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Version finale

37th Legislature, 1st Session
(June 4, 2003 au March 10, 2006)

Tuesday, November 23, 2004 - Vol. 38 N° 106

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Table des matières

Affaires du jour

Présence du ministre de l'Énergie et des Mines
de la Colombie-Britannique, M. Richard Neufeld

Souligner le retour à l'Assemblée nationale du député
de Lac-Saint-Jean, M. Stéphan Tremblay

Affaires courantes

Affaires du jour

Ajournement

Journal des débats

(Dix heures six minutes)

Le Vice-Président (M. Cusano): À l'ordre, s'il vous plaît! Mmes, MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants.

Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.

Affaires du jour

M. le ministre du Travail et député de Jean-Lesage. M. le ministre.

M. Després: Oui. M. le Président, j'appellerais l'article 17, s'il vous plaît.

Projet de loi n° 79

Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Cusano): À l'article 17, M. le ministre du Travail propose l'adoption du principe du projet de loi n° 79, Loi modifiant la Loi sur l'équité salariale concernant l'établissement de programmes distincts. Y a-t-il des interventions? M. le ministre du Travail.

M. Michel Després

M. Després: Merci beaucoup, M. le Président. J'ai déposé à l'Assemblée nationale, le 11 novembre dernier, le projet de loi modifiant la Loi sur l'équité salariale concernant l'établissement de programmes distincts. Nous franchissons aujourd'hui une seconde étape en sollicitant l'accord de principe des parlementaires de l'Assemblée sur l'adoption de son principe.

D'entrée de jeu, je tiens à réaffirmer que notre gouvernement a pris un engagement, à réaffirmer que notre gouvernement a pris un engagement ferme en ce qui regarde la réalisation de l'équité salariale au sein des entreprises qui sont visées par la loi. Le gouvernement adresse un message clair aux femmes, aux travailleuses, aux travailleurs syndiqués, aux syndicats, de même qu'à la population en général en déposant un projet de loi visant à faciliter cet exercice auquel sont soumis les employeurs touchés. La Loi sur l'équité salariale s'applique, depuis le 21 novembre 1997, aux entreprises comptant 10 salariés ou plus. Elle prévoit diverses obligations établies en fonction de la taille des entreprises. Ces obligations ont pour but de corriger des écarts salariaux dus à la discrimination fondée sur le sexe à l'égard des personnes qui occupent des emplois dans des catégories d'emploi à prédominance féminine.

Le chapitre IX de la loi permettait aux employeurs de faire approuver à certaines conditions un programme d'équité salariale ou de relativité salariale réalisé avant l'adoption de cette loi. Ils devaient, pour ce faire, soumettre leur programme à l'analyse de la Commission de l'équité salariale. Si le programme soumis rencontrait les critères établis au chapitre IX, l'employeur n'avait pas à recommencer un exercice d'équité salariale en vertu du régime général de la Loi sur l'équité salariale. Près de 120 entreprises se sont prévalues de cette option et ont soumis des rapports à la Commission de l'équité salariale. La grande majorité de ces demandes ont été approuvées par la commission. Un total, M. le Président, de 67 ont eu recours devant la Cour supérieure pour attaquer la validité de certaines décisions de la commission et le fondement même du chapitre IX de la loi. Le 9 janvier 2004, la Cour supérieure a rendu sa décision. Elle déclare l'invalidité constitutionnelle du chapitre IX, obligeant ainsi un grand nombre d'entreprises québécoises à reprendre cet exercice.

Le gouvernement a pris acte de la décision de la cour et, en février 2004, le Procureur général du Québec a annoncé qu'il ne porterait pas en appel le jugement de la Cour supérieure. Nous reconnaissions ainsi, dans un geste tangible et significatif, l'appui important du gouvernement au principe de l'équité salariale. C'est à ce moment que la présidente du Conseil du trésor et ministre responsable de l'Administration gouvernementale, Mme Monique Jérôme-Forget, et moi-même avons annoncé que nous étions confiants d'identifier des pistes de solution rapidement pour que l'équité salariale puisse se concrétiser dans un cadre d'application reconnu et qui saurait rallier l'ensemble des organisations concernées. Nous avons tenu promesse, M. le Président.

n (10 h 10) n

Nous avons été sensibles à l'argumentation des entreprises, qui ont désormais l'obligation de se doter d'un programme d'équité salariale en vertu du régime général de la loi, et qui éprouvaient des difficultés dans son application. Nous avons donné suite à leurs représentations en déposant le présent projet de loi à l'Assemblée nationale, le 11 novembre, et le portant à l'attention aujourd'hui de cette même Assemblée pour l'adoption de principe. Nous sommes conscients de l'importance de procéder rapidement à ce chapitre, puisque plusieurs travailleuses et travailleurs attendent depuis longtemps les résultats de l'application des programmes d'équité salariale.

Par ailleurs, il est prévu que la Loi sur l'équité salariale sera examinée dans sa globalité à la suite du dépôt d'un rapport qui fera le bilan de son impact depuis son entrée en vigueur dans deux ans. Essentiellement, le projet de loi appelé projet de loi modifiant la Loi sur l'équité salariale concernant l'établissement de programmes distincts facilitera, pour les organisations concernées, la réalisation de leur exercice d'équité salariale. Il traduit la volonté du gouvernement d'apporter son soutien aux entreprises qui ont l'obligation de se conformer au régime, comme je le disais, général de la loi. Son adoption permettra à un employeur de conclure une entente avec plusieurs associations accréditées en vue d'établir un programme distinct d'équité salariale applicable aux salariés représentés par ces associations.

Actuellement, M. le Président, la loi prévoit que l'employeur, sur demande d'une seule association accréditée, doit établir un programme d'équité salariale applicable aux salariés de cette association accréditée. Il doit donc établir un programme applicable à l'ensemble de son entreprise et en établir un distinct pour chacune des associations accréditées qui en ferait la demande. M. le Président, il est donc essentiel que le principe de ce projet de loi soit adopté aujourd'hui pour le soumettre à l'approbation de l'Assemblée nationale. Cette modification législative est très attendue par les entreprises et les syndicats pour qu'ils puissent procéder avec plus de facilité et de souplesse à la mise sur pied des programmes d'équité salariale de toutes les entreprises et pour le gouvernement. Le gouvernement donne la preuve encore une fois qu'il est sensible aux attentes des clientèles qui sont concernées par ce projet de loi et qu'il tient promesse. Surtout lorsqu'il y va de l'intérêt public et des milliers de salariés qui pourront bénéficier de l'équité salariale une fois les programmes complétés, il convient donc de procéder avec diligence.

M. le Président, pour commémorer la date de l'adoption de la Loi sur l'équité salariale, on sait que la Commission de l'équité salariale réunit chaque année les divers partenaires du monde patronal, syndical et du mouvement des femmes dans le but d'échanger sur leurs préoccupations respectives et d'élaborer des propositions permettant de faire face aux défis qui se poseront dans l'avenir. Je veux également profiter de l'occasion pour remercier les partenaires oeuvrant au sein des milieux de travail et du mouvement des femmes de leur apport précieux. Ces derniers contribuent à faire progresser ce dossier par leur expertise et nous permettent de faire, M. le Président, des choix éclairés. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Cusano): Merci, M. le ministre du Travail. Je reconnais maintenant le député de René-Lévesque, porte-parole en matière de travail. M. le député.

M. Marjolain Dufour

M. Dufour: Alors, merci, M. le Président. Alors, c'est la première fois que j'ai à intervenir en cette Chambre comme porte-parole en matière de travail. Je vais le faire sur une note bien entendu positive, en félicitant l'ensemble des parties dans le règlement du dossier de ABI, et particulièrement le conciliateur au dossier qui fait en sorte que cette région touchée économiquement depuis quatre mois et demi va voir un essor économique reprendre par rapport à la fin de ce conflit de travail.

En ce qui a trait au projet de loi n° 79, Loi modifiant la Loi sur l'équité salariale concernant l'établissement de programmes distincts, alors, M. le Président, la Loi sur l'équité salariale a pour objet de corriger les écarts salariaux dus à la discrimination systématique fondée sur le sexe à l'égard des personnes qui occupent des emplois dans la catégorie d'emplois à prédominance féminine. La Loi sur l'équité salariale allait plus loin que dire: À travail égal, salaire égal, mais disait: À travail équivalent, salaire égal. Il s'agit d'un grand chantier pour le Québec mis de l'avant par le gouvernement du Parti québécois. Le projet de loi n° 79 est en partie dû au jugement de janvier 2004 annulant le chapitre qui a permis à certains employeurs, dont le gouvernement, de se soustraire de la Loi sur l'équité salariale en faisant valoir qu'ils avaient déjà un programme d'équité salariale amorcé dans leurs entreprises.

Par ce projet de loi, le gouvernement fait en sorte que les employeurs puissent conclure une entente avec plusieurs associations accréditées en vue d'établir un programme d'équité salariale distinct, applicable aux salariés représentés par ces associations. Ainsi, sans ce projet de loi, les parties auraient dû reprendre le processus d'équité salariale du début. Le travail effectué par les représentants des travailleurs est complexe et a été bien avancé, surtout sous le gouvernement du Parti québécois.

Ce projet de loi résulte d'une demande syndicale afin de faciliter le règlement de l'équité salariale. Il favorise l'atteinte de l'équité salariale, mais ce n'est pas un gage de réussite, car il faut se rappeler que ce sont les syndicats qui font le plus d'efforts afin de compléter cet exercice.

L'élection du gouvernement libéral a mis un frein aux travaux sur le règlement de l'équité salariale dans le secteur public. La présidente du Conseil du trésor a indiqué que l'exercice du droit, le règlement de l'équité salariale, serait dilué dans les négociations sur le renouvellement des conventions collectives. Les femmes du Québec ont suffisamment attendu, il est temps de corriger la situation et de régler le dossier de l'équité salariale.

Le ministre du Travail pourrait peut-être faire entendre raison à la présidente du Conseil du trésor et lui faire comprendre ce qu'est l'équité salariale. L'équité salariale, ce n'est pas un objet de négociation, c'est le règlement d'un droit. Le gouvernement du Québec doit montrer l'exemple et terminer le règlement de l'équité salariale. Ce sera une pression morale supplémentaire pour que toutes les entreprises terminent, elles aussi, cette obligation. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cusano): Merci, M. le député de René-Lévesque et porte-parole en matière de travail. Je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant. Je reconnais maintenant la députée de Terrebonne, porte-parole à la condition féminine. Mme la députée.

Mme Jocelyne Caron

Mme Caron: Merci, M. le Président. Alors, c'est avec plaisir que j'interviens sur le projet de loi n° 79, Loi modifiant la Loi sur l'équité salariale concernant l'établissement de programmes distincts. Vous comprendrez, M. le Président, que tout projet de loi ou tout projet de règlement touchant l'équité salariale me préoccupe particulièrement. Ayant participé avec mes collègues à l'élaboration de la Loi sur l'équité salariale, il est bien évident que son application est aussi importante que la loi elle-même.

Je veux tout de suite apporter une précision importante. Ce matin, j'ai entendu dans la définition de la Loi sur l'équité salariale ou son objet de corriger les écarts salariaux dus à la discrimination fondée sur le sexe ou à la discrimination systématique. Le vrai terme, M. le Président, là, c'est important de le dire, c'est la discrimination systémique, et ce mot-là est capital quand on se parle d'équité salariale ou qu'on se parle d'égalité de fait pour les femmes.

Ce n'était pas simplement une discrimination qui est fondée sur le sexe. Si on disait «à travail égal, salaire égal», ce serait effectivement une discrimination exclusivement fondée sur le sexe. Quand on se parle de discrimination systémique, c'est que, systématiquement, on a décidé comme société que les emplois qui étaient occupés majoritairement par des femmes avaient une valeur monétaire moindre. On accorde comme société moins d'importance à ce travail qui est accompli majoritairement par des femmes pour toutes sortes de raisons historiques, les premières raisons étant à l'effet que les femmes étaient plus particulièrement au travail à la maison et non sur le marché du travail et qu'on considérait que c'était un salaire d'appoint qui arrivait avec l'autre revenu. Donc, on a basé nos évaluations salariales d'une manière différente, et c'est une discrimination systémique qui est faite parce que c'est un travail accompli par des femmes et qu'on accorde une considération moindre à ce revenu-là.

Donc, c'est ce que la Loi de l'équité salariale vient corriger. C'est une loi importante qui a demandé un cheminement très grand, beaucoup de concertation avec les différents partenaires, et c'est essentiel que la concertation se poursuive au niveau de l'application.

n (10 h 20) n

Le projet de loi n° 79, il est important. C'est une modification qui va nous permettre effectivement de poursuivre et de faciliter les choses, le ministre l'a dit tantôt, mon collègue porte-parole aussi. Parce que, si le projet de loi n° 79 n'était pas là, bien, les parties auraient dû reprendre le processus d'équité salariale depuis le début, donc se réasseoir, recommencer, donc encore perdre du temps sur ce qui est finalement un principe d'égalité de droits et qui doit s'appliquer le plus vite possible.

Je veux aussi joindre ma voix à celle de mon collègue porte-parole du travail, le député de René-Lévesque, pour rappeler l'importance de faire une différence fondamentale entre l'application de l'équité salariale et la négociation au niveau des conventions collectives. Il est primordial que le gouvernement libéral ne confonde pas les deux.

La Loi de l'équité salariale doit s'appliquer. C'est une loi, il faut donc l'appliquer. Les négociations de la convention collective, c'est une autre chose et ça doit avoir lieu aussi, des négociations, dans un système démocratique de convention collective. Et on ne doit pas dire que, comme la présidente du Conseil du trésor l'avait laissé entendre, l'équité salariale fait partie aussi de la négociation. C'est deux choses.

Mon collègue a rappelé que les femmes avaient suffisamment attendu puis qu'il fallait corriger la situation. Moi, j'ajoute: Il ne faut pas que les femmes soient considérées responsables d'une négociation de convention collective qui serait moindre parce qu'on a mis en place le principe de l'équité salariale.

Les femmes ont eu à supporter suffisamment le fait d'avoir des salaires moins élevés très longtemps, et les hommes qui choisissaient ces professions-là aussi, en fait. Elles n'ont pas à subir un odieux de dire que la négociation des conventions collectives serait moins intéressante parce qu'on a réglé le principe de l'équité salariale. Donc, c'est deux choses: c'est une loi qu'il faut appliquer, c'est un droit, puis il y a les négociations de conventions collectives qui doivent se faire avec le gouvernement et les syndicats.

Alors, M. le Président, je remercie le ministre de cette présentation de projet de loi qui va nous permettre de faire avancer les choses. Merci.

Le Vice-Président (M. Cusano): Merci, Mme la députée de Terrebonne et porte-parole en matière de condition féminine. Je cède maintenant la parole au ministre du Travail pour son droit de réplique. M. le ministre.

M. Michel Després (réplique)

M. Després: Très rapidement, M. le Président. Tout d'abord, mes premiers mots pour remercier le député de René-Lévesque pour son intervention sur ce projet de loi là et la députée de Terrebonne, et pour vous dire que notre gouvernement, qui a été élu l'année dernière, en avril 2003, a démontré très rapidement l'importance qu'il accordait au dossier de l'équité salariale, comme les gens de l'opposition l'ont fait lorsqu'ils ont présenté la loi en 1996; mais de dire qu'effectivement, avant que ce soit implanté à l'ensemble des entreprises ou au gouvernement, ça prend effectivement un certain temps; mais de vous dire que la priorité qu'on accorde au dossier de l'équité salariale a démontré très rapidement la volonté du gouvernement de vouloir agir. Pourquoi, M. le Président?

C'est que, dès le jugement qui a été rendu sur le chapitre IX, le gouvernement aurait pu décider de contester, de défendre sa propre loi qui avait été adoptée à l'unanimité ici, à l'Assemblée nationale, en 1996, mais, dès le premier jugement de la Cour supérieure, le gouvernement a décidé: Non, on ne conteste pas, M. le Président.

Et, dès ce moment-là, la présidente du Conseil du trésor et moi-même avions fait un point de presse pour dire qu'on regarderait quels seraient les meilleurs mécanismes pour s'assurer d'accélérer le processus, et, suite à la demande des centrales syndicales, le gouvernement, lui aussi, reconnaît qu'on se devait de déposer ce projet de loi là justement pour permettre de pouvoir régler le plus rapidement possible le dossier de l'équité salariale.

Et vous dire en terminant, M. le Président, dans la même lignée que l'a dit la députée de Terrebonne... Naturellement, le dossier de la Loi sur l'équité salariale est là pour être appliqué et non négocié, M. le Président, et c'est ce que la présidente du Conseil du trésor va s'assurer pour l'ensemble du gouvernement, de bien appliquer la Loi de l'équité salariale et en contrepartie, M. le Président, mais d'un autre côté, de négocier le renouvellement des conventions collectives dans les secteurs public et parapublic. Merci beaucoup.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Cusano): Merci, M. le ministre du Travail. Le principe du projet de loi n° 79, Loi modifiant la Loi sur l'équité salariale concernant l'établissement de programmes distincts, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Cusano): Adopté. M. le ministre du Travail.

Renvoi à la Commission de l'économie et du travail

M. Després: M. le Président, je vous demanderais, peut-être avant d'appeler un autre article... Oh!, O.K., M. le Président, excusez-moi. Je vous demande que le projet de loi soit déféré à la Commission de l'économie et du travail pour étude détaillée, s'il vous plaît.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Cusano): Est-ce que la motion de renvoi à la Commission de l'économie et du travail pour étude détaillée est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Cusano): Adopté. M. le ministre du Travail.

M. Després: M. le Président, avant d'appeler un autre article, je vous demanderais peut-être de suspendre quelques instants, le temps que la ministre puisse arriver.

Le Vice-Président (M. Cusano): Alors, à la demande du ministre, je vais suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 10 h 26)

 

(Reprise à 10 h 29)

Le Vice-Président (M. Cusano): À l'ordre, s'il vous plaît! Je reconnais maintenant la ministre de la Culture et des Communications. Mme la ministre.

Mme Beauchamp: M. le Président, j'aimerais que vous appeliez l'article 7 du feuilleton.

Projet de loi n° 69

Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Cusano): À l'article 7 du feuilleton, Mme la ministre de la Culture et des Communications propose l'adoption du principe du projet de loi n° 69, Loi modifiant la Loi sur la Bibliothèque nationale du Québec, la Loi sur les archives et d'autres dispositions législatives. Alors, Mme la ministre, je vous reconnais.

Mme Line Beauchamp

Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. M. le Président, le Québec est confronté à d'importants défis, tant sur les plans budgétaire et économique que sur les plans social et culturel. J'ai été mise à même de constater, lors des forums Place aux citoyens, à quel point les Québécoises et les Québécois sont de plus en plus sensibilisés aux problématiques majeures qui nous interpellent collectivement, soit celles de la santé, du vieillissement de notre population et bien sûr de l'état des finances publiques. Le Québec évolue par ailleurs dans un contexte de mondialisation et de concurrence qui conditionne la recherche et l'adoption de solutions novatrices si nous voulons continuer d'affirmer notre identité ainsi que de défendre et promouvoir la diversité des expressions culturelles.

Nos concitoyens sont certes disposés à mettre l'épaule à la roue, ils me l'ont démontré clairement lors des derniers mois, mais ils attendent aussi de leurs dirigeants des orientations fermes et des gestes concrets. À cet égard, notre gouvernement a déjà clairement affiché ses positions en indiquant que, pour relever ces défis, il faut recentrer l'État sur ses missions essentielles, soit la santé, le savoir, la prospérité, la sécurité et l'identité. Il importe à cet effet de procéder prioritairement et rapidement à la modernisation et à l'allégement des structures de l'État.

n (10 h 30) n

Ma collègue et présidente du Conseil du trésor, la députée de Marguerite-Bourgeoys, rendait ainsi public, en mai dernier, un plan de modernisation de l'État québécois dont les objectifs visent très nettement l'amélioration de nos façons de faire et le développement d'une offre de services publics de meilleure qualité encore.

Elle précisait alors qu'il s'agit là d'un travail d'architecte, dont le but n'est pas bien sûr de détruire l'État que nous avons édifié pièce par pièce depuis le début des années soixante, mais bien plutôt d'y apporter certaines rénovations devenues incontournables si nous voulons faire face aux enjeux du présent et de l'avenir. À cet égard, il m'apparaît essentiel de rappeler que, malgré sa détermination à mettre en oeuvre cette modernisation axée sur l'innovation et l'excellence, notre gouvernement entend y procéder en respectant les valeurs héritées du passé.

Le projet de Loi modifiant la Loi sur la Bibliothèque nationale du Québec, la Loi sur les archives et d'autres dispositions législatives, que j'ai le plaisir de déposer aujourd'hui à l'Assemblée nationale, se veut le reflet de deux missions essentielles de l'État: le savoir et l'identité. Il témoigne par ailleurs éloquemment de la volonté gouvernementale de procéder à la modernisation des structures étatiques dans le respect des valeurs du passé. Ce n'est donc pas le fruit du hasard si ce projet est l'un des premiers que nous soumettons à votre attention à ce chapitre.

Gardienne du patrimoine documentaire québécois, la Bibliothèque nationale du Québec et les Archives nationales du Québec représentent à n'en pas douter des institutions-phares en matière de conservation et de diffusion du savoir. Chacune de leur côté, elles ont ainsi accumulé, au fil des décennies, des strates de documents et de connaissances constituant aujourd'hui un gisement presque inépuisable de savoir qui continue de s'enrichir chaque jour.

En réunissant ces deux importantes actrices du patrimoine québécois sous une même administration, nous donnons naissance à une nouvelle institution nationale d'envergure en mesure de favoriser la concertation et l'intégration des expertises et des fonctions propres à assurer la constitution, la conservation et la diffusion de notre patrimoine documentaire publié, non publié et filmique.

À une époque où le savoir s'avère un ingrédient essentiel à l'épanouissement des individus et à l'amélioration de notre société, la création d'une telle institution apparaît d'autant plus essentielle que sa contribution constitue un gage de santé démocratique. À ce propos, on me permettra de rappeler que, dès l'arrivée de notre gouvernement en avril 2003, notre premier ministre a tenu à affirmer que l'identité du peuple québécois fait partie des cinq grandes missions de l'État. Il soulignait du même souffle que cette identité repose essentiellement sur sa culture et que nous avons le devoir de défendre ce que nous sommes, ce que nous voulons être, ce que nous exprimons.

Comme peuple de 7 millions de Québécois, dont 6 millions de francophones en Amérique, soit à peine 2 % de la population totale de l'Amérique, la préservation du caractère unique et original de notre culture représente un enjeu collectif majeur qui convie l'État à s'engager résolument dans la défense et la promotion de notre culture et de notre identité. À cet égard, la création d'une institution forte comme Bibliothèque et Archives nationales du Québec constitue l'expression concrète de cette volonté. Notre dynamisme culturel et notre identité prennent d'abord racine dans la protection et l'affirmation de notre patrimoine.

Plusieurs autres éléments justifiaient assurément le rapprochement de nos deux grandes institutions nationales. À ce sujet, il n'est pas inutile de rappeler qu'au cours des 15 dernières années mes prédécesseurs au ministère de la Culture et des Communications ont maintes fois envisagé divers scénarios de modification du statut des Archives nationales du Québec. C'est ainsi que, lors de la transformation de la Bibliothèque nationale du Québec en corporation autonome, en 1988, l'on examina la possibilité d'attribuer un statut similaire aux Archives nationales du Québec. Cette hypothèse était finalement écartée, préférant attendre que le projet de la Bibliothèque nationale du Québec soit mené à terme et puisse être évalué.

L'idée de transformer les Archives nationales du Québec en société d'État refaisait surface en 1992, lors de l'entrée en vigueur de la nouvelle Loi sur le ministère de la Culture, puis de nouveau en 1996. La transformation des Archives nationales du Québec en unité autonome de service s'est également envisagée en 1992 et 1998, alors qu'en 2000, avec l'adoption de la Loi sur l'administration publique, l'on décidait plutôt de procéder à la création d'une agence gouvernementale.

Enfin, en trois occasions au moins, soit en 1988, 1996 et 1999, la fusion des Archives nationales du Québec avec la Bibliothèque nationale du Québec devait faire l'objet d'analyses répétées qui menèrent finalement à un premier rapprochement concret alors que les deux institutions, aux prises avec des problèmes similaires d'espace, aménageaient un édifice commun de conservation sur la rue Holt, à Montréal, en 1997.

Le projet de fusion que nous vous présentons aujourd'hui marque donc dans les faits l'aboutissement logique d'une longue réflexion et d'un cheminement entrepris, depuis plusieurs années déjà, sous différents gouvernements. La différence, aujourd'hui, c'est que notre gouvernement estime qu'il est temps d'arrêter les études et les analyses pour passer à l'action et enfin concrétiser la fusion de nos deux institutions nationales vouées à la conservation et à la diffusion de notre patrimoine documentaire.

Que l'on ne se méprenne pas toutefois, notre décision est mûrement réfléchie et s'inscrit dans la volonté gouvernementale de moderniser les structures de l'État et d'améliorer les services à la population. Ce choix est aussi conforté par notre lecture de l'évolution récente des deux entités, qui, outre le partage de l'édifice de conservation sur la rue Holt, à Montréal, ont posé les jalons d'un rapprochement et d'une collaboration plus étroite. Au cours des dernières années, la Bibliothèque nationale du Québec et les Archives nationales du Québec ont en effet procédé à un échange de fonds d'archives privées. Elles se sont entendues pour coordonner les efforts d'acquisition d'archives privées en se partageant les divers champs d'acquisition. Elles ont collaboré et mis en commun leurs expertises réciproques pour soutenir, entre autres, la gestion des archives des maisons d'édition. Elles discutent aussi sur la façon d'offrir les meilleurs services possible à l'importante clientèle des généalogistes qui fréquentent leurs salles de recherche un peu partout dans les régions du Québec.

À l'évidence, ces deux institutions se sont progressivement et, je dirais, presque naturellement rapprochées au fil des années. Cette collaboration volontaire s'explique sans aucun doute par le fait que la Bibliothèque nationale du Québec et les Archives nationales du Québec présentent plusieurs points de convergence et de complémentarité au plan de leurs missions respectives de sauvegarde et de mise en valeur du patrimoine documentaire. De plus, elles évoluent dorénavant l'une comme l'autre dans un contexte d'émergence de nouveaux médias et de nouvelles technologies, de nouveaux supports, ce qui tend à amenuiser la distinction entre leurs missions liée à la différence entre document publié, pour la Bibliothèque nationale du Québec, et le document non publié, pour les Archives nationales du Québec.

Conséquemment à la numérisation de tous les types de documents et au développement de nouveaux outils de recherche en ligne, les chercheurs voient de moins en moins la pertinence de distinguer ces deux sources documentaires. L'intégration fonctionnelle des sources archivistiques et publiées progresse constamment et régulièrement, et les institutions détentrices conviennent de plus en plus de la nécessité de se rapprocher et de collaborer pour tenir compte des nouveaux paramètres de la recherche. Le projet de fusion de la Bibliothèque nationale du Québec et des Archives nationales du Québec trouve donc sa pertinence dans une dynamique d'évolution du savoir, de ses moyens de transmission, de ses méthodes de recherche et des besoins de ses utilisateurs. Cette progression irréversible commande d'adapter les structures de ces organisations détentrices du savoir, à défaut de quoi elles risquent de stagner.

Le projet de Loi modifiant la Loi sur la Bibliothèque nationale du Québec, la Loi sur les archives et d'autres dispositions législatives a pour objet de confier à une nouvelle institution, appelée Bibliothèque et Archives nationales du Québec, les responsabilités actuellement exercées par la ministre de la Culture et des Communications et la conservatrice des Archives nationales du Québec en matière d'archives, lesquelles s'ajoutent à celles assumées jusqu'ici par la Bibliothèque nationale du Québec. Ce projet de loi confie également à Bibliothèque et Archives nationales du Québec la mission de conservation du patrimoine filmique québécois.

La réalisation de cette union au sein d'une même organisation de la Bibliothèque nationale du Québec et de la Direction régionale des Archives nationales du ministère de la Culture et des Communications nécessite de modifier la Loi sur la Bibliothèque nationale du Québec et la Loi sur les archives et, pour fins de concordance, certaines autres lois.

Rappelons que la Loi sur la Bibliothèque nationale du Québec prévoit l'organisation administrative de la société d'État, définit sa mission et ses pouvoirs, encadre le dépôt légal des documents publiés et formule des dispositions réglementaires et financières. Le projet de loi introduit donc les modifications nécessaires pour refléter les différentes responsabilités de la nouvelle société. Il modifie en outre la composition du conseil d'administration de l'actuelle Bibliothèque nationale du Québec pour y introduire des représentants du secteur des archives et du milieu cinématographique, augmentant le nombre des membres du conseil de 15 à 17. La composition du comité exécutif est également changée afin d'y prévoir la présence d'un représentant du secteur des archives.

n (10 h 40) n

L'ajout de la mission archivistique à celle que lui attribue déjà la Loi sur la Bibliothèque nationale du Québec suppose également, pour la bibliothèque, la modification des actuelles dispositions traitant de sa mission, de son plan d'activités et de ses états financiers annuels.

C'est ainsi notamment que l'article 15.1 du projet de loi vient préciser, en ce qui a trait à la mission archivistique de la nouvelle société, que ? et je cite: «Bibliothèque et Archives nationales a également pour mission d'encadrer, de soutenir et de conseiller les organismes publics en matière de gestion de leurs documents, d'assurer la conservation d'archives publiques, d'en faciliter l'accès et d'en favoriser la diffusion. Il est aussi chargé de promouvoir la conservation et l'accessibilité des archives privées.

«Il exerce, à cette fin, les attributions prévues à la Loi sur les archives. Il peut aussi, dans le domaine des archives, offrir des services de soutien à la recherche et contribuer au développement et au rayonnement international de l'expertise et du patrimoine québécois.»

Rappelons par ailleurs que cette mission viendra ainsi s'ajouter au mandat dont s'acquitte pour le moment la Bibliothèque nationale du Québec. Bibliothèque et Archives nationales du Québec devra donc s'assurer ? et je cite de nouveau le projet de loi: «de rassembler, de conserver de manière permanente et de diffuser le patrimoine documentaire québécois publié et tout document qui s'y rattache et qui présente un intérêt culturel, de même que tout document relatif au Québec et publié à l'extérieur du Québec.

«[Il] a également pour mission d'offrir un accès démocratique au patrimoine documentaire [constitué par le dépôt légal], à la culture et au savoir et d'agir, à cet égard, comme catalyseur auprès des institutions documentaires québécoises, contribuant ainsi à l'épanouissement des citoyens.

«Plus particulièrement, [il] poursuit les objectifs suivants: valoriser la lecture, la recherche et l'enrichissement des connaissances, promouvoir l'édition québécoise, faciliter l'autoformation continue, favoriser l'intégration des nouveaux arrivants, renforcer la coopération et les échanges entre les bibliothèques et stimuler la participation québécoise au développement de la bibliothèque virtuelle.»

La Loi sur les archives encadre pour sa part la gestion des archives québécoises pendant tout leur cycle de vie, soit depuis leur création jusqu'à leur élimination ou leur conservation permanente comme archives historiques.

La Loi sur les archives est également modifiée par le projet de loi, mais essentiellement pour distribuer autrement les responsabilités et les pouvoirs actuellement confiés à la ministre de la Culture et des Communications et à la conservatrice des Archives nationales du Québec. Ces modifications prévoient notamment que:

1° le gouvernement approuvera la politique de gestion des documents actifs et semi-actifs des ministères et des organismes gouvernementaux;

2° la ministre de la Culture et des Communications approuvera la politique... des documents actifs et semi-actifs proposée au lieutenant-gouverneur et à l'Assemblée nationale, la politique de gestion des documents inactifs applicable à tous les organismes publics, les conditions de l'agrément, les programmes d'aide financière et la revendication d'archives publiques possédées sans droit.

Bibliothèque et Archives nationales du Québec établira également toutes les politiques de gestion de documents, approuvera les calendriers de conservation, pourra déposer des archives publiques ou en autoriser le dépôt et pourra agréer des services d'archives privées.

Quelques autres modifications techniques et de concordance sont aussi apportées aux différentes lois concernées par ce projet de loi. Je tiens d'ailleurs à insister tout particulièrement sur le maintien intégral de la Loi sur les archives, avec ses politiques et ses règlements. Adoptée en 1983, la Loi sur les archives a permis de concrétiser l'idée d'une archivistique intégrée au Québec, c'est-à-dire d'un continuum entre la gestion des documents qu'on considère actifs, semi-actifs et historiques.

Considérée comme un modèle à travers le monde, cette loi, qui a plus de 20 ans maintenant, a suscité une sensibilité accrue aux archives et permis des progrès évidents dans la gestion des archives des quelque 3 000 organismes publics du Québec, soit, entre autres, les ministères, les tribunaux, les municipalités et les institutions scolaires. La grande majorité de tous ces organismes disposent maintenant d'outils efficaces, tels des plans de classification, des calendriers de conservation, pour gérer leurs documents administratifs et en permettre l'identification et la conservation. Pour ces motifs, il m'apparaissait donc essentiel que la nouvelle institution, la nouvelle société d'État, conserve la gestion et le leadership, si vous me permettez l'expression, de cette activité auprès des organismes publics afin de maintenir ce continuum dans la gestion des documents d'archives, respectant ainsi l'intégralité de la mission des Archives nationales du Québec.

La loi aura également permis de responsabiliser davantage le milieu vis-à-vis la conservation et la diffusion des archives privées en permettant, entre autres, le développement d'un réseau d'archives agréé à travers tout le Québec. Il existe ainsi actuellement 29 services d'archives agréés dans 17 régions du Québec qui assurent la conservation et l'accès de milliers de fonds d'archives privées. Enfin, ces services conservent maintenant plus d'archives privées que les neuf centres des Archives nationales du Québec. À l'évidence, les multiples effets bénéfiques de la Loi sur les archives justifient pleinement que nous la maintenions en application.

Dans cette veine, le projet de loi prévoit le maintien de la fonction de conservateur qui agira comme cadre supérieur chargé, au sein de la nouvelle institution, de la responsabilité de la direction des archives. Bien sûr, nous le faisons par respect du passé des Archives nationales du Québec qui existent depuis 1920, mais aussi et surtout pour bien marquer notre volonté de reconnaître, malgré plusieurs éléments communs, ce caractère propre à la discipline archivistique qui la distingue de la bibliothéconomie. Je souligne également que le rôle consultatif de la Commission des biens culturels est intégralement préservé au profit du nouveau détenteur des responsabilités et pouvoirs décrits dans la Loi sur les archives.

Par ailleurs, le projet de loi permettra à Bibliothèque et Archives nationales du Québec de gérer dorénavant les programmes de soutien financier en matière d'archives, lesquels seront toutefois préalablement approuvés par la ministre. Je rappelle au passage que les programmes d'aide financière destinés aux services d'archives agréés et pour le traitement et la mise en valeur des archives privées se partagent une enveloppe de près de 1 million de dollars.

Enfin, il importe de noter que des dispositions transitoires ont été prévues au projet de loi afin d'encadrer le transfert administratif des employés des archives vers la nouvelle société. Elles reprennent les conditions de transfert qui ont prévalu lors de la fusion de la Bibliothèque nationale du Québec et de la Grande Bibliothèque du Québec, soit le maintien des conditions de travail négociées, la sécurité d'emploi, le droit de retour permanent dans la fonction publique. L'opération se fera donc dans le plus complet respect de tous nos employés et des conventions collectives en vigueur.

Dans les dernières minutes, j'en viens maintenant au dépôt légal des films dont le projet de loi déposé devant cette Assemblée prévoit la création. Le dépôt légal des films et des émissions de télévision est un sujet qui a fait l'objet de discussions au Québec depuis au moins trois décennies. La Loi sur le cinéma, en 1975, le prévoyait, mais ça ne s'est pas concrétisé. La loi de 1983, la Loi sur le cinéma de 1983 adoptait pour sa part une autre approche. Il s'agit d'un dépôt obligatoire d'un film auprès de la Cinémathèque québécoise, mais à condition que cette dernière en assume les frais. Cette formule a permis à la cinémathèque, au fil des ans, d'acquérir environ 500 films québécois.

Vous le savez, la consultation publique menée en 2002 sur le cinéma et la production audiovisuelle a permis de constater qu'il existait maintenant un très large consensus, au sein du milieu du cinéma québécois, quant à l'importance de prendre les mesures requises afin d'assurer, dans les meilleures conditions, la conservation à long terme de productions cinématographiques et télévisuelles. À cet égard, le projet de créer un dépôt légal a fait l'unanimité. Aussi le moment est-il venu de passer à cette étape. Je donne ainsi suite à une mesure prévue dans le Plan de soutien au cinéma et à la production audiovisuelle que je dévoilais en septembre 2003. Également vous indiquer, M. le Président, que le fonctionnement du dépôt légal sera simple. Bibliothèque et Archives nationales du Québec sera responsable de sa mise en oeuvre et veillera à sa bonne marche et, si besoin était, à son respect.

Mais la Cinémathèque québécoise pour sa part aura le mandat d'assurer la conservation physique des documents déposés. Je vous rappelle en effet que cette institution jouit du statut de cinémathèque, reconnu en vertu de la Loi sur le cinéma. Elle est d'ailleurs la seule qui ait jamais bénéficié de cette désignation. En outre, la cinémathèque dispose déjà d'un entrepôt de conservation avec des magasins répondant aux exigences les plus sévères et également elle dispose d'un personnel compétent et expérimenté, et il aurait été pour le moins incongru de vouloir recréer ce qui existe déjà et ce dont nous pouvons être très fiers.

Dans ce contexte, M. le Président, je crois que le projet de loi proposé, le projet de loi n° 69, marque un pas, fait suite à une évolution de collaboration, de concertation assez naturelles entre ces institutions qu'étaient la Bibliothèque nationale du Québec et les Archives nationales du Québec. Nous marquons un pas en termes de concrétiser bien sûr la mission essentielle de l'État en termes d'identité, de culture et de savoir, mais également nous marquons le pas en termes de la nécessaire modernisation de l'État québécois. Je vous remercie, M. le Président.

n(10 h 50)n

Le Vice-Président (M. Cusano): Merci, Mme la ministre de la Culture et des Communications. Je cède maintenant la parole au député de Mercier, porte-parole en relations internationales, de la culture et des communications. M. le député.

M. Daniel Turp

M. Turp: Merci, M. le Président. J'ai le plaisir de prendre la parole dans le cadre du débat sur l'adoption de principe du projet de loi n° 69, Loi modifiant la Loi sur la Bibliothèque nationale du Québec, la Loi sur les archives et d'autres dispositions législatives. En ma nouvelle qualité de porte-parole en matière de culture et de communications, j'ai d'autant plus de plaisir qu'il m'est permis de m'intéresser, comme je l'avais fait, en octobre dernier, lors d'une motion sur la Semaine des bibliothèques... de parler aujourd'hui à nouveau du sort d'institutions qui sont au service des lecteurs et des chercheurs mais qui préservent aussi la mémoire et donnent accès à notre histoire.

M. le Président, c'est lendemain du Salon du livre de Montréal, où je me suis d'ailleurs rendu, samedi dernier, pour constater l'engouement continu pour cette manifestation culturelle d'envergure, et à l'occasion duquel j'ai pu, comme citoyen et lecteur, assister à des débats, toucher à des livres, en lire de courts extraits à l'occasion, acheter Merci, le dernier roman de Daniel Pennac, échanger au kiosque de VLB Éditeur sur Le déclin de l'empire hollywoodien, avec l'auteur Hervé Fischer, et y parler de diversité culturelle avec l'éditeur Pierre Graveline.

Je me réjouis d'entreprendre, aujourd'hui, le débat sur ce projet de loi qui vise à regrouper la Bibliothèque nationale du Québec et les Archives nationales du Québec en un organisme ou une société d'État. À cet égard, l'opposition officielle rappelle qu'elle a exprimé le souhait que des consultations particulières soient faites à l'égard de ce projet de loi et que les groupes et personnes intéressées par le sort de nos Bibliothèque nationale et Archives nationales puissent se faire entendre sur les tenants et aboutissants du projet de loi n° 69. Nous l'avions fait à l'occasion de la présentation du projet de loi. Et, si le gouvernement pense que ce projet de loi est d'importance, il devrait vouloir entendre des personnes et des groupes à l'occasion de telles consultations. Je réitère donc la demande de telles consultations et invite le gouvernement à faire preuve d'ouverture et de transparence dans le débat qui s'amorce et que nous entendions des groupes au-delà de l'examen que nous ferons de ce projet de loi, de ce projet de loi article par article, comme nous l'impose notre règlement. Ces consultations paraissent s'imposer, d'autant plus qu'il s'agit d'un premier exercice de réingénierie qu'effectue le gouvernement du Parti libéral du Québec et qu'il importe, dès lors, d'en apprécier les impacts sur les institutions visées, leur personnel ainsi que leur budget de fonctionnement.

M. le Président, cet exercice concerne une société, une institution dont il importe d'ailleurs de rappeler les profils et rappelant par là l'importance qu'elles ont acquise au sein de l'appareil de l'État québécois. La Bibliothèque nationale du Québec est une société d'État relevant du ministère de la Culture et des Communications, dont la mission est de conserver et de diffuser le patrimoine publié au Québec. Près de 750 000 titres en conservation et diffusion, près de 4,5 millions d'unités matérielles sont détenues par la Bibliothèque nationale du Québec. Les Archives nationales du Québec sont quant à elles une institution nationale relevant directement de la ministre de la Culture et des Communications, responsable de la conservation et de l'accessibilité des archives partout au Québec. On y retrouve 47 km de documents, 14 millions de photographies, 800 000 cartes et plans.

M. le Président, ces jours derniers, j'ai eu le plaisir et le privilège d'échanger avec les deux femmes en qui l'État québécois a investi sa confiance pour diriger ces deux institutions. La présidente-directrice générale de la Bibliothèque nationale du Québec, Mme Lise Bissonnette, m'a parlé avec passion de notre Bibliothèque nationale et de cette future Grande Bibliothèque qui lui donnera la visibilité qu'elle mérite.

J'ai le plaisir d'ailleurs, M. le Président, de voir grandir cette Grande Bibliothèque. Ainsi, avant de monter dans l'autobus qui me conduit ici, dans notre capitale nationale, les mardis matin et notamment ce matin, et, en sortant de l'autobus qui me ramène à Montréal les jeudis soir, j'ai vu un bâtiment être soulevé de terre par des travailleurs qui afficheront, j'en suis sûr, une grande fierté, comme l'afficheront également ses concepteurs et ses architectes lorsqu'au terme des travaux la Grande Bibliothèque ouvrira ses portes au printemps 2005.

M. le Président, j'ai également eu le plaisir de m'entretenir, et je remercie la ministre de l'avoir autorisé de la sorte, avec la conservatrice des Archives nationales du Québec, Mme Sylvie Lemieux, dans cet édifice patrimonial où loge cette institution, sur le campus de l'Université Laval. La conservatrice a également à coeur l'avenir de son institution et tient à ce que l'État québécois assure sa pérennité et lui donne les moyens de donner à la nation québécoise une mémoire, d'exercer en son nom un devoir de mémoire.

J'ai constaté que les Archives nationales du Québec sont à la fine pointe des développements de la science archivistique, comme l'a rappelé d'ailleurs la ministre dans son allocution, et que le Québec fait figure de pionnier dans le monde en partageant notamment ses expertises avec d'autres États, nations et peuples du monde, et en particulier, ce qui est tout à son honneur, avec les pays en développement.

Mme Lemieux m'a instruit sur la distinction à faire entre les deux disciplines que sont la bibliothéconomie et l'archivistique, la première visant l'organisation et l'inventaire méthodique du patrimoine publié du Québec, alors que l'archivistique vise plutôt la conservation de documents uniques. Mme Bissonnette m'a parlé, quant à elle, des rapports qu'entretiennent la Bibliothèque nationale et les bibliothèques universitaires, collégiales, scolaires et municipales. J'aurai à l'esprit ces enseignements et ces renseignements dans les débats relatifs au projet de loi, dont l'étude commence aujourd'hui, dans l'enceinte d'une Assemblée nationale où il est approprié de parler de bibliothèques ? notre Assemblée n'a-t-elle pas sa bibliothèque? ? et d'archives. Est-ce que cette Assemblée et ses membres ne doivent pas avoir une préoccupation avec l'histoire et les archives mêmes de cette Assemblée?

M. le Président, le projet de loi n° 69 a pour objet de créer une nouvelle institution, appelée Bibliothèque et Archives nationales du Québec, et de confier à celle-ci les responsabilités actuellement exercées par la ministre de la Culture et des Communications en matière d'archives et celles du conservateur ou de la conservatrice des Archives nationales du Québec, ainsi que les responsabilités assumées par la Bibliothèque nationale du Québec. Le projet de loi confie également au nouvel organisme d'État la mission de conservation du patrimoine filmique québécois.

Le projet de loi introduit par ailleurs les modifications nécessaires pour refléter les différentes responsabilités de Bibliothèque et Archives nationales du Québec, dont celles qui découlent de l'obligation de dépôt légal d'une copie d'un film québécois qui est prévue au projet de loi.

En outre, ce projet de loi modifie la composition du conseil d'administration de la Bibliothèque nationale du Québec pour prendre en compte les nouvelles missions de l'institution et comporte, comme on l'a souligné, des mesures transitoires afin d'assurer le transfert à Bibliothèque et Archives nationales du Québec des droits et obligations ainsi que du personnel de la Direction générale des archives nationales du ministère de la Culture et des Communications.

M. le Président, Mme la ministre, j'ai examiné avec attention le projet de loi et réserverai mes suggestions particulières pour l'étude détaillée du projet de loi par la Commission de la culture. Et, Mme la ministre, vous verrez que le porte-parole nouveau que je suis devenu aime faire ses devoirs, et j'ai bien examiné les dispositions, et je voudrai, à l'occasion des travaux de la commission parlementaire, faire une étude sérieuse de ce document qui a été préparé par les fonctionnaires de votre ministère et les personnes qu'ont associées votre ministère... à la fois aux Archives nationales et à la Bibliothèque nationale, de ce projet de loi.

n(11 heures)n

M. le Président, à ce stade de l'examen du projet de loi n° 69, je souhaite généralement rappeler l'importance de protéger et de promouvoir les missions de la société d'État qu'est la Bibliothèque nationale et de l'institution nationale que sont les Archives nationales du Québec, et de les protéger dans la perspective du regroupement qui est proposé dans ce projet de loi. Mais il est important de dire d'ores et déjà que ces missions ne sauront être réalisées que si la nouvelle institution se voit garantir un budget de fonctionnement et un personnel adéquat pour assumer ces responsabilités si importantes mais qui peuvent être aussi très onéreuses. Des engagements clairs devraient être pris par le gouvernement et la ministre à cet égard, et j'aurai l'occasion d'en parler pendant les travaux de la commission.

S'agissant de la Bibliothèque nationale, je m'intéresserai en particulier aux relations de notre Bibliothèque nationale et les autres bibliothèques du Québec, et l'ambition que devrait avoir la nouvelle institution de contribuer à l'existence d'un réseau qui pourrait peut-être d'ailleurs nécessiter l'adoption d'une loi sur les bibliothèques. Une discussion, je crois, pourrait être engagée, lors des travaux relatifs au projet de loi, sur cette idée de créer ou d'adopter une loi sur les bibliothèques qui comporterait certaines règles et certaines normes d'un type analogue que celles qui sont contenues à la Loi des archives. Et je crois que cette discussion a eu lieu mais devrait être approfondie, s'agissant d'une question qui est très importante pour l'avenir de la Bibliothèque nationale du Québec comme instrument pour assurer au Québec le meilleur réseau des bibliothèques, s'agissant d'un réseau comprenant à la fois la Bibliothèque nationale du Québec mais les bibliothèques universitaires, collégiales, scolaires et municipales.

M. le Président, s'agissant des Archives nationales, la Loi sur les archives, sur laquelle continuera de reposer l'action de la nouvelle institution, s'avère une référence à travers le monde en matière de gestion du cycle de vie des documents. Et j'étais heureux d'entendre la ministre dire que l'intégrité de la Loi sur les archives et de ses règlements sera respectée. Je crois que c'est le souhait des Archives nationales du Québec et de ceux qui y travaillent. Il faut absolument préserver cet acquis et assurer que les calendriers de conservation, par exemple, continuent d'être analysés avec autant de soin que par le passé.

Une autre préoccupation que je compte exprimer en mon nom et au nom de plusieurs députés d'ailleurs de ma formation politique qui m'ont signalé les préoccupations, parfois les inquiétudes de personnes et d'institutions dans leur région, c'est justement la dimension régionale du travail et des activités et du déploiement de cette nouvelle institution que l'on veut créer. Il faut de toute évidence assurer le maintien des centres régionaux d'archives ainsi que le soutien financier aux services d'archives agréés. Nous croyons ici, à l'opposition officielle, que les ressources qui seront octroyées à ces centres régionaux ou aux services d'archives agréés devront être suffisantes afin de maintenir et de développer un réseau très, très apprécié par les chercheurs et les généalogistes ici et là à travers le Québec ainsi que par la population en général. Et, M. le Président, il s'agit vraiment ici de la mémoire collective de notre nation et de ses régions, et nous souhaitons donc voir la sensibilité du grand public à l'égard de cette mission de l'État grandir.

M. le Président, l'opposition officielle donne dès lors un appui au principe de ce projet de loi. Nous tenons par ailleurs à entendre la ministre confirmer l'engagement du gouvernement que les ressources de ces deux organismes seront préservées. La réingénierie de l'État ne doit pas être le prétexte de coupures. Et un exercice pour priver l'État et ses institutions de la capacité d'agir de ses missions les plus fondamentales ne serait pas un exercice auquel l'opposition officielle donnerait son assentiment.

M. le Président, «les livres viennent des arbres», a rappelé dans L'équilibriste l'écrivain français Christian Bobin. C'est une belle image parce qu'il est vrai que les livres et le papier sur lequel sont présentés les idées, la fiction ou l'essai viennent des arbres. Et, au moment où le développement durable semble susciter l'intérêt du gouvernement, je dirais, de la francophonie d'ailleurs qui en fait le thème de son prochain sommet, où le premier ministre ira représenter le Québec avec la ministre des Relations internationales, où d'ailleurs l'opposition officielle aurait souhaité être associée, là, dans une délégation parlementaire, mais on a cru faire autrement, au moment donc où le développement durable semble susciter l'intérêt du gouvernement et doit être appliqué en matière d'exploitation de ressources que sont les forêts et leurs arbres, sans doute serait-il aussi bon de garder à l'esprit, pendant le débat sur le projet de loi n° 69, qu'il n'y aura de développement durable au Québec que si nos livres sont accessibles et que notre Bibliothèque nationale contribue à leur accessibilité parce que le livre, et l'accès aux livres est aussi... et participe aussi du développement durable, du développement d'une nation par l'éducation, par la lecture.

Mais ce n'est pas tout de lire, il faut remonter loin dans la vie du Créateur et dans la vie pour reconnaître «le comment de la beauté», comme l'a écrit Victor-Lévy Beaulieu. M. le Président, Mme la ministre, nos Archives nationales nous permettront de reconnaître le comment de la beauté. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cusano): Merci, M. le député de Mercier et porte-parole en matière de culture et de communications. S'il n'y a pas d'autre intervenant, je cède maintenant la parole à la ministre des Communications pour son droit de réplique. Mme la ministre.

Mme Line Beauchamp (réplique)

Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. M. le Président, quelques secondes seulement pour remercier le député de Mercier, porte-parole de l'opposition officielle en matière de culture et de communications, pour l'appui apporté au principe du projet de loi n° 69.

Peut-être lui souligner la chose suivante. Au moment où j'ai déposé le projet de loi pour que l'Assemblée nationale soit saisie du projet de loi n° 69, l'opposition officielle, d'habitude par la voix de sa leader, à ce moment-là, n'a pas fait part de demande ? j'ai ici l'extrait des débats ? donc, n'a pas fait de demande pour qu'il y ait des consultations. Maintenant, je sais que depuis lors le député de Mercier a indiqué à notre leader sa demande pour avoir des consultations. Je tiens à lui dire ceci. Nous pourrons en discuter.

Mais par ailleurs il a pu rencontrer les dirigeants des sociétés d'État, et, par ailleurs, de notre côté, au moment où on se parle, il n'y a eu aucune demande d'aucun groupe, en tout cas vers le cabinet du ministère de la Culture et des Communications ou le ministère pour une demande de consultations. Mais je veux traiter ce projet de loi, les débats qu'il mérite avec la plus grande ouverture possible. Nous aurons donc, par l'intermédiaire de nos leaders, des discussions sur cette demande de consultations.

Maintenant, peut-être indiquer ceci très, très brièvement, M. le Président. Aux inquiétudes exprimées par le député de Mercier quant au financement de cette nouvelle institution nationale, examinons les gestes faits par le passé. Alors même que la Bibliothèque nationale du Québec n'a pas encore ouvert son nouveau grand centre de diffusion à Montréal, son budget a été augmenté, dans le dernier budget du ministère de la Culture ? je le dis de mémoire, mais je crois que c'est plus de 13 millions de dollars ? pour justement réaliser l'ouverture de la Grande Bibliothèque.

Également, lui indiquer ceci. Je souhaiterais avoir sa collaboration pour en fait qu'il n'alimente pas les inquiétudes qui seraient injustifiées par rapport aux centres régionaux d'archives, compte tenu d'ailleurs que, dans le projet de loi ? et je crois que ceci est la meilleure réponse à faire ? dans le projet de loi, nous reconnaissons ces centres régionaux et même nous confirmons que le financement proviendra dorénavant de cette grande institution que sera Bibliothèque et Archives nationales du Québec.

Ce projet de loi a demandé beaucoup de travail. Je vous l'ai dit, depuis maintenant près de... presque 30 ans, on parlait du statut des Archives nationales du Québec, mais, en toute humilité, j'avoue qu'il est sûrement perfectible, et dans ce contexte les apports et les suggestions du député de Mercier lors de l'étude article par article seront les bienvenus. Merci, M. le Président.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Cusano): Merci, Mme la ministre de la Culture. Le principe du projet de loi n° 69, Loi modifiant la Loi sur la Bibliothèque nationale du Québec, la Loi sur les archives et d'autres dispositions législatives, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

n(11 h 10)n

Le Vice-Président (M. Cusano): Adopté. Mme la ministre.

Renvoi à la Commission de la culture

Mme Beauchamp: M. le Président, je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la Commission de la culture pour étude détaillée.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Cusano): Est-ce que la motion de renvoi à la Commission de la culture pour étude détaillée est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Cusano): Adopté. Mme la ministre.

Mme Beauchamp: M. le Président, je vous demande de suspendre les travaux jusqu'à 14 heures.

Le Vice-Président (M. Cusano): Alors, effectivement, nos travaux sont ajournés à 14 heures... suspendus jusqu'à 14 heures.

(Suspension de la séance à 11 h 11)

 

(Reprise à 14 h 8)

Le Président: Bonjour, Mmes, MM. les députés. Nous allons nous recueillir quelques instants.

Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.

Alors, au nom de tous les collègues, je voudrais saluer et souhaiter un bon anniversaire à notre député de Drummond. M. le député, bonne fête!

Présence du ministre de l'Énergie et des Mines
de la Colombie-Britannique, M. Richard Neufeld

J'ai le plaisir de souligner la présence dans les tribunes... J'ai le plaisir de souligner la présence dans les tribunes du ministre de l'Énergie et des Mines de la Colombie-Britannique, M. Richard Neufeld. M. Neufeld, bienvenue à l'Assemblée nationale.

Exceptionnellement, aujourd'hui, je vais reconnaître le député de Lac-Saint-Jean pour une brève intervention.

Souligner le retour à l'Assemblée nationale
du député de Lac-Saint-Jean, M. Stéphan Tremblay

M. Stéphan Tremblay

M. Tremblay: M. le Président, chers collègues, c'est avec beaucoup d'émerveillement que je reviens en Chambre, ici, aujourd'hui, considérant que statistiquement je ne devrais peut-être pas y être, ou être en fauteuil roulant. Heureusement, comme on dit par chez nous, je n'étais pas dû et j'ai droit à une deuxième chance.

n(14 h 10)n

Cette période de souffrances physiques, de perte d'autonomie et de dépendance envers les autres m'a fait voir un autre aspect de la vie mais ne m'a pas fait changer d'idée sur l'importance de faire de la politique. Je dois dire par contre, et c'est pourquoi je veux parler publiquement aujourd'hui, que, oui, j'ai été chanceux, mais j'ai surtout eu la chance d'avoir des gens autour de moi qui m'ont supporté, à commencer par mes deux passagers, mon adjoint et ma conjointe, qui, malgré les événements, ont pris soin de moi, mes secouristes, le personnel de l'Hôtel-Dieu d'Alma, en particulier les infirmières, avec qui j'ai eu une perspective différente, ma famille, ma belle-famille.

Remercier aussi Hydro-Québec pour avoir réagi rapidement afin de corriger une situation dangereuse pour mes confrères pilotes de brousse, le député de Masson qui a pris la relève du dossier environnement et finalement mon père qui ne m'a pas trop chicané, même si j'ai coulé son avion. Alors, merci.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Jean Charest

M. Charest: Je ne veux pas manquer l'occasion de dire au député du Lac-Saint-Jean que nous sommes très, très heureux de le voir de retour à l'Assemblée nationale du Québec. On s'est beaucoup inquiétés pour lui. Il a raison de dire que les dieux étaient avec lui, puisqu'un accident d'avion ça pardonne rarement. Je suis d'autant plus heureux aujourd'hui que son père, si j'ai bien compris, est témoin de son retour à l'Assemblée nationale du Québec. Et je peux lui dire qu'il y a peut-être juste une chose de pire en politique que de ne pas être dû, ça, c'est d'être passé dû, et ce n'est pas son cas. Ce n'est pas son cas.

Mais je veux également lui dire qu'à l'insistance du ministre de l'Environnement il n'était pas question de rendre public le plan de développement durable du gouvernement tant que le député de Lac-Saint-Jean n'était pas de retour.

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.

M. Bernard Landry

M. Landry: Le député de Lac-Saint-Jean était déjà un homme remarquable avant que n'arrivent les événements qu'il a lui-même évoqués. L'épreuve généralement grandit. Dans certains cas, ça peut tuer, mais, quand ça ne tue pas, ça peut rendre la vie beaucoup plus significative, et c'est ce que je souhaite et que je constate déjà. Sa brève intervention dénote déjà que, redoutable avant, je crois qu'il le sera davantage après l'épreuve.

Et j'ai été content d'entendre le premier ministre saluer son retour, mais je crois qu'une pointe d'angoisse devrait se lire à travers ses propos, car le député, qui était déjà d'une remarquable efficacité, le sera davantage.

Nous avons été très inquiétés par ce qui est arrivé, nous avons été profondément bouleversés, mais notre joie est proportionnelle à la peine que nous avons failli avoir et que nous avons ressentie à la nouvelle de l'accident. Un des plus jeunes députés élus à la Chambre des communes et à l'Assemblée nationale aurait pu devenir aussi un des plus jeunes à disparaître prématurément. Les dés en ont été jetés autrement, et je crois, et j'espère, et je souhaite que sa nouvelle vivacité profitera à l'Assemblée nationale et à l'ensemble du Québec dans les années qui vont venir.

Affaires courantes

Le Président: Aux affaires courantes aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles ni présentation de projets de loi.

Dépôt de documents

Dépôt de documents. M. le ministre des Finances.

Rapport annuel du ministère des Finances

M. Séguin: Merci, M. le Président. J'ai l'honneur de déposer le rapport annuel de gestion 2003-2004 du ministère des Finances.

Le Président: Ce document est déposé. M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

Rapport sur l'application
de la procédure d'examen des plaintes
de l'ADRLSSSS
?Bas-Saint-Laurent et
rapports annuels de certaines agences et
de la Régie régionale de la santé et
des services sociaux du Nunavik

M. Couillard: M. le Président, je voudrais déposer le rapport annuel 2003-2004 sur l'examen des plaintes par les établissements et par l'Agence de développement de santé du Bas-Saint-Laurent, de même que les rapports annuels de gestion 2003-2004 des agences suivantes: Bas-Saint-Laurent, Gaspésie?Les Îles, Outaouais, Chaudière-Appalaches, Capitale-Nationale, et enfin le rapport annuel 2003-2004 de la Régie régionale de Nunavik.

Le Président: Ces documents sont déposés. M. le leader du gouvernement.

Renvoi du rapport annuel
de la régie régionale à la Commission
des affaires sociales pour examen

M. Dupuis: Au sujet de ce dernier dépôt, M. le Président, j'aurais une motion à présenter, qui serait la suivante:

«Que, conformément à l'article 392 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux, l'étude du rapport annuel 2003-2004 de la Régie régionale de Nunavik soit déférée à la Commission des affaires sociales et que le ministre de la Santé et des Services sociaux soit membre de ladite commission pour la durée du mandat.»

Mise aux voix

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée? Adopté. M. le ministre de l'Éducation.

Rapport annuel de la Commission
des programme d'études

M. Reid: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 2003-2004 de la Commission des programmes d'études.

Préavis d'une motion
des députés de l'opposition

Le Président: Ce document est déposé. Pour ma part, j'ai reçu, dans les délais prescrits, préavis d'une motion qui sera inscrite dans le feuilleton de demain, aux affaires inscrites par les députés de l'opposition, conformément à l'article 97.1 du règlement. Je dépose copie du texte de ce préavis.

Il n'y a pas de dépôt de rapports de commissions.

Dépôt de pétitions

Dépôt de pétitions. Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: Merci, M. le Président. Je demande le consentement de la Chambre pour déposer une pétition non conforme.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement? Consentement. Mme la députée.

Maintenir le nombre de cours obligatoires
en philosophie au niveau collégial

Mme Marois: Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 3 772 pétitionnaires, citoyennes et citoyens du Québec, et qui invoque les faits suivants:

«Considérant la triple finalité de la formation générale, telle que définie par le ministère de l'Éducation, c'est-à-dire l'acquisition d'un fonds commun culturel, l'acquisition d'habiletés génériques, l'appropriation d'attitudes souhaitables;

«Considérant que la formation générale évite l'enfermement de la formation spécifique et fournit à tous les citoyens d'une nation des références fondamentales communes afin de permettre une discussion démocratique à partir de bases partagées;

«Considérant que la formation complémentaire n'a jamais fait l'objet d'une évaluation par la CEEC et qu'il serait important de l'examiner avant d'étendre son modèle à la formation générale;

«Considérant que la formation du citoyen, qui devrait être la finalité première de l'éducation moderne et qui demeure le principe moteur de la formation générale dans les cégeps, ne peut pas trouver de meilleur cadre que la réflexion philosophique;

«Considérant que l'interrogation philosophique s'enracine dans une capacité réflexive qui est communément partagée et pratiquée et que le succès de l'éducation dépend de l'établissement et du renforcement de cette capacité commune;

«Considérant que le cadre pédagogique propre aux diverses disciplines ne permet pas de dégager le sens de chacune; les cours de philosophie sont nécessaires à la formation générale, puisque seule l'interrogation philosophique peut donner sens à la pluralité des disciplines qui jalonnent le parcours de l'étudiant;

«L'intervention réclamée se résume ainsi:

«Les soussignées et soussignés demandons au ministre de l'Éducation de maintenir le nombre actuel de cours obligatoires en philosophie dans le réseau collégial.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président: Merci, Mme la députée. Cette pétition est déposée. Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: Alors, je demande le consentement de la Chambre pour déposer une pétition non conforme.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement? Consentement. Mme la députée Taillon.

Mme Marois: Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 1 520 pétitionnaires, citoyennes et citoyens du Québec, qui invoque les faits suivants:

«Considérant que l'enseignement de la philosophie est essentiel aux étudiants du collégial pour une formation générale et culturelle de base;

«Considérant que l'apprentissage de la philosophie au collégial contribue fortement à donner des outils de base pour aider les étudiants à se qualifier dans la nouvelle économie du savoir;

«L'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous exigeons du ministère de l'Éducation le maintien séquentiel des trois cours de philosophie obligatoires dans le cadre de la formation générale commune, propre et complémentaire.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président: Je vous remercie, Mme la députée. Cette pétition est déposée.

Il n'y a pas d'interventions portant...

Mme Lemieux: M. le Président.

Le Président: Oui.

Mme Lemieux: M. le Président, avant qu'on passe à une autre rubrique, le ministre délégué de la Forêt, la semaine dernière, a indiqué son intention de déposer des avis au sujet d'un projet concernant le parc du Mont-Orford. Je me demandais s'il pouvait le faire à ce moment-ci.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: Aussitôt que le ministre délégué sera prêt à déposer les avis, ils seront déposés. Ce sera fait avec célérité.

Le Président: Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.

n(14 h 20)n

Je vous avise qu'après la période de questions et réponses orales sera tenu le vote reporté sur la motion sans préavis concernant la Journée de sensibilisation à la schizophrénie.

Questions et réponses orales

Nous en sommes maintenant à la période des questions et réponses orales, et je suis prêt à reconnaître M. le député de Dubuc.

Mandat confié à l'Office
des professions relativement
aux relations commerciales entre
des chaînes de pharmacies et des médecins

M. Jacques Côté

M. Côté: Alors, merci, M. le Président. M. le Président, concernant le dossier des loyers gratuits, après avoir tergiversé tant et plus concernant le mandat donné à l'Office des professions, le ministre de la Justice, responsable des lois professionnelles, a dit, le 21 septembre, que l'office vérifiait la question des loyers gratuits. Le 3 novembre, il a dit avoir demandé à l'Office des professions un avis sur l'ensemble des relations commerciales entre médecins et pharmaciens. Le 4 novembre, le ministre a refusé de déposer en cette Chambre le mandat donné à l'office. Le 5 novembre, l'office a confirmé ce mandat par voie de communiqué. Le 16 novembre, nous avons demandé, comme opposition officielle, en vertu de la loi d'accès à l'information, la copie du mandat. Le 19 novembre, le ministère de la Justice nous avise qu'il prolonge le délai de 20 à 30 jours, dû à un fort volume de demandes d'accès.

Le Président: Votre question.

M. Côté: Je vais déposer, M. le Président, la lettre du ministère de la Justice.

Le Président: Votre question.

M. Côté: Ma question, M. le Président: Pourquoi 30 jours pour communiquer une lettre? Au lieu de finasser avec la loi sur l'accès à l'information, le ministre peut-il nous déposer maintenant le mandat qu'il a donné à l'Office des professions?

Document déposé

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour le dépôt du document? Consentement. Ce document est déposé. M. le ministre de la Justice et responsable de l'application des lois professionnelles.

M. Jacques P. Dupuis

M. Dupuis: Alors, la réponse est oui. Je dépose une lettre qui est datée du 3 novembre 2004 et qui est signée par ma directrice de cabinet, Christiane Pelchat.

Des voix: ...

Document déposé

Le Président: S'il vous plaît! Est-ce qu'il y a consentement pour le dépôt du document référé par le ministre? Consentement. Le document est déposé.

En question principale, M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

Aide financière aux producteurs de bovins

M. Maxime Arseneau

M. Arseneau: Merci, M. le Président. Hier, les producteurs bovins et les producteurs laitiers ont signifié leur exaspération face au gouvernement libéral qui ferme les yeux à leurs demandes. Leur désespoir a atteint un tel sommet qu'ils ont choisi de confier un troupeau de vaches aux ministres du gouvernement libéral. M. le Président, pour en arriver là, il faut vraiment être désespéré. La supposée annonce extraordinaire de la ministre, alors qu'elle-même reconnaissait avoir échoué, vendredi, dans son communiqué pour les animaux de réforme, tout cela a entraîné les agriculteurs à descendre dans la rue avec leurs vaches. Comme pour la question des OGM, la ministre s'en remet au fédéral.

Est-ce que la ministre de l'Agriculture sait qu'à la question qui lui a été posée hier, au Parlement fédéral, son homologue a laissé entendre qu'il n'avait pas l'intention de se plier à la demande du Québec?

Le Président: Mme la ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

Mme Françoise Gauthier

Mme Gauthier: D'entrée de jeu, M. le Président, permettez-moi de dire qu'en tout temps, depuis mon entrée en fonction et surtout depuis la crise du 20 mai 2003, je suis en étroite collaboration, je discute régulièrement avec le président de l'UPA, le président de la Fédération des producteurs de bovins, le président de la Fédération des producteurs laitiers, M. le Président.

Je voudrais juste dire aussi au député des Îles-de-la-Madeleine que, lorsqu'il a quitté ses fonctions comme ministre de l'Agriculture, il a laissé en plan, M. le Président, le cadre stratégique agricole, laissant en plan, pénalisant ainsi nos producteurs agricoles québécois de revenus de 1 million... 1 milliard de dollars juste pour la gestion des risques, M. le Président. 1 milliard de dollars. Nous avons repris le dossier et négocié de la flexibilité, et c'est ce qui nous a permis, la semaine dernière, d'avoir une entente avec le fédéral pour annoncer l'entente concernant les bouvillons.

Concernant la vache de réforme, M. le Président, nous sommes en train de discuter. Nous, on ne pratique pas la politique de la chaise vide, M. le Président; nous, on discute avec le gouvernement fédéral pour avoir un prix plancher qui sera uniforme à travers le Canada.

Le Président: En question complémentaire, M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Maxime Arseneau

M. Arseneau: Est-ce que la ministre réalise qu'il y a un problème? Est-ce que la ministre réalise qu'il y a une problématique qui entoure toute la question de la vache folle et la question de la vache de réforme en particulier? Et, M. le Président, puisque c'est elle-même qui a suggéré aux producteurs de fixer un prix plancher, est-ce que la ministre peut nous donner... est-ce qu'elle peut nous dire les conséquences, pour les producteurs et pour les consommateurs, d'un tel prix plancher qui sera en application à compter de lundi prochain?

Le Président: Mme la ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

Mme Françoise Gauthier

Mme Gauthier: M. le Président, manifestement le député des Îles connaît un peu mal son dossier. Il y avait une décision de la régie, qui a été donnée au mois de juin dernier, qui permettait effectivement aux producteurs de bovins de fixer un prix plancher pour la vache de réforme. La Fédération des producteurs s'est conformée à la décision et a fixé le prix plancher, le prix plancher qui sera effectif à partir du 29 novembre. Mais manifestement, si le député des Îles revoit bien son dossier, revoit bien sa loi, il n'y a aucune disposition qui y rattache un volume d'achat pour les acheteurs, M. le Président, d'où la nécessité d'avoir un prix plancher qui soit uniforme avec le Canada.

Je l'ai dit en septembre, je l'ai dit en octobre, je le dis en novembre et on aura gain de cause, M. le Président, pour...

Le Président: En question principale?

M. Landry: ...

Le Président: En question principale, M. le chef de l'opposition officielle.

M. Bernard Landry

M. Landry: ...qui est très grave, là, pour les agriculteurs, et ça fait longtemps que ça dure. Est-ce que le premier ministre ne pourrait pas se servir lui-même du dossier et intervenir, ce que les agriculteurs du Québec réclament à hauts cris?

Le Président: Question complémentaire. M. le premier ministre.

M. Jean Charest

M. Charest: Je peux dire au chef de l'opposition officielle que, jeudi dernier, sur un appel conférence qu'avait convoqué le premier ministre du Canada pour préparer la visite du président américain, M. Bush, il a consulté les premiers ministres des provinces sur les sujets que nous souhaitions que le gouvernement canadien soulève avec son vis-à-vis américain, et le Québec, à l'instar de plusieurs autres provinces, soit dit en passant, a beaucoup insisté sur le dossier justement de la vache folle et sur les mesures qui doivent être prises pour que nous puissions réouvrir les frontières. Alors, on n'est pas les seuls, évidemment. Il y a le dossier du bois d'oeuvre qui est un dossier extrêmement important. De mon point de vue à moi, il y a une fenêtre qui s'ouvre avec la réélection du gouvernement américain, et c'est une occasion de faire la démonstration que la relation est à ce point importante que l'Administration choisira d'y mettre tout son poids, l'Administration américaine, la Maison-Blanche, pour permettre la réouverture des frontières.

La deuxième chose que je tiens à réitérer, c'est ce que la ministre de l'Agriculture vient tout juste de dire: le gouvernement du Québec a pris déjà des mesures depuis que cette crise a commencé. C'est 165 millions de dollars qu'on y a mis. On suit ça de très près, d'une part. On a annoncé un prix plancher pour le 29 novembre prochain. Mais le chef de l'opposition officielle doit reconnaître qu'un prix plancher n'a d'effet que dans la mesure où le gouvernement fédéral établit un prix plancher pour l'ensemble du Canada.

La ministre a écrit à son vis-à-vis...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! Je vous demande votre collaboration. Vous êtes en question complémentaire, M. le premier ministre. Si vous voulez conclure.

M. Charest: Et puis je veux rassurer... La députée de Rosemont dit que c'est long, là. Je partage l'information avec vous. Je présume que c'est vous qui voulez savoir ? vous voulez savoir? ? ce qui a été fait, puis c'est le sens de mon intervention, là.

Des voix: ...

Le Président: M. le député de Berthier, je vous demande votre collaboration.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! M. le député de Papineau, un peu de respect, s'il vous plaît. En conclusion, rapidement, M. le premier ministre.

M. Charest: Oui, je vais conclure parce que je voulais rappeler qu'on a fait une intervention pour établir un prix plancher au niveau canadien pour la raison suivante: la ministre vient de vous informer qu'à défaut d'y rattacher un volume, ce qu'on ne peut pas faire du côté québécois, ça n'a pas d'effet si on est les seuls à fixer un prix plancher. Il faut que le prix plancher soit fixé au niveau canadien. Et, en terminant, je vous dirai qu'on va continuer à appuyer par toutes les mesures possibles et à suivre au jour le jour le dossier, M. le Président.

Le Président: En question complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.

M. Bernard Landry

M. Landry: C'est non seulement long, mais c'est loin, M. le Président, des préoccupations des agriculteurs. Ma question était très simple et axée sur la demande des agriculteurs du Québec. Ils veulent un programme immédiat de compensation. Ils sont dans la détresse financière. Le fédéral nage dans les surplus, le premier ministre est dans une ère de coopération avec le fédéral. Pourquoi n'exige-t-il pas lui-même de son homologue fédéral une intervention rapide pour répondre aux angoisses des agriculteurs du Québec?

Le Président: Mme la ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

Mme Françoise Gauthier

Mme Gauthier: M. le Président, juste dire au chef de l'opposition officielle, juste lui rappeler que le gouvernement du Canada et le gouvernement du Québec, on a établi des programmes pour venir en aide aux producteurs agricoles. Juste lui rappeler ça. Juste lui rappeler aussi, M. le Président, concernant les producteurs laitiers, pour ce qui est de la vache de réforme qu'on a établi un programme ? on est venus en aide aux producteurs agricoles du Québec ? de l'ordre de 325 $ par tête pour chacun des producteurs, M. le Président.

Manifestement, eu égard au fait qu'il y a une distorsion dans le marché, il faut passer par un prix plancher, un prix plancher qui sera nivelé à travers le Canada, parce que, je le répète, M. le Président, la crise, c'est une crise qui est nationale, qui est canadienne, pas juste au Québec. C'est à travers le Canada, donc il faut un prix plancher à travers le Canada, M. le Président.

n(14 h 30)n

Le Président: En question principale, M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

Demande d'enquête concernant le prix du boeuf

M. Maxime Arseneau

M. Arseneau: M. le Président, les agriculteurs du Québec attendent des actions du gouvernement du Québec en regard en particulier de la vache de réforme. C'est une problématique particulière, et les annonces faites par la ministre jusqu'à maintenant ne répondent pas à la problématique. Il y a aussi une situation, dans la vache de réforme, qui fait en sorte que les producteurs du Québec sont face à un monopole en termes d'abattoirs. M. le Président, l'an dernier, la ministre de l'Agriculture disait que les Québécois n'avaient pas à s'inquiéter, que le prix du boeuf n'avait pas été affecté par la crise de la vache folle. Elle s'appuyait, entre autres, sur un rapport qu'elle avait mandaté un comité de travailler pour examiner le marché jusqu'au mois d'août 2003.

M. le Président, comment la ministre peut-elle expliquer, alors que les producteurs subissent des pertes qui frôlent les 70 %, que le prix du boeuf aux consommateurs n'a pas fluctué et n'a pas été en diminuant? Comment elle explique cela, M. le Président?

Le Président: Alors, Mme la ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

Mme Françoise Gauthier

Mme Gauthier: M. le Président, je voudrais rappeler au député des Îles-de-la-Madeleine ce que je lui ai dit en entrée de jeu, tantôt, à la période des questions, c'est de lui dire que, si, moi, je n'avais pas pris la défense des producteurs... Le programme qui avait été annoncé par le fédéral, le 10 septembre dernier, ne faisait pas l'affaire. Ce que j'ai obtenu, c'est la flexibilité nécessaire pour répondre aux exigences des producteurs québécois, M. le Président. Je n'ai pas fait comme lui, moi. Je ne me suis pas assise sur ma chaise en attendant que ça passe. J'ai effectivement...

Des voix: ...

Mme Gauthier: J'ai négocié avec le fédéral pour avoir la...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît, M. le leader adjoint! S'il vous plaît! Vous savez, le règlement s'applique à tout le monde, même si on est leader adjoint. Alors, si vous voulez poursuivre, Mme la ministre.

Mme Gauthier: M. le Président, je n'ai pas fait comme le député des Îles-de-la-Madeleine, je n'ai pas attendu que par magie ça se résorbe, on a négocié. On a obtenu, pour les producteurs du Québec, M. le Président, la flexibilité nécessaire pour leur venir en aide, et cela, je le répète, de concert... je l'ai fait en collaboration avec le président de la Fédération des producteurs de bovins, avec le président de la fédération de l'UPA et avec le président de la Fédération des producteurs laitiers du Québec, M. le Président.

Le Président: En question complémentaire, M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Maxime Arseneau

M. Arseneau: M. le Président, est-ce que la ministre pourrait répondre à la question pour commencer, avant de prétendre toutes sortes de théories? Et le gouvernement précédent a pris ses responsabilités avec les agriculteurs, elle pourra se le faire dire.

Le Président: Votre question, M. le député.

M. Arseneau: Qu'attend le gouvernement, M. le Président, pour procéder à une véritable enquête, une enquête peut-être du Vérificateur général justement, sur ce qui se passe? Et à qui profite véritablement cette crise de la vache de réforme? À qui profite, un peu comme ça s'est passé en Alberta, M. le Président...

Le Président: En conclusion.

M. Arseneau: ...alors qu'on a constaté que les intermédiaires entre les producteurs et les consommateurs ont fait des profits de 300 %...

Le Président: En conclusion à votre question.

M. Arseneau: À quand une véritable enquête? Et, après ça, il faut reprendre...

Le Président: Je vous rappelle qu'en question additionnelle il faut poser sa question avec pas de préambule, tel que le règlement le permet. Alors, question complémentaire, Mme la ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

Mme Françoise Gauthier

Mme Gauthier: M. le Président, je le rappelle ? et je sais que ça lui fait mal, au député des Îles-de-la-Madeleine ? quand il avait les fonctions de ministre de l'Agriculture, il nous a... il a commencé des négociations avec le gouvernement canadien pour une politique canadienne de l'agriculture. À un moment donné, il s'est rendu compte qu'il n'y aurait pas la flexibilité, donc il a arrêté les négociations, M. le Président, privant les producteurs agricoles du Québec de revenus de 1 milliard de dollars, M. le Président. C'est ça qu'il a fait, M. le Président.

Le Président: En question complémentaire, M. le député de Beauce-Nord.

M. Janvier Grondin

M. Grondin: Merci, M. le Président. Est-ce que la ministre peut s'engager maintenant à soutenir les agriculteurs qui veulent démarrer des abattoirs, et les soutenir et les soutenir financièrement aussi, parce qu'on sait qu'il y a plusieurs projets sur la table présentement?

Le Président: Mme la ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

Mme Françoise Gauthier

Mme Gauthier: Bien, M. le Président, le député de Beauce-Nord devait être présent lorsque mon collègue le ministre des Finances a fait la lecture du budget, en avril dernier. On a annoncé effectivement qu'on supporterait les producteurs agricoles dans un projet d'abattoirs et on attend effectivement que la Fédération des producteurs de bovins nous soumettent leurs états financiers pour les appuyer dans un projet qu'ils choisiront, M. le Président.

Le Président: En question principale, M. le chef de l'opposition officielle.

Perspectives en matière de production d'électricité

M. Bernard Landry

M. Landry: Oui. M. le Président, en fin de semaine, lors d'une activité partisane, le premier ministre, encore une fois, a fait preuve d'improvisation en parlant d'exportation massive de l'électricité du Québec vers les États-Unis, en parallèle avec l'Alberta qui exporte massivement gaz et pétrole. Or, l'été dernier, la Régie de l'énergie, dans un avis très bien documenté, concluait qu'au cours des six prochaines années la situation énergétique du Québec serait fragile. Et, pas plus tard que mercredi dernier, le ministre des Ressources naturelles rappelait à peu près la même chose en disant: La situation énergétique demeure préoccupante.

M. le Président, je demande au premier ministre: Qu'est-ce qui s'est passé entre mercredi et dimanche pour qu'il puisse soudainement promettre des mégawatts destinés à l'exportation, mégawatts qui, aux dernières nouvelles, n'existaient pas dans la production québécoise? Quelles sont les nouvelles données qui permettent de faire une telle annonce?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Jean Charest

M. Charest: M. le Président, je sais que le chef de l'opposition officielle est un lecteur assidu du journal Le Devoir, je veux lui lire une citation, qui est la suivante, et c'est suite à une entrevue qu'avait donnée le ministre de l'Environnement et où il est dit ceci: «Tout aussi clairement, ajoute le [ministre de l'Environnement], le gouvernement [...] accorde [la priorité] au développement de l'hydroélectricité non seulement pour nos besoins internes, mais aussi pour le marché des exportations, ce qui réduira les émissions de gaz à effet de serre de nos voisins et les contaminants crachés par leurs centrales thermiques, dont le Québec écope.» C'est une entrevue que le ministre avait donnée le 1er juin 2003... publiée le samedi 31 mai 2003, suite à l'élection du gouvernement ? il y a même une très belle photo du ministre dans le journal; moi, je l'ai beaucoup aimée.

Et c'est pour dire que, sur cette question-là, nous avons été d'une constance remarquable, que nous avions annoncé avant l'élection générale notre intention de développer un plan de développement durable, que nous croyons, nous, de ce côté-ci de la Chambre, que le Québec doit développer ses ressources hydroélectriques, qu'on doit développer les ressources renouvelables aussi, les énergies renouvelables. Mais il y a une chose à laquelle nous croyons aussi, j'aimerais savoir si le chef de l'opposition y croit, oui ou non: Est-ce que vous pensez qu'au Québec on doit les développer et que nous devrions également les vendre pour que nous puissions créer de la richesse pour les citoyens du Québec, pour distribuer cette richesse? Moi, j'y crois. Moi, je pense que c'est le bon choix pour le Québec, c'est celui que j'ai l'intention de défendre. Et vous?

Le Président: En question complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.

Capacité d'exportation d'électricité

M. Bernard Landry

M. Landry: Ma question ne portait pas sur la photo du ministre, elle portait sur le portrait de la situation énergétique du Québec. Alors, je la reformule de façon plus serrée en espérant avoir une réponse.

À l'exception des projets déjà connus et annoncés par le gouvernement précédent, comme Péribonka, que j'ai annoncé moi-même, Eastmain-Rupert, qui découle directement de la «Paix des Braves», Toulnustouc, rénovation de 10 centrales et éoliennes en Gaspésie, tout ce que nous avions préparé et annoncé, aucun nouveau projet majeur ne permet d'envisager un virage semblable vers l'exportation. De plus, le premier ministre déclarait, la semaine dernière, dans La Presse ? la semaine dernière: «Il y a [...] une capacité limitée sur les lignes électriques entre le Canada et les États-Unis.» Donc, problème de production, problème de lignes.

Sachant qu'il y aura prochainement une commission parlementaire sur l'énergie, est-ce que le premier ministre peut déposer en cette Chambre un document d'analyse qui lui permet de prévoir tout d'un coup que le Québec aurait la capacité d'exporter massivement de l'énergie aux États-Unis?

Le Président: Il s'agit d'une question principale. M. le premier ministre.

M. Jean Charest

M. Charest: Bien, M. le Président, d'abord il faut rappeler au chef de l'opposition officielle que, si aujourd'hui le Québec se trouve dans une situation où, pour les prochaines années, là, ce sera serré sur le plan de l'alimentation de notre propre marché, c'est parce que son gouvernement, pendant neuf ans, n'a à peu près rien fait dans le développement hydroélectrique du Québec. Alors, vous avez négligé...

D'abord, le premier choix que le gouvernement... c'est-à-dire que le Parti québécois avait défendu, c'était le nucléaire. Rappelons-nous qu'il a fallu se battre contre le Parti québécois, dans les années soixante-dix, pour qu'on puisse, nous, comme Québécois, développer la filière hydroélectrique. Vous avez défendu la filière nucléaire à ce moment-là. Aujourd'hui... Après ça, vous avez fait neuf ans de négligence.

n(14 h 40)n

Ce que je peux déposer aujourd'hui, M. le Président, c'est un document de projets hydroélectriques qui sont en construction et en phase d'autorisation environnementale et en avant-projets. Ça décrit assez bien ce qu'il y a actuellement. Mais je veux également citer un communiqué de presse rendu public par Hydro-Québec aujourd'hui. Je vous cite un seul paragraphe, puisque vous posez la question sur l'exportation, qui dit ceci: «Avec ces 10 milliards d'investissements, Hydro-Québec Production aura une marge de manoeuvre en 2012 de près de 20 TWh par année.» Et entre guillemets: «"Cela [pourrait permettre] un niveau d'exportation très rentable pour le Québec", a conclu Thierry Vandal», aujourd'hui même, Hydro-Québec, pour les Québécois.

Ça, c'est ce que, moi, j'ai l'intention de défendre. Mais je vous repose la question, M. le Président: Est-ce que le chef de l'opposition croit, oui ou non, que, nous, Québécois, on peut produire de l'électricité pour en vendre à nos voisins du Sud...

Le Président: En conclusion.

M. Charest: ...parce que c'est bon pour l'environnement et parce qu'on veut s'enrichir, également, pour payer nos programmes sociaux et l'éducation?

Document déposé

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour le dépôt du document? Consentement. Le document est déposé.

En question complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.

M. Bernard Landry

M. Landry: C'est rare que Thierry Vandal nous rend hommage, mais j'accepte humblement les compliments qu'il nous fait dans son communiqué.

Il n'y aurait pas un kilowatt de ce qu'il dit si ça n'avait pas été de notre action courageuse en matière de projets...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! Juste un instant. Alors, je vous demande votre collaboration. La question est au chef de l'opposition officielle. Je vous demande votre collaboration. M. le chef de l'opposition officielle.

M. Landry: Je les redis pour rendre le premier ministre plus réaliste: Péribonka, Eastmain-Rupert, Toulnustouc, rénovation de 10 centrales. S'il n'y avait pas eu ça de fait, dans cinq ans, on aurait eu de la difficulté à éclairer le parlement. Alors, qu'il n'essaie pas d'assombrir les choses quand la lumière est venue des travaux qu'on a faits.

Alors, qu'il réponde donc, là. Qu'il réponde donc de façon réaliste. Il s'est fait rappeler toute la fin de semaine que, sans la «Paix des Braves», son discours, qui était déjà largement absurde, le serait davantage.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Je vous demande votre collaboration. S'il vous plaît!

M. Landry: Est-ce que le premier ministre peut nous indiquer s'il a consulté son ministre des Richesses naturelles avant de procéder à cette annonce? Et est-ce que le ministre lui a confirmé que le Québec aurait les approvisionnements, un, et les lignes de transport nécessaires pour exporter massivement de l'électricité? C'est ça, la question que des millions de Québécois et Québécoises veulent voir éclaircir.

Des voix: ...

Le Président: Je vous demande votre collaboration, mes chers collègues. M. le premier ministre.

M. Jean Charest

M. Charest: Justement, je vais essayer de mettre le chef de l'opposition officielle au courant. Il prétend que n'eût été de ses actions le parlement ne serait pas éclairé. En tout cas, je peux vous dire que ce n'est certainement pas ses déclarations à lui qui vont nous éclairer sur les intentions de...

Je peux lui en nommer, des projets, là, qui peuvent connaître le jour à la condition qu'il y ait une volonté politique, comme c'est le cas de notre côté, que ces projets-là puissent se réaliser: Chute-Allard, Rapide-des-Coeurs, Eastmain 1-A, la dérivation Rubert-Sarcelle, complexe de La Romaine, où il se trouverait quatre centrales. Voilà des projets qui devraient pouvoir se réaliser à la condition qu'il y ait une volonté politique de le faire.

Mais, M. le Président, je remarque, je remarque encore une fois que le chef de l'opposition officielle et sa formation politique semblent incapables de nous dire si, oui ou non, ils croient au développement hydroélectrique du Québec et à la possibilité que nous puissions exporter pour s'enrichir.

Moi, c'est une idée que je suis prêt à défendre, et je conçois qu'il y ait des gens, comme il y en a au Parti québécois, qui sont contre. Ils parlent... actuellement, là, dans les premières rangées du Parti québécois, ils hochent la tête pour nous dire qu'ils sont contre ce que je viens d'affirmer.

Vous, M. le chef de l'opposition officielle, M. le Président, est-ce que vous êtes pour ou contre? Je veux savoir, moi, au nom des Québécois, si, oui ou non, vous avez des convictions profondes sur cette question-là ou si vous allez encore chercher à vous cacher derrière des déclarations confuses.

Le Président: En question principale, M. le chef de l'opposition officielle.

Bilan des projets en matière
de production d'électricité

M. Bernard Landry

M. Landry: M. le Président, je vais déposer un document qui fait douter profondément de la pertinence de la question que le premier ministre pose. Je vais lui énumérer une série de projets, avec les dates de l'annonce, ce qui devrait, ce qui devrait lui faire reconnaître honnêtement qu'on a répondu à sa question bien avant qu'il ne la pose: Le Rapide-des-Coeurs, il l'a mentionné, l'annonce, c'est le 28 juin 2001; Toulnustouc, c'est le 24 mars 1998; Eastmain, c'est le 7 février 2002, Eastmain 1 et Eastmain-Rupert; la Paix-des-Braves, c'est le 7 février 2002; Péribonka, c'est le 21 mars 2001; premier appel d'offres d'éoliennes en Gaspésie, 14 novembre 2002.

Pourquoi est-ce que le premier ministre nous demande si on est en faveur de l'électricité, alors qu'on en a fait plus qu'il ne rêvera jamais d'en faire dans sa vie et qu'il ne pourra jamais en faire?

Le Président: M. le... M. le premier ministre.

M. Jean Charest

M. Charest: Je veux rappeler au chef de l'opposition officielle qu'il était présent au Forum des générations, qui, sur cette question-là, était absolument unanime. D'ailleurs, le maire de Laval, M. Vaillancourt...

Des voix: ...

M. Charest: Aimez-vous mieux le nom de Guy Chevrette?

Des voix: ...

M. Charest: Oui?

Des voix: ...

M. Charest: Bon!

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Alors, si vous voulez vous adresser à la présidence, s'il vous plaît.

M. Charest: Vous aimez mieux le nom de Guy Chevrette? Vous aimez mieux Henri Massé?

Des voix: ...

M. Charest: Bon! Bon, bien, écoutez, si vous êtes d'accord avec Guy Chevrette...

Des voix: ...

Le Président: M. le premier ministre, je vous demanderais, conformément au règlement, de vous adresser au président tout le temps.

M. Charest: S'ils sont d'accord, M. le Président, avec Guy Chevrette, ils sont d'accord avec Henri Massé, ils sont d'accord avec le maire Vaillancourt, pourquoi seraient-ils en désaccord avec nous, puisque nous étions d'un commun accord et que vous étiez dans la pièce?

Mais c'est intéressant, votre liste de projets. Dites-nous donc, entre 1994 et 2000, vous étiez où, vous? Il se passait quoi au Québec? Parce que j'ai... c'est drôle, je n'ai pas entendu beaucoup de projets entre 1994-2000. Relisez donc le rapport de...

Des voix: ...

M. Charest: Je ne sais pas si la leader...

Le Président: S'il vous plaît! Il faut vous adresser à la présidence, tel que le règlement le dit. M. le premier ministre.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Adressez-vous à la présidence, ça va mieux aller.

M. Charest: Entre 1994 et 2000, il ne s'est à peu près rien passé au Québec. Mais, si vous voulez absolument avoir le bilan, allez donc relire le rapport de la Régie de l'énergie qui a été déposé au mois de juin dernier. Il y a là-dedans le bilan malheureux de votre gouvernement.

Ce n'est pas moi qui le dis. La Régie de l'énergie, M. le Président, a fait le bilan de l'échec lamentable du chef de l'opposition officielle, qui n'est pas capable de se lever à l'Assemblée nationale aujourd'hui et dire à voix haute: Je suis favorable à l'exportation d'énergie hydroélectrique. Si vous y croyez, dites-le donc à voix haute, au lieu de vous cacher derrière votre fauteuil.

Le Président: En question principale, Mme la députée de Rosemont.

Date de disponibilité d'énergie
hydroélectrique excédentaire

Mme Rita Dionne-Marsolais

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Au-delà des slogans, comme: On est prêts, on veut vendre, on veut exporter, nous, on voudrait comprendre, M. le Président.

Est-ce que le ministre des Ressources naturelles réalise qu'il doit clarifier la confusion totale qui existe en ce moment entre son gouvernement, lui et Hydro-Québec?

In extremis, à 13 h 30 cet après-midi, Thierry Vandal, qui est bien connu pour son implication au Parti libéral et surtout président d'Hydro-Québec Production...

Des voix: ...

Mme Dionne-Marsolais: Bien, il était président des jeunes libéraux, ce n'est pas moi qui l'ai dit.

Le Président: Oui. S'il vous plaît! Question de règlement?

M. Dupuis: L'article 35 du règlement ne permet pas qu'on puisse insulter qui que ce soit.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît!

Des voix: ...

Le Président: Attendez. Sur votre question... S'il vous plaît! Une question de règlement à la fois. Votre question de règlement.

M. Dupuis: Laisser croire qu'un serviteur public de cette qualité-là pourrait avoir d'autres intérêts que les intérêts des Québécois, c'est injuste à son égard, c'est injuste à l'égard de l'Assemblée.

Le Président: Question de règlement... S'il vous plaît! Question de règlement.

Mme Lemieux: Si le mot... M. le Président, si le mot «libéral» est une insulte, nous allons le retirer.

n(14 h 50)n

Le Président: Alors, si vous voulez conclure votre question, Mme la députée.

Mme Dionne-Marsolais: Je continue. Donc, Thierry Vandal, président d'Hydro-Québec Production, vient de publier une confirmation de l'important potentiel de développement hydroélectrique du Québec, moyennant un certain nombre de conditions, dont l'obtention des permis nécessaires. Un détail, M. le Président.

Dans son plus récent plan stratégique, publié en octobre 2003 l'an passé, Hydro-Québec prévoyait un taux de croissance de la demande de 1 % en moyenne par année. Ce mois-ci, novembre 2004, Hydro-Québec a déposé à la Régie de l'énergie ses nouvelles prévisions de la demande, qui prévoient un taux de croissance de 1,2 % par année en moyenne, c'est-à-dire 2/10 de 1 % de plus.

Alors, que le ministre nous explique: Si la demande intérieure augmente plus que prévu, d'où viendra l'électricité qu'on compte exporter en 2009?

Le Président: M. le ministre des Ressources naturelles... S'il vous plaît!

M. Sam Hamad

M. Hamad: M. le Président, je comprends que l'opposition, ils sont confus dans le domaine énergétique, je comprends que ce n'est pas leur domaine. Et leur marque de commerce, c'est la souveraineté; notre marque de commerce, c'est le développement hydroélectrique au Québec.

M. le Président...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Je demande votre collaboration. Je vous demande votre collaboration. M. le ministre des Ressources naturelles a la parole.

M. Hamad: Il me semble que le premier ministre, il l'a bien expliqué, mais on va le répéter encore, M. le Président. J'inviterais la députée de Rosemont de faire un peu plus de lecture. Je comprends, son service de recherche ne fournit pas toute l'information.

Maintenant, M. le Président, ce qu'on dit, là, ce qu'on a dit, ce qu'Hydro-Québec dit aujourd'hui: D'ici 2012, nous avons additionnellement... on va produire de plus 10 TWh. Et tantôt le chef de l'opposition, il a oublié un projet majeur que notre gouvernement a annoncé récemment, La Romaine, 1 500 MW, M. le Président, 6,5 milliards de dollars, et il va être mis en service en 2014. Et, lorsqu'on fait le total de tous les térawattheures qu'on va produire d'ici 2014, on va avoir plus que 30 TWh. 30 TWh, pour la compréhension de l'opposition, M. le Président, c'est plusieurs milliers de maisons au Québec.

Document déposé

Le Président: Avant de céder la parole à Mme la députée de Rosemont en question additionnelle, je voudrais avoir le consentement pour le dépôt du document dont a fait référence le chef de l'opposition il y a quelques instants, lors de sa dernière question. Est-ce qu'il y a consentement pour le dépôt du document? Consentement. Alors, ce document est déposé. En question complémentaire, Mme la députée de Rosemont.

Date de disponibilité d'énergie
hydroélectrique excédentaire (suite)

Mme Rita Dionne-Marsolais

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Est-ce que le courant passe entre le premier ministre et le ministre des Ressources naturelles? Le premier ministre parle de 2009, lui, il parle de 2012 et Hydro-Québec aussi parle de 2012. À moins d'annoncer une nouvelle centrale... à moins d'annoncer une nouvelle centrale thermique en service en 2007, et je dis «en service»... en 2009, pardon, qu'est-ce que le ministre cache pour faire dire à son premier ministre qu'on pourra exporter en 2009, alors qu'Hydro-Québec sent elle-même le besoin de préciser dans son communiqué qu'elle n'a pas les permis nécessaires et qu'en plus il n'y en aura pas, de surplus, avant 2012?

Le Président: Alors, M. le ministre des Ressources naturelles.

M. Sam Hamad

M. Hamad: M. le Président, les étapes sont les suivantes. Première étape, c'est faire la job que ce parti-là n'a pas faite, la sécurité énergétique au Québec. C'est ça qu'on va faire en première étape. Ça, c'est clair. Deuxième étape, on veut développer l'hydroélectricité au Québec pour pouvoir exporter. Est-ce que, maintenant, la question: Êtes-vous pour ou contre... pour l'exportation et créer la richesse au Québec?

Le Président: En question principale, Mme la députée de Taillon.

Intentions en matière de frais de scolarité

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. En campagne électorale, le Parti libéral s'est engagé à maintenir le gel des frais de scolarité. Une fois élu, il a tenu une commission parlementaire sur le financement des universités. Incapable de convaincre son gouvernement de réinvestir dans les universités, le ministre de l'Éducation s'est tourné vers les étudiants. Une résolution a donc été adoptée par le Parti libéral à l'effet de dégeler les frais de scolarité. M. le Président, la situation que je viens de décrire, elle n'a pas eu lieu ces derniers temps et en fin de semaine. En fait, elle s'est produite lors du dernier séjour au pouvoir du Parti libéral, entre 1989 et 1994. Or, le résultat, nous le connaissons: les frais de scolarité ont été triplés sous les libéraux, M. le Président.

Est-ce que le ministre de l'Éducation est en train de nous refaire le coup de Claude Ryan il y a 15 ans?

Le Président: M. le ministre de l'Éducation.

M. Pierre Reid

M. Reid: M. le Président, comme en général pour les interventions de la députée de Taillon, il faut toujours redresser un petit peu les énoncés qui sont faits. Quand on dit qu'on n'a rien réinvesti dans les universités, nous avons réinvesti au-delà de 225 millions depuis que nous sommes arrivés, dans les universités. Les budgets des universités...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Je vous demande votre collaboration. La question a été posée dans l'ordre, et je voudrais que la réponse soit dans l'ordre également. M. le ministre de l'Éducation.

M. Reid: Faut-il rappeler, M. le Président, que le gouvernement précédent a appauvri les universités considérablement? Nous avons ajouté 700 millions de dollars dans les budgets de l'éducation, dont plus de 200 millions dans les universités, pour nous assurer au minimum qu'on maintienne les niveaux de qualité, M. le Président, et c'est ce que nous avons fait.

Le Président: En question complémentaire, Mme la députée de Taillon.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Vous comprendrez, M. le Président, que la réponse n'était pas évidente. Mais est-ce qu'on doit comprendre que le ministre a refusé ? refusé ? de faire le débat en commission parlementaire parce qu'il préférait plutôt régler la question de façon expéditive, en quelques minutes, au dernier congrès libéral, sachant que les jeunes de son parti allaient s'aplatir devant lui?

Le Président: M. le ministre de l'Éducation.

M. Pierre Reid

M. Reid: M. le Président, l'énoncé de la députée de Taillon ne m'a pas permis, dans un premier temps, de répondre à la totalité de sa question, pour respecter les temps.

La réponse est très claire, M. le Président: Nous avons pris un engagement solennel de geler les droits de scolarité pour toute la durée de notre mandat. Nous avons été questionnés là-dessus par la députée de Taillon encore et encore et par beaucoup de monde. Nous avons tenu notre engagement jusqu'à maintenant et nous allons tenir cet engagement jusqu'à la fin de notre mandat. Est-ce que c'est assez clair, M. le Président?

Le Président: En question principale, M. le député de Joliette.

État des dossiers en négociation
avec le gouvernement fédéral

M. Jonathan Valois

M. Valois: Oui. Merci, M. le Président. Le premier ministre du Québec et celui du Canada iront au Sommet de la Francophonie main dans la main. En effet, selon notre premier ministre, les relations avec le fédéral se passent bien.

J'ai quand même pris, M. le Président, la peine de faire une petite liste de quelques problèmes qui existent avec le gouvernement fédéral. Il y a le déséquilibre fiscal, M. le Président; la péréquation; le dossier de la vache de réforme; l'étiquetage des OGM; les congés parentaux; les services de garde; les institutions... les intrusions du fédéral dans le domaine municipal; l'apport du Québec quant aux objectifs de Kyoto ? comprenant que ça se passe bien, là; je continue ? les Jeux policiers et pompiers; les 75 millions perdus en bourses du millénaire; la crise de Kanesatake; l'aide à Bombardier; le logement social; le transfert des ports; Inforoute Santé Canada; le dossier de l'habitation; les 200 millions du Fonds de développement du marché du travail; et, comme si tout ça, ce n'était pas suffisant, alors que tout se passe bien et qu'on est dans une nouvelle ère de coopération...

Le Président: À votre question.

M. Valois: ...il y a aussi le dossier des discussions constitutionnelles quant à la création de trois nouvelles provinces.

Ma question est bien simple, M. le Président: Combien de temps le premier ministre a-t-il prévu pour discuter d'au moins une de ces problématiques avec son homologue fédéral?

Le Président: M. le ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes.

Des voix: ...

M. Benoît Pelletier

M. Pelletier: Alors, M. le Président, la nomenclature du député de Joliette est évidemment fort éloquente et témoigne justement de l'importance qu'il y a à défendre jour après jour les intérêts du Québec dans de nombreux dossiers, ce que nous... ce que nous faisons.

Il y a des dossier par ailleurs qui ont été mentionnés par le député de Joliette qui font l'objet de négociations qui vont très bien en ce moment; je pense à celui des congés parentaux. Nous serons le premier gouvernement à obtenir une entente Ottawa-Québec dans le domaine des congés parentaux. Ça, c'est tout à l'honneur du gouvernement du Québec.

Et il y a d'autres dossiers par ailleurs à l'égard desquels nous continuons à négocier. La ministre de l'Agriculture a mentionné tout à l'heure le dossier de la vache de réforme, au sujet duquel il y a une négociation avec Ottawa. Le dossier des services de garde est aussi un dossier où nous avons fait connaître à Ottawa nos demandes, qui sont des demandes tout à fait formelles. Alors, je peux rassurer le député de Joliette que nous sommes tout à fait vigilants.

n(15 heures)n

Et, par rapport à des dossiers majeurs comme celui du déséquilibre fiscal, j'insiste à nouveau sur l'importance qu'il y ait un consensus à l'Assemblée nationale pour que nous fassions front commun afin que Québec puisse obtenir ce à quoi il a droit.

Le Président: En question principale, M. le député de Mercier.

Position sur l'avant-projet de convention
sur la diversité culturelle

M. Daniel Turp

M. Turp: Merci, M. le Président. Nous ne connaissons toujours pas la position du gouvernement du Québec à l'égard de l'avant-projet de convention sur la diversité culturelle, qui a été rendu public par le directeur général de l'UNESCO le 15 juillet dernier. Le gouvernement du Canada, lui, a transmis ses commentaires écrits au Secrétariat de l'UNESCO vendredi dernier.

Ma question au premier ministre alors qu'il a l'intention, comme le disait mon collègue, d'aller déambuler main dans la main avec le premier ministre du Canada au Burkina Faso: Peut-il nous faire part des observations que son gouvernement a transmises à l'UNESCO au sujet de cet avant-projet de convention sur la diversité culturelle?

Le Président: Mme la ministre de la Culture et des Communications.

Mme Line Beauchamp

Mme Beauchamp: Bien, il me fait plaisir d'informer le député de Mercier que les commentaires du Québec se retrouvent sur le site Internet du ministère de la Culture et des Communications depuis aujourd'hui.

Rappelons également le fait qu'il y a des éléments importants que nous défendons avec le gouvernement canadien ? et je suis sûre et certaine que vous les défendez avec nous ? c'est que cet avant-projet de convention affirme haut et clair le droit des États, comme le Québec, de se doter de politiques culturelles actives; la double nature des produits culturels, qui ont à la fois une valeur bien sûr commerciale et également identitaire; également le fait qu'on souhaite voir retirées de l'avant-projet de convention certaines formulations qui laisseraient sous-entendre que ce projet de convention ne porterait que sur des formes d'expression culturelle vulnérables, ce qui n'est pas souhaitable dans l'avant-projet de convention à l'UNESCO; également lui rappeler que le Québec souhaite des mécanismes de règlement des différends efficaces, qui vont permettre le développement d'une jurisprudence. Donc, nous travaillons avec le gouvernement fédéral à défendre ces positions haut et clair, à l'échelle du monde.

Nous sommes actifs, très actifs, la preuve: dans le cadre de la mission en compagnie de la France, avec M. Raffarin, le premier ministre du Québec a partagé une même scène ? il y avait également des représentants mexicains ? pour réaffirmer haut et fort la position du gouvernement du Québec quant à l'avant-projet de convention sur la diversité culturelle.

Le Président: En question complémentaire, M. le député de Mercier.

M. Daniel Turp

M. Turp: M. le Président, est-ce que je pourrais demander à la ministre de la Culture si les commentaires du Québec sont similaires à ceux du Canada, ceux que nous avons retrouvés sur le site du ministère du Patrimoine canadien, et est-ce qu'il y a une différence entre la position canadienne et québécoise sur la question, ou est-ce qu'en définitive le Québec laisse le Canada parler en son nom en présentant en son nom des commentaires écrits à l'UNESCO?

Le Président: Mme la ministre de la Culture et des Communications.

Mme Line Beauchamp

Mme Beauchamp: Il y a plusieurs éléments de convergence, vous pourrez les voir en prenant connaissance des commentaires du Québec, entre la position bien sûr canadienne et la position du Québec, comme ça a été le cas historiquement. Je vous les ai mentionnés: l'importance d'affirmer haut et clair le droit des États à se doter de politiques culturelles, la double nature des produits culturels et également, bien sûr, le fait d'éliminer des principes, je dirais, un peu mathématiques, là, de culture vulnérable, auxquels s'attarderait la convention sur l'avant-projet... en fait l'avant-projet de convention à l'UNESCO.

Maintenant, vous dire ceci, vous informer de la situation suivante. Mardi dernier, la Commission européenne a voté à l'unanimité une position...

Le Président: En conclusion, Mme la ministre.

Mme Beauchamp: ...sur le dossier de l'avant-projet de convention sur les expressions culturelles, ce qui fait, par exemple, je vous donne cet exemple...

Le Président: En conclusion.

Mme Beauchamp: ...que la France, comme État souverain, ne déposera pas ses commentaires à l'UNESCO, c'est l'Europe qui le fait. Donc, bien sûr, à l'échelle de la fédération canadienne...

Le Président: Merci, Mme la ministre. En question complémentaire, Mme la... En question principale, Mme la députée de Matapédia.

Méthode d'établissement de la valeur admissible
à titre de paiement de droits des travaux sylvicoles

Mme Danielle Doyer

Mme Doyer: Merci, M. le Président. M. le Président, à chaque année, le ministre délégué à la Forêt, à la Faune et aux Parcs doit définir, dans un règlement, les traitements sylvicoles auxquels il attribue une valeur admissible à titre de paiement de droits. Or, il semble que le ministre a l'intention de changer cette façon de faire, si ce n'est pas déjà fait. Avant même que la commission Coulombe n'ait fini ses travaux, le ministre veut se défaire de ses responsabilités et introduire la loi du marché dans les travaux sylvicoles, ce qui va détériorer les conditions de travail déjà difficiles de 8 000 travailleurs sylvicoles au Québec.

Ma question: Est-ce que le ministre délégué à la Forêt, à la Faune et aux Parcs peut nous confirmer s'il a bien l'intention de modifier la méthode d'établissement de la valeur des travaux sylvicoles?

Le Président: Alors, M. le ministre délégué aux Forêts, à la Faune et aux Parcs.

M. Pierre Corbeil

M. Corbeil: M. le Président, je tiens à rassurer la députée de Matapédia que, nous aussi, on est préoccupés par le sort des travailleurs, par le fait que les travaux sylvicoles se réalisent et par le fait qu'il y ait la meilleure relation possible qui s'établisse entre les travailleurs, les contractants et ceux qui donnent ces ordres-là. Présentement, il y a un projet de règlement qui va être déposé en prépublication pour consultation, pour 45 jours, et on va attendre les commentaires des intervenants sur ce dossier-là, M. le Président.

Le Président: Alors, ceci met fin à la période de questions et réponses orales.

Votes reportés

Motion proposant que l'Assemblée souligne
la Journée de sensibilisation à la schizophrénie

Tel qu'annoncé précédemment, nous allons maintenant procéder au vote reporté sur la motion sans préavis présentée conjointement par le ministre de la Santé et des Services sociaux, la députée de Rimouski, le député de Rivière-du-Loup, le député de Beauce-Nord, le député de Vanier, le député des Chutes-de-la-Chaudière et la députée de Lotbinière. Cette motion se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale souligne la Journée de sensibilisation à la schizophrénie.»

Que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Charest (Sherbrooke), M. Dupuis (Saint-Laurent), M. Séguin (Outremont), M. Chagnon (Westmount?Saint-Louis), Mme Courchesne (Fabre), M. Couillard (Mont-Royal), M. Reid (Orford), M. Audet (Laporte), Mme Gauthier (Jonquière), M. Béchard (Kamouraska-Témiscouata), M. Hamad (Louis-Hébert), M. Corbeil (Abitibi-Est), Mme Théberge (Lévis), Mme Normandeau (Bonaventure), M. Pelletier (Chapleau), M. Bergman (D'Arcy-McGee), M. Ouimet (Marquette), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Kelley (Jacques-Cartier), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), Mme Beauchamp (Bourassa-Sauvé), M. Mulcair (Chomedey), M. Vallières (Richmond), Mme Jérôme-Forget (Marguerite-Bourgeoys), M. Marcoux (Vaudreuil), Mme Boulet (Laviolette), Mme Loiselle (Saint-Henri?Sainte-Anne), M. Lafrenière (Gatineau), M. Brodeur (Shefford), M. Gautrin (Verdun), M. Bordeleau (Acadie), M. MacMillan (Papineau), Mme Lamquin-Éthier (Crémazie), M. Chenail (Huntingdon), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Whissell (Argenteuil), M. Cholette (Hull), Mme Thériault (Anjou), M. Bachand (Arthabaska), M. Bernard (Rouyn-Noranda? Témiscamingue), M. Bernier (Montmorency), M. Blackburn (Roberval), Mme Charest (Matane), M. Gabias (Trois-Rivières), Mme Hamel (La Peltrie), Mme Gaudet (Maskinongé), M. Dubuc (La Prairie), M. Descoteaux (Groulx), Mme Charlebois (Soulanges), Mme Legault (Chambly), M. Lessard (Frontenac), M. Mercier (Charlesbourg), M. Moreau (Marguerite-D'Youville), M. Morin (Montmagny-L'Islet), M. Paquet (Laval-des-Rapides), M. Paquin (Saint-Jean), M. Tomassi (LaFontaine), M. Soucy (Portneuf), M. Rioux (Iberville), Mme Perreault (Chauveau), Mme Vien (Bellechasse), Mme James (Nelligan).

M. Landry (Verchères), Mme Lemieux (Bourget), Mme Marois (Taillon), M. Pinard (Saint-Maurice), M. Legault (Rousseau), M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine), M. Bertrand (Charlevoix), M. Létourneau (Ungava), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Jutras (Drummond), Mme Vermette (Marie-Victorin), Mme Caron (Terrebonne), M. Pagé (Labelle), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Cousineau (Bertrand), M. Valois (Joliette), M. Bouchard (Vachon), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), M. Bédard (Chicoutimi), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Simard (Richelieu), M. Legendre (Blainville), M. Deslières (Beauharnois), Mme Charest (Rimouski), Mme Richard (Duplessis), M. Dufour (René-Lévesque), Mme Beaudoin (Mirabel), M. Boulerice (Sainte-Marie?Saint-Jacques), M. Bourdeau (Berthier), M. Turp (Mercier), M. Côté (Dubuc), Mme Maltais (Taschereau), Mme Doyer (Matapédia), M. Lelièvre (Gaspé), Mme Papineau (Prévost), M. Thériault (Masson), M. Tremblay (Lac-Saint-Jean), Mme Champagne (Champlain), M. Girard (Gouin), Mme Lefebvre (Laurier-Dorion).

M. Picard (Chutes-de-la-Chaudière), M. Grondin (Beauce-Nord), Mme Roy (Lotbinière), M. Légaré (Vanier).

Le Président: Oui, M. le leader.

M. Dupuis: M. le Président, je voudrais solliciter le consentement pour permettre au député de Jean-Lesage d'enregistrer son vote.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement? Consentement? Consentement. M. le ministre.

La Secrétaire adjointe: M. Després (Jean-Lesage).

Le Président: Est-ce qu'il y a des députés qui sont contre cette motion? Aucun. Est-ce qu'il y a des abstentions? Aucune. M. le secrétaire général.

n(15 h 10)n

Le Secrétaire: Pour: 108

Contre: 0

Abstentions: 0

Motions sans préavis

Le Président: Alors, nous en sommes maintenant aux motions sans préavis. M. le premier ministre.

Rendre hommage aux entreprises lauréates
des Grands Prix québécois de la qualité

M. Charest: M. le Président, je sollicite le consentement de l'Assemblée pour présenter la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale rende hommage aux entreprises lauréates des Grands Prix québécois de la qualité, qui ont été remis le 30 septembre dernier.»

Et, avec votre permission, puisqu'ils sont dans les tribunes aujourd'hui, j'aimerais à tout le moins mentionner la présence de gens qui ont été reconnus. Parmi les lauréats de Grands Prix, il y a: M. Mike Parent, directeur de production, Paccar du Canada; Josée De La Durantaye, présidente du bureau de l'Ordre des CMA du Québec; François Renauld, président-directeur général de l'Ordre des CMA du Québec. Dans la catégorie Grande Mention: Michel Tremblay, premier vice-président, secteurs Particuliers et Gestion de patrimoine, Banque Nationale du Canada; Michel Brouillette, vice-président, Services aux entreprises, Québec et Est du Québec, Banque Nationale du Canada. Et dans la catégorie Mention: Mohamed Yacoub, président, Relizon Canada; Michel Savard, directeur de l'usine de Drummondville, Relizon Canada.

M. le Président, chers collègues, les lauréats des Grands Prix québécois...

Le Président: ...

M. Charest: M. le Président, j'aurais aimé faire quelques commentaires, mais je comprends qu'il y a absence de consentement.

Le Vice-Président (M. Gendron): Non, non, un instant, M. le premier ministre. Ça, c'est parce que...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Gendron): Non, mais, comme président de l'Assemblée, moi, il faut que je m'assure s'il y a consentement avant que vous fassiez les commentaires. Alors, par déférence, compte tenu de la présence des gens, on a accepté qu'ils soient nommés, mais la règle, c'est l'inverse, et normalement on sollicite le consentement avant de faire quelque commentaire que ce soit.

Alors, comme président, je sollicite: Est-ce qu'il y a consentement pour que nous puissions débattre de cette motion présentée par le premier ministre?

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Gendron): Pardon?

Une voix: ...

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Gendron): O.K. Alors, cette motion est adoptée, mais il n'y aura pas de débat.

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Gendron): S'il vous plaît! S'il vous plaît! On est toujours aux motions sans préavis. Je cède maintenant la parole à M. le député de Trois-Rivières. M. le député de Trois-Rivières.

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Gendron): S'il vous plaît! Non, on n'est pas passés aux affaires du jour, on est toujours à la même place, à la rubrique des motions sans préavis. Et, s'il y a des gens qui doivent quitter cette Assemblée, il faut se rappeler qu'il faut le faire dans le silence.

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, s'il vous plaît, la Chambre n'est pas suspendue, je voudrais poursuivre nos travaux, et normalement on peut le faire si les gens quittent cette Assemblée dans le silence.

Et la parole est maintenant à M. le député de Trois-Rivières pour la présentation de sa motion. M. le député de Trois-Rivières.

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Gendron): S'il vous plaît! M. le député de Trois-Rivières.

Souligner la victoire des Diablos
de Trois-Rivières, équipe de football
collégial AA, au Bol d'Or

M. Gabias: Alors, je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de déposer une motion sans préavis, sans débat, qui se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale souligne la victoire des Diablos, équipe de football du cégep de Trois-Rivières, au Bol d'Or, emblème de la suprématie du football collégial AA au Québec, et félicite son entraîneur-chef, M. Martin Croteau, le personnel des entraîneurs, [ses] joueurs et la direction du cégep de Trois-Rivières qui ont complété avec brio une trente-sixième saison.»

Cette victoire sur les Géants de Saint-Jean-sur-Richelieu...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Gendron): Bon, un instant, un instant, M. le député de Trois-Rivières. Je regrette, on ne peut pas procéder comme ça. D'abord, assoyez-vous gentiment. Il n'appartient pas au présentateur de la motion de décider si ça va être avec débat ou sans débat. Alors, on demande si l'Assemblée veut débattre de la motion. Et, pour ça, il ne faut pas la faire indirectement, on donne tout de suite le sujet de la motion, rapidement.

Alors, j'ai bien compris votre demande de motion. Et là je suis rendu à: Est-ce que les parlementaires de cette Chambre acceptent que nous débattions de cette motion? Y a-t-il consentement?

Une voix: ...

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Gendron): Oui, mais ça, ça appartient aux membres de la Chambre de le dire, pas au présentateur de la motion. Donc, oui, cette motion est adoptée. Merci, M. le député de Trois-Rivières. Nous avons terminé les motions sans préavis.

Avis touchant les travaux des commissions

Nous en sommes maintenant à la rubrique Avis touchant les travaux des commissions. M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: Oui, M. le Président, permettez-moi d'aviser l'Assemblée que la Commission des affaires sociales poursuivra les auditions dans le cadre de la consultation générale à l'égard du projet de loi n° 57, Loi sur l'aide aux personnes et aux familles, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, ainsi que demain, le mercredi 24 novembre 2004, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle du Conseil législatif;

Que la Commission des finances publiques, d'autre part, poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 60, Loi sur la Société de financement des infrastructures locales du Québec et modifiant le Code de la sécurité routière, demain, le mercredi 24 novembre 2004, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papineau;

Et finalement, M. le Président, conformément à l'article 114 de la Loi sur l'équité salariale, la Commission de l'économie et du travail procède à l'étude du projet de règlement sur l'équité salariale dans les entreprises où il n'existe pas de catégorie d'emploi à prédominance masculine demain, le mercredi 24 novembre 2004, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine.

Et je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Gendron): Merci, M. le leader du gouvernement.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Nous en sommes maintenant à la rubrique Renseignements sur les travaux de cette Assemblée. Alors, je ne vois pas de demande de renseignements.

Moi, comme président, je vous informe que, demain, lors des affaires inscrites par les députés de l'opposition, sera débattue la motion inscrite par Mme la députée de Rosemont. Cette motion se lit comme suit:

«Que le gouvernement du Québec, en tant qu'unique actionnaire, exige d'Hydro-Québec qu'elle retire sa demande devant la Régie de l'énergie visant à obtenir une troisième hausse des tarifs consécutive en un an et demi.»

Affaires du jour

La période des affaires courantes étant maintenant terminée, nous allons maintenant passer aux affaires du jour, et je cède la parole à M. le leader du gouvernement. M. le leader.

M. Dupuis: J'apprécierais, M. le Président, que vous nous référiez à l'article 16 du feuilleton.

Projet de loi n° 78

Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, à l'article 16 du feuilleton d'aujourd'hui... Si on veut me... c'est parce que je l'ai laissé, moi. Je vais vous le remettre, je n'ai pas l'article 16. Merci.

Alors ? s'il vous plaît! ? à l'article 16 du feuilleton d'aujourd'hui, M. le ministre des Finances propose l'adoption du principe du projet de loi n° 78, Loi modifiant la Loi sur la Caisse de dépôt et placement du Québec. Alors, je reconnais pour l'intervention M. le ministre des Finances. À vous.

M. Yves Séguin

M. Séguin: Merci, M. le Président. Je voudrais effectivement demander à l'Assemblée nationale de procéder à l'adoption de principe du projet de loi n° 78, qui introduit une réforme majeure à la loi actuelle de la Caisse de dépôt. J'aimerais, à cette étape-ci de l'étude du projet de loi, en résumer brièvement les principaux éléments qui font l'objet du projet de loi.

On se rappellera, M. le Président, que la loi existe depuis 1965, et c'est probablement la première fois que le Parlement procédera à une réforme en profondeur de cette loi. Je pense que ça s'inscrit dans le besoin ? et on l'a bien remarqué dans l'opinion publique ? ce besoin d'augmenter une transparence dans le fonctionnement de la caisse et de clarifier ses responsabilités.

Probablement que l'article premier du projet de loi, qui modifie la mission, est probablement, non pas dans son libellé, le plus important mais certainement, dans ce que je venais de dire, dans cet effort de clarification, l'élément principal du projet de loi. Ça ne s'inscrit pas dans un grand changement, M. le Président, mais une clarification, et pour faire voir que la mission de la caisse, telle que souhaitée d'ailleurs par son président ? l'actuel président, M. Rousseau ? qui, en fonction depuis deux ans, a toujours souhaité que le mandat, la mission de la caisse soient clairement identifiés comme un mandat de gestionnaire, de fiduciaire de l'ensemble des dépôts qu'il reçoit, parce qu'il faut se rappeler que la Caisse de dépôt du Québec a comme raison d'être de recevoir l'ensemble des dépôts qui sont prélevés par l'ensemble des sociétés ou régies.

Pour ne mentionner que les principaux ou les principales, pensons à la Régie des rentes du Québec, la CSST, les régimes de pension. C'est fondamentalement dans le fond la pension de l'ensemble des Québécois qui est gérée par la Caisse de dépôt, et la présidence de la Caisse de dépôt a toujours... a préféré, depuis deux ans, que nous clarifiions sa mission à l'effet que la priorité de la caisse est, d'abord et avant tout, d'agir comme fiduciaire, comme bon gestionnaire pour faire fructifier l'ensemble des biens qu'elle reçoit sous forme de dépôts, et bien sûr de collaborer, de participer au développement du Québec, ce qu'elle fait toujours, en investissant, en participant à des entreprises au Québec.

n(15 h 20)n

Un élément important, M. le Président, aussi qu'il faut mentionner et qu'on va retrouver dans plusieurs articles de loi suggérés dans le projet de loi, c'est une nouvelle gouvernance que nous souhaitons installer au travers de ce projet de loi, une nouvelle gouvernance qui va apparaître sous forme de plusieurs mesures de changement.

Je pense, c'est des changements importants, pour ne mentionner que le premier. C'est que la direction de la caisse dorénavant sera assurée par deux fonctions, deux personnes, c'est-à-dire, d'un côté, le président du conseil d'administration et de l'autre, le P.D.G., le président-directeur général, qui est là actuellement et qui, à toutes fins pratiques, cumule, depuis sa nomination, depuis deux ans, les deux titres. Et ce que nous faisons par le projet de loi, c'est de clarifier les deux fonctions, les séparer et bien distinguer les responsabilités et les devoirs de chaque fonction, et ça, c'est dans le but de rehausser la gouvernance au niveau de la caisse.

Deuxièmement, le conseil d'administration va jouer un rôle accru, et la qualité, l'intervention des membres au conseil d'administration va être rehaussée, l'imputabilité sera clairement définie, et c'est sur ces éléments que le projet de loi va accorder beaucoup d'importance. Et, tel qu'on le voit aussi, M. le Président, dans d'autres structures, dans d'autres identités... pardon, entités semblables, que ce soit dans les autres provinces, que ce soit aux États-Unis, que ce soit dans les pays d'Europe où des caisses de dépôt ou des entités juridiques semblables à la Caisse de dépôt du Québec ont des structures qui ont été, au travers des... je dirais, la dernière décennie, ont été changées et modernisées, et dans le but toujours d'assurer d'un côté une plus grande imputabilité, une plus grande transparence pour faire en sorte que les décisions... Ce que l'on souhaite dans le fond, M. le Président, c'est que les décisions du conseil d'administration, de la direction soient les plus éclairées possible et les plus réalisées dans l'intérêt des déposants, dans l'intérêt des Québécois.

Un aspect également important du conseil d'administration, c'est qu'il pourra dorénavant, clairement, avoir des attributs pour procéder à des décisions. À titre d'exemple, le conseil d'administration va fixer la rémunération et les autres conditions d'emploi du président et chef de la direction selon les paramètres que le gouvernement déterminera après consultation du conseil.

Il approuvera les politiques de ressources humaines ainsi que les normes et barèmes de rémunération et les autres conditions de travail des dirigeants et des employés de la caisse, sauf ceux du président et chef de la direction qui sont définis par le gouvernement. Il en sera de même pour les nominations et la rémunération des dirigeants sous l'autorité immédiate du président et chef de la direction de la caisse et du principal dirigeant de chacune des filiales en propriété exclusive.

Le conseil d'administration adoptera des règles d'éthique et de déontologie applicables aux membres du conseil d'administration, aux dirigeants et aux employés de la caisse et de ses filiales détenues en propriété exclusive.

Également, le conseil d'administration aura la tâche d'évaluer l'intégrité des contrôles internes, des contrôles des systèmes d'information et surtout la divulgation de l'information.

Il s'assurera également que le comité de vérification exerce adéquatement ses fonctions. Afin de favoriser une prise de décision plus objective, au moins les deux tiers des membres du conseil d'administration, incluant son président, devront avoir le statut de membre indépendant, et ça, c'est nouveau dans la loi. On définira plus clairement dans la loi ce qu'on entend par notion d'indépendant, mais c'est très important, ce changement à la loi qui est toujours dans le but de s'assurer que les décisions du conseil d'administration ne soient prises que dans l'intérêt de la mission de la société et selon aucune autre influence ou intérêt.

Toute la question du code d'éthique est également importante, puisque dorénavant la caisse devra mettre sur pied trois comités obligatoires, et c'est prévu dans la loi, ces trois comités: le comité sur les ressources, le comité de vérification et le comité d'éthique et de déontologie. Ce sont là trois comités dont l'existence est assurée par la loi et dont le fonctionnement est obligatoire.

En terminant, M. le Président, qu'il me soit permis d'attirer l'attention également sur cette notion de transparence. Plusieurs dispositifs que nous suggérons auront pour but d'améliorer la transparence, améliorer le contenu des rapports annuels que devront faire non plus que la caisse, mais également les trois comités que j'ai mentionnés et s'assurer que l'information adéquate soit accessible aux différents comités comme au Vérificateur général.

Un dernier mot ici est très important: nous allons accorder, dans le projet de loi, une ouverture, et des attributs, et des pouvoirs, des fonctions additionnelles au Vérificateur général du Québec, d'une part, parce qu'il le souhaite et, d'autre part, parce que le gouvernement est tout à fait convaincu qu'il y a lieu, par la participation du Vérificateur général, d'améliorer cet effort de transparence et de rigueur.

Et, dans ce sens, M. le Président, tout en permettant à la caisse de se développer avec autonomie, avec respect et confiance dans sa mission, nous voulons nous assurer en même temps ? et je pense que c'est le voeu de tous les élus ici, à l'Assemblée nationale ? que, lorsque nous avons le dépôt du rapport annuel de la caisse, nous puissions se satisfaire qu'effectivement la société a mis en marche tous les procédés et qu'elle puisse répondre de la plus haute satisfaction sur toutes les questions rigoureuses, tant de la transparence de l'information que du suivi des processus de décision à l'intérieur de la caisse, et que la caisse puisse assurer que les processus normaux et qui répondent aux critères les plus élevés ont été suivis dans la décision, si on veut, M. le Président... qui ont amené la caisse à investir ou à faire des placements. Et de sorte que je suis convaincu que l'ensemble des dispositifs ici suggérés est une très grande amélioration dans la gouvernance de la Caisse de dépôt, et ça rejoint, je le dis en terminant, les voeux exprimés par la direction de la caisse, le gouvernement et, je pense, aussi l'intérêt public qui, depuis des années...

Et j'ai pu voir, M. le Président, qu'à l'annonce du projet de loi, la semaine passée, la plupart des observateurs et des médias ont salué cette page de réforme, et j'en suis très heureux. Et je peux vous assurer une pleine collaboration au niveau des travaux qui vont commencer bientôt afin de perfectionner, s'il y a lieu, ce projet de loi, mais à tout le moins pour que ce projet de loi soit adopté selon la majorité de l'Assemblée nationale dans les délais les plus courts possible afin qu'on puisse mettre en oeuvre ce projet de loi. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, M. le ministre des Finances.

Avant de poursuivre le débat sur l'adoption du principe du projet de loi, tel que le prévoit le règlement, j'avise les membres de cette Assemblée que nous aurons, aujourd'hui, trois débats de fin de séance. Tel que le prévoit le règlement, là, rapidement: un débat concernant une question par rapport à la question des travaux sylvicoles, la question du député au ministre des Ressources naturelles; un deuxième débat concernant la ministre de la Culture et des Communications sur la diversité culturelle; et enfin un autre débat concernant l'Office des professions qui sera adressé au ministre de la Justice mais responsable de l'Ordre des professions. Alors, tel que le prévoit le règlement, dès que le président a connaissance qu'il y a des débats de fin de séance, c'est sa responsabilité d'en communiquer aux membres de cette Assemblée, ce que je viens de faire. Alors, il y aura trois débats de fin de séance à la fin de la séance d'aujourd'hui.

Nous allons poursuivre maintenant le débat sur l'adoption du principe, et je cède la parole au porte-parole de l'opposition officielle en matière de finances, M. le député de Rousseau. Alors, M. le député.

M. François Legault

M. Legault: Oui. Merci, M. le Président. Ça me fait plaisir, M. le Président, d'intervenir sur l'adoption de principe du projet de loi n° 78. M. le Président, comme vient de le dire le ministre des Finances, ce projet de loi touche deux grands aspects. D'abord, dans un premier temps, on revoit la mission de la Caisse de dépôt et, deuxièmement, on revoit les règles de gouvernance de la Caisse de dépôt et placement du Québec.

n(15 h 30)n

Il faut rappeler, M. le Président, que la Caisse de dépôt et placement du Québec a été créée le 15 juillet 1965 par le gouvernement de M. Jean Lesage. Donc, ça veut dire que, l'année prochaine, on aura maintenant à fêter le 40e anniversaire de cette institution importante. Je dirais, M. le Président, que c'est pour moi l'outil le plus important pour le développement économique du Québec. La Caisse de dépôt a atteint son premier milliard de dollars d'actif en 1970. Aujourd'hui, on est rendu à 140 milliards de dollars d'actif. Donc, c'est évidemment, là, si on le compare à n'importe quel autre organisme, le seul organisme, je dirais, au Québec, qui est capable d'investir dans certaines entreprises d'une taille importante.

Il faut rappeler, M. le Président, dans la petite histoire du Québec, qu'il n'y avait pas une longue tradition, dans les familles québécoises, d'investissement dans les entreprises. Et, grâce à la Caisse de dépôt, grâce au Régime d'épargne-actions du Québec, grâce à tout ce qui a été fait par les gouvernements depuis la Révolution tranquille, on a fait des grands pas. Et je pense qu'il faut dire les choses aussi comme elles sont: C'est grâce à la Caisse de dépôt qu'on a pu créer plusieurs des grandes entreprises québécoises qui font notre fierté aujourd'hui. Je peux mentionner, par exemple, CGI. Je pourrais mentionner évidemment Bombardier, Domtar, Shermag, Rona, Cascades. Et on pourrait continuer longtemps, M. le Président. Donc, c'est grâce à la Caisse de dépôt qu'on a pu développer ces entreprises, en faire des entreprises qui ont des centaines de millions, sinon des milliards de dollars de valeurs, là, comme capital-actions.

Évidemment, là, que les familles au Québec ont évolué. Il y a quelques familles maintenant, aujourd'hui, M. le Président, qui peuvent investir des centaines de millions de dollars dans des entreprises, mais je dirais que c'est encore très limité, encore très limité, là; je pense qu'il n'y a pas plus d'une dizaine de familles au Québec qui sont capables d'investir des centaines de millions de dollars dans des entreprises. Donc, il y a encore beaucoup de réserve à avoir, M. le Président, avant de penser que le secteur privé finalement, au Québec, puisse soutenir le contrôle des entreprises québécoises.

Donc, M. le Président, c'est avec ce contexte en tête qu'il faut regarder le projet de loi qui est déposé par le ministre des Finances. On a entendu toutes sortes de choses, au cours de la dernière année, au sujet justement de la révision de la mission de la Caisse de dépôt. Rappelons, M. le Président, que cette mission n'a jamais été fixée dans un projet de loi, mais c'était entendu que le discours inaugural qui avait été fait par le premier ministre de l'époque, Jean Lesage, avait fixé les balises pour cette mission de la Caisse de dépôt, cette double mission de la Caisse de dépôt. Donc, la Caisse de dépôt, depuis bientôt 40 ans, a toujours été donc une double mission: un, réaliser des rendements pour les déposants et, deux, contribuer au dynamisme de l'économie du Québec.

Et c'est important de préserver, M. le Président, ces deux missions parce que malheureusement, aujourd'hui, on se retrouve... et puis je l'ai vécu lors de mon passage dans l'entreprise privée, on vit une situation où le capital-actions des entreprises est possédé en grande partie par des grands fonds de pension, par des grands fonds qui ont des objectifs de rendement à très court terme. Les épargnants investissent leurs fonds et choisissent leurs fonds en fonction des rendements des derniers trimestres. Donc, dès qu'un fonds de pension n'a pas réussi à battre l'indice, à battre la moyenne des rendements de l'ensemble des fonds, bien, ce fonds se retrouve dans une situation où il a de la difficulté à attirer les épargnants à venir chez lui. Donc, la bataille du rendement à très court terme, du rendement trimestriel est très forte.

Et c'est pour ça que c'est important de protéger les deux missions de la Caisse de dépôt. Il ne faudrait pas que la Caisse de dépôt se retrouve à être un fonds de pension comme les autres, à être un fonds de pension comme les grands fonds de pension, comme Teachers' ou OMERS, ces fonds de pension qui recherchent un rendement à court terme. La Caisse de dépôt a une mission additionnelle, celle de s'assurer du développement économique à long terme du Québec. Et c'est là que les deux missions, il faut bien le dire, peuvent être en contradiction. Il peut arriver, M. le Président...

Je donne un exemple: demain matin, un acheteur américain ou étranger qui arriverait pour faire une offre sur les actions de Bombardier, et ça se peut que, pour le rendement du prochain trimestre, ce soit profitable d'accepter de vendre le contrôle de Bombardier à des intérêts étrangers. Mais est-ce que ce serait une bonne décision pour les Québécois et les Québécoises, pour le développement économique du Québec, de vendre le contrôle de Bombardier, de voir un siège social quitter le Québec, de voir... Parce qu'on sait, là, qu'autour des sièges sociaux, il y a un ensemble d'emplois qui se développent. Quand on a un siège social à Montréal, bien il fait affaire avec les banques, entre autres, qui sont à Montréal, il fait affaire avec les avocats qui sont à Montréal, il fait affaire avec les courtiers en valeurs mobilières qui sont à Montréal, il fait affaire avec des sous-traitants qui sont à Montréal, des fournisseurs qui sont à Montréal. Pas exclusivement avec ce réseau qui est à Montréal, mais quand même d'une façon importante. En tout cas, plus importante que si le siège social quittait le Québec.

Donc, M. le Président, je suis très inquiet, très inquiet quand je vois que le ministre des Finances a accepté de subordonner la mission de développement économique à la mission de rendement, donc comme si le rendement à court terme était plus important que le développement économique du Québec à long terme. Et c'est inquiétant, et je veux vous lire, M. le Président, là, le nouvel énoncé qu'on a dans le projet de loi, on dit: «La caisse a pour mission de recevoir des sommes en dépôt conformément à la loi et de les gérer en recherchant le rendement optimal du capital des déposants dans le respect de leur politique de placement tout en contribuant au développement économique du Québec.» Donc, pourquoi ne pas avoir fait comme Jean Lesage et comme tous les gouvernements du Québec l'ont fait depuis 40 ans, mettre les deux missions sur le même pied d'égalité? Pourquoi avoir subordonné la mission de développement économique, d'en faire une mission moins importante? Je pense que c'est inquiétant. En tout cas, on aura l'occasion sûrement d'en débattre en commission parlementaire.

Mais, M. le Président, je pense qu'il ne faut pas être naïf. Comme je le disais tantôt, il y a encore beaucoup de familles au Québec qui n'ont pas les fonds suffisants pour soutenir une croissance, là, quand on est rendu qu'on parle en termes de centaines de millions de dollars, et c'est en ces termes qu'on parle aujourd'hui dans notre économie.

Et, M. le Président, je pense qu'il faut aussi être prudent et regarder ce qui se fait ailleurs. Peut-être vous raconter un peu l'expérience que j'ai vécue dans une autre vie, lorsque j'étais président d'une compagnie aérienne. Je me souviens d'avoir regardé pour faire des acquisitions dans certains pays, par exemple, en Europe, en Grande-Bretagne entre autres, en Allemagne, et, à chaque fois qu'on a essayé de faire une acquisition, on se butait sur un bloc de contrôle du grossiste en voyages qu'on cherchait à acheter qui était possédé par une institution financière qui était elle-même contrôlée directement ou indirectement par le gouvernement. Donc, je pense que je n'ai pas fait un recensement complet, là, mais je dirais que tous les pays industrialisés d'une taille comparable au Québec ou au Canada ont des mécanismes pour s'assurer pas d'une façon systématique, mais que, dans la mesure du possible, on essaie de maintenir nos sièges sociaux au Québec. Or, pour y arriver, l'outil le plus important qu'on a au Québec, c'est la Caisse de dépôt et placement du Québec. Avec 140 milliards d'actif, M. le Président, c'est la seule institution qui est capable, demain matin, de contrer une tentative qu'on appelle, là, d'OPA hostile sur une entreprise québécoise.

Et il y a, au niveau structurel, un risque réel de voir un certain nombre d'entreprises québécoises quitter le territoire au cours des prochaines années pour des raisons bien simples. Le coût du financement n'est pas le même, par exemple, sur la Bourse de New York que sur la Bourse canadienne à Toronto. Les multiples de profit sont plus élevés sur les grandes Bourses comme New York que sur les Bourses comme Toronto. Donc, il y a un avantage, là, immédiat pour l'entreprise qui se finance sur une autre Bourse de venir acheter, par exemple, une entreprise québécoise à un meilleur multiple, de la financer à un meilleur multiple et de faire un gain immédiat au niveau du profit par action. Donc, il y a un risque réel, et c'est important, M. le Président, de laisser la Caisse de dépôt jouer son rôle important de développement économique, et que cette mission soit sur le même pied d'égalité que les rendements à court terme qu'elle doit effectivement viser. Donc, de ce côté-là, on aura évidemment sûrement beaucoup de discussions avec le ministre des Finances pour clarifier, parce que je pense qu'il faut clarifier absolument la mission telle qu'elle est définie dans le projet de loi n° 78.

n(15 h 40)n

Pour ce qui est du deuxième objectif du projet de loi, de revoir les règles de gouvernance de la Caisse de dépôt, bien je pense qu'on avait déjà prévu, même annoncé, le gouvernement du Parti québécois, notre intention de déposer aussi de nouvelles règles de gouvernance. Je pense que toutes les entreprises évoluent de ce côté-là, s'assurent, entre autres, de diviser la fonction de président du conseil d'administration avec celle de président et chef de la direction. Donc, de ce côté-là, je pense qu'il faut éviter évidemment qu'il y ait de la confusion, mais je pense que c'est évidemment une façon de s'assurer d'une plus grande transparence, une plus grande indépendance.

Là où j'ai des inquiétudes, M. le Président, c'est sur les règles pour la nomination des membres du conseil d'administration de la Caisse de dépôt et de placement du Québec. Dans la situation actuelle, on avait des postes qui étaient réservés à des groupes qui étaient précisés dans la loi. On avait, entre autres, deux postes pour les associations de salariés, qui étaient représentées jusqu'à présent par M. Henri Massé et Mme Claudette Carbonneau. On avait aussi un poste qui était réservé pour un administrateur de coopérative, qui est actuellement occupé par le président du Mouvement Desjardins, Alban D'Amours. Et on avait aussi de réservé un poste pour le président de la Régie des rentes du Québec, qui est occupé par M. Pierre Prémont. Or, M. le Président, dans le projet de loi, de la façon qu'il est déposé, ces postes réservés disparaîtraient, donc laissant place totalement à des nominations libérales partisanes pour nommer tous les membres du conseil d'administration de la Caisse de dépôt et de placement du Québec.

Alors, M. le Président, quand on a vu ce qui s'est passé, par exemple à la Société des alcools du Québec, où on a remplacé sept sur sept, là... Sept administrateurs ont été remplacés par sept personnes qui ont contribué au Parti libéral, à la caisse du Parti libéral du Québec ou occupé des fonctions importantes au Parti libéral du Québec. Quand on a vu plein d'exemples, là, à Hydro-Québec et ailleurs, dans les nominations qui ont été faites depuis un an par le Parti libéral du Québec, je pense qu'on a toutes les raisons du monde d'être inquiets que cette clause soit aussi ouverte à des nominations partisanes.

Maintenant, M. le Président, il y a effectivement des comités qui ont été prévus, entre autres un comité de vérification. Moi-même, comme ancien vérificateur, comptable agréé, je pense que c'est incontournable. Je pense que c'était souhaitable d'avoir ce comité de vérification. Il y a des questions à poser. On a permis, dans le projet de loi, l'expansion des mandats qui peuvent être confiés au Vérificateur général, mais il y a probablement des précisions, là, à apporter de ce côté-là. Je pense que le mandat du Vérificateur général devrait être le plus large possible. Donc, de ce côté-là, il y a des précisions à apporter. Donc, M. le Président, évidemment qu'on a des questions à se poser. Il y a des changements qui sont proposés, avec lesquels on est d'accord, qui étaient nécessaires, mais il y a d'autres changements qui sont proposés où on a beaucoup de questionnement à faire.

Donc, M. le Président, je pense qu'on aura l'occasion d'en discuter en commission parlementaire donc, et c'est pourquoi on adopte, à ce moment-ci, le principe du projet de loi, mais pour en discuter et évidemment, là, espérer avoir des modifications au projet de loi n° 78. Merci.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, M. le député de Rousseau. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants sur le principe? Oui. Excusez. Alors, M. le député des Chutes-de-la-Chaudière. Excusez. Oui, allez, pour votre intervention.

M. Marc Picard

M. Picard: Merci, M. le Président. Comme vous le savez, depuis plusieurs années, notre formation politique demande une réforme de la gouvernance de la Caisse de dépôt et de placement du Québec. À cet égard, le projet de loi n° 78 propose une gouvernance qui nous apparaît plus transparente et plus rigoureuse. Nous appuyons donc le principe du projet de loi n° 78. Toutefois, nous serons très, très attentifs, lors de l'étude article par article, à certains éléments mentionnés dans le projet de loi tel que présenté par le ministre des Finances.

Tout d'abord, le projet de loi mentionne la création d'un mécanisme de contrôle par l'entremise d'un comité de gouvernance et d'éthique, un comité de ressources humaines et un comité de vérification. L'objectif de transparence derrière ces comités est clair. Néanmoins, il est essentiel que le mode de nomination des membres de ces trois comités soit également transparent et rigoureux. Il est évident que ces comités auront un mandat de contrôle interne de premier plan à réaliser. Si nous souhaitons que ces comités soient efficaces et remplissent pleinement leurs rôles, nous devons nous assurer que les membres de ces comités soient les personnes les plus compétentes possible et les plus qualifiées pour occuper ces fonctions.

Un des objectifs du projet de loi doit être d'assurer la dépolitisation de la caisse; le bas de laine des Québécois ne doit aucunement servir à des intérêts partisans. Il est essentiel que la caisse demeure un organisme qui travaille pour tous les Québécois et toutes les Québécoises. La caisse ne doit pas devenir un lieu de nominations partisanes, elle doit rester un organisme qui administre l'avoir de tous les Québécois avec des critères d'évaluation visant le bien commun de tous les citoyens du Québec et ne pas être au service d'un parti ou d'une cause partisane.

À cet égard, nous nous questionnons sur l'article 6 du projet de loi n° 78, qui abroge l'article 8 de la loi actuelle. L'article 8 prévoit que le directeur général ne puisse être destitué que par résolution de l'Assemblée nationale. Il nous semble étrange qu'un projet de loi qui vise la transparence retire le droit de regard de l'Assemblée nationale du Québec sur la destitution de son directeur général. De plus, le projet de loi ne précise aucunement le mode de rémunération des hauts dirigeants de la caisse. Il me semble approprié que le projet de loi n° 78 soit beaucoup plus rigoureux sur la rémunération et les primes octroyées aux dirigeants de la caisse. Le projet de loi prévoit également que le mandat du président du conseil soit de cinq ans. Nous sommes d'accord avec une telle durée de mandat pour son président et nous souhaitons que tous les membres du C.A. soient nommés pour la même durée.

Bref, le projet de loi n° 78 est un projet de loi important, qui encadre davantage le travail de la caisse. La nouvelle gouvernance proposée pour la caisse est un mode axé sur la transparence et la rigueur. Toutefois, comme je l'ai souligné, il y a des choses à clarifier dans le projet de loi, et nous serons attentifs aux améliorations à apporter lors de l'étude article par article. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, M. le député des Chutes-de-la-Chaudière. Maintenant, je reconnais M. le député de Charlevoix, toujours sur l'adoption du principe de ce projet de loi. M. le député.

M. Rosaire Bertrand

M. Bertrand: Merci, M. le Président. Je veux en effet faire une courte intervention, et la raison est assez simple, c'est que j'ai une croyance totale en la Caisse de dépôt. C'est un organisme qui selon moi, pour le Québec, a rendu d'énormes services, et j'ai déploré que, dans les derniers mois, la crédibilité de la Caisse de dépôt soit affectée, qu'on l'ait mise en doute dans certains milieux, et la raison pour laquelle, aujourd'hui, j'interviens justement est dans ce sens-là.

Mon collègue et critique le député de Rousseau a mentionné qu'on votait en faveur du principe de la loi, et il faut expliquer évidemment aux gens, réexpliquer que notre rôle, comme opposition, c'est justement de voir, quand un projet de loi est présenté, est-ce qu'il est dans l'intérêt du public, est-ce qu'il est dans l'intérêt des Québécoises et des Québécois et est-ce qu'on peut le bonifier, est-ce qu'on peut convaincre le ministre de l'améliorer, est-ce qu'on peut convaincre le ministre d'apporter peut-être d'autres modifications.

Même si le projet de loi n'est pas tellement long, M. le Président, il y a quelques articles, mais à la fois le député de Rousseau et le député des Chutes-Chaudière viennent de mentionner des éléments extrêmement importants. Et je vous lis simplement les notes explicatives pour qu'on comprenne bien que, quand on lit les notes explicatives d'un projet de loi, il faut aller beaucoup plus loin que ça pour comprendre l'importance du projet de loi et l'importance du rôle de l'opposition.

n(15 h 50)n

Le projet de loi n° 78, qui dit Loi modifiant la Loi sur la Caisse de dépôt et placement du Québec, les notes explicatives sont celles-ci: «Ce projet de loi modifie la Loi sur la Caisse de dépôt et placement du Québec afin notamment de préciser les objectifs que la Caisse doit poursuivre dans la réalisation de sa mission.»

Mon collègue de Rousseau a soulevé les points, déjà là, extrêmement importants sur la mission réelle que la Caisse de dépôt doit avoir. Alors, on va questionner évidemment, on va échanger avec le ministre beaucoup là-dessus quand on va arriver sur cet élément.

Ce projet de loi établit de nouvelles règles de gouvernance, plus particulièrement en ce qui concerne la composition et le fonctionnement du conseil d'administration ainsi que les critères de sélection de ses membres.

Alors, on dit là-dedans qu'on a l'intention de changer des choses. Alors, là aussi on va questionner sur est-ce que la nouvelle formule va nous garantir une transparence améliorée, va nous garantir, au niveau des citoyens et des citoyennes du Québec, une transparence qui est à toute épreuve, parce que c'est ça qu'on doit viser.

Il prévoit la création par le conseil d'administration d'un comité de vérification, d'un comité de gouvernance et d'éthique et d'un comité des ressources humaines dont les fonctions sont déterminées par la loi.

Ce projet de loi prévoit que les fonctions de président du conseil d'administration et de président et chef de la direction de la caisse constitueront des fonctions distinctes. De plus, il prévoit l'obligation pour la caisse d'adopter une politique d'investissement pour chacun des portefeuilles spécialisés qu'elle détient et introduit de nouvelles règles d'éthique applicables à la caisse, à ses dirigeants et employés ainsi qu'à ses filiales en propriété exclusive.

Voilà là aussi un élément sur lequel on va questionner beaucoup parce que, dernièrement, ce qui s'est produit aux États-Unis, ce qui s'est produit ailleurs dans le monde au niveau des administrations des grandes institutions ont créé chez les citoyennes et les citoyens du Québec des doutes: Est-ce que notre argent est bien administré? Est-ce que notre argent est bien sécuritaire? Est-ce qu'il y a de l'abus de la part des administrateurs de ces institutions? Et je pense qu'on a là une belle occasion actuellement...

Je disais, au début de mon intervention, que j'ai trouvé malheureux qu'on décrie la Caisse de dépôt il n'y a pas si longtemps, et là je parle de nos adversaires politiques, mais je trouve aussi heureux qu'on puisse avoir une occasion à l'heure actuelle de, en se donnant de nouvelles règles, une occasion de, si c'est possible, de remonter la cote de la Caisse de dépôt, parce que selon moi ? et puis le député de Rousseau l'a dit, et je pense que le ministre y croit aussi ? selon moi, c'est un outil indispensable pour les Québécois et les Québécoises, et on ne peut pas se permettre qu'il y ait le moindre doute par les Québécois et les Québécoises sur la façon dont est administrée la Caisse de dépôt.

Alors, comme disait mon collègue de Rousseau, on va voter en faveur du principe, mais on informe déjà M. le ministre qu'on aura de bons échanges sur des éléments plus précis de son projet de loi.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, M. le député de Charlevoix. Je reconnais maintenant M. le député de Gaspé, toujours sur l'adoption du principe de ce projet de loi n° 78. M. le député de Gaspé.

M. Guy Lelièvre

M. Lelièvre: Oui. Merci, M. le Président. Effectivement, le ministre des Finances a déposé un projet de loi qui modifie les règles de gouvernance.

J'aimerais rappeler à cette Assemblée que déjà les travaux avaient été entrepris par le gouvernement précédent. On se souviendra qu'en mars 2003 il y a un rapport qui a été déposé quand même, là, sur la gouvernance de la Caisse de dépôt et de placement.

M. le Président, je voudrais attirer l'attention de mes collègues sur un des éléments de ce rapport, et c'est le sujet des investissements responsables. Je pense que la Caisse de dépôt et de placement du Québec doit être exemplaire dans ce domaine.

Le choix de faire des investissements dans des entreprises à l'échelle de la planète... et on sait qu'aujourd'hui, la planète, elle est relativement petite avec tous les moyens de communication. On le voit au Québec, on le voit au Canada, on le voit aux États-Unis, les entreprises déménagent en Asie, font fabriquer des marchandises à des prix ridiculement, ridiculement bas, les gens sont exploités.

Et j'espère que le ministre des Finances est sensible à ces situations, et je comprends qu'il écoute attentivement, sur ce point, et je me ferai un devoir également, M. le Président, de le lui rappeler en commission parlementaire, lorsque nous procéderons à l'étude article par article, que l'exploitation des enfants au profit d'une institution d'État d'où proviennent des investissements par des fonds de pension, M. le Président, qu'ils soient publics, parapublics ou privés, que le gouvernement a une responsabilité à cet égard et que la Caisse de dépôt et de placement entérine les orientations à ce sujet, et qu'on le voit... qu'on inscrive, dans ce texte de loi que nous allons débattre à la Commission des finances publiques, des dispositions qui empêchent ou qui obligent aussi cette institution qu'est la Caisse de dépôt et de placement d'aller vérifier au préalable, de vérifier dans quel type d'entreprise elle investit.

Et je pense que c'est fondamental, pour une société comme le Québec, de donner un exemple, à l'échelle de d'autres pays, de donner l'exemple que nous prenons nos responsabilités à cet égard, M. le Président. Et d'ailleurs les membres du comité sur le rapport de la gouvernance en parlent, et c'est important d'en parler. Alors, si le ministre des Finances accepte, en commission parlementaire, de prévoir des dispositions, je me ferai un plaisir de voter pour ces dispositions légales qui obligeront la Caisse de dépôt et de placement à agir correctement. Et, en ce qui a trait à ces dispositions, j'espère avoir l'appui de tous mes collègues de cette Assemblée.

Alors, M. le Président, je vais m'arrêter là. Je trouve que les autres points ont été couverts par mon collègue de Rousseau, mon collègue de Charlevoix. Et je tenais absolument à attirer l'attention de cette Assemblée sur ce sujet.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, est-ce qu'il y a d'autres interventions sur le principe? Comme je ne vois personne qui sollicite, je cède la parole maintenant au ministre des Finances pour un droit de réplique, comme c'est prévu au règlement. M. le ministre des Finances.

M. Yves Séguin (réplique)

M. Séguin: Merci, M. le Président. Très brièvement, simplement, d'une part, pour souligner que... et j'en profite, à ce moment public de nos travaux, pour réitérer ma pleine confiance à la direction de la Caisse de dépôt. Effectivement, tous les collègues qui sont intervenus ont souligné que la Caisse de dépôt est une grande institution au Québec, et j'en suis, moi aussi, très profondément convaincu. Et j'espère que les collègues ont remarqué que j'ai déposé ce projet de loi avec un esprit très positif de développement de la Caisse et je n'ai pas fait allusion aucunement au passé. Je pense que ce qui est important, et comme le souhaite la caisse, c'est qu'en 2004-2005 on puisse tourner la page, et puis souhaiter se réorganiser, et partir d'un bon pied avec des principes que je pense que tout le monde reconnaît, que ce soit la transparence, que ce soit la gouvernance.

Et, d'autre part, cette question de la mission... Et je veux assurer tout de suite... Parce que, vis-à-vis des inquiétudes que j'ai entendues, il n'est pas question de limiter la capacité de la caisse d'intervenir dans l'économie. Elle le fait depuis longtemps, elle le fait au moment où on se parle, puis elle va continuer à le faire dans les prochaines semaines, les prochains mois, la prochaine année. Ce qui est important, c'est qu'il y ait une distance prudente entre le gouvernement et la décision même au niveau d'investir. Ça appartient à la caisse de décider, comme gestionnaire et comme fiduciaire, et non pas que la caisse puisse subir l'influence de d'autres considérations que celle qu'elle a entre ses mains, qui est son mandat, sa mission. Et c'est simplement cela qui anime actuellement le dépôt du projet de loi, c'est de simplement non pas limiter la caisse, mais clarifier que c'est elle qui doit décider de l'à-propos de ses investissements. C'est elle qui en répond d'ailleurs dans son rapport annuel. Et tout ce que souhaitent le ministre des Finances, par le dépôt du projet de loi, et le gouvernement, c'est que ce soit dans le plein respect de la liberté de la caisse, dans ses critères d'évaluation. C'est le collègue de l'opposition qui l'a mentionné lui-même, que c'est important que la Caisse puisse élaborer ses décisions selon des critères, des principes et, lorsqu'elle les suit, elle les assume. C'est tout ce qu'on veut s'assurer qu'il soit dit à l'article qui concerne sa mission. Et ça me fera plaisir de reprendre les discussions dans les travaux qui s'en viennent, M. le Président. Merci.

n(16 heures)n

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, M. le ministre des Finances.

Mise aux voix

Le principe du projet de loi n° 78, Loi modifiant la Loi sur la Caisse de dépôt et placement du Québec, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, adopté. Cette motion est adoptée. M. le leader du gouvernement, je vous cède la parole pour la suite de nos travaux.

Renvoi à la Commission des finances publiques

M. Dupuis: Bien, évidemment, sur... Puisque le principe a été adopté ? du projet de loi n° 78 ? je fais donc motion pour que le projet de loi soit déféré à la Commission des finances publiques. Bien sûr, le ministre des Finances en sera partie intégrante.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Gendron): Est-ce que cette motion est adoptée? Adopté. M. le leader, pour la suite des travaux.

M. Dupuis: Je me permettrais d'attirer votre attention sur l'article... que vous nous référiez à l'article 3 du feuilleton.

Projet de loi n° 61

Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Gendron): Merci. M. le leader nous réfère à l'article 3 du feuilleton d'aujourd'hui. L'article 3 du feuilleton d'aujourd'hui, c'est: l'Assemblée reprend le débat ajourné le 18 novembre 2004 sur l'adoption du principe du projet de loi n° 61, Loi sur l'Agence des partenariats public-privé du Québec. Et, à ce moment-ci, je suis disponible pour entendre les interventions et je reconnais M. le député de Rousseau sur l'adoption du principe de ce projet de loi là. M. le député.

M. François Legault

M. Legault: Oui, merci, M. le Président. Ça me fait plaisir d'intervenir, aujourd'hui, sur ce projet de loi concernant les partenariats public-privé. Évidemment, on a beaucoup entendu parler de ce projet de loi. On l'a vu aussi au congrès du Parti libéral du Québec en fin de semaine, il y avait beaucoup de gens dans la rue qui étaient inquiets de ce projet de loi, M. le Président. Je pense que le moins qu'on puisse dire, et puis j'entendais même la présidente du Conseil du trésor le dire elle-même: Il y a des modifications qui devront être faites à ce projet de loi.

D'abord, je pense que c'est important de dire qu'on ne peut pas laisser un projet de loi aussi vague sur tous les partenariats public-privé sans baliser, là, les secteurs. Je comprends qu'il y ait des gens qui aient des inquiétudes. On n'exclut rien dans le projet de loi, donc tout pourrait être l'objet de partenariat public-privé.

Je pense que par contre ce qui est le plus inquiétant de ce projet de loi, M. le Président, c'est que, et on l'a vu depuis l'arrivée au pouvoir du Parti libéral du Québec, on laisse entendre que les partenariats public-privé seraient la solution à tous nos problèmes au Québec. On laisse sous-entendre qu'il y aurait des économies extraordinaires à faire avec ces partenariats public-privé. Je pense qu'il faut être prudent.

D'abord, il faut remettre les choses dans leur contexte. Entre autres, si on parle du domaine de la santé, on sait très bien qu'il y a un problème structurel important qui amène un problème grave des finances publiques du Québec. À chaque année, les besoins en santé augmentent de plus de 5 % par année, alors que les revenus du gouvernement du Québec augmentent d'environ 3 % ou 3,5 %. Donc, il y a un problème structurel réel, et je pense que ce serait déplacé de laisser entendre que, grâce à des partenariats public-privé, on pourrait régler tous ces problèmes. Donc, de ce côté-là, je pense que le projet de loi, là, ne doit pas être présenté comme étant la panacée, comme étant la solution magique à tous nos problèmes.

Ce qui inquiète aussi, M. le Président, dans ce projet de loi ? et puis il y a beaucoup de personnes qui sont venus nous le dire ? c'est tous les problèmes qui sont posés au niveau de l'éthique, de la transparence, de l'imputabilité. On ne se donne carrément pas de règle stricte pour s'assurer qu'il n'y aura pas des entreprises privées qui vont profiter de cette nouvelle approche, là, du gouvernement libéral du Québec.

Mais, M. le Président, je veux aussi vous parler peut-être de certains dogmes, certaines interprétations qu'on fait de ce projet de loi. D'abord, les partenariats public-privé sont souvent présentés, comme je le disais, comme étant une solution, entre autres une solution au manque de liquidités du gouvernement ou une solution au problème d'endettement public. Je pense qu'on va tous reconnaître, M. le Président, qu'à plus de 100 milliards de dollars la dette du Québec est très élevée, que les besoins en termes d'infrastructures, que ce soit au niveau municipal, que ce soit dans le domaine de la santé, que ce soit dans le domaine de l'éducation, se chiffrent à plusieurs milliards de dollars. Donc, on se retrouve dans une situation où les besoins sont très importants.

Et certaines personnes laissent sous-entendre qu'avec les partenariats public-privé on pourrait construire des autoroutes, construire des hôpitaux, construire des écoles, par magie, sans que personne ait à payer pour ces services. Or, M. le Président, je pense qu'on l'a vécu dans l'entreprise privée, ce n'est pas parce qu'on donne en location, là, une bâtisse ou une infrastructure au secteur privé ou à une autre entreprise qu'on règle notre problème.

Je veux vous donner peut-être l'exemple que j'ai moi-même vécu dans le domaine de l'aviation, quand, comme compagnie aérienne, on avait besoin d'un avion additionnel. Bien, on avait le choix de dire: On achète un avion, que ce soit 20, 30, 40 millions, et on s'endette du même montant. Il y a des formules qui ont été mises en place à travers les années pour se dire: Est-ce qu'il n'y aura pas une compagnie qui accepterait d'acheter l'avion et on pourrait louer cet avion sur 25 ans, du locateur et donc se retrouver avec une dette en moins dans son bilan? Donc, ça a fonctionné pendant un certain nombre d'années, mais les règles comptables ont été modifiées et on s'est retrouvés dans une situation où les engagements à long terme ont été inclus, d'abord en notes aux états financiers puis ensuite carrément dans la dette, donc au bilan des entreprises. Pourquoi? Parce qu'il n'y a pas de différence, M. le Président.

Si, demain matin, le ministère des Finances décide de prendre sa bâtisse et, plutôt que d'en être le propriétaire, de la céder à l'entreprise privée et en échange de signer un bail à long terme pour relouer cette bâtisse, bien, il n'y a pas de gain qui a été fait, là, et, je dirais même, il y a une perte parce que l'entreprise privée va accepter de faire tout ça en échange d'un profit. Donc, l'entreprise va aller se financer pour la valeur de la bâtisse et va relouer avec profit la bâtisse au ministère des Finances. Donc, il n'y aura aucun gain et même une perte pour le ministère des Finances.

Donc, je pense qu'il faut être prudent quand on laisse sous-entendre que, étant donné qu'on a un problème d'endettement, bien, les partenariats public-privé pourraient permettre de construire sans s'endetter. Un engagement à long terme pour moi, c'est la même chose qu'une dette, et les agences de cotation, que ce soit à New York ou ailleurs, les interprètent, là... Je pense qu'il n'y a pas personne qui est dupe. Quand on regarde les états financiers d'un gouvernement, les agences de cotation vont se dire: Oui, je regarde la dette, mais je regarde aussi les engagements à long terme sur des loyers ou autres, et finalement il y a une actualisation qui est faite, puis ça revient à avoir la dette dans ses états financiers. Donc, il n'y a pas de miracle, il n'y a pas de gain de fait. Donc, de ce côté-là, je pense qu'il faut tuer ce mythe que les partenariats public-privé permettent d'éviter l'endettement.

Il y a un autre mythe concernant les partenariats public-privé. On dit parfois que ça permet de donner des services à moindres coûts. Bon. Je pense que ce qu'il est important de dire: Ce n'est pas une bataille publique ou privée, c'est une bataille à savoir est-ce qu'on peut améliorer l'efficacité dans la façon dont on donne les services? Si, demain matin, on décide qu'il y a un service, que ce soit de buanderie ou autre, qui est donné par l'entreprise privée, si l'entreprise privée a la même efficacité que l'entreprise publique, il n'y aura pas de gain en bout de ligne. Même, au contraire, comme je le disais tantôt, l'entreprise privée, contrairement à l'entreprise publique, doit se prendre un profit, donc, au-delà de ses coûts d'opération, additionne un profit avant de facturer ce montant, et, en bout de ligne, c'est le contribuable qui paie plus.

Donc, la vraie question, et je l'ai souvent dit, M. le Président: Il y a des gains d'efficacité à faire, mais notre priorité, ça devrait être de s'assurer qu'on travaille à améliorer l'efficacité dans la façon dont on donne les services dans les réseaux publics. Pourquoi aller baisser les bras, dire: Il n'y a rien à faire; les seuls qui peuvent être efficaces, c'est le privé; donnons ça au privé, ils vont être plus efficaces, et donc on paiera moins cher en bout de ligne? Attention! Attention, il n'y a jamais aucune étude qui a démontré qu'il y avait effectivement des gains à faire de ce côté-là.

D'abord, ce qu'il est important de dire, entre autres, c'est que l'entreprise privée ne pourra jamais se financer à des taux d'intérêt aussi bons que ceux du gouvernement du Québec. Je pense que tout le monde va comprendre, là, que, quand le gouvernement du Québec va s'endetter, bien, il paie des taux d'intérêt qui sont moins élevés qu'une entreprise privée avec tous les risques que cette entreprise, là, peut comporter pour le prêteur.

n(16 h 10)n

En fait, les seuls gains qui peuvent être faits en passant par l'entreprise privée, ce sont des gains au niveau de la main-d'oeuvre. Donc, il peut arriver que l'entreprise privée réussisse à obtenir des taux de main-d'oeuvre moins élevés que l'entreprise publique. Est-ce que c'est ça, l'objectif réel du gouvernement du Parti libéral du Québec? Je pense que, là, on se doit d'avoir un minimum de transparence. Si l'objectif réel de la présidente du Conseil du trésor, c'est de couper les salaires des travailleurs dans l'entreprise publique pour les passer à l'entreprise privée, bien, je ne pense pas que ça ferait une économie très saine de dire: On va développer ce qu'on appelle en anglais du «cheap labor» dans certains secteurs pour faire certaines économies. Ces personnes-là vont moins consommer, vont moins dépenser, vont moins faire rouler l'économie, et je ne suis pas certain qu'en bout de ligne il y ait beaucoup de gains qui soient faits. Mais, si c'est l'objectif de la présidente du Conseil du trésor de couper les salaires de ceux qui travaillent dans les entreprises publiques, elle se doit de le dire d'une façon très transparente.

Il y a un autre mythe, M. le Président, qui est colporté un peu autour des partenariats public-privé, c'est de dire: On peut éviter les dépassements de coûts en passant par l'entreprise privée. Bon. D'abord, il faut comprendre, là, qu'il n'y a pas une entreprise privée qui est là pour les beaux yeux de qui que ce soit, du gouvernement ou de qui on voudra. Les entreprises privées sont là pour faire du profit. Donc, s'il y a un risque de dépassement, bien, comme on dit dans le monde des affaires, là, l'entreprise privée va se mettre un bon coussin, plus que moins, avant d'établir son montant qui sera facturé au gouvernement du Québec. Parce qu'il n'y a pas une entreprise privée qui peut faire des miracles et dire: Ah, s'il y a des dépassements de coûts de millions de dollars, ce n'est pas grave, je vais les assumer personnellement, mon entreprise. Voyons donc! Ces coûts-là vont être passés au gouvernement et avec encore une fois une prime au risque.

Et ce qu'il faut dire aussi, c'est qu'il y a des frais de reliés justement à préparer ces contrats entre l'entreprise privée et le gouvernement. Il y a un exemple qui est souvent utilisé, mais je pense qu'il est révélateur: lorsqu'on a construit le métro de Londres, qui a été construit avec un PPP, avec un partenariat public-privé, le contrat, M. le Président, le contrat entre le gouvernement et l'entreprise privée avait 183 000 pages. 183 000 pages. M. le Président, ça a coûté combien en frais d'avocats? Plus de 1 milliard de dollars canadiens, là, 1 milliard de dollars en frais d'avocats. Est-ce que le gouvernement...

Une voix: ...

M. Legault: Oui, j'entends, je vois le député ? d'où? c'est à quel endroit, ce député? ? ...

Une voix: ...

M. Legault: ...de Marguerite-D'Youville qui est avocat, qui dit: Il faut laisser les avocats vivre. Mais quand même est-ce que le gouvernement a comme responsabilité d'aller assurer, hein, un emploi puis des beaux contrats payants aux firmes d'avocats? Je ne pense pas que c'est l'objectif. En tout cas, si c'est encore une fois l'objectif de la présidente du Conseil du trésor, je pense qu'elle devrait nous le dire. Si c'est son objectif réel de donner de l'ouvrage aux avocats du Québec pour les 10, 20 prochaines années dans tous ces contrats de PPP, je pense qu'il faut être prudent.

Il y a aussi évidemment un autre risque qui est relié aux PPP, c'est la question de la tarification. Et je pense que le meilleur exemple, c'est la fameuse autoroute 407, du côté de l'Ontario. On sait que le gouvernement de l'Ontario a cédé la construction de cette autoroute à l'entreprise privée. L'entreprise privée a eu des dépassements de coûts. Qu'est-ce que l'entreprise, vous pensez, a décidé de faire? L'entreprise a décidé d'augmenter les tarifs qu'elle chargeait aux voitures qui circulent sur l'autoroute 407. Il y a un débat, là, il y a une chicane. C'est encore une fois devant les tribunaux ? donc encore beaucoup d'argent pour les avocats ? parce que le gouvernement de l'Ontario dit: Écoutez, vous n'avez pas le droit d'augmenter les tarifs de n'importe quel pourcentage, là; ce n'est pas juste, cette affaire-là. Vous aviez prévu des tarifs de x, là vous êtes rendus avec des tarifs beaucoup plus élevés. Mais donc il y a un risque que, quand il y a dépassement de coût, ce soit indirectement passé aux contribuables via les tarifications, surtout quand on laisse l'entreprise privée dans une position de quasi-monopole où elle peut charger le tarif qu'elle veut.

Je sais, là, qu'il y a eu des rectifications qui ont été faites, mais on a entendu la présidente du Conseil du trésor, il y a quelques mois, évoquer la possibilité qu'on passe toute la gestion de l'eau via l'entreprise privée. Est-ce qu'on peut dire, à ce moment-là, qu'il y aurait possibilité pour les entreprises privées de charger le tarif qu'elles veulent pour l'eau? Est-ce qu'il y aurait comme... Et on l'a vu, c'est exactement ce qui s'est produit en France. En France, on a comme transféré la gestion de l'eau à l'entreprise privée. Il y a eu une augmentation des tarifs. Je pense que les tarifs pour l'eau ont été triplés. Et aujourd'hui le gouvernement français est en train d'essayer de patiner par en arrière pour se sortir de ces PPP dans la gestion de l'eau. Donc, je pense que, M. le Président, le moins qu'on puisse dire, là, c'est: On doit être très prudent.

Il y a une autre mise en garde, je pense, qui doit être faite. Les entreprises privées qui s'embarquent dans des PPP ne veulent pas non plus se retrouver dans une situation où les risques puissent mettre en péril toute leur entreprise. Donc, la technique qui est utilisée souvent par l'entreprise privée, c'est de créer une nouvelle entreprise qui est une filiale de la première, qui vient faire une soumission sur le contrat de PPP, sauf que, s'il y a dépassement de coûts, bien, ce que l'entreprise peut faire, c'est de dire: On laisse la nouvelle filiale aller en faillite. Donc, il n'y a pas de respect, et le gouvernement se retrouve avec une contrepartie qui n'est pas capable d'exécuter son contrat au prix convenu, et on n'est pas plus avancé. Donc, il y a ce risque-là aussi qui est très important. Donc, M. le Président, je pense que le moins qu'on puisse dire, là, c'est qu'avant de s'embarquer dans les PPP il faut s'assurer de bien baliser.

Et, dans ce projet de loi n° 61, on crée une agence qui sera gérée par un conseil d'administration, donc formée d'administrateurs. Et je reviens à ce que je disais tantôt pour la Caisse de dépôt. Là, ce qu'on ouvre et ce qu'on vient faire, là, c'est la possibilité que les administrateurs résultent de nominations partisanes du Parti libéral du Québec, comme on l'a vu dans plusieurs cas, là, à la Société des alcools, à Hydro-Québec et à beaucoup d'endroits. Donc, est-ce qu'on veut que ce soit la distribution des contrats aux entreprises privées faite par les amis du régime du Parti libéral du Québec? Est-ce que c'est ça qu'on veut faire avec ce projet de loi? En tout cas, il n'y a rien qui empêche de le faire, et c'est ce qui a amené d'ailleurs quatre organismes qui relèvent de l'Assemblée nationale à venir en commission parlementaire, là. Puis, je veux dire, la Protectrice du citoyen, la Commission d'accès à l'information, le Commissaire au lobbyisme et le Vérificateur général sont tous venus mettre des réserves importantes à ce projet de loi en disant: Attention! Attention! Il n'est pas prévu des balises suffisantes pour assurer la transparence nécessaire à ces contrats qu'on ne sait pas comment importants ils vont être. Une journée, la présidente du Trésor nous dit: Ah! ce sera très important. Un autre jour, elle dit: Non, non, non, il y aura juste seulement quelques petits projets. On ne le sait pas, il n'y a rien qui est prévu, il n'y a pas de plan qui a été déposé.

Je veux, peut-être en terminant, M. le Président, vous parler de quelque chose qui me touche, là, comme critique en finances, entre autres la position du Vérificateur général du Québec. C'est important. C'est une personne indépendante qui a été nominée ici, à l'Assemblée nationale, incluant par le Parti libéral du Québec. Or, le 11 novembre ? ça, ça ne fait pas longtemps, là, on est, aujourd'hui, le 23 novembre, donc il n'y a même pas deux semaines ? le Vérificateur général a écrit à la présidente du Conseil du trésor, et je veux vous lire deux paragraphes de sa lettre.

Il dit: «La Commission des finances publiques procède actuellement à une consultation générale à l'égard du projet de loi n° 61, [...] projet que vous avez présenté à l'Assemblée nationale. Au cours des auditions, plusieurs participants se sont interrogés sur le rôle du Vérificateur général à l'égard de l'agence et de ses filiales. En réponse à ces interrogations, vous avez indiqué, avec raison, que le Vérificateur a accès à l'agence et à toutes ses filiales.

«Cependant ? et c'est là que c'est important, cependant ? je crois opportun de rappeler que cet accès ne permet pas nécessairement une vérification complète. Si elles le désirent, l'agence et ses filiales pourront fort probablement m'empêcher de mener les travaux de vérification de l'optimisation des ressources (vérification de gestion) que je jugerais nécessaires.» Donc, M. le Président, ce n'est pas rien, là, le Vérificateur général qui vient dire à la présidente du Conseil du trésor: Attention!

n(16 h 20)n

Donc, je pense, M. le Président, qu'en terminant c'est évident, là, qu'il doit y avoir des modifications importantes qui soient apportées au projet de loi n° 61. Je pense qu'il faut d'abord baliser quels projets pourront être réalisés, s'assurer, entre autres, qu'on va exclure la livraison de services publics directs. Je pense que ce serait une très mauvaise idée de penser que des services, par exemple en éducation ou en santé, seraient donnés par des entreprises privées, qui n'ont pas nécessairement comme objectif premier la qualité des services donnés aux citoyens. Donc, il doit y avoir un minimum de balises de mises sur ce projet de loi.

Je pense aussi que le projet de loi doit s'assurer, au niveau de l'agence, que des mesures de transparence, d'éthique, d'imputabilité soient mises en place pour répondre aux préoccupations des organismes que j'ai mentionnés tantôt, doit s'assurer aussi que les règles comptables viennent inclure aux comptes publics du gouvernement du Québec les dettes contractées dans les partenariats public-privé et s'assurer aussi qu'on mette en place des critères de sélection pour les administrateurs de l'agence.

Donc, c'est pourquoi, M. le Président, nous voterons contre le projet de loi n° 61. Merci.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, M. le député de Rousseau, pour votre intervention. Et je reconnais maintenant, toujours sur le principe de ce projet de loi n° 61, Mme la députée de Marie-Victorin. Mme la députée, à vous la parole.

Mme Cécile Vermette

Mme Vermette: Je vous remercie beaucoup, M. le Président. Alors, M. le Président, oui, effectivement, moi aussi, je trouve important de parler sur ce projet de loi. Il faut vraiment revenir à la charge et informer la population sur les conséquences et les risques en fait de ce projet de loi là.

À sa lecture, il semble un petit peu inoffensif parce qu'en fait c'est la création d'une agence qui aura pour mission de contribuer au renouvellement des infrastructures publiques et à l'amélioration de la qualité des services aux citoyens par la mise en oeuvre de projets de partenariat public-privé. Au point de départ, M. le Président, on peut dire: Bien, ce n'est pas si mauvais que ça et pourquoi ne pas aller avec le privé? Ce n'est pas un dogme que de travailler exclusivement avec l'État; probablement qu'on peut avoir de très bons partenariats public-privé.

Mais, M. le Président, ce pourquoi je suis inquiète et je trouve important aussi d'informer la population sur les conséquences de ce projet de loi là, c'est qu'il faudrait se rappeler qu'il n'y a pas si longtemps le premier ministre du Québec se rendait à Boston rencontrer des financiers américains pour leur dire: «Québec is open for business», une déclaration qui était à mon avis fort inquiétante au moment où, à Québec, la présidente du Conseil du trésor, à ce moment-là, soumet son projet de loi n° 61 créant l'Agence des partenariats public-privé.

Le partenariat constitue une pièce importante de la réingénierie de l'État. En ce sens, il s'inscrit en continuité avec l'amendement de l'article 45 du Code du travail et avec le dépôt des offres patronales qui exigent plus de mobilité de la main-d'oeuvre dans le cadre de la négociation des conventions collectives des employés de l'État.

La présidente du Conseil du trésor a débuté le processus menant au dépôt du projet de loi n° 61 en retenant les services de 13 firmes privées, dont plusieurs proches du Parti libéral, pour définir et élaborer la réingénierie de l'État. Vous voyez pourquoi je me sens très inquiète, M. le Président: parce que, déjà au point de départ, on sent qu'il y a une orientation par le choix même des firmes qui doivent se pencher sur la façon de faire la réingénierie de l'État. Parmi ces firmes de consultants, plusieurs sont maintenant sur les rangs afin d'obtenir des contrats dans le cadre des PPP. Il est clair que, dans ce processus de redéfinition du rôle de l'État, les firmes-conseils sont à la fois juge et partie.

M. le Président, les projets de partenariat public-privé ne sont en fait pas une chose nouvelle au Québec. On en a vécu certaines expériences antérieurement. Même notre gouvernement a mis de l'avant certaines expériences, notamment dans les travaux d'infrastructures en ce qui concerne les réseaux routiers. Mais, M. le Président, ces projets étaient encadrés. On était réellement en train de faire un encadrement spécifique. Mais actuellement, avec le projet de loi n° 61, c'est que la présidente du Conseil du trésor n'a pas de plan directeur en ce qui concerne les conséquences des aboutissants et qui, en fin de compte... à qui s'adressera l'ensemble de ces nouvelles orientations, qui est une pièce maîtresse pour le gouvernement libéral, il faut le redire, M. le Président.

Donc, le projet n° 61... En fait, bien qu'en commission parlementaire la ministre a surtout parlé des infrastructures comme domaine privilégié pour les PPP, comme ce fut notre cas, un examen attentif du projet de loi permet de constater que ce n'est pas nécessairement tout à fait en fait les seuls objectifs que la ministre a en tête. Le champ d'intervention de l'agence est illimité, car, en plus du ministère, des organismes gouvernementaux et paragouvernementaux, des établissements de la santé et des services sociaux, des organismes municipaux ou des commissions scolaires, des agences, il inclut tout autre organisme désigné par le gouvernement, comme le stipule l'article 7 du chapitre II. L'Agence des PPP exercera une quasi-tutelle qui permettra de forcer la privatisation de nombreux secteurs d'activité du gouvernement et du secteur public.

Et, M. le Président, voilà les conséquences, à ce qu'il me semble, dramatiques pour l'ensemble de la société québécoise, non pas parce qu'on ne veut pas toucher au modèle québécois des années soixante-dix, quatre-vingt ou du modèle québécois émis par le Parti québécois, mais parce que, M. le Président, ça touche directement en fait les salariés québécois, ça touche directement la syndicalisation des travailleurs dans l'ensemble du Québec, alors, M. le Président, ce qui me fait dire que le gouvernement libéral justifie le recours au secteur privé par l'incapacité financière du gouvernement de financer le renouvellement de nos infrastructures. Donc, le gouvernement, il dit: Je n'ai pas bien, bien d'imagination; la seule façon de voir comment on pourrait finalement financer les besoins de l'État québécois, c'est par le recours des PPP.

Alors, M. le Président, le gouvernement, lui, quant à lui, s'est lui-même mis dans une position, en fin de compte... dans ce qu'on peut dire un carcan financier avec sa promesse de réduction des impôts de 1 milliard par année sur cinq ans. C'est bien plus ça qu'autre chose qui fait qu'actuellement on est pris avec des problèmes, là, financiers et qui fait qu'en sorte on ne peut plus répondre aux besoins de l'ensemble de la population dans différents services, notamment la santé, l'éducation, nos routes, nos municipalités.

Dans le fond, on s'aperçoit bien que ce gouvernement a pris un engagement au moment des élections et qu'il s'aperçoit qu'il a de la difficulté... qu'il ne pourra pas finalement... et, s'il le fait, il le refera... il fera cette réalisation d'une promesse électorale sur le dos des contribuables en allant chercher dans l'autre poche finalement, par le biais de certaines augmentations de coûts sur certaines... sur les plaques, sur l'immatriculation, sur l'augmentation des frais de scolarité. Donc, c'est une façon comme une autre, pour eux, d'aller chercher de l'argent.

Mais aussi le manque de vision du gouvernement fait qu'en sorte, bien, ils disent: Bien, on n'a pas le choix, hein? C'est ce qu'on entend souvent: On n'a pas le choix. C'est la seule façon. Avec le privé, ça va aller beaucoup mieux, ça va coûter beaucoup moins cher, et finalement bien on n'aura pas aussi le syndicat dans les pattes. C'est un petit peu ce qu'ils semblent vouloir dire.

Alors, c'est sans doute habile. En fait, c'est comme un genre de tour de passe-passe aussi, qu'on pourrait dire, comptable que de faire inscrire les emprunts dans le passif des partenaires privés plutôt que de l'inscrire dans celui de l'État. Mais nous savons bien que les entreprises feront assumer ces emprunts d'une manière ou d'une autre par les contribuables québécois. Ce que je veux dire par là, M. le Président, c'est tout simplement qu'à un certain moment donné, à un certain niveau, en fait les entreprises ne pourront plus assumer le service, se retourneront vers l'État québécois et demanderont, en fin de compte, des subventions pour pouvoir continuer à donner le service ou augmenteront les coûts finalement pour avoir de tels services. D'une façon ou d'une autre, ça revient encore aux contribuables, soit par l'augmentation d'impôts ou bien soit par l'augmentation des coûts des services. Et en même temps le gouvernement pourrait dire: Je suis un très bon gestionnaire, vous voyez, nous arrivons à un budget équilibré, alors qu'il aura refilé la facture ailleurs. Il aura refilé les dettes ailleurs, ses emprunts ailleurs.

n(16 h 30)n

Alors, M. le Président, on peut se poser la question: Pourquoi alors aller dans ce sens? Où sont les économies? Quand le Vérificateur général adjoint du Canada a examiné les coûts du financement, de 161 millions, du Pont de la Confédération par l'entreprise privée, il a démontré que ceux-ci auraient pu être inférieurs d'environ 45 millions si le gouvernement s'était procuré l'argent en ayant recours à son propre programme d'emprunt, parce que le gouvernement peut avoir de meilleurs taux, peut faire des émissions d'obligations. Donc, il y a une façon de se financer et qui quelquefois peut sembler beaucoup mieux en fait que pourrait le faire le privé.

Où sont les économies quand le gouvernement s'engage à rembourser les frais des soumissions des entreprises? Dans le projet de l'Îlot Balmoral devant abriter l'Orchestre symphonique de Montréal, le gouvernement a autorisé le versement d'une compensation de 800 000 $ aux compagnies éliminées. Quel avantage y a-t-il pour la collectivité québécoise en bradant notre patrimoine collectif?

Déjà, l'Association des constructeurs de routes et des grands travaux du Québec et l'Association des ingénieurs-conseils du Québec craignent qu'étant donné l'ampleur des sommes recherchées plusieurs promoteurs proviennent nécessairement de l'extérieur du Québec. Nous connaissons l'appétit des multinationales comme la Suez Lyonnaise des Eaux pour la gestion des aqueducs et des systèmes de traitement des eaux, ou encore celui de la multinationale française, de la britannique et de l'américaine Aramark pour des services alimentaires, d'entretien ménager, de buanderie des hôpitaux et des autres institutions publiques, ou encore de la multinationale Connex pour le transport public. Est-ce que le Québec serait à vendre, Mme la Présidente? Est-ce que finalement ce que nous voulons faire, c'est de donner aux autres la possibilité de nous exploiter? Et quand je dis «nous exploiter», c'est de prendre, en fin de compte, nos biens collectifs, de nous les refiler à un coût éventuellement plus onéreux que ce qu'il peut être à l'heure actuelle.

Il faut vraiment se questionner sur les objectifs, en fin de compte, et les conséquences de ce projet de loi parce qu'actuellement on n'a aucune garantie qu'il y aura des économies de coûts. À court terme, je vous dirais: Oui, il se peut que dans certains cas, pour certains services, il pourrait y avoir certaines économies au point de départ. Mais, sur une certaine longue période de temps, sur un certain nombre d'années, j'en douterais, Mme la Présidente. Parce que, partout là où on s'est appliqué à mettre en application ce genre de partenariat, on est arrivé à des conclusions qui laissent croire en fin de compte que finalement les gouvernements préfèrent maintenant se désengager de ce genre de partenariat parce qu'il en coûtait davantage pour le contribuable, et finalement la qualité du service ne s'était pas améliorée, bien au contraire, elle s'était détériorée.

Quels sont alors les avantages des PPP pour les travailleurs et les travailleuses? Quelles seront leurs protections contre des baisses de salaire et de conditions de travail maintenant que le gouvernement a modifié l'article 45 du Code du travail pour faciliter la sous-traitance et qu'il remet en question le plancher d'emploi chez les cols bleus et les employés de la fonction publique? Quels sont les avantages, pour les citoyens et les citoyennes, de cette dilapidation du bien commun? Qui est encore assez naïf pour croire que les entreprises seront philanthropiques, ils seront vraiment des gens philanthropiques, qu'elles ne refileront pas les intérêts sur les emprunts, leurs profits, les salaires faramineux de leurs dirigeants aux consommateurs en introduisant ou en augmentant les tarifs pour usage de services publics, et qu'elles ne demanderont pas de rouvrir les contrats si ceux-ci s'avèrent déficitaires?

Car, partout où les PPP ont été appliqués, l'expérience le démontre qu'en général ils sont plus coûteux pour les contribuables et antidémocratiques, car les tarifs accrus diminuent l'accès aux services à une partie de la population. Nos concitoyennes et concitoyens les plus mal nantis ne verront pas un sou des réductions d'impôts du gouvernement libéral de M. Charest, du premier ministre actuel, mais seront étranglés par des hausses des tarifs sur le transport en commun, entre autres, l'électricité et bientôt des tarifs nouveaux sur l'eau et une série d'autres services publics dont nous avions convenu de répartir les coûts sur l'ensemble de la collectivité de la façon la plus équitable qui soit, c'est-à-dire par le biais de l'impôt sur le revenu des particuliers et des sociétés.

Le gouvernement libéral ne peut plaider la nouveauté et la candeur en appui à son projet de partenariats public-privé. Les conséquences néfastes de ces projets ont été très souvent rapportées dans les médias, que ce soit avec la privatisation de l'eau en Angleterre, Walkerton, en Ontario, ou encore celle des prisons aux États-Unis, pour ne prendre que quelques exemples parmi les plus connus. De plus, on ne peut que s'inquiéter avec le Commissaire au lobbying, le Vérificateur général et la Protectrice du citoyen, qui soulignent tous le manque de transparence de l'agence. «"Transparence, éthique, déontologie, imputabilité, tous ces principes fondamentaux sont négligés dans le projet de loi n° 61", a déclaré la Protectrice du citoyen, en ajoutant que "favoritisme, népotisme, quête personnelle directe ou simple espoir d'un retour d'ascenseur risquent de favoriser l'intérêt particulier au détriment de l'intérêt public".»

Donc, Mme la Présidente, je suis obligée de vous dire que le projet de loi n° 61 est une entreprise sans précédent de démolition de plus de 40 années d'acquis et qu'il aura un impact considérable sur la société québécoise. En ce sens, il est d'une importance aussi grande que les lois adoptées avec le bâillon il y a un an et qui avaient entraîné une mobilisation exceptionnelle. Et si j'ai tenu vraiment, Mme la Présidente, à parler sur ce projet ? et, comme je vous l'ai dit, il est important de revenir à la charge avec ce projet de loi ? c'est que c'est les orientations de l'ensemble de la population et de nos concitoyens et nos concitoyennes qui seront altérées par une telle orientation et une telle entreprise, avec l'agence.

Nous n'avons pas à ce jour assez d'éclairage par la présidente du Conseil du trésor pour donner notre aval et dire: Bien, oui, c'est intéressant, le projet semble intéressant, et nous voulons aller de l'avant. C'est important, il faut être modernes, il faut être dans une nouvelle mouvance, il faut faire confiance aux partenaires. Oui, c'est vrai, Mme la Présidente, mais faut-il encore avoir des balises. Il faut avoir un plan directeur, il faut savoir exactement où on veut s'en aller. Il est difficile à l'heure actuelle de pouvoir, à l'heure actuelle... de dire à quel point... si nous sommes bien informés sur les enjeux de ce projet. Qu'arrivera-t-il en fait une fois que nous aurons privatisé une bonne partie de nos institutions? Comment seront refilés les profits sur les biens publics? Comment seront redistribués les risques, les coûts? Et la collectivité devrait-elle en faire les coûts? À quelle hauteur devra-t-elle en faire les coûts?

Donc, Mme la Présidente, j'estime qu'à l'heure actuelle... et ma voix se fait entendre autant que l'ensemble d'autres qui se sont prononcées sur ce projet de loi là, que ce soit dans le domaine de la santé... que ce soit dans le domaine de la santé. «Devant l'étendue des pouvoirs consentis à l'agence par le projet de loi et l'imprécision des objets sur lesquels s'exercent ces pouvoirs, l'Association des hôpitaux du Québec ne peut que recommander le retrait de ce projet de loi dans sa forme actuelle.» La Fédération des infirmières et des infirmiers du Québec: «Le projet de loi n° 61 sur l'Agence des partenariats public-privé du Québec vise à mettre les institutions publiques au service du secteur privé pour le seul profit.

«La Fédération des infirmières et infirmiers du Québec formule les recommandations suivantes: Que le gouvernement libéral retire le projet de loi n° 61, Loi sur l'Agence des partenariats public-privé du Québec, dont la portée est tellement large qu'elle n'épargne rien ni personne; que le gouvernement libéral abandonne ses intentions de transformer l'État du Québec en un État marchand au service du capitalisme mondial. Ce modèle ne peut que nuire au Québec, dont le développement repose sur la petite et moyenne entreprise.»

n(16 h 40)n

Ce sont autant de gens, Mme la Présidente, qui sont d'accord en fait pour démontrer à l'ensemble de la population du Québec les conséquences néfastes de ce projet de loi si on l'accepte tel qu'il est libellé à l'heure actuelle.

Coalition des médecins pour la justice sociale, Mme la Présidente: «Le partenariat du public et du privé ne présente donc aucun avantage pour le système de santé public, tout en faisant en sorte d'augmenter les coûts pour des services autrement diminués.»

Au niveau des municipalités, Mme la Présidente, là où il semblerait que c'était peut-être plus facile d'aller dans ce sens-là: «L'ensemble des groupes représentant les municipalités du Québec demandent que soit retirée du projet de loi l'obligation qui leur est faite de recourir aux services de l'agence.»

Fédération québécoise des municipalités: «Il faudrait y aller progressivement en favorisant le mode de partenariat auprès des organismes municipaux. Quelconque obligation sera, comme tout, perçue comme une erreur stratégique envers les municipalités qui ont su innover, au fil des ans, des manières de faire pour améliorer la prestation de services aux citoyens, malgré les inconvénients de certaines lois.»

Donc, Mme la Présidente, beaucoup, au Québec, de gens concernés réclament des modifications à la loi n° 61. Et, Mme la Présidente, je m'inscris et je serai, moi aussi, en accord avec les gens sur les modifications à la loi n° 61.

La Vice-Présidente: Je vous remercie, Mme la députée. Alors, nous en sommes toujours sur l'adoption du principe du projet de loi n° 61, loi créant l'Agence sur les partenariats public-privé. Comme prochaine intervenante, je reconnaîtrai la députée de Champlain et porte-parole de l'opposition officielle en matière de formation technique et professionnelle. À vous la parole, Mme la députée.

Mme Noëlla Champagne

Mme Champagne: Merci, Mme la Présidente. Alors, écoutez, à la suite des nombreuses interventions de mes collègues en Chambre depuis près d'une semaine maintenant, j'ai fait le tour, comme plusieurs d'entre eux, des dépôts faits par quatre organismes reconnus, foncièrement reconnus, des organismes qui ont fait leurs preuves jusqu'à date et qui sont venus, à l'instar de plein d'entreprises également, dire au gouvernement du Québec: Retirez votre projet de loi, il y a trop d'inconvénients, il y a trop d'inconnues, il a une portée beaucoup trop large, et les conséquences vont être désastreuses pour le Québec.

À partir du moment également, Mme la Présidente, où je me suis donné la peine de suivre de très près la commission qui a fait l'étude du projet de loi n° 61, ce projet-là qui crée l'Agence des partenariats public-privé du Québec, je me suis également donné cette peine de faire la part des choses entre ceux qui se disaient un peu favorables, ceux qui se disaient défavorables. Et, à l'intérieur de tout ça, j'ai retenu l'opinion des quatre organismes, au-delà d'opinions politiques, des opinions de gens qui ont pris la peine de décortiquer ce projet de loi là. Il est évident que la grande portée de ce projet de loi là peut inquiéter plus d'un. Ça inquiète le parti d'opposition, mais ça inquiète également les partenaires dans chacun de nos milieux.

Vous savez, Mme la Présidente, là, un député, ça vit également dans sa région, ça vit également dans son comté et ça questionne également les gens de sa région et de son comté. Et, quand on ne le fait pas, les gens viennent nous voir dans nos bureaux pour nous interpeller, nous donner leur avis et nous demander également leur opinion.

Or, j'ai fait également ce travail-là auprès des gens, soit des chambres de commerce, auprès des entreprises qui auront, un jour ou l'autre, à jouer dans cette nouvelle game là, si je peux m'exprimer comme ça, avec cette agence-là de partenariat public-privé. Et, à la toute fin, j'ai relu les quatre documents, les quatre documents concernant des mémoires, et, le premier, ça concernait la Commission d'accès à l'information. Et cette commission-là a, dans un mémoire soutenu, un mémoire complet, sorti des informations qui m'ont questionnée, et je vais les soumettre, parce que, à part les gens ici, en Chambre aujourd'hui, il y a également la population qui nous écoute, Mme la Présidente, et qui a peut-être le goût d'en savoir davantage.

Alors, si je prends la Commission d'accès à l'information, cette commission-là nous dit et de façon très claire: Est-ce que cette loi-là va permettre d'assurer la transparence des partenariats public-privé?

Et, tout au long des mémoires qui ont été déposés, on a, Mme la Présidente, parlé de transparence, on a parlé d'éthique, on a parlé d'inconnues, on a parlé de contrôle, on a parlé de déontologie. Eh bien, j'aime autant vous dire que, dans le document, le mémoire déposé par la Commission d'accès à l'information, on nous soulève ces mêmes questions là et on dit ceci ? et je n'ai pas l'expertise de ces gens-là, je me permets donc de citer textuellement ce qu'ils ont dit à l'occasion de leur présence en commission: «Les contrôles de la transparence dans l'élaboration de la norme, comme la consultation et la supervision politique et administrative, ou ceux visant l'imputabilité, ont été conçus pour un processus décisionnel principalement interne à l'organisation» de l'État.

En bref, Mme la Présidente, ce que le commissaire dit: Nos lois présentement nous permettent d'agir à l'intérieur d'un État parce qu'on est balisés, parce qu'on a des normes puis qu'on est capables de les mettre en place, en tout cas selon des règles, je pense, très acceptables. Or, si on s'en va vers un partenariat public-privé, eh bien, on va devoir revoir les règles qui gèrent l'État, parce que ce n'est plus le même rôle, on n'agit plus de la même façon puis on a un nouveau partenaire, on a une tierce partie, là, qui arrive dans le décor.

Et le commissaire ajoute: «Lorsque l'élaboration de la norme et son application sont contractées ou déléguées ? donc déléguées à un partenaire privé ? en tout ou en partie, à des personnes ou des organisations privées, les formes traditionnelles des contrôles parlementaire, administratif ou même judiciaire doivent être réévaluées.» Ce n'est pas moi qui le dis, ce n'est pas ma formation politique qui le dit, c'est le commissaire, le commissaire à l'information. Alors, je pense que, si le commissaire à l'information, sur lequel l'État se base depuis des années, lui fait confiance, nous dit: Attention! Prenez garde! ça s'appelle une première petite lumière rouge, comme le mentionnait mon collègue de Richelieu, porte-parole dans ce domaine.

Le commissaire ajoute également, et je trouve que ce paragraphe-là vient chercher nos entrepreneurs et les politiciens qui présentement débattent de ce sujet-là: «En acceptant de jouer le jeu du partenariat, l'entreprise privée doit cependant accepter d'opérer dans un contexte très particulier: elle acceptera ainsi de se plier à de nouvelles exigences de transparence, de reddition de comptes et d'écoute des citoyens-consommateurs. Les opérations faites par l'entreprise privée et utilisant les deniers publics sont sujettes à des contraintes particulières qu'on ne retrouve pas dans le cadre [de la transaction] entre deux entreprises privées.»

Alors, l'entreprise privée, M. le Président, mon collègue de Rousseau le disait tout à l'heure, le collègue de Rousseau le disait tout à l'heure, il est important de comprendre que l'entreprise, elle est là pour faire du profit. Ce n'est pas un problème en soi, parce que, quand tu es une entreprise privée, tu te dois de faire un profit, puis, quand tu es une entreprise publique, tu te dois de prendre... peut-être également de regarder le côté profit, mais de prendre également attention à ce que tes deniers publics, qui ne sont pas tes deniers à toi, soient dépensés de façon correcte.

Or, la commission ajoute, et je cite à nouveau: «Selon la commission, éviter de débattre maintenant ? maintenant ? de règles de transparence et d'accès à l'information applicables aux partenariats public-privé risque de susciter la méfiance des citoyens.» Mme la Présidente, je pense que la méfiance des citoyens, elle est déjà très grande envers les politiciens, toutes couleurs confondues. Alors, je pense que ce n'est pas le temps de donner, je dirais, à manger à ceux qui déjà considèrent les politiciens comme des gens ayant parfois une éthique un petit peu sur le bord.

Et la commission ajoute: «...[et devant] l'absence de règles claires, il ne fait aucun doute que le débat se transportera alors devant les tribunaux.» Même si, de façon un peu taquine, tout à l'heure, j'ai senti qu'il y avait eu des réparties, à savoir qu'après tout les avocats doivent bien gagner leur vie, et j'en conviens également, je pense qu'il ne faudrait pas que la population soit convaincue que la façon de faire dans les partenariats privé-public, c'est afin de permettre aux municipalités, au gouvernement ou à d'autres de passer leur temps devant les tribunaux afin d'aller faire régler des choses qui n'ont pas été faites correctement parce qu'on aurait manqué de prudence, parce qu'on aurait manqué, je dirais, de sérieux. Et le gouvernement doit à mon avis, dans le cadre de ce projet de loi là, tenir compte de ce commentaire-là des gens de cette commission-là, et ces gens-là sont, je pense, plus que crédibles.

n(16 h 50)n

Et je termine de ce mémoire-là, quelques petites questions qui ont été soulevées. Bien sûr, les réponses ne sont pas là, ce sont des questions, et on demande au gouvernement, on demande à la présidente du Conseil du trésor de répondre d'abord à ces questions-là avant d'aller plus loin avec son projet de loi. En fait, ce qu'on lui dit: Ne partez pas de l'avant, Mme la présidente du Conseil du trésor, sans avoir d'abord répondu à ces questions-là, sinon vous êtes dans le trouble.

Alors, on dit ceci: L'État ne peut se départir, face aux citoyens, de sa responsabilité ultime de gestionnaire du domaine public. La présidente du Conseil du trésor dit: Je vais tenir compte de ce que vous me dites. Alors, nous, ce qu'on lui dit, de notre formation politique: Tenez-en compte d'abord. Représentez un projet de partenariat public-privé et tenez compte de ce qu'on vous demande, Mme la présidente.

Première question: À quelles obligations de transparence devraient être assujettis les organismes publics et les entreprises liés par un contrat de partenariat? À quelles obligations de transparence? On n'a pas de réponse. Les filiales créées ou acquises par l'Agence des partenariats public-privé ? parce qu'on peut faire naître d'autres organismes à partir de ça ? ne devraient-elles pas être assujetties à l'application de la Loi sur l'accès? On n'a pas de réponse à ça.

Autre question: De quelle façon les citoyens pourront-ils exercer leur droit d'accès si un document est lié à un partenariat? Pas plus de réponse, Mme la Présidente.

Autre question: Ne devrait-on pas débattre des conditions d'application des restrictions à l'accès énoncées à quelques articles de la loi ? et ces articles-là, ce sont les articles 22 à 24, c'est la Loi sur l'accès ? afin de s'assurer qu'elles ne constitueront pas un frein à la transparence des activités de partenariat public-privé? Ce sont des lumières qu'on tente d'allumer, Mme la Présidente.

Autre question: Pourquoi la loi ne prévoirait-elle pas que le contrat de partenariat et le plan d'affaires, documents décrits dans certains articles, aient un caractère public? Pourquoi on veut lui garder un caractère uniquement privé? Ce sont des questions qui suscitent de la part de l'opposition et de la part de certains entrepreneurs, de la part de certaines formations, dont nos chambres de commerce, certaines questions, et on ne veut pas, nous, comme élus, comme députés élus de notre formation politique, se ramasser devant une situation où effectivement nos entrepreneurs pourront aller à l'encontre de certaines règles d'éthique, à l'encontre de certaines règles de transparence, et, ensuite de ça, bien tout ce qu'on aura à faire, ce sera d'aller devant les tribunaux.

Finalement, le commissaire à l'accès à l'information dit ceci: «Afin que la confiance des citoyens...» Et j'ai tenu à mentionner particulièrement ce paragraphe-là parce que cette confiance-là, là, il ne faut pas, en aucun temps, la rendre, je dirais, fragile. Elle l'est déjà suffisamment. Alors, je répète: «Afin que la confiance des citoyens envers les prestataires de services publics qui détiennent des renseignements personnels les concernant puisse être maintenue et afin qu'une réelle protection de renseignements personnels puisse être assurée, la commission croit que tout projet de partenariat qui impliquera une vaste communication de renseignements personnels entre organismes publics et entreprises privées, ou une cueillette de renseignements personnels par ces dernières [ça] devrait être précédé d'une évaluation de son impact sur la protection des renseignements personnels. Et, lorsque requis, des mesures de protection de renseignements additionnels devraient être prises afin de tenir compte de ce contexte particulier que sont les partenariats privé-public.»

Donc, ce qu'on veut, de notre côté, de ce côté-ci de la Chambre, c'est d'assurer une harmonieuse coexistence entre les partenariats privé-public, en donnant la bonne information et les bonnes règles de départ. Si les règles ne sont pas claires au départ et si le commissaire se questionne, comme il le fait dans un document quand même fort soutenu, bien je me demande comment l'entrepreneur privé pourra s'en sortir comme il se doit.

À cela, Mme la Présidente, s'ajoute le document du Commissaire au lobbyisme. Il rejoint beaucoup son collègue commissaire à la Commission d'accès à l'information, mais il y va avec des questions, je dirais, d'un autre ordre, qui mettent en cause et en évidence le risque de conflit d'intérêts. Et ce risque-là, de conflit d'intérêts, est aussi, je dirais, délicat que le risque de communiquer de l'information qui ne serait pas pertinente, comme l'a fait tout à l'heure le commissaire à l'accès à l'information. Et là on parle d'exercice de lobbyisme, et voilà ce que nous dit, à quelques mots... et quelles sont les questions que soulève ce projet de loi là pour le Commissaire au lobbyisme. Il dit ceci: «Ça soulève des questions d'ordre général sur le cadre juridique, mais ça soulève également d'autres formes de questions, dont certaines garanties dont vont bénéficier les citoyens.»

Le Commissaire au lobbyisme dit, lui: Écoute, moi, je me questionne toujours sur le lien entre ce partenariat et les conséquences sur le citoyen. Est-ce qu'il n'arrivera pas ce dont ma collègue a parlé tout à l'heure, que, devant une conséquence peut-être parfois évidente ? on a donné quelques exemples tout à l'heure ? de dépassements de coûts, que la facture ne sera-t-elle pas refilée aux citoyens de quelque façon que ce soit? Tout est possible. Encore un inconnu auquel notre formation politique demande réponse et demande une assurance à la présidente du Conseil du trésor.

Autre question sur les garanties. Voici ce que dit le Commissaire au lobbyisme: «Pourront-ils ? les gens, les partenaires de ce partenariat-là privé-public ? pourront-ils faire valoir leur point de vue auprès d'entreprises partenaires investies d'une mission de services publics, de la même façon qu'on pouvait le faire au niveau du public? Le projet de loi est muet sur ces questions fondamentales de garanties et ces questions fondamentales d'éthique et de conflits d'intérêts.» Alors, il n'y a pas de réponse. Alors, le Commissaire au lobbyisme dit à la présidente du Conseil du trésor: Mme la présidente, nous voulons des réponses avant que vous alliez de l'avant dans ce projet de loi là.

Quand on parle de l'intérêt public, ça également, c'est un domaine où on ne doit pas lésiner sur les prudences à prendre. «L'intérêt public ? et je cite toujours le commissaire ? car c'est ce dont il est question ici, exige que les gouvernants ? donc le gouvernement présent ? donnent aux citoyens les garanties que le processus d'introduction et de gestion des P3 ? donc partenariats privé-public ? place l'intérêt public au-dessus des intérêts particuliers. La transparence et la crédibilité du processus détermineront le degré d'adhésion de la population.»

Donne-leur cette garantie-là, et la population sera possiblement intéressée à embarquer dans ce genre de processus là. Et, nous les premiers, Mme la Présidente, on n'a pas de problème avec le partenariat privé-public. Certains collègues d'en face nous rappelaient, la semaine dernière, qu'avec un certain projet de loi, le 164, si je ne me trompe, on était allé de l'avant avec un partenariat privé-public au niveau du transport. Or, je pense qu'on avait limité cet exemple-là au niveau du transport, mais il était bien entouré, bien encadré.

Ce qu'on dit maintenant: Si on veut élargir, pas de problème, mais donnons-nous les prudences nécessaires. «Or ? et c'est un peu le dernier propos que je prends du Commissaire au lobbyisme ? comme condition de succès des partenariats, l'implication des citoyens ne peut être acquise sans le maintien de mécanismes qui visent à garantir une gestion de fonds publics ouverte et transparente.» Là, on ne parle pas de petites choses, parce que le projet de loi, on l'a dit tout à l'heure et ça a été répété depuis plusieurs jours, il est très large, il ouvre très grand, il ouvre toutes les portes à toutes les formes de partenariats.

On dit ceci, de la part bien sûr de la population: «Si les citoyens sont placés devant des faits accomplis à la suite de décisions prises en catimini ? ça veut tout dire ? les citoyens risquent fort d'être méfiants et de manifester leur désapprobation. Maintenir les citoyens dans l'ignorance engendre la méfiance.» Et la petite phrase suivante, elle a toute sa place et toute son importance: «Être transparent à leur égard ? on parle toujours des citoyens ? engendre la confiance.»

Alors, ce que le Commissaire au lobbyisme dit: On est bien prêts à reconnaître qu'on peut faire la création de partenariats public-privé. On peut en faire ce qu'on appelle la mise en oeuvre des partenariats public-privé, mais prenons toutes les précautions nécessaires, sinon on va se ramasser encore une fois devant les tribunaux, ce qui n'est pas, je pense, l'objectif de qui que ce soit dans ça.

Tout à l'heure, j'ai deux de mes collègues, et je vais terminer là-dessus, qui ont souligné un peu, là, l'inquiétude du Vérificateur général du Québec. Ça a déjà été fait, donc je n'y reviendrai pas. Et il y a également le Protecteur du citoyen qui y est allé, lui aussi, d'un grand questionnement et qui dit ceci concernant les conflits d'intérêts: «Si le projet de loi traite des conflits d'intérêts chez les membres de l'agence, il ne contient aucune disposition concernant les conflits d'intérêts susceptibles de se développer dans le cadre des partenariats eux-mêmes.» Donc, autre petite lumière qui a été allumée par le Protecteur du citoyen.

n(17 heures)n

Or, Mme la Présidente, tel que mentionné par mes collègues précédemment, tel que mentionné par les collègues qui vont suivre, j'en suis convaincue, nous avons des questions, et ce sont des questions fondées, ce sont des questions qui viennent dire au gouvernement en place: Attention devant les inconnues ? et je résume ? devant la large portée, devant l'inquiétude face à l'éthique, devant l'inquiétude face au contrôle, devant l'inquiétude face à la transparence, devant l'inquiétude face au code de déontologie, nous vous demandons de tenir compte des quatre petites lumières rouges qui ont été apportées tant par le Vérificateur général, que par la Protectrice du citoyen, que par le commissaire d'accès à l'information, que par le Commissaire au lobbyisme.

Et je termine en disant que, comme mes collègues de l'opposition, je devrai m'opposer au projet de loi tel quel. Et on est allé même plus loin que ça, on est allé jusqu'à demander à la présidente du Conseil du trésor de retirer le projet de loi et de le représenter, puisque telle est son intention, avec les amendements que lui demandent d'apporter les quatre organismes dont j'ai mentionné les noms tout à l'heure.

Alors, Mme la Présidente, je vous remercie de votre attention et je demande en terminant, cette fois-ci, à la présidente du Conseil du trésor de donner l'exemple en se fiant à des organismes publics reconnus et en allant de l'avant avec des modifications au projet de loi, tel que demandé par tous mes collègues en cette Chambre. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Je vous remercie, Mme la députée de Champlain. Alors, comme prochain intervenant, si je respecte l'alternance, je devrais... Oui, je vais reconnaître le député des Îles-de-la-Madeleine et porte-parole de l'opposition officielle en matière d'agriculture, pêcheries et alimentation. À vous donc la parole, M. le député.

M. Maxime Arseneau

M. Arseneau: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Mme la Présidente, j'écoutais avec beaucoup d'attention la députée de Champlain qui parlait avec un ton tout à fait posé et pertinent à propos de ce projet de loi n° 61 qui est devant nous, qui est un projet de loi très important, un projet de loi qui est considérable, qui aurait des impacts considérables sur la dispensation des services publics au Québec, puisque ce projet de loi crée une agence, une agence qui aura pour mandat de conseiller le gouvernement, de fournir tout service d'expertise, finalement d'organisation, qui prévoit en outre que l'agence peut créer tout comité, et aussi une agence qui aura des responsabilités financières, donc un projet de loi très important.

Et, Mme la Présidente, je veux employer les minutes qui me sont réservées pour expliquer en grande partie à ceux qui nous écoutent et aux gens... peut-être convaincre aussi les gens d'en face quant au questionnement que nous avons et quant à l'obligation que nous aurons de nous opposer au principe même de ce projet de loi, puisque justement la création de cette Agence des partenariats public-privé, c'est comme si c'était, pour le gouvernement actuel, la solution à tous les problèmes que rencontre l'État du Québec.

On sait que, lors des discussions, lors des rendez-vous, des sommets, la société québécoise dans son ensemble est confrontée à des problématiques en termes de démographie, en termes de finances publiques aussi, et c'est des réalités avec lesquelles nous vivons quotidiennement. Mais justement, Mme la Présidente, toutes ces préoccupations en regard du vieillissement de la population, en regard des investissements considérables qui sont à faire dans les infrastructures québécoises, dans les infrastructures de transport, les infrastructures en général qui sont utilisées pour dispenser les services publics, c'est comme si la solution, cette solution des PPP allait permettre à l'État du Québec de se délester, entre guillemets, de ses responsabilités de fournir des services publics, comme si ces partenariats public-privé avaient l'apanage de faire en sorte d'économiser, que l'État du Québec pourrait éviter de s'endetter.

Bref, Mme la Présidente, c'est comme si le privé était considéré comme bien meilleur pour gérer et pour dispenser les services publics, et c'est là-dessus, Mme la Présidente, que je veux m'employer au cours des minutes qui viennent pour tenter de démontrer que ce n'est pas nécessairement le cas. Et en plus, avec ce projet de loi n° 61, on en vient presque, lorsqu'on regarde la composition, par exemple, dans la section V, dans les dispositions financières... et quand on regarde un peu plus loin au niveau de la composition du conseil d'administration, c'est comme si on sortait des périmètres comptables, comme si on sortait des responsabilités ministérielles, des engagements financiers pour donner ça à des agences sur lesquelles finalement non seulement le gouvernement, mais les membres de cette Assemblée et le Parlement n'ont pas d'emprise ou n'auraient pas leur mot à dire.

Alors, moi, Mme la Présidente, c'est regrettable, mais je ne pense pas que le privé, dans beaucoup des secteurs pour lesquels l'État du Québec doit dispenser des services, en santé, en éducation, dans bien des secteurs comme ceux-là qui sont des secteurs vitaux, je ne crois pas que le privé soit mieux placé pour dispenser de meilleurs services à des moindres coûts que l'État peut le faire.

Nous avons, de ce côté-ci de la Chambre, Mme la Présidente, énormément de problèmes avec cette approche, avec cette façon de voir, c'est-à-dire d'aborder le rôle de l'État dans la dispensation des services publics. Est-ce à dire, Mme la Présidente, que notre formation politique s'oppose à toute expérience ou à toute forme de partenariat public-privé? Aucunement, aucunement. Et la députée de Champlain l'a mentionné tantôt, nous avions effectivement présenté un projet de loi, n° 164, à l'effet de justement permettre des partenariats public-privé. Mais c'était limité dans le secteur des infrastructures de transport.

Par exemple, le pont de la Confédération que cite très souvent la présidente du Conseil du trésor, c'est un partenariat public-privé. Mais c'est parce que c'est une infrastructure qui était nécessaire. De toute façon, les gens qui prenaient la traverse entre Cap-Tourmentin et l'Île-du-Prince-Édouard devaient payer un coût pour prendre le bateau. Alors là, le pont, avec la durée de vie, avec cette infrastructure, c'est des choses qui sont possibles. Il n'est pas impensable d'imaginer que des autoroutes ou des infrastructures qu'on doit avoir au Québec... que les citoyens pourraient être appelés à contribuer et que des partenariats public-privé pourraient être envisagés dans ce cas, Mme la Présidente. Mais c'est parce qu'il y a des alternatives. En France, en Europe, beaucoup des infrastructures routières, beaucoup des autoroutes sont des autoroutes où les citoyens doivent payer. Ce sont des partenariats public-privé. Aux États-Unis aussi.

Mais là, attention, il y a des nuances à apporter avec le projet de loi qui est devant nous. Et ce n'est pas ainsi qu'il faut voir le projet de loi n° 61. Ce n'est pas réservé à un secteur, le secteur, par exemple, des infrastructures routières. Le projet de loi n° 61 fait suite à un projet de loi cadre et crée une agence où tous les services publics de l'État québécois risquent de se retrouver entre les mains de partenariats public-privé. Voilà pourquoi il faut être vigilant en regard du projet de loi n° 61. Ce projet de loi est beaucoup plus vaste, beaucoup plus général, beaucoup plus englobant, englobant même toutes les missions de l'État.

Attention, c'est loin d'être la même chose que ce que nous avions proposé comme possibilité dans un secteur tout à fait précis, dans un secteur tout à fait possible, probable, comme il se fait autour de nous. Si vous prenez la 95, dans certaines sections ? ça, c'est l'autoroute qui traverse les États-Unis nord-sud ? si vous prenez certaines sections ou que vous prenez la New Jersey Turnpike, vous allez payer, et possiblement que ça pourrait être offert par des partenariats public-privé.

Mais, attention, avec le projet de loi n° 61, tout risque d'y passer, Mme la Présidente. Et, vous savez, ce qui est plus grave, c'est que le véritable débat de fond n'a pas encore été fait au Québec là-dessus. On crée une agence actuellement sur les PPP, qui risque de toucher à toutes les missions de l'État du Québec sans que nous ayons eu les débats nécessaires. On parle maintenant de prisons dans les perspectives partenariats public-privé, d'écoles, et même qu'il y a, Mme la Présidente, au Québec, des écoles privées. Il y a certains ministères qui ont déjà créé des partenariats public-privé où c'est possible. Mais, lorsque nous parlons des hôpitaux, lorsque nous parlons de développement économique, lorsque nous parlons d'éducation, il faut être extrêmement vigilant. Il faut être extrêmement vigilant sur la qualité des services qui seront dispensés.

n(17 h 10)n

Et c'est ça qui est assez incroyable. Comment pouvons-nous aborder cette question, Mme la Présidente, autrement que sous l'angle du programme du Parti libéral du Québec, que sous l'angle de la réingénierie de l'État? Comment voir le projet de loi n° 61, qui ouvre la porte à des partenariats public-privé de façon vaste et illimitée, sans contrôle, sans paramètres, comment voir ça autrement que sous l'angle du démantèlement de l'État pour sauver des sous, pour économiser? Voilà où nous nous inquiétons. Voilà où il serait important et essentiel même d'avoir un débat. Les partenariats public-privé, le débat qu'on doit avoir, c'est: Est-ce que le privé peut mieux gérer que ne peut le faire l'État? Est-ce que c'est ça, la démonstration qu'on veut nous faire?

Vous savez, Mme la Présidente, et peut-être que certains économistes pourront contester mes prétentions, et je ne prétends pas que l'économie est une science exacte non plus, et on n'a qu'à écouter les économistes pour savoir qu'il y a des théories qui varient énormément, mais il y a un principe économique qui est simple et qu'il ne faut jamais oublier, à savoir que le secteur privé ne cherche qu'une chose, il ne carbure qu'à une réalité, qu'à un objectif, et cet objectif, Mme la Présidente, c'est que le privé ne cherche qu'une chose: faire des profits.

Si l'État doit, si l'État du Québec a dû, au cours des années, assurer des services publics, c'est essentiellement pour deux raisons, Mme la Présidente. C'est que le privé ne voyait pas, de façon morale, comment empocher suffisamment de profits sur le dos des malades ou dans les institutions d'éducation. C'est pour ça que ces secteurs étaient laissés aux congrégations religieuses historiquement et que, à la Révolution tranquille, l'État du Québec a dû créer le ministère de l'Éducation, le ministère de la Santé pour s'occuper de ces secteurs où, manifestement, le secteur privé ne voyait pas comment, de façon morale, il pouvait faire des profits sur le dos des malades. Parce que c'est ça qu'il vise, le secteur privé. Ou encore l'État du Québec a dû intervenir pour assurer l'universalité de ces services et de ces soins. C'est pour ça que les États modernes en général doivent se préoccuper de ces grands secteurs.

Mais il y a une question, Mme la Présidente, qui se pose, qui est fondamentale: Comment le privé pourrait-il être aussi ou plus efficace, c'est-à-dire leur qualité de services en santé, en éducation, dans l'eau potable, comment le privé pourrait-il être aussi ou plus efficace que ne l'est l'État et faire des profits en plus? Essayons de voir ça. On va consacrer... On va laisser le privé s'occuper de l'éducation, de la santé, de l'eau potable, puis le privé va être plus efficace que l'État puis il va faire des profits en plus. Là, il y a des questions à poser parce qu'il y a quelque chose qui se pose au niveau de la compréhension, hein? Moi, je dis: C'est impossible pour le privé de le faire à moins qu'il ait une marge de bénéfice assurée de par son contrat avec le gouvernement, à moins qu'il y ait une tarification de prévue suffisante pour permettre au privé de rencontrer sa marge de profit, ou encore, Mme la Présidente, ce qui serait catastrophique pour les Québécois, à moins qu'il y ait une baisse des services, ou encore, ce qui est plus probable et ce que craignent le plus les Québécois et les travailleurs québécois aux services publics, à savoir une baisse dans la qualité des emplois offerts par les PPP qui dispensent les services publics.

Alors, Mme la Présidente, il est extrêmement important de questionner ces options parce que, en regard du concept même de partenariat public-privé prévu dans ce projet de loi n° 61, on dit que le concept de partenariat ne fait pas l'objet d'une définition claire dans son sens large. Il désigne toute association des secteurs public et privé dans la livraison de biens ou de services. Alors, dans sa définition donc, le gouvernement est très large pour englober le plus de services publics. Voilà pourquoi beaucoup de Québécois s'inquiètent justement de ces réalités, s'inquiètent de ces problématiques.

Mais, à ce moment-là, Mme la Présidente, la situation devient, je dirais, presque loufoque lorsqu'on voit, à l'article 45 de ce projet de loi: «Le gouvernement peut, aux conditions et selon les modalités qu'il détermine [...] garantir ? le gouvernement va garantir ? le paiement en capital et intérêts de tout emprunt contracté par l'agence ou par l'une de ses filiales visées à l'article 15 ainsi que toute obligation de celles-ci.» Autrement dit, lorsque l'agence signerait une entente de partenariat public-privé avec un partenaire privé, le privé va chercher à faire des bénéfices, et les Québécois vont réclamer la même qualité de service. Mais comment il va faire pour faire son profit? Soit qu'il va avoir des tarifs ou soit qu'il a une marge bénéficiaire d'assurée. Mais plus que ça, Mme la Présidente, l'État va aller même jusqu'à garantir les investissements. Alors là, le privé n'aura pas à prendre de risques, puisque c'est l'État qui le prend, va pouvoir faire un profit sur le dos ou sur la dispensation des services publics, puis on essaie de nous faire accroire que ça va être plus efficace puis ça va coûter moins cher, puis qu'on va sauver de l'argent avec ça. Là, un gros problème, il y a un gros problème, parce qu'on n'est pas dans un pont qui dure 75 ans ou une autoroute... Mais là il y a des ponts qui durent plus que ça d'ailleurs, heureusement, heureusement.

Mais vous comprenez, Mme la Présidente, que, là, il y a un problème, puisque le gouvernement va garantir le paiement en capital et en intérêts de tout emprunt contracté par l'agence pour démarrer un PPP. Alors, si on comprend bien ce que ça signifie, c'est que le privé n'assume pas le risque, c'est le gouvernement qui le fait, et que le privé fera des profits sans assumer les risques, et que ce sera à l'avantage des citoyens. Mme la Présidente, je pense que la preuve n'a pas été faite de cela. Je pense qu'effectivement il y a comme des questions à se poser avec une avalanche de PPP. Et c'est pour cela, Mme la Présidente, qu'il faut faire le débat de fond préalablement sur les risques. Les risques justement sont trop grands pour l'État du Québec. Les risques sont trop grands de ne pas baliser suffisamment les secteurs touchés. Il faut préciser davantage, il faut faire taire les inquiétudes, Mme la Présidente. Vous savez, les expériences ne sont pas toutes concluantes dans le monde, et les inquiétudes sont palpables dans tout le Québec.

Je voudrais quand même, Mme la Présidente, juste signaler, parce qu'on a plein d'information, et les recherchistes nous trouvent plein d'information, puisqu'il y a eu une commission à ce propos... Mais, quand on regarde le secteur de la santé, l'ensemble des représentants du réseau de la santé demandent que soit retirée du projet l'obligation qui leur est faite de recourir aux services de l'agence. C'est sérieux, Mme la Présidente. L'Association des hôpitaux du Québec, devant l'étendue des pouvoirs consentis à l'agence dans le projet de loi et l'imprécision des objets sur lesquels s'exercent ces pouvoirs, l'association ne peut que recommander le retrait de ce projet de loi dans sa forme actuelle. La Fédération des infirmières... Mme la Présidente, je pourrais continuer, et continuer, et continuer ainsi sur le nombre de groupes et de gens qui s'inquiètent quant à l'avenir, quant au fait qu'on n'a pas balisé suffisamment ce projet de loi.

Et il y a encore plus, Mme la Présidente, ont été soulevés des problèmes qui ont été abondamment abordés par ma collègue la députée de Champlain et par les gens de ce côté-ci de la Chambre où on a soulevé des problèmes d'éthique et de transparence. Voyons, si on va, par exemple, Mme la Présidente, en ce qui concerne cette idée de la transparence, le projet de loi n° 61, qui supporte la création d'une agence des partenariats public-privé... L'agence serait impliquée dans la sélection et la priorisation des projets ainsi que dans la négociation, la conclusion et la gestion des contrats de PPP. Les ministères et organismes du gouvernement, les établissements du réseau de l'éducation, de la santé et des services sociaux, des organismes municipaux seraient tenus de recourir aux services de l'agence. Selon le projet de loi, l'agence aurait pour rôle de susciter, recueillir, évaluer... Alors, voyez comment ça en mène large, Mme la Présidente, que ce projet de loi.

Et, parce qu'il ne me reste pas beaucoup de temps, Mme la Présidente, puis je veux absolument tout livrer ce que j'ai à livrer, mais, au niveau de l'éthique, les enjeux majeurs dans le dossier des partenariats et de la mise en place de l'agence, c'est toute la question de l'éthique. En effet, un bref survol de la littérature portant sur la question a vite fait de nous mettre en garde contre les nombreux pièges inhérents à la prolifération des PPP, et je pense qu'on n'a pas suffisamment de garanties à ce sujet.

n(17 h 20)n

En ce qui concerne toute la question de l'argument de l'endettement que devra connaître le Québec pour rencontrer ses obligations, c'est assez étonnant de voir... On nous dit, par exemple, que les partenariats public-privé sont souvent présentés comme une solution au manque de liquidités du gouvernement. Mais, dans les faits, ce n'est pas ça qui se produit. Ce n'est pas ça, la réalité.

Alors, j'écoutais la présidente du Conseil du trésor et je vais prendre 30 secondes pour mentionner ça, Mme la Présidente, parce que ça m'a touché beaucoup, puisqu'il s'agit de ma région. La présidente du Conseil du trésor avançait que, avec des partenariats public-privé, il n'y aurait pas eu de cas comme le dossier de la Gaspésia. Et j'ai toujours de la difficulté avec ça, Mme la Présidente, parce que justement c'en était un, un dossier où le privé a été mis à contribution, dans la question de la Gaspésia. Et on n'a aucune garantie que ça ne pourrait pas se produire. Ce qu'il faut, dans le dossier de la Gaspésia comme dans d'autres, c'est la volonté politique de mettre l'État du Québec au service des régions et de son développement.

En conclusion, Mme la Présidente, puisqu'il me reste très peu de temps, je dirais: Oui au principe des PPP, mais après un débat de fond; pas dans tous les secteurs, pas dans toutes les missions de l'État. Et le projet de loi est trop vaste, il est trop large et il y a trop de lumières rouges, comme le Commissaire aux lobbyistes, le commissaire aux citoyens... Il y a trop de risques, et voilà pourquoi, dans sa forme actuelle, les gens de ce côté-ci de la Chambre, on devra voter contre le principe même du projet de loi et bien sûr contre le projet de loi s'il n'est pas amendé de façon satisfaisante, Mme la Présidente. Merci beaucoup.

La Vice-Présidente: Je vous remercie, M. le député. Alors, comme prochain intervenant, je vais reconnaître le député de Roberval, qui est également adjoint parlementaire du ministre du Développement économique et régional et de la Recherche. À vous la parole.

M. Karl Blackburn

M. Blackburn: Merci, Mme la Présidente. D'abord, d'entrée de jeu, encore une fois, c'est de mentionner à quel point je suis fier de prendre la parole ici, aujourd'hui, dans cette Assemblée, d'autant plus que vous avez l'air dans une forme splendide à l'aube de la session parlementaire intensive. Alors, je pense que ça va bien se dérouler au cours des prochaines semaines, et c'est tout à votre honneur.

Mme la Présidente, j'aimerais commencer par une citation, une citation qui, je pense, peut nous porter... va porter sur l'orientation que je veux donner à mon allocution, Mme la Présidente: «Ce projet de loi établit des normes pour la réalisation de projets de construction, de réfection ou d'exploitation d'infrastructures de transport en partenariat avec le secteur privé et il accorde à cet effet des pouvoirs spécifiques au ministre des Transports et au gouvernement. Il encadre plus particulièrement la réalisation d'infrastructures routières et leur exploitation en vertu d'une entente de partenariat et il prévoit notamment l'application du Code de la sécurité routière sur de telles infrastructures et de certaines règles concernant l'imposition de péages et leur recouvrement.» Moi, je pense, Mme la Présidente, que c'est un élément extrêmement important des partenariats public-privé, et bien sûr que je vais me permettre de vous donner la source de cette note explicative qui provient du projet de loi n° 164, adopté, en 2000, par l'ancien gouvernement, et ça, de manière unanime, ici, à l'Assemblée nationale.

Alors, moi, je vous avouerai que, de ce côté-ci de la Chambre, je pense qu'on fait preuve de constance dans les décisions et dans les orientations qu'on veut apporter à la population du Québec.

De l'autre côté, dépendamment de l'orientation du soleil, on peut voir à quelque part qu'il y a une différence dans leurs opinions. Et, lorsque j'écoute les députés de l'opposition nous faire part de leur opposition systématique au projet de loi n° 61, je vous avouerai qu'ils le font avec très peu de conviction. On voit qu'à quelque part il y en a beaucoup parmi eux qui sont mal à l'aise aujourd'hui de prendre la parole contre un projet de loi qu'ils ont unanimement adopté il y a quatre ans.

Et je vous avouerai que l'allocution extrêmement intéressante que mon collègue le député de Hull et l'adjoint parlementaire à la présidente du Conseil du trésor a eu l'occasion de faire la semaine passée et d'une manière, je vous dirais, très explicite, en détaillant chacun des points du projet de loi n° 61, il faut croire que les gens de l'opposition n'ont pas l'air d'avoir compris. Alors, c'est un peu triste parce que ça valait vraiment la peine d'entendre mon collègue faire cette allocution.

Et je vous avouerai que, cet après-midi, en regardant les députés de l'opposition faire leurs allocutions... J'écoutais la députée de Marie-Victorin, et pour eux ? je comprends, là, je comprends qu'on a un problème, on a problème de vision ? pour eux, PPP, c'est: panique, panique, panique. J'écoutais la députée de Marie-Victorin, cet après-midi, qui disait, puis elle avait l'air sincère dans ce qu'elle disait, mais je vous avouerai que... mais avait l'air sincère pareil, qu'on allait augmenter les impôts parce qu'à quelque part les services ne suffiraient plus, l'entreprise privée allait faire en sorte qu'il allait y avoir une pression importante sur les finances publiques, que nous allions devoir augmenter les impôts, qu'on allait manquer de services, que la population allait être prise en otage par rapport aux nouvelles orientations qu'on veut donner. Je ne peux pas croire qu'à quelque part les gens qui nous écoutent ce soir et les gens qui ont eu l'occasion de nous entendre depuis plusieurs semaines puissent imaginer ça.

Je vous avouerai... Je vais faire une citation, une citation qui a été prise dans le journal La Presse, la semaine dernière, et qui parlait effectivement de... La catastrophe n'a pas eu lieu. Rappelez-vous, l'année dernière, lorsqu'on a eu l'occasion d'adopter des projets de loi, de faire des modifications que nous jugions essentielles pour que le Québec puisse continuer de prospérer, rappelez-vous le tollé de protestations qui avait été annoncé. Et je vous avouerai que... Je vais faire la citation de l'article de La Presse, écrit par Denis Lessard, le 13 novembre dernier, qui, par rapport à cette catastrophe tant annoncée par les gens de l'opposition, par plusieurs centrales syndicales, faisait état de... du suivant: «C'était il y a un an. D'une seule voix, les centrales syndicales prédisaient une catastrophe au Québec parce que le gouvernement voulait amender l'article 45 du Code du travail pour faciliter la sous-traitance. L'adoption à toute vapeur en décembre du projet de loi déposé le 13 novembre avait donné lieu à des manifestations d'une rare agressivité devant le parlement. La loi s'applique depuis février 2004. Depuis? Rien.»

Au contraire, au contraire, les statistiques le démontrent très clairement, la situation économique du Québec va bien. Nous sommes en train justement de prendre de l'avance, nous sommes en train de rattraper le chemin qui était très éloigné entre nous et bien sûr nos partenaires. Nous sommes en train de démontrer que les décisions que nous avions prises à ce moment-là étaient les bonnes décisions pour nous permettre d'asseoir nos objectifs, nous permettre d'asseoir les balises sur lesquelles nous voulions construire une maison solide pour assurer à nos jeunes qui nous suivent et aux générations qui nous suivent la possibilité de pouvoir, eux aussi, profiter de ce que nous allions prendre comme décisions. Et je vous avouerai que ce que nous sommes en train de voir actuellement démontre à quel point nous avions raison de le faire.

Il y a un élément qui est extrêmement important qu'il faut que les gens de l'opposition puissent comprendre. Rappelez-vous, cet été, lors des différents forums qui ont eu lieu dans toutes les régions du Québec, qui ont été suivis par un forum des générations ici, à Québec, qui regroupait l'ensemble des partenariats de toutes les régions du Québec, bien sûr il y avait des gens des centrales syndicales, il y avait des gens du côté patronal, il y avait des gens de l'éducation, de la santé, il y avait des jeunes, il y avait des moins jeunes, il y avait des gens de tous les regroupements de la société qui étaient assis ensemble justement pour trouver les bonnes solutions pour nous permettre de faire face aux défis qui se posent à nous.

Et, juste pour rappeler à l'opposition officielle ces grands enjeux qui sont les suivants: la démographie et les finances publiques, qui sont extrêmement importants, on a juste à penser, Mme la Présidente ? et je suis convaincu que les gens qui sont chez eux ce soir et qui nous écoutent le comprennent très bien ? qu'en 1976 il y avait huit travailleurs par personne qui était à la retraite. Lorsque je parle d'une personne qui est à la retraite, je parle bien sûr d'une personne de 65 ans et plus. Donc, il y avait huit personnes qui contribuaient ? de par leur travail, de par leur richesse collective, en payant des impôts, en dépensant davantage, en faisant tourner l'économie ? qui contribuaient à payer pour bien sûr qu'on puisse se doter de ces services sociaux dont nous sommes très fiers aujourd'hui. Nous n'avons qu'à penser, par exemple, à notre système d'éducation, qui fait la fierté bien sûr du Québec, à notre système de santé, qui fait l'envie de plusieurs pays à travers le monde, de notre système d'infrastructures, de tous les services publics que nous nous étions donnés. Alors, nous étions huit travailleurs pour pouvoir continuer de s'offrir ces services-là.

n(17 h 30)n

Aujourd'hui, ce ratio est maintenant de cinq pour un. Donc, il y a cinq personnes qui sont au travail pour chaque personne qui est à la retraite. Donc, il y a un petit peu moins de gens qui contribuent, de par leurs efforts, de par leur travail, à la richesse collective parce qu'à un moment donné il y a de moins en moins de gens qui sont là. En 2025, Mme la Présidente, ce ratio-là va être de deux travailleurs pour chaque personne qui est à la retraite. Alors, vous comprendrez que, dans ces circonstances, en voulant protéger le tissu social que nous nous sommes donné et dont nous sommes très fiers, en voulant protéger les acquis que nous avons et qui font la fierté du Québec, il faut absolument que nous puissions regarder des alternatives différentes pour pouvoir bien sûr continuer de prospérer, mais pour pouvoir aussi continuer de faire grandir ces services-là pour bien sûr que nos générations qui nous suivent puissent en profiter. Alors, le projet de loi n° 61 va directement dans cette ligne-là. Il apporte des pistes de solution dans lesquelles nous devons nous pencher pour pouvoir évaluer la pertinence de chacun de ces partenariats. Un partenariat public-privé, Mme la Présidente, ce n'est pas la fin du monde. Au contraire, en 2000, l'ancien gouvernement en avait même fait une loi qui a été adoptée à l'unanimité, qu'il a voulu appliquer. Donc, c'est quelque chose qui peut fonctionner et c'est quelque chose dans lequel nous croyons profondément.

Tout à l'heure, j'écoutais les gens de l'opposition qui martelaient que les partenariats public-privé allaient faire en sorte que l'entreprise privée allait faire seulement des bénéfices sur le dos des citoyens et des citoyennes, qui allaient en avoir des besoins, donc qui allaient, mon ami, souffrir comme jamais. Donc, les gens de l'opposition sont en train de dire que les entrepreneurs, les créateurs d'emplois, au lieu de les traiter comme des bijoux, comme on se doit de le faire, puis de les aider, puis de les accompagner pour faire ce qu'il font de mieux, c'est-à-dire créer des emplois, donc ce qu'ils sont en train de nous dire, c'est que c'est des bêtes noires parce qu'ils génèrent des activités économiques, ils génèrent des bénéfices qui souvent sont réinvestis dans l'économie du Québec pour pouvoir faire de la création d'emplois.

Alors, vous comprendrez, Mme la Présidente, que j'ai un peu de misère à essayer de calibrer tous ces éléments-là. Et l'apocalypse tant annoncée, l'épouvantail qui est tant brandi par les gens de l'opposition font en sorte qu'à quelque part c'est trop. Trop, c'est comme pas assez. On a une expression qu'on se sert souvent chez nous: Trop, c'est comme pas assez. Et je vous dirais que: Qui trop exagère risque de perdre sa crédibilité.

Écoutez, les PPP ? et la présidente du Conseil du trésor, elle a été extrêmement claire à ce niveau-là; les PPP ? il y a du privé et il y a du public. Comment peut-on arriver à regarder des nouvelles pistes de solution? Comment peut-on arriver à faire les choses différemment, à sortir des sentiers battus pour justement assurer à quelque part que nous puissions en profiter mais que les générations qui sont derrière nous puissent aussi en profiter? Et, dans ce contexte-là, c'est pour ça que la présidente du Conseil du trésor, elle a tenu une commission parlementaire. Ça s'est fait dans une manière extrêmement transparente. C'est pour ça qu'à quelque part les recommandations qui ont été faites... Bien sûr qu'il y a eu des recommandations qui ont été faites, qui ont été très bien entendues par la présidente du Conseil du trésor et qui démontrent à quel point nous voulons faire en sorte que ce partenariat privé-public puisse bien sûr fonctionner et nous assurer que nous sommes en mesure de prendre les bonnes décisions.

Et, pour s'assurer de comprendre ça, Mme la Présidente, j'aimerais juste apporter un élément important sur qu'est-ce qu'un partenariat public-privé parce que les éléments qui nous sont apportés par l'opposition souvent nous font croire à toutes sortes de choses. Écoutez, un partenariat public-privé, c'est une entente contractuelle, généralement de longue durée ? on parle de 25, 30 ans, mais ce peut être plus, ce peut être moins, mais c'est une entente qui se fait sur une longue période ? associant des organismes publics à des entreprises privées du secteur de la conception pour la réalisation, pour l'exploitation d'un projet. L'entente peut impliquer une participation du secteur privé au financement. Il n'y a pas de mal à ça. Il n'y a pas de mal à demander à des entreprises de participer à du financement dans des projets collectifs pour se donner des services. Je ne comprends pas pourquoi l'opposition touche à ça avec une baguette de 25 pieds comme si c'étaient des bêtes noires, comme si c'étaient des éléments qu'il fallait renier. Ces gens-là contribuent à la richesse collective, contribuent au développement économique de notre province. Donc, dans ce contexte-là, moi, je veux être un partenaire de ces gens-là pour faire de la création d'emplois, pour faire de l'activité, la création de la richesse économique.

Un partenariat privé-public, Mme la Présidente, il y a un partage de responsabilités, au lieu que ce soit toujours le public qui assume l'ensemble des risques, là, 100 % des risques. Et il faut comprendre que, dans certains dossiers, comme le métro de Laval par exemple... Tantôt, j'écoutais le député des Îles-de-la-Madeleine nous parler du dossier de la Gaspésia. Je vous avouerai que je ne l'ai pas trouvé peureux d'embarquer dans un dossier comme celui-là. Il y a des éléments, vous comprendrez, qui sont assumés maintenant à 100 % par le secteur public parce qu'à quelque part les gens de l'autre côté n'ont pas eu la brillance de prévoir certains éléments. Construire un métro qui manque 1 km, ou à peu près, pour rejoindre les bouts... Je comprends qu'il peut manquer peut-être un quart de pouce quand tu fais une maison neuve, mais, quand tu construis un métro, Mme la Présidente, et qu'il manque 1 km...

Une voix: 1,5 km.

M. Blackburn: 1,5 km, on me mentionne 1,5 km. Moi, je viens de Roberval, donc les dimensions... Mais 1,5 km, à Laval, pour un métro, Mme la Présidente, y a-tu quelqu'un à quelque part qui dormait sur la «switch», de l'autre côté?

Et là, maintenant, le risque est assumé à 100 % par les contribuables, le risque est assuré à 100 %. Donc le 300, le 500, le 800, le milliard d'argent qui manque parce que ces gens-là ont manqué de vision, parce que ces gens-là n'ont pas eu le courage de faire affaire avec des privés, donc c'est 1 milliard, 1,5 milliard par rapport à des manques de jugement qui sont assumés par la population du Québec, Mme la Présidente, qui sont assumés par les citoyens et les citoyennes du Québec de par leurs impôts et de par leurs taxes, mais c'est des services qu'on ne peut pas leur donner non plus parce qu'à quelque part il faut payer pour ces... ? j'ai passé proche d'utiliser un terme antiparlementaire, je vais me ressaisir ? mais il faut payer pour ce genre de décisions qui n'ont pas été prises à ce niveau-là.

Un partenariat public-privé, Mme la Présidente, c'est une entente assurant la protection des deniers publics à l'intérieur des coûts et des délais fixés et pour un résultat de qualité clairement défini au préalable et basé sur les besoins. Alors, ça va directement en lien avec ce que je suis en train de vous dire par rapport, entre autres, à certains éléments qui jettent beaucoup un ombrage sur la gestion du Parti québécois qui faisait à l'époque le gouvernement du Québec. Ce n'est pas de la sous-traitance, car l'État n'est pas le seul à assumer le risque et le financement. Bien sûr, il s'agit d'une entente par laquelle nous assurons la pérennité de notre patrimoine afin que les générations qui suivent puissent aussi en bénéficier. Mme la Présidente, ça cadre directement dans la philosophie et dans les orientations que nous sommes en train de prendre.

Et j'ai eu l'occasion souvent, au cours de la dernière campagne électorale, de mentionner qu'à quelque part... Vous savez, j'ai quatre petits bonhommes, et ce que je souhaite le plus, c'est que les décisions que nous prenons aujourd'hui puissent être les bonnes décisions, que les fondations sur lesquelles nous sommes en train de construire le Québec de demain puissent être solides et non des fondations faites en argile. Alors, bien sûr que, dans ce contexte-là, je suis fier de faire partie de l'équipe actuellement qui a le courage de prendre des décisions courageuses, de faire partie de l'équipe qui a le courage, Mme la Présidente, de défier les gens de l'opposition qui crient à la destruction du Québec, parce qu'à quelque part, si on est dans cette situation-là aujourd'hui, c'est par leur inaction et le manque de jugement qu'ils ont bien sûr laissé démontrer au cours des dernières années.

Maintenant, pourquoi les PPP, Mme la Présidente? Pourquoi on est en train de faire ça? C'est justement dans le sens qu'il faut qu'on soit en mesure d'améliorer les façons de faire, développer, par exemple, les services en ligne, d'alléger et de simplifier les structures, Mme la Présidente, de réévaluer les programmes. Il ne faut pas avoir peur de se questionner.

La philosophie de l'ancien gouvernement, c'était bien sûr l'objectif numéro un de leur parti, la souveraineté du Québec. Alors, en dehors de la souveraineté du Québec, il n'y a rien qui primait. Point de salut. Alors, les seuls objectifs qu'ils travaillaient, c'était de poser des gestes en fonction de rallier le plus de gens possible à leur cause, à la souveraineté du Québec. Alors, vous comprendrez que, dans ce contexte-là, bien sûr qu'il y a eu beaucoup d'éléments qui ont été délaissés, et c'est pour ça qu'à quelque part il faut avoir le courage de prendre des décisions qui sont importantes mais qui vont être salutaires, Mme la Présidente, pour les générations qui nous suivent.

Et, moi, je vous avouerai qu'à quelque part nous avons écouté, nous avons écouté en campagne électorale, nous avons écouté depuis que nous sommes élus. La présidente du Conseil du trésor a écouté en commission parlementaire, bien sûr avec son illustre adjoint parlementaire, mais aussi avec l'ensemble des collègues du Parti libéral du Québec, du gouvernement du Québec. Et je regarde le député de Laval-des-Rapides qui, de par les connaissances qu'il a et de par l'expertise qu'il a, et le jugement qu'il a, est un membre extrêmement important aussi sur cette commission parlementaire là, qui, grâce à son travail, apporte bien sûr de la plus-value, de la bonification, comme l'ensemble des collègues sont en train de le faire, au projet de loi n° 61 sur les PPP.

Je tiens à ce que le projet de loi, Mme la Présidente, version amendée reflète ce que les groupes qui sont venus nous voir, qui sont venus rencontrer Mme la présidente du Conseil du trésor... puisse bien sûr être bonifié. Nous travaillons, et c'est ce que Mme la présidente est en train de faire, sur des projets d'amendements.

Le bilan maintenant de la commission parlementaire, parce que je pense que c'est important de le faire. Il y a eu une commission parlementaire, il y a beaucoup de groupes qui sont venus présenter leur opinion, expliquer leur vision sur les PPP et dire s'ils étaient favorables ou contre, mais bien sûr apporter leur...

Une voix: ...

M. Blackburn: On me dit: 10 jours de commission parlementaire. Alors, la commission parlementaire, ce qu'elle a permis de faire, Mme la Présidente, c'est bien sûr d'éclairer la réflexion. On a parlé beaucoup d'énergie, aujourd'hui, à la période des questions et, à entendre le chef de l'opposition officielle, on allait être à peine capable d'assurer l'éclairage du parlement dans les années 2009. Je l'ai trouvé courageux de dire ça, c'est parce qu'à quelque part ils n'ont pas pris les bonnes décisions en 1994, ils ont arrêté tout grand projet de développement. Et, aujourd'hui, ils viennent nous accuser, par rapport à nos visions sur le développement hydroélectrique ? je me permets de faire un petit aparté ? mais, sur le développement des ressources électriques, ils nous ont accusé qu'on va manquer de courant parce qu'ils n'ont pas pris les bonnes décisions. Alors, la commission parlementaire, Mme la Présidente, ce qu'elle a permis de faire, c'est d'apporter des éclairages à cette réflexion.

n(17 h 40)n

La présidente du Conseil du trésor a fait de l'écoute active pour expliquer et bien sûr répondre à des craintes non fondées. Et c'est ce qu'on entend, là, c'est ce qu'on entend du côté de l'opposition, là. Je comprends qu'à quelque part il y a des changements qui sont en train de s'impliquer, il y a des changements qui sont en train de prendre forme, mais, à brandir les épouvantails comme ils sont en train de le faire, je pense qu'à quelque part, comme je l'ai mentionné tantôt, qui trop exagère risque de perdre toute crédibilité. Et, dans ce contexte-là, c'est ce qu'ils sont en train de faire. Et je suis convaincu que les parlementaires qui vont me suivre et qui vont faire partie de l'opposition officielle, je suis convaincu qu'ils vont continuer dans la même lignée, ils vont continuer dans la même lignée en décriant le projet de loi n° 61, pour toutes sortes de raisons. Mais ça fait partie de leur travail, alors il faut accepter ça. Mais ce qui est important, c'est qu'on puisse faire part aussi à ceux qui nous écoutent d'autres éléments qui sont extrêmement importants.

Il y a de nombreux participants qui ont démontré une ouverture prudente aux PPP. Ce n'est pas la panacée, ce n'est pas la panacée de la réussite, c'est une alternative supplémentaire, c'est un outil supplémentaire que le gouvernement du Québec se donne pour justement affronter ces réalités et ces grands défis qui se posent à nous. J'utilise souvent une expression, Mme la Présidente, qui est la suivante: Il y a juste les poissons morts qui suivent le courant. Alors, on ne pourrait rien faire, rester en place, puis continuer de suivre la lignée que l'opposition officielle, qui était au gouvernement à l'époque, nous enligne, sauf que, nous, on a le courage de prendre des décisions, on a le courage de sortir des sentiers battus, on a le courage de faire les choses différemment, justement parce qu'à quelque part les défis d'hier ne sont pas les mêmes que demain. Et, dans ce contexte-là, bien, les PPP cadrent directement dans cet objectif-là.

À peu près unanimement, et il y avait un coup de barre à donner, c'est ce qu'on est en train de faire, c'est ce qui est ressorti au niveau de la commission parlementaire... Nous avons été invités à la prudence et à la transparence. Bien sûr, c'est ce que nous sommes en train de faire, c'est ce que la présidente du Conseil du trésor, elle a l'intention de faire, et c'est ce qu'elle a mentionné à chaque fois qu'elle a eu l'occasion de le faire, en période de questions à l'Assemblée nationale, c'est ce qu'elle a l'occasion de dire, qu'il va y avoir beaucoup de prudence et de transparence.

Et il ne s'agit pas encore une fois, Mme la Présidente, d'une solution miracle. Ce n'est pas une idéologie libérale, parce qu'en 2000 nous avons voté avec l'opposition officielle, qui était à l'époque le gouvernement, sur un projet de loi sur les PPP. Ça fait partie des réalités d'aujourd'hui; nous devons nous poser de nouvelles questions, et de nouvelles solutions sont apportées. Et, dans ce contexte-là, moi, je suis convaincu que les décisions que nous prenons aujourd'hui vont assurer à nos jeunes la prospérité économique dont ils ont droit. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Roberval. Alors, comme prochain intervenant, je reconnais le député de Joliette et porte-parole de l'opposition officielle en matière d'affaires intergouvernementales canadiennes. À vous la parole.

M. Jonathan Valois

M. Valois: Merci, Mme la Présidente. Je vais à mon tour intervenir sur le projet de loi n° 61, le projet de loi sur l'Agence des partenariats public-privé du Québec, pour apporter, moi aussi, à mon tour, ma contribution, ma réflexion, comme tous les parlementaires sont invités à le faire, continuer dans cette lignée des commissions parlementaires auxquelles j'ai eu la chance d'assister, moi aussi, pour apporter, oui, une série de craintes, de préoccupations, apporter, moi aussi, ma voix à celles et ceux de ma formation politique pour que la présidente du Conseil du trésor considère une série de recommandations, considère aussi tous nos propos dans le sens de la prudence et dans le sens de la transparence.

Alors, de quoi parlons-nous lorsque nous parlons des partenariats public-privé? Est-ce que nous parlons de privatisation, de sous-traitance, de gestion déléguée? Bien, évidemment, plutôt que de moi-même vous donner une définition, pourquoi ne pas prendre la définition qui est celle qui nous a été transmise? Alors, on parle ici d'un contrat à long terme qui lie un organisme public et une entreprise privée. Par ce contrat, l'entreprise est associée à la conception, à la réalisation, à l'exploitation et généralement au financement d'un projet émanant de l'Administration publique et implique un partage de responsabilités, un partage des risques et des bénéfices entre les partenaires public et privé. Alors, on comprend très bien, à l'intérieur de cette définition-là, Mme la Présidente, que le partenariat est composé d'une conception avec le privé de nos services publics, une exploitation avec le privé, une réalisation et un financement. Alors, c'est quatre grands éléments de partenariat qui vont jusqu'à aller à l'intérieur d'une implication au niveau du partage de responsabilités, de risques et de bénéfices. Alors, ce partenariat et ce partage, il est entre qui? C'est un peu ça qu'on doit regarder, on dit: le public et le privé. Bien, il est entre ceux et celles qui ont d'abord comme premier élément de réflexion le bien commun et le public et ceux et celles qui ont comme premier élément de réflexion le profit. Et, en ce sens-là, comment faire conjuguer des réalités qui semblent aussi différentes à prime abord, c'est-à-dire des réalités basées sur le bien commun et des réalités basées sur une quête de profit?

Avant de répondre à cette question, Mme la Présidente, il faut comprendre qu'au Québec une autre forme de privé existe, le privé social, ce qu'on pourrait appeler l'économie sociale, ce qu'on pourrait appeler les coopératives. C'est du privé, mais qui n'est pas individuel. C'est un privé social, comme je l'ai dit, c'est un privé collectif. Et, pour des raisons historiques, pour des raisons culturelles, voire même sociologiques, le Québec est une terre où le coopératisme se cultive bien. Comme je vous l'ai dit, l'absence de propriétaires privés francophones et aussi l'obligation de mettre en commun nos ressources collectives, pour gérer une activité économique et sociale, ont fait en sorte qu'ici, en terre d'Amérique, au Québec, s'est développée une forme d'entreprise privée, de privé collectif, les coopératives. On a juste à penser aux caisses populaires. Évidemment, le premier exemple qui nous vient lorsqu'on parle des coopératives, ce sont les caisses populaires. La première institution économique du Québec n'est pas une banque privée, c'est une coopérative. Déjà là, on a un élément très important qu'on doit considérer. Mais il n'y a pas simplement les caisses populaires, il y a aussi des coopératives au niveau agricole, des coopératives agricoles, des coopératives funéraires, les coopératives de radiodiffusion, les coops scolaires. Quel cégep ou université n'a pas sa coop scolaire? Il y a aussi des coopératives évidemment d'habitation, de travailleurs, pour toutes sortes de choses.

Donc, le système coopératif est un système qui vit bien ici. C'est une réalité économique privée qui vise... Et, si je parle du milieu coopératif, Mme la Présidente, c'est que le Conseil de la coopération est venu voir la présidente du Conseil du trésor, a déposé un mémoire, a réfléchi sur la question du partenariat public-privé. Ils sont venus nous dire qu'au Québec tout n'est pas simplement public et privé, comme l'entend le projet de loi qu'il y a ici. Et c'est drôle que ce soit par rapport à une réflexion qui nous est amenée par le Conseil de la coopération qu'on puisse en arriver ici, aujourd'hui, à comprendre que cette société distincte que nous parlons, ce Québec n'est pas simplement distinct par sa culture, n'est pas simplement distinct par sa langue, il est aussi distinct par son tissu économique et, comme je vous l'ai dit, historiquement développé.

Alors, je vais vous citer un passage de la présidente du Conseil de la coopération lors de sa présentation en commission parlementaire. Alors, je cite: «Nous préconisons, nous, une autre voie qui correspond peut-être plus à notre réalité et à notre vécu. Nous nous inspirons, entre autres, des travaux d'un chercheur très connu, Benoît Lévesque, qui a dirigé longtemps le Centre de recherche sur les innovations dans l'économie sociale, les entreprises et les syndicats, et ce modèle que préconise M. Lévesque est fondé sur des partenariats entre l'État, le marché et la société civile. En s'appuyant sur 20 ans de recherche, M. Lévesque tend à démontrer qu'un nouveau modèle de développement est en émergence au Québec, un modèle qu'on pourrait qualifier de partenarial ? certes ? un modèle qui se distingue aussi bien du modèle keynésien ou fordiste de la Révolution tranquille que du modèle néolibéral» qu'on entend donc parler depuis quelque temps.

Alors, je continue la citation: «Lévesque affirme que ce qui distingue le Québec des autres pays dans leur façon de faire, c'est que ce renouvellement de notre modèle de développement repose sur un paradigme davantage porteur d'innovations fondé sur la solidarité et l'innovation.

«Cet éclairage nouveau dépasse les limites actuelles de l'analyse qui se limite donc à deux paradigmes: un modèle de développement reposant sur les lois du marché, le privé et la rentabilité alliée à ces lois du marché, et l'autre, l'intérêt général où l'État serait responsable dans le fond de cette mise... de cet intérêt général et à répondre à cet intérêt général par des services publics», ce que je vous ai parlé tout à l'heure.

Je continue la citation: «D'un autre côté donc, de part et d'autre, un débat qui se situe entre l'intérêt général et les lois du marché. [...]À notre avis, si on mobilise uniquement les acteurs du secteur privé ou ceux du secteur public dans cette démarche, il est plausible qu'elle provoque un important choc culturel et un important choc de société aussi.»

n(17 h 50)n

Donc, fort de cette présentation, fort de cette réflexion, fort aussi de cette conception historique de ce privé collectif et social qui s'est développé qui s'appelle le coopératif, je pourrais vous dire que ma première interrogation, par rapport au projet de loi n° 31, est celle de dire que...

Des voix: ...

M. Valois: ... ? projet de loi n° 61, désolé; est que ? ce projet de loi ne tient peut-être pas compte tant de l'histoire, du développement et des particularités économiques du Québec. Et, lorsque questionnée à savoir si le projet de loi n° 61 prenait compte justement de cette idée des coopératives et de ce privé collectif et social qu'est le coopératisme, la présidente du Conseil de la coopération nous a répondu: «Nous avons souligné quelques éléments ? évidemment, je la cite encore, là; nous avons souligné quelques éléments ? [là] qui nous semblaient absents, mais qui nous semblent... une des clés qui manquent, je pense, qui est absolument importante, c'est le client, l'usager, la personne qui est au coeur, dans le fond, des services de l'État. Où est-elle dans ce nouveau mécanisme là? Où est-elle dans ce nouveau type de partenariat là? [...]Il y a à la fois un danger que le gouvernement choisisse uniquement un type de partenariat et un type de grand projet qui va l'amener à être partenaire beaucoup plus avec des grandes entreprises ou des entreprises extérieures [au Québec] dont on a peu de contrôle comme citoyen.»

Ce n'est pas rien. Ce n'est pas rien comme réflexion qui est apportée par le Conseil de la coopération. Je ne dis pas que, le projet de loi, je serais capable de vivre avec demain matin, si ce projet de loi là était un genre de projet de loi partenariat public-coopératif. Ce n'est pas ça que je vous dis. Je vous dis qu'à l'intérieur de la réflexion qui a mené à l'élaboration du projet de loi n° 61 il y a tout un pan de notre histoire, de notre réalité, de la culture québécoise qui n'est pas pris en considération, et le Conseil de la coopération nous dit: On ne trouve pas notre place là-dedans.

Il y a eu un échange d'ailleurs très, très intéressant entre la présidente du Conseil du trésor et la présidente du Conseil de la coopération sur le modèle italien, où justement ce partenariat public-privé prenait énormément en considération le modèle coopératif. Alors, pourquoi ici, terre de coopératisme en Amérique, on n'a pas pensé à ça à l'intérieur du projet de loi n° 61? Peut-être sommes-nous beaucoup trop ou peut-être énormément désireux de faire du Québec, bien, une autre province canadienne et de copier, de couper et de copier ces modèles-là du reste de l'Amérique ou d'une partie de l'Europe. Il faut réfléchir un peu plus longuement sur qu'est-ce qui, au Québec, avec son histoire et son tissu économique, ferait en sorte que l'État pourrait s'associer et faire participer le milieu économique au développement et à la livraison de services publics. Mais cette réflexion semble très mince lorsqu'aujourd'hui on a les gens du Conseil de la coopération qui nous disent que tout le milieu coopératif n'a pas été considéré à l'intérieur de cette réflexion-là.

Mais, lorsqu'on nous dit par contre... ? et ça va m'amener à mon deuxième problème de fond que j'ai et interrogation que j'ai par rapport au projet de loi n° 61 ? c'est lorsqu'on nous dit qu'il y a un danger par rapport au citoyen, au client, à l'usager. Bien, mon deuxième problème est beaucoup plus lié à une série de considérations démocratiques. Il y a des questionnements qu'on doit avoir, par rapport à nos institutions démocratiques, en regard à ce projet de loi n° 61. Qu'advient-il de la capacité de nos institutions démocratiques d'orienter les décisions, de s'assurer que nos ressources communes sont administrées par les représentants de notre collectivité? Encore une fois, comme je viens de le lire, la présidente du Conseil du trésor reçoit certains avertissements. On doit nous-mêmes, lorsque nous sommes ici, dans cette institution démocratique première qui s'appelle l'Assemblée nationale, lorsque nous déposons tout projet de loi, avoir une considération pour ces institutions démocratiques, et donc la démocratie au sens large, la place du citoyen dans la prise des décisions qui vont regarder l'ensemble des citoyens. Et, lorsque le Commissaire au lobbyisme, lorsque la Commission d'accès à l'information, le Protecteur du citoyen, le Vérificateur général nous allument des lumières rouges, nous lancent des avertissements en regard du projet de loi n° 61, ce sont quatre organismes nommés par l'Assemblée nationale, par cette Assemblée, qui nous disent: Attention, il y a possibilité de glissement démocratique.

Alors, au-delà de la politique, au coeur du politique, quatre grands organismes qui sont là pour s'assurer que nos institutions démocratiques demeurent les lieux où les décisions se prennent, où les décisions... que nos lieux, comme celui de l'Assemblée nationale, demeurent des lieux où les orientations collectives sont débattues, les lieux où les comptes sont rendus. Si on commence à concevoir, exploiter, réaliser, financer les quatre grands éléments que j'ai parlé tout à l'heure par rapport aux partenariats, alors commencer à concevoir, exploiter, réaliser, financer des services publics en dehors de nos institutions démocratiques avec l'incapacité de quatre grands organismes, nommés par cette Assemblée, d'intervenir sur ce type de partenariats et sur ce qu'ils feront, bien, nous contribuons nous-mêmes, par l'adoption de ce projet de loi n° 61, à l'affaiblissement de nos pouvoirs comme législateurs.

Et, en ce sens-là, Mme la Présidente, on doit être très vigilant. J'ai fait une tournée, je suis allé rencontrer plusieurs jeunes partout au Québec. La plupart de ces jeunes-là nous parlaient du glissement démocratique en lien avec la mondialisation. Quelle est notre réplique par rapport à ce glissement démographique en lien avec la mondialisation? Est-ce que notre Assemblée nationale essaie de se réapproprier des capacités d'intervenir sur sa collectivité? Non. Ce que je vois, c'est le projet de loi n° 61 qui au contraire amène un affaiblissement encore plus marqué de nos institutions démocratiques.

Alors, vous comprenez qu'évidemment comme démocrate j'ai énormément de difficultés par rapport à ça. Déjà que le Québec province se situe à l'intérieur d'une fédération canadienne qui est mal foutue de façon démocratique, une démocratie canadienne qui est à revoir, est à considérer, mais en plus, au-delà des tensions constitutionnelles, au-delà d'un projet de société québécois qu'il est impossible de mettre en place dans le cadre de la fédération canadienne actuelle, on se rend compte que c'est sur le terrain économique que tout se joue présentement. Le déséquilibre fiscal, on le comprend très bien, fait en sorte qu'il y a une pression économique énorme portée sur le gouvernement. Et le gouvernement répond à cette pression économique là comment? Non pas en voulant encore plus de démocratie et de capacité d'organiser ses fonds comme il le veut par rapport à un gouvernement fédéral qui fait la sourde oreille. Non. On accentue le glissement démocratique, on accentue le glissement démocratique en allant nous-mêmes tenter des partenariats avec un privé où nos institutions démocratiques auront peut-être peu de prise. Et, à ce niveau-là, à ce niveau-là, Mme la Présidente, il me semble qu'il y a certainement d'autres façons de faire par rapport à cette pression qui est très réelle, qui est très présente sur les finances publiques du Québec que de se lancer dans un partenariat public-privé qui, comme je vous le dis, peut contribuer à un affaiblissement de nos institutions démocratiques. Alors, comme je vous dis, Mme la Présidente... Il ne me reste vraiment pas beaucoup de temps.

En résumé, les deux grandes interrogations, ou questionnements, ou craintes que j'ai, un, par rapport à... Est-ce que ce projet de loi là répond à un tissu économique réel ici, au Québec? Et d'un autre côté, est-ce que nous, comme législateurs, comme démocrates, ne contribuons-nous pas avec ce projet de loi à notre propre affaiblissement?

Et, à cette deuxième considération, vous comprenez que, comme démocrate, comme législateur, moi-même, je ne peux pas voter pour un projet de loi qui risque d'accentuer le glissement démocratique. Je ne participerai pas à mon propre affaiblissement.

Et c'est pour ça qu'avec les membres de mon groupe politique, de mon parti politique, avec les membres qui sont ici au nom du Parti québécois, je ne pourrai pas, Mme la Présidente, voter en faveur de ce projet de loi là. Les gens de Joliette ne me le pardonneraient jamais. Vous le comprenez très bien. Les gens de Joliette ne m'ont pas élu pour que je vienne contribuer au fait que je ne puisse plus intervenir et que, comme législateur, mes interventions ne puissent plus porter, et, en ce sens-là, vous comprenez que, comme j'ai des craintes au niveau de ce glissement démocratique là en regard à ce partenariat public-privé, je ne peux aller dans le sens du projet de loi.

La Vice-Présidente: Je vous remercie, M. le député. Compte tenu de l'heure, nos travaux seront terminés pour la journée, c'est-à-dire qu'il nous reste les débats de fin de séance. Je vous signale que, si vous voulez toujours intervenir, M. le député de Joliette, il restait trois minutes à votre intervention, environ.

Débats de fin de séance

Mandat confié à l'Office des professions
relativement aux relations commerciales
entre des chaînes de pharmacies et des médecins

Alors, tel qu'annoncé précédemment, nous allons maintenant procéder aux trois débats de fin de séance. Le premier débat, ce sera sur une question adressée par le député de Dubuc au ministre de la Justice et ministre responsable des lois professionnelles concernant le mandat donné à l'Office des professions.

n(18 heures)n

Je vous rappelle que, conformément à l'article 310 du règlement, le député qui a soulevé le débat et le ministre qui lui répond ont chacun un temps de parole de cinq minutes et le député a ensuite un droit de réplique de deux minutes.

M. le député, je vous cède donc la parole pour les cinq prochaines minutes.

M. Jacques Côté

M. Côté: Merci, Mme la Présidente. Alors, Mme la Présidente, ce n'est pas d'aujourd'hui que nous questionnons le gouvernement sur la question des loyers gratuits entre les professionnels, particulièrement entre les médecins et les pharmaciens, et sur le mandat accordé à l'Office des professions du Québec.

Je rappellerai qu'il nous a fallu attendre 20 jours avant de pouvoir enfin y avoir accès, Mme la Présidente. J'ai posé une question au ministre afin qu'il puisse nous déposer ce mandat qu'il a donné à l'Office des professions. Enfin, il a fini par acquiescer à notre demande, et je lui en sais gré.

Toutefois, la lettre nous laisse songeurs, pour ne pas dire perplexes. En effet, le mandat donné à l'office, publié par communiqué de presse le 5 novembre dernier, ne semble pas tout à fait conforme à la lettre qui vient de nous être déposée. Et, oui, Mme la Présidente, le mandat est différent de la lettre, ou, si vous voulez, la lettre est différente du mandat. On peut y lire, au deuxième paragraphe de cette lettre: «L'Office des professions a fourni au cabinet du ministre de la Justice, à plusieurs reprises, des commentaires quant aux situations particulières que nous avons soulevées.» C'est le texte de la lettre. Et, dans un souci de transparence, je crois, je suis convaincu que le ministre devrait rendre public dans ce cas l'ensemble des commentaires qui ont déjà été transmis au cabinet par l'Office des professions.

Quelle était la nature exacte de ces commentaires? Sur quelles problématiques l'office a-t-il émis ces commentaires? Parle-t-on du règlement concernant le Code de déontologie des pharmaciens ou du règlement concernant l'existence en société des médecins? Parle-t-on du règlement concernant l'exercice en société des pharmaciens ou du projet de modification du Code de déontologie présentement en consultation auprès des pharmaciens? S'agit-il de commentaires émis par l'office au sujet de la lettre envoyée par la députée de Laviolette à son ordre professionnel? Le ministre a-t-il été consulté avant l'envoi de cette lettre par la députée? A-t-il demandé des commentaires auprès de l'office? Ou encore a-t-il émis lui-même des commentaires au sujet de cette lettre avant ou après son envoi? Alors, voilà, Mme la Présidente, autant de questions qui demeurent malheureusement sans réponse.

Quand vous dites, M. le ministre, que vous souhaitez, dans ce mandat, que l'office demande aux ordres professionnels la possibilité d'évaluer l'harmonisation de leurs codes déontologiques avec d'autres gouvernements, notamment avec les autres ordres professionnels au Canada, en ce qui a trait aux primes, aux rabais de location et toutes autres questions connexes, nous nous posons de sérieuses questions. D'abord, aucune indication à savoir si cette harmonisation sera à la hausse ou à la baisse. Quelles sont les intentions, quelles sont vos intentions, M. le ministre: renforcer ou diminuer les obligations ou les interdictions prévues aux codes déontologiques? Va-t-on tout simplement niveler par le bas?

On apprend aussi que vous souhaitez recevoir de la part de l'Office des professions une étude détaillée concernant l'impact qu'aurait l'entrée en vigueur de la législation permettant l'exercice des activités professionnelles des médecins et des pharmaciens en société. Vous référez naturellement à l'impact sur le respect des règles déontologiques de ces professionnels. Est-ce qu'il s'agit du même mandat? Doit-on en conclure que vous n'excluez toujours pas que votre gouvernement puisse adopter des règlements...

La Vice-Présidente: M. le député, je vous prierais de toujours vous adresser à la présidence.

M. Côté: Merci, Mme la Présidente. Est-ce qu'il s'agit du même mandat? Doit-on en conclure que vous n'excluez toujours pas que votre gouvernement approuve lesdits règlements proposés avant le dépôt de l'avis de l'office? Est-ce que cet avis sera rendu public en même temps que l'étude détaillée? Mme la Présidente, il est évident qu'à la lecture de cette lettre on constate qu'il s'agit bien d'une demande d'avis, de commentaires, de recommandations, alors que, nous, nous sommes convaincus qu'il faut une requête en vertu de l'article 14 du Code des professions.

Le plus surprenant, c'est qu'on nous dépose une demande d'avis signée par la directrice du cabinet du ministre, alors qu'il s'agit d'un dossier d'ordre public, d'intérêt public. Cela démontre, Mme la Présidente, toute l'importance qu'accorde le ministre aux lois professionnelles, à cette affaire. Il n'est même pas le signataire de la demande, alors qu'il a dit, en Chambre, que lui-même allait demander à l'office de s'occuper du cas.

Mme la Présidente, le ministre doit prendre aujourd'hui l'engagement de nous déposer l'avis et de le rendre public dès sa réception. Pour nous, l'échéancier est essentiel, alors que, pour le ministre, il a dit tout simplement que c'était dans les meilleurs délais. Alors, Mme la Présidente, écoutez, cette lettre est cousue de fil blanc. Je pense que ce qui est important... Pour reprendre l'expression de notre collègue: Est-ce que le ministre est en train de faire comme son collègue le ministre de l'Environnement...

La Vice-Présidente: Je vous remercie, M. le député. Merci.

Une voix: ...

La Vice-Présidente: Je vous remercie, M. le député. Votre temps est écoulé. Alors, je cède maintenant la parole au ministre pour les cinq prochaines minutes.

M. Jacques P. Dupuis

M. Dupuis: Ce que le responsable du dossier des lois professionnelles ? que je représente, compte tenu des fonctions que j'exerce ? doit faire, c'est répondre au public, pas à l'opposition officielle. Lorsque l'opposition officielle pose des questions, il faut toujours, de ce côté-ci de la Chambre, envisager les réponses qu'on donne aux questions du point de vue de la protection du public. Ce que le mandat qui a été donné à l'Office des professions le 3 novembre indique, au contraire de ce que dit le député, c'est que nous sommes parfaitement conscients et nous sommes parfaitement préoccupés par la situation que représentent les pratiques commerciales dans le domaine duquel parle le député de Dubuc.

Je répète ce que j'ai déjà dit dans un débat de fin de séance sur ce sujet-là, que, suite à la loi qu'a adoptée le précédent gouvernement, permettant aux professionnels de se constituer en société en nom collectif... a évidemment fait en sorte qu'il y a eu des conséquences juridiques. Plusieurs règlements ont déjà été adoptés. Notamment, le Barreau, l'Ordre des comptables ont adopté des règlements sur la pratique en société en nom collectif. Et là évidemment les autres professions déposent auprès du gouvernement, et l'Office des professions dépose auprès du gouvernement les possibles amendements soit aux règlements existants ou aux codes de déontologie.

Je dis au député de Dubuc mais surtout à la population du Québec qu'il n'est pas question ? et c'est pour ça qu'on a donné un mandat à l'Office des professions ? qu'il n'est pas question que nous permettions que des amendements aux différents codes de déontologie des différentes professions soient adoptés sans que nous sachions, sans que nous soyons convaincus comme gouvernement qu'ils vont dans les intérêts de la protection du public, premièrement.

Deuxièmement, ça veut dire quoi? Je vous suggère de lire un article d'un ex-collègue avocat ? c'est-à-dire il est toujours avocat et je ne pratique plus maintenant, du moins comme avocat ? Jean-Claude Hébert, dans La Presse, il y a quelques semaines, qui disait: Non seulement faut-il qu'il soit clair, dans ces différents codes de déontologie et dans ces différentes pratiques commerciales, qu'il n'y a pas de conflit d'intérêts ou qu'on ne donne pas la possibilité qu'il y ait de conflit d'intérêts, ça va de soi, mais non seulement ça, encore faut-il qu'il n'y ait pas apparence de conflit d'intérêts.

Et, dans le fond, dans le mandat que j'ai donné à l'Office des professions et dans les questions qu'on pose à l'Office des professions, parce que c'est l'organisme qui est en contact direct avec les différentes professions, les questions qu'on a posées, les mandats qu'on a donnés, c'est pour nous assurer, nous, comme gouvernement, lorsqu'on nous proposera des amendements aux règlements qui existent, notamment aux codes de déontologie, qu'on se sera assurés qu'on a un avis de l'Office des professions sur la question de la protection du public, serons-nous rassurés comme gouvernement que ce que nous proposerons comme modification aux codes de déontologie et aux règlements n'est pas à l'encontre de l'intérêt public, n'est pas à l'encontre de la protection du public. Ça, là, c'est ce que je m'engage à faire vis-à-vis de la population du Québec.

Oui, il y a un mandat qui a été donné à l'Office des professions. Il est impertinent de vouloir prétendre, et je trouve ça un petit peu triste que le député de Dubuc veuille sous-entendre que, parce que le mandat a été donné par la directrice de cabinet du ministre responsable des lois professionnels, c'est moins un mandat que s'il avait été donné, signé par le ministre. Tout le monde sait très bien que ces mandats-là se donnent de cette façon-là... peuvent se donner de cette façon-là et que c'est aussi valable de le donner de cette façon-là qu'autrement. De toute façon, entre vous et moi, l'Office des professions, lui, il n'a pas douté comme le député de Dubuc. Ils se sont exécutés sur le mandat et ils l'ont confirmé par communiqué qu'ils s'exécutaient sur le mandat. Non seulement s'exécutent-ils sur le mandat, mais j'ai des informations à l'effet que déjà des questionnements ont été soumis par l'Office des professions aux différents ordres concernés, qu'un délai leur a été donné pour répondre.

n(18 h 10)n

Et je dirai, en terminant ? parce qu'il ne me reste pas beaucoup de temps ? je dirai, en terminant, au député de Dubuc qu'il peut se rassurer sur le fait que le gouvernement prendra une décision. Et toutes ces choses-là sont faites dans le but que le gouvernement puisse prendre une meilleure décision. Toutes ces choses-là sont faites dans le but que les décisions que le gouvernement prendra sur ces questions-là soient faites dans le sens de l'intérêt public, la protection du public, seront prises en tenant en compte qu'il ne doit pas y avoir de conflits d'intérêts possibles et qu'il ne doit pas non plus y avoir d'apparence de conflits d'intérêts. C'est ce que j'avais à mentionner sur le débat de fin de séance, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Alors, je vous remercie, M. le ministre. Maintenant, je cède la parole à M. le député, pour votre droit de réplique de deux minutes.

M. Jacques Côté (réplique)

M. Côté: Merci, Mme la Présidente. Au-delà des belles paroles du ministre, il s'agit de questions fondamentales pour la société québécoise: Est-ce que l'Assemblée nationale pourra être informée de toutes les modifications des règlements déontologiques que le ministre nous dit qu'il va nous proposer? Est-ce que le ministre va déposer les avis qu'il a reçus, est-ce que le ministre va déposer les commentaires qu'il a reçus de l'Office des professions? Dans l'évaluation de l'harmonisation des codes de déontologie, est-ce que nous allons être consultés sur l'impact de l'incorporation en société avec des médecins et des pharmaciens? Est-ce qu'on va pouvoir prendre connaissance justement de l'étude détaillée que l'Office des professions est censé produire?

Voilà, Mme la Présidente, des questions qui sont fondamentales et que le ministre nous répond, selon sa bonne volonté: On va prendre en charge l'intérêt du public. Oui, je suis d'accord que l'intérêt du public est important, mais il faut qu'il le prouve par des actes, Mme la Présidente, il faut que le ministre dépose à l'Assemblée nationale ces avis, ces commentaires, ces recommandations pour que nous puissions les étudier et les évaluer. Il s'agit de modifications importantes aux ordres professionnels par des règlements sur les codes de déontologie, et je pense qu'il faut être très, très, très sérieux dans cette étude de ces nouveaux règlements parce que ces règlements sont excessivement importants.

Ça me semble, Mme la Présidente, cousu de fil blanc, tout ça. Parce qu'on nous avait annoncé qu'on nous donnerait des informations. Par hasard, aujourd'hui, on nous dépose une lettre qui est datée du 3 novembre. On avait fait la demande à plusieurs reprises. Le ministre nous disait: Fiez-vous à ma parole, vous allez voir qu'on va travailler ça de façon correcte. Mais voilà que tout à coup, après avoir fait une demande à l'accès à l'information, le ministre arrive avec une lettre, aujourd'hui. C'est très questionnant, Mme la Présidente. Et, en ce sens-là, j'espère que le ministre saura nous donner des réponses affirmatives.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député. Alors, nous allons maintenant procéder au deuxième débat de fin de séance sur une question adressée par la députée de Matapédia au ministre délégué à la Forêt, à la Faune et aux Parcs, concernant la méthode d'établissement de la valeur des travaux sylvicoles. Alors, Mme la députée, je vous cède la parole pour les cinq prochaines minutes.

Méthode d'établissement de la valeur admissible
à titre de paiement de droits des travaux sylvicoles

Mme Danielle Doyer

Mme Doyer: Merci, Mme la Présidente. Alors, aujourd'hui, j'ai posé une question au ministre délégué aux Forêts, et, n'ayant pas eu de réponse satisfaisante, j'ai voulu avoir ce débat pour aller plus avant. Et je pense que j'avais raison, puisqu'il a été vérifié qu'il y avait un projet de règlement au niveau d'une modification de la méthode de calcul au niveau des travaux sylvicoles, Mme la Présidente.

Alors, c'est un sujet compliqué qui n'intéresse pas toujours la presse parlementaire et, je dirais, la presse en général. Ces questions sont assez techniques, mais elles peuvent être lourdes d'impact pour des travailleurs, en l'occurrence des travailleurs sylvicoles. Ils sont 8 000 au Québec, autour de 8 000. Alors, je vais vous faire...

Je ne suis pas la seule à être inquiète. Parce que ça ne fait pas... ce n'est pas d'aujourd'hui qu'on peut être inquiet par rapport à ça. Je vous lis une lettre qui a été adressée au ministre délégué aux Forêts, à la Faune et aux Parcs le 24 septembre de cette année. Alors, les représentants des trois associations principales, soit l'Association des entrepreneurs de travaux sylvicoles du Québec, la Conférence des coopératives forestières du Québec et le RESAM, soit le Regroupement des sociétés d'aménagement forestier du Québec, dans cette lettre, Mme la Présidente, les trois présidents de ces organisations faisaient part de leurs inquiétudes.

Ils disaient: «Les représentants de nos trois associations apprenaient récemment que le ministère que vous dirigez entend modifier en profondeur le système d'établissement de la valeur des travaux sylvicoles admissibles en paiement des droits. Sans en faire encore un débat public, nos associations ont déjà consulté une partie de leurs membres afin de connaître leur point de vue. La présente a donc pour objet de vous informer de l'inquiétude que cette proposition engendre auprès de nos membres et de solliciter une rencontre auprès de vous et de votre cabinet.»

Et cette demande, Mme la Présidente, ils disaient qu'elle se fonde essentiellement sur trois arguments. Le premier, c'est: «La proposition est terriblement prématurée, alors que la Commission d'étude sur la gestion de la forêt publique québécoise ne déposera ses recommandations qu'au mois de décembre 2004.

«Deuxièmement, les délais sont beaucoup trop serrés d'ici au 1er avril 2005 pour que les bénéficiaires de CAAF et les entrepreneurs revoient tous leurs engagements contractuels dans un environnement de marché, alors qu'une partie des travaux de préparation sont déjà débutés.

«Troisièmement, les conditions entourant la réalisation des travaux sylvicoles ne sont pas toujours réunies pour que le retour au marché ne se traduise pas en détérioration des conditions de travail et par une diminution encore plus grande de la capacité de rétention des travailleurs expérimentés. Cela entraînera conséquemment la diminution de la capacité de réalisation des scénarios sylvicoles prévus aux PGAF et affectera les rendements forestiers à court et à long terme.» Et là, ils disent: «À l'heure actuelle, nous estimons que l'inquiétude que manifestent nos membres pourrait se traduire par une réaction assez vive.»

Alors, on est dedans, Mme la Présidente. Aujourd'hui, deux minutes avant mon intervention, le ministre a eu l'amabilité... Parce que ça, je pense que c'est court, là, mais au moins je le vérifie. Je lui ai demandé de me remettre le projet de règlement. Je l'ai. On va pouvoir se préparer au moins en connaissant qu'est-ce qu'il y a sur la table. Alors, ce projet de règlement, le contenu, c'est qu'il «vise principalement à modifier les règles de calcul de la valeur des traitements sylvicoles et autres activités de protection ou de mise en valeur des ressources du milieu forestier admis à titre de paiement des droits prescrits par le ministre des Ressources naturelles, de la Faune et des Parcs, ainsi qu'à fixer de nouvelles conditions d'attribution de ces crédits applicables au paiement des droits».

Et je peux vous dire, Mme la Présidente, qu'il y a déjà une mobilisation qui est en cours, et vous allez probablement avoir une demande de rencontre des gens dans ce domaine, qui vont rencontrer les députés, autant libéraux que péquistes, car ils sont inquiets. Et ça, c'est la Conférence des coops forestières qui dit qu'elle mobilise son monde et qu'ils vont regarder ça. Donc, pourquoi ne pas attendre les conclusions de la commission Coulombe, où il a été abondamment question de l'amélioration du sort des travailleurs forestiers?

On a un problème de main-d'oeuvre majeur au niveau des travaux sylvicoles, c'est difficile d'encourager les jeunes, et on a un problème de vieillissement de la main-d'oeuvre. On parle d'ailleurs maintenant ? et je suis quasiment gênée de parler de ça ici ? de roumanisation de la main-d'oeuvre. Et même, ça se commence dans la région du ministre, en Abitibi-Témiscamingue, où on dit qu'il y a des Roumains de Montréal qui s'en vont remplacer... Je dirais «remplacer» parce que ce n'est tellement plus intéressant des fois que ça n'a comme pas de bon sens. Et on parle de roumanisation. C'est terminé?

La Vice-Présidente: Il reste 30 secondes.

Mme Doyer: 30 secondes. Alors, moi, ce que je veux demander au ministre, c'est... Ce n'est pas tant la loi du marché en tant que telle qui est à craindre, il faut s'assurer que ce marché soit encadré adéquatement afin d'éviter des situations où on va avoir une dégradation des conditions de travail, qu'elles ne surviennent pas... ou encore qu'on détériore une industrie qui est déjà précaire, Mme la Présidente. Alors, en encadrant le marché avec des règles comme l'accréditation des entreprises...

La Vice-Présidente: Je m'excuse, Mme la députée, je suis obligée de vous arrêter, votre temps est écoulé. Alors, je cède maintenant la parole au ministre, en vous rappelant que vous disposez d'un temps de parole de cinq minutes.

M. Pierre Corbeil

M. Corbeil: Merci, Mme la Présidente. Je suis surpris de l'intervention de la députée de Matapédia quand elle mentionne qu'elle n'a pas reçu de réponse satisfaisante. Je pense que j'ai donné une réponse très satisfaisante en Chambre, cet après-midi. Non seulement elle est très satisfaisante, mais elle précède de 12 heures la prépublication dans la Gazette officielle, demain le 24 novembre, du projet de règlement auquel fait référence ma collègue la députée de Matapédia.

Je suis surpris également, Mme la Présidente, que ma collègue veuille semer l'émoi, semer l'émoi, alors que, moi, je veux cultiver le partenariat puis la concertation pour assurer le développement durable de nos forêts, de ce capital québécois de première importance pour le développement économique de l'ensemble des régions du Québec. Et je suis surpris, Mme la Présidente, d'autant plus que cette question a été abordée lors de l'étude des crédits et j'avais déjà mentionné, au mois d'avril dernier, qu'on travaillerait à proposer des modifications pour réduire le taux de remboursement des crédits de travaux sylvicoles. On parlait à l'époque d'une contribution de 10 % pour la première année et de 20 % pour la suivante.

n(18 h 20)n

Donc, je voudrais rassurer ma collègue la députée de Matapédia en lui disant que la lettre à laquelle elle fait référence, du 4 octobre, provenant du RESAM, de l'AETSQ et du CCFQ, j'ai répondu à cette lettre-là, les signatures ont été faites aujourd'hui, et les lettres ont été envoyées aux représentants des organismes. Mais, d'abord et avant tout, Mme la Présidente, je voudrais quand même rappeler un certain nombre de faits.

Depuis notre arrivée au gouvernement, nous sommes très actifs pour améliorer notre régime forestier. Il y a eu trois projets de loi qui ont été déposés et adoptés, la loi n° 14, la loi n° 39 et la loi n° 48, le premier travaillant pour assurer un meilleur contrôle, une meilleure protection de la mise en valeur des ressources, le deuxième pour un meilleur contrôle en forêt et le troisième pour introduire la notion, de façon formelle, de façon dynamique, la notion de gestion intégrée des ressources dont on parle tant depuis plusieurs années mais qu'on n'a pas nécessairement jusqu'ici posé de gestes concrets.

Mais surtout, Mme la Présidente, j'aimerais le rappeler en cette Chambre, on a procédé à la création de la commission Coulombe, cette commission qui a travaillé sans relâche, au cours de la dernière année, en allant dans les régions, pour essayer d'établir le meilleur portrait possible de l'état de la forêt québécoise et aussi de faire des propositions pour améliorer la gestion de cette forêt, de ce capital d'importance auquel je faisais référence tantôt.

Alors, Mme la Présidente, nous agissons, contrairement à ce que l'ancien gouvernement avait fait, c'est-à-dire que, ce dont on parle ce soir et qui semble tout d'un coup sorti d'un chapeau, le précédent gouvernement, en juin 2001, avait mis sur pied un comité pour discuter de la méthode de fixation des valeurs admissibles, Mme la Présidente, ils ont pris deux ans pour discuter, nous, pendant ce temps-là... depuis ce temps-là, depuis avril 2003 finalement, on agit sans modération pour améliorer notre régime forestier.

La commission Coulombe a été mise en place, et les commissaires ont parcouru le Québec, comme je le disais tantôt. Nous attendons son rapport pour décembre de cette année, donc dans quelques semaines, j'oserais peut-être même dire quelques jours. Et, comme on a commencé à le faire, on va continuer à apporter les modifications qui seront nécessaires pour améliorer notre régime forestier.

La députée me demandait, Mme la Présidente, si j'étais sensible au sort et aux conditions de travail des travailleurs sylvicoles. La réponse est oui. C'est pour cette raison que nous proposons ce projet de règlement. Nous nous étions engagés, lors de la dernière campagne, à améliorer les conditions des travailleurs sylvicoles. La nouvelle façon de faire permettrait de rémunérer adéquatement les travailleurs de chaque région et de chaque secteur à traiter. Nous pourrons prendre en compte les particularités locales et régionales, par exemple les difficultés de terrain et l'éloignement des sites à traiter.

De plus, Mme la Présidente, le projet de règlement introduit de meilleures garanties pour les entreprises d'aménagement et les travailleurs sylvicoles en exigeant le dépôt de contrats écrits et de preuves de paiement comme conditions d'obtention des crédits sylvicoles. En permettant aux entreprises de négocier des contrats entre elles, nous contribuons à l'atteinte de notre objectif de régionalisation et de décentralisation.

En terminant, je pense, Mme la Présidente, que le projet de règlement sera, demain, comme je l'ai dit tantôt, en prépublication pour une période de 45 jours, et tous les intervenants intéressés pourront faire leurs commentaires et propositions.

La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre. Alors, Mme la députée de Matapédia, pour votre droit de réplique de deux minutes.

Mme Danielle Doyer (réplique)

Mme Doyer: Merci, Mme la Présidente. Alors, ce n'est pas moi qui ai créé l'émoi, Mme la Présidente, c'est le ministre en nous déposant ça, alors que... Et, comme ce n'est pas la députée de Matapédia... Je le redis, c'est un document qui a été envoyé à tous les directeurs généraux qui sont en lien avec la Conférence des coopératives forestières du Québec, qui parlent de l'abolition de la grille de taux des travaux sylvicoles. Ils disent: «Il est presque scandaleux de proposer un changement aussi drastique avant le dépôt du rapport de la commission.» Ils disent aussi: «Les ententes contractuelles ne sont pas prises pour faire face à ce changement dès le prochain printemps.» Ils disent: «Les conditions pour régir le marché ne sont pas réunies actuellement.»

Et les trois présidents des grands organismes qui s'occupent de travaux sylvicoles au Québec, Mme la Présidente, je le redis, ils disent: «La proposition est terriblement prématurée, alors que la Commission d'étude sur la gestion de la forêt publique québécoise ne déposera [pas] ses recommandations [avant la fin novembre, début décembre].» Le ministre l'a dit lui-même.

Alors, ma question au ministre, c'est: Qu'est-ce qui nécessite l'adoption d'un tel règlement à ce moment-ci? Pourquoi vous ne pouvez pas attendre un an avant de faire ça, de bien étudier, là, aussi de consulter? Avez-vous consulté? 45 jours. Je peux vous dire que je vais l'étudier en profondeur et que, moi aussi, je vais consulter de mon côté. Et je dis: D'accord, je vous donne le bénéfice du doute. On a toujours eu, Mme la Présidente, le ministre et moi, une attitude constructive, puis je pense que j'ai fait preuve aussi de bonne volonté, et on a travaillé à des projets de loi correctement. Et, si c'est bon, je vais vous le dire, mais, si ce n'est pas bon, je vais vous le dire aussi. Et là ce que les gens me transmettent, c'est leur inquiétude, M. le ministre.

Alors, quelle est l'urgence d'agir ainsi avant la fin de la commission Coulombe et le dépôt de son rapport? Et on a reconnu, et c'est là mon inquiétude, c'est qu'on a reconnu fortement, partout dans les régions du Québec, des conditions de travail difficiles au niveau des travailleurs sylvicoles du Québec. Et là, sur ce terrain-là, vous allez me trouver parce que je veux les défendre.

La Vice-Présidente: Je vous remercie, Mme la députée. Alors, nous allons maintenant procéder au troisième débat de fin de séance sur une question adressée par le député de Mercier à la ministre de la Culture et des Communications, concernant les observations du gouvernement du Québec dans l'avant-projet de convention portant sur la diversité culturelle. Alors, M. le député, je vous cède la parole pour cinq minutes.

Position sur l'avant-projet de convention
sur la diversité culturelle

M. Daniel Turp

M. Turp: Merci, Mme la Présidente. Un peu plus tôt aujourd'hui, je posais à la ministre de la Culture et des Communications une question relative aux observations du gouvernement du Québec au sujet de l'avant-projet de convention sur la diversité culturelle qui avait été rendu public par le directeur général de l'UNESCO cet été, le 15 juillet, plus précisément.

Mme la Présidente, j'ai été un petit peu surpris d'apprendre que ces commentaires avaient été affichés sur le site électronique de son ministère, d'autant que, quelques minutes avant la période de questions, j'avais consulté ce site pour bien faire mes devoirs de porte-parole et que je ne les y avais pas trouvés. Quelle ne fut pas ma surprise lorsque j'ai quitté cette salle de l'Assemblée et que je suis allé sur le site Internet du ministère, et je ne les ai pas trouvés non plus. Ils ont été affichés à 15 h 26.

Et je crois devoir demander à la ministre: Pourquoi a-t-elle indiqué à cette Chambre que les commentaires du gouvernement étaient affichés sur le site de son ministère, alors qu'après vérification ils ne l'étaient pas? Je n'aurais pas pu prendre connaissance de ces commentaires avant de venir en Chambre et poser ma question sur les commentaires du gouvernement du Québec parce qu'ils n'étaient pas affichés. Plusieurs vérifications ont été faites dès 15 heures. Alors, ma surprise est grande, et j'aimerais bien que la ministre puisse éclaircir les choses.

Mme la Présidente, j'ai pris connaissance des commentaires qui ont été formulés par le gouvernement du Québec, qui étaient d'ailleurs prêts depuis le 1er novembre, semble-t-il, qui avaient été préparés par un comité interministériel composé de fonctionnaires, je l'imagine, de trois ministères, celui de la Culture et des Communications, du Développement économique et régional et des Relations internationales. Alors, encore là, j'aurais bien souhaité, puisqu'ils étaient prêts le 1er novembre, qu'ils puissent être diffusés, qu'ils puissent être connus des parlementaires, d'autant plus qu'un débat a eu lieu à la Commission des institutions sur la question d'un mandat d'initiative portant sur l'avant-projet de convention sur la diversité culturelle postérieurement au 1er novembre.

n(18 h 30)n

Mme la Présidente, j'ai pris connaissance du contenu, j'ai pu lire les 57 pages du rapport et les commentaires qui ont été faits. C'est des commentaires d'un intérêt réel, c'est des commentaires très détaillés sur plusieurs dispositions de cet avant-projet. Ce sont des commentaires qui proposent d'ailleurs de nouvelles formulations. Certaines méritent un débat. Il y en a plusieurs avec lesquelles sans doute l'opposition officielle pourra exprimer son accord, d'autres avec lesquelles elle pourra exprimer son désaccord.

Je constate par ailleurs ? et c'est ce que je demande aussi à la ministre ? que ces observations ne me semblent pas avoir été transmises à l'UNESCO et que l'UNESCO ne pourra pas prendre connaissance de ces observations. Ce que je comprends, c'est que les commentaires du Canada qui ont été envoyés à l'UNESCO tiennent en compte certaines observations du Québec mais pas toutes et certainement pas des plus importantes.

Et j'aimerais bien savoir qui, de notre ministre de la Culture et des Communications ou de la ministre du Patrimoine canadien... D'ailleurs, vous semblez bien vous entendre toutes les deux. On le sait que parfois vous êtes même bras dessus bras dessous à parler de diversité culturelle. Mais je constate que, sur des choses aussi fondamentales que, par exemple, la question du règlement des différends où des propositions sont faites par le gouvernement du Québec sur cette question, il n'y a rien dans les commentaires du Canada, rien. Il n'y a qu'une suggestion qu'on doit débattre de cela plus tard, ultérieurement, parce que c'est prématuré. Alors, qui parle au nom du Québec à l'UNESCO ou qui présente les positions du Québec à l'UNESCO? Parce que, si c'est le Canada qui le fait, il ne présente pas les vues du Québec.

Alors, sur cette question, j'aimerais aussi ? et je termine sur cela, Mme la Présidente ? j'aimerais savoir si la ministre est maintenant disposée à ce qu'il y ait un véritable débat au Parlement. Il a été question, ce matin, à la Commission de la culture...

La Vice-Présidente: Je vous remercie. Merci, M. le député. Votre temps est écoulé maintenant. Alors, je cède maintenant la parole à la ministre de la Culture et des Communications en vous rappelant que vous disposez d'un temps de parole de cinq minutes.

Mme Line Beauchamp

Mme Beauchamp: Merci, Mme la Présidente. Je profite de ce débat de fin de séance pour rappeler, avec beaucoup de conviction, je dirais, un brin de fierté ? mais en fait il faut rester très humble, puisqu'il y a encore un énorme travail à faire, et le député de Mercier le sait bien ? mais réaffirmer ici le leadership qu'a eu le gouvernement du Québec depuis les 18 derniers mois et avant. Parce que ? le député de Mercier, je sais, il le sait ? sur toutes les scènes, dans tous les débats que j'ai menés sur la diversité culturelle, j'ai toujours insisté sur ceci: l'Assemblée nationale du Québec doit parler d'une voix dans ce dossier.

J'ai toujours indiqué qu'avec beaucoup, je dirais, de sens de la responsabilité, lorsque nous étions dans l'opposition et encore maintenant, sur toutes les scènes, au nom du gouvernement du Québec, je dis en toutes lettres ceci: que nous nous inscrivons en droite ligne avec le travail fait par le gouvernement précédent. Donc, nous avons poursuivi, avec beaucoup d'énergie, ce travail, participant et organisant de multiples débats encore il y a quelques jours, à Mexico, lors du Festival du monde arabe à Montréal. Et je tiens également à souligner le leadership exercé par ma collègue la ministre des Relations internationales qui participait récemment à ce réseau international qu'on appelle le RIPC, mais également le positionnement du premier ministre du Québec qui, sans aucune exception, donc aucune exception, a toujours interpellé ses vis-à-vis internationaux qu'il a rencontrés sur ce dossier de la diversité culturelle. Il l'a fait, lui aussi, sur toutes les scènes: en France, en Allemagne, en Angleterre, aux États-Unis, à Mexico, sans aucune exception. Et également, avec le leadership du Québec, bien sûr le dossier de la diversité des expressions culturelles sera de nouveau soulevé dans le cadre de la Francophonie, dans quelques heures, donc.

Rappelons la position du gouvernement du Québec. Vous l'avez retrouvée dans le document fourni aujourd'hui même, sur le site Internet du ministère.

Et ils sont importants. Il faut le redire haut et fort. Le droit des États à se doter de politiques culturelles, chose qu'on ne retrouvait pas de façon claire dans l'avant-projet de convention et chose également qu'on retrouve dans la position du Canada; l'affirmation claire et nette, si on veut développer une jurisprudence dans ce domaine des produits culturels, l'affirmation claire et nette du pourquoi on ne peut pas traiter cela, par exemple, à l'OMC, parce que les produits culturels ont une double valeur, une double nature: commerciale bien sûr mais également porteuse de valeurs identitaires ? et c'est pour cela qu'on ne peut pas traiter de cela dans les, je dirais, dans les forums consacrés vraiment au libre commerce; la non-hiérarchisation de cette convention par rapport justement aux accords de commercialisation du commerce et également ? c'est la position du Québec ? des mécanismes de règlement des différends efficaces pour être en mesure de développer une jurisprudence internationale.

Et vous aurez compris que nous proposons, à ce moment-ci, des débats qui vont se dérouler encore au cours des prochains mois. Notre proposition, à ce moment-ci, est-ce qu'elle évoluera? Peut-être, à la lumière des discussions que nous aurons avec différents collaborateurs, y compris bien sûr le gouvernement canadien. Mais, à ce moment-ci, nous proposons ce qu'on appelle une saisine unilatérale devant un certain tribunal et bien sûr la transparence des décisions de ce tribunal, ce mécanisme de règlement des différends. Il y a des convergences avec la position déposée bien sûr par le gouvernement fédéral à l'UNESCO. Il y a certaines questions où le Canada, comme d'ailleurs la Commission européenne, s'en est tenu à réaffirmer des principes. Nous ne sommes habituellement pas en désaccord avec ces principes. Nous remarquons comme vous que le gouvernement fédéral a choisi, à ce moment-ci, comme le fait, dans la plupart des cas, la Commission européenne, de réitérer des principes et n'a pas choisi, à ce moment-ci, d'adopter une formulation plutôt qu'une autre.

Ça m'amène à vous... Je suis sûre que vous en avez pris connaissance. Cet après-midi même, à la Chambre des communes, la ministre du Patrimoine était interpellée elle aussi sur ce dossier. Et elle a bien indiqué que le Canada, en collaboration avec les provinces, allait continuer à développer sa position sur, par exemple, le mécanisme de règlement de différends que vous soulevez.

Je termine en disant que les prises de position faites par l'opposition officielle jusqu'à maintenant n'ont pas semblé obtenir beaucoup d'appui. Certains se sont demandés si l'opposition n'essaie pas de faire dérailler cet avant-projet de convention. Je me pose, à vrai dire, la même question.

La Vice-Présidente: Je vous remercie, Mme la ministre. Alors, maintenant, pour votre droit de réplique de deux minutes, M. le député.

M. Daniel Turp (réplique)

M. Turp: Merci, Mme la Présidente. D'abord, ma première question est restée sans réponse. Je trouve inélégant sinon discourtois le fait qu'on m'ait laissé entendre que les commentaires du gouvernement du Québec étaient sur le site Internet. Au moment où j'ai posé la question, ils n'y étaient pas. Après vérification, à 15 heures, ils n'y étaient pas. Et nous avons fait une recherche qui est tout à fait appropriée. Je n'ai pas eu de réponse à cette question et je trouve que la façon de faire est inélégante et discourtoise. J'espère que ça ne se reproduira pas. Et ce n'est pas parce que nous voulons faire dérailler une convention que nous avons des positions sur le fond de l'avant-projet. Il s'agit de débattre intelligemment de questions qui peuvent poser, au moment où on se parle, des divergences parce que nous avons des positions. Et nous sommes de ceux qui veulent une convention sur la diversité culturelle, mais la meilleure des conventions sur la diversité culturelle. Et je dirais d'ailleurs, en ce sens-là, que même le gouvernement du Québec ne propose pas un mécanisme de règlement des différends qui serait une véritable portée obligatoire dans ses propositions. Et, dans ce sens-là, il ne serait pas un instrument véritablement contraignant.

Et à l'autre question: Qui parle au nom du Québec? À l'UNESCO, bien il me semble que c'est le Canada. Et, dans les observations du Canada, il y a plusieurs propositions du Québec, qui semblent être importantes, que l'on ne retrouve pas. Alors, j'ai le sentiment que c'est Liza Frulla qui parle au nom du Québec lorsqu'il s'agit de ces questions, et non pas la ministre de la Culture et des Communications du Québec. Merci, Mme la Présidente.

Ajournement

La Vice-Présidente: Je vous remercie, M. le député. Alors, maintenant que les débats de fin de séance sont terminés, les travaux sont ajournés à demain, mercredi le 24 novembre, à 10 heures. Bonne fin de soirée.

(Fin de la séance à 18 h 38)