(Neuf
heures quarante et une minutes)
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, chers collègues, je vous souhaite une très bonne séance.
Veuillez vous asseoir.
Affaires courantes
Déclarations de députés
Nous
en sommes à la rubrique de la déclaration
des députés, et je cède maintenant la parole à Mme la députée de
Jeanne-Mance—Viger.
Souligner l'inauguration de Montréal Auto Prix inc.,
division hybride électrique
Mme Filomena Rotiroti
Mme
Rotiroti : Merci, M. le Président. C'est avec plaisir que
j'ai participé, conjointement avec le ministre du Transport, à l'inauguration officielle de Montréal
Auto Prix, division hybride électrique, qui s'est déroulée le 19 février
dernier. C'est un établissement entièrement voué à la vente de véhicules
électriques et hybrides d'occasion, une première au Canada. J'ai eu
l'occasion de souligner la contribution et maintien... et au développement
économique local aux deux copropriétaires de
cette entreprise, MM. Richard Martin et Sylvain Lamoureux. Je suis très
fière de les avoir dans mon comté, surtout qu'ils en sont à leur
deuxième installation à Saint-Léonard.
De son premier
entrepôt installé dans le comté, Montréal Auto Prix continue de se renouveler
en innovant et redéfinissant l'industrie de l'automobile. Il a su révolutionner
l'industrie des véhicules d'occasion sur le marché. Nos entrepreneurs locaux, nos PME sont des piliers importants à la
prospérité de notre économie locale et permettent aussi la création
d'emplois.
En
terminant, je tiens à offrir mes sincères félicitations à M. Martin et
M. Lamoureux, et je vous souhaite surtout un franc succès. Merci.
Le Vice-Président
(M. Ouimet) : Merci à vous, Mme la députée de Jeanne-Mance—Viger. M.
le député de René-Lévesque, à vous la parole.
Rendre hommage à l'organisme
Hockey Côte-Nord inc.
M. Martin Ouellet
M.
Ouellet : Merci, M. le Président. Je désire souligner aujourd'hui tout
le travail qui a été accompli par l'équipe de Hockey Côte-Nord et son président, M. Pierre Rocque, ainsi
que Steve Ahern qui ont travaillé d'arrache-pied au cours des dernières semaines afin de sauvegarder le
hockey de développement sur la Côte-Nord. Ensemble, ils ont su présenter
un plan crédible auprès des instances de
Hockey Québec. L'approbation des recommandations proposées par les responsables de Hockey Côte-Nord permettra aux
jeunes athlètes d'évoluer dans un environnement compétitif et dans leur
région.
Également, je ne peux
passer sous silence tout le travail de mobilisation qui a été orchestré depuis
décembre dernier. De nombreux acteurs
sociaux, citoyens, politiques et des Premières Nations ont offert un support à
Hockey Côte-Nord. Un citoyen de
Baie-Comeau, Dominic Savard, a été l'un des instigateurs du mouvement, et
son engagement envers sa région méritait d'être souligné.
En
mon nom et en celui des citoyens de la circonscription de René-Lévesque, je
tiens à remercier tous ceux et celles qui ont permis le maintien du
hockey de développement sur la Côte-Nord. Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Merci à vous, M. le député de
René-Lévesque. M. le député de la Côte-du-Sud, à vous la parole.
Féliciter Mme Suzanne Blais pour sa
carrière dans le monde municipal
M. Norbert Morin
M.
Morin : Merci, M. le Président. Aujourd'hui, je souligne le
départ à la retraite de Mme Suzanne Blais, qui se retire de la scène municipale de
Berthier-sur-Mer après 36 ans de carrière.
C'est tout d'abord comme secrétaire municipale dans un bureau au sous-sol de sa résidence
qu'elle accueillait les citoyens
et gardait précieusement les archives municipales. Puis, en 1983, elle se voit confier le poste
de directrice générale. C'est avec aplomb et une excellente connaissance
des lois et règlements qu'elle a su mener à bien plusieurs projets importants
pour ses concitoyens. Tout au long de son mandat, cinq maires différents ont pu
compter sur son professionnalisme.
Suzanne, ce
fut un plaisir de collaborer avec toi
dans les divers dossiers municipaux, et je suis convaincu que tu continueras
à t'impliquer dans les comités qui te tiennent à coeur. Bonne retraite!
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le député
de la Côte-du-Sud. M. le député de Masson, à vous la parole.
Saluer
la contribution d'étudiants du cégep
régional de Launaudière à la Fondation
canadienne Rêves d'enfants
M.
Mathieu Lemay
M.
Lemay : Le 19 février dernier, les étudiants de techniques de
comptabilité et de gestion du cégep de Terrebonne ont remis plus de 8 500 $ à la fondation
Rêves d'enfants. Ils peuvent être fiers non seulement d'avoir réussi leur cours
et d'avoir atteint leur objectif, mais surtout fiers d'avoir redonné à la
communauté en contribuant à la réalisation d'un rêve d'un enfant atteint
d'une maladie grave.
Dans le cadre
de leur cours, les étudiants répartis en six équipes devaient monter un projet
d'activité sans but lucratif afin de
recueillir des fonds pour la fondation Rêves d'enfants, une fondation qu'ils
avaient choisie eux-mêmes en début d'année. C'est ainsi qu'ils ont
appris à mener à terme un projet bien concret, et ce, pour une bonne cause.
Je salue Mme Josée Bouchard, enseignante du cours,
ainsi que ses élèves de la cohorte 2015‑2016 qui ont porté ces projets avec passion et détermination. Félicitations à vous tous!
Et, comme vous en conviendrez, cette expérience, cette réussite va bien au-delà
d'une note, c'est une expérience inoubliable. Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le député
de Masson. M. le député de Jean-Lesage, je vous cède la parole.
Souligner
le succès du Tournoi international
de hockey pee-wee de Québec
M.
André Drolet
M. Drolet :
Merci beaucoup, M. le Président. Je prends la parole aujourd'hui pour saluer le
succès de la 57e édition du Tournoi
international de hockey pee-wee de Québec et pour féliciter tous les
organisateurs bénévoles et participants et surtout son président, M. Patrick
Dom. Cette année, le succès de cet événement se mesure par l'engouement
suscité ainsi que par sa réussite
logistique. En effet, pour sa première édition au Centre Vidéotron, c'est un
nombre record de demandes d'inscriptions, plus de 300 équipes, que le
tournoi de pee-wee a reçues, et c'est un nombre inégalé de spectateurs, 236 279, qui ont franchi les tourniquets
durant les 12 jours de la compétition. Fondé en 1960 par le père Gérald Bolduc,
le Tournoi international de hockey
pee-wee accueille des joueurs âgés de 11 à 12 ans, provenant des cinq
continents, qui viennent défendre les
couleurs de leurs équipes. C'est une occasion inestimable pour les jeunes
hockeyeurs de partager leur passion et pour les résidents de Québec de
découvrir leurs talents.
En terminant, M. le Président, je tiens à
remercier l'engagement du tournoi qui, après 60 ans, a offert plus de
2 millions de dollars en dons au Patro Roc-Amadour, un organisme de mon
comté. Merci beaucoup, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Merci à vous, M. le député de
Jean-Lesage. M. le député de Bourget, à vous la parole.
Souligner
la tenue du cinquième projet
Hommage aux femmes
M.
Maka Kotto
M. Kotto :
Merci, M. le Président. À quelques jours du 8 mars, je veux, dès aujourd'hui,
souligner la tenue, à Montréal, de la
cinquième édition du projet Hommage aux femmes, une initiative de femmes et
d'hommes issus de la diversité
québécoise, qui met en lumière l'apport de personnalités féminines à notre vie
culturelle, sociale et économique. Aussi, je tiens à saluer celles qui
seront honorées cette journée, à savoir : Mmes Ketlyn Maitland, Louisa
Kafrine, Michèle Audette, Jocelyne Élie,
Lydie Olga Ntap, Ania Ursulet, Timiebi Aganaga-Jeanty, Ana Gloria Blanch, Alice Tran, Élisa Libai, Doina Balzer, Suzanne
Rousseau, Nathalie Baran, Sylvie Mouna, Sadia Groguhé et Juanita
Westmoreland-Traoré. Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le député
de Bourget. M. le député de Rouyn-Noranda—Témiscamingue, pour votre
déclaration.
Rendre hommage à M. Pierre Larouche pour sa
contribution au Centre de santé Sainte-Famille
M.
Luc Blanchette
M.
Blanchette : Merci, M. le Président. Le 31 décembre dernier, le
Témiscamingue a perdu un homme qui a marqué l'histoire du Centre de
santé Sainte-Famille, de Ville-Marie, M. Pierre Larouche.
Pierre, que je connaissais bien, s'est éteint à
l'âge de 72 ans. Il aura été directeur général de l'établissement pendant près d'un quart de siècle, soit de 1979 à
2003. Pierre avait à coeur la santé des Témiscamiennes et des Témiscamiens.
Il a mené de nombreuses batailles pendant sa
carrière pour s'assurer que la population ait accès à des services et des soins de
qualité au Centre de santé Ste-Famille de Ville-Marie.
Travailleur
acharné, il faisait en sorte de mener à bien tous ses dossiers. Aussi, il était
reconnu pour son écoute et son humour, mais aussi pour le respect qu'il
vouait à l'ensemble de ses employés.
Il est important
pour moi aujourd'hui, devant cette Assemblée, d'honorer la mémoire de
ce grand homme qu'a été Pierre
Larouche. C'est pourquoi il me fait plaisir, au nom de la population
témiscamienne, de remettre à son épouse et à sa famille, qui sont ici
dans les estrades, Clémence Paul et ses deux enfants, Paul et Josée, une
médaille de député à titre posthume. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
Alors, merci à vous, M. le député de Rouyn-Noranda—Témiscamingue. Mme la députée d'Arthabaska,
je vous cède la parole pour votre déclaration.
Souligner
le 100e anniversaire du
Cercle de fermières Plessisville
Mme
Sylvie Roy
Mme Roy
(Arthabaska) :
Bonjour, M. le Président. Aujourd'hui, je veux souligner le 100e anniversaire du
Cercle des fermières de Plessisville.
Fait intéressant à noter, Le Cercle des fermières de Plessisville
est le seul au Québec à fêter son siècle d'existence en même
temps que sera célébré le 100e anniversaire du fondement de ce mouvement.
Sans
interruption depuis 1975... Je tiens à vous répéter qu'à cette époque il
fallait avoir un curé dans chacun des cercles et qu'on nommait les
femmes Mme Alfred... par le nom de leurs maris encore à cette époque.
Ces fermières
ont été les gardiennes de notre identité et de nos traditions. Elles passent
fièrement le flambeau de notre
savoir-faire ancestral à la relève féminine et assiste les nouvelles
générations afin de leur permettre de comprendre l'importance des
valeurs qu'elles défendent et de notre savoir-faire. Je vous remercie, M. le
Président.
• (9 h 50) •
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Merci à vous, Mme la députée
d'Arthabaska. M. le député de Saint-Laurent, je vous cède la parole pour
votre déclaration.
Souligner
la 10e Journée de réflexion
sur l'immigration francophone
M.
Jean-Marc Fournier
M. Fournier : Merci, M. le
Président. Le 2 mars prochain, la Fédération des communautés francophones
et acadienne du Canada réunira ses forces
pour trouver des solutions pratiques au maintien du poids démographique des
2,6 millions de francophones et francophiles du Canada.
L'histoire de
la francophonie canadienne nous rappelle bien des batailles et des reculs, mais
aussi des victoires et toujours de
l'espoir. Depuis 40 ans, les classes d'immersion se multiplient, l'offre
active de services en français prend place,
le français retrouve sa légitimité. Nous pouvons maintenant grandir. Les
communautés francophones du Canada misent
avec raison sur l'immigration francophone pour assurer la présence de notre
langue : d'abord, atteindre la cible représentant la proportion de francophones, ensuite, atteindre celle
représentant la proportion de francophiles. À l'aube du 150e, j'en appelle aux décideurs publics du
Canada pour que nous travaillions ensemble pour un français qui s'affirme
et qui grandit. Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Merci à vous, M. le député de Saint-Laurent. Mme la
députée de Taschereau,
à vous la parole pour votre déclaration.
Souligner
la Journée internationale des maladies rares
Mme
Agnès Maltais
Mme
Maltais : Merci,
M. le Président. Alors, le 29
février, soit lundi prochain, se tient la Journée internationale des maladies rares. Plus de
7 000 maladies rares ont été
répertoriées dans le monde. D'après certains, près de 500 000 Québécois
et Québécoises seraient atteints ou porteurs
d'une de ces maladies, et la majorité serait des enfants. Alors, il est important d'informer
et de sensibiliser la population aux problématiques rencontrées par les personnes
atteintes et par leurs proches. Je
pense à la méconnaissance de ces maladies héréditaires, évolutives,
dégénératives, la difficulté à se trouver une place dans le système de
santé et l'isolement.
Alors,
je tiens à remercier le Regroupement québécois des maladies orphelines pour son travail, et plus
particulièrement Ataxie Canada,
Fondation Claude-Saint-Jean, dont une résidente de mon comté, Lucie Gagnon, est
présidente et présente aujourd'hui
dans nos tribunes. Je tiens à souligner l'engagement exceptionnel de ces
personnes à représenter et à soutenir les personnes qui sont atteintes
d'une maladie rare, mais surtout, surtout, c'est le courage de leur famille...
Le Vice-Président
(M. Ouimet) : En terminant.
Mme
Maltais :
...et d'elles-mêmes que je tiens à saluer. Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, Mme la
députée de Taschereau, pour cette déclaration.
Ça
met un terme à la rubrique Déclarations de députés, et je suspends les travaux
de l'Assemblée quelques instants.
(Suspension de la séance à
9 h 52)
(Reprise à 10 h 1)
Le Président :
Mesdames messieurs, nous allons nous recueillir quelques instants.
Merci. Veuillez vous
asseoir.
Présence de M. Jean-Louis Baudouin, jurisconsulte
de l'Assemblée nationale
Maintenant que j'ai bien réfléchi, j'ai le plaisir
de souligner, dans nos tribunes, la présence de M. Jean-Louis Baudouin, notre
nouveau jurisconsulte depuis le 1er janvier 2016. Le Pr Baudouin a eu une
grande chance dans sa vie, il m'a eu comme élève, puis le député de Jonquière aussi. Voilà. Mais tout le monde a lu son livre
sur les obligations. Ça fait qu'on
est correct.
Présence de M. Éric Charbonneau, ex-parlementaire
de l'Assemblée nationale
J'ai également le
plaisir de souligner la présence de M. Éric Charbonneau, ancien député de
Johnson.
Nous poursuivons les
affaires courantes.
Aujourd'hui, il n'y a
pas de déclarations ministérielles.
Présentation de projets de loi
À la rubrique
Présentation de projets de loi, M. le leader du deuxième groupe d'opposition.
M.
Bonnardel :
Merci, M. le Président. Je vous demande d'appeler l'article a, s'il vous plaît.
Projet de loi n° 591
Le
Président : À l'article a du feuilleton, M. le député de
Borduas présente le projet de loi n° 591, Loi affirmant la participation du Québec au processus de
nomination des juges de la Cour suprême du Canada pour le Québec. M. le député
de Borduas.
M. Simon Jolin-Barrette
M.
Jolin-Barrette : Oui. Merci, M. le Président. Ce projet de loi a pour
objet d'affirmer la participation et le choix du Québec dans le processus de
nomination des trois juges de la Cour suprême du Canada pour le Québec.
Ce
projet de loi vise à établir un cadre juridique servant d'assise à
l'élaboration d'une convention constitutionnelle entre le Québec et le gouvernement fédéral afin d'assurer au Québec sa
participation dans le processus de nomination de ses trois juges à la
Cour suprême du Canada.
Ce
projet de loi définit les conditions et modalités de la procédure de sélection
des trois candidats proposés par le
Québec au gouvernement fédéral pour la nomination d'un juge à la Cour suprême
du Canada lorsqu'un siège réservé au Québec est vacant ou en voie de
l'être.
Ce projet de loi
prévoit qu'un comité de sélection composé de membres provenant des différents
milieux est responsable d'évaluer les
candidatures et de désigner dans un rapport transmis aux membres de l'Assemblée nationale les trois candidats
les plus aptes à occuper la fonction de juge à la Cour suprême du Canada pour
le Québec.
Ce projet de loi prévoit que les candidatures
des candidats désignés par le comité de sélection sont soumises à l'Assemblée
nationale par motion présentée par le
premier ministre et que chacune des candidatures soumises doit
être approuvée par les trois quarts des membres de l'Assemblée nationale.
Ce
projet de loi prévoit que le nom des trois candidats choisis
par l'Assemblée nationale pour occuper un siège vacant de juge à la Cour suprême du Canada
pour le Québec est communiqué par une lettre du président de l'Assemblée nationale adressée au gouvernement
fédéral.
Merci, M. le Président.
Le
Président : Est-ce que
l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? M. le leader, vous avez une question?
M.
Bonnardel : Oui, M.
le Président. Est-ce que le leader du gouvernement entend appeler des consultations
particulières sur cette loi?
Le Président : M. le leader.
M.
Fournier : Évidemment,
là on en est saisis, on va le lire. Je suis très craintif du fait que le législatif
viendrait ici faire le procès de
trois personnes. Je sens qu'on n'aura pas les meilleures qualités de ceux qui
vont se présenter, mais on va en
discuter. Il y a une petite lacune que je vois, mais on va en
discuter certainement, on est toujours ouverts aux débats constructifs.
Le Président : Alors, est-ce
que le dépôt est adopté?
Une voix : ...
Mise aux voix
Le Président : Attendez! ...accepte
d'être saisie de ce projet de loi? Adopté. M. le leader de l'opposition
officielle.
M. Drainville : Pouvez-vous
appeler l'article b de notre feuilleton, M. le Président?
Projet de loi
n° 594
Le Président :
Alors, à l'article b du feuilleton, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve
présente le projet de loi n° 594, Loi modifiant la Loi sur les élections
et les référendums dans les municipalités. Mme la députée
d'Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Carole Poirier
Mme Poirier : Alors, merci, M. le
Président. Ce projet de loi a pour objet de permettre à tout membre du conseil
d'une municipalité de s'absenter des séances
du conseil pour une période maximale de 18 semaines consécutives si cette
absence est attribuable à sa grossesse ou à la naissance ou à l'adoption de son
enfant sans que son mandat prenne fin.
Mise aux voix
Le Président :
Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?
Des voix :
...
Dépôt de documents
Le Président :
Adopté. À la rubrique Dépôt de documents, M. le ministre de l'Énergie.
Rapport annuel d'Hydro-Québec
M.
Arcand :
M. le Président, il me fait plaisir de déposer, conformément à la loi qui régit
cette société, le rapport annuel 2015 d'Hydro-Québec.
Le Président :
Ce document est déposé. M. le ministre des Forêts.
Rapport annuel 2014 du
Programme d'aide aux Inuits pour
leurs activités de chasse, de pêche et de piégeage
M.
Lessard : M. le Président, je
dépose le rapport annuel 2014 produit par l'Administration régionale Kativik
au Programme d'aide aux Inuits pour leurs activités de chasse, de pêche et de
piégeage.
Le Président :
Ce document est déposé. M. le leader du gouvernement.
Réponses à des pétitions et à
des questions inscrites au feuilleton
M.
Fournier : Oui, M. le Président. Je dépose les réponses du
gouvernement aux pétitions présentées par le député de Jonquière le
4 décembre 2015 et par la députée de Mirabel le 9 février 2016, de
même que les réponses du gouvernement aux
questions inscrites au feuilleton le 9 février 2016 par la députée de
Taschereau et le 10 février 2016 par le député de
Nicolet-Bécancour.
Rapports du Vérificateur général intitulés
Vérification de
l'information
financière et autres travaux connexes et
Fonds vert : gestion et aide
financière, accompagnés
de documents de présentation
Le
Président : Ces documents sont déposés. Pour ma part, je dépose
deux rapports qui font partie du rapport du Vérificateur général à l'Assemblée nationale pour l'année
2015-2016 : un premier rapport intitulé Vérification de l'information
financière et autres travaux connexes et un second rapport portant sur le
suivi d'une vérification de l'optimisation
des ressources du Commissaire au développement durable intitulé Fonds
vert : gestion et aide financière. Ces rapports sont
accompagnés de documents de présentation.
Il n'y a pas de dépôt
de rapports de commissions.
Dépôt de pétitions
À la rubrique Dépôt
de pétitions, M. le député de Rosemont.
Rétablir les prestations d'aide financière de dernier
recours pour les
adultes qui séjournent dans un centre offrant des services en
toxicomanie avec hébergement tout en rehaussant le
financement des centres d'intervention en dépendance
M.
Lisée : M. le Président, je dépose l'extrait d'une pétition
adressée à l'Assemblée nationale, signée par
1 456 pétitionnaires. Désignation : citoyens et citoyennes du
Québec.
«Les faits invoqués
sont les suivants :
«Considérant que, le
1er mai 2015, le ministre du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité
sociale a réduit la prestation mensuelle
d'aide financière de dernier recours de 747 $ à 200 $ pour les
adultes qui séjournent dans un centre offrant des services en
toxicomanie avec hébergement;
«Considérant
que lors de la mise en application de la nouvelle réglementation, de très
nombreux prestataires de l'aide financière de dernier recours ont dû
abandonner leur thérapie par manque de moyens pour en assumer les frais;
«Considérant
que des centres, dont l'un des plus importants en termes d'offre de service, le
centre Mélaric, ont déjà dû fermer
leurs portes, retournant à contrecoeur en établissement de détention ou encore
à la rue plusieurs personnes qui
étaient sur le chemin de la réhabilitation, ce qui créera des coûts
supplémentaires pour les contribuables québécois;
«Considérant
que le gouvernement avait en main, depuis le mois de novembre, des rapports
indépendants qu'il avait lui-même
commandés et qui faisaient état de la situation, l'avertissant que, sans un
rehaussement de l'aide accordée aux centres, des fermetures seraient
inévitables;
«Et l'intervention
réclamée se résume ainsi :
«Nous,
soussignés, demandons au gouvernement du Québec de rétablir les prestations
d'aide financière de dernier recours pour les adultes qui séjournent
dans un centre offrant des services en toxicomanie avec hébergement, tout en rehaussant le financement des centres
d'intervention en dépendance afin d'assurer leur survie et l'accessibilité pour
toutes les personnes qui font le choix courageux d'entamer une thérapie
pour vaincre une dépendance.»
Je certifie, M. le
Président, que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.
Le Président :
Alors, l'extrait de cette pétition est déposé.
Il
n'y a pas de réponses orales aux pétitions ni d'interventions portant sur une
question de droit ou de privilège.
Questions et réponses orales
Nous
en sommes donc rendus à la période de questions et de réponses orales. Je cède
la parole à M. le chef de l'opposition officielle.
Investissement du gouvernement dans Bombardier inc.
M. Pierre Karl Péladeau
M. Péladeau :
Merci, M. le Président. Je suis certain que le premier ministre s'est réjoui,
comme la grande majorité des
Québécois, des résultats divulgués par la Caisse de dépôt hier matin. La Caisse
de dépôt est gérée par des experts, par des professionnels. J'ai moi-même eu
l'occasion de négocier quelques transactions avec elle, dont notamment une
très importante, une très importante dont la
caisse était représentée par un grand avocat de Montréal d'un grand cabinet
de Montréal dans les fusions et acquisitions. Son nom : Calin Rovinescu,
aujourd'hui le président d'Air Canada.
La caisse a
négocié une entente solide avec une convention d'actionnaires dans Bombardier
Transport. Si le premier ministre ne
sait ce que c'est qu'une convention d'actionnaires, ça va me faire plaisir de
lui expliquer en quoi ça consiste. Il semble
que rien de cette nature ne se retrouve dans l'entente qui a été signée par son
ex-ministre de l'Économie. Entre-temps,
M. le Président, Bombardier annonçait 2 400 mises à pied, annonçait
la fermeture de son centre de la série C.
Alors, ma
question, M. le Président, est très simple : Après s'être entendu pour
avoir injecté 1,3 milliard dans la compagnie, est-ce que le premier ministre peut nous dire s'il a été mis
au courant de la mise à pied de 2 400 employés et s'il a été
mis également au courant du transfert du centre d'essai de la série C?
• (10 h 10) •
Le Président : M. le premier
ministre.
M. Philippe Couillard
M.
Couillard : Alors, un, il
n'y a pas de transfert, il n'y a pas de transfert d'employés du tout, malgré ce
que dit le collègue. Mais je pense
qu'il y a lieu également ici d'avoir une réflexion à la fin de la semaine où on
arrive sur la façon d'aborder les
questions de politique publique ici. On peut le faire à court terme, essayer de
scorer des points, comme on dit, entre
nous des fois, tel jour ou tel autre jour, ou avoir une vision à plus long
terme. Puis le temps, ça permet parfois de clarifier les choses.
Alors, si on
regarde quelques dossiers où les deux oppositions nous faisaient des
propositions, on constate que, dans
tous les cas, ce sont les positions du gouvernement qui se voient confirmées et
corroborées. Il a parlé de la Caisse de
dépôt et de RONA, et j'espère qu'il a lu les remarques du président de la
Caisse de dépôt, M. Sabia, sur RONA et les raisons pour lesquelles
il a décidé de ne pas intervenir pour modifier la transaction, qui était
consensuelle entre les deux conseils
d'administration. Ça lui aurait peut-être évité de soulever une piste qui
était, là également, une piste sans issue.
Deuxièmement,
la cible d'investissement du gouvernement dans la série C se trouve
maintenant corroborée par beaucoup
d'intervenants et d'analystes parce qu'on constate, comme il vient de le dire,
que les pertes d'emploi sont dans la
division où il voulait qu'on investisse et que la dette se trouve dans la
division où il voulait qu'on investisse. Alors, également, deuxième
erreur, mais ça prend, des fois, quelques jours pour le voir.
Troisième
élément, sur la question des travailleurs d'Aveos — et je suis content d'avoir l'occasion, grâce
à sa question, d'y revenir
aujourd'hui — je
voudrais quand même lui souligner au passage ce que j'ai dit hier, c'est que
l'avenue juridique n'apportait aucune
garantie d'emploi aux travailleurs. Et, pour prouver ce que je viens de dire,
je vais citer un extrait du jugement, M. le Président : «La loi
n'entend pas, on le conçoit aisément, figer les activités de maintenance d'Air Canada. L'obligation relative aux centres
d'entretien et de révision est d'ailleurs formulée de manière générale et
[on] n'y impose pas de plancher d'emplois,
pas plus [qu'on] n'y prévoit un volume d'activités minimal précis ou une autre
garantie du genre. [Ce qui] est
compréhensible, compte tenu de la nature de l'entreprise...» Alors, j'espère
qu'il a dit ça aux travailleurs avec lesquels il a fait un point de
presse hier et qui étaient avec nous dans les galeries.
Le Président : M. le chef de
l'opposition, en première complémentaire.
M. Pierre Karl Péladeau
M. Péladeau : ...comme à
l'accoutumée, le premier ministre ne répond pas aux questions, je n'ai pas
parlé d'Aveos. Mais, quand Bombardier a
annoncé la mise à pied de 2 400 personnes, le premier ministre nous a dit
que c'était une bonne nouvelle.
Alors, j'imagine que les dirigeants de Bombardier ont voulu lui faire plaisir
en déménageant le centre d'essai de Montréal au Kansas.
Alors, je
répète ma question, M. le Président. Est-ce que le gouvernement, propriétaire
de 49,5 % des actions, était au courant du transfert du centre
d'essai de Montréal au Kansas?
Des voix : ...
Le Président : S'il vous
plaît! M. le premier ministre.
M. Philippe Couillard
M. Couillard : M. le Président, c'est assez désolant parce qu'il
n'y a pas de transfert du centre d'essai. La poursuite des essais se
fait comme prévu jusqu'à la certification, et, après la certification, les
employés vont être gardés dans la compagnie
et vont faire autre chose. C'est une pratique normale pour quiconque connaît un
peu les façons de faire. Et moi,
j'aime beaucoup lire, M. le Président, puis de m'informer avant de parler
publiquement. Alors, ce n'est pas du tout... Il n'y a pas de transfert,
il n'y a pas de délocalisation d'emplois, rien à voir avec ce qu'il dit.
Maintenant,
encore une fois, je voudrais revenir sur les pertes d'emploi annoncées par
Bombardier, qui touchent très
largement la division des avions d'affaires. Est-ce que le collègue est en
train de nous dire, de même que son collègue de la deuxième opposition, qu'il aurait fallu mettre le milliard
là-dedans ou payer du monde quand il n'y a pas de commandes?
Le Président :
En terminant.
M. Couillard : Est-ce que c'est
comme ça qu'il gérait son entreprise? Je ne crois pas, M. le Président.
Le Président : Deuxième
complémentaire, M. le chef de l'opposition.
M. Pierre Karl Péladeau
M.
Péladeau : Merci, M. le Président. Il y a deux possibilités. Après
avoir injecté 1,3 milliard dans Bombardier, ou bien le gouvernement a un pouvoir décisionnel ou bien il n'en a pas.
S'il en a un, la question est simple, M. le Président, et la population
du Québec veut le savoir.
Est-ce que le premier ministre a approuvé le
transfert du centre d'essai de Montréal à Kansas City?
Le Président : M. le premier
ministre.
M.
Couillard : Alors, ce n'est
pas Kansas City, c'est Wichita, mais, ceci dit, il n'y a pas de transfert...
Mais ceci dit, M. le Président...
Des voix : ...
Le
Président : Ce qui changerait, c'est qu'une fois que la
question est posée selon nos normes on puisse entendre la réponse avec
les mêmes...
Une voix : ...
Le Président : Ah! M. le
député de Sanguinet...
Une voix : ...
Le Président : M. le député
de Sanguinet, on vous a beaucoup entendu. Allez, M. le premier ministre.
M. Philippe Couillard
M.
Couillard : ...avec respect,
que le collègue est dans l'erreur, il n'y a pas de délocalisation d'emplois du
tout.
Maintenant,
c'est la raison pour laquelle on a choisi d'intervenir dans la série C
spécifiquement et de poser un geste économique majeur auquel j'espère le
gouvernement fédéral va se joindre également, ce qui va nous permettre d'avoir une influence déterminante au conseil
d'administration. Lorsque les ententes seront finalisées, bien sûr les
documents pourront, le cas échéant,
être rendus publics, mais ça nous permet d'avoir une influence réelle sur le
développement de ce qui est véritablement l'avenir du secteur
aéronautique, ce que ne voulait pas le chef de l'opposition officielle.
Le Président : Troisième
complémentaire, M. le chef de l'opposition.
M. Pierre Karl Péladeau
M. Péladeau : Merci, M. le
Président. Je m'excuse. Effectivement, c'est Wichita. Mais est-ce que le
premier ministre, le chevalier, le grand
chevalier de l'intégrité et de la transparence, tel qu'il l'a déclaré au moment
de l'assermentation de son Conseil
des ministres, M. le Président, est-ce qu'il a décidé de nommer son conseiller
Daniel Johnson au poste de président
du conseil de la série C, puisqu'il vient de parler de la composition du conseil? Est-ce
qu'il va rendre publiques les
ententes ou la population devra conclure qu'il s'agit d'ententes secrètes?
Le
Président : M. le chef de l'opposition, je voudrais juste vous rappeler qu'on appelle tous les membres de
cette Chambre selon leur titre. M. le premier ministre.
M. Philippe Couillard
M.
Couillard : M. le Président, je voudrais que le chef de
l'opposition, avec un minimum de
prudence, aborde ces questions-là,
étant donné qu'il est lui-même l'actionnaire de contrôle d'une très grande entreprise
qui a fait des dizaines de milliers
de mises à pied, qui a fait des acquisitions, qui a fait des faillites. Alors,
ça, c'est la réalité, M. le Président, du domaine des affaires.
Maintenant, la composition actuelle — parce
qu'on est deux actuellement, Bombardier à 51 % et nous à 49 % — fait
en sorte que c'est, comme d'habitude, l'actionnaire majoritaire qui suggère une
nomination de président du conseil d'administration, cette fois d'un
homme honorable, intègre, qui était déjà sur le conseil d'administration de
Bombardier et qui, en plus, est un ancien premier ministre du Québec. Franchement,
s'inquiéter de ça, ça m'apparaît singulièrement déplacé.
Le
Président : Principale, Mme la députée de Taschereau, mais
aussi la leader adjointe de l'opposition.
Présence de M. Adil Charkaoui au collège de Maisonneuve
Mme Agnès Maltais
Mme
Maltais : M. le Président, tous en lien avec le collège
Maisonneuve, cinq jeunes partis combattre en Syrie et en Irak, quatre autres jeunes interceptés à
l'aéroport, deux autres en attente d'un procès pour possession d'explosifs
aux fins de terrorisme. Il y a pourtant
11 mois que j'ai questionné pour la première fois le gouvernement sur la
présence de l'agent de radicalisation
Adil Charkaoui au collège Maisonneuve. À l'époque, l'ex-ministre de la Sécurité
publique m'avait répondu : C'est complexe; le ministre de
l'Éducation m'avait répondu : Je suis perplexe.
Dans
la presse de ce matin, le collège de Maisonneuve a, de nouveau, maille à partir
avec Adil Charkaoui. On apprend qu'il
y avait un comité de suivi qui avait été mis sur pied et qu'il ne s'est réuni
qu'une seule fois. Il n'y a aucun suivi qui se fait. Pendant ce
temps-là, on est obligé de faire intervenir la police.
Quand
le gouvernement va-t-il, une fois pour toutes, régler le cas d'Adil Charkaoui
au cégep Maisonneuve et son influence sur les jeunes?
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît! Mme la ministre de la Justice.
Mme Stéphanie Vallée
Mme
Vallée : M. le Président, je dois vous avouer que je suis
étonnée puis je ne suis pas étonnée de la question de notre collègue. Nous avons déposé en juin
dernier un plan global pour lutter contre la radicalisation. Depuis plusieurs
mois, nous sommes en commission parlementaire pour étudier le projet de loi visant
le discours haineux, le discours incitant à
la violence, qui propose également une série de mesures mises à la disposition
des organismes et des maisons d'enseignement.
J'ai
déposé le 19 novembre à mes collègues une proposition, une série
d'amendements, notamment un amendement qui
est exactement discuté dans l'article de ce matin, la demande de la Fédération
des cégeps. Que fait ma collègue? Elle fait
de l'obstruction intelligente, selon elle. Et ça, c'est tiré même d'un article
du Devoir de la semaine dernière.
Elle l'a avoué séance tenante. Là, M. le Président, je veux bien, là, mais est-ce
qu'on peut, de l'autre côté, arrêter
de défendre le discours haineux?
Des voix :
...
Le
Président : S'il vous plaît! Il y a une personne ici qui a le droit de parole, c'est Mme la députée de Taschereau
et leader adjointe.
Mme Agnès Maltais
Mme
Maltais : M. le Président, on lui a proposé de faire une scission pour régler ce problème-là rapidement, puis elle
a refusé, puis elle a répondu par la négative. Son plan d'action, il ne marche pas. Même la direction du collège fait part de son insatisfaction à l'égard
du gouvernement. Le collège dit qu'ils sont tannés de l'inaction
du gouvernement. Il y a
plusieurs événements graves qui ont été rapportés au collège Maisonneuve, et,
comme par hasard, Adil Charkaoui est toujours dans les parages.
Au
lieu d'essayer de limiter la liberté d'expression, pourriez-vous limiter le
travail des agents de radicalisation? C'est ça, le problème.
Le
Président : D'abord,
je vous rappelle à tous, d'un côté comme de l'autre, qu'on s'adresse toujours à
la présidence. M. le leader du gouvernement.
M. Jean-Marc Fournier
M.
Fournier : M. le Président, la première question qui a été posée par la leader adjointe a eu comme
réponse qu'il y a en ce moment à l'Assemblée nationale, dans
une de nos commissions, l'étude des dispositions qui permettraient
d'agir. Or, vous avez entendu la leader
adjointe dire : Nous mettons notre veto de l'opposition officielle. Nous
empêchons d'étudier ça, on va guider
les affaires de l'Assemblée à la seule façon de l'opposition officielle. Il y a des outils qui existent. Si on veut se battre contre les discours haineux
en protégeant la liberté d'expression, c'est ce qu'il y a là-dedans.
Mais ce que le PQ essaie de faire, M. le Président, c'est de protéger le discours haineux, se lever en Chambre puis
dire : Qu'est-ce que vous faites? On attend juste que vous
collaboriez pour qu'on se donne des outils pour lutter contre ça.
• (10 h 20) •
Le Président : Deuxième
complémentaire, Mme la leader adjointe de l'opposition.
Mme
Agnès Maltais
Mme
Maltais : Pendant qu'Adil Charkaoui est toujours
au cégep Maisonneuve, le gouvernement nous propose une loi pour limiter la liberté d'expression de tous les Québécois
et une loi qui donnera un outil incroyable aux islamistes, soit la Commission
des droits de la personne, pour bâillonner toute l'opposition à cette
radicalisation.
Quand est-ce que le gouvernement va agir
véritablement et protéger nos jeunes de l'influence des agents de
radicalisation? Le collège Maisonneuve demande de l'aide, vous ne foutez rien.
Des voix : ...
Le
Président : S'il vous plaît! La neige, pourtant, on l'a eue
hier. Normalement, ça aurait dû être... Mme la ministre de la Justice.
Mme Stéphanie Vallée
Mme Vallée : M. le Président,
en commission parlementaire en août dernier, la Fédération des cégeps nous a demandé des outils, oui, pour pouvoir agir. J'ai
déposé le 19 novembre l'amendement à l'article 24 du projet
de loi, qui donne, justement, aux fédérations des cégeps, aux établissements d'enseignement les outils requis pour intervenir. Mais savez-vous quoi, M. le
Président? Ça fait 40 heures qu'on étudie l'article 1 parce qu'on ne veut pas
avancer.
M. le
Président, le projet de loi prévoit
une série d'outils. Le plan de lutte à la radicalisation prévoit une série de
mesures et des mesures qui portent fruit. La collègue...
Le Président : En terminant.
Mme Vallée : ...devrait, au
moins, l'admettre.
Le Président : Principale, M.
le chef du deuxième groupe de l'opposition.
Plan du gouvernement
pour le maintien au Québec
des emplois du secteur aéronautique
M. François Legault
M. Legault : M. le Président,
le politique s'est fourvoyé dans ses négociations avec Bombardier et avec
Air Canada. Tout le monde le reconnaît, sauf lui.
M. le
Président, on apprend ce matin que le premier ministre, le gouvernement du
Québec, a demandé au gouvernement
fédéral d'investir seulement dans la division série C pour faire en sorte
qu'on va se retrouver avec une entreprise,
l'entreprise de la série C, qui sera possédée à un tiers par le
gouvernement du Québec, un tiers par le gouvernement fédéral puis un tiers par Bombardier, qui n'ajoute pas un
sou dans la nouvelle entreprise. M. le Président, de penser qu'on va avoir une entreprise qui va
être présidée par Daniel Johnson, contrôlée par le premier ministre puis
Justin Trudeau, juste y penser, j'ai
froid dans le dos, M. le Président. Bombardier a 17 700 employés au
Québec, 1 700 dans la série C, 16 000 dans les divisions de transport et avions d'affaires. Le
premier ministre a dit en cette Chambre, et je le cite : «Ce n'est pas à l'État de dicter à une
entreprise quelles sont ses politiques [en matière] de maintien d'emplois.» Fin
de la citation.
M. le
Président, je lui suggère de ne pas répéter ça, là, il va faire rire de lui. M.
le Président, moi, je pense qu'un État
qui investit 1,3 milliard, il n'a pas juste le droit, il a le devoir
d'exiger des garanties de maintien d'emplois. Va-t-il le faire?
Le Président : M. le premier
ministre.
M. Philippe Couillard
M.
Couillard : ...collègue
constate, comme son collègue de l'opposition officielle, qu'il a fait erreur en
s'objectant à notre proposition
d'investir dans la série C, qui était l'endroit où il fallait investir. Et
c'est curieux, on verra bien ce que le
gouvernement fédéral va annoncer parce qu'ils font la même analyse, il est
curieux que tout le monde en arrive à la même conclusion, que c'était effectivement le geste à poser, M. le
Président, pour assurer l'avenir du secteur aéronautique. Nous retrouver actionnaires dans une entreprise qui
a des liquidités, contrairement à ce qu'il dit, qui a un carnet de commandes,
qui a des actifs, qui n'a pas de dette, c'était le geste à poser pour l'avenir
de quoi? L'avenir du secteur aéronautique de
Montréal, qui est centré — bien sûr, il y a d'autres entreprises — sur Bombardier, mais notamment sur
l'avenir de la série C.
Alors, constatant maintenant qu'il n'a pas donné
le bon conseil à cette Assemblée, il essaie de pédaler par en arrière et de faire dévier le débat sur des
questions de personnalité ou de personnes, et lui-même impute... Je dois le
dire et le regretter, on ne devrait
jamais se comporter de cette façon-là devant la situation où quelqu'un,
M. Johnson, qui est au conseil de Bombardier, qui est un ancien
premier ministre du Québec, lui, y trouve un problème. C'est une bonne nouvelle, M. le
Président, de voir des anciens premiers ministres, comme l'a fait Lucien
Bouchard dans quelques dossiers, revenir
s'impliquer dans des dossiers importants pour le présent et l'avenir du Québec.
Je l'invite à se ressaisir et à saluer la décision d'investir dans la
série C.
Le Président : Première
complémentaire, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.
M. François Legault
M. Legault :
M. le Président, tous les analystes le disent, dans ses négociations avec
Bombardier puis Air Canada, le
premier ministre n'a rien obtenu. C'est comme un petit poisson avec des
requins. Ce sont des habiles négociateurs. Je répète ma question, parce que je n'ai pas eu de réponse : Va-t-il
exiger de Bombardier le maintien d'un certain nombre d'emplois sur les 17 700?
Le Président : M. le premier
ministre.
M. Philippe Couillard
M. Couillard : Je vais réitérer ma
confiance envers Bombardier, contrairement au message négatif que lui particulièrement et son collègue envoient sur les
marchés au sujet de Bombardier depuis plusieurs semaines, au risque de faire échouer la transaction sur la
série C. Il faut le dire parce que ça aussi, c'est entendu. C'est entendu,
M. le Président, encore une fois,
comme ça a été le cas dans un autre dossier récemment, qu'il n'y a que le Parti
libéral du Québec, notre gouvernement,
qui défend le fleuron de l'aéronautique québécoise ici, et on va continuer de
le faire contre l'opposition officielle et contre la deuxième
opposition.
Le Président : Deuxième
complémentaire, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.
M. François Legault
M. Legault :
M. le Président, le premier ministre est un homme intelligent, c'est un bon
médecin, mais ce n'est pas un bon
négociateur. Il doit exiger des garanties sur les 17 700 emplois de
Bombardier au Québec. Va-t-il le faire?
Le Président : M. le premier
ministre.
M. Philippe Couillard
M.
Couillard : Je ne peux pas
croire que quelqu'un qui a dirigé déjà une entreprise privée fasse une
proposition semblable, c'est incroyable.
Il existe une règle de droit, il existe un système de marché libre au Québec,
et heureusement qu'on en fait partie, et il ne faut surtout pas envoyer
de signaux contraires.
Maintenant, comme il l'a dit, lorsqu'on investit
on peut parler et on peut agir. On est maintenant au conseil d'administration de la série C. Pas de Bombardier,
on ne voulait pas être au conseil d'administration de Bombardier, on voulait être à la série C. On y est —j'espère, bientôt avec le gouvernement
fédéral — on va s'assurer
que ce chemin, qui est le chemin
d'avenir du Québec pour l'aéronautique, soit suivi avec succès. Et, malgré lui,
on va réussir, M. le Président.
Le Président : Principale, M.
le député de Granby et leader du deuxième groupe d'opposition.
Négociations relatives
à l'achat par
Air Canada d'appareils de la CSeries
M. François Bonnardel
M.
Bonnardel :
M. le Président, ce que le gouvernement nous a démonté au cours des dernières
semaines, c'est son incapacité à
protéger les emplois au Québec. En échange d'une aide de 1 milliard US à
Bombardier, le Québec a perdu 2 400 jobs chez Bombardier et
sacrifié 1 800 travailleurs chez Aveos.
Tout indique que c'est le premier ministre
lui-même qui a entrepris les négociations avec le P.D.G. d'Air Canada pour l'achat des avions de la CSeries. J'ai
une question fort simple, M. le Président : Est-ce que le premier ministre
peut nous confirmer qu'il a initié lui-même les rencontres avec le P.D.G. d'Air
Canada?
Le Président : Mme la
ministre de l'Économie.
Mme Dominique Anglade
Mme
Anglade : Merci, M. le Président. Alors, d'abord, sur la question
d'Aveos, M. le Président, j'aimerais situer un peu le contexte au niveau
de la loi, hein? On a beaucoup parlé de la loi puis on a beaucoup parlé des échanges
qu'il y avait eu au niveau du projet, mais
fondamentalement ce que dit le jugement de la cour, c'est qu'on «n'y impose
pas de plancher
d'emplois, pas plus que l'on [...] prévoit [de] volume d'activités minimal
précis ou une autre garantie», sur les emplois qui avaient été chez
Aveos.
On induit la
population en erreur, M. le Président. Fondamentalement, fondamentalement, M.
le Président, aujourd'hui, dans ce que nous
avons eu comme jugement... L'opposition essaie de faire de la politique là-dessus,
mais fondamentalement il n'y a rien qui garantit aujourd'hui le retour
spécifique, avec le bilan de la Cour suprême... de la Cour d'appel, excusez-moi, excusez-moi, avec le bilan de la Cour
supérieure... de la Cour d'appel, qu'il y ait eu effectivement un plancher d'emploi qui aurait pu être maintenu
avec les travailleurs d'Aveos, rien, absolument rien, M. le Président.
Le Président :
Première complémentaire, M. le député de Granby.
M. François Bonnardel
M.
Bonnardel : M. le Président, en échange d'une aide de
1 milliard US, on a perdu 2 400 jobs chez Bombardier,
sacrifié 1 800 emplois chez Aveos.
Je
vous pose juste une question, M. le premier ministre, ayez le courage de vous
lever : Dites-moi, dites-nous, à tout le monde ici, au Québec, que
c'est vous ou non qui avez initié les rencontres avec Air Canada.
Le Président :
On s'adresse à la présidence, M. le député de Granby. M. le premier ministre.
M. Philippe Couillard
M. Couillard : Alors, je suis très heureux de répondre à ça parce que ça montre le
type de comportement auquel on doit
faire face dans cette Assemblée parfois. Alors, M. le Président, moi, je n'ai
pas parlé jamais de la transaction avec Air Canada, avec Bombardier. Tout ce que j'ai souhaité dans une
conversation, une conversation avec le président d'Air Canada, c'est
qu'il commande des séries C pour l'intérêt supérieur du Québec, et ça, je
suis très fier de le dire aujourd'hui. Mais
ce n'est pas moi qui ai négocié l'entente, M. le Président, rien à voir
là-dedans. Ce qu'on veut, c'est l'avenir, l'avenir de l'aéronautique au
Québec.
Et,
quand il dit, M. le Président, que l'investissement de 1 milliard de
dollars est lié aux pertes d'emploi, c'est faux, M. le Président. Les pertes d'emploi sont liées à la perte de
commandes dans le domaine des avions d'affaires, rien à voir avec ce qu'il dit. Quand il dit qu'on aurait
pu préserver les emplois par les poursuites juridiques, rien à voir avec la
vérité, M. le Président.
Le Président :
Première...
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît! Il y a une personne qui a le droit de parole ici, puis c'est
le député de Granby.
M. François Bonnardel
M.
Bonnardel :
M. le Président, le premier ministre nous confirme qu'il a parlé au P.D.G.
d'Air Canada. La question est fort simple,
là : Qui a négocié cette entente, son ministre des Transports, lui-même?
Est-ce que c'est Daniel Johnson qui a finalisé l'entente entre
Bombardier et le gouvernement?
Des voix :
...
• (10 h 30) •
Le Président :
S'il vous plaît! M. le premier ministre.
M. Philippe Couillard
M. Couillard : ...ridicule, là, je regrette, là. Il m'arrive ici de parler à
l'actionnaire de contrôle de Québecor, il m'arrive de parler à l'ancien président d'Air Transat. Et moi, je
suis très fier de dire que, pour l'intérêt supérieur du Québec, je suis content qu'Air Canada ait fait cette
transaction d'achat et de commande de série C. C'était essentiel pour
l'avenir non seulement de Bombardier
Aéronautique, mais j'oserais même dire de toute l'entreprise. Si je n'avais pas
fait, M. le Président, cette
recommandation et ce souhait, j'aurais failli à mes responsabilités. Mais ce n'est pas moi qui ai fait les négociations,
ce sont des gens d'affaires qui ont négocié ensemble pour le bénéfice, d'abord
et avant tout, du secteur aéronautique, M. le Président. Et, au lieu d'essayer de couler la transaction, au lieu d'essayer de
nuire à la réputation de Bombardier,
au lieu d'essayer de faire perdre des dizaines de milliers d'emplois au secteur
aéronautique pour Montréal, je demande aux oppositions...
Le Président :
En terminant.
M. Couillard : ...de se ressaisir et
d'agir de façon responsable.
Le Président : Principale, M.
le député de Borduas.
Projet de loi n° 591
affirmant la participation du
Québec au processus de nomination des juges de
la Cour suprême du Canada pour le Québec
M. Simon Jolin-Barrette
M.
Jolin-Barrette : Aujourd'hui, M. le Président, la CAQ a présenté un projet de loi nationaliste, un projet de
loi qui vise à permettre aux Québécois, par le biais des membres de leur
Assemblée nationale, de participer au processus de nomination des trois juges
du Québec à la Cour suprême du Canada, un projet de loi, M. le Président, qui
permet d'assurer la représentation des
valeurs sociales et des traditions juridiques du Québec, un projet de loi qui permet au Québec de faire des gains à l'intérieur du Canada sans
avoir à modifier la Constitution, un projet
de loi pragmatique et concret
qui permet à la nation québécoise de s'affirmer.
M. le Président, est-ce que le premier ministre
est prêt à défendre les intérêts des Québécois en s'engageant à appuyer et à
appeler le projet de loi n° 591?
Le Président : M. le leader
du gouvernement.
M. Jean-Marc Fournier
M. Fournier : Écoutez, le projet
de loi a été déposé il y a quelques minutes, mais j'ai entendu quand même... lorsque le
député les a déposés, il y a certains des éléments qui se retrouvent dans le projet de loi et il y en a un particulièrement qui saute au visage, c'est le
choix que fait la CAQ, et peut-être d'autres formations de l'opposition, à l'effet que ça soit dorénavant à l'Assemblée
nationale, dans ce parlement, où des débats sont à forte teneur de
partisanerie, de passer le test auprès de certains candidats, alors on
va avoir les juges de la Cour d'appel, de la Cour supérieure, de nombreux avocats qui vont être scrutés par
l'Assemblée nationale, par les partis pour se demander lesquels vont être ceux
qui vont être soumis au gouvernement fédéral pour la Cour suprême pour nous
représenter.
Autrement
dit, M. le Président, ce qu'on essaie de nous dire ici, c'est que tous ceux qui
sont en la meilleure position pour
être des juges à la Cour suprême vont être sur la place publique en train de
dire qu'ils ne veulent plus être dans leurs fonctions. Nous n'aurons plus, un, les meilleurs candidats, nous aurons
le système le plus partisan possible, alors qu'en ce moment, M. le
Président, nous avons une mécanique qui permet d'avoir des candidats de façon
indépendante, que...
Le Président : Première
complémentaire, M. le député de Borduas.
M. Simon Jolin-Barrette
M.
Jolin-Barrette : M. le Président,
j'invite le gouvernement à lire le projet de loi. C'est quoi, la réalité au
Québec, M. le Président, depuis l'arrêt Nadon de 2013 de la Cour suprême
du Canada? C'est qu'on vient constitutionnaliser trois sièges qui viennent du
Québec, une demande historique du Québec.
Ce qu'on
propose dans le projet de loi, c'est d'avoir une mécanique qui est
transparente, qui est claire afin d'assurer la représentation des valeurs sociales du Québec. M. le
Président, le leader du gouvernement va pouvoir le lire, parce que,
chez les libéraux, c'est le parti du statu quo
où on ne veut pas faire de gain à
l'intérieur du Canada.
C'est une question de défense d'intérêts
de la nation québécoise, M. le Président.
Le Président : M. le leader
du gouvernement.
M. Jean-Marc Fournier
M.
Fournier : Je voudrais remercier notre collègue de
reconnaître le jugement de la Cour
suprême dans l'affaire Nadon, qui reconnaît les valeurs sociales
distinctes du Québec, M. le
Président. L'ensemble
des notions que nous connaissions dans la clause de société distincte du
lac Meech se trouve maintenant reconnu de façon répétée par la Cour suprême. J'imagine que notre collègue veut nous féliciter d'avoir été justement
promoteurs auprès de la Cour suprême
pour avoir un jugement comme celui-là. La cause du Québec avance en termes de
jurisprudence, M. le Président.
Ceci étant,
pour plus de clarté, parce que, malheureusement, on n'a jamais assez de temps
pour répondre, je vais déposer ici, en cette Chambre, une lettre que ma
collègue et moi avons signée le 2 mai 2014, au Procureur général du Canada, qui
va lui expliquer la façon...
Le Président : En terminant.
M. Fournier : ...dont ça
procède pour que nous donnions les noms du Québec, M. le Président.
Document déposé
Le
Président : Est-ce qu'il y a consentement pour le dépôt?
Consentement. Deuxième complémentaire, M. le député de Borduas.
M.
Simon Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette : M. le Président, la réalité, c'est que le premier ministre se lève en
Chambre pour parler de fierté, pour dire qu'il est nationaliste. La
réalité, c'est très simple : dans le projet de loi n° 591, on propose
d'avoir un comité de sélection, ensuite que
les candidatures soient approuvées aux trois quarts des membres de l'Assemblée
nationale pour défendre les intérêts du Québec, pour assurer que le
caractère de droit civil soit représenté à la Cour suprême du Canada. M. le
Président, même Robert Bourassa, dans l'accord du lac Meech, était en faveur,
même dans l'accord de Victoria, même dans Charlottetown.
Est-ce que le Parti
libéral va démontrer aux Québécois qu'il défend ses intérêts et qu'il est
nationaliste?
Le Président :
M. le leader du gouvernement.
M. Jean-Marc Fournier
M.
Fournier : Jamais dans Meech ou ailleurs Robert Bourassa n'a
demandé à ce que l'Assemblée nationale, dans un débat partisan, décide
de ceux qui vont être soumis à la cour. Jamais, M. le Président.
Il
veut nous parler de nationalisme dans un parti pour lequel le nationalisme
correspond à passer des tests d'expulsion
à des immigrants après trois ans, un nationalisme juste pour certains
Québécois. Le nationalisme, c'est pour tous les Québécois, et nous en
sommes les promoteurs, M. le Président.
Le Président :
M. le leader du deuxième groupe d'opposition.
M.
Bonnardel :
Oui. Qu'il arrête de déchirer sa chemise...
Une voix :
...
M.
Bonnardel : Oui, le multiculturalisme que le leader défend,
là... qu'il arrête de déchirer sa chemise puis qu'il réponde correctement
à la question de mon collègue.
Le Président :
Est-ce que vous avez terminé? Alors, M. le leader du gouvernement, s'il vous
plaît.
M. Fournier :
Représenter tous les Québécois, il dit : Ça, c'est du multiculturalisme
dont on ne veut pas?
Notre
nationalisme, c'est celui d'un Québec où chacun a sa place, peu importe son
origine, et nous avons comme mode
celui de l'interculturalisme, mais lui, il veut exclure. L'autre veut juste des
Québécois qui sont souverainistes.
Nous, on accueille tout le monde.
Le Président :
Principale, monsieur...
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît!
Des voix :
...
Le
Président : Bon, ça va? Il y a une personne, là, qui va avoir
le droit de poser une question, c'est le leader de l'opposition.
Enquête de l'Unité permanente
anticorruption sur le député
des Îles-de-la-Madeleine, M. Germain Chevarie
M. Bernard Drainville
M. Drainville :
M. le Président, ça fait plus d'un an que l'UPAC a remis au DPCP, au Directeur
des poursuites criminelles et
pénales, le dossier d'enquête sur le député des Îles-de-la-Madeleine. Un an
plus tard, il n'y a toujours pas...
Des voix :
...
Le
Président : S'il vous plaît! C'est trop bruyant. Contenez-vous
un peu, là, c'est trop bruyant. Il va avoir le droit de poser sa question, et
vous répondrez.
M. Drainville :
Un an plus tard, M. le Président, il n'y a toujours pas d'accusation ni d'explication
de la part du DPCP dans les enquêtes Joug et Lierre. La radio des Îles,
CFIM, nous apprend que, selon le porte-parole du DPCP, Me Jean-Pascal Boucher, les conclusions de l'analyse des dossiers
Joug et Lierre et les motifs de décision de poursuivre ou non les personnes visées seront rendus publics. Le
DPCP le confirme lui-même, sa décision n'est pas prise, et le député des
Îles peut encore être accusé.
M.
le Président, l'actuel ministre et député de Rivière-du-Loup a dû se retirer du
caucus libéral en 2009 quand il était sous
enquête policière. Est-ce que le premier ministre peut nous dire qu'est-ce que
le député de Rivière-du-Loup a fait
de pire que le député des Îles pour que lui soit expulsé du caucus libéral,
alors que le député des Îles ne l'a pas été encore?
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît! On pourrait avoir une réponse? M. le leader du gouvernement.
M. Jean-Marc Fournier
M.
Fournier : Donc, comme hier, on peut toujours se
demander : Comment se fait-il que lui a des liens directs avec le DPCP, M. le Président, ou avec l'UPAC? On
peut toujours se demander ça. Peut-être qu'il nous dévoilera, M. le
Président, les liens directs qu'il a.
Ceci
étant, parlant de notre collègue des Îles, je voudrais ici citer un courriel
venant de la Direction des affaires juridiques
du Directeur général des élections, qui dit ceci : «Je vous confirme que
le dossier touchant M. [le député des Îles]
et les allégations à son endroit entendues à la commission sur l'octroi et la
gestion des contrats publics dans l'industrie de la construction a été
fermé en tout début d'année 2015.»
Ce
que je suis en train de lui dire, c'est que lui, il n'a rien sur le DPCP et
rien sur l'UPAC. Moi, j'ai un courriel du
Directeur général des élections qui dit que le dossier est fermé. Je vais lui
demander la chose honorable à faire en cette Chambre : qu'il
s'excuse pour ce qu'il fait depuis hier et aujourd'hui. Il n'y a rien; dossier fermé.
Va-t-il s'excuser, oui ou non?
Le Président :
Première complémentaire, M. le leader de l'opposition.
M. Bernard Drainville
M. Drainville :
Belle tentative de diversion, M. le Président. Le leader sait faire la
différence, je pense, entre le DGE et le DPCP. J'espère, en tout cas,
qu'il sait faire la différence.
Le
dossier de l'UPAC sur l'enquête concernant le député des Îles, il est sur le
bureau du DPCP depuis maintenant plus
d'un an. Et, selon le DPCP, qui a parlé à la radio des Îles, il
y a encore une décision à venir
d'accuser ou pas, et cette décision-là, elle sera rendue publique. Pourquoi
ne pas demander au député des Îles de se...
Le Président :
M. le leader...
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît! M. le leader du gouvernement.
M. Jean-Marc Fournier
M. Fournier :
De toute évidence, le leader de l'opposition ne connaît pas la différence entre
«honorable» et «déshonorable»...
Des voix :
...
M. Fournier :
...de toute évidence.
Dans
le dossier en question, M. le
Président, il n'a rien. Le DPCP est
venu ici, l'opposition officielle a préféré ne pas poser de questions parce
qu'elle ne veut pas avoir de réponse,
elle aime mieux laisser entendre des choses. C'est la façon dont ils font de la politique.
Ça fait quelque temps qu'ils le font ainsi. Est-ce que ça les a amenés à beaucoup de succès électoraux? Non, parce
que la société québécoise n'aime pas ce genre de comportement.
Dans le même dossier,
le Directeur général des élections a fermé le dossier il y a un an. La seule
chose honorable, s'il n'est pas capable de s'excuser : au moins, qu'il ne
se relève pas.
• (10 h 40) •
Le Président :
En terminant.
Des voix :
...
Le Président :
M. le leader de l'opposition, en deuxième complémentaire.
M. Bernard Drainville
M. Drainville : M. le
Président, quand le député de Rivière-du-Loup était sous enquête, l'ex-premier
ministre Jean Charest lui a demandé
de se retirer. Là, on veut juste que l'actuel premier ministre applique les
mêmes critères qui ont été utilisés par le premier ministre Jean Charest
dans le cas du député de Rivière-du-Loup. On ne lui en demande pas beaucoup, M. le
Président, on lui demande juste
d'être au niveau des standards éthiques de Jean Charest, hein? C'est
tout ce qu'on lui demande.
Est-ce qu'il va demander au député des Îles de se retirer du caucus comme Jean
Charest a demandé au député de...
Des voix :
...
Le Président :
Ça va!
Des voix :
...
Le Président :
Ça va! Merci beaucoup. La question a été posée selon le code.
Des voix :
...
Le Président :
Ça va? M. le leader du gouvernement.
M. Jean-Marc Fournier
M.
Fournier : M. le Président, honnêtement, honnêtement, sur le fond des choses, ce qu'on sait, c'est que
notre collègue des Îles, il n'a pas de dossier. Ça a été fermé, le
dossier du DGE. C'est ça qu'on sait.
Maintenant, le collègue
ne veut pas faire la chose honorable. Il veut nous parler d'éthique. Je lui
demande de regarder à sa droite, M. le Président. En termes d'éthique, à sa
droite, il y a eu deux blâmes sur l'éthique par le Commissaire à l'éthique : encore ce collègue de droite
qui prétend qu'il a une fiducie sans droit de regard avec plein de droits de
regard, encore un collègue
supposément plein d'éthique qui nous dit qu'il va avoir un institut indépendant
qui n'aura absolument aucune indépendance...
Des voix :
...
Le Président :
M. le leader de l'opposition.
Des voix :
...
M. Drainville :
M. le Président...
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît! M. le leader de l'opposition.
M. Drainville :
...de répondre à la question sur le député des Îles.
Le Président :
Est-ce que vous avez terminé?
M. Fournier :
Ah! non, je n'ai pas terminé.
Le Président :
Alors, allez-y.
M.
Fournier : Il veut
citer un article, M. le
Président, je vais vous citer le code
d'éthique, je vais vous citer la Loi de l'Assemblée nationale : On
est supposés de se respecter ici...
Le Président :
En terminant.
M.
Fournier : ...on est
supposés de respecter l'ensemble des députés qui se font élire, qui représentent les citoyens, puis c'est ça...
(Applaudissements)
Le Président :
S'il vous plaît! Je suspends les travaux.
(Suspension de la séance à
10 h 42)
(Reprise à 11 h 13)
Le Président : Nous allons
reprendre les travaux, mais, avant de reprendre les travaux, nous allons avoir
quelques mots de chacun de nos collègues leaders. M. le leader du gouvernement.
M. Fournier : Oui, M.
le Président. Je tiens à dire à nos
collègues, nous avons eu une discussion entre les leaders et avec la
présidence, et je souhaite dire à cette Assemblée personnellement, comme leader
du gouvernement, que, j'y tiens et j'insiste, je souhaite que nous appliquions
notre règlement, tous les articles de notre règlement.
Je
reconnais que les applaudissements spontanés et chargés d'émotion n'ont pas
respecté une disposition de notre règlement. Je souhaite que cela ne se
reproduise plus. Je souhaite que tous les articles du règlement soient
respectés : 35.3°, 35.5°, 35.7°. Je
souhaite que le code d'éthique et ses valeurs qui nous amènent le respect entre
parlementaires soit aussi respecté. Et je tiens à vous dire, M. le
Président, que j'entends me gouverner suivant ces valeurs de respect et je
souhaite que nous puissions retrouver ces valeurs de respect en cette enceinte.
Le Président :
M. le leader de l'opposition.
M. Drainville :
M. le Président, dans ce qui avait été discuté et convenu en votre présence, il
y avait aussi, je pense... On avait
convenu, M. le Président, on avait convenu que le leader du gouvernement allait
exprimer ses regrets. Je n'ai malheureusement
pas entendu ce mot-là. Je le regrette, M. le Président. Je regrette que ce
manquement à notre règlement, que
cette violation du règlement sur lequel nous nous sommes tous entendus ait eu
lieu, et franchement j'aurais souhaité, tel qu'on s'était entendus,
qu'il l'exprime explicitement.
Quant
à nous, M. le Président, je tiens à dire et à redire que, dans notre
esprit, nous nous sommes comportés dans le respect du règlement et de tous les articles du règlement, que ce
soit sur les questions que nous avons posées et que ce soit également
sur notre comportement quant aux applaudissements.
M. le Président,
c'est nous, de ce côté de la Chambre, qui avons proposé la fin des
applaudissements. C'est le leader du gouvernement qui est venu me rejoindre en conférence de presse pour le confirmer, et
nous avons convenu, avec le leader de la deuxième opposition et tous les
députés, parce qu'on a voté là-dessus, la fin des applaudissements.
C'est très dommage
que ce règlement-là ait été violé aujourd'hui, et j'espère, M. le Président,
j'espère que ça n'arrivera qu'une seule
fois, parce qu'on sait ce qui arrive une fois qu'il y a
un précédent qui est créé. Nous, de notre côté, en tout cas — je vais conclure là-dessus — je réitère, M. le Président, notre
intention, notre volonté de respecter tous les articles du règlement, y
compris celui sur les applaudissements.
Le Président :
M. le leader du deuxième groupe d'opposition.
M.
Bonnardel : M. le Président, ce n'est pas un beau moment de notre législature, ce qu'on vient de
voir. On est tous des adultes, des
députés qui représentons les citoyens du Québec, on s'attend à ce que
le décorum, à l'Assemblée
nationale, soit respecté. On a adopté un règlement, nous tous, pour dire que la
fin des applaudissements est un signal important pour nous, comme élus, autant que pour les gens
qui nous écoutent, et on s'attend à ce que tous les députés de l'Assemblée nationale respectent ce règlement, tout comme mes collègues de ma formation politique
vont le faire. Merci.
Le Président :
Compte tenu du temps qui nous est imparti puis pour permettre à la période de
questions de pouvoir se terminer, je ne
commenterai pas. Je ferai une déclaration... plutôt une réflexion qui sera sous
forme de déclaration au début de
notre prochaine réunion... au fait, ce sera le 8 mars. Avant la période de
questions, je vous ferai part de ce que je comprends, de ce que je vois
puis de comment on doit se comporter dans cette situation-là. Ça va?
Alors, prochaine
question du côté de l'opposition, Mme la députée de Taillon, en principale.
Financement des cliniques privées
Mme Diane Lamarre
Mme
Lamarre : M. le Président, hier, par la Gazette officielle, on
apprenait que, dans son projet pilote qui dirige les chirurgies au privé, le ministre de la Santé a décidé ce qui
suit : chaque clinique sera financée selon les dépenses réelles engagées plus une marge de profit, plus une marge de
profit. Pourtant, il s'est bien gardé d'en parler durant son point de presse la veille. Après avoir d'abord nié qu'il
donnerait un extra aux cliniques, le ministre s'est repris quelques minutes
plus tard et a admis qu'il y aurait une marge de profit raisonnable pour les
cliniques privées.
On
lui a posé la question pour les frais
accessoires, où il a donné le droit aux médecins de facturer des services au prix coûtant plus une marge, mais on n'a jamais
eu de réponse. Je lui repose donc la question pour les chirurgies qu'il
envoie au privé.
M.
le Président, une marge de profit raisonnable, pour le ministre, quelle
est-elle? Est-ce que c'est 5 %? 10 %? 20 %?
Le Président :
M. le ministre de la Santé.
M. Gaétan Barrette
M. Barrette :
M. le Président, évidemment, tout le monde aura compris que, pour faire un
exercice comme celui-là, on ne pourrait pas
demander à des partenaires de travailler à perte, évidemment. Et évidemment, si
on fait un tel exercice, c'est dans
le but de générer une détermination de coût qui va nous permettre de faire des
économies substantielles. Et, comme
je l'ai dit dans ma conférence de presse, on parle ici de centaines de millions
de dollars dans le réseau public.
Est-ce que, dans notre relation
avec ces gens-là, qui auront à être, avec nous... à faire preuve d'une absolue
transparence, il y aura
potentiellement une marge de profit? La réponse est oui, et cette marge ne
pourra en aucune circonstance excéder 10 %.
Alors, c'est le canevas sur lequel nous travaillons aujourd'hui. Et évidemment
ça pourrait être moins, mais nous sommes
dans un environnement qui est empirique, et, par définition, la détermination
de ces coûts-là se fait sur un point de départ qui est très clair :
on ne le sait pas au public, on ne le sait pas au privé. On va le savoir. Et on
s'engage à un aménagement qui va permettre
que tous sortent gagnants, parce qu'au bout de la ligne, M. le Président, c'est
le réseau et la société québécoise qui vont en sortir gagnants...
Le Président :
En terminant.
M. Barrette :
...parce que nous ferons des économies substantielles au bénéfice des citoyens.
• (11 h 20) •
Le Président :
Première complémentaire... Principale, M. le député de Lévis.
Pénurie de médecins de famille dans la
municipalité régionale de comté d'Acton
M. François Paradis
M. Paradis
(Lévis) : Merci, M. le Président. Alors qu'il n'y a plus de
consultation sans rendez-vous dans la MRC
d'Acton en raison du manque de médecins de famille, les patients de la
coopérative de santé d'Acton sont inquiets parce qu'au cours des prochains mois deux autres médecins de famille
vont prendre leur retraite. Plus de 2 000 patients vont alors
devenir orphelins.
La
directrice de la coop de santé, le préfet de la MRC et le maire d'Acton Vale se
sont déplacés, malgré les mauvaises conditions
routières, et sont avec nous pour témoigner de leurs inquiétudes. Depuis des
mois, ils multiplient sans succès les démarches pour obtenir de nouveaux
médecins.
Le ministre de la Santé sait que plus de
2 000 patients vont devenir orphelins dans quelques semaines. Il a
même déclaré à la radio la semaine
dernière que le problème se réglerait d'ici trois ans avec l'arrivée de
nouvelles cohortes de médecins. Le ministre ne propose rien à court
terme.
M. le Président,
est-ce que le ministre est conscient de la pénurie imminente? Et va-t-il agir pour
éviter cette nouvelle rupture de services?
Le Président :
M. le ministre de la Santé.
M. Gaétan Barrette
M.
Barrette : Alors, M. le Président, c'est dommage que le député de
Lévis ne prenne pas note de tout ce que je dis et de tout ce que je fais parce que, s'il le faisait, il
aurait constaté, en écoutant aussi les entrevues que je donne dans les stations
de l'Estrie — et je salue les élus municipaux qui sont ici
aujourd'hui — il
aurait appris — enfin,
je pense qu'il le sait — que nous sommes le
premier gouvernement à avoir mis en place un plan d'effectifs médicaux
extrahospitaliers au Québec, selon lequel,
pour la première fois de l'histoire du Québec, M. le Président, le gouvernement
s'est donné un outil, un levier formel pour
s'assurer que les finissants qui sortent des facultés de médecine aillent là où
sont les besoins, comme à Acton Vale.
Alors, cette
mesure-là n'existait pas ni dans l'esprit de la première opposition ni dans
l'esprit de la deuxième opposition, mais il
n'en reste pas moins, M. le Président, que nous agissons dans l'optique de
pourvoir la population de services
médicaux adéquats. Dans les trois prochaines années, M. le Président, il va
sortir plus de 1 000 médecins, 750 au net, compte tenu des mises à la retraite, ce qui nous permettra de
distribuer correctement les médecins là où il y a des besoins. Et, au moment où on se parle, deux personnes sont
identifiées pour aller s'installer à Acton Vale. Je suis content que les
élus soient ici pour apprendre la bonne nouvelle. Et merci pour le bon
commentaire que vous allez faire.
Le Président :
Première complémentaire, M. le député de Lévis.
M. François Paradis
M. Paradis
(Lévis) : Alors, il réitérera cette garantie : Il faut au minimum
un nouveau médecin de famille le 31 mars,
il en faut un autre le 31 juillet. Parce qu'actuellement il y a un médecin
pour 3 000 patients dans la MRC d'Acton. En août prochain, si ce n'est pas fait, ce sera un
pour 4 300 patients alors que le ratio au Québec est d'environ un
pour 900.
Alors,
je donne la possibilité au ministre de garantir l'arrivée de ces deux médecins
à ces moments précis pour faire en sorte que ce ratio soit respecté,
soit identique à celui du Québec.
Le Président :
M. le ministre de la Santé.
M. Gaétan Barrette
M.
Barrette : J'entends le leader de la deuxième opposition dire :
Excellent! Bien, j'avise la deuxième opposition officielle, M. le
Président, que je n'ai pas de bouteille que je peux frotter pour faire sortir
un génie de la médecine et distribuer des médecins partout, alors... Et, non, M. le Président, je
ne peux pas me mettre dans la position aujourd'hui où je vais dire à des gens dans une région :
Parce que vous venez à l'Assemblée nationale à la demande du député de Lévis,
vous allez avoir un médecin. Il y a des
problèmes partout au Québec, et nous devons faire une distribution en fonction
des besoins, ce que nous faisons. Et, je le
répète, il n'y a jamais eu ça au Québec, M. le Président. Alors, je dis que,
dans les trois prochaines années, il
est clair que nous allons très probablement régler le problème partout parce
qu'on s'est donné le levier.
Le Président :
En terminant.
M.
Barrette : Alors, laissons-nous le temps de le faire et n'exigeons pas
des garanties qui sont basées sur des fausses prémisses.
Le Président :
Complémentaire, M. le député de Johnson.
M. André Lamontagne
M.
Lamontagne : ...de la coopérative d'Acton. Il y a un médecin qui a
quitté en décembre, il y a deux médecins qui vont quitter au cours des prochaines semaines. Il n'y a aucun
service de sans rendez-vous. L'accès aux médecins de famille est
critique aujourd'hui, imaginez ce que ce sera dans quelques semaines.
Est-ce
que c'est possible pour vous de rencontrer les gens qui se sont déplacés
aujourd'hui pour leur témoigner, un, de votre écoute et de votre
soutien, s'il vous plaît?
Le Président :
M. le ministre de la Santé.
M. Gaétan Barrette
M.
Barrette : ...de les rencontrer, et je pense qu'à l'écoute de nos
échanges ils ont déjà constaté que je suis bien au fait et à l'affût de leur problématique puisque c'est parce
que je suis au courant de leur problématique que j'ai déjà fait en
sorte que la réglementation qu'on a mise en place puisse s'exercer avec l'effet
recherché, qui est celui de diriger des médecins finissants là où il y a
des besoins, comme dans Acton Vale.
Ça va me
faire plaisir de les rencontrer, M.
le Président. Ça va me
faire plaisir de les rencontrer pour leur redire ce que je viens de dire là. Et la réalité, elle est celle-là. Il y a,
au moment où on se parle, deux personnes qui sont identifiées pour aller
à Acton Vale, premièrement...
Le Président :
En terminant.
M. Barrette :
...et deuxièmement, au moment où on se parle, comme le dit le député, il y a
des médecins qui donnent des services actuellement là-bas.
Le Président :
Principale, M. le député de Lac-Saint-Jean.
Financement de l'éducation postsecondaire
M. Alexandre Cloutier
M.
Cloutier : M. le Président, lors de son remaniement ministériel en
janvier, le premier ministre nous a dit : Fini l'austérité en
éducation, là, il va y avoir des eaux plus tranquilles.
Pourtant, à peine
cinq jours plus tard, La Presse nous apprenait que les
recteurs des universités avaient été informés
qu'il y aurait des nouvelles coupures. L'annonce est assez sérieuse, M. le
Président, parce que la ministre des Relations
internationales est sortie en pleine presse en fin de semaine pour contredire
son gouvernement et dire que ce n'était peut-être pas l'idée du siècle
de couper davantage dans l'éducation postsecondaire.
Alors
là, on résume ça, M. le Président. Tu as un premier ministre qui dit : On
va arrêter de couper en éducation. Tu
as l'ancien ministre de l'Éducation qui dit : Non, non, non, il va y avoir
des coupures supplémentaires. Puis tu as la ministre des Relations
internationales qui sort en pleine page pour dire : Peut-être pas l'idée
du siècle.
Alors
là, il y a une nouvelle ministre de l'Éducation supérieure. Est-ce qu'on peut
savoir, M. le Président, c'est quoi, la position du gouvernement? Est-ce
qu'elle s'engage à ne pas faire de nouvelles coupures?
Le Président :
Mme la ministre de l'Enseignement supérieur.
Mme Hélène David
Mme
David (Outremont) : Merci beaucoup. J'en profite pour saluer, donc,
mon nouveau collègue qui s'intéresse à l'enseignement supérieur et je le
remercie.
Vous savez,
oui, vous avez lu les journaux, il y a une lettre que les recteurs ont envoyée,
le bureau de coopération internationale,
sur la question des régimes de retraite, il y a la question aussi des frais de
scolarité pour étudiants étrangers. Ce sont des pistes, effectivement, qui sont
regardées, des pistes avec lesquelles on travaille, ma collègue, évidemment,
du MRI, qui a des considérations, qui a des réflexions. Je les ai moi aussi.
Je
viens d'arriver depuis à peu près 72 heures. J'ai déjà parlé au recteur Guy
Breton, de l'Université de Montréal, qui
est en même temps le porte-parole du BCI, qui m'a fait part effectivement d'un
certain nombre de préoccupations.
Puis
savez-vous quoi? On a déjà parlé aux 19 recteurs des universités, aux 19.
24 heures après ma nomination, ils avaient tous été contactés.
Et je serai au Bureau de coopération interuniversitaire vendredi prochain. Je
vais passer deux heures, trois heures, on va
regarder l'ensemble des dossiers. Parce que là vous parlez d'un dossier...
Donc, savez-vous quoi? Moi, c'est l'ensemble...
Le Président :
En terminant.
Mme David
(Outremont) : ...de la situation des universités qui m'intéresse.
Le Président :
Principale, Mme la députée de Joliette.
Délai de prescription pour la dénonciation d'agressions
sexuelles
Mme Véronique Hivon
Mme
Hivon : L'actualité
récente démontre, une fois de plus, à quel point il est difficile pour les
victimes d'agression sexuelle de briser le silence, de dénoncer leur agresseur.
Elles ont souvent besoin de plusieurs années, voire des décennies, pour y arriver. Devant cette situation,
en 2013, le ministre de l'époque, Bertrand St-Arnaud, faisait passer la prescription, pour les recours civils des
victimes, de trois à 30 ans, et il commandait aussi une analyse aux ex-juges
René Dussault et Jean-Louis Baudoin — qui, par un heureux hasard,
est parmi nous aujourd'hui — pour
étudier la compatibilité de l'abolition pure
et simple du délai de prescription avec notre droit civil, comme le réclament
les victimes.
Or, ce rapport est
entre les mains de la ministre de la Justice depuis 2014. Et on apprend, dans
le Courrier de Frontenac, qu'elle s'est engagée, lors d'une rencontre en
novembre avec des victimes, de le rendre public. Elle leur a dit : Pas besoin de demande d'accès, je vais le rendre
public. Rien depuis. Au nom de la transparence et surtout au nom des victimes, est-ce
qu'elle peut rendre ce rapport public dès...
Le Président :
Mme la ministre de la Justice.
Mme Stéphanie Vallée
Mme
Vallée : M. le Président, je remercie la collègue de sa question parce
que ça me permet de rectifier. J'ai
effectivement rencontré les victimes en novembre dernier, les victimes d'agression
sexuelle qui portaient un message quand même pas facile, des gens qui avaient un bagage
derrière eux et qui souhaitaient... et qui militent pour l'abolition pure et simple de la prescription en matière
civile. Ils ont demandé la publication de ce rapport. Je me suis engagée à
vérifier la possibilité de le rendre public, puisqu'il s'agissait d'un
avis juridique commandé par mon prédécesseur.
Ceci étant dit, M. le
Président, la question qu'aborde la collègue a fait l'objet d'une étude en commission
parlementaire en décembre 2013. Mes collègues parlementaires ont fait le choix à l'unanimité de réduire la prescription à 30 ans. Mais ce que ça veut dire... Puis ça, c'est
important aussi de le mentionner, parce qu'il est important de faire la distinction entre le recours civil, qui est entre
les mains de la victime, et le recours criminel, qui n'est assujetti à aucune
prescription.
Le Président :
En terminant.
Mme
Vallée : M. le Président, cette prescription de 30 ans est en
vigueur. La réflexion se poursuit, dans le cadre...
Le Président :
Cela met fin à la période de questions et de réponses orales.
Motions sans préavis
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, nous en sommes à la
rubrique des motions sans préavis. Et, en fonction de nos règles et de l'ordre de présentation, je
cède la parole à M. le député de Borduas pour la présentation de sa motion
sans préavis.
• (11 h 30) •
M. Jolin-Barrette : M. le Président, je demande le consentement pour déposer la motion
suivante conjointement avec la députée de Gouin :
«Que
l'Assemblée nationale se dote, dans les meilleurs délais, d'un cadre juridique
garantissant que la nomination des trois juges québécois de la Cour
suprême du Canada soit effectuée à partir d'une liste de candidats adoptée par l'Assemblée
nationale, conformément aux demandes historiques du Québec.»
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, merci, M. le
député. Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?
Mme Vien :
...M. le Président, comme il existe déjà un cadre, il n'y aura pas de
consentement.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, il n'y a pas de
consentement. Je cède maintenant la parole à M. le ministre du
Développement durable et de l'Environnement. À vous la parole pour votre motion
sans préavis.
Souligner le 25e
anniversaire de la Société
québécoise de récupération et de recyclage
M.
Heurtel : Merci, M. le Président. Je sollicite le consentement de
cette Assemblée afin de présenter la motion suivante conjointement avec le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries
et de l'Alimentation, le député de Terrebonne, le député de Masson et la
députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques :
«Que
l'Assemblée nationale souligne le 25e anniversaire de la Société
québécoise de récupération et de recyclage, RECYC-QUÉBEC;
«Qu'elle
salue l'énergie de cette société d'État qui, depuis un quart de siècle,
travaille pour une société plus verte et
qu'elle rende un hommage tout particulier aux personnes ainsi qu'aux organismes
partenaires qui oeuvrent quotidiennement afin que nos enfants puissent
grandir dans un Québec sans gaspillage;
«Qu'elle
reconnaisse et réitère l'importance que RECYC-QUÉBEC poursuive, en étroite
collaboration avec la société
québécoise, ses actions et ses efforts de mobilisation autour d'une gestion
responsable, novatrice et durable des matières
résiduelles, nous permettant de lutter, ensemble, contre les changements
climatiques.» Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, merci, M. le
ministre. Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion? Mme la
leader adjointe du gouvernement.
Mme Vien :
En fait, M. le Président, avec plaisir. En fait, ce que nous proposons, ce sont
des interventions d'une durée
maximale de deux minutes par intervenant selon l'ordre suivant : alors,
notre ministre de l'Environnement, suivi du député de Terrebonne, du
député de Masson et finalement par la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, je comprends qu'il y a
consentement pour quatre interventions d'une durée maximale de deux minutes. Consentement? Alors, je vous cède la
parole, M. le ministre de l'Environnement et du Développement durable.
M. David Heurtel
M.
Heurtel : Merci, M. le Président. Le texte de la motion est assez long
et couvre l'ensemble du message que je tenais à apporter aujourd'hui. Je
profite de ces quelques secondes additionnelles pour remercier toute l'équipe
de RECYC-QUÉBEC pour le travail acharné qu'ils font à travers le Québec, un
travail méconnu, et c'est mon souhait, justement, qu'au cours des prochains
mois et prochaines années on connaisse mieux l'ensemble du travail que fait et qu'accomplit RECYC-QUÉBEC, et aussi qu'on se
tourne résolument vers l'avenir. Parce qu'évidemment, les 25 dernières
années, le recyclage, oui, c'est une chose
très importante, mais il y a d'autres choses, il y a réduire, il y a les 3RV-E,
il y a la valorisation, il y a la réutilisation, il y a également
l'intégration complète de la nouvelle économie, des nouvelles technologies, de l'économie circulaire, et de
s'assurer qu'on intègre l'ensemble de ces concepts-là pleinement, et de voir
non seulement ça comme une façon de lutter
et de contribuer à la lutte contre les changements climatiques, mais également
de voir là aussi des opportunités de
développer la nouvelle économie québécoise, une nouvelle économie verte, une
nouvelle économie qui va effectuer
cette transition vers une économie plus sobre en carbone, une économie qui va
contribuer à la prospérité des Québécoises et des Québécois au
XXIe siècle.
Et je
terminerai quand même par reconnaître mon collègue le ministre de l'Agriculture
qui, il y a 25 ans, en tant que
titulaire de mon portefeuille, a mis sur pied cette société qui est aujourd'hui
une fierté non seulement dans le monde du développement durable, mais un
modèle pour l'ensemble du Québec. Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Merci à vous, M. le ministre. M.
le député de Terrebonne, je vous cède la parole.
M. Mathieu Traversy
M.
Traversy : Merci beaucoup, M. le Président. Il y a des rares
moments ici, en cette Chambre, où l'opposition officielle et le
gouvernement se rejoignent sur des positions communes, et aujourd'hui, en ce
qui concerne RECYC-QUÉBEC, nous en vivons
une. Nous sommes contents, M. le Président, de voir cette motion déposée par le
gouvernement parce que,
rappelez-vous, il y a quelques années des réflexions avaient eu lieu quant à
l'avenir de RECYC-QUÉBEC. On se
souviendra que, dans les années 2011, le gouvernement de Jean Charest
avait déjà réfléchi à abolir concrètement cette instance, qui fait un excellent travail, comme l'a mentionné notre
collègue de l'Environnement. J'ai cru comprendre, donc, qu'il y avait des sages à l'intérieur du
Parti libéral, des députés d'expérience qui évidemment ont fait avorter cette
réflexion très rapidement pour revenir sur le chemin du gros bon sens.
Alors, à tous
les employés de RECYC-QUÉBEC, à tous leurs partenaires, félicitations pour ces
25 ans de gestion responsable de matières résiduelles, pour votre
excellent travail de promotion, de valorisation et de favorisation de la récupération de nos matériaux et de diverses
ressources. Là-dessus, on se donne rendez-vous pour le 50e. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
Très bien. Alors, merci, merci, M. le député de Terrebonne. M. le député de
Masson.
M. Mathieu Lemay
M. Lemay :
Merci. M. le Président, je suis très heureux de souligner aujourd'hui le
25e anniversaire de RECYC-QUÉBEC. Si,
aujourd'hui, le recyclage est ancré aussi profondément dans les habitudes de
vie des Québécois, mais dans leurs
valeurs, c'est certainement en grande partie grâce à l'implication et au
dynamisme de RECYC-QUÉBEC. Il aura
fallu éduquer, bâtir, changer, mais, en 25 ans, les Québécois, ils ont
bien changé. Je me rappelle très bien, moi, il y a 25 ans, j'étais au primaire, puis on débutait
cette nouvelle initiative, ce projet de société. Pour les jeunes qui sont nés
en même temps que RECYC-QUÉBEC puis pour ceux qui ont suivi, le
recyclage puis la récupération sont des réalités concrètes, incontournables et tout simplement naturelles. Notre société
a bien changé en 25 ans. RECYC-QUÉBEC est en quelque sorte omniprésente dans nos vies. Partout
où on se trouve au Québec, dans nos maisons, chez nos amis, dans les
parcs, dans les endroits publics, on peut maintenant trouver un endroit où
recycler nos déchets.
Si
on retourne un peu 25 ans en arrière... Bien, dans le fond notre économie
a bien changé depuis ce temps-là, c'est
rendu l'économie de la récupération puis du recyclage, elle a permis de créer
des milliers d'emplois. Des nouvelles technologies
ont vu le jour. Il y en a d'autres qui vont s'imposer dans le futur.
RECYC-QUÉBEC est et doit être une source d'innovation au Québec. On a bien changé notre façon de concevoir nos habitudes
de consommation, la gestion de nos déchets,
et elle a permis de vivre dans un environnement plus sain et plus propre, mais
il ne faut surtout pas croire qu'on est arrivés à destination.
Si
on constate le progrès immense qui a été réalisé sur à peine 25 ans, on se
dit qu'on doit poursuivre le travail pour
les 25 prochaines années. Mais le Québec peut faire encore plus, on peut
encore faire plus de sensibilisation, plus d'innovation. Donc, on s'attend que RECYC-QUÉBEC continue d'être un
leader central contre le gaspillage, pour un environnement plus sain. Faisons simplement penser à la récupération des
batteries. Bien sûr, ça va devenir un enjeu réel le jour où on va avoir
100 000 véhicules électriques sur nos routes. Ça, ce n'est qu'un
exemple.
Mais,
M. le Président, pour toutes ces innovations, pour avoir réduit le gaspillage,
pour avoir permis à nos enfants de vivre dans un environnement plus
sain, bravo à tous les artisans de RECYC-QUÉBEC!
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le député
de Masson. Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Mme Manon Massé
Mme Massé :
Merci, M. le Président. Alors, effectivement, 25 ans, c'est un beau moment
dans une vie, on a développé beaucoup de
maturité, beaucoup d'expérience. Et le Québec est fier d'avoir vu cette
organisation naître à la fin du
XXe siècle pour nous aider à entrer dans le XXIe siècle. Des concepts
et principes, bien entendu, à la fin du XXe siècle, telle la hiérarchie
des 3RV, hein? Notre premier objectif, ce n'est pas de recycler, ça, ça arrive
à la fin. Notre premier objectif, c'est de réduire. C'est ça, le réel objectif
que devrait avoir la société du XXIe siècle, réduire. Réutiliser. Ah! Aïe! On est loin de ça dans notre société qui
jette tout à l'instant où c'est désuet ou à tout le moins, certaines
industries, on dirait qu'elles s'arrangent pour que ça soit désuet. Recycler,
troisième étape. Recycler n'est pas valoriser. Recycler c'est de faire en sorte que la valeur de la matière première
soit utilisée à son maximum et non pas seulement amenée en fin de vie,
comme on le fait dans la majorité des matières que nous envoyons dans notre bac
de recyclage.
Je
pense que RECYC-QUÉBEC a fait un travail extraordinaire depuis 25 ans et je
pense que nous avons maintenant un
travail aussi à accomplir, considérant que, dans ce premier 25 ans là, on
a été chercher la quantité en mettant tout dans un même bac, et
maintenant notre défi du XXIe siècle, ce n'est plus la quantité, M. le
Président, c'est la qualité. La quantité y demeure, mais c'est la qualité.
Alors,
je vous souhaite encore un 25 ans et je vous souhaite un 25 ans dans
lequel nos matières premières vont pouvoir vivre très, très longtemps.
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président
(M. Ouimet) : Merci à vous, Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Mise aux voix
Cette motion est-elle
adoptée?
Des voix :
Adopté.
• (11 h 40) •
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Adopté. Je cède maintenant la
parole à M. le député de Bourget pour une nouvelle motion sans préavis.
M. le député.
Souligner le 25e anniversaire du Mois de l'histoire des
Noirs
M. Kotto :
M. le Président, je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée
afin de présenter, conjointement avec
la ministre de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion, la députée
d'Iberville et le député de Mercier, la motion suivante :
«Que
l'Assemblée nationale du Québec souligne le 25e anniversaire du Mois de
l'histoire des Noirs;
«Qu'elle
salue les fondateurs de la Table ronde du Mois de l'histoire des Noirs pour
avoir permis de mettre en lumière
l'apport des membres des communautés noires dans le développement, le progrès
et le succès de la nation québécoise;
«Qu'elle
félicite les lauréats de cette 25e édition, à savoir la Ligue des Noirs du
Québec, l'Association jamaïcaine de
Montréal, la compagnie Black Theatre Workshop, le Quebec Board of Black
Educators, l'Association des enseignants et enseignantes haïtiens du
Québec, le Coloured Women's Club of Montreal, la Maison d'Haïti, Vues
d'Afrique, les Productions Nuits d'Afrique, l'Association des festivités
culturelles des Caraïbes, la Universal Negro Improvement Association [of] African Communities League et le
Conseil des personnes âgées de la communauté noire de Montréal.»
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le député
de Bourget. Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion? Mme la
leader adjointe du gouvernement.
Mme
Vien : Avec plaisir, M. le Président. Comme tout à l'heure, des
interventions de deux minutes chacune, à commencer par notre collègue de Bourget, suivi par la députée
d'Iberville, ensuite par le député de Mercier et, en terminant, par la
ministre de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion.
Le Vice-Président
(M. Ouimet) : Très bien. Alors, consentement, si je comprends
bien, pour permettre aux quatre intervenants
indiqués par Mme la leader adjointe... pour une durée d'environ deux minutes,
en commençant par vous, M. le député de Bourget.
M. Maka Kotto
M.
Kotto : M. le Président, c'est avec un enthousiasme certain que
nous joignons notre voix pour souligner, avec cette motion, la 25e édition du Mois de l'histoire des Noirs au
Québec. En félicitant tous ces organismes lauréats de cette 25e édition et bien évidemment celles et ceux
qui les animent, c'est un large pan de l'histoire de Montréal et du Québec
que nous embrassons, car ils ont joué et
continuent de jouer un rôle fondamental dans le progrès social et économique
de la société québécoise.
Que
ce soit au chapitre de l'éducation, de la culture ou de la défense des droits,
toutes ces associations ont permis aux membres des communautés noires de
l'ensemble du Québec, de façon directe ou indirecte, d'être des partenaires incontournables d'un vivre-ensemble réussi, ce,
malgré des obstacles rencontrés ici et là en chemin, notamment au chapitre
de la discrimination, phénomène qui, on le sait, dans toute société, a la peau
dure.
À l'instar de la
table ronde de l'histoire du mois des Noirs, vous me permettrez, M. le
Président, de saluer la mémoire du regretté
Jean Doré. Dans leur message, il est écrit, et je cite : «C'est l'ancien
maire de Montréal, Jean Doré, qui a ouvert les portes de l'hôtel de
ville à toutes les minorités en les invitant à participer à un processus
décisionnel démocratique visant à définir le genre d'endroit où ils se
sentiraient comme chez eux.
«[...]souvenons-nous
des circonstances qui ont permis de nommer février "Mois de l'histoire des
Noirs" à Montréal.» Fin de la citation.
Sous
le thème, M. le Président, Lève-toi et brille!, la Table ronde du Mois
de l'histoire des Noirs en appelle à un avenir radieux pour toutes et tous. Nous remercions ainsi M. Michael
Pierre Farkas et toute son équipe de la table ronde, ainsi que celles et
ceux qui, depuis 25 ans, de tous les horizons, donnent tout un sens à ces
mots de Nelson Mandela : «En faisant scintiller notre lumière, nous
offrons aux autres la possibilité d'en faire autant.» Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le député
de Bourget. Mme la députée d'Iberville, pour votre déclaration.
Mme Claire Samson
Mme
Samson : Merci, M. le Président. Nous avons en effet, aujourd'hui, l'honneur
de souligner en cette Assemblée le
25e anniversaire du Mois de l'histoire des Noirs. L'histoire des
communautés noires au Québec est encore trop méconnue. Nous entendons et lisons beaucoup sur l'histoire
des Noirs ailleurs au monde, notamment chez nos voisins du Sud. Nous avons souvent l'impression, à tort, que le Québec
n'a été que peu touché par les problèmes du racisme et de la discrimination.
Cette méconnaissance démontre encore toute l'importance du Mois de l'histoire
des Noirs. En effet, l'histoire des
communautés noires du Québec est riche de courage et de détermination. Nous
devons reconnaître à regret que l'esclavage se produisait aussi à Montréal.
Nous avons le devoir de nous souvenir de cette partie de notre histoire plus
sombre afin de ne jamais la répéter.
Les
communautés noires du Québec ont également
leurs succès qui sont devenus les nôtres avec des années, avec le
cheminement des droits des minorités. Je pense ici à Fred Christie qui, malgré
les énormes difficultés qui ont eu raison de
sa fougue, a sonné la charge pour la conquête juridique des droits des
minorités. Ses actions ont mené à une série de gestes qui ont culminé par l'adoption de la Charte des droits et libertés de la
personne du Québec en 1975. Je
pense également, comme mon collègue, au défunt maire de Montréal
Jean Doré qui jeta les bases de la collaboration entre la ville de Montréal et les
différentes communautés ethniques.
M. le Président, le Québec a de quoi être fier de pouvoir compter sur
l'apport de ses communautés noires. La richesse qu'elles nous amènent
fait de nous un peuple culturellement riche et très fort. Merci, M. le
Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Merci à vous, Mme la députée d'Iberville. M. le
député de Mercier, je vous
écoute.
M. Amir Khadir
M. Khadir : Merci, M. le Président. Bien sûr, 25 ans, il y a
de quoi célébrer. 25 ans d'un travail de mémoire, d'un travail de présence, d'un travail de reconnaissance. Que tant de gens des communautés noires du Québec ont — parce que je parle des communautés
à cause de leur très grande diversité — tant de travail réalisé pour, disons, nous
rappeler à notre mémoire... nous
rappeler à notre mémoire que, si l'histoire des Noirs, et sa commémoration, a
25 ans, la présence des Noirs au
Québec, en fait, a 400 ans. En 1629, en 1629 était vendu ici même, à
Québec, le premier esclave noir amené directement,
directement d'Afrique au Canada. Heureusement, celui qui s'appelait Olivier
Le Jeune a réussi à s'affranchir quelques années plus tard... enfin,
avant la fin de sa vie, ce qui est, à notre, je dirais, honneur.
Cependant, ce
que j'aimerais dire, c'est qu'on a besoin régulièrement de se rappeler que,
dans le fond, il n'y a jamais de
vigilance à abandonner de ce point de vue là. Encore ce matin, plusieurs des
collègues ici, à l'Assemblée, ont dû voir
le même reportage qui m'a horripilé, qui montrait que, malheureusement, le
profilage dont les minorités visibles, particulièrement
les Noirs, sont victimes, malheureusement, fait encore des ravages. Un jeune
Québécois noir, un jeune entrepreneur
a été interpelé par la police sur la simple présomption qu'étant donné la
couleur de sa peau il pouvait être impliqué dans des, disons, activités
criminelles.
Ceci m'amène
à un texte que j'aimerais... puisqu'on parle de l'histoire des Noirs, attirer
l'attention de tous mes collègues — je finis là-dessus — un texte écrit par Claude Marcil, qui a tant
écrit sur l'histoire des Noirs, c'est la Petite histoire des
Noirs du Québec et où il dit :
«C'est quand
même fascinant : une minorité visible qui, pendant des siècles, reste
invisible aux historiens, aux politiciens,
aux penseurs et à la population. On vient à peine de [les] découvrir, il y a quelques décennies, qu'ils
sont là, qu'ils ont toujours été là, et qu'à part la couleur de la peau
la communauté noire du Québec est plus hétérogène que n'importe quel groupe de Blancs — et
donc mérite qu'on les connaisse davantage et mieux.» Et le Mois de l'histoire des
Noirs est là pour ça. Merci.
• (11 h 50) •
Le Vice-Président
(M. Ouimet) : Merci à
vous, M. le député de Mercier. Enfin, Mme
la ministre de l'Immigration, de la Diversité et de
l'Inclusion.
Mme Kathleen Weil
Mme Weil :
Merci, M. le Président. Il me fait plaisir d'ajouter ma voix en faveur de cette
motion qui souligne la tenue, tout au
long du mois de février, de la 25e édition du Mois de l'histoire des Noirs
grâce à une loi adoptée par l'Assemblée nationale en 2006.
Le Mois de
l'histoire des Noirs représente une occasion privilégiée pour reconnaître et
promouvoir la contribution des
Québécoises et Québécois des communautés noires depuis plus de quatre siècles à
l'histoire du Québec ainsi qu'à sa prospérité,
l'occasion de raconter cette histoire commune, celle d'un Québec qui s'enrichit
de sa diversité et qui favorise le rapprochement
interculturel. C'est aussi un devoir de mémoire et d'éducation auprès notamment
des jeunes générations afin qu'elles
s'approprient l'héritage historique des communautés noires au Québec et
s'engagent à poursuivre les idéaux de justice, d'égalité et de dignité.
Ce sont
notamment ces idéaux que défendait l'écrivaine Maya Angelou dans son poème Still I Rise qui invite les
communautés noires, notamment les femmes, à
se tenir debout, à porter fièrement leur héritage et à poursuivre leurs rêves
malgré les obstacles sur leurs parcours. Ce
poème est d'ailleurs l'inspiration du thème de cette année, Lève-toi et
brille!
Cette édition
vise à honorer particulièrement une douzaine de femmes qui ont marqué l'histoire
de la musique québécoise et canadienne, dont la chanteuse mondialement reconnue Régine
Chassagne. Cette édition souligne également
l'engagement des organismes communautaires qui accompagnent chaque jour des milliers
de personnes, notamment des communautés
noires, dans leur insertion en emploi et qui facilitent leur participation et
leur inclusion à la société québécoise.
Ces organismes jouent un rôle fondamental.
Tout au long
du mois de février, une programmation variée a encore une fois été offerte à
toute la population. Pour ceux qui n'auraient pas eu la chance
d'y prendre part, il reste d'ailleurs quelques activités d'ici la fin du mois.
M. le Président, je tiens à féliciter la Table ronde du Mois de l'histoire des Noirs,
son président, M. Michael Farkas, les membres de son conseil d'administration et
ses bénévoles, ainsi que les organismes qui rendent possible cette nouvelle
édition. J'adresse aussi mes félicitations toutes spéciales aux
13 organismes honorés cette année.
En terminant, je tiens à citer en cette
Chambre une strophe du poème très
inspirant Still I rise, de Maya Angelou :
«Just like moons and like suns,
With the certainty of tides,
Just like hopes springing high,
Still I'll rise.»
«Tout comme les lunes et les soleils,
Avec la certitude des marées,
Tout comme les espoirs toujours vivaces,
Je vais encore m'élever.»
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M.
Ouimet) : Alors, merci à vous, Mme la ministre.
Mise aux voix
Cette motion est-elle adoptée? Adopté. M. le
député de Mercier, pour une nouvelle motion sans préavis.
M. Khadir : Merci, M. le Président. Je demande le consentement de la Chambre pour
présenter la motion suivante :
«Que l'Assemblée nationale rappelle son attachement à la Loi visant à lutter
contre la pauvreté et l'exclusion sociale adoptée à l'unanimité en 2002;
«Qu'elle rappelle au gouvernement du Québec que
l'article 20 de cette loi prévoit l'obligation à tous les [ministères] du gouvernement de produire des
études d'impacts pour toute proposition législative ayant un impact sur les
revenus des personnes et des familles en situation de pauvreté;
«Qu'elle
rappelle au gouvernement du Québec que cette loi prévoit également
l'obligation pour le gouvernement
de prendre en compte les réalités propres
aux femmes et aux hommes dans l'élaboration de ses politiques, notamment en réalisant systématiquement des
analyses différenciées selon les sexes;
«Que l'Assemblée nationale presse le ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale, de réaliser de telles analyses avant de
procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 70, Loi visant à
permettre une meilleure adéquation entre [...] formation et [...] emploi ainsi
qu'à favoriser l'intégration en emploi.»
Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le
député de Mercier,
pour la présentation de cette motion. Y a-t-il consentement pour
débattre de cette motion? Mme la leader adjointe du gouvernement.
Mme Vien : Permettez-moi, M.
le Président, de dire un mot : Ce n'est pas la...
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
Non, mais là...
Mme Vien : ...ce n'est pas
la...
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
...bien, y a-t-il consentement ou pas de consentement?
Une voix : ...
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Il n'y a pas de consentement. Très bien.
Y a-t-il d'autres motions
sans préavis?
Avis touchant les travaux des commissions
S'il n'y a pas d'autres motions sans préavis,
nous allons passer à la rubrique des avis touchant les travaux des commissions.
Mme la leader adjointe du gouvernement.
Mme Vien :
Alors, M. le Président, j'avise cette Assemblée que la Commission de la culture
et de l'éducation poursuivra les
consultations particulières à l'égard du projet de loi n° 86, Loi
modifiant l'organisation et la gouvernance des commissions scolaires en
vue de rapprocher l'école des lieux de décision et d'assurer la présence des parents
au sein de l'instance décisionnelle de la
commission scolaire, dès maintenant pour une durée de
1 h 45 min, à la salle Louis-Joseph-Papineau;
La Commission
de la santé et des services sociaux poursuivra les consultations particulières
à l'égard du projet de loi
n° 81, Loi visant à réduire le coût de certains médicaments couverts par
le régime général d'assurance médicaments en permettant le recours à une procédure d'appel d'offres, dès
maintenant pour une durée de deux heures, ce sera à la salle du Conseil
législatif;
La Commission de l'aménagement du territoire
poursuivra les consultations particulières à l'égard du projet de loi n° 83, Loi modifiant diverses
dispositions législatives en matière municipale concernant notamment le
financement politique, dès maintenant pour une durée de
1 h 30 min et de 15 heures à 18 heures, ce sera à la
salle Louis-Hippolyte-La Fontaine,
ainsi que le mardi 8 mars 2016, de 10 heures à
11 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papineau;
En terminant,
La Commission des institutions poursuivra l'étude détaillée à l'égard du projet
de loi n° 89, Loi visant à
assurer une meilleure concordance entre les textes français et anglais du Code
civil, aujourd'hui, après les affaires courantes
jusqu'à 12 h 30, à la salle des Premiers-Ministres — 1.38 — de l'édifice Pamphile-Le May, ainsi que
le mardi 8 mars 2016, de 10 heures à midi, à la salle
Louis-Hippolyte-La Fontaine.
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
Merci, Mme la leader adjointe, pour ces avis.
Pour ma part, je vous avise que la Commission
des institutions se réunira en séance de travail aujourd'hui, de 14 heures à 15 heures, à la salle RC.161
de l'hôtel du Parlement. L'objet de cette séance est de statuer sur la
demande de mandat d'initiative
d'entendre la présidente de la Commission
d'enquête sur l'octroi et la gestion des contrats publics dans l'industrie de la construction, France
Charbonneau, et le commissaire Renaud Lachance afin de faire toute la lumière
sur les conclusions du rapport de la commission, notamment la dissidence du
commissaire Lachance.
Renseignements sur les
travaux de l'Assemblée
À la rubrique des renseignements sur les travaux
de l'Assemblée, y a-t-il... Très bien.
Je vous avise
que l'interpellation prévue pour le vendredi 11 mars 2016 portera sur
le sujet suivant : La nécessité d'une
baisse du fardeau fiscal des citoyens et d'un plan de relance économique dans
le contexte prébudgétaire. M. le député de Granby s'adressera alors à M.
le ministre des Finances.
Affaires du jour
Alors, la période des affaires courantes étant
terminée, nous allons passer maintenant aux affaires du jour. Mme la leader
adjointe du gouvernement, pour la suite des choses.
Mme Vien : On en serait
rendus, M. le Président, à appeler l'article 9, s'il vous plaît.
Projet de loi n° 70
Reprise du débat sur l'adoption du principe
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
Alors, à l'article 9 du feuilleton, l'Assemblée reprend le débat ajourné
le 24 février 2016 sur l'adoption
du principe du projet de loi n° 70, Loi visant à permettre une meilleure
adéquation entre la formation et l'emploi ainsi qu'à favoriser
l'intégration en emploi.
Y a-t-il des intervenants? M. le député de
René-Lévesque.
M. Martin Ouellet
M.
Ouellet : Merci, M. le Président. Je suis heureux et même très content
de joindre aujourd'hui ma formation politique pour intervenir sur le
projet de loi n° 70 qui, à notre avis, est un projet de loi qui va
modifier de façon dramatique les
applications pour ce qui est de l'emploi et de l'employabilité sur le
territoire. Vous le savez, le Parti québécois est un parti de justice sociale. C'est le parti des régions et c'est un
parti de social-démocratie. Donc, lors de mon intervention, il me fera plaisir d'expliquer en quoi les
fondements mêmes du Parti québécois sont avec nous pour appuyer notre désir
de voir ce projet de loi là reporté.
Mais,
juste avant, j'aimerais faire un bref retour sur ma campagne électorale, parce
que, oui, M. le Président, je suis tout juste élu. Donc, le 9 novembre
dernier, j'ai été élu dans la circonscription de René-Lévesque et, lors de
cette campagne électorale, j'ai pu parcourir l'ensemble de ma circonscription
pour effectivement prendre le pouls des enjeux économiques, sociaux et surtout de
bien entendre ce que les gens de ma circonscription avaient à apporter à
l'Assemblée nationale.
Chez nous, on
vit un véritable bouleversement. Juste dans la Manicouagan, c'est près de
2 000 emplois qui ont été
perdus en 10 ans, et près de 1 100 personnes ont quitté notre
MRC pour aller s'installer ailleurs. Donc, on vit effectivement de
grands enjeux, et je voulais effectivement en prendre connaissance.
Et la
meilleure façon d'en prendre connaissance, ce n'était pas exclusivement de
faire le tour des centres d'achat, des restaurants pour aller prendre le
pouls de mes électeurs, mais c'était aussi pour rencontrer les intervenants et
les organismes qui intervenaient directement
auprès de cette clientèle. Alors, j'ai eu l'opportunité de rencontrer, lors de
ma campagne et après, le
Centre-Émersion de Baie-Comeau, qui travaille effectivement en partenariat avec
Emploi-Québec pour que ce qui est de...
l'employabilité — pardon,
M. le Président. J'ai pu rencontrer aussi le carrefour jeunesse-emploi. J'ai pu rencontrer notre carrefour jeunesse, les gens
du groupe Action-Chômage. J'ai pu rencontrer les groupes communautaires. J'ai rencontré des syndicats et
des entrepreneurs. Et, pour eux, l'employabilité, et l'emploi, est un enjeu
majeur sur notre territoire.
Juste à
penser, le Centre-Émersion, ce qu'il faut comprendre, c'est que cette
organisation-là a un partenariat avec Emploi-Québec,
et elle agit directement sur le terrain pour s'assurer que les gens qui sont en
démarche d'emploi ou qui cherchent à améliorer leurs chances d'avoir un
emploi sont supportés, accompagnés, que ce soit en formation, que ce soit aussi pour l'aide pour l'embauche et les
entrevues. Donc, ils sont supportés, comme je le disais tantôt, avec le Centre-Émersion pour les aider dans le succès pour
l'obtention d'un emploi rémunéré, effectivement, mais d'un emploi nécessaire dans leur domaine d'études. Et ce
qu'ils nous disent, c'est qu'effectivement le contexte économique actuel
ne permet pas nécessairement à tous les gens qui voudraient travailler d'avoir
l'opportunité de le faire.
• (12 heures) •
Même chose du
côté du carrefour jeunesse-emploi. On a reconfiguré un peu leur intervention
avec Emploi-Québec. Donc, dorénavant,
nos carrefours jeunesse-emploi travaillent exclusivement avec une clientèle qui
est issue de l'assistance sociale. Donc,
on a laissé de côté un pan de la clientèle, donc les jeunes, qui était
désireuse de se trouver un travail. Et ce qu'on nous dit : Malheureusement,
les cibles sont difficiles à atteindre, et voire même inatteignables, ce qui
rend un peu fragile le travail des conseillers et conseillères sur le terrain et ce
qui, malheureusement, brime les chances des jeunes de se trouver un emploi.
J'ai
rencontré aussi les gens du groupe Action-Chômage, et ce groupe-là milite pour
ce qu'on appelle dans notre jargon,
dans notre territoire, les fameux trous noirs. Ces fameux trous noirs, c'est
cette période lorsque la période de chômage se termine et avant que le travail saisonnier reprenne. Ils sont
effectivement dans un endroit où est-ce qu'aucune prestation ne peut s'appliquer et alors ils sont
malheureusement victimes de cette situation-là. Ils sont bénéficiaires, à ce
moment-là, de l'assistance sociale et
doivent effectivement, parce que les lois ont été changées en matière
d'assurance-emploi, faire des recherches ardues pour se trouver du travail. Mais j'aurai
l'occasion de vous parler des dynamiques territoriales sur mon
territoire par rapport à ça.
Et enfin, et
c'est la partie la plus importante, l'organisation que je mentionnais tantôt,
le Centre-Émersion, travaille en étroite collaboration avec plusieurs
partenaires, dont la ville de Baie-Comeau, dont Innovation et Développement Manicouagan, dont la chambre de commerce, dont la
SADC, pour assurer une bonne intégration de nos communautés qui sont immigrantes, parce que, oui, de
l'immigration, il s'en fait au Québec, mais il s'en fait aussi du côté de la Manicouagan. Et on accueille d'ailleurs plusieurs
immigrants, qui viennent réussir ici leur transition entre un pays qui est malheureusement victime de grands préjudices
mondiaux, disons-le comme ça... et qui essaient de se faire une nouvelle
vie en Manicouagan et sur le territoire de
la Côte-Nord. Et ils sont accompagnés pour réussir, un, leur intégration mais,
deux, surtout réussir, grâce à l'emploi... de
réussir leur vie et leur installation. Donc, tout ce qui va modifier le rôle
d'Emploi-Québec et ce que... Ce projet de
loi a un impact direct sur l'avenir, la vitalité et surtout a un avenir sur...
pardon, met en péril un avenir pour les jeunes en région.
Alors,
première inquiétude que j'ai pour les gens de ma communauté, les gens de la
circonscription de René-Lévesque, c'est d'abord le retrait des
responsabilités de la commission. Alors, ce qu'on peut voir avec ce projet de
loi là, c'est qu'il y aura une perte d'autonomie, avec l'abolition
d'Emploi-Québec, et c'est très dramatique pour nous.
Et je
voudrais refaire un peu le fil du temps, pourquoi je dis que c'est dramatique
pour nous, parce que, je le disais tantôt, nous avons perdu tout près de
2 000 emplois en Manicouagan. Et les gens pensent que la Manicouagan,
l'ensemble de la Côte-Nord, est une région exclusivement industrielle
pour laquelle les travailleurs sont ceux et celles qui sont exclusivement dédiés à l'exploitation des
ressources, mais j'aimerais rappeler en cette Chambre que, sur le territoire de
la Côte-Nord, plusieurs directions
régionales, plusieurs organisations embauchent des gens, et c'est un tissu
économique important. Et, dans
certains cas, lorsqu'on additionne tous les emplois, c'est même un moteur plus
grand que l'exploitation et la
diversification des ressources sur notre territoire. Alors, quand on touche à
des organisations comme Emploi-Québec... Parce qu'on l'a fait par le passé. Nous avons malheureusement perdu la
Direction du ministère de l'Éducation, du côté de la Côte-Nord. Nous avons été
fusionnés avec le Lac-Saint-Jean pour la Direction de la Culture. Nous avons
été fusionnés aussi avec la Direction
de la Forêt, Faune et Parcs. Donc, chez nous, quand on perd une direction régionale,
on perd un poids. Et, avec
l'abolition d'Emploi-Québec, c'est une nouvelle direction — ou une ancienne direction, devrais-je
dire — qui
quitte, et ça effrite effectivement notre
pouvoir décisionnel, mais ça effrite aussi notre particularité territoriale,
que j'aurai l'occasion de vous faire part tout à l'heure.
Donc, pour
nous, c'est effectivement une disparition d'une prise en main régionale dans le
développement et la mise en oeuvre des politiques et des services publics.
Ainsi, on confie au ministre la fonction de préparer le propre plan d'action annuel et celle de l'approuver pour ce
qui est des plans d'action régionaux en matière de main-d'oeuvre et d'emploi.
Et j'aimerais
attirer votre attention sur ce plan-là parce que, par le passé, j'ai eu
l'occasion de diriger, de présider et même d'administrer plusieurs
organisations qui travaillaient main dans la main avec Emploi-Québec pour
financer des opportunités créatives d'employabilité mais surtout
créatives d'emplois. J'avais plusieurs collaborations, plusieurs discussions, plusieurs partenariats sur un plan
qui était régional, et on était d'accord sur les enjeux, entre partenaires, qui
devaient être adressés.
Et le meilleur exemple que je pourrais vous
dire, bien, c'est notre exemple de collaboration qu'on avait entre Emploi-Québec et plusieurs autres organisations, dont, encore
une fois, Innovation et Développement Manicouagan, la SADC
Manicouagan, la chambre de commerce,
avec notre Corporation des services universitaires de l'Est de la Côte-Nord... de l'Ouest de la Côte-Nord, pardon.
Et pourquoi je vous dis ça? Bien, parce que, sur la Côte-Nord, on n'a pas
l'université. Malheureusement, dans
l'histoire du temps, il n'a pas été jugé nécessaire et opportun d'installer une
Université du Québec en Manicouagan,
mais aussi en Haute-Côte-Nord et en Côte-Nord en général. Donc, on n'a pas
d'université.
Nous avons
une organisation qui fait du courtage universitaire et malheureusement ce
courtage-là n'est pas ce qu'on
pourrait appeler efficient en matière de services à offrir pour nos étudiants.
Et, quand je dis qu'il n'est pas efficient, bien, malheureusement, il manque de financement. Donc, assurément, les
services ne sont pas donnés de façon adéquate. Mais il doit, à chaque fois qu'ils veulent organiser une formation ou,
du moins, mettre des partenaires pour répondre à une problématique, bien, solliciter d'autres
partenaires pour la voir se réaliser — et, dans certains cas, ou même dans
plusieurs cas, Emploi-Québec est un
partenaire de choix — dont notamment
les colloques en ressources humaines qui se tiennent aux deux ans dans ma région, donc à Baie-Comeau...
et qui fait aussi le pont, du côté de Forestville et de la Haute-Côte-Nord,
pour adresser les problématiques, justement,
d'employabilité et les problématiques de recrutement de main-d'oeuvre sur
notre territoire.
Donc là, en
voyant l'abolition d'Emploi-Québec, bien, effectivement, notre partenaire
risque de partir avec les sommes qui étaient dédiées justement pour
accompagner notre service universitaire et notre corporation. Alors, pour nous, l'abolition d'Emploi-Québec et, du moins,
l'application d'un plan plus national, au-delà des plans d'action régionaux, bien, c'est pour nous une atteinte directe à la
diversification de notre territoire, mais surtout c'est une atteinte directe
pour que nos... voyons! nos
spécificités — pardon,
M. le Président, je vais prendre un peu d'eau — pour que nos spécificités soient
reconnues et surtout répondent à nos problématiques.
Autre chose aussi qu'on a vu apparaître, là,
dans le projet de loi, c'est la modification de la commission des partenaires, donc sa composition. Le ministère,
selon nous, s'attribue trop de pouvoirs. Donc, les membres étaient auparavant
recommandés par les associations patronales et syndicales, mais maintenant ils
seront nommés par le ministre, après consultation
des associations. Alors, notre questionnement ici, au Parti québécois mais pour
moi aussi : Sur quelles bases se
feront ces choix? Sur quels types de compétences ou de représentation ces
personnes-là seront choisies pour participer à la commission? Alors, notre crainte à nous, c'est qu'encore une fois
on centralise les pouvoirs aux mains d'une seule et unique personne, soit le ministre en question. Et ça nous fait dire
présentement que, malheureusement, les particularités régionales, qui sont défendues et débattues par
les gens qui aimeraient les porter haut et fort, ne seront malheureusement
pas écoutées ou, du moins, entendues.
On retire
aussi la présence des représentants du MELS et des milieux communautaires.
Donc, encore une fois, on voit
apparaître une perte de pouvoirs au profit du ministre, notamment de participer
à la prise de décision quant à la mise
en oeuvre de la gestion des mesures et des programmes et celui de déterminer
les critères de répartition des ressources. Parce que je veux vous le faire comprendre, M. le Président, puis
j'espère que le gouvernement pourrait en mesurer la valeur : juste sur la Côte-Nord, les besoins
changent de MRC en MRC. Les réalités sont très différentes d'une MRC à
l'autre, mais d'une ville à l'autre. Forestville... la Haute-Côte-Nord est une...
et ce sont des municipalités qui se sont développées
autour de la foresterie... qui est tout à fait différent d'une ville comme...
d'une municipalité, pardon, comme Tadoussac qui, elle, s'est diversifiée
grâce... pas «qui s'est diversifiée», qui vit notamment grâce au tourisme.
On pense que
Baie-Comeau vit exclusivement des ressources naturelles, effectivement, mais,
comme je disais tantôt, il y a plusieurs services et entreprises de
services qui y ont établi... Et donc on a une différente économie sur l'ensemble du territoire, d'où l'importance de
prendre en compte l'ensemble des enjeux quand viendra le temps d'adresser
les problématiques en matière d'employabilité.
La partie
Objectif emploi, donc l'accompagnement personnalisé en vue d'une intégration en
emploi, bien ça, pour nous, ça nous
pose plusieurs questions. Notre véritable première question, c'est :
Comment est-ce que cela va s'appliquer concrètement?
En Manicouagan, on a reçu plusieurs témoignages pour lesquels on dit qu'il nous
manque de personnel au centre local
d'emploi. Donc, les gens attendent pour avoir du service, et je sais que ce
n'est pas de la faute des gens qui le
font, les fonctionnaires qui sont attitrés, mais malheureusement on manque de
personnes pour donner le service. Donc,
cet Objectif, là, emploi, notre crainte qu'on a, c'est que, malheureusement, on
n'aura pas de moyen ou assez de moyens pour donner les services adéquats
aux gens qui iront cogner à la porte.
• (12 h 10) •
Notre crainte aussi, c'est que certains dossiers
soient transférés. Donc, en ayant une direction plus territoriale, nos dossiers seront transférés à Port-Cartier ou à
Sept-Îles. Alors, comment va-t-on assurer un suivi
approprié avec ces personnes? Et
c'est important parce
que, je le répète, c'est tout près de
250 000 kilomètres carrés, la
Côte-Nord, et, quand je dis
kilomètres carrés, sur 100 000 de population, c'est 0,4 habitant à
l'hectare. Donc, vous avez compris, M. le Président, que le territoire est immense, les distances à
couvrir sont immenses, et malheureusement, M. le Président, ces
municipalités-là ne sont pas toutes
reliées par la route. Dans certains cas, il faut prendre le bateau, et, dans
d'autres cas, il faut tout simplement prendre
l'avion. On n'a qu'à penser à l'île d'Anticosti aussi. Et, dans certains cas,
on est aussi... je ne veux pas dire «mal desservis», mais on est victimes des conditions météo pour effectivement
assurer la fluidité du transport. Donc, quand la météo n'est pas favorable, bien, malheureusement, le bateau ne peut pas
faire la navette entre les différents territoires. Donc, effectivement,
si on veut s'assurer que les services soient offerts et que ce qu'on a appelé
l'accompagnement personnalisé puisse se
faire, bien, notre prétention, c'est que les gens ne pourront pas se rendre à
leur rendez-vous ou, du moins, se rendre à leur point de service,
considérant les problématiques face au transport.
L'acceptation
de tout emploi convenable qui lui est offert. Comme je disais tout à l'heure,
la Côte-Nord est un immense et grand
territoire. Parfois, peu d'emplois sont disponibles dans certaines petites
localités. Est-ce qu'on va donc forcer
les gens à quitter leur localité? Parce qu'il faut bien comprendre, là, le
transport en commun chez nous, là, ce n'est pas une panacée, là. Certaines municipalités ont été capables de
s'organiser, mais le transport interrégional n'est pas tout à fait adéquat. La fluidité du transport et sa
fréquence sont totalement inadéquates aussi. Donc, comment les gens vont
pouvoir effectivement, grâce au
transport en commun... parce que le calcul qu'on fait, c'est que ceux et celles
qui sont à la recherche d'emploi
n'auront pas tous un moyen de se déplacer, donc la distance va être un frein à
ceux et celles qui voudront embarquer
dans le programme, et, malheureusement, ils ne pourront pas réussir à obtenir
un emploi à cause de ces contraintes-là.
On risque aussi de déraciner certaines gens qui
habitent en région et qui n'auront peut-être pas le choix de quitter vers les grands centres, et ça,
effectivement, ça nous interpelle. Une chose qui nous interpelle aussi, ce sont
nos jeunes. On sait que les jeunes
ont un parcours de vie des fois atypique, ils sont pleins de potentiel et ont
un avenir prometteur. Je le sais, dans mon ancien travail, avant d'être
député, j'en ai côtoyé plusieurs, parce que même certains... plusieurs voulaient se lancer en affaires et, contrairement
aux préjugés populaires, ils ne sont pas paresseux, ils ne manquent pas ni d'intelligence ni de volonté afin de se trouver
un emploi. C'est sûr qu'ils ont besoin d'un support personnalisé et du temps dépassant parfois la limite du 12 mois
d'un emploi stable comme envisagé par le projet de loi. Donc, je pense qu'il
faut prendre le temps de s'occuper de notre
jeunesse, et ce n'est pas en mettant un continuum temps qu'on va réussir à
mettre au travail les gens qui voudraient
effectivement se lancer soit en affaire ou se lancer à la recherche d'un emploi
convenable. Donc, dans ce cas-là, nous, on recommande l'abandon d'une approche
qui est dite punitive aussi par le programme
Objectif emploi, parce qu'on encourage plutôt le gouvernement à employer une
approche de type volontaire pour tout ce qui concerne le développement
et l'employabilité.
On veut aussi
que les sanctions administratives ne doivent pas conduire à des coupures dans
les prestations de base des
bénéficiaires de l'aide sociale. Ces dernières ne couvrent qu'une fraction des
dépenses nécessaires pour vivre dignement.
Nous souhaitons que chaque citoyen ait la liberté de choisir, quel que soit son
destin professionnel, et nous souhaitons
que le projet de loi, plutôt que d'être coercitif, fasse place à l'idée que
nous souhaitons investir dans leur avenir.
Nos groupes
de tables populaires nous disent qu'on s'attaque... puis, pour les avoir même
rencontrées en début de semaine, lors
d'un point de presse, que ce projet de loi là — puis je suis d'accord avec eux — s'attaque aux plus démunis, aux nouveaux arrivants sur l'aide sociale, et
souvent ce sont des femmes monoparentales. On accentue les préjugés face
aux assistés sociaux et on culpabilise la personne sur l'aide sociale : si
elle ne travaille pas, c'est de sa faute.
Au final, ce
qu'on veut, nous, au Parti québécois, mais ce que je veux aussi... parce que ce
qu'il est important de comprendre,
c'est qu'on veut le retrait de ce projet de loi là dans sa forme actuelle et on
veut retourner à la table à dessin. On n'est pas contre les objectifs du projet de
loi, mais nous doutons des moyens qui sont proposés. Dans sa forme actuelle,
nous ne croyons pas que le projet de loi
permettra de briser le cercle de la pauvreté. Nous croyons plutôt qu'il alimente
des préjugés envers les assistés sociaux. La
grande majorité des groupes que nous avons entendus — et je continue de les entendre parce qu'on a encore des rendez-vous la
semaine prochaine dans nos différentes circonscriptions — ce qu'ils nous disent, c'est qu'ils sont contre les mesures coercitives, et ce
n'est pas quelque chose qu'ils veulent subir, c'est quelque chose qu'ils veulent choisir. Le choix d'emploi,
c'est une décision personnelle. Ils veulent être capables de s'orienter selon
leur motivation et non pas selon un cadre légal et législatif. Nous déplorons
aussi que plusieurs groupes n'aient pas eu la chance d'être entendus en
commission parlementaire.
Ce
qu'on veut aussi, puis je pense que celle-là est importante... Il y avait une
obligation dans la loi du 1 % de... Il y avait l'obligation dans la
loi, pardon, qui permettait... qui demandait aux entreprises d'investir
1 % de leur masse salariale, et, avec
le changement de loi... Autrefois, c'étaient plus de
240 000 entreprises qui étaient obligées d'investir en formation. Puis «obligées», c'est un mot très
faible, là, parce qu'on sait que, quand on investit en formation, on améliore
les compétences. Mais, avec le changement de loi, c'est maintenant seulement
8 000 entreprises qui seront tenues de contribuer aux fonds de formation. Donc, pour nous, c'est un immense
enjeu pour les entreprises, effectivement, parce que, oui, la formation
en entreprise, elle est nécessaire, mais, avec ce changement de loi là,
l'obligation amène moins d'entreprises à
former leurs gens dans le milieu de travail, et ça, pour nous, c'est un immense
enjeu sur le territoire de la Côte-Nord.
Nous
dénonçons aussi le fait qu'à aucun moment le ministre ne tienne des
consultations sur le prochain plan de lutte
à la pauvreté. Ce que je veux dire, c'est que ces consultations-là se
portent... pardon, se déroulent derrière les portes du ministre, et on aurait
aimé que ce débat-là arrive dans le domaine du public, donc que les gens
puissent y participer de façon très
ouverte et transparente. On se demande d'ailleurs pourquoi il n'y a pas eu de
grande consultation générale sur le prochain
plan de lutte avant de revoir l'ensemble de la Loi sur l'aide sociale. Nous
critiquons donc le fait que ce projet de loi est déposé sans règlement
et que plusieurs des mesures sont définies par règlement.
Donc,
M. le Président, au nom des gens de ma circonscription, au nom des gens de
René-Lévesque et au nom des gens de
toute la Côte-Nord, nous sommes légitimés de demander le report de ce projet de
loi là, parce que nous pensons que le débat n'est pas inclusif. Merci,
M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Merci à vous, M. le député de René-Lévesque. Je cède
la parole maintenant à un prochain intervenant et je
reconnais M. le député de Rousseau.
M.
Marceau : Bien, avant que je
commence, M. le Président, je ne
crois pas qu'on soit suffisamment nombreux. Je pense qu'il faudrait regarder si on a le quorum.
Le Vice-Président
(M. Ouimet) : Ah! Vérifier le quorum. Très bien. Qu'on appelle
les députés.
• (12 h 17 — 12
h 18) •
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, l'Assemblée poursuit ses travaux. M. le député de Rousseau, je vous cède la parole.
M. Nicolas Marceau
M.
Marceau : Parfait. Merci, M. le Président. Alors, M.
le Président, j'interviens sur le projet de loi n° 70, dont nous
sommes à adopter le principe, et puis
essentiellement c'est pour vous dire que je ne suis pas favorable au principe,
M. le Président. Je trouve qu'il y a des lacunes importantes dans le projet de
loi et je pense qu'il est important de les exprimer.
Alors, vous allez me
permettre de commencer par la partie du projet de loi qui concerne la Loi favorisant
le développement et la reconnaissance des
compétences de la main-d'oeuvre, et la Loi sur le ministère de l'Emploi et de
la Solidarité sociale, et la
Commission des partenaires du marché du travail. Je n'irai pas dans tous les
détails, mais simplement vous
rappeler que le projet de loi, essentiellement, enlève à la Commission des
partenaires, enlève aussi aux centres locaux d'emploi, à Emploi-Québec des pouvoirs qui jusqu'à maintenant leur
étaient attribués. Il y a donc un exercice de centralisation dans ce projet de loi. On prend des pouvoirs qui
présentement sont dans les régions, et tout ça est centralisé vers le ministre.
• (12 h 20) •
C'est
sûr qu'après tout ce qu'on a observé puis après tous les gestes qui ont été
posés par le gouvernement vers la centralisation puis vers la
dépossession des régions de leurs moyens d'intervention... C'est sûr qu'on ne
peut pas être favorables à quelque mesure de
cette nature. Simplement vous rappeler que, depuis l'arrivée du gouvernement,
on a vu des directions régionales du
ministère de l'Éducation disparaître, on a eu le projet de loi de notre
ministre de la Santé qui a créé des
organisations régionales qui sont redevables au ministre de la Santé, que le
ministre... avec des pouvoirs pour le
ministre de la Santé qui sont considérables,
donc un exercice de centralisation qui a fait en sorte que la répartition des
ressources à l'intérieur des régions, des
ressources en santé, a été réduite. Donc, cette capacité de la région,
d'elle-même attribuer les ressources selon ce qui lui semble le plus
pertinent, cette capacité a été réduite.
Bien sûr,
au plan économique, il y a aussi des gestes qui ont été posés qui ont été
néfastes. Les centres locaux de
développement, les CLD, qui étaient des outils tout à fait pertinents puis
qui avaient fait leurs preuves, ont carrément été attaqués. Et toute la mission de développement économique qui était bien réalisée par ces centres locaux de développement... Aujourd'hui, on est encore à se réorganiser avec
une gouvernance qui n'est pas, je suis désolé de le dire, parfaite. Donc,
les CLD ont été sacrifiés sur l'autel de l'austérité. Il y a eu aussi les
conférences régionales des élus, qui elles aussi intervenaient dans le développement
économique régional, qui ont disparu.
Alors,
si on fait le bilan, là, M. le Président : les conférences régionales des
élus, les centres locaux de développement, les directions régionales du
ministère de l'Éducation, la centralisation en Santé puis, aujourd'hui, les
centres locaux d'emploi qui, désormais, vont
relever du ministre puis n'auront plus autant d'autonomie. C'est sûr qu'on voit
une tendance très forte à la
centralisation et, encore une fois, on dépossède les régions de leurs pouvoirs,
et nous, on croit — au Parti
québécois, on est un parti des régions — on pense que les régions doivent avoir plus
d'autonomie, plus de capacité à se gouverner,
et ça va exactement dans le sens inverse de ce à quoi on adhère de notre côté.
Alors, évidemment, ne serait-ce que pour cet élément-là, on est très,
très défavorable à ce qui est proposé par le gouvernement.
Dans la
même portion du projet de loi, il est aussi question de la Loi favorisant le
développement et la reconnaissance des
compétences sur la main-d'oeuvre. Là, je prends le temps de le lire parce que
c'est un long titre, mais je veux simplement rappeler ce que mon collègue de René-Lévesque mentionnait quant à cette
loi puis quant à l'obligation que nos entreprises ont de former leurs
employés, leur main-d'oeuvre. À ce jour, les entreprises ayant un chiffre
d'affaires de moins de 1 million
étaient assujetties, c'est-à-dire avaient l'obligation de faire de la
formation, avaient l'obligation de former leur main-d'oeuvre. Et le gouvernement a choisi de relever ce seuil
d'assujettissement de 1 à 2 millions. Et la conséquence, c'est
qu'effectivement des milliers d'entreprises n'auront plus cette obligation de
faire de la formation.
M. le
Président, là, je pense qu'il faut se poser la question : Est-ce que les
employés au Québec sont trop formés? Est-ce
que nos employés au Québec sont trop productifs? Est-ce qu'au Québec on est
plus productifs qu'ailleurs? Bon, j'aimerais
vous dire que les Québécois, que le Québec fait mieux que les États-Unis ou
bien que l'Ontario au plan de la productivité.
Par rapport à l'Ontario, on s'est énormément améliorés, même, à certains
égards, on a rattrapé, mais, par rapport
aux États-Unis, on a encore beaucoup de chemin, là, les écarts de productivité
sont très élevés. Moi, je pense que la
loi sur la formation de la main-d'oeuvre a permis au Québec de faire des
progrès puis a permis d'augmenter la productivité des Québécois, des travailleurs québécois et des
travailleuses québécoises. Et je m'explique très mal le geste qui est posé,
qui consiste, dans le fond, à réduire la formation au Québec.
Si on me présentait des études démontrant
l'inefficacité de ce qui existe, je serais prêt à discuter. Et peut-être, peut-être, M. le Président, faut-il apporter des
ajustements à cette loi sur la formation de la main-d'oeuvre de façon à rendre les formations encore plus pertinentes, de façon à
donner peut-être plus de souplesse aux entreprises, mais, est-ce qu'il faut carrément permettre à des entreprises de ne
plus former leurs travailleurs? Moi, je suis désolé, mais je ne suis pas du tout d'accord avec cette décision. Je pense que la
justification de cette décision n'a pas été rendue publique, et, certainement,
il n'y a pas eu de débat à cet égard au Québec. Et disons que je m'explique très,
très mal ce choix du gouvernement.
La partie qui a peut-être fait parler un peu plus d'elle, dans le projet de loi, à ce
jour en tout cas, c'est la question du programme Objectif emploi, qui
est l'autre partie, donc, du projet de loi. Et c'est de cela dont je veux vous
parler, M. le Président. Là, là-dessus, il y a beaucoup de choses à dire.
Tout d'abord, le gouvernement a... enfin, prévoit, par cette mesure, des
mesures... prévoit, par Objectif emploi, qu'essentiellement des pénalités, des sanctions seront imposées aux demandeurs d'aide sociale qui n'acceptent pas de se plier à un parcours de... je ne sais pas
comment on l'appelle, là, je vais peut-être... un accompagnement personnalisé en vue
d'une intégration en emploi. Alors, ceux qui n'accepteraient pas cet
accompagnement personnalisé seraient pénalisés,
puis il a été question, là, de couper de près de la moitié... jusqu'à
la moitié les prestations d'aide
sociale que ces personnes retirent. Donc, on parle ici d'une
approche punitive, une approche coercitive pour amener des jeunes, essentiellement
des jeunes, à intégrer le marché du travail.
Énormément
de choses à dire là-dessus. Premièrement, il y a le ministre de l'époque qui est aujourd'hui notre président du
Conseil du trésor qui nous disait : La raison pour laquelle on veut
obliger les jeunes à participer à ces programmes-là puis la raison pour
laquelle on est prêts à les sanctionner pour qu'ils y participent, c'est parce
qu'on veut briser le cercle vicieux de la
pauvreté. Alors, M. le Président, je vous annonce très clairement que je suis tout à fait d'accord avec le fait de
briser le cercle vicieux de la pauvreté, je trouve que c'est un très bon objectif.
Maintenant, là où je suis en désaccord, c'est avec le
moyen.
Et je
reviendrai plus précisément sur l'utilisation des sanctions puis des pénalités,
mais je voudrais quand même dire que c'est assez ironique qu'un ministre
du gouvernement qui coupe en éducation, qui coupe dans la
lutte au décrochage scolaire
vienne nous dire qu'il veut briser le cercle vicieux de la pauvreté, parce que,
quand on coupe en éducation, quand on
coupe dans nos CPE, on coupe... on brise, dans le fond, l'ascenseur
social, hein, l'ascenseur qui permet à des jeunes enfants de réaliser leurs rêves, de s'épanouir
puis de faire mieux que leurs parents. Et c'est à la base même, en fait, là, de
ce qui permet une certaine mobilité sociale,
c'est le système d'éducation, parce
que, dans le fond, je pense que
vous savez comme moi, M. le Président, que les revenus des adultes sont déterminés, bien sûr,
par les milieux desquels ils originent, c'est déterminé aussi par leur cheminement scolaire puis c'est déterminé
aussi, puis il ne faut pas le négliger non plus, par de
la chance, hein? La chance joue un rôle aussi dans la vie, donc d'où on vient, qu'est-ce qu'on a fait comme parcours scolaire puis un peu la chance. Si vous
réfléchissez, M. le Président vous vous rendez bien compte qu'en tant que
société, en tant qu'État, on ne peut pas agir beaucoup sur d'où vous venez,
parce qu'inévitablement il y a des gens qui vont naître dans des milieux
plus défavorisés, ça va continuer à exister. Puis inévitablement aussi, la chance,
on ne peut pas faire grand-chose là-dessus.
Il y a des gens qui sont plus chanceux que d'autres, pour lesquels les dés
tournent du bon côté. Mais il reste
une chose, parmi les trois facteurs que je viens de vous dire, sur lequel une
société peut agir, évidemment, et c'est
l'éducation, hein? Donc, le milieu d'origine, pas facile. La chance... Mais le
milieu... l'éducation, ça, ça détermine aussi. Et je m'explique, encore
une fois, très mal... Je trouve ça très ironique quand j'entendais notre
président du Conseil du trésor actuel, notre
ministre actuel de l'Emploi et de la Solidarité sociale qui nous disent qu'il
faut briser le cercle vicieux de la
pauvreté, quand ils appartiennent à un gouvernement qui coupe sérieusement dans
l'ascenseur social, dans l'éducation, qui permet aux jeunes de se sortir
de là où ils sont.
• (12 h 30) •
Vous
savez, au Québec, au Canada, on est bons, on fait bien en termes de mobilité
sociale. Les chiffres, je vais vous
les donner, il y a des gens qui ont travaillé là-dessus; un économiste de
l'Université d'Ottawa qui s'appelle Miles Corak, qui fait vraiment un boulot
formidable et puis qui a calculé, avec d'autres collègues, ce qu'on appelle
l'élasticité intergénérationnelle. Puis essentiellement ça pose la question :
À quel point les revenus d'un parent persistent dans le temps puis sont transmis aux enfants lorsqu'ils deviennent adultes?
Et on comprendra que, plus le chiffre est gros, bien, plus ça persiste et, donc, moins il y a
de mobilité sociale. Et, à l'inverse, si le chiffre est petit, ça veut dire que
les revenus du parent n'influent pas beaucoup
sur les revenus de l'enfant lorsqu'il sera adulte. Et, effectivement, l'élasticité
intergénérationnelle calculée par Miles
Corak et ses coauteurs était de 0,2. Ça, ça veut dire essentiellement que, si les revenus des parents augmentent, disons, de
10 %, bien, les revenus des enfants, lorsqu'ils seront adultes, auront
augmenté de seulement 2 %. Donc, peu de persistance des revenus dans le
temps entre les générations.
Aux États-Unis,
ce n'est pas 0,2, l'élasticité, c'est entre 0,4 et 0,6. Donc, les avantages
qu'un parent obtient... si un parent
augmente ses revenus de 10 %, ses enfants auront des revenus, lorsqu'ils
seront adultes, qui auront augmenté de 4 % à 6 %, donc beaucoup
plus de persistance de la richesse aux États-Unis qu'au Canada.
À quoi ça tient, ça? Évidemment, plusieurs
facteurs, je vous le disais, mais beaucoup, beaucoup au système d'éducation qui, aux États-Unis,
est essentiellement orienté vers les classes les plus aisées puis
aussi beaucoup orienté vers
l'université, alors que, nous, au Canada, puis en particulier au Québec,
on a beaucoup plus de ressources qui sont consacrées à
l'école primaire, à l'école secondaire, puis au Québec, encore mieux, à la
petite enfance.
Alors, quand
on sait que c'est là que se passe l'affaire, que la mobilité sociale, ça se
fait... Bon, je le disais, il y a le facteur...
le milieu d'origine, il y a la chance puis il y a l'éducation, le système
d'éducation. Quand on sait que ça, ça existe, moi, d'entendre des gens me dire qu'ils veulent briser le cercle vicieux
de la pauvreté, alors qu'ils charcutent les CPE, alors qu'ils coupent sévèrement en éducation. M. le Président, je n'en peux plus, je trouve ça complètement incroyable.
Ça fait que,
en plus de ça, une fois qu'on a dit ça, là, une fois qu'ils ont coupé dans les
CPE, qu'ils ont coupé dans notre
système d'éducation, qu'ils viennent me dire : On va taper sur la tête des
jeunes qui ne veulent pas intégrer une espèce de parcours qu'eux autres
ont imaginé dans leurs têtes, regardez, je trouve ça incroyable, je trouve ça
incroyable.
Juste en
ajouter un peu, je vois que le temps file, mais je pense que ça vaut la peine
que vous entendiez ce que je vais vous
dire. Vous savez, en plus de cette mesure d'élasticité intergénérationnelle
dont je vous parlais, il y a maintenant du travail qui a été fait par le
même économiste, par Miles Corak de l'Université d'Ottawa, qui montre que — écoutez-moi
bien — moins
de mobilité est associé à plus d'inégalité. Et donc, d'une part, il y a
la mobilité dans le temps, est-ce que
les revenus des parents se reproduisent dans le temps avec leurs enfants, puis il y a
aussi l'inégalité, évidemment, des revenus dans une société.
Et ce qu'il est parvenu à montrer, c'est que les sociétés dans lesquelles il y a plus
d'inégalité sont également les sociétés dans lesquelles il y a moins de mobilité, ce
qui est terrible. C'est donc dire que
cette situation d'inégalité va persister dans le temps, va se
reporter dans le temps. Il a appelé cette régularité empirique... il a appelé ça la courbe de Gatsby le magnifique,
vous savez, Gatsby le magnifique, c'est un jeune millionnaire new-yorkais
du roman de F. Scott Fitzgerald. Donc, cette
courbe de Gatsby le magnifique nous dit, dans le fond, que lutter ou
permettre plus de mobilité sociale,
ça permet aussi de lutter contre les inégalités. Et, je réitère, je trouve
que le gouvernement n'a pas la bonne approche présentement.
Dernier
point, M. le Président, on est dans une situation économique
morose, inquiétante. Je sais que le ministre
des Finances, comme tous les Québécois, s'inquiète du recul du PIB deux mois de
suite à l'automne. Nous sommes tous inquiets de ça, on veut tous que ça se
redresse le plus rapidement possible. Et, pas plus tard que le printemps
dernier, l'OCDE publiait une étude qui
montrait que réduire les inégalités permet plus de croissance économique, hein, contrairement à l'idée qui était reçue dans certains milieux
dans le passé. Alors, je le répète, là : En combattant les inégalités, on
peut favoriser la croissance économique. Et donc, là, il y a comme
un ensemble de faits qui se regroupent. Donc, avec l'éducation, vous favorisez la mobilité sociale, vous éliminez
les inégalités à long terme puis vous permettez d'obtenir plus de croissance,
ça vous permet d'avoir plus de croissance.
Alors, dans ce
contexte-là, les gestes qui ont été posés par le gouvernement en éducation
contre la lutte au décrochage... Ici,
j'ai l'article... La lutte à la persévérance. J'ai l'article du Devoir
qui est paru hier qui disait que près de 60 % des fonds destinés à la
lutte au décrochage, des fonds destinés à la persévérance avaient disparus. Ce
n'est pas rien, M. le Président.
Alors, dans
ce contexte-là, l'approche punitive, l'approche coercitive qui consiste à taper
sur la tête, dans le fond, des
prestataires d'aide sociale, elle est très difficile à accepter. C'est quelque
chose qui va stigmatiser encore plus les gens qui vivent la pauvreté. Ce qu'il faut, ce n'est pas taper sur les gens
qui sont en difficulté, c'est leur donner le moyen de s'en sortir, c'est
d'avoir un système d'éducation qui fait le travail, qui fait la job.
Je vais finir
en vous disant un petit mot. Je sais qu'il ne me reste pas grand temps. Mais je
voudrais simplement vous parler de
l'approche par sanctions. Je sais que notre ministre de l'Emploi et de la
Solidarité sociale a été un partisan, en
tout cas, dans le passé, du revenu minimum garanti. Et je ne ferai pas le débat
sur l'approche en question, mais je veux simplement lui rappeler, au ministre, que l'idée même du revenu minimum
garanti, c'est de ne pas imposer de conditions à l'obtention d'un revenu. En gros, c'est ça, là. C'est : vous êtes
un citoyen, vous avez un revenu. Ça, c'est l'approche. Moi, je ne défends pas cette approche-là; M. le
ministre la défend. Mais c'est impossible d'avoir cette conviction que le
revenu minimum garanti est la bonne chose puis en même temps d'avoir un
programme d'aide sociale dans lequel on garde
des incitants, dans lequel on met des carottes ou bien dans lequel on met des
bâtons. Ça ne va pas ensemble. C'est comme
dire : J'aime les autos blanches noires. Elles sont blanches ou elles sont
noires. Il y a un des deux, là. Mais vous ne pouvez pas aimer le revenu minimum
garanti puis les incitants, que ce soient des bâtons ou des carottes. Alors,
je sais qu'il va avoir le temps de se faire
une tête avec ce dossier. Disons que je ne comprends pas encore, là. Écoutez,
ou bien on aime une chose, ou bien on
ne l'aime pas, mais on n'aime pas les deux en même temps, dans ce cas-là, en
tout cas.
Alors, moi, évidemment, je vous le
réitère, je pense que l'approche coercitive n'est pas la bonne approche et je
conclus en vous disant que, pour toutes ces
raisons-là, pour toutes ces raisons-là, je ne suis pas d'accord avec le
principe et je voterai contre. Merci, M. le Président.
• (12 h 40) •
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le député
de Rousseau, pour cette intervention. Je cède la parole maintenant à M.
le député de Bonaventure.
M. Sylvain Roy
M. Roy :
Merci, M. le Président. Vous savez, les politiciens puis les gouvernements au
pouvoir dictent et imposent une vision et un
certain projet de société qui s'expriment et s'émancipent dans les lois, hein,
et dans nos institutions.
Aujourd'hui, le projet de loi n° 70 vient s'exprimer comme une suite
philosophique de l'ensemble de l'oeuvre de ce gouvernement. La position
puis les prétentions de ce projet sont que, chaque année, environ 17 000
personnes demandent de l'aide sociale pour
la première fois; près de 60 % des premiers demandeurs de prestation
d'aide sociale sont âgés de 29 ans et
moins. Objectif emploi fera en sorte que 85 % des 17 000 nouveaux
demandeurs ne toucheront pas d'aide
sociale, ce qui pourrait se traduire par des économies de 50 millions par
année, une fois atteint le rythme de croisière, puis là je parle bien
des positions du gouvernement, vous me comprenez, M. le Président.
Il
y a, selon le gouvernement, parmi les nouveaux assistés sociaux, 6 200
jeunes qui proviennent d'une famille recevant déjà de l'aide sociale,
c'est ce qu'on appelle la reproduction sociale. Les demandeurs de prestation
sociale n'ayant aucune contrainte
particulière devront s'inscrire à une démarche de recherche d'emploi sous peine
de pénalité financière. Le ministre a
justifié la nature de son projet de loi en disant qu'il fallait briser le
cercle vicieux de la pauvreté surtout
lorsqu'il s'agit de jeunes aptes à gagner leur vie. Le gouvernement souhaite
intervenir tôt auprès des jeunes pour briser
la culture de dépendance envers l'État. Et, en conclusion, il souhaite revoir
le programme qui prévoit de consacrer 1 %
de la masse salariale à la formation afin d'éliminer les programmes de
formation personnelle qui ne sont pas directement reliés à l'emploi. Vous comprendrez que le picot sur briser la culture de
dépendance envers l'État m'interpelle quelque peu.
On
vient de couper 60 % du fonds de persévérance scolaire... briser la
dépendance envers l'État. À Laval, on coupe les services aux élèves en difficultés et les élèves, bon, handicapés,
briser encore une fois la dépendance envers l'État. Les coupes dans les
CPE, les coupes dans l'éducation, en santé publique...
Donc,
ce qu'on fait en réalité, via ce paradigme de vouloir couper la dépendance
envers l'État, c'est de se retirer, c'est de ne plus soutenir les gens plus défavorisés. C'est ce qu'on appelle
produire une fabrique d'exclus. On va fabriquer de l'exclusion sociale parce que les assistés sociaux vont être
stigmatisés. On fabrique de l'exclusion culturelle parce qu'ils ne pourront pas aller chercher un capital de
formation, et ce qui par ricochet va faire en sorte qu'ils vont être exclus au
niveau économique aussi, donc pas de job.
Donc,
l'ensemble des actions du gouvernement va faire en sorte qu'on va augmenter le
potentiel de nombre de requérants de
l'aide sociale dans les années à venir d'une manière très significative étant
donné qu'on ne donnera pas de chance
aux plus démunis de se raccrocher et d'avoir un parcours qui leur permettrait
de... bien, s'insérer à l'intérieur des activités économiques, sociales et culturelles de notre société. On est
donc devant un programme structuré de retrait de l'État dans son soutien
aux institutions d'émancipation collective et d'entraide aux plus fragiles.
Je
ne reprendrai pas les communiqués de presse qui citent, bon, les coupures en
persévérance scolaire ou les autres effets
d'austérité. Donc, on parle des CPE, l'aide aux devoirs, persévérance, élèves
en difficulté, etc. Donc, on passe d'un État, ce qu'on appelle un État social, à un État régalien ou coercitif,
comme mon collègue l'a expliqué tout à l'heure. L'État coercitif ou régalien, c'est la loi, l'ordre et la
déréglementation économique. Le reste, on essaie de se retirer de ça. On
abandonne la prévention, ou, comme aux
États-Unis, on pourrait passer d'un État social, et là on ne le souhaite pas,
mais à un État carcéral. Comment on
fait pour s'occuper des gens qui vont être exclus, déclassés, et qui n'auront
plus de soutien économique de l'État pour fonctionner? Ils vont faire
quoi, ces gens-là? Ils vont aller où? Dans la rue? Ils vont se criminaliser?
Suicides? Maladies mentales? On ne sait pas. On sait qu'on s'en va vers une problématique,
je dirais, d'instabilité sociale qui peut être assez importante.
Donc,
on entre dans une nouvelle ère de méritocratie, où l'individu devient le seul
responsable de sa destinée, comme si
son environnement n'existait pas. La pauvreté, ce n'est pas que, bon, je ne
veux pas travailler, je n'ai pas de job, ce n'est pas ça, c'est un tout, c'est : on n'a pas eu d'héritage
culturel pour nous forcer potentiellement à aller sur le... bon, dans
une institution pour se former, on n'a pas de capital économique, on n'a pas de
capital social, on n'a pas des fréquentations
qui peuvent nous aider, bref, on est... c'est ce qu'on appelle en sociologie de
la pauvrissitude, c'est-à-dire un ensemble de déterminants qui amènent
un individu dans une situation qu'il n'a pas voulue.
Donc,
l'hyperresponsabilisation de l'individu facilite la prétention à lui imposer un
comportement ou une posologie : Tu es
le seul responsable de ta destinée, ton environnement n'a rien à voir, donc
c'est toi qui dois t'organiser pour
t'en sortir, tu es le seul. Donc, on lui impose une posologie étant donné que
c'est lui le fautif et non son environnement. Ça ressemble un peu à la
problématique de la ritalinisation des enfants via l'hyperactivité. On
dit : Bon, le jeune a un problème
physiologique, on lui donne du Ritalin. Mais c'est parce qu'on ne s'est jamais
posé la question à savoir : Est-ce que c'est la pauvreté, est-ce que ce sont des problèmes de violence, de
malnutrition qui engendrent son manque d'attention à l'école? Non.
Au lieu d'agir sur son environnement
pour structurer son intégration au système scolaire, on agit sur l'individu
dans une philosophie d'hyperresponsabilisation du jeune par rapport à ce qu'il
est.
Le
projet de loi n° 70, il propose quoi? Une posologie comportementale. Si tu
ne prends pas le traitement pour te guérir
de ta pauvreté, on t'abandonne à la maladie mentale, au suicide, à la
criminalité, puis on sait qu'actuellement les gens qui ont des problèmes de santé mentale sont souvent criminalisés et
incarcérés. Donc, la prison est devenue l'endroit où on contrôle un peu
ces gens-là.
Comment
va se matérialiser le projet de loi n° 70 en Gaspésie? Dans un premier
temps, j'aimerais vous rappeler, M. le
Président, qu'on n'a pratiquement pas de transport en Gaspésie. On a perdu le
train, on n'a pratiquement pas d'autobus, et là on parle de quoi? D'obliger des gens à faire 300 kilomètres pour
se trouver un emploi. On va y aller comment? À pied? En raquettes? En bateau? En skis de fond? Là, la
mer est gelée. Ça fait que ça va être compliqué, là. Donc, on demande de
la mobilisation à des gens qui sont pris au
piège ou en otage dans un contexte d'immobilisation. Un des déterminants de la
dynamique économique et de la santé d'une
région, c'est bien l'accès aux transports, et nous, on n'en a pas. Donc, on a
une aberration, ici, qui est extraordinaire
dans le sens où, si on n'a pas compris ça, c'est parce qu'on a autre chose en
tête. Est-ce qu'on est dans une stratégie
d'expulsion des jeunes et moins jeunes de la Gaspésie? On sait que le Conseil
du patronat a déjà exprimé ses voeux
en ce sens, où on disait que, bon, on va donner de l'argent aux Gaspésiens pour
qu'ils sortent de la Gaspésie, et ça n'a pas été bien pris, je peux vous
le dire.
Un autre exemple, M. le Président, de cette
volonté de déportation qui s'exprime, ça s'exprime par des cibles complètement
arbitraires qui ont été imposées aux carrefours jeunesse-emploi de la Gaspésie
en termes de clientèle à accompagner. Et là
on ne la comprend vraiment pas, celle-là. Pour carrefour jeunesse-emploi de la
Gaspésie, les trois carrefours, on
demande une cible de 2 344 jeunes sur une population de 80 000
habitants. Pour la région de l'Outaouais, on a une cible de 2 176 jeunes pour 383 000
habitants. Donc, la problématique que je vois là, c'est qu'il y a eu une
demande pour atteindre des objectifs
qui sont complètement arbitraires et qui peuvent engendrer — et je ne le souhaite pas — des pertes de financement, étant donné que les cibles sont absolument
inatteignables. C'est irréaliste, ça n'a pas de bon sens. Puis c'est deux poids, deux mesures : il y a une
région où on a, quoi?, quatre fois plus d'individus, puis on demande à peine
200 personnes de plus à accompagner. Donc,
c'est arbitraire, c'est incompréhensible et ça signe pratiquement la fin de la
capacité d'accompagnement des CJE chez nous,
étant donné que les cibles sont absolument inatteignables. C'est presque
du sabotage de carrefour jeunesse-emploi. Donc, l'objectif, ici, qu'on voit,
c'est de déconstruire puis aseptiser l'offre d'accompagnement des jeunes en
Gaspésie dans leur processus d'intégration. Les CJE ne pourront pas atteindre
ces cibles-là, donc nous sommes dans une situation où on va légitimer des coupures
de financement, étant donné que les objectifs ne sont pas atteints.
• (12 h 50) •
Les
carrefours jeunesse-emploi ont produit un document où, bon, ils nous dictent
les éléments qui soulèvent des inquiétudes.
Entre autres, «la modification de la Loi sur l'aide sociale aux personnes et
aux familles transforme l'aide [sociale] de dernier recours en un
système qui s'apparente à une politique [du] "workfare".
«L'approche
qui consiste à assortir l'aide sociale à des conditions ou à un parcours
obligatoire est inutile et inefficace,
dans une perspective d'insertion durable à l'emploi. Il faut plutôt investir
dans des mesures d'alphabétisation et
d'éducation.» C'est l'éducation qui permet à une civilisation de s'émanciper
puis qui permet aux jeunes de s'intégrer à l'économie, qui permet à une
nation de progresser.
«Dans un
mémoire présenté au Conseil supérieur de l'éducation en décembre 2011, dans le
cadre de la consultation pour
l'élaboration du rapport 2012 sur l'état et les besoins de l'éducation, nous
affirmions que l'éducation que l'éducation et la formation professionnelle sont des clés essentielles pour
décrocher des emplois durables et de qualité, qui sont les principaux
facteurs d'une véritable réinsertion sociale et économique.»
«Selon un article de Bernard Fortin publié en
1997 sur la dépendance à l'égard de l'aide sociale : "la scolarité demeure l'un des facteurs les plus importants à
long terme dans la lutte contre la dépendance à l'aide. En limitant le risque d'une première participation[...], une scolarité
accrue prévient la dépendance dynamique [...] chez les jeunes."» Donc,
c'est assez clair.
«La mise en
place de pénalités financières destinées aux personnes qui refusent de
participer aux programmes ou qui ne remplissent pas toutes les
obligations découlant de leur plan d'intégration à l'emploi.
«[Donc,]
selon les déclarations du ministre[...], les pénalités devraient toucher à peine 10 % des personnes visées par le projet de loi. Si l'on estime à 17 000
le nombre de jeunes visés, cela signifie [...] environ 1 700 jeunes
prestataires [qui] verront leurs prestations réduites.
«Or, pour ces
jeunes prestataires, déjà parmi les plus pauvres de la société, couper dans les
prestations aura des conséquences dramatiques sur leur capacité à se
loger, se nourrir et participer activement à la société. L'aide [du] dernier recours devrait être incompressible. Selon
l'organisme ATD Quart Monde, cette aide couvre moins que la moitié des besoins de base. Il nous apparaît donc
inconcevable de la réduire. L'effet démobilisateur de ces pénalités sera
important, car un jeune qui verra ses prestations amputées risque de demeurer
définitivement en marge par la suite.» Donc, décrocheur, criminalisation, toxicomanie, la rue, problématiques de santé, réquisition d'un arsenal thérapeutique pour soigner ces
gens-là qui vont vivre toutes sortes de drames... On n'est pas gagnants.
«S'il est
important de prévoir des mesures incitatives à la participation, nous croyons
que les sanctions prévues en cas de non-participation, s'il y a lieu, doivent
être souples, progressives et offrir une gradation afin de favoriser une
meilleure participation et tenir compte des réalités des jeunes visés, souvent
décrocheurs ou qui vivent des enjeux particuliers. Elles ne devraient jamais
toucher à la prestation de base.»
Vous savez, le travail, c'est l'instrument
d'intégration sociale où on va construire une estime de soi qui est fondamentale. On va aller chercher un réseau
social, on va aller chercher des ressources économiques, etc. Mais la réintégration au travail, il
faut être capable, aussi, de
permettre au jeune d'avoir les moyens d'y aller. Et, si on n'offre pas la formation, l'accompagnement et les ressources essentielles
à la réintégration du jeune, ça ne marchera pas. Mais ce n'est pas en menaçant de couper de 50 % l'aide sociale qu'on va mobiliser ces
jeunes-là, on va les démobiliser. Et c'est psychologique. Si tu es mobilisé, tu as une aide, on te laisse aller, on
ne t'oblige pas à faire des 300 kilomètres pour aller travailler dans des conditions dont on ne connaît
pas encore les aboutissants, pas très motivant. Prime à la réinsertion aux
études, soutien dans le projet de vie du
jeune, etc., c'est comme ça. Les carrefours jeunesse avaient une mission
extraordinaire à ce
niveau-là. Là, on a réduit leur mission à, bon, accompagnement pour la
recherche d'emploi, mais ils faisaient plus que ça. C'étaient des jeunes qui, en Gaspésie, ils intégraient des
nouveaux... des jeunes, bon, venus de l'extérieur pour leur permettre de se faire des réseaux sociaux, etc.
Bon, ils étaient capables de pousser le jeune vers la stimulation de sa propre
volonté à intégrer le marché du travail.
Bon, là : «L'obligation d'accepter tout
emploi convenable.
«La
définition de ce [qui] constitue un emploi convenable sera précisée
ultérieurement dans la réglementation. Cependant,
sur le principe, nous croyons qu'il est risqué d'obliger les participants à
accepter tout emploi. La distance avec le
lieu de résidence est un élément extrêmement sensible, car le risque de couper
les participants de leurs liens familiaux et sociaux — bref, les sortir d'à peu près le seul
univers où ils ont un petit peu d'entraide — [...]
peut accentuer leur situation de
pauvreté en les privant d'un recours à l'entraide offerte par [les] réseaux
naturels.» Les réseaux s'entraident. Les gens qui vivent des problématiques
financières se soutiennent. Et là admettons que ce n'est pas à leur avantage
que de les délocaliser.
«Le ton et la teneur de la réglementation à
venir.
«Tel que
mentionné précédemment, plusieurs modalités d'application du programme
restent à être définies dans la réglementation à venir.» Et ça, c'est problématique :
on ne sait pas, là, quels vont être les règlements. Est-ce que ça va être arbitraire, comme la situation des carrefours
jeunesse-emploi, où on a des cibles qui sont complètement démesurées par
rapport à la population et inéquitables entre les régions du Québec? À suivre.
Donc, «quel sera le ton de cette réglementation?
Permettra-t-elle une flexibilité suffisante pour adapter les mesures [de] l'aide offerte aux situations
particulières des participants? — Pas sûr. — L'évaluation de la participation au
programme pourra-t-elle tenir réellement compte des apprentissages et des
différents parcours? Malheureusement, contrairement
au projet de loi, qui est soumis à un processus parlementaire, le ministre
dispose d'une grande discrétion dans
la mise en place de la réglementation et n'a pas l'obligation de consulter le
milieu.» Donc, on est dans l'arbitraire. Nous sommes dans une situation
où ce qui va guider le comportement du ministre ne sera pas nécessairement le
bien-être ou l'accessibilité à un emploi des jeunes qui sont sous les
prestations d'aide sociale.
«La capacité
du marché du travail à accueillir les participants du programme Objectif
emploi.» En Gaspésie, là, il n'en mouille pas, des jobs. On n'a pas de Wal-Mart
ou de grands commerces. Écoutez, comment on va faire ça? On ne sait pas. Ça fait que les jeunes, qui devront
faire 300 kilomètres, sans moyen de transport, où il n'y a pas d'emploi,
ils font quoi? Ils quittent la région. Et c'est vraiment une stratégie, pour
nous, de dévitalisation et de délocalisation d'une
partie de notre population. Nous, là, ce qu'on perd en premier, c'est nos
jeunes. Je l'ai déjà exprimé ici : notre plus grande richesse, c'est nos enfants. On les perd
assez rapidement pour venir dans les universités et les cégeps en dehors
de nos régions. Et là on a une belle
jeunesse qu'on peut soutenir et qu'on peut réintéger à notre activité
économique, et là on va faire quoi? On les délocalise, on les déporte, on les
exile, et c'est absolument inacceptable. Et c'est évident que ce projet
de loi là ne fait pas notre affaire, il ne vise pas... On est pour la réintégration
des jeunes dans l'économie, aux activités,
mais pas via une pénalisation extrême, une déportation à peine masquée, une
volonté d'aseptiser la capacité de nos
institutions à l'émancipation collective comme carrefour jeunesse-emploi, à
faire une bonne job puis à s'occuper des jeunes en leur donnant de l'espoir. Puis, quand nos jeunes ont de
l'espoir, nous, on peut vieillir en paix. Et là on va créer du
désespoir, on va semer la panique et on n'arrivera pas à nos fins, c'est
évident.
Donc, contre ce projet-là, et, sur ces mots, je
termine mon intervention. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
Alors, merci à vous, M. le député de Bonaventure, pour cette intervention.
Compte tenu
de l'heure, il reste à peine une minute, je pense que je vais suspendre les
travaux de l'Assemblée et nous serons de retour à 15 heures cet
après-midi pour entendre l'intervention du député de Sanguinet.
(Suspension de la séance à 12 h 58 h )
(Reprise à 15 h 1)
Le Vice-Président (M. Gendron) :
Alors, veuillez vous asseoir. On vous souhaite un bon après-midi.
Nous allons poursuivre le débat sur l'adoption
du principe du projet de loi n° 70, Loi visant à permettre une meilleure
adéquation entre la formation et l'emploi ainsi qu'à favoriser l'intégration en
emploi.
Et je suis
prêt à laisser la parole à M. le député du Lac-Saint-Jean pour son intervention
sur le principe. M. le député, à vous la parole.
M. Alexandre Cloutier
M.
Cloutier : Oui. Je vous remercie, M. le Président. Alors, vous aurez
compris que j'en ai long à dire sur les mesures que le gouvernement du Québec devrait adopter pour favoriser le
retour à l'emploi de nos jeunes particulièrement. Je regardais le ministre, qui disait : Je
veux briser le cycle de la pauvreté, je souhaite que les jeunes puissent
s'intégrer davantage au marché du
travail, je souhaite qu'il y ait le moins de jeunes possible sur l'aide
sociale — qui
bénéficient donc de l'État, M. le
Président — pour
subvenir à leurs besoins. M. le Président, si j'avais un conseil à donner au
ministre du Travail, de l'Emploi et
de la Solidarité sociale, avec qui j'ai eu la chance d'échanger en long et
large, M. le Président, et j'aurais
même souhaité discuter davantage, mais, si j'avais un conseil à lui donner pour
favoriser le retour des jeunes à
l'emploi, c'est de les aider, M. le Président, à obtenir leur diplôme, avant
d'en arriver avec des mesures coercitives — l'approche du bâton, M. le Président, sur notre jeunesse
québécoise — leur
dire qu'on va couper leur chèque de prestation d'aide sociale alors qu'ils vivent déjà à peu près avec
rien. Quelle est la meilleure solution, M. le Président, pour ne pas en arriver
là?
Évidemment,
tout passe par l'éducation, mais c'est juste pour vous dire à quel point le
gouvernement, à mon point de vue,
manque de cohérence. C'est que ce gouvernement, qui nous arrive avec une
approche coercitive, une approche à la
dure envers notre jeunesse, particulièrement celle qui est la plus vulnérable,
avec une aide sociale qui est déjà, à mon point de vue, nettement insuffisante, hein... Y a-tu quelqu'un ici, dans
cette Assemblée, qui pense qu'il est capable de vivre avec une aide
sociale de l'ordre d'un petit peu plus de 600 $ par mois? Évidemment, la
réponse, c'est non.
Alors, M. le
Président, l'approche du gouvernement actuel, ça a été de se dire :
Coupons d'abord dans les CPE. Coupons
d'abord dans les centres pour la petite enfance, qui est un des modèles le plus
cité à l'international, un modèle d'inspiration, un modèle qui a fait
ses preuves, M. le Président, parce que nous avons le plus haut taux d'emploi
des femmes en Amérique du Nord. Ça devrait
être une fierté nationale, on devrait s'en réjouir, on devrait le célébrer.
Mais non, l'approche du gouvernement,
ça a été de dire : Même si ça fonctionne bien au Québec, là, les CPE, là,
on va les couper. Le programme
éducatif pour permettre à nos tout-petits de zéro à cinq ans d'être accompagnés
par des professionnels, de leur
offrir un accompagnement structuré, éducatif, avec un programme éducatif
élaboré par des professionnels, l'approche gouvernementale, M. le
Président, ça a été de couper dans la petite enfance.
Alors, quand on décide de s'en prendre à nos tout-petits,
déjà, alors que ça donnait des résultats extraordinaires, bien, vous aurez compris que ça se pourrait malheureusement, là, qu'un jour il y en ait qui se retrouvent dans les mailles du système
et se retrouvent pris par des mesures
d'aide sociale ou d'aide à l'État que le gouvernement, là, est en train
de couper avec le projet de loi n° 70. Alors, le gouvernement du Québec utilise
l'approche bâton pour les gens qui se retrouvent sur l'aide sociale, mais il ne fait absolument rien pour nous
assurer que les jeunes actuels, ceux qui, présentement, ont accès
aux services de CPE, qui reçoivent une formation primaire, secondaire, aillent
au bout de leurs capacités.
Si, jour après jour, en cette Chambre, M. le
Président, l'opposition rappelle au gouvernement l'importance de la lutte à la persévérance scolaire, l'importance
d'augmenter notre taux de diplomation, pourquoi, pourquoi on fait ça? C'est parce qu'on est profondément convaincus que le meilleur outil d'intégration, le
meilleur outil pour prendre sa place, le meilleur outil pour se trouver un emploi, le meilleur outil pour
s'épanouir, c'est d'avoir une formation adéquate. M. le Président, le ministre
de l'Emploi n'est pas sans savoir que près de 30 % de nos jeunes atteignent l'âge de 20 ans sans avoir aucun diplôme d'études secondaires. De mon
point de vue, M. le Président, c'est une véritable catastrophe, et cette
problématique doit être réglée.
Qui pensez-vous,
M. le Président, ait plus de chances de se retrouver sur l'aide sociale et pris
avec un projet de loi comme celui qui
nous est présenté? Un jeune qui poursuit son parcours scolaire ou secondaire,
cégep, universitaire, ou le jeune
qui, pour toutes sortes de raisons, se décourage, perd le goût de
l'apprentissage et quitte le réseau scolaire? Évidemment, M. le Président, poser la question, c'est y
répondre. Et on est tous conscients que, si on ne fait rien pour augmenter
notre diplomation au Québec, bien, inévitablement que de plus en plus de
jeunes... ou un nombre important de la jeunesse québécoise... qui va devoir
vivre avec une aide de dernier recours, une aide minime.
Alors, on pourrait penser que le gouvernement du
Québec, considérant cet état de fait, considérant le retard historique en matière de diplomation par rapport à
ce qui se fait ailleurs dans le monde et particulièrement notre voisin direct, l'Ontario, qui, soit dit en passant, a un
taux de diplomation, M. le Président, de 10 % supérieur à celui du
Québec... c'est notre voisin, il va
compétitionner... l'Ontario va compétitionner directement avec le Québec, ou
plutôt les jeunes Ontariens
compétitionnent directement avec les jeunes Québécois sur le marché du travail,
mais ils ont un avantage net, c'est qu'ils ont un taux de diplomation où
il y a plus de jeunes qui obtiennent une formation adéquate. La réponse du gouvernement pour combler ce retard aurait dû être
d'investir davantage, de mieux cibler les jeunes qui sont à risque de
décrochage.
En Ontario,
par exemple, ils ont clairement décidé d'identifier les jeunes de première
génération, ceux et celles qui n'ont
pas eu la chance d'avoir des parents qui ont fait des études postsecondaires,
on a identifié ces jeunes-là qui sont plus
susceptibles que d'autres à décrocher à l'université. On a davantage accompagné
les jeunes autochtones, qui, on le sait, M. le Président, au Québec et probablement ailleurs au Canada, ont le
plus haut taux de décrochage, et de loin, au Québec. Ça aussi, M. le Président, on n'en parle pas
suffisamment, mais, quand on regarde le taux de diplomation dans certaines
commissions scolaires où il y a une présence
autochtone, M. le Président, de toute évidence, il y a des problématiques
immenses, immenses, et on ne peut pas
continuer comme on le fait présentement, avec des statistiques aussi
difficiles. Alors, qu'est-ce qu'il
arrive, en bout de course, de ces jeunes qui ne poursuivent pas... qui sont mis
de côté par notre réseau? Bien, malheureusement pour certains d'entre
eux, ça devient extrêmement difficile de se trouver un emploi.
• (15 h 10) •
Alors, nous, ce qu'on réclame, de ce côté-ci de
la Chambre, c'est un investissement massif en éducation, une politique nationale sur la persévérance scolaire,
un accompagnement de nos tout-petits dès le centre de la petite enfance.
On a vu notre collègue le député de Labelle
qui jour après jour s'est levé ici, à l'Assemblée nationale, a
dénoncé les coupures, le manque de vision du gouvernement libéral, un
manque de vision flagrant, M. le
Président, alors que toutes les
études démontrent... l'étude de Pierre
Fortin, par exemple, qui rappelle qu'investir dans les CPE, c'est un investissement pour le Québec, que ça crée de l'emploi. D'avoir le plus haut
taux d'activité des femmes au Québec, il me semble, ce n'est pas rien, ça,
c'est quelque chose qu'on doit préserver.
Je me serais
attendu, du côté gouvernemental, à ce qu'il y en ait un qui lève la main, qui
dise : Ça n'a pas de bon sens,
c'est trop, là, ça va trop loin, ça fait trop mal, qui dénonce aussi les
coupures en éducation, qui dénonce le manque d'accompagnement de nos jeunes, particulièrement nos jeunes élèves en difficulté.
Ce n'est pas par hasard, là, que les parents
ont décidé d'encercler les écoles. Ce n'est pas rien, ça, M. le Président. Vous êtes un ancien ministre
de l'Éducation; je suis sûr qu'à votre époque on n'encerclait pas les
écoles comme on le fait présentement. Les manifestations qui s'expriment un peu partout à travers le Québec
durant la dernière année, des manifestations parfois mêmes spontanées, elles ont un fondement, c'est parce que
des parents sont témoins de services qui existaient pour leurs élèves. Mais
plus fondamentalement encore, M. le Président, ces gens-là défendent quoi? Ils défendent l'école publique du Québec,
une école qui a besoin d'être
soutenue, qui a besoin d'être défendue. Alors, on se serait attendus, du côté gouvernemental, qu'il y ait des gens qui
se lèvent, qu'il y ait du monde qui disent : Ça n'a juste pas de
bon sens, on se tire dans le pied, comme
société. Quand tu coupes dans le secteur primaire, quand tu coupes dans tes
tout-petits, aux centres de la petite
enfance, puis au secondaire, bien, inévitablement, ça finit par te rattraper.
C'est
incroyable de voir la réaction du ministre de l'Éducation, qui, soit dit en passant, a un départ pour le moins douteux.
Sa première réaction à la présidente de la commission scolaire de Laval
qui annonce qu'elle va devoir fermer quatre
classes pour des élèves ayant le trouble du langage, pour des élèves
handicapés, pour des élèves qui ont des besoins particuliers, savez-vous ça a été quoi, M. le Président? Ça a été de
dire qu'elle fait de la politique.
C'est assez... Puis, à mon avis, à
Laval, si elle fait de la politique, je serais très surpris que ce soit du côté
du Parti québécois, M. le Président, je vous dis ça de même en passant. Alors, on accuse la présidente de la
commission scolaire à Laval de faire de la politique sur le dos des
élèves handicapés. Je ne sais pas. Il me semble, si j'avais un conseil à donner
au nouveau ministre de l'Éducation, ce
serait : Essaie de ne pas te mettre à dos ton réseau. Les gens avec qui tu
travailles, il me semble que ce n'est pas une mauvaise idée, au lieu de
leur taper dessus, de leur tendre la main.
Alors, pas
plus tard qu'il y a quelques minutes, M. le Président, nous recevions en
commission parlementaire le plus important
représentant des travailleurs du milieu de l'éducation, et j'ai posé la
question à la représentante des professionnels : Êtes-vous inquiète pour l'année scolaire à venir?
Pas pour l'année scolaire qui vient de passer, parce que ça, on le sait
qu'il y a déjà 200 postes qui ont été coupés. Savez-vous ce qu'elle m'a
répondu, M. le Président? D'autres coupures. D'autres postes vont être abolis.
D'autres postes de professionnels, des orthopédagogues, des psychoéducateurs,
des orthophonistes vont être abolis au
Québec. Alors, le ministre de l'Éducation, qui en principe doit accompagner nos
jeunes pour obtenir leurs diplômes,
bien j'ai des petites nouvelles pour lui parce que, s'il pense que la
présidente de la commission scolaire
de Laval fait de la politique, bien il va trouver que tout le monde en fait,
parce que les coupures, elles, elles sont uniformes partout à travers le
Québec, l'ensemble des commissions scolaires, l'ensemble des services à nos
jeunes.
Alors, M. le
Président, comme arrivée comme ministre de l'Éducation, c'est pour le moins
surprenant, sans compter, évidemment, toutes les autres contradictions
par rapport à ses prises de position sur les commissions scolaires, ou la hausse des frais de scolarité, ou, là, même plus
récemment, M. le Président, sur... Vous avez peut-être vu ça passer, là.
Le ministre de l'Éducation, qui pilote le projet de loi n° 86 pour
mettre fin aux élections scolaires, se retrouve dans l'embarras aujourd'hui parce qu'à cause de lui il va y avoir une
élection partielle dans un conseil scolaire au Québec parce qu'un de ses attachés politiques a démissionné de
son poste. Au lieu d'avoir géré ça à l'interne, au lieu d'avoir dit à son
attaché qu'il allait trouver une solution
peut-être avec un autre collègue, temporaire, pendant que le projet de loi
n° 86 allait être adopté, il a
démissionné de son poste et on refile la facture à qui, M. le Président? Aux
Québécois. L'élection partielle va
coûter à peu près 50 000 $. Il me semble, M. le Président, que le
ministre de l'Éducation reçoit son conseiller politique ou reçoit l'appel du premier ministre, puis il parle à son
conseiller politique, puis il dit : Bien, avant de démissionner, on va s'assurer, peut-être
temporairement, de nous assurer de mettre un mur pour assurer qu'il n'y a pas
de conflit d'intérêts ou tu vas aller
travailler ailleurs de façon temporaire. Mais ça n'a pas été le réflexe premier
du ministre de l'Éducation. Il a
préféré dire : Bien, démissionne, puis il y aura une élection partielle,
puis ce n'est pas la fin du monde. Bien,
pas la fin du monde, mais ça va coûter 50 000 $ aux Québécois. Puis,
pendant ce temps-là, dois-je le rappeler, on est en étude du projet de loi n° 86. S'il pensait que le projet de loi
n° 86 allait être adopté cette session-ci, M. le Président, il
n'aurait peut-être pas dit à son conseiller politique de démissionner.
J'imagine que
l'actuel ministre de l'Emploi m'entend parler du projet de loi n° 86 avec
un certain regret, mais il n'en
demeure pas moins que la réalité, c'est que ça devient extrêmement difficile,
dans le contexte actuel, qu'il soit adopté dans les délais qui soient
requis.
La raison pour
laquelle je vous parle de tout ça, M. le Président, des centres de la petite
enfance, primaire, secondaire, c'est
parce que la réalité, c'est que tous ceux et celles qui n'obtiendront pas de
diplôme, pas de certification, bien,
malheureusement, ils risquent... Leurs probabilités qu'ils fassent partie de
ceux et celles qui, un jour, aient recours à l'aide de dernier recours, à l'aide sociale, bien, les statistiques
sont nettement plus élevées pour ceux qui n'ont pas de formation, puis c'est extrêmement malheureux.
Alors c'est pour ça qu'on doit se battre bec et ongles, qu'on doit réitérer
jour après jour la nécessité d'investir en éducation.
Ça ne sera
pas la première fois qu'on va entendre le premier ministre répéter aux
Québécois que l'éducation devrait être
la priorité. Je suis sûr que mon collègue de Sanguinet se souvient de la
dernière campagne électorale quand il avait dit aux Québécois : Vous savez, l'éducation va être en haut de la
liste. Inquiétez-vous pas, on va investir en éducation. Même dans le
discours inaugural. Le discours inaugural, il est allé encore plus loin. Il a
dit : On ne peut pas avoir 25 priorités,
on va en avoir une plus importante encore : l'éducation. Je dois avouer
que j'étais d'accord avec le premier ministre qu'effectivement l'éducation doit être placée en haut. La problématique
est survenue après, après l'assermentation du premier ministre, où, là, clairement, on a eu un discours... le premier
ministre, clairement, a agi contrairement à ce qu'il avait annoncé aux
Québécois, a fait exactement, en fait, l'inverse de ce qu'il avait promis. Il a
carrément coupé des centaines de millions.
Il a coupé des centaines de millions, qui se sont traduits par
d'importantes coupures partout à travers le réseau.
En plus de
ça, M. le Président, comme si ce n'était pas assez, le premier ministre... ou
le gouvernement, plutôt, a aussi
coupé dans les instances régionales qui luttent contre le décrochage scolaire.
S'il y a une fierté nationale de plus que
nous devrions avoir, ce sont toutes ces instances régionales qu'on s'est
données partout à travers le Québec, qui visent à accompagner nos jeunes avec de l'offre de livres, service de
bibliothèque, avec un accompagnement pour les parents, avec un accompagnement
pour les jeunes qui ont quitté mais qui veulent revenir à l'école, revenir à
l'école. C'est un service qui était
offert partout à travers le Québec. Je vois ma collègue de la région de la
Capitale-Nationale, l'instance n'existe plus. Qu'est-ce que vous pensez qui arrive avec ces jeunes qui veulent
retourner sur les bancs d'école, qui veulent apprendre plutôt que d'être pris dans les mailles du
système? Avec le projet de loi qui nous est proposé, qui vise à couper les plus
vulnérables, à couper nos plus jeunes qui
ont accès à l'aide de dernier recours, il faut miser sur la prévention. Puis
miser sur la prévention, ça veut dire miser sur la diplomation.
• (15 h 20) •
Et c'est
là-dessus, M. le Président, qu'on doit concentrer nos efforts, et c'est là-dessus
que le ministre de l'Emploi... à l'époque,
je lui disais : Allez cogner à la porte de votre collègue au Conseil du
trésor, allez lui dire que ça n'a pas de bon sens de couper en éducation. Bien, maintenant, j'ai envie de lui
dire : Cognez à la porte de votre collègue à l'Éducation. Expliquez-lui la nécessité de réinvestir
massivement, entre autres, dans les instances régionales de lutte au décrochage
scolaire. Pourquoi, M. le Président? Parce
que chaque jeune qui peut obtenir un
diplôme et qui ne l'obtient pas, c'est un jeune de trop.
Savez-vous ce
qu'un jeune qui est atteint de dysphasie m'a dit cette semaine, M. le Président? J'ai envie de le nommer :
Vincent Godin. Vincent Godin, c'est celui, là, qui a traversé le golfe du
Saint-Laurent à la nage, qui est parti de la Nouvelle-Écosse pour se
rendre jusqu'aux Îles-de-la-Madeleine. Puis je lui ai parlé cette semaine, puis
ça m'a fait vraiment... ça m'a rendu triste. Il dit : Ce n'est pas moi qui ai quitté
l'école, c'est l'école qui m'a quitté. Il dit : Moi, je veux aller à l'école, mais je ne suis pas capable;
à cause de mon trouble neurologique, la dysphasie, je ne suis pas capable
de continuer. M. le Président, des jeunes
comme ceux-là qui nous disent : On veut continuer, mais l'école ne me
soutient pas pour que je puisse
pouvoir aller au bout de mon rêve. Lui, il me dit : Moi, mon but dans la
vie, je ne veux pas travailler à l'épicerie.
Il dit : Je le sais que j'ai de la misère en mathématiques. À cause de mon
trouble neurologique, je n'y arriverai probablement jamais, mais je suis capable de parler, je suis capable
d'écrire, j'ai envie d'apprendre la science politique. C'est ce qui l'intéresse, il rêve de ça, mais il
ne peut pas s'inscrire au cégep, M.
le Président. Puis je le sais, qu'il
a appelé l'ancien ministre de l'Éducation, il m'a dit qu'il lui avait parlé, alors
j'imagine qu'il se souvient de cette conversation.
Ce que
j'essaie de dire, M. le Président, c'est que, ces jeunes qui veulent réussir, qui
veulent aller about de leurs rêves,
qui veulent apprendre, qui veulent s'intégrer et surtout qui veulent avoir un
emploi de qualité, il faut enlever tous les freins dans notre société qui les empêchent d'aller au bout de leur
formation et au bout de leurs rêves, M.
le Président. Alors, vous
aurez compris que je plaide, avant de taper sur nos jeunes comme le gouvernement
s'apprête à le faire en coupant dans les budgets sur l'aide sociale, qu'il faut
investir en éducation.
Le Vice-Président (M. Gendron) : Je
vous remercie, M. le député du Lac-Saint-Jean, de votre intervention, toujours
sur le principe du projet de loi qu'on étudie. Et, pour la poursuite du débat, je
cède la parole à M. le député de Sanguinet. M. le député de Sanguinet, à
vous.
M. Alain Therrien
M.
Therrien : Merci,
M. le Président. Je vais intervenir
sur le projet de loi n° 70, loi
visant une meilleure adéquation entre la formation ainsi qu'à favoriser
l'intégration en emploi.
Écoutez,
depuis presque deux ans, nous regardons ce gouvernement qui est à
l'oeuvre, et c'est sûr qu'on analyse ce
qu'ils font, c'est notre travail quand on est à l'opposition, on va analyser
puis on va scruter tout ce qu'ils vont faire, et il y a des images qui
me viennent en tête quand je les regarde, quand je regarde l'ensemble de
l'oeuvre, si vous voulez, M. le Président. À un
moment donné, quand j'enseignais aux
HEC, j'expliquais c'était quoi, le chômage. Je disais que le chômage,
c'était quelqu'un qui ne travaille pas, quelqu'un qui recherche activement du
travail et quelqu'un qui est disponible à
travailler. Et là il y a des étudiants qui me disaient... Puis je dois
vous dire, M. le Président, que devant moi, dans cette classe, il y avait des jeunes qui ont été choyés par la vie, je
vous dirais, je dirais ça comme ça. Et, à un moment donné, il y a un étudiant qui me dit : Bien, je ne
comprends pas... puis ce n'était pas un fou, là, pantoute, là, un gars
brillant, là, il m'a
dit : Je ne comprends pas que quelqu'un qui veuille travailler ne trouve pas un travail. Ça
m'avait marqué. Bien, je dis :
Tu penses que c'est impossible? Il dit : Moi, quand je veux travailler,
quand je veux me trouver un emploi, je m'en trouve un. Ça m'a frappé. Parce que c'est la responsabilité de l'enseignant, à un moment
donné, d'expliquer la théorie qu'on enseigne puis aussi d'être ancré dans la
réalité pour dire : Regarde, là, ce que j'enseigne là, ce n'est peut-être
pas ta réalité, mais c'est la
réalité. Alors, je lui ai dit : Écoute, toi, tu as tiré le bon numéro. Tu
es rendu à l'université. Je te vois aller, tu réussis bien, tu as tout pour réussir entre tes mains. Malheureusement, ce n'est pas tout le monde qui est comme ça. Il y a des gens qui n'ont pas tiré le bon numéro comme
toi. Il y a des gens qui sont issus de milieux plus
difficiles que le tien, il y a
des gens qui n'ont pas eu la chance d'avoir des parents qui les ont bien
encadrés, pour x raisons, on ne veut pas les juger, on ne juge pas, mais
que ces gens-là n'ont pas été capables d'avoir un environnement qui leur
permette, justement, de s'épanouir au niveau du marché du travail. Alors, ces
gens-là, pour eux, oui, ça peut être difficile de se trouver un travail parce qu'ils n'ont pas la chance que tu as eue. Parce
qu'il y a une question de chance. Il y a une question de mérite. Le capitalisme, vous allez me
dire : Bien oui, mais le capitalisme récompense le mérite, la compétence. C'est sûr. Mais, quand on regarde plus loin, on
s'aperçoit qu'au-delà du mérite on ne part pas tous de la même ligne de départ,
M. le Président, et c'est à ça qu'il faut réfléchir.
Quand je les
écoute, j'ai l'impression qu'ils n'ont pas acquis cette sagesse-là, en tout
respect. À un moment donné, une de
mes collègues m'avait dit : On devrait exiger du ministre des Finances qu'il ait déjà été chômeur pour qu'il comprenne
c'est quoi, pour qu'il comprenne cette dure
réalité là, pour qu'il fasse en sorte de faire des choix, de réfléchir aux
conséquences de chacun de ses gestes,
pour se dire : Regarde, si je prends cette décision, il y aura
des conséquences, et je les connais, ces conséquences, je les ai vécues, M. le Président. C'est dur pour moi, c'est dur pour la famille, c'est dur pour les
enfants, c'est dur pour l'entourage.
Moi, je
dirais : Peut-être pas, peut-être pas. De
toute façon, on ne peut pas exiger ça
d'un ministre des Finances. Moi, je pense
qu'on n'a pas besoin d'aller aussi loin. Moi, ce que je vous dis, M. le Président : Demandons à nos politiciens de faire preuve d'empathie. Comprenez-vous?
Faisons preuve d'empathie. Disons que les gestes que l'on pose ici ont des conséquences sur des gens dans la réalité, et
ce n'est pas drôle toujours, et qu'on a un pouvoir d'améliorer le sort de
ces gens-là parce que la plupart d'entre
eux ne l'ont pas mérité. Il faut avoir de l'empathie. Et ce n'est pas ce que je
sens de ce gouvernement-là, M.
le Président. Depuis le début qu'ils
sont là, je trouve qu'ils manquent d'empathie. Et ce projet de loi là en est l'exemple le plus
évident : on n'en a pas, d'empathie, envers les Québécois, les gens qu'on
est censés représenter. Et là je vais aller
plus loin, je vais peser mes mots, M. le Président : Ils font de la
schizophrénie. C'est ce qu'on a devant nous.
Une voix : ...
M.
Therrien : Elle va
se lever, oui.
Le Vice-Président (M. Gendron) :
Oui.
Mme Vien :
Non, mais je... Est-ce que j'ai compris, M. le Président, que le collègue d'en
face dit qu'on fait de la schizophrénie?
Une voix : ...
Le Vice-Président (M. Gendron) :
Oui, juste une seconde! J'allais vous dire qu'il faut faire attention au vocabulaire qu'on utilise, mais, en même temps,
nos débats sont télédiffusés... alors, ce n'est pas antiparlementaire, mais
c'est sûrement prêter des intentions
sévères, vous allez en convenir avec moi. Donc, il ne me semble pas que ça
hausse le niveau du débat, d'avoir
des mots aussi durs dans un débat qui se déroulait très bien, là. Alors, je
vous demanderais, mais je le demande
à chaque parlementaire : Attention aux débats et aux mots choisis, qui ne
reflètent pas cette sérénité qu'on doit
avoir ici et être aussi dur dans le vocabulaire. Alors, attention au
vocabulaire. Mais c'est sûr qu'il y a là une accusation que j'aimerais
mieux qu'elle n'existe pas.
M.
Therrien : Bien,
écoutez, j'avais prévu le coup. Schizophrénie, schizophrène, peu importe,
définition du dictionnaire : «Psychose
caractérisée par [...] la perte du contact avec la réalité...» Ils ne sont pas
schizophrènes, parce qu'ils n'ont jamais eu de contact avec la réalité.
Le Vice-Président (M. Gendron) :
Non, mais écoutez, ça reste des mots blessants, et on ne peut pas faire indirectement ce qu'on n'a pas le droit de faire
directement. Donc, ça revient au même, là. Dire quelque chose en Chambre,
prévoir le coup pour être capable de
s'expliquer dans le choix de terme qui a comme conséquence ce que vous venez de
vivre, je vous invite, M. le député de
Sanguinet, à ne pas pratiquer cette théorie. Alors, veuillez poursuivre, mais
avec un vocabulaire approprié.
M.
Therrien :
Merci, M. le Président. Alors donc, écoutez, on va y aller avec un manque
d'empathie. On peut dire ça? Ça, ça va? Ça va? Ça ne froisse pas
personne.
Le Vice-Président (M. Gendron) :
C'est un langage qui est acceptable.
• (15 h 30) •
M.
Therrien : Voilà. O.K. Alors, on va y aller comme ça, il y a
définitivement, de l'autre côté, un manque d'empathie.
Regardons le
problème comme on devrait le regarder en sciences humaines, de façon
intelligente. Puis le ministre, en
plus, a une formation en sciences humaines, alors donc il saura m'accompagner
dans ma logique et, peut-être même, il pourrait en rajouter ou me
corriger si je fais erreur. On a un problème, c'est qu'il y a des jeunes qui
retirent de l'assistance sociale, qui ne
travaillent pas. Ça, c'est un problème. Alors, étant donné que, nous, notre
travail, c'est d'améliorer le sort de
nos citoyens, on se dit : Il faut régler le problème. Et c'est correct,
sauf que ce qu'il propose, c'est de dire, avec leur programme Objectif emploi : Nous avons un problème, nous avons
des gens qui n'ont pas de travail, des jeunes, et nous voulons les sortir du cercle de la pauvreté.
Jusqu'à date, M. le Président, c'est très noble, très noble. Moi, j'applaudis
à ça. Sauf que ce qu'ils font, c'est qu'ils
tapent sur la personne sans emploi avec des mesures coercitives, donc c'est la
théorie du bâton et dire : Tu
vas aller travailler, sinon on va te couper ton chèque. On va t'accompagner,
mais, si tu ne veux pas travailler, on va te couper ton chèque.
Alors, vous voyez, M. le Président, on a un
problème, on doit envoyer... bien, on doit faire en sorte que ces jeunes-là aillent travailler. Sauf que, si on veut
régler un problème, M. le Président, il faut regarder les sources du problème.
C'est ça, la science. Vous avez un problème,
il faut regarder où est la source du problème. Et, quand il traite de cette
façon les assistés sociaux, les
jeunes assistés sociaux, il considère que l'assisté social est responsable de
tous ses actes et qu'il n'a pas été
influencé par son environnement. Parce qu'on ne va pas corriger son
environnement, qui l'a amené à se trouver
là. Au contraire, on va dire : Tu es là, on va te punir si tu ne pars pas
de là. Automatiquement, on considère que cet individu-là ne fait pas partie d'une société et n'est pas influencé
par la société. M. le Président, l'homme est un animal social, il est victime de
son environnement économique, socioéconomique. C'est clair, tous les gens en
sciences humaines vont vous dire ça, on est le produit de notre
environnement.
Alors, si on
veut le régler, ce problème-là, comment on doit faire? On doit tout simplement
jouer, travailler avec cet environnement-là. Si on veut régler le
problème à court, moyen et long terme, il faut se dire quels sont les éléments socioéconomiques qui ont amené cet individu là, et
travaillons sur ces mesures socioéconomiques pour faire en sorte que ce problème, peu à peu, va disparaître. C'est ça
qu'on a. Alors, si la personne se retrouve sans emploi — je vais vous donner un truc — c'est parce qu'il n'y a pas
d'emploi, en partant. Parce qu'ils nous avaient promis 50 000 emplois
par année, pour les cinq prochaines
années, 250 000 emplois. Depuis deux ans, depuis qu'ils sont là, c'est
37 000 emplois, puis pas tous à
temps plein évidemment, qu'on a créés. Manque de dynamisme économique.
Pourquoi? Parce que leur politique n'est
pas axée sur la création d'emplois. Pourquoi? Parce qu'ils n'en ont pas, de
politique économique, tout simplement. C'est la main invisible d'Adam
Smith, le laisser-faire, le laisser-aller. M. le Président, il arrive que la
main invisible d'Adam Smith ait besoin d'un
petit coup de pouce, et c'est l'État qui amène ce coup de pouce là. Ça, ils ne
l'ont pas compris.
Alors donc,
le premier problème sur lequel on devrait s'attaquer, c'est la création
d'emplois. Comment voulez-vous qu'il
y ait une création d'emplois quand on coupe de cette façon-là les dépenses
publiques qui sont souvent destinées à l'amélioration
des conditions de vie des citoyens? Le ministère qui a été le plus coupé depuis
un an et demi, c'est le ministère de
l'Économie. Donc, le levier d'intervention qui nous permet de créer des
emplois, on l'a coupé. L'austérité libérale a coûté 4 milliards, cette année, en production. Ça, c'est le
résultat des politiques libérales. Alors, voyez-vous, l'austérité va faire quoi?, va pousser des gens vers justement
l'assistance sociale. Parce qu'il n'y a pas assez d'emplois disponibles,
on va se trouver à avoir une marche plus
certaine vers l'assistance sociale. C'est une évidence. On a coupé les CJE, on
a coupé les CLD. Même chose, on coupe
la croissance économique dans les régions. Comment voulez-vous, M. le
Président, qu'on arrive dans les
régions et qu'on crée un dynamisme économique, alors que la dynamo économique
des régions a été amputée de
52 %? Comment voulez-vous qu'on arrive à une croissance économique et à
faire travailler nos gens? Premier problème.
Deuxième
problème, M. le Président. Les gens qui se retrouvent à l'aide sociale souvent
sont victimes de leur environnement.
Souvent, c'est lié à l'éducation; souvent. Souvent, ils vont avoir des
problèmes dans leur cheminement académique.
Bien là, tu dis : Bien, il faut faire en sorte d'améliorer la réussite
scolaire des enfants. C'est une règle de base. Si tu veux les faire travailler, si tu veux amener un pont entre cette
personne-là puis l'emploi qui est disponible, parce que ce n'est pas toujours le cas, il faut qu'il y ait
un arrimage. Cet arrimage-là est possible grâce à l'éducation. Mais comment
voulez-vous que ces gens-là... que les
jeunes qui s'en vont à l'école persévèrent et réussissent à se trouver un
travail quand tu as les coupures libérales qui viennent tout simplement
nuire à son cheminement académique? Et les exemples sont nombreux. Quand on coupe les CPE, alors que les
spécialistes, les sociologues qui sont passés en commission parlementaire
ont dit au ministre des Finances que c'est
prouvé scientifiquement que les enfants qui vont dans les CPE vont mieux
réussir académiquement... C'est
prouvé scientifiquement, M. le Président. Quand tu coupes dans les CPE, tu
coupes justement dans la réussite
scolaire des enfants et tu pousses ces enfants-là davantage vers l'aide
sociale. Allons extirper le problème jusqu'à
la racine, essayons de faire mieux. Ne punissons pas les gens sur l'assistance
sociale sous... Parce que, là, ce qui va
arriver, c'est que, s'ils pénalisent ces gens-là, ils ne travailleront
peut-être pas plus, mais ils vont peut-être se retrouver ailleurs,
peut-être dans la rue, avec des problèmes encore plus importants.
Et donc,
quand on regarde l'éducation primaire, les gens qui ont de la difficulté,
l'aide aux devoirs, les gens qui ont
de la difficulté à réussir, à suivre
le rythme des autres... coupures à ce niveau-là, M. le Président. Les
organismes qui vont aider les gens
qui ont des problèmes, des problèmes divers qui vont faire en sorte que ces
gens-là vont être exclus littéralement du cheminement académique :
coupés, M. le Président.
La pauvreté
des parents. Tu as un enfant, et les parents sont pauvres pour x raisons. Si tu
fais en sorte de laisser tomber les
parents en créant au Québec un climat économique malsain qui va faire en
sorte que les parents ne pourront pas
se débrouiller puis atteindre le minimum de revenus qui leur permettent
justement d'envoyer leurs gens à l'école, c'est un problème, M. le Président. Bien, l'austérité libérale frappe les familles,
les parents en difficulté. Il y aura une augmentation du nombre de parents qui se retrouveront avec des
problèmes financiers, qui empêchera les gens de pouvoir réussir à l'école.
C'est là le problème, M. le Président. Ils veulent oeuvrer contre, justement, l'assistance sociale? C'est là qu'il faut qu'ils commencent. La différence entre un pays en voie de
développement et un pays développé, c'est l'éducation. Vous savez, quand on tire le mauvais numéro, qu'on n'a pas la
chance que nous, on a eue, la plupart d'entre nous, quand on tire le mauvais numéro, ça prend quelqu'un, M. le
Président, pour nous amener à réussir notre vie académique et, plus tard, sur
le marché du travail. Cette chose-là,
ça s'appelle l'État québécois. L'État québécois a pris de l'émancipation à
partir des années 60, a, dans
plusieurs cas, aidé les gens à s'épanouir intellectuellement et monétairement,
financièrement, malgré qu'on ait tiré le mauvais numéro. C'est le rôle
de l'État.
Depuis 2014,
ce gouvernement prend un malin plaisir à sabrer, à ébranler le socle étatique.
C'est ce qu'ils font. Bien, moi, je
peux vous dire, M. le Président, ce n'est pas des projets de loi comme ça qui
vont nous aider à sortir les gens du
cercle de la pauvreté. Si on veut travailler comme il faut, intelligemment, il
faut travailler la source véritable du problème, et ce n'est vraiment
pas ce qu'ils font. Alors, voyez-vous, en partant, on a vraiment frappé sur le
mauvais clou.
En plus, ce
projet de loi là... je vais revenir sur ce programme-là, M. le Président, si
j'ai le temps, mais je voulais parler
aussi du fait que les centres locaux d'emploi vont perdre de l'indépendance.
Ça, c'est important. Dans les régions, ces
gens-là vont perdre de l'autonomie. Bien, ça, c'est caractéristique de
l'ensemble de l'oeuvre du Parti libéral, M. le Président. Il centralise tout. C'est «Québec knows best», on connaît ce
qu'il faut faire, les gens doivent nous écouter. On envoie des informations dans les régions, et c'est
les régions qui vont nous écouter, on sait ce qu'ils ont de besoin. Ça, c'est la façon libérale de faire. C'est la
soviétisation de l'économie, M. le Président. On pensait que l'Union soviétique
était morte, mais il y en a ici qui sont en
train de la reconstruire. Ça va à l'encontre de toutes les théories de
développement économique qu'on
connaît depuis les 100 dernières années, qui disent que la meilleure façon
d'amener une augmentation de l'efficacité de tous les appareils, que ce soit politique ou les
entreprises, c'est de décentraliser, de rapprocher le pouvoir plus près des gens et plus près des besoins. Eux,
c'est exactement le contraire qu'ils font avec les centres locaux d'emploi.
Et moi, je vous dirais plus, dans mon comté, ils en ont fermé un.
Imaginez, en
plus de ça, on ferme les CLE. Puis on dit qu'on veut aider les assistés
sociaux, M. le Président, puis on ferme les CLE. Dans mon comté, ils ont fermé
celui de Saint-Rémi. Levée de boucliers, ainsi de suite. Finalement, c'est toujours la... ça, c'est la stratégie
libérale : on coupe au complet, et après on revient avec une fanfare et on
se dit : Bien, deux fois par
mois, deux jours par mois, on va réouvrir le centre local d'emploi. Et là c'est
une victoire, on sabre le champagne
et on se tape dans la mite. C'est une victoire. Comprenez-vous? On coupe, on
élimine et ensuite on revient deux
jours par mois, et il faudrait les applaudir. À Châteauguay, à côté de chez
nous, actuellement ils veulent fermer le centre local d'emploi. Alors,
voyez-vous, quand tu veux justement amener une amélioration de l'adéquation
entre les besoins du marché et l'offre de services, bien ce n'est pas comme ça
que tu fonctionnes.
• (15 h 40) •
Écoutez, si
on regarde les commentaires qui ont été formulés durant la commission
parlementaire — je vais
vous en lire quelques-uns parce qu'il
y en a d'assez intéressants — évidemment, comme c'est à peu près
l'habitude, là, les... je ne dirais
pas ça, parce qu'il y a certains projets de loi où est-ce que ça a bien été,
mais il y a souvent des projets de loi où est-ce qu'il y a un «crunch»,
là, c'est que les gens qui viennent en commission parlementaire, ils
disent : Bien, on ne comprend pas du
tout où est-ce que vous vous en allez et généralement on n'est pas d'accord
avec le sentier que vous voulez parcourir.
Rapidement,
le regroupement des grandes centrales syndicales... Selon les grandes centrales
syndicales, ce projet de loi est le pire produit de l'austérité
libérale. Selon eux, «abolir Emploi-Québec, diluer les capacités du Fonds de développement et de reconnaissance des compétences
de la main-d'oeuvre, puis transférer les programmes de la main-d'oeuvre [à l'emploi] de Services Québec, ce
sont toutes des décisions qui vont affaiblir la politique de l'emploi parce qu'elles ne répondent pas aux besoins du
milieu, mais plutôt à des impératifs d'efficacité administrative commandés
par la politique d'austérité du gouvernement
libéral». Ça, M. le Président, là, c'est le pot aux roses. Pourquoi ils font
ça? Pour aider les gens à aller sur
le marché du travail? Non. Parce qu'ils coupent. Parce qu'ils ont une
maladie : ils coupent. Ils
coupent toujours, sans regarder et sans penser aux conséquences. Imaginez.
Alors, on se dit : On va couper puis on va faire en sorte d'économiser de l'argent. Ça, là, M. le Président, là,
c'est vraiment... quand tu dis «penser à court terme», là, puis n'avoir aucune
vision, là, c'est exactement ça. Gouverner, c'est prévoir. Je peux-tu dire que
ce gouvernement-là, là, ce n'est pas trop fort? Ce n'est vraiment pas
trop fort.
Puis je
terminerais avec le Conseil du patronat, là. On est loin de Che Guevara,
là, on s'entend, là, tu sais, je veux dire? Propos d'Yves-Thomas Dorval en
commission parlementaire : «Je vais être honnête avec vous, M. le ministre,
le montant d'aide sociale, ce n'est pas
grand-chose.» Imaginez, «pas grand-chose», puis eux autres, ils vont couper davantage
en culpabilisant les gens qui vont recevoir
cette aide-là de dernier recours. Il n'y a personne qui se tape dans la mite
puis qui joue du clairon, c'est une aide de dernier recours. Vous allez
couper, vous allez pousser ces gens-là dans la rue. Félicitations!
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
Alors, merci, M. le député de Sanguinet, de votre intervention. Et, pour la
poursuite du débat, je reconnais maintenant
M. le leader de l'opposition officielle. M. le leader de l'opposition
officielle, à vous la parole.
M. Bernard Drainville
M.
Drainville : Merci,
M. le Président. M. le Président, certains des mots qui me viennent en tête
quand je pense au projet de loi
n° 70, c'est des mots comme «sans-coeur», «arbitraire», «malavisé», «à
courte vue», «irrespectueux».
Prenez, par
exemple, là — on va
aller à l'essentiel, M. le Président, hein? — le fameux Objectif emploi, l'article 28
du projet de loi, qui donne au ministre le
pouvoir d'établir un plan d'intégration en emploi. Alors, le plan d'intégration,
M. le Président... la personne visée par ce plan-là aura l'obligation de
l'accepter. On te propose un plan, ce n'est pas discutable, il faut que tu l'acceptes. Il faut que tu acceptes quoi dans
le cadre de ce plan-là, M. le Président?, «tout emploi convenable» qui
t'est offert.
M. le
Président, vous qui avez une certaine expérience, une certaine sagesse
reconnue, vous auriez mis ça dans un
projet de loi... puis Dieu sait que vous en avez parrainé, des projets de loi,
vous auriez vu ça dans votre projet de loi, «emploi convenable», puis
tout de suite vous auriez dit : C'est quoi, ça, «convenable», qu'est-ce
que ça veut dire, ça, «convenable»? Puis,
s'il y avait quelqu'un qui vous avait dit : Ah! on va définir ça par
règlement, vos instincts démocratiques vous auraient fait sursauter puis
vous auriez dit : Bien là, attends un peu, wo! Si on est pour imposer à
quelqu'un un emploi qu'il va devoir
accepter, un emploi convenable, on va toujours bien définir dans le projet de
loi ce qu'est un emploi convenable.
Bien non, bien non, la belle affaire, M. le Président : l'emploi
convenable, qui est quand même au coeur de ce projet de loi là, il n'est pas défini dans le projet de loi, il va être
défini par règlement, oui, par règlement, M. le Président. Ça fait que c'est le conseil... c'est le ministre,
enfin, qui va recommander au Conseil des ministres puis ça va être : Cric!
Adopté, voici ma définition de l'emploi convenable.
Ça fait que,
nous, les législateurs, là, on nous demande de se pencher sur un projet de
loi qui ne définit même pas ce qui est au coeur même de ce projet de loi, c'est-à-dire ce qu'est un emploi convenable. Puis là on
rajoute, dans le même projet de loi, M. le
Président... Les personnes qui se
trouveraient en défaut de respecter le plan d'intégration, donc respecter
notamment l'emploi soi-disant convenable, ces personnes-là qui vont le refuser verront leurs prestations coupées jusqu'à un
seuil minimal de combien, M. le Président? C'est quoi, le seuil minimal
jusqu'où ils vont pouvoir couper la prestation de la personne qui va juger que l'emploi qu'on lui
propose, il n'est pas convenable? C'est quoi, le seuil, M. le Président,
où c'est qu'ils peuvent te couper? C'est le règlement, toi, qui va le définir,
c'est le règlement qui va décider ça aussi, M. le Président.
Tout ce qu'on
sait, c'est qu'au moment du point de presse le ministre, il a indiqué... le
ministre, là, qui a déposé ça, là,
qui est maintenant président du Conseil du trésor, il a indiqué que le chèque
pourrait être coupé de moitié. Le chèque, M. le Président, là... c'est mon collègue de Sanguinet qui le disait,
là, le chèque à propos duquel Yves-Thomas Dorval, du Conseil du patronat, disait : «Ce n'est
pas grand-chose»... bien, nos bons libéraux, M. le Président, qui ne manquent
jamais une belle occasion de s'attaquer aux
plus faibles puis aux plus vulnérables, ont décidé que le seuil minimal
jusqu'où le chèque pourrait être
coupé va être déterminé par règlement, le même chèque dont le Conseil du
patronat dit que ce n'est déjà pas
grand-chose. Puis, je peux vous dire une affaire, M. le Président, quand tu
connais du monde qui sont sur l'aide sociale,
là, puis qui vivent avec 600 $ par mois, là, puis tu entends le ministre
qui dépose le projet de loi puis qui dit qu'il pourrait faire baisser le chèque de 600 $ à 300 $ par mois,
là... dire ça à quelqu'un, M. le Président, là, c'est un affront à la
dignité de la personne, c'est une invitation à lui dire : Fais donc ce que
tu veux, ta vie n'a pas de valeur à nos yeux.
M. le
Président, vivre sur 600 $ par mois puis entendre le ministre qui est
supposé s'occuper de toi dire : Je pourrais te couper jusqu'à 300 $
si tu n'acceptes pas l'emploi convenable que je ne définis pas, c'est odieux.
Bien, c'est ça, le projet de loi
n° 70, M. le Président. Juste pour ça, là, je pourrais m'asseoir puis
dire : Juste avec ça, on en a assez pour voter contre, hein? Juste là-dessus, on en a assez pour voter
contre, mais savez-vous quoi?, ce n'est pas tout. Emploi-Québec, M. le
Président, Emploi-Québec... Aïe! Emploi-Québec, M. le Président, là, ça a fait
l'objet d'un consensus, c'était un des pouvoirs
que Robert Bourassa voulait rapatrier au Québec, les pouvoirs sur la
main-d'oeuvre, M. le Président. Pendant les années 80, Robert Bourassa voulait négocier avec Brian Mulroney le
rapatriement des pouvoirs sur la main-d'oeuvre. Il y avait un consensus extraordinaire, au Québec, de tous les
milieux : syndicaux, patronaux, communautaires, politiques. On
était favorable à cette idée de rapatrier nos pouvoirs...
(Interruption)
M. Drainville : ... — attendez
un peu, là, il faut que je mette ça en mode silencieux, M. le Président — nos
pouvoirs sur la main-d'oeuvre, sur la formation de la main-d'oeuvre, puis ça a
marché, M. le Président, ça a marché.
Ça a marché.
La bataille, les partis, toutes couleurs confondues, ils l'ont menée les uns
après les autres, puis, à un moment
donné, on a réussi à rapatrier ces pouvoirs-là. Après l'échec de Meech, après
le referendum de 95, il y a eu une négociation,
et, si je ne m'abuse, c'est le gouvernement de M. Bouchard qui a
finalement signé l'entente, on a rapatrié ces pouvoirs-là, ça a donné
naissance à Emploi-Québec avec les centres locaux d'emploi, et tout ça.
Bien, M. le
Président, dans le projet de loi n° 70, là, qu'est-ce qu'ils font avec
Emploi-Québec, vous pensez, cette fierté
transpartisane, cette bataille pour laquelle on s'est battus, cette idée de
concentrer, de consolider à un seul endroit les pouvoirs en matière de main-d'oeuvre pour justement être cohérents,
pour ne plus être incohérents comme avant, alors qu'il y avait une partie des responsabilités qui était à Ottawa? Vous
vous rappelez des centres de chômage, là, on avait ça, hein? Il y en avait un, moi, dans ma communauté.
Puis il y avait évidemment tout le volet qui était contrôlé par Québec. On avait décidé
de contrôler tout ça à partir de Québec. On en est venus à une entente avec Ottawa,
les pouvoirs ont été transférés, Emploi-Québec a été créée.
• (15 h 50) •
Bien, le projet de loi n° 70, M.
le Président, il met fin à Emploi-Québec. Bye-bye, Emploi-Québec! Pour quelle raison, M. le Président? Pour
quelle raison? Si ça ne marche pas aussi bien que ça devrait marcher, travaille
sur l'amélioration, mais ne sacre pas toute la structure puis tout
ce qu'on a gagné puis tout ce qu'on a développé par la fenêtre.
Je peux
comprendre, M. le Président, qu'il
y a pas mal de monde qui sont extrêmement déçus de voir Emploi-Québec
éliminée dans ce projet de loi là. C'est vraiment, vraiment inquiétant. Ils prennent Emploi-Québec, M. le Président, puis ils rapatrient ça dans le ministère, alors qu'actuellement ça fonctionnait de façon autonome puis... En tout cas, moi... je ne sais pas pour
vous, mais, moi, dans ma communauté à Longueuil, M. le
Président, le centre local d'emploi, là, il fonctionnait plutôt
bien, plutôt bien puis il rendait des vrais bons services.
Puis on avait développé, M. le
Président, une très bonne relation... on a développé — je
ne parlerai pas au passé tout de
suite — une très belle relation avec certaines personnes
qui travaillent au centre local d'emploi à Longueuil puis on avait des problèmes, par moments, avec
des personnes qui avaient besoin de
faire affaire avec le centre local
d'emploi ou qui faisaient affaire
avec le centre local d'emploi qui frappent un noeud. On appelait les personnes avec qui on avait
développé une belle relation sur quelques années, sur plusieurs années puis souvent
on arrivait à résoudre le problème, au bénéfice du citoyen, M. le Président, au
bénéfice du citoyen. La personne, elle
venait au comté, puis on prenait en main son dossier — un
cas de comté, M. le Président, comme on en a tous en cette Chambre, des cas de comté — puis on travaillait avec le centre local d'emploi, à
l'intérieur justement d'Emploi-Québec, puis on
réussissait très souvent à régler le problème.
Là, la
structure, elle va disparaître, elle va être intégrée dans le ministère,
M. le Président. Je ne sais pas ce qui va rester des personnes avec lesquelles on a tissé
cette relation de confiance, je ne sais pas où elles vont se retrouver, mais
j'ai peur un peu qu'elles se retrouvent dans un grand tout anonyme puis que
cette relation de confiance, cette relation humaine
de respect prenne le bord. Puis qui va faire les frais de ça, M. le Président, qui va faire les frais de ça?
C'est le citoyen qu'on aide
actuellement quand on fait affaire avec Emploi-Québec, avec cette entité
autonome présentement mais qui ne le sera plus au terme de l'adoption
éventuelle du projet de loi n° 70, M. le Président.
Alors, franchement, c'est un mauvais, mauvais
projet de loi, M. le Président. Puis, tu sais, on aurait espéré... Mauvais projet de loi déposé par un mauvais
ministre, en ce qui nous concerne. Mais là il a changé de place, ils l'ont
envoyé au Conseil du trésor. Ils
l'ont envoyé au Conseil du trésor, M. le Président. Bon, ils l'ont envoyé au
Conseil du trésor.
Une
voix : ...
Le Vice-Président (M. Gendron) : Oui. Là, je vais vous entendre. Par contre,
objectivement, j'ai entendu ça des centaines de fois, là, c'est son
point de vue. Alors, je vous écoute. C'est quoi, votre question de règlement?
Mme Vien :
M. le Président, c'est l'article 35.
Le Vice-Président
(M. Gendron) : Oui.
Mme
Vien : On est bien ouverts à entendre les commentaires de
l'opposition officielle puis du collègue, il ne faudrait pas qu'il pousse la machine un peu trop loin. De traiter le
ministre de «pas bon», d'«incompétent», là, on ne veut pas entendre ça
dans cette Chambre-ci.
Une voix :
...
Mme Vien :
On ne veut pas entendre ça, ce genre de...
Une voix :
...
Le Vice-Président
(M. Gendron) : Bien, vous avez le droit de...
Une voix :
...
Le Vice-Président
(M. Gendron) : Un instant! Un instant, M. le leader de l'opposition
officielle...
Une voix :
...
Le Vice-Président (M. Gendron) : Non, non, vous avez le droit de le souhaiter,
sauf que, je répète, là, ça, c'est une opinion de quelqu'un qui prend la parole ici. Et je l'ai entendue
des centaines et des centaines de fois. Et la table me donne raison, là, c'est une opinion qui n'est pas
antiparlementaire, ce n'est pas discourtois. Il n'a pas dit ce que vous venez
de dire, il n'avait jamais dit... il n'a
jamais employé, madame, en vous respectant, les deux qualificatifs que vous
venez d'employer. Je le dis pour
nous, là... pas pour nous, mais... Alors, on fait attention au langage utilisé
pour pas que ça soit blessant,
j'essaie de le faire avec beaucoup de rigueur, mais le propos que vous avez
repris n'était pas antiparlementaire, et l'opinant avait le droit
d'utiliser l'opinion qu'il a utilisée.
Alors, veuillez
poursuivre, mais toujours en faisant attention de ne pas blesser... Ça, c'est
défendu.
M. Drainville : Merci, M. le Président. Alors, le ministre qui a déposé
ce projet de loi là, il se retrouve au Conseil du trésor, puis là c'est
le ministre de l'Éducation qui prend sa place à l'Emploi et à la Solidarité, le
même ministre, M. le Président, qui a déjà
fait une plaidoirie éloquente pour le revenu minimum garanti. Puis le revenu
minimum garanti, M. le Président, là,
ce n'est pas un revenu qui propose de diminuer de 600 $ à 300 $ le
chèque mensuel ou le revenu mensuel d'une personne, d'un citoyen, ce
n'est pas ça pantoute, M. le Président.
Alors,
le nouveau ministre, là, qui est là — justement, je le salue — qui parraine ce projet de loi là, là, il
est-u fier de ça, lui là, là? Il
est-u fier du contenu du projet de loi déposé par son prédécesseur? Parce
que, savez-vous quoi, M. le Président?, s'il n'est pas fier, il peut le changer. C'est-u
pas extraordinaire? Ça s'appelle la démocratie. S'il ne l'aime
pas, il peut le changer, il peut
dire : Bien, visiblement, il y a des affaires qui ne sont pas bonnes là-dedans,
puis on va les changer. Il y a des affaires qui n'ont pas d'allure là-dedans,
puis on va les changer. L'emploi convenable, ça n'a pas d'allure, bien, on va enlever ça, ou on va resserrer, ou on va
définir... Mais, tu sais, bon, l'idée de la distance qu'il faut
couvrir, puis tout ça, là, puis la
diminution de moitié, là... C'est quoi, la diminution? On ne le sait pas trop.
On a vu, à un moment donné, des hypothèses, là, qui ont été évoquées soit par le ministre
soit par son entourage, mais on ne sait pas trop, trop, M. le Président.
Mais
moi, je le rappelle — je
le rappelle — à
ses valeurs, à ses valeurs, à ses convictions d'antan — ça
ne fait pas si longtemps
que ça — sur
le revenu minimum garanti. Puis savez-vous quoi, M. le Président?, la beauté de l'affaire, c'est
que, quand il a été nommé ministre, le premier
ministre, qui l'a nommé ministre,
il lui a dit : Explore ça, le revenu
minimum garanti, j'aimerais ça t'entendre là-dessus.
Bien, moi, M. le Président, là, sincèrement, là, sincèrement, là, si tu veux explorer l'idée d'un revenu
minimum garanti, je ne vois pas
comment tu peux être pour le projet
de loi n° 70 en même
temps, hein, je ne vois pas ça, moi,
là, là. Bien, si lui, il voit ça, il
faudrait qu'il me l'explique. Peut-être que je ne comprends pas. Mais j'attends, j'attends, M. le
Président, j'attends, puis, bon, je ne suis pas un expert sur le revenu minimum
garanti comme lui l'est. En tout respect, je
respecte sa compétence dans ce domaine, M. le Président, il a écrit un livre
là-dessus, je ne peux pas... je ne l'accote
pas, moi, là, là-dessus, pas pantoute, là. Mais ce que j'en sais, par exemple,
ce que je comprends de ça, ce que je
connais de ça, aussi parcellaire que ça peut être, je suis certain d'une chose,
M. le Président, le projet de loi n° 70, là, ça ne va pas avec le
revenu minimum garanti, c'est deux affaires qui vont dans deux directions opposées. Alors, si vraiment il veut aller vers un
revenu minimum garanti, comme lui a demandé le premier ministre, à tout le moins, de l'explorer, il me semble, M. le
Président, la première chose qu'il devrait faire, c'est prendre ses distances
d'avec le projet de loi n° 70 puis
dire : Ce n'est pas mon projet de loi. Savez-vous quoi? On va mettre ça
sur la glace, tu sais. Erreur de
parcours, erreur du pitcheur, M. le Président, erreur du pitcheur. On va
revenir avec quelque chose de plus consensuel, de plus respectueux qui
va faire davantage consensus.
M.
le Président, c'est quand même incroyable, quand même incroyable, c'est assez
rare, quand vous lisez les réactions, là,
des différents groupes, là, au projet de loi, là, faire l'unanimité de même
contre un projet de loi, là... ou, en tout
cas, faire consensus — «unanimité», c'est un peu fort — mais faire consensus de même contre un
projet de loi. Je veux dire, tu es
ministre, là, tu entends ça, là, tu dis : Oupelaïe! Il y a un problème. Il
y a un problème, il y a un problème, parce
que les personnes qui travaillent avec les groupes antipauvreté, ils n'aiment
pas ça, ils n'aiment pas ça, le projet de loi. Ceux qui travaillent avec
les personnes qui sont sur l'aide sociale, ils ne l'aiment pas non plus. Le
mouvement syndical, les travailleurs, ils ne
l'aiment pas. Même le patronat trouve que, là, c'est gênant, là, tu sais, de
s'associer à ça, là, ça va trop loin, là, tu sais.
Alors,
M. le Président, nous, ce qu'on dit — vous ne serez pas surpris de me l'entendre
dire — c'est
qu'il devrait retirer son projet de
loi, hein? On est pas mal conséquents, là, avec notre critique, là. Il devrait
retirer son projet de loi puis
retourner à sa table à dessin. On ne pense pas, M. le Président, que l'approche
coercitive est une bonne approche. Vous
pouvez y aller incitatif, M. le Président, incitatif, proposer des mesures qui
vont inciter les personnes à s'investir pour sortir, justement, de la
pauvreté. D'ailleurs, M. le Président — moi, je fais une petite
parenthèse, là — ça
serait intéressant de l'entendre, le
ministre, dire : Je reconnais qu'il y a beaucoup de gens qui vivent dans
la pauvreté, là, qui n'ont pas fait
le choix de la pauvreté puis qui veulent sincèrement s'en sortir puis je ne
vais pas les punir pour qu'ils s'en sortent,
je vais les aider pour qu'ils s'en sortent. C'est ça, ma job, comme ministre.
Ça, on aimerait ça l'entendre dire, M. le Président, de sa part, de sa
part.
• (16 heures) •
Il
y en a beaucoup qui l'ont dit, hein, le projet de loi, il alimente les
préjugés, il n'aide pas bien, bien, M. le Président, sur ce plan-là, tu
sais, parce que le message que tu envoies... Quand tu dis à quelqu'un : Je
vais t'imposer un emploi convenable, ce que
ça envoie comme message, c'est : Moi, je vais juger ce qui est bon pour
toi puis, si ça ne fait pas ton affaire, ca-clang! je te coupe de
moitié, mon ti-pit. Vous ne trouvez pas que ça fait un peu autoritaire, ça fait
un peu l'État «knows best»? On va te le
dire, ce qui est bon pour toi, puis,
si ça ne fait pas, on va te punir. Je vais te le dire, moi. C'est moi, le ministre. Ça va marcher, tu
vas voir. Tu es bien mieux de faire ce que je te dis, sinon je te coupe :
600 $ à 300 $,
tiens, toi! Ça va-tu assez bien?
M.
le Président, ce n'est pas la bonne voie, ce n'est pas un bon projet de loi. On
craint beaucoup que l'abolition d'Emploi-Québec
va nous faire perdre de l'expertise puis pourrait amener une privatisation des
services en emploi. Puis on le sait,
qu'ils aiment ça, le privé. Eux autres, ils aiment ça, le privé. En santé, ils
aiment ça; dans les services de garde, ils aiment ça, puis on craint
qu'ils aiment ça aussi dans l'aide à l'emploi, M. le Président.
Motion de scission
Alors, pour toutes
ces raisons, je vais déposer une motion de scission qui se lit comme
suit :
«Qu'en
vertu de l'article 241 du règlement de l'Assemblée nationale, le projet de
loi n° 70, Loi visant à permettre une meilleure adéquation
entre la formation et l'emploi ainsi qu'à favoriser l'intégration en emploi
soit scindé en deux projets de loi : un
premier intitulé Loi visant à permettre une meilleure adéquation entre la
formation et l'emploi, comprenant les
articles 1 à 18 et l'article 38 à l'exception des mots "Celles de la
partie II et de l'article 37 de la présente loi entreront en
vigueur à la date ou aux dates déterminées par le gouvernement."; [et] un
second intitulé Loi visant à favoriser
l'intégration en emploi, comprenant les articles 19 à 37 et
l'article 38 à l'exception des mots "de la partie I de la
présente loi entrent en vigueur le (indiquer
ici la date de la sanction de la présente loi). Celles".» Je ferme les
guillemets, M. le Président. Voilà la motion de scission.
Le Vice-Président
(M. Gendron) : Alors, merci, M. le...
M. Drainville :
...bonne idée, M. le Président. Merci de votre écoute attentive, et à la
prochaine.
Le Vice-Président
(M. Gendron) : Merci, M. le leader de l'opposition officielle, de
votre intervention.
Comme
le veut la coutume, nous allons suspendre quelques minutes, parce que je veux
prendre connaissance du texte. Et je
vais consulter rapidement, et on verra par la suite pour la recevabilité, comme
le veut la pratique. Et je donnerai l'occasion...
Une voix :
...
Le Vice-Président
(M. Gendron) : ...je donnerai l'occasion, avant de statuer, si les
leaders de chacune des formations politiques
veulent inspirer la présidence... pour que la décision soit la plus sage
possible. Ça sera fait comme on l'a toujours fait.
Les travaux sont
suspendus pendant quelques instants.
(Suspension de la séance à 16 h 2)
(Reprise à 16 h 32)
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
Alors, merci. Nous allons reprendre là où nous en étions. Il y a eu une suspension de quelques minutes à la demande
des deux formations politiques qui l'ont demandée, ils auraient pu être trois, parce que, règle générale,
quand il y a une motion de scission qui est présentée, on leur donne le temps
de préparer l'argumentaire qu'ils veulent soutenir pour être en faveur
ou en défaveur de la motion de scission.
Débat sur la
recevabilité
La
présidence, avant de faire une suspension et de prendre la décision en
délibéré, donne l'occasion aux partis concernés
d'exposer. Alors, je suis rendu là, je cède la parole à Mme la leader de
l'opposition officielle pour qu'elle fasse valoir les arguments pour lesquels elle pense qu'il y aurait lieu que la
présidence donne suite ou pas. À vous, Mme la leader de l'opposition
officielle.
Mme
Agnès Maltais
Mme
Maltais : Leader adjointe. Merci, M. le Président. Alors, il s'agit
d'une motion de scission que je qualifierais de classique, dans le sens où il y a déjà plusieurs décisions dans le
même sens que ce type de motion de scission que nous venons de déposer.
Sur quelles
bases nous fondons-nous en général pour décider qu'une motion de scission est
acceptable, qu'elle est acceptable par l'Assemblée nationale?
D'abord,
est-ce que le projet de loi n° 70, en l'occurrence, contient plus d'un
principe? À l'évidence, le projet de
loi n° 70 contient deux principes. Le premier principe est celui qui vise
une meilleure adéquation entre la formation et l'emploi et qui, d'ailleurs, si on lit les notes explicatives, M. le
Président, est très, très bien décrit comme étant dans sa première partie. La première moitié des notes
explicatives du projet de loi décrit bien toutes les fonctions administratives,
celles sur le Fonds de développement du marché du travail, Commission des
partenaires du marché du travail et Emploi-Québec,
tout ce qui a une relation avec une meilleure adéquation entre la formation et
l'emploi. Ce sont des unités administratives
qui sont soit abolies soit fusionnées. Alors, on est vraiment dans une zone
administrative décrite très bien dans les notes explicatives et
complètement séparée.
Et les notes
explicatives, ensuite, tombent dans sa deuxième partie, le projet de loi
modifie la Loi sur l'aide aux personnes afin d'instaurer le programme
Objectif emploi. Effectivement, la deuxième partie de la loi vise à favoriser l'intégration en emploi. Il s'agit là de modifications...
en fait, la création d'un nouveau programme, Objectif emploi, qui
s'adresse exclusivement aux personnes vivant de l'aide, recevant de l'aide de
dernier recours.
Il s'agit
donc, M. le Président, d'un fait établi, pour moi, si on lit bien la loi, que
chaque partie du projet de loi ne
constitue pas une fraction d'un tout, le tout constituant le principe,
puisqu'il y a non pas un tout à un principe séparé en deux arguments, mais bel
et bien deux principes inscrits nommément dans chaque partie différente de la
loi. Chaque partie du projet de loi peut être considérée distinctement
et ne constitue pas une modalité l'une de l'autre, puisque la première partie, c'est vraiment des changements administratifs dans tout ce qui constitue l'assemblage de la Commission
des partenaires du marché du travail et du
Fonds de développement du marché du travail, l'adéquation entre la formation
et l'emploi. Tandis que l'autre principe, ce
n'est pas une modalité que l'aide de dernier recours, que ce programme qu'on
va créer, puisque, d'ailleurs, M. le
Président, l'aide de dernier recours n'est pas sous la responsabilité de la
Commission des partenaires du marché
du travail, elle est sous la responsabilité du ministère de l'Emploi et de la
Solidarité sociale. Donc, ce n'est
pas des modalités de l'un, de l'autre, puisque ce sont deux parties séparées
même dans leur façon d'exister dans l'appareil public.
En outre, les
projets de loi qui résulteraient de la scission constituent des projets de loi
cohérents en eux-mêmes. Vous pouvez séparer les deux parties, là,
chacune des parties se tient. D'ailleurs, le gouvernement aurait pu décider d'opérer la fusion de ses modifications dans ses
changements administratifs, d'une part, ou décider, comme c'est arrivé dans le passé... Et là on peut vraiment regarder
dans l'histoire du gouvernement, non pas de l'Assemblée nationale, mais l'histoire du gouvernement, où des changements à
des programmes de l'aide de dernier recours ont été faits de façon séparée.
Dans ce cas-ci, la réinscription dans la loi
est bien indiquée en deux parties complètement différentes. Enfin, et ça, c'est
important, je pense, pour l'Assemblée
nationale, tous les éléments contenus dans le projet de loi initial sont
intégralement redistribués dans les projets de loi proposés sans n'y
ajouter aucun élément nouveau.
D'où viennent
ces critères? Ces critères ont été établis à de nombreuses reprises, M. le
Président, que vous dotez... les
décisions qu'on connaît bien : Lefebvre, le 3 décembre 1990;
Pinard, le 11 décembre 1997; Pinard, le 3 juin 1998;
Brouillet, le 29 novembre 2000; le
député d'Abitibi-Ouest — mais c'est vous, M. le Président — 5 juin 2006; Mme Houda-Pépin, le 18 mai 2011; et
enfin, je vais le nommer, le vice-président, le député de Marquette, que je salue,
avec la décision du 3 novembre 2015 sur le projet de loi
n° 59, que j'avais plaidé à l'époque.
Alors, en
plus, dans sa décision du 27 mai 2004, le député d'Abitibi-Ouest indiquait — puis je reviens toujours à ça, c'est important — qu'«une motion de scission doit contenir les
précisions nécessaires afin d'être déclarée recevable sans que la présidence ait à modifier le contenu
de la motion». Vous ne pouvez pas rejouer dans la motion. Il n'y a aucun
problème, elle est solide, la motion. En
plus, vous ne pouvez apporter que des corrections de forme, et la modification
de certains articles visés par une motion de scission n'entre pas dans cette
catégorie de correction.
Enfin,
dernier argument, il ne doit pas y avoir de réécriture des articles. M. le Président,
comme je le dis, je vais le dire
comme je le pense, ce serait bien le bout, mais il n'y a pas de réécriture des
articles proposée ici, ils sont intégralement disposés dans chacune des lois, évidemment sauf l'entrée en vigueur.
L'entrée en vigueur, c'est parce que, ce n'est pas compliqué, il y a un article d'entrée en vigueur,
on fait deux lois, si on ne le divise pas, c'est impossible. Alors, il y a une
habitude, de ce côté-là, d'accepter que, là,
on modifie l'article de l'entrée en vigueur. Alors, voilà, M. le Président, ce
que j'avais à dire. Voilà ma plaidoirie.
Le Vice-Président (M.
Gendron) : Alors, je vous remercie, Mme la leader de l'opposition
officielle, de vos arguments. On va essayer
d'être le plus cohérent possible, mais je vous remercie d'avoir l'occasion de
nous donner votre point de vue avant de prendre en délibéré la décision.
Je cède maintenant la parole à Mme la leader
adjointe du gouvernement. À vous la parole.
Mme
Dominique Vien
Mme Vien :
Merci beaucoup, M. le Président. Vous serez sans surprise si je vous dis que,
pour nous, cette motion déposée par
le Parti québécois est actuellement et de façon permanente assez irrecevable.
Et, pour nous, à sa face même, M. le
Président, le projet de loi n° 70, qui est la Loi visant à permettre une
meilleure adéquation entre la formation et l'emploi ainsi qu'à favoriser l'intégration en emploi, ne
contient qu'un seul, et qu'un seul grand principe, il s'agit de l'intégration
sur le marché du travail du plus grand
nombre de personnes possible. Alors, ça, je pense que c'est important de le
camper et de le rappeler d'entrée de jeu.
M. le
Président, je n'ai pas besoin de vous rappeler ces choses-là, mais je sens
quand même que c'est nécessaire cet
après-midi, à l'effet que le Québec fait face à de grands défis au moment où on
se parle, que ce soient des défis de type
démographique, que ce soient des défis de prises de retraite qui seront
massives, ou encore de vieillissement de la population. Tout ça dresse
un contexte, tout ça dresse un environnement dans lequel nous évoluons
actuellement.
• (16 h 40) •
M. le Président, avant d'en arriver de façon
peut-être plus pointue sur un argumentaire un peu plus pointu ou juridique, j'aimerais quand même vous donner quelques
informations très importantes qui vont vous éclairer sur la décision que nous avons prise de présenter le projet de loi
n° 70 dans la facture que nous l'avons déposé, c'est-à-dire que, chaque
année, M. le Président, actuellement, ce
sont 16 000 personnes qui arrivent à l'aide sociale,
16 000 personnes, 16 000 Québécois et Québécoises qui arrivent à l'aide sociale à chaque
année, et que, d'ici les cinq prochaines années, M. le Président, il nous
faudra pourvoir... — écoutez
bien — il nous
faudra pourvoir 725 000 emplois sur le sol québécois. Alors, voilà
donc une force de travail qui existe,
qui est là. On parle de 16 000 personnes qui sont donc disponibles et
que nous voulons rejoindre, M. le Président.
Alors, le
projet de loi vient ainsi, donc, confirmer l'adéquation nécessaire entre la
formation, l'emploi, l'intégration à l'emploi.
Et je pense que le projet de loi n° 70, c'est exactement ce qu'il vient faire. Il nous fournit aussi toute
la logique et toute la cohérence... Et je m'inscris un peu en faux par
rapport à ce que soulevait la leader adjointe de l'opposition officielle. Nous sommes d'une grande cohérence
avec le projet de loi n° 70, l'ensemble des ingrédients et des éléments pour atteindre nos objectifs s'y retrouvent, nous
pouvons les considérer comme étant des modalités. Il s'agit, bien entendu,
de participer à l'économie du Québec, mais
surtout, M. le Président, de participer à l'augmentation de la dignité chez nos
personnes, chez nos Québécois qui entrent à l'aide sociale à chaque année.
M. le
Président, en tout respect, la députée de Taschereau et leader adjointe de
l'opposition officielle, si j'ai bien entendu tout à l'heure, disait
que, dans les notes explicatives... elle soulevait les notes explicatives pour
soulever... ou soutenir sa prétention à
l'effet qu'il y ait plusieurs principes à l'intérieur de son projet de loi. Eh
bien, nous avons aussi, effectivement, des décisions, à l'époque, qui
ont été prises et rendues sur le banc à l'effet qu'effectivement les notes explicatives n'ont aucune valeur juridique en soi,
et ça a été décidé en 1985 par le président Richard Guay, M. le Président.
Alors, à
notre avis, à notre avis, l'opposition officielle ne saisit pas le portrait
global et la teneur de ce projet de loi là pour déposer une motion de
scission. D'ailleurs, c'est assez étonnant de voir que l'opposition officielle,
si ma mémoire est bonne, et je pense qu'elle l'est, ait appuyé une motion d'un
autre parti de l'opposition, en fait de Québec solidaire, à l'effet d'y aller
avec une motion de report de ce projet de loi là. Alors, on a l'impression que
l'opposition officielle cherche à tout prix à s'éloigner de ce projet de loi
n° 70.
Alors, M. le
Président, je termine en citant Louise Bégin, une ancienne députée de
Bellechasse, mais aussi une ancienne
présidente, qui disait ceci : «Même si le projet de loi contient plusieurs
modalités — ce qui
est le cas selon nous aujourd'hui — il ne faut pas nécessairement
en conclure qu'il existe plusieurs principes.» Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Gendron) :
Alors, je vous remercie, madame...
Une voix : ...
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
Juste une seconde. Je vous remercie, Mme la leader
adjointe du gouvernement, de votre intervention. Oui, très rapidement, parce
que je veux me... prendre le moins de temps possible. Allez.
Mme
Agnès Maltais
Mme
Maltais : Écoutez, ça
va être bref, simplement une petite
réplique aux commentaires qui ont été énoncés de l'autre côté. Une intention gouvernementale n'est pas un principe de projet de loi. La preuve, par exemple, le plan de lutte à la radicalisation contient deux lois, le n° 59
et le n° 62. D'ailleurs, Fatima Houda-Pépin, dans sa décision du
18 mai 2011, rappelait que,
par exemple, pour mettre en oeuvre un discours du budget, il peut y avoir plusieurs lois. Il faut faire attention à l'intention gouvernementale et les principes d'une loi. Et ça allait dans le sens des propos de
Claude Pinard, 3 juin 1998,
qui indiquait qu'«agir autrement ferait en sorte que l'article 241 de notre règlement serait inapplicable», puisque, s'il
suffisait d'une intention gouvernementale, on ne pourrait plus jamais
proposer de scission. C'est très clair, M. le Président, pour
moi.
Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, je
vous remercie de part et d'autre. On va essayer de prendre le moins de temps possible, mais je vais aller prendre la décision en délibéré.
Et les travaux sont
suspendus pour le plus court temps possible. Les travaux sont suspendus. Merci.
(Suspension de la séance à
16 h 44)
(Reprise à 17 h 10)
Décision de la présidence
Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, merci. Nous allons poursuivre là où nous
avons laissé. La présidence s'est
retirée pour prendre en délibéré les arguments sur une motion de scission, et
je suis maintenant en mesure de rendre ma décision sur la recevabilité de la motion de
scission présentée par M. le député de Marie-Victorin dans le cadre du débat sur l'adoption du principe sur le projet de loi n° 70, Loi visant à permettre une meilleure adéquation
entre la formation et l'emploi ainsi qu'à favoriser l'intégration en
emploi.
Selon
la leader adjointe du gouvernement, le projet
de loi ne contient qu'un seul principe,
soit l'intégration du plus grand
nombre de personnes sur le marché du
travail. Tout ce qui est dans le projet de loi vise cet objectif, disait-elle. Il ne serait donc pas possible de
le scinder, car il s'agit d'un tout indissociable. Pour cette raison, la motion
de scission devrait être déclarée irrecevable. C'était un de ses points
de vue.
Quant à la leader
adjointe de l'opposition officielle, elle est d'avis que le projet de loi
contient bel et bien deux principes qui
peuvent être considérés directement et que la motion de scission propose deux projets de loi cohérents, qui reprennent intégralement tous les éléments du projet
de loi n° 70.
Je désire remercier
les deux leaders adjointes — du
gouvernement et de l'opposition officielle — pour leurs commentaires. Après avoir analysé les arguments
soulevés de part et d'autre à l'égard de la recevabilité de la motion de
scission, voici comment j'entends me prononcer sur la question.
La
jurisprudence, elle est nombreuse, elle est longue. La jurisprudence
parlementaire a plusieurs fois reconnu que,
pour qu'une motion de scission soit déclarée recevable, un projet de loi doit
comporter plus d'un principe, et chaque projet de loi résultant de la scission, si elle avait lieu, doit être
cohérent, complet et pouvoir vivre indépendamment l'un de l'autre. Alors, elle a également établi qu'il faut
distinguer un principe, qui est un élément essentiel du projet de loi, d'une
modalité, qui est plutôt accessoire au principe.
Qu'est-ce
qu'il en est du projet de loi n° 70?
Après analyse, il ressort, bien sûr,
qu'il contient plus d'un principe. Tout
d'abord, bien que les notes explicatives ne soient qu'un élément à prendre en
considération parmi d'autres, il est très
évocateur de constater que, d'entrée de jeu, elles indiquent, les notes
explicatives, que le projet de loi doit comporter deux parties. Dans la description qui est faite de
chacune des parties, la présidence retient qu'il s'agit de deux principes
distincts. L'un concerne une série de
modifications à différentes lois existantes afin de permettre une meilleure
adéquation entre la formation et
l'emploi, et l'autre concerne des mesures favorisant l'intégration en emploi et
vise plus précisément l'instauration d'un programme, le programme
Objectif Emploi, et à la fin du programme Alternative jeunesse.
Il
s'agit de deux principes distincts qui impliquent des modifications à des lois
tout à fait différentes. Cela ressort d'ailleurs
de la structure même du projet de loi, qui identifie nommément ces deux parties
distinctes. Ainsi, à la lumière des critères établis par la
jurisprudence, je ne suis pas en présence de simples modalités d'un principe
plus large, elles doivent plutôt être
considérées distinctement comme deux éléments essentiels du projet de loi. Je
dois préciser à ce sujet que la
présidence a souvent mentionné qu'il y a une distinction à faire entre ce
qu'est un principe aux fins de l'analyse de la recevabilité d'une motion
de scission et l'objectif visé par celui qui a présenté le projet de loi. C'est
deux affaires complètement distinctes.
Pour
nos fins, la jurisprudence est donc claire quant à ce qui doit me guider. Ce
qui doit me guider, là, c'est m'en tenir au contenu du projet de loi tel
qu'il a été présenté, et je ne peux que constater qu'il contient plus d'un
principe. Cela dit, à titre de président, je
dois poursuivre l'analyse et vérifier... Parce que le deuxième élément que je
dois vérifier, c'est, chacune des
parties, si elle était prise individuellement, est-ce qu'elle peut exister de
manière autonome et former un tout cohérent.
Dans
sa motion, le député de Marie-Victorin propose de scinder le projet de loi
n° 70 en deux projets de loi. À savoir,
un premier intitulé Loi visant à permettre une meilleure adéquation entre la
formation et l'emploi comprenant les articles
1 à 18 et l'article 38 à l'exception des mots «Celles de la partie II et de
l'article 37 de la présente loi entreront en vigueur à la date ou aux dates déterminées par le gouvernement.»; un
second projet de loi intitulé Loi visant à favoriser l'intégration en emploi, comprenant les articles
19 à 37 et l'article 38 à l'exception des mots «de la partie I de la présente
loi entrent en vigueur le (indiquer ici la date de la sanction de la présente
loi)».
Cette
motion vise donc bel et bien à répartir les principes dans deux projets de loi.
De plus, la manière dont la motion de scission répartit les différents
éléments du projet de loi en fait deux projets de loi cohérents qui pourraient vivre de façon complètement autonome, car il n'existe
aucune référence entre les dispositions de la partie I et celles de la
partie II qui les empêcherait de se retrouver dans deux projets de loi
distincts.
Quant à la manière
dont l'article d'entrée en vigueur est scindé, la jurisprudence parlementaire a
déjà indiqué à plusieurs occasions qu'on ne peut réécrire les articles d'un
projet de loi dans le but de la rendre recevable, la seule exception étant
l'article qui concerne les dispositions d'entrée en vigueur.
La
motion de scission, telle que présentée, respecte les critères énoncés par la
jurisprudence. Par conséquent, je déclare la
motion de scission recevable et je cède le siège à mon collègue pour la
poursuite des échanges sur la suite des choses, et il va vous
l'indiquer. Merci.
Débat sur la motion
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, en vertu de l'article 241 du règlement, cette motion fait l'objet d'un débat restreint de deux heures. La répartition du temps
de parole pour ce débat restreint s'effectuera comme suit :
56 min 30 s sont allouées
au groupe parlementaire formant le
gouvernement;
33 min 30 s sont allouées au groupe parlementaire formant l'opposition officielle;
23 minutes sont allouées au deuxième groupe d'opposition; sept minutes
sont allouées aux députés indépendants, sous
réserve d'un maximum de deux minutes pour la députée d'Arthabaska. Dans ce cadre, le temps non
utilisé par les députés indépendants ou par l'un des groupes parlementaires sera redistribué entre les groupes parlementaires selon les
proportions établies précédemment. Enfin, les interventions ne seront
soumises à aucune limite de temps.
• (17 h 20) •
Alors,
je suis prêt à céder la parole à un premier intervenant, et je la cède à M. le ministre de l'Emploi et de la
Solidarité sociale.
M. François Blais
M.
Blais : Alors, merci beaucoup, d'abord, M. le Président, de me céder
la parole. Bien sûr, c'est possiblement scindable, mais je crois qu'il ne le faut pas. Je pense qu'il faut, là,
s'assurer que ce projet de loi là suive le chemin le plus rapide possible et que les principaux éléments que
l'on y retrouve, là, soient mis en place le plus rapidement possible.
Je
vais commencer peut-être par donner un petit peu un arrière-fond de la
situation qui confronte le Québec et qui
rend nécessaire l'adoption de ce projet de loi. Alors, nous sommes aujourd'hui,
en 2015, à des niveaux records de taux
d'activité chez les 15-64 ans au Québec, 78,9 %, avec des taux d'emploi de
72,8 %. Donc, ça n'a jamais été aussi élevé. Les Québécoises et les Québécois participent au marché du travail
comme ils ne l'ont donc jamais fait auparavant. Et, malgré tout, malgré tout, ce n'est pas suffisant, les besoins en
main-d'oeuvre vont aller rapidement, là, grandissant au cours des prochaines années. La croissance de
l'emploi et le contexte démographique font en sorte que 725 000 emplois
seront à combler dans les cinq prochaines années.
Le
taux de chômage au Québec est donc appelé à diminuer, à continuer à diminuer de
façon constante, notamment, là, pour
des raisons démographiques, là, évidentes. Il est déjà passé de 8 % en
2011 à 7,6 % en 2015. Dans un horizon de trois ans, les prévisionnistes estiment qu'ils pourraient retrancher
un autre point de pourcentage pour avoisiner les 6,5 %. On n'a jamais vu ça au Québec... en tout cas, depuis
très, très, très longtemps. Donc, à moyen terme, le taux de chômage au
Québec va frôler le plein-emploi.
Les
besoins du marché du travail, par ailleurs, sont appelés à augmenter dans tous
les secteurs d'activité, que ce soit en production de biens, en
construction ou dans le secteur des services. Les emplois seront aussi
disponibles en grand nombre dans tous les
niveaux de qualification, autant pour les emplois hautement qualifiés que l'on
recherche, bien sûr, qui exigent, par
exemple, un diplôme collégial ou universitaire que dans les emplois peu
qualifiés qui n'exigent qu'un diplôme secondaire, par exemple, et même
dans les emplois qui n'exigent aucune qualification.
Pour répondre à ces
importants besoins de main-d'oeuvre, le Québec doit obtenir la contribution de
tous les différents groupes au marché de l'emploi : les jeunes, les
immigrants, les travailleurs expérimentés, les personnes en chômage et les primodemandeurs de l'aide sociale.
Donc, ça, c'est l'arrière-fond, l'arrière-fond de la situation, c'est qui
nous confronte, et c'est la raison pour laquelle nous avons besoin du projet de
loi n° 70.
Il
faut bien comprendre aussi que la structure démographique est telle qu'aujourd'hui il y a plus personnes qui
quittent l'âge de travailler, donc les 15 à 65 ans, qu'il y a de
personnes qui rentrent à l'intérieur de ce groupe. Donc, il y a une pression
énorme, et on doit trouver des nouvelles façons de répondre à ces besoins.
Qu'est-ce
que contient maintenant le projet de loi et pourquoi nous avons besoin de
l'ensemble des éléments et des instruments
qui sont à l'intérieur de ce projet de loi pour nous faire avancer au Québec?
Il y a tout d'abord une réorganisation administrative
du statut d'Emploi-Québec. Il faut faire très attention. On a entendu nos
collègues d'en face dire : Écoutez, Emploi-Québec, c'est une des
grandes réalisations que nous avons faites, nous avons rapatrié au Québec — et
c'était historique, et ça, il faut le
reconnaître, hein? — des
pouvoirs extrêmement importants en matière d'emploi, ça nous a été
reconnu par le fédéral à partir d'ententes financières extrêmement importantes.
Alors, je veux vous dire aujourd'hui, M. le
Président, que, d'aucune façon, ce qui est dans le projet de loi — et je ne l'ai pas entendu de mes collègues,
heureusement — ne remet en question les arrangements
financiers que nous avons avec le gouvernement fédéral pour qu'il continue, bien sûr, à contribuer aux mesures
d'employabilité... aux services d'Emploi-Québec que nous avons déjà avec
nous. Donc, sur ce point-là, il faut être sécurisé.
Il
faut bien comprendre que, ces dernières années, de plus en plus les liens qui
distinguaient Emploi-Québec et le ministère
de l'Emploi étaient devenus extrêmement ténus, et on veut simplement, disons,
reconnaître dans la réalité ce qui
s'est passé comme changements. Mais essentiellement, pour nous, c'est
administratif et, surtout, ça ne met aucunement en cause les ententes et les gains que le Québec a faits en matière de
services à l'emploi, là, dans ses négociations avec le gouvernement fédéral. Premier ingrédient, donc,
important. Administratif, mais qui va nous donner une prise plus forte,
là, sur les outils mis à la disposition par Emploi-Québec.
Deuxième
élément, la Commission des partenaires du marché du travail. Et ça, je pense
que, généralement, les transformations que nous recherchons ont été
assez bien accueillies en commission parlementaire. Quelles sont ces transformations? L'objectif le plus important, c'est de
faire en sorte que la Commission des partenaires du marché du travail... Et peut-être, pour les fins des
auditeurs qui nous écoutent qui ne connaissent pas bien cette organisation-là,
il s'agit d'un organisme qui
accueille de manière paritaire les représentants des grands syndicats du
Québec, les représentants des
organisations patronales du Québec, représentants du milieu communautaire et
représentants du milieu de l'éducation. Et qu'est-ce qu'ils font, ces gens? Auparavant, ces dernières années,
ils avaient géré différents programmes, et on considère qu'il faut les amener vers un rôle beaucoup plus
stratégique par rapport à l'emploi. Ce qu'on leur demande de faire et ce
sur quoi on insiste dans le projet de loi, c'est de clarifier un peu leur rôle
pour faire en sorte qu'ils nous donnent des indications
les plus précises sur les besoins actuels du marché du travail, mais
aussi — et ça,
c'est un élément qui est nouveau dans le projet de loi — sur
les besoins futurs du marché du travail.
Parce que
c'est bien utile d'avoir une idée de ce que l'on a de besoin, mais souvent il
est trop tard, la formation n'est pas
encore... les gens sont en formation, c'est très bien, mais ça va prendre un
certain temps avant qu'ils terminent. Mais regarder un peu plus loin, et
regarder quels sont les besoins futurs, et pouvoir alimenter les établissements
d'enseignement, que ce soit au niveau
secondaire, que ce soit au niveau collégial ou encore universitaire, ça a aussi
un rôle important. Donc, on reconnaît
la fonction extrêmement stratégique des partenaires du marché du travail pour
aider le Québec à identifier quels
sont les besoins de formation et s'assurer que ces formations-là répondent le
mieux possible, hein, le mieux
possible aux besoins du marché du travail. Donc, il y a eu différentes
discussions là-dessus, on insiste sur l'expression «adéquation
formation-emploi» parce que cette adéquation, elle est plus importante que
jamais.
Dans un
monde où il y a beaucoup de chômage, dans un monde où il y a beaucoup de
disponibilité de main-d'oeuvre, bon,
on peut accepter que la formation soit plus ou moins rattachée avec les besoins
du marché du travail parce que, de toute
façon, il y aura du temps pour trouver les mécanismes de formation appropriés,
il y aura une plus grande main-d'oeuvre, les employeurs peuvent choisir ceux qui sont mieux formés, de manière
plus adéquate, mais ce monde-là n'existe plus, hein? Moi, je fais le
tour du Québec depuis ma nomination, je rencontre des gens dans les CLE, j'ai
rencontré des employeurs en Montérégie encore cette semaine, et tout le monde,
tous les employeurs nous disent une chose : Le problème le plus important
que nous rencontrons aujourd'hui, c'est le défi de la main-d'oeuvre, c'est de
trouver une main-d'oeuvre et faire en sorte
que cette main-d'oeuvre soit la plus qualifiée possible. Soyons raisonnables,
la plus qualifiée possible pour
occuper les emplois. Donc, dans un monde où il y a un bassin qui est plus
faible, hein, d'employés disponibles, l'enjeu
de l'adéquation formation-emploi devient crucial parce que ça permet de perdre
beaucoup moins de temps dans la gestion
de la ressource, dans l'identification de la ressource, et, bien sûr, si la
personne est prête rapidement à entrer en fonction, il y a aussi des
gains qui sont possibles pour les organisations.
Donc, quand
on regarde aujourd'hui, là, d'où va venir notre richesse collective, elle peut
venir de deux endroits principaux :
l'innovation, qu'elle soit technologique ou encore sociale, même juridique, et
aussi cette adéquation plus grande entre la formation et l'emploi. Donc, ce
qu'on demande à la Commission des partenaires du marché du travail, c'est de mettre de côté la gestion de
programmes — ce
qu'ils ont fait ces dernières années, mais ce qu'Emploi-Québec et le ministère peuvent très bien faire — mais davantage s'interroger sur les besoins
réels, les besoins futurs et — c'est l'ajout important dans le
projet de loi — demander
aux établissements d'enseignement de développer les formations et aussi — c'est la nouveauté — de rendre compte à la Commission des
partenaires du marché du travail sur l'offre de cette formation à venir. Et, si les établissements d'enseignement ne
sont pas en mesure d'offrir la formation en question, les établissements auront à répondre de la raison
pour laquelle c'est impossible, ce qui est vraiment une nouveauté. Donc,
il y a un lien très fort, qui n'est pas un
ien de suprématie, mais un lien de complémentarité, hein, qui est nouveau entre
la Commission des partenaires du marché du
travail, bien entendu, et le monde de l'enseignement, et je pense que tout
le monde a à gagner là-dessus.
On a parlé
aussi de la formation duale. La formation duale, hein, fait partie, disons, de
la philosophie même de l'adéquation formation-emploi. Donc, il y a peu
de mention de la formation duale à l'intérieur du projet de loi, mais c'est
extrêmement important de comprendre que, si nous voulons faire des progrès du
point de vue de l'adéquation formation-emploi,
M. le Président, il faut s'assurer que les personnes en formation, surtout en
formation professionnelle et en
formation technique, passent davantage de temps, de temps de formation, à l'intérieur des organisations. La situation actuelle
au Québec est celle-ci, et nous sommes uniques au Québec
quand on regarde l'ensemble du Canada et quand on se compare aussi avec d'autres
pays dans la façon dont nous formons nos professionnels.
Essentiellement, la formation se fait dans les établissements, et, en fin de parcours,
en général à la toute fin, vous procédez
à un stage qui peut durer quelques semaines ou quelques mois. Une fin de
parcours, c'est un peu tard pour faire un
stage, hein? Si vous le faites plus tôt, dès les premiers moments de votre
formation, ne serait-ce qu'un stage d'observation dans une entreprise ou une organisation, le mérite, c'est que vous saurez rapidement
si ça vous intéresse, si vous vous imaginez
dans ce contexte de travail dans les prochaines années. Si ce n'est pas le cas,
bien, tant mieux, vous changez, vous
ne perdez pas, hein, toute votre énergie à faire la formation. Mais, au
contraire, si vous découvrez que, vraiment,
ça vous intéresse encore plus que vous ne le croyiez, à ce moment-là vous vous
engagez davantage dans ce cadre de formation.
Et les chiffres sont très, très clairs, ce type de formation, avec une alternance
travail-études, stage-études, hein, montrent...
les chiffres nous indiquent clairement que les taux de réussite sont beaucoup
plus élevés, la rétention aussi est plus forte. Donc, il y a à
l'intérieur de cette recherche d'adéquation formation-emploi aussi une proposition, une vision d'améliorer, de rehausser la place des stages à
l'intérieur de la formation et que ces stages-là, bien sûr, soient faits
dans les meilleures conditions, avec un mentorat, bien sûr, des entreprises.
C'est une
révolution pour le Québec. Il faut comprendre que ça va prendre du temps, ça va
prendre des efforts. Mais je
rencontre aujourd'hui le milieu des entreprises, et les entreprises, de plus en
plus, sont prêtes. Elles comprennent peut-être
qu'elles n'ont plus le choix, mais elles comprennent aussi qu'elles peuvent
jouer un rôle social plus important dans
la formation. Il y a des efforts à faire du côté des plus petites entreprises,
pour qui c'est nouveau comme philosophie. Encore une fois, Emploi-Québec est en mesure de
leur offrir des services pour faire en sorte que ce mentorat-là, là, qui,
quand même, pèse un peu lourd dans une
entreprise, surtout une petite entreprise, ce mentorat-là puisse être partagé
entre différentes entreprises.
• (17 h 30) •
Donc, il y a,
à l'intérieur du projet de loi cette vision d'un changement de rôle de la
Commission des partenaires du marché
du travail afin d'amener la commission vers une vision beaucoup, beaucoup plus
stratégique, bien sûr, de son rôle, autant des besoins actuels que des
besoins futurs.
Je prends une
petite gorgée d'eau et je continue maintenant avec un troisième élément, qui
est aussi très important dans le
projet de loi. Nous avons au Québec, hein, une innovation qui est la loi sur la
formation de la main-d'oeuvre, qui oblige
l'ensemble des entreprises du Québec... en tout cas, les entreprises qui ont
une masse salariale de plus 2 millions, qui les oblige à une
dépense en formation parce que nous croyons que la formation est fondamentale
pour maintenir la productivité et augmenter la productivité des entreprises. Je
pense que, là-dessus, il y a un consensus autour de la Chambre qu'il faut
maintenir et même renforcer cette loi.
On a vu ces
dernières années un certain nombre d'écueils, d'exagérations. On se rappellera
ici... certainement, certains
collègues se rappelleront des formations avec des clowns, et, bon, on peut
considérer que ce n'était pas nécessairement
le type de formation auquel on pense quand on veut améliorer la productivité
d'une entreprise, mais, qui sait, peut-être que, hein, ça peut aider
dans certains cas. Mais on a vu des excès. On a vu aussi des formations qui,
finalement, étaient offertes à un tout petit nombre d'employés, des cadres
supérieurs, par exemple, qu'on envoyait à l'étranger, et sans se préoccuper
suffisamment des employés, là, qui sont en production.
Il y a, à l'intérieur de la loi, des dispositions extrêmement importantes, tout d'abord pour resserrer la
nature des dépenses qui vont être
admises. C'est, si ma mémoire est bonne, autour de 1,5 milliard de dollars qui sont reconnus, là, par Revenu
Québec, qui sont reconnus en termes de dépenses par les entreprises du Québec. Est-ce
que c'est possible de faire un effort pour que ces dépenses soient
plus probantes, soient plus sérieuses, aient un impact plus important sur la
productivité? La réponse est oui. Et c'est
la raison pour laquelle on se donne des moyens, à l'intérieur du projet de loi, de le resserrer.
Je le dis, parce qu'il y avait une discussion au Québec sur le sujet. Il y avait des représentants des entreprises qui disaient :
Écoutez, mettez fin à ça. C'est une taxe sur la masse salariale. Une taxe sur
la masse salariale, c'est un effort important,
parce que l'entreprise n'a pas fait encore de bénéfice, mais qu'elle
doit quand même assumer sa taxe sur la masse salariale. Tous,
hein, on reconnaît... en général, les économistes
reconnaissent qu'une taxe sur la masse salariale, ce n'est peut-être pas
la chose la plus évidente, là, du point de vue de la prospérité économique,
mais il y a eu un consensus qui s'est
dégagé, qu'il fallait maintenir la loi qu'on appelle maintenant la loi du
1 %, la maintenir, mais la bonifier de deux façons; premièrement,
en resserrant les critères comme je l'ai mentionné, donc plus difficile de
financer des formations qui sont plus ou moins pertinentes.
Et deuxièmement, et c'est l'innovation, et je
peux vous dire que j'ai été personnellement engagé dans cette discussion dans
mon premier séjour au ministère, c'est la possibilité que les employeurs
utilisent cette dépense pour les jeunes qui
ne sont pas encore à l'emploi. Parce que, pour le moment, hein, il est
impossible pour un employeur de faire valoir
une dépense pour quelqu'un qui n'est pas à son emploi directement. Là, ici, on
permet, avec la loi, de faire en sorte qu'il
soit possible pour les employeurs de faire reconnaître des dépenses, notamment
pour des stagiaires, notamment pour accueillir
des professeurs, qui sait, des enseignants dans leur organisation, dans leur
entreprise ou encore pour reconnaître la dépense de mentorat que
certains employés de l'entreprise, hein, effectuent auprès de stagiaires.
Ça, c'est une nouveauté. Et je peux vous dire
que j'ai eu quelques discussions là-dessus avec notamment les représentants de la Fédération des chambres de
commerce, et il y a eu une évolution, mais une évolution extrêmement
importante, hein? Les premières rencontres que j'ai eues avec eux sur le sujet,
il y a maintenant à peu près presque deux
ans, étaient à l'effet que la loi du 1 %, il faudrait abolir ça, que ce
n'était pas vraiment efficace, que c'était une perte d'argent et de
temps, que les entreprises qui voulaient survivre, elles devaient investir, et
c'est tout.
Mais je dois reconnaître, ils sont venus nous
voir en commission parlementaire, qu'il y a eu une évolution très forte, et ils voient très bien l'importance
pour les entreprises maintenant d'investir chez les jeunes, d'investir dans la
formation et de les recevoir en stage. Ils sont prêts à jouer un rôle...
notamment, la Fédération des chambres de commerce nous l'a dit très clairement : Nous sommes
prêts à jouer un rôle, à parler au monde de l'industrie, aux employeurs pour
leur dire : Ouvrez les portes aux
stagiaires, faites en sorte d'avoir des ententes avec des établissements
d'enseignement reconnus. Le temps que
vous allez mettre, l'effort que vous allez mettre, vous allez voir, ça va vous
revenir au centuple.
L'exemple que
l'on peut utiliser là-dessus, bien sûr, c'est le modèle dual allemand. En Allemagne, quand vous faites une formation
professionnelle, essentiellement 70 % de votre formation se fait en
entreprise et 30 % dans un établissement
d'enseignement. Ici, je dirais, à l'oeil, la moyenne, c'est peut-être autour de
24 %, 25 % qui va se faire en entreprise. Donc, on a un effort à faire. On s'est donné comme objectif
d'atteindre à peu près 50 %, là, au cours des prochaines années. Et c'est fondamental pour notre économie
et c'est aussi fondamental, je crois, pour les jeunes et pour le succès
de nos jeunes.
Quand on
essaie de comprendre pourquoi le taux de décrochage scolaire, par exemple, est
plus élevé au Québec qu'en Ontario et
qu'on essaie de comparer les systèmes et de voir, on s'aligne assez rapidement
sur une variable qui semble une variable assez lourde : le fait que
notre formation professionnelle est extrêmement différente de la formation
professionnelle que l'on retrouve en Ontario. En Ontario, les jeunes, très
rapidement, entrent en entreprise, en stage d'observation,
continuent, parfois sont rémunérés aussi à l'intérieur de l'entreprise,
retournent à l'école. Donc, il y a des va-et-vient.
Et, comme je le disais tout à l'heure, au Québec, malheureusement, la formation
en stage se fait beaucoup trop tardivement, là, à notre avis.
Donc, les changements, là, à la loi du
1 % sont importants, ils sont désirés, et je pense que j'ai entendu qu'il
y avait un consensus ici, en Chambre,
sur le fait que ces changements-là, que la possibilité d'utiliser, là, les
dépenses soit reconnue pour les
jeunes stagiaires, c'était une bonne
chose. Et je dois le dire parce que, lors des premières discussions à ce sujet,
il y a eu, disons, une frilosité de la part du monde syndical à l'effet
que maintenant les argents puissent être utilisés non pas pour les employés en fonction mais pour
d'autres fins, des employés à venir, disons, disons-le comme ça. Mais je pense
qu'on a eu des discussions très honnêtes,
très franches avec les syndicats, qui ont reconnu que cette approche-là, finalement, n'était pas nocive; au
contraire, ça permettrait, à la limite, d'intégrer plus d'employés plus rapidement,
et que tout le monde y gagnerait, même le monde syndical. Donc, on a
fait des pas de géant là-dessus. Autant au niveau syndical que patronal,
on veut ces changements et on veut qu'ils arrivent le plus rapidement possible.
Maintenant,
je veux vous parler un petit peu d'Objectif emploi. Alors, qu'est-ce que c'est qu'Objectif emploi, hein? C'est de permettre aux nouveaux
demandeurs à l'aide sociale — il y en a à peu près 17 000 par année,
répartis sur le territoire — d'être accompagnés plus rapidement
vers l'emploi, vers une formation ou encore dans une formation de
préemployabilité.
Alors,
là-dessus, j'ai quelques différends, là, avec mes collègues sur ce que j'ai
entendu jusqu'ici, hein? Il ne s'agit jamais
de forcer quelqu'un à prendre un emploi, il s'agit de faire en sorte de pouvoir
rencontrer la personne, hein? Le mot clé, là, hein, quand on rencontre les
agents d'aide sociale, ce qu'ils nous disent, c'est : La difficulté que
nous avons, c'est mobiliser, c'est de
faire en sorte qu'une personne qui s'inscrit dans une démarche poursuive sa
démarche jusqu'à la fin. Si nous
avions voulu faire ça avec les 400 000 ou à peu près prestataires à l'aide
sociale au Québec, ça aurait été une très mauvaise idée, mais on sait très bien — et
là-dessus les recherches sont abondantes et claires — qu'il faut prendre une personne avant qu'elle arrive à l'aide sociale ou
avant qu'elle ait développé une certaine sous-culture à l'aide sociale. Il
faut les prendre très tôt, et leur offrir une perspective, et les aider à s'en
sortir.
• (17 h 40) •
Et
là-dessus on a, bien sûr, les métaétudes, là, qui ont été proposées et discutées par l'OCDE ces dernières années
qui disent : Si vous voulez augmenter le taux d'intégration des
sans-emploi, hein, dans une société comme la nôtre, il faut y aller de trois façons.
Tout d'abord, il faut bonifier leurs prestations, les encourager. Et c'est ce
qu'on va faire, hein? Nos collègues
d'en face ont dit qu'on voulait faire des économies; on ne fera aucune économie
avec Objectif emploi. Au contraire, on ajoute des sommes
supplémentaires. Donc, j'ai entendu des chiffres comme 50 millions. Il n'y
a aucune économie à l'aide sociale dans Objectif emploi, aucune économie
directe dans Objectif emploi. L'essentiel, c'est une augmentation, bien sûr,
des allocations pour leur permettre, hein, de se mobiliser davantage. Alors,
premier élément.
Ensuite,
ce qu'il faut comprendre, c'est que l'idée... même si ça s'appelle Objectif
emploi, ça devrait être plutôt objectif mobilisation. C'est-à-dire, il y
a trois voies que ces personnes peuvent suivre. La première voie, c'est une
voie de préemployabilité. Et là-dessus je m'entends totalement avec mes
collègues d'en face. Il y a des personnes qui arrivent à l'aide sociale... qui
sont des primo-demandeurs, qui ne sont pas prêts à occuper un emploi. À cause
de leur situation, leur contexte personnel,
familial, social, ils ne sont pas prêts à occuper un emploi. Ils ont des
habiletés à obtenir, des habiletés de base ou encore, simplement, ils
n'ont pas de logement. Il faut commencer par régler la question du logement, hein? Ils ont des problèmes avec des
personnes autour d'eux, hein, qui sont des personnes peu recommandables.
Il faut aussi régler ce type de problème là.
Si
on veut régler ces difficultés-là, il faut qu'ils viennent nous voir, il faut
qu'ils acceptent de venir nous voir et il faut qu'ils soient dans un
parcours. Donc, ça, c'est tout le secteur de la préemployabilité, et il ne faut
pas nier qu'un certain nombre de premiers
demandeurs à l'aide sociale sont très éloignés du marché du travail parce
qu'ils viennent d'une famille, hein...
il y a un pourcentage important qui vient d'une famille d'assistés sociaux,
donc, qui n'ont pas nécessairement connu,
là, les perspectives du marché du travail, comment on s'y prend, comment on
fait, qui ont une sociabilité qui est un peu défectueuse ou simplement qui ont un capital humain qui s'est
extrêmement déprécié au cours du temps. Et ce que les agents d'aide sociale nous disent : Écoutez,
on a tellement de choses à leur offrir, et malheureusement ils ne viennent pas.
Donc,
la préemployabilité, hein, les rentrer dans un parcours où ils développent...
où ils règlent des problèmes, parfois,
des problèmes de consommation ou d'autres problèmes liés à leur environnement,
c'est extrêmement important, avant
même de penser à leur dire : Allez travailler ici ou allez travailler là.
Ce n'est pas un cadeau pour eux, et ce n'est pas un cadeau pour un
employeur s'ils ne sont pas prêts à le faire.
L'autre
possibilité — et
j'insiste beaucoup là-dessus — c'est la possibilité de reprendre leurs
études, de terminer leurs études ou
encore d'aller chercher une qualification. Et, encore une fois, les agents
d'aide à l'emploi nous disent : Il
y a des histoires formidables. Il y a vraiment des jeunes qui ont fait un
parcours difficile. Il y a parfois des moins jeunes, qui arrivent à
l'aide sociale pour une première fois, et qui ont le goût, et qui ont la
capacité de le faire.
Et
j'insiste là-dessus parce que, hein, dans Objectif emploi, il y a l'idée d'un
contrat mutuel, hein? Dis-moi quel est ton projet. Qu'est-ce que tu
aimerais faire? Tu n'es pas prêt encore? Très bien, on va commencer une
discussion ensemble. Réfléchis à telle ou telle possibilité, tu reviendras me
voir dans deux semaines et on regardera comment ta réflexion a avancé. Bien, à un moment ou l'autre, la personne nous
dit : Écoutez, moi, j'aimerais retourner aux études, j'aimerais faire un doctorat en physique. Alors
là, on dit : Wo! Un doctorat en physique, c'est un long chemin quand on a
à peine terminé son secondaire III.
Mais, qui sait, on va commencer par terminer son secondaire. Donc, on va
essayer de t'offrir des possibilités
pour terminer ton secondaire. Et là, à un moment donné, il y a un contrat moral
qui se fait avec la personne. Et, quand ce contrat moral là est établi, c'est
là qu'on est en droit à la fois de lui donner plus de ressources, mais de faire en sorte, hein, qu'il suive son
parcours. Et, si jamais
il abandonne son parcours, la première chose, ce n'est pas de couper l'aide sociale, c'est de le
rencontrer pour voir qu'est-ce qui ne
va pas. Est-ce que ça a été une mauvaise idée, une mauvaise évaluation? C'est possible que la personne ait changé
d'idée, mais c'est possible aussi que la personne qui est responsable d'aide, là, l'agent d'aide à
l'emploi, reconnaisse que ce n'était peut-être pas une bonne idée compte
tenu de certaines limitations. L'idée, c'est
toujours d'être mobilisé dans un projet quel qu'il soit. On n'a pas encore parlé d'occuper un emploi et certainement pas... on n'a forcé personne à occuper un emploi. Mais c'est de garder
cette mobilité-là.
Et,
la troisième perspective, bien sûr, il y a des gens qui arrivent, qui disent : Écoutez,
moi, ce que je veux, c'est d'occuper
un emploi, hein? Alors, on regarde ses possibilités, ses capacités, ses intérêts
et, encore une fois, on met en appui à son projet, par exemple,
des groupes d'aide à la recherche d'emploi, différents moyens d'y arriver. Donc,
on favorise l'atteinte d'un emploi, mais, encore une fois, si c'est le projet réel d'une personne, sa mobilisation doit être réelle. On doit s'assurer
que les démarches sont accomplies. Objectif emploi ne fait pas en sorte que la personne doit
occuper un travail, doit accepter un
travail, mais fait en sorte qu'elle est toujours mobilisée, hein, vers cet objectif qu'elle s'est
elle-même donné, tout d'abord, et sur lequel on s'est entendus avec
l'agent en emploi.
Donc, on a
entendu, chez nos collègues d'en face souvent, l'idée qu'Objectif emploi
reposait sur des préjugés. Mais, sincèrement, j'ai écouté attentivement
et j'ai essayé de voir où sont les préjugés, hein, quel est le préjugé qu'il peut y avoir à l'endroit des assistés sociaux dans
Objectif emploi. Jamais on n'a dit : Ils sont paresseux. La seule
chose que l'on dit et qui est une réalité très forte :
Malheureusement, malheureusement, ils refusent de l'aide alors que, s'ils
acceptaient cette aide-là, ce serait d'un grand secours pour eux.
Et, pour vous
donner un exemple, on a aujourd'hui un taux de participation global à l'aide
sociale... à peine 8 % des
bénéficiaires de l'aide sociale, hein, des bénéficiaires de l'aide sociale qui,
vraiment, sont dans un parcours, qui sont mobilisés dans un parcours de
réinsertion. Donc, 8 %, c'est très, très peu. Et, quand on rencontre les
agents d'aide à l'emploi, ce qu'on nous dit,
c'est qu'il y a plein de naufrages. Il y a des jeunes aujourd'hui qui ont une
perspective, qui pourraient faire quelque chose, et, malheureusement,
ils ne veulent pas se mobiliser suffisamment. Donc, ce qu'il est assez important de comprendre, c'est que l'OCDE
nous recommande, hein, d'avoir une augmentation de l'allocation, d'avoir
des mesures et d'avoir des sanctions si
jamais la personne ne montre aucun intérêt. Ces sanctions-là doivent être
mesurées, bien sûr, elles doivent être aussi strictes.
Alors, encore une fois, le but d'Objectif
emploi, ce n'est pas de punir, le seul but d'Objectif emploi, c'est de mobiliser. Et je sais qu'il y a eu beaucoup de
débats sur le fond, sur la question de l'inconditionnalité ou pas de l'aide
sociale, tout comme il peut y avoir des débats sur l'inconditionnalité de
quelque transfert que ce soit.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Désolé de vous interrompre, M. le
ministre, mais j'entends des bruits, des bruits de fond, derrière. Une seule personne a la parole, et c'est le ministre
de l'Emploi et de la Solidarité sociale. Merci de votre collaboration.
Veuillez poursuivre, M. le ministre.
M.
Blais : M. le Président, ça m'oblige à hausser le ton, là,
graduellement, ce n'est pas bon pour ma voix puis ce n'est bon pour les
auditeurs non plus.
Donc, ce que les recherches nous indiquent, c'est que la
période, disons, 16 à 25 ans, elle est fondamentale pour une personne, c'est un moment crucial. Et, quelle
que soit la forme de revenu minimum
garanti que vous choisissez, que ce
soit l'aide sociale, un impôt
négatif, une allocation universelle, la principale critique que l'on peut faire
à toute forme de revenu minimum garanti, comme l'aide
sociale, d'une certaine façon, c'est
de ne pas faire un effort particulier pour les jeunes, pour s'assurer
qu'ils soient mobilisés correctement.
Et il y a
une littérature, là-dessus, abondante, notamment à la page 145
de mon ouvrage, si ça l'intéresse, ou
à d'autres endroits, comme le fait que, pour
les jeunes, l'inconditionnalité totale pose un problème. Ça a été dit par
plusieurs auteurs. Philippe Van Parijs, qui est peut-être le
grand philosophe de l'allocation universelle dans le monde, dit que, dans le cas des jeunes, hein, il faut
exiger une forme de réciprocité non pas pour les punir mais pour s'assurer,
bien sûr, qu'ils aient au moins la
chance une fois de développer leur capital humain. John Rawls, hein, le grand
théoricien de la social-démocratie au
XXe siècle, a aussi reconnu dans ses ouvrages qu'il fallait pouvoir exiger
une forme de réciprocité, notamment
chez les plus jeunes. Et regardez le dernier ouvrage, par exemple, d'Anthony
Atkinson, Inequality, hein, qui est
paru, si je me souviens bien, l'année dernière, qui est le grand, grand
théoricien des inégalités et qui fait des propositions extrêmement radicales pour lutter contres les
inégalités dans le monde occidental. Lui-même dit qu'un revenu totalement inconditionnel est problématique. Il
propose plutôt ce qu'on appelle un revenu de participation, un «participation
income». Et, bien sûr, un revenu de participation, par définition, introduit
aussi des éléments de réciprocité.
Donc,
le fond de la proposition, ce n'est pas, certainement pas de punir, de
sanctionner. Le fond, c'est de s'assurer que le plus grand
nombre sera en démarche et sera mobilisé.
Donc,
l'essentiel de ma plaidoirie aujourd'hui, M. le Président, c'est pour vous dire
que tous ces éléments-là sont attachés ensemble, que tous ces éléments-là, là, font en sorte qu'on
peut augmenter de façon non négligeable les personnes sur le marché du travail, leur permettre
éventuellement d'aller sur le marché du travail, même si on sait que, dans
certains cas, certaines personnes
sont particulièrement éloignées du marché du travail. Donc, ce n'est pas un
projet qui presse les gens, c'est un projet qui fait en sorte qu'ils soient
mobilisés, qu'ils soient en action, quel que soit le temps, bien sûr, qu'il
faudra prendre pour y arriver.
Alors, je vous remercie, M. le
Président, là, pour m'avoir laissé l'occasion de faire cette plaidoirie en
faveur d'une non-scission, là, de ce projet de loi.
• (17 h 50) •
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le
ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale, pour
cette intervention. Je cède la parole maintenant à M. le député de Drummond—Bois-Francs pour son intervention.
M.
Sébastien Schneeberger
M.
Schneeberger : Oui. Alors, merci, M. le Président. Alors, à
moi, maintenant, d'argumenter sur cette motion de
scission.
Tout d'abord, je pense que
cette motion est très, très valide, très valable pour les principes suivants.
Premièrement, il contient
plus qu'un principe. La preuve, c'est que, dans la première note explicative du
projet de loi, la première phrase, c'est marqué : «Ce projet de loi
comporte deux parties.» Alors, en partant, ils le disent automatiquement.
De plus, chaque partie du projet de loi scindé peut être
considérée distinctement, et on voit vraiment la différence. C'est qu'on a un volet qui est
beaucoup plus d'ordre administratif, où est-ce qu'on parle d'ailleurs de la
révision du contrôle par le ministre
de la formation éligible, la loi du 1 %, que tout le monde connaît, l'accroissement du rôle de la CPMT
sur la détermination des besoins du marché du travail, l'assujettit
aussi au niveau du ministre et l'abolition de la structure administrative distincte d'Emploi-Québec. Je peux
vous dire que, de ce côté-ci de la Chambre, là, quand on parle d'abolition
de structures, on est tout à fait d'accord.
Alors,
ça, premièrement, je pense que, si l'ancien ministre du Travail, de l'Emploi et
de la Solidarité sociale, au mois de
novembre, avait déposé dans la même journée deux projets de loi distincts,
bien, cette partie-là, je pense qu'elle serait déjà adoptée et probablement en vigueur. Alors, ça, c'est une
très, très, très bonne chose. Et là-dessus je pense que, pour nous,
c'est très, très... on est tout à fait en accord avec toutes les mesures qui
allaient dessus. Peut-être quelques questionnements,
là, sur justement la décision du ministre de nommer lui-même, là, certains
membres au niveau de la CPMT, là, ça, c'est... mais le reste...
La grosse différence de l'autre côté, deuxième
volet, et là c'est un volet qui touche vraiment une grande partie,
malheureusement, de notre population, ce sont les premiers demandeurs de l'aide
sociale. Et ça, bien, ça a un impact directement
sur leur vie, alors que l'autre, ce sont vraiment des mesures administratives,
la plupart, et surtout il n'y a personne qui va être contre ça, que le gouvernement vienne encadrer des règles,
là, quand on parle de formation. Mettons, là, on parlait de la rigologie ou des formations de clown, je pense que tout le
monde ici, dans cette Chambre, trouve ça totalement stupide. Alors, la
motion de scission pour ce cas-ci, tout le monde est pour ça.
Par
contre, l'autre volet, qui touche les mesures de la création d'Objectif emploi,
est un autre domaine complètement.
Et, avant tout, ce qui est... En tant que législateurs, le but ici, là, de nous
dans cette Chambre, c'est d'amener les meilleurs arguments pour être
contre ou pour un projet de loi. Et, quand on amène un projet de loi qui
comporte deux volets très distincts, où
est-ce que le même parti, que vous
soyez le parti au pouvoir, la première opposition, deuxième opposition, on pourrait être tout à fait contre un volet et tout à
fait opposé à l'autre, bien, ce que
le gouvernement fait en faisant
ça, c'est qu'il nous demande de nous déchirer en deux. J'appelle ça, en termes de parents, c'est comme, moi, demain matin, on me demande lequel de mes deux enfants j'aime le plus. C'est ça,
la réalité. Alors, pour cette question-là, nous, on appuie cette motion,
tout à fait en accord d'une motion de scission.
Autre
volet. Tout à l'heure, le ministre,
là, vend sa salade pour dire : Oui, c'est un bon projet de loi. Là, on
n'est pas ici pour dire que c'est un
bon ou mauvais projet de loi, là, une motion de scission, c'est le principe de
fonctionner. Et on s'est tous vus
dans le passé au niveau du fédéral quand... on appelait ça des projets de loi
mammouth, où est-ce qu'on amène une
panoplie de projets de loi et de réglementations, et, à la fin, le législateur
doit choisir : Est-ce que tu es pour ou contre? Et là, si,
admettons, à 60 % des articles, on est pour, et 40 %, on est contre,
tu fais quoi? C'est ça, la réalité.
Et,
autre chose, admettons, admettons qu'à la fin du processus nous votons pour ou
contre... nous votons contre le projet
de loi et qu'avant l'application du premier volet, c'est-à-dire au niveau des
mesures qui concernent l'administration d'Emploi-Québec, surtout, admettons, un exemple précis, sur les
formations, on parlait de formation de clown, il arrive un autre événement où est-ce que, là, on va
questionner le ministre, qu'est-ce qu'il va nous dire? Vous avez voté contre
le projet de loi. Nous, on était pour ça.
C'est ça qu'il va nous dire, alors que le citoyen qui nous écoute, il va voir
quoi de ça? Il dit : Bien oui, c'est vrai, il a bien raison, le ministre.
Alors, on sait tout à fait que, quand on décortique un projet de loi, ce n'est pas ça qui est la réalité. Et pour ça,
nous, ici, nous appuyons la motion de scission proposée par l'opposition officielle. Merci, M. le
Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le
député de Drummond—Bois-Francs. Je suis prêt à céder la
parole à un prochain intervenant. M.
le député de Laval-des-Rapides, il reste un peu moins d'une vingtaine de minutes, je pense, à
votre formation politique. Alors, je vous cède la parole.
M. Saul Polo
M. Polo :
Combien de temps il reste avant 18 heures, M. le Président?
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Avant 18 heures, il en reste un peu moins. Il reste trois ou quatre
minutes... deux ou trois minutes. Veuillez poursuivre.
M. Polo :
Parfait. Merci beaucoup, M. le Président. Je prends la parole aujourd'hui — puis
je comprends que j'aurai à poursuivre mon
discours ou mon allocution lors d'une prochaine opportunité — pour
vous souligner jusqu'à quel point ce projet de loi est important,
et, selon moi, il forme un tout. On a eu des plaidoiries du ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale et des oppositions, mais, selon moi, il forme un tout parce que
justement, tel que le ministre l'a mentionné, il y a diverses dispositions dans ce projet de loi qui sont très importantes dans le contexte actuel
de l'emploi au Québec.
Je
vais vous parler tout d'abord de ma région, la région où je suis un des six
élus, la région de Laval. Et j'ai ma collègue du comté de Fabre qui a pris la parole il y a
quelques jours pour vous expliquer également de quelle façon ce projet de loi était important,
non seulement pour elle, mais pour l'ensemble des Québécois
qui souhaitent intégrer le marché de l'emploi. Mais ce que je souhaite,
c'est de vous présenter tout d'abord un portrait de ma région au niveau économique
et surtout au niveau de l'emploi.
La
région de Laval, M. le Président, est une région qui dénombre plus de 420 000 résidents, un taux de croissance de tout près de 7,2 % au cours des dernières
années et qui représente aujourd'hui non seulement une région, mais une ville,
la troisième ville la plus importante au
Québec, une région où nous retrouvons 12 000 entreprises, une région où le
taux de chômage, au cours des
dernières années, a subi une hausse, mais où il y a un dynamisme important,
économique, un dynamisme important au
niveau des opportunités d'emploi, mais aussi une région où nous avons des
secteurs de pauvreté importants, des
Québécois et Québécoises qui souhaitent que nous fassions tout ce qui est dans
notre possible pour les accompagner dans leur démarche d'intégration au
marché de l'emploi. C'est l'essentiel du projet de loi en question.
Je suis un des six députés, un des six élus de
la région de Laval, et, dans ma circonscription, nous voyons des difficultés
importantes. Pour l'ensemble de la région de Laval, le revenu moyen pour les
ménages est d'à peu près 27 000 $. Ceci dit...
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : ...M. le député de
Laval-des-Rapides, je dois vous interrompre. Je vous demande si vous
avez l'intention de poursuivre votre intervention lors de la reprise des
travaux.
Ajournement
Alors, la
réponse étant oui, compte tenu de l'heure, les travaux de l'Assemblée sont
ajournés au mardi 8 mars 2016 à 13 h 40. Bonne fin de semaine
à toutes et à tous et bonne semaine en circonscription électorale.
(Fin de la séance à 18 heures)