(Neuf
heures quarante minutes)
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Alors, bon mercredi à tous et toutes. Vous
pouvez prendre place.
Affaires courantes
Déclarations de députés
Et,
comme à l'habitude, nous allons débuter notre séance avec la rubrique des déclarations de députés. Et, sans plus tarder, je cède la parole à
M. le député d'Abitibi-Est.
Souligner l'initiative
Bistro des Écoliers de l'école
Notre-Dame-de-l'Assomption, à Val d'Or
M. Guy Bourgeois
M. Bourgeois : Bonjour, Mme
la Présidente. Je tiens à saluer
l'initiative des élèves de l'école primaire de Vassan en Abitibi-Est. Un
Bistro des Écoliers a été créé afin de développer les compétences
entrepreneuriales et les saines habitudes de
vie dans leur école. Ce nouveau projet vise à cuisiner des repas aux élèves qui
le souhaitent, moyennant une somme de
3 $. Les élèves qui sont mis à
contribution afin de percevoir les sommes, cuisiner les repas et assurer les
services aux tables...
Cette année, trois
journées comme celle-ci sont à l'horaire. Suite à un sondage, les recettes
gagnantes sont cuisinées. Des 22 élèves, 11
cuisinent, 11 assurent le service. Les surplus générés sont redistribués dans
la communauté. Ces élèves prennent conscience de la pauvreté, de la malbouffe,
ils apprennent l'efficacité et l'autonomie. Leur sentiment de fierté et d'appartenance se perçoit dans leurs
témoignages. De plus, ces petits entrepreneurs produiront prochainement
un livre de recettes.
À vous tous, vous
êtes des modèles pour les autres. Félicitations aux élèves, au personnel et aux
parents qui supportent cette initiative...
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le
député. Et je tiens à vous rappeler que vous disposez d'un temps de
parole d'une minute pour vos déclarations. Alors, tenez-vous-le pour dit.
Maintenant, pour la prochaine déclaration, je vais céder la parole à M. le
député de Matane-Matapédia.
Rendre hommage au Dr
Louis Poirier pour son
engagement auprès de la population mitissienne
M. Pascal Bérubé
M. Bérubé : Mme la
Présidente, aujourd'hui, je désire rendre hommage au Dr Louis Poirier, qui a pratiqué
la médecine avec dévouement pendant plus de 40 ans dans La Mitis.
C'est en 1974 que le Dr Poirier a débuté sa carrière dans notre région. Il travaillait alors à l'hôpital, à l'urgence, et il
pratiquait également des accouchements. Il s'est rapidement démarqué par son approche humaine, son sens de
l'humour et son avant-gardisme. À titre d'exemple, il aura été l'un des premiers médecins à autoriser les conjoints à être
présents dans les salles d'accouchement.
Il fut également l'un des rares à appuyer ouvertement le
droit à l'avortement.
Au début des années 80, le Dr Poirier fut
l'un des fondateurs de la Clinique médicale de Mont-Joli, une initiative qui aura permis d'attirer de nouveaux médecins chez nous. Médecin
attentionné et dévoué, il a accompagné des milliers de patients. Il a
veillé à mieux les outiller afin d'affronter la maladie et d'améliorer leur
état de santé.
Dr Poirier, à titre de député de
La Mitis, je tiens à vous remercier sincèrement pour l'ensemble
de votre travail et de votre engagement
auprès de la population mitissienne. Aujourd'hui, je vous offre à
vous et votre conjointe Diane mes meilleurs voeux et mes meilleures
pensées. Bonne retraite! Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, M. le député de Matane-Matapédia. Maintenant, je
cède la parole à M. le député de Laval-des-Rapides.
Féliciter l'organisme
Diapason-Jeunesse pour son engagement
dans la prévention du décrochage scolaire
M. Saul Polo
M. Polo : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Dans le cadre de la semaine de la persévérance scolaire, je
choisis aujourd'hui d'adresser mes sincères félicitations à un organisme
de ma circonscription. Depuis plus de 20 ans, Diapason-Jeunesse intervient en matière de prévention du décrochage
scolaire dans la région de
Laval et le fait avec passion et
brio. À ce titre, en 2013, Diapason-Jeunesse a donné vie à un projet de café
étudiant destiné aux 14-17 ans, adapté à leurs
besoins et à leurs préoccupations, le Café Le cafArdeur. Cet organisme doit en
grande partie son succès à ceux qui y travaillent d'arrache-pied pour assurer
sa pérennité.
Alors,
merci à Chantal Lachaine, directrice
générale, Yannick Gratton, coordonnateur du café étudiant, Jean-Sébastien Leduc, Martin Calvé,
Sophie Forget ainsi qu'aux nombreux bénévoles qui les accompagnent. Votre
travail est fondamental, et vous êtes
des superhéros pour les jeunes de Laval, Laval-des-Rapides et Pont-Viau. Merci
beaucoup, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, je vous remercie,
M. le député. Maintenant, à M. le député de Beauce-Nord de nous
faire sa déclaration d'aujourd'hui.
Féliciter des étudiants
du Centre de formation en entreprise
et récupération de Beauce, champions provinciaux
des Olympiades Réussite jeunesse
M. André Spénard
M. Spénard :
Merci, Mme la Présidente. Dans le cadre des Journées de la persévérance
scolaire, c'est avec plaisir aujourd'hui
que je souligne la présence dans nos tribunes d'un groupe d'étudiants du CFER
de Sainte-Marie de Beauce. Pour la
petite histoire, je me permets de mentionner que le tout premier centre de
formation en entreprise et récupération a ouvert ses portes au moment où
mon chef était ministre de l'Éducation, Mme la Présidente.
Je
profite de la présence de nos invités tout là-haut pour rappeler un exploit,
s'il en est un, soit l'obtention, en juin dernier, d'un septième titre de champion provincial en 10 ans aux
Olympiades Réussite jeunesse, une fiche supérieure à celle des Patriots
de la Nouvelle-Angleterre, si je peux me permettre.
Tout
comme les entraîneurs des grandes équipes professionnelles, les jeunes du CFER
de Beauce comptent sur des enseignants,
des superhéros passionnés et dévoués qui les encouragent à développer la
culture de l'effort et de la rigueur. Je
salue donc Alexandre Savoie, Danny Roy, Alain Giguère et Denis Picard, ici présents, qui sont source
d'inspiration pour notre jeunesse. Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, je vous remercie, M. le
député, et nous leur souhaitons la
bienvenue à l'Assemblée nationale. Alors, voilà.
Alors, nous allons
poursuivre avec la déclaration de Mme la députée de Chauveau.
Féliciter Mme Laurie
Blouin pour sa performance
à la Coupe du monde de surf des neiges
Mme Véronyque Tremblay
Mme Tremblay : Merci, Mme la Présidente. Permettez-moi de souligner la récente performance
de Laurie Blouin, qui a obtenu une
deuxième place en «slopestyle» à la Coupe du monde de surf des neiges, tenue en
Italie à la fin du mois de janvier.
Il s'agit de son deuxième podium en seulement une dizaine de départs en carrière. Cette jeune
femme de 20 ans n'est donc pas passée inaperçue dans cette compétition
internationale de niveau très relevé.
Audacieuse
et déterminée, la jeune athlète de Stoneham poursuit ses rêves. Elle a
d'ailleurs en poche son invitation pour le U.S. Open, qui s'ouvrira le
28 février au Colorado.
Je
salue chaleureusement Laurie Blouin pour son travail acharné et sa
détermination, un bel exemple d'inspiration pour nos jeunes planchistes de la région. Bravo, Laurie, et continue ta
poursuite vers l'excellence! Nous sommes très fiers de toi. Merci
beaucoup, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci, Mme la députée. Maintenant, au tour de M. le député de Berthier.
Souligner le 25e anniversaire du Conseil de
développement bioalimentaire de Lanaudière
M. André Villeneuve
M. Villeneuve :
Merci, Mme la Présidente. Cette année, Mme la Présidente, le Conseil de développement
bioalimentaire de Lanaudière fête ses 25 ans, communément appelé le CDBL.
Depuis un quart de
siècle, cet organisme à but non lucratif développe et dynamise le milieu
bioalimentaire et agrotouristique de la
région par le biais de projets structurants et par le tissage de liens
d'affaires entre intervenants. Parmi
ses réalisations, notons les Paniers saveurs, qui permettent à la fois de faire
connaître les produits locaux et financer l'organisme.
Le conseil implante aussi régulièrement des panneaux d'interprétation pour les
entreprises agrotouristiques. Il organise tous les ans La Grande Tablée,
un repas gastronomique basé sur les produits locaux et ouvert à tous.
Il a aussi
créé le logo Goûtez Lanaudière, qui permet d'identifier les produits locaux.
S'ajoutent des documents de
promotion, des émissions de radio, la mise sur pied de circuits
agrotouristiques. Cependant, un des rôles les plus importants du conseil est d'offrir des services spécialisés
et des activités de recherche et développement dans le but d'accroître la
compétitivité des entreprises du secteur par le biais de l'innovation, du
transfert technologique et de la formation.
Je tiens donc à saluer le conseil pour
ses nombreuses réalisations et ses efforts constants qui, j'en suis persuadé,
vont continuer à dynamiser notre industrie bioalimentaire. Merci.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Alors, merci, M. le député de Berthier. Je
reconnais maintenant M. le député de Portneuf.
Féliciter Mme Julie Vachon, nommée chef pâtissière de
l'année
M. Michel Matte
M. Matte :
Merci, Mme la Présidente. Comme Obélix, Julie Vachon est tombée dans le
chocolat quand elle était enfant. La
fève et le beurre de cacao n'ont plus de secrets pour elle. Depuis peu, Julie
arbore fièrement la distinction de chef
pâtissier de l'année. Elle est l'ambassadrice de la région de Québec pour
l'élection nationale du chef pâtissier de l'année qui sera connu
prochainement.
Depuis six ans, Julie Vachon a posé ses valises
dans Portneuf, et plus précisément dans le charmant village de
Deschambault-Grondines, véritable berceau
épicurien. Elle propose des produits délicats au goût franc et authentique.
Déguster les chocolats de Julie Vachon, c'est une évasion vers la douceur et
même vers l'extase.
Je
me fais l'écho de Portneuf pour dire à Julie Vachon que nous sommes fiers
d'elle et que nous lui souhaitons la meilleure des chances pour
l'élection nationale. Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, M. le
député de Portneuf.
Maintenant, M. le
député de Montmorency, à vous de nous faire votre déclaration.
Remercier le personnel de l'Hôpital Laval pour son
professionnalisme
M. Raymond Bernier
M. Bernier :
Merci, Mme la Présidente. Ce matin, je désire remercier le personnel du centre universitaire
de l'Hôpital Laval de Québec.
J'ai eu au cours du mois de novembre, en début novembre, une opération, une
lobectomie, et j'ai été à même de
constater tout le travail professionnel du personnel de l'Hôpital Laval qui accompagne
les patients et qui les aide dans ce processus-là.
Je
désire remercier, bien sûr, le département de chirurgie thoracique, particulièrement le Dr Jocelyn Grégoire et l'infirmière,
Mme Annie Roy, mais également tout le personnel qui, au cours de mon
hospitalisation, ont été dévoués et m'ont
accompagné. Il y a également, bien
sûr, cette opération, mais il y a
eu également tous les examens précédents. Donc, je veux remercier également tous les
techniciens, et les infirmières auxiliaires, et infirmières, et tout le
personnel qui ont contribué à me permettre aujourd'hui d'être avec vous.
Et j'en suis fort heureux.
Donc, merci au
personnel de l'Hôpital Laval de Québec.
• (9 h 50) •
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci. Merci de ce beau message, M. le député de Montmorency. Maintenant, je cède la parole à M. le député de Sherbrooke.
Rendre hommage aux lauréats du Mérite estrien
M. Luc Fortin
M. Fortin
(Sherbrooke) : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Permettez-moi de rendre hommage aux lauréates
et aux lauréats du Mérite estrien 2016, organisé par le journal La Tribune,
et les féliciter pour leur parcours inspirant. Véritables ambassadeurs, leur passion et leur dévouement en font des
modèles pour nous tous. Ils se démarquent par leur engagement et
contribuent au rayonnement de la belle région de l'Estrie.
Jeudi
dernier, ces 61 personnes ont été honorées lors de la 25e édition du gala du
Mérite estrien qui récompensait tous les lauréats de la dernière année. J'ai d'ailleurs eu l'occasion, Mme la Présidente, de remettre le prix dans la catégorie jeunesse.
En
tant que député de Sherbrooke et ministre
responsable de la région de l'Estrie,
je suis extrêmement fier et heureux de voir à quel point les Estriennes et les Estriens sont talentueux et
généreux. À tous les lauréats, je vous félicite et vous remercie de
votre contribution au rayonnement de notre région. Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci, M. le député de Sherbrooke. Et, pour clore cette rubrique des déclarations
de députés, je vais céder la parole à M. le député de Verchères.
Souligner le 40e anniversaire de l'Association des parents
et des handicapés de la Rive-Sud métropolitaine
M. Stéphane Bergeron
M. Bergeron : Merci,
Mme la Présidente. Il y a
de cela 40 ans était fondée, à l'initiative de Mme Mariette Hamelin
et de sa fille Lise, l'Association des parents et des handicapés de la Rive-Sud
métropolitaine. Cette organisation visait à offrir des activités de loisirs à des adultes
présentant une déficience intellectuelle. Ce qui n'était au départ qu'une
petite association regroupant 25
membres s'est rapidement élargi à l'ensemble de la région métropolitaine et
oeuvre aujourd'hui auprès de plusieurs centaines de personnes.
J'aimerais
exprimer aujourd'hui ma profonde reconnaissance pour ces quatre décennies de
dévouement exemplaire consacré au
mieux-être et à l'épanouissement de personnes handicapées de la Rive-Sud
métropolitaine, ainsi que de leurs familles.
Grâce à l'organisation d'activités sociales récréatives, ludiques et
thérapeutiques dans un environnement convivial et sécuritaire, cette association permet à ses membres de développer des
habiletés et des amitiés durables, ce qui a pour effet d'améliorer leur qualité de vie et de favoriser leur intégration
harmonieuse dans la communauté en plus d'apporter soutien, répit et
accompagnement à leurs proches.
Bon
40e anniversaire! Longue vie à l'Association des parents et des handicapés de
la Rive-Sud métropolitaine ainsi qu'à leurs membres! Merci, Mme la
Présidente.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Alors, merci, M. le député de Verchères.
Alors,
ceci met fin à la rubrique des déclarations de députés, et je vais suspendre
nos travaux quelques instants.
(Suspension de la séance à
9 h 52)
(Reprise à 10 h 1)
Le Président :
Alors, mesdames messieurs, nous allons nous recueillir quelques instants. Mais,
auparavant, j'aimerais certainement, en votre nom, rendre et envoyer des condoléances à notre collègue de Vachon,
qui a perdu son papa hier soir.
Alors,
je pense que ce serait de bon ton que tous les membres de
cette Assemblée aient une pensée pour Mme
la députée de Vachon
et les membres de sa famille, qui
sont en deuil aujourd'hui. Alors, nous allons nous recueillir quelques
instants.
Merci. Veuillez vous
asseoir.
Nous poursuivons les affaires
courantes. Aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles.
À la rubrique Présentation
de projets de loi, Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Mme Massé :
Merci, M. le Président. Veuillez, s'il vous plaît, appeler l'article a du feuilleton.
Présentation de projets de loi
Projet de loi n° 790
Le
Président : Alors, à l'article
a du feuilleton, Mme la
députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques présente le projet de loi n° 790, Loi concernant la
suspension du processus de délimitation des circonscriptions électorales. Mme la
députée.
Mme Manon Massé
Mme
Massé : Ce projet de loi a pour objet de suspendre jusqu'au 16 juin 2017 le processus entrepris en vertu de la Loi électorale par la Commission
de la représentation électorale et
relatif à la délimitation des circonscriptions électorales.
Mise aux voix
Le Président :
Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?
Une voix :
...
Le Président :
Accepté? Alors, adopté.
Il n'y a pas de dépôt
de documents ni de rapports de commissions.
Il n'y a pas non plus
de dépôt de pétitions.
Il
n'y a pas de réponses orales aux pétitions ni d'interventions portant sur une
violation de droit ou de privilège.
Questions et réponses orales
Nous
en sommes donc rendus maintenant à la période
de questions et de réponses orales,
et je cède la parole à M. le chef de l'opposition officielle.
Position du gouvernement sur le port de signes religieux
par les employés de l'État
M. Jean-François Lisée
M. Lisée : M. le
Président, depuis l'attentat terrible à la Grande Mosquée de Québec, les
membres de cette Assemblée ont décidé
d'avoir un débat apaisé et de mettre de l'eau dans leur vin. Et je tiens à
remercier le chef de la CAQ de l'avoir fait, les membres de Québec solidaire, mes collègues, beaucoup de membres du caucus libéral aussi, qui voulaient
le faire, et le premier ministre, qui avait un discours apaisé jusqu'à hier. Et hier il a décidé non seulement
de défendre sa position à lui, ce qui
est son droit, mais de dénigrer la position des autres en disant qu'elle
représentait une dérive néfaste et qu'elle pouvait normaliser les
discours xénophobes.
Alors, à qui
parle-t-il? Bien, il parle à Gérard Bouchard, le grand sociologue. Il parle au
Conseil du statut de la femme, qui
n'est pas d'accord avec lui. Il parle à tous les membres de cette Assemblée,
les trois partis d'opposition, plusieurs
de ses députés, qui seraient, selon lui,
responsables de dérives néfastes. Il parle à la cour européenne de justice, qui
n'est pas d'accord avec lui et qui, selon lui, normaliserait les
discours xénophobes, 10 démocraties européennes, la France, beaucoup de nos citoyens,
même de confession musulmane.
Ne se rend-il pas compte que, par ses paroles,
il fait preuve lui-même d'intolérance?
Le Président : M. le premier
ministre.
M. Philippe Couillard
M. Couillard : Inverser le problème, c'est une technique
bien connue, M. le Président, puis je ne voudrais pas revenir sur les
événements malheureux dont ce parti a été l'auteur, qui ont mené, effectivement,
à une augmentation, M. le Président...
Des voix : ...
Le
Président : S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il
vous plaît, là, ça vaut quand même...
Chut! Chut! Chut! M. le premier ministre, je ne sais pas exactement ce que vous vouliez dire, mais j'aimerais
comprendre ce que vous vouliez dire.
M. Couillard : Je pense qu'on
s'est énervé un peu vite, là.
Le Président : Oui, mais...
Oui?
Une voix : ...
Le Président : M. le leader
de l'opposition.
M. Bérubé : M. le
Président, on a entendu très clairement
ce que le premier ministre a dit. Accuser le Parti québécois d'être à la
source de cette intolérance, c'est impardonnable. Je lui demande de changer le
ton, comme il l'a demandé à l'ensemble des Québécois, M. le Président.
Le Président : D'abord, M. le
leader de l'opposition, joyeux anniversaire. Je vais commencer comme ça.
Une voix : ...
Le
Président : Ah! c'est
demain? Bon, je suis en avance. M. le
premier ministre, effectivement, je comprenais mal aussi
comment... Ce début de réponse là pouvait être blessant. Alors, évidemment,
on essaie d'éviter les propos blessants ici.
M. Couillard : Ce n'est pas du tout ce que je voulais
transmettre comme message. Je vous dirais qu'on fait face à deux modèles complètement différents pour
l'avenir du Québec. Comment, en effet, résoudre les problèmes
de vie commune qui existent dans
notre société comme dans les autres sociétés?
On a deux choix : on a le choix de l'exclusion et on a le choix de
l'inclusion. On a un modèle qui dit : Il faut que le Québec devienne la
seule société nord-américaine à pratiquer la
discrimination à l'emploi pour des raisons vestimentaires. Ça,
c'est une option. Ce n'est pas la nôtre. Nous visons plutôt la
confiance, nous visons l'inclusion, nous visons l'ouverture. Nous disons que
l'identité québécoise est très forte. Elle
est forte, cette identité, elle rayonne partout dans le monde. Elle n'a pas
besoin de béquilles, elle n'a surtout pas
besoin d'effacer les autres identités pour prospérer et grandir. Voici la
vision du Québec que nous, avec beaucoup de personnes au Québec, dont la jeunesse québécoise...
voici ce dont nous voulons faire la promotion.
Il n'est pas question
pour nous, il n'a jamais été question pour nous d'aller dans la direction de la discrimination basée sur les vêtements. Je
pense que je peux le dire, et le
redire, et le redire encore, et le répéter : Ce n'est pas quelque chose que nous ferons. Ce n'est pas
quelque chose que nous ferons.
Maintenant,
on a l'occasion ici, dans cette Assemblée, M. le Président, de statuer sur l'encadrement
de la gestion des accommodements pour qu'ils demeurent raisonnables. On
est tous d'accord là-dessus. La question des visages découverts pour les services publics également, je crois qu'on s'entend
là-dessus. Alors, ma proposition demeure la même, adoptons rapidement ce sur quoi nous nous
entendons tous et toutes. Il sera possible pour les partis d'opposition de dire
qu'il y a une urgence manifeste pour augmenter les interdictions...
Le Président : En terminant.
M. Couillard : ...envers les
minorités, M. le Président.
Le
Président : Première complémentaire, M. le chef de
l'opposition.
M. Jean-François Lisée
M.
Lisée : Le premier ministre fait semblant de ne pas comprendre
ce qu'il a fait hier. Il a une position que nous respectons. Nous sommes en désaccord, nous la respectons. Nous ne
l'accusons pas de souffler sur les braises de l'intolérance. Nous ne l'accusons pas, en n'agissant pas, de créer de la
division. Lui a accusé tous ceux avec lesquels il est en désaccord de
normaliser la xénophobie. Je lui demande de s'excuser envers tous les Québécois
qui ne pensent pas comme lui.
Le Président :
M. le premier ministre.
M. Philippe Couillard
M. Couillard : M. le Président, je pense qu'il y a une dérive de ce côté-là, on va
arrêter ça là. Je vais, encore une fois,
répéter que c'est un choix de société, et c'est le rôle de cette Assemblée de
débattre des choix de société. Nous ne bougerons
pas sur des principes comme la discrimination. Ce n'est pas vrai qu'on va
marchander la discrimination dans cette
Assemblée, M. le Président. Ce n'est pas vrai qu'on va dire aux minorités du
Québec : La majorité sait ce qui est bon pour vous, il y a certaines professions qui vous seront interdites si
vous voulez manifester soit votre croyance religieuse soit votre identité. Ce n'est pas là que le Québec
va. Ce n'est pas là que le Québec doit aller. Ce n'est surtout pas comme
ça que le Québec doit être connu à l'étranger.
Il
y a eu une époque, M. le Président, pas trop lointaine où il y a eu rapidement,
on l'a vu, un discours de rejet par rapport à certaines minorités...
Le Président :
En terminant.
M. Couillard : ...il faut mettre un terme à ça. La façon de mettre un terme à ça,
c'est d'adopter rapidement ce sur quoi nous nous entendons.
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le chef de l'opposition.
M. Jean-François Lisée
M. Lisée :
De toute évidence, le premier ministre ne comprend pas son rôle de chef de
gouvernement d'apaiser le débat. Il ne comprend pas que l'exemple qu'il doit
donner, c'est le respect mutuel, en particulier dans des débats délicats. Hier,
il a manqué à sa tâche de montrer à tous que nous avons des points de vue
divergents, mais respectables et légitimes. Je lui demande de se ressaisir et
de montrer le respect qu'il a pour les gens qui ne sont pas d'accord avec lui.
Le Président :
M. le premier ministre.
M. Philippe Couillard
M. Couillard : Alors, conclusion, adoptons ce sur quoi nous sommes d'accord, et on a exactement
fait ce que le collègue demande. Et on peut le faire rapidement, en quelques semaines, dans cette Assemblée. Mais je l'ai dit
et je vais le répéter : Lorsqu'on
vient en politique, on vient pour défendre des valeurs et des
principes de société. La discrimination à l'emploi, mes chers amis, ne fait pas partie des valeurs québécoises.
Est-ce qu'on peut s'entendre là-dessus? C'est ce en quoi nous croyons.
Alors, on ne tolérera pas, nous, on n'appuiera pas de dérives qui nous amènent
vers ce type de discrimination au Québec. Je le dis avec fierté, avec fermeté et je le
répéterais, M. le Président, ce sont les principes que nous défendons. Maintenant,
nous pouvons très bien, encore une fois, faire acte de partage et d'accord en
adoptant rapidement ce sur quoi nous sommes d'accord, faisons-le donc.
• (10 h 10) •
Le Président :
En terminant. Troisième complémentaire, M. le chef de l'opposition.
M. Jean-François Lisée
M.
Lisée : Alors, M. le premier ministre est un récidiviste de
l'intolérance envers les gens qui ne sont pas d'accord avec lui. Alors, je lui ai posé une question. Il y
a quelqu'un qui a dit, il n'y a pas très longtemps, en janvier 2014 :
«Nous considérons que le port de ces
trois vêtements — le
niqab, la burqa et le tchador — par la femme est l'instrumentalisation
de la religion pour des fins d'oppression et de soumission.» C'est lui qui a
dit ça.
Est-ce qu'il plaide
coupable d'être un xénophobe?
Le Président :
M. le premier ministre.
M. Philippe Couillard
M.
Couillard : C'est un mot que j'emprunterais avec beaucoup de prudence
si j'étais le Parti québécois.
Maintenant,
ceci dit, M. le Président, je vais répéter quelque chose et je crois que c'est
une erreur fondamentale qui est faite
du côté de l'opposition officielle. On peut tout à fait dire ce qui a été dit
et que je serais prêt à répéter, c'est un fait. Mais, entre ça et l'interdiction législative, c'est ça, la marche
qu'il ne faut pas emprunter. Ce qu'il faut plutôt faire, c'est favoriser l'inclusion des gens, l'inclusion
des nouveaux arrivants, l'inclusion des nouveaux arrivants, ce que nous devons faire, parce que l'inclusion, ça passe par
l'emploi. Et ce n'est pas en disant à quelqu'un d'une minorité, ce n'est
certainement pas en disant à quelqu'un d'une
minorité : Tu es bienvenu chez nous, mais pas tout à fait, pas pour ce
type d'emploi, qu'on va arriver à une
société ouverte et inclusive. C'est le but que nous poursuivons. C'est l'avenir
que la jeunesse du Québec désire, M. le Président.
Le Président :
Principale, M. le chef de l'opposition.
Intégration des immigrants au marché du travail
M. Jean-François Lisée
M. Lisée :
Le Parti libéral du Québec a été au pouvoir pendant l'essentiel des 15
dernières années; le premier ministre,
pendant trois ans. Il a été ministre de la Santé de longues années aussi. Sous
cette Administration, le chômage, pour
les Québécois d'origines diverses, a été le triple de pour les Québécois en
général. La discrimination à l'embauche, la discrimination à l'emploi a continué à avancer. Hier, le premier
ministre a décidé qu'il était urgent de légiférer là-dessus à travers le projet de loi n° 98, qui a un
objet très, très précis, seulement le Code des professions. Alors, c'est tard, c'est tard, mais mieux vaut tard que
jamais.
Alors,
on le prend au mot, est-ce qu'il accepte... Nous avons fait 20 propositions, lundi de la semaine dernière, qui vont beaucoup plus loin que le projet de loi n° 98. Nous
pourrions transformer ce projet de
loi, en ajoutant des chapitres,
en un projet de loi omnibus pour
l'intégration en emploi et contre la discrimination. Est-ce que le premier ministre est disposé à discuter avec
nous d'amendements, de nouveaux chapitres qu'on pourrait mettre, par exemple de rendre illégal pour les
employeurs de réclamer une expérience préalable d'emploi au Canada pour leur interdire l'accès à l'emploi?
Est-ce qu'il est disposé à faire plus qu'un geste de communication, mais
un geste significatif?
Le Président :
M. le premier ministre.
M. Philippe Couillard
M. Couillard : Voilà une bonne nouvelle, M.
le Président. Voilà le signal qu'il
fallait envoyer depuis quelques années,
qu'on veut favoriser l'inclusion et l'intégration des nouveaux arrivants en
emploi. Quelle bonne nouvelle! Je l'ai déjà dit et je le répète : Bien sûr
qu'on est prêts à écouter les représentations, les recommandations et les suggestions qu'on nous fera si elles sont, bien sûr,
réalistes et susceptibles d'être mises en place.
Puis,
en passant, il y aura d'autres... il
y a eu d'autres mesures parce que,
bonne nouvelle, le taux de chômage des nouveaux arrivants diminue depuis trois ans,
on l'a noté. Pas encore assez, mais il diminue. Il y a d'autres mesures
que celles-là qui seront également
annoncées. S'il y a des bonnes idées du côté des
oppositions, on est tout à fait prêts à les
entendre, M. le Président, de
façon à — disons-le clairement — dire
aux nouveaux arrivants au Québec : Toutes les portes de l'emploi, toutes les
portes de l'emploi vous sont ouvertes.
Le Président :
Première complémentaire, M. le chef de l'opposition.
M. Jean-François Lisée
M.
Lisée : On a dit ça au premier ministre mardi dernier, on a
écrit à sa ministre de l'Immigration jeudi, on attend une réponse.
Est-ce qu'on peut s'asseoir ensemble pour faire des amendements conjoints au
projet de loi n° 98? J'aimerais avoir une réponse précise.
Par
ailleurs, le premier ministre est-il disposé à ce qu'on adopte des amendements
qui vont faire en sorte de mettre des
amendes, comme on le fait pour les dépanneurs qui vendent des cigarettes à des
mineurs, pour des employeurs qui refusent d'embaucher des gens
d'origines diverses?
Le Président :
M. le premier ministre.
M. Philippe Couillard
M. Couillard : Je pense qu'il
faut être un peu prudent, M. le Président, surtout pour parler aux employeurs puis aux entreprises du Québec. Il faut
s'assurer que ce qu'on fait est réaliste, et peut être mis en place, et
correspond au cadre légal qui est celui du Québec.
Maintenant,
je voudrais lui rappeler que c'est la ministre
de la Justice qui pilote le projet de loi n° 98. Donc, s'il a des recommandations puis
des suggestions à lui faire pour les amendements, c'est à elle qu'il faut
s'adresser.
Par contre,
s'il y a des mesures non législatives sur lesquelles les collègues voudraient apporter des
suggestions, effectivement ma
consoeur en présente et en présentera plusieurs au cours des prochaines
semaines. On a d'ailleurs un rendez-vous
national sur la main-d'oeuvre cette semaine qui est d'une importante capitale,
dont un des thèmes — pas le
seul thème, mais un des thèmes — est l'intégration des nouveaux arrivants
au marché du travail.
Quelle bonne
nouvelle! On semble tous unis sur cette question, allons de l'avant.
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le chef de l'opposition.
M. Jean-François Lisée
M.
Lisée : Bien, comme la semaine dernière, je sens le premier
ministre sur le frein : Ah! bien, ce n'est pas sûr, puis il faut regarder ça, puis agir rapidement,
puis ça va être la ministre de la Justice. Pas sûr que c'est la meilleure chose
à faire. Je vais lui donner un autre
exemple. Il y a trois ans, quand il a pris le pouvoir, il avait sur son bureau
les préliminaires d'ententes,
d'accords de reconnaissance mutuelle pour les professions avec les trois pays
qui nous ont envoyé le plus de diplômés,
l'Algérie, la Tunisie et le Maroc. Il nous a dit qu'il en a parlé à Marrakech
après deux ans et demi de pouvoir. Nous savons que c'est la seule trace...
Le Président :
M. le premier ministre.
M. Philippe Couillard
M. Couillard : Alors, c'est typique de ce qu'a fait l'Administration précédente, M. le
Président, on fait toutes sortes de
déclarations de projets, mais rien n'avance parce que rien n'est prêt. Alors,
effectivement, il n'y avait aucune démarche
concrète qui avait été entreprise. Ce n'est pas une surprise, c'est comme ça
dans tous les ministères, dans tous les
secteurs dont on a fait l'examen. Maintenant, ce qu'on a fait, effectivement,
c'est parler aux trois pays, et on est prêts à travailler avec les trois et les pays européens pour avoir des
arrangements sur la reconnaissance mutuelle des compétences. C'est une très bonne nouvelle. Mais de dire que
c'était prêt, là, je m'excuse, ce n'était même pas au début du commencement
d'être prêt.
Le Président :
Principale, M. le député de Rimouski.
Augmentation de l'âge d'admissibilité au crédit d'impôt en
raison de l'âge
M. Harold LeBel
M.
LeBel : Ce matin, la FADOQ, l'association québécoise de défense des
retraités, l'association des retraités de l'éducation, l'Association québécoise des retraités du secteur public,
tout le monde demande au gouvernement de reculer sur sa décision de piger 500 $ dans la poche des aînés. Ces groupes
nous disent ce matin qu'ils ont des déluges d'appels. Jamais vu! Tous les députés ici, vous avez eu dans
vos bureaux de comté plein de téléphones d'aînés qui sont outrés. Ils
disent au gouvernement qu'il faut qu'il recule, car ça n'a pas de bon sens
d'aller piger dans leurs poches 500 $.
Ici,
il y a une ministre responsable des Aînés, elle doit porter la parole des
aînés. Elle connaît tous ces groupes-là, elle les connaît très bien. Est-ce que qu'elle a réussi, dans les dernières
heures, à convaincre son ministre de reculer sur cette position? Est-ce
qu'elle peut se lever et défendre les aînés, ici, s'il vous plaît?
Le Président :
Je vous rappelle qu'on s'adresse à la présidence. M. le ministre des Finances.
M. Carlos J. Leitão
M. Leitão :
M. le Président, c'est un sujet qui est dans les nouvelles depuis déjà certains
jours, et, malheureusement, c'est
basé sur des calculs qui sont faux. Des calculs qui sont faux. Il n'y a
personne, personne qui va perdre 500 $. Personne, il n'y a aucun aîné au Québec, aujourd'hui, qu'on
a enlevé quoi que ce soit. Les personnes qui avaient droit au crédit
d'impôt en raison de l'âge continueront à avoir droit à ce crédit d'impôt. Ça
n'a pas changé et ça ne changera pas.
Ce qui a changé,
c'est l'âge d'admissibilité...
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît! S'il vous plaît!
Des voix :
...
Le Président :
Non, non. S'il vous plaît! Vous voulez avoir une réponse, écoutez-la. M. le
ministre.
M. Leitão :
Une personne qui a droit à ce crédit d'impôt continuera d'avoir droit. La
personne qui n'avait pas droit avant ne va pas avoir droit non plus, M.
le Président. C'est la logique la plus simple que, malheureusement...
Malheureusement, nos collègues de l'opposition, déjà hier, jouent sur les mots
pour créer de l'inquiétude...
Des voix :
...
Le Président : S'il vous
plaît!
M. Leitão : ...sur un sujet où
il ne devrait pas avoir d'inquiétude. Mais allons...
Le Président : En terminant.
M. Leitão : Ça va.
Le Président : En
complémentaire, M. le député de Rousseau.
M. Nicolas Marceau
M. Marceau :
M. le Président, la vérité, c'est qu'il y a des gens qui avaient planifié
longtemps à l'avance leur retraite en
prenant en compte ce 500 $ auquel ils n'auront plus droit en vertu des
changements que vous avez introduits dans
votre budget. C'est vous qui avez changé les règles du jeu sans avertissement,
et il y a des gens qui, aujourd'hui, pour les cinq prochaines années,
vont se faire prendre 500 $ par année.
C'est ça, le plan libéral pour les aînés, M. le
Président? Ça n'a pas de bon sens, il faut reculer.
Des voix : ...
Le Président : S'il vous
plaît! S'il vous plaît! M. le ministre des Finances.
M. Carlos J. Leitão
M. Leitão :
O.K. On va essayer de rester calme, M. le Président. Donc, ce qu'on a fait, on
ne l'a caché à personne, c'était dans le budget de 2015, mars 2015, il y a
deux ans. Il y a deux ans qu'on a annoncé ça. C'était caché où, là? Il y a deux ans qu'on a annoncé ça, et, il y a
deux ans, on avait, justement, des discussions en commission parlementaire
à ce sujet-là. Alors, comment on peut dire aujourd'hui qu'on a caché ça si on
l'avait annoncé il y a deux ans?
Qu'est-ce
qu'on a annoncé il y a deux ans? Il y a deux ans, on a annoncé que la réalité
des aînés d'aujourd'hui, de 2015, 2016, 2017, est bien différente. La
réalité des aînés de...
Des voix : ...
Le Président : En terminant.
M. Leitão :
Est-ce qu'on peut écouter un peu, là? On se calme, là. Est-ce qu'on peut
comprendre que la réalité des aînés...
Le Président : Deuxième
complémentaire, M. le député de Rousseau.
Des voix : ...
• (10 h 20) •
Le Président : S'il vous
plaît! M. le député de Rousseau.
M. Nicolas Marceau
M. Marceau :
M. le Président, j'ai averti le ministre des Finances en 2015, j'ai averti le
ministre des Finances. Je ne l'accuse
pas d'avoir caché quoi que ce soit, je l'accuse de ne pas avoir réagi, de ne
pas avoir changé ce qui était une mauvaise
mesure. Ce qui était une mauvaise mesure en 2015 est une mauvaise mesure
aujourd'hui. Vous vous attaquez aux gens les plus vulnérables.
500 $ par année pendant cinq ans, ça n'a pas de bons sens. Et, plutôt que
de verser des centaines de millions de
dollars aux médecins, revenez sur votre décision puis arrangez les affaires
pour que tout le monde soit correct.
Des voix : ...
Le Président : S'il vous
plaît! M. le ministre des Finances.
M. Carlos J. Leitão
M. Leitão : Non, non, non, M.
le Président. Encore une fois, on oublie toujours la deuxième partie de la...
Des voix : ...
Le
Président : S'il vous plaît! La question a été posée dans
l'ordre, je l'ai bien entendue. Je ne la qualifierai pas, mais j'aimerais entendre aussi la réponse. Il n'y
a qu'une personne ici qui a le droit de parole dans l'Assemblée, et c'est le
ministre des Finances.
M. Leitão :
On oublie toujours la deuxième partie de la réforme, qui était l'amélioration,
la bonification du crédit d'impôt
pour le travailleur d'expérience, M. le Président. Ce qu'on a fait sur la
prochaine réforme fiscale, on réduit l'âge d'un certain côté pour améliorer la situation des personnes à partir de
l'âge de 62 ans. À partir de 62 ans, vous avez droit à un crédit d'impôt pour travailleur d'expérience
qui est bonifié sur ce qu'il y avait avant. Donc, on a amélioré. Au net, pour
l'État, en fin de compte, ça nous coûte même des sommes additionnelles.
Donc, non, ce n'est pas une mesure de
restriction budgétaire, on a ajouté de l'argent...
Le Président : En terminant.
M. Leitão : ...pour bonifier ceux
qui sont au travail, M. le Président.
Le Président : Principale, M.
le chef du deuxième groupe d'opposition.
Crédit d'impôt en
raison de l'âge
M. François Legault
M. Legault : M. le
Président, le gouvernement libéral fait preuve d'une insensibilité
déplorable à l'égard des aînés. On a
une situation où, en repoussant, effectivement, le crédit d'impôt pour les
aînés de 65 à 70 ans graduellement d'ici 2020 — c'est la première année que ça s'applique,
c'est pour ça qu'on en parle davantage actuellement — on prive des personnes qui croyaient recevoir 500 $ d'un montant important.
Peut-être, pour le premier ministre, 500 $, ce n'est pas beaucoup d'argent. Mais, quand on atteint
65 ans, qu'on a un petit revenu, là, ça fait une énorme différence. On
parle de personnes qui ont travaillé toute leur vie.
Et le ministre
des Finances nous dit, et puis le premier ministre aussi, depuis deux jours : Oui, mais on a remplacé ça par un crédit
d'impôt pour les travailleurs âgés. Ce que doit comprendre le premier ministre, là, c'est qu'il y a
des gens qui ont des métiers durs
physiquement, qui n'ont pas la santé pour travailler jusqu'à
70 ans, donc qui vont perdre leur 500 $.
Donc, est-ce
que le premier ministre peut se lever aujourd'hui puis dire : Il y a un
budget qui s'en vient, on va remettre en place le crédit d'impôt pour
les aînés à partir de 65 ans?
Le Président : M. le premier
ministre.
M. Philippe Couillard
M.
Couillard : Je veux quand même
relever très brièvement, puis sans appuyer trop la petite remarque un peu
mesquine du début, là, sur le fait
qu'apparemment 500 $, c'est plus
important pour moi que pour lui... Pas sûr de ça, on pourrait faire des
calculs. Enfin, en tout cas.
Ceci dit,
effectivement, on a cette démarche qui est en cours, puis il faut se souvenir
que ce sont les personnes qui ont des
revenus qui, théoriquement, ont des crédits d'impôt, ce qui n'est pas le cas des
aînés vulnérables, par définition, pour
lesquels il y a de nombreux programmes que nous avons bonifiés, que nous allons
continuer à bonifier pour leur venir en aide. Premièrement.
Deuxièmement,
on s'entend tous que le profil de la main-d'oeuvre change au Québec, qu'il faut
multiplier les mesures non pas pour garder les personnes à l'écart du
marché du travail plus tôt, mais les garder plus longtemps au marché du travail. Alors, on aura l'occasion,
d'ailleurs, de discuter de ces questions au rendez-vous sur la main-d'oeuvre
cette semaine.
Il y aura
effectivement, comme il l'a bien noté, M. le Président, un budget très
prochainement, que mon collègue déposera,
probablement un troisième budget équilibré consécutif. C'est du moins ce que la
rumeur nous dit. On verra, mais, en
soi, c'est une bonne nouvelle pour
tous les Québécois et pour les aînés du Québec en particulier, pour lesquels on a toujours été là et on sera toujours là, M.
le Président.
Le Président : Première
complémentaire, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.
M. François Legault
M. Legault : M. le
Président, on parle d'aînés qui
gagnent 33 000 $ par année, hein? Je comprends que ce n'est pas son cas, ce n'est pas mon cas, on est tous
d'accord avec ça. Mais est-ce qu'il peut faire preuve d'un peu de compassion?
Comment se fait-il qu'il ne comprend pas mieux la réalité des aînés?
Ma question est claire, là, il a une chance de
se lever aujourd'hui, est-ce qu'il va remettre en place le crédit d'impôt pour
personnes aînées à partir de 65 ans, oui ou non?
Le Président : M. le premier
ministre.
M. Philippe Couillard
M. Couillard : On fait toujours la révision des politiques qu'on met en place, puis on
aura l'occasion de le faire pour le
budget, mais on croit qu'il est actuellement dans l'intérêt du Québec et des
aînés, dont beaucoup veulent demeurer actifs
ou actives, dont beaucoup veulent demeurer au marché du travail, d'être
encouragés davantage pour rester actifs dans la société. Et ce n'est pas du tout faire preuve d'insensibilité,
c'est le contraire. C'est, au contraire, écouter ce que les aînés nous
disent, M. le Président.
Maintenant,
il faut quand même que notre collègue ait un peu de suite dans les idées,
minimalement. Il nous dit hier qu'il
veut faire 3 milliards, ou quelque chose comme ça, de baisses d'impôt,
puis il n'est pas capable de dire avec quels services publics il va financer ça. À moins qu'il ait une autre... J'ai
entendu parler vaguement du Fonds des générations, ce qui est, en soi, très intéressant,
j'espère qu'il va le répéter. Mais on ne peut pas, d'un coin de la bouche, dire
qu'on veut baisser les impôts massivement...
Le Président :
En terminant.
M.
Couillard : ...et, de l'autre, demander le maintien des services
publics et des subventions aux personnes.
Le Président :
Deuxième complémentaire. M. le chef du deuxième groupe d'opposition.
M. François Legault
M. Legault :
M. le Président, on apprend ce matin que le gouvernement a, jusqu'à présent,
cette année, un surplus de
1,9 milliard. Comment il l'a fait, ce surplus-là? En pigeant dans les
poches des Québécois. Les familles ont 1 000 $ de moins
aujourd'hui qu'elles avaient quand il est arrivé.
Je répète ma
question : Est-ce qu'il va remettre en place le crédit d'impôt pour aînés
à partir de 65 ans, oui ou non?
Le Président :
M. le premier ministre.
M. Philippe Couillard
M. Couillard : Je ne pensais jamais entendre la CAQ — autrefois, l'ADQ — déplorer le fait que les finances
publiques du Québec sont tellement bien gérées qu'on a des marges de manoeuvre
maintenant, alors qu'ils nous ont abreuvés
de ça pendant des années et des années. Mais ça s'adonne que c'est nous autres
qui l'avons réalisé. Et la raison pour
laquelle ça s'est réalisé, ce n'est pas du tout ce qu'il dit. Qu'il regarde
comme il faut les comptes publics que nous publions régulièrement de façon transparente, c'est l'augmentation des
revenus due à la bonne tenue de l'économie. C'est pour ça. C'est pour ça
que les finances publiques du Québec vont bien.
Alors,
c'est bien, je vois qu'il veut qu'on le donne, on va le donner également en
services d'éducation, en services de
santé, en aide aux entreprises, notamment pour profiter du nouveau marché
d'exportation qui s'ouvre maintenant au Québec. Alors, on va faire ça,
on va continuer de faire ça, on va bâtir un Québec prospère, un Québec juste...
Le Président :
En terminant.
M. Couillard : ...basé sur des finances publiques saines, ce que, pourtant, il a
réclamé pendant des années.
Le Président :
Principale, M. le député de La Peltrie.
Gestion du Centre de services partagés
M. Éric Caire
M.
Caire : M. le Président, hier, on a assisté à un autre
triste épisode de médiocrité du CSPQ. Et, à ceux qui pensent que mes propos sont durs, je les invite à lire
l'ensemble des rapports accablants dont il a fait l'objet, que ce soit Raymond Chabot en 2010, que ce soit la
Vérificatrice générale en 2011, que ce soit encore le sous-comité des
ressources informationnelles en 2012,
que ce soit encore la Vérificatrice générale en 2012, que ce soit encore la
Vérificatrice générale, 2014-2015,
que ce soit KPMG, le rapport KPMG en
2015, M. le Président, que ce soit encore la Vérificatrice générale, qui nous l'a dit en 2015, en 2016, en 2017. Encore et toujours,
le Centre de services partagés
n'apprend pas de ses erreurs. Le Centre de services partagés patauge
dans la médiocrité et il continue les mêmes erreurs rapport après rapport.
Est-ce
que le président du Conseil du trésor ne pense pas qu'il est temps de se
questionner sur l'existence du Centre de services partagés?
Le Président :
M. le président du Conseil du trésor.
M. Pierre Moreau
M.
Moreau : Le moins qu'on puisse dire, c'est que l'introduction
de la question du député fait écho à ce qui a été dit et même reconnu par le président du CSPQ hier
en commission parlementaire. En fait, la commission parlementaire, hier, donnait suite au rapport de Vérificatrice
générale de 2014, et un des gestes que nous a appris, d'ailleurs, le secrétaire
général de l'Assemblée nationale, lorsqu'on
arrive à l'Assemblée nationale, c'est que le rôle des députés, c'est véritablement
d'exercer aussi un contrôle sur l'action gouvernementale, dont le CSPQ.
Le
président de l'organisme, hier, a reconnu que, ce qu'ils faisaient, tout
n'était pas parfait, et le gouvernement en est fort conscient. D'ailleurs, mon prédécesseur à ce poste, qui est
aujourd'hui ministre des Affaires municipales et de la Sécurité
publique, a déposé en 2015 un plan de transformation qui vise à repositionner
le CSPQ, et c'est ce à quoi nous travaillons.
Et
nous travaillons aussi... un des aspects les plus importants, je pense, et les
plus questionnés par le député sur les gestes
du CSPQ, c'est toute la question des technologies de l'information, et on aura
l'occasion de déposer prochainement un projet de loi qui viendra
encadrer davantage...
Le Président :
En terminant.
M. Moreau :
...l'action gouvernementale en matière des technologies de l'information. Voilà.
Le Président :
Première complémentaire, M. le député de La Peltrie.
M. Éric Caire
M.
Caire :
M. le Président, en 2010, Monique Gagnon-Tremblay voulait réformer le CSPQ,
elle a échoué. Michelle Courchesne a suivi,
elle a voulu réformer le CSPQ, elle a échoué. Le député de Louis-Hébert, de façon assez fugace, j'en conviens, a voulu le faire, il a échoué.
Le député de Nelligan, il y a deux ans, a déposé un large plan pour le réformer. Ce que la Vérificatrice générale nous dit, c'est qu'il a échoué. Et, pour être
original, le nouveau président du Conseil du trésor nous dit : Je
vais déposer un projet de loi qui va réformer le CSPQ.
Est-ce qu'il n'est
pas temps de se questionner sur le CSPQ lui-même?
• (10 h 30) •
Le Président :
M. le président du Conseil du trésor.
M. Pierre Moreau
M.
Moreau : J'écoute la
question du député, et c'est comme s'il détenait la formule magique et lui,
d'un claquement de doigts, serait capable de gérer l'ensemble de tous
les services qui sont fournis par le CSPQ aux ministères et aux organismes de l'État. C'est curieux, je ne
l'entends pas amener des suggestions qui visent l'amélioration du CSPQ. Ce
que je l'entends dire, c'est que la solution...
Il aime les cahiers à colorier, il est en train de lever un cahier à colorier
encore une fois. Alors, lui, sa
solution se trouve ou dans les cahiers à colorier ou dans l'abolition de
l'organisme. Nous, M. le
Président, on est au travail. Nous avons l'intention...
Le Président :
En terminant.
M. Moreau :
...de faire en sorte qu'on posera les gestes pour améliorer la situation.
Le Président :
Deuxième complémentaire.
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît, s'il vous plaît! Deuxième complémentaire, M. le député de La Peltrie.
M. Éric Caire
M.
Caire : Et, plutôt
que de ridiculiser la situation, le premier
ministre dit : Si vous avez des
solutions magiques, là, pour ne pas
piller 500 $ à des aînés qui en
ont besoin... Le CSPQ, par son incompétence, nous fait perdre des centaines de
millions. Juste le regroupement des centres
de traitement de l'information... 100 millions d'économies récurrentes que
vous laissez sur la table. Pendant ce
temps-là, vous pillez le Trésor, le portefeuille des aînés. Des suggestions,
j'en ai, mais ça n'implique pas le CSPQ.
Est-ce qu'on peut se
questionner sur le CSPQ? Oui ou non?
Le Président :
M. le président du Conseil du trésor.
M. Pierre Moreau
M. Moreau :
M. le Président, plutôt que de faire de l'enflure verbale... La dernière partie
de sa question, là, c'était : Est-ce
que vous entendez vous questionner sur l'amélioration du CSPQ? Plutôt que de
faire de l'enflure verbale, il devrait aller lire la première réponse que j'ai donnée et
dire que déjà on est à la tâche et que mon prédécesseur, en 2015, a déposé
un plan que nous sommes à mettre en oeuvre
pour améliorer les méthodes au CSPQ. Alors, s'il a des solutions magiques
dans son cahier à colorier, je suis prêt à
les recevoir, je n'ai aucune difficulté avec ça. Mais il est faux de penser que
la solution simple, c'est de tout faire sauter. Ça, on n'est pas là.
Le Président : Principale,
Mme la députée de Marie-Victorin.
Coût des produits
d'hygiène féminine
Mme Catherine Fournier
Mme Fournier :
M. le Président, les femmes paient généralement plus cher les produits de base
équivalents aussi destinés aux
hommes. Dans le jargon populaire, on parle de la taxe rose. Les produits
d'hygiène et produits cosmétiques sont
en haut de la liste des principaux suspects : shampoings, déodorants,
rasoirs, parfums. Depuis quelques mois, c'est ce que plusieurs études internationales tendent à démontrer. L'État de New
York est intervenu en légiférant. La France va intervenir pour contrer les stratégies marketing basées sur le genre. Au
Québec, des enquêtes de La facture et du Journal de Montréal ont comparé plusieurs produits et ont constaté des disparités parfois
très significatives entre les produits destinés aux femmes et aux hommes. Les femmes québécoises veulent savoir si
l'argent qu'elles vont gagner aura la même valeur que celui des hommes
québécois.
Est-ce que la
ministre responsable de la Protection du consommateur et de la consommatrice
reconnaît que cette taxe rose affecte le pouvoir d'achat des femmes?
Le Président : M. le ministre
des Finances.
M. Carlos J. Leitão
M. Leitão :
Merci, M. le Président. Alors, en effet, c'est un sujet pas seulement
intéressant, mais important. Faire une
précision : je sais qu'on l'appelle la taxe rose, mais ce n'est pas une
taxe, ce sont des pratiques de prix par les détaillants, les grands détaillants qui font cette
discrimination. Mais ce n'est pas une taxe, ce n'est pas le gouvernement qui
impose une taxe spéciale à ces produits-là, donc, pour que ce soit
clair.
Alors, si on
revient aux pratiques de prix des grandes chaînes de produits cosmétiques, ou autres, en effet, il y a
là des pratiques qui semblent à
première vue un peu incompréhensibles. Donc, je pense qu'il y a
du travail à faire de notre part, en
tant que gouvernement, de mieux... que cela nous soit mieux expliqué.
Comment se fait-il que de telles différences de prix existent? Quel est le rationnel pour ces pratiques de prix là?
Et je pense que c'est à ça que nous devons nous attaquer.
Le Président : Première
complémentaire, Mme la députée de Marie-Victorin.
Mme Catherine Fournier
Mme
Fournier : Oui. Bon, merci, M. le Président. Je suis contente que le ministre reconnaisse
donc qu'il y a cette discrimination. Mais, vous savez, il arrive que le marché, justement...
que la règle de l'offre et la demande, bien, ça ne règle pas tous les
problèmes, effectivement, de notre société, on peut penser à la pauvreté, à la
pollution, aux inégalités sociales. Et donc, quand le marché est responsable
d'une discrimination basée sur le sexe, je crois que le gouvernement a le
devoir d'intervenir, c'est exactement notre rôle de législateur.
Alors, moi,
j'aimerais entendre la ministre responsable de la Protection des consommatrices
québécoises pour savoir si vraiment elle entend
intervenir pour corriger...
Le Président : Mme la ministre
de la Justice.
Mme Stéphanie Vallée
Mme Vallée : M. le
Président, je remercie la collègue
pour sa question. Effectivement, il y
a une préoccupation à l'égard du
fait que certains produits, notamment les produits d'hygiène féminine, sont,
pour des produits équivalents, un peu plus chers que les produits
destinés aux hommes.
Il faut se rappeler que notre gouvernement a
quand même posé des gestes qui vont un peu dans le sens de la préoccupation et qui répondent à la préoccupation de notre collègue. Rappelons-nous que, le 1er juillet 2015, la
taxe... il y a eu, du côté du gouvernement
fédéral, pardon, la taxe sur les
tampons et les serviettes hygiéniques qui avait été abolie. Des mesures
ont également été mises de l'avant dans ce sens-là.
Le Président : En terminant.
Mme Vallée : Alors, il y a
une préoccupation qui est...
Le Président : Deuxième
complémentaire, Mme la députée de Marie-Victorin.
Mme
Catherine Fournier
Mme
Fournier : M. le Président, les femmes ont déjà un salaire inférieur à celui des hommes, c'est
une réalité. Maintenant, on constate que les femmes paient généralement
plus cher des produits de base équivalents destinés aux femmes et aux
hommes.
Est-ce que la
ministre responsable de la Protection des consommatrices considère que c'est
normal que les femmes québécoises aient leur pouvoir d'achat réduit par
cette taxe rose? Va-t-elle agir rapidement sur cet enjeu?
Le Président : Mme la ministre
de la Justice.
Mme Stéphanie Vallée
Mme Vallée : M. le
Président, il y a
effectivement une préoccupation, mais il
y a un manque de données qui ne
permet pas de déterminer si effectivement,
de façon probante, il y a réellement une discrimination sur les
distinctions entre certains prix.
Ceci étant
dit, M. le Président, il y a une volonté de documenter davantage la question,
nous allons le faire, parce qu'avant de légiférer, avant d'apporter et de
mettre de l'avant des mesures législatives, encore est-il important de
s'assurer que ce qui est mis de l'avant est factuellement probant.
Et, ceci étant, je tiens à souligner que le
Conseil du statut de la femme...
Le Président : En terminant.
Mme Vallée : ...a également
posé des gestes pour sensibiliser les consommatrices au...
Le Président : Principale, M.
le député de Richelieu.
Exploration et
exploitation des gaz de schiste
M. Sylvain Rochon
M.
Rochon : Oui. Merci, M. le
Président. En décembre dernier, le gouvernement libéral a bâillonné
l'opposition pour adopter une loi sur
les hydrocarbures qui a rouvert toute grande la porte aux gaz de schiste. Avec
la CAQ, il a refusé d'interdire la
fracturation hydraulique. Résultat : l'entreprise albertaine Questerre a
repris ses travaux d'évaluation du potentiel
gazier dans Bécancour et Lotbinière. Quand la loi a été adoptée, savez-vous ce
que Questerre a dit? Nous nous réjouissons de cet important pas en
avant, ça va nous permettre d'accélérer notre travail pour opérer dans les
basses terres. Le ministre des Ressources
naturelles, il sait très bien qu'il a, en quelque sorte, donné un signal de
départ à Questerre.
La question,
elle est simple. La population, elle ne veut pas se faire répéter que Questerre
n'a pas encore déposé de demande
formelle, elle veut que le ministre lui garantisse qu'aucune licence ne sera
délivrée pour du gaz de schiste. Peut-il le faire, M. le Président?
Le Président : M. le ministre
des Ressources naturelles.
M. Pierre Arcand
M.
Arcand : D'abord,
M. le Président, je pense que, depuis nombre d'années maintenant, je vois ça :
le Parti québécois essaie de faire peur à la
population en revenant toujours sur le fait qu'il y aura évidemment des
exploitations de gaz de schiste dans
les basses terres du Saint-Laurent. Pourtant, ils ont approuvé, en 2014,
la loi qui limite les activités pétrolières et gazières spécifiquement
dans les basses terres du Saint-Laurent.
Je rappelle que ce dont on parle aujourd'hui,
c'est la question qui a été mentionnée à un moment donné par Questerre sur le fait qu'ils avaient des permis et
qu'ils allaient examiner qu'est-ce qu'ils allaient faire avec ça. À ce
stade-ci, on n'a aucune demande de la
part de Questerre pour des travaux d'exploration, et je peux assurer cette
Chambre, M. le Président, qu'aucune
licence ne sera octroyée tant que les règlements qui découlent de la loi sur
les hydrocarbures ne seront pas en vigueur et encore moins si
l'acceptabilité sociale, M. le Président, n'est pas au rendez-vous.
Le Président : Première
complémentaire, M. le député de Jonquière.
M. Sylvain Gaudreault
M.
Gaudreault : Oui, M. le Président. Le rapport du BAPE de décembre 2014
est très clair : pas de rentabilité de l'exploitation des gaz de schiste, détérioration de la qualité de l'air,
augmentation des GES, pollution des eaux de surface et des eaux
souterraines et surtout — surtout — pas
d'acceptabilité sociale.
La vraie
question que les gens de Lotbinière, de Bécancour se posent et que le
gouvernement n'a jamais voulu répondre
clairement : Est-ce que, oui ou non, il garantit aux citoyens de cette
région qu'aucune licence ne sera délivrée pour l'exploitation du gaz de
schiste?
Le
Président : M. le ministre des Ressources naturelles.
M. Pierre Arcand
M.
Arcand :
M. le Président, je viens de dire que, s'il n'y a pas d'acceptabilité sociale,
il n'y aura pas de projet. C'est très différent du contrat qui a été
signé, M. le Président, par le Parti québécois dans le cas d'Anticosti.
Alors,
encore une fois, je tiens à vous rappeler que, lorsque des projets sont
présentés, ça prend des licences, ça prend des permis, à la fois un
certificat d'autorisation du ministère de l'Environnement, un permis qui est
émis par le ministère de l'Énergie et des
Ressources naturelles. Et, dans ces cas-là, on tient compte de l'acceptabilité
sociale, M. le Président. Donc, pas d'acceptabilité sociale, pas de
projet, M. le Président.
• (10 h 40) •
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le député de Jonquière.
M. Sylvain Gaudreault
M.
Gaudreault : Oui, M. le Président. Le Parti québécois a voulu faire
inscrire l'interdiction claire de l'exploitation du gaz de schiste dans la Loi sur les hydrocarbures, ce qui aurait permis
de refléter le consensus québécois. Mais, malheureusement, pour les gens touchés, particulièrement à
Nicolet-Bécancour, leur député local de Nicolet-Bécancour a voté pour la loi sous le bâillon du
gouvernement, comme le Parti libéral. Alors, le gouvernement doit aujourd'hui
rassurer les citoyens.
Quand va-t-il fermer
définitivement la porte aux gaz de schiste?
Des voix :
...
Le Président :
M. le leader du deuxième groupe d'opposition.
M.
Bonnardel : Il y a un député qui vient de dire exactement le
contraire de ce que mon collègue a voté. J'aimerais qu'il se relève et qu'il
s'excuse, au nom du député de Nicolet-Bécancour.
Le Président :
Je pense que le message est passé. M. le ministre des Ressources naturelles.
M. Pierre Arcand
M.
Arcand :
M. le Président, quand on voit ce qui se passe au niveau d'Anticosti, on voit
jusqu'à quel point il y a de la confusion au sein des partis d'opposition.
Nous
avons un plan qui a été très clair, M. le Président, un plan sur la question
des hydrocarbures. Je pense que, sur
la question d'Anticosti également, notre position est claire, elle est connue,
elle est prévisible. On n'est pas contre les projets d'hydrocarbures, mais il faut que ce soient des projets,
encore une fois, dans lesquels il y a une acceptation générale de la population. Et on a des règlements
qui sont très stricts, des règlements qui vont être déposés très bientôt,
suite à l'adoption de la loi n° 106, des règlements qui vont encadrer,
justement...
Le Président :
En terminant.
M.
Arcand :
...cette exploitation des hydrocarbures, M. le Président.
Le Président :
Principale, M. le député d'Arthabaska.
Entente de continuité concernant l'usine Grande-Baie de
Rio Tinto Alcan
M. Éric Lefebvre
M. Lefebvre :
Merci, M. le Président. Les travailleurs de l'usine Grande-Baie de Rio Tinto au
Saguenay—Lac-Saint-Jean ont reçu toute une tuile sur la
tête en début d'année : plus d'une centaine d'entre eux ont été mis à la
porte, des familles dévastées, une région durement touchée.
Quelle a été la
réponse du premier ministre, qui est aussi ministre responsable de la région?
C'est un choix de l'entreprise. Le marché de l'aluminium traverse une période difficile. Pourtant, ce
même gouvernement libéral a signé, en
2006, une entente de continuité. Cette entente prévoit des retombées majeures
pour la région, des investissements de plusieurs milliards, des bons emplois
bien rémunérés, des projets d'agrandissement d'usine comme celle d'Alma, un investissement
de 2 milliards.
Ma
question est simple : Est-ce que le premier ministre va faire respecter l'entente de continuité... du gouvernement libéral a signée en 2006?
Des voix :
...
Le Président : S'il vous
plaît! M. le premier ministre.
M. Philippe Couillard
M. Couillard : Je suis content de me lever là-dessus. D'ailleurs, je le félicite. Je pense, c'est la première question du collègue dans cette Chambre.
Bienvenue.
Des voix :
...
M. Couillard : Oui, c'est une question qui est très pertinente, d'autant plus qu'effectivement ça nous permet de dire, M. le
Président, que l'entente de
continuité, elle est respectée. Qu'il la lise, qu'il s'informe. On sera heureux
de lui donner les informations. L'entente de continuité, elle est respectée. Il n'y a
pas de perte d'emploi. Il n'y a personne qui a perdu de job à cette usine-là. Ce sont des emplois qui ne
seront pas remplacés par attrition, parce
qu'effectivement le marché de l'aluminium traverse une période
difficile. On ne peut pas le nier, personne ici.
Deuxièmement,
l'automatisation gagne également le secteur de l'aluminium. J'ai eu l'occasion
moi-même de visiter des cuves où il y
avait autrefois 15 personnes; il y en a trois, maintenant. Et ça, ça va se
produire dans toutes les usines d'aluminium partout dans le monde. Et le
Québec, l'Amérique du Nord n'y échappera pas.
Cependant,
nous, on a un enjeu extraordinaire, on a un atout extraordinaire qui est
l'hydroélectricité du Québec. La
seule raison pour laquelle on a, au Québec, une industrie de l'aluminium, c'est
la présence de notre hydroélectricité et l'ouverture du gouvernement, particulièrement des gouvernements
libéraux, à ce que cette industrie investisse. On veut qu'ils
investissent davantage. On veut leur dire que c'est important, leur présence,
dans la région. Ça crée beaucoup d'emplois, ça crée beaucoup de richesse pour
la région du Saguenay—Lac-Saint-Jean
et tout le Québec.
J'ai
eu une communication directe du dirigeant mondial de l'entreprise. Il a été
clair, les investissements de Rio Tinto seront prioritairement destinés au Saguenay, parce qu'ils sont satisfaits
de la main-d'oeuvre, satisfaits de l'environnement social. Gardons
l'environnement positif, M. le Président.
Le Président :
Première complémentaire, M. le député d'Arthabaska.
M. Éric Lefebvre
M.
Lefebvre : Merci beaucoup. Merci, M. le Président. Si je comprends
bien, le gouvernement libéral a signé une
entente de continuité en 2006 pour préserver les emplois. Aujourd'hui, c'est le
contraire, on a un exemple clair : l'usine de Grande-Baie avait 720 employés; maintenant, ils sont 300. Les
travailleurs du Saguenay, M. le Président, méritent mieux.
Est-ce
que le premier ministre s'est au moins assis avec les dirigeants de Rio Tinto
pour demander le respect de cette entente?
Le Président :
M. le premier ministre.
M. Philippe Couillard
M. Couillard : Je le fais continuellement. Puis ça s'adonne, M. le Président, que
l'entente est respectée. Puis ce n'est pas du tout ce que le collègue dit, en
tout respect. Qu'il relise l'entente. On sera prêts à lui expliquer la
signification de l'entente. Ce n'est pas ce que l'entente dit.
Maintenant,
effectivement, j'ai rencontré et je rencontrerai à de nombreuses reprises les
dirigeants de l'entreprise en pensant
aux travailleurs, à leurs familles puis à l'économie de ma région, parce qu'il
est absolument essentiel que les investissements
se poursuivent. Il y a deux projets majeurs : il y a l'agrandissement de
l'usine d'Alma puis il y a l'AP60. On
veut que les deux projets se fassent. On a dit à l'entreprise, on leur
répète : On a tous les outils pour vous aider à prendre votre
décision d'investissement. Venez nous voir, on va faire que ça marche, vous
êtes bienvenus au Saguenay—Lac-Saint-Jean.
Il
faut que l'économie reste en direction de
la prospérité. Et, sans industrie de l'aluminium prospère au Québec, on n'aura pas
de Saguenay—Lac-Saint-Jean
prospère, redisons-le.
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le député d'Arthabaska.
M. Éric Lefebvre
M. Lefebvre :
Merci, M. le Président. Je conclus que le premier ministre se doit de
rencontrer à nouveau les dirigeants d'Alcan pour respecter l'entente qui a été
signée par le gouvernement libéral en 2006.
Est-ce
que le premier ministre peut s'engager à rencontrer à nouveau les gens d'Alcan
pour régler et continuer ce qui a été signé en 2006 et qu'on respecte ce
qui a été entendu avec le gouvernement?
Le Président :
M. le premier ministre.
M. Philippe Couillard
M.
Couillard : M. le Président,
encore une fois, en tout respect, notre collègue doit s'informer davantage.
L'entente est respectée, donc on n'a pas à avoir de discussion
là-dessus. Elle est respectée, l'entente.
Mais ce sur quoi on
rencontre régulièrement l'entreprise, soit moi, soit ma collègue ou les autres ministres
du gouvernement, c'est les investissements
futurs de Rio Tinto dans la région, notamment l'agrandissement de l'usine
d'Alma et le projet d'AP60. C'est sur
ça qu'on devrait tous ensemble s'appuyer, les uns les autres, pour s'assurer
qu'au siège social de Londres on
entend le signal d'accueil de la région et du Québec pour l'entreprise mais
également un message très fort qu'on désire l'investissement et qu'on va
l'appuyer ici collectivement.
Le Président : Principale, M.
le député de Saint-Jean.
Services aux élèves
handicapés ou en difficulté
d'adaptation ou d'apprentissage
M. Dave Turcotte
M.
Turcotte : M. le
Président, voici la question d'une citoyenne de Saint-Jérôme, Nadia Lévesque,
qui nous a écrit pour que l'on interroge la
ministre de la Réadaptation au sujet de l'autisme. Mme Lévesque rappelle
qu'il y a presque un an jour pour
jour la ministre avait bien déçu des gens lors de son forum national sur
l'autisme en ne promettant qu'un plan
d'action d'ici 2016, sans argent supplémentaire. Nadia Lévesque dit : «Mis
à part des coupes de services et une perte de temps considérable pour obtenir les allocations destinées aux enfants
lourdement handicapés, nous, les parents d'enfants autistes, n'avons vu
aucun changement depuis ce forum.»
M. le
Président, la ministre, est-ce qu'elle peut dire à Nadia Lévesque, de
Saint-Jérôme, pourquoi elle n'a pas respecté son engagement de déposer son plan d'action? Et à quand un
réinvestissement pour les enfants autistes et leurs parents?
Le Président : Mme la
ministre responsable de la Réadaptation.
Mme Lucie Charlebois
Mme
Charlebois :
Alors, M. le Président, depuis mon entrée en fonction, s'il y a une des
préoccupations, un des dossiers qui m'a animée par-dessus tout, c'est
bien l'autisme.
Et je vais
rappeler à mon collègue, effectivement, que, l'année dernière, en février 2016,
nous avons tenu un premier forum
québécois sur l'autisme, ce qu'ils n'ont pas pensé de faire alors qu'ils
étaient au pouvoir. Je comprends qu'ils auraient aimé ça, mais on y est arrivés, nous. À partir de ce forum, les gens qui
étaient sur place, pas les élus, M. le Président, mais les gens qui étaient sur place, c'est-à-dire des
intervenants, des spécialistes et des personnes elles-mêmes atteintes du
trouble du spectre de l'autisme, ont
pu fixer des objectifs. Il y en a eu 10 que nous nous sommes fixés sur place,
en temps réel.
Je me
suis engagée, effectivement, à déposer un plan d'action, et le plan d'action
devra tenir compte, M. le Président... parce
que ce que nous souhaitons, c'est d'offrir davantage de services. Et vous savez que le trouble du spectre de l'autisme, c'est un... le trouble grandit. À tous les quatre
ans, ça double au Québec. Mais c'est comme ça partout dans le monde.
Alors, ce que nous souhaitons, c'est offrir davantage de services en lien avec
les objectifs que les gens...
Le Président : En terminant.
Mme Charlebois :
...se sont fixés.
Le Président : Alors, cela met
fin à la période des questions et de réponses orales.
Motions sans préavis
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Alors, nous en sommes maintenant à la rubrique
des motions sans préavis. Et, selon nos
règles et l'ordre de présentation, je vais céder la parole à un membre formant
l'opposition officielle. Et je cède la parole à M. le député de
Verchères.
Mettre en oeuvre le
projet d'élargissement de l'autoroute 50
M. Bergeron :
Mme la Présidente, je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée
afin de présenter, conjointement avec le député de Deux-Montagnes et le
député de Groulx, la motion suivante :
«Que
l'Assemblée nationale prenne acte de la dangerosité de plusieurs tronçons de
l'autoroute 50 pour ses usagers;
«Qu'elle déplore les nombreuses pertes [de vies
humaines] sur son tracé;
«Qu'elle
presse le ministre des Transports, de la Mobilité durable et de
l'Électrification des transports d'aller de l'avant rapidement avec le projet d'élargissement à 4 voies de
l'autoroute 50, par phases et que ces travaux soient inscrits dans
le Plan québécois des infrastructures.»
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Alors, je vous remercie, M. le député. Y
a-t-il consentement pour débattre de cette motion?
M. Tanguay : Nous
proposons de l'adopter sans débat.
Mise aux voix
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Alors, très bien. Est-ce que cette motion est
adoptée?
Des voix :
Adopté.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Adopté. Maintenant, je vais
reconnaître un membre du deuxième groupe d'opposition et je cède la
parole à M. le député de Chambly.
M. Roberge :
Mme la Présidente, je demande le consentement pour déposer la motion suivante
conjointement avec le député du Lac-Saint-Jean et le député de
Groulx :
«Que
l'Assemblée nationale demande au gouvernement de revoir sa méthode de calcul du
taux de diplomation en excluant le taux de qualification afin d'avoir un
véritable portrait de la diplomation au Québec.»
• (10 h 50) •
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, est-ce qu'il y a
consentement pour débattre de cette motion?
Une voix :
...
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Il n'y a pas de consentement.
Maintenant, je vais céder la parole à un membre du groupe formant le gouvernement et je cède la parole à M. le
ministre de l'Éducation, du Loisir et du Sport.
Souligner les Journées de la persévérance scolaire
M. Proulx : Merci, Mme la Présidente. Je sollicite le consentement de cette
Assemblée afin de présenter la motion suivante conjointement avec le
député de Lac-Saint-Jean, le député de Chambly, le député de Mercier et le
député de Laurier-Dorion :
«Que
l'Assemblée nationale souligne la tenue, du 13 au 17 février 2017,
des Journées de la persévérance scolaire;
«Qu'elle
remercie et félicite toutes celles et ceux qui relèvent chaque jour le défi de
soutenir les élèves sur la voie de la réussite scolaire;
«Qu'elle
invite l'ensemble de la population québécoise à accompagner les jeunes sur le
chemin de la persévérance scolaire;
«Qu'elle encourage
les jeunes à persévérer et à se dépasser.» Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, M. le ministre. Y
a-t-il consentement pour débattre de cette motion?
M. Tanguay :
Nous proposons de l'adopter sans débat.
Mise aux voix
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Alors, très bien. Est-ce que cette motion est adoptée?
Des voix :
Adopté.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Adopté. Et, pour la prochaine motion, je vais céder la
parole à M. le député de
Mercier.
Reconnaître l'importance des juristes de l'État et
demander au
gouvernement de dévoiler aux parlementaires les offres patronales
M. Khadir : Mme la
Présidente, je demande le
consentement de la Chambre pour débattre de la motion suivante
conjointement avec la députée de Pointe-aux-Trembles, le député de Borduas et
le député de Groulx :
«Que l'Assemblée
nationale reconnaisse l'importante contribution des juristes de l'État;
«Que
l'Assemblée nationale demande au gouvernement de dévoiler aux
parlementaires les offres patronales.»
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le
député. Y a-t-il
consentement pour débattre de cette motion.
M. Tanguay :
Nous proposons de l'adopter sans débat.
Mise aux voix
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, est-ce que cette motion est adoptée? M. le leader de l'opposition officielle.
M.
Bérubé : Mme la
Présidente, nous demandons le vote par appel nominal.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, c'est très bien. Je vais
suspendre les travaux. Nous allons avoir un vote par appel nominal.
Que nous appelions
les députés.
• (10 h 52 — 10 h 55)
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, nous allons procéder au vote sur la motion présentée par M. le député de Mercier, qui se lit comme suit. Cette motion était
présentée conjointement avec la députée
de Pointe-aux-Trembles, le
député de Borduas et le député de Groulx. Alors :
«Que l'Assemblée
nationale reconnaisse l'importante contribution des juristes de l'État;
«Que
l'Assemblée nationale demande au gouvernement de dévoiler aux parlementaires
les offres patronales.»
Et que les députés en
faveur de cette motion veuillent bien se lever.
La
Secrétaire adjointe : M. Khadir (Mercier).
M. Couillard (Roberval),
M. Fournier (Saint-Laurent), M. Blais (Charlesbourg), Mme Charbonneau
(Mille-Îles), M. Hamad (Louis-Hébert), M. Leitão
(Robert-Baldwin), Mme Anglade (Saint-Henri—Sainte-Anne), M. Coiteux (Nelligan), M. Proulx (Jean-Talon),
M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Vallée (Gatineau), M. Lessard
(Lotbinière-Frontenac), M. Barrette (La Pinière),
M. Drolet (Jean-Lesage), Mme Charlebois (Soulanges), M. Moreau
(Châteauguay), M. Heurtel (Viau),
M. Arcand (Mont-Royal), Mme Vien (Bellechasse), M. Billette
(Huntingdon), M. Fortin (Sherbrooke), M. Reid (Orford),
M. Morin (Côte-du-Sud), Mme Nichols (Vaudreuil), M. Bernier
(Montmorency), Mme de Santis (Bourassa-Sauvé),
Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce), Mme Ménard (Laporte), M. Tanguay
(LaFontaine), Mme Boulet (Laviolette), Mme Rotiroti
(Jeanne-Mance—Viger),
M. Carrière (Chapleau), M. Poëti (Marguerite-Bourgeoys),
M. Girard (Trois-Rivières), M. Chevarie (Îles-de-la-Madeleine),
M. Auger (Champlain), Mme Vallières (Richmond), M. Iracà (Papineau), M. Bolduc
(Mégantic), M. Simard (Dubuc), M. Matte (Portneuf), M. Birnbaum
(D'Arcy-McGee), M. Boucher (Ungava), M. Bourgeois
(Abitibi-Est), M. Fortin (Pontiac), M. Giguère (Saint-Maurice),
M. Habel (Sainte-Rose), M. Hardy
(Saint-François), M. Merlini (La Prairie), Mme Montpetit (Crémazie),
M. Polo (Laval-des-Rapides), Mme Simard (Charlevoix—Côte-de-Beaupré),
M. St-Denis (Argenteuil), Mme Tremblay (Chauveau), Mme Sauvé
(Fabre), Mme Melançon (Verdun).
M. Lisée (Rosemont),
M. Bérubé (Matane-Matapédia), M. Marceau (Rousseau), Mme Léger
(Pointe-aux-Trembles), M. Lelièvre (Gaspé), Mme Maltais
(Taschereau), Mme Lamarre (Taillon), M. LeBel (Rimouski), M. Bergeron
(Verchères), Mme Richard (Duplessis), M. Rochon (Richelieu),
Mme Poirier (Hochelaga-Maisonneuve), M. Cloutier (Lac-Saint-Jean),
M. Therrien (Sanguinet), M. Gaudreault (Jonquière), M. Pagé
(Labelle), M. Cousineau (Bertrand), M. Bourcier
(Saint-Jérôme), Mme Jean (Chicoutimi), M. Ouellet (René-Lévesque),
M. Villeneuve (Berthier), Mme Fournier (Marie-Victorin),
M. Traversy (Terrebonne), M. Kotto (Bourget), M. Turcotte
(Saint-Jean), M. Roy (Bonaventure).
M. Legault
(L'Assomption), M. Bonnardel (Granby), M. Caire (La Peltrie),
M. Charette (Deux-Montagnes), M. Martel (Nicolet-Bécancour),
Mme Roy (Montarville), Mme Samson (Iberville), M. Roberge
(Chambly), M. Laframboise (Blainville), M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs),
M. Lefebvre (Arthabaska), M. Lemay (Masson), Mme Lavallée
(Repentigny), Mme D'Amours (Mirabel), Mme Soucy (Saint-Hyacinthe),
M. Spénard (Beauce-Nord), M. Paradis (Lévis), M. Picard
(Chutes-de-la-Chaudière), M. Jolin-Barrette (Borduas).
Mme Massé
(Sainte-Marie—Saint-Jacques),
M. Surprenant (Groulx), M. Sklavounos (Laurier-Dorion).
La Vice-Présidente (Mme
Gaudreault) : Alors, y a-t-il des députés contre cette motion? Des
abstentions? Alors, M. le secrétaire général, pour le résultat du vote.
Le
Secrétaire : Pour : 105
Contre :
0
Abstentions :
0
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, cette motion est adoptée.
Alors, nous en sommes toujours à la
rubrique des motions sans préavis. Je vais céder la parole à M. le leader
adjoint du gouvernement.
M. Tanguay : Oui.
Merci, Mme la Présidente. Alors, suite à des échanges et une entente avec
l'opposition, je sollicite le consentement afin de présenter une
deuxième motion qui touche la tenue de consultations particulières.
La Vice-Présidente (Mme
Gaudreault) : Alors, y a-t-il consentement pour déroger à
l'article 84.1 de notre
règlement pour permettre la présentation d'une motion supplémentaire? Il semble
y avoir consentement. Allez-y, M. le
leader adjoint. Et je demande aux membres de cette Assemblée qui doivent
quitter de le faire en silence, s'il vous plaît. M. le leader adjoint.
Procéder à des consultations particulières
sur le projet de loi n° 126
M. Tanguay : Merci,
Mme la Présidente. Alors, je fais motion, conformément à l'article 146 du
règlement de l'Assemblée nationale, afin :
«Que la Commission des finances
publiques, dans le cadre de l'étude du projet de loi n° 126, Loi
favorisant la santé financière et la pérennité du régime de retraite du
personnel d'encadrement et modifiant diverses dispositions législatives,
procède à des consultations particulières et tienne des auditions publiques les
22 et 23 février 2017.
• (11 heures) •
«Qu'à cette fin, la commission entende les organismes
suivants : la Coalition de l'encadrement en matière de retraite et d'assurance[...], le Regroupement des
associations de cadres en matière d'assurance et de retraite[...],
l'Association démocratique des retraités[...], l'Association des
retraités [...] de l'enseignement du Québec[...], le Comité de sauvegarde du
Régime de retraite du personnel d'encadrement[...], la Caisse de dépôt et de
placement du Québec[...], M. Guy
Lessard, de l'Association québécoise des directeurs et directrices
d'établissements d'enseignement à la retraite[...], M. Donald Tremblay de l'Association
québécoise des retraité‑e‑s des secteurs public et parapublic [...] et
M. Réjean Gauvin de l'Association québécoise du personnel retraité
de direction des écoles;
«Que la durée maximale de l'exposé de chaque organisme
soit de 10 minutes et l'échange avec [les parlementaires, des] membres
de la commission soit d'une durée
maximale de 35 minutes partagées ainsi :
17 minutes 30 secondes pour le groupe parlementaire formant le gouvernement,
10 minutes 30 secondes pour l'opposition officielle et
7 minutes pour le deuxième groupe d'opposition;
«Que la durée maximale de l'exposé conjoint de
M. Guy Lessard, de M. Donald Tremblay et [...] M. Réjean Gauvin
soit de 15 minutes et l'échange avec
les membres de la commission soit d'une durée maximale de 45 minutes
partagées ainsi : 22 minutes 30 secondes pour le
groupe parlementaire formant le gouvernement, 13 minutes 30 secondes
pour l'opposition officielle et 9 minutes pour le deuxième groupe
d'opposition;
«Que le ministre responsable de l'Administration gouvernementale et de la Révision permanente des programmes et président
du Conseil du trésor soit membre de ladite commission pour la durée du mandat.»
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le
leader adjoint. Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette
motion?
Mise aux voix
Alors, cette motion est-elle adoptée?
Des voix : Adopté.
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Adopté.
Avis touchant les
travaux des commissions
Alors, s'il
n'y a pas d'autres motions sans préavis, nous allons passer à la rubrique des
avis touchant les travaux des commissions, et je recède la parole à M.
le leader adjoint du gouvernement.
M. Tanguay :
Oui. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, j'avise cette Assemblée que la
Commission des transports et de
l'environnement poursuivra l'étude détaillée à l'égard du projet de loi
n° 102, Loi modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement afin de moderniser le régime d'autorisation
environnementale et modifiant d'autres dispositions législatives
notamment pour réformer la gouvernance du Fonds vert, aujourd'hui, après les
affaires courantes jusqu'à 13 heures, à
la salle Louis-Joseph-Papineau, et de 15 heures à 18 heures, à la
salle des Premiers-Ministres de l'édifice Pamphile-Le May;
La Commission
de l'aménagement et du territoire poursuivra les consultations particulières à
l'égard du projet de loi n° 122, Loi visant principalement à
reconnaître que les municipalités sont des gouvernements de proximité et à augmenter à ce titre leur autonomie et leurs
pouvoirs, aujourd'hui, à compter de 11 h 15, pour une durée de
45 minutes, et de 15 heures à 18 h 45, à la salle
Louis-Hippolyte-La Fontaine;
La Commission
de la santé et des services sociaux poursuivra les consultations particulières
à l'égard du projet de loi
n° 130, Loi modifiant certaines dispositions relatives à l'organisation
clinique et à la gestion des établissements de santé et de services sociaux, dès maintenant, pour une durée de deux
heures, et complétera lesdites consultations de 15 heures à
17 h 30, à la salle du Conseil législatif;
Et finalement, Mme la Présidente, la Commission
des institutions entreprendra l'étude détaillée à l'égard du projet de loi n° 98, Loi modifiant diverses
dispositions... Loi modifiant, pardon, diverses lois concernant principalement
l'admission aux professions et la gouvernance du système professionnel,
aujourd'hui, à compter de 15 h 45 jusqu'à 18 heures, à la salle
Louis-Joseph-Papineau.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, je vous remercie, M. le
leader adjoint du gouvernement. Alors, est-ce
qu'il y a consentement pour déroger à l'article 143 du règlement
concernant l'horaire des travaux des commissions? Consentement? Très
bien.
Alors, pour
ma part, je vous avise que la Commission des institutions se réunira en séance
de travail demain, jeudi le 16 février 2017, à 8 heures
pour une durée de 30 minutes, à la salle RC.171, afin de statuer sur
la possibilité que la commission se saisisse
d'un mandat d'initiative visant à analyser les circonstances entourant l'octroi
de subventions du Fonds d'intervention économique régional
FIER-Boréal 02 à l'entreprise BCIA.
Affaires
du jour
Maintenant,
nous en sommes à rubrique des renseignements sur les travaux de l'Assemblée,
et, s'il n'y a pas de question à ce
sujet, la période des affaires courantes étant terminée, nous allons maintenant
passer aux affaires du jour. Et je recède la parole à M. le leader
adjoint du gouvernement.
M. Tanguay : Merci,
beaucoup, Mme la Présidente. Je vous prierais d'appeler l'article 68.
Débats statutaires
Reprise du débat sur le
rapport de la Commission de la représentation
électorale concernant la délimitation des circonscriptions électorales
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, à l'article 68 du
feuilleton, l'Assemblée reprend le débat ajourné le 14 février 2017 sur le rapport de la Commission de la
représentation électorale du Québec concernant la délimitation des
circonscriptions électorales, qui a été déposé le 7 février 2017.
Je vous
rappelle que, conformément à l'article 28 de la Loi électorale, il s'agit
d'un débat limité à cinq heures qui peut
se tenir au cours d'une même séance ou lors de deux séances consécutives à
l'Assemblée. Je vous informe qu'il reste
1 h 15 min 7 s au débat, dont
15 min 55 s au groupe parlementaire formant le gouvernement,
12 min 33 s au groupe parlementaire
formant l'opposition officielle, 15 min 46 s au deuxième groupe
d'opposition et 30 min 53 s aux députés de Québec
solidaire.
Et je cède
maintenant la parole au prochain intervenant, qui sera Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Mme Manon Massé
Mme
Massé : Merci, Mme la Présidente. Alors, bonjour, chers collègues. Je suis heureuse, pour les
30 prochaines minutes, d'avoir
l'opportunité, au nom de mes concitoyens et concitoyennes, de venir vous
présenter notre magnifique comté de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
J'aimerais bien sûr, d'entrée de jeu, souligner
le travail extrêmement difficile que doivent avoir les gens de la Commission
de la représentation électorale, je
pense notamment à M. Reid, MM. Jean et Courville, puisque, par
définition, quand on dit «électoral»,
il y a inévitablement des batailles à travers... avec différents partis
politiques pour en arriver à déterminer notre représentation.
Je n'ai pas
le temps aujourd'hui de vous parler de la réforme du scrutin, mais vous
comprendrez que, dès que nous aurons
réussi à voir comment la carte électorale et le processus, présentement, qui
n'a pas inclus la consultation des gens de Sainte-Marie—Saint-Jacques...
Quand on aura réussi à régler cette situation-là, nous pourrons revenir sur ces
questions plus de fond, puisque la représentativité effective des
électeurs nécessiterait que chaque vote compte.
Alors, je
dois dire, malheureusement, que le second rapport de la Commission de la
représentation électorale a créé, bien sûr, tout un émoi dans ma
circonscription et depuis la dernière semaine. La proposition de la
délimitation des circonscriptions sur l'île de Montréal en a surpris plusieurs,
moi la première, mais surpris plusieurs. Pourquoi? Et je le dis depuis des semaines... depuis une semaine,
pardon : Tout simplement parce que, pendant deux ans, à aucun moment
donné il n'a été question de regarder dans
le sud de l'île de Montréal pour atteindre l'objectif identifié de diminuer
d'une circonscription sur l'île de
Montréal. Et donc les gens du Centre-Sud ont été pris par surprise, et c'est à
cet effet que j'espère pouvoir un tant soit peu, dans les minutes qui
viennent, exprimer leurs voix.
Je veux vous
dire, parce qu'on l'a entendu, certains l'ont laissé entendre, Mme la
Présidente, qu'il est clair ici, pour
moi, qu'il n'est pas question de mon élection ou non. Depuis le jour 1,
depuis la première minute où mon collègue de Mercier et moi avons parlé de la carte électorale, nous avons toujours
ramené la démocratie et la parole de mes concitoyens au coeur de nos prises de parole. Alors, je veux
juste le redire, parce que ce n'est pas de moi qu'il s'agit mais bien du fier
monde du Centre-Sud, bien sûr dont je fais partie, puisque je suis aussi une
centre-sudiste, comme on dit.
Alors, le
Centre-Sud, c'est le fier monde, c'est le faubourg des ouvriers, c'est les
minorités de la diversité sexuelle, c'est les artistes, c'est des gens
qui, depuis la fondation de Montréal, se sont créé un esprit, sont devenus
ensemble le centre-ville historique de
Montréal et non pas le centre-ville déplacé que la nouvelle reconfiguration des
arrondissements nous amène.
• (11 h 10) •
Alors, dans
un premier temps, je vais vous parler d'un grand cri du coeur, le cri du
quartier Centre-Sud. Bien sûr, Sainte-Marie—Saint-Jacques, c'est mes concitoyens du
Centre-Sud, c'est mes concitoyens, concitoyennes du Vieux-Montréal et c'est mes concitoyens, concitoyennes du bas
Plateau. Cette circonscription, depuis près de 30 ans, a appris à cohabiter,
a appris à, je dirais même, développer des
liens assez solides pour faire en sorte qu'un coeur comme celui du Centre-Sud est un coeur qui bat et résonne pour l'ensemble
des autres communautés naturelles qui les entourent, j'entends le sud du bas
du Plateau et le Vieux-Montréal. D'ailleurs,
c'est fascinant comment les gens du Vieux-Montréal, une certaine frange,
Faubourg Québec, etc., se qualifient comme
étant des gens du Centre-Sud. Il y a quelque chose d'identitaire qui s'est
passé à travers le temps.
Alors, le cri
du coeur est un consensus chez les organismes du Centre-Sud. L'événement du 12 février
dernier, d'ailleurs, où la
Corporation de développement communautaire du Centre-Sud avait appelé la population
à venir comprendre ce qui était en
train de se passer, où on était, malgré un froid de canard... non, ce n'est pas la bonne expression. Alors,
il faisait
froid, on s'entend. Les gens sont sortis à près de 400, 500 personnes,
sont venus nous dire comment ils sentaient que, dans ce processus-là,
ils avaient été oubliés.
Il
y a aussi une circonscription qu'on me parle peu, et je le comprends,
puisqu'elle est la circonscription de notre président d'Assemblée, qui se doit bien sûr de se tenir loin de cet
échange-là, de cette discussion-là. Je l'exprimais plus tôt, les gens de la circonscription Westmount—Saint-Louis m'écrivent pour me dire comment eux
autres aussi ne sentent pas qu'ils
ont été entendus. Et je pense notamment — et c'est un groupe bien connu du Parti
libéral — comment
le Québec Community Groups Network a
signifié clairement que ces communautés-là aussi ont senti qu'elles n'ont pas
été consultées lors du rapport.
Hier, M. Coderre,
avec les représentants, la conseillère municipale de Sainte-Marie et le
conseiller municipal de Saint-Jacques...
Parce que l'arrondissement de Ville-Marie, c'est comme ça qu'il est
configuré : Sainte-Marie avec Mme Plante, Saint-Jacques avec
M. Bergeron, et Peter-McGill, qui est complètement autre chose.
Sainte-Marie—Saint-Jacques, c'est quelque chose qu'on connaît
depuis longtemps. Je pense qu'il faut se rappeler que même l'arrondissement
Ville-Marie, quand il s'est défini, s'est
appuyé sur la logique de vie historique de Sainte-Marie, et de Saint-Jacques,
et de Peter-McGill plus loin. Et là,
à l'inverse, on est en train de reconfigurer le palier du gouvernement du
Québec en retirant Sainte-Marie et en intégrant Peter-Mcgill. C'est une
piste. Les gens ont juste envie d'être entendus sur cette piste-là.
Alors,
bien sûr que, j'en parlais plus tôt, la représentation effective exige un
casse-tête que... Je dois vous avouer, Mme
la Présidente, même en tant que grande démocrate, je ne voudrais pas avoir la
job du comité de la représentativité électorale,
en tout cas pas dans un mode de scrutin uninominal à un tour. Ça doit être une
job terrible. Mais on sait que le poids
électoral doit tenter à être équitable le plus possible, bien sûr sur des
critères quantitatifs, le nombre d'électeurs, mais aussi sur des
critères qualitatifs.
Et
c'est bien de cela que je souhaite vous parler pour bien sûr permettre au
Directeur général des élections et à la commission... dont je suis convaincue
qu'ils m'écoutent comme ils écoutent très attentivement le débat actuel, mais
d'aider les gens à comprendre qui est donc cette circonscription de
Sainte-Marie—Saint-Jacques,
quelle est donc la communauté tantôt
naturelle, tantôt qui a développé des liens tellement tissés serré depuis des
décennies, voire des siècles qu'ils se sentent unis dans la situation
qui nous occupe présentement.
Alors,
Sainte-Marie—Saint-Jacques,
il y a bien sûr... c'est une circonscription qui a, à travers le temps, été une
circonscription où il y a moins de gens à
l'intérieur que d'autres endroits, d'autres circonscriptions à travers le
Québec. Bien sûr, on peut être tenté dans ce temps-là de dire :
Bien, dans le fond, on va la prendre et on va la disloquer, puisque, dans le fond, elle est déjà... elle vit
déjà un déficit. Hein, on était à moins 14 dans Sainte-Marie—Saint-Jacques. C'est sûr qu'il y en a qui sont à moins... il y en a beaucoup plus que
nous qui sont à moins quelque chose, mais celle de moins 14 peut être attirante pour l'oeil,
surtout si on ne la connaît pas bien. On dit : Ah! bien, déjà il y a le Vieux-Montréal, donc ça veut dire qu'il y a déjà une communauté plus aisée financièrement. Déjà, il y a
le bas du Plateau. Donc, on reconnaît que
la cohabitation est possible. Sauf que ce qu'on oublie, c'est que Sainte-Marie—Saint-Jacques, c'est un milieu de vie qui
coule très bien entre le parc Lafontaine — pour
les gens qui connaissent bien — entre
le parc Lafontaine jusqu'aux abords
du Vieux-Montréal, des quais. Qui coule très bien, pourquoi? Bien, parce que
c'est comme ça que la ville s'est construite,
Mme la Présidente. Le coeur, le Vieux-Montréal s'est déployé :
paroisse Saint-Jacques, une des premières, si ce n'est la première; Faubourg à
m'lasse, faubourg Sainte-Marie. La ville, le village, le hameau de
Sainte-Marie, vers l'est, est là depuis le début aussi.
Alors,
c'est sûr que ce n'est pas, disons... ce n'est pas la juxtaposition... mais ce
n'est pas le bon mot, ce n'est pas l'unification
d'un centre-ville, par exemple, comme Peter-McGill, qui a été construit beaucoup
plus par le commercial, d'ailleurs, comme milieu de vie. Sainte-Marie—Saint-Jacques, c'est des milieux de vie. C'est des milieux où on marche pour aller faire notre épicerie. D'ailleurs,
les gens de Sainte-Marie—Saint-Jacques sont les gens... en tout cas au début des
années 2000, étaient les gens, au Canada —je ne suis pas certaine si ma statistique est
encore bonne aujourd'hui — qui avaient
le moins de voitures par ménage. Pourquoi? On n'en a pas besoin, on est
habitués, depuis des siècles, à trouver... Parce qu'on était, on est le centre-ville, le Centre-Sud, on trouvait ce
qu'on avait besoin en marchant. Alors, c'est sûr...
Et
là, bien, il y a toutes sortes de développements qui s'en viennent en plus,
plusieurs ont eu lieu. D'ailleurs, la nécessité de densifier le
centre-ville, les gens de Sainte-Marie—Saint-Jacques en sont, ils le croient, mais
jamais au détriment, comme on l'a fait au
début des... au milieu des années 2000, de détruire, de raser un quartier
ouvrier complet pour être capable de
faire émerger quelque chose. Les gens, la fierté des gens du Centre-Sud ne
veulent plus que, parce qu'ils sont
différents, parce qu'ils ont moins de voix, parce qu'ils sont moins capables de
se payer des avocats... Parce que cette voix-là, elle est parfois
différente et parfois dissonante, ils ne font, pour plusieurs, pas partie de
l'élite, bien, parce que cette voix-là, elle est différente, elle nécessite
d'être entendue.
D'ailleurs,
je vous disais qu'il y a un consensus au niveau des organismes communautaires
de la circonscription. Le Coup de
pouce Centre-Sud — Coup de
pouce Centre-Sud qui fêtait dans les derniers mois leurs 40 ans
d'existence, Mme la Présidente — le Coup de pouce Centre-Sud,
je vous lis une partie d'un poème qui nous a été envoyé :
«Nous, les
Centre-Sudistes...» C'est assez... moi, j'adore ça.
«Nous,
les Centre-Sudistes — pas à
cause de l'histoire américaine, mais vraiment à cause d'être du sud — avons la dignité bien enlignée à la
hauteur du coeur
Plus qu'un
territoire, plus qu'un comté, plus qu'une carte électorale
Nous touillons ce
passé étonnant
Les coudes serrés et
la manivelle à entraide
Bien devant.
«Notre
voix a du coffre,
Notre trame est déjantée
Et pourtant elle jubile de fierté
Nous sommes bien enracinés et nous rêvons
Nous osons et sans cesse nous nous réinventons.»
• (11 h 20) •
C'est ça, le
Faubourg à m'lasse, Mme la Présidente. Et ce n'est pas juste un milieu naturel,
ce n'est pas juste un territoire
naturel, c'est des siècles de construction d'une identité. Et, même si je ne
suis pas native de là, parce que je suis née dans la région de Sherbrooke, je me sens profondément une femme du
Faubourg à m'lasse. Puis ce n'est pas dur à comprendre quand vous lisez des poèmes comme celui du Coup de pouce
Centre-Sud... bien, en fait, de Gisèle Caron, du Coup de pouce Centre-Sud. Et d'ailleurs, l'ironie, le Coup de pouce
Centre-Sud qui, depuis 40 ans, est dans le Centre-Sud, désormais, Mme la Présidente, va être dans
Hochelaga-Maisonneuve, si les projets de la carte se poursuivent. C'est ça, ne
pas comprendre la réalité du Centre-Sud. C'est une identité
forte.
Alors,
déjà Sainte-Marie—Saint-Jacques, au niveau municipal, a un déficit démocratique. Peut-être que je vais apprendre bien des choses, ici, à des gens, peut-être même au DGE et à la... comité de la représentation électorale : Depuis que la loi n° 22 a été passée
en 2008, les citoyens de ma circonscription sont les seuls, Mme la Présidente,
à Montréal, qui n'élisent pas leur
maire d'arrondissement. Ils sont les seuls, Mme la Présidente, qui n'élisent
pas leurs deux conseillers, un de l'arrondissement,
l'autre de ville. Pourquoi? Bien, parce que Ville-Marie, qui inclut
Sainte-Marie—Saint-Jacques et Peter-McGill,
Ville-Marie, les citoyens ne votent pas pour leur maire parce que c'est le
maire de la ville qui devient automatiquement
leur citoyen. Ils ne votent pas pour leurs conseillers de ville parce que c'est
le maire qui va les nommer, leurs conseillers de ville.
Alors,
voyez-vous, déjà ces gens-là ont un déficit démocratique dans leur parole au
niveau municipal, et là on leur
dit : Bien, Sainte-Marie—Saint-Jacques, dans le fond, c'est une circonscription qu'on peut
démanteler, démembrer, qu'on peut
ajouter aisément à Saint-Louis, Westmount, mais surtout à Saint-Louis, parce
que, dans les faits, il n'y a pas assez
de monde dans cette circonscription-là, alors que cette voix-là, cette voix-là
particulière, pensons aux itinérants, pensons
à la communauté LGBT, j'en parlerai un peu plus tard, pensons aux artistes,
cette voix-là a retrouvé, historiquement toujours, une résonnance à
travers les porte-parole qui étaient assis ici pour la circonscription de
Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Alors, je comprends que les gens de mon comté
souhaitent pouvoir avoir le temps d'aller exprimer leurs particularités, leur vivre-ensemble à la
commission, comme ont le droit d'autres citoyens qui ont aussi des
particularités, qui ont aussi des
vivre-ensemble. Moi, j'en suis une pâle représentation, de cette belle
diversité de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Alors donc,
déficit démocratique au niveau municipal. Il est important, donc, de nous
assurer que la voix particulière de
ces milieux-là, de ces communautés-là soit bien entendue ici, et non pas noyée
dans une voix qui aura certainement un
peu de difficultés à se comprendre, puisque, même en termes de maîtrise de la
langue, que ce soit la langue de Molière ou de Shakespeare... Ce qu'on essaie
d'unir comme deux milieux de vie naturels, mais qui n'ont que très peu de
choses en commun, notamment la langue, une forte proportion ne comprend
pas la langue de l'autre, ça ne sera pas facile.
Alors,
Sainte-Marie—Saint-Jacques
a toujours eu des députés peu fiers... Je pense bien sûr, dans Saint-Jacques,
à M. Charron, à M. Boulerice, qui, plus de
20 ans, a représenté... Et M.
Boulerice m'a écrit une lettre, lorsqu'il a appris que la circonscription allait être démembrée de telle
façon, il m'a écrit personnellement. Je vous en lis un extrait : «Fondre
le Centre-Sud dans ce qui m'apparaît
être un calque de l'arrondissement municipal de Ville-Marie est une erreur.» Ce
n'est pas un député péquiste, là, qui...
je veux dire Solidaire qui a dit ça, là. Là, je dis ça juste pour les gens qui
pensent qu'on fait ça de façon très partisane. Non, non, il y a une
identité à Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Donc, M.
Boulerice dit : «Quels sont les liens, les préoccupations qui unissent les
citoyens de la rue Montcalm et ceux
de la rue Drummond? Le Centre-Sud est un milieu de vie, alors que la partie
ouest de Ville-Marie est un territoire principalement
commercial.» Je ne parle pas de la montagne, bien sûr, là, je parle du sud. «La
logique de l'arrondissement municipal
Ville-Marie constitutif à la création d'un centre-ville n'a rien à voir avec la
constitution d'une circonscription provinciale.»
D'ailleurs,
je le réitère, il y a trois districts dans l'arrondissement Ville-Marie, dont
le district Sainte-Marie, qui avait
été divisé, il y a quelques années, entre Hochelaga-Maisonneuve et Sainte-Marie—Saint-Jacques. On avait divisé le village de Sainte-Marie : on avait donné une
portion puis on avait pris une portion dans Sainte-Marie—Saint-Jacques. Mais là ce n'est pas ça qu'on fait, on donne la portion Sainte-Marie à Hochelaga-Maisonneuve, alors qu'il y a une track de chemin de fer. Juste pour vous prouver comment
cette séparation, elle est aussi géographique, il y a une track de chemin
de fer qui sépare, depuis des décennies, des
siècles, Sainte-Marie—Saint-Jacques... bien, Sainte-Marie de
Hochelaga-Maisonneuve, et on prend Sainte-Marie, et on l'envoie dans
Hochelaga-Maisonneuve, mais on ajoute à Saint-Jacques Peter-McGill, alors qu'au
niveau municipal c'est trois districts très différents. Ce n'est pas pour rien.
Alors donc,
M. Boulerice qui dit : «Anyway» — et il
termine comme ça — pendant
20 ans, lorsque je m'adressais à mes
électeurs, je disais : Chers concitoyens et chères concitoyennes du
Centre-Sud, du Plateau et du Vieux-Montréal... Voilà 20 ans, André, ça doit faire un bon... M. Boulerice, ça
doit faire un bon 15 ans qu'il n'est plus député. Comprenez-vous
que ça fait longtemps qu'on a intégré la côte Sherbrooke, tel que je vous l'ai
défini un peu plus tôt?
M. Lemay
aussi, Martin Lemay, qui a été député de 2006 à 2012... En fait, je veux aller
plus rapidement, Martin dit : «Faut-il
rappeler que la circonscription de Sainte-Marie—Saint-Jacques constitue le coeur historique de la
métropole?» Il me semble que, dans
les critères, la commission a aussi cette dimension-là, patrimoniale, dont elle
doit tenir compte. Je m'arrête là.
Parlons de l'itinérance maintenant.
«Si je pouvais moduler, je préciserais que la période de consultation est incontournable, que le paysage de la circonscription est unique, [que] son ADN social ne se trouve nulle part au Québec.»
Sandhia Vadlamudy, de CACTUS Montréal.
Qu'est-ce qu'elle nous dit? Elle nous parle de l'itinérance. Pourquoi vous
pensez que les premiers centres d'injection
supervisée sont dans ma circonscription? C'est parce
qu'on cohabite avec la toxicomanie,
avec la prostitution, avec les gens qui vivent dans la rue, avec les gens qui
vivent de l'itinérance. On cohabite depuis longtemps. L'ADN social ne se
trouve nulle part ailleurs au Québec.
Vous savez,
d'ailleurs, dans mon comté : la Maison du Père, l'Accueil Bonneau, Old
Brewery, Patricia Mackenzie, La Rue
des femmes, toutes des ressources par rapport à l'itinérance. Saint-Louis,
l'autre partie de La Rue des femmes. De plus, cette diversité-là, on nous rappelle que, la proposition qui était
là — et je ne
sais pas si ça a été considéré — ça va être une circonscription
impossible à représenter, là. En plus de la diversité dont je vous parle, et je
n'ai pas terminé, il va se retrouver, Mme la
Présidente, trois universités : l'UQAM, Concordia, McGill; un très grand
cégep; le CHUM; le centre-ville; Place
Ville-Marie, et autres; le centre des affaires; le Vieux-Montréal; les musées
d'histoire et la Pointe-à-Callière; le Vieux-Port; le centre de
sciences; 300 organismes communautaires et culturels; la Bibliothèque nationale du Québec; le Musée d'art contemporain;
le Musée des beaux-arts; l'orchestre symphonique; la Place des Arts; la
Cinémathèque; le Palais de congrès; Radio-Canada; et le Centre Bell.
Ça va être de
la job. Parce que quelle voix vous allez porter quand vous avez tout ça à
porter? Celle des sans-voix déjà, des
gens déjà marginalisés, comme je faisais état, donc les gens de l'itinérance,
les gens vivant de l'aide sociale, les
gens qui ont déjà si peu de voix? D'ailleurs, un autre représentant de groupe
communautaire disait : «Ainsi, l'enjeu pour les groupes marginalisés, c'est vraiment la question de la
représentation de leurs droits et besoins auprès du gouvernement du Québec. Comment une députée qui
doit représenter autant d'institutions — que je viens d'énumérer — et d'organismes
pourrait également représenter les intérêts des moins nantis, des poqués, des
toxicomanes, des travailleurs, [travailleuses],
prostitué(e)s?» Ces gens sont déjà oubliés, sont perpétuellement oubliés dans
nos sociétés. Ça nous prend une voix forte à l'Assemblée nationale.
• (11 h 30) •
Ça, c'est
pour parler diversité. La communauté LGBT, il me semble que j'en parle
tellement souvent ici, de cette communauté-là.
Mais je ne suis pas la seule. Tous les députés qui ont passé ici... D'ailleurs,
Sainte-Marie—Saint-Jacques
a très régulièrement, dans l'histoire, sur
les 40 dernières années, eu des députés de la communauté pour les
représenter. Ce n'est pas un hasard, c'est une réelle... Entre vous et moi, Mme la Présidente, c'est plus qu'un sentiment d'appartenance.
Mme Line
Chamberland, qui est titulaire de la Chaire de recherche sur l'homophobie, Line
nous dit : «...je m'interroge sérieusement sur les impacts indirects de la carte électorale proposée sur la représentation de ces minorités
au sein de nos institutions démocratiques.»
Nous sommes la voix de ces minorités. «L'adoption d'une carte électorale qui
ferait disparaître le comté de Sainte-Marie—Saint-Jacques risque de pénaliser
les minorités sexuelles et de genre.
«Grâce à la concentration territoriale des
personnes LGBT [...] et à la présence de nombreux organismes qui défendent leurs droits, il [...] est plus facile
d'obtenir l'écoute de leur représentante [et] de leur représentant, actuel ou
futur, à l'Assemblée nationale [...] quelle que soit son allégeance politique.»
En fait, ce
que Line vient nous dire, vous savez, le Village gai, là, ce n'est pas juste le
village des gens qui vivent, il y a
une communauté d'appartenance. Les jeunes descendent des régions pour venir au
moins une fois dans leur Village gai. C'est un sentiment d'appartenance
important, ça. Il faut que cette voix soit bien entendue et bien représentée
ici, à l'Assemblée nationale, et non pas noyée dans un ensemble.
J'en aurais
tellement à dire, mais c'est pour ça qu'on continue de travailler, pour qu'il y
ait des réelles représentations que
puissent faire ces gens. Parce que, pour le moment, je ne fais que citer des
gens qui nous ont écrit depuis une
semaine — tout ça
en une semaine. «Le patrimoine culturel et historique fait aussi partie d'un
guide nécessaire lorsqu'on rebrasse
les dés par rapport aux frontières d'une carte électorale.» M. René Binette, le
directeur général de l'économusée, nous
dit : «Les nombreux projets de recherche et d'exposition réalisés à
[l'économusée] du fier monde démontrent que le quartier Centre-Sud a une histoire spécifique, un caractère distinct et
des traits culturels qui lui sont propres. Fondre ce quartier avec les comtés voisins ne peut se
justifier d'un point de vue historique, social et culturel.» René Binette,
directeur général de l'économusée du fier monde, un homme qui fait
partie de ce fier monde.
Alors, le
Centre-Sud, Sainte-Marie—Saint-Jacques,
c'est quoi? C'est un quartier hors des murs de la ville depuis le XVIIIe siècle. C'est important, ça, là, là. Le
faubourg se développe avec la révolution industrielle, Faubourg à m'lasse,
bien sûr, commence à prendre la physionomie
qu'on a aujourd'hui grâce à son patrimoine, son paysage. Même le plus ancien parc de Montréal est dans Sainte-Marie.
Sainte-Marie—Saint-Jacques
est vraiment majeur dans le... Et, bien sûr, c'est avec la création de
Sainte-Marie—Saint-Jacques,
à la fin des années 80... nous a amené une cohabitation avec le Vieux-Montréal vraiment intéressante.
Sainte-Marie—Saint-Jacques,
c'est le Quartier latin, aussi. Parlons-en, cette identité latine qui fait la
fierté de plusieurs Montréalais, Montréalaises, bien sûr, particulièrement des
gens plus jeunes, hein? C'est les universités. On s'y reconnaît.
Et je m'en voudrais, Mme la Présidente, de
terminer sans vous parler d'une des richesses bien connue de Sainte-Marie—Saint-Jacques, mais bien cachée aussi, qui est son
volet artistique. Saviez-vous, Mme la Présidente, que, dans le
Centre-Sud de Montréal, et ça n'inclut même pas le Quartier des spectacles, il
y a 459 entreprises culturelles, 10 939
emplois en français? C'est l'Espace libre, l'Usine C, le Théâtre Prospero, la
Maison Théâtre. Ça pullule. L'artistique transpire de l'ADN du Centre-Sud : pensons aux ateliers au Chat
d'artistes, pensons à la Grover, qui se sont battus pour avoir des ateliers accessibles financièrement pour
les artistes. Tout ça existe; sans considérer la multitude de productions
artistiques, que ce soient les contes du
Centre-Sud, documentaire. Allez voir ça, les gens de la commission, vous allez
voir qu'est-ce qu'on veut dire quand
on dit que ce démembrement de Sainte-Marie—Saint-Jacques pour l'intégrer à Saint-Louis, qui est une communauté
extrêmement différente de celle de Sainte-Marie... Allez
voir. De mémoire, c'est encore sur Tou.tv, une
réalisation de Danic Champoux, Conte du Centre-Sud. D'ailleurs, j'invite
tout le monde à aller voir ça et plein d'autres
documentaires qui ont été faits.
Je
tiens juste à rappeler la nécessité de laisser les gens de Sainte-Marie—Saint-Jacques pouvoir venir s'exprimer. Et je demande donc la collaboration de
l'ensemble de mes collègues, y compris de la partie gouvernementale, pour
permettre qu'ils puissent être entendus. Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la
députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques. Et, pour la poursuite de ce
débat, je vais céder la parole à M.
le député de Pontiac, tout en vous
rappelant que votre formation politique dispose d'un temps de parole de
15 min 55 s.
M. André Fortin
M.
Fortin (Pontiac) : Merci, Mme la Présidente. Je suis content de pouvoir intervenir dans le débat sur la carte électorale. J'aurais pu choisir, aujourd'hui, de me lever et de parler de l'ajout d'un sixième comté en Outaouais,
argument qui, par la démographie de votre comté, Mme la Présidente, de mon
comté, du comté du collègue de Chapleau, se tient et sur lequel je suis sûr que le DGE devra se pencher
au cours de ses prochaines révisions. Mais, Mme la Présidente, aujourd'hui, ce que j'aimerais faire, c'est plutôt parler du comté de
Pontiac, parce que, comme pour tous ceux qui m'ont précédé, il n'y a pas
de plus grand honneur que de répondre ici, en cette Chambre, au titre de député
de Pontiac.
Pontiac,
c'est 20 000 fiers résidents, des gens travaillants, des gens
chaleureux, des gens accueillants; des gens dédiés à l'avancement de leur région, qui ont la tête pleine de projets;
des gens directs, qui ne se gênent pas pour dire ce qu'ils pensent, même à leur député... surtout
à leur député; des gens que je suis
fier de représenter ici, dans notre Assemblée, parce que je viens moi-même du Pontiac, du village de Quyon, dans la
municipalité de Pontiac. Et cette municipalité, c'est 6 000 résidents qui, lorsqu'ils vous
entendent, Mme la Présidente, interpeler le député de Pontiac, se
reconnaissent. Ils savent qu'il y a
quelqu'un qui s'apprête à parler pour eux, à parler en leur nom. Et il y a la
MRC de Pontiac qui est 18 municipalités, de Rapides-des-Joachims à
Bristol. La MRC de Pontiac, c'est 14 000 résidents qui, encore là,
ont un attachement tout particulier à
leur région, à leur Pontiac, et eux aussi se reconnaissent quand ils entendent
le nom du grand chef amérindien.
Mais,
dans ma circonscription, Mme la Présidente, dans la circonscription nommée
Pontiac, il y a aussi environ 40 000 résidents
du secteur Aylmer de la ville de Gatineau, et c'est pourquoi je demande au
directeur des élections de renommer la circonscription que je représente
Pontiac-Aylmer.
Mme
la Présidente, jamais le nom Aylmer n'a été prononcé ici, en cette Chambre,
pour interpeler un député. Quand je
me présente à quelqu'un ici, à Québec, je me présente député de Pontiac. Et
pourtant, pour tous ces électeurs, tous ces résidents, ils méritent que
leur communauté soit reconnue ici, dans leur Assemblée.
Aylmer
a une longue histoire, Mme la Présidente, vous la connaissez. C'est un endroit
où les francophones et les anglophones ont su cohabiter en harmonie
pendant des décennies. C'est maintenant un endroit où ensemble ces deux communautés accueillent des gens de partout à
travers le monde, où on peut entendre toutes sortes de langues quand on marche le long de la rue principale. C'est là où
mon grand-père s'est lui-même installé après avoir immigré au Canada. Et, même si depuis 2002 il n'y a plus de ville
d'Aylmer, Mme la Présidente, comme il n'y a plus de ville de Hull, évidemment,
il y a quand même source de fierté à Aylmer.
There is lots to be proud of in Aylmer,
Madam Speaker. We should be proud of its history, its history of shipbuilding, proud of the Lady
Colborne and the Symmes Inn. We should be proud of its people, its
athletes, its artists, its Aylmer ambassadors : Caroline Calvé, Xavier Caféïne, Peter
Jennings, Madam Speaker, Peter Jennings, the great reporter, the great
news anchor, grew up in Aylmer. We should be proud of what it is today : a
tight-knit community, a green community, and a welcoming community.
Et c'est pourquoi je demande, comme plusieurs résidents d'Aylmer l'ont
fait lors de la consultation régionale du directeur des élections, à ce que Pontiac devienne Pontiac-Aylmer. Et,
par le fait même, j'appuie la demande de la députée de Richmond d'ajouter Rock Forest, j'appuie la
demande du député de Rivière-du-Loup d'ajouter un nom à sa circonscription,
j'appuie la demande du député de
Matane-Matapédia d'ajouter un nom à sa circonscription, parce qu'ils
représentent la volonté des électeurs d'être nommés ici, en cette
Chambre.
Mme
la Présidente, ceux qui connaissent
l'histoire savent que le grand chef Pontiac a gagné parce qu'il a pu créer une coalition de
gens de différentes tribus amérindiennes, parce qu'avant même la révolte, avant même la bataille qu'il a
menée, il a su être rassembleur.
Alors, si le
directeur des élections souhaite honorer le chef Pontiac, Mme la Présidente,
qu'il soit comme lui, rassembleur et
inclusif, qu'il rassemble les résidents du Pontiac et Aylmer et qu'il inclue
les deux régions au titre de la circonscription. Merci, Mme la
Présidente.
• (11 h 40) •
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député de
Pontiac. Et maintenant, pour la prochaine intervention, je suis prête à
reconnaître...
Une voix :
...
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Oui, allez-y, Mme la députée de Taschereau.
Mme
Maltais :
Simplement, avant de commencer mon allocution, je vois qu'il n'y a personne de
la Coalition avenir Québec qui parle.
Alors, j'aimerais savoir si on va partager le temps de la deuxième opposition.
Sinon, je m'attends à ce qu'ils prennent la parole, puisque je suis
peut-être la dernière oratrice de notre équipe.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, nous n'avons pas été
informés s'il y avait une intervention ou non. Est-ce que, Mme la
députée de Mirabel, vous souhaitez prendre la parole pour votre formation
politique?
Mme Sylvie D'Amours
Mme D'Amours : Oui.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Oui? Alors, je vous informe que
vous disposez d'un temps de parole de 15 min 46 s.
Mme
D'Amours : Merci, Mme la Présidente. Eh bien, vous ne serez pas
surprise de m'entendre dire que le comté de Mirabel est très, très content des changements qui ont été apportés,
parce que c'est un comté qui était problématique, un comté qui avait beaucoup de citoyens, et je
trouvais que c'était une façon concrète, en faisant ce changement-là, de
donner plus de voix, parce que je trouvais
que les citoyens de Mirabel étaient sous-représentés étant donné le nombre que
nous avions comme citoyens voteurs.
Effectivement,
nous avons eu des consultations. Nous avons eu aussi beaucoup de temps pour
être capables de travailler avec la
commission, être capables aussi d'être en relation avec nos citoyens, et nous
avons eu aussi du temps à la commission, quand ils sont venus ici, avec
la CRE, de discuter de cette proposition qu'ils avaient au tout début.
Il est vrai
que maintenant ce qui a été déposé n'a pas changé pour le comté de Mirabel, n'a pas changé non
plus pour le comté de Blainville,
Rousseau, où on va... Rousseau aussi a une problématique. Mais ce qu'on s'aperçoit,
c'est que maintenant il y a un changement au niveau de Montréal...
Une voix : ...
Mme D'Amours : Ça va, Mme la
Présidente?
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
...
Mme
D'Amours : Merci. Alors, le
changement est fait, et il est vrai que les citoyens de Sainte-Marie—Saint-Jacques n'ont peut-être pas eu les mêmes privilèges que mes
citoyens : d'avoir été entendus, d'avoir été sollicités, d'avoir eu un
temps, comme nous, comme les citoyens de ma circonscription, pour être capables de s'exprimer. Le changement a été fait.
On arrive
devant une situation où... Moi, j'ai confiance en la CRE, j'ai
confiance en la commission, j'ai confiance en notre jugement, mais j'ai confiance aussi aux citoyens de Sainte-Marie—Saint-Jacques. Vous comprendrez que, je pense,
tous les partis confondus ici, à l'Assemblée
nationale, ont donné du temps aussi à
la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques de pouvoir être la porte-parole de ces citoyens-là qui n'ont pas eu la chance
comme les autres citoyens touchés par
cette refonte électorale. Alors, je crois que la volonté de donner du temps aux
citoyens, c'est une bonne façon de pouvoir donner justice à ces gens-là.
Et, par la porte-parole, je crois que notre volonté était de bien vouloir
entendre, par la porte-parole, la volonté des citoyens de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Je terminerai
en vous disant qu'il faut faire vraiment attention
au procédé qui est installé, que ce procédé-là soit d'une transparence absolue pour que tous les
citoyens du Québec, peu importe leur lieu de résidence, ne soient pas brimés
par des façons de faire, par un manque de
temps. Moi, je pense que tous les citoyens doivent avoir droit au chapitre, et
la commission doit réfléchir sur les
façons de faire qu'ils ont faites, le procédé. Ils ont peut-être des raisons
valables, qu'on aimerait entendre,
mais il y a un processus dont moi, je suis en accord, c'est que c'est la
transparence absolue qu'on doit avoir pour tous les citoyens du Québec
et ceux de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, je vous remercie, Mme la
députée de Mirabel. J'aimerais savoir si vous êtes la dernière
intervenante pour votre formation politique. Non? Très bien. Alors, nous aurons
l'occasion d'entendre le prochain intervenant plus tard.
Maintenant,
je vais céder la parole à Mme la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré, tout en vous indiquant
qu'il vous reste un temps de parole de 11 min 22 s.
Mme Caroline Simard
Mme
Simard : Merci, Mme la Présidente. Alors, comme plusieurs collègues
l'on fait précédemment, c'est à mon tour,
aujourd'hui, de profiter de cette tribune pour me faire réentendre par le
Directeur général des élections et donc réitérer ma requête en faveur de l'ajout d'«Île-d'Orléans» au nom de la
circonscription actuelle de Charlevoix—Côte-de-Beaupré.
Le tour de
l'île, 42 milles de choses tranquilles, comme le chantait son plus célèbre
citoyen, le grand et regretté Félix
Leclerc. Aussi chantée par les Duteil, Ferland et Lelièvre, l'île d'Orléans,
c'est six municipalités, soit Saint-Pierre-de-l'Île-d'Orléans,
Sainte-Famille, Saint-François-de-l'Île-d'Orléans, Saint-Jean-de-l'Île-d'Orléans,
Saint-Laurent-de-l'Île-d'Orléans et
Sainte-Pétronille, qui forment ensemble la plus petite municipalité régionale
de comté du Québec, avec quelque
7 000 habitants. Chacune de ces municipalités possède un caractère
patrimonial et agricole distinctif qui s'articule
autour d'un coeur de village présentant une concentration de bâtiments et lieux
patrimoniaux remarquables où habitent
des résidentes et résidents tout aussi remarquables et que je suis extrêmement
fière de représenter à l'Assemblée nationale.
L'île
d'Orléans a été décrétée site patrimonial par le gouvernement du Québec en
1970. Véritable berceau de l'Amérique
francophone et plus grand arrondissement historique au Québec, avec ses
245 kilomètres carrés, l'île d'Orléans est un des plus anciens lieux de peuplement en Nouvelle-France. Celle-ci
a accueilli quelque 300 familles fondatrices, aujourd'hui
dispersées aux quatre coins de la province et même de toute l'Amérique du Nord.
Et,
grâce à ses terres fertiles, l'île de Bacchus, comme l'a nommée
Jacques Cartier lors de sa découverte en 1536, est devenue, selon une expression populaire, le
jardin de la région de Québec. L'agriculture y règne depuis effectivement
depuis plus de 400 ans. Mais les
attraits touristiques attirent de plus en plus de voyageurs en quête de
paysages grandioses et de riche
patrimoine. Offrant des vues panoramiques imprenables de la ville de Québec, de
la chute Montmorency, de la côte de
Beaupré et d'ailleurs, l'île d'Orléans rappelle l'époque de la colonie
française. Parmi les résidences, d'ailleurs, témoignant du régime
français, on y retrouve le noble Manoir Mauvide-Genest à Saint-Jean et la
Maison Drouin à Sainte-Famille.
Comme
le monde évolue, l'île d'Orléans aussi. Alors, tout en conservant ses attraits
historiques et patrimoniaux, des
commerces liés aux produits du terroir y sont très prisés par les épicuriens
qui raffolent, par exemple, des produits dérivés du vin, de la bière, de la canneberge, de la pomme, de la
fraise, du fromage et de la crème glacée. L'île d'Orléans occupe une place si importante à proximité de
Québec qu'un pont a d'ailleurs dû y être construit en 1935 afin de permettre
aux nombreux cultivateurs et touristes d'y
accéder par ce moyen. Ce pont, qui est devenu au fil des ans la signature de l'île d'Orléans, passera le flambeau à une
nouvelle infrastructure dont la mise en service est prévue en 2024 et dont
l'utilité ne fera qu'augmenter en
raison de l'affluence sans cesse croissante des gens, intimement liée à la vie
sur l'île d'Orléans.
Vous
savez, ce n'est pas la première fois qu'une telle demande est effectuée afin
d'inclure l'île d'Orléans au nom d'une
circonscription puisqu'en 2013 un décret de représentation électorale a
confirmé que la circonscription fédérale autrefois connue sous le nom de Montmorency—Charlevoix—Haute-Côte-Nord porterait dorénavant le nom de
Beauport—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans—Charlevoix,
et c'est le cas depuis.
Je
terminerai en disant que l'île d'Orléans ne serait pas ce qu'elle est sans ses
habitants, des gens travaillants, fiers, sympathiques et nombreux qui
m'appuient entièrement dans cette démarche et qui ont également le désir qu'on
les reconnaisse. Pour toutes ces raisons et pour d'autres encore,
comme par exemple le sentiment d'appartenance accentué que crée le fait de retrouver le nom de notre lieu
de vie dans le nom de notre circonscription, l'Île-d'Orléans mérite d'emblée d'être ajoutée à la circonscription
de Charlevoix—Côte-de-Beaupré
pour devenir Charlevoix—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans.
Merci, Mme la Présidente.
• (11 h 50) •
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la
députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré.
Maintenant, au tour de Mme la députée
de Taschereau de prendre part à ce débat, et je vous rappelle qu'il reste un
temps de parole à votre formation de 12 min 33 s.
Mme Agnès Maltais
Mme
Maltais : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Quelques mots.
D'abord, je vais parler de la carte, nouvelle carte qui est proposée par le DGE, et ensuite j'aurai quelques mots sur
la représentation effective dans les circonscriptions si vous me le permettez. Mais ma première partie
sera sur la nouvelle proposition de la direction générale des élections.
Je sais que les gens sont sûrement à
l'écoute, les gens de la direction générale des élections et de la Commission
de la représentation électorale.
J'ai assisté aux
audiences, et c'est à ce titre que je veux prendre la parole. J'ai assisté aux
audiences à titre de porte-parole et j'ai
entendu tous les commentaires sur la carte qui était proposée. J'ai entendu
aussi les commentaires du Directeur général des élections.
À
mon avis, il y a deux cartes sur la table actuellement. La première est la
carte qui a été présentée, la première proposition
du DGE, qui est une carte qui a été débattue, discutée, où il y a eu des
échanges et où les députés, normalement, dans une situation régulière, viennent parler de l'impact des
modifications sur leur circonscription. C'est comme ça que ça se passe, en général. La deuxième carte est une
carte qui arrive de façon surprenante avec un changement qui n'a pas été
débattu, qui n'a pas été discuté, autour de laquelle j'ai assisté aux échanges;
il n'y a eu aucun échange.
C'est
pourquoi, à mon avis, ce débat de cinq heures est si important et que, pour moi,
il y a deux cartes sur la table. Et
ce que je vais proposer à la direction générale des élections, c'est de
retourner à la première carte, qui est, à mon avis, la seule qui a été véritablement discutée, sur
laquelle il y a eu des modifications, d'accord, sur certaines circonscriptions,
mais où il y a un changement majeur :
la disparition de Sainte-Marie—Saint-Jacques, qui est, comme vous le voyez, très contesté.
Pourquoi
je dis ça? J'ai assisté aux audiences et je dirais respectueusement au DGE que l'addition
des opinions sur le même argument
n'égale pas une addition d'arguments en faveur d'une prise de position sur une
telle chose. À peu près tous les
députés libéraux, presque tous, sont venus débattre de la carte proposée, mais
ont tous et toutes systématiquement parlé
de la fusion de Westmount—Saint-Louis et
parlé contre la fusion de Westmount—Saint-Louis. Et ils en avaient le droit, c'est notre prérogative, sauf que c'est
arrivé de façon systématique. Il y a donc eu une addition d'arguments mais
addition... pas d'arguments, une addition
d'opinions toujours à partir du même argument, toujours à partir du même
argument. Bien, ça ne fait pas plus
d'arguments en faveur; ça fait un argument répété, répété, répété. C'est
extrêmement important. S'il y avait eu addition d'arguments à chaque
fois qu'un député se levait pour ça, là, je dirais : Écoutez, c'est
correct, chacun a eu sa vision. Mais, c'est
étonnant, c'est la première fois que je vois ça, parce que j'ai assisté
plusieurs fois à ces discussions, que
tous les députés d'un même parti arrivent avec la même argumentation sur un
comté qui n'est pas le leur.
J'en tiens
pour preuve... et le meilleur exemple que j'en ai, c'est ce qu'on a vu hier. On
a entendu le député des Laurentides
du Parti libéral être contre — c'est le seul député libéral dans les
Laurentides — l'ajout
de comtés dans les Laurentides. Et je vais le
citer : «M. le Président, je propose aujourd'hui une solution différente
pour la région des Laurentides et de
Lanaudière. Je crois, à tout le moins, qu'il est possible pour la commission de
procéder à une redélimitation au sein
même des comtés actuels sans pour autant avoir à ajouter de nouveaux comtés.
Ainsi, nous pourrions éviter la suppression de deux comtés, soit un sur
l'île de Montréal.»
Même le
député des Laurentides prend fait et cause contre cette disparition d'un comté
à Montréal. C'est assez étonnant, ça.
Je n'ai jamais vu ça. C'est pour ça que je dis qu'il y a comme... Et c'est tout
à fait le droit, là, ils ont le droit, là, mais il y a comme eu une addition de toujours le même argument par
plusieurs personnes. Ça n'en fait pas un meilleur argument. L'argument n'est pas meilleur parce
qu'il est répété 35 fois.
L'argument n'est bon que s'il est valide et non pas à cause de la répétition. Dans ce cas-ci, je trouve que la
démonstration des communautés naturelles n'a pas été faite. Et la démonstration que nous avons depuis cinq
heures dans cette Assemblée
nationale, c'est que l'argument, s'il
existait pour Westmount, contre la fusion de Westmount-Outremont, existe
d'autant plus contre la fusion de Westmount-Saint-Louis et Sainte-Marie—Saint-Jacques,
le sud de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Et, à ce
propos j'ai écouté la collègue de Sainte-Marie—Saint-Jacques, et ses commentaires sont très pertinents. Si c'est valide
contre, c'est valide aussi contre la deuxième carte. Sous prétexte de ne pas
défaire des communautés naturelles, on
défait d'autres communautés naturelles... Ah! oui, c'est Outremont—Mont-Royal, ce n'est pas Westmount, c'est Outremont—Mont-Royal, excusez-moi. Donc, sous prétexte de ne
pas défaire des communautés naturelles, on défait des communautés naturelles beaucoup plus dissemblables.
La fusion qu'on va donner est beaucoup plus dissemblable, difficile à réaliser
que la fusion qui était proposée.
Nous n'avons pas réussi à débattre de cela, Mme
la Présidente, parce que ça n'a jamais été le sujet de la discussion. Alors, c'est quelque chose de très, très, très important, ce qui se passe. Je vais le dire avec attention
et avec beaucoup de respect : Ce qui se passe en ce moment
décrédibilise le processus de consultation du DGE. Et c'est très délicat,
ce que vous avez à juger en ce moment, au
DGE, parce que vous avez vu le tollé qu'a soulevé cette décision
inattendue, autour de laquelle il n'y a
pas eu de consultation, sauf ce débat de cinq heures à l'Assemblée nationale. Je souhaite que vous fassiez une réflexion profonde, profonde, sur l'aventure que vous venez
de vivre, au DGE, et que vous reveniez, reveniez à la carte originale, qui, à mon avis, est toujours
sur la table et la plus pertinente, et aussi celle, celle qui a été le
plus débattue, et pour laquelle il y a eu une consultation.
Alors, Mme la Présidente, je souhaite de bons travaux au DGE, mais, je vous le dis, c'est plus
dangereux pour le DGE qu'autre chose, parce que ce que ça a provoqué, cette
surprise, ce choc, cette absence de consultation, parce que ce
n'était pas sur la table... nous fait poser des questions sur notre processus,
sur le travail... de la façon dont on a travaillé, actuellement. Donc, moi, je souhaite qu'il demeure
dans la première proposition. Cette carte est toujours valide, elle est sur
la table, il y a eu une consultation autour, et l'addition
d'opinions qui amène le même argument n'est pas une addition
d'arguments.
Je veux
parler de la représentation effective. On en parle souvent. Mon collègue
d'Abitibi-Ouest m'a sensibilisée à ça dans maints caucus, dans maints débats sur la carte électorale, la
représentation effective. Moi, j'ai la chance d'être dans une circonscription où, à la limite, je peux passer... en trois
quarts d'heure, je peux faire ma circonscription à pied d'un
bout à l'autre. C'est assez exceptionnel. J'en suis fort heureuse : ça
sert bien mes citoyens et mes citoyennes, qui peuvent partir à pied et s'en venir au bureau de circonscription de leur députée. Incroyable! Mais, quand il y a 200 kilomètres
entre deux villages, quand on est à 100,
125 kilomètres, même 50 kilomètres — pensez à l'hiver, sur des routes pas toujours bien
entretenues à cause des tempêtes et tout — pensez à
ça quand il s'agit d'aller rencontrer son député. C'est pour ça que les
circonscriptions d'exception existent et qu'elles doivent demeurer.
• (12 heures) •
Le citoyen
doit pouvoir rencontrer son député. Ceux et celles qui pensent que ça se
remplace par un coup de fil ou par un
Skype, je m'excuse, nous rencontrons des citoyens qui ont besoin de nous. Moi,
je dis toujours : Je suis l'avocat gratuit. Je suis l'avocate
gratuite de mes citoyens et citoyennes qui ont un problème avec
l'administration publique. Et ils viennent,
et on a besoin de les rencontrer pour comprendre, pour étaler les dossiers,
pour lire avec eux. Mais nous, là, on
est au bureau de circonscription, mais c'est eux souvent qui se déplacent. Et
on ne peut pas demander à des citoyens... on ne peut pas élargir ad
vitam aeternam des circonscriptions sans affecter la capacité de représentation
des députés.
Et c'est ça
qu'on appelle la représentation effective. L'effet de la représentativité,
c'est... Non, c'est une mauvaise expression.
La représentation doit pouvoir s'exercer. La relation avec le député et le citoyen
doit pouvoir s'exercer. On ne peut
pas faire ça par téléphone, on ne peut pas faire ça par courriel. Il y a un
déplacement, il y a une rencontre. Il y a des députés qui se promènent dans les villages, il y a des députés qui vont
rencontrer les maires, les mairies, qui assistent aux chambres de
commerce pour aller voir les citoyens et citoyennes, comprendre, comprendre la
situation, être dans le milieu, aller voir,
entendre. C'est la représentation effective, il faut que ça puisse se passer.
Être représentant de quelqu'un qui
est à 200 kilomètres, mais ne pas pouvoir y aller, ne pas avoir de
contacts réguliers, sauf quelques téléphones, ne pas pouvoir aller sur
place, ça n'a pas de sens.
Il y a déjà
de très grands territoires au Québec. Je pense à mon collègue de René-Lévesque
qui a de Tadoussac à Baie-Comeau. Je
le sais, c'est parce que je viens de la Côte-Nord. Ça fait que, la route, je la
connais par coeur, je connais chaque
virage. Je peux vous dire que c'est déjà quelque chose, il y a des comtés encore
plus vastes. On a déjà proposé à un
collègue d'Abitibi d'intégrer dans sa circonscription un village qui était à
200 kilomètres. C'est ça, là. C'est pour ça que les circonscriptions d'exception existent et
qu'elles doivent continuer à exister. Ça s'appelle la représentation effective,
et elle n'est à peu près pas présente dans
la façon dont on calcule ça actuellement. Or, on ne doit pas calculer seulement
le nombre d'électeurs, on doit voir à ce que ces électeurs et électrices
puissent être effectivement représentés.
Alors,
c'étaient les deux sujets que je voulais aborder, Mme la Présidente. Je
souhaite que le DGE et la Commission de
représentation électorale réfléchissent à cette espèce de... comment on le
ressent, les députés, par rapport à ce qui s'est passé.
Ce changement de cap entre fusion Outremont et Mont-Royal versus fusion
Westmount et Sainte-Marie—Saint-Jacques, on a le sentiment de ne pas avoir
eu notre voix, même comme députés. On a un sentiment que maintenant le processus n'est plus satisfaisant, et ce serait
dommage. C'est pour ça que je souhaite que le débat de cinq heures soit un vrai débat, qu'il soit écouté et que le DGE
revienne à cette carte qui est toujours sur la table, à mon avis. C'est pour
elle qu'on a été consultés, la première carte. Merci.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, je vous remercie, Mme la
députée de Taschereau. Maintenant, je reconnais M. le député de... J'ai
un blanc.
Une voix :
LaFontaine.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : LaFontaine, excusez-moi. Et vous
disposez d'un temps de parole de 7 min 28 s.
M. Marc Tanguay
M.
Tanguay : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Vous me permettrez
de reprendre au bond l'argumentaire de
la collègue, que je respecte beaucoup, qui a dit des choses auxquelles,
évidemment, j'adhère quant au principe, mais j'y vois une certaine contradiction. Elle demande essentiellement, si
j'ai bien compris son intervention, que la Commission de représentation électorale revienne sur son
rapport initial, rapport qui a été, elle l'a souligné... abondamment été
débattu par les collègues, notamment par 33 collègues libéraux,
cinq collègues du Parti québécois et quatre collègues de la Coalition avenir
Québec.
Qu'il
y ait, évidemment, un bémol à faire quant au système, qui est perfectible en ce
qui a trait au deuxième rapport, qui
apporte des modifications qui n'ont pas du tout été mises dans le contexte du
premier débat... Le deuxième rapport, normalement, devrait prendre acte du
débat qui a eu lieu les 12, 13 et 15 septembre dernier, mais là,
évidemment, le processus est
perfectible, et on arrive avec des éléments tout à fait nouveaux qui n'ont pas
été débattus. Ça, j'en suis. Ça, je conçois ce principe-là.
Et
la collègue qui dit : Bien, écoutez, il y a beaucoup de députés qui ont
dit : Oui, présent les 12, 13 et 15 septembre dernier, 33 libéraux, cinq du Parti
québécois, quatre de la CAQ, et que, là, le deuxième rapport... Donc, un débat
a été fait sur le premier. Nous avons
fait des représentations qui disaient essentiellement, Mme la Présidente :
Nous sommes contre. Les collègues qui ont eu l'occasion de parler, nous sommes
contre — puis il
y a d'autres collègues également qui
l'ont dit, des autres partis — l'abandon d'un comté à Montréal, contre
l'abandon du comté de Saint-Maurice et contre, évidemment — c'est un
pendant logique — l'ajout
d'une 16e et d'une 17e circonscription dans la région de Laurentides-Lanaudière.
On
l'a fait, ce débat-là, à plus de 40
députés, et là la collègue dit : Bien, parce qu'il y a des nouveaux éléments dans le deuxième rapport, revenons au premier
rapport alors qu'un débat a été fait sur le premier rapport, Mme la Présidente.
La collègue ne peut pas dire : On doit
revenir absolument sur le premier rapport et que ce soit le final parce que ce
serait faire quoi, Mme la Présidente,
du débat qui a eu lieu en septembre, où il y a plus de 40 collègues qui sont
venus parler du premier rapport?
Alors,
en ce sens-là, Mme la Présidente, oui, la commission de représentation doit
prendre acte, suite au dépôt du
premier rapport, à tout ce qui a été dit en Commission de l'Assemblée nationale
en septembre dernier, notamment, oui,
par beaucoup de députés libéraux qui ont répondu présent, Mme la Présidente.
Les collègues libéraux, comme certains collègues,
mais en un nombre très, très inférieur, certains collègues des oppositions...
mais les collègues libéraux ont dit : Oui, présent, et ont eu un
discours cohérent en ce qui a trait aux critères d'applicabilité de la carte.
Ce qui nous faisait
dire à l'époque puis ce qui nous fait toujours dire aujourd'hui — il
n'y a pas de surprise là-dessus — que nous sommes contre la perte d'un comté à
Montréal, contre la perte du comté de Saint-Maurice puis nous sommes contre, on le dit, on fait le choix... Puis
mon collègue d'Argenteuil a tout à fait le courage et l'intelligence d'exprimer
son opinion lorsqu'il dit : Bien, vous
savez, Laurentides-Lanaudière, là, ajouter un 16e puis un 17e comté quand on
sait que ça en prend absolument un dans Saint-Maurice puis quand on sait
qu'il ne faut absolument pas en faire perdre un à Montréal... Bien, mon collègue d'Argenteuil, quand il se lève à
l'Assemblée nationale pour dire : Bien, j'ai eu le courage et l'intelligence d'exprimer mon choix politique,
ma vision est de dire : Non, on n'a pas besoin d'un 16e puis un 17e comté
dans Laurentides-Lanaudière, bien, c'est
tout à fait son droit, et ça démontre une position cohérente à notre première
lecture du premier rapport, aux
représentations qui ont été faites en septembre à la Commission de l'Assemblée
nationale. Et des représentations ont
été faites, et on aurait aimé ça, évidemment, que, dans le rapport final, ce
soit pris en compte, mais ça n'a pas
été le cas. Montréal perd un comté, Saint-Maurice perd son comté,
Laurentides-Lanaudière perd ses deux comtés.
Et
là il y a d'autres choses qui sont apparues. J'en suis quand la collègue de
Taschereau dit : C'est assez surprenant et décevant de voir que,
pouf! arrivent de nouveaux éléments qui n'ont pas du tout fait l'objet d'une
rédaction dans le premier rapport, qui n'ont
pas du tout fait l'objet d'un débat face à plus de 40 collègues... de façon
précise, 42 collègues. Ça, j'en suis,
la Loi électorale et le système qui fait en sorte que nous redécoupons à toutes
les deux élections générales... «On»
exclut les personnes qui parlent, c'est un peu là où le bât blesse. «On
redécoupe» exclut les personnes qui parlent. Le bât blesse pas parce que c'est à nous, les députés, de décider, mais
c'est à nous, les députés, de faire les représentations, ce qu'on a fait ici de façon très intelligente,
cohérente et systématique, du côté des libéraux. Bien, quand on dit «on», bon,
on a confié ça à une entité, une
commission de représentation électorale qui, nous le souhaitons, nous le
voulons, nous le désirons, doit entendre, et doit échanger avec nous, et
doit prendre acte de ce qui est envoyé comme message sur les modifications
proposées.
Alors, qu'on vienne nous dire :
Bien, ce que vous avez dit, finalement on vous a écoutés, on vous a entendus,
mais on ne va pas modifier en ce
sens-là, ça, c'est une chose. Puis c'est une autre chose — puis j'en suis également — lorsque la collègue dit, puis c'est tout à fait vrai : Bien là, on arrive avec
des éléments tout à fait nouveaux, il est minuit moins cinq, après ce débat de cinq heures, la Commission de
représentation électorale pourra, le cas échéant, faire les modifications.
L'histoire nous démontre que c'était très peu, et le débat est fini, clos, on
s'en va en élection avec cette carte-là.
Alors,
c'est important, Mme la Présidente, de regarder le débat.
Laurentides-Lanaudière, bien, vous dites : Bien, voyons donc, Laurentides-Lanaudière, ils sont beaucoup
là-bas. Oui, ils sont beaucoup dans Laurentides-Lanaudière. Mais, vous savez, Mme la Présidente, on parle de comtés
sur l'île de Montréal qui... Pour faire une histoire courte et pour simplifier
les statistiques, la population d'électeurs
divisée par 125 comtés, c'est 48 000 par comté. On devrait, normalement,
viser à avoir 48 000 électeurs
par comté. La loi dit plus ou moins 25 %, ça veut dire entre 60 000
et 36 000 électeurs. À Montréal, nous
sommes présentement, en termes de nombre d'électeurs, nous sommes au-delà de
cette moyenne-là. Bien, en enlevant un
comté à Montréal, nous venons faire en sorte d'augmenter de façon beaucoup plus
marquée cet écart-là au niveau de la représentativité.
Et, lorsque l'on crée deux comtés dans Laurentides-Lanaudière, on vient
d'ajouter deux comtés qui sont à moins
13 % puis à moins 20 %. Alors, c'est là où on a de la difficulté à
comprendre la logique qui a été suivie, le tout respectueusement soumis à cette institution qu'est la Commission de la
représentation électorale. Mais j'en suis sûr, Mme la Présidente, qu'ils ne seront pas indifférents à
tout ce qui a été dit ici et sauront bien appliquer les critères de la loi.
C'est mon souhait et ma certitude, Mme la Présidente.
Alors,
de façon très claire, avant, pendant et après ce débat — et je serai celui qui aura, du côté de la
banquette libérale, ministérielle, prononcé les dernières paroles :
Non à la perte de Saint-Maurice, non à la perte d'un comté à Montréal, et Laurentides-Lanaudière n'a pas besoin
d'avoir deux comtés additionnels. En subdivisant déjà à travers les
15 comtés, ils ont la solution. Merci, Mme la Présidente.
• (12 h 10) •
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, je vous remercie, M. le
député de LaFontaine. Maintenant, pour la
poursuite du débat, je cède la parole à M. le député de Nicolet-Bécancour, et
il vous reste un temps de parole de 11 min 17 s.
M. Donald Martel
M. Martel :
C'est beaucoup trop. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je me permets
d'intervenir dans le débat parce que
je pense que c'est un bon moment. Vous savez, au Québec, on s'est donné des
bons outils, des bonnes institutions, puis
le DGEQ, je pense, ça fait partie des bonnes décisions qui ont été prises parce
que ça serait malheureux que ça soit les députés qui se mettent les deux mains dans la carte pour dessiner les
comtés à leur convenance. Donc, c'est intéressant qu'on se soit donné une institution objective,
neutre pour faire avancer ou suivre l'évolution de la démographie au Québec.
Cependant,
le DGEQ fait des propositions, puis je pense que, comme députés, c'est un peu
notre rôle, c'est un peu notre mandat
de lever des «flags», comme on dit, pour dire : Regardez, parce qu'on est
sur le terrain, on s'attache à nos comtés,
on connaît la réalité. Vous savez, Mme la Présidente, tantôt j'entendais ma
collègue de Taschereau, le comté de Taschereau
n'a rien à voir avec celui de Nicolet-Bécancour, que moi, je représente, en
termes de superficie, en termes de
démographie. Puis le comté de Nicolet-Bécancour n'a rien à voir avec le comté
d'Ungava ou des grands comtés en Abitibi.
Donc, ça prend quelqu'un de neutre qui fait un travail, puis je pense que notre
mandat, notre rôle, c'est d'essayer de perfectionner, je dirais, les
propositions qui ont été faites par le DGEQ.
Moi, je m'intéresse beaucoup à la Mauricie. Vous
savez, la Mauricie, Nicolet-Bécancour, souvent on a l'habitude de dire que, même si c'est deux régions
administratives, d'un point de vue médiatique, d'un point de vue
d'appartenance, je vous dirais qu'on
fait presque partie de la même région. Je suis avec intérêt ce qui se passe en
Mauricie, d'autant plus que c'est une
région qui m'est chère. Je suis natif de Grand-Mère, donc j'ai vu évoluer un
peu le comté au fil des ans. Là, on
arrive, la région de la Mauricie — puis j'entendais tantôt, qui était à cinq
comtés — qui en
perd un, c'est quand même 20 %
de son poids politique, mais, en même temps, je comprends le mandat du DGEQ
puis je comprends qu'on arrive à des décisions comme ça. Des décisions
comme ça, elles n'arrivent pas par accident.
Vous
savez, Shawinigan, si on recule d'un siècle, c'était peut-être une des villes
les plus industrielles au Canada. C'était une ville qui était beaucoup plus populeuse
qu'elle est actuellement, et on a subi un déclin au fil du temps qui a fait
en sorte que la population a diminué.
Heureusement, là on ressent une reprise en main, et ça adonne avec la perte
d'un comté. Je voulais mentionner
que, quand qu'on a vécu, les gouvernements, à l'époque, l'espèce de déclin
économique de la Mauricie, on s'est
dit : Bien, on va essayer de réorganiser ça pour essayer de redynamiser la
région. On a dit : On va peut-être profiter un petit peu plus du
fleuve Saint-Laurent. On a dit : Il y a des terrains disponibles à
Bécancour, on pourrait faire un grand parc industriel, ça pourrait générer de
l'activité économique. Il y avait un projet de centrale nucléaire. Donc, c'était un peu la réponse gouvernementale pour
dire : On a subi un déclin économique dans la région Mauricie—Centre-du...
dans le centre, Mauricie, on va essayer de reprendre ça de cette façon-là.
Quand
on regarde les dernières années, il y a eu la fermeture de la centrale
nucléaire. Le Parti québécois s'est vanté beaucoup de ça, d'avoir fermé Gentilly, mais il y avait 850 jobs.
Puis, dans ces 850 jobs là, il y avait quand même beaucoup de gens qui étaient de la Mauricie, c'est des gens
qui sont partis. Quand je regarde le parc industriel de Bécancour, moi, ça fait
20 quelques années que je suis dans la région de Nicolet-Bécancour, les
15 dernières années, il s'est perdu plus d'emplois
dans le parc industriel de Bécancour qu'il ne s'en est créé, alors que l'État a
investi au niveau des infrastructures routières,
a mis en place une société
de développement, a aménagé un port. Et, 15 ans plus tard, on
s'aperçoit qu'il y a eu moins d'emplois qui se sont créés là. Encore
là, des pertes d'emploi, c'est une mobilisation de la population. Tout ça pour
dire qu'il y a un urgent besoin, pour répondre à cette
démographie-là, de renforcer nos pouvoirs, de mettre beaucoup plus l'accent au niveau du développement
économique.
Maintenant, quand je regarde la carte, la
deuxième carte qui a été présentée...
Une
voix : ...
M.
Martel :
Ce n'était pas 11 minutes?
Une voix :
...
M.
Martel : O.K.
Mais j'achève. Ce que je veux dire, c'est que, la nouvelle carte qui a été
présentée, moi, j'aurais peut-être des propositions à faire ou, en tout
cas, des éléments à tenir compte. Puis je suis un peu d'accord avec ma collègue de Taschereau, la première
mouture, quand je parle de la Mauricie, m'apparaissait quand même
mieux équipée. Mais, en tout cas, ce que je veux dire, c'est : Pour moi, on devrait tout faire pour
essayer de garder ensemble les MRC. Des
fois, ce n'est pas possible. Je regarde mon comté, je touche à quatre MRC, mais
j'en ai deux complètes dans mon comté.
Quand je regarde du côté de Trois-Rivières, qui va aller chercher Saint-Louis-de-France,
Mont-Carmel, pour moi, il y a un peu une aberration parce que
c'est comme si on passait à travers une bonne partie du comté de Champlain.
On sait que Champlain, c'était le
Cap-de-la-Madeleine. Donc, Trois-Rivières, on va passer à travers une bonne partie du comté
de Champlain pour aller rejoindre les gens de Mont-Carmel et
de Saint-Louis-de-France. D'ailleurs, mon collègue me disait tantôt que c'est un peu le choix de la municipalité de Mont-Carmel aussi... son deuxième choix peut-être,
mais au moins d'être rattachée au comté de Champlain plutôt que celui de
Trois-Rivières.
Donc,
moi, ce que j'aurais comme recommandation à faire au DGEQ, c'est d'essayer de respecter les
territoires de MRC. Quand je regarde
le territoire de Mékinac, la MRC de Mékinac va s'en aller beaucoup
plus avec Champlain, alors qu'il
y a vraiment un naturel avec
Grand-Mère, Shawinigan. Moi, je pense que c'était plus naturel de garder ça
comme c'est actuellement. Peut-être, au niveau de Champlain, d'intégrer
Mont-Carmel et Saint-Louis-de-France, et quitte à ce qu'à l'ouest du comté de... c'est-à-dire que, dans le comté de Maskinongé, on approprie un peu plus une partie de la
ville de Trois-Rivières.
Donc,
je voulais soumettre quand même cette préoccupation-là. Pour moi, il y a des imperfections par rapport aux territoires de MRC dans le redécoupage, et je souhaite que le DGEQ
va en tenir compte. Merci, Mme la
Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, je vous remercie, M. le
député de Nicolet-Bécancour. Alors, il reste encore
quelques minutes, je ne sais pas s'il
y a d'autres intervenants. Ce n'est
pas le cas. Alors, cela met fin au débat
restreint de cinq heures sur le rapport de la Commission de la représentation électorale concernant la délimitation
des circonscriptions électorales du Québec.
Pour la suite des
choses, je cède la parole à M. le leader adjoint du gouvernement.
M.
Tanguay : Oui. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je vous
demanderais de suspendre nos travaux jusqu'à 15 heures afin de
permettre le débat sur les affaires inscrites par les députés de l'opposition.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Alors, est-ce qu'il y a consentement pour suspendre
nos travaux? Consentement.
Alors, je suspends
nos travaux jusqu'à 15 heures.
(Suspension de la séance à
12 h 20)
(Reprise à 15 heures)
Le Vice-Président
(M. Ouimet) : Alors, bon après-midi, chers collègues. Veuillez
vous asseoir.
Affaires inscrites par les députés de l'opposition
Motion
proposant que l'Assemblée reconnaisse la nécessité de poser des gestes
concrets en matière de neutralité religieuse de l'État et qu'elle demande au
gouvernement d'inclure dans le projet de loi n° 62 la proposition de la
Commission de consultation sur les pratiques d'accommodement
reliées aux différences culturelles d'interdire le port de signes
religieux aux personnes en autorité coercitive
Nous
en sommes aux affaires inscrites par les députés de l'opposition, et, à l'article 69 du feuilleton, aux affaires inscrites par les députés de
l'opposition, Mme la députée de Montarville présente la motion suivante :
«Que
l'Assemblée nationale reconnaisse la nécessité de poser des actions concrètes
en matière de neutralité religieuse de l'État et d'encadrement des accommodements
raisonnables;
«Qu'elle rappelle que la Commission de
consultation sur les pratiques d'accommodement reliées aux différences
culturelles recommandait dans son rapport d'interdire le port de signes
religieux aux magistrats et procureurs de la couronne, aux policiers, aux
gardiens de prison et aux président et vice-présidents de l'Assemblée
nationale;
«Qu'elle demande au
gouvernement d'inclure cette recommandation dans le projet de loi n° 62.»
Je vous
informe que la répartition du temps de parole pour le débat restreint sur la
motion inscrite par Mme la députée de Montarville s'effectuera comme
suit : 10 minutes sont réservées à l'auteure de la motion pour sa
réplique, environ
51 min 30 s sont allouées au groupe parlementaire formant le
gouvernement, environ 30 min 29 s sont allouées au groupe parlementaire formant l'opposition
officielle, environ 21 minutes sont allouées au deuxième groupe
d'opposition, sept minutes sont réservées aux députés indépendants.
La présidence
répartira cette enveloppe de temps parmi ceux qui auront signifié vouloir
participer au débat, sous réserve
d'un maximum, le cas échéant, de 1 min 30 s chacun pour les députés de Groulx
et de Vachon et de six minutes pour les deux députés de
Québec solidaire.
Dans le cadre de ce débat, le temps non utilisé par les députés indépendants ou par l'un
des groupes parlementaires sera
redistribué entre les groupes
parlementaires selon les proportions
établies précédemment. Mis à part les consignes mentionnées
précédemment, les interventions ne seront soumises à aucune limite de temps.
Enfin, je
rappelle aux députés indépendants qui souhaitent intervenir au cours du débat
qu'ils ont 10 minutes à partir
de maintenant pour en aviser la
présidence. Alors, Mme la députée de Montarville, vous avez l'honneur de nous présenter
cette motion. Je vous cède la parole.
Mme
Nathalie Roy
Mme Roy : Merci
beaucoup, M. le Président. C'est un privilège pour moi de prendre la parole cet après-midi
sur cette motion qui porte sur le projet de loi n° 62.
Vous savez,
après les terribles attentats de Québec, que nous condamnons tous ici, c'est indéniable,
le premier ministre
a tendu la main, il a tendu la main aux oppositions. Il nous a demandé un
changement de ton. Il nous a demandé de régler à l'unanimité le dossier
de la neutralité religieuse qui se trouve dans le projet de loi n° 62.
Nous l'avons
cru. Nous avons répondu à l'appel du premier
ministre. Nous avons mis de l'eau
dans notre vin. Nous lui avons tendu
la main à notre tour. Le PQ et Québec
solidaire se sont dits d'accord,
eux aussi, pour régler la question
rapidement. L'opposition, d'un seul geste, a tendu la main pour saisir celle du
premier ministre.
Mais hier, comme si c'était un mauvais réveil,
le premier ministre a retiré sa main tendue. Hier, le député de Roberval
a retiré ses habits de premier
ministre pour revêtir ceux du chef du
Parti libéral du Québec. Hier, dans son discours, le Parti
libéral a repris ses droits sur les
considérations du vivre-ensemble. Hier et encore ce matin, le premier ministre a parlé de dérive néfaste,
d'exclusion, de xénophobie, et j'en passe, M. le Président.
M. le Président, avoir des positions politiques différentes de celles du premier ministre, c'est devenu de la dérive. Moi,
je trouve ça très méprisant, M. le Président. C'est du
mépris pour plus de 60 % de la
population qui n'a pas voté pour le
Parti libéral. Quelle inconsidération pour les opinions différentes! Et je
trouve ça très regrettable ici même, en cette Chambre. Et j'anticipe déjà, peut-être que je me trompe, peut-être que
je me trompe, j'espère me tromper, mais j'anticipe déjà d'entendre la
ministre de la Justice nous insulter dans quelques instants et nous traiter
d'intolérants parce que nous croyons, tout
comme Gérard Bouchard, qu'il faut interdire les signes religieux pour les
employés de l'État en position
d'autorité coercitive, et ce, rapidement, de manière énergique et même de façon
préventive. Là, je vous citais M. Gérard Bouchard.
Je vous
parie, peut-être que je me trompe, que la ministre va nous dire que nous sommes contre la diversité, ce qui est tout
à fait faux, M. le Président. Moi, je vais lui répondre tout de suite que c'est
elle qui est contre la diversité d'opinions.
La ministre va m'accuser encore de stigmatiser certaines
personnes, pour faire accroître le sentiment d'exclusion, je l'ai entendue, là — je trouve ça déplorable — alors que c'est son propre gouvernement qui
veut exclure du débat l'opinion de près de 80 % de la population.
80 % des citoyens de Québec ont leurs idées, on ne les entend pas.
Finalement, le gouvernement nous a tendu la
main, mais, dans les faits, il n'a aucunement l'intention de modifier son
projet de loi, il veut l'imposer.
Alors,
reprenons l'objet du débat. La position que la CAQ défend, le compromis que
nous avons offert au gouvernement est
le suivant : nous voulons des services à visage découvert, mais, M. le
Président, sans exception aucune, des balises claires et un guide, un guide
pour les accommodements religieux, l'interdiction de signes religieux
pour les employés de l'État en position
d'autorité coercitive : juges, policiers, gardiens de prison et procureurs
de la couronne. Mais la réalité,
c'est que le projet de loi n° 62, actuellement, ne répond à aucune de ces
demandes, qui sont les mêmes pour nous depuis 2013, soit dit en passant.
D'abord, le projet de loi n° 62 est, selon nous, une coquille vide sur le plan législatif, puisque ce projet de loi ne fait
que reproduire la jurisprudence développée par la Cour suprême du Canada,
une jurisprudence largement à l'encontre des
principes de laïcité défendue par la CAQ et par une majorité de citoyens
du Québec.
En ce qui
concerne l'obligation du visage découvert, il ne s'agit que d'une obligation de
façade puisque le projet de loi ouvre la porte à des accommodements possibles.
Le projet de loi légifère par le non-dit, et, pire, il prétend une chose
mais fait son contraire. Et je reviendrai
tout à l'heure avec des arguments juridiques tenus par des gens qui sont venus
en commission parlementaire appuyer ce que je viens de vous mentionner.
Pour nous,
c'est un mauvais projet de loi. Quand on parle d'accommodements religieux, pour
la ministre, chaque dossier est un
cas d'espèce. Or, les intervenants qui se sont présentés en commission sont
largement unanimes : il leur faut des règles claires, un guide
d'application, ce que le projet de loi ne nous offre pas pour le moment.
Finalement,
évidemment, il n'y a rien dans ce projet de loi sur les signes religieux. «Ce
n'est pas une charte sur le linge»,
nous avait dit Mme la ministre : «C'est un projet de loi libéral», elle
avait bien pris soin de nous le dire en commission parlementaire. Et qui dit projet de loi libéral
parle des principes du Parti libéral. On entend beaucoup ça, des valeurs et des
principes, mais parlons-en, justement, M. le Président, des principes libéraux.
Dans Le
Devoir de ce matin, sous la plume de Lisa-Marie Gervais, dans Le Devoir,
naturellement, on parle de cette
volte-face de Charles Taylor, qui est comme «une bénédiction pour
M. Couillard». Et je vous fais grâce de tout le texte...
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : ...par son titre, hein?
Mme Roy :
Ah! excusez.
Le Vice-Président
(M. Ouimet) : Voilà.
• (15 h 10) •
Mme Roy :
Désolée d'avoir lu le titre en mentionnant le nom. Alors, on peut y lire,
naturellement, à la suite de cette
volte-face : «Les
libéraux rejettent ainsi tout compromis avec les partis d'opposition, qui
s'étaient pourtant montrés ouverts à appuyer le projet de loi n° 62 sur la neutralité de
l'État s'il contenait une disposition empêchant le port de tout signe
religieux pour les personnes détenant une fonction "coercitive" ou en
situation d'autorité.»
Et là je vous le cite, le premier ministre : «"Nous,
on a toujours été opposés à la discrimination vestimentaire. Ce n'est pas la première fois que je le dis ce matin. [...]Je crois que ça permet de constater que, quand on a des
principes, il faut s'y tenir", a affirmé [le premier ministre].»
Alors, parlons-en, de ces principes. Ça, c'était ce matin.
Je vous amène maintenant au verbatim, aux retranscriptions
d'un point de presse du même premier
ministre le 21 janvier 2014. Voici quels étaient ces principes, ces
principes libéraux, alors
qu'il n'était pas premier ministre mais chef du Parti libéral. Et ça, cette
retranscription-là, elle est disponible, là. Et il nous dit, le premier ministre nous dit, alors chef du Parti
libéral : «Le Parti libéral du Québec dit oui [...] à l'interdiction
du port de la burqa, du niqab et du tchador
par les employés de l'État [et] au fait que tout accommodement doit
respecter, bien sûr, la charte
québécoise des droits et libertés et ne peut absolument pas, sans concession
bien sûr, enfreindre le principe de l'égalité des [hommes et des
femmes].»
Toujours le même premier ministre qui nous parle de ces
valeurs et de ces principes : «Je vais répondre de façon très claire. Nous ne voulons pas
d'employés du secteur public,
des services gouvernementaux, portant le niqab, la burqa ou le tchador.»
Toujours
le premier ministre, à une autre époque,
21 janvier 2014 : «...ces vêtements, outre la question du
visage, sont également des
manifestations d'une situation d'oppression de la femme, et d'exclusion, et de
retrait social qui nous apparaît incompatible avec l'exercice des
services publics.»
Toujours
le même premier ministre, dans le même point de presse, janvier 2014 : «Notre
approche n'est pas que légaliste.
[...]Notre approche vient de ce que les Québécois veulent, de ce que j'ai
entendu, de ce que nous avons entendu. Ils
savent, les Québécois, qu'ils sont un peuple tolérant et ouvert, mais ils
disent : Il y a des limites. Il y a des limites que nous devons
exprimer.» C'était le premier ministre qui s'exprimait ainsi, M. le Président.
Il
poursuit : «Faire de la politique, c'est dire au monde : Voici dans quoi
je crois. [...]voici la façon dont moi, comme chef d'un gouvernement libéral, je vais mettre ces règles en place. Je
pense que les gens respectent ça, respectent quelqu'un qui est capable
d'exprimer ses principes. [...]Ce que je dis à la population, ce que je leur
répéterais dans la campagne électorale qu'on
aura un jour : Voici ce que je crois, voici ce que je pense, voici ce que je
vais faire. Vous décidez. Si vous voulez soutenir ce que je propose,
vous voterez pour le Parti libéral du Québec.»
C'est
le premier ministre qui avait dit ça en 2014, le même qui
nous a dit ce matin, là, que, quand on a des principes, il faut s'y
tenir, là.
Il
poursuit : «...je connais, par mon expérience de vie, peut-être un peu
mieux que la moyenne des Québécois, ces
situations vestimentaires. J'ai vécu dans ces régions et dans ces pays, et je
comprends très bien les messages qui sont envoyés par les vêtements. [...]Dans ces trois cas, le message
d'oppression, de soumission et de retrait social de la femme, pour nous,
n'est pas acceptable et n'est pas compatible avec les services publics.»
Mon
Dieu que je m'entends bien avec le premier
ministre quand il dit des choses
comme ça! C'est tout à fait ce que nous croyons également.
Il
poursuit : «...vous faites, selon nous, une erreur, parce que les trois
vêtements en question ne sont pas que religieux. Ils sont également des outils politiques, où on instrumentalise la
religion pour transmettre un message sur la condition des femmes.»
C'est
notre premier ministre qui nous disait ça en 2014. Vous savez, j'ai
applaudi, moi, quand j'ai entendu ça.
Alors, c'est le même premier
ministre qui dit : «On a toujours été opposés à la discrimination
vestimentaire.» Trouvez l'erreur. Il faut
croire que, vous savez, les grands principes dont se drape le premier ministre ont changé depuis trois ans,
hein? Et c'est qui maintenant qui marchande ces principes? Je me pose la question.
Alors, moi, ces citations-là, je les adore. J'appuyais le premier
ministre à cette époque.
Je
voudrais maintenant poursuivre, si vous me permettez, avec cette main
tendue, cette main tendue que nous avons offerte au gouvernement, ce qui
serait quelque chose d'historique, tout de même, parce que c'est une question,
ici, de vivre-ensemble qui est débattue. Et
je citerais M. Mario Dumont, qui a siégé bien des années ici, dans un texte
publié le samedi 11 février, disponible un peu partout.
Il
nous dit, je prends un court extrait, nous parlant de... oui, un court
extrait : «Majoritaire à l'Assemblée
nationale, le gouvernement libéral pourrait imposer le bâillon et imposer
son insignifiant projet de loi
n° 62. Cela n'aurait aucune valeur. Rien ne serait réglé, et le
Québec serait aussi divisé. Le premier ministre aurait manqué à son devoir de
rassembler.
«Dès que s'amorce la
recherche d'un consensus, une chose devient évidente. Tous les partis, comme
tous les observateurs, se tournent spontanément vers le rapport
Bouchard-Taylor. Même s'il a 10 ans, ce rapport demeure une référence
incontournable.
En 10 ans, aucun
gouvernement n'agit dans le sens [de ce] rapport. Le gouvernement Charest a
voulu y aller [un petit peu] plus
timidement. Son projet est mort au feuilleton. Le gouvernement péquiste a voulu
aller bien plus loin avec sa charte.
Morte au feuilleton elle aussi après une élection désastreuse. La nouvelle
mouture, le projet de loi n° 62, est pire que tout.
«On
pourrait dire que le rapport Bouchard-Taylor a été tabletté par les
gouvernements, mais n'a jamais été tabletté par la société québécoise — on s'en souvient, M. le Président. Le
travail de ces deux sages prend même de la valeur à mesure que les uns
et les autres se cassent les dents et que le problème traîne.» Le problème
traîne, il a bien raison.
«10 ans
plus tard, les parlementaires de tous les partis feraient une grande chose en
concluant ce chapitre de notre histoire collective par un vote unanime à
l'Assemblée nationale.»
Ce serait
bien, M. le Président. Je vous rappelle que ce rapport de nos deux commissaires
nous a quand même coûté collectivement 3,7 millions de dollars,
qu'il n'est toujours pas appliqué.
Par ailleurs, j'aimerais également poursuivre
sur cette sortie, poursuivre sur cette main tendue. Cette sortie, naturellement, il y a eu cette sortie de
M. Bouchard il y a quelques jours, au début du mois de février, qui nous
disait : Écoutez, nous devons
agir, nous devons... «nous» étant... c'est-à-dire les parlementaires devraient
accepter, devraient trouver une
solution de passage, et nous devrions... ou ils devraient adopter cette
recommandation d'interdiction du port de signes religieux pour les personnes en autorité coercitive, même si — et c'est ce qu'il disait, et c'était très
intéressant — ça se
fait de façon préventive. Il faut agir de façon efficace. Moi, je suis
bien d'accord avec lui.
Bon,
naturellement, ce matin... c'est-à-dire hier matin, on voit la sortie de
M. Charles Taylor, qui, lui, renie sa signature d'il y a 10 ans. Parfait, il a droit à son opinion, mais
la sortie de M. Charles Taylor nous apparaît chorégraphiée ou pour le moins une drôle de coïncidence, une
drôle de coïncidence ou une bénédiction pour le premier ministre, c'est selon, hein, tout ça arrive en même temps, M.
Taylor qui cautionne avec sa sortie, en quelque sorte, la crispation
idéologique du gouvernement libéral.
Mais ma question demeure entière : Comment le gouvernement peut-il
accorder plus de valeur aux propos d'un commissaire plutôt qu'à ceux de
l'autre, sinon que pour se conforter dans son idéologie?
À ce
sujet — je vois le
temps qui file — je vais
faire grâce de la lecture, mais il y a un excellent texte qui a été
publié par Mme Fatima Houda-Pepin justement sur la neutralité religieuse
de l'État et cette sortie de M. Charles
Taylor. Je vais vous en lire un petit extrait, elle nous écrit ce matin :
«Parmi les raisons de ce raidissement incompréhensible d'un chef libéral
qui trahit l'héritage libéral, il y avait le fait que...» Et elle parlait
d'elle lorsqu'elle a déposé sa propre charte
et qu'elle a dû démissionner et l'a déposée en tant qu'indépendante, elle
dit : «J'y définissais la neutralité religieuse de l'État comme un
droit collectif et un droit individuel dans la Charte des droits et libertés de
la personne; j'y proposais la mise sur pied
d'un centre de recherche-action pour la lutte contre l'intégrisme; j'y
interdisais le port de la burqa, du
niqab et du tchador comme des tenues asservissantes pour les femmes; et j'y
reprenais l'une des recommandations
du rapport Bouchard-Taylor sur l'interdiction des signes religieux», pour ces
personnes en position d'autorité coercitive.
Et elle nous dit, et c'est intéressant parce
qu'elle nous apprend un petit peu ce qui se passe au sein du caucus libéral : «Non seulement M. Couillard
m'avait interdit, en 2013-2014, de débattre de ce projet de loi au caucus
libéral, mais il avait exigé de moi que je défende ouvertement sa position,
notamment sur le port du tchador dans la fonction publique pour les employées de l'État et son refus d'interdire les
signes religieux à l'autorité contraignante, une position qui va à
l'encontre de mes principes et de tout ce que j'avais soutenu, publiquement,
depuis des années.»
Alors, elle
poursuit, mais c'est pour vous donner une idée. J'ai énormément de respect pour
les propos de cette femme, qui a étudié la question de long en large.
Je vois le
temps qui file et j'ai beaucoup de choses à vous dire, mais, vous savez, le
premier ministre nous dit : Adoptons le principe sur les points sur
lesquels font consensus. Le problème, avec ce projet de loi, c'est qu'il n'y a
pas de points qui font consensus, pour les raisons que je vous ai
expliquées tout à l'heure.
Et un point
parmi les plus préoccupants, c'est celui du visage découvert, le fameux
article 9. Et là je vais me référer aux juristes qui sont venus en
commission parlementaire nous parler, entre autres Les Juristes pour la laïcité
et la neutralité religieuse de l'État. Ils
nous ont dit : «...nous nous expliquons mal que le troisième alinéa de
l'article 9 du projet de loi
n° 62 vienne affaiblir la règle générale de la prescription du visage à
découvert et permette d'emblée l'accommodement à cette prescription, et ce, tant pour la personne à qui le service est
fourni que pour le membre du personnel d'un organisme.
• (15 h 20) •
«Une telle caution du port du niqab par l'État,
qui devrait pourtant donner l'exemple en ce domaine, ne signifie-t-elle pas que le principe d'égalité entre les hommes et les
femmes, qui constitue une valeur fondatrice du Québec moderne, devient dès lors une coquille vide?
Comment interpréter cette démission, alors qu'il s'agit d'un principe qui ne
devrait pas être compromis lors de l'octroi par l'État d'un accommodement fondé
sur un motif religieux, selon le troisième
alinéa de l'article 10 du projet de loi n° 62? Nous suggérons donc la
suppression du troisième alinéa de l'article 9.»
Je vais
poursuivre un tout petit peu. Ce que ça veut dire, dans les faits, on dit que
les services seront donnés et reçus à
visage découvert, mais, dans les faits, si vous voulez un accommodement, on
pourrait vous l'accorder. Donc, on crée une règle, mais tout de suite on
la démolit.
Les juristes
poursuivent en nous disant : «Nous nous expliquons mal que le troisième
alinéa de l'article 9 du projet de
loi n° 62 vienne affaiblir la règle générale de la prescription du visage
à découvert pour la prestation et la réception des services gouvernementaux et permette d'emblée l'accommodement à la
prescription du visage à découvert, et ce, tant pour la personne à qui le service est fourni que pour le membre du
personnel d'un organisme. Ceci implique que tant une employée de l'État
qu'une citoyenne pourraient porter le niqab en ces circonstances. Le niqab
exprime pourtant l'asservissement et
l'indignité de la femme, et la négation de son identité. Donner droit de cité à
un tel vêtement, marqueur d'oppression,
par une représentante de l'État serait lui accorder une légitimité [sociale],
et faire une entorse au respect de l'égalité entre les femmes et les
hommes, une valeur publique fondatrice du Québec et du Canada modernes.»
Je souscris
pleinement à ces propos, qui sont ceux de Me Julie Latour, qui est quand
même l'ex-bâtonnière du Québec, c'est important de le souligner, il y a
des arguments juridiques.
Il me
reste quelques minutes. Je vais arrêter pour pouvoir prendre quelques minutes
un peu plus tard, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, Mme la
députée de Montarville. Je suis prêt à céder la parole à un prochain
intervenant et je reconnais Mme la ministre de la Justice. À vous la parole.
Mme
Stéphanie Vallée
Mme Vallée :
Merci, M. le Président. Tout d'abord, je vais... Je suis un petit peu étonnée
de l'allocution de notre collègue, qui a porté sur l'ensemble du projet de loi
n° 62, alors que la motion visait la volonté manifestée par la CAQ d'intégrer au projet de loi n° 62 certaines
des recommandations du rapport Bouchard-Taylor, recommandations qui ont pour effet d'interdire à la magistrature, aux
membres de la magistrature et d'interdire au personnel... aux procureurs de la
couronne, policiers et gardiens de prison,
et président et vice-présidents de l'Assemblée nationale le port d'un signe
religieux.
J'écoutais le
discours de ma collègue, et elle nous attribue toutes sortes d'intentions. Puis
là-dessus je ne reviendrai pas,
j'espère qu'on pourra élever le débat. J'aurais aimé l'entendre sur les éléments
qui l'amènent à proposer cette restriction quand même importante aux libertés individuelles. J'aurais aimé
l'entendre là-dessus. J'aurais aimé comprendre, outre la lecture d'articles que nous avons lus, que nous
connaissons, j'aurais aimé entendre ce qu'elle, elle avait à apporter à cette
réflexion.
Parce que
c'est un débat, M. le Président, qui... Toute la question de la place de la
religion dans la sphère publique, c'est
un débat qui a fait l'objet... qui a suscité l'intérêt de la société depuis plus
de 10 ans maintenant. C'est un débat qui nous interpelle tous, chacun, individuellement. Et c'est un débat qui,
je le souhaite, saura s'élever au-dessus de la partisanerie et que l'on
pourra aborder sans nécessairement attaquer l'autre systématiquement comme le
fait notre collègue.
Parce que la
collègue dit : Lorsqu'on ne pense pas comme le premier ministre, on est
intolérant. C'est, en somme, ce
qu'elle nous disait comme message. On peut jouer à ce jeu-là longtemps. Je
pourrais dire à ma collègue : Parce que je ne partage pas votre volonté de restreindre les droits individuels,
les libertés individuelles, vous vous moquez de ma position, vous considérez que ma position n'est
pas adéquate, vous considérez que mes valeurs ne sont pas adéquates, vous vous
moquez allègrement, d'ailleurs, parfois sur les médias sociaux, de mes prises
de position, de mes valeurs.
M. le
Président, je vais vous citer des passages du discours d'ouverture de cette
41e législature. Je me souviens, moi,
d'un premier ministre qui nous disait : «...le devoir premier d'une
démocratie n'est pas d'assurer la dominance de la majorité qui est acquise par le nombre, mais de
protéger les minorités contre ses [exercices] de pouvoir ou la discrimination.»
Il citait d'ailleurs Rosa Luxemburg qui, en
1918, disait : «La liberté, c'est toujours la liberté de celui qui pense
autrement.» C'est bien, hein? «Il ne
faut pas banaliser les libertés individuelles ni en faire bon marché dans
l'arbitrage [...] entre celles-ci et les droits collectifs.»
Et par la
suite le premier ministre continuait et disait ce qui suit : «Nous
légiférerons donc, comme nous l'avons indiqué
au cours des derniers mois, sur cette question — en parlant de place de la religion,
notamment la neutralité religieuse de l'État — en
tout respect de nos chartes des droits et libertés.
«Notre gouvernement soumettra à cette Assemblée
un projet de loi affirmant la neutralité religieuse des institutions de l'État, la nécessité que les services publics soient
donnés et reçus à visage découvert, balisant les accommodements
raisonnables...»
M. le
Président, c'est ce que nous avons fait avec le projet de loi n° 62.
D'aucun temps, d'aucun temps le premier ministre ni notre formation politique ne s'est engagé dans la voie de
restreindre les libertés individuelles des magistrats, des policiers,
des procureurs de la couronne, des gardiens de prison et des membres de cette
Assemblée. Pourquoi? Plusieurs raisons.
Dans un
premier temps, M. le Président, je pense qu'il est bien de voir un petit peu...
de retourner en arrière sur la question de la magistrature. Il y a, M.
le Président, un document fort intéressant, Principes fondamentaux relatifs
à l'indépendance de la magistrature, un document qui provient des Nations unies,
donc, qui a été adopté le 29 novembre 1985 et qui prévoit
que... et qui indique et qui nous éclaire sur l'indépendance de la
magistrature : «L'indépendance de la magistrature
est garantie par l'État et énoncée dans la Constitution ou la législation
nationales. Il incombe à toutes les institutions, gouvernementales et
autres, de respecter l'indépendance de la magistrature.»
Et, un peu
plus loin, à l'article 8 du
texte, Liberté d'expression et d'association : «Selon la
Déclaration universelle des droits de
l'homme, les magistrats jouissent, comme les autres citoyens, de la liberté
d'expression, de croyance, d'association
et d'assemblée; toutefois,
dans l'exercice de ces droits, ils doivent toujours se conduire de
manière à préserver la dignité de leur charge et l'impartialité [de] l'indépendance
de la magistrature.
«[...]Les
personnes sélectionnées pour remplir les fonctions de magistrat doivent être
intègres [puis] compétentes et justifier d'une formation et de
qualifications juridiques suffisantes. Toute méthode de sélection des magistrats
doit prévoir des garanties contre les
nominations abusives. La sélection des juges doit être opérée sans distinction
de race, de couleur, de sexe, de
religion, d'opinion politique ou autre, d'origine nationale ou sociale, de
richesse, de naissance ou de situation; la règle selon laquelle un candidat à la
magistrature doit être ressortissant du pays concerné n'est pas considérée
comme discriminatoire — ceci
n'est pas applicable en l'espèce.»
Le juge doit
être conscient et doit comprendre la diversité dans la société et les
différences qui sont causées par les différentes origines, ça fait
partie des grands principes, mais en quoi, M. le Président, est-il opportun de
brimer la liberté de religion d'un
magistrat, de brimer la liberté de religion d'un procureur de la couronne, de
brimer la liberté de religion d'un
policier? Parce que, vous savez, M. le Président, l'article 18 de la Déclaration universelle des droits de l'homme,
qui a été adoptée en 1945 dans un
contexte fort particulier, suite à la Deuxième Guerre mondiale, suite à un
génocide terrible : «Toute personne a droit à la liberté de penser,
de conscience et de religion; ce droit implique la liberté de changer de religion ou de conviction ainsi que la liberté de
manifester sa religion ou sa conviction seule ou en commun, tant en public
qu'en privé, par l'enseignement, les pratiques, le culte et
l'accomplissement [de] rites.» Ça, c'est reconnu par la Déclaration universelle des droits de l'homme, c'est reconnu.
Cette liberté de conscience, elle est reconnue par nos chartes, la charte
canadienne, la charte québécoise également.
• (15 h 30) •
Ce que nous demande
la députée de Montarville, M. le Président, aujourd'hui, c'est de limiter pour
certaines fonctions cette liberté de croyance, cette liberté de conscience,
cette liberté de religion. Elle nous demande de porter atteinte au droit à la religion de ceux et celles qui
oeuvrent au sein de ces fonctions et ainsi de porter atteinte à leur droit à
l'égalité. Elle, indirectement, vient
dévaloriser également la diversité culturelle et religieuse au sein des
institutions de l'État, au sein des instances juridictionnelles.
Il
y a eu, M. le Président, au Québec, des juges qui, à la Cour supérieure,
portaient la kippa. Il y en a eu. Est-ce que ça a porté un préjudice
quelconque? Aucunement. Aucunement. Expliquez-moi, M. le Président, en quoi on
devrait interdire la diversité culturelle au
sein des forces policières, au sein des forces de la paix, les constables
spéciaux, au sein de la magistrature.
Ces secteurs-là sont déjà assujettis à des codes vestimentaires. La
magistrature est assujettie à un code vestimentaire
très strict qui est dicté par le Conseil de la magistrature. Les forces
policières sont assujetties à une tenue vestimentaire. Ils portent l'uniforme tel que prévu par les dispositions
qui encadrent les différentes forces policières. Les constables spéciaux
portent un uniforme.
Bref,
M. le Président, il n'y a pas d'explication, du côté de l'opposition, qui nous
amène à justifier cette atteinte aux libertés individuelles, cette
atteinte au droit à l'égalité qu'ont les gens issus de la minorité. Il n'y en a
pas, de justification. Moi, je me serais
attendue à ce que notre collègue nous fasse cette démonstration, nous explique
en quoi cette proposition méritait d'être analysée, méritait d'être
insérée au projet de loi n° 62. C'est ce à quoi je me serais attendue de
la députée de Montarville. Mais, au lieu de cela, nous avons eu droit à des lectures
d'extraits d'articles de journaux. C'est son
droit, mais elle ne m'a pas convaincue de la raison d'être de sa motion. Elle
ne m'a pas convaincue qu'il était
nécessaire d'enfreindre les libertés individuelles, qu'il y avait un motif, une
justification à cette atteinte aux droits et libertés. Elle ne m'a pas
convaincue de ça, M. le Président.
Et,
vous savez, lorsqu'il est question de porter atteinte aux droits individuels,
bien, cette atteinte, elle se doit d'être justifiée, elle se doit d'être expliquée.
Nous avons toujours été constants sur cette question-là. Nous avons toujours
considéré que cette disposition, que cette
recommandation portait atteinte, de façon injustifiée, aux libertés
individuelles. C'est pour ça que
cette recommandation ne se retrouve pas dans 62. Mais, M. le Président, nous
sommes d'accord, il y a des points de
rencontre, par contre, pour d'autres éléments de 62. Sur cette question, il n'y
a pas d'entente, nous avons fait le choix de l'exclure.
Par
contre, par contre, lorsque la collègue parle de l'importance que les services
soient offerts et reçus à visage découvert,
les services publics, pour des raisons de sécurité, d'identification et de
communication, je suis d'accord avec elle. Lorsque la collègue nous indique qu'il est important d'avoir des balises
claires pour les accommodements religieux, je suis d'accord avec elle. Lorsque la collègue nous indique que nous
devons assurer un espace public neutre, libre de toute préférence, de toute manifestation de favoritisme
à l'égard d'une religion ou à l'égard d'une absence de religion, je suis
d'accord. Mais l'espace public, M. le
Président, il ne peut pas être aseptisé. On ne peut pas demander à ce que
l'espace public soit aseptisé de
manifestations de signes religieux. Ça fait partie du vivre-ensemble que
d'accepter la croyance ou la
non-croyance de l'autre. Ça fait partie du vivre-ensemble que d'accepter ces manifestations de croyance ou de
non-croyance. Moi, M. le Président, je souhaite vivre dans un Québec où les gens peuvent accéder à toutes les
professions, ont la capacité de s'émanciper dans notre société.
L'utilisation
de cette recommandation du rapport Bouchard-Taylor, malheureusement, vient limiter la participation de citoyens et de citoyennes au sein de la société québécoise
d'une façon subtile, certes, mais elle la limite. Le message que l'on lance, c'est que la personne croyante
doit faire un choix entre sa croyance religieuse ou sa participation à la société, à son accès, peut-être, au rêve
d'un jour accéder à la magistrature, au rêve d'un jour accéder aux forces
policières.
L'autre
ne doit pas nous faire peur. La diversité ne doit pas nous troubler. Et cette
manifestation de la diversité, elle ne porte pas atteinte à notre
identité québécoise. Au contraire, cette manifestation de la diversité, elle
est aussi une manifestation d'une face de la
société québécoise. Cette diversité... Et là nous parlons, mais cette
diversité, actuellement, elle n'est
pas présente ou très peu présente, comme je le mentionnais plus tôt, puisqu'il
y a eu à Montréal quelques magistrats qui portaient la kippa.
Donc,
M. le Président, lorsqu'on fait une motion comme celle-là, c'est qu'on a des
arguments forts, sachant très bien que
la position du gouvernement n'a pas changé sur la question. Ce n'est pas une
question de fermeture. Et, lorsque nous tendons la main, nous tendons la main pour adopter ce sur quoi nous
pouvons ensemble nous entendre, ce sur quoi nous pouvons travailler constructivement, comme nous l'avons fait dans un tas
de projets de loi ici, à cette Assemblée, M. le Président.
Que
le projet de loi, dans ses mots, ne corresponde pas exactement aux attentes,
moi, je suis prête à ce qu'on s'assoit ensemble et qu'on en discute. On
l'a fait dans le passé et on va continuer de le faire parce que c'est la beauté
de cette Assemblée que de travailler
ensemble et d'en arriver à des pièces législatives qui, ultimement, sont le
reflet de ce travail collectif.
Par
contre, il est normal, et on l'a vu dans le passé, que certains projets de loi
ne comportent pas certaines demandes présentées,
formulées par les oppositions, parce qu'elles ne correspondaient pas à une
volonté. Bien, moi, je vous explique pourquoi
les recommandations du rapport Bouchard-Taylor sur cette question précise... Parce
que je tiens encore une fois à
corriger ce que la collègue de Montarville nous indique. Elle nous indique que
le rapport Bouchard-Taylor a été laissé sur la tablette, n'a pas été considéré, ce qui est complètement inexact.
C'est complètement inexact, M. le Président. Près de 80 % des
recommandations ont été mises en application ou sont en voie de l'être.
Le rapport
Bouchard-Taylor a été à l'origine de grands changements, effectivement, qui
permettaient d'intégrer la diversité
au sein de la société québécoise. Et on remercie les auteurs du rapport pour
avoir formulé des recommandations, mais il est possible, lorsqu'on reçoit un rapport,
de prendre les recommandations avec lesquelles on est fondamentalement en accord et, pour des raisons que j'ai expliquées...
Alors ce n'est pas... La raison pour laquelle on ne retient pas cette recommandation-là, ce n'est pas des raisons
frivoles, ce n'est pas simplement parce qu'on souhaite ne pas s'entendre avec les oppositions, c'est qu'elles ne correspondent
tout simplement pas à nos valeurs, à nos valeurs comme équipe, qui est une
équipe pour laquelle le respect des libertés individuelles fait partie de notre
ADN. Il n'y a rien de méchant avec ça. Il
n'y a rien de ridicule non plus avec ça, que de respecter les libertés
individuelles, de respecter les droits
de la minorité. On nous accuse de... multiculturalistes.
On nous
accuse de tous les noms, on nous ridiculise sur toutes les tribunes. Et là je
vois la collègue de Montarville
qui fait des grimaces, qui se crispe, qui parle tout en écrivant. M. le
Président...
• (15 h 40) •
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Mme la ministre, ces commentaires-là n'ajoutent rien au débat. Adressez-vous
à la présidence.
Mme Vallée : M. le
Président, ces recommandations et la motion de la collègue, on ne peut malheureusement y souscrire,
et c'est pour toutes les raisons que je vous ai expliquées. Et c'est parce que
nous croyons fondamentalement à
cette liberté; il faut rassembler, il faut tendre la main. Et,
vous savez, c'est important de poser les bons gestes, surtout au
lendemain d'événements tragiques. Ne posons pas de geste qui pourrait
stigmatiser davantage des communautés, des individus
qui sont, comme vous et moi, Québécois et Québécoises à part entière. Ne limitons pas les droits et
libertés et ne lançons pas le message
qu'il existe, dans notre société, de bonnes religions, parce qu'elles ne sont pas apparentes, et de
moins bonnes religions. Ne lançons pas le message qu'il y a de bons Québécois
et de moins bons Québécois qui ne peuvent
accéder à certaines fonctions en raison de leur identité, en raison de leur
liberté de conscience, en raison de leurs croyances. Ne lançons pas ce message aux Québécois, M. le Président.
Gardons-nous d'augmenter davantage la distance entre les individus et
célébrons cette possibilité et cette société diversifiée qui est la nôtre.
Vous savez,
il y a des gens... certains qui semblent s'indigner que la majorité ne puisse
pas unilatéralement dicter ses
valeurs à l'ensemble de la société, mais c'est fondamental. C'est fondamental.
Je le disais, je crois, hier, à la période de questions : Une société est jugée à la façon dont sa majorité
traite ses minorités. On a jugé grandement ce qui se faisait au sud de
la frontière. M. le Président, est-ce qu'on peut s'inscrire dans une tendance
où l'ouverture vers l'autre est manifestée?
Est-ce qu'on peut simplement s'entendre sur ce qui fait consensus ici, comme je
l'ai mentionné? Si nos collègues souhaitent aller plus loin, ils le
proposeront. Nous avons toujours été constants quant à cette recommandation du rapport Bouchard-Taylor. Nous n'avons pas fait
volte-face, nous n'avons pas changé d'avis, et je vous ai expliqué pourquoi.
Donc, je vous
laisse en citant Thomas Jefferson : «On s'attend à ce que la majorité
l'emporte dans une société. Cependant, pour que cette victoire soit
légitime, il faut que la minorité soit protégée par des droits équitables et un
encadrement juste, dont la violation signifie l'oppression.» Merci, M. le
Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, Mme la
ministre, pour cette intervention. Mme la députée de Taschereau, je vous
cède la parole.
Mme Agnès Maltais
Mme Maltais :
Merci, M. le Président. Écoutez, M. le Président, mon ton va être respectueux,
je n'aurai pas le ton du premier
ministre, qui a dit que les gens qui ne pensaient pas comme lui étaient
xénophobes. C'est une citation. On peut me la refuser, mais c'est une citation. Alors, je n'irai pas jusqu'à
dire qu'il y a des gens qui nous accusent de tous les torts et qui nous amènent dans un débat
vindicatif, mais je vais quand même rectifier quelques propos de la ministre
et je le fais respectueusement parce que je l'apprécie beaucoup, puis on a bien
travaillé sur des projets de loi.
Première
chose, elle a dit — je ne
pensais jamais entendre une ministre libérale me dire ça : La
magistrature, il ne faut pas qu'il y
ait de nominations abusives. Bien, je vais parler de Chantal Landry et des
post-it. Le seul parti, au Québec, qui a eu des nominations abusives, où
il y a eu une commission là-dessus...
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Un instant. Une question de règlement,
M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Tanguay : Vous me
voyez venir. Sur l'article 211, au niveau de la pertinence. On parle ici
de neutralité religieuse de l'État, d'accommodements raisonnables et d'un
projet de loi, 62. Nous sommes à des années-lumière. On n'est même pas sur le
sujet, M. le Président. Je vous demanderais de rappeler à l'ordre la collègue.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, une question de
règlement basée sur la pertinence. Je vous demanderais, Mme la députée de Taschereau, peut-être de vous
adresser davantage au coeur de la motion, et le débat va bien se dérouler.
Mme Maltais :
J'y arrive, M. le Président. Bien sûr, je me réfère aux propos de la ministre.
Alors, voilà, j'ai fait mon point. Je
l'ai dit parce que ça, il y a des choses que... j'ai une certaine histoire dans
ce Parlement puis je vais souvent y référer.
Deuxième
chose que la ministre a dite, je vais vraiment la citer souvent, puis ça
aussi : Nous avons toujours été constants.
La ministre a dit de son parti qu'ils ont toujours été constants. Bien,
écoutez, je vais citer un article de novembre 2013 et de... non, ça, c'est janvier 2014, de Denis Lessard, dans La Presse :
«Avant les fêtes, [le député de LaFontaine] avait affirmé que rien
n'empêcherait des femmes portant le tchador d'être candidates au Parti
libéral[...], ce qui avait provoqué une hyperbolique "Bienvenue au tchador au Parti
libéral[...]" dans certains médias. Par la suite il s'était repris en se disant convaincu que ces femmes ne seraient
pas choisies par leur association de circonscription.» Tiens, tiens, tiens!
L'association de circonscription du député de LaFontaine fait de la
discrimination vestimentaire. Continuons.
«Plus
tard, il s'enfonçait encore dans le marécage en soutenant que le port du
tchador était inacceptable pour une employée de garderie.» On continue à faire
de la discrimination vestimentaire. Mon Dieu! Mais quel parti est-ce que j'ai
devant moi?
«L'absence
[du premier ministre] dans ce débat important a soulevé bien des questions chez
les commentateurs[...].
«[...]après
une semaine de slalom, les libéraux tenteront — de slalom, comme constance, ce n'est pas
vraiment ça — d'établir une position claire sur des
questions où la nuance se transforme toujours en piège.» C'est vrai que c'est
difficile, la nuance dans ce débat-là, mais c'est vrai.
Alors,
je vais citer le rapport Ouimet, que nous n'avons jamais vu, malheureusement,
et j'invite toujours les libéraux à déposer le rapport Ouimet pour qu'on
ait vraiment toutes les pièces de référence sur ce débat qui dure depuis 2007.
«Le
rapport Ouimet statuera que le Parti libéral [...] est contre toute
interdiction en ce qui touche le port de signe religieux.» Bon, ça ne va pas tout à fait avec ce qu'avait dit le député
de LaFontaine, mais ça va avec la constance dont se réclame la ministre,
sauf qu'«il prônera [...] l'égalité des sexes, la "laïcité
ouverte"[...], et[...], il promet qu'en tant qu'employeur il proscrira
tout vêtement incarnant "la soumission, l'exclusion de la
femme"[...].
«Dans
un gouvernement libéral, les fonctionnaires n'auraient pas le droit de porter
le tchador ou la burqa. Même proscription pour le niqab...»
Là,
il y a un problème, c'est que ce n'est pas tout à fait de la constance dans ses
opinions. Je tenais à le dire parce qu'il
faut ramener un peu l'histoire, les faits de ce qui se passe autour de ce
débat-là. On est sur un débat qui dure depuis 2007, 2007. 2007, ça a été
le débat sur... Il y a eu une élection où un des principaux sujets de
l'élection, ça a été les accommodements raisonnables, comment doit-on faire les
accommodements raisonnables. 2007...
Une voix :
...
• (15 h 50) •
Mme Maltais :
Mme la députée de Jeanne-Mance—Viger, je vais y arriver, à la charte. 2007, accommodements
raisonnables.
2008,
rapport Bouchard-Taylor. Une série de recommandations qui vient du fait qu'il y
avait eu un débat au Québec actuellement.
Dans le rapport Bouchard-Taylor, il y avait plusieurs propositions. Certaines
ont été mises en place, ça, je le dis, sauf que je vais juste laisser
des spécialistes contester le chiffre de la ministre.
La
ministre vient de nous dire que 80 % des recommandations du rapport
Bouchard-Taylor avaient été mises en oeuvre
ou étaient sur le point d'être mises en oeuvre. Le chiffre des experts, c'est
30 %. Ce n'est pas nous de l'opposition officielle qui le disons, ce sont les experts qui ont lu... D'ailleurs,
si vous regardez dans la revue de presse récente de la semaine dernière, vous allez voir que le chiffre
avalisé par les experts, c'est 30 %. J'aurais apprécié que la ministre
revienne au vrai chiffre et non pas
au chiffre qui est élaboré par le gouvernement, qui, de ce côté-là, a une
tendance partisane. Je peux l'accepter, mais là on le sait tous, que
c'est 30 %, là. Arrêtons de jouer aux fous puis à n'importe quoi.
Bon,
M. le Président, la ministre nous a dit qu'elle n'acceptait aucune restriction
aux libertés individuelles. Pourquoi a-t-elle
accepté de déposer le projet de loi n° 59, qui restreignait tellement la
liberté d'expression qu'elle a fini par le retirer? Si les libertés
inscrites dans la Charte des droits et libertés sont si importantes et si
intouchables, imbalisables, pourquoi le gouvernement libéral a-t-il osé
déposer le projet de loi n° 59, qui restreignait la liberté d'expression?
Je
veux juste expliquer qu'il ne faut
pas tomber dans l'enflure verbale,
dans les accusations outrancières. C'est très difficile puis c'est ce à quoi, malheureusement... Même sur un
ton respectueux parce que la ministre,
elle fait tout ça sur un ton
respectueux, puis ça, je la reconnais là-dedans, mais on ne peut pas tomber là-dedans
aussi simplement.
On
est tous et toutes d'accord que la liberté de culte constitue un droit
précieux, fondamental au Québec. La liberté de conscience, la liberté de croire, elle est protégée pourquoi? Parce que,
partout dans le monde et même ici, peut-être, à une
certaine époque, les gens qui ont des croyances religieuses ont été non seulement minorisés parfois, mais, par
rapport à... il y a
eu des chocs des religions. Il y a encore des pays où on est tué parce qu'on est chrétien ou parce qu'on est musulman. C'est terrible et ça ne saurait être. C'est pour ça qu'on a des chartes
des droits et libertés. On ne veut pas qu'un État restreigne le
droit de croire, la conviction religieuse d'une personne.
Comme
l'a mentionné Julie Latour, la liberté de religion implique aussi que tous les citoyens
puissent se reconnaître, les croyants
comme les non-croyants, et le projet
de loi duquel on discute et pour
lequel ma collègue de Montarville dépose une motion pour qu'on amende ce projet-là, motion avec laquelle on est d'accord
complètement, on a la même proposition depuis un bout de
temps aussi, c'est qu'on touche à la neutralité religieuse de l'État.
La ministre a fait allusion à la place publique quelquefois, mais, nous, ce que nous touchons, nous, au Parti québécois, et ce que touche cette loi, le projet de loi n° 62, c'est l'État québécois. Comment doit-on se conduire face à des demandes d'accommodement religieux dans l'État québécois? C'est pour ça qu'il y a une partie, par exemple, sur les accommodements
religieux, et on accepte, et on
accepte, de dire : La religion se vit
mais avec certaines balises. On le fait dans la partie sur les accommodements religieux. On
n'empêche pas la liberté de conviction, la liberté de croyance, la liberté
religieuse. On préserve ce droit, mais on dit : Ça se vit à travers certaines balises dans l'État.
On n'est pas sur la place publique, on n'est pas sur les plages, on n'est
pas dans la rue, on est dans l'État québécois. Il faut ramener ça à cette
dimension.
Alors,
ce débat-là, il perdure depuis 2007. Il
y a eu le rapport Bouchard-Taylor, il y a eu la charte des valeurs, charte de la laïcité
du Parti québécois, occasion ratée deux fois. Et on le dit, on fait notre mea
culpa, occasion ratée deux fois. Nous
n'avons pas réussi à trouver le point d'atterrissage qui satisfasse tout le monde, pas du tout. Alors, il y a eu le rapport
Ouimet, que nous n'avons jamais vu. Il
y a eu le projet de loi n° 491 de la
députée Fatima Houda-Pepin, qui est
resté lettre morte aussi. Nous n'avons toujours pas trouvé le point
d'atterrissage.
Alors,
quand le projet de loi n° 62 est arrivé, nous avons remarqué... nous avons,
nous, du côté de l'opposition officielle, voté pour le principe. Nous avions de
l'espoir, et je dois dire que je l'ai encore. J'entends le premier ministre
fermer la porte à cet espoir, mais moi, je
suis une femme, je vais dire, déterminée, je pense qu'il est encore possible de
changer les choses. Nous avons voté pour le
principe et nous avons ensuite déposé huit amendements, huit amendements.
Et j'ai entendu la ministre débattre, puis
discuter, puis dire : Oui, certains amendements, ce serait peut-être
possible de les apporter. Je pense à
celui sur un guide qui a été demandé pour les secteurs de l'éducation, les
secteurs de la santé en matière
d'accommodement religieux. Regarder s'il est possible d'assujettir les municipalités
à la loi, ça aussi, on nous disait qu'on verrait si c'était possible, puis on
faisait ça en bonne entente. Mais on avait aussi la demande minimale d'appliquer la recommandation de Bouchard-Taylor
qui était d'interdire le port de signes religieux aux agents de l'État, de l'État, qui sont en situation de
coercition : juges, procureurs, gardiens de prison et... juges,
procureurs, gardiens de prison. Voilà. Le problème...
Une voix : ...
Mme Maltais :
Policiers, policiers. Merci, c'est gentil. C'était la manière d'essayer d'en
arriver à une solution qui permette à
tout le monde de se sentir à l'aise, laïcs et croyants, athées et croyants. La
laïcité de l'État, normalement, ne devrait pas faire l'objet de
discussions, elle devrait être fait accompli.
Là, la ministre nous parle de neutralité
religieuse de l'État. Moi, je pense que ce n'est pas tout à fait ce qu'on cherche, c'est la laïcité de l'État. Parlez aux
Québécois, ils vont vous dire que l'État québécois est laïc. Tout le monde
est convaincu de ça. L'État québécois est
laïc. Ce que ça veut dire, c'est qu'il y a une séparation stricte entre
l'Église et l'État. L'État juge ses
choses, et l'Église n'intervient pas dans les affaires de l'État. C'est du
passé. Ça a existé au Québec. La
laïcisation de l'État québécois, la laïcisation du Québec, elle s'est faite,
c'est une évolution. On n'est pas partis d'un État laïc. On a vraiment travaillé, surtout depuis les années 60, à
permettre à toutes les expressions de se faire, à toutes les consciences
de vivre ce qu'elles avaient à vivre, mais à travers des balises. Il y a eu une
époque où les religieuses enseignaient avec
la cornette. Elles ne le font plus, puis tout le monde a accepté ça. Pourquoi?
Parce que la laïcité, ça doit aussi s'incarner à quelque part, ça doit
s'incarner.
Et de la même façon qu'on demande à des gens de
ne pas porter de signes d'expression politique... Parce qu'il y a là un enjeu émotif. S'il y a quelque chose qui est émotif au
Québec... Il y a deux choses, hein? La religion puis la politique. C'est deux sujets qui peuvent
enflammer. La langue aussi, parfois. Mais l'expression politique est interdite
dans les vêtements de l'État pour ne pas créer de malaise à la personne qui
demande un service ou aux personnes qui travaillent ensemble. C'est normal. Est-ce que c'est un
empêchement de la liberté d'expression? Le fait qu'on pose cette discipline
vestimentaire aux employés de l'État, est-ce
que c'est un empêchement d'avoir des convictions politiques? Personne ne
comprend ça comme ça. Tout le monde comprend
que, même si on est profondément souverainiste, fédéraliste, péquiste,
caquiste, libéral, Québec solidaire, tout le monde comprend que c'est par
respect pour le milieu de travail et pour la fonction qu'on assume dans l'État,
pour le visage qu'on représente. On représente la neutralité politique.
Bien,
beaucoup de Québécois, comme moi, et de Québécoises croient qu'on doit avoir la
même pudeur face à nos expressions
religieuses. Non pas à nos convictions — nos convictions, elles sont incarnées, elles
sont en nous — mais
face à l'expression. C'est sûr que
c'est plus difficile pour quelqu'un qui croit que vie publique et vie privée
sont indissociables et que le vêtement
fait partie de la conviction religieuse. Et je suis capable de comprendre le
trouble immense que ce doit être. Mais on peut ensemble, comme société,
considérer que cette balise est nécessaire. Quand on a déposé la charte des valeurs, on trouvait que la balise devait être
beaucoup plus large que ça. Mais, vu le débat en cours, nous avons décidé
de restreindre nos demandes. Et, vu les
événements tragiques qui se sont passés au Centre culturel islamique de Québec,
on est partis de nos huit amendements puis on
a dit : Bien, écoutez, on va en garder trois, peut-être que ce sera une
piste d'atterrissage intéressante pour tout le monde.
On a gardé le
fait d'avoir un guide pour les secteurs de l'éducation et de la santé, et ça
semble être très bien accueilli. C'est
quelque chose d'important, puis ça va permettre de mieux accueillir la
diversité. On a dit : On va conserver aussi la demande que la... Ça, c'est pour que la... Ce guide-là, il est
important aussi pour que ce ne soit pas la personne, l'employée qui reçoive ça, qu'elle prenne la décision seule.
Il faut qu'elle puisse s'appuyer sur un guide pour se défendre après s'il y a
poursuite ou des choses comme ça.
• (16 heures) •
Mais,
dans les demandes qu'on avait, une demande extrêmement importante, c'était le minimum
de Bouchard-Taylor, que les agents de coercition ne portent pas de
signes religieux. Et nous avons un accord au niveau de tous les partis d'opposition. Est-ce qu'un parti d'opposition est
xénophobe ici? Non. Est-ce qu'il y a un collègue xénophobe? Je ne le crois pas, non. Est-ce qu'on pourrait dire ce
mot-là dans cette Assemblée nationale? Non. Et pourtant le premier ministre l'a dit en dehors du salon bleu, en dehors de l'Assemblée nationale, là où nos règles ne jouent plus, et je trouve
cela terrible. Je trouve ça terrible parce que, depuis les tragiques événements du
Centre culturel islamique, il y avait une main tendue, et on avait l'impression qu'il était en train de se
tisser quelque chose. Il y avait tout à coup une piste d'atterrissage qui se
dessinait, il y avait un accord potentiel.
Simplement en ajoutant ça, on aurait pu rapidement adopter 62 et tout à coup
dire : Bon, regardez, tous ensemble, nous avons donné une balise,
la laïcité va s'exprimer comme ça, c'est quelques rares personnes, et c'est
terminé. Après, à la campagne électorale, nous présenterons chacun, chacune des
éléments.
Tout le monde
mettait de l'eau dans son vin, à notre avis, c'est ce que nous avions compris.
Une main tendue, c'est une main
tendue, il faut que l'autre main se tende pour qu'il y ait accord. Notre main
tendue, nous croyions... nous avons
vu un mouvement, nous avons senti un mouvement vers nous, et tout à coup ça
s'est refermé. Si j'avais une image, je
dirais, c'est presque... non, je n'irai pas jusque-là, ce n'est pas une bonne
image de dire que cette main s'est refermée, je vais arrêter là. Mais on l'a échappé. Et
malheureusement, M. le Président, je vais le dire comme je le pense, c'est le
premier ministre qui l'a échappé. C'est le
premier ministre qui, hier, on dirait, a complètement oublié tout ce qui s'est
passé dans les 10 dernières journées et le ton absolument respectueux avec
lequel tout le monde travaille ensemble.
Il y a eu,
après les événements du Centre culturel islamique, un mouvement d'unité pour
montrer aux hommes et aux femmes du
Québec de toutes origines que nous étions une nation, un peuple, que nous
vivions ensemble et que nous allions
travailler à établir un vivre-ensemble harmonieux. Ça se sentait dans les mots,
dans la façon, dans la posture. Je me
souviens d'avoir dit que le premier ministre avait eu une très belle posture et
qu'il avait été, à ce moment-là, à la hauteur de ce qu'on s'attend d'un
premier ministre du Québec.
Qu'est-ce qui
s'est passé? Comment s'est produite la rupture d'hier? Est-ce que c'est la
lettre de M. Taylor, qui s'est
détaché du rapport Bouchard-Taylor? Est-ce qu'il y a eu contact avant pour en
arriver à ce que M. Taylor débarque du rapport cet article, cette recommandation du rapport Bouchard-Taylor?
Nous ne le saurons pas, nous, nous n'avons pas ces informations. Mais pourquoi le premier ministre a-t-il brisé
l'entente qui se préparait devant nous? Pourquoi le premier ministre
a-t-il tout à coup durci le ton? Nous n'avons pas de réponse à cette question.
Mais, je le
répète, quand la ministre dit qu'ils ont toujours été constants, elle oublie
des grands pans de l'histoire récente
de nos débats. Le député de LaFontaine a été pour le tchador, contre le
tchador, pour le tchador, contre le tchador. Le rapport Ouimet était pour Bouchard-Taylor; là, maintenant, ce serait
contre Bouchard-Taylor. On ne sait plus. Qu'est-ce que le Parti libéral veut? Est-ce que le premier
ministre mène le Parti libéral au point d'imposer ses principes, ses valeurs
à lui à son parti, au lieu d'être à l'écoute
de l'ensemble de la société québécoise et du consensus québécois et de nous
aider tous ensemble — c'est
sa responsabilité — à
cheminer et à atterrir enfin à quelque part? Je pense qu'il a oublié cela. Il n'est pas le premier ministre du Parti libéral,
il est le premier ministre de tous les Québécois et les Québécoises. Et le
grand consensus québécois qui se dessine,
c'est ce qui est contenu dans la motion de la collègue de Montarville. Il est
là, la solution était là. Elle ne brimait personne, il n'y a pas de
brimade là-dedans. Il y a une règle de jeu connue qui s'exprimait facilement, simplement. Et, quand on me répond, quand on me
répond : Il n'y a personne qui en porte, de signe religieux, je dis : Bien, c'est justement le
temps de légiférer, c'est justement le temps d'établir clairement des balises. Tu établis
des balises à un moment où, justement, tout
le monde, après ça, qui voudra
travailler dans les domaines qu'on a là connaîtra les balises. Et ce
sont des balises tout à fait raisonnables dans une société.
On a jeté l'anathème du côté du premier ministre,
on a jeté l'anathème sur tous les partis qui pourraient être xénophobes, sur les gens qui font de la
discrimination vestimentaire; c'était jeter l'anathème sur bien du monde et bien
des pays. C'était jeter l'anathème d'abord
sur M. Bouchard lui-même, qui maintient sa recommandation.
M. Bouchard maintient sa recommandation. Il n'a absolument pas démenti son rapport, le rapport Bouchard-Taylor. Et cette recommandation qui existe, il l'a conservée.
Le Conseil du statut de la femme avait demandé qu'on légifère sur les vêtements
religieux et sur les vêtements signifiant
l'oppression à une femme. Le premier
ministre a jeté l'anathème sur les
opinions, sur un rapport du Conseil
du statut de la femme. C'est assez étonnant. C'est assez étonnant de la part
d'un premier ministre.
Il y a
des pays, dont la France, qui ont légiféré sur la question.
Manuel Valls, qui était le premier
ministre de France, à côté du premier
ministre, lui a fait un peu la leçon — c'est
comme ça que ça a été interprété — sur
ce que ça signifiait que la laïcité. Est-ce que la France, et le premier
ministre français Manuel Valls, de l'époque, est xénophobe, raciste? Personne ne dirait ça, mais, si on applique
stricto sensu les mots du premier
ministre, c'est ce qu'il faut
conclure. C'est pour ça que ça n'a
pas de bon sens, là. Il y a une rupture qui s'est faite qui est inexplicable,
et il y a des mots qui ont été beaucoup trop durs.
Ce matin, le chef de l'opposition officielle a demandé des excuses au premier ministre. Je pense que ce serait de bon
aloi, puis je vais vous dire aussi pourquoi. Dans les discussions qu'on a eues depuis une
semaine... c'était très apaisant. On
se parlait vraiment en hommes et
femmes politiques avec de la hauteur. Il y avait une répercussion, à cause de
ça, sur les réseaux sociaux. Les réseaux sociaux avaient baissé le ton.
Ce que je vois, moi, sur Facebook, Twitter — j'en reçois beaucoup, ça fait longtemps que je suis là-dessus — ça avait baissé le ton. Puis c'était facile
de faire baisser le ton aux gens, de
leur dire : Hé! Hé! Hé! Wo! Wo! Wo! On s'est tous entendus pour avoir un
ton apaisant, et tout, puis ça baissait vite. Ça vient de reprendre, M. le Président. Le ton vient de se
redurcir à nouveau. Pourquoi? Parce que c'est en réplique. Instantanément, il y a une réplique, et on ressort
les vieux articles, et on ressort les affaires, et untel a dit ça, untel a dit
ça. Moi-même, je viens de le faire en
disant : Bien, écoutez, M. le député de LaFontaine, vous avez déjà fait
quelques volte-face qui vous rendent
similaires à une toupie dans le dossier. Mais il est important que le premier
ministre revienne, revienne à la
situation qui prévalait il y a à peine 48 heures, c'est-à-dire un ton
apaisant, et que nous trouvions ensemble une solution.
Alors, dans
le projet de loi n° 62, nous avons proposé les guides d'utilisation
d'encadrement des accommodements religieux.
Nous croyons que cela devrait arriver. Nous n'avons toujours pas de nouvelles
de la part du gouvernement. Nous ne savons pas comment ça va évoluer,
mais on pense que ça devrait encore arriver.
Dans le
projet de loi n° 62, l'idée d'interdire le visage couvert pour la
prestation et la réception de services publics était une bonne idée. Il y avait une exception tellement grande qui
rendait la règle inopérante... Nous n'avons toujours pas de réponse à nos questions là-dessus. Nous avons
proposé des amendements. J'ai même proposé un amendement très précis, là, qui était inspiré par... je pense que c'est
Guillaume Rousseau, l'avocat qui était venu nous présenter... qui disait que
l'exception devrait être pour un cas de santé ou de sécurité avéré :
billet du médecin, blablabla.
• (16 h 10) •
Parce que les
seules exceptions que nous a données la ministre là-dessus, c'était de
dire : Imaginons un cas que quelqu'un
s'est fait opérer puis qui a un pansement. Cas de maladie avéré, santé avéré,
aucun problème. Donc, ça, il y a moyen
de trouver des solutions. On est en
mode solution, mais on n'a toujours
pas de réponse. Ça fait longtemps qu'on a débattu, en principe, de ce dossier-là, de 62. Ça fait longtemps qu'on a
fait les auditions, ça fait longtemps qu'on a fait le principe, mais on n'a toujours pas de nouvelle de
la part du gouvernement de l'état de situation sur les amendements qu'on
a proposés sur ces éléments-là, mais le 62
ne s'adoptera pas avec la règle actuelle. Si le durcissement de ton du Parti
libéral et du gouvernement, c'est de
dire : On ne bouge plus, vous allez l'adopter comme ça, bien, je suis
obligée de vous dire, M. le
Président, le projet de loi, actuellement, tel qu'il est ne correspond pas à ce
que nous demandions, donc on se dirige vers un mur, là. On n'a pas de
nouvelle. Mais l'ajout de Bouchard-Taylor fait partie maintenant des choses qui
nous semblent importantes depuis les récents événements. Ça nous semble
extrêmement important.
Il
s'est passé un événement aussi aujourd'hui. Le leader du gouvernement a
dit : Notre majorité suffira pour adopter le projet de loi
n° 62. C'est à peu près les mots, là, «notre majorité suffira». Pour que
la majorité s'exerce, ça prend deux choses.
Ça prend quand même un certain accord des oppositions. Je rappellerais que le
projet de loi n° 59 ne s'est jamais
rendu au bout de sa première partie, il a fallu que le gouvernement fasse ce
que l'opposition avait demandé au début, c'est-à-dire l'enlever pour réussir à adopter quelque chose. Donc, la
majeure partie de projet de loi n° 59, il a fallu que le gouvernement l'abandonne lorsque les
oppositions, de façon très respectueuse, ont utilisé les outils à leur
disposition pour convaincre le
gouvernement, ce qui s'est bien passé. C'est une chose. Je ne dis pas que nous
ferons cela sur 62, puis ça, je tiens
à le dire tout de suite, là, on attend de voir ce qu'on va nous proposer. On va
voir ce qu'on va nous proposer, qu'est-ce
que ça va contenir, puis comment on va réussir à refermer les brèches de 62 et,
deuxièmement, comment on va accueillir
notre demande d'apaisement avec cette entrée de Bouchard-Taylor que notre
collègue et nous avons demandé. C'était dans nos huit amendements qu'on
a déjà demandés. Premièrement.
Deuxièmement,
sinon, ça prend un bâillon, ça prend un bâillon. Jamais je ne croirai qu'on va
se rendre là, M. le Président. On part
de l'apaisement, on part du sentiment d'unité, d'union mutuelle, on part de
tous les partis qui se réunissent,
qui parlent de vivre-ensemble, qui travaillent ensemble, puis, à la fin, on
finirait dans un bâillon. Ce serait aller
tout à fait à l'encontre de ce qu'on avait compris qui allait se passer la
semaine dernière, et ce serait dommage. Et, encore là, ce serait un durcissement de ton, une couche supplémentaire
qui nous amènerait à voir les gens encore durcir le ton. Ça, c'est très
personnel, M. le Président, il ne faut plus durcir le ton sur ce sujet. Il ne
faut plus de ce genre de remarque qu'a eu le
premier ministre, il n'en faut plus. Il ne faut plus d'attaques entre nous. Il
faut trouver, de façon paisible, dans
les débats normaux, le chemin de l'entente. Bien, le chemin de l'entente, il
est entre autres dans la motion de notre collègue, il est dans la fermeture à l'exception sur le visage
découvert, et je pense que ça, tout le monde l'a compris. Tout le monde
l'a compris et tout le monde l'a vu.
Mais
l'autre chemin de l'entente, il est dans ce petit bout qu'on pourrait nous
donner pour baliser, baliser la façon dont
s'incarne l'État chez les agents de coercition. Alors, ce n'est pas énorme,
mais ce serait une avancée pour le Québec. Je me souviens de notre chef, le député de Rosemont, chef de
l'opposition officielle, qui disait : Nous allons examiner 62 en
fonction d'une avancée pour le Québec. Est-ce qu'on avance, est-ce qu'on fait
avancer ou pas le Québec?
Nous
croyons que nous pouvons encore faire avancer le Québec. Mais ce n'est pas en
durcissant le ton que nous trouverons
ce chemin qui s'est ouvert devant nous et qui semble vouloir se refermer. Je
souhaite que nous continuions à débattre
dans un esprit d'ouverture et que nous trouvions ensemble ce chemin. C'est
pourquoi nous appuierons la motion de la députée.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, Mme la
députée de Taschereau, pour cette intervention. Je cède la parole
maintenant à Mme la députée de Crémazie.
Mme Marie Montpetit
Mme
Montpetit : Merci, M. le Président. Je suis très contente d'avoir
l'opportunité de participer à ce débat sur la députée de Montarville, qui revient encore une fois avec la question de l'interdiction de port de signes religieux aux
magistrats, aux procureurs de la couronne, aux policiers, aux gardiens de
prison, aux président et vice-présidents de l'Assemblée
nationale.
Deux
choses en commençant, M. le Président. On va où après ça? Parce qu'une fois qu'on a
fait les magistrats, les procureurs
de la couronne, les policiers, on va où? On va dans les écoles? On va chez les enseignants? On va dans les garderies? On retourne sur la plage avec le
burkini, où nous a indécemment amenés la députée de Montarville cet été?
Donc, on s'en va où avec cette discussion-là
de restreindre les droits des citoyens à porter les vêtements qu'ils souhaitent
porter?
Puis
je pense qu'il est important, factuellement, de se rappeler que les auteurs
dudit rapport, qui sont mentionnés dans
la motion, ont mentionné que leurs recommandations de l'époque, hein, parce
qu'on parle beaucoup des recommandations de l'époque... que les recommandations à cet effet n'avaient aucun
fondement, aucun fondement. Pourquoi les magistrats? Pourquoi les policiers? Pourquoi les policiers? Ça
implicite quoi? Ça implicite qu'ils ne peuvent pas être partiaux parce qu'ils pratiquent une religion, puis, une fois
qu'ils ont enlevé leurs signes religieux, ils deviennent plus partiaux, même
s'ils continuent de pratiquer leur religion?
Il n'y a aucun fondement à cette proposition-là, puis les auteurs dudit rapport
l'ont mentionné à plusieurs reprises.
Et
je ne sais pas si la députée de Montarville puis la députée de Taschereau, qui
ont mentionné à plusieurs reprises ce
rapport-là, ont fait leur revue de presse de la journée d'hier, mais je vais me
permettre quand même de revenir sur les différentes lettres de Charles Taylor qui... et je vais me permettre
d'en lire des extraits parce que c'est tout le propos du débat d'aujourd'hui, puisque dans la motion on
réfère à cette commission-là, aux recommandations de la commission. Et
Charles Taylor disait : «J'ai bien signé le rapport où cette
recommandation apparaît; mais, neuf ans plus tard, je ne l'endosse plus.» Je ne sais pas comment il peut
être plus clair qu'en disant ça : Je ne l'endosse plus. Donc, c'est une
motion qui en partant fait référence
à quelque chose qui n'est plus d'actualité et dont l'auteur même dit qu'il ne
l'endosse plus.
Et je vais me
permettre d'aller plus loin dans sa citation parce que je trouve que c'est
bien, bien important d'avoir des propos d'un des auteurs de ce
rapport-là, qui dit : «Je pense principalement au débat sur la charte des
"valeurs québécoises"
[proposée par le Parti québécois]. On a constaté lors de ce débat que la
proposition de restreindre les droits de
certaines classes de citoyens a eu un effet secondaire de stigmatisation.» Et
c'est de ça qu'il est question, de stigmatisation. «Cet effet s'est entre autres fait sentir dans la
multiplication des incidents d'agression, surtout envers les musulmanes portant
le voile, des agressions allant des paroles jusqu'aux voies de fait dans
certains cas.»
Et
je vais me permettre de parler de ma circonscription dans Crémazie. J'ai eu
l'occasion, suite aux attentats de Québec,
de faire plusieurs rencontres avec la communauté musulmane, avec les
Québécoises et Québécois de confession musulmane, qui m'ont tristement
fait mention de plusieurs témoignages, justement, à l'effet d'agressions
verbales, d'agressions physiques, de femmes
de confession musulmane qui portent le voile qui se font cracher au visage, qui
se font insulter. J'ai eu des papas
qui m'ont fait des témoignages d'une tristesse sans nom, qui m'ont dit :
Nous, ce qu'on apprend à nos filles
adolescentes, parce qu'elles sont voilées, c'est, quand elles vont dans le
métro de Montréal, de se tenir le dos
au mur, de ne pas être sur le bord de la voie de métro, parce qu'on a peur que,
parce qu'elles portent un voile, elles
se fassent pousser dans la voie.
C'est absolument effrayant de penser que dans une ville comme Montréal, de
penser qu'au Québec... Puis j'entends
la deuxième opposition, qui a l'air de trouver ça bien drôle. Je vous amènerai
avec moi rencontrer ces gens-là, qui
vivent ça à tous les jours et... Je pense que des fois il y a des gens ici, en
cette Assemblée, qui ne réalisent pas que tous ces échanges qui sont faits se
font au détriment de personnes qui vivent ça au quotidien, dont c'est la
réalité au quotidien. Et moi, j'ai le
grand privilège d'avoir une communauté musulmane bien intégrée, bien présente, mais qui vit ça au
quotidien et qui... Oui, ça a un impact sur l'isolement, sur la stigmatisation
de cette communauté.
• (16 h 20) •
Et
j'en reviens à la lettre de Charles Taylor, qui dit aussi : «Ces gestes
sont le fruit d'une minorité de citoyens qui nourrissaient
déjà de l'hostilité envers les immigrants en général ou envers les
musulmans, mais qui n'osaient pas l'afficher préalablement. Le débat a eu pour effet d'atténuer ou d'éliminer leurs
inhibitions, en plus d'épaissir les nuages de suspicions et de craintes qui entouraient les nouveaux
arrivants dans une partie de l'opinion publique.» Et c'est exactement
ce qu'on fait encore aujourd'hui et ce qu'ils ont fait hier, ce qu'ils ont fait avant-hier, ce qu'ils
vont faire demain en remettant sur la place
publique constamment une aura de suspicion sur : si on porte le voile, si
on porte une kippa, si on porte le kirpan, si on porte un signe religieux, c'est suspicieux. Il y a
anguille sous roche, il y a quelque
chose. Il y a quelque chose, il y a quelque chose.
Et
il y a des effets extrêmement concrets sur ces personnes-là à l'heure actuelle,
et je pense que, quand on parle de société ouverte, de société tolérante, de société
d'accueil, c'est la direction exactement contraire que l'on prend avec ce genre de
discussion là.
Et
je continuerai sur la lettre de Charles Taylor, qui est très éloquente, qui
dit : «J'estime qu'on ne peut pas se payer le luxe de poser de nouveaux gestes qui renouvelleraient cet effet
de stigmatisation. [...]Ne rouvrons pas les plaies à nouveau.» Et je pense que cette lettre-là, il faut
l'avoir très près de soi dans les débats qu'on est en train de faire. Et il
faut le répéter, et le répéter, et le répéter, et je le répète à la deuxième
opposition, parce que je pense qu'ils ne l'ont pas bien saisi,
et je vais relire encore le premier paragraphe : «J'ai bien signé le
rapport où cette recommandation paraît; mais neuf ans plus tard, je ne
l'endosse plus.»
Donc,
au lieu de faire référence à ce dit rapport là et aux recommandations à chaque
fois, je pense que c'est bien important de se saisir du fait que le
propre auteur du rapport ne l'endosse plus.
Et
la proposition qui est faite s'attaque directement aux droits des citoyens, au
droit de liberté, au droit de pratique de
la religion, au droit de s'habiller comme on veut. Ça exacerbe la
stigmatisation, ça augmente le sentiment d'exclusion, ça augmente l'isolement des minorités. Et, pour
moi, c'est très clair. Je ne comprends pas que, dans la société dans laquelle
on est, il y a de ce genre de propositions là qui soient faites encore aujourd'hui.
Et
j'invite vraiment la deuxième opposition à aller directement sur le terrain,
puis l'opposition officielle aussi, à aller
rencontrer ces gens-là, à voir quels sont les impacts, à l'heure actuelle, de
toutes ces discussions-là qui sont faites dans la sphère publique, particulièrement auprès des femmes qui portent
le voile, les craintes que ça peut amener, la peur que ça peut amener,
la peur d'être seule le soir quand on s'est fait cracher au visage, quand on
s'est fait tirer un voile, quand on s'est
fait insulter, ce que ça peut amener au quotidien comme craintes et la
difficulté que ça peut amener aussi à s'intégrer comme il faut dans une communauté
qui, oui, pour une grande, grande majorité...
Ah!
il y a eu une vague d'amour spectaculaire dans les dernières semaines, puis
j'espère que ça permettra de changer le
ton, et je l'aurais espéré.
Malheureusement, ça n'a pas duré très longtemps, parce que la deuxième
opposition a ramené encore davantage ce discours-là. Et j'espère qu'on
pourra, en tout cas, passer à autre chose extrêmement rapidement.
Et sur cette
motion-là particulièrement, évidemment, j'invite la Chambre à voter contre.
Merci.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, Mme la
députée de Crémazie, pour cette intervention. Il reste
2 min 30 s pour la deuxième opposition. Je vous cède la parole,
M. le député de Shefford.
M. François Bonnardel
M.
Bonnardel :
Oui. M. le Président. Vous êtes qui, le Parti libéral? Vous êtes qui pour
parler de peur de la diversité, M. le Président? Vous êtes qui pour dire
que, demain matin, là, ici, dans les oppositions, M. le Président...
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Un instant! Un instant!
Adressez-vous à la présidence, monsieur. Le ton était correct. Je sais
que c'est un débat qui est un peu sensible. Adressez-vous à la présidence.
M.
Bonnardel :
Vous savez, M. le Président, je suis né à Granby avec 115 communautés
différentes. Puis, quand j'entends la
ministre parler : Ah! les oppositions... Peur de, fermeture, diversité,
moins bonne religion, bonne religion... Mais vous êtes
qui? Vous êtes qui pour nous dire ça? Est-ce que ma collègue, mon chef a dit
que, dans l'espace public, demain
matin, on empêchait les gens de porter ce qu'ils veulent? Est-ce qu'on a déjà
dit ça? Jamais. Jamais. Pour ceux qui nous écoutent : Jamais.
Ce qu'on a
dit, c'est que les personnes en autorité, position de coercition, hein, les
policiers, les gardiens, les juges, les
procureurs, ce qu'une grande majorité de Québécois, près de 80 % sinon
plus, se disent... Et même, parlez aux minorités, qui vont vous dire : Porter le kirpan, la
kippa, la croix... Ils m'ont dit non. On dit : Non. Ah! ça, c'est être
fermé? C'est de ne pas être capable d'avoir un débat serein
minimalement? On n'est pas capables d'avoir ce débat et de différencier, M. le
Président, l'espace public versus les personnes qui sont en position
d'autorité!
S'il y a une
chose qui m'écoeure, M. le Président, depuis que je suis ici, à l'Assemblée
nationale, c'est de voir des partis
politiques — et on
n'a jamais été au pouvoir — que ce soit le Parti québécois, le Parti libéral le premier
ministre en tête, là, qui était chef
de l'opposition le 21 janvier 2014 puis qui disait à tout le monde :
Le Parti libéral du Québec dit oui à
l'interdiction du port de la burqa, du niqab et du tchador par les employés de
l'État et au fait que tout accommodement doit respecter, bien sûr, la charte québécoise des droits — eh oui — et ne peut absolument pas, sans concession,
bien sûr, enfreindre le principe de
l'égalité entre hommes et femmes. Qu'est-ce que le chef de l'opposition a fait
quand il est allé s'asseoir comme
premier ministre? Renié, renié. Que ceux qui nous écoutent, là : il a
renié ce qu'il a dit comme chef de l'opposition officielle.
On continuera d'avoir ce débat serein pour être
capables d'avoir une position qui va satisfaire la grande...
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, merci à vous, M.
le député de Shefford, pour cette intervention. M. le député d'Ungava,
il reste 30 minutes à votre formation politique.
M. Jean Boucher
M.
Boucher : Alors, bonjour, M. le Président. Ça me fait plaisir cet
après-midi de prendre la parole sur un dossier aussi délicat et qui
soulève les passions.
Vous savez,
on va faire un petit peu d'histoire. Le 29 janvier dernier, c'était une
journée froide comme bien des journées
de janvier comme Québec en a connu depuis des années et puis en connaîtra
sûrement encore pendant des années. Exceptionnellement,
j'étais à Québec cette journée-là. J'étais avec ma femme, mon garçon,
Jean-David, sa conjointe, Sandra, et
notre petit Vincent, un petit bébé qui est né peu longtemps avant Noël. Puis ce
samedi après-midi là, bien, on se promenait dans le Vieux-Québec, on
visitait les sites du Carnaval pour profiter de l'ambiance un petit peu, etc.
Après un
après-midi passé au froid, bon, on en vient à l'heure de rentrer à la maison,
on mange, on fait ce qu'on a à faire,
on décide d'écouter en soirée un film qu'on loue, bon, sur le système par
câble, la pitonneuse, ce qu'on fait. En fin de soirée, bon, bien, le
film est terminé, on va mettre ça aux nouvelles. Voyons, stupéfaction, c'est
quoi, ça, attentat à Québec? Sur le coup, tu
te demandes : Ça doit être une fiction, ça doit être l'annonce d'une
émission qui va passer sous peu, puis
là, après 30 secondes, une minute d'incompréhension, tu te rends compte de
ce qui s'est passé pendant la soirée à Québec, une soirée toute simple,
un dimanche soir comme bien d'autres, chacun vaque à ses affaires, un groupe de
Québécois, ce soir-là, de confession
musulmane avait décidé de se réunir dans un lieu de prière. C'est quoi qu'ils
étaient allés faire là? Est-ce qu'ils
étaient allés fomenter un complot contre l'État? Est-ce qu'ils étaient allés
préparer un attentat? Est-ce qu'ils
étaient allés mettre des idées subversives? Non, ils étaient allés prier. C'est
très grave, ça, M. le Président, ils
étaient allés prier, prier d'une façon non conventionnelle pour nous, moi,
catholique, chrétien non pratiquant, mais, je veux dire, quand tu
regardes de quelle façon un catholique prie puis de quelle façon un musulman
prie, il y a des différences, c'est des
choses avec lesquelles on n'est pas habitués. Ces gens-là ont été abattus parce
qu'ils s'étaient réunis pour prier ce soir-là.
Face à ça,
bien, bon, il y a eu un élan d'amour, de générosité, de réconfort où il y a eu
une ouverture, je pense, des deux
côtés, autant de la communauté de confession musulmane que de la communauté...
j'allais dire québécoise, mais de la communauté
traditionnelle, si on veut, où on dit : Bien là, il est temps qu'on se
parle, on vit ensemble des fois depuis deux, trois générations, côte à côte, on
est des voisins puis on ne se regarde pas. Il est temps qu'on se parle puis il
est temps qu'on apprenne à se
connaître. Puis tout ça vient s'inscrire dans le débat du projet de loi
n° 62. Ce n'est pas désincarné, M. le Président, ce n'est pas quelque chose qui s'est passé puis, dans une
bulle, ailleurs, il y a d'autres choses qui se passaient ici, à l'Assemblée nationale. Tout ça, c'est dans
le même plat de sauce puis dans la même soupe, là, tout ça, ça vit ensemble.
• (16 h 30) •
Suite à ça,
bien, les oppositions ont dit : O.K., dans le projet de loi n° 62,
nous, on va faire un grand compromis, un
grand pas en avant, on va dire que, finalement, les enseignants pourront porter
des signes religieux. C'est correct, on est prêts à céder dans ça, mais on est tellement bons qu'on va, comment
dire, enlever moins de droits aux minorités religieuses qu'on prévoyait en enlever au début. Ainsi donc,
on veut seulement que, bon, les juges, procureurs de la couronne, policiers
et gardiens de prison ne puissent pas porter
de signes religieux. Est-ce que c'est raisonnable? Est-ce que ça ne l'est pas?
On va regarder ça ensemble un petit peu pendant quelques minutes, M. le
Président. Ainsi donc, une jeune avocate qui a fait son droit, qui a fait son Barreau, qui a réussi tous ses examens,
qui a fait son stage, mais qui est de confession musulmane, et qui est pratiquante, et puis qui porte le
voile, et qui aurait comme ambition de devenir ce qu'on appelait autrefois un
procureur de la couronne, un avocat du DPCP, bien là elle a un
choix : ou elle choisit son opportunité
de carrière ou elle choisit sa croyance religieuse, parce que les deux
ne pourraient pas marcher de front puis marcher côte à côte.
Une avocate
d'expérience, de 10 ans, 15 ans, 20 ans d'expérience, comme vous en connaissez
sûrement vous-même, M. le Président,
qui, après une belle carrière en droit, avec succès, etc., qui a une belle
renommée mais qui a le malheur d'être
une femme de confession musulmane et qui porte le voile, qui voudrait aspirer à
la magistrature, bien, elle est devant le même choix : Tu as eu une belle carrière
d'avocate, tu as eu du succès, tu as eu une renommée, tu as tout ce qui vient
avec, mais oublie la magistrature à cause
d'un foulard que tu portes sur la tête. C'est la même chose du côté des
policiers, c'est la même chose du côté des gardiens de prison.
Bon, certains
vont dire : Oui, mais ces femmes-là, c'est un instrument de soumission,
elles n'ont pas le choix, elles
portent ça parce que le conjoint les oblige, parce que la société dans laquelle
elles vivent les oblige, parce que l'imam de leur mosquée les oblige. Je ne
suis pas prêt à acheter ça. Je ne vous dis pas que ça n'existe pas, M. le
Président. Dans certains cas, oui, ça
se peut que ça existe. Mais, dans la foulée, là, des attentats de Québec, on a
eu des femmes musulmanes qui sont
venues témoigner à la télé, qui semblaient des femmes totalement articulées,
intelligentes, sensées, brillantes et équilibrées,
qui ont dit : Moi, je porte ça parce que je le veux, puis je suis bien
comme ça puis je suis heureuse comme ça, puis il n'y a pas personne qui
m'oblige à ça, puis je me sens tout à fait libre puis, si, demain matin, je ne
veux plus le mettre, je ne le mettrai plus,
puis ça va finir là. Mais, nous, dans notre conception, un plus un, ça n'égale
pas deux, là, ça ne peut pas marcher ensemble, ça ne se peut pas que
cette femme-là porte ça de son plein gré.
Maintenant,
on va parler de celles qui seraient peut-être obligées ou qui sentiraient une
pression pour faire en sorte que :
Tu es libre, mais ce serait peut-être mieux que tu le portes. Eh bien, on est
tellement bons puis on est tellement gentils envers ces femmes-là qu'on va dire : Tu es opprimée dans ta communauté,
tu es opprimée à ta mosquée, on va t'opprimer un petit peu plus. Oublie ça, tu ne seras jamais juge. Oublie ça, tu ne
seras jamais procureure de la couronne. Pourquoi? Parce que tu n'es pas
comme nous autres. Tu es bizarre, tu ne manges pas la même affaire que nous
autres. C'est sûr qu'il y a de quoi de
louche, c'est sûr qu'il y a de quoi de pas correct. Est-ce qu'on est en train
de dire que, si jamais je fais appel
aux policiers, soit que j'ai besoin d'aide... ou qu'un policier m'interpelle
parce qu'un crime a été commis, ou peu
importe, puis que c'est une femme, parce que, bon, on parle de kippa, on parle
de kirpan, on parle de... Appelons les choses
par les vraies affaires. Ici, c'est un débat à peu près uniquement, ou presque,
concernant le port du voile islamique chez
les femmes. Je ne pense pas, là, que, si c'était juste une question de kippa ou
de kirpan, là, on serait ici cet après-midi. C'est uniquement concernant
les femmes.
Donc, une
policière qui porte le voile me vient en aide ou m'interpelle concernant un
événement x. Est-ce que ça veut dire que cette personne-là va être
biaisée? Est-ce que ça veut dire qu'elle a l'intention de m'imposer ses valeurs
musulmanes? Est-ce qu'elle va juger mes
actes ou le crime que j'aurais potentiellement commis en fonction de ses
valeurs musulmanes? Je ne pense pas,
M. le Président. Elle va tout juger ça et tout faire son travail avec ce
qu'elle aura appris au cégep lors de
son D.E.C. en techniques policières et à l'École nationale de police, à
Nicolet, où elle aura fait son cours pour
parfaire ses connaissances dans le milieu policier. Puis, si jamais ce n'est
pas le cas, M. le Président, si jamais elle décide d'appliquer la charia locale, ou appelez ça comme vous voudrez,
bien, il y a des recours pour ça, M. le Président. Tu sais, des gens qui ne font pas leur travail
correctement, il y en a dans tous les domaines, dans toutes les sociétés, puis
il y a des recours contre ça.
La même chose
si, un bon jour, je me retrouve devant une juge qui porte le voile islamique,
qui porte le foulard. Est-ce que
c'est une moins bonne juge? Est-ce qu'elle ne va pas me donner raison parce que
moi, je suis un catholique, je suis
un homme? Est-ce qu'elle donnerait moins raison à mon collègue d'à côté, qui
est de confession juive? Je ne pense pas.
Je veux dire, la madame est là pour faire sa job de juge, elle va appliquer la
loi, la jurisprudence, et puis ça finit là. Puis, si jamais elle se laissait emporter dans des choses qui ne doivent
pas arriver, bien, il y a le Conseil de la magistrature, encore une
fois, il y a des remparts et des choses contre ça.
Donc, M. le Président, le fait d'interdire et de
limiter les droits d'une minorité religieuse, ça amène presque automatiquement
une deuxième pensée, une deuxième présomption, c'est qu'il y a quelque chose,
il y a un problème avec cette minorité-là, hein? On ne va pas interdire le port
de signes religieux chez les personnes avec un pouvoir de coercition juste pour une question
de mode, une question de couleur, une question vestimentaire,
d'attitude. Non, non, c'est parce qu'il y a quelque chose qui cloche, il y a
péril en la demeure, hein, ce n'est pas normal, puis ça va entraîner des conséquences pas correctes. Mais, à date, M.
le Président, il est... je n'ai pas l'heure exacte, il est 16 h 35,
on est le 15 février, il n'y a pas
personne qui m'a démontré quelque problème que ce soit, logique et rationnel,
pas des soupçons, pas des
impressions, de façon logique et rationnelle que ces gens-là ne peuvent pas
porter ça pour une raison x qui est indiscutable.
Tout ça, c'est des impressions, c'est des jugements de valeur de, nous, notre
société nord-américaine, qui dit : Bien là, dans la société
nord-américaine, ce n'est pas bien vu, on ne doit pas porter ça, on ne doit pas
faire ça.
Alors, M. le
Président, vous aurez compris que je n'ai pas besoin de m'étaler plus longtemps
pour vous dire que je serai contre
cette motion-là, de façon très évidente. Et puis je peux même vous dire que,
durant les consultations, il y a l'Assemblée
des évêques catholiques... Normalement, ces gens-là, bon, on ne peut pas dire
que... peut-être qu'on n'aimera pas
mon commentaire, mais ce n'est souvent pas les gens les plus progressistes et
les plus ouverts qu'on peut trouver — je m'excuse
auprès des évêques, là, ne m'excommuniez pas, s'il vous plaît — mais ces gens-là ont dit : Il faut
avoir des raisons graves et
inattaquables pour restreindre la liberté de porter des signes religieux, puis,
à date, nous n'avons connaissance d'aucune
raison suffisante pour le faire. Les évêques catholiques du Québec nous
disent : Nous autres, on n'en voit pas, de problème, à ça. Qu'une juge porte un voile, qu'une policière porte un
voile, qu'un gardien de prison porte une kippa, il n'y en a pas, de problème. En autant que ça n'attaque
pas la sécurité des autres ou la sécurité de la personne même, il n'y en a pas, de problème. C'est l'expression de sa foi, c'est
l'expression de sa religion puis dans une société pluraliste, dans un
Québec pluriel comme on se plaît à l'appeler, c'est tout à fait correct.
Je voulais
vous faire des extraits de la lettre de Charles Taylor. Ma consoeur tantôt l'a
fait, donc je vais m'abstenir en ce sens-là.
Alors, M. le
Président, je me désole du débat d'aujourd'hui. Je pense que c'est un débat qui
ne devrait pas avoir lieu. C'est un
non-débat, malgré l'opinion contraire. Puis j'entendais tantôt les collègues de
la deuxième opposition rigoler concernant, bon, l'histoire, là, où on
disait : Un père dit à ses filles musulmanes : Tiens-toi près du mur,
j'ai peur que quelqu'un
te pousse devant le métro. Je veux dire, je ne pense pas que c'est une peur
irraisonnée, je ne pense pas que c'est une
peur irrationnelle. Moi, si j'étais de cette confession-là puis que j'avais des
filles dans le même état, c'est probablement une mise en garde que leur
ferais, M. le Président.
Donc, je vous
soumets le tout, et puis, là-dessus, bien, c'est bien sûr que moi, je vais être
contre la motion. Merci beaucoup.
• (16 h 40) •
Le
Vice-Président (M. Gendron) : On vous remercie, M. le député d'Ungava,
et je cède maintenant la parole au
prochain intervenant qui le souhaitera. Alors, M. le député de D'Arcy-McGee,
vous avez environ 11 minutes à vous... 10 minutes. On vient de
m'indiquer 10. Parce que, là, je ne savais pas à quel moment il arrêterait.
Donc, il vous reste 10 minutes, à votre formation politique. À vous la parole.
M. David Birnbaum
M.
Birnbaum : Merci, M. le Président. Il me fait plaisir d'intervenir
dans le débat sur la motion proposée par ma collègue de Montarville et
d'inviter tous mes collègues de voter contre.
Le temps est
venu pour circonscrire ce débat devant nous et au nom de nos concitoyens, le
temps est venu pour agir clairement et raisonnablement. Notre
gouvernement est déterminé d'agir et, comme je le dis, de façon claire et raisonnable. Je vous soumets, M. le Président, que
la proposition devant nous aujourd'hui ne fait appel ni à la clarté ni à la
raison.
Je n'oserais
jamais instrumentaliser la tragédie que tout le Québec a vécue il n'y a que
quelques semaines. Par contre, notre
réplique collective, digne, raisonnable et humaine à cet incident horrible,
j'ose suggérer, nous a démontré la bonne voie. Malheureusement, c'est
une voie qui n'est pas empruntée par la deuxième opposition ni appuyée par l'opposition
officielle.
Avec les yeux du monde sur le Québec, notre réplique collective à cette tragédie a été marquante par
sa dignité, sa raison et son
ouverture. Nos concitoyens québécois de foi musulmane ont pris note, les gens à
travers la planète ont pris note. Si
nous voulons être fidèles aux paroles et gestes raisonnables, aux expressions
d'empathie, de solidarité et de l'inclusion
qui ont suivi les événements tragiques à Sainte-Foy, nous allons comprendre
qu'il n'y a qu'une seule réponse — une seule réponse — cohérente et responsable à la proposition
devant nous, qui se lit de même — la proposition se lit :
«Que l'Assemblée
nationale reconnaisse la nécessité de poser des actions concrètes en matière de
neutralité religieuse de l'État et d'encadrement des accommodements
raisonnables;
«Qu'elle rappelle [à] la Commission de consultation sur les
pratiques d'accommodement reliées aux différences culturelles
recommandait dans son rapport d'interdire le port de signes religieux aux magistrats
et procureurs de la couronne, aux policiers, aux gardiens de prison et aux
président et vice-présidents de l'Assemblée nationale;
«Qu'elle demande au
gouvernement d'inclure cette recommandation dans le projet de loi n° 62.»
Je vous
soumets, M. le Président, que la seule réponse à cette motion est non. Si nous
sommes tous Québécois, c'est raisonnable que nous pouvons tous être
employés de l'État, que ce soit à titre de prof, éducatrice de CPE, juge,
policière, procureur ou, oui, présidente ou président de l'Assemblée nationale.
Je ne porte aucunement intention aux interventions
des membres de la deuxième opposition, je parle des faits. Je parle de la
conséquence, de la cohérence. Si on est
tous citoyens à part entière, on peut être tous gardiens de prison, on peut
être tous en position d'autorité. De dire le contraire est de dire qu'il
y a inégalité entre certains Québécois et d'autres Québécois. C'est une
évidence.
J'invite donc
mes collègues de poser cette question, la question dans cette motion, aux
Québécois issus des communautés
minoritaires, culturelles, linguistiques, définis par leur orientation
sexuelle, leur race, peu importe. Je vous invite de leur poser la question :
Est-ce que vous vous sentirez visés? Est-ce que votre sentiment d'appartenance
au Québec serait, en quelque part, atteint
par cette exclusion vestimentaire? En étant Juif non pratiquant, je peux dire
que ma réponse serait oui. Je vous
invite de poser la question aux gens ciblés par cette motion-là. Est-ce qu'ils
sont atteints par ce qui est proposé? La réponse va
être oui.
Mr.
Speaker, as we say in English, let's walk the walk. If our collective Québec
response, and I'm sure it is, is to reject intolerance, to combat acts of exclusion,
to prosecute acts of discrimination and violence directed at visible minority
groups, if, as I know it is, our collective response is that a Quebecker is
anyone who chooses to be a resident «chez nous», if our collective response is
to tell our Muslim neighbors, our Jewish neighbors, our gay neighbors, our
disabled neighbors that they are full-fledged Quebeckers and accept that
it is our collective response, from the members of «la deuxième opposition aussi», if that's our collective
response, that we are all full-fledged Quebeckers in the eyes of the law and,
more importantly, in the hearts of their fellow Quebeckers, the answer
to this motion is clear, the answer is no.
On
the matter of dress code restrictions, in fact, on the totality of our
discussions surrounding Bill 62, the approach of our Government is predicated on a few immutable
principles; first, that issues involving fundamental values, questions of principles, basic rights of citizens to equal access, equal
representation before the law, these questions do not get decided by simple consensus, they do not get
adjudicated based on the headlines that appear on a given morning, the poll
results of some potentially loaded
questions. Such fundamental matters can never be reasonably or responsibly
settled on the basis of a simple majority, they require leadership. The answers
must stand up to rigorous tests of reason. They must be judged to be equitable and transparent, and certainly by those
who would be most implicated by their consequences.
In
the case of this
afternoon's motion, those individuals most implicated are minorities, M. le Président. Again, I submit that they, like most Quebeckers, would ask us to defeat the
motion before us today on behalf of the MNA from
Montarville.
L'État se doit
d'être neutre, c'est-à-dire au-dessus de toute croyance religieuse, même la
non-croyance. Nous avons vu, tout au
long de ce débat, une tendance malheureuse alimentée, avec tout respect, par la
deuxième opposition de confondre les
mots «neutre» et «laïque», et surtout par l'opposition officielle, qui s'est
prononcée à cet effet aujourd'hui. La neutralité de l'État signifie que tout le monde, peu importent leurs croyances ou
non-croyances, a les mêmes droits et privilèges, que l'État est neutre, sans préférence, sans
allégeance. Le mot «neutre» n'est pas interchangeable avec le mot «laïque», qui
signifie, pour moi, une négation de la diversité de croyances et de
non-croyances qui s'exprime au sein de notre société québécoise. Le mot «laïque» peut nous amener
faussement à la conclusion que la discrimination vestimentaire est indiquée
et nécessaire. Aucunement. La neutralité sur laquelle on s'entend est
parfaitement en harmonie avec le projet de loi actuellement proposé par notre
gouvernement.
M. le
Président, Charles Taylor l'a dit de façon élégante dans sa lettre publiée
hier, et je le cite : «...le nouveau "nous" québécois est désormais plus large, comme [son
coprésident] Gérard Bouchard nous l'a signalé dans un excellent texte
récent. Le temps où une partie de notre société, fût-elle majoritaire, pouvait
agir sans égard pour les minorités marginalisées est passé.» Fin de la
citation.
Bon, le
député de Rosemont et leader de l'opposition a suggéré dans les quotidiens de ce
matin que M. Taylor se trompe,
que... et je le cite, l'argument qu'il apporte, c'est-à-dire : «Si on
agit, ça va libérer [les paroles des] gens extrémistes.» Fin de la
citation.
Je n'accepte
pas cette thèse. Les Québécois nous invitent à trancher sur ces questions, de
faire preuve de leadership, de
trouver l'équilibre entre deux concepts, l'un est aussi incontournable que
l'autre : la sécurité et le bien-être de chaque résident du Québec et à la fois l'accès égal et
inclusif aux services et à l'emploi pour tous ces mêmes résidents, peu
importent leurs croyances ou leurs
non-croyances. Voilà le débat démocratique que Charles Taylor nous invite de
conclure en toute transparence, en
toute sincérité. Notre gouvernement privilégie les valeurs de liberté et croit
fermement qu'il ne faut pas prendre des mesures qui entraîneraient les
restrictions injustifiées des libertés individuelles.
Le leader du
deuxième groupe d'opposition est cité aussi ce matin dans Le Soleil,
en accusant le premier ministre, et je cite, de laisser «ses émotions
prendre le dessus [de] la raison». Fin de la citation.
Avec respect,
une autre fois, aucunement. Notre position constante et claire, au fil des
mois, est raisonnable, réfléchie et responsable.
Un Québécois francophone résidant depuis quatre générations, comme le Québécois
nouvellement citoyen originaire
d'Algérie, du Pakistan, d'Allemagne ou d'Israël, est aussi Québécois tout
court. Donc, comment la raison peut faire en sorte qu'un Québécois peut
postuler pour être juge, policier, gardien en prison et qu'un autre Québécois
égal devant la loi, égal devant ses concitoyens ne peut pas...
• (16 h 50) •
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
On vous remercie, M. le député de D'Arcy-McGee. Il reste à l'opposition officielle 45 secondes. Est-ce que vous le prenez ou
pas? Merci. Je donne le droit de réplique à l'auteure de cette motion, Mme
la députée de Montarville. Vous avez 10 minutes de droit de réplique, à
vous la parole.
Mme Nathalie Roy
(réplique)
Mme Roy : Merci beaucoup, M.
le Président. J'aimerais tout de suite répliquer, mais, enfin, c'est surtout un
commentaire.
À la lumière
des propos de la députée de Crémazie, ce que je comprends et ce que je vois du
gouvernement, c'est qu'il discrimine
lui-même entre les commissaires Bouchard
et Taylor. Le gouvernement préfère M. Taylor, qui renie sa parole. Alors, nous, nous préférons M. Bouchard, qui, lui, persiste et
signe. Et il l'a répété il y a quelques jours à peine, il dit qu'il faut légiférer de façon
préventive, s'il le faut, avant qu'une autre crise ne survienne. Et il
préconise, oui, la motion que je vous
ai soumise, M. le Président, aujourd'hui, d'interdire le port de signes religieux pour les
personnes en position d'autorité coercitive, comme il le recommandait
dans ce rapport.
Alors, tout
est une question de perspective. Qui dit vrai? Qui a raison? Une chose demeure,
cependant : les citoyens, eux,
s'en souviennent, du rapport Bouchard-Taylor. Et force est de constater que, depuis
une dizaine d'années, ça n'a pas bougé et il n'y a rien eu. Et on leur
doit bien ça, aux citoyens, d'arriver justement à une solution.
Par ailleurs,
la députée de Crémazie nous a dit d'aller voir sur le terrain ce que vivent
certaines personnes. Alors, je lui
répondrai en toute amitié : Nous sommes sur le terrain, nous entendons les
gens. Et je lui dirais... et, pas plus tard que dimanche encore, des citoyens — des Québécois, des Canadiens, des
Canadiennes, des Québécoises de confession musulmane — viennent
me voir et me disent : Mme la députée, de grâce, légiférez, faites quelque
chose. Nous avons quitté des pays où
nous étions opprimés. Je pense, entre autres, aux Algériens. Les Algériens,
dans les années 90, il y a eu une grande
vague d'immigration, puis on les a accueillis à bras ouverts, des gens
extraordinaires. Et ils ont fui l'oppression des islamistes radicaux dans leur pays. Je vous rappelle, et peut-être
que certains députés l'ignorent, qu'il y a eu 200 000 morts en
Algérie. Et ces gens-là viennent nous dire : Écoutez, faites attention. De
grâce, légiférez et acceptez au moins Bouchard-Taylor.
Au moins, faites en sorte que les fonctionnaires de l'État en position
d'autorité coercitive... Ce n'est pas
n'importe qui, là, M. le Président. Puis on n'est pas dans l'espace public,
puis on n'est pas chez les gens, on est vraiment dans l'État et on est vraiment au coeur même de ses fonctionnaires qui
ont une position pas comme les autres, qui ont un droit de vie ou de mort sur les contribuables, sur
les citoyens. Et ce que nous disent ces gens-là, ces citoyens, ces Québécois,
ces Canadiennes de confession musulmane, ils disent : Il faut interdire le
port de signes religieux chez ces gens.
Vous savez
quoi? Je les écoute, je les entends, je les reçois, je les accueille à bras
ouverts. Et ils me disent : Le Parti libéral ne nous entend plus, le Parti libéral ne nous écoute plus. Force
est de constater que le Parti libéral ne protège que les intégristes religieux. Et on a même entendu M.
le premier ministre nous dire que l'intégrisme religieux, c'est un choix
personnel. Soit. Mais, ces gens-là, je répondrai à la députée de Crémazie, je
les entends, et leurs préoccupations me rejoignent. Ils vivent avec nous, mais ils ont
vécu d'autres choses, il faut écouter leur passé. Et je pense à tous ces noms,
Nadia, Fatima — j'en passe, il y en a une longue liste — mais toutes ces femmes et ces hommes qui
nous disent : Il faut faire quelque chose. Et ce serait un minimum,
le message serait très, très fort.
Maintenant, la ministre de nous dire qu'il n'y
avait pas d'argument juridique. Bon, je vais lui en donner, des arguments
juridiques. D'abord, première chose, quand la ministre nous dit que 90 %
des recommandations de la commission
Bouchard-Taylor, des conclusions de la commission ont été adoptées, je dois la
corriger, parce que M. Bouchard lui-même
dit : C'est faux. C'est 30 %. Alors, elle a un petit peu induit la
population en erreur ici en disant que c'était 90 %, parce que le
signataire des recommandations nous dit : Non, c'est 30 %...
Le Vice-Président (M. Gendron) : Je
vais vous entendre, mais j'ai écouté religieusement. Je vous écoute.
M. Tanguay :
Oui, puis je vous remercie de m'entendre, M. le Président, avant de juger. Ça
serait une bonne idée de votre part comme président.
Dire d'un
collègue qu'il a induit la population en erreur, c'est clairement inférer des
motifs. Non seulement c'est à l'index
de notre code — si vous
voulez de la jurisprudence, je vais vous la dire — mais de dire qu'un collègue a induit
la population en erreur, c'est imputer des motifs, en vertu de l'article 35.
Le
Vice-Président (M. Gendron) : Je vous le dis très respectueusement, je
ne peux voir quel motif, parce qu'elle a dit avant...
Une voix : ...
Le Vice-Président (M. Gendron) :
Bien oui, mais vous en avez une.
Une voix : ...
Le
Vice-Président (M. Gendron) : J'ai écouté religieusement, et il n'y a
pas de motif... C'était un point de vue. Ça allait bien, là, ça allait bien. J'ai entendu des choses qui
ressemblaient à un point de vue que j'ai entendu le contraire. Je n'ai
pas dit un mot, parce qu'il était correct, il était respectueux. Alors,
veuillez poursuivre.
Mme Roy :
Merci, M. le Président. La ministre ou le gouvernement, dans leurs propos, ne
veulent pas concevoir le fait qu'il est possible de légiférer, que ce
n'est pas illégal de légiférer, que ce n'est pas mal d'édicter un interdit de
port de signes religieux. Légalement
parlant, les gouvernements ont le pouvoir d'interdire les signes religieux,
ils ont également le droit de
le faire, et tout est une question de choix politique et de courage politique.
Mme la ministre nous dit : Nous, nous respectons les libertés individuelles, c'est
dans notre ADN. Je veux bien, mais
moi, je lui dis : Que fait-elle des libertés collectives? Parce qu'il y a aussi ça qu'il faut prendre en considération. Et le premier
ministre nous dit que ces principes ne sont pas marchandables. Soit. Mais en
contrepartie il demande au Québécois, lui, de marchander ses principes, de marchander
ses droits collectifs. Près de 80 %
des Québécois sont d'accord avec le
compromis proposé par la CAQ, d'accord avec Bouchard-Taylor : interdire le
port de signes religieux chez ces personnes
en position d'autorité coercitive, juges, procureurs de la couronne, gardiens
de prison et policiers. Pour notre part,
nos principes sont clairs, ils l'ont toujours été, nous défendons la même
position depuis 2013. À la conception d'une société strictement canadienne et multiculturaliste du Parti libéral,
nous continuerons de proposer le modèle laïque québécois, le modèle de
société auquel aspire la vaste majorité des Québécois.
Il n'y a
d'ailleurs, M. le Président, rien d'intolérant à défendre la laïcité, et le
problème, je le dirais à mes collègues du
gouvernement, c'est que ce débat de société n'a pas été fait. Il n'est pas fait
avec le projet de loi n° 62 actuellement, parce qu'il n'est pas question de laïcité, ce qui est très pernicieux,
quant à moi, puisque les gens pensent que laïcité égale... pardon, les gens pensent que neutralité égale
laïcité, mais, comme le disait, à juste titre, mon collègue du gouvernement,
ce n'est pas la même chose. La neutralité,
c'est une chose. La laïcité, c'est une chose. Ce débat n'a pas été fait. Nous
n'avons pas débattu là-dessus, pourtant nous devrions le faire.
Affirmer la
laïcité de l'État, c'est affirmer aussi l'identité québécoise. Les officiers de
l'État en position d'autorité doivent
être neutres, ça doit se voir, M. le Président. Ils sont si importants, ces
employés de l'État en position d'autorité coercitive. Ils représentent
l'État. Ils ont un droit si grand sur les contribuables, sur les citoyens
qu'ils ne doivent pas représenter autre chose que l'État. Ils ne doivent pas
porter de signes religieux, sur cette base-ci.
Et, je vous dirais, si on pousse la réflexion,
vous savez, actuellement, les employés de l'État, M. le Président, ils n'ont
pas droit de porter des macarons politiques, d'afficher leurs convictions
politiques, d'afficher des discours antigouvernementaux
ou encore anarchiques, hein? C'est le gros bon sens, M. le Président. C'est des
questions évidentes. Mais, pour nous,
d'exiger des fonctionnaires de l'État en position d'autorité coercitive qu'ils
s'affichent d'une parfaite neutralité,
ce n'est pas de la discrimination volontaire, c'est également le gros bon sens.
Et là, si on veut parler de droits et d'atteinte aux droits des libertés
des individus — je
vais suivre la ministre de la logique — donc on peut atteindre les droits de conscience des gens, hein? Je veux
porter mon macaron de la CAQ, je ne peux pas, on porte atteinte à mes droits.
Cependant, si je veux porter un signe
religieux, là c'est parfait. Donc, on peut porter atteinte aux droits de
conscience, mais ne pas porter atteinte aux droits de religion.
Qu'est-ce que c'est que ça?
Donc, je vous
rappelle qu'on peut légiférer. Nous soumettons au gouvernement qu'on pourrait
justement trouver un chemin de
passage si, minimalement, le gouvernement voulait accepter la motion que j'ai
déposée. Et je vous rappellerai que, durant les auditions que nous avons eues, M. le
Président, la grande majorité des groupes qui sont venus nous parler ont tous dit que ce n'était pas un bon projet de
loi, nous ont tous dit qu'il fallait même ou l'amender très sévèrement ou le
rejeter. Alors, je tends la main à nouveau à la ministre. Nous pourrions
trouver un compromis ici tous ensemble, nous pourrions. Je doute qu'elle
le fasse. De toute façon, elle m'a confirmé qu'il n'était pas question qu'elle
appuie cette motion. C'est dommage, parce
qu'en quelque part c'est aussi renier ce que la grande majorité des Québécois
souhaite.
Alors, voilà. Ça conclut, M. le Président, ma
présentation. Nous voterons pour notre motion.
• (17 heures) •
Le Vice-Président (M. Gendron) :
Alors, je vous remercie, Mme la députée de Montarville.
Et je reviens sur ce qui s'est passé tantôt, sur
la question de règlement. Effectivement, on ne peut pas dire, Mme la députée de Montarville, en cette Chambre
qu'untel a induit la population en erreur. Et c'est moi qui ai fait... non,
mais ce n'est pas grave, là, c'est moi qui
ai fait l'erreur. J'ai plaidé, moi, sur les motifs indignes, là — mais il faut que je vienne rétablir les faits — alors que la demande préalable était :
C'est un propos antiparlementaire. Et c'était le cas. On ne peut pas dire ce que vous avez dit. Mais ça
allait bien. Il n'y a pas eu de drame. Merci, c'est clos, c'est terminé.
Je vais maintenant mettre aux voix la motion de
Mme la députée de Montarville, qui se lit comme suit :
«Que l'Assemblée
nationale reconnaisse la nécessité de poser des actions concrètes en matière de
neutralité religieuse de l'État et d'encadrement des accommodements
raisonnables;
«Qu'elle rappelle — ce ne sera pas long — que la Commission de consultation sur les
pratiques d'accommodement reliées aux
différences culturelles [recommandant] dans son rapport d'interdire le port de
signes religieux aux magistrats et
procureurs de la couronne, aux policiers, aux gardiens de prison et aux
président et vice-présidents de l'Assemblée nationale;
«Qu'elle demande au
gouvernement d'inclure cette recommandation dans le projet de loi n° 62.»
Est-ce que cette motion est adoptée? M. le
leader.
M. Tanguay : Oui. Merci
beaucoup, M. le Président. Alors, je vous demanderais, s'il
vous plaît, un vote par appel
nominal et, conformément à l'article 223 du règlement, de reporter le vote à la
période des affaires courantes de jeudi 16 février 2017.
Vote reporté
Le Vice-Président (M. Gendron) :
Alors, tel...
Des voix : ...
Le
Vice-Président (M. Gendron) : Un instant! Laissez-moi terminer. Tel
que souhaité, parce que vous avez le pouvoir,
la demande de vote est reportée, tel que le leader vient de le faire. À vous à nouveau,
M. le leader, pour la suite des choses.
Ajournement
M. Tanguay :
Oui. Merci, M. le Président. Alors, je fais motion pour ajourner nos travaux au
jeudi 16 février 2017, à 9 h 40.
Le Vice-Président (M. Gendron) :
Est-ce que cette motion d'ajournement de nos travaux est adoptée?
Des voix : Adopté.
Le Vice-Président (M. Gendron) :
Alors, adopté. Merci. Les travaux sont ajournés, tel qu'indiqué.
(Fin de la séance à 17 h 2)