(Neuf
heures quarante-six minutes)
La Vice-Présidente
(Mme Poirier) : Bon matin. Vous pouvez
vous asseoir.
Affaires courantes
Déclarations de députés
Alors, nous en sommes
à la rubrique Déclarations de députés. Je reconnais M.
le député de Bonaventure.
Rendre hommage à M. Jean-Marie
Huard
à l'occasion de sa retraite du domaine de la boxe
M. Sylvain Roy
M. Roy :
Bon matin, Mme la Présidente. Chers collègues, je souhaite aujourd'hui
souligner la carrière exceptionnelle de
Jean-Marie Huard.Après
plus d'un demi-siècle consacré à la boxe…
entame une retraite bien méritée. M. Huard a commencé à faire
de la boxe à l'âge de 12 ans, est entré dans le domaine professionnel en 1960 et par la suite est devenu un entraîneur en 1971. Il a fondé
plusieurs clubs de boxe dans notre région et a levé de nombreux boxeurs gaspésiens
aux niveaux
régional, provincial et même international. Sa participation aux Jeux olympiques de 1976 en tant
qu'entraîneur avec son frère Camille comme boxeur
est d'ailleurs le point culminant de sa carrière.
Dans
une région comme la Gaspésie, il est primordial que des personnes-ressources, tel M. Huard, partagent
leur passion avec des jeunes. Cela a permis
à certains d'entre eux de développer de nouvelles activités sportives
permettant l'épanouissement et parfois même la
distinction.
M. Huard, merci pour votre dévouement et votre inspiration. En espérant que
votre art perdure, je vous souhaite une bonne retraite. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente
(Mme Poirier) : Merci. Mme la députée
de La Pinière.
Rendre hommage aux bénévoles
de la circonscription de
La Pinière pour leur engagement pendant la période des fêtes
Mme Fatima Houda-Pepin
Mme
Houda-Pepin : Mme la Présidente, la période des fêtes est
l'occasion pour des milliers de bénévoles de se mobiliser pour venir en
aide aux familles démunies et aux personnes âgées ou seules. C'est à ces gestes
d'entraide et de solidarité que je voudrais aujourd'hui rendre hommage, et le
comté de La Pinière n'y fait pas exception. Plusieurs organismes communautaires, tant francophones qu'anglophones, y sont déjà à
l'oeuvre. Certains préparent des paniers de Noël et d'autres mijotent de
bons petits plats à livrer aux personnes seules. Les comités de loisirs dans
les centres d'hébergement de soins de longue
durée sont déjà à planifier des repas savoureux et à acheter des cadeaux que le
père Noël amènera, dans son traîneau, aux personnes malades.
J'invite
mes collègues de cette Assemblée à se joindre à moi pour rendre hommage à ces
bénévoles qui, dans un élan de
générosité, consacrent leur temps et leur énergie à rendre les autres heureux.
Merci à ces organismes d'entraide et à ces personnes de coeur et
d'action qui ne laissent personne de côté. Joyeux Noël!
La Vice-Présidente
(Mme Poirier) : Merci. Mme la députée d'Iberville.
Féliciter l'entreprise Pur
Vodka inc., lauréate
de plusieurs prix lors du Vodka Masters
Mme Marie Bouillé
Mme
Bouillé :
Mme la Présidente, chaque année, le magazine anglais The Spirits Business
organise un des plus prestigieux concours
consacrés à la vodka, le Vodka Masters. Pur Vodka, distillée dans la
circonscription d'Iberville, a
remporté l'argent dans la catégorie Super Premium et la plus haute mention
master dans la catégorie Micro Distillery. Ce dernier prix fait la
fierté de ses producteurs, car il est remis lorsque tous les juges ont attribué
à l'aveugle une note supérieure à 90 points.
Je suis très fière de
souligner que des entrepreneurs de chez nous, qui sont dans nos tribunes en ce
matin, Nicolas Duvernois et sa conjointe Karolyne Auger, produisent la
meilleure vodka au monde avec du maïs et de l'eau de source du Québec. Pur
Vodka est exportée et reconnue partout dans le monde comme un produit de la
plus haute qualité. Je tiens à les féliciter
et à les remercier d'avoir fait rayonner le Québec dans un concours mondial
aussi prestigieux. Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Poirier) : Merci. M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
Rendre hommage à l'Association
Messinese de Montréal inc.
M. Robert Poëti
M.
Poëti : Merci, Mme la Présidente. l'Association Messinese de
Montréal fut créée en 1981. Son but premier était la préservation de la culture sicilienne et d'aider l'intégration
de ses membres au mode de vie québécois. Depuis les 30 dernières
années, l'association a pris de l'expansion en aidant différents organismes. À
ce jour, ils ont amassé 90 000 $
pour la Fondation de la recherche sur les maladies infantiles. 18 tournois
de golf ont été organisés pour amasser des dons pour L'Hôpital de
Montréal pour enfants. En tout, 290 000 $ ont été remis.
L'Association
Messinese de Montréal est aussi très active dans sa propre communauté en
organisant des campagnes de financement pour
la Fondation de l'hôpital LaSalle. Grâce à leurs efforts depuis plusieurs
années, de belles causes ont pu
profiter de cet engagement. En terminant, Mme la Présidente, j'aimerais
féliciter la présidente, Mme Maria
Donato, dans nos estrades, ici, aujourd'hui, et toute son équipe pour leur
dévouement à cette organisation. (S'exprime en italien).
• (9 h 50) •
La Vice-Présidente
(Mme Poirier) : Merci. M. le député de Beauce-Nord.
Souligner la tenue de
guignolées dans Beauce-Nord et au Québec
M. André Spénard
M.
Spénard : Merci, Mme la Présidente. Dimanche dernier, comme
bien des Québécois, j'ai parcouru quelques rues de mon comté dans le cadre de la guignolée. Accompagné du maire
Gaétan Vachon, ce sont quelque 40 000 $ qui ont été récoltés à
Sainte-Marie, au profit du service d'entraide de l'endroit. De nombreuses
autres municipalités de Beauce-Nord tenaient
des guignolées ce jour même, notamment à Saint-Isidore et Scott. Demain, les
Beaucerons, tout comme bien des Québécois, seront conviés à participer à
la Grande Guignolée des médias. Je salue l'initiative des médias radios,
imprimés et Web de Beauce-Nord qui s'unissent au profit de Moisson Beauce.
D'autres
guignolées se sont tenues ou se tiendront dans mon comté prochainement ainsi
qu'aux quatre coins du Québec. J'invite les Beaucerons et les Québécois
à participer généreusement à cet élan de générosité à l'approche des fêtes. Que ce soit en offrant de l'argent, des
denrées, des produits de toutes sortes, vos contributions sont les
bienvenues. Et que dire de ces milliers de bénévoles qui prépareront des
activités ou paniers de Noël pour les plus démunis de notre société? Je vous
lève mon chapeau et vous remercie de votre implication dans votre communauté. À
vous tous et toutes je souhaite de joyeuses fêtes.
La Vice-Présidente
(Mme Poirier) : Merci. Mme la députée de Sainte-Rose.
Féliciter les personnes honorées
lors
de la soirée reconnaissance organisée par le
Comité régional en économie sociale de Laval
Mme Suzanne Proulx
Mme Proulx :
Merci, Mme la Présidente. Laval compte plusieurs entreprises d'économie sociale
dont les acteurs partagent des valeurs
communes de gouvernance égalitaire et démocratique, de rentabilité sociale et
de recherche du bien commun. Ces
entreprises collectives tentent aussi à développer des emplois durables qui tiennent compte du respect
des personnes tout autant que de la réussite financière de leurs organisations.
Récemment,
13 personnes se sont distinguées lors d'une soirée reconnaissance organisée par
le Comité régional en économie sociale de Laval, dont notamment
Anne-Marie Vézeau du Café Le Signet, Koceila Syphax Sedoud de l'atelier de tri
des matières plastiques recyclées du Québec, Denise Filiatrault d'Éco-Nature et
Brigitte L'Ecuyer de Mieux-Naître à Laval. L'importance de leur contribution à
la collectivité est à l'image de la force et du dynamisme de l'économie sociale
à Laval.
Je
veux les féliciter et les encourager à poursuivre dans cette voie. Elles
contribuent ainsi à diversifier le portrait économique de Laval tout en
améliorant la qualité de vie de nos concitoyens. Merci.
La Vice-Présidente
(Mme Poirier) : Merci beaucoup. M. le député de Vimont.
Féliciter l'Association
régionale de soccer de Laval,
nommée Association régionale de soccer de l'année
M. Jean Rousselle
M. Rousselle :
Merci, Mme la Présidente. C'est avec un immense plaisir que je prends la parole
aujourd'hui pour féliciter l'Association régionale de soccer de Laval.
Le 2 décembre dernier avait lieu le
Gala de la mi-temps, organisé par la Fédération de soccer du Québec. À
cette occasion, l'Association régionale de soccer de Laval a été nommée
l'Association régionale de soccer de l'année.
Dynamique et présente
au sein de la communauté, l'association regroupe les six clubs de Laval. Je tiens
à féliciter et à remercier pour leur
excellent travail le président régional de l'association régionale, M. Bernard
David, les membres du comité exécutif, les représentants des clubs de Laval,
les bénévoles et surtout les joueurs.
Je
fais le souhait que 2014 soit une année gagnante pour l'Association régionale
de soccer de Laval et que ses joueurs
connaissent encore le succès et les honneurs qui ont fait la fierté des
Lavallois et des Lavalloises. Merci, madame.
La Vice-Présidente
(Mme Poirier) : Merci, M. le député. M. le député de
Matane-Matapédia.
Féliciter la Maison des
naissances Colette-Julien,
lauréate du prix Approche multidisciplinaire
en prévention des risques obstétricaux
M. Pascal Bérubé
M.
Bérubé :
Mme la présidente, en novembre dernier, la Maison des naissances Colette-Julien
de Mont-Joli s'est vue décerner le prix Approche multidisciplinaire en
prévention des risques obstétricaux, AMPRO. Ce prix est remis aux organisations
qui font preuve de pratiques hautement sécuritaires.
C'est
le deuxième établissement à recevoir cette distinction au Québec, qui exige à
l'ensemble du personnel une formation
accrue et la réussite d'examens de compétences supplémentaires. Ainsi,
l'ensemble des intervenants participent à des ateliers cliniques afin
d'harmoniser leurs pratiques en obstétrique. Cette façon de faire favorise
grandement la communication avec les différents corps professionnels, et ce,
pour un meilleur encadrement des femmes enceintes de notre région.
La
Maison des naissances Colette-Julien est un modèle de réussite au Québec. Je
tiens à féliciter sa directrice, Mme
Chantal Lavallée, son équipe ainsi que l'ensemble de leurs partenaires qui,
chaque jour, contribuent au mieux-être des femmes et de leurs
nouveau-nés. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente
(Mme Poirier) : Merci. M. le député Berthier.
Féliciter M. Hugues Fafard et
Mme Isabelle Fontaine
pour leur ascension du Kilimandjaro
M. André Villeneuve
M. Villeneuve :
Bonjour, Mme la Présidente et chers collègues, bien sûr. Entre le 12 et 17
octobre dernier, deux Berthelais ont réussi l'ascension du Kilimandjaro, cette
montagne mythique de près de 6 000 mètres située en Tanzanie. Il s'agit d'Isabelle Fontaine, chef
d'équipe des services d'emploi à Emploi-Québec, et d'Hugues Fafard,
employé de la compagnie Bridgestone et pompier à la Régie intermunicipale de
Berthier.
Il
aura fallu plus de deux ans et demi
de préparation méticuleuse à nos deux héros avant de réaliser leur
projet. L'exploit, en tant que tel, mérite d'être salué, bien sûr, mais c'est
avant tout son objectif qu'il convient de souligner. En effet, ces deux Berthelais
ont vécu cette aventure dans le cadre du programme d'expédition et de collecte
de fonds intitulé Challenge SRC, qui
soutient la recherche sur le cancer. Ils ont ainsi pu remettre la somme de 11 000 $ chacun à ladite société.
Voilà une belle façon de contribuer à combattre une terrible maladie, tout en
réalisant un vieux rêve et un exploit sportif.
J'adresse
donc toutes mes félicitations à Isabelle Fontaine et à Hugues Fafard et les
remercie d'avoir fait preuve de tant de courage et de générosité. Merci,
Mme la Présidente.
La Vice-Présidente
(Mme Poirier) : Merci. Alors, est-ce qu'il y a consentement
pour permettre à la députée de Richmond de faire sa déclaration ce matin? Il y
a consentement?
Une voix :
…
La Vice-Présidente
(Mme Poirier) : Alors, excellent. Alors, Mme la députée de Richmond.
Souligner le 40e anniversaire
de la FADOQ, région Estrie
Mme Karine Vallières
Mme
Vallières : Merci, Mme la Présidente. J'aimerais, particulièrement aujourd'hui, souligner le 40e anniversaire de la FADOQ, région Estrie. Avec
ses 18 000 membres répartis dans 50 clubs où oeuvrent plus de 400 bénévoles,
la FADOQ Estrie constitue un maillon essentiel pour la défense du droit des
aînés mais également pour les inciter à demeurer actifs. Que ce soit par la
mise sur pied d'activités ou de programmes répondant aux besoins spécifiques
des aînés, la FADOQ travaille tous les jours à maintenir et à favoriser
l'inclusion sociale des personnes de 50 ans et plus à la vie des communautés.
Aujourd'hui,
j'invite tous mes collègues à l'Assemblée nationale à saluer le travail des
administrateurs, des travailleurs et des
bénévoles qui, par leur dévouement, font du troisième âge une étape de vie sous
le signe de la santé et de l'épanouissement. Un bon anniversaire à la
FADOQ Estrie.
La Vice-Présidente
(Mme Poirier) : Ceci met fin à la rubrique Déclarations de députés.
Alors, je suspends
nos travaux pour un court moment.
(Suspension de la séance à
9 h 58)
(Reprise à 10 h 13)
Le Président :
Alors, mesdames messieurs, nous allons nous recueillir quelques instants.
Nous poursuivons les
affaires courantes.
Aujourd'hui, il n'y a
pas de déclarations ministérielles.
Présentation de
projets de loi
À la rubrique
Présentation de projets de loi, M. le leader du gouvernement.
M.
Bédard :
Bonjour, M. le Président.En cette semaine importante, j'aimerais que vous
appeliez l'article b de notre feuilleton.
Projet de loi
n° 68
Le
Président :
Alors, à l'article b du
feuilleton, M. le ministre des Transports présente le projet de loi n° 68, Loi sur
l'Agence des infrastructures de transport du Québec. M. le ministre.
M. Sylvain
Gaudreault
M. Gaudreault : Oui, merci, M. le Président. Alors, ce projet de loi
propose d'instituer l'Agence des infrastructures de transport du Québec.
Le projet
de loi prévoit que l'agence aura pour mission de gérer et d'exploiter les
infrastructures routières dont la responsabilité relève du ministre des
Transports de même que tout autre bien qu'il détermine. Elle privilégiera le développement
d'une expertise en matière d'études, de planification, de conception et de
réalisation de projets d'infrastructure routière. Elle protégera l'intégrité des
investissements routiers par une gestion rigoureuse et transparente et par une
optimisation de ses façons de faire.
Aussi,
le projet de loi prévoit que l'agence sera appelée à réaliser les projets d'infrastructure publique de transport majeurs ou à accompagner les organismes publics dans la
réalisation de tels projets. Le projet de loi
spécifie que l'agence collaborera
étroitement avec le ministre des Transports dans l'établissement d'une vision
intégrée de la mobilité au Québec.
Le
projet de loi confère à l'agence des pouvoirs et des responsabilités en matière
immobilière lui permettant notamment d'acquérir des immeubles pour les
organismes publics et d'en disposer.
Le
projet de loi prévoit que l'agence sera sous la responsabilité du ministre des
Transports. Elle sera dotée d'un conseil
d'administration qui en supervisera l'administration et d'un président-directeur
général qui en aura la direction et la
gestion. Le projet prévoit aussi que la Loi sur la gouvernance des sociétés
d'État s'applique à l'agence. Elle possédera tous les pouvoirs propres à
l'accomplissement de sa mission.
Le
projet de loi prévoit aussi que les employés de l'agence seront nommés selon un
plan d'effectifs qu'elle établira. L'agence
déterminera les normes et barèmes de rémunération, les avantages sociaux et les
autres conditions de travail de ses employés, conformément aux règles définies par le gouvernement.
Le
projet de loi prévoit également les dispositions financières qui encadrent les
activités de l'agence.
Enfin,
le projet de loi comporte des dispositions modificatives diverses et
transitoires nécessaires à la création de l'agence et concernant notamment le transfert à l'agence d'une partie
des employés du ministère des Transports. En outre, il accorde aux fonctionnaires certains droits leur
permettant un retour dans la fonction publique. Merci,
M. le Président.
Le Président :
Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? M. le leader
de l'opposition.
M.
Moreau :Alors, M. le Président, on aura sans doute l'occasion de donner toute l'impression que nous
avons de l'idée de créer une agence semblable.
Mais, avant de ce faire, nous souhaitons avoir des consultations particulières avant que le
principe ne soit appelé. Et, notamment, dans ces consultations particulières,
M. le Président, nous souhaiterions entendre
le Syndicat de la fonction publique du Québec, l'Association des constructeurs
de routes et grands travaux du Québec, le Syndicat de professionnelles
et professionnels du gouvernement du Québec, et notamment l'Ordre des
ingénieurs, et nous aurons sans doute une liste plus complète. J'aimerais
savoir si le leader du gouvernement est prêt à tenir des consultations avant le
principe du projet de loi.
Le Président : M. le leader
du gouvernement.
M.
Bédard : M. le Président, si ça peut aider le Parti libéral
à prendre position enfin, nous le ferons avec grand plaisir.
Des voix :
…
Mise aux voix
Le Président :
Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?
Une voix :
…
Le Président :
Adopté. M. le leader du gouvernement.
M.
Bédard : On ne pourra pas me dire que je ne suis pas
collaborateur, M. le Président, je suis partie même à leur réflexion de
groupe.
Alors, j'aimerais
aussi appeler l'article c, M. le Président, de notre feuilleton.
Projet de loi
n° 66
Le
Président : Alors, à l'article c du feuilleton, M. le ministre
de la Culture et des Communications présente le projet de loi
n° 66, Loi modifiant la Loi sur le patrimoine culturel. M. le ministre.
M. Maka Kotto
M.
Kotto : M. le Président, ce projet de loi a pour objet
d'habiliter le ministre de la Culture et des Communications à prendre des règlements, pour l'ensemble ou une
partie d'un site patrimonial déclaré ou classé, afin de moduler
l'exercice des pouvoirs que lui confère la Loi sur le patrimoine culturel. Il
permet au ministre d'édicter certaines prohibitions.
Il prévoit également
des dispositions de concordance, notamment en lien avec les dispositions de
cette loi relatives au transfert de responsabilité, aux pouvoirs d'autorisation
du ministre, aux recours et aux sanctions.
Le Président :
Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? M. le leader
de l'opposition.
M.
Moreau : Là aussi, M. le Président, nous désirons avoir des consultations
particulières sur ce projet de loi. Et j'espère que, sans
arrogance cette fois, mon collègue le leader du gouvernement, qui est dans une
forme splendide, et qui applaudit, et qui
trouve drôle ses propres interventions — c'est bon, ça, déjà, ça fait une
personne — acceptera
de tenir les consultations que nous demandons.
Le Président :
Bon! Alors, M. le leader du gouvernement.
M.
Bédard : Je pense que le leader mélange bonne humeur et
arrogance, mais, si ça peut faire son affaire que je sois et de bonne
humeur et arrogant, bien, tant mieux, mais je l'apprécie par ailleurs tout
autant, puis leur dire que je comprends… Il intervient souvent de ces temps-ci.
Je me demande si ce n'est pas la venue de son nouveau chef... Il profite de
chacune des occasions pour parler parce que peut-être il a peur de perdre…
Des voix :
…
Le Président :
M. le leader, sur le…
Des voix :
…
Le Président :
S'il vous plaît. M. le leader, sur le point qui a été mentionné.
M.
Bédard :
Ceci dit, M. le Président, je serai toujours un allié du leader de
l'opposition, peu importe ce qui lui arrive.
Des voix :
Ha, ha, ha!
M.
Bédard :
Et nous allons collaborer, effectivement, à avoir des consultations.
Le Président :
Si ça peut continuer de même encore pendant trois jours, ça va être correct. M.
le leader de l'opposition.
M. Moreau :
Non, non, non, je veux que le leader du gouvernement sache que, malgré toute
son attitude, il conserve mon estime et qu'il y a des matins que c'est beaucoup
plus difficile que d'autres.
Des voix : Ha, ha, ha!
Mise aux voix
Le
Président : Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie du
projet de loi? Alors, adopté. M. le député de Mercier.
• (10 h 20) •
M. Khadir : Merci… Président. M. le Président,
pour permettre un intermède dans les échanges entre le leader du
gouvernement et le leader de l'opposition officielle, veuillez, s'il vous
plaît, appeler l'article f du feuilleton.
Projet de loi n° 499
Le Président : Alors, à
l'article f du feuilleton, M. le député de Mercier présente le projet de loi
n° 499, Loi modifiant la Loi sur les
normes du travail afin d'interdire les clauses de disparité de traitement en
fonction de la date d'embauche
relatives aux régimes complémentaires de retraite et aux régimes d'assurance
collective. M. le
député de Mercier.
M. Amir Khadir
M. Khadir : Merci, M. le Président. Ce
projet de loi a pour objet d'interdire les clauses de disparité de
traitement relatives aux régimes complémentaires de retraite et aux régimes
d'assurance collective. Il vient renforcer la Loi sur les normes du travail en précisant que les disparités de traitement sont
interdites pour tous les avantages sociaux accordés aux salariés qui
effectuent les mêmes tâches dans le même établissement.
Mise aux voix
Le Président : Est-ce que
l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?
Des voix : Adopté.
Le Président : Adopté. Mme la
députée de Gouin.
Mme David : M. le Président,
veuillez, s'il vous plaît, appeler l'article g du feuilleton.
Projet de loi n° 498
Le Président : Alors, à
l'article g du feuilleton, Mme la députée de Gouin présente le projet de loi n° 498, Loi modernisant les dispositions
relatives aux briseurs de grève et modifiant le Code du travail. Mme la députée
de Gouin.
Mme Françoise David
Mme David : Merci, M. le
Président. Ce projet de loi modifie le Code du travail afin d'interdire le recours à des briseurs de grève dans des
cas qui ne sont pas actuellement couverts par ce code. Le projet de loi prévoit qu'il est interdit pour un employeur d'utiliser,
à l'extérieur de l'établissement où une grève ou un lock-out a été déclaré, les
services ou le produit du travail d'un salarié, d'un entrepreneur, d'une
personne morale ou d'une personne
employée par un autre employeur pour remplir les fonctions d'un salarié
faisant partie de l'unité de négociation en
grève ou en lock-out.
Mise aux voix
Le Président : Est-ce que
l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?
Des voix : Adopté.
Dépôt de documents
Le Président : Adopté. Alors,
à la rubrique Dépôt de documents, M. le leader du gouvernement.
Réponses à des pétitions
M.
Bédard :
Alors, M. le Président, permettez-moi de déposer la réponse du ministre des
Transports, des Affaires municipales, des Régions et de l'Occupation du
territoire aux pétitions déposées les 23 et 30 octobre 2013 par les députés de
Portneuf et de LaFontaine.
Le Président : Alors, ces
documents sont déposés.
Lettre de la députée de Gouin, Mme Françoise David,
informant de son souhait d'être membre
de la Commission des institutions
Pour ma part, je dépose la lettre que m'a adressée
Mme la députée de Gouin, dans laquelle elle m'a fait part de son souhait
de changer de commission afin de devenir membre de la Commission des
institutions.
Lettre du leader de l'opposition officielle sur la
recevabilité de la demande de la députée de Gouin
Et je dépose également la lettre que j'ai reçue de
M. le leader de l'opposition officielle en réponse à la demande formulée par Mme la députée de Gouin.
Évidemment,
je tiens à souligner qu'à la lecture des dispositions de notre règlement
relativement à la composition des commissions et, au surplus, constatant
que l'unanimité nécessaire aux décisions prises par la commission de
l'Assemblée en semblable matière n'existe pas, vous comprendrez donc que je ne
peux donner suite à cette demande.
Dépôt de
rapports de commissions
Alors,
nous sommes rendus maintenant au dépôt de rapports de commissions. M. le
président de la Commission des finances publiques et député de Rimouski.
Étude
trimestrielle de la politique budgétaire du
gouvernement et de l'évolution des finances publiques
M.
Pelletier
(Rimouski) : M. le Président, je dépose le
rapport de la Commission des finances publiques qui a siégé le 20
novembre 2013 afin de procéder à l'étude trimestrielle de la politique
budgétaire du gouvernement et de l'évolution des finances publiques.
La commission s'est
également réunie en séance de travail concernant ce mandat les 1er, 29, 30
octobre et le 3 décembre 2013, et ce rapport contient deux recommandations.
Le
Président : Alors, ce rapport est déposé. M. le président de la
Commission des institutions et député d'Ungava.
Audition du
ministre de la Justice concernant
les commentaires de la Commission des droits
de la personne et des droits de la jeunesse sur
le projet de charte des valeurs québécoises
M. Ferland :
M. le Président, je dépose le rapport de la Commission des institutions, qui,
le 28 novembre 2013, a procédé à l'audition du ministre de la Justice
concernant les commentaires de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, rendus
publics le 17 octobre 2013, sur les orientations gouvernementales au
sujet du projet de charte des valeurs québécoises ainsi que sur le caractère
inconstitutionnel du projet gouvernemental.
La commission s'est
également réunie en séance de travail le 3 décembre 2013 relativement à ce
mandat. Ce rapport contient deux recommandations.
Consultations
particulières sur le projet de loi n° 65
Et
je dépose également le rapport de mandat des consultations particulières et
auditions publiques sur le projet de loi n° 65, Loi concernant le
remplacement et la reconstitution des actes notariés en minute détruits lors du
sinistre ferroviaire le 6 juillet 2013 dans la Ville de Lac-Mégantic.
Étude détaillée
du projet de loi n° 65
Finalement, je dépose
le rapport de mandat de l'étude détaillée du projet de loi n° 65, Loi
concernant le remplacement et la reconstitution des actes notariés en minute
détruits lors du sinistre ferroviaire du 6 juillet 2013 dans la Ville de
Lac-Mégantic. La commission a adopté le texte du projet de loi avec des amendements.
Le Président :
Alors, ces documents sont déposés.
Dépôt de
pétitions
Nous
en sommes maintenant rendus à la rubrique Dépôt des pétitions. J'inviterais Mme la députée de La Pinière, s'il vous plaît.
Bonifier le programme d'aide de la Société
d'habitation aux propriétaires de maisons lézardées
Mme Houda-Pepin :
M. le Président, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée
nationale, signée par 115 pétitionnaires. Désignation : citoyennes et
citoyens du Québec.
«Les faits invoqués
sont les suivants :
«Considérant
l'ampleur du sinistre qui a touché 23 municipalités du Québec en 2012
suite à la sécheresse causant des affaissements de sol et des maisons lézardées
pour plusieurs centaines de résidents;
«Considérant que le gouvernement
du Québec soit sensible aux difficultés vécues par les propriétaires des
résidences lézardées et ait accepté déjà de rétablir un programme de subvention
par le biais de la Société d'habitation du Québec;
«Considérant que les 4,5 millions de dollars
annoncés par ce programme s'avèrent insuffisants pour répondre aux
besoins des sinistrés du Québec, dont la ville de Brossard particulièrement
touchée;
«Considérant que le programme précédent de 2003 fixait à 20 000 $ l'aide financière maximale par
projet, pour l'agglomération de Longueuil, alors qu'en 2013 l'offre
budgétaire s'avère de beaucoup inférieure;
«Considérant qu'un
certain nombre de sinistrés ont réalisé en urgence les travaux en empruntant
des sommes énormes, de 50 000 $ à 70 000 $, plus les
intérêts;
«Considérant
que bon nombre d'autres sinistrés se trouvent dans l'incapacité de trouver les
fonds nécessaires pour réparer et préserver leur immeuble de
conséquences de ce sinistre;
«Et l'intervention
réclamée se résume ainsi :
«Nous,
soussignés, réclamons que le gouvernement du Québec bonifie le programme de la
Société d'habitation du Québec lié aux maisons lézardées afin de
permettre aux victimes en cause d'effectuer les réparations nécessaires et
obligatoires au maintien de leur immeuble, et ce, à un montant équivalent des
subventions offertes aux sinistrés de 2003, en toute équité.»
Je certifie que cet
extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition. Merci, M. le
Président.
Le Président :
Alors, l'extrait de cette pétition est déposé. M. le député de Mercier.
Corriger la
situation d'iniquité
salariale des physiothérapeutes
M. Khadir :
Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à
l'Assemblée nationale, signée par 4 914 pétitionnaires, et
j'en profite pour souligner que l'initiatrice de la pétition ainsi qu'une de
ses collègues, Mme Paradis et Mme Dubé, sont parmi nous dans les tribunes.
Alors, désignation : citoyens et citoyennes du Québec.
«Les faits invoqués
sont les suivants :
«Considérant que les
ergothérapeutes et physiothérapeutes ont toujours fait partie du même groupe
quant aux échelles de salaires — niveaux équivalents de scolarité et
responsabilité professionnelle;
«Considérant que les
curriculums des deux professions ont été rehaussés au niveau de la maîtrise
dans toutes les universités du Québec à la même date et que l'Ordre
professionnel de la physiothérapie a présenté sa demande de modification
réglementaire à l'Office des professions le 2 décembre 2008;
«Considérant que la
demande de modification réglementaire pour les physiothérapeutes a été soumise en février 2010
à une nouvelle directive du ministère du Conseil exécutif qui a entraîné un délai, au-delà du 20 décembre 2010, retardant ainsi l'adoption
de la modification réglementaire au 12 mai
2011;
«Considérant
que les ergothérapeutes bénéficient d'une hausse
salariale de 5,9 % depuis décembre 2010, contre seulement 0,9 % pour les physiothérapeutes;
qu'en mars 2013 le Conseil du trésor a admis l'injustice en consentant une
hausse additionnelle rétroactive au 18 janvier
2013 plutôt qu'au 20 décembre 2010;
«Considérant
que plus de 1 000 physiothérapeutes ont porté plainte à la
Commission de l'équité salariale en mai 2011 et sont toujours en attente
d'un règlement;
«L'intervention
réclamée se résume ainsi :
«Nous, citoyennes et
citoyens du Québec, exigeons que le gouvernement du Québec
corrige la situation d'iniquité salariale des physiothérapeutes,
incluant la rétroactivité au 20 décembre
2010.»
M. le Président, je certifie
que l'extrait que je viens de lire est conforme au règlement et à
l'original de la pétition
•
(10 h 30) •
Le Président :
Merci. Alors, l'extrait de cette pétition est déposé.
J'ai
reçu de la part de M. le député de La Peltrie une demande de dépôt de pétition qui est non
conforme. Est-ce que j'ai un consentement?
Consentement. M. le député de La Peltrie, c'est
à vous, la parole.
Demander à la
commission scolaire de la Capitale
de soumettre aux citoyens de Val-Bélair une offre de
service scolaire cohérente avec le développement du secteur
M.
Caire : Merci, M. le Président. Vous me permettrez de saluer la présence, dans
nos tribunes, des représentants du collectif
pour un parcours scolaire complet à Val-Bélair. Je
les salue.
M. le Président, je dépose l'extrait d'une
pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 2 186
pétitionnaires. Désignation : citoyens et
citoyennes du Québec.
«Les
faits invoqués sont les suivants :
«Considérant
que nous, adultes concernés par le bien-être des enfants du secteur
Val-Bélair, désirons porter à l'attention de la commission scolaire de la Capitale le fait que
nous considérons le projet de transfert des cinquième et sixième années du primaire vers l'école secondaire l'Odyssée inacceptable dans les conditions
présentes;
«Et l'intervention
réclamée se résume ainsi :
«Nous, soussignés, demandons à la commission scolaire
de la Capitale de soumettre aux citoyens de Val-Bélair un projet
conforme au mandat qui lui est confié, c'est-à-dire un projet où le bien-être
des enfants prime et une offre de service scolaire cohérente avec le
développement du secteur.»
Je certifie que cet
extrait est conforme à l'original de la pétition.
Le Président :
Alors, l'extrait de cette pétition est déposé.
J'ai
reçu de la part de M. le député d'Argenteuil
une demande de dépôt d'une pétition non conforme. Est-ce que j'ai un
consentement? Consentement. M. le député
d'Argenteuil.
Intervenir
auprès d'Hydro-Québec
concernant le projet de ligne à 120 kV du
Grand-Brûlé—Dérivation Saint-Sauveur
M.
Richer : Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une
pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée
par 1 202 pétitionnaires. Désignation : citoyens et citoyennes
de la circonscription d'Argenteuil.
«Les
faits invoqués sont les suivants :
«Considérant
qu'Hydro-Québec projette de construire, au coeur
des Laurentides, une ligne de transport 120 kV, comprenant des
pylônes d'une hauteur de [20] mètres,
soit la hauteur d'un immeuble de vingt étages;
«Considérant
que le tracé de la variante nord A proposé par Hydro-Québec viendra augmenter
de 15 mètres le déboisement de l'emprise actuelle et par le fait
même augmentera la pollution visuelle qui affectera considérablement la
beauté des paysages naturels de Sainte-Adèle;
«Considérant qu'Hydro-Québec projette de déboiser
l'emprise actuelle, ceci éliminerait par le fait même l'écran naturel qui nous protège de la vision de la servitude.
Elle affectera la qualité de vie, la quiétude d'un paysage et le bien-être des
gens;
«Considérant
qu'Hydro-Québec veut construire une nouvelle ligne 120 kV, ceci aura un
impact économique qui sera désastreux sur la valeur des propriétés
limitrophes de Sainte-Adèle;
«Considérant
que le conseil municipal de Sainte-Adèle, par
une résolution, appuie les citoyens et adressera une demande à
Hydro-Québec afin de maintenir les pylônes existants ou de les remplacer par
des pylônes d'une même hauteur afin de conserver les emprises actuelles;
«Et l'intervention
réclamée se résume ainsi :
«Nous, citoyens de Sainte-Adèle,
des Pays-d'en-Haut, demandons à l'Assemblée nationale :
«De
s'assurer qu'Hydro-Québec respecte la Loi sur le développement durable et la
Charte des paysages naturels et [du] patrimoine bâtis des Laurentides;
«Une intervention de
votre part avant que l'irréparable ne soit accompli par la société d'État du Québec
sur le projet Grand-Brûlé—Saint-Sauveur
s'ils vont de l'avant avec ce qu'ils nous ont présenté le 20 mars 2013.»
Je certifie que cet
extrait est conforme à l'original de la pétition. Merci, M. le Président.
Le Président :
Alors, l'extrait de cette pétition est déposé.
Il n'y a
pas de réponses orales aux pétitions ni d'interventions portant sur une question
de droit ou de privilège.
Questions
et réponses orales
Nous en sommes donc
rendus à la période de questions et de réponses orales. Je cède la parole à M.
le chef de l'opposition officielle.
Atteinte des objectifs en
matière d'équilibre budgétaire
M.
Jean-Marc Fournier
M. Fournier :
Dans son discours du budget, le ministre des Finances déclarait, et je
cite : «J'annonce que le budget sera
équilibré en 2013‑2014 et les années suivantes.» Il l'a réaffirmé à New York en
avril, il l'a répété encore en septembre.
La vérité, c'est que le déficit zéro, c'est un trou de 2,5 milliards de
dollars. Le PQ a raté la cible des revenus, la cible des dépenses, la
cible du déficit.
Dimanche, le ministre
des Finances a déclaré : On n'a pas été bons. On s'est trompé beaucoup.
La première ministre
est au courant depuis le mois d'avril qu'elle s'est trompée au budget, mais,
comme elle voulait aller en élection avant
la mise à jour, elle refusait de l'admettre. Maintenant, la même tactique
recommence : une nouvelle échéance électorale l'amène à prétendre
que toutes ses promesses non budgétées pour l'an prochain seront respectées.
Mais ça ne marche pas, M. le Président.
Dans
le budget, le PQ prévoit une hausse des dépenses de 1,5 milliard en santé
pour 2014‑2015. Dans sa mise à jour,
il prévoit une hausse du budget pour tout le gouvernement, tous les ministères,
de 1,3 milliard. Il n'y a pas assez d'argent
pour les engagements budgétés, il n'y en aura pas pour les promesses non
budgétées. Pourquoi nier la réalité de vos chiffres?
Le Président :
Mme la première ministre.
Mme
Pauline Marois
Mme
Marois :
Alors, merci, M. le Président. La réalité des chiffres que nous avons déposés,
c'est que nous avons décidé… nous avons décidé de continuer à être
responsables, de contrôler la croissance de nos dépenses. Nous l'avons fait
cette année, nous avons même atteint une cible plus basse que celle qui avait
été prévue, M. le Président, contrairement à tout ce qui s'est passé sous
l'ancien gouvernement, qui, à chaque fois, systématiquement, a raté sa cible de contrôle des dépenses, d'ailleurs
tellement que ça a été difficile pour nous d'atteindre cet objectif-là parce
qu'il y avait une habitude de prise dans
l'ensemble du gouvernement, qui faisait que, bon an, mal an, on augmentait les
dépenses parce qu'en contrepartie on augmentait les tarifs, les impôts, les
taxes. Ça, c'était la recette du gouvernement libéral.
D'ailleurs,
le chef du Parti libéral du Québec a, lui, proposé qu'on atteigne l'équilibre
budgétaire seulement en 2017‑2018, M.
le Président. Or, le gouvernement, plus responsable que ne l'est le nouveau
chef du Parti libéral du Québec, Philippe Couillard, a décidé que la
cible 2015 était raisonnable et était atteignable.
Nous allons agir sur
tous les fronts, comme nous l'avons toujours fait. Nous avons fixé une cible
quant à la croissance de nos dépenses, nous
avons établi des priorités sur les dépenses que nous voulons faire pour aider
les gens. Je pense, entre autres, à la question de l'assurance
autonomie, aux politiques de solidarité sociale, aux politiques en matière de garde, aux politiques en matière
d'investissement pour rehausser l'emploi, pour soutenir nos
entrepreneurs, pour augmenter et améliorer
notre productivité, soutenir nos agriculteurs. Ce sont des choix, des priorités
qu'on a établis...
Le Président :
En terminant.
Mme
Marois :
…et c'est en fonction de cela que nous allons agir, M. le e Président.
Le Président :
Première complémentaire, M. le chef de l'opposition.
M.
Jean-Marc Fournier
M.
Fournier : Dans le budget de l'an passé, le ministre des
Finances prévoit, à la page A.50, des dépenses en santé de 1,5 milliard en 2014‑2015. Dans sa
mise à jour d'il y a une dizaine de jours, à la page A.62, il dit que, pour
tout le gouvernement, la hausse des dépenses va être de 1,3 milliard. Il
n'y a pas suffisamment d'argent en 2014‑2015 pour les engagements du budget. Elle veut nous faire croire que les
promesses, depuis ce temps-là, qui ne sont pas budgétées, elle va les
réaliser. Je lui demande de dire la vérité.
Le Président :
Mme la première ministre.
Des voix :
…
Le Président :
M. le chef de l'opposition, je vous recommande de faire attention dans vos
propos. Mme la première ministre.
Mme
Pauline Marois
Mme
Marois :
Alors, M. le Président, le budget, quand nous avons préparé le budget, nous
l'avons établi sur la base des prévisions du ministère des Finances et
sur la base des prévisions des économistes de l'ensemble des institutions financières du Québec et même des institutions
financières pancanadiennes, M. le Président. Alors, ces prévisions-là nous
amenaient à pouvoir atteindre, de fait, l'équilibre budgétaire, compte tenu de
la hausse prévisible des revenus. Il s'est avéréque la conjoncture n'a pas été celle qui avait été prévue, et les taux
de progression des revenus ont été plus bas que prévu.
Il
y a un autre phénomène qui a joué, M. le Président, et j'en rends en partie
responsable le gouvernement libéral qui nous a précédés. Nous avons eu
un… Je vais revenir, M. le Président.
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.
M.
Jean-Marc Fournier
M. Fournier :
Malheureusement, elle ne répond pas à la question. Il n'y a pas d'argent pour
les engagements budgétés, puis elle ne veut
pas avouer qu'il n'y en aura évidemment pas pour les promesses qui ne sont pas
budgétées. Les 200 millions des
universités, c'est du vent. Le 80 millions du plan de solidarité,
200 millions de la forêt, 165 millions de la politique
industrielle, c'est du vent. C'est un paravent électoraliste, M. le Président.
On ne peut pas mettre un gallon dans une pinte. On ne peut pas la croire.
Le Président :
Mme la première ministre.
Mme Pauline Marois
Mme
Marois :
Alors, M. le Président, je sais que le Parti libéral a une grande expérience
dans l'annonce de projets d'investissements jamais budgétés; ce n'est pas notre
cas, M. le Président. Alors…
Des voix :
…
Mme
Marois :
Je m'excuse, là, ce n'est pas notre cas. Alors, je vais terminer la réponse de
tout à l'heure. Il y a eu un manque à gagner, du côté des rendements de la taxe
de vente, de 1 milliard de dollars parce que le Parti libéral du Québec, alors qu'il formait le
gouvernement, avait poussé le bouchon trop loin et avait augmenté la taxe de
vente de telle sorte que maintenant on ait un rendement décroissant,
décroissant. C'est ça que ça veut dire, M. le Président. Alors, on repassera
pour les leçons quant à la bonne gestion de la chose…
Le Président :
En terminant.
Mme
Marois : …publique, M. le Président. Alors, ce que je veux
signifier à l'opposition officielle, c'est que…
Le Président :
Troisième complémentaire, M. le chef de l'opposition.
M.
Jean-Marc Fournier
M. Fournier :
La première ministre refuse de voir la vérité de ses propres documents. Son
budget prétend qu'à la santé seulement il va y avoir 1,5 milliard de plus
en 2014‑2015. Elle vient de nous dire que, non, pour tout le gouvernement, ça va être 1,3 milliard. Puis
elle veut nous faire croire qu'il va y en avoir plein d'autres pour toutes
les autres promesses? Elle nous a trompés depuis un an. C'est assez, M. le
Président!
• (10 h 40) •
Le Président :
M. le chef de l'opposition, vous savez fort bien que ces propos-là ne peuvent
pas être dits en Chambre. Je vous demande de les retirer. Il les retire. Mme la
première ministre.
Mme
Pauline Marois
Mme
Marois :
Alors, M. le Président, je crois que l'opposition officielle devrait être un
peu prudente à cet égard. Je regardais des données tirées du budget de
2009, M. le Président, alors que le gouvernement libéral… alors
que le gouvernement libéral était au pouvoir. Un mois à peine avant de déposer
le budget, la ministre annonçait qu'on allait maintenir
l'équilibre budgétaire, alors que c'est 4 milliards de dollars
qu'on a annoncés comme déficit, M. le
Président. Après ne pas avoir dit tout ce
qu'ils auraient dû dire sur Gentilly et sur sa fermeture, M. le Président, je crois que nous n'avons
aucune leçon à recevoir. Lorsque nous présenterons le budget des
crédits, c'est-à-dire les dépenses dugouvernement, il pourra
constater que nous allons respecter les engagements que nous avons
pris à l'égard de la population québécoise.
Le Président :
Principale, M. le député de Brome-Missisquoi.
Situation économique et
financière du Québec
M.
Pierre Paradis
M.
Paradis :
M. le Président, la première ministre répète à qui veut bien l'entendre que l'économie
du Québec se porte bien, du moins, du moins aussi bien que celle du reste du Canada
ou des États-Unis. Le ministre des Finances, quant
à lui, est passé aux aveux en fin de
semaine, et vous me permettrez de le citer : Je n'étais pas en
mesure de porter un jugement intelligent. C'est vrai qu'on s'est trompé beaucoup.
C'est vrai qu'on n'a pas été bons.
Qui dit la vérité,
celle qui se prétend bonne ou celui qui admet qu'il n'a été pas bon?
Le Président :
M. le ministre des Finances.
M.
Nicolas Marceau
M. Marceau :
M. le Président, on va revenir sur la situation économique. La question de ce
matin est équivalente à celle d'hier et possiblement à celle de demain. Une
dose de répétitions chez l'adversaire.
M. le Président, la situation économique du Québec est une situation
de croissance économique modérée, je l'ai dit à plusieurs reprises. Nous
avons par ailleurs des indicateurs très, très positifs du marché du travail, je
vous rappelle la création d'emplois de 53 000,
53 000 emplois quand on prend les 10 premiers mois de l'année 2013 et
qu'on les compare aux 10 premiers mois de l'année 2012, dont 57 000
du secteur privé, un taux de chômage qui est en baisse, un taux d'activité qui
est en hausse. M. le Président, le marché du travail québécois se porte bien.
Par ailleurs, d'autres
indicateurs sont également des indicateurs qui sont bons, j'en prends pour
preuve celui des exportations. Je vous rappelle que les exportations
québécoises ont augmenté, janvier à septembre 2013 sur janvier à septembre
2012, de 4,5 %, ce qui est pas mal, pas mal, pas mal meilleur que ce qui
s'est passé dans le reste du Canada, où c'est 1,2 %. Alors, M. le
Président, d'autres indicateurs montrent la même tendance.
Alors, évidemment, j'aimerais que ce soit plus…
Le Président : En terminant.
M. Marceau :
…j'aimerais qu'on ait plus de croissance économique. C'est pour ça qu'on a mis
en place notre politique économique, M. le Président.
Le Président : Première
complémentaire, M. le député de Brome-Missisquoi.
M. Pierre Paradis
M.
Paradis : M. le
Président, à la page A.7 de sa mise à
jour économique de la semaine dernière, le ministre des Finances écrit que la croissance économique du Québec,
pour 2013, est inférieure de 50 % à celle du reste du Canada et des
États-Unis. 50 % de moins, ce n'est pas bon.
Le ministre des Finances peut-il risquer un
jugement intelligent et nous dire pourquoi il n'a pas été bon?
Le Président : M. le ministre
des Finances.
M. Nicolas Marceau
M. Marceau : M. le Président,
je vais revenir à la question de l'équité budgétaire, c'est important. Le Parti
libéral, à ce jour, n'a pas de position
claire. D'ailleurs, j'aimerais bien que le député de Brome-Missisquoi, le
caucus libéral, le Parti libéral et
que Philippe Couillard arrivent un jour à une position qui est claire,
compréhensible pour les Québécois.
M. le
Président, une chose est certaine, de notre côté, on n'ira pas dans le sens de
ce qu'on a pu observer du Parti libéral ces dernières années,
c'est-à-dire des hausses de taxe de 6 milliards pour les Québécois, des
dépenses qui n'ont jamais été contrôlées,
hein? On parle de neuf ans, 10 ans de cibles dépassées. M. le Président, de
notre côté, la gestion va être serrée sur les dépenses, on n'augmentera
pas les taxes, on n'augmentera pas les impôts…
Le Président : En terminant.
M. Marceau : …et on va
continuer de stimuler l'économie québécoise, M. le Président.
Le Président : Deuxième
complémentaire, M. le député de Brome-Missisquoi.
M. Pierre Paradis
M.
Paradis :
Mais, M. le Président, le titre de ministre des Finances comporte une
responsabilité ministérielle à valeur ajoutée, une respectabilité
ministérielle à valeur ajoutée.
Comment le ministre des Finances a-t-il pu, en
si peu de temps, décrédibiliser sa fonction au point de se faire affubler par
les médias du titre de «sinistre des finances»?
Le Président : M. le ministre
des Finances, en rappelant à nos collègues ici qu'on doit appeler les gens ici
par leur titre.
M. Nicolas Marceau
M. Marceau : M. le Président,
M. le Président, je vais passer sur ce genre de remarque du député de Brome-Missisquoi, qui ne l'honore pas, et je vais
revenir simplement sur son chef, parce qu'il y a un chef en principe dans
ce parti-là, dans le libéral. Je rappelle que le chef a parlé de 2017-2018. Est-ce qu'il va y avoir un nouveau Philippe-flop, M. le Président? La question
se pose. Parce qu'effectivement
2017-2018, ça n'est pas responsable. Ce qui ne serait pas plus responsable, ça serait d'augmenter les taxes et
les impôts à la manière de l'ancien gouvernement, M. le Président. Et ce
qui ne serait pas responsable non plus, ça serait d'augmenter les dépenses à
des rythmes de 4 % aux dépenses de programmes et de 5 % aux dépenses
consolidées. Ça, c'était…
Le Président : En terminant.
M. Marceau : …irresponsable!
Nous sommes responsables, nous allons stimuler l'économie québécoise, nous
allons contrôler les dépenses, M. le Président.
Le Président :
Principale, Mme la députée de Trois-Rivières.
Situation
financière du réseau
des centres de la petite enfance
Mme
Danielle St-Amand
Mme
St-Amand : M. le Président, en plus des coupures de
56 millions imposées au réseau des services de garde au printemps
dernier, on apprend, ce matin, que la ministre de la Famille pourrait imposer
de nouvelles coupures de 40 millions aux CPE.
De
plus, depuis la mise à jour économique, on sait que le gouvernement péquiste
n'a pas l'argent pour remplir ses engagements,
notamment celui de développer de nouvelles places, et qu'il sera incapable,
encore une fois, de tenir sa promesse.
M.
le Président, la ministre peut-elle avouer aux jeunes parents du Québec que,
lorsqu'elle a fait son annonce, elle n'en avait pas, d'argent, elle le
savait, et elle n'en a pas plus aujourd'hui?
Le Président :
Mme la ministre de la Famille.
Mme Nicole Léger
Mme
Léger : Alors, M. le Président, je veux dire clairement qu'il
n'y a pas de coupure dans les CPE. Je le dis, je le confirme et je le
répète.
Maintenant,
j'en profite pour dire que j'ai tenu ma promesse avec les associations de CPE
du Québec de tenir un chantier de travail, dans le fond. Pour ce
chantier de travail là, qui est fait avec eux, la question qui est sur la table, c'est de voir, en fin de compte,
avec la même subvention, comment se fait-il qu'il y a des CPE qui sont
en déficit et d'autres pas, que certains ont
des surplus et d'autres pas. C'est ça, la question sur le chantier de travail,
donc comment on peut mieux optimiser et s'assurer de la pérennité de
notre réseau, dont nous sommes très fiers, M. le Président.
Le Président :
Première complémentaire, Mme la députée de Trois-Rivières.
Mme
Danielle St-Amand
Mme
St-Amand : M. le Président, c'est ça, le problème. Des fois,
c'est des comités, des fois, c'est des chantiers, mais ils n'en ont pas, d'argent, l'argent n'est
jamais au rendez-vous. Elle a beau dire qu'il n'y a pas de coupure — c'est
ce qu'elle vient de nous dire — une note interne de son propre ministère
indique qu'à court terme on doit combler un manque à gagner récurrent de
l'ordre de 40 millions.
La
ministre peut-elle admettre qu'elle fera payer l'incompétence de son
gouvernement aux familles du Québec et que, là aussi, comme le disait le
ministre des Finances, ils n'ont franchement pas été bons?
Le Président :
…de la Famille.
Mme
Nicole Léger
Mme
Léger : Si la députée, M. le Président, voit bien, dans le
dernier budget que nous avons mis sur la table, ce budget-là a été clair, il y a une augmentation de
3,2 % du ministère de la Famille expressément pour créer des
nouvelles places en service de garde.
Nous avons annoncé
28 000 nouvelles places en service de garde. Et, je tiens à le dire, hier,
nous avons commencé le déploiement de toutes
les 15 000 places additionnelles. Alors, je pense qu'on est heureux, tous
les députés ici, de l'Assemblée
nationale, de ce déploiement, dans chacune des circonscriptions, des
15 000 places. Hier, j'ai annoncé celles de la Côte-Nord et du
Nord-du-Québec, c'est 363 places à tous les enfants et parents de
Nord-du-Québec et de la Côte-Nord.
Le Président :
Deuxième complémentaire, Mme la députée de Trois-Rivières.
Mme
Danielle St-Amand
Mme
St-Amand : C'est bien beau, des annonces, M. le Président, il
n'y en a pas, d'argent. De l'aveu même de son collègue des Finances, il
n'y a pas d'argent nécessaire pour le développement des nouvelles places, les
familles du Québec le savent maintenant, M. le Président.
Aujourd'hui,
la ministre peut-elle avoir la décence d'avouer que son gouvernement s'est
aussi trompé à ce sujet, que maintenant, au lieu d'avoir un enfant, une
place, c'est pas d'argent, pas de place?
Le Président :
Mme la ministre de la Famille.
Mme
Nicole Léger
Mme Léger : Je comprends, M.
le Président, qu'on est encore dans le même parfum chez les libéraux, M. le
Président, où, les libéraux, c'était un don et un permis. Alors, les
libéraux ont retardé le développement des places. Il y a beaucoup de pression pour développer les
places. Nous, c'est un enfant, une place. On n'est pas au Parti libéral
ici, on n'a pas à politiser les places, M. le Président. Je ne m'appelle pas
Tony Tomassi, je m'appelle Nicole Léger.
Le Président : Je ne sais pas
si notre règlement permet de s'autonommer en Chambre.
Des voix : …
• (10 h 50) •
Le Président : Principale,
madame… M. le chef du deuxième groupe d'opposition.
Gestion du Centre hospitalier de l'Université de Montréal
M. François Legault
M. Legault :
Oui. M. le Président, le gouvernement a complètement perdu le contrôle des
dépenses. Je ne sais pas si la première ministre a lu la mise à jour
économique. Si elle ne l'a pas fait, elle pourrait l'emprunter au ministre et
lire seulement une page, la page C-24.
À la page
C-24, M. le Président, on le voit clairement, les dépenses, cette année, augmentent de 3,3 % si on exclut
le service de la dette, de 4,1 % si on inclut le service de la dette. Et, M.
le Président, le ministre des Finances nous dit : Il n'y a pas d'inflation
au Québec. Une chance! Ça serait quoi, l'augmentation des dépenses s'il y avait
de l'inflation, M. le Président?
M. le Président, un bon exemple de perte de
contrôle des dépenses, c'est la gestion du CHUM, le plus gros hôpital au Québec.
Selon les derniers chiffres disponibles, au CHUM, il y a
3 687 employés non soignants, dont 344 gestionnaires. Juste dans
un hôpital, M. le Président. Ça n'a pas empêché le gouvernement, le
22 août dernier, de renouveller le
contrat du D.G. Le ministre de la
Santé a même
dit, je le cite : C'est une sage décision, je fais complètement confiance au conseil d'administration du
CHUM. Évidemment, on n'a pas entendu le Parti libéral, parce que c'est tout leur beau monde qu'ils avaient
nommé là.
Mais, M. le Président, ce que je veux savoir ce matin, c'est : Est-ce que
la première ministre trouve que le CHUM est bien géré? Est-ce
qu'elle trouve que c'est raisonnable, 3 600 non…
Le Président : Mme la
première ministre.
Mme Pauline Marois
Mme
Marois :
Alors, M. le Président, je crois que le chef de la deuxième opposition aurait
besoin de l'aide du Vérificateur
général du Québec — d''ailleurs,
j'ai l'intention de présenter une motion, on va regarder ça avec le
leader du gouvernement — parce
qu'à chaque fois que le chef du deuxième groupe d'opposition présente des
chiffres et que nous les revisons on se rend
compte que c'est truffé d'erreurs. Et la meilleure preuve de cela, c'est le
document qu'il a déposé la semaine
dernière, affirmant qu'on avait pris des engagements pour 10 milliards de
dollars, laissant croire que ce 10 milliards
s'appliquait dans les mois qui viennent, dans l'année qui vient, alors qu'il a
comptabilisé des immobilisations avec
des dépenses de programme, alors qu'il a comptabilisé deux fois les mêmes
dépenses, M. le Président, alors qu'il a mis dans ce document un
investissement qui s'étale sur 10 ans, la Politique nationale de la
ruralité. Son document est un véritable torchon, M. le Président. Et…
Des voix : …
Mme
Marois : Absolument!
Alors, quand il m'amène des chiffres ce matin…
Des voix : …
Le Président : S'il vous
plaît!
Mme
Marois :
…peut-être sont-ils justes, peut-être ne le sont-ils pas. Mais la première
fois, l'année… il y a quelques mois, il s'était trompé de 3 000 %
dans les projets d'investissement. On repassera…
Des voix : …
Le
Président : S'il vous plaît! Mme la première ministre,
j'espère… On va essayer tous ici, là, d'éviter le langage qui est
blessant. M. le chef du deuxième groupe d'opposition, en complémentaire.
M. François Legault
M. Legault : …document, page
C.24, les dépenses augmentent de 3,3 %. Mais, M. le Président, la première
ministre n'a pas répondu à ma question. En
juin dernier, la députée de Groulx a fait venir le D.G. du CHUM ici. Le
D.G. du CHUM a avoué qu'il avait engagé des cadres sans autorisation, qu'il
avait donné des contrats sans appel d'offres.
Comment la première ministre a-t-elle
pu garder en poste le D.G. et même être d'accord pour renouveler son
contrat?
Le Président :
M. le ministre de la Santé.
M.
Réjean Hébert
M.
Hébert :
M. le Président, la situation du CHUM est sérieuse. Le Vérificateur général a
complété son évaluation. On souligne des
problèmes de gestion, au CHUM, qui sont sérieux, avec des nominations et une
rémunération des cadres qui ne respecte pas
les règles, des contrats qui ont été attribués de gré à gré, alors qu'ils
auraient dû faire preuve… faire face
à des appels d'offres, des dépenses de déplacement qui ne respectent pas les
normes également et une absence de transparence envers le conseil
d'administration. Nous avons attendu le rapport du VG pour avoir faits et
causes dans ce fait plutôt que de lancer…
Le Président :
En terminant.
M.
Hébert :
…des accusations à tort et à travers, comme le député de Saint-Jérôme a fait,
M. le Président. Nous avons…
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.
M.
François Legault
M.
Legault : M. le Président, tout le monde est au courant des
problèmes depuis le mois de juin. Personne n'est responsable. Le ministre n'est pas responsable, le conseil
d'administration, pas responsable, le D.G., pas responsable. C'est ça,
le problème au Québec, c'est qu'il n'y a jamais personne de responsable.
Est-ce
que la première ministre peut prendre ses responsabilités? Qu'est-ce qu'elle va
faire pour faire le ménage dans le CHUM, M. le Président? C'est le plus gros
hôpital du Québec.
Le Président :
M. le ministre de la Santé.
M.
Réjean Hébert
M.
Hébert :
M. le Président, nous prenons nos responsabilités. Nous ne lançons pas des
accusations à tort et à travers, comme le député
de Saint-Jérôme puis le chef du deuxième groupe d'opposition, M. le Président, nous attendons d'avoir des faits. Nous avons attendu que ce soit
documenté par le Vérificateur général. Nous avons attendu que les accompagnateurs qui ont été mis en place au CHUM
pour faire l'observation de ce qui se passait au niveau de la gestion
et de la gouvernance puissent nous faire des
recommandations préliminaires. Et, dans les prochaines heures, M. le Président, nous prendrons les
décisions qui s'imposent.
Le Président :
Principale, Mme la députée de Montarville.
Réglementation du prix des
livres
neufs imprimés et numériques
Mme
Nathalie Roy
Mme
Roy
(Montarville) : Bonjour, M. le Président! On va changer de ton, si vous le voulez bien. Le
ministre de la Culture veut…
Des voix :
…
Le Président :
C'est à vous, la parole, Mme la députée de Montarville.
Mme
Roy
(Montarville) : Le ministre de la Culture veut limiter à 10 % les rabais sur le prix des nouveaux livres, alors qu'actuellement certains détaillants offrent
des rabais de 20 % à 40 %. Nous, c'est clair, nous sommes contre ce
projet. Le PQ est pour, c'est clair
également. Mais là on cherche la position du Parti libéral. On sait que la
députée de l'Acadie est favorable, mais qu'en pense le chef du Parti
libéral? Est-ce que ce sera le prochain Philippe-flop du PLQ?
En
tous les cas, M. le Président, je vais vous démontrer comment les consommateurs
seront pénalisés. Ce livre, qui a été
acheté dans une grande surface il y a quelques jours à 24 $... a été payé
24 $ plutôt que 35 $ en librairie. C'est une économie de 11 $ pour le consommateur. Si le
PQ et le PLQ s'associent, eh bien, ce même livre sera vendu 31,50 $,
une…
Le Président :
J'imagine que la question va au ministre de la Culture. Alors, M. le ministre
de la Culture.
Des voix : …
M. Maka Kotto
M. Kotto :
M. le Président, ma collègue n'a pas eu le temps de terminer sa question, elle
avait probablement une interrogation à la fin de son laïus.
Je dirais tout simplement que je connais la
position de la CAQ depuis le jour un de la commission parlementaire qui s'est tenue autour de cet enjeu touchant un prix
plancher sur les livres neufs… sur le prix des livres neufs imprimés et numériques. Ils ont été clairs. Ce qui m'inquiète
par contre, c'est la position du Parti libéral, exprimée par la voix de
la porte-parole, la députée d'Acadie, à
l'effet qu'il fallait aller de l'avant, y aller très vite, nous reprochant même
de traîner des pieds. Elle avait mis cinq ans avant de s'intéresser au
dossier de façon tangible.
Et je m'interroge
également de savoir où loge exactement M. Couillard dans ce dossier et aussi
quelle est la position de l'ensemble du caucus relativement à ce dossier. Ça,
personne ne le sait, c'est un grand mystère.
Le Président :
Première complémentaire, Mme la députée de Montarville.
Mme
Nathalie Roy
Mme Roy
(Montarville) :
M. le Président, comment le fait d'augmenter les prix du livre va augmenter les
ventes? Le prix unique du livre va priver aussi les auteurs de revenus en
raison de la diminution des ventes.
Par
ailleurs, Blaise Renaud, le président de Renaud-Bray, a demandé : Comment
le gouvernement pourra empêcher les
gros joueurs de l'extérieur, comme Amazon, d'offrir des livres à rabais?
Cette loi ajoutera encore un nouveau fardeau aux Québécois qui sont déjà
les plus taxés en Amérique du Nord.
Alors, M. le
Président, pourquoi priver les lecteurs de grosses économies sur les nouveaux
livres?
Le Président :
M. le ministre de la Culture.
M.
Maka Kotto
M. Kotto :
M. le Président, la CAQ nous a habitués à défendre les PME, et je veux informer
ma collègue à l'effet que notre réseau de
librairies indépendantes est constitué de PME, c'est 12 000 emplois, c'est
800 millions de ventes de livres neufs par année.
Alors,
ma question est de savoir : Demain, quand ce réseau va s'effondrer, que
direz-vous aux familles des gens qui y
travaillent? Que répondrez-vous à ces gens qui vont se retrouver au chômage?
Partout où il n'y a pas eu réglementation, on l'a constaté, il y a eu
oligopole en puissance et effondrement de la lecture…
Le Président :
En terminant.
M. Kotto :
…et augmentation de prix des livres. Ce qui va, demain, disons, se limiter à
10 % va...
• (11 heures) •
Le Président :
Deuxième complémentaire, Mme la députée de Montarville.
Mme
Nathalie Roy
Mme Roy
(Montarville) : Bon, M. le Président, ce n'est pas fini, on n'a eu aucune preuve de ce
qui a été dit là, là.
À
la veille de Noël, il y a une
nouvelle taxe qui pourrait frapper
les citoyens. Le rapport sur l'avenir du cinéma québécois
propose au gouvernement la création d'une nouvelle taxe sur les produits
électroniques comme les téléviseurs, les portables, les téléphones
intelligents et les tablettes comme celle-ci, par exemple. Alors, avec la TPS,
et la TVQ, et aussi l'écotaxe, ces produits sont déjà taxés trois fois.
Le ministre peut-il
fermer la porte à cette quatrième taxe sur les...
Le Président :
M. le ministre de la Culture.
M. Maka Kotto
M. Kotto :
M. le Président, les taxes, ce n'est pas nous, ce sont les libéraux.
Des voix :
…
Le
Président : M. le député de Jean-Lesage, je vous ai entendu
encore. Ça me surprend, je vous ai entendu encore.
Des voix :
…
Le Président :
S'il vous plaît! M. le ministre, veuillez compléter.
M. Kotto : M. le Président,
ma collègue met en relief des scénarios catastrophe relativement à ce qui va arriver. Il n'y a aucune étude qui peut soutenir
ce qu'elle avance ici comme assertion. J'ai proposé avant-hier
l'élaboration d'un
projet de loi qui s'étendrait sur trois années. Attendons de voir. Nous, nous
sommes convaincus que la mesure va être constructive et va profiter aux
consommateurs québécois parce qu'on va maintenir la diversité de l'offre de
titres de livres nouveaux au Québec, contrairement à ce qui arriverait...
Le Président : En terminant.
M. Kotto : ...en défendant
votre position.
Le Président : Principale,
Mme la députée de Laviolette.
Demande d'accès à des documents
d'Hydro-Québec
Mme Julie Boulet
Mme Boulet :
M. le Président, le 10 octobre dernier, je faisais une demande d'accès à
l'information à Hydro-Québec pour obtenir la liste des projets
hydroélectriques en cours et la liste des tous les contrats où il y avait des
dépassements de coûts, et incluant le nom des entrepreneurs, les échéanciers et
les coûts estimés.
Hydro-Québec a refusé de nous transmettre les
documents. Pourtant...
Des voix : …
Mme Boulet : Pourtant, M. le
Président...
Des voix : …
Le
Président : S'il vous plaît! S'il vous plaît! Il n'y a qu'une
personne qui a le droit de parole ici, c'est Mme la députée de
Laviolette.
Mme Boulet :
Pourtant, M. le Président, on sait qu'au ministère des Transports on rend
publique l'information lors
d'attribution de contrats, notamment la description des travaux, le montant des
soumissions, les soumissionnaires, l'entreprise
qui obtient le contrat et les dépassements de coûts s'il y a lieu. Alors, ce
que je comprends, c'est deux poids, deux
mesures : des règles pour le ministère des Transports et des règles... Ce
n'est pas même des règles, c'est des passe-droits pour Hydro-Québec.
Alors, comment la ministre peut expliquer ce
manque flagrant de transparence de la part de la société d'État? Et peut-elle
s'engager ici aujourd'hui à déposer dans les plus brefs délais les documents
demandés?
Le Président : Mme la
ministre des Ressources naturelles.
Mme Martine Ouellet
Mme
Ouellet :
M. le Président, c'est assez particulier, la question de la députée de
Laviolette, la députée même de la
région de la centrale Gentilly. Alors qu'en ayant les informations pour
s'assurer de faire semblant de ne pas le savoir ils ne demandaient pas
de rapport à Hydro-Québec tellement qu'ils ne voulaient pas le savoir… Mais ils
savaient, mais ils faisaient semblant de ne
pas le savoir, M. le Président. Ça fait que de l'entendre aujourd'hui faire ces
remarques-là, alors qu'à l'époque où
nous étions à l'opposition nous avons été obligés de demander et de redemander
l'information, jusqu'à un outrage au Parlement pour avoir les informations, je
trouve ça assez particulier ce matin, M. le Président.
Le Président : Juste pour le…
Des voix : …
Le Président : Juste pour le
bon fonctionnement de notre séance, nous allons éviter d'imputer des motifs à
l'un et à l'autre et…
Des voix : …
Le Président : S'il vous
plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! Ça va. Mme la députée de Laviolette,
en complémentaire.
Mme Julie Boulet
Mme Boulet : Alors, je vais
vous lire quelques citations : «…pourquoi la ministre n'exige-t-elle pas
d'Hydro-Québec [qu'ils communiquent] immédiatement les documents demandés?»
«…qu'est-ce qu'elle attend, la ministre, pour mettre son poing sur la table
puis dire à Thierry Vandal de donner les documents tout de suite?» «…pourquoi ce traitement
de faveur d'Hydro-Québec?» Alors, M. le Président, ça, ces paroles-là viennent
du député de Jonquière alors qu'il
était assis juste ici. Mais j'avoue qu'il était plus jasant, qu'il avait plus
de convictions à l'époque.
Alors,
qu'est-ce que la ministre… C'est elle qui est au gouvernement, qu'est-ce
qu'elle répond à son collègue?
Le Président : Mme la
ministre des Ressources naturelles.
Mme Martine Ouellet
Mme
Ouellet :
Oui. Merci, M. le Président. Toujours aussi surprise des déclarations de la
députée de Laviolette, de, tout d'un
coup, s'intéresser à ce que fait Hydro-Québec, alors que, lorsqu'elle était au
sein du gouvernement, au sein du Conseil des ministres, elle ne s'y
intéressait pas du tout concernant Gentilly. Il faut se rappeler, M. le
Président. Donc, un petit peu surprise de voir ça aujourd'hui.
Et, par rapport à sa question, la députée ne m'a
jamais contactée pour me demander qu'est-ce qu'il en était concernant ces
demandes d'information là. Hydro-Québec ne réfère pas à la ministre pour
chacune des demandes d'information, M. le Président, donc je suis un peu
surprise de sa demande ce matin.
Le Président : Deuxième
complémentaire, Mme la députée de Laviolette.
Des voix : …
Le Président : Un instant. Un
peu trop…
Mme Julie Boulet
Mme Boulet : La ministre a refusé de nous transmettre les rapports d'Hydro-Québec sur les feux de forêt, elle est incapable de défendre les travailleurs
pylôniers, il n'y a toujours pas de règlement sur les tarifs d'électricité avec
les alumineries, et, aujourd'hui, elle cautionne Hydro-Québec dans son mépris
envers les citoyens du Québec.
Alors, M. le Président, pour Hydro-Québec, la ministre n'existe même pas. Alors, il faudrait peut-être transférer le dossier d'Hydro-Québec
au député de Jonquière, peut-être qu'il pourrait répondre à ses propres questions.
Mais ce qui est clair, c'est qu'elle, elle
n'existe pas. Peut-être qu'elle a juste existé quand elle était leur
employée, tout simplement.
Le Président : Mme la
ministre des Ressources naturelles.
Mme Martine Ouellet
Mme
Ouellet :
Merci, M. le Président. Quand les propos d'une députée sont rendus à des
insultes, c'est parce que la députée n'a plus grand-chose à dire, M. le
Président. Je suis très déçue de…
Des voix : …
Mme
Ouellet :
Je vais vous dire ce que le gouvernement a fait depuis qu'on est au
pouvoir : réparer le gâchis libéral dans le dossier de la centrale nucléaire Gentilly, alors que le Parti
libéral n'a rien fait. Ça fait que c'est assez désolant de l'entendre ce
matin, M. le Président.
Le Président : En terminant.
Mme
Ouellet : Nous
avons fait l'éolien. Nous avons géré les minicentrales parce qu'elles étaient
en période de surplus. La planification…
Le Président : Principale, M.
le député de Nicolet-Bécancour.
Rapport d'enquête sur l'abattoir Levinoff-Colbex inc.
M. Donald Martel
M.
Martel :
M. le Président, le gouvernement a ordonné en février 2013 une enquête sur la
vente de l'abattoir Levinoff-Colbex. En 2006, la Régie des marchés
agricoles a autorisé cette transaction malgré un avis contraire des fonctionnaires du MAPAQ. En 2011, on a appris que
l'ex-ministre libérale de l'Agriculture Françoise Gauthier aurait
avantagé la famille Cola. Rappelons que la famille Cola a contribué pour
192 000 $ au Parti libéral. La transaction de 62,5 millions implique une part de 19 millions
d'Investissement Québec, en plus d'une marge de crédit de
10 millions garantie par le gouvernement. Résultat : ce sont les
contribuables qui ont payé pour ce fiasco.
Il y a neuf
mois que nous attendons les résultats de cette enquête, aucun suivi n'a été
fait par le ministre. Par respect pour les contribuables et les
producteurs bovins, le ministre doit publier le rapport d'enquête sur
l'abattoir Colbex.
Quand va-t-il le faire? Quand saurons-nous la
vérité dans ce dossier?
Le
Président : M. le ministre de l'Agriculture.
M. François Gendron
M.
Gendron :
Oui. Je remercie énormément le collègue du deuxième groupe parlementaire parce
que, ce qu'il a énoncé, il y a beaucoup de
choses qui, effectivement, ont été entendues dans l'opinion publique, il y a
beaucoup de choses qui sont douteuses. Ce
n'est pas pour rien qu'on a pris nos responsabilités et qu'on a voulu faire
toute la lumière sur ce dossier-là, parce qu'il y avait besoin de pas
mal de clarté, et ce n'est pas le cas qu'on a eu avec les gens d'en face.
Alors,
on a nommé un juriscomptable qui poursuit actuellement… et je reconnais que
j'ai hâte — vous
connaissez mon expression — en étoile de mettre la main sur le rapport
parce qu'effectivement je voudrais informer l'ensemble de la population de passablement d'éléments
douteux — pour
l'instant, je n'emploierai pas d'autre expression — immensément
douteux, toutes sortes d'allégations. Mais ce n'est pas la première fois, on a
vécu ça pendant neuf ans, là. Il y en a eu pas
mal, toutes sortes de choses douteuses. Et, dans ce cas-là, bien c'est comme le
reste, et c'est pour ça que nous, dès qu'on a été au pouvoir, on a
ordonné à un juriscomptable, qui a des pouvoirs plus particuliers, de fouiller
cette question-là, parce qu'elle mérite d'être fouillée. C'est loin d'être un
exemple…
Le Président :
En terminant.
M.
Gendron :
…de bon usage de fonds publics.
Le Président :
Première complémentaire, M. le député de Nicolet-Bécancour.
M. Donald Martel
M.
Martel : M. le Président, ça fait quand même neuf mois.
L'histoire récente de l'Abattoir Colbex, c'est un fiasco financier pour
les contribuables du Québec. L'abattoir devrait réouvrir ses portes le
15 janvier prochain grâce à la mise sur pied de la Coopérative d'abattage
du Québec.
À la veille de sa
réouverture, le ministre peut-il nous garantir que le rapport d'enquête sera
rendu public?
• (11 h 10) •
Le Président :
M. le ministre de l'Agriculture.
M. François Gendron
M.
Gendron :
Bien, le collègue a la gentillesse d'appeler ça un fiasco financier, mais c'est
également un fiasco libéral. Et ça, c'est clair. On n'a pas besoin de
jurisconsulte pour confirmer ça, que c'est clair parce que, par les noms qui
circulent là-dedans, les collecteurs de fonds des gens qui, effectivement, ont
obtenu des permis de garderie, bien, c'est les mêmes noms, puis ils étaient
propriétaires de l'abattoir Levinoff, là. Il faut que vous soyez conscients de
ça, là, c'est des gens qui ont obtenu des permis de garderie. Il faut le faire!
Donc, c'est clair que ça méritait de faire tout un nettoyage. Ça méritait de
faire tout un nettoyage, et je répète devant les membres de cette Assemblée,
j'affirme que le ministre concerné…
Le Président :
En terminant.
M.
Gendron :
…pour les aspects que j'ai traités, je n'ai pas pu encore mettre la main sur le
rapport.
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le député de Nicolet-Bécancour.
M. Donald Martel
M.
Martel : M. le Président, quand ça va être déposé? Et est-ce que ça va être
public? Je tiens à rappeler que la Fédération des producteurs bovins
doit toujours 9 millions à Investissement Québec. Par respect pour les
producteurs bovins, qui paient toujours pour rembourser cette transaction qui
crée toujours énormément de tension dans le milieu agricole, le ministre doit
rendre le rapport d'enquête public.
Est-ce que le ministre
a discuté des conclusions du dossier d'enquête avec les représentants de l'UPA?
Le Président :
M. le ministre de l'Agriculture.
M. François Gendron
M.
Gendron : Bien,
une chose qui est sûre, lorsqu'il y a mauvais usage de fonds publics, ce n'est pas
inadéquat d'être très transparent, et on va l'être.
Le Président :
M. le…
Des voix : …
Le Président :
S'il vous plaît! M. le leader de l'opposition.
M. Moreau : Le ministre de
l'Agriculture rappelle avec éloquence que, pendant neuf ans, on a fait de la culpabilité par association. Ici, il répond à une question… d'une question qui est sous
enquête, ce qui va à l'encontre de l'article 35.3° de notre règlement.
Il a lui-même dit qu'on était sous enquête. Et une question sous enquête, c'est
visé par l'article 35, paragraphe 3°. Il
devrait se garder une petite gêne et, surtout, ne pas faire de la culpabilité
par association.
Le Président : M. le leader
du gouvernement.
M.
Bédard : À moins
que le leader ait des informations qu'on ne sait pas, actuellement on est en
enquête du juriscomptable. S'il sait qu'il y
a des enquêtes de police, qu'il nous le dise. Quant aux garderies, je tiens,
effectivement, à affirmer à cette Chambre
qu'il y a enquête de police, qu'il y a des accusations, que l'UPAC a même passé
au ministère de la Famille. C'est ça, le résultat de l'ère libérale, M.
le Président, et nous ferons attention dans nos réponses.
Le Président : En terminant,
M. le leader de l'opposition.
M. Moreau : Moi, là, les
informations que j'ai, elles viennent de la bouche de la personne qui répond,
et il a lui-même dit que c'était sous
enquête. Le député qui a la parole ne peut parler — paragraphe 3° — d'une chose qui fait l'objet d'une
enquête…
Des voix : …
Le
Président : Alors, j'aimerais préciser ici, là, lorsqu'on parle
d'une enquête, on parle d'une enquête de police. Je ne sais pas si c'est
à ça que faisait référence le ministre, là. M. le leader.
M.
Bédard :
On a dit, effectivement, que c'était une enquête du juriscomptable. S'il y a d'autres
enquêtes, on n'est pas au courant.
Mais je tiens à vous dire qu'il n'est nullement question pour nous de se taire
sur ce fiasco libéral, M. le Président.
Le Président : M. le
ministre, veuillez conclure. M. le ministre, concluez-vous?
M.
Gendron : Bien, je
répète ce que j'ai dit sans aucun problème, j'ai toujours parlé d'un
juriscomptable.
Des voix : …
M.
Gendron : Non. Un
juriscomptable, il a un travail à faire.
Des voix : …
Le
Président : Juste une seconde, là, on va… Une des choses les
plus importantes ici, c'est d'éviter de s'interpeller. Alors, M. le
ministre, d'abord, adressez-vous à la présidence, premièrement. Puis,
deuxièmement…
M.
Gendron : M. le
Président, je répète ce que j'ai dit. J'ai toujours parlé de juriscomptable
parce qu'il y a un paquet d'affaires louches qui confirment les affirmations
qui ont été mentionnées par le collègue. On en a entendu parler longtemps, il y
avait lieu de faire la lumière. C'est ce qu'on est en train de faire, et on
sera transparents pour les suites des choses.
Le Président : Principale, M.
le député de Huntingdon.
Aide à la relève agricole
M.
Stéphane Billette
M.
Billette :
Merci, M. le Président. «Des jeunes en agriculture, il y en a. Il ne manque pas
de relève, il manque des moyens pour prendre la relève. C'est pourquoi
le non-renouvellement de la politique jeunesse agricole agace la Fédération de la relève agricole, et, dans la
politique de souveraineté du ministère, elle n'y était pas.» Fin de la
citation.
Ces propos,
M. le Président, ce sont ceux de la Fédération de la relève agricole du Québec.
Depuis la fin de la politique
jeunesse, il y a maintenant huit mois, aucun signe de vie du gouvernement, plus
de plans pour nos jeunes et, du même coup, perte nette de
10 millions pour ces derniers. Pourtant, il y a huit mois, le ministre
s'époumonait à dire : La politique jeunesse sera incluse dans la Politique
de souveraineté alimentaire. Six mois plus tard, rien. Rien du tout, M. le
Président.
Est-ce que le ministre, dans quelques minutes,
va aller confirmer au congrès de l'UPA qu'il a complètement largué la relève agricole et qu'il s'est, lui
aussi, beaucoup trompé? Son bilan en relève, zéro. Zéro puis une
barre, M. le Président. Merci.
Le
Président : M. le ministre de l'Agriculture.
M. François Gendron
M.
Gendron : Oui, M. le Président. Je remercie le collègue de sa question. J'ai très hâte d'aller de l'autre bord, effectivement,
parce que je sais que l'accueil va être chaleureux, parce qu'on a eu une année extraordinaire
dans le domaine de l'agroalimentaire, y
incluant la relève. Je donne un exemple. Dès la publication de la Politique
de souveraineté alimentaire, premier
geste de bonification de l'aide à la relève de 150 %. Les jeunes me l'ont rappelé. Je les ai
rencontrés à trois, quatre reprises, je suis allé les voir la semaine dernière.
Quand
il me parle de la politique jeunesse, on a dit : Nous, on va l'intégrer
dans la politique jeunesse nationale du Québec. Et on a un adjoint parlementaire à la première ministre qui est
responsable là-dessus, il a rencontré les jeunes de la relève, et, dans la réflexion que le gouvernement
conduit pour une politique jeunesse du Québec, il y aura également un volet pour la relève agricole. J'aurai l'occasion
d'en parler tantôt au congrès de l'UPA et je suis à peu près certain que
les jeunes vont être agréablement surpris du rapport que je vais faire de
l'ensemble des mesures d'accompagnement. Lorsque je fais une politique de souveraineté
alimentaire, c'est aussi pour la relève. Lorsque je fais une politique…
Le Président :
En terminant.
M.
Gendron :
…pour contrer l'achat des terres à l'étranger, c'est pour la relève agricole.
Le Président :
Complémentaire, M. le député de Papineau.
M. Alexandre Iracà
M.
Iracà : En
additionnelle, M. le Président. Je rappelle qu'en campagne électorale la première ministre avait pris l'engagement de bonifier les programmes de relève agricole
en investissant 20 millions de
plus par année pour donner le coup de pouce nécessaire à nos jeunes
agriculteurs. Près d'un an et demi plus tard, toujours rien, et rien non plus
dans sa mise à jour panique où tout le monde a constaté qu'il n'y avait rien
pour les jeunes.
Est-ce que la
première ministre, responsable des dossiers jeunesse, va nous confirmer, elle
aussi, qu'elle abandonne cet engagement envers nos jeunes de la relève
agricole?
Le Président :
M. le ministre de l'Agriculture.
M. François Gendron
M.
Gendron : Bien, la première ministre aura l'occasion de
s'exprimer dans d'autres occasions là-dessus, mais je suis sûr qu'elle dirait exactement la même chose
que je viens de vous dire. Elle était présente avec moi lorsqu'on a
rendu publique la première Politique de souveraineté alimentaire du Québec et
elle était à côté de moi où j'ai annoncé, le même jour, deux mesures de correction de tout ce que
vous n'avez pas fait puis de vos négligences, que je ne qualifierai pas
pour le moment, dans le domaine de l'agroalimentaire.
Alors,
je n'ai pas de trouble avec la relève. Je
pense que c'est une responsabilité collective. Il faut être responsable, il faut tous être
responsables pour améliorer…
Des voix :
…
Le Président :
S'il vous plaît! Alors, ceci met fin à la période de questions et de réponses
orales.
Motions sans préavis
La Vice-Présidente
(Mme Poirier) : Alors, nous en sommes à la rubrique des motions
sans préavis. Alors, je reconnaîtrais maintenant un membre du deuxième groupe
d'opposition. M. le député de Chauveau.
M.
Deltell :
Merci beaucoup, Mme la Présidente.
Des voix :
…
La Vice-Présidente
(Mme Poirier) : S'il vous plaît! J'aimerais entendre le député
de Chauveau, s'il vous plaît. Merci.
M.
Deltell :
Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, je demande le consentement pour
déposer la motion suivante conjointement avec la députée de Laporte et la députée
de Gouin :
«Que l'Assemblée
nationale exige du gouvernement qu'il rende public immédiatement le rapport du
comité sur les conditions d'emploi des titulaires en provenance de l'extérieur
de la fonction publique.»
La Vice-Présidente (Mme Poirier) :
Merci. Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?
M. Traversy :
Mme la Présidente, il n'y a pas de consentement pour cette motion.
La Vice-Présidente (Mme Poirier) :
Il n'y a pas de consentement. Alors, je reconnaîtrais maintenant le ministre
des Finances et de l'Économie.
Réitérer l'opposition
de l'Assemblée au projet
du gouvernement fédéral de commission
canadienne des valeurs mobilières
M. Marceau : Oui. Mme la
Présidente, je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de
présenter, conjointement avec le député de
Brome-Missisquoi, le député de La Prairie, le député de Mercier et le
député de Blainville, la motion suivante :
«Que
l'Assemblée nationale salue les initiatives de la communauté d'affaires du
Québec afin de s'opposer au projet du gouvernement fédéral de créer une
commission canadienne des valeurs mobilières;
«Qu'elle réitère son opposition à ce projet qui
aurait pour conséquences d'affaiblir l'économie du Québec, en particulier le
secteur de la finance;
«Qu'elle
réitère son appui au système de passeport en valeurs mobilières dont
l'efficacité est reconnue mondialement;
«Que le gouvernement du Québec consacre des
efforts pour créer des alliances avec les autres provinces canadiennes, afin de
contrer le projet fédéral de créer une commission nationale des valeurs
mobilières.» Voilà.
• (11 h 20) •
La Vice-Présidente (Mme Poirier) :
Merci. Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? M. le
leader adjoint.
M. Traversy : Mme la
Présidente, il y a consentement sans débat pour la motion.
Mise aux voix
La Vice-Présidente (Mme Poirier) :
Est-ce que la motion est adoptée?
Des voix : Adopté.
La Vice-Présidente (Mme Poirier) :
Adopté. Je reconnaîtrais maintenant la députée de Gatineau.
Souligner la Journée internationale
des personnes handicapées
Mme Vallée :
Alors, Mme la Présidente, je sollicite le consentement de cette Assemblée afin
de présenter la motion suivante conjointement avec la ministre déléguée
aux Services sociaux et à la Protection de la jeunesse, la députée
d'Arthabaska, le député de Blainville et la députée de Gouin :
«Que
l'Assemblée nationale souligne la Journée internationale des personnes
handicapées qui s'est tenue le 3 décembre et qui cette année se
déroulait sous le thème Ensemble, réduisons les obstacles et ouvrons la
porte à une société plus inclusive!;
«Qu'elle
réitère toute l'importance qui doit être accordée à l'intégration des personnes
handicapées sur le marché du travail, et dans tous les volets de notre
société;
«Qu'elle
réaffirme son engagement à travailler pour éliminer les obstacles à la
participation sociale des personnes [en situation de handicap].»
La Vice-Présidente (Mme Poirier) :
Merci. Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?
M.
Traversy : Merci, Mme la
Présidente. Alors, je prendrai la parole pour vous dire qu'il y a consentement
pour débattre de cette motion pour un temps de parole d'approximativement une
minute par intervenant, en commençant, bien sûr, par la députée de Gatineau,
suivie par la députée d'Arthabaska et en terminant, bien sûr, par la ministre
responsable et déléguée aux Services sociaux et à la Protection de la jeunesse.
La Vice-Présidente (Mme Poirier) :
Merci. Alors, Mme la députée de Gatineau.
Mme Stéphanie Vallée
Mme Vallée : Alors, Mme la
Présidente, il me fait extrêmement plaisir de souligner aujourd'hui devant
cette Assemblée nationale la Journée
internationale des personnes handicapées et, en fait, les personnes en
situation de handicap parce que,
comme l'a si bien souligné ma collègue de Saint-Henri—Sainte-Anne ce matin, les personnes sont en
situation de handicap. Il suffit, pour notre société, d'adapter notre
environnement afin de réduire cette situation et de rendre notre société plus
inclusive.
Il me fait aussi extrêmement
plaisir de souligner l'implication de tous ceux et celles qui, au quotidien, travaillent d'arrache-pied, justement… ils
s'investissent, justement, pour rendre cette société plus inclusive. Alors,
un peu partout à travers le Québec, il y a des gens qui, à travers leur
quotidien, travaillent auprès des personnes en situation de handicap. Ou elles-mêmes sont des personnes en
situation de handicap qui, par leur action, par leur implication, par
leurs interventions, deviennent des modèles et font de sorte que nous sommes
une société qui, au quotidien, est plus inclusive.
Alors, Mme la Présidente, il me fait plaisir de souligner ici cette journée
très spéciale et de rendre hommage à tous ces intervenants et à ceux et
celles qui, au quotidien, vivent avec des situations de handicap. Merci.
La Vice-Présidente (Mme Poirier) :
Merci, Mme la députée de Gatineau. Je cède maintenant la parole à la députée
d'Arthabaska.
Mme Sylvie Roy
Mme Roy
(Arthabaska) : Mme la Présidente, on parle ici de la Journée internationale
des personnes handicapées. On en parle une fois par année, mais ces
gens-là vivent, 365 jours par année, cette condition-là. Donc, je félicite leur
courage, je félicite l'implication de ceux
qui les aident. Et je me permets de nous sensibiliser. Avec la population qui
vieillit, il y aura certainement de plus en plus de personnes dont l'autonomie
sera restreinte. Il va falloir être d'autant plus vigilants, dans les années et les mois qui vont suivre, pour faciliter
la vie de nos concitoyens. Parce que les enjeux liés, je dirais, à la
longévité — parce
que je ne veux pas appeler ça le vieillissement de la population, on vieillit
tous chaque 24 heures, une journée — donc, les enjeux liés à la longévité sont un
grand défi que nous aurons à vivre tous ensemble, et je pense que c'est
bien au-delà des partis politiques. Je convie donc mes collègues à travailler
sur ce sujet. Merci.
La Vice-Présidente (Mme Poirier) :
Merci beaucoup. Alors, je cède maintenant la parole à la ministre déléguée aux
Services sociaux.
Mme Véronique Hivon
Mme
Hivon :
Merci, Mme la Présidente. Alors, je suis heureuse, à mon tour, d'avoir
l'occasion de souligner cette très importante journée qu'est la Journée
internationale des personnes handicapées parce que c'est une occasion de faire de la sensibilisation sur l'importance
d'avoir une société qui adapte toujours plus sa réalité aux personnes qui
ont un handicap, une incapacité et qui doivent, à tous les jours, Mme la
Présidente, vivre avec ce défi, ce défi souvent plus grand que nature d'évoluer
dans un monde qui n'est pas parfaitement adapté pour eux, loin de là, et aussi
avec le défi plus général de la différence.
Donc, hier, à l'occasion de la journée des
personnes handicapées, j'ai eu la chance de reconnaître une de ces personnes,
Martin Deschamps, le chanteur célèbre au Québec, qui, bien sûr, a ce handicap,
mais surtout fait de ce handicap une force en allant auprès des jeunes dans les
écoles pour passer ce message très important d'inclusion, d'acceptation de la
différence, et je peux vous dire que c'est une valeur qui nous est chère, au gouvernement,
et nous travaillons à chaque jour pour toujours plus d'inclusion. Merci, Mme la
Présidente.
Mise aux voix
La Vice-Présidente (Mme Poirier) :
Merci. La motion est adoptée?
Des voix : Adopté.
La
Vice-Présidente (Mme Poirier) : Adopté. Alors, je demanderais le consentement pour déroger à l'article 84.1
pour permettre au député de Bonaventure de présenter une motion. Alors, Mme la
leader de l'opposition?
Mme Thériault : Il n'y a pas
de consentement, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente (Mme Poirier) :
Il n'y a pas de consentement.
Une voix : ...
La Vice-Présidente (Mme Poirier) :
M. le leader adjoint.
M.
Traversy : ...juste
bien m'assurer, pour que la députée d'Anjou soit consciente, on parle vraiment
de la motion qui traite, là, du décès de
M. Bertrand Berger, c'est bien ça.
La Vice-Présidente (Mme Poirier) :
Mme la leader adjointe de l'opposition.
Mme
Thériault : Oui. Mme la Présidente, vous savez très bien qu'à ce
moment-ci ça prend un consentement,
et il n'y a pas de consentement. On a donné notre consentement pour que le
député puisse faire une déclaration de député, et ils
n'ont pas accepté. Donc, je n'ai pas donné de consentement.
Avis touchant les travaux des
commissions
La Vice-Présidente (Mme Poirier) :
Alors, nous passons à la rubrique suivante, aux avis
touchant les travaux des commissions. M. le leader du gouvernement.
M. Traversy : Bertrand, je vais lire celle-là. Bonjour, Mme la
Présidente. Alors, pour les avis touchant les commissions, j'avise cette Assemblée que la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de
l'énergie et des ressources naturelles poursuivra aujourd'hui les consultations particulières et les auditions publiques en vue d'étudier
l'acceptabilité,pour le Québec, du
projet proposé par Enbridge Pipelines Inc. sur le renversement vers l'est du
flux de l'oléoduc 9B situé entre North Westover et Montréal, décrit notamment dans le document que vous
connaissez bien, Inversion du flux de
l'oléoduc 9B d'Enbridge, aujourd'hui, après les affaires courantes pour une durée d'une heure et demie ainsi que de
15 heures à 17 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papineau;
Prenez note, Mme la Présidente, que la Commission
de l'aménagement du territoire entendra les intéressés et procédera à l'étude
détaillée du projet de loi d'intérêt privé n° 211, Loi concernant la Ville
de Sherbrooke, suivi d'un projet de loi
privé, n° 207, intitulé Loi concernant la
Ville de Windsor, aujourd'hui, après les affaires
courantes jusqu'à 13 heures,
à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine;
La Commission de la santé et des services
sociaux poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 52, Loi
concernant les soins de fin de vie, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, à la
salle du Conseil législatif, ainsi que de
15 heures à 18 heures, à la salle
Louis-Hippolyte-La Fontaine;
Et
finalement, Mme la Présidente, la Commission des institutions ne procédera pas,
aujourd'hui, à l'audition des intéressés
à l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé n° 210, Loi modifiant
la Loi fusionnant le Centre de réadaptation Mackay et L'Association montréalaise pour les aveugles sous le nom de
Centre de réadaptation MAB-Mackay / MAB-Mackay Rehabilitation Centre, tel qu'il avait été initialement prévu dans l'avis donné à ce sujet le 26 novembre
dernier.
La
Vice-Présidente (Mme Poirier) : M. le leader de l'opposition.
M. Moreau :
Oui, Mme la Présidente. Vous me permettrez, sur cet avis de révocation, très
brièvement, de rappeler que l'avis fait suite à des échanges qui ont eu lieu
entre la ministre de l'Éducation, du Sport et du
Loisir et la députée de Notre-Dame-de-Grâce, qui est la marraine de ce
projet de loi privé, et que nos discussions se poursuivent, Mme la Présidente,
quant au rappel possible de ce projet de loi en commission parlementaire.
Renseignements sur les travaux de l'Assemblée
La
Vice-Présidente (Mme Poirier) : Alors, j'en suis maintenant à la rubrique des renseignements sur
les travaux de l'Assemblée. M. le leader de l'opposition officielle.
M. Moreau : Oui, Mme la présidente. Hier,
j'ai eu l'occasion de poser, à tout le moins, une question concernant
cet item, le projet de loi n° 55, Loi
modifiant la Loi sur les impôts miniers, qui a
été présenté le 12 novembre 2013 et pour lequel nous avons envoyé des propositions de consultations particulières le 13 novembre 2013. Mon
collègue le leader adjoint du
gouvernement a répondu ou a laissé entendre dans sa réponse qu'il y
avait des négociations entre les cabinets de leaders. Je souhaite mentionner au leader adjoint du gouvernement que nous
n'avons aucun retour du gouvernementdepuis le 13 novembre et je réitère donc ma question : À quel moment
procéderons-nous aux consultations sur ce projet de loi, compte tenu
qu'il n'y a pas de discussions entre les cabinets de leader à ce sujet?
La
Vice-Présidente (Mme Poirier) : Alors, M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Traversy : Mme la Présidente, les
informations que je détiens sont à l'effet qu'on est en train d'analyser
la liste qui nous a été fournie. Nous allons revenir le plus rapidement
possible au leader de l'opposition pour répondre à sa question.
La
Vice-Présidente (Mme Poirier) : Merci. M. le leader de la
deuxième opposition.
•
(11 h 30) •
M.
Deltell : Merci, Mme la
Présidente. Alors, selon l'horaire de notre règlement, il nous reste encore
deux jours parlementaires, soit, donc, jeudi et
vendredi, et pourtant il y a des questions qui
sont inscrites au feuilleton, des questions écrites, donc, qui dorment
actuellement, et on voulait s'enquérir auprès du gouvernement de quoi il en
retournait.
Par
exemple, à l'article 23 de la
partie 5 de notre feuilleton, la question
posée le 7 novembre dernier par le député de Lévis au ministre des Finances, qui demande de fournir le
portrait de la croissance des dépenses de programmes et des dépenses
consolidées. Également, le 12 novembre, le député de Granby a posé
une question au ministre des Affaires municipales concernant la réglementation
qui touche les piscines. Également, toujours le député de Granby, le
19 novembre, a posé une question à la ministre de l'Emploi et de la
Solidarité concernant les saisies qui peuvent être
faites lorsqu'un jugement est rendu. Et finalement j'ai posé moi-même une
question écrite, le 27 novembre dernier, au ministre des Transports
concernant le manque à gagner du financement pour la MRC de
La Jacques-Cartier en ce qui concerne
le transport collectif, ce qui, à notre point de vue, est en complète contradiction
avec les propos du ministre et la réalité qui se vit sur le terrain.
Donc, Mme la Présidente,
nous avons quatre questions écrites en suspens. La session achève, il nous
reste encore deux jours devant nous. On aimerait savoir de la part du gouvernement :
Quand aurons-nous les réponses à ces quatre questions?
La Vice-Présidente (Mme Poirier) :
Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Traversy : Merci, Mme la
Présidente. Il devrait y avoir des réponses sous peu aux questions du député de
Chauveau.
La
Vice-Présidente (Mme Poirier) : Je vous remercie. Alors, je
vous informe qu'il y aura sanction du projet de loi n° 39, Loi sur
les régimes volontaires d'épargne-retraite, aujourd'hui, à 15 h 30,
au bureau de Son Honneur le lieutenant-gouverneur.
Affaires du jour
La période des affaires courantes étant
terminée, nous allons maintenant passer aux affaires du jour. M. le leader
adjoint du gouvernement.
M.
Traversy : Merci, Mme la Présidente. Nous nous approchons d'une
adoption finale. Alors, sans plus tarder, je voudrais donc que vous
puissiez appeler, pour poursuivre nos travaux, l'article 25 de notre
feuilleton.
Projet de loi n° 45
Prise en considération du
rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée
La
Vice-Présidente (Mme Poirier) : Alors, l'Assemblée prend en
considération le rapport de la Commission de la culture et de l'éducation sur le projet de loi n° 45, Loi sur le
ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche, de la Science et
de la Technologie.
Alors, je vous cède la parole, M. le ministre de
l'Enseignement supérieur, des Sciences, de la Recherche et de la Technologie.
M. Pierre Duchesne
M.
Duchesne : Merci, Mme la Présidente. Alors, effectivement, nous
voilà maintenant à une étape… une autre étape, en fait, du cheminement du projet de loi n° 45, soit celle
de la prise en considération du rapport de la commission. Alors, après
avoir passé l'étude du projet de loi article par article, nous en sommes
maintenant à une étape charnière.
Le projet de loi n° 45, il faut le
rappeler, revêt un caractère très important pour le développement du Québec. Essentiellement, ce projet de loi va créer le
ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche, de la Science et
de la Technologie. Il faut expliquer aux
citoyens qu'il existe déjà par décret mais qu'il doit y avoir un projet de loi
et qu'il doit être consacré par l'existence d'une loi.
Ce projet de loi n° 45 va, entre autres…
détermine, entre autres, la mission du ministre de l'Enseignement supérieur, de la Recherche, de la Science et de la
Technologie. Il établit aussi les pouvoirs et fonctions de ce ministre.
Il précise également les modalités
d'organisation interne, qui sont similaires, il faut le dire, à l'ensemble des
ministères.
Pendant cette
étude détaillée, plusieurs amendements ont été apportés afin de répondre aux
préoccupations des députés de l'opposition, et, parmi eux, certains
concernent les missions et les fonctions du ministre. Notamment, un amendement a été proposé par le parti ministériel
et retenu par la commission pour l'une des fonctions du ministre, et ça se lit comme suit : «Favoriser la probité, la
valorisation et la qualité des activités de recherche.» C'est une
amélioration qui précise, Mme la Présidente, davantage le rôle du ministre en
matière de recherche.
Deux
amendements ont aussi été apportés avec la collaboration des partis
d'opposition afin d'accroître la parité entre les hommes et les femmes
au sein du conseil d'administration de l'Institut national des mines et de
l'Institut de tourisme et d'hôtellerie du Québec. Certains amendements ont
introduit dans la législation aussi des consultations interministérielles qui
vont rendre plus formels les liens entre les différents ministères.
C'est un
projet de loi, Mme la Présidente, qui vient clarifier les rôles et
responsabilités de chacun des ministères. Il va permettre la signature
d'ententes visant au partage des ressources et de services qui faciliteront le
travail au quotidien de mon ministère. Et, avec l'adoption du projet de loi, le
cadre juridique va être clarifié et simplifié.
L'institution
du ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche, de la Science et de
la Technologie va faciliter la réflexion sur l'avenir de l'enseignement
supérieur, sur les perspectives qui s'offrent au Québec en matière de recherche, de science, d'innovation et de
technologie. C'est aussi un moyen privilégié d'intensifier la synergie
entre les différents acteurs de l'enseignement supérieur, et de la recherche,
et de l'innovation. Et, en créant ce ministère, nous voulons valoriser plus que
jamais le savoir, lui donner la place qui lui revient au sein de notre société.
Alors,
c'est une étape importante. Et il faut rappeler que, pour ce gouvernement,
l'éducation est une... je dirais, d'une importance stratégique, parce
qu'il y aura… et, en fait, depuis la venue du nouveau gouvernement, il y a donc
deux ministres qui ont pour responsabilité, au Conseil des ministres, de parler
de l'éducation : la ministre, bien sûr, qui est
assise normalement à côté de moi, la ministre de l'Éducation, et moi-même.
Alors, ces deux ministres sont présents au Conseil des ministres, sont présents au sein de leurs ministères.
Et, en ce qui me
concerne, l'apparition de ce nouveau ministère donne aussi toute la place aux
collèges, à nos cégeps, une belle invention québécoise,
Mme la Présidente. D'ailleurs, on célèbre cette année
le 50e anniversaire du dépôt du rapport Parent,
qui a initié, dans les années suivantes, la création des cégeps, les cégeps, qui sont présents sur toute notre région… tout notre grand territoire plutôt. Les cégeps et l'innovation, là — puisque
c'est un ministère aussi qui doit parler d'innovation — l'innovation
des cégeps, c'est qu'à l'intérieur de la même boîte, qui est ce collège, il y a, en parallèle,
une formation préuniversitaire qui nous amène à l'université et une formation technique qui est
valorisée, et tout ça avec une formation générale. Il y a un noyau de
formation générale qu'on garde et qu'on préserve.
La
création, et l'apparition, et le développement de cégeps font que le nombre de diplômés
postsecondaires au Québec est supérieur à celui du Canada
et supérieur à celui qu'il y a aux États-Unis. Donc, pour nous, la pertinence des cégeps et la création de ce ministère
confirment la pertinence et la valorisation que nous
accordons à cet ordre d'enseignement.
C'est aussi un endroit où il se fait de la
recherche appliquée, les CCTT, les centres collégiaux de transfert de technologie,
qui sont des succès et qui suscitent même l'envie du reste du Canada.
Ce ministère, bien
sûr, aussi, aura et a comme responsabilité de suivre, d'encourager le développement
des universités, de notre système universitaire, 18 universités, Mme
la Présidente, des universités
qui sont situées dans des grands
centres, des universités aussi dans les régions du Québec — parce que nous avons un grand territoire — et
qui favorisent,
de par leur présence sur l'ensemble du territoire, des
diplômés de première génération. Et ça, les diplômés de première
génération, Mme la première ministre… Mme la Présidente, pardon, nous allons
tout faire pour continuer à valoriser cette situation.
Un diplômé de première génération, c'est ce jeune homme ou cette jeune fille
qui revient à
la maison avec son diplôme et c'est le premier de sa
famille à avoir un diplôme, ses parents n'en
avaient pas; ça inspire, ça donne de la fierté à la
famille, c'est bon pour l'estime de soi de l'individu. Il peut se développer, il va s'enrichir, bien sûr, en ayant un emploi avec un bon
salaire, mais en ayant beaucoup plus de place à jouer dans la société, en étant
présent dans les débats sociaux, en étant un citoyen, une citoyenne très
active.
Alors, les universités
ont maintenant un ministère qui leur est consacré. Nous allons rappeler que ce
sont des institutions publiques qui visent au développement du bien commun, et nous avons déjà installé un rapport de dialogue avec eux. On l'a vu, il y a
eu un sommet sur l'enseignement supérieur où il y avait de grands défis, et
nous sommes arrivés à un succès suite à ce sommet. Donc, nous allons
tout faire pour, bien sûr, valoriser les institutions universitaires, parce que — on pourrait même
dire l'université au singulier — l'université est une institution essentielle
dans une démocratie. C'est même, à la limite, à l'occasion, un contre-pouvoir. Ça
permet d'amener un équilibre. C'est une des sentinelles qui permet à un système de demeurer une démocratie. Et
il faut préserver, pour ça, bien sûr,
l'autonomie universitaire, la libre pensée, la capacité de faire de la
recherche, mais aussi de transmettre le savoir, d'avoir des professeurs qui
sont, je dirais, des maîtres, hein — c'est le nom, d'ailleurs, qui leur est
donné — des
maîtres pour former une nouvelle génération qui est toujours plus… qui a
un sens critique toujours plus développé.
L'autre
responsabilité de ce futur ministère, Mme la
Présidente, c'est la recherche et l'innovation. Donc, j'ai déposé d'ailleurs
une politique nationale de la recherche et de
l'innovation, et le but, ici, parce que la recherche et l'innovation est maintenant sous l'autorité de ce
ministère de l'Enseignement supérieur, c'est donc de favoriser
l'harmonie. Pas d'opposition au Québec entre
la recherche fondamentale et la recherche appliquée. Ces gens-là travaillent
ensemble. Nos PME ont besoin de nos
laboratoires, de nos centres de recherche dans nos universités, de nos CCTT. Il
faut favoriser la collaboration. Ce ministère va viser à donner
beaucoup, je dirais, d'élan à cet objectif-là. Collaboration aussi entre les
universités et entre les cégeps. Il faut cesser de se concurrencer, là. La
concurrence, elle est à l'international. Mais ensemble il faut définir des
mandats communs, collaborer ensemble.
Et cette Politique nationale de la recherche et de
l'innovation, Mme la Présidente, elle est ancrée dans des valeurs, je
viens de vous en parler, collaboration, bien commun,
mais aussi des valeurs importantes : le
développement durable. On le sait, la planète
est menacée. Il faut que nos chercheurs des universités, il faut que nos
entrepreneurs pensent au développement de technologies et de moyens d'action
qui nous permettent de préserver et de donner de la pérennité, bien sûr, à
notre planète.
• (11 h 40) •
L'autre axe à
favoriser, c'est toute la question de comment traverser ce… affronter ce défi des changements démographiques. Le Québec est une des sociétés qui
vieillit le plus rapidement au monde,
à l'exception du Japon. Il faut donc
favoriser... trouver des solutions face à une société vieillissante et aussi… et ça, c'est des défis liés à la santé,
bien sûr, toute la technologie, tout le
domaine de la santé, mais aussi donner de la place à nos jeunes. Quand vous
avez une part qui est moins grande donnée aux jeunes, parce qu'il y a moins de jeunes dans notre société, il faut leur donner de l'oxygène, Mme la Présidente, il faut leur permettre d'avoir
un avenir malgré une société vieillissante, d'établir des liens
intergénérationnels. Il ne faut pas opposer une génération à l'autre, il faut
surtout éviter ce genre de choses. Ça veut dire, par exemple, des politiques
familiales pour les plus jeunes, Mme la Présidente.
Et,
bon, enfin, les PME. Les PME, j'en ai parlé un peu tout à l'heure, mais, notre
structure économique, là, le filet de notre structure économique est
basé, est structuré à partir de PME, les petites et moyennes entreprises, qui
créent beaucoup d'emplois. Et nous avons au
Québec une tradition : beaucoup d'inventeurs, mais souvent la
commercialisation, la capacité d'en faire
une petite entreprise, c'est difficile. Alors, notre ministère va assister, va
aider, va appuyer ces jeunes entrepreneurs ou ces entrepreneurs d'une
certaine génération qui ont travaillé des années pour développer un produit ou
un service, parce qu'il y a l'innovation technologique et il y a l'innovation
sociale, Mme la Présidente.
Alors, la pérennité. Nous avons déposé une
politique nationale de recherche sur cinq ans; pas sur trois ans, sur cinq ans. Pour les milieux économiques, on
demandait de la stabilité. Cinq ans, c'est aussi un engagement
important. Et, vous le savez, ce ministère,
à la suite du sommet, a annoncé un réinvestissement dans l'enseignement
supérieur sur une période de sept ans, jusqu'en
2019, 1,8 milliard, Mme la Présidente, et c'est un engagement ferme de notre
gouvernement, et c'est appuyé en plus sur l'existence d'un nouveau ministère.
En terminant, Mme la Présidente, je vous dirais
que, dans les prochains mois, il y aura beaucoup de travail, parce que,
suite à ce Sommet sur l'enseignement supérieur, ce ministère va devoir donner des
suites aux différents chantiers qui ont été mis en place. Celui sur l'aide
financière est terminé. Résultat : pour la première fois depuis des
années, le régime d'aide financière donne plus de bourses que de prêts. C'est important. C'est une réforme
structurante, Mme la Présidente.
On ne veut pas endetter les étudiants inutilement. Il y a
donc un signal, là, un choix qui est de dire : Quand on le peut, quand les dossiers sont évalués et que
les besoins sont là, d'aider — et
d'aider, là, pas les fils de riches, pas les filles de riches, ils ont les moyens — d'aider la classe moyenne, d'aider même ceux qui
sont peut-être moins choyés en termes de revenus pour… lorsqu'ils
ont la capacité et la volonté, de monter aux plus hauts échelons, et d'être
même des étudiants, et même des finissants, et, qui sait, des maîtres ou des
docteurs dans le domaine universitaire, pour ceux qui le veulent.
L'autre chantier, c'est la création du Conseil
national des universités qui va superviser le développement des universités. On
doit développer... On va déposer un projet de loi dès le début de l'année
prochaine là-dessus.
Troisième
chantier, une loi-cadre sur les universités. Qu'est-ce
que c'est, les universités?
Étonnamment, dans nos lois, on n'en
parle pas, on ne parle que de la façon dont on finance les universités.
Et il faudra aussi amener un nouveau regard
sur la gouvernance. On le sait, il y
a beaucoup de questions, dans
les derniers jours, on le voit, la façon dont les conseils d'administration
des différentes organisations sont composés. Nous avons de bons conseils
d'administration dans les universités, mais la population demande encore plus
de transparence, d'en faire des piliers d'intégrité. Nous allons travailler là-dessus.
Autre
chantier, sur l'offre de formation collégiale, comment mieux protéger nos
cégeps en région. Parce que, face à… j'en parlais tout à l'heure, les changements
démographiques, il y a des régions qui… où il y a des défis face à un
peu moins d'étudiants, je dirais, dans les cégeps. Il faut voir comment on peut
préserver ces institutions, entre autres. Mais il y a d'autres domaines, il y a
d'autres défis, bien sûr, à l'intérieur de ce chantier.
Le cinquième
chantier, le plus important, la formule de financement. Ça fait au moins 12 ans
qu'on n'a pas révisé cette formule de financement. Il y a, semble-t-il,
des effets contestés, contestables de cette formule de financement qui amènerait les universités, devant tout, à une
course à la clientèle, aux cohortes étudiantes, parce que cette formule
de financement est basée essentiellement sur
le nombre d'étudiants. Une université a plus d'étudiants, on finance par
tête de pipe, elle a plus d'argent. On est
en train de voir s'il n'y a pas moyen de bonifier, de diversifier, d'enrichir
la formule de financement. C'est
fondamental, Mme la Présidente. La façon dont on donne l'argent, bien sûr,
assure un développement à l'université. Donc, c'est un chantier
important, et il y aura un rapport qui sera déposé au printemps prochain.
Alors, vous
voyez, ce ministère a du pain sur la planche mais dans un domaine d'avenir, qui
est celui de notre jeunesse, qui est celui du savoir, qui est celui de
la recherche, dans une société qui bouge vite, Mme la Présidente, bombardée
d'information, où le divertissement occupe beaucoup de place, où la démocratie
demeure fragile. C'est toujours un combat constant. Il faut qu'il y ait une
place pour la réflexion, il faut qu'il y ait une place pour le savoir. Il faut
qu'il y ait des professeurs qui prennent le temps de dire à des jeunes comment
réfléchir, comment… et eux, ils doivent transmettre leur savoir, c'est
essentiel. Nos universités, nos cégeps sont plus que des bâtiments, c'est une
institution du Québec qu'il faut protéger et en assurer le développement. La
même chose pour tout le domaine de la recherche, ça assure un dynamisme, ça
donne à notre société, au Québec, une place sur la scène internationale, ça en
fait une société qui est concurrentielle.
La libre
pensée — je
termine là-dessus — l'indépendance
d'esprit, c'est fondamental. Il faut… Et ça, c'est lié… c'est une valeur stratégique : quand on veut
une démocratie, il faut qu'on ait, de génération en génération, des gens
qui se questionnent, qui sont capables
d'argumenter et d'engager des débats, pas se lancer dans la calomnie, Mme la
Présidente, des débats argumentaires, et nos maisons d'enseignement, tous les
ordres d'enseignement confondus, ont un rôle fondamental là-dessus.
Alors, je
suis heureux, donc, de voir que nous traversons… nous passons une étape
importante en vue d'adopter ce projet de loi qui, donc, pourrait
confirmer, donc, le ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche, de
la Science et de la Technologie. Ça a été
fait, donc, à la suite d'une commission où il y a eu des discussions
enrichissantes, et je suis très satisfait et très encouragé pour la suite, Mme
la Présidente.
La Vice-Présidente (Mme Poirier) :
Merci. Merci, M. le ministre. Je cède maintenant la parole au député de Mont-Royal.
M. Pierre Arcand
M.
Arcand : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Vous savez, aujourd'hui, nous consacrons, en fait,
en cette prise de considération, la loi qui crée évidemment le ministère de l'Enseignement
supérieur, de la Recherche et de l'Innovation.
J'aimerais peut-être profiter de l'occasion pour
rappeler un peu les étapes de la création de ce ministère. Ce ministère avait été créé en septembre 2012.
Le gouvernement avait décidé, le 15 mai 2013, donc de déposer, huit
mois après, le projet de loi du
ministère. Nous avons adopté le principe le 4 juin 2013 et donc nous
en sommes aujourd'hui, en ce 4 décembre, pour la prise en
considération et l'adoption finale.
Il y avait évidemment, pour nous… Nous avions
accepté le principe, nous avions accepté le principe malgré un malaise évident
non pas sur la question de principe de la création du ministère, mais compte
tenu que, dès le début du mandat, le gouvernement avait
fait des coupures extrêmement importantes au niveau des universités, au niveau
de plusieurs maisons d'enseignement; ça avait été vraiment très mal reçu au
départ.
Et, aujourd'hui, on ne sait pas dans quelle
direction on s'en va, parce que — ceux qui ont pu écouter avec nous la période de questions, Mme la
Présidente — on est
toujours actuellement dans une atmosphère de déni. Au niveau, par
exemple, des CPE, par exemple, on a posé des questions aujourd'hui, c'étaient
les en-têtes des journaux, partout qu'il y
avait des coupures, et le ministre nous dit : Non, ça n'existe pas. Ça a
été la même chose au niveau des CHSLD. Et, au niveau des universités, ça
fait déjà une semaine où j'ai un nombre important d'universités, Mme la
Présidente, qui sont venues nous parler de leurs inquiétudes, du fait que, leur
budget, pour l'année en cours, on ne sait pas dans quelle direction on s'en va.
Et d'ailleurs une des choses qui m'a fait rire
un peu lors de cette séance avec les universités, c'est que, là, le gouvernement était un peu mal à l'aise, les
députés du gouvernement étaient un peu mal à l'aise parce qu'ils
entendaient évidemment les universités faire part de leurs préoccupations,
préoccupations majeures à ce niveau-là, et il y avait le député de Sainte-Marie—Saint-Jacques…
et je reprends un peu, vous savez, la chanson de Mme Bolduc, là, lorsqu'il
arrivait et qu'il disait : «Bien, ça va venir, ça va venir,
découragez-vous pas.» Je ne sais pas si vous vous rappelez de cette chanson-là,
mais c'est un peu ce que le député de Sainte-Marie—Saint-Jacques disait aux
universités : Ça va venir, découragez-vous pas, ça s'en vient.
• (11 h 50) •
Alors, c'est
donc dans ce contexte-là et de cette atmosphère un peu particulière qu'on a
discuté, Mme la Présidente, du projet
de loi n° 45 article par article. Et donc nous avons, bien sûr, adopté le principe de ce projet de loi, et nous
nous sommes assurés de bien faire le travail,
parce que c'est ce que la population attend des élus, entre autres, et des parlementaires. Et nous, comme nous avons déjà été au gouvernement,
peu importent les structures, nous pensons que
c'est tout à fait le droit du gouvernement
d'organiser son Conseil exécutif comme bon lui semble, et je pense que
ça, à notre avis, c'est quelque chose qu'il faut
respecter. Et la création de ce ministère, pour nous, était un principe qui se défendait à ce moment-là. Cependant, comme on le dit toujours, le diable est
dans les détails, et, tout au cours de ces discussions, évidemment nous avons
fait un travail rigoureux, un travail constructif pour avoir, bien sûr, le
meilleur projet de loi.
Je dois dire que ce projet de loi, Mme la Présidente, ce n'était pas simple.On
parlait de quoi? On parlait de 208 articles,
Mme la Présidente, et ces 208 articles modifiaient 51 lois et 36 règlements.
Ce n'est donc pas une tâche
qui était simple, évidemment. Et, à partir du moment où les travaux ont
commencé — les
travaux ont véritablement commencé plus tôt,
à l'automne, puisque le principe avait été adopté le
4 juin, donc on a commencé à l'automne — il
y a eu, pendant un certain temps, une certaine impatience de la part du cabinet du
ministre — je
ne dis pas du ministre, nécessairement,
lui-même, mais certainement de son
cabinet — qui, évidemment, avait
multiplié les tactiques pour faire adopter
encore plus rapidement ce projet de loi.À un point tel d'ailleurs
que nous sommes allés nous plaindre à vous, Mme la Présidente, et
vous avez confirmé ce que tout le monde pense, c'est que l'opposition doit
prendre le temps nécessaire qu'il faut pour
adopter les projets de loi et faire de ces projets de loi des projets de loi
responsables. Évidemment, il y avait
des syndicats, il y avait, entre autres, récemment, une organisation qui
s'appelle l'ACFAS, et, à notre très grande surprise, c'était l'ancienne chef de cabinet du ministre actuel qui
menait la campagne pour faire adopter ce projet de loi là.
Alors, évidemment, je dois vous dire qu'il y a
eu, à certains moments, je dirais, une atmosphère un peu difficile dans l'élaboration de ce projet de loi
et les discussions qui ont suivi, parce que,
d'une part, on est, nous, convaincus qu'il
y a beaucoup de difficultés au niveau financier,
actuellement, dans ce gouvernement — la mise à jour l'a montré la semaine
dernière — et,
malgré les bonnes intentions du ministre, il est clair que le gouvernement n'a
pas l'argent suffisant pour parler
véritablement, avec respectabilité, du sous-financement des universités, parce
qu'actuellement les choses ne vont pas dans
cette direction-là.
Qu'est-ce que nous avions, sur le plan du
principe, comme problèmes avec ce projet de loi? Qu'est-ce que nous avions
comme arguments pour dire que ce projet de loi
là méritait d'être bonifié? Mme la Présidente, le premierpoint, je pense… et
là-dessus je dirais que la
deuxième opposition était d'accord avec nous sur cette question-là. Vous
savez, ce ministère-là a changé de vocation
à plusieurs reprises. À un moment donné, on a créé un ministère de la Recherche et du
Développement, auparavant il y avait un seul ministère de l'Éducation.
Je pense qu'on a changé à peu près 10 fois,
au cours des 15 ou 20 dernières années, on
a changé à peu près 10 fois tout ce qui touchait la recherche. À un moment
donné, même, en 2003, à l'époque où l'actuelle première ministre était ministre des Finances, la recherche, l'innovation,
c'était sous la responsabilité du ministère des Finances. Sous notre gouvernement, la recherche et
l'innovation a été la responsabilité
du ministère du Développement économique. Le gouvernement a décidé d'abolir le
ministère du Développement économique, de confier tout l'aspect de la
recherche et de l'innovation au ministre.
Et
donc on avait quand même certaines questions. Parce que, comme vous le savez,
c'est toujours, lorsqu'on parle de recherche et
d'innovation, un peu la même chose : il y a des gens qui font de la
recherche pure, il y a des gens qui font de la recherche appliquée, et,
ceux qui font de la recherche pure, je dois vous dire qu'évidemment… Si je
prends, par exemple, la génomique, ça a été extrêmement bénéfique de faire de
la recherche pure, parce qu'on a développé, au fil des années, dans ce
domaine-là, une expertise très importante. Mais la recherche appliquée, celle
avec laquelle on travaille avec des
entreprises sur des projets particuliers, des façons de faire particulières, je
dois vous dire que là-dessus il y a aussi un besoin. Et j'étais un peu
inquiet, moi-même, sur ces questions-là, non pas de la part du ministre, mais, encore une fois, lorsque j'entendais le député de
Sainte-Marie—Saint-Jacques
qui n'arrêtait pas de parler des abus, des abus des compagnies, qu'il ne fallait pas fonctionner de cette façon-là. Et
donc il m'apparaissait qu'il était particulièrement contre la recherche
appliquée, dans une certaine mesure. Alors, pour nous, il était très important,
Mme la Présidente, dans ce projet de loi, de vraiment avoir des notions à
caractère économique pour ne pas que ce soit uniquement un projet de loi dans lequel, évidemment, les seuls
gagnants sont les cégeps et les universités, que c'est seulement la
recherche pure. Il fallait aussi qu'il y ait un équilibre, un équilibre qui, à
mon avis, était nécessaire.
Et
d'ailleurs je dois vous dire qu'on a eu de très longues discussions. Le député
de Laurier-Dorion et également le député de La Prairie ont fait
ensemble, au départ, beaucoup de pression sur le ministre, qui a décidé, à la
fin, bien sûr d'adopter certains aspects du
projet de loi dans lesquels il y avait des considérations économiques. Nous
tenions donc à apporter, Mme la Présidente, ces amendements
constructifs, car, à première vue, dans la lecture de ce projet de loi, le Parti québécois semblait avoir évacué, en fait,
tout rapport entre le ministère de l'Enseignement supérieur, de la
Recherche, de la Science et de la
Technologie, et nous avons donc tenu à ce que les termes économiques… que la
relation qui doit exister entre le
ministre de l'Économie et des Finances et le ministre de l'Enseignement
supérieur soit présente, et, même, pas
seulement le ministre de l'Économie et des Finances, mais les autres
ministères, que ce soit inscrit comme tel dans la mission du ministère
et dans le rôle du ministre.
Vous savez, Mme la
Présidente, la situation des universités, au moment où on se parle... Je vous
donnerai simplement quelques citations que
j'ai entendues depuis une semaine. Lorsque je parle, par exemple, de l'UQAM,
l'UQAM dit : Je ne vous dirai pas qu'on
est riches, je ne vous dirai pas qu'on nage dans l'argent et on réussit à faire
nos frais. On respecte notre plan budgétaire, mais c'est très difficile.
Quant
à l'INRS, qui est venu témoigner devant nous, ce qu'ils nous ont dit, c'est
que... L'Institut national de la recherche
scientifique mentionne que, si elle n'a pas de signal clair d'un gouvernement
d'ici février prochain, elle aurait beaucoup de difficultés à mettre des
chiffres dans son budget au cours de l'année. Donc, son budget est en péril.
Dans
le cas du HEC, des Hautes Études commerciales, ils ont dit : Bien, au
sujet du plan de réinvestissement des universités de la part du
ministre, les messages sont un peu ambigus. On ne sait pas trop, véritablement.
On entend la première ministre qui dit qu'il va y avoir des réinvestissements,
mais on n'a pas de nouvelle, on ne sait pas. On veut y croire, mais ce qu'on
veut, c'est des actions probantes. On veut voir vraiment.
Et,
aujourd'hui, le chef de l'opposition a vraiment fait une démonstration, je
pense, lors de la période de questions, particulièrement éloquente
lorsqu'il a démontré que, dans le premier budget du ministre des Finances, on
parlait évidemment d'investissement au
niveau du ministère de la Santé et des Services sociaux, on parlait d'un
investissement de 1,3 milliard dans le budget, et là on était rendus à 1,2
pour tout le gouvernement.
Alors, dans les
circonstances, comment le gouvernement va-t-il pouvoir investir dans les
universités, comme il semble le promettre, après avoir coupé? Et, après ça, il
dit qu'il va investir? On a beaucoup de doute, surtout qu'il n'y a pas
actuellement de cadre budgétaire.
• (12 heures) •
Puis je peux
continuer comme ça. Concordia a dit, en parlant du réinvestissement : On
l'attend. On travaille seulement avec le
réel. Nous sommes à la limite financière, on ne peut pas couper indéfiniment.
Hier, c'était l'Université McGill. L'Université McGill est une
université, disaient-ils... disaient-ils... Mme la rectrice, Mme Fortier, disait :
C'est une université fragilisée. L'élastique
est étiré à son extrême limite. Les murs de McGill craquent. Il faut
redonner de l'oxygène aux universités. Et, quant à l'Université de Montréal
hier, c'est une université qui déclare : Bien sûr, nous n'avons plus de
marge de manoeuvre. Chaque dollar coupé, c'est autant de revenus aux étudiants
qui sont coupés.
Alors,
Mme la Présidente, lorsqu'on regarde cette situation-là, il n'y a rien de très,
très réjouissant, c'est le moins que
l'on puisse dire. Et une des choses également que toutes les universités
montréalaises, parce que celles qui ont comparu devant nous, à la Commission de la culture et de l'éducation, ce sont
des universités de Montréal… Et là les universités de Montréal nous ont dit : En plus de tout ça,
on est inquiets des orientations du ministre. Le ministre dit : Il y a
trois choses. Il y a trois choses
qu'il veut privilégier, entre autres, c'est bien sûr le développement des
universités en région. Je pense que
c'est une des choses qu'il veut privilégier. Que certains groupes de la société
comme, par exemple, des autochtones puissent
avoir un meilleur accès aux universités… Et une autre des choses qu'il veut
aussi privilégier, c'est l'accessibilité financière. Trois principes sur lesquels, évidemment, on ne peut pas être
en désaccord avec ça, mais il est clair, Mme la Présidente, que, dans ce domaine-là, ça me semble être un peu... pas
être très positif, ces priorités-là, pour des universités montréalaises,
qui recherchent, entre autres, l'excellence, qui ont à se battre dans un marché
mondial, dans un marché dans lequel les universités, à l'échelle mondiale, sont
présentes. Et donc il y a, au sein de ces universités montréalaises là,
énormément d'inquiétudes, d'inquiétudes qui, je pense, sont pleinement
justifiées par les récentes actions du gouvernement.
Et,
encore une fois, on a parlé beaucoup de la recherche et de l'innovation, bien sûr,
une politique sur laquelle, lorsqu'on regarde ce qui est
écrit, évidemment, on peut difficilement
être contre, sauf qu'il est clair qu'encore une fois le gouvernement n'a
pas de cadre financier, Mme la Présidente, pour véritablement dire, à ce
stade-ci, que nous allons réinvestir et que nos universités, au cours des
prochaines semaines et des prochains mois, vont être en santé.
Donc,
pas de cadre financier, pas de prévisibilité de façon très claire. On
remarquera, dans la politique de recherche et d'innovation, on va
jusqu'en 2019, Mme la Présidente, on balaie, si on veut, vers l'avant, parce
que nous n'avons pas, encore une fois...
La Vice-Présidente
(Mme Poirier) : ...de Mont-Royal. M. le leader adjoint du
gouvernement.
M.
Traversy : Mme la Présidente, l'article 211. Écoutez, nous
parlons, présentement ici, du projet de loi n° 45. Je sais que,
dans l'optique de la pertinence, on peut laisser une grande marge de manoeuvre
à ceux qui prennent la parole en cette Chambre. On aimerait quand même pouvoir
y revenir très prochainement.
La Vice-Présidente (Mme Poirier) :
M. le député de Mont-Royal, je vous invite à poursuivre votre propos, s'il vous
plaît.
M.
Arcand : Écoutez, Mme la
Présidente, on parle d'universités. Je ne vois pas vraiment quelle est laproblématique. Évidemment, le gouvernement
n'aime pas entendre, lorsqu'on parle des coupures qu'ils ont faites, des
coupures draconiennes au niveau des
universités dès le départ. Et le gouvernement, évidemment, est toujours dans le
déni et n'arrête pas de dire qu'il va
vouloir, n'est-ce pas, continuer à investir dans les universités. Mais il est
clair qu'ils ont fait des coupures, et on parle de 250 millions de
dollars, Mme la Présidente, et ça, c'est sans compter, évidemment, un déficit
des universités qui est près de 100 millions de dollars actuellement pour
les universités.
Alors, il est très clair, Mme la Présidente,
que, même si la première ministre, lors du sommet, avait dit qu'en 2014‑2015 il y aurait une augmentation de
8,5 % et une augmentation de 1,7 milliard sur huit ans, ce ne sont
pas encore des chiffres qui sont dans le cadre budgétaire du ministre
des Finances.
Alors, Mme la
Présidente, dans tout ça, la question qui se pose… Et, avec la création de ce
ministère, on espère qu'il y ait de l'espoir.On espère qu'il va y avoir, avec ce ministère,
n'est-ce pas, une amélioration, une amélioration importante des universités, du
financement qui est fait et qui sera poursuivi dans la lignée de ce que nous
avons fait, Mme la Présidente. Nous avions présenté, lors du discours du budget
en 2011 et 2012, un plan quinquennal pour les universités. Nous avions prévu, Mme
la Présidente, une hausse des droits de scolarité et l'engagement, également, du gouvernement de réinvestir 1 milliard en enseignement
supérieur, une croissance des revenus autonomes des universités et une
participation plus importante du secteur privé, Mme
la Présidente, au financement.
Il y avait aussi, parallèlement à cela, parce
qu'on croit, nous aussi, à l'accessibilité, mais il y avait aussi une
hausse importante, un budget de 568 millions de dollars, Mme la
Présidente, qui était consacré au Programme de prêts et bourses, au programme, je dirais, complémentaire, et je vous dirais
qu'on avait même modifié le Programme de prêts et bourses afin que les premiers 1 200 $ de
revenus de pension alimentaire ne soient pas pris en considération dans le
calcul de la contribution de l'étudiant. Et
cette exemption, donc,
des revenus de pension alimentaire est de 1 200 $ par année
par enfant, plutôt que 1 200 $ par année sans égard au nombre
d'enfants, Mme la Présidente.
Alors, je pense que, lorsqu'on regarde
l'ensemble du travail qui a été fait par le précédent gouvernement, les
universités... Je regardais hier simplement le budget et les subventions du
ministère en 2007‑2008 : le ministère de l'Éducation, en 2007, à
l'Université de Montréal seulement, on parlait de 397 ou 395 millions, à
peu près, en 2007‑2008, que le
ministère consacrait aux universités. Lorsque je regarde où on est rendus, au
niveau de 2012, eh bien, on était rendus à près de 500 millions, donc de 395, disons, à peu près, à presque 500 millions. On voit que le
gouvernement précédent avait fait le
travail, Mme la Présidente, pour favoriser les universités, et je note cet
exemple-là dans le cas de l'Université de Montréal.
Il y a une autre chose qu'on a apprise lors de,
je dirais, la discussion que nous avons eue,
pendant plusieurs heures, avec le ministre, c'est que les liens entre le
gouvernement du Québec et, évidemment, le gouvernement fédéral sont parfois difficiles. Le ministre nous a avoué, évidemment, qu'il
n'avait pas vraiment eu de rencontre avec les gens du gouvernement
fédéral. Et, vous savez, lorsque nous étions là, il y avait un programme d'infrastructure du savoir de la part du gouvernement
fédéral.Il y avait, n'est-ce pas, une enveloppe de
458 millions de dollars, Mme la Présidente, qui avait été affectée au Québec. À cela, donc, il y avait
eu une espèce de programme commun, 597 millions qui venaient du Québec et 458 millions du fédéral qui
étaient donc ajoutés et qui faisaient donc un investissement qui allait au-delà
du milliard pour tous les établissements
d'enseignement supérieur. Alors, jusqu'à entre 2009 et 2011, Mme la
Présidente, ça a été un total de 235
projets, Mme la Présidente, dans les cégeps, dans les universités, dans les
collèges privés agréés aux fins de subventions, qui auront été réalisés,
Mme la Présidente, par le ministère, par l'entremise de ce programme. Et je
pense qu'actuellement — le
ministre nous l'a dit en commission parlementaire — il
n'y a pas de lien qui existe actuellement avec le gouvernement fédéral, et je
dois dire, Mme la Présidente, que c'est particulièrement important.
• (12 h 10) •
Maintenant, si je reviens sur la question de
l'autre débat que nous avons eu au sujet du projet de loi n° 45, Mme la Présidente, il y avait un enjeu qui nous
apparaissait très important, et cet enjeu, c'était évidemment, je dirais,
la composition du conseil d'administration,
le conseil d'administration, par exemple, de l'institut
des mines, où on a débattu de
l'importance de cet institut pour la région du Nord, parce qu'évidemment, le
Plan Nord n'existant plus, il était très clair,
pour nous, qu'il fallait qu'il y ait, à
l'intérieur de cet institut, une amélioration,
évidemment, de la vocation, de la coordination qui existe dans la région de l'Abitibi, et qu'il y ait véritablement des possibilités de relance, et cette relance peut se faire par
une meilleure éducation. Et donc nous avons discuté de la composition du conseil
d'administration, n'est-ce pas, de l'institut des mines et nous avons... Finalement, nous en sommes arrivés à une entente
pour qu'il y ait vraiment une meilleure table de concertation au sein de
l'institut des mines.
Même chose
pour l'institut d'hôtellerie, Mme la Présidente, où, au niveau de l'institut de
l'hôtellerie, dans lequel il y a des
responsabilités ministérielles, il y avait à l'intérieur de cet institut à la
fois un hôtel, à la fois un restaurant et en plus, bien sûr, une école ou, enfin, un institut qui enseigne, bien sûr.
Ce que nous avions demandé, nous, c'était simplement de dire :
Écoutez, sur la composition du conseil d'administration, il faudrait qu'il y
ait au moins, à tout le moins une personne qui ait une expertise dans le domaine
du marketing, dans le... parce que vous avez un restaurant qui doit fonctionner. Et donc c'était important, parce
qu'il y a quand même une certaine rentabilité à aller chercher. On ne
peut pas opérer ce restaurant-là à
l'intérieur de l'institut de l'hôtellerie et penser, Mme la Présidente, qu'on
ne va pas quand même s'assurer, là, qu'on est capables de faire nos
frais.
D'ailleurs,
j'avais expliqué au ministre l'importance de cela, parce que parfois… le
restaurant n'était pas toujours plein, jusqu'au moment où quelqu'un a
eu, à l'institut, la brillante idée… Lorsque Kate et William sont venus à l'institut, quelqu'un a eu la brillante idée
d'offrir à tous les consommateurs du Québec la possibilité d'aller à cet
institut, aller au restaurant, et d'avoir exactement
le même repas que les deux monarques britanniques avaient eu à ce
moment-là, lors de leur visite à Montréal. Bien, vous savez, ce restaurant-là,
Mme la Présidente, il a été plein pendant six mois de temps. Alors, s'il n'y a pas quelqu'un au sein
de l'institut qui n'a pas une expertise marketing... Le ministre nous a répondu : Il y en a plus qu'un, donc je n'ai
pas besoin de mettre ça dans le projet de loi. Il y a plus qu'une personne
qui a une expertise de marketing à ce niveau-là.
Alors, c'étaient, à
quelque part, Mme la Présidente, différents enjeux à l'intérieur de ce projet
de loi. Et je ferai grâce au ministre… Parce qu'on allait même, à un moment
donné, toucher l'école d'agriculture à La Pocatière. Il y avait même le député de Côte-du-Sud qui nous
a parlé de l'insémination des bovins. J'étais très surpris de voir que
le ministre avait à l'intérieur de son
projet de loi un règlement sur l'insémination des bovins; je ne pensais pas que
le ministre de l'Enseignement
supérieur aurait, à ce moment-là, à jouer un rôle. Alors, on en apprend tous
les jours, Mme la Présidente.
Alors,
pour toutes ces raisons-là, je dois vous dire, Mme la Présidente, que nous en
sommes finalement arrivés à un
accord, un accord qui a été long. Mais je tiens à rappeler cependant, Mme la
Présidente… Pour ceux qui nous auraient reproché d'avoir pris trop de temps, bien, je peux simplement vous dire,
Mme la Présidente, que le gouvernement n'a pas à rappeler à toutes les semaines, comme il peut très bien le faire, ce
projet de loi n° 45. Et donc nous avons travaillé sur les
208 articles dans le but de mieux le faire fonctionner.
Et je reprendrai
certains propos du ministre lorsqu'il a fait, entre autres, sa déclaration de
base, sa première déclaration, lorsque nous avons accepté le principe de ce
projet de loi. Et je reprends essentiellement les propos du ministre, et il dit, entre autres, évidemment, que
c'est «un moyen privilégié pour intensifier la synergie entre
l'enseignement supérieur et la recherche». Ça, là-dessus, on est tout à fait
d'accord. Et on pense, nous, que, ce ministère, s'il est bien financé… ce dont nous avons des doutes, mais, s'il
est bien financé, je pense que ce ministère peut, bien sûr, améliorer
les choses.
Cependant,
il dit une chose qui m'apparaît particulièrement spéciale, c'est qu'il dit,
entre autres, qu'en créant ce ministère,
eh bien, un ministère consacré entièrement à l'enseignement supérieur et à la
recherche, il a dit : Nous allons valoriser
le savoir. Là-dessus, évidemment, valoriser le savoir, Mme la Présidente, c'est
une très bonne intention, mais le problème,
c'est qu'encore faut-il donner les
ressources à la hauteur de nos ambitions. Et ça, je pense que c'est ce qui
nous préoccupe le plus pour l'avenir, maintenant que le ministère est en place,
maintenant que ce ministère a été fait dans des délais raisonnables.
Je
rappelle qu'on a appris d'ailleurs, en commission
parlementaire, que même le ministère de l'Économie et des Finances
n'est même pas officiellement créé. Alors, là, on vient de franchir une étape. Je pense qu'il n'y a même pas de projet de loi qui a été déposé pour
créer officiellement le ministère de l'Économie et des Finances.
Là, cette fois-ci,
nous avons collaboré dans le but, Mme la Présidente, de créer justement le
ministère de l'Enseignement supérieur. Le
ministre a maintenant tous les outils pour faire le travail auquel on s'attend,
un travail de motivation. Et il doit…
Et je l'incite, encore une fois, d'une part à s'attaquer au problème entre
autres des cégeps en région au cours des prochains mois et des
prochaines années, je pense que c'est un enjeu majeur. Il doit également… Et je
l'inviterais beaucoup… Parce que je suis un député de Montréal, alors vous
comprendrez qu'en tant que député de Montréal — je pense que vous comprenez ça, vous aussi,
Mme la Présidente — je pense
qu'il est très important que nos grandes
universités, celles du haut savoir, celles qui vont finalement faire qu'on a un
Québec où il va y avoir del'excellence,
que ces universités-là vont être pleinement financées. Et, Mme la Présidente,
je souhaite donc au ministre, malgré
toutes mes inquiétudes, la meilleure des chances, et j'espère qu'il va faire le
travail nécessaire pour qu'on puisse avoir un système d'éducation, au
Québec, dans lequel on sera fiers, Mme la Présidente. Merci.
La Vice-Présidente
(Mme Poirier) : Merci. Alors, je reconnaîtrais maintenant M. le
député de La Prairie.
M. Stéphane Le Bouyonnec
M.
Le Bouyonnec : Merci, Mme la Présidente. Donc, à mon tour, je
tenais à remercier les collègues de la banquette ministérielle et de l'opposition officielle pour le travail en
commission parlementaire. Mais, d'entrée de jeu, malgré le fait qu'on ait pu nous entendre, j'aimerais quand même
revenir sur, un petit peu, la genèse de la création de ce ministère, en rappelant…
Et c'est évidemment le choix du gouvernement, et le gouvernement a le droit de
faire ce choix-là, dans l'attribution et la
répartition des responsabilités ministérielles, de recomposer finalement les
portefeuilles des différents ministres.
À
la base de la création du ministère de l'Enseignement supérieur, de la
Recherche et de la Science, Technologie, on aura tous compris que c'est
en partie le ministère de l'Éducation. Et à ça il faut évidemment souligner le
fait que la communauté de l'enseignement
supérieur a bien accueilli le fait d'avoir un ministre à temps plein versus le
fait d'avoir peut-être un demi-ministre. Donc, ça a eu un impact positif
dans les communautés, puis on peut le comprendre.
Cependant,
l'autre élément de modification touchait le ministère du Développement
économique, de l'Innovation et de
l'Exportation. Pour des raisons certainement réfléchies, d'autres gouvernements
avaient décidé de regrouper certaines fonctions
économiques extrêmement importantes, et nous voyons aujourd'hui à quel point
l'économie est importante. La faible croissance économique, ça pose même
des maux de tête à notre ministre des Finances, et on peut comprendre pourquoi. Le fait de disloquer, d'un côté, le
ministère du Développement économique, de l'Innovation et des
Exportations en les répartissant dans différents ministères, ça a été pour
nous, dès le départ, une source d'inquiétude. Et, je vous dirais, ça a tellement été une source d'inquiétude
que notre chef, d'ailleurs, a voulu, d'une certaine manière, démontrer
son mécontentement face à ça en faisant en sorte que, pour la deuxième
opposition, c'est le même critique qui porte les dossiers de développement
économique, de commerce extérieur et d'enseignement supérieur.
• (12 h 20) •
Maintenant, le nouveau
design gouvernemental, quels sont les effets? Nous constatons, par exemple, que
le terme «innovation», qui est si important, là, de nos jours, pour le
développement de nos sociétés, a complètement disparu
de l'un ou l'autre des titres ministériels. Nous comprenons que certaines
fonctions, par contre, ont été récupérées à l'intérieur du ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche,
de la Science et de la Technologie. Mais, à l'instar de mon collègue de l'opposition officielle, le
député de Mont-Royal, je ferais remarquer que nous avons quand même, au
moment des travaux, remarqué très rapidement que le ministère de l'Enseignement
supérieur, de la Recherche et Technologie,
eu égard à la mission du ministère, eu égard aux fonctions du ministre,
semblait faire une part congrue aux fonctions de développement
économique. Ce ministère-là avait davantage un design de ministère à vocation
sociale qu'un ministère à vocation de
développement économique. Donc, nous avons porté la plupart de nos
interventions à ce niveau pour faire en sorte qu'effectivement ces
missions, qui étaient auparavant au ministère du Développement économique, de l'Innovation et de l'Exportation,
continuent à être portées par le ministre de l'Enseignement supérieur,
de la Recherche, de la Science et de la Technologie.
Et il faut comprendre que c'est quand même
quelque chose de très concret parce qu'évidemment, lorsque nous regardons la nouvelle politique de l'emploi,
priorité… politique économique Priorité emploi, il y a quand même des volets extrêmement importants qui visent justement
à stimuler l'innovation en faisant en sorte que la recherche, appliquée ou fondamentale, se rapproche des préoccupations
des entreprises et que des ponts de convergence puissent être établis
afin de créer du développement réel.
Maintenant, sur la question des autres
interventions que nous avons pu faire. Nous avons attiré l'attention du ministre à plusieurs moments sur la question de la
gouvernance. Les journaux sont remplis d'exemples, en ce moment, d'organismes gouvernementaux ou
paragouvernementaux qui semblent avoir des lacunes de gouvernance. Nous
avons vu Tourisme Montréal, nous avons vu le CHUM et nous avons vu, dans le
passé, à l'intérieur du réseau des universités aussi, un certain nombre de problèmes. Pensons, par exemple, aux primes
de séparation à Concordia. Pensons à la dérive de l'îlot Voyageur.
En 2007, un
rapport important, créé par un comité, là, dirigé par l'ancien recteur des HEC,
Toulouse, avait donné quand même des directives et des indications
claires en ce qui a trait à une saine gouvernance pour nos universités. Six ans plus tard, on se rend compte que certaines
universités ont suivi un certain nombre de recommandations, pas toutes. Le gouvernement, dans le dépôt de son projet de
loi, semblait avoir oublié… On avait un exemple. Vous allez me
dire : Ce n'est pas si important, parce que ce n'était que l'institut
d'hôtellerie… mais avait directement des modifications à la gouvernance, et donc à la composition du conseil
d'administration, qui allaient à l'encontre, finalement, des recommandationsdu rapport Toulouse qui ont été suivies par
certaines universités. Je prends ça en exemple, et je ne veux pas faire de
cet exemple-là une généralisation, ça serait
abusif, mais je crois que le ministre, dans le futur, avec son nouveau
ministère, aura un rôle à jouer pour faire en sorte que la gouvernance des
universités sera revue, de telle sorte que ces principes-là puissent être
appliqués.
Évidemment,
ça touche, cette question-là, d'autres chantiers qui ont été lancés. On
comprend que, dorénavant, le ministre ayant son outil de travail, il
pourra être à la hauteur, je dirais, des expectatives qui ont été créées suite
au sommet sur l'éducation… l'enseignement
supérieur. Rappelons qu'évidemment il y a eu la crise, il y a eu le sommet.
Le règlement quant aux frais de scolarité,
évidemment, pour notre part, nous avons été déçus parce que ça ne règle pas
le problème de sous-financement chronique des universités. Et un certain nombre
de chantiers ont été établis justement pour faire travailler la communauté,
revenir au ministre avec des recommandations qui pourraient éventuellement
améliorer le sort de tout un chacun à l'intérieur de ce réseau.
Rappelons
que, sur les chantiers, nous avons évidemment la loi-cadre sur les universités.
À l'intérieur de cette loi-cadre-là, on peut imaginer que la question de
la gouvernance va être traitée, de la place, aussi, des universités, éventuellement, l'objet du deuxième chantier,
c'est-à-dire le Conseil national des universités, qui ferait partie peut-être
aussi de cette loi-cadre.
Sur ce
deuxième point, le Conseil national des universités, je vous rappellerais que
notre formation s'est montrée en défaveur
puisqu'il s'agissait de la création, à nouveau, d'un autre organisme, alors… Et
je veux faire tout à l'heure un petit peu
la liste de tous les organismes que se propose de créer le ministre, et nous
trouvons ça un peu trop, dans un contexte de contraintes budgétaires comme nous le vivons, de créer autant de
nouveaux organismes, même si, de manière objective, dans l'absolu, il
peut y avoir des fonctions intéressantes et de l'intérêt pour la création de
ces organismes. Mais le contexte ne s'y prête pas.
Sur le
Conseil national des universités, je rappellerais que nous avions déjà le
Conseil supérieur de l'éducation, avec
peut-être l'avantage d'avoir un oeil à la fois sur le début du réseau, le
primaire, le secondaire, le collégial et universitaire. Aujourd'hui,
nous aurons le Conseil supérieur de l'éducation pour le primaire et le
secondaire, nous aurons le Conseil national
des universités. Mais les cégeps tombent un peu, si vous me permettez
l'expression, dans la craque. Ils n'ont
pas leur conseil. Puis là on assiste un peu à une dislocation du continuum et
puis des éléments d'intégration entre les divers conseils.
Pour ça, si
jamais nous devons participer à la création du Conseil national des
universités, à l'instar de l'Université de Montréal, Mme la Présidente, je vous dirais que nous souhaiterions que ça soit plutôt le conseil
national de l'enseignementsupérieur plutôt que simplement
des universités. Nous savons à quel point les cégeps ont de
l'importance, et l'interface entre
les cégeps et les universités, quelque
part, ça doit être considéré comme un
tout. Et j'invite le ministre à réfléchir à cette question.
D'autres
chantiers étaient aussi mis de l'avant : la formation collégiale, le financement des universités et l'aide financière aux études. Tout ça
pour dire que, maintenant que le ministère est créé, les attentes sont énormes.
On a pu réaliser, comme l'a souligné le député de Mont-Royal, qu'il
y a un malaise, en ce moment, au niveau universitaire, dans la mesure où… et
j'espère que ce n'est pas la création du ministère qui a fait en sorte
que certains travaux de planification budgétaire,
de discussions permanentes avec les différentes institutions ont été retardés
de telle sorte qu'aujourd'hui, alors qu'il
ne reste que quelques mois avant le début de la nouvelle année de ces organisations-là, les gens sont, aujourd'hui encore, dans le flou artistique
et un peu dans le noir.
D'ailleurs,
le recteur le l'Université Laval, aujourd'hui, disait, à la limite, que Québec
ne tenait pas ses promesses. D'autres
recteurs étaient moins, si vous
voulez, virulents, mais indiquaient
qu'ils n'avaient pas eu de coup de téléphone. Et effectivement le député de
Laurier… Sainte-Marie, annonçant une bonne nouvelle, a promis à ces recteurs-là
que, dans quelques semaines, ils
auraient un coup de téléphone du ministre, entre
autres pour élaborer les projets de
partenariat, qui, rappelons-nous, sont la source principale du nouveau
réinvestissement. Donc, c'est un peu un cas le cas, contrat de performance. On
n'est pas contre cette approche, parce que ça permet éventuellement au ministre
d'avoir un meilleur contrôle; encore faudrait-il que le ministère se mette au
travail.
Alors, la question
qu'on pourrait se poser : Est-ce
que tous les délais de la création du
ministère et les énergies qui ont été consenties à créer ce ministère ont fait en sorte
que les urgences et les priorités d'offrir un cadre financier stable et
prévisible aux universités n'ont pas été rencontrées et que nous nous
retrouvons à nouveau un peu comme dans une crise,
comme ce qu'ils ont vécu lorsque le gouvernement, prenant le pouvoir, a évidemment
aboli la hausse des frais de scolarité du précédent gouvernement, qui
générait une première coupe dans les budgets universitaires et aussi pour
donner une coupe de 250 millions, qui ajoutait vraiment à un stade déjà
critique? Finalement, le gouvernement, pour jouer en fait sur les fins d'année
financière du gouvernement puis du réseau universitaire, le petit mois de
différence, par un tour de passe-passe comptable, permettait de basculer et de
pelleter en avant une partie des déficits.
Alors, la question
du financement des universités, évidemment, aujourd'hui, à la lumière de ce que nous avons vu dans la dernière mise à jour économique
du gouvernement avec le déficit de 2,5 milliards, peu importent les raisons qui ont mené à cet état de fait, je
ne reviendrai pas là-dessus, ça a été moultement commenté, nous devons réaliser
que ce 2,5 milliards, c'est quelque chose d'important. Et, dans les années futures, nous voyons très bien
que nous sommes encore en déficit.
Nous voyons très bien que, pour la première année, suite aux 2,5 milliards, le ministre des Finances devra trouver peut-être un 500 millions
de coupures additionnelles; l'année suivante, un autre milliard. Alors, où le
trouvera-t-il?
Lorsque
la politique a été annoncée économique, Priorité emploi,
sur le 2 milliards d'annonce, le ministre des Finances le disait lui-même, en fait, il y avait
700, 800 millions qui étaient déjà à l'intérieur du cadre budgétaire et 1,3 milliard,
qui étaient finalement des sommes qui devaient être des dépenses
supplémentaires à l'extérieur du cadre budgétaire. Ce qui signifie, à la
lecture de tout ça, qu'on peut raisonnablement penser que la politique de
recherche et d'innovation, pour laquelle on
dit que c'est un investissement de 3,7 milliards
de dollars sur cinq ans — rappelons-nous
qu'on a un cadre financier sur trois ans,
j'oublie les deux dernières années, mais il y a quand même
un 2,1 milliards, là, pour les trois prochaines années — on
peut raisonnablement penser que, si le gouvernement devait appliquer des coupes additionnelles, si les revenus n'étaient pas au rendez-vous à nouveau ou l'inflation ou peu importe, on pourrait penser raisonnablement que les universités
et le milieu de la recherche universitaire et la recherche en général pourraient
écoper.
Alors, lorsqu'on est face à des faits qui sont
aussi troublants, j'invite donc le ministre, maintenant, avec son nouveau ministère, peut-être à donner l'heure juste aux organisations qui sont sous sa responsabilité, particulièrement les universités,
d'éviter les fausses promesses, d'éviter de faire en sorte que la planification
budgétaire…
Une voix : Mme la Présidente.
La Vice-Présidente (Mme Poirier) :
Oui, M. le leader du gouvernement.
• (12 h 30) •
M.
Traversy : Mme la Présidente, dans le cadre du débat actuel sur le projet de loi n° 45,
le ton est excellent. Nous demanderions simplement aux parlementaires,
en cette Chambre, de faire attention à leurs propos qui pourraient imputer des motifs à des collègues,
ou encore utiliser des propos non parlementaires
qui sont proscrits à notre lexique. Merci beaucoup.
La
Vice-Présidente (Mme Poirier) : Alors, M. le député de
La Prairie, M. le député de La Prairie, je vais vous inviter à
la prudence dans vos propos, tout simplement.
M. Le Bouyonnec : Alors,
j'accepte le commentaire du leader adjoint, alors
je vais reformuler : De faire... En fait, de faire des promesses que le
gouvernement pourra s'assurer de tenir.
Plusieurs
députés du gouvernement, à l'intérieur de la commission parlementaire, ont
indiqué à plusieurs reprises que le
gouvernement disait ce qu'il fait et faisait ce qu'il
dit.D'accord, mais, dans le cas des
universités, je pense qu'on doit tous reconnaître que la situation est
grave et critique. Le recteur Breton, par exemple, a réaffirmé en commission
parlementaire ce qu'il avait dit directement à la première ministre lors du
sommet, c'est qu'il craignait, au niveau des organismes d'agrément — entre autres pour
la médecine et d'autres — que le sous-financement chronique des
universités fasse en sorte que nous puissions assister à des
désaccréditations pour des domaines aussi importants, par exemple, que
la médecine. Écoutez, j'ai reposé la question au recteur Breton en
disant : Est-ce que vous avez prononcé ces phrases,dans le cadre du sommet, sur le coup de l'émotion? Quelques mois après,
est-ce que vous vous répétez? Il a répété ces phrases-là. Nous avons vu d'autres universités aussi, McGill,
par exemple, avec presque 1 milliard de déficitaccumulé quant à
l'entretien reporté.
Lorsqu'on regarde le tout, ça s'additionne. On est
dans une situation où il est raisonnable que les gens puissent avoir des
doutes sur les capacités du gouvernement de pouvoir livrer aux universités ce
qui a été indiqué. Alors, la solution, je crois, si on devait se rendre compte que le gouvernement
n'est pas en mesure de donner suite à l'un ou l'autre de tous ces chantiers, et finalement des attentes
qui ont été créées : il y a peut-être lieu — le nouveau ministère pourrait se pencher là-dessus, avec ou sans l'aide du conseil
national des universités — de voir à ce qu'on puisse donner davantage de flexibilité
financière à nos grandes universités. Et,
parmi ces flexibilités financières additionnelles, moult exemples ont été présentés, entre autres les frais de
scolarité pour les étudiants étrangers, etc., et j'en
passe — je ne
veux pas aller trop loin dans le
détail — ou même de permettre de financer, par exemple, pour des universités comme l'Université de Montréal, des cours de
francisation — ça
pourrait peut-être être un clin d'oeil pour la
ministre de l'Immigration — pour
permettre de faire immigrer des étudiants de langue... qui ne parlent pas le
français, de telle sorte qu'ils se francisent à l'intérieur du cursus et que
les sommes, finalement, des frais de scolarité
augmentées puissent servir au budget de l'université. C'était un autre exemple.
Alors, Mme la
Présidente, tout ça pour vous dire que je crois que le ministre a beaucoup de
pain sur la planche. C'est un travailleur infatigable, on lui souhaite
bonne chance, on lui offre notre collaboration et on souhaite que les éléments prioritaires soient : évidemment, la question du financement des universités dans le
cadre de ses prochains travaux, que
nos universités soient rassurées, aient une
prévisibilité; la question de la reddition de comptes, d'alléger la
reddition de comptes pour laquelle nous savons que des sommes importantes sont engagées de manière inutile; de favoriser une plus grande autonomie de nos universités; et de
faire en sorte que le ministère de l'Enseignement supérieur, de la
Recherche, de la Science et de la
Technologie soit véritablement connecté et aussi en collaboration avec
l'économie réelle, avec le monde des
affaires, avec nos grandes industries. Et c'est sur ce, Mme la Présidente, que
je vais terminer mon intervention.
La
Vice-Présidente (Mme Poirier) : Alors, je vous remercie, M. le
député de La Prairie. Je reconnais maintenant Mme la députée... Excusez, j'ai un...
Mme Dominique Vien
Mme Vien : …de Bellechasse, bien oui.
La Vice-Présidente (Mme Poirier) :
...de Bellechasse, effectivement.
Mme Vien : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Bon matin, bonjour à chacun et à chacune.
Alors, ça me fait plaisir, effectivement, à titre de parlementaire, de prendre la parole ce matin sur un
important projet de loi, un projet
de loi qui a commandé beaucoup
d'heures de travail, Mme la
Présidente, tout le monde le sait, un projet de loi important, aussi, parce qu'il vient confirmer la création du ministère
de l'Enseignement supérieur, de la Recherche, de la Science et de la Technologie, donc une situation qui vient un peu
chambarder, bouger aussi, ce qui était,
sous une autre administration, sous
la coupe, donc, du ministère de l'Éducation. Il
faut savoir qu'ici, avec la création
de ce ministère, Mme la
Présidente, là, c'est le ministère, aussi, du Développement économique qui n'existe plus. Alors, effectivement, c'est un projet de
loi qui est important. Et, tout comme les
collègues l'ont dit un peu avant moi, soit le député de Mont-Royal
ou de La Prairie, il s'agit effectivement d'un choix légitime, d'un choix qui appartient à
l'Exécutif, d'organiser, évidemment, le cabinet, le Conseil des ministres comme
l'entend la partie ministérielle et comme l'entend la première ministre.
Toujours important de se rappeler d'où on vient. M. le député de La Prairie parlait de la genèse, il a raison de le souligner. Un ministère, donc, qui verra le
jour officiellement dans les prochaines heures, peut-être, ou dans les
prochains jours. Mais il faut spécifier que le ministre en question a pu vaquer
à ses occupations que lui a confiées la première ministre le 19 septembre
2012, au moment de la constitution, de l'installation du nouveau Conseil des ministres, parce qu'évidemment l'Exécutif a adopté un décret à ce
moment-là. Ce n'est que huit mois plus tard, faut-il le rappeler, que la
partie gouvernementale a déposé un projet de
loi voyant justement à la création de ce ministère. Et, à juste titre, le
député de Mont-Royal soulignait tout à l'heure que, dans l'étude article par
article de ce projet de loi n° 45, on se sentait quelquefois un peu bousculés d'aller rapidement parce que c'était
important d'avoir ce projet de loi là, effectivement, pour fonctionner, alors que le ministre fonctionne déjà
depuis plus d'un an avec le décret qu'il a reçu, et on se questionne, on
se questionne pourquoi, Mme la Présidente. Si c'est si important pour le
ministre actuel de l'Enseignement supérieur, pourquoi
ça ne l'est pas pour le ministre… concernant les finances et l'économie? Mais
ça, c'est un autre débat. On attend toujours un dépôt de projet de loi à
ce niveau-là.
Donc, le
15 mai, c'est le dépôt du projet de loi en question, 45. Et, le
4 juin, nous avons, bien entendu, adopté le principe de ce projet
de loi et, depuis l'automne, nous sommes à la tâche d'étudier article par
article ce projet de loi.
C'est un projet de loi, je l'ai dit, je le rappelle,
qui est très, très, très important, et je tiens à souligner que nous avons pris
à peu près une soixantaine d'heures pour étudier la création d'un nouvel
organisme de ce ministère. Je n'ai pas
l'impression, Mme la Présidente, que nous avons utilisé des mesures dilatoires,
bien au contraire. Je pense que nous
avons fait oeuvre utile de prendre notre temps, parce que nous avons pu
convaincre la partie ministérielle d'apporter certains aménagements, certains amendements, certains changements au
projet de loi, et ces changements, ces amendementsserviront beaucoup mieux, je pense, toute la
communauté des universités, des cégeps, tout ce qui concerne
l'enseignement supérieur au Québec, la
recherche, l'innovation. Je pense que nous avons eu raison aujourd'hui de
prendre notre temps et d'apporter certains amendements dont… J'en
parlerai dans quelques instants.
Vous
vous rappelez, Mme la Présidente, hein? Des fois, on oublie ça, au Québec, à
quel point on est bien munis en termes
d'établissements d'enseignement supérieur : 19 universités au Québec,
48 cégeps, 47 collèges privés. Évidemment, ce sont tous des établissements, par la richesse
de leur corps professoral, par la richesse également des projets qu'ils mettentsur la table, notamment en recherche, qui sont
devenus, qui deviennent et qui deviendront, je l'espère, encore davantage
des vecteurs du
savoir. Cette recherche qui est, pour certains, fondamentale, pour d'autres, en
recherche appliquée, dans nos collèges par exemple, est fondamentale. Elle est
importante notamment au niveau du développement régional. On le sait tous, on en connaît dans nos régions, des cégeps,
par exemple, qui sont carrément collés sur les besoins des communautés que le cégep dessert, collés sur
les priorités des petites et moyennes entreprises de nos régions. Alors,
c'est vous dire à quel point c'est
carrément, là, indispensable, ce qui se déroule dans nos établissements
d'enseignement supérieur.
• (12 h 40) •
Alors,
nous avons, je le répète, travaillé avec beaucoup de rigueur, beaucoup de
constance, beaucoup de sérieux pour
en arriver, je crois, au meilleur projet de loi possible. Nous avons eu des
collègues qui ont travaillé sans relâche, que ce soit du parti ministériel, ou du côté de l'opposition officielle, ou
de la deuxième opposition. Je lève mon chapeau à chacun et à chacune, Mme la Présidente, parce que c'étaient plusieurs
heures. Il y a des fois où ça n'a pas été comique à tous les jours, on va se le dire, mais je pense
aujourd'hui que nous sommes devant une pièce législative qui satisfait
quand même les parlementaires ici aujourd'hui.
Un des amendements
qui a été apporté, Mme la Présidente, qui est très important, c'est d'avoir
convaincu le ministre d'apporter un changement majeur au niveau
de la mission du nouveau ministère qui va voir le jour, mais aussi d'avoir apporté un changement dans ce qu'est le
rôle du ministre de l'Enseignement
supérieur, c'est-à-dire d'avoir réussi à apporter
toute cette notion importante de l'économie, du volet économique. Le député de Mont-Royal, tantôt, je pense, que… je ne
reprendrai pas tout son exemple, mais il en a fait une démonstration
éloquente, notamment avec l'institut d'hôtellerie
et du tourisme. Quand on parle d'économie, quand on parle de marketing, ce sont tous des
vases communicants et qui sont importants de considérer quand on est
dans un univers d'enseignement supérieur, dans des établissements d'enseignement. Il faut être collé sur la réalité de nos entreprises, il faut être
collé sur la réalité du monde qui nous entoure. Alors, ces gens-là ne sont pas désincarnés de la société québécoise et, je dirais même, ne sont pas désincarnés de l'ensemble du monde. Alors, il était important
de pouvoir convaincre le ministre et d'y aller, donc, avec l'ajout de cette notion d'économie.
Bien sûr, Mme la
Présidente, nous avons aussi insisté souvent — souvent — pour
clarifier les rôles entre la ministre de l'Éducation maintenant et le nouveau ministre
de l'Enseignement supérieur. Très honnêtement, ce n'était pas toujours évident de tracer la ligne entre les deux, et
nous avons souvent insisté pour clarifier les choses à ce niveau-là.
On
connaît aussi l'insistance, et on l'appuie là-dedans à 100 %, de notre collègue d'Acadie en ce qui a
trait à la parité hommes-femmes sur
nos établissements, nos conseils d'administration. Alors, bien entendu, nous
avons fait front commun auprès de
notre collègue pour convaincre d'insister, notamment avec l'institut des mines
et l'Institut d'hôtellerie, pour
qu'il y ait, sur leurs conseils d'administration, la parité hommes-femmes. Je
pense qu'il est de notre devoir comme parlementaires, à chaque fois
qu'il se présente une occasion justement de rappeler cet aspect fondamental des
choses, qu'il y ait l'égalité entre les
hommes et les femmes et qu'il y ait parité sur le conseil d'administration.
Vous le savez, vous-même, vous me
dites — je pense
que j'ai raison de le souligner — qu'il faut… que nous soyons un homme ou une
femme, un parlementaire, nous devons insister sur cette question.
Bien
sûr, Mme la Présidente, donc ce sont des événements, des changements, des
amendements qui ont demandé du temps.
Et nous ne sommes pas gênés aujourd'hui devant cette pièce législative quand
même qui porte aussi le sceau de l'opposition
officielle, du Parti libéral qui a insisté, à plusieurs reprises, pour intégrer
des changements qui sont fondamentaux mais dont on se réjouit
aujourd'hui.
Mme la Présidente,
vous dire, au passage, également — je vais juste vérifier le temps qu'il me
reste — que
je demeure inquiète quand même sur la suite
des choses. Nous avons, à la Commission de la culture et de l'éducation,
entrepris des auditions sur la gestion des
universités. Quelles qu'elles soient jusqu'à maintenant, elles sont toutes
inquiètes sur la suite des choses au niveau budgétaire. Elles se sont fait
promettre, Mme la Présidente, pour 2014‑2015… l'année
2014‑2015, des augmentations de 8,5 %, un chiffre aux alentours de
1,7 milliard de dollars d'argent neuf dans leurs établissements. Or, ce qu'on nous dit, ce qu'on apprend
aujourd'hui, que ce soit de l'Université de Montréal, que ce soit de
Concordia, que ce soit des HEC, que ce soit n'importe quelle université
montréalaise, parce que ce sont les universités
montréalaises que nous avons auditionnées jusqu'à maintenant, elles sont toutes
inquiètes pour la suite des choses. Pourquoi? Parce qu'elles n'ont pas
de signal, Mme la Présidente.
Non
seulement il y a 2,5 milliards de dollars qui manquent actuellement pour
l'année en cours, c'est la conséquence directe
de cette mauvaise gestion de ce gouvernement, mais on se rappellera aussi que
le gouvernement a déjà demandé des
coupures inimaginables aux universités. Alors, elles se retrouvent aujourd'hui
avec une impasse budgétaire, et elles savent bien qu'elles ne sont pas, elles
aussi, désincarnées de ce qui se passe au reste du Québec et qu'elles
pourraient effectivement payer une facture.
Payer une facture, pour elles, ça veut dire probablement entacher ou revoir un
certain nombre de services qui ne pourraient pas être justement délivrés auprès
de leurs étudiants.
Alors, vous me voyez très inquiète, Mme la Présidente, ce matin : une situation budgétaire, au Québec, qui est préoccupante, des universités qui
se sont fait promettre mer et monde et elles se rendent compte aujourd'hui
qu'il se peut qu'elles n'aient pas les argents auquel elles s'attendent pour
faire un budget équilibré dans leur établissement.
Alors,
Mme la Présidente, je vais terminer là-dessus, en rappelant, donc, au ministre
ses engagements budgétaires auprès de
ces établissements, pour lui rappeler également — parce que ce sont d'autres de ses collègues
qui assistaient aux auditions des universités — que
ces universités attendent son coup de fil. Merci beaucoup, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente
(Mme Poirier) : Merci. Mme la députée de l'Acadie.
Mme Christine St-Pierre
Mme
St-Pierre :
Merci, Mme la Présidente. Alors, il me fait grand plaisir de prendre la parole
dans le cadre du projet de loi n° 45, un projet de loi qui crée le
ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche, de la Science et de la Technologie. C'est un ministère qui sera
important dans l'appareil gouvernemental, bien
sûr, et c'est un ministère qui est créé avec
ce projet de loi qui comporte plusieurs articles : il y a des articles de
concordance, bien évidemment, mais plusieurs
articles qui créent le ministère — on parle de 208 articles. Alors,
l'opposition officielle a adopté le principe du projet de loi et s'est
assurée de bien faire le travail que la population attend des élus lors des
travaux parlementaires.
Il
y a eu certaines critiques, vraiment, qui ont été... qui étaient injustes, puisqu'on sous-entendait — ou enfin on le
disait même carrément — que les députés de l'opposition officielle
faisaient en sorte qu'on étirait le débat. Mais sachez, Mme la
Présidente, qu'aujourd'hui on se retrouve avec un projet de loi qui est
nettement meilleur que ce qui a été déposé
au début de la commission parlementaire. C'est un projet
de loi qui est bonifié, c'est un projet de loi
qui est clair, c'est un projet
de loi, aussi,
qui éclaircit certains éléments.
Vous
savez, comme ancienne responsable du ministère de la Condition féminine,
j'étais très sensible — et je le suis
toujours — aux
questions de parité ou de zones de parité dans les conseils d'administration.
Nous avions adopté une loi, sous
notre gouvernement, sur... une loi sur la gouvernance,
qui faisait en sorte que les sociétés d'État devaient faire en sorte que
leur conseil d'administration atteigne une parité. Lorsque, pendant l'étude du
projet de loi, des articles de concordance allaient dans des organismes où il y
avait des conseils d'administration, je me suis assurée de vérifier s'il y avait soit la zone... en fait, la zone de
parité, parce que je pense que ça, c'est pas mal reconnu dans les milieux,
plutôt que la parité pure et dure. La zone
de parité, ça peut être 40-60 ou 60-40, ce qui donne encore plus de marge de
manoeuvre,parce
qu'on peut aller même jusque... les femmes pourraient représenter 60 % des
conseils d'administration plutôt que de se limiter à 50 %.
Alors,
ça a été assez long. La première fois que j'ai parlé de cette question-là,
c'était lorsque nous étions au chapitre qui traitait
de l'institut des mines. Ça a été long, le ministre a dû prendre un certain
moment de réflexion. Et la nuit lui a porté
conseil puisque, le lendemain, il est revenu en acceptant la proposition de
faire en sorte que le conseil d'administration soit dans la zone de
parité, et ça a été la
même chose également pour l'institut de l'hôtellerie.
Donc,
simplement sur ces deux aspects-là, qui peuvent paraître, lorsqu'on rédige un
projet de loi, pas nécessaires, mais,
lorsqu'on allait dans certaines lois... Puisque nous étions à... puisque nous
allions ouvrir certaines lois, bien, on en a profité aussi pour regarder un peu plus en profondeur les
éléments de ces lois.
C'est,
je le disais, un ministère qui est important, puisqu'il
représente l'enseignement supérieur, donc on parle de nombreux collèges, universités également. Et, pour moi qui suis députée de la circonscription de
l'Acadie, évidemment, c'est un projet
de loi qui m'intéresse au plus haut point,
puisque, dans ma circonscription, on compte trois cégeps et… dont un cégep
anglophone, deux cégeps francophones, alors c'est nettement important. On parle
de plusieurs milliers d'étudiants qui fréquentent ces institutions qui
sont situées dans ma circonscription d'Acadie. Alors, pour moi, c'est
évidemment un projet de loi qui m'intéressait au
plus haut point.
• (12 h 50) •
La
question du développement économique était complètement évacuée — pourtant, le lien est naturel — et nous avons insisté, évidemment, pour
que cette notion de développement économique soit vraiment prise en compte et qu'on comprenne qu'évidemment la recherche, le
développement doit aller de pair avec le développement économique.
Le
projet de loi, nous a dit le ministre, était très bien accueilli. On en
convient, ce projet de loi était bien accueilli, mais il fallait, bien sûr, faire le travail qui était nécessaire comme
parlementaires. Et je pense que ceux qui sont intervenus en dehors de la commission parlementaire, les
organismes, entre autres les syndicats qui sont intervenus, comprennent
mal le rôle des députés, et ce rôle de député doit être réitéré, doit être
rappelé. Et, pour avoir piloté des projets de loi… Et je me souviens que vous
étiez, Mme la Présidente, en face de moi à ce moment-là. Entre autres le projet
de loi sur le patrimoine culturel, il y a certains moments où je sourcillais.
Vous me rappeliez à l'ordre — et vous le faisiez très bien — en me disant qu'il y avait un travail qui
devait se faire, un travail, évidemment, en profondeur pour que le
projet de loi soit le meilleur possible, et
c'est ce qui est arrivé, alors je vous en remercie. Et j'espère que le
ministre, qui est à ses débuts...
C'était son premier projet de loi. Et je comprenais très, très bien à quel
point il pouvait être fier, et excité, et tout ça, mais, même quand il
le rappelait, ça ne nous impressionnait pas beaucoup, puisque nous savions que
nous avions un travail très, très sérieux à faire.
Nous
avons abordé certaines questions. Entre autres, il y a eu la question de la
langue, puisqu'on avait un article de référence, de concordance qui
allait dans la loi de la Charte de la langue française, et j'en ai profité pour
rappeler au ministre que, dans la Charte de la langue française, il y a un
article qui dit aux collèges et aux universités qu'ils se doivent
d'adopter — cette
loi a été adoptée en 2002 — des
politiques linguistiques. Alors, j'ai posé des questions au ministre sur cette
question-là. Il a dit que… Il a fait savoir que c'était important et que ça
devait être révisé, il l'a dit rapidement.
Après ça, il s'est un petit peu rétracté. Ça va mériter des éclaircissements
éventuellement pour savoir quel est le message exactement qu'il a
envoyé, parce que, lorsqu'on a rencontré… On rencontre présentement les
universités en commission parlementaire.
J'ai posé carrément la question aux HEC : Est-ce que vous avez entendu
parler de quelque chose? Est-ce que
le ministre vous a demandé quelque chose? Est-ce que le ministre vous a passé
une commande à ce sujet-là? Puis ça a
été non. Alors, je pense qu'il va falloir qu'on comprenne quel est le message
exactement qu'il leur a envoyé, puisque c'est très important. C'est dans
la loi, et, à la demande du ministre, il doit y avoir des comptes qui sont
rendus.
Il
a aussi… Lorsque je lui ai posé la question s'il était toujours d'accord pour
que la loi 101 soit appliquée au niveau collégial, il a répondu qu'il était favorable à cette question-là,
question qui m'intéresse encore, puisque je suis députée d'Acadie, et,
dans mon comté, il y a trois cégeps, dont un cégep qui est anglophone. Et, si
la loi 101 ou des… était appliquée à ce
cégep — il y a
beaucoup de francophones qui le fréquentent parce qu'ils veulent, ces
étudiants-là, avoir une formation en
anglais — ça
voudrait dire que ça viderait le collège d'environ, je me dis… peut-être
2 000 étudiants. Alors, ce serait quand même assez…
La
Vice-Présidente (Mme Poirier) : Excusez, Mme la députée de
l'Acadie, excusez-moi. M. le ministre.
M. Duchesne :
…parce qu'on ne peut pas mettre dans ma bouche des mots qui ne sont pas le cas.
La Vice-Présidente
(Mme Poirier) : Vous invoquez quel article?
M.
Duchesne : J'invoque l'article
sur imputer des motifs. Alors, sur la question du cégep en français, je n'ai pas donné de
détails là-dessus. Alors, elle peut interpréter, mais il faut juste que ce soit
présenté ainsi.
La
Vice-Présidente (Mme Poirier) : D'accord. Alors, veuillez poursuivre, Mme la ministre… Mme la députée.
Mme
St-Pierre : Merci, Mme la Présidente. On pourra sortir les transcripts. On pourra les
envoyer au ministre avec plaisir. C'est exactement ce qu'il a dit.
Alors,
Mme la Présidente, nous avons aussi, pendant les audiences que nous
tenons sur les maisons… collèges, en fait les cégeps, présentement, il y
a une énorme préoccupation sur les questions budgétaires. Des promesses, des engagements
ont été pris d'augmentation très importante des budgets.
Avec la mise à jour économique du ministre, qui a admis cette semaine
qu'il s'était trompé beaucoup, les universités sont très, très, très inquiètes
et elles sont venues nous le dire en
commission parlementaire cette semaine, commission parlementaire qui se tient…
Vous savez, à tous les trois ans, les
universités viennent rendre des comptes, faire rapport de leur administration,
et, sur cette question-là, vraiment c'était
l'inquiétude. Ça nous a permis — et je termine là-dessus — d'apprendre que… On savait que les HEC
avaient un M.B.A. en anglais seulement. Alors, théoriquement, le HEC de Montréal pourrait diplômer un
étudiant d'une université… un collège
francophone… en fait, une maison
d'enseignement francophone, qui ne parle pas un mot de français. Alors,
ça a été assez… C'était déjà sorti dans les médias il y a deux ans, et le HEC
nous a appris que c'est la première ministre elle-même,
lorsqu'elle était ministre de l'Éducation, qui avait autorisé ce programme aux
hautes études collégiales en anglais
seulement, le M.B.A. en anglais seulement. Donc, parfois, ça fait du bien
d'entendre que certaines décisions ont été prises par des personnes qui croyaient à une formation en
anglais et à une possibilité de faire un programme où on peut obtenir un
diplôme dans une autre langue.
Alors, je termine
là-dessus, Mme la Présidente?
La Vice-Présidente
(Mme Poirier) : Non, c'est terminé, vous aviez 10 minutes.
Alors, c'est terminé, je vous remercie.
Mme
St-Pierre :
…
La
Vice-Présidente (Mme Poirier) : Ça a été une erreur de ma part,
tout simplement. J'essaie de ne pas les faire deux fois. Alors, M. le
député de LaFontaine.
M. Marc Tanguay
M.
Tanguay : Oui. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, je
suis heureux, Mme la Présidente, de prendre la parole dans le contexte
de la prise en considération et, le cas échéant, de l'adoption du projet de loi
n° 45. Donc, dans ce contexte, Mme la Présidente, je crois qu'il est
important de rappeler évidemment la chronologie des événements.
En
septembre 2012, par décret, le 20 septembre 2012, le gouvernement du Parti
québécois a décidé de fusionner certains éléments, tantôt du ministère
du Développement économique, de l'Innovation et de l'Exportation, d'une part,
et, d'autre part, du ministère de l'Éducation, du Loisir et du Sport. Alors,
par décret, parce qu'il était possible au gouvernement
de le faire de cette façon-là en vertu de l'article 9 de la Loi sur l'exécutif,
a été constitué, je dirais, administrativement mais non législativement,
le ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche, de la Science et de
la Technologie.
Évidemment,
cette décision fut prise, on vient de le souligner, par décret le 20 septembre
2012. Il est important, dans la chronologie des événements, Mme la
Présidente, de constater que, huit mois après, soit le 15 mai 2013, il y a eu dépôt d'un projet de loi qui visait à,
législativement, faire, de un, le constat, mais évidemment bonifier et
entériner cette décision qui était
tantôt de prendre une partie du ministère de l'Éducation et de la fusionner ou
de la récupérer au sein du ministère du Développement économique, de
l'Innovation et de l'Exportation, ce qui nous donnerait évidemment, avec
l'Enseignement supérieur… qui nous donne le projet qui est devant nous, le
projet de loi n° 45.
Nous
avons eu l'occasion, Mme la Présidente... Et j'ai eu l'occasion de siéger comme
représentant de l'opposition officielle dans le cadre de l'étude article
par article. Rappelons-nous, et j'y vais de mémoire : un projet de loi qui
a 208 articles, qui vient modifier 51 lois, vient modifier 36 règlements, un
projet de loi qui nécessitait évidemment un minimum,
de un, de compréhension, de donner un minimum, également, de temps au ministre
et à la banquette ministérielle pour
expliquer et justifier ce qui était proposé et faire en sorte que la mission…
Parce que nous avons eu, dès les premiers articles, Mme la Présidente, à statuer sur la mission de ce ministère
qui reprenait… et nous avions avec nous l'opportunité d'avoir un organigramme de ce qui avait été le
nouveau ministère au lendemain de la prise de décret. Donc, le 20
septembre 2012, par décret, le ministère a été constitué. Nous avons pu voir,
administrativement, qu'il y avait toute une section intitulée «Recherche, innovation, infrastructures et collaborations
internationales» qui avait été ajoutée à l'Enseignement supérieur, ainsi que la troisième grande boîte, si
je peux m'exprimer ainsi, l'«Aide financière aux études et gouvernance
interne des ressources».
Alors,
il y avait là évidemment, au niveau de la philosophie d'action, au niveau de la
justification, une importance de
tenir un débat sur, je vous dirais, premier élément, les premiers articles, sur
la mission de ce ministère, sur les fonctions que le ministre voulait
s'octroyer et évidemment comment il aurait pu les mettre en application :
Comment il peut ou non les mettre en application? A-t-il les outils
nécessaires? Et aussi on a pu voir, Mme la Présidente, qu'il y avait un
chevauchement…
La Vice-Présidente (Mme Poirier) :
Alors, étant donné l'heure, je vais vous demander si vous souhaitez poursuivre
votre présentation au retour de la pause?
M. Tanguay : Tout à fait, Mme
la Présidente.
La Vice-Présidente (Mme Poirier) :
Alors, je vais suspendre nos travaux jusqu'à 15 heures.
(Suspension de la séance à 13 heures)
(Reprise à 15
h 1)
Le Vice-Président (M. Cousineau) :
Veuillez vous asseoir. Bon après-midi à tous et à toutes.
Alors, l'Assemblée poursuit la prise en considération du rapport de la Commission de la culture et de l'éducation
sur le projet de loi n° 45, Loi sur le ministère de l'Enseignement
supérieur, de la Recherche, de la Science et de la Technologie. Nous en étions
avec M. le député de LaFontaine. Je vous laisse aller, M. le député de LaFontaine, vous pouvez poursuivre votre
intervention.
M. Tanguay : Merci
beaucoup, M. le Président. Alors, effectivement, M. le
Président, nous en étions à la
prise en considération qui nous amènerait
vers l'adoption finale du projet de loi n° 45,
projet de loi, il est important de le rappeler, qui a pour but la création du ministère
de l'Enseignement supérieur, de la Recherche, de la Science et de la
Technologie. Alors, avant la pause du midi, M. le Président, j'avais eu l'occasion,
en quelques minutes, de préciser évidemment l'importance du débat qui a eu lieu
sur les assises, sur les justifications ou non d'y aller de certaines modifications
à plusieurs autres lois, d'autres lois, M. le Président, qui sont au nombre de
51, 51 lois qui sont amendées par ce projet de
loi, et 36 règlements. Donc, il
s'agissait bien évidemment, comme opposition responsable, de faire en sorte
que l'on puisse se prononcer sur des
articles qui soient clairs, dont l'on connaît évidemment les impacts
tangibles, et également de se
prononcer et de pouvoir bonifier le projet
de loi, et c'est ce que nous avons
fait durant les heures qui nous ont occupés en commission parlementaire.
Deux lois importantes,
M. le Président, parce
qu'il y a deux ministères
touchés, essentiellement : le ministère
de la ministre de l'Éducation, du Loisir et du Sport et évidemment l'actuel ministre,
ministre de l'Enseignement supérieur, qui fait en sorte d'aller chercher, permettez-moi l'expression, un morceau
des responsabilités qui sont déjà dans la Loi sur le ministère
de l'Éducation, du Loisir et du Sport et également un morceau non négligeable,
Loi sur le ministère du Développement économique, de l'Innovation et de
l'exportation.
Ce qui, d'entrée de jeu, était très important pour nous, M. le Président, c'est de
faire en sorte qu'en mettant ce pan innovation et exportation, en
mettant ce pan surtout innovation sous l'égide du ministre de l'Enseignement supérieur, bien, qu'on ne perde pas évidemment
le nécessaire maillage, la nécessaire collaboration et prise en considération tantôt des recherches que l'on fait
dans nos universités, dans nos cégeps... On parle ici de recherches, d'une part,
fondamentales, mais, d'autre part, de recherches appliquées, faire en sorte
que, oui, on se pose des questions tout en conservant…
Et j'ai particulièrement aimé, M.
le Président, ce matin, entendre le ministre
du Développement... pas du Développement économique, mais
le ministre de l'Enseignement
supérieur souligner à grands traits l'importance pour les universités de demeurer des centres de savoir,
mais également de conserver leur pleine autonomie institutionnelle. On
aura l'occasion, dans le contexte de la charte des valeurs, de parler de cette
autonomie institutionnelle là, mais je referme la parenthèse, M. le Président, parce que vous pourriez me faire un
rappel au règlement auquel je n'aurais aucune objection, et, en ce sens-là, il est important de revenir sur
l'importance, l'importance de s'assurer que le développement économique puisse aussi — et ce n'est pas une tare, ce n'est pas un
avatar, ce n'est pas un défaut — bénéficier de la recherche fondamentale,
mais qu'elle puisse être appliquée. La recherche appliquée également doit
pouvoir avoir cours dans ce contexte-là.
Principales statistiques de l'éducation, je
pense que c'est important de s'y attarder, M. le Président. On parle des cégeps, on parle de l'enseignement supérieur,
cégeps et universités. Pour les personnes qui nous écoutent à la maison,
de quoi parle-t-on? 48 cégeps au Québec,
c'est ce que nous avons, dont cinq anglophones. Il y avait, pour le
trimestre d'automne 2011, tout près de 200 000, 195 499, tout près de
200 000 étudiantes et étudiants dans nos 48 cégeps dont cinq anglophones.
Il est important de reconnaître également qu'il y a, là aussi, beaucoup
d'implication au niveau des universités. Il
y a 19 entités universitaires, 18 universités et un siège social, et — mêmesstatistiques de la session 2011, l'année 2011 — tout
près de 300 000,
281 948 étudiants et étudiantes
à l'université pour nos 19 entités, dont 18 universités.
Quels sont
les indicateurs de performance? Lorsque l'on dit,
évidemment : Apprendre un métier, évidemment
il faut s'assurer que l'enseignement
technique, également,
au niveau du secondaire, après le
secondaire III, on puisse y avoir un enseignement technique. Parce que
des emplois, au Québec, il y en a, nous devons
nous assurer que la main-d'oeuvre soit
là et que les gens, sur une base individuelle… C'est
ça, le Parti libéral du Québec, la liberté individuelle
de choisir son métier, également
la capacité et l'opportunité de pouvoir étudier dans le domaine qui nous
passionne et de pouvoir performer. Au Parti libéral du
Québec, c'est la réalisation de l'individu qui permet socialement d'en récolter
les bénéfices. On ne pourra jamais, M. le
Président, partager ce que l'on n'aura pas
préalablement créé. On veut financer nos systèmes de santé, notre système d'éducation, ça prend des femmes,
des hommes qui vont venir étudier et qui vont se passionner pour un
métier, et ce n'est pas uniquement au niveau universitaire et collégial — c'est
en bonne partie à ce
niveau-là — mais également au niveau secondaire par de
la formation technique. Les emplois sont là, nous devons former notre main-d'oeuvre, et, en ce
sens-là, M. le Président, il est important de s'assurer que le financement des
universités, des cégeps, des études supérieures
puisse être là.
Nous
avons toujours été de l'école de s'assurer du plein financement de nos
universités, de nos cégeps, ça a toujours été notre position.Dans les
dernières années également, on a eu l'occasion de le reconfirmer. Il est
important de constater qu'il y a un énorme
défi pour nos universités, on les entend en commission parlementaire quant à leur niveau de
financement.
Et,
en terminant, M. le Président, vous me permettrez de souligner que, durant
cette commission parlementaire, il y a des paroles malheureuses qui ont
été prononcées par le ministre de l'Enseignement supérieur, qui faisait en
sorte de remettre en question le travail de
l'opposition. Mais on se félicite aujourd'hui, M. le Président, d'avoir entendu
le ministre dire
qu'effectivement — alors je
vois qu'il a un recul salué et salutaire — il y avait eu, en cette commission, des
bonifications, des amendements qui font en sorte qu'aujourd'hui on a un
meilleur projet de loi. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président
(M. Cousineau) :Merci. Merci,
M. le député de LaFontaine. Est-ce qu'il y a d'autres
interventions?
Mise aux voix du rapport
Donc,
s'il n'y a pas d'autre intervention, le rapport de la Commission de la culture
et de l'éducation portant sur le projet de loi n° 45, Loi sur le ministère
de l'Enseignement supérieur, de la Recherche, de la Science et de la Technologie, est-il adopté?
Des voix :Adopté.
Le Vice-Président
(M. Cousineau) : Adopté.
M.
le leader adjoint du gouvernement.
M.
St-Arnaud : Oui, M. le Président. Alors, cela étant, si j'ai
bien compris, nous avons adopté, M. le Président, la prise en considération
du projet de loi n° 45.
Alors,
je vais vous demander maintenant… je vais en profiter pour appeler un de mes
dossiers, M. le Président, peut-être
l'article 24, qu'est-ce que vous en pensez?
Projet de loi n° 35
Prise en considération du
rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée
Le Vice-Président
(M. Cousineau) :Est-ce que vous avez le choix?
Merci.
Donc, l'article 24 du feuilleton : l'Assemblée prend en
considération le rapport de la Commission des institutions sur le projet
de loi n° 35, Loi modifiant le Code civil en matière d'état civil, de
successions et de publicité des droits. Y a-t-il des interventions? M. le ministre de la Justice.
M. Bertrand St-Arnaud
M.
St-Arnaud : Merci, M. le Président. Alors, M.
le Président, il me fait plaisir de
prendre part aujourd'hui à cette nouvelle étape relative au projet de loi n° 35, cette étape de la prise
en considération du rapport de la Commission des institutions, qui a procédé, les 22 et
23 mai dernier, les 4, 10, 11 et
12 juin, ainsi que le 26 novembre dernier, à l'étude détaillée du projet de loi n° 35, Loi
modifiant le Code civil en matière d'état civil, de successions et de publicité
des droits. Ce projet de loi, je vous le rappelle, M. le Président,
avait été présenté à l'Assemblée le 17 avril
2013, et son principe y avait été adopté le 28 mai 2013.
• (15 h 10) •
Alors,
on me permettra d'abord, M. le Président, de remercier les collègues de cette
Assemblée qui ont participé à l'étude
détaillée de ce projet de loi, notamment le député de Fabre, qui est le
porte-parole de l'opposition officielle en matière de justice; la députée de Montmorency, porte-parole également
en matière de justice, cette fois, pour le deuxième groupe d'opposition;
et tous les députés, M. le Président… je me
contenterai de nommer les deux porte-parole, mais tous les députés qui ont participé à ces séances
fructueuses qui nous amènent aujourd'hui à débattre du rapport de la
commission avant son adoption finale, je le
souhaite bien, M. le Président, d'ici la fin de la semaine, parce que les
travaux, vous l'aurez compris, M. le Président, se sont faits sur la base d'un respect réciproque, et je pense
que nous avons réussi à travailler d'une manière particulièrement
constructive.
M. le Président, je ne serai pas très long à cette étape, quelques
minutes seulement peut-être pour vous rappeler que ce projet de loi n° 35
comporte, comme son titre l'indique, des mesures en matière d'état civil, de
successions et de publicité des droits.
Sans entrer
dans tous les détails du projet de loi, M. le Président, j'aimerais
rappeler qu'il propose d'abord, en matière
d'état civil, des mesures visant à pallier à certaines difficultés vécues par
les personnes transgenres et transsexuelles concernant notamment la
publicité du changement de nom et de la mention du sexe ainsi que les
conditions pour obtenir le changement de la
mention du sexe. Et, à cet égard, M. le Président, je suis particulièrement
fier de l'ajout d'un élément qui
n'était pas prévu dans la version initiale du projet de loi n° 35, d'un
amendement que j'ai présenté durant les travaux de la Commission des institutions et qui, M. le Président,
retire du Code civil, retire de l'article 71 du Code civil la
condition consistant à avoir subi avec succès une chirurgie de réassignation
sexuelle pour obtenir la modification de la mention du sexe à son acte de
naissance.
Cette
disposition, M. le Président, qui a fait l'objet d'un consensus, que j'ai
présentée et qui a fait l'objet d'un consensus
à la Commission des institutions sera donc dans le projet de loi et devrait
entrer en vigueur en 2014, en même temps
que le règlement qui encadrera les nouvelles formalités à remplir pour obtenir
le changement de sexe à son acte de naissance.
Il s'agit là, M. le Président, vous l'aurez compris, d'un changement majeur
dans notre droit. Certains, et je les comprends,
M. le Président, auraient souhaité que l'Assemblée nationale aille encore
plus loin, et un jour, j'espère pas si lointain,
nous irons plus loin, mais, à ce moment-ci, je crois que nous devons être très
fiers d'avoir franchi une étape que nous n'envisagions même pas de
franchir il y a à peine quelques mois.
Toujours, M. le Président, en matière d'état
civil, et plus particulièrement concernant les actes de décès, des dispositions
confèrent dorénavant au Directeur de l'état civil le pouvoir de dresser l'acte
de décès d'une personne disparue chaque fois
qu'un tribunal a déjà déclaré une autre personne coupable d'avoir causé soit le
décès de la personne disparue soit la disparition de son corps.
Enfin, le projet de loi apporte des mesures
visant à moderniser certaines façons de faire afin de permettre la transmission
par voie électronique des déclarations relatives aux événements de l'état civil
comme les naissances et les décès. Alors, ça, M. le Président, c'est donc en
quelques mots le premier volet, eu égard à l'état civil.
Le deuxième
volet porte sur les successions, parce qu'effectivement, M. le Président, le
projet de loi n° 35, en matière
de successions, et plus particulièrement concernant les testaments, propose des
mesures permettant aux personnes sourdes
qui ne savent ni parler, ni lire, ni écrire de recourir aux services d'un
interprète pour faire un testament notarié ou un testament devant
témoins et ainsi disposer de leurs biens à leur décès comme elles l'entendent.
Troisième
volet, M. le Président, du projet de loi : la publicité des droits. En
cette matière, le projet de loi propose de nouvelles mesures concernant
la présentation des réquisitions d'inscription au registre foncier et des
mesures visant à régler certaines difficultés en matière de publicité foncière.
Alors, voilà,
M. le Président, en quelques mots ce que contient ce projet de loi. Il a été,
comme je vous l'ai dit, travaillé en
commission parlementaire depuis déjà quelques mois, amendé, notamment sur cette
question des conditions pour modifier la mention du sexe à son acte de
naissance, une modification... un amendement important. Et je vous soumets donc
ce rapport en souhaitant qu'il soit adopté aujourd'hui, et que nous puissions
franchir cette étape, et éventuellement, M.
le Président, si la Chambre y souscrit, que nous puissions procéder à
l'adoption finale avant la fin de la semaine. Je vous remercie, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Cousineau) :
Alors, merci, M. le ministre. Merci, M. le ministre de la Justice. Est-ce qu'il
y a d'autres interventions? M. le député de Fabre, à vous la parole pour
10 minutes.
M.
Ouimet (Fabre) :
Merci. 10 minutes?
Le Vice-Président (M. Cousineau) :
Non, c'est vrai, vous avez droit à 30 minutes, excusez-moi.
M. Gilles Ouimet
M.
Ouimet
(Fabre) : Je vais essayer d'être bref, M. le Président, mais
j'ai l'habitude de dire que 10 minutes, c'est le temps que ça me
prend pour placer ma voix, faire mon introduction, préparer mes collègues. Mais
je vais être bref, je vais être bref.
Mais tout de même je pense que ça vaut la peine,
c'est... Le ministre vient de faire des commentaires sur le rapport de la
commission suite à l'étude détaillée, et je suis d'accord avec les commentaires
qu'il a faits. J'ajouterai cependant
quelques observations sur ce processus que nous venons de vivre parce
que, bien que le travail a été fait
de façon, comment dire… à l'enseigne de la collaboration, comme c'est la marque
de commerce de la Commission des institutions depuis le début de la 40e
législature, présidée de main de maître par le député d'Ungava, il y a tout de même, même à la Commission des institutions, des
moments où il peut y avoir des petites tensions parce que nous vivons dans cet environnement où, malgré notre désir
collectif de servir le bien public, de travailler dans l'intérêt collectif,
de temps à autre, M. le Président, nos intérêts politiques immédiats peuvent
nous amener à, disons, diverger d'opinion, et je ferai quelques commentaires
par rapport à ça.
Ceci dit,
dans un premier temps, moi aussi, je tiens à remercier tous les collègues qui
ont participé aux travaux de la commission, qui y ont consacré plusieurs
heures, je pense, une vingtaine d'heures. Et d'ailleurs, M. le Président, je
suis encore un bébé député, un jeune député, je me suis donné la peine… puisque
nous étions à l'étape de la prise en considération
du rapport, j'ai fait une chose étrange, j'ai lu le rapport de la commission.
Même si j'avais participé à tous les travaux, je me suis dit : Ce ne serait pas
une mauvaise idée de lire le rapport puisqu'on va le prendre en
considération, et je tiens, M. le Président,
à souligner la qualité du rapport. Nous bénéficions, à l'Assemblée nationale,
d'équipes de soutien, des gens, les
secrétaires, tous ceux qui participent à nos travaux, qui travaillent dans
l'ombre pour appuyer les députés, et je tiens à les remercier parce que, particulièrement en lisant le rapport
de la Commission des institutions dont nous discutons, qui fait l'objet
de notre discussion en ce moment, il est de grande qualité et donne un très bon
aperçu du travail que nous avons fait.
Ce qu'on y
apprend, c'est que le projet de loi n° 35, qui était, et je le rappelle,
une reprise du projet de loi qui avait été déposé par le député de
Saint-Laurent, alors ministre de la Justice, à la précédente législature, qui
était le projet de loi n° 70, le
ministre de la Justice actuel a eu la bonne idée de s'en inspirer pour déposer
le projet de loi n° 35 qu'il a, il faut le reconnaître, bonifié à
quelques endroits…
Ceci dit,
donc, nous avons procédé à l'étude de ce projet de loi et nous y avons consacré
une vingtaine d'heures, à peu près, réparties en cinq séances, le 4
juin, 10, 11, 12 juin et le 26 novembre. Il y a un délai de quelque cinq mois entre la quatrième et la cinquième séance,
cinquième et finale, dernière séance, et c'est à propos de ça que j'aimerais
faire des commentaires, M. le Président.
• (15 h 20) •
Ceci dit,
avant d'aborder le vif du sujet, je tiens à souligner, parce que c'est
pertinent, ça fait partie du rapport de la commission, que le projet de loi, qui comptait 43 articles, suite au
travail très sérieux, très rigoureux des députés, on a procédé à l'adoption de 25 amendements. Sur un
projet de loi qui compte 43 articles, c'est quand même un bon rendement.
Et je suis heureux de souligner que nous avons bonifié le projet de loi.
Ce projet de loi qui a, le ministre y a fait
référence, entre autres, porté sur un changement qui peut sembler, comment dire… ne soulèvera pas les passions,
l'ensemble de la population, mais on a corrigé, par ce projet de loi,
des injustices, des traitements qui étaient,
à notre point de vue, inéquitables pour certaines personnes, certaines
catégories de personnes, notamment pour les personnes sourdes qui, jusqu'à ce
que nous adoptions, puisque j'ai bon espoir que nous allons adopter ce projet
de loi… les personnes sourdes ne pouvaient pas faire un contrat notarié.
C'était interdit puisque la personne sourde ne peut pas communiquer avec le
notaire qui a pour fonction de s'assurer des volontés du testateur, puisque la personne sourde, qui ne peut
pas parler, ne peut pas communiquer directement avec le notaire qui doit… Je n'entrerai pas dans le débat. On m'invite
à préciser la notion de «sourde et muette», M. le Président, et je
voudrais répondre aux collègues, mais c'est un peu technique, mais l'idée étant
que la loi ne permet pas à la personne sourde, qui ne peut pas communiquer directement ses volontés au notaire… le
notaire ne pouvait pas, à ce moment-là, prendre le testament et l'enregistrer comme un acte notarié.
Et donc nous avons, M. le Président, fait ce changement, et, en cette
Chambre, certains de mes collègues ont déjà souligné… disons critiqué la
réponse de la Chambre des notaires, parce que, M. le Président, la Chambre des notaires s'est opposée à ce changement en insistant sur
le caractère essentiel de la communication entre le notaire et le testateur, et ce qui
rendait, selon la Chambre des notaires, ce changement incompatible avec
la fonction notaire. Mais, tout de même,nous avons fait ce
changement, et je pense que c'est une amélioration.
Ceci dit, M. le Président, malgré tout, je demeure désolé que nous ayons rejeté un amendement
que nous avions proposé, qui visait à simplifier la rédaction d'un des articles. Et malheureusement le ministre a insisté pour conserver la version longue, alambiquée de l'article 40. Je le
déplore encore, mais ça ne nous empêchera pas d'appuyer et l'adoption du
rapport et, éventuellement, l'adoption du projet de loi,
au final.
Ceci dit, M. le Président, j'aborde l'aspect le plus délicat, en fait, de ce débat. Je dis «délicat»parce que
je trouve malheureux, alors que nous avons, dans le cadre des travaux de
la Commission des institutions, fait la démonstration
que nous travaillons de façon, en fait c'est
presque toujours le cas, nous travaillons en collaboration… Nous avons connu un
épisode un peu — ah! je cherche le terme — «déplorable» est un
peu fort, mais disons…
Une voix : …
M.
Ouimet (Fabre) : …désagréable, merci, désagréable, c'était en lien
avec le changement que le ministre a évoqué,
c'est-à-dire permettre à une personne de changer le sexe au niveau
de l'État
civil sans que nous ayons recours à la chirurgie.
Parce que, jusqu'à maintenant, M. le
Président, le Code civil
exige, pour une personne majeure domiciliée au Québec qui désire obtenir
un changement de la désignation de son sexe à l'État
civil, que cette personne ait subi des traitements médicaux ou chirurgicaux.
C'était l'objet du débat.
Malheureusement, M. le Président, ce changement,
que nous venons d'adopter lors de la dernière séance de la commission, ne faisait pas partie du projet de loi dès le départ. Et c'est, en ce qui me concerne, le point regrettable.
C'est que ce changement qui exigeait, de la part de notre société, une évolution, c'est un changement qui bouleverse les gens
qui ne sont malheureusement pas familiers avec cette réalité. Moi-même, M. le
Président, avant que nous n'entreprenions les consultations
particulières, j'avoue ne pas avoir
été très familier avec cette réalité de ces personnes qui se désignent
les trans, c'est-à-dire transgenre et
transsexuel. Je n'étais pas très familier avec leur réalité, leur triste
réalité. Parce que, lors des
consultations particulières, nous avons eu le privilège d'entendre ces drames
que ces personnes-là vivent au quotidien, et
c'est ce qui a motivé, au bout du compte, l'ensemble des parlementaires à adhérer à ce changement.
Le problème,
M. le Président, c'est que — et
c'est le but de mon propos en ce moment — je
pense que le ministre de la Justice aurait dû, dès le départ, dès le dépôt du
projet de loi n° 35, annoncer le changement qu'il souhaitait
faire, de sorte
que nous aurions pu… et c'est
le but du processus législatif de donner avis à la
population des changements que nous proposons d'adopter. Nous tenons des
consultations sur le changement proposé, nous discutons, nous débattons des
changements proposés et, ultimement, nous les adoptons si ces changements sont
ceux souhaités par la société. Malheureusement, M. le Président, le ministre
n'a pas jugé opportun d'insérer ce changement dès le départ du projet de loi, alors qu'il a lui-même — peut-être qu'il l'a reconnu en commission parlementaire — été sensibilisé dès son entrée en
fonction. Donc, dès l'automne 2012, il avait été sensibilisé à cette
problématique et il avait, à ce moment-là, pris connaissance
des arguments qui étaient très convaincants pour justifier ce changement,
c'est-à-dire qu'un changement identique a été
adopté en Ontario.
La Commission des
droits de la personne… le Tribunal des droits de la personne de l'Ontario avait, si
je ne m'abuse, en avril 2012, rendu une
décision qui ordonnait au gouvernement de la province d'adopter ce changement,
ce que l'Ontario a fait au mois d'octobre 2012. Le ministre de la Justice nous
a dit candidement, lors des travaux de la commission parlementaire, avoir été
au courant de cette situation-là, et, malgré tout, le dépôt du projet de loi
n° 35, qui a eu lieu, je crois, au mois
d'avril dernier, ne portait pas sur cette question, de sorte qu'on s'est
retrouvés, M. le Président, lors de
la dernière séance du mois de juin, notre quatrième séance alors que le projet
de loi avait presque franchi toutes les étapes, nous avions à ce moment-là adopté presque tous les articles, ce
n'est qu'à la quatrième séance de travail, l'étude article par article,
que le ministre nous a annoncé qu'il déposait cet amendement.
L'opposition officielle a tenté de convaincre le
ministre que ce n'était pas une façon régulière de procéder, et malheureusement, et c'est le seul moment de nos
travaux en commission, M. le Président, où on a senti qu'il y avait une certaine tension, et, comble de malheur pour moi,
c'était le jour de mon anniversaire, mais j'ai défendu mes convictions
et j'ai tenu mon bout, M. le Président. Malheureusement, je l'avoue, ça a été
une journée triste pour moi, souligner mon anniversaire
jusqu'à… je pense que nous avons terminé nos travaux vers 10 heures, 10 h 30,
sur cette note d'affrontement. Il y
avait un débat assez intense avec le gouvernement sur cette question. Alors,
ça, c'est ce qui s'est passé en commission parlementaire.
Ce qu'il est important de souligner, M. le
Président, et je l'ai répété sur à peu près toutes les tribunes depuis ce temps-là, l'opposition officielle n'était pas
contre le changement, le changement qui était proposé. L'opposition
officielle reprochait au gouvernement la façon avec laquelle elle proposait ce
changement, parce que, pour l'opposition officielle,
il était nécessaire qu'il y ait des consultations spécifiques sur ce point
avant qu'il soit adopté. Et le ministre avait lui-même reconnu la nécessité de faire des consultations ministérielles,
à l'interne, pour voir si le changement nécessitait des modifications de politiques ou d'autres
modifications législatives. Or, le ministre lui-même reconnaissait qu'il y
avait du travail à faire, mais que, malgré tout, il avait choisi de procéder de
cette façon.
Alors donc,
depuis le mois de juin, M. le Président, j'ai répété, j'ai réitéré… et j'ai
même écrit au ministre, dès le mois
de septembre, pour lui faire part de la volonté de l'opposition officielle de
procéder à l'adoption de ce changement si nous procédions de façon
régulière, et ça a quand même pris deux autres mois, au mois de novembre, pour
que le ministre accepte cette façon de
procéder pour que nous tenions des consultations, et la même journée, le 26
novembre, toute la question était réglée, et
nous avons, tel que nous l'avions annoncé, adopté le changement qui était
proposé, qui est, le ministre l'a dit
tantôt, un pas. Ce n'est qu'un pas, il y aura d'autres pas à franchir, mais, à
tout le moins, nous avons, comme société…
du moins, c'est ce que la Commission des institutions propose au terme de son
étude article par article du projet de
loi n° 35, de faire ce changement pour permettre aux personnes trans
d'obtenir une reconnaissance de leur situation auprès de l'État civil
sans subir ce que la Commission des droits de la personne, ce que les spécialistes
reconnaissent, au plan juridique, comme
étant un traitement cruel, d'exiger de la personne qu'elle subisse une
intervention chirurgicale très douloureuse.
C'était, de l'avis de ces personnes, un traitement cruel, et il fallait
corriger cette situation. C'est ce que la Commission des droits de la
personne du Québec recommandait, et nous faisons, aujourd'hui… nous
recommandons ce changement, et je suis satisfait et je suis convaincu que c'est
un changement positif pour la société québécoise.
Ceci dit, en conclusion, M. le Président, sur
cet épisode, j'espère que nous éviterons de nous placer dans ces situations, et la meilleure façon de le faire, M.
le Président, c'est de respecter notre processus législatif. Que legouvernement qui dépose un projet de loi annonce
ses intentions, c'est le but de la présentation du projet de loi, c'est
le but du débat qui s'enclenche à partir de ce moment-là, de laisser savoir à
l'ensemble de la société québécoise des changements que nous envisageons, et particulièrement quand on parle de ces questions
d'état civil liées à la personne, ce sont des questions très délicates,
très sensibles.
Alors, je
suis convaincu que le ministre de la Justice a pris de bonnes notes de mes
propos et que nous pourrons, et je le fais, j'envisage... j'anticipe
avec beaucoup de plaisir que nous reprenions nos travaux à la Commission des
institutions, travaux très intenses depuis le début de l'automne… Le président
opine, il est d'accord, il est très, très occupé. Alors, nous allons poursuivre
nos travaux, M. le Président.
Je conclus mes remarques. Je suis heureux de
proposer à cette Chambre que nous adoptions le rapport de la commission sur le
projet de loi n° 35. Merci, M. le Président.
• (15 h 30) •
Le
Vice-Président (M. Cousineau) : Merci. Merci, M. le député de
Fabre. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur ce projet de loi?
Oui? Mme la députée de Montmorency?
Mme Michelyne C. St-Laurent
Mme
St-Laurent : Oui.
Merci, monsieur…
Le Vice-Président (M. Cousineau) :
À vous la parole pour... Vous êtes la représentante. Alors, allez-y pour
30 minutes.
Mme
St-Laurent :
Merci, M. le Président. C'est avec un enthousiasme non caché que je viens,
aujourd'hui, appuyer ce projet de loi au nom de mon parti. Et, M. le Président,
nous avons salué à quelques reprises l'initiative du ministre de la Justice d'améliorer l'accessibilité
à la justice pour tous. Je tiens, aujourd'hui, à remercier encore une
fois le ministre de la Justice, mais pas seulement le ministre de la Justice,
je voudrais remercier aussi le député de Fabre, le député de D'Arcy-McGee qui n'est pas là, mais qui ont contribué… Je me
souviens de la fameuse virgule, entre autres, où on a passé une heure et demie sur une virgule. La députée de
Bourassa-Sauvé, les députés du gouvernement qui étaient là, et le
président aussi, le député d'Ungava.
Au fil des
ans, M. le Président, je dois vous dire que ça a été toute une saga et, vous
savez, après un travail d'autant de mois, qu'on en vient à cette
conclusion aujourd'hui, c'est un soulagement pour nous, c'est un soulagement
pour la population aussi. Au fil des ans, de
nombreuses difficultés dans l'application du Code civil du Québec ont été
constatées. Effectivement, il semble que certaines injustices soient apparues
et il est bien temps d'y remédier. Entre autres, mon collègue de Fabre en a
parlé, pour les sourds-muets entre autres, pour le fait de faire un testament
authentique.
Écoutez, je n'ai pas remercié... les personnes
que je veux remercier aussi, ce sont tous ceux qui ont contribué à cette commission, qui nous ont apporté des
éclaircissements. Entre autres, je ne peux pas tous les nommer, mais,
entre autres, je veux parler du Barreau, de
la Chambre des notaires. Même si je n'ai pas toujours été tendre avec la
Chambre des notaires, je les remercie pour
leur participation. Évidemment, nous avons reçu, M. le Président, de nombreuses
personnes qui représentaient les transgenres, et plusieurs transgenres
également qui nous ont montré la réalité, bien que je la connaissais un peu. Je
vous en parlerai tout à l'heure.
Avec les
années, notre société a évolué; j'en suis heureuse. Les lois qui l'encadrent
doivent en faire tout autant, et c'est ce qu'on fait aujourd'hui. Aussi,
lors des consultations particulières, les groupes invités nous ont fait part de
plusieurs recommandations et ont mis la lumière sur diverses bonifications
possibles que nous avons étudiées. Je les remercie
encore pour tout le temps qu'ils ont consacré à ce projet de loi. Mais je tiens
à remercier aussi ceux qui nous ont envoyé des mémoires et qui ne se
sont pas présentés à la commission. On a tenu compte d'ailleurs de tous ces mémoires. Tout le travail a été fait. Leur
participation... Et, en passant, quand je dis : Tout le travail a été fait
et bien fait, je veux dire qu'il n'y
avait aucune partisanerie dans le travail que nous avons fait sur la réforme du
Code civil, et nous faisons pareil
sur le Code de procédure civile. C'est un travail intense, sérieux et sans
partisanerie. Leur participation, à tous
ces gens-là, est nécessaire à la bonne santé de notre démocratie. Leurs
propositions et recommandations ont élevé le débat et nous ont
certainement guidés.
Lors de l'étude détaillée de ce projet de loi,
nous avons discuté de divers points que je ne répéterai pas, mes collègues l'ont fait, avec toujours à l'esprit
d'en arriver à une loi qui réponde adéquatement aux objectifs d'une
justice équitable et accessible. Nos débats,
entre autres ceux ayant porté sur la question des transgenres, ont apporté un
éclairage nouveau sur un sujet délicat qui soulève bien des passions. Je suis
heureuse de pouvoir affirmer aujourd'hui que nous sommes finalement parvenus à
une entente.
Il y a plusieurs années déjà, j'ai fait une des
premières causes de jurisprudence de changement de nom d'une personne qui n'était pas transformée. À l'époque,
c'était quelque chose, ça fait déjà
il y a plus de 20 ans, je ne compte plus les dizaines d'années, M.
le Président, et... pour vous dire comme c'était un sujet chaud depuis
longtemps, et, personnellement, je savais
tout ce que ça impliquait. Et j'excuse, justement, les députés de l'opposition
officielle qui ne connaissaient pas tous les problèmes qu'ils
rencontraient. D'ailleurs, ça a retardé le dossier parce qu'il fallait qu'ils prennent connaissance. Je les excuse et je me...
Écoutez, je me faisais beaucoup de mauvais sang pour ces personnes-là parce que je disais : Le projet de loi, ça
n'avance plus, ça bloque. Et je me suis rendu compte que je ne pouvais pas
trop pousser parce que moi, je m'y
connaissais et des collègues du côté de l'opposition n'avaient pas vécu cette
expérience-là.
Ces personnes vivent des situations qui
engendrent un lot important de difficultés. Et cette opération, je tiens à vous le dire, je la connais et je tiens… Je ne
vous la décrirai pas. Il y a un député qui est sorti de mon caucus quand
j'ai commencé à décrire l'opération parce que… Disons qu'il y en a que ça leur
fait mal, là. Je tiens à vous dire que j'appelais
ça une opération barbare, surtout pour des gens qui étaient réticents. Pour les
autres, c'est extrêmement difficile. Ce n'est pas une simple opération,
et c'est une opération, je vais vous dire, terrible, et ça dure longtemps, les
effets, c'est quelque chose.
C'est notre
rôle... Et maintenant c'est notre rôle, comme représentants de la population et
comme législateur, de les soulager d'une partie de ce fardeau. Ils
n'auront plus besoin, maintenant, de cette transformation. Et on retrouvait des cas... Une personne pouvait s'appeler
Micheline, et c'était marqué, sur le registre d'état civil «masculin». Un
autre pouvait s'appeler Jacques, et c'était
marqué «féminin». Vous imaginez ces gens-là lorsqu'ils allaient pour un
emploi? L'employeur trouvait qu'ils avaient les compétences et voyait, à un
moment donné, Micheline devant lui, et, oh, devant
elle, et... ou devant lui, et là, ah, mon Dieu! Sexe masculin. Je vais vous
dire qu'il y a beaucoup de gens qui se sont sentis rejetés des emplois
suite à ça.
Et sans compter qu'il y a des pays où ces
gens-là, qui partent avec un nom féminin ou un nom masculin avec un sexe
contraire dans leur passeport, ces gens-là sont en danger de mort dans certains
pays dans le monde. Ça va jusque-là, M. le
Président. Et je voudrais que les gens soient conscients que, si nous avons
modifié cette loi, c'était pour éviter
toute discrimination, que ce soit en matière d'emploi, que ce soit... en
matière de passeport et en d'autres matières. Je vais vous dire que c'étaient des gens qui subissaient des pressions
énormes de toutes parts, tous côtés. Ils se ramassaient dans les
hôpitaux, carte d'assurance maladie, nom féminin et sexe masculin. C'était
partout.
C'est donc
avec enthousiasme et avec le sentiment du devoir accompli que j'aborde la
prochaine et dernière étape de ce
projet de loi. Lors de l'étude détaillée de ce projet de loi, nous avons
discuté de divers points avec toujours à l'esprit d'en arriver à une loi
qui réponde adéquatement aux objectifs d'une justice équitable et accessible.
Nos débats, entre autres, ont porté sur les sujets énumérés.
Je suis heureuse de pouvoir affirmer aujourd'hui
que nous sommes finalement, avec la bonne volonté, sans partisanerie, parvenus
à une entente. Enfin, le devoir est accompli. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M.
Cousineau) : Merci. Merci, Mme la députée de Montmorency.
Est-ce que... Bien, principe d'alternance,
ce serait supposé d'être à vous, M. le député de Blainville. Non? Mme la
députée de Bourassa-Sauvé, allez-y pour 10 minutes.
Mme Rita de Santis
Mme de Santis :
Merci beaucoup. Pour combien?
Le Vice-Président (M. Cousineau) :
10 minutes.
• (15 h 40) •
Mme de Santis :
Merci beaucoup. M. le Président, ce projet de loi, comme son titre l'indique,
propose de modifier le Code civil en
matière d'état civil, de successions et de publicité des droits. Ce projet de
loi, bien qu'en apparence ne soit pas
spectaculaire, vise à apporter des changements qui ont un impact réel dans la
vie des Québécois et Québécoises.
Ma participation a été limitée à deux jours de
consultation publique, au printemps dernier, et aux consultations de cet automne, et l'étude de quelques
articles du projet de loi touchant particulièrement les transsexuels et les transgenres. Même
si je voudrais parler du projet de loi dans son ensemble, je vais plutôt m'en
tenir aux audiences et études auxquelles j'ai participé.
Tout d'abord, je voudrais remercier le ministre
de la Justice, le député de Chambly,
le porte-parole de l'opposition officielle en justice, le
député de Fabre, la députée de Montmorency et le député de Blainville, ainsi que tous mes
collègues députés qui ont participé aux délibérations de la Commission des
institutions sur le projet de loi n° 35, ainsi que le président, député
d'Ungava, les membres du ministère, le personnel de la commission et les pages.
Modifier le Code civil, c'est modifier une loi
fondamentale du Québec. D'une certaine manière, c'est comme toucher la Bible.
Porter des modifications touchant l'état civil de la personne, c'est encore
plus fondamental. En commission, ce que tous
et toutes, nous avons recherché, c'est de faire de notre mieux, d'être à la
recherche du bien de tous et toutes
les Québécois et Québécoises, et sans partisanerie. Merci, M. le ministre.
Merci, le député de Fabre. Merci, Mme la députée de Montmorency.
Merci, M. le député de Blainville.
Rappelons-nous
le préambule du Code civil du Québec : «Le Code civil du Québec régit, en
harmonie avec la Charte des droits et
libertés de la personne et les principes généraux du droit, les personnes, les
rapports entre les personnes, ainsi que les biens.
«Le code est constitué d'un ensemble de règles
qui, en toutes [manières] auxquelles se rapportent la lettre, l'esprit ou l'objet de ses dispositions, établit,
en termes exprès ou de façon implicite, le droit commun. En ces
matières, il constitue le fondement des autres lois qui peuvent elles-mêmes
ajouter au code ou y déroger.»
Ce sont les
groupes et leurs représentants qui sont venus nous faire part de leurs
commentaires qui ont fait toute la différence. Les consultations
particulières ont été une étape importante dans le processus d'étude du projet
de loi. Ils ont enrichi nos réflexions
concernant les multiples sujets traités par le projet de loi n° 35 et en
particulier la situation des transsexuels et transgenres. C'est une
situation que moi, je ne connaissais pas du tout. Mes propres réactions m'ont surprise. À la fin, j'ai réalisé comment les
membres de notre société connaissent très peu les difficultés vécues par
les personnes transgenres et transsexuelles, et je suis une de ces personnes.
D'après la
loi actuelle, avant la proposition du projet de loi n° 35, les
transsexuels et transgenres sont obligés de publier dans un journal et à
la Gazette officielle le fait qu'elles demandent au Directeur de l'état
civil le changement de leur prénom. Cette
obligation de publication les force donc à révéler publiquement leur situation,
ce qui pourrait avoir des répercussions négatives pour ces personnes.
Le projet de
loi n° 35, dans sa forme initiale, proposait de dispenser le Directeur de
l'état civil de s'assurer que des avis ont été publiés dans un journal
et dans la Gazette officielle, dès lors qu'il était manifeste, à la vue
du changement du nom demandé, que la demande de modification de prénom
concernait une modification de l'identité sexuelle de la personne. De même, la décision du Directeur de
l'état civil d'autoriser le changement de prénom dans ce cas n'aurait
plus à être publiée. Toujours pour les mêmes raisons, le Directeur de l'état
civil n'aurait plus à s'assurer de la publication d'un avis dans un journal et
dans la Gazette officielle lorsqu'une personne présentait une demande de
changement de la mention de sexe à son acte de naissance.
Mais, lors des consultations, au printemps
dernier, ce sont les groupes qui sont venus nous faire part de leurs
commentaires qui ont souligné que les personnes transsexuelles peuvent changer
leur mention de sexe sur l'ensemble de leurs
documents d'identité uniquement si elles subissent des chirurgies de
réassignation sexuelle. Pour une femme trans, cette chirurgie implique habituellement l'ablation du pénis et des
testicules, ainsi qu'une vaginoplastie et une augmentation mammaire. Pour
l'homme trans, la chirurgie consiste en l'ablation des ovaires, de l'utérus et
du vagin, voire des seins, ainsi qu'à
façonner un pénis. Vous pouvez comprendre la crainte des complications, des
pertes de sensation, des problèmes de santé. Ces personnes sont donc
contraintes à une stérilisation forcée pour pouvoir changer la mention de leur
sexe.
Les personnes
transsexuelles qui n'effectuent pas ces chirurgies sont contraintes de dévoiler
leur mention de sexe à chaque fois
qu'elles présentent leurs pièces d'identité : permis de conduire, RAMQ,
passeport, etc. Ces circonstances les placent dans des situations de
dévoilement forcé de leur vie privée et intime, de discrimination, de refus de
service, de curiosité malsaine, de danger
lors de voyage à l'étranger. La plupart des personnes transsexuelles qui n'ont
pas une mention de sexe qui
correspond à leur identité de genre se sentent régulièrement angoissées et
humiliées, dû à des propos négatifs à
caractère transphobe, et finissent par s'isoler. Par exemple, certaines de ces
personnes transsexuelles attendent à la dernière minute pour aller dans
une clinique ou un hôpital pour recevoir des soins de santé ou elles n'y vont
pas du tout par peur d'être rejetées. Presque 50 % font des tentatives de
suicide.
Le
printemps dernier, suite aux consultations, le ministre a déposé une
modification au projet de loi n° 35, qui n'était pas prévue dans le projet de loi initial, que des modifications
aux actes de naissance ne peuvent en aucun cas être subordonnées à
l'existence que la personne ait subi quelque traitement médical ou intervention
chirurgicale que ce soit. Une modification
de telle importance ne se fait pas soudainement, sans transparence et sans
discussion. Si le ministre l'avait
prévue dans le projet de loi initial, cela aurait été autre chose. Nous avons
conclu qu'il fallait que des consultations publiques soient tenues sur
les modifications suggérées. Cet automne, plusieurs groupes ont été invités à
venir nous présenter des mémoires. C'est
vrai que très peu ont répondu à l'invitation, mais, en tant que législateur, il
faut toujours agir dans la transparence.
Je suis heureuse que nous présentions
aujourd'hui un projet de loi modifié pour permettre des modifications aux actes de naissance dans le cas de transgenres
et transsexuels sans traitement médical ou intervention chirurgicale.
Mais je suis aussi convaincue qu'il faut
faire plus. Je me souviens le début des années 90. Il y avait des gangs de
skinheads qui attaquaient des gays et
lesbiennes. En tant que société, nous avons évolué. C'est nécessaire qu'on
fasse la même chose quant à la
discrimination basée sur l'identité sexuelle et l'expression de l'identité
sexuelle. Les Québécois, tous les Québécois doivent être mieux informés.
En plus, et je tiens cela à coeur, on doit mieux comprendre la situation, les
problèmes des jeunes qui vivent cette crise
d'identité de genre. Les modifications au Code civil, quant à la mention du
sexe figurant à l'acte de naissance, s'appliquent uniquement à des
majeurs domiciliés au Québec depuis au mois un an et ayant la citoyenneté canadienne. Il y a des enfants qui
souffrent. On est obligé, à un moment donné, de faire face à cette situation.
Je veux aussi vous assurer que je crois que le
principe de stabilité des éléments identifiant les personnes est important.
D'après le projet de loi que nous allons adopter, les premiers règlements qui
prescrivent les conditions nécessaires pour
obtenir un changement à la mention de sexe et les documents qui doivent être
fournis doivent faire l'objet d'une
étude par la Commission des institutions avant l'adoption par le gouvernement.
C'est important qu'on retienne les préoccupations
de la SPVM. Personne ne veut que le projet de loi n° 35 soit utilisé au
profit des personnes malhonnêtes qui essaieront de se forger de
nouvelles identités.
Nous
reconnaissons aussi que le retrait de l'exigence de chirurgie implique des
défis significatifs, le premier étant celui du maintien de la stabilité
du genre fondamental à l'identité d'une personne et le deuxième étant propre
aux pratiques et lieux ségrégués sur la base du sexe, tels les prisons, les
foyers pour personnes itinérantes, les centres de désintoxication, certains
lieux d'entraînement, les vestiaires, etc.
Le Vice-Président (M. Cousineau) :
En conclusion.
Mme de Santis : Nous allons travailler ensemble pour y parvenir.
Nous allons travailler ensemble pour réussir. Merci, M. le Président.
• (15 h 50) •
Le Vice-Président
(M. Cousineau) :
Merci, Mme la députée de Bourassa-Sauvé. Alors, je reconnais maintenant le député
de Blainville. M. le député, vous avez 10 minutes.
M. Daniel Ratthé
M. Ratthé : Je vous
remercie beaucoup,
M. le Président. Tout d'abord, d'entrée
de jeu, M. le Président, j'aimerais souligner le fait
que j'ai joint la Commission des
institutions il y a à
peine deux semaines à titre de membre officiel, et je dois reconnaître que j'ai eu droit à un accueil
chaleureux et que j'ai eu également… pu constater de mes yeux que c'est une commission
qui travaille habituellement en bonne collaboration. Moi, je pense que le choc
des idées ne veut pas dire qu'on ne
travaille pas en collaboration. Toute discussion peut se faire dans le respect des
autres. Et j'ai été à même de
constater, pour avoir participé à d'autres commissions parlementaires où il y
avait des fois plus d'effervescence, où moi-même, j'ai eu à jouer des rôles
parfois où on devait confronter le gouvernement… J'ai été toutefois à même de constater que c'est une commission parlementaire, d'une part, qui travaille beaucoup,
fort intéressante et dans laquelle on apprend beaucoup, et,
d'une part… d'autre part, également une commission qui, je pense, a un souci…
dont tous les membres ont un souci, M. le Président, de faire en sorte que les projets
de loi qui sont adoptés
le sont de manière à ce qu'on puisse,
en fait, permettre à la population d'avoir les meilleurs outils, dans un projet de loi, pour pouvoir effectivement soit légiférer soit fonctionner.
Et je dois
dire, M. le Président, que, dans
le cadre du projet de loi n° 35, je suis arrivé dans le dernier droit, si
je peux dire, mais un droit, un bout, une
audition qui m'a, comme, je pense, la plupart des collègues de la
commission… en tout cas nous a sûrement
forcés à nous poser des questions, M. le Président. Nous avons eu à nous
remettre en question, à remettre nos pensées, nos façons de voir en
question puis à se demander — et c'est peut-être là, en tout cas, un des
aspects les plus intéressants de notre
travail de législateur — comment nous pouvions, par un projet de loi, faire évoluer notre société, faire en sorte que nos lois
reflètent les changements importants qui arrivent dans notre société. En
écoutant les gens qui sont venus, les
groupes qui sont venus nous parler des problématiques que rencontraient les
transgenres, je me disais qu'il y a
eu des étapes dans notre société, entre autres, où probablement que nos mères
ont dû faire des combats très difficiles,
lorsqu'il a été le temps de parler de contraception — c'était un changement de moeurs
important — lorsque publiquement, quelques années plus
tard, quelques décennies plus tard, je devrais dire, les personnes
homosexuelles, gaies ont dû s'affirmer,
sortir dans la rue pour faire avancer leurs droits, et j'avais l'impression, en
tout cas, lors de l'audition des représentants des groupes transgenres,
que nous avions à faire un pas, que nous avions à montrer le chemin pour qu'éventuellement on soit encore plus capables de
faire accepter aux gens de la société cette évolution et surtout,
surtout, M. le Président, les difficultés que vivent ces personnes au
quotidien.
Ce
qui m'a beaucoup frappé, c'est que ces difficultés-là ne sont pas seulement
rencontrées par des adultes, ce sont des
difficultés qui parfois sont rencontrées par des jeunes de huit, neuf,
11 ans, 12 ans et qui sont très au fait de leur différence en termes de genre, qui vivent, selon
leurs dires, dans des corps qui ne sont pas en réalité ce qu'ils ressentent
intérieurement et qui rencontrent des difficultés d'intimidation, qui
rencontrent des difficultés au secondaire surtout, M. le Président, et qui doivent, tout ce temps-là, se faire accepter.
Parfois, c'est très difficile. Parfois, ils n'y arrivent pas : taux
de suicide important. Et ça, ça m'a touché, M. le Président, d'entendre ça. Je
pense qu'on a tous été sensibilisés.
Le Vice-Président
(M. Cousineau) : M. le député de Blainville, je vous arrête
quelques secondes pour demander… S'il vous plaît, ceux qui veulent parler, vous
avez des salles adjacentes au salon bleu, vous pouvez vous déplacer dans ces
salles, mais on aimerait avoir le silence, s'il vous plaît. Poursuivez, M. le
député de Blainville.
M. Ratthé :
Merci, M. le Président. D'autant plus que je pense que c'est un sujet très
important.
Alors,
écoutez, on a eu un… Ce n'est pas un débat. Je pense qu'on a eu des
discussions, j'allais dire, même, à la limite,
émotives, qui venaient tous nous chercher sur justement à quel âge, d'une part,
on allait faire en sorte que la décision de pouvoir changer sur un permis de conduire, ou sur un acte de
naissance, ou sur une pièce d'identité… donc de pouvoir faire changer le genre d'une personne sans que
celle-ci — et ça,
c'était le grand pas — n'ait à subir aucune opération, aucune intervention chirurgicale. Et je dois vous dire qu'on s'est
beaucoup questionnés même à savoir est-ce qu'on allait permettre, par
exemple, avec l'autorisation d'un parent, d'un tuteur, d'un adulte, à ce qu'un
mineur puisse effectuer ce changement-là, et
nous avons convenu après moult discussions que, pour l'instant, je pense, il
fallait faire un premier pas, un pas important, et pouvoir accorder à
une personne majeure cette possibilité-là de pouvoir changer de genre et de pouvoir, en fait, pour cette personne-là, dans beaucoup
de cas, franchir le pas final qui allait lui permettre de vivre en société
comme elle se sent, comme elle désire vivre.
Et je pense que, dans cet esprit-là, M.
le Président, nous avons
accompli quelque chose de très important.
Je
n'étais pas là au moment où le ministre a déposé l'amendement. J'entendais tout à l'heure le député de Fabre,
qui m'a dit que… qui disait, en tout cas, que ça avait eu… En fait, il avait un certain regret, à savoir que ça ne s'était peut-être
pas passé aussi harmonieusement qu'il l'aurait souhaité. Mais parfois, quand on
fait des changements, ça ne peut pas toujours être harmonieux. Comme je disais tantôt, à
condition que ce soit dans le respect, je pense que les résultats sont
importants. Et je vous dirais, moi, qu'au contraire je pense que le ministre de
la Justice, ce faisant, a fait preuve de beaucoup de souplesse. Et je pense que, dans notre… Quand
on fait des lois, quand on les amende, quand on les corrige, on doit
faire preuve de souplesse. Il arrive parfois qu'on dépose un projet de loi et
que, n'ayant pas perçu... ou du moins s'être
rendu compte qu'il y a des lacunes,ou du moins qu'il y a des modifications importantes
auxquelles on n'a pas changé... devraient
être apportées, je pense qu'au contraire, même si
parfois ça apporte de vives discussions, il est important de pouvoir faire preuve de souplesse. Et j'ai pu
constater qu'à la fin tous les partis étaient prêts à faire preuve d'une
grande souplesse et surtout de paver la voie pour un changement important dans
notre société.
Et
ce que je pense que je retiens également de ce projet
de loi, mais surtout de cette partie
de projet de loi, M.
le Président, c'est le fait qu'il y a eu un voeu également de tous les membres
de la commission à ce que ça ne s'arrête pas là,que notre réflexion, à
savoir… On vient de faire un
pas important : on vient d'accorder à des personnes majeures le
droit de changer de genre sans intervention
chirurgicale. On s'est tous dit qu'on devait, dans un avenir quand même relativement rapproché, M. le Président, poursuivre
notre réflexion, à savoir :Est-ce que
la société est prête à aller plus loin? Est-ce que, nous, comme parlementaires, comme législateurs,
nous devons mettre en place les outils pour aller encore un peu plus
loin et permettre aux personnes mineures, évidemment avec consentement de
parents, et des études psychologiques, et tout ce que
ça devrait engendrer... Est-ce qu'on devra, dans un avenir rapproché, faire
évoluer encore un peu plus notre loi pour
que toutes les personnes concernées, visées par cette problématique, puissent
enfin pouvoir vivre leur vie de façon beaucoup plus… j'allais dire positive, de
façon beaucoup plus, en tout cas, à leur ressemblance?
M. le Président, en
terminant, bien, je voudrais remercier,
évidemment, tous les gens qui sont venus nous
rencontrer. Je pense que ça prend beaucoup de courage pour venir parler sur un
sujet comme celui-là. On a eu une mère de
famille qui est venue nous parler. On a eu des gens qui sont venus nous parler.
Ça prenait quand même une bonne dose
de courage, une bonne dose de conviction, et
ils ont réussi à nous convaincre, en tout cas, jusqu'à un certain point.
Remercier également
les collègues, autant le ministre que l'équipe ministérielle, l'équipe de… les
gens de l'opposition officielle, deuxième
groupe d'opposition, la présidence et tous les gens qui nous entourent, pour le travail qui a été effectué. Et je suis convaincu, parce que...
pour y avoir participé maintenant depuis deux semaines, que je vais me plaire dans cette commission. Les sujets y sont
passionnants, parfois un peu arides, je vous dirais, M. le Président,
mais, bon, ça me permet d'apprendre et d'accumuler
différents bagages au niveau de mon expérience personnelle. Et ça me
fera plaisir, évidemment, de participer à
cette prise en considération et de voter de façon positive pour ce projet de
loi, M. le Président. Merci.
Le
Vice-Président (M. Cousineau) : Merci. Merci, M. le député de
Blainville. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur cette prise en considération? Non.
Mise aux voix du rapport
Alors,
le rapport de la Commission des institutions portant sur le projet de loi
n° 35, Loi modifiant le Code civil en matière d'état civil, de
successions et de publicité des droits, est-il adopté?
Des voix : Adopté.
Le Vice-Président (M.
Cousineau) : Adopté. M. le
leader adjoint du gouvernement.
M. St-Arnaud : Bien, M. le
Président, je vais en profiter, puisque je suis toujours leader adjoint, pour
appeler un autre de mes dossiers, le dossier n° 15, M. le Président.
Projet de loi n° 61
Adoption du principe
Le Vice-Président
(M. Cousineau) : D'accord. Alors, on voit que vous avez mis la
table pour vous cet après-midi.
Alors, article 15 du
feuilleton. M. le ministre de la Justice propose l'adoption du principe du
projet de loi n° 61, Loi visant principalement le recouvrement de
sommes payées injustement par des organismes publics relativement à certains
contrats dans l'industrie de la construction.
• (16 heures) •
Y a-t-il des
interventions? M. le ministre de la Justice.
M. Bertrand St-Arnaud
M. St-Arnaud :Merci,
M. le Président. Alors, effectivement, M. le Président, il me fait
plaisir de prendre la parole à l'occasion de ce débat sur l'adoption du
principe de l'important projet de loi
n° 61, Loi visant principalement le recouvrement
de sommes payées injustement par des organismes publics relativement à certains
contrats dans l'industrie de la construction.
Alors, M. le Président, ce projet de loi, que j'ai déposé à
l'Assemblée nationale le 13 novembre dernier, est une suite logique du premier geste posé par notre
gouvernement au début de son mandat, soit la présentation d'une loi pour
enrayer la corruption et la collusion dans
le processus d'octroi des contrats publics, la Loi sur l'intégrité en matière
de contrats publics, la loi n° 1, M. le Président. Nous poussons
maintenant plus loin notre démarche en présentant ce projet de loi, le projet de loi n° 61, qui vise, lui, à récupérer
les sommes dues aux organismes publics en raison d'opérations
malhonnêtes telles que de la fraude ou des manoeuvres dolosives.
Alors, M. le
Président, sommairement — et
on m'apporte le projet de loi, M. le Président, une copie supplémentaire du projet de loi — ce projet de loi n° 61 comporte deux
volets. Le premier volet, que l'on retrouve aux articles 12 et suivants, vise à inciter les entreprises à rembourser
les organismes publics avant que des recours juridiques ne soient
entrepris. Ce premier volet, c'est le programme de remboursement. Le second
volet du projet de loi n° 61 vise, pour sa part, à faciliter les recours
civils au nom des organismes publics. C'est ce volet que l'on retrouve aux articles 3 et suivants. Donc, M. le
Président, deux volets : premier volet, Programme de remboursement;
deuxième volet, Règles particulières applicables aux recours
judiciaires.
Si je reprends
rapidement, M. le Président, les deux volets, d'abord le premier volet, le
programme de remboursement, prévoit que le
ministre de la Justice pourra créer un programme de remboursement afin qu'une
entreprise puisse remettre les sommes qui pourraient avoir été obtenues à la suite
de manoeuvres dolosives ou frauduleuses. Ce programme
permettra notamment aux entreprises ayant posé des gestes répréhensibles de
démontrer une volonté de changer leur culture organisationnelle, en plus
de démontrer qu'elles sont de bonnes citoyennes corporatives. Toujours dans le but d'optimiser l'utilisation des ressources
mises à notre disposition et de réduire ainsi le fardeau des Québécois,
une telle mesure permettra aux entreprises
concernées d'éviter une judiciarisation inutile des litiges, avec les
désagréments et les coûts qui s'y
rattacheraient. Il est entendu que la quittance que pourrait obtenir une
entreprise suite au remboursement sera limitée aux seules divulgations
faites par elle. Le projet de loi établit également une présomption à l'effet
que le préjudice causé par une faute
correspond à un certain pourcentage, déterminé par décret du gouvernement, du
montant payé par l'organisme public concerné
pour un contrat visé. Il appartiendra, le cas échéant, à une entreprise de
démontrer au tribunal que le préjudice causé était moindre.
D'autres règles sont également prévues afin que soient
recouvrées les sommes injustement payées lorsque sont intentés des
recours judiciaires, tel d'allonger le délai de prescription à cinq ans, de
permettre la prise de recours pour des actes
fautifs commis dans les 15 ans précédant l'adoption du projet de loi et de
transiger au nom d'un organisme public. Ces diverses mesures permettront une utilisation efficace des ressources
des ministères et des organismes publics telles les municipalités si des
procédures judiciaires devaient être intentées pour récupérer les sommes payées
injustement.
Alors, en quelques mots, M. le Président, voilà donc le
volet 1 de ce projet de loi — articles 12 et suivants — qui
crée, donc, le cadre législatif encadrant le programme de remboursement.
Le deuxième volet, M. le Président, du projet de loi a pour
objet, quant à lui, comme je le disais il y a quelques instants,
d'établir des règles particulières applicables aux recours judiciaires. Le
projet de loi permet ainsi au ministre de la
Justice d'intenter pour le compte d'un organisme public un recours contre une
entreprise qui a commis une faute, par exemple une manoeuvre dolosive,
dans le cadre de l'adjudication, de l'attribution ou de la gestion de contrats publics dans l'industrie de la construction.
Voilà, M. le Président, le résultat. Donc, comme je le disais tantôt, il y
aura donc une présomption à l'effet que le
préjudice causé par une faute correspond à un certain pourcentage — déterminé
par décret du gouvernement — du
montant payé par l'organisme public concerné pour un contrat visé.
Alors donc, M. le
Président, deux volets essentiellement. Un premier volet qui est un programme
de remboursement qui permettra, M. le Président, donc, de… qui permettra à
une personne neutre et impartiale désignée de tenter d'amener les parties à s'entendre — on
peut penser, par exemple, à un juge à la retraite — les sommes étant perçues étant redistribuées aux ministères et organismes
publics en fonction du préjudice subi par chacun, déduction faite, dit le projet
de loi n° 61, d'un montant de 20 % des sommes recouvrées pour payer
les frais liés à la mise en application de
la loi. Alors donc, M. le Président, programme de remboursement, c'est le premier
volet. Deuxième volet, règles particulières permettant aux
entreprises... permettant de faciliter les recours judiciaires.
M. le
Président, donc, sur chacun de ces deux volets, les consultations particulières
tenues depuis jeudi dernier nous ont
permis d'entendre de la part de divers intervenants concernés qui se sont
présentés à la commission plusieurs suggestions
visant à bonifier le projet de loi n° 61. J'ai demandé, M. le Président,
aux experts du ministère de la Justice qui travaillent sur ce dossier en étroite collaboration avec les experts du
Conseil du trésor… j'ai demandé à nos experts de regarder avec attention les suggestions qui ont été faites et qui
pourraient éventuellement faire l'objet d'amendements lors de l'étude
détaillée du projet de loi n° 61.
Eu égard, M.
le Président, aux articles 27 et suivants, on retrouve certaines modifications
à la Loi sur les contrats des organismes publics, donc à la loi
n° 1, le chapitre C-65.1 de nos lois. Et, eu égard à ces articles, M. le
Président, nous avons reçu quelques suggestions lors de la consultation
particulière, des suggestions de modification de la part du Directeur général
des élections, suggestions très pertinentes qui mériteront, j'en suis
convaincu, une attention toute particulière des membres de la Commission des
institutions lors de l'étude article par article du projet de loi.
Alors, M. le
Président, donc, je vais me contenter de ces quelques mots en vous résumant,
donc, ce projet de loi, projet de loi
important. Je pense que le titre même du projet de loi le dit, il s'agit d'un
projet de loi qui vise le recouvrement de
sommes payées injustement par des organismes publics relativement à certains
contrats dans l'industrie de la construction. Comment on fait pour
recouvrer ces sommes, M. le Président? On crée d'abord un cadre législatif qui encadre un programme de remboursement. Donc,
possibilité pour des entreprises de faire un remboursement en allant
rencontrer un tiers désigné, qui pourrait être un juge à la retraite, et
éventuellement, M. le Président, il peut y avoir entente sur un remboursement
de certaines sommes. Alors, ça, c'est le premier volet.
Le deuxième volet, M. le Président, ce sont des
règles particulières, des présomptions particulières qui permettront... en fait, des moyens plus costauds
qui permettront, si le premier volet n'a pas fonctionné, qui permettront
à l'État, qui permettront au ministre de la Justice, au Procureur général
d'intenter des recours judiciaires pour aller récupérer ces sommes, et là
l'État se donne un certain nombre de moyens particuliers, de moyens plus
costauds pour aller récupérer ces sommes.
Alors, voilà,
M. le Président. C'est, en quelques mots, ce que contient ce projet de loi.
Nous avons, comme je l'ai dit, tenu
des consultations particulières. Nous avons reçu plusieurs suggestions, nous
sommes à les analyser en vue de bonifier
ce projet de loi, et je souhaite qu'on adopte, dans un premier temps, le
principe du projet de loi cette semaine, et, éventuellement, s'ensuivra l'étude détaillée avec certains amendements
pour le bonifier. Tout ça dans un but que nous avons tous, M. le
Président, d'aller recouvrer ces sommes qui ont été payées injustement par des
organismes publics, notamment par le gouvernement du Québec. Je vous remercie.
M. le Président.
Le Vice-Président (M. Cousineau) :
Merci. Merci, M. le ministre de la Justice. Alors, je cède maintenant la parole
au député de Fabre.
M. Gilles Ouimet
M.
Ouimet (Fabre) :
Merci. Merci, M. le Président. Je crois, je dispose de...
Le Vice-Président (M. Cousineau) :
De 60 minutes.
M.
Ouimet
(Fabre) : 60 minutes de plaisir. Puisque j'ai eu l'occasion, M.
le Président, de placer ma voix, mon intervention
tantôt, je vais pouvoir plonger plus rapidement dans le vif du sujet au plus
grand plaisir de tous mes collègues ici présents cet après-midi. C'est
vraiment le… tu sais — comment
dire? — c'est
l'après-midi de la Commission des institutions,
c'est… On rend hommage au travail de la Commission des institutions, dont il y
a plusieurs membres ici.
Une voix : ...
M.
Ouimet (Fabre) :
Pardon?
Une voix : ...
• (16 h 10) •
M.
Ouimet (Fabre) :
Oui, je m'excuse, M. le Président, j'ai été... Les collègues... En fait, je me
réjouis parce que je sens qu'il y a beaucoup
d'attention pour les... On a écouté avec beaucoup d'intérêt les propos du
ministre et… bien là je vais profiter de cet
intérêt des collègues pour essayer de maintenir leur intérêt pour les prochaines
minutes dans ce débat.
J'ai
l'habitude, M. le Président… Je me préoccupe de ceux qui nous regardent, même
si — et je
m'en excuse encore une fois — on m'a déjà fait la remarque,
je bouge, je m'exprime avec les mains. Probablement que, si on m'attachait les mains, je deviendrais muet. Mais on a nos
qualités et nos défauts, j'ai les
miens. Mais on m'a aussi mentionné que j'avais tendance à bouger. J'ai développé
cette mauvaise habitude alors que je fréquentais les mêmes endroits que le ministre
de la Justice, c'est-à-dire les cours de justice de la province en matière
criminelle.
Des voix : …
M.
Ouimet
(Fabre) : Oui, fiou! Je sais que j'en ai inquiété plusieurs,
mais, non, non, ne craignez...
Des voix : …
Le
Vice-Président (M. Cousineau) : J'apprécie votre collégialité, mais, si c'était possible de poursuivre
en vous adressant au président. Poursuivez.
M.
Ouimet
(Fabre) : Oui, M. le Président, je m'excuse. Je vais essayer d'être plus... m'en tenir à mon texte
pour éviter les situations embêtantes.
Ceci dit, donc, j'ai tendance à bouger et je
vais faire l'effort, M. le Président, de vous fixer et de m'adresser à vous, quoique, j'ai déjà eu
l'occasion, en parlant ici, de le rappeler, je crois beaucoup
au parlementarisme qui est cet
acte de prendre la parole entre nous, et on
s'écoute, et c'est dans le choc de ces idées… Quelquefois, on ne partage pas le
même point de vue au départ, mais, lorsqu'on
prend la parole ici, on écoute les collègues, et c'est dans cet exercice que
notre pensée évolue. Et c'est ça, la force
du parlementarisme, un système auquel je crois beaucoup, qui a de grandes
vertus. Et moi, je souhaiterais qu'on exploite davantage ce système, mais, pour
faire ça, c'est que nous devons nous livrer à l'exercice,
nous devons collectivement, les 125 députés, accepter d'être présents pas
seulement physiquement, comme nous le sommes en ce moment, mais
également présents d'esprit, ouverts au débat, ouverts à la discussion, et
c'est dans cet exercice, M. le Président, que nous allons adopter de meilleures
lois.
Je disais
tantôt, je soulignais... J'ai pris l'habitude de rappeler pour les gens qui
nous écoutent que nous en sommes au débat sur le principe. C'est-à-dire,
dans notre procédure parlementaire, selon notre règlement, c'est la deuxième étape qui apparaît après la présentation du projet
de loi, avant l'étude détaillée, avant la prise en considération du
rapport et, si, évidemment, tout se passe bien, l'adoption du projet de loi.
Donc, nous en sommes au débat sur le principe, débat qui porte, comme le
rappelle le règlement, sur l'objet de la loi, sur ses valeurs intrinsèques, et
c'est de cela dont il est question aujourd'hui.
Le ministre a présenté brièvement le projet de
loi, a rappelé l'objet de cette loi-là, son titre, et je vous dirai d'emblée, M. le Président, que nous sommes
favorables, l'opposition officielle est favorable au principe, donc à
l'adoption du principe. Et je pense que je
sens la tension, du côté ministériel, qui vient de baisser d'un cran en entendant
mes propos, mais j'aurai tout de même— et peut-être que ça, ça va faire monter la
tension du côté du ministre — quelques remarques, disons, moins encourageantes quant à l'état du
projet de loi tel qu'il est en ce moment, des points qui sont, à mon point
de vue, importants et qui vont au-delà de l'aspect technique de ce projet de
loi, des aspects qui touchent les fondements mêmes d'une société de droit.
Quand on parle de modifier les règles de droit,
les règles fondamentales, la responsabilité contractuelle fait partie de nos règles de droit, de notre Code
civil, nos règles fondamentales. Et le projet de loi proposé par le ministre,
le projet de loi dont nous discutons cet
après-midi propose de modifier ces règles-là, et c'est un exercice, M. le
Président… Si nous sommes d'accord de
discuter de ces moyens, je pense qu'avant de conclure à la nécessité d'adopter
ces moyens, de poser ce geste, qui
est de modifier les règles fondamentales, les règles du jeu qui s'appliquent en
matière de responsabilité contractuelle... C'est un geste grave, c'est
un geste qu'en tant que parlementaires nous devons poser de façon... avec
extrêmement de prudence et de retenue, et j'aurai l'occasion de citer, entre
autres, le Barreau du Québec, qui rappelle l'importance de cette prudence.
Donc, ça fera partie de mes commentaires.
D'entrée de
jeu, M. le Président, et tel que c'est notre habitude, même si ça ne figure pas
dans le règlement tel quel, le débat
d'aujourd'hui sur le principe fait suite à la procédure habituelle que nous
adoptons, c'est-à-dire après les consultations
particulières. Je vous vois réagir. Vous savez l'affection, l'intérêt que je
porte aux consultations particulières, et je prendrai quand même
quelques minutes pour faire des observations parce que je fais souvent ces
remarques en commission parlementaire sur notre façon de procéder. Non
seulement il est absolument essentiel — et certains projets de loi plus que d'autres, évidemment — de tenir ces consultations particulières,
mais, depuis que je suis député à l'Assemblée
nationale, j'ai été à même de constater l'importance de ces consultations dans
l'exercice de l'examen des projets de loi et dans la poursuite de
l'objectif de la bonification de nos projets de loi. J'avais connu cette
expérience de l'autre bout de la table,
puisque, comme représentant du Barreau, j'avais eu, à plusieurs reprises,
l'occasion de... le privilège de comparaître en commission
parlementaire, à l'Assemblée nationale, pour faire des représentations sur des projets de loi. Mais, depuis que je suis
député, je vois la richesse de l'exercice et je ne cesserai jamais d'insister
sur cette étape essentielle.
C'est une étape essentielle, M. le Président,
mais je suis obligé de nous critiquer dans la façon dont nous gérons cette étape essentielle. Et le projet de
loi n° 61 offre, malheureusement, un bel exemple de comment notre
façon de procéder, de façon tout à fait
involontaire, de façon... dans la plus pure bonne foi, malheureusement, nous
prive de cet outil, on ne peut pas l'exploiter comme il se doit. Et
surtout — et
c'est sans doute l'aspect qui est le plus troublant, à mon point de vue — de la façon que nous procédons, nous
manquons de respect à l'égard des personnes que nous convoquons en
commission parlementaire.
Je
m'explique, M. le Président. En fait, pour les collègues de la Commission des
institutions, qui ont l'habitude de m'entendre
le dire à peu près à chaque occasion... Et même le député de Blainville, qui
célèbre ses premières semaines comme membre de la Commission des institutions,
réagit déjà, il m'a déjà entendu à quelques reprises faire ces commentaires.
Alors, je m'excuse pour les membres de la commission, qui m'entendent
régulièrement faire ce commentaire, mais je ferai ces commentaires — M. le
Président, j'en prends l'engagement solennel — je ferai ces commentaires jusqu'au jour où nous modifierons nos
façons de procéder afin que nous ne répétions plus cette façon de
procéder, que j'estime inacceptable. Et je m'explique.
Comme je l'ai mentionné,
le projet de loi n° 61 nous offre un bel exemple de cette situation-là,
puisqu'il a... Le projet de loi a été
déposé, et j'ai... Le ministre a mentionné la date, là, c'est à la fin du mois
de novembre. Un projet de loi qui
vise à offrir des solutions pour un problème sur lequel nous nous entendons
tous, un fléau, une situationdéplorable,
les sommes qui ont été volées, les sommes qui ont été fraudées de l'ensemble
des contribuables, que ce soit... Peu importent les villes, peu importent
les organismes publics qui ont été touchés, le Québec, les citoyens ont été
volés de sommes d'argent, et le projet de loi n° 61 propose des moyens
d'action pour tenter, dans la mesure du possible, de corriger cette situation
inacceptable. Sur ce point-là, M. le Président, tous les parlementaires, sans
exception, sont unanimes. Cet objectif est important, et nous devons prendre
tous les moyens légitimes, tous les moyens légaux, tous les moyens nécessaires
pour corriger cette situation. Sur ce point, il n'y a pas de problème.
• (16 h 20) •
Donc, le
ministre de la Justice, après 14 mois dans ses fonctions, a proposé, à la fin
du mois de novembre, le projet de loi
n° 61. Le problème, M. le Président, c'est que, puisque nous étions en fin
de session et que le gouvernement tenait à ce que nous entreprenions le
débat sur ce projet de loi, nous avons décidé de tenir des consultations
particulières à quelques jours d'avis.
J'oublie les détails, là, mais nous sommes à, je pense, moins de sept jours
d'avis entre le moment de la convocation de la commission… de la liste
des personnes convoquées et la date de cette convocation.
Je vous
laisse deviner, M. le Président, le résultat. Lorsqu'on s'adresse à des
organisations importantes à qui on demande de faire un travail sérieux,
de commenter un projet de loi… Est-il réaliste, est-il raisonnable de demander
à une organisation comme le Barreau, comme
l'Ordre des ingénieurs, comme la ville de Montréal, de leur demander de produire des commentaires, de produire un mémoire…
Parce qu'évidemment, comme parlementaires, on souhaite avoir un document
qui nous permet de connaître le point de vue des témoins. Est-il raisonnable,
M. le Président, d'exiger, de la part de ces personnes, à quelques jours
d'avis, de se livrer à ce travail quand on le veut sérieux? Et c'est ce que
nous voulons tous.
Alors, M. le
Président, je pense que nous devrions… À moins de nous placer dans une
situation d'urgence, qui peut
exister, je crois, M. le Président, que nous devrions modifier nos façons de procéder,
de sorte que nous nous imposions une limite, à mon point de vue, d'au
moins 14 jours avant de convoquer une organisation pour demander une critique constructive des projets de loi que nous voulons
étudier, avant que nous convoquions ces organisations ou ces personnes
en commission parlementaire. Et je le dis, évidemment, sous réserve d'une
situation exceptionnelle, donc du pouvoir de convoquer
à brève échéance. Mais je pense, M. le Président… Et j'espère qu'un jour je
vais arrêter de prêcher dans le désert,
sur mon île déserte, sur cette question. Je sais que tous les députés partagent
le point de vue. Le problème, c'est qu'au-delà du fait qu'on le
mentionne en présence des témoins qui viennent malgré les courts délais, malgré
qu'on les place dans des situations
impossibles… Alors, tous mes collègues, on est tous d'accord. Le problème,
c'est qu'on ne corrige pas la
situation, et, la fois d'après, ça recommence. Donc, je souhaite qu'un jour… Et
là je vois tous mes collègues qui écoutent mes propos avec beaucoup
d'intérêt, et je suis convaincu que, dans un avenir très rapproché, nous aurons
procédé aux modifications nécessaires, de sorte que cette situation déplorable
ne se reproduise plus.
Ce qui m'amène, M. le Président, à… D'ailleurs, nous avons
reçu ce matin les commentaires du Barreau du Québec sur le projet de loi n° 61, et vous me
permettrez… En fait, je pense qu'il serait utile que je fasse lecture de
l'ensemble des commentaires du Barreau. Si j'ai le temps, je le ferai tantôt,
mais vous me permettrez, M. le Président, de citer le premier paragraphe de la lettre signée par la bâtonnière du Québec, Me
Johanne Brodeur, en date du 4 décembre 2013, lettre adressée au ministre
de la Justice. Donc, je cite la lettre : «M. le ministre, le Barreau du Québec
a pris connaissance avec intérêt du projet
de loi n° 61 intitulé Loi visant principalement le recouvrement de
sommes payées injustement par des organismes publics relativement à
certains contrats dans l'industrie de la construction.
Le Barreau désire vous faire part de ses
commentaires au sujet de ce projet de loi d'exception. Le Barreau aurait
souhaité comparaître en commission parlementaire, mais les trop courts
délais de convocation l'en ont empêché.»
M. le Président, je suis convaincu que, parmi mes collègues,
compte tenu de mes antécédents, certains pourraient être tentés de penser que j'ai influencé la
rédaction de ce paragraphe. Ce n'est pas le cas, M. le Président. Donc,
quand j'ai lu cette lettre ce matin, j'ai
dit : Quel merveilleux adon, comme on dit. Alors, je ne pouvais pas
m'empêcher de citer la bâtonnière du Québec,
qui me rejoint. Et, je l'ai dit en commission parlementaire,
particulièrement sur le projet de loi
n° 61, compte tenu de la nature exceptionnelle des mesures, il est, à mon point de vue,
totalement inconcevable qu'on propose d'aller plus loin dans l'adoption
de ce projet de loi sans que nous nous donnions la peine de compléter
l'exercice des consultations particulières. Avec le Barreau, à tout le moins.
Je sais également que… Je pense que c'est la STM
qui nous a transmis et qui veut transmettre des commentaires. Donc, M. le Président — et je reviens à mon point de départ — je
pense qu'on peut très bien procéder à l'adoption du principe et refaire des consultations. Nous l'avons fait dans… Nous
venons de compléter la prise en considération du rapport sur le projet de loi n° 35, et c'était un exemple où,
malgré le fait que nous avions franchi l'étape de l'adoption du
principe, malgré le fait que nous avions presque complété l'étude de tous les
articles du projet de loi, nous avons, d'un
commun accord, après avoir discuté d'une façon de procéder, nous avons convenu
de suspendre l'étude article par article et nous avons procédé à des consultations particulières.
Alors, je pense… et j'invite le ministre de la Justice à se
rappeler cette procédure que nous venons d'adopter, et je l'invite à ce que nous procédions au même exercice
et que nous entendions le Barreau du Québec sur le projet de loi
n° 61 parce qu'ils ont… J'y ferai sans doute référence de façon plus
détaillée tantôt si j'ai le temps, mais ce que le Barreau mentionne, il y a des remarques absolument
essentielles, des problèmes avec le projet de loi tel qu'il est rédigé, et je
pense que nous ne… Le travail de législateur
serait, malheureusement, incomplet si nous ne bénéficiions pas des
commentaires du Barreau du Québec en commission parlementaire lors de
commissions additionnelles. Et, de la même façon, je ne peux pas présumer de ce que la STM, la Société de transport de Montréal,
veut nous dire, mais, comme organisme public qui peut être visé par cette loi, je pense qu'on
ne peut pas justifier par l'urgence d'agir par rapport au projet de loi
n° 61 de refuser d'entendre ce groupe-là. Je pense que ça, ce serait
inacceptable, et on ne doit pas le faire.
Ceci dit, sur la question d'urgence, je pense qu'il est
important de souligner une chose, M. le Président. À première vue, je sais que quelques collègues ont déjà
soulevé cette question depuis fort longtemps, et
peut-être serions-nous tentés d'agir
rapidement à cause que cette situation remonte à plusieurs années et à cause
qu'on l'a dénoncée depuis plusieurs mois déjà.
Et, donc, la tentation d'agir
rapidement pourrait peut-être nous venir naturellement, mais je nous invite à
la retenue pour une chose. D'abord, quand on
lit le projet de loi, un des moyens exceptionnels, un des moyens costauds, pour reprendre l'expression utilisée par le
ministre de la Justice lorsqu'il décrivait certaines dispositions du projet de
loi, c'est qu'on permet d'entreprendre des recours pour des gestes posés il y a jusqu'à 15 ans.
Ça, M. le Président,
en termes simples, là, ce qu'il faut savoir, c'est qu'en temps normal vous disposez
d'un délai de trois ans pour poursuivre lorsqu'un
geste a été posé. Je ne suis pas spécialiste en procédure civile ni en droit
civil, quoiqu'avec les heures qu'on a faites
sur le projet de loi n° 28 je commence à me débrouiller, mais la règle
normale, dans notre système de droit,
ce n'est pas 15 ans. Là, on propose d'étendre la période pour laquelle on
peut entreprendre des recours jusqu'à
15 ans. Je pense qu'on peut se permettre, dans ce contexte-là, de se
donner quelques mois de plus pour s'assurer que le projet de loi va être
bien rédigé et va correspondre à nos besoins.
Et donc je
reviens à mon point, c'est-à-dire je pense qu'on n'est pas à quelques jours, à
quelques semaines près pour dire : Non, non, on n'a pas… on va se
passer des commentaires du Barreau, on va se passer des commentaires des spécialistes, des gens dont c'est la mission, dans
la société québécoise, de protéger le Québec sous l'angle juridique, on
va se priver de leur regard spécialisé dans
l'examen d'un projet et on va changer nos règles fondamentales du droit, on
va changer les règles du jeu sans… en se privant de leurs observations. On peut
bien dire qu'on a eu un mémoire et que l'essentiel
est là, mais je suis convaincu que tous les collègues qui participent à des
auditions en commission parlementaire…
Vous avez mal saisi, M. le Président? Je peux
répéter un bout, là, si ce n'était pas clair.
• (16 h 30) •
Une voix : …
M.
Ouimet (Fabre) :
Ah! Vous êtes d'accord? Bon, bien, c'est bon, ça, c'est… On progresse.
Une voix : …
M.
Ouimet
(Fabre) : Oui, je m'excuse,
M. le Président. C'est mon manque d'expérience. Vous savez, j'ai
cette habitude de vouloir… Quand on veut
convaincre les gens, la première façon de convaincre les gens, c'est de les
regarder, c'est de s'adresser à eux. Là, je dois faire le choix difficile entre
convaincre la présidence et convaincre mes 124… 123 autres collègues, alors j'essaie de partager l'effet en
regardant de temps à autre la présidence et les autres collègues. Mais
je vais faire un effort supplémentaire, M. le Président.
Donc là, j'ai perdu le fil de ma pensée, mais
tant mieux si le ministre a compris. C'est déjà… c'est déjà…
Une voix : …
M.
Ouimet (Fabre) :
Non, c'est plus tard, ça. J'ai quelques… Je suis encore dans le réchauffement, M.
le Président, là. Ça s'en vient, ça s'en vient. Oh! Déjà 24 minutes! Le
temps file quand on s'amuse.
Donc, on va
aller dans quelque chose d'un peu plus léger, on va parler de la primauté du
droit. Non, mais, vous savez, j'aime bien faire des blagues et je pense
qu'il faut être capable de faire des blagues même quand on fait un travail
sérieux.
D'ailleurs,
et vous me… Est-ce que vous permettez une petite anecdote, M. le Président, mon
premier procès devant jury? Je fais
un procès devant jury et, à ce moment-là, je travaille… je suis au ministère
fédéral de la Justice, poursuite en évasion
fiscale. D'ailleurs… En fait, c'est en lien direct avec le projet de loi.
C'était en 1996, et déjà à cette époque-là, comme poursuivant, on
s'attaquait à… Les factures d'accommodation, les fameuses factures
d'accommodation dans l'industrie de la construction, là, moi, je faisais des
poursuites dans les années 90 par rapport à ça, mais évidemment personne
ne s'intéressait à ça. On faisait ça caché au palais de justice, là, mais les
médias ne s'intéressaient pas à ça. Mais ce fléau-là, ce système de fraude
était largement répandu, et donc c'était tout à fait connu.
Ceci dit, je
reviens à mon anecdote, procès devant jury. Et, au terme de l'exercice, le jury
rend son verdict, justice a été
rendue, mais… J'étais à la poursuite. À ce moment-là, un membre du jury,
quelques semaines plus tard, croise un de mes collègues et avait fait le commentaire qu'il trouvait que le
procureur de la couronne était cabotin. Ce qui veut dire que… Écoutez, je suis qui je suis. Je pense qu'on
peut faire un travail sérieux, même si on fait des blagues. Donc, je
ferme mon anecdote, je ferme ma parenthèse
et je reviens à mon propos pour vous dire que je vais vous parler de la
primauté du droit, sujet on ne peut plus sérieux.
Qu'est-ce que
c'est, la primauté du droit, M. le Président? Bon, la raison pour laquelle je vous parle de la primauté du
droit, c'est que le projet de loi n° 61, d'une certaine façon, remet en question
certaines règles fondamentales. Et, lorsqu'on
fait ça, on peut... on s'approche de remettre en question les règles qui
relèvent de la primauté du droit, et c'est la raison pour laquelle je
pense qu'il faut le faire avec prudence, et c'est la raison pour laquelle, M.
le Président, pour le bénéfice des collègues, et je sais qu'ils connaissent
déjà bien le sujet, mais pour ceux qui nous écoutent, je pense qu'il est important
de rappeler certaines règles.
Qu'est-ce que c'est
que la primauté du droit? Nous vivons dans une société de droit, une société
qui est basée sur la règle de droit, sur la primauté du droit. Qu'est-ce que ça
veut dire? Selon la Cour suprême… J'aurais pu citer beaucoup
d'autres autorités, mais je m'inspire d'une décision de 2005 de la Cour
suprême, qui se penchait sur la constitutionnalité
d'une loi adoptée par la Colombie-Britannique et qui visait à récupérer des sommes liées au
tabagisme, au fléau ou… en fait, les coûts
du système de santé liés à la vente du tabac, l'usage du tabac au fil
des années. Et, dans les années...
fin des années 90, début des années 2000, plusieurs provinces, dont le Québec,
ont adopté des lois d'exception, des lois
particulières qui visaient à permettre de récupérer, de la part des compagnies
du tabac, des sommes qu'on a dû consacrer, comme société, au système de
santé pour combattre les effets du tabagisme, le problème étant, M. le Président,
qu'il y avait des défis insurmontables à mener ces poursuites pour obtenir le
dédommagement de la part des compagnies de tabac si nous nous en tenions
aux règles usuelles du droit en matière de responsabilité civile. Et donc les provinces, les différentes juridictions, ont
proposé de changer les règles du jeu pour faciliter l'exercice de ces
recours. Et la Cour suprême, en 2005, a eu à
se prononcer sur la validité constitutionnelle de ce geste, et je pense que le projet de loi que nous examinons s'inspire de ces législations, et c'est la raison
pour laquelle je pense qu'il est intéressant de retourner aux enseignements
de la Cour suprême en 2005.
Donc,
la Cour suprême nous dit ceci : «La primauté du droit constitue "un
des postulats fondamentaux de notre structure constitutionnelle".»
«La
Cour [suprême] a décrit la primauté du droit comme embrassant trois principes.
Le premier reconnaît que "le droit est au-dessus des autorités gouvernementales
aussi bien que du simple citoyen et exclut, par conséquent, l'influence de l'arbitraire".» Le deuxième,
deuxième principe, reconnaît… Pardon. «Le deuxième "exige la création
et le maintien d'un ordre réel de droit
positif qui préserve et incorpore le principe plus général de l'ordre
normatif".» J'avoue que celui-là est un petit peu plus aride, c'est
pour initiés. «Selon le troisième, "les rapports entre l'État et les
individus doivent être régis par le droit".»
Toujours
dans le jugement, la cour dit ceci, rappelant les propos de la juge en chef
McLachlin dans l'arrêt Babcock : «…les
"principes constitutionnels non écrits", incluant la primauté du
droit, "[peuvent] limiter les actes du gouvernement".»
• (16 h 40) •
Alors, dans cette
affaire, M. le Président, les compagnies de tabac, en invoquant la primauté du
droit comme principe constitutionnel non
écrit, prétendaient qu'on ne pouvait changer les règles du jeu pour modifier de
façon… après coup, changer les règles
du jeu pour permettre de justifier, de fonder des recours juridiques contre les
compagnies de tabac, ce qu'on appelle
les faits rétroactifs. Et également les compagnies de tabac soutenaient qu'on ne
pouvait pas changer les règles du
droit civil applicables de façon rétroactive pour, d'une certaine façon,
j'allais dire, loader la main du gouvernement et donc avantager le gouvernement de façon injuste. C'étaient
essentiellement les deux arguments qui étaient invoqués pour attaquer la
constitutionnalité de la loi ou des différentes lois. Et la Cour suprême, au
bout du compte, a rejeté cette attaque
constitutionnelle, non pas en statuant que la loi était nécessairement juste,
parce que, et vous le verrez, la cour ne se prononçait pas sur la justesse ou sur l'opportunité de ces lois, mais ne
se prononçait que sur le caractère constitutionnel. Est-ce que le
gouvernement, qu'il soit provincial ou fédéral, a l'autorité constitutionnelle
nécessaire pour adopter ces changements au
droit usuel? Est-ce qu'il est permis de le faire du point de vue
constitutionnel et non pas est-ce qu'il est souhaitable, est-ce qu'il
est juste, est-ce qu'il est opportun de le faire? Cette question relève de la
sphère politique. C'est la question, M. le
Président, à laquelle nous devons répondre, mais la cour a tout de même pris la
peine de souligner que, du point de vue constitutionnel, il n'y avait
pas de problème.
Vous
me permettrez une citation, toujours du jugement de 2005. La cour dit
ceci : «Il n'existe aucune exigence générale que la législation ait une portée uniquement prospective, même
si une loi rétrospective et rétroactive peut renverser des expectatives
bien établies et être parfois perçue comme étant injuste. Ceux qui partagent
cette perception seront peut-être rassurés
par les règles d'interprétation législative qui imposent au législateur
d'indiquer clairement les effets rétroactifs
ou rétrospectifs souhaités. Ces règles garantissent que le législateur a
réfléchi aux effets souhaités et "a conclu que les avantages de la rétroactivité [ou du caractère rétrospectif]
l'emportent sur les possibilités de perturbation ou d'iniquité".»
Ce
qui m'amène, M. le Président, à un point important à l'égard du projet de loi
n° 61, et j'ai déjà fait ce point lors
des consultations particulières et j'espère que le ministre de la Justice prend
bonne note. Parce que, pour moi, un des problèmes avec le projet de loi n° 61, c'est que nous... avant de
changer les règles du jeu, avant de modifier les règles de la
responsabilité contractuelle, les règles qui nous gouvernent tous, qui, comme
je le rappelais tantôt, puisque personne n'est
au-dessus de la loi, ces règles s'appliquent à tous, même au gouvernement… Et
on ne peut, à la légère, modifier ces règles sans paraître qu'on agit de
façon injuste.
Et donc l'importance,
M. le Président, et c'est le message tiré de la Cour suprême, c'est que nous
devons faire la démonstration de la
nécessité de poser ce geste grave de modifier les règles du jeu pour que la
démonstration soit faite que cette mesure n'est pas injuste.
En
2009, et c'est intéressant, parce qu'encore une fois le Barreau du Québec avait
fait ce commentaire lorsqu'il était question du projet de loi québécois
en matière de tabac, l'équivalent de la loi de Colombie-Britannique, donc le Barreau du Québec avait dit ceci en juin
2009 : «Le Barreau du Québec ne s'oppose pas au principe du projet de loi
compte tenu de la situation exceptionnelle créée par l'utilisation des produits
du tabac qui justifie une intervention de cette nature. Cependant, le Barreau est d'avis que des efforts additionnels
doivent être faits par le législateur pour concilier les objectifs
légitimes poursuivis avec les principes de saine législation dans une société
démocratique comme la nôtre. En principe, le
législateur devrait explicitement protéger les causes pendantes sans rouvrir
les jugements déjà rendus ayant acquis
l'autorité de la chose jugée. En outre, la loi devrait explicitement faire état
de son caractère exceptionnel afin de réduire les risques qu'elle puisse
servir de précédent.»
Il y a, M. le
Président, dans ce passage de la lettre du Barreau, écrite en 2009 pour une loi
relativement à la récupération des coûts du
service de santé pour le tabagisme, des paroles sages, qui devraient nous
inspirer aujourd'hui, alors que le
ministre de la Justice nous propose de modifier les règles du jeu. Le ministre
de la Justice n'a pas, à mon point de vue, démontré… en tout cas, il n'a
pas écrit, dans son projet de loi, ce qui justifie de modifier les règles du
jeu.
Lors des consultations
particulières, la ville de Montréal est venue malgré les courts délais. Et ce
qui est intéressant, M. le
Président, c'est que, malgré les difficultés
qu'on peut imaginer dans le fait de préparer une poursuite et
d'entreprendre une poursuite judiciaire pour recouvrer des sommes, la ville de
Montréal nous a dit qu'ils avaient entrepris
deux de ces recours. Alors, à première vue, et sans évidemment…
Je n'ai pas l'intention de m'aventurer sur le terrain de… est-ce que ces recours sont bien fondés ou non, mais, à tout
le moins et à première vue, il faut
reconnaître qu'il est possible de le faire.
Alors, si la ville de Montréal avait entrepris ces recours-là, il semble qu'eux
autres, ils ont été capables de le
faire. On peut se poser la question : Pourquoi le gouvernement ne l'aurait pas fait avant? Je sais qu'en disant ça je fais plaisir au député de Saint-Jérôme, qui
l'a, à maintes reprises, soulevée, cette question, mais je pense que,
dans le contexte du projet de loi n° 61, alors que le ministre de
la Justice nous dit : Là, il faut qu'on change les règles du jeu,
et voici ce qu'on va faire, je pense que le
ministre de la Justice doit expliquer pourquoi il est impossible de suivre les
règles usuelles et entreprendre des recours pour atteindre l'objectif que nous
souhaitons tous, c'est-à-dire de récupérer ces sommes qui ont été volées.
Alors, sur ça, je pense que, même si je suis… nous sommes d'accord avec
l'objectif, le ministre de la Justice a
encore un travail pour exposer à la population en quoi ces mesures sont
nécessaires, en quoi il est aujourd'hui nécessaire de déroger aux règles
du jeu qui sont établies depuis des siècles, pourquoi est-il nécessaire
aujourd'hui de modifier ces règles pour permettre que justice soit rendue et
que les sommes soient restituées. C'est un point important.
Un autre point, M. le Président, en lien avec
tout ça, et ça, ça ressort du projet de loi même, c'est toute cette idée du programme de remboursement. C'est les
articles, je pense, 12 et suivants, chapitre III. Il n'y a personne,
M. le Président, qui peut être contre
ça, là. Tout le monde est d'accord à ce qu'il puisse y avoir des
remboursements. Et, quand on lit les
dispositions de la loi, qu'est-ce qu'on voit? C'est qu'on vise à encadrer, à
proposer un cadre pour encourager la négociation.
Maintenant, M. le Président, j'ai tout le temps pensé, moi, que, la
négociation, au Québec, il s'en fait depuis toujours. On a même
d'excellents négociateurs, on a des médiateurs, on a des conciliateurs. Nous
avons développé, particulièrement dans les 20 dernières années, tout le
pan, en matière de justice… On parle de la justice alternative, la justice participative, ça a différents noms,
mais nous encourageons de plus en plus les avocats, les juristes à
explorer ces façons de régler des problèmes
plutôt que de s'adresser aux tribunaux. Donc, tout ça, là, ça fait 20 ans,
M. le Président, que c'est à la
mode, qu'on le développe, et ça fait du chemin, au point où — on est en train d'examiner le projet de loi
n° 28, un nouveau code de procédure
civile — on a
décidé qu'il fallait qu'on mette ça dès le début du livre, dès le début du
code, pour envoyer ce message aux avocats
que, avant de se précipiter au palais de justice pour entreprendre des
poursuites, ce qu'ils devraient faire, c'est d'envisager la possibilité de
négocier. C'est le message qu'on veut envoyer.
• (16 h 50) •
Maintenant,
là, c'est bien qu'on décide : On va se donner un programme de remboursement,
mais ces règles-là existent déjà, on
a déjà les outils. Alors, je reviens à la question. Sûrement que le député de
Saint-Jérôme va la reposer cet après-midi, comme il l'a fait à de
nombreuses reprises depuis plusieurs mois. Qu'est-ce qu'on fait? Pourquoi
est-ce qu'on ne négocie pas déjà? Alors, ça, on n'a pas besoin du projet de loi
n° 61 pour négocier. Peut-être qu'il y a des questions qui restent en
suspens, à savoir : Est-ce qu'il y aurait lieu de donner une quittance
complète? Est-ce que cette négociation doit
avoir un impact sur l'accréditation ou l'autorisation que la compagnie cherche
à obtenir de l'Autorité des marchés
financiers? Et ça, c'est en lien avec
la loi n° 1. Ça, c'est une question intéressante à
laquelle il faut se... sur laquelle on peut se pencher.
Mais sincèrement, M. le Président, en lien avec mes commentaires sur la
nécessité du projet de loi, la nécessité d'adopter les mesures costaudes
telles que décrites par le ministre
de la Justice, je m'interroge
à savoir si cette démonstration-là a été faite, et j'invite le ministre de la
Justice à faire cette démonstration-là et à l'inscrire dans la loi.
Et je vous
annonce, M. le Président, que je vais inviter... Évidemment,
je ne veux pas présumer du résultat du débat d'aujourd'hui sur l'adoption
du principe. J'ai tendance à penser qu'il
y a de bonnes chances que le principe
soit adopté, donc que nous nous
retrouverons à l'étude article par... Bien là, je ne peux pas dire quand, là,
je sais qu'il me reste juste 18 minutes,
mais ça devrait… Il y a de l'espoir, M. le ministre. Ça va...
Un jour, on va l'adopter, le principe, je suis confiant.
Ceci dit, et
trêve de plaisanteries, parce que je
pense que c'est un sujet très
sérieux, j'invite le ministre à emboîter le pas à ce que nous amendions le projet
de loi pour que nous inscrivions dans
le préambule ou dans les premières dispositions de la loi pour quelle raison il est nécessaire de modifier les règles
usuelles de notre droit, de notre responsabilité contractuelle, pour que ces mesures soient
justifiées et qu'elles paraissent, M. le Président, justes à l'égard de la société.
Parce qu'il y a une chose que nous ne devons
jamais faire. Dans notre société fondée sur la règle de droit, il y a
un principe fondamental qui n'est pas uniquement un principe de droit
criminel. La présomption d'innocence, M. le Président, c'est une règle fondamentale
de la société et en matière criminelle et en matière civile. Le pendant en
matière civile, ça s'appelle la présomption de bonne foi. Ça fait partie de
notre Code civil depuis très longtemps; on présume de la bonne foi d'une personne, et, avant de conclure à sa
responsabilité, on doit en faire la preuve. Et ça, c'est une règle
fondamentale, et on doit toujours garder à l'esprit de ne pas tirer des
conclusions sans motif valable.
Et un des problèmes qui a été soulevé par de
nombreuses personnes qui sont venues en consultation, lors des consultations
particulières, c'est la portée de l'article 3, où le ministre de la
Justice propose, dans le projet de loi, que les
personnes... Et je vais le lire, le deuxième alinéa de l'article 3 dit
ceci : «Dans un tel cas — parlant de la preuve qu'une
entreprise a fraudé dans le processus d'attribution ou d'adjudication d'un
contrat public, alors dans un tel cas — la responsabilité de ses dirigeants ou de ses représentants, agissant à
quelque titre que ce soit au moment de la fraude ou de la manoeuvre
dolosive, est engagée à moins qu'ils démontrent avoir agi avec le soin, la
diligence et la compétence dont ferait preuve, en pareilles circonstances, une
personne prudente.»
Ça va très
loin, M. le Président. On n'exige même pas que la personne ait participé
activement à la fraude, qu'elle ait eu une connaissance, et on lui
impose le fardeau de démontrer son innocence, sa non-responsabilité, toujours
en gardant à l'esprit,
M. le Président, que la loi propose que nous puissions entreprendre des recours
jusqu'à 15 ans en arrière, ce
qui n'est pas rien. Quand on pense... Me demander à moi de me défendre sur quelque
chose que j'ai fait il y a 15 ans, alors qu'on n'a pas
nécessairement gardé les documents... D'autant plus que la loi permet de
réouvrir des dossiers où il y aurait eu un
jugement qui conclut que le recours est prescrit. La loi dit : Ce n'est
pas grave, on peut quand même poursuivre. Alors, la personne qui aurait gagné un dossier en disant : C'était
prescrit, le dossier est fini, on peut jeter les boîtes, là, avec la loi, on dit : Non, on peut réouvrir, puis
on recommence, puis là la personne va devoir se défendre, sans qu'on lui
accorde nécessairement les moyens de le faire. Ça va loin, là.
Encore une fois, M. le Président, on est tous
d'accord, là. Les bandits, ceux qui nous ont volés, là, je pense qu'ils doivent payer. Ça, là, il n'y a personne
qui va débattre de ça, on ne perd pas notre temps sur ça. La question,
c'est : Comment est-ce qu'on doit procéder? Et moi, je pense, M. le Président, qu'on a déjà beaucoup d'outils, mais il faut les utiliser. Je suis convaincu qu'en disant ça je
fais plaisir au député de Saint-Jérôme qui dit ça et qui répète ça depuis plusieurs
mois. Et je ne suis pas dans les souliers du
ministre de la Justice puis je ne sais pas tout ce qu'il sait puis je ne
sais pas ce que les juristes de l'État
savent, mais je regarde la ville de Montréal puis eux autres, ils ont agi au moins dans deux
dossiers…
Une voix : …
M.
Ouimet
(Fabre) : Bon, bien,
huit… On me dit huit dossiers. J'avais compris deux lors des consultations. Donc, il y a des moyens d'agir. Tout ça pour dire, M. le Président, qu'on devrait, à tout le moins, prendre le temps de bien
analyser le projet de loi pour s'assurer
que ce qui est là-dedans correspond aux mesures qu'on veut. D'ailleurs,
j'ai trouvé ça cute, je l'ai
noté : le 2 décembre, les représentants de l'Association de la construction du Québec
sont venus en commission et
ils ont dit exactement ça. Ils ont dit : Prenez le temps de faire une loi
juste. Je trouvais que ce n'était pas fou de se dire : On peut-u
s'assurer… Évidemment, ils parlaient, à ce moment-là, du pourcentage de
dommages, et ça, c'est un point qui est soulevé.
Malheureusement, je vois que je n'aurai pas le temps, M. le Président. Je vais être
obligé de limiter mon plaisir. Il y a plusieurs points que j'aurais aimé aborder en détail avec
vous cet après-midi, mais je vais laisser mes collègues…
je sais que plusieurs autres collègues vont en parler. Mais, sur cette question-là
du pourcentage des dommages, comme d'autres
aspects, le ministre a recours à cette… ce que j'appelle ou ce que je
décrivais, lorsque j'étais bâtonnier du Québec, cette fâcheuse habitude de la législation par délégation. C'est-à-dire qu'on adopte une loi et on dit : Ah! C'est
le gouvernement qui va adopter
par règlement ce qui va dans la loi, qui va fixer les paramètres. Du point de
vue de la stabilité et de la prévisibilité
de la loi, M. le Président, qui sont des qualités fondamentales de la primauté du droit dans une société fondée sur la règle de
droit, il est important que les règles du jeu soient débattues, connues,
élaborées dans le cadre du processus législatif et pas de déléguer ça au
gouvernement.
Or, ça, c'est
un point, et il y a plusieurs aspects de la loi… du projet de loi proposé par
le ministre, le projet de loi n° 61, où on a recours à cette
technique, où on nous dit, notamment quant au montant des dommages : C'est
le gouvernement qui va déterminer c'est
quoi, le pourcentage du dommage applicable. Sur ça, M. le Président, je pense
qu'il est absolument essentiel : si on ne l'écrit pas dans la loi, donc,
si ça ne fait pas partie du processus législatif, si on ne règle pas ces questions dès la loi, il faut,
minimalement, que le gouvernement s'engage à tenir des consultations sur
le règlement. Parce que, comme on vient de
le… on l'a fait dans le projet de loi n° 35 cette semaine, c'est un aspect
essentiel du projet de loi qui est à l'étude
présentement, et on ne peut pas tout simplement dire : Bien, le
gouvernement répondra à ces questions
plus tard. Il y a des aspects importants de la loi qui sont délégués au
gouvernement, qui devra fixer les règles du jeu. Et ça, je pense que
c'est inacceptable dans l'état actuel du projet de loi.
• (17 heures) •
Un point...
Il y a plusieurs points importants. Il y a plusieurs points importants, M. le
Président, que je souhaiterais aborder, mais je vais revenir sur... Je
sais que mon collègue de Chomedey va en parler. Il avait participé activement à
l'adoption du projet de loi n° 1 l'an
dernier. Il a vécu de près ce qui était... je n'ai pas pu m'empêcher de sourire
lorsque nous avons entendu le Directeur général des élections qui est venu,
lors des consultations particulières, et qui a porté à notre attention le fait
que nous proposons de modifier la loi n° 1, qui a été adoptée il y a à
peine un an; il faut la changer. Je ne
ferais pas de commentaire, là, sur l'opportunité de ce changement-là, sauf
noter que ça fait déjà... ça fait un an,
mais déjà il faut faire des changements à cette loi-là. Le DGE, M. le
Président, nous a dit… est venu nous dire que… Vous savez, vous allez
faire des changements à la loi n° 1, la loi n° 1, qui permet de… qui,
à l'heure actuelle, empêche d'obtenir une autorisation, de la part de
l'Autorité des marchés, une compagnie qui a fait l'objet d'une condamnation… Et le DGE est venu nous dire :
Vous savez, le changement qui a été adopté en 2010 par le gouvernement libéral à la loi sur le… des élections, la Loi
électorale, est une disposition plus sévère que ce que vous avez adopté en
2012 parce que, en vertu de la Loi
électorale, une déclaration de culpabilité à l'égard d'une infraction en
matière de financement électoral, quel que soit le montant impliqué,
quel que soit le contrat public que la compagnie souhaiterait obtenir par la suite, cette compagnie est automatiquement
barrée. Alors, je n'ai pas pu m'empêcher de sourire lorsque j'ai entendu
ce commentaire du DGE qui, dans le fond, venait nous dire : Vous savez, la
loi de 2010 qui a été proposée par le gouvernement libéral, là, était plus
sévère encore. Quand même… c'est quand même particulier.
Ceci dit, M.
le Président, nous en sommes, avec le projet de loi n° 1, à la possibilité
de faire une modification à la loi
n° 1, celle qui a été… que nous avons adoptée, à mon point de vue, avec un
peu d'empressement l'an dernier. Et donc
je profite de cette expérience que nous avons connue pour dire que, comme le
reconnaît le ministre de la Justice lors de nos séances de travail en commission parlementaire, le processus
législatif ne doit pas se conjuguer à la vitesse grand V.
Il y a une
sagesse dans notre règlement, M. le Président. Ces étapes et ces délais que
nous devons respecter ont pour but
d'assurer que nous allons adopter des lois qui correspondent aux besoins de la
société, que nous avons travaillé de façon
rigoureuse, on a soupesé, considéré les impacts de ces lois-là. Et, dans tous
les cas, ça s'applique au projet de loi
n° 61 comme à toutes les lois que nous adoptons. C'est un exercice, il
faut que nous ayons cette retenue. Il faut l'avoir encore plus lorsqu'on
propose, comme c'est le cas avec le projet de loi n° 61, de modifier les
règles du jeu, les règles fondamentales de
la responsabilité contractuelle. Et, pour cette raison-là, M. le Président,
j'espère que le ministre aura la sagesse
de ne pas précipiter les choses pour que nous fassions bien notre travail de
législateurs, pour qu'au bout du compte nous proposions à la société
québécoise la loi dont nous avons besoin pour nous aider à corriger cette
situation où des personnes nous ont volé, où ils ont volé des contribuables et
donc où les personnes responsables paient leur dû à la société, tout en gardant
à l'esprit, M. le Président, parce que c'est un point important…
Et je
conclurai là-dessus. Il faut garder à l'esprit que nous devons permettre à
l'économie québécoise de progresser. Nous
ne devons pas nous pénaliser doublement en nous privant de l'expertise
québécoise, en matière de génie notamment, et donc d'avoir à l'esprit
cette idée de réhabilitation, permettre aux personnes responsables de payer
leur dû, mais de contribuer positivement à
la société en se réhabilitant et en faisant bénéficier l'ensemble de la société
de leur expertise. Et, sur ce, M. le
Président, je réitère mon approbation avec le principe malgré les difficultés
que j'ai avec le projet de loi tel que rédigé. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Cousineau) :
Merci, M. le député de Fabre. Vous aviez encore un gros cinq minutes. M. le
député de Saint-Jérôme, vous avez 60 minutes.
M. Jacques Duchesneau
M. Duchesneau : Est-ce que je
peux en prendre 65, M. le Président?
Le Vice-Président (M. Cousineau) :
Ah non, ça, vous ne le pouvez pas. Allez-y, M. le député.
M.
Duchesneau : Je dois vous dire que j'ai écouté avec beaucoup
d'attention et beaucoup de plaisir les propos de mon collègue de Fabre. Quoiqu'on soit dans un système partisan, je dois
vous dire que ses propos ont raisonné comme de la musique à mes
oreilles, et je vous dis ça même si je ne suis pas du tout virtuose de quelque
façon que ce soit. Mais vraiment ses propos
pavent la voie aux commentaires que je vais vous faire. Et je suis aussi ravi
de voir qu'il y a fusion des esprits ici, là, quant à l'appréciation du
projet de loi n° 61.
Mon collègue
de Fabre en a fait écho tantôt, on a reçu, ce matin, le mémoire du Barreau du
Québec, et j'ai à peine eu le
temps de le lire, mais une chose qu'on pouvait voir en première page, c'est que
le Barreau exprimait clairement que le projet de loi n° 61 est une loi d'exception. D'autres témoins qui
sont venus devant notre commission
nous ont aussi parlé que… ou nous ont
fait prendre conscience que le projet de loi n° 61 n'est pas un projet de
loi temporaire, mais un projet de loi qui est là pour toujours, du moins
jusqu'au moment où on va le changer.
Personnellement,
je pense que cette idée de rembourser les argents qui nous ont été volés en
ayant fraudé l'État est une loi-phare
dans la lutte à la corruption que nous voulons entreprendre. Encore faut-il que
cette loi soit justement bien encadrée et que cette loi vienne vraiment
appuyer ce qui a déjà été amorcé au cours des dernières années pour s'attaquer
à cette plaie qu'est la corruption dans notre société. Alors, il était
important pour moi de d'abord mettre en contexte
et peut-être faire un bref historique, en commençant bien évidemment par les
propos que nous avons tenus en cette Chambre,
que la Coalition avenir Québec a tenus en cette Chambre principalement lors de
la dernière session parlementaire, où
on a demandé à plusieurs reprises au gouvernement d'entamer et aussi de
coordonner des poursuites civiles envers les entreprises qui nous ont
volés.
Malheureusement, on a souvent été rabroués
lorsqu'on a apporté des suggestions comme celle-là, on a même raillé la coalition, et on l'a fait avec tant de
vigueur qu'il me semble pertinent aujourd'hui de vous faire part de
quelques exemples pour comprendre le
contexte qui nous amène à être un peu, non pas sceptiques parce qu'on est bien
d'accord avec le principe, on l'a d'ailleurs
suggéré il y a longtemps, je le répète… mais l'importance de bien faire notre
travail cette fois-ci et non pas de le faire rapidement.
Un de ces exemples, c'est qu'à une question
posée par le député de L'Assomption et chef de la coalition, le ministre
président du Conseil du trésor nous traitait d'amateurs. Puis, comme ses
collègues — j'ai
été surpris parce que je l'apprécie particulièrement — le
ministre de la Justice ne s'est même pas gêné pour nous traiter, lui aussi, d'amateurs et de simplistes quand venait le temps
de qualifier la proposition, à laquelle heureusement il adhère aujourd'hui.
On nous disait, à ce moment-là, que c'était
un concept qui était pseudo juridique et qui manquait de rigueur. Je ne
veux pas en dire autant aujourd'hui du projet qu'il nous a présenté, mais, bien
évidemment, tout n'est pas encore ficelé comme on voudrait qu'il le soit.
Donc, afin de mettre un peu de pression sur le
gouvernement pour qu'il prenne des actions concrètes, on est même allés plus
loin, en demandant… ou en présentant une pétition qui s'appelait Remboursez-nous.
Il y a près de 27 000 personnes qui ont signé en neuf jours une pétition.
Donc, c'est vraiment un souhait populaire de faire en sorte que ceux qui nous
ont volés nous remboursent; aussi simple que ça. Encore là, malgré la pétition,
malgré le fait que près de 27 000 personnes avaient appuyé cette demande,
notre proposition a encore une fois été rejetée.
Et
ça a pris un avis juridique indépendant présenté au gouvernement pour qu'on
comprenne l'importance de l'action que nous proposions. Et cet avis
juridique stipulait six choses, il est important, je pense, de le préciser.
D'abord, il stipulait qu'il était possible pour une administration publique
d'instituer des recours même si toutes les informations pertinentes, incluant le montant qui nous a été volé, même si tout ça
n'est peut-être pas encore connu. Le deuxième point que nos avocats nous
disaient, c'est qu'une partie a intérêt à instituer rapidement un recours civil
aussitôt qu'elle a en main suffisamment d'éléments pour
établir les fondements de la réclamation. Troisième point, on nous disait que rien n'empêche d'utiliser un témoignage rendu
devant la commission Charbonneau comme guide dans la rédaction d'une requête introductive d'instance. Quatrième point,
un tribunal pourrait déterminer que certains témoins entendus devant la
commission Charbonneau étaient aussi les mandataires autorisés de leurs
employeurs, et, à ce moment-là, on pouvait admettre en preuve la transcription
de leur témoignage à titre d'aveu, et tout ça pour faire valoir contre l'entreprise
des éléments de preuve pour montrer justement qu'il y avait eu malversation.
• (17 h 10) •
On
parlait d'immunité que les témoins avaient devant la commission
Charbonneau, mais on disait aussi qu'il était toujours possible, dans le
cadre d'éventuelles poursuites civiles, d'interroger les mêmes individus qui
ont témoigné devant cette commission sur l'ensemble des sujets abordés lors de
leur témoignage. Et finalement on concluait avec l'affirmation suivante, qu'il n'existe a priori aucun obstacle juridique
au dépôt de recours civil à l'encontre des entreprises nommées dans le
cadre des audiences de la commission Charbonneau.
Alors,
il faut constater, M. le Président, aujourd'hui, que non
seulement c'était possible, mais,
pour une raison que j'ignore et qui
demeure toujours obscure, quand
même reconnaître que le gouvernement a très certainement
procrastiné trop longtemps
sur ce sujet. Donc, il est évident qu'aujourd'hui, avec le projet de loi n° 61, nous répondons à une demande de la population,
ceux qui nous élisent ici, en cette Chambre.
La
question que nous devons nous poser est maintenant
celle-ci : Ce projet de loi est-il maintenant le véhicule adéquat pour mener à bien le principe qui est sous-jacent à cette
demande de nous rembourser, ou offrons-nous, dans la hâte clairement
évoquée par mon collègue de Fabre… est-ce qu'on offre un projet de loi qui est
mal ficelé et qui va laisser filer nos objectifs que nous voulons avoir avec ce
projet de loi?
Avant
de débuter, M. le Président, je pense qu'il nous semble inacceptable que
certains groupes, des groupes très importants comme le Barreau du Québec
par exemple, n'aient pas pu venir témoigner lors de la Commission des
institutions. Chaque fois que les témoins qui se sont présentés devant nous ont
exposé leur point de vue, on a eu l'impression qu'on était dans une position
pour bonifier le projet tel qu'il était présenté.
Je
répète, là, les organisations telles que le Barreau ont une expertise qui est
particulière. Ils jettent un regard sur un projet de loi important, mais
avec une lentille très différente. Et, pour l'avoir expérimenté dans le passé,
chaque fois que le Barreau est venu
témoigner devant la Commission des institutions, on a entendu des choses fort
intéressantes, et ils nous ont
toujours apporté un angle très particulier, et ils l'ont fait avec une
précision, je dirais, chirurgicale, justement, pour caractériser les
recommandations qu'ils nous faisaient. Donc, ces propos nous ont manqué dans le
processus que nous vivons actuellement. Et,
comme mon collègue de Fabre, je réitère ma déception face à cette précipitation
à conclure rapidement le projet de loi n° 61.
Je
pourrais dire la même chose de l'AMF, l'AMF, qui devait venir témoigner devant
nous, qui, à la dernière minute, s'est
désistée. Or, l'AMF est vraiment le maître d'oeuvre de l'application de la loi
n° 1 et leur expérience de la dernière année aurait pu certainement
nous aider, encore là, à venir accepter ce projet de loi n° 61, qui était,
en fait, quand on regarde ça bien comme il
faut… c'est plutôt un projet de loi n° 1a, là où on n'avait pas pu pousser
notre réflexion lors des travaux
entourant le projet de loi n° 1. Il est bien évident qu'à l'époque on
aurait pu inclure quelque chose qui visait le remboursement, et on n'a
pas pu le faire. Et je trouve inadmissible que l'AMF ne se soit pas présentée
devant nous. Même si tous les partis présents à la commission ont demandé à ce
que ces gens-là viennent nous rencontrer, ils ne l'ont pas fait.
On vit dans une
société démocratique, et, je devrais dire, nous avons la chance de vivre dans
une société démocratique où la population et ces groupes ont l'occasion de se
faire entendre dans le débat qui les concerne. En agissant avec urgence comme on le fait actuellement, pour des raisons
qui ne sont pas encore tellement claires à mon esprit, bien je pense qu'on manque une occasion de faire
justement triompher cette démocratie.
Mais, en tant que représentant de la population, parmi les membres de cette auguste Chambre, je
ne peux pas me faire complice de ce type d'agissement et ne pas dénoncer
avec véhémence cet accroc important à ce processus démocratique, je le répète.
Je vais faire quelques
critiques, encore là en préambule, qui concernent le projet de loi n° 1,
mais qui visent essentiellement à bonifier le projet de loi n° 61. La
principale critique : je le répète, le projet de loi n° 1 s'est
fait à va-vite. Un an… moins d'un an depuis son adoption, on est en
train justement d'y apporter des corrections. Malgré le fait que le principe
était excellent et l'est encore, je pense qu'on est en train de faire une
mauvaise application. Et on a besoin justement de poursuivre notre réflexion
sur le sujet parce que, sinon, on a des relents amers de ce qui s'est fait en cette Chambre il y a un an, où, à cause de mon manque d'expérience
concernant la procédure parlementaire, on a été dans l'impossibilité d'apporter
des corrections à la dernière minute. C'est pour ça que l'adoption du principe
n'est pas juste une étape automatique, il y a
toute une philosophie derrière ça. Et on veut profiter justement
pour claironner notre opinion et expliquer à la population des principes
fondamentaux qui doivent entourer le projet de loi n° 61.
Lors
de l'adoption du projet
de loi n° 1, les étapes adoptées avec urgence, sans apprécier les effets
pervers que pouvait apporter ce projet de loi… Et pourtant on a martelé,
l'opposition officielle et nous, la deuxième opposition, on a martelé des situations qui pouvaient devenir
problèmes importants et, un an plus tard, on est obligés d'admettre que peut-être qu'on avait vu juste. Si seulement on
nous avait entendus, on ne serait pas, aujourd'hui, en train de peut-être
recoller les pièces qui sont brisées actuellement.
Nos avions, je le répète, soulevé de nombreuses objections. Et, si je me
rappelle bien, sur 90 articles, je pense
qu'on a fait 94 ou 95 amendements, là, je... mais dans cet ordre-là. Je ne me
rappelle pas des chiffres de façon exacte, là. Donc, je pense qu'on a amélioré,
mais, encore là, vu qu'on était pressés par le temps, on n'a pas pu aller au
bout de cette réflexion. Permettez-moi juste de vous en énumérer quelques-uns
de ces amendements que nous voulions faire.
D'abord, nous
avions dénoncé l'absence d'un plan global pour s'attaquer à la corruption. On
avait dit, et je le répète encore aujourd'hui : Un problème aussi
important et aussi vaste et complexe que celui de la corruption ne peut pas être résolu uniquement par une certification, comme on a eu
avec le projet de loi n° 1. Et, je ne sais pas si vous vous rappelez, M. le Président, mais je crois qu'on
était le 6 décembre, l'an passé, donc à la veille d'ajourner les travaux,
on avait... J'avais même demandé au nom de ma formation de changer le nom du
projet de loi n° 1, qui était la loi sur l'intégrité, alors que c'était
une infime partie d'une lutte globale à cette criminalité-là. Et, parce qu'on
n'avait pas, justement, exprimé notre
désaccord lors de l'adoption du principe, bien on a trouvé une décision qui
nous empêchait d'aller plus loin. Et
c'est pour ça aujourd'hui que je me sens justement appuyé par mes collègues de
l'opposition et de mon équipe pour faire valoir ces points avec lesquels
on était en désaccord et comme on le fait ici avec le projet de loi n° 61.
On avait soutenu, à l'époque, qu'il fallait
changer nos façons de faire. Le président du Conseil du trésor nous avait parlé
qu'il fallait adopter le projet de loi n° 1 parce que, de toute façon, le
volet 2 et le volet 3 allaient suivre. Ça fait
plus d'un an, et on attend toujours les tomes 1 et 2 de cette lutte à la
corruption. On avait notamment parlé des contrats publics, et on ne
s'était pas tellement attardés à cet aspect-là. Pourtant, s'il y a quelque
chose qui fait problème actuellement, s'il y
a une porte d'entrée à la corruption, c'est d'abord lors de l'entente que le
gouvernement peut avoir avec un de ses fournisseurs, donc lors de la
signature du contrat.
Et je vais
vous donner un exemple et citer ce que le président du Conseil du trésor nous
disait le 13 novembre 2012, alors que nous étions à l'étape de de
l'adoption du principe, et je le cite : «Ça fait partie de la trilogie
qu'on veut développer autour des contrats
publics. Et vous allez voir, là, on s'intéresse beaucoup à la probité des
entreprises, mais il y aura d'autres aspects au niveau
de ceux et celles qui donnent les contrats dans un avenir très rapproché et,
par la suite, d'harmonisation et
uniformisation des pratiques contractuelles sur l'ensemble des ministères
et organismes dépendant de l'État, et incluant les sociétés d'État.» Et
je ferme la parenthèse.
• (17 h 20) •
Puis le lendemain, le 14 novembre, le même président
du Conseil du trésor nous expliquait un peu plus sa vision : «Nous en
sommes à réfléchir sur comment les détecter — en parlant des activités
frauduleuses, comment les détecter — comment se donner des processus pour être
capables de ne pas attendre l'inévitable. Ça fait plusieurs fois que je
me répète, il y a eu plusieurs groupes, mais c'est vraiment notre volonté.»
Or, il nous disait que, «dans une première
étape — là,
il parlait toujours de sa trilogie, "une belle trilogie",
disait-il — au
départ, [c'est] ceux qui contractent…» C'était le but du projet de loi
n° 1. «On a une situation urgente, nous
disait-il, il faut ramener la confiance, [la] probité, alors on commence.» On
commençait avec le projet de loi n° 1. «Puis, de toute façon, c'est un processus qui va s'étendre.» C'est ce qu'on
voit avec le projet de loi n° 61. «Autrement dit, à partir du
moment où on commence, on ne peut pas certifier tout le monde.» On parlait du
projet de loi n° 1. «Donc, il y aura un
crescendo, il y aura une mise en application qui va permettre à terme, effectivement,
d'avoir un processus qui va être tout à fait rodé.»
Deuxième
point, disait-il, «ça va être d'agir au niveau, effectivement, de ceux et
celles qui prennent les décisions.» Et ça, c'est un point sur lequel je
vais revenir, M. le Président. «Et nous en sommes [donc là]. Dans certains cas,
malheureusement, même face à — comment je pourrais dire sans cibler
personne, [nous disait le président du Conseil du trésor, là il
dit] c'est assez difficile — face à des situations d'illégalité plus
que présumées, disons, quasi avouées, il y a
des gens qui ne comprennent pas. Donc, on devra agir sur tous les plans. Ça, je
suis entièrement d'accord.» Je ferme la parenthèse.
Plus loin, il
nous disait : «Et ultimement, après ça, sur aussi la révision de l'ensemble
de la façon qu'on donne les contrats
publics, quand on voit les mauvaises pratiques, comment on peut uniformiser. On
est là, c'est pour ça. D'ailleurs, une
des dispositions du projet de loi ramène à rapatrier — [et là] je vois que vous êtes en accord avec
ça — au
Conseil du trésor, qui a déjà des bonnes compétences, pour assurer une plus
grande harmonisation, pour faire en sorte que vous qui soumissionnez ne soyez pas pris dans des règles […] un peu
disparates qui font en sorte que ça peut donner l'impression parfois — sans parler de collusion, ou corruption, ou
quoi que ce soit — que les
appels d'offres ne suivent pas des règles qui devraient normalement être
suivies pour assurer une saine concurrence.» Fin de cette longue citation, mais
qui vraiment pave la voie à ces commentaires que je vous ferai sur le projet de
loi n° 61.
On parlait à
l'époque des notions subjectives au niveau de l'intégrité et de la probité, on
l'avait mis à l'ordre du jour, on
disait : Le projet de loi, tel qu'il est fait, donne trop dans
l'arbitraire et permet à des gens qui ont des visions différentes de rendre des décisions différentes, alors qu'on
devrait avoir des moyens très objectifs d'évaluer ce qui est une fraude,
ce qui est de la collusion ou ce qui est de la corruption.
Alors, en
terminant sur le projet de loi n° 1, je vous dirais aussi qu'on a dénoncé
l'absence de mesures de prévention et de détection. Parce qu'avec le
projet de loi n° 1 on était toujours en réaction à une situation, alors
que ce nous proposions, c'était justement de
trouver des moyens de détecter, donc ne pas attendre de se faire voler et après
ça tenter de réagir, mais empêcher
justement que des crimes soient commis. Un an plus tard, on n'a toujours pas
plus de moyens pour trouver et questionner les personnes suspectes. Nous
n'avons pas de rempart supplémentaire pour nous assurer, par exemple, que, lors de l'exécution d'un contrat,
justement, ce contrat-là va être fait selon les règles de l'art, selon les
règles du jeu, justement, clairement étayées dans les contrats. Parlant de
contrats, on avait répété ad nauseam, M. le Président, que rien dans le projet
de loi n° 1 — et
je ne constate rien dans le projet de loi n° 61, quoi que ce n'est pas son
objectif — ne
touche les contrats, je répète, contrats qui sont les portes d'entrée vers la
collusion et la corruption.
On
avait aussi clairement indiqué — et j'ai martelé ce point-là plus d'une fois,
autant en commission parlementaire, l'an
passé, que cette année et aussi plusieurs fois en cette Chambre — que rien n'est fait pour protéger les
dénonciateurs, les lanceurs d'alerte. On a
souvent aussi été rabroués là-dessus. Et on a refusé des amendements qu'on
avait proposés en disant que ça
ferait partie de la trilogie; un an plus tard, on attend toujours. Pourtant, de
nombreux dénonciateurs, de nombreux lanceurs d'alerte subissent toujours
les conséquences de leurs actions non seulement sur le plan professionnel, mais
également sur le plan personnel. M. le
Président, la collusion et la corruption, c'est un mal collectif. Mais, quand
on est un lanceur
d'alerte, les blessures sont au niveau personnel ou au niveau familial. Et,
encore aujourd'hui, un an plus tard, les gens qui ont dénoncé subissent
les contrecoups de ça.
Et,
à cet effet, cette Assemblée a d'ailleurs adopté une motion enjoignant la
Chambre à adopter dans les meilleurs délais
des mesures législatives visant à protéger les lanceurs d'alerte, et on est
toujours laissés pour compte à ce niveau-là, on est sur l'attente, et l'attente qui ne finit pas. Et on devrait faire
en sorte justement de pousser plus loin tout ce qui touche la protection
des dénonciateurs et des lanceurs d'alerte parce que ces gens-là se mettent
souvent dans des positions de vulnérabilité,
s'exposent à des représailles. On l'a vu, que cette loi, au fédéral, qui a été
amenée en 2007, a emmené son lot de
victimes, malheureusement toujours des victimes du côté de ceux qui lancent des
alertes. Alors, on peut faire des lois, mais, si cette loi n'a pas de mordant, on fait faux bond et ça pose des
problèmes et amène des risques qui sont considérables.
Parlons
maintenant du projet de loi n° 61, M. le Président. Il est clair que nous
devons envoyer un message clair à ceux
qui nous ont volés : Remboursez-nous. Et le message est aussi simple que
ça : Remboursez-nous l'argent que vous nous avez volé et, à ce
moment-là, vous pourrez avoir des contrats de l'État. Si vous ne payez pas ce
que vous nous devez, bien, c'est simple,
vous n'aurez pas de contrats de l'État. Le message est aussi simple que ça. Le
reste devient de la mécanique
purement juridique. Et, je le disais et je le répète, tout ce qui est légal
n'est pas nécessairement juste. Alors, il faut faire en sorte que le
projet de loi n° 61 puisse justement donner espoir à ceux qui se sont fait
avoir.
Et,
quand je dis «pas d'entente de remboursement, pas de contrat», bien on le
vit tous, hein? C'est comme si vous allez
chez votre garagiste pour faire faire une réparation, que, quand vous avez
payé, vous retournez chez vous, vous vous apercevez que votre auto n'a pas été réparée comme vous l'aviez demandé,
bien évidemment, avant de retourner chez votre garagiste, vous allez demander d'être remboursé ou à tout le moins
qu'il, justement, fasse la réparation qui s'impose. Et c'est un peu ce
qu'on demande avec le projet de loi n° 61.
Par
contre, ce principe d'être remboursé doit respecter trois règles, trois
principes fondamentaux : l'équité, la justice et aussi le discernement. Alors, quand je dis
«équité» : équité pour les travailleurs honnêtes des firmes fautives.
Quand on a une entreprise de 5 000, 6 000 personnes et qu'il y a
seulement quelques personnes à la tête de l'organisation qui ont, justement, fait des tractations de coulisse pour
obtenir illégalement des contrats, ces gens-là qui sont des pères de
famille, des mères de famille qui travaillent de bonne foi pour ces
entreprises-là, qui n'ont jamais été partie prenante à ces manoeuvres dolosives et frauduleuses… «Dolosives»,
M. le Président, j'ai appris, cette semaine, par un témoin ce que ça
voulait dire. Mais c'est dans le projet de loi n° 61. Voyez-vous, comment
on éclaircit plusieurs choses quand on fait nos travaux de la bonne façon en
commission parlementaire.
• (17 h 30) •
Donc,
équité pour ces gens-là, qui sont des gens honnêtes, mais qui, aujourd'hui,
parce que leurs compagnies n'ont plus
de contrats parce qu'ils ont, justement, commis des fraudes, ces gens-là
peuvent perdre leur emploi. Et c'est…
Souvent, les premiers à subir les contrecoups ont été justement ceux qui ont
lancé des alertes ou qui ont été des dénonciateurs.
Le
deuxième point, c'est la justice, la justice pour les citoyens et les
entrepreneurs honnêtes qui, eux, se sont fait éjecter du processus d'appel d'offres parce qu'ils respectaient les
règles, parce qu'ils n'étaient pas les plus forts, parce qu'ils
n'étaient pas les plus gros et qu'ils devaient faire face à une compétition tout
à fait... ou une concurrence tout à fait déloyale de la part de certaines
compagnies.
Et
le troisième point, c'est le discernement pour justement jeter les bases de
nouvelles façons de faire afin de mettre un frein, un frein réel à la corruption, et considérer justement,
en même temps, l'importance des firmes de génie et des entrepreneurs. On ne peut pas jeter le bébé avec
l'eau du bain, M. le Président, donc on doit appliquer nos règles, mais
les appliquer avec discernement. Il faut être guidés par ce qu'on appelle au
quotidien, si vous voulez, le gros bon sens. On
ne peut pas laisser la place à la rancoeur et à la vengeance. On s'est fait
voler, oui, mais est-ce qu'on est capables de bâtir un monde meilleur?
C'est ce qu'on souhaite. Mais on peut le faire uniquement avec des procédures
qui vont venir régler des choses, pas
nécessairement avec des procédures qui sont complexes. Et on doit le faire dans
un laps de temps qui va être
acceptable, acceptable et raisonnable. En fait, le remède que nous proposons
avec le projet de loi n° 61 ne peut pas être plus dommageable que
le mal auquel nous tentons justement de remédier.
Il va aussi falloir,
M. le Président, penser à une forme de réhabilitation et de réconciliation. Ça
s'est fait dans d'autres pays, dans des pays
où on a justement commis des crimes innommables, mais on s'est aperçu, après un
certain temps… Je pense à l'Afrique du Sud,
on a trouvé des moyens de trouver justice et réconciliation, et peut-être qu'on
en est rendus là ici, au Québec, dans cette
lutte à la corruption. Il faut regarder devant nous et tenter d'entrevoir un
avenir plus brillant que celui qu'on
a connu au cours des 10, 15 dernières années. Sinon, à quoi bon apporter
de nouvelles solutions si notre objectif n'est justement pas de créer un
monde meilleur?
Parlons d'équité
encore une fois. C'est le premier objectif que nous visons avec le projet de
loi n° 61. Puis un exemple qui me vient
en tête, que tout le monde va comprendre, là, alors qu'on est dans la fièvre du
hockey, c'est : quand vous mettez deux équipes sur la patinoire, il
faut que chaque équipe ait cinq joueurs d'avant et un gardien de but. Si une équipe décide de jouer avec 10 joueurs ou
avec deux rondelles, bien, on vient briser la façon de faire. C'est la
même chose quand on fait des contrats avec
le gouvernement. Il faut que tout le monde soit capable de respecter ces règles
et amener des moyens qui vont éviter l'injustice dont plusieurs entreprises et
firmes ont été victimes, et donc il faut être capables de trouver des moyens de
le faire.
On
a eu des témoignages variés au cours de la commission parlementaire. En fait,
avec un si court laps de temps, je suis,
moi aussi, comme l'a été... comme l'a exprimé tantôt mon collègue de Fabre,
mais qui reflétait un peu l'opinion de tout
le monde de la commission, nous avons été impressionnés par la qualité des
mémoires qui nous ont été présentés, et avec un court laps de temps, là, entre l'invitation et le moment où ces
gens-là devaient témoigner. Et je pourrais
vous dire que chacun de ces
témoignages ou chacun de ces mémoires ont été une fleur qui nous a été apportée. À
nous maintenant, à la commission,
de faire un bouquet de ces fleurs qui nous ont été déposées et de présenter un projet de loi qui va respecter vraiment ce que cherche la population et nous
aussi, les parlementaires, c'est-à-dire la justice.
Et, dans cette optique, on
doit évaluer les propositions qui nous ont été faites, et, à titre d'exemple,
il faut élargir au-delà du monde de la construction une saine application des
règles d'octroi de contrat public à l'ensemble des contrats publics, justement,
pas seulement au monde de la construction. Et là je pense à tout ce qui touche l'informatique, ce qui touche l'approvisionnement. Le gouvernement dépense des centaines de millions de dollars chaque année, est-ce
qu'on en a pour notre argent? Alors, il serait erroné ou mal avisé que de
prendre le projet de loi n° 61 et de l'utiliser uniquement au monde de la
construction, ça serait, d'une certaine façon, M. le Président, faire un peu de
l'aveuglement volontaire.
Plusieurs des groupes qui ont été entendus nous
l'ont d'ailleurs souligné. Et je pense à l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du
Québec, c'est à la page 9 de son mémoire, et je cite : «…le mandat
accordé en 2011 à l'Unité permanente
anticorruption — l'UPAC — en vertu de la Loi concernant la lutte
contre la corruption ne s'arrête pas à l'industrie de la construction,
il concerne tout le secteur public.» On dit aussi que «le présent projet de loi devrait [...] également viser tout le secteur
public». Il faut «étendre l'application du projet de loi à tous les
contrats du secteur public [afin de permettre] d'éviter les écueils du choix
d'une définition, tout en rendant l'application de la loi encore plus large et
efficace — et
je ferme les guillemets.»
La Corporation des entrepreneurs généraux du
Québec, que tout le monde a salué… tout le monde de la commission a salué l'excellence du mémoire qui nous a été présenté,
d'entrée de jeu, à la page 3 de son mémoire, et je cite, on nous dit : «Nous sommes d'avis que ce
projet de loi devrait viser l'ensemble des marchés publics et non
seulement les contrats reliés à la construction. Les autres secteurs
d'approvisionnement sont également à risque de connaître des situations similaires et sont par ailleurs
également soumis aux accréditations de l'AMF — l'agence des marchés financiers. Au surplus, nous sommes déçus — disaient-ils — de constater que ce projet de loi vise
uniquement les entreprises de construction qui ont conclu un contrat
directement avec un organisme public. Ce qui exclut les sous-entrepreneurs, les
fournisseurs, etc.» Alors, on pose une question, on dit : «Pourquoi ne pas
saisir l'opportunité de légiférer pour tous les secteurs? — et je
pense que c'est une merveilleuse suggestion et je ferme les guillemets.»
Dans le même sens, l'Ordre des ingénieurs du Québec,
à la page 8 de son mémoire, nous disait, et je cite : «Nous partageons, par ailleurs, l'opinion de la
Corporation des entrepreneurs généraux du Québec à l'effet que le projet
de loi devrait viser l'ensemble des marchés publics et non seulement les contrats
liés à la construction.»
Alors, vous
voyez, M. le Président, tout le monde a à peu près la même opinion. Même chose
pour l'Association de la construction
du Québec, pages 7 et 8 de son mémoire, dans une longue citation que je
vais tenter de résumer, on nous disait — j'ouvre les guillemets :
«Les arguments qui militent en faveur d'un champ d'application élargi de la loi
sont de deux ordres. Débutons par le souci
d'uniformité législative. La Loi sur les contrats des organismes publics,
adoptée en 2006 puis entrée en vigueur
en 2008, encadre l'ensemble des processus d'approvisionnement de l'État.» Il vise trois
points, que je vous résume rapidement : «Tout contrat d'approvisionnement,
de services ou de travaux de construction comportant une dépense égale ou supérieure au seuil [minimum]
prévu dans tout accord intergouvernemental applicable pour chacun de ces contrats et organismes publics — vise aussi — tout contrat de partenariat
public-privé — et
finalement, le troisième point — tout autre contrat déterminé
par règlement du gouvernement. Seules les municipalités sont partiellement
exclues de l'application de la loi, une situation — disaient-ils — qui
n'a pas sa raison d'être.» Et je ne citerai pas l'ensemble de… ce que j'avais
extrait de ce mémoire, mais je pense que le message, vous voyez, il est très
clair.
Alors, il ne
faut pas penser que, puisque nous avons débusqué des cas de corruption dans le
monde de laconstruction, il n'y en a
pas dans d'autres secteurs. Je pense qu'il faut aller au-delà de ces seuls
contrats dans le domaine de la construction, sinon, bien honnêtement, je
pense que nous allons faillir à notre tâche, parce que les citoyens nous
demandent justement de non seulement réagir, mais d'être beaucoup plus
proactifs. Et on a vu dans les journaux récemment que les contrats en
informatique ont fait la manchette plus d'une fois. Alors, c'est un des aspects
que nous pourrions regarder. Parce que, vous
savez, M. le Président, les criminels ne se limitent pas à un champ
d'activité, puis les barrières pour les retenir ne sont pas là, et, tant qu'il
y aura des failles dans notre façon de faire, soyez assurés que des gens avec
de mauvaises intentions vont être très créatifs et surtout très proactifs.
• (17 h 40) •
Au même titre, les personnes qui ont commis des
actes répréhensibles ne sont pas uniquement dans le secteur privé. Il y en a aussi dans la fonction publique.
On l'a entendu à la commission Charbonneau. Pour faire de la collusion
et de la corruption, c'est-à-dire collusion,
c'est au niveau des idées, mais corruption, c'est qu'on passe à l'acte, ça
prend des gens dans l'appareil gouvernemental qui vont faciliter
justement, à ceux qui sont prêts à payer le gros prix, qui vont faciliter leurs façons de faire à l'interne. Et
malheureusement le projet de loi n° 61 ne vise qu'un des acteurs, ne vise
pas des gens qui, à partir de leur fonction dans l'appareil gouvernemental, ont
facilité la tâche à ces gens-là.
La ville de
Montréal a d'ailleurs souligné cet aspect et en a même fait une recommandation.
Et ce que la ville de Montréal nous
disait, je vais le citer parce que je pense qu'ils ont mis le doigt sur le
problème, je cite : «Les audiences de la commission Charbonneau ont démontré que des employés et des élus ont
tiré des avantages indus, notamment d'ordre financier, dans le cadre de l'adjudication, de l'attribution ou [...] la
gestion de contrats publics. Or, dans sa forme actuelle, les fonctionnaires et les élus qui ont participé à
ce genre de stratagèmes ne sont pas inclus dans le projet de loi
[n° 61]. La ville de Montréal a déjà intenté un certain nombre de recours
à l'égard d'ex-employés. Ces recours impliquent les mêmes défis que les recours visés par le projet de loi
n° 61, notamment au chapitre de la preuve des dommages et de la prescription.
La ville de Montréal souhaite donc que le projet de loi soit modifié pour
permettre de faciliter également les recours à l'égard des employés,
fonctionnaires et élus en faisant les adaptations nécessaires. Si cette
proposition devait être acceptée — nous disait la ville de Montréal — il faudrait ainsi notamment s'assurer que les recours visés par le projet
de loi ne se limitent pas à ceux initiés
devant les tribunaux civils, mais visent également les tribunaux
d'arbitrage où certains litiges entre
la ville de Montréal et ses employés syndiqués sont tranchés.» Je poursuis en citant : «La ville de
Montréal recommande
que le projet de loi soit modifié pour permettre de faciliter également les
recours à l'égard des employés, fonctionnaires
et élus en faisant les adaptations nécessaires.» Et ils ont terminé leur
mémoire sur ces propos qui, selon moi, sont tout à fait pertinents, M.
le Président.
Le troisième point, c'est la capacité juridique
exclusive présentée dans le projet de loi n° 61, une capacité juridique exclusive que se donne le ministre de la
Justice pour intenter des recours et qui soulève un tas de
questionnements de la part de plusieurs
témoins. Certains organismes ont pourtant des moyens d'intenter des recours, et
l'ont déjà fait, la ville de Montréal en étant un exemple. Cependant,
avec le projet de loi n° 61, un organisme public, une municipalité, par exemple, devra toujours obtenir l'autorisation du
ministre pour intenter un recours. Alors, s'il estime que l'intérêt
public le justifie, le ministre peut, bien sûr, autoriser le recours devant le
tribunal du district judiciaire de son choix. Et ce dernier, à ce moment-là, doit être mis en cause. Pourtant, hier, le
maire de Montréal a revendiqué le droit pour la ville d'intenter ses propres recours sans devoir
demander la permission à Québec. Et je pense que ça, c'est un aspect
qu'on va devoir fouiller beaucoup plus avant d'adopter ce projet de loi, M. le
Président.
Donc, ce
qu'on doit viser pour être efficaces, c'est une meilleure collaboration entre
les organismes, tous voués aux meilleurs intérêts de la population, et
des organismes qui veulent empêcher qu'on continue à se faire frauder, voler et
spolier comme on le fait actuellement.
L'Union des municipalités du Québec est même,
aussi, allée dans le même sens, et je cite leur mémoire, on dit :
«Considérant que les municipalités sont des partenaires privilégiés dans la
mise en oeuvre de ce projet de loi, permettez-moi
de vous proposer quelques amendements pour bonifier les mécanismes
d'application du projet de loi en impliquant
les municipalités et en respectant leur autonomie». Donc, c'est un message qui
nous vient de toutes parts et qui est
clair, net, précis. Et les municipalités nous disent aussi qu'ils veulent avoir
ce choix d'intenter eux-mêmes lerecouvrement.
Vous savez, quand, dans le projet de loi, le gouvernement se donne la
possibilité de retenir 20 % des sommes recouvrées, bien, il y a peut-être des municipalités qui vont se
dire : On va développer l'expertise puis peut-être qu'on sera en
mesure de faire le travail pour beaucoup moins cher.
L'Association des ingénieurs-conseils du Québec,
qui nous sont aussi arrivés avec des idées fort originales et pertinentes, cite, notamment en page 6 de son
mémoire — et
j'ouvre les guillemets : «À l'heure actuelle, le projet de loi du gouvernement et l'institution de certains
recours collectifs de droit civil font double emploi, ce qui aura pour effet
de nuire à l'efficacité [des] processus
engagés par le gouvernement. La possibilité que des entrepreneurs et sous-traitants
désirent éventuellement entreprendre des
poursuites sur la base de faits visés par le projet de loi risque également
d'en perturber l'application.» On dit que «le projet de loi n° 61, tel que
rédigé, contient par ailleurs peu d'incitatifs à la participation des
entreprises au programme de remboursement».
Alors, ça,
c'est un point qui est important. Est-ce qu'on va viser uniquement les entreprises qui ont été
convoquées à la commission Charbonneau, qui ont avoué leur crime ou est-ce
qu'on doit regarder l'ensemble des entreprises ou des firmes qui ont pu participer à un tel problème? On serait surpris,
mais l'Association des ingénieurs-conseils du Québec, qui comptait à peu près 170 membres il y a
plusieurs années, n'a maintenant que 34 membres. Alors, ce serait
simple, si on trouvait un moyen d'avoir une négociation avec un organisme comme l'association, de réunir ces 34 firmes là
et de nous dire : Écoutez, on peut embarquer dans un long processus
judiciaire pour tenter de vous faire admettre certains faits ou admettez que maintenant
vous êtes coincés. On va se réunir ensemble puis on va revenir au gouvernement
avec une proposition.
Le ministre
de la Justice parlait, lors de l'annonce du projet de loi n° 61,
que les autorités gouvernementales au Québec se sont fait voler plusieurs centaines de millions.
Bien, peut-être qu'on pourrait s'entendre rapidement,
éviter des longs processus judiciaires et faire en sorte qu'on puisse
récupérer notre argent le plus rapidement possible. Et ça, je peux vous dire que c'est une proposition avec laquelle je suis entièrement d'accord, quand l'Association des
ingénieurs-conseils du Québec
nous disait : Au lieu d'y aller, là, contrat par contrat et tenter de
trouver une méthode quelconque pour déterminer quelle a été notre perte,
on pourrait s'entendre sur l'ensemble des pertes qu'une compagnie a pu nous faire subir. La compagnie X qui a eu 150, 200 millions de contrats pourrait déterminer avec le gouvernement et dire :
Bon, bien, parfait, on vous doit, là, tant
de millions de dollars, est-ce
qu'on peut s'entendre là-dessus? Mais il n'y a pas personne qui ose
venir le faire parce que, dans sa forme actuelle, le projet de loi n° 61
n'offre aucun incitatif pour que des gens viennent faire la bonne chose. Alors,
ça, c'est une des choses sur laquelle on va mettre aussi beaucoup d'emphase.
• (17 h 50) •
Deuxième idée
que je veux traiter, en plus de l'équité, M. le Président, c'est la justice.
C'est sûr que les citoyens du Québec
vivent une injustice depuis trop longtemps en matière de collusion et de
corruption. La population a été flouée, et je pense qu'on doit rendre
justice aux citoyens mais également aux firmes honnêtes. Combien de firmes ont
déclaré faillite, M. le Président, parce
qu'elles n'avaient pas accès à certains marchés, parce qu'elles n'avaient pas
accès à certains fonctionnaires,
parce qu'elles n'avaient pas accès à certains élus, et que ces firmes-là, parce
qu'elles ont voulu respecter les règles du jeu, bien, ont perdu leurs
rêves, ont perdu leurs compagnies? Plusieurs ont fait faillite. Qu'est-ce qu'on
dit aux gens honnêtes, M. le Président? La
loi n° 61 vise essentiellement à venir, justement, parer ou répondre à
cette injustice flagrante. Et personnellement,
dans le cadre des travaux que j'ai effectués à l'Unité anticollusion, j'ai
rencontré de ces ingénieurs qui
étaient devenus ingénieurs pour la bonne cause et qui ont tout simplement
décidé de quitter ce secteur-là parce que justement ils n'avaient jamais
droit au chapitre et ils n'étaient jamais capables d'obtenir les contrats que
le gouvernement devrait accorder de façon équitable à l'ensemble de ces
citoyens, à l'ensemble de ces entreprises.
Donc, visons
un remboursement rapide selon les règles de l'art. On ne fera pas de raccourci,
on ne fera pas de choses qui ne sont
pas transparentes, mais faisons en sorte justement de régler ça autrement que
par des dédales juridiques compliqués.
Un témoin est venu nous dire que le projet de loi n° 61, tel qu'il est,
est un fouillis juridique… un casse-tête
juridique, pas fouillis, trop négatif, mais un casse-tête juridique. Et là-dessus
le ministre a pris acte, et, oui, on va regarder ces aspects-là. Mais il est important de
s'assurer qu'on aura les reins solides pour naviguer durant de longues années dans de telles procédures, M. le Président. L'Assemblée nationale étudie actuellement un projet
de loi qui vise à rendre la
justice accessible et compréhensible. Bien, voici un bel exemple. Pour
commencer, commençons avec le projet de loi n° 61, allons dans ce sens, et
arrêtons de faire compliqué, et trouvons un moyen d'agir avec simplicité,
efficacité et aussi rapidité.
Faire payer,
bien, c'est ce que vise essentiellement le projet
de loi n° 61, recouvrer les
sommes volées et aussi penser à une
certaine forme de suramende. Ce n'est pas vrai que quelqu'un
qui a pris toutes sortes de moyens frauduleux pour nous voler 100 millions pourrait s'en tirer en nous remettant
100 millions. À ce que je sache, comme citoyen, si je tente de
frauder le fisc, on va d'abord me faire payer ce que j'aurais dû payer, puis en
plus de ça on me donne une amende. Bien, peut-être
que c'est cette amende-là qui deviendrait justement un moyen de ramener
les gens dans le droit chemin. Sans
ça, il n'y a pas de danger de se faire prendre, on est aussi
bien de continuer à frauder, puis on s'arrangera avec le gouvernement pour pouvoir négocier une pénalité qui va être beaucoup
moindre. Et là-dessus l'association
des entrepreneurs généraux du Québec a d'ailleurs proposé cette idée
d'introduire, et je le cite : d'«introduire pour ces entreprises une
pénalité équivalente à 5 % des montants des contrats conclus avec des
organismes publics pour les trois années qui vont suivre [l']accréditation [de]
l'AMF». Donc, penser à une suramende, je pense que c'est une voie intéressante.
La ville de
Montréal a d'ailleurs repris cette idée, et la ville qui disait : Bien, on
va être obligés d'aller chercher des
avocats, des juriscomptables pour faire la preuve; qu'ils viennent s'asseoir
avec nous, qu'ils nous remboursent, qu'ils paient cette amende, puis, à
ce moment-là, on ne sera pas quittes, mais, à tout le moins, on aura trouvé une
solution rapide plutôt que de traîner des dossiers comme ceux-là en justice
pendant de longues périodes de temps.
Plusieurs, M.
le Président, ont posé des questions sur les frais forfaitaires du ministre,
20 %; on veut donner au ministère
ou au gouvernement 20 %
des sommes qui auront été recouvrées. Alors, si on s'est fait… on a eu une
entente pour se faire rembourser
100 millions, bien, il y a seulement 80 millions qui vont retourner
aux victimes, d'une certaine façon, et 20 % serviront de frais
administratifs. C'est énorme. Si je ne me trompe pas, dans mon vieux métier,
30 % était un taux usuraire, et on
pouvait accuser quelqu'un au criminel. Alors, 10 % de plus, là... on va
peut-être y arriver. Je pense qu'on
peut trouver un terrain d'entente pour réduire les frais pour ces sommes
recouvrées. Et je dis bien les sommes... pas les sommes qui nous ont été
volées, les sommes qu'on va recouvrer. C'est beaucoup. Et la ville de Montréal
a aussi appuyé cette motion en nous disant qu'eux autres, ils veulent récupérer
100 % des sommes qui leur ont été volées, idéalement, mais, à tout le
moins, 100 % des sommes que le gouvernement aura réussi à récupérer, M. le
Président.
Donc, ce
qu'on constate, c'est qu'il y a une importance d'avoir une bonne coordination
avec toutes les instances de poursuite, autant le gouvernement que les
municipalités ou que d'autres partenaires importants, et de s'assurer que le
gouvernement, s'il entame des poursuites, fasse défrayer les frais par les entreprises
fautives plutôt que de refaire payer encore une fois les citoyens qui vont
réclamer leur dû, M. le Président.
Alors, ça me
porte aussi à me questionner au sujet des moyens que va utiliser le gouvernement pour déterminer les pourcentages à rembourser, les surcharges... On parle qu'on
s'est fait voler, depuis plusieurs années… On parle, à la ville de Montréal,
de 30 %, d'autres parlent de
15 %. Comment on va faire pour déterminer ce pourcentage-là? C'est un...
on dirait en criminologie le chiffre
gris pour déterminer c'est quoi, la vraie criminalité. Seulement celle qui nous
est rapportée ou celle qui a vraiment
eu lieu? Là, c'est la même chose, comment on est en mesure de dire exactement
combien telentrepreneur a pu prendre
en surcharge lorsqu'il nous a soumis son contrat? Ça, c'est une chose. Ça,
c'est... on regarde uniquement le
montant. On pourrait aussi regarder la qualité du travail; combien d'argent il
nous a chargé une chose, mais, si, en
plus de ça, la route qu'il nous a construite doit être refaite dans deux ans,
c'est un coût supplémentaire que l'État va être encore obligé de regarder. Donc, si on a regardé le tort fait à une
municipalité ou au gouvernement, bien, il faut regarder l'ensemble des
choses. Et, pour plusieurs, les surcharges entraînées par, justement, cette
collusion, qui varient entre 13 % et 35 %, on ne peut pas y aller de
manière arbitraire pour déterminer exactement combien qu'on va charger à ces
entreprises-là, parce que ça ouvre la porte, encore là, à des débats
judiciaires qui vont être longs et difficiles.
Le troisième point, M. le Président, en
terminant, c'est discernement et pragmatisme. Soyons terre à terre, est-ce qu'on va récupérer 100 % des sommes
qui nous ont été volées? La réponse, c'est non, n'ayons pas peur de
l'affirmer aujourd'hui. Mais on peut se laisser
guider par des moyens qui vont être autre chose que la vengeance, et je pense
que c'est un aspect important du projet de loi, et ça doit répondre à des
objectifs qui sont, justement, objectifs mais qui vont préserver aussi
l'économie du Québec.
Est-ce qu'on
va faire en sorte qu'on va faire couler toutes les entreprises qui ont pu
participer à certains stratagèmes et
de faire venir des gens de l'extérieur dont on ne sait pas grand-chose? On
pourrait, là aussi, avoir des surprises. Parce que, s'il y a une chose qu'on doit se dire ici, au
Québec, c'est : À tout le moins, on a eu le courage de faire le ménage
dans cette industrie-là. Moi, j'ai donné des conférences à travers le pays,
puis les gens disaient au début que c'était un problème qui était purement québécois. Et je leur disais : Mais commencez
donc à regarder dans votre propre cour. Et, c'est drôle, depuis qu'ils ont commencé à faire ça, ils se sont
aperçus que le problème de collusion puis de corruption, ça existe
ailleurs.
Alors, au
moins, donnons-nous un bon certificat… ou un certificat de bon gouvernement, de
vouloir justement faire les bonnes
choses et de prendre des moyens pour s'attaquer à un problème qui va au-delà,
comme je le disais tantôt, de l'aspect
monétaire. On ne peut pas se voiler les yeux, on ne peut pas faire de
l'aveuglement volontaire : il y a beaucoup d'argent qui nous a été volé. Et on va faire une chose, et la chose la
plus digne, mon collègue de Fabre l'a dit tantôt, il faut négocier. On regarde, là, les conflits qu'on a en
Afghanistan et au Pakistan, même les forces de ces pays-là, lesgouvernements de ces pays-là sont en train de
contempler l'idée qu'il faut peut-être négocier avec les talibans, ceux
qui étaient leurs ennemis il n'y a pas si longtemps. Peut-être qu'on est rendus
là, au Québec, et il faut trouver un moyen de négocier et faire en sorte qu'on
va trouver une solution qui va être équitable pour tout le monde.
Et, à ce propos, l'Association
des ingénieurs-conseils du Québec nous disait, je les cite : «Le programme
de remboursement prévu par le projet de loi n° 61
devrait offrir la possibilité de négocier non seulement sur la base de
chacun des contrats visés, mais bien pour l'ensemble
des contrats visés d'une même firme. L'AICQ observe un grand désir chez
ses membres de prendre part activement au
virage amorcé dans l'industrie du génie-conseil, et ce, de manière efficace.
Les membres craignent qu'en procédant par contrat la période nécessaire à
établir les remboursements soit inutilement prolongée.
Il est crucial que le programme de remboursement créé par le gouvernement soit facilitateur
et incitatif afin d‘atteindre rapidement l'objectif [visé].» Voyez-vous,
c'est ce qu'ils disent : Arrêtons de poursuivre notre malheur, trouvons un
moyen de régler et faisons ça d'une façon logique, en négociant.
Et ce qu'ils
nous ont dit, les gens, les représentants de l'association des ingénieurs, c'est que les firmes sont
prêtes à venir voir le gouvernement. Mais, s'ils sont pour le faire à leur
détriment, c'est-à-dire que… le faire et amener leurs entreprises à la faillite,
bien évidemment ils vont rester sur la touche et vont attendre
que le gouvernement
intervienne. Donc, ça nous prend des incitatifs au programme. Et il faut
améliorer, dans le projet de loi n° 61, ces incitatifs, M. le Président,
et on doit le faire avec ces organisations.
En
conclusion, M. le Président, on vit actuellement une conjoncture extraordinaire qui nous donne
l'occasion de changer les cultures, c'est ça qu'on doit changer. Le
projet de loi n° 61 n'est pas uniquement une question de dollars, c'est
une question de culture. Il faut saisir cette occasion. Et je vois que vous
vous levez, donc vous voulez que je résume. M. le Président…
Le
Vice-Président (M. Cousineau) : Il est 18 heures, M. le… Bien, s'il y a consentement pour
qu'on poursuive une petite minute ou deux de plus pour faire votre
conclusion.
Des voix : …
• (18 heures) •
Le Vice-Président (M. Cousineau) :
Consentement pour deux minutes? Est-ce que vous êtes capable de nous… M. le
député de Saint-Jérôme, alors concluez.
M.
Duchesneau : …ça fait
partie du bouquet dont je vous parlais tantôt, donc vous pouvez avoir une conclusion de deux minutes ou de 15 minutes si… Mais je
vais vous faire ça en deux minutes, M.
le Président; je ne veux pas étirer
indûment.
On l'a entendu lors des audiences, on a actuellement
une intention ferme de vouloir changer les choses. Profitons-en. Et les propos critiques que j'ai apportés tantôt ne visent pas le ministre de la Justice
lui-même, je connais ses intentions
nobles à vouloir changer les choses, mais m'obligent comme parlementaire à vous
apporter ces corrections, ces changements. Puis je suis sûr qu'on va
trouver un terrain d'entente, on l'a fait dans le passé, mais je ne peux pas
être tout simplement silencieux. On a le
leadership, ça nous prend un leadership qui est porteur pour amener justement
le navire à bon port. Et on va faire en sorte qu'on va trouver une
solution.
Ce qu'il faut
retenir, et la Commission de réforme du droit nous l'a dit — je termine là-dessus, M. le
Président, j'ai 12 pages mais je vais
terminer — la
Commission de réforme du droit, en 1973, nous avait dit que le vrai facteur
de dissuasion quand des crimes sont commis,
ce n'est pas la sévérité de la peine, c'est la certitude d'être pris quand tu
as commis un crime. Alors, il faut que le
projet de loi n° 61 soit cette certitude d'être pris si tu commets une
infraction à la réglementation. Merci d'avoir été indulgent, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Cousineau) :
Merci, M. le député de Saint-Jérôme.
Ajournement
Alors, s'il
vous plaît, compte tenu de l'heure, les travaux de l'Assemblée sont ajournés au
jeudi 5 décembre 2013, 9 h 45. Bonne soirée à tous et à
toutes et bonne nuit.
(Fin de la séance à 18 h 2)