(Neuf heures quarante-six minutes)
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, chers collègues, je vous souhaite une très belle journée.
Veuillez vous asseoir.
Affaires courantes
Déclarations de députés
Nous
en sommes à la rubrique de la déclaration
des députés, et je cède la parole à Mme la députée de Crémazie.
Souligner la Journée nationale de l'enfant
Mme Marie Montpetit
Mme
Montpetit : Merci, M. le Président. Il me fait grandement plaisir aujourd'hui
de souligner la journée internationale des
enfants, cette journée célébrée à chaque 19 novembre, en synergie avec la
journée des droits des enfants, qui sera célébrée demain, le 20
novembre.
Dans
le cadre de cette journée, l'organisme Espace, dont la mission est vouée à la
protection des enfants et à la prévention
de la violence, met de l'avant le port du ruban bleu, un geste qui se veut un
appui à l'importance de protéger le droit
des enfants. Aujourd'hui, nous avons l'occasion de nous rappeler que nous
devons porter une attention sans relâche à leurs droits. Ils sont une de nos richesses les plus précieuses, et il
en va de notre responsabilité de veiller à les protéger.
À titre d'adjointe
parlementaire à la ministre déléguée à la Réadaptation, à la Protection de la
jeunesse et à la Santé publique, mais
également comme maman, j'invite mes collègues à supporter cette initiative et à
porter le ruban bleu tout au long de la journée.
En
terminant, M. le Président, je tiens également à souligner la Semaine des
centres jeunesse du Québec, qui se déroule cette semaine sous le
thème Nos jeunes d'aujourd'hui, nos adultes de demain. Merci.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, Mme la
députée. Je cède maintenant la parole à M. le député de Saint-Jean.
Féliciter les Géants du cégep Saint-Jean-sur-Richelieu,
gagnants de leur 10e Bol d'or
M. Dave Turcotte
M.
Turcotte : En fin de semaine, Saint-Jean-sur-Richelieu était
l'hôte de la finale du Bol d'or et a eu l'honneur d'accueillir des équipes de football étudiant de
partout au Québec. C'est vendredi soir, pour ouvrir ce championnat, que les
Géants du cégep Saint-Jean-sur-Richelieu, accompagnés de leur treizième joueur,
c'est-à-dire la foule de 2 400 spectateurs, qui étaient en feu malgré le froid, ont vaincu les Phénix du collège
André-Grasset 37 à 10. Cette victoire titanesque permet aux troupes de
l'entraîneur Alex Surprenant de remporter le 10e Bol d'or de l'équipe et le
premier depuis 1998.
Cette
victoire est une fierté pour tous les Johannais, et, à titre de député de
Saint-Jean, je désire vous féliciter pour la saison de rêve que vous
nous avez apportée, une saison qui aura permis à sept joueurs des Géants de
faire partie de l'équipe étoile 2014 du Réseau du sport étudiant du Québec.
Alors,
à Nicola, Samuel, Kevin, Pierre-Karl, Philippe, Jonathan, William, notre étoile
du match Gabriel et à tous les autres, je vous dis bravo, les Géants!
Le Vice-Président
(M. Ouimet) : Merci à vous, M. le député de Saint-Jean. M. le
député de Maskinongé.
Rendre hommage à Mme Pierrette Plante-Roy,
récipiendaire de la Médaille de l'Assemblée
nationale pour son engagement bénévole
M. Marc H. Plante
M.
Plante : Merci beaucoup, M. le Président. Permettez-moi aujourd'hui de
souligner le travail exceptionnel d'une grande bénévole du comté de
Maskinongé, soit Mme Pierrette Plante-Roy.
Mme Plante-Roy
est présidente du Noël du pauvre depuis plus de 10 ans. Elle est très
impliquée dans son milieu. Elle est
vice-présidente des Dames charitables, de la Fondation québécoise du cancer,
section Mauricie. Elle est également bénévole
de la fondation du centre de santé et de services sociaux de la MRC de
Maskinongé, du centre de bénévolat de Louiseville.
Je tiens donc aujourd'hui à souligner
l'engagement de Mme Plante-Roy auprès des personnes âgées dans les foyers de la municipalité. M. le Président, la
population du comté de Maskinongé est choyée de pouvoir compter sur une personne de coeur qui
fait preuve d'altruisme, une personne aussi dévouée au bien-être d'autrui. Au
nom de mes concitoyens, j'aurai le
privilège ce soir de décerner à Mme Plante-Roy une médaille de l'Assemblée
nationale pour son engagement bénévole qui fait une différence dans la
vie de ceux et celles qui la côtoient. Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Merci à vous, M. le député de
Maskinongé. Mme la députée de Saint-Hyacinthe, je vous cède la parole.
Souligner la première année d'existence
de la maison de répit en agriculture
Mme Chantal Soucy
Mme
Soucy : Merci, M. le Président. Aujourd'hui, je veux souligner la
première année d'existence de la maison de répit en agriculture du
Québec.
Le
20 septembre 2013, cette maison ouvrait officiellement ses portes sur la
rue Benoît à Saint-Hyacinthe. Ce projet est né de l'initiative de
l'organisme Au Coeur des familles agricoles et de ses dirigeants, dont la
présidente actuelle, Mme Lise Tremblay,
et sa directrice générale, Maria Labrecque Duchesneau, qui sont ici présentes
avec nous. Pendant deux ans, elles
ont travaillé d'arrache-pied pour convaincre donateurs, commanditaires et
gouvernements à contribuer au bien-être des familles agricoles qui
vivent des moments difficiles.
Il
faut connaître les agriculteurs pour savoir que ce sont des gens travaillant
365 jours par année, des gens fiers et orgueilleux qui n'iront pas chercher facilement de l'aide. La maison
répit en agriculture est donc essentielle. Le travail que la maison
accomplit pour aider et conseiller les agriculteurs qui vivent des moments
difficiles est inestimable.
En
espérant que le gouvernement mettra un jour l'agriculture dans ses listes de
priorités, je remercie Mmes Labrecque et Duchesneau pour leur engagement et leur dévouement et je les
encourage à poursuivre leur mission. Merci, M. le Président.
• (9 h 50) •
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Merci à vous, Mme la députée de
Saint-Hyacinthe. M. le député de Sainte-Rose.
Rendre hommage à l'Association
pulmonaire du Québec
M. Jean Habel
M.
Habel : Merci, M. le Président. En tant que membre de la Commission de
la santé et des services sociaux, permettez-moi
de saluer l'Association pulmonaire du Québec, qui a pour mission de combattre
les maladies respiratoires grâce à la recherche, l'éducation, la
prévention et le soutien aux personnes atteintes.
Il
existe de nombreuses maladies pulmonaires, dont la bronchite chronique et
emphysème. Cette maladie pulmonaire chronique
est associée au plus haut taux d'hospitalisation et constitue l'une des
principales causes d'engorgement des salles d'urgence de la province. Le
cancer du poumon, quant à lui, demeure le plus meurtrier de tous les cancers.
Au Québec en 2014, on estime que
6 400 personnes décéderont des suites de cette maladie. L'asthme est
une maladie pulmonaire qui touche
plus de 350 000 enfants et adolescents dans la province, et près de
50 % des personnes asthmatiques maîtrisent mal leur condition.
Dans
le cadre de la journée de la sensibilisation à l'Assemblée nationale,
l'Association pulmonaire du Québec souhaite
que les parlementaires luttent contre l'augmentation alarmante des cas de
maladie pulmonaire et a proposé des mesures en amont et en aval pour
contrer la maladie. Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Merci à vous, M. le député de
Sainte-Rose. M. le député de Rosemont, je vous cède la parole.
Souligner la Semaine des centres jeunesse
M. Jean-François Lisée
M.
Lisée : Merci, M. le Président. Je suis heureux de souligner
aujourd'hui la Semaine des centres jeunesse du Québec 2014 qui se déroule du 16 au 22 novembre. C'est l'occasion
de reconnaître le travail de plus de 14 000 femmes et hommes unis autour d'un même but depuis plus de
20 ans : accompagner et aider les jeunes en difficulté et leurs
familles. Je tiens à exprimer ma
reconnaissance pour l'énergie qu'ils consacrent à des milliers de jeunes qui
chaque année fréquentent les centres jeunesse. Et, grâce à leur soutien
humain et chaleureux, ces jeunes s'épanouissent et réalisent leurs rêves.
Il
est malheureusement difficile de passer sous silence l'inquiétude
suscitée par le projet de loi
n° 10 du ministre de la Santé, qui entend fusionner
les centres jeunesse dans de nouvelles mégastructures. La fusion proposée
risque de déstructurer le modèle de
protection de la jeunesse du Québec pourtant efficace et envié à l'extérieur de nos frontières. Les
centres jeunesse détiennent une expertise inestimable, il est donc essentiel que ce modèle, un succès québécois, soit
préservé et valorisé pour 20 ans, et encore 20 ans, et encore 20 ans. Merci, M.
le Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Merci à vous, M. le député de
Rosemont. Mme la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré, à vous la parole.
Féliciter Mme Catherine Dufour,
championne
nord-américaine et 10e au championnat
du monde de kitesurf
Mme Caroline Simard
Mme
Simard : Merci, M. le Président. Alors, je souhaite aujourd'hui
féliciter Catherine Dufour, une jeune athlète de L'Île-aux-Coudres présente
dans nos tribunes, pour ses performances remarquables et remarquées en
kitesurf.
Actuellement
championne nord-américaine et 10e au championnat du monde, Catherine a appris à
faire du kitesurfing à l'île, où les
conditions de vent sont réputées comme étant particulièrement remarquables. Ce
n'est certes pas sans raison qu'on a
mis sur pied, en 2010, un OSBL ayant comme mission de promouvoir L'Île-aux-Coudres
comme destination kitesurf privilégiée.
Il
suffit de parler avec Catherine ou de lire à son sujet pour constater que le
kitesurf a changé positivement sa vie. L'adrénaline,
le privilège de visiter des endroits inaccessibles et la volonté de se dépasser
sont des raisons motivant sa passion
pour ce sport. Selon Catherine, elle participe au développement du plus beau
sport jamais inventé. Elle consacre d'ailleurs
son énergie à devenir une ambassadrice pour le Canada et pour la voile, ce
qu'elle fait parfaitement. Félicitations, Catherine! Tu es un bel
exemple de fierté régionale. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président
(M. Ouimet) : Alors, merci à vous, Mme la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré.
Mme la députée de Bellechasse, à vous la parole.
Féliciter les lauréates de la soirée
Hommage aux femmes d'influence
Mme Dominique Vien
Mme
Vien : Merci beaucoup, M. le Président. Je félicite la direction de la Chambre de
commerce de Bellechasse-Etchemins pour la soirée reconnaissance Hommage
aux femmes d'influence qui avait lieu récemment. 16 femmes au parcours exceptionnel ont été honorées pour leurs
qualités humaines, leurs talents de gestionnaires, leurs contributions à la vie communautaire et à l'avancement
des femmes. Et ces femmes d'influence sont les suivantes, je vais vous les nommer, M.
le Président : Mmes Paule
Baillargeon, Isabelle Bilodeau, Chantal Brochu, Nathalie Chabot, Cathy Demers,
Laurence Couture, Francine Ferland, Thérèse Gagnon, Caroline Gilbert,
Marie-Claude Guillemette, Maryan Lacasse, Marie-Claire
Larose, Nancy Lemieux, Nicole Mathieu, Céline Plante et Linda Saindon. Mesdames,
je vous salue et je vous redis toute mon appréciation.
Le Vice-Président
(M. Ouimet) : Alors, merci à vous, Mme la députée de Bellechasse.
Mme la députée de Laporte, à vous la parole.
Rendre hommage à soeur Gisèle Lalande, récipiendaire
de la Médaille de l'Assemblée nationale
Mme Nicole Ménard
Mme
Ménard : Merci, M. le Président. J'ai eu le privilège de remettre la Médaille de l'Assemblée nationale du Québec à soeur Gisèle Lalande pour
souligner 50 ans de dévouement et d'implication au sein du collège Durocher de
Saint-Lambert. Son histoire avec le collège débute en 1964, alors qu'elle
enseigne les mathématiques, et ce, pendant 34
ans. Elle est aussi responsable de la photographie, de l'audiovisuel, de
l'album des finissants, et j'en passe. Depuis sa retraite, elle continue de donner d'elle-même en siégeant au conseil d'administration de la fondation, au comité des bourses et au cabinet de campagne de l'école. Elle
a toujours su mettre ses élèves au coeur de ses projets et encourager
leurs réussites qui font la renommée du collège.
Félicitations,
soeur Lalande, pour votre implication et votre dévouement qui font de vous un
exemple pour notre communauté et pour l'ensemble du Québec! Merci.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Merci à vous, Mme la
députée de Laporte.
Enfin, M. le député de Verchères, je vous cède la parole.
Souligner le 20e anniversaire de la Fondation
Centre d'accueil Contrecoeur
M. Stéphane Bergeron
M.
Bergeron : Merci, M. le Président. C'est le 27 septembre dernier que nous avons
souligné, à l'occasion du souper
spaghetti de la Fondation du Centre d'accueil de Contrecoeur, le 20e
anniversaire de cette remarquable organisation vouée à l'amélioration des conditions de vie des
résidentes et résidents du Centre d'hébergement de Contrecoeur. On parle
ici, M. le Président, de 20 années
de dévouement exemplaire consacré au mieux-être des bénéficiaires, ce qui se
traduit par l'achat d'équipement adapté, la mise en place d'un milieu de
vie chaleureux ainsi que l'organisation d'activités thérapeutiques et récréatives, tout cela avec pour objectif d'assurer
confort et divertissement au quotidien à ces membres à part entière de notre communauté, à qui nous
devons tant, contribuant ainsi à égayer leur séjour et le rendre toujours plus
agréable.
Qu'il
me soit donc permis d'exprimer aux dévoués membres de la fondation du centre
d'accueil de Contrecoeur toute ma
gratitude et mes plus chaleureuses félicitations pour leur engagement
indéfectible. Longue vie à la Fondation du Centre d'accueil de Contrecoeur, ainsi qu'à ses valeureux bénévoles, au
personnel du Centre d'hébergement de Contrecoeur et à ces personnes
inestimables qui sont au centre de leur attention! Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Merci à vous, M. le député de Verchères. Voilà qui met un terme à la rubrique
Déclarations de députés.
Je suspends les
travaux de l'Assemblée quelques instants.
(Suspension de la séance à
9 h 57)
(Reprise à 10 h 19)
Le Président :
Bon début de journée, chers collègues. Nous allons nous recueillir quelques
instants.
Merci. Veuillez vous
asseoir.
Une voix :
…
Le Président :
Pas tant que ça, quand même. Vous avez raison.
Présence
de l'ambassadeur de la république
de Corée, M. Cho Hee-yong
Alors,
j'ai le plaisir de souligner la présence dans nos tribunes de l'ambassadeur de
la république de Corée, Son Excellence M. Cho Hee-yong, à l'occasion de
sa visite officielle.
Présence
du consul général de l'État d'Israël
à Montréal, M. Ziv Nevo Kulman
Également,
j'ai le plaisir de souligner la présence du consul général de l'État d'Israël à
Montréal, M. Ziv Nevo Kulman, à l'occasion de sa
visite de prise de poste.
Présence
de M. Pierre Corbeil, ex-parlementaire
de l'Assemblée nationale
Et
je remarque que nous avons aussi un ancien collègue parlementaire parmi nous ce matin, M. Pierre Corbeil, l'ancien député
d'Abitibi-Est.
• (10 h 20) •
Nous
poursuivons les affaires courantes. Aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations
ministérielles ni présentation de projets de loi.
Dépôt
de documents
À
la rubrique Dépôt de documents... Donc, à la rubrique Dépôt de documents, pour
ma part, je... C'est moi qui dépose un document.
Rapport détaillé des résultats
du scrutin tenu dans la
circonscription électorale de Lévis le 20 octobre 2014
Alors,
je dépose le rapport du Directeur général des élections concernant les
résultats officiels du scrutin qui s'est tenu le 20 octobre 2014 dans la circonscription électorale de Lévis, au plus
grand bonheur du député de Lévis, évidemment.
Dépôt
de rapports de commissions
À
la rubrique Dépôt de rapports de commissions, M. le président de la Commission
des transports et de l'environnement et député d'Orford.
Consultations
particulières sur le projet de loi n° 16
M.
Reid : M. le
Président, je dépose le rapport de la Commission des transports et de
l'environnement qui, le 18 novembre 2014, a
procédé à des consultations particulières et tenu des auditions publiques sur
le projet de loi n° 16, Loi modifiant la Loi sur les véhicules hors
route et d'autres dispositions.
Dépôt de documents (suite)
Le
Président : Alors, ce rapport est déposé. Je reviens à la
rubrique Dépôt de documents. M. le leader du gouvernement.
Réponse à une pétition
M.
Fournier : Oui, avec mes excuses, M. le Président.
Permettez-moi de déposer la réponse du gouvernement à la pétition
déposée par la députée d'Hochelaga-Maisonneuve le 18 septembre 2014.
Dépôt de pétitions
Le Président : Alors, ces
documents sont déposés.
À la rubrique
Dépôt de pétitions, M. le député de L'Assomption et chef du deuxième groupe
d'opposition voudrait présenter une
pétition qui est non conforme. Est-ce que j'ai un consentement? Consentement?
Consentement. M. le député de L'Assomption, nous vous écoutons.
Maintenir l'interdiction de l'euthanasie
M. Legault :
Oui. M. le Président, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée
nationale, signée par 108 pétitionnaires. Désignation : citoyens et
citoyennes du Québec.
«Les faits invoqués sont les suivants :
«Considérant
que nous disons oui aux soins palliatifs accessibles à tous, mais non à
l'euthanasie présentée sous le nom d'"aide médicale à mourir";
«Et l'intervention réclamée se résume
ainsi :
«Nous,
soussignés, agissons en qualité de citoyens concernés et demandons à nos
dirigeants du Québec de ne pas légaliser l'euthanasie.»
Je certifie que cet extrait est conforme à
l'original de la pétition.
Le Président : Alors,
l'extrait de cette pétition est déposé.
J'ai aussi
reçu, de la part de M. le député de Rousseau, une demande de dépôt d'une
pétition qui est non conforme. Est-ce que j'ai un consentement? Vous
consentez? Alors, consentement. M. le député de Rousseau.
Empêcher l'établissement d'une nouvelle sablière
dans la Grande-Jetée, à Chertsey
M. Marceau :
Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à
l'Assemblée nationale, signée par
2 785 pétitionnaires. Désignation : citoyens et citoyennes de la
municipalité de Chertsey. Il n'y a pas de faits invoqués.
«Et l'intervention réclamée se résume
ainsi :
«Nous,
soussignés, nous joignons aux membres du conseil municipal afin de contrer
l'établissement d'une nouvelle sablière dans la Grande-Jetée.»
Je certifie que cet extrait est conforme à
l'original de la pétition.
Le Président : Alors,
l'extrait de cette pétition est déposé.
Il n'y a pas
de réponses orales, ni de pétitions, ni d'interventions portant sur une
violation de droit ou de privilège.
Questions et réponses orales
Nous sommes donc rendus à la période de
questions et de réponses orales. J'invite maintenant M. le chef de l'opposition
officielle.
Projet d'oléoduc Énergie Est
M. Stéphane Bédard
M.
Bédard :
M. le Président, hier, le Sénat américain n'a pas approuvé le projet de loi
autorisant la construction du
pipeline qui devait permettre d'acheminer le pétrole des sables bitumineux de
l'Alberta vers le golfe du Mexique. Les élus américains, eux, ont donc droit au chapitre et refusent ce que le
premier ministre du Québec, lui, accepte en échange d'un chèque de péréquation. Les élus américains se
sont donc prononcés sur le projet, un luxe qui ne nous est pas donné, M.
le Président; trop de risques pour eux, pas assez d'avantages économiques.
Hier, donc, dans un vrai pays, on évalue qu'il y a
plus de risques que d'avantages à aller de l'avant, mais, dans la réalité du Québec d'aujourd'hui, nous sommes incapables de décider ce qui se passe chez nous, M. le Président. Aussi simple que ça. On est
dans une réalité provinciale bien réelle qu'a même... nous l'a rappelé, d'ailleurs, le premier ministre et le chef de la deuxième
opposition, en choeur, d'ailleurs.
Est-ce
que le premier ministre peut nous dire ce qui arrivera si les Québécois disent
non au projet de TransCanada Énergie
dans notre réalité provinciale? Le premier ministre peut nous le dire... peut-il nous dire s'il sera
capable de faire respecter la volonté du Québec et d'empêcher la réalisation de
ce projet?
Le Président : M. le premier
ministre.
M.
Philippe Couillard
M. Couillard : Alors, M. le Président, je vais rassurer notre
collègue, d'abord pour lui dire que, comme nous, il a une grande chance d'être né de ce côté-ci de la
planète, ce qui lui donne une patrie, le Québec, et un pays, le Canada.
Et, pour ça, on doit tous en être heureux, M. le
Président.
Maintenant, je ne sais pas où il prend qu'on
a approuvé le projet de TransCanada. Je ne sais pas dans quel rêve ou dans quelle dimension parallèle de l'univers il
se trouvait, parce qu'à ce que je sache le gouvernement n'a pas accepté,
n'a pas approuvé ce projet. Il a cependant établi très clairement... y compris
par écrit, au président de la compagnie TransCanada, que les règles et règlements
environnementaux du Québec allaient s'assumer, que nous allions assumer notre pleine juridiction, qu'il y avait des
exigences à remplir pour les autochtones, pour la
sécurité en cas de déversement et
les autres règles normales, M. le Président, que le Québec doit imposer et
exiger avant d'autoriser ce projet, qui n'est pas encore autorisé, je le
rappelle, malgré la façon dont la question a
été posée.
Il
est clair, M. le Président, qu'on veut également analyser... Et cette
entreprise, en passant, qui est une entreprise constituée, a le droit qu'on analyse son projet correctement. Cependant,
c'est notre devoir de faire part à cette entreprise, au promoteur
du projet, qu'il y a des conditions à remplir sur le développement économique,
les retombées, l'environnement, la
relation avec les peuples autochtones. Et nous allons le faire de façon très
ferme, mais avec également un esprit d'équité envers tous ceux concernés, bien sûr, la population du Québec au premier
choix, mais également l'entreprise, qui doit voir l'objet de son projet
faire l'objet d'un... pardon, son projet faire
l'objet d'un examen équitable.
Le Président : Première complémentaire, M. le chef
de l'opposition.
M.
Stéphane Bédard
M.
Bédard : Le premier
ministre a une mémoire sélective sur ses engagements, mais il en a aussi sur
ses propos. Il a clairement dit, en cette Chambre,
que c'était normal, on recevait un chèque de péréquation, donc c'était normal
qu'on laisse passer le pétrole ici sans avantage.
Mais il parle de la compagnie. Hier, à plusieurs
reprises, on a demandé au ministre de dénoncer les méthodes de manipulation, littéralement, qui ont été prises
par la compagnie. Le ministre a refusé. Aujourd'hui, je demande au premier
ministre... On est face à un plan de
communication où, clairement, on souhaite manipuler l'opinion publique, instrumentaliser
les médias.
Est-ce qu'il dénonce
ces méthodes archaïques...
Le Président : M. le premier ministre.
M.
Philippe Couillard
M. Couillard : Franchement, M. le Président, bien sûr,
ça ne nous influence pas, ce genre de manoeuvre là, ce genre de
publication là. On est à un autre niveau, on est au niveau des intérêts
supérieurs du Québec.
Pour ce qui est des paiements de péréquation, je vais quand même
lui rappeler... Je pense que ça fait cinq fois que je leur demande — ils
ont une course au leadership, ils auront l'occasion d'en débattre — comment, dans leur projet, qui, un
jour, peut-être, souhaitent-ils, se réalisera, comment pensent-ils remplacer
les 9 milliards de péréquation, les 16 milliards
de dépenses excédentaires du gouvernement fédéral au Québec? Ils n'osent pas
aborder la question parce qu'il n'y a pas de réponse, parce que c'est
impossible de compenser ça, M. le Président, dans l'état actuel des choses.
Maintenant,
encore une fois, nous avons des exigences très précises par rapport au
promoteur du projet, notamment sur la
question, je le répète, des retombées économiques vérifiables, des peuples
autochtones, de l'environnement et de la
sécurité, M. le Président.
Le Président : Deuxième complémentaire, M. le chef
de l'opposition.
M.
Stéphane Bédard
M.
Bédard : Le premier ministre banalise encore,
M. le Président. On est face à un exercice, littéralement, de
manipulation. Lui, il dit : Bien non, ce
n'est pas de la manipulation. Ils vont payer
des millions de dollars à une des plus grandes firmes de communication mondiale. Pour faire quoi? Même faire de la fausse mobilisation citoyenne, une
fausse campagne d'appui au projet, attaquer
littéralement ceux qui sont contre le projet. Ça, ça va à
l'encontre de nos valeurs, à comment on procède au Québec.
Alors,
moi, ce que je demande au premier
ministre, c'est d'avoir le courage de
ce que n'a pas fait son ministre. C'est de dénoncer cette campagne qui
va à l'encontre de nos valeurs et de nos intérêts, M. le Président.
Le Président :
M. le premier ministre.
M.
Philippe Couillard
M. Couillard : M. le Président, je ne prétends pas ici faire un parallèle inapproprié,
mais je retrouve certaines techniques
utilisées par l'opposition officielle dans la promotion de leur projet, où tout Québécois
qui n'est pas d'accord avec
eux n'est pas d'accord avec le Québec. Et je pense..
Des voix :
...
M. Couillard : Maintenant, M. le Président, que ce soit dit de façon très claire : Nous ne sommes pas… je ne suis
pas de ceux qu'on influence par des techniques aussi grossières.
Le Président :
Troisième complémentaire, M. le chef de l'opposition.
M.
Stéphane Bédard
M.
Bédard : Je prends note, encore une fois, que le premier
ministre refuse de condamner ces procédés et je pense que c'est bien malheureux. Et il se traîne les
pieds, en plus, parce que ça fait des mois qu'on entend et qu'on souhaite…
Il y a une même motion votée unanimement qui
souhaite la tenue d'un BAPE sur le projet d'Énergie Est, et le premier
ministre n'y donne pas suite.
Alors,
ce que je voudrais savoir maintenant, là, puis là ce n'est pas une campagne de
publicité qui va nous changer, là : Est-ce qu'il va… Quand va-t-il
ordonner ce BAPE souhaité par tous les Québécois, M. le Président ?
• (10 h 30) •
Le Président :
M. le premier ministre.
M.
Philippe Couillard
M. Couillard : M. le Président, je dois malheureusement informer notre collègue que
ses propos ne sont pas exacts. Depuis le 30 mai dernier, nous avons
entrepris la démarche qui mène à un BAPE. Cette démarche commence par les
données qu'il faut rassembler, communiquer en langue
française au gouvernement du Québec pour qu'on puisse les étudier, faire de
cette évaluation environnementale une partie
de ce qui constituera le travail du BAPE, qui aura des audiences publiques.
Alors,
M. le Président, je ne sais pas, encore une fois, où notre collègue va chercher
ses informations, ça fait déjà plusieurs mois qu'on a lancé le BAPE.
Qu'il reprenne contact avec la réalité, M. le Président.
Le Président :
Principale, M. le député de Lac-Saint-Jean.
Décès
d'un enfant dans un accident d'automobile
impliquant un membre de la Sûreté du Québec
M.
Alexandre Cloutier
M.
Cloutier : M. le Président, comme tous les matins, le 13 février 2014, Mike Belance se
dirigeait vers l'école pour aller
reconduire son fils de cinq ans. Il a amorcé le même virage qu'il fait à
chaque jour avant d'être frappé de plein fouet au côté arrière droit de sa voiture, là où son fils était
installé. Le père de famille a été frappé par un enquêteur de la Sûreté
du Québec qui roulait à 122 kilomètres-heure
dans une zone de 50, alors qu'il ne répondait à aucune urgence. Le garçon s'est accroché à la vie pendant cinq
jours à l'hôpital avant, malheureusement, de succomber à ses blessures.
Neuf
mois après l'incident, ce sont les enquêteurs de police eux-mêmes qui ont cogné
à la porte des parents pour informer
les parents qu'il n'y aurait pas d'accusation criminelle de portée contre
le policier, et le porte-parole du Directeur des poursuites criminelles
qui refuse de s'expliquer.
Mme la justice,
allez-vous personnellement intervenir?
Le Président :
Mme la ministre de la Justice.
Mme
Stéphanie Vallée
Mme Vallée :
M. le Président, d'abord, évidemment, des circonstances telles que celles
décrites par mon collègue sont des
circonstances terribles pour des parents. La perte d'un enfant est probablement la perte la plus importante. Alors, à cet égard, M. le Président,
permettez-moi d'offrir toutes mes sympathies à la famille de la jeune victime.
Je vous rappellerai encore une fois, M. le Président, que le Directeur des poursuites criminelles et
pénales est un organisme indépendant.
Depuis 2007, il jouit d'une indépendance totale, et la décision de porter ou de ne pas
porter une accusation relève… faite suite à une analyse et ne peut aucunement
être politisée.
Maintenant,
dans la foulée, M. le Président, de l'annonce de la création du Bureau des
enquêtes indépendantes, le Directeur des poursuites criminelles et pénales s'est engagé à revoir toute la politique
de communication lorsqu'il va décider ou non de ne pas déposer de poursuite
suivant une enquête indépendante. La situation particulière à laquelle mon
collègue fait référence est, en effet,
quelque peu inusitée puisqu'un représentant du Directeur des poursuites
criminelles et pénales aurait dû…
Le Président :
En terminant.
Mme Vallée :
…accompagner les policiers.
Le Président :
Première complémentaire, M. le député de Lac-Saint-Jean.
M. Alexandre Cloutier
M.
Cloutier : M. le Président, la mère de la jeune victime lance
un véritable cri du coeur, et je cite : «Mon fils est parti. Rien ne pourra me le ramener. […]c'est
comme si [pour les autorités], c'est correct ce qui [...] est arrivé. J'ai
besoin d'une explication rationnelle...»
La ministre a tous
les pouvoirs d'intervenir. Va-t-elle donner des explications rationnelles aux
parents?
Le Président :
Mme la ministre de la Justice.
Mme Stéphanie Vallée
Mme
Vallée : M. le Président, vous comprendrez que, dans ce
dossier, et j'ai expliqué la décision, l'analyse du rapport, l'analyse des faits dans le litige, de
l'ensemble des faits dans le litige a été entreprise de façon tout à fait indépendante par le Directeur des poursuites
criminelles et pénales. Et c'est cette analyse rigoureuse qui a mené à la
décision du Directeur des poursuites
criminelles et pénales de ne pas entreprendre de poursuite. Cette analyse-là
doit se faire de façon indépendante. Peu importe la publicisation d'un
dossier, la sortie d'un dossier, on ne peut politiser…
Le Président :
En terminant.
Mme Vallée :
…cette décision. Ceci étant dit, le Directeur des poursuites criminelles et
pénales…
Le Président :
M. le député de Lac-Saint-Jean, en deuxième complémentaire.
M. Alexandre Cloutier
M.
Cloutier : M. le Président, la ministre de la Justice, le
Procureur général du Québec, a une immense responsabilité dans ce dossier. Il existe des situations exceptionnelles
où on donne tous les pouvoirs au ministre de la Justice pour intervenir, ce sont les articles 23 et 24 de la loi. Les
parents lancent un véritable cri du coeur. Il s'agit là d'une situation exceptionnelle où un policier est
impliqué. Mme la ministre, ayez de la compassion pour la famille et donnez
des explications.
Des voix :
…
Le Président :
S'il vous plaît! S'il vous plaît! Mme la ministre de la Justice.
Mme Stéphanie Vallée
Mme
Vallée : M. le Président, j'en ai, de la compassion pour la
famille. Et il faut justement éviter de politiser des situations comme celle-ci. Ceci étant dit, M.
le Président, le Directeur des poursuites criminelles et pénales doit et va
rencontrer la famille afin d'expliquer la situation qui l'a amené à ne pas
porter d'accusation.
Le Président :
Principale, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.
Encadrement législatif du principe de laïcité
M. François Legault
M. Legault :
M. le Président, au cours de la dernière année, on a assisté à un débat très
sensible, au Québec, sur la laïcité.
Le gouvernement du Parti québécois a été sanctionné par la population, le 7
avril dernier, pour avoir exploité politiquement ce dossier délicat.
M. le Président, ce débat n'est pas
terminé. Il est toujours en suspens. Lors de la dernière campagne électorale,
le premier ministre s'est engagé à faire des
propositions — et je
prends ses mots — dès le
lendemain des élections. Et sa
ministre de la Justice, lors de l'étude des crédits, a pris l'engagement de
déposer un projet de loi sur la laïcité cet automne. Il reste quelques jours, quelques semaines à la
session en cours, et le problème
demeure. Pourtant, c'est une valeur importante,
la laïcité. Ça fait partie de l'identité québécoise. Et ça fait des années que ça traîne. Il faut le régler. Et il y a
un consensus, M. le
Président, au Québec
pour interdire aux personnes qui sont en autorité de porter des signes
religieux.
Donc,
ma question au premier
ministre : Est-ce qu'il va déposer un projet de loi
et est-ce qu'il est d'accord pour interdire aux personnes qui sont en
autorité, comme les policiers, les agents de la paix, les juges, de porter des
signes religieux visibles, oui ou non?
Le Président :
M. le premier ministre.
M. Philippe Couillard
M. Couillard : M. le Président, notre collègue fait des reproches au Parti québécois
qui sont justifiés, mais il va dans la même voie, du congédiement, de la
discrimination. C'est ce qu'il nous indique actuellement.
Alors, je vais
répéter, M. le Président, qu'effectivement nous allons légiférer. Nous allons
légiférer sur cette question qui est une
question importante. Et, je suis d'accord avec lui, ce débat doit être
poursuivi. Et notre position est bien connue, il le sait, on l'a répété
plusieurs fois, on en a même débattu, lui et moi.
Nous voulons, bien
sûr, réitérer d'abord que c'est l'interculturalisme qui est le modèle d'accueil
de la société québécoise. Nous voulons
réitérer, M. le Président, que l'État, dans ses institutions, dans ses
institutions, doit être neutre. Nous
voulons dire que les services publics doivent être donnés et reçus à visage
découvert et nous voulons donner aux décideurs
un guide qui est le même pour tout le monde pour décider des demandes
d'accommodement. On a dit qu'on le ferait, on va le faire.
Maintenant,
je demanderais à notre collègue et aux collègues de l'Assemblée de réaliser
que, dans le contexte actuel, avec
les événements tragiques des dernières semaines qui ont meurtri une communauté
de Québécois, de Québécois qui se
sont sentis interpellés et stigmatisés à travers ces malheureux événements
alors qu'ils n'ont aucune responsabilité, pour la vaste majorité d'entre eux, pour ce qui s'est produit, il est préférable
de ne pas ajouter à ça pour l'instant. Nous allons légiférer en temps
requis, et ce sera fait comme nous l'avions dit, M. le Président.
Le Président :
Première complémentaire, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.
M. François Legault
M.
Legault : M. le Président, le premier ministre nous dit que sa
position est connue. Je voudrais lui poser une question très précise : Est-ce que, selon lui, une policière ou un
policier devrait avoir la permission de porter une croix visible, un turban
ou un voile? Oui ou non?
Le Président :
M. le premier ministre.
M. Philippe Couillard
M. Couillard : M. le Président, je condamne avec force cette façon d'aborder la
question. Je vais le dire avec force
tous les jours, s'il le faut, que je suis là pour défendre les libertés des
Québécois et Québécoises de toutes les origines, que je dis non à l'exclusion et non à la discrimination. Cependant, il y
aura des règles claires, et il connaît ces règles. Il connaît ces
règles.
Je
vais lui poser une question : Combien est-ce qu'il y en a, de policiers,
qui portent des signes religieux au Québec? On va bien sûr s'assurer que les décisions se prennent selon des
critères qui sont corrects, respectueux des droits des gens parce que,
pour nous, les droits et libertés, ça compte aussi.
Le
Président : Deuxième complémentaire, M. le chef du deuxième
groupe d'opposition. Et j'aimerais entendre et la question et la réponse.
M. François Legault
M.
Legault : M. le Président, notre responsabilité, là, c'est de
préparer l'avenir. Et ce que je comprends, c'est que le premier ministre, contrairement aux consensus québécois, lui, il
est d'accord qu'un policier ou une policière puisse porter...
Des voix :
...
• (10 h 40) •
Le
Président : S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il
vous plaît, le chef du deuxième groupe d'opposition a bien le droit de poser la question comme
il l'entend.
M.
Legault : M. le Président, ce
que je comprends, c'est que le premier
ministre, contrairement au consensus québécois, lui, il est d'accord pour qu'un policier,
une policière puisse porter une croix visible, un
turban ou un voile. C'est ça
qu'il dit.
Le Président : M. le premier ministre.
M. Philippe Couillard
M. Couillard : M. le
Président, il y a
une raison pour laquelle notre collègue est de ce côté-là de la
Chambre puis, nous autres, de
ce côté-là. Une de ces raisons… il y en a
d'autres également, une de ces raisons, c'est
que nous — je vais employer un mot qu'il a connu, mais qu'il n'utilise plus — on
a eu le courage de parler des droits et des libertés
des gens et on va continuer à
le faire. Maintenant, on s'est déjà parlé de ça, lui et moi,
il sait très bien quelle est notre position. C'est au directeur des
services de police à prendre ces décisions si
on a des critères légaux, des critères clairs…
Le Président : En terminant.
M. Couillard : …des critères équitables pour tout le
monde. Qu'il arrête de sombrer dans la discrimination, M. le Président.
Le Président : Principale, Mme la députée de…
Des voix : …
Le Président : Ça va? M. le député, ça va?
Des voix : …
Le
Président : M. le
député, ça va? Il y a
une personne ici qui a le droit de parole, c'est
Mme la députée de Repentigny.
Tarification des services de garde
Mme Lise Lavallée
Mme
Lavallée : M. le
Président, ce matin, l'intention du gouvernement d'aller chercher plus d'argent dans les poches
des familles se précise encore une
fois. Les différents scénarios du Parti libéral indiquent toutes les mêmes choses, soit l'augmentation des tarifs de garderie. Même le gouvernement semble vouloir aller chercher le 60 millions supplémentaire de
la Prestation universelle pour la garde d'enfants
annoncé par le gouvernement fédéral.
En
clair, ce que le gouvernement fédéral donne d'une main aux familles québécoises, le gouvernement libéral le reprend de l'autre main. Le premier ministre
s'était pourtant engagé clairement à ne pas récupérer le champ fiscal libéré
par le gouvernement fédéral. On comprend
donc, encore une fois,
qu'il renie sa parole.
Ma
question est simple : Pourquoi le
faire toujours sur le dos des familles québécoises?
Le Président : M. le ministre des Finances.
M. Carlos J Leitão
M.
Leitão : M. le Président, je dois
vous avouer que cette question est complètement à côté de la réalité. Malheureusement, c'est
ça. Rappelons un peu de quoi on parle, on parle du PUGE, c'est un nom un peu étrange, mais la
Prestation universelle pour garde d'enfants, qui est une prestation fédérale
qui est envoyée à tous les Canadiens, qui bénéficie
surtout les familles, les familles les plus défavorisées. Donc, de cette
optique-là, c'est un programme fédéral avec lequel nous partageons entièrement les
objectifs. Et, au Québec, cette PUGE bénéficie,
encore une fois, surtout les familles
les plus vulnérables et à plus bas revenus.
Cependant,
cette prestation-là, elle est taxable, elle est imposable ici comme ailleurs au
Canada. Donc, les personnes qui ont
un revenu plus élevé, oui, en effet, une partie de cette prestation est déjà… déjà, elle est imposable et donc elle revient déjà aux coffres des gouvernements. Donc, il n'y a pas de nouvelle mesure, il n'y a pas de
nouveau projet d'aller chercher quoi que ce soit à qui que ce
soit. Ce sont les dispositions actuelles qui sont déjà en vigueur, et ça ne
change absolument rien.
Le Président : Première complémentaire, Mme la
députée de Repentigny.
Mme Lise Lavallée
Mme Lavallée : M. le Président, le gouvernement fédéral
a fait le choix d'accorder un répit aux familles québécoises. Le gouvernement
libéral s'apprête à renier sa parole, à occuper le champ fiscal libéré et à
taxer encore davantage les familles.
La
ministre de la Famille, qui tarde à nous
donner l'heure juste, peut-elle nous garantir
qu'elle écarte complètement les scénarios de modulation ou
d'augmentation des frais de garderie au-delà de l'inflation?
Le Président :
M. le ministre des Finances.
M. Carlos J Leitão
M. Leitão : M. le Président, c'est quand même dommage. Encore une fois, on ne
change absolument rien. Cette prestation,
elle est taxable ici comme ailleurs. On ne va pas
occuper quoi que ce soit de nouveau, il n'y a rien qui change.
D'ailleurs, la façon dont cette prestation universelle est établie, elle est
particulièrement progressive et progressiste. Elle
soutient surtout les familles à plus bas revenus,
qui, elles, ne paient aucun impôt additionnel
sur cette prestation-là. Ce sont les
familles à plus hauts revenus qui, elles,
encore aujourd'hui, avant qu'on fasse quoi que
ce soit, paient de l'impôt sur cette
prestation-là. Je ne vois pas vraiment, mais vraiment, pourquoi on fait un
scandale sur un sujet qui n'ait pas
lieu à avoir de scandale, M. le Président.
Le Président : Deuxième
complémentaire, Mme la députée de Repentigny.
Mme Lise Lavallée
Mme
Lavallée : M. le Président, le gouvernement libéral est difficile à suivre. Il dénonçait la
hausse de l'ancien gouvernement du Parti québécois, mais aujourd'hui il
s'apprêterait à faire encore pire.
La ministre
peut-elle nous garantir qu'elle écarte complètement les scénarios de modulation ou d'augmentation des frais de garderie au-delà de l'inflation? Pourquoi ce gouvernement empêche les familles de profiter enfin du répit offert par le gouvernement
fédéral?
Le Président : M. le ministre
des Finances.
M. Carlos J Leitão
M.
Leitão : M. le Président, c'est la même chose, les familles québécoises
vont profiter de l'amélioration que le gouvernement fédéral a apportée au PUGE — je
n'aime pas beaucoup ce nom — alors,
Prestation universelle pour garde d'enfants,
les familles québécoises vont profiter de ça. On n'occupe en rien cet
espace fiscal qui aurait été… qui n'a pas été, en tout cas, libéré par
le gouvernement fédéral. C'est une mesure qui bénéficie…
Une voix : …
Le Président : M. le leader,
oui.
M.
Bonnardel : …le ministre doit répondre directement à la question, il doit répondre directement à la question.
La question qu'on lui pose : Est-ce que, oui ou non, il va accepter que l'augmentation
des tarifs ne soit pas plus…
Le Président : M. le ministre
des Finances, veuillez conclure, s'il vous plaît.
M.
Leitão : Une éventuelle… une
éventuelle augmentation des tarifs… je ne sais pas s'il va y en avoir ou
pas, mais une éventuelle augmentation des tarifs des garderies n'a rien à voir avec le PUGE, ce sont deux
sujets complètement différents
et séparés. Une chose n'a rien à voir avec l'autre, c'est différent, M. le
Président.
Le Président : Principale, M.
le député de Chambly.
Utilité des élections
scolaires
M. Jean-François Roberge
M.
Roberge : M. le Président, on apprenait, hier soir, que le gouvernement a l'intention de
fusionner les commissions scolaires.
Mais pourquoi les fusionner? J'ai bien l'impression que le gouvernement ne sait pas trop pourquoi, parce
que c'est tout un revirement.
En campagne électorale et au printemps dernier, les commissions
scolaires étaient qualifiées par les
libéraux de partenaires
incontournables. Pas question de s'attaquer aux structures, nous disaient-ils il y a à
peine six mois. Alors, le gouvernement a dépensé 20 millions de dollars pour
tenir des élections, et, avec un taux de participation de 5 %, bien ils ont été rappelés à la
réalité.
Donc, il
fallait un plan de réforme, ils n'en avaient pas, alors ils sont allés fouiller
dans le programme de la coalition. Et
il a vu que nous, on voulait réduire la bureaucratie. Mais j'espère qu'il va
poursuivre la lecture de notre programme, M. le Président, parce qu'on
parle d'écoles autonomes puis on parle aussi d'éliminer les élections
scolaires, oui, oui.
Le ministre s'attaquera-t-il aux élections
scolaires ou se contentera-t-il de fusionner des structures désuètes?
Le Président :
M. le ministre de l'Éducation.
M. Yves Bolduc
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Dans un premier
temps, ce que nous voulons, c'est travailler en collaboration, en partenariat avec les autres intervenants, dont,
entre autres, les commissions scolaires et la Fédération des commissions scolaires. Et également, M. le
Président, notre objectif premier, c'est la réussite scolaire. Et j'ai dit à
plusieurs reprises que le statu quo
maintenant n'est plus possible. Et, ce que j'ai compris, les deux partis et
également Québec solidaire, je crois,
sont d'accord qu'il y a des choses qu'on doit faire au Québec. Suite aux
derniers résultats des élections scolaires, les gens nous disent :
On veut du changement.
J'ai dit
qu'il y aurait trois niveaux de changement. Premier niveau de changement, on va
faire une réflexion sur la gouvernance,
la question des élections scolaires. On va également discuter quelles sont les
autorités… le pouvoir que le ministre doit se donner puis que les
commissions scolaires doivent avoir et surtout que l'école doit posséder.
Deuxième
niveau, M. le Président, j'ai annoncé à plusieurs reprises, dans un but
d'optimisation des ressources, qu'on
devrait regrouper certaines commissions scolaires, donc possibilité de fusion,
mais également ce que l'on doit faire, c'est voir s'il ne pourrait pas y
avoir des ententes pour regrouper certains services.
M. le Président, c'est notre plan de match, et
on le suit à la lettre.
Le Président : Première
complémentaire, M. le député de Chambly.
M. Jean-François Roberge
M. Roberge : M. le Président, manifestement,
ce plan de match là n'était pas écrit en campagne électorale, parce que c'est le contraire de ce qu'on
entendait. Aux dernières élections, moins de 5 % des gens sont allés
voter. Ça, ça veut dire qu'il y a
plus que 95 % des gens qui ont choisi de ne pas aller voter, et le
gouvernement veut maintenir les élections scolaires. Il parle de fusion,
mais il ne nous parle pas du fait qu'il veut maintenir les élections scolaires.
Il y a un
grand penseur qui s'appelle Albert Einstein qui disait que la folie, c'est de
faire toujours la même chose en espérant un résultat différent. Le
ministre…
Des voix : …
• (10 h 50) •
Le Président : Bien, je… On
va cesser ça là, là. M. le ministre de l'Éducation.
M. Yves Bolduc
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Bien, M. le Président, là j'entends un
message qui est incohérent. Il nous dit qu'on n'en fait pas assez puis
en même temps il nous dit qu'on en fait trop. Ça fait qu'il faudrait juste
s'entendre.
Il est très clair qu'on veut améliorer le réseau
scolaire, on veut améliorer la réussite scolaire. Pour cela, il y a plusieurs niveaux d'intervention. Premier
niveau : réflexion sur la gouvernance. Deuxième niveau : tout le
monde s'entend, on peut regrouper des
commissions scolaires, faire des fusions de façon géographique, respectant la
démographie, mais surtout laisser le
pouvoir à l'école le plus près possible où étudient les enfants. Le troisième
niveau : revoir les responsabilités entre le ministère, la
commission scolaire et l'école, en favorisant l'école.
Le Président : Deuxième
complémentaire, M. le député de Chambly.
M. Jean-François Roberge
M.
Roberge : M. le Président, laisser le pouvoir à l'école, c'est une
bonne chose, mais ça, ça veut dire qu'il faut l'enlever quelque part. Le
pouvoir ne peut pas être aux deux endroits ou même aux trois endroits : au
ministère, à la commission scolaire, à l'école. À un moment donné, il faut
faire des choix. Il faut avoir un plan, il faut le suivre.
Donc, si vous
dites que vous voulez que le pouvoir soit dans les écoles, ça veut dire qu'il
ne peut pas être dans vos commissions scolaires, même si vous les
fusionnez. Ça ne fonctionnera pas.
Le ministre
peut-il s'engager à éliminer les élections scolaires pour vraiment décentraliser
la prise de décision dans les écoles?
Le Président : M. le ministre
de l'Éducation.
M. Yves Bolduc
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : M. le Président, le député de Chambly mélange
deux dossiers. Il y a la question de l'élection
scolaire, une réflexion à faire, mais même lui a reconnu qu'advenant
l'abolition des commissions scolaires on devait garder un palier
intermédiaire, l'équivalent de la commission scolaire, sans élection. M. le
Président, c'est la réflexion que nous
faisons, et en même temps on veut optimiser le réseau en faisant des fusions,
et en même temps on veut qu'il y ait plus de pouvoirs au niveau de
l'école. Quoi demander de plus?
Le
Président : Principale, M. le député de Bonaventure.
Ajustement de la garantie d'approvisionnement
en bois pour les papetières
M. Sylvain Roy
M.
Roy : M. le Président, le ministre des Forêts affirmait ici
même, le 2 octobre dernier, et je cite : «Le monde travaille dans
le bois, les entreprises font de l'argent, les scieries vont mieux, on répond
aux besoins des papetières.» M. le Président, le ministre est complètement
déconnecté de ce qui se passe sur le terrain.
Après les pertes
d'emploi en Estrie, à Shawinigan, au Saguenay—Lac-Saint-Jean et à Baie-Comeau, ce
sont maintenant trois usines de Tembec, en
Abitibi, qui vont interrompre leurs opérations dû au manque d'approvisionnement.
À La Sarre, à Senneterre et à Béarn,
des centaines de travailleurs risquent de passer les fêtes au chômage pendant
que le ministre se complaît dans
l'inaction et l'immobilisme. Pourtant, les volumes de bois existent, mais le
ministre refuse de les rendre disponibles.
Qu'est-ce qu'il
attend pour libérer le bois et permettre aux travailleurs de gagner leur vie?
Le Président :
M. le ministre des Forêts.
M. Laurent Lessard
M.
Lessard : Alors, merci, M. le Président. La question est
fort pertinente. Donc, je reprends les propos. Dans l'industrie du sciage au Québec, M. le Président,
ça va bien. Les usines manquent quoi? D'approvisionnement. Pourquoi ils manquent d'approvisionnement? Parce que,
justement, le régime doit libérer le bois suffisant parce que la demande
aux États-Unis est importante, parce qu'il y a 1 million de chantiers qui
demandent pour que nos entreprises aient le maximum de bois pour qu'on donne de
l'ouvrage.
Récemment,
j'étais en Abitibi, hein? Dès le mois de juin, on a demandé aux entreprises de
libérer le maximum de bois avec le
ministère. Dès le mois de septembre, deux fois les entreprises, autant de
Tembec que Résolu, ont obtenu 100 000 mètres
cubes de volume non récolté. On pousse la machine. On demande au Forestier en
chef de faire plus vite. On demande
aux entreprises puis au ministère de planifier le territoire pour libérer le
maximum de bois parce que ça crée de
la job, autant dans les papetières, autant les gens qui vont scier sur le
territoire. C'est vrai aujourd'hui, c'est vrai demain. On travaille au
maximum pour libérer l'ambition du Québec puis donner des jobs partout dans
toutes les régions.
Le Président :
Première complémentaire, M. le député de Bonaventure.
M. Sylvain Roy
M. Roy :
M. le Président, ce n'est pas le son de cloche que nous avons de l'industrie.
Et les gens de l'Abitibi sonnent l'alarme.
La MRC du Témiscamingue, les maires de La Sarre et de Senneterre et le
syndicat des travailleurs sont unanimes : le bois est là, et le
ministre doit le rendre disponible pour que les travailleurs gardent leurs
emplois.
Qu'est-ce que le
ministre attend pour prendre ses responsabilités?
Le Président :
M. le ministre des Forêts.
M. Laurent Lessard
M.
Lessard : Toutes les usines, autant de l'Abitibi, de la
Mauricie, de la Gaspésie, ont toutes une capacité de scier du bois plus grande que la demande forestière, M.
le Président. Il y a moins de bois disponible pour l'ensemble des usines,
qui ont une surcapacité de production.
Mais,
malgré ça, on a demandé au Forestier en chef de regarder dans les cinq
dernières années… En passant, le Parti
québécois aurait peut-être eu... aurait dû avoir l'idée avant, hein? Parce que,
l'année passée, vous ne l'avez pas fait. Cette année, on est obligés de faire du rattrapage. Mais ce n'est pas grave, M.
le Président, on est déterminés à
réussir pour donner le maximum
de bois dans toutes les régions du Québec. Ça procure des jobs aujourd'hui, ça procurera des jobs demain
parce que la perspective s'est
améliorée, puis le gouvernement, on est
au travail à tous les jours. Tous les jours…
Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député
de Bonaventure.
M. Sylvain Roy
M.
Roy : M. le
Président, il se perd des emplois en
forêt. Malgré le discours du ministre, qui est déconnecté de la réalité, actuellement les gens crient à l'aide, l'Abititi crie qu'il n'y a pas de bois et que
des emplois vont se perdre. Le préfet
de la MRC de Témiscamingue est clair, j'ouvre les
guillemets : «Il est inadmissible que des travailleurs et leurs familles subissent
les contrecoups de l'inaction du ministre des Forêts…» À
Senneterre et à La Sarre, même son de cloche.
Est-ce que le ministre peut s'engager à libérer
les volumes de bois pour permettre à ces travailleurs
de garder leurs emplois? Et, M. le Président…
Le
Président : M. le ministre des Forêts.
Une voix : …
Document déposé
Le
Président : Vous demandez un dépôt? Consentement pour le dépôt? Consentement pour le dépôt. M. le
ministre des Forêts.
M. Laurent Lessard
M.
Lessard : Au mois de juin, j'étais en Abitibi, à l'invitation de mes deux collègues. La semaine passée, l'association forestière, on y tenait une conférence
fort importante, lors de la tenue de l'association forestière, où tous les forestiers de la région étaient présents. Ce
qu'on a dit : On va libérer l'ambition de
la forêt pour qu'on évite qu'il se perde
de l'argent en forêt. Le maximum de monde travaille dans nos entreprises,
et tout le monde est au travail pour qu'on réussisse, autant
en Abitibi, en Mauricie, en Gaspésie
puis au Lac-Saint-Jean. On va la libérer, la forêt,
pour faire travailler le maximum de monde. Le message est clair : Tous les jours, c'est un lundi quand on est en affaires.
Le Président : Principale, M. le député de Mercier.
Des voix : …
Le Président : S'il vous plaît! C'est bon. M. le député de Mercier, c'est à vous la parole.
Recours collectif contre la surfacturation
dans les cabinets de médecins
M. Amir Khadir
M. Khadir : M. le Président, un cabinet d'avocats a révélé, dimanche, que plus de 100 millions de dollars sont facturés
illégalement par des cliniques privées à des malades pour des produits ou des
services qui, en principe, devraient être
gratuits selon la loi. Des médecins, malheureusement, font honte à ma profession, à celle du premier ministre, en faisant payer les malades parfois jusqu'à 100 fois le prix
de certains produits ou médicaments. C'est parfaitement illégal.
Alors,
50 cliniques médicales, la RAMQ et même le ministre
de la Santé sont actuellement poursuivis en recours collectif.
Le gouvernement, en fait, s'expose à devoir payer des centaines
de millions de
dollars aux patients si le recours s'avère aussi fondé que tout dernièrement, en 2012, où le gouvernement a payé 6 millions de
dollars pour une situation
similaire.
Alors,
des médecins consciencieux réunis au sein du MQRP, des retraités des organisations de défense des droits des
malades demandent au gouvernement et au Collège des médecins d'agir. Que compte
faire le ministre de la Santé actuel? Vous savez, de riches…
Le Président : M. le ministre de la Santé.
M. Gaétan Barrette
M.
Barrette : M. le
Président, évidemment,
actuellement, comme le
député de Mercier
vient de nous l'indiquer, il y a actuellement un recours collectif qui est devant les
tribunaux. Et, sur cet élément-là, évidemment, je ne peux faire de commentaire autre que
celui que la justice doive suivre son cours.
Ceci
dit, M. le Président, contrairement
à ce que dit le député
de Mercier, il y a des facturations qui sont faites, des frais qui sont chargés aux patients qui sont tout à fait légaux et il y a des zones grises dans
la loi, et que c'est une chose, effectivement,
qu'un jour nous allons essayer de clarifier, un jour
prochain — au cas où j'aie une complémentaire à cet effet-là, on ne sait jamais.
Mais,
ceci dit, M. le Président, il y
a, contrairement à ce que dit le député
de Mercier, des frais qui sont tout à fait légaux. Maintenant, dans le recours collectif, je ne ferai pas de commentaire sur chacun des frais qui sont mis en cause, et nous laisserons, évidemment, la
cour faire son oeuvre, M. le Président.
• (11 heures) •
Le Président : Première complémentaire, M. le député de Mercier.
M. Amir Khadir
M. Khadir : Alors, je vais
demander au ministre de m'expliquer si les faits que je vais lui exposer, qui
sont vécus par des milliers de patients, sont légaux : «Mon médecin a refusé de me traiter quand j'ai
demandé des précisions sur le 50 $ qu'il demandait pour de la Xylocaine — ça, c'est pour geler avant de faire un prélèvement — ça a retardé d'un mois et demi l'excision d'un naevus qui s'est avéré ensuite
cancéreux.» Un autre exemple :
«L'optométriste m'a chargé 30 $ pour des gouttes qui valent
3 $ à la pharmacie. Il m'a forcé à les acheter, sinon je devais partir.»
Le Président :
M. le ministre de la Santé.
M. Gaétan Barrette
M. Barrette : M. le Président, comme
beaucoup de gens s'en sont rendu compte dans cette Chambre, j'adore pratiquer illégalement le droit. Mais, dans le cas
présent, je ne le ferai évidemment pas, puisque, comme je l'ai dit il y a quelques instants, cette cause étant devant la justice, la
justice fera son oeuvre.
Ceci dit, je
me permettrai de rappeler au député de Mercier qu'il y a une différence
fondamentale... Et ça, M. le Président,
c'est difficile à apprécier, à Québec
solidaire, entre qu'est-ce qui est légal, illégal et exagéré. L'exagération
est un concept qui se pratique différemment
en politique selon le parti. Alors, la différence entre la légalité et
l'illégalité existe et...
Le Président : En terminant.
M. Barrette : Et voilà. Il n'y a
rien d'autre à dire.
Le Président : Deuxième
complémentaire, M. le député de Mercier.
M. Amir Khadir
M. Khadir : Bien, le ministre peut éviter de
répondre si ça lui plaît comme ça, mais les cas que je lui décris ne
sont pas devant les tribunaux. Il aurait pu répondre, ça aurait été peut-être
plus intéressant.
En 2007, le premier ministre actuel avait promis
de clarifier les choses. Il n'a rien fait pour mettre fin à la surfacturation. En 2010, son successeur a reçu un
rapport confidentiel de la RAMQ, il l'a tabletté. En 2013, le ministre
du PQ voulait faire des choses, donner les moyens, rien n'a été fait.
Pourquoi rien n'a été fait depuis le
7 avril par le ministre actuel?
Le Président : M. le leader
du gouvernement.
M. Jean-Marc Fournier
M.
Fournier : …en réponse à la question posée par notre collègue,
peut-être un rappel au règlement lui permet d'offrir une partie de la réponse à la question qui est posée.
L'article 82 de notre règlement prohibe, empêche… Ce n'est pas une
question que le ministre décide de ne pas répondre, c'est qu'il n'a pas le
droit en vertu du règlement qui nous gouverne
tous et auquel nous devons tous notre appui et notre respect. L'article 82
dit que le ministre ne peut pas répondre à des éléments qui concernent les paragraphes 2° et 3° de
l'article 35, et justement, à cet article-là, on parle des causes qui sont devant les tribunaux. Notre collègue, M.
le Président, ne fait que respecter le règlement. Faire le contraire l'amènerait
dans une zone d'illégalité, tout au moins d'irrespect du règlement...
Le Président : En terminant.
M. Fournier : ...et je suis
sûr que ce n'est pas ce que notre collègue le député de Mercier souhaite.
Le Président : Principale, M.
le député de La Peltrie.
Informatisation du
réseau de la
santé et des services sociaux
M. Éric Caire
M.
Caire :
M. le Président, le projet de loi n° 10 a du potentiel, mais, il faut bien
le dire, il a été mal vendu, on veut
aller trop vite, et surtout le ministre oublie des éléments majeurs, par exemple
l'intégration des systèmes informatiques. On parle ici de la gestion de toutes les informations nécessaires à la
prise de décision et à l'évaluation de la performance, ce qui a fait dire à la Protectrice du citoyen
qu'il y avait de nombreux risques financiers et des risques de dérapage. Et
faut-il rappeler que les dérapages
informatiques expliquent l'échec de la réforme amorcée par le premier ministre
il y a 10 ans?
La
Protectrice du citoyen n'est pas seule à nous dire ça. L'AQESSS est venue dire
ça, l'AMQ, les pharmaciens, les jeunes médecins, l'IGOPP et des dizaines
d'autres organismes sont venus exprimer la même crainte, il n'y a pas de plan.
Est-ce que le
ministre de la Santé peut nous dire pourquoi il nous lance dans une réforme
comme celle-là sans avoir de plan
d'intégration des services informatiques, d'échéancier et de budget pour un
élément qui va capitaliser, qui va faire en sorte que sa réforme va
être...
Le Président :
M. le ministre de la Santé.
M.
Gaétan Barrette
M. Barrette : M. le Président, je
profite de cette question-ci pour remercier la Coalition avenir Québec et, particulièrement, le député de La Peltrie pour l'appui qu'il vient d'exprimer au fondement
du projet de loi ainsi que pour le travail qu'il a fait en commission
parlementaire, travail qui a été éminemment constructif. Ceci dit…
Une voix : ...
M.
Barrette : Bien, c'est parce que
ça n'a pas été la même chose de tous les partis, là. C'est de même, M. le Président.
Alors, ceci
dit, pour ce qui est de la vente du projet de loi, bien je l'invite,
évidemment, à nous appuyer à faire cet
exercice de vente auprès de la population. J'invite aussi l'opposition
officielle à le faire comme je l'invite à participer de façon fluide, comme le projet de loi n° 10
le recherche, et constructive en commission parlementaire lorsqu'il y aura
l'étude article par article.
Ceci dit, M.
le Président, pour ce qui est de l'informatique, il m'apparaît implicite dans
le projet de loi n° 10 que l'informatique
sera un des éléments qui devra être intégré dans un CISSS sans que ce soit
nécessairement uniforme. Mais j'ai dit en commission parlementaire, par
exemple, pour ce qui est de la comptabilité, M. le Président...
Le Président : En terminant.
M. Barrette : ...que des sommes sont
déjà engagées pour uniformiser le Québec sur ce plan.
Le Président : Première
complémentaire, M. le député de La Peltrie.
M. Éric Caire
M.
Caire :
M. le Président, justement
parce qu'on souhaite que la réforme, cette fois-ci, fonctionne,
contrairement à la précédente, je le mets en garde, l'intégration des systèmes
informatiques est capitale à l'échec ou au succès.
Alors, quand
va-t-il déposer un plan clair, un recensement des systèmes, un budget et un
plan d'intégration des systèmes informatiques, M. le Président?
Le Président : M. le ministre
de la Santé.
M. Gaétan Barrette
M.
Barrette : M. le Président, le député de La Peltrie s'adresse,
effectivement, à un élément qui est critique, et je suis d'accord avec lui. Ceci dit, je lui rappelle
qu'en commission parlementaire j'ai indiqué à la commission et aux gens qui sont venus devant nous qu'il y avait
actuellement — et c'est
au budget — un
investissement de 85 millions de dollars qui était en cours de déploiement pour, justement, uniformiser la
comptabilité et toute la gestion dans notre système de santé. Et, d'autre part, lorsqu'il y aura la
création des CISSS, évidemment on fera obligatoirement cette intégration-là
parce qu'il a été dit qu'il y aurait un
dossier unique, un seul patient, un seul répertoire de laboratoire, et ainsi de
suite.
Le Président : En terminant.
M. Barrette : Je comprends que ce
n'est pas dit de façon spécifique, mais c'est clairement implicite.
Le Président : M. le député
de La Peltrie en deuxième complémentaire.
M. Éric Caire
M.
Caire :
M. le Président, le ministre fait une erreur fondamentale. Ce ne sont pas les
CISSS qui vont amener l'intégration
des systèmes informatiques, c'est l'intégration des systèmes informatiques qui
va permettre la création des CISSS.
Et, pour ça, on a besoin d'un plan qui est clair, d'échéanciers qui sont précis
et de budgets qui sont dévolus à ça précisément.
Alors, quand le ministre va-t-il nous déposer ce
plan-là? On en a besoin.
Le Président : M. le ministre
de la Santé.
M. Gaétan Barrette
M.
Barrette : M. le Président, je vais rappeler… Bien, en fait, je vais
dire au député de La Peltrie ce qu'on dit souvent en médecine : On ne traite pas des images et des résultats
de laboratoire. Et le pendant de ça dans le projet de loi n° 10 est que les ordinateurs ne se
fusionnent pas eux-mêmes, et ce sont des administrations qui font cette
fusion-là. Alors, ce n'est pas vrai de penser que l'intégration des
systèmes informatiques va faire la fusion. Ce sera le projet de loi n° 10 qui mettra en place une structure
de gestion qui fera en sorte que cette intégration-là se fera — et je terminerai là-dessus,
M. le Président — pour le
bénéfice des patients, qui s'attendent à ça, à avoir une fluidité de
l'information qui les concerne, et ça se réalisera, M. le Président.
Le Président : Principale, M.
le député de Sanguinet.
Intentions du
gouvernement concernant
l'utilisation du suffixe de domaine .quebec
M. Alain Therrien
M.
Therrien : M. le Président, le 11 juin 2008, tous les partis
ont adopté une motion présentée par Raymond Bachand pour appuyer la
démarche visant à obtenir la reconnaissance de suffixe .quebec. Depuis le 13
novembre dernier, c'est possible d'adopter
cette adresse. Pourtant, le gouvernement libéral refuse de faire migrer ses
sites gouvernementaux vers cette
appellation. Ça ne coûtait rien de réserver le nom des domaines, mais le
gouvernement ne l'a pas fait. C'est l'organisme PointQuébec qui a été obligé de le faire. Le projet est appuyé par les
gens d'affaires et les Québécois de tous les milieux. C'est un investissement qui nous permettra d'être
attractifs vis-à-vis les investisseurs et les visiteurs de l'étranger. Migrer
progressivement minimiserait les coûts par
rapport aux retombées positives d'adopter cette appellation. Mais, quand il
s'agit de s'affirmer, de prendre notre place
sur le Web, de créer un véritable drapeau virtuel, le gouvernement fait preuve
de très peu de vision.
Pourquoi ne pas saisir, M. le Président, cette
occasion unique et cesser votre provincialisme?
Le Président : M. le
président du Conseil du trésor.
M. Martin Coiteux
M.
Coiteux : Bien, M. le Président, c'est très simple, c'est parce qu'au
moment où on est en train de prendre des décisions qui sont forcément difficiles pour retourner à l'équilibre
budgétaire en ayant une marche à franchir qui nous a été laissée par l'administration précédente à plus
de 5 milliards de dollars, eh bien, dans le moment, M. le Président, on
n'a pas les moyens d'enlever de 11 à
12 millions de dollars, par exemple, à la culture pour le mettre dans la
migration vers des sites Web qu'on a
actuellement et qui fonctionnent très bien. L'argent ne pousse pas dans les
arbres, M. le Président.
Le Président : Cela met fin à
la période de questions et de réponses orales.
Motions sans préavis
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, nous en sommes à la rubrique
des motions sans préavis, et, en fonction de nos règles et de l'ordre de
présentation, je cède la parole à Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.
• (11 h 10) •
Mme Poirier : Alors, M. le
Président, je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de
présenter, conjointement avec la députée de Montarville, la motion
suivante :
«Que
l'Assemblée nationale prenne acte de la récente vague de dénonciation
d'agressions sexuelles dans les médias du Québec;
«Qu'elle reconnaisse que la violence sexuelle
contre les femmes est un problème de société extrêmement préoccupant qui nous
concerne tous sans exception;
«Qu'elle
encourage les victimes à dénoncer toute forme d'agressions et qu'elle demande
au gouvernement de renforcer les services d'aide aux victimes actuellement
disponibles;
«Qu'elle
rappelle la motion votée unanimement le 6 décembre 2013 par l'Assemblée nationale qui demande au gouvernement de remettre en
2014 son plan d'action en matière d'exploitation sexuelle;
«Enfin, qu'elle invite les membres de la Commission
des relations avec les citoyens à statuer sur un mandat d'initiative portant sur ce sujet en prenant exemple sur la Commission
spéciale sur la question de mourir dans la dignité.
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
Alors, merci à vous, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve. Y a-t-il
consentement pour débattre de cette motion? M. le leader du gouvernement.
M.
Fournier : Je vais d'abord
solliciter par votre entremise la possibilité que je puisse donner quelques
informations concernant cette motion, M. le Président. Je vois que la collègue
qui présente est d'accord.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Moi, je dois vérifier s'il y a consentement ou pas pour débattre. Quant
aux autres informations, s'il y a un consentement unanime, on peut aller
de l'avant.
Une voix : …
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Il n'y a pas de consentement, M. le leader. Question de
règlement, M. le leader du
gouvernement.
M.
Fournier : Oui,
question de règlement inspirée de notre Code d'éthique, M. le Président, concernant la conduite d'un
député, qui nous rappelle que nous devons rechercher la parole donnée. Ce
matin, avec la députée de Gouin et la députée qui propose, il y a eu une
entente pour qu'il y ait reformulation et dépôt demain d'une motion sur le
sujet. Je considère — et
je le dis honnêtement — je
considère que cette présentation est pour retrait et donc qu'elle est maintenant retirée, tel que l'entente a été
donnée à la députée de Gouin, et les partis pourront reformuler.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, M. le leader, comme vous savez, la présidence n'est pas au
courant des tractations entre les différentes formations politiques, et
donc…
Une voix : …
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
Oui, je vais vous entendre, Mme la leader.
Mme
Maltais : …question de règlement. On a eu une discussion avec le
leader avant la période de questions. J'ai
vérifié s'il y avait entente, et on me disait qu'il n'y avait pas entente
formelle. S'il veut qu'on rediscute de la motion, ça nous fera plaisir. Je m'attendais à ce qu'il se
lève et qu'il dise : Mettez-la sur la glace, on se reparlera. Ça, c'est
possible.
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
M. le leader.
M. Fournier : …pour indiquer que, dans nos travaux, je suis
toujours là pour qu'il y ait des discussions et que ça aille bien. Je veux simplement
dire à notre collègue qu'elle peut même vérifier avec la députée
de Gouin, l'entente était formelle. Elle ne l'a juste
pas respectée.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, je n'irai pas plus loin dans cette
voie-là, là, il n'y a pas de consentement pour débattre de cette
motion. Sur la question de règlement…
Mme
Maltais : …il vient de dire que nous n'avons pas respecté
d'entente. Je m'excuse, là, il n'y avait pas entente, mais j'entends le ministre, et il répond à ma
demande que je lui ai faite à la période de questions, c'est-à-dire qu'on se
rassoie et qu'on discute.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, quant à moi, je vais recevoir une
prochaine motion sans préavis, et je pense que M. le député de Groulx
souhaite présenter une motion sans préavis. M. le député.
M.
Surprenant : M. le Président, je demande le consentement pour déposer la motion suivante
conjointement avec le député de Sanguinet et la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques :
«Que l'Assemblée nationale exige du gouvernement qu'il respecte l'engagement pris par le président du Conseil du trésor de publier un rapport concernant les
premières recommandations de la commission permanente de révision des
programmes;
«Qu'elle exige du gouvernement qu'il dépose ce
rapport prévu pour octobre dernier immédiatement.»
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le député
de Groulx. Y a-t-il consentement pour débattre de la motion? M. le
leader adjoint du gouvernement?
M.
Sklavounos : Pas de
consentement, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Il n'y a pas de consentement.
Alors, nous passons maintenant à la motion de M. le ministre de la Santé
et des Services sociaux.
M.
Barrette : M. le Président, avant de présenter la motion, peut-être
que vous me permettrez de souligner pour les auditeurs qui nous écoutent que, dans l'Assemblée d'aujourd'hui, la
totalité des gens porte soit une boucle pour signaler la Journée québécoise de sensibilisation au cancer
de la prostate ou encore une cravate, une cravate qui est à l'initiative de nos
collègues qui sont ici présents, que
j'aimerais saluer. Au balcon, nous avons avec nous aujourd'hui l'Association
professionnelle des gardes de corps du gouvernement du Québec, dont le
président est M. Éric Létourneau. Je tiens à les souligner.
Alors, à
l'initiative de l'association et en collaboration avec M. Pierre Jobin, qui est
chef d'antenne à TVA à Québec, et
pour le bénéfice du CHUQ, nous portons la cravate. Et la boucle est une promotion au bénéfice de la Fondation Procure, et je salue mes collègues féminines qui, aussi, la portent.
Voilà.
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
Et maintenant pour la motion, M. le ministre de la Santé.
Souligner la Journée
internationale de l'homme
et la Journée québécoise de sensibilisation
au cancer de la prostate
M.
Barrette : Merci. Alors, M. le Président, je sollicite le consentement
de l'Assemblée, puisqu'il est tard, afin de présenter la motion suivante
conjointement avec la députée de Taillon et le député des
Chutes-de-la-Chaudière :
«Que l'Assemblée nationale souligne la
Journée internationale de l'homme et la Journée québécoise de sensibilisation
au cancer de la prostate;
«Qu'elle
réitère que le cancer de la prostate est la forme de cancer la plus répandue
chez les hommes au Canada.»
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le
ministre de la Santé et des Services sociaux. Y a-t-il consentement pour
débattre de cette motion? M. le leader adjoint du gouvernement.
M.
Sklavounos :
M. le Président, nous proposons l'adoption sans débat.
Mise aux voix
Le Vice-Président
(M. Ouimet) : Très bien. Alors, cette motion est-elle adoptée?
Des voix :
Adopté.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Adopté. Mme la députée de
Sainte-Marie—Saint-Jacques,
pour une prochaine motion.
Mme Massé :
Merci, M. le Président. Je demande le consentement de la Chambre pour débattre
de la motion suivante conjointement avec le député de Marie-Victorin :
«Que
l'Assemblée nationale prenne acte du nombre record de débranchements de clients
par Hydro-Québec qui a atteint plus de 51 000 clients en septembre
2014;
«Que
l'Assemblée nationale rappelle à Hydro-Québec que l'installation de compteurs
intelligents ne visait pas à
faciliter le débranchement de clients à distance, que l'accès à l'électricité
est un besoin essentiel, que l'augmentation du nombre de débranchements est causée par l'appauvrissement de la
population et l'invite à la plus grande retenue puisque les
débranchements à distance peuvent entraîner des risques importants pour la santé
et la sécurité de la population.»
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, Mme la
députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion? M. le leader
adjoint du gouvernement.
M.
Sklavounos :
Pas de consentement, M. le Président.
• (11 h 20) •
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, il n'y a pas de
consentement. Y a-t-il d'autres motions sans préavis?
Avis touchant les travaux des commissions
S'il n'y en a pas, nous passons maintenant aux
avis touchant les travaux des commissions. M. le leader adjoint du
gouvernement.
M.
Sklavounos : Oui. Merci, M. le Président. J'avise cette
Assemblée que la Commission de l'aménagement du territoire poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 3, Loi
favorisant la santé financière et la pérennité des régimes de retraite à prestations déterminées du secteur
municipal, aujourd'hui, après la période des affaires courantes jusqu'à
13 heures et de 15 heures à 18 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau;
La Commission de
l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources naturelles
poursuivra l'étude détaillée du projet de
loi n° 11, Loi sur la Société du Plan Nord, aujourd'hui, après les
affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 15 heures à 18 heures, à la
salle Louis-Hippolyte-La Fontaine;
La Commission des
institutions poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 17, Loi
modifiant la Loi sur le Barreau, la Loi sur
le notariat et le Code des professions, aujourd'hui, après les affaires
courantes jusqu'à 13 heures et de 15 heures à 16 h 30, à la
salle du Conseil législatif;
Et
finalement la Commission des finances publiques poursuivra l'étude détaillée du
projet de loi n° 15, Loi sur la
gestion et le contrôle des effectifs des ministères, des organismes et des
réseaux du secteur public ainsi que des sociétés d'État, aujourd'hui, de
15 heures à 17 heures, à la salle des Premiers-Ministres, 1.38, de l'édifice
Pamphile-Le May. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président
(M. Ouimet) : Merci à vous, M. le leader adjoint du
gouvernement.
À la rubrique,
maintenant, des renseignements sur les travaux de l'Assemblée…
Affaires du jour
Alors,
nous passons maintenant à la rubrique des affaires du jour, la période des
affaires courantes étant terminée. M. le leader adjoint du gouvernement,
pour la suite des choses.
M.
Sklavounos :
Oui. M. le Président, auriez-vous l'amabilité d'appeler l'article 1 de notre
feuilleton?
Projet
de loi n° 10
Adoption du principe
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
Alors, à l'article 1 du feuilleton, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux propose l'adoption du principe du projet
de loi n° 10, Loi modifiant l'organisation et la gouvernance du réseau de la santé et des services sociaux notamment par
l'abolition des agences régionales. Alors, M. le ministre de la Santé et
des Services sociaux, je vous cède la parole. Vous avez un droit de parole de
60 minutes.
M. Gaétan Barrette
M.
Barrette : Merci, M. le Président. Le 25 septembre dernier, j'ai
présenté à l'Assemblée nationale le projet de loi n° 10, intitulé la Loi modifiant l'organisation et la
gouvernance du réseau de la santé et des services sociaux notamment par l'abolition des agences régionales.
Ce projet de loi a récemment fait l'objet de consultations particulières
et d'auditions à la Commission de la santé
et des services sociaux. Ces consultations se sont déroulées du 20 octobre au
13 novembre dernier, et, à cette occasion,
nous avons entendu 64 groupes et avons reçu 120 mémoires qui ont été déposés. Nous avons apprécié la qualité des réflexions et
des propositions émises par tous ceux et celles qui sont venus exprimer leur point de vue en partageant leurs idées et
leurs préoccupations. Ces personnes, groupes, associations et organismes
ont donc pu enrichir nos propres réflexions.
J'accorde,
pour ma part, une immense importance à ce projet de loi, dont l'objectif,
rappelons-le, est d'assurer, par la création d'un seul établissement intégré de santé et de services sociaux par région, une véritable intégration des services. Cette intégration permettra, M. le Président, un parcours de soins plus simple et plus fluide pour les usagers,
un accès plus grand aux services et l'amélioration de la qualité et de la sécurité des services. Aussi, l'intégration
favorisera l'accroissement de
l'efficience et l'efficacité du réseau par une consolidation et une
concentration des fonctions administratives
au profit des services à la population. Le projet
de loi vise également
à alléger les structures et la bureaucratie
au profit d'une gestion administrative plus rigoureuse et plus saine.
Enfin, il favorise une ligne d'autorité, de gouvernance et d'imputabilité plus claire et cohérente. La
prise en compte des réalités propres à chaque région sera plus effective, et
les points de service, comme les
équipes cliniques, resteront autonomes dans le choix des moyens déployés pour
assurer l'accès et le respect des orientations ministérielles.
Les modifications législatives qui sont
présentées s'inscrivent dans la foulée de la réforme entreprise, M. le Président, en 2003. Elles offrent d'ailleurs
d'aller plus loin pour placer davantage le patient au coeur des activités et
des actions du réseau. Des gains,
tant sur le plan technologique, clinique et financier, sont escomptés et
justifient de terminer l'oeuvre
d'intégration amorcée il y a maintenant près d'une décennie. En misant sur des
acquis déjà en place, le gouvernement
propose des changements législatifs touchant principalement la structure
organisationnelle du réseau de la santé et des services sociaux et la
mise en place d'une nouvelle gouvernance.
S'y
inscrivent également des dispositions relatives aux ressources financières,
dont un nouveau mode d'allocation par programmes services permettant de
protéger les services aux personnes les plus vulnérables comme la clientèle présentant une déficience physique, une déficience
intellectuelle ou une dépendance, ainsi que des mesures précisant le partage de certaines responsabilités entre les
deux paliers de gouvernance restants et donnant au ministre le moyen d'assurer
une saine gestion du réseau de la santé et des services sociaux.
Je suis donc
très heureux, M. le Président, de proposer aujourd'hui l'adoption de principe
du projet de loi n° 10. Avant
d'aller plus loin, il m'apparaît essentiel de rappeler dans le détail les
principaux objectifs inhérents à ce projet de loi. Le projet de loi propose la création d'établissements
à mission élargie pour chaque région sociosanitaire issue de la fusion et de l'agence de la santé et des services sociaux
et de l'ensemble des administrations des établissements publics de la région. Pour la région de Montréal, évidemment, le
nombre d'établissements régionaux prévus est plutôt de cinq, compte tenu de la situation sociodémographique de la
région de Montréal. Ainsi, cette réorganisation vise, je le rappelle, à
favoriser et à simplifier l'accès aux
services pour la population et à contribuer à l'amélioration de la qualité et
de la sécurité des soins, de même qu'à accroître l'efficience et
l'efficacité du réseau de la santé et des services sociaux.
Le projet de
loi, M. le Président, instaure également une nouvelle gouvernance pour les
établissements régionaux et suprarégionaux. Plus spécifiquement, il
précise la composition des conseils d'administration de ces deux types
d'établissement, dont le nombre de membres variera entre 13 et 15.
Le projet de loi prévoit également que ces
membres soient rémunérés, que la majorité soit indépendante et réponde à des
profils de compétence précis. L'ensemble de ces membres est nommé par le
ministre de la Santé et des Services sociaux
à partir d'une liste de noms qui sera fournie par différents groupes, dont un
groupe d'experts en gouvernance pour ce qui est des membres indépendants
Le projet de
loi, M. le Président, confie également à la direction des nouveaux
établissements un président-directeur général
qui est secondé dans ses fonctions par un président-directeur général adjoint.
Tous deux sont aussi nommés par le ministre.
Par ailleurs,
le projet de loi contient des dispositions d'interprétation et d'application de
plusieurs lois et règlements pour
tenir compte des modifications, évidemment, apportées à l'organisation et à la
gouvernance du réseau de la santé et des
services sociaux. Ces dispositions portent essentiellement sur l'exercice, par
les établissements régionaux et le ministre, de certaines fonctions
actuellement exercées par les agences de la santé et des services sociaux.
Je tiens à
rappeler, M. le Président, que le projet de loi dont il est question ici est de
nature transitoire. Je l'ai dit à plusieurs reprises, il vise à donner une
impulsion au réseau tout en menant vers une véritable intégration des services,
et ce, au profit des citoyens du Québec. Il va donc de
soi qu'il sera nécessaire, dans un deuxième temps, de revoir en profondeur
l'actuelle loi sur la santé et les services sociaux, tel que je l'ai mentionné
auparavant à plusieurs reprises.
M. le
Président, nous avons entendu les réflexions et les propositions d'une
multitude de groupes en commission parlementaire. Depuis, nous avons
pris le temps d'analyser chacune des propositions de façon consciencieuse, et
je m'engage donc, M. le Président, formellement aujourd'hui à apporter des
ajustements au projet de loi de façon à le bonifier, et ce, dans le respect des
objectifs principaux fixés.
Tout d'abord, je tiens à réaffirmer, M. le
Président, ma confiance envers les
gestionnaires, les administrateurs et
l'ensemble des différents acteurs du système
de santé et de services sociaux du Québec et en leur capacité de relever les
importants défis qui les attendent au cours
des prochaines années. D'entrée de jeu, les consultations qui viennent tout
juste de se terminer ont permis de constater que la très grande majorité
des personnes, groupes, associations et organismes rencontrés souscrivent pleinement à l'intention première du projet de
loi. Cette intention, je le rappelle, est de favoriser et de simplifier et l'accès aux services pour la
population, mais aussi de contribuer à l'amélioration de la qualité et de la
sécurité des soins et d'accroître
l'efficience du réseau québécois de santé et de services sociaux en définissant
mieux les corridors de services et en
assurant la simplicité et la fluidité du parcours des patients. Plusieurs ont
exprimé le désir d'être partie
prenante du changement qui s'amorce et ont affirmé leur pleine collaboration à
la mise en place de cette restructuration.
J'ajouterai
ici, M. le Président, que personne, ni un groupe ni un individu de quelque
origine que ce soit, n'a remis en
question la pertinence d'abolir les agences régionales de santé et de services
sociaux. Alors, nous avons des consultations qui nous ont permis de conclure que le fondement du projet de loi est
accepté par la population et que personne ne conteste l'abolition des
agences.
Des réserves,
par contre, ont été soulevées sur certains aspects touchant l'organisation et
la structure proposées par le projet
de loi. Actuellement, contrairement à la région de Montréal, il est prévu dans
le projet de loi que les centres hospitaliers universitaires de la
région de la Capitale-Nationale et de l'Estrie soient intégrés à l'intérieur
même d'un centre intégré de santé et de
services sociaux. À cet égard, j'ai bien entendu, M. le Président, les principaux messages soulevés
par les gens qui se sont présentés en commission
parlementaire et je prends l'engagement de m'appliquer à définir des solutions qui permettent de
progresser tout en respectant les objectifs poursuivis par le projet de loi.
En ce qui a trait au regroupement des établissements actuellement prévu au projet
de loi, je retiens, M. le Président, également que la réorganisation du réseau visée par le projet
de loi pourrait tenir compte
davantage de certaines réalités géographiques, démographiques et
socioculturelles de certaines régions. Je verrai donc à revoir le regroupement
des établissements et des réseaux locaux de services de certaines
régions telles la Capitale-Nationale, l'Estrie, la Montérégie et la Gaspésie—Îles-de-la-Madeleine.
Également, M. le Président, vous comprendrez que la mise en place d'une réforme de cette nature
doit se faire de façon progressive, et c'est pourquoi
le projet de loi actuel prévoit et maintiendra la nomination par
le ministre des P.D.G., des présidents-directeurs généraux adjoints ainsi que les membres des conseils d'administration. Cependant, il est important de réitérer que ce mode
de comblement est et sera définitivement transitoire. Tel que je l'ai déjà
mentionné, il sera nécessaire dans un deuxième temps, c'est-à-dire dans ce mandat, M. le Président, de revoir en
profondeur l'actuelle Loi sur les
services de santé et les services sociaux. Les conclusions de cet exercice nous
permettront d'évaluer la meilleure façon de pourvoir ces différents postes lors du renouvellement de leurs
mandats respectifs, qui se réalisera sans aucun doute d'ici la fin de ce
mandat.
Un autre ajustement
envisagé est de s'assurer que le projet
de loi n'entraîne pas l'éloignement
des usagers du réseau de la santé et
des services sociaux des actions et
des centres de décision, mais plutôt de maintenir une voix forte pour ceux-ci.
Le projet de loi doit s'assurer d'un équilibre entre la participation citoyenne
et la professionnalisation des conseils d'administration nécessaire en raison de la taille et de la
complexité des nouveaux établissements créés. Ainsi, la mise en place d'un comité provincial relevant du ministre
pourrait être envisagée en ce qui a
trait aux usagers, mais d'autres
réflexions sont en cours actuellement pour s'assurer, dans l'éventuel projet de loi, s'il est adopté, une représentation significative et, je
dirais, M. le Président, maximale des usagers dans cette nouvelle structure.
Finalement, le projet de loi propose une
intégration des services sous la gouverne d'un seul établissement par région, sauf, évidemment, à Montréal
et dans certaines régions qui seront révisées, incluant l'ensemble des services
sociaux. Cette intégration permettra
un meilleur arrimage entre les soins à offrir à ces clientèles et une plus
grande fluidité entre les première, deuxième et troisième lignes, notamment
pour les cas qui présentent des problématiques multiples.
• (11 h 30) •
Il est plus
urgent que jamais, sachant à quel point notre population
vieillit et se déplace sur le territoire, victime plus que jamais de problèmes de santé chroniques qui exigeront
d'accéder à plusieurs types de services dans plusieurs endroits,
dans plusieurs… pendant plusieurs années.
Dans
l'intérêt, M. le Président, dans l'intérêt
d'assurer une place solide à ces différents services au sein de chacun des centres intégrés de santé et de services sociaux, des mesures ont été introduites
au projet de loi afin de protéger les ressources
financières ainsi que l'expertise dévolue aux clientèles vulnérables. Je l'ai
dit en commission parlementaire à
plusieurs reprises, il y a des secteurs d'activité qui sont petits en budget,
immensément importants en importance, et ces gens-là doivent voir et
leur expertise et leur financement protégés dans l'exécution de nos
orientations futures. Toutefois, comme j'ai
la ferme intention de bien protéger le secteur social, des mesures de
protection supplémentaires seront ajoutées.
En terminant,
M. le Président, je suis conscient que des inquiétudes ont été exprimées et que
des zones d'ambiguïté peuvent demeurer. Ces zones apparaissent
inévitables dans le cas d'un projet de loi de transition qui n'est pas encore accompagné
de sa réglementation. Je vous réitère donc mon intention d'analyser encore plus
en profondeur et avec une grande ouverture l'ensemble des
recommandations issues de la récente consultation afin de pouvoir, dans un
avenir rapproché,
apporter les éléments de clarification qui parviendront à répondre à plusieurs
des inquiétudes exprimées en commission parlementaire.
Et je
rajouterai ceci, M. le Président : Il y a
eu toutes sortes de représentations qui ont été faites en commission parlementaire, qui sont venues
par divers groupes, parfois des citoyens individuels, parfois des
regroupements de citoyens de diverses
origines, parfois des organisations représentatives professionnelles ou syndicales, mais je peux dire une chose : Bien qu'il y ait eu des discours
purement... que je pourrais qualifier de corporatistes, il y a eu une grande
majorité de remarques et de commentaires qui
ont été faits sur des fondements réels. Et nous les avons entendus, et je peux
raisonnablement affirmer aujourd'hui, M. le Président, que nous aurons
des amendements qui seront proposés, qui répondront à, je l'espère, la totalité
des critiques et commentaires qui ont été formulés qui sont fondés.
Évidemment,
le projet de loi n° 10 n'est pas là pour
refaire la politique entière de notre gouvernement — je termine là-dessus — le
projet de loi n° 10 est un projet qui est fait non pas pour le
gouvernement, mais pour les patients. Ce projet de loi mis en place… à mettre la structure… en place la structure
nécessaire pour qu'on puisse grever... greffer
dessus la panoplie de mesures qui
vont faire en sorte qu'enfin nous pourrons améliorer de façon définitive notre
système de santé et de services
sociaux au bénéfice des patients, des usagers, des citoyens qui nous écoutent
et qui sont concernés ainsi que pour leurs proches, M. le Président. Je
vous remercie, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) :
Alors, merci à vous, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux. Mme la
députée de Taillon et porte-parole de l'opposition officielle en matière de
santé, je vous cède la parole.
Mme Diane Lamarre
Mme
Lamarre : Merci beaucoup, M. le
Président. Alors donc, mes commentaires porteront sur la Loi modifiant
l'organisation et la gouvernance du réseau de la santé et des services sociaux
notamment par l'abolition des agences.
D'entrée de
jeu, j'aimerais lire l'article 1 de ce projet de loi, qui indique : «La présente loi modifie l'organisation
et la gouvernance du réseau de la santé et
des services sociaux afin de favoriser et de simplifier l'accès aux services
pour la population, de contribuer à
l'amélioration de la qualité et de la sécurité des soins et d'accroître
l'efficience et l'efficacité de ce
réseau.» Et, dans le deuxième paragraphe, on indique
que ce sera axé sur la proximité et la continuité des services.
M. le
Président, les gens qui sont venus nous rencontrer, les 64 groupes,
seulement quatre ont donné un appui clair à ce projet de loi là. Une
douzaine ont émis des réserves, mais ont quand même donné une opinion
favorable, mais la majorité, grande majorité
ont vraiment exprimé des préoccupations. Surtout, je vous dirais, ce qui a été
dit, c'est que ce n'était pas ça,
la priorité. Et je pense que ce que les gens ont unanimement dit dans cette commission parlementaire là, c'est que la priorité, c'était un meilleur accès à
notre système de santé.
Et, pour vous
donner quelques exemples de comment l'accès,
actuellement, est déficient au Québec... Et c'est inconcevable,
M. le Président, qu'on ait autant de
difficultés que ça à avoir accès à un médecin
de famille. Il n'y a pas d'autres
endroits qui ont ce genre de problème là. On a 2 millions de Québécois sur
8 millions qui n'ont pas de médecin
de famille. On a 18 heures d'attente,
en moyenne, à l'urgence. Dans tous les pays développés, on fixe des objectifs
de quatre heures comme maximal temps d'attente à l'urgence. Il faut
que les urgences soient réglées. Quand ça ne fonctionne pas, on remet en question nos processus
et on trouve une façon pour qu'en quatre heures tout le monde soit vu dans les
urgences.
Le rapport du Commissaire à la santé et au bien-être
nous a dit récemment que 60 % des gens qui allaient à l'urgence avaient un niveau de priorité P4 ou P5,
ce qui veut dire que ce n'était pas prioritaire, en tout cas ce n'était pas
une priorité importante, P1, P2 et P3 étant
les priorités les plus grandes. Donc, on a un problème avec la première ligne.
Et ça, ça nous a été répété énormément. Non
seulement on a ces gens qui viennent de façon non appropriée à l'urgence, et ça coûte très cher, parce qu'une
consultation à l'urgence, ça coûte entre 250 $ et 500 $. Alors, quand
les gens mettent le pied à l'urgence,
on ne le sait pas, là, mais on ouvre un dossier, on fait une démarche qui coûte
entre 250 $ et 500 $. Et on
apprend en plus que 30 % des gens quittent avant d'avoir été vus parce que
c'est trop long, ça prend trop de temps. Et finalement on a dépensé le
250 $, on n'a pas le bon service, on n'a pas la protection du citoyen, et
ce citoyen-là va probablement se retrouver ailleurs le lendemain pour
retrouver... et donc amener d'autres frais.
Il y a plus de six mois d'attente pour les
chirurgies. Alors, cette semaine, on avait, dans nos revues de presse,
20 000 chirurgies qui étaient en attente pour
20 000 Québécois.
Une autre statistique qui est troublante :
18 % des Québécois apprennent qu'ils ont un cancer et, quand ils apprennent qu'ils ont un cancer, ils n'ont pas de
médecin de famille. Alors, ça, ça veut dire que, s'ils en avaient eu un,
médecin de famille, peut-être que le cancer
aurait été identifié, diagnostiqué plus tôt. Et, s'ils n'ont pas de médecin de
famille, on peut comprendre que leur cancer
a été diagnostiqué à l'urgence d'un hôpital, encore une fois. Et c'est sûr que,
si on a des médecins de famille à rendre disponibles, ces patients-là en ont
besoin en priorité prioritaire.
Donc, ce que
l'ensemble des gens sont venus dire, c'est qu'on avait un système de santé qui
était bon mais qui avait besoin d'amélioration au niveau de
l'accessibilité.
Le ministre a
souvent évoqué que son modèle de réforme de gouvernance faisait référence au
Cleveland Clinic ou au Kaiser
Permanente. Je vais citer Robert Perreault, qui est médecin et professeur
associé à la Faculté de médecine de l'Université McGill, qui connaît
bien ces deux systèmes. Et, à la Cleveland Clinic, ce qu'il précise, c'est que
la Cleveland Clinic possède bien d'autres caractéristiques que celle de l'intégration,
comme c'est prévu, première ligne, deuxième
ligne et service ultraspécialisé. Il dit, comme autres services, comme autres
caractéristiques que le Québec ne semble pas être prêt à offrir :
«Les voici : continuité de soins absolue, équipes multidisciplinaires de
prise en charge, médecins salariés et gérés
de manière cohérente, contrat de travail pour les médecins renouvelable chaque
année avec évaluation de performance, départements
structurés selon une logique de besoins du patient, par exemple un institut [de cardiologie] et vasculaire. Enfin et surtout,
des systèmes d'information orientés sur la mesure de la performance…»
En
ce qui concerne le Kaiser Permanente : «Ici, [la] priorité à des
interventions préventives et précoces à partir de protocoles clairs et de services de première ligne hautement
coordonnés hors des hôpitaux.» Alors donc, on voit qu'il y a énormément
de dimensions qui ne sont pas abordées.
Et
ce que les gens sont venus nous dire, sont venus dire au ministre, c'est :
M. le ministre, ne nous embarquez pas
dans une autre réforme de structure qui va nous paralyser pendant 10 ans.
Parce que les gens venaient témoigner que, la réforme de 2003, ils commençaient à peine à retomber sur leurs pieds
et être capables d'être fonctionnels. Ils ont dit : Ce n'est pas de ça dont on a besoin. Ce dont on a
besoin, c'est des mesures comme celle-là, de la reddition de comptes. Le mot est mal... est souvent mal perçu, mal
utilisé, mais je pense que c'est ça. Donc, c'est vraiment d'avoir des orientations
claires, des indicateurs de performance et
d'orienter vers des résultats concrets où on va clairement démontrer qu'on a
amélioré l'accessibilité aux soins de santé dans un système qui a de belles
qualités.
• (11 h 40) •
Maintenant,
ce système de santé là, les gens sont aussi venus nous dire : Attention,
M. le ministre, ce n'est pas que le
système de santé, c'est le système de santé et de services sociaux. Et on a
très peur que, dans cette réforme, tout ce qui est service social soit escamoté, soit... les gens ont utilisé le
terme «englouti» par les services de curatif, par l'hospitalier, parce que, dans le modèle des CISSS, on replace
les hôpitaux au centre, dans le fond, de chacun de ces centres intégrés de services… de santé et de services sociaux.
Alors, clairement, les gens sont venus dire : Ne touchez pas à tout, ne
venez pas nous bouleverser tout ce qu'on a et surtout travaillez sur les
vraies choses. Les vraies choses, c'est la reddition de comptes, c'est des indicateurs de performance. C'est, comme mon collègue
de la CAQ l'a dit, une urgence à améliorer nos systèmes d'information et
l'informatisation du système.
On ne réalise pas
actuellement. C'est inconcevable que les hôpitaux ne puissent pas partager
l'information, qu'entre un hôpital, un CLSC
et une pharmacie d'un territoire donné l'information ne circule pas. Elle est
là, la priorité aussi. Et n'importe quelle réforme ne donnera pas de
résultat si on n'a pas un meilleur système d'information et une informatisation
beaucoup plus appropriée.
Tantôt,
je suis un peu… j'étais un peu inquiète, parce que le ministre a dit : On
va travailler sur l'informatisation sans
que ce soit uniforme. Écoutez, les laboratoires ne se parlent pas, on ne peut
pas fusionner les laboratoires. Si vous passez une prise de sang, si quelqu'un passe une prise de sang à un
endroit, on ne peut pas savoir ailleurs, dans un autre endroit du Québec, qu'est-ce que cette prise de
sang là a donné. Alors, on a vraiment une priorité à mettre là-dessus, et
les ressources, elles doivent aller là. Elles ne doivent pas aller sur
l'organisation de structures.
Tantôt,
le ministre a aussi dit : Personne ne conteste l'abolition des agences.
Bien, en fait, le constat que les gens ont
fait, avec raison, c'est que les agences ne sont pas abolies dans ce projet de
loi là. Ce qu'on fait, c'est qu'on reconstruit 28 centres intégrés de services… de santé et de services sociaux.
Ce qui a été aboli, ce sont la centaine de CSSS, qui étaient, avant, plus près des gens et qui étaient la structure,
dans notre système de santé, qui vraiment était près des citoyens, qui
étaient répartis partout sur le territoire et avec lesquels les citoyens
avaient une bonne relation. Alors, ce n'est pas les agences qui sont abolies,
ce sont ces CSSS là par des fusions à profusion.
L'accès
priorité, écoutez, on a aussi d'autres informations qui sont venues.
L'Association des établissements de réadaptation
en déficience physique du Québec est venue nous donner des chiffres qui sont,
je pense, très parlants et qui nous
donnent, encore une fois, l'importance à accorder à l'accessibilité.
Actuellement, quand on détecte chez des enfants des problèmes de langage, eh bien, si on détecte, par exemple, chez un
enfant de trois ans un problème de langage, les délais d'attente sont de deux ans et demi, deux ans et demi pour que cet
enfant-là puisse avoir accès à des soins. On se rend compte que, s'il est rendu à cinq ans et demi, les dommages sont
difficilement récupérables, et très souvent il va déjà avoir été à la maternelle, à l'école et il va déjà
avoir été marginalisé. Il y a des urgences, il y a des choses qui ne se
récupèrent pas après deux ans, deux
ans et demi. Alors, si on a de l'urgence à mettre, c'est là. Et ça, ça a été
confirmé par l'Ordre des
orthophonistes et audiologistes du Québec, qui est venu aussi avec un cri du
coeur dire : Écoutez, c'est ça qui est la priorité pour ce secteur
d'exercice là.
La
Fédération québécoise des centres de réadaptation en déficience intellectuelle
et en troubles envahissants du développement
nous a aussi fait part de sa grande, grande crainte qu'il y ait un glissement
vers l'hôpital, et c'est le genre de
problème de… Leur fédération, d'ailleurs, disparaît carrément avec le projet de
loi n° 10. Cette fédération était constituée à 50 % de membres qui étaient des parents
d'enfants avec un problème d'autisme ou de trouble… ou de déficience
intellectuelle. Les parents sont très, très inquiets. Alors, je pense
qu'ils doivent vraiment… il faut entendre cette préoccupation-là.
Et
on peut comprendre que ce genre de priorité là peut facilement être
complètement escamoté par des budgets qui vont devoir prendre compte
davantage du prix des médicaments, par exemple, dans les hôpitaux, de
différentes priorités curatives, alors qu'on a des enjeux importants à ce
niveau-là et des enjeux qui ont un impact aussi sociétal, social… sociaux, pardon, mais également
économique, parce que, quand on réussit à faire en sorte que des parents
gardent leurs enfants avec un trouble
du spectre de l'autisme à la maison parce qu'ils ont des services raisonnables
pendant un certain nombre d'heures durant la journée, bien, on peut
comprendre qu'à ce moment-là c'est toute la société qui en bénéficie et c'est l'enfant lui-même.
Alors,
en gros, ce qu'on nous dit de ce système, les 64 groupes qui sont passés
et ceux qui ont eu aussi… qui n'ont pas
pu être entendus mais qui ont pris le temps de rédiger un mémoire… et je les
remercie d'avoir pris ce temps, d'avoir eu la conscience sociale de… sociétale
de participer à cet exercice-là. Donc,
d'abord, ce qui est ressorti énormément aussi, c'est l'absence de consultation. J'ai demandé
à la plupart des groupes s'ils avaient été consultés avant la
publication du projet de loi, et
personne, personne ne m'a dit avoir été consulté au préalable. Et je rappelle
qu'on a reçu 64 groupes, des groupes
de médecins, des groupes d'infirmières, des groupes de travailleurs sociaux,
des groupes de patients, des groupes de citoyens, des syndicats.
Personne n'a été consulté.
Je vous dirais que la
Fédération des médecins résidents a même dit que c'était un projet pour lequel
il y avait seulement le ministre qui avait
une vision globale complète. Parce que, là aussi, ce qu'on nous a dit, c'est
que le projet de loi n° 10,
c'est seulement un morceau du casse-tête. Or, on nous demande de nous prononcer
sur ce morceau-là, et on n'a aucune idée de ce que sera l'ensemble du
casse-tête, et ça, c'est très préoccupant. Et,
quand on parle de transparence, sincèrement,
c'est inadmissible. Le ministre aurait dû au moins nous dire… grossièrement, de façon plus générale, mais
nous dire :
Il y aura, après ce projet de loi là, quatre ou cinq
autres projets de loi, et nous indiquer un peu la nature de ces projets pour qu'on ait une vision globale.
D'abord, ça aurait peut-être atténué certaines préoccupations, certaines
craintes, mais ça aurait été nettement quelque chose qui aurait fait
preuve de transparence, alors que, sur la transparence, à ce moment-ci, on est obligés de donner la note zéro.
Donc, la centralisation, clairement, on fait remonter dorénavant à peu
près toutes les décisions au ministre.
Et, pour vous donner une idée de ça, même
certains groupes de préposés sont venus dire… et de travailleurs communautaires qui ont accès à des programmes de perfectionnement,
eh bien, dans le projet de loi n° 10, l'autorisation des programmes de perfectionnement, la formation
continue pour ces gens-là, va devoir remonter au ministre. Alors, on s'imagine
la congestion que ça va créer, ça va être très, très long à avoir des
résultats, et les questions devront toutes remonter
au ministre. Donc, il n'y aura plus d'appropriation du terrain, il n'y aura
plus les citoyens… La
participation active des citoyens est vraiment abolie : on avait 3 100 usagers, on va en avoir
15 sur les conseils d'administration maintenant.
Mais certainement, aussi, on voit bien, là, qu'on n'a plus du tout de… on a vraiment une centralisation incroyable,
qui va à l'encontre aussi de tous les modèles de soins de santé qui
fonctionnent actuellement dans le monde.
On veut
décentraliser parce que les besoins des gens sont différents, parce qu'à l'intérieur d'une région on a des
caractéristiques particulières. Et on a besoin d'avoir aussi la grande
contribution des groupes communautaires, qui jouent un rôle exceptionnel dans l'équilibre et
dans la performance du soutien en santé et en services sociaux, et ces gens-là
vont se sentir complètement mis de côté, très
éloignés du processus de décision. On se rend compte qu'à Longueuil, en Montérégie, actuellement, il y aura un seul CISSS,
le ministre a évoqué la possibilité qu'il en fasse peut-être deux, mais… 1,5 million de citoyens dans un seul centre
intégré en Montérégie, entre Vaudreuil et Contrecoeur. Alors, vous imaginez
un citoyen qui veut essayer d'avoir un lien
avec sa structure administrative pour faire avancer
un dossier? C'est énorme, c'est
mégastructure. C'est impossible, dans le fond, de faire entendre sa voix
rapidement, à tout le moins, et peut-être même de
la faire entendre tout court.
• (11 h 50) •
Donc, la
centralisation, clairement, ce qui a été également évoqué comme préoccupation,
c'est la grosseur des conseils des
médecins, dentistes et pharmaciens, ce qu'on appelle les CMDP. Alors, il y aura
des CMDP qui vont contenir
jusqu'à 2 000 médecins, et ce qu'on voit, à ce moment-là, c'est qu'il
faut qu'on standardise les pratiques. Donc, il va y avoir énormément de temps
passé à travailler sur la standardisation des protocoles.
Vous savez, quand on rentre à l'hôpital, il y a
des protocoles. Quand on fusionne deux, trois établissements ensemble, il faut qu'il y ait une standardisation
de ces protocoles-là. Les médecins, par exemple, du CHUQ, à Québec, sont venus parler du temps qu'ils avaient mis… Ça
fait deux ans et demi qu'il y a eu une… on a forcé une réforme… une fusion c'est-à-dire, pas forcé, mais on a… Il y a eu une
fusion, et 1 600 médecins ont mis deux ans et demi, ils disent…
à peine… Ils ont supplié le ministre de ne
pas leur imposer une autre réforme, parce
qu'ils ont dit : Écoutez, on en sort à peine, là. On veut donner continuellement les bons
soins aux patients, mais en plus on a un travail supplémentaire à faire
avec ces fusions. Donc, vraiment, une préoccupation importante.
La FADOQ, la
Fédération de l'âge d'or
du Québec, est venue nous dire que le projet centralisait le pouvoir sans
prévoir de processus décisionnel local, et elle l'a déploré très fortement.
Alors donc,
centralisation, bureaucratie. Alors, comme tout va retourner au gouvernement,
au ministre, c'est sûr qu'il va y avoir énormément de paperasse. On
prévoit des économies d'emploi. Je pense que le chiffre qui a été évoqué,
d'avoir une centaine de cadres seulement qui vont être rapatriés, sur les
1 300, qui vont être rapatriés à Québec, au gouvernement... je pense que, rapidement, on va
avoir à réembaucher d'autres personnes pour travailler, pour accueillir tout ça. De sorte que les économies du projet de
loi n° 10, qui sont essentiellement, en fait,
deux choses… Il y a 220 millions qui est évoqué comme économie potentielle, je vous dirais que, là-dessus,
c'est du temps de personnel, c'est de la rémunération de personnel, et un 20 millions en santé publique, je vais revenir à la santé publique tantôt, mais, le
200 millions en ressources humaines, on est loin d'être sûrs que ça va être au rendez-vous.
Il est certain qu'il va y avoir énormément de
personnes qui vont devoir être mises à contribution. Mais, au lieu que ce soient des gens qui travaillent dans les
régions, qui étaient aussi des forces vives dans les territoires du Québec…
Et ça, on l'a… Mes collègues qui sont en
région ont aussi évoqué qu'il y avait, dans ce projet
de loi, des pertes d'emploi de
haut niveau à travers toutes les régions. Et donc on perd ces emplois-là, on les reconcentre tous à Québec, donc des
difficultés importantes à ce niveau-là.
Dans le
budget, plusieurs ont demandé au ministre un estimé des coûts de transition, et
on n'a pas du tout ça. Donc, le 200 millions, il est très
arbitraire. C'est un 200 millions vraiment grossier, pour dire : Il va y
avoir, finalement,
de l'attrition, des postes qui vont être
abolis progressivement. Mais tous les coûts de changement n'ont pas été
évoqués, et ils vont être nombreux,
ne serait-ce que dans la papeterie, dans tout ce
qu'il va y avoir à être changé partout,
dans toute l'organisation, les structures, les locations de locaux.
C'est incroyable. Les accréditations syndicales vont également devoir être
changées.
Alors, vous
imaginez l'énergie — et c'est
ça que les gens sont venus nous dire — qui va être mise à une fusion, alors
qu'on a besoin de mettre cette énergie-là à
l'accessibilité aux soins?
Les gens nous ont parlé de différentes
priorités — on
va essayer d'être positif. Et donc ils ont dit :
Oui, on est d'accord pour que le
gouvernement donne… le ministre donne les orientations. Tout le monde est
d'accord pour ça. Mais il y a une deuxième obligation qui va avec les orientations, et c'est
d'assurer l'atteinte des résultats. Et trop souvent, dans notre système, on a mis des structures, on a même
mis des balises, et on a mis des objectifs à atteindre, et on ne s'est pas
rendu jusqu'aux résultats. Il faut changer
aussi la culture de dire qu'on donne tout de suite et qu'on n'attend pas que
les résultats soient là. Je donne
l'exemple de la Colombie-Britannique, où les
médecins ont des objectifs : par exemple, des patients diabétiques qui vont à l'hôpital cinq
fois dans l'année et qui n'atteignent pas leurs cibles, bien, le médecin doit
les accompagner, et souvent c'est avec des équipes d'infirmières, pharmaciens. Donc, ils ont
des... ils suivent ce patient-là, et
on finance au résultat. Donc, si, au bout d'un an, on a réussi à démontrer que
le patient est allé juste deux fois à l'hôpital
au lieu de cinq fois, si ses glycémies ont
été mieux contrôlées, là on donne la prime. Alors qu'au Québec,
on l'a bien vu, malheureusement, avec le
député de Taillon,
la prime est donnée au départ, et on n'a pas du tout de garantie qu'on a le
résultat. Alors, ça, ça a été rapporté
souvent comme un changement à apporter dans notre structure et dans les
modalités qui entourent la rémunération des médecins.
Beaucoup
de gens ont demandé clairement au ministre un plan de transition, et Mme Saint-Germain, la Protecteur du citoyen, y a fait référence, et elle a insisté,
et plusieurs autres groupes ont également insisté là-dessus. Quand on a une
réforme de cette envergure-là, il est certain que ça prend un plan de
transition. Il y a un jour où on va dire : On ferme l'agence et on va récréer notre conseil
d'administration avec notre CISSS, mais il va y avoir des gens qui vont devoir
quand même recommencer à travailler.
Et cette agence-là, comme je vous disais, elle ne sera pas fermée, elle va être
reconstruite mais avec une
méga-agence qui va être encore avec d'autres personnes. Ça va être très, très
compliqué. Et donc ça prend un plan de transition.
Ça prend un
plan de transition aussi pour tous les organismes qui actuellement se
référaient... soit qu'ils étaient autonomes
ou soit qu'ils se référaient à un CSSS et qui, là, du jour au lendemain, vont
se retrouver à devoir se référer à un centre
intégré de santé et de services sociaux. Donc, clairement, un plan de
transition, c'est essentiel. Et ça, ça n'est pas du tout, du tout présent, et je n'ai pas entendu le
ministre manifester d'intention d'ouverture par rapport à l'élaboration d'un
plan de transition.
Ce que des
gens sont venus nous dire aussi, c'est que, de travailler dans un grand, grand
groupe comme ça, il risque d'y avoir
une déresponsabilisation. Tantôt, je vous parlais des CMDP. C'est sûr que les
gens, les médecins qui travaillent dans
un hôpital, ils ont l'appartenance à cet hôpital-là. Quand on parle de groupe
communautaire, ils ont une appartenance à leur groupe communautaire. Si tout à coup ça devient quelque chose qui
couvre une région immense et qu'ils n'ont plus la structure de base qui
était les CSSS, eh bien, ils n'ont plus d'ancrage, ils n'ont plus de point de
référence avec leur système de santé. Et ça,
ça les inquiète beaucoup. Ils ont très peur de démobiliser leurs membres, ils
ont très peur que ça soit vraiment quelque chose qui fasse en sorte que les
gens se déresponsabilisent de toutes les contributions qu'ils ont à faire pour
le bon fonctionnement du CISSS. Des gens nous ont dit : Ça a pris
10 ans avec la réforme de 2003 pour qu'on puisse voir lever le travail des CSSS, et là on est rendus à recueillir
le bien de ça, et vous le laissez tomber, et vous repensez tout ça. Certains ont reproché au ministre, et je
le cite parce que c'est comme ça que c'était... il y a une pensée magique
face aux effets collatéraux de la réforme.
Alors, comme
je vous dis, il y a énormément de choses qui vont être touchées dans ces
fusions, mais il faut même penser que
les accréditations syndicales vont devoir être revues. Alors, ça nous donne une
idée de l'ampleur de tous les éléments non liés directement avec la
qualité des soins et l'accessibilité.
Il y a
certaines préoccupations qui demeurent également par rapport à certains
articles du projet de loi, et je vais en
lire quelques-uns. Par exemple, au niveau de la langue française, il y a un
article, l'article 65, qui dit : «Tout établissement doit élaborer un programme d'accès aux services de santé
et aux services sociaux en langue anglaise pour les personnes
d'expression anglaise à qui il dispense des services.
• (12 heures) •
«Le programme
doit tenir compte des ressources humaines, matérielles et financières de
l'établissement. Il doit également
être approuvé par le gouvernement et être révisé au moins tous les trois ans.» Ça
existe déjà, ça. C'est exactement ce
qui existe déjà, donc l'accès en anglais à des services, mais vous noterez que
le mot qui est utilisé, c'est le mot «établissement». Et là on va fusionner une
quinzaine… peut-être 18, 20 établissements, et ça porte encore le nom «établissement». Alors, comment on va distinguer
quel est l'établissement à l'intérieur de l'établissement? Et, si c'est
un seul établissement, eh bien, ça veut dire que ça va être le
méga-établissement qui va devoir répondre à cette demande-là. Et le ministre, dans sa réponse aux questions, a
été habile parce qu'il n'a pas utilisé le mot «établissement», il a utilisé
le mot «institution». Mais, si le mot «établissement» reste comme il est
actuellement dans le projet de loi n° 10, on comprend,
et des groupes l'ont évoqué comme problématique, que ce méga-établissement-là
devrait offrir les soins en anglais
comme les établissements désignés actuellement. Alors, on voit que ça couvre
beaucoup, beaucoup, beaucoup plus
large. Donc, on aura besoin de revérifier tout ça et de faire reclarifier ça.
Mais les réponses du ministre en commission parlementaire n'étaient pas claires parce qu'il a utilisé le mot
«institution». Alors, ou bien il faudra changer «institution»... il faudra changer le nom «établissement», pour ce
méga-établissement, pour le mot «institution» ou bien il faudra, à ce
moment-là, faire, préciser des choses à ce niveau-là.
Il y a
également quelque chose qui a posé problème en termes de transparence. Ça a été
évoqué par Me Jean-Pierre Ménard, ça
a été évoqué également par le Protecteur du citoyen et ça a été évoqué par
plusieurs autres groupes, et c'est l'article 161 du projet de loi :
«Le
gouvernement peut, par règlement, prendre toute mesure nécessaire ou utile à
l'application de la présente loi ou à la réalisation efficace de son
objet.
«Un règlement pris en application du présent
article n'est pas soumis à l'obligation de publication ni au délai d'entrée en vigueur prévus aux articles 8 et 17 de
la Loi sur les règlements; il peut en outre, une fois publié et s'il en dispose
ainsi, s'appliquer à compter de toute date non antérieure au 1er avril 2015.»
Alors, ce qu'on comprend
de ça, c'est que le projet de loi permettrait qu'il soit soustrait à la
publication des règlements. Je vais vous
dire, ça a l'air anodin peut-être pour les gens qui nous écoutent à la maison,
mais c'est très grave. C'est un
projet que tout le monde a dit… avoir été fait dans la précipitation. On l'a
dit, aucune consultation. Toutes les autres
réformes de la santé qu'on a eues ont fait l'objet de consultations qui ont
duré un certain nombre de mois. Ou, à tout
le moins, le ministre aurait pu rencontrer des groupes avant, faire des états
généraux, faire quelque chose qui aurait permis d'aller chercher un peu plus le pouls de ce que les gens du
réseau de la santé et des services sociaux perçoivent et vivent et ce qu'ils ont à apporter et il ne l'a
pas fait. Mais non seulement il ne l'a pas fait, donc, en consultations
préalables, mais là, on l'a vu avec
les 64 groupes qui sont passés, il y a eu énormément de préoccupations qui ont
été exprimées, de demandes de
modifications, d'amendements, de changements au niveau du libellé de plusieurs
articles, et là le projet de loi
n° 10 prévoit qu'il pourrait se soustraire à la publication, c'est-à-dire
que les modifications qui vont être apportées au règlement ne seraient
plus soumises… Après, il passerait directement à l'adoption et ne serait plus
soumis à la publication.
Ce que ça
dit, c'est qu'il y a une volonté du ministre de ne pas écouter les autres, de
ne pas entendre et de vraiment gérer
tout ça comme s'il était le seul à être responsable de tout ce système-là. Et
les gens lui disent : Attention, M. le ministre, c'est dangereux, tout ça. Il y a des choses que
vous pouvez ne pas avoir pensées, il y a des réalités que vous pouvez ne pas
connaître, en particulier au niveau des services
sociaux. La ministre déléguée est venue à plusieurs occasions également, mais je vous dirais qu'il y a quand même
des choses qui sont dans le projet de loi qui ne rassurent pas les gens.
Donc, la transparence, elle n'est pas au rendez-vous,
et la capacité de vouloir recueillir
des critiques, elle n'est pas au rendez-vous aussi, et, les indices qu'on aurait dans le projet de loi pour nous rassurer, on ne les retrouve pas. Et non seulement
on ne les retrouve pas, mais on retrouve le contraire, on retrouve des éléments
qui nous disent : On veut pouvoir contrecarrer
toute résistance, toute critique. Et, si on décide que, le règlement,
on va le modifier comme ça, ça sera comme ça, et personne d'autre n'aura le droit de le relire une dernière fois
avant qu'il soit adopté de
façon définitive. Et ça, c'est
vraiment, en termes de transparence… On a un gouvernement qui nous a annoncé de la transparence. Eh bien, c'est un bris important. Et, pour une fois, là, il a une occasion de nous
montrer qu'il va nous donner de la transparence, et on ne la retrouve pas. Et, comme je
vous dis, on retrouve même, étonnamment, cet article-là spécifiquement qui
dit : On peut court-circuiter le
processus de consultation, en
tout cas, de publication qui permet
encore une dernière chance aux gens qui veulent réajuster le tir sur les
modifications apportées au projet de loi.
Il y a également
des préoccupations dans le projet
de loi par rapport à une éventuelle
privatisation. Et là aussi le ministre nous a dit : Il n'en est pas question,
je veux un système public, on veut un système public, mais on
regarde… Et la FTQ l'a bien indiqué
dans sa présentation. L'article 59, le 12e alinéa dit : «12° le
ministre est responsable de soutenir les
établissements dans l'organisation des services et d'intervenir auprès de ceux-ci
pour favoriser la conclusion d'ententes de services visant à répondre aux besoins de la population
ou, à défaut d'entente et conformément
à l'article 105.1 de la
Loi sur les services de santé et les services sociaux, de préciser la contribution attendue de chacun des établissements.» Alors, pour plusieurs,
il y a dans cet article-là une possibilité d'ouverture à des services au privé, et elle est
bien… elle est indiquée, là, le
potentiel est là. Donc, c'est la CSN — je
m'excuse, j'ai dit «la FTQ» — c'est
la CSN qui a manifesté de grandes préoccupations, et sa lecture est à l'effet que cet article-là pourrait facilement
permettre la privatisation de certains services en santé.
Donc, vraiment,
on doit être très prudents, et il n'y
a pas beaucoup de choses qui nous
rassurent dans cette… Dans tous les
petits écueils qui ont été soulevés, le ministre disait : Non, non, non,
ce n'est pas ça que ça veut dire. Mais c'est quand même ça qui était écrit
et c'est ça qui est encore écrit. Alors, on espère qu'il va avoir vraiment
l'ouverture. Moi, ce que j'entends de
sa préoccupation et de son ouverture, c'est beaucoup
plus des ouvertures de modification territoriale, géographique où on va couper un petit peu là, on va le réaménager là.
Mais des vraies ouvertures ou des vrais correctifs sur des articles du projet de loi qui sont
problématiques et qui laissent sous-entendre qu'on pourrait avoir des écarts au niveau de la transparence et au
niveau de la protection de notre système de
santé public… eh bien, écoutez, c'est problématique,
et ça, je n'ai pas entendu de correctif du côté du ministre
à ce niveau-là. Les gens nous ont dit également…
Donc, centralisation, j'en ai parlé un petit
peu; la bureaucratie, évidemment, comme tout va remonter principalement au gouvernement. Politisation. Alors, on l'a déjà
dit, le mot «ministre» apparaît plus de 100 fois, 102 fois, dans le projet de loi; le mot «patient», aucune
fois, et quelques fois le mot «usager».
• (12 h 10) •
Donc, là
aussi, dans tous les systèmes de santé des pays développés, on essaie de ne
pas politiser les systèmes de santé. Pourquoi? Parce que
les politiciens ont des mandats qui, en
général, sont autour de quatre ans, et les mesures qui sont performantes en
santé mettent beaucoup de temps avant de porter leurs
résultats. Alors, les mesures peuvent prendre
jusqu'à 10 ans, en santé publique, 15 ans avant qu'on ait un
impact. Par exemple, si on dit aux gens :
On fait une campagne pour la santé,
diminuer le tabagisme, on va avoir un impact parfois 50 ans plus tard. Or,
quand on politise un système comme
celui de la santé et des services sociaux, on incite les politiciens à mettre
des actions qui vont avoir un impact court, alors que les grands enjeux qui
affectent beaucoup la santé sont les enjeux de la prévention et de la santé
publique.
Dans le modèle de Kaiser Permanente, c'est vraiment,
vraiment la priorité à des interventions préventives. Vous savez, au Québec, on a un budget
de 335 millions pour la santé publique et 35 milliards pour le
reste du système de santé. Ça nous
donne la mesure : c'est une poussière, ça, qu'on met dans notre santé publique, dans la prévention au Québec,
alors que c'est ça qui va nous donner de
vraies économies. Sinon, on fait juste dépenser et dépenser rapidement sans
avoir les bénéfices. C'est en
prévenant différents contextes, différents indicateurs de non-santé qu'on va
avoir la diminution des coûts.
Tantôt, je parlais du diabète, qui est une maladie qu'on doit contrer beaucoup
plus; l'hypertension, il y a beaucoup de facteurs sur lesquels on peut
travailler; le tabagisme, qui est une situation qui est tellement dommageable
et pour laquelle il faut vraiment, vraiment agir. Alors,
ces mesures-là sont vraiment priorisées dans d'autres modèles, comme le Kaiser
Permanente, dont le ministre a parlé.
Tantôt,
j'ai commencé à vous préciser, ici, la
priorité, pour le Kaiser Permanente, à des interventions préventives et précoces à partir de protocoles clairs et de
services de première ligne hautement coordonnés hors des hôpitaux. Pour
y arriver, Kaiser ne recrute que des médecins qui croient à la promotion de la
santé et qui soutiennent une approche interdisciplinaire.
Les médecins qu'on juge capables de souscrire aux valeurs de l'entreprise
deviennent des associés de Kaiser
Permanente. Ils deviennent ainsi coresponsables des budgets et de tous les
soins. Ils doivent donc transcender les divergences corporatives et fournir un travail interprofessionnel sans
faille. Ce choix de gouvernance clinique... Et ça, ça a été demandé aussi. Ce n'est pas juste
une gouvernance administrative, une
gouvernance clinique. Qu'est-ce que c'est, une gouvernance clinique? C'est une gouvernance au niveau des soins. Donc, il y a des principes au niveau des soins et il faut que le médecin intègre des enjeux de prévention pour être
accepté dans le modèle de Kaiser Permanente et qu'il fasse rappel aux patients :
Est-ce que vous avez eu votre vaccin pour la grippe? Est-ce que vous avez eu
différentes mesures préventives
appropriées? Alors, ce choix de gouvernance clinique est caractérisé par une
insistance sur la promotion de la
santé, la prévention et la participation active des patients, «self-care», des
modes de soins collaboratifs et une gestion active des patients à l'extérieur de l'hôpital. Et,
là encore, l'institution s'est aussi dotée d'un ambitieux système de
dossiers électroniques. Alors, toute
l'information au sujet d'un patient — imaginez, on en rêverait au Québec — est accessible partout, en tout temps,
et l'organisation peut suivre
la performance de ses services de manière pointue et ainsi gérer les
problèmes rapidement. Les clients bénéficient d'un accès à une version
numérique de leurs dossiers et d'outils.
Alors,
on le voit, on a un contexte où, au niveau économique,
chaque sou compte. Et là on va s'engouffrer dans une réforme de structure qui ne nous donnera rien
des moyens qui sont nécessaires pour améliorer réellement la performance
de nos soins, la performance des équipes, je
vous dirais, même le plaisir de travailler avec des instruments qui sont
parlants. Et, quand on veut parler
d'interdisciplinarité, ça prend ces outils communs
là. Et le Québec, on est vraiment très, très, très en retard, même par rapport aux autres
provinces canadiennes. On a l'histoire des dossiers informatisés au Québec.
C'est un échec complet. Et il y a eu
pourtant des centaines de millions de dollars qui ont été engouffrés dans les
différents projets qui ont eu cours au Québec depuis 1992.
Moi,
j'étais au projet de cartes à puce à Rimouski en 1992. Et que, toutes ces
années plus tard, 22 ans plus tard, on
se retrouve encore avec un non-accès, une non... je veux dire, nos systèmes ne
se parlent pas, il n'y a pas de conciliation possible, les systèmes ne
sont même pas capables d'être conciliés ensemble, c'est inconcevable. Et ça,
c'est une des priorités sur lesquelles le ministre aurait dû se pencher bien
avant la réforme de structure, où les gens nous disent que finalement ça ne va
pas si mal, on est capables de travailler avec ce qu'on a, mais donnez-nous des
instruments de communication entre nous, assurons-nous qu'on est capables
d'avoir accès à de l'information.
Vous
savez, actuellement, on a accès en temps réel quand Le Canadien compte un but
puis on n'est pas capable de savoir,
quand un patient rentre inconscient à l'urgence de l'hôpital, qu'est-ce qu'il
prend comme médicaments, qu'est-ce qu'il
a comme maladies, qu'est-ce qu'il a comme problèmes de santé chroniques. C'est
inadmissible, c'est inconcevable. Et
on est huit millions, et on est une petite équipe, et on n'a pas d'énergie à
perdre. Et on n'a pas d'argent à perdre sur des choses qui ne sont pas directement liées avec la performance de
notre système de santé. Et jusqu'à maintenant, en tout cas, le ministre n'a pas réussi à convaincre
les groupes que le projet de loi n° 10 améliorerait la performance de
notre système de santé. Il va
circonscrire les conseils d'administration. Il va faire en sorte qu'on va avoir
seulement... On va avoir toujours, d'ailleurs, dans chaque conseil
d'administration, un nombre majoritaire de personnes indépendantes,
indépendantes mais nommées par le ministre. Tous les membres des conseils
d'administration sont nommés par le ministre :
l'usager est nommé par le ministre, les médecins qui sont prévus dans la
constitution de base du conseil d'administration,
l'infirmière qui va être là. Et, dans chacun de ces conseils d'administration
là, il y a toujours un nombre majoritaire de membres indépendants, donc, en
général, non professionnels, et membres indépendants mais nommés par le
ministre.
Alors,
on voit que c'est vraiment un grand, grand, grand exercice de contrôle du
système de santé par le ministre auquel on assiste, et actuellement
c'est vraiment un acte de foi parce qu'on n'a vraiment pas de façon de
comprendre comment cette réforme va vraiment
se greffer à une amélioration des vrais services de santé, ceux qui ont un
impact pour vous à la maison, ceux
qui font vraiment une différence, ceux qui vont faire qu'on va arrêter de faire
des allers-retours 10 fois quand on a
besoin de voir un médecin ou quand on a besoin d'avoir des services à
l'hôpital. Actuellement, nos dossiers
sont toujours perdus. On n'a pas reçu les résultats, on n'a pas votre liste de
médicaments, on n'a pas... C'était ça qui était la priorité, et là on
n'est pas du tout dans ça.
Je
veux garder les minutes qu'il me reste pour témoigner aussi de la préoccupation
que tous les gens qui sont au niveau
des services sociaux nous ont exprimée. Vous savez, on le voit actuellement, on
est en coupures. Les CPE n'étaient pas
supposés être coupés, n'étaient pas supposés être augmentés, mais là, tout à
coup, c'est augmenté parce que les coupures l'exigent. Alors, les coupures sont là. Il y a des services qui ne
peuvent pas ne pas être donnés. Dans des hôpitaux, on sait qu'il y a des chirurgies qui coûtent très cher. Il
y a des traitements de chimiothérapie qui coûtent très cher. Il y a plein de
choses qui sont presque obligatoires, mais
vous comprenez que, pour les gens qui font des merveilles avec quelques dollars
dans les services sociaux, ils ont très, très, très peur d'être mis de côté,
que leurs budgets soient toujours retirés, que finalement le budget soit relocalisé, retransféré dans les soins
curatifs au détriment des services sociaux et des services
communautaires.
• (12 h 20) •
Et
ce que les gens sont venus nous dire et ce que je peux voir dans ma
circonscription depuis que je suis
députée, c'est l'impact incroyable, la contribution inestimable que les groupes
communautaires apportent à notre système de santé — avec des budgets qui
sont ridiculement bas, ils font des miracles littéralement — et
que ces gens-là d'abord se sentent vulnérables parce que, là, on les regreffe,
on les met dans une mégastructure où ils ne se retrouveront plus.
La
plupart de ces organismes
communautaires ont déjà créé des
liens entre eux, des liens sur le territoire, ils ont des réseaux. On peut avoir un patient qui a un
problème de santé mentale avec des problèmes physiques, avec un problème
d'habitation, de logement. Alors, ils ont
déjà tout ça et là ils se disent : Mais on va recommencer tout ça à zéro,
on va avoir à recréer des liens. Les organismes vont avoir été fusionnés.
On n'aura plus les mêmes personnes avec lesquelles on va pouvoir parler. Certains organismes ne seront peut-être
plus aussi présents. Ils vont être relocalisés peut-être plus loin. Il
y a plein de préoccupations.
Vraiment,
c'est un choix qui est très préoccupant que ce projet de loi n° 10
là pour les citoyens et les gens qui s'impliquent au niveau des services
sociaux et pour les groupes communautaires, et je pense qu'ils ont... nous
devons réaliser jusqu'à quel point ces gens ont une contribution importante et
nous devons entendre. Et moi, je déplore qu'à plusieurs occasions ces groupes-là ne se sont pas sentis
entendus et écoutés beaucoup par le ministre parce
que, quand la portion qui
finissait avec le ministre… sa portion, son intervention… souvent les gens
cherchaient son regard, cherchaient une
façon d'avoir son attention, et ce n'était pas là. Alors, je pense que c'est
très, très important que ces gens-là soient
entendus, et qu'on apprécie, qu'on reconnaisse le travail immense qu'ils font,
et qu'on entende, dans le cadre du projet
de loi n° 10, leur grand
désarroi, leur grande préoccupation de se voir littéralement engloutis par le
curatif, par tout ce qui sont les
soins qu'on dit plus médicamentés, les soins qui impliquent des médicaments,
des chirurgies. Alors, ça, ce sont
des choses, là, que le ministre comprend bien comme étant la santé, mais je
voudrais être sûre qu'il ait bien entendu aussi ces gens-là quand ils lui ont dit : M. le ministre, la santé, c'est aussi ce qui vient en amont de tout ça et en aval,
c'est tout ce qu'on fait, nous, avec les gens, les proches aidants à la
maison qui soutiennent les gens qui ont la maladie d'Alzheimer, les gens qui sont en situation d'aide pour des...
des toxicomanes, des gens qui sont en situation de crise. Et ça, ces gens-là sont tous venus dire : On est très inquiets, on a peur
que notre mission ne soit pas bien reconnue dans cette mégaréforme que
vous nous imposez, finalement. Donc, une importante mise en garde.
J'espère que
le ministre va vraiment, vraiment prendre acte de cette contribution, parce que
je crois que... Et non seulement
je crois, mais j'en suis convaincue. Ces groupes ont un impact immense au
niveau de la qualité des soins et des services
sociaux, mais ils ont également un impact important au niveau économique. Et, si
on ne prend pas soin de ces groupes
qui s'occupent des plus vulnérables, des gens qui ont des problèmes
d'alcoolisme, de violence, ces gens-là vont se retrouver continuellement dans
les urgences, il va y avoir des dommages collatéraux auprès de leurs proches,
et ça, ça a un coût social énorme. Et
il doit donc bien, bien protéger, non pas juste dire : Ça va
être correct, ça va bien aller, ne vous en faites pas, on va protéger vos budgets. Il doit
vraiment protéger pas seulement le budget, mais
protéger les groupes, leur faire sentir son appui, son soutien, sa
compréhension de l'immense contribution qu'ils apportent à la société
québécoise. Et ces gens-là sont nombreux, et tous, ils ont dit la même chose par
rapport à leurs préoccupations.
Et je vous
dirais que, là encore, dans le projet
de loi… c'est sûr qu'on
voudrait croire le ministre sur parole, mais l'article 55 du projet de loi dit : «Les règles budgétaires
établies par un établissement régional ou
suprarégional en application du premier alinéa de l'article 283 de cette loi ne peuvent permettre la permutation de sommes dédiées à un programme-service — si ça
s'arrêtait là, on serait rassurés, mais ça continue — sauf
sur autorisation du ministre.» Alors, vous
voyez que le ministre se laisse encore la latitude, dans ce
contexte-là, de pouvoir rapatrier des budgets et de pouvoir les relocaliser différemment. C'est une
autre demande, une autre préoccupation importante et un autre pouvoir que le ministre s'attribue. Alors, les sommes sont dédiées à des programmes-services,
sauf sur autorisation du ministre. Alors,
le ministre se donne tous les pouvoirs, il se donne toutes
les possibilités, et partout il y a toujours
l'exception que le ministre peut faire ce qui n'est pas permis par l'article
du projet de loi. Alors, c'est très
préoccupant. On a même entendu le
ministre dire : C'est sûr que ce sera un projet de loi transitoire parce que je ne permettrais jamais à un autre ministre d'avoir
autant de pouvoirs que ce qu'il y a de prévu dans le projet de loi n° 10.
Alors, ce n'est pas peu dire, il le reconnaît lui-même. Et donc on peut
avoir confiance dans un ministre, et on ne remet pas en question cette confiance-là,
mais je pense
qu'un ministre ne peut pas malgré tout avoir toute la connaissance de tous les besoins et de toute la pertinence de ce qui est nécessaire pour un système
de santé et de services sociaux. Et
il faut savoir écouter. Et, quand on est ministre, il faut avoir la sagesse de ne pas seulement
contrôler, mais de gouverner. Et gouverner, ça fait appel à de la collaboration, ça fait appel à de l'écoute, ça fait appel à de l'amélioration
de ce que différents intervenants peuvent nous
apporter pas seulement dans une heure de commission parlementaire où
les gens ont 10 minutes pour nous parler,
20 minutes pour répondre
aux questions du ministre. C'est beaucoup
plus que ça, avoir une écoute, avoir une contribution, et il n'y a pas
d'endroit dans ce projet de loi là où les citoyens vont pouvoir apporter leur contribution de façon plus importante, autre que les CISSS, dans lesquels on va avoir une quinzaine de
personnes.
Alors, cette façon de faire là diminue beaucoup,
beaucoup ce que les gens ont décrit comme la participation citoyenne
à leur système de santé. Et je
pense qu'on doit se considérer
privilégiés que les Québécois considèrent que leur système de santé leur appartient et qu'ils aient envie d'y contribuer, qu'ils aient
envie de faire mieux. Alors, on sait qu'il faut faire mieux parce qu'au
niveau de l'accès on a des problèmes. Le projet de loi ne répond pas du tout à
cette préoccupation. Et je pense que,
si les gens avaient été capables de crier quand ils sont venus, c'est ça qu'ils
auraient dit, ils auraient dit : M. le ministre, écoutez-nous, ce n'est pas
ça, la priorité. Ça, ça va peut-être… Peut-être que c'est quelque chose que vous trouvez qui serait bien, là, mais
ce n'est pas ça, la priorité. Soyez plus directif. Demandez de la reddition
de comptes aux organisations. Créez des
mécanismes d'information, de partage. Assurez-vous que la première ligne est
forte, qu'il y ait une collaboration entre les gens de la première ligne.
Assurez-vous que les médecins de famille, les médecins
spécialistes réussissent à communiquer correctement l'information sur le
patient. Faites en sorte que le soin à domicile
soit une priorité parce que c'est là qu'on doit… qu'on
veut aller. Les gens veulent rester à
domicile, ils veulent avoir des
soins. Quand on sait qu'une année dans un CHSLD, ça coûte 60 000 $,
on peut en donner, du temps de soins à la maison, pour beaucoup moins
que ça à beaucoup plus de patients que ça.
• (12 h 30) •
Alors,
c'est ça que les gens veulent actuellement. Et, pour une raison qui est un peu
obscure, le ministre a fait une priorité
de quelque chose qu'il sous-estime. Et, si le projet de loi n° 10, on se
disait : Écoutez, on va le faire, là,
puis, dans six mois, ça va être fini, on va être
capables de passer à d'autre chose. Mais tout le monde est venu nous dire que
l'ampleur de la désorganisation que
ça va générer, ça va durer des
années. Ça va prendre cinq ans avant que juste on se retrouve tous dans ce système-là. On n'a pas ça,
cinq ans, actuellement. Et c'est ce que le ministre
doit comprendre. On est déjà en carence de soins, on est déjà en
carence d'accès, et ça a des impacts importants pour la population, et c'est donc une priorité. Sa priorité, ça doit être l'amélioration de l'accessibilité.
Il doit y mettre toute son énergie et ne pas concentrer tout le pouvoir sur lui. Il ne pourra pas tout
faire ce qui est prévu là-dedans. Et ses équipiers au gouvernement, au ministère, vont être rapidement débordés. Tout remonte au ministre.
Alors, on va recréer une structure centralisatrice, une structure qui dépossède les gens de leur investissement dans leur système de santé, et on n'aura toujours pas les résultats
attendus. Il y a tellement mieux à faire, et il y a tellement
à faire mieux avec ce qu'on a. Et je pense que c'est vraiment
ce sur quoi le ministre devrait se consacrer.
Et je vais
finir avec deux... dans le fond, deux citations, la Fédération interprofessionnelle
de la santé du Québec et la FTQ, qui
ont dit à peu près la même chose : Notre système de santé est bonifiable. Il est bonifiable par pas le projet de loi
n° 10, il est bonifiable par des
actions concrètes, des actions urgentes et des actions qui sont préalables à
une réforme, celle prévue dans le projet de loi n° 10, cette réforme qui déstabilise et peut même
contribuer à détruire le système public.
Il y a
donc des préoccupations sérieuses, et la dernière préoccupation, c'est tous les
droits qui sont brimés, que Me Ménard
a évoqués. En général, Me Ménard est l'avocat des patients. Or,
quand lui nous donne un avertissement aussi sévère que ce qu'il nous a donné dans ses lettres qui ont été publiées
et dans ses commentaires — je l'ai entendu dans des conférences également — c'est très préoccupant. Il n'a pas d'intérêt
politique partisan, il ne parle qu'au nom des patients et il met en garde le ministre sur la diminution
des droits des patients qui transpire à travers de nombreux articles dans
ce projet de loi n° 10.
Alors,
j'espère que le ministre saura entendre toutes ces recommandations. J'espère
encore qu'il mettra en priorité les
enjeux qui tiennent à coeur aux Québécois, qui sont vraiment l'amélioration de
l'accessibilité aux soins. Je vous remercie, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, Mme la
députée de Taillon, pour cette intervention. Je cède maintenant la parole à M. le député de La Peltrie,
porte-parole pour l'opposition en matière de santé, services sociaux. M.
le député.
M. Éric Caire
M.
Caire :
Merci beaucoup, M. le Président. C'est avec plaisir que j'interviens
aujourd'hui au nom de ma formation politique sur le principe du projet
de loi n° 10.
M. le
Président, quelqu'un, un jour, a dit : Pour savoir où on s'en va, encore
faut-il savoir d'où on vient. Et je pense que, dans le cas du projet de
loi n° 10, cette maxime-là s'applique parfaitement.
Ce n'est pas
la première fois, M. le Président, qu'un ministre libéral d'un gouvernement
libéral nous propose une réforme, une réforme que je qualifierais de
pleine d'espoir.
Vous avez
certainement comme moi, M. le Président, en mémoire… le premier ministre, en
2003, fraîchement élu, gouvernement libéral majoritaire, nommé au poste
de ministre de la Santé et des Services sociaux, propose aux Québécois une
réforme, une réforme majeure. Quelle était-elle, cette réforme, M. le
Président? Abolition des régies régionales
qui étaient l'instance régionale intermédiaire entre le ministère de la Santé
et les établissements; regroupement important
de conseils d'administration d'établissement, donc réduction du nombre de
conseils d'administration. Vous entendez
là, M. le Président, comme moi, les mêmes mots qui ont été prononcés par
l'actuel ministre de la Santé pour présenter
sa réforme, les mêmes éléments de recette
qui devaient nous donner les mêmes résultats. On nous parlait, à ce moment-là, de réduire la bureaucratie, faciliter le
processus décisionnel avec moins de conseils
d'administration, moins de bureaucrates, dégager des marges de manoeuvre, des ressources pour investir dans les soins de santé et non pas
dans la paperasse. Il y avait
des économies d'échelle à faire, M.
le Président. Bien sûr,
on réduisait le nombre d'établissements, on les regroupait, on les
fusionnait, donc il y avait des économies d'échelle qui étaient prévues dans
cette réforme.
Une réforme
qui correspondait, M. le Président, à un besoin du réseau de la santé d'alléger sa
structure, d'alléger, de diminuer sa
bureaucratie, d'alléger ses processus administratifs
et d'intégrer, d'une façon plus cohérente, les services, parce qu'on le sait, entre les CLSC, CHSLD, les
centres hospitaliers, la communication, la collaboration étaient difficiles, et
c'était encore pire quand on parlait des
groupes communautaires et des différents points de service pour les services
sociaux.
M. le Président, un portrait qui ressemble
étrangement à ce qu'on vit aujourd'hui, mais, il y a 10 ans, alors, qu'est-il arrivé? On a transformé les régies
régionales en agences de santé, on a créé les CSSS et on a lancé le réseau dans
une réforme sans une planification
rigoureuse de l'intégration de toutes ces structures-là, notamment, M. le
Président, les systèmes
d'information. Et aujourd'hui qu'est-ce qu'il en est? Quel est le bilan qu'on
peut faire de cette réforme de l'actuel
premier ministre au moment où il était ministre de la Santé? Je vous dirais, M.
le Président, que cette réponse-là, elle
est complexe. Pourquoi? D'abord, parce que beaucoup de groupes que nous avons
entendus en commission parlementaire sont
venus nous dire : On n'en a pas fait, de bilan de cette réforme-là.
D'autres nous ont dit : On ne peut pas la faire, on n'a pas
l'information nécessaire, on n'a pas les outils nécessaires pour faire le bilan
de la réforme.
Mais, je vous
dirais, il y en a un qui a essayé, et je pense qu'il a amené un éclairage
important, c'est le Commissaire à la
santé. Qu'est-ce qu'il nous dit de la réforme du premier ministre, le
Commissaire à la santé, M. le Président? Ce qu'il nous dit est loin
d'être reluisant. Il nous dit que, malgré le fait qu'on ait augmenté les
ressources financières de façon importante en 10 ans, le budget de la santé et des services sociaux a
crû de 64 %. Ce n'est pas rien, ça, M. le Président. Regardez l'ensemble des budgets de tous les
ministères, et vous allez constater que celui de la santé est, de très loin,
celui dont le budget a augmenté le
plus et le plus rapidement. On parle d'une croissance des dépenses en santé de
5 % à 7 % par année, ce qui, M. le Président, nous amène même
dans une situation problématique, dont je parlerai un peu plus tard.
Une augmentation aussi sans précédent des
ressources humaines. On me dira : Le précédent gouvernement péquiste, avec les départs à la retraite, a créé
une situation de pénurie. C'est vrai, c'est incontestablement vrai, de
mauvaises décisions administratives
prises par le gouvernement du Parti québécois ont créé, dans le réseau de la
santé, des pénuries dans le personnel soignant, notamment les médecins
et les infirmières. C'est un fait.
Ceci étant
dit, ça n'explique pas tout, M. le Président. Il faut bien comprendre que, dans
les 10 dernières années, non
seulement a-t-on comblé ce retard-là, mais, au niveau canadien, on s'est
positionné comme étant la province, en tout cas, la deuxième au niveau du ratio de médecins par population. Alors, si on
se fie à la moyenne canadienne, au Québec, on est la deuxième province qui a le plus de médecins par habitant. Même
chose pour le personnel infirmier; là aussi, les ressources ont crû de façon importante. Donc, M. le Président, des
efforts notables pour augmenter les ressources financières, les
ressources humaines.
• (12 h 40) •
Et quel est
le bilan de tout ça? Quel est le
bilan, là, de ces investissements massifs en santé, de ce recrutement
massif en santé, de ces regroupements administratifs proposés? Quel est le
bilan? Un triste bilan, M. le Président, un triste
bilan. La vérité, c'est que l'attente en urgence ambulatoire, donc quand on se
présente à l'urgence, là, on a un bobo quelconque — et, comme la plupart des gens n'ont pas de
médecin de famille, on va à l'urgence — l'attente a augmenté. Les délais d'attente pour les patients sur civière
ont augmenté. Augmenté, M. le Président. Plus de ressources financières,
plus de ressources humaines, moins de services. C'est ça que le Commissaire à
la santé nous dit.
Un autre exemple, M. le Président : le
nombre de gens qui vont à l'urgence et qui partent sans avoir vu un médecin, ce nombre-là a augmenté. Plusieurs
milliers de nos concitoyens vont se rendre à l'urgence, année après année,
pour consulter un médecin et vont quitter
sans avoir de médecin. Pourquoi? Parce qu'ils ont trop attendu, parce que ça a
été trop long. Parce qu'on a souvent autre
chose à faire que d'attendre des heures, et des heures, et des heures qu'on
daigne bien nous donner une consultation.
On en a fait
état, et ça a été relayé par les médias, M. le Président. Bon an, mal an,
20 000 Québécois se retrouvent sur
une liste d'attente pour une chirurgie et vont dépasser le délai de six mois.
7 000 à 8 000 vont dépasser l'année d'attente pour une chirurgie, M. le Président. Dans un
système de santé digne de ce nom, qui se soucie du patient, c'est un échec
lamentable. C'est honteux, honteux.
Et je reprends un exemple qui m'est cher, M. le
Président, un enfant québécois — et celle-là, elle me touche particulièrement — qui, s'il a la chance d'être inscrit sur une
liste d'attente pour consulter un pédopsychiatre… Et vous comprendrez,
M. le Président, que, quand on est rendus à ce type de consultation là, ce
n'est pas pour des maladies imaginaires. Deux ans d'attente, M. le Président,
imaginez-vous. Un enfant dont on en arrive à la conclusion qu'il a besoin de consulter un professionnel du niveau
d'un pédopsychiatre, qui est en plein développement, va attendre, s'il a la
chance d'être inscrit sur la liste d'attente, deux ans. C'est honteux, c'est
honteux, c'est honteux.
Alors, M. le
Président, c'est un bilan qui est lamentable. Et quelles ont été les lacunes?
Parce que, M. le Président, je vous
l'ai dit : Si on veut savoir où on s'en va, encore faut-il savoir d'où on
arrive. Qu'est-ce qui explique qu'on ait échoué de façon aussi
catégorique, aussi claire?
D'abord,
l'actuel premier ministre, lorsqu'il était ministre de la Santé, tenait
sensiblement le même discours que l'actuel
ministre de la Santé : Je suis issu du réseau de la santé, je le connais,
je connais ses lacunes, je connais les problèmes. Et je vous dirais, M. le Président, qu'à ce jour
tous ceux qui nous ont dit : Je suis issu du réseau de la santé, je le
connais sont trop souvent les pires
ennemis du réseau de la santé lui-même et de son amélioration. On dirait que ce
réseau-là est incapable de produire des gens dont l'autocritique est
assez large.
Alors, le
premier ministre nous disait : Je le sais, ce qui ne va pas, et je vais corriger
le problème, sensiblement le même
discours que l'actuel ministre. Il a, M. le Président, erré lamentablement dans
l'intégration de ces services... de ces
systèmes d'informatique. Et j'insiste là-dessus, M. le Président, pourquoi?
Parce qu'à l'heure actuelle... Je vous donne un exemple très précis, M. le Président. Vous ne vous sentez pas bien,
vous avez besoin de consulter, donc vous allez avoir accès un jour peut-être à un professionnel de la
santé. Donc, jusqu'à la première consultation, de la première consultation
jusqu'à la guérison de votre maladie ou le
règlement du problème de santé que vous pouvez avoir, le réseau de la santé,
M. le Président, est incapable, incapable de vous dire combien tout le
processus aura coûté. Je l'ai dit en commission parlementaire : Aucune entreprise privée digne de ce nom qui souhaite survivre et
prospérer ne pourrait se gérer comme ça.
Il n'y a aucune entreprise privée au Québec, qu'elle produise un
bien ou un service, qui serait incapable de dire quel est le coût de
production de ce bien ou de ce service-là ne
va passer à travers. C'est la faillite assurée.
La beauté de
la chose, M. le Président, c'est que, dans le système
public, on ne peut pas faire faillite parce que, quand on manque d'argent, on va piger dans la poche du contribuable. Et
ça, je dois dire que les péquistes et les libéraux débordent
d'imagination pour trouver des nouvelles façons de taxer un peu plus, d'aller
chercher encore un peu plus d'argent dans la
poche du contribuable. Là où le bât blesse, c'est quand il vient le temps
d'améliorer la qualité des services. Là, on est moins imaginatifs. Et on
a encore des exemples à tous les jours.
Or, M. le Président, l'incapacité du premier
ministre à faire de ce secteur-là de
la réforme, de ce pan-là de la réforme,
l'intégration des services d'information, l'a
privé de l'information nécessaire, fondamentale, vitale
pour la prise de décision et la gestion de la performance. Comment peut-on
prendre une décision éclairée sur un sujet si on ne dispose pas de toute l'information pertinente? À sa
face même, M. le Président, la réponse à cette question-là,
c'est : Impossible. Comment
peut-on savoir si le système réussit à exécuter ou à produire le service ou le
bien qu'on lui demande de produire ou d'exécuter ce qu'on lui demande d'exécuter
si on n'est pas capables… si on n'a aucun référent sur la production
de ce service-là et sur la performance qui
est attendue? La réponse à cette question-là, M.
le Président,
c'est : C'est impossible.
Le premier ministre
du Québec, à l'époque où il était ministre
de la Santé, a négligé cet aspect-là, ne s'en est pas préoccupé à la hauteur de ce qu'il devait faire.
Le résultat, c'est qu'il a été incapable de voir que la réforme qu'il présidait
s'en allait dans le mur et nous entraînait
avec elle, entraînait tout le réseau de la santé avec
elle parce qu'il n'avait pas
l'information nécessaire, il n'avait pas les
indicateurs de performance et donc il était
incapable de poser les gestes qu'il aurait
dû poser, faute d'information, faute d'une
connaissance fine de ce qui se produisait au sein même de son réseau. Et
il n'y a pas un gestionnaire digne de ce nom, M. le Président, qui peut
fonctionner comme ça.
Le résultat,
M. le Président? La réforme du premier ministre a été un échec. Et ce qui est,
je dirais amicalement, amusant, c'est
de constater qu'une des personnes les plus critiques du travail du premier
ministre, c'est l'actuel ministre de
la Santé. Je veux dire, on a des citations de lui qui, mises bout à bout, nous
feraient faire Québec-Montréal aller-retour, où il qualifie assez
négativement la performance du premier ministre.
Mais je dois
dire, je dois dire que ses commentaires les plus vitrioliques vont au
successeur du premier ministre, qui,
lui aussi, a échoué lamentablement, l'actuel ministre de l'Éducation. Pourquoi, M. le Président? Parce que lui aussi nous a proposé une réforme, la méthode Toyota. En
tout cas, ça aurait mérité un rappel, je peux vous dire, parce que ça n'a
pas non plus donné les résultats escomptés. Pourquoi? Sensiblement les mêmes raisons, M. le
Président. Voici un autre médecin qui
nous arrive en nous disant : Je sais ce
qui ne va pas bien dans le réseau de la santé, je connais les problèmes du réseau de la santé, je possède la connaissance.
J'ai fait telle ou telle affaire à mon hôpital, et ça a bien fonctionné, donc, si je
fais ça partout dans le réseau, ça devrait donner le même résultat. Eh! Erreur. Erreur.
À tel point, M. le Président, à tel point qu'on
a innové au niveau du gouvernement libéral avec celui qui est actuellement
ministre de l'Éducation, le député de Jean-Talon, qui a dit : Écoutez, la seule façon pour nous de ne pas manquer nos objectifs, c'est d'arrêter de s'en
fixer. Et ça, je dois dire que c'est indéniable. C'est sûr que, si tu n'as pas
d'objectif, tu ne peux pas rater ton objectif. Là-dessus, je suis obligé de lui
donner raison.
• (12 h 50) •
Ceci étant
dit, on peut se questionner, par contre, sur la qualité d'un gestionnaire qui se dit : Sans objectif, je ne peux pas rater mon objectif. Ça a donné quoi, M.
le Président? On a poursuivi l'échec
amorcé par le premier ministre.
Et ça donne le bilan que la Commissaire à la
santé nous a fait : un système
de santé qui coûte plus cher, qui
engage plus de monde, qui a vu sa
bureaucratie augmenter et non pas diminuer, augmenter. Le nombre de cadres,
dans le réseau de la santé, a augmenté
de façon exponentielle, alors qu'on nous avait promis des économies
d'échelle. Alors qu'on nous avait promis
une réduction de la bureaucratie, on a livré une augmentation de la
bureaucratie. Alors qu'on nous a promis une intégration des soins et des services, on nous a livré un parcours du
combattant, parce que, M. le
Président, le parcours d'un
patient dans le réseau de la santé, c'est loin d'être évident.
Et on le dit
souvent, et j'en suis, la qualité des soins dans le réseau de la santé est
exceptionnelle, et c'est vrai. La
qualité des soins dans notre réseau de la santé est exceptionnelle. Nos
professionnels de la santé sont des gens d'une compétence exceptionnelle, et ce n'est pas là où on échoue. Là où on
échoue, M. le Président, c'est dans l'orchestration des soins. C'est d'avoir accès à un médecin de famille, d'avoir accès aux soins de première ligne qu'on échoue. On échoue
dans la capacité à avoir accès à des examens particuliers.
M. le Président, je vous mets au défi, je vous mets au défi d'essayer d'avoir une IRM à l'intérieur d'une semaine à Québec. C'est impossible. Impossible? Non, ce n'est pas
impossible. Si vous allez au privé, c'est possible. Mais, si vous voulez rester dans le réseau public, oubliez ça. Non seulement ce ne sera pas possible, mais vous allez devoir prendre le téléphone puis appeler un hôpital,
à l'autre hôpital, à l'autre hôpital, à tel autre hôpital,
et là vous mettre sur toutes sortes de
listes d'attente, puis là il y a un derby, tu sais? Le premier qui se libère,
bien, j'y vais. Alors, M. le
Président, ce n'est pas… ce ne sont pas les professionnels de la santé
qui échouent, dans le réseau, à donner des soins, c'est le réseau qui
échoue, M. le Président.
Donc, des
lacunes majeures, des lacunes majeures qui sont la cause d'administrateurs qui ne se sont pas préoccupés
de ces questions-là, d'administrateurs qui
se sont crus plus connaissants que le réseau, qui ont pensé, pour des raisons
que je ne qualifierai pas, M. le Président,
qu'ils étaient même plus grands que le réseau et qui ont eu un cruel rappel à
la réalité, à savoir que cette histoire-là n'est pas, ne sera pas, ne
sera jamais l'histoire d'une seule personne.
M. le
Président, ceci étant dit, est-ce que ça veut dire que la recette n'est pas bonne?
Je voudrais peut-être, d'une façon
imagée, dire : Vous savez, la cuisine a ses grands classiques. Il y a des
recettes dont on sait qu'à travers les années… sont tellement bonnes que, bien
exécutées, ce sont devenues… c'est devenu des classiques de la cuisine.
J'oserais faire l'analogie, M. le
Président. Je pense que la recette est bonne. Je pense que la recette est
bonne, parce qu'ailleurs elle a produit
des résultats; ailleurs, elle a livré la marchandise; ailleurs, elle a conduit
à une diminution de la bureaucratie, à une augmentation de l'intégration des services, et elle a même contribué à
dégager des marges de manoeuvre et a permis des réinvestissements dans
les services. Ailleurs, ça a fonctionné. Donc, si la recette est bonne, mais
qu'elle donne un mauvais résultat, est-ce
qu'il faut questionner la recette ou se demander si ce n'est pas le cuisinier
qui a un peu botché le travail?
Encore là, M. le Président, vous comprendrez que ma réponse à cette
question-là, elle est assez claire. La recette, elle est bonne, mais je
pense que ceux qui l'ont exécutée l'étaient un peu moins.
M. le
Président, on a devant nous une pièce législative majeure. Je pourrais dire
que, depuis que je siège en ce Parlement,
sans qualifier les autres projets de loi, parce qu'il y en a eu de très
importants et des déterminants… mais, en termes d'implications, je pense que c'est probablement un des plus importants, sinon le plus important.
Et je suis tout à fait d'accord pour dire que cette réforme-là qui nous
est proposée nous amène dans une perspective de plusieurs années avant de voir son établissement et sa concrétisation. Il m'apparaît fondamental, dans ces
circonstances-là, de prendre le temps nécessaire pour avoir une
planification qui va nous amener au résultat escompté.
Et
là je vais faire référence à plusieurs groupes qui sont venus nous parler en
commission parlementaire. Est-ce qu'il
est nécessaire de se lancer dans une réforme comme celle-là? M. le Président,
compte tenu de ce que je viens de vous dire,
et je ne vous ferai pas languir, vous comprendrez que ma réponse à moi,
c'est : Oui, c'est nécessaire, parce que, comme je l'ai dit, je ne crois pas que l'échec du réseau
soit l'échec des professionnels de la santé. Nos professionnels de la santé
sont des gens extrêmement compétents, qui
donnent une qualité de service qui est exceptionnelle. Donc, pourquoi est-ce
que c'est si difficile de recevoir un
traitement à chaque étape? Ça, c'est la responsabilité du réseau, des
structures, si vous voulez. C'est la
responsabilité du réseau d'orchestrer, de coordonner, d'intégrer les soins de
la façon la plus simple et la plus fluide possible. Et force est
d'admettre qu'actuellement le réseau échoue.
Alors, M. le Président, on peut bien continuer à
faire un petit peu plus de ce qui ne marche pas, mais ça va continuer à ne pas marcher. Ou on peut aussi se
bercer d'illusions, comme je l'ai entendu, et penser que la cause, c'est
qu'il manque d'argent dans le réseau, le réseau n'est pas suffisamment financé.
J'aimerais qu'on s'arrête quelques instants
à cette affirmation-là, M. le Président, parce que d'abord, comme je l'ai dit
précédemment, c'est le réseau de la santé
qui a reçu les contributions financières ou l'augmentation de ses budgets les
plus significatives de tous les ministères et d'une façon qui est même
bien au-delà de l'augmentation du PIB et de la croissance économique du Québec.
Ce qui nous a
amené collectivement, en 2008, à une réflexion... en fait, en 2007, avec le
rapport Castonguay, une réflexion parce qu'on s'est dit, à ce
moment-là : Mais est-ce qu'on peut continuer à ce rythme-là? Est-ce qu'on
peut continuer à faire augmenter le budget
du Québec au même rythme? Et la conclusion a été sans appel, M. le Président,
sans appel. La conclusion,
c'est : non, c'est impossible. C'est impossible parce que, dans ces
perspectives-là, avant longtemps, c'est
jusqu'à 70 % du budget du Québec qui va aller à la santé. C'est
impensable. Le gouvernement du Québec a d'autres missions qui sont,
elles aussi, fondamentales. On pense à l'éducation, on pense à l'entretien de
nos routes, on pense, M. le Président, à la
justice, à la sécurité publique, et j'en passe. Donc, c'est impossible de
soutenir ce rythme de croissance là, d'une part.
D'autre part, combien de ministres de la
Santé... M. le Président?
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Avant d'aborder l'autre part, je
vais vous demander, compte tenu de l'heure, si vous avez terminé votre
intervention. Probablement pas.
M.
Caire : ...
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Voilà. Alors donc, lorsque le
débat reprendra sur l'adoption de principe, nous reviendrons avec vous.
Et donc, pour
permettre la tenue des affaires inscrites par les députés de l'opposition à
15 heures, je vais suspendre les travaux et ajourner le débat sur
l'adoption de principe du projet de loi n° 10.
Donc, les travaux sont suspendus jusqu'à
15 heures.
(Suspension de la séance à 12 h 59)
(Reprise à 15 h 2)
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, bon après-midi à tous. Vous pouvez vous asseoir. Alors, je vous
avise tout de suite que ma voix est un peu éraillée, alors donnez-moi une
chance pour la suite des choses.
Affaires inscrites par
les députés de l'opposition
Motion proposant que l'Assemblée
nationale approuve la position
du ministre de l'Économie, de l'Innovation et des Exportations
concernant le maintien des crédits d'impôt destinés aux sociétés
de jeux vidéo, à l'aéronautique, aux technologies de
l'information et aux entreprises culturelles
Alors, à l'article 23
du feuilleton, aux affaires inscrites
par les députés de l'opposition, M. le député de Rousseau présente
la motion suivante :
«Que
l'Assemblée nationale approuve la position du ministre de l'Économie, de
l'Innovation et des Exportations selon
laquelle il faut maintenir les crédits d'impôt destinés aux sociétés de jeux
vidéo, à l'aéronautique, aux technologies de l'information et aux
entreprises culturelles.»
Je vous informe que la répartition du temps de
parole pour le débat restreint sur cette motion s'effectuera comme suit :
10 minutes — et
je dis «environ 10 minutes» — sont réservées à l'auteur de la motion
pour sa réplique, environ 52 minutes
sont allouées au groupe parlementaire
formant le gouvernement, environ
29 min 34 s sont allouées au groupe parlementaire
formant l'opposition officielle,
environ 22 min 26 s sont allouées au deuxième groupe d'opposition, et six minutes sont réservées aux députés
indépendants. Dans ce cadre, le temps non utilisé par les députés indépendants
ou par l'un des groupes parlementaires sera redistribué entre les groupes
parlementaires selon les proportions établies précédemment. Enfin, les
interventions ne seront soumises à aucune limite de temps.
Et je suis maintenant prête à céder la parole à
l'auteur de la motion, M. le député de Rousseau.
M. Nicolas Marceau
M.
Marceau : Oui, merci, Mme la Présidente. Alors, effectivement, j'ai déposé une motion importante qui demande
au gouvernement de ne pas couper encore une fois dans les crédits d'impôt, une motion très simple que nous avons… que nous nous sommes sentis obligés de déposer parce que
nous sommes… parce que je suis extrêmement inquiet de ce qui se passe présentement au Québec, extrêmement inquiet. Et le contexte, Mme la Présidente, c'est que des décisions seront
prises prochainement sur la question des crédits d'impôt. On se
rappellera qu'une mise à jour doit être déposée prochainement par le ministre
des Finances, mise à jour dans
laquelle on pourrait trouver des mesures supplémentaires de resserrement au crédit d'impôt.
Par ailleurs, il y a
la commission sur la fiscalité qui siège présentement et qui doit également
annoncer des mesures pour... dans les
prochaines semaines. Et la commande qui a été passée à la commission sur la
fiscalité, c'est de trouver des
coupes de 650 millions de dollars dans les crédits d'impôt. Et cette coupe
de 650 millions s'ajoute à une coupe déjà annoncée par le gouvernement à l'occasion du budget de juin
dernier, une coupe de 370 millions. Alors, si on fait le total, Mme la Présidente, on parle de coupes de
1 milliard, 1 milliard, dans les crédits d'impôt qui servent à
soutenir les meilleures entreprises du Québec.
Alors,
Mme la Présidente, pourquoi je suis inquiet? Parce que, déjà, la situation
économique n'est pas très bonne au Québec, il faut le dire. Les
prévisions de croissance économique qui avaient été annoncées par le Parti
libéral en campagne électorale laissaient
entrevoir du 2,1 %, au budget on nous a annoncé du 1,8 %, et
récemment Desjardins et la Nationale
ont ramené les prévisions de croissance économique à 1,5 %. Par ailleurs,
le gouvernement libéral a réussi à battre
un record de médiocrité qui datait du début des années 90, de février
1991, quant à la perte d'emploi à temps plein, la plus importante en sept mois. On a réussi à faire 82 000 avec
l'approche préconisée par le gouvernement libéral, inspirée par la Coalition avenir Québec. Alors, Mme la
Présidente, il y a de quoi être très inquiets quand on sait que les coupes
qui sont annoncées, qui sont à venir, vont contribuer à détériorer encore plus
la situation économique.
Alors,
Mme la Présidente, je profite de cette motion pour féliciter, féliciter le
ministre de l'Économie qui a su... qui
a eu le courage de dire à ses collègues : Cessons d'improviser, cessons de
faire mal à l'économie du Québec. Et, Mme la Présidente, je le salue et je lui
lève mon chapeau, je pense que c'est important. Parce que, écoutez, le ministre
de l'Économie a accès aux mêmes
documents auxquels j'ai eu accès. Et ces documents nous disent quoi? Ils nous
disent qu'il y a... En fait, il n'y a
pas un document, moi, que j'ai vu, pendant que j'étais au ministère des
Finances et de l'Économie, pas un document
que j'ai vu qui démontrait que les crédits d'impôt n'étaient pas rentables. Je
n'en ai jamais vu un. Et on attend encore qu'on nous présente un
document démontrant qu'ils ne sont pas rentables. Au contraire, chacun de ces
crédits d'impôt là est rentable pour l'économie québécoise.
Et
s'est jointe à la voix du ministre de l'Économie la voix de Raymond Bachand,
notre ancien collègue, ministre des
Finances lui aussi, qui dit exactement la même chose. Il dit quoi? Il dit que
les crédits d'impôt, ils sont rentables. Ce n'est pas compliqué, il dit qu'ils sont rentables. Et il demande au
gouvernement de cesser d'improviser, cesser d'improviser, cesser de jouer à l'apprenti sorcier avec
l'économie du Québec, qui a besoin de soutenir ses meilleures entreprises, les
meilleurs secteurs de notre économie.
Mme
la Présidente, je dois le dire, le gouvernement, dans son intention de couper
650 millions de dollars en crédits d'impôt en plus des 370 annoncés, donc son intention de couper
1 milliard, s'est inspiré directement du programme de la CAQ, de la Coalition avenir Québec. Et je constate,
je constate avec une grande déception, que le gouvernement libéral ne sait pas, ne sait pas emprunter les quelques
rares idées qu'il pourrait y avoir de bonnes parmi celles de la CAQ. Et ça,
c'est parmi les pires qu'on puisse imaginer.
• (15 h 10) •
Je
vais simplement vous rappeler que le chef de la deuxième opposition demandait
qu'on coupe 2 milliards de dollars
en crédits d'impôt. Il a demandé ça, lui. Il demandait qu'on coupe
2 milliards dans les crédits d'impôt. Dans son cas, c'était pour... Enfin, les raisons pour
lesquelles il coupait, c'était pour financer diverses choses. Chacun des
dollars coupés servait à... était
utilisé plus qu'une fois dans le cas de la CAQ, mais, à l'époque, on nous
parlait de décontaminer les sols pour
le plan Saint-Laurent, et on nous proposait, donc, de couper des entreprises
comme Bombardier, Héroux-Devtek, CAE, Bell Textron, Ericsson, de couper
les meilleures entreprises au Québec pour décontaminer les sols, Mme la Présidente. C'était la proposition de la CAQ. Et
je suis désolé, mais c'est de l'amateurisme, c'est des propositions de pee-wee,
d'amateurs, de comptables en culottes courtes, c'est… les qualificatifs me
manquent, Mme la Présidente, ils me manquent pour qualifier ce genre
de proposition. Et je suis tellement désolé de voir que le gouvernement libéral
s'inspire de propositions aussi amateurs que
celles-là. C'est absolument terrible. Et ce que ça prend, là, c'est un gouvernement qui se ressaisit. Il faut se ressaisir, il faut arrêter d'aller
dans cette très mauvaise direction.
Et
vous allez me permettre de rappeler l'ensemble des crédits d'impôt qui
pourraient être affectés par… qui pourraient être touchés par cette très, très mauvaise orientation. Il y en a
de très nombreux : crédit d'impôt pour la R&D, crédit d'impôt pour le design, pour les affaires électroniques,
pour la production de titres multimédias, pour l'investissement, pour les
activités de transformation dans les régions ressources, pour l'exploitation
d'un centre financier international, pour la production
cinématographique et télévisuelle. Mme
la Présidente, ce sont les meilleurs
secteurs de notre économie, les secteurs
dans lesquels on retrouve la plus grande productivité, les secteurs dans
lesquels on investit le plus, que ce soit en machines et équipements, en recherche et en développement, en
technologies de l'information, que ce sont les entreprises qui sont regroupées dans des grappes qui font qu'elles
sont plus productives. Ce sont nos entreprises aussi qui exportent le plus. Ce sont nos entreprises qui exportent le
plus. Ce sont celles-là précisément qu'on cherche… qu'on vise par des coupes
dans les crédits d'impôt.
Et je vais vous rappeler les secteurs qui sont
en cause. Je vous ai dit les crédits d'impôt, je vais vous dire maintenant
qui les utilise, ces crédits d'impôt là. Il y a le secteur de
l'aéronautique, bien sûr, les sciences de la vie, le jeu
vidéo, le multimédia, les technologies, le secteur financier, l'ensemble des
industries créatives, que ce soient celles qui produisent des films, qui
produisent des émissions de télévision, de la musique.
Alors, Mme la Présidente, je suis complètement renversé par cela. Et on sait ce qu'a donné… on
sait ce qu'a donné l'incertitude qui a été placée au-dessus de la tête
de nos entreprises, on voit le ralentissement qui est subi. Et ce qu'on annonce, ce qu'on s'apprête à annoncer, évidemment,
ce ne sera pas l'ensemble des propositions de la commission sur la fiscalité, puisqu'on n'aura pas le temps de
tout faire ça d'ici la mise à jour. Et donc il faut prévoir que cette
incertitude va se poursuivre. Cette incertitude va se poursuivre. On va
avoir une partie de l'incertitude qui va se résorber par des mauvaises décisions puis par des coupes dans les
crédits d'impôt, puis il y aura une autre étape plus tard, j'imagine, au
budget.
Alors, Mme la Présidente, c'est absolument catastrophique. Je vais simplement répéter :
On n'a jamais vu une seule
étude démontrant que ces crédits d'impôt là n'étaient pas rentables. Les seules
études qu'on a démontrent, au contraire, qu'ils sont rentables. Et je me rends compte que, dans le fond, on a
coupé en juin sans réfléchir, hein? On a coupé sans réfléchir, sans
aucune réflexion, et, dans le fond, l'approche qui a été utilisée, c'est un peu
celle qui avait été utilisée en 2003. En 2003, vous vous rappellerez, le
nouveau gouvernement de l'époque, le nouveau gouvernement libéral de l'époque
avait décidé de sabrer dans les crédits d'impôt, et il a fallu un an pour qu'on
revienne sur la décision.
Alors, Mme la Présidente, je fais un appel
solennel au gouvernement, je lui demande : Écoutez le ministre de l'Économie, écoutez le ministre de l'Économie,
écoutez Raymond Bachand qui vous disent : C'est une mauvaise décision.
Évitons d'avoir à faire un nouveau recul. Moi, je leur suggère d'éviter un
nouveau recul. N'annoncez pas des coupes supplémentaires
dans les crédits d'impôt, vous allez devoir reculer, parce que les entreprises
du secteur de l'aéronautique, les
entreprises du secteur des jeux vidéo vont avoir à subir les conséquences de
ces gestes-là. Alors, c'est extrêmement
important, je crois que la main est tendue,
le ministre de l'Économie a fait une partie du travail, je le salue, je l'ai
déjà salué. Maintenant, je pense qu'il faut que le gouvernement entende.
Je vais revenir
sur… Je vais prendre quelques minutes, puis je ne veux pas vous assommer avec
des chiffres, mais j'aimerais qu'on
comprenne bien l'ampleur de ce qui est proposé, hein, 1 milliard dans les crédits d'impôt, qu'est-ce que ça représente. Dans les documents qu'on peut trouver, et dont on se rend
bien compte que, du côté de la CAQ, on ne les avait jamais regardés, il y a un document qui
s'appelle Dépenses fiscales. Dans les dépenses fiscales, on se rend
compte que, des crédits d'impôt et autres mesures, il y en a pour 3,2 milliards.
3,2 milliards. Maintenant, si on enlève de ces 3,2 milliards ce qu'on pourrait appeler des mesures
d'application générale, des mesures, essentiellement, qui sont intouchables… il y en a beaucoup
là-dedans. Par exemple, le taux réduit pour les petites et moyennes
entreprises, est-ce que quelqu'un
va toucher à ça? Je serais bien surpris, je serais bien surpris. Il y a, par exemple, le crédit d'impôt remboursable pour la déclaration des pourboires, est-ce que quelqu'un
veut toucher à ça, ici? Évidemment pas, parce que, si on touche à ça, c'est la recette parfaite pour relancer le travail au noir. Est-ce qu'on veut toucher à ça? La réponse, c'est,
bien entendu,
non. La déductibilité des dons, est-ce qu'on veut toucher à ça? La
réponse, c'est non, évidemment pas.
Alors, quand on enlève ces mesures d'application générale, il y en a pour 1 054 000 000 $. On passe de 3,2 milliards à
2,1 milliards, 2,1 milliards, et c'est de ce 2,1 milliards que
le gouvernement libéral veut couper 1 milliard. En passant, c'est de ce 2,1 milliards que la CAQ voulait couper
2 milliards. Eux autres, ils voulaient faire disparaître l'ensemble des
crédits d'impôt pour financer on ne sait trop quoi. Mais, dans le cas du gouvernement libéral, on veut
couper 50 %, 50 % des crédits
d'impôt existants. Alors, Mme la Présidente, c'est le meilleur moyen pour
stopper la recherche et le développement au Québec, pour stopper les investissements en design, pour stopper les
investissements en machineries et équipements, pour
stopper les investissements en recherche et développement dans les technologies
de l'information. C'est le meilleur moyen
pour freiner l'ensemble des entreprises qui servent notre cause, qui servent
notre économie, qui donnent des jobs aux Québécois.
Je vous donne
un exemple, puis je vais prendre cet exemple-là parce que je le connais bien
pour avoir eu la chance de côtoyer
les gens de ce secteur pendant mon mandat de ministre des Finances et de
l'Économie, je vais prendre le secteur de l'aéronautique. Le secteur de l'aéronautique,
Mme la Présidente, c'est un secteur dans lequel le
nerf de la guerre, le nerf de la guerre, c'est les dépenses en recherche
et développement. Tout passe par là, tout passe par là. Au Québec, au Québec,
70 % des dépenses en R&D au Canada, dans le secteur aéronautique, sont
effectuées au Québec, 70 % est effectué au Québec. Ce n'est pas rien, là, 70 %. Là, on parle de jobs pour des
ingénieurs, on parle de jobs pour des techniciens, on parle des meilleures
jobs qui soient. Et le fait que 70 % de ces jobs-là se fassent au
Québec, ce n'est pas étranger, vous en conviendrez,
au fait que Montréal, c'est la troisième place mondiale en matière
d'aéronautique, troisième mondiale, avec Toulouse et Seattle.
Mme la Présidente, ces dépenses en R&D là, là,
directement, ça implique quoi? Ça implique que les aéronefs, c'est le premier produit d'exportation du Québec,
premier produit d'exportation du Québec. Qu'est-ce qui va arriver, Mme la
Présidente, si on coupe dans les crédits
d'impôt à la R&D? Ce n'est pas compliqué, ce qui va arriver, on va envoyer
la R&D ailleurs, on va envoyer la
R&D dans d'autres pays. Et qu'est-ce qui va arriver? Bien, évidemment, le
secteur va se défaire, va se briser,
et on va avoir des exportations encore plus faibles que celles qu'on a eues, et
les conséquences vont être graves et
dramatiques. Alors, Mme la Présidente, cet exemple du secteur de l'aéronautique
est très parlant, est très parlant,
et explique à lui seul toute l'importance de cet appui que nous donnons aux
activités de recherche et développement.
Mme la
Présidente, je vois le temps qui file puis je vais être forcé de conclure. Je
vais vous dire la chose suivante : L'économie québécoise est affligée, malheureusement,
de phénomènes qui sont à la fois structurels et de phénomènes qui sont conjoncturels. Dans le structurel,
évidemment, on le sait, on a eu des entreprises qui ont été affectées
négativement par la force du dollar
canadien et qui sont aujourd'hui moins compétitives, moins en mesure de
compétitionner sur les marchés
étrangers. Ça, c'est un phénomène qui est structurel et qu'il faut corriger. Puis comment on corrige? En incitant
les entreprises à investir plus, en les
incitant à se moderniser, à s'automatiser. Ça, c'est le premier phénomène, le
phénomène structurel.
Par ailleurs, il y a des
phénomènes conjoncturels, phénomènes qui sont, on l'espère, temporaires. Un
premier phénomène temporaire, évidemment,
c'est les restants, la queue de la récession que nous vivons présentement. Le
deuxième phénomène conjoncturel, Mme
la Présidente, c'est l'effet libéral, l'effet libéral dont on espère qu'il sera
temporaire et qu'il ne durera pas plus que
quelques années. Donc, des effets comme
ceux-là qui sont dramatiques.
L'espoir que j'ai, c'est qu'on va se ressaisir,
qu'on va se ressaisir, de l'autre côté, et qu'on va déposer une véritable
politique économique. On le sait que le gouvernement
a été pris de court parce qu'il a été forcé d'abandonner son 15 milliards supplémentaire en infrastructures, on le sait qu'ils ont coupé dans les politiques
économiques structurantes que nous avions mises en place, on le sait qu'ils ne sont pas encore capables
d'entrevoir tous les effets négatifs que va amener un projet comme TransCanada
pour les entreprises manufacturières du secteur... du Québec. Alors, à défaut,
à défaut d'avoir une politique
économique structurante, est-ce qu'on peut leur demander de ne pas détruire et
de ne pas défaire les outils que nous
nous sommes donnés? Puis je pense aux CLD, je pense aux centres jeunesse-emploi
puis je pense aussi aux crédits
d'impôt. Est-ce qu'on peut leur demander de ne pas couper dans les choses qui sont déjà là
puis qui sont utiles? On ne leur demande pas d'en inventer plus, là, on
leur demande simplement d'arrêter de briser ce qui fonctionne.
Alors, Mme la
Présidente, très simple, je vais conclure là-dessus : On a une motion qui
est importante, on a une économie qui
n'a pas besoin de cette mesure de coupe de 1 milliard dans les crédits
d'impôt. On demande au gouvernement libéral
d'arrêter de s'inspirer de la CAQ, de s'inspirer de son ministre de l'Économie,
de s'inspirer de l'ancien ministre des Finances Raymond Bachand puis
d'agir en conséquence. Merci, Mme la Présidente.
• (15 h 20) •
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, M. le député
de Rousseau. Je suis maintenant prête à céder la parole à M. le ministre
de l'Économie, de l'Innovation et de l'Exportation.
M. Jacques Daoust
M.
Daoust : Je vous remercie, Mme la Présidente. D'abord, les crédits
d'impôt, ça n'existe pas depuis quelques années, ça existe depuis longtemps. En fait, si on recule dans le temps
et on fait un pourcentage de ce qui était prélevé par rapport aux prélèvements des sociétés, ça
représentait à peu près 5 % au début des années 90, ça représente
maintenant près de 20 %. Alors,
ce sont des progressions qui sont importantes, et ces progressions-là se sont
installées avec les années. Et, comme
je le dis souvent, un peu comme les feux de circulation dans une ville, on en
ajoute, mais on n'en enlève jamais. Ce
que j'essaie d'exprimer, si vous voulez, par ça, c'est que les métiers
changent, notre économie change, tout change, et il faut s'ajuster
aussi, il faut ajuster aussi notre fiscalité à ça.
Quand notre
gouvernement a été porté au pouvoir, une des choses qu'on s'est engagés à
faire, c'est de rééquilibrer les finances publiques. Rééquilibrer les
finances publiques, on le sait tous, ça peut se faire de trois façons puis des combinaisons
de ces trois façons-là. Il y en a une qui consiste à couper les dépenses, un
peu celle qu'on a privilégiée, Mme la
Présidente. Il y en a une deuxième qui consiste à augmenter les revenus. On se
souviendra, quand on a failli passer la
marque du 50% d'impôt sur les taux marginaux, du tollé qu'on a connu, il y a un
an et demi, deux ans, si ma mémoire est
bonne. Je pense qu'on est rendus à un maximum de ce qu'on peut demander aux
citoyens de ce côté-là. On ne peut pas prélever plus que ce qu'on laisse
aux citoyens. En bout de ligne, ça devient… En fait, les gens tendent à fuir
les économies comme celles-là. Et la
troisième, bien sûr, c'est celle de dire : On se fout un petit peu de tout
ça puis on augmente la dette. Bien,
de notre côté à nous, on a dit : Écoutez, considérant la taille des
finances de l'État, est-ce qu'on est à ce point persuadés que la structure est parfaite qu'on ne peut pas jouer à
l'intérieur des dépenses, qu'on ne peut pas regarder si, les dépenses que nous avons à travers l'appareil,
il n'y a pas des ajustements qu'on peut faire? Est-ce qu'on ne peut pas être un peu plus rigoureux dans notre façon de
gérer les finances publiques? Et on pense que c'est dans cette voie-là
qu'on doit aller, de couper dans les dépenses.
Quand j'étais
dans le secteur privé, dans le secteur privé j'avais un président de la Banque
Nationale à l'époque, M. André Bérard, qui dit : La seule chose que je
contrôle vraiment, c'est les dépenses. Et, dans le secteur privé, quand on veut équilibrer le budget, bien
sûr, on demande à nos gens de marketing d'augmenter les revenus, on fait des
efforts, on fait des campagnes, mais
la seule façon qu'on a véritablement d'équilibrer nos budgets, c'est de gérer nos dépenses, et on le
fait de façon très rigoureuse.
Les mesures
fiscales qui sont en vigueur
actuellement au Québec ne sont pas révisées systématiquement. Moi, ça fait huit ans maintenant
que je côtoie l'appareil public et que j'avais comme responsabilité, lorsque j'étais président
d'Investissement Québec, d'en faire le suivi, tout au moins sur les
mesures fiscales de nature économique, et je peux vous assurer que ce sont des choses qui ne sont pas revues systématiquement. Bien au contraire, on est installés dans le confort de ces
mesures-là, et c'est pour ça, comme je le disais au tout début, que le pourcentage
a tant augmenté.
Il faut dire
aussi qu'une mesure fiscale, c'est une mesure un peu commode, parce que, quand
on se prive d'un revenu, on n'a pas à
faire un chèque, ça paraît moins mal. Mais c'est aussi dévastateur pour les
revenus de l'État. Et, comme on essaie de corriger cette situation-là,
bien, il est clair qu'on doit s'attaquer à tout ça.
Les mesures
fiscales, aussi, il faut comprendre qu'il y a des milliards qui sont payés par
les individus, et on retourne une partie aux individus, puis il y a
des milliards qui sont payés par
les entreprises, et on redonne aussi aux entreprises. Mais il serait impensable d'essayer d'équilibrer
un budget en ne demandant ou en ne jouant, avec les mesures fiscales, qu'avec
celles qui sont adressées aux citoyens. Il faut penser que le milieu des
affaires aussi doit faire son effort.
On se souviendra aussi que certaines mesures
fiscales se sont installées… certains métiers se sont installés au Québec avec les années. Puis on peut toujours
essayer d'imposer un modèle économique, mais, on ne sait pas trop pourquoi,
certains moments, il y a des modèles
économiques qui se développent tout seuls. Je
prendrai simplement l'exemple du multimédia dans le jeu vidéo.
À l'origine de tout ça, Mme la
Présidente, c'est le film Jurassic Park
qui a fait débuter tout ça. Comment a-t-il fait débuter tout ça? C'est qu'à un moment donné on a fait des dessins
animés à l'intérieur d'un film. C'est une
firme montréalaise qui s'appelle Softimage
qui a parti tout ça, et ça a allumé beaucoup de lumières, ça a donné beaucoup
d'éclairage à Montréal comme ayant
une capacité de livrer des technologies complètement nouvelles. On est rendu
complètement à l'autre bout du
spectre maintenant avec des boîtes comme Technicolor, avec des boîtes comme…
qui ont fait le film Gravity, que
vous avez peut-être vu. Gravity, il y a juste deux choses qui sont
vraies dans ça, c'est le visage de George
Clooney puis c'est le visage de Sandra Bullock. Le reste, c'est entièrement du dessin animé. Quand vous
regardez le film War Horse, les
chevaux de guerre… Bien, j'ai vu une femme pleurer, moi, parce qu'elle aimait les chevaux, puis je l'ai vu pleurer
tellement ce cheval-là devait souffrir. C'est
un pur dessin animé, il n'a jamais existé, ce cheval-là.
Alors, quand on
regarde tout ça, on a développé une expertise, une créativité, on a développé
des moyens, au Québec, qui ont attiré les investisseurs étrangers. Et la firme
Ubisoft, qui est un des grands joueurs, dans le jeu
vidéo, mondiaux, a décidé de
s'installer au Québec. Et, à l'époque, on avait placé une mesure
fiscale, si ma mémoire est bonne… je n'y étais pas à ce moment-là, mais, de mémoire, on avait placé une mesure fiscale à hauteur de
50 % des salaires. 50 % des
salaires, vous savez, il n'y a personne qui paie 50 % d'impôt juste au
Québec. Mais on voulait, si vous voulez, se doter d'une locomotive dans
ce milieu-là, dans cette
industrie-là, et ça a fonctionné. Ça a fonctionné à un point tel qu'Ubisoft Montréal
est non seulement le plus grand studio de jeux vidéo au monde, pas pour Ubisoft mais pour l'ensemble de l'industrie, mais
ils ont gagné, il y a quatre ou cinq semaines,
le concours du meilleur studio de jeux vidéo au monde. C'est un concours qui était organisé, et la finale se déroulait en
Angleterre.
Alors,
on a une grande fierté à tout ça, et on l'a créée
avec des crédits d'impôt. Mais ce
50 % là, voyez-vous, on l'a
reculé à 37,5 %. Enfin, on l'avait mis à 30 %, et puis on l'a porté à
37,5 %, dans la mesure où ces films-là
étaient faits en français. S'ils ne
s'étaient faits qu'en anglais, à ce moment-là on est à 30 %. C'est comme ça que la mesure fiscale était
construite. Je donne simplement cet exemple-là pour expliquer un peu comment
tout ça fonctionne.
Alors,
ce qui a été fait, c'est qu'on a été chercher
d'autres studios avec tout ça. Personnellement, j'avais été rencontrer les représentants d'Eidos, qui est à Wimbledon en Angleterre, et je les avais convaincus de venir s'installer
chez nous. Ils ont été acquis par une firme
japonaise qui s'appelle Square Enix. Square
Enix n'a pas pensé du tout à fermer le studio.
Au contraire, ils ont dit : On garde le
studio Eidos et on ouvre aussi un studio Square Enix à Montréal, on découvre
Montréal. Montréal, c'est une ville de
créativité, Québec aussi.
À Québec, on a une
firme qui est née ici, qui s'appelle Beenox, qui a été vendue il y a quelques
années, mais d'abord, Québec, aucun
«turnover», il n'y avait aucun roulement de personnel. Pourquoi? Parce que c'est une qualité de vie incroyable qu'il y avait à l'intérieur de l'entreprise. Ce sont de
bons salaires, ce sont des jeunes qui sont contents de travailler dans
ce métier-là. Alors, pour moi, c'est une
industrie dans laquelle on s'est développé
beaucoup.
J'ai
donné l'exemple récemment, et ça a été repris dans certains médias, j'ai donné
l'exemple du film Avatar qui a coûté
250 millions et qui a pris un mois au box-office à aller générer
1 milliard de revenus, et j'ai pris le film… le jeu vidéo Destiny qui a coûté aussi
250 millions à développer et qui a généré des
ventes de 1 milliard en 48 heures. Il y a donc un domaine qui est un domaine d'avenir, et
personne ne va contester ça, et le Québec est devenu une capitale mondiale
dans l'industrie du jeu vidéo, on en est très
fiers.
• (15 h 30) •
Parallèlement
à ça, ce sont des bons salaires. On a développé non seulement une main-d'oeuvre
compétente dans ces métiers-là, celui
du cinéma, celui du jeu vidéo, ça touche la culture
aussi. On en a dans plusieurs, plusieurs, plusieurs secteurs, des mesures fiscales, et c'est un petit
peu à ça que le gouvernement a demandé à la commission sur la fiscalité
de jeter un coup d'oeil, de même qu'à la
commission de révision de programmes. On se souvient qu'on a créé deux
commissions. Il y en a une dont la
durée de vie est déterminée, la commission sur la fiscalité, pour des raisons
fort simples, hein? On ne peut pas tenir tout le monde en l'air sur la
fiscalité à dire : Bien, il y aura peut-être quelque chose, on en mettra peut-être plus, on en mettra peut-être moins. Il
faut que cette commission-là livre. Et, nous, à partir du moment où elle
nous éclaire, elle nous amène de l'information, elle a tenu ses consultations,
elle nous fait des recommandations, et le gouvernement est appelé à prendre des
décisions. Alors, la commission sur la fiscalité rendra ses recommandations
prochainement, et ça inclura l'industrie du jeu vidéo.
J'ai
exprimé ma préoccupation, mon intérêt pour toute l'industrie des mesures fiscales,
et j'ai pointé certains secteurs plus
spécifiquement, et j'ai hâte de lire le rapport de la commission sur la
fiscalité pour voir, eux, ce qu'ils en disent, pour qu'on voie la rentabilité de cette mesure-là.
Est-ce que toutes ces mesures-là sont optimales? Toujours dans la base de
l'analyse qu'on a voulu faire des finances
publiques, de dire : Sont-elles vraiment optimales? Je ne le pense pas. Si
on était capables d'aller chercher, à
l'intérieur de notre budget, 4 %, on aurait équilibré nos dépenses publiques.
Est-ce qu'il est à ce point
imperfectible, parce qu'il est tellement bon, qu'on ne peut pas aller chercher
4 %? Je ne pense pas. C'est la même
logique qui s'applique dans l'industrie du jeu vidéo, c'est la même chose qui
s'applique dans le cinéma, c'est la même
chose qui s'applique dans la culture. Est-ce que toutes les mesures qui ont été
installées avec les années, avec le quantum qu'on a mis à chacune, sont
toujours pertinentes et à ce quantum-là ou est-ce qu'on ne peut pas en bonifier
certaines? Est-ce qu'il y en a qu'on doit diminuer? Bien, ce sont les questions
auxquelles on doit répondre.
Et,
quand on pose ces questions-là, ça va plus loin, Mme la Présidente. Il faut
regarder non seulement la mesure telle
qu'elle est chez nous, mais il faut la regarder dans un contexte concurrentiel.
Si j'installe une mesure fiscale qui est nettement plus généreuse que les autres et que ce métier-là se
transporte facilement dans une autre juridiction, il est clair que je me tire dans le pied. Si je suis compétitif
au niveau de ce mode fiscal là, de ce métier-là, et j'ai, en plus, imaginons,
des salaires un peu moins élevés, imaginons
que j'ai aussi accès à une main-d'oeuvre compétente, dédiée, créative,
bilingue, capable de faire des jeux
dans deux langues — ce qui
est un atout dans ça, c'est mieux trois, c'est mieux quatre, parce qu'ils les font dans toutes les langues — bien, il est sûr qu'à ce moment-là je suis
capable de compétitionner les autres juridictions. Mais il se peut aussi
que je sois beaucoup plus riche qu'ailleurs.
Je
me souviendrai, d'ailleurs — et là je vous le donne à peu près — je me souviendrai, quand j'avais été
chercher Eidos en Angleterre, ça
avait fait un peu une commotion dans les marchés là-bas. Ça avait fait une
commotion dans le sens que je venais
d'aller chercher un studio d'un gros joueur, mais c'était 400 emplois. Et il y
avait eu un membre du Parlement qui avait dit, je ne sais pas si c'était
dans une commission parlementaire ou si c'était directement dans une réunion de la Chambre, il avait dit, parce que
j'avais expliqué nos mesures fiscales, il m'avait dit : «You're a nice
person, Mr. Daoust, but you're a
liar»; parce que je disais qu'on ne compétitionnait pas impunément, on n'était
pas démesurément riches dans nos mesures fiscales. Bien, au cours des…
avec les années, finalement, ils se sont ralliés et ils offrent sensiblement des… pas tout à fait au même niveau
que nous, même après la coupe paramétrique de 20 % qu'on a faite,
mais l'industrie du jeu vidéo mondiale s'est installée de façon un peu
compétitive de cette façon-là.
Alors, il faut se poser la question,
c'est : Est-ce qu'on est compétitif avec notre mesure? Est-ce que toutes
les mesures fiscales qu'on a actuellement,
au Québec, sont compétitives? Est-ce que ce sont celles qui sont les plus
généreuses, les moyennement généreuses? On ne le sait pas, et c'est pour
ça qu'on a créé une commission.
Le deuxième
point que je veux faire aussi, c'est que la compétition, si ce n'est pas
mobile, si la main-d'oeuvre n'est pas
mobile, si on ne peut pas réinstaller ça facilement, bien, la partie est un peu
différente. On a une mesure fiscale, voyez-vous,
qui a été introduite par le gouvernement précédent, qui était de dire :
Pour un projet de 200 millions, si ma mémoire est bonne, en immobilisations, on donnera un congé de taxes sur
les profits pour une période de 10 ans. Bien, il est clair qu'une fois
qu'on a installé cette infrastructure-là elle ne se sauvera pas. Ça a coûté
200 millions, ça ne se déménage pas
bien. Dans le jeu vidéo, ça se déménage
pas mal plus vite. Dans le jeu vidéo, vous savez, vous louez des locaux,
vous avez des équipements à crédit-bail, vous vous achetez des écrans
cathodiques, et puis avec un minimum d'installations.
La force de l'industrie du jeu vidéo, c'est sa créativité, c'est sa
capacité à innover. Les meilleurs jeux au monde ont été conçus à Montréal.
Je vous fais
une parenthèse, d'ailleurs. Quand j'avais été présenté à Eidos, j'étais
arrivé là-bas avec une petite puce et une clé USB, et j'avais dit : Écoutez,
je vais vous montrer un petit bout de jeu vidéo — à Eidos — et
je leur avais montré une petite
coupure d'Ubisoft, puis j'avais dit : C'est bon, hein? Bien, quand vous
voudrez cette qualité-là, vous viendrez à Montréal. Et ils sont venus.
Alors, il
faut se demander où est la concurrence, quelle sorte de concurrence on a. Est-ce que
la concurrence est forte, aussi? Parce que
souvenons-nous que Vancouver a attiré Electronic Arts, grand studio de jeux
vidéo, et, quand… Electronic Arts
composait littéralement 80 %
de leur industrie. Nous, on a plusieurs joueurs à l'intérieur de notre
industrie, et il s'en installe
encore. Et vous remarquerez, d'ailleurs, que, depuis la coupe qu'on a faite,
paramétrique, de 20 %, dans l'industrie
du jeu vidéo, la population, dans ce métier-là, n'a pas diminué, on a même eu
des annonces — vous
l'avez vu récemment — de
nouveaux studios qui ouvrent. Alors, justement, la mesure à l'intérieur de
ça...
L'autre
question, c'est : Est-ce qu'il s'agit d'un métier d'avenir? Est-ce qu'on
donne une mesure fiscale dans un métier
qu'on tient artificiellement vivant parce qu'il y a une mesure fiscale?
Question qu'il faut se poser, et je pense qu'elle est très, très, très
légitime.
Revenons
maintenant à l'équilibre dans les finances publiques, et on a choisi, bien sûr,
d'optimiser l'appareil de l'État. Si
on le fait, il y a des mesures fiscales qui s'adressent aux entreprises, c'est
de celles-là qu'on parle actuellement. Il y a des mesures fiscales qui s'adressent aux individus aussi. Alors, si
on dit : On regarde toutes celles des entreprises, est-ce que ça veut dire qu'on doit aller plutôt chercher
du côté des individus? Pas sûr. Pas sûr que, politiquement, financièrement,
économiquement, et tous les «ment» qu'on
peut imaginer, ça tient la route, parce qu'il y a tant, comme je le disais au
tout début, d'argent qu'on peut demander à des individus, à nos
citoyens.
La seule
difficulté qu'on a actuellement, et on devrait être en mesure d'y répondre dans
un avenir rapproché, c'est… on ne veut pas faire ces ajustements-là de
façon aveugle; on veut les faire de façon posée, on veut les faire de façon informée, on veut être sûrs qu'on optimise, pas
qu'on démolisse, qu'on optimise notre appareil. Alors, lorsque nous aurons
reçu le rapport de la commission sur la
fiscalité, ce qui est incessant parce qu'on leur avait demandé, vous vous
souviendrez, de nous livrer quelque
chose avant Noël, à partir de là on va arriver avec des recommandations, et les
recommandations, je le répète, sont
des recommandations. Ce ne sont pas des décisions qui ont été prises par la
commission. Ils n'ont pas ce pouvoir
décisionnel là, on ne leur a pas donné ça. La commission sur la fiscalité et la
commission sur la révision de programmes,
qui, elle, est permanente, ces commissions-là vont nous faire des
recommandations, et on prendra les décisions, comme gouvernement, qu'on
jugera les plus appropriées en fonction de notre population.
Ce que
j'essaie de dire par là, Mme la Présidente, c'est que ça ne veut pas dire que,
parce que la commission sur la fiscalité,
dans sa vision, je dirais, objective, apolitique, considère que ça doit être
fait comme ça, socialement, c'est quelque chose avec laquelle nous, on est capables de vivre. Et, si on doit
maintenir certaines mesures fiscales, même s'il n'était pas recommandé de les conserver, ça se peut, pour
des décisions… sur une base économique, et structurelle, et conjoncturelle,
comme le soulignait tantôt le député de Rousseau, il se peut qu'on
prenne des décisions autrement.
Mais le seul point qu'on essaie de faire
actuellement, c'est que n'anticipons pas nos décisions. On présume actuellement
qu'on va passer la hache dans tout ce qui bouge, alors qu'on n'a pas eu de
recommandations, on n'a pas eu le rapport des commissions. Et c'est pour ça que
la motion, telle qu'elle a été présentée, présume de nos décisions, présume aussi que tout ce qu'on a actuellement est
imperfectible, c'est parfait comme c'est là, on ne peut pas l'améliorer.
Il y a peut-être lieu de les augmenter, il y
a peut-être lieu de les diminuer, il y a peut-être lieu de les laisser comme
ça, puis il y a peut-être lieu de les
éliminer, puis il y a peut-être lieu d'en créer d'autres. Alors, c'est pour ça
que je suis, entre guillemets,
inconfortable avec la motion telle qu'elle est présentée, parce que je n'y vois
pas de mesure, j'y vois un geste brusque qui n'est fondé sur aucune
donnée solide.
Alors, je terminerai, Mme la Présidente, simplement en rappelant que ce que nous voulons faire, justement,
c'est de mettre... de gérer nos
budgets de façon rigoureuse, c'est de revenir à un équilibre qui
va nous redonner de la marge de manoeuvre pour être capables de faire en sorte que le Québec
soit meilleur. Je recule loin en terminant, mais on se rappellera que M. Wilson, quand il était ministre des Finances au fédéral… et on avait été déclaré, le Québec,
comme membre honoraire des pays du
tiers-monde, tellement notre économie était mauvaise en 1996. On se rappellera qu'ils
ont eu à prendre, justement,
le même type de décisions qu'on a prises là, et aujourd'hui on est tous jaloux
du gouvernement fédéral parce
que lui génère des gros surplus.
Bien,
il faudrait qu'on essaie de revenir à des surplus au gouvernement du Québec. Il faudrait qu'on arrive à des surplus pour être capables d'avoir une fiscalité
attrayante, pas seulement pour les entreprises, mais qu'on ait une fiscalité qui soit attrayante pour les individus, pour les
citoyens. C'est difficile de distribuer la richesse quand on ne l'a pas créée.
Alors, le cri de ralliement, simplement, que
je mets sur la table, c'est : Créons de la richesse qui sera beaucoup
plus facile à distribuer par la suite et à gérer. Merci, Mme la
Présidente.
• (15 h 40) •
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, M. le
ministre. Et, pour la prochaine
intervention, je reconnais M. le député de Johnson.
M. André Lamontagne
M.
Lamontagne : Oui. Merci, Mme la Présidente. J'ai un petit problème de
voix aussi, là, ça fait que je suis un peu
en symbiose avec vous aujourd'hui. Ce qu'il est important de rappeler en
commençant, c'est un petit peu qu'est-ce qui est à l'origine, qu'est-ce qui est à la source de la motion qui a
été présentée, qui vise les crédits d'impôt, hein? À la source de la motion qui a été présentée, c'est
parce qu'on est en face, au niveau du gouvernement du Québec, d'un déficit
structurel très important, qu'il importe de
résorber, puis, parallèlement à ça, bien, notre économie est anémique depuis
des années, comme en font foi, là, tous les
indicateurs qui sont dignes de ce nom. Alors, nous, on a baptisé ça, à la
Coalition avenir Québec, on a appelé ça le déclin tranquille, le long
déclin tranquille dans lequel on est engagés.
Puis
qu'est-ce qui fait aussi qu'on est aujourd'hui à débattre de cette motion-là?
Dans un premier temps, c'est parce
qu'on est en face d'un gouvernement qui n'était pas prêt à gouverner. On est en
face d'un gouvernement qui n'avait pas de plan, que ce soit pour le
redressement des finances publiques ou que ce soit pour une relance durable de
notre économie, puis que maintenant il
cherche désespérément à trouver un cap sur le chemin, un, du redressement des
finances, mais d'une façon durable, puis de relancer l'économie de la
même façon.
Alors,
c'est certain que, si on avait eu un plan auparavant puis, quand on aurait pris
le pouvoir, on aurait eu un certain
nombre de mesures à annoncer, on n'aurait pas laissé dans le vent toutes sortes
d'hypothèses, sortir toutes sortes de ballons, et tout ça; peut-être que, un,
aujourd'hui, on saurait où on s'en va, les entreprises sauraient où on s'en va,
l'opposition officielle saurait où le
gouvernement s'en va, puis il y aurait peut-être moins de panique dans l'air,
hein? Mais, qu'est-ce que vous
voulez, ce gouvernement-là n'était pas prêt à faire ces choses-là. Alors, ça
prend un certain nombre de mois avant qu'il puisse un petit peu
s'enligner.
L'autre
point aussi qu'il est important de souligner, une des raisons, une des sources
en arrière de cette motion-là, bien,
c'est le gouvernement précédent puis l'impact que le gouvernement précédent a eu sur la situation qu'on vit aujourd'hui, Mme la Présidente, parce
qu'il faut rappeler que leur court
passage à la direction du Québec, ça a été un désastre. Ça a
été un désastre tant au niveau des
impacts très négatifs de leurs actions sur l'économie puis ça a été aussi
un désastre au niveau de l'impact
très négatif que certaines propositions qu'ils ont faites ont eu de diviser les Québécois.
Ça fait qu'au lieu de s'investir
à unir les Québécois puis à chercher à bâtir un projet, ce qu'ils ont
fait : ils ont préféré diviser puis, en même temps, s'en aller un petit peu n'importe où avec l'économie.
Alors,
aujourd'hui, si on est dans une situation
où on a un gouvernement qu'on a l'impression qui est un peu en panique, puis qu'il regarde les crédits d'impôt, puis il a comme une commande à passer pour être capable de payer une
partie de l'épicerie, bien, c'est sûr que
c'est triste, O.K.? Il y a quelqu'un
qui n'avait pas de plan, mais, en même temps, il y a un impact qui est venu d'un gouvernement, Dieu merci, qui a été
là seulement pour une courte période de temps, mais ils ont fait
passablement de dommages.
Une
autre chose qu'il serait important de se rappeler, Mme la Présidente, c'est que le problème structurel qu'on a au Québec, là, ça ne date pas d'hier, ça ne date pas d'il y a
un an, ça ne date pas d'il y a cinq ans. Ça fait 20 ans, 25 ans que c'est annoncé. Lucien Bouchard, un ancien premier ministre du Québec, chef du Parti
québécois, en parlait. Afin
d'adresser cette situation-là,
les parlementaires, à l'unanimité, en 1996, ont voté une loi qui
ramenait le déficit zéro, dans laquelle les gouvernements devaient apprendre à se gérer pour faire en
sorte qu'année après année on battait ce potentiel déficit structurel là pour qu'on n'ait jamais à
faire face à un déficit structurel. Et qu'est-ce
qui est arrivé, Mme la Présidente? Pendant
15 ans qu'ils ont suivi ça, les deux gouvernements, qui sont un petit peu
bonnet blanc, blanc bonnet, ont accumulé neuf années des déficits, puis ces neuf années-là ont cumulé
20 milliards de déficit. Puis ça, c'étaient des déficits pour payer l'épicerie, payer le gaz, payer la
nourriture, payer les assurances. Ça, c'était vraiment un très bon
investissement pour les Québécois, Mme la Présidente.
Un autre point aussi
qu'il est important de se rappeler, c'est les importants changements
démographiques auxquels à partir de
maintenant, là… que le Québec est confronté pour les années à venir. On
entendait le premier ministre, là, il
y a quelques semaines, commenter les derniers résultats économiques puis
dire : Bien, écoutez, il y a une partie de ça qui vient des changements démographiques, comme si
ça venait d'arriver. Bien, ça, encore là, il y a 20 ans, 25 ans, on
pouvait regarder la courbe démographique
puis on pouvait savoir à une année près quand est-ce que ça allait commencer
à frapper, quand est-ce que ça allait commencer à avoir un impact sur les
revenus de l'État, quand est-ce que ça allait commencer à avoir un impact au
niveau de l'emploi au Québec. C'était tout écrit, c'était tout écrit dans le
ciel. Puis qu'est-ce qu'ils ont fait, nos joyeux lurons qui ont gouverné depuis
ces années-là? Qu'est-ce qu'ils ont fait, Mme la Présidente? Ils ont géré à la
petite semaine, au jour le jour. Puis, quand il y avait des décisions qui
étaient à prendre qui
étaient un petit peu difficiles, ils ont préféré ne pas les prendre parce que
ça fait mal, mais on pousse la neige par en avant, on pousse la neige par en avant. Ça fait que c'est ça qui s'est
fait, Mme la Présidente, pendant 20 ans, c'est ça qui s'est fait.
Alors, quand on regarde un petit peu le
casse-tête auquel on est confrontés, parce qu'honnêtement c'est un casse-tête auquel on est confrontés, auquel ce
gouvernement-là est confronté parce que c'est lui qui est au pouvoir, mais
il faut bien comprendre que c'est la somme
des actions non prises puis le manque de vision puis de courage du gouvernement
du Parti québécois puis du gouvernement du
Parti libéral, qui ont gouverné en réalité le Québec, là… Depuis 44 ans,
les libéraux ont été au pouvoir
24 ans, et les péquistes ont été au pouvoir 20 ans. Alors, si on
cherche un petit peu d'où ça peut venir,
ce qui nous arrive comme ça, subitement, bien, je veux dire, on n'a pas bien,
bien, bien à chercher bien loin, je veux dire, c'est eux autres… puis je ne dirai pas «ou eux autres», je vais
dire : C'est les deux. Ils se sont partagé ça à peu près
moitié-moitié.
Puis, si on fait juste regarder les
15 dernières années, Mme la Présidente, là, prenez le temps que les
libéraux étaient au pouvoir de 2003 à 2012,
qu'est-ce qu'ils ont fait? En 2003, ils ont laissé poindre la possibilité, là,
qu'ils allaient s'occuper de ce qui
pourrait devenir structurel, ils ont parlé de réingénierie de l'État. Il y a eu
trois, quatre pancartes dans la rue,
il y a deux, trois personnes qui ont chialé, ça a brassé un petit peu. Ils ont
fermé les livres, ça a été fini. Alors là, là, on a été, là, sur l'autorégulateur de vitesse pendant neuf années
consécutives. Ils nous ont tapé plus que 5 % à chaque année
d'augmentation des dépenses publiques de l'État, 5 % par année, année
après année, après année à partir de 2003, Mme
la Présidente. Ça fait que ça, c'est une bonne façon de prévenir qu'un jour on
soit face à un déficit structurel, hein?
L'autre chose
qu'ils ont faite aussi, c'est par leur vision économique. Ils ont mis tout leur
capital dans deux projets. Il y en a un que ça a été des
infrastructures, puis il y en a un autre, ça a été le Plan Nord.
Une voix : ...
• (15 h 50) •
M. Lamontagne : Pardon? Ça va?
Alors, des infrastructures puis le Plan Nord.
Les infrastructures, c'est certain que c'est une bonne... Un, première des choses, il faut
s'occuper de nos routes, il faut s'occuper de nos ponts, ça, on
s'entend là-dessus, puis de nos
bâtiments, nos écoles, nos hôpitaux. Mais c'est certain que bâtir une politique sur les infrastructures,
qu'est-ce que ça fait, Mme la Présidente? Ça fait qu'à un moment donné, quand on a terminé de s'occuper des
infrastructures, bien là on n'a plus besoin d'emplois. Ça fait que tant qu'on
pompe de l'argent on maintient de
l'emploi, mais, quand on arrête d'en pomper, bien là l'emploi s'en va, Mme la
Présidente, il faut recommencer. Ça
fait que ce n'est pas tellement durable. Ça peut aider, mais ce n'est pas
tellement durable. Puis, entre-temps, bien on a gonflé le déficit de 50
à 60 milliards.
L'autre
façon, le Plan Nord, bien, encore là, les ressources du Nord québécois, là, ça
devrait être la responsabilité de
chacun des gouvernements qui se succèdent de mettre le meilleur de ses
capacités à développer les ressources du Nord au bénéfice des Québécois
puis des familles québécoises. Ça, on s'entend tous là-dessus. La seule chose,
c'est que ça adonne que c'est relié à des
marchés mondiaux de matière qui font en sorte, Mme la Présidente, qu'on peut
être des années que les marchés sont
complètement à terre. Qu'est-ce qui se passe? L'industrie s'effondre. Alors,
bien là on a vécu ça. Alors, de
penser que, pour stimuler l'économie puis s'assurer qu'on a une croissance
durable de notre économie, on investit dans
les immobilisations puis on investit dans le Plan Nord, bien, il y avait
des bonnes idées là-dedans, sauf que, d'une façon durable, ce n'était pas la bonne idée. Ça fait que, d'un côté, on
a complètement monté les dépenses publiques puis, de l'autre côté, Mme la Présidente, on s'est
assurés de mettre tout notre capital dans des actions qui étaient éphémères au
niveau du développement économique.
Ça, c'est le Parti libéral. Puis, suite à l'éloquence de mon collègue de Rousseau,
c'est avec un petit plaisir additionnel que je vais parler du bref passage — Dieu merci! — du Parti
québécois au pouvoir de l'automne
2012 au mois d'avril 2014, hein?
Parce que, première chose qu'ils ont… Ils ont fait une succession d'actions
pendant leur passage. Première chose qu'ils
ont faite en rentrant là, là, ils se sont assurés que, s'il y avait un plan Nord, c'est de le tuer. Ils ont mis les deux pieds
sur les freins. Puis moi, je me souviens,
j'ai un collègue qui est un associé dans une firme, à Montréal,
puis qui pilote des projets pour des
grandes, grandes, grandes entreprises qui, justement, investissent dans
le Nord québécois. Un matin, je déjeune avec lui, il dit : André, ce n'est pas des farces, il dit,
j'avais 11 projets que je m'occupais, ça ne fait même pas deux mois
qu'ils sont là, je suis rendu qu'il m'en reste trois. Il y a quelqu'un en
quelque part qui a mis les freins, Mme la Présidente.
Une autre chose qu'ils ont faite, c'est qu'ils
ont proposé des augmentations de taxes… Ça, c'est le député de Rousseau,
là. Il faut s'en souvenir, c'est lui qui était aux commandes du navire du gouvernement à l'époque. Il a proposé des
augmentations de taxes où ça amenait les taux d'imposition supérieurs à
50 % sur les plus hauts salaires au Québec. Une autre proposition qu'ils ont faite, ils ont
proposé des augmentations rétroactives de l'imposition des dividendes. Ça
veut dire que, là, on est au mois de
novembre, on dit : Ce qu'on vous propose, là, ça va s'appliquer à partir
du mois de janvier. Ça, des mesures
comme ça, Mme la Présidente, là, on retrouve ça dans des républiques de
bananes. Mais, dans le monde industriel, éduqué, on ne retrouve pas ça,
parce que, quand on laisse pointer la possibilité de faire des gestes comme ça, qu'est-ce qui se passe, Mme la Présidente? Les gens, soit qu'ils ne viennent pas chez nous ou qu'ils s'en vont
ailleurs. Bien, c'est un petit peu ça qui s'est passé avec nos amis pendant
qu'ils ont été au gouvernement.
Alors, une
autre chose qu'ils ont faite, puis, encore là, c'était le député de Rousseau
qui était aux commandes, ils ont
perdu le contrôle des finances totalement. On est à l'automne 2013, là, le
député de Rousseau nous explique que le déficit va être… il n'y aura pas de déficit, c'est
l'équilibre budgétaire. On arrive au printemps, finalement, il nous explique
que ça va être un déficit de 2,5 milliards, et on arrive un petit peu plus tard, quand on a les vrais chiffres, on
est à 3,1 milliards de déficit. Après ça, ils ont commencé une
caravane à l'automne 2013, printemps 2014, ils ont saupoudré 2 milliards de dollars
de promesses à gauche et à droit au Québec. Après ça, le même député de Rousseau,
qui parlait tantôt, a déposé un budget sans crédit.
Alors, quand
on regarde tout ça, Mme la Présidente, puis qu'on rajoute qu'ils ont mis le meilleur
d'eux-mêmes à diviser les Québécois,
on ne peut pas se surprendre d'être dans une situation… aujourd'hui, là, on est un peu en panique parce
que ça ne balance pas au Québec. La croissance économique n'est pas là, puis on a
de la misère avec le contrôle de nos dépenses.
Alors, moi,
juste pour parler encore avec le député de Rousseau, c'est sûr que moi,
je serais gêné de me lever en Chambre
pour parler de n'importe quelle question qui touche l'économie. Moi, si j'étais
à leur place, au moins, je ferais parler
le député de Saint-Jérôme, parce que le député de Saint-Jérôme, il n'était pas là. Peut-être que ça, ça pourrait aider. Malgré qu'avec tout le respect que je lui dois je
le lis un petit peu depuis quelque temps, là, je ne suis plus sûr qu'il aurait
fait différemment, mais, dans un passé récent, j'aurais été convaincu qu'il
aurait fait différemment, hein?
Alors, Mme la Présidente, le net de tout ça, là, c'est que la situation dans laquelle on est,
là, les gens qu'on a à pointer puis à
regarder, c'est de ce côté-là, c'est les gens qui sont là. Ça, ça nous amène à
parler des crédits d'impôt, puis un
des problèmes qu'il y a par rapport aux crédits d'impôt aujourd'hui, ce n'est pas qu'il y a des actions qui ont été prises, c'est
toute l'insécurité qui plane autour de ça. Puis hier on a eu une grande
révélation, Mme la Présidente, on a notre premier
ministre qui s'est levé en Chambre,
en répondant à une question. Textuellement, il a répondu : Moi, les
crédits d'impôt, on est d'accord pour
le principe, mais à quoi ça sert? Est-ce
que, véritablement, il y a des objectifs précis? Ça, c'est
notre premier ministre, Mme la Présidente, là, le patron de tout ce monde-là,
qui explique ça. Je vais vous dire honnêtement, j'étais assis à ma place, j'étais découragé. Puis là j'ai
une grande sympathie pour le ministre de l'Économie, qui vient de s'exprimer, en me disant :
Wow! Lui, il a toute une job à faire. Si le premier ministre pense comme ça, c'est là que ça
se situe, là, ça ne va pas bien, hein?
Ça fait que c'est un peu pathétique d'entendre ça sept mois après avoir été élus, mais c'est
surtout pathétique d'entendre ça quand ils
ont été au pouvoir pendant toutes ces années-là. Ça veut dire que, pendant
toutes ces années-là, qu'il y avait tous ces crédits-là, qu'on essayait d'intervenir pour aider, tout ça, là,
en bout de ligne, il n'y a pas de direction, il n'y a
pas d'objectif, il n'y
a pas de contrôle, on ne sait pas
trop ce qu'on fait avec ça. D'ailleurs,
le ministre de l'Économie l'a mentionné, il a été huit ans à la tête d'Investissement Québec, il n'a jamais
eu de comptes à rendre. Alors, ça, Mme
la Présidente, ça ne fait pas beaucoup de sens, ça.
Alors, pour
le bénéfice du premier ministre, là,
je veux dire, je peux lui donner un petit peu quelques objectifs, à quoi ça sert, des crédits d'impôt puis de l'aide
aux entreprises, hein? On peut dire que, dans un premier temps, quand on
a commencé à introduire ça au Québec de
façon importante, l'objectif, c'était de faire
du savoir une importante composante de
l'économie du Québec. Ça, si on regarde dans le passé, là, dans les objectifs
du gouvernement, là, on voyait ça, hein? Après ça, c'est favoriser la
collaboration entre les entreprises puis d'autres
milieux. On parle d'avoir une participation
accrue des PME dans la recherche et
développement au Québec, d'accroître le
soutien à des entreprises, à certains secteurs, d'accroître la création d'emplois à valeur ajoutée, hein, de soutenir les régions
économiques, de soutenir la culture. C'est
à tout ça que ça sert, l'utilisation de crédits d'impôt puis d'aide aux entreprises.
Mais, en plus
de ça, Mme la Présidente, les crédits d'impôt puis l'aide aux entreprises, ça
sert aussi à une chose qui est bien
utile : un, c'est soutenir nos industries, celles qui en ont
besoin, puis c'est soutenir l'emploi à valeur
ajoutée dans un contexte concurrentiel, là, qui n'est plus canadien, qui n'est plus nord-américain, mais qui est mondial, Mme
la Présidente, hein? On a juste à
penser, là, si on regarde un petit peu qu'est-ce qui
se fait ailleurs, là, dans la dernière année, New York ont annoncé... ils appellent ça des «hubs». Pour une dizaine de
secteurs, là, que ça soit l'électronique, l'optique, l'image,
l'équipement de transport, matériaux avancés, sciences de la vie, ils ont
annoncé des zones que, quand les entreprises
s'en vont s'installer là, exemple, le premier
10 000 emplois par année qui est créé dans ces zones-là, jusqu'à 200 000 $, pas
une cent d'impôt à payer; si on est chef de famille, jusqu'à 250 000 $, pas un sou d'impôt à payer; si on a un conjoint, jusqu'à
300 000 $, pas d'impôt à payer. Ça, c'est
une mesure, O.K.? Après ça, il y a toute une
kyrielle de mesures qui touchent la taxation, qui touchent l'aide, et tout ça, aux
entreprises. Ça, c'est New York, pas loin
d'ici.
Si on regarde
dans un autre volet, je parlais avec un entrepreneur,
cet automne, qui a une belle entreprise qui
est en région. À un moment donné, il
reçoit un téléphone. Ça parle en anglais au bout de la ligne.
Ça vient du Wisconsin : Hello, how are you? Il commence à lui parler de sa business, la personne du Wisconsin, il explique son
entreprise, puis il lui dit, finalement :
Si vous pensez à vous relocaliser, on a un terrain, on a une bâtisse, on forme
votre staff puis on vous aide, on vous accompagne,
et tout ça. Ça, c'est une autre sorte
d'affaire, Mme la Présidente, là, hein?
Après ça, bien, on a juste à regarder l'Ontario.
Quand on regarde ce qui se passe en Ontario,
Mme la Présidente, c'est
depuis quelques années, l'Ontario a augmenté la cadence considérablement en
termes de crédits puis en termes d'aide aux entreprises.
Si on regarde la Colombie-Britannique, ils sont enlignés complètement sur
la Californie, ils sont dans
le même fuseau horaire. Ils font des efforts
colossaux pour attirer, hein, tout le milieu
de la télévision et du film.
On va penser
à un petit pays qui s'appelle la Lettonie, une petite république balte, là, qui a 2,5 millions d'habitants, les
anciennes républiques baltes, là, qu'eux autres font
des efforts colossaux depuis des années pour aller chercher de
l'animation pour devenir très bons dans le milieu de l'animation. Alors, ils
sont très, très agressifs à ce niveau-là.
Puis
après ça on regarde, mettons, notre
industrie de l'aéronautique, que c'est un
miracle. C'est extraordinaire, au Québec,
ce qu'on a en termes de capacité aéronautique,
hein, versus de nos 8 millions d'habitants. Bien, ils compétitionnent avec l'Europe,
qui viennent de mettre un fonds de 4 milliards pour un projet, puis un
autre, puis un autre. Ça fait que c'est
certain que tous ces outils-là, O.K.,
peuvent aider nos entreprises. Mais ce qu'il faut
faire, c'est que, un, il faut avoir de
la vision puis il faut avoir un plan
pour se servir de ça à bon escient, Mme la Présidente, hein? Une chose qui est
sûre, c'est que, deux jours
après avoir été élu... nommé président
du Conseil du trésor, le président du
Conseil du trésor avait mentionné que c'était très important, O.K., de ne pas faire de coupe paramétrique dans rien,
que ce n'était pas utile. Bien, le premier jet qu'il nous a envoyé ou qu'il a envoyé en
fonction des crédits d'impôt, ça a été de faire une coupe paramétrique. Ça
fait qu'on peut comprendre qu'il y ait une
certaine insécurité, pas juste au niveau de la Chambre, mais un petit peu
partout au Québec dans le milieu des affaires, hein?
Ça fait
qu'une chose importante, Mme
la Présidente… Je ne reviendrai pas
sur les commentaires du député de Rousseau en fonction du programme de la CAQ. Je veux
dire, je vais lui en envoyer une version, là, peut-être qu'il va être capable de la lire, mais c'est sûr que, s'il
lit comme il s'occupait des finances, ça ne donnera pas un autre résultat.
Mais une chose qui est importante,
c'est que la CAQ a été la première à soulever qu'il était très important
de faire le ménage puis de revoir… de faire une refonte des crédits
d'impôt au Québec puis de l'aide aux entreprises, parce que c'est des sommes colossales, puis, de la bouche même du ministre
de l'Économie, ça n'a jamais ou à
peu près jamais
été remis en question. Il n'y
a personne qui était redevable sur
rien. On ne peut pas penser continuer, que ça soit dans les crédits d'impôt ou dans d'autres domaines,
à pomper...
J'ai 22 minutes? Non? Madame me dit que non.
• (16 heures) •
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : C'est ça, il vous reste une minute, puisqu'on a commencé... on a débuté
la séance un peu plus tard, on a commencé en retard. Alors, une minute, s'il
vous plaît.
M. Lamontagne : Alors, il me reste
une minute? 1 min 30 s.
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Une minute en cours, là.
M.
Lamontagne : C'est bon. O.K.
Alors, grosso modo, ce que la CAQ voulait faire, Mme la Présidente, O.K.,
c'est de faire une refonte des crédits d'impôt puis, quand on parle de faire une refonte des crédits d'impôt, c'est de définir clairement
ce qu'on cherche à accomplir; c'est d'évaluer les secteurs, évaluer la taille
des entreprises, celles qui ont une masse critique de R&D, celles qui n'en ont pas;
évaluer les conditions du marché de l'emploi auquel ces crédits-là s'appliquent;
évaluer les différentes formes d'aide puis évaluer l'efficacité des mesures.
Mais parallèlement, Mme la Présidente, il est très important de mettre en place un suivi de tous les programmes de crédits
d'impôt puis de subventions, puis de documenter, puis de communiquer les
résultats et suivis de tous les programmes, ce qui ne s'est jamais fait jusqu'à aujourd'hui. Puis l'objectif de tout ça, c'est de se dégager une marge de manoeuvre pour pouvoir… pas pour payer l'épicerie, mais réinvestir dans
des secteurs qui vont être plus porteurs.
Alors, Mme la Présidente, quand je regarde un petit
peu la position qu'on peut avoir en
fonction de cette motion-là aujourd'hui, et je termine là-dessus, alors, oui, il importe
de revisiter les crédits d'impôt puis, oui, il importe de revisiter les conditions. À savoir si on doit monter,
majorer, baisser, oui, il faut le faire. À savoir si on doit revisiter des
secteurs, oui, il faut le faire.
Mais, si on nous demande aujourd'hui s'il faut maintenir tels quels les crédits d'impôt puis préserver le statu quo, notre réponse, c'est non, Mme la
Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci beaucoup, M. le
député. Je suis maintenant
prête à céder la parole à Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques
pour une durée d'environ six minutes. Merci.
Mme Manon Massé
Mme
Massé : Merci, Mme la Présidente. Alors, il me fait plaisir, au nom de Québec solidaire, d'intervenir sur cette motion. Dans sa forme actuelle, je vous
annonce d'entrée de jeu que Québec solidaire ne peut pas appuyer cette motion-là pour une raison assez simple :
c'est que cette motion est bien incomplète et fait référence à une simple déclaration d'un ministre, et ça nous
éloigne, à notre point de vue, du problème de fond.
Évidemment,
un ministre libéral qui doute des choix qui ont été faits,
qu'il a faits lui-même il y a à peine cinq mois, ça apparaît plutôt une bonne nouvelle pour le Québec,
mais cette motion, telle qu'elle est là, nous pose un problème parce que, dans les faits, elle nous ramène
au statu quo sans questionner la hauteur, sans questionner le type de programme.
Alors, pour
nous, à Québec solidaire, le dernier budget a été assez surprenant puisque
le ministre des Finances a, semble-t-il, improvisé un certain
nombre de mesures fiscales. Alors que, de l'autre côté, il nous promet une
réflexion sérieuse sur la fiscalité, quelques mois plus tard, il nous
dit : Ah! ça, ça pourrait revenir, sans qu'on ait eu une once d'information sur la réflexion de la commission sur la fiscalité. Peut-être que le ministre
en a, c'est possible. Si tel est le cas, on aimerait bien l'entendre,
nous aussi, pour nous aider, au nom de nos concitoyens, à se faire une tête sur
cette question-là.
Est-ce que
les crédits d'impôt qui ont été identifiés sont les seuls? Est-ce qu'il y en a comme étant possiblement de retour dans le panier des crédits
d'impôt? Est-ce qu'il y en a d'autres? Est-ce
qu'ils seront modulés de la même façon? Voyez-vous, beaucoup de
questions qui nous portent à croire que la réflexion de fond n'est pas
terminée.
Alors, ce qu'il fallait d'entrée de jeu, c'est
de prendre peut-être quelques mois pour réfléchir. On y va, on est d'accord avec ça, mais il fallait inévitablement
réfléchir sur l'impact. Quelle sorte d'impact allait avoir ce mur-à-mur du
20 % de coupes au niveau de la trentaine
de programmes de crédit d'impôt dans les différents secteurs.
Alors, c'est
sûr qu'actuellement, avec la période dans laquelle
nous sommes — pertes d'emploi, économie qui semble être en
ralentissement, etc. — on se demande le rapport direct de ces
coupures avec le développement de l'économie du Québec. Mais n'ayez de crainte, de façon générale, Québec solidaire,
depuis au moins six ans... Là, je ne sais pas si c'est la CAQ ou Québec solidaire qui parle de revisiter l'ensemble des
crédits d'impôt... qui en a parlé en premier, je ne le sais pas, mais, pour nous, c'est clair que ça fait longtemps qu'on y réfléchit parce qu'il y a des
choses là-dedans qui nous apparaissent absolument
questionnables. Par exemple, dans la coupe qui a été faite, il y a des secteurs
pour lesquels la coupe de 20 % a un
impact beaucoup plus grand que d'autres. Par exemple, l'exemple que je donne : entre 150 millions de crédits d'impôt coupés en recherche et
développement, qui a un impact, c'est sûr, au niveau des grandes entreprises
multinationales que... de fleurons québécois, ça a des impacts, mais, quand on
coupe 2,8 millions dans le monde du spectacle,
ça, ça a des sacrés impacts. Quand on coupe 1,8 million dans le monde de
l'édition du livre, dans la seule société francophone en Amérique du Nord, ça aussi, ça a un impact. Et il y a une
marge, et c'est ça qu'on a besoin de regarder programme par
programme. Mais le ministre nous dit :
La commission est en train de le faire. Or, si la commission est en
train de le faire, on aimerait bien y voir les résultats.
Comme je vous
disais, de façon générale, à Québec solidaire, on appuie le principe d'une
réduction des crédits d'impôt des entreprises parce que, selon nous, bien souvent, ça ne
remplit pas ou ça ne remplit plus les mandats
initiaux que nous avons
souhaités par l'utilisation de cet outil-là. Ce qu'on constate, c'est qu'avec
l'empressement, premièrement, de la
coupure et, deuxièmement, de peut-être le rétablissement, c'est, encore une fois… l'empressement est de mauvais
conseil. Surtout, pour nous, tout ce qui
amène ces gestes-là rapides et empressés, c'est
bien sûr l'obstination du retour au
déficit zéro dès l'an prochain, et ça, ça a un prix.
Ça a un prix pour les individus, ça a un prix
pour les entreprises, et on ne croit pas que c'est par là qu'on va
relancer une réelle économie au Québec.
Lors de la
dernière campagne électorale, Québec solidaire a présenté un cadre financier
qui contenait une réduction très
significative des crédits d'impôt, mais surtout pour développer une nouvelle
fiscalité au Québec. Je vous dirais que l'important, c'est que tout ce qu'on met en branle, il faut que ce soit
au service des travailleurs, travailleuses et non pas du 1 % qui a
beaucoup moins besoin d'argent pour vivre que nos services publics.
Alors, je dépose donc l'amendement suivant,
d'ajouter à la fin de la motion le paragraphe
suivant :
«Qu'en
conséquence, l'Assemblée nationale presse le ministre des Finances de suspendre
la modification des crédits d'impôt et de présenter un plan cohérent de [...] réforme de [...] fiscalité
des entreprises qui vise à respecter la capacité de payer des contribuables, à favoriser une politique de plein emploi, à
assurer le développement régional, à permettre un virage vers une
économie plus verte et à assurer le droit à l'égalité pour les femmes.» Merci,
madame.
• (16 h 10) •
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Alors, merci beaucoup, Mme la députée. Et je vous rappelle que seul l'auteur de la motion peut permettre un
amendement. Alors, nous pourrons évaluer s'il y a permission ou pas un peu plus
tard.
Maintenant, je suis prête à reconnaître le
prochain intervenant, M. le député de Jean-Lesage.
M. André Drolet
M. Drolet : Merci beaucoup, Mme la Présidente.
Tout d'abord, Mme la Présidente, j'aimerais vous dire l'importance que nous accordons, notre
gouvernement, à l'industrie du jeu vidéo, à l'aéronautique, aux technologies de
l'information et aux entreprises culturelles.
Ce sont des créneaux d'excellence incontournables pour la province de Québec.
Il est essentiel qu'ils continuent d'occuper une place importante
pour notre économie.
En effet, ces
différents secteurs d'activité sont une source de fierté pour l'ensemble des
Québécois et des Québécoises, c'est
pourquoi nous serons très sensibles, comme gouvernement, à s'assurer qu'ils
aient toutes les ressources disponibles
à leur développement. En effet, ces entreprises
créent beaucoup d'emplois pour le Québec. Il est primordial,
pour moi et mes collègues
du gouvernement, que ça, ça joue un rôle constructif pour
s'assurer que les conditions mises en place encouragent la viabilité de
leurs industries respectives.
Mme la Présidente, ici, dans la Capitale-Nationale, nous avons des modèles de l'industrie du jeu vidéo, Beenox et Frima,
près de 600 employés, comme le ministre le disait tout à l'heure, à de très
bons salaires, et, oui, Mme la Présidente, nous reconnaissons l'importance de ces entreprises
pour notre capitale.
Et, comme
vous le savez, par contre, Mme la
Présidente, depuis le 12 juin
dernier, face à un déficit structurel, notre
gouvernement a annoncé la mise en place de la Commission d'examen sur la fiscalité québécoise, un
engagement pris au cours de la
dernière campagne électorale. Cette commission a pour but d'étudier les
problématiques liées à l'ensemble de
la fiscalité québécoise, autant celles des particuliers que celles des entreprises.
Par ce processus, l'ensemble des programmes seront revus et analysés
dans le but d'optimiser leur efficacité.
D'ailleurs,
Mme la Présidente, il est important de souligner que, dans cette démarche, nous
avons l'appui d'une majorité
d'acteurs socioéconomiques de tous les horizons. Notre plan budgétaire est
sérieux et vise le rétablissement des finances publiques, ainsi que la
relance de l'économie, et surtout la création d'emplois. Nous devons
obligatoirement maintenir le cap, puis ça,
Mme la Présidente, c'est important pour l'avenir de mes enfants et de nos
petits-enfants. Quand qu'on pense que 10 milliards d'intérêts de
dette par année est payé et de plus de 15 milliards d'argent en besoins
additionnels pour le fonctionnement du gouvernement, alors voilà pourquoi il
faut s'en occuper.
Mme la Présidente, les différentes agences de
cotation, Moody's et Fitch, confirment le sérieux du plan du gouvernement libéral mis en place. Ils comprennent
la pertinence des actions qui ont été rapidement mises en place dès que nous sommes arrivés au pouvoir, ce, pour
rétablir l'ordre des finances publiques, tout en mettant en place des mesures
pour faciliter l'investissement privé et
relancer notre économie. En fait, si notre plan n'avait pas été très sérieux, nous
aurions connu une décote, ce qui n'a pas été le cas, Mme la Présidente.
Par contre,
l'agence de cotation Fitch indiquait dans un communiqué qu'une décote pourrait
survenir si le gouvernement n'arrivait pas à atteindre ses cibles
budgétaires. Voilà pourquoi qu'il y a urgence d'agir et de prendre vraiment ce message très au sérieux. À titre
indicatif, la cote du Québec se situe actuellement à A-2, ce qui situe le
Québec au cinquième rang des
provinces canadiennes. Cette situation est bien, mais elle pourrait être à la
baisse si la province ne parvient pas
à contrôler ses dépenses. Donc, c'est pourquoi le gouvernement a pris la
décision d'aller de l'avant avec la révision des programmes. En fait, une
modification à la cote du gouvernement aurait pu avoir un impact important sur
l'accès aux capitaux des entreprises basées au Québec, ce qui aurait pu
influencer l'emploi à la baisse et réduire la compétitivité
de nos entreprises. Encore une fois, Mme la Présidente, voilà pourquoi il
fallait prendre ce message très au sérieux.
Je vous
rappelle que le remboursement de la dette est le troisième poste budgétaire du
gouvernement, après la santé et
l'éducation. C'est pourquoi, dans ses actions, notre gouvernement a privilégié
des mesures d'application générales plus simples afin de limiter le
fardeau administratif des entreprises, car c'est un frein à leur développement.
Je considère que nous avons agi et que nous
continuerons à agir de façon responsable et je fais confiance au processus de
révision actuel. Il est réalisé par des gens très compétents. Voilà pourquoi
j'invite les Québécois et les Québécoises à
nous faire confiance et faire confiance au gouvernement, parce que les
décisions que nous allons prendre sont pour l'avenir de nos
petits-enfants.
Mme la Présidente,
voilà quelques mesures que nous avons mises en place pour soutenir l'économie
dans notre dernier budget.
Dans un
premier temps, nous avons réduit le taux d'imposition sur le revenu de
centaines de PME. Par la suite, nous
avons ajouté des déductions additionnelles pour les coûts de transport de
certaines PME situées dans les endroits éloignés.
Un autre
point très important, qui m'a toujours été souligné par nos PME, le processus
de l'allégement, l'allégement réglementaire,
la fameuse paperasse qui, à tous les jours, les irrite et qui fait en sorte que
ces gens-là mettent plus d'énergie à remplir
les documents du gouvernement que de faire leur propre business. Alors, voilà
pourquoi c'est important de leur donner un coup de main pour que leur
performance continue… et être davantage compétitives sur le marché.
Également,
nous avons investi 150 millions de dollars sur trois ans dans le fonds de
soutien à l'innovation Créativité Québec.
Cette somme pourra être utilisée par les entreprises pour développer divers
projets. En plus, près de 175 000 PME ont pu bénéficier, cette année, d'un congé de cotisation de Fonds de services de santé pour leur… pour
l'embauche d'un employé qualifié.
Mme la
Présidente, je tiens à souligner que la bonne note accordée par Moody's et
Fitch est un avertissement, et nous
avons le devoir de respecter le plan de match que nous nous sommes donné pour
revenir à l'équilibre budgétaire. J'invite
l'ensemble des entreprises, ainsi que mes
collègues, et les membres de l'opposition à
comprendre l'importance de cette
démarche, sans
partisanerie, car, à toutes… à la fin de tous,
nous serons gagnants si nous arrivons, à la
suite de ce processus, à
dégager des sommes qui pourront être réinvesties pour créer de la richesse et
des emplois. Ce sont l'ensemble des entreprises québécoises qui pourront
en profiter et, par conséquent, les travailleurs québécois. En effet, Mme la Présidente, nous sommes sur la bonne voie, nous
devons poursuivre nos efforts, le temps n'est
plus aux simples changements cosmétiques,
les gestes que nous posons aujourd'hui pour rétablir les finances publiques
permettront de dégager une marge de
manoeuvre importante pour soutenir les nouvelles initiatives en matière de
développement économique, dont les créneaux d'excellence que comprend le
Québec.
En conclusion, Mme la Présidente, laissons la
chance à la Commission d'examen sur la fiscalité de faire son travail afin qu'elle rencontre les différents
groupes, qu'elle analyse les suggestions, les mémoires pour qu'elle puisse
faire ses recommandations. Il est totalement prématuré de sauter aux
conclusions d'aujourd'hui. En fait, je crois que cette démarche de notre gouvernement est nécessaire et je suis certain qu'elle
apportera des solutions et qu'elle dégagera des marges de manoeuvre importantes afin de soutenir les entreprises
oeuvrant dans l'industrie du jeu vidéo, de
l'aéronautique, des technologies de l'information et dans les
entreprises à vocation culturelle. D'ailleurs, j'invite tous les groupes
intéressés, vraiment intéressés, à
apporter leur éclairage aux membres de la commission en faisant valoir leurs
expertises et leurs points de vue.
Voilà, Mme la
Présidente, le message que je voulais laisser pour cette dynamique industrielle
qui est notre industrie, naturellement, importante pour l'avenir de nos Québécois. Merci
beaucoup.
• (16 h 20) •
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Alors, merci beaucoup, M. le député de Jean-Lesage.
Et maintenant je cède la parole à Mme la députée de Joliette, en
vous rappelant que vous disposez d'un temps de parole d'environ
10 min 55 s.
Mme Véronique Hivon
Mme
Hivon : Merci beaucoup, Mme la Présidente.
Alors, je suis heureuse, à mon tour, de prendre la parole sur ce sujet très important qui, donc, fait l'objet d'une
motion, aujourd'hui,
de l'opposition officielle. Sujet très important,
particulièrement en ce qui me concerne, et
ce sera le centre de mon propos, l'impact,
donc, de ces coupes paramétriques de 20 % dans les crédits d'impôt pour le
secteur culturel, qui est un secteur
absolument fondamental, je pense qu'on devrait tous en convenir, même si on doute parfois que, du côté du gouvernement,
on prend bien la pleine mesure de l'importance
du secteur culturel, de la production
culturelle, du rayonnement culturel au Québec non seulement parce qu'évidemment
c'est qui
nous sommes, c'est l'essence même de notre
identité de Québécois, de francophones dans cette mer anglophone d'Amérique du Nord,
donc on devrait se battre
trois fois plus que toute nation pour la préservation du dynamisme de notre
secteur culturel, mais c'est aussi une force de développement économique
extraordinaire.
Alors, je
dois vous dire que ces coupes, donc, paramétriques qui ont été imposées au secteur
culturel comme à tout autre secteur, bien sûr, elles sont vraiment
catastrophiques pour tout le milieu de la production culturelle, et on est
vraiment désolés de voir qu'encore
une fois, dans ce dossier-là, le gouvernement n'a pas du tout donné de la
résonnance au principe pourtant
fondamental de l'exception culturelle. Donc, on en a eu bon nombre de
manifestations au cours des derniers mois, mais on en a eu une flagrante, une désolante avec
ces coupes imposées au milieu culturel au printemps dernier. Et, malgré mes demandes répétées à la ministre de la Culture,
malgré que je lui aie demandé, dès l'étude des crédits à l'été dernier, de suspendre l'application de ces coupes avant, donc, de voir les
effets dramatiques qu'ils pourraient... que ces coupes pourraient
produire, donc, on n'a eu aucune réponse à ce jour de cette demande.
Et pourquoi elle apparaissait si importante
pour le secteur culturel? Eh bien, c'est que ce n'est pas banal, l'effet de déstructuration que ces coupes pourront
provoquer, risquent de provoquer. D'ailleurs, il y a des effets qui se font sentir, je vais y revenir, dans le milieu notamment
de la production cinématographique. Donc, c'est loin d'être banal. Donc, il me
semble que nous avions fait une proposition tout à fait sensée lors de l'étude des crédits, qui était
de demander à la ministre de la Culture, donc, de suspendre l'application, le temps qu'on fasse des études d'impact, le
temps que l'on consulte le milieu, parce que
ces coupes ont été imposées, et ça nous a été admis, lors de l'étude des crédits, avec aucune étude d'impact préalable et sans aucune consultation.
C'est maintenant, à
cause de la commission sur la fiscalité, par le truchement de cette commission-là,
qu'on commence à faire des consultations, alors que ces coupes ont été décrétées au printemps dernier, donc
c'est excessivement préoccupant. Et ce qui est aussi, je vous dirais, paradoxal,
c'est qu'on a entendu deux ministres du gouvernement… on connaît bien les déclarations du ministre de
l'Économie puisqu'elles ont été un élément déclencheur de cette motion, parce qu'on s'est dit : Mon Dieu! On a
un allié du côté du gouvernement, puisqu'il décriait, pas plus tard qu'hier,
dans une entrevue, ces coupes paramétriques.
Mais
on avait aussi entendu, de la part de la ministre de la Culture, lorsque ces
coupes ont été décrétées, un appel à
la mobilisation du milieu culturel, qui avait fait la une d'ailleurs du Devoir,
où elle disait au milieu : Battez-vous. Donc, on a eu un peu deux manifestations de
désolidarisation, de deux ministres du gouvernement, de l'ensemble de l'équipe
face à ces coupes qui, bien sûr, n'ont aucun
sens et risquent de provoquer des effets excessivement dommageables à long
terme sur toute notre industrie, mais, dans le cas qui m'occupe aujourd'hui,
sur l'industrie culturelle.
Mais
ce qui était particulier de la déclaration de la ministre de la Culture, c'est
qu'elle disait un peu aux autres de
se battre, de se battre à sa place, donc elle se désolidarisait de son gouvernement, mais, en plus, elle ne prenait pas fait et cause pour ces gens, alors qu'on voit qu'il y a
eu une progression, du moins, de la part du ministre de l'Économie qui, lui,
semble vouloir, donc, se porter à la défense
des gens qui sont touchés, des milieux qui sont touchés par ces coupes, bien
qu'aujourd'hui je dois vous dire que c'est avec déception qu'on a entendu ses propos
puisqu'il semble revenir, en quelque
sorte, sur sa position.
Mais pourquoi c'est
si important de maintenir les crédits d'impôt dans le secteur culturel? Bien, d'abord,
je voudrais vous rappeler, Mme la Présidente, que le milieu culturel, c'est plus de 4,5 % de notre PIB, c'est 130 000 emplois
au Québec. Donc, ce n'est pas banal, c'est
vraiment un moteur central de notre développement et de notre vie économique.
Les coupes représentent... donc, de
l'ensemble des coupes des crédits d'impôt, c'est 13 % qui sont absorbées
par le milieu culturel. Donc, encore
une fois, c'est loin d'être banal, c'est 36 millions dès maintenant. Et,
si on suit la logique pour les 650 millions
autres qui doivent s'en venir, de coupes dans les crédits d'impôt, ça
représente un montant supplémentaire qui
va donc totaliser une coupe de 85 millions pour une industrie qui, déjà,
est vulnérable, autant pour différents secteurs, donc, de sa vie que pour les emplois qui, on le sait, sont souvent très
précaires. Donc, on ne peut pas prendre ça à la légère, les impacts qui
vont découler des décisions gouvernementales.
Alors, c'est pourquoi
aujourd'hui on a une chance de convaincre, de plaider pour que le gouvernement
fasse volte-face, et je pense que c'est la
seule décision qui s'impose bien sûr à la fois pour respecter qui nous sommes,
respecter notre culture, respecter
l'entreprise culturelle, le milieu culturel, mais aussi s'assurer de la
vitalité économique, que cet essor-là, que cet apport-là ne sera pas
freiné.
Et d'ailleurs il y a
une statistique que je trouve intéressante. Si on regarde, entre 2006 et 2014,
la hausse des dépenses de programmes, donc
pourquoi on est dans la situation financière difficile dans laquelle on est, eh
bien, seulement 11 %
d'augmentation en matière de culture, mais le PIB, lui, a augmenté de 26 %
et les dépenses en santé ont augmenté de
40 %. Donc, ce n'est certainement pas la hausse des dépenses en matière
culturelle qui a fait en sorte qu'on est dans le déficit que l'on vit aujourd'hui. Or, pourquoi pénaliser ce secteur-là
qui, pourtant, a amené des résultats extraordinaires avec ces crédits d'impôt? Je vous rappelle, Mme la
Présidente, que notre industrie cinématographique est florissante et que
c'est une industrie excessivement
compétitive, où on a réussi à attirer des productions, évidemment, locales,
mais des productions d'un peu partout
dans le monde. On est en compétition
avec le monde, donc on doit s'affirmer, on doit prendre les outils nécessaires pour maintenir cette compétitivité-là. Et ce qui est
paradoxal, c'est qu'il n'y a pas moins de 43 États américains… se sont inspirés de nos mesures pour
le secteur culturel, qui ont, aujourd'hui, de ces crédits d'impôt, et nous, on
reculerait et on les mettrait de côté. Donc, évidemment,
ça n'a aucun sens.
Et
je veux vous rappeler que, pour la production d'émissions de télévision, on
sait, ces émissions auxquelles les Québécois tiennent tant, qui font partie de notre
quotidien, de notre identité, qui sont à la base de notre système, un peu,
médiatique, qui est si fort, qui est unique
dans le monde, eh bien, les 20 émissions les plus regardées au Québec
sont toutes des émissions québécoises
produites au Québec. C'est un phénomène mondial de voir que le Québec
est si fier, adhère autant à ses
productions locales. Eh bien, si on va de l'avant avec ces coupes, c'est toute
cette entreprise-là qu'on va mettre à mal.
Mais
ce n'est pas tout, parce que, bien
sûr, il y a toute l'industrie du
doublage du film, qui est très, très importante pour nos artistes, qui,
on le sait, doivent avoir des contrats et qui peinent déjà à arriver, le crédit
d'impôt pour les enregistrements sonores, pour la production de spectacles. J'entendais, pas plus tard qu'hier, Dan Bigras dire
que le Show du Refuge, avec les
coupes des crédits d'impôt, devait être amputé
d'une somme importante, et ils étaient à la recherche de fonds supplémentaires pour pouvoir produire leur
spectacle cette année, la semaine prochaine, d'ailleurs, pour la bonne cause de la lutte à l'itinérance. Donc, ça a des
répercussions absolument partout, et aussi pour l'édition du livre — je ne fais pas le tour de tous les secteurs culturels — qui est déjà mise
à mal. Donc, on se demande vraiment d'où sort cette idée, ce manque de
sensibilité qui va amener des effets très, très
concrets.
Et je me
permettrais de citer quelques citations qui ont été, donc, mises de l'avant à l'occasion
des consultations de la commission sur la fiscalité.
Donc, il y a six associations du milieu qui se sont regroupées
pour faire valoir à quel point les
effets allaient être déstructurants — on
parle de centaines et de centaines d'emplois — avec
des analyses qui, cette fois, ont été
faites avec rigueur par les associations qui sont en péril. Alors, voici ce que
ces six associations, qui représentent
les techniciens, les producteurs, La Guilde
des musiciens, l'Union des artistes, et j'en passe, a déclaré : «Il est d'autant plus inconcevable de
sabrer dans les crédits d'impôt que ces mesures ont fait la preuve de leur
efficacité. Elles ont permis à des
entreprises de production de voir le jour [...]
de croître, à des créateurs, artistes et artisans de
vivre de
leur art et à leurs oeuvres de
rayonner ici et à l'étranger. Nos succès culturels sont souvent spectaculaires,
ce qui ne veut pas dire que les industries et les personnes qui font
vivre la culture ne doivent pas continuer d'être soutenues financièrement. C'est un choix de société que le Québec a
toujours fait [et] nous lui demandons de poursuivre dans cette
voie qui bénéficie à l'ensemble de la société [et
au rayonnement du Québec].»
Alors, ce que
je demande aujourd'hui au gouvernement, c'est de prendre acte de cette exception
culturelle, de cesser le saccage de
la culture en plus d'avoir sabré dans les budgets des musées, en plus d'avoir
voulu faire des coupes, qui, in
extremis, on a sauvées, dans les conservatoires.
Il faut mettre fin à ces coupes dans les
crédits d'impôt. Je vous remercie, Mme la Présidente.
• (16 h 30) •
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci
beaucoup, Mme la députée de Joliette. Et maintenant au tour de l'intervention de M. le député
de Laval-des-Rapides.
M. Saul Polo
M. Polo :
Merci. Merci beaucoup, Mme la Présidente. J'aimerais débuter, si vous le
permettez, par expliquer pourquoi nous
sommes ici, aujourd'hui, cet après-midi, parce que l'opposition, la
première opposition souhaite, et je cite :
«[Demander à]
l'Assemblée nationale [d'approuver] la position du ministre de l'Économie, de
l'Innovation et des Exportations selon
laquelle il faut maintenir les crédits d'impôt destinés aux sociétés [des] jeux vidéo, à
l'aéronautique, aux technologies de l'information et [les] entreprises
culturelles.»
En
introduction, Mme la Présidente, j'aimerais rappeler quelques faits, en
introduction, sur le sujet précis. Le Québec et l'Ontario sont les provinces les plus
actives en matière d'incitatifs. Elles représentent près de 80 % de
l'ensemble des incitatifs offerts au
Canada. En juin 2014, les crédits d'impôt québécois ont été réduits de
20 %. Pour le jeu vidéo, ces
crédits sont passés d'un taux maximum de 37,5 % à 30 %, soit de
5 % à 10 % inférieurs à ceux de l'Ontario. Pour la production
cinématographique et télévisuelle, dont les effets spéciaux numériques, ces
crédits sont passés d'un taux maximum de 65 % à 52 % pour la production
et de 45 % à 36 % pour les services de production cinématographique.
Malgré ces baisses, le différentiel global entre le Québec et l'Ontario est
d'environ 1 % à l'avantage du Québec.
Le
ralentissement économique des dernières années a fait de la promotion de
l'investissement étranger une activité particulièrement concurrentielle
à l'échelle mondiale. L'offre d'incitatifs à l'investissement des gouvernements
s'est accélérée de façon souvent démesurée au cours des dernières années,
spécialement aux États-Unis ainsi que dans les provinces canadiennes. Les incitatifs semblent être une condition
nécessaire mais non suffisante à la compétitivité économique. Les entreprises prennent aussi leurs décisions
d'investissement en se basant sur des facteurs clés tels que la disponibilité
de la main-d'oeuvre qualifiée, la présence
d'infrastructures stratégiques, l'environnement réglementaire et commercial, la
qualité de vie, et j'en passe. Je tenais à
faire cette introduction, M. le Président, pour mettre bien la question et la
motion de l'opposition officielle en contexte.
J'aimerais
également ajouter l'importance que nous accordons au secteur des jeux vidéo
québécois. C'est une partie importante de notre économie et un secteur
que je connais bien, étant moi-même issu de la grande région de Montréal, où un bon nombre d'entreprises s'y sont
installées et ont leur siège social, ce secteur d'activité économique et très novateur qui connaît actuellement, au
Québec, un grand succès et également un bon pouvoir d'attraction. Il génère
d'importantes retombées économiques en plus d'être créateur d'emplois, lesquels
emplois sont bien rémunérés et ont connu une
forte augmentation depuis le début des années 2000. Nous avons permis à ce
secteur de bien se démarquer au cours
des 10 dernières années et nous continuerons à le faire à la hauteur de
nos moyens, tout en demeurant compétitifs sur l'échiquier mondial afin de continuer d'être un joueur important.
Et, tel que le ministre de l'Économie l'a souligné, l'un des studios de création en jeux vidéo a
récemment remporté un prix à l'échelle mondiale pour la qualité de ses
produits.
Nous le savons tous, notre gouvernement a décidé
de remettre les finances du Québec sur la bonne voie. Le précédent gouvernement a laissé la situation
budgétaire du Québec dans un état lamentable, avec plus de 5 milliards de
déficit en seulement 18 mois. Dès notre
arrivée au pouvoir, nous avons mis de l'avant une série de mesures qui feront
du Québec une province compétitive sur
l'échiquier mondial. En ce sens, notre gouvernement a mis sur pied la
commission de révision des programmes,
qui a comme mandat d'examiner et de proposer des pistes de solution à l'égard
de la pertinence, l'efficacité,
l'efficience et du mode de financement des programmes ainsi que de la révision
des structures existantes. La
commission a également pour mandat d'évaluer l'efficacité et l'efficience de
tous les programmes et les prestations
de services à la population afin de les adapter aux besoins actuels et de ceux
des générations futures en fonction de la capacité de nos moyens… de la
capacité des citoyens.
Ce n'est pas
tout, M. le Président. La commission a également comme mandat, et il est
important de le noter, de proposer
des solutions pour favoriser la croissance économique du Québec. Nous avons une
dette importante, au Québec, et nous
faisons face à des choix déchirants, c'est pourquoi notre gouvernement a pris
les bonnes décisions dans le cadre du
retour à l'équilibre budgétaire. Notre objectif et notre plan est clair.
Contrairement à d'autres formations politiques qui cherchent à instaurer un climat de turbulence économique, nous, nous
travaillons à instaurer une stabilité économique, et, pour ce faire, cela nécessite des finances
publiques saines et prévisibles. Notre but est bien précis : des finances
publiques solides et une relance
économique forte. En fait, nous voulons un budget équilibré afin de respecter
une équité intergénérationnelle dans
le but que nos enfants et petits-enfants soient eux aussi à même de prendre les
décisions que nos parents ont pu prendre par le passé.
Notre gouvernement est un gouvernement
responsable. Nous avons une équipe forte et expérimentée qui est résolument axée sur le développement des
entreprises et sur l'économie, nous en faisons une priorité. Nous avons donc
entrepris un vaste plan de retour à
l'équilibre budgétaire, et, en ce sens, tous les organes du gouvernement
doivent faire leur part. Par contre,
notre aide fiscale aux entreprises demeure avantageuse à tout point de vue.
Cette diminution sera donc graduelle
et s'étendra jusqu'à l'année 2016‑2017. Par ailleurs et bien que nous ayons
annoncé la baisse de certains crédits
d'impôt aux entreprises, ces derniers demeurent compétitifs par rapport aux
mesures fiscales des autres provinces canadiennes. À titre d'exemple… Je
vous cite deux exemples, M. le Président.
Le crédit
d'impôt à la recherche et du
développement au Québec demeure le plus compétitif au Canada
pour les PME et concurrentiel en ce
qui a trait aux grandes entreprises. Je reviendrai sur le secteur des PME un peu
plus loin dans ce discours. Enfin,
nous avons ici, au Québec, des crédits
d'impôt exclusifs. En effet, pour le
développement des affaires électroniques,
cet avantage est unique au Canada, et le soutien offert dans les autres provinces à
cet égard n'est pas aussi important que celui accordé au Québec. Nous
pouvons donc être fiers de cette initiative qui nous permet de nous démarquer
dans cet univers concurrentiel et compétitif.
L'ensemble
des activités économiques reliées à
la recherche et développement, l'innovation et l'investissement constituent, rappelons-le, un des principaux
facteurs de croissance de la productivité des entreprises. Ces activités
contribuent ultimement à la création
de richesse collective, et c'est pourquoi elles profitent d'un soutien
particulier. N'oublions pas que
l'ensemble des initiatives adoptées au budget 2014‑2015 représentent des
investissements de plus de 270 millions de dollars en moyenne par année au cours des trois prochaines années.
Ultimement, notre objectif, en tant que gouvernement, est d'établir des
règles compétitives pour toutes les entreprises. Avec ce geste, notre
gouvernement réaménage l'aide gouvernementale
afin d'accroître notre efficacité et ainsi améliorer la compétitivité de notre
économie. À terme, comme je le
rappelais plus tôt, nos actions en tant que gouvernement responsable
permettront de créer un environnement économique stable et de relancer
l'économie de façon durable pour notre génération et celles qui nous
succéderont.
J'aimerais revenir au secteur des PME au Québec.
Elles sont un atout majeur pour notre économie, et notre gouvernement sera un
agent facilitateur pour celles-ci. Nous avons déjà commencé certains de nos
engagements, par exemple l'allègement de la
bureaucratie afin que les PME se concentrent sur la mission première d'une
entreprise, celle de créer de la richesse et des emplois. Nous
continuerons à déployer tous les efforts nécessaires en ce sens.
Et, nous le
savons, les PME occupent une place importante dans la relance économique du
Québec en contribuant au dynamisme
économique du Québec et à l'emploi en région, et ce facteur est très, très
important pour nous. Rappelons-le, entre
2009 et 2013, en moyenne, les PME représentaient 57 % des emplois en
entreprise et 77 % des nouveaux emplois créés en entreprise. Ces chiffres évoquent toute l'importance de
soutenir ce secteur afin de maintenir et voire même de dépasser ces
résultats.
Le Québec
compte aussi des secteurs d'excellence dont nous sommes particulièrement fiers
et dont nous pouvons… dont nous
faisons l'envie de plusieurs. M. le Président, je suis d'accord avec notre
collègue qui y fait mention dans sa question,
le secteur des jeux vidéo est en effet très important au Québec, et nous
pouvons être fiers des très grands progrès accomplis au cours des dernières années. En ce sens, Desjardins Études
économiques faisait mention, dans une perspective économique publiée l'an dernier, que ce secteur a
pris son envol grâce, d'une part, à l'aide octroyée par le gouvernement
mais également grâce à une multitude de facteurs contribuant à sa réussite.
En premier lieu, le secteur des jeux vidéo peut
compter sur l'aide de plusieurs institutions universitaires et collégiales. À
ce sujet, on n'a qu'à penser à l'Université Laval et son programme en art et
science de l'animation, à l'Université de Montréal
et son programme de deuxième cycle en design de jeux, à l'Université Concordia
avec sa formation en design et arts
numériques, à l'Université du Québec à Chicoutimi avec son programme de
baccalauréat avec majeure en conception
de jeux vidéo et finalement à l'Université de Sherbrooke et son programme de
deuxième cycle en développement de
jeu vidéo, pour ne citer que ceux-là. Un autre facteur non négligeable de la
compétitivité de la main-d'oeuvre québécoise est que celle-ci a le net avantage d'être bien formée, de par le vaste
secteur institutionnel québécois et sa diversité des programmes adaptés
au secteur des jeux vidéo, en plus d'être formée en plusieurs langues.
En second
lieu, il ne faut pas non plus passer sous silence toute l'industrie des fournisseurs
de technologies et de production qui
permettent de contribuer à la notoriété et à la solidité de ce secteur. Ces
partenaires renforcent et contribuent à faire du Québec une plaque tournante des jeux vidéo permettant de faire
de la province un terreau fertile pour cette industrie novatrice et
créatrice.
• (16 h 40) •
On peut
également se féliciter de nombreux succès commerciaux mondiaux qui sont issus
de la création d'entreprises établies
ici, au Québec. Ce secteur est un atout important, au Québec, et c'est en
partie grâce aux mesures prises dans le passé. Cela a permis d'avoir une
concentration d'entreprises et d'institutions bien établies au Québec, permettant, donc, de bien définir la notoriété de
notre province en la matière. Le Québec peut donc être fier d'être devenu au fil des ans un leader dans le domaine du jeu
vidéo et des effets spéciaux. L'industrie a, comme j'en faisais mention un petit peu plus tôt, connu une croissance annuelle de sa main-d'oeuvre de plus de 20 %, et
plusieurs multinationales se sont
installées au Québec. Encore une fois, ce secteur bénéficie des coûts
d'implantation et d'exploitation les plus bas en Amérique du Nord.
Nous le
savons tous, M. le Président, la santé des finances publiques n'est pas
uniquement l'affaire du Québec. Vous
le savez sans doute, l'Ontario également fait face à un déficit important pour
l'année 2014‑2015. Eux aussi ont constaté que la révision des programmes est un travail
essentiel à effectuer et procède donc actuellement à un exercice similaire
au nôtre. En d'autres termes, un comité technique remettra un rapport au
gouvernement concernant la pertinence des programmes
de soutien aux entreprises, y compris les crédits d'impôt. Il ne faut donc pas
venir aux conclusions trop vite. Nous
avons ici le même exercice à faire. Laissons donc, M. le Président, le temps
nécessaire à la commission de révision des
programmes de soumettre ses recommandations, et nous procéderons, le cas
échéant, à des annonces en temps et lieu opportuns.
J'aimerais, M. le Président,
revenir sur un secteur fort important également au Québec, mais il est
judicieux d'y revenir afin de présenter les
mesures que notre gouvernement a mises de l'avant. Comme je le disais un petit
peu plus tôt, les PME représentent plus de la moitié des emplois au
Québec. Et, en ce sens, il devient nécessaire d'atteindre l'équilibre des finances publiques du Québec afin,
d'une part, d'être justes pour les générations futures, mais aussi afin
d'assurer un environnement économique stable et prévisible. Et j'insiste
sur ce dernier facteur parce qu'il est la pierre angulaire d'une saine gestion.
À
cet effet, notre gouvernement rétablira les finances publiques et est déjà à
pied d'oeuvre afin de s'assurer d'une gestion
rigoureuse des dépenses. Chaque secteur de dépenses devra faire sa part afin de
maintenir cet important équilibre entre
les revenus et les dépenses. Et nous ne pouvons plus, au Québec, continuer
d'hypothéquer les choix que pourraient faire
les générations futures par nos décisions actuelles. Il faut le rappeler, un
enfant né cette année a toutes les chances de voir le XXIIe siècle. De par ce constat, il faut donc s'assurer de
faire les bons choix et de prendre les bonnes décisions, car celles-ci
influenceront inévitablement le futur, et c'est de cela, M. le Président, toute
l'importance de s'assurer de l'équilibre des
finances publiques. Cette gestion rigoureuse permettra, à moyen terme, de
dégager une marge de manoeuvre afin
de notamment améliorer la compétitivité du régime fiscal afin d'encourager les
investissements privés et la création d'emplois.
Il faut le rappeler,
ce n'est pas le rôle du gouvernement de créer des emplois mais bien celui-ci de
créer les conditions propices à la création
d'emplois par l'ensemble des mesures de soutien auxquelles j'ai fait référence
plus tôt. Ces mesures permettront de mieux positionner les bases
nécessaires pour permettre l'investissement afin de favoriser l'innovation et les exportations. Concrètement,
ces actions représentent plus de 180 millions de dollars, en moyenne, par
année, sur trois ans. Nous estimons donc que
ces appuis à l'investissement permettront, à moyen terme, des investissements
de plus de 5,2 milliards dans
l'économie du Québec en plus de maintenir et de créer de nouveaux emplois pour
les Québécois.
Le
secteur manufacturier a connu quelques années difficiles récemment, et c'est
pourquoi notre gouvernement agit afin
de soutenir concrètement ce secteur en diminuant le taux d'imposition des PME
manufacturières. Donc, dès le 1er janvier 2015, donc d'ici
quelques semaines, M. le Président, le taux des PME passera donc de 8 % à
4 %, le taux d'imposition. Cette diminution permettra de rendre le régime
fiscal du Québec plus compétitif et plus attractif. Les entreprises concernées pourront ainsi libérer des liquidités
supplémentaires et celles-ci pourront donc mieux absorber les coûts de transport, par exemple, ou la recherche
de partenaires à l'étranger, ou encore la commercialisation de leurs biens à l'étranger. Ce changement vient donc rendre le Québec
l'une des provinces les plus compétitives au niveau de la fiscalité de ce secteur. D'autre part, cette mesure vient
concrètement compenser largement la réduction des crédits, mais aussi réitérer
notre appui à cet important secteur économique et créateur de richesse pour le
Québec.
Vous
constatez donc, M. le Président, que notre gouvernement est à pied d'oeuvre
dans la recherche de solutions, et
travaille activement, et s'efforce de trouver les meilleurs moyens pour aider et soutenir notre économie,
mais également le retour à l'équilibre
budgétaire. Nous voulons, par nos
mesures budgétaires, créer un environnement économique
propice aux investissements privés et, à cet effet, nous
travaillons d'ores et déjà au rétablissement des finances publiques afin de
mettre en place un environnement économique
stable et prévisible. Comme je le disais, cela permettra de dégager une
marge de manoeuvre afin d'une part
d'améliorer la compétitivité de notre régime fiscal dans l'optique d'encourager
les investissements privés à la création d'emplois, qui est la priorité de notre gouvernement.
Tous
ces facteurs s'enchaînent dans une suite logique de saine gestion financière
des finances publiques. De plus, dans
le cadre du budget 2014‑2015, notre gouvernement a posé des balises afin de
soutenir davantage la croissance des investissements
au sein des PME, créatrices de richesse et d'emplois au Québec. En ce sens,
nous avons mis en place des mesures fiscales aux PME leur permettant,
donc, d'alléger leurs coûts de production afin de leur laisser la marge de
manoeuvre financière nécessaire, des mesures d'investissement ainsi que des
mesures d'aide directe.
J'aimerais également compléter, si vous le permettez, M. le Président, et vous préciser quelques
mesures d'appui et d'investissement
spécifiquement par rapport aux PME. Lors du dernier budget, le ministre des
Finances a annoncé que le gouvernement mettra en place des mesures
permettant de créer un environnement stable et propice. Et, à cet effet spécifiquement, au niveau du secteur résidentiel,
le gouvernement a annoncé la mise en place dès le 25 avril 2014 du crédit d'impôt LogiRénov. Ce crédit d'impôt supportera près de
3 milliards de dépenses en rénovations résidentielles, ce qui permettra de soutenir plus de 20 000 emplois
dans l'industrie. De plus, pour soutenir davantage la croissance et
l'investissement des PME du Québec,
le gouvernement a annoncé, dans le cadre du budget passé, des mesures fiscales
d'application générale qui
permettront d'alléger, justement, le coût de production de ces PME et des mesures
aussi d'appui à l'investissement.
Je vois que vous me
signalez, M. le Président, qu'il me reste
1 min 30 s à peu près?
Le Vice-Président
(M. Gendron) :
1 min 30 s.
M.
Polo : 1 min 30 s. J'aimerais, si vous me le permettez, profiter des
dernières 90 secondes, M. le Président, puisque nous avons passé
les dernières 90 minutes à débattre ou à échanger sur la motion présentée
par l'opposition officielle, présenter, à
mon tour, un amendement à la motion du député de
Rousseau inscrite à l'article 23 du feuilleton.
La
motion du député de Rousseau serait amendée de la manière suivante : À la troisième ligne, remplacer le mot
«les» — au
pluriel — par
le mot «certains»;
Aux troisième, quatrième et cinquième lignes,
après le mot «d'impôt», remplacer les mots «destinés aux sociétés de jeux vidéo, à l'aéronautique, aux technologies
de l'information et aux entreprises culturelles» par
les mots — entre
guillemets — «dans
la mesure où cet investissement est dans l'intérêt
économique du Québec.»
Donc, la motion, telle qu'amendée,
se lirait ainsi :
«Que
l'Assemblée nationale approuve la position du ministre de l'Économie, de l'Innovation et des Exportations selon laquelle il faut maintenir certains crédits
d'impôt dans la mesure où cet investissement est dans l'intérêt
économique du Québec.»
Est-ce que je suis dans les temps, M. le
Président?
Le Vice-Président (M. Gendron) : Toujours. Vous êtes dans les temps.
M. Polo : Donc, je prends les dernières secondes
pour proposer cet amendement. Vous me direz si l'amendement est dans les
ordres ou recevable.
Le
Vice-Président (M. Gendron) : Oui, ça
me fera plaisir, M. le député, de vous indiquer la suite des choses normalement. Parce qu'on
avait déjà... — merci pour votre intervention — on avait déjà un amendement qui a été
proposé. Alors, c'est sûr que moi, avant la réplique, je souhaiterais qu'on ait des indications — parce que c'est
plus facile pour la table — si on l'intègre ou pas. Et là je parle de
l'amendement proposé par la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques. Est-ce que, M. l'auteur de la motion, vous en
avez pris connaissance et qu'en dites-vous?
M. Marceau :
On ne l'incorporera pas dans notre motion.
Le Vice-Président (M. Gendron) : O.K. Donc, l'amendement de Sainte-Marie—Saint-Jacques
ne sera pas incorporé à la motion. Quant à celle
du député de Laval-des-Rapides, est-ce que vous en avez pris...
M. Marceau :
...
• (16 h 50) •
Le
Vice-Président (M. Gendron) : Bon,
alors, on va... Parce que moi, je suis obligé, sous réserve... Alors, on le
fera à la fin. On va vous permettre
d'entamer votre réplique. Et ça veut dire qu'avant le vote je recevrai
l'indication si l'amendement que vous
venez de proposer, après qu'elle sera regardée par l'auteur de la motion, si
elle est agréée ou pas. Je l'indiquerai aux membres de cette Assemblée.
Alors, allez-y pour votre 10 minutes de réplique protégée. À vous, M. le
député de Rousseau.
M. Nicolas Marceau
(réplique)
M. Marceau : Bon, écoutez, Merci, M. le Président.
Je vais prendre quelques minutes pour rappeler les secteurs qui vont être affectés par les coupes à venir dans
les crédits d'impôt telles que commandées par le ministre des Finances à
la commission sur la fiscalité. On parle, je vous le
rappelle, de coupes de 650 millions qui s'accouplent... — qui s'accouplent! — qui s'ajoutent aux coupes de 370 millions, donc il y en a pour
1 milliard. Vous savez, les secteurs qui sont les grands utilisateurs de ces crédits d'impôt là sont des secteurs
aussi qui sont les fers de lance de notre économie. Je vous en donne
simplement quelques-uns.
Le secteur
des jeux vidéo, on parle de 9 000 emplois directs, 9 000 emplois
directs, et un secteur qui est en forte croissance, en très forte croissance. Le secteur de l'aérospatial, j'en
ai parlé plus tôt, 42 000 emplois, 42 000 emplois, on parle d'exportations de 9 milliards en 2011,
60 % du total canadien, et 70 % — j'en ai parlé déjà — 70 % de la R&D en
aérospatial au Canada est réalisée au Québec. Alors, secteur extrêmement
important, lui aussi. Dans le secteur des technologies
de l'information, on parle d'un secteur avec un PIB de près de
14 milliards de dollars, plus de 120 000 emplois, 120 000 emplois, des dépenses en recherche et
développement de 750 millions de dollars. Et, quatrième secteur — puis je voulais juste qu'on comprenne l'importance de tous ces secteurs — le secteur culturel, dont ma collègue a certainement
parlé abondamment, dans lequel on retrouve
130 000 emplois, 10 milliards de PIB, c'est 4 % du PIB du
Québec, c'est gigantesque, c'est
important. Et surtout, au-delà de ce que ça représente pour notre économie,
évidemment, ça représente ce que nous
sommes. Il n'y a rien qui a un sens sans notre culture sans nos créateurs, sans
notre langue. Le reste est secondaire, d'une certaine manière.
Alors, M. le
Président, on parle de ces secteurs-là, là, on parle de ça aujourd'hui et on
est dans un contexte, je vous l'ai
dit un peu plus tôt aujourd'hui, un contexte économique où c'est difficile, un
contexte où la croissance économique a
ralenti, on le sait, ça a été confirmé. On sait qu'au moment des élections le
Parti libéral a essentiellement fait miroiter l'impossible, a essentiellement présenté aussi un cadre financier qui
était farfelu, qui aujourd'hui n'a plus aucune valeur. Si vous voulez savoir ce qui va se passer dans les
prochaines années au plan financier au Québec, le dernier endroit à aller
voir, c'est le cadre financier du Parti
libéral parce que, je vous l'annonce, là, M. le Président, six mois après la
tenue des élections, il n'y a plus un chiffre, là-dedans, qui tient la route,
aucun, rien. On nous prévoyait du 2,1 %, on est à 1,5 % pour
2014. Pas besoin de vous dire que ça ne tient plus la route.
Donc, situation économique qui n'est pas facile
au plan de la croissance économique, situation économique qui n'est pas facile au plan aussi de l'emploi. Il
s'est perdu, vous le savez, des emplois à temps plein, 82 000, record de médiocrité, record qui remonte au début des années 1990,
février 1991, de mémoire, pour retrouver un dossier comme celui-là. Et le gouvernement, il faut le
comprendre, c'est ce qui arrive et ce qui a été dénoncé à la fois par Raymond
Bachand et puis par Jacques Daoust,
le gouvernement est tenté par des gains comptables, des gains financiers, le
gouvernement est tenté par les
quelques dizaines de millions qui pourraient être coupés ou les quelques
centaines de millions qui pourraient être
coupés en se disant : Ça va me permettre de combler, d'équilibrer mon
budget, mais, M. le Président, le problème, c'est que chaque dollar dépensé va faire perdre à notre économie bien
plus que 1 $. Chaque dollar économisé puis qui va aller dans les
coffres de l'État aujourd'hui va se traduire par 1,25 $, 1,50 $ de
moins dans notre économie demain.
Alors,
c'est une très mauvaise décision. Ce sont des gains fictifs de court terme
contre des profondes conséquences économiques
à long terme, et c'est un très, très mauvais calcul que celui qui est fait par
le gouvernement. Le ministre de l'Économie
l'a dit au Conseil des ministres, j'en suis certain, il l'a dit au caucus,
Raymond Bachand, l'ancien ministre des Finances, l'a dit, évidemment,
nous le disons, et l'ensemble des acteurs de notre économie le disent.
Je
vais simplement vous mettre en tête des propos qui ont été tenus par Patrice
Désilets. Patrice Désilets, c'est quelqu'un
qui est dans le secteur du jeu vidéo, c'est celui qui a participé à la création
de Assassin's Creed, qui est des jeux vidéo les plus populaires de l'histoire, un grand, grand, grand
succès commercial, M. le Président. Et Patrice Désilets, il dit que le Québec est ce qu'il est, quant aux
jeux vidéo, parce que nous avons offert, nous avons eu la vision d'offrir
un support financier généreux aux
entreprises de ce secteur. Ce secteur a été créé de toutes pièces. Et moi, je pense que le gouvernement
doit être sensible à l'opinion de ceux qui connaissent bien ce secteur-là.
Vous
savez, il y a des gens qui se frottent les mains ailleurs,
là. Il y a des gens qui se frottent les mains à Toronto,
il y a des gens qui se frottent les mains à Vancouver, il y a
des gens qui se frottent les mains dans d'autres capitales à travers le
monde, en se disant : Si le Québec laisse aller sa grappe du jeu vidéo,
s'il laisse aller sa grappe de la production cinématographique,
s'il laisse aller ses entreprises du secteur aéronautique… Bien, écoutez,
les gens se disent : Ils sont bêtes.
Tant mieux si le Québec fait ça; nous autres, on va récupérer ces grands
joueurs là, ces grands acteurs là. Alors, Patrice Désilets, c'est ce qu'il nous dit, M. le Président. Il demande au gouvernement d'avoir de la vision, d'écouter le ministre
de l'Économie, d'écouter Raymond Bachand. C'est ça qu'il demande.
Donc,
l'économie va très
bien, et là on s'apprête à infliger
un coup important à des entreprises importantes de notre économie. Je vais vous faire une courte liste de très
grosses entreprises, vous savez, les fleurons de notre économie,
des entreprises majeures qui emploient des centaines et des
centaines, voire des milliers de travailleurs. Alors, des Ericsson, des Pratt & Whitney, des Bombardier,
des CAE, des Bell Textron, Héroux-Devtek — des grosses entreprises, ça, M. le Président — Ubisoft,
Warner, Framestore, Cinesite, CGI, Pfizer, toutes des grosses entreprises
qui sont très importantes. Les crédits d'impôt aussi pour le secteur financier, pour les centres financiers internationaux, très important aussi. Vous savez, Montréal… le secteur financier montréalais,
en quelques années, est passé de la 25e place à la 16e place dans le classement des grands centres financiers
internationaux. Et c'est ce qui est en cause ici, c'est ce dans quoi on veut
mettre la hache.
J'ai
parlé de grandes entreprises, mais il y a aussi des entreprises un peu plus
petites, mais tout aussi dynamiques et
tout aussi importantes pour notre économie, des entreprises qui sont, par
exemple, Frima, ou bien Demarque, ou bien Enzyme, des entreprises qui sont menées par des entrepreneurs qui ont de
la vision pour le Québec, qui veulent faire croître leur entreprise et puis qui ont des plans
d'affaires qui effectivement comptent, hein, tiennent compte de la présence des
crédits d'impôt puis qui, grâce à ces
crédits d'impôt, ont été capables d'amener leur entreprise à un niveau déjà
très, très important, mais qui ont des plans pour le futur puis qui
veulent faire grossir encore plus leur entreprise.
Alors,
M. le Président, il y a des grandes entreprises, des plus petites entreprises,
dans les secteurs les plus vitaux de notre économie, qui vont être
affectées par la mauvaise décision que s'apprête à prendre ce gouvernement.
Alors, M. le Président, je suis très
inquiet. Je suis extrêmement inquiet devant ce qui s'apprête à se faire, ce
qu'on s'apprête à faire. Et je demande au gouvernement de ne pas aller
de l'avant avec sa décision, de s'éviter un recul, de s'éviter un recul équivalent à celui de 2003. En 2003, le
gouvernement de l'ancien premier ministre Charest avait dû reculer. Ils avaient
reculé parce qu'effectivement c'était une
mauvaise décision. Malheureusement, le temps nécessaire pour le recul, qui a
été à l'époque d'environ un an, a fait en sorte que tout le secteur des
biotechs est parti à Toronto à l'époque. Toutes les entreprises de biotech… pas toutes, mais une grande partie, ce qui était
le moteur de notre secteur des biotechs a quitté le Québec pour aller à
Toronto.
Alors,
M. le Président, n'assistons pas au départ des entreprises de nos grappes les
plus productives au Québec. Le
gouvernement, plutôt que d'avoir à reculer, devrait ne pas aller de l'avant
avec cette décision. Je l'implore, le gouvernement, de ne pas reprendre la mauvaise idée de la CAQ de
couper des milliards de dollars dans les crédits d'impôt. Vous savez que la CAQ voulait en couper deux,
2 milliards de dollars, M. le Président, dans les crédits d'impôt, alors
qu'il y en a deux. Donc, ils
voulaient éliminer 100 % des crédits. Le gouvernement libéral contemple
une coupure de 50 % des crédits, de 1 milliard. Dans les deux cas, ce sont des décisions irrationnelles, des
mauvaises décisions, et le gouvernement ne doit pas aller dans cette direction-là. Le gouvernement doit refaire ses
devoirs. Bien sûr, on peut faire des ajustements aux crédits d'impôt, c'est raisonnable, c'est raisonnable de
refaire des ajustements, mais de les couper de 50 %, comme le gouvernement
l'envisage, ou de 100 %, comme le
voudrait la CAQ, ça n'est pas raisonnable. C'est le plan parfait pour détruire
les secteurs économiques les plus
productifs de notre économie. Et, M. le Président, il faut arrêter ça
maintenant. Merci, M. le Président.
• (17 heures) •
Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, je vous remercie, M. le député de Rousseau, de votre intervention. Alors, moi, il
faut que je sache à ce moment-ci si vous acceptez l'amendement qui a été
proposé par le député de Laval-des-Rapides parce
qu'il faut que le mette aux voix avant la motion principale si c'est le cas. Alors, M. le député de Rousseau, j'attends votre
verdict.
Une voix : ...
Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, l'amendement étant refusé, ça veut dire que nous n'avons dans
les mains que la proposition que vous connaissez, qui a été énoncée à
plusieurs reprises. Alors, je vais la relire.
Mise aux voix
Je vais maintenant
mettre aux voix la motion de M. le député de Rousseau, qui se lit comme
suit :
«Que l'Assemblée nationale approuve la position du
ministre de l'Économie, de l'Innovation et des Exportations selon laquelle il faut maintenir les crédits
d'impôt destinés aux sociétés de jeux vidéo, à l'aéronautique, aux technologies
de l'information et aux entreprises culturelles.»
Est-ce que cette
motion est adoptée?
Mme
Maltais :
Vote par appel nominal, M. le Président.
Le Vice-Président
(M. Gendron) : Alors, le vote par appel nominal étant demandé, alors,
que l'on appelle... M. le leader, est-ce que
vous le reportez ou on le fait? Alors, le vote étant appelé, que l'on appelle
les députés. Les travaux sont suspendus quelques minutes.
•
(17
h 1— 17 h 17) •
Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, chers collègues, nous allons mettre aux
voix la motion de M. le député de Rousseau, qui se lit comme suit : «Que
l'Assemblée nationale approuve la position du ministre de l'Économie, de l'Innovation et des Exportations selon laquelle il
faut maintenir les crédits d'impôt destinés aux sociétés de jeux vidéo,
à l'aéronautique, aux technologies de l'information et aux entreprises
culturelles.»
Que les députés en
faveur de cette motion veuillent bien se lever.
La Secrétaire adjointe :
M. Bédard (Chicoutimi), Mme Maltais (Taschereau), M. Marceau (Rousseau), Mme
Hivon (Joliette), M. Bérubé
(Matane-Matapédia), Mme Poirier (Hochelaga-Maisonneuve), Mme Léger
(Pointe-aux-Trembles), Mme Lamarre (Taillon), M. LeBel (Rimouski), M. Kotto
(Bourget), M. Gaudreault (Jonquière), M. Therrien (Sanguinet), M. Bergeron (Verchères), M. Dufour (René-Lévesque),
M. Drainville (Marie-Victorin), M. Cloutier (Lac-Saint-Jean), M. Lisée (Rosemont), M. Traversy (Terrebonne), M. Cousineau
(Bertrand), M. Leclair (Beauharnois), M. Villeneuve (Berthier), Mme
Ouellet (Vachon), M. Péladeau (Saint-Jérôme), M. Turcotte (Saint-Jean), M. Pagé
(Labelle), Mme Richard (Duplessis), M. Roy (Bonaventure).
Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, que les députés qui sont contre cette
motion veuillent bien se lever.
La Secrétaire adjointe :
M. Couillard (Roberval), M. Fournier (Saint-Laurent), M. Hamad (Louis-Hébert),
M. Dutil (Beauce-Sud), M. Leitão
(Robert-Baldwin), M. Coiteux (Nelligan), M. Moreau (Châteauguay), Mme David
(Outremont), M. Poëti
(Marguerite-Bourgeoys), M. D'Amour (Rivière-du-Loup—Témiscouata), M. Huot (Vanier-Les Rivières),
M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Vien
(Bellechasse), M. Lessard (Lotbinière-Frontenac), M. Barrette
(La Pinière), M. Blanchette
(Rouyn-Noranda—Témiscamingue),
M. Heurtel (Viau), M. Arcand (Mont-Royal), Mme Charbonneau (Mille-Îles), M.
Daoust (Verdun), Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce), Mme Vallée (Gatineau), M.
Billette (Huntingdon)…
Le Vice-Président (M. Gendron) : Un instant, un instant, un instant! Non, non, je
comprends, là, mais, par déférence, pour entendre celles et ceux qui
s'expriment… S'il vous plaît! Dans un vote, là, c'est toujours important. Alors, madame, veuillez poursuivre.
• (17 h
20) •
La
Secrétaire adjointe : M. Blais (Charlesbourg), Mme St-Pierre (Acadie),
Mme Vallières (Richmond), Mme Boulet
(Laviolette), M. Morin (Côte-du-Sud), M. Ouellette (Chomedey), Mme Charlebois
(Soulanges), Mme Ménard (Laporte), M. Sklavounos (Laurier-Dorion), M.
Girard (Trois-Rivières), M. Bernier (Montmorency), Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger), M. Carrière (Chapleau), M. Drolet
(Jean-Lesage), M. Chevarie (Îles-de-la-Madeleine), M. Matte (Portneuf),
M. Simard (Dubuc), M. Tanguay (LaFontaine), M. Bolduc (Mégantic), Mme
de Santis (Bourassa-Sauvé), M. Fortin (Pontiac), M. Bourgeois
(Abitibi-Est), M. Boucher (Ungava), M. Birnbaum (D'Arcy-McGee), M. Auger (Champlain), M. Rousselle (Vimont), M. Ouimet
(Fabre), M. Fortin (Sherbrooke), M. Giguère (Saint-Maurice), M. Habel (Sainte-Rose), M. Hardy (Saint-François), M.
Merlini (La Prairie), Mme Montpetit (Crémazie), Mme Nichols (Vaudreuil),
M. Polo (Laval-des-Rapides), M. St-Denis (Argenteuil).
M.
Legault (L'Assomption), M. Bonnardel (Granby), M. Caire (La Peltrie), M.
Martel (Nicolet-Bécancour), Mme Roy
(Montarville), Mme Samson (Iberville), M. Roberge (Chambly), M. Charette
(Deux-Montagnes), M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs), Mme D'Amours
(Mirabel), M. Laframboise (Blainville), Mme Lavallée (Repentigny), M. Lamontagne (Johnson), M. Jolin-Barrette
(Borduas), M. Surprenant (Groulx), Mme Soucy (Saint-Hyacinthe), M. Spénard
(Beauce-Nord), M. Paradis (Lévis), M. Picard (Chutes-de-la-Chaudière), M. Lemay
(Masson).
M.
Khadir (Mercier), Mme Massé (Sainte-Marie—Saint-Jacques).
Le Vice-Président (M. Gendron) : Y a-t-il des abstentions? Alors, Mme la
secrétaire générale, s'il vous plaît.
La
Secrétaire : Pour : 27
Contre : 81
Abstentions :
0
Le Vice-Président (M. Gendron) :
Alors, merci. La motion est rejetée.
Des
voix : …
Le Vice-Président (M. Gendron) : S'il vous plaît! Personne n'a indiqué que c'était
terminé. La motion est rejetée. Alors, M. le leader, pour la poursuite
de nos travaux.
M.
Sklavounos : …appeler l'article 5, M. le Président.
Projet de loi n° 22
Adoption du principe
Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, à l'article 5 du feuilleton, c'est M.
ministre de l'Économie, de l'Innovation
et des Exportations qui propose l'adoption du principe du projet de loi
n° 22, Loi donnant suite aux conclusions du Rapport du groupe
spécial en vertu de l'Accord sur le commerce intérieur…
Des
voix : …
Le
Vice-Président (M. Gendron) : Alors, les travaux sont suspendus pour
quelques minutes.
(Suspension
de la séance à 17 h 23)
(Reprise à 17 h 24)
Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, je vais poursuivre ce que j'étais en train
de lire avec un peu plus de décorum.
Alors, c'est M. le ministre de
l'Économie, de l'Innovation et des Exportations qui propose l'adoption du
principe du projet de loi n° 22,
Loi donnant suite aux conclusions du Rapport du groupe spécial constitué en
vertu de l'Accord sur le commerce
intérieur concernant particulièrement les articles 7.1 et 7.2 de la Loi sur les
produits alimentaires. Est-ce qu'il y a des interventions? M. le
ministre, je suis prêt à vous entendre. Alors, à vous la parole, M. le
ministre.
M. Jacques Daoust
M.
Daoust : Je vous remercie, M. le Président. Il me fait plaisir de
prendre la parole dans le cadre de l'adoption du principe du projet de loi donnant suite aux conclusions du rapport du
groupe spécial constitué en vertu de l'Accord sur le commerce intérieur
concernant les articles 7.1 et 7.2 de la Loi sur les produits alimentaires.
Permettez-moi,
d'abord, de rappeler brièvement le contexte dans lequel s'inscrit celui-ci. Le
commerce interprovincial joue un rôle
primordial dans l'économie du Québec. À titre d'illustration, en 2012, la
valeur des exportations québécoises
de biens et de services à destination du reste du Canada s'est élevée à plus de
68 milliards de dollars. Cela représente
42,7 % du total de nos exportations et 19,2 % du produit intérieur
brut de la province. Il ne fait donc aucun doute qu'un marché canadien
ouvert, stable et performant est essentiel à la vitalité économique du Québec.
Or,
il s'avère que l'Accord sur le commerce intérieur, l'ACI, a précisément pour
objectif d'éliminer, dans la mesure du
possible, les obstacles à la libre circulation des personnes, des produits, des
services et des investissements à l'intérieur du Canada. Cet accord est entré en vigueur en 1995, et tous les
gouvernements au Canada en font maintenant partie. Les entreprises et
les travailleurs québécois doivent pouvoir accéder sans difficulté aux marchés
des autres provinces et territoires. En
contrepartie et pour son plus grand bénéfice, le Québec doit maintenir un
environnement d'affaires exempt d'obstacles
injustifiés de manière à attirer les travailleurs, les entreprises et les
investisseurs canadiens sur son territoire.
L'ACI
est l'instrument que se sont donné les provinces, les territoires et le
gouvernement fédéral pour encadrer les
pratiques commerciales, et notre gouvernement estime important de veiller à son
respect. C'est justement cette notion de respect de l'ACI et des engagements commerciaux pris par le Québec qui
est à l'origine du projet de loi n° 22. Tel que son titre l'indique, le projet de loi n° 22 a
pour but de donner suite aux conclusions du rapport du groupe spécial constitué
en vertu de l'Accord sur le commerce intérieur.
Afin d'énoncer clairement la fonction exacte de ce projet de loi, je me
dois de consacrer quelques instants au processus ayant donné lieu à la décision
du groupe spécial.
En
premier lieu, il faut savoir que certaines mesures prévues à la Loi sur les
produits alimentaires font en sorte qu'il est actuellement interdit, sur le territoire québécois : a) de
mélanger un produit laitier avec un succédané de produit laitier; et b) de produire ou de vendre certains succédanés
de produits laitiers. Je précise au passage que de telles interdictions ne sont en place nulle part ailleurs au Canada.
Ainsi, à titre d'exemple, une tartinade contenant à la fois du beurre et de
l'huile d'olive ou un lait évaporé qui
contiendrait à la fois du lait et de l'huile de soya ne peuvent être fabriqués
ou vendus au Québec. En juin 2013, la
Saskatchewan a initié un recours formel en vertu des procédures de règlement
des différends de l'ACI afin de
contester ces deux mesures québécoises ainsi qu'une troisième mesure prévue à
la même loi qui a trait à l'étiquetage des succédanés. La Colombie-Britannique,
l'Alberta et le Manitoba se sont joints
aux procédures à titre de
parties intervenantes et en support à la Saskatchewan.
Conformément
aux procédures de règlement des différends prévus à la l'ACI, un groupe spécial
formé de trois membres a été
constitué. Le mandat de ce groupe spécial était de déterminer si les mesures
québécoises visées par la plainte étaient compatibles ou incompatibles avec les obligations de
l'ACI. Tout au long des procédures, le gouvernement du Québec a
vigoureusement défendu la conformité avec l'ACI de l'article qui régit
l'étiquetage des succédanés, c'est-à-dire
l'article 4.1 de la Loi sur les produits alimentaires. Nous jugeons que les
dispositions de la loi qui
interdisent l'utilisation du terme «laitier», de marques de commerce,
d'appellations ou d'images évoquant l'industrie laitière pour désigner
un succédané de produit laitier ne constituent pas un obstacle de commerce
interprovincial. Elles sont transparentes et
nécessaires pour protéger les consommateurs, d'autant plus que ces dispositions
sont basées sur une norme
internationale du Codex Alimentarius, la norme générale Codex pour
l'utilisation de termes de laiterie. Il est important que le consommateur puisse choisir en toute connaissance de
cause entre un produit laitier ou une imitation.
En
ce qui a trait aux interdictions prévues aux articles 7.1 et 7.2 de la Loi sur
les produits alimentaires, à savoir l'interdiction de mélanger un
produit laitier avec un succédané et l'interdiction de produire ou de vendre
certains succédanés, le Québec a indiqué au
groupe spécial qu'à la suite d'un examen attentif de la réglementation et en
raison de l'évolution du marché des
produits alimentaires il avait été déterminé à propos de lever ces
interdictions. Le projet de loi visant
à donner suite à cette intention a d'ailleurs été présenté par le précédent
gouvernement à l'Assemblée nationale le 19 septembre 2013. Le projet de loi n° 56 avait exactement le même
contenu que le projet de loi n° 22 devant nous aujourd'hui, mais il
n'a pu être adopté avant la fin de la 40e législature et il est mort au
feuilleton.
• (17 h 30) •
Le
processus de règlement des différends a, pour sa part, suivi son cours. C'est
ainsi que le 31 mars 2014, sur la base
des observations écrites présentées par chacune des parties et après la tenue
d'une audience qui s'est tenue à Québec le 8 janvier 2014, le groupe spécial a rendu son rapport. Dans ce
rapport, le groupe spécial a conclu que les articles 4.1.1, 7.1 et 7.2 de la Loi sur les produits alimentaires
sont contraires aux engagements pris par le Québec en vertu de l'ACI. Le groupe spécial a accordé au Québec jusqu'au 31
décembre 2014 pour abroger ou modifier ces articles de façon à les rendre compatibles avec l'ACI. Très important de
spécifier, M. le Président, à ce moment-ci que le Québec a porté en appel les conclusions du groupe spécial en lien
avec la question de l'étiquetage, soit l'article 4.1.1 de la Loi sur les
produits alimentaires, au motif que
le groupe spécial a commis des erreurs de droit. La décision finale du groupe
spécial d'appel à l'égard de
l'article 4.1.1 sera connue au plus tard le 25 janvier 2015. Il n'est donc pas
du tout envisagé, dans le cadre de projet de loi n° 22, de toucher
à cet article de quelque façon.
Nous
voilà donc avec une décision du groupe spécial validement constitué qui exige
l'abrogation de deux articles de la
Loi sur les produits alimentaires que le gouvernement du Québec a déjà annoncé
avoir l'intention d'abroger. Bien sûr,
notre gouvernement pourrait choisir d'ignorer les gestes posés par le
gouvernement précédent et, du même coup, sciemment omettre de respecter la décision rendue par le
groupe spécial en mars 2014. Mais ce serait agir de manière irresponsable
et incohérente. Irresponsable parce que les
conséquences rattachées au non-respect d'une décision du groupe spécial peuvent
être importantes — j'y reviendrai dans un instant — et incohérente parce que notre gouvernement
reconnaît l'importance de respecter les règles établies en matière de
commerce interprovincial.
Il existe un concept
reconnu en matière d'accord de commerce selon lequel l'efficacité et la
crédibilité d'un accord se mesurent à la robustesse
de son mécanisme de règlement des différends. Pendant de nombreuses années,
l'ACI a été décrit comme étant un
accord politique sans dents et, par conséquent, peu efficace. Une partie pouvait ignorer la décision
rendue par un groupe spécial, et ce, sans
conséquence autre que l'opprobre de la partie adverse et une vague menace de
représailles. Depuis 2009, les choses ont
bien changé, et l'ACI est devenu un accord hautement contraignant. Si le Québec
omet de donner suite à la décision du groupe
spécial, un groupe spécial de l'observation des décisions est susceptible de
lui imposer une sanction pécuniaire maximale de 5 millions de
dollars. Cette sanction pécuniaire n'est pas de la nature d'une compensation monétaire liée aux dommages
subis par les parties plaignantes, il s'agit d'une sanction visant strictement
à punir la partie qui ne respecte pas une décision. Au surplus de la sanction
pécuniaire, si le Québec persiste à ne pas respecter
la décision du groupe spécial et qu'un délai de 180 jours s'écoule suite
au rapport constatant ce défaut, son droit d'initié un différend, à participer à un différend en vertu de l'ACI lui
sera entièrement retiré, de même qu'aux personnes et entreprises qui résident sur son territoire. Ce
sont là des conséquences graves qui seraient susceptibles d'entacher indûment
la réputation et la crédibilité du Québec à
titre de partenaire commercial au sein du Canada. Dans les circonstances
actuelles, nous pouvons les éviter et nous devons le faire.
En conclusion, M. le
Président, je sollicite l'appui de l'ensemble des membres de cette Assemblée
afin que le principe du projet de loi
n° 22 soit adopté. S'il est adopté, le projet de loi permettra au Québec
de se conformer à la décision du
groupe spécial ayant été validement constitué en vertu de l'ACI. Le Québec
démontrera ainsi sa volonté de respecter les mécanismes institutionnels prévus à cet accord et protégera sa
réputation à titre de partenaire commercial. Au surplus, l'offre des
produits alimentaires mise à la disposition des consommateurs québécois en sera
élargie.
Je
termine en rappelant, M. le Président, que, comme il s'agit d'un projet de loi
qui est exactement celui que vous, comme
ministre de l'Agriculture, aviez déposé, nous réitérons notre demande à
l'opposition officielle que nous nous en tenions à un briefing technique
et que nous évitions des consultations particulières, qui m'apparaissent, dans
les circonstances, inutiles et qui nous
rapprochent d'un délai... qui nous rapprocheraient d'un délai qui pourrait coûter
cher au Québécois. Alors, respectueusement, M. le Président, j'en fais la
demande formelle à la première opposition, les autres partis en ayant
convenu. Merci.
Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, merci, M. le ministre, de votre intervention.
Je suis prêt à entendre le prochain
intervenant et je reconnais M. le député de Saint-Jérôme pour son intervention,
porte-parole de l'opposition officielle en ces matières. M. le député de
Saint-Jérôme, à vous la parole.
M. Pierre Karl Péladeau
M.
Péladeau : Merci, M. le Président. Alors, comme l'a mentionné M. le
ministre, nous sommes ici pour l'adoption de principe du projet de loi n° 22, et, comme l'a mentionné
également M. le ministre, il s'agit exactement du même projet de loi que
le projet de loi n° 56 déposé par le gouvernement du Parti québécois le
19 septembre 2013.
Le
gouvernement libéral précédent s'était engagé à lever les interdictions en
vigueur au Québec en ce qui a trait à
la production et à la vente de mélanges et de succédanés de produits laitiers.
Au rappel, en janvier 2012, la Saskatchewan, la Colombie-Britannique et le Manitoba ont demandé
la tenue de consultations formelles avec le Québec, conformément au
processus de règlement des différends de l'Accord sur le commerce intérieur,
l'ACI. Ces provinces considéraient comme non conforme la réglementation québécoise
interdisant la production et la vente de certains succédanés et de mélanges de produits laitiers et de succédanés. Le
Québec s'est engagé à lever ces interdictions, ce qui a eu pour effet
d'éviter l'initiation d'un recours commercial à l'encontre du Québec.
Le
projet de loi n° 22, donc, «modifie la Loi sur les produits
alimentaires afin d'y retirer les dispositions interdisant de mélanger un produit laitier ou un constituant
d'un produit laitier et un succédané de produits laitiers et de préparer,
d'offrir en vente, de vendre, de livrer, de transformer ou de détenir,
d'exposer ou de transporter en vue de la vente un succédané de produits laitiers qui n'est pas désigné par un règlement du
gouvernement». La parole du Québec sera respectée. Il en
va de notre crédibilité en tant que partenaire commercial.
En
terminant, M. le Président, j'aimerais donc dire à M. le ministre que nous voterons pour le principe du projet de loi et que nous osons espérer qu'il continuera à
défendre les intérêts du milieu agricole, que ce soient les produits laitiers
ou que ce soient les fabricants de fromage, particulièrement dans le cadre de l'entente de libre-échange actuellement en train d'être négociée avec la communauté
européenne. Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
Alors, je vous remercie, M. le
député de Saint-Jérôme, de votre intervention. Je
suis prêt à entendre le prochain intervenant, s'il y a lieu. Alors, oui, je
reconnais maintenant M. le
député de Johnson pour
son intervention. À vous la parole, sur le même projet de loi, quand on sait
que c'est son principe qu'on doit adopter. M. le député de Johnson, à
vous la parole.
M. André Lamontagne
M.
Lamontagne : Oui, M. le Président. Alors, comme mentionné, c'est pour l'adoption de principe du projet de loi n° 22.
Juste
pour revenir un petit peu en arrière, depuis plus qu'une cinquantaine d'années,
le Québec, de façon directe ou un peu
indirecte, là, cherche à avoir un certain protectionnisme, entre guillemets,
là, de son industrie laitière, de toute la production laitière au
Québec. Et puis, en 1995, on a accepté de devenir participant dans l'Accord de
commerce intérieur du Canada. Puis, comme le ministre de l'Économie le
mentionnait, de 1995 à 2009, c'est un accord qui était reconnu comme n'ayant pas vraiment beaucoup de dents, à savoir que, si
on se conformait plus ou moins à l'accord… quels étaient les recours,
mettons, des autres partenaires de l'accord.
Par
contre, en 2009, suite à des négociations, le Québec a accepté de signer des
modifications à cet accord-là. Puis, à l'époque,
en 2009, les producteurs laitiers du Québec s'étaient opposés avec véhémence au
fait que le gouvernement signe un tel
accord. Mais il faut rappeler que ça s'est inscrit dans l'optique vraiment, de
un, au Canada, d'ouvrir les frontières puis
de permettre vraiment d'améliorer les capacités de commerce transfrontalier,
là, entre les provinces. Puis ça s'inscrit aussi dans une plus large perspective, là, qui est tout le commerce
nord-américain puis le commerce mondial. Mais c'est entendu qu'en 2009, en signant ça, bien, il était
possible que le gouvernement du Québec reçoive, à un moment donné ou un autre, un avis à l'effet qu'un partenaire de la
fédération allait contester certaines dispositions de notre Loi sur les
produits alimentaires. Et puis cette contestation-là est arrivée en
2012, au printemps 2012.
• (17 h 40) •
Et, principalement,
la contestation visait trois articles qui visaient, un, à interdire la
fabrication ou la vente de succédanés, un
autre article, de désigner par règlement des succédanés qui pouvaient être
produits ou offerts à la vente, puis un troisième, bien, c'est dans le
cas où on le permettait par règlement, bien, on s'autorisait à s'assurer d'une différenciation des produits via l'étiquetage,
hein? C'est les articles 7.1, 7.2, pour ce qui est de la fabrication et de la vente des produits, et
c'est l'article 4.1 pour ce qui touche la notion d'étiquetage.
Alors,
quand la position du Québec a été mise à défi par la Saskatchewan et d'autres partenaires de l'Ouest, il y a eu la formation du comité spécial. Et puis, rapidement,
dans son mémoire soumis à l'automne, le Québec
a, d'emblée, confirmé qu'il allait
abroger les dispositions 7.1 et 7.2 de la loi, qui venaient
restreindre la fabrication, production et le commerce de ces biens-là,
de ces produits-là sur le territoire du Québec.
Par contre,
le Québec, dans ce même mémoire là, a contesté, un, l'opportunité du plaignant,
qui était la Saskatchewan, de lever le principe au niveau de
l'étiquetage, et il l'a contesté sur la base… en disant que, dans les consultations
préliminaires, la Saskatchewan n'avait pas mentionné ce fait-là, alors ils ont fait une réclamation
tardive à ce niveau-là. Et
puis le Québec a aussi mentionné qu'advenant que le comité
spécial accepterait quand même d'évaluer l'article 4.1,
bien, le Québec maintenait qu'il était tout à fait dans son droit… avec la réglementation
internationale, et, comme le mentionnait le ministre
tantôt, principalement au
niveau de la norme du Codex
Alimentarius, il était tout à fait dans son droit de venir réglementer
l'étiquetage à ce niveau-là.
Alors,
au printemps 2014, il y a eu… Il y a eu le dépôt aussi, à
l'automne 2013, du projet de loi
n° 56, qui était une copie
conforme du projet de loi n° 22. M. le Président, je pense que c'est vous
qui, à l'époque, étiez le parrain de cette loi-là. Et puis, à l'automne… au printemps, alors il y a eu le jugement…
ou plutôt le rapport a été rendu par le comité spécial à l'effet que la Saskatchewan se voyait donner raison sur les
articles 7.1 et 7.2 et aussi pour la question de l'étiquetage.
Alors,
nous, conformément, le Québec, à notre position dans le mémoire qu'on avait
déposé, le projet de loi n° 22, aujourd'hui,
respecte l'engagement qu'on avait pris, avant d'y être contraints, à savoir
qu'on voyait que c'était correct d'abroger
les articles 7.1 et 7.2. Mais en même temps, dans le mémoire, M. le
Président, on spécifiait qu'on ne le faisait pas parce qu'on s'y voyait contraints. On pensait qu'on avait toujours
les droits d'avoir ces articles-là. Par contre, dans le cadre des relations avec nos partenaires de
l'Accord de commerce intérieur, on a jugé opportun d'abroger ces deux
articles-là.
Alors, comme
le ministre a mentionné, le projet de loi n° 22 vise à rétablir… ou
abroger les articles 7.1, 7.2. Et, pour ce qui en est de l'article 4.1, bien, le jugement va être
rendu le 25 janvier 2015, et après ça, bien, on verra ce que le
gouvernement décidera de faire par rapport à
ce dossier-là. Alors, il va sans dire que, de notre côté, là, on est favorables
à l'adoption du principe du projet de loi n° 22. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Gendron) :
Alors, je vous remercie, M. le député de Johnson, de votre intervention.
Mise aux voix
Est-ce à dire
que le principe du projet de loi n° 22, loi modifiant… pas vrai, Loi
donnant suite aux conclusions du
Rapport du groupe spécial constitué en vertu de l'Accord sur le commerce
intérieur concernant les articles 7.1, 7.2 de la Loi sur les
produits alimentaires, est adopté?
Des voix : Adopté.
Le Vice-Président (M. Gendron) :
Adopté. M. le leader du gouvernement.
Renvoi à la Commission
de l'économie et du travail
M.
Sklavounos :
Oui, M. le Président. Conformément à l'article 243 du règlement, je fais
motion pour que ce projet de loi soit déféré à la Commission de
l'économie et du travail pour étude détaillée.
Mise aux voix
Le Vice-Président (M. Gendron) :
Est-ce que cette motion de renvoi est adoptée?
Des voix : Adopté.
Le Vice-Président (M. Gendron) :
Adopté. M. le leader, pour la suite.
M.
Sklavounos : Merci,
M. le Président. Demain, nous allons poursuivre le projet de loi n° 10.
Ajournement
Pour le
moment, je vais vous demander, conformément à l'article 5, d'ajourner nos
travaux jusqu'à demain, 9 h 45, s'il vous plaît.
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
Alors, compte tenu de l'heure et de la demande du leader, les travaux sont
ajournés à demain, 9 h 45.
(Fin de la séance à 17 h 44)