(Neuf heures quarante minutes)
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Alors, bon jeudi à tous et toutes. Vous pouvez prendre place.
Affaires courantes
Déclarations de députés
Nous allons
débuter cette journée avec la rubrique des déclarations de députés. Et,
sans plus tarder, je cède la parole à M. le député de Vimont.
Féliciter M. Pierre Bolduc, lauréat du Prix de
reconnaissance
des bénévoles en matière de véhicules hors route
M. Jean Rousselle
M.
Rousselle : Merci, Mme la Présidente. Lors de la remise des prix de reconnaissance des bénévoles en matière
de
véhicules hors route, un lauréat de provenance de la circonscription de Vimont fut récompensé pour sa grande implication
au sein du Club de motoneige Guillaume-Tell de la région de Lanaudière.
En effet, M. Pierre Bolduc, membre de son club
depuis de nombreuses années, n'a jamais compté ses heures. Malgré ses 79 ans, ce passionné de motoneige
continue à consacrer plus de 300 heures de bénévolat par année. Directeur
depuis 1985 et vice-président depuis quelques années, M. Bolduc est un homme profondément honnête et déterminé. Bon administrateur, il a su, grâce à ses compétences
en comptabilité, résoudre les problèmes financiers du club lorsque celui-ci
traversait des années difficiles. Ponctuel,
négociateur hors pair, il réalise ses tâches avec rapidité et, en plus, est un
excellent motivateur et conseiller.
Merci, M.
Bolduc, d'offrir une des choses les plus précieuses qui existent : du
temps. Je tiens d'ailleurs à vous réitérer mes plus sincères
félicitations pour votre prix qui est amplement mérité. Merci, madame.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci beaucoup, M. le député de
Vimont. Et, pour la prochaine déclaration, je cède la parole à M. le
député de Sanguinet.
Souligner le 35e anniversaire du
Centre de femmes L'Éclaircie
M. Alain Therrien
M.
Therrien : Merci,
Mme la Présidente. C'est avec plaisir
que je souligne aujourd'hui les 35 ans d'existence du Centre des femmes L'Éclaircie. Ce centre, qui
regroupe des intervenantes chevronnées, oeuvre dans notre région afin d'aider des femmes en situation
de difficulté à retrouver l'autonomie et la confiance en elles.
Pour ce faire, le centre offre à celles qui en ont besoin le support
d'une communauté dynamique et fait la promotion de l'égalité entre les sexes.
Plusieurs
raisons peuvent mener une personne à
perdre confiance en elle. Par exemple, il peut s'agir de quelqu'un qui n'a jamais eu l'environnement ou l'occasion
pour s'émanciper. Il peut s'agir également de femmes qui ont subi de la violence physique ou psychologique. Quelles qu'en
soient les raisons, je suis heureux
de savoir qu'il y a un organisme comme le Centre de femmes
L'Éclaircie dans notre région pour aider celles qui en ont besoin.
Joyeux anniversaire au Centre des femmes L'Éclaircie et
merci pour tous les services extraordinaires que vous rendez à notre
population!
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Merci, M. le député de Sanguinet. Maintenant, pour sa déclaration
d'aujourd'hui, je cède la parole à M. le député Sainte-Rose.
Souligner la tenue d'une journée de sensibilisation
de la Société canadienne de la sclérose en plaques
M. Jean Habel
M.
Habel : Merci, Mme la Présidente. En tant que membre de la Commission
de la santé et des services sociaux, il
me fait plaisir ce matin de prendre la parole afin de souligner la journée de
sensibilisation de la Société canadienne de la sclérose en plaques. J'aimerais mentionner que la Société canadienne de
sclérose en plaques est présente dans le foyer du parlement afin de sensibiliser les députés et de
les informer sur la maladie qui affecte plusieurs dizaines de milliers de
gens au Québec.
Il faut
souligner les besoins de ces personnes, tant au niveau de l'hébergement et le
renforcement des ressources pour le maintien à domicile et l'aide aux
proches aidants. Également, la question de l'accès aux médicaments est très importante. Les maladies
neurologiques évolutives ont notamment en commun les caractéristiques
suivantes, soit complexes et variables. Il faut améliorer la qualité de
vie de ceux-ci, Mme la Présidente.
Donc, en
terminant, j'aimerais mentionner que la division du Québec de la Société
canadienne de la sclérose en plaques regroupe plus de
8 000 membres et a pour mission d'être le chef de file de la
recherche sur les remèdes de la sclérose en
plaques et de permettre aux personnes aux prises avec cette maladie d'améliorer
leur qualité de vie. Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, M. le député de Sainte-Rose.
Et, pour la prochaine déclaration, je cède la parole à M. le député de
Beauce-Nord.
Souligner le 350e anniversaire de
l'arrivée des Grondin en Amérique
M. André Spénard
M.
Spénard :
Merci, Mme la Présidente. L'année 2016 marquera le 350e anniversaire
de l'arrivée de celui que l'on peut
considérer comme le père des premiers Grondin en Amérique. En effet, c'est en
1666 que Jean Grondin laissa derrière lui Brouage, sa ville natale
en France, tout comme l'avait fait Samuel de Champlain quelque 60 ans plus
tôt, pour s'établir sur le nouveau continent. Plus tard, dans les
années 1690, Pierre Grondin vient également s'installer en
Nouvelle-France et y fonda lui aussi une famille.
Étant l'une
des familles souches du Québec, voilà que l'Association des Grondin d'Amérique
voit le jour officiellement à
Sainte-Marie en 1993. Depuis une vingtaine d'années, elle oeuvre notamment à
regrouper les descendants, organiser
des rassemblements, honorer la mémoire de Jean et Pierre, et aider les membres
à établir leurs généalogies respectives.
En terminant,
je tiens à souligner, dans la tribune, la présence de nombreux membres de
l'Association des Grondin d'Amérique,
notamment celle de mon prédécesseur, M. Janvier Grondin, ancien
député de Beauce-Nord. Alors, bienvenue,
messieurs dames.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Bienvenue. Bienvenue à l'Assemblée
nationale. Maintenant,
pour sa déclaration d'aujourd'hui, je cède la parole à M. le député d'Ungava.
Rendre hommage à M. George Jaaji Okpik,
primé aux Indigenous Music Awards
M. Jean Boucher
M.
Boucher : «Ullaakkut», Mme la Présidente. «Wachiya», chers membres de l'Assemblée. Bon matin à tous.
Ce matin, je
voudrais vous parler de M. Jaaji Okpik qui a été récompensé dernièrement aux
Indigenous Music Awards. Le jeune
compositeur et interprète inuit Jaaji Okpik, originaire du village nordique de
Quaqtaq au Nunavik, dans le comté d'Ungava, a reçu en septembre dernier
un Indigenous Music Award à Winnipeg.
Music is one of the most important ways of expression for Inuit people. Recognition
of that art is very significant, and I'm very proud of
the young award-winning.
Le prix de la meilleure chanson francophone lui a été décerné, album qu'il a
lui-même enregistré dans sa maison, sur lequel il chante en anglais, en
français et en inuktitut. Ça reflète bien le visage actuel du Nunavik.
Album title is Nunanga, my home, my land.
Great job, Jaaji! Congratulations! Merci. «Nakurmiik.»
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci. Merci, M. le député d'Ungava. Et, toujours à la rubrique des déclarations de députés,
je cède la parole à M. le député de Gaspé.
Féliciter Mme Anne Sohier, lauréate du Prix du bénévolat
en
loisir et en sport Dollard-Morin, et M. Jean-Luc Bujold,
lauréat du prix Étoiles Stingray
M. Gaétan Lelièvre
M. Lelièvre : Merci, Mme la
Présidente. Je souhaite aujourd'hui reconnaître le succès d'un citoyen et d'une
citoyenne de ma circonscription, lesquels ont reçu récemment des
reconnaissances à l'échelle nationale.
Je souhaite
donc féliciter Mme Anne Sohier, de Marsoui, en Gaspésie, qui s'est vu attribuer
la semaine dernière ici, au parlement, le Prix du bénévolat en loisir et
en sport Dollard-Morin pour la qualité de son engagement dans les domaines du loisir et du sport. Grâce à sa
remarquable implication et à son grand dévouement, les citoyennes et citoyens
de Marsoui peuvent bénéficier d'une offre culturelle unique et diversifiée.
Mme Sohier,
bravo encore une fois pour cet honneur pleinement mérité! Vous êtes non
seulement une leader de votre communauté, vous êtes un exemple à suivre
pour l'ensemble des Gaspésiens et Gaspésiennes.
Je souhaite
également souligner le talent artistique de M. Jean-Luc Bujold, de
Sainte-Thérèse-de-Gaspé, qui a remporté en septembre 2015 le prix
Étoiles Stingray dans la catégorie Country western traditionnel au festival de Saint-Tite. Musicien,
compositeur et interprète bien connu au sein de la région, Jean-Luc Bujold a
également offert des prestations aux
quatre coins du Québec, et le succès remporté au prestigieux festival de
Saint-Tite confirme le grand talent de cet artiste gaspésien.
Jean-Luc,
félicitations pour cette reconnaissance bien méritée et merci de faire rayonner
la Gaspésie à l'échelle du Québec! Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Merci, M. le député de Gaspé. Et maintenant, Mme la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré,
la parole est à vous.
Souligner le 25e anniversaire de l'organisation
Place aux jeunes Charlevoix
Mme Caroline Simard
Mme
Simard : Merci, Mme la Présidente. Il y a 25 ans, l'organisation
Place aux jeunes en région s'impliquait dans trois municipalités régionales de comté, dont celle de
Charlevoix-Est. Depuis, sa mission est de favoriser la migration, l'établissement et le maintien des jeunes diplômés âgés de 18 à 35 ans en région
dans le but de contrer l'exode des jeunes vers les grands
centres puis qu'ils contribuent au développement économique et démographique.
À titre de
députée et d'adjointe parlementaire du premier
ministre pour le volet Jeunesse, je
suis à même d'observer l'engagement des agents à faire briller nos jeunes et nos
régions, ces jeunes qui désirent participer au dynamisme de notre territoire,
bâtir, créer et innover, ces mêmes jeunes dont nous pouvons être très fiers.
Chez nous,
Place aux jeunes Charlevoix constitue un organisme fort apprécié de ses
partenaires promoteurs et des organisateurs locaux et régionaux. Je
désire remercier l'équipe de Place aux jeunes Charlevoix, les bénévoles et les
membres fondateurs pour leur contribution significative. Je les encourage, bien
sûr, à continuer à s'impliquer dans la communauté. Bon 25e! Et merci, Mme
la Présidente.
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Merci beaucoup, Mme la députée. Maintenant, je cède la parole à Mme la députée
de Mirabel.
Rendre hommage à M. Roland Joannin, agronome, pour
sa contribution à la communauté de Mirabel
Mme Sylvie D'Amours
Mme
D'Amours : Merci, Mme la Présidente. Ce matin, je veux honorer un innovateur, un
agronome réputé et un rouage important de la vie communautaire de ma circonscription
de Mirabel, M. Roland Joannin.
Arborant plusieurs
chapeaux, il est, entre autres, un conseiller pomicole auprès d'Agro-Pomme
depuis plus de 30 ans, il est
membre fondateur des Jardins solidaires et il est à l'origine du collectif La
Pomme de demain, qui oeuvre dans
le domaine de la création et de la diversification variétale du pommier depuis 1986.
Bon nombre d'agriculteurs pourront le dire,
Roland Joannin les a accompagnés dans la régénération de leur exploitation
agricole. C'est un homme qui n'arrête jamais, passant d'un projet à un autre et cherchant toujours
à innover en animant et en dynamisant le domaine pomicole de la région.
J'espère pouvoir
compter sur sa présence et son dévouement encore longtemps dans notre belle circonscription de Mirabel. Bravo,
M. Roland Joannin! Merci, Mme la Présidente.
• (9 h 50) •
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci. Merci de ces bons mots. Maintenant, M. le
député de Laval-des-Rapides, à
vous de nous présenter votre déclaration.
Féliciter les récipiendaires des bourses du mérite
de la Fondation du collège Montmorency
M. Saul Polo
M.
Polo : Merci beaucoup, Mme la Présidente. J'ai eu le plaisir de participer la semaine dernière au gala des bourses de mérite
de la Fondation du collège Montmorency à Laval-des-Rapides. Lors de
cette soirée, les étudiants ayant fait preuve de persévérance et
d'excellence étaient honorés.
J'ai eu le plaisir de remettre, en mon nom,
ainsi qu'au nom de la ministre responsable de Laval et députée de Mille-Îles, ainsi qu'au nom de mon collègue le
député de Chomedey,
des bourses de mérite à quatre étudiants lauréats. Je tiens donc à féliciter Mmes Joy Victoria
Viera et Marie-Anne Léveillé, récipiendaires dans le programme
d'études de soins infirmiers, ainsi
que M. Rodric Haddad, récipiendaire dans le programme d'études en technique
informatique, et Mme Abigaëlle Gascon, récipiendaire pour le programme
études en sciences humaines.
Je tiens à
féliciter l'ensemble des membres de la Fondation du collège
Montmorency pour la qualité de l'événement auquel nous avons assisté, également
en compagnie de mon collègue de Vimont. Bravo à tous! Et merci beaucoup, Mme la
Présidente.
La Vice-Présidente (Mme
Gaudreault) : Alors, merci, M. le député de Laval-des-Rapides. Et, pour la dernière déclaration d'aujourd'hui, je cède la parole à M. le
député de Rivière-du-Loup—Témiscouata.
Rendre hommage à Mmes
Madeleine Landry
et Steven Thériault de la brigade
scolaire de Rivière-du-Loup
M. Jean D'Amour
M.
D'Amour : Alors, merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, pour tout parent, savoir ses enfants en
sécurité lorsqu'ils se rendent à l'école, c'est une priorité, c'est une
source de grand réconfort. C'est la raison pour laquelle j'aimerais souligner
l'excellence du travail de la brigade scolaire de Rivière-du-Loup ce matin, particulièrement
Mmes Madeleine Landry et Steven Thériault
qui célèbrent respectivement 25 et 30 ans de service en tant que
brigadières scolaires et, avouons-le,
parfois même en tant que conseillers ou confidents de nos jeunes écoliers. Beau
temps, mauvais temps, et on connaîtra
des jours froids bientôt, Mmes Landry et Thériault sont au rendez-vous afin de faire circuler de façon sécuritaire nos enfants vers
l'école Joly, dans ce cas-ci, ou encore l'école Saint-François de Rivière-du-Loup.
Alors,
au nom de la population que je représente, au nom aussi de l'ensemble des
parlementaires de cette Chambre, j'aimerais féliciter Mmes Landry et Thériault, en espérant qu'elles
puissent continuer à travailler à la sécurité de nos enfants encore longtemps,
Mme la Présidente. Merci beaucoup.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Alors, merci, M. le député de Rivière-du-Loup—Témiscouata.
Ceci met fin à la
rubrique des déclarations de députés, et je suspends les travaux quelques
instants.
(Suspension de la séance à
9 h 52)
(Reprise à 10 heures)
Le Président :
Mesdames messieurs les députés, nous allons nous recueillir quelques instants.
Présence de M. Janvier
Grondin, ex-parlementaire
de l'Assemblée nationale
Merci.
Veuillez vous asseoir. J'ai remarqué la présence de notre ancien collègue
Janvier Grondin qui est avec nous. Janvier était député de Beauce-Nord.
Présence de M. Stephen J.
Ortego,
député de l'État de la Louisiane
Et
nous avons aussi la présence d'un député de l'État de la Louisiane,
M. Stephen J. Ortego, qui est avec nous aussi.
Alors, nous
poursuivons les affaires courantes. Aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations
ministérielles.
Présentation de projets de loi
À la rubrique
Présentation de projets de loi, M. le leader de l'opposition.
M. Drainville :
M. le Président, pouvez-vous appeler l'article a de notre feuilleton?
Projet de loi n° 211
Le
Président : Certainement. Ah! Ha! À l'article a du feuilleton,
j'ai reçu le rapport de la directrice de la législation sur le projet de loi n° 211, Loi concernant
la Municipalité régionale de comté Les Moulins. La directrice de la législation
a constaté que les avis ont été faits et
publiés conformément aux règles de fonctionnement des projets de loi d'intérêt
privé. Je dépose ce rapport.
Mise aux voix
En conséquence, M. le
député de Terrebonne présente le projet de loi d'intérêt privé n° 211, Loi
concernant la Municipalité régionale de comté Les Moulins. Est-ce que
l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?
Des voix :
...
Le Président :
Adopté. M. le leader du gouvernement.
Renvoi
à la Commission de l'aménagement du territoire
M. Fournier :
Conformément au premier alinéa de l'article 267 de notre règlement, je fais
motion afin que ce projet de loi soit
déféré à la Commission de l'aménagement du territoire et pour que le ministre
des Affaires municipales et de l'Occupation du territoire en soit
membre, M. le Président.
Mise aux voix
Le Président :
Est-ce que la motion est adoptée?
Des voix :
...
Dépôt de documents
Le
Président : Adopté. À la rubrique Dépôt de documents, Mme la
ministre de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion.
Plan d'immigration du Québec
pour l'année 2016
Mme
Weil : Merci, M. le Président. J'ai le plaisir de déposer
aujourd'hui le Plan d'immigration du Québec 2016.
Le Président : Le
document est déposé. M. le ministre de l'Éducation.
Rapport annuel de l'Institut
de tourisme et d'hôtellerie
M.
Blais : M. le Président, il me fait plaisir de déposer aujourd'hui le
rapport annuel de gestion 2014‑2015 de l'Institut de tourisme et
d'hôtellerie du Québec.
Le Président :
Ce rapport est déposé. M. le leader du gouvernement.
Réponses à une pétition et à des
questions inscrites au feuilleton
M.
Fournier : M. le Président, je dépose la réponse du
gouvernement à la pétition présentée par la députée de Richmond le 6
octobre 2015. Je dépose également les réponses du gouvernement aux
questions inscrites au feuilleton le
24 septembre par le député de Marie-Victorin, le 6 octobre par le député de
La Peltrie et le 20 octobre par le député de Granby.
Le Président :
Alors, ces documents sont déposés.
Dépôt de rapports de
commissions
À
la rubrique Dépôt de rapports de commissions, M. le président de la Commission
de l'économie et du travail et député de Bertrand.
Consultations particulières
sur le projet de loi n° 57
M.
Cousineau :
M. le Président, je dépose le rapport de la Commission de l'économie et du
travail qui, les 27 et 28 octobre 2015,
a tenu des auditions publiques dans le cadre des consultations particulières
sur le projet de loi n° 57, Loi
modifiant la Loi sur les régimes complémentaires de retraite principalement
quant au financement des régimes de retraite à prestations déterminées.
Le
Président : Le rapport est déposé. M. le président de la
Commission des institutions et député de Chomedey.
Élection à la vice-présidence
de la
Commission des institutions
M.
Ouellette : Merci, M. le Président. Je dépose le rapport de
la Commission des institutions qui, le 28 octobre 2015, a procédé à
l'élection à la vice-présidence de la commission.
Le
Président : Ce rapport est déposé. M. le président de la
Commission de la santé et des services sociaux et député de LaFontaine.
Étude
détaillée du projet de loi n° 20
M.
Tanguay : Merci beaucoup, M. le président. Je dépose le rapport de la Commission de la santé et des services
sociaux qui, les 26, 27 mai, les 3, 4, 5, 8 et 10 juin, 21 août, 4, 8, 14, 15,
16, 17, 22, 23, 24, 29, 30 septembre, 5, 6, 7, 8, 20, 21, 22, 27, 28
octobre 2015, a procédé à l'étude détaillée du projet de loi n° 20, Loi
édictant la Loi favorisant l'accès aux
services de médecine de famille et de médecine spécialisée et modifiant
diverses dispositions législatives en matière de procréation assistée.
La commission a adopté le texte du projet de loi avec des amendements.
Le Président :
Ce rapport est déposé.
Dépôt de pétitions
À la rubrique Dépôt
de pétitions, M. le député de Matane-Matapédia.
Maintenir le programme de
formation en
charpenterie-menuiserie au Centre de formation
professionnelle Mont-Joli—Mitis
M.
Bérubé : Je dépose
l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée
nationale, signée par 275
pétitionnaires. Désignation : citoyens et citoyennes du Québec.
«Les faits invoqués
sont les suivants :
«Considérant que le
programme en charpenterie-menuiserie est offert aux jeunes depuis maintenant 10
ans;
«Considérant que le
Centre de formation professionnelle de Mont-Joli possède déjà tous les
équipements nécessaires, ainsi qu'un personnel compétent pour offrir une
formation de qualité;
«Considérant
que cette formation ne serait maintenant
offerte qu'à Rivière-du-Loup ou Bonaventure, engendrant des coûts
supplémentaires et représentant ainsi un frein à l'éducation;
«Considérant
que les cohortes ont toujours
été à pleine capacité et que 41 personnes se sont déjà inscrites pour le
cours débutant en janvier 2016;
«Considérant que
cette formation offre une excellente possibilité d'emploi au sein de plusieurs
entreprises du Bas-Saint-Laurent;
«Et l'intervention
réclamée se résume ainsi :
«Nous,
soussignés, demandons au gouvernement
du Québec d'intervenir auprès du ministre de l'Éducation, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche afin que soit autorisé le maintien du programme
de formation en charpenterie-menuiserie au CFP Mont-Joli—Mitis en
janvier 2016.»
Et je certifie que
cet extrait est conforme à l'original de la pétition.
Le Président :
Alors, l'extrait de cette pétition est déposé.
J'ai
reçu de la part de M. le député de Gaspé une demande de dépôt d'une pétition, mais cette
pétition n'est pas conforme. Est-ce que j'ai une autorisation, un
consentement pour le dépôt de cette pétition?
Des voix :
...
Le Président :
Consentement. M. le député de Gaspé, nous vous écoutons.
Installer un service
d'hémodialyse
à l'Hôpital Hôtel-Dieu de Gaspé
M. Lelièvre :
M. le Président, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée
nationale, signée par 8 489 pétitionnaires. Désignation : citoyens
et citoyennes du Québec.
Il n'y a pas de faits
invoqués.
«Et l'intervention
réclamée se résume ainsi :
«Nous, soussignés,
désirons demander au ministre de la Santé et des Services sociaux du Québec
d'installer à l'Hôtel-Dieu de Gaspé un service d'hémodialyse afin de soigner les
gens souffrant d'insuffisance rénale dans le grand Gaspé.»
Je certifie que cet
extrait est conforme à l'original de la pétition. Merci.
Le Président :
L'extrait de cette pétition est déposé.
Il
n'y a pas de réponses orales aux pétitions ni d'interventions portant sur une
question de droit ou de privilège.
Questions et réponses orales
Nous
en sommes donc rendus à la période de questions et de réponses orales. Je cède
la parole à M. le chef de l'opposition officielle.
Investissement du gouvernement
dans Bombardier inc.
M. Pierre Karl Péladeau
M.
Péladeau : Merci, M. le Président. Alors, nous apprenons ce matin que
le gouvernement a finalement décidé d'agir
dans le dossier Bombardier. Après de nombreuses interpellations, il vient de se
réveiller. Le problème, c'est qu'à la lueur des informations que nous
obtenons...
Des voix : ...
Le
Président : S'il vous plaît! Il n'y a qu'une personne ici qui a
le droit de parole, surtout au début de la période de questions. Je veux
entendre le chef de l'opposition poser sa question.
Une voix : ...
Le Président : M. le député
de Louis-Hébert, c'est assez. Je vous ai entendu. M. le chef.
M.
Péladeau : À la lueur des informations que nous avons obtenues, nous
sommes obligés de conclure que le premier
ministre et son ministre de l'Économie ne comprennent rien à l'économie, ils ne
comprennent rien à la finance et qu'ils sont de piètres négociateurs.
Nous
apprenons ce matin qu'ils ont décidé d'investir 1 milliard dans le
programme de la série C. Le problème, c'est
que le gouvernement investit, prend tous les risques et ne reçoit aucun
bénéfice. Le premier ministre s'apprête à faire en sorte qu'il renonce à tous les autres actifs qui sont très importants
dans Bombardier, la division ferroviaire, la division aéronautique, avec des grands succès comme le
Challenger Q400. En décidant d'investir dans une coquille spécifiquement
créée pour l'investissement dans la série C, il renonce à tous ces bénéfices.
Alors, est-ce
que le premier ministre peut nous dire pourquoi il a décidé que les
contribuables et les Québécois devaient prendre tous les risques pour le
bénéfice des actionnaires? C'est ça, la question, M. le Président.
Le Président : M. le premier
ministre.
Des voix : ...
Le Président : Est-ce que ça
vous tenterait d'écouter le premier ministre? M. le premier ministre.
M. Philippe Couillard
M.
Couillard : Désolante
manifestation d'amateurisme, M. le
Président, ici. D'abord,
c'est comme si on avait attendu les
remarques du chef de l'opposition
officielle — et Dieu sait qu'on n'attend pas grand-chose de sa
part — pour
nous intéresser à l'avenir de l'aéronautique
au Québec, M. le
Président. La filière aéronautique au
Québec, M. le Président, à Montréal particulièrement, dont le socle est Bombardier, c'est plus de 40 000 emplois, et c'est aussi important
pour le Québec, l'aéronautique, que l'automobile l'est pour l'Ontario.
Alors, bien
sûr, et je voudrais l'amener à corriger ce qu'il vient de dire parce que ce
qu'il dit est entendu par les marchés
et les autres observateurs, ce qu'il
vient de donner, c'est une marque de non-confiance envers Bombardier pour
le développement
de la série C. Moi, j'affirme au contraire qu'on a là l'avion le plus
moderne actuellement disponible sur
le marché. La première certification arrive bientôt. J'affirme que c'est
également un choix d'investissement tout à fait stratégique et justifié,
et qu'il fallait faire, et que nous devions faire, et que nous avons fait. Et
je voudrais d'abord féliciter, féliciter mon
collègue le ministre de l'Économie, qui a montré un grand doigté et un grand
jugement, M. le Président,
dans la conclusion de cette négociation.
Maintenant, je comprends que, du côté de l'opposition, on aurait aimé ça être du côté de ceux qui ont réalisé cette
opération si importante pour l'avenir du Québec. Malheureusement, ce n'est pas
le cas. C'est nous qui sommes au gouvernement, c'est nous qui l'avons fait, avec fierté, M. le Président. Et on va aller de l'avant avec la série C, qui va être un
grand succès pour tous les Québécois.
• (10 h 10) •
Le Président : Première
complémentaire, M. le leader de l'opposition... M. le chef de l'opposition.
M. Pierre Karl Péladeau
M.
Péladeau : M. le Président, j'ai interpellé à plusieurs
reprises, à titre de député de
Saint-Jérôme, le ministre
de l'Industrie. Je le fais aujourd'hui à titre de chef de
l'opposition envers le premier ministre, je l'ai fait également dans le passé.
Je n'ai jamais dit que l'État devait prendre tous les risques, et c'est la
raison qui m'amène à conclure que vous êtes de piètres négociateurs.
Alors, si
l'entente est si bonne que vous le prétendez, M. le premier ministre,
allez-vous rendre publique cette entente pour savoir si les Québécois en
ont pour leur argent?
Le Président : M. le chef de l'opposition, je vous rappelle
qu'on s'adresse à la présidence. M.
le premier ministre.
M. Philippe Couillard
M. Couillard : M. le Président, l'habitude de hurler ses questions est à la fois
ridicule et non efficace, je pense qu'il faut le dire ici. Il vaut mieux
avoir une conversation sensée sur un sujet aussi important.
S'il
veut avoir les détails de la transaction, bien, qu'il lise donc le communiqué de presse et les documents publiés par l'entreprise, tout y est, notamment le fait que le gouvernement obtient également
200 millions de bons de souscription pour
la société mère, qui seront exercés à partir d'un certain
niveau d'actions de Bombardier, société mère également, ce qui donne lieu à une considérable plus-value, M. le Président, parce que nous, on a confiance dans Bombardier. Et c'est ça qui
est au coeur de l'intervention de mon collègue. Bien sûr, lui le déguise comme
une attaque contre le gouvernement
parce qu'il aurait bien voulu, lui, être ici pour faire cette entente, et malheureusement ce n'est pas le cas, mais ce qu'il exprime, c'est un manque
total de confiance...
Le Président :
En terminant.
M.
Couillard : ...envers Bombardier et l'avenir de l'aéronautique à Montréal.
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le chef de l'opposition.
M. Pierre Karl Péladeau
M.
Péladeau : M. le Président, si la transaction que prétend le
premier ministre est si bonne, où est le gouvernement fédéral? Parce
que, quand le secteur de l'automobile est en difficulté...
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît!
M. Péladeau :
...il vient à sa rescousse avec notre argent. Alors, nous serions curieux de
savoir pourquoi le gouvernement fédéral
n'est pas présent dans cette transaction. Alors qu'il dépense des millions
d'argent... de sommes d'argent qui proviennent des Québécois, il est
absent dans cette transaction. Est-ce que le premier ministre peut nous
expliquer pourquoi?
Le Président :
M. le premier ministre.
M. Philippe Couillard
M. Couillard : M. le Président, c'est toujours émouvant d'entendre le chef de
l'opposition demander l'aide du gouvernement fédéral. Franchement, ça me
sidère. Mais j'en suis heureux, il en est peut-être venu à la conclusion, M. le Président, comme l'ont dit deux économistes,
ce matin, dans La Presse, que son plan pour le Québec est
totalement désastreux sur le plan économique. D'ailleurs, je l'invite à
lire la La Presse+ de ce matin.
Maintenant,
il fait erreur encore une fois, le gouvernement fédéral est déjà intervenu pour
soutenir Bombardier, même à un niveau
plus élevé que le gouvernement du Québec. Au cas où il ne l'aurait pas
remarqué, depuis trois mois il y avait des élections fédérales. Il y a un
nouveau gouvernement qui va être formé. Actuellement, la nouvelle entreprise...
la nouvelle coentreprise prend son essor et
commence ses activités. Bien sûr, M. le Président, on va interpeller le gouvernement
fédéral pour la même raison...
Le Président :
En terminant.
M.
Couillard : ...que ce qu'il a dit : c'est aussi important pour le
Québec que l'auto l'est pour l'Ontario.
Le Président :
Troisième complémentaire, M. le chef de l'opposition.
M. Pierre Karl Péladeau
M.
Péladeau : M. le Président, le premier ministre ne souhaite pas parler
de l'argent que les Québécois envoient à Ottawa, alors je vais lui demander : Pourquoi la Caisse de dépôt
n'est pas présente dans cette transaction? Nous savons que la Caisse de dépôt est indépendante, mais je
peux vous dire quelque chose, M. le premier ministre : La Caisse de dépôt
ne refuse jamais un bon deal.
Alors,
peut-il nous expliquer pourquoi la Caisse de dépôt n'est pas présente à cette
transaction, M. le Président?
Le Président :
M. le premier ministre.
M.
Philippe Couillard
M.
Couillard : En français, s'il vous plaît. En français, s'il vous
plaît.
Des voix :
...
M. Couillard : Alors, oui, la Caisse de dépôt est indépendante, M. le Président, et
bien sûr elle prendra les décisions d'investissement qui lui sembleront
justes de prendre. Et je l'invite à la patience, je crois qu'il y a de nombreux
investisseurs institutionnels qui vont s'intéresser au cas de Bombardier, de
façon constructive, au cours d'un proche avenir.
Mais justement, M. le Président, il a dit dans sa question : La Caisse de
dépôt est indépendante. Alors, on va la laisser prendre ses décisions, et je pense que ces décisions seront
prises, mais c'est à la caisse de les annoncer et d'en répondre.
Le Président :
Principale, M. le député Matane-Matapédia.
Enquête sur certains policiers
de la
Sûreté du Québec à Val-d'Or
M. Pascal Bérubé
M.
Bérubé : M. le Président, lorsqu'en novembre 2012 le
gouvernement du Parti québécois a déposé un projet de loi créant le Bureau des enquêtes
indépendantes, le principe était simple : les enquêtes de la police sur la
police ne seront plus acceptables; un processus indépendant est
nécessaire afin de préserver en tout temps la justice et l'apparence de justice. Le projet de loi ayant été adopté à
l'unanimité, le Parti libéral était d'accord. Pourtant, au printemps 2015
et depuis une semaine, le
gouvernement défend exactement le contraire; il défend des enquêtes faites par
les policiers sur des policiers à propos d'allégations graves. Pourquoi,
M. le premier ministre?
Le Président :
M. le leader du gouvernement.
M. Jean-Marc Fournier
M.
Fournier : Notre
collègue de la Sécurité publique n'est pas avec nous, M. le Président, pour des problèmes de santé. Je profite donc du moment pour
répondre en son nom, si me le permet notre collègue de l'opposition.
Il
a déjà été établi, d'une part, qu'une fois que nous sommes revenus aux
affaires, nous avons pris des décisions qui permettaient de mettre en place
le bureau. Le bureau lui-même a fait la... Sa dirigeante a fait une
communication publique établissant les
étapes qu'elle avait franchies et celles qu'il restait à franchir, notamment
au niveau de la formation, de manière à pouvoir entrer en
fonction de façon complète... je crois que la date était avril prochain. Alors,
ils se font dans des étapes qui vont
dans la suite du projet de loi qui a été adopté. Nous avons toujours
l'intention que ce bureau puisse être en fonction.
Le Président :
Première complémentaire, M. le député de Matane-Matapédia.
M. Pascal Bérubé
M.
Bérubé : M. le Président, j'offre un précédent au
gouvernement pour étude. Lorsque le Parti québécois était au pouvoir en 2012, il se souviendra que des
allégations troublantes concernant des agissements d'ex-hauts gradés de la
SQ auraient pu ébranler la confiance du
public envers leur police. Pour éviter que la police enquête sur la police, la
ministre de l'époque a créé un comité
d'enquête spécial et indépendant, exactement ce que nous demandons depuis une
semaine.
Qu'est-ce
qui empêche le premier ministre de faire exactement la même chose aujourd'hui
dans le dossier de Val-d'Or?
Le Président :
M. le leader du gouvernement.
M. Jean-Marc Fournier
M.
Fournier : Je pense qu'on connaît tous, là, les nouvelles
récentes sur le sujet. Le SPVM fait enquête. Il y a une question
d'observateurs, donc, pour permettre qu'il y ait justement cette
indépendance-là. Je sais aussi qu'il y a une volonté
que les autochtones soient aussi mis à contribution dans ce type d'enquête et
du côté des observateurs. Enfin, c'est les nouvelles que nous avons tous.
Alors, je crois qu'on est en mesure d'avoir cette démarche-là qui puisse être
accomplie de façon indépendante.
Ceci
étant dit, il n'y a pas que cet élément-là dans l'ensemble de l'oeuvre. Il y a
toutes les relations à rebâtir. Et nous
savons tous que le premier ministre — d'ailleurs, c'est public — avec notre collègue des Affaires
autochtones, va entreprendre de façon très intensive des rencontres...
Le Président :
En terminant.
M. Fournier : ...et des
discussions avec les autochtones, M. le Président.
Le
Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Matane-Matapédia.
M. Pascal Bérubé
M.
Bérubé : M. le Président, je viens d'exposer un précédent qui est à la disposition du gouvernement. Il n'y
a rien qui l'empêche de procéder. S'il
y a un blocage, il s'explique
comment, au bureau de la ministre de
la Sécurité publique, au bureau
du premier ministre? On aimerait
pouvoir procéder maintenant. Je
pense que c'est la demande de la population qu'on puisse y aller en toute transparence et en toute indépendance. C'est toujours
compliqué lorsque vient le temps de parler de la police puis
du gouvernement.
Est-ce qu'il pourrait, pour cette fois, cette fois, utiliser un précédent puis
répondre aux attentes de la population
en cette matière?
Le Président :
M. le leader du gouvernement.
M. Jean-Marc Fournier
M.
Fournier : On assiste
à un précédent dans la mesure où le SPVM va mener l'enquête de façon
indépendante avec un observatoire ou des observateurs. Alors, de cette
façon-là, nous avons une façon de le faire qui nous semble indépendante, qui constitue peut-être
aux yeux de notre collègue un précédent en lui-même. Mais l'important, c'est de nous assurer qu'il y ait justement cette marge
d'indépendance, et l'observateur le permet.
Je
tiens à dire encore qu'il est très important aussi que cela se fasse toujours
en collaboration avec les autochtones. Mon collègue le dit tellement souvent, il l'a tellement souvent
répété : Ce n'est pas en provenance du Sud qu'on peut tout régler le Nord. On ne peut pas aller faire un
tour, revenir puis dire : C'est réglé. On doit le faire avec eux, et je pense
que c'est la bonne voie.
Le Président :
Principale, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.
Investissement gouvernemental
dans
le développement des CSeries
M. François Legault
M.
Legault : M. le Président, dans l'entreprise Bombardier, il
y a trois grandes divisions. Il y a
deux divisions qui vont très bien actuellement, la division du matériel de transport, la division des avions
d'affaires. Il y a une division qui a des graves difficultés.
Ce n'est pas un secret, là, tous les analystes le disent, c'est la partie des
avions commerciaux, donc le
développement de la série C. Pourquoi? Bien, M.
le Président, évidemment,
c'est très risqué de développer un avion de 100, 160 places quand on est en compétition avec deux géants,
Airbus et Boeing. Ce n'est pas le cas dans les deux autres divisions.
Donc,
M. le Président, Bombardier, actuellement, a des problèmes
de liquidités, et nous, on pense qu'il faut que le gouvernement intervienne pour sauver ce joyau, mais pour sauver les trois divisions.
Or, le gouvernement libéral a décidé d'investir 1 milliard de
dollars américains seulement dans la division qui va mal, dans la CSeries, dans
la plus risquée, avec l'argent des Québécois.
Est-ce
que le premier ministre peut nous expliquer pourquoi il n'a pas investi le
1 milliard américain dans l'ensemble de Bombardier pour minimiser
les risques de la transaction puis qu'il a choisi d'aller seulement dans la
division qui a des graves difficultés?
• (10 h 20) •
Le Président :
M. le premier ministre.
M. Philippe Couillard
M. Couillard : M. le Président, d'abord, il faut établir et exprimer ici, dans cette
Chambre, hein, un message de confiance
envers Bombardier et sa capacité de développer la série C. C'est actuellement
l'avion le plus perfectionné et le plus
compétitif sur le marché. Comme il le sait, il y a un grand nombre d'ententes
fermes et d'autres types d'ententes qui ont été signées, et on veut que
ça continue.
Maintenant,
je vais l'amener à aller plus loin dans sa pensée. Compte tenu de
l'investissement qui est fait, 1 milliard de dollars, quelle est, à son avis, la valeur totale de l'entreprise
Bombardier dans son entier? Et quelle influence aurait donné ce milliard pour Bombardier dans son
entier, alors qu'avec cet investissement nous nous retrouvons avec 49,9 %
de l'actionnariat de la nouvelle
entreprise de la série C, la garantie pour 20 ans, pour 20 ans, de
conserver le siège social des activités
de fabrication, d'ingénierie à Montréal, au Québec, ce qui est absolument
capital, M. le Président, pour cette filière aéronautique dont je parlais, et également la possibilité d'obtenir des
bons de souscription dans la compagnie mère à partir d'un certain niveau de valeur de l'action, comme
il le sait très bien? Il n'a qu'à lire le communiqué de l'entreprise ce matin.
Alors,
c'est une décision qui était justifiée, équilibrée, sage, M. le Président, et
surtout à la hauteur des ambitions des Québécois.
Le Président : Première
complémentaire, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.
M.
François Legault
M. Legault :
M. le Président, avec tout le respect que j'ai pour le premier ministre, il
vient de nous montrer qu'il ne comprend
rien. Il nous dit qu'il aime mieux investir 49 % dans une division qui ne
va pas bien qu'un plus petit pourcentage
dans une entreprise qui va bien au global. Il nous parle de confiance. Depuis
l'annonce de la transaction, le prix de l'action a baissé de 16 %.
Donc, belle confiance!
M.
le Président, lorsque le gouvernement américain a décidé d'investir dans GM,
ils n'ont pas juste investi dans les automobiles qui n'allaient pas
bien.
Le Président :
M. le premier ministre.
M. Philippe Couillard
M. Couillard : Encore une fois, j'invite le collègue à la prudence. Ce qu'il vient de
dire, ça va exactement avoir l'effet
dont il vient de parler sur l'action de Bombardier. Chaque mot qui est prononcé
ici sur cette entreprise et ses projets...
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît!
M. Couillard : ...a un impact direct sur les marchés, M. le Président. Alors, j'invite
tout le monde à faire preuve de retenue et d'un plus grand sens des
responsabilités.
Mais effectivement,
M. le Président, on veut avoir un impact direct dans les décisions qui seront
prises sur le développement de cette filière-là. Tout le monde s'entend que
c'est le socle sur lequel l'aéronautique, à Montréal, va continuer de croître au cours des prochaines
années. Avec la position stratégique qu'on détient là, qui est très préférable
à une position très minoritaire dans le
reste de l'entreprise dont, en passant, beaucoup des activités sont en Europe
plutôt qu'en Amérique du Nord...
Le Président :
En terminant.
M. Couillard : ...on est beaucoup mieux
placés pour faire progresser
l'aéronautique à la hauteur des ambitions des Québécois, M. le Président.
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.
M. François Legault
M.
Legault : M. le Président, lorsque le gouvernement
américain a investi dans GM, il n'a pas investi seulement dans les
modèles qui étaient des mauvais vendeurs. Il a investi dans les bons actifs et
dans des actifs plus risqués.
Pourquoi
prendre autant de risques avec l'argent des contribuables? C'est un mauvais deal. Le gouvernement libéral s'est comporté comme un enfant d'école dans cette
transaction-là. Pourquoi ne pas avoir investi dans l'ensemble de Bombardier?
Le Président :
M. le premier ministre.
M. Philippe Couillard
M. Couillard : M. le Président, je
crois qu'on voit pourquoi notre collègue
a quitté le milieu des affaires, là. Et clairement c'était la décision stratégique...
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît!
M. Couillard :
C'était la décision stratégique à prendre.
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît! M. le leader du...
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît! M. le leader du deuxième groupe d'opposition.
M.
Bonnardel : Je pense que mon chef a eu pas mal plus de
succès en affaires que lui a pu en avoir avec Arthur Porter.
Le Président :
Bon. M. le leader du gouvernement.
M. Fournier :
M. le Président, je crois que non seulement on a pris la décision toute récente
de modifier le règlement pour qu'il
n'y ait plus d'applaudissements, mais je crois aussi qu'on avait pris cette
décision pour qu'il y ait un ton
différent et que le débat soit plus relevé. Je vois le leader de la deuxième
opposition, M. le Président, qui a de l'air à l'avoir déjà oublié, et je
le regrette. Je le regrette.
Le
Président : Bon, je vais demander au premier ministre de
continuer, s'il vous plaît, mais en s'adressant à la présidence.
M.
Couillard : Je vais
demander, M. le Président, avec politesse, à mon collègue d'être plus
constructif dans ses propos sur ce
fleuron de l'entreprise et de l'économie québécoise. La décision que nous avons
prise vise à garder au Québec l'actif
stratégique le plus important pour l'avenir. Oui, bien sûr, les jets d'affaires
vont continuer à se développer puis les avions avec d'autres modes de propulsion également, mais ce qui est
absolument crucial, ne nous contons pas d'histoire, M. le Président, ce qui est absolument crucial
pour l'avenir de la filière aéronautique du Québec centrée à Montréal autour
de Bombardier, c'est le développement de la
série C, dans lequel le gouvernement du Québec a déjà investi, dans lequel
il continue d'investir, dans lequel il est partenaire et non pas
subventionnaire, M. le Président.
Le Président : Principale,
Mme la députée de Montarville.
Distribution de livres de propagande islamique
à des bibliothèques publiques
Mme Nathalie Roy
Mme Roy
(Montarville) : Oui, merci beaucoup, M. le Président. On
sait que plusieurs bibliothèques du Québec ont reçu gratuitement, il y a quelques jours, des livres de propagande
islamique provenant de l'Arabie saoudite. Ces livres, accompagnés d'une lettre adressée aux
bibliothécaires, auraient été envoyés par la Ligue islamique mondiale, qui
prétend vouloir améliorer la
compréhension interculturelle. On n'est pas dupes. En réalité, plusieurs de ces
ouvrages prêchent carrément contre
nos valeurs et dénigrent la façon de vivre des femmes occidentales. Par
exemple, un des livres soutient que l'émancipation des femmes a mené à
l'infidélité, à la destruction des familles et à la négligence et la
maltraitance des enfants.
Bon, d'abord
ici, M. le Président, j'aimerais saluer le jugement des bibliothécaires qui ont
dénoncé cette propagande. Ils ne sont pas restés les bras croisés.
Maintenant,
j'aimerais savoir quelles actions la ministre de la Culture a posées, elle,
depuis que nous avons tous pris connaissance de ces envois de livres qui
n'ont rien d'innocent dans le contexte actuel.
Le Président : Mme la
ministre de la Culture.
Mme Hélène David
Mme David
(Outremont) : Écoutez, je pense que ce qu'il n'y a de rien d'innocent
dans le contexte actuel, c'est la
question de la collègue, justement. Ce n'est pas innocent de soulever que cinq
bibliothèques ont reçu effectivement un
envoi qui a été envoyé à peu près à toutes les bibliothèques au monde. Bon,
c'est la question des dons que les bibliothèques reçoivent très régulièrement, c'est la question des bibliothèques
publiques qui reçoivent des livres de toutes sortes et qui ont la
responsabilité de classer, de faire des choix, des choix. Et je suis très, très
contente que ma collègue fasse la constatation que nos bibliothécaires sont
très bien formés, et ils ont un jugement qui est absolument impeccable dans
l'immense majorité des cas et ils l'ont eu dans ce cas-ci.
Il faut aussi dire que les bibliothèques
publiques sont la responsabilité des municipalités, donc mon collègue pourra donner un peu plus de détails là-dessus, et
qu'effectivement ils exercent un choix à tous les jours sur la quantité impressionnante de livres qu'ils reçoivent, de
dons qu'ils reçoivent, et ils auront un jugement critique. Et il est évident
que l'égalité hommes-femmes est toujours,
toujours, toujours un critère extrêmement important, et ils ont toutes sortes
d'autres critères aussi qu'ils suivent.
Le Président : En terminant.
Mme David (Outremont) : Ils se
donnent des règlements, soumis aux municipalités qui les adoptent.
Le Président : Première
complémentaire, Mme la députée de Montarville.
Mme Nathalie Roy
Mme Roy
(Montarville) : Oui, merci, M. le Président. Si ce
gouvernement veut vraiment lutter contre la radicalisation des jeunes — c'est ce qu'il dit — il doit agir devant de tels envois qui sont
inacceptables. L'Arabie saoudite n'a pas à imposer sa propagande islamique au
Québec. L'envoi de ces livres, ce n'est pas un hasard, ce n'est pas innocent
de la part de la Ligue islamique mondiale, qui a comme vocation de faire la
promotion de la charia autour du monde.
Alors, la ministre
a-t-elle entrepris des vérifications pour connaître les véritables motivations
de ceux qui ont expédié ces ouvrages de propagande au Québec? Les avez-vous
contactés?
Le Président :
Mme la ministre de la Culture.
Mme Hélène David
Mme
David (Outremont) : Écoutez,
je répète, la question n'est pas innocente non plus de vouloir faire un
peu un petit parcours, un petit chemin par rapport à cette question pour toujours ramener un public cible par rapport à un autre public. Et je vous
répète qu'on reçoit à tous les jours... que les bibliothèques reçoivent à tous
les jours des livres qui peuvent être
non indiqués de mettre sur les étagères des bibliothèques, par exemple des livres qui seraient beaucoup trop à connotation ultrareligieuse, dans un sens comme dans l'autre, à connotation
sexuelle, dans un sens comme dans l'autre. Ils exercent leur jugement à tous les jours, et ils le font
avec des politiques réglementaires
qui sont soumises aux conseils municipaux. Et ils le font très bien, car
ils sont...
Le Président :
En terminant.
Mme David
(Outremont) : ...très bien formés, M. le Président.
Le Président :
Deuxième complémentaire, Mme la députée de Montarville.
Mme Nathalie Roy
Mme
Roy
(Montarville) : Je le répète, ces envois ne sont pas
innocents. La Ligue islamique
mondiale est basée à La Mecque, en
Arabie saoudite. Cette organisation est hostile à la démocratie, aux droits et
libertés. Elle finance à coup de
milliards les avancées de la charia dans le monde. Elle a d'ailleurs
ici, au Québec, un représentant qui était derrière le projet d'instaurer
une charia, ce tribunal islamique, dans les années 2000.
Est-ce qu'il y a quelqu'un dans ce gouvernement qui va avoir le courage d'agir contre l'islamisme
radical au Québec? Oui, ça existe.
Le Président :
Mme la ministre de la Culture.
Mme Hélène David
Mme
David (Outremont) : Écoutez,
le courage d'agir, il est chez les bibliothécaires et leur jugement. Le courage
d'agir, c'est de dire : Je ne mets pas
ces livres-là dans les rayons des bibliothèques. Le courage d'agir, c'est la formation formidable que le Québec s'est donnée par rapport aux bibliothécaires qui... Les bibliothécaires, c'est un métier important,
c'est un métier que nous respectons
tous, et ils le font avec un très grand jugement. Donc, le courage, c'est justement
de porter un certain jugement
critique et de bien le faire, et nous respectons nos bibliothèques publiques et nos bibliothécaires.
Le Président :
Principale, M. le député de Granby.
Intentions du gouvernement concernant
la hausse de la taxe de vente
M. François Bonnardel
M.
Bonnardel : Merci, M. le Président. Depuis des mois, nous questionnons
le gouvernement sur son intention ou non de ne pas augmenter la
TVQ. Jusqu'à maintenant, aucune réponse du gouvernement ne nous a permis
de croire qu'il n'augmentera pas la TVQ. Au contraire, le premier ministre laissait clairement entendre la semaine dernière que c'était
possible. Or, le premier ministre a été catégorique.
Hier, de passage dans Beauce-Sud, il a dit, et je le cite : «Il n'est pas
question d'augmenter la TVQ.» Ce gouvernement
semble avoir une position à géométrie variable. Quand on est en élection
partielle, on dit clairement qu'on n'augmentera
pas la TVQ, mais, quand on répond aux questions en Chambre, il laisse planer le
doute.
Ma
question est très simple au ministre des Finances : Peut-il répéter mot
pour mot en cette Chambre la déclaration du premier ministre hier en
Beauce et nous dire clairement : Non, je n'augmenterai pas la TVQ?
• (10 h 30) •
Le Président :
M. le ministre des Finances.
M. Carlos J Leitão
M.
Leitão : Alors, M. le Président, comme M. le premier ministre l'a très
bien et très clairement
dit non seulement hier, mais
ici, dans cette Chambre, plusieurs fois, nous n'avons aucune intention
d'augmenter le fardeau fiscal des Québécois, nous voulons le baisser. Eh oui!
Eh oui! Eh oui! nous n'avons aucune intention d'augmenter la TVQ.
Le Président :
Première complémentaire, M. le...
Des voix : ...
Le Président : S'il vous
plaît!
Des voix : ...
Le
Président : S'il vous plaît! M. le député de Rivière-du-Loup.
M. le député de Granby, c'est à vous la parole en première
complémentaire.
M. François Bonnardel
M.
Bonnardel :
M. le Président, est-ce qu'il s'engage à ne pas augmenter la TVQ pour la durée
du mandat? Et, s'il augmente la TVQ, est-ce qu'il est prêt à mettre son
siège en jeu?
Des voix : ...
Le Président : S'il vous
plaît! M. le ministre.
M. Carlos J Leitão
M.
Leitão : Peut-être, M. le Président, on s'engage dans la prochaine ère
glaciale. Je ne sais pas, peut-être que l'on devrait faire ça aussi. Est-ce que le député de Granby s'engage
aussi à ne pas barbouiller les affiches électorales de nos candidats en
Beauce, M. le Président?
Le Président : Deuxième
complémentaire, M. le député de Granby.
M. François Bonnardel
M.
Bonnardel :
Je répète ma question, M. le Président : Est-ce qu'il est prêt à mettre
son siège en jeu si la TVQ augmente d'ici la fin du mandat libéral? Oui
ou non?
Une voix : ...
Le Président : S'il vous
plaît, M. le député d'Orford! M. le ministre des Finances.
M. Carlos J Leitão
M.
Leitão : Est-ce que le député de Granby s'engage, oui ou non, à ne
plus déformer les pancartes électorales en Beauce et dans les autres
circonscriptions, M. le Président?
Le Président : Bon.
Principale, Mme la...
Des voix : ...
Le Président : Les deux...
Des voix : ...
Le Président : M. le leader
du gouvernement.
M. Fournier : 35.6° : Le
député qui a la parole ne peut refuser d'accepter la parole d'un autre député.
Notre collègue a répondu. Il est revenu
trois fois parce qu'il n'aimait pas la réponse, mais cette réponse-là exige
simplement qu'il retire ses bulles dans la Beauce, M. le Président.
Le Président : Mme la députée
de Joliette, en principale.
Protection patrimoniale
du studio d'Ernest Cormier
Mme Véronique Hivon
Mme
Hivon :
...M. le Président, la ministre de la Culture nous refait le coup de la petite
annonce en mettant une fois de plus en vente un édifice patrimonial en
douce comme s'il s'agissait d'une banale transaction immobilière. Après l'épisode de la
bibliothèque Saint-Sulpice, c'est le tour de la petite annonce de vente du «lot
2 340 042, du cadastre du Québec, [...]un bâtiment de type
résidentiel unifamilial à paliers multiples», lot qui s'avère, en fait, être
l'atelier d'Ernest Cormier, probablement
l'architecte le plus illustre du Québec, un bâtiment d'exception selon le
directeur de l'École d'architecture
de Montréal. Encore une fois, pas de débat public, pas de
discussion avec la ville, aucune explication ne venant de la ministre, simplement
qu'elle n'en avait pas besoin.
Faudra-t-il désormais
surveiller les petites annonces tous les jours, comme semble le faire le chroniqueur François
Cardinal, pour s'assurer que la ministre ne liquide pas notre patrimoine? Devant le tollé
de la mise en vente de la bibliothèque Saint-Sulpice, la ministre a finalement
reculé. Est-ce qu'elle peut faire la même chose pour le...
Le Président :
Mme la ministre de la Culture.
Mme Hélène David
Mme David (Outremont) : Je sais que ma collègue de Joliette
aime beaucoup le mot «reculer», mais ça s'adonne qu'on avance beaucoup
dans tous ces dossiers-là, et non
seulement on avance... Parce que
c'est plutôt le mode habituel de la civilisation que d'avancer, on n'aime pas
reculer en général. Et, dans le cas de la bibliothèque
Saint-Sulpice, je crois que tout
le monde est au travail, et tout le monde est extrêmement satisfait. Et je rappellerai, évidemment, à ma collègue l'immense collaboration que nous avons avec la
ville de Montréal. Et je
pense qu'elle doit être très, très, très fière du comité que nous avons nommé avec M. Corbo et Mme Courchesne,
ils sont au travail, ils font un travail remarquable, et ça, j'appelle ça
avancer de façon exemplaire.
Pour
ce qui est du studio Ernest-Cormier, là, vraiment, je ne sais pas si ma
collègue a eu l'occasion d'aller en faire le tour. Évidemment, moi, j'en avais fait le tour, c'est très intéressant. On ne parle pas du tout, du tout de la même chose, soyons très, très clairs, et de parler de processus
de mise en vente... Écoutez, il y a un nombre incroyable de maisons, de
sites classés patrimoniaux qui appartiennent
à des intérêts privés, là n'est pas la question.
Est-ce qu'elle va me demander, un jour, si j'interviens dans toutes les
ventes...
Le Président :
En terminant.
Mme David
(Outremont) : ...chaque appartement d'Habitat 67 qui est classé
et privé?
Le Président :
Première complémentaire, Mme la députée de Joliette.
Mme Véronique Hivon
Mme
Hivon : Le village
des Tanneries, la bibliothèque Saint-Sulpice, maintenant le studio Cormier,
le gouvernement fait vraiment bien peu de cas de notre patrimoine au Québec.
Je cite le professeur émérite Jean-Claude Marsan si, moi, ça ne compte pas : «J'ai représenté le Québec
pendant 16 ans à la Commission des lieux et monuments historiques et je
n'ai jamais vu un gouvernement agir de la sorte.»
Comment la ministre
de la Culture, la première gardienne de notre patrimoine, peut-elle justifier
une telle manière de procéder et un tel
mépris pour notre patrimoine? Peut-elle poser le seul geste qui s'impose et,
oui, renoncer à la vente du studio Cormier?
Le Président :
Mme la ministre de la Culture.
Mme Hélène David
Mme
David (Outremont) : Il va
falloir que je donne un cours à ma collègue sur la différence entre classer un
site, mettre un site patrimonial et vendre
un site. On peut tout à fait... Il y en a des centaines à travers le Québec.
Depuis 50 ans, nous sommes les
champions de la protection du patrimoine. Il y a des sites patrimoniaux, il
y a des immeubles patrimoniaux, ça n'empêche pas qu'il puisse y avoir
des propriétaires privés.
Ceci
dit, la loi passée en 2012, la Loi sur le patrimoine culturel, donne une
protection formidable. Et ça s'adonne que
le site Ernest-Cormier, la maison Ernest-Cormier est dans une aire protégée,
ils ne peuvent pas faire ce qu'ils veulent. Puis ça s'adonne aussi
qu'avant que M. Cardinal même mette le doigt là-dessus il y avait une
demande...
Le Président :
En terminant.
Mme
David (Outremont) : ...que
j'avais formulée de, justement, pouvoir rehausser le niveau de cet édifice-là.
Le Président :
Principale, Mme la députée de Gouin.
Négociation des conditions salariales dans la fonction
publique
Mme Françoise David
Mme David
(Gouin) : M. le Président, cette semaine, des milliers de travailleuses et travailleurs du secteur public ont été en grève. Malgré la volonté du président
du Conseil du trésor de les dépeindre comme des gras-dur, leur réalité
est tout autre. Depuis 25 ans, les employés du secteur public se
sont appauvris, la hausse du coût de la vie a augmenté bien plus vite que leurs revenus. L'écart entre leurs
salaires et ceux des travailleurs du privé a plus que doublé au cours des six dernières années en défaveur, évidemment,
du public. 75 % des employés du
secteur public sont des femmes, 50 % d'entre elles occupent un emploi atypique, à statut précaire ou à temps
partiel et gagnent en moyenne 28 000 $ par année.
Comment le président du Conseil du trésor
peut-il justifier ses propositions salariales, qui ne couvrent pas la hausse du coût de la vie et le rattrapage que les
travailleuses et travailleurs méritent et appauvrissent celles et ceux qui,
chaque jour, éduquent nos enfants et soignent nos parents?
Le Président : M. le premier
ministre.
M. Philippe Couillard
M.
Couillard : M. le Président,
je vais être heureux de répondre à ma collègue. D'abord, si elle compare ce qui
se fait au Québec en matière de contrôle des
finances publiques avec la situation de nos voisins, elle constatera que notre
situation au Québec n'a rien d'inhabituel,
notamment avec nos voisins de l'Ontario, autant pour la croissance des dépenses
de programmes que pour les offres et, on
l'espère, le règlement qui sera bientôt conclu à la table de négociation, parce
que c'est là que ça va se conclure.
Je pense
qu'il y a déjà des éléments, cependant,
qu'il faut remettre sur la table et rappeler à la population.
D'abord, c'est qu'avec 27 % de tous les emplois au Québec dans le
domaine gouvernemental à tous les niveaux confondus personne ne peut dire qu'au Québec l'État
est atrophié, au contraire, d'autres ont l'opinion inverse.
Deuxièmement, c'est qu'il est clair que c'est à la table que ça va se
régler. Il ne faut pas oublier qu'il
y a 1 $ qui est mis dans la
convention collective. On souhaiterait que ce soit le cas, mais ce n'est pas
nécessairement le cas. Il n'est pas certain
que 1 $ investi dans la convention collective va apporter une amélioration
de la qualité et de l'accessibilité aux services publics. Il faut garder des réserves financières pour les deux,
oui, avoir une entente juste et équitable avec les employés du secteur public, compte tenu de la
situation financière du Québec, mais également garder des réserves pour
développer les services, notamment en éducation.
Le Président : Première
complémentaire, Mme la députée de Gouin.
Mme Françoise David
Mme David
(Gouin) : M. le Président, 86 % des Québécois sont satisfaits du
travail des infirmières et 81 % croient que leur charge de travail est trop lourde. À l'école, 82 % des
Québécois s'objectent à l'abolition des postes d'enseignantes et de professionnels qui travaillent auprès des
élèves en difficulté, 84 % des Québécois rejettent l'augmentation du
nombre d'élèves par classe en plus d'être contre le gel salarial.
Comment le président du Conseil du trésor
peut-il demander aux infirmières et enseignantes de faire plus en
s'appauvrissant?
Le Président : M. le
président du Conseil du trésor.
M. Martin Coiteux
M.
Coiteux : Bien, M. le Président, je suis très heureux que les
Québécois soient satisfaits du travail des employés du secteur public, c'est notre cas également. Et
moi, évidemment, j'ai l'occasion, comme d'autres de mes collègues, de travailler notamment avec les gens de la fonction
publique à tous les jours puis je suis là pour témoigner de leur dévouement
puis de la grande qualité de leur travail.
Ceci dit, les
finances publiques du Québec vivent une période très difficile, et ce qu'on doit
avancer dans le cadre de cette
négociation, c'est de faire avancer toute notre société au complet à la hauteur
de nos moyens, qu'on souhaiterait plus
élevés. C'est d'ailleurs parce qu'on veut nos moyens plus élevés qu'on investit
parfois dans des secteurs aussi névralgiques que celui de
l'aéronautique, par exemple, aujourd'hui.
• (10 h 40) •
Le Président : En terminant.
M.
Coiteux : Alors, M. le Président, on fait des propositions sur la
table qui permettent à tous de progresser dans notre société.
Le Président : Deuxième
complémentaire, Mme la députée de Gouin.
Mme Françoise David
Mme David
(Gouin) : Le président du Conseil du trésor, au fond, nous dit que les
demandes des travailleuses et
travailleurs des services publics coûtent trop cher à l'État, mais, en même
temps, ce gouvernement refuse d'imposer plus de redevances aux minières et de taxer le capital des banques, qui
ne manquent pas de profits. Il versera, au cours des cinq prochaines
années, plus de 13 milliards au Fonds des générations.
Pourquoi
le gouvernement refuse-t-il de mettre en place des mesures fiscales permettant
de soutenir les services publics et les gens qui y travaillent?
Le Président : M. le
président du Conseil du trésor.
M. Martin Coiteux
M.
Coiteux : ...notre approche, M. le Président, c'est de penser non pas
une année à l'avance ou deux années à l'avance, mais de penser
20 années à l'avance, 30 années à l'avance.
Un des
problèmes du Québec actuellement, c'est qu'il y a 10,5 milliards de
dollars qui vont en intérêts sur la dette publique qu'on a accumulée
dans le passé. Ces 10,5 milliards de dollars, bien entendu, ne sont pas
disponibles pour l'éducation. Dans les
faits, c'est plus d'argent que ce qu'on met dans les écoles primaires et
secondaires à chaque année, M. le Président.
Alors, le
Fonds des générations, c'est un outil par lequel on se désendette peu à peu, de
manière responsable, pour que nos
jeunes, là, pas ceux à naître dans les prochaines années, là, mais nos jeunes,
on en a, des enfants, là, ici, les collègues autour de la table, ici...
Le Président : En terminant.
M.
Coiteux : C'est pour qu'ils puissent accéder à des services publics de
qualité à un coût qu'ils soient capables de payer.
Le Président : Principale,
Mme la députée de Mirabel.
Construction d'un pôle
logistique de
transport intermodal en Montérégie
Mme Sylvie D'Amours
Mme
D'Amours : Merci, M. le Président. Le gouvernement du Québec envisage
d'implanter un pôle logistique de
transport dans la région de Vaudreuil-Soulanges, en plein coeur d'une zone
agricole. J'ai personnellement rencontré tous les producteurs agricoles du coin, et ils craignent d'être
expropriés. Près de 25 fermes pourraient être amputées d'une partie
ou de la totalité de leurs terres. On parle ici de 500 hectares parmi les
meilleures terres agricoles du Québec.
Le ministre
responsable de la Stratégie maritime a déclaré qu'il était prématuré de songer
à dézoner et à exproprier des terres
agricoles. Il n'a donc pas fermé la porte. D'ailleurs, le gouvernement libéral
a voté hier contre ma motion qui réitérait
l'importance de privilégier d'abord le site de Contrecoeur pour l'implantation
d'un futur pôle logistique de transport.
M. le
Président, est-ce que le ministre peut rassurer les producteurs agricoles en
fermant définitivement la porte
à une expropriation?
Le Président : M. le leader
du gouvernement.
M. Fournier : Écoutez, mon
collègue répond... Seulement une précision, nous n'avons pas voté contre.
Le Président : M. le ministre
responsable de...
Une voix : ...
Le Président : ...délégué aux
Transports.
M. Jean D'Amour
M.
D'Amour : Alors, merci, M. le Président. Effectivement, au Québec, il y aura installation, implantation de pôles logistiques. On a eu l'occasion d'en parler
du côté de Contrecoeur, du côté de Vaudreuil-Soulanges parce que
c'est bon pour l'emploi. Et sincèrement, M. le Président, j'ai eu
l'occasion, il y a deux ou trois semaines, de rencontrer les représentants de
l'UPA de la région de Vaudreuil-Soulanges, où on a échangé. D'abord, je tiens à
dire à la députée qu'il y a
plus de 300 hectares disponibles, dézonés pour l'implantation
d'entreprises en territoire de Vaudreuil-Soulanges. C'est une bonne
nouvelle.
Moi, je
travaille en collaboration avec l'ensemble de mes collègues, et ça va créer
des emplois à court terme et à moyen terme dans la région. Ça fait partie de
nos orientations gouvernementales que de développer l'économie, et on est d'avis aussi que l'agriculture fait partie de l'économie. C'est la
raison pour laquelle nous avons multiplié nos rencontres au cours des dernières semaines pour faire en
sorte que l'implantation des pôles logistiques se fasse sous l'angle de la
création d'emplois, mais du respect des communautés aussi, M. le Président.
Le Président : Première
complémentaire, Mme la députée de Mirabel.
Mme Sylvie D'Amours
Mme
D'Amours : Les firmes agricoles créent de l'emploi, eux autres aussi,
M. le Président. L'expropriation possible de 25 producteurs agricoles à
Vaudreuil est lourde de conséquences. Pourtant, le gouvernement pourrait implanter le pôle logistique à Contrecoeur, là où
il n'y a pas de terres agricoles menacées et là où le port est accessible
365 jours par année.
Est-ce
que c'est parce que le pôle logistique se retrouvait dans un comté libéral que
le ministre est prêt à exproprier de nombreux producteurs agricoles?
Le Président :
M. le ministre délégué aux transports.
M. Jean D'Amour
M.
D'Amour : ...M. le Président, on nous prête des intentions, mais ce
que nous voulons comme gouvernement, c'est
de créer des emplois partout dans les régions du Québec. Et, sur la question
des pôles logistiques, il y a pour nous une opportunité d'affaires importante. Tout comme l'agriculture, je le
répète, je l'ai dit tout à l'heure, c'est important parce que ça fait
partie de notre économie au Québec.
Alors,
évidemment, il y a d'autres pourparlers qui s'en viennent, qui vont nous
permettre de développer... C'est ça, la stratégie maritime, M. le
Président, et c'est important pour nous.
Le Président :
Deuxième complémentaire, Mme la députée de Mirabel.
Mme Sylvie D'Amours
Mme
D'Amours : Un propriétaire producteur agricole qui risque
l'expropriation a envoyé hier un courriel au ministre de la Stratégie maritime et à celui de l'Agriculture pour les
aviser que ses terres agricoles de qualité sont menacées. Il n'a pas le
même discours que le ministre aujourd'hui. Je la dépose ici.
Il
dit que le rendement de ses terres agricoles est l'équivalent, au hockey, d'un
joueur de Canadien qui compte 50 buts dans la même année. Essayez
de faire la différence.
Est-ce que le
ministre de l'Agriculture est d'accord avec l'expropriation des terres à
Vaudreuil?
Le Président :
Est-ce qu'il y a consentement pour le dépôt?
Une voix :
Oui.
Document déposé
Le Président :
Consentement pour le dépôt. M. le ministre de l'Agriculture,
M. Pierre Paradis
M. Paradis (Brome-Missisquoi) : ...remercier Mme la députée pour son
intervention. Comme l'a indiqué mon collègue,
on le travaille en équipe, ce dossier-là. La croissance économique, c'est
important, puis, comme il l'a indiqué, l'agroalimentaire,
c'est de la croissance économique. Le principal
secteur créateur d'emplois au Québec — puis
je le dis ce matin, là, dans le cadre... — avant l'aéronautique,
avant le pharmaceutique, avant les jeux vidéo, c'est le secteur agroalimentaire. Donc, vous pouvez compter sur le
gouvernement du Québec pour se porter à la défense de son secteur
agroalimentaire.
Le Président :
Principale, Mme la députée de Taillon.
Patients dirigés vers une clinique privée par
L'Hôpital de Montréal pour enfants
Mme Diane Lamarre
Mme
Lamarre : M. le Président, on apprend ce matin que L'Hôpital de
Montréal pour enfants envoie les parents et leurs enfants vers une clinique privée toute proche qui est détenue
par Brunswick Medical Group. Les parents arrivent à cette clinique référés par l'hôpital, et on leur
demande leur carte d'assurance maladie. Donc, il y a une facturation qui est
faite à l'assurance maladie par les
médecins, et on leur demande en plus des frais supplémentaires, entre 25 $
et 200 $, pour un test
d'allergie ou une prise de sang. Pourtant, tous ces services sont absolument
gratuits lorsqu'ils sont donnés à l'hôpital, et on dirige volontairement
ces parents et leurs enfants malades vers une clinique toute proche.
Est-ce que le
ministre va mettre fin à cette pratique et s'assurer que ce qui est gratuit à
l'hôpital reste gratuit à l'extérieur de l'hôpital?
Le Président : M. le ministre
de la Santé.
M.
Gaétan Barrette
M.
Barrette : Alors, M. le Président, je suis content que la députée de
Taillon se lève en Chambre pour me poser cette question d'actualité pour
ramener les pendules à l'heure. Alors, je vais rappeler la situation qui fait
que nous sommes là aujourd'hui. Il y a une dizaine d'années, M. le Président,
il a été convenu de construire un nouvel hôpital universitaire, le Centre hospitalier de santé de l'Université McGill,
et, dans cette planification-là, il avait été convenu, M. le Président, que le centre hospitalier en
serait un de centre tertiaire et quaternaire et que la première et la deuxième
lignes ne s'y feraient que peu, seulement en quantité suffisante pour y
prodiguer de l'enseignement. Il avait donc été convenu à la naissance, M. le
Président, de ce projet que des activités devaient se faire dans la communauté,
et c'est exactement ce qui est arrivé, évidemment, aujourd'hui.
Malheureusement, M. le Président, tant chez
l'adulte que chez l'enfant, les gens ne se sont pas préparés en conséquence — et je parle du corps médical ici — il a dû y avoir des décisions qui ont été
prises et est née une clinique à côté
de l'hôpital. Il est donc faux de dire que l'hôpital envoie des patients à
l'extérieur, se font à l'extérieur des choses qui n'auraient pas dû se
faire à l'hôpital...
Le Président : En terminant.
M. Barrette : ...et on a une nouvelle
situation qui est maintenant normale, tout simplement.
Le Président : Première
complémentaire, Mme la députée de Taillon.
Mme Diane Lamarre
Mme Lamarre : Alors, le ministre
reconnaît qu'il est normal que les gens aient à payer quand leur enfant est malade et qu'ils vont vers une clinique où ils
sont dirigés par l'hôpital. C'est ce qu'il vient de reconnaître. Alors, on dit
même ici que c'est sur directive du
ministère dans l'article, The Gazette. Alors, le ministre,
clairement, favorise la privatisation du
réseau de la santé, il impose des frais complètement imprévisibles pour les
parents et les enfants malades qui sont pris en otage.
Est-ce qu'il va mettre fin à cette pratique,
abolir les frais accessoires et punir ces...
Le Président : M. le ministre
de la Santé.
M. Gaétan Barrette
M.
Barrette : M. le Président, j'ai bien expliqué que la situation
actuelle était connue et prévue depuis longtemps. Maintenant, M. le Président, au moment où on se
parle, la députée de Taillon aurait pu peut-être s'informer aux autorités
compétentes pour apprendre que le
gouvernement n'a donné aucune directive à cet effet. Les patients ne sont pas
dirigés de l'hôpital à cet endroit, les patients peuvent aller là.
Maintenant,
M. le Président, d'insinuer que tous les patients qui vont là vont devoir payer
des frais, c'est faux. Évidemment, on
a mis en place récemment, hein... on a terminé l'étude sur une loi qui va faire
en sorte que les abus et les tarifs qui sont illégaux et qui sont, en
général, exceptionnels...
Le Président : En terminant.
M. Barrette : ...soient éliminés,
tout simplement. M. le Président. C'est une situation qui est donc normale.
Le Président : Deuxième
complémentaire... Principale?
Une voix : ...
Le Président : Principale, M.
le député de Gaspé.
Impact d'une hausse de
la taxe spécifique sur les
boissons alcooliques sur les microbrasseries
M. Gaétan Lelièvre
M.
Lelièvre : M. le Président, le rapport Godbout propose de hausser la
taxe spécifique pour les microbrasseries québécoises. Rappelons-nous que c'est sous l'impulsion d'un gouvernement
du Parti québécois, en 1996, que le secteur des microbrasseries a pris
son essor au Québec. Aujourd'hui, en 2015, nous retrouvons 130 entreprises
réparties dans 16 régions du Québec et
3 800 emplois directs répartis partout, en Abitibi, au Lac-Saint-Jean,
Cantons-de-l'Est, dans les Laurentides,
etc. Nous devons être fiers de cette nouvelle génération d'entreprises qui
remportent des prix dans des compétitions même internationales, Pit Caribou, Anse-à-Beaufils. Percé a remporté récemment
le prix de la meilleure bière brune au monde.
M. le Président, ce sont des entrepreneurs dont nos régions ont besoin, des
personnes dynamiques qui participent activement au développement des
régions.
Est-ce que le ministre des Finances
peut, aujourd'hui, confirmer qu'il renonce à implanter cette nouvelle taxe
contre les microbrasseries québécoises?
• (10 h 50) •
Le Président :
M. le ministre des Finances.
M. Carlos J Leitão
M.
Leitão : M. le Président, on a passé un grand nombre de mois, même une
commission parlementaire, à regarder le
rapport Godbout. Il y a plusieurs recommandations dans le rapport Godbout sur
la réforme de la fiscalité québécoise. À
ce que je sache, on n'a rien mis en oeuvre de ce... jusqu'à aujourd'hui. Je
m'étais aussi engagé publiquement, il y a à peine quelques jours, à dire que,
quelle que soit la réforme, on va d'abord attendre et voir quelle va être la
décision du nouveau gouvernement
fédéral en termes de... eux aussi qui font une réforme fiscale. Donc, on est
très loin d'arriver à ces scénarios-là. Ça ne fait pas du tout partie de nos
intentions de changer la taxe sur la bière, du tout, M. le Président.
Le Président :
...
Une voix :
...
Le Président :
Complémentaire, Mme la députée de Taschereau.
Mme Agnès Maltais
Mme
Maltais : Pour que les gens comprennent, je vais vous citer
le propriétaire de la Microbrasserie Saint-Pancrace à Baie-Comeau : «C'est certain que ça vient
mettre fin à toute capacité de croissance de l'entreprise.» Donc, le
développement, c'est quelque chose
qu'ils vont être obligés de mettre de côté. Après ça, la rentabilité, même en
fonction des installations actuelles, est sérieusement menacée. C'est ça
qu'ils ont compris, les propriétaires de microbrasserie.
Est-ce que
vous tenez véritablement, véritablement à faire fermer des petites
installations comme la Microbrasserie Saint-Pancrace de Baie-Comeau?
Le Président :
M. le ministre des Finances.
M. Carlos J Leitão
M.
Leitão : Je trouve
ça vraiment désolant. Encore une fois, l'opposition officielle nous porte des intentions, saute aux conclusions absolument pas fondées du
tout. Je viens de dire, M. le
Président, je viens de dire qu'on n'a
aucune intention d'augmenter la taxe
spécifique sur la bière. Alors, la députée saute aux conclusions sans aucune justification.
De plus, de plus, la brasserie
qu'elle a citée a bénéficié de l'aide gouvernementale, M.
le Président, et nous comptons
continuer à le faire.
Le Président :
Complémentaire, Mme la députée de Taschereau.
Mme Agnès Maltais
Mme
Maltais : Ce que
je cite, c'est un propriétaire de microbrasserie. Ce n'est pas nous qui le
disons, là, ce sont les propriétaires
de microbrasserie partout sur le territoire des régions. Puis je pense à la Microbrasserie
Saint-Pancrace de Baie-Comeau parce que je la connais, je connais les jeunes
entrepreneurs comme ceux-là. Prenez un engagement ferme, M. le ministre.
Est-ce que
vous prenez un engagement ferme, ferme de ne pas augmenter la taxe, de ne
pas augmenter la taxe sur les microbrasseries comme celle qu'on a à Baie-Comeau?
Le Président :
M. le ministre des Finances.
M. Carlos J Leitão
M.
Leitão : M. le Président, je ne comprends pas que... Encore
une fois, là, je l'ai dit clairement
deux fois, donc troisième fois :
Nous n'avons aucune intention, nous n'avons aucune intention d'augmenter la
taxe spécifique sur la bière. Est-ce
qu'on peut être plus clair que ça, M. le Président? Peut-être je ne connais pas très bien la langue française,
mais je ne suis pas capable d'être plus clair que ça.
Le Président :
En tout cas, cela met fin à la période de questions et de réponses orales.
Motions sans préavis
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, puisqu'il n'y a pas de votes reportés, nous allons passer à
la rubrique des motions sans préavis.
Et, en fonction de nos règles et de l'ordre de présentation, je reconnais maintenant
un membre du deuxième groupe d'opposition et je cède la parole à M. le
député de Deux-Montagnes.
M.
Charette : Merci, Mme la Présidente. Je demande le consentement pour
déposer la motion suivante :
«Que l'Assemblée nationale reconnaisse
que le versement d'allocations de transition aux députés qui choisissent
de quitter leurs fonctions en cours de
mandat contribue grandement au cynisme de la population envers la classe
politique;
«Qu'elle reconnaisse que cet enjeu
peut être réglé indépendamment des autres enjeux touchant les conditions de
travail des députés et presse le gouvernement d'abolir dès maintenant les
allocations de transition; enfin
«Que
tous les députés actuels de la 41e législature s'engagent à renoncer à leur
allocation de transition s'ils quittent durant le présent mandat sans
que leur démission ne soit attribuable à des raisons de santé ou familiales.»
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Alors, merci, M. le député. Y a-t-il consentement
pour débattre de cette motion? M. le leader adjoint du gouvernement.
M.
Sklavounos :
Pas de consentement, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, il n'y a pas de consentement. Pour la prochaine motion sans préavis, je reconnais un membre du groupe formant le gouvernement, M. le ministre responsable de l'Accès à l'Information et de la Réforme des Institutions
démocratiques.
Presser le gouvernement d'abolir les allocations de
transition des députés démissionnant en cours
de mandat pour des raisons autres que de
santé ou familiales sérieuses
M. Fournier :
Merci, Mme la Présidente, je sollicite le consentement de cette Assemblée afin
de présenter la motion suivante conjointement avec la députée de Gouin ainsi
que la députée d'Arthabaska :
«Que
l'Assemblée nationale reconnaisse que le versement d'allocations de transition
aux députés qui choisissent de
quitter leurs fonctions en cours de mandat contribue grandement au cynisme de
la population envers la classe politique;
«Qu'elle reconnaisse
que la solution à cet enjeu pourrait entrer en vigueur plus rapidement que
l'ensemble des autres conditions de travail
des députés et presse le gouvernement d'abolir dès maintenant les allocations
de transition;
«Que
tous les députés actuels de la 41e législature s'engagent à renoncer à leur
allocation de transition s'ils quittent durant le présent mandat sans que leur démission ne soit attribuable à
des raisons de santé ou familiales sérieuses justifiées auprès du
Commissaire à l'éthique et à la déontologie.»
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, très bien. Y a-t-il
consentement pour débattre de cette motion? M. le leader adjoint du
gouvernement.
M.
Sklavounos : Oui, Mme la Présidente, il y a consentement
pour le débat. Durée maximale de trois minutes par intervenant dans l'ordre suivant : notre ministre responsable
de l'Accès à l'Information et de la Réforme des Institutions démocratiques, l'auteur de la motion,
suivi du leader de l'opposition officielle, le député de Deux-Montagnes et,
finalement, la députée de Gouin.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Alors, je vous remercie. M. le ministre, la parole
est à vous.
M. Jean-Marc Fournier
M. Fournier :
Merci, Mme la Présidente. D'abord, je remercie l'Assemblée de permettre que
nous puissions débattre de cette motion, qui
était l'amendement, la motion que j'ai présentée hier dans le débat
sur la même motion de la deuxième opposition. Et, à ce moment-là, le
proposant n'a pas accepté que nous ayons le débat sur cette motion, j'apprécie,
aujourd'hui, que nous ayons ce consentement et que nous puissions en discuter.
Ça
me permet d'expliquer que ce qui ne fonctionne pas dans la motion d'hier
présentée par la deuxième opposition...
et qui explique pourquoi nous avons voté
contre était le fait qu'elle disait — et
je le rappelle, d'ailleurs elle vient
d'être citée tantôt — que l'enjeu est indépendant des autres
enjeux du rapport L'Heureux-Dubé. Et, pour nous, il y a un lien avec l'ensemble de L'Heureux-Dubé. Pourquoi? D'abord,
parce que, dans le rapport indépendant L'Heureux-Dubé mis sur pied avec
le consentement de tous pour que ce soit un comité indépendant, le rapport
indépendant appelle à l'adopter comme un
tout. Donc, en respect au mandat qu'on a donné, c'est, pour nous, normal qu'on
l'envisage comme un tout.
On se souvient que le
Commissaire à l'éthique est intervenu dans son rapport, son dernier rapport, où
il dit aux députés de cesser d'être en
conflit d'intérêts et plutôt de s'en reporter à des comités indépendants comme
celui de L'Heureux-Dubé. Nous voulons respecter la recommandation du
Commissaire à l'éthique.
Nous
voyons bien que, dans l'ensemble du rapport L'Heureux-Dubé, il y a
des économies de 270 000 $
pour les allocations de transition en cas de démission durant mandat,
mais il y en a aussi de 550 000 $ pour les allocations de transition en cas de défaite ou de retraite. Il y
a 2 240 000 $ d'économies sur le régime de retraite, il y a
230 000 $ d'économies sur
le régime d'assurance collective, et on pourrait continuer. L'ensemble de
l'oeuvre fait en sorte que, lorsqu'on prend tout L'Heureux-Dubé, il y en a pour 400 000 $ annuellement,
4 millions sur 10 ans, d'économies pour les Québécois, et nous
croyons qu'on devrait considérer tous ces éléments.
Cela
étant dit, on l'a dit depuis longtemps, parce qu'on voyait bien le fait que les
députés, tous les députés souhaitaient
que, pour ce qui est des départs à la retraite durant mandat, la prime de
transition soit éteinte... On le voyait, et donc j'ai proposé plusieurs fois qu'on puisse faire entrer en vigueur
plus tôt cette disposition-là et que tout le reste, tel que le propose L'Heureux-Dubé, se fasse à la
prochaine législature. C'est le sens de la motion que nous avons déposée hier.
On n'a pas pu
en discuter, mais, ce matin, j'apprécie que nous puissions discuter de cela. Et
l'intention que nous avons, c'est de
faire en sorte que l'Assemblée soit saisie en même temps, le même jour, de deux
projets de loi qui vont reprendre
l'ensemble de L'Heureux-Dubé, qui vont nous permettre ensemble de mettre fin
aux allocations de transition durant
mandat avant Noël peut-être, Mme la Présidente, et aussi d'étudier l'ensemble
des autres recommandations pour que,
le plus rapidement possible — je comprends qu'il y a plus d'éléments — le plus rapidement possible, on puisse
mettre toute cette question-là derrière nous, qu'on ait respecté un
comité indépendant, qu'on ait respecté le Commissaire à l'éthique et qu'on
puisse fonctionner normalement, dans le respect les uns des autres. Merci, Mme
la Présidente.
• (11 heures) •
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, M. le
ministre. Et maintenant, M. le leader de l'opposition officielle, la
parole est à vous.
M. Bernard Drainville
M.
Drainville : Merci,
Mme la Présidente. Alors, oui, nous allons voter en faveur de cette motion,
puisque cette motion reprend
l'essentiel d'une proposition que nous avons faite non pas à une reprise, mais
à deux reprises, Mme la Présidente.
Nous avons déposé le projet de loi n° 33
lorsque nous étions au gouvernement. Malheureusement, les élus du Parti libéral l'avaient, à ce moment-là, bloqué,
ce qui en avait empêché l'adoption. On a de la suite dans les idées. Mon
collègue de Verchères a redéposé le même
projet de loi, qui est maintenant le projet de loi n° 398, qui reprend,
effectivement, les mêmes orientations
qui nous engagent comme élus à mettre fin à ces allocations de transition, à
moins que le ou la député ne quitte pour des raisons de santé ou des
raisons familiales. Et l'explication, la justification doit être portée à
l'attention du Commissaire à l'éthique, qui doit porter un jugement sur les
raisons évoquées pour le ou la députée qui demanderait
à ce moment-là qu'on lui verse l'allocation, mais, à moins d'avoir de très
bonnes raisons, il n'y en aurait plus, d'allocation. Et c'est ce que dit
398 et c'est ce que disait 33.
Alors, la
motion du projet... du Parti libéral, dis-je, reprend l'essentiel de
l'engagement et le projet de loi que nous avons déposé, donc on va, bien sûr, appuyer cette motion-là, Mme la
Présidente. Et, comme je l'ai dit hier, lors de la prise de parole sur la motion de la deuxième opposition,
nous, on pense depuis le départ que c'est un geste que nous devons poser comme députés, comme élus pour redonner
confiance aux citoyens, Mme la Présidente. Les citoyens, tous partis confondus, nous demandent de poser des gestes qui
vont leur redonner foi dans la fonction de député. Les gens sont très critiques des politiciens de façon générale, ils
sont soupçonneux, ils sont sceptiques, ils sont méfiants, ils sont cyniques
et, je l'ai dit hier et je le répète
aujourd'hui, Mme la Présidente, ils sont très, très cyniques et très, très
critiques quand ils voient l'un des
nôtres, peu importe le parti, quitter avec sa prime sans raison valable. Alors,
si on peut, par un geste comme celui-là, Mme la Présidente, contribuer à
redorer la fonction de député, contribuer à réduire le cynisme, contribuer à redonner confiance dans la fonction du député ou
de la députée, il faut poser ce geste-là. Et ça fait longtemps qu'on veut
le poser, Mme la Présidente. Et, si on peut enfin s'entendre, comme élus, à
travers cette Chambre, toutes formations politiques
confondues, je pense qu'on aura, Mme la Présidente, posé le bon geste, le geste
noble qui va nous permettre d'avancer
et de dire à nos concitoyens : Vous voyez, tous ensemble, on est capables
de répondre à ce que vous souhaitez de nous, à ce que vous voulez de
nous.
populaire, à cette
volonté citoyenne et entendre enfin ce que réclament les Québécois et les
Québécoises, ce qu'ils souhaitent de nous comme députés. Voilà, Mme la
Présidente. Merci.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, M. le leader de l'opposition
officielle. Maintenant, M. le député de Deux-Montagnes, c'est à vous la
parole.
M. Benoit Charette
M. Charette : Merci, Mme la
Présidente. C'est invariablement ou immanquablement un sujet extrêmement sensible parce qu'on est tous touchés par la
question. Ça nous oblige à deux choses : ça nous oblige à beaucoup
d'objectivité, ça nous oblige à de la
rigueur. Et ça nous oblige à de la constance, mais ça nous oblige également à
traiter le sujet en respect des opinions des autres.
Je ne veux
pas insister beaucoup sur le sujet, mais hier le leader du gouvernement, dans
son argumentaire, a employé des
termes extrêmement insultants, antiparlementaires. Il s'est excusé par la
suite, et j'en prends bonne note, mais cette attitude, pour nous, signifie une chose, c'est qu'il y a un malaise de
la part du Parti libéral au pouvoir sur cette question. Et ce malaise s'explique par une chose, c'est
qu'il est absolument impossible de tracer une ligne de conduite ou, à tout le
moins, une opinion claire sur ses
intentions. Pendant l'essentiel de sa plaidoirie, hier, le ministre, le leader
du gouvernement, a plaidé contre
l'idée de scinder différents aspects du rapport L'Heureux-Dubé, plaidant qu'il
doit au contraire être adopté comme
un tout. Or, ce matin, dans Le Journal de Québec — etde Montréal — on lit exactement le contraire : il
aurait donné une entrevue exclusive à
la journaliste Geneviève Lajoie où il aurait affirmé qu'il y aura deux
projets de loi bien distincts de
présentés au cours des prochaines semaines. Si c'est le cas, c'est un revirement
majeur en 24 heures, et on ne le lui reprochera pas, parce qu'effectivement il y
a possibilité de s'entendre rapidement sur la question des primes de départ
aux députés démissionnaires. Cependant,
cependant, ce flip-flop — on peut l'appeler ainsi — nous interpelle énormément et nous
amène à se poser une autre question, c'est sur la valeur des votes que l'on
tient en cette Assemblée nationale.
Moi, je vais
lui rappeler une motion qui a été adoptée à l'unanimité, donc, par tous les
collègues du Parti libéral le 12 novembre dernier où il est
clairement mentionné et dit que les membres de l'Assemblée nationale acceptent
de contribuer à hauteur de 50 % à leur
régime de retraite. Or, si, aujourd'hui, il veut adopter dans l'intégralité le rapport
L'Heureux-Dubé, il est en contradiction avec son propre engagement qu'il a pris
lors de ce vote-là.
Donc, aujourd'hui, on est devant un flou qui est
plus qu'artistique, Mme la Présidente, qui nous empêche de connaître les véritables intentions du gouvernement. Il n'y a aucun projet de loi qui est déposé à ce jour, et chaque jour
nous arrive une version différente. Donc, pour cette raison, on ne peut pas
appuyer la motion qui est présentée par le Parti libéral. Et, pour tous les citoyens,
pour tous les citoyens qui nous regardent, on va tout de même...
Des voix : ...
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Un instant! Je peux vous demander le silence? Il y a une personne qui a
la parole, et c'est M. le député de Deux-Montagnes, et j'aimerais bien pouvoir l'entendre.
Des voix : ...
M. Charette : Tout à fait. Et, pour
tous les citoyens qui nous regardent et qui, à juste titre, nous demandent...
Des voix : ...
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Un instant! Je vous ai demandé le silence. S'il vous plaît! M. le député, vous
pouvez poursuivre.
M.
Charette : Donc, j'allais dire, Mme la Présidente : Pour tous
les citoyens qui nous regardent et qui s'attendent de nous à un minimum de rigueur et de constance,
on va tout de même souhaiter qu'un projet de loi soit déposé rapidement,
même si ça constitue un revirement majeur de
la part du gouvernement, un projet de loi qui soit déposé rapidement et qui
interdise le versement des primes de départ
aux députés qui quitteraient sans des raisons familiales ou de santé, Mme la
Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, je vous remercie, M.
le député de Deux-Montagnes. Maintenant, Mme la députée de Gouin, à vous
d'intervenir.
Mme Françoise David
Mme David
(Gouin) : Merci, Mme la Présidente. J'écoute avec un certain plaisir
l'ensemble des discussions. Il me
semble que, ce matin, ce qu'on doit surtout retenir, nonobstant bien sûr les
divergences et les différences, c'est qu'on a, je pense, collectivement
enfin trouvé ce qui pourrait s'appeler un début de solution à un débat qui
durait depuis trop longtemps, c'est-à-dire
comment faire pour mettre fin à la pratique actuelle du versement, à peu près
sans condition, des primes de
transition mais, en même temps, s'attaquer à l'ensemble de la question de la
rémunération des députés. Donc, moi,
je pense qu'il faut tout le temps se réjouir quand on commence à trouver des
pistes de solution qui nous permettent d'agir en même temps sur deux
fronts.
Je rappelle
aussi à mes collègues que la prime de transition, quoi qu'il soit écrit dans la
motion, contient un autre élément qui
n'est pas seulement l'élément prime, c'est l'élément transition, et qu'on va
avoir du plaisir, à partir du rapport L'Heureux-Dubé,
à en débattre, puisque ce rapport ne propose pas seulement les balises
indiquées dans la motion pour le versement
ou non de la prime de transition, il propose aussi de la limiter à la période
de transition pendant laquelle le ou la députée se cherche un nouvel emploi. Donc, vous voyez qu'il y a des
débats qui débordent largement la seule et unique question de : Allons-nous, oui ou non, verser
des primes de transition au moment du départ d'un député en cours de mandat?
Nous allons
nous intéresser beaucoup, dans ma formation politique, à l'ensemble de la
discussion, à l'ensemble de
l'architecture du rapport L'Heureux-Dubé parce que c'est une architecture
rigoureuse et intelligente et c'est une très bonne base de débat. Maintenant, est-ce que nous, nous sommes prêts à
dire que nous allons l'adopter sans ambages, sans aucune modification et sans aucun amendement? Tel
n'est pas le cas, parce que, dans ma formation politique, nous allons
nous objecter à ce qu'il y ait des augmentations de rémunération pour chacun et
chacune des députés, ministres et personnes
assumant différentes fonctions politiques. Donc, il y aura des débats, ce qui
veut dire que ça ne sera peut-être pas
adopté avant les fêtes pour ce qui est de l'ensemble du travail. Par contre,
oui, sur la question des primes, je pense que l'entente pourrait venir
assez vite.
• (11 h 10) •
En terminant,
Mme la Présidente, je dirais ceci sur la question du cynisme de la
population : Il serait peut-être intéressant qu'on se comporte de
façon un petit peu moins masochiste, si j'ose m'exprimer ainsi. Il y a, oui,
dans certaines couches de la population, je
dirais, encouragées par certains médias une certaine dose de cynisme. Il y a
aussi, en ce moment, un peu de
découragement. Il y a aussi pas mal de colère, il y a pas mal d'inquiétude. Vous
savez, les gens ne passent pas leur
journée à discuter seulement de primes de transition. Ces temps-ci, ils
discutent de bien d'autres choses. Et, s'il y a quelque chose qu'on peut faire comme
politiciennes et politiciens pour que les gens aient confiance en nous, c'est
de répondre à leurs besoins
quotidiens. Ça, ça aiderait beaucoup à un meilleur moral dans la population.
Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, Mme la
députée de Gouin. Maintenant, est-ce que cette motion est adoptée?
M.
Sklavounos :
Vote par appel nominal, Mme la Présidente.
Mise aux voix
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, nous allons procéder avec un
vote par appel nominal. Appelons les députés. Je suspends les travaux
quelques instants.
(Suspension
de la séance à 11 h 11)
(Reprise à
11 h 13)
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, nous allons maintenant
mettre aux voix la motion suivante :
«Que l'Assemblée nationale reconnaisse
que le versement d'allocations de transition aux députés qui choisissent
de quitter leurs fonctions en cours de
mandat contribue grandement au cynisme de la population envers la classe
politique;
«Qu'elle reconnaisse que la solution à
cet enjeu pourrait entrer en vigueur plus rapidement que l'ensemble des autres conditions de travail des députés et presse
le gouvernement d'abolir dès maintenant les allocations de transition;
«Que
tous les députés actuels de la 41e législature s'engagent à renoncer à leur
allocation de transition s'ils quittent durant le présent mandat sans que leur démission ne soit attribuable à
des raisons de santé ou familiales sérieuses justifiées auprès du
Commissaire à l'éthique et à la déontologie.»
Et que les députés en
faveur de cette motion veuillent bien se lever.
Le Secrétaire adjoint : M.
Couillard (Roberval), M. Fournier (Saint-Laurent), M. Paradis
(Brome-Missisquoi), M. Hamad
(Louis-Hébert), M. Leitão (Robert-Baldwin), M. Coiteux (Nelligan), M. Moreau
(Châteauguay), Mme David (Outremont),
M. Poëti (Marguerite-Bourgeoys), M. D'Amour (Rivière-du-Loup—Témiscouata), M. Huot (Vanier-Les Rivières), M. Kelley
(Jacques-Cartier), Mme Vallée (Gatineau), M. Lessard (Lotbinière-Frontenac), M. Barrette (La Pinière), M. Blanchette
(Rouyn-Noranda—Témiscamingue),
M. Heurtel (Viau), M. Arcand (Mont-Royal), Mme Charbonneau (Mille-Îles), Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce), Mme Vien
(Bellechasse), M. Billette (Huntingdon), M. Blais (Charlesbourg), Mme St-Pierre (Acadie), M. Reid (Orford), Mme
Vallières (Richmond), M. Morin (Côte-du-Sud), M. Bernier (Montmorency), M. Ouellette (Chomedey), Mme Charlebois
(Soulanges), Mme Ménard (Laporte), M. Sklavounos (Laurier-Dorion), M. Girard (Trois-Rivières), Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger), M. Carrière (Chapleau), M. Drolet (Jean-Lesage), M. Chevarie (Îles-de-la-Madeleine),
M. Matte (Portneuf), M. Tanguay (LaFontaine), M. Bolduc (Mégantic), Mme
de Santis (Bourassa-Sauvé), M. Iracà (Papineau), M. Rousselle (Vimont), M.
Proulx (Jean-Talon), M. Giguère (Saint-Maurice),
M. Fortin (Sherbrooke), M. Fortin (Pontiac), M. Bourgeois (Abitibi-Est), M.
Boucher (Ungava), M. Birnbaum
(D'Arcy-McGee), M. Auger (Champlain), M. Habel (Sainte-Rose), M. Hardy
(Saint-François), M. Merlini (La Prairie),
Mme Montpetit (Crémazie), Mme Nichols (Vaudreuil), M. Plante (Maskinongé), M.
Polo (Laval-des-Rapides), Mme Simard (Charlevoix—Côte-de-Beaupré), M.
St-Denis (Argenteuil), Mme Tremblay (Chauveau).
M. Péladeau (Saint-Jérôme), M.
Drainville (Marie-Victorin), M. Marceau (Rousseau), M. Therrien (Sanguinet),
M. Bérubé (Matane-Matapédia), Mme Poirier (Hochelaga-Maisonneuve), Mme Lamarre
(Taillon), M. Traversy (Terrebonne), M.
Lelièvre (Gaspé), M. Bergeron (Verchères), M. Gaudreault (Jonquière), Mme
Maltais (Taschereau), M. LeBel
(Rimouski), Mme Hivon (Joliette), M. Cloutier (Lac-Saint-Jean), M. Lisée
(Rosemont), M. Rochon (Richelieu), M.
Villeneuve (Berthier), Mme Ouellet (Vachon), M. Turcotte (Saint-Jean), M. Kotto
(Bourget), Mme Richard (Duplessis), M. Roy (Bonaventure).
Mme
David (Gouin), Mme Massé (Sainte-Marie—Saint-Jacques), Mme Roy (Arthabaska).
La Vice-Présidente (Mme
Gaudreault) : Maintenant, que les députés contre cette motion
veuillent bien se lever.
Le Secrétaire adjoint :
M. Legault (L'Assomption), M. Bonnardel (Granby), M. Caire (La Peltrie),
M. Charette (Deux-Montagnes), M. Martel (Nicolet-Bécancour), Mme Roy
(Montarville), Mme Samson (Iberville), M. Laframboise (Blainville), M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs), Mme D'Amours (Mirabel), M. Lemay
(Masson), Mme Lavallée (Repentigny), M. Surprenant (Groulx), Mme Soucy
(Saint-Hyacinthe), M. Spénard (Beauce-Nord), M. Picard
(Chutes-de-la-Chaudière), M. Jolin-Barrette (Borduas).
La Vice-Présidente (Mme
Gaudreault) : Maintenant, y a-t-il des abstentions? Alors, pour le
résultat du vote, M. le secrétaire général.
Le
Secrétaire : Pour : 87
Contre :
17
Abstentions :
0
La Vice-Présidente (Mme
Gaudreault) : Alors, cette motion est adoptée.
(Applaudissements)
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, nous allons poursuivre. Toujours à la rubrique des motions sans préavis, je vais maintenant céder la parole à un
membre du groupe formant...
Des voix : ...
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vais vous demander de quitter le salon bleu. En silence, s'il vous plaît; il y a d'autres motions.
Maintenant, Mme la députée de Duplessis, à vous
la parole.
Mme
Richard : Mme la Présidente, je sollicite le consentement
des membres de cette Assemblée afin de présenter, conjointement avec le
député de Groulx et la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques, la motion
suivante :
«Que
l'Assemblée nationale exige du gouvernement qu'il rende publique l'entente
signée entre Investissement Québec et son partenaire financier, Yara International,
pour le projet Mine Arnaud.»
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, Mme la
députée. Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion? M. le
leader adjoint du gouvernement.
M.
Sklavounos : Pas de
consentement, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Alors, malheureusement, il n'y a pas de consentement. Et, pour la prochaine
motion, je cède la parole à Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Mme
Massé : Merci, Mme la Présidente. Je demande le consentement de la Chambre
pour débattre de la motion suivante conjointement avec le député de Terrebonne
et le député de Masson :
«Que l'Assemblée nationale salue la qualité du travail des groupes qui ont
participé aux consultations
particulières sur la cibles de
réduction des émissions [de] gaz à effets de serre à l'horizon 2030;
«Qu'elle
prenne acte que le scénario présenté par le ministère du Développement durable prévoit que 40 % des
réductions d'émissions de gaz à effet de serre
se [réaliseront] hors-Québec par l'achat de crédits carbone, ce qui représenterait un transfert de
325 millions $ par année vers d'autres juridictions et freinerait
ainsi la réalisation de mesures au Québec;
«Que
l'Assemblée nationale presse le gouvernement de réduire de façon significative
la part des réductions des émissions de gaz à effet de serre réalisées
hors-Québec.»
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Merci beaucoup, Mme la députée.
Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?
M. le leader adjoint du gouvernement.
M.
Sklavounos : Pas de
consentement, Mme la Présidente.
• (11 h 20) •
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Alors, il n'y a pas de consentement.
Avis touchant les travaux des commissions
Nous en
sommes maintenant à la rubrique des avis touchant les travaux des commissions,
et je cède la parole à M. le leader adjoint du gouvernement.
M.
Sklavounos : Oui. Merci, Mme la Présidente. Alors,
j'avise cette Assemblée que la Commission
de l'agriculture, des pêcheries, de
l'énergie et des ressources naturelles
poursuivra l'étude détaillée à l'égard du projet de loi n° 54, Loi
visant l'amélioration de la situation juridique de l'animal, aujourd'hui, immédiatement au terme de la séance prévue pour l'élection d'un nouveau président,
jusqu'à 13 heures et de 15 heures à 18 heures, à la salle du
Conseil législatif;
La Commission des institutions, quant à elle, poursuivra l'étude détaillée à
l'égard du projet de loi n° 51, Loi
visant notamment à rendre l'administration de la justice plus efficace
et les amendes aux mineurs plus dissuasives, le mardi 3 novembre 2015, de
10 heures à midi, à la salle Louis-Joseph-Papineau. Merci, Mme la
Présidente.
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Merci. Alors, pour ma part, je vous avise que la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des
ressources naturelles se réunira aujourd'hui, après les affaires courantes,
à la salle du Conseil législatif, afin de procéder à l'élection à la présidence
de la commission.
Je vous avise par ailleurs que la Commission des
relations avec les citoyens se réunira en séance de travail aujourd'hui, de 13 heures à 15 heures, à
la salle RC.161 de l'hôtel du Parlement. L'objet de cette séance est
d'organiser les travaux de la
commission concernant le mandat d'initiative portant sur les conditions de vie
des femmes autochtones en lien avec les agressions sexuelles et la
violence conjugale.
La
Commission des institutions se réunira, pour sa part, en séance de travail
aujourd'hui, de 12 h 30 à 13 heures, à la salle RC.171 de l'hôtel du Parlement. Et
l'objet de cette séance est de statuer sur la demande de mandat d'initiative
du député de Borduas concernant les
ressources allouées au Directeur des poursuites criminelles et pénales et le
plan du gouvernement dans le cadre de la lutte contre le crime organisé.
Cette même
commission se réunira également le lundi 2 novembre 2015, en séance de
travail, de 14 heures à 15 heures, à la salle RC. 171 de
l'hôtel du Parlement, afin de préparer l'audition du Commissaire à la lutte
contre la corruption; et, en séance
publique, de 15 heures à 18 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau,
afin de procéder à l'audition du
Commissaire à la lutte contre la corruption, de discuter de sa gestion
administrative ainsi que d'examiner ses orientations et ses activités.
Renseignements sur les
travaux de l'Assemblée
Nous en
sommes maintenant à la rubrique des renseignements sur les travaux de
l'Assemblée. Et je vous rappelle que,
lors de l'interpellation prévue pour demain, vendredi 30 octobre 2015, M.
le député de Lac-Saint-Jean s'adressera à M. le ministre de l'Éducation, de l'Enseignement supérieur et de la
Recherche sur le sujet suivant : La perte de confiance généralisée envers
le ministre de l'Éducation, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche.
Je vous avise
de plus que l'interpellation prévue pour le vendredi 6 novembre 2015
portera sur le sujet suivant : Les
enjeux et défis du secteur agricole au Québec. Et c'est Mme la députée de
Mirabel qui s'adressera alors à M. le ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation.
Affaires du jour
La période
des affaires courantes étant terminée, nous allons maintenant passer aux
affaires du jour, et je cède la parole à M. le leader adjoint du
gouvernement.
M.
Sklavounos :
Merci, Mme la Présidente. Je vous demanderais de bien vouloir suspendre nos
travaux pour une dizaine ou une quinzaine de minutes environ, Mme la
Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, très bien. Alors, je
suspends les travaux pour une quinzaine de minutes.
(Suspension de la séance à 11 h 24)
(Reprise à 11 h 39)
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, nous allons reprendre nos travaux. Et je cède sans plus tarder
la parole à M. le leader adjoint du gouvernement.
M.
Sklavounos : Oui, merci,
Mme la Présidente. Je vous
demanderais d'appeler l'article 6 de notre feuilleton, s'il vous
plaît.
Projet de loi
n° 59
Adoption du principe
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, à l'article 6 du feuilleton, Mme la ministre de la Justice propose l'adoption du principe du projet de
loi n° 59, Loi édictant la Loi concernant la prévention et la lutte
contre les discours haineux et les
discours incitant à la violence et apportant diverses modifications
législatives pour renforcer la protection des personnes. Mme la
ministre, à vous la parole.
Mme Stéphanie Vallée
Mme Vallée :
Merci, Mme la Présidente. Alors, Mme la Présidente, le projet de
loi n° 59, la loi édictant la loi concernant la prévention et
la lutte aux discours haineux et aux discours incitant à la violence et
apportant diverses modifications
législatives pour renforcer la protection des personnes, a été déposé à cette
Assemblée le 10 juin dernier.
Dans un
premier temps, je crois qu'il est important, en fait il est essentiel de
rappeler à nos collègues les objectifs du projet de loi.
• (11 h 40) •
Tout d'abord, ce projet
de loi prévoit l'interdiction de
tenir ou de diffuser publiquement des discours haineux ou des discours incitant à la violence qui visent une
personne ou qui visent un groupe de personnes qui présentent une
caractéristique commune identifiée comme un motif de discrimination à l'article
10 de la Charte des droits et libertés de la
personne. Ce projet de loi prévoit également l'interdiction d'agir de manière à
ce que de tels actes soient posés. Le projet
de loi met en place une procédure
bien spécifique de dénonciation auprès de la commission des droits de la
personne et de
la jeunesse, un organisme qui déjà, déjà, veille à assurer le respect de l'ensemble
des droits et libertés prévus dans notre
charte. Et la commission reçoit, par le projet de loi, des pouvoirs
d'enquête. Il permet aussi à la commission qu'elle s'adresse aux tribunaux afin que cesse la tenue,
la diffusion d'un tel discours. Les nouvelles responsabilités sont aussi
confiées au Tribunal des droits de la
personne, tribunal dont nous avons souligné le 25e anniversaire la semaine dernière, et l'une de ces responsabilités, Mme la Présidente, est celle de déterminer si le discours haineux
ou le discours incitant à la violence a été tenu ou diffusé et, s'il y a
lieu, à fixer le montant des sanctions qui pourraient être applicables.
Vous
savez, Mme la Présidente, la liberté d'expression, c'est l'un des
fondements de notre démocratie. Les seules balises de la liberté d'expression doivent viser à contrer la tenue de
discours qui incitent à la haine ou à la violence contre une personne,
contre un groupe de personnes pour des motifs de discrimination.
C'est
pourquoi, Mme la Présidente, que le projet
de loi prévoit plusieurs
étapes au sein desquelles la plainte sera examinée avant d'en arriver à une sanction. Il n'est pas du tout, pas du
tout dans l'intérêt de la démocratie de freiner la liberté d'expression ni de restreindre les débats. L'expression
d'opinions contradictoires, elle encourage les échanges, elle contribue
à notre démocratie.
Je
tiens à le réitérer, Mme la
Présidente, et je tiens à réitérer ce
que j'ai mentionné et martelé à
plusieurs reprises tout au long du
processus de consultation : Le discours haineux, ce n'est pas un simple
discours qui est répugnant, ce n'est pas
simplement un discours qui est offensant. Le discours haineux, ce n'est pas
celui qui ridiculise quelqu'un. Bien qu'il ne
soit pas agréable, ridiculiser quelqu'un ne constitue pas en soi un discours haineux. Le
discours haineux, ce n'est pas la critique
d'une idée, Mme la Présidente, ce n'est pas la critique d'une religion, ce
n'est pas la critique d'une orientation
politique. Le discours haineux, tel que l'a défini la Cour suprême dans l'affaire Whatcott, c'est d'une ampleur telle qu'il ne nuit pas seulement à des individus,
mais qu'il tente de marginaliser le groupe dont ils font partie en attaquant
son statut social et en compromettant son acceptation.
Mme la Présidente, nous avons passé de nombreuses heures en commission parlementaire, nous avons entendu de nombreux groupes, de nombreux individus qui sont venus formuler leurs commentaires à l'égard du projet
de loi. Nous avons entendu également les préoccupations qui ont été exprimées quant à la nécessité de clarifier la notion de
discours haineux. Mme la Présidente, là-dessus, je rejoins ces préoccupations-là. C'est
important, pour des fins ne serait-ce que pédagogiques, de prévoir au projet de loi une définition claire, une
définition qui permettra de bien comprendre ce que constitue un discours haineux. Et, Mme la
Présidente, j'entends travailler dans ce sens, je l'espère, lors du processus
d'étude article par article du projet
de loi puisque c'est justement à ça que sert notre processus parlementaire, à
bonifier, à peaufiner et à permettre de mieux saisir les dispositions
d'un projet de loi si celles-ci ne sont pas clairement définies.
Mme
la Présidente, il est proposé, dans le cadre du projet de loi n° 59,
également de modifier la Charte des droits et libertés de la personne pour prévoir l'interdiction de tenir ou de
diffuser un discours haineux ou qui incite à la violence à l'égard d'une personne en particulier. Les
mécanismes de réparation qui sont prévus à ce texte s'appliqueraient dans
un tel contexte.
Le
projet de loi ne fait pas qu'encadrer, ne fait pas qu'interdire la tenue d'un
discours haineux, la tenue d'un discours qui incite à la violence, mais il prévoit également une pléiade de
mesures qui visent à renforcer la protection des personnes, et ces mesures, Mme la Présidente, sont
importantes. Et ces mesures méritent également d'être analysées, d'être
étudiées, mais elles sont importantes.
Parmi
celles-ci, dans un premier temps, le projet de loi prévoit la possibilité
d'émettre des ordonnances civiles de
protection afin de favoriser la protection des personnes dont la vie, la santé
ou la sécurité serait menacée par une autre personne.
Le projet de loi
prévoit de préciser que le contrôle excessif peut constituer une forme de
mauvais traitement psychologique qui
justifie l'intervention du directeur de la protection de la jeunesse. Le projet
de loi prévoit de confier au tribunal le pouvoir d'autoriser la
célébration de mariages lorsque l'un des futurs époux est mineur. Vous savez, Mme la Présidente, les mariages forcés ont fait l'objet
de plusieurs préoccupations, notamment ont fait l'objet d'un avis, de recommandations de la part du Conseil du statut
de la femme. Ils constituent une préoccupation grandissante au sein de la population, et il est important de bien
protéger les mineurs et de s'assurer du consentement du mineur. Et qui de mieux
que le juge pour pouvoir apprécier de façon tout à fait neutre et impartiale la
portée du consentement d'un mineur?
Le
projet de loi prévoit aussi l'ajout de pouvoirs d'enquête au ministre de l'Éducation
dans les secteurs de l'éducation préscolaire
et de l'enseignement primaire, secondaire et collégial à l'égard de tout
comportement qui pourrait raisonnablement faire craindre pour la sécurité physique ou morale des élèves ou des
étudiants. La tolérance d'un tel comportement par un établissement
entraînerait des conséquences, telles la retenue ou l'annulation d'une
subvention ou la révocation d'un permis d'établissement d'enseignement privé.
Concernant,
Mme la Présidente, l'interdiction de tenir ou de diffuser des propos haineux ou
incitant à la violence, j'entends
déjà l'opposition officielle nous demander : Pourquoi est-il nécessaire de
légiférer? Au cours de la dernière année, nous avons vu apparaître des comportements à proscrire basés sur des
motifs de discrimination interdits à l'article 10 de la charte
québécoise, comme l'intimidation ou la tenue de propos haineux. Une action
gouvernementale a d'ailleurs été réclamée en
ce sens dans le cadre de la consultation publique sur la lutte contre l'intimidation
en 2014. Ainsi, notamment en réponse
à ces réalités de plus en plus complexes, notre gouvernement a déposé le projet
de loi n° 59 dans le cadre du plan de lutte à la
radicalisation, qui vise à agir, à prévenir, à détecter et à mieux vivre ensemble.
Notre
société, elle est riche de sa diversité. La crainte de l'autre, le rejet des
différences font reculer le Québec, c'est
pourquoi nous devons rejeter les atteintes aux valeurs de respect, d'ouverture
et d'inclusion qui sont les nôtres. Le Québec ne peut accepter des
comportements qui compromettent la sécurité et la dignité des personnes. Le
projet de loi n° 59 s'inscrit
justement dans une volonté de défendre, de promouvoir les droits et libertés
fondamentaux tout en assurant la
sécurité des Québécois et des Québécoises. L'objectif est donc de protéger les
citoyens les plus vulnérables contre cette forme de discours discriminatoire qui a malheureusement souvent pour
effet d'isoler les personnes qui en sont victimes.
Ceci
étant, Mme la Présidente, le projet de loi ne vise pas à sanctionner les
membres d'un groupe en particulier mais
toute personne qui tient ou qui diffuse un discours haineux ou qui incite à la
violence, et ce, évidemment, dans un souci de respect des valeurs
démocratiques, de l'ordre public et du bien-être général des citoyens et des
citoyennes.
• (11 h 50) •
Le projet de
loi n° 59, évidemment a fait l'objet, comme je le mentionnais, de
vastes consultations, lors des mois d'août
dernier et septembre. Et, lors de ces consultations, 38 groupes ont été
entendus, 39 mémoires ont été déposés. Les audiences, en commission parlementaire, ont pris fin et nous ont permis
et ont permis aux organismes de nous faire part de leurs commentaires évidemment. Nous avons abordé
les consultations avec une ouverture. Nous avons été à l'écoute des commentaires. Nous entendons d'ailleurs continuer
d'être attentifs aux propositions qui se voudront constructives. Nous
avons entendu les préoccupations qui étaient exprimées, comme je le
mentionnais, quant à la nécessité de clarifier la définition du discours
haineux. Nous allons nous y attarder.
L'expression
d'opinions publiques contribue à la démocratie en encourageant l'échange
d'opinions opposées. Par contre — par contre — tel qu'énoncé par la Cour suprême du Canada
en 1990 dans l'affaire Taylor, tel qu'énoncé par la Cour suprême du Canada en 2013 dans l'affaire Whatcott, les
propos haineux vont directement à l'encontre de cet objectif du fait
qu'ils empêchent tout dialogue en rendant difficile, en rendant voire
impossible pour les membres du groupe
vulnérable de réagir, entravant la possibilité, l'échange d'idées. C'est donc
pourquoi la Cour suprême considère que l'interdiction
du discours haineux est justifiée dans une société libre et démocratique. Une
telle interdiction n'est pas contraire à la charte québécoise ou à la
Charte canadienne des droits et libertés.
Quant à l'atteinte à la liberté d'expression, il
est important de mentionner que la commission des droits de la personne et de la jeunesse a comme mission de
veiller au respect des principes qui sont énoncés dans la charte québécoise,
y compris le principe de la liberté
d'expression. Il s'agit donc, en confiant le mandat à la commission, d'un
double rempart de protection. Autant
la Commission des droits de la personne et de la jeunesse que le Tribunal des
droits de la personne devront
pondérer le droit à la liberté d'expression avec la restriction visant les
discours interdits. Ce rôle de pondération de différents droits est déjà assumé par la commission des droits de la
personne et de la jeunesse et par le Tribunal des droits de la personne, notamment à l'égard de
l'interdiction de la diffamation, qui est fondée sur un motif de
discrimination. L'interdiction qui
vise les discours haineux ou les discours incitant à la violence basée sur un
motif de discrimination est donc le prolongement d'un rôle qui est déjà
assumé par la commission des droits de la personne et de la jeunesse.
Par
ailleurs — et ça,
c'est important de le mentionner, Mme la Présidente — contrairement à ce qui a été énoncé par plusieurs, la notion de discours haineux est
un concept qui est bien connu par la jurisprudence. Il a été abondamment
repris. Selon les enseignements de la Cour
suprême... Je vous ai lu tout à l'heure quelques extraits de l'affaire
Whatcott, mais, selon les
enseignements de la Cour suprême, pour être considéré haineux, un discours doit
être fondé sur une caractéristique commune
identifiée comme un motif de discrimination interdit. Qu'est-ce que c'est? On
parle de la race, on parle de la couleur,
on parle du sexe, on parle de la grossesse, on parle de l'orientation sexuelle,
on parle de l'état civil, de l'âge, de la religion, des convictions politiques, de la langue, de l'origine
ethnique ou nationale, de la condition sociale et du handicap.
Le discours
haineux doit exposer un groupe de personnes à la déconsidération, au
dénigrement, à l'exécration ou au
rejet. Le discours haineux rend le groupe illégitime, rend le groupe dangereux,
rend le groupe ignoble ou inacceptable aux
yeux de celui auquel le message est destiné. Le discours haineux est d'un
extrême tel qu'il est susceptible d'inciter ou d'inspirer, à l'égard de ce groupe de personnes, un traitement qui
est discriminatoire justement en raison de ce motif interdit. Je vous citerais quelques exemples de
discours qui ont été considérés haineux par la jurisprudence : lorsqu'on
parle de créatures horribles qui ne
devraient pas avoir le droit de vivre; lorsqu'on reproche à certaines personnes
d'être la cause actuelle des
problèmes de la société; lorsqu'on qualifie certaines personnes de race
parasite, de mal à l'état pur.
Par contre,
Mme la Présidente, je vous fais la
démonstration de ce qu'est les discours haineux, mais j'aimerais également
vous indiquer ce que la jurisprudence n'a pas considéré comme constituant du
discours haineux : par exemple,
l'expression d'idées répugnantes, d'idées
offensantes, des propos qui suggèrent simplement de restreindre les droits des
groupes vulnérables de la société,
des propos satiriques qui visent des groupes protégés. Dans ce contexte, la
critique, même la critique la plus virulente d'une religion ou d'une
pratique religieuse n'est pas en soi un discours haineux.
Plusieurs
groupes, Mme la Présidente, ont également insisté sur l'importance, au-delà de la sanction,
de fournir des moyens qui nous
permettraient de prévenir la tenue d'un tel discours. J'entends donc proposer
des améliorations au projet de loi lorsque nous reprendrons les travaux. Avec les
mesures qui sont proposées au projet
de loi, nous souhaitons pouvoir affirmer haut et fort notre volonté de
faire du Québec une société égalitaire, une société qui est respectueuse, une société qui est non violente et
une société qui est exempte d'intimidation.
Plusieurs
groupes sont favorables aux objectifs du projet de loi, Mme la Présidente. Les
groupes ont formulé des recommandations,
les groupes ont formulé des suggestions de bonification, mais, quant à la base
du projet de loi... et ça, malheureusement,
on en a très peu parlé, mais j'aimerais quand même réitérer que le Barreau du
Québec est favorable aux objectifs
visés par le projet de loi, le Conseil du statut de la femme est favorable aux
objectifs visés par le projet de loi, la Fondation Émergence aussi, la
ville de Montréal est favorable aux objectifs visés par le projet de loi, la
Fondation Jasmin-Roy est favorable aux
objectifs visés par le projet de loi, Cyber-aide est favorable aux objectifs du
projet de loi et la commission des droits de la personne et de la
jeunesse également, puisque c'est la commission des droits de la personne et de la jeunesse elle-même qui, lors des
consultations de ma collègue ministre de la Famille et responsable de
l'Intimidation, a abordé cette nécessité d'encadrer le discours haineux ou le
discours incitant à la violence.
Je vais vous
citer, Mme la Présidente, quelques extraits de ce que les groupes sont venus
nous dire en commission. AMAL-Québec
est venu nous dire en commission : «Dans une société où circulent des
discours haineux contre les femmes, les
homosexuels, les musulmans, les Noirs, les Juifs, il nous [apparaît] essentiel
de promulguer une telle loi afin de protéger les groupes vulnérables.»
Le Barreau du Québec, quant à lui,
nous a dit : «D'emblée, le Barreau est favorable à ce que le législateur
impose des limites aux discours
haineux ou incitant à la violence en tant qu'actes discriminatoires et que la
[commission des droits de la personne
et de la jeunesse] ait un contrôle sur ces dossiers. Nous soulignons qu'un
régime administratif éviterait le recours automatique au droit criminel
tout en favorisant le respect des droits et [des] libertés de la personne et en
garantissant le respect des libertés civiles de tous.»
De
son côté, Mme la Présidente, la Fondation Émergence affirmait, dans son
mémoire, ce qui suit : «Enfin, élevée au rang des droits fondamentaux, la protection individuelle contre les
discours haineux est, pour nos communautés LGBT et nos personnes LGBT, un levier supplémentaire pour leur intégration
sociale et leur pleine participation à l'avancement de [la] société.»
Et
le Conseil du statut de la femme ajoutait ce qui suit : «Le conseil désire
un autre outil juridique pour interdire les propos haineux à l'égard des femmes, pour punir les auteurs afin de
permettre aux femmes d'exercer réellement leur liberté d'expression.»
Je
tiens à rappeler que l'ensemble des mesures prévues au projet de loi ont un
objectif commun, soit de renforcer la
protection des personnes. Les consultations qui ont été effectuées ont été
faites avec le plus grand sérieux et afin que le projet de loi puisse
être bonifié et qu'il réponde réellement aux besoins de la population.
Mais
j'aimerais rappeler aux collègues ce que disait la députée
d'Hochelaga-Maisonneuve le 4 août dernier lors de la venue du blogueur Roosh V, reconnu pour
ses propos haineux envers les femmes. Elle a dit que c'était le devoir du gouvernement de lancer un message pour indiquer
que les propos haineux faisant la promotion de la violence envers les femmes étaient inacceptables. Je suis d'accord
avec ma collègue, Mme la Présidente. C'est exactement ce que nous
entendons faire avec le projet de loi n° 59.
Mais,
pour lancer ce message fort que les propos haineux sont inacceptables, il
faudrait que la députée de Taschereau écoute sa collègue et qu'elle
collabore avec nous afin de faire cheminer nos travaux. J'espère vraiment, Mme la Présidente, pouvoir compter sur son appui, pouvoir compter sur l'appui de la députée de
Montarville, pouvoir compter
sur l'appui des collègues de cette Assemblée pour permettre de faire
cheminer rapidement cet important projet
de loi. Je vous remercie de votre attention.
• (12 heures) •
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, Mme la ministre
de la Justice. Et maintenant, pour la prochaine intervention, je cède la parole à Mme la députée de Taschereau et leader
adjointe de l'opposition officielle.
Mme Agnès Maltais
Mme
Maltais : Merci, Mme la Présidente. Alors, je veux saluer la ministre qui vient nous présenter sa loi pour l'adoption de principe. Je me permettrai de faire
ce que je n'ai pas fait en 17 ans, Mme la Présidente : je
vais dédier mon allocution sur ce projet de loi qui porte sur la liberté d'expression à une amie décédée cette semaine,
Jocelyne Corbeil, qui était membre
d'un groupe qui s'appelait Les Folles alliées. Nous étions quatre, comme les
Beatles. J'ai perdu une Beatle. Alors, à cette femme auteure, poète et
amoureuse de la liberté d'expression, je dédie cette allocution.
Un
projet de loi doit répondre à un besoin. Je sais que la ministre
a, tout à l'heure, cité une de mes collègues, la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, en disant : Il faut protéger les femmes des
propos haineux, des discours haineux, et elle a demandé que le gouvernement
intervienne, comme j'ai, moi aussi, demandé régulièrement que le gouvernement intervienne quand, par exemple, venaient des
religieux, peu importe quelle religion, qui décriaient, décriaient l'égalité
entre les hommes et les femmes, qui avaient
des discours qu'on peut qualifier de haineux. Nous avons toujours
demandé que le gouvernement agisse, j'ai moi-même agi à titre de ministre responsable de la Condition féminine à l'époque. Mais quel est le moyen qui a été
utilisé par le gouvernement? Une loi restreignant la liberté d'expression.
C'est là où il y a un problème. Il y a une différence entre donner des outils à
une municipalité, à des écoles, à des commissions scolaires pour gérer
la situation et décider de faire un amendement
à la Charte des droits et des
libertés pour essayer de juguler la
liberté d'expression.
Et
je veux dire à la ministre que je
comprends bien la difficulté qu'elle
vit. On a eu une série d'événements
dans la... au Québec qui reflètent un peu la situation, des événements qu'il y
a eu dans le monde entier. On sait qu'il y a eu les événements de Charlie Hebdo qui ont
bousculé tout le monde, et, à ce moment-là, on a d'ailleurs répété... Combien
de fois on a répété qu'il était important de protéger la liberté d'expression?
Il y a eu au Québec, ensuite, les événements de Saint-Jean-sur-Richelieu, puis l'événement d'Ottawa où des gens sont
décédés parce qu'il y avait une radicalisation de jeunes qui ont décidé
d'exprimer par la violence des convictions qu'on peut croire religieuses, et
nous avons interpellé le gouvernement
en disant : Qu'est-ce que vous allez faire? Malheureusement, la réponse
que nous avons entre les mains ne nous satisfait pas. Non seulement elle
ne nous satisfait pas, nous pensons qu'elle passe à côté de la cible.
Ce
n'est pas... Ce «nous» que j'exprime, Mme la Présidente, ne signifie pas
seulement l'opposition officielle, la deuxième
opposition, qui, je sais... qui va probablement... qui s'est exprimée jusqu'ici
un peu dans le même sens, mais la grande
majorité des mémoires qui ont été présentés par de très grandes organisations.
Je crois qu'il est venu à peu près une
cinquantaine de mémoires. Il y en a eu d'autres aussi qui sont entrés par voie
Internet. La CSN s'est exprimée, la CSQ, elles se sont exprimées. La grande majorité des mémoires disent :
Bon, on veut bien, mais ce moyen que vous nous apportez, il est
difficilement applicable. C'est de ça dont je veux parler.
Je suis un
peu surprise que l'amendement qu'on attendait tous, quelque chose de profond,
de sérieux, une véritable révision de
la loi, d'après ce que vient de nous dire la ministre, c'est simplement un
ajout à l'article 1 pour définir le discours haineux. Nous ne
croyons pas que ce sera suffisant, Mme la Présidente, nous nous attendions à
beaucoup plus.
Bien sûr, nous avons demandé une révision
profonde de la loi. Pourquoi on a demandé une révision profonde de la loi? Je vais l'expliquer dans mon
allocution, j'ai un certain temps pour le faire. C'est très rare d'ailleurs
qu'on a autant de
temps pour exprimer vraiment sa vision dans l'Assemblée nationale, il faut
prendre le temps de le faire. Mais il n'y a pas que cet article 1, il y a une série d'articles et la mise en
branle dans cette loi d'un processus parallèle de jugement des attaques aux droits de la personne, un processus
parallèle, des sanctions parallèles au Code criminel par un tribunal parallèle
et une façon, donc, de procéder différente du Code criminel, qui est
l'abandon de la preuve hors de tout doute raisonnable. Pas un mot là-dessus. Alors, là-dessus,
je vais citer des mémoires. Ce n'est pas seulement moi qui le dis,
c'est, entre autres, tiens, le Barreau. Le Barreau que la ministre
a cité, mais le Barreau, il dit ça. Il
n'y a pas que nous qui parlons en ce moment.
Notre
devoir, quand on fait l'adoption de principe comme ça, c'est d'exprimer ce qui
s'est passé en commission parlementaire. Et, de la part de la ministre, pour dire : J'ai entendu telle chose, telle
chose, de ce côté-ci je
comprends qu'elle a entendu qu'on
demandait... ou à tout le moins de clarifier l'expression «discours haineux».
Mais, sur tout le reste de la loi, je n'entends rien et j'en suis
profondément déçue. On a le temps de se rattraper.
Mais
présentement, ce que j'ai devant moi, n'ayant aucun amendement
en plus, Mme la Présidente, et devant la façon dont — je
vais utiliser le terme, il est un peu dur, mais je l'ai déjà
utilisé, alors je vais le reprendre — cette loi s'est fait ratiboiser en commission parlementaire, je
n'ai jamais vu autant un tel tollé devant une loi, autant d'articles
défavorables, mais je m'attendais à tout le moins à soit un dépôt
d'amendements soit à une nouvelle vision présentée ce matin.
Les
réactions dans les médias, par exemple, je fais juste lire les gros titres, je
reviendrai avec les articles, mais les
gros titres, Pierre Trudel, Le Journal de Québec : Le projet de
loi n° 59 : une très grave menace à la liberté d'expression.
The Suburban: Bill 59 : Our continuing problem
with freedom. Le Devoir, Josée Boileau : La mauvaise loi. Denise
Bombardier, blogueuse au Journal
de Québec : La loi comme bâillon. Mathieu Bock-Côté : Peut-on
critiquer les religions, les tourner en ridicule, les conspuer? Lise
Ravary : Alerte — encore — à la liberté d'expression. Et The Montreal
Gazette : Québec's hate speech bill is problematic, en
éditorial, un éditorial The Gazette assez étonnant.
Alors,
vous voyez qu'il y a une diversité d'expressions... de voix, plutôt, qui
s'élèvent contre le projet de loi tel qu'il est présenté actuellement.
Et ce que je comprends bien, c'est que le principe du projet de loi actuel n'a
pas été abandonné, et on discute du principe.
Je vais d'abord citer
pour ma cause la ministre elle-même. Ma première citation pour défendre ma
cause, Mme la Présidente, en sera une de la
ministre de la Justice porteuse du projet de loi n° 59. Cette citation
date du 18 février 2015. À
l'époque, ma collègue de Montarville, députée de la deuxième opposition, avait
présenté une motion avec laquelle je n'étais
pas d'accord, je le dis, c'est vrai. Vous devriez aller fouiller dans les
galées, il y a des citations intéressantes, Mme la députée. Moi, je suis
allée.
Alors, la ministre de la Justice disait à la
députée de Montarville qui avait présenté une motion qui voulait toucher
à la liberté d'expression et à la charte, un
peu de la même façon... elle y allait un peu plus rudement, ce qui m'avait mis
à m'objecter, mais voilà ce qu'a dit la
ministre de la Justice à l'époque : «M. le Président, la problématique à
laquelle on fait face, la montée du
radicalisme qui amène à la violence, cette montée de la violence, cette
incitation à la violence, cette apologie
du terrorisme, c'est ce que nous devons combattre. Nous devons — et nous l'avons dit et nous le répéterons — d'abord détecter, enquêter et sanctionner, c'est ce qui est important, parce
que, si on prend la logique et le libellé de la motion, on ne détecte pas, on n'enquête pas et on ne sanctionne
pas. On sanctionne, d'une certaine façon des propos [et] des opinions.»
C'est une citation exacte, je n'ai enlevé aucun mot, aucun mot.
Alors, la ministre
dit deux choses là-dedans. Elle dit, un : Ce qu'il faut faire, c'est
prévenir la montée du radicalisme. C'est ce
qu'elle dit. «Détecter, enquêter, sanctionner», c'est ça qu'elle dit. Or,
cette loi ne contient aucune, aucune notion de prévention,
d'éradication, d'éducation envers le radicalisme. Il n'y a rien qui prévient la
montée du radicalisme. C'est d'ailleurs une
des grandes déceptions de la loi n° 59. Une des très grandes déceptions de
ce projet de loi, c'est qu'il n'y a
rien là-dedans pour faire face au phénomène contemporain que nous vivons,
phénomène très actuel de la radicalisation
des jeunes. Au contraire, il embrouille un peu les choses. Quand on va tomber
dans le milieu de l'éducation, on va
le voir. Mais c'est plutôt un problème comme loi, ce que sont venues nous dire
toutes les fédérations éducatives : commissions scolaires, cégeps et écoles privées. Les trois fédérations
sont venues nous dire : Ne faites pas ce que prévoit cette loi,
vous allez tout mêler. La Loi de l'instruction publique couvre déjà ce secteur.
• (12 h 10) •
Mais
la deuxième partie de ce qu'a dit la ministre,
c'est : «On sanctionne, d'une certaine façon, des propos, des opinions.»
Elle s'élevait contre la sanction d'opinions et d'expressions. Et il y a plein
de ministres du gouvernement actuel qui se
sont levés, j'ai plein de citations où ils ont dit : Ça ne se fait pas. La
députée de Gouin s'était levée en disant : Ça ne
se fait pas. La députée de Gouin aussi.
Alors,
qu'est-ce qui se passe? Bien,
malheureusement, une loi qui a été présentée restreint la liberté d'expression,
est très floue. On peut considérer comme une
avancée, peut-être, qu'on va spécifier la... on va rectifier la définition de
discours haineux, mais tout le reste de la loi ensuite qui en découle, qui a
été décrié, tout le reste est encore là. On ne peut pas adopter le principe d'une loi comme ça sans avoir écouté les
commissions, la commission parlementaire. Je suis vraiment stupéfaite.
Je
suis leader adjointe, on discutait aux leaders de qu'est-ce que ferait le
gouvernement. On se disait : Peut-être qu'il va y avoir une déclaration ministérielle ce matin. Je m'attendais
à ça, une déclaration qui dise : Écoutez, on a entendu, on a écouté
et nous allons provoquer tel changement, ce qui aurait changé la nature du
débat de ce matin. Je serais en approche d'ouverture, en me disant : Bon,
O.K., quels sont les grands mouvements qu'amène le gouvernement face à cette loi? Il aurait pu y avoir un dépôt
d'amendements, ce matin, il aurait pu y avoir une annonce. Rien. Il n'y a
surtout pas de réponse à quelque chose qui, pour moi, est fondamental,
et pour mon parti.
Ce
projet de loi, en fait, contient deux lois. Il y a d'abord une loi toute
nouvelle, complètement nouvelle. Si je prends ma loi, c'est... on crée
la loi concernant la prévention et la lutte contre les discours haineux et les
discours incitant à la violence, et le
premier article contient toute la nouvelle loi. Donc, on aurait pu prendre
cette partie-là, la mettre dans une autre loi pour qu'on débatte de
cette partie-là, qui a été vertement critiquée, vertement critiquée.
Par contre, l'autre, à partir de
l'article 2, partie II, c'est l'article 2, puis là c'est toutes
les modifications qui sont intéressantes,
à notre avis. Puis ça, je ne suis pas gênée de le dire à la ministre, je l'ai
dit récemment, couramment, constamment.
Il y a là-dedans des choses qu'il faut faire, sur lesquelles nous désirons
travailler. Je pense aux modifications pour
renforcer la protection des personnes. Je pense au Code de procédure civile qui
serait modifié, d'ajouter des injonctions à des ordonnances de protection. Je pense au réseau... qu'on regarde
particulièrement la section sur les mariages forcés. Nous voulions
débattre de ces questions.
Et,
je le disais, on pourrait arriver après à une solution consensuelle, qui ferait
rapidement l'unanimité, j'en suis convaincue.
Ça aurait été un article par article facile à faire, avec quelques débats de
juristes, bien sûr, mais on aurait pu traverser
cette période, puis là la ministre aurait entre les mains de quoi agir sur sa
société, de quoi qui aurait fait grandir sa société immédiatement et dans l'unanimité. On l'aurait applaudi.
Mais, en conservant la partie conflictuelle de cette loi, cette nouvelle loi,
intégralement dans cette loi, dans le projet de loi n° 59, on ne
pourra pas travailler dans la même harmonie,
on ne pourra pas aller rapidement à ce que nous voulons, les mariages forcés.
Pourquoi? Parce que la partie la plus
discutée pendant les auditions parlementaires, la partie la plus contestée est
au début de la loi, elle n'est pas à la fin, elle est au début, ça fait que les grands débats qu'on va faire, ça va
être là-dessus. Or, je trouve dommage que la ministre n'ait pas répondu
à notre appel de séparer les deux parties de loi.
D'ailleurs,
je sais qu'il y a des députés indépendants... Je pense que c'est la députée de
Gouin qui disait : Ce serait le fun qu'on sépare ça. On n'est pas
seuls dans l'Assemblée à dire ça. Ça nous aurait permis d'avancer et d'évoluer
rapidement, c'est dommage.
Donc,
pas de scission. Inadéquation entre la demande, le besoin québécois et la
réponse. Le besoin, c'est la lutte au radicalisme. Il y a un plan
d'action de... Je vais répéter ce que la ministre a répété régulièrement en
commission parlementaire, le gouvernement
actuel a déposé un plan de lutte à la radicalisation. Bravo! Bravo! Il y a des
gestes là-dedans qui doivent être
posés rapidement, d'accord. Misons sur l'éducation et la prévention, d'accord.
Mais comment comprendre que le projet
de loi n° 59, qui est — je répète ce qu'on s'est fait dire en commission
parlementaire et ce qu'on croit — une atteinte à la liberté
d'expression et qui en plus crée un nouveau régime juridique qui n'a pas de
bons sens... comment comprendre... — je viens de me perdre,
excusez-moi. J'ai une bonne grippe ce matin, là. Mais cet appel à... comment comprendre que ce soit... que ça n'a pas été
éliminé? Je ne comprends pas. Je ne comprends vraiment, vraiment,
vraiment pas.
Alors,
comment comprendre que le projet de
loi n° 59, comme le dit la ministre,
soit à l'intérieur d'un plan de lutte à la radicalisation? Voilà où je
voulais en arriver. Là, je viens de me retrouver, Mme la Présidente. Comment comprendre que le projet de loi n° 59 soit
un outil de lutte à la radicalisation quand il n'y a pas un mot sur la
radicalisation? Il n'y a pas un mot
sur la prévention, il n'y a pas un mot sur l'éducation, rien, nul, nenni. Du
beau vieux français, «nenni»! Voilà.
Alors,
pourtant, comme le disait Nicolas Boileau : «Ce qui se conçoit bien
s'énonce clairement. Et les mots pour le dire viennent aisément.» Bien, ils ne viennent pas. Sur la
radicalisation, il n'y a rien là-dedans, là. Pourquoi ce n'est pas là? Je ne comprends toujours pas. Et, malgré nos
demandes, malgré les demandes des gens en commission parlementaire, on n'a pas eu de réponse
là-dessus.
Les
problèmes générés par le projet de
loi n° 59, tel qu'il est actuellement libellé et qu'il le restera dans sa majeure partie, d'après ce que je viens de comprendre... Parce que
la ministre n'a pas remis en question de grands pans de sa
loi qui ont été vertement critiqués.
D'abord,
la liberté d'expression est touchée. Là-dessus, je vais citer la ministre
de la Sécurité publique — toujours
pendant la discussion sur la motion de ma
collègue de Montarville. Elle dit ceci : «Au contraire, je pense,
comme mon chef a répondu ce matin — ah! parce que j'aurais pu aussi citer le premier ministre — comme
le premier ministre l'a dit [...] comme ma collègue la ministre
de la Justice s'est exprimée également, je
pense qu'on risque de se créer encore
plus de problèmes en voulant limiter les expressions des gens.»
Ça
fait qu'en plus la ministre de la Sécurité publique avait compris la même
chose que moi de la ministre de la Justice : qu'elle ne voulait
pas limiter l'expression des gens.
«Je
crois à [la liberté et] l'égalité des hommes et des femmes, mais je crois aussi
à la liberté d'expression. Et on ne peut
pas arriver et dire : Je suis Charlie, prôner la liberté d'expression, se
draper dans la Charte des droits et libertés et, de l'autre côté,
arriver et dire : Non, mais ça, par exemple, on ne peut pas.» La ministre
de la Sécurité publique.
Je
continue ce qu'elle a dit : «[Êtes-vous] en train de me dire... [...]par
l'entremise de la députée de Montarville, qu'on va commencer à décider que ça, ce n'est pas correct comme
discours, puis ça, on a le droit. [...]sa vérité n'est pas la vérité de
tous les citoyens. Ma vérité n'est pas sa vérité, mais j'ai autant [de raisons]
qu'elle de vouloir protéger les droits», à la charte des libertés et droits, M.
le Président.
«Nous
sommes des êtres humains. On est fondamentalement différents. Ici, là, ce n'est
pas une question de dire qu'on va limiter les propos haineux.» Ministre
de la Sécurité publique, cette année.
Elle
en rajoute : «Mais sérieusement, M. le Président, le débat qu'on a
aujourd'hui, qui vient faire en sorte qu'on décide, nous, que ça, c'est un propos haineux, elle est où, la ligne, M.
le Président? Elle est où, la ligne, M. le Président?» Quelle entende sa collègue qui disait : «Elle
est où, la ligne?» On ne peut pas tirer cette ligne si facilement. C'est ça, le
problème. Même elle, même ses collègues le reconnaissaient, le
18 février 2015. Alors, ce n'est pas simple.
D'autre
part, un des graves problèmes, c'est le tribunal de la Commission des droits de
la personne et des droits de la
jeunesse, le nouveau tribunal, en partie, qui va être créé. Il va y avoir une
infraction pénale, une nouvelle infraction pénale, donc il va y avoir une nouvelle définition du discours haineux,
c'est ce qu'on comprend. Jusqu'ici, il n'était même pas défini, ce qui est un problème. Maintenant, il
va être défini. Je ne sais pas comment on va faire pour le définir. Moi,
je m'attendais à voir la définition, parce
que c'est la base au moins sur laquelle on aurait pu travailler, on ne l'a pas.
Or, on va créer une infraction pénale calquée sur l'interdiction, au
Code criminel, relativement à la tenue et à la diffusion de discours haineux ou
incitant à la violence.
• (12 h 20) •
Là,
vous comprenez : calquée sur l'interdiction au Code criminel. Il y a déjà
une interdiction là-dessus dans le Code
criminel. Ce sont les articles 318 à 320. Ils existent déjà. Donc, si ce
qu'on veut faire, c'est contenir les appels à la violence et à la haine,
c'est déjà inscrit dans le Code criminel.
Est-ce que
la loi québécoise qu'on nous propose quant à cet objet, à cet
objet, l'appel à la violence, et pour contrer le discours haineux, est-ce
que ça va ajouter quelque chose? Non. Non. Cette partie-là, elle est déjà couverte, surtout si on
redéfinit encore plus le discours haineux. Parce que
le premier ministre, 17 février 2015, disait ceci : Ce
qu'il faut, et c'est seulement ça qu'il
faut... Puis il y en a
plein, de citations de lui, là, j'en ai plein, mais il y en a
une le 17 février 2015 : Ce qu'il faut, c'est limiter les
appels à la haine et à la violence, et c'est déjà couvert par le Code criminel, c'est déjà couvert par le Code criminel.
Donc, cette
partie-là, on la dédouble. Bon, ça peut arriver qu'on dédouble pour se donner
des nouveaux pouvoirs au Québec. Ce
n'est pas tellement l'usage chez le Parti libéral du Québec, de
donner de nouveaux pouvoirs au Québec, mais
je me dis : Bon, on veut rappeler que ça existe. D'accord.
Et, si on rappelle ça, le problème, c'est qu'on ajoute après ça... on donne
des pouvoirs à la Commission des droits de la personne et des droits de la
jeunesse.
Donc, comment
ça fonctionne? Quand tu vas devant les cours, en vertu du Code criminel, tu dois prouver hors de tout doute raisonnable la culpabilité de
l'accusé, hors de tout doute raisonnable, c'est comme ça que fonctionne notre
système, c'est comme ça que fonctionne notre
système. Là, maintenant, devant le Tribunal des droits de la personne, on ne fonctionne pas de cette façon-là, c'est la
prépondérance de la preuve, c'est l'équilibre entre les deux qui est le facteur
de jugement, qui est la base de jugement. Plein de gens sont venus nous
dire : Il y a un problème avec ce problème de la prépondérance de la preuve. Julius Grey, Julie Latour — ce n'est quand même pas n'importe qui — ils sont venus nous parler de ça, ce
sont des juristes renommés particulièrement en matière de Charte des droits et
des libertés. Donc, la prépondérance de la
preuve disparaît, c'est l'équilibre, premièrement. Deuxièmement, comme on va
aller devant le Tribunal des droits
de la personne et des droits de la jeunesse, on va avoir affaire à un tribunal
qui jusqu'ici n'a pas... en vertu de ces
nouveaux pouvoirs là n'a pas de jurisprudence accumulée, hein, ils n'ont jamais
travaillé là-dessus, là, c'est nouveau, c'est un nouveau pouvoir.
Ce qui est
étonnant, c'est que Jacques Frémont, le président de la commission des droits
de la personne et de la jeunesse, est
venu nous voir en commission parlementaire et nous a dit : Je n'ai jamais
demandé ces pouvoirs. C'est le plus
loin que peut aller un président qui ne veut pas quelque chose. Je n'ai jamais
vu ça, là, c'est rare, là, exceptionnel, un président d'une organisation
à qui le gouvernement veut céder de nouveaux pouvoirs vient dire en commission parlementaire à sa ministre de tutelle : Je
n'ai jamais demandé ces pouvoirs. C'est parce qu'il est mal à l'aise, c'est
évident, avec ces pouvoirs, parce que lui aussi a entendu, lui aussi a
compris ce qui s'est passé, d'autant que M. Frémont a été fortement cité, régulièrement cité, dans cette
commission parlementaire, parce que M. Frémont avait dit que lui, s'il
voulait une loi contre la liberté
d'expression pour restreindre les propos haineux, c'était pour restreindre les
discours islamophobes, point final,
c'est ça qu'il visait. Alors, vous comprenez l'inquiétude dans la société, là.
La loi est très large, mais l'intention du président de la Commission des droits de la personne et des droits de
la jeunesse était de viser le discours islamophobe. Alors, c'est lui
qui... il nous dit son intention, il l'a dit publiquement à Radio-Canada.
Alors, il dit
cette intention claire, il la réaffirme dans des interventions, des conférences
qui sont sur Internet, puis c'est lui à qui on va confier le tribunal
qui va juger de ça, mais le tribunal a déjà un penchant, il l'a dit. Le
tribunal a exprimé au départ ce qui va
exister, le président de ce tribunal-là dit : Moi, c'est ça que je veux
faire avec. Mais ce n'est pas ça que
la loi dit, mais on sait qu'il y a un penchant. C'est mal parti, c'est mal
barré. Mais il est venu en commission parlementaire,
il dit : Bon, je voulais une loi contre les discours haineux, ça, il tient
encore son bout, mais il dit : Pas moi, pas moi, je n'ai pas... je n'ai jamais demandé ça. Vous connaissez
l'expression «je n'ai jamais demandé ça». Quand tu dis : Je
n'ai jamais demandé ça, ça veut dire : Je me retire. Il n'en veut pas.
Pourquoi il
n'en veut pas? Il y a plein de raisons. Probablement que ça tient aussi à ce qu'on voit ici, c'était
dans... le média que j'aime bien, Radio-Canada, nouvelles, jeudi le
11 juin 2015 : La Commission des droits de la personne
a-t-elle les moyens d'enquêter sur les plaintes pour discours haineux? On
parle de moyens, on est en pleine période d'austérité,
Mme la Présidente, on va aller voir où c'est que le gouvernement a décidé de
mettre de l'argent, hein? Il a décidé
d'ajouter de l'argent, j'espère, à la Commission des droits de la personne et
des droits de la jeunesse pour créer un
nouveau tribunal pour sanctionner la liberté d'expression. C'est toujours
amusant à dire en file, ça fait un peu bizarre.
Mais ce que
Radio-Canada nous apprend, c'est : «La Commission a-t-elle les ressources nécessaires pour assumer ces nouvelles responsabilités?
«Vérification faite : non.
«La
Commission peine déjà à traiter les plaintes qui lui sont soumises : plus
de 1 600 concernant les droits de la personne au
cours de l'exercice financier 2013-2014.
«[...]Le
problème est que[...], avec son budget annuel de 15 millions de dollars,
[la commission] dispose de seulement 23 enquêteurs
pour s'occuper de tous ces dossiers, [...]les retards s'accumulent.
«...le
traitement d'une plainte prend [en moyenne] 376 jours, soit plus d'un an.
Et, lorsque l'affaire nécessite la judiciarisation du
dossier, le délai moyen — tenez-vous bien — est de 525 jours.» Le délai moyen est de 525 jours.
Alors, je vais vous inviter à...
je vais prendre une gorgée d'eau et vous inviter à imaginer quelque chose. Un
professeur dans une école primaire, primaire, tient des propos, ça peut être
dans toutes sortes d'affaires, dans le cours d'éthique
et culture religieuse, ça peut être dans le gymnase, ça peut être... tient des
propos sur la religion. Quelqu'un, un
parent, se sent attaqué, frustré dans ses convictions profondes et décide de
porter une plainte à la CDPDJ. La CDPDJ décide de recevoir la plainte. Qu'est-ce qui se passe avec le
professeur? On le suspend? Il y a une plainte officielle, là, contre un prof. La direction de l'école, qu'est-ce
qu'elle fait? Bien, les gens de la Fédération des commissions scolaires sont venus nous dire : Bien, on va le suspendre, on n'a pas le
choix, il est l'objet d'une plainte à la CDPDJ, d'un processus judiciarisé, donc on va le suspendre. Pendant combien de
temps? Moyenne, 525 jours? Moyenne, 525 jours, l'actuel traitement
des plaintes, puis on n'a même pas encore ajouté les nouveaux pouvoirs. La
moyenne, elle va monter, là. Qu'est-ce qu'on fait? Comment on applique ça?
J'ai
parlé à des syndiqués après, j'ai dit ce qu'elle nous a dit, la Fédération
des commissions scolaires. Ils ont dit : Bien oui, c'est là-dedans qu'on va se retrouver, puis devant des griefs,
puis là devant... On va compliquer, on judiciarise quelque chose que normalement une direction
d'école aurait tout à fait été capable de gérer, c'est-à-dire une direction
d'école a déjà tous les pouvoirs en cette
matière, mais, si un parent y tient, on va se retrouver suspension de prof,
délais, quelque chose de complètement inutile.
Alors, vous voyez les...
Ça paraît beau de dire : On va protéger les discours haineux, mais, dans
l'application pratique à la CDPDJ, ils vont avoir des sérieux problèmes.
Alors,
sur l'intention de la CDPDJ, les motivations, j'ai cité les propos de M. Frémont,
sur la capacité de la CDPDJ, j'ai
exprimé la situation actuelle et, sur le traitement judiciaire qui est
différent, je vous ai expliqué qu'on sort de la preuve hors de tout
doute raisonnable.
• (12 h 30) •
Qu'en
disait le ministre des Affaires municipales et de la Métropole? J'ai dit qu'il
y a plusieurs ministres qui ont jasé
lors de la motion de la députée de Montarville. Vraiment, députée de
Montarville, allez faire un petit tour dans les galées, c'est assez amusant, vous allez voir, vous avez suscité quelques
réactions. Ministre : «Vous savez, en droit criminel, on dit souvent : Le principe du droit
criminel amène la preuve hors de tout doute raisonnable. Pourquoi, la preuve
hors de tout doute raisonnable? La
députée de Montarville le sait très bien : parce qu'on préfère, dans une
société démocratique, qu'un criminel
échappe à la justice plutôt que de voir un innocent condamné. Utilisons
exactement la même approche dans le
dossier qui nous occupe et disons-nous que les interventions que l'on doit
faire, particulièrement lorsqu'il s'agit de limiter la liberté
d'expression, doivent amener une tolérance à entendre des choses», blablabla.
Mais voilà il dit : «Utilisons
exactement la même approche dans le
dossier qui nous occupe», celui de la preuve hors de tout doute raisonnable.
Deuxième ministre qui a tenu des propos
qui vont tout à fait à l'encontre, à l'encontre directement de ce que nous propose la ministre de la Justice. J'en ai
d'autres, là. Tantôt. Je vais m'en garder pour tantôt.
Donc,
la liste noire, l'autre problème, la liste noire. Je suis très étonnée, très
étonnée que ce matin la ministre ne nous ait pas annoncé d'entrée de jeu
que la liste noire n'existerait plus. Qu'est-ce que la liste noire? Une fois
que la Commission des droits de la personne
et des droits de la jeunesse a décidé
d'enquêter sur vous, avec les conséquences dont on a parlé, une fois
qu'elle a statué et qu'elle dit que vous êtes effectivement coupable d'avoir
tenu des propos haineux, un discours haineux
ou incitant à la violence, qu'est-ce
qui vous arrive? Bien, vous allez être sur une liste, une liste publique, pas n'importe quoi, là, pas une
liste comme celle des délinquants
sexuels, qu'on peut aller... que des gens, sur demande, peuvent aller consulter, pas ça, là, puis qui est entre les
mains, je crois, de... Je pense qu'elle est entre les mains de la Sécurité publique ou de la SQ puis
qu'il faut, par exemple, un CALACS, un centre d'aide aux victimes de
violence, pour aller voir. Bon, il y a des choses... il y a une manière, là.
Non, non, non, c'est une liste...
Voici comment on le
dit : «...tenir à jour une liste des personnes qui ont fait l'objet d'une
décision du tribunal concluant qu'elles ont
enfreint une interdiction prévue à l'article 2 — celui interdisant les discours haineux — et la rendre disponible sur son site Internet.» La rendre disponible sur son site
Internet! La ministre ne nous a pas annoncé ce matin ce que je m'attends, là, ce que je dis : Elle
va disparaître, là, la liste noire.
Même pour les délinquants sexuels, on ne fait pas ça. Même dans un processus rigoureux, Code criminel, et avec preuve
hors de tout doute raisonnable, délinquants sexuels, un des crimes les
plus horrifiants dans une société, on ne fait pas ça.
Aïe!
Ça va être le fun. On va avoir une liste, ça va être marqué :
Délinquant sexuel : Jean Tremblay. Il y a à peu près 300 Jean Tremblay au Québec — je me
suis laissé dire, j'ai appelé des gens — à peu près 300 Jean Tremblay
au Québec. Ça fait que : Délinquant
sexuel : Jean Tremblay. Là, tu fais : O.K., comment je fais pour le
distinguer des autres? Qu'est-ce que je mets? Je mets son adresse? Je
mets son numéro d'assurance sociale? Comment je fais? C'est un Jean Tremblay, il y en a des centaines au Québec,
ça fait que je suis obligée de le faire identifier. C'est fou, c'est
complètement fou!
Je
sais que la ministre a dit : Non, on ne sera pas de même. Mais comment?
J'attends une solution, j'attends une solution
sur la liste. Comment on va faire? Une liste publique, en plus. Il y a des gens
qui sont venus dire : Ah! mais, si, après, il y a une erreur judiciaire ou après un certain temps,
on pourra vous enlever de la liste, parce
qu'il y a un système au Québec
qui s'appelle le système de la réhabilitation. L'éducation, la prévention sont
exclues de cette loi, la réhabilitation aussi.
Alors,
imaginons que vous disparaissez de la liste à un moment donné, la capture
d'écran sur Internet, ça existe. Vous
êtes marqués à jamais, en plus de la rumeur, en plus de l'opprobre, etc. La capture
d'écran, ça existe. Les moyens technologiques
actuels sont comme ça. On n'a même pas ce matin l'annonce que la liste va
disparaître, je n'en reviens pas.
C'est pour ça que je dis : Je suis un peu stupéfaite. Je suis prudente,
j'essaie de rester dans un climat de collaboration, mais
j'exprime les choses qui ont été exprimées par à peu près tout le monde. Même le Barreau est contre la liste. Même le Barreau est contre
la liste. Alors, la liste noire n'est pas disparue.
Les
amendes. Il y a des amendes prévues dans la loi. Elles peuvent
être assez salées, mais vraiment
assez salées. Et j'imagine qu'un
jeune sur Twitter... Parce que, ça aussi, un discours haineux sur Twitter,
tu peux être traîné devant la CDPDJ
par quelqu'un. Un jeune se lâche sur Twitter, traîné devant la CDPDJ,
l'opprobre, les parents... Y a-t-il processus d'enquête? Oui, ce sont des
discours haineux. O.K., sanction. Est-ce qu'il va y avoir une amende? Combien? Comment ça va marcher? Est-ce que le jeune va payer? Ça va
être ses parents. C'est complètement fou, là. Je trouve qu'on est en train
d'établir un système de justice parallèle.
Je vais citer
le Barreau du Québec. «Ce régime serait en parallèle avec le régime de plaintes
pour discrimination, prévu aux articles 74 et suivants de la
charte québécoise. Le projet de loi semble donc établir un motif particulier de
discrimination qui nécessite un régime
parallèle bien que la Cour suprême du Canada a établi que les discours haineux
constituent un acte discriminatoire aux droits de la personne.» Donc, c'est
déjà couvert.
«Le
Barreau s'interroge sur les conséquences d'un tel régime parallèle, compte tenu
des nouvelles responsabilités confiées
à la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, y
compris le dédoublement des procédures et
le pouvoir de recevoir des dénonciations.» Dédoublement. «De plus, il
reprend une série de dispositions de la charte québécoise concernant notamment les pouvoirs d'enquête de la commission
des droits de la personne et de la jeunesse, lesquels devront être
interprétés.» C'est ce que je disais.
La liste.
«Enfin, l'article 17, paragraphe 3° du projet de loi confère à la CDPDJ le
pouvoir de tenir une liste de personnes
faisant l'objet d'une ordonnance du Tribunal des droits de la personne sans
pour autant prévoir la protection des droits des personnes inscrites sur
cette liste.»
C'est le Barreau. Moi aussi... Moi, je les ai
écoutés en commission parlementaire. «Le Barreau reconnaît la compétence de la province de Québec d'adopter une
législation créant des sanctions civiles en matière de discours haineux.
Nous constatons que ce nouveau régime
pourrait créer une tension entre des plaintes pour discrimination et les
dénonciations anonymes de discours haineux.» Voilà.
Régime
parallèle. Ça fait que, d'un côté, tu as le Code criminel avec son régime où on
peut aller en cour contre un appel à
la violence ou un discours haineux. De l'autre côté, tu as la commission des
droits de la personne et de la jeunesse sur laquelle tu peux aller faire une plainte, tu peux aller faire une
plainte pour discrimination. Puis, à côté de ça, tu as la Commission des droits de la personne et des droits
de la jeunesse pour lequel tu peux aller non seulement faire une plainte,
tu peux aller faire une dénonciation. Trois
systèmes parallèles différents pour le même objet. C'est ça que nous dit le
Barreau, c'est ça qui n'a pas de sens.
Alors, les
amendes — j'ai
hâte de voir, les jeunes, comment on va prendre ça. Voilà pour à peu près la
première partie de la loi. Vous
comprenez... Je ne sais pas si vous avez compris à quel point il y a des
problèmes dans cette partie de la
loi. C'est pour ça qu'on n'a pas dit : Mettez tout aux poubelles. On n'a
pas dit d'envoyer ça à la déchiqueteuse, de l'expression de la ministre qui disait : L'opposition officielle me
demande de l'envoyer à la déchiqueteuse. Non. Nous avons dit : Revoyez en profondeur cette
partie-là. Cette partie de la loi avait besoin d'être remaniée en profondeur.
On ne doit pas créer un tribunal parallèle.
Malheureusement,
la réponse n'est pas à la hauteur de nos attentes. Malheureusement. Tout ce
qu'on nous propose, c'est un ajout,
une précision à l'article 1, mais ça ne défait pas le nouveau tribunal
parallèle qui est créé, même si j'ai des doutes quant à ce qui va se passer avec l'article 1. Mettons que
j'oublie que je trouve que ça n'a pas de bon sens sur le principe, il y
a tout le principe de la création d'un tribunal parallèle qui est dans cette
loi-là, qui n'a pas de sens.
Alors, Mme la
Présidente, juste le principe de cette partie-là de la loi, pour nous, est
inacceptable. On est en train de
débattre du principe, puis je tiens bien à démêler les deux choses parce qu'on
aurait dû les démêler. Le principe de cette partie-là est inacceptable. On ne s'avancera pas en essayant de créer
des tribunaux parallèles au Québec, des tribunaux basés sur un autre système de justice de la
prépondérance de la preuve au lieu de la preuve hors de tout doute raisonnable,
qui vont stigmatiser des personnes pendant peut-être des années. Alors, c'est
ce que je pense.
• (12 h 40) •
Maintenant, deuxième partie de la loi — parce
que la loi est vraiment deux mondes complètement différents. D'ailleurs, la grande majorité des mémoires qui
ont été déposés disaient qu'ils séparaient, eux, les deux parties. Qu'ils
séparaient. La ministre en a cités quelques-uns
qui ont été pour. Le nombre de contre est assez volumineux, mais, quand il y en a qui étaient pour, il y en a même qui
disaient : Nous ne sommes pas
contre le principe de limiter sur le discours haineux, d'accord si vous
voulez y aller, mais ne faites pas
ça, ne faites pas ça, ne faites pas ça. En général, ça démolissait à peu
près tout l'autre pan de la loi, tout l'autre pan.
Mais, sur la deuxième partie, là je souhaite
qu'on travaille ensemble. Le problème de la deuxième partie : la deuxième
partie nous parle des écoles, elle ajoute des pouvoirs au ministre pour
intervenir dans les écoles de façon particulière.
Je vais retrouver l'article : «Le ministre peut également désigner une personne pour enquêter sur tout comportement
pouvant raisonnablement faire craindre pour la sécurité physique ou morale des
élèves.»
Vous
rappelez-vous, Mme la Présidente, le débat que nous avons eu quand Yves Bolduc,
ex-ministre de l'Éducation,
avait défendu ce qu'on peut appeler une
fouille à nu — même si
on a des... on peut discuter de la pertinence d'appeler ça «fouille à nu», mais c'est le terme utilisé
habituellement — une
fouille sur une jeune élève? Suite au tollé de protestation qui s'est ensuivi, le ministre avait désigné un
enquêteur qui était allé à l'école. Pourquoi on a besoin de rajouter un pouvoir
au ministre? La Loi de l'instruction
publique prévoit déjà que le ministre peut dépêcher des enquêteurs. Quel est le
besoin de rajouter des pouvoirs
exceptionnels sur la sécurité physique ou morale des élèves? La sécurité
physique est déjà assurée, ça, c'est
clair. C'est déjà dans la Loi sur l'instruction publique. Le ministre a tous
les pouvoirs pour intervenir dans une école.
On l'a prouvé dans le passé. Ils l'ont prouvé, puis ça a été correct. On était
d'accord pour qu'ils envoient un enquêteur. Donc, c'est un pouvoir déjà
utilisé.
Mais là il y a quelque chose qui est
nouveau : la sécurité morale. Qu'est-ce que la sécurité morale? Qu'est-ce
que la sécurité morale d'un élève?
Pour aborder cette définition de «sécurité morale», je vais, avant, vous
montrer le... vous ramener le
filigrane de la discussion qu'on avait au Québec. J'en ai parlé d'entrée de
jeu, mais ça commence à être loin, ça
fait 42 minutes que je parle. En filigrane, il y a la montée du phénomène
religieux et la radicalisation, c'est ce qu'on sent. Mais c'est aussi... c'est la radicalisation, dont
on ne parle pas, mais la montée du phénomène religieux. Est-ce qu'un croyant
radical, intégriste, là... Je ne parle pas
de la majorité des croyants, ils sont très à l'aise, mettons, avec le cours
d'éthique et culture religieuse, des
choses comme ça. Mais est-ce qu'un croyant radical, intégriste pourrait se
dire : Je suis contre tel propos en classe, ça affecte la sécurité
morale d'un élève, de mon enfant, la sécurité morale de l'enfant devient un élément du débat entre les professeurs, les
directions d'école et les parents? Il n'y a pas de définition de la sécurité
morale dans la loi, aucune idée de ce
que c'est, et personne, absolument personne en commission parlementaire, ni la
ministre, ni les collègues, ni les intervenants n'ont été capables de
nous expliquer qu'est-ce que la sécurité morale de l'élève.
Les directions d'école
sont venues nous dire le problème. Les directions d'école, dans la Loi sur
l'instruction publique, ont déjà un devoir
d'intervention, et cela, ils sont venus nous le rappeler. Commissions
scolaires, cégeps, les directions
d'école se doivent d'intervenir s'il y a quelque chose qui affecte la sécurité
des enfants. Mais là, en mettant le
focus, vraiment un éclairage particulier dans une nouvelle loi, sur la sécurité
morale et physique dans un contexte où c'est
une loi qui parle de la lutte contre les discours haineux et, on sait, qui
vient, d'après même le débat qu'on a eu, du fait qu'il y a une montée du phénomène religieux, comment est-ce que va
être interprétée cette loi-là? Les
directions d'école étaient très mal à l'aise. Il y a vraiment un problème
à cet endroit-là. Il n'y a pas de définition puis il n'y a pas de nécessité. Elles sont toutes venues nous
dire : Il n'y a pas de nécessité. C'est déjà couvert par la loi, et les
pouvoirs du ministre, et ce devoir de s'occuper de sécurité morale et
physique des élèves.
Par contre,
ce qu'elles nous ont dit, comme la direction d'école est imputable, elle
pourrait être sanctionnée, la direction
de l'école, si elle tolère au sein de son établissement un comportement pouvant
raisonnablement faire craindre pour
la sécurité physique ou morale des élèves. Des directions d'école sont venues
nous dire : Écoutez, on s'en occupe déjà, de la sécurité morale et physique de nos élèves, là. Vous ne nous
donnez pas de moyens pour intervenir quand il y a des locations de locaux par les Adil Charkaoui,
semeurs de haine de ce monde — je
répète ces mots-là, les semeurs de haine de ce monde — et
nous avons ici un article qui va nous mettre une pression intolérable, qui
fait qu'on va devenir plus que prudents. Il y a une espèce d'autocensure
qui va s'installer.
Mme la Présidente, le terme «autocensure» est venu à maintes reprises dans la commission parlementaire. Les gens
qui sont venus nous dire : Attention à l'autocensure, particulièrement les Nord-Africains pour la laïcité... Il y a une association des Nord-Africains de la laïcité qui
est venue nous dire : Attention! Ceci, la partie 1 de la loi et le reste
vont nous amener à un climat
d'autocensure. Les gens savent qu'il
y a un nouveau tribunal qui touche à
la liberté d'expression dans un processus
fou, avec des... «fou» dans le sens d'un processus qui dépend de la Commission des droits de la personne, qui
elle-même a déjà dit que ce qu'elle voulait, c'était lutter contre
l'islamophobie et qui a déjà des délais d'attente immenses. Puis, déjà, tu sais que tu as une plainte contre quelqu'un,
mais tu as un délai d'attente de presque deux ans. Et puis là les gens
nous disent : On va être obligés de s'autocensurer parce qu'on va craindre
ce processus.
Il y a une différence entre donner des outils à
une société pour gérer de vrais problèmes et créer un climat d'autocensure. Créer un climat d'autocensure, ce
n'est pas moi qui le dis, Mme la Présidente. Ce thème-là a été abordé dès les premiers intervenants en commission
parlementaire et il a duré toute la commission parlementaire. On l'a entendu
souvent. Il n'a pas été apporté par nous, il
a été apporté par les intervenants. Ce sont les gens qui sont venus nous dire
ça, les gens qui vivent, entre autres, dans
les communautés religieuses qui sont visées. Les gens de la communauté des
Nord-Africains pour la laïcité sont venus
nous dire : Ne nous mettez pas dans un climat d'autocensure. Des juristes
sont venus nous dire : Ne créez pas un climat d'autocensure. Le
Mouvement laïque est venu dire : Ne créez pas un climat d'autocensure.
C'est vraiment un problème, vraiment un problème de cette loi.
Par contre,
sur les mariages forcés, bien là on avait plutôt hâte de travailler là-dessus.
Je pense que c'est quelque chose qui
va avoir l'unanimité des parlementaires. Sur les mariages forcés, on peut faire
quelque chose, même si la loi n'est pas parfaite. Il y a eu des
interventions, de très belles interventions, entre autres... Je vais chercher
ma liste des intervenants parce que, de
mémoire, je ne les trouve pas, mais je pense que c'est le conseil des femmes
musulmanes... l'association des
femmes musulmanes canadiennes qui est venue nous dire : Oui, il y a des
choses à faire, mais, faites attention,
vous pourriez... est-ce que ça va vraiment aider les femmes qui subissent des
mariages forcés à l'extérieur, à l'étranger puis quand elles reviennent?
Alors, elles sont vraiment venues nous interpeller là-dessus.
• (12 h 50) •
Alors, il y a
des choses à faire, on veut travailler dessus. Malheureusement, ce n'est pas,
pour l'instant, détaché de la loi
actuelle, mais... Vous voyez la série de problèmes qu'on a à régler avant
d'arriver à ce vrai problème. C'est ça que je déplore ce matin, Mme la Présidente. Il va falloir régler tout un
paquet d'autres problèmes qui sont, je vais vous avouer, un noeud
gordien en matière de liberté d'expression, là, très difficile. Ce noeud
gordien, c'est entre la liberté d'expression
et la lutte à l'intimidation, aux discours haineux, là. Il y a un noeud, là.
Là, on l'a déplacé, puis ça va être difficile à trancher, très difficile à trancher. C'est comme ça qu'on a réglé le
problème du noeud gordien : Alexandre le Grand est venu trancher. Alors, sur les mariages forcés,
malheureusement, ça va... On aurait aimé travailler dessus assez rapidement.
À moins que la ministre décide que ces
articles-là devraient passer tout de suite. On verra, mais moi, j'ai une petite
crainte.
Dans les
crimes motivés par la haine d'une race ou d'une origine ethnique et déclarés
par la police, le fondement de cette
loi, le principe, c'est de protéger les gens des discours haineux. J'ai ici ce
qui nous a été suggéré. Je pense que c'est
le conseil juif qui est venu nous présenter ça, d'une communauté juive. Il nous
a dit... Il nous a référés à Statistique Canada. C'est assez surprenant, ce qu'on a appris : d'abord, que le
nombre de crimes motivés par la haine d'une race ou d'une
origine ethnique et déclarés par la police au Canada en 2013 visaient d'abord
les Noirs. C'est la grande majorité, c'est
au-delà de 50 %, presque 60 %. Les seuls groupes qui représentaient
la communauté noire qui sont venus à l'Assemblée nationale, en
commission parlementaire, nous voir nous ont dit : Ne prenez... ne faites
pas cette loi. Les principales victimes des
discours haineux en matière de race et d'ethnie sont venues nous dire :
N'adoptez pas cette loi, nous
préférons l'éducation et la prévention. Ils sont venus nous le dire. C'est eux,
les principales victimes. Je ne sais pas si on réussit à voir dans ce
petit tableau, là, mais l'immense majorité des crimes haineux, c'est contre
eux. Ils ont dit : N'adoptez pas cette
loi. Quelle est la justification du gouvernement? La deuxième, les Asiatiques
de l'Est et du Sud-Est, du Sud,
ensuite les Arabes et les Asiatiques, mais la grande, l'immense... près de
60 % des crimes haineux sont contre les Noirs. Ils ont dit :
Ne faites pas cela.
Les
religions, les crimes haineux contre les religions, crimes motivés par la haine
d'une religion et déclarés par la police,
population ciblée, l'immense majorité, l'immense majorité des crimes haineux
sont contre les Juifs. Les représentants des Juifs sont venus nous voir et ont dit : N'adoptez pas cette
loi. J'en ai encore vu hier soir qui étaient là, ils sont venus à la soirée Québec-Italie
et ils m'ont répété : Mon Dieu, n'adoptez pas cette loi! Ce sont eux, les
principales victimes des crimes haineux en matière de religion. Ils sont
pour l'éducation, la prévention, c'est ça qui fait avancer une société.
Je suis
membre de la communauté gaie. Les LGBT sont venus nous dire, les associations,
sauf la Fondation Émergence, qui
n'avait pas vu ça sous cet angle-là, je le dis, là... Ils ont dit : Ah!
avez-vous vu que ça pourrait être contre vous? Ils ont dit : Non. Ah! O.K. On pensait être protégés,
mais effectivement on n'a pas vu que ça pourrait être un discours religieux
contre les gais qui nous attaque. Alors, les
LGBT disent : Non, n'adoptez pas cette loi. Ils sont venus, les grandes
coalitions sont venues nous dire : Ce n'est pas le bon moyen. Le
bon moyen, c'est l'éducation et la prévention.
Donc, les
principales victimes de discours haineux en matière de race et d'ethnie, et l'immense
majorité, là, 60 %, les
principales victimes en matière de crimes religieux, les Juifs, immense
majorité, près de 50 %, et les LGBT sont venus nous dire : N'adoptez pas cette loi. La
justification de la ministre ne tient pas la route, le gouvernement doit y
réfléchir et entendre les appels. La
prévention, l'éducation sont des outils majeurs, et c'est comme ça qu'on a fait
changer les choses au Québec.
Je ne dis pas
de ne pas faire la lutte à la radicalisation. Au contraire, je le dis, nous
avons salué le plan de lutte à la radicalisation,
mais ce n'est pas une loi contre la radicalisation, ce n'est pas une loi de
protection des jeunes. Il y a quelques ajouts
pour la DPJ, d'accord, ça, c'est dans la deuxième partie, mais ce n'est pas une
loi qui atteint les objectifs sociétaux auxquels nous avons envie de
nous associer.
Là-dessus, je
vais citer la députée de Gouin qui... je ne sais pas encore où son parti va se
loger dans ce débat-là, c'est un peu
difficile à saisir pour le moment, mais voici ce qu'elle nous dit dans le débat
du 18 février 2015. Félicitations, Mme la députée de Montarville,
vous avez fait beaucoup jaser.
Là, je cite Mme la députée de Gouin :
«Deuxième paragraphe, on nous dit : Il faut reconnaître la nécessité de défendre des valeurs auxquelles adhèrent la nation
québécoise et qui sont contenues dans notre charte des droits et libertés. Bien
évidemment qu'il faut les défendre, ces valeurs, mais la question, c'est :
Comment? Comment combattre les
idées défendues par des individus porteurs
de valeurs rétrogrades, voire obscurantistes? Pour moi, pour Québec solidaire, c'est d'abord et avant tout par le débat, par l'éducation, par l'inclusion et par des mesures
qui visent à contrer les terreaux sur lesquels s'appuient les
intégristes, en tout premier [lieu] : la lutte aux inégalités, au racisme,
à l'exclusion.»
Je cite
encore : «Elle veut interdire — elle parlait de la motion — les expressions qui nient nos valeurs
communes, soit en faisant la
promotion de la haine — et je rappelle qu'à ce chapitre c'est déjà couvert par le Code
criminel», donc la députée de Gouin
reconnaît que c'était déjà couvert par le Code criminel, «soit, et je cite,
"en incitant au mépris et à la marginalisation d'une personne ou d'un
groupe de personnes sur la base d'un motif de discrimination interdit"».
On voit qu'il y a un petit peu de la
CAQ dans le projet de loi n° 59, dans le sens où ils sont allés rechercher
une partie de vos idées.
Alors :
«C'est absolument vrai que des individus et des organismes utilisent la liberté
d'expression que nous avons au Québec pour dénigrer des personnes ou des
groupes marginalisés. [...]Est-ce qu'il faut sanctionner les gens qui se permettent des blagues sexistes et homophobes plus
que douteuses[...]? Ou alors est-ce que l'éducation et le débat sont les meilleurs moyens que nous avons pour réagir?»
Ça fait pas mal de monde de notre bord, Mme la Présidente, pas mal de
monde de notre bord.
Alors, j'ai
cité déjà, pour terminer, le mémoire du Barreau : parlant. J'ai expliqué
un peu les positions des fédérations d'écoles,
cégeps et enseignement privé qui sont venus nous dire à quel point ce projet de
loi n'atteignait pas sa cible. J'ai peu
parlé du Mouvement laïque, on s'y attardera. Le Mouvement laïque québécois
aurait pu dire : Oui, c'est intéressant parce qu'on va lutter contre les propos haineux incitant à la violence
des imams religieux, par exemple. Il y en a certains... De certains,
certains imams, pas tous. Il ne faut pas tous les mettre dans le mettre paquet.
De certains. Mais, non, le Mouvement laïque
dit : Non, non, pas comme ça, pas comme ça, ce n'est pas un bon moyen. On
parle toujours du moyen, là, ici.
Alors, un des
mémoires qui a le plus lancé le débat, c'est le premier, c'était le mémoire
présenté par Les Juristes pour la
défense de l'égalité et des libertés fondamentales, représentés par
Me Julius Grey et Me Julie Latour. Le résumé de leur mémoire parle beaucoup : «Nous
sommes — je cite,
je cite le début, là, le résumé — également très inquiets de constater les atteintes potentielles à la liberté
académique qui y sont instaurées [et] avec l'avènement d'un pouvoir unilatéral
et non balisé pour le ministre de
l'Éducation d'"enquêter sur tout comportement pouvant raisonnablement
faire craindre pour la sécurité physique et morale des élèves".»
Donc, sur la
sécurité morale, ils sont d'accord avec nous, mais sur le projet de loi
lui-même : «Nous sommes des juristes
spécialisés en droit constitutionnel et en droit public, de tous âges et de
tous horizons, mus par la vive inquiétude que suscite en nous la volonté du projet de loi n° 59 d'inscrire
dans la Charte des droits et libertés de la personne et dans la
législation québécoise des dispositions contre les discours haineux ou incitant
à la violence, en duplication avec les dispositions
qui existent déjà au Code criminel — articles [318 à] 320 notamment. Nous
estimons que le projet de loi n° 59 générerait des entraves
majeures et injustifiées à la liberté d'expression de tous les citoyens du
Québec et à la liberté académique. Loin de favoriser le vivre-ensemble et la
cohésion sociale, nous croyons que les dispositions proposées risqueraient de
créer un climat social de suspicion aux effets délétères, aux effets
délétères.»
Voilà. La pile de mémoires, là, qui dit qu'il ne
faut pas aller là, elle est épaisse comme ça, et je n'ai pas imprimé ceux qui sont sur Internet. On est de plus
en plus environnementalistes, on ménage le papier, mais on peut
remonter un peu la pile.
Dans le
temps, le bref temps qui m'est imparti, Mme la Présidente, je voudrais
conclure en disant que, bien sûr, on va
collaborer, on collabore tout le temps aux projets de loi, on essaie de les améliorer. Le problème que nous avons
dans cette loi, c'est que la matière
de base, la première partie n'a pas... on n'a pas d'annonce d'amendement
solide, sérieux, fondamental dans un projet de loi qui a été totalement
décrié par la grande majorité des gens qui sont venus.
• (13 heures) •
Alors,
de ce côté-là, Mme la Présidente, c'est évident qu'on ne pourra pas être pour
le principe de cette loi-là. Nous ne
pourrons pas être pour le principe parce que nous n'avons pas eu ce dont nous
avions besoin : une intention claire et forte du gouvernement d'amener des changements sérieux, profonds à
cette idée mauvaise de créer un tribunal parallèle, de créer un système
de droit parallèle, d'amener une liste noire — je n'en
reviens pas — des
sanctions pour rattraper des jeunes, en fait, un système juridique
parallèle qui ne devrait pas exister et qui, en plus, ne devrait pas être
confié à la commission des droits des
personnes et la commission des droits de la jeunesse, parce qu'elle n'en
a — d'abord,
elle a une intention qui a été émise au départ, étonnante d'eux — pas
les moyens, Mme la Présidente. Merci.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, je vous remercie, Mme la
députée de Taschereau et leader adjointe de l'opposition officielle.
Compte tenu de l'heure, je vais suspendre les
travaux jusqu'à 15 heures.
(Suspension à 13 h 1)
(Reprise à 15 h 5)
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
Alors, chers collègues, veuillez prendre place. Nous allons poursuivre l'adoption
du principe du projet de loi
n° 59, Loi édictant la Loi concernant la prévention et la lutte contre les
discours haineux et les discours
incitant à la violence et apportant diverses modifications législatives pour
renforcer la protection des personnes.
Et, avant la
suspension temporaire, nous en étions rendus à l'intervention de Mme la députée
de Montarville. À vous la parole pour votre intervention, Mme la députée.
Mme Nathalie Roy
Mme Roy
(Montarville) : Merci beaucoup, M. le Président. Écoutez, je
ne suis pas une vieille politicienne, j'ai peu d'expérience, on apprend à chaque jour. Et je dois dire aux gens qui
nous écoutent qu'on est ici pour parler du projet de loi n° 59, le fameux projet de loi dont le
titre spécifie qu'il doit lutter contre les discours haineux, les discours
incitant à la violence.
Et c'est un
projet de loi dont nous attendions beaucoup, ma formation politique, et
également, je pense, la population.
C'est un projet de loi que nous attendions, et nous l'avons réclamé à plusieurs
reprises, d'ailleurs, à la ministre parce
qu'il se passe quelque chose au Québec qui... Ma collègue de l'opposition
officielle en faisait mention, des événements — j'y reviendrai tout à l'heure — qui ont bousculé la façon de voir les choses
des Québécois, et qui nous ont
bousculés, et qui nous ont blessés dans nos convictions, et qui nous ont
blessés comme société, et le gouvernement libéral nous avait promis un vaste plan pour contrer la radicalisation
des jeunes. Parce que c'est de ça dont il s'agit, la radicalisation des jeunes — c'est important de le dire — et le projet de loi n° 59 s'inscrivait
dans cette vague d'actions prises par
le gouvernement. Alors, vous comprendrez que j'ai salué la ministre, au
printemps dernier, lorsqu'elle a déposé ce fameux projet de loi, puisque
nous l'attendions, nous l'attendions depuis plus d'un an. Force est de
constater, à la lecture de ce projet de loi et de ses articles, que j'ai été
très, très surprise, et je vous dirai pourquoi tout à l'heure.
Puis je vous
rappellerais aussi, M. le Président, que, dès février 2015, nous avions déjà
fait une sortie médiatique qui avait été soulignée et remarquée par le
gouvernement, d'ailleurs, et les autres partis, puisque nous demandions
des choses très précises pour nous attaquer
aux discours... mais aux discours de ces prédicateurs autoproclamés qui
endoctrinent nos jeunes. Alors, on
était bien précis, hein? C'étaient des discours très précis auxquels nous
voulions que le gouvernement réagisse,
et nous demandions — oui,
c'est ce qu'on appelle en droit... — nous demandions, effectivement, que la
liberté d'expression, à cet égard, à
l'égard de ces discours qui sont prononcés pour endoctriner les jeunes, pour
les amener à vouloir quitter le Québec pour aller se battre en Syrie,
pour aller faire le djihad... donc, nous voulions spécifiquement que ces discours qui touchaient nos jeunes, qui
endoctrinaient nos jeunes, ce genre de lavage de cerveau dont ils étaient
victimes et qui les influençait soient interdits.
Et, mon Dieu!
le gouvernement avait fait les hauts cris quand je suis sortie au mois de
février dernier pour dire ça. J'étais
Satan, je m'attaquais à la liberté d'expression. C'était épouvantable, ce que
la CAQ faisait, ça ne tenait pas la route. Ça n'avait pas de bon sens, on attaquait directement la liberté
d'expression, c'était horrible. Et je me souviens très, très bien de...
j'avais questionné la ministre à cette époque et je me souviens très, très bien
de la réaction du leader du gouvernement
officiel, qui avait dit que les droits et libertés, que la liberté d'expression
étaient beaucoup mieux protégés par
l'actuelle ministre de la Justice que par elle — «elle» étant la députée de Montarville — qui avait soumis qu'on devait
s'attaquer aux propos des prédicateurs autoproclamés qui endoctrinent les
jeunes.
C'était ça,
l'essentiel de notre point. On ne disait pas : Il faut faire fermer la
trappe à tout le monde, ça prend une police
de la parole, il faut censurer tout le monde. On n'a plus le droit de parler,
on n'a plus le droit de s'exprimer. Ce n'est
pas ce que nous disions, nous étions très précis sur le type de discours et
d'intervenants qui allaient endoctriner les jeunes. Parce que c'est de ça qu'on parle, la lutte contre la
radicalisation, ces jeunes à qui on lave le cerveau et qui passent à l'acte. Parce que c'est très grave, on parle ici
d'actes de terrorisme, on parle de meurtres, on parle d'une radicalisation
épouvantable. Et c'est un phénomène
occidental, puis on ne connaissait pas ça au Québec il y a une quinzaine
d'années. Là, force est de constater que c'est une nouvelle réalité qui
nous frappe.
• (15 h 10) •
Donc,
je vous disais que, d'entrée de jeu, lorsque la ministre a déposé sa loi que
nous lui avons réclamée, et nous étions...
enfin, on avait quelque chose, on avait un projet de loi entre les mains qui
allait, nous l'espérions, régler cette problématique,
cet endoctrinement, ce lavage de cerveau, j'ai été extrêmement surprise de
constater que les propositions de la
ministre étaient de loin beaucoup plus larges que ce que nous lui avions soumis
en février dernier et j'ai été très, très
surprise de voir jusqu'à quel point son projet de loi porte atteinte à la
liberté d'expression et va beaucoup plus loin, je vous dirais mille fois plus
loin que ce qu'on suggérait. Alors, je pense qu'il y a des nuances importantes
à faire, et c'est important de le dire aux gens qui nous écoutent, très important
de le dire aux gens qui nous écoutent.
Et, d'entrée
de jeu, je vous disais : Je suis une jeune parlementaire, je commence — quoique j'ai 51 ans, mais je suis jeune parlementaire — je suis depuis trois ans ici, et il y a une
chose que j'ai découverte et que les gens doivent savoir de la façon dont ça fonctionne, c'est
extrêmement important, les fameuses commissions parlementaires, la tenue
de ces consultations lorsqu'un projet de loi est déposé. Alors, Mme la ministre
nous a déposé le projet de loi n° 59 au printemps dernier. La commission et ses audiences, ses consultations ont
commencé au mois d'août dernier. Et je veux vous dire que c'est extrêmement important et que c'est extrêmement
formateur parce que nous nous faisons une tête en tant qu'élus, en tant que députés, en tant que
parlementaires. Nous lisons le projet de loi, nous l'analysons avec des
juristes, nous le décortiquons, mais
ce que les gens viennent nous dire a une extrême valeur. Mme la ministre le
disait à juste titre, nous avons reçu
38 groupes, et des groupes choisis, des groupes ciblés, justement, en raison de
la délicatesse du sujet parce que, oui, c'est un sujet qui est délicat,
oui, il faut faire attention.
Donc, les
groupes que nous avons entendus nous ont beaucoup appris. Et ce qui m'a
impressionnée, c'est la mesure avec
laquelle la majorité de ces groupes étaient inconfortables avec cette atteinte
à la liberté d'expression que le projet de loi n° 59 va édicter, et j'ai été extrêmement surprise de
constater... Mme la ministre disait : Ils étaient d'accord avec l'objectif. Certes, oui, plusieurs étaient
d'accord avec l'objectif du projet de loi. Cependant, on ne s'entendait pas sur
la façon, la manière d'y arriver. Et
d'accord avec l'objectif, on ne peut pas être contre la vertu. Il n'y a
personne qui peut être contre le fait
de vouloir s'attaquer à l'endoctrinement des jeunes, à ces discours radicaux,
mais ce n'est pas si simple que ça,
et c'est la façon d'y arriver. Et, à la lumière des commentaires des gens que
nous avons entendus, commentaires que
j'ai trouvés fort édifiants, j'ai été, d'une certaine façon, confortée dans
notre première appréciation du projet de loi parce que plusieurs des intervenants, la très grande majorité, disaient
comme nous, disaient ce que nous avions dit lorsque le projet de loi a
été déposé, que ce projet de loi est beaucoup trop large, est beaucoup trop
vaste et rate sa cible.
Alors, je
vous rappelle la mise en contexte. C'est un vaste plan pour contrer la radicalisation,
plusieurs ministères sont impliqués.
On lit la loi, le p.l. n° 59 — j'imagine que tous les collègues du
gouvernement l'ont lu — et on se rend compte que, dans ce projet de loi, le mot
«radicalisation», là, oubliez ça, M. le Président, il ne s'y trouve même pas. Donc, écoutez, le principe du projet de loi — parce que c'est bien du principe du projet de
loi que nous débattons actuellement — dans sa forme actuelle, ne pourra pas
obtenir l'appui de ma formation politique pour la simple et bonne raison que la ministre de la Justice, à la lumière
des audiences que nous avons eues et à la lumière aussi de l'excellente revue de presse qu'a faite ma collègue de
l'opposition officielle — que je ne répéterai pas, là, je vous en ferai grâce, mais, effectivement, la revue de presse était
édifiante — donc, la
ministre de la Justice a été incapable de recueillir l'acceptabilité
sociale nécessaire pour assurer la légitimité de ce projet de loi.
Il y a eu
énormément d'opposition, et de l'opposition justifiée, d'autant plus
qu'actuellement, au moment où on se parle,
là, on ne sait pas sur quel projet de loi nous votons. Parce que je vous
rappelle que le premier ministre, à la sortie du caucus présessionnel,
en août dernier, si je m'abuse — ou début septembre, mais je pense que
c'était en août, 27, 28 août — avait demandé, justement, à
la ministre de revoir son projet de loi n° 59, de retourner faire ses
devoirs et d'amender le projet de loi, donc
on nous demande de se prononcer sur un projet de loi qui, aux yeux mêmes du
premier ministre, devra être
complètement retravaillé. Donc, sur quoi on va travailler en bout de ligne? On
ne le sait pas. Alors, dans sa forme actuelle, on ne peut pas voter pour
ce projet de loi tel qu'il est.
Certes,
écoutez-moi bien, nous avons besoin d'une loi pour protéger les valeurs
fondamentales des Québécoises et des
Québécois contre cette menace intégriste que leur posent les agents de
radicalisation qui dénigrent nos droits et libertés et qui fomentent la haine et la violence chez nos jeunes, parce
que c'est bien de ça qu'il s'agit.
Or, ce projet de loi dont nous
avons besoin — nous
avons besoin de quelque chose — eh bien, ce n'est pas le projet de loi
n° 59, pas à la lumière de la façon dont il est écrit actuellement.
Et, je vous
l'ai dit d'entrée de jeu — et
je pense qu'il est important de le répéter — que,
cette dernière année, le Québec a été le théâtre non seulement
de discours méprisants, discours haineux à l'endroit des valeurs démocratiques
que nous chérissons, mais également et, malheureusement, le Québec a été le théâtre d'un attentat meurtrier, un
attentat perpétré par un jeune au nom
de la religion après qu'il se soit converti, qu'il ait été endoctriné. Et là je
ne vous parle pas non plus de
l'attentat qui est survenu sur la colline Parlementaire à Ottawa,
encore là un jeune Montréalais endoctriné, radicalisé qui, au nom d'une religion, s'en va commettre
l'irréparable. Puis je ne vous parle pas non plus des attentats de Charlie
Hebdo qui se sont passés en
France. Il y a quelque chose qui s'est passé, il fallait agir. C'est pourquoi
nous avions demandé — et
nous l'avons fait à répétition — au
gouvernement libéral qu'il dote le Québec
des outils nécessaires pour lutter contre cette menace, pour
lutter contre l'intégrisme religieux et la radicalisation.
Parce que,
M. le Président, ça existe, l'intégrisme religieux. D'ailleurs, nous avons beaucoup apprécié, lors des audiences de cette consultation lors du projet de loi n° 59, le
témoignage de Mme Fatima Houda-Pepin, que je salue, qui, vraiment,
est une mine intarissable d'information
sur le sujet et qui est venue nous dire : Attention! l'intégrisme
religieux existe, il existe, et c'est
à ça qu'il faut s'attaquer. Et d'ailleurs, ce matin, à la période des
questions, c'est justement l'essence même de ma question, la troisième
question, la deuxième complémentaire, est-ce qu'on va s'attaquer à cet
islamisme radical? Parce que ce n'est pas le
Coran, ce n'est pas les musulmans, le problème, c'est l'islamisme radical. On
n'a qu'à voir les attentats qui ont été commis, c'est mouvant, c'est ce
qu'on peut lire, il se passe quelque chose, il faut agir. Nous ne croyons pas que le p.l. n° 59 s'y
attaque, pas plus que nous croyons que tout le plan de radicalisation s'y
attaque vraiment.
Le projet de
loi n° 59 constitue peut-être un pas dans la bonne direction. Parce que,
oui, Mme la ministre, je salue qu'il y a de très bonnes choses
là-dedans, très bonnes choses concernant les mariages forcés, ces jeunes filles
qui... M. le Président, ce qu'on a appris,
c'est qu'on ne les marie pas de force ici, on les envoie en voyage durant
l'été, puis elles reviennent, puis
elles sont mariées avec quelqu'un de beaucoup plus âgé, puis ce n'était pas
leur choix. Eh bien, ça, ça existe au
Québec, et on s'est fait donner des chiffres. Moi, j'ai demandé à certaines
organisations des chiffres, et les chiffres sont afférents dans la
mesure où c'est un phénomène qu'on ne connaissait pas, qui n'était pas
comptabilisé, il y a une quinzaine d'années,
mais maintenant on nous dit : Bien, oui, une vingtaine, une trentaine, une
quarantaine de cas. Bien, 40 petites
filles, au Québec, qui se font marier de force, c'est 40 de trop. Donc, il y a
quelque chose, et c'est à ça qu'il faut
s'attaquer, et je salue les mesures de la ministre qui sont dans ce projet de
loi pour contrer les mariages forcés. Mais ça, c'est un autre volet du projet de loi. Ce volet-là, il est bon. Donc,
c'est un pas dans la bonne direction, mais pas à tous les égards.
Les
consultations particulières, les avis d'éminents juristes et la réaction de la
population démontrent que ce projet de
loi crée davantage de craintes qu'il n'en apaise. Comme je vous dis, je ne vous
referai pas la nomenclature de la revue de presse, mais on a pu lire
abondamment, autant des éditoriaux que des journalistes, qu'il y avait un
problème, puis il y avait un problème, entre
autres, à l'égard de la liberté d'expression, qu'il y avait... enfin, il y
avait un problème, mais il y avait plusieurs problèmes, certaines
faiblesses qu'on appelle des faiblesses majeures.
Un message
clair a été lancé à la ministre dans le cadre des consultations et dans
l'espace public médiatique. Et, je l'ai dit dès ce printemps, dès le
dépôt du projet de loi par la ministre, et je vais le répéter, le p.l.
n° 59 rate sa cible, ne s'attaque pas à la menace qu'on veut réellement
éradiquer au Québec, soit l'intégrisme religieux, l'endoctrinement idéologique qui mènent à la discrimination et au
radicalisme violent. C'est ce qui préoccupe réellement les Québécois.
Pourtant, ces concepts et ces mots que je viens de vous dire ne se trouvent pas
du tout dans le projet de loi.
• (15 h 20) •
Je vous
disais tout à l'heure que le mot «radicalisation» n'était pas dans le projet de
loi. Le mot «endoctrinement» n'est
pas dans le projet de loi. Les mots «intégrisme religieux», les mots «dérive
religieuse» ne sont pas dans ce projet de loi. Alors, vous voyez que la
cible est beaucoup trop large, il faut être précis.
L'absence de
définition aussi... Parce que c'est une loi qui s'attaque aux discours haineux.
«Discours haineux», c'est une notion
qui peut sembler large à à peu près toute la population qui n'a pas fait de cours de droit et qui n'est
pas allée lire toute la jurisprudence
qui nous explique ce que c'est qu'un discours
haineux. Alors, l'absence de définition de «discours haineux» dans le projet de loi, malgré la jurisprudence — et jurisprudence qui doit guider la
commission des droits et libertés de
la personne dans l'application de la loi — bien, ce manque de définition, ça a soulevé
énormément de craintes chez plusieurs
groupes quant à sa portée et quant aux conséquences sur la liberté
d'expression. Mais la ministre en a
glissé, d'ailleurs, souvent... en a glissé plusieurs mots et a entendu ce
message-là, et je salue le fait qu'elle ait entendu ce message-là. Mais
ce projet de loi est tellement large et flou que des agents de radicalisation
islamistes comme Adil Charkaoui, par
exemple, qui ont semé la haine dans le coeur de jeunes qui sont partis en Syrie
faire le djihad, qui pensaient
pouvoir s'en servir pour se protéger et leur permettre, à ces agents, de faire
avancer les préceptes intégristes au
Québec et de continuer à dénigrer nos valeurs fondamentales... alors je ne sais
pas si vous voyez l'ironie de la chose.
Lorsque nous
avons reçu plusieurs groupes, la majorité exprimaient plusieurs craintes, mais
certaines personnes qui nous
disaient : Il n'y a pas de problème, puis la ministre devrait aller encore
plus loin... bien, c'est un imam radical qui est venu nous dire qu'on devrait aller tellement plus loin, qu'on
devrait mettre dans ce projet de loi là qu'on n'a même pas le droit de rire des religions ni des dieux
des religions. Écoutez, quand on vient nous dire ça, quand on vient nous dire
au Parlement qu'on devrait censurer à ce point-là puis qu'on est bien d'accord
avec le projet de loi n° 59, moi, ça soulève des craintes. Ça me soulève des craintes sur la
perception, la perception que certains peuvent avoir de l'utilité d'interdire
discours haineux, discours incitant à la violence tous azimuts.
Le Barreau du Québec, également Me Julius
Grey et Me Julie Latour, qui sont des juristes spécialisés dans le domaine — vous les connaissez, c'est des
spécialistes — également
un groupe de défense des droits des communautés noires et juives, et même des musulmanes, des musulmanes sont venus nous
dire que l'absence de balises claires dans ce projet de loi soulève
d'importantes craintes. Il est trop large, trop flou, trop attentatoire.
Je vous
soumets que l'objectif de ce projet de loi ne devrait pas être de prévenir et
de lutter contre les discours haineux,
comme l'indique son titre, bien que leur proscription doive en faire partie,
mais ce projet de loi devrait plutôt viser
à prévenir et à lutter contre leur principale cause, soit les prêches et les
enseignements intégristes qui encouragent le dénigrement de nos valeurs et de nos libertés démocratiques. C'est à
la racine du mal qu'il faut s'attaquer, pas au mal une fois qu'il est
là.
Malheureusement,
le gouvernement libéral a été incapable de nommer les vraies affaires dans ce
dossier-là. Nulle part dans ce projet
de loi ne retrouve-t-on les mots qui sont au coeur du problème. Nous, ça nous
dérange, et puis ça dérange la population.
Pourtant, je reviens à ces spécialistes, Me Julius Grey, notamment, et
d'autres spécialistes sont venus nous dire
qu'il serait possible de cibler les prêches et les enseignements intégristes
qui visent à endoctriner et à fomenter la haine. Et je lui ai personnellement posé la question — pourquoi me priver d'une expertise, de celle
de Me Grey, pour le dire? — ce qu'on avançait en février lorsqu'on lui
disait : Nous devrions cibler le discours, Me Grey, vous êtes une
sommité, dites-nous, est-ce que c'est
faisable? Le gouvernement était monté aux barricades en disant qu'on était
complètement fous, là. Bien, il dit
oui. Il dit : Oui, des propos qui visent l'embrigadement — ça, c'est pour utiliser son terme — oui, on peut les circonscrire, oui,
on peut faire une limite à la liberté d'expression pour des propos qui visent
l'embrigadement. Croyez-moi pas, là, M. le
Président, c'est Me Julius Grey qui l'a dit. Donc, il faut être précis.
Quand on précise trop, on exclut, me répondra la ministre. Je lui répondrai : Quand on
précise trop peu, on inclut peut-être trop aussi, et c'est le cas ici
avec le projet de loi n° 59.
Certes, on en
a parlé, là, en long et en large. La Cour suprême a dressé des balises dans ses
jugements, le fameux arrêt Whatcott
de 2013 notamment. Or, il y a quand même des risques de subjectivité qui
demeurent, et la ministre ne peut pas
ouvrir une porte aussi large et donner une telle carte blanche à la Commission
des droits et libertés de la personne malgré
toute la compétence et l'intégrité des gens que nous avons mis en place dans
cette organisation névralgique pour la protection
des droits et libertés québécoises. Ces balises doivent être codifiées pour des
raisons de clarté et de pédagogie. C'est
important de dire qu'on est ici en droit civil. Ce n'est pas du common law, ce
n'est pas la jurisprudence, il faut être précis.
Or, si les
définitions ne sont pas resserrées, mieux encadrées, ce projet de loi ne
permettra pas d'atteindre l'objectif qu'il
poursuit implicitement. Je vous ramène au grand plan de lutte contre la
radicalisation des jeunes, donc ce projet de loi ne permettra pas d'atteindre l'objectif qu'il poursuit implicitement,
soit de mener la lutte à l'intégrisme religieux et de prévenir la radicalisation, car la menace n'y est
pas clairement identifiée, et on n'y retrouve aucun de ces concepts clés.
Le projet de loi ne précise pas la définition du
concept de discours haineux. Ce flou s'avère problématique et soulève des préoccupations chez bon nombre
d'intervenants dans la population et, notamment, chez des juristes réputés
quant aux risques — et là ce sont les risques inhérents à
ça — de
plaintes frivoles, de censure excessive et d'interprétation subjective de la part des 13 membres de la
Commission des droits de la personne qui risqueraient de porter atteinte à la
liberté d'expression. S'ils n'ont pas de définition claire, autant d'individus,
autant de définitions.
En assumant
que cette nouvelle infraction serait traitée par la Commission des droits de la
personne et le Tribunal des droits de
la personne en respectant les balises dessinées par la Cour suprême du Canada
au sujet des discours haineux, la
ministre de la Justice mine quand même l'acceptabilité de ce projet de loi
auprès de la population. Aller dire aux gens que ça sera les balises de l'arrêt Whatcott, les balises de la Cour
suprême, ça ne veut rien dire. Il faut être précis, il faut dire
précisément ce que sont les discours haineux.
Selon la jurisprudence, et là je la cite...
Parce que vous allez voir jusqu'à quel point, pour un néophyte ou un non-initié, c'est compliqué, selon la
jurisprudence — là, je
cite le texte — voici ce
que c'est qu'un discours haineux : «Les propos haineux constituent une façon de tenter de marginaliser des
personnes en raison de leur appartenance à un groupe. Au moyen de messages qui exposent à la haine le groupe visé, le
propos haineux cherche à dénigrer les membres du groupe aux yeux de la
majorité en attaquant leur statut social et en compromettant leur acceptation
au sein de la société.» Ils doivent être — ces propos — virulents,
et extrêmes, et sous-tendre une aversion profonde qui ne saurait exprimer une simple opinion, une moquerie ou des
propos véhiculés de bonne foi dans le cadre d'une discussion argumentée
en public, par exemple.»
Fiou! Ça, c'est la définition de ce que c'est.
Comment les gens vont-ils s'y retrouver? Comment les gens qui voudront porter
plainte pourront dire : Bien oui, bien oui, ça répond carrément aux
critères de la jurisprudence?
On change de
registre. Ça, c'est pour le manque de clarté de la définition et l'absence de
définition de «propos haineux». Au
niveau des sanctions, il y a des sanctions, dans ce projet de loi. C'est un
projet de loi qui, naturellement, a été...
Ça a été répété, là, maintes et maintes fois, mais, je vais vous le dire une
nouvelle fois, qui reprend essentiellement les dispositions du Code criminel. Parce que c'est prévu au Code
criminel de porter plainte à la police, et ensuite la police fait enquête, et là, s'il y a lieu, des accusations
sont portées, la couronne porte des accusations contre la personne qui aurait
tenu des propos haineux. Donc, ce projet de
loi reprend essentiellement les dispositions qui sont prévues au Code criminel,
et, selon nous, bien, faire ça et ne faire que
ça, on rate la cible. Ce n'est pas nécessairement d'un dédoublement qu'on a
besoin, même si toute l'application de la preuve est différente, j'en conviens,
et je n'embarquerai pas là-dessus pour endormir
les gens qui nous écoutent. On aurait aimé, on aurait apprécié que le
gouvernement soit plus créatif, et j'y reviens, mais cible le discours
précis, très précis.
Par ailleurs,
il y a des sanctions qui sont prévues au projet de loi, des sanctions qui,
selon nous, n'ont pas été assez loin,
dans la mesure où elles ne sont pas assez créatives, et je vous donne un
exemple. Nous avions proposé des avenues de sanction en février dernier,
mais on ne les a pas retrouvées dans ce projet de loi, et je m'explique.
• (15 h 30) •
Avec ce
projet de loi, les activités des corporations religieuses qui diffusent ou
facilitent la tenue de discours haineux continueront d'être indirectement subventionnées par les contribuables
du Québec par l'entremise de
généreuses exemptions fiscales. Les
corporations religieuses recevront toujours leurs exemptions fiscales. Moi, je ne comprends pas, ça me dépasse. On donnait
une piste de solution ici. Ça fait des mois qu'on demande au gouvernement de sanctionner les organisations
religieuses, et on martèle l'importance de
réitérer ces privilèges que reçoivent ces corporations religieuses si elles contreviennent, par exemple, au projet de loi
n° 59 ou à un autre projet de loi, mais si, justement, elles s'en prennent, par leurs discours, à l'endoctrinement des jeunes, parce que,
n'oubliez pas, là, la cible, là, c'est de contrer la radicalisation des
jeunes, là... Donc, ça fait des mois qu'on dit : Pourquoi ne pas aller là?
Depuis février qu'on le dit.
Vous savez, il y a même...
on avait eu des discussions, l'ancien député
de Fabre, il aurait déjà
plaidé en faveur d'une telle mesure
au sein du caucus libéral. Donc, ce n'est pas complètement fou, ce qu'on a dit, là. Il y a des choses là-dedans qui ont de l'allure, mais le manque
d'écoute à l'égard de ses collègues, enfin, ça a donné ce que ça a donné.
Malheureusement, le député de Fabre n'est
plus là avec nous. J'aurais aimé qu'il soit là pour participer au débat, il
n'est plus là.
La ministre
nous dit donc que son gouvernement, en ne sanctionnant pas les organisations
religieuses, bien, va continuer à
piger dans les poches des contribuables pour subventionner les activités de
propagande intégristes d'organismes dont
les enseignements véhiculent les mêmes idées haineuses visées par son projet de
loi. La réalité, c'est qu'on ne touche pas
aux organisations qui se veulent des organisations religieuses. Pourtant — je
vous ramène dans l'actualité — il y a quelques mois — et
ça, ma collègue de la première opposition l'a omis dans sa revue de presse — on
apprenait que deux
réseaux islamistes intégristes au Québec qui se réclament des Frères musulmans sont propriétaires d'écoles et de lieux de culte
au Québec et bénéficient d'au moins un demi-million de dollars par année en
exemptions.
Alors,
les exemptions, pour les gens qui nous écoutent, on parle d'exemptions de taxes
municipales et de taxes scolaires.
Donc, en ne touchant pas à ces organisations, la ministre leur dit : Bien,
écoutez, si vous contrevenez au projet de
loi n° 59, vous devrez payer une amende de 10 000 $ à
250 000 $ si on vous attrape, mais on va quand même continuer
à subventionner vos pratiques et vos prêches qui sont contraires à nos valeurs.
Il
y avait une opportunité, ici, M. le Président, de faire quelque chose, on ne
l'a pas fait. Par surcroît, cet argent, compte tenu du fait que ce sont
des amendes qu'on retrouve dans le projet de loi pour les organisations qui
auront contrevenu, l'argent de ces amendes,
elle ira où, M. le Président? Bien, elle va aller dans les coffres de l'État,
pas dans celui des municipalités, pas
dans les coffres des municipalités, les municipalités qui, elles, ne pourront
pas récupérer les précieux dollars qu'elles ont offerts en exemptions de
taxes municipales.
Vous
savez, on a fait des parallèles. Selon la Loi sur l'intégrité dans les contrats
publics, une entreprise qui commet une
infraction doit payer une amende, certes. Elle est ensuite mise sur une liste
noire et ne peut plus recevoir de contrats publics pendant cinq ans. Alors, moi, ce que je vous
soumets bien respectueusement, bien, pourquoi, pourquoi les organisations religieuses, les organismes religieux qui prônent
la charia, qui font l'apologie du terrorisme et le financement, dans certains cas,
du terrorisme, ne sont pas autant sanctionnés? Le Parlement aurait pu le faire,
le gouvernement aurait pu le faire.
Mais,
non, ce n'est pas le nom des contrevenants qui ont été jugés par le tribunal
qui devrait être mis sur une liste publique.
Parce que, dans le projet de loi n° 59, les contrevenants qui auront été
reconnus d'avoir eu des discours haineux ou incitant à la violence vont être mis sur une liste noire. On va avoir
le nom de ces gens-là, mais ce n'est pas le nom de ces gens-là qui devrait être mis sur une liste,
mais ce sont le nom et les noms des organismes qui devraient être sanctionnés
qu'on devrait mettre sur cette liste. Il
faut savoir quel organisme religieux ou qui se dit un organisme religieux a des
liens avec des organisations terroristes. Il faudrait le savoir, il
faudrait le dire, il faudrait l'écrire en quelque part.
Vous
savez, le gouvernement fédéral a été proactif à cet égard. Il y aurait
peut-être des exemples à prendre. Il y a des organisations de bienfaisance, des organisations religieuses qui ont
perdu les exemptions d'impôt auxquelles elles avaient droit en fonction de la fiscalité fédérale parce qu'elles
avaient des liens avec les Frères musulmans, entre autres. Ici, qu'est-ce qu'on fait au Québec à cet égard?
Rien. Ça aurait été une opportunité, je pense, de faire quelque chose, et je
pense que la population aurait apprécié.
Donc, nous vous disons que les personnes morales,
les corporations religieuses devraient être inscrites sur une liste.
C'est ce que nous croyons, c'est ce que nous avons suggéré.
Et
je vous rappellerai d'ailleurs... Et ça, c'est intéressant parce que
c'était d'ailleurs une question de Mme
la ministre lors de la tenue de ces
audiences. Mme la ministre a questionné M. le maire de Montréal.
Denis Coderre est venu faire un tour,
et, lors de son témoignage en commission parlementaire, le maire de Montréal, M. Coderre, a
non seulement invité le
gouvernement à mieux définir les termes utilisés dans son
texte de loi, ce que nous disons depuis tout à l'heure, vraiment
il y a des définitions qui doivent être apportées, mais aussi il a invité le gouvernement à doter les municipalités de véritables outils afin de lutter contre la radicalisation. Et là Mme la ministre l'a questionné sur nos propositions de février, et il a également
dit, suite au questionnement de la ministre, à savoir : Ça a-tu du bon
sens, ma collègue de la deuxième opposition suggère que... Bon, eh bien,
il a également dit que notre mesure proposée en février dernier concernant les
exemptions de taxe municipale en
valait la chandelle, que c'était un outil concret qui frappait là où ça fait
mal. On connaît le coloré maire de
Montréal, c'était clair, c'est une façon de mettre des bâtons dans les roues
aux agents de radicalisation. Alors, ça nous réconforte dans notre position de voir qu'il y a des choses qui
pourraient être faites mais qui malheureusement ne se retrouvent pas
dans le projet de loi. Et nous les avons dites bien avant que le gouvernement
le dépose.
Par
ailleurs, nous déplorons que le projet de loi n'offre aucun outil aux élus locaux
pour leur permettre de prendre des mesures adéquates lorsqu'ils sont
confrontés à des situations délicates comme le cas, on s'en souvient tous, de
l'imam Chaoui. Nous soutenions, de notre part, en février dernier, que les
municipalités doivent pouvoir refuser par résolution,
sous recommandation de la Commission des droits de la personne, la délivrance
d'un certificat d'occupation s'il y a des motifs raisonnables de croire
qu'un immeuble sera occupé pour mener des activités qui comportent la diffusion d'idées fondées sur la haine, toute
incitation ou assistance à des activités discriminatoires ou même terroristes.
Ça, donner des outils aux municipalités, ça pourrait les aider lorsqu'on voit
ce qui se passe sur le terrain.
Par ailleurs, avec tout le respect que j'ai pour ma collègue de l'opposition officielle, que je salue d'ailleurs, dont je salue la présence, nous ne croyons pas qu'il
faille scinder le projet de loi en deux. Pour nous, c'est un tout. La radicalisation, l'endoctrinement et ses conséquences,
ça va ensemble. Même s'il n'est pas suffisamment explicite quant
à l'objectif poursuivi, sa première comme sa deuxième partie, à ce projet de loi là, visent à mettre des mesures en oeuvre pour protéger les personnes contre les dérives et
des pratiques religieuses qui vont à l'encontre de nos droits et libertés,
et les deux parties de ce projet de loi partagent donc un esprit et un objectif communs. C'est un aparté, mais nous croyons
que c'est un tout qui devrait être pris ensemble.
Mais
ce qui nous préoccupe grandement, c'est qu'on est ici pour l'adoption
de principe d'un projet de loi, et ce qui nous préoccupe, c'est que le
28 août, dans les journaux, on pouvait lire que le premier ministre a
annoncé que le projet de loi n° 59
allait être amendé afin de limiter sa portée aux appels directs à la violence.
Ah! Si on limite la portée aux appels
directs à la violence... Et je vous rappelle que le projet de loi
s'intitule — c'est
quand même un titre édifiant — Loi édictant la Loi concernant la prévention
et la lutte contre les discours haineux et les discours incitant à la violence et apportant diverses modifications
législatives pour renforcer la protection des personnes. Donc, Loi concernant
la prévention et la lutte contre les
discours haineux et les discours incitant à la violence, quand nous lisons que
le premier ministre songe à limiter
sa portée aux appels directs à la violence, bien je me dis : Mais
qu'est-ce qui se passe avec les discours haineux? On n'en parle plus.
• (15 h 40) •
Les discours haineux que diffusent les
prédicateurs religieux et les agents de radicalisation, et ça, c'est important
de le dire, n'incitent pas forcément
directement à la violence, vous comprenez. Ces agents de radicalisation ou ces prédicateurs autoproclamés peuvent en dire, bien
des choses pour endoctriner les jeunes, avant que ce soit : Prends les
armes, va faire le djihad. Il y a une
gradation dans le propos avant d'arriver là. Mais, si on enlève les discours
haineux, qu'on ne garde que les
appels directs à la violence, bien on vient de vider pratiquement la loi d'un
de ses objectifs, parce que,
comprenez-moi bien, il faut parler contre les discours incitant à la haine et incitant à la violence, mais, nous, ce
que nous disons, c'est qu'il faut
viser spécifiquement les discours qui sont de cet ordre mais qui
endoctrinent, parce qu'on lutte contre la radicalisation des jeunes, ne
l'oublions pas, même si ce n'est écrit nulle part dans le projet de loi.
Nous
avions fait des propositions en février dernier, et d'ailleurs j'ai spécifié
à la ministre qu'avant de voter pour le projet
de loi il y aurait de nombreux
amendements à voir, que nous souhaitons. Et je vais vous faire la nomenclature
de quelques modifications que nous souhaitons, que nous avons souhaitées,
et c'est le même discours que nous maintenons depuis le début, là.
Ce
que nous aurions souhaité voir dans ce projet
de loi, c'est, naturellement, préciser la nature des propos interdits et la portée de cette interdiction, tel que nous l'avons proposé en
février dernier, en nous fondant sur la jurisprudence. Oui, ça prend des balises, il faut les prendre en quelque part, les balises, mais il faut l'écrire en quelque part. Nous vous
soumettons bien respectueusement une suggestion d'écriture pour
que les gens puissent au moins avoir une base, alors : «Nul ne peut tenir ou diffuser publiquement,
notamment par des enseignements ou des prêches, des propos haineux qui expriment une aversion profonde à l'égard d'un
principe énoncé dans la Charte des droits et libertés de la personne et qui
sont susceptibles d'inciter à la violence ou
à l'hostilité, de promouvoir ou d'encourager un traitement discriminatoire,
de porter atteinte à la dignité inhérente de
chacun ou d'exposer une personne ou un groupe de personnes au dénigrement,
au rejet, à la détestation ou la
marginalisation sur la base d'un des 13 motifs interdits de
discrimination.» C'est une suggestion,
je la soumets bien respectueusement. Parce que, vous savez, lorsqu'on parle de
discours haineux ou de discours incitant
à la violence, le prédicateur autoproclamé qui est en train de faire un lavage
de cerveau sur les jeunes, là, qui est en
train de les endoctriner lentement, pas vite, là... Puis on en a vu, hein? On
en a vu qui sont partis, puis on en a vu qui heureusement, Dieu soit loué, ont été arrêtés avant de prendre l'avion
parce qu'ils avaient un papa, un papa assez vite qui a appelé la police
pour dire : Il se passe quelque chose avec ma fille, puis elle est sur le
point de s'en aller. Donc, ces gens qui ont
un discours... et j'appelle ça un discours dangereux, un discours de
radicalisation, d'endoctrinement et d'embrigadement,
comme l'a appelé Me Julius Grey. C'est dangereux. Et, les gens qui ont ces
discours-là, et je reviens à ma
prémisse de départ, ce sont vraiment ces discours d'embrigadement qu'il faut
interdire, et ce n'est pas une liberté d'expression tous azimuts qu'il
fallait interdire mais bien spécifier le type de discours.
Donc,
les gens qui ont ce type de discours, il y a une gradation, il y a une
gradation, ce n'est pas du jour au lendemain,
mais, à l'heure actuelle, et avec le projet de loi que la ministre nous soumet,
ces espèces d'agents de radicalisation pourraient
continuer à dire aux jeunes hommes : Vous savez, la femme, là, c'est vous,
le patron, puis la femme n'a pas le
droit de sortir de sa maison sans un tuteur. Ces folies totalement
moyenâgeuses, là, on peut continuer à les enseigner sans problème avec ce qui est écrit actuellement
dans le projet de loi n° 59. Donc, si l'essence même du projet de loi n° 59
était d'éradiquer la radicalisation des jeunes, bien il ne faut jamais oublier
que le processus de radicalisation, c'est un processus
d'endoctrinement très subtil, graduel, pervers, insidieux mais qui arrive à
faire son chemin. Et ça ne commence pas avec : Tiens, prends les
armes, va te battre contre les méchants, ce n'est pas comme ça du tout que ça
se passe.
Autre
modification souhaitée : nous souhaitons que le gouvernement clarifie
l'objectif du projet de loi en spécifiant la menace qu'il vise à contrer, soit l'intégrisme religieux et la
radicalisation. Et je vous ramène — j'y vais de mémoire — en
décembre 2013, lorsque le premier ministre a été élu chef de son parti. Lors de
son discours, il avait spécifié qu'il
fallait lutter contre l'intégrisme religieux et la radicalisation. Ce sont ses
paroles. Il nous l'a répété lorsqu'il a été élu premier ministre. Moi, j'applaudissais. Parfait. Mais, quelques
mois plus tard, ce n'était plus lutter contre l'intégrisme religieux, parce que l'intégrisme religieux était
devenu un choix personnel, pas de problème avec ça, il faut lutter contre les
dérives religieuses. Le discours du premier ministre a changé, soit, c'est sa
prérogative. Alors, expliquez-moi pourquoi on en est rendu à vouloir lutter contre les dérives religieuses et qu'à
nulle part le mot, le mot choisi par le premier ministre n'apparaît dans
ce projet de loi. Donc, nous aurions apprécié que le projet de loi soit précis à
l'égard de l'objectif.
Autre modification
que nous souhaitons, nous souhaitons accorder au Tribunal des droits de la
personne les pouvoirs, un, de retirer aux corporations religieuses
contrevenantes le privilège de bénéficier d'exemptions fiscales diverses — je vous ai expliqué tout à l'heure — et nous souhaitons accorder au Tribunal des
droits de la personne le pouvoir de révoquer par résolution tout
certificat d'autorisation d'occupation à l'égard d'un immeuble.
Autre
demande, nous aimerions voir accordé au Tribunal des droits de la personne le
pouvoir de dissoudre une personne morale constituée en corporation
religieuse, naturellement, qui irait en contravention de la loi. Mais ça, ça n'existe pas, on n'en parle pas. Nous aimerions
également voir ajouté au projet de loi que l'on inscrive sur une liste publique
les corporations religieuses reconnues
coupables d'avoir facilité la diffusion de discours haineux dans leur lieu de
culte. Ça n'apparaît pas non plus en nulle part. Nous demandons aussi de
retirer la liste de personnes reconnues coupables d'avoir tenu un discours
haineux, parce que, là, ça va loin, là.
Naturellement,
c'est un survol, c'est un aperçu. Nous avons travaillé 38 heures en
commission parlementaire, et j'y
reviens parce que ces consultations sont extrêmement éclairantes. Et ce qui est
un peu dommage... C'est l'ancienne journaliste qui va parler, là. Ce qui est un peu dommage, c'est
lorsque l'on voit les reportages le soir. Bien, naturellement, les médias, les électroniques surtout, ont des
contraintes de temps. Les médias écrits ont plus de colonnes, mais les médias
électroniques doivent faire un reportage de
1 min 30 s. 1 min 30 s, là, ce n'est pas long,
et, en 1 min 30 s, on
doit expliquer les travaux qui se passent en commission, alors que nous
avons tous ici travaillé de bonne foi, travaillé fort, travaillé 38 heures. Alors, on comprend qu'on est loin
d'avoir tout vu, d'avoir tout entendu dans un reportage qui se veut un résumé
très, très, très succinct. Et c'est la contrainte des médias électroniques.
Cependant, l'ancienne
journaliste que je suis... parce que je suis là puis j'entends, j'écoute, je pose des questions
pendant 38 heures à des gens, la grande majorité de tous les gens qui se sont
présentés devant nous disent : Attention, attention, attention! Ça va trop loin. Ça va trop loin, c'est une
bien trop grande atteinte à la liberté d'expression que le gouvernement est en train de faire. Ce n'est pas assez précis. On aurait pu être beaucoup
plus précis. On aurait pu limiter aux
discours qui mènent à l'embrigadement, ce qui n'est pas fait. Moi, j'ai écouté,
moi, j'ai entendu et je suis ici dans un
dessein constructif, là. On a fait des suggestions en février dernier. Je crois
que la population attend du gouvernement des actions. On attend qu'il se passe quelque chose.
Et
d'ailleurs, ce matin, j'y reviens parce que...
C'est peut-être anecdotique, mais c'est quand même
révélateur de ce que la population
pense, parce que ce matin, lors de la période des questions, j'ai questionné le gouvernement, vous savez,
sur ces envois qui nous sont arrivés de l'Arabie saoudite. Nous étions en
semaine de circonscription, hein, nous étions tous en circonscription quand la nouvelle est sortie dans les médias. Il y a,
la ministre nous a dit, sept bibliothèques... Je peux vous nommer les villes où les
bibliothèques ont reçu des volumes, un beau petit paquet, un petit
paquet-cadeau qui nous arrive de l'Arabie saoudite, la Ligue islamique
qui nous envoie de l'information et de la documentation.
Et j'aurais aimé
avoir plus de réponses ce matin. J'aurais aimé savoir : Ces envois ont-ils
été sollicités? De toute apparence, non,
c'est ce que nous disent les bibliothécaires. Quel est le contenu de ces
envois? À la lecture de ce qu'on a pu
faire, ce sont des livres en anglais. On peut constater que le contenu, ce
n'est pas anodin, ce n'est pas innocent, c'est vraiment l'apologie, l'apologie de l'islamisme radical. Et je
pense que c'est important que la population sache que l'Arabie saoudite a un agenda, que le groupe qui a
envoyé ces livres a également un agenda, qui est un agenda politicoreligieux,
qui est celui d'instaurer la charia dans le
plus d'endroits possible sur la planète. Bien, on en est rendus là, au Québec.
On reçoit des petits paquets-cadeaux de l'Arabie saoudite avec un
contenu plus que douteux.
• (15 h 50) •
Et
j'aurais aimé... et j'ai demandé au gouvernement : Y a-t-il quelqu'un, de
grâce, au gouvernement qui va dénoncer l'islamisme
radical? Parce que c'est de ça qu'il s'agit. Il est là, le problème, et
personne n'ose le dire, personne n'ose le mentionner. Tout le monde se met la
tête dans le sable. Et de le dire...
Et, vous savez, M. le Président, si vous saviez, durant cette commission parlementaire,
ce qui m'a le plus touchée lorsqu'on a vu ces 38 groupes... Bien, il y
avait quand même... des groupes, mais il y avait plus que 38... plus qu'une personne, donc, on a vu plusieurs dizaines de
personnes. Il y avait aussi des citoyens, des musulmans du Maghreb, qui sont venus ici pour avoir la paix, hein? Ils sont
venus ici parce qu'ils ont fui, ils ont fui les exactions dans les années 90 en
Algérie. Il y a 200 000 Algériens qui
ont été massacrés par des islamistes qui voulaient justement imposer leur
agenda. Et ces gens-là ont trouvé
refuge au Québec, et on les accueille à bras ouverts. Ils sont extraordinaires.
Ils sont venus ici pour avoir la
paix, pour vivre en paix. Mais vous savez ce qu'ils m'ont dit durant cette
commission parlementaire? Et là j'en ai des frissons. Ils m'ont dit : Madame, on a peur. Il n'y a plus
personne qui nous protège. Plus personne ne veut dénoncer les islamistes
radicaux.
Et,
durant cette commission parlementaire, on a même eu l'ultime plaisir de
recevoir M. Adil Charkaoui, qui est venu nous dire que ce que Mme Fatima
Houda-Pepin a dit : Pas vrai, ça! Mme Pepin nous a bien spécifié que
l'islamisme radical existe au Québec,
tout comme ces musulmans qui sont venus ici trouver asile, trouver la paix pour
vivre avec nous. Et ce monsieur qui
vient nous dire que ce que Mme Fatima Houda-Pepin a dit est faux. Ça n'existe
pas, les mariages forcés. Voyons
donc! Je suis partie à rire. Ça n'existe pas, l'islam radical au Québec. Voyons
donc! Qu'est-ce que vous dites là? Vous êtes islamophobe.
Écoutez,
M. le Président, si poser des questions, si oser dire qu'il y a un problème
avec les islamistes radicaux... Puis
même, d'ailleurs, certains me disent que c'est un pléonasme parce
qu'«islamiste», c'est déjà radical, mais on va les appeler islamistes radicaux pour bien faire la
différence, là, avec quelqu'un qui pratique sa religion de façon tout à fait
paisible, là, et il y a des mondes entre les
deux, c'est très important de le dire. Mais que cet individu vienne nous dire
que tout ça est faux, que ça n'existe pas...
Moi,
je me pose des questions en tant que parlementaire. Pourquoi personne n'ose
dénoncer l'islamisme radical au
Québec? Alors, ce matin, ma question, elle portait là-dessus : Est-ce
qu'il y a quelqu'un qui va le dénoncer? Parce que, là, ce que je vois, ce que j'en conviens, ce que j'en
conclus, à la lecture du p.l. n° 59, c'est qu'on tourne autour du pot, on
essaie de sauver la chèvre et le chou, on essaie de trouver une solution, mais,
à quelque part, le vrai problème, on ne le mentionne même pas. Les mots n'apparaissent pas dans la loi, alors que
le premier ministre lui-même nous a dit, nous a répété qu'il fallait s'attaquer aux extrémistes religieux, à la
radicalisation. Les mots ne sont pas là. Alors, je pense que la démonstration est faite, là. Et je reviens à ces
gens qui sont venus nous dire : Nous avons peur, on ne se sent plus
protégés, et il faut dénoncer.
Alors,
moi, je lève ma voix, je lève mon petit drapeau, puis je dénonce. Il faut le
faire, il faut le faire pour nos concitoyens,
ces gens qui sont venus vivre avec nous en paix. Puis il faut le faire aussi
pour tous les Québécois qui le voient aussi, qu'il se passe quelque
chose. Les citoyens, là, allez vous promener dans vos comtés, là, puis allez
leur dire que l'islamisme radical, ce n'est
pas un problème puis que ça n'existe pas. Allez leur dire ça, voir. Puis allez
leur dire qu'avec le p.l. n° 59
il n'y aura plus de problème, puis la radicalisation des jeunes est enrayée et...
plus de problème. Moi, j'ai de la difficulté à croire ça, surtout que je
considère et que nous considérons que le projet de loi rate sa cible. Nous
l'avons dit, et je le répète, malheureusement.
Et
les travaux que nous avons faits... Comme je vous dis, les témoignages que nous
avons entendus, moi, je les trouve
très marquants. Et puis, surtout, je voudrais saluer — tiens, je vais en profiter pour le
faire — saluer
le courage, entre autres, de la
communauté maghrébine, de ces gens d'Afrique du Sud qui sont venus me voir puis
me parler après la commission.
Et j'irai
plus loin que ça, je vais vous faire une confidence. Après que nous ayons
rencontré certains personnages qui nous disaient qu'il fallait aller beaucoup
plus loin puis, même, il ne fallait pas rire des religions ni de la mère du Prophète, là, c'est épouvantable, on n'avait pas le droit,
il aurait fallu mettre ça dans le projet de loi, là : Non, non, non,
on n'a pas le droit de rire de ça, vous
devriez voir les courriels que j'ai reçus à mon bureau, chez moi, les lettres
sur Facebook. Des gens de
partout, des gens de la Tunisie, la Tunisie, M. le Président, m'ont écrit pour
dire : Oui, il faut dénoncer. Oui, il faut dénoncer les islamistes radicaux. Oui, ils ont un agenda
politique, politicoreligieux, oui. Et je les ai écoutés, je les ai lus,
j'ai répondu à chacun d'entre eux. Ça a été long, j'en avais, j'en avais, j'en
avais des centaines.
Mais, je me dis, qu'une petite députée
de Montarville se lève pour dénoncer quelque chose et qu'elle reçoive des centaines
de commentaires et de courriels, il y a quelque chose qui se passe, et j'apprécierais que le gouvernement ait cette sensibilité, et voie qu'il y a quelque chose qui se passe, et qu'il puisse apporter des modifications au projet de loi n° 59
pour s'attaquer, s'attaquer vraiment à la
radicalisation des jeunes, aux discours d'endoctrinement, à l'endoctrinement,
à l'embrigadement.
Et
je n'ai aucune prétention, aucune prétention à l'égard de la rédaction du
projet de loi, je laisse ça aux éminents juristes du ministère, de l'équipe de la ministre, mais je lui soumets
respectueusement qu'il faudrait être beaucoup plus précis à l'égard des discours que nous voulons
contrer parce qu'actuellement, et plusieurs sont venus nous le dire, et c'est
une des craintes, c'est que c'est tellement
large, je veux dire, qu'on ne peut pas... qu'on va lutter contre les discours
haineux incitant à la violence, c'est
tellement large qu'on en est rendus... que certains en sont rendus à croire que
ça permettrait à certains groupes
qui, eux, ont des intentions et un agenda caché de nous interdire de parler
contre leur religion. Alors là,
voyez-vous dans quel dilemme on est rendus? Et puis nous vivons justement dans
une société de droit avec des libertés, avec la liberté d'expression, et moi, au Québec, il n'y a personne qui
va m'empêcher de rire de quelque religion que ce soit et il n'y a personne qui va m'empêcher de dire, de
critiquer ou de poser une opinion. Ce n'est pas de la violence, puis ce n'est pas de la haine, puis ce n'est pas de
l'islamophobie, d'ailleurs. D'ailleurs, au demeurant, c'est très important que
ce soit dit. Et j'aimerais, j'apprécierais
qu'il y ait des modifications d'apportées à ce projet de loi parce que, pour le
moment, on passe à côté, on passe à côté d'une opportunité. Il y a une
écoute, les citoyens sont là. Et je repose la question aux députés de la partie gouvernementale. Vous ne me
ferez pas croire que vos citoyens ne vous ont pas interpellés à cet égard,
ne voient pas qu'il se passe quelque chose et qu'il faille faire quelque chose
de précis, de précis.
Alors,
sans les modifications que nous demandons, bien la Coalition avenir Québec ne
pourra pas appuyer ce projet de loi.
Nous aurions apprécié aussi que la ministre nous fasse part de ses intentions
d'amendement avant, avant d'appeler l'adoption
du principe de ce projet de loi, parce que, je vous le disais d'entrée de jeu,
on est ici pour l'adoption de principe, mais le premier ministre nous a avertis à la fin du mois d'août que la
loi qu'on a entre les mains, ce ne sera plus la même tantôt. Alors, comment se prononcer sur une
adoption de principe d'un projet de loi qui ne sera plus le même tout à l'heure
sans que nous ayons des amendements,
sans que nous sachions précisément où va-t-on aller? Et le premier ministre,
disant qu'il voulait exclure les
discours haineux, bien là il ne reste plus rien, alors on passe de tout à rien.
Je pense qu'il y aurait beaucoup de nuances à apporter.
La
façon de faire du gouvernement dans ce dossier, à notre avis, a miné
l'acceptabilité de son projet de loi, cette acceptabilité qui a été dénoncée par un grand nombre de personnes, des
gens qui considèrent le projet de loi... Et c'est des termes très sévères qui ont été employés, je vais
les dire une seule fois. Les gens qui sont venus nous voir et qui ont dit que
ce projet de loi était inacceptable, ils ont
dit que c'était un canon législatif, un projet liberticide qui menace au lieu
de protéger nos valeurs. Et puis ce
n'est pas moi qui le dis, ce sont ces citoyens que nous avons rencontrés et de
tous azimuts, ce qui était
intéressant dans le choix des intervenants, vraiment de tous azimuts, mais la
grande majorité s'entendaient pour ne pas,
pour ne pas accepter le projet de loi tel quel. D'ailleurs, aucun, aucun des
38 groupes n'a dit : Ce projet de loi là, parfait, Mme la
ministre, vous êtes en plein dans le mille, c'est ça qu'il nous faut. Au
contraire, au contraire.
Et
là je vous fais grâce — et ma collègue de la première opposition l'a bien fait — de tout ce qui touche les écoles.
Oui, il faut agir dans les écoles, mais là c'était large, et très, très, très
large. Et on parle de mineurs.
Une voix :
...
Mme Roy
(Montarville) :
Quoi?
Une voix :
...
Mme Roy
(Montarville) :
Oh! désolée.
Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, comme ça a l'air à bien s'arranger
ensemble, la présidence n'interviendra pas.
Alors, merci. Veuillez poursuivre. Ça va bien. Il vous reste un gros six
minutes, si vous voulez l'utiliser, alors on vous laisse la parole.
• (16 heures) •
Mme
Roy
(Montarville) : Il n'y a pas de mauvaise intention
derrière. Et j'y reviens, et c'était le propos d'entrée de jeu, et nous le disons depuis le mois de
février, nous avons fait nos recommandations... en fait, nos suggestions, ce
n'est pas des... On n'a pas la
prétention de dire au gouvernement quoi faire, mais nous suggérions en février
des pistes de solution via une conférence de presse à laquelle on s'est
fait traiter de tous les mots. Et, je le disais d'entrée de jeu, même en période de questions, on m'a traitée de... j'étais
Satan, là, je m'attaquais à la liberté d'expression tous azimuts comme ça ne
se peut pas. Mais, à la lumière des travaux
que nous avons faits, on a pu constater que ce n'est pas vrai, je ne
m'attaquais pas à la liberté
d'expression tous azimuts. Et vous savez très bien, M. le Président, que, la
liberté d'expression, il est possible, en vertu de nos chartes, d'y
apporter certaines limites, il est possible... elle n'est pas absolue.
Et c'est la
raison pour laquelle nous suggérions très précisément dans quelles
circonstances il fallait limiter la liberté d'expression si on voulait
limiter, ou éradiquer, ou tenter d'éradiquer la radicalisation via justement
l'endoctrinement des
jeunes. Mais force est de constater qu'à la lecture du projet de loi n° 59
ce que le gouvernement fait est extrêmement large et va, je le disais d'entrée de jeu, 1 000 fois plus loin que
ce que nous suggérions à l'égard de la liberté d'expression. Et ça,
malheureusement, il n'y a personne qui est là pour le rapporter ou pour faire
le parallèle, là, mais ce serait bien intéressant
que quelqu'un le dise, mais, du moins, je le dis pour les gens qui nous
écoutent. Nous voulions faire une petite limitation à la liberté d'expression, précise, ciblée. Nous avions
d'ailleurs utilisé les termes de l'arrêt Whatcott, puisqu'en droit,
lorsqu'on veut faire une limitation, il faut utiliser les termes que les juges
utilisent pour faire évoluer le droit, surtout
que c'étaient de nouveaux termes qui étaient utilisés dans cet arrêt de 2013.
Donc, dans l'optique de faire avancer le
droit, nous utilisions les termes qui étaient employés par les juges dans cet
arrêt. Un arrêt, ça veut dire un jugement. Et c'est la raison pour laquelle nous l'avions fait de la sorte. Nous
avons eu droit aux foudres des médias, et aux foudres du gouvernement, et aux
foudres de l'opposition officielle, et aux foudres du groupe indépendant.
Cependant, on se rend compte qu'à la
lumière de ce qu'on a dans le projet de loi n° 59 c'est le gouvernement
qui porte extrêmement atteinte à la liberté d'expression avec son projet de
loi, qui est beaucoup trop large, qui, je le répète... tout est là, accessible,
n'ose pas s'en prendre aux vrais problèmes,
n'ose pas contrer les discours des intégristes religieux, des dérives
religieuses, de la radicalisation, rien, pas un mot, zip, «niet». Ce
n'est pas ça qu'on fait.
Alors, écoutez,
M. le Président, pour ces raisons, ma formation
politique et moi-même ne pouvons pas être en faveur avec cette adoption de principe pour ce projet de loi. Nous espérons tout de même... Nous aurions aimé voir des amendements,
nous aimerions aller voir où s'en va la ministre, compte tenu du fait que le premier
ministre lui a donné un devoir, si je peux dire, ou lui a dit : Il faut
faire quelque chose, il
faut changer le projet de loi. Mais on ne sait pas vers où
on s'en va. Alors, comment se prononcer sur un principe de projet de loi lorsque le premier ministre nous dit : Le projet de loi, là, ça ne sera plus ça? Bien, sur quoi on se
prononce?
Donc, vous comprenez que, sur
1 min 50 s qu'il me reste, j'aimerais...
Une voix : ...
Mme Roy
(Montarville) :
Non, ce n'est pas une question de toffer, mais c'est vraiment... J'aimerais
rendre hommage aux gens qui sont venus en commission parlementaire puis qui nous ont éclairés, parce que
ça sert à ça, des commissions parlementaires, et qu'ils ont tous été
pertinents à leur façon, à leur façon. Certains nous ont montré les manquements, certains nous ont montré les risques,
certains nous ont montré les conséquences, certains nous ont montré l'interprétation qu'ils feraient du projet de loi n° 59 s'il devenait loi, ce
qu'il n'est pas pour le moment. Et, moi, ce qui m'inquiète et ce qui me fait peur, c'est quand la personne la plus
radicale qui était devant nous nous dit : C'est excellent! Puis
rajoutez-en une couche. Empêchez... il faut empêcher de rire des religions.
Écoutez, bien
sûr, il n'y a personne qui accepterait ça dans une société libre et
démocratique comme la nôtre. C'est la
base de notre démocratie de justement avoir cette liberté d'expression, pouvoir
rire, pouvoir se moquer, pouvoir questionner, pouvoir mettre en doute.
C'est ça qui fait avancer les choses. Mais, quand quelqu'un vient nous dire en
commission parlementaire qu'on n'a pas le droit de faire ça puis qu'on ne
devrait pas avoir le droit de faire ça, vous comprenez
que j'ai été renversée. Et ça nous montre un peu l'absurdité du projet de loi,
dans la mesure où, si certaines personnes
ont compris ça, qu'est-ce qu'on va faire avec ce projet de loi là? Comment
vont-ils s'en servir? Parce que ce projet de loi permettrait, de la
façon dont il est rédigé, à toute personne de porter plainte, et même dans
l'anonymat. Écoutez, cette personne-là pourrait porter plainte rapidement.
Je vois le
temps qui file. Déjà. M. le
Président, je vous remercie de votre attention, et nous espérons de grandes, grandes,
grandes modifications, mais on n'en voit pas le début du commencement. Merci.
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
Alors, Mme la députée de Montarville, je
vous remercie de votre intervention.
Je rappelle que nous en sommes toujours
sur l'adoption du principe
du projet de loi n° 59.
Et, pour la poursuite du débat, je reconnais maintenant M. le député de Rosemont,
qui sollicite la parole. M. le député de Rosemont, à vous.
M. Jean-François Lisée
M. Lisée : M. le
Président, on est ici pour discuter
d'un projet de loi qui nous amène dans un genre de parcours
de l'absurde.
Au début de
l'année, des extrémistes radicaux islamistes sont entrés dans un journal
satyrique français, dans les locaux, et ont tiré, et ont fait
plusieurs morts et plusieurs blessés. Pourquoi? Parce que ce journal, Charlie
Hebdo, blasphémait, montrait des caricatures de Mahomet, comme il blasphémait
contre les Juifs, il blasphémait contre les catholiques,
il blasphémait contre les athées, il blasphémait contre tout le monde. C'est un journal satyrique extrême, et beaucoup de gens, dont moi,
n'aimaient pas particulièrement ce genre d'humour, mais la communauté internationale a dit : Non, on ne peut
pas tuer des gens qui font des dessins puis on doit affirmer le droit au
blasphème, même si on trouve que ce
n'est pas une bonne chose de blasphémer. On ne fait pas la promotion du
blasphème, on fait la promotion du respect mutuel, puis ce n'est pas une bonne idée, mais ça fait partie de la
liberté d'expression. Quand on protège la liberté d'expression, on ne la protège pas quand les gens
se font des gentillesses, pas besoin, on la protège quand les gens sont méchants et ont des propos méchants. C'est le seul
propos qu'il faut défendre, parce que sinon il
n'y a pas de difficulté.
Et là on est
parti de là puis on est parti d'attentats terroristes qui ont eu lieu à Saint-Jean-sur-Richelieu
et à Ottawa et là on nous arrive avec un projet de loi qui,
s'il était appliqué, interdirait la publication, au Québec, d'un Charlie
Hebdo parce qu'on pourrait très
bien dire que ce sont des propos haineux, que ce sont des propos méprisants,
que ce sont des propos qui distillent la détestation. On pourrait
affirmer ça sans problème. Sans problème, on pourrait l'affirmer. Et, s'il y avait un Charlie
Hebdo québécois, le nombre de dénonciateurs anonymes qui utiliseraient la
ligne d'appel que la ministre nous propose, bien, seraient très
nombreux. Alors, on se dit : Mais comment on est arrivé à un renversement complet et au fait qu'un imam est venu dire à la
ministre en commission parlementaire : Vous savez, le projet de loi, il
devrait être encore plus précis pour faire en
sorte qu'on arrête d'insulter Mahomet, la femme de Mahomet et ma religion, et
ça, c'est ça qui devrait se faire. Et là on se dit : Mais là c'est sûr que
ce n'est pas ce que la ministre a voulu faire. Et je la vois me dire : Non, non, non. Mais je n'ai pas
de doute que ce n'est pas ça qu'elle a voulu faire, mais comment se fait-il
qu'on parle de ça maintenant? Comment se fait-il que des juristes de renom,
Julius Grey et Julie Latour... et c'est intéressant parce qu'ils étaient tous
les deux opposés sur un autre débat identitaire que nous avons eu sur la
charte. Julius Grey était contre la charte,
Julie Latour était pour la charte, mais là ils sont venus ensemble pour
dire : Bien là, on est unis
contre le projet de loi du Parti libéral. C'est quand même extraordinaire, ils
ont réussi à unir les procharte et les anticharte
contre leur projet de loi, et ceux qui en disent du bien, ce sont des
islamistes plus ou moins radicaux. Alors, je pense qu'ils devraient voir
un problème là, ils devraient voir un problème.
Alors, quel est le problème auquel ce projet de
loi, ou un projet de loi, ou une action gouvernementale devrait s'adresser? Bien, j'ai écrit une lettre ouverte au
premier ministre en février dernier, après qu'il ne se soit pas rendu à la grande manifestation contre Charlie Hebdo.
Il était absent. Le gouvernement libéral était absent. Il n'y avait pas de
ministre qui était présent alors qu'il y avait un ministre canadien qui
était présent et que des membres de toute la communauté internationale y
étaient, et ils nous ont dit : Ah! bien, finalement, on n'avait pas été
invités.
• (16 h 10) •
Bien, c'est
justement l'expression de l'amitié, M. le Président. On n'a pas besoin d'être invité quand une nation soeur est en
deuil, on dit : Je viens, j'arrête tout et je viens parce que c'est grave,
ce qui se passe.
Mais là on a
un peu plus compris pourquoi le premier
ministre n'y était pas allé, lorsque,
dans une visite subséquente, il est
allé au Royaume-Uni et en Belgique et là il a dit que la radicalisation n'avait
aucun lien avec la neutralité ou la laïcité
de l'État. Il a dit ça à côté d'un ministre
belge qui venait de lui dire qu'il faudrait collaborer davantage sur l'éducation à la laïcité comme moyen de prévention contre la
radicalisation. Et le premier
ministre du Québec a dit : Ça
n'a rien à voir. Alors, le ministre belge était un peu interloqué, parce
que les islamistes radicaux, eux, ils veulent un État non laïque. Ils veulent un califat religieux où c'est le Coran et la
charia qui décident. Alors, eux, ils ont bien compris que c'était le contraire
de la laïcité et que donc d'enseigner
dans nos écoles que la religion doit être respectée et que, lorsqu'il y a un
conflit entre la norme sociale et la norme religieuse, c'est la norme sociale
qui doit primer... si tout le monde comprenait
ça, bien les dérives de dire «non, moi, je veux un État religieux» seraient
prévenues, jusqu'à un certain point. Alors, quel est le problème? Est-ce
que c'est les discours haineux en soi?
Alors, dans
ma lettre au premier ministre, je disais : Cher premier ministre, la
principale menace qui pèse sur la vie
de nos citoyens dans les années qui viennent ne provient pas d'athées, de Juifs
ou de Témoins de Jéhovah radicalisés, elle
provient de l'islamisme radical. Alors, le problème qu'il y a devant nous,
c'est qu'il y a une organisation internationale qui a des relais locaux qui essaie de convaincre des jeunes de passer de
l'aliénation, du désengagement petit à petit vers l'islamisme radical et
vers la violence, le djihad, là-bas ou ici. C'est précisément le problème.
En quoi
est-ce que le projet de loi de la ministre satisfait les conditions de
résolution et de prévention de ce problème? Bien, aucunement, aucunement. Ce qu'il faudrait faire, et c'est
intéressant... Un des très bons mémoires qui a été présenté, c'est celui de la ville de Montréal. Alors, la
ville de Montréal, eux, ils ont créé un centre de prévention de la
radicalisation menant à la violence.
Ils ont compris que c'est ça, le problème. Et ils ont fait un très beau
tableau, très intéressant, une pyramide qui montre qu'au début la
personne visée par les recruteurs islamistes, bien, a un questionnement sur son
vivre-ensemble, ensuite elle commence à former son discours anti-valeurs
occidentales, ensuite elle consolide son discours,
ensuite il y a des incidents haineux, ensuite elle envisage la violence comme
moyen légitime et, à la fin, elle commet
des crimes haineux, elle peut faire le djihad ici ou là-bas. Alors, c'est un
continuum. Alors, si on veut lutter contre la menace, bien il faut voir ça comme un continuum. Alors, ce n'est pas le
discours haineux en soi. Et d'ailleurs on le sait maintenant, parce
qu'on a suffisamment de témoignages de recruteurs, qu'ils ne commencent jamais
par le discours haineux, ils commencent
toujours plus graduellement en isolant la personne de sa communauté, en
disant : On est tes amis, on va
t'aider, on va t'appuyer, on va t'envoyer de la littérature, tu peux venir chez
nous, créer un réseau d'amis et petit à petit l'amener à se couper de
son milieu et à vouloir poser des gestes.
Alors donc,
si on avait un projet de loi ou un plan d'action, on dirait : Bon, bien,
nous sommes à la recherche de personnes
qui vont s'inscrire dans un continuum pour pousser des gens à la violence, à la
violence religieuse ou autre. Je
comprends très bien que dans une législation on ne veuille pas pointer
spécifiquement un processus, celui-là, l'islamisme radical, et, s'il y en avait d'autres, il faudrait
qu'on puisse avoir un outil contre ceux-là aussi, mais là, en ciblant sur les
discours haineux alors même qu'il y a un
débat, au Canada et ailleurs, sur la portée du discours haineux,
c'est-à-dire... Et Charlie Hebdo est un exemple. On peut dire que, selon la législation
canadienne actuelle, selon même le jugement Whatcott de 2013, Charlie Hebdo
pourrait être considéré comme haineux au Canada, alors que ce n'est pas de ça
dont on veut parler. Et c'est pour ça
que Me Latour et Me Grey ont dit : On n'en revient pas que vous
légifériez là-dessus en en élargissant la
portée, en faisant des listes de coupables qui seraient publiques, avec des
dénonciations anonymes, alors qu'on se pose la question même de cette
définition de discours haineux, un discours qui mène à la violence, un appel à
la violence. Là-dessus, on est tous sur le dur. Il n'y a
pas de problème. Dès qu'on passe de «je déteste telle religion» à
attaquer tel temple, bien là on est certain qu'attaquer tel temple, ça
doit être absolument... on appelle la police immédiatement.
Et donc le
gouvernement s'est engagé dans un débat qui est déjà décalé et qui n'est pas
apte à répondre à la question posée,
et donc c'est pourquoi ma collègue leader adjointe de l'opposition officielle a
demandé de scinder le projet de loi. Comme
plusieurs groupes, on se dit : Bien, toute cette question, là, de discours
haineux, là, scindez-la, oubliez-la... en fait, retirez-la, retirez-la, ce n'est pas la bonne voie. L'autre
partie, qui protège les enfants qui seraient entraînés dans des mariages forcés ou qui
fait en sorte que la DPJ a plus d'outils pour protéger des enfants qui seraient
dans des sectes, ah! ça, c'est bien, quoiqu'il y a des libellés qui sont
un peu forts. On dit qu'il faut protéger la sécurité morale des étudiants. Encore là, on comprend, la sécurité morale...
c'est juste mal écrit. Je ne comprends pas que les légistes aient laissé passer
ça, parce que, comme le disent M. Grey et
Mme Latour, dans les années 50, on aurait dit qu'un propos communiste est
une atteinte à la sécurité morale de nos
étudiants. Dans les années 60, on aurait dit que des propos favorables à l'homosexualité ou au séparatisme auraient été une
atteinte à la sécurité morale des élèves. Alors, qu'est-ce que c'est, ça,
la sécurité morale? Qui décide de la
sécurité morale, vous savez? Alors, évidemment, c'est une façon de rédiger les
choses qui est complètement gauche. Ça n'aurait jamais dû arriver, à
l'étape d'un projet de loi, d'avoir mis ça là-dedans. Et d'ailleurs le mémoire qui a été déposé par la
Fédération des cégeps a dit que c'est un peu fort de café et que... qui va
venir, dans les écoles, dans les
cégeps, dire : Voilà, votre sécurité morale est en cause? Et même, vous
savez, cette question de la sécurité
morale, c'est aussi, bon, le propos révolutionnaire. Est-ce que le propos
révolutionnaire, s'il n'est pas un appel immédiat à la violence, doit être considéré comme illégal? Bien, dans ce
cas-là, on aurait mis George Washington en prison, puis Nelson Mandela,
et puis certainement Martin Luther King, et plusieurs autres, Thomas Jefferson.
Donc, voilà
le genre de champ de mines vers lequel s'est jeté le gouvernement libéral,
alors que ce n'était pas la direction
qui était nécessaire du tout pour essayer de lutter contre le problème que nous
avons, qui est celui de la radicalisation vers la violence religieuse.
Donc, c'est quand même
extraordinaire que, lorsqu'ils étaient au gouvernement, avant, ils
avaient échoué dans toutes leurs
tentatives de proposer et de faire voter un projet de loi sur des questions
sur les accommodements raisonnables
ou autrement. Cette fois-ci, ils avaient une
chance de se reprendre. Et puis ils savaient, là, ce n'était pas comme s'ils
n'étaient pas avertis, là. Ça fait
des années qu'on discute de ça, ça fait des années qu'on dit que le gouvernement libéral n'agit pas. Donc, ils avaient
le temps de bien se préparer et ils nous sont arrivés avec un projet de loi qui, de toute évidence, ne tient pas la route, pose plus de problèmes
qu'il n'en règle, pose les mauvaises questions. Et, la meilleure solution, il y
a un moment où le premier ministre a semblé indiquer qu'il avait, lui, entendu raison et qu'il y aurait
une refonte majeure du projet. Mais
non, il est revenu sur cette opinion, et là on nous annonce quelques précisions
qui ne vont rien régler et qui, au contraire, vont ajouter à la
complexité.
Parce que, si — on
revient sur le plancher des vaches — moi — je
suis un parent — j'observe
qu'un enfant ou un ami de mon fils
est en train d'être embrigadé là-dedans,
alors, moi, je dis : Il y a
juste une chose à faire, là, c'est d'appeler la police de Montréal. C'est
ça qu'il faut faire :
Appelle la police de... si tu es à Montréal. Si tu n'es pas à Montréal, appelle la
police locale...
Une voix : ...
• (16 h 20) •
M. Lisée : ...ou appelle le 9-1-1, me souffle-t-on, de la
deuxième opposition. Oui, parce
que, là, ils vont l'envoyer directement au Centre de prévention de la radicalisation, puis là il y a quelqu'un
qui connaît ça qui va voir à quel niveau il est rendu. Est-ce qu'il est à
la veille de prendre son billet d'avion pour la Syrie ou est-ce qu'il est
encore seulement en train d'être
isolé de son groupe par les recruteurs? Mais là on va lui dire : Ah! non,
non, il y a un processus de plainte, là, à la commission de la personne,
puis c'est peut-être des propos haineux, puis est-ce que vous avez entendu ces
propos haineux là dans une conversation
privée, une conversation publique? Est-ce que c'est une conversation privée qui
pourrait être rendue publique? Puis
là vous allez aller là, puis là ils vont vous mettre en attente. En ce moment,
ça prend un an avant d'entendre une plainte, puis là, à un an, là, le
jeune, il va être rendu en Syrie, tu sais.
Alors, on
crée une confusion dans l'action qu'il faut prendre. Il faut dire : Non,
non, madame, n'appelez pas à la commission,
n'appelez pas à la Cour suprême, n'appelez pas votre député, appelez la police.
La police, elle va savoir, tu sais,
quoi faire puis à quel niveau d'intervention. Puis peut-être qu'ils vont
revenir sur les cégeps. On dit : Bon, votre enfant est au cégep Maisonneuve? Bon, bien, on a un intervenant au cégep
Maisonneuve. Il va le rencontrer. Ou bien : Votre enfant, il n'est
plus là, il n'est plus au cégep, il est chez lui, vous n'avez pas pu lui parler
depuis six mois, puis il va faire du soccer
dans le centre musulman de soccer. Bien, on sait que ce n'est pas vraiment du
soccer qu'ils font là, parce que, M. le président, il y a eu un rapport
récent, en France, sur l'infiltration des groupes de sport jeunesse en France par des islamistes radicaux. Alors, quand
ils disent qu'ils font juste jouer au soccer, là, bien, il faut aller voir ça.
Donc, moi, ce que je trouve, c'est que ce
projet de loi, avec son institution de plaintes, de listes, est en train de
mélanger les genres, de créer un
parcours qui n'est pas nécessaire et qui en fait peut nuire, hein, parce qu'on
ajoute de la bureaucratie là où on a
un centre de prévention de la radicalisation qui doit concentrer les efforts,
qui connaît les réseaux, qui connaît les gens, qui a de l'information et qui est le mieux à même de réagir
rapidement. Et d'ailleurs c'est le chroniqueur Yves Boisvert, dans un de ses écrits, qui... et là lui aussi est contre
le projet de loi, qui dit : Bien là, c'est écrit que, si la commission de protection des droits et de la
jeunesse constate qu'il y a urgence, il peut appeler les autorités policières.
Bien, comment ça, tu sais, qu'il appelle la police immédiatement, tu sais? Puis
on montre comment, là, il y a un délai supplémentaire qui est créé par l'étude
de la plainte qui ne devrait pas exister, hein? Si c'est urgent, appelle la
police. Alors, moi, je pense que toute cette
partie du projet de loi nuit, ça nuit, ça devrait être retiré. Si vous n'êtes
pas assez bons pour aider, au moins, arrêtez de nuire, arrêtez de nuire.
Alors, ça, M.
le Président, j'espère que, du côté gouvernemental, on va se rendre compte de
l'ampleur de la bévue, qu'on va scinder le projet de loi, qu'on va nous
permettre d'adopter la deuxième partie sur les crimes haineux, sur les mariages
forcés et puis l'autre projet de loi sur l'encadrement des accommodements
raisonnables, sur la neutralité de l'État.
Le gouvernement est trop timide pour parler de laïcité, c'est dommage, mais en
tout cas, ça ne nuit pas, mais tout ce qui nuit devrait être simplement
retiré, puis qu'on ne perde pas notre temps avec ça, parce qu'ensuite il y a
des sous là-dedans, il y a des sous. Et je
vais essayer de retrouver la citation du mémoire des juristes pour la défense des
libertés fondamentales,
je regarde mes feuilles, là, parce que... Et je vais terminer là-dessus :
«En cette époque d'austérité économique
étatique, où d'importants programmes sociaux sont supprimés ou
significativement réduits, l'idée que des deniers publics soient investis pour que la commission des droits de la
personne et de la jeunesse [...] se dote d'une brigade d'effectifs pour recevoir des dénonciations
anonymes [...] avant même la supposée diffusion d'un
discours [...] pour créer un "comité des
dénonciations" [...] et tenir une liste à jour sur son site
Internet des coupables qui auraient fait l'objet d'une décision à leur encontre [...] nous
apparaît totalement inconciliable avec les assises d'une société libre et
démocratique et nous heurte profondément.» Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
Alors, je vous remercie, M. le député de Rosemont, de votre intervention.
Et pour la poursuite du débat...
Une voix : ...
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
Oui. Alors, je reconnais M. le député d'Ungava. M. le député d'Ungava, à
vous la parole.
M. Jean Boucher
M. Boucher : Merci beaucoup, M. le
Président. Bon après-midi à vous. Bon après-midi à tous.
Nous sommes ici aujourd'hui, bon, pour faire le
débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 59, la Loi concernant la prévention et la lutte contre les
discours haineux et les discours incitant à la violence et apportant diverses
modifications législatives pour renforcer la
protection des personnes. M. le Président, bon, souvent, pour savoir où on
s'en va, il faut savoir d'où on vient. Vous
n'êtes pas sans savoir, bon, vous suivez l'actualité comme tous, que le monde
est présentement en ébullition puis il y a des choses qui se passent
présentement qu'on ne voyait pas quelques années auparavant. Je voudrais
répéter, là, bon, les objectifs de ce projet de loi là, M. le Président.
Dans le
projet de loi en question, on vise à lutter contre les discours haineux, M. le
Président, puis ça s'inscrit dans le plan d'action gouvernemental, afin
de prévenir la radicalisation. On veut renforcer les interventions et se doter
de nouveaux moyens pour assurer la
protection des personnes et sanctionner la diffusion de propos haineux ou
incitant à la violence, M. le Président. Nous voulons élever au rang de
droits fondamentaux la protection individuelle contre les discours haineux ou incitant à la violence en
l'incluant dans la Charte des droits et libertés de la personne. Nous voulons
proposer une série de mesures afin de
prévenir et de faire cesser la diffusion de discours haineux et pour en
sanctionner les auteurs, M. le
Président. En matière de protection de la personne, nous voulons lutter contre
le mariage forcé. Puis on a vu que,
bon, c'est des choses qui se passent, c'est des choses qui existent, même si on
n'en entend pas beaucoup parler. On
veut prévenir les crimes basés sur une conception de l'honneur, M. le
Président, implanter des outils de protection immédiate pour les
personnes dont la sécurité pourrait être menacée, menacée par quelqu'un d'autre
ou menacée par eux-mêmes, et mieux protéger les élèves dans les établissements
d'enseignement sanctionnés.
M. le Président, on est allés en commission
parlementaire pendant 38 heures pour permettre à ceux qui le souhaitaient de nous faire part de leurs opinions.
Il s'agissait du processus démocratique pour débuter la loi. On a entendu
des groupes, des individus, et puis on veut,
bon, finalement une loi qui dit non à la violence mais qui ne limite pas l'expression de la liberté garantie par nos
chartes. Vous savez, M. le Président, ici il ne s'agit pas d'une loi, on n'est
pas en présence d'une loi, là, où il
s'agit de régir l'utilisation de tel véhicule sur tel type de route, ce n'est
pas quelque chose de technique, c'est
quelque chose de très humain, de très subjectif. Vous savez, dans la foulée des
événements survenus à Saint-Jean-sur-Richelieu,
M. le Président, à Ottawa, au collège Maisonneuve, le premier ministre avait
annoncé la mise en place d'un comité
interministériel sur la question de la radicalisation chez les jeunes. Le
gouvernement a donc proposé un plan
d'action gouvernemental portant le titre La radicalisation au Québec :
agir, prévenir, détecter et vivre ensemble. J'inviterais d'ailleurs tous les collègues qui ne
l'ont pas déjà fait à en prendre connaissance puis à le lire. Il y a des choses
intéressantes dans ça. Puis finalement, dans
le dépôt... dans la foulée dans ce plan d'action là, pardon, on a eu le dépôt
du projet de loi n° 59, qui nous intéresse aujourd'hui, dont j'ai
mentionné le titre tout à l'heure.
Si on reprend un petit peu, un par un, là, les
objectifs visés par la loi, on va...
Une voix : ...
M.
Boucher : Bonjour, M. le Président. Je viens de me rendre compte qu'on
a changé de président au moment où j'avais les yeux baissés.
Le Vice-Président (M. Gendron) : ...
• (16 h 30) •
M. Boucher : Je le sais, mais je
prends le temps de saluer le président 2.0.
Si on parle
de discours haineux ou incitant à la violence, on veut élever au rang de droits
fondamentaux la protection individuelle
contre les discours haineux et les discours incitant à la violence en
l'incluant à la charte québécoise des droits et libertés. Il ne s'agit pas, M. le Président, ici de limiter le droit
à la liberté d'expression, le droit à la liberté de la presse.
Vous savez,
il n'a jamais été question... puis la ministre l'a dit à de nombreuses
reprises, ce n'est pas la question de
dire qu'un humoriste, un journaliste, un éditorialiste ou quiconque, là,
n'aurait plus le droit de parler en mal de telle religion, de faire de l'humour sur telle religion, de la critiquer
sévèrement, objectivement ou même subjectivement, de dire : Bien là, écoutez, mon Dieu, en lequel
je crois, est meilleur et supérieur à ton Dieu à toi, il n'a jamais été
question de ça. Au contraire, je
pense que toute religion, comme tout sujet, comme tout parti politique...
On vit dans une société qui est libre, ouverte et démocratique, donc on
peut donner notre opinion, critiquer et même faire de l'humour là-dessus
sans aucun problème. Là où ça devient problématique, c'est quand vous vous
adressez à un groupe de personnes en particulier, puis invitez les gens à les
haïr, invitez les gens, comme disait la ministre plus tôt ce matin... Tel type
de personnes ou tel groupe de personnes ne
mérite pas de vivre, ne devrait pas être accepté dans notre société.
Nous devrions retourner tel type de
personnes dans leurs pays parce qu'ils n'ont pas le droit d'être ici. C'est des
discours qui mènent à la violence, M. le Président, puis c'est le genre
de chose dans laquelle on veut légiférer.
Ça joue dans
les deux sens, M. le Président. Autant, bon, les prêcheurs que les critiques de
certaines religions... Quand un
prêcheur vient en chaire, peu importe la religion — parce
qu'ici je ne pense pas qu'on soit dans un projet de loi anti-islamisme ou antimusulman, bien au
contraire, je pense que c'est un projet
de loi à portée générale, et c'est
bien comme ça — un
prêcheur ne pourrait pas dire : Bien, écoutez, si tu n'embrasses pas
mes croyances, tu es un mécréant. On
doit s'attaquer à toi, on doit... Je veux dire, ça aussi, on ne peut pas faire
ça. Donc, c'est un projet de loi qui couvre ces aspects-là.
L'attribution
à la commission des droits de la personne et de la jeunesse de
pouvoirs d'enquête dans le cas de discours
haineux ou incitant à la violence tenus publiquement tant à l'égard d'un groupe
d'individus... est basée sur des motifs de discrimination interdits à l'article
10 de la charte québécoise des droits et libertés. L'instauration par la commission
d'une liste publique de personnes sanctionnées par le Tribunal des droits de la
personne pour avoir tenu ou diffusé
des propos haineux incitant à la violence ou qui ont agi de manière à ce que de
tels actes soient posés. L'attribution au
Tribunal des droits de la personne du pouvoir de délivrer des ordonnances pour
faire cesser des discours haineux, faire cesser la publication de tracts, faire cesser la tenue d'assemblées qui
incitent à la violence. L'attribution au Tribunal des droits de la personne du pouvoir de déterminer le
montant des sanctions civiles pécuniaires que doivent payer les personnes
ayant tenu ou diffusé des discours haineux
ou incitant à la violence... ainsi qu'aux personnes qui agissent de manière à
ce que de tels actes soient posés, de même que la durée de leur
inscription sur une liste diffusée sur le site Internet.
Donc,
concernant les discours haineux et incitant à la violence, c'est un petit peu l'objectif de la loi. Vous savez, M. le Président, ici, bon, on est dans une Assemblée élue démocratiquement. Certains
disent que ça serait peut-être même l'Assemblée
la plus démocratique au monde, où on est un modèle souvent pour des visiteurs
qui disent : Bien, écoutez, on a
regardé comment vos travaux se tiennent, et puis, franchement, on est
admiratifs. Dans notre pays, ça ne se passe pas comme ça. Dans notre pays, il n'y a pas ce niveau de débat là. Bien,
vous savez, M. le Président, malgré qu'on est peut-être les plus
démocrates et les plus libres, si tout ça se passe bien, c'est parce qu'il y a
un ensemble de règles qui diminuent nos
libertés. Ainsi, vous n'êtes pas sans savoir qu'on ne peut pas dire ce qu'on
veut, comme on veut, à qui on veut,
quand on veut. Il y a plein de règles qui diminuent nos libertés, mais
que, finalement, le vivre-ensemble, à l'intérieur du salon bleu, fait
qu'on a une Assemblée qui s'élève au-dessus des autres.
Bien, c'est
un peu ça qu'on veut faire sur un autre plan avec cette loi-là, où il ne s'agit
pas de dire : Bien, on n'a plus
le droit de critiquer telle religion, on n'a plus le droit de dire que tel Dieu
n'est pas bon, ou est ridicule, ou que je ne partage pas sa foi. Ce n'est pas du tout ça, sauf qu'on ne peut plus
tenir de discours ciblant des personnes, les pointant comme étant des personnes à être détestées
systématiquement, pointant ces personnes-là comme étant des futures victimes
d'actes.
Vous savez, M. le Président, on n'a pas besoin d'être des très grands historiens pour voir que,
dans le passé, dans les derniers 100
ans, souvent, au nom de la religion, au nom de la politique,
il y a des choses épouvantables qui se sont passées dans le monde. Et puis, si on avait dit : Ah! bien là, écoutez,
il a le droit de dire ça, il a le droit de tenir tel discours, bien, peut-être que, si certaines libertés auraient été
restreintes pour dire : Bien là, non, ça, c'est un discours haineux, on ne
peut pas tenir tel discours face à tel type
ou telle catégorie de personnes, il y a peut-être
certains drames qui auraient été évités ou qui auraient été moins
étendus, M. le Président.
La loi, aussi, vise à donner des ordonnances de
protection. La création d'un pouvoir d'ordonnance civile de protection peut être demandée lorsqu'une
personne croit que sa vie ou sa santé est menacée. C'est un autre des objectifs
de la loi. Du côté de la protection de la
jeunesse, une modification à la Loi sur la protection de la jeunesse, notamment par l'ajout à la liste des exemples de mauvais traitements psychologiques la
notion de contrôle excessif auprès des enfants.
Vous savez,
bon, mon collègue, là, disait tantôt : Il y a
des choses qui étaient inacceptables dans les années 50, puis aujourd'hui
c'est la normalité, puis on ne pourrait plus empêcher ça. Dans les années 50,
dire à un jeune adulte : Tu n'as pas le
droit de sortir avec tes amis à partir de telle heure, tu n'as pas le droit de
t'habiller de telle façon, c'était tout
à fait convenable et puis c'était à
l'époque où la religion catholique tenait notre Québec serré, puis tout le monde était fermement croyant. Aujourd'hui, bien, tout ça a évolué, les libertés ont évolué. Donc, est-ce que
quelqu'un peut empêcher son enfant ou son jeune de moins de 18 ans à vivre une vie comme le
jeune Québécois moyen la vit, à voir ses amis fréquenter... sortir dans les bars? Je ne vous
parle pas d'une vie de débauche, M.
le Président, puis d'une vie débridée,
mais simplement une vie normale de
jeune, diverses fréquentations. Donc, ça pourrait être associé à un contrôle
excessif auprès des enfants.
Une loi qui modifie aussi la Loi de la
protection de la jeunesse pour y préciser qu'en «aucune considération, qu'elle
soit d'ordre idéologique ou autre, [y compris] celle qui serait basée sur un
concept [d'honneur], ne peut justifier» que la sécurité ou le développement
d'un enfant soit compromis.
Une modernisation du mode de publication des
unions conjugales, soit leur publication sur un site Internet de l'État
civil pour empêcher les mariages forcés, M. le Président. On parlait,
bon, que, souvent, le mariage forcé n'était pas... dire : Bon, bien, voici, là, ma petite fille,
aujourd'hui, tu maries M. Untel, puis on s'en va au coin de
la rue, puis tu te maries, tu n'as
pas le choix. Souvent, bien, non, non, on va aller dans tel pays visiter la
famille cet été pour un mois, deux mois, sauf que, oups! un des objectifs
du voyage, c'est que la jeune, là, de 13, 14, 15 ans doit se marier involontairement
à tel type souvent deux fois et même
trois fois son âge. Donc, ce genre de chose là pourrait être grandement
diminué ou même évité dans le futur.
La sécurité
physique ou morale des élèves, de nouveaux pouvoirs d'enquête et de sanction
pour le ministre de l'Éducation. À la suite d'un comportement pouvant raisonnablement faire craindre
pour la sécurité physique ou morale des
élèves, cette mesure s'appliquerait tant dans le domaine de l'enseignement public que celui de l'enseignement
privé, tant aux ordres d'enseignement
primaire, secondaire que collégial. On parlait tantôt de clubs de soccer. Un
nouvel entraîneur arrive ou un
bénévole arrive pour s'impliquer auprès des jeunes, mais première nouvelle
qu'on a, bon, on se rend compte que
tel type de religion est promu, puis : Ne parle plus à telle autre
personne parce que ce ne sont pas des bonnes personnes pour toi, puis etc. Il y aurait des pouvoirs
d'intervention à ce niveau-là. Donc, M. le Président c'est un petit peu ça, en
résumé, qui sont les objectifs de la loi.
On parle beaucoup de radicalisation des jeunes,
mais ce que j'ai bien aimé dans un groupe, à un moment donné, qui est venu nous voir en commission parlementaire, M. le
Président, où lui, il parlait de contreculture, on disait : Pourquoi un jeune de 19, 20 ans, 21 ans qui vit
souvent un confort standard de la classe moyenne déciderait de partir pour
aller dans un autre pays prendre les armes, puis faire la guerre, et se mettre
lui-même en péril, et, si cette personne-là n'est pas blessée ou ne décède pas, vivre des moments
vraiment difficiles? C'est une question de contreculture. De tout temps,
on a toujours... Bon, tout le monde a été
jeune, moi comme vous, M. le Président, et puis certains ont eu une jeunesse
plus mouvementée que d'autres. On a toujours contesté nos aïeux, là,
contesté l'autorité en place. Ça a été le mouvement hippie à l'époque, bon, qui voulait se sortir, là, de l'emprise des
années 50 et 60, où on réclamait plus de libertés. De tout temps, ça a existé, puis ça, ça peut être associé
à une contreculture chez les jeunes. Et puis c'était une idée qui vraiment,
là... que je trouvais intéressante puis qui mériterait d'être développée.
• (16 h 40) •
Donc, à ce niveau-là, M. le Président, c'est toutes des pistes qui peuvent être
regardées, et puis, si ce jeune-là décide de s'intéresser à d'autres choses, décide de s'intéresser à une nouvelle
religion qui n'est pas la sienne — puis
c'est tout à fait
correct, il n'y a rien de blâmable dans ça — mais
que cette personne-là reçoit des enseignements qui se rapprochent plus de la secte, hein... Vous savez, on parlait tantôt, tout à l'heure, de décrire... On commence par dire : Bien, viens, regarde, moi, je vais t'écouter, moi. Moi, je vais te
rendre service. Moi, je suis de ton bord. Moi, je te comprends. Ah! bien, lui,
c'est sûr, lui, c'est ton ennemi, parle-z-y plus... puis isoler tranquillement
des amis, de la famille. Et, pour avoir l'emprise totale sur la
personne, c'est exactement le même procédé que la secte. Donc, c'est une façon,
là, en diminuant ou en empêchant les
discours haineux, bien, à ce
moment-là, de dire au jeune :
Écoute, là, l'enseignement que tu reçois, ça n'a pas de bon sens. Est-ce
que tu trouves ça correct?
Et puis cette
loi-là, est-ce que c'est une loi qui dit : Bon, bien, voici,
là, le projet de loi n° 59 est là, on le vote, le lendemain matin, c'est fini, il n'y aura
plus de radicalisation, il n'y aura plus d'endoctrinement? C'est impossible, M. le Président. Peu importe la loi, peu importe qui la votera,
c'est impossible. C'est de l'humain, c'est du subjectif. Jamais on ne sera capable de contrôler tout ce qui se dit
dans les assemblées, à gauche et à droite, mais il faut créer un mouvement
puis une voix pour que les gens réalisent, là, que ce n'est pas une façon, là,
une marche à suivre, et puis éveiller les consciences, puis éveiller les jeunes
à ce moment-là.
Donc, M. le Président, ça fait un petit peu le tour de ce que j'avais à vous dire cet après-midi
sur le sujet, et puis personnellement, bien, c'est bien sûr que, du côté gouvernemental, on va être en faveur de l'adoption
du principe pour aller dans une étude article par article où, justement,
chaque article pourra être évalué, soupesé à sa valeur et bonifié avec la participation et la collaboration des deux
oppositions et des députés
indépendants, puis je souhaite que tous ensemble... ce projet de loi là soit aussi bien mené que
possible et puis puisse atteindre ses objectifs dans la mesure du possible.
Merci beaucoup, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le député
d'Ungava. Je cède maintenant la parole à M. le député de Blainville.
J'ai vu M. le député de Blainville se lever en premier, M. le député de
Blainville.
M. Mario Laframboise
M.
Laframboise : Merci
beaucoup, M. le Président. Il me fait plaisir de prendre la parole aujourd'hui
sur le projet de loi n° 59 au nom de
mon parti, la Coalition avenir Québec. Il me fait plaisir de prendre la parole
après que la députée de Montarville,
ma collègue, ait fait un si beau discours. Je pense que ma collègue, que j'ai
eu la chance d'accompagner à quelques
reprises cet été, là, à la commission parlementaire, a fait un résumé très,
très important. Ce n'est pas facile de parler
d'une situation aussi importante que la lutte à l'intégrisme, et ça,
évidemment, ma collègue, depuis février 2015...
Puis je pense
que, si le gouvernement a déposé le projet de loi n° 59, c'est en bonne
partie parce que ma collègue, depuis
maintenant plusieurs mois... Évidemment, on a connu les événements de
Saint-Jean-sur-Richelieu, les événements d'Ottawa, mais, en début d'année 2015, les événements entourant les
cégeps à Montréal où des étudiants et des étudiantes ont quitté pour aller rejoindre... et, après ça,
bien, des locaux qui étaient loués dans divers équipements publics et puis
l'impossibilité, pour les décideurs publics, d'empêcher qu'on loue des locaux,
justement, pour prêcher et puis... Et c'est de là, depuis février 2015, que notre parti, la Coalition avenir Québec,
mais plus particulièrement ma collègue la députée de Montarville, s'est empressé d'aller au-devant
parce que je pense qu'on ne peut pas laisser nos institutions publiques,
on ne peut pas laisser les municipalités du
Québec libres à elles-mêmes quand elles ont à respecter, entre autres, la
Charte des droits et libertés, et,
évidemment, qui fait que des décisions, parfois, ne se prennent pas parce
qu'elles ne se sentent pas aptes à
décider, de peur de se faire accuser en vertu de la Charte des droits et
libertés. Donc, ce n'est pas pour rien que ma collègue de Montarville puis la Coalition
avenir Québec, on a posé plusieurs questions ici, à l'Assemblée nationale,
et on a décidé de mettre la pression
nécessaire pour que le gouvernement puisse, une fois pour toutes, contrer ce
qui, pour nous, est le discours haineux.
Mais
je vais juste... je vais revenir au texte du projet de loi, mais je voudrais
juste... Parce que, quand la Coalition avenir
Québec défend un dossier, elle ne fait pas juste parler, elle dépose les
documents, puis il y avait... Et puis je peux vous lire le texte, là, de
ce qu'aurait souhaité la Coalition avenir Québec, ce qui a été présenté par ma
collègue de Montarville, basé sur l'arrêt
Whatcott et, évidemment, basé sur une décision judiciaire où il y avait, dans
cet arrêt-là, une ouverture à montrer aux décideurs publics
l'opportunité de régler ce problème-là. Et pourquoi? Parce que cet arrêt-là mentionnait qu'on pourrait notamment, quand on
parle des enseignements et des prêches... les propos haineux pourraient
être... on pourrait faire une législation pour empêcher ces enseignements dans
une lutte, évidemment, à l'intégrisme religieux,
et à la radicalisation, et à l'endoctrinement. Donc, c'était de cette façon-là
qu'on avait abordé ce dossier, qui n'est
pas facile parce que, quand on parle de la Charte des droits et libertés de la
personne, ce n'est jamais facile. Mais il
faut se baser sur des décisions judiciaires, et ce que ma collègue de
Montarville avait fait, puis ce qui avait été proposé par la Coalition
avenir Québec, c'était de s'attaquer à... et de lutter contre l'intégrisme
religieux, la radicalisation, l'endoctrinement et, évidemment, s'attaquer aux
enseignements et aux prêches.
Ça,
je pense que les Québécois sont en symbiose par rapport à ça. C'est-à-dire que
moi, là, je n'ai pas eu aucun commentaire négatif par rapport à la
position de la Coalition avenir Québec de dire qu'on ne veut plus que dans nos édifices publics, que dans des lieux publics au
Québec il n'y ait aucune possibilité d'y avoir des enseignements, des prêches
sur des propos haineux susceptibles
d'inciter à la violence et à l'hostilité. Moi, je pense que de lutter contre
l'intégrisme religieux, puis la
radicalisation, puis l'endoctrinement... je pense que tout le monde est
favorable à ça. J'ai beaucoup de difficultés à comprendre qu'on ne
puisse pas être d'accord avec ce concept-là de lutter contre l'intégrisme
religieux. Mais là, évidemment vu qu'on est
dans la religion, le diable est dans les détails, là, c'est comme ça, et arrive
le projet de loi n° 59, et là, évidemment...
Puis, comme je vous
dis, M. le Président, j'ai eu la chance de participer à deux journées
d'audiences où des témoins — puis ma collègue de Montarville a très bien
exprimé ça — de tous les...
Je pense qu'on a, oui, oui... Puis on avait
un tant soit peu, là... tous les horizons étaient représentés à cette
commission parlementaire là, et c'était pour moi, là, qui n'est pas un spécialiste du droit, là... Je
suis notaire de formation, mais je ne suis pas avocat, là, donc de la
plaidoirie ou quoi que ce soit, là...
C'était intéressant de voir des témoins de tous les horizons qui viennent
donner toutes les positions, mais qui
se basent sur un texte, pas celui que je vous ai lu tantôt, là, qui était celui
de la Coalition avenir Québec, qui parlait de ne plus... Nul ne peut tenir publiquement des enseignements, des
prêches, des propos haineux susceptibles d'inciter à la violence et à l'hostilité. Ce n'était pas ça,
le texte. Le texte, c'est : «La présente loi a pour objectif d'établir des
mesures de prévention et de lutte contre les discours haineux et les
discours incitant à la violence.
«Elle
s'applique aux discours haineux et aux discours incitant à la violence tenus ou
diffusés publiquement [...] qui visent
un groupe de personnes qui présentent une caractéristique commune identifiée
comme un motif de discrimination interdit [par la] Charte des droits...»
• (16 h 50) •
Là,
quand je vous dis que le diable est dans les détails, bien là, évidemment, on
s'aperçoit que ceux qui... Puis c'était
ça, là. Moi, là, j'étais renversé des témoignages qui ont été présentés devant
la commission parce que les plus radicaux se servaient de ce texte-là pour dire : Puis il faut aller encore
plus loin parce qu'évidemment nous, on fait l'objet de discours haineux,
de discours incitant à la violence, donc il faut nous défendre, nous. Je veux
dire, c'est... Et c'est là qu'il faut vraiment, là, monsieur...
Puis
je peux comprendre que le premier ministre, à un moment donné, a dit à sa
ministre : Bien là, il va falloir être
capable de corriger le tir. Mais il a décidé de dire qu'il fallait enlever les
discours haineux de dedans, alors qu'il faut lutter contre les discours haineux, il faut lutter contre ça, c'est tout
simplement ça, c'est ça qu'il faut faire. Mais, par contre, il faut y aller dans l'optique de l'enseignement, des
prêches et des propos qui incitent à la violence et à l'hostilité, il ne faut
pas laisser la marge de manoeuvre pour...
Comme je vous dis, quand on lit : «Elle s'applique aux [...] discours
incitant à la violence tenus ou diffusés publiquement et qui visent un
groupe de personnes qui présentent une caractéristique commune...» Et là, évidemment, le projet de loi — et ma collègue de Montarville a raison — est trop large, et beaucoup
d'intervenants le trouvent trop large.
Et
ça, M. le Président, je pense que, qu'on demande un vote de principe sur ce
projet de loi là sans qu'on ait vu les amendements
que le premier ministre a demandés à sa ministre, de dire : Écoutez, il
faut que tu nous déposes quelque chose d'autre, je ne suis pas d'accord
avec ce qu'il y a là... Bien, je veux dire, on ne peut pas donner notre accord
de principe sur ce projet de loi là, qui va
être, de toute façon, modifié, puis que sûrement son article 1 va être modifié.
Donc, comment on peut être capables
aujourd'hui de dire oui ou donner notre accord de principe à un projet de
loi qui, dans son premier article, va être modifié?
Parce
qu'il le faut, M. le Président. Et je pense qu'encore une fois ce n'est jamais
facile, mais, pour nous... Puis vous avez entendu, là, bon, je pense que
l'opposition officielle a le même discours, c'est-à-dire que c'est plus facile
pour nous de dire qu'on ne peut
pas donner notre accord de principe sur ce projet de loi tant qu'on n'a pas vu,
évidemment, les amendements qui
seront déposés par le gouvernement et qui pourraient, en sa face même, changer,
là, l'article 1 même du projet de loi, là.
Parce
que tout se base sur l'article 1, parce que, par la suite... Puis là je
pourrais... Je vais aller à l'article 3 parce que, ça aussi, l'article 3... «Toute personne qui a connaissance de la
tenue ou de la diffusion d'un discours haineux ou un discours incitant à la violence peut le dénoncer.»
Et la dénonciation, bien, évidemment, n'est pas obligée d'être publique.
Donc, n'importe qui peut, sous l'anonymat,
décider de faire une dénonciation. Donc, à quelque part, là, c'est trop
important pour qu'on ne puisse pas aller au fond des choses, M. le
Président.
Puis
ça, là-dessus, j'en fais foi parce qu'étant porte-parole aux affaires
municipales ma collègue a depuis... Même avant que j'arrive ici, en ce Parlement, en 2014, la Coalition avenir
Québec décriait le fait que des organismes religieux bénéficient des crédits,
entre autres, des crédits fiscaux, entre autres, des crédits de taxes
municipales et scolaires. Et évidemment,
moi, qui est issu du milieu municipal, ancien président de l'Union des
municipalités du Québec, je vous dirais que les villes au Québec sont
prises avec ce problème-là, finalement, des organismes religieux qui se créent,
là, à la queue leu leu. Dès que tu es un organisme religieux, puis un organisme
sans but lucratif, puis que tu as une mission religieuse, tu es exempt de
taxes. Ça, il y a eu un resserrement, souvenez-vous, parce que, là, c'est les
lieux de culte seulement. Mais là il faut
penser que, dans des lieux de culte, il n'y a pas juste l'endroit, là, il y a
même certains endroits qui sont des terrains beaucoup plus vastes qui,
maintenant, sont des lieux de culte.
Donc, je peux
comprendre quand ma collègue, qui a senti... Quand la ministre a demandé au
maire de Montréal : Bien là, notre collègue de la deuxième
opposition revient toujours... qu'est-ce que vous en pensez?, ma collègue était
nerveuse, elle avait peur que le maire
dise : Ah! ça n'a pas... Non, bien au contraire, il ne fallait pas qu'elle
soit nerveuse, le maire de Montréal a dit : Écoutez, il faut mettre
fin à ça, c'est effrayant!
Puis ça, ça
ne finira jamais, là. Parce que je m'étais amusé... Étant donné que je suis
dans le milieu municipal, je suis allé faire un voyage aux États-Unis
pour regarder, à un moment donné, dans un annuaire téléphonique comment il y avait, tu sais, comment il y avait d'églises,
il y en avait... J'ai arrêté, au-dessus de 300, de compter, là. Donc, ça veut
dire qu'il y avait au moins, aux États-Unis,
au-dessus de 300 types de religion dans une grande ville américaine. Donc, inévitablement, là, nous, on en a peut-être une
soixantaine, 70, mais, écoute, laissez-les aller, ils vont réussir à atteindre
300, là. C'est comme ça que ça arrive, là,
il n'y a aucun problème avec ça. Sauf que je pense qu'il faut mettre fin...
Puis ma collègue, à juste titre, trouvait ça intéressant de dire : Bien,
écoutez, pourquoi qu'on ne profite pas de ce projet de loi là pour, justement, mettre fin à ces paradis fiscaux?
Parce que c'est un paradis fiscal, finalement, là, que tu aies la possibilité
d'avoir un lieu de culte puis que tu ne
paies pas de... puis en plus que tu puisses faire de l'endoctrinement, puis...
Écoutez, là, quand on se parle bien gentiment, je pense que ça n'a aucun
sens, puis tout le monde va en convenir.
Pourquoi on
n'est pas capables de s'entendre autour d'un projet de loi puis dire :
Écoutez, là, ça n'a aucun sens que
des organismes religieux puissent bénéficier de crédits de taxe municipale et
scolaire et puis que des organismes qui font de l'endoctrinement, des gens qui font des enseignements puis des
prêches puissent utiliser des endroits publics, puis qu'on puisse mettre
mal à l'aise les villes, puis qu'on dise au gouvernement : Bien là, c'est
aux villes de prendre la décision? Mais il n'y a rien de pire que ça, les
villes vont vous dire qu'on est pris avec la Charte des droits et libertés, donc...
Puis, encore
une fois, là, il faut penser que, pour certains, là... N'oubliez jamais qu'il y
a 1 100 municipalités au Québec,
là. La ville de Montréal, la ville de Québec ont leurs services juridiques,
Laval, Longueuil, mais ce n'est pas toutes les municipalités du Québec qui ont un service juridique, là. Donc,
imaginez-vous, là, à quelque part, là, tous ces prédicateurs-là puis, évidemment, ces prêcheurs et ceux qui font des
enseignements religieux, évidemment, qui sont des radicaux puis qui font de l'endoctrinement de nos
enfants, bien, auront beau aller... Il y a plusieurs... Là, les grandes villes
peuvent peut-être, comme je vous disais, se
défendre avec leur contentieux, mais ce n'est pas toutes les villes qui en ont
au Québec dans les 1 100, et, encore une fois, il faut...
Et il y a
trop d'exemples dans la société au cours, je vous dirais, des cinq dernières
années. Ce n'est pas quelque chose,
là, qu'on peut dire que ça fait juste un temps, je pense que l'intégrisme
radical... En tout cas, moi, je souhaiterais bien que ce soit éliminé, mais je ne pense pas que c'est quelque chose
qui est présentement... Puis, ma collègue le soulignait aujourd'hui,
justement, judicieusement dans une question, quand on reçoit des envois de
l'Arabie saoudite dans nos bibliothèques pour qu'ils nous envoient des livres,
justement, pour prôner cet intégrisme et cette radicalisation, bien il y a comme un malaise dans le problème, M. le
Président, là, c'est-à-dire que c'est quelque chose qui... que, là, ils peuvent
se permettre ouvertement d'envoyer ça dans
nos bibliothèques, puis en sachant très bien qu'il n'y aura rien qui va se
passer par rapport à eux, là, tu
sais. Le Québec est une terre d'accueil, c'est ça que ça veut dire pour eux,
là. Donc, il faut que ça arrête, là, il faut arrêter de laisser ces
gens-là profiter de notre largesse parce qu'on est ouverts sur le monde. Moi,
je veux bien, mais jamais qu'on ne sera
ouverts à l'intégrisme religieux, puis aux propagandes, puis à l'endoctrinement
de nos enfants, là, jamais, jamais,
jamais, là, puis, évidemment, c'est pour ça que je vous dis : Est-ce que
c'est quelque chose qui va diminuer?
Non, on s'aperçoit que nos Québécois, nos Québécoises même réussissent à se
faire endoctriner pour toutes sortes de raisons, là.
Moi, je veux
bien qu'on... Oui, c'est vrai qu'on a des éléments qui sont un petit peu plus
faibles dans notre société, il faut être capable de lutter contre la
pauvreté, et tout ça, moi, je veux bien, là, mais il reste quand même qu'il
faut empêcher ces gens-là de venir prêcher
dans nos édifices publics, puis même sur tout le territoire du Québec, puis il
faut faire une lutte féroce à ça,
puis il faut être capable de donner... Puis la vigilance, là, ça, là-dedans, il
faut être capable de donner les
outils nécessaires aux villes puis à tous nos organismes publics, à nos cégeps,
à nos universités pour qu'ils soient capables de prendre les bonnes
décisions très rapidement, là, tu sais. À quelque part, là, pourquoi...
Puis ce qui
m'a étonné parce qu'un des témoins qui... C'est de tous les horizons, M. le
Président, puis ça vaut la peine parce qu'un des témoins, lui, ne veut
pas de cette loi-là parce que lui, il les chasse partout à travers le Canada. Lui, sa mission, c'est de les chasser partout à
travers le Canada, et il s'invite puis il va dans ces endroits-là où ils font
des prêches puis qu'ils endoctrinent
parce que, lui, ça lui permet de les découvrir. Lui, c'est comme un chasseur.
Il y en a qui chassent les ouragans
ou les tempêtes, lui, là, bon, lui, il chasse les extrémistes. Bon, c'est le
fun, là, c'est... bon, tu sais, mais
sauf que lui, il ne veut pas de loi parce que, si j'ai une loi puis que vous
les faites disparaître, je ne pourrai plus les trouver. Bon, ça, c'est comme ça qu'il nous a vendu ça, puis il nous a
dit ça, puis il nous a... Puis il était bien sérieux, là, je veux dire. Lui, c'est sa vie, là, lui, c'est faire
ça. Puis, vu que c'est public puis qu'ils peuvent le faire, bien, lui, ça permet
de les détecter puis de les trouver. Bon.
C'est la nouvelle génération James Bond, là, il n'y a aucun problème. J'aime
mieux aller
regarder les films, là. Il y en a un nouveau, là. Mais, tu sais, je veux dire,
ceux-là, je les aime moins. C'est juste qu'à quelque part il faut
vraiment, là...
• (17
heures) •
Tu sais, on
peut toujours essayer de faire quelques farces, là, mais ce n'est pas drôle,
parce que, dans la vérité, dans la
vraie vie, on a de nos jeunes Québécois, nos jeunes Québécoises qui sont plus
fragiles dans certains moments de leur vie,
puis là je pense... En même temps, je pense aux parents qui ont à vivre ça,
puis qui ont à subir ça, puis qui n'ont pas vu venir. Parce que, ces choses-là, on n'est pas habitués à ça, nous,
hein? C'est récent, c'est pour ça que je vous dis : Ce n'est pas quelque chose qui... ce n'est pas appelé
à disparaître, parce qu'on en a de plus en plus. Mais il faut être très
vigilant, M. le Président, puis il faut mettre un terme à ça.
Donc, si ce
projet de loi là peut avoir un effet qui aurait été soulevé par ma collègue de Montarville, la Coalition avenir
Québec, si on peut être capables d'en
arriver à la... le gros bon sens, M. le
Président, de ne plus jamais
que, sur le territoire du Québec,
il y ait des enseignements et des prêches, des propos haineux susceptibles
d'inciter à la violence et à l'hostilité,
tel que le permet l'arrêt Whatcott qui, évidemment, prend en compte la Charte
des droits et libertés, bien, je pense qu'il faut y aller, il faut faire
ça, puis il faut être capables de...
Il faut que
le gouvernement dépose le plus rapidement possible ses amendements, puis encore
une fois, là, il faudrait qu'il le
fasse avant qu'on vote sur l'accord de principe de ce projet de loi là. Il
aurait fallu qu'il fasse ça... Puis il a encore le temps, parce que j'ai l'impression qu'on va lui donner du temps.
Puis, en tout cas, moi, en tout cas, mon objectif à moi, c'est qu'il ait le temps d'y penser puis de bien y
repenser, parce qu'à quelque part il y a des fois où on parle en cette Chambre
puis il y a du temps qui se gaspille. Mais
là je ne pense pas qu'il y ait du temps qui se gaspille à dire au
gouvernement : Tu as déposé un
projet de loi trop large, un projet de loi qui n'est pas conforme à ce que les
citoyens, les citoyennes du Québec
souhaitent, et c'est ce que le premier ministre a reconnu. Donc, il est temps,
avant qu'on adopte le principe de ce projet de loi là, de nous déposer les
amendements, puis c'est ce qu'on va demander à la ministre. Puis ça, on le fait
dans l'intérêt de nos enfants, nos
petits-enfants, M. le Président. Parce que moi, j'en ai, des petits-enfants,
là. J'en ai quatre, là, puis qui sont
tout petits, là. Puis j'en ai un tout neuf, en plus, qui vient d'arriver il y a
quelques semaines, là, puis je ne voudrais pas qu'il ait à vivre ces
situations-là, M. le Président, puis qu'on ait passé au côté de la possibilité
d'empêcher ces extrémistes de prendre la possession des cerveaux de nos
enfants. Merci beaucoup, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le député
de Blainville. Je suis prêt à céder la parole à un prochain intervenant
et je reconnais M. le député de Jonquière.
M. Sylvain Gaudreault
M. Gaudreault :
Oui. Merci. Merci beaucoup, M. le Président. Alors, il me fait plaisir
d'intervenir aujourd'hui sur le
projet de loi n° 59, la Loi édictant la Loi concernant la prévention et la
lutte contre les discours haineux et les discours incitant à la violence
et apportant diverses modifications législatives pour renforcer la protection
des personnes.
Alors, les
objectifs de ce projet de loi, M. le Président, comme vous le savez, puis je
pense que plusieurs collègues l'ont
énoncé de façons différentes, mais qui reviennent toutes au même, évidemment
c'est de contrer le radicalisme, contrer l'endoctrinement et aussi contrer, évidemment, le recrutement dans les
groupes islamistes, notamment, ou les groupes religieux radicaux,
contrer le recrutement notamment de certains jeunes Québécois, Québécoises qui
peuvent être sensibles ou entendre ces arguments ou ces chants de groupes
radicaux avec des objectifs qui ne sont pas louables.
Donc,
évidemment, la chasse à l'islamisme radical est un objectif extrêmement important
que nous partageons tous. Mais nous
pensons qu'il y a des façons différentes d'atteindre cet objectif de chasse à
l'islamisme radical, je vais y
revenir tout à l'heure. Parce que nous avons fait un geste... en fait, ma
collègue de Taschereau, au nom de notre formation politique, a fait un geste extrêmement important
en déposant un projet de loi à cet égard, le projet de loi n° 395, sur
lequel je reviendrai tout à l'heure.
Ce projet de
loi, le n° 59, donc, sur lequel nous nous exprimons aujourd'hui, fait
suite à des cas troublants, notamment
chez des jeunes, entre autres, des cégeps, certains cégeps, qui ont été
recrutés par des groupes islamistes radicaux. Il y a également eu des attentats terroristes profondément troublants, il y
a à peine un an, du côté de Saint-Jean-sur-Richelieu mais aussi dans un autre Parlement, à Ottawa, donc des attentats qui ont troublé profondément
les gens et qui ont été le fait de
jeunes d'origine québécoise et qui se sont radicalisés auprès de groupes
islamistes ou qui ont été séduits par justement
les arguments de ces groupes.
Et cette question-là
est une véritable préoccupation partagée par l'ensemble de la population
du Québec, notamment
la question du recrutement. C'est un phénomène complexe,
hein? Nous serions fort présomptueux de dire ici qu'une seule raison explique pourquoi un jeune ou une jeune
de classe moyenne, qui vit relativement bien, dans une famille unie, unie ou
désunie, ça n'a rien à voir, mais qu'il soit recruté ou qu'il se laisse séduire
par ces groupes radicaux. Donc, c'est profondément troublant, puis il ne faut
pas apporter des réponses simplistes.
Le gouvernement, évidemment, a hésité longtemps, malgré toutes les
ressources que nous connaissons dans la machine gouvernementale, malgré la présence d'universités
sur le territoire québécois, malgré la présence de spécialistes, malgré même, au sein de leur caucus, du côté du gouvernement, la présence pendant de
nombreuses années de l'ancienne députée
de La Pinière, Fatima Houda-Pepin, le gouvernement a hésité longtemps
avant de présenter un projet de loi, pour finalement aboutir avec le
projet de loi n° 59, qui est divisé en deux parties.
Et je vous annonce tout de suite qu'à la fin de
mon intervention j'aurai une motion à déposer, une motion de scission, parce que nous, nous croyons qu'il y a
deux parties complètement distinctes. D'ailleurs, je fais un aparté, hein,
pour dire que ça devient une pratique
courante, du côté de ce gouvernement, de mettre à l'intérieur d'un seul texte
législatif plusieurs
objectifs complètement différents. Et la première partie de ce projet de loi
vise davantage à contrer les discours haineux, mais la deuxième partie
vise à mieux protéger les personnes.
Donc, que
pense... De quelle manière veut se prendre... veut prendre le projet de loi
n° 59 pour lutter contre les discours
haineux et les discours qui incitent à la violence? Bien, c'est par la mise en
place de dispositions pénales, par des
pouvoirs d'enquête confiés à la Commission des droits de la personne et des
droits de la jeunesse, par l'établissement d'une liste publique de personnes ciblées comme ayant tenu des propos
haineux. À première vue ça peut paraître séduisant, tout cela, ça peut
paraître séduisant, mais il faut y regarder de plus près et faire attention, M.
le Président.
Vous savez, la question de la liberté
d'expression est un sujet extrêmement sensible au Québec, comme dans plusieurs sociétés occidentales, évidemment. Mais,
vous savez, j'ai un défaut, je suis historien de formation, alors j'ai
tendance à remonter un peu dans les archives et dans l'histoire, et, en
regardant le projet de loi n° 59, j'ai pensé à ce qu'on appelait la «loi du cadenas» sous le gouvernement de Duplessis. Le
vrai nom était la Loi protégeant la province contre la propagande communiste, mais elle avait été surnommée la «loi
du cadenas» parce que cette loi permettait de fermer des maisons où la police prétendait qu'il pouvait y avoir des
activités communistes. Elle a été présentée et adoptée par le gouvernement de M. Duplessis ici, en cette
Chambre, en 1937. Alors, elle visait donc à mettre un terme aux activités
communistes dans la province, hein, vous savez, c'était un peu le diable, le
communisme, à l'époque. Même dans les années
60, il y a eu une vague, aux États-Unis, de maccarthysme. Alors, le
gouvernement Duplessis, à cet égard, était précurseur parce que déjà en
1937 il a fait adopter sa loi, mais c'est une loi qui a été extrêmement
contestée parce qu'elle a servi, au fil du
temps, finalement, à légitimer la fermeture de journaux, comme le journal Clarté
en novembre 1937. Elle a permis de
faire de nombreuses perquisitions. En 1948, la police a même effectué une
saisie au local du journal le Combat. Il y a même d'autres
groupes non politiques et certainement pas communistes qui ont été ciblés,
comme les Témoins de Jéhovah.
• (17 h 10) •
Alors, je ne
veux pas dire que ce gouvernement est duplessiste, mais ce que je veux dire,
c'est qu'inspirons-nous d'une
histoire somme toute assez récente ici, au salon bleu, puis là je ne prends pas
des exemples tirés des antipodes,
mais je prends des exemples qui
viennent d'ici, d'une histoire assez récente pour dire : Faisons attention
au dérapage, faisons attention au dérapage d'une loi qui vise la liberté
d'expression.
Et finalement
qu'est-ce qui est arrivé, M. le
Président, avec la loi du cadenas de Duplessis? Elle a été déclarée
inconstitutionnelle en 1957, donc c'était bien avant l'époque des chartes des
droits et libertés, elle a été déclarée anticonstitutionnelle
ou non constitutionnelle en 1957 par la Cour suprême du Canada à la suite du
procès Switzman contre Elbling. Donc, inspirons-nous de ce que nos
prédécesseurs parlementaires ont fait ou ont connu pour se poser des questions
sur la pertinence réelle du projet de loi n° 59 que nous avons devant
nous.
D'abord, il y
a déjà des possibilités, hein, les instances gouvernementales ont déjà des
moyens via le Code criminel, qui
interdit déjà les propos haineux. Mais évidemment le Code criminel est de
compétence fédérale. Mais il prévoit des garanties procédurales constitutionnelles, entre autres la preuve hors
de tout doute raisonnable. Mais le problème que la ministre de la Justice a, c'est qu'elle ne peut
agir qu'en matière civile, où il n'y a pas les mêmes garanties procédurales
que permet le Code criminel fédéral.
Évidemment,
nous, nous aurions une solution parfaite pour elle, si elle veut agir en ce
sens, en matière de droit criminel, ça s'appelle de faire du Québec un
pays où, là, on aurait l'ensemble de nos pouvoirs, notamment en matière criminelle. Mais la ministre refuse de regarder
cela, donc elle essaie, par toutes sortes de manières, d'arriver à un peu faire
ce qu'elle ne peut pas faire directement. Vu
qu'elle ne peut pas modifier le Code criminel, elle essaie de passer par des
procédés civils, mais qui causent quelques problèmes, sur lesquels nous pouvons
intervenir maintenant.
D'abord, dans son projet de loi, le projet de
loi n° 59, bien, nous avons constaté... Puis j'ai regardé un peu les
auditions en commission parlementaire, j'en ai parlé avec ma collègue de
Taschereau qui a assisté à tout cela, qui a participé, j'ai lu également la
revue de presse sur le sujet, et à peu près tout le monde s'entend pour dire
qu'il y a une définition à tout le moins
floue de ce que sont des discours haineux. On pourrait en parler longuement, M.
le Président, qu'est-ce qu'un
discours haineux. Où on tire la ligne entre ce qui est haineux et pas haineux?
Alors, il y a eu de longues discussions
là-dessus en commission parlementaire, également via les journaux, notamment
dans un éditorial du Devoir, des chroniques abondantes dans
l'ensemble des médias du Québec.
Parce que la
ministre a dit : Laissons les tribunaux éventuellement définir ce qu'est
un discours haineux. Bien, vous savez,
nous, comme parlementaires, on a cet immense privilège de pouvoir donner
quelques indications aux tribunaux. Mais
la ministre, elle s'en est lavé les mains tout de suite en disant :
Laissons les tribunaux s'inspirer de ce qui se fait ailleurs ou d'une éventuelle jurisprudence, le pouvoir des
juges, laissons-les construire ce qu'est une définition de discours haineux
au lieu de prendre cette question à bras le
corps. En fait, peut-être qu'elle a vu la complexité de ce que ça pouvait
représenter, définir «discours haineux», et elle a préféré s'en laver
les mains.
Ça, c'est malheureusement ce à quoi nous faisons
face ici. Ce qui a fait dire à des intervenants crédibles, des intervenants crédibles... Et je lisais les
articles, entre autres, de Marco Bélair-Cirino dans Le Devoir au
mois d'août, entre autres le 17 août, au moment où la commission
siégeait à plein régime. Me Julie Latour, ex-bâtonnière du Barreau de Montréal, et je la cite : La ministre a
«recours à un canon législatif pour tuer une mouche hypothétique». Au-delà de
la beauté de cette formule, c'est extrêmement significatif sur le
problème derrière le projet de loi n° 59.
Elle a créé
également, la ministre, une brigade d'enquête, hein, via la Commission des
droits de la personne et des droits
de la jeunesse, entre autres à l'alinéa deux de l'article 6 du projet de
loi n° 59, qui nous pose une série de questions. Ça va coûter
combien, cette brigade d'enquête, dans une époque d'austérité? Ça va nous
coûter combien? Comment elle va
procéder, cette brigade d'enquête? Surtout qu'il n'y a pas de définition claire
de ce que sont des soi-disant propos
haineux, alors ça donne toute une discrétion... tout un pouvoir discrétionnaire
à cette Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse de faire des
dérapages, inspirés, M. le Président, nous devons y revenir, de la loi du cadenas de Duplessis, comme il y a
eu des dérapages à cette époque. Alors, on n'est pas... on risque d'être
victimes de cela.
Me Latour et
Me Julius Grey, qui est bien connu également au Québec comme un défenseur acharné des droits de la personne, disent que ce projet de loi peut emmener, entre autres, via la brigade d'enquête créée par la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse via le projet
de loi n° 59, ça peut emmener,
et là je les cite, «un climat social de suspicion aux effets
délétères». On trouve que ça pourrait faire une belle façon de décrire le
climat qui a été emmené par la loi du cadenas de Duplessis.
Autre
problème avec le projet de loi n° 59, c'est qu'il ouvre la porte à des
abus. Il ouvre la porte à des dérapages, comme je disais tout à l'heure, il ouvre la porte à des abus, à des dérapages. Et je veux juste utiliser deux
exemples. Je veux juste utiliser deux cas possibles qui ont été énoncés
en commission parlementaire.
Premier
exemple a été longuement et fortement exprimé, illustré par Fatima Houda-Pepin,
l'ancienne députée de La Pinière. On se rappellera qu'elle a été exclue du caucus libéral par le premier ministre. Ça a été un événement assez marquant
de l'année 2014. Mais, en commission
parlementaire, Mme Houda-Pepin a
amené finalement ce que j'appellerais, moi, une réflexion a contrario sur le projet de loi n° 59. Elle dit qu'au fond ce projet de loi pourrait avoir un effet pernicieux ou un effet inattendu en emmenant une protection juridique aux
islamistes. Autrement dit, des groupes religieux pourraient se dire la cible d'un discours haineux, alors
qu'au fond il s'agit de la simple liberté d'expression, qui est celle de
critiquer des religions. Des groupes
pourraient prétendre ça à partir du moment où on ne définit pas ce qu'est un
discours haineux. Donc, Mme
Houda-Pepin nous dit que ça amène une menace au droit à la dissidence, et là on
est complètement dans le sens contraire de l'objectif que prétendait emmener ou rejoindre la ministre.
C'est que son projet de loi amènerait indirectement une protection supplémentaire aux intégristes. Alors, il faut le
faire, M. le Président. Et vous comprenez à quel point cela nous inquiète. Et c'est Mme Houda-Pepin, qui,
comme vous le savez, est très, très fortement impliquée dans toutes ces
questions et dans toutes ces préoccupations de lutte contre l'islamisme
radical.
Deuxième
exemple que je veux donner, et cela m'interpelle particulièrement, c'est toute
la question de la lutte contre l'homophobie. Alors, il y a plusieurs groupes qui sont venus en commission parlementaire pour insister sur l'approche préventive plutôt que répressive, donc rappeler à
quel point la prévention est davantage importante que la coercition. Et ce sont des groupes sérieux, la Chaire de recherche
sur l'homophobie de l'Université du Québec à Montréal, l'Association pour la diversité sexuelle et de genre de Bonaventure, en Gaspésie, la Coalition des familles LGBT, le fameux GRIS-Montréal et
Québec, Groupe de recherche et d'intervention sociale gais et lesbiennes, et
qui parlent eux aussi un peu comme Mme
Houda-Pepin, mais dans un autre volet, des effets pernicieux que peut emmener
le projet de loi n° 59, s'il devient loi, sur la lutte contre
l'homophobie.
Vous savez, M. le Président, l'homophobie est souvent le fait d'insultes, de moqueries, d'actes ou
d'actions qui nuisent à l'estime de
soi, qui isolent la personne qui en est victime, mais qui ne sont pas des
discours haineux pour autant, surtout dans un contexte où on ne sait pas
quelle est la définition de discours haineux.
• (17 h 20) •
Donc, ces
groupes nous disent quoi dans leur mémoire? C'est que le projet de loi n° 59, par les dispositions qu'il amène,
risquerait de banaliser l'homophobie, de banaliser le problème de l'homophobie.
Et le projet... le mémoire, c'est-à-dire, de ce groupe est extrêmement éclairant à cet
égard. Et je vous invite à le lire, notamment la conclusion à la page 16, là, de ce mémoire, M. le Président, c'est extrêmement éclairant et ça pose toutes sortes de
questions, entre autres, quant aux risques de dérapage possibles amenés
par le projet de loi n° 59, s'il s'avère qu'il devenait loi.
Alors,
comprenez que, de notre côté, nous voyons de nombreux risques à l'adoption de
ce projet de loi, c'est pour cette raison que nous vous informons que nous
allons voter contre. D'autant plus que nous croyons... Évidemment, considérant l'importance de
cet enjeu, nous croyons qu'il faut des actions structurées, des actions fortes,
des actions qui vont porter immédiatement
sur le terrain mais qui en même temps vont agir en amont pour éviter la répétition et la récurrence de ces actions des
groupes islamistes. Parce que, vous savez, comme le disaient des groupes
qui luttent contre l'homophobie, rien ne
vaut l'éducation, le travail sur le terrain de groupes communautaires. Par
exemple, Mme Fatima Houda-Pepin
propose la création d'un centre de recherche sur l'intégrisme. Et c'est, entre
autres, pour toutes ces raisons mais
aussi parce que nous y croyons fondamentalement que notre collègue de
Taschereau a déposé le projet de loi
n° 395, la Loi sur l'observateur de l'intégrisme religieux. Je vous invite
à le relire, M. le Président, parce que vraiment c'est un projet de loi qui implique l'Assemblée nationale en raison de
ce poste exceptionnel qu'est celui de l'observateur, qui serait nommé par l'Assemblée nationale, mais aussi
parce qu'il amène davantage un travail de compréhension, comme je le disais d'emblée, d'entrée de jeu, qui aurait
pour mission, cet observateur, d'identifier, de documenter les manifestations
d'intégrisme religieux au Québec, mais il
aurait également un pouvoir d'enquête, mais balisé, contrairement à ce que le
projet de loi n° 59 propose, un projet... ce
serait un pouvoir d'enquête balisé par une définition, par une définition de ce
qu'est l'intégrisme religieux.
Motion de scission
Alors, M. le
Président, là-dessus, je voudrais proposer une motion de scission qui se lirait
de la façon suivante :
«Qu'en vertu
de l'article 241 du règlement de l'Assemblée nationale, le projet de loi
n° 59, Loi édictant la Loi concernant
la prévention et la lutte contre les discours haineux et les discours incitant
à la violence et apportant diverses modifications législatives pour
renforcer la protection des personnes, soit scindé en deux projets de
loi :
«Un premier intitulé Loi édictant la Loi
concernant la prévention et la lutte contre les discours haineux et les
discours incitant à la violence, comprenant l'article 1 et
l'article 43; et
«Un
second [projet de loi] intitulé Loi apportant diverses modifications
législatives pour renforcer la protection des personnes, comprenant les
articles 2 à 43.»
Alors, je fais dépôt de cette motion, M. le
Président, et je vous remercie... Je vous remercie.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le député
de Jonquière, pour cette intervention. Votre motion est déposée.
Là-dessus, M. le député de... leader adjoint du gouvernement.
M.
Sklavounos :
Oui. M. le Président, je vous demanderais une suspension de cinq minutes, s'il
vous plaît, afin de regarder le tout, en prendre connaissance et revenir
avec les arguments.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) :
Je vais suspendre, M. le leader adjoint, jusqu'à 17 h 45. Les
précédents veulent qu'on suspende 15
à 20 minutes pour permettre à tous les députés de bien prendre
connaissance... Cinq minutes semblent convenir à tout le monde?
M.
Sklavounos : Oui,
M. le Président.
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
Alors, nous allons suspendre cinq minutes.
(Suspension de la séance à 17 h 24)
(Reprise à 17 h 33)
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
Alors, l'Assemblée poursuit ses travaux.
Débat sur la
recevabilité
Et je suis
prêt à entendre les plaidoiries sur la motion de scission présentée par M. le député de Jonquière. Et je
cède la parole à M. le leader adjoint du gouvernement.
M.
Gerry Sklavounos
M.
Sklavounos : Oui, merci, M. le Président. Alors, nous sommes
devant vous sur une motion de scission présentée en vertu de l'article
241 de notre règlement par notre collègue de Jonquière
avant de terminer son intervention. Et je veux vous lire, évidemment, juste pour les fins de clarté, cet article-là, M. le Président, que vous
connaissez bien : «Lorsqu'un projet
de loi contient plusieurs principes, il peut, avant leur adoption, faire
l'objet d'une motion de scission. Si elle est adoptée, les projets de
[la] loi résultant de la scission doivent être réinscrits à l'étape de la
présentation.
«Une telle
motion ne peut être faite qu'une fois, sauf par la ministre. Elle ne peut être
amendée et fait l'objet d'un débat restreint.»
Et nous sommes ici, M. le Président, devant un
projet de loi, et nous avons entendu, écouté attentivement l'argumentation de notre collègue de Jonquière,
nous présentant ce projet de loi comme ayant deux parties distinctes qui
peuvent coexister indépendamment.
On va
commencer au début, M. le Président, parce que — vous savez très bien, et je vais le réitérer
pour ceux et celles qui n'ont peut-être pas suivi — le
principe de ce projet de loi, puisque je vais vous soumettre à la fin de ma plaidoirie, entre autres, qu'il y a un principe
dans ce projet de loi. Et je commence en vous disant que ce principe s'inscrit
dans le cadre du plan d'action
gouvernemental 2015‑2018 qui visait à agir contre la radicalisation au Québec,
intitulé Agir, prévenir, détecter et vivre ensemble.
Alors, ce que
je vous soumets, M. le Président, c'est que les mesures qui sont proposées dans
ce projet de loi, malgré les
différentes modalités qu'elles puissent prendre lorsqu'on rentre dans les
détails, visent la protection des individus qui seraient vulnérables contre non
seulement les discours qui pourraient être haineux, qui pourraient susciter la haine, mais qui pourraient également
susciter la violence, et qui pourraient également aussi faire en sorte que des
individus passent à l'acte. Et vous avez
entendu à plusieurs reprises notre collègue faire référence à des incidents...
nos collègues de l'autre côté faire
référence à des incidents malheureux qui se sont passés dans notre pays, qui
ont fait en sorte que, veux veux pas,
notre société a vu ici, chez nous, des choses qui faisaient
plus partie des bulletins de nouvelles internationales qu'on
entendait, des choses qui se passaient à
l'extérieur, mais qui nous a ramené
cette question, ce sujet de la radicalisation, qui peut
mener, dans des circonstances, à de la violence, nous la ramener bien près de
chez nous.
Il y a
des mesures également, des modalités, dans ce projet de loi, pour protéger des individus, surtout des personnes qui sont en vulnérabilité, on pense entre autres à des mineurs, des dispositions pour protéger contre des mariages dans des situations qui ne cadrent pas avec nos valeurs et qui ne
cadrent pas avec la protection que, nous croyons, doit être apportée à des personnes d'un jeune âge et
qui visent également... Et il
y a une autre partie qui rentre à l'intérieur des institutions académiques, où il pourrait y avoir des messages
qui sont véhiculés, qui eux aussi ne cadrent pas avec nos valeurs
et qui ont le potentiel de provoquer des résultats qui peuvent soit provoquer
la haine, soit provoquer la violence, soit un mélange des deux, mais qui, de
toute façon, ne peuvent pas être
tolérés dans une société libre et démocratique,
où nous voulons favoriser le vivre-ensemble dans une société, un climat
pacifique.
Alors,
je vous soumets, M. le Président, que ces arguments font en sorte que le but,
le principe de ce projet de loi est bien la protection. Maintenant, vous
allez me dire : Mais il y a une partie qui agit sur la protection
contre... ou les discours, il y a une partie
qui agit contre la protection des actes, il y a une partie qui touche plus ce
qui est dit, d'autres parties sur ce
qui est fait, mais le principe qui englobe le tout est une de protection, et je
vous soumets que la protection soit à
l'encontre des mots, que ça soit à l'encontre des gestes, on est dans un
principe de protection. Pourquoi un principe de protection? Vous allez vous souvenir que même nos collègues,
lorsqu'il y a eu des appels à la ministre d'agir, nous mettaient le tout dans un amalgame et nous
disaient : Vous ne pouvez pas agir sur l'un sans agir sur l'autre parce
que l'un trouve sa genèse dans
l'autre. Et, en n'agissant pas en prévention, là où les paroles sont
prononcées, où ces paroles ont l'occasion
de toucher des gens qui sont vulnérables, vous vous retrouverez avec le
potentiel d'avoir des gens qui agissent sur ces propos-là et qui passent à l'acte, des gens vulnérables. Alors,
je vous soumets, M. le Président, que le principe est un, est unique,
les modalités sont différentes.
• (17 h 40) •
Maintenant,
outre cet argument, et vous le connaissez bien, M. le Président, il y a de la
jurisprudence, et je ne vais pas
passer mon temps à la réitérer pour vous, elle est bien connue, cette
jurisprudence-là, on va aller également sur le fait que nos jurisprudences et nos principes bien
connus nous obligent de regarder attentivement la motion de scission pour
voir si les parties qu'on vous demande de scinder peuvent exister indépendamment l'une de l'autre. Alors, il faut
regarder plus attentivement outre
cette argumentation que je viens de faire. Et vous êtes, évidemment... vous
connaissez bien que chaque projet de
loi qui résulterait de cette motion de scission, si jamais elle était accordée
et votée, devrait créer des lois, des projets de loi qui seraient
cohérents, complets et qui pourraient vivre indépendamment l'un de l'autre. Il
y a des décisions, je vous citerais, 1er
juin 1995, Raymond Brouillet : «Chaque série de mesures [...] forme en soi
un tout cohérent qui peut exister
distinctement.» Donc, le contraire est aussi vrai, et je vais vous citer, avant
de vous amener directement sur la
partie qui pose problème, quant à nous, la décision de votre collègue, que je
ne peux pas nommer, votre collègue vice-président,
241.16, une décision du 27 mai 2004, où on avait évidemment à se prononcer sur
la recevabilité d'une motion de
scission, et je vais vous citer une partie de cette décision-là : «En effet, l'article 18, qui concerne l'entrée en vigueur du projet
de loi, se retrouve dans les deux projets de loi qui résulteraient de la scission. Or, il contient des références
à des dispositions contenues uniquement dans
le premier projet de loi proposé dans la motion de scission. Cela fait en
sorte que cet article réfère à des dispositions qui ne se retrouvent
[plus] dans le deuxième projet de loi.»
Alors, vous
avez un cas très spécifique. Je vais vous référer maintenant
aux articles particuliers qui nous concernent, où, si on est pris avec deux projets
de loi qui résulteraient
distinctement, mais que, dans le deuxième, on ferait référence... et qui nécessiterait un des articles du premier
pour pouvoir exister et donner force à cet article, et cet article aura été
enlevé dans la scission et existerait
seulement dans le premier, bien, le deuxième ne pourrait
exister indépendamment, et donc la motion serait irrecevable et caduque
selon la jurisprudence, bien claire, M. le Président.
Alors,
regardant le projet de loi maintenant, M. le
Président, je vous réfère évidemment
à la partie I, qui comporte l'article 1,
mais qui est introductif... d'autres articles. Alors, à l'intérieur de l'article 1, on prend complètement la première partie du projet
de loi, qui veut dire que, est
introductif des articles 1 à... il termine avec 25. Et je vous demande
d'aller à l'article 17, plus particulièrement introduit par l'article 1 dans la première partie, et je vais vous
lire, et vous pouvez suivre avec moi : «Section II. Autres
fonctions et obligations de la commission.
«17. Pour l'application de la présente loi, la commission
assume en outre les fonctions suivantes :
«1° assurer un rôle de prévention et d'éducation en
matière de lutte contre les discours haineux et ceux incitant à la
violence;
«2° formuler
des recommandations au gouvernement sur toute mesure de prévention et de lutte
contre les discours haineux et ceux incitant à la violence;
«3° tenir à
jour une liste des personnes qui ont fait l'objet d'une décision du tribunal
concluant qu'ils ont enfreint une
interdiction prévue à l'article 2, et la rendre disponible sur son site
Internet.» Alors, cet article-là, le 17.3° introduit par le 1, donne le mandat de créer cette liste.
Maintenant, cet article-là partirait selon la motion de scission que vous avez
devant vous — mais que j'essaie de trouver devant
moi — dans le
premier projet de loi qu'on vous demande de... qui résulterait de cette
motion de scission. Alors, si je vous amène... Merci, madame.
Alors, parce que, vous voyez, on vous demande de
créer un premier projet de loi intitulé Loi édictant la Loi concernant la prévention et la lutte contre les
discours haineux et les discours incitant à la violence, comprenant l'article
1, qui inclut le 17.13° et le 43, qui veut dire que le 17.13° quitterait
et irait avec le premier projet de loi.
Là, le
deuxième qui en résulterait... Si on lit attentivement, M. le Président, je
vous invite à lire l'article 27 dans la deuxième partie du projet de loi : L'article 118 de la Loi sur
l'enseignement privé est modifié par l'insertion, après le premier
alinéa, des suivants :
«Le ministre
peut également désigner une personne pour enquêter sur tout comportement
pouvant raisonnablement faire craindre pour la sécurité physique ou
morale des élèves.
«Est réputée
avoir un comportement pouvant raisonnablement faire craindre pour la sécurité
physique ou morale des élèves, la
personne dont le nom est inscrit sur la liste tenue par la Commission des
droits de la personne et des droits de
la jeunesse en vertu de la Loi concernant la prévention et la lutte contre les
discours haineux et les discours incitant à la violence.»
Le problème
avec ça, M. le Président, c'est que, si on vient d'enlever le 17.3° avec
l'article 1 de la première partie, bien, il serait très difficile que le
27 existe indépendamment, et donc le 27... Et il y a également le 32, je vous
invite à regarder l'article 32 également de
cette deuxième partie, qui fait également, dans le dernier alinéa, référence
également à cette liste-là. Alors, on
lirait ce projet de loi puis on se demanderait de quelle liste on parle, où est
la liste, d'où vient la liste; bien, la liste n'est pas là, elle est
partie dans l'autre projet de loi.
Alors, sans vouloir retarder indûment
mon intervention, M. le Président, je vous soumets que, pour cette raison-là,
qui est apparente à la face même, à la
lecture de cette motion-là, suite à notre lecture du projet de loi et des deux
qui en résulteraient, nous sommes
devant une situation où la motion de scission ne peut être acceptée puisque les
deux projets de loi qui en
résulteraient ne seraient pas cohérents, ne pourraient pas exister
indépendamment une fois une telle motion accordée. Alors, le tout
respectueusement soumis, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le leader
adjoint du gouvernement. Je suis prêt à entendre d'autres plaidoiries
sur la recevabilité et je cède la parole à Mme la leader adjointe de
l'opposition officielle.
Mme Agnès Maltais
Mme
Maltais : M. le Président, ce projet de loi, c'est
exactement deux principes très différents. Je n'en reviens pas d'entendre le leader adjoint du gouvernement
dire que le grand principe, c'est l'intention gouvernementale. On a souvent
plaidé ici, dans l'Assemblée nationale,
qu'une scission, ça se fait sur la loi qui est présentée et non pas sur
l'intention du gouvernement.
L'intention
du gouvernement, c'est le plan de lutte à la radicalisation. Et la preuve même
que le leader adjoint erre, sûrement
pas de façon intentionnelle, bien sûr, en disant qu'il s'agit d'une intention
gouvernementale, donc ça doit se refléter dans une seule loi, c'est que
l'intention gouvernementale, qui est le plan de radicalisation selon sa propre ministre...
j'espère qu'il est d'accord avec sa ministre, sa ministre dit : Tout ça découle d'un plan de lutte à
la radicalisation qui s'exprime dans plusieurs
lois. Déjà, le projet
de loi n° 59 et le projet de loi n° 62, d'après sa propre ministre,
membre de son gouvernement, la ministre de la Justice, sont deux lois qui découlent de l'intention gouvernementale de lutter contre la radicalisation. Donc, l'affirmation du
leader adjoint selon laquelle un principe est une intention gouvernementale est
démentie par les gestes de son gouvernement. Il y a déjà la loi n° 59, il
y a déjà le projet de loi n° 62, et il y aurait un troisième projet de loi.
Donc, cette idée d'une intention gouvernementale est un principe est totalement
erronée et a souvent, M. le Président, été plaidée dans cette Assemblée. C'est
arrivé régulièrement.
Donc,
quels sont les deux principes qui sont dans cette loi? Ils sont édictés clairement
dans le titre. Le titre nous propose
une loi édictant la Loi concernant la
prévention et la lutte contre les discours haineux et les discours incitant à
la violence. C'est une loi. Elle est
inscrite telle quelle dans la loi. Et le deuxième, c'est d'apporter diverses
modifications législatives pour renforcer la protection des personnes.
Or,
comment je peux dire que la première partie que j'ai nommée, qui termine au mot
«violence», est en soi une loi indépendante, autonome, et tout? Regardez
bien. L'article 1 édicte un texte qui suit à l'intérieur de l'article 1 dans combien d'articles, dans 25 articles. 25 articles.
Donc, c'est une nouvelle loi qui est édictée par l'article 1. Elle est autonome
en soi. Elle ne réfère à aucun autre article
d'un autre projet de loi. Aucun autre article d'une autre loi n'est référé
là-dedans, c'est véritablement... c'est une nouvelle loi sur un nouveau
principe, de nouvelles idées. On peut être d'accord ou pas d'accord, mais c'est
intégral.
• (17 h 50) •
Chaque
partie du projet de loi scindé peut être considérée distinctement et constitue
plus qu'une simple modalité. La première partie, c'est les discours
haineux, et on en a parlé, qui incitent à la violence. La deuxième partie,
c'est la protection des personnes, c'est
totalement et intégralement la protection des personnes, complètement
différent. D'ailleurs, souvent, j'ai plaidé, et je l'ai fait encore cet
après-midi, en disant : Écoutez, la partie importante de cette loi-là, on
la retrouve dans la partie II, c'est les
mariages forcés, par exemple. Alors, tous les intervenants en commission
parlementaire sont même venus nous dire :
Ce sont deux principes complètement différents, traitez-les de façon séparée,
c'est important, parce qu'on n'est pas dans les mêmes objets. Alors, ce
sont deux principes totalement différents.
Et les projets de loi
qui résulteraient de la scission constituent des projets de loi cohérents en
eux-mêmes. Il n'y a aucune référence dans la
partie II disant : Allez voir tel autre article, réfère à l'article 22,
réfère à l'article 12. Il n'y a aucune référence à une autre disposition
ailleurs. Ils se tiennent intégralement. Ils sont indépendants tels quels.
Et
finalement il n'y a aucun article qui a été oublié, tous les articles seraient
à l'intérieur de la scission qu'on propose, aucun oubli, tout y est.
Deuxièmement, on n'y ajoute aucun élément nouveau.
Les
critères que je viens d'énumérer ont été réitérés à de nombreuses reprises,
notamment par Lefebvre, en 1990, Pinard,
Claude Pinard, le 11 décembre 1997, Claude Pinard, le 3 juin 1998, Raymond
Brouillet, le 29 novembre 2000, le
député d'Abitibi-Ouest, le 5 juin 2006, et Fatima Houda-Pepin, 18 mai 2011.
Toutes ces décisions confirment le plaidoyer que je vous tiens.
De
plus, concernant l'article 43... Et là ça démolit un peu l'argument du leader
adjoint. L'article 43 a déjà ce type d'article
qui est final, là, qui est la fin de la... qui est la finale d'une loi, le
dernier article, qui, dans ce cas-ci, dit : «Les dispositions de la
présente loi entreront en vigueur à la date ou aux dates déterminées par le
gouvernement.» Il a déjà été édicté que,
dans cette Assemblée, souvent, l'article de mise en vigueur de la loi doit être
séparé sans qu'on le modifie. Bien
là, on l'accole aux deux, tout simplement. Il n'y a aucune modification de
l'article. Décision du 27 mai 2004. Je vais la citer. Elle est importante,
cette décision. Le député d'Abitibi-Ouest indiquait qu'«une motion de scission
doit contenir les précisions
nécessaires afin d'être déclarée recevable sans que la présidence ait à
modifier le contenu de la motion». Aucun problème. «La présidence ne
peut apporter que des corrections de forme, conformément à l'article 193, et la
modification de certains articles visés par
une motion de scission n'entre pas dans cette catégorie de corrections.» On ne
demande aucune modification. «Dans une
motion de scission, on ne doit pas réécrire les articles du projet de loi dans
le but de la rendre recevable.»
Aucune réécriture, aucune réécriture. «Cependant, la présidence doit déclarer
recevable une motion de scission qui adapterait l'article d'entrée en
vigueur aux projets de loi qui résulterait de la scission.» Jugé
27 mai 2004, le député d'Abitibi-Ouest.
D'ailleurs,
dans tous les projets de loi, il y a uniquement un article d'entrée en vigueur
et la présidence a toujours déclaré
recevable une motion qui inclut cet article dans tous les projets de loi qui
résultent de cette scission. Ce que nous faisons, c'est exactement ça : on prend l'article, on ne le modifie
pas, mais on l'inclut dans tous les projets de loi qui résultent de cette scission. C'est une pratique qui a été
confirmée encore une fois par le député d'Abitibi-Ouest dans sa décision
du 23 mars 2010.
Donc, à
notre sens, M. le Président, cette motion est tout à fait acceptable,
recevable. Ce sont deux lois complètement indépendantes, séparées. Et je dirais que, pour le gouvernement, de
voter pour, d'accepter qu'on fasse deux lois avec ça serait répondre à la grande demande qui a été
faite pendant les auditions en commission parlementaire. La population, les groupes concernés nous ont demandé de traiter
ces deux questions séparément parce que ce sont deux questions séparées.
Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci, Mme la leader
adjointe de l'opposition officielle. Y a-t-il d'autres interventions sur la recevabilité? Sinon, je
remercie et la leader adjointe de l'opposition officielle et le leader adjoint
du gouvernement. Et je vous avise que
je vais prendre cette question en délibéré. Lorsque le principe du projet de
loi sera rappelé, je rendrai ma décision à ce moment-là.
Ajournement
Et d'ici là,
compte tenu de l'heure, je vais ajourner les travaux à
mardi 3 novembre 2015 à 13 h 40. Merci et bonne
fin de semaine.
(Fin de la séance à 17 h 55)