(Neuf heures quarante-cinq minutes)
La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Bonjour, Mmes et MM. les députés. Veuillez vous asseoir.
Affaires courantes
Déclarations de députés
Nous sommes à la rubrique des déclarations de députés. Et je suis prête à reconnaître M. le député de Portneuf.
Féliciter cinq citoyens de la circonscription
de Portneuf récipiendaires de la
Médaille de l'Assemblée nationale
M. Michel Matte
M. Matte: Merci, Mme la Présidente. Le dimanche 30 octobre dernier, j'ai remis la Médaille de l'Assemblée nationale à cinq personnes d'exception qui ont su se démarquer de part leur contribution et leur implication à la vie collective et sociale.
Ces personnes de coeur contribuent à l'identité portneuvoise et représentent l'essence même de notre société. Voilà de quoi être fiers et reconnaissants envers ces passionnés dont les réalisations font de Portneuf un milieu de vie accueillant et chaleureux. Ce sont des modèles à imiter, et ils sont une source d'inspiration pour chacun de nous. Je tiens à leur exprimer toute ma gratitude et à leur dire merci.
Ces médaillés sont: Mme Thérèse Dion Langevin, MM. Denis Beaulieu, Louis Bourassa, Gérard Galestrosi, René Montambault. Au nom de tous les citoyens et citoyennes de Portneuf, je leur dis bravo et félicitations.
La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Je vous remercie, M. le député de Portneuf. Je cède maintenant la parole à M. le député de Jonquière.
Féliciter les finissants du programme
Persévérance scolaire, mobilisation et
communautés, du cégep de Jonquière
M. Sylvain Gaudreault
M. Gaudreault: Oui. Merci, Mme la Présidente. Je tiens à saluer la première cohorte inscrite au programme Persévérance scolaire, mobilisation et communautés du centre de formation continue Mastera, du cégep de Jonquière. Cette attestation d'études collégiales unique au Québec vise à former des acteurs sociaux désireux de contribuer à la mise en oeuvre de projets novateurs favorisant la persévérance scolaire et la réussite éducative. Cet enjeu passe par une mobilisation de toute la communauté, et cette A.E.C. s'inscrit dans cet esprit.
Comme député de Jonquière, j'ai accompagné un groupe d'administrateurs et d'enseignants du cégep lors d'une mission en Bretagne, en février 2010, afin d'appuyer la démarche conduisant à la mise en place de ce programme. Il permet aux étudiants de développer de fortes capacités d'adaptation à différents milieux et réalités, et ce, dans le but de favoriser autour d'eux la persévérance scolaire et la réussite. Une fois sur le marché du travail, les diplômés de ce programme deviennent des personnes clés dans les milieux communautaires, scolaires, gouvernementaux et socioéconomiques.
Je tiens à souligner tout le travail des administrateurs et du personnel enseignant du cégep de Jonquière et de Mastera Formation continue pour la mise en place de ce programme, une première au Québec. Merci.
La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Je vous remercie, M. le député de Jonquière. Je reconnais maintenant M. le député des Îles-de-la-Madeleine.
Souligner le lancement de la
campagne Dans la marge jusqu'au cou!
organisée par la Coalition des associations
de consommateurs du Québec
M. Germain Chevarie
M. Chevarie: Mme la Présidente, permettez-moi, en mon nom et au nom du ministre de la Justice, de souligner le lancement de la huitième édition de la campagne Dans la marge jusqu'au cou!, réalisée par la Coalition des associations de consommateurs du Québec. Elle vise notamment à sensibiliser la génération X au risque d'endettement lié aux habitudes d'achat à crédit et a pour thème Achetez maintenant, payez longtemps. Cette campagne de sensibilisation au crédit et à l'endettement vient en complément des actions de notre gouvernement en matière de protection des consommateurs et nos travaux liés au projet de loi n° 24 visant à lutter contre le surendettement.
Je veux remercier et féliciter toutes les associations de consommateurs qui offrent des services indispensables aux citoyens. En plus de promouvoir et de défendre les intérêts des consommateurs au quotidien, elles offrent des services d'aide et de soutien essentiels à ceux qui éprouvent de graves problèmes de surendettement. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, M. le député des Îles-de-la-Madeleine. Mme la députée de Mirabel.
Souligner le 60e anniversaire du
District scout des Laurentides
Mme Denise Beaudoin
Mme Beaudoin (Mirabel): Merci, Mme la Présidente. Il me fait plaisir de souligner tout le travail accompli auprès des jeunes de chez nous, filles et garçons, par les représentants du District scout des Laurentides, en activité dans notre région depuis 60 ans.
Récemment, deux groupes d'entre eux, celui de Mirabel, représenté par Donald Fortin, et celui du lac des Deux-Montagnes, représenté par Chantal Sheehy et Gaétan Morin, ont organisé une grande rencontre publique, dont j'ai été la marraine d'honneur, au parc national d'Oka. L'événement a regroupé plusieurs groupes actifs et d'anciens scouts, dont des collègues de l'Assemblée nationale. Il était destiné à mieux faire connaître publiquement la famille scout, ses valeurs et ses réalisations.
Les jeunes sont encadrés par des bénévoles dévoués qui leur accordent temps et énergie. Placés sous leur responsabilité, les jeunes sont amenés à construire un monde meilleur, et le tout s'inscrit dans une démarche environnementale. Longue vie au mouvement scout!
**(9 h 50)**La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Je vous remercie, Mme la députée de Mirabel. Je reconnais maintenant M. le député des Chutes-de-la-Chaudière.
Souligner le Tournoi provincial
de ringuette Chutes-Chaudière
M. Marc Picard
M. Picard: Merci, Mme la Présidente. Depuis maintenant quatre ans, j'ai le plaisir de m'associer au tournoi provincial de ringuette Chutes-de-la-Chaudière. Cette année, le tournoi s'est déroulé du 18 au 20 novembre et a réuni plusieurs équipes de différentes régions du Québec, du Nouveau-Brunswick et de l'Ontario.
Vous savez tout comme moi que la pratique d'un sport est source de motivation pour nos jeunes. À travers leur discipline, ils développent leur esprit d'équipe, ils apprennent à repousser leurs limites et à se fixer des objectifs.
Aujourd'hui, je tiens à souligner le travail exceptionnel de l'Association de ringuette Chutes-de-la-Chaudière, qui existe depuis plus de 30 ans. Le dynamisme et l'implication de ses membres contribuent à promouvoir ce sport de glace qui est en pleine expansion. Par la même occasion, je félicite tous les organisateurs et les bénévoles qui, par leur dévouement, participent au succès de ce tournoi. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, M. le député des Chutes-de-la-Chaudière. Je reconnais maintenant M. le député de Montmorency.
Souligner la contribution des équipes
sportives Centaures au rayonnement de
l'école de la Courvilloise, à Beauport
M. Raymond Bernier
M. Bernier: Merci, Mme la Présidente. Je désire féliciter ce matin les équipes sportives qui portent fièrement le nom des Centaures de la polyvalente de la Courvilloise, de Beauport. Je tiens à souligner aujourd'hui le succès du programme sportif de l'école secondaire la Courvilloise qui permet aux élèves de développer la persévérance, la discipline et la coopération.
Les équipes de badminton, de basketball, de cheerleading, de football, de rugby, de soccer intérieur et de volleyball portent fièrement les couleurs rouge et noir des Centaures. Avec grande fierté, j'appuie ces jeunes sportifs de la Courvilloise. Par leur implication, ils contribuent au rayonnement de leur école. Et je tiens également à remercier et à féliciter l'équipe de la direction, les entraîneurs et les parents pour leur dévouement, leur engagement auprès de nos jeunes.
Je serai d'ailleurs présent lors du gala annuel des Centaures, qui se tiendra le vendredi 25 novembre et qui vise à récompenser les efforts et les réussites des équipes et des jeunes. Particulièrement, je tiens à féliciter également nos Centaures au football cadet BB, qui ont remporté le championnat interrégional lors des événements du Bol d'or, à Sherbrooke.
Je souhaite aux Centaures beaucoup de succès sportifs et académiques.
La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, M. le député. Je reconnais maintenant M. le député de Matane.
Souligner le 100e anniversaire de la
Caisse populaire Desjardins de Matane
M. Pascal Bérubé
M. Bérubé: Mme la Présidente, je veux aujourd'hui célébrer à mon tour le 100e anniversaire de la Caisse populaire Desjardins de Matane. C'est le 20 août 1911 que, convaincus par Alphonse Desjardins, le notaire Joseph-Octave Lebel, l'abbé Antoine-Annibal Soucy et 89 citoyens signaient la déclaration de fondation. Depuis, cette institution financière est devenue un moteur économique important de la région de Matane.
Tout au long de l'année, la caisse a célébré en grand son centenaire. Les membres ont pu visionner un documentaire relatant l'histoire de cette institution. La fête du centre-ville a eu lieu à la date exacte de la fondation, et l'on en a profité pour inaugurer une oeuvre d'art, au siège social, de l'artiste Roger Langevin.
Du jeudi 29 septembre au vendredi 4 novembre, à La Galerie d'art de Matane, le public a pu voir une exposition de la Collection Desjardins. Un numéro spécial de la revue Au pays de Matane soulignant le 100e anniversaire de la caisse a aussi été publié cet automne.
Enfin, je veux rendre hommage aux bâtisseurs, aux dirigeants, aux employés et aux membres qui ont façonné cette institution au fil du temps et qui lui ont permis d'être active, dynamique et toujours de son temps. Merci.
La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Je vous remercie, M. le député de Matane. Je reconnais maintenant M. le député de Vimont.
Souligner la Campagne de paniers de
Noël dans la circonscription de Vimont
M. Vincent Auclair
M. Auclair: Merci, Mme la Présidente. Partout sur le territoire du Québec, des milliers de bénévoles et des centaines d'organismes communautaires sont au travail afin de nous rappeler que, sans notre générosité et notre implication, trop de nos concitoyens seront isolés pour la période des fêtes. C'est pourquoi j'aimerais faire un clin d'oeil ce matin aux citoyens de Laval et leur rappeler que le Centre de bénévolat et Moisson Laval sont à procéder au lancement officiel de sa 27e campagne de paniers de Noël sous le thème Un geste d'espoir.
Cette année, l'objectif est de livrer 1 700 paniers de Noël, c'est-à-dire à plus de 5 000 Lavallois, des personnes vivant seules, des aînés, des mères monoparentales, peut-être même votre voisin. Pour atteindre son objectif, le Centre de bénévolat a besoin de bénévoles, soit pour les activités de sollicitation ou pour la livraison des paniers de Noël qui aura lieu dimanche le 18 décembre prochain.
Je vous invite donc à communiquer avec le Centre de bénévolat ou vous présenter sur la rue Michelin, où ils ont leur... où l'entrepôt est situé, pour livrer vos marchandises.
Alors, soyez généreux. On se retrouve le 18 décembre prochain.
La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, merci, M. le député de Vimont. Je reconnais maintenant Mme la députée de Marguerite-D'Youville.
Souligner le 15e anniversaire
de la Loi sur l'équité salariale
Mme Monique Richard
Mme Richard (Marguerite-D'Youville): Mme la Présidente, c'est avec plaisir que je souligne ce matin le 15e anniversaire de l'adoption de la Loi sur l'équité salariale au Québec, l'une des lois les plus progressistes au monde. Le Québec en est fier, et elle fait désormais partie de son patrimoine. Nous savons tous que le marché du travail est loin d'être un espace social neutre, il reste marqué par la ségrégation professionnelle des femmes et des hommes en termes de conditions de travail, de choix professionnels et de statuts d'emploi. Par cette loi, le gouvernement a admis que la discrimination salariale envers les femmes était répandue à travers l'ensemble de l'économie et a obligé les employeurs à accorder aux femmes une rémunération qui soit juste, équitable, à la mesure de leur apport à leur milieu de travail. La loi exige que, pour établir un salaire, l'employeur évalue la valeur de l'emploi et non la personne qui l'occupe.
Je salue la détermination et le courage des personnes qui ont travaillé à l'adoption de cette loi qui a un impact déterminant dans la lutte contre la discrimination que vivent les femmes. Il reste du travail à faire, et je réaffirme ma volonté à travailler pour que le droit à l'équité salariale devienne un droit accessible à toutes les travailleuses du Québec. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Je vous remercie, Mme la députée de Marguerite-D'Youville.
Alors, sur cette belle déclaration, je suspends nos travaux quelques instants.
(Suspension de la séance à 9 h 56)
(Reprise à 10 h 11)
Le Président: Nous allons nous recueillir quelques instants.
Bon mercredi matin. Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.
Nous poursuivons les affaires courantes.
Aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles.
Présentation de projets de loi
À la rubrique Présentation de projets de loi, M. le leader du gouvernement.
M. Fournier: Je vous demanderais d'appeler l'article a, M. le Président.
Projet de loi n° 43
Le Président: Alors, à l'article a du feuilleton, M. le ministre de la Justice...
Des voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! Je comprends qu'on a un petit peu de neige aujourd'hui, mais ce n'est pas supposé être une tempête.
Alors, M. le ministre de la Justice présente le projet de loi n° 43, Loi modifiant la Loi sur les tribunaux judiciaires et d'autres dispositions législatives.
M. Jean-Marc Fournier
M. Fournier: Merci, M. le Président. Ce projet de loi apporte un certain nombre de modifications à la Loi sur les tribunaux judiciaires. Ainsi, il prévoit que la Cour supérieure sera dorénavant composée de 152 juges, dont 96 seront nommés pour le district de Montréal. De plus, il augmente à 290 le nombre de juges de la Cour du Québec et porte à 12 le nombre maximum de juges coordonnateurs adjoints de cette cour.
Le projet de loi permet au gouvernement, à la demande du juge en chef de la Cour du Québec, d'autoriser un juge de paix magistrat à la retraite à exercer des fonctions judiciaires.
Le projet de loi habilite le juge en chef de la Cour du Québec à désigner, avec l'approbation du gouvernement et parmi les juges de paix magistrats, un juge responsable des juges de paix magistrats et à déterminer ses fonctions. Il prévoit la durée de son mandat et les modalités de son remplacement en cas d'empêchement.
Le projet de loi insère, à l'égard du président du Tribunal des droits de la personne et du président du Tribunal des professions, des dispositions relatives au congé d'étude et à la protection de traitement analogues à celles applicables à un juge après qu'il ait exercé la fonction de juge en chef adjoint pendant au moins sept ans.
Le projet de loi autorise les membres du personnel désignés par le greffier d'une cour de justice à faire prêter le même serment qu'un commissaire à l'assermentation.
Le projet de loi modifie par ailleurs la Loi sur les cours municipales afin de prévoir que le gouvernement fixe, par décret, la rémunération additionnelle du juge responsable des activités de perfectionnement des juges des cours municipales.
Mise aux voix
Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? M. le leader de l'opposition.
M. Bédard: ...un projet de loi évidemment très particulier, je vous dirais, avec des conséquences qui sont, je vous dirais, techniques mais importantes. Peut-être des consultations éventuellement particulières, au cas où on ne pourrait pas discuter avec les intervenants, les principaux concernés.
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Fournier: Aucune difficulté, M. le Président. Il s'agit effectivement d'une loi qui comporte certains détails techniques mais qui a pour but d'augmenter, entre autres, de 20 juges à la Cour du Québec et sept à la Cour supérieure.
Le Président: Alors, Présentation de projets de loi. M. le député de Chutes-de-la-Chaudière.
M. Picard: Merci, M. le Président. Est-ce que vous pourriez appeler l'article c du feuilleton?
Projet de loi n° 494
Le Président: Alors, à l'article c du feuilleton, M. le député de Chutes-de-la-Chaudière présente le projet de loi n° 494, Loi modifiant la Loi sur le traitement des élus municipaux. M. le député.
M. Marc Picard
M. Picard: Merci. Ce projet de loi vise à reporter l'entrée en vigueur du règlement qui fixe la rémunération des membres d'un conseil d'une municipalité après l'élection générale qui suit l'adoption de ce règlement. Il prévoit toutefois qu'un règlement qui fixe la rémunération à la baisse puisse entrer en vigueur au moment indiqué au règlement.
Le projet de loi prévoit également qu'un règlement adopté dans l'année qui précède une élection générale doit être confirmé par résolution du conseil lors de la première séance qui suit cette élection. Merci, M. le Président.
Mise aux voix
Le Président: Alors, est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.
Dépôt de documents
Réponses à une pétition et à une
question inscrite au feuilleton
M. Fournier: Permettez-moi de déposer la réponse du gouvernement à la pétition déposée par le député de René-Lévesque le 27 octobre 2011 et la réponse du gouvernement à la question inscrite au feuilleton par le député de Verchères le 15 novembre 2011.
Le Président: Alors, c'était à la rubrique Dépôt de documents. Ces documents sont déposés.
Dépôt de rapports de commissions
À la rubrique Dépôt de rapports de commissions, M. le président de la Commission des finances publiques et député d'Arthabaska.
Étude détaillée du projet de loi n° 7
M. Bachand (Arthabaska): Oui. M. le Président, je dépose le rapport de la Commission des finances publiques qui, les 27 octobre, 1er, 3, 9, 10, 11, 15, 17, 21 et 22 novembre 2011, a procédé à l'étude détaillée du projet de loi n° 7, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant le secteur financier. La commission a adopté le texte du projet de loi avec des amendements et un au titre.
Le Président: Alors, le rapport est déposé.
Dépôt de pétitions
À la rubrique Dépôt des pétitions, Mme la députée de Hull.
Interdire la vente de services de
bronzage artificiel aux mineurs
et encadrer les pratiques des
commerces offrant ces services
Mme Gaudreault: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, je dépose l'extrait d'une pétition qui a été présentée sur le site de l'Assemblée nationale, adressée à l'Assemblée nationale et signée par 8 801 pétitionnaires.
Désignation: citoyens et citoyennes du Québec.
«Les faits invoqués sont les suivants:
«Considérant qu'en 2009 le Centre international de recherche sur le cancer a classé les appareils de bronzage dans la catégorie des risques de cancer les plus élevés pour l'humain, au même titre que la cigarette ou l'amiante;
«Considérant que de nombreuses études montrent que l'exposition au rayonnement UV des appareils de bronzage artificiel, avant l'âge de 35 ans, augmente de 75 % le risque de développer un mélanome, la forme de cancer de la peau la plus sévère et la plus meurtrière;
«Considérant que, chez les 15 à 29 ans, le mélanome compte pour 11 % des nouveaux cas de cancer et que 70 % des utilisateurs de lits de bronzage sont des femmes de ce même groupe d'âge;
«Considérant que plusieurs pays interdisent la vente de services de bronzage artificiel aux mineurs. Au Canada, la Nouvelle-Écosse le fait, ainsi que le district de Victoria, en Colombie-Britannique;
«Considérant que l'Organisation mondiale de la santé recommande l'interdiction de vendre des services de bronzage artificiel aux moins de 18 ans;
«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:
«Les signataires de cette pétition demandent à l'Assemblée nationale d'interdire la vente de services de bronzage artificiel aux mineurs, de mettre sur pied un registre de tous les commerces offrant des services de bronzage et d'instaurer des mesures visant à restreindre les pratiques de marketing des salons de bronzage artificiel auprès des jeunes.» Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition.
Le Président: L'extrait de cette pétition est déposé. J'inviterais maintenant Mme la députée de Vachon.
Mme Ouellet: Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 584 pétitionnaires. Désignation: citoyens et citoyennes du Québec.
«Les faits invoqués sont les suivants:
«Considérant qu'en 2009 le Centre international de recherche sur le cancer a classé les appareils de bronzage dans la catégorie des risques de cancer les plus élevés pour l'humain, au même titre que la cigarette ou l'amiante;
«Considérant que de nombreuses études montrent que l'exposition au rayonnement UV des appareils de bronzage artificiel, avant l'âge de 35 ans, augmente de 75 % le risque de développer un mélanome, la forme de cancer de la peau la plus sévère et la plus meurtrière;
«Considérant que, chez les 15 à 29 ans, le mélanome compte pour 11 % des nouveaux cas de cancer et que 70 % des utilisateurs de lits de bronzage sont des femmes de ce même groupe d'âge;
«Considérant que plusieurs pays interdisent la vente de services de bronzage artificiel aux mineurs. Au Canada, la Nouvelle-Écosse le fait, ainsi que le district de Victoria, en Colombie-Britannique;
«Considérant que l'Organisation mondiale de la santé recommande l'interdiction de vendre des services de bronzage artificiel aux moins de 18 ans;
«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:
«Les signataires de cette pétition demandent à l'Assemblée nationale d'interdire [...] les services de bronzage artificiel aux mineurs, de mettre sur pied un registre de tous les commerces offrant des services de bronzage et d'instaurer des mesures visant à restreindre les pratiques de marketing des salons de bronzage artificiel auprès des jeunes.» Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition.
Le Président: L'extrait de cette pétition est déposé.
Il n'y a pas de réponses orales aux pétitions ni d'interventions portant sur une question de droit ou de privilège.
Questions et réponses orales
Nous en sommes maintenant à la période de questions et de réponses orales. Et je cède la parole à Mme la chef de l'opposition.
Projet de loi fédéral C-10
en matière de justice
Mme Pauline Marois
Mme Marois: Merci, M. le Président. Malgré les motions unanimes, malgré le large consensus, malgré que le ministre de la Justice se soit rendu à deux reprises à Ottawa, le gouvernement canadien persiste dans sa volonté inébranlable d'imposer au Québec le projet de loi C-10, un projet de loi qui heurte de front nos valeurs et nos pratiques en matière de justice. Le modèle québécois de justice pénale pour les adolescents sera littéralement jeté aux poubelles, et l'adoption de C-10 pourrait coûter un demi-milliard de dollars aux Québécois. C'est le ministre de la Sécurité publique qui le dit, M. le Président.
En passant, j'espère qu'il n'y a plus personne au Québec qui pense que la fameuse motion de reconnaissance de la nation québécoise voulait dire quelque chose ou avait une réelle portée.
Devant l'impuissance à faire changer d'idée le gouvernement canadien, le premier ministre a déclaré hier, à l'une de mes questions: «...il y a une responsabilité qui nous revient dans l'administration de la justice. Nous avons l'intention de jouer à plein le rôle qui nous revient là-dessus.»
Je comprends donc que le gouvernement, en vertu des pouvoirs qui sont les siens dans la Loi sur le Directeur des poursuites criminelles et pénales, donnera des instructions précises aux procureurs québécois afin que les dispositions du projet de loi C-10 ne s'appliquent pas sur le territoire québécois. Est-ce exact, M. le Président?
**(10 h 20)**Le Président: M. le premier ministre.
M. Jean Charest
M. Charest: D'abord, je veux... je constate, M. le Président, que la chef de l'opposition officielle s'éloigne de la prémisse de la question qu'elle posait hier en question principale, vous vous rappellerez, alors qu'elle présentait ça comme le reste du Canada qui s'acharnait sur le Québec, alors que, sur le projet de loi C-10, vous le savez, et les Québécois devraient... ont besoin de savoir qu'ailleurs au Canada, incluant dans d'autres gouvernements provinciaux, il y a une objection à la loi. Alors, il n'y a pas uniquement au Québec où nous avons exprimé un désaccord sur le projet de loi C-10, mais également ailleurs, en Ontario, par exemple, où le premier ministre de l'Ontario a exprimé des désaccords sur des éléments de la loi C-10. Alors, ce n'est pas uniquement au Québec.
Maintenant, sur le partage des responsabilités constitutionnelles, des compétences, parce que la chef de l'opposition officielle en vient indirectement là-dessus, il y a une compétence qui relève de nous, c'est l'administration de la justice. C'est comme ça depuis toujours. Et il y a effectivement... au moment où on traversera ces étapes-là, au moment où on y arrivera, on fera un examen de la manière dont nous allons assumer cette responsabilité, M. le Président.
Par ailleurs, je remarque au passage que le Parti québécois présente une motion aujourd'hui où il voudrait réécrire la Constitution parce que le Québec n'est pas d'accord sur un projet de loi. Quand même, je pense qu'il n'y a personne qui se trompe sur les intentions partisanes du PQ là-dessus. Ce n'est pas parce qu'on est en désaccord sur une loi avec le gouvernement fédéral qu'on va réécrire la Constitution canadienne, M. le Président.
Le Président: Première complémentaire, Mme la chef de l'opposition.
Mme Pauline Marois
Mme Marois: Alors, M. le Président, je rappellerai au premier ministre que nous représentons plus qu'une province, nous sommes une nation. Et je lui rappellerai, M. le Président, à cet égard qu'il s'agit des valeurs québécoises que nous défendons.
Je lui ai posé une question précise, il a été très évasif dans sa réponse. Je lui repose la question: En vertu des pouvoirs qui sont les siens dans la Loi sur le Directeur des poursuites criminelles et pénales, le premier ministre donnera-t-il des instructions précises aux procureurs québécois afin que les dispositions du projet de loi C-10 ne s'appliquent pas sur le territoire québécois?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Jean Charest
M. Charest: Le fait d'être une nation, M. le Président, ne nous empêche pas de partager des valeurs communes avec les autres Canadiens, pas du tout. Il n'y a pas de contradiction entre le fait d'être Québécois et Canadien, M. le Président, évidemment sauf au PQ, probablement. Alors, eux, ils croient qu'il y a une contradiction entre le fait d'être Québécois et Canadien. La preuve est faite, ne serait-ce que dans le cas du projet de loi C-10, que d'autres Canadiens nous rejoignent parfaitement, justement sur les énoncés de valeur. Alors, vous en avez la démonstration. Sauf qu'il y a un gouvernement qui, lui, présente une loi avec laquelle nous ne sommes pas en accord. Maintenant, il y a un partage des compétences.
Le Président: En terminant.
M. Charest: On est responsables de l'administration de la justice, nous allons assumer nos responsabilités.
Le Président: Deuxième complémentaire, Mme la chef de l'opposition.
Mme Pauline Marois
Mme Marois: Alors, je comprends que, quand le gouvernement parle, il ne parle pas au nom du Canada. C'est ça que je dois interpréter des propos du premier ministre. Il ne répond cependant toujours pas à ma question, M. le Président. Il nous dit: On verra.
Cependant, comme on ne sait pas ce qu'il veut faire, alors je vais lui poser la question: Comme il n'a pas appelé le premier ministre du Canada, qu'il ne veut pas me dire qu'il va appliquer les règles sur lesquelles il peut prendre des décisions et qui sont propres à nos valeurs, à ce moment-là, quel autre plan B a-t-il, M. le Président, pour nous défendre?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Jean Charest
M. Charest: Bon, M. le Président, là, on voit bien, là, ce qui se cache derrière les questions de la chef de l'opposition officielle. Ce qu'elle dit, c'est: Bon, on n'est pas d'accord avec le gouvernement fédéral, donc on va faire la souveraineté. Ça va être ça.
D'ailleurs, ça va être intéressant de voir François Legault quand il sera confronté à ce genre de question là. Il va falloir essayer de deviner lequel des François Legault va se présenter, lequel des caquistes va se présenter. Peut-être qu'on aura la question aujourd'hui, M. le Président. Peut-être qu'il y en a un, des caquistes, qui se lèvera aujourd'hui pour nous le dire.
Cela étant dit, M. le Président, quand on n'est pas d'accord avec le gouvernement fédéral, on le dit, puis on défend les intérêts du Québec, puis on est bien capables de le faire sans à chaque fois dire qu'il faut se séparer. On est capables de défendre les intérêts du Québec. Nous avons fait des gains importants. Nous allons assumer nos responsabilités.
Le Président: Troisième complémentaire, Mme la chef de l'opposition.
Mme Pauline Marois
Mme Marois: Alors, M. le Président, le premier ministre devrait peut-être se rappeler qu'il est l'héritier de Robert Bourassa et de Claude Ryan et qu'eux ont été capables de se lever debout et de nous défendre, M. le Président.
Aujourd'hui, ce que je lui demande... Et, de fait, nous aurons une motion à l'Assemblée nationale parce que nous nous trouvons devant une véritable obstination de la part d'Ottawa qui est contre nos valeurs et contre les lois que nous avons appliquées et qui ont donné des résultats.
Est-ce que le premier ministre va voter avec nous sur cette motion, M. le Président?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Jean Charest
M. Charest: M. le Président, la chef de l'opposition officielle devrait nous épargner les larmes sur les anciens chefs du Parti libéral du Québec. Nous, on se rappelle très bien de la façon dont le Parti québécois a traité Robert Bourassa. On ne l'a pas oublié, ça.
Alors, de grâce, de grâce, ayez un peu de retenue, d'autant plus que vous avez moins d'empressement de citer vos anciens chefs à vous. Ce serait un peu plus crédible si vous étiez capables de citer vos anciens chefs, sauf dans une instance, quand Jaques Parizeau dit qu'il faut créer de la chicane pour favoriser la souveraineté. Dans le fond, c'est exactement ça que vous essayez de faire.
Des voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît!
M. Charest: Et la réponse à votre question, c'est non, on ne jouera pas votre jeu, on ne votera pas pour une motion qui a pour but de faire la promotion de la souveraineté, M. le Président.
Le Président: En principale, Mme la chef de l'opposition.
Défense des intérêts du Québec
auprès du gouvernement fédéral
Mme Pauline Marois
Mme Marois: Alors, M. le Président, je comprends... je comprends que le...
Des voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! J'aimerais entendre la question comme j'aimerais entendre la réponse ensuite. La question, Mme la chef de l'opposition.
Mme Marois: M. le Président, je comprends que le premier ministre du Québec a fait son choix. Il préfère défendre le fédéralisme plutôt que de défendre les valeurs et les intérêts du peuple québécois, M. le Président.
Le Président: M. le premier ministre.
M. Jean Charest
M. Charest: M. le Président, bravo pour le plaidoyer auprès...
Des voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! Je vous répète, je comprends qu'il neige un peu, là, mais ce n'est pas une tempête. Alors, je voudrais entendre la réponse. On a bien entendu l'affirmation, je voudrais bien entendre la réponse. M. le premier ministre.
M. Charest: Merci, M. le Président. Je comprends que la chef de l'opposition officielle fait l'exaltation de la souveraineté parce que, si, par malheur, selon la chef du PQ puis dans la chapelle du PQ puis de Québec solidaire et de François Legault, si on n'est pas d'accord avec les souverainistes, on ne doit pas être des bons Québécois, hein? Si, par malheur, on n'est pas d'accord avec la souveraineté, on ne doit pas être un bon... Bien, j'ai malheureusement de mauvaises nouvelles pour la chef de l'opposition officielle: les Québécois sont parfaitement à l'aise à l'idée qu'ils sont à la fois Québécois et Canadiens. Ils y croient, à leur pays, puis ils croient au Québec, puis il n'y a aucune contradiction entre les deux, malheureusement pour elle et pour le PQ.
Le Président: En principale, M. le député de Marie-Victorin.
Préservation des données québécoises
contenues au registre des armes à feu
M. Bernard Drainville
M. Drainville: M. le Président, M. le Président, on est tous ensemble sur C-10, on est tous ensemble sur C-10 dans cette Chambre. Alors, au lieu de s'attaquer à Pauline Marois, il devrait s'en prendre à Stephen Harper, notre premier ministre. Il devrait s'en prendre à Stephen Harper.
Des voix: ...
M. Drainville: Bien oui, bien oui, c'est très fort, hein? Un peu d'élévation, ça nous ferait du bien, monsieur...Des voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! Monsieur...
Des voix: ...
Le Président: Ça va. Ça va. Ça va. M. le député de Châteauguay! M. le député de Châteauguay! M. le député de Louis-Hébert! Ça va!
Des voix: ...
Le Président: M. le député de Vimont, je vous ai bien entendu. Et, vous, je ne vous entends pas, c'est parfait. M. le député de Marie-Victorin... M. le député de Marie-Victorin, vous avez quand même oublié de nommer une des membres de cette Assemblée par son titre.
**(10 h 30)**M. Drainville: ...raison, M. le Président. M. le Président, il n'y a pas juste C-10 qui fait problème, il y a C-19 également, projet de loi sur le registre des armes à feu qui s'apprête à être adopté. Le premier ministre s'est engagé à prendre tous les recours pour empêcher la destruction des données québécoises, M. le Président.
Alors là, on va lui donner une autre chance de nous dire quels sont les moyens qu'il va prendre maintenant pour protéger les données québécoises. Est-ce que ce sera un recours devant les tribunaux? Est-ce que ce sera une injonction? Quels moyens va-t-il prendre dès maintenant pour préserver les données québécoises dans le registre des armes à feu?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Jean Charest
M. Charest: M. le Président, je veux remercier le député de Marie-Victorin de me donner une dernière chance, c'est très généreux de sa part, et lui dire que, sur le projet de loi justement sur les armes à feu que le gouvernement va étudier, il étudie tous les recours qui sont potentiellement là pour nous, et que, là-dessus, il a été témoin du travail que nous avons fait effectivement pour défendre les intérêts du Québec.
Sur un autre sujet, M. le Président, je dois lui dire que je suis assez d'accord avec lui que les députés de l'Assemblée nationale devraient arrêter d'attaquer Pauline Marois.
Le Président: Première complémentaire, M. le député de Marie-Victorin. Tout en signalant, M. le premier ministre, qu'on doit qualifier tout le monde par son titre ici, à l'Assemblée nationale. M. le député de Mercier, vous avez une question de règlement?
M. Khadir: M. le Président, je n'ai pas de mots pour souligner le caractère disgracieux de ce qui vient d'être dit...
Le Président: Bien, ce n'est pas une question de règlement.
Des voix: ...
Le Président: Ce n'est pas une question de règlement. M. le député de Marie-Victorin, en complémentaire.
M. Bernard Drainville
M. Drainville: M. le Président, on demande à notre premier ministre un petit peu d'élévation, là, un petit peu d'élévation, là. Le seul qui n'a pas contacté Stephen Harper et qui peut encore le faire, c'est notre premier ministre, M. le Président. Alors, est-ce qu'il va le faire? Est-ce qu'il va agir concrètement pour protéger les données québécoises du registre?
La question est bien simple, M. le Président: Quels sont les recours que notre premier ministre est prêt à prendre? Est-ce qu'il va aller devant les tribunaux? Est-ce qu'il va demander une injonction? Vous avez le devoir d'informer les Québécois sur ce que vous allez faire pour protéger le registre et les données québécoises du...
Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.
M. Robert Dutil
M. Dutil: Alors, M. le Président, comme on le sait, il y a eu des motions unanimes ici, à de nombreuses reprises, sur le registre des armes à feu, et nous maintenons cette position-là que nous défendons avec ardeur. Alors, j'ai été moi-même à Ottawa, malheureusement sans le succès que nous souhaitions. Mais nous continuerons et nous continuons à faire tous les efforts qui sont nécessaires pour nous assurer que, le registre des armes à feu, à tout le moins, les données soient préservées. C'est une question de simple bon sens. Le premier ministre l'a dit à maintes reprises, je le répète, c'est une question de simple bon sens.
Les données... Nous avons participé au paiement de ces données-là. Nous souhaitons les avoir. Il est impératif qu'elles soient protégées, et nous prendrons toutes les mesures qui sont possibles pour faire entendre...
Le Président: En terminant.
M. Dutil: ...le bon sens au gouvernement canadien.
Le Président: Principale, M. le député de Verchères. Complémentaire? Complémentaire, M. le député de Verchères.
M. Stéphane Bergeron
M. Bergeron: Le 2 novembre, cette Chambre adoptait une motion exigeant du contrôleur des armes à feu «qu'il prenne toutes les mesures nécessaires afin de préserver l'intégralité des données provenant du Québec inscrites au registre des armes à feu». Le ministre de la Sécurité publique, la semaine dernière, a laissé entendre que son gouvernement avait voté en faveur de cette motion simplement pour la galerie et qu'il n'avait pas l'intention de donner suite à cet ordre de la Chambre.
Peut-il nous dire aujourd'hui qu'il ne s'est pas placé en situation d'outrage au Parlement et qu'il a effectivement donné instruction au contrôleur des armes à feu...
Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.
M. Robert Dutil
M. Dutil: Alors, M. le Président, sur cette question précise, nous avions bien prévenu la Chambre, et nous avons discuté, et nous l'avons mentionné dans nos discours, que nous ne demanderions pas, à qui que ce soit, de commettre des gestes illégaux, tout simplement.
Alors, ce qui est examiné, ce qui est regardé: Que peut-on faire dans le cadre de la légalité, M. le Président? M. le Président, je pense que tout le monde sera d'accord ici, il n'y a aucun ministre du gouvernement du Québec et, j'espère, aucun député qui voudrait que l'on demande à quelque personne que ce soit de faire des gestes illégaux. Est-ce qu'on est d'accord là-dessus? La loi a priorité sur toute autre chose. Nous adoptons des lois, nous sommes des gens qui adoptons des lois, c'est bien sûr que les premiers à devoir les respecter, c'est bien nous.
Le Président: Principale? Principale, M. le député de Verchères.
Délivrance d'un permis de port d'armes
au patron de la firme de sécurité BCIA
M. Stéphane Bergeron
M. Bergeron: Oui, M. le Président. Hier, j'ai posé une question fort simple au ministre de la Sécurité publique: Est-ce que son prédécesseur, Jacques Dupuis, a consulté le sous-ministre associé aux affaires policières, responsable de la sécurité privée, Robert Lafrenière, dans l'affaire du permis de port d'armes à BCIA?
Que le ministre de la Sécurité publique cesse de louvoyer: Est-ce que, oui ou non, le ministre de la Sécurité publique de l'époque a consulté Robert Lafrenière sur cette question particulière du permis de port d'armes de BCIA?
Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.
M. Robert Dutil
M. Dutil: M. le Président, je l'ai rappelé hier, le député de Verchères a eu l'occasion, et il l'a fait à maintes reprises... a questionné le ministre de la Sécurité publique de l'époque, M. Jacques Dupuis, et il a obtenu toutes les réponses qu'il devait s'attendre sur cette question-là. Alors, je ne vois pas pourquoi on revient à la charge bien du temps plus tard, avec un nouveau ministre, alors que, pendant que cet événement-là s'est produit, le député de Verchères s'est levé, a posé des questions à maintes reprises à M. Dupuis, a obtenu les réponses auxquelles il était en droit de s'attendre.
Le Président: Première complémentaire, M. le député de Verchères.
M. Stéphane Bergeron
M. Bergeron: M. le Président, c'est un passé qui est très récent. Le sous-ministre de l'actuel ministre était responsable de la sécurité privée. C'est ce ministre qui l'a nommé en charge de l'UPAC, c'est ce ministre qui lui a demandé d'enquêter sur la sécurité privée à Montréal.
Est-ce que le ministre de la Sécurité publique ne trouve pas particulier de confier à Robert Lafrenière, qui a été impliqué dans le dossier de BCIA, d'enquêter sur BCIA?
Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.
M. Robert Dutil
M. Dutil: M. le Président, j'ai l'impression qu'on revoit un film qui s'est passé il y a quelques mois où on attaquait M. Duchesneau et le comité anticollusion. Dans quel but veut-on discréditer les organismes que nous formons et que nous subventionnons, à qui nous donnons les crédits nécessaires pour faire la lumière? Pourquoi s'attaque-t-on à ces organisations-là? Pourquoi essaie-t-on de discréditer les gens qui les dirigent? Pourquoi essaie-t-on de déstabiliser les gens qui les dirigent? Comme on l'a fait, comme on l'a fait à l'époque avec l'Unité anticollusion, à tort, comme vous vous en rappelez très bien.
Alors, M. le Président...
Le Président: En terminant.
M. Dutil: Alors, M. le Président, M. Lafrenière a une réputation sans faille, il a été nommé à la tête de l'UPAC, il a un mandat à faire, il a les moyens de le réaliser, il va le réaliser.
Le Président: Deuxième complémentaire, M. le député de Verchères.
M. Stéphane Bergeron
M. Bergeron: M. le Président, je comprends le malaise, parce que Robert Lafrenière était sous-ministre associé au ministère de la Sécurité publique, responsable de la sécurité privée. Il doit mener une enquête sur BCIA.
Alors, M. le Président, fort simple: Est-ce que le ministre de la Sécurité publique peut nous dire si les enquêteurs de l'UPAC ont rencontré l'actuel patron de l'UPAC pour lui poser des questions sur la situation qui prévalait à l'époque?
Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.
M. Robert Dutil
M. Dutil: M. le Président, nous avons créé un organisme extraordinaire et exceptionnel, le seul au Canada, avec des budgets de 30 millions de dollars, un personnel de 189 personnes, et nous avons mis à la tête de cette organisation-là une personne qui a une expérience formidable dans la lutte contre le crime, et on essaie aujourd'hui de le discréditer. Je ne sais pas pourquoi, je ne sais pas qui veut-on servir, ce faisant.
L'UPAC a les moyens de faire le travail, ils vont continuer à faire ce travail. Et j'espère que nous obtiendrons des résultats, tout le monde l'espère, mais en dehors de toute intervention politique, je tiens à le rappeler, en dehors de toute intervention politique. Ce que semble nous dire le député de Verchères, c'est que, lui...
Le Président: En terminant.
M. Dutil: ...s'il était au gouvernement, il interviendrait de façon politique dans les enquêtes policières.
Le Président: Principale, M. le député de Chambly.
Crédit d'impôt alloué pour la cession de
l'île Lapierre, sur la rivière des Prairies
M. Bertrand St-Arnaud
M. St-Arnaud: M. le Président, dans le dossier de l'île Lapierre et du crédit d'impôt de 10 millions de dollars versé à un proche de la famille libérale, j'ai été renversé d'entendre hier le ministre de l'Environnement déclarer en cette Chambre, et je le cite: «Notre rôle a été simplement d'attester [...] que ce terrain-là avait une valeur écologique. Nous n'avons pas un mot à dire sur le montant du don écologique.» Fin de la citation. Or, les règles du Programme de dons écologiques sont pourtant claires: la déclaration de juste valeur marchande du don est signée par Environnement Canada et le ministère de l'Environnement du Québec.
Je répète donc ma question d'hier au ministre, M. le Président: Quelles sont les vérifications que le gouvernement libéral a faites avant d'octroyer un crédit d'impôt de plusieurs millions de dollars à Alfonso Argento, proche du député de LaFontaine et du Parti libéral, pour une île qui était évaluée à quelques centaines de milliers de dollars seulement? A-t-on fait enquête? A-t-on posé des questions ou a-t-on signé les yeux fermés?
**(10 h 40)**Le Président: M. le ministre de l'Environnement.
M. Pierre Arcand
M. Arcand: M. le Président, j'aimerais encore une fois rappeler au député de Chambly, premièrement, que ce programme-là existe depuis 1994. C'est un programme... Alors, de 1994 à 2003, il n'y avait pas de problème avec ce programme-là, et soudainement il y a des problèmes avec le Programme de dons écologiques.
Or, il y a des responsabilités très claires qui sont définies, et, dans le programme et dans les lignes directrices, M. le Président, qui sont émis par Environnement Canada -- et je l'invite à regarder ça, à la page 8, c'est un document qui existe actuellement -- la déclaration de la juste valeur marchande est signée par le ministre de l'Environnement d'Ottawa.
Alors, c'est très clair, c'est très limpide de ce côté-là, c'est Ottawa qui a fait l'évaluation, et je suis surpris de voir que le Parti québécois, qui connaît ce programme-là depuis 1994, eh bien, pose des questions là-dessus aujourd'hui.
Le Président: Première complémentaire, M. le député de Chambly.
M. Bertrand St-Arnaud
M. St-Arnaud: M. le Président, je suis renversé, là. Écoutez, je vais déposer, M. le Président, le document, qui vient du ministère dirigé par le ministre, qui dit ceci: La déclaration de la juste valeur marchande est «signée conjointement par Environnement Canada et le ministère du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs». Est-ce que le ministre connaît son dossier? Je dépose le document, M. le Président.
M. le Président, est-ce que le ministre de l'Environnement est en train de nous dire qu'il a... qu'il nous... de nous confirmer qu'il a signé ce crédit d'impôt de 10 millions de dollars les yeux fermés? 10 millions de dollars, ce n'est pas des pinottes, ça, M. le ministre, 10 millions.
Document déposé
Le Président: Consentement pour le dépôt? M. le ministre de l'Environnement.
Des voix: ...
Le Président: M. le ministre de l'Environnement.
M. Pierre Arcand
M. Arcand: M. le Président, j'ai eu l'occasion de déposer en cette Chambre la lettre qui a été présentée par la direction régionale du ministère de l'Environnement, qui intervient sur le plan écologique et qui recommande au ministère de l'Environnement à Ottawa, M. le Président, encore une fois, de tenir compte du fait qu'il y a des terrains contaminés.
M. le Président, je trouve ça un peu contradictoire de la part du Parti québécois que... Ce que le député de Chambly essaie de montrer, c'est qu'il y a eu intervention politique, et je suis surpris quand le même député m'écrit, le 7 novembre dernier...
Le Président: En terminant.
M. Arcand: ...pour que j'intervienne personnellement et de manière spéciale...
Le Président: Deuxième complémentaire, M. le député de Chambly.
M. Bertrand St-Arnaud
M. St-Arnaud: M. le Président, je suis renversé, et le mot est faible, d'entendre le ministre de l'Environnement nous dire qu'il a signé un crédit d'impôt de 10 millions de dollars les yeux fermés. Aïe! 10 millions, M. le Président, ce n'est pas un petit montant et, plus que ça, ce n'est pas un montant habituel, loin de là, pour ce genre de dossier, où on parle généralement de quelques dizaines de milliers de dollars seulement. Dans le reportage d'Enquête, la semaine dernière, on voyait une dame qui avait reçu un crédit d'impôt de 70 000 $. M. Argento, lui, il a reçu 10 millions.
Pourquoi ce deux poids, deux mesures? On veut une réponse sur ce dossier.
Le Président: M. le ministre de l'Environnement.
M. Pierre Arcand
M. Arcand: M. le Président, le gouvernement du Québec, c'est très simple, nous sommes tout simplement en train de dire que nous fixons la valeur écologique, et le gouvernement fédéral fixe le montant qui doit être à ce moment-là. Et c'est un programme que le Parti québécois connaissait, M. le Président.
Encore une fois, je ne comprends pas pourquoi le député de Chambly s'obstine, alors que lui-même me demande par lettre d'intervenir, au Québec, au-delà des programmes existants. Pour le Parti québécois, c'est deux poids, deux mesures, M. le Président.
Le Président: En principale, M. le député de La Prairie.
Langue de travail à la Banque
Nationale du Canada
M. François Rebello
M. Rebello: M. le Président, après la Caisse de dépôt qui s'anglicise, on a aujourd'hui un autre bel exemple d'une entreprise qui opère au Québec, la Banque Nationale, où les employés doivent travailler en anglais. J'en cite un: «Dans une réunion, s'il y a un seul anglophone sur cinq ou 10 personnes, la réunion est en anglais.» On se justifie en disant que, si un fournisseur parle anglais, on doit lui parler en anglais. Beau raisonnement! C'est digne des années cinquante, M. le Président. Le problème pour ces banques-là, c'est qu'elles pensent pouvoir faire ce qu'elles veulent au Québec. Elles se justifient en disant qu'elles ne sont pas soumises à la loi 101.
Quelles mesures le gouvernement a-t-il prises pour corriger cette situation? Est-ce que le premier ministre trouve ça acceptable qu'une entreprise force ses employés à travailler en anglais au Québec?
Le Président: Mme la ministre de la Culture.
Mme Christine St-Pierre
Mme St-Pierre: M. le Président, les banques relèvent du Parlement fédéral et elles ne sont pas obligées de s'inscrire à l'office. Cependant...
Des voix: ...
Mme St-Pierre: J'aimerais ça terminer ma réponse, M. le Président. Cependant, dans le cas de la Banque Nationale, la Banque Nationale s'est inscrite de façon volontaire à l'Office québécois de la langue française en 1983, et la Banque Nationale a un certificat de francisation de l'Office québécois de la langue française. Donc, ayant un certificat de francisation, la Banque Nationale est soumise à certaines règles, les règles qui s'appliquent aux entreprises de 50 employés et plus. Il doit y avoir un comité de francisation, et elle doit se soumettre à ces règles.
Le Président: Première complémentaire, M. le député de La Prairie.
M. François Rebello
M. Rebello: À entendre la réponse de la ministre, je crois comprendre qu'elle, elle trouve ça acceptable, qu'elle ne se lève pas pour exiger que ça change rapidement à la Banque Nationale.
Est-ce que le gouvernement du Québec va exiger que le fédéral change sa loi afin que les banques qui opèrent au Québec soient soumises à la loi 101? On a tous un devoir ici, M. le Président, on a le devoir de s'unir pour protéger notre langue, notre culture, notre héritage.
Le Président: Mme la ministre de la Culture.
Mme Christine St-Pierre
Mme St-Pierre: M. le Président, dans le cas de la Banque Nationale, l'office, bien sûr, va faire les vérifications qui s'imposent.
Mais, quand il lance cet élan, qu'on a tous un devoir, ici, de protéger notre culture, notre langue, etc., bien je rappellerais au député, qui était probablement trop jeune à l'époque, qu'entre 1994 et 1998 le Parti québécois a coupé 69 postes à l'Office québécois de la langue française et, dans la même période, le Parti québécois a coupé 8 millions de dollars à l'office... dans les programmes de francisation, M. le Président.
Et tout ça pour répéter la belle déclaration du député de Drummond vendredi dernier: C'est que le PQ pouvait se permettre d'être plus souple en matière d'application de la Charte de la langue française. Bel exemple! Bel exemple!
Le Président: En terminant. Deuxième complémentaire, M. le député de La Prairie.
M. François Rebello
M. Rebello: Hier, M. le Président, vous l'avez entendu, vous l'avez lu ce matin aussi dans les journaux, Guy A. Lepage nous a dit: «Je tourne les talons chaque fois qu'on me sert en anglais. Mes grands-parents l'ont toujours fait, ma mère aussi.» Est-ce que le premier ministre va faire honneur à sa langue et dire à la Banque Nationale: Si vous voulez faire affaire avec le gouvernement des Québécois, vous allez respecter le droit des Québécois, celui de travailler en français?
Le Président: Mme la ministre de la Culture.
Des voix: ...
Le Président: Mme la ministre de la Culture.
Mme Christine St-Pierre
Mme St-Pierre: M. le Président, alors, je remercie le député pour sa question. Évidemment, Guy A. Lepage, avec la notoriété qu'il a, il a fait la manchette. Mais Guy A. Lepage a la réaction qui s'impose, et il n'est pas le seul à le faire. Plusieurs Québécois font la même chose: lorsqu'ils vont dans des magasins, ils veulent se faire servir en français.
Et je rappellerai la manchette du Journal de Québec du 19 novembre: Les libéraux ont investi davantage dans la question linguistique, M. le Président.
Le Président: M. le député de Chutes-de-la-Chaudière... M. le député de La Peltrie.
Mode de financement du réseau de la santé
M. Éric Caire
M. Caire: Merci, M. le Président. Transformer le mode de financement global par activité dans les systèmes de santé est une tendance mondiale qui était une recommandation de Claude Castonguay, qui était une recommandation de Renaud Lachance. Plus récemment, Claude Paradis, du CHUM, disait que c'était imminent et inévitable. Malheureusement, au printemps dernier, le Parti libéral a voté contre une motion que j'ai déposée qui demandait au gouvernement d'aller dans ce sens-là.
Plus récemment, dans Le Devoir du 12 novembre, on apprend qu'autant au ministère des Finances qu'au Conseil du trésor on fait des pressions pour que le ministère de la Santé transforme la façon de financer le réseau de la santé. Le ministre de la Santé, donc, est de plus en plus isolé dans son entêtement à refuser ce qui est une tendance mondiale.
Ma question est très simple: Est-ce qu'il va se ranger à l'avis du ministre des Finances, de la présidente du Conseil du trésor, est-ce qu'il va procéder à la transformation du mode de financement du réseau de la santé, d'un financement global à un financement par activité?
Le Président: M. le ministre de la Santé.
M. Yves Bolduc
M. Bolduc: Merci, M. le Président. Récemment, il y a eu quelqu'un qui a exposé, du Danemark, le fonctionnement du financement par activité. Au Danemark, ils sont, au maximum, à 20 % de toutes les activités qu'ils... du financement par activité.
Ici, au Québec, je ne sais pas comment ça se fait que le député ne le sait pas, mais on a déjà commencé. Toutes les activités dans un bloc opératoire en chirurgie, c'est financé en fonction du nombre de chirurgies et du type de chirurgie. Donc, c'est déjà commencé au Québec.
Il faut faire attention également. Ce qu'on veut financer... le financement par activité à l'urgence, c'est avoir de plus en plus de visites à l'urgence, alors qu'on veut que ces visites soient référées plus vers les cliniques privées, vers les CLSC, et diminuer l'achalandage de l'urgence. Donc, il faut l'utiliser au bon endroit. Et j'y crois, au financement par activité, pour atteindre des meilleurs résultats.
Il faut dire que je suis en train de voir également que le député indépendant s'en va beaucoup du côté des caquistes, puis ce que je vois, il est en train de renier tout ce qu'il est en train de faire au... qu'il disait auparavant, parce qu'il disait auparavant que ça prenait beaucoup, beaucoup de privé, ce qui... ce matin dans le journal, ce n'est pas ça qui est dit, surtout que l'ADQ également renie à ses anciennes idées.
**(10 h 50)**Le Président: Première complémentaire, M. le député de La Peltrie.
M. Éric Caire
M. Caire: M. le Président, je pense que le ministre pourra lire mes déclarations sur ce que j'ai défendu comme position. Il n'y a rien de très nouveau là-dessus.
Ceci étant dit, M. le Président, Lise Denis, présidente de l'Association québécoise des établissements de santé et de services sociaux, dit qu'il est temps qu'on regarde la façon... la transformation du financement du réseau de la santé. Or, quand le ministre nous dit que c'est déjà fait au Québec, c'est totalement inexact. Et Jason Sutherland, qui est chercheur dans le mode de financement des hôpitaux, nous dit que la façon dont on finance nos hôpitaux, c'est une boîte noire...
Le Président: M. le ministre de la Santé.
M. Yves Bolduc
M. Bolduc: Merci, M. le Président. Ce que j'ai dit, c'est que, le financement par activité, on y croit dans certaines activités très particulières. Ça fait déjà des années qu'on le fait en chirurgie.
D'ailleurs, le député va-tu faire comme l'ADQ puis renier tout son engagement qu'il faisait par rapport à tout le privé, de tout privatiser, sur la mixité? Ce matin, l'ADQ l'a dit, là, on ne dira pas le mot comment... mais... M. le Président, j'aimerais finir mon intervention.
Le Président: M. le député de La Peltrie, sur question de règlement, je vous écoute.
M. Caire: Question de règlement: Si le ministre veut faire un débat sur mes convictions, je n'ai aucun problème, mais ma question, elle était claire. Elle portait sur le financement...
Le Président: Bon. M. le ministre, s'il vous plaît, est-ce que vous pourriez être plus précis sur la question?
M. Bolduc: M. le Président, dans le système public, on peut très bien faire du financement par activité. On a commencé en chirurgie.
Mais ce que je comprends, puis il faudrait le demander au député: Est-ce qu'il est d'accord à ce que l'ADQ renie ses anciennes valeurs fondamentales de Mario Dumont, s'en va avec le CAQ, parce que lui-même veut s'en aller avec le CAQ? C'est ça, la question fondamentale, M. le Président.
Le Président: M. le député de La Peltrie.
M. Caire: M. le Président, j'aurais d'abord une question de directive. J'aurais d'abord une question de directive, M. le Président. L'article 79... l'article 79 est très clair, la réponse du ministre n'avait rien à voir avec la question, premièrement. Deuxièmement, dit: On ne doit pas susciter de débat. Ce que le ministre vient de faire suscite des débats, c'est très clair.
Alors, M. le Président, je vous demanderais, s'il vous plaît, de rappeler le ministre à l'ordre sur la base de l'article 79...
Le Président: Alors, j'ai bien compris. Alors, M. le ministre, effectivement, lorsqu'on a une question comme celle-là, il faut... puis notre règlement est assez clair, il faut au moins toucher à la question qui est touchée... qui est appelée. Je vous demanderais de...
Une voix: ...
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Fournier: Bien, on va peut-être regarder le transcript, on va regarder le vidéo au ralenti, M. le Président. Il est clair qu'à la question posée le ministre a répondu, sur le financement par activité. Il a soumis à cette Assemblée le fait qu'il y a effectivement des convictions à géométrie variable en ce moment, un sable mouvant au niveau des adéquo-caquistes. Il faut bien le constater, M. le Président.
Le Président: Ah! Je vous remercie. Ce n'était pas une question de règlement. Monsieur... Deuxième complémentaire, M. le député de La Peltrie.
M. Caire: M. le Président, le leader devrait lire le règlement. Normalement, il est supposé le connaître, son ministre aussi.
Le Président: Je vous suggère d'aller à la question, à votre question, parce que vous allez perdre votre temps, là.
Une voix: ...
Le Président: M. le député de Mercier, j'écoute.
M. Khadir: M. le Président, je vous soumets humblement, je vous soumets humblement que, les députés indépendants, nous n'avons qu'une question à toutes les sept ou huit séances. Donc, quand on pose une question, on prend la peine de poser une question précise sur un sujet précis, il devient d'autant plus important que vous protégiez nos droits et que vous rappeliez...
Le Président: Quand je suis debout, vous êtes assis. Je viens justement de demander au ministre de traiter le sujet qui lui était...
Des voix: ...
Le Président: Je viens justement de faire ce que vous me demandez, je viens justement de... je viens justement de demander au ministre de dire... Je lui ai dit: Il faut traiter le sujet sur la question complémentaire que nous avons reçue.
Là, nous sommes à la deuxième question complémentaire et nous vous écoutons, M. le député de La Peltrie.
M. Éric Caire
M. Caire: Merci, M. le Président. Donc, sur le financement du système de santé, le ministre sait très bien qu'il n'y a pas de paiement à l'acte ou à l'activité dans le réseau présentement. Il le sait très bien. D'ailleurs, Gaétan Barrette, président de la Fédération des médecins spécialistes...
Des voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! Je voudrais entendre la fin de la question. Il a droit...
Des voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! Le député a le droit de choisir ses exemples, alors...
Des voix: ...
Le Président: M. le député, à vous la fin de la question.
M. Caire: ...qui a fait une tournée des blocs opératoires en collaboration avec le ministère de la Santé, a dit lui-même qu'il y avait des pertes incroyables au niveau de la performance dans les blocs opératoires, c'est l'exemple que le ministre nous a donné...
Le Président: M. le ministre de la Santé.
M. Yves Bolduc
M. Bolduc: En tout cas...
Des voix: ...
M. Bolduc: Écoutez...
Des voix: ...
M. Bolduc: M. le Président, en 45 secondes, je vais essayer de faire de la pédagogie. Dans les blocs opératoires, le financement est déjà par activité. On paie pour le type de chirurgie, le nombre de chirurgies... D'ailleurs, je suis content qu'il dit: La meilleure façon d'améliorer la productivité d'un bloc opératoire, c'est la méthode Toyota -- le «lean». On a passé de neuf à 15 chirurgies à Pierre-Boucher, 25 % à 30 % de productivité. Ça, c'est de la performance.
Je suis content qu'il parle du Dr Barrette parce que le Dr Barrette a renié tout ce l'ADQ disait auparavant. Maintenant, il est rendu plus avec le public, avec les caquistes. L'ADQ renie le privé actuellement, toute leur... fondamentale, il faut se poser la question: De qui du député de la Chaudière, de qui du député de La Peltrie, de qui de l'ADQ qui est le cocu des caquistes?
Des voix: ...
Le Président: M. le ministre...
Des voix: ...
Le Président: M. le ministre, c'est une expression qui n'est pas acceptable dans la Chambre, et je vais vous demander de la retirer. Vous retirez votre... Retiré? Retiré.
Des voix: ...
Le Président: Je l'ai entendu. Il a retiré sa...
Des voix: ...
Le Président: ...l'expression. Elle a peut-être une autre question? Alors, M. le député de Kamouraska-Témiscouata, c'est à vous la parole en principale.
Offre de services d'hémodialyse en région
M. André Simard
M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): M. le Président, M. Jacques Mayer, de Saint-Pacôme, dans Kamouraska-Témiscouata, souffrant d'insuffisance rénale et sous traitements d'hémodialyse, m'a fait parvenir la question citoyenne suivante.
Le besoin pressant d'un centre de dialyse et de la présence d'un néphrologue dans les MRC de Kamouraska, Témiscouata et Rivière-du-Loup sont pressants. Le nombre d'insuffisants rénaux augmente. Ces derniers sont obligés de se déplacer soit à Québec soit à Rimouski, ce qui leur impose des trajets longs et coûteux et qui altère considérablement leur qualité de vie et celle de leur famille.
Quand va-t-on les obtenir, ces services?
Le Président: M. le ministre de la Santé.
M. Yves Bolduc
M. Bolduc: M. le Président, tout à fait d'accord avec le député de Kamouraska: il faut développer de l'hémodialyse partout au Québec où il y a le volume nécessaire, entre autres dans le secteur de Rivière-du-Loup, également celui de Kamouraska.
C'est des plans de déploiement qu'on est en train de faire partout au Québec. Présentement, il est en train de s'en installer à Dolbeau-Mistassini; on en veut en Gaspésie, aux Îles-de-la-Madeleine; en Abitibi, c'est déjà très bien déployé. C'est un plan de déploiement qu'on est en train de regarder. Il faut que les institutions soient prêtes à embarquer dans le projet, déposent leurs projets.
Pour ce qu'il s'agit du néphrologue, il n'y aura pas de néphrologue à Kamouraska, mais on travaille en collaboration en télémédecine, parce que c'est très développé à ce niveau-là. En télémédecine, soit avec Lévis; on va le travailler avec Rimouski. Et la télémédecine, là-dedans, s'applique très bien. Puis je vais vous inviter à aller visiter plusieurs endroits où est-ce que c'est déjà mis en place, et ça fonctionne bien, contrairement à ce qu'a dit le député, hier, de la Chaudière.
**(11 heures)**Le Président: Première complémentaire, M. le député de Kamouraska-Témiscouata.
M. André Simard
M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): M. le Président, je reçois très bien la réponse du ministre, mais M. Mayer, comme bien d'autres personnes, c'est plusieurs jours par semaine qu'ils subissent l'hémodialyse. Alors, il veut savoir quand.
M. le ministre parle d'un plan de déploiement. D'ailleurs, dans sa réponse à une pétition de 528 pétitionnaires en juin, il précisait qu'à Rivière-du-Loup il y avait tout ce qu'il fallait en termes de services médicaux et techniques.
Alors, la question, c'est: Quand? Est-ce qu'il peut nous donner, est-ce qu'il peut donner un horizon pour que les personnes qui attendent puissent se faire une idée, là, quand ces services-là vont arriver?
Le Président: M. le ministre de la Santé.
M. Yves Bolduc
M. Bolduc: M. le Président, dans mon expérience, il faut qu'il y ait un projet de déposé par l'établissement. On travaille avec l'agence, ça peut prendre toujours de plusieurs mois à deux à trois ans. Ce n'est pas une question de ministre de la Santé, c'est une question de mettre ça en place, de faire comme il faut les études puis de s'assurer que tout est correct. Mais je peux vous assurer que, plus rapidement on peut développer ce type de services pour donner des meilleurs services localement, on est tout à fait d'accord avec ça. Après ça, c'est la mise en place.
En attendant, il continue de recevoir ses services probablement à Rimouski, c'est très loin. Mais je considère qu'actuellement on veut le développer le plus près possible et on va le faire dans les plus brefs délais. Mais on ne peut pas mettre un échéancier en termes de date précise mais une perspective de quelques mois à un à deux ans, deux années.
Le Président: Principale, Mme la députée de Taschereau.
Engorgement du service des
urgences de certains hôpitaux
Mme Agnès Maltais
Mme Maltais: Depuis l'arrivée de l'actuel ministre de la Santé à la tête de son ministère, la médecine de corridor est devenue la façon usuelle de travailler au Québec. Il y a quelques semaines, je dénonçais la situation très difficile vécue à l'urgence de l'Hôpital L'Enfant-Jésus, qui déborde depuis plusieurs semaines. Le ministre nous a répondu alors, et je vais le citer: «Les solutions ont commencé à être appliquées il y a quelques jours. [...]on s'est entendus sur un plan de match.» Alors, je vais lui donner le résultat de son plan de match: 72 patients sur civière à l'urgence, alors que la capacité est de 48, des conditions de soins et de travail qui sont déplorables. Il y a 28 patients en attente d'hospitalisation qui attendent dans ces conditions inacceptables.
Est-ce que le ministre a un plan de match un peu plus efficace que son dernier? Et pourquoi, surtout, pourquoi est-ce qu'il accepte que la médecine de corridor est devenue la façon de faire au Québec?
Le Président: M. le ministre de la Santé.
M. Yves Bolduc
M. Bolduc: M. le Président, on n'accepte pas du tout de faire de la médecine de corridor au Québec. Ce sont des gens qui sont très malades, c'est des gens qui ont besoin de soins. D'ailleurs, j'ai rencontré les gens de L'Enfant-Jésus, et actuellement ils sont en train de sortir des patients qui sont en attente d'hébergement dans des ressources intermédiaires, en CHSLD. Il y a un plan qui est en train d'être mis en place, et ils ont déjà commencé. Il y avait de 15 à 20 patients à qui on avait trouvé des places pour les sortir. On prend un budget spécial pour le faire. On s'en occupe. Et je peux vous dire, M. le Président, qu'au Québec les urgences, c'est un défi à cause du vieillissement de la population, les gens sont de plus en plus malades. Mais tous les établissements ont reçu la consigne, c'est leur priorité numéro un.
Le Président: Première complémentaire, Mme la députée de Taschereau.
Mme Agnès Maltais
Mme Maltais: En 2003, ils savaient que la population allait vieillir, pourtant ils ont fait des promesses inconsidérées.
Un autre hôpital où l'attente à l'urgence a augmenté en flèche depuis l'arrivée en fonction de l'actuel ministre, c'est celui de Maria. D'après les propres chiffres du ministère, que le ministre a tenté de nier en fin de semaine, l'attente sur civière, à Maria, est passée de 10 heures à 17,5 heures en 2010-2011. Ça a explosé dans le comté de Bonaventure.
Pourquoi accepter que la médecine de corridor, ce soit devenu la façon de faire à Maria, dans Bonaventure?
Le Président: M. le ministre de la Santé.
M. Yves Bolduc
M. Bolduc: Deux commentaires, M. le Président, le premier commentaire, là: C'est le Parti québécois qui a démoli le réseau de la santé. La chef de l'opposition puis François Legault ont été des ministres qui... De mon époque, on s'en souvient. Ça a été une démolition complète du réseau de la santé.
Et, M. le Président, quand on parle de Maria, elle a peut-être les chiffres de l'année dernière, mais, les chiffres d'en date d'aujourd'hui, on a passé de 17 heures à 14,5 heures, donc une amélioration de 1,5 heure. Le volume de patients est stable, mais beaucoup plus malades... les gens sont beaucoup plus malades il y a 10 ans qu'aujourd'hui. Mais je peux vous dire qu'à Maria l'accessibilité des services est bonne au niveau des cliniques, au niveau de la chirurgie puis au niveau de tous les services. Et, pour ce qu'il s'agit de l'urgence, il y a une amélioration depuis l'année dernière.
Le Président: Alors, cela met fin à la période de questions et de réponses orales.
Motions sans préavis
La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, comme il n'y a pas de votes reportés, nous allons maintenant passer aux motions sans préavis. Et, en fonction de nos règles et de l'ordre de présentation des motions sans préavis, je reconnais maintenant un membre du deuxième groupe d'opposition et je cède la parole à M. le député de Shefford.
Un instant, M. le député. Il y a des députés qui veulent vaquer à d'autres occupations, qu'ils le fassent maintenant, rapidement et dans l'ordre.
Des voix: ...
La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, rapidement, s'il vous plaît. Donc, je cède la parole à M. le député de Shefford pour sa motion.
Souligner l'importance des interventions de
l'unité d'urgence Patrouille Secours sur la
route 175 traversant le parc des Laurentides
et favoriser le maintien de ses services
M. Bonnardel: Mme la Présidente, je demande le consentement pour déposer la motion suivante conjointement avec le député de Groulx, le député de Deux-Montagnes, le député de Borduas, le député de Mercier, le député de Chicoutimi, le député de La Peltrie, le député de Chutes-de-la-Chaudière, le député de Deux-Montagnes, la députée de Rosemont et la députée de Crémazie:
«Que l'Assemblée nationale souligne l'importance de l'unité d'urgence Patrouille Secours qui, depuis 10 ans, a effectué plus de 3 500 interventions de secours sur la route 175 traversant le parc des Laurentides;
«Qu'elle rappelle que depuis 1997, ce parc ne compte aucun poste de la Sûreté du Québec et que, par conséquent, les pompiers et policiers doivent partir d'aussi loin que Québec ou Saguenay lorsque survient un accident sur cette route très achalandée;
«Que l'Assemblée nationale se positionne en faveur du maintien d'une unité d'urgence permanente afin de garantir la protection des automobilistes qui circulent sur la route 175.» Merci.
La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?
M. Gautrin: En effet, Mme la Présidente, il y a consentement pour que nous puissions débattre de cette motion avec des interventions de l'ordre de deux minutes et, dans l'ordre, le député de Shefford, le député de Chicoutimi qui pourrait intervenir et le ministre des Transports pour clore le débat.
La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, je comprends qu'il y a consentement pour qu'il y ait trois intervenants et pour que la durée des interventions soit limitée à un maximum de deux minutes. Je donne la parole à nouveau à M. le député de Shefford.
M. François Bonnardel
M. Bonnardel: Merci, Mme la Présidente. Quelle surprise, ce matin, de voir que, dans les journaux, on pouvait penser, du côté du gouvernement, de mettre en péril le fait qu'une entité, un organisme, Patrouille Secours, puisse disparaître dans les prochains mois parce qu'on a terminé la route du parc, une route qui, oui, est à double voie de chaque côté, mais, quand on regarde les statistiques, Mme la Présidente, vous comprendrez que sauver une vie, c'est important. Et, quand je vous parle de statistiques, je vous parle de la documentation du journal de ce matin, où on parle de l'utilisation des mâchoires de vie. Mâchoires de vie, la moyenne annuelle est de 10,5 interventions sur des accidents, et cette année on parle de 11. 11, Mme la Présidente, c'est une intervention par mois. Vous comprendrez que c'est une intervention ou des interventions de trop, parce qu'on ne souhaiterait pas d'accident, mais j'ose espérer que le ministre, dans sa réponse tantôt, va nous expliquer comment on peut imaginer -- il y a eu un face à face mortel dans le parc voilà quelques semaines déjà -- comment on peut imaginer que, s'il y avait un accident grave, que ce soit au kilomètre 100 ou au kilomètre 160, dans le parc des Laurentides, on puisse envoyer une unité de secours qui va partir de Saguenay ou partir de Stoneham et possiblement espérer sauver une vie.
Alors, Mme la Présidente, j'espère que, dans ce contexte, le ministre et le gouvernement vont rassurer la population, principalement du Saguenay--Lac-Saint-Jean, pour s'assurer que cette unité, cette Patrouille Secours continue d'opérer dans le parc des Laurentides dans les prochains mois et surtout dans les prochaines années, parce que cette unité est importante. Et je vous cite Sébastien Simard, qui dit, ce matin: «Ils sont toujours les premiers arrivés. Maintenant qu'ils ont enlevé le poste de la SQ -- en 1997 -- s'ils enlèvent Patrouille Secours, ça n'ira pas bien. Selon nous, leur présence est vraiment importante.» Pour la sécurité des automobilistes, il y a 1,5 million, 1,5 million de véhicules qui circulent dans le parc des Laurentides année après année, il faut s'assurer de garder la sécurité dans le parc des Laurentides, et j'espère que le gouvernement va répondre positivement. Merci, Mme la Présidente.
**(11 h 10)**La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, je vous remercie, M. le député de Shefford. Je reconnais maintenant M. le député de Chicoutimi et leader de l'opposition officielle.
M. Stéphane Bédard
M. Bédard: Très brièvement, Mme la Présidente. Nous avons aussi pris connaissance de l'article, ce matin, concernant la Patrouille Secours, qui, depuis 10 ans, on le sait, effectivement, a effectué 3 500 interventions sur la route 175, que je vais prendre aller-retour d'ailleurs ce soir, Mme la Présidente. Donc, c'est une route que je connais bien, chacun des virages.
Je vous avouerais que je dois quand même souligner qu'on a fait un effort de sécurité sur cette route en la mettant à quatre voies divisées, et j'en suis très, très fier, Mme la Présidente. Je pense que tous ceux et celles qui ont la chance et le privilège de venir au Saguenay--Lac-Saint-Jean, peu importe la saison maintenant, ne risquent plus leur vie. Ils peuvent le faire de façon normale, sur une route à quatre voies divisées où le transport lourd est beaucoup moins, je vous dirais, dangereux pour ceux et celles qui, comme moi, circulent la plupart du temps en autobus, mais aujourd'hui en auto, Mme la Présidente.
Je dirais par contre que nous avons la préoccupation de maintenir la sécurité sur cette route, malgré les améliorations notables qui ont été faites. Je crois que cette unité est importante, d'autant plus que, vous savez, on me faisait la remarque, la 20 est à quatre voies divisées, oui, mais, entre la 20 et... entre Québec et Montréal, il y a quand même beaucoup de villes et villages qui permettent des interventions. Quand tu as un accident dans le parc des Laurentides au kilomètre 107, tu es loin de ta mère, comme on dit, là. Donc, qu'on puisse permettre que cette unité soit présente et puisse agir rapidement dans les cas de traumatisme... On sait que la première intervention est souvent la plus importante.
Donc, j'ai compris que le ministre va nous rassurer sur cette question. Qu'on puisse évaluer les besoins, nous y serons. Et nous souhaitons que cette décision ne soit pas prise de façon hâtive. Au contraire, ce que j'ai compris de l'engagement du ministre, c'est qu'il n'y a pas de réflexion à ce niveau-là, mais que, s'il y a une réévaluation, nous serons consultés à ce niveau-là.
Donc, je tiens à réaffirmer l'importance du maintien, comme l'a fait mon collègue, de ce service pour les gens du Saguenay--Lac-Saint-Jean, mais évidemment pour les gens de l'ensemble du Québec qui utilisent cette merveilleuse route, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, je vous remercie, M. le leader de l'opposition officielle. Je cède maintenant la parole à M. le ministre des Transports.
M. Pierre Moreau
M. Moreau: Merci, Mme la Présidente. Alors, maintenant que je sais que le député de Chicoutimi n'a pas pris l'autobus mais sa voiture, j'espère qu'il a mis ses pneus d'hiver. C'est une question qui m'a été posée avant que j'arrive ici. Vous savez que la date limite pour installer les pneus d'hiver, c'est le 15 décembre, mais qu'il n'y a rien qui nous empêche de le faire avant. D'ailleurs, il faut suggérer aux gens de le faire et d'être prudents.
Je remercie également le député de Shefford d'avoir déposé la motion. On a eu des discussions pour essayer d'en modifier un peu le libellé parce que je ne voulais pas laisser entendre d'aucune façon que le service en question était pour être annulé ou retiré par le ministère des Transports. Il y a peut-être une petite ambiguïté sur le texte, mais...
Essentiellement, ce service-là a été fondé par un gouvernement libéral. C'est l'ancien ministre des Transports, Paul-Yvan Côté... Paul... Pierre... Marc-Yvan Côté, pardon, qui a créé cette unité d'urgence en 1989 et qui patrouille les routes 175 et 169. Et j'ai lu, comme le député de Shefford et comme le député de Chicoutimi, l'article du journal, ce matin, et j'ai cru comprendre que cette inquiétude-là venait d'une réflexion du maire de Tewkesbury, qui semblait dire que le ministère attendait un événement récent pour annuler le service.
Je veux simplement rappeler aux gens qui nous écoutent -- et le député de Shefford indiquait que c'était important pour les gens du Saguenay--Lac-Saint-Jean -- c'est important pour la sécurité de tous les usagers de cette route-là, de la route 175. On connaît les efforts considérables, reconnus par le député de Chicoutimi, qui ont été faits par le gouvernement. Il y a des millions et des millions de dollars qui ont été mis sur cette route-là pour l'améliorer. D'ailleurs, c'est une des routes... ça va être une des plus belles routes qu'on aura au Québec non seulement en termes d'infrastructures, mais en termes de paysage, et il s'agit d'y passer. Et la sécurité routière est une priorité pour le ministère des Transports.
À l'heure actuelle, la situation, c'est qu'il y a une entente qui existe, et je lis simplement le début de cette entente-là entre la ville... entre la municipalité de Stoneham-et-Tewkesbury et le ministère des Transports, où on dit:
«En attendant une décision gouvernementale visant l'amélioration des services d'urgence en milieu isolé, le ministère conclut une entente de service avec la municipalité d'une durée de trois ans -- qui débutait le 1er juillet 2009, il y en a eu avant ça -- avec un renouvellement automatique annuel, à moins d'avis écrit de cession de l'entente 60 jours avant le renouvellement.» Alors, il n'y a pas d'intention aucune d'envoyer un avis pour arrêter cette entente-là, et le service va être maintenu jusqu'à ce qu'on puisse voir ce qui sera fait à long terme.
Mise aux voix
La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, je vous remercie, M. le ministre des Transports. Cette motion est-elle adoptée?
Des voix: Adopté.
La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Adopté. Nous sommes toujours à la rubrique des motions sans préavis, et je reconnais Mme la députée de Rosemont.
Mme Beaudoin (Rosemont): Merci, Mme la Présidente. Alors, je demande le consentement de la Chambre pour présenter, conjointement avec le député de René-Lévesque, la députée de Crémazie, le député de Borduas et le député de Mercier, la motion suivante:
«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement d'appeler le projet de loi n° 399 présenté par le député de Beauharnois, intitulé Loi modernisant les dispositions relatives aux briseurs de grève et modifiant [...] le Code du travail, afin de protéger les droits des travailleurs dans des établissements en situation de grève ou de lock-out.»La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, je vous remercie, Mme la députée de Rosemont. Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?
M. Gautrin: Il n'y a pas consentement.
La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Pas de consentement.
Avis touchant les travaux des commissions
Alors, nous sommes rendus aux avis touchant les travaux des commissions, et je donne la parole à M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Gautrin: Merci, Mme la Présidente. Il me fait plaisir d'aviser cette Assemblée que la Commission des institutions poursuivra l'étude détaillée à l'égard du projet de loi n° 40, Loi abrogeant la Loi assurant la continuité de la prestation des services juridiques au sein du gouvernement et de certains organismes publics et modifiant la Loi sur le régime de négociation collective des procureurs aux poursuites criminelles et pénales, aujourd'hui, après les affaires courantes, et ce, jusqu'à 13 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau;
La Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources naturelles poursuivra l'étude détaillée à l'égard du projet de loi n° 27, Loi sur la Société du Plan Nord, aujourd'hui, après les affaires courantes, et ce, jusqu'à 13 heures, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine;
Cette même commission poursuivra l'étude détaillée à l'égard du projet de loi n° 14, Loi sur la mise en valeur des ressources minérales dans le respect des principes du développement durable, aujourd'hui, de 15 heures à 17 h 30, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine;
La Commission de l'économie et travail complétera les consultations particulières à l'égard du projet de loi n° 35, Loi visant à prévenir, combattre et sanctionner certaines pratiques frauduleuses dans l'industrie de la construction et apportant d'autres modifications à la Loi sur le bâtiment, aujourd'hui, après les affaires courantes pour une durée de 1 h 15 min, à la salle du Conseil législatif;
Cette même commission poursuivra l'étude détaillée à l'égard du projet de loi n° 33, Loi éliminant le placement syndical et visant l'amélioration du fonctionnement de l'industrie de la construction, aujourd'hui, de 15 heures à 18 heures, à la salle du Conseil législatif;
La Commission des finances publiques entreprendra l'étude détaillée à l'égard du projet de loi n° 42, Loi modifiant la Loi sur les régimes complémentaires de retraite en vue de prolonger certaines mesures d'atténuation des effets de la crise financière de 2008 à l'égard de régimes de retraite visés par cette loi, aujourd'hui, de 15 heures à 18 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau.
La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, merci. Je vous avise, pour ma...
Une voix: ...
La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Bien. Bien sûr, bien sûr, comme d'habitude.
Alors, je vous avise, pour ma part, que la Commission de la culture et de l'éducation se réunira en séance de travail aujourd'hui, de 13 heures à 14 heures, à la salle RC.161 de l'hôtel du Parlement, afin d'organiser les travaux de la commission.
Nous sommes rendus aux renseignements sur les travaux. Il n'y a pas de demande de renseignements sur les travaux. Très bien.
Affaires du jour
Alors donc, la période des affaires courantes étant terminée, nous allons maintenant passer aux affaires du jour. Et je cède la parole à M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Gautrin: Je vous remercie, Mme la Présidente. Auriez-vous l'extrême amabilité d'appeler l'article 1 du feuilleton, s'il vous plaît?
Débats sur les rapports de commissions
Prise en considération du rapport de la
commission qui a procédé à un mandat
d'initiative sur la modernisation des
dispositions antibriseurs de grève
prévues au Code du travail
La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, à l'article 1 du feuilleton, l'Assemblée prend en considération le rapport de la Commission de l'économie et du travail qui, les 1er et 2 février 2011, a tenu des auditions publiques lors de consultations particulières tenues dans le cadre du mandat d'initiative sur la modernisation des dispositions antibriseurs de grève prévues au Code du travail. La commission s'est également réunie en séance de travail à six reprises relativement à ce mandat. Ce rapport, qui a été déposé le 9 novembre 2011, contient une recommandation.
**(11 h 20)** Je vous rappelle que, conformément aux dispositions de l'article 95 du règlement, la prise en considération du rapport donne lieu à un débat restreint d'au plus deux heures et qu'aucun amendement n'est recevable. Je vous rappelle également qu'en vertu du deuxième alinéa de l'article 95 ce débat n'entraîne aucune décision de l'Assemblée.
Conformément à ce qui a été énoncé antérieurement par la présidence, la répartition des temps de parole dans le cadre de ce débat s'effectuera comme suit: 8 min 24 s sont allouées au deuxième groupe d'opposition; 10 minutes sont réservées aux députés indépendants. La présidence répartira cette enveloppe de temps parmi ceux qui auront signifié vouloir participer au débat, sous réserve d'un maximum de cinq minutes par député. Le reste du temps sera partagé également entre le groupe parlementaire formant le gouvernement et le groupe parlementaire formant l'opposition officielle. Le temps non utilisé par les députés indépendants ou par les députés du deuxième groupe d'opposition sera redistribué également entre le groupe parlementaire formant le gouvernement et le groupe parlementaire formant l'opposition officielle, et le temps non utilisé par le groupe parlementaire formant le gouvernement ira au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, et vice versa.
Mis à part les consignes mentionnées précédemment, les interventions ne seront soumises à aucune limite de temps. Enfin, je rappelle aux députés indépendants qui souhaitent intervenir au cours de ce débat qu'ils ont 10 minutes à partir de maintenant pour en aviser la présidence.
Je suis maintenant prête à céder la parole au premier intervenant, et je reconnais M. le député de Chomedey.
M. Guy Ouellette
M. Ouellette: Merci, Mme la Présidente. Mme la Présidente, j'avais le privilège, le 9 novembre dernier, de déposer le rapport sur le mandat d'initiative de la Commission de l'économie et du travail relativement à la modernisation des dispositions antibriseurs de grève prévues au Code du travail. Je mentionne, Mme la Présidente, que j'avais ce privilège étant arrivé après l'attribution du mandat, ayant remplacé le député de Marquette, qui est maintenant vice-président de l'Assemblée nationale.
Je voudrais, Mme la Présidente, remettre en contexte ce qui a donné naissance à ce mandat d'initiative pour que les gens puissent saisir tout le travail qui a été fait, tout le travail sérieux qui a été fait par les différents parlementaires qui ont participé à ce mandat d'initiative de la Commission de l'économie et du travail.
Ce mandat d'initiative, Mme la Présidente, trouve origine dans une motion adoptée à l'unanimité, du 22 septembre 2010, qui se lisait comme suit, une motion de l'Assemblée nationale, bien entendu, et je cite, c'est: «Dans la perspective d'avoir un Code du travail qui reflète les nouvelles réalités du monde du travail, que l'Assemblée nationale demande au gouvernement du Québec d'étudier la possibilité de moderniser le Code du travail, particulièrement en ce qui concerne les dispositions anti-briseurs de grève, afin notamment de tenir compte de l'impact des nouvelles technologies.» Suite à cette motion adoptée à l'unanimité, Mme la Présidente, le 8 décembre 2010, sous la présidence du député de Marquette, comme je vous le mentionnais, la Commission de l'économie et du travail s'est réunie et s'est saisie d'un mandat d'initiative portant, comme je l'ai mentionné, sur la modernisation des dispositions antibriseurs de grève prévues au Code du travail.
Des consultations particulières ont eu lieu le 1er et le 2 février 2011. Je tiens à remercier les 16 groupes et les personnes qui sont venus éclairer les parlementaires, Mme la Présidente, qui ont assisté à ces consultations particulières, et permettez-moi de les citer à nouveau, parce que l'importance du rapport, et la justesse du rapport qui a été déposé le 9 novembre, est en grande partie le résultat des échanges, et des consultations, et des mémoires qui ont été produits par ces 16 groupes ou individus que je me permets de vous citer: le Barreau du Québec, la Centrale des syndicats démocratiques, la Centrale des syndicats du Québec, la Confédération des syndicats nationaux, le Conseil du patronat du Québec, la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, la Fédération des chambres de commerce du Québec, la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec et le Syndicat canadien de la fonction publique, la Fédération nationale des communications-CSN, la Fédération professionnelle des journalistes du Québec; quatre personnes individuelles qui sont venues éclairer la commission à titre d'experts, M. Alain Barré, M. Gregor Murray, M. Marc-François Bernier et Me Gilles Trudeau; ainsi que les organisations suivantes, Quebecor et le Syndicat des travailleurs de l'information du Journal de Montréal.
Mme la Présidente, ces 16 entités, personnes et organismes ont guidé les travaux de la commission et ont éclairé les membres de la commission, que je tiens à remercier. Par la suite, après le 1er et le 2 février, les membres de la commission se sont réunis -- vous l'avez mentionné -- à six reprises, que ce soit en séance de travail ou en comité directeur, afin de rendre le plus fidèlement possible les discussions qui avaient eu lieu le 1er et le 2 février.
Je tiens, aujourd'hui, à remercier particulièrement les trois agents de recherche qui ont participé à la rédaction finale du rapport: M. Simon Blouin, qui nous a quittés le 10 de juin pour d'autres occupations professionnelles, M. David Boucher et le rédacteur actuel, M. Bertrand Nadeau. Sans leur concours, nous n'aurions pu, Mme la Présidente, déposer un rapport de la qualité que celui qui est devant vous.
Je veux juste, Mme la Présidente, vous mentionner quelques-uns des points qui ont retenu l'attention des parlementaires. Vous trouverez... Le rapport est constitué de la façon suivante: pour chacun des points qui ont été portés à l'attention des parlementaires, l'agent de recherche a noté les réactions ainsi que les opinions de chacun des groupes que je vous ai notés. Par la suite, le rapport contient une section d'observations, conclusions et recommandations de la commission. Et nous avons inclus... nous avons fait inclure, dans le rapport, les jugements -- Cour supérieure, Cour d'appel -- qui justifiaient le mandat d'initiative qui a été pris par la Commission de l'économie et du travail, et lesquels jugements sont survenus en cours de route, Mme la Présidente.
Dans les discussions qui ont eu cours en commission parlementaire, effectivement il a été question du projet de loi n° 399, que le député de Beauharnois avait déposé devant la commission. Et, de l'avis même du député de Beauharnois, son projet de loi était une vague ébauche et avait besoin d'être peaufiné. Il en a été question, Mme la Présidente, au cours des séances de travail, et la recommandation qui a été apportée à l'unanimité, dont je vais vous parler dans quelques minutes, rejoint bien l'esprit que les parlementaires... avec lequel... l'esprit qui a guidé les parlementaires tout au long de leurs discussions.
Dans les points importants qui ont été soulevés et qui ont fait partie des discussions, que ce soient la notion d'établissement et la notion d'employeur, celle des travailleurs bénévoles, dans les observations de la commission, Mme la Présidente, les parlementaires ont noté que... Parce qu'on s'est penchés sur le nombre de jours perdus au Québec au cours des conflits de travail sur une période de plus de 40 ans. Et on note que, dans la dernière période de 2006 à 2010, il y a 14 fois moins de jours-travail perdus lors des... de jours-personnes perdus lors des conflits de travail. Et c'était une donnée qui était très importante.
Pour la notion d'établissement, les parlementaires considèrent effectivement qu'il doit y avoir une évolution et que cette évolution-là devrait se faire par modification législative. Quant à la notion d'employeur, là aussi les parlementaires sont d'avis que la notion d'employeur mériterait d'être précisée dans notre droit du travail -- parce qu'on faisait référence à l'article 109 et 109.1a du Code du travail.
**(11 h 30)** Je pense que ça a été un travail sérieux qui a été fait par les parlementaires au cours de ce mandat d'initiative. Pour ce qui est de l'utilisation des travailleurs bénévoles, les membres de la commission croient que le recours aux travailleurs bénévoles devrait être interdit, Mme la Présidente, dans la phase des négociations et pendant un conflit de travail, sauf dans des proportions normales et habituelles dans l'entreprise.
Il y a eu beaucoup de discussions, Mme la Présidente, sur le temps de réponse de la Commission des relations du travail, la longueur des jugements. Et, même si les organismes qui sont venus témoigner lors des consultations particulières et présenter des mémoires parlaient d'une période qui devait être plus courte dans le but d'avoir des décisions... Parce que très souvent les décisions s'échelonnent ou sont rendues après de longues périodes, ce qui souvent dépasse 12 à 15 mois.
Les parlementaires, Mme la Présidente, demandent à la Commission des relations de travail de prendre les dispositions nécessaires pour réduire significativement ces délais, sans préciser qu'ils doivent être... que ce soit dans 60 ou 90 jours. Mais définitivement, et c'est unanime au niveau des membres de la commission, que le temps de réponse à la Commission des relations de travail doit être raccourci de façon significative.
Une autre conclusion auxquelles sont arrivés les membres de la commission, c'est de regarder pour accroître les pouvoirs des enquêteurs du ministère du Travail de façon à ce qu'ils puissent vérifier et intervenir sur le champ relativement à l'application des dispositions de la loi antibriseurs de grève. Et les parlementaires se sont questionnés, Mme la Présidente, s'il n'y aurait pas lieu de hausser aussi les amendes qui sont prévues en vertu de l'article 109 du Code du travail.
Quant à la concentration de la presse, il y a plusieurs commentaires qui ont été reçus, mais les parlementaires considèrent que l'approfondissement de cette question, spécifiquement sur la concentration de la presse, relève beaucoup plus du mandat de la Commission de la culture et de l'éducation, et c'est noté dans le rapport de façon précise.
De façon générale, pour la modernisation du Code du travail, autant les organismes qui ont été reçus en consultations particulières, Mme la Présidente, c'est loin de faire l'unanimité, ce qui devrait être fait, tant d'un côté que de l'autre, dépendant si vous êtes un syndicat ou que vous êtes du côté des patrons. Il y a des vues diamétralement opposées, et c'est peut-être le seul point où, au niveau des parlementaires aussi, l'idée d'entreprendre une refonte globale du Code du travail, ça ne fait pas l'unanimité, même chez les parlementaires de la Commission de l'économie et du travail.
En conclusion, Mme la Présidente, à l'unanimité et dans l'harmonie des travaux des membres de la Commission de l'économie et du travail, nous en sommes arrivés à formuler une recommandation, comme je l'ai mentionné, qui était unanime et qui couvrait bien l'ensemble des discussions qui ont eu lieu lors des consultations particulières, et je vous la lis, Mme la Présidente:
«La Commission de l'économie et du travail recommande:
«Que le ministère du Travail revoie la notion d'établissement ainsi que la notion d'employeur prévue dans le Code du travail pour tenir compte de l'évolution des réalités économiques et technologiques, et ce, afin d'établir un juste équilibre du rapport de force entre les parties négociantes lors d'un confit de travail.» Je pense, Mme la Présidente, que cette recommandation unanime des membres de la commission traduit fort bien le consensus qui a pu se dégager de nos travaux et les discussions sérieuses. Et vous verrez à la lecture du rapport, qui est très étoffé, que les agents de recherche ont vraiment pu circonscrire l'ensemble de nos discussions, faire une synthèse des idées des parlementaires pour en arriver à cette recommandation finale, Mme la Présidente.
Je veux remercier tous les parlementaires qui ont participé, autant ceux de l'opposition que ceux du parti ministériel, du deuxième groupe d'opposition et les députés indépendants, et souligner la collaboration reçue de tous les parlementaires de la Commission de l'économie et du travail spécifiquement depuis que j'assume la présidence de cette commission, le 7 avril. J'ai eu à terminer ce mandat d'initiative, comme je l'ai mentionné, qui avait été débuté par mon collègue de Marquette, qui a fait un travail exemplaire, et je l'en remercie. Cela a d'autant facilité la conclusion et la livraison du rapport de la Commission de l'économie et du travail. Je vous remercie, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, je vous remercie, M. le député de Chomedey. Je reconnais maintenant M. le député de René-Lévesque et porte-parole de l'opposition officielle en matière de travail. M. le député.
M. Marjolain Dufour
M. Dufour: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, ça me fait plaisir d'intervenir à ce moment-ci et de participer au débat restreint sur le rapport de la Commission économie et travail au niveau du mandat d'initiative qu'on avait sur la modernisation des dispositions antibriseurs de grève prévues au Code du travail.
Ça me tient à coeur, Mme la Présidente, parce que les suites qui ont été données par rapport au mandat d'initiative à ce volet-là, c'est un peu les suites qu'on avait travaillées, la députée de Taschereau et moi, dans le conflit du Journal de Québec, à même cette enceinte, Mme la Présidente. Alors, je me rappelle, on avait posé des questions à la ministre, suite au conflit du Journal de Québec, sur l'ouverture du Code du travail par rapport à ce que j'appellerais l'équilibre au niveau du rapport de force entre les parties.
Dieu sait que le conflit du Journal de Québec s'est terminé. Il y a le conflit du Journal de Montréal, mais j'y reviens à l'instant. Tout simplement, peut-être vous dire, Mme la Présidente, que j'ai participé au débat en dernier parce que j'ai arrivé sur le tard, par rapport aux travaux qui avaient été faits lors de cette commission. Alors, j'aimerais remercier le député de Chomedey, président; le député de Marquette, qui est maintenant rendu vice-président de l'Assemblée nationale; le vice-président, M. le député de Verchères, les membres qui ont participé à cette commission et les autres députés ayant participé; bien sûr, secrétaire de commission, agents de recherche, révision linguistique et d'agents de secrétariat.
Nous avons reçu, Mme la Présidente, ou ils ont reçu en commission parlementaire, au niveau des consultations, 17 groupes, autant des associations patronales, syndicales, que des gens seuls qui venaient en leur nom propre pour intervenir dans le dossier. Alors, peut-être lire l'avant-propos du mandat qui avait été donné. Alors, c'est le 8 décembre 2010, dans le contexte du conflit de travail qui sévissait au Journal de Montréal et pour répondre aux pétitions déposées à l'Assemblée nationale à ce sujet, que la Commission de l'économie et du travail s'est saisie d'un mandat d'initiative portant sur la modernisation des dispositions antibriseurs de grève prévues au Code du travail. La commission a alors choisi d'entendre, dans le cadre des consultations particulières, des représentants syndicaux, patronaux, ainsi que des témoins experts. Les auditions ont eu lieu le 1er et le 2 février 2011. Les membres de la commission se sont ensuite réunis en séances de travail à quatre reprises afin de faire le bilan des auditions publiques et des conclusions qui pouvaient être engagées. Le présent rapport comprend une recommandation qui a été adoptée à l'unanimité des membres le 1er novembre 2011. La Commission de l'économie et du travail tient à remercier les organismes et les personnes qui y ont collaboré.
Simplement vous signifier, Mme la Présidente, que... puis j'y tenais lorsque j'ai incorporé les derniers débats en commission, et puis au niveau des membres, c'était qu'il fallait y aller sur la simple notion, justement, de l'équilibre par rapport à la loi antibriseurs de grève et ne pas ouvrir sur d'autres pans comme il nous avait été dit lors des consultations particulières. Alors, il était important de... le mandat était sur la loi antibriseurs de grève, puis on a resté là-dessus.
Les suites de ça, Mme la Présidente, c'est qu'à ce sujet l'Assemblée nationale a adopté à l'unanimité, le 22 septembre 2010, la motion suivante: «[C'est] dans la perspective d'avoir un Code du travail qui reflète les nouvelles réalités du monde du travail que l'Assemblée nationale demande au gouvernement du Québec d'étudier la possibilité de moderniser le Code du travail, particulièrement en ce qui concerne les dispositions anti-briseurs de grève, afin notamment de tenir compte de l'impact des nouvelles technologies.» Puis c'est ça qui a fait foi de tout par rapport aux observations de notre commission.
**(11 h 40)** Alors, je vous lis les observations de la commission, Mme la Présidente: «Les membres de la commission souhaitent d'abord faire le point sur l'évolution du bilan des arrêts de travail...» Je pense que le député de Chomedey en a parlé un peu tantôt, mais, en conclusion de ce paragraphe-là, au niveau des jours perdus, des années: «Les membres de la commission ont été sensibilisés, tout au long des auditions, à certaines difficultés d'application des dispositions anti-briseurs de grève. Ces difficultés ont semblé s'accentuer au cours des [...] années, particulièrement là où les technologies de l'information et des communications sont prédominantes», en l'occurrence ce qu'on a inclus dans la recommandation qu'on a en dernier, la notion d'établissement. «L'interprétation évolutive faite par la Commission des relations du travail sur la notion d'établissement contenue dans le Code du travail a été annulée par le jugement du 11 septembre 2009 par la Cour supérieure du Québec. Les députés prennent note que ce jugement a été porté en appel devant la Cour d'appel qui, le 14 septembre 2011, a maintenu le jugement de la Cour supérieure.
«Sur la base des témoignages reçus lors des auditions, la commission évalue que le rapport de force entre les parties négociantes peut actuellement être nettement déséquilibré dans certains milieux de travail, notamment dans le secteur de l'information. Les parlementaires considèrent que les dispositions anti-briseurs de grève doivent pouvoir s'adapter à l'évolution économique et technologique de la société afin d'assurer et de maintenir le rapport de force équilibré entre les parties, ce qui constitue un objectif primordial pour le législateur. Si cette évolution ne fait pas part de la jurisprudence, la commission est d'avis qu'elle devrait se faire par des modifications législatives.
«À la lumière des témoignages entendus lors des auditions, les parlementaires sont d'avis que la notion d'employeur mériterait d'être précisée dans notre droit du travail. L'article 109.1 a) du Code du travail [qui] interdit actuellement: "d'utiliser les services d'une personne pour remplir les fonctions d'un salarié faisant partie de l'unité de négociation en grève ou en lock-out [ou] lorsque [celle-ci] cette personne a été embauchée entre le jour où la phase des négociations commence et la fin de la grève ou du lock-out".
«Le Code du travail n'interdit cependant pas d'utiliser, à l'extérieur de l'établissement où la grève ou le lock-out a été déclaré, les services d'un autre employeur ou ceux d'entrepreneurs pour remplir les fonctions d'un salarié faisant partie de l'unité de négociation en conflit de travail. Or, il peut y arriver qu'une personne embauchée pour remplir lesdites fonctions le soit dans une entreprise faisant partie d'un même conglomérat que l'unité de négociation qui est en conflit de travail. Il est aussi possible qu'un sous-traitant embauché pour remplir ces fonctions puisse, dans les fait, se trouver dans une situation de subordination telle envers les donneurs d'ouvrage qu'il existe dans les faits une relation employeur/employé entre les contractants.
«L'entreprise en conflit de travail pourrait ainsi arriver à faire indirectement ce qu'il n'est pas permis de faire directement, c'est-à-dire utiliser le travail de nouveaux employés pour remplir les fonctions de salariés en [...] conflit de travail. Compte tenu de cette situation, les membres de la commission sont d'avis que le ministère du Travail devrait examiner la possibilité d'actualiser la notion d'employeur. De plus, les membres de la commission estiment qu'il y aurait lieu d'évaluer l'introduction de la notion d'entrepreneur dépendant dans le Code du travail [et] en s'inspirant de celle existant dans le Code canadien du travail ainsi que des recommandations du rapport Bernier [qui disait...] -- Les besoins de protection sociale des personnes en situation de travail non traditionnelle.» Alors, Mme la Présidente, en terminant: La modernisation générale du Code du travail. «L'idée d'entreprendre une vaste modernisation du Code du travail est loin de faire l'unanimité des témoins reçus en audition. Dans le cadre de l'actuel mandat d'initiative sur la modernisation des dispositions anti-briseurs de grève, les organisations syndicales s'y opposent alors que plusieurs organisations patronales y sont favorables. Les témoins experts ont, quant à eux, exprimé des opinions variées [de différentes manières.]
«Sans s'engager en profondeur sur la question, les membres de la commission se sentent interpellés par les suggestions faites par le professeur Gregor Murray à ce sujet, incluant celles ayant trait à un meilleur partage de l'information et à une consultation plus systématique avant de prendre des décisions majeures. Ces suggestions veulent s'inscrire dans une approche de la prospérité fondée sur le partenariat social. Les parlementaires ont aussi reçu avec beaucoup d'intérêt les commentaires du président de Quebecor sur le même sujet, lorsqu'il réclame un cadre de relations de travail qui favorise la coopération et la collaboration entre les [employés et les employeurs.]
«Cependant, l'idée d'entreprendre une révision globale du Code du travail est loin de faire l'unanimité des membres de la commission...» Et, à ce sujet, Mme la Présidente, il y a une recommandation qu'on fait à la ministre:
«Par conséquent, la Commission de l'économie et du travail recommande:
«Que le ministère du Travail revoie la notion d'établissement ainsi que la notion d'employeur prévue dans le Code du travail pour tenir compte de l'évolution des réalités économiques et technologiques, et ce, afin d'établir un juste équilibre du rapport de force entre les parties négociantes lors d'un conflit de travail.» En espérant que la ministre va donner suite à la recommandation de la commission parlementaire, Mme la Présidente. Merci beaucoup.
La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, je vous remercie, M. le député de René-Lévesque. J'ai deux députés indépendants qui se sont manifestés dans les délais pour prendre la parole. Donc, je vais reconnaître Mme la députée de Crémazie pour cinq minutes.
Mme Lisette Lapointe
Mme Lapointe: Merci, Mme la Présidente. Ce matin, nous sommes saisis de ce rapport de la Commission de l'économie et du travail qui a étudié le projet de loi qui a été présenté par le député de Beauharnois, un projet de loi qui... ce projet de loi qui prévoit, dit-on dans les notes explicatives, «qu'il est interdit pour un employeur d'utiliser, à l'extérieur de l'établissement où une grève ou un lock-out a été déclaré, les services ou le produit du travail d'un salarié, d'un entrepreneur, d'une personne morale ou d'une personne à l'emploi d'un autre employeur pour remplir les fonctions d'un salarié faisant partie de l'unité de négociation en grève ou en lock-out».
Ce projet de loi vise à moderniser les dispositions de la loi antibriseurs de grève de 1977, et on se rappellera, Mme la Présidente, qu'avant l'adoption de cette loi, en 1977, il y a eu des conflits sauvages, des conflits violents. Et je me souviens très bien, puisque j'étais attachée politique du ministre d'État au Développement social qui a proposé et fait adopter cette première loi, je me rappelle très bien du conflit qui avait lieu à la United Aircraft, qu'on appelait à l'époque, c'est-à-dire la Pratt & Whitney, où des autobus, des camions entraient avec des fiers-à-bras. Et c'était épouvantable, et je pense que tout le Québec avait été touché par ça.
Donc, la première loi, la loi antibriseurs de grève de 1977, a civilisé, si on veut, les relations de travail, a permis, a permis que des négociations collectives se fassent, se fassent avec un rapport de force correct. Ça a changé complètement les relations de travail au Québec et ça s'est bien passé pendant plusieurs années, jusqu'à ce qu'on voie, au cours des dernières années, que la notion d'établissement ne pouvait plus... ne convenait plus, ne convenait plus pour empêcher les briseurs de grève de prendre et de faire le travail des salariés de l'unité de négociation.
Mme la Présidente, je pense qu'ici, en cette Chambre, on a tous le devoir de protéger la liberté, le droit à la saine négociation de tous les travailleurs syndiqués au Québec. Le rapport de la Commission de l'économie et du travail fait une seule recommandation, et c'est la suivante: «Que le ministère du Travail revoie la notion d'établissement ainsi que la notion d'employeur prévue dans le Code du travail...» Mme la Présidente, ce matin, ma collègue la députée de Rosemont a présenté une motion demandant que l'Assemblée nationale demande au gouvernement d'appeler le projet de loi n° 399, le courageux projet de loi de notre collègue de Beauharnois, que le gouvernement l'appelle pour qu'on puisse en débattre, un projet de loi d'un seul article mais qui changerait draconiennement le rapport de force. Et il y a urgence parce qu'il y a eu des conflits, pour ne pas nommer ceux du Journal de Québec et ceux du Journal de Montréal, il y a eu des conflits où vraiment toute cette notion de la loi antiscab non appropriée, l'ancienne loi, était en cause.
Alors, Mme la Présidente, je souhaite que la ministre du Travail, qui d'ailleurs ne s'est pas présentée lors de ces commissions parlementaires, je souhaite qu'elle appelle ce projet de loi pour qu'on puisse en débattre et rétablir un rapport de force correct entre les patrons et les travailleurs lors de conflits. Merci, Mme la Présidente.
**(11 h 50)**La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, je vous remercie, Mme la députée de Crémazie. Je reconnais maintenant M. le député de Jean-Lesage et adjoint parlementaire au ministre du Développement économique, de l'Innovation et de l'Exportation. M. le député.
M. André Drolet
M. Drolet: Merci, Mme la Présidente. En tant que député de Jean-Lesage, il me fait plaisir d'être avec vous aujourd'hui pour débattre du rapport de la Commission de l'économie et du travail. J'aimerais d'ailleurs saluer mes collègues députés.
Mme la Présidente, en 1977, le législateur québécois a incorporé dans le Code du travail des dispositions antibriseurs de grève. L'objectif ainsi visé par le législateur est le maintien du rapport de force entre les parties durant la négociation. Cependant, ces dispositions n'empêchent pas l'employeur d'utiliser à l'intérieur de l'établissement concerné certaines personnes comme travailleurs de remplacement. Pour ce faire, il peut avoir recours au personnel-cadre de cet établissement, à des personnes bénévoles ou, dans certains cas, à un administrateur ou à un actionnaire. À l'extérieur de l'établissement, l'employeur pourra ainsi recourir aux services de ces employés qui ont été embauchés avant le début de la phase de négociation et qui ne font pas partie de l'unité de négociation en grève ou en lock-out. Il pourra également utiliser les services d'un entrepreneur ou des employés d'un autre employeur.
Depuis l'adoption des dispositions antibriseurs de grève, le secteur des services a pris de l'ampleur et les changements technologiques ont été nombreux, particulièrement dans les domaines des communications et de l'information. L'information est de plus en plus prédominante, et la production n'est plus nécessairement réalisée dans un lieu physique particulier. De plus, le recours à la sous-traitance s'accroît. Dans cette perspective, la notion d'établissement utilisée dans le droit du travail québécois ne correspond peut-être plus adéquatement aux structures contemporaines de production.
Le 22 septembre 2010, l'Assemblée nationale a adopté à l'unanimité une motion invitant à moderniser le Code du travail. Elle se lisait ainsi, c'est: «Dans la perspective d'avoir un code du travail qui reflète les nouvelles réalités du monde du travail, que l'Assemblée nationale demande au gouvernement du Québec d'étudier la possibilité de moderniser le Code du travail, particulièrement en ce qui concerne les dispositions anti-briseurs de grève, afin notamment de tenir compte de l'impact des nouvelles technologies.» Par ailleurs, le 3 décembre 2010, le député de Beauharnois a présenté le projet de loi n° 399 visant à modifier le Code du travail afin d'interdire le recours à des briseurs de grève dans des cas qui ne sont pas actuellement couverts par ce code.
En avril 2009, Le Journal de Québec a mis ses journalistes et ses photographes en lock-out à la suite des négociations infructueuses visant le renouvellement de leur convention collective. Durant ce lock-out, qui a environ duré 16 mois, le journal a publié des articles fournis par l'Agence Nomade, une agence de presse, ainsi que des photographes produites par l'Agence Keystone. Cette dernière employait ses propres photographes pour couvrir des événements dans la région de Québec, le travail étant effectué à l'extérieur des locaux du journal et transmis à ce dernier par voie électronique.
Le syndicat représentant les employés en lock-out a déposé des demandes à une commission des relations du travail pour obtenir une ordonnance empêchant Le Journal de Québec d'utiliser les services de ces agences. Dans sa défense, le journal a soutenu que les employés des agences ne remplissaient pas leurs fonctions dans l'établissement où le lock-out avait été déclaré.
En décembre 2008, la Commission des relations du travail a statué que les fonctions remplies par certains employés des agences en question étaient sous l'autorité du journal, lequel donnait à ces employés des instructions précises, du moins indirectement. Les employés des agences occupent essentiellement les mêmes endroits où ces derniers travaillaient habituellement. Par conséquent, le journal avait contrevenu aux dispositions antibriseurs de grève du Code du travail du Québec. En rendant sa décision, la Commission des relations du travail a donc élargi la portée du terme «établissement» de manière à inclure tout endroit où les employés en grève ou en lock-out remplissent ordinairement leurs fonctions, et ce, lorsque l'employé exerce une autorité directe ou indirecte sur le travail effectué par les salariés de remplacement.
Cette décision a cependant été renversée par la Cour supérieure en septembre 2009. Celle-ci estimait que le travail en question n'avait pas été effectué dans l'établissement où le lock-out avait été déclaré. Cette affaire a par la suite pris... été portée devant la Cour d'appel, qui confirme que Le Journal de Québec n'a donc pas contrevenu aux dispositions antibriseurs de grève du Code du travail.
En janvier 2009, soit quatre mois après la fin du conflit au Journal de Québec, c'est Le Journal de Montréal qui a mis en lock-out ses journalistes, photographes, ses employés de bureau et les employés de son service des petites annonces, soit 253 salariés au total. Au coeur du litige, on retrouve la convergence entre les médias du groupe, la suppression des postes aux petites annonces et à la comptabilité et l'allongement de la semaine de travail. Pendant ce lock-out, le journal a eu recours aux services de l'Agence QMI, l'agence de presse de Quebecor Média qui a été créée à l'automne 2008. Le journal a aussi publié des textes et des photographies provenant de publications et de sites Internet appartenant à Quebecor.
Devant cette situation, les syndicats ont déposé une demande auprès de la Commission des relations du travail. Dans ce cas-ci, la décision a été plus favorable à l'employeur. En effet, la commission a statué que le journal avait le droit d'utiliser le produit du travail effectué par les salariés d'un autre employeur dans la mesure où le travail effectué par ces salariés est exécuté sous la direction et au profit de cet autre employeur. Lorsque cette décision a été contestée, la Cour supérieure a validé le verdict rendu par la commission. En septembre 2010, la Cour d'appel a confirmé la décision des instances inférieures.
Mme la Présidente, au cours de l'automne 2010, deux pétitions ont été déposées à l'Assemblée nationale afin de demander au gouvernement du Québec de mettre en branle tous les moyens dont il dispose pour favoriser dans les meilleurs délais un règlement négocié satisfaisant pour les deux parties. Le 8 décembre 2010, la Commission de l'économie et du travail adoptait la motion suivante:
«Que, dans le contexte du conflit de travail qui sévit présentement au Journal de Montréal et des pétitions qui ont été déposées à l'Assemblée nationale, la Commission de l'économie et du travail se saisisse d'un mandat d'initiative, en vertu de l'article 149 du règlement, portant sur la modernisation des dispositions anti-briseurs de grève prévues au Code du travail.» Il est donc convenu que la commission entende, dans le cadre de la consultation particulière, des intervenants tels que des représentants patronaux, des représentants syndicaux et des témoins experts. Il faut se rappeler, Mme la Présidente, que, le 15 décembre 2010, le président et le vice-président de la commission ont respectivement apporté les précisions suivantes relatives au mandat: «Le contexte du conflit de travail qui sévit présentement au Journal de Montréal et les pétitions qui ont été déposées à l'Assemblée nationale interpellent les parlementaires. Ces derniers souhaitent se pencher sur la problématique des relations de travail au Québec, plus particulièrement sur les dispositions anti-briseurs de grève prévues au Code du travail. Les députés sont préoccupés par le déséquilibre illustré par ce conflit.»«L'équilibre du rapport de force entre les travailleurs et l'employeur est un enjeu de société majeur. C'est pourquoi la commission entendra des représentants patronaux, des représentants syndicaux et des témoins experts. Depuis l'adoption des dispositions prévues au Code du travail en 1977, les réalités économiques et technologiques ont beaucoup évolué et une réflexion est aujourd'hui nécessaire.» Au moment où la Commission de l'économie et du travail a terminé les auditions publiques sur le mandat d'initiative concernant la modernisation des dispositions antibriseurs de grève au Code du travail, nous avons pris acte des diverses positions exprimées par les parties patronales et syndicales ainsi que par les experts en relations de travail. Les auditions nous ont permis de réaliser toute la complexité du débat. Nous sommes aussi conscients que plusieurs facteurs doivent être pris en considération si la solution retenue était celle de la modernisation des dispositions antibriseurs de grève. Également, Mme la Présidente, plusieurs intervenants ont eu l'occasion de se prononcer sur le projet de loi proposé par le Parti québécois, la modernisation des dispositions relatives aux mesures antibriseurs de grève et modifiant de nouveau le Code du travail, et force de constater qu'il soulève plusieurs critiques.
Nous avons rencontré des témoins provenant du milieu syndical, et ils se sont tous prononcés en faveur d'un renforcement des dispositions antibriseurs de grève du Code du travail. Leurs interventions ont d'abord porté sur la possibilité de revoir la notion d'utilisation des services d'une personne, prévue à l'article 109.1 du Code du travail, ainsi que sur les besoins de moderniser et d'élargir la notion d'établissement.
Pour ce qui est des représentants patronaux, ils considèrent qu'il serait mal venu et même dommageable de modifier les dispositions antibriseurs de grève pour pallier une situation propre à un conflit donné entre deux parties. Il n'en demeure pas moins que les représentants patronaux estiment qu'une révision du Code du travail qui toucherait aux dispositions antibriseurs de grève devrait nécessairement se faire dans le cadre d'une révision de l'ensemble du code.
Je crois que nous devons prendre le temps d'analyser correctement la situation. Nous devons aussi garder en tête l'esprit que le législateur a conféré aux dispositions antibriseurs de grève lors de leur adoption en 1977, mais surtout le souci d'équilibre qu'il a toujours eu dans l'élaboration des lois du travail afin d'en arriver à la meilleure solution possible.
En conclusion, Mme la Présidente, il faut se rappeler que le nombre moyen de jours-personnes perdus annuellement au Québec au cours du conflit de travail a considérablement diminué depuis une trentaine d'années. À titre d'exemple, pour la période de 2006 à 2010, il s'est perdu en moyenne moins de 247 000 jours-personnes de travail par année au Québec en raison de grèves ou de lock-out, soit 14 fois moins que la période de 1976 à 1980.
Bien que l'on puisse conclure à une relation de cause à effet sur la base de ces seuls chiffres, il reste que l'introduction, en 1977 puis en 1983, de dispositions antibriseurs de grève dans le Code du travail ne semble pas avoir eu les conséquences négatives dont certains anticipaient à l'époque sur les relations industrielles au Québec. Les membres de la commission ont été sensibilisés tout au long des auditions à certaines difficultés d'application des dispositions antibriseurs de grève. Ces difficultés ont semblé s'accentuer au cours des dernières années, particulièrement là où les technologies de l'information et des communications sont prédominantes.
Bref, je vous rappellerai la grande sagesse qu'a eue le législateur, en 1977, de trancher entre les positions diamétralement opposées des représentants patronaux et syndicaux. Nous devons poursuivre dans cette voie, c'est-à-dire celle de ne pas avantager un groupe par rapport à un autre. Merci, Mme la Présidente.
**(12 heures)**La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Je vous remercie, M. le député de Jean-Lesage. Je reconnais maintenant Mme la députée de Taschereau et porte-parole de l'opposition officielle en matière de santé. Mme la députée.
Mme Agnès Maltais
Mme Maltais: Merci, Mme la Présidente. Si vous me permettez, j'ajouterais que j'interviens aussi à titre de porte-parole en matière de Capitale-Nationale et que c'est à ce titre que, dans le passé... Je veux vraiment spécifier parce que, dans le passé, je suis intervenue en cette matière à cause de cette responsabilité. Et je parle du moment où nous avons vécu difficilement, dans la région, la grève, la très longue et très dure grève du Journal de Québec. Je suis intervenue dans cette Chambre, alors que normalement je n'interviens pas beaucoup en matière de relations de travail.
Beaucoup de nos collègues ici, dans la salle, proviennent soit des milieux patronaux ou des milieux syndicaux et ils connaissent bien cette matière. Ce que je connais bien, moi, c'est la situation des travailleurs et des travailleuses qui ont subi une grève qui a été extrêmement difficile. Ce que je connais bien aussi, c'est l'histoire du Québec. C'est l'histoire du Québec.
Mon collègue de René-Lévesque, mon collègue de René-Lévesque est intervenu à maintes reprises avec moi pendant la grève du Journal de Québec. Il a travaillé avec moi de très près. En fait, c'est lui qui était en avant, mais, par rapport à la région, j'avais eu à intervenir parce que j'avais été touchée personnellement. Voici comment.
J'étais allée à une activité, c'était la journée de lutte contre l'homophobie, et il y avait un photographe de Keystone, de l'entreprise Keystone, qui est une entreprise qui travaillait parallèlement au Journal de Québec et dont les photos se retrouvaient dans un Journal de Québec alors en grève. Alors, j'ai demandé au photographe de Keystone de ne pas prendre de photo de moi en disant: Écoutez, je suis une parlementaire, vous êtes en grève, j'ai un doute, je vous demande respectueusement de ne pas prendre de photo de moi. Alors, le photographe n'a pas pris de photo de moi.
Mais, pendant ce temps, la journaliste, elle, qui était là non pas officiellement pour Le Journal de Québec mais pour l'AgenceQMI, la journaliste a pris une photo de moi, et je l'ai retrouvée le lendemain dans Le Journal de Québec, cette photo de moi, sous le titre Photo archives Le Journal de Québec. Alors là, je ne l'ai pas pris. Je ne l'ai pas pris parce que c'était un contournement de la loi. On ne pouvait pas mettre un faux nom sous ma photo. J'avais demandé: Pas de photo, je le retrouve sous le mot «archives», alors je n'étais pas contente et je l'ai dénoncé. Et je pense avoir été, à l'époque, la première à dénoncer la possibilité d'utiliser des briseurs de grève au Québec à cause de ce qui est une faille dans la loi versus les nouvelles technologies.
Alors, la grève du Journal de Québec a été vécue difficilement dans la région. Tous les matins, on pouvait voir, à la sortie des autobus, les journalistes en grève distribuer un journal, le MédiaMatin, comme il s'appelait ce... bénévolement et essayer de continuer à parler aux citoyens et aux citoyennes non seulement de ce qui se passait dans leur région, mais de ce qu'ils vivaient, eux et elles.
Par ailleurs, il y a eu un vaste mouvement de soutien autour de ce journal. Les gens de la région ont acheté de la pub parce qu'ils voulaient, ils voulaient, ils voulaient que ces gens, qui sont des partenaires de l'information, qui véhiculent l'information qui est une notion essentielle dans une société démocratique, soient appuyés, que l'on entende encore leur voix. Toutefois, à côté de ça, il y avait des familles impuissantes qui vivaient cette situation.
Une société doit toujours avancer en matière de droits, Mme la Présidente, elle ne doit jamais reculer. C'est très important, cette société-là... cette notion-là. Une société doit toujours avancer en matière de droits, elle ne doit jamais reculer. Or, l'évolution des technologies a amené les travailleurs à nous interpeller en disant: Écoutez, il y a un recul dans nos droits actuellement. Et c'est le Parti québécois qui non seulement a interpellé le gouvernement en cette matière à l'Assemblée nationale, mais a déposé un projet de loi qui pourrait permettre, pourrait permettre d'examiner des solutions à ce déplacement dans les droits des travailleurs.
Vous savez, dans le passé... Bon, tout tourne autour de la notion d'établissement. C'est l'article 109.1 du Code du travail qui dit que... Il parle de la notion d'établissement versus la possibilité d'utiliser des briseurs de grève, il protège l'établissement. Sauf que, dans le passé, quand on parlait d'un établissement, on parlait d'un lieu précis, d'un territoire. J'ai des images en tête, Mme la Présidente, des grilles, vous savez, ces grosses grilles qui s'ouvraient devant le passage d'autobus transportant des grévistes, où les travailleurs faisaient leurs lignes de piquetage, mais se voyaient défoncer les lignes de piquetage par des grévistes. Ce sont des images du passé, mais qu'on ne veut plus revivre. Mais la notion d'établissement, elle était physique, il y avait une clôture souvent autour des endroits, et il y avait une ligne de piquetage, autour de l'endroit, qui était très précise.
Mais aujourd'hui, aujourd'hui, la frontière, elle n'est plus physique. Aujourd'hui, les frontières physiques établies dans le passées sont disparues, et il faut parler de porosité des frontières, où la personne qui peut traverser la frontière, c'est une onde, tout simplement. Grâce aux satellites, grâce aux télécommunications, l'onde traverse la frontière de l'établissement. C'est pour ça qu'on parle, dans la société, de télétravail. Aujourd'hui, c'est courant, mais c'est une explosion dans le monde du travail. Ça a changé les façons de faire le travail, ça nous a... même notre façon de travailler. Regardez, j'ai un iPad ici. Je peux communiquer avec le comté de Bonaventure en deux secondes, si ça me tente, alors ça... communiquer avec le monde. Donc, la société est transformée, le milieu du travail est transformé. Mais donc, peut-être que notre droit du travail aussi mérite d'être regardé à la lumière de ce profond changement.
Pendant les débats de cette commission, la notion d'établissement a été soulevée bien sûr par tout le monde, mais j'amènerais une note qui a été amenée par le professeur Trudeau, disant: Il faut peut-être faire la différence entre la notion d'établissement et le remplacement de grévistes. Parce que c'est là toute la situation difficile qui a été vécue. À l'intérieur de l'établissement physique, il n'y a pas eu remplacement de grévistes, mais ce que les travailleurs nous disent, ce que le syndicat nous dit, c'est qu'il y a eu effectivement remplacement de grévistes, mais en dehors de l'établissement.
Donc, est-ce qu'on doit regarder la notion d'établissement ou si la notion ne s'est pas déplacée à celle de grévistes versus briseurs de grève? Est-ce que c'est la notion... En fait, ce qu'on cherche, c'est à protéger les droits des travailleurs, mais à protéger les droits des grévistes et des employeurs. Mais, si les deux ne se retrouvent plus dans un établissement physique mais se retrouvent dans un univers démultiplié, un univers technologique, alors il faut examiner ce que fondamentalement nous désirons. Et ce que nous désirons, c'est éviter le remplacement de grévistes pour permettre de protéger les droits des uns et des autres. Donc, le professeur Trudeau nous amène cette chose-là.
L'autre, le professeur Murray, nous parle de la notion de pratique déloyale, là aussi référant à la notion d'établissement, en se demandant: Si la notion d'établissement n'est plus la notion correcte... Il nous dit, lui: Nous devrions documenter du côté de la pratique déloyale. La loyauté, c'est: nous établissons un terrain de négociation, nous avons une convention collective, nous sommes en négociation, nous voulons la renouveler, nous voulons travailler de façon loyale à partir de nos lois, la légalité. Alors, qu'est-ce qui maintenant est une pratique qui brise l'esprit des lois? C'est une notion très intéressante, c'est un bon questionnement que nous demandait... que nous proposait le professeur Murray.
**(12 h 10)** L'autre notion dont nous parle le professeur Marc-François Bernier, c'était la notion de contournement de la loi. Et c'est tout simple, c'est quelque chose qu'on se dit, Mme la Présidente, ici, régulièrement, vous en êtes d'ailleurs la gardienne: On ne peut pas faire indirectement ce qu'on ne doit pas faire directement. On ne doit pas faire indirectement ce qu'on ne peut pas faire directement. Alors, ça peut être aussi un angle à partir duquel on peut maintenant étudier la proposition du Parti québécois, qui est devenue une recommandation unanime de la Commission de l'économie et du travail.
L'article 109.1 du Code du travail doit être modernisé, on doit moderniser la notion d'établissement et on doit aussi, je tiens à le dire -- il a été question de ça aussi -- baliser l'utilisation de travailleurs bénévoles. Ça a été soulevé. Moi, je ne connaissais pas cette utilisation-là. Je ne la connaissais pas, mais c'est la beauté des travaux d'une commission parlementaire, c'est d'instruire tant les citoyens que les parlementaires. Et on nous a informés de cette situation où la notion de travailleurs bénévoles pouvait nuire à nos relations de travail.
Selon le professeur Gilles Trudeau, les dispositions antibriseurs de grève ne sont plus adaptées à la nouvelle économie, carrément. Et il a cité particulièrement le domaine des médias et des télécommunications. Voilà le domaine où véritablement la notion d'établissement est devenue extrêmement... peut être devenue... est devenue extrêmement confuse. La notion... Dans ce domaine, télécommunications, médias, c'est vraiment maintenant un domaine sur lequel il va falloir se pencher.
Le professeur Gregor Murray, lui, nous demandait une approche active mais progressive, orientée vers des mesures qui contribueraient à améliorer le dialogue. Bien sûr. Parce qu'encore une fois on est dans le monde des relations de travail où on essaie de faire que les gens entre eux puissent arriver à une conclusion. Et c'est ça toute la délicatesse et la difficulté d'intervenir en matière de relations de travail, c'est qu'il faut amener des gens entre eux, entre eux, leur donner les conditions, les balises, les conditions de succès face à une relation de partenaires, parce qu'ensemble ensuite ces gens-là vont travailler, ils vont amener leur entreprise un peu plus loin. Alors, c'est extrêmement important, cette idée de contribuer, dans une loi, à améliorer le dialogue.
Alors, j'ai déjà parlé de la porosité des frontières devant le passage des ondes. Je vous ferai une anecdote. La semaine dernière, j'avais affaire à mon fournisseur Internet. J'avais un problème chez moi et je parlais avec un spécialiste -- vous savez, on appelle puis on a des gens qui nous répondent pour le soutien technique -- puis j'écoutais le bel accent du jeune homme qui me répondait, j'ai dit: Tiens, j'ai dit, est-ce que vous pourriez me dire où vous êtes? Il est parti à rire, il dit: Je ne peux pas vraiment, je n'ai pas le droit. Bien, écoutez, j'ai dit: Je vais faire un essai. Je ne me suis pas trompée de bien loin, il était en Tunisie. Il était en Tunisie et il était en train de m'expliquer comment, chez moi, au Québec, je pouvais régler mon problème sur Internet. Bien, c'est ça, maintenant, ce nouvel univers, et c'est à ça qu'on fait face maintenant.
Alors, nous devons donc... J'apprécie beaucoup que la Commission de l'économie et du travail en soit venue à une recommandation unanime pour essayer de nous sortir un peu du modèle dans lequel nous sommes, qui ne correspond plus à la réalité. Qu'elle l'ait fait de façon unanime signifie aussi que nous nous entendons sur cet aspect fondamental de l'avancée des droits au Québec, c'est important, et de la protection des droits des travailleurs. Alors, Mme la Présidente, je vais saluer le travail des membres de cette commission, le travail de cette Assemblée, mais je vais surtout espérer profondément, profondément, qu'il y ait maintenant des travaux qui se fassent, que le gouvernement travaille, à moins que... ou que le leader nous permette d'étudier le projet de loi n° 399, qui a été proposé par mon collègue de Beauharnois, et que nous puissions enfin aider les relations de travail à évoluer positivement au Québec. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, je vous remercie, Mme la députée de Taschereau. Je cède maintenant la parole au deuxième député indépendant pour cinq minutes. M. le député, cinq minutes, M. le député de Mercier.
M. Amir Khadir
M. Khadir: Merci, Mme la Présidente. Évidemment, si la Chambre est unanime pour m'octroyer une autre minute par la suite, par consentement, je suppose que vous aurez la gentillesse de me les accorder.
Mme la Présidente, nous sommes, je pense, tous d'accord que la loi doit être modernisée. La loi actuelle ne protège pas les travailleurs, comme de nombreux conflits, comme de nombreux lock-outs patronaux l'ont démontré au cours des deux, trois dernières années. Comme l'a souligné tout à l'heure la députée de Taschereau, la loi actuelle ne protège pas les travailleurs, ne protège pas les employés contre des lock-outs abusifs et surtout des lock-outs qui s'éternisent, qui durent un an, deux ans sur le dos des travailleurs, avec un règlement qui donne le plein pouvoir au patron de régler le conflit à sa guise parce que malheureusement la loi actuelle, qui a été introduite il y a plus de 35 ans... ou en fait 35 ans, n'avait pas prévu ce que tout le monde maintenant reconnaît, qu'on peut produire, produire évidemment ce qui est immatériel, c'est-à-dire des articles, des produits d'information, comme on l'a vécu au Journal de Montréal, au Journal de Québec et aujourd'hui, maintenant, à 24 heures, mais aussi d'autres types de production. On peut produire à distance, on peut produire en dehors du milieu de travail.
Là n'est pas le problème, donc. Tout le monde est d'accord: cette loi est désuète, il faut la modifier. Ce qui m'étonne, c'est d'entendre la partie gouvernementale aujourd'hui venir avec l'idée qu'il y aurait, ce faisant, qu'il y aurait un déséquilibre qu'il faudrait corriger en faisant d'autres concessions aux milieux patronaux. Je voudrais bien que le leader du gouvernement, son leader adjoint présent en Chambre nous expliquent en quoi est-ce que corriger un déséquilibre patent que tout le monde décrie et le ramener à l'équilibre, que l'équilibre serait un déséquilibre pour certains milieux patronaux, pourquoi on devrait accepter cette équation loufoque.
Tout le monde reconnaît qu'actuellement il y a un déséquilibre profond qui fait en sorte que les employeurs... que les employés, que les travailleurs ne peuvent pas exercer leurs droits pleinement, que les briseurs de grève peuvent agir au profit des patrons, certains patrons voyous qui ne reconnaissent pas la nécessité des droits et des protections syndicales dans notre société, et leur permet de les mettre à pied et ensuite de les remercier dans des conditions jugées par tout le monde comme étant indignes. Je me rappelle que même des députés du Parti libéral se sont indignés, se sont offusqués du traitement qu'ont finalement reçu les employés et les travailleurs et les journalistes du Journal de Montréal.
Je voudrais aussi m'interroger sur la trop grande sensibilité du Parti libéral aux requêtes du milieu patronal. Je voudrais leur demander: En vertu de quoi devons-nous tout le temps, tout le temps, tout le temps prendre des décisions dans la chambre du peuple seulement après avoir obtenu l'accord, l'imprimatur, l'appui des milieux patronaux?
Je rappelle pour les gens qui nous écoutent qu'on n'a pas entendu le Conseil du patronat, qu'on n'a pas entendu la Fédération des chambres de commerce, qu'on n'a pas entendu l'Institut économique de Montréal, qui ont l'oreille du gouvernement, tout au cours des deux dernières années, s'interroger sur la situation dans le milieu de la construction et demander énergiquement, comme l'ensemble des Québécois, la tenue d'une commission d'enquête pour mettre de l'ordre dans ce secteur-là. Je rappelle qu'on n'a pas entendu le Conseil du patronat, l'Institut économique de Montréal et la Fédération des chambres de commerce se demander pourquoi les classes moyennes aujourd'hui ont sur leurs épaules tout le poids de la fiscalité, tout le poids des impôts, que nous sommes les seuls à payer des impôts. Je n'ai pas entendu le Conseil du patronat s'offusquer, s'interroger pourquoi 80 milliards de dollars de l'argent du Québec dort dans les paradis fiscaux. À qui appartient cet argent-là? Je n'ai pas entendu ce 1 %, non, ce 1/1 000 des plus riches et des plus fortunés se soucier de l'ampleur du vol que consiste tout ce que les compagnies minières sortent de notre sous-sol et dont les Québécois ne voient pas la couleur.
Alors, c'est sûr que je trouve indécent que le gouvernement aujourd'hui invoque les préoccupations du milieu patronal et de la Fédération des chambres de commerce pour nous dire qu'il ne peut pas aller plus loin avec un rapport unanime et très fort qui est sorti de la commission qui avait le mandat d'initiative et qui dit: Il faut absolument que le ministère du Travail...
**(12 h 20)**La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): ...un instant, un instant!
M. Khadir: ...revoie la...
La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Un instant, M. le député! Un instant, s'il vous plaît. Est-ce qu'il y a consentement pour permettre à M. le député de Mercier de poursuivre pour une minute? Votre temps est écoulé, M. le député.
Je reconnais maintenant le prochain intervenant et je cède la parole à M. le député de Verchères.
M. Stéphane Bergeron
M. Bergeron: Mme la Présidente, je suis conscient du fait que des propos sont tenus en cette Chambre, qui dérangent. Et je pense qu'il est de bon aloi qu'en ce parlement nous prononcions, à des moments particuliers, des paroles qui puissent déranger. Lorsqu'on travaille pour le bien commun, c'est clair qu'on dérange. Alors, j'accueille évidemment les propos de mon collègue de Mercier. C'est clair qu'il y a eu, dans le cadre de ces travaux de la Commission de l'économie et du travail, encore une fois, des propos qui dérangeaient. Et ce qui était un peu le défi des membres de la commission, c'était de parvenir, malgré nos divergences de points de vue, malgré nos divergences idéologiques, de parvenir à un rapport qui puisse être unanime de telle sorte d'amener le gouvernement à apporter des changements. Or, nous en sommes arrivés à un rapport unanime qui, au moins sur deux éléments, réclame des ajustements sur la notion d'employeur et la notion d'établissement. Et je crois qu'il y a, même à travers le débat d'aujourd'hui, unanimité quant à la nécessité de procéder à ces ajustements.
Mme la Présidente, ce furent des travaux qui se sont échelonnés pendant des mois, qui furent passionnants, qui sont nés au départ d'une motion unanime de cette Assemblée, adoptée le 22 septembre 2010, et qui se lisait comme suit:
«Dans la perspective d'avoir un code du travail qui reflète les nouvelles réalités du monde du travail, que l'Assemblée nationale demande au gouvernement du Québec d'étudier la possibilité de moderniser le Code du travail, particulièrement en ce qui concerne les dispositions anti-briseurs de grève, afin notamment de tenir compte de l'impact des nouvelles technologies.» À la lumière de cette seule motion, Mme la Présidente, il aurait été superflu, pour ainsi dire, de faire... de tenir les travaux que nous avons tenus pendant des mois, puisqu'il y avait un ordre de la Chambre de procéder à la modernisation des dispositions anti-briseurs de grève du Code du travail.
Malgré tout, devant la présentation de pétitions, devant le conflit qui perdurait au Journal de Montréal, après avoir vécu celui du Journal de Québec, il nous apparaissait que les dispositions qui avaient été mises en place en 1977, visant à prémunir les syndicats contre des manoeuvres déloyales de la part des patrons par l'embauche de briseurs de grève, n'étaient plus adaptées aux réalités contemporaines du monde du travail, Mme la Présidente. Peut-être les dispositions en 1977 étaient-elles tout à fait au goût du jour. On constatait à l'époque qu'il y avait un déséquilibre entre le patronat et les syndicats en termes de relations de travail et que, si on veut que la partie syndicale puisse se faire entendre, il faut que la partie syndicale puisse avoir un véritable rapport de force avec le patronat. Or, lorsque le patronat remplaçait d'office les employés en grève par des travailleurs de remplacement, des briseurs de grève... des briseurs de grève, Mme la Présidente, le rapport de force était, de fait, faussé.
Alors, le Québec s'est montré très progressiste, en termes de lois du travail, en 1977, en introduisant les dispositions antibriseurs de grève. Alors, si ces dispositions-là, en 1977, étaient de mise, nous avons constaté, avec le conflit du Journal de Québec et le conflit du Journal de Montréal, que tel n'était plus le cas. Et c'est fort simple, Mme la Présidente, puisque, malgré le fait que les employés du Journal de Montréal étaient en grève, le journal continuait à être produit et non seulement il continuait à être produit, mais les propriétaires se vantaient même d'une augmentation du tirage. Alors, c'est dire, Mme la Présidente, que les dispositions qui devaient prévoir un rapport de force entre les patrons et les syndiqués ne s'appliquaient plus, n'avaient plus d'effet puisqu'il n'y avait pas de rapport de force. Malgré la grève, le journal continuait à être produit, continuait à être vendu et le tirage augmentait.
Alors, à la lumière de ces exemples, la Commission de l'économie et du travail, dans la foulée de la motion adoptée par l'Assemblée nationale, a adopté à son tour, le 8 décembre 2010, la motion suivante:
«Que, dans le contexte du conflit de travail qui sévit présentement au Journal de Montréal et des pétitions qui ont été déposées à l'Assemblée nationale, la Commission de l'économie et du travail se saisisse d'un mandat d'initiative, en vertu de l'article 149 du règlement, portant sur la modernisation des dispositions anti-briseurs de grève prévues au Code du travail.» Et là nous avons entrepris un travail des plus fascinants, Mme la Présidente. Nous avons entendu le point de vue bien sûr des représentants syndicaux, mais également le point de vue des représentants patronaux, le point de vue d'experts en matière de relations de travail, qui sont venus éclairer les membres de la commission sur la réalité aujourd'hui, en 2010-2011, la réalité des relations de travail et de l'application des dispositions antibriseurs de grève du Code du travail.
Or, qu'avons-nous appris, Mme la Présidente? Bien, nous avons appris ce dont nous nous doutions beaucoup, que, dans le contexte de grands consortiums... dans le contexte de grands consortiums, une composante du consortium peut bien voir ses employés en grève ou en lock-out, mais que ce consortium peut demander à d'autres composantes du consortium de faire le travail pour permettre à la composante en grève de poursuivre à peu près normalement ses opérations. Donc, nécessité de réfléchir à la notion d'employeur. Si l'employeur ultimement est le consortium et non pas simplement la composante du consortium, on se retrouve encore une fois avec des dispositions antibriseurs de grève biaisées, qui ne sont plus vraiment applicables et qui ne permettent plus un véritable rapport de force dans les relations de travail, donc qui créent un déséquilibre.
Autre constat dont nous nous doutions aussi, Mme la Présidente, c'est concernant les nouvelles technologies. Les nouvelles technologies font en sorte qu'une entreprise peut être en grève et avoir, à toutes fins utiles, ses portes fermées et continuer à opérer puisque, s'il s'agit d'une entreprise opérant de façon virtuelle ou opérant partiellement de façon virtuelle, une bonne partie du travail peut être effectuée ailleurs. On n'a qu'à envoyer par courriel, par Internet les informations, le matériel, et l'affaire est dans le sac, le tour est joué, l'affaire est ketchup, Mme la Présidente.
**(12 h 30)** Or, le résultat de cela, Mme la Présidente, c'est qu'encore une fois les dispositions antibriseurs de grève mises en vigueur... entrées en vigueur en 1977 s'avèrent, là encore, inopérantes, sans dent, faisant en sorte que le rapport de force n'existe plus, et il y a là déséquilibre, Mme la Présidente. Donc, nécessité également de réfléchir, de mettre à jour les dispositions touchant la notion d'établissement, établissement étant le lieu de travail. Si le lieu de travail est fermé ou techniquement fermé parce qu'il y a une grève... On l'a bien vu dans le cas du Journal de Montréal, qui continuait à opérer, qui continuait à publier et qui voyait même son tirage augmenter. Bien que le lieu de travail soit officiellement fermé, ça n'empêchait pas l'entreprise d'opérer presque normalement, en fait, plus que normalement, puisque le tirage a augmenté. Donc, le rapport de force n'existe pas. Le rapport est déséquilibré. Nécessité, donc, de réfléchir à la notion d'établissement.
Qu'est-ce qu'on a entendu d'autre aussi, Mme la Présidente? Bien, on a entendu des propriétaires, des entrepreneurs, des représentants du monde patronal nous dire: Écoutez, écoutez, écoutez, si vous ouvrez le Code du travail, vous ne pouvez pas ouvrir à la pièce, là, il faut ouvrir tout le Code du travail, parce que, là, on va créer un déséquilibre. Mme la Présidente, je me permets de vous signaler respectueusement qu'après l'élection de 2003 le gouvernement a procédé à l'ouverture de l'article 45 du Code du travail. Je n'ai pas entendu aucun représentant du patronat, à ce moment-là, dire: Écoutez, si vous ouvrez le Code du travail, il faut l'ouvrir au complet parce qu'autrement ça va être déséquilibré. Je pense que le patronat, à ce moment-là, était très content que le gouvernement apporte des modifications à l'article 45. Ils n'ont pas dit un mot, ils n'ont pas exigé qu'on ouvre l'ensemble du Code du travail. Tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes. Ils s'en sont satisfaits, tout à fait, sans problème. Or, pourquoi cette fois-ci? Pourquoi, lorsqu'on veut réviser des dispositions du Code du travail touchant les travailleurs, touchant les syndicats, là, faudrait-il rouvrir l'ensemble du Code du travail? Quand on ouvre le Code du travail à l'avantage du patronat, c'est correct, pas besoin de rouvrir l'ensemble du code, mais, lorsqu'on ouvre l'ensemble du code, simplement pour rééquilibrer une situation qui désavantageait les syndicats, là, tout à coup, là, il faudrait rouvrir tout le code, parce que, sans ça, ça va créer un déséquilibre.
Mme la Présidente, je réitère que la proposition, la recommandation de cette commission vise à rééquilibrer une situation qui était devenue déséquilibrée et qu'il n'y a pas lieu pour autant de rouvrir l'ensemble du Code du travail parce qu'on l'a déjà rouvert au désavantage des syndicats et qu'il était maintenant temps de rééquilibrer à la faveur des syndicats, Mme la Présidente.
Mais nous avons appris aussi un certain nombre de choses fort intéressantes, notamment sur l'utilisation du travail bénévole. On a vu ça dans l'hôtellerie, Mme la Présidente. On a vu ça dans le secteur funéraire. On voit ça, par exemple, au Repos Saint-François, à Montréal, où les employés sont en grève, mais, malgré tout, l'entreprise opère comme si de rien n'était. Là, on se demande: Comment ça se fait que ça réussit à opérer comme si de rien n'était? Et là on nous explique que ce sont des bénévoles qui font le travail. Alors, Mme la Présidente, c'est quand même extraordinaire, cette abnégation de la part de tant de bénévoles qui permettent aux opérations de ces entreprises de se poursuivre comme si de rien n'était.
Alors, nous nous sommes penchés sur cette question. Malheureusement, je le dis, c'est mon point de vue que j'exprime, Mme la Présidente, c'est le mien que je vous exprime à l'instant, mais j'aurais aimé que nous puissions effectivement élargir notre recommandation sur la notion de bénévole. Nous avions même, dans le libellé préliminaire, une proposition visant à faire en sorte de circonscrire la notion de bénévole à ce qui constitue, dans notre société, une définition acceptable de ce qu'est un bénévole. Par exemple, dans une entreprise familiale, on accepte que des membres de la famille puissent contribuer au bien de l'entreprise. Mais on ne peut pas s'imaginer que tout un staff, excusez-moi l'anglicisme, d'une entreprise puisse être constitué de bénévoles et permettre à l'entreprise de poursuivre, jour après jour, ses opérations comme si de rien n'était, en pensant qu'on va être assez valises pour penser qu'il n'y a pas rémunération ou rétribution de quelque façon que ce soit, Mme la Présidente, contournant, ce faisant, les dispositions antibriseurs de grève du Code du travail.
Alors, bien que ça ne fasse pas l'objet d'une recommandation précise, Mme la Présidente, il y a des observations, dans le rapport, extrêmement pertinentes concernant le travail bénévole. Et j'aime à penser que la ministre du Travail, lorsqu'elle examinera le rapport, ne se contentera pas uniquement de la recommandation extrêmement importante que nous avons adoptée unanimement, mais qu'elle s'intéressera aussi aux différentes dispositions, aux différents éléments du rapport, aux observations des membres de la commission, notamment concernant l'utilisation du travail bénévole.
Nous avons également fait des observations concernant le temps de réponse de la Commission des relations de travail, concernant des pouvoirs accrus aux enquêteurs du ministère du Travail. Il y a là également des éléments sur lesquels, je pense, la ministre du Travail devrait se pencher, parce que, que ce soit quant aux amendes, qui sont devenues un peu dérisoires aujourd'hui lorsqu'il y a infraction aux dispositions... au Code du travail, aux lois du travail, que ce soit concernant les délais de prise en considération des procédures en vertu du Code du travail, il y a là, encore une fois, Mme la Présidente, au-delà de la seule recommandation adoptée dans le contexte que j'évoquais tout à l'heure, Mme la Présidente... En dépit de nos divergences de point de vue, de nos divergences idéologiques, nous avons adopté une recommandation unique, importante, fondamentale, mais nous avons réussi, malgré tout, à formuler pas des recommandations, mais des observations de façon unanime, des observations sur le travail bénévole, Mme la Présidente, sur les pouvoirs accrus aux enquêteurs du ministère du Travail, sur le temps de réponse de la Commission des relations du travail, et je crois qu'à la lumière de ces observations pertinentes et unanimes de l'ensemble des membres de la Commission de l'économie et du travail, tant du côté ministériel que du côté de l'opposition, la ministre doit également examiner les dispositions du code touchant ces questions particulières.
Alors, Mme la Présidente, j'aimerais terminer ma participation, mon intervention dans le cadre de ce débat restreint sur le rapport de la Commission de l'économie et du travail sur les dispositions antibriseurs de grève du Code du travail par des remerciements, des remerciements à l'ensemble des membres de la commission, au président qui a amorcé les travaux de cette commission, le député de Marquette, et le président qui a complété les travaux de cette commission, le député de Chomedey.
Je veux remercier l'ensemble des collègues du parti ministériel qui ont participé aux travaux de cette commission, les collègues de l'opposition. Et je pense tout particulièrement à mon collègue de Beauharnois, mon collègue de René-Lévesque, mon collègue de Lac-Saint-Jean, les collègues qui ont pris part à ces travaux et qui ont, je pense, travaillé de façon extrêmement constructive pour qu'en dépit de nos divergences d'opinions et de nos divergences idéologiques nous puissions faire avancer le droit du travail au Québec, de telle sorte de rééquilibrer les relations de travail et de préserver le rapport de force nécessaire qui doit exister dans les relations de travail entre le patronat et les syndicats.
Je veux remercier aussi, Mme la Présidente, les membres de la commission, qui ont été d'une efficacité absolument extraordinaire et d'une patience d'ange, compte tenu du caractère pour le moins délicat et difficile, sensible du dossier sur lequel nous nous penchions.
Je veux remercier tous les témoins qui, directement, en comparaissant en commission, ou en nous faisant parvenir leurs observations par écrit, ont éclairé, enrichi la réflexion des membres de la commission et nous ont permis d'arriver à ce résultat.
**(12 h 40)** Je veux remercier les représentants syndicaux, les représentants patronaux, les experts qui ont été consultés et qui ont eu la générosité de bien vouloir éclairer nos travaux. Vous ne m'en voudrez pas, Mme la Présidente, en terminant, de remercier tout aussi chaleureusement la toute petite équipe, mais ô combien compétente équipe qui nous accompagnait, du côté de l'opposition officielle, dans le cadre de ces travaux.
Alors, sur ce, Mme la Présidente, je termine en réitérant le voeu très cher que la ministre du Travail ne fasse pas comme trop souvent il arrive: de prendre un rapport et de le mettre sur une tablette. Ce rapport est le fruit de nombreuses heures de travail non seulement de la part des membres de la commission, mais du personnel de la commission, mais aussi des groupes qui sont venus comparaître et qui se sont préparés consciencieusement pour enrichir la réflexion des parlementaires.
Alors, j'ose espérer que la ministre prendra en compte ce rapport, et plus particulièrement la recommandation unanime, mais aussi les observations extrêmement pertinentes qui ont été formulées, également de façon unanime, dans ce rapport sur le travail bénévole, sur les délais, Mme la Présidente, les délais de temps de réponse de la Commission des relations de travail, et sur les pouvoirs accrus aux enquêteurs du ministère du Travail. Sur ce, Mme la Présidente, je vous remercie.
La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, je vous remercie, M. le député de Verchères. Y a-t-il d'autres interventions? Pas d'intervention sur ce sujet. Alors, cela met fin au débat sur le rapport de la Commission de l'économie et du travail relatif au mandat d'initiative sur la modernisation des dispositions antibriseurs de grève prévues au Code du travail. M. le leader du gouvernement.
M. Gautrin: Je vous remercie, Mme la Présidente. Auriez-vous l'amabilité d'appeler l'article 25 du feuilleton, s'il vous plaît?
Projet de loi n° 22
Prise en considération du
rapport de la commission
qui en a fait l'étude détaillée
La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): À l'article 25 du feuilleton, l'Assemblée prend en considération le rapport de la Commission de l'aménagement du territoire sur le projet de loi n° 22, Loi modifiant le Code civil concernant certains cas de résiliation du bail d'un logement. Je suis prête à entendre la prochaine intervenante, et c'est la ministre responsable des Aînés.
Mme Marguerite Blais
Mme Blais: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Le projet de loi n° 22 modifiant le Code civil concernant certains cas de résiliation du bail d'un logement a franchi une autre étape la semaine dernière, lors de son adoption de principe et de son étude détaillée en commission parlementaire.
Lorsque j'ai déposé le projet de loi n° 22, le 3 juin dernier, on m'a demandé... Je me souviens très bien, c'était la députée de Crémazie qui m'a demandé de procéder à des consultations particulières. Et c'était un souhait que j'avais, Mme la Présidente, parce que je sentais qu'il fallait déjà aller plus loin avec ce projet de loi. Et les consultations particulières ont été extrêmement fructueuses. C'est un processus d'étude du présent projet de loi. Ces consultations ont été l'occasion de faire valoir différents points de vue.
Entre autres, on a reçu 16 mémoires. Il y a 13 groupes, dont l'Association québécoise de défense des droits des personnes retraitées et préretraitées, le réseau FADOQ, la Corporation des propriétaires immobiliers du Québec, l'Association des propriétaires du Québec et le Regroupement québécois des résidences privées pour aînés, pour ne nommer que quelques groupes. Je tiens à réitérer mes plus sincères remerciements aux experts ainsi qu'à tous les organismes, les représentants qui, tout au long de ces consultations, nous ont fait part de leurs précieux commentaires et de leur expertise. Ça nous a permis d'ajuster et d'améliorer le présent document.
J'aimerais remercier aussi ma collègue de Jeanne-Mance--Viger pour son point de vue très éclairant durant la commission particulière, étude article par article, parce qu'elle a assisté, entre autres, au projet de loi n° 16, et, parfois, ça nous permettait d'avoir des avis de concordance pour être en mesure d'arrimer le projet de loi n° 22 avec le projet de loi n° 16.
Mme la Présidente, je reconnais que la première mouture du texte, et je tiens à le dire, la première mouture du texte ne me satisfaisait pas, malgré que la première mouture du texte de loi eut été appuyée par la FADOQ et eut été appuyée par la conférence régionale des tables. Mais, à l'intérieur de moi, dans mon for intérieur, je me disais qu'on pouvait sûrement aller plus loin. Et c'est pour ça que je trouve l'exercice d'une consultation particulière comme étant quelque chose d'extrêmement positif parce que ça nous permet d'aller plus loin, ça nous permet parfois d'écouter sa petite sonorité intérieure et de pouvoir pousser le projet de loi, d'écouter les collègues et de se dire: Oui, j'avais probablement raison; dans tel et tel endroit, on peut améliorer le projet de loi.
Et le projet de loi a été drôlement amélioré et, même, je dirais qu'il a été beaucoup réécrit. Quand nous avons fait l'adoption de principe, Mme la Présidente, vous étiez là, et j'ai mentionné mes intentions d'apporter des amendements majeurs lors de l'étude détaillée. Et j'ai, entre autres, apporté un des amendements. C'est qu'on est partis de trois mois à deux mois. Ça semble peut-être anodin, un mois de moins, mais c'est beaucoup, c'est beaucoup pour des personnes vulnérables. Et je peux vous dire que c'est également beaucoup pour des associations de propriétaires, parce que les associations de propriétaires consentaient à trois mois, mais ils trouvent beaucoup plus difficile deux mois. Mais, pour nos personnes vulnérables, je pense qu'on vient davantage les protéger. Donc, deux mois. Si, dans l'intervalle du deux mois, le logement est reloué, la personne est libérée de son logement. Donc, on a quand même préservé un équilibre entre les associations de propriétaires et entre les personnes vulnérables, que ce soient les aînés ou que ce soient les autres catégories qui sont touchées par le projet de loi n° 22.
Nous avions remarqué, Mme la Présidente, durant les consultations particulières, que, bien souvent, il y avait, dans la pratique, quelque chose qui nous semblait généralement observé chez une majorité de propriétaires qui s'entendaient avec leur locataire qui doit faire face à des situations particulières afin de mettre fin au bail avant la fin du délai d'avis prévu par la loi, sans égard au délai, et c'est la raison pour laquelle on devait aller plus loin dans le projet de loi. Ensuite, ce projet de loi vient préciser que la résiliation de bail est possible pour la personne aînée qui, en raison de son état de santé ou de sécurité, doit déménager dans un lieu où elle pourra recevoir des soins infirmiers ou des services d'assistance personnelle, et ce, peu importe le lieu d'hébergement. Je pense que ça aussi, c'est une avancée qui est majeure.
Plus clairement, Mme la Présidente, nous avons ajouté un motif qui permet ainsi la résiliation du bail sur la base de l'état de santé de la personne aînée lorsque celle-ci doit déménager pour assurer sa santé et sa sécurité. Alors, l'état de la santé de la personne devient déterminant pour permettre la résiliation du bail.
Nous avons également remplacé, Mme la Présidente, la notion de foyer d'hébergement par des termes plus actuels. Et on s'en rendait compte durant la consultation particulière, ce n'est pas un terme qui était actuel. On a voulu arrimer la terminologie avec le projet de loi n° 16. Ainsi, les personnes âgées qui sont visées par celle-ci, qui sont admises de façon permanente dans un centre d'hébergement et de soins de longue durée, dans une ressource intermédiaire, dans une résidence privée pour aînés où lui sont offerts des soins infirmiers ou les services d'assistance personnelle que nécessite son état de santé ou dans tout autre lieu d'hébergement, quelle qu'en soit l'appellation, où lui sont offerts de tels soins ou services, qu'il réside ou non dans un tel endroit au moment de son admission... Une autre avancée tout à fait majeure.
**(12 h 50)** De plus, ce projet de loi oblige le locateur à distinguer, dans l'annexe 6 du formulaire de bail, les coûts qui sont liés au logement des coûts liés aux services rattachés à la personne même du locataire. Ainsi, lorsque le locataire doit résilier son bail dans des situations spécifiques déjà mentionnées dans cette Chambre, il n'est tenu qu'au paiement de la partie du loyer afférente aux coûts des services qui se rattachent à sa personne même... qu'à l'égard des services qui lui auront été fournis avant qu'il quitte son logement.
Mme la Présidente, il y a quelque chose qui me chicotait beaucoup depuis même le dépôt du projet de loi n° 22, le 3 juin denier, c'était toute la notion des frais afférents. Je l'ai mentionné et je vais le redire, j'avais été tellement marquée et même stigmatisée pendant la consultation publique avec toute cette notion «les morts mangent»-- parce que, lorsqu'une personne décède, c'est toujours la succession, les héritiers qui doivent financer, qui doivent régler toute la question des frais afférents, et ça, ça pouvait durer trois mois -- que nous l'avons réglée. Maintenant, lors d'un décès, il n'y a plus de frais afférents.
Et non seulement j'ai voulu le régler pour les décès, Mme la Présidente, mais je me suis dit: On va régler la question une fois pour toutes pour toutes les situations, c'est-à-dire que, dorénavant, on vient d'enlever un poids énorme aux aînés, aux familles qui sont souvent aux prises avec cette difficulté de devoir payer les frais afférents. Même si le ministre des Finances avait consenti, dans le dernier budget, et à compter du 1er juillet dernier, que les personnes qui étaient hébergées en centre d'hébergement et de soins de longue durée ou en ressources intermédiaires puissent obtenir un montant jusqu'à hauteur de 650 $ par mois pour compenser le loyer, il n'en demeure pas moins que les frais afférents étaient toujours rattachés à cette question de bail, et c'était en quelque sorte extrêmement fatigant.
Alors, pour moi, c'est une avancée majeure qu'il n'y ait plus de frais afférents et qu'on puisse vraiment distinguer entre le bail et l'annexe au bail: l'annexe au bail, les frais qui sont rattachés à la personne; le bail, c'est le coût du logement. Et puis qu'une fois pour toutes on ne parle plus de cette question de frais afférents et qu'on puisse soulager les personnes qui sont vulnérables.
En terminant, Mme la Présidente, vous savez, on vient en politique pour prendre des décisions, et les décisions ne sont pas toujours faciles à prendre. Et je vais dire que Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve a merveilleusement bien travaillé avec moi. On a fait avancer ça rondement, l'étude détaillée. On s'est assises deux fois, et il n'y avait pas question qu'on tergiverse puis qu'on palabre pendant des heures de temps sur des questions qui nous semblaient tout à fait logiques. Alors, on s'est assises ensemble, tout le monde était là, et nous avons décidé que, pour nos aînés et pour les personnes vulnérables, nous devions poser des gestes qui vont marquer l'histoire pour les prochaines années et qui vont surtout soulager un grand nombre de nos aînés vulnérables, un grand nombre de familles et aussi d'autres personnes, dont les personnes qui deviennent handicapées et qui doivent déménager, les personnes qui obtiennent un logement à loyer modique, les personnes aussi qui sont victimes de violence conjugale ou d'agression sexuelle.
Donc, en terminant, je veux remercier évidemment mes collègues qui ont été présents durant cette étude détaillée, qui m'ont beaucoup soutenue, qui m'ont apporté leur réconfort et qui m'ont dit: N'aie pas peur, fonce, on est là pour ça dans la vie, quand on est élus, pour faire la différence. Et je crois que ce projet de loi va faire la différence dans la vie de nombreuses personnes. Et je veux remercier la députée d'Hochelaga-Maisonneuve pour sa précieuse collaboration. Merci beaucoup, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, je vous remercie, Mme la ministre. Je cède maintenant la parole à Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve et porte-parole du dossier des aînés.
Mme Carole Poirier
Mme Poirier: Merci, Mme la Présidente. Alors, écoutez, ça me fait plaisir d'intervenir à cette prise en considération du projet de loi n° 22 qui est venu répondre à un engagement, engagement que la ministre des Aînés avait pris à maintes reprises de venir changer le portrait des clauses de bail pour les aînés qui doivent, par leur état de santé, quitter leurs logements pour aller dans une résidence, pour aller dans un CHSLD, pour aller dans un hébergement où il y a des soins de santé.
Alors, la ministre l'a dit d'entrée de jeu, et je vais reprendre ses mots, au dépôt de son projet de loi, elle savait quelle devait aller plus loin. Elle nous dit aussi que sa première mouture ne la satisfaisait pas. Bien, nous non plus, ça ne nous satisfaisait pas, Mme la Présidente. Ça ne nous satisfaisait pas du tout -- et c'est d'ailleurs étonnant et il faut souligner que la ministre l'a dit d'emblée -- ce projet de loi là ne répondait pas du tout aux engagements qu'elle avait pris, mais même pas du tout. Et, ce qui est important, c'est qu'autant celle qui était la porte-parole aux Aînés avant moi et moi-même par la suite on a fait en sorte de dire à la ministre: Il nous en faut plus. Il en faut plus parce que ça, ce n'est pas suffisant. Il faut faire en sorte que ce projet de loi là réponde à un besoin existant, ce à quoi le projet de loi de quatre articles...
Et je peux vous dire, Mme la Présidente, c'est un projet de loi de quatre articles qui est devenu 10 articles, et le seul qu'on n'a pas changé, c'est l'article 4 de la mise en vigueur. C'est le seul qu'on n'a pas modifié. On a réécrit complètement ce projet de loi là. On l'a réécrit pour une seule et unique raison, c'est la volonté que l'on avait de faire en sorte que les aînés... et la promesse de la ministre puisse répondre à ce qu'elle s'était engagée, mais aussi à ce que les groupes nous ont dit en consultations particulières.
Mme la Présidente, quand la ministre nous dit, et je répète, que sa première mouture ne la satisfaisait pas, on pourrait se demander, à ce moment-ci, pourquoi elle l'a déposé. Pourquoi? Pourquoi déposer quelque chose qui ne la satisfaisait pas? Bien, je comprends qu'elle l'a fait pour pouvoir aller chercher les besoins auprès de son propre gouvernement. Dans le fond, l'opposition, les groupes tout entiers ont appuyé sur des demandes que la ministre a été chercher auprès de son gouvernement après. C'est quand même le jeu inverse de ce qu'on connaît d'habitude. Mais elle l'a fait, elle l'a fait. Et la dynamique qu'on a vécue en article par article, puisque c'est de ça qu'on parle aujourd'hui, a fait en sorte qu'il s'est déposé 10 amendements, 10 nouveaux articles... je dirais, oui, 10 amendements et qu'on a réécrit effectivement totalement ce projet de loi là pour qu'il réponde à quelques principes.
Et ces principes-là, Mme la Présidente, sont très importants, parce que, lorsqu'on est une personne âgée et que l'on doit quitter son logement parce qu'on est malade, parce qu'on n'est plus en mesure d'habiter le logement où on est... Moi, je regarde dans Hochelaga-Maisonneuve, les gens sont au troisième étage, Mme la Présidente, ils ne sont plus capables de descendre les escaliers, ils ont besoin de soins, ils sont en perte d'autonomie, il faut que ces gens-là puissent changer de logement. Eh bien, dans la loi actuelle, dans le Code civil actuel, il faut payer trois mois. Il faut payer trois mois de loyer à son logement actuel et trois mois de loyer dans l'endroit où on s'en va, où il y a des soins de santé. Et ça, c'est quelque chose qu'on est venus éclaircir, l'endroit où on va.
Mais ce qu'on est venus faire aussi... Et la ministre s'était engagée, on se le rappellera, à un mois, que les gens n'aient pas à payer plus que un mois. Elle a obtenu de son gouvernement d'avoir deux mois. Mais je ne suis pas sûre qu'aujourd'hui la CORPIQ, qui appuyait son projet de loi n° 22 à l'époque, parce qu'elle ne touchait pas aux trois mois, doit avoir à peu près la même en-tête. Ça, c'est leur en-tête, en fin de semaine, de leur journal qui dit que la CORPIQ appuie le projet de loi n° 22. Je ne suis pas sûre, je ne suis pas sûre qu'aujourd'hui ils titraient la même chose, parce que la CORPIQ, quand elle venue en consultations, était d'accord avec le projet de loi parce que la ministre ne touchait pas aux trois mois. Là, ils ne sont pas contents. Bien, moi, je suis contente qu'ils ne soient pas contents. Parce qu'on a travaillé pour la clientèle que l'on représente, la ministre et moi, qui sont les aînés.
Alors là, Mme la Présidente, vous allez m'interrompre.
La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, je comprends que votre intervention n'est pas terminée?
Mme Poirier: Non.
**(13 heures)**La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, compte tenu de l'heure et afin de permettre, cet après-midi, le débat sur une affaire inscrite par les députés de l'opposition, le présent débat sur la prise en considération du rapport de la Commission de l'aménagement du territoire sur le projet de loi n° 22, Loi modifiant le Code civil concernant certains cas de résiliation du bail d'un logement, est ajourné. Vous pouvez à ce moment-là, Mme la députée, poursuivre votre intervention.
Et je suspends les travaux jusqu'à cet après-midi, 15 heures.
(Suspension de la séance à 13 h 1)
(Reprise à 15 h 2)
Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, on vous souhaite un bon après-midi. Veuillez vous asseoir. Nous allons poursuivre nos travaux.
Affaires inscrites par les
députés de l'opposition
Motion proposant que l'Assemblée
demande au gouvernement d'entreprendre
les démarches pour doter le Québec
de ses propres lois criminelles
Alors, mercredi après-midi, aux affaires du jour, c'est les affaires inscrites par la députée de l'opposition... ou les députés de l'opposition.
À l'article 67 du feuilleton, aux affaires inscrites par les députés de l'opposition, c'est Mme la députée de Joliette qui présente la motion suivante:
«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement du Québec d'entreprendre les démarches pour doter le Québec de ses propres lois criminelles, dont le Code criminel, qui refléteront les valeurs fondamentales des Québécoises et des Québécois.» Alors, conformément à ce qui a été énoncé antérieurement par la présidence, la répartition des temps de parole dans le cadre de ce débat restreint s'effectue comme suit: alors, je vais assez rapidement parce que vous le savez par coeur, 10 minutes sont réservées à l'auteur de la motion, sept minutes et... en réplique... 7 min 42 s, en tout cas sept minutes et un peu plus qu'et demie sont allouées au deuxième groupe d'opposition, 10 minutes sont réservées aux députés indépendants, et c'est une enveloppe qui est répartie s'ils me signalent qu'ils veulent intervenir. Mais un indépendant ne peut pas s'exprimer plus que cinq minutes si les autres ne parlent pas, pour éviter ce qui s'est produit hier. Le reste du temps est également partagé entre les formations. Il n'y a pas de limite de temps, sauf celle que vous décidez de vous imposer vous-mêmes. Mis à part les consignes mentionnées, les interventions ne seront soumises à aucune limite de temps. Je rappelle aux députés indépendants qui souhaitent intervenir, je viens de le dire, qu'ils le fassent, ils ont 10 minutes à partir du moment où nous allons commencer. Donc, je cède maintenant la parole à Mme la députée de Joliette pour son intervention. Mme la députée, à vous la parole.
Mme Véronique Hivon
Mme Hivon: Merci beaucoup, M. le Président. Je suis très heureuse qu'on ait la chance de débattre aujourd'hui de cette importante motion. C'est une motion qui est, selon moi, fondamentale pour la nation québécoise parce qu'elle traite vraiment d'un sujet qui va au coeur de la spécificité des valeurs d'une nation, c'est-à-dire ses lois criminelles. Les lois criminelles, comme ça, ça peut avoir l'air peut-être théorique, mais les lois criminelles, c'est ce qui touche profondément ce qu'on estime, comme société, comme peuple, comme nation, être acceptable ou être inacceptable. C'est ce qu'on juge pouvoir être toléré de ce que l'on juge pouvoir être interdit.
Alors, c'est un sujet qui, oui, me tient particulièrement à coeur, dont je parle d'ailleurs très souvent. Et je suis très heureuse que, pour une fois, on ait la chance de faire ce débat fort important ici même, au salon bleu, à l'Assemblée nationale. Et je pense que tout le monde ici, tous les parlementaires aujourd'hui devraient voter en faveur de cette motion. Et je vais expliquer, bien sûr, pourquoi dans les prochaines minutes.
C'est certain que, pour la souverainiste que je suis, et je le rappelle très souvent ces temps-ci avec tout le débat qui nous occupe, notamment sur C-10 et sur le registre des armes à feu, le fait que le Québec ne contrôle pas toutes ses lois en matière criminelle, qu'il ne contrôle pas la loi, par exemple, sur le système de justice pénale pour les adolescents, la Loi sur les drogues, bien sûr d'abord et avant tout son Code criminel, le fait qu'il n'ait pas compétence dans le domaine, c'est certain que c'est un puissant argument qui milite pour la souveraineté du Québec, parce que, comme je l'ai dit récemment, si on avait nos pleins pouvoirs, on ne serait pas dans le cul-de-sac dans lequel on est présentement, on n'en serait pas à essuyer des odieuses rebuffades sur rebuffades de la part du gouvernement fédéral quand le Québec exprime un consensus clair, quand le Québec, par la voie de son Assemblée nationale, exprime un consensus clair sur C-10, tout comme sur le registre des armes à feu. C'est certain que, si on avait nos pleins pouvoirs, on ne serait pas dans la position aussi humiliante que l'on est présentement parce que l'on pourrait agir conformément à nos valeurs, à notre spécificité et à nos modèles d'intervention.
D'ailleurs, trop souvent, on est dans une espèce de spirale de choc des valeurs. On est dans un choc des valeurs avec des intérêts et des prises de position qui sont complètement différentes, pour ne pas dire souvent diamétralement opposées à ce que l'on prône ici, au Québec, au sein de la société québécoise, comme approche.
Est-ce qu'aujourd'hui, M. le Président, on est dans un débat sur la souveraineté, comme l'a dit ce matin le premier ministre? C'est certain que, moi, toutes les occasions que j'aurais de faire le débat sur la souveraineté, je les prendrais, mais aujourd'hui on est dans un débat qui est autre. On est dans un débat où on devrait être tous capables de discuter ensemble et de voir où est le bien-fondé pour les Québécois par rapport à la motion qu'on présente, c'est-à-dire de voter en faveur pour que quelque chose qui est si profondément, je le répète, lié à notre manière d'être, à nos valeurs, à ce que l'on juge acceptable ou non puisse faire l'objet d'un consensus.
Évidemment, c'est un débat qui est particulièrement bien mis en valeur dans le conflit actuel sur C-10 et sur le registre des armes à feu, qui porte précisément sur les valeurs et sur les manières de faire du Québec, et on a vu encore hier comment la voix du Québec était bien peu de chose aux yeux du gouvernement fédéral. Il me semble que, même si on est fédéraliste, même si on est face à un gouvernement fédéraliste, il me semble qu'on devrait aussi être enclin à se dire que la nation québécoise a le droit de parler de sa voix et qu'elle a le droit, dans un domaine aussi fondamental, de voir ses manières de faire et ses valeurs respectées. Je ne vois pas comment on peut s'opposer à l'idée donc que le Québec devrait avoir ses pleins pouvoirs en matière de promulgation de lois criminelles.
S'il y a quelque chose de lié aux valeurs d'un peuple, M. le Président, il me semble que c'est bien de déterminer ce qui acceptable de ce qui ne l'est pas, ce qui est interdit, ce qui est toléré, ce qui doit être réprimé, ce qui, en fait, est moral de ce qui ne l'est pas. C'est ça, la base du droit criminel. C'est de savoir ce qui doit recevoir une sanction, ce qui doit être mis au banc des accusés dans une société, qui doit être mis à l'écart, quel comportement justifie l'opprobre des pairs dans une société, dans une nation.
Et je veux simplement rappeler que, au-delà de toutes ces questions qui, il me semble, devraient amener une réponse assez claire à la motion d'aujourd'hui, dans les entités fédératives, dans les fédérations, dans à peu près tous les cas, ce sont les entités fédérées qui ont le pouvoir en matière de lois criminelles. Pourquoi? Parce qu'à partir du moment où on pense qu'il est justifié qu'il y ait des entités fédérées, qu'il y ait des États subnationaux parce que, pour un certain nombre de domaines, il y a assez de différences que l'on devrait pouvoir exprimer pleinement ses différences en ayant un partage des compétences, bien, ce devrait être encore plus vrai quand on est dans une fédération où il y a une nation, une nation qui, je l'ajoute, a été reconnue par le gouvernement fédéral. On voit évidemment encore avec force, avec ce qu'on vit présentement, que ça n'a aucune résonance pour le gouvernement fédéral, puisque, pour un enjeu où il y a un tel consensus comme celui que l'on vit à l'heure actuelle, il n'y a aucune suite qui est donnée à cette réalité que le Québec est une nation. Mais encore plus qu'aux États-Unis, où les lois criminelles sont promulguées par les États, même chose en Australie, ici on est face à une nation propre au Québec qui a sa langue, qui a son identité, qui a ses valeurs, et on n'est même pas capables de faire valoir notre propre point de vue sur quelque chose d'aussi fondamental que de déterminer fondamentalement ce qui est jugé bien de ce qui est jugé mal, M. le Président.
**(15 h 10)** En plus, on est dans une spirale où, du fait qu'on n'a pas la capacité de mettre en place nos propres lois criminelles, on en est toujours aux prises avec d'éternels compromis avec les autres provinces. Et on est même, je vous soumettrais, soumis aux diktats de l'Ouest, aux diktats de l'Ouest qui a une approche totalement à l'encontre de notre vision ici, au Québec. Et d'ailleurs, encore ce matin, je voyais, dans un article d'Yves Boisvert... dans une chronique d'Yves Boisvert, dans La Presse, qui nous rappelait des faits importants: non seulement on n'a pas les mêmes valeurs, non seulement on est pris, parce qu'on n'a pas le contrôle sur nos lois criminelles, à toujours être dans une position de compromis, parce que le fédéral est en train de donner suite à ce que l'Ouest revendique, c'est-à-dire, pour reprendre l'expression qu'il privilégie tellement, d'être «tough on crime», donc de mettre de l'avant des mesures rétrogrades, comme on voit en ce moment avec C-10, des mesures idéologiques, mais en plus ça ne donne pas de résultat, alors qu'ici ce qu'on fait, ça donne des résultats.
Juste quelques faits sur les crimes violents, sur les jeunes délinquants, O.K.? On observe, en 2009, huit adolescents au Québec qui ont commis un homicide. Combien en Ontario? 16. Au Manitoba? 24. Et dans les autres provinces de l'Ouest? Huit ou neuf, donc le même nombre qu'au Québec mais pour des populations beaucoup plus petites. Et là on est en train non seulement de ne pas vouloir respecter le point de vue, les valeurs, la spécificité du Québec, mais on est en train d'aller complètement à l'encontre de la logique, à l'encontre de ce que nous montrent les faits, les statistiques, tout simplement, c'est-à-dire qu'au Québec on a un taux de criminalité et un taux de récidive beaucoup plus bas qu'ailleurs au Canada et surtout que dans l'Ouest, alors que c'est pour l'Ouest qu'on est en train de faire les modifications qu'on est en train de faire.
Donc, c'est non seulement une rebuffade, c'est non seulement un comportement odieux à l'égard de la nation québécoise, mais c'est un comportement qui va à l'encontre de la logique, qui va à l'encontre des faits, et ça, c'est tout à fait inacceptable. Et, si on pense, comme l'a dit un peu le ministre de la Justice hier, lors du débat d'urgence, que ce que l'on vit actuellement, c'est une question de conjoncture, c'est parce qu'en ce moment il y a un gouvernement très conservateur -- le ministre de la Justice l'a appelé le gouvernement du Reform Party au gouvernement fédéral -- si on pense que c'est ça, bien, je pense qu'il faudrait se détromper, parce que ce n'est pas la première fois -- et malheureusement je pressens que ce n'est pas la dernière fois -- que le Québec va voir ses positions en matière de justice criminelle mises de côté, comme elles le sont présentement avec les deux projets de loi qui sont devant nous, C-10 et le registre des armes à feu.
Je vais revenir sur un bon nombre d'exemples, dans le passé, qui nous montrent que ce n'est pas du tout quelque chose qui est conjoncturel. Mais, au-delà de ça, je pense aussi qu'il faut se projeter dans l'avenir. Il y a beaucoup de débats qui vont nous interpeller: on peut penser à celui sur la décriminalisation des drogues douces, on peut penser à celui sur notre comportement par rapport à la prostitution. Il y en a beaucoup, de ces débats, qui sont déjà présents dans la société et auxquels on ne pourra pas échapper. Et est-ce qu'on va encore devoir, comme nation, être soumis aux diktats de l'Ouest qui a des positions complètement différentes? Les sondages d'opinion le montrent constamment, M. le Président: il y a toujours un écart significatif, généralement d'une quinzaine de points, quand ce n'est pas plus, entre notre attitude par rapport à certains comportements, par rapport à l'attitude des Canadiens; encore plus si on tient compte spécifiquement des échantillons qui proviennent de l'Ouest.
Or, en ce moment, on voit à quel point on accorde du pouvoir à ces sous-groupes et à ces groupes qui prônent donc des attitudes beaucoup plus conservatrices qui, je le répète, donnent des résultats beaucoup moins bons que ceux que l'on connaît au Québec. Alors, effectivement, ce n'est pas une question de conjoncture. Et je veux le rappeler parce que, dans le dossier spécifique des jeunes contrevenants, en 2000-2001, alors que le gouvernement libéral... On sait notamment que le ministre de la Justice aime beaucoup le gouvernement... le Parti libéral fédéral, bien, je veux juste lui dire que ce n'est pas une question de conjoncture, parce que le Québec a dû se battre, en 2000, au moment où on a changé la Loi sur les jeunes contrevenants pour qu'elle devienne la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents. À ce moment-là, il y avait, encore une fois, des pressions de l'Ouest, il y avait une ministre qui s'appelait la ministre Anne McLellan, qui venait de l'Alberta. Et, encore une fois, on avait mis de l'avant des mesures tout à fait inappropriées comme une présomption de peine pour adulte pour certaines infractions.
Et, à cette occasion-là, eh oui, ce n'est pas une première, des ministres du gouvernement, Linda Goupil, Serge Ménard, étaient allés... et même avec le vice-président de l'Assemblée nationale, le député de Marquette, qui était critique à l'époque en matière de justice, qui occupait le poste que j'occupe aujourd'hui, ils étaient allés ensemble pour plaider la cause du modèle québécois et des valeurs québécoises. Est-ce qu'on était face à un gouvernement de Stephen Harper? Non. On était face à un gouvernement libéral de Jean Chrétien, et ça s'est produit. Et il y a eu une telle fermeture, M. le Président, qu'on a dû aller, au Québec, en renvoi. Il y a eu un renvoi devant la Cour d'appel pour contester les mesures, tellement elles frappaient de plein fouet nos valeurs et notre manière de faire. Et savez-vous quoi? On a eu gain de cause en vertu de la charte. On a dit que l'article 7 de la charte canadienne était violé par les dispositions et la présomption d'innocence qui n'était plus respectées et le fait de la proportionnalité de la peine avec le crime qui avait été commis. Donc, quand on parle de conjoncture, c'est un faux argument.
Même chose: on peut se rapporter aux années soixante-dix, débat sur l'avortement. Ce n'était pas Stephen Harper qui était aux commandes. Bien, encore une fois, choc des valeurs. Le Québec estimait qu'on ne pouvait pas conserver la criminalisation de l'avortement. Or, il était pris, encore une fois, dans une fédération, à devoir faire face aux diktats de l'autre nation et non pas à celle des valeurs de la société québécoise. Et encore une fois on n'a pas pu... ça a été très long avant que la question de l'avortement puisse arriver à satisfaire le Québec. On a même dû faire en sorte de donner des directives aux procureurs du Québec pour qu'ils n'appliquent pas certaines mesures du Code criminel parce qu'on estimait que ça allait trop à l'encontre des valeurs québécoises en matière d'avortement.
Autre argument qu'on nous sert, M. le Président, on nous dit: Ah! Ce n'est pas vrai, là, ce n'est pas vrai, c'est tout le monde au Canada, là, qui a des réserves par rapport à C-10. Il n'y a pas de spécificité du Québec. Les autres provinces, ils sont comme nous. Regardez, il y a plusieurs provinces qui ont dénoncé les coûts que ça allait représenter, C-10. Bien, justement, M. le Président, les provinces qui se sont prononcées, elles ne se sont prononcées que sur les coûts. Les provinces ne se sont pas prononcées sur le fond des choses, elles ne se sont pas prononcées sur les mesures, elles ne se sont pas prononcées sur les valeurs, elles ne se sont pas prononcées sur les modèles. Elles se sont prononcées, avec raison bien sûr, sur les coûts, mais on n'est pas sur un débat de fond où il y a une concomitance de vues avec les autres provinces sur la question des valeurs puis de comment on devrait aborder la justice criminelle au Canada. Mais non! Alors, c'est un autre argument qui nous est servi à tort par le gouvernement, parce que c'est le Québec qui porte ce débat-là et le Québec seul.
Bien sûr, est-ce que ça veut dire que les autres arguments, les arguments qui ont trait à l'administration de la justice, devraient être mis de côté? Bien non. Puis d'ailleurs j'inviterais le gouvernement... Si la question de la nation québécoise ne l'interpelle pas, si la question des valeurs et des manières de faire du Québec ne l'interpelle pas, j'aimerais qu'il soit au moins interpellé sur les impacts monstres, que le fait que de voir que le fédéral est responsable en matière de droit criminel et que le Québec est responsable de l'administration de la justice, c'est d'une incongruité totale. Pourquoi, M. le Président? Parce qu'on a des mesures qui sont déterminées par le gouvernement fédéral, des peines, des manières d'aborder la criminalité, des sanctions qui doivent s'appliquer automatiquement -- les peines minimales, c'est ça -- et qui ont des répercussions énormes quand on arrive au Québec, qui ont des répercussions parce que, oui, on est responsables de l'administration de la justice. Ça veut dire que c'est nous, après, qui devons mettre en place les prisons, qui devons supporter les coûts qui sont liés à ça.
Donc, j'aimerais ça qu'au moins sur cet aspect-là il se rende compte que ça n'a aucun sens, le système, tel qu'il est organisé aujourd'hui. C'est nous non seulement qui sommes responsables de l'administration de la justice, ce qui veut dire de recevoir les coûts, de devoir mettre en place les prisons qui sont requises, mais aussi c'est nous qui sommes responsables de déposer les accusations. Or, on est en train de faire des choses qui vont à l'encontre de ce que l'on souhaite comme peuple au Québec où il y a ce consensus.
**(15 h 20)** Donc, je les inviterais bien franchement à s'objecter au moins à ça et à dire: D'un simple point de vue logique, ce serait la moindre des choses que l'on puisse se doter de nos propres lois criminelles, parce que, quand on entend un ministre fédéral comme Vic Toews venir dire: Les coûts, ah, on ne peut pas vraiment les chiffrer, on sait que c'est quelques milliards pour le Canada, nous, on sait que c'est au moins 500 millions pour le Québec, les mesures qui sont dans C-10. Puis là il vient nous dire: Ah! on ne peut pas vraiment les chiffrer. Il va mettre le bâillon sur son projet de loi, puis on n'aura toujours pas connu les chiffres, obtenu les chiffres de ce que ça va nous coûter. Ça, c'est vraiment une attitude particulièrement respectueuse à l'endroit du Québec.
Mais, en plus, il nous dit: Bien, écoutez, c'est vraiment dommage, mais vous avez juste à couper ailleurs, en santé, en éducation, en aide sociale. Écoutez, c'est un non-sens total. Si on coupe en éducation puis en aide sociale, qu'est-ce que vous pensez quand on a une population qui est moins instruite, qui est plus pauvre? Bien, il va y avoir juste plus de criminalité. Alors, franchement, au-delà des valeurs, il y a la logique, et puis là ni les valeurs ni la logique ne sont respectées.
Donc, en terminant, M. le Président, je l'ai dit d'entrée de jeu, si on était souverains, on ne serait pas pris dans ce cul-de-sac dans lequel on est. Mais on est face à une question de valeurs, on est face à une question qui devrait faire consensus, que l'on soit fédéraliste ou souverainiste, parce que, si on croit dans la nation québécoise, on devrait se battre pour que quelque chose qui est tellement lié à sa spécificité puisse être pleinement reconnu et que donc on puisse avoir nos propres lois en matière de justice criminelle. Et, bien sincèrement, c'est assez désolant de voir l'attitude du gouvernement qui ne semble pas se préoccuper de ce fait-là, particulièrement dans le contexte que l'on vit présentement. C'est à se demander ce que ça va lui prendre pour comprendre à quel point ce serait bénéfique pour les Québécois de pouvoir se doter de leurs propres lois en matière criminelle, parce que c'est quelque chose fondamental. Et je pense qu'aujourd'hui on a l'occasion, M. le Président, de faire honneur aux Québécois, et à nos valeurs, et à notre nation. Merci beaucoup.
Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, je vous remercie, Mme la députée de Joliette, pour votre intervention. Et, pour la poursuite des débats sur cette motion à temps déterminé, je cède maintenant la parole à M. le ministre des Affaires intergouvernementales. M. le ministre, à vous.
M. Yvon Vallières
M. Vallières: Alors, je veux vous remercier, M. le Président. Alors, il me fait plaisir, cet après-midi, de prendre la parole sur cette motion de Mme la députée de Joliette. M. le Président, la motion que nous présente le Parti québécois aujourd'hui, à mon avis, était prévisible dans le contexte actuel. Évidemment, je pourrais me référer à cette stratégie de la formation politique de l'opposition officielle qui consiste toujours à exploiter, dans... peu importe le contentieux, toutes les situations propices pour faire valoir sa cause. Je pense que la députée de Joliette, d'ailleurs, ne s'en gêne pas du tout, elle l'a indiqué tantôt qu'elle est une souverainiste. Mais que chacune des occasions qui se présente en cette Assemblée serve à la promotion de la cause... et que parfois, je pense, on puisse être capables de discuter en s'élevant au-dessus de la nature partisane des formations politiques que nous représentons ici, je pense, serait à l'honneur également de tous ceux et celles qui y travaillent.
Enfin, le Parti québécois nous demande, M. le Président, en quelque sorte, de réécrire la Constitution simplement parce que le Québec n'est pas d'accord sur un projet de loi présenté par le gouvernement fédéral, qui concerne la modification de certains articles du Code criminel. M. le Président, il est facile de voir clair dans les intentions vraiment peu voilées du Parti québécois, mais ce n'est pas parce qu'on est en désaccord avec une loi qui est présentée par le gouvernement fédéral qu'on va réécrire la Constitution canadienne. Alors, M. le Président, je veux dire et être très clair, je veux vous assurer que le gouvernement du Québec n'a aucunement l'intention de procéder à un réaménagement à la pièce ou à la carte du partage des compétences législatives, comme nous propose actuellement le Parti québécois par cette motion.
Une voix: ...
M. Vallières: Oui. Alors, le député de Saint-Jean vient...
Le Vice-Président (M. Gendron): Non, non. S'il vous plaît!
Une voix: ...
Le Vice-Président (M. Gendron): Non, mais je veux tout simplement vous dire que j'ai eu la chance d'écouter l'exposé de la députée de Joliette d'une façon tout à fait sereine et calme, alors j'en attendrais autant pour la réplique du ministre qui nous parle. Chaque porte-parole doit porter ce qu'il affirme, mais il a le droit de l'avoir dans le silence. Alors, je demande votre collaboration. Alors, veuillez poursuivre.
M. Vallières: M. le Président, vos paroles sont de la musique à mes oreilles. Alors, il y a évidemment, M. le Président, je l'indiquais, une juridiction fédérale, au niveau du Code criminel, qui s'est toujours appliquée, avec une collaboration bien affirmée entre les provinces et le gouvernement fédéral. De tout temps, depuis 1867, cette collaboration existe. Et cette collaboration n'était pas du tout problématique, elle nous a, au contraire, permis de développer nos approches en collaboration avec le gouvernement fédéral, une approche qui tient compte de nos valeurs, qui tient compte de nos façons de faire, avec la caractéristique propre de notre nation.
Alors, qu'il s'agisse du registre des armes à feu ou encore de C-10 sur les jeunes contrevenants, est-ce que ça nous satisfait, M. le Président? La réponse est non, de ce côté-ci de la Chambre. C'est clair. Nous avons très clairement signifié notre désaccord sur l'approche qui est privilégiée actuellement par le gouvernement fédéral dans ces deux dossiers.
M. le Président, c'est le gouvernement fédéral qui, par ailleurs, a compétence pour légiférer en matière criminelle à travers tout le Canada. Les provinces, quant à elles, sont responsables de l'administration de la justice sur leurs territoires. Et, de façon générale, ça a donné de bons résultats. La conjoncture actuelle -- même si le terme déplaît à Mme la députée qui est marraine de la motion -- cette conjoncture actuelle, cependant, ne répond pas à nos attentes, non plus qu'à celles exprimées à l'unanimité, je veux le rappeler, par les membres de cette Assemblée nationale, par des motions. Et c'est une situation exceptionnelle, M. le Président, qu'on se mette tous d'accord, en haut de nos valeurs, là, des valeurs partisanes qu'on représente en cette Chambre, pour dire: On a un message à envoyer au gouvernement fédéral, et ce message a été très clairement envoyé par tous les parlementaires dans cette Chambre. Il n'en demeure pas, cependant... Il n'en demeure pas moins que la compétence fédérale ne saurait être exercée sans tenir compte de ses répercussions possibles, notamment sur la compétence provinciale.
Alors, ce n'est pas parce que nous ne sommes pas d'accord avec certains articles du Code criminel qu'il faut le rapatrier et avoir notre propre Code criminel en sol québécois. Mais ce que le Parti québécois nous dit aujourd'hui, M. le Président, c'est qu'à tout moment, si nous ne sommes pas d'accord avec le gouvernement fédéral, la façon de régler le problème, pour eux, c'est de faire la souveraineté. Parce que le plan du Parti québécois, M. le Président, c'est d'utiliser tous les moyens à leur disposition pour limiter le cadre constitutionnel canadien et rapatrier toutes les juridictions fédérales. Ça, c'est l'objectif d'un parti souverainiste. Et ça ne serait pas la première fois, M. le Président, que cette formation souhaite de la chicane, de la bisbille, une crise politique, pour enfin, finalement, pouvoir créer les conditions gagnantes pour un référendum maintes fois repoussé par les Québécois et les Québécoises.
Maintenant que cela est dit, M. le Président, j'aimerais rappeler à l'opposition que, lorsque notre gouvernement n'est pas d'accord avec les décisions que prend le gouvernement fédéral, nous n'hésitons pas à le dire et à défendre les intérêts du Québec. De notre côté, au gouvernement, nous sommes capables de dénoncer sans parler de la séparation à chaque fois et collaborer, quand c'est le temps, avec le gouvernement fédéral. D'ailleurs, nous avons fait des gains importants depuis le début de notre arrivée au pouvoir, dont récemment l'harmonisation de la TPS et de la TVQ, le pont Champlain, en mars dernier la signature d'Old Harry. Et il y a une longue liste d'ententes qui témoigne de cette capacité qu'on a à s'entendre sur plusieurs dossiers.
Je rappelle, M. le Président, nous avons fait des gains importants, mais nous allons continuer d'assumer nos responsabilités et de défendre les intérêts du Québec à Ottawa, au risque parfois -- oui, au risque parfois -- d'alimenter les objectifs souverainistes de l'opposition officielle. Non, nous ne reculerons pas pour autant devant la défense des valeurs du Québec et des intérêts du Québec. Nous l'avons d'ailleurs fait, M. le Président, dans le dossier qui nous occupe ici aujourd'hui, en cette Chambre.
Si nous sommes ici, face à cette motion présentée par le Parti québécois, c'est à l'origine parce que le gouvernement fédéral a présenté le projet de loi C-10 en matière de justice criminelle à la Chambre des communes un peu plus tôt cet automne. Je tiens à préciser que ce ne sont pas tous les éléments du projet de loi C-10 qui soulèvent un problème au niveau intergouvernemental. On le sait, c'est principalement la partie IV, qui concerne le système de justice pénale pour les jeunes contrevenants, qui cause le problème.
**(15 h 30)** Par l'entremise de mon collègue le ministre de la Justice et Procureur général du Québec, notre gouvernement a défendu auprès du gouvernement fédéral que, dans le cas du projet de loi C-10, il est essentiel que les gouvernements travaillent de concert. M. le Président, n'est-il pas exceptionnel d'avoir vu un ministre du gouvernement du Québec, comme l'a fait mon collègue, aller témoigner devant un comité de la Chambre des communes, soit le comité permanent de la justice et de la personne, afin de porter les intérêts du Québec à Ottawa? Je veux, M. le Président, le féliciter, féliciter mon collègue qui a exercé un travail de leadership dans ce dossier, qui est allé au front porter le message du Québec pour défendre nos intérêts.
Et le Québec, je l'ai dit plus tôt, détient déjà la compétence constitutionnelle d'administrer la justice sur son territoire, dispose de moyens importants pour administrer la mise en oeuvre des dispositions du Code criminel. Le partage des compétences constitutionnelles fait donc en sorte que les provinces et le gouvernement fédéral doivent collaborer si on veut que le système pénal et criminel fonctionne. Si l'un des deux ordres de gouvernement ne collabore pas, il y a alors impasse. La réforme du Code criminel entreprise par le gouvernement fédéral ne pourra donc pas fonctionner si ceux qui l'administrent s'y opposent.
Le Québec a toujours défendu le principe du développement social en matière de justice criminelle, dont la réadaptation et la réinsertion sont les principaux objectifs. Je m'explique encore mal comment l'actuel gouvernement fédéral refuse de prendre en compte les arguments probants, chiffrés, soutenus par des résultats, que le Québec lui a soumis. Nos résultats sont probants: le Québec affiche le taux de criminalité et de récidive parmi les plus bas de toute l'Amérique du Nord dans le contexte d'un code criminel fédéral.
Pour nous, il est clair qu'exiger un transfert de la compétence en matière criminelle vers le Québec n'est pas une solution, M. le Président. Le gouvernement du Québec n'a aucunement l'intention de procéder à un réaménagement à la pièce ou à la carte du partage des compétences législatives, comme je l'ai dit un peu plus tôt. La question du transfert de compétences législatives est complexe et doit être abordée avec l'ensemble des revendications constitutionnelles du Québec. Nous n'en sommes pas là. Le gouvernement du Québec peut très bien agir dans le cadre constitutionnel que nous connaissons.
Il faut tout de même voir ici que huit provinces, incluant le Québec, ont déjà manifesté leur intention d'exiger une compensation financière du gouvernement fédéral pour l'administration de la réforme engendrée par le projet de loi C-10: l'Ontario, la Colombie-Britannique, Terre-Neuve-et-Labrador, l'Île-du-Prince-Édouard, le Manitoba, le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse. Donc, le Québec ne fait pas cavalier seul dans cette cause, M. le Président. Alors, si le gouvernement fédéral refuse de payer, il devra trouver une solution s'il veut que le projet de loi C-10 soit mis en oeuvre.
Comme mon collègue le ministre de la Justice l'a si bien affirmé devant le Comité permanent de la justice et des droits de la personne, le gouvernement du Québec offre sa pleine collaboration au gouvernement fédéral pour l'aider à doter le Canada d'une véritable loi capable d'assurer de façon durable la sécurité de nos rues et de nos communautés. Les solutions proposées par le projet de loi C-10 ne rencontrent pas l'objectif avoué de sécurité publique ni les besoins réels de pénalisation des délinquants ni de prévention du crime et de la récidive. Il faut amener le gouvernement fédéral à réaliser qu'il fait fausse route.
Le gouvernement du Québec fera preuve de toute la vigilance nécessaire pour préserver le modèle québécois de justice pénale, fondé sur la réinsertion sociale et la réhabilitation, spécialement en ce qui concerne les jeunes contrevenants. Mais, pour nous, M. le Président, il est clair que la solution de l'impasse que nous vivons en ce moment ne passe pas par un référendum sectoriel portant sur le rapatriement du Code criminel. C'est clair, net et précis. Je veux cependant, M. le Président, vous indiquer que toute l'énergie sera... continuera d'être faite... d'être mise afin qu'on connaisse un dénouement heureux dans ce dossier et vous faire part, évidemment, qu'à ce jour l'attitude du gouvernement fédéral dans les deux dossiers dont j'ai fait mention est tout à fait décevante et parfois même inexplicable.
Alors, n'était-ce qu'à ce titre, évidemment, je ne veux pas, d'aucune façon, blâmer la proposition qui nous est faite aujourd'hui. Je pense qu'elle stimule le débat. Évidemment, cette motion aura l'occasion de... plusieurs collègues de s'exprimer, nous pourrons la voter tout à l'heure, mais je pense qu'à partir du moment où l'Assemblée nationale, une fois de plus, se saisit d'un dossier de cette nature... contribuera peut-être à faire comprendre davantage au gouvernement fédéral là où se situe le Québec. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, je vous remercie, M. le ministre, de votre intervention.
Une voix: ...
Le Vice-Président (M. Gendron): Oui, pour votre intervention ou l'article 34? Alors, article 213, alors, oui, allez.
M. Cloutier: M. le Président, alors j'ai une question pour le ministre. Le ministre nous dit que...
Le Vice-Président (M. Gendron): ...le ministre accepte de se faire poser une question? Alors, veuillez la prononcer.
M. Cloutier: Merci, M. le Président. Alors, le ministre nous a fait part, dans son intervention, qu'il n'avait pas l'intention de modifier à la pièce des amendements constitutionnels, mais que ça devait s'inscrire dans l'ensemble des demandes d'amendements constitutionnels du Québec. Alors, je lui demande: Quelle est cette liste d'amendements constitutionnels que souhaite faire le Québec face au gouvernement fédéral?
Le Vice-Président (M. Gendron): C'est un bel exemple, quand même, de respect de l'article, là, dans le sens que la question ne doit pas être trop longue, et la réponse doit être brève à la question posée. Alors, M. le ministre.
M. Vallières: Oui. Alors, M. le Président, la réponse va être très courte: Quand le fruit sera mûr, vous connaîtrez toutes nos intentions à ce sujet.
Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, je suis prêt à entendre le prochain intervenant, mais juste avant j'indique que les collègues indépendants se sont... ont indiqué...
Des voix: ...
Le Vice-Président (M. Gendron): S'il vous plaît! Les collègues indépendants ont indiqué qu'ils voulaient s'exprimer. Il y en aura trois. Donc, dans leur 10 minutes, ça veut dire que chacun pourra prendre 3 min 30 s. Et je cède maintenant la parole à M. le député pour son intervention. À vous.
M. Bernard Drainville
M. Drainville: Merci, M. le Président. M. le Président, que ce soit sur le registre des armes à feu ou sur le projet de loi C-10, nous assistons présentement à un conflit entre deux systèmes de valeurs, à un conflit entre deux sociétés, à un conflit entre deux nations. La nation québécoise, M. le Président, a, sur les questions de justice criminelle comme sur d'autres enjeux d'ordre moral, une opinion, une position qui est différente de celle qu'affiche l'autre nation, c'est-à-dire, comme l'appelle communément, le «rest of Canada», le ROC.
La question, M. le Président, est maintenant de savoir si cette différence d'opinion, si ce consensus que nous partageons si fortement au sein de la société québécoise sur cette question-là, si ce consensus-là qui nous anime et qui fait de nous une communauté à part, qui a une vision différente des choses, qui a une sensibilité différente des choses, si cette différence-là qui s'exprime sur le registre des armes à feu ou qui s'exprime sur C-10, si ce n'est qu'un phénomène épisodique. Est-ce que ce n'est qu'un phénomène épisodique, M. le Président, ce qu'on est en train d'observer présentement, ou est-ce que c'est un phénomène qui est appelé à se répéter de plus en plus souvent dans les années à venir? Et je vous dirais, M. le Président: Sur cette question-là, j'ai tendance à me fier à la loi du nombre, à la loi démographique.
Dans un système démocratique comme le nôtre, M. le Président, la capacité de faire valoir nos intérêts, la capacité de faire valoir nos droits, la capacité de faire valoir nos valeurs, elle est directement liée au poids que nous occupons dans l'espace politique qui est le nôtre. Et, M. le Président, je pense qu'il est bon de se remettre à l'esprit quelques chiffres qui vont nous donner un très fort indice sur la réponse qu'il faut donner à la question que j'ai soulevée. Je vous rappelle, M. le Président, qu'en 1867, au moment où le Canada a été créé, le Québec représentait 34 % du poids démographique au sein du Canada, 34 %. En 2006, le Québec ne comptait plus que 23,9 % de la population, et, selon les projections, en 2016, on va tomber sous les 23 %, M. le Président. Si on regarde maintenant le poids politique qu'occupait le Québec en 1867, le Québec représentait 36 % des sièges à la Chambre des communes; en 2011, c'est 24 %; et, selon le projet de loi C-20, on va tomber à 23 %, M. le Président.
En d'autres mots, ce que j'essaie de dire, M. le Président, c'est que la bataille qu'on mène présentement sur le registre des armes à feu, que l'on mène également sur C-10, ce n'est pas un épiphénomène, ce n'est pas quelque chose qui va passer puis qui ne reviendra pas avant un certain temps. On va être, M. le Président, de plus en plus confrontés à ces conflits de valeurs, à ces conflits de nations où vous allez avoir d'un côté un gouvernement canadien qui va exprimer un certain nombre de choses, un certain nombre de priorités, un certain nombre de valeurs et de normes, et vous aurez de l'autre côté la nation québécoise qui va exprimer très souvent des opinions divergentes, des principes divergents, une hiérarchisation des valeurs différente de celle que le reste du pays fera valoir.
Et c'est mathématique, M. le Président, c'est mathématique. Plus notre poids démographique va diminuer, plus notre poids politique va diminuer, moins nous serons capables, comme nation, de faire justement valoir ce qui fait notre différence, plus ce sera difficile de se faire respecter. Parce qu'après tout, M. le Président, à quoi avons-nous observé ces derniers jours, là? Quand on a un ministre qui part de sa capitale nationale puis qui s'en va dans l'autre capitale et qui se fait revirer de bord sans beaucoup de respect, c'est quoi, ça, M. le Président, si ce n'est pas justement un manque de respect?
On a observé exactement la même chose avec le ministre de la Sécurité publique. C'est un manque de respect. C'est un manque de considération. Vous avez les représentants de notre gouvernement national qui portent un consensus, qui portent le poids de plusieurs motions adoptées à l'unanimité et qui font valoir auprès du gouvernement canadien la position de la nation québécoise, et ils se font dire: Nous ne voulons pas vous entendre; nous n'allons pas modifier le projet de loi; vous ne comptez pas pour nous. Et c'est exactement, M. le Président, ma prétention: c'est qu'avec la baisse du poids démographique et la baisse du poids politique qui s'ensuit nous allons compter de moins en moins dans ces débats, pas simplement sur les questions d'ordre criminel, M. le Président, je vous dirais sur l'ensemble des questions, mais en particulier sur les questions d'ordre moral, qui, comme l'a dit la députée de Joliette, sont essentielles à la définition et à l'essence même de ce qu'est une nation.
Maintenant, M. le Président, regardons le fond des choses. Regardons ce que nous proposons. Il faut se rappeler le texte, là: «Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement du Québec d'entreprendre les démarches pour doter le Québec de ses propres lois criminelles, dont le Code criminel, qui refléteront les valeurs fondamentales des Québécoises et des Québécois.» M. le Président, je vous soumets que la question que nous posons à travers cette motion-là, ce n'est pas la question de l'avenir du Canada, comme voudraient nous le faire croire les gens d'en face, M. le Président. Ils essaient de détourner de son sens une motion qui porte essentiellement sur une chose: les lois criminelles, le Code criminel. M. le Président, je me rappelle d'une époque, moi, où il y avait des chefs libéraux qui n'avaient pas peur d'envisager des réformes politiques, des réformes constitutionnelles au sein de ce pays-là. Je me rappelle de Robert Bourassa, je me rappelle de Claude Ryan, ils proposaient des changements constitutionnels, et est-ce qu'ils proposaient pour autant la rupture du pays? Est-ce qu'ils proposaient la rupture du pays?** (15 h 40)**Une voix: ...
M. Drainville: Hein? Alors, M. le Président...
Une voix: ...
M. Drainville: Ça va. Laissez-le aller, c'est... Laissez-le aller, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Gendron): Oh! Non, je ne peux pas.
Une voix: ...
Le Vice-Président (M. Gendron): ... s'il vous plaît. Je ne peux pas permettre ça.
Une voix: ...
Le Vice-Président (M. Gendron): Non. Il interpelle la présidence. Il s'adresse à la présidence. Parce que je l'écoute religieusement, et il faut être en mesure de subir les propos des collègues qui sont seuls à avoir le droit de parole. Sinon, bien on sait où retraiter. Alors, on est ici en silence ou on est ailleurs. Veuillez poursuivre.
M. Drainville: M. le Président, la seule question à laquelle ils doivent répondre: Est-ce que c'est dans l'intérêt des Québécois que de contrôler les lois criminelles et le Code criminel? C'est la seule question à laquelle ils doivent répondre. Est-ce que c'est dans notre intérêt national d'avoir le plein contrôle sur les lois criminelles et sur le Code criminel? C'est la seule question à laquelle ils doivent répondre, M. le Président.
De se faire accuser de partisanerie alors qu'on recherche le rassemblement et qu'on recherche l'unité, qu'on recherche leur appui, M. le Président... et je le dis ouvertement: Nous espérons, quoique c'est bien mal parti, mais nous espérons quand même l'appui sur le principe, M. le Président. On cherche, nous, de ce côté, et la députée de Joliette cherche le plus grand consensus possible au sein de cette Assemblée nationale.
Ceux qui font de la partisanerie, M. le Président, ce n'est pas nous. Nous, on ne défend pas notre intérêt partisan. J'ai la prétention de dire que nous défendons l'intérêt national actuellement avec cette position-là et que ceux qui défendent l'intérêt libéral, ce sont justement les gens d'en face. Parce que, sincèrement, M. le Président, on ne leur demande pas, là... on ne leur demande pas, là, de voter sur une déclaration d'indépendance, là, on leur demande de se poser la question: Est-ce que ce serait une bonne chose pour les Québécois que de contrôler nos lois criminelles? Est-ce que ce serait une bonne chose, M. le Président, qu'on ne soit pas obligés de faire des pèlerinages un peu humiliants comme celui auquel s'est consacré le ministre de la Justice? Je pense, M. le Président, je vous soumets bien, bien, bien respectueusement que ce n'est pas nécessaire d'aller, comme ça, à Ottawa quêter des changements puis de se faire dire: On n'est pas intéressé, puis de revenir un peu gênés, hein, un peu gênés. Moi, je suis un peu gêné. En tout cas, j'étais un peu gêné de voir mon ministre de la Justice revenir comme ça, M. le Président, là, après s'être fait dire: Regarde, cause toujours, mon ami, mais on ne t'écoutera pas, puis on n'est pas intéressé à procéder aux changements.
M. le Président, comment expliquer l'attitude du gouvernement quand ils essaient de transformer en enjeu existentiel ce qui est essentiellement une question très pragmatique? Est-ce que ce serait une bonne chose que les Québécois aient le plein pouvoir en ces matières? Comment expliquer leur attitude? Pourquoi est-ce qu'ils veulent faire déraper le débat puis susciter la division alors que nous recherchons l'unité? Moi, je pense, M. le Président, qu'ils ont peur. Ils ont peur de formuler la demande parce qu'ils ont peur de se faire dire non. Alors, comme ils ont peur de se faire dire non, ils préfèrent dire qu'on est dans un autre agenda, ils préfèrent essayer de nous diviser entre nous alors qu'on leur tend la main.
M. le Président, la raison pour laquelle ils refusent d'appuyer notre demande, c'est qu'ils ont peur de se faire dire non. Ils sont en train, je pense, par leur refus, de donner leur appui à ce qui est tout à fait raisonnable. Ils sont en train de faire la démonstration de la nature profondément irréformable de ce fédéralisme dans lequel nous nous inscrivons encore comme Québécois. Parce que, s'ils avaient espoir, M. le Président, que c'est réformable, qu'il y a moyen d'aller chercher ces nouveaux pouvoirs, je n'ai aucun doute que, dans la tradition de Bourassa, et de Ryan, et de Lesage, il y aurait un certain nombre de nationalistes de ce côté-là qui seraient capables de faire entendre leur voix et qui seraient capables de dire: Situons le Parti libéral là où il a déjà été, dans un courant justement qui vise à faire avancer les intérêts de la nation québécoise.
Mais, comme ils sont incapables, M. le Président, d'obtenir les changements qui nous permettraient d'avancer, ils préfèrent plutôt dénoncer la soi-disant partisanerie de ce débat-là, alors qu'il n'y a aucune partisanerie, M. le Président, de notre côté. C'est eux qui sont en train d'en faire un enjeu partisan, et, ce faisant, ils sont en train de reconnaître leur état de faiblesse et leur incapacité à transformer ce pays-là qui est cadenassé par une constitution à laquelle on n'a toujours pas donné notre appui, notre aval, notre autorisation, notre approbation. C'est ça que vous êtes en train de faire comme démonstration, M. le Président.
Alors, ils sont condamnés à statuer que c'est impossible pour eux de donner leur appui. Ils sont condamnés, M. le Président, à se contenter du statu quo. C'est ça qui est en train de se passer. Le fruit n'est pas mûr. On se demandait quand est-ce qu'on allait l'entendre, celle-là. Bien, on l'a entendue en réponse au député de Lac-Saint-Jean: Le fruit n'est pas mûr. Le fruit n'est pas mûr, M. le Président, là, remplacez ça par «le système actuel est un échec», au sens où nous sommes incapables comme Québécois de faire avancer quelque transformation que ce soit qui touche le cadre légal, constitutionnel, le contrat fondamental sur lequel est appuyé ce pays-là. Quand ils disent: Le fruit n'est pas mûr, ce qu'ils sont en train de dire, M. le Président, c'est qu'ils sont incapables de faire avancer l'intérêt national québécois au sein du Canada.
Alors, M. le Président, je vous dirais, fondamentalement, la motion que nous mettons de l'avant, ce n'est pas une motion souverainiste, c'est une motion nationaliste, parce qu'elle vise à faire avancer l'intérêt national des Québécois. Et, s'il y a encore un petit peu de nationalisme au sein du Parti libéral, M. le Président, on espère qu'ils vont se lever puis qu'ils vont se manifester un petit peu, là, parce que ça commence à être gênant, M. le Président, d'avoir au pouvoir un gouvernement qui est à ce point endormi, qui est à ce point incapable de faire valoir quelque demande que ce soit pour faire avancer l'intérêt québécois au sein du Canada. Alors, que l'intérêt national du côté du gouvernement se lève, M. le Président, on a bien hâte qu'il se manifeste et qu'il cesse de se donner des raisons pour ne rien faire, c'est là-dessus qu'on peut se rejoindre.
**(15 h 50)** Évidemment, M. le Président, on ne se fait pas trop d'espoir, le premier ministre a bien situé le débat ce matin. C'était extraordinaire, ce matin, M. le Président. Vous avez la chef de l'opposition qui demande l'appui du gouvernement et vous avez le premier ministre qui se lève et qui commence à faire de la partisanerie à gros, gros traits, là, même pas subtils, M. le Président, parce que, voyant le cul-de-sac dans lequel ils se trouvent, ils n'ont d'autre choix que de susciter la division.
Alors, M. le Président, on va écouter avec beaucoup d'attention les arguments qu'on va nous donner de l'autre côté, mais, moi, je tiens à réaffirmer que, de notre côté, on pense que c'est une demande qui est raisonnable, qui est tout à fait responsable et qui se situe dans un axe, dans un courant de pensée et un courant politique qui vise à permettre aux Québécois d'être toujours plus libres et d'être toujours plus responsables de leur destin, M. le Président. C'est là-dedans qu'on se situe. Nous autres, vous connaissez notre opinion. Nous autres, on pense qu'il va falloir un jour, M. le Président, qu'on ait la pleine liberté et la pleine responsabilité, qu'on ait l'ensemble de nos moyens. Mais aujourd'hui ce n'est pas de ça dont il est question. Il ne s'agit pas de la plénitude, il s'agit d'un secteur extrêmement fondamental, important, essentiel pour notre vie collective, puis je ne vois pas pourquoi les différents partis présents en cette Chambre, surtout le Parti libéral, ne nous appuieraient pas sur cette demande-là, M. le Président. Merci.
Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, je vous remercie, M. le député de Marie-Victorin, de votre intervention. Et, pour la poursuite du débat, je suis prêt à reconnaître les prochains intervenants. Ça inclut les indépendants qui ont voulu signaler. Alors, je reconnais Mme la députée de Crémazie, en vous indiquant que vous avez 3 min 30 s pour vous exprimer sur cette motion.
Mme Lisette Lapointe
Mme Lapointe: Merci, M. le Président. Moi aussi, il me fait plaisir d'intervenir aujourd'hui sur la motion de l'opposition officielle qui demande que l'Assemblée nationale demande au gouvernement d'entreprendre les démarches pour doter le Québec de ses propres lois criminelles, dont le Code criminel, qui refléteront les valeurs fondamentales des Québécoises et des Québécois.
M. le Président, tout à l'heure un député ministériel, un ministre, en fait, nous a dit: Les souverainistes ne veulent pas... Les souverainistes veulent créer des crises. Je vais vous répondre, moi: Les souverainistes ne veulent pas créer des crises, il y a une crise en ce moment. En ce moment, le gouvernement Harper traite le Québec avec mépris. Je dirais même qu'on a eu droit à certains sermons du sénateur conservateur Boisvenu, qui a même insulté les membres du Barreau du Québec. Le projet de loi qui est devant... qui est à Ottawa, ce projet de loi C-10 qui vise à durcir le Code criminel heurte de plein fouet nos valeurs, particulièrement à l'égard des jeunes contrevenants. Et, à deux reprises devant le comité parlementaire de la justice à Ottawa, le ministre de la Justice du Québec a livré un plaidoyer en faveur de la différence québécoise, et le ministre de la Justice a été salué largement partout au Québec.
M. le Président, la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse dit ceci: «Ces modifications vont nuire à la réhabilitation et à la réinsertion sociale des adolescents contrevenants et vont à l'encontre de la plupart des dispositions de la Convention relative aux droits de l'enfant des Nations unies, que le Canada a pourtant ratifiée.» M. le Président, je n'ai que trois petites minutes, c'est bien court, mais je rappelle au ministre que plusieurs États américains ont leur propre code criminel. Et je repose ma question: Pourquoi le Québec n'aurait-il pas son propre Code criminel? Pourquoi ne serions-nous pas capables de faire valoir nos valeurs et, nous-mêmes, de faire les lois qui touchent justement le Code criminel?
Je pense, M. le Président, que ce qu'on voit en ce moment à Ottawa est encore une preuve que nous serions vraiment beaucoup mieux si nous étions en mesure de faire toutes nos lois, de signer tous nos traités et de percevoir tous nos impôts. C'est eux qui nous donnent l'occasion de redire notre foi en la souveraineté du Québec, M. le Président. Et je demande au ministre de la Justice de considérer cette question, de faire en sorte que nous disposions de notre propre Code criminel. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, on vous remercie, Mme la députée de Crémazie, pour votre intervention. Je cède maintenant la parole à M. le ministre de la Justice, en vous indiquant que, à votre formation, il reste 30 minutes au total dans la banque. M. le ministre, à vous.
M. Jean-Marc Fournier
M. Fournier: Merci, M. le Président. Je vais commencer sur, dans le fond, notre collègue de Crémazie, qui cadre différemment mais, je crois, avec justesse ce que le collègue de Marie-Victorin n'a pas voulu dire: il s'agit bien sûr, pour quelqu'un qui est souverainiste, ce que je respecte...
En démocratie, je trouve que les Québécois peuvent être souverainistes puis aussi être fédéralistes, et ils ne peuvent... ne peuvent... j'aimerais -- j'aimerais -- qu'on puisse les respecter aussi quand ils ne sont pas d'une autre allégeance. Un jour, peut-être, ce sera le cas -- pas encore -- partagé complètement ici.
Mais elle l'a bien situé: pour elle, il s'agit d'une démarche dans une conviction souverainiste, étape par étape. C'est évidemment une logique du Parti québécois, aussi, qu'on n'ose pas nommer ici aujourd'hui, mais on le voit bien, on le sait bien, même si on ne la nomme pas, le jupon ne fait pas juste dépasser, M. le Président, on le constate, il s'agit là d'une occasion que le Parti québécois a saisie pour dire: Tiens! Essayons de nous faire une première étape. Puis, il n'y a pas si longtemps, on a parlé d'assurance-emploi; demain, on parlera d'autre chose, mais je l'aborderai tantôt.
Le coeur de ce que l'on entend, et d'ailleurs ma collègue de Crémazie a dit «eux», «eux», comme ma collègue et d'autres en face se plaisent à dire: Voilà, le Canada agit avec C-10, M. le Président. Et on veut dépeindre le Canada et les Canadiens comme un bloc monolithique, qui sont tous d'allégeance réformiste, qui sont opposés au Québec. Voilà, C-10, c'est le Canada. Tous les Canadiens sont C-10 et ils sont contre le Québec. À mon avis, M. le Président, c'est simpliste, c'est démagogique et, en plus, c'est erroné.
Imaginez-vous si, de 1976 à 1985 ou de 1994 à 2003, il y avait des gens ailleurs au Canada qui s'étaient dit: Tiens! Tous les Québécois sont séparatistes; parce qu'il y a une gouverne séparatiste à Québec, tous les Québécois sont maintenant séparatistes. On généralise: Voilà, ils sont tous séparatistes. Pourtant, M. le Président, ça aurait été une erreur, il y a au moins... il y a au moins deux référendums qui ont établi le contraire. On ne peut pas généraliser comme ça parce qu'il y a une gouverne dans un sens, on ne peut pas qualifier tout le monde qui sont soumis à cette gouverne comme participants à cette gouverne. Est-ce qu'on voudrait dire, M. le Président, que les progressistes américains, ceux qui militent ou militaient pour les recherches sur les cellules souches, ceux qui favorisaient l'assurance maladie aux États-Unis étaient tous des idéologues de droite sous George W. Bush, M. le Président? Ont-ils fait la promotion, ceux qui n'étaient pas de la même opinion que Bush, ont-ils fait la promotion de l'éclatement du pays parce qu'ils ne partageaient pas ces convictions-là? C'étaient des moments de gouverne. En démocratie, ils se sont organisés avec cette gouverne.
Et on n'a pas à qualifier tout en bloc monolithique parce que cela voudrait bien appuyer une thèse qu'on veut présenter comme étant eux contre nous. Il n'y a pas de tel bloc monolithique. D'abord, est-ce qu'on peut dire que tout le Canada appuie C-10, M. le Président? Quels sont les faits objectifs pour entendre le «eux» et pour se faire dire que voilà tout le Canada qui rejette l'approche québécoise? Est-ce qu'on peut vraiment dire ça, M. le Président, objectivement? Objectivement?
Une voix: ...
M. Fournier: J'ai compris qu'il y avait minimalement des partis d'opposition, le NPD et le Parti vert du Canada, qui représentent ensemble plus de suffrages, qui ne sont pas en faveur. J'ai compris... Elle nous accompagnait, la Société canadienne de pédiatrie -- canadienne; le Barreau du Canada. On a parlé du Barreau du Québec qui nous accompagnait, bien sûr, mais le Barreau du Canada. Puis, vous vous en souviendrez, ça s'est passé cet été, c'était à Halifax, qui n'est pas au Québec -- Halifax, pas encore -- le Barreau du Canada qui a vilipendé la gouverne fédérale actuelle dans ses intentions à l'égard de la justice pénale et criminelle. La Cour suprême du Canada s'est exprimée dans le sens de l'approche québécoise, au soutien de l'approche québécoise, qui est d'ailleurs à certains égards une approche d'autres provinces aussi. On n'a pas les mêmes façons de faire, mais il y a, dans d'autres provinces aussi, une approche de réhabilitation. C'est bien le problème: ce n'est pas que québécois, mais il y a une emphase mise au Québec, plus grande qu'ailleurs, c'est exact. Mais, ailleurs, ce n'est pas des démons non plus, dans les autres provinces. Incidemment, dans les autres provinces canadiennes, ils ne sont pas tous d'accord avec le gouvernement fédéral. On ne peut donc pas dire objectivement qu'il y a là, dans cette gouverne fédérale, un bloc monolithique, le Canada, eux contre nous. Objectivement, on ne peut pas le présenter comme ça, M. le Président.
**(16 heures)** La collaboration entre la juridiction criminelle et la collaboration... bien, la collaboration... juridiction criminelle et la juridiction sur l'administration de la justice n'a pas soulevé de problématique dans le passé. Notre système et nos gouvernements ont permis que le Québec se donne l'approche actuelle. Je vois les gens d'en face, M. le Président, qui n'en reviennent pas: imaginez, si le Québec a pu développer l'approche qu'il a depuis 40 ans, dites-moi pas que c'est le système qui l'empêche. Il l'a fait pendant 40 ans, M. le Président.
Voici comment s'inscrit le débat qu'on a aujourd'hui: ce n'est pas sur C-10, le débat, aujourd'hui, on nous amène dans le débat de la séparation du Québec. C'est ça qu'on fait, c'est exactement ça. Comment nier le fait que le système actuel a permis au Québec de développer son approche? Ça fait 40 ans qu'on l'a. Si le système ne le permettrait pas, ma foi, on ne l'aurait jamais eu. Est-ce qu'on l'a eu? Tout le monde dit: Oui, on l'a eu. Est-ce que ça fait 40 ans qu'il est développé de cette façon aussi intense? Oui. Pourquoi? Parce que c'est impossible? Parce que le système ne le permet pas? Voyons donc!
Objectivement, le système le permet. Ce n'est pas une question structurelle, ce n'est pas une question de système, c'est une question de gouvernance, M. le Président. Le système a offert au Québec les moyens de développer ses façons de faire. La gouvernance actuelle choisit le bris de collaboration, mais on ne peut pas qualifier cela de problème de structure, c'est un problème de gouverne, M. le Président. Il faut savoir le nommer.
Ainsi, je sais que, du côté du Parti québécois, on cherche... D'abord, d'abord, c'est avoué, hein, il y a beaucoup de gens au Parti québécois qui disent qu'il faut trouver des nouvelles raisons pour supporter la souveraineté. Déjà, dans cette allégation qui m'a toujours un peu surpris, il y a cette admission que les anciennes raisons ne tiennent plus, parce que, probablement, ils constatent qu'ils ont été ou répondus ou que la problématique n'est plus là. Il faut trouver des nouvelles raisons, alors, aujourd'hui, on nous sort la question criminelle.
Moi, je me souviens d'un débat, M. le Président, en 1995, c'était à Hull, l'actuelle chef de l'opposition était là, c'était un débat télévisé -- j'y participais avec grand plaisir -- et la grande raison pour faire la séparation en 1995, c'était la faillite du Canada -- je ne sais pas si vous vous en rappelez, je suis sûr que vous vous en rappelez -- la faillite du Canada. Alors, on attend toujours. On voit d'autres pays, mais, pour ce qui est de la faillite, ce qu'on constate, c'est que le système financier canadien a, entre autres, été un outil pour le Québec pour passer par-dessus la crise que nous avons rencontrée dernièrement.
Alors, cette semaine, il n'y a pas longtemps, il y a, quoi, deux, trois jours ou un peu plus, c'était la... il fallait aller chercher l'assurance-emploi. C'est arrivé il y a quelques jours, ça, là. Alors, la motion d'aujourd'hui, là, il ne faut pas imaginer qu'elle sort de... tout à coup, là, c'est une nouvelle. Ça fait partie d'une stratégie, M. le Président. Alors, tantôt, c'est l'assurance-emploi. Aujourd'hui, on nous l'emmène sous l'angle de la question de la juridiction criminelle. Demain, ce sera l'armée, M. le Président, sans doute que ce sera l'armée. Et puis, la semaine prochaine, on va proposer de rééditer les études Le Hir. Il n'y a pas de doute, on est déjà passés par là. Puis, un peu plus tard, on va nous dire qu'il faut saisir l'argent de la Caisse de dépôt pour supporter les obligations du Québec, pour supporter le dollar canadien. Puis, après ça, on va nous dire, M. le Président... après ça, on va nous dire qu'il faut prendre le dollar québécois.
On est dans une logique... On est dans une logique...
Des voix: ...
M. Fournier: On est dans une logique où le Parti québécois choisit d'affaiblir le consensus que nous avions il y a deux semaines, l'unanimité que nous avions encore hier, de l'affaiblir et de le contaminer par leur obsession de séparation et de chicane. Drapés dans un désir d'unité, on nous met sur la table la seule option qu'ils connaissent: le refus du Canada, la grande capacité de nommer un problème comme étant menotter le Québec.
On est capables de persistance pour se battre quand il y a un problème, mais il faut le nommer comme il faut. Le problème ici est un problème de gouvernance. Et j'aurais souhaité, M. le Président, que le Parti québécois n'affaiblisse pas notre position là-dessus en venant y mettre son assaisonnement de séparation dont il a la recette parfaite, M. le Président. Nous avons, M. le Président, devant nous, un gouvernement fédéral qui propose une loi qui n'est pas bonne pour le Québec. Pensez-vous vraiment... pensez-vous vraiment que ce qu'il faut, c'est lancer la démarche étapiste de la souveraineté? Est-ce que c'est ça qu'il faut, M. le Président?
Et d'ailleurs j'aimerais ça entendre le constat du Parti québécois: Est-ce que, les 40 ans que nous avons faits, nous l'avons fait dans l'ignorance canadienne qui aurait tout fait pour nous en empêcher? Est-ce qu'on a...
Malheureusement, malheureusement, la réalité, c'est que nous avons pu développer nos approches et qu'aujourd'hui il y a un projet de loi qui est sur la table. Or, ce projet de loi, M. le Président, il n'est pas bon. Il a des effets qui sont néfastes pour l'approche québécoise. Et tous nos centres jeunesse, tous nos criminologues, tous nos psychoéducateurs auraient souhaité que nous soyons capables de garder le focus sur ce projet de loi plutôt que de l'amener dans l'ordre constitutionnel, M. le Président. Ce n'était pas nécessaire. Cette motion n'est pas nécessaire pour l'appui qu'ont besoin d'avoir les gens, les intervenants sur le terrain qui s'occupent des jeunes contrevenants, en pensant aux victimes et en évitant qu'il y en ait d'autres. Ils n'avaient pas besoin de ça.
Je pense qu'on doit saisir, comme je l'ai fait hier, on doit saisir l'occasion de remercier ces gens qui préparent une société qui est meilleure pour nous et de les encourager, M. le Président, parce que le projet de loi qui est devant nous, si jamais il devient loi, M. le Président, ce projet de loi n'est que temporaire, ne peut pas être autre chose que temporaire, M. le Président. Et vous savez pourquoi? D'abord parce que Justice Canada, Justice...
Des voix: ...
M. Fournier: Je comprends que je les dérange, M. le Président, là.
Le Vice-Président (M. Gendron): M. le député de Marie-Victorin, je veux dire, si vous avez des choses à dire à un collègue, il faut le faire en dehors de la Chambre, parce que, moi, ça dérange l'écoute que je voudrais avoir. Et je ne dis pas que ce n'est pas arrivé de l'autre côté. Il y a une personne qui a le droit de parole, c'est le ministre de la Justice, donc je voudrais l'entendre pleinement. Mais je sais que le débat peut avoir son contenu qu'il a, mais c'est pour ça que c'est télévisé, pour permettre aux gens de se faire une opinion. C'est à eux autres à arbitrer et non pas à nous. Alors, veuillez poursuivre.
M. Fournier: Oui, on peut comprendre, M. le Président, que ça peut aussi fatiguer les autres quand on a des arguments et qu'ils ne veulent pas les entendre. Je peux le comprendre. Mais on a le droit de présenter nos choses.
Dans C-10, la loi, comme tel, n'est pas une bonne loi, mais on ne doit pas saisir C-10 objectivement comme étant quelque chose qui va être la raison fondamentale pour tout mettre de côté, M. le Président. On peut se battre pour éviter que C-10 arrive et on peut déjà savoir à l'avance que C-10 n'est que temporaire.
Prenons un exemple. Dans un des éléments de C-10 sur les peines obligatoires -- je sais que mon collègue de Marie-Victorin, ça l'intéresse particulièrement, il en a parlé abondamment tantôt -- sur les peines obligatoires, M. le Président, l'étude de Justice Canada dit justement que les juridictions qui sont allées dans le sens que fait C-10, ces juridictions, l'ayant essayé, elles sont maintenant rendues à revenir sur leurs pas, à abroger ces lois.
Lorsque je demande à Ottawa: Avez-vous des études pour supporter votre projet?, la réponse, c'est non. Ils n'en ont pas, d'étude pour supporter le projet. Pourtant, on en a trouvé, des études fédérales, mais évidemment la question qu'on leur posait, c'est: Avez-vous des études pour supporter votre projet? Leur réponse, c'est non. Si on avait demandé: Avez-vous des études qui vont à l'encontre de votre projet?, la réponse aurait été oui. On l'avait peut-être mal posée, M. le Président. Lorsqu'on regarde les études de Justice Canada 2005, ils nous annoncent la destinée de C-10, une loi temporaire parce qu'elle ne marche pas.
Par ailleurs, toutes les autres dispositions de C-10 sont des dispositions pour lesquelles il n'y a aucun fondement scientifique, aucun caractère raisonnable. C'est une loi qui agit sur l'idéologie mais pas sur les fondements réfléchis. Conséquemment, ce projet de loi ne pourra pas subir le temps, M. le Président. Cette loi sera temporaire, et nous allons tout faire pour qu'elle le soit.
Entre-temps, si d'aventure elle était adoptée, et durant le temps qu'elle serait en application, nous allons tout mettre en oeuvre dans l'ordre constitutionnel que nous connaissons, tout mettre en oeuvre. Pourquoi se payer des perturbations, hein? Pourquoi absolument se payer des perturbations, M. le Président, comme disait si bien la chef de l'opposition? Alors, pourquoi faire ça, M. le Président, alors qu'on peut trouver par les moyens que nous avons? C'est ce que nous cherchons: trouver les moyens d'endiguer les effets qu'il pourrait y avoir sur nos façons de faire.
Ce qui est bien embêtant M. le Président, c'est que, lorsque l'opposition souhaite, appelle, demande au gouvernement de défendre les intérêts du Québec et que nous le faisons, dès que nous commençons à le faire, ils se disent: Je vais les prendre à contre-pied et je vais aller leur dire que ce n'est pas assez, et il faut aller plus loin, il faut casser le pays, peu importe la raison, M. le Président, et ce qui est bien dommage là-dessus.
**(16 h 10)** On ne reviendra pas sur ce qu'on a déjà dit hier, on ne reviendra pas sur ce qu'on a dit sur la motion il y a, quoi, trois semaines, un mois à peu près. Mais pourquoi la motion aujourd'hui? Quel est le sens de la motion d'aujourd'hui, inscrite alors que nous avions une unanimité, alors que le Parti québécois savait très bien que nous ne sommes pas séparatistes? Le savait-il? Il savait très bien que nous ne sommes pas d'accord avec la séparation par étapes et que nous ne croyons pas que la meilleure façon d'établir une collaboration, c'est de gifler l'autre. Nous croyons à la collaboration, nous l'offrons. Lorsqu'on nous la refuse, nous continuons de combattre, M. le Président. Mais nous n'allons pas baisser les bras et se dire: Je vais rentrer dans mes terres. Il y a pour nous, les Québécois, des avantages canadiens, et on ne va pas les perdre simplement pour des questions partisanes mal nommées par l'opposition, mal nommées par l'opposition. J'insiste. Ils nous disent: C'est eux. Ils nous disent: C'est le Canada. Ils nous disent: Harper, c'est tous les Canadiens. Vous savez que c'est faux. Nous le savons tous, que c'est faux. Il y a un gouvernement qui n'a pas l'appui de tous les Canadiens, bien au contraire, qui pose un geste qu'on doit dénoncer, que nous faisions de façon unanime, sans division, sans débats partisans. Et ce débat que vous mettez sur la table n'a qu'un objectif, qu'un objectif, M. le Président: dévier l'appui que nous donnions à tous ceux qui oeuvrent sur le terrain.
Alors, vous voulez savoir le sens de mon vote cet après-midi? Il sera celui que j'avais lorsque la députée de Joliette a déposé la motion sur C-10. Lorsque je suis allé à Ottawa, j'ai mentionné qu'il y avait eu une motion unanime déposée par la députée de Joliette, parce que je considérais qu'il fallait nommer non seulement la personne qui avait eu l'idée de mettre cette motion sur la table, mais que nous puissions nous rassembler tous ensemble derrière cette motion. Je vais voter le vote que j'ai eu l'autre fois, qui signifiait à ceux qui travaillent tout l'encouragement que nous devons leur donner et leur dire de ne jamais baisser les bras. Même si C-10 devenait une loi, elle sera temporaire, et nous retrouvons nos façons de faire au Québec. Merci, M. le Président.
Une voix: ...
Le Vice-Président (M. Gendron): S'il vous plaît! Alors, pour votre intervention ou autre chose?
Des voix: ...
Le Vice-Président (M. Gendron): Non, non, mais juste... Oui, c'est votre intervention?
Une voix: ...
Le Vice-Président (M. Gendron): Vous faites... O.K. Alors, M. le député, pour votre intervention sur le fond.
M. Alexandre Cloutier
M. Cloutier: M. le Président, j'aurais préféré que le ministre de la Justice reste avec nous pour cette intervention, M. le Président, mais je me réjouis que le ministre des Affaires intergouvernementales...
Des voix: ...
Le Vice-Président (M. Gendron): Oui, je le sais.
Des voix: ...
Le Vice-Président (M. Gendron): Non, je le sais, je l'aurais fait.
Des voix: ...
Le Vice-Président (M. Gendron): Non, mais une minute! Je suis en mesure... La présidence est en mesure de signaler ça, là. Il n'avait même pas fini sa phrase qu'il y en avait quatre debout.
Donc, oui, on ne peut pas, on ne peut pas. Même si c'est un souhait, on ne peut pas indirectement faire quelque chose qu'on n'a pas le droit directement. C'est réglé. Veuillez faire votre intervention.
M. Cloutier: Je vous remercie, M. le Président. Mais je n'en reviens pas, de ce que j'ai entendu, M. le Président, au cours des dernières minutes. On a un gouvernement devant nous... Jamais le Parti libéral n'a été aussi à-plat-ventriste dans l'histoire du Québec, M. le Président. Est-ce que c'était être souverainiste quand vous avez... Vous souvenez-vous que vous avez déjà négocié une entente sur l'immigration? Vous souvenez-vous que vous avez déjà revendiqué des amendements constitutionnels? Est-ce que vous vous souvenez que vous avez aussi négocié des ententes administratives? Est-ce que ça, c'était une démarche souverainiste? Est-ce que ça, c'étaient les méchants souverainistes, là, dans une alliance, qui souhaitaient une confrontation avec le fédéral pour mieux provoquer des appuis vers la souveraineté du Québec?
La réalité, M. le Président, c'est que jamais dans l'histoire du Québec on n'a eu un gouvernement aussi à genoux, aussi à-plat-ventriste devant le gouvernement fédéral. Ils sont incapables de nous nommer quelque demande que ce soit de nature constitutionnelle. J'ai demandé au ministre: Nommez-nous-les! Quelles sont vos revendications constitutionnelles, M. le Président? Ils n'en ont aucune. Ils nous répondent: Le fruit n'est pas mûr. Y a-tu quelqu'un au Québec qui suit le débat aujourd'hui qui se dit que le fruit n'est pas mûr, qui croit le gouvernement, honnêtement? Ça fait 10 ans qu'ils nous disent ça. Ça doit faire plus que 10 ans, M. le Président, mais, depuis qu'ils sont là, depuis 2003, c'est leur ligne, hein: Le fruit n'est pas mûr, on n'est pas prêts, les négociations ne sont pas entamées, on va attendre que le fruit mûrisse. Y a-tu quelqu'un, M. le Président, au Québec qui croit réellement que ce gouvernement a quelque volonté que ce soit à quelques amendements constitutionnels que ce soient?
M. le Président, ça me met un peu hors de moi parce qu'on laisse entendre qu'un jour on pourrait avoir la volonté d'améliorer les choses. La réalité, c'est qu'on est pris dans un immobilisme, on est pris dans un statu quo. Pourquoi? Parce qu'on est cadenassés par la Constitution canadienne et on n'ose pas affronter la réalité. Pendant qu'on se fait imposer une nouvelle vision, une nouvelle philosophie sur les changements du droit criminel au Canada, une philosophie qui va... clairement contraire à tout ce qui s'est toujours fait, au Québec, en matière de réhabilitation, pendant que le gouvernement Harper impose ça au Québec, qu'est-ce qui se produit, M. le gouvernement? On a un gouvernement qui envoie des lettres à Ottawa, qui s'en va en commission parlementaire, qui exprime son point de vue, mais, en bout de course, c'est quoi? C'est une fin de non-recevoir. Et, lorsque c'est Ottawa qui décide, les Québécois se le font imposer. Et concrètement c'est une décision unilatérale, et le gouvernement du Québec se retrouve muet, se retrouve dans une situation où il devra accepter les amendements qui sont faits au Code criminel.
Il est où, le problème? Si nous sommes une nation, si le Québec a cette reconnaissance du gouvernement fédéral de la nation québécoise, il est où, le problème pour le gouvernement libéral, M. le Président, de revendiquer toutes les lois en matière criminelle? Il est où, le problème? Nous gérons déjà l'administration de la justice, nous nommons déjà les juges dans les tribunaux inférieurs, M. le Président, nous avons déjà des responsabilités en matière de justice, en matière pénale, en matière civile. Il est où, le problème d'étendre ses compétences en matière criminelle, se donner des lois à notre image, en vertu de nos valeurs, en vertu de qui nous sommes, M. le Président, comme Québécois? Il est où, le problème?
Le problème, M. le Président, c'est le manque de volonté, l'absence de franchise de dire réellement la vérité et de dire concrètement aux gens qu'ils sont incapables de négocier. Ils sont incapables parce qu'ils n'en ont pas la volonté. Puis, quand on demande au ministre des Affaires intergouvernementales de nous faire sa liste, il n'en a pas, de liste. Il n'en pas, de liste. Pourquoi, M. le Président? Parce qu'il a abdiqué, parce qu'il n'y croit plus.
Nous, au Parti québécois, on est tannés de l'immobilisme, on est tannés du statu quo et on veut faire avancer le Québec. Et, à chaque fois qu'il y a une mauvaise décision qui sera prise, aussi importante que celle de revoir le coeur du système criminel au Canada, et que ce sera des décisions imposées qui vont contre les intérêts des Québécois, bien, au Parti québécois, on sera là pour revendiquer nos pouvoirs et réclamer que tous les pouvoirs et toutes les décisions soient décidés à l'Assemblée nationale. M. le Président, si on se choque et si on parle avec autant d'émotion, c'est parce que le projet de loi... contrairement à ce qu'on laisse entendre de l'autre côté, ce n'est pas une loi banale, c'est une loi omnibus qui vient modifier toute une série de dispositions. Si le Barreau du Québec... L'avez-vous lu, le mémoire du Barreau du Québec? J'espère que vous l'avez lu, M. le Président, parce qu'il est sans équivoque, le mémoire du Barreau du Québec: ça va clairement à l'encontre de toutes les valeurs, de tout ce que les spécialistes québécois croient et ont exercé, dans les dernières années, comme vision de la justice criminelle, au Québec et au Canada.
Alors, M. le Président, il y a des sérieux problèmes dans la loi qui nous est imposée, qui va clairement à l'encontre, entre autres, en matière du processus démocratique qui a été utilisé par le gouvernement fédéral, parce que ce qu'on a voulu faire, c'est utiliser une espèce de bâillon pour forcer des débats, alors que ça aurait nécessité qu'on prenne nettement plus de temps. En plus, on a fusionné ça dans une loi omnibus pour mieux venir noyer certaines dispositions qui auraient mérité un débat attentif, accru et certainement plus approfondi que ce qui a été fait jusqu'à maintenant. On impose des peines minimales à des crimes qui, par le passé, ce n'était pas le cas, alors qu'on sait tous qu'une telle façon de procéder va enlever aux juges la capacité d'exercer un jugement approprié sur les peines qui devraient être mises. Le Barreau dit même que c'est contraire à la dignité humaine. Savez-vous ce que ça veut dire, ça, M. le Président? Ça veut dire des contestations judiciaires, des contestations de la constitutionnalité de ces prochaines lois qui seront mises en vigueur parce que contraires à la dignité humaine. C'est ce que le Barreau plaide dans son mémoire qui a été déposé à la commission parlementaire.
Et enfin le système de justice pénale pour adolescents, M. le Président, il y a une modification qui est proposée par le gouvernement Harper qui vient nuire à la réhabilitation, est clairement contraire aux orientations que le Québec s'est données. Le gouvernement Harper nous a habitués, dans les six derniers mois, M. le Président, à de très mauvaises habitudes.
On savait qu'un gouvernement majoritaire conservateur nuirait aux intérêts du Québec. On le voit dans la défense du français: on vient de nommer un juge unilingue anglophone à la Cour suprême du Canada. Ce n'est pas banal, ça, M. le Président. Ça veut dire quoi? Lorsqu'il vient le temps d'interpréter les deux dispositions législatives, laquelle, vous pensez, des deux, qu'ils prennent? La disposition législative en anglais. Quand vient le temps de s'inspirer de la doctrine française, québécoise, par rapport à la doctrine anglaise, laquelle, pensez-vous, qui est privilégiée par les juges de la Cour suprême?
Nomination d'un vérificateur unilingue anglais, M. le Président.
On vient d'avoir l'exemple de ce que c'était, notre représentant qu'on avait à l'UNESCO. Quand j'ai demandé au gouvernement quelles étaient les indications que le représentant québécois avait défendues à l'UNESCO, incapable de nous le dire. Pourquoi? Parce que notre place à l'UNESCO, ce n'est rien d'autre que la place du Canada, parce qu'il n'y a pas de place réelle pour le Québec, M. le Président.
J'en perds mes mots tellement je suis déçu du comportement du gouvernement actuel qui est à genoux, qui est couché devant le gouvernement fédéral et qui n'a aucune revendication et aucune aspiration pour le Québec.
M. le Président, le Parti québécois, on sera toujours là quand viendra le temps de défendre les intérêts des Québécois, parce que, nous, on veut réellement faire avancer le Québec. Merci.
**(16 h 20)**Le Vice-Président (M. Gendron): Juste avant votre intervention, M. le député de Borduas, vous aviez 8 min 30 s, vous avez pris 7 min 30 s, M. le député. Il reste 1 min 30 s à votre formation, plus le temps non utilisé par l'ADQ. Donc, il restera 4 min 30 s à l'opposition officielle, et j'indiquerai le temps qu'il reste aux ministériels.
Je cède la parole à M. le député de Borduas, en vous indiquant que vous avez 3 min 30 s.
M. Pierre Curzi
M. Curzi: 3 min 30 s. Merci, M. le Président. M. le Président, je profite de cette occasion pour dire que je vais voter en faveur de cette motion qui a été présentée par le Parti québécois, évidemment, parce qu'il me semble absolument évident que c'est une occasion inespérée d'avoir un front commun et de réclamer un pouvoir qui, de toute évidence, doit nous revenir.
C'est assez paradoxal de voir qu'on dit toujours que le fruit n'est pas mûr, et là on a l'impression qu'il y a un soleil particulièrement puissant qui vient de se lever dans cette cause-là et que le fruit peut mûrir avec une très grande rapidité. C'est clair que ce projet de loi là touche à nos valeurs. Et, quand il s'agit de valeurs, aucune valeur n'appartient à un seul parti. Les valeurs appartiennent à l'ensemble de la population.
Et là, quand il y a de... Actuellement, ce qui se produit, il y a unanimité de la part de la population sur le fait que ce projet de loi va à l'encontre même des valeurs fondamentales des Québécois. Alors, la question ne se pose même pas. La question, c'est que nous devrions tous, de concert, réclamer pleinement le rapatriement de l'ensemble de nos pouvoirs dans cette matière criminelle.
Le gouvernement cherche actuellement à... a un comportement trouble, parce qu'à la fois il se fait le fier défenseur de cette cause-là -- le ministre de la Justice va à Ottawa -- et pourtant, vu d'ici, vu de la part de ceux qui sont des fruits blêmes au Québec, nous avons l'impression qu'il s'agite et qu'il s'agite d'une façon un petit peu inutile. En fait, il est très clair que le rapport de force lui échappe complètement. Et c'est troublant de voir qu'un parti qui, actuellement, détient la majorité du pouvoir au Québec ne ressente pas à quel point il peut être éloigné des valeurs fondamentales des gens qu'il -- en principe -- représente et qu'il n'ait pas l'audace et, je dirais, l'intelligence politique de faire de cette cause-là un cheval de bataille qui réunit tout le monde.
Bien sûr, on peut se contenter d'aller chercher à la pièce ou de combattre à la pièce un projet de loi C-10, mais voilà une occasion inespérée d'avoir un capital politique remarquable en se faisant le défenseur de l'intérêt collectif des Québécois. C'est ce que je comprends dans la proposition qui est faite actuellement et c'est une position et une proposition que je partage entièrement. Il est assez rare qu'on puisse retrouver comme ça un type d'union où, tout à coup, au-delà de la partisanerie, nous rejoignons directement les gens que nous représentons.
Alors, il me semble qu'il y aurait un effort conséquent à faire pour que la logique gouvernementale actuellement, dont on espère un retour sur l'investissement... tout simplement, on élargisse cette politique-là et qu'on ait l'audace de dire: Bien, puisque nous n'arrivons pas à aller négocier à la pièce -- et c'est extrêmement difficile, le rapport de force est difficilement transformable en pièces sonnantes -- puisque nous n'avons pas ce pouvoir-là, ayons au moins l'audace... puisque nous savons que votre gouvernement va perdre cette bataille, pourquoi ne pas réclamer entièrement tous les pouvoirs et cesser de perdre des batailles à la pièce? Une occasion unique, au niveau guerrier, d'avoir une vraie victoire plutôt que d'avoir une petite défaite amère et douloureuse pour l'ensemble des Québécois et des Québécoises. Merci.
Le Vice-Président (M. Gendron): Je vous remercie, M. le député de Borduas. Je cède maintenant la parole à M. le député. À vous.
M. Gerry Sklavounos
M. Sklavounos: Merci, M. le Président. Alors, il me fait plaisir de prendre parole sur cette question ici, aujourd'hui, au salon bleu. Tout à l'heure, Mme la députée de Crémazie nous a dit qu'il ne s'agit pas ici... question de provoquer une crise. Mme la députée de Crémazie est bien placée pour nous parler de ça, parce qu'elle connaît très bien, elle est très proche de la personne qui a élaboré cette stratégie de provoquer des crises. Et, malgré tout ce qu'il a fait pour le Québec et pour toute l'admiration que j'ai pour lui, parce qu'il a contribué beaucoup au Québec, je ne partage pas cette partie de sa philosophie où il faudrait essayer de provoquer des crises en essayant de provoquer des changements.
Mais elle nous a précisé, Mme la députée de Crémazie, elle a dit: On n'essaie pas de provoquer une crise, il y a une crise. On est bel et bien dans une crise. Je suis d'accord avec elle: il y a une crise au Parti québécois. C'est pour ça qu'il y a des membres, des péquistes qui sont assis ici... Il y a des péquistes qui sont assis ici, il y a des péquistes qui sont en train de fonder des nouveaux partis. Il y a même des péquistes qui sont confinés chez eux. Il y a des problèmes et... Oui?
Le Vice-Président (M. Gendron): J'ai bien de la misère à voir c'est quoi, pertinent, par rapport au débat actuel, là, sincèrement. Et...
Une voix: ...
Le Vice-Président (M. Gendron): Non, non. Mais un instant, s'il vous plaît, là.
Une voix: ...
Le Vice-Président (M. Gendron): Non, un instant! Le président est debout. Voilà. Assoyez-vous. Je veux bien, dans une motion limitée à deux heures, être très tolérant, pour le vrai, mais là, écoutez, ça n'a rien à voir avec le sujet de la motion. Alors, je souhaiterais que vous reveniez rapidement à la pertinence du débat.
M. Gautrin: ...il est en train, actuellement, de rappeler dans quel cadre ce débat se fait. Il va bien sûr être en mesure de ramener, évidemment, sur le fond du débat dans quelques minutes, voyez-vous.
Le Vice-Président (M. Gendron): J'admire votre très... très pertinemment. Mais, écoutez, j'ai écouté religieusement, la motion n'a rien à voir avec les propos qu'il tenait. Donc, j'ai tout simplement fait un appel à la pertinence du débat, point. Alors, j'aimerais qu'il revienne à la motion qu'on débat. Alors, M. le député.
M. Sklavounos: ...parfait, M. le Président, je vais poursuivre. J'aimerais bénéficier de la même tolérance qu'il y a eu pour les intervenants précédents qui ont utilisé le mot «crise» et qui ont parlé et explicité le mot «crise». Mais je vais continuer, M. le Président.
Il y a au moins un éminent criminaliste de l'autre côté, qui a exercé en droit criminel, c'est le député de Chambly, quelqu'un que je connais bien, que j'admire beaucoup. Je ne l'ai pas entendu aujourd'hui. J'ai entendu d'autres personnes, principalement qui sont identifiées comme des souverainistes nationalistes -- et c'est leur droit, et c'est leur droit, ils l'ont dit -- mais je n'ai pas entendu un criminaliste, quelqu'un qui a déjà exercé en droit criminel. Et ça serait important parce que nous parlons du droit criminel, nous parlons de la loi... le projet de loi C-10.
Et nous avons dit unanimement que nous sommes contre ce projet de loi. Nous avons dit: Nous sommes contre ce projet de loi unanimement à l'Assemblée nationale, puisque l'énoncé des principes des peines minimales, l'intrusion profonde dans le judiciaire, on viendrait contrecarrer la liberté de la magistrature d'imposer des sentences pertinentes dans des dossiers particuliers, et les coûts additionnels que provoquerait une telle approche sont quelque chose... sont des choses qui sont inacceptables pour le Québec.
Nous nous sommes exprimés clairement et d'une seule voix. Et nous avons envoyé notre Procureur général du Québec faire des représentations, le ministre de la Justice, Procureur général, et il a agi avec rigueur. Il a exprimé la position du Québec avec vigueur. Nous avons expliqué que c'est une approche plutôt axée sur l'idéologie, qui n'était pas nécessaire dans l'état actuel des statistiques sur la criminalité et qui n'était pas appuyée par les données empiriques qui devraient venir appuyer ce type de démarche législative.
M. le Président, notre différend est avec cette administration fédérale. Et nous avons des alliés: le Barreau canadien, entre autres, l'Ontario, l'Île-du-Prince-Édouard, d'autres provinces qui ne veulent assumer ce coût. Tout à l'heure, notre collègue et députée de Joliette nous a dit: Les autres provinces se sont prononcées sur le coût. Je l'invite à lire l'article d'Hélène Buzzetti, du Devoir, 8 novembre 2011: «Non seulement les premiers ministres de l'Ontario et de l'Île-du-Prince-Édouard ont mis en doute l'efficacité des mesures conservatrices proposées, mais ils ont aussi indiqué qu'Ottawa devrait augmenter ses transferts aux provinces pour payer ses réformes.»**(16 h 30)**.
Alors, d'abord, c'est inexact de prétendre qu'il n'y a aucune autre province, il n'y a pas d'allié sur la question du fond et que nos alliances sont juste sur la question du coût. C'est inexact. Nous avons des alliés canadiens et nous avons aussi des détracteurs québécois. Et, dans un article d'aujourd'hui, le 23 novembre 2011, encore Hélène Buzzetti, elle s'intéresse à cette question, elle nous parle d'un sondage Léger Marketing pour le compte du Devoir qui révélait, hier, que 41 % des Québécois ne croyaient pas que ce projet de loi réduirait la criminalité et qu'il y avait 22 % des Québécois qui avaient l'opinion contraire.
Maintenant, je n'ai jamais fait de la politique en essayant de dire qui qui est un bon Québécois, qui qui est un mauvais Québécois, en essayant d'imposer des conditions préalables à l'appartenance au Québec. Mais ce qu'on voit, c'est qu'il y a des gens, même de chez nous, qui semblent appuyer ce projet de loi. Nous avons entendu un éminent collègue du Sénat qui s'est aussi exprimé. Il y a d'autres, certains qui lui ont dit de se taire parce qu'il n'était pas élu. Je ne serais pas parmi eux. Je crois qu'il bénéficie de la liberté d'expression, même s'il a été nommé au Sénat. Il a son expérience personnelle, il a vécu des choses difficiles, il a le droit à son opinion.
Nous sommes en désaccord, et nous l'avons dit, comme Assemblée. Notre différend est idéologique, M. le Président, avec le fédéral, n'est pas avec le Canada, n'est pas avec le fédéralisme et la division de pouvoirs. Nos collègues aiment utiliser les termes «humiliant», «gênant» pour parler de la défense que nous avons faite de notre position et de la façon que notre ministre est allé défendre les intérêts du Québec, mais on pourrait appliquer ça au bilan du Parti québécois dans ses relations avec le fédéral, le bilan du Parti québécois, qui a amené beaucoup moins au Québec que ce que le gouvernement actuel a amené en termes de fonds, et d'appuis, et de transferts.
L'article 92, paragraphe 14° de la Loi constitutionnelle donne compétence au Québec en matière d'administration de la justice. Et ce qu'il est exact de dire, c'est que, depuis très longtemps, le Québec a développé l'approche qu'il défend aujourd'hui à l'intérieur de cette division de pouvoirs constitutionnels. Notre approche a été faite, a été défendue, a été élaborée, notre approche québécoise, que nos collègues d'en face avec nous voulons défendre, a été faite à l'intérieur de ce cadre constitutionnel. On ne peut pas dire que le cadre constitutionnel nous cadenasse aujourd'hui -- l'expression préférée de M. le député de Marie-Victorin -- alors que l'approche que nous défendons aujourd'hui a été élaborée dans le même cadre. C'est un non-sens, M. le Président. Et c'est intéressant de dire à quel point cette question-là du rapatriement du pouvoir en matière criminelle n'a pas été, n'a jamais été sur le radar du Parti québécois jusqu'à tout récemment.
Oui, il y a eu des débats faits par le passé, là, oui, mais, à entendre Mme la députée de Joliette nous parler du Canada, on se dirait que, du moment qu'on quitte le Québec, c'est rendu l'extrême-droite partout. C'est des gens pro-vie, pour des fusils, c'est la droite religieuse. J'invite Mme la députée de Joliette de prendre le temps, durant le temps des fêtes, de prendre le train et de voyager un petit peu à l'extérieur du Québec. Elle verrait que les gens ne sont pas... C'est vrai que les Canadiens ne sont pas tous pareils. Ils ne sont pas tous pareils, les Canadiens. Il y a des personnes qui sont pour, il y a des Canadiens qui sont plus à gauche, il y a des Canadiens qui sont plus à droite, il y a des Canadiens qu'on peut qualifier de «law and order» ou du «soft on crime», qui est l'expression de M. le sénateur.
Alors, ce qui est important là-dedans, c'est d'imaginer qu'en ce moment, alors que nous faisons la lutte à la corruption, à la collusion, quelle est la priorité de nos collègues d'en face. Pendant que nous mettons nos ressources ensemble, un investissement, nous mobilisons les forces policières pour faire la lutte à la corruption, que nous demandent nos collègues d'en face? Ils veulent rentrer dans une ronde des négociations constitutionnelles. Je comprends qu'il y a une crise au PQ, mais il ne faut pas chercher à faire de la diversion juste pour cette raison-là. Il faut garder notre oeil sur la balle. On va prendre le Code criminel, on va le peinturer bleu et on aura changé quoi?
Sommes-nous si différents que les autres Canadiens en matière de droit criminel? Est-ce que le Code criminel québécois dont parle notre collègue exclurait... Quel article elle exclurait du Code criminel? Moi, je suis convaincu, là, qu'une multiplication dans le scénario péquiste, où chaque province aurait un code criminel séparé avec d'autres peines et d'autres infractions, ce serait drôle. On pourrait prendre et mettre des panneaux à côté des panneaux «Bienvenue au Québec»: Ça vaut moins cher, au Québec, pour les criminels. On va mettre des panneaux juste à côté, on va les inviter à venir faire de la business ici.
Un code criminel unique pancanadien a démontré, a démontré qu'il pourrait fonctionner. Les gens qui pratiquent le droit criminel, qui ont exercé, comme le député de Chambly, savent. Écoutez, là, si nos collègues pensent qu'au palais de justice de Montréal, en ce moment, les criminalistes sont tous réunis dans un cubicule en train de parler du rapatriement du Code criminel, là, honnêtement j'ai des nouvelles pour eux, ce n'est pas ça. On pratique le droit criminel avec les outils que nous avons en main. Et ils font du travail excellent, que ce soient nos procureurs, nos avocats de la défense, nos juges, les membres de notre magistrature. Et, une autre chose, mauvaise nouvelle pour le Parti québécois, ils plaident la Charte canadienne également, ils plaident cet outil constitutionnel à tous les jours devant les tribunaux québécois pour protéger des Québécois, la Charte canadienne des droits et libertés, qui fait partie intégrante de notre système de droit criminel également.
Alors, on va-tu aussi arriver puis changer la charte? Est-ce qu'on veut une autre charte? Est-ce qu'on veut une charte avec moins de droits et libertés? La question se pose, M. le Président. Nous sommes dans une situation où la priorité de tous, alors que nous avons des alliés au Canada, nous avons une motion unanime ici, à l'Assemblée nationale... qu'est-ce qu'ils viennent faire de l'autre côté? Ils veulent la rupture de cette unanimité avec une proposition qui n'a nul autre but que de provoquer une crise constitutionnelle à un moment où toutes nos forces doivent être unies pour combattre la corruption et la collusion. C'est ridicule, c'est irréaliste, c'est contre-productif, ce n'est pas nécessaire et c'est une diversion pour ceux qui font le travail sur le terrain. Merci, M. le Président.
**(16 h 40)**Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, je vous remercie. Il restera quatre minutes à votre formation politique si vous décidez de l'utiliser. Alors, je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant. Je reconnais maintenant monsieur... Quatre minutes. Je reconnais maintenant M. le député de Verchères pour son intervention. M. le député de Verchères, en vous rappelant que vous avez... 3 min 30 s ou 4 min 30 s qu'on avait dit? 4 min 30 s, c'est ça, 4 min 30 s. À vous.
M. Stéphane Bergeron
M. Bergeron: M. le Président, c'est un débat qui, je le pense, aurait dû nous permettre une certaine élévation. C'était peut-être trop demander à nos collègues du parti ministériel, qui n'ont rien trouvé d'autre que de transformer cette motion des plus sérieuses, présentée par ma collègue de Joliette, en occasion de se livrer à un cirque partisan assez désolant, merci. M. le Président, je me serais attendu à ce que les héritiers des Lesage, Robert Bourassa... ou les prétendus héritiers de Lesage et Robert Bourassa, qui n'ont jamais cessé de réclamer pour le Québec, dans le cadre fédéral canadien, des pouvoirs pour permettre à la nation québécoise de s'affirmer, de se réaliser, je me serais attendu de ces soi-disant héritiers qu'ils regardent avec un certain sérieux la motion de ma collègue.
On a vu le député de Laurier-Dorion faire des gorges chaudes avec le terme «crise», l'appliquant au Parti québécois. Ha, ha, ha! Ha, ha, ha! On s'est tous bidonnés, M. le Président, c'était absolument hilarant. Comme s'il n'y avait pas de crise actuellement entre le Québec et le reste du Canada sur des questions touchant directement le Code criminel.
Je l'évoquais hier, M. le Président, c'est sans précédent qu'en l'espace de deux semaines deux ministres québécois se soient rendus à trois reprises à Ottawa pour faire valoir notre point de vue, notamment deux fois devant une commission parlementaire fédérale. De mémoire, je crois que la dernière fois où c'est arrivé, c'est lorsque la chef de l'opposition est allée plaider pour la déconfessionnalisation des écoles au Québec. C'est dire à quel point le geste est unique et est exceptionnel. Or, ça fait trois fois en deux semaines que les ministres libéraux doivent aller faire de douloureux pèlerinages à Ottawa simplement pour faire entendre raison au gouvernement fédéral sur le projet de loi C-10 sur la justice criminelle et sur le projet de loi C-19 concernant l'abolition du registre des armes à feu et la destruction des données.
Moi, je me souviens, M. le Président, avoir donné une entrevue, à un moment donné, à un journaliste sur l'Unité permanente anticorruption. Puis, à un moment donné, le journaliste m'a dit: Mais vous n'allez pas me dire, M. Bergeron, que c'est à cause du fédéral, là, puis que bon... Bien, j'ai dit: Non, mais il n'en demeure pas moins que, si on avait le plein contrôle sur notre Code criminel, il y a un certain nombre de difficultés auxquelles on fait face présentement auxquelles on ne ferait pas face.
Donc, c'est dans cette perspective-là, dans la foulée de la controverse entourant C-10, dans la foulée de la controverse entourant C-19 -- comme s'il n'y avait pas crise -- que ma collègue de Joliette présente cette motion visant à proposer le rapatriement au Québec du Code criminel. Or, tout ce que nos collègues libéraux ont trouvé à dire par rapport à cette proposition, c'est: Bien, ah, c'est ça, le PQ cherche à faire de la chicane, là, pour faire en sorte de faire avancer son option. On peut-u s'entendre ici, qu'on soit souverainiste ou fédéraliste, pour faire avancer le Québec tout simplement? Mais non, c'est trop demander aux libéraux, parce que tout ce qu'ils cherchent tout le temps -- puis on l'a vu depuis deux ans et demi -- c'est de faire avancer le Parti libéral, M. le Président.
Je veux dire, on a un exemple fascinant d'à-plat-ventrisme de la part des députés libéraux, et tout particulièrement de la part du députée de Laurier-Dorion. La semaine dernière, sur Twitter, la députée de Joliette écrivait: «C-10: exemple éloquent de dysfonctionnement du fédéralisme. Le Québec s'oppose mais il devra ramasser la facture de centaines de millions [de dollars]!» La réplique du député de Laurier-Dorion: «Le fédéralisme fonctionne mieux par exemple lorsque nous recevons 16,7 milliards en transferts fédéraux par année.» Alors, ça, c'est l'argument de Vic Toews, hein? Couper dans la santé et les services sociaux...
Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, on vous remercie. Le temps est terminé, M. le député de Verchères.
Une voix: ...
Le Vice-Président (M. Gendron): Oui, je le sais. Je le sais. Je l'ai vu. Alors, M. le député de Mercier, pour votre intervention. En vous rappelant que vous avez trois minutes et demie pour votre intervention.
M. Amir Khadir
M. Khadir: Merci, M. le Président. Je voudrais, donc, exprimer immédiatement la volonté de Québec solidaire d'appuyer la motion présentée par notre collègue de Joliette. C'est une demande légitime, d'autant plus légitime que le Québec... En fait, le Québec gère toute l'administration de la justice sur notre territoire. C'est un service que nous donnons à nos citoyens. Il est, d'abord, au départ, assez déraisonnable que les lois qui doivent guider l'exécution de la justice sur notre territoire soient écrites ailleurs qu'au Québec même.
Deuxièmement, dans bien d'autres domaines, le Québec a déjà... sans vouloir séparer le Québec du Canada, sans vouloir créer de crise constitutionnelle, le Québec a réclamé, à juste titre, de rapatrier un certain nombre de juridictions, un certain nombre de compétences. Et, malgré tout ce qu'en pense un parti indépendantiste comme Québec solidaire et tout ce que ça remet en question comme, je dirais, réalité d'un clivage profond entre la société québécoise et les élites qui dominent le Canada, qui dominent les institutions fédérales, des élites qui dominent ces institutions par-dessus, en fait, et en contravention des intérêts mêmes du reste de la population du Canada, qui ne demanderait pas mieux que le Québec ouvre la voie en cherchant par tous les moyens, notamment par le rapatriement du Code criminel, pour créer la crise nécessaire pour forcer aussi le jeu sur la scène fédérale... Donc, en dépit de ce qu'on pense de l'opportunité que ça présente, à la fois, que ça représente pour le peuple québécois et pour le peuple canadien, même un gouvernement libéral, des députés comme celui de Laurier-Dorion peuvent voter en faveur d'une telle motion pour donner au gouvernement... Même, en fait, le député de Verdun, mon ancien professeur, je pense, sans avoir besoin de la main invisible de Claude Ryan, peut réaliser à quel point, à quel point, dans le contexte actuel surtout, alors que son collègue fait le voyage deux fois à Ottawa et se fait rabrouer, se fait éconduire par les institutions fédérales, le geste le plus logique et le plus digne pour le gouvernement du Québec, c'est d'en tirer des conclusions et, par delà la partisanerie, demander et engager toutes les initiatives nécessaires pour qu'on se dote nous-mêmes d'un code criminel, puis demander que des amendements constitutionnels soient apportés.
Et, je le rappelle pour le bénéfice du député de Laurier-Dorion, pour Québec solidaire comme parti indépendantiste, ce n'est pas ça, notre stratégie. Pour nous, l'indépendance va se faire quand le peuple québécois en décidera. Ça sera dans le cadre d'une assemblée constituante, c'est clair, il n'y a pas d'ambivalence là-dessus. Québec solidaire arrive au pouvoir; six mois plus tard, il y a une constituante; au cours des 12 à 18 prochains mois, on écrit une constitution dans laquelle il y aura des dispositions relatives au Code criminel; puis ensuite le peuple québécois va se prononcer. Et ça sera fait dans un cadre démocratique, et les fédéralistes, comme le député de Laurier-Dorion et tous ceux comme lui, auront droit de parole. Cependant, il y a des actions concrètes à mener au nom du peuple québécois aujourd'hui, puis c'est le rapatriement du Code criminel au Québec.
Le Vice-Président (M. Gendron): On vous remercie, M. le député de Mercier, de votre intervention. Je cède maintenant la parole à M. le député de Verdun pour les quatre minutes restant à sa formation politique. M. le député de Verdun.
M. Henri-François Gautrin
M. Gautrin: Je vous remercie, je vous remercie, M. le Président. Je dois dire que je regrette profondément qu'on ait présenté aujourd'hui, cette motion qui va nous diviser, et que vous cherchez actuellement vos intérêts personnels ou les intérêts de parti plutôt que des intérêts supérieurs, à l'heure actuelle, qui nous avaient unis ici, dans cette Chambre, sur la question de C-10, M. le Président.
Vous savez parfaitement, et ils le savent parfaitement parce qu'il y a, de l'autre côté, des juristes de qualité, que voter cette motion, c'est ouvrir des négociations constitutionnelles, c'est commencer à rentrer réellement sur des négociations constitutionnelles. Premier élément.
Je reviendrai avec vous tout à l'heure, M. le Président. Il faut que j'intervienne -- j'ai peu de temps -- sur l'intervention de mon collègue et ami le député de Mercier. Je lui rappellerai, je lui rappellerai que, pendant très longtemps, les progressistes, les progressistes, ce n'était pas au Québec où ils étaient, ils étaient dans le reste du Canada. Ça a été l'ensemble... Et, moi, j'ai oeuvré pendant très longtemps à l'intérieur d'un parti qui maintenant est représenté au gouvernement fédéral par nombre de députés du Québec. Mais, à l'époque, le NPD était principalement représenté par des députés qui venaient de l'Ouest canadien et de l'Ontario. C'était là que se trouvaient, au Canada, l'ensemble des progressistes. Ce n'était pas, à l'époque, au Québec, je me permets de le rappeler à mon distingué collègue le député de Mercier.
M. le Président, de ce côté-ci de la Chambre, nous sommes profondément fiers d'être à la fois Canadiens et Québécois. Je suis représenté dans deux Parlements. J'ai un député fédéral qui me représente au Parlement canadien. Aujourd'hui, j'ai la chance qu'il soit NPD et j'en suis fier, mais j'ai un député qui me représente.
En démocratie, ce n'est pas parce que je suis opposé à une motion du gouvernement qui est majoritaire actuellement et que, je dois dire, je dois complètement briser complètement le fonctionnement, M. le Président. C'est comme si, à chaque fois qu'ils n'étaient pas... que l'opposition n'était pas d'accord avec un projet de loi ou avec une motion qui était de l'avant, on devrait changer la Constitution, on devrait changer la Constitution.
Nous ne sommes pas d'accord avec le projet de loi C-10, mais nous respectons actuellement un gouvernement démocratiquement élu qui est notre gouvernement au niveau fédéral. Et, pour moi, je suis aussi fier d'être Canadien que je suis fier d'être Québécois. Et on ne pourra jamais commencer à vouloir retirer... à la fois, de dire: Il existe, d'un côté, le Québec et, de l'autre côté, le Canada. Nous sommes à la fois, M. le Président, et ça a été la grande force du Québec pour se développer à l'heure actuelle... La grande force de se développer, c'est qu'ils peuvent oeuvrer actuellement à l'intérieur d'un gouvernement fédéral en ayant deux éléments: le gouvernement provincial, que nous représentons dans notre champ de juridiction, et le gouvernement fédéral, qui, dans son champ de juridiction, permet une meilleure répartition, en quelque sorte, de la richesse et un meilleur développement. Il y a une scission profonde entre l'opposition et nous sur ces questions-là, et c'est évident. À les écouter parler, j'avais l'impression qu'on parlait dans un monde totalement différent.
De ce côté-ci de la Chambre, nous ne sommes pas d'accord, M. le Président, avec le projet de loi C-10, nous aurions aimé maintenir une unanimité dans cette Chambre contre ce projet de loi, mais... Ce n'est pas la raison parce que je suis contre un projet de loi qu'automatiquement je dois ouvrir la Constitution, changer les éléments majeurs à l'intérieur de cette Constitution, M. le Président. Je respecte, actuellement, parce que je suis un démocrate, un gouvernement que je n'aime pas, que je n'aime pas, je n'ai jamais voté pour lui d'ailleurs, mais qui est... quand même avoir été élu à l'intérieur de mon pays.
**(16 h 50)**Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, on vous remercie, M. le député de Verdun, pour votre intervention. Et cette dernière intervention met fin au débat restreint. Alors, je vais maintenant vous donner votre droit de réplique, Mme la députée de Joliette, pour votre... Vous savez que vous avez un temps protégé de 10 minutes pour votre réplique. À vous.
Mme Véronique Hivon (réplique)
Mme Hivon: Merci, M. le Président. Je suis vraiment sidérée de la tournure du débat aujourd'hui. Je le dis vraiment de manière tout à fait transparente. Je pense qu'on avait une occasion de faire de la grande politique, de faire de la politique au-dessus justement des lignes partisanes. Depuis le début du dossier de C-10, il y a eu une collaboration extraordinaire. On s'est relayés pour toujours garder le momentum et pour faire valoir le consensus québécois. On s'est positionnés, de ce côté-ci de la Chambre. On a déposé une motion en Chambre, le gouvernement a voté avec nous, puis tous les partis d'opposition ont voté pour la motion. Ensuite, fort de cette motion-là, le ministre de la Justice est parti à Ottawa. Il est allé plaider le consensus québécois, il a déposé des amendements. Il y a toujours eu une superbe collaboration.
Aujourd'hui, qu'est-ce qu'on voulait? On voulait que ce consensus-là, dans un effort de faire de la vraie politique, de la noble politique, on puisse le pousser plus loin. Et puis, là, c'en est sidérant, le gouvernement est en train de nous dire que l'on veut diviser. J'aimerais qu'on m'explique où on veut diviser aujourd'hui. Au contraire, on est en train de dire au gouvernement -- parce que malheureusement on n'est pas au gouvernement, donc on ne peut pas faire ce qu'on aimerait qu'il fasse -- on est en train de lui dire: Entreprenez les démarches pour qu'on ait le plein contrôle sur nos lois criminelles, nos lois criminelles qui sont fondamentales, et en plus on va vous appuyer.
On travaille avec vous depuis des semaines pour C-10, pour le registre des armes à feu, puis là on est en train de vouloir pousser ça plus loin, pousser la collaboration, puis là on vient se faire dire qu'on veut diviser. Qui qui est en train de faire la division, là, aujourd'hui, entre les souverainistes puis les fédéralistes? À la limite, là, si on les avait, nos pouvoirs en matière criminelle, ça fonctionnerait mieux. Ça fonctionnerait mieux pour eux aussi, il me semble. Il n'y aurait pas eu rebuffade sur rebuffade comme le ministre vient de subir depuis quelques semaines, qui ne sont rien pour, je pense, faire plaisir aux Québécois puis honorer la nation qu'on est.
Donc, je ne comprends pas, je ne comprends pas qu'on ait voulu, de ce côté-là, diviser. C'est eux qui ont voulu diviser. Donc, c'est eux parce qu'ils ne savent pas quoi dire à notre motion. Je les comprends, remarquez. Qui, dans le contexte actuel, pourrait être contre le fait que le Québec puisse être maître d'oeuvre de toutes ses politiques et de ses lois en matière criminelle? Ça dépasse l'entendement. Qui pourrait être contre ça en ce moment? D'ailleurs, on n'a pas entendu un seul argument sur le fond des choses. Pourquoi ils sont contre la motion? On vient nous dire: C'est une motion pour la souveraineté. On leur dit depuis le début: Oui, on est des souverainistes. Oui, je suis une souverainiste, oui, et je ne pense pas qu'il n'y a personne qui devrait être étonné de ce côté-là. Oui, je pense que c'est un argument, parmi pleins d'autres, pour la souveraineté. Mais ce n'est pas ça, le débat aujourd'hui, M. le Président.
Le débat aujourd'hui, c'est de se dire: À la lumière de la conjoncture que l'on vit sur C-10, sur le registre des armes à feu, qu'on a vécue d'ailleurs il n'y a pas très longtemps, il y a à peu près deux ans, sur les crimes économiques, sur les criminels à cravate... Il y a énormément de moments où on vit des affrontements avec Ottawa sur des questions liées aux enjeux en matière criminelle. Et puis là on en vit un patent. Alors, oui, c'est un débat qui, nous, nous interpelle depuis longtemps. On pense qu'il a sa place depuis longtemps, mais on le ramène aujourd'hui, bien sûr, parce qu'on pense qu'on pourrait avoir un beau consensus là-dessus, compte tenu de la conjoncture.
Puis là on nous dit: Bien non, c'est un débat, là, pour créer la chicane puis c'est un débat de souverainistes versus fédéralistes. Est-ce que ça veut dire que, quand on a obtenu l'entente pour les congés parentaux, c'était une patente de souverainistes, ça? Voyons donc! Le gouvernement s'en réjouissait, le gouvernement n'arrête pas de vanter ça. Est-ce que, quand on a obtenu... quand la chef de l'opposition officielle à l'époque a obtenu l'amendement pour la déconfessionnalisation des commissions scolaires pour qu'elles deviennent des commissions scolaires linguistiques, est-ce que c'était un affrontement entre souverainistes et fédéralistes? Quand il y a eu l'entente sur l'immigration, comme le rappelait mon collègue de Lac-Saint-Jean, est-ce qu'on était dans un affrontement souverainistes-fédéralistes? Non, on était en train de porter un consensus québécois fait des valeurs, des intérêts, des priorités et de la manière de voir et de faire des Québécois. C'est ça qu'on voulait faire aujourd'hui. Et ils sont en train de détourner le débat parce qu'ils ne savent pas quoi dire.
Et puis là je ne sais pas si le ministre de la Justice m'a entendue tantôt, mais malheureusement je pense que non, parce qu'il est revenu pour dire que ce n'était pas parce qu'on était face à un problème conjoncturel, un problème épisodique que l'on allait vouloir se doter de toutes nos lois en matière criminelle. Je veux juste lui rappeler qu'il n'y a rien d'épisodique.
Oui, effectivement, en ce moment, c'est particulièrement difficile avec le gouvernement avec lequel on doit composer au niveau fédéral, mais ces problèmes-là, ils ne datent pas que de quelques semaines, de quelques mois. Je le rappelais tout à l'heure, précisément dans le dossier des jeunes contrevenants, quand la loi a été modifiée, fin des années quatre-vingt-dix, 2000, pour devenir la Loi sur le système de justice pénale pour adolescents, M. le Président, le Québec s'opposait. Unanimité encore. Pas une chicane entre souverainistes puis fédéralistes, unanimité. Le député de Marquette, le vice-président de l'Assemblée maintenant, avait accompagné les ministres péquistes de l'époque, bien oui, puis ils s'étaient rendus à Ottawa pour s'élever au-dessus de toutes les lignes partisanes et pour dire que ça n'avait aucun sens. Ce n'était pas un gouvernement du Reform Party.
Quand j'entends le ministre de la Justice dire qu'il ne se retrouve plus dans le Canada, c'est quand même assez éloquent. Et puis là, après, il veut nous le faire croire, il ne se retrouve plus dans le Canada, dans ce Canada, ce Canada de Stephen Harper. Je veux juste lui dire que c'était à peu près la même chose qu'on vivait sous le gouvernement de Jean Chrétien quand ils ont voulu modifier la Loi sur les jeunes contrevenants, tellement que... il y a eu un consensus si fort qu'on est même allé jusqu'à un renvoi devant la Cour d'appel. Je tiens à le redire parce qu'on nous sert toutes sortes d'arguments qui ne tiennent pas la route pour venir aujourd'hui nous dire qu'on est en train de vouloir, nous, diviser, alors que, depuis le départ, on a interpellé le gouvernement, on leur a dit qu'on leur offrait toute notre collaboration sur C-10, sur le registre des armes à feu pour travailler avec eux, et c'est ce qu'on a fait. On n'a jamais eu une note discordante.
Et puis là, aujourd'hui, on pense que, oui, compte tenu de la conjoncture, c'est un débat qui est totalement d'actualité. Il est d'actualité parce que la conjoncture est assez dramatique, merci. On est en train non seulement de venir à l'encontre des valeurs puis du modèle du Québec, mais on est en train de faire une chose qui est complètement illogique. Qui, au Canada, a intérêt à avoir des mesures illogiques pour que la criminalité augmente plutôt qu'elle baisse? Moi, j'aimerais ça qu'on m'explique ça. Puis là, quand on vient me dire: Ah! vous êtes en train de faire le «eux» et le «nous», bien ce n'est peut-être pas ça, mais quels intérêts sont pris en compte quand on voit les mesures qui sont mises de l'avant maintenant, mêmes mesures qui avaient été tentées par le gouvernement Chrétien? Ce n'est certainement pas les voix progressistes, les voix modérées, la voix du Québec, c'est d'autres voix qui sont dominantes.
Donc, je veux bien qu'on me dise: C'est la grande harmonie au Canada, mais le fait est que, quand il y a une nation, une nation qui est supposée être reconnue, puis qui s'oppose, et qu'on met complètement de côté ses arguments, ses valeurs, ses manières de faire, bien je ne pense pas qu'on peut dire qu'on fait tous partie de la magnifique famille qui a des intérêts convergents. Alors, non, ce n'est pas conjoncturel, au même titre où on a eu d'autres débats et au même titre où on voit que les lois criminelles, M. le Président, c'est intrinsèquement lié à l'identité, à l'identité d'une nation, à l'identité d'une société. Alors, je ne vois pas... À moins que le gouvernement nous dise qu'il ne reconnaît pas la nation, qu'il ne reconnaît pas la spécificité du Québec, qu'il ne reconnaît pas les valeurs du Québec, ce qui me surprendrait, parce qu'encore hier on a vu le ministre de la Justice complètement outré de voir que le gouvernement fédéral ne se rendait pas à ses arguments concernant justement la spécificité des valeurs, du modèle, de l'approche, qui misaient sur la réhabilitation, du Québec.
**(17 heures)** Donc, je ne comprends pas comment on peut faire fi d'un élément aussi fondamental pour la défense d'une identité, d'une nation que de décider ce qui est bien, ce qui ne l'est pas, ce qui peut être accepté dans une société et de ce qui doit être interdit, des mesures que l'on doit prendre face aux contrevenants, de les envoyer en prison, de leur offrir la réhabilitation, d'être dans les peines minimales. Les approches sont multiples. Comment qu'on pourrait nier ça si on se rend compte, comme le ministre dit qu'il s'en rend compte, que nos valeurs ne sont pas respectées?
Alors, je le répète, j'aurais aimé aujourd'hui qu'on soit capables encore une fois d'être dans le consensus. Et j'interpelle à nouveau le gouvernement. Aujourd'hui, on n'est pas dans un débat entre souverainistes et fédéralistes. On l'est de manière générale. Je l'ai dit tout à l'heure, moi, je suis prête à faire le débat n'importe quand. Et, pour la gouverne du ministre, je veux lui dire que les arguments ne s'excluent pas, pour la souveraineté, ils s'additionnent. Mais aujourd'hui ce n'est pas ça qui est devant nous. C'était, dans la foulée de la conjoncture que l'on vit, de marquer un geste fort pour la défense des intérêts et de la voix du Québec, et on aurait aimé que, comme on s'est relayé le flambeau pour défendre ce consensus-là depuis plusieurs semaines, que l'on continue, que l'on fasse entendre haut et fort la voix du Québec et surtout qu'on s'assure de défendre jusqu'au bout, dans tous les domaines possibles, la spécificité du Québec et des valeurs québécoises. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, je vais mettre maintenant aux voix la motion de Mme la députée de Joliette, qui se lit comme suit:
«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement du Québec d'entreprendre les démarches pour doter le Québec de ses propres lois criminelles, dont le Code criminel, qui refléteront les valeurs fondamentales des Québécois et des Québécoises.» Est-ce que cette motion est adoptée?
M. Kotto: ...nominal, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, le vote par appel nominal est demandé. Que l'on appelle les députés.
**(17 h 2 -- 17 h 11)**Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, on a suspendu, chers collègues... Veuillez prendre vos places assis et non pas debout.
Mise aux voix
On a suspendu parce que c'est la motion du mercredi, puis on avait appelé un vote nominal sur la motion suivante. Je la relis avant d'appeler le vote:
«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement du Québec d'entreprendre les démarches pour doter le Québec de ses propres lois criminelles, dont le Code criminel, qui refléteront les valeurs fondamentales des Québécois et des Québécoises.» Quels sont ceux qui sont d'accord avec cette motion?
Le Secrétaire adjoint: Mme Marois (Charlevoix), Mme Maltais (Taschereau), Mme Malavoy (Taillon), M. Gaudreault (Jonquière), M. Lemay (Sainte-Marie--Saint-Jacques), M. Simard (Richelieu), M. Cloutier (Lac-Saint-Jean), M. Trottier (Roberval), Mme Champagne (Champlain), Mme Beaudoin (Mirabel), Mme Richard (Duplessis), M. Bergeron (Verchères), M. Robert (Prévost), M. Pelletier (Rimouski), M. Rebello (La Prairie), Mme Hivon (Joliette), M. St-Arnaud (Chambly), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Drainville (Marie-Victorin), M. Girard (Gouin), M. Bérubé (Matane), M. Pinard (Saint-Maurice), M. Pagé (Labelle), M. Cousineau (Bertrand), M. Ferland (Ungava), M. Dufour (René-Lévesque), Mme Ouellet (Vachon), M. Kotto (Bourget), Mme Richard (Marguerite-D'Youville), Mme Poirier (Hochelaga-Maisonneuve), M. Ratthé (Blainville), M. McKay (L'Assomption), M. Tremblay (Masson), M. Simard (Kamouraska-Témiscouata), M. Traversy (Terrebonne), M. Pelletier (Saint-Hyacinthe).
M. Khadir (Mercier), M. Curzi (Borduas), Mme Lapointe (Crémazie).
Le Vice-Président (M. Gendron): Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever.
Le Secrétaire adjoint: M. Charest (Sherbrooke), M. Fournier (Saint-Laurent), Mme Beauchamp (Bourassa-Sauvé), Mme Courchesne (Fabre), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce), M. Bachand (Outremont), Mme Blais (Saint-Henri--Sainte-Anne), M. Lessard (Frontenac), Mme Thériault (Anjou), M. Corbeil (Abitibi-Est), M. Auclair (Vimont), Mme St-Pierre (Acadie), Mme Ménard (Laporte), Mme James (Nelligan), Mme Vien (Bellechasse), M. Kelley (Jacques-Cartier), M. MacMillan (Papineau), M. Moreau (Châteauguay), M. Arcand (Mont-Royal), M. Hamad (Louis-Hébert), M. Dutil (Beauce-Sud), Mme Charlebois (Soulanges), Mme Boulet (Laviolette), M. Vallières (Richmond), M. Gignac (Marguerite-Bourgeoys), M. Simard (Dubuc), Mme St-Amand (Trois-Rivières), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Marcoux (Vaudreuil), M. Whissell (Argenteuil), M. Bergman (D'Arcy-McGee), M. Gautrin (Verdun), Mme L'Écuyer (Pontiac), M. Bachand (Arthabaska), M. Bernard (Rouyn-Noranda--Témiscamingue), M. Bernier (Montmorency), M. Morin (Montmagny-L'Islet), M. Reid (Orford), M. Dubourg (Viau), Mme Gaudreault (Hull), Mme Gonthier (Mégantic-Compton), M. Ouellette (Chomedey), M. Sklavounos (Laurier-Dorion), Mme Vallée (Gatineau), M. Billette (Huntingdon), M. Huot (Vanier), M. Drolet (Jean-Lesage), M. Diamond (Maskinongé), M. D'Amour (Rivière-du-Loup), M. Chevarie (Îles-de-la-Madeleine), Mme Charbonneau (Mille-Îles), M. Carrière (Chapleau), M. Lehouillier (Lévis), M. Mamelonet (Gaspé), M. Matte (Portneuf), Mme Rotiroti (Jeanne-Mance--Viger).
M. Deltell (Chauveau).
Le Vice-Président (M. Gendron): Y a-t-il des abstentions? Mme la secrétaire générale adjointe.
La Secrétaire: Pour: 39
Contre: 59
Abstentions: 0
Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, la motion est rejetée.
Alors, M. le leader du gouvernement, pour la poursuite de nos travaux.
M. Gautrin: Je vous remercie, M. le Président. Auriez-vous l'obligeance d'appeler, pour la poursuite du débat, l'article 25, de manière que notre collègue d'Hochelaga-Maisonneuve puisse terminer son intervention?
Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, oui, je veux bien l'appeler, mais on va laisser... Que les gens qui doivent se retirer se retirent pour qu'on puisse poursuivre dans l'ordre. Et ce n'est pas le cas présentement.
Alors, on va suspendre les travaux quelques instants.
(Suspension de la séance à 17 h 15)
(Reprise à 17 h 17)
Une voix: ...
Projet de loi n° 22
Reprise du débat sur la prise en
considération du rapport de la commission
qui en a fait l'étude détaillée
Le Vice-Président (M. Gendron): Oui, mais c'était une courte suspension uniquement pour qu'on puisse faire ce que vous venez de nous indiquer, c'est-à-dire: À l'article 25 du feuilleton, l'Assemblée prend en considération le rapport de la Commission de l'aménagement du territoire sur le projet de loi n° 22, Loi modifiant le Code civil concernant certains cas de résiliation du bail d'un logement.
Ces délibérations avaient été commencées; même, on achevait. Alors, c'est pour les terminer que je cède la parole à Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve. Alors, vous saviez, vous, mieux que moi quel temps qu'il vous restait. Alors, veuillez utiliser le temps qui vous était imparti, et on verra par la suite. À vous.
Mme Carole Poirier (suite)
Mme Poirier: Alors, merci, M. le Président. Alors, je nous rappellerais qu'on est sur le projet de loi n° 22, qui vient faire en sorte de corriger les clauses au bail pour, entre autres, les personnes âgées, et qui faisait suite à la promesse de la ministre des Aînés à réduire de trois mois à un mois la pénalité qui est donnée à un aîné lorsque cette personne quitte pour une résidence de personnes âgées. Alors, on se rappellera que la ministre avait promis sur plusieurs tribunes -- il y avait même eu une pétition de 35 000 noms de la FADOQ qui avait été déposée à l'Assemblée nationale -- la ministre avait pris l'engagement de réduire de trois mois à un mois... Mais malheureusement, lorsqu'elle a déposé son projet de loi, et je vais même la citer, cette première mouture là ne la satisfaisait pas. Elle ne satisfaisait pas personne, M. le Président. Les seules personnes que ça satisfaisait, c'était l'Association des propriétaires, les gens qui sont propriétaires des immeubles à logements. Eux, ils étaient bien contents parce que finalement on ne venait pas changer rien, on ne venait pas faire en sorte que le trois mois à un mois s'appliquerait.
Cependant, M. le Président, lorsque nous avons fait les travaux article par article, la ministre était retournée à son Conseil des ministres et elle est revenue avec des amendements pour... qui ont fait en sorte de transformer totalement le projet de loi. Alors, on se rappellera, M. le Président, 10 amendements qui ont été déposés pour faire en sorte que ce projet de loi ait enfin un peu de nerf, ait du contenu dedans. Et je vais vous dire que c'est forte de l'appui de l'opposition, forte de l'appui aussi des groupes, des associations de retraités que la ministre était appuyée dans ce sens-là. Et le résultat final, M. le Président, qui a été déposé lors de l'étude article par article, a fait en sorte qu'on a réécrit totalement ce projet de loi là.
Alors, ce que ça veut dire, le réécrire, eh bien, c'est que maintenant, au lieu d'être trois mois de pénalité, c'est deux mois, maintenant. Alors, on a gagné un mois. On n'a pas tout gagné, on a gagné un mois. C'est extraordinaire! C'est au moins un mois. Mais ce qui est encore plus important, c'est que cette nouvelle donne ne s'applique pas seulement qu'aux aînés, va s'appliquer aussi dans le cas des femmes violence de... -- mon Dieu! -- des femmes victimes de violence conjugale, va s'appliquer aussi lorsqu'une personne quitte son HLM et dans le cas d'un décès. Alors, ça, c'est très important parce que ça vient faire en sorte de s'appliquer à tout le monde.
**(17 h 20)** Ce que ça vient faire aussi, M. le Président, c'est qu'il y a maintenant dans la loi le fait qu'il y a une attestation et que cette attestation doit être signée par une personne autorisée, personne autorisée qui doit être quelqu'un, exemple, un travailleur social, une infirmière, et qui doit venir, dans le fond, décrire la situation de cette personne-là qui doit changer de logement à cause de sa condition de perte d'autonomie. Alors, c'est ça qui est important, M. le Président, parce qu'il ne faut pas que ça serve à n'importe quoi.
Et à cet effet, M. le Président, nos amis de la CORPIQ, qui suivaient beaucoup, beaucoup nos travaux, dans leur dernière édition, alors ils sont venus nous dire comment on devrait transformer l'expression «foyer d'hébergement». Et ils s'appuyaient, là-dessus, sur plusieurs décisions de la Régie du logement, parce que la régie, elle aussi, est venue nous dire durant nos travaux qu'ils ne savaient pas comment appliquer la loi en tant que telle, entre ce que c'était, un foyer d'hébergement, une résidence pour personnes âgées ou un CHSLD.
Alors, M. le Président, ce qu'on est venus faire dans le projet de loi, c'est venir vraiment affirmer qu'est-ce que c'est dorénavant, une résidence pour personnes âgées. Bien, ce n'est pas compliqué. Et on s'était fiés, là-dessus, sur ce qu'on avait fait dans le projet de loi n° 16, qui n'est toujours pas adopté, M. le Président. Ça s'en vient, je l'espère. Alors, dans le projet de loi n° 16, il y a un règlement qui accompagne ça, et ce règlement-là vient dire que ça prend des services d'assistance personnelle et des soins infirmiers. Et d'ailleurs un des amendements vient même décrire au texte ce qui est dans le projet de règlement du projet de loi n° 16. Ça se retrouve maintenant dans le projet de loi n° 22, pour faire en sorte que, durant l'année de transition où on va appliquer le règlement du projet de loi n° 16, eh bien, au moins, dans cette loi-là, les gens vont être protégés.
Alors, M. le Président, on est venus aussi, dans ce projet de loi là, faire en sorte que les frais afférents... Et là je vais vous expliquer c'est quoi, un frais afférent. Le frais afférent, M. le Président, là, c'est tout ce qu'il y a dans l'annexe au bail, alors quand je reste dans une résidence pour personnes âgées et que je dois payer, par exemple, pour avoir un bain, que je dois payer pour mes repas. Et puis il y en a toute une ventilation, là, il y en a trois pages, de types de ce que je peux avoir: qu'on puisse venir me donner mes médicaments, qu'on me donne... par exemple, est-ce je peux avoir... le fait d'avoir le gardien de sécurité, est-ce que j'ai accès à la cuisine commune, est-ce que j'ai le droit à l'entretien ménager, par exemple. Et tout ça m'est facturé, en général, à la pièce.
Lorsqu'une personne décédait, M. le Président, eh bien, pendant trois mois, sa succession devait continuer à payer ses frais afférents. Alors, c'était une requête, entre autres, de l'AREQ, de l'association des retraités de l'éducation, qui sont venus en commission nous dire: Voyons, ça n'a pas de bon sens!
La ministre avait une expression qui parle par elle-même: la ministre nous avait dit que les morts mangeaient. Eh bien, effectivement, M. le Président, les morts mangeaient, parce que les morts continuaient à payer les frais de repas dans les résidences dans lesquelles ils vivaient avant leur décès. Alors, assez pathétique.
Alors, maintenant, avec les travaux de notre commission parlementaire, eh bien, c'est fini, c'est fini. À partir du moment du décès, les morts ne mangeront plus, mais il y a tout le reste des frais afférents qui ne seront pas affectés et qui vont faire en sorte, M. le Président, que les familles vont se voir allégées de frais importants, parce que ce ne sont que les frais de logement qui sont considérés maintenant et non pas toute cette pléiade de frais.
Alors, aussi, M. le Président, durant nos travaux, on a pu discuter avec la ministre concernant le crédit d'impôt que le gouvernement donne dorénavant. Mais ça, ce n'est toujours pas clair, et on n'a toujours pas la réponse. La ministre a dit tout à l'heure quelque chose pour lequel on n'a toujours pas exactement la réponse, et j'espère que, d'ici l'adoption finale, on aura une réponse claire du gouvernement: Est-ce que le crédit d'impôt s'applique dans les résidences intermédiaires? On a posé la question. La ministre me fait signe de oui, mais, dans les documents du ministère du Revenu, ce n'est pas clair. Alors, il va falloir que le gouvernement vraiment le signifie de façon... plus clairement, parce que ce crédit d'impôt là va venir contribuer à payer le deux mois que les gens doivent payer en double.
Alors, M. le Président, dans le cadre du projet de loi, on a travaillé très sérieusement, on a travaillé en collaboration, mais je peux vous dire que, grâce à la vigilance de l'opposition, on a permis de faire en sorte que ce projet de loi là ait du mordant, ait de la force puis ait surtout des services pour les personnes âgées. Les mesures transitoires qui ont été instaurées dans le projet de loi vont faire en sorte qu'on va pouvoir, dans le fond, aller jusqu'en décembre 2012, parce que le projet de loi n° 16, le projet de loi de l'autre ministre qui s'occupe des aînés, fait en sorte que tout ce qui concerne les résidences de personnes âgées va s'appliquer seulement qu'en décembre 2012. Alors, dans le projet de loi n° 16, des dispositions transitoires sont venues s'installer pour faire en sorte qu'on va pouvoir se rendre à décembre 2012, mais au moins en protégeant les droits des aînés, mais surtout protéger leur dignité dans les résidences de personnes âgées.
Alors, M. le Président, je pense qu'on a fait un grand bout. Moi, je suis très fière d'avoir collaboré et d'avoir par mon insistance... Et je le dis, M. le Président, sans vouloir me vanter, M. le Président, mais, je vous le dis, si on n'avait pas été aussi insistants de ce côté-ci, ce projet de loi là n'aurait pas la teneur qu'il a présentement. Et, moi, je veux nous féliciter du beau travail qu'on a fait en commission, mais, je vous le dis, M. le Président, il y avait de l'ouvrage à faire parce que la première mouture ne satisfaisait pas la ministre, mais ne satisfaisait personne, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Gendron): Je vous remercie, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve. Et je cède maintenant la parole à Mme la ministre.
Mme Marguerite Blais
Mme Blais: Alors, M. le Président, j'aimerais rectifier certaines choses, entre autres concernant... Lorsque j'ai déposé la première mouture, le 3 juin dernier, il faut dire qu'il n'y avait pas que la CORPIQ qui était d'accord avec le projet de loi, il y avait la FADOQ et il y avait aussi la conférence régionale des tables qui étaient d'accord avec le programme... avec le projet de loi. Donc, il n'y avait pas seulement les associations de propriétaires. La première des choses.
La deuxième des choses, j'ai dit que le projet de loi, intérieurement, ne me satisfaisait pas, surtout quand j'ai entendu en consultations particulières, et c'est ça, la beauté de la consultation particulière, les gens qui sont venus débattre. Et la députée d'Hochelaga-Maisonneuve n'a pas eu beaucoup besoin de me convaincre, j'étais moi-même convaincue. J'étais convaincue qu'on devait faire des changements. Donc, ça n'a pas été un très long travail que... il n'y a pas eu de très longs débats. Alors, j'ai vu immédiatement qu'il fallait qu'on fasse des modifications, et c'est moi qui ai apporté les principaux amendements, entre autres concernant les frais afférents. Ça n'avait pas été demandé. La question des morts qui mangent, oui, ça avait été demandé à la consultation publique sur les conditions de vie des aînés. C'est-à-dire, quand une personne décède, toute la question des frais afférents qui doivent être payés par la succession, par les héritiers, et ça, c'était vraiment un irritant majeur. Mais j'ai pensé que ce serait fondamental et ce serait une avancée majeure de pouvoir soutenir les personnes plus vulnérables, nos aînés qui sont pris avec des frais afférents, et tout de suite je l'ai proposé.
La deuxième des choses, ça n'avait pas beaucoup de logique d'avoir la notion de foyer d'hébergement telle que c'était inscrit dans le Code civil, alors qu'il y avait des modifications. Maintenant, ça s'appelle «résidence privée pour aînés», et non pas pour personnes âgées, et on trouvait qu'il n'y avait pas de concordance. On a décidé de faire une concordance. Oui, on a décidé de faire de la concordance avec le projet de loi n° 16 pour que les deux projets de loi aient de l'allure. Et, quand la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, qui a étudié tout le projet de loi n° 16, nous parlait de concordance, bien ça nous apparaissait tout à fait évident. Et là on a immédiatement enclenché le processus pour que ces modifications, ces amendements-là se fassent.
Concernant du trois mois au deux mois, bien là, M. le Président, vous connaissez ça, l'équilibre, hein? Ce n'est pas facile. Des fois, votre coeur parle parce que vous êtes responsable des aînés, mais d'un autre côté tu as 243 000 petits propriétaires et tu ne veux pas que nos aînés soient stigmatisés et qu'on leur refuse un loyer dans un duplex ou dans un triplex. Et, pour garder l'équilibre, il a fallu, à un moment donné, trancher, et on a tranché pour de trois mois à deux mois.
Alors, oui, il y a eu des avancées majeures. Je tiens à remercier la députée d'Hochelaga-Maisonneuve. On a fait l'étude détaillée seulement en deux sessions. Ça veut dire qu'il y avait une volonté ministérielle de faire avancer le dossier, et ça, je tiens à le dire aussi. Parce que ce n'est pas vrai que ça s'est fait juste d'un côté de la Chambre. Ça s'est fait des deux côtés de la Chambre. Et je pense qu'on doit respecter aussi le fait que les travaux se sont faits dans l'harmonie dans les deux côtés de la Chambre. Ça a pris moins de six heures, moins de six heures, peut-être même cinq heures, pour faire l'étude détaillée et pour réécrire le projet de loi. Ça fait qu'il ne faut pas dire ici que c'est seulement un côté de la Chambre qui a travaillé.
**(17 h 30)** Donc, je tiens à remercier la députée d'Hochelaga-Maisonneuve. Je tiens aussi à remercier tous les collègues qui ont participé à l'étude détaillée de ce projet de loi qui fait en sorte qu'on vient améliorer les conditions de vie non seulement des aînés, mais des personnes qui doivent déménager en raison d'un handicap, en raison... parce qu'elles obtiennent un logement à loyer modique, lors d'un décès ou lorsqu'une personne est victime d'agression sexuelle ou à caractère... de violence conjugale. Alors, merci, M. le Président.
Mise aux voix du rapport
Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, cette dernière intervention met fin au débat. Est-ce que le rapport de la Commission de l'aménagement du territoire portant sur le projet de loi n° 22, Loi modifiant le Code civil concernant certains cas de résiliation du bail d'un logement, est adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Gendron): Adopté. M. le leader du gouvernement.
Ajournement
M. Gautrin: Je vous remercie, M. le Président. Compte tenu de la célérité de nos travaux, je voudrais faire motion pour ajourner nos travaux à jeudi le 24 novembre, à 9 h 45.
Le Vice-Président (M. Gendron): Est-ce que cette motion est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Gendron): Adopté. En conséquence, nous ajournons nos travaux au jeudi 24 novembre 2011, à 9 h 45. Les travaux sont ajournés.
(Fin de la séance à 17 h 31)