans le Témiscouata, retourner à Rivière-du-Loup, faire... c'est
immense. La job qu'il doit faire pour
être présent dans son comté, c'est immense. Avoir des circonscriptions encore
plus grandes que ça, je ne sais pas. Et c'est sûr que les citoyens ne
peuvent pas avoir accès.
Ça fait qu'il faudra, dans notre exercice de
proportionnelle, de trouver une proportionnelle, avoir ce... faire l'exercice d'équilibriste, aller chercher la
proportionnelle mais s'assurer que les circonscriptions seront de grandeur
adéquate pour que les citoyens aient accès à leurs députés. Dans le
projet de loi, on parle de 80 circonscriptions. On prend les 125 actuelles, on les redivise en 80. Vous
imaginez la grandeur des territoires? Et il y en aurait 45 de liste. Ce qui
ferait, entre autres, sur la
Côte-Nord, deux députés, mais deux députés pour le même comté. Le comté serait
toute la Côte-Nord. Duplessis,
René-Lévesque, actuellement, là, les deux seraient ensemble, ce serait une
seule circonscription avec un député de
circonscription puis un député de liste. Ça fait que c'est sûr que la Côte-Nord
ne perd pas de député, mais on a deux députés sur le même territoire. Comment
on va gérer ça?
C'est là, il
y a un changement de culture à avoir, mais il y a quand même un questionnement.
Est-ce qu'on ne pourrait pas, pour
s'assurer que les citoyens aient accès à leurs députés, puis en gardant notre
volonté d'avoir une proportionnelle, rajouter
un député? Moi, je pense que c'est faisable. Avec quatre ou cinq nouveaux
députés, on pourrait réussir à trouver cet
équilibre. Parce qu'on l'a vu... — on n'a pas d'eau — parce qu'on l'a vu pendant la pandémie,
pendant la... et c'est encore là, mais, pendant le pic, au printemps passé,
comment les députés ont été utiles pour leurs citoyens puis comment qu'il
fallait être là puis être capables de
répondre. Ça fait qu'imaginez des circonscriptions immenses, ça aurait été
encore plus compliqué
Nous avons,
avec nos équipes en circonscription, tous étaient appelés à répondre
directement aux questionnements, puis
impliqués dans l'inquiétude des citoyens, à expliquer en détail les différentes
mesures qui ont été mises en place pendant cette période-là. Ça fait que j'imagine avec 80 circonscriptions
beaucoup plus grandes, il faudra s'assurer que les députés aient ce qu'il faut pour travailler, le personnel
qu'il faut. Ça fait qu'il y a tout cet élément-là de la capacité du député
d'être proche de ses citoyens qu'il faudra discuter dans le cadre du
projet de loi.
L'égalité... non,
sur... Il y a tout l'élément du seuil national minimal. Un seuil élevé réduit
la proportionnalité des résultats et
représente une barrière supplémentaire
pour une représentativité. Au printemps 2019, les discussions portaient
sur 5 %. Le projet de loi
n° 39 surprend avec 10 %.
Le Mouvement Démocratie nouvelle propose 3 %. La ministre se dit ouverte à bouger. Est-ce que ce sera 2 %, 3 %, 5 %? La seule
certitude, c'est qu'un seuil de 10 % est beaucoup trop élevé.
Les méthodes
traditionnelles d'attribution des sièges compensatoires prennent généralement
compte de 100 % des sièges gagnés dans le diviseur pour répartir les
sièges de l'Est. La méthode CAQ est unique et ne tient compte que de
50 % des sièges remportés lors de
l'attribution des sièges de l'Est. Cette modification permettrait au parti
gagnant d'obtenir des sièges de
compensation même s'il a remporté plus de sièges dans une région, au détriment
des petits partis. C'est ce qu'on appelle
la prime au vainqueur. Cette proposition a été fortement décriée par plusieurs
groupes lors des consultations, en commençant par le Mouvement Démocratie nouvelle et
le Pr Louis Massicotte, spécialiste reconnu des divers modes de scrutin. Nous comprenons mal l'idée d'avoir un système
proportionnel si c'est pour en faire le système le moins proportionnel
du monde.
L'égalité
entre les femmes et les hommes est une valeur fondamentale au Parti québécois. C'est sous notre bannière qu'une
grande dame comme Pauline Marois a pu diriger autant de ministères
plus importants les uns que les autres, ne pensons qu'à
l'Éducation, les Finances, pour ne
nommer que ceux-là. Mme Marois aura aussi réussi l'exploit d'être la première
femme à occuper la fonction de première ministre du Québec, ce qui demeurera à jamais
une très grande fierté pour les gens de mon parti.
Malgré tout,
nous admettons que beaucoup de chemin reste à faire pour l'égalité
hommes-femmes en politique. C'est pourquoi nos statuts, les statuts du Parti québécois, prévoient l'obligation de respecter la parité dans nos candidatures
lors de la prochaine élection générale.
C'est aussi pourquoi ma collègue la
députée de Joliette
a fait adopter à l'unanimité une résolution pour accélérer la mise en place de congés parentaux pour
les élus. Il faut savoir aussi que les partis politiques ne fonctionnent pas tous de la même façon.
Certains, comme ma formation politique, font confiance à leur base militante
pour choisir les candidats lors
d'investitures, alors qu'ailleurs c'est le chef de parti qui décide, qui décide
de tout : ça va être toi, mon
candidat, ça va être toi, ma candidate. Nous, ça passe par des investitures.
Est-ce vraiment avisé de punir une formation politique en raison d'un tel mode de fonctionnement qui
laisse une plus grande place à la démocratie, au risque du moins grand
contrôle sur le résultat des investitures et donc des candidats?
Le projet de loi n° 39 prévoit un engagement non contraignant. Les
partis devront communiquer au DGEQ leurs objectifs en matière de parité et leur plan pour les atteindre. Ils
vivront alors avec les conséquences électorales de ne pas atteindre leurs
objectifs. Encore une fois, l'engagement du Parti québécois en la matière
est clair. Nos statuts nous imposent le
respect de la parité dans notre liste de candidatures. Laissons la population
juger de nos efforts pour y arriver. Cela dit, le nouveau mode de scrutin proposé permettra de
faciliter l'atteinte de la parité entre les femmes et les hommes grâce au
recours de listes de candidatures pour les sièges régionaux, ce que nous
saluons.
Le nombre de
régions, le projet de loi propose 17 régions électorales, ce qui
semble élevé, à première vue, mais nous
sommes d'accord avec les 17 régions. Rappelons qu'un nombre
élevé de régions implique généralement une baisse de proportionnalité, mais il
fallait faire ce choix des 17 régions. Plusieurs groupes entendus en consultations
demandent de réduire le nombre de régions pour augmenter la proportionnalité,
en garantissant moins de deux députés... au moins deux députés par liste, par région. Il ne s'agit par contre que d'une
seule variable dans l'atteinte de la proportionnalité. Des régions plus petites et plus nombreuses nous
semblent un gage plus grand de proximité entre les députés et leurs citoyens,
tout en respectant la réalité géographique
du Québec, six fois plus grand que la France. Je vous parlais de la Côte-Nord
tantôt, c'est un exemple
patent, ou dans le Bas-Saint-Laurent. Tout le Bas-Saint-Laurent serait divisé en deux, il y aurait deux comtés, dans tout le Bas-du-Fleuve, la partie est, la partie ouest, puis il y aurait un troisième
député qui aurait tout le Bas-Saint-Laurent.
Ça fait des circonscriptions immenses, et on
pense que ça pourrait être corrigé par l'ajout d'un seul député. Il y en aurait quatre de plus au Québec,
puis il me semble que c'est faisable.
Des
alternatives existent, et j'invite le gouvernement à y réfléchir, comme hausser légèrement le nombre de députés, en particulier dans les régions étendues, pour
maintenir justement cette proximité, en favorisant une plus grande proportionnalité. On parle peut-être de seulement
quatre députés de plus pour arriver. Ne soyons pas surpris, alors, que des
groupes avec une forte sensibilité régionale
comme L'Union des producteurs agricoles ou la Fédération étudiante collégiale
du Québec sont favorables au maintien des
17 régions ou avec une légère hausse de la députation, parce qu'elles
connaissent bien la réalité vécue par les gens de nos régions et leur
attachement à un lien étroit avec leurs députés.
En
conclusion, en tant que signataires de l'entente du 9 mai 2018, nous
sommes évidemment favorables au principe du projet de loi pour une
réforme du mode de scrutin, un projet de loi qui représente une avancée vers
une plus grande proportionnalité, mais qui
semble être en conflit avec lui-même parce qu'il comprend certaines mesures qui
remettent un peu en question son objectif, soit l'atteinte d'une plus grande
proportionnalité des résultats électoraux et la volonté exprimée par les
électeurs.
C'est pourquoi nous avons hâte de procéder à
l'étude détaillée pour pouvoir le bonifier et clarifier. On a des enjeux — proximité des députés avec leurs citoyens,
protection du poids politique des régions — mais on pense qu'on est capables ici ensemble de
protéger ça mais prendre ce rendez-vous avec un mode de scrutin qui va être
beaucoup plus respectueux des idées politiques des Québécois. Et on pense qu'on
peut y arriver. Et travaillons ensemble pour y arriver. Merci.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député de Rimouski.
D'autres interventions? Mme la députée de Verdun.
Mme Isabelle Melançon
Mme Melançon : Merci, M. le
Président. Vous êtes lumineux, aujourd'hui.
Écoutez, je vais débuter, je vais débuter sur
une note un peu plus sérieuse, parce que je suis heureuse d'être ici aujourd'hui pour pouvoir parler du principe du
projet de loi n° 39, qui est la Loi établissant un nouveau mode de scrutin.
C'est un projet de loi qui touche le
coeur de notre démocratie, donc je pense qu'on doit prendre le temps d'en
discuter, prendre le temps d'échanger et d'entendre les positions des
uns et des autres, c'est pour ça qu'on est là.
Et
j'entendais tout à l'heure le député
de Gouin parler : Les autres
qui pensent ça, puis moi, je pense qu'on doit le faire de façon
très respectueuse, et c'est ce que j'entends en ce moment, parce que
rien n'est totalement gris, hein, ce n'est ni... c'est-à-dire
que tout est gris, rien n'est noir, rien n'est blanc, on est dans une zone...
Puis je sais que c'est la même chose du côté du gouvernement, parce que je comprends que c'est un projet de loi qui émane du gouvernement, mais je sais
qu'il y a aussi beaucoup de tiraillements à l'intérieur du gouvernement de la CAQ sur ce projet de loi, et
avec raison, parce que ce n'est pas simple.
• (15 h 50) •
Et, avant
d'aller plus loin, je veux déjà vous donner mes couleurs, là, de mon côté. Je
vais parler de ce qui s'appelle condition
féminine, au moment où on se parle, parce qu'il y a un article très important
dans le projet de loi, qui est l'article 73, et je vais y revenir
un peu plus tard, qui, moi, me déçoit, me déçoit, et je vais vous expliquer
pourquoi.
D'abord, la parité, c'est un concept qui n'est
pas simple non plus. Et je regarde d'où on est parti à là où on est aujourd'hui, puis je vois des collègues féminines
qui sont là aujourd'hui, je pense qu'on peut se dire : Fierté. Il n'y a
pas si longtemps, ce salon bleu était
uniquement dédié aux hommes, il n'y a pas si longtemps, et, la dernière
élection, bien, voici ce que ça a donné : maintenant, au salon bleu, il y
a 54 femmes sur 125 élus. Ce que ça donne en répartition pour les
différentes formations politiques, c'est ceci, M. le Président :
donc, pour la Coalition avenir Québec, il y a 29 femmes sur 76 députés, donc 38 % des élus sont
des femmes; au Parti libéral du Québec, il y a 16 femmes, pour 57 %
des femmes qui sont élues; au parti...
oui, à Québec solidaire, pardonnez-moi, c'est 10 députés dont c'est cinq
femmes élues, 50 %; au Parti québécois, il y a neuf députés, il y a
trois femmes élues, qui donne 33 %; et puis il y a une députée
indépendante.
Là, vous allez me dire : Bien, pourquoi est-ce qu'elle parle de ça? Puis il y a la représentation,
bien sûr, aussi de l'Assemblée nationale, là, où on doit se dire : C'est
54 %, 43 % et des poussières. Donc, on est dans la zone de parité.
Là, vous allez me dire : Pourquoi?
Pourquoi est-ce qu'elle nous parle de ça? Bien, c'est qu'il y a eu beaucoup de
chemin qui a été fait, mais cet
équilibre-là est fragile, actuellement. Non seulement c'est fragile, mais on ne
peut pas se fier à une seule élection
pour dire que c'est dans la poche, c'est fait, c'est gagné, on passe à un
prochain appel. Mais non, c'est un combat
de tous les jours, d'assurer qu'on puisse être suffisamment nombreuses à
l'Assemblée nationale pour représenter 50 %
de la population, hein, les hommes, les femmes, on est même un peu plus
nombreuses, messieurs, dans la... Bien oui. Il y a des hommes qui semblent... que ça a l'air de déranger, mais on
est un petit peu... on est même un peu plus nombreuses dans la
population, du côté des femmes.
Alors, je
veux vous parler d'un mémoire qui a été déposé par le Comité des femmes du
Cercle des ex-parlementaires de l'Assemblée nationale du Québec. Et les
femmes qui ont signé ce mémoire sont Marie Malavoy, Hélène Daneault, Louise Harel, Lucienne Robillard et Carole
Théberge, que je salue au passage. Ce qu'elles mentionnaient à l'intérieur de
leur mémoire, c'est la chose suivante :
«Si l'avancée des femmes lors des élections de 2018 au Québec est
manifeste — et
on le salue — celle-ci n'est pas exempte de reculs
possibles comme celui que nous avons vécu entre 2012 et 2014 — ce n'est pas il y a si longtemps — perdant d'un coup 5,6 % d'élues.
[...]Le déséquilibre de représentation entre les hommes et les femmes dans les parlements est d'ordre
systémique — je sais
que vous n'aimez pas ce mot, du côté du gouvernement, mais quand même.
L'apprentissage des rôles sociaux, la tradition de gouvernance au masculin,
l'absence de modèles féminins, les
règles du jeu qui constituent la culture du pouvoir, la perception des
responsabilités familiales sont parmi [les] obstacles à l'entrée des femmes en politique.» C'est
intéressant. Et ça m'a fait sourire, lorsque j'ai lu ce mémoire, parce que,
bien, on parle de modèles. J'ai eu la chance d'avoir un modèle, à la
maison, bien sûr, parce
que ma mère est quand même
une femme... disons qu'elle avait ses
idées puis elle les faisait entendre, mais j'ai aussi eu le bonheur de
rencontrer, toute jeune, Liza Frulla. Alors,
Liza est pour moi un modèle, et ce n'est pas donné... Il ne faut pas
sous-estimer, mesdames, lorsqu'on va dans les écoles primaires, secondaires, lorsqu'on va à la rencontre des jeunes
filles, le poids que ça peut leur donner, la volonté aussi que ça peut dégager,
à ces jeunes femmes, de devenir, sait-on jamais, à leur tour aussi, un jour,
députées à l'Assemblée
nationale.
Je vais vous lire un autre passage et je vais
revenir sur l'idée d'avoir, de notre côté, là, des modèles féminins. Il y a
le Conseil du statut de la femme qui
a aussi écrit sur le sujet, en disant ceci, dans leur mémoire — permettez-moi, M. le Président, je vais mettre mes verres, parce
que, là, c'est écrit un peu petit pour moi — alors : «Ces résultats rendent compte d'avancées qui demeurent fragiles,
notamment parce qu'ils ne [se concentrent que sur une] élection — voilà ce qu'on disait tout à l'heure — se présentent à la suite d'une longue
période, en 2000 [...] 2014, pendant laquelle les proportions de femmes candidates et élues à l'Assemblée
nationale [a] stagné autour de 30 %.» Donc, tout à l'heure, là, on voyait,
sur le tableau, on était rendus
autour de 44 %, 43 et des poussières, pour cent. Alors, on a gagné
13 %, mais en une seule élection. Donc, on se rappelle de la
fragilité. Moi, c'est le mot que j'ai envie de vous dire, là, qu'il est
important de retenir à ce moment-ci. «...s'inscrivent
dans une histoire récente marquée par [le recul ponctuel], particulièrement
lorsque la proportion des femmes
élues a décru de 32,8 % à 27,2 % entre 2012 et 2014 et lorsque les
candidatures féminines ont chuté de 31,2 % à 28,5 % entre 2007
et 2012.»
J'entendais
tout à l'heure mon très estimé collègue de Rimouski nous faire mention de la
problématique de la grandeur des comtés, puis là, bien, il citait... il donnait
en exemple le député de Rivière-du-Loup, qui est avec nous, qui a un immense
comté. Je dois vous dire que j'ai été candidate en 2002 dans le comté de René-Lévesque,
c'est grand longtemps. Je veux juste
vous dire que, si on pense que c'est une bonne idée d'agrandir les comtés, je
peux vous dire que ça va décourager certains hommes mais aussi certaines femmes
à plonger dans l'arène politique. Je veux juste... Ça m'a fait penser à ça,
tout à l'heure, lorsque j'entendais le député de Rimouski parler de ça, parce
que les femmes, souvent, aiment beaucoup
la proximité, justement, avec leur monde, hein, quand on parle de notre monde.
Je vois des collègues, en face, dire :
Oui, c'est important, on est là pour aider notre monde. Vous aussi, M. le
député de La Peltrie, vous êtes là pour aider votre monde. C'est
votre petit côté féminin qui parle, là. Mais, cela étant dit...
Une voix : ...
• (16 heures) •
Le Vice-Président (M. Picard) :
...
Mme Melançon :
Bien sûr, M. le Président. Mais, oui, c'est un immense compliment.
Alors,
ce que je voulais... où je voulais en venir, c'est qu'il faut attirer plus de
femmes en politique, puis c'est important de le faire. Ça prend des tremplins pour ça.
Et
là je vais faire un petit éditorial de quelques secondes, mais le projet de loi n° 40, où on a aboli des commissions
scolaires, qui était principalement... où
c'étaient des femmes qui étaient élues, n'aide pas à l'entrée de femmes en
politique, d'autant plus que, ces
commissions scolaires là, quand on parle d'aider notre monde, il y a des
femmes, là, qui voulaient venir, justement,
à l'école pour aider leurs petits, là, les enfants, puis voir comment ça
roulait, c'était ça. Donc, je fais cette parenthèse-là.
Et
je me permets une autre parenthèse du même coup. Tout à l'heure, j'entendais le
député de Rimouski nous parler de la
première première ministre, donc de Mme Marois, et de la citer. Je
voudrais quand même rappeler, avec beaucoup de gentillesse, que Mme Marois est contre le changement de mode de
scrutin. Elle le dit dans son livre, dans son dernier ouvrage. Je pourrais vous
en faire lecture, mais je vois le temps qui file et j'ai peur, vraiment, de
manquer de temps. Mais je voulais simplement le rappeler au député de
Rimouski, parce que c'est une bonne chose, de pouvoir citer des grandes dames, et je reconnais le travail qu'a fait Mme Marois
pour le Québec, mais, quand même, à l'intérieur de son livre, là, lorsque... elle dit : «Doit-on changer le
mode de scrutin dont les vertus ont été démontrées pour le remplacer par un
autre qui ne correspond pas à
l'histoire de notre démocratie, de notre culture démocratique? Je crois plutôt
qu'il serait préférable d'améliorer notre système actuel.» Alors, je le
dépose ici, M. le Président.
Vous
savez, M. le Président, c'est un projet de loi qui est costaud,
sur lequel il y a 227, je crois, articles. Il y en a eu 163 nouveaux qui ont été ajoutés, et dans
tout ce qui a été ajouté comme amendement, bien, il n'y a rien eu qui pouvait modifier les articles sur la parité, il n'y a que
l'article 73, dont je vous parlais un peu plus tôt. Et, moi, mon grand
malaise, c'est de voir qu'on met, à l'intérieur d'un projet de loi comme
celui-là, la parité en jeu. Là, vous allez dire : Pourquoi c'est en jeu? Ça ne devrait pas être dans un projet de loi comme ça. Ça devrait être traité autrement, sur le côté, parce qu'on
n'est même pas sûrs, dans le contenu, là,
d'être d'accord avec ça. Puis on va s'en aller, puis ça va être soumis à un
référendum, puis peut-être
qu'en référendum, là, ça va être rejeté. Ça veut-u dire que les Québécois puis
les Québécoises qui vont voter vont
rejeter la parité? Moi, je ne pense pas. Ça devient un tout. Moi, je pense que
la parité, ça doit être traité à l'extérieur d'un projet de loi comme celui-là, c'est trop important. Ce n'est pas vrai qu'on aurait
accepté de traiter de, par exemple, la Charte
des droits et libertés dans un référendum. Mais, pour moi, la parité,
c'est aussi important et ça ne doit pas être traité dans un projet de
loi comme celui qui nous est proposé.
Puis je trouve ça tellement
faible, les articles qui sont amenés, en plus, dans le projet de loi. C'est des
objectifs généraux. O.K. Puis
elles sont où, les poignées? C'est comme si je vous disais, M. le Président : Moi, j'ai envie de perdre
du poids, là, puis je me donne un
objectif, mais je vais continuer à manger de la poutine, puis je vais continuer
à être en arrière de mon bureau à l'Assemblée
jusqu'à tard le soir, puis je n'irai pas marcher. C'est bien beau d'avoir des
objectifs, là, mais, si on ne fait rien pour les atteindre, bien, ça ne
donne rien du tout.
Alors,
cela étant dit, je me pose une question, là. J'espère que la ministre de la
Condition féminine a lu le projet de loi parce que devant la faiblesse de ce
qui est proposé, je pense qu'il devrait y avoir une conversation avec la
présidente du Conseil du trésor et la ministre de la Condition féminine.
Je ne suis pas la seule à le mentionner, il y en a plusieurs qui en ont parlé. Je vais vous donner des exemples,
parce que plusieurs ont parlé d'un
manque d'audace, d'un manque de poigne à l'intérieur de ce qui est proposé,
actuellement. Il y en a qui ont parlé d'un bonus financier. Là, actuellement,
là, ce qui est proposé dans le projet
de loi, là, c'est de déposer quelque chose auprès du DGEQ à la
12e journée, puis après ça, bien, de venir revoir. O.K., puis, si
vous ne les atteignez pas, ça fait quoi? Rien.
Alors,
quand on veut parler de parité avec un peu de sérieux, bien, il faut aussi
donner un peu de poigne puis il faut se
donner aussi le goût d'atteindre les objectifs, et ce n'est pas ce que nous
avons, actuellement. On parle de mesures timides dans bien des cas. Si j'avais un titre à donner au projet de loi pour la
parité, je pense vraiment qu'on a manqué l'objectif. On est passés à
côté complètement, et je ne suis pas la seule à le dire. J'ai traversé les
différents mémoires qui nous ont été déposés,
et je sais à quel point le député de LaFontaine a travaillé avec les groupes qui sont venus se
faire entendre, il a questionné les
groupes de femmes qui sont venus se faire entendre, puis elles ont toutes dit
la même chose : Ça prend plus d'audace, il faut arrêter d'y aller avec
des voeux pieux.
Et
donc, en ce sens-là, je vais me permettre de prendre, là, un petit peu, parce
que le temps file vraiment... Je vais prendre,
par exemple, le mémoire de la FTQ, donc, de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec, en page 13. Voici ce qui est dit, M.
le Président : «Dans cet exercice de réforme du mode de scrutin, la FTQ
s'attendait à ce que le gouvernement présente des mesures contraignantes pour
obliger les partis [...] à atteindre la parité [hommes-femmes] parmi leurs candidatures. Or, ce n'est pas le cas
avec le projet de loi n° 39. Les seules exigences consistent à obliger
chaque formation politique à
"transmettre au Directeur général des élections — ce que je vous racontais il y a quelques
instants — un énoncé relatif aux objectifs que se fixe son parti en ce
qui concerne la parité entre les femmes et les hommes ". On ne peut pas qualifier cet article de très contraignant...» Honnêtement, soyons
sérieux, si on veut vraiment faire bouger l'aiguille, il va falloir qu'on
se donne vraiment des mesures plus costaudes.
Et,
parlant de mesures costaudes, moi, je me rappelle... là, je ne suivrai plus du tout mes feuilles, parce que je viens
de toutes les mêler, mais je me rappelle
très bien qu'en 2006 on voulait changer la donne dans les conseils
d'administration de l'État. Jean Charest, premier ministre du Québec, se
faisait tout le temps dire la même chose : Ah! il n'y a pas beaucoup
de femmes qui appliquent, vous devez vivre
avec ça, là, on va continuer à aller avec ces chiffres-là. Un jour, là, le
gouvernement, il a dit : Non, non, non, on va y aller avec des
vraies mesures. Ils sont allés avec des mesures, ils l'ont enchâssé dans la loi. Savez-vous ce que ça a donné
comme résultat? Je vais y aller court : «L'objectif de 50 % de femmes
au sein des conseils d'administration pour
l'ensemble de sociétés d'État devait être atteint le 14 décembre
dernier — donc
là, on parle de 2011 — ce qui fut fait; le pourcentage de femmes
aux conseils d'administration est donc passé de 27,5 % en 2006 à la moitié en 2011.» Ça aura pris cinq ans,
mais on y est arrivé. C'est formidable, mais encore faut-il se donner des mesures
structurantes. Il faut être audacieux.
Et
moi, M. le Président, là, j'espère un jour que ma fille voudra venir au salon
bleu. J'espère un jour qu'elle voudra représenter
des gens. Je lui souhaite, c'est le plus beau des métiers du monde. Mais
savez-vous quoi? Pour pouvoir lui donner cette chance-là, on a la chance,
aujourd'hui, de changer les choses. Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée de Verdun. Mme
la députée de Verdun, vous voulez bien déposer
tout à l'heure ce que vous avez cité, le texte de Mme Marois? Vous avez
dit : Je dépose. Est-ce que c'était bien ça?
Mme Melançon : Oui, je peux le
déposer, bien sûr, bien sûr.
Le Vice-Président (M. Picard) :
C'est un dépôt électronique. Consentement?
Une voix : ...
Document déposé
Le
Vice-Président (M. Picard) : Consentement. Le dépôt est fait. Je
cède la parole à Mme la députée de Sherbrooke.
Mme Christine Labrie
Mme Labrie :
Merci, M. le Président. Je suis contente de venir m'exprimer sur le projet de
loi n° 39, aujourd'hui, de la réforme du mode de scrutin. On avait
hâte que ce projet-là revienne à l'ordre du jour. Il a été déposé il y a très longtemps, on voudrait qu'il progresse plus
rapidement que ça. Donc, je me réjouis de voir qu'on passe à l'adoption de
principe en ce moment.
Il y a
beaucoup de gens qui ont eu des préoccupations par rapport à ce projet de loi
là, notamment sur la question du
poids des régions. Puis évidemment je suis moi-même une élue des régions et je
représente des citoyens des régions, donc c'est quelque chose qui me
préoccupe énormément. Il s'est dit toute de sortes de choses, notamment que le
projet de loi allait peut-être diminuer le
poids des régions. Et pourtant c'est assez particulier, parce que, bon,
d'abord, les régions ont déjà plus
d'élus par nombre d'électeurs que les circonscriptions des grandes villes, et
en plus le mode de scrutin qui est proposé va accentuer la surreprésentation
des régions rurales et des régions qui sont éloignées. Donc, c'est une préoccupation, qui est légitime,
des gens, mais manifestement elle ne s'applique pas, là, au projet de loi qui est sur la table en ce
moment. Dans le projet de loi n° 39, Montréal perd trois députés et trois régions en gagnent un, soit le Centre-du-Québec, la
Mauricie et l'Outaouais. Donc,
définitivement, c'est difficile d'argumenter pour dire que ce projet de loi là
va nuire à la représentation des régions.
• (16 h 10) •
Et puis
d'ailleurs nous, on est tout à fait à l'aise avec ça, le fait que les régions
soient un peu plus avantagées par le système parce que c'est important
que leurs voix soient bien prises en compte à l'Assemblée nationale, en raison
de la grandeur du territoire qu'elles
occupent, notamment. Donc, c'est assez clair, là, qu'avec ce projet de loi là
la préoccupation de certaines
personnes sur la représentation des régions, elle a été prise en compte, et il
n'y a lieu de s'inquiéter avec le projet de loi.
Et d'ailleurs
la façon dont le projet de loi va modifier notre mode de scrutin propose de le
faire risque d'empêcher la mainmise
d'un parti sur une région, et je pense que ça va être favorable aux électeurs
des régions parce qu'en ce moment il y a plusieurs régions qui sont
représentées par un seul parti. On peut penser à la région Gaspésie—Bas-Saint-Laurent,
qui est représentée par un seul parti, la région des Laurentides aussi, où, par
exemple, la CAQ occupe 100 % des sièges même
s'il y a quand même 55 % des gens de cette région-là qui ont voté pour
d'autres partis. Donc, eux, ils sont représentés seulement par des députés d'une même formation politique, et ça, c'est
assez problématique parce que, dans ce temps-là, les citoyens ne peuvent pas toujours s'adresser à un élu qui représente
ou partage ses valeurs. Et ça, moi, je le vis beaucoup parce que je suis dans une région où il y a deux
partis qui sont représentés, et on reçoit énormément de demandes de gens
qui ne sont pas de ma circonscription, mais
qui sont dans la région, et qui parfois, après s'être adressés après un autre
bureau de circonscription, ou même
sans l'avoir fait, simplement parce qu'ils estiment avoir plus d'affinités avec
moi, s'adressent à mon bureau de
circonscription. Puis je suis certaine qu'il se passe la même chose dans les
autres bureaux de circonscription de mes collègues de la région de
l'Estrie.
Mais ça a
quand même un impact sur la façon dont on travaille parce que, nous, à chaque
année, là, depuis le début de mon
mandat, c'est environ 300 demandes d'ouverture de dossier de citoyens
qu'on a, de gens qui ne sont pas de ma circonscription,
qui sont généralement de l'Estrie, mais même parfois de plus loin au Québec. Et
ça, ça ne tient pas compte du tout
des demandes d'information, là, on parle de gens qui nous parlent d'un problème
et qui mériteraient qu'on ouvre un
dossier pour eux, mais on ne le fait pas, là, parce qu'on n'a pas la capacité,
les ressources humaines dans nos
bureaux de circonscriptions pour
gérer des centaines de demandes, comme ça, qui ne viennent pas de nos citoyens,
on les réfère. Mais ce que ça nous
permet de constater, c'est que les gens ont tendance à s'adresser en premier à
un élu qui correspond peut-être un peu plus à leurs valeurs, et c'est
important que, dans chaque région, les citoyens aient accès à ça, aient la possibilité
de faire ça. En ce moment, bien, nous, on
ne peut pas répondre à cette demande-là des citoyens, puis il y en a
qui sont déçus. Il y en a qui nous disent : Bien, j'aurais aimé mieux
que ce soit vous qui passiez mon dossier, ou : J'ai essayé de le faire
avec mon élu à moi, puis, bon, ça n'a pas marché, pour toutes sortes de
raisons.
Donc, moi, je pense
qu'il y a un avantage pour les citoyens d'avoir accès à plusieurs
députés dans la même région, notamment parce qu'il y a cette question-là
des affinités sur le plan des valeurs, mais il y a aussi la question que les députés ne travaillent
pas de la même manière s'ils sont dans l'opposition ou s'ils sont au le gouvernement, ils n'ont pas accès aux mêmes moyens, nécessairement. Donc, ça
vient offrir un éventail de moyens qui va être plus complet pour les citoyens
d'avoir accès à des députés qui représentent plusieurs formations politiques.
Donc, moi, je pense
que ça vient vraiment faire
en sorte que les citoyens vont être
mieux servis d'avoir accès dans chaque
région à une plus grande variété de partis
politiques. Puis même je trouve
que deux, ce n'est pas beaucoup. C'est moins
pire que dans d'autres régions, mais moi, j'aimerais voir que les citoyens ont
accès à des partis qui représentent la réalité de ce qu'ils ont exprimé lors des élections. Donc, c'est clair
que, pour moi, ça, c'est un des avantages de la réforme. D'avoir des députés de liste, là, qui viendraient
ajuster un peu le résultat de ce qui est exprimé lors des élections,
c'est un avantage. Ça encourage aussi
le travail transpartisan parce que, nous, quand on a des collègues qui sont d'une
autre formation politique
dans la région, c'est clair qu'on va avoir des dossiers locaux, régionaux, municipaux, dans mon cas, qui vont toucher
plusieurs circonscriptions, et donc on va travailler ensemble. C'est sûr qu'on
va travailler ensemble, on le fait, je ne sais pas... Ma collègue de
Saint-François, ça arrive à l'occasion qu'on travaille ensemble sur des
dossiers, peu importe notre formation politique, parce qu'on a un
intérêt commun qui est de représenter nos citoyens, peu importe notre formation
politique. Et là il y a des régions où les
élus n'ont jamais l'occasion de travailler avec des élus d'autres formations
politiques que la leur. Moi, je pense que ça entretient la partisanerie. Puis,
quand on a l'occasion de travailler sur des dossiers locaux avec des députés de plusieurs formations
politiques, bien, ça nous permet de tisser des liens, de briser un peu cette
partisanerie-là, puis je pense que c'est au bénéfice des citoyens de
pouvoir faire ça.
Puis d'ailleurs il y en a qui pensent que les
députés de liste auraient un statut particulier puis ils n'auraient pas nécessairement à faire de travail sur le terrain
autant que les autres. Mais la réalité, c'est que, si ce député-là se traîne
les pieds puis n'est pas efficace
auprès de ses citoyens, bien, il va y avoir... il va quand même être en
concurrence avec les autres députés
de la région parce que les citoyens vont pouvoir aller en voir d'autres, députés,
puis ils vont pouvoir lui faire savoir
qu'ils ne sont pas satisfaits de ses services. Donc, sur la légitimité de ces
élus-là de liste, là, finalement, ceux qui obtiendraient un poste sans
avoir nécessairement été inscrits sur un bulletin de vote, il y en a qui se
posent la question sur leur
légitimité, à ces élus-là, mais en fait ce qu'on constate ailleurs dans le
monde, parce qu'il y a d'autres pays qui ont des mesures comme on le propose avec le projet de loi n° 39,
c'est que ces députés-là ont exactement les mêmes pouvoirs, les mêmes
responsabilités quand ça vient le temps d'exercer leur rôle dans l'Assemblée nationale de leurs États respectifs. Les deux types de députés participent autant aux
débats, aux votes au sein de l'Assemblée, ils sont des députés à part entière.
Puis tous les spécialistes qui ont étudié les systèmes... les modes de scrutin
comme on le propose à l'étranger ont tous mentionné
que ce n'était pas un enjeu dans ces pays-là, par exemple en Écosse, en
Allemagne, qui ont un système assez similaire
à ce qui est proposé ici. Puis d'ailleurs la plupart des pays industrialisés en
ont une, composante de proportionnelle, en fait, c'est 85 % des pays industrialisés. On est plutôt une
anomalie, nous, ici, en ce moment, de ne pas avoir de composante de proportionnelle. En Europe, d'ailleurs, il y a
seulement la France et le Royaume-Uni qui n'en ont pas. Donc, je pense que c'est le temps qu'on aille rejoindre cette
longue liste là de pays qui ont soit une longue tradition ou qui ont soit
modernisé leurs institutions pour s'assurer d'une meilleure
représentation de leurs citoyens.
Puis, avant
de conclure, j'aimerais ça dire quelques mots sur la parité, parce que, même si
j'apprécie beaucoup le projet de loi et que j'ai hâte qu'il avance et
qu'il se traduise dans la réalité, c'est quand même une déception pour moi qu'il n'y ait pas de mesures plus solides que ça
sur la parité, dans le projet de loi, parce que c'est une occasion qu'on a, là,
de réfléchir à notre mode de scrutin, puis tout ce qu'il y a dans le projet de
loi n° 39, en ce moment, sur la parité, c'est l'obligation pour les partis de soumettre au Directeur général des élections ses objectifs de parité, et puis ils vont être
rendus publics sur le site Web du DGEQ. Donc, ce n'est pas exactement
une mesure qui favorise l'atteinte de la parité ici, à l'Assemblée nationale, dans le
sens où il n'y a pas... on leur demande de transmettre leur objectif, mais on
ne leur donne pas de contraintes pour
cet objectif-là. Cet objectif-là pourrait aussi bien être de 10 %, ce qui
est bien en dessous de ce que la
plupart des partis font déjà. Donc, ce n'est pas, pour moi, un gage qu'on va
atteindre une amélioration au niveau de la parité.
Donc, nous, à
Québec solidaire, ce qu'on propose, d'ailleurs, avec d'autres
mouvements sociaux, notamment le Mouvement
Démocratie nouvelle, qui fait la même proposition, c'est d'obliger les partis à
présenter des listes régionales paritaires,
donc, qu'ils alternent les candidatures entre les hommes et les femmes sur
leurs listes et qu'au moins la moitié des
listes régionales devraient commencer par des candidatures féminines. On sait
qu'on n'a pas le pouvoir sur le choix des électeurs, mais au moins, si on y va avec les députés de liste, en
imposant la parité sur ces listes-là et l'alternance, on va s'assurer de
favoriser un accès à la politique pour les femmes plus rapidement.
Puis
d'ailleurs, sur le plan des candidatures dans les circonscriptions, on propose
aussi de rehausser le financement public des partis qui respectent une cible de
45 % de candidatures féminines et que les partis qui ne s'y conforment
pas, à cette cible-là, voient leur
financement public amputé aussi. Et on propose ça parce que
ça semble, en fait, assez normal, que les
fonds publics — parce que c'est ça, hein, le financement des partis politiques, c'est les fonds
publics — ce
soit utilisé pour faire arriver les
changements qu'on veut voir arriver dans la société. On le fait dans toutes
sortes de programmes. Pourquoi on ne le ferait pas dans le financement des
partis politiques, donc, d'utiliser ça comme un levier, à la fois la carotte
et le bâton, pour que les partis politiques
soient, disons, encouragés, aient des incitatifs forts à s'assurer d'avoir des
candidatures paritaires? Parce que
je suis certaine que tout le monde ici aspire à ce qu'on ait une Assemblée
paritaire. Ça, pour moi, ce n'est même pas une question que j'ai. Tout
le monde est fier ici, en ce moment, qu'on ait une représentation qui atteint pour la première fois la zone paritaire, hein?
C'est quand même la première fois, en 2018, qu'on l'atteignait.
Jusqu'en 2018, il y avait moins de
30 % des sièges qui étaient occupés par des femmes, donc c'est très peu.
Et, pour moi, ce gain-là, il est très précaire, dans le sens où c'est arrivé
une fois, mais il n'y a rien qui nous dit que ça va se reproduire. Puis
d'ailleurs on l'a vu dans d'autres
pays qui avaient même parfois des longues traditions de parité, on a vu que
parfois, bien, il y a des reculs là-dedans, quand ce n'est pas prévu
puis encadré par des lois pour s'assurer... ou le financement des partis
politiques, par
exemple, quand il n'y a pas de
mesures structurantes, bien, on sait que c'est fragile, et puis donc ça va
dépendre à chaque fois de la conjoncture.
• (16 h 20) •
Et, pour moi,
c'est important qu'il y ait ici, à l'Assemblée
nationale, une parité dans la
représentation, comme c'est important
pour moi aussi qu'il y ait une diversité au niveau de l'appartenance culturelle
parce que, quand on a la parité ici, ça nous permet
d'aborder plus souvent des enjeux qui touchent les femmes, puis je pense entre
autres à la violence conjugale, à la
violence sexuelle. C'est quelque
chose qui n'est pas un phénomène
nouveau, loin de là, en fait, et pourtant c'est tout récent qu'on en parle ici,
à l'Assemblée nationale. Et, pour moi, il y a un lien direct avec le fait
qu'il y a de plus en plus de femmes
qui sont représentées ici. Et, pour nous, c'est des sujets qui sont quotidiens,
qui habitent nos vies. Donc, c'est certain que c'est normal, quand on a
des élues ici qui vivent ces enjeux-là au quotidien, que ce soit plus rapide
qu'on les traite politiquement puis on... parce qu'on ne peut pas s'attendre à ce que des
gens qui ne connaissent pas ces réalités-là pensent nécessairement à les aborder. Donc, pour moi,
c'est clair que, si on veut faire les changements
qu'on veut dans la société, il faut
commencer par atteindre la parité ici. Et, pour ça, bien, il faut rejoindre les
plus d'une centaine de pays qui appliquent déjà des mesures structurelles pour s'assurer de représenter
adéquatement les femmes et parfois même les minorités nationales au sein de leurs Assemblées. Donc, je pense que
c'est le temps qu'on prenne aussi les moyens d'atteindre nos objectifs par rapport à ça. Et puis changer le système
électoral comme on se propose de le faire en ce moment sans agir en même temps pour atteindre la parité, ce serait plutôt ironique, dans le sens où on
propose une grande transformation, une transformation majeure, c'est l'occasion ou jamais,
tant qu'à jouer dans ces lois-là d'aller jusqu'au bout puis de s'assurer que
l'Assemblée va ressembler à ce à quoi on veut qu'elle ressemble.
Et puis
d'ailleurs, par rapport à ça, je
pense que les modifications sur la
parité auraient dû être faites, d'ailleurs, depuis longtemps et puis
elles ne devraient pas être traitées de la même manière que la réforme du mode
de scrutin, au sens où elles doivent être
indépendantes du référendum, à mon
sens, elles doivent être en vigueur
dès la prochaine élection. Et ce
n'est pas quelque chose qui fait partie de la réforme du mode de scrutin
en elle-même, donc, à mon sens, ça doit entrer en vigueur, là, sans tarder, sans nécessairement être lié à un référendum
comme le reste des mesures de réforme du mode de scrutin. Donc, je vous
remercie.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée de Sherbrooke. D'autres interventions? M. le député de Mont-Royal—Outremont.
M. Pierre Arcand
M. Arcand : Merci beaucoup, M. le
Président. Très heureux de pouvoir
parler aujourd'hui du projet
de loi n° 39.
Je pense qu'on a eu déjà plusieurs interventions à ce niveau-là depuis le début.
J'ai écouté plusieurs des commentaires qui ont été faits, entre autres par la députée de Champlain et la ministre responsable, par le
député de Mercier, par notre collègue,
également, de LaFontaine. Notre collègue de LaFontaine est quelqu'un de
profondément convaincu, profondément convaincu
qu'il faut qu'on poursuive la discussion et profondément convaincu également
que ce projet de loi là ne tient pas
la route d'aucune façon. Et moi, je voudrais, au départ, M. le Président, vous
dire que ce que j'ai entendu de la part de la ministre, au départ, c'était de dire : Bien, écoutez, nous voulons
ce projet de loi qui va vers une meilleure proportionnelle. Ce n'était pas : C'est un projet de loi en
fonction d'une proportionnelle, mais qui va vers une meilleure proportionnelle.
Le député de Mercier, quand il a
parlé, lui, il a dit : Écoutez, j'ai un enthousiasme prudent, ce qui veut
dire, donc, que ce projet de loi ne fait pas son affaire à bien des
égards également.
Et je
voudrais donc, au départ, régler, premièrement, un des aspects, je pense, qui
est particulièrement important, c'est
la question de la parité. Je pense que notre formation politique, que je
représente, on a été les pionniers dans ce domaine. À l'époque, le gouvernement de M. Charest a été le premier à parler d'une
parité à l'intérieur d'un Conseil
des ministres. Le gouvernement de M. Couillard, par la suite, a mis énormément
d'efforts pour d'assurer qu'il y ait véritablement, dans nos
sociétés d'État, un peu partout, la parité la plus grande. Donc,
je pense que, de ce côté-là, je ne crois pas que ce soit l'enjeu principal de ce projet de loi. Je pense que tout le monde ici, à l'Assemblée
nationale, est capable de s'entendre
sur ces éléments-là.
Maintenant, lorsque je regarde ce projet de loi,
j'aimerais peut-être qu'on puisse, au départ, regarder de quelle façon ça s'est produit parce que
la proportionnelle, ça dure depuis nombre d'années. Je pense que ça s'est particulièrement accentué en 1973, lorsque le premier
ministre M. Bourassa, avait été
réélu et qu'il avait eu environ 50 quelques pour cent des votes. Le Parti
québécois avait eu 30 % des votes, et là le Parti québécois, je crois,
avait eu six députés et M. Bourassa, à l'époque, avait eu 102 députés. Évidemment, à partir de ce
moment-là, tout le monde a dit : Il faut une proportionnelle, ça n'a pas de bon sens, etc., pour s'apercevoir,
trois ans plus tard, que le Parti québécois, avec 42 %, si ma mémoire est
bonne, avait eu 60 % des députés.
Alors, oui,
parfois, le système que nous avons a pu, dans certains cas, pénaliser certains
partis, mais, dans d'autres cas, ces mêmes partis qui avaient été pénalisés à
l'époque, trois ans auparavant, se sont retrouvés avec un gouvernement majoritaire également, puis personne, je crois, à
l'époque, ne doutait que c'était le voeu d'une grande partie de la population.
Avant de
parler des détails de ce projet de
loi, l'autre élément qui m'apparaît
important de dire, c'est qu'un des arguments,
entre autres, du député de Mercier, c'était de dire : Écoutez, ce projet de loi là, l'aspect
«proportionnelle» est partagé par la vaste majorité
de la population. Moi, écoutez, si demain matin vous faites un sondage auprès
des gens puis vous dites : Écoutez,
voulez-vous avoir un régime dans lequel, bien, le nombre de gens qui... le parti politique qui obtient un tel pourcentage de votes, bien, il va avoir un tel pourcentage de représentation?
Probablement que c'est vrai, tout le monde
va dire : Bien oui, ça fait du sens. Mais, quand on pousse la réflexion
plus loin, quand on commence à entrer dans le détail de la mécanique, de ce que ça peut
impliquer... Si on dit, par exemple, à un électeur caquiste qui a voté :
Bien là, tu vas te retrouver dans un
Parlement où tu risques d'avoir Québec
solidaire qui va avoir la balance du
pouvoir ou qui va avoir un potentiel
de bloquer, d'une certaine façon, le Parlement, je pense que l'électeur ne va
pas être sûr que c'est la meilleure formule. Je ne suis pas sûr qu'il va
trouver qu'il n'y a pas là des éléments importants.
Puis je voudrais lire simplement ce qu'il y avait dans le livre de, entre
autres, Christian Dufour, qui avait
écrit et qui a dit la chose suivante :
Plusieurs personnes réclament la mise à mort du système
en vigueur, accusé d'être peu représentatif du choix des électeurs. En fait, il s'agissait, selon
lui, ce qui est proposé, entre
autres, d'un projet dangereux pour le
pouvoir du seul gouvernement qui est présent. Il déclare : La
proportionnelle est devenue une véritable obsession pour certains. Et, en fait, il veut démontrer qu'elle n'est pas toujours
démocratique, qu'elle est démocratique sur papier, en plus de comporter de multiples effets pervers, trop souvent
passés sous silence. «Les résultats de l'élection de 2018, dit-il, ont illustré que le mode de scrutin[...], loin d'être une aberration,
tient la route. Il favorise l'accouchement de gouvernements à la fois forts,
mais des gouvernements [qui sont] congédiables, tout en permettant
l'émergence de forces politiques nouvelles comme [ce fut le cas pour] la Coalition
avenir Québec et [comme ce fut le cas pour] Québec solidaire.»
• (16 h 30) •
En plus, ce qu'il dit, puis je pense que les
députés, de l'autre côté, devraient entendre ce que je vais dire, il dit :
En fait, la proportionnelle serait... le
premier parti qui aurait vraiment avoir un avantage d'une proportionnelle pure,
c'est le Parti libéral du Québec. Une des raisons pourquoi la proportionnelle
risquerait de verrouiller pour longtemps le pouvoir au bénéfice des libéraux, bien,
c'est le fait que le parti politique que nous avons, Parti libéral du Québec,
même si actuellement il n'est pas, au niveau des sièges, dans une
position aussi importante qu'il l'a déjà été dans le passé... Je pense qu'il
ne faut pas oublier que cette formation
politique n'est en rien menacée de
disparition et qu'elle a tout avantage à adopter, très souvent, la
proportionnelle.
Ce n'est pas,
d'ailleurs, pour rien que... En fait, dans ce cas-ci, en tout cas, ce qui est
arrivé, c'est que, la proportionnelle, comme
tel, lorsque la députée de Champlain et la ministre responsable a commencé à en
parler, bien, elle a dit : Il va quand même devoir y avoir ce que j'appelle une prime au vainqueur. Je pense
que c'était très important pour elle parce qu'elle s'est rendu compte que la proportionnelle appliquée à
l'état pur risquait justement, comme l'a mentionné d'ailleurs le député de
LaFontaine au cours de sa discussion
aujourd'hui, au cours de son intervention... Il a parlé de gouvernements
minoritaires à répétition. Je pense que c'était une expression qui était tout à
fait valable et qui a vraiment démontré jusqu'à quel point il y a quand
même des éléments qui sont importants.
Moi,
l'élément, également, que je retiens, encore une fois, parce que je sais
jusqu'à quel point, souvent, c'est délicat, moi, ce que je retiens beaucoup, pour l'électeur, c'est la confusion
dans la tête de l'électeur entre ce qu'on appelle le député de liste et le député qui est élu sur les 80. Moi,
je me mets dans la peau de l'électeur. Premièrement, pour aller voter, là, ça
va être un peu plus compliqué, il va devoir y avoir des explications
importantes qui vont devoir être données. Puis, en plus de ça, ça va être quoi, le rôle des deux? On
risque de se retrouver dans une situation où est-ce qu'il va y avoir... souvent,
même, dans certaines régions, il peut y
avoir un petit peu de compétition entre des députés, surtout, évidemment, s'ils
ne sont pas de la même formation
politique. Mais là imaginez-vous avoir des territoires qui sont partagés à la fois
par des députés élus puis des députés de liste, là. Je pense que ça va
causer des problèmes particulièrement importants de ce côté-là.
Alors, tout
ça pour vous dire qu'on dit toujours que le diable est dans le détail, on dit
toujours qu'on ne fait pas de changement à moins que ce changement-là ne
soit vraiment clairement supérieur. Nous, on pense qu'il y a matière à discussion, mais on pense aussi que, compte tenu
de ce qui s'est passé au cours des derniers temps, surtout, en plus on est en
pleine pandémie... je ne crois pas,
actuellement, que la population a nécessairement vraiment à coeur de vouloir
discuter ces éléments-là. Et, compte
tenu de cet échéancier également que nous a donné aussi le Directeur général
des élections, qui nous dit :
Écoutez, il faut que le projet de loi soit adopté le 1er février, je pense
que le temps commence très sérieusement, à ce stade-ci, à nous manquer.
Nous allons cependant certainement participer aux
commissions parlementaires qui vont suivre, mais il n'en demeure pas moins que le nombre de questions qui
sont posées sont très importantes, que ce soit, par exemple, le seuil national
d'accès à la représentation parlementaire,
qui, à 10 %, a été jugé trop élevé, les primes aux vainqueurs régionaux et
le calcul de la compensation dans
chaque région, qui devrait se faire en tenant compte de toutes les
circonscriptions locales remportées et
non seulement la moitié; le mécanisme de motion de censure constructive, la
délimitation et le nombre de régions, les précisions sur les rôles des députés. Je pense que tout ça démontre
jusqu'à point il va y avoir des discussions extrêmement importantes.
Et, quand on
regarde, entre autres, le nombre d'articles... Ce matin, quand j'écoutais le
député de LaFontaine, qui disait : Écoutez, on est rendu à
quasiment 500, là, au-delà de 500, même, avec les amendements et tous les
articles qui ont été faits, je doute très
sérieusement qu'on ait le temps de véritablement discuter de ce projet de loi,
parce que ce projet de loi, essentiellement,
est mal ficelé. Même les représentants qui étaient vraiment en faveur de la
proportionnelle, aucun groupe n'est venu pour affirmer qu'il était
pleinement satisfait de la réforme annoncée.
Et, comme on le rappelait très bien, ce n'est
pas la première discussion qu'il y a à cet effet-là. Il y avait eu des discussions en 2006, entre autres, et la
conclusion, entre autres, d'un travail très sérieux qui avait été fait, à
partir de ce moment-là, c'était de dire : Écoutez, pour l'instant, il n'y
a pas consensus sur la façon d'appliquer les principes d'élection proportionnelle. Alors, nous avons toujours été,
nous, comme formation politique, en faveur de mesures pour améliorer notre
démocratie, mais, encore une fois, il faut vraiment en discuter, il faut vraiment
analyser les modalités choisies par, entre autres, le ministre.
Maintenant,
les principaux écueils, encore une fois, c'est le fait de passer de 125 à
80 circonscriptions. C'est un processus de délimitation qui va être
extrêmement complexe et qui va occasionner des débats extrêmement déchirants.
Je vous rappelle que, quand le Directeur général des élections du Québec a
essayé, à un moment donné, de simplement... parce que j'ai été, évidemment, impliqué dans ça.
J'avais le comté de Mont-Royal, ma collègue à Outremont avait également le comté d'Outremont, et que, là, à deux reprises
le Directeur général des élections a changé d'idée en disant : Bon, bien,
on va mettre Sainte-Marie—Saint-Jacques avec Westmount. Là, il y a eu un autre drame qui
est arrivé. Par la suite, il est revenu
en disant : Bien, on va finalement fusionner cela, Mont-Royal—Outremont. Bon, il y a des éléments qui sont extrêmement déchirants, alors
imaginez-vous dans quelle situation on va se retrouver.
Le rôle des
députés, pour moi, il est fondamental. Il va y avoir deux types de députés. Des
types de députés, certains auront un
immense territoire à représenter. Les cas de comté, les gens vont se demander :
Est-ce que je vais voir le député de liste ou je vais voir le député qui a été élu?
Ça va être pas simple comme situation pour l'électeur. Et je pense que notre
rôle fondamental, c'est justement de faciliter le travail auprès des gens qui
vont nous élire.
Déjà, on a un
système qui est compliqué. Quand il y a des dossiers, par exemple, en matière d'immigration, puis que les gens m'appellent, puis que je
vois que le dossier, ça relève plus du fédéral, bien, tu sais, je ne commence
pas à expliquer aux gens : Bien,
allez voir le député fédéral. J'appelle le député fédéral, son bureau,
j'appelle à Ottawa puis je donne la
réponse, parce que la situation, elle est déjà suffisamment complexe
comme ça pour l'électeur moyen. Et donc je pense qu'à partir du moment où ils vont se retrouver avec un député
de liste, un député de région... je pense qu'ils vont vraiment se poser la question, encore une fois :
Bien, qui, véritablement, va me représenter? Je pense que le fait, d'ailleurs,
que, dans ce projet de loi, le rôle du
député de région ne soit pas clarifié démontre, encore une fois, qu'il y a une
grande partie d'improvisation dans ce projet de loi.
Deuxièmement, notre formation politique
considère que... la tenue d'un référendum en même temps qu'une élection comme celle qu'il va y avoir en 2022 nous
apparaît, en tout cas, un chamboulement de la démocratie, c'est-à-dire que je pense que c'est très grave... Quand on décide, par exemple, de
changer un système électoral, c'est très sérieux. De le faire en le mêlant en même temps qu'une élection,
je trouve ça... Vous savez, quand on décide de faire un référendum pour des choses qui sont relativement simples,
exemple... je ne sais pas, moi, sur la question, par exemple, de la marijuana,
si je donne ça comme exemple, ce
n'est pas... êtes-vous pour, contre, il y a des choses qui peuvent se faire de
façon simple, mais, un enjeu comme
ça, je ne vois pas comment on peut faire ça en même temps, entre autres, qu'une
campagne électorale, en même temps
que le fait de choisir, justement, un député, de choisir un futur gouvernement au sein du gouvernement du
Québec.
• (16 h 40) •
Mon collègue de LaFontaine a parlé de
l'instabilité, également, des gouvernements minoritaires. Vous savez, j'ai fait partie d'un gouvernement minoritaire,
j'ai fait partie d'un gouvernement majoritaire. Vous savez, il y a différentes
personnes qui disent : Aïe! c'est bien mieux, un gouvernement minoritaire,
parce qu'il est plus à l'écoute des citoyens, il doit composer avec les oppositions, etc. Moi, je dois vous dire qu'un
gouvernement majoritaire, qui peut être congédié à tous les quatre ans, si jamais les gens trouvent qu'il
ne fait pas le travail, là, je pense que c'est plus efficace. Je pense qu'on
peut accomplir certainement beaucoup
plus à ce moment-là. Moi, pour avoir participé, justement, quand il y avait un
gouvernement minoritaire, ce qu'un
gouvernement minoritaire fait, très souvent, c'est d'arriver avec des projets
de loi les plus consensuels possible
la première année, et là, bien, ils essaient de fonctionner pour ne pas être
défaits. C'est ce qu'on vit actuellement à Ottawa, au moment où on se parle, et c'est ce qu'on a vécu en 2012 au
Québec, c'est ce qu'on a vécu en 2007 au Québec. Et, à un moment donné, un gouvernement minoritaire, ça ne peut pas durer
très longtemps. On le sait très bien, on le sait, de la façon dont ça fonctionne. Et ce projet de loi
là, à toutes fins pratiques... Il ne faut jamais oublier qu'on n'est plus dans
l'époque, là, du Parti québécois avec le
Parti libéral, on est dans l'époque dans laquelle il y a quatre formations
politiques bien ancrées, bien
installées, au Québec. Et donc le risque de se retrouver... Même en gardant,
d'ailleurs, le même système que celui
qu'on a actuellement, on risque déjà de se retrouver, au cours des prochaines
années, avec plus que moins de gouvernements
minoritaires. Mais, avec l'adoption du projet de loi tel que proposé, il est
absolument très clair que ça, ça veut dire des gouvernements, je dirais,
minoritaires qui vont, à toutes fins pratiques, être à répétition.
L'autre
élément, encore une fois, c'est que la population doit absolument comprendre de
quelle façon les choses vont fonctionner. Et le mode de scrutin proportionnel
mixte compensatoire, tel qu'il est proposé, certainement, risque de
créer un désengagement du processus électoral à cause de sa très grande
complexité.
Alors, Mme la
Présidente, on est là pour, encore une fois, en discuter, on est là pour faire
ce travail, mais moi, j'invite sérieusement
le gouvernement à ne pas bousculer l'adoption de ce projet de loi, parce que je
pense qu'à partir du moment où ce
projet de loi serait adopté on risque
de vivre avec ça pour très longtemps. Et moi, je pense que la discussion est
encore de rigueur, parce que c'est un projet de loi extrêmement
complexe. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Merci, M. le député. Et maintenant nous allons poursuivre ce débat avec M. le
député de D'Arcy-McGee.
M. David Birnbaum
M. Birnbaum : Merci, Mme
la Présidente. À mon tour
d'intervenir sur le projet de loi
n° 39, Loi établissant un nouveau mode de scrutin,
à son étape d'adoption de principe.
Je le fais avec une certaine ambivalence, vous
allez comprendre. On parle d'un sujet qui nous est très cher, fondamental, la
démocratie, dans son instance la plus sérieuse, c'est-à-dire le choix solennel
de nos concitoyens chaque quatre ans et
comment le faire. Suite à ça, il y a des conséquences sur la gouvernance qui en découlent, de chaque élection. Et vous allez me permettre, Mme
la Présidente, d'être un petit peu
ambivalent parce que, pour un sujet si solennel, il me semble qu'il nous
faut des assises assez solides. Est-ce que l'échéancier de nos délibérations
est compris et réaliste? Est-ce que les enjeux sont vulgarisés et compris de façon
claire et transparente? Est-ce que les conséquences sont connues?
Quand on parle de la démocratie et
l'accès à la démocratie, on parle, dans un premier temps, de rendre l'individu
habile et en mesure d'exercer son droit
tellement solennel, alors, qu'on a l'obligation dès le début de se donner le
seuil, d'être compris dans nos
délibérations et nos gestes ultimes par l'électeur. Trop souvent, je trouve,
dans notre bulle, on se permet de
dire : Mais, voyons donc, vous n'avez rien compris. C'est le privilège et
le droit du citoyen, de vouloir regarder son bulletin de vote, de regarder des nouvelles ou même pas,
même pas. C'est son privilège, de prendre une bière à la taverne et dire :
Bon, je vais me donner 10 minutes pour décider comment je vote le
1er octobre. C'est son privilège. Nous avons une responsabilité civile
pour faire tout pour inciter l'intérêt et l'implication de nos concitoyens,
mais c'est leur droit d'en embarquer de leur
façon. Donc, c'est leur droit d'avoir devant eux un régime électoral qu'ils
comprennent, qui fait leur affaire,
qui leur permet d'avoir accès aux services gouvernementaux après, qui leur permet de comprendre comment s'insérer
de la façon qui leur convient et quand ils
ont un problème durant les quatre ans de mandat de quelque gouvernement que
ce soit.
Ils
ont aussi le droit de comprendre nos délibérations qui risquent de nous mener à
une éventuelle loi. Et je peux me
permettre d'imaginer que mon monsieur, madame cible devraient être assez confus
à l'instant. Nous sommes en train de
parler, à juste titre, et on fait notre contribution, notre «due diligence» à
un processus qui, de toute évidence, va s'arrêter soudainement, sans issue, sans conclusion. Est-ce
qu'il y a quelqu'un dans cette Chambre qui peut même oser suggérer que
nous serons au rendez-vous prévu, en toute objectivité, par un officier, nommé
de façon unanime par le Parlement, le Directeur général des élections?
Moi, pour avoir
travaillé comme directeur général de l'Association des commissions scolaires
anglophones du Québec, bon, un système
d'élection un petit peu plus modeste et très difficile, je vous en conviens,
les élections scolaires, le processus
a besoin d'être entamé, quoi, deux ans, trois ans avant une élection où ils
vont être implantés. C'est compliqué, les
listes électorales, les consultations prévues en bonne et due forme par les
lois pour décider sur les démarcations, les frontières des circonscriptions, c'est un processus énorme. Et, bon, on
est en temps de pandémie, maintenant, ce qui nous invite et nous interpelle de temps en temps, de
façon responsable... peut-être le projet de loi n° 66 et pas le
projet de loi n° 61, avec
respect, de façon responsable, des fois, à regarder nos échéanciers. On
est en crise, alors peut-être des processus en bonne et due forme, qui
sont en place, doivent être abrogés, en quelque part, mais pas le processus
devant nous.
Alors,
quand je parle du fait que c'est très, très compliqué, la confection des
frontières, les avis à l'électeur, la mise en candidature, l'explication de la
chose, la réservation des bureaux de scrutin, le tout, les délais prescrits
sont là pour une bonne raison, et ces délais font en sorte que
l'échéancier qu'a suggéré le Directeur général des élections est réaliste, et
il faut le respecter, et on parle d'un échéancier qui terminerait nos
délibérations d'ici sept, huit, neuf semaines. Alors, comme je dis, mon ambivalence, on met toutes nos
énergies dans notre analyse et notre participation à un projet de loi sur un sujet d'une importance
capitale. En même temps, on est conscients un petit peu qu'on fait un petit peu
de surplace, bon.
The leader called the bill, so here we
are, and we're doing our work in all due diligence. And we'll look at each article in «étude détaillée» with an eye on each elector and their
equitable right and ability to participate in this process.
Mais, il me semble qu'«ambivalence», c'est un mot approprié quand on
parle d'un projet de loi qui a, comme a été dit, quelque 400 et plus amendements de déjà déposés, qui est d'une complexité
énorme. C'est un petit peu surréel, en quelque part, surtout en temps de pandémie, où le temps de nos délibérations est
assez précieux. Il y a d'autres choix qui auraient pu être faits. Bon.
Mais là, ici, c'est là où nous sommes. Il faut dire qu'on est ici aussi suite à
un engagement solennel du gouvernement devant nous de poursuivre ces délibérations-là.
Donc, on va essayer de le faire, mais, comme je dis, avec un oeil sur le sérieux de ce projet-là. La
faisabilité dans les échéanciers identifiés d'ici 2022, bon, voilà une
chose dont on va être toujours conscients.
• (16 h 50) •
En
même temps, nous parlons de l'intégrité du système. Nous parlons de la place
équitable et essentielle de nos régions au Québec, la place des députés
en région qui ont déjà des territoires énormes à couvrir. On parle de la place équitable de notre grande métropole de Montréal
qui est en quelque part peut-être compromise par les propositions que nous
avons devant nous.
On
parle aussi, en quelque part, de crédibilité, solidité du mandat qui serait
confié aux éventuels gouvernements sous le régime proposé dans ce projet de loi. Et je ne parle pas juste de l'aspect probable d'un plus grand nombre
de gouvernements minoritaires.
Un gouvernement élu de façon minoritaire est quand même dûment
élu. Mais le mandat, la solidité du mandat des éventuels gouvernements élus sur un système qui risque d'être très mal
compris par le public, qui risque de faire en sorte qu'un problème prédominant dans les démocraties occidentales et
aggravé ici, au Québec, il faut le dire, c'est-à-dire le taux de
participation aux élections. Moi, je crois qu'il y aurait un consensus auprès
des experts en tout ce qui a trait à la réforme électorale qu'une formule telle que proposée par ce projet de loi risque fortement de faire en sorte qu'on se trouverait devant un taux de participation dramatiquement
réduit, ce qui est une mesure essentielle de la santé même de notre démocratie.
Donc,
Mme la Présidente, on a ces grandes ambivalences. Si on tombe un
petit peu dans les spécifiques de l'affaire, on peut aussi avoir nos grandes questions. Y a-t-il de la transparence
dans ce qu'on propose de faire? Y a-t-il, comme je dis, des outils qui
vont faire en sorte que l'électeur vote en mesure de participer pleinement?
Bon,
première chose, on va avoir, si le projet
de loi est adopté
tel que proposé, 80 circonscriptions au lieu de 125. Je nous offre l'exemple banal, et je suis sûr que je ne suis pas le
seul, ça arrive tellement souvent dans ma circonscription : Ah! salut, M. Birnbaum, dis bonjour à Justin.
Bien, voyons donc! Et moi, comme nous tous, on travaille, on est très fiers
de tout ce qu'on fait et on espère que ça ait écho, j'espère que ce n'est pas
juste moi, mais que ça ait écho et que nos concitoyens nous suivent dans nos
délibérations tellement importantes en leur nom, comme députés de l'Assemblée nationale du Québec. Alors, déjà, nous avons à sauvegarder et, à chaque jour, faire
connaître le rôle solennel qu'on joue ici, pas de façon partisane, dans
les délibérations de l'État.
Donc, je me
permets de donner l'exemple banal, parce qu'où va être le niveau de
compréhension de nos citoyens quand,
dans une période assez courte, ils ou elles seraient obligés de comprendre que,
bon, maintenant, j'ai un député... le territoire a
changé, est-ce qu'il ou elle est sur une liste comme député choisi de façon
proportionnelle? Comment ça se fait que
je vois que les gens d'une communauté qui est assez éloignée de moi fait partie
maintenant de la même circonscription? Alors, l'exercice de la
gouvernance ainsi que la démocratie risquent d'être compromis par un tel genre
de formule.
En région,
qui est... Comme je dis, des fois, j'empathise, surtout les jeudis, pour
quelques-uns de mes collègues qui ont
devant eux soit un vol interminable ou six heures, sept heures à faire, de
route, pour arriver à la circonscription, j'espère, pour se reposer un petit peu, mais pour se
réveiller le lendemain, le samedi, pour aller à un évènement qui est à
1 h 30 min de chez
eux. Ce n'est pas facile, ce n'est pas facile. Une des choses, bon, qui ne rend
pas ça nécessairement plus facile mais plus
faisable, je crois, c'est la crédibilité de ce député-là, sa notoriété au sein
de sa communauté qui est connue, quantifiable, identifiable en termes de frontières, c'est une chose claire. La
démocratie s'exprime de la meilleure façon quand les balises sont
claires. Alors, voilà juste un exemple de la répartition des circonscriptions
qui sème la confusion.
Je regarde
mon collègue et notre expert sur l'affaire, je ne vous cache pas qu'il y avait
beaucoup de grattage de tête lors de
ces briefings assez, assez efficaces devant notre caucus. Nous sommes des
parlementaires qui ont la responsabilité de creuser un petit peu plus et de se doter d'une certaine expertise
dans les choses électorales, dans les règles du jeu de la démocratie, et ce n'était pas facile. Moi, je
serais mal à l'aise à vous donner un topo de deux minutes sur le projet de loi devant nous. Donc, je le dis parce
que c'est notre obligation de nous
assurer, quand on embarque... et nécessairement, dans la réforme électorale, on se donne la tâche
solennelle, difficile et sérieuse de le faire de façon claire, imputable et
explicable.
Bon, une
autre ambiguïté, compte tenu du fait qu'on va convenir qu'on est dans une
complexité énorme : on va l'assujettir
à un processus référendaire. Bon, si on est pris avec une
réforme de cette ampleur-là, ce serait inacceptable de faire autrement. Et voilà la tâche de taille qu'on
va avoir devant nous. Le citoyen aurait l'opportunité, au moins, de
trancher sur cette grande question.
Bon, il y a
des livres, et des livres, et des livres, évidemment, de rédigés sur la
campagne référendaire de 1995 et probablement quelques livres, et livres, et livres sur le
libellé. Là, on parle des enjeux... peu importe où on se situe sur le
spectrum là-dessus, mais on parle d'un choix qui a été évident. On vivait ces
réalités en continu, de d'autres façons, maintenant, de vivre ces réalités à chaque jour. Alors,
malgré le fait que cette question référendaire était d'une complexité épouvantable, on avait la possibilité de se dire... M., Mme Tout-le-monde, ils avaient l'opportunité de comprendre les enjeux. Là,
déjà, ça va être très difficile de faire le même constat. Et comment est-ce
qu'on peut même, de bonne foi... Parce
que, pour moi, s'il y a
un... bon, de bonne foi, je vais le laisser comme ça, comment on peut imaginer
qu'un référendum coïncidant avec une campagne d'élection
peut être une chose fidèle, crédible à défendre?
• (17 heures) •
Ce serait, en
quelque part, de dire : Tout ce qu'on fait... Et la plupart des gens que
je vois autour de moi ont déjà participé
dans plus qu'une élection, mais, même si vous auriez participé à une seule, ce
serait de dire : Bon, ce n'est pas si compliqué que ça, nos 30 jours, quelques jours de campagne, je vais
mettre ma plateforme dans votre boîte
à malle, là, et, bon, faire une
publicité ici et là, et ça devrait être facile, votre choix. J'espère qu'on
s'est donné, chacun — et
j'en suis sûr — une
job beaucoup plus étoffée que ça dans les campagnes qui nous auraient menés
ici, de comprendre, dans chacun de
ces 30 jours, que ce n'était pas juste un enjeu pour nous faire élire, ça
a été une des opportunités très chères et rares de savoir que notre population
a été à l'écoute, est à l'écoute, donc une opportunité, sans être arrogant, de
les sensibiliser à chaque aspect de notre gouvernance au Québec, de les sensibiliser aux questions sur l'environnement, sur l'économie, sur la
santé, sur l'éducation. C'est ça, une campagne électorale. Est-ce qu'on trouve ça normal d'ajouter à cette tâche-là un référendum sur
une réforme fondamentale de notre système électoral?
Je nous
inviterais à faire pas un référendum, mais un sondage, une fois qu'on aura
complété nos discussions, d'ici, même,
qu'on est en phase finale, de faire un sondage informel ou de se donner la
tâche de se promener dans notre circonscription pour demander à 10 personnes de nous dire
une phrase sur la réforme électorale qui serait devant eux. On parle de
nos électeurs, on parle de nos gardiens de la démocratie, on parle du système
qui choisit nos gouvernements. Ces 10 personnes, de ma lecture, vont être
unanimes en disant : Je ne comprends pas.
Ça, ce n'est pas une petite affaire. Ils peuvent
ne pas comprendre un de nos projets de loi ou une de nos discussions sur un autre sujet. Et nous avons le
devoir solennel de les suivre, ils ont besoin de comprendre comment ça
marche, notre système électoral.
Alors, on va
travailler, Mme la Présidente, en étude détaillée, mais on a un projet, devant
nous, qui a tous ces risques pour notre démocratie. Merci.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je vous remercie, M. le député.
Maintenant, nous allons poursuivre le débat avec Mme la députée de
Vaudreuil.
Mme Marie-Claude Nichols
Mme Nichols : Merci. Merci, Mme
la Présidente. Alors, il me fait plaisir d'intervenir sur le projet de loi
n° 39.
Je ne le
cacherai pas, d'emblée c'est un projet
de loi qui est quand même
assez complexe, disons-le. Mon collègue,
précédemment, disait qu'on a eu plusieurs
présentations au caucus, en effet, puis
c'est très technique, c'est très... je dirais même que c'est difficile à suivre. On a un excellent porte-parole. Donc, je remercie le
député de LaFontaine, qui, je suis certaine,
nous voit... On le regarde, des fois, puis on se dit : Je ne suis pas sûre
que j'aie suivi, là, mais, comme je vous dis, c'est hypercomplexe.
Je me suis
permis de regarder le projet de loi, avec le collègue de LaFontaine, avec des
lunettes qui viennent du monde
municipal, donc, et je me suis permis aussi d'écouter, là, les interventions de
la FQM, de lire le mémoire de la FQM. Je me suis permis aussi d'en
parler à différents élus dans le monde municipal, autant des maires... Vous
savez la MRC Vaudreuil-Soulanges,
c'est 23 maires. J'ai d'anciens collègues aussi qui sont encore en poste,
soit à la mairie ou soit des conseillers
municipaux, puis j'ai jasé avec eux à savoir l'importance qu'ils accordaient...
Un, permettez-moi de revenir sur la
compréhension. Je ne suis pas certaine, puis pourtant, là... Les gens dans le
monde municipal, là, pour eux, ça fait partie de leur mode électoral, quand on
parle d'élections, là, mais, quand on rentre dans les détails comme ça, pour
eux aussi, c'était quand même assez
complexe. Mais j'ai quand même jasé avec eux, puis, ce qui revenait souvent, à
la fin de la conversation, bien, les élus me disaient : Bien,
Marie-Claude, finalement, c'est un projet de loi majeur, puis ce que je comprends, ce que tu m'expliques, bien, ça
chamboule pas mal le coeur de notre démocratie. Alors, bien, j'ai été obligée
de leur répondre : Oui, en effet, tu sais, ça vient vraiment changer... ça
change le coeur de la démocratie. Mais est-ce que c'est dans le sens où
on veut aller?
Bien, j'ai
fait des statistiques, là, auprès des gens qui... lesquels j'ai abordés, puis
je vous dirais que 98 % des élus à
qui j'ai parlé se disaient : Pourquoi on fait ça? Pourquoi on s'en va là?
Dans le fond, l'objectif, ce que vous devez faire, c'est... vous devez faire une meilleure
communication auprès des citoyens, vous devez l'expliquer mieux aux citoyens, vos
citoyens n'embarqueront pas dans ce projet
de loi là si vous l'expliquez comme vous me l'expliquez. Donc, c'est que ce
les élus nous demandent de faire. Donc, c'est ce qu'on fait aujourd'hui, on
prend la parole à tour de rôle puis on essaie d'expliquer un peu où est-ce
qu'on s'en... en fait, ce que représente ce projet de loi là.
Je voudrais
peut-être, d'emblée, expliquer que le Québec, c'est probablement une des plus
anciennes démocraties parlementaires
au monde, que notre système parlementaire date de 1792. Oui, il a des défauts,
on a un système parlementaire qui a
des défauts, mais c'est un système parlementaire qui fonctionne bien aussi. Un
idéal démocratique, je pense que ça n'existe
pas. Peut-être, tu sais, qu'on est dus pour des améliorations, puis je pense
que c'est ce qu'on essaie de faire, mais je pense qu'ici, en Amérique
du Nord, le Québec
représente certainement une stabilité. Je pense que le Québec,
on est une stabilité par notre mode de fonctionnement, entre autres.
Je pense
qu'on est une communauté qui est devenue, au fil du temps, une société bien
distincte, je dois le dire, puis qu'on jouit d'une situation des plus
enviables. Bon, peut-être qu'en temps de pandémie c'est un peu moins
partagé, cette situation enviable là.
Mais, si on se compare, on peut dire qu'ici on a un système parlementaire où
chacun on peut prendre la parole, chacun on a le droit de s'exprimer
dans le respect, puis ce n'est pas comme ça partout à travers le monde.
Donc, comme
je disais, bien, je suis convaincue qu'il n'en existe pas, de système électoral
idéal, que tous les modes de scrutin
sont perfectibles, que les propositions doivent évidemment être analysées.
Cependant, c'est vrai, c'est vrai que note
société veut améliorer le caractère démocratique de ses institutions, mais je
pense que ça ne doit pas se faire sans une réflexion approfondie des conséquences sur le Québec
d'aujourd'hui mais surtout le Québec de demain, le Québec
de nos enfants.
Le Québec, c'est une nation complexe. C'est une
nation complexe, c'est un territoire immense avec une faible population. Pour la grandeur du territoire, on a
une faible population. On a une minorité anglophone importante parmi une
majorité francophone, qui est elle-même
minoritaire en Amérique. Donc, vous comprenez déjà là un peu la complexité de
tout ça. Mais il reste que l'attractivité de
quelques grandes villes et la diminution du poids démographique des régions
ajoutent aussi cette complexité-là.
Les tendances migratoires se poursuivent, puis notre système d'immigration,
entre autres, n'arrive toujours pas à attirer des nouveaux citoyens en
région. Le Québec risque de perdre une partie de son identité liée à son territoire et à la façon dont il habite son
territoire. C'est pourquoi toute proposition de réforme du mode de scrutin ne
peut pas s'appuyer uniquement sur le
principe de la représentation du vote proportionnel, parce que cela ne fera
qu'accentuer la perte d'influence des régions, et les régions, c'est
tellement important — j'imagine
que c'est important aussi pour le gouvernement, puisque, la représentativité du
gouvernement, vous êtes majoritairement des régions — et le
sentiment, évidemment, déjà largement répandu à l'extérieur de Montréal
et de Québec de ne pas être entendu par nos gouvernements.
Donc, le
poids politique des régions est, selon moi, l'argument le plus important et
l'élément incontournable de la présente
réforme. Et c'est ce qu'est venu dire, entre autres, le président de la FQM,
M. Demers. C'est ce qu'ils ont aussi exprimé dans leur mémoire, un mémoire bien étoffé, bien élaboré, avec
six recommandations, six recommandations quand même assez simples mais tout de même précises. Et ce que j'apprécie du
travail de la FQM, qui représente, disons-le, plus de 1 000 municipalités, là, au Québec,
donc c'est une belle représentativité, mais, quand ils nous font un travail, ou
quand ils déposent un mémoire, ou
quand ils viennent faire des représentations, bien, ils ont consulté leurs
gens. Donc, le travail, le mémoire
qui a été fait, les arguments qui ont été présentés, bien, soyez assurés que ça
ne vient pas juste d'une personne,
mais que ça vient bel et bien d'un comité et c'est réfléchi.
• (17 h 10) •
Donc, je vais
me permettre de vous présenter, entre
autres, les six recommandations de la FQM, parce que je pense que
ça résume quand même bien ce qui se passe dans nos régions ou, en
fait, là où on veut s'en aller. Donc, je vais présenter les recommandations. Puis il
y a peut-être des recommandations sur lesquelles je porterai une attention un peu plus particulière,
mais la première représentation est que «le projet de loi assure la
pérennité du poids politique des régions». Donc, j'en ai déjà parlé beaucoup, dans mon introduction, de cette
importance-là. Et je faisais une petite recherche, je regardais, entre autres,
sur l'Institut de la statistique du Québec,
je regardais l'évolution de la démographie au Québec, et définitivement ça
montre une baisse lente mais
continuelle de la population dans les régions plus éloignées des grands
centres. Je pense que ce n'est pas une surprise pour personne, mais
c'est quand même étonnant quand on va voir sur le site de l'ISQ.
Entre autres, dans le dernier bilan sur les
perspectives démographiques des régions du Québec, qui a été publié en 2019, l'institut prévoit une croissance
démographique des régions près de Montréal de 14 %. Donc, tout qu'est-ce
qui est aux alentours de Montréal,
qu'on appelle les régions, on voit qu'il y aura une augmentation de 14 %.
À l'inverse, les régions plus
éloignées, comme le Bas-Saint-Laurent, la Gaspésie, les Îles-de-la-Madeleine,
le Saguenay—Lac-Saint-Jean,
l'Abitibi-Témiscamingue et la Côte-Nord,
eux, verront le poids de leurs populations passer de 10,3 % à 8,6 %
en 2041. Je le sais, que c'est loin,
mais c'est quand même des statistiques qui sont disponibles, puis je pense
qu'il faut en tenir compte quand on embarque dans des changements ou quand on veut
étudier des projets de loi aussi importants. Donc, malheureusement, force est d'admettre que, malgré les efforts
énormes des régions pour lutter contre cette tendance à la baisse, l'adoption
de ce projet de loi provoquera, à moyen terme, une baisse réelle du poids
politique des régions malgré les précautions prises par le gouvernement. Donc, voilà toute
l'importance... et ce pourquoi cette recommandation, de s'assurer que la
pérennité du poids politique des régions soit bien représentée.
La
deuxième recommandation, c'est qu'on «demande que le rôle du député issu de la
liste régionale, ou [...] appelé
"député de région", soit
clarifié». Je pense que mes collègues, précédemment, en ont largement parlé, à
l'effet que, dans le projet de loi,
ce n'est pas clair, les rôles ne sont pas clairement définis. Et d'ailleurs ça
fait... si on le lit rapidement, on voit
que ce n'est pas nécessairement défini, puis, dans le fond, ce qu'on tire comme
conclusion, bien, c'est qu'il existerait désormais deux classes de
députés. Bon. C'est clair. On se demande : Mais qu'est-ce que ça apporte
de plus, ce projet de loi là? Bien, ça
apporte deux classes de députés, deux classes de députés, qui apporte
probablement ou très certainement beaucoup de confusion auprès de nos
citoyens, beaucoup de confusion auprès de notre population. Déjà que, quand on explique, au Québec, comment ça fonctionne, la
politique, souvent on leur dit : Bien, vous savez, il y a le niveau
municipal, après il y a la MRC. La
MRC, c'est le regroupement de vos municipalités, qui sont des municipalités régionales de comté. Après, vous avez le provincial, puis
après vous avez le fédéral. Ça fait que, là, ils nous disent : O.K., ça
fait que, là, tu commences au municipal, après tu es élu à la MRC, après tu es
élu au provincial, puis là tu as le top suprême au fédéral. Mais, non, ce n'est
pas comme ça que ça fonctionne, c'est tous des champs de compétence qu'on se
partage.
Bien,
nous, la politique provinciale, c'est notre quotidien, donc on baigne là-dedans
à tous les jours, on comprend comment ça fonctionne, mais, pour un
citoyen, pour une mère de famille qui va mener ses enfants à l'école, qui est débordée au travail, l'école, les devoirs, les
dodos, les bains, bien, elle ne porte peut-être pas tant d'attention que ça au
système, à savoir comment ça
fonctionne, qui me représente. Donc, elle, quand elle a un problème — je
dis elle... ou ce citoyen ou cette
citoyenne — quand
elle a un problème, puis que ça se passe... Bon, on va se le dire, quand c'est
un nid-de-poule, on le sait, on
appelle au municipal. Mais, quand c'est un peu plus que ça, qu'est-ce qu'on
fait? Bien, on prend le téléphone puis on appelle au bureau de notre
député. Puis souvent, comme disait mon collègue précédemment, on appelle au
bureau de la députée ou du député, puis :
J'ai un problème en immigration ou j'ai un problème en... Puis là on leur dit :
Oui, mais c'est peut-être plus
fédéral. Bien, eux ils ne comprennent pas, là, nécessairement, là, le partage
des compétences, qu'il y a des compétences fédérales, qu'il y a des compétences
provinciales. Déjà là, c'est mêlant pour nos citoyens, de savoir est-ce que c'est provincial ou est-ce que c'est fédéral.
Le municipal, comme je vous disais, c'est un petit peu plus facile, mais même
quand on leur dit... bien, même au
municipal, là, quand on leur dit : Non, non, non, ton changement de
zonage, là, ça doit passer par le
PMAD, le Plan métropolitain d'aménagement, puis ça doit passer par la MRC, puis
la MRC doit avoir une autorisation de
la CMM... Ah! Bien là, embarquez-moi pas sur la CMM, là. Mais, quand on dit
qu'il faut que ça passe en plus par la CMM, bien là ça devient encore
plus complexe.
Donc, moi, je suis
d'avis qu'il faut garder ce lien de proximité là avec notre député. Je pense
que, justement, il y a un sentiment, il y a quelque chose qui se développe avec nos citoyens, avec nos députés. Ils nous voient,
on est présents pour eux, puis quand
ils ont des questions ou une problématique, bien, ils viennent nous voir, c'est
important. C'est important pour eux,
c'est important pour nous aussi, là, de pouvoir les aider. Même nous, advenant
qu'il y a deux classes de députés, comment... Même nous, je pense qu'on
va être mêlés, à savoir, bien, c'est toi, c'est moi, c'est en haut, c'est à qui.
Donc,
je pense qu'il y a beaucoup de... je pense que ce n'est pas nécessairement une
bonne avenue à choisir. Puis ça
allait aussi dans le même sens que la recommandation n° 3,
quand on dit que... «garantir la proximité du député et des citoyens».
Donc, c'est dans ce sens-là, les recommandations n° 2
et n° 3 de la FQM, lesquelles j'appuie, évidemment.
La
quatrième recommandation, c'est qu'on «demande à nouveau que toutes nouvelles
délimitations [des] territoires de
circonscriptions respectent les limites des territoires [des] MRC». Donc, je
pense que la délimitation des territoires, ça a toujours été un sujet très,
très, très délicat. Écoutez, je pourrais vous donner des exemples,
particulièrement présentement, là, en
temps de pandémie. La délimitation des territoires, ce n'est pas évident. C'est
souvent un casse-tête, particulièrement pour le gouvernement qui doit prendre des décisions difficiles à
savoir : Qu'est-ce qui tombe en zone rouge? On le définit par MRC, on le définit par CMM, on le définit
comment? Chez nous, ça a été une grande problématique parce que
c'est la MRC Vaudreuil-Soulanges, donc on a des institutions en commun, comme la commission scolaire Vaudreuil-Soulanges, la MRC
Vaudreuil-Soulanges, mais, le territoire de la CMM, ce n'est pas Vaudreuil-Soulanges qui fait partie du territoire de
la CMM. Donc, quand on dit que la commission
scolaire passe... quand on dit que Vaudreuil-Soulanges passe en zone rouge, que la
CMM passe en zone rouge, bien, ce n'est pas tout Soulanges qui passe en zone
rouge, c'est partiel. Donc, pour nous,
c'est hypercomplexe, d'utiliser la délimitation CMM. C'est beaucoup plus facile
d'utiliser un territoire MRC, un peu
partout comme le reste du Québec. C'était déjà bien défini, puis, déjà là, c'est
compliqué pour nos citoyens, à savoir : Bien, moi, je fais-tu partie de la délimitation Vaudreuil ou de la
délimitation Soulanges? C'est déjà compliqué. On a des gens qui
appellent au bureau puis qui disent, je donne un exemple, là : Moi,
j'habite à Saint-Lazare, je suis dans le comté
de Vaudreuil. Non, vous êtes dans le comté de Soulanges, mais c'est la MRC
Vaudreuil-Soulanges. Non, mais vous le savez, là. Je fais un exposé sur
la chose, là, mais vous le savez, à quel point c'est déjà difficile, pour les citoyens,
de s'identifier à une région. Si en plus il
fallait agrandir ces régions-là et les délimiter autrement, avec un nouveau
nom, avec... C'est hypercomplexe, puis je ne pense pas que ce soit nécessaire.
Puis même au niveau de la collaboration entre élus, parce que je me permets de dire aussi que le nombre puis
l'importance des dossiers qu'on travaille en collaboration avec les élus municipaux, ça augmente, là. D'année en
année, on travaille encore plus en collaboration avec nos élus municipaux.
On leur a d'ailleurs donné un titre, un titre de gouvernement de proximité, on
a reconnu les municipalités et les MRC comme
des gouvernements de proximité, donc on doit également
refléter dans ce projet de loi là cette proximité-là avec nos élus des
différents paliers. Donc, vous comprendrez, encore là, toute l'importance de la
délimitation des territoires.
Je passe vite sur une des
recommandations qui a été faite par la FQM, qui demandait, entre autres, que «toute
réforme inclue l'obligation de déposer des listes paritaires pour les
candidatures régionales». Ils sont venus faire des représentations aussi à cet
effet-là, auxquelles j'adhère.
• (17 h 20) •
Et la
dernière recommandation de la FQM, qui demandait que «le gouvernement s'assure
que toute l'information, notamment des simulations quant aux effets
réels du vote, soit disponible et accessible afin que les citoyens et les citoyennes puissent exercer leur droit de vote en
toute connaissance de cause», donc, j'ai tout simplement envie de vous
rappeler que ça prend une grande campagne,
une grande campagne d'information. Il faut prévoir ça pour expliquer clairement
comment ça fonctionne ou comment pourrait
fonctionner un mode de scrutin tel que proposé. Ce n'est pas évident, comme
je disais, de transmettre cette information-là, ou de détricoter tout ça, ou de le présenter aux citoyens,
à la population, que ce soit aussi accessible, de prévoir
des périodes d'échange, de questions, questions-réponses. C'est loin d'être
évident. C'est complexe.
Alors, je le
dis en tant que représentante d'une région, parce que je pense que Vaudreuil
est une région, Vaudreuil est une partie... Oui, on a un petit centre peut-être
un peu plus urbain, mais on a quand
même 70 % de notre territoire
qui est agricole. Et je me considère comme une députée de région, et je crois
sincèrement que les régions, bien, nous serons pénalisées par un tel projet
de loi, par une telle réforme. Et
j'irais même un peu plus loin, je dirais que je trouve que
c'est un manque de considération pour les citoyens qui habitent en
région. Je ne vois pas comment ça peut bonifier le travail, bonifier l'accès à leurs députés. Je ne vois pas
comment ils pourraient tirer profit de tout ça. Ça fait que, selon moi, c'est
un grand manque de considération pour nos citoyens.
Le contact avec le député serait encore plus dur à couvrir parce que le
territoire serait encore plus grand.
Et je terminerai en vous disant que le poids politique
des régions doit être protégé. C'est la seule phrase que je demande qu'on
puisse retenir dans ce projet de loi.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Maintenant, je cède la parole à Mme la députée de Saint-Laurent.
Mme Marwah Rizqy
Mme Rizqy : Ah! J'aurais pensé que peut-être... — j'ai
pris un peu de temps — peut-être que quelqu'un voudrait parler,
de l'autre côté, étant donné que c'est tellement un projet
de loi important, mais, bon, contente
de vous retrouver. C'est jeudi, je vais essayer de m'assurer que tout le
monde reste réveillé jusqu'à 18 heures.
Alors, Mme la Présidente, quand j'étais plus
jeune, à l'école primaire, quand je me présentais, je disais mon prénom, puis là les gens disaient : Hein,
comme Pauline Marois? Et moi de dire : Bien oui. Quand j'étais au primaire,
elle était ministre de l'Éducation. Et je me rappelle de cette grande dame qui, à la
télévision, expliquait, vulgarisait et s'assurait que les gens
comprennent où est-ce qu'elle s'en va avec ses skis.
Alors, quand
elle a récemment publié son livre, je me suis dit : Ah! je ne peux
m'empêcher que de trouver inspiration que
dans le livre de notre première femme première
ministre du Québec.
Et c'est rare que Mme Marois revienne pour donner des conseils. Elle
a vraiment très, très bien respecté, je dirais, son devoir de réserve.
Alors, Pauline
Marois — Au-delà du
pouvoir, je vous invite à aller
acheter son livre, évidemment, mais, de façon plus précise, à la page 362 de son livre... J'ai fait des petites
copies, inquiétez-vous pas, le livre est à la maison. Peut-être que j'aurai la chance, quand le coronavirus sera
terminé, d'avoir une dédicace. Et vous savez que même Infoman a fait une
petite photo de Mme Marois et moi-même,
si jamais elle et moi avions un enfant, à quoi ressemblerait l'enfant? Je vous
le dis tout de suite, ce n'est pas une bonne
idée. Alors, il est question, dans son livre, un bref passage sur la réforme électorale...
Une voix : ...
Mme Rizqy : Ah! Non, mais je
sais que le ministre à la Transformation numérique se dit... Là, j'ai piqué
votre curiosité, hein? Je vais vous envoyer
la photo. Puis je suis convaincue que vous allez dire : Là-dessus, c'est
unanime, on est d'accord, pas d'enfant entre les deux.
Alors, il est
question, dans le livre... Il y a un court passage mais quand même
très précis sur la réforme électorale. Elle
commence d'abord en rappelant que c'est un débat qui date depuis maintenant
plusieurs décennies. Et elle dit ainsi : «Bernard Drainville...» Tout le monde connaît Bernard Drainville. D'ailleurs, plusieurs d'entre vous lui parlez très tôt le matin, avant qu'il rentre en ondes au 98,5, à
Cogeco. Alors : «Bernard Drainville déposait donc le projet de loi n° 13, qui contribuerait à accroître l'engagement
démocratique des jeunes Québécois en permettant aux étudiants des cégeps, des universités
et des centres de formation
professionnelle de voter directement sur leurs campus.» Je fais une parenthèse. C'est vrai, et on devrait lui dire merci. Alors, j'en
profite, M. Drainville, merci, parce que c'était un changement qui était important et nécessaire.
«On estimait à ce moment-là qu'un demi-million d'étudiants pourraient se prévaloir de cette possibilité lors de la prochaine élection générale. Le projet de loi de
M. Drainville a été adopté à l'unanimité le 23 avril 2013.» Je vous
invite à retenir «unanimité».
«Depuis le
milieu des années 70, la réforme du mode de scrutin est un sujet qui
revient périodiquement dans l'actualité. Même si nous avions souhaité aborder les problèmes qui y sont liés
durant notre mandat, il aurait été maladroit de le faire dans le contexte où nous étions. Comme tous les
acteurs politiques, je suis préoccupée par la représentativité des élus. Il est
évident qu'un mode de scrutin plus
proportionnel faciliterait l'expression d'un spectre plus large des opinions.
En même temps, il faut bien réaliser que pour fonctionner
la société doit être gouvernée en tout temps, sinon, c'est le blocage
des institutions. Et, si une crise
économique ou sociale survient, on risque fort de se retrouver dans
l'incapacité de décider et d'agir...» Et Mme Marois ajoute trois
petits points, trois petits points de suspension.
«Par
ailleurs, je suis bien placée pour parler des difficultés de gouverner
lorsqu'on est minoritaire à l'Assemblée. Notre système électoral, malgré ses défauts, a permis l'alternance des
gouvernements — alternance
des gouvernements — et
l'apparition de nouveaux partis — ah! ça, la CAQ, vous devriez être sensibles
à cela — qui ont
pu accéder à la direction de l'État.
C'est déjà beaucoup lorsqu'on regarde comment les choses se passent dans
d'autres sociétés. Doit-on changer un mode de scrutin dont les vertus ont été démontrées pour le remplacer par un
autre qui ne correspond pas à l'histoire de notre culture démocratique?»
Mme Marois pose la question.
«Je crois
plutôt qu'il serait préférable d'améliorer notre système actuel. On pourrait, par exemple, adopter un mode de scrutin
majoritaire à deux tours, où les électeurs auraient à choisir entre les deux
candidats ayant obtenu le plus de voix au
premier tour. Si on proposait une telle option aux Québécois,
je crois qu'un large consensus permettrait d'entreprendre rapidement
une réforme. Il serait alors possible pour chacun de voter avec son coeur au
premier tour, et au second de choisir celui des deux candidats qui
représente le mieux ses valeurs et ses opinions.»
«En 2012‑2013,
en modifiant ces lois pour les adapter à la réalité de l'époque, nous avons agi
dans le cadre de ce qui était possible. Dans ce contexte, la priorité de
rétablir un sain climat de confiance entre les citoyens et les dirigeants du
Québec et l'adoption de ces nouvelles lois représentaient assurément un pas
remarquable dans la bonne direction.» Fin de citation.
Il y a plusieurs
passages pertinents dans son livre, évidemment, mais le court extrait que je me suis permis de
vous lire, Mme la Présidente, j'aimerais m'attarder à quelques éléments : «Notre système
électoral, malgré ses défauts, a permis l'alternance des gouvernements et l'apparition de nouveaux partis qui ont pu
accéder à la direction de l'État.» En
ce moment, le projet de loi n'aurait pas pu permettre, par
exemple, à l'arrivée de l'ADQ, et nous
n'aurions pas eu le plaisir et le bonheur d'avoir le ministre délégué à la
Transformation numérique faire ses premiers pas dans un nouveau parti qui
correspond à ses couleurs et
motivations politiques. Et imaginez ma peine d'être aujourd'hui au salon bleu
et ne pas avoir le privilège d'être assise face à face avec lui.
Imaginez le salon bleu sans le shérif de la CAQ. Ce serait impossible... Ce
serait comment?
Une voix : ...
• (17 h 30) •
Mme Rizqy :
Non, mais c'est bon. Mais, vous voyez, c'est ça, je vous parle, cette
interaction, cette alternance, mais aussi l'arrivée de nouveaux partis. Et ça,
il me semble que, juste ça, là, juste ce petit élément-là, moi, je ferais en
sorte qu'effectivement je m'assurerais
que c'est toujours possible à tout Québécois de dire que moi, j'ai envie de
créer un nouveau parti, et c'est
possible au Québec; qu'au Québec, lorsqu'on a de l'ambition puis qu'on veut
avoir son propre parti, on est capable de le faire.
Imaginez, le premier ministre du Québec actuel
qui ne se reconnaissait plus dans le Parti québécois, avec ce projet de loi, qu'est-ce qu'il aurait fait? Est-ce
qu'il aurait été pris avec le Parti québécois? Je ne sais pas comment ça se
serait passé entre lui puis Pascal Bérubé
parce que, de toute évidence, dernièrement, ça a été un peu plus tendu. Mais je
me dis que c'est quand même important de laisser place aux nouveaux. Imaginez
l'histoire du Québec sans l'apparition du Parti québécois. Non, mais c'est important. Et Mme Marois, toujours
remplie de sagesse, parle de pouvoir gouverner. Lorsqu'on regarde
ailleurs dans le monde, c'est très difficile, lorsqu'ils ont modifié leur mode
de scrutin, d'avoir un gouvernement majoritaire.
C'est très souvent des gouvernements minoritaires. Imaginez lorsqu'on est dans
l'incapacité, et je cite, d'agir. En
pleine turbulence économique et sociale, c'est important d'avoir les coudées
franches ou, pour reprendre une expression tellement célèbre, les deux
mains sur le volant!
Je peux
toujours compter sur le ministre délégué à la Transformation numérique pour
être mon meilleur public en cette
Chambre. Alors, merci. Mais c'est... Ah! Merci pour le petit coeur. C'est
dommage qu'on ne peut pas voir tout ça, mais il y a quand même ici une
belle camaraderie, j'aimerais le souligner, Mme la Présidente.
Mais, de
façon très sérieuse, c'est important d'être... aussi avoir les coudées
franches. Ici, je trouve qu'il y a quelque chose qui est en train de
nous échapper. Moi, je comprends parfaitement l'objectif, avoir une plus grande
participation citoyenne. C'est vrai que
lorsqu'on regarde dans les dernières années, le taux de participation... bon, à
part 2014, ça a été vraiment plus élevé, mais 2018, ça a été ma première
campagne électorale au Québec, provinciale, et le taux de participation était 68 %, si ma mémoire est bonne? Je
regarde la ministre. Oui. Plus ou moins. Donc, c'est quand même un Québécois
sur trois, presque, environ, si vous me permettez d'arrondir, qui est
resté à la maison. Ça, ça me préoccupe.
Mais, vous
voyez, Bernard Drainville, sage homme avec un excellent flair politique, lui,
il s'est attaqué directement à un enjeu. Il dit : Les jeunes votent moins.
Qu'est-ce que je peux faire concrètement pour dire aux jeunes que c'est important
d'aller voter? Puis, si vous n'allez pas au bureau de vote, bien, on va faire
comme avec la montagne : si vous n'êtes pas capable de vous rendre à la
montagne, bien, la montagne va se rendre à vous sur les campus. Ça, c'est
vraiment une mesure spécifique qui a
permis... Et je reprends les chiffres, là, un demi-million, là. Ça visait un
demi-million de citoyens, jeunes, en
plus, que malheureusement, des fois, leur taux de participation est moins élevé
que la population générale. Et ça, on devait le corriger. Alors, ça,
c'est une... je trouve que c'est très, très spécifique comme action.
D'autre part,
je me demande pourquoi qu'on n'a pas examiné d'autres avenues. Est-ce que c'est
par manque de temps? Bien, je
comprends qu'on veut des fois aller vite. Et je me pose sincèrement la question :
Une fois qu'on s'est arrêté sur une
solution, pourquoi qu'on ne va pas réellement
à un référendum? Et, pour faire un référendum, il faut encore respecter
la loi sur le référendum. On ne peut pas tenir un référendum en même temps
qu'une élection générale.
Imaginez,
quand j'ai demandé au ministre de
l'Éducation la possibilité de tenir
des élections municipales avec les
élections scolaires, c'était un : Non,
non, non, on n'est pas capables de faire deux affaires en même temps, on va
carrément, même,
les abolir. Et, même pour les élections anglophones, quand j'ai demandé que ce
soit — parce
que, vous savez, pour les élections
anglophones, c'est maintenu — en même temps, municipal et élections
scolaires anglophones, la réponse était encore : Non, non, non, on
n'est pas capables de faire deux affaires en même temps.
Alors,
imaginez une question aussi importante, en pleine campagne électorale, où on ne
peut même pas nous-mêmes, les
députés, en débattre. Pour moi, il m'appert ici que ce n'est pas une véritable
consultation. Il faudrait que cette consultation se fasse à un moment
autre que la campagne électorale. Et là on aurait le vrai pouls.
Et
c'est aussi important de faire ce que Mme Marois faisait : beaucoup
de pédagogie, expliquer et vulgariser afin que, lorsque les gens se rendent aux urnes pour voter, ce soit fait en
toute connaissance de cause. Parce qu'un consentement doit être vraiment
libre et éclairé. Et, pour l'obtenir, encore faut-il comprendre toutes les
nuances.
Alors,
parlons-en, des nuances. Je suis une députée de Montréal, le magnifique comté
de Saint-Laurent. Vous savez, ville Saint-Laurent, c'est deux comtés. Il
y a ma chère collègue, estimée collègue, la députée d'Acadie, qui représente environ l'autre moitié de ville Saint-Laurent.
Bon, je ne vous dirai pas qui est la meilleure des deux, hein, quand même. On
est ex aequo. Mais vous savez quoi? Les gens à Saint-Laurent, ils savent que la
députée de l'Acadie, c'est leur députée. Mais
ils savent aussi que moi, là, je représente mon territoire, l'autre partie de
ville Saint-Laurent. Donc, vous prenez la 15, d'un côté, à l'est, c'est Acadie, à l'ouest, avec le technoparc, c'est
moi. Donc, un député, Mme la Présidente, est rattaché à sa population
mais aussi à son territoire.
J'ai
aussi le magnifique bonheur d'avoir d'autres collègues sur l'île de Montréal.
Nous sommes 27, avec deux caquistes. Il
ne faut jamais l'oublier. Des fois, même eux l'oublient, mais nous, on est là
pour leur rappeler. Alors, imaginez, nous sommes 27 pour représenter 1,3 million de citoyens. Et, avec la
réforme, lorsque je regarde les projections... Qui ne viennent pas de
moi, hein? Vous savez, le Secrétariat à l'accès à l'information et à la réforme
des institutions démocratiques du Québec a
préparé un tableau, un estimé. Quelles sont les projections si jamais,
d'aventure, le projet de loi était sanctionné et rentrait en vigueur? Eh bien, nous passerons, Mme la Présidente, de
27 députés à 16 sièges de circonscription. Donc, vous savez comment c'est découpé, donc, moi,
Saint-Laurent, qui qu'on choisit? Moi ou Christine? Le choix va être difficile,
hein? Je vous vois sourire, qu'est-ce que
vous préféreriez? La blonde ou la brune? Hum! La brune? Merci. Bien, vous
savez, ce ne sera pas comme ça que ça
va se décider. Je vois la députée de Vaudreuil, elle préférerait qu'on garde
les blondes, mais moi, dans mon
caucus libéral, je suis en minorité, et c'est vraiment un caucus avec beaucoup,
beaucoup de blondes. Alors, j'espère
que je serais celle qui serait conservée, advenant le cas qu'on devra fusionner
la magnifique ville de Saint-Laurent, les
deux comtés en un. J'espère qu'on va me garder pour la dernière brune. Alors,
ça, ce n'est quand même pas la dernière des Mohicans, mais la dernière
brune, quand même, c'est important.
Alors,
Mme la Présidente, imaginez, on passe de 27 à 16, de comtés, donc, de
circonscription, mais on aurait ce qu'on appelle les députés de liste. Est-ce qu'un député de liste, c'est comme,
au fond, des célébrités? Parce que, quand même... C'est comme la ligue des stars, ceux qui ne sont
pas attachés à un comté, sont attachés, au fond, au chef. Donc, plus que
le chef vous aime, plus il va vous mettre
sur la liste, j'imagine? J'espère que je vais être attachée à un comté, là,
parce que c'est important. Mais un
député de liste, pour l'île de Montréal, il y en aurait huit, et les huit au
même pied d'égalité pour représenter
l'entièreté de l'île de Montréal. Ça inclut l'île des Soeurs, là. Ça en fait,
du monde. Mais moi, je me pose la question.
Si jamais moi, je suis la députée de Saint-Laurent, qui pensez-vous que le
citoyen va appeler? Le député de liste qui va toujours à la télévision
ou la députée de Saint-Laurent qui est toujours prise à son bureau? Ouais.
Est-ce que le député de liste aura le temps
de s'occuper de 1,3 million de personnes à l'île de Montréal ou il va être
trop occupé parce que c'est un député de liste, un député prestigieux? Est-ce
que le député de liste aura les mêmes obligations que le député d'un comté? En fait, son bureau va être où? Est-ce
qu'il va être au centre-ville de Montréal? Je comprends que les tours
commencent à avoir besoin d'amour. J'espère que vous aurez l'occasion
d'ailleurs de pouvoir remédier à la situation névralgique au centre-ville de Montréal, parce que, sinon, il va falloir
vraiment qu'on occupe plusieurs tours avec les députés de liste, là. On
pourra les mettre là, je vois que le député de La Peltrie est d'accord.
Mais,
imaginez, là, moi, je parle de Montréal, allons faire un tour en Abitibi, Mme
la Présidente. Bon, moi, je suis allée une fois en Abitibi, c'était pour
un match de basketball, ça m'a pris sept heures à m'y rendre avec toute
l'équipe. Puis, pire que ça, c'est qu'on a
perdu par un point, mais c'est à cause du coach qui m'a fait «bencher» à la
dernière minute. C'est de sa faute.
Donc, le chemin du retour, il a été long longtemps, là, je peux vous le dire.
Par contre, je sais une chose, nous,
on est arrivés... Puis on n'a pas fait toute l'Abitibi, là, c'est grand. En ce
moment, il y a trois comtés. Selon ce qui est proposé, on tomberait avec deux comtés. Donc, on n'est plus trois
députés rattachés à un comté, trois députés rattachés à leur propre population, on a deux députés pour un
immense territoire et une grande population. Et évidemment le superdéputé
de liste que, lui, on ne sait pas ce qu'il
va faire, mais il va être responsable de cette région-là. Je me demande comment
le citoyen là-dedans est gagnant.
• (17 h 40) •
En ce moment, là,
dans les députés qui sont plus en région, les règles de fonctionnement leur
permettent d'avoir deux bureaux, donc un
bureau principal puis le bureau satellite. Ça, c'est pour démontrer, là, à quel
point que l'Assemblée nationale
reconnaît l'étendue du territoire, mais reconnaît aussi qu'un député doit être
en mesure de se présenter physiquement dans un bureau, rencontrer ses citoyens,
son monde. Puis, son monde, là, eux, c'est leur député, puis ils sont fiers de
dire : Moi, mon député, je lui ai parlé
de mon problème. Puis savez-vous quoi? Il s'est levé en Chambre. Comme cette
semaine, le député des Îles qui nous a raconté une histoire vraiment
tragique par rapport à un couple qui a eu un accident d'auto, puis qui n'a pas eu le soutien nécessaire, puis
qui s'est fait traiter comme des parias du Québec. Alors, ça, c'est
important d'être des députés qui
représentent leur population. Parce qu'un député de liste, moi, je fais le pari
suivant, Mme la Présidente, il sera peut-être rattaché à une liste, mais il ne sera pas
rattaché à une population puis à un territoire. Il n'aura peut-être
pas le même souci qu'un député de comté. Et je dis «peut-être».
Je
vois mon collègue, estimé collègue, il le sait. Des fois, il faut reconnaître
que, oui, c'est important de changer les choses, mais, si on veut faire quelque chose d'aussi important, la
consultation est de mise. Une consultation et un référendum dans ce que
c'est, je crois que c'est plus que souhaité, c'est primordial, une vraie
consultation.
Et je vais laisser la question en suspens, je
nous invite à réfléchir : Est-ce que c'est un type de projet de loi qui
nécessite que nous votions à l'unanimité? Peut-être pas, peut-être que c'est
souhaitable. Et je crois sincèrement que, si Bernard
Drainville a réussi à avoir l'unanimité, c'est parce
que tout le monde savait que c'était
utile. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Merci, Mme la députée. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Comme il n'y a
pas d'autre intervention, nous allons procéder au vote.
Et je constate qu'il manque des formations
politiques, donc nous allons suspendre quelques instants.
(Suspension de la séance à 17 h 43)
(Reprise à 17 h 47)
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Donc, nous allons reprendre. Nous
étions rendus pour voter. M. le député... M. le leader du
gouvernement, ça va? Tout est correct, tout va bien?
M.
Caire : Ah! Oui,
oui. «Top shape», Mme la Présidente. Je suis prêt, je suis prêt.
Mise aux voix
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : O.K. Merci. Alors, en application de l'ordre spécial, j'inviterais
maintenant les leaders parlementaires à m'indiquer le vote de leurs
groupes sur l'adoption du principe du projet de loi n° 39, Loi
établissant un nouveau mode de scrutin. M. le leader du gouvernement?
M.
Caire : Pour.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
M. le leader de l'opposition officielle?
M. Tanguay : Contre.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Mme la députée de Sherbrooke?
Mme Labrie : Pour.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) : M.
le leader du troisième groupe d'opposition?
M. Ouellet : Pour.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : M. le leader du gouvernement, vous avez à nous donner le vote du
député de Chomedey?
M.
Caire : Oui, Mme la
Présidente. M. le député de Chomedey nous a indiqué qu'il votait contre.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Et Mme la députée de Marie-Victorin?
M.
Caire : Mme la
députée de Marie-Victorin nous a indiqué qu'elle votait pour.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Donc, je vous remercie. En conséquence, le principe du projet de loi n° 39 est adopté.
M. le leader du gouvernement, pour les
indications pour la suite.
Renvoi à la Commission des institutions
M.
Caire : Oui, merci, Mme la Présidente. Donc,
conformément à l'article 243 de notre règlement, je fais motion afin que le projet de loi n° 39, Loi établissant un nouveau mode de scrutin, soit déféré à la Commission des institutions
pour son étude détaillée.
Mise aux voix
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci. En application de l'ordre spécial, nous allons faire le même
exercice. J'invite les leaders parlementaires à m'indiquer le vote de
leurs groupes sur la motion. M. le leader du gouvernement?
M.
Caire :
Pour.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
M. le leader de l'opposition officielle?
M. Tanguay : Pour.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Mme la députée de Sherbrooke?
Mme Labrie : Pour.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Merci. M. le leader du troisième groupe d'opposition?
M. Ouellet : Pour.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Je vous remercie. En conséquence, la motion est adoptée. M. le leader du
gouvernement.
M.
Caire :
Pourriez-vous appeler l'article 18, Mme la Présidente, s'il vous plaît?
Projet de loi n° 44
Reprise du débat sur l'adoption
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Bien sûr. Donc, à l'article 18 du feuilleton, l'Assemblée reprend le débat
ajourné le 7 octobre 2020 sur
l'adoption du principe... sur l'adoption du projet de loi n° 44, Loi visant principalement la gouvernance efficace de la lutte contre les
changements climatiques et à favoriser l'électrification. Y a-t-il des interventions sur ce projet
de loi? M. le leader de l'opposition officielle, la parole est à vous.
M. Marc Tanguay
M. Tanguay : Le député
de LaFontaine. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Mon rôle a changé.
Alors, sur le projet de loi n° 44, nous en
sommes donc, et je suis très heureux de m'inscrire dans le débat, quant à l'adoption finale du projet de loi n° 44. Évidemment, c'est un projet de loi qui a pour titre Loi visant principalement
la gouvernance efficace de la lutte contre les changements climatiques
et à favoriser l'électrification.
• (17 h 50) •
Mme la Présidente, vous ne serez probablement pas surprise de voir que, suite aux débats,
aux nombreux débats... Puis j'ai même
la liste ici, là, des débats qui ont eu lieu lors de l'article par article, une
liste assez longue des amendements qui ont été proposés par tous les partis
d'opposition, notamment le Parti libéral du Québec, l'opposition officielle,
qui visaient à renforcer le projet de loi, qui visaient à assurer que le mot «lutte», dans le titre du projet de loi, veuille dire quelque chose.
Bien, il y a eu énormément d'amendements. Certains ont été adoptés, mais beaucoup trop
d'amendements ont été rejetés, des
amendements qui venaient faire en sorte que le projet de loi aurait été
bonifié. Alors, vous ne serez pas surprise qu'à la fin, au final, nous n'allons pas voter en faveur du projet de
loi n° 44. Et je vous dirais que ça participe, entre
autres, de la nature même du gouvernement qui propose le projet de loi.
Alors, quand
on parle d'environnement, vous allez me permettre, avant d'aborder
deux aspects, si le temps le permet, deux aspects du projet de loi,
j'aimerais ça que l'on regarde ensemble un peu d'où vient la Coalition avenir
Québec.
La CAQ a mis,
en environnement, la barre très haute. On sait que ça n'a pas été un enjeu
durant l'élection pour la CAQ... pas
que ça a été un enjeu, je vais rephraser ce que je viens de dire, ça n'a pas
été un chapitre assez volumineux de la plateforme
électorale de la CAQ que la lutte aux changements
climatiques. Je vais dire ça comme
ça. Je pense que c'est plus exact. Ça
a été, par contre, un enjeu électoral. Mais force est de constater
que, suite à l'élection, suite.. surtout la dernière semaine de la campagne, tout le monde... si certains avaient des doutes, dont la CAQ, que l'environnement,
c'était un enjeu central, plus personne ne l'avait au lendemain de
l'élection, plus personne ne l'avait.
Alors, évidemment,
la barre a été mise, entre autres, et traduite dans un article
du Devoir d'Alexandre Shields, du 20 avril 2019, où le premier ministre, on peut lire l'article, insiste sur l'importance de «relever un grand
défi». Et là il citait le premier ministre : «La survie de notre planète est en jeu, et je ne
peux pas ignorer ce défi de l'urgence climatique et continuer de regarder mes deux fils dans les yeux. L'audace
dans ce domaine consiste à regarder la réalité en face, à nous retrousser
les manches malgré l'ampleur colossale du
défi qu'on a devant nous.» Fin de la citation. Ça, c'était le premier ministre dans Le Devoir, l'article du
20 avril 2019.
Le ministre de l'Environnement a évidemment
ajouté à cette affirmation-là, et je le cite : «Comme nous nous y sommes engagés dans le budget, nous présenterons,
dans les prochains mois, un plan détaillé de lutte contre les changements
climatiques qui démontrera l'importance que
nous accordons à la question et comment nous envisageons de prioriser ainsi
que d'orienter nos actions dans les prochaines années.» Fin de la citation. Ça,
c'est l'affirmation. Ça, c'est la barre que la CAQ met très haute en matière
d'environnement. On ne peut pas avoir affirmation, parole plus claire que ça.
Il y en a même
un, évidemment, qui est tombé, je vous dirais, pas dans le piège, parce que je
pourrais peut-être être dérogatoire, mais qui est tombé... qui a cru,
évidemment, de bonne foi ce qui avait été dit, c'est Dominic Champage. Dominic Champagne faisait même partie... Et là j'ai un
article du Devoir toujours, cette fois-ci sous la plume de Marco
Bélair-Cirino, Dominic Champagne, article du 23 mai 2019, où...
sûrement que mes collègues, en face, de la Coalition avenir Québec, ils ont dû le croiser sur le plancher de leurs
délibérations du week-end à ce moment-là, en mai 2019, où il faisait
partie des militants, imaginez-vous donc, Mme la Présidence : «...dont
certains portent la signature de nouveaux membres écolos de la formation
politique», comme Dominic Champagne avait pris sa carte de membre de la
Coalition avenir Québec, croyait à ce
qu'avait dit le premier ministre, croyait à ce qu'avait dit le ministre de
l'Environnement et faisait... Je
continue à citer l'article : «Le metteur en scène Dominic Champagne et le directeur général pour le Québec et l'Atlantique
de la Fondation David-Suzuki, Karel Mayrand,
s'adresseront tour à tour aux militants caquistes avant l'amorce du débat
en plénière dans un hôtel du centre-ville de
Montréal samedi. Ils tenteront de les "convaincre de l'urgence d'agir" — ça, c'est
entre guillemets — pour une
transition écologique.» Barre très haute. Dominic Champagne, les gens de la
fondation Suzuki ont dit : Aïe! on embarque, c'est trop important.
Désenchantement,
Mme la Présidente. Je ne sais pas si «climatosceptique» va un jour devenir un
terme interdit, mais, pour l'instant,
il ne l'est pas. On disait dans le titre de cet article-là, qui traduit le
désenchantement de ces écologistes, de ces
militants... pour que l'on puisse réellement donner suite à l'affirmation de
principe du premier ministre puis du ministre de l'Environnement. Eux y ont cru, mais eux ont été désenchantés, comme
disait la chanson. En septembre 2019, le 21 : «...Dominic
Champagne doute maintenant que le premier ministre croit réellement aux
changements climatiques.» Et, en ce sens-là,
il parlait même que... «Le premier ministre agit comme un climatosceptique,
croit Dominic Champagne.» Je ne suis
pas en train de vous dire que je porte foi à ce qu'il dit là, mais, quand il se
questionne, et c'est surtout comme ça que
je le prends, quand il se questionne, au-delà... Et mon propos n'est pas de
prêter de mauvaises intentions, c'est... Quand il se questionne, ce
questionnement-là découle des gestes, des actions au-delà des bonnes paroles.
Et les gestes, les actions au-delà des bonnes
paroles, allons voir l'étalon de mesure, qui est le projet de loi n° 44. Le projet de loi n° 44, Mme la Présidente, premier écueil de deux, j'aurai juste le temps de
vous en soulever deux, on vient éliminer
Transition énergétique Québec. Transition énergétique Québec, Mme la
Présidente, est un organisme qui avait fait ses preuves, un organisme,
et ce fut soulevé par plusieurs groupes entendus en commission parlementaire...
Transition énergétique Québec, c'est le TEQ,
T-E-Q. TEQ représente tout près de 65 % des réductions des gaz à effet de
serre au Québec, et ce, avec seulement 18 % du budget du Fonds
vert.
Ça faisait
même dire à l'Institut sur la gouvernance d'organisations privées et publiques,
l'IGOPP, ça leur faisait dire, Mme la
Présidente, et je cite un article, une lettre d'opinion signée par Yvan Allaire
et Michel Nadeau, 30 janvier 2020, ce qui suit : Ce
projet de loi — ils
parlent du projet de loi n° 44 — la
mesure... «...ce projet de loi comporte la mesure discutable, voire douteuse, d'intégrer au ministère une pléthore de
programmes et de mesures spécifiques visant l'atteinte de cibles énergétiques, un rôle actuellement assumé par la société d'État Transition
énergétique Québec. Or, cet organisme gère
depuis près de trois ans avec souplesse, transparence et imputabilité des
dizaines d'initiatives; l'organisme assume la coordination sous une même administration des services et des programmes
reliés à différents volets de la
transition énergétique...»
Et, Mme la
Présidente, il poursuivait : «Comme le montre l'étude récente de
l'IGOPP — ça,
c'est l'institut — sur la
gouvernance des sociétés d'État, TEQ se
classe dans le peloton de tête — huitième rang — des sociétés d'État et organismes québécois en matière de gouvernance. TEQ est à
réaliser son plan directeur 2018-2023, lequel fut préparé en concertation
avec toutes les parties prenantes, ce qui
est précisément le rôle et l'avantage d'une société d'État. Le rôle du ministre
et du ministère consiste à établir
des objectifs précis, des priorités des cibles, les grandes orientations et de
mesurer les résultats obtenus.»
Et là la
prochaine partie, elle est en gras : «Pour bien faire son travail de
planification des efforts du Québec, le ministre doit se concentrer sur l'essentiel : déterminer et gérer
les priorités du Québec dans la lutte contre les changements
climatiques, mais laisser la gestion quotidienne à un organisme comme [le]
TEQ.»
Donc, le fait
de ramener le TEQ de façon unilatérale au sein du ministère de l'Environnement
et avec le Fonds vert du ministère de
l'Énergie et des Ressources naturelles, on vient mettre de côté, Mme la
Présidente, un organisme, Transition énergétique
Québec, qui avait fait ses preuves, et pas les moindres. Je n'ai cité que
l'IGOPP, l'Institut sur la gouvernance d'organisations privées et
publiques, mais d'autres sont venus le dire également, reconnaître de façon
très tangible sur le terrain... Je vous ai
dit : 65 % des résultats ont été atteints par l'action du TEQ avec
18 % du budget du Fonds vert. Et, lorsque
l'on regarde ça, Mme la Présidente, force est de constater que l'on ne peut pas
applaudir le ministre quand il dit : Bien, moi, le TEQ, je vais faire en sorte de ramener ça sous le
ministère de l'Environnement et ainsi détruire ce qui fonctionne bien,
anéantir les efforts qui fonctionnent bien.
Et j'aurai
l'occasion, Mme la Présidente, si je n'ai pas l'occasion de terminer
maintenant, parce qu'on va bientôt arriver à 18 heures, de soulever également
qu'ici... Nouveau plan vert du Québec : «complètement insuffisant».
Même le plan qui a été déposé... Il y
a deux aspects qui ont été déposés, le plan pour une économie verte et un plan
de mise en oeuvre. Même là les experts ont des doutes très sérieux, et,
selon leur propre analyse, on va manquer la cible. Autre élément... Donc, mauvaise idée de faire en sorte que Transition énergétique Québec soit complètement anéantie et mise sous le ministère de l'Environnement.
Deuxième élément du projet de loi dont je veux
vous parler, c'est la perte de pouvoir de la Régie de l'énergie. La Régie
de l'énergie, Mme la Présidente, on retire la révision de l'efficacité des mesures en matière énergétique, on vient limiter le chien de garde
indépendant.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Alors, merci, M. le député de LaFontaine. Compte tenu de l'heure, je vais suspendre les travaux quelques instants pour
permettre la désinfection des places, pour ensuite prendre les débats de fin
de séance.
Alors, je suspends les travaux
quelques instants.
(Suspension de la séance à 18 heures)
(Reprise à 18 h 5)
Débats de fin de séance
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Donc, nous allons procéder aux débats de fin de séance. Tel qu'annoncé précédemment, le premier débat portera sur une
question adressée par M. le député de D'Arcy-McGee au ministre délégué à la Transformation numérique, en remplacement du
ministre de la Santé et des Services sociaux, concernant l'impact de la
pandémie de COVID-19 sur la santé mentale des Québécois.
Je vous
rappelle que, conformément à l'article 310 du règlement, le député qui a
soulevé le débat et le ministre qui lui
répond ont chacun un temps de parole de cinq minutes, et ensuite le député aura
droit à une réplique de deux minutes.
M. le député de D'Arcy-McGee, je vous laisse la
parole pour une durée de cinq minutes.
Impact de la pandémie de
COVID-19 sur la santé mentale
M. David Birnbaum
M. Birnbaum :
Merci, Mme la Présidente. Chaque matin, on se lève avec d'autres indications
d'un écho de cette pandémie terrible
qui nous confirment l'étendue d'une crise émergente de santé mentale, une crise
qui touche nos jeunes, qui touche nos
aînés, qui touche nos familles. Il y a des études déjà qui démontrent une
croissance de 20 % dans les demandes des ordonnances pour les antidépresseurs. Il y a une étude toute récente
qui suggère qu'un adulte sur cinq souffre de l'anxiété et/ou dépression.
Nous sommes, comme formation de l'opposition officielle, à la recherche d'une
réponse cohérente, réfléchie et sérieuse du
gouvernement de la CAQ qui est à la taille de cette crise. Le premier ministre
lui-même a commencé cette semaine,
suite à plusieurs interventions, ah oui! à constater qu'il y a un problème
d'une certaine ampleur en ce qui a
trait à notre santé mentale collective. Ce n'est pas rien, ce n'est pas rien,
et ça nous touche, et ça exige des réponses sérieuses, comme je dis,
réfléchies, conséquentes et chiffrées.
Nous avons...
Moi, j'ai en main 43 lettres de l'Ordre des psychologues du Québec,
l'Ordre des travailleurs sociaux, l'ordre des pédiatres, les experts qui
nous ont écrit avec leurs préoccupations en ce qui a trait à la santé mentale.
La plupart des lettres appuyaient notre demande, de toute évidence, qui tombait
dans les oreilles sourdes du gouvernement, d'inviter
la Commission de la santé et des
services sociaux à se saisir d'un
mandat d'initiative, une enquête sur la santé mentale pour qu'on puisse entendre les experts. Ces
43 lettres avaient des exemples déchirants et documentés qui parlaient de
l'étendue de la crise devant nous et qui offraient des solutions.
Bon, Mme la
Présidente, comme tout au long de cette pandémie, nous prenons très au sérieux,
en opposition officielle, nos
responsabilités d'être impliqués, rigoureux et actifs dans nos propositions.
Donc, on a donné suite à cette obligation, comme on fait chaque semaine et chaque jour, ce matin, en faisant une
proposition claire, et structurante, et implémentable dans un court délai, c'est-à-dire une proposition
d'une couverture publique de la psychothérapie au Québec. On parle de rendre une seule vitesse de disponible pour l'aide
aux gens qui souffrent actuellement, c'est-à-dire qui souffrent des problèmes
d'anxiété, dépression. Actuellement, il y a
des délais qui sont triplés depuis le début de la pandémie et il y a deux
vitesses. Il y a des gens avec
certains moyens qui peuvent avoir recours à un psychothérapeute certifié en
privé ou qui sont assez chanceux pour être assurés pour le faire. Les
autres Québécoises et Québécois n'ont pas cet accès-là. Nous, on propose de mettre fin à ce problème-là, et dans un court
délai, et en pérennité. La CAQ, lors d'une motion, aujourd'hui, là-dessus, a donné le revers de la main à cette solution-là.
On veut être
clairs. On veut être clairs, on parle d'une solution structurante, et en
pérennité, et, oui, qui coûte cher, ça
va coûter 300 millions de
dollars. Est-ce que ça va s'adresser de façon efficace, compatissante et
sérieuse aux gens qui souffrent dans
chaque région du Québec? Oui. Est-ce
que le gouvernement, s'il a été
disposé, peut agir vite? Oui. C'est basé sur des programmes très
probants en Angleterre, en Nouvelle-Zélande, et ça a été bâti sur un programme
que notre gouvernement a mis en place, que ce gouvernement a décidé de mettre
sur la tablette.
Alors là, on
a une proposition devant nous, de toute évidence à fin de non-recevoir, mais
voilà une autre chance de changer la
donne, qui va donner de l'aide aux Québécois et Québécoises, ils le méritent, et qu'on agisse maintenant
pour le faire.
• (18 h 10) •
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Merci, M. le député de D'Arcy-McGee. Maintenant, je cède la parole à M. le ministre de la Transformation numérique, en remplacement au ministre de la Santé et des Services... délégué
Santé et Services sociaux. Allez-y, la parole est à vous.
M. Éric Caire
M.
Caire : Oui. Merci, Mme la Présidente. Mme la Présidente, je pense que je ne surprendrai personne en disant qu'on est présentement dans une lutte à la
pandémie, qui amène une réalité qui est complètement différente de celle que
l'on connaît, très certainement, et potentiellement que l'on ne connaîtra
jamais.
J'ai
écouté attentivement mon collègue de D'Arcy-McGee. D'ailleurs, je trouve ça intéressant de voir
que, maintenant qu'on est dans l'opposition, on foisonne de
bonnes idées. J'ai surtout écouté la proposition et j'ai écouté le montant :
300 millions de dollars.
D'abord, Mme la Présidente, permettez-moi de mettre en doute les calculs qui
ont été faits par l'opposition officielle. Je pense que le montant de la proposition que
les collègues font est substantiellement beaucoup plus élevé que les 300 millions de dollars annoncés. Donc, ça, première remarque, ce serait très intéressant d'avoir une
discussion sur ce fameux 300 millions, parce qu'il m'apparaît être
nettement sous-évalué.
Ceci étant
dit, Mme la Présidente, le gouvernement n'est pas resté les bras croisés, là. À écouter
mes collègues de l'opposition,
on croirait que le gouvernement n'est pas conscient que la pandémie amène une
réalité, une réalité qui est difficile,
une réalité qui peut amener, effectivement, des difficultés, des problèmes de santé mentale
et qui peut exacerber ces problèmes-là chez les gens qui étaient déjà en
situation de problèmes de santé mentale.
C'est la
raison pour laquelle on a déposé un plan. Puis ça, je sais que les collègues de
l'opposition n'aiment pas le dire et/ou en parler, mais, oui, le gouvernement du Québec a déposé
un plan pour lutter contre les problèmes de santé mentale, y faire face, un plan qui a été
accompagné d'un budget de 31 millions, soit
dit en passant, ce qui amène
250 ressources supplémentaires. Le gouvernement du Québec a mis en
place aussi des outils pour aider les gens, notamment sur le site Québec.ca. Le
gouvernement du Québec a renforcé le service de la ligne 8-1-1, avec des
temps de réponse qui sont significativement réduits et qui permettent, et qui
permettent de rejoindre les Québécois qui auraient besoin de ce soutien-là. Le gouvernement du Québec a aussi fait
un suivi chez les gens qui avaient déjà, comme je l'ai manifesté et comme je l'ai dit précédemment, qui avaient déjà été
identifiés comme étant à risque au
niveau de la santé mentale. On a quand même rejoint 325 000 personnes
pour faire le suivi.
Alors, Mme la
Présidente, moi, quand j'entends mon collègue nous parler de l'improvisation, nous parler du fait que le gouvernement
reste les bras croisés, ça, je veux dire, j'ai beaucoup, beaucoup, beaucoup de difficulté.
Mme la Présidente, le Québec lutte contre une pandémie, la planète lutte
contre une pandémie. Et moi, je veux bien, là, je veux bien qu'on est dans un forum politique
et je veux bien qu'on a des échanges qui se veulent politiques,
mais, à un moment donné, on a une responsabilité aussi comme
élus, là. On a une responsabilité comme élus, qu'on soit au gouvernement, qu'on soit à l'opposition, on a une responsabilité de regarder l'objectif commun, qui est de
lutter contre cette pandémie et d'y travailler ensemble.
Et, quand je
vois mes collègues, je vais faire attention à mes propos, Mme la Présidente, mais, quand je vois les collègues dépeindre des situations qui
sont peut-être beaucoup plus noires que ce qu'elles sont véritablement, avec
des objectifs très personnels, personnels à
leur formation politique, personnels à l'avancement de leurs idées, bien
là je me pose des questions. Être un élu, c'est avoir une
responsabilité.
Et j'en veux
pour preuve, Mme la Présidente, puis ça, le collègue ne l'a pas mentionné,
des usagers en attente de soins : diminution de 21 % pendant la pandémie. 21 % de
diminution des temps d'attente. Je n'ai pas entendu le collègue parler de ça. Je n'ai pas entendu le collègue
parler de l'argent qui a été investi. Je n'ai pas entendu le collègue parler
des différents moyens qui ont été mis en place.
J'entends mon collègue, qui, maintenant qu'il est
dans l'opposition, trouve que d'avoir un service public universel, ça devient la panacée, mais, alors qu'il était au gouvernement, moi, je n'ai pas entendu l'ombre du début du commencement de ça. Puis je pourrais lui en parler longtemps. Puis
j'aurai certainement l'occasion de le faire avec le collègue de Viau,
qui va nous parler des problèmes de santé mentale chez les jeunes, si j'ai bien
compris. Puis je vais avoir beaucoup, beaucoup, beaucoup de choses à lui
dire sur le legs politique...
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Alors, M. le ministre, vous allez continuer tantôt, parce que
votre temps de parole est écoulé. M. le député, votre droit de réplique.
M. David Birnbaum (réplique)
M. Birnbaum : Merci, Mme
la Présidente. Bon, dans un premier
temps, ça me déçoit de ne pas être en mesure d'avoir des réponses du
ministre responsable. Tant mieux.
Je veux
parler de notre proposition. Le premier
ministre nous invite de mettre des
choses concrètes de l'avant, on n'avait pas besoin de sa permission pour le
faire, c'est pleinement dans notre façon de faire. Nous sommes à la recherche,
Mme la Présidente, depuis la première vague, de gestes structurants et clairs. En voilà une, une
proposition qui va assurer que les
gens en détresse, peu importent leurs revenus, leurs circonstances, vont avoir
de l'aide. Ils n'auraient pas à avoir à
attendre pour un médecin, pour une référence, des psychothérapeutes et d'autres
qui ont les qualifications vont répondre immédiatement. Oui, ça va coûter 300 millions de dollars. C'est
basé sur des exemples probants dans deux pays : Angleterre puis
Nouvelle-Zélande.
Le député de La Peltrie a ses doutes. «Get to work! Get to work, do some homework! We've been
waiting for months.» Nous attendons des
études probantes, l'opportunité pour les experts de s'intervenir, une
transparence. Un système, un plan
d'action, en voilà un. En voilà un qui va mettre à l'oeuvre une offre
universelle publique aux gens en grande détresse. Le gouvernement a une responsabilité d'en agir.
Pas avec un numéro 1-800, des coups de téléphone qui sont répondus par
quelqu'un, qui vont faire du triage. Il faut un programme désigné, ambitieux,
audacieux, et en voilà un.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Merci, M. le député. Donc, nous allons maintenant procéder au deuxième débat, qui portera sur une question adressée par
M. le député de Viau au ministre délégué à la Transformation numérique, en remplacement du premier ministre et responsable
des dossiers jeunesse, concernant l'impact de la pandémie de COVID-19 sur la santé mentale des jeunes. M.
le député de Viau, la parole est à vous.
Impact
de la pandémie de COVID-19 sur la santé mentale des jeunes
M. Frantz Benjamin
M. Benjamin : Merci. Merci,
Mme la Présidente. Mme la Présidente, dans un premier temps, j'aimerais peut-être rappeler au ministre de la Stratégie numérique qu'il
n'est ici question du député de Viau ni non plus du Parti libéral du Québec,
il est question des jeunes du Québec. C'est de cela dont il
s'agit. Et je dois commencer par déplorer, Mme la Présidente,
que le ministre de la Santé et Services sociaux ne soit pas là pour répondre
à...
Une voix : ...
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Oui, tout à fait, je...
M. Benjamin : Merci pour le
rappel...
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Bon, merci. Vous comprenez le règlement. Merci.
M. Benjamin : Mme la
Présidente, démotivés, démoralisés,
désabusés, c'est comme ça, c'est par ces mots que j'ai commencé, ce matin, ma question
au premier ministre, qui est en même temps... bien sûr,
c'est notre premier ministre à nous
toutes et à nous tous, mais c'est aussi le responsable des dossiers jeunesse.
Et, à ce que je sache, il n'a pas démissionné de ses responsabilités comme responsable des dossiers jeunesse. Alors,
je veux bien qu'on me serve la soupe pour me dire : Écoutez,
concentrons-nous sur la pandémie, mais on peut aussi se concentrer sur les
jeunes Québécoises et les jeunes Québécois dont il est question, de leur santé
mentale.
Et, Mme la Présidente, il n'y a pas une semaine,
il n'y a pas une semaine, depuis les derniers mois, sans qu'on ait vu un article de journal qui nous rappelle, soit les experts,
les organismes qui travaillent auprès de ces jeunes, l'enjeu
de la santé mentale des jeunes et des jeunes
Québécoises. L'angle mort, nous disent les revues de
presse. Et aujourd'hui, Mme la
Présidente, ce que nous avons comme
débat... Parce que je n'ai pas eu... on n'a pas eu d'engagement ferme, parce que, il
va de soi, on parle de la jeunesse québécoise, nous sommes obligés de revenir
pour poser des questions.
• (18 h 20) •
Lorsque, par exemple,
Mme la Présidente, je vous donne comme exemple le
ROCAJQ, le regroupement des organismes communautaires
jeunesse, un organisme qui regroupe 66 membres et qui rejoignent
300 000 jeunes du Québec, qui
a écrit au premier ministre du Québec, et, dans cette lettre envoyée au premier
ministre du Québec, qui est le responsable des dossiers jeunesse, le
ROCAJQ lui rappelle ceci : «...notre constat depuis le début de cette
crise est à quel point les jeunes — de 12 à 29 ans — sont exclus, jusqu'à maintenant, des mesures
de soutien[...]. [Nous tenons à] vous sensibiliser à leur réalité, à leur besoin [en matière de santé
mentale]. [...]Les jeunes qui étaient déjà fragilisés le sont encore [davantage].
En cette période stressante, incertaine et
anxiogène, nous sommes inquiets de la santé mentale des jeunes.» Et je veux
déposer, Mme la Présidente, si vous permettez, cette lettre qui a été
envoyée par le ROCAJQ au premier ministre du Québec.
Mme la Présidente, lors des crédits budgétaires,
j'ai moi-même questionné le premier ministre pour lui demander c'était quoi, son engagement pour la santé mentale des jeunes.
On n'a pas eu de réponse. Je suis
revenu à la charge aussi par une question au feuilleton. Et, Mme la
Présidente, j'écoutais le ministre de la Stratégie numérique, c'était véritablement... je ne sais pas si le mot
«cassette» est parlementaire ou est antiparlementaire, mais c'est une véritable
cassette parce que la réponse que
j'ai eue au feuilleton, Mme la Présidente, c'est exactement ce que le ministre
nous disait. Aucun engagement, aucun engagement, donc, pour soutenir les
enjeux de santé mentale des jeunes Québécoises et des jeunes Québécois.
Mme la
Présidente, il n'y a pas si longtemps, le 30 juin dernier, une vingtaine
d'organismes jeunesse, et pas des moindres,
Force Jeunesse, le Regroupement des jeunes chambres de commerce du Québec,
venaient rappeler au gouvernement du
Québec... Et je pourrais faire la liste, Mme la Présidente, ils sont une
vingtaine d'organismes jeunesse qui sont venus rappeler au gouvernement du Québec que les jeunes de 18 à 35 ans
sont peut-être moins à risque d'être victime de la COVID, et j'aimerais bien
que le ministre nous entende, m'écoute, mais force est de constater qu'ils sont
aussi directement concernés par des
conséquences collatérales de la pandémie. J'aimerais déposer aussi cet article,
cette coupure de presse, Mme la Présidente, au sujet de l'avenir des
jeunes Québécois tel que nous l'a dit les organismes jeunesse du Québec.
Et, pour
terminer, Mme la Présidente, il y a aussi cette demande, cette demande qui a
été formulée par Force Jeunesse du
Québec. Force Jeunesse qui vient rappeler que, dans cette pandémie, que, dans
cette pandémie, bien sûr, les premiers à être expulsés du marché du travail, ce
sont les jeunes. Et Force Jeunesse est arrivée avec des propositions concrètes,
notamment au niveau de la Loi sur les
normes du travail, pour soutenir en matière de santé et de sécurité du travail
par rapport à la santé et aux enjeux de santé mentale des jeunes. Là
encore, lettre morte.
Voilà, nous
avons fait une proposition concrète, Mme la Présidente. Et je salue, je
remercie le député de D'Arcy-McGee d'avoir fait cette proposition qui va
soutenir les besoins des jeunes...
Documents déposés
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Est-ce qu'il y
a consentement pour que le député de Viau dépose les deux documents? Il
y a consentement. M. le député de Viau, vous allez devoir les envoyer
électroniquement.
Alors, M. le ministre, je vous cède la parole
pour une durée de cinq minutes.
M. Éric Caire
M.
Caire :
Merci, Mme la Présidente. Bien, je ne sais pas si le terme «cassette» est
parlementaire, mais j'invite le député de Viau à être très attentif,
parce que, dans le message que je vais lui passer, il n'y en aura pas, de
cassette.
Le député de
Viau a commencé son interpellation... pardon, son débat de fin de séance en
disant : Il ne s'agit pas du
député de Viau, il ne s'agit pas du Parti libéral. C'est vrai qu'il ne s'agit
pas du député de Viau, mais, oui, il s'agit du Parti libéral. Et moi, je vais lui raconter l'histoire d'un jeune, d'un
jeune qui avait besoin de services il y a 14 ans de ça, alors qu'on disait : Cet enfant-là, il a un
problème, il a besoin de services, puis qu'on nous disait : Non, non, non,
ça va se corriger, tout va bien
aller, tout va bien aller, pour lequel les parents ont répété, année après
année, jusqu'à la troisième année, où,
enfin, la psychologue de l'école l'a vu, enfin, après trois ans, trois ans
d'efforts. Pour dire quoi? Oui, cet enfant-là a besoin de services et, non, il ne les aura pas à l'école.
Allez au privé. C'est ça qu'il s'est fait dire, cet enfant-là il y a
14 ans. Ce n'était pas le
gouvernement de la CAQ qui était au pouvoir à ce moment-là, Mme la Présidente,
c'était le Parti libéral, c'était le gouvernement libéral qui était là
puis qui nous font des leçons aujourd'hui sur le traitement des jeunes.
Mais je vais
poursuivre parce que ce jeune-là a été en CLSC, hein? Besoin de soins? On va
essayer au CLSC, guichet de santé
mentale. Aïe! Le guichet de santé mentale. La psychologue du CLSC, qu'est-ce
qu'elle lui répond, à ce jeune-là? Malheureusement, je suis limitée à
16 séances avec votre enfant. 16 séances. Mais je peux vous référer
au privé. Ça, Mme la Présidente, c'était il y a 11 ans.
Le même
enfant, l'orthophoniste, qui lui dit : Oui, il a besoin de soins en
orthophonie. Malheureusement, je suis une
demi-journée par semaine à votre école. Je ne peux pas faire de suivi. Allez au
privé. C'est ça qu'il s'est fait répondre, cet enfant-là il y a 11 ans. Qui était au gouvernement, Mme la
Présidente? Les gens qui, aujourd'hui, veulent nous faire des leçons sur
comment traiter les jeunes.
Et là je
pourrais continuer comme ça, mais je vais m'arrêter là parce que des histoires
d'horreur, ce jeune-là et des milliers
de jeunes en ont vécues fois après fois, appel après appel, parce que le
gouvernement libéral ne s'est jamais vraiment préoccupé des jeunes avant
aujourd'hui. Le gouvernement libéral, qui nous arrive avec une
pseudo-proposition de 300 millions,
dont, dans les faits, on pourrait plutôt calculer qu'elle est dans les
milliards, n'avait pas la bonne idée, au moment où il était au gouvernement, de mettre de l'avant cette
proposition-là. C'est le fun, être dans l'opposition, hein, Mme la
Présidente? Parce que, finalement, on a toutes les solutions, on a toutes les
bonnes idées.
Mais qu'est-ce que le gouvernement de la CAQ a
fait avec mon collègue le ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux? D'abord, le portrait de la DPJ.
Je veux juste rappeler à mon collègue que ce qu'on a entendu sur la DPJ, ce
n'était pas le fun, puis ça aussi, c'est un legs libéral. La commission Laurent
est sur pied justement pour être capable de corriger ces problèmes-là qui s'adressent directement aux jeunes. Mon
collègue ministre délégué à la Santé a mis en place le programme Agir
tôt. Pourquoi? Parce que tout le monde s'entend que ce petit bonhomme là, il y
a 15 ans, qui était en troisième année,
aurait dû les avoir, ces services, et même bien avant, parce qu'agir tôt c'est fondamental. Nous, on l'a fait, on l'a
mis en place, le programme. On a financé le programme. Les sommes sont là
pour aider les jeunes, pour être capable de détecter les problèmes à la
base parce que c'est à cette période-là qu'il faut intervenir.
Alors, Mme la Présidente, de voir le député de Viau,
dans un contexte de pandémie, hein... parce que, comprenons-nous bien, là, en plus de ramasser des pots cassés, en plus
d'hériter d'une situation dramatique et pathétique, le gouvernement actuel a aussi à faire face à une pandémie. Ça
non plus, le gouvernement libéral, Mme
la Présidente, la seule pandémie à laquelle ils ont fait face,
c'était plus les questions éthiques puis de corruption qu'il était
question, puis la source de la pandémie, on la connaissait, de cette
pandémie-là, on la connaissait.
Alors, Mme la Présidente, aujourd'hui, de se faire donner des leçons par mon collègue
de Viau, mon collègue de D'Arcy-McGee, qui nous arrivent avec des solutions en disant :
Ça coûtera ce que ça coûtera, alors que le gouvernement est en action, je ne vous dirai pas ce que j'en
pense, Mme la Présidente, mais ce n'est pas très parlementaire.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le ministre. Maintenant, je cède la parole pour votre droit de réplique de
deux minutes.
M. Frantz Benjamin (réplique)
M. Benjamin : Merci,
Mme la Présidente. Et, comme il est question
des jeunes, c'est cela dont il est question
pour moi, Mme la
Présidente, je vais céder la parole à
Danaé Langlois, 15 ans, à travers son cri du coeur en mai dernier :
«Qui pense à nous, à tous les
étudiants qui ont passé leurs années du secondaire dans la peur, le stress,
l'anxiété, l'angoisse, à tous les
étudiants qui se forçaient chaque jour pour aller à l'école car ils n'étaient
pas bons et ne voyaient plus le bout? Qui pense à eux? Qui pense à nous, nous qui sommes laissés à nous-mêmes
avec de longs travaux à faire seuls sans encadrement, sans enseignant pour nous rassurer sur notre avenir
scolaire?
«Je sais, je
sais que la population mondiale qui
est touchée n'est pas juste moi, mais, pendant que le gouvernement et tous les
médecins pensent à notre santé et à la COVID, qui pense à notre bien-être
mental? Qui pense à notre bien-être mental?
À tous les sportifs qui sombrent, chaque jour, dans un monde sans stimulation,
sans équipe, sans adrénaline, sans peut-être la seule chose qui les
rendait bien, souriants, et tout ce qui nous tenait en vie?»
• (18 h 30) •
Alors, je
tiens à dire à Danaé Langlois, aujourd'hui : Le gouvernement a refusé de
vous entendre, mais nous, du côté de l'opposition officielle, nous vous avons entendus. Et c'est pour cette
raison que nous allons continuer. Nous allons encore continuer. Danaé, en votre nom et au nom des nombreux jeunes Québécoises
et Québécois qui ont besoin plus que jamais du soutien nécessaire, pourtant, pour leur
santé mentale, nous allons revenir à la charge. Nous allons
parler en votre nom,
car cette parole, elle est importante. Nous croyons qu'il faut continuer effectivement à parler des enjeux de la COVID, mais à parler aussi des angles morts. Et, parmi ces angles morts, il y a
vous, Danaé, il y a d'autres jeunes dans toutes nos circonscriptions au Québec, dans les 125 circonscriptions, dans toutes
les régions du Québec. Et, pour ces jeunes-là, au nom de ces jeunes-là,
nous allons continuer à parler, à rappeler au gouvernement l'importance, la
nécessité qu'il investisse dans les enjeux de santé mentale pour la population
québécoise. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Je vous remercie, M. le député.
Ajournement
Compte tenu de l'heure, les travaux de l'Assemblée
sont ajournés jusqu'au mardi 20 octobre 2020, à 13 h 40.
(Fin de la séance à 18 h 31)