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Version finale

37th Legislature, 1st Session
(June 4, 2003 au March 10, 2006)

Tuesday, April 20, 2004 - Vol. 38 N° 61

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Table des matières

Affaires du jour

Présence de l'ambassadrice de la République de Slovénie, Mme Veronika Stabej

Affaires courantes

Affaires du jour

Ajournement

Journal des débats

(Dix heures dix minutes)

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, nous allons nous recueillir pendant quelques moments.

Alors, veuillez vous asseoir.

Affaires du jour

Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: Je vais vous demander d'appeler l'article 14 du feuilleton, M. le Président.

Projet de loi n° 21

Adoption

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, M. le leader du gouvernement, l'article 14, aujourd'hui, M. le ministre de la Justice propose l'adoption du projet de loi n° 21, Loi modifiant le Code civil et le Code de procédure civile en matière de fixation de pensions alimentaires pour enfants. Y a-t-il des interventions?

Alors, je reconnais M. le ministre pour son intervention. M. le ministre de la Justice.

M. Marc Bellemare

M. Bellemare: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, je suis très fier de pouvoir discuter encore aujourd'hui du projet de loi n° 21, qui est un projet de loi important pour les familles du Québec et pour les jeunes adultes bien sûr qui bénéficient d'une créance alimentaire face à un de leurs parents ainsi que pour les familles reconstituées, c'est-à-dire pour les adultes du Québec qui ont décidé, après une séparation, après un échec matrimonial, de refaire leur vie et d'avoir d'autres enfants.

Alors, c'est un projet de loi, M. le Président, qui a fait l'objet de débats en commission parlementaire et qui a fait l'objet également d'audiences publiques au cours desquelles plusieurs groupes ont été entendus, et je cite: l'Association des avocats et avocates en droit familial du Québec, le Barreau du Québec, le Comité des organismes accréditeurs en médiation familiale, l'Action des nouvelles conjointes du Québec, l'Organisation pour la sauvegarde des droits des enfants, la Fédération des associations de familles monoparentales et recomposées du Québec, le Protecteur du citoyen, la Confédération des organismes familiaux du Québec, l'Association des familialistes de Québec, le Conseil de la famille et de l'enfance ainsi que l'Association des médiateurs familiaux du Québec. Donc, des audiences, M. le Président, qui ont duré quelques jours et au cours desquelles ces groupes sont venus nous présenter l'ensemble de leurs observations.

Je dirai que la majorité, la nette majorité des organismes ont appuyé sans réserve le projet de loi n° 21 dont je ferai un bref descriptif ce matin relativement aux deux éléments importants dont il est porteur.

Premièrement, ce projet de loi permettra à des jeunes adultes issus d'une union qui n'a pas été consacrée par le mariage de pouvoir mandater un des deux parents pour ester en justice pour obtenir une prestation alimentaire. Actuellement, en vertu de la Loi sur le divorce, seuls les enfants issus du mariage, lorsqu'ils ont atteint l'âge adulte, peuvent mandater un de leurs parents pour agir en leur nom pour obtenir une créance alimentaire, donc faire respecter une obligation alimentaire. Alors, nous allons élargir cette possibilité et faire en sorte que les enfants qui ont atteint l'âge adulte et qui ont encore des besoins alimentaires face à un des deux parents puissent mandater l'un des deux parents pour agir en justice en leur nom. Donc, on parle ici des enfants bien sûr issus d'union libre. On parle également des enfants issus de l'union civile, donc d'arrangements matrimoniaux qui n'ont pas été considérés dans le cadre du mariage.

Alors, dorénavant, nous permettrons à ces jeunes adultes de mandater un des deux parents pour agir en justice en leur nom, ce qui va avoir deux conséquences importantes, à mon avis: d'abord, faciliter l'exercice du recours, M. le Président, parce qu'il faut comprendre qu'à l'heure actuelle ces enfants-là qui ont atteint l'âge de 19, 20 ans, qui sont, dans bien des cas, d'âge universitaire ou cégep, sont obligés à l'heure actuelle d'exercer eux-mêmes le recours alimentaire, ce qui entraîne bien sûr beaucoup de pressions et ce qui va aller, dans certains cas, jusqu'à compromettre la qualité des relations entre l'enfant et le parent. On sait très bien que, à l'âge de 19 ou 20 ans, quand on est obligé d'exercer soi-même un recours alimentaire en Cour supérieure, ça a certains impacts et ça peut amener un bris de la qualité des relations qu'ont entretenue jusque-là les enfants majeurs avec un des deux parents. Alors, en permettant à l'autre conjoint, à l'autre parent d'exercer le recours en leur nom, nous allons éviter bien sûr de compromettre la qualité de ces relations et amener bien sûr une promotion de l'harmonie entre les enfants ayant atteint la majorité et le parent débiteur alimentaire.

Autre avantage bien sûr de cette mesure, c'est qu'elle permettra de limiter les frais juridiques, M. le Président, de faire en sorte, par exemple, que la mère ou le père puisse exercer le recours. Dans bien des cas, un des deux parents lui-même exerce un recours de nature alimentaire; il n'aura qu'à joindre les intérêts de l'enfant majeur à cette procédure pour faire en sorte qu'une seule procédure plutôt que deux pourra être implantée, donc limitant ainsi les coûts juridiques, la durée des procès et les frais d'avocats.

Une autre mesure importante qui est apportée par le projet de loi n° 21, M. le Président, est le fait que, dorénavant, un parent qui paie une pension alimentaire ou encore l'autre qui en reçoit une pourra saisir la cour d'une demande de modification de pension alimentaire du fait des difficultés apportées par la naissance d'un enfant additionnel. C'est une mesure, à mon avis, qui vise à favoriser l'égalité des enfants et à permettre au juge d'exercer une plus large discrétion, lui permettant, dans certains cas exceptionnels, d'écarter les barèmes qui jusqu'à maintenant permettent d'établir le montant de la pension alimentaire et d'en venir à fixer une pension alimentaire qui serait davantage respectueuse de la capacité de payer du débiteur alimentaire ainsi que du nombre d'enfants, parce qu'on sait très bien que, dans certains cas, la pension alimentaire qui a été fixée ou qui sera fixée pourrait être modifiée du fait que le parent qui doit payer une pension alimentaire a eu des enfants déjà avant l'union qui est débattue devant le tribunal à ce moment-là ou après l'union qui est débattue devant le tribunal.

Alors, on sait qu'il existe au Québec quelque 24 000 familles recomposées, c'est-à-dire des gens qui ont déjà eu des enfants et qui ont décidé d'avoir des enfants avec une autre personne, ce qu'on appelle communément les familles recomposées. Alors, dans ces cas, il a été porté à notre attention le fait que l'arrivée de nouveaux enfants dans le cadre d'une famille reconstituée pouvait amener le juge à modifier à la hausse ou à la baisse la pension alimentaire pour tenir compte de cette nouvelle réalité et pour empêcher qu'une pension alimentaire trop faible ou trop élevée ne soit payée sans considération des obligations alimentaires que ce ou cette débiteur ou débitrice alimentaire aurait à l'égard d'autres enfants qui seraient nés dans le cadre d'unions additionnelles. Alors, pour remédier à cette situation et pour faire en sorte que la capacité de payer du débiteur alimentaire soit davantage répartie en tenant compte de l'ensemble de ces obligations alimentaires face à d'autres enfants, nous avons apporté, M. le Président, un amendement à l'article 587 du Code civil qui permet au juge d'exercer une plus vaste discrétion.

Et, dans certains cas exceptionnels, là où il y aurait un déséquilibre important entre les allocations ou les aliments qui pourraient être versés à certains enfants par rapport à d'autres, le juge pourrait exercer sa discrétion, mettre de côté les barèmes dans des cas exceptionnels, bien sûr, et en arriver à fixer une pension qui serait plus élevée quand la capacité du débiteur alimentaire est répartie à travers plusieurs enfants issus de différentes unions ou, dans certains cas, que la créancière alimentaire pourrait elle-même avoir décidé d'avoir eu d'autres enfants dans le cadre d'autres unions, ce qui augmenterait ses besoins par rapport à ce qui avait été initialement établi par le tribunal qui se serait penché sur les besoins dans un premier temps.

Alors, c'est une mesure qui a reçu l'appui de tous les groupes, certains, par contre, émettant certaines réserves du fait qu'ils craignaient une augmentation importante du nombre de demandes en justice ou encore craignaient que certains nouveaux parents de nouveaux enfants n'adressent automatiquement une demande au tribunal pour faire modifier la pension initialement fixée par le tribunal. Alors, nous avons voulu éviter une avalanche de procédures additionnelles ou encore que les nouveaux parents qui paient déjà une pension alimentaire pour d'autres enfants ne se précipitent au bureau du juge pour demander une révision de pension alimentaire.

Alors, nous avons apporté certains accommodements à l'article 587, tel qu'initialement rédigé, pour faire en sorte que le parent, que le nouveau parent... le parent de nouveaux enfants doive établir à tout le moins une difficulté, c'est-à-dire que, pour faire modifier une pension initialement reconnue pour des enfants antérieurs, le nouveau parent doive établir la présence de difficultés. Ce qui veut dire que cette possibilité de faire réviser la pension alimentaire à cause de la présence d'un nouveau-né ne serait réservée finalement qu'aux parents qui éprouveraient des difficultés du fait de l'arrivée de ce nouvel enfant, ce qui, à notre avis, signifie que les parents qui ont un revenu moyen, peut-être dans les 30 000 $, 40 000 $, 50 000 $, pourraient se prévaloir de cette possibilité. Des parents... des débiteurs alimentaires qui seraient davantage fortunés auraient beaucoup plus de difficultés à établir devant le tribunal la présence de difficultés, ce qui constituerait selon nous un frein acceptable à cette perspective de demandes abondantes et nombreuses de révision de pension alimentaire du fait de l'arrivée d'un nouvel enfant.

n (10 h 20) n

Il faut également prévoir et constater, M. le Président, que l'article 586 tel qu'il existe actuellement prévoit une présomption à l'effet que le règlement, que le barème de fixation de pension s'appliquera dans l'immense majorité des cas, de sorte que, pour faire modifier la pension alimentaire du fait de l'arrivée d'un nouvel enfant, non seulement le débiteur alimentaire ou le créancier alimentaire devrait établir qu'il y a eu une difficulté, mais également qu'il y a un barème qui doit être écarté, la présomption devant être écartée afin de tenir compte de la difficulté de l'arrivée de ce nouvel enfant.

Alors, M. le Président, il s'agit à mon avis de deux mesures importantes qui ont été réclamées depuis des années par les parents québécois, qui visent à apporter davantage d'équité, l'égalité des enfants, le respect de la capacité de payer, le respect des besoins alimentaires, et toutes ces préoccupations avaient été soulevées par le comité de suivi qui a été créé en 1997 dans le but d'assurer le suivi et l'évolution harmonieuse des mesures qui ont été adoptées par le gouvernement précédent relativement à l'ensemble de la problématique des pensions alimentaires.

Alors, compte tenu de l'appui important qu'il reçoit, je tiens à souligner également la contribution importante du député de Chicoutimi à l'avancement des travaux en commission parlementaire. Nous avons fait un travail à mon avis qui est exceptionnel, d'une grande qualité démocratique, et l'ensemble des amendements qui ont été apportés en deuxième lecture à mon avis reflètent l'harmonie et la qualité des travaux et des échanges qui ont eu lieu en commission parlementaire. Alors, je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, je vous remercie, M. le ministre de la Justice.

Je cède maintenant la parole au porte-parole de l'opposition officielle en matière de justice et également leader adjoint de l'opposition officielle. M. le député de Chicoutimi.

M. Stéphane Bédard

M. Bédard: Merci, M. le Président. Alors, il me fait plaisir à mon tour de vous entretenir quelques minutes sur ce projet de loi dont j'ai eu l'occasion d'ailleurs de discuter ici, en Chambre, lors de la prise en considération du rapport il y a de ça... lors de notre dernière période d'ailleurs où nous avons siégé, M. le Président. Et j'aurais tendance à vous référer à mes commentaires que j'ai émis lors de cette prise en considération du rapport. Et, comme nous sommes à l'étape finale, je vais me permettre d'en rappeler quelques-uns, de ces commentaires, pour faire part tout d'abord de notre contentement quant à, je vous dirais, au processus qu'a suivi le projet de loi. Je tiens aussi à remercier le ministre de l'ouverture qu'il a eue quant au... à ceux et celles, en nous permettant d'ailleurs de faire des consultations particulières.

Je tiens particulièrement à remercier les intervenants dans ce dossier qui sont venus nous rencontrer dans un délai quand même assez rapide, nous faire état, là, de leurs craintes dans certains cas, de leur contentement dans d'autres. Et, comme je le disais d'ailleurs la dernière fois que j'ai pris la parole sur ce projet de loi, c'est peut-être une... un des projets de loi plutôt qui démontre l'utilité de nos commissions, du travail qui se fait à l'intérieur de nos commissions, et que l'image qui est projetée à cette Assemblée, parfois, de nos débats ? et un citoyen m'en parlait encore hier, d'ailleurs ? de nos débats houleux parfois à la période des questions ne reflète pas le travail qui se déroule en commission, qui est celui d'une étude approfondie, détaillée, avec beaucoup de recherche, beaucoup de sérieux, beaucoup de... même dans le détail aussi, pour faire en sorte que la loi qui va aboutir du processus soit la plus représentative de l'intention et de l'amélioration de l'économie générale de nos lois et en même temps, évidemment, du bien commun.

Ce projet de loi posait des difficultés à sa lecture, pas sur le principe, nous avons voté en faveur du principe, puisqu'il prévoyait l'égalité des enfants. Mais, l'égalité, il faut bien le dire, M. le Président, l'égalité devant le débiteur et pas l'égalité dans la vie, ce qui est une notion qui est fort différente.

Pour bien la refléter, M. le Président, je vous dirais que... Et plusieurs groupes sont venus nous faire part de leurs craintes par rapport à cette réalité-là. On nous donnait l'exemple, par exemple, d'un père qui gagne 40 000 $, 45 000 $, et d'une mère qui gagne 20 000 $. Le père, bon, pour des raisons... peu importe qui des deux quitte, mais la femme se retrouve seule avec l'enfant, le mari refait sa vie avec une conjointe qui, elle, gagne le même salaire, 20 000 $.

L'égalité face au débiteur fait en sorte que, oui, il peut, entre guillemets, être égal vis-à-vis le débiteur, mais, dans... quant à ses revenus totaux dont bénéficie la famille, évidemment, ils sont beaucoup moindres dans la première ? celle qui est restée monoparentale ? que la deuxième ? celui qui a refait sa vie. Donc, l'égalité des chances n'est pas réelle, il faut bien le dire.

Alors, on parle plutôt de l'égalité vis-à-vis un débiteur, donc la possibilité pour les gens de... pas de refaire sa vie, je vous dirais, parce que mon souci n'est pas par rapport au payeur mais bien par rapport à ceux qui sont sous la responsabilité du payeur. Et on peut comprendre effectivement que quelqu'un qui a une famille désire avoir d'autres enfants, cela ne lui enlève aucune responsabilité; au contraire, elle lui en ajoute.

Par contre, il peut arriver que ses responsabilités vont au-delà de sa capacité, lui-même, de payer. Et là le problème que nous avons, c'est répartir cette capacité à travers des différents débiteurs qui ont chacun des droits fondamentaux, je vous dirais, celui d'avoir accès à des aliments et au respect des obligations, de leurs amis, de leurs parents vis-à-vis eux. Et on ne peut pas non plus faire reposer sur ces enfants issus d'une deuxième ou parfois d'une troisième union la responsabilité ou plutôt les conséquences de ces mariages successifs.

Donc, d'où l'idée d'amenuiser... pas amenuiser, je vous dirais, mais de mieux circonscrire le critère qui était utilisé, qui était celui, souvenez-vous, M. le Président, celui d'une difficulté qui était très rigide et qui faisait en sorte, une difficulté excessive qui faisait en sorte que même les cas que nous aurions souhaité qui passent à travers les mailles, pour faire réviser leurs pensions alimentaires, malheureusement, à l'étude de la jurisprudence, nous avons constaté que c'était tellement exceptionnel que finalement on les comptait presque sur les doigts de notre main, alors que peut-être il aurait fallu ouvrir la porte un peu plus. Mais ouvrir la porte un peu plus ne veut surtout pas dire, M. le Président, l'ouvrir beaucoup. Et je tiens à le redire, le ministre le dit, mais je l'ai dit tout au cours des travaux qui ont animé notre commission: D'aucune façon, le principe n'est remis en cause. Le principe qui est celui du paiement total et entier tel que prévu par les barèmes, et l'exception demeure la difficulté, demeure la révision, et c'est une exception qui demeure exceptionnelle, M. le Président.

Et nous laissons aux tribunaux une plus grande discrétion, entre guillemets. Je dis «entre guillemets». Pourquoi? Parce qu'il demeure de l'intention du législateur ? et vous avez vu des débats qui ont animé cette commission ? qu'en aucun cas nous souhaitions qu'il y ait un automatisme ou même que cette discrétion serve à accréditer l'idée que, bon, la naissance d'un enfant va, dans la majorité des cas, amener une révision des pensions alimentaires, c'est faux. C'est faux, ce n'est pas l'intention du législateur.

Et ce n'était tellement pas l'intention que nous avons ajouté un critère à notre proposition. Le ministre a accepté, j'en suis fort heureux, et, aussi, le Barreau nous avait, après que nous les ayons, il faut le dire, brassés un petit peu, M. le Président... Il est rare... j'entretiens mes relations avec le Barreau, avec beaucoup de camaraderie, je vous dirais, comme ce sont des collègues... mais dans ce cas-ci, nous avons eu quand même certaines prises de bec qui ont amené quand même le Barreau ? et je tiens à les remercier ? à nous faire une proposition finalement pour modifier le projet de loi. Et avec le ministère de la Justice et les membres de la commission, ma collègue, ici, la députée de Terrebonne et mon collègue le député de Mercier, nous sommes entendus sur une modification qui rejoint nos craintes, soit celle d'ajouter le critère de difficulté, autrement dit, de dire: Non, ce n'est pas excessif, dans le sens tel qu'interprété par la jurisprudence auparavant, mais ça demeure une difficulté. Et là la qualifier, ça devient compliqué: importante, réelle? Plus on en mettait, plus on voyait qu'on se lançait dans un débat qui ne nous menait nulle part finalement et peut-être empêchait les effets du bon côté du projet de loi, ce que voulait le principe du projet de loi.

Alors, nous avons gardé «difficulté», nous sommes entendus sur «difficulté», mais nous avons demandé au ministre, et il donne son accord d'ailleurs... et nous avons eu plutôt son accord. D'ailleurs, une lettre est déposée au rapport de la commission, que j'ai redéposée encore lors de la prise en considération, où le ministre a donné un mandat précis au comité qui va s'assurer du suivi de l'application au niveau des pensions alimentaires, d'avoir un suivi particulier par rapport à l'application de cette disposition, donc de nous faire rapport, à l'Assemblée nationale, au ministre particulièrement, au ministère de la Justice, de l'application jurisprudentielle, de l'interprétation qu'a eue cette disposition. Et pourquoi? Pour éviter finalement qu'une mauvaise interprétation, ou contraire à l'intention du législateur, se diffuse à l'intérieur de nos tribunaux... Et vous savez, lorsqu'il y a... ou une interprétation parfois qui sont divergentes. Il peut y avoir deux ou trois sources d'interprétation qui nous amènent à avoir des lignes différentes, et la Cour d'appel peut être amenée, mais après plusieurs années, à trancher ces débats de jurisprudence, et parfois même la Cour suprême, mais comme on est en matière de droit matrimonial... de droit familial, il est plutôt rare que ces décisions vont devant l'instance suprême. Donc, elles vont devant la Cour d'appel, notre instance suprême, au Québec, et, malheureusement, ça prend beaucoup de temps, vous le savez. Et je ne pense pas que les familles, plus particulièrement les familles monoparentales, peuvent avoir le luxe de se payer de tels recours et aussi de tels délais.

n (10 h 30) n

Donc, au lieu de laisser trancher ce débat ultimement par la Cour d'appel, nous avons demandé de faire rapport, et ce qui nous permettra d'ici peut-être, après deux ans d'application ? deux ans et quelques mois ? de voir si l'intention qui est à la base du projet de loi de garder le caractère exceptionnel plutôt de ces révisions et de ne pas créer d'automatisme, mais que cette discrétion judiciaire soit appliquée avec beaucoup de circonspection, soit suivie. Et nous le souhaitons évidemment, vous le comprendrez. Et je m'assurerai avec d'ailleurs ma collègue de Terrebonne, qui prendra la parole après moi, de l'application de cette disposition.

Les autres dispositions ne posaient aucun problème, M. le Président, elles étaient... Après vérification et quelques modifications, elles étaient conformes et elles répondaient à la volonté qui était exprimée au départ par le ministre et par le principe du projet de loi.

Encore là, je tiens à rappeler que ce débat est très important. Pourquoi? Parce qu'il touche les familles monoparentales et souvent les familles monoparentales avec des revenus beaucoup moindres, M. le Président. Donc, de notre côté et, je suis convaincu, du côté du gouvernement ? je le souhaite ardemment, même ? du côté du ministre, ça, j'en suis convaincu, que d'aucune façon cela ait des effets négatifs sur la situation des familles monoparentales au Québec, parce que les difficultés et parfois même la pauvreté ? et même trop souvent, je vous dirais, la pauvreté ? se trouvent dans ces situations de femmes, il faut bien le dire, encore à notre époque, qui vivent seules avec un, deux ou trois enfants qui sont élevés dans des conditions qui ne sont pas toujours optimales, tant pour la femme que pour les enfants. Donc, la priorité du Québec, la priorité du gouvernement doit toujours ? et des membres de cette Assemblée ? doit toujours demeurer les enfants, l'égalité des chances. Alors, M. le Président, je vous remercie de votre attention. Évidemment, vous comprendrez que nous suivrons l'application du projet de loi.

Je tiens, en terminant, aussi à remercier la députée de Terrebonne du soutien qu'elle nous a donné à titre de critique de l'opposition en matière de condition féminine, un important travail dans cette commission au niveau des groupes, au niveau des conseils qu'elle nous a donnés, de l'éclairage par rapport même à certaines statistiques au niveau du vécu des familles et mon collègue de Mercier, vous le savez, éminent juriste, ancien... qui a fait partie d'autres législatures, mais qui a été aussi professeur à la Faculté de droit de l'Université de Montréal. Donc, j'ai été bien entouré, M. le Président, dans cette commission. Et les membres de l'opposition aussi, il faut bien le dire: le député de Marguerite-D'Youville, qui est toujours un membre fort apprécié de nos commissions, je vous dirais, et peu importe du côté où il se situe. On souhaiterait même, des fois, qu'il soit plus... qu'il demeure de ce côté-ci, je vous dirais, M. le Président. Mais nous avons eu l'avantage d'avoir ses conseils, ainsi que le député d'Orford, qui est un ancien membre d'un comité juridique, et le ministre de la Justice. Donc, je remercie chacun de mes collègues du travail fort intéressant que nous avons eu à accomplir dans l'étude de ce projet de loi. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, M. le député de Chicoutimi. Et je reconnais maintenant, pour la poursuite du débat sur l'adoption finale du projet de loi, Mme la députée de Terrebonne, critique de l'opposition officielle en matière de condition féminine. Mme la députée de Terrebonne.

Mme Jocelyne Caron

Mme Caron: Merci, M. le Président. Alors, évidemment, le projet de loi n° 21 est un projet qui a peu d'articles, mais qui ont des conséquences pour la vie des familles. Évidemment, comme porte-parole de l'opposition officielle en matière de condition féminine, il m'apparaissait important de suivre les travaux, de participer, et je remercie vraiment les membres de la commission, et le ministre, et notre porte-parole du côté de la justice qui ont travaillé sur ce projet de loi.

Vous savez, il y a des conséquences importantes. Et, au Québec, nous avons fait beaucoup d'efforts au niveau d'assurer un minimum vital au niveau des enfants, tant par la fixation de la perception automatique des pensions alimentaires, par les barèmes que nous avons apportés, par le Comité de suivi du modèle québécois de fixation des pensions alimentaires pour enfants qu'on a mis sur pied, et les participants nous ont permis d'apporter des améliorations au fil des ans.

Donc, l'objectif d'être centré sur les enfants a toujours été là par rapport aux pensions alimentaires. Et il faut aussi regarder les conséquences importantes, et on s'aperçoit toujours que les conséquences sont différentes pour les familles monoparentales, contrairement aux familles reconstituées. Il y a toujours des conséquences différentes, alors c'est important d'en tenir compte.

Ce projet de loi a intéressé autant le milieu juridique que ceux et celles qui représentent les droits des enfants, les droits des familles, le Conseil de la famille et de l'enfance. Et il est réel que les audiences nous ont vraiment permis de cheminer et d'apporter des améliorations significatives.

Au point de départ, c'est sûr qu'on ne peut pas être contre le principe de l'égalité des enfants. C'est un principe qui se dit, qui s'écrit, mais, dans les faits, on s'apercevait très bien que, malgré la modification de l'article, il était complètement faux de prétendre qu'on arriverait à une égalité de droits pour les enfants. Au contraire, on pouvait pénaliser davantage les enfants qui étaient nés d'un premier couple et qui se retrouvaient dans une famille monoparentale, alors que les autres enfants dans une famille reconstituée pouvaient se retrouver avec une situation financière beaucoup plus intéressante, c'est bien évident.

Donc, M. le Président, je pense que l'éclairage des différents groupes qui sont venus en commission parlementaire nous a permis de cheminer beaucoup. Parmi ceux et celles qui avaient le plus d'objections, je dirais, principalement au niveau de la clause qui amenait la question de difficulté excessive au niveau du débiteur, c'est évidemment la Fédération des associations de familles monoparentales et reconstituées du Québec, qui nous ont présenté ? et je ne reviendrai pas sur l'exemple, mon collègue en a parlé tantôt ? des exemples très concrets des conséquences au niveau des familles.

Il y avait aussi des inquiétudes, et je vais les citer, du côté du Conseil de la famille et de l'enfance qui nous disait que, le principe de l'égalité, évidemment personne ne pouvait être contre, «toutefois la disposition 587.2 de l'article suscite des interrogations, des inquiétudes. Assisterons-nous à un accroissement des situations conflictuelles non favorables au climat serein nécessaire au développement des enfants? Quelles seront les conséquences sur les familles monoparentales qui vivent déjà des situations de précarité financière? Le recours à la pension alimentaire est un moyen d'assurer une juste contribution financière des deux parents. Toutefois, il est illusoire de considérer que, dans tous les cas, cette pension alimentaire est en mesure d'assurer un niveau de vie convenable aux enfants.» Donc, si, en plus, on remodifie, il peut y avoir des conséquences effectivement dramatiques pour certaines familles.

J'ai grandement apprécié l'ouverture du ministre de la Justice dans ce projet-là, qui a su bien écouter, bien entendre les inquiétudes des différents groupes, celles aussi de l'opposition officielle, et apporter des modifications qui nous permettaient de restreindre et d'amener une assurance un peu plus forte au niveau des groupes, principalement des familles monoparentales.

Il est évident que l'autre modification concernant les enfants majeurs issus d'union libre ou civile, je pense que c'est une question de justice ou d'équité par rapport à ces enfants qui ne sont pas nés d'un mariage religieux, mais de leur assurer, à eux aussi, la possibilité de pouvoir avoir un recours alimentaire en passant par les parents, par un tuteur. Et c'est important que ces jeunes-là puissent aussi poursuivre des études parce que, les enfants majeurs, c'est évidemment au niveau des études supérieures que ça se passe, et c'est capital de pouvoir offrir, au Québec, à tous nos jeunes, la chance de poursuivre des études. Et à cet égard-là je pense qu'on vient d'apporter une solution équitable au niveau de l'ensemble des enfants majeurs.

Du côté des modifications au niveau de tenir compte du fait des nouveaux enfants nés dans une famille reconstituée, je pense que ce qu'il faut rappeler au niveau des conséquences, les éléments importants, c'est qu'il n'y a pas d'automatisme, il faut absolument que ce soient des difficultés, qu'il y ait une notion de difficulté. Quand il n'y a pas de difficulté, le barème évidemment doit s'appliquer, doit se maintenir. Et l'élément auquel nous tenions le plus: de s'assurer ? le ministre a respecté sa parole d'envoyer la lettre au Comité de suivi du modèle québécois de fixation des pensions alimentaires pour enfants ? de s'assurer de l'interprétation qui sera faite de ce projet de loi. Et il faut que, s'il y a des conséquences qu'on n'a pas prévues, s'il y a des conséquences... si on se retrouve avec une abondance de recours, ce qu'on ne croit pas, parce qu'on a mis des balises, le ministre a mis ses balises... Mais, si jamais les interprétations qui en étaient faites allaient à l'encontre des intentions du législateur, eh bien, je pense que, à ce moment-là, il faudra qu'on puisse réintervenir et ouvrir.

n (10 h 40) n

Mais je pense que, à ce moment-ci, nous pouvons dire qu'il y a eu un excellent travail de fait en commission parlementaire; remercier l'ensemble des participants, des groupes qui se sont manifestés et qui nous ont permis d'apporter les modifications qui étaient nécessaires à ce projet de loi. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, Mme la députée de Terrebonne. Je ne vois pas d'autre intervenant. Est-ce qu'il y a un droit de réplique qui s'exerce? Non.

Mise aux voix

Alors, en conséquence, le projet de loi n° 21, Loi modifiant le Code civil et le Code de procédure civile en matière de fixation de pensions alimentaires pour enfants, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, adopté. M. le leader du gouvernement, pour la poursuite de nos travaux.

M. Dupuis: Je vais vous demander d'appeler l'article 12 du feuilleton, M. le Président.

Projet de loi n° 20

Prise en considération du rapport
de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, à l'article 12 du feuilleton, l'Assemblée prend en considération le rapport de la Commission des finances publiques sur le projet de loi n° 20, Loi modifiant la Loi sur le ministère du Revenu et d'autres dispositions législatives. M. le ministre du Revenu, pour votre intervention. M. le ministre du Revenu.

M. Lawrence S. Bergman

M. Bergman: Merci, M. le Président. M. le Président, je soumets à cette Assemblée le rapport de la Commission des finances publiques qui a été déposé le 1er avril dernier concernant le projet de loi n° 20 intitulé Loi modifiant la Loi sur le ministère du Revenu et d'autres dispositions législatives en vue de sa prise en considération.

M. le Président, le projet de loi n° 20 a été présenté le 29 octobre 2003, et le principe en a été adopté le 11 novembre suivant. Des consultations particulières ont eu lieu le 20 novembre 2003, et la Commission des finances publiques en a fait l'étude détaillée les 18, 20, 25 novembre 2003, le 2 décembre 2003 ainsi que les 24, 25, 30 et 31 mars 2004. Elle en a adopté les 65 articles avec trois amendements.

M. le Président, ce projet de loi modifie la Loi sur le ministère du Revenu, notamment:

1° pour adapter certaines règles de procédure propres à la législation fiscale aux nouvelles règles introduites par le Code de procédure civile le 1er janvier 2003;

2° pour préciser certaines règles de procédure propres aux matières fiscales;

3° pour introduire des pouvoirs d'enquête au moyen d'une procédure d'autorisation générale et au moyen également d'une procédure d'ordonnance de communication de documents ou de renseignements;

4° pour modifier certaines règles relatives à la responsabilité des administrateurs;

5° et enfin pour modifier également certaines règles relatives à la compensation fiscale gouvernementale.

M. le Président, ce projet de loi modifie de plus la Loi facilitant le paiement des pensions alimentaires et la Loi sur le remboursement d'impôts fonciers afin de les rendre concordantes avec la Loi sur le ministère du Revenu en matière de procédure.

M. le Président, il modifie la Loi concernant l'impôt sur le tabac et la Loi concernant la taxe sur les carburants afin de préciser les obligations d'une personne qui entend vendre au détail du tabac ou du carburant au Québec.

Enfin, M. le Président, plusieurs articles du projet de loi ont pour objet de modifier les lois fiscales afin de permettre que les avis de cotisation et certains autres avis prévus par ces lois puissent être communiqués autrement que par voie postale.

M. le Président, ce projet de loi tient compte de plusieurs préoccupations importantes pour notre gouvernement. Il en est ainsi notamment de l'allégement de certaines règles de procédure applicables en matière fiscale. Par exemple, les nouvelles règles relatives à la production d'une défense écrite et à la possibilité de procéder à un interrogatoire préalable sans égard au montant en litige assureront aux contribuables qui sont partie à un litige avec le fisc québécois de pouvoir obtenir toute l'information utile au soutien de leur contestation.

Enfin, M. le Président, il faut savoir qu'en fiscalité non seulement la matière est complexe, mais encore une cotisation émise bénéficie d'une présomption de validité. Ainsi, il appartient au contribuable de contester la cotisation qui lui est adressée et c'est sur lui que repose le fardeau de preuve que celle-ci était mal fondée. Il est donc important, M. le Président, que le contribuable comprenne complètement les tenants et aboutissements de la cotisation à laquelle il fait face pour pouvoir assumer ce fardeau de preuve.

M. le Président, dans ce contexte, le fait qu'une défense écrite soit obligatoire et que le contribuable puisse procéder à un interrogatoire au préalable fait en sorte que le contribuable pourra mieux comprendre la cotisation et sera mieux à même de rencontrer le fardeau de preuve qui lui est imposé.

De plus, les modifications apportées permettront aux contribuables de joindre plusieurs cotisations dans un même appel. Il s'agit d'une amélioration substantielle, puisque les contribuables concernés verront la gestion de leur dossier juridique simplifiée. Il s'agit de mesures qui permettent de simplifier la vie du citoyen en lui facilitant la tâche vis-à-vis du ministère du Revenu, tout en diminuant son fardeau administratif.

Par ailleurs, M. le Président, ce projet de loi permettra au ministère du Revenu d'accroître la lutte à la fraude fiscale, et ce, dans le respect des droits fondamentaux reconnus par les chartes canadienne et québécoise des droits et libertés.

M. le Président, la mission du ministère ne se limite pas à traiter les déclarations que produit la majorité des contribuables conformément aux prescriptions des lois fiscales. Elle implique, M. le Président, que le ministère identifie les fraudeurs et perçoive d'eux les montants dont ils sont redevables. En effet, M. le Président, en matière de contrôle fiscal, les mandats et les pouvoirs du ministère du Revenu sont de deux ordres: la vérification et l'enquête.

Le mandat de vérification revêt un caractère purement civil, puisqu'il est axé sur la détermination des créances fiscales et se traduit par l'établissement d'une cotisation, soit un titre de créance en faveur de l'État. En vérification, M. le Président, le ministère dispose de pouvoirs souples compte tenu du caractère civil de l'opération. Il peut donc vérifier les déclarations et les pièces et exiger des renseignements auprès de la personne vérifiée ou de tiers.

Le mandat d'enquête, M. le Président, vise quant à lui à contrer la fraude fiscale et à entreprendre des poursuites pénales en vue d'obtenir une condamnation. Les pouvoirs de vérification ne peuvent légalement être utilisés pour mener une enquête en ce qu'il est statué que leur utilisation irait à l'encontre des chartes, notamment le droit au silence. Le seul pouvoir demeurant aux enquêteurs était donc celui du mandat de perquisition traditionnel qui ne leur permet que de saisir des choses tangibles dans un endroit précis. Les nouvelles mesures, M. le Président, et plus particulièrement l'autorisation générale introduite par le projet de loi, permettront donc au ministère de récupérer des sommes importantes éludées au fisc, et ce, en toute équité pour les citoyens et les citoyennes du Québec.

n (10 h 50) n

L'autorisation générale, M. le Président, a fait l'objet de beaucoup de discussions avec les membres de l'opposition officielle et avec les différents organismes intervenus lors des consultations particulières ou à un stade ultérieur. M. le Président, ces intervenants nous ont fait part de certaines inquiétudes dont nous avons tenu compte et auxquelles nous avons répondu au moyen d'amendements à l'article 40.1.1. Ces modifications ont eu pour effet de bonifier la disposition en l'encadrant encore plus.

Toutefois, M. le Président, avant d'aborder les modifications apportées, compte tenu de l'importance de l'article 40.1.1, je tiens à rappeler certains éléments fondamentaux de cette disposition afin que sa teneur soit bien comprise de tous. Tout d'abord, il importe de souligner que cette autorisation doit être approuvée par un juge de la Cour du Québec. Il n'est aucunement question que les enquêteurs utilisent ce pouvoir selon leur bon vouloir, sans aucun contrôle.

Par ailleurs, j'estime primordial que le caractère exceptionnel et de dernier recours de ce pouvoir soit souligné, et ce, avec toute l'importance qu'il mérite. Enfin, M. le Président, j'insiste pour souligner que l'autorisation générale ne peut être accordée que lorsque le juge, arbitre impartial, je tiens à le rappeler, est convaincu de l'existence à la fois de trois conditions, soit:

1° qu'il y a des motifs raisonnables de croire qu'une infraction à la loi fiscale à l'égard de laquelle une personne est passible d'un emprisonnement a été ou sera commise;

2° que la délivrance de l'autorisation servira au mieux l'administration de la justice;

3° qu'il n'y a aucune disposition dans une loi fiscale ou dans le Code de procédure pénale qui prévoit un autre type de mandat, d'autorisation ou d'ordonnance permettant de poursuivre l'enquête.

M. le Président, l'on voit donc aisément que cette disposition sera, de par sa nature même, d'une utilisation contrôlée. Il importe également de souligner que la demande d'autorisation ne peut être effectuée que par le fonctionnaire du ministère du Revenu autorisé par règlement.

De plus, soulignons que cette disposition tient compte de la protection de la vie privée des citoyens, en plus du fait qu'elle soit autorisée par un juge. En effet, M. le Président, dans le cadre de cette disposition, le juge ne peut autoriser l'interception d'une communication privée. Quant à l'observation des activités d'une personne au moyen, par exemple, d'une caméra, celle-ci ne pourra se faire que dans des circonstances où la personne ne peut raisonnablement s'attendre au respect de sa vie privée, tel que l'a suggéré la Commission d'accès à l'information.

Par ailleurs, M. le Président, bien que l'équivalent au Code criminel de l'article 40.1.1 s'applique non seulement aux crimes prévus à ce code, mais aussi aux infractions à toute autre loi fédérale, l'application de l'article 40.1.1 se limite aux enquêtes relatives à des infractions aux lois fiscales passibles d'une peine d'emprisonnement, c'est-à-dire aux infractions graves.

De plus, M. le Président, en vue de clarifier la situation à l'égard de la protection de la vie privée tant de la personne sous enquête que des tiers, une modification a été apportée pour mentionner expressément que l'autorisation doit énoncer les modalités que le juge estime appropriées dans les circonstances, notamment pour que l'attente raisonnable du respect de la vie privée d'une personne soit protégée.

M. le Président, il en est de même pour la protection du secret professionnel. En effet, une modification a été apportée afin d'indiquer que le juge devra préciser les modalités qu'il estime appropriées pour protéger le secret professionnel de l'avocat ou du notaire. À cet égard, voici ce que disait récemment la Cour suprême du Canada dans l'affaire Maranda, et je cite le jugement: «Le privilège avocat-client représente d'ailleurs l'un des rares privilèges génériques qu'admet la "common law". La jurisprudence de notre cour l'a clairement distingué des privilèges reconnus sur une base particulière, cas par cas, pour des motifs de politique juridique, selon les critères de Wigmore.» Fin de citation, M. le Président. C'est le jugement Maranda contre Richer, 2003, Cour suprême du Canada, 1967, paragraphe 11.

Par ailleurs, M. le Président, dans l'affaire Tower, rendu en 2003, la Cour d'appel fédérale a expressément exclu le secret professionnel des comptables en matière fiscale en ces termes, M. le Président, et je cite le jugement: «Le privilège du secret professionnel de l'avocat, qui est fondamental à la bonne administration de la justice, est nécessaire pour que le client puisse, à la faveur d'avis confidentiels, ester en justice pour défendre ses droits contre les réclamation indues. Les avocats sont tenus, par la loi et par leur code de déontologie, de préserver et de protéger l'intérêt public dans l'administration de la justice. Les comptables, par contre, ne sont pas assujettis à ces obligations et ils ne donnent pas des avis juridiques, sinon ils contreviendraient aux lois provinciales et territoriales régissant les professions légales. D'après mon analyse, aucune considération de politique générale prépondérante ne permet d'assimiler au privilège de l'avocat les conseils obtenus de comptables.» Fin de la citation, M. le Président, et c'est la cause Tower contre Canada, 2003, CAF 307, paragraphe 38.

Enfin, M. le Président, une dernière modification a été apportée afin de réduire de trois à un an le délai maximal pour donner un avis à l'effet qu'une perquisition secrète a été effectuée.

M. le Président, ceci termine mes remarques concernant l'autorisation générale.

Toujours en matière pénale, M. le Président, le projet de loi introduit l'ordonnance judiciaire de communication des documents ou de renseignements. Cette ordonnance est émise par un juge de la Cour du Québec et permet à un enquêteur de recueillir d'une personne autre que la personne sous enquête ? souvent, M. le Président, une banque ? de lui communiquer des renseignements ou documents pouvant faire preuve de la commission de la fraude fiscale sous enquête. M. le Président, cette ordonnance vise à prendre en compte les effets de l'arrêt Jarvis, rendu par la Cour suprême du Canada, qui empêche les enquêteurs du ministère du Revenu d'utiliser les pouvoirs ordinaires de vérification, notamment la demande péremptoire, lorsqu'ils cherchent à déterminer la responsabilité pénale d'une personne.

M. le Président, dans un autre ordre d'idées, il importe de souligner que ce projet de loi est conforme aux orientations de notre gouvernement en matière de gouvernement en ligne.

n (11 heures) n

Je rappelle, M. le Président, qu'actuellement l'envoi par le ministre du Revenu des avis de cotisation, qui sont en quelque sorte des avis officiels indiquant aux contribuables si ces derniers doivent ou non un montant à l'État en vertu des lois fiscales, est limité en ce moment par la loi à la voie postale.

M. le Président, plusieurs des modifications apportées par ce projet de loi visent à lever cette limitation et accordent au ministre du Revenu davantage de souplesse dans ses communications avec les citoyens. M. le Président, elles lui permettront donc d'élargir la gamme des services qu'il peut offrir à la population par voie électronique et faciliteront les échanges avec sa clientèle.

À ce sujet, M. le Président, j'aimerais souligner que le ministère a continuellement enrichi sa vitrine Internet et s'est fait fort de développer sa prestation électronique de services aux citoyens. Le site du ministère est devenu une référence quotidienne pour de nombreux spécialistes en fiscalité, et j'en suis très fier. Le site du ministère reçoit plus de 7 500 visites par jour, on y procède à près de 20 000 téléchargements quotidiennement, ce qui en fait l'un des sites gouvernementaux québécois les plus fréquentés.

M. le Président, bien que l'offre de service électronique du ministère soit déjà diversifiée, son amélioration est déjà prévue, entre autres, pour répondre aux orientations gouvernementales en matière de gouvernement en ligne.

M. le Président, en ce qui concerne la bonification de la gamme de services actuels, des travaux sont déjà amorcés afin d'y intégrer, à moyen terme, d'autres services. D'abord, l'amélioration du contenu informationnel du site et son enrichissement sont des préoccupations constantes. Ensuite, M. le Président, le ministère veut être capable d'offrir la possibilité aux contribuables qui en font la demande de recevoir par Internet leur avis de cotisation en matière d'impôt, de taxe ou de retenues à la source.

M. le Président, finalement, je tiens à souligner que l'éventail de services offerts par le ministère à sa clientèle, parmi lesquels on retrouve notamment la déclaration de revenus électronique, le service info-remboursement ainsi que le service «Faites vos changements d'adresse en ligne», est l'un des plus généreux parmi toutes les administrations fiscales en Amérique du Nord.

En conclusion, M. le Président, je demande donc à cette Assemblée de bien vouloir adopter le rapport de la Commission des finances publiques sur l'étude détaillée du projet de loi n° 20 intitulé Loi modifiant la Loi sur le ministère du Revenu et d'autres dispositions législatives. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, M. le ministre du Revenu. Et je reconnais, pour la poursuite de l'adoption du rapport de ce projet de loi, M. le député de Gaspé et porte-parole de l'opposition officielle en matière de revenu. M. le député de Gaspé.

M. Guy Lelièvre

M. Lelièvre: Alors, merci, M. le Président. Effectivement, le projet de loi qui a fait l'objet d'étude en commission parlementaire a été un projet de loi auquel nous avons consacré beaucoup d'énergie. C'est un projet de loi qui, à première apparence, introduisait des notions de concordance et des modifications pour faciliter la gestion des envois et des communications avec la clientèle du ministère du Revenu.

Vous savez, M. le Président, que ce projet de loi modifie énormément de lois, la Loi sur la fiscalité municipale, l'impôt sur le tabac, la Loi sur les impôts, la Loi sur le ministère du Revenu, qui est celle qui a fait l'objet de plus de débats, la Loi facilitant le paiement des pensions alimentaires, le Régime des rentes du Québec, le remboursement d'impôts fonciers, le soutien du revenu et favorisant l'emploi et la solidarité sociale, la taxe de vente et la taxe sur les carburants.

Je voudrais attirer l'attention, votre attention, M. le Président, et particulièrement sur l'article 25 de ce projet de loi, qui introduisait des nouvelles notions, des nouveaux moyens, un nouvel arsenal pour le ministère du Revenu.

Il a fallu, M. le Président, que l'opposition réclame avec énergie la tenue de consultations particulières, puisque ce projet de loi permettait au ministère d'introduire des dispositions législatives... que vous ou n'importe quel citoyen aurait pu faire l'objet d'écoute électronique, aurait pu faire l'objet de surveillance vidéo. Et il a été sage de notre part, à l'opposition, de réclamer du Barreau du Québec sa présence, de la Commission d'accès à l'information, de la Commission des droits de la personne et de la jeunesse, du Conseil interprofessionnel du Québec, de l'Ordre des comptables agréés, de l'Association de planification fiscale et financière des commentaires. Ces commentaires nous sont venus, et les délais qui nous ont été accordés par le gouvernement ont été très restreints, mais nous avons réussi quand même à apporter au ministre et au gouvernement des points de vue différents de ceux qu'ils nous soumettaient lors de l'étude de ce projet de loi.

Or, nous n'avons pas débuté l'étude du projet de loi tant et aussi longtemps que ces organismes n'avaient pas émis des avis, et nous avions raison. Des gens sont venus en commission parlementaire, et la preuve, M. le Président: le 3... au mois de novembre dernier, les organismes ont comparu; le 25 novembre, le Conseil interprofessionnel a envoyé un avis mettant en garde le ministre concernant ces mesures; le Barreau du Québec est intervenu également de vive voix; et il s'en est suivi une série de communications entre le ministère du Revenu et les organismes pour faire en sorte que le projet de loi soit acceptable afin de ne pas brimer les droits des citoyens, de ne pas faire des brèches dans le respect du droit à la vie privée, M. le Président, de clarifier quels seront les mécanismes. Et je peux vous dire aujourd'hui que la collaboration de ces organismes a été précieuse pour les citoyens et les citoyennes du Québec.

D'ailleurs, le ministre, dans ses correspondances ? la dernière en date du 23 mars, et par la suite la commission parlementaire a poursuivi ses travaux ? a clairement indiqué que le juge ne peut autoriser l'interception d'une communication privée telle que définie à l'article 183. C'est dans les notes explicatives des amendements qu'il a déposés à la Commission des finances publiques. D'autre part, le juge ne peut pas non plus autoriser l'observation au moyen d'une caméra de télévision ou d'un autre dispositif électronique semblable. C'est important, M. le Président, parce que toute personne aurait pu être visée par cette disposition, si le ministre l'avait conservée, parce qu'on la retrouve à l'article 25, là, de... l'article 40.1 et le suivant.

D'autre part, on retrouve, dans les commentaires et dans les orientations ministérielles, et qui, j'espère, sont devenus des engagements, hein, que l'utilisation des dispositifs outre... électroniques semblables... les activités d'une personne dans des circonstances telles que celle-ci peut raisonnablement s'attendre au respect de sa vie privée. Donc, le ministre a reconnu, à l'instar des démarches qui ont été faites auprès des organismes, le Barreau, etc., que le ministre ne peut pas espionner qui il veut, quand il le veut, il faut qu'il y ait une procédure suivie de façon rigoureuse. Et, M. le Président, je suis très fier de la collaboration de mes collègues de l'opposition, entre autres le député de Chicoutimi, la députée de Mirabel, le député de Saint-Maurice, le député de Charlevoix, qui ont contribué énormément à apporter des commentaires pour enrichir de façon positive le projet de loi du ministre.

n (11 h 10) n

Alors, M. le juge... M. le Président, on sait que le Code criminel prévoit des interceptions de communications. Là, le ministre, il a renoncé à cet élément, et nous allons nous assurer, par un suivi très serré, que, effectivement, il n'y aura pas de débordement.

D'autre part, M. le Président, quand il y aura une autorisation émise par un juge, elle devra énoncer des modalités qu'il estime appropriées dans les circonstances pour que la fouille, la perquisition ou la saisie soient raisonnables, pour que l'attente ? parce qu'on parle réellement d'une attente, que chaque citoyen s'attend à ce que le respect de sa vie privée soit protégé ? donc pour que l'attente raisonnable du respect de la vie privée soit protégée ainsi que pour protéger le secret professionnel de l'avocat et du notaire.

D'autre part, le ministre souhaitait avoir des autorisations générales pour une durée de trois ans. M. le Président, je suis heureux que le ministre se soit rendu aux arguments de tous ceux qui lui disaient: Trois ans, c'est long; un an serait suffisant. Et le ministre a accepté. Je pense que l'opposition a fait un travail ? avec les organismes qui nous ont supportés par leurs avis ? quand même constructif, et le ministre a compris que le respect de la vie privée, c'est important.

D'ailleurs, la Commission des droits de la personne et de la jeunesse a publié un document, en septembre 2003, et dont tous les membres de cette Assemblée devraient prendre connaissance: La surveillance vidéo dans les lieux publics par les organismes publics et son incidence sur les droits protégés par la Charte québécoise.

M. le Président, je pense que nous sommes dans une période où nous avons connu, en 2001, des événements tragiques. Il y a eu une panoplie, une panoplie de mesures qui ont été mises en place pour surveiller tout le monde. Dans les aéroports, on projette de mettre des appareils qui vont faire la lecture de l'iris et que, par la suite, aucun contrôle sur les données qui seront recueillies... Et vous savez que, par l'iris, on peut connaître l'état de santé d'une personne, ça a été soulevé. Les compagnies d'assurance pourraient se servir de ces données pour déterminer l'assurabilité d'une personne ou encore pour augmenter la prime, déterminer qu'elle est à haut risque. Donc, on élimine des gens, tandis qu'aujourd'hui on n'est pas dans ce cas-là. Et, aux États-Unis, la pratique, je crois, est commencée, ce qu'ils appellent des entrées privilégiées ou faciles. Pour faciliter l'entrée des passagers aux États-Unis, la lecture de l'iris se fait, on reconnaît la personne ou la machine la reconnaît, et c'est fait sans autres contrôles parce qu'elle bénéficie d'un statut particulier au niveau de certains critères qui ont été appliqués à son égard.

Alors, M. le Président... alors je dois, dans les circonstances, dire que les organismes sont rassurés mais en partie. Si je prends, par exemple, la dernière lettre du 17 mars 2004, avant que nous commencions nos travaux en commission parlementaire, la Commission d'accès à l'information dit ceci: «Nous prenons donc bonne note de cette dernière version ? parce que le ministre en a envoyé plusieurs avant que cette version finale soit enfin présentée à la Commission des finances publiques ? et plus particulièrement des modifications qui seraient apportées à l'article 40.1.1 qu'on retrouve à l'article 25 du projet de loi.

«Une autorisation émise par la Cour du Québec afin de permettre le recours à certaines techniques ou méthodes d'enquête devra énoncer les modalités appropriées pour que l'attente raisonnable du respect de la vie privée soit protégée. Ainsi, cette nouvelle version de l'article 40.1.1 reconnaît que l'attente raisonnable du respect de la vie privée vaut tant pour la personne visée directement par l'autorisation de la cour que pour toute autre personne.»

Et on a vu également, dans les commentaires du 17 mars de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, le commentaire suivant, concernant la dernière proposition, toujours de l'article 40.1.1: «La commission soutient un tel amendement. En revanche, nous continuons de nous interroger sur les moyens effectifs qui seront mis de l'avant de manière à ce que l'attente raisonnable au respect au droit de la vie privée des personnes concernées par une infraction de même que celle des tiers soit prise en compte dans chaque circonstance. Le cas échéant, en vertu des fonctions qui lui sont conférées à l'article 71 de la charte, la commission restera vigilante et vous réitère une fois de plus son entière collaboration.» Et cette lettre a été adressée au ministre du Revenu en date du 17 mars.

M. le Président, un autre élément qui a été convenu ou dont le ministre a pris l'engagement, c'est que, vous savez, au Québec, il y a 45 ordres professionnels réunis au sein du Conseil interprofessionnel. Il y a le secret professionnel des avocats ou des notaires qui est protégé. Il y a 43 autres corps professionnels qui n'ont aucune protection, et particulièrement à l'égard des lois fiscales. Et ce que le Conseil interprofessionnel du Québec souhaitait, c'est qu'on commence à discuter de l'application des lois fiscales et du respect du secret professionnel.

Vous allez voir un psychiatre, vous allez voir un psychologue, vous allez voir un médecin, vous allez voir un autre professionnel qu'on retrouve au Québec, et là tout le monde peut aller chercher l'information sans qu'il n'y ait aucune protection. Parce qu'on a constitutionnalisé le droit au secret professionnel de l'avocat, celui du notaire, mais le secret professionnel des autres ordres, il est aussi important que celui du Barreau à l'égard des avocats et des clients, parce que le secret professionnel, c'est pour protéger les clients... que celui du notaire à l'égard de ses clients.

Je pense que ce n'est pas donné... ce n'est pas permis, hein, que, par exemple, un psychiatre puisse dévoiler toutes les informations parce que le ministère du Revenu se présente à ce bureau dans l'espoir d'obtenir des informations à l'effet qu'il y a des confidences qui auraient été faites que la personne aurait fraudé le ministère du Revenu. Il y a des limites à cette intrusion dans la vie privée. Et le ministre a mentionné, à la fin de cette commission ? et le Conseil interprofessionnel en est heureux ? qu'il y aura un comité de travail pour justement se pencher sur les lois... le secret professionnel et l'application des lois fiscales. Au Québec, je pense que nous avons fait un cheminement très particulier en ce qui a trait au respect des droits fondamentaux, au respect des droits à la vie privée, on a une charte québécoise qui est excellente.

Alors, M. le Président, je ne peux que quand même conserver, à l'instar de mes collègues, des réserves, parce qu'on sait aussi que le ministre pourra quand même faire des perquisitions secrètes. Mais c'est limité dans le temps parce que le texte de loi, il prévoit que le juge, hein, le juge doit exiger qu'un avis de la perquisition soit donné après son exécution dans le délai qu'il estime approprié dans les circonstances. Les éléments de perquisition ont été balisés, et ça assure dans le fond l'application des lois fiscales, ça...

Et, il faut le dire, l'opposition est aussi contre l'évasion fiscale. Le ministre nous a rassurés en commission parlementaire en nous disant que ça va représenter au maximum une vingtaine de cas par année, peut-être une dizaine minimum. Bon. Alors, c'est 10 à 20 cas. Mais j'espère que le ministre rendra publiques, comme il le fait à l'heure actuelle sur le site Internet, les poursuites qui sont intentées, les condamnations qui sont infligées à ceux qui contreviennent aux lois fiscales, et on peut voir à ce moment-là dans quelles régions, le montant des fraudes ainsi que l'amende qui est imposée aux différents contrevenants.

n(11 h 20)n

Alors, M. le Président, je vais m'arrêter ici pour vous dire que l'opposition a joué son rôle, dans ce dossier, de façon remarquable. Et je ne suis pas le seul à avoir travaillé sur ce dossier. Comme je l'ai mentionné, mes collègues, tout à l'heure, de Chicoutimi et de Charlevoix, Mirabel ont participé à ce dossier et leur apport à ce travail... Je ne sais pas si j'ai nommé le député de Saint-Maurice, mais le député de Saint-Maurice a apporté une contribution aussi quand même très importante, de même que le vice-président de la commission. Leur apport a été exceptionnel compte tenu de l'importance du sujet.

Et le ministre a peut-être eu l'impression, en cours de route, que l'opposition n'avançait pas très rapidement dans ce dossier pour l'étude du projet de loi, mais nous avions des craintes, et nous avons encore des craintes, et les organismes auxquels je fais référence ont toujours des craintes. Mais on se fie sur la bonne foi du ministre et surtout la présence d'un juge qui sera celui... d'un juge ou d'une juge qui pourra émettre une autorisation avec des balises qui permettront d'encadrer plus efficacement et de façon certaine les perquisitions ou les mandats de perquisition qui seront sollicités par le ministère du Revenu. Alors, je m'arrête là-dessus, M. le Président, et je vous remercie de l'attention.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, M. le député de Gaspé et porte-parole de l'opposition officielle en matière de revenu. Et je reconnais à nouveau le ministre du Revenu pour une intervention sur le rapport.

M. Lawrence S. Bergman

M. Bergman: M. le Président, juste une courte intervention. Je remercie mon collègue pour ses commentaires. Et, oui, il a raison, on a fait des consultations et, au contraire de nos amis en face, on a écouté. Et, comme vous le savez, un bon document, c'est un document où on est prêt pour faire des modifications et des changements. On a fait quelques modifications suite aux recommandations qu'on a eues des groupes qui ont intervenu sur ce projet de loi, et je suis très, très fier que nous ayons reçu des lettres d'appui pour ce projet de loi de la Commission d'accès à l'information, de la Commission des droits de la personne et de la jeunesse et du Barreau. M. le Président, on a déposé copie de ces lettres en commission parlementaire.

Mon collègue le député de Gaspé a fait référence que toute personne visée par les pouvoirs dans cette loi d'autorisation générale... Il a fait référence à l'article 25, mais il ne vous a pas expliqué qu'il y a une grande différence dans les procédures disponibles au ministère du Revenu dans les cas de vérification et dans les cas d'enquête et que les pouvoirs disponibles au ministère en vertu de l'article 25, c'est seulement dans le cas d'enquête. Alors, ce n'étaient pas toutes les personnes... disons, tous les citoyens, mais c'est seulement... L'article se limite aux enquêtes qui peuvent être faites par le ministère dans le cas d'une grave infraction fiscale.

Alors, il y a une grande différence. Et ces pouvoirs s'appliquent seulement... En plus du fait que c'est au moment d'une enquête et pas d'une vérification, ces pouvoirs s'appliquent seulement quand l'employé du ministère a l'autorisation d'un juge de la Cour du Québec, un arbitre impartial, qui est convaincu de l'existence des conditions qui étaient très, très claires dans le projet de loi, trois conditions qu'il doit appliquer à la fois, et j'ai indiqué ces conditions dans mon discours il y a quelques moments.

Finalement, mon collègue a fait référence aux questions du secret professionnel, mais, M. le Président, si vous examinez la jurisprudence, vous allez voir... la jurisprudence que j'ai citée ce matin dans le cas de Maranda contre Richer et dans le cas de Tower contre Canada. Il y a une différence entre le secret professionnel accordé à l'avocat et au notaire et ceux accordés aux autres professionnels. Et je vous cite encore le cas de Tower contre Canada, où le juge nous a dit que le privilège du secret professionnel de l'avocat, qui est fondamental à la bonne administration de la justice, est nécessaire pour que le client puisse, à la faveur d'avis confidentiels, ester en justice pour défendre ses droits contre les réclamations indues. Alors, c'est pour assurer aux contribuables d'avoir une pleine et entière défense devant les cours, une grande différence entre le secret professionnel qui s'applique à l'avocat et notaire et le secret professionnel qui s'applique aux autres professionnels.

Alors, c'est mes commentaires. Mais finalement encore je remercie tous les collègues qui ont contribué à nos débats en commission parlementaire. Merci, M. le Président.

Mise aux voix du rapport

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, M. le ministre du Revenu. Comme je ne vois pas d'autre intervenant, le rapport de la Commission des finances publiques portant sur le projet de loi n° 20, Loi modifiant la Loi sur le ministère du Revenu et d'autres dispositions législatives, est-il adopté? Adopté sur division. Adopté sur division. M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: Je vais vous demander d'appeler l'article 13 du feuilleton, M. le Président.

Projet de loi n° 39

Prise en considération du rapport
de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, pour la poursuite de nos travaux, j'appelle l'article 13 du feuilleton. C'est: L'Assemblée nationale prend en considération le rapport de la Commission de l'économie et du travail sur le projet de loi n° 39, Loi modifiant la Loi sur les forêts. Y a-t-il des interventions? Alors, je constate qu'il n'y a pas d'intervention.

Mise aux voix du rapport

Alors, est-ce que le rapport de la Commission de l'économie et du travail portant sur le projet de loi n° 39, Loi modifiant la Loi sur les forêts, est adopté? Alors, le projet est adopté. M. le leader, pour la poursuite de nos travaux.

M. Dupuis: Alors, dans les circonstances, M. le Président, je vous demanderais de suspendre nos travaux jusqu'à 14 heures cet après-midi.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, les travaux de cette Chambre sont suspendus jusqu'à 14 heures cet après-midi.

(Suspension de la séance à 11 h 27)

 

(Reprise à 14 h 6)

Le Président: Bonjour, Mmes, MM. les députés. Nous allons nous recueillir quelques instants.

Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.

Alors, au nom de tous les collègues, je voudrais souhaiter un bon anniversaire à M. le député de Dubuc dont c'était l'anniversaire hier, M. le député de Dubuc, et aujourd'hui et en votre nom, un bon anniversaire à Mme la députée de Rosemont.

Présence de l'ambassadrice de la République
de Slovénie, Mme Veronika Stabej

J'ai le plaisir de souligner la présence dans les tribunes de l'ambassadrice de la République de Slovénie, Son Excellence Mme Veronika Stabej.

Affaires courantes

Aux affaires courantes, aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles ni présentation de projets de loi.

Il n'y a pas de dépôt de documents, de rapports de commissions ou de pétitions.

Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.

Je vous avise qu'après la période de questions et réponses orales M. le ministre des Affaires municipales, du Sport et du Loisir répondra à une question posée le 30 mars dernier par Mme la députée de Prévost concernant le protocole d'inauguration de la Société d'habitation du Québec.

Questions et réponses orales

Et nous en sommes maintenant à la période de questions et réponses orales. Et je reconnais M. le chef de l'opposition officielle.

Des voix: ...

Le Président: Je vous demanderais l'ordre, s'il vous plaît, puis de prendre vos places. Merci.

Stratégie de défense de la compétence exclusive
du Québec en matière de santé

M. Bernard Landry

M. Landry: M. le Président, on a un premier ministre du Canada qui est, à toutes fins pratiques, en campagne électorale avec comme première priorité la santé. Après avoir dit, il y a quelque temps, que les provinces n'auraient pas un sou cette année en dépit du fait évidemment ? et nous y souscrivons pleinement ? qu'on sait que le Québec a besoin de cet argent, et un besoin impérieux, le premier ministre du Canada dit qu'il va proposer un plan de 10 ans avec une série de conditions, plusieurs conditions, dit-il, et que les provinces devront accepter des réformes importantes. Même l'ancien premier ministre Brian Mulroney est outré par une telle attitude.

Ma question: Est-ce que le premier ministre, pour contribuer à l'élection de ses amis libéraux à Ottawa, va baisser les bras, qu'il va céder aux pressions et qu'il va accepter quelque condition que ce soit de la part du gouvernement fédéral dans notre juridiction exclusive de santé?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Jean Charest

M. Charest: M. le Président, la question du chef de l'opposition officielle m'encourage parce que, en lisant les journaux ce matin, j'apprenais que son parti avait l'intention de créer un ministère de la souveraineté, et il me semblait que la population du Québec avait été très claire sur ses choix. Quand on demande aux Québécois: C'est quoi, la première priorité, c'est-u la santé ou est-ce que c'est la cause de la souveraineté...

Des voix: ...

n(14 h 10)n

M. Charest: Alors, attendez, le député de Rousseau n'a pas applaudi encore, là.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: Alors, M. le premier ministre.

M. Charest: Excusez, je ne voulais pas les interrompre, M. le Président, mais je voulais simplement dire ceci, simplement dire ceci. Sur la question de la santé, sur la question de la santé, c'est une compétence qui relève de l'État québécois, c'est une compétence... Et puis ce n'est pas juste une question d'inscrire dans une colonne, dans un article de la Constitution qui est responsable de quoi, c'est une affaire de bon sens, M. le Président. Si on veut que le système de soins de santé au Québec, comme ailleurs au Canada, soit dit en passant, fonctionne de façon efficace, il faut reconnaître la première responsabilité comme étant celle de l'Assemblée nationale du Québec. C'est une affaire de bon sens. Et, pour cette raison-là, il n'est pas question de faire de compromis.

Le gouvernement fédéral a joué un rôle au niveau de la santé, il fait des transferts. Au niveau de la recherche, il a joué un rôle que personne n'a contesté, même pas des gouvernements du Parti québécois. Il pourrait jouer un rôle s'il voulait faire des financements d'infrastructures. Mais, au niveau des compétences et qui est responsable du fonctionnement du système de soins de santé, incluant ses choix, incluant ses choix, ça, ça relève de l'Assemblée nationale du Québec.

Le Président: En question additionnelle, M. le chef de l'opposition officielle.

M. Bernard Landry

M. Landry: Le premier ministre se souvient-il qu'il a proclamé, quand il était chef de l'opposition, qu'il n'accepterait aucune condition, aucune condition, aucune condition? Il l'a dit trois fois, et je pense qu'il avait raison.

Vu l'importance en soi de la question argent pour les malades du Québec et notre système de santé et vu l'importance conjoncturelle eu égard aux élections fédérales, est-ce que le premier ministre peut dire à la population du Québec jusqu'où il est prêt à aller pour, en même temps, avoir l'argent, mais refuser toute condition qui pourrait venir du gouvernement central?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Jean Charest

M. Charest: Bien, M. le Président, sur cette question-là, j'ai toujours été très clair. D'ailleurs, je suis fier de rappeler au chef de l'opposition officielle que, dans une autre vie, alors que j'étais dans un autre Parlement, je défendais les mêmes positions que je défends aujourd'hui. Alors, ce que je défends ici, à l'Assemblée nationale du Québec, je le défends partout où je vais au Canada et je le fais depuis plusieurs années. Je n'ai pas... Excusez-moi de vous...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Je vous demanderais votre collaboration. M. le premier ministre, si vous voulez poursuivre.

M. Charest: Je ne voulais pas réveiller le député de L'Assomption, M. le Président, mais, puisque c'est le cas, je peux lui dire et lui rappeler que j'ai toujours défendu de façon très constante les positions que je défends aujourd'hui.

Maintenant, on veut aller plus loin parce qu'on veut se sortir de mesures ou de positions ad hoc au niveau de la fédération canadienne. C'est la raison pour laquelle on a proposé la création d'un conseil de fédération, pour qu'on puisse concerter davantage l'ensemble des gouvernements au niveau canadien pour que nous puissions ensemble obtenir des résultats durables pour la plus longue période possible.

Maintenant, il y a une bonne nouvelle quand même, l'État fédéral a annoncé sa décision, après le budget, de financer davantage la santé. Ils ne nous ont pas dit à quelle hauteur, ils ne nous ont pas dit de quelle façon, mais, en cela, au moins ils envoient un signal au niveau du financement qui est mieux que ce qu'on nous avait dit le jour du budget, puis ça, on l'accueille bien. Puis on va travailler de façon constructive, mais on va le faire avec un seul intérêt en tête, celui des citoyens du Québec. Quand le choix arrive entre la promotion de la souveraineté ou de la santé, nous autres, on est clairs, notre choix, c'est la santé.

Le Président: En question additionnelle, M. le chef de l'opposition officielle.

M. Bernard Landry

M. Landry: Le premier ministre peut-il s'engager à réfléchir sur le fait que, pour une nation normale, la souveraineté, c'est la santé et pas juste dans les hôpitaux mais dans tous les aspects de sa vie collective?

Et, quand le premier ministre dit que le premier ministre du Canada envoie un bon signal, peut-il nous expliquer ce qu'il voit de bon dans le signal qui dit, et je cite, que «Québec devra se plier à plusieurs conditions et accepter des réformes importantes de la part du gouvernement central»? Est-ce que ce n'est pas le signal le plus pervers qu'on peut avoir? Et comment se fait-il que le premier ministre peut penser que c'est un bon signal?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Jean Charest

M. Charest: Bien, M. le Président, le chef de l'opposition semble très ému, là, par cette question-là, ce qui, encore une fois, je vais vous dire, m'encourage parce que, l'entendre parler de santé, venant de sa bouche à lui en tout cas, c'est encourageant parce qu'on avait davantage l'habitude d'entendre parler de souveraineté. Et je lui rappelle que, sur cette question-là, nous, on ne mettra pas les intérêts des citoyens du Québec à la remorque de la défense de la cause de la souveraineté. On défend purement et simplement les intérêts des citoyens sur cette question-là.

Le signal qui est plus encourageant, qui n'était pas là au jour du budget, vous l'avez constaté en même temps que nous, c'est que le gouvernement fédéral, le jour où il a livré son budget, nous a... on le dit, nous a déçus parce qu'il n'y avait pas d'indication à l'effet qu'il allait augmenter les transferts de fonds au niveau de la santé. Quelques jours plus tard, M. Martin a dit que, oui, il allait le faire.

Est-ce qu'il le fera au prix d'imposer des conditions sur la façon dont on doit gérer le système de soins de santé au Québec, le réseau? Si c'est le cas, ce ne sera pas acceptable pour nous. Ça ne l'a jamais été dans le passé, ce ne le sera pas non plus à l'avenir. Et ce serait faire fausse route, fondamentalement, ce serait faire fausse route pour ceux et celles qui ont besoin de services de soins de santé. Que ce soit au Québec, en Ontario, en Saskatchewan ou en Alberta, c'est un mauvais choix qu'on va dénoncer ici, et qu'on dénoncera ailleurs au Canada, et qu'on dénoncera au moment où on s'assoira pour travailler ensemble sur les services de... système de soins de santé. Excusez.

Le Président: En question principale, Mme la députée de Prévost.

Financement des services
de francisation des immigrants

Mme Lucie Papineau

Mme Papineau: Merci, M. le Président. M. le Président, des centaines de personnes ont manifesté leur mécontentement dimanche, devant les bureaux du premier ministre. Des citoyens, des organismes communautaires, des professeurs, des représentants des carrefours d'intégration, mais surtout, M. le Président, surtout les personnes immigrantes elles-mêmes sont venus réclamer un droit à l'enseignement du français.

Le premier ministre peut-il reconnaître que la coupure des budgets en francisation, budgets qui sont passés de 45 millions l'an dernier à 35 millions cette année, entraînera une baisse importante de participation des nouveaux arrivants aux cours de français et que ce sera certainement dramatique pour l'intégration des nouveaux arrivants?

Le Président: Alors, Mme la ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration.

Mme Michelle Courchesne

Mme Courchesne: Alors, M. le Président, j'aimerais profiter de la question de la députée de Prévost pour apporter les chiffres suivants et les données suivantes. D'abord, je veux réitérer l'engagement du gouvernement sur l'importance de la langue française pour le Québec et l'importance de la francisation pour les nouveaux arrivants. À cette preuve, c'est qu'il y aura effectivement cette année 35 millions de dollars au moins, au moins d'investis dans les cours de français. À ce jour, le 3 mai prochain, 218 classes seront ouvertes, soit le même niveau que l'an dernier à pareille date.

Nous avons informé les représentants des... les étudiants qui étaient inscrits à ces cours des nouvelles mesures. Aujourd'hui, 90 % des étudiants qui ont été informés des mesures ont choisi de maintenir leur inscription aux cours de français. Et je dois dire aussi ? une autre donnée très importante ? que les allocations aux réfugiés sont maintenues, M. le Président.

Le Président: En question additionnelle, Mme la députée de Prévost.

Mme Lucie Papineau

Mme Papineau: Merci, M. le Président. M. le Président, comment la ministre peut-elle nous dire que la coupure des budgets de francisation, de l'ordre de 10 millions... Elle vient de nous dire qu'il va y avoir 35 millions, mais il y en avait 45. Comment peut-elle dire qu'on va être capable d'offrir plus de cours en français? Comment est-ce qu'elle peut prétendre qu'elle fait de l'intégration des immigrants une priorité?

Le Président: Mme la ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration.

Mme Michelle Courchesne

Mme Courchesne: M. le Président, je tiens à rappeler que ce 35 millions est encore un meilleur niveau que ce que vous investissiez lorsque, vous, vous étiez au gouvernement. Alors, de ce sens-là, les délais d'attente...

Des voix: ...

Mme Courchesne: ...je m'excuse, les délais d'attente, les délais d'attente ont commencé en l'an 2000. Nous sommes en 2004, et vous-même n'avez pas réussi à régler ces problèmes de délais d'attente pour les nouveaux arrivants. Première chose.

Deuxième chose, M. le Président, deuxième chose...

Le Président: Excusez-moi! Je vous demanderais votre collaboration, là. Mme la ministre, si vous voulez conclure.

n(14 h 20)n

Mme Courchesne: Deuxième chose. Plus de 51 % de ceux que nous accueillons chaque année parlent et maîtrisent la langue française. Or, ces personnes ont aussi des difficultés à trouver un emploi. Alors, ce que nous disons, c'est que nous allons faire ce maillage absolument nécessaire entre la francisation bien sûr dans la vie quotidienne, mais ce maillage nécessaire entre la francisation et l'insertion au milieu de travail. Et c'est ça que les communautés réclament, c'est de pouvoir...

Le Président: En terminant, Mme la ministre.

Mme Courchesne: ...s'exprimer en français tout en travaillant, M. le Président, et c'est ce que ce gouvernement s'attaquera à faire très prochainement: insérer les nouveaux arrivants en milieu de travail.

Le Président: En vous remerciant, Mme la ministre. En question principale, M. le député de Gouin et leader de l'opposition officielle.

Effet de la réduction du budget de Télé-Québec

M. André Boisclair

M. Boisclair: Oui, M. le Président. La coupure qu'impose la ministre de la Culture à Télé-Québec choque. Elle fait parler, M. le Président. Elle choque et elle fait parler parce que les intervenants comprennent bien, à la fois les gens du secteur privé, que les employés, que les auditeurs comprennent bien qu'aux 5 millions annoncés au cahier de crédits, Télé-Québec doit financer l'augmentation des coûts de système. Ces compressions s'ajoutent aussi à celles qui avaient été faites au cours de l'année dernière sous l'administration de l'actuelle ministre de la Culture.

La semaine dernière, lorsque nous avons évoqué cette question, la ministre de la Culture nous a dit froidement, sans réagir, et je la cite: «Je peux également vous dire ceci ? et je la cite, M. le Président: La programmation de Télé-Québec ne sera pas affectée.» Elle le dit sans broncher. Comment la ministre de la Culture peut-elle aujourd'hui maintenir de tels propos, alors qu'elle sait très bien, M. le Président, qu'il n'y aura rien de nouveau dans la programmation de Télé-Québec pour cet été, qu'il n'y aura aucune production nouvelle, que les productions qui étaient en cours devront être mises de côté? Comment, M. le Président ? question simple ? la ministre peut-elle maintenir ses propos, alors qu'elle sait très bien que, dès cet été, la programmation de Télé-Québec sera affectée par cette décision dangereuse pour Télé-Québec?

Le Président: Alors, Mme la ministre de la Culture et des Communications.

Mme Line Beauchamp

Mme Beauchamp: M. le Président, je réitère ici mes propos, Télé-Québec, en disposant de plus de 10 % du budget du ministère de la Culture et des Communications, budget qui a augmenté pour bien remplir cette mission que nous avons, une responsabilité incontournable comme gouvernement québécois de développer et assurer l'identité québécoise... Ce budget a augmenté, plus les mesures fiscales bien sûr octroyées par mon collègue ministre des Finances. Et, dans ce contexte d'un budget allant en augmentant, Télé-Québec reçoit plus de 10 % du budget du ministère de la Culture et des Communications, ministère qui a bien d'autres enjeux, vous en conviendrez avec moi, à relever également.

Je veux juste rappeler au député de Gouin que son propre gouvernement a procédé également à des coupures importantes à Télé-Québec dans le passé. Il se rappellera sûrement de ces importantes coupures faites à l'époque sous celui qui était titulaire du ministère de la Culture et des Communications, qui était Jacques Parizeau, qui a procédé à des coupures importantes, faisant en sorte que le budget que vous avez octroyé et qui apparaissait au livre des crédits de l'année 2000-2001, se résumait à 50,8 millions de dollars.

Vous venez de parler d'une baisse des crédits accordés à Télé-Québec l'année dernière par notre gouvernement? Ce n'était pas le cas. L'année dernière, considérant que le budget déposé...

Le Président: En terminant, Mme la ministre.

Mme Beauchamp: ...devait être adopté en juillet et que l'année était fort avancée, Télé-Québec a connu une augmentation de ses crédits, passant de 55 à 59 millions. Mais maintenant nous considérons qu'avec 57 millions de dollars Télé-Québec est à même d'assurer sa mission culturelle et éducative.

Le Président: En question additionnelle, M. le leader de l'opposition officielle.

M. André Boisclair

M. Boisclair: M. le Président, question simple: Combien de productions originales nouvelles seront sur les ondes de Télé-Québec cet été?

Le Président: Mme la ministre de la Culture et des Communications.

Mme Line Beauchamp

Mme Beauchamp: Oui. Je souris un peu parce que je me demande, le député de Gouin, lorsqu'il pose sa question, s'il s'est assuré de la cohésion au sein même de son caucus, puisqu'il y a encore... En l'an 2000, l'ancien président du Conseil du trésor révélait à un journaliste de La Presse que lui-même se posait beaucoup de questions, s'il fallait maintenir ou pas Télé-Québec. Êtes-vous bien sûr de votre position?

Ici, ce qu'on dit, c'est que Télé-Québec est une télévision que le gouvernement du Québec doit garder. Cette antenne, nous la possédons, nous allons l'exploiter à son maximum. Avec 57 millions, Télé-Québec est à même d'assurer sa mission éducative et culturelle.

Le Président: En question additionnelle, M. le leader de l'opposition officielle...

M. Boisclair: En principale, M. le Président.

Le Président: En question principale.

Objectifs concernant
le développement de Télé-Québec

M. André Boisclair

M. Boisclair: En principale, M. le Président, tout simplement pour vous dire que toute l'équipe du Parti québécois est très fière des réinvestissements qui se sont faits par la députée de Taillon, par le député de Verchères dans le budget. Nous sommes très fiers de ces réinvestissements qui ont été faits dans Télé-Québec. Tout le monde dans cette Assemblée...

Une voix: ...

Le Président: Je m'excuse! M. le leader de l'opposition officielle est en question principale.

M. Boisclair: Et tout le monde, M. le Président, dans cette Assemblée a compris la non-réponse de la ministre de la Culture, qui ne répond pas à la question que je lui pose, laissant entendre qu'il n'y aura aucune nouvelle production originale à Télé-Québec. Je le prends donc maintenant pour un fait.

Je lui adresse une question cependant additionnelle: Est-ce que la ministre est consciente que les compressions qu'elle impose priveront Télé-Québec d'avoir accès au fonds des câblos, priveront Télé-Québec de jouer l'effet de levier? Et, bien plus que le 5 millions de compressions qu'elle impose, c'est près d'une dizaine de millions de perte, puisque Télé-Québec n'a pas les moyens de se payer les droits de licence qu'elle devrait pourtant payer pour avoir accès au fonds des câblos. Est-ce que, M. le Président, la ministre réalise qu'elle est en train de tuer Télé-Québec à petit feu et que les mots qu'elle prononce ne sont que des mots qui restent dans sa tête?

Le Président: Mme la ministre de la Culture et des Communications.

Mme Line Beauchamp

Mme Beauchamp: M. le Président, permettez-moi de citer un extrait de l'article du 7 juillet 2001 de La Presse, sous la plume de Denis Lessard, qui révèle ceci: «Il y a quelques semaines, à la réunion du Conseil des ministres ? nous parlons de l'ancien gouvernement ? la titulaire des Affaires culturelles, Diane Lemieux, a demandé plus d'argent pour TV5. Simard lui a répliqué en soutenant qu'au contraire il faudrait sabrer les budgets de Télé-Québec...»

Le Président: Mme la ministre, lorsque vous vous référez à un article de journal, vous donnez le nom des députés et non pas leur nom directement.

Une voix: ...

Le Président: Même si elle cite un...

Mme Beauchamp: Très bien. Je recommence: La titulaire des Affaires culturelles, l'actuelle députée de Bourget, a demandé plus d'argent pour TV5. L'ancien président du Conseil du trésor lui a répliqué en soutenant qu'au contraire il faudrait sabrer les budgets de Télé-Québec, songer même à la privatisation partielle du diffuseur public.

Est-ce que votre position est claire, tout à fait claire? Vous avez sabré les budgets de Télé-Québec. En l'an 2000, vous l'aviez réduit à 50 millions de dollars. Nous leur accordons cette année, alors que l'année passée nous leur avons accordé 59 millions, ce qui était une hausse de crédits pour Télé-Québec, nous leur accordons cette année 50...

Des voix: ...

Mme Beauchamp: ...57 millions ? merci! ? ce qui, je le réaffirme, permet tout à fait à ce diffuseur public d'assurer entièrement sa mission éducative et culturelle.

Le Président: En question additionnelle, M. le leader de l'opposition officielle.

M. André Boisclair

M. Boisclair: M. le Président, est-ce que la ministre comprend que nous sommes très fiers d'avoir décidé d'un réinvestissement dans Télé-Québec, à l'initiative de la députée de Bourget? Et est-ce que la ministre peut nous dire comment elle peut, alors qu'elle sait très bien que plus de 40 employés ont vu leur contrat renouvelé sur une courte période, alors que près d'une dizaine ont vu leurs emplois disparaître faute de ressources... Est-ce que la ministre n'est pas en train, par son silence et ses propos glorieux...

Peut-elle, plutôt que de s'exprimer de la façon dont elle le fait, nous dire les moyens qu'elle entend prendre pour que Télé-Québec puisse compter sur l'appui non seulement du ministère de la Culture, mais aussi des autres ministères? Peut-elle nous dire quels sont ses objectifs de développement pour Télé-Québec, pour que rapidement une quotidienne d'été puisse revenir à Télé-Québec?

Le Président: Alors, Mme la ministre de la Culture et des Communications.

Mme Line Beauchamp

Mme Beauchamp: Ce que je comprends dans la logique du député de Gouin, c'est, alors qu'ils ont fait passer le budget de Télé-Québec, sous leur gouverne, de tout près de 65 millions, la dernière année du Parti libéral du Québec au pouvoir, sous la gouverne de Robert Bourassa, donc 65 millions à 58,8 millions en 2000-2001, ce que je comprends, c'est qu'à leur dernière année budgétaire dont ils étaient responsables, le budget, au livre des crédits, accordé à Télé-Québec, était de 55 millions. Ils doivent donc nous féliciter aujourd'hui que le budget de Télé-Québec est à 57 millions.

Le Président: En question principale, M. le député de Drummond.

Niveau des investissements pour
l'amélioration du réseau routier

M. Normand Jutras

M. Jutras: Oui. M. le Président, M. le ministre des Transports, ce matin, annonçait une autre mauvaise nouvelle pour les Québécois, c'est-à-dire encore, pour une deuxième année consécutive, une réduction de 25 % du Fonds de conservation et d'amélioration du réseau routier. En fait, M. le Président, je pense que dorénavant il faudrait parler du fonds de détérioration du réseau routier du Québec parce que, cette année, c'est encore 930 millions au lieu de 1,2 milliard qui avait été consenti par le gouvernement précédent. C'est la deuxième année de suite.

Le ministre disait même ce matin que l'échéancier pour porter notre réseau routier comparable, le rendre comparable à celui des États voisins, c'était de 10 ans. Or, avec une réduction de 25 % par année, comment le ministre peut-il encore dire que l'échéancier est de 10 ans, d'autant plus que, plus il laisse le réseau routier se détériorer, plus ça va prendre du temps et de l'argent pour le réparer? Alors, est-ce que l'échéancier maintenant, avec les libéraux, n'est pas plutôt rendu de l'ordre de 15 à 20 ans, M. le Président?

n(14 h 30)n

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. Yvon Marcoux

M. Marcoux: Alors, M. le Président, je suis très heureux que le député de Drummond me donne l'occasion d'indiquer, de répéter la bonne nouvelle que nous avons annoncée ce matin: 930 millions d'investissement dans le réseau routier. Et, si nous ajoutons à ce montant la participation fédérale que nous sommes allés chercher par la signature de l'entente que j'ai faite au mois d'août, alors que ça traînait depuis deux ans avec le Parti québécois, c'est plus de 1 milliard qui sera investi dans le réseau routier du Québec, M. le Président.

Le Président: En question additionnelle, M. le député de Drummond.

M. Normand Jutras

M. Jutras: M. le Président, comment le ministre des Transports peut-il tenir le même raisonnement que la ministre des Relations avec les citoyens? On investit moins puis on considère que c'est une bonne nouvelle. On investit 930 millions puis on dit que c'est une bonne nouvelle, au lieu de 1,2 milliard.

Le ministre lui-même parlait de l'importance des investissements en transport, ce matin. Est-ce qu'il réalise qu'il laisse davantage le réseau routier québécois se détériorer? Est-ce qu'il considère que, ça, c'est une bonne nouvelle?

Le Président: Alors, M. le ministre des Transports.

M. Yvon Marcoux

M. Marcoux: Alors, M. le Président, je voudrais simplement faire remarquer que le député de Drummond, lorsqu'il parle de détérioration du réseau routier, il devrait peut-être examiner ce que son parti a fait au cours des années où il a été au pouvoir. Durant neuf années, M. le Président, la moyenne d'investissement dans le réseau routier, sous le Parti québécois, a été de 692 millions. Depuis deux ans, nous, c'est 930 millions et 1 milliard cette année, M. le Président.

Le Président: En question additionnelle, M. le député de Drummond.

M. Normand Jutras

M. Jutras: M. le Président, comment le ministre peut-il oublier...

Des voix: ...

M. Jutras: ...comment le ministre peut-il oublier des événements aussi récents que le fait que le gouvernement du Parti québécois, en 2001, a adopté un plan de réhabilitation de notre réseau routier à raison de 1,2 milliard par année ? ce que nous avons mis à exécution, M. le Président ? et le ministre actuel, le ministre actuel le réduit de 25 %? Comment peut-il oublier des événements comme ça? Et pourquoi renonce-t-il à ce plan de réhabilitation de notre réseau routier qu'on avait mis en place?

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. Yvon Marcoux

M. Marcoux: Alors, M. le Président, d'abord, je vous rappelle que la moyenne d'investissements du Parti québécois pour neuf ans, ça a été de 692 millions; 930, pour nous, sur deux ans, les deux années, M. le Président, 930 millions et 1 milliard.

Et, lorsque le député de Drummond, vous savez, fait référence à son plan soi-disant, c'est un plan sur papier avec de l'argent de Monopoly, M. le Président. C'est comme ils ont fait dans d'autres secteurs; alors ce n'est pas sérieux. Nous, c'est vraiment des réalisations concrètes, et jamais ce plan dont il a été question n'a été approuvé en nulle part, soit au Conseil des ministres soit au Conseil du trésor, M. le Président.

Le Président: En question principale, M. le député de Joliette.

Financement et versement
du Soutien aux enfants

M. Jonathan Valois

M. Valois: Merci, M. le Président. M. le Président, dans le cadre de son opération Transformons nos crédits d'impôt existants en chèques visibles pour les familles, on a appris à la lecture des crédits que cette même opération visibilité va coûter 15 millions au gouvernement.

15 millions, M. le Président, c'est exactement le même montant qu'on est allé rechercher des coffres des CPE; 15 millions, c'est le même montant que la mesure, qu'on a abolie, qui venait en aide aux parents dans les écoles. C'est ça, 15 millions.

La question qu'on se pose, M. le Président, c'est: Où vont-ils prendre ce 15 millions là? Est-ce que c'est à même les crédits du ministère de la Famille ou c'est encore une fois dans les poches des parents du Québec?

Le Président: Alors, M. le ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille.

M. Claude Béchard

M. Béchard: Merci beaucoup. Merci beaucoup, M. le Président. M. le Président, c'est un grand plaisir, un grand plaisir de reconfirmer aujourd'hui, de redire au député de Joliette qu'il y aura, pour toutes les familles québécoises sans exception, plus de 500 millions d'argent supplémentaire et d'argent neuf, pour toutes les familles québécoises, dans la prochaine année. Et c'est ça, un gouvernement qui gouverne pour toutes les familles et qui ne laisse personne de côté.

Je veux aussi souligner que... On tente de faire un gros plat, là, avec les sommes qui devront être mises de l'avant pour donner de l'argent aux gens. Pour donner de l'argent aux gens, pour nous, c'est un plus: les familles auront plus d'argent dans leurs poches. Et, contrairement à ce que vous avez fait... Parce que ce qui est intéressant, c'est que, quand ils ont diminué, en face, les allocations familiales, c'est drôle, les frais d'administration et de gestion sont restés les mêmes. Alors, pour donner moins d'argent, vous dépensiez la même chose.

Alors, nous, on va donner plus d'argent, on va le faire dans le meilleur intérêt des familles, au moindre coût possible, avec la Régie des rentes. Et, en passant, êtes-vous pour ou contre le fait qu'on donne des chèques aux familles, vous?

Le Président: Alors, en question additionnelle, M. le député de Joliette.

M. Jonathan Valois

M. Valois: Oui. M. le Président, est-ce que le ministre est conscient qu'un budget familial, ça ne se règle pas aux trois mois mais bien au mois? Est-il conscient que la hausse des tarifs de son opération visibilité...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le député! M. le député de Papineau, s'il vous plaît! Alors, si vous voulez poser votre question, M. le député.

M. Valois: Oui. Ma question était bien simple: Est-il conscient qu'un budget familial, ça se règle beaucoup plus au mois qu'aux trois mois? Que leur hausse de tarifs d'Hydro-Québec, que leur hausse de tarifs de services de garde, que leur hausse de tarifs de transport en commun, c'est chaque mois, dans le budget familial, que ça va jouer?

Est-ce que le gouvernement... est-ce que le ministre est conscient que son besoin de visibilité nuit beaucoup plus aux familles qu'il les aide présentement?

Le Président: Alors, M. le ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille.

M. Claude Béchard

M. Béchard: M. le Président, ça a pris trois semaines après le budget pour trouver cette question-là. À l'évidence, là, il y a un problème en face, là.

M. le Président, là, moi, ce que j'aimerais beaucoup savoir... Vous nous dites... Dans le fond, ce que vous nous reprochez, vous n'êtes pas pour le fait qu'on donne un chèque aux familles. Vous ne semblez pas être d'accord avec le fait qu'on redonne de l'argent aux familles. Ça, ça semble évident, là, parce qu'il n'a pas dit qu'il était pour.

Deuxièmement, il dit: Dans le fond, le chèque, vous ne l'envoyez pas assez souvent, il faudrait l'envoyer aux trois mois. Savez-vous une chose, M. le député de Joliette ? on devrait l'envoyer au mois? Mais savez-vous une chose, M. le Président? C'est sûr qu'un budget familial, c'est plus facile à boucler quand il y a des chèques qui rentrent à tous les trois mois, d'une moyenne de 750 $, que quand, pour la moitié des familles québécoises, comme vous l'avez fait, on coupe les allocations familiales puis on enlève de l'argent aux familles qui ne font pas le choix. Le seul et unique choix que vous leur proposiez, c'était de mettre des enfants dans des services de garde à contribution réduite.

Le Président: En dernière question additionnelle, M. le député de Joliette.

M. Jonathan Valois

M. Valois: M. le Président, est-ce que le ministre peut rassurer les familles du Québec et leur dire que, comme il existait avant avec les crédits d'impôt, où à chaque paie les parents pouvaient recevoir une partie de leur crédit d'impôt, les parents pourront encore, malgré le désir de visibilité du gouvernement, se prévaloir à chaque paie d'un retour d'impôts ou crédit familial?

Le Président: Alors, M. le ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille.

M. Claude Béchard

M. Béchard: Mais là ils sont pour ou contre? Parce qu'ils sont comme contre, mais ils veulent qu'on envoie le chèque plus souvent. Alors, j'ai un peu de misère à les suivre, mais juste rappeler quelques points des réactions au budget, entre autres: «De bonnes nouvelles pour les familles», le Conseil du statut de la femme. Diane Lavallée, la présidente du Conseil du statut de la femme, s'est dite heureuse...

Le Président: S'il vous plaît! Ce n'est pas un exemple, aujourd'hui, là. S'il vous plaît! Chacun des deux côtés, je vous demanderais votre collaboration. M. le ministre.

M. Béchard: Je vais parler plus lentement, M. le Président. Il s'agissait d'un... Les gens ont dit aussi ? la Fédération des associations de familles monoparentales du Québec ? qu'il s'agissait d'«un pas important pour les familles québécoises». Collectif pour un Québec sans pauvreté ? ça, c'est le dossier du député de Vachon, qu'on n'entend pas depuis un bout de temps: «Un bon départ pour les familles».

«Et il est important de souligner que le programme de soutien aux enfants permettra de rendre plus équitable l'aide générale aux familles.»

Le Président: ...M. le ministre.

M. Béchard: Ça, c'est Claude Faucher, vice-président de la Centrale des syndicats démocratiques. Donc, M. le Président, en bout de ligne, les réactions au dernier budget sont excellentes. Je les comprends d'être jaloux. Je les comprends d'être jaloux, parce que les réactions, les gens nous ont dit: Ça fait 10 ans qu'on attendait un gouvernement qui s'occupe de toutes les familles dans la transparence, puis on ne laisse personne de côté.

Le Président: En question principale, Mme la députée de Bourget.

Tenue de référendums
sur l'organisation municipale
au cours d'une campagne électorale fédérale

Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: Merci, M. le Président. M. le Président, tout indique que le Conseil des ministres décidera demain du libellé de la question référendaire sur les défusions et de la date des référendums. Selon toute vraisemblance, les référendums se tiendraient le 20 juin prochain.

Est-ce que le ministre des Affaires municipales, qui, j'imagine, ne connaît pas la date des élections fédérales, peut prendre l'engagement que, si les deux campagnes se chevauchent, il va reporter la tenue des référendums sur les défusions?

n(14 h 40)n

Le Président: Alors, M. le ministre des Affaires municipales.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: M. le Président, je trouve la question un peu bizarre, là. Tantôt, le chef de l'opposition s'est levé pour dire qu'il ne fallait pas se soumettre à aucune condition. Le premier ministre a dit: Il n'est pas question qu'il y ait des conditions. Je peux vous le dire, le fédéral n'imposera pas ses conditions à l'égard de nos consultations. On veut consulter les citoyens, on va les consulter.

Le Président: En question additionnelle, Mme la députée de Bourget.

Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: M. le Président, est-ce que, par la réponse du ministre, le ministre n'est pas en train de faire la démonstration que ce qu'il veut vraiment, ce n'est pas consulter, c'est que ce dossier des défusions soit le plus rapidement derrière lui?

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: M. le Président, d'abord, je ne sais pas si... ma collègue a peut-être plus d'informations que je n'en ai. Elle, elle semble penser... puis ça se peut, là, je ne veux pas nier qu'elle a peut-être plus d'informations que moi. Elle, elle semble dire qu'elle connaît la date des élections fédérales, ou en tout cas qu'il faudrait qu'on attende de la connaître avant que, nous, au Québec, on bouge, donc qu'on reste paralysés en attendant que des décisions se prennent ailleurs. Ce n'est pas notre intention.

On est grands, on est élus, on est capables de prendre des décisions. On a un engagement, on va le réaliser, et il va y avoir une consultation des citoyens, comme nous nous sommes engagés à le faire. Il n'y a pas personne dans d'autres Parlements qui vont venir limiter la capacité que nous avons de bouger. Nous allons le faire.

Le Président: En question principale, Mme la députée de Rosemont.

Nomination de membres
du conseil d'administration de l'Agence
de l'efficacité énergétique

Mme Rita Dionne-Marsolais

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Si dans certains domaines on est prêts à prendre des décisions, dans d'autres, les décisions tardent. Et, en matière d'efficacité énergétique, M. le Président, on nage en pleine négligence. La Loi sur l'Agence de l'efficacité énergétique prévoit que les affaires de l'agence sont administrées par un conseil d'administration composé d'au moins sept membres et d'au plus 10 membres nommés par le gouvernement. Or, M. le Président, on apprend, ce matin, dans Le Devoir, qu'il manque des membres, à tel point que l'Agence de l'efficacité énergétique ne peut même pas adopter son budget pour cette année.

Est-ce que le ministre des Ressources naturelles pourrait nous expliquer la cohérence entre l'urgence du Suroît, qu'on essaie de nous passer dans la gorge, et l'inaction, pour ne pas dire la négligence, du gouvernement en matière d'efficacité énergétique, alors qu'il ne respecte même pas sa loi?

Le Président: Alors, M. le ministre des Ressources naturelles.

M. Pierre Corbeil

M. Corbeil: M. le Président, en réponse à la question de la députée de Rosemont, j'aimerais tout d'abord remettre les pendules à l'heure. Premièrement, le conseil d'administration a adopté le budget de l'agence et son plan de développement lors de sa séance du 20 janvier dernier. Alors, contrairement à ce qui est prétendu, l'agence peut fonctionner, et son budget et le plan de développement seront adoptés sous peu par le gouvernement, et ça ne l'empêche pas du tout, du tout de fonctionner.

Pour ce qui est de Suroît, je pense que c'est quelque chose que la députée de Rosemont est mal placée pour placer dans cette question-ci, parce que ça avait déjà été adopté par le précédent gouvernement, et elle nous le met... elle le place de travers dans la gorge de certaines personnes, mais je pense que la ligne Hertel-des Cantons aussi avait la même position.

Le Président: En question additionnelle, Mme la députée de Rosemont.

Mme Rita Dionne-Marsolais

Mme Dionne-Marsolais: Est-ce que le ministre peut nous dire, M. le Président, quand est-ce qu'il va nommer les membres du conseil d'administration de l'Agence de l'efficacité énergétique?

Le Président: M. le ministre des Ressources naturelles.

M. Pierre Corbeil

M. Corbeil: M. le Président, je pense qu'il y aura... Il y a un projet de décret qui est préparé et qui sera adopté par le Conseil des ministres soit demain ou mercredi de la semaine prochaine. Et je pense que le gouvernement actuel croit beaucoup à l'efficacité énergétique et je voudrais citer en exemple le fait que mon collègue le ministre des Ressources naturelles, M. le député de Louis-Hébert ? je ne peux pas le nommer, excusez ? avait demandé à Hydro-Québec, lors de l'étude de son plan stratégique, de tripler ses budgets en efficacité énergétique pour l'agence, ce qu'Hydro-Québec s'était engagée à faire en passant de 7,2 millions à 21 millions sur trois ans.

Le Président: En question principale, M. le député de Richelieu.

Maintien de la sécurité d'emploi
au sein de la fonction publique

M. Sylvain Simard

M. Simard: M. le Président, la semaine dernière, un document du Conseil du trésor a été rendu public par les médias, document qui exposait de façon extrêmement claire un plan pour s'attaquer à la sécurité d'emploi dans la fonction publique.

Après avoir trahi ses promesses de baisses d'impôts et d'investissements en santé, est-ce que le gouvernement libéral est en train de trahir la promesse faite aux employés de la fonction publique de maintenir la sécurité d'emploi dans la fonction publique?

Le Président: Mme la présidente du Conseil du trésor.

Mme Monique Jérôme-Forget

Mme Jérôme-Forget: M. le Président, je remercie le député de Richelieu de la question, je souhaitais qu'il me pose cette question.

Je n'ai jamais demandé, sollicité un tel document, M. le Président. Non seulement je n'ai jamais sollicité ou demandé un tel document, je n'ai jamais été informée qu'il y avait un tel document qui existait au Conseil du trésor. Et, non seulement ça, M. le Président, je ne l'ai jamais vu, le document, ledit document du Conseil du trésor.

Le Président: En question additionnelle, M. le député de Richelieu.

M. Sylvain Simard

M. Simard: M. le Président, à part de m'inquiéter un petit peu de l'ignorance de la présidente du Conseil du trésor sur ce qui se passe au Conseil du trésor, est-ce que je pourrais lui demander ? elle a une occasion extraordinaire de le faire ? de rassurer l'ensemble des fonctionnaires de l'État en nous garantissant ici qu'elle ne s'attaquera d'aucune façon, ni directement ni indirectement, de quelque façon que ce soit à la sécurité d'emploi des fonctionnaires de l'État du Québec?

Le Président: Alors, Mme la présidente du Conseil du trésor.

Mme Monique Jérôme-Forget

Mme Jérôme-Forget: M. le Président, j'en ai parlé souvent, je l'ai affirmé dans cette Chambre à plusieurs reprises: la sécurité d'emploi est un contrat avec nos employés. Nous respectons cet engagement, et nous l'avons respecté, et nous avons pris cet engagement de le respecter, et nous allons le respecter.

Le Président: En question additionnelle, M. le député de Richelieu.

M. Sylvain Simard

M. Simard: Est-ce qu'il faut comprendre, M. le Président, par la déclaration de la présidente du Conseil du trésor que la présidente du Conseil du trésor donne par le fait même avis à tous ses négociateurs qu'il n'est en aucune façon question, lors des prochaines négociations, de remettre de quelque façon que ce soit en cause quelque aspect que ce soit de la sécurité d'emploi des fonctionnaires?

Le Président: Mme la présidente du Conseil du trésor.

Mme Monique Jérôme-Forget

Mme Jérôme-Forget: M. le Président, je veux réitérer que la sécurité d'emploi est un engagement que j'ai pris, je l'ai pris dans cette Chambre.

Mais, par ailleurs, je voudrais rappeler au député de Richelieu, qui a déjà été président du Conseil du trésor, que désormais, au Conseil du trésor, les analystes peuvent librement faire des propositions, des hypothèses, et je les invite à le faire, parce que, M. le Président, ce n'est pas une dictature au Conseil du trésor, c'est un endroit où on analyse des données, et on va continuer à le faire, M. le Président, dans un environnement de recherche et de liberté.

Le Président: En question principale, M. le député de René-Lévesque.

Assouplissement des règles de l'assurance-emploi
à l'égard des travailleurs saisonniers

M. Marjolain Dufour

M. Dufour: Alors, merci, M. le Président. Alors, hier, les travailleurs saisonniers de la Côte-Nord et de Charlevoix ont manifesté leur impatience envers le gouvernement fédéral et l'inéquité du régime actuel d'assurance-emploi.

Il y a quelques semaines, j'ai communiqué par écrit avec le premier ministre, M. Paul Martin, et le ministre, M. Joseph Volpe, pour les sensibiliser aux demandes des sans-chemise et à leur volonté d'avoir un statut particulier comme travailleurs saisonniers. Le ministre de l'Emploi a été avisé de mes démarches et, comme il devait rencontrer son vis-à-vis dans les jours suivants, il m'a demandé de lui faire parvenir copie de mes lettres, ce que j'ai fait.

Le ministre de l'Emploi et ministre responsable de la Côte-Nord a-t-il, lui aussi, entendu le cri d'alarme lancé hier par les travailleurs saisonniers? A-t-il communiqué avec son vis-à-vis du fédéral pour exiger l'assouplissement des règles de l'assurance-emploi?

Le Président: Alors, M. le ministre de l'Emploi, de la Solidarité et de la Famille.

M. Claude Béchard

M. Béchard: Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Merci de la question. Je dois vous dire que déjà, effectivement, à plusieurs reprises et dès les premiers jours où... suite aux élections du 14 avril dernier, c'est un des premiers dossiers sinon le premier dossier sur lequel nous nous sommes penchés, déjà à cette époque, au niveau de la révision de certains paramètres de la Loi sur l'assurance-emploi. Mais comprenons-nous bien: d'abord, c'est une loi de juridiction fédérale.

Deuxièmement, je peux dire aux gens que, oui, nous appuyons les revendications des travailleurs saisonniers. J'en ai parlé avec le ministre fédéral des Ressources humaines à plusieurs reprises, je lui en ai reparlé pour que cette loi-là qui pénalise nos régions, qui pénalise les travailleurs saisonniers, soit revue afin de faire en sorte que les gens puissent éviter de tomber dans le fameux trou noir, puissent tomber dans cette période où il n'y a pas de travail, il n'y a plus de prestations d'assurance-emploi, et ils se retrouvent devant rien.

Alors, oui, on a entendu les revendications des gens de Forestville hier, comme on entend les revendications des gens du Bas-Saint-Laurent, de la Gaspésie, de toutes les régions du Québec qui sont aux prises avec ce problème-là, et, oui, nous continuerons de faire pression et de discuter avec le gouvernement fédéral, puis pas juste discuter, de faire pression pour que ce problème-là qui touche nos régions et nos travailleurs soit réglé le plus vite possible, de la meilleure façon possible, afin d'éviter que des gens se retrouvent devant rien, sans rien et, dans des périodes extrêmement difficiles, dans un trou noir.

n(14 h 50)n

Le Président: En question additionnelle, M. le député de René-Lévesque.

M. Marjolain Dufour

M. Dufour: Alors, est-ce que, avec votre vis-à-vis au fédéral... Est-ce que le ministre, M. Volpe, vous a donné l'assurance que les travailleurs saisonniers auront un statut particulier?

Le Président: M. le ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille.

M. Claude Béchard

M. Béchard: Merci, M. le Président. L'assurance qu'on a eue du ministre fédéral, du ministre Volpe, c'est qu'effectivement il serait... il se pencherait très sérieusement sur ce dossier-là.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! M. le ministre, si vous voulez poursuivre.

M. Béchard: Et ce qui est surtout intéressant, M. le Président, c'est de voir l'opposition officielle aujourd'hui nous demander d'intervenir dans le dossier. C'est probablement dû à l'inefficacité des interventions du Bloc à Ottawa, qui, au lieu de tenter de régler le dossier, tente de faire de la politique sur le dossier. Nous, ce qu'on veut, c'est avoir...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Alors, si vous voulez conclure, M. le ministre.

M. Béchard: Je lançais seulement ça comme hypothèse, M. le Président. Mais je veux vous dire... Je veux vous dire... Je veux vous dire, M. le Président, que, comme nous l'avons fait dans plusieurs situations ? par exemple, la crise du crabe, l'année passée ? dans d'autres situations où des travailleurs saisonniers sont touchés ? puis le député peut en témoigner, on l'a fait dans son comté ? Emploi-Québec et le gouvernement du Québec intervient toujours pour aider ces gens-là.

Sauf qu'à un moment donné, c'est assez, ce n'est pas notre rôle, c'est le rôle du gouvernement fédéral. Et, oui, on va continuer de faire pression pour que le gouvernement fédéral modifie cette loi, qu'elle soit plus juste pour les travailleurs saisonniers et qu'on arrête de ramasser finalement des gens qui sont au bout du rouleau. Et que les gens d'Ottawa prennent leurs responsabilités là-dedans, c'est leur domaine.

Le Président: En question principale, M. le leader adjoint de l'opposition officielle et député de Chicoutimi.

Nature et résultats des mandats
de médiation à Kanesatake

M. Stéphane Bédard

M. Bédard: Merci, M. le Président. M. le Président, là, on apprenait en fin de semaine que l'Assemblée des premières nations pourrait jouer un rôle de médiation dans le dossier de Kanesatake. On se rappellera que le gouvernement avait lui-même mandaté un médiateur pour tenter de dénouer l'impasse, souvenez-vous, l'ex-sénateur conservateur, Me Jean Bazin.

Compte tenu qu'un nouveau médiateur pourrait être nommé, le ministre de la Sécurité publique peut-il nous faire rapport des travaux et des résultats obtenus par le travail de M. Bazin?

Le Président: Alors, M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Jacques Chagnon

M. Chagnon: M. le Président, le rôle de M. Bazin et celui dont parle le député de Chicoutimi est fort différent. Le rôle de M. Bazin a été celui... a été le rôle d'un médiateur, de quelqu'un qui a travaillé de très près avec le chef James Gabriel et son Conseil de bande et aussi à faire en sorte de s'assurer que tous les fonctionnaires et fédéraux et provinciaux puissent avoir exactement la même lecture de la situation. Il a donc servi à faire une grande partie du déblayage de l'information qu'il y avait... qu'on avait sur le dossier de Kanesatake.

La demande qui est faite à certains égards concernant l'association des premières nations est fort différente. Il s'agit d'une médiation d'ordre politique entre les nations autochtones elles-mêmes. Et c'est évidemment une chose qui est tout à fait... peut-être congrue, mais que... D'une part, le Conseil de bande devra déterminer s'il en accepte les termes, si on accepte la proposition. Mais, comme il l'avait fait, par exemple, avec... comme d'ailleurs le chef Gabriel avait lui-même demandé d'avoir une personne comme M. Bazin pour pouvoir travailler avec. Et c'est exactement ce que nous avons laissé...

Le Président: Ceci met fin à la période des questions et réponses orales.

Réponses différées

Inauguration de la résidence
La Bellefeuilloise, à Saint-Jérôme

En réponses différées. M. le ministre des Affaires municipales, du Sport et du Loisir répondra maintenant à une question posée le 30 mars dernier par Mme la députée de Prévost concernant le protocole d'inauguration de la Société d'habitation du Québec. M. le ministre des Affaires municipales, du Sport et du Loisir et responsable de l'habitation.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Merci, M. le Président. La députée de Prévost a relaté les complications relatives à une inauguration d'une résidence pour personnes âgées. Selon elle, la participation du fédéral à l'annonce aurait soulevé une polémique, parce que le fédéral, selon la députée, ne participait pas au financement. J'ai demandé au bureau des plaintes de la SHQ de faire une enquête. Voici les conclusions, M. le Président.

En vertu d'une entente datée du 21 décembre 2001, le fédéral et le gouvernement du Québec ont conclu une entente pour financer des projets comme celui de la personne... du centre pour personnes âgées. L'entente du 21 décembre 2001 a même une portée rétroactive et couvre justement La Bellefeuilloise II. L'entente prévoit de plus que la SCHL doit être présente aux annonces. Il s'agit donc une entente négociée par le précédent gouvernement. Dans les faits, M. le Président, la SCHL a participé à la hauteur de 819 000 $ sur un projet de 1,6 millions, soit 50 %.

Je veux dire à la députée que la polémique ? et je tiens à insister là-dessus ? n'est pas née de la faute du conseil d'administration, aucunement. Il n'était pas au courant de la participation du fédéral.

Elle me permettra cependant, M. le Président, de lui dire que je m'interroge encore sur la raison pour laquelle le gouvernement précédent et encore elle-même le 30 mars dernier n'ont pas cru bon d'informer les bénévoles de ce partenariat. Pour le présent gouvernement, M. le Président, il n'y aura pas de cachette de ces partenariats de financement au bénéfice des citoyens.

Le Président: En question complémentaire, Mme la députée de Prévost.

Mme Lucie Papineau

Mme Papineau: M. le Président, j'aimerais déposer un document interne de la SHQ qui démontre noir sur blanc la non-participation du gouvernement fédéral dans ce projet.

M. le Président, ma question est la suivante: Est-ce que le ministre maintient ses propos?

Document déposé

Le Président: Consentement pour le dépôt du document? Consentement. Le document est déposé. M. le ministre des Affaires municipales.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: M. le Président, je vais lire le document qu'elle me dépose. La SHQ m'informe du contenu même de l'entente, à l'effet qu'il y avait, contenue dans cette entente, mesure rétroactive qui englobait La Bellefeuilloise II.

Ceci étant, M. le Président, le gouvernement précédent aurait dû dire aux gens qui sont dans cet établissement et qui montaient ce projet-là qu'il y avait une participation d'autres acteurs. Je ne peux pas dire si c'était une erreur de bonne foi, si c'était un oubli de la part du gouvernement précédent ou si c'était une démarche du genre de celle des chiffons rouges. Une chose est sûre, nous allons bénéficier d'ententes municipales provinciales-fédérales, parce que les citoyens en profitent, et nous n'allons pas avoir peur de dire que ces partenariats sont au bénéfice des citoyens.

Le Président: Comme il n'y a pas de votes reportés, nous allons passer à la rubrique des motions sans préavis. M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: Compte tenu du fait, M. le Président, qu'il y a de nombreuses motions sans préavis, je solliciterais le consentement de l'opposition et des députés indépendants pour présenter un avis touchant les travaux des commissions.

Motions sans préavis

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement? Il n'y a pas de consentement. M. le premier ministre, aux motions sans préavis.

Souligner l'anniversaire
d'Hydro-Québec

M. Charest: Merci. Alors, M. le Président, je demande la consentement de cette Chambre pour présenter la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale souligne, à l'occasion de ses 60 ans, l'immense contribution d'Hydro-Québec au développement du Québec, de son économie, de ses régions, de son savoir-faire et reconnaisse en cette société d'État et en l'hydroélectricité un des principaux leviers de notre développement futur.»

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour la présentation de cette motion? Consentement. M. le premier ministre.

M. Jean Charest

M. Charest: Alors, M. le Président, le 14 avril dernier marquait le 60e anniversaire de la création d'Hydro-Québec. Les six décennies d'histoire de cette société d'État sont jalonnées de réalisations marquantes qui font la fierté de tous les Québécois et qui ont grandement soutenu le développement tant économique, social que technologique du Québec tout entier.

L'histoire d'Hydro-Québec est intimement liée au parcours de la formation politique que j'ai l'honneur de diriger. Elle a été marquée par plusieurs de mes prédécesseurs premiers ministres également qui ont largement contribué par leur vision et leur détermination à faire en sorte que le Québec d'aujourd'hui fasse partie des grandes... mondiales de l'énergie. Je pense notamment à Jean Lesage, à René Lévesque et, bien sûr, à Robert Bourassa.

Le développement hydroélectrique occupe une place cruciale dans l'histoire du Québec, et c'est beaucoup plus qu'une affaire énergétique, c'est beaucoup plus qu'une affaire économique, c'est une affaire identitaire. Hydro-Québec nous ramène aux symboles, on pourrait presque dire à la mythologie québécoise, car il y a une allégorie toute naturelle entre le développement de ce formidable savoir-faire et le développement de notre société. Nous, Québécois, nous avons su dompter des torrents rugissants pour y puiser l'énergie de grandir. Ce que nous avons fait sur la Manic, sur La Grande, c'est le reflet de l'histoire de notre peuple.

n(15 heures)n

Il y a 60 ans, M. le Président, c'est le gouvernement libéral d'Adélard Godbout... J'ignore si vous étiez membre de l'Assemblée à ce moment-là, M. le Président, mais, il y a 60 ans, c'est le gouvernement... Non, je crois comprendre que vous n'étiez pas... adoptait la loi établissant la Commission hydroélectrique de Québec. Hydro-Québec comptait alors près de 300 000 clients. Ses centrales avaient une puissance installée de 616 MW. Quelque 20 ans plus tard, Hydro-Québec étendait ses services à l'ensemble du Québec, lors de la deuxième phase de nationalisation.

Il s'en est suivi une période de croissance marquée par de nombreuses innovations: l'aménagement du complexe Manic-Outardes, comprenant le plus important barrage à voûtes et contreforts et le plus long mur d'étanchéité du monde; la réalisation de la première ligne de transport d'électricité à 735 kV au monde, véritable avancée technologique, qui demeure encore aujourd'hui la norme; la construction du projet du siècle, comme on l'appelait, l'aménagement hydroélectrique de la Baie James, un complexe qui fournit la moitié de l'hydroélectricité produite au Québec.

La nationalisation de l'électricité a donné lieu à des mises en chantier de ces grands complexes hydroélectriques qui créèrent des milliers et des milliers d'emplois. Elle a permis de développer et de pourvoir en électricité tous les citoyens de notre territoire, et ce, au même tarif partout. Elle a donné naissance à une puissante industrie de l'électricité dont l'expertise et le savoir-faire sont aujourd'hui reconnus mondialement. Combien de jeunes ingénieurs ont fait leurs premiers pas, sinon leur carrière à Hydro-Québec? Aujourd'hui, cette expertise est reconnue aux quatre coins du monde et elle fait aussi notre fierté. Grâce à nos bâtisseurs d'eau, le Québec est le quatrième producteur d'hydroélectricité au monde. Et, à ce sujet, permettez-moi de souligner que l'année 2004 coïncide avec le 25e anniversaire de la mise en service de l'aménagement hydroélectrique Robert-Bourassa, connu sous l'appellation de LG 2.

La nationalisation de l'électricité a également permis au Québec de se doter d'un levier économique majeur, grâce auquel il a pu prendre en main son développement et consolider sa base industrielle. Aujourd'hui, nous bénéficions de tarifs d'électricité parmi les plus bas en Amérique du Nord, pour ne pas dire au monde. C'est un avantage certain pour nos entreprises, qui contribuent à faire du Québec un environnement économique compétitif, propice à l'investissement et à la création d'emplois.

Pour donner un peu de perspective, M. le Président, à l'avantage que nous accordent aujourd'hui nos tarifs, c'est 300 % moins cher, l'électricité et l'énergie au Québec, que ça l'est chez nos voisins américains dans l'État de New York; 50 % moins cher que chez nos voisins de l'Ontario; 50 % moins cher... à l'Est, que chez nos voisins du Nouveau-Brunswick. C'est donc dire à quel point il y a chez nous un avantage compétitif très, très, très important.

Notre société d'État Hydro-Québec a toujours su s'adapter aussi aux nouveaux contextes énergétiques, notamment pour faire face à la déréglementation des marchés de l'énergie ? ce qui est très significatif. Ça représente pour nous un très grand succès de pouvoir se présenter dans le marché nord-américain comme étant une des sociétés d'État, au niveau de l'énergie, qui fonctionne bien et qui est en mesure de tirer des profits et de faire du développement. Elle nous dessert toujours aussi bien, elle nous assure une énergie propre, renouvelable et à très bon prix.

Hydro-Québec est un chef de file dans la conception, l'exploitation et la maintenance de réseaux de transport d'électricité. Sa conduite de réseaux est reconnue mondialement pour sa fiabilité, qui devient aussi une marque de commerce d'Hydro-Québec. Rappelons-nous que, l'été dernier, au mois d'août, M. le Président, il y a eu une panne d'électricité qui a affecté tout l'est de l'Amérique, incluant l'Ontario, incluant plusieurs États américains. S'en est suivie aussi une commission d'enquête canado-américaine sur les causes de cette panne d'électricité, et, dans les conclusions de l'enquête, ce que les enquêteurs ont relevé, c'est le fait que le réseau de distribution est en très mauvais état chez nos voisins du Sud et qu'heureusement pour nous notre réseau n'est pas synchronisé avec celui de notre voisin américain. Donc, nous sommes protégés contre les pannes qui pourraient se produire à l'avenir.

Hydro-Québec procède et construit et exploite des installations à l'extérieur du Québec, notamment en Amérique du Sud, en Australie, aux États-Unis et aussi en Chine. Aujourd'hui, il y a 3,6 millions d'abonnés au Québec et des centrales d'une puissance installée de 33 000 MW. Hydro-Québec devient ainsi un des beaux fleurons de notre société, un fleuron qui fait l'envie de bien des États.

Hydro-Québec, c'est un actif de 58 milliards de dollars, un chiffre d'affaires de 11,4 milliards de dollars et presque 22 000 employés, Québécois et Québécoises dont nous sommes extrêmement fiers pour leur engagement, pour leurs compétences, M. le Président, et je tiens à souligner la contribution exceptionnelle de plusieurs générations de Québécois à la construction d'Hydro-Québec.

Rappelons-nous que, dans la dernière année, Hydro-Québec a fait un profit de 1,9 milliard de dollars, un profit qui bénéficie à l'ensemble des citoyens du Québec et qui est bien, bien, bien dans les normes de ce que cette société doit faire comme profit pour assurer son développement et s'assurer qu'elle puisse également rencontrer ses obligations envers la société.

Le marché de l'énergie évolue rapidement, M. le Président. La panne d'électricité de l'été dernier en témoigne, les besoins énergétiques du Québec ont demeuré très importants. Une des décisions dont nous sommes le plus fiers depuis notre élection, c'est la décision d'Hydro-Québec d'investir de l'ordre de 3,4, 3,5 milliards de dollars par année pour les 20 prochaines années dans son développement.

Cela signifie pour nous, M. le Président, des occasions de continuer à alimenter notre propre marché, à assurer notre sécurité énergétique, ce qui est un impératif pour la société québécoise. Inutile de vous dire que pour un gouvernement du Québec, ça, c'est une obligation. Et ce développement se fera dans les conditions qui vont nous permettre d'en faire bénéficier le plus grand nombre; je pense, entre autres, aux obligations que nous avons sur le plan environnemental. Tout développement est conditionnel à ce que nous puissions respecter les processus d'évaluation environnementale, que nous puissions le faire rigoureusement aussi, M. le Président.

Mais il y a aussi l'acceptation qui doit venir des communautés. En ce sens, je veux applaudir aujourd'hui la signature, hier, pas plus tard qu'hier, d'une entente entre Hydro-Québec et les communautés cries, une entente qui vient régler des litiges qui traînaient dans le décor depuis une vingtaine d'années et qui représentaient un obstacle à ce que nous puissions continuer à développer nos relations avec les communautés.

Et l'entente signée hier, je veux être très clair, M. le Président, n'a pas été signée à la condition que nous puissions faire des projets de développement parce qu'il fallait régler des affaires qui relevaient du jour où on a convenu de signer la Convention de la Baie James, mais cela nous permet de créer un environnement où nous pourrons ensemble ? quand je dis ensemble, c'est tous les Québécois, incluant les communautés cries ? envisager des projets de développement pour l'avenir.

Alors, M. le Président, je veux, en terminant, vous réitérer toute la fierté que nous ressentons aujourd'hui comme Québécois pour ce 60e anniversaire. Le gouvernement libéral d'Adélard Godbout avait bien raison dans sa décision de créer cette société d'État. Elle a connu une évolution formidable. Et je veux dire aujourd'hui encore une fois à tous les employés, les hommes et les femmes qui travaillent à Hydro-Québec, l'immense fierté des députés de l'Assemblée nationale de souligner 60 ans de réalisations pour cette société d'État extraordinaire. Merci, M. le Président.

Le Président: Je cède maintenant la parole à M. le chef de l'opposition officielle.

M. Bernard Landry

M. Landry: M. le Président, ce qui caractérise un groupe humain comme nation, c'est le fait qu'il ait eu des malheurs communs, des bonheurs communs et qu'il ait des projets communs. Il est hors de tout doute que la création d'Hydro-Québec est un des bonheurs communs, comme d'autres réalisations qui allaient suivre plus tard avec la Révolution tranquille, et celui-là a commencé à se dessiner en 1944.

Et Adélard Godbout, lui aussi, avait utilisé l'aide des fédéraux pour se faire élire et a eu un comportement plus que mou par rapport au gouvernement central, il a laissé aller des pans entiers de nos pouvoirs. Mais, pour être tout à fait juste envers sa mémoire, il a fait deux choses fondamentales: il a donné le droit de vote aux femmes qui, selon moi, est plus important encore que l'énergie et n'importe quelle compagnie qu'on peut fonder, mais il a donné naissance à Hydro-Québec.

En fait, c'était plutôt Hydro-Montréal, hein? On a nationalisé Montreal Light, Heat and Power qui possédait quatre centrales, sans insulter personne, trois relativement modestes et une fantastique qui tourne encore aujourd'hui et qui est celle de Beauharnois, avec autour de 1 500 MW.

n(15 h 10)n

Ça a été un événement intéressant, oui, pour les Montréalais, pour la région immédiate, mais ça n'a pas pris la dimension révolutionnaire qu'allait prendre plus tard le geste posé par le gouvernement de Jean Lesage et par René Lévesque à la suite de l'élection de 1962. Là, on a débordé de beaucoup la question du courant électrique. On a abordé de façon frontale un des problèmes du Québec du temps, et le mot n'est pas exagéré, et tous les historiens l'emploient: le colonialisme. Ce n'est pas pour rien que le maître mot de la Révolution tranquille, c'était Maîtres chez nous. C'est parce qu'on ne l'était pas avant. Et, dans ce domaine en particulier des richesses naturelles, c'est à peine pensable.

D'abord, toutes les compagnies avaient des noms anglais, y compris ici, dans notre capitale nationale. On peut dire: Qu'est-ce qu'un nom? «What's in a name?», comme dit Shakespeare. Oui, oui, mais, quand tu es dans une population à 85 % francophone comme ça devait être le cas dans le temps et puis que la compagnie s'appelle Quebec Power puis, dans mon village ? il n'y avait personne qui parlait anglais, sauf un de mes oncles ? Gatineau Power, et ainsi de suite, ça donnait tout de suite déjà l'atmosphère ? Southern Canada Power... Et puis, dans une des grandes compagnies qui était Shawinigan Water and Power, il y avait 20 ingénieurs francophones sur 175. On n'est pas en 1815, là, on est en 1962.

Je me souviens, une fois j'étais allé à Victoriaville pour une activité très louable qu'on appelait dans le temps aller voir les filles. Vous vous rappelez de ça, M. le Président. Ça ne se dirait plus aujourd'hui. Alors, j'étais allé en voir une ? une formidable ? à Victoriaville, puis, pendant qu'on mangeait, pendant qu'on mangeait à table, le téléphone a retenti. Son père s'est levé, il a dit: «Yes, it's X speaking.» Oui, j'ai dit: Qu'est-ce que c'est ça que ce truc-là? Qu'est-ce qu'il fait, ton père? Bien, elle dit: Il parle à son boss. À Victo! Son boss était anglophone, puis il lui parlait l'anglais, relativement mal d'ailleurs, mais, en tout cas...

Alors, on n'est plus dans le courant électrique, là, on est dans le destin d'une nation. Et c'est pour ça que René Lévesque, qui a d'abord convaincu Georges-Émile Lapalme puis Eric Kierans et puis Pierre Laporte, ont présenté un dossier qui avait été préparé par l'artisan intellectuel principal de cette nationalisation, André Marier, qui fut fonctionnaire du gouvernement du Québec pendant plusieurs années après, qui vit toujours aujourd'hui dans notre capitale nationale, qui a été conseiller municipal. Alors, le dossier structuré par André Marier a été véhiculé par René Lévesque dans une séance mémorable du Conseil des ministres au lac à l'Épaule. Et Jean Lesage a décidé qu'il embarquait sans réserve dans le projet. On sait qu'il en a même fait l'enjeu d'une élection.

Et, pour montrer encore le climat du temps, le syndicat financier qui était en furie d'un projet, communiste à la limite, à tout le moins socialiste, de nationaliser l'électricité, a écrit à Lesage, et j'ai la copie... une des copies existantes de la lettre chez moi ? c'est un ami qui m'a envoyé ça, ça doit être André Marier d'ailleurs ? où ils écrivent au premier ministre du Québec: «Dear Sir. Would you be aware of...» Et puis ils lui disent dans la lettre que, s'il nationalise, ils ne financeront plus le Québec. 1962.

Alors, Lesage avait plutôt une personnalité à être consolidée positivement par une telle lettre, hein? Lesage, c'était un homme qui avait une grande fierté, pour ne pas dire davantage. Ça l'a stimulé, et la nationalisation s'est faite. On a emprunté sur les marchés financiers de New York. Je pense que ça a coûté exactement 390 millions de dollars. Quand on pense qu'il y a eu des profits de 1 milliard et plus cette année seulement, même en dollars constants, on voit que ça a été une sacrée bonne acquisition.

Et les formidables avantages qu'a eus Hydro-Québec dans notre histoire nationale sont un prélude à plus encore, à mon avis. D'abord, il y a eu cette question socioéconomique, cette question de fierté, de construction, de... la preuve de notre capacité économique. Il y a eu aussi un élément de justice sociale immédiat. Parce que, à Montréal, on payait l'électricité pas cher, mais, partout ailleurs dans le Québec, c'était beaucoup plus cher, et sans compter le fait qu'il y avait des régions qui étaient au 40 cycles. Alors, une pochette, là, à 40 cycles, là, ça rend la lecture compliquée, hein? Parce que, à 40 cycles, on les perçoit. Alors, tout est passé au 60 cycles, tout est passé à des tarifs uniformes et dans les plus bas du monde, comme on l'a bien dit.

Et c'est intéressant qu'hier, justement, une date importante de l'histoire du Québec ? Hydro-Québec, toujours ? coïncide avec un épisode de la grande réconciliation de la «Paix des Braves» ou avec les Cris. Mais aussi on parle souvent des Cris, puis on oublie qu'on a signé aussi, en même temps, une entente avec ceux qui sont au nord du Nord, au nord des Cris, qui sont les Inuits.

Il y a probablement 15 000 MW de courant électrique possible dans ces territoires de l'extrême nord du Québec. Mais, encore une fois, ce n'est pas juste en mégawatts qu'il faut compter. Il faut compter en possibilités de bonheur et de développement pour les collectivités locales, pour la jeunesse crie, pour la jeunesse inuite qui peut se trouver des emplois, qui peut vivre dans un contexte matériel supérieur à la plupart des aborigènes du monde, à cause d'Hydro-Québec, à cause de ces ressources et à cause de la «Paix des Braves» et des excellents rapports que nous avons avec eux. Ça fait déjà beaucoup pour l'histoire d'une seule société.

Je pense que le meilleur peut être à venir. Si on regarde ça dans un contexte environnemental, il y a à peu près 40 000 MW hydrauliques qui tournent au Québec, actuellement. On peut penser à 15 000 MW de plus, je l'ai dit, et déjà aujourd'hui, par tête d'habitant, le Québec est le plus grand producteur d'électricité d'origine hydraulique du monde. Alors, imaginez-vous si on continue à augmenter notre potentiel.

Tout ça joint à une politique de l'énergie sage: économie d'énergie, protection de l'environnement comme une priorité pratiquement absolue; alors, ça veut dire que, sauf exception ? et il peut y en avoir ? on renonce au gaz, on continue à pousser l'hydraulique, on continue à pousser l'éolien, les économies d'énergie. Ce qui veut dire en clair que notre avenir énergétique, et je n'exagère pas, est probablement le plus brillant qui se trouve sur cette planète. Parce qu'en Alberta, il y a du gaz, mais dans 10 ans il n'y en a plus. Dans 10 ans, la centrale de Beauharnois, qui tourne depuis le début de l'autre siècle, va tourner encore avec la même efficacité et sans aucun rejet de gaz à effet de serre.

Le jour où il va manquer 1 m³ de gaz en Amérique, vous allez voir le prix partir vers le haut. Et, le prix du gaz partant vers le haut, c'est le prix du courant électrique, aux États-Unis, qui part vers le haut et c'est la possibilité d'exportations extrêmement lucratives. Et, moi, le mot «exportation», ce n'est pas un mot sale pour moi, d'aucune espèce de manière, pourvu que ce produit soit créé dans des conditions écologiques acceptables et pourvu que nous ayons le prix qui convient dans un marché américain qui sera alors resserré, pourvu que nos consommateurs et consommatrices soient eux-mêmes protégés. Ça veut dire que, dans le monde de l'énergie, on peut avoir un des destins les plus brillants qui soient. Et ça, ça va avoir un impact financier ? et je termine par ça.

Le Québec a une dette accumulée d'environ 100 milliards de dollars. Elle est moins importante, à toutes fins pratiques, que celle du Canada, mais elle est là. Puis d'ailleurs on partage les deux. Or, l'Hydro-Québec, quand toutes ses installations permanentes seront amorties, comme l'est la centrale de Beauharnois aujourd'hui, va être l'entreprise la plus profitable de la planète. Regardons les choses en face, hein? Parce que nos collègues d'en face salivent déjà. Ils ne seront plus là, évidemment, quand tout ça va arriver, puis depuis longtemps d'ailleurs. Mais, ne parlons pas en termes partisans, parlons en termes sociétaux: la valeur d'Hydro-Québec, quand toutes les centrales seront amorties, sera plus importante que la dette du Québec, et largement.

n(15 h 20)n

Alors, on a un passif, c'est vrai. Il a été créé par les gouvernements antérieurs. Il n'augmente presque plus depuis qu'on est au déficit zéro. Il augmente encore un peu, justement à cause des profits d'Hydro-Québec. Mais il faut toujours garder en tête, avant d'être alarmiste, de penser que, comme une famille a un passif, une famille a un actif, et la grande famille québécoise, à cause d'Adélard Godbout, dans une moindre mesure, et du grand René Lévesque, et de Jean Lesage au premier chef, a un actif fantastique.

Le Président: Alors, M. le député des Chutes-de-la-Chaudière.

M. Marc Picard

M. Picard: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir d'intervenir aujourd'hui en mon nom et au nom de ma formation politique pour féliciter les Québécoises et les Québécois de leur courage et de leur vision pour la création d'une société d'État qui, aujourd'hui, 60 ans plus tard, fait la fierté dans le monde entier, la société Hydro-Québec. Fleuron de notre économie d'hier à aujourd'hui, elle fut l'instigatrice du développement fulgurant et prodigieux qu'a connu le domaine de l'ingénierie «made in Québec».

Prenons l'exemple de la direction des travaux à Carillon, en 1960, qui a été confiée aux ingénieurs francophones d'Hydro-Québec. Carillon a été le chantier qui a confirmé la politique du faire-faire de l'entreprise en matière d'ingénierie. Cela a eu pour effet d'accélérer la création et l'essor des firmes de génie-conseil québécoises.

Ou prenons pour exemple les travaux d'aménagement d'un des plus ambitieux complexes hydroélectriques jamais entrepris au Canada sur les rivières Manicouagan et Outardes. Ce chantier a donné lieu à des exploits techniques et à des premières mondiales qui assureront d'emblée à Hydro-Québec une renommée internationale.

À l'initiative d'un jeune ingénieur québécois, Hydro-Québec a effectué une percée technologique déterminante dans le domaine du transport des grandes quantités d'électricité sur de longues distances en poussant la tension à un niveau jusque-là inégalé, 735 kV.

Je parle de fierté parce que nos dirigeants de l'époque avaient une vision de notre développement énergétique à long terme. Le Québec s'était certainement démarqué comme étant un champion de l'énergie, un champion de la production énergétique renouvelable. Le cafouillage qui a marqué le dossier du Suroît n'est certainement pas de nature à rassurer la population du Québec. Il est surtout de nature à démontrer que l'actuel gouvernement et son premier ministre n'ont pas de vision claire en matière de développement énergétique. Robert Bourassa, par exemple, dans les années soixante-dix notamment, avait fait énormément pour positionner le Québec d'une façon stratégique dans le dossier énergétique, et M. Bourassa a fait preuve de vision en cette matière.

Aujourd'hui, on se rend compte qu'à l'intérieur même du Parti libéral les militants semblent fort mal à l'aise avec le projet du Suroît, tant et si bien que, à quelques heures du début du conseil général du parti, le gouvernement et le premier ministre ont relancé le projet vers des consultations supplémentaires, consultations supplémentaires qui, on le sait aujourd'hui, n'étaient que poudre aux yeux pour tranquilliser la grogne des militants plus que celle de la population.

Quand on relit la partie énergétique du programme électoral du Parti libéral de 2003, on y voit des engagements très clairs dans le cadre du Protocole de Kyoto pour un développement énergétique qui n'aille pas vers l'énergie thermique, qui n'aille pas vers les solutions les plus polluantes. Et, c'est logique, M. le Président, l'Assemblée nationale a appuyé l'adhésion du Canada au Protocole de Kyoto, et le développement de la centrale de Suroît marque un recul extrêmement important au regard de nos engagements par rapport à Kyoto. Et le Québec, qui était à ce chapitre-là un leader, ferait une erreur considérable en regard de notre adhésion au Protocole de Kyoto. On comprend mal que le gouvernement, qui se dit sérieux en matière d'efficacité énergétique, ait coupé le budget de l'Agence d'efficacité énergétique de 35 % quand le Québec accuse un retard énorme en cette matière avec ce qui se fait en Colombie-Britannique et ailleurs sur le continent.

Dans les années soixante, la nationalisation de l'électricité, ça se faisait à l'initiative du premier ministre, ça se faisait à l'initiative des plus hauts dirigeants du gouvernement. Qu'est-ce qu'ils avaient? Deux choses: une vision où on devait aller puis le leadership de mettre en place cette vision.

Dans les années soixante-dix, sous Robert Bourassa, ce n'est pas à coup de Régie de l'énergie puis de commissions parlementaires, puis de toutes sortes de pseudoconsultations qu'on a lancé le développement de la Baie-James, il y avait des gens qui avaient une vision et qui avaient le leadership pour la mettre en place.

Le gouvernement précédent a fait preuve d'une absence complète de leadership. En fait, M. le Président, ils ont eu quand même un certain leadership, mais pour embourber le Québec, pour retarder son développement hydroélectrique durant de longues périodes, voire plusieurs années.

Et aujourd'hui, bien évidemment cette situation et ces retards créent ? et je le reconnais ? créent une situation serrée qui oblige le gouvernement à faire des choix stratégiques. Mais nous ne croyons pas que ces choix stratégiques doivent être dévolus à des organes administratifs ou à des consultations de tout ordre, qui n'ont rien à voir avec ce qui est attendu de leadership d'un premier ministre qui doit nous exprimer sa vision. Parce que, dans le gouvernement, M. le Président, à l'heure actuelle, le seul qui a exprimé des éléments clairs, qui a pris des positions précises, qui nous a fait part d'une vision énergétique, c'est le ministre de l'Environnement, qui, à quelques reprises, a mis des crans d'arrêt très précis sur ce qu'il pensait inacceptable en matière de développement énergétique. Mais on a besoin d'une vision gouvernementale, on a besoin d'une stratégie, on a besoin de sentir que ce gouvernement et ce premier ministre ne sont pas à la dérive en matière énergétique, mais qu'ils ont une vision de développement.

En terminant, M. le Président, je souhaite ardemment que cette vision de développement soit basée sur l'énergie renouvelable, sur le développement durable, sur le développement hydroélectrique, sur le développement éolien, sur la relance de grands projets de développement non seulement pour répondre à la demande du Québec, mais pour devancer la demande extérieure, qui nous permettra, dans les meilleurs délais possibles, d'exporter et de créer de la richesse pour le Québec et pour les prochaines générations au Québec. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, merci, M. le député. Je suis prêt à reconnaître maintenant M. le ministre des Ressources naturelles.

M. Pierre Corbeil

M. Corbeil: Merci, M. le Président. C'est à double titre de ministre des Ressources naturelles, de la Faune et des Parcs et ministre responsable de la région de l'Abitibi-Témiscamingue et du Nord-du-Québec que j'interviens dans le cadre de cette motion soulignant le 60e anniversaire de fondation d'Hydro-Québec.

Et je vais y aller plutôt dans un climat positif et constructif et ne souscrirai pas nécessairement aux remarques du député de Chutes-de-la-Chaudière en ce qui a trait à la motion qu'on dépose pour souligner cet événement exceptionnel. Je vais le faire, M. le Président, pour souligner la convention concernant une nouvelle relation entre Hydro-Québec, et la Société d'énergie de la Baie James, et les Cris de Eeyou Istchee, que la société d'État a signée hier à Chisasibi en compagnie de mon collègue ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes et aux Affaires autochtones et de moi-même. Cette entente est porteuse de bonnes relations pour l'avenir d'Hydro-Québec, de la communauté crie et de la région Nord-du-Québec. Il n'a jamais été aussi vrai de dire, M. le Président, que nous partageons un même territoire. La «Paix des Braves», que nous continuons à mettre en oeuvre, fait de nous les partenaires solidaires du développement du Nord-du-Québec et des ressources qui se trouvent sur ce grand territoire.

À titre de ministre responsable de cette région, je suis d'autant plus heureux de cette convention. Cette entente bénéfique et durable nous permet d'assurer le partage de la responsabilité des ressources tout comme celui des bénéfices sur les territoires visés. Je tiens à souligner le travail des partenaires, qui a permis de pousser plus loin le développement du Nord-du-Québec. Depuis l'accord historique entre nos peuples, nous avons travaillé à la résolution des conflits développés au cours des 20 dernières années et à un moyen de contrer les futurs différends. La convention signée hier s'inscrit dans cet effort constant de partage des idées et des actions, d'échange et de compréhension mutuelle.

n(15 h 30)n

En nous donnant des mécanismes supplémentaires de gestion commune et de résolution des différends, nous voulons tous nous assurer de solidifier la relation entre nos deux nations. La construction des infrastructures hydroélectriques dans la région, dans les années soixante-dix et quatre-vingt, a eu des impacts sur la vie des communautés cries du Nord québécois. Ces impacts ont suscité des préoccupations au fil des ans. La convention signée hier viendra nous aider à résoudre ces préoccupations. Elle donne des outils pour permettre aux Cris, en particulier à ceux de Chisasibi, de poursuivre le développement de leur communauté. Comme la mise en oeuvre du Conseil Cris-Québec sur la foresterie et comme les amendements que nous avons apportés à la «Paix des Braves» en décembre dernier, la convention permet de donner suite aux engagements pris par les diverses parties dans le cadre de cette entente. Il s'agit donc d'un pas de plus pour assurer des relations harmonieuses entre nos deux nations, notamment en ce qui a trait au développement futur des ressources hydroélectriques. La signature de cette nouvelle entente est un autre pas visant à assurer de meilleures relations entre nos deux communautés. Je suis sûr que les partenaires, dont le gouvernement du Québec, auront l'occasion de se revoir au cours des prochains mois et des prochaines années pour poser d'autres jalons dans ce grand parcours commun et je suis confiant que nous saurons le faire dans un esprit de partage et d'ouverture qui assurera le succès de nos entreprises.

En plus de souligner le travail d'Hydro-Québec fait en collaboration avec les Cris et les intervenants régionaux dans cette convention qui sera profitable pour le Nord-du-Québec, je salue, M. le Président, le 60e anniversaire de notre société d'État et je l'encourage à continuer de favoriser le développement durable du Québec. Par ailleurs, en tant que ministre des Ressources naturelles, de la Faune et des Parcs, mon devoir est de m'assurer de la sécurité énergétique des Québécois et des Québécoises, et je compte sur Hydro-Québec pour m'aider à y parvenir. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, merci, M. le ministre. La parole est maintenant à la députée de Rosemont.

Mme Rita Dionne-Marsolais

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. C'est très important, cet anniversaire que l'on souligne aujourd'hui, et le premier ministre parlait de vision et de détermination des hommes d'Hydro-Québec. C'est vrai, parce qu'il n'y avait pas de femmes dans le temps. Mais effectivement, Hydro-Québec, ça ne relève pas de la mythologie, je ne partage pas son commentaire là-dessus, mais c'est un symbole, c'est un symbole de nos compétences québécoises, c'est un symbole de nos talents, et c'est un symbole aussi de nos connaissances.

Et Hydro-Québec a pris son envol grâce à la vision et la détermination de personnes qui ont travaillé d'arrache-pied pour établir au Québec une grande entreprise. Et ils l'ont fait, le chef de l'opposition l'a bien indiqué tout à l'heure, de manière compatible au marché, la preuve qu'on peut avoir une société d'État qui joue les règles du marché. On se rappelle la soi-disant nationalisation de 1963 qui était en fait une prise de contrôle des actions de sociétés privées. Et l'objectif de ses dirigeants à l'époque, c'était d'avoir une qualité d'énergie équivalente et disponible sur tout le territoire du Québec et les tarifs les mêmes sur tout le territoire du Québec pour les mêmes catégories de consommateurs.

Aujourd'hui, le défi de notre société d'État ? et je pense que, que ce soit de ce côté-là de la Chambre ou de notre côté, on est tous conscients de ces défis-là ? c'est d'abord de gérer la croissance, gérer la croissance de cette consommation d'électricité. Et ça veut dire responsabiliser aussi les citoyens face à cette consommation d'électricité pour qu'on utilise plus efficacement l'énergie que nous avons la chance d'avoir au Québec.

Le troisième défi, c'est de développer le potentiel, tout le potentiel du Québec. Mais, pour le développer, ça ne veut pas dire de l'exploiter, mais de gérer ce développement en innovant, et c'est le quatrième défi, en innovant autant au niveau des modes de production d'électricité ? on pense ici aux nouveaux modes, que ce soit l'éolien, qui sont moins nouveaux dans certains pays, mais plus nouveaux pour nous, au Québec ? et aussi en innovant en matière de transport et de distribution. Et quel beau défi, M. le Président, que la distribution souterraine en milieu urbain! C'est un défi extraordinaire si la technologie permet justement de réduire les coûts.

Alors, ce que je voudrais souhaiter à tous ces Hydro-Québécois aujourd'hui, en plus du bon anniversaire, c'est garder une vision à long terme de l'approvisionnement et de la disponibilité énergétique du Québec, garder la qualité de cette onde et le prix concurrentiel. Mais faisons-le de manière responsable.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Sirros): Merci, Mme la députée. Alors, cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Sirros): Adopté. Alors, je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant, M. le député de D'Arcy-McGee. Vous avez, je pense, une motion à...

Souligner le Jour commémoratif
de l'Holocauste-Yom Hashoah

M. Bergman: M. le Président, je sollicite le consentement de cette Assemblée afin que soit présentée la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale souligne que le dimanche 18 avril 2004 était Yom Hashoah, soit la Journée internationale de commémoration des victimes de l'Holocauste.»

«That the National Assembly recognizes that Sunday, April 18th 2004, was Yom Hashoah, the International Day of Commemoration for the Victims of the Holocaust.»

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, y a-t-il consentement pour débattre de cette motion? Il y a consentement. Alors, M. le député de D'Arcy-McGee et ministre du Revenu.

M. Lawrence S. Bergman

M. Bergman: M. le Président, l'Holocauste, un simple mot pour décrire la souffrance et la mort de 11 millions de personnes dont 6 millions de Juifs. Je suis ici pour rendre hommage à tous ceux qui sont tombés aux mains des nazis. Aujourd'hui, à l'Assemblée nationale du Québec, nous évoquons la mémoire des gens qui ont péri et également de ceux qui ont survécu.

On Yom Hashoah, Holocaust Remembrance Day, we bring to mind the heinous number of children who perished and those children who lived but are haunted with vicious nightmares. We recall the fathers and mothers who were taken from their sons and daughters and the husbands and wives who were lost to each other. On se souvient des milliers de communautés qui ont été disséminées et détruites, des citoyens tués brutalement. Quand cette guerre fut terminée, le monde a déclaré: Plus jamais! Never again!

L'Holocauste a marqué à tout jamais le coeur et l'âme de ceux qui ont survécu. Il suffit d'entendre le témoignage d'une seule personne survivante de l'Holocauste pour comprendre pourquoi nous devons continuellement se souvenir, pourquoi nous disons: Plus jamais! Pour ces survivants, ils ne pourront jamais effacer de leur mémoire les atrocités subies, la terreur qui les a habités et qui se lit encore dans leurs regards. Nous ne pourrons jamais échapper aux conséquences de cette horreur de l'histoire humaine. Un survivant a déjà dit: «The days belong to them. However, the nights still belong to the Nazis.»

Même si Yom Hashoah ne peut effacer l'angoisse et l'odeur de la mort, il souligne l'oeuvre de ceux qui, encore de nos jours, se battent afin d'enrayer les génocides de ce monde. Il permet aussi de se remémorer les victimes, les hommes et les femmes, les vieux et les jeunes qui ont vu leurs vies volées.

When asked why the Jewish people did so little to resist the Nazis during the Holocaust, Elie Wiesel, a noted author and Holocaust survivor, stated that the question should be how Jews were able to accomplish so much under Nazi occupation? There are thousands of stories of Jewish people who resisted the Nazi regime, not through weapons, but by choosing life.

We remember every person who lived or perished during the Holocaust, who stood firm and who resisted in his or her way. We remember those who attempted to continue living as human beings, in abhorrent conditions. Those who tried to live as dignified a life as possible when others tried to take away their humanity.

n(15 h 40)n

Nous devons également relever la résistance spirituelle continuelle des Juifs. À l'intérieur des camps de concentration, nous savons que certains cachaient des items religieux comme des petits livres de prières, refusant d'abandonner leur foi. Nous saluons les gens dans les camps et les ghettos qui, malgré les souffrances, écrivaient de la poésie et chantaient des chansons.

En cette journée de commémoration de l'Holocauste, je salue l'oeuvre d'un homme spécial, M. Adam Gutman, un Juif polonais. Ce survivant est venu au Québec afin de rebâtir sa vie. Malgré la perte de la majeure partie de sa famille, M. Gutman a trouvé ici, au Québec, un endroit où il fait bon vivre. Il est devenu un violoniste accompli qui a composé des chansons populaires en langue française. Il fut un pionnier dans l'industrie de la musique pop, mais surtout un exemple de courage et de détermination né de l'Holocauste. Malheureusement, M. Gutman a rendu l'âme en août dernier.

M. le Président, en mémoire d'Adam Gutman et des milliers d'autres comme lui, Yom Hashoah doit être considéré comme un appel à notre conscience collective. Nous savons que «never again» n'est pas une garantie, mais une promesse de souvenir. Même aujourd'hui, nous sommes confrontés à des enjeux d'équité, de justice, de compassion, de sensibilité et de compréhension face à la violence, la peur et la haine. Nous avons l'opportunité de combattre sans craindre ces enjeux. Alors, combattons le racisme, la discrimination, l'intolérance et la haine sous toutes ses formes. Nous en avons le devoir.

Comme vous le savez, la violence provient de la haine, la haine provient de la peur, la peur provient de l'ignorance. Le seul moyen d'enrayer cette ignorance, c'est par l'éducation. Il faut donc tirer des leçons du passé. L'histoire de l'Holocauste nous permet de réfléchir sur les responsabilités morales des individus, des sociétés et du gouvernement. Nous devons se servir de ce jour pour en parler avec nos enfants, nos amis, nos collègues et toute notre communauté sur les enjeux de tolérance, de liberté et de fraternité.

For the greater the circle of those who remember and learn from the past, the more likely is it that it shall never, never occur again. Never again.

Et, M. le Président, je suis reconnaissant de faire partie d'une société qui endosse, elle aussi, ces fondements éthiques. Nous avons, au Québec, des valeurs qui sont reconnues à travers le monde entier. Les Québécois sont reconnus pour leur tolérance, leur esprit d'ouverture. Et, par l'adoption de la loi n° 198, la reconnaissance du Yom Hashoah comme le jour international de commémoration des victimes de l'Holocauste, au Québec, nous avons statué haut et fort que nous prônons ici, au Québec, la diversité et la tolérance, qualités mêmes de toute démocratie.

Cette commémoration se veut un hommage aux victimes de l'Holocauste, à l'héroïsme de tous ceux qui ont lutté et au courage de ceux qui ont su se relever. Pour toutes ces personnes qui sont encore hantées par les horreurs qu'elles ont vécues, nous devons continuer à dire: Plus jamais. Never Again. Nowhere on this earth, nowhere on this planet. Je salue bien bas ceux qui ont péri, ceux qui ont survécu, ceux qui se souviennent et qui n'oublieront jamais. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Sirros): Merci, M. le député. M. le chef de l'opposition.

M. Bernard Landry

M. Landry: M. le Président, il est certain que, dans plusieurs assemblées démocratiques dans le monde et pour plusieurs autres regroupements humains, le fait de commémorer Yom Hashoah est une chose normale, eu égard à l'importance de l'horreur de cet événement dans l'histoire.

Au Québec, c'est normal aussi, à cause des raisons qu'ont tous les autres peuples de le faire et aussi pour des raisons qui nous sont propres, la première étant que c'est au Québec, et dans la région de Montréal en particulier, que, toutes proportions gardées, sont venus se réfugier le plus grand nombre de survivants de l'Holocauste. Et il y en a encore vivant à Montréal. Il y en a moins, comme... notre collègue a souligné un décès. Ces choses-là sont arrivées avant 1945. Mais les gens, instinctivement... Le Québec a été considéré comme une terre d'accueil et choisi comme telle. De ce point de vue, il y avait une prédisposition québécoise.

En effet, dans tout l'Empire britannique, c'est notre Assemblée, celle qui a établi Yom Hashoah il y a quelques années, qui a accueilli le premier député juif de plein droit, élu par la circonscription de Trois-Rivières, où, à quelques exceptions près, il était évidemment le seul Juif ? il y avait peut-être des membres de sa famille. Et, quand il a été élu, à cause des lois britanniques du temps, il a été refoulé et n'a pas pu siéger. Et la population de Trois-Rivières l'a élu une deuxième fois, et ça a été le précédent pour l'Empire britannique. On pourrait dire qu'indirectement, si Disraeli a été premier ministre d'Angleterre, c'est parce que Ezekiel Hart a été député de Trois-Rivières. Parce que, en droit britannique, le précédent, c'est le fait accompli.

Une autre circonstance aussi intéressante, notre droit civil est basé sur le Code Napoléon, comme chacun sait, c'est le Code civil du Québec, mais d'inspiration napoléonienne. Or, pour les Juifs d'Europe, Napoléon est un personnage de première importance parce que c'est lui qui, d'abord et avant quiconque dans toute l'Europe de l'Ouest, a dit: Les Juifs sont des citoyens à part entière. Et c'est curieux que c'est un Québécois qui est le plus grand napoléoniste de nos jours, un Québécois d'origine juive, Ben Weider, qui a un musée extraordinaire dans sa propre maison puis qui a publié des livres récemment. Et il y a même une thèse un peu polémique, parce qu'il est tellement admirateur de Napoléon qu'il veut savoir s'il a été empoisonné à l'île Sainte-Hélène ou s'il est mort d'une autre manière. Mais, en tout cas, peu importent les débats qu'il fait, ça démontre qu'il y a une tradition historique qui relie le Québec à la communauté juive de diverses manières.

Et cette tradition, elle est d'une vivacité extraordinaire. Je l'ai encore vu la semaine dernière. Mon collègue le député de Richelieu, on est allés à la Mimouna, une fête extraordinaire et une des fêtes les plus sympathiques qui arrivent au Québec. Ça vaut le jour de l'An chez mon grand-père Eugène. Et on va dans les foyers puis aussi au centre communautaire, où là on voit des Juifs profondément québécois, et qui le sont d'une façon plus apparente que ceux qui n'ont pas la langue française comme langue première, parce que ceux-là, ils ont la langue française comme langue première; c'est des gens qui viennent du Maroc pour la plupart d'entre eux.

n(15 h 50)n

D'ailleurs, moi, quand on ne parle pas français dans une circonstance officielle, au Québec, je le prends encore de travers, et même assez raide, souvent. Mais là j'ai eu la satisfaction de voir un notable juif qui est venu leur parler uniquement en anglais: la plupart dans la salle n'ont pas dû comprendre ce qu'il a dit, hein? Ceux qui ont compris, ils ont assez compris pour ne pas applaudir. Ça ne se fait plus.

Les Juifs du Québec savent ce qu'est le Québec. Et le Québec sait ce que sont les Juifs du Québec, c'est-à-dire des citoyens profondément intégrés, qui ont bâti le Québec dans tous les aspects de sa vie, dans le commerce, dans les professions libérales, chez les avocats, et des masses.

J'ai eu l'honneur de commencer ma carrière dans un bureau qui s'appelle Lapointe, Rosenstein ? ce n'était pas d'origine bretonne. Et, dans une harmonie parfaite, Pierre Lapointe ? décédé il y a quelques mois ? et Mark Rosenstein ont fondé une grande étude. Et on a vu les Juifs s'illustrer dans nombre de professions libérales, dans les arts, dans les lettres, y ont contribué puissamment à la vie québécoise.

Ce ne serait pas une raison suffisante pour redire l'horreur qui est arrivée à 6 millions de membres de ce peuple? Le deuil n'est pas québécois, il n'est pas européen, il est planétaire. Et il n'est pas pour cinq ans, 10 ans, 50 ans, je crois qu'il sera éternel, et il faut qu'il en soit ainsi tellement la tragédie était grave et incompréhensible. Et ça, ça me fait peur. Ça me fait peur encore aujourd'hui.

Comment se fait-il qu'un des peuples occidentaux les plus évolués de l'histoire humaine soit également celui qui, dans un segment de sa population, les nazis, a commis une telle horreur? C'est le peuple de Beethoven, de Jean-Sébastien Bach, des philosophes, de Kant, Leibniz, des physiciens, des chimistes, de Bertolt Brecht. Comment, dans un peuple aussi avancé, une idéologie aussi rétrograde, méchante et antihumaine a pu atteindre cette ampleur? C'est assez pour qu'on se pose la question et qu'on soit prudent avec toutes les formes de fanatisme, avec toutes les formes de discrimination.

Actuellement, on a eu encore des événements malheureux à Montréal, depuis quelque temps, puis à Toronto, puis un peu partout. Il y a une circonstance, là, au Moyen-Orient, qui comporte un danger de radiation à l'extérieur de cette région du globe, qui est à ce point perturbée. Mais qu'est-ce qu'il faut se dire comme Québécois, comme Québécoises? Je suis d'origine juive, je suis d'origine arabe, je suis Québécois d'abord. J'ai une première patrie, oui. J'y suis attaché, je connais son histoire, je peux l'aimer, je peux critiquer sa politique, mais je suis d'abord Québécois et je n'ai pas le droit de me comporter comme si j'étais en Palestine ou si j'étais en Israël. Je suis au Québec, et un autre Québécois, quelle que soit son origine, est un Québécois comme moi.

Alors, nos concitoyens d'origine arabo-musulmane, et c'est le cas évidemment de l'immense majorité d'entre eux ? et je souhaite la totalité ? sont très perturbés par ce qui se passe au Moyen-Orient, et nos amis juifs, la même chose. Il faut leur dire d'avoir comme premier réflexe un réflexe québécois, c'est-à-dire un réflexe de tolérance. Ça n'empêche pas de s'impliquer dans les débats, d'écrire dans les journaux, de blâmer le gouvernement Sharon ou de l'approuver ou de blâmer l'autorité palestinienne ou de l'approuver. Mais, entre Québécois, on ne peut jamais, sous aucun prétexte, franchir le niveau de la discussion démocratique, la discussion ouverte, le respect de l'opinion de l'autre. Je sais que ça doit être très, très, très difficile. Ça doit être très, très difficile.

J'ai des amis d'origine juive, surtout ceux qui sont des intellectuels, qui sont tourmentés comme ce n'est pas permis, puis ils ne sont pas tous du même avis, même entre eux. J'ai des amis intellectuels arabes qui vivent le même niveau de tourmente. Alors, ce qu'il faut leur dire: Québécois et Québécoises d'origine juive ou d'origine arabe, l'ensemble du Québec sympathise avec vous, vous aime, vous a donné une nouvelle patrie qui, elle, est en paix et doit le rester pour toujours et d'une façon exemplaire, en cultivant le respect, la tolérance et l'harmonie qui, beaucoup plus que tout ce que les philosophes allemands ont pu écrire au cours des âges, est la forme la plus avancée de l'humanisme.

Le Vice-Président (M. Sirros): Merci, M. le chef de l'opposition. M. le député de Chutes-de-la-Chaudière.

M. Marc Picard

M. Picard: Merci, M. le Président. Dimanche dernier, le 18 avril, les Juifs et les membres de toutes les communautés du monde se sont rassemblés pour commémorer le jour du souvenir de l'Holocauste. C'est un anniversaire que l'humanité entière se doit de commémorer pour ne jamais oublier, pour que les horreurs qu'on y a commises ne se reproduisent jamais dans ce monde.

Il y en a pour dire qu'un acte de souvenir n'est pas beaucoup face à l'horreur qui est survenue. Bien sûr, M. le Président, ces actes de souvenir ne peuvent pas enlever la douleur et effacer la tragédie qui est arrivée aux Juifs d'Europe aux mains des nazis. Mais le fait que le cercle de ceux qui font une pause pour se rappeler de ce cauchemar soit de plus en plus grand encourage ceux qui reconnaissent que l'humanité a appris quelque chose de ce passé terrible.

Certes, M. le Président, le développement d'une société pluraliste n'est pas un fait accompli, mais il représente une tendance croissante dans l'évolution de nos sociétés et une tendance dont les avantages sont indéniables, surtout lorsqu'on réfléchit aux situations contraires comme celle de l'Holocauste que nous commémorons aujourd'hui. Ce souvenir nous rappelle que le chemin vers cette évolution pluraliste a été long et pénible, parsemé d'erreurs et payé de sang humain. Mais ce souvenir nous fait également mesurer la grandeur de cette même évolution et nous fait apprécier la singularité de cette conquête morale de l'humanité que le pluralisme représente.

Car il ne faut pas non plus sous-estimer ce que le pluralisme exige de nous tous. Il exige la tolérance, le respect d'autrui avec tous ses défauts et non seulement ses qualités. Il exige qu'on habite ensemble, qu'on partage le même espace avec les gens avec lesquels on a parfois des différences profondes, et qu'on apprenne lentement mais sûrement à apprécier ces différences. Mais nous ne devons jamais oublier jusqu'à quel point ceci n'a pas constitué l'état des choses dans l'histoire humaine.

C'est facile de vous entendre avec les gens qui partagent vos valeurs, vos croyances religieuses, vos modes de vie, vos opinions politiques. Ce n'est pas problématique lorsque vos compatriotes pensent le même patriotisme comme vous. Mais, lorsque toutes ces similarités éclatent avec les migrations de population, les traditions et les échanges commerciaux, nous sommes mis à l'épreuve. Les actes antisémites que nous avons été témoins lors des dernières semaines nous rappellent à quel point la marge entre le respect et la violence est bien maigre.

C'est précisément dans ces conditions que nous voyons à quel point le pluralisme est une valeur qui n'est pas toujours facile à vivre. On apprend à le valoriser, à le chérir, parce qu'on sait que, tant et aussi longtemps que le pluralisme est vivant, nous sommes protégés contre tout retour vers une société plus fermée, plus dense, plus intégriste, dont sa forme totalitaire est incarnée dans l'Holocauste. Mais on apprend aussi à le valoriser parce qu'on s'aperçoit en même temps combien nos vies seraient appauvries si on vivait dans une société moins diverse et moins différente.

Réaffirmons, M. le Président, non seulement notre engagement au pluralisme, mais aussi célébrons-le, soulignons son importance pour les générations futures, rappelons-leur comment nous nous rappelons ces crimes contre l'humanité, que l'humanité a également beaucoup de triomphes, lesquels sont de notre devoir de les nourrir et de les préserver. Merci, M. le Président.

n(16 heures)n

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, merci, M. le député. La parole est maintenant au député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Russell Copeman

M. Copeman: Merci, M. le Président. M. le Président, je prends parole aujourd'hui en tant évidemment que législateur, mais également en tant que Juif. D'ailleurs, j'ai décidé, pour la motion, de porter le kippa, qui est la couverture traditionnelle de la tête, que portent beaucoup de Juifs plus observants que moi. C'est rare que je le porte. Je l'ai porté trois fois pendant ma carrière politique. Il s'agissait à chaque assermentation comme député, en 1994, 1998 et en 2003. C'est également rare, M. le Président, que j'invoque ma foi, ma croyance religieuse, parce que, la foi et la croyance, c'est essentiellement une chose personnelle, ce n'est pas normalement quelque chose qu'on étale sur la place publique. Mais je fais exception aujourd'hui, M. le Président. Je fais exception, compte tenu du contexte de la Journée de la commémoration de l'Holocauste de cette année. Je fais exception par symbole de solidarité avec le peuple juif, mais également d'un désir d'être visible, comme Juif, et même visible à l'intérieur de cette Chambre, visible à un moment où certains souhaitent qu'on soit invisibles. C'est pour ça que je le porte, M. le Président.

Mr. Speaker, 60 years ago, a Fascist regime undertook an unprecedented genocide of an entire society. It was a genocide supported by a vast infrastructure, that of Nazi Germany. And that genocide murdered 6 million Jews, including 1,5 million children. That genocide, Mr. Speaker, destroyed, practically destroyed an entire culture, that of European Jewry, a culture that had been flourishing for hundreds of years, a culture that expressed itself in literature in its own language, Yiddish, a culture which had derived music particular to its time and place, a culture which had built architecture particular to its time and place, and a culture that promoted learning throughout Middle Europe. Jews, the world over, Mr. Speaker, and indeed all of humanity said, after the Holocaust: Never again.

Mais qu'est-ce que nous avons appris de cet Holocauste, M. le Président? Avons-nous rayé l'holocauste de la famine à travers le monde? Avons-nous intervenu en Serbie afin d'arrêter la violence sectorielle? Avons-nous agi avec célérité et force au Rwanda où 800 000 individus ont été massacrés en trois mois? Poser la question, M. le Président, c'est y répondre.

La commémoration de l'Hashoah ici, à l'Assemblée nationale, a une fonction double: dans un premier temps, d'honorer la mémoire des 6 millions de Juifs victimes des nazis, victimes non pas parce qu'ils étaient combattants dans une guerre ou non pas parce qu'ils étaient des civils tués, comme on dit en anglais, «as collateral damage» ? comme si ça changeait de quoi dans la vie de quelqu'un ? mais ils étaient tués simplement parce qu'ils étaient des Juifs. Mais la commémoration de l'Holocauste a également une fonction éducative, afin de s'assurer que ça n'arrive plus jamais ni au peuple juif, ni à l'humanité. Point. Est-ce que nous avons réussi, M. le Président? Ça demande la réflexion.

Il y a un contexte particulier cette année, M. le Président, avec l'événement qui est survenu à l'école Talmud Torahs Unis, à Saint-Laurent. J'ai pu, avec le ministre du Revenu, visiter cette école à la suite de l'incendie, en compagnie du député de Saint-Laurent. Je sais que le premier ministre du Québec a visité, le ministre de la Sécurité publique aussi. Le lendemain, avec le ministre du Revenu, le député de D'Arcy-McGee, j'ai été frappé, M. le Président, mais très frappé par l'odeur. Quand on rentre dans un édifice où il y a eu incendie, il y a une odeur terrible. J'ai été frappé par des images de livres brûlés, M. le Président. Livres. Dans un lieu qui est voué à l'éducation, on a mis un incendie. Et je dois vous dire, M. le Président, que j'ai été personnellement ébranlé par l'événement pour toutes sortes de raisons. Je ne pensais pas que de pareilles choses pouvaient arriver chez nous. J'étais presque convaincu que ça ne pouvait pas arriver. Ça pouvait arriver ailleurs mais pas ici, au Québec, en 2004.

Je ne veux pas dramatiser la situation outre mesure, M. le Président. Il se peut que cet événement ait été un événement unique, commis par un illuminé. C'est possible. Il se peut également que cet événement ait été perpétré par un groupe. Mais je suis sûr d'une chose, M. le Président, compte tenu de la communication laissée sur les lieux, que ce geste était plus qu'un acte de vandalisme simple.

Par la suite, M. le Président, moi et ma famille avons décidé d'aller à la synagogue pour la pâque juive, le samedi. D'ailleurs, c'est assez rare ? j'imagine que ça arrive à des collègues également ? de s'assurer que toute la famille soit capable d'aller à des offices religieux, ce n'est pas nécessairement facile. Mon fils de 18 ans, mon fils de 15 ans, ma fille de huit ans, mon épouse et moi, nous avons décidé d'aller en groupe, tout le monde. Ce n'est pas facile de ramasser tout le monde pour aller à la synagogue, mais nous l'avons fait. Et j'avais un certain sentiment de tristesse, c'est normal, mais également de nervosité. Et, ça aussi, je pensais que ça n'arriverait jamais ici, au Québec.

Je sais, M. le Président, et nous savons que la communauté juive de Montréal et de Québec n'est pas seule suite à ces événements. On a eu une motion ici, à l'Assemblée nationale. Malheureusement, j'étais absent, avec le ministre du Revenu, pour cause des fêtes de la pâque juive, mais nous avons pris connaissance de cette motion. Nous avons beaucoup apprécié, comme toute la communauté a beaucoup apprécié, l'intervention du premier ministre, celle du chef de l'opposition, celle du député de Rivière-du-Loup; par la suite, des éditoriaux, des témoignages des leaders de la société civile, des témoignages des simples citoyens qui m'ont appelé, M. le Président, qui m'ont envoyé des e-mails pour démontrer leur solidarité avec nous. Ces témoignages sont très réconfortants, M. le Président, et ça démontre à quel point, comme société, on dit non à ce type d'événement, à ce type de violence.

Mr. Speaker, Serbia, Rwanda, the Holocaust. Evil exists in the world and we must vigorously condemn it and energetically combat it, no matter when or where it occurs, even when or perhaps especially when it manifests itself as the setting of a fire in a school library.

Mr. Speaker, a British parliamentarian, for whom I have great admiration, once said ? Edmund Burke, who sat in the British House of Commons in the 18th century ? and I quote: «It is necessary only for the good men to do nothing for evil to triumph.» And so, Mr. Speaker, as good men and women, we must do something. We must denounce, we must speak out, we must remember, we must insure that it does not happen again.

Nous devons rechercher, M. le Président, la paix, «peace», «salâm», «shalom», la paix entre les individus, la paix entre les religions, la paix entre les communautés ethniques, la paix entre les pays. (S'exprime en hébreu). Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, merci, M. le député.

Mise aux voix

Alors, cette motion est-elle adoptée? Adopté.

Alors, Mmes, MM. les députés, je vous demande de bien vouloir vous lever. Nous allons observer une minute de silence.

n(16 h 9 ? 16 h 10)n

Le Vice-Président (M. Sirros): Veuillez bien vous asseoir.

Alors, pour ce qui est de la suite des choses, M. le député d'Acadie.

Souligner l'anniversaire du génocide
du peuple arménien

M. Bordeleau: Merci, M. le Président. Alors, je sollicite le consentement de l'Assemblée nationale pour présenter la motion sans préavis suivante:

«Qu'à l'occasion du 89e anniversaire du génocide arménien l'Assemblée nationale du Québec commémore avec respect la mémoire des citoyennes et des citoyens arméniens disparus lors des événements de 1915 et transmette à nos compatriotes d'origine arménienne l'expression de toute notre sympathie et de notre compassion.»

Le Vice-Président (M. Sirros): Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? Il y a consentement. M. le député.

M. Yvan Bordeleau

M. Bordeleau: Merci. M. le Président, aujourd'hui, l'Assemblée nationale du Québec souligne le 89e anniversaire de commémoration du génocide arménien, survenu le 24 avril 1915. Pour la première fois, en 1980, nos collègues alors présents dans cette enceinte faisaient preuve de compassion à l'égard de nos compatriotes arméniens en s'associant à eux dans le rappel du génocide arménien. C'est donc dire, M. le Président, que, depuis plus de 24 ans, l'Assemblée nationale du Québec rend hommage unanimement à la mémoire des victimes arméniennes en votant, le 24 avril, une motion de commémoration, que j'ai eu le privilège de présenter depuis mon arrivée à l'Assemblée nationale, en 1989.

Permettez-moi, M. le Président, de souligner la présence dans nos galeries d'une délégation de la communauté arménienne. Il s'agit de Son Éminence l'archevêque Khajag Hagopian, prélat de la prélature arménienne du Canada, M. Norair Serengulian, président du Comité national arménien du Québec, M. Viken Afarian, président du Comité national arménien du Québec, accompagnés également de membres du comité, soit Mme Nanor Manoukian, M. Dikran Arouchian et M. Roupen Achkarian.

Alors, l'objectif recherché par la présentation de cette motion vise à rappeler à tous nos concitoyens et à toutes les générations futures que le respect de la vie humaine est primordial et que nous devons bannir toutes formes d'intolérance et de racisme fondées sur l'origine ethnique, religieuse ou sexuelle. Je voudrais souligner et remercier tous mes collègues actuels et passés pour l'appui unanime accordé à ces motions successives de reconnaissance du génocide arménien. L'ensemble de tous les parlementaires s'expriment ainsi au nom de leurs concitoyens et demandent à chaque Québécois d'en tirer les leçons que l'histoire nous impose.

M. le Président, le peuple arménien a en effet une très longue histoire, malheureusement jalonnée de nombreuses tragédies. Au fil des siècles, les Arméniens furent victimes de multiples occupations territoriales. Ce peuple fier et déterminé n'a jamais cessé de lutter pour protéger son territoire et faire respecter ses valeurs. Les Arméniens, dont l'histoire remonte à plus de 3 000 ans, méritent donc tout notre respect et toute notre admiration.

Après des siècles de résistance mais aussi d'une croissance exemplaire, les Arméniens se retrouvent, en 1908, sous la gouverne du parti des Jeunes Turcs, qui, malgré des accords signés en 1914, fomentent, selon les faits historiques consignés, l'extermination du peuple arménien. Le 24 avril 1915, 600 notables arméniens qui formaient alors l'élite du peuple arménien ont été exterminés à Constantinople. Au cours des huit années suivantes, ce sont plus de 1,5 million d'Arméniens qui ont péri ou survécu en prenant la fuite. L'exil constituait alors le seul salut possible.

L'extermination des populations arméniennes à la faveur d'une déportation générale est bien documentée. Plusieurs témoignages de personnes crédibles alors présentes au moment de ces événements viennent confirmer le caractère horrible de ce premier génocide du XXe siècle. Notons plus particulièrement les témoignages écrits de l'ambassadeur des États-Unis en Turquie, M. Henry Morgenthau, du consul américain à Kharpet, M. Leslie Davis, et du consul allemand, le Dr Rössler. Voilà, M. le Président, autant de personnes qui ont pu agir comme des observateurs directs et objectifs de la réalité.

Après la Deuxième Guerre mondiale, soit de 1945 jusqu'en 1974, des mémoires ont été présentés à plusieurs reprises devant l'Organisation des Nations Unies afin que l'on reconnaisse ce qu'il était convenu d'appeler alors le problème arménien. D'ailleurs, en avril 1984, le Tribunal permanent des peuples consacre sa session au génocide arménien et fait ses recommandations à l'effet que l'Organisation des Nations Unies et chacun de ses membres sont en droit de réclamer cette reconnaissance et d'assister le peuple arménien à cette fin.

En 1981, dans une déclaration à l'Assemblée nationale française, M. Claude Cheysson, ministre des Affaires extérieures, reconnaît le génocide arménien de 1915. Suivra, en janvier 1984, la reconnaissance explicite du président français, M. François Mitterrand, qui, dans une allocution désormais historique, affirme, et je cite: «Il n'est pas possible d'effacer la trace du génocide qui vous a frappés. Il faut que cela s'inscrive dans la mémoire des hommes.» Enfin, plus récemment, l'Assemblée nationale française adoptait un texte législatif visant la reconnaissance du génocide arménien.

En 1982, le Congrès chypriote entérine une proposition de reconnaissance de ce génocide, qui fut suivie, en 1985, de celle de la sous-commission des Nations Unies pour la protection des minorités. En 1987, une motion du Parlement européen affirmait aussi l'existence du génocide arménien.

Du côté des autorités religieuses, l'Assemblée mondiale des églises, le Vatican, l'Union américaine des congrégations hébraïques se sont tous, au cours des années quatre-vingt, prononcés également dans le sens de la reconnaissance de ce génocide. Par la suite, ce fut au tour des Parlements russe, israélien, bulgare de rendre hommage aux victimes du génocide.

Tous ces pays et organismes qui, au cours de ces dernières décennies, ont reconnu la réalité du génocide arménien se sont joints à d'autres qui avaient antérieurement agi dans le même sens, notamment l'Argentine, la Belgique, la Grèce, l'Italie, la Suède et l'Uruguay. Très récemment, la Fédération internationale des droits de l'homme a appelé le gouvernement turc à reconnaître le génocide arménien.

Suite aux nombreuses preuves et témoignages bien fondés présentés au fil des ans, nous pouvons aujourd'hui constater que l'existence du génocide arménien est déjà largement reconnue sur le plan international. C'est donc dans la suite de ces gestes courageux posés par plusieurs intervenants internationaux, politiques, religieux ou juridiques que le Québec s'est inscrit en présentant avec régularité, depuis 1980, une motion de commémoration du génocide arménien adoptée à l'unanimité des parlementaires.

En novembre 2003, M. le Président, l'Assemblée nationale du Québec a choisi d'adopter à l'unanimité un projet de loi qui visait essentiellement à appuyer la position déjà bien connue de l'Assemblée nationale du Québec. Le projet de loi n° 194 avait donc pour objectif exclusif de confirmer que le 24 avril soit reconnu comme Jour commémoratif du génocide arménien en souvenir des victimes qui ont vécu l'horreur de ces événements et pour exprimer notre compassion aux parents et amis qui continuent encore aujourd'hui à porter la douleur de ces disparitions.

Ce faisant, il faut bien comprendre, M. le Président, que l'Assemblée nationale du Québec ne visait aucunement à condamner certains de nos compatriotes actuels pour des gestes qui se sont produits sous un gouvernement qui existait il y a maintenant plus de 90 ans. Une lecture attentive du projet de loi permet d'ailleurs de constater notre grande préoccupation à ce niveau. Cependant, cette démarche, qui se veut absolument respectueuse et non litigieuse, ne peut nous soustraire à notre obligation de réagir face à toute action passée ou future qui va à l'encontre de la priorité que nous accordons, comme société, au respect des droits de la personne et à la vie humaine.

Lors des récents événements survenus dans une école juive de Saint-Laurent, soit l'incendie criminel de la bibliothèque de l'école Talmud Torahs Unis de Montréal auquel on a fait référence, le premier ministre du Québec a eu l'occasion d'exprimer de façon éloquente les valeurs qui caractérisent la société québécoise et sous-tendent également l'action de l'Assemblée nationale en regard du génocide arménien.

n(16 h 20)n

Je me permets donc de citer un extrait de son allocution prononcée ici même, à l'Assemblée nationale, le 6 avril dernier, et je cite: «Notre diversité à nous est une de nos plus grandes richesses, et j'irais plus loin que ça pour dire que c'est une grande source de liberté. Cette capacité que nous avons, nous, au Québec et au Canada aussi, d'accueillir des gens qui viennent de partout sur la planète, de les intégrer à notre société, de s'enrichir de leurs expériences et de leur culture, tout ça, pour nous, est une chose qui caractérise notre société et dont nous sommes extrêmement fiers.

«Ce qui fait notre grandeur, M. le Président, c'est que nous puissions justement puiser aux sources de toutes les cultures, de toutes les civilisations, sans exception, pour imaginer un avenir, pour construire un avenir ensemble sous le signe de la paix et surtout sous le signe de la tolérance, et j'ajouterais, du respect. Les différentes communautés culturelles ou religieuses qui composent le Québec d'aujourd'hui ont toutes un droit égal à la dignité et au respect. On ne saurait s'en prendre à quelque groupe que ce soit sur la base de quelque argument que ce soit sans s'en prendre à l'ensemble du Québec et à chacun de nos concitoyens, parce qu'à chaque fois qu'un citoyen est heurté parce qu'il représente un groupe aux yeux de certains, c'est chacun d'entre nous individuellement qui est heurté par ce geste.» Fin de la citation.

Le Québec est une société ouverte et tolérante à l'égard des différences individuelles qui caractérisent l'ensemble de nos compatriotes québécois. Dans ce contexte, toute différence d'opinion doit pouvoir s'exprimer dans un climat social respectueux des personnes. Ces valeurs fondamentales de notre société sont d'ailleurs bien traduites dans nos chartes des droits canadienne et québécoise. Bien que ces valeurs doivent d'abord être assumées et défendues par chaque citoyen, il est évident que notre gouvernement, et l'Assemblée nationale tout entière, continuera à promouvoir cet esprit de tolérance et de respect. Malgré nos divergences d'opinions ? ce qui est normal dans toute société démocratique ? aucune manifestation de haine ou de discrimination raciale n'est admissible. Le respect de chaque individu dans sa personne même et dans sa liberté de s'exprimer est fondamental. Au moindre geste d'intolérance, il faut que nous puissions ensemble, ceux et celles qui sont ici, à l'Assemblée nationale du Québec, se lever pour dénoncer ces gestes.

Si le rappel du génocide arménien est un devoir de mémoire pour les victimes et une manifestation de l'importance que nous accordons à la dignité humaine, il est, d'abord et avant tout, un symbole d'espoir dans l'avenir. Dans le contexte de la commémoration récente du génocide ruandais, la vice-première ministre, ministre des Relations internationales et ministre responsable de la Francophonie expliquait très bien les raisons pour lesquelles nous devons de rappeler ces événements intolérables. Elle disait à ce moment: «Ces événements dramatiques ne peuvent que nous émouvoir et nous faire réaliser que, si la race humaine est capable du meilleur, elle est aussi malheureusement capable du pire. Nous avons la chance d'appartenir à une société tolérante envers autrui, à une société ouverte à la diversité, curieuse et attentive au passé, une société qui n'hésite pas à relever les plus douloureux chapitres de l'histoire pour que ses jeunes en tirent des leçons. Plus jamais, plus jamais ne doit-on porter atteinte à la vie et à la dignité humaine où que ce soit dans le monde.» Fin de la citation.

M. le Président, nos compatriotes arméniens, tout en participant à l'essor de leur société d'accueil, permettent, par leur persévérance et leur détermination, de sensibiliser tous les Québécois à l'existence de la tragédie vécue par leurs ancêtres et nous donnent l'occasion de réaffirmer notre volonté de défendre, sans concessions, les valeurs de respect et de démocratie si fondamentales à notre société.

Il est aujourd'hui tout à fait justifié qu'à travers ses élus la population québécoise reconnaisse la douleur de nos concitoyens arméniens et contribue à rechercher un avenir meilleur pour l'humanité tout entière. Laisser passer sous silence l'extermination d'une grande partie du peuple arménien serait admettre que de telles horreurs puissent se répéter. Ce serait plus précisément abdiquer par un silence condamnable devant tant de cruauté de l'homme envers l'homme et ce serait renier, M. le Président, le droit à la justice et à la dignité auquel a droit tout être humain, quelles que soient sa race, sa nationalité, sa religion. En ce sens, il est certes révoltant que nous soyons encore aujourd'hui trop souvent témoins de massacres et de génocides inadmissibles, et ce, malheureusement sur presque tous les continents.

J'en appelle, en terminant, à la bonne volonté de tous ceux et celles qui sont de près ou de loin concernés par cette manifestation de reconnaissance officielle du Jour commémoratif du génocide arménien afin que cet événement ne soit pas un sujet de discorde, mais bien une manifestation de notre attachement profond à nos valeurs de justice et de respect des droits de l'homme. Je fais donc confiance au bon jugement et au bon vouloir de tous nos concitoyens pour que la commémoration du 24 avril prochain soit une occasion de réflexion et non de tension, et ce, dans le but ultime de rechercher ensemble un avenir meilleur pour nous tous et pour les générations futures. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Sirros): Merci, M. le député. Mme la députée de Prévost.

Mme Lucie Papineau

Mme Papineau: Je vous remercie beaucoup, M. le Président. M. le Président, le 24 avril de chaque année, depuis 20 ans, l'Assemblée nationale du Québec adopte à l'unanimité une motion commémorant le génocide arménien. Je voudrais saluer l'effort et la persévérance du député de l'Acadie, souligner également l'apport de l'ancienne députée de Crémazie, Manon Blanchet, et celui des membres de cette Assemblée qui, durant les 20 dernières années, ont exercé au nom de la nation québécoise ce devoir de mémoire, celui de rappeler que le peuple arménien a subi, au début du siècle dernier, un génocide. Grâce à eux, l'Assemblée nationale du Québec a adopté en décembre dernier la loi sur le génocide arménien. À ce moment, l'unanimité de cette assemblée des députés du parti gouvernemental et de l'opposition officielle a démontré la primauté qui doit être accordée au respect fondamental de la personne humaine, et cela, au-dessus de tout calcul politique et même davantage, au-dessus de tout intérêt économique.

Aujourd'hui, ce sont d'ailleurs plus de 20 000 citoyens et citoyennes d'origine arménienne vivant au Québec, qui nous écoutent, qui apprécieront le geste solennel que pose cette Assemblée et qui contribuent, depuis leur arrivée en cette terre du Québec, de façon active à son essor économique et à son développement social et culturel. Certains d'ailleurs de ces citoyens et de ces citoyennes d'origine arménienne ont vécu ce génocide et tiennent, comme ils le font de façon régulière, à perpétuer la mémoire de ce génocide et des personnes qui sont disparues.

M. le Président, nous ne pouvons pas rester indifférents à la vue de la terreur et de la violence qui sont encore aujourd'hui dans de nombreux pays. Il faut rappeler que le génocide n'est pas seulement l'affaire du XXe siècle et des siècles qui ont précédé. Le Rwanda et des membres du peuple du Rwanda ont aussi été victimes de génocide à la toute fin du XXe siècle, comme les Arméniens et les Arméniennes l'avaient été au début du XXe siècle. Cette violence est le lot quotidien de familles entières qui ont, pour ce qui est des Arméniens et des Arméniennes, vu leurs maisons détruites sous leurs yeux et leurs proches tués de façon presque démente. Chaque jour encore aujourd'hui, en ce début du XXIe siècle, la télévision nous transmet en direct des images d'horreur, et force est d'admettre que beaucoup reste encore à faire pour que notre communauté internationale connaisse enfin la primauté du droit et le respect de la dignité humaine de même que la paix. Reconnaître l'existence d'un génocide s'impose, s'impose à tous et à toutes, s'impose à nous, membres de l'Assemblée nationale, car nier son existence serait une insulte à la mémoire des victimes; elle banaliserait l'horreur et falsifierait l'histoire.

n(16 h 30)n

Les travaux des historiens sont d'ailleurs convergents pour considérer que les Arméniens ont été assassinés en masse. L'appréciation du nombre de victimes variant, étant inhérente aux circonstances de ce drame qui ne remet pas en cause l'existence même du génocide du fait que des hommes, et des femmes, et des enfants ont été assassinés parce qu'ils étaient arméniens, parce qu'elles étaient arméniennes.

Tous les témoins de l'époque, les diplomates, les militaires, les personnes civiles ont attesté de l'intention délibérée du gouvernement de Constantinople, et tous les documents ultérieurs ont confirmé l'intention sur la base de laquelle on évalue l'existence d'un génocide, de sorte que les faits ne peuvent faire l'objet d'une controverse. Il faut que nous soyons tous et toutes sensibilisés à l'existence de ce génocide et que nous réaffirmions par cette motion notre refus de l'intolérance, notre refus de l'exclusion ethnique, notre refus de cette idée qu'il faut exterminer des peuples.

Est-il nécessaire de rappeler que nous ne pouvons pas demeurer indifférents envers ce qu'ont vécu les Arméniens au début du siècle dernier, car les conséquences de l'indifférence pourraient être tragiques, aussi tragiques que le génocide lui-même.

Je rappellerai que l'indifférence envers le génocide arménien a servi de prétexte à l'auteur d'un autre génocide, Adolf Hitler, pour lancer, en 1939, sa propre campagne d'épuration ethnique et de génocide à l'endroit de la communauté juive. L'histoire raconte d'ailleurs que, pour se justifier et renforcer la poursuite de ses objectifs inacceptables, Hitler posait avec cynisme la question suivante: Qui se souvient du génocide arménien? Il s'ensuivit la mort atroce de plus de 6 millions de Juifs au cours de la Seconde Guerre mondiale.

M. le Président, malheureusement, des guerres et des répressions ont encore lieu au vu et au su de l'humanité entière, et nous sommes trop souvent impuissants à régler ces conflits, et nous constatons les conséquences de ces conflits, qui ne se traduisent que par le désespoir. Il nous faut donc continuer sans relâche ici même, dans notre Assemblée nationale, à dénoncer la cruauté, à dénoncer la guerre, à dénoncer les violations des droits fondamentaux, quelles que soient les frontières, quels que soient les gouvernements et en dépit des pressions des uns et des autres qui voudraient faire passer des calculs politique et des intérêts économiques avant le respect des droits fondamentaux de la personne humaine. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Sirros): Merci, Mme la députée. M. le député des Chutes-de-la-Chaudière.

M. Marc Picard

M. Picard: Merci, M. le Président. C'est avec émotion que je me lève aujourd'hui, en cette Chambre, en mon nom et au nom de ma formation politique, pour prendre quelques instants afin de nous remémorer les actes atroces survenus lors du génocide arménien du 24 avril 1915.

L'automne dernier, l'Assemblée nationale a voté à l'unanimité le projet de loi n° 194, projet de loi sur lequel je suis intervenu, projet de loi proclamant le 24 avril Jour commémoratif du génocide arménien. Depuis le début des années quatre-vingt, l'Assemblée nationale du Québec a toujours accordé son appui unanime aux motions de commémoration du génocide arménien.

Les Québécoises et les Québécois, qui ont des valeurs solides basées sur le respect et l'inclusion, se sont toujours fortement opposés à toutes formes d'intolérance et d'exclusion ethnique comme ceux du génocide arménien. Nous comptons, au Québec, sur une communauté arménienne formée de plus de 20 000 concitoyens et concitoyennes, et c'est en pensant à eux que j'interviens aujourd'hui pour que le Québec n'oublie jamais les actes atroces de ce génocide, pour que jamais ils ne se répètent. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Sirros): Merci, M. le député. M. le député de Mercier.

M. Daniel Turp

M. Turp: Merci, M. le Président. L'adoption, par l'Assemblée nationale du Québec, de la Loi proclamant le Jour commémoratif du génocide arménien a nourri l'espoir de la communauté arménienne. Cette loi, dont la sanction et l'entrée en vigueur se sont produites lors de la Journée internationale des droits de l'homme, le 10 décembre dernier, doit son existence au courage et à la détermination de la communauté arménienne d'ici. Elle résulte de sa lutte pour ne pas laisser le temps oblitérer l'histoire de l'exercice du devoir essentiel de mémoire.

Ce devoir de mémoire a été exercé également par notre Assemblée nationale, par l'Assemblée nationale du Québec, qui a voulu dire, comme je l'ai dit en décembre dernier: «Je me souviens du génocide arménien», qui l'a d'ailleurs dit par la loi, cet instrument solennel par lequel s'exprime la nation et dont l'objet est de faire du 24 avril le Jour commémoratif du génocide arménien au Québec. Notre loi, M. le Président, donne une pérennité à cette commémoration et nous fait nous souvenir et nous fera nous souvenir, à chaque année, du sort qui a été réservé au peuple arménien, un sort qui n'aura pas empêché le peuple arménien de lutter pour sa survie et de démontrer, à travers les continents et par les femmes et les hommes qui le composent, une solidarité exemplaire.

M. le Président, l'Assemblée nationale du Québec a choisi ainsi de donner primauté au respect fondamental de la personne humaine, au droit fondamental à la vie, au-dessus, comme le disait ma collègue, de tout calcul politique et même davantage au-dessus de tout intérêt économique. Et je me réjouis d'avoir exprimé mes convictions, de les avoir vues triompher le 10 décembre dernier et de les réaffirmer aujourd'hui, dans notre Assemblée nationale, pour rappeler que le génocide est l'un des plus graves crimes qui peuvent se commettre, est l'un des plus graves crimes contre l'humanité.

M. le Président, ceux qui m'ont précédé en cette Assemblée ont rappelé qu'il y avait eu plusieurs génocides au courant des siècles. On a rappelé le génocide que fut celui du peuple juif, la Shoah, que nous commémorons aujourd'hui également. Il faut aussi se souvenir du génocide cambodgien. On connaît moins le génocide des Mayas du Guatemala. Et hier le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie, sa Chambre d'appel a statué qu'il y avait eu un génocide à Srebrenika, et le président de la Chambre d'appel du Tribunal pénal pour l'ex-Yougoslavie a condamné Radislav Krstic à un crime de génocide... ou à une complicité pour crime de génocide. C'était, M. le Président, en 1995. Quelques années plus tard, on l'a rappelé encore aujourd'hui, 800 000 Rwandais, peut-être 1 million, ont aussi perdu la vie dans le cadre de l'un des plus graves génocides de notre histoire.

M. le Président, des poètes ont inspiré la lutte du peuple arménien pour la reconnaissance et pour son combat, pour que la culture arménienne continue, comme elle le fait aujourd'hui, à enrichir le patrimoine commun de l'humanité. L'un de ces poètes est Yeghishé Tcharents, qui fait ainsi l'éloge de l'Arménie dans un poème, que je peux vous lire d'ailleurs dans une traduction française que m'a fait connaître l'une de mes étudiantes, Québécoise d'origine arménienne, Anouche Arabaghian, et que je vous lis:

«De ma douce d'Arménie, j'aime le verbe à saveur solaire; de notre vieux sâz la corde plaintive, les fleurs vives de sang, la douceur des roses, la danse agile des filles de Naïri;

«J'aime le sombre de nos cieux, les eaux limpides, le lac diaphane et le soleil d'été, le noir dragon d'hiver gonflant sa haute bourrasque; j'aime les murs enfumés des chaumines inhospitalières, l'usure millénaire des antiques cités;

«Où que j'aille, jamais je n'oublierai nos chansons poignantes, ni nos livres aux lettres de fer enserrant tant de prières; malgré la plaie qui me vida le coeur, c'est encore, orpheline et brûlée de soleil, mon Arménie que j'aime;

n(16 h 40)n

«Nulle autre légende est douce à mon coeur dolent, nul front plus pur que celui de Narek, de Koutchak. Parcours le monde: il n'est pas de sommet plus radieux que celui d'Ararat pour me tracer ma voie de gloire inaccessible, je n'ai désir que du seul mont Massis.»

M. le Président, commémorer aujourd'hui, en cette Assemblée nationale, le génocide arménien, c'est louer le courage des femmes, des hommes et des enfants d'Arménie. C'est faire aussi, en quelque sorte, comme le poète Tcharents, l'éloge de l'Arménie. Merci, M. le Président.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, merci, M. le député. Cette motion est-elle adoptée? Adopté. Alors, Mmes, MM. les députés, je vous demanderais de bien vouloir vous lever, nous allons observer une minute de silence.

n(16 h 41 ? 16 h 42)n

Le Vice-Président (M. Sirros): Veuillez vous asseoir.

M. Dupuis: M. le Président?

Le Vice-Président (M. Sirros): M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: Je solliciterais de nouveau le consentement de cette Assemblée pour présenter un avis touchant les travaux des commissions.

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, est-ce qu'il y a consentement? Il y a consentement. M. le leader.

Avis touchant les travaux des commissions

M. Dupuis: Alors, permettez-moi d'aviser cette Assemblée, M. le Président, que la Commission des finances publiques, conformément à l'article 275 du règlement de l'Assemblée nationale, poursuivra le débat sur le discours du budget, dès maintenant jusqu'à 18 heures, ainsi que mercredi le 21 avril, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papineau. Merci.

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, merci, M. le leader du gouvernement.

Je vous informe... Aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée, pour ma part, je vous informe que...

Une voix: ...

Motions sans préavis (suite)

Le Vice-Président (M. Sirros): On revient aux motions? Excusez-moi. Effectivement, c'était une... Alors, M. le ministre de la Solidarité sociale.

Féliciter les médaillés des Huitièmes Olympiades
de la formation professionnelle et technique
et appuyer les membres de l'équipe québécoise
qui participeront aux Olympiades canadiennes

M. Béchard: Oui. Merci, M. le Président. M. le Président, je sollicite le consentement de cette Assemblée pour déposer et adopter la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale du Québec félicite les médaillés des Huitièmes Olympiades de la formation professionnelle et technique et qu'elle témoigne son appréciation à tous les participants de cette activité; et

«Que l'Assemblée nationale du Québec témoigne également son appui aux membres de l'équipe québécoise qui participeront, du 27 au 30 mai prochain à Winnipeg, aux Olympiades canadiennes de la formation professionnelle et technique.»

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? Il y a consentement.

Mais, juste avant, M. le ministre, vous me permettrez, pour ma part, de vous aviser, les membres de cette Assemblée, que nous avons reçu trois demandes pour la tenue de débats de fin de séance aujourd'hui: et la première demande, sur une question adressée par M. le député de Gouin à la ministre de la Culture et des Communications, concernant le financement de Télé-Québec; la deuxième demande, sur une question adressée par M. le député de Drummond au ministre des Transports, concernant le financement des travaux routiers 2004-2005 au Québec; et la troisième demande, sur une question adressée par M. le député de Chicoutimi au ministre de la Sécurité publique, concernant le rôle du médiateur Jean Bazin dans le dossier de Kanesatake.

Alors, avec ça, on va revenir aux motions présentées par M. le ministre. M. le ministre.

M. Claude Béchard

M. Béchard: Oui. Merci, M. le Président. Simplement souligner finalement que j'ai eu la chance de participer, et je pense que depuis plusieurs... depuis huit ans déjà ? c'est la huitième édition ? à cette activité que sont les Olympiades de la formation professionnelle et technique. Justement, c'est une très, très belle occasion de mettre, je dirais, en lumière le talent, les passions et la conviction de dizaines et même, je dirais, de centaines plutôt de jeunes de toutes les régions du Québec qui, pendant quelques jours, viennent rivaliser, je dirais, autant d'adresse, de rapidité, afin de réaliser un certain nombre d'activités reliées à des métiers de formation professionnelle et technique. C'est une belle occasion ? et je le soulignais samedi dernier lors de la remise des médailles ? et un beau véhicule pour continuer de faire la promotion des métiers et de la formation professionnelle et technique au Québec.

Selon les plus récentes données d'Emploi-Québec, c'est entre 200 000 et 250 000 emplois qui seront disponibles au Québec, entre 2002 et 2006, qui nécessitent une formation soit professionnelle ou de niveau technique. Et donc c'est encore une belle façon de démontrer qu'il y a de l'avenir, qu'il y a beaucoup, beaucoup d'avenir dans toutes les régions du Québec pour des jeunes qui sont finissants et qui choisissent la formation professionnelle et technique et des métiers. Et je voudrais qu'une telle activité démontre que finalement, de plus en plus, la formation professionnelle, la formation technique, c'est un premier choix des étudiants, c'est un premier choix pour les jeunes. Ce n'est pas une deuxième voie, ce n'est pas une deuxième vocation, ce n'est pas une voie qu'on prend quand les autres semblent moins ouvertes.

Ça devient de plus en plus un premier choix, et c'est très bien ainsi parce que les régions du Québec en ont besoin. Et, dans plusieurs projets d'investissement, dans plusieurs projets dans les régions du Québec, la première question qu'on se fait poser maintenant, ce n'est plus de savoir quels sont les crédits d'impôt, quelles sont les subventions qu'on peut avoir, mais on doit répondre à la question que les entrepreneurs nous posent: Est-ce que vous avez de la main-d'oeuvre qualifiée et disponible pour nos entreprises? Et ça souvent c'est le facteur déterminant, de plus en plus, de localisation des entreprises entre une région, une municipalité et une autre.

Donc, la présentation des Olympiades de la formation professionnelle et technique, la semaine dernière, allait justement dans le sens de valoriser ces métiers-là, de valoriser ces professions. Et ce fut une très belle occasion de fournir une belle vitrine pour faire rayonner ces formations et mettre en valeur les meilleurs étudiants de chaque discipline. Et, lors de ces événements-là, moi, un des éléments qui m'ont frappé, c'est que, oui, il y a un esprit de compétition, mais c'est le niveau de perfection que les jeunes veulent atteindre. Et souvent on dit: Au-delà de la réalisation comme telle, on veut vraiment réussir le projet qui est présenté, la compétition, puis on ajoute même la question du temps. Et souvent les jeunes veulent tellement le perfectionner, le projet, veulent tellement qu'il soit parfait, qu'à ce moment-là c'est le temps qui vient leur jouer un tour, et certains manquent de temps.

Alors, tout ça pour démontrer la grande rigueur que les participants ont aux Olympiades de la formation professionnelle et technique. Et je vous dirais qu'au-delà de ceux qui ont été médaillés, tous et toutes qui ont participé ont fourni de grands efforts... Ce fut vraiment une très, très belle activité qui a été organisée.

Je tiens à souligner aussi qu'une des caractéristiques de la fin de semaine, quand on regarde les jeunes, quand on regarde les participants, c'est que, oui, ce sont des métiers, ce sont des professions, mais c'est aussi une grande passion, ce sont des passions pour les participants, qui mettent beaucoup de temps, beaucoup d'énergie et qui, entre eux... bien sûr c'est une compétition qui est amicale mais qu'ils veulent bien sûr gagner, mais ils veulent, d'abord et avant tout, se faire reconnaître comme étant les meilleurs dans leur profession. Et donc ce souci-là d'excellence est un très bon signal qu'on envoie aux entreprises du Québec, qui pourront compter sur cette main-d'oeuvre qualifiée au cours des prochaines années.

Je vous dirais aussi ? une caractéristique qui n'est pas à négliger ? que, depuis plusieurs années, les étudiants québécois représentent 50 % de l'équipe canadienne. Et donc il y aura une autre olympiade, canadienne cette fois-là, de la formation professionnelle et technique, du 27 et 30 mai prochain, à Winnipeg. Et on souhaite donc la meilleure des chances à tous les participants et de faire en sorte que, comme au cours des années, ils représentent le Québec de façon, je dirais, non pas seulement à 50 % de la représentation totale, mais que... Je pense qu'on voit dans ces représentants-là la force du Québec en termes de développement de la main-d'oeuvre, de la formation professionnelle et technique. Donc, on leur souhaite la meilleure des chances.

Je veux aussi souligner le travail des enseignants, des formateurs, des juges, du jury qui étaient là. C'est une grosse, grosse opération qui est très, très, très valorisante et qui implique beaucoup de partenaires de tous les secteurs. Je pense que le fait que tous soient impliqués démontre l'importance, au Québec, qu'on accorde à la formation professionnelle et technique comme étant un premier choix, une voie d'avenir mais aussi une solution au développement économique de beaucoup de régions au Québec.

n(16 h 50)n

Alors, merci beaucoup. Bonne chance aux participants aux Olympiades de la formation professionnelle et technique canadienne qui auront lieu à Winnipeg prochainement et aussi aux mondiaux de la formation professionnelle et technique! Alors, merci beaucoup.

La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre. Alors, est-ce qu'il y a d'autres intervenants sur cette motion? Mme la députée de Champlain, à vous la parole.

Mme Noëlla Champagne

Mme Champagne: Merci, Mme la Présidente. Alors, c'est avec un immense honneur... de me joindre à mes collègues aujourd'hui sur cette motion de félicitations pour les médaillés des Huitièmes Olympiades de la formation professionnelle et technique. Alors, nous savons tous, en éducation, que chaque domaine a son importance. Et, particulièrement en formation professionnelle et technique, c'est un domaine où il faut favoriser, encourager les jeunes à aller, puisqu'on a des besoins et de la demande de la main-d'oeuvre dans ce domaine-là.

Alors, vous savez, l'histoire de ces jeunes-là, Mme la Présidente, c'est une histoire de réussite, c'est une histoire de talent et c'est une histoire également de performance. Ces jeunes se démarquent dans chacune de nos régions, et, quand on leur donne, à l'occasion d'olympiades ? on sait très bien que ce titre-là nous rappelle une formule sportive bien connue... Eh bien, on leur permet de se démarquer à l'intérieur de toute une région et, plus large que ça, à l'intérieur de tout le Québec. Et c'est là la valorisation.

Et je regarde la commission scolaire qui me concerne davantage, la commission scolaire Chemin-du-Roy. Les jeunes ont, à travers des salons de formation professionnelle et technique, en cours d'année, ont, à l'intérieur de chacune de leur formation, de chacun de leur domaine, développé des habiletés, et, à la toute fin, ils vont présenter leur savoir sur une place publique. Alors, c'est valorisant. C'est incroyable à quel point ces jeunes-là reviennent valorisés et, qui plus est, sont un exemple pour tous leurs collègues et les jeunes de leur âge dans chacune de leurs écoles.

Alors, vous savez, le talent se conjugue à ce niveau-là. Je regarde, il y a 30 disciplines qui ont été mises en action à l'occasion de ces olympiades-là, puis il y a une centaine de jeunes qui se sont prévalu de ce travail-là. Mais ça, c'est le résultat... c'est le constat qu'on a fait, parce que ces jeunes-là avaient déjà eu au préalable une préparation à l'intérieur de chacune de leurs institutions.

Et je remarque également que la spécialisation de ces jeunes-là en formation professionnelle et technique est impressionnable et impressionnante au niveau technique. Pensons aux spécialistes de mécatronique, de robotique, de polymécanique, d'automation, d'infographie, de technologies d'information et d'application de logiciels, pour n'en nommer que quelques-uns. Alors, aujourd'hui, nos jeunes sont très techniques, veulent se démarquer, et on leur donne une occasion rêvée de le faire.

Et je répète que les olympiades, comme le disait le ministre tout à l'heure, sont une des occasions de valoriser tous ces métiers. Et ces jeunes praticiens là sont à la fine pointe de la technologie, dans des voies d'avenir où l'emploi est très prometteur. C'est important, parce que nos jeunes ont besoin de débouchés, ont besoin de sentir qu'ils ne reçoivent pas une formation pour recevoir une formation, mais bien reçoivent une formation qui va leur permettre de gagner leur vie correctement.

Alors, les olympiades, Mme la Présidente, que nous soulignons aujourd'hui ont permis à des centaines de jeunes Québécois et Québécoises ? parce qu'il y avait des filles également ? de toutes provenances régionales, de se mesurer aux meilleurs dans leurs domaines. On peut constater aussi que tout le monde est sorti gagnant et sort gagnant d'un exercice semblable, et pas juste les récipiendaires de médailles, tous les autres qui les entourent, leurs copains, leurs collègues, leurs familles également.

On peut également... Et ça, je le constate personnellement dans les domaines que j'ai l'occasion de fréquenter dans ma région, les jeunes ont une passion pour leurs métiers. Ce n'est pas juste un métier, ils développent une passion et ils pensent évidemment à une future carrière.

Alors, je voudrais aujourd'hui profiter de cette belle occasion pour féliciter tous les participants et participantes à ces Olympiades québécoises de la formation professionnelle et technique. Et je félicite particulièrement, bien sûr, les gagnants, qui ont su se démarquer par leur talent. Et même je pourrais me permettre, mais je ne le ferai pas parce que je sais qu'il y a d'autres intervenants, de les nommer. Ils sont nombreux, ils sont de l'ordre d'une centaine. Et, à la commission scolaire Chemin-du-Roy, pour laquelle j'ai toujours un petit coup de coeur, eh bien, j'ai six jeunes qui se sont démarqués dans des métiers très prometteurs. Alors, je les félicite particulièrement.

Je remercie également des gens que souvent on oublie, dont on oublie le travail dans l'ombre, ce sont les parents et les familles de ces jeunes. Vous savez, parmi les métiers, il y a beaucoup de gens qui ont parfois quitté l'école et qui reviennent suivre une formation professionnelle et technique. On a beaucoup de jeunes adultes et même d'adultes qui retournent sur les bancs d'école et qui vont se chercher la petite différence pour leur permettre de gagner dignement leur vie. Alors, je remercie ces parents-là et ces familles-là qui ont soutenu, encouragé les efforts en formation professionnelle et technique et qui ont valorisé ces métiers-là. Sans eux, bien des rêves ne se seraient pas réalisés. Ils sont les complices au quotidien de nos étudiants. Alors, nous leur disons merci.

Je remercie également les enseignants et les enseignantes de la formation professionnelle et technique. On oublie que ces gens-là font plus qu'enseigner. Ils sont un modèle, une image pour les jeunes et donnent beaucoup plus d'heures que parfois il est inscrit dans leur métier. Leur dévouement est immense, et le soutien extraordinaire qu'ils apportent aux jeunes doit être souligné en cette Chambre, Mme la Présidente. Ces enseignants et ces enseignantes sont ceux qui cultivent et entretiennent la passion des jeunes pour leurs métiers, cela sans compter bien sûr l'excellence de la formation qu'ils procurent à nos jeunes. Ils méritent, eux aussi, des médailles. On ne leur en donne pas, mais, quand leurs étudiants reviennent avec des médailles, je pense qu'ils reçoivent leurs récompenses. C'est une grosse partie de leur paie.

Je tiens également à remercier les organisateurs ? M. le ministre l'a fait également tout à l'heure ? d'un tel événement. Ça ne se fait pas rapidement. Ça prend de nombreuses démarches. C'est une grosse organisation, et, quand je compare le Salon professionnel et technique qui se tient dans ma région tous les automnes, on voit le travail qui est fait et le travail qui se tient... qui se fait en fait pendant un an. Leur travail est immense, les jeunes en sortent enchantés, stimulés et très fiers.

Ces olympiades permettent également de croire surtout que la formation professionnelle et technique doit prendre toute la place qui lui revient dans l'avenir. On a besoin de métiers, on a besoin de gens formés, il faut le valoriser. On doit valoriser cette formation-là, et, pour ce faire, il faut démontrer l'excellence parce que c'est ça qui est un exemple pour le reste de notre jeunesse.

Alors, je termine, Mme la Présidente, en disant que, pour valoriser davantage l'éducation, valoriser, entre autres, la formation professionnelle et technique, leur meilleur moyen d'y arriver, c'est de valoriser une formation de qualité, qui est donnée quotidiennement dans chacune des régions du Québec. La qualité de cette formation procure à nos jeunes des carrières stimulantes, des emplois de qualité, bien rémunérés et des plus intéressants.

Nous sommes fiers de ce qui se fait, au Québec, en formation professionnelle et technique. Nous sommes fiers de nos jeunes, Mme la Présidente. Alors, il faut saluer leur passion, leur détermination, leur enthousiasme et leur ambition. Nous leur souhaitons donc un bon succès dans leurs études et dans les compétitions qui seront à venir. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Je vous remercie, Mme la députée. Alors, toujours sur cette motion, je reconnais le député des Chutes-de-la-Chaudière. M. le député.

M. Marc Picard

M. Picard: Merci, Mme la Présidente. La Commission de la santé et sécurité au travail a remis une médaille et une bourse à chacun des lauréats des Huitièmes Olympiades de la formation professionnelle et technique. Ces olympiades, comme le disait tout à l'heure le ministre, ces olympiades visent à valoriser les compétences en santé et sécurité dans la formation professionnelle et technique.

Notre formation politique tient à s'associer à cette motion qui souligne l'excellence et surtout les efforts des participants venus de partout au Québec. En effet, c'est plus de 250 étudiants et étudiantes qui ont participé à ces olympiades, et 87 d'entre eux ont participé au concours de la Commission de la santé et sécurité au travail. De plus, nous souhaitons apporter notre appui à l'équipe québécoise qui participera, en mai prochain, à Winnipeg, aux Olympiades canadiennes de la formation professionnelle et technique.

La qualité de la formation professionnelle et technique n'est plus à démontrer. Nos jeunes diplômés peuvent rivaliser avec leurs confrères d'ailleurs. Et je suis assuré que nous devrons... que nous pourrons intervenir sur une nouvelle motion en mai dernier... en mai prochain plutôt, suite aux Olympiades canadiennes qui auront lieu à Winnipeg. Je dis simplement bonne chance à tous les participants. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député. Alors, toujours sur cette motion, je reconnais le ministre de l'Éducation. M. le ministre.

M. Pierre Reid

M. Reid: Merci, Mme la Présidente. Je tiens à féliciter tous les médaillés ainsi que les participants des Huitièmes Olympiades de la formation professionnelle et technique. Les Olympiades de la formation professionnelle et technique constituent une magnifique vitrine pour faire rayonner ces formations et mettre en valeur les meilleurs étudiants de chaque discipline.

Le savoir-faire de cette précieuse relève nous fait prendre conscience du travail immense réalisé par le personnel enseignant qui l'a formée, motivée et préparée à relever ce défi de haut niveau, par les parents, qui n'ont pas ménagé leurs encouragements, et par toutes les personnes qui, de près ou de loin, ont travaillé à l'organisation de cette compétition.

n(17 heures)n

Le Québec dispose d'un système de formation professionnelle et technique performant, qui compte quelque 300 points de services dans les différentes régions. En 2001, les réseaux du secondaire et du collégial ont délivré un total de 49 842 diplômes d'études professionnelles ou techniques de même que près de 10 000 attestations d'études collégiales. La promotion de ces voies de formation doit se poursuivre même si nos jeunes diplômés sont très appréciés par les employeurs qui les recrutent et même si les champions des Olympiades québécoises figurent très bien aux Olympiades canadiennes annuelles de même qu'au Mondial des métiers.

Les jeunes et les parents doivent savoir que la formation professionnelle et technique conduit à des métiers spécialisés et à des emplois de techniciens ou de techniciennes valorisants. Ils doivent savoir également que plusieurs de ces emplois manquent de relève et qu'on constate des difficultés de recrutement dans les programmes de formation qui y mènent. Les efforts en vue de modifier les perceptions des jeunes et des parents à l'égard de la formation professionnelle et technique se poursuivent, et ils sont importants, et ils connaissent du succès. Des gains à ce chapitre ont été observés au cours des dernières années, et c'est grâce en partie aux Olympiades de la formation professionnelle et technique que ces gains se sont réalisés, Mme la Présidente. Bravo à tous les participants!

Mise aux voix

La Vice-Présidente: Merci. Alors, est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté. Toujours aux motions sans préavis. M. le député de Viau et président de la Commission de la culture.

Souligner la Semaine du don d'organes

M. Cusano: Mme la Présidente, je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale souligne la Semaine du don d'organes, qui se tient cette année du 18 au 24 avril.»

La Vice-Présidente: Alors, est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? Consentement? Consentement. Alors, M. le député de Viau.

M. William Cusano

M. Cusano: Merci, Mme la Présidente. La Semaine du don d'organes nous offre l'occasion de réfléchir au don et à la greffe d'organes, qui représentent, pour plusieurs de nos concitoyens, le seul espoir d'entrevoir la vie sous un jour meilleur.

La situation relative au don d'organes, Mme la Présidente, est des plus prometteuses. Au cours des dernières années, le nombre de donneurs, le nombre d'organes transplantés et de personnes ayant reçu des organes ont continuellement augmenté. On compte actuellement au Québec 19,2 donneurs par million, ce qui veut dire, Mme la Présidente, si on compare ça avec le reste du Canada ? contrairement à nos impôts, hein ? en ce qui concerne les dons d'organes, on est la meilleure province au Canada, parce que, dans le reste du Canada, les chiffres démontrent qu'il n'y a que 13,3 donneurs par million d'habitants.

Qu'est-ce c'est que ça veut dire, ça, Mme la Présidente, avec 19,2 donneurs par million au Québec? Ça veut dire que, cette année, il y a eu plus de 487 transplantations d'organes. Et je voudrais également souligner que les transplantations réalisées ici atteignent un niveau de qualité comparable, sinon supérieur à ce qui se fait à l'étranger. Et nos équipes médicales québécoises non seulement sont-elles reconnues mondialement, mais elles sont recherchées à travers l'Amérique du Nord.

Toutefois, malgré les progrès réalisés au cours des dernières années, on est loin de la première transplantation de Christian Barnard ? vous vous en rappelez, de ça, quand c'est arrivé ? et on est très loin de ce point-là. Des défis majeurs sont présentement à relever, car il y a un manque d'organes, parce que la demande est aussi très forte, parce qu'on a fait des pas de géant dans ce domaine.

Alors, il est important qu'on prenne l'occasion de sensibiliser nos concitoyens à l'importance de faire le don de leurs organes et de leurs tissus à leur décès. J'encourage donc, Mme la Présidente, les Québécoises et les Québécois de laisser leur vie en héritage ? de laisser leur vie en héritage ? à poser ce geste ultime de générosité qu'est le don d'organes, un geste qui constitue souvent le seul espoir de certaines personnes de mener une vie normale.

À titre d'exemple, Mme la Présidente, une transplantation rénale, une transplantation rénale, une personne qui a besoin d'un rein, ça veut dire pour cette personne-là un congé de dialyse pour une période de 25 ans, 25 ans où cette personne n'aura pas à subir une dialyse si on réussit à lui trouver un rein qui est compatible. Dans mon cas, Mme la Présidente, mon cas personnel, hein, lorsque j'ai prononcé le premier discours après ma transplantation du coeur, je vous avais dit à ce moment-là que j'aurais été ici pour longtemps. Effectivement, cet automne, ça fera 13 ans que j'ai été transplanté... et je peux dire que, suite à la transplantation, je peux dire que, oui, j'ai pu mener une vie normale, s'il y a une vie normale pour un député, avec les heures de travail que nous avons.

Alors, il faut comprendre aussi qu'auparavant, à cause peut-être des histoires qui ont été racontées, on pensait que seulement des personnes accidentées pouvaient être des donneurs, qu'il fallait que ce soient des jeunes, tu sais, tout en pleine santé. Aujourd'hui, on constate, avec le progrès qui a été fait et particulièrement au Québec, qu'un rein d'un enfant, un rein d'un enfant aujourd'hui peut servir à un adulte, peut servir à un adulte. Le foie, le foie d'une personne de plus de 85 ans, là ? pensez-y, là ? le foie d'une personne de plus de 85 ans peut servir à une autre personne, hein? Il faut toujours s'assurer qu'il soit en bonne condition, mais pour vous dire que les mythes qui ont existé dans le passé aujourd'hui ont été écartés.

J'invite la population de non seulement signer la carte de don d'organes qui vous est envoyée lorsque vous renouvelez votre carte santé... Mais de la signer n'est pas suffisant. Moi, j'ai recommandé aux gens, à différents endroits où j'ai participé justement à des discussions, que la signature est importante légalement, mais il faut aussi en parler avec les membres de notre famille, les membres de... même les voisins, nos proches, parce que ça peut convaincre aussi ces personnes-là à signer leur carte.

Mais qu'est-ce que c'est qui est important aussi, qu'est-ce que c'est qui est important ? puis ça, je voudrais que ce soit extrêmement clair ? c'est qu'au moment où une personne qui a signé sa carte de don d'organes devient cadavérique, devient donneur potentiel, il faut que quelqu'un atteste que c'était bel et bien la volonté de l'individu, parce que, des fois, on signe des documents et on les oublie. Alors, il ne faut pas... J'entends souvent des gens dire: Ah, ils ont demandé la permission à la famille pour prélever les organes. C'est faux, ils ne demandent pas la permission à la famille de prélever des organes si la carte a été donnée. Qu'est-ce que c'est qu'ils demandent en réalité, c'est: Est-ce qu'au moment où il est devenu donneur potentiel, est-ce que c'était son intention encore à ce moment-là?, pour respecter l'individu, pour le respect de l'individu. Et ça, j'y tiens mordicus.

Et je l'ai dit à travers le Québec, qu'il est très important, au niveau des dons d'organes, même s'il y a des gens qui voudraient que nos organes soient donnés de façon universelle, moi, j'ai toujours prétendu, et je vais le prétendre longtemps, que le droit de l'individu est primordial sur ça et que, même si ça semble être une solution facile de dire que tout le monde est un donneur potentiel, mais il faut tenir compte que ce que c'est qui nous est le plus cher, hein, c'est notre liberté individuelle, même à ce moment-là. Et je dis en blaguant, hein: Il ne faudrait pas mettre le don d'organes dans les mains de l'État, hein, ils en contrôlent déjà assez qu'on pourrait laisser ça à l'individu. Alors...

n(17 h 10)n

Madam Speaker, we've come a very long way since the first heart transplant by Dr. Barnard. Here, in Québec, we have achieved a tremendous success, a tremendous success, and we have actually a record, you know, which is quite different from our taxation, in terms of the number of donors. We have in Quebec 19.2 donors per million residents, and, if we compare that to the rest of Canada, they're only at 13.3 per million. So, I think we should be very proud of that.

But there is such a demand, because, now, the... our own doctors have managed to, with experiments that have gone on... where the old myth of having to be a young athletic individual to be a donor is false. Because you can use the heart of a very young child, you can use the kidneys of a very young child in an adult. You can use the liver from the person who is extremely... well, I won't say extremely old, but fairly old, you know, in another patient.

So, you have to realize that the signature that you will hopefully... because there's quite a few people in the next few months that will be renewing their «carte-soleil», their Medicare card, and you will be receiving a little note and a little sticker to sign and give your consent. It's important to talk about it with the rest of your family because, at the time, when a person becomes the potential donor, at the moment of his death, it's very important that there be somebody there to be able to attest that the will of the individual or the willingness to donate was still there at the time that he had signed the card, was still predominant at the time that he became what we call a potential donor.

En terminant, Mme la Présidente, vous comprendrez que je tiens à remercier très sincèrement, au nom de notre Assemblée, tous ceux et celles qui sont impliqués dans cette cause, et il y en a tellement, hein? Il y a une marche présentement des dons d'organes qui se fait à travers le Québec, par la Fondation Lina Cyr, elle-même transplantée du foie, et à la Fondation Diane Hébert, et à l'Association canadienne des dons d'organes, et j'en saute, et j'en saute parce qu'ils sont tellement nombreux qui travaillent dans ce domaine, et j'aimerais bien, au nom de ceux qui sont en attente, les remercier pour le travail qu'ils ont fait.

Alors, n'oubliez pas, si vous ne l'avez pas fait, hein, si vous ne l'avez pas fait, signez votre carte de dons d'organes, et, le plus important encore, discutez-en avec les membres de votre famille, vous en serez très heureux. Merci beaucoup.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député. Alors, je reconnais, toujours sur cette motion du député de Viau, la députée d'Hochelaga-Maisonneuve et porte-parole de l'opposition officielle en matière de santé. Mme la députée.

Mme Louise Harel

Mme Harel: Alors, merci, Mme la Présidente. Au nom de l'opposition officielle, je voudrais souscrire à l'adoption de la motion présentée par le député de Viau. Il siège dans cette Assemblée depuis maintenant 23 ans, je crois. Nous sommes tous les deux de la même cuvée, de la même génération d'élus en 1981. Et je voudrais saisir l'occasion cet après-midi pour le féliciter du travail inlassable qu'il a réalisé pour promouvoir le don d'organes et de tissus humains.

Je crois que, si nous avons ce record enviable qu'il a cité en fait, puisque le Québec est champion de dons d'organes en comparaison aux autres provinces canadiennes, alors, c'est en grande partie au travail qu'il a lui-même réalisé, ainsi que Québec-Transplant, et de même que la collaboration et le concours de toutes ces organisations sans but lucratif auxquelles il s'est référé il y a quelques minutes déjà.

Mme la Présidente, j'ai moi-même signé cet autocollant que nous recevons lorsqu'il y a renouvellement de notre carte d'assurance maladie. Donc, c'est après une intervention du député de Viau que je me suis fait un devoir, n'est-ce pas, d'obtenir cet autocollant, il y a bien des années maintenant, et puis de l'apposer sur cette carte d'assurance maladie. Et je souhaite que cette motion en Chambre, ça donne l'occasion à certains et certaines d'entre nous, peut-être qui nous écoutons cet après-midi, de se faire un devoir également d'abord d'obtenir cet autocollant. Ce n'est pas simplement au moment du renouvellement de la carte d'assurance maladie, qui maintenant ne se fait qu'à tous les cinq ans, je crois, mais il est possible également de se le procurer dans n'importe quel CLSC, je crois, ou encore dans n'importe quel établissement de santé et de services sociaux et, je pense, aussi au bureau du député de Viau, mais...

Une voix: ...

Mme Harel: Québec-Transplant. Alors, il est possible de communiquer avec Québec-Transplant pour obtenir cet autocollant.

J'ai beaucoup aimé cette expression de «laisser sa vie en héritage». Je crois que c'est là un très bel héritage qu'on puisse laisser et je crois que tout ça nous est facilité justement par tous ces outils qui sont à notre disposition. Et je pense qu'il faille insister sur le fait qu'on doit en informer nos proches, parce que, même avec cet autocollant qui est apposé sur la carte d'assurance maladie, en cas de décès cérébral, je crois que les médecins ne procèdent pas au prélèvement d'organes s'ils n'ont pas d'abord vérifié, auprès des proches et de la famille, leur consentement, et en cas... si tant est que la famille ignore la volonté du défunt, il peut donc arriver que... malgré cette indication claire apposée sur la carte d'assurance maladie du défunt, il est donc plausible que l'intervention ne soit pas faite, n'étant pas autorisée par les proches.

Pourquoi est-ce que c'est si important, finalement? Parce que les Québécois, lors d'un... sondés par la maison de sondage Léger & Léger, en 1999, faisaient état d'un appui de 80 % de la population québécoise en accord avec le don d'organes. C'est donc un pourcentage qui est beaucoup plus élevé en réalité que ce qui se concrétise, et il faut donc que ce désir de laisser en héritage une partie de soi puisse aussi se concrétiser, en procédant aux étapes qu'il faut franchir, là, pour que ce désir devienne réalité. Alors, dans le sondage réalisé en 1999, on y lisait que 82 % de la population était tout à fait en accord pour faire un don d'organes et que 60 % avaient pris les dispositions pour faire connaître leurs intentions à leurs proches, en avaient informé leurs familles, et 94 % considéraient très important le rôle d'information et d'explication que doivent jouer les professionnels de la santé auprès de la famille d'une personne déclarée en mort cérébrale. Je pense que ça, c'est un élément important.

En principe, on rencontre peu de nos concitoyennes ou concitoyens qui sont hostiles à ce don d'organes, mais il y a encore une multitude de questions qui se posent, à savoir: est-ce qu'on vérifie vraiment, de manière absolue finalement, qu'il s'agit bien d'une mort cérébrale et non pas d'un coma? C'est souvent la crainte qui est manifestée. À tort ou à raison, c'est la crainte qui est exprimée par bon nombre, hein, de gens autour de soi. Mais comment est-ce qu'on peut vérifier ça? Je pense qu'il est important que les informations à ce sujet leur soient transmises, puisqu'il y a certainement une sorte de réticence qui s'exprime lorsque ces informations ne sont pas suffisantes.

n(17 h 20)n

Je pense que... Aujourd'hui, à l'occasion de cette motion, je veux réitérer combien... c'est de mort cérébrale qu'il s'agit. Il n'y a pas de prélèvement s'il n'y a pas de mort cérébrale. Et je prenais connaissance de ces informations qui nous étaient transmises à l'occasion de l'adoption de cette motion, à l'effet qu'il n'y a que... ou même moins, pas 2 %, moins de 2 % des décès qui répondent aux critères d'une mort cérébrale. Alors, ce n'est pas, en fait, tous les défunts qui peuvent donner ou livrer, laisser en héritage une partie d'eux-mêmes, puisque ça n'est que dans le contexte d'une mort cérébrale qu'il y a donc prélèvement. Et, cette mort cérébrale, elle est vérifiée par l'arrêt définitif du fonctionnement du cerveau qui est à ce moment-là irrémédiablement détruit, et, cette vérification faite, à partir de là seulement il y a donc prélèvement.

Alors, je pense qu'il faut donner ces explications pour qu'il y ait finalement une certitude qui s'impose en fait dans des... pour convaincre bon nombre de nos concitoyens qui ne l'auraient pas fait encore de donc procéder aux démarches qui vont leur permettre de s'inscrire parmi les donneurs.

Alors, je souhaite que cette motion ait convaincu certains des nôtres à le faire. Je vous remercie, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci. Toujours sur cette motion? Alors, je reconnais le député des Chutes-de-la-Chaudière. M. le député.

M. Marc Picard

M. Picard: Merci, Mme la Présidente. L'Action démocratique du Québec souscrit tout à fait à la motion présentée par le député de Viau afin de souligner la semaine de sensibilisation au don d'organes et de tissus.

Chaque année, de nombreux Québécois perdent la vie sans avoir signé leur carte d'assurance maladie, ne signifiant pas ainsi à leur entourage leur intention de faire un don d'organe. Chaque jour, de nouveaux noms s'ajoutent à la trop longue liste d'attente de greffes, rendant ainsi la vie de ces patients de plus en plus précaire. Pourtant, il est si simple de signer sa carte-soleil, d'en parler avec sa famille et ainsi faire un don de la vie.

Un récent sondage nous indiquait que les trois quarts des Canadiens étaient favorables au don d'organes mais que plus de la moitié d'entre eux n'ont pris aucune disposition en ce sens. Le Québec, Mme la Présidente, est le champion canadien des dons d'organes, comme ça a été dit tout à l'heure, avec un taux de 19 donneurs par million d'habitants.

L'organisme Québec-Transplant nous apprend également que 52 % des Québécois ont signé leur carte pour un don d'organe, ce qui est remarquable. Toutefois, compte tenu du nombre de patients en attente d'une greffe, ce pourcentage doit absolument augmenter.

Ainsi, la semaine de sensibilisation au don d'organes et de tissus permet justement de mieux nous informer sur cette question, et c'est pourquoi, Mme la Présidente, l'Action démocratique apporte son soutien à cette cause en appuyant la présente motion. Merci.

La Vice-Présidente, Mme Diane Leblanc

La Vice-Présidente: Merci, M. le député. Alors, je joins ma voix à celle des membres de cette Assemblée pour souhaiter que votre voix soit entendue à l'extérieur de nos murs et que les gens signent leur carte-soleil.

Mise aux voix

Alors, est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Avis touchant les travaux des commissions

La Vice-Présidente: Adopté. Alors, nous en sommes aux avis touchant les travaux des commissions, et il me reste quand même à vous aviser que la Commission des finances publiques se réunira en séance de travail demain, mercredi 21 avril 2004, de 8 heures à 9 heures, au salon Johnson de l'hôtel du Parlement, afin d'organiser les travaux de la commission.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Et, aux renseignements concernant les travaux de l'Assemblée, je vous informe que, demain, lors des affaires inscrites par les députés de l'opposition, sera débattue la motion inscrite par le député de Rivière-du-Loup. Cette motion se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale exige du gouvernement la mise sur pied d'une commission d'enquête publique sur la qualité de vie des personnes vivant dans les centres d'hébergement au Québec, dont le mandat serait de briser la loi du silence qui règne dans le réseau et de rechercher des solutions à long terme qui misent sur la dignité et le respect de nos aînés.»

Affaires du jour

Alors, la période des affaires courantes étant terminée, nous allons maintenant passer aux affaires du jour. M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: Oui. Mme la Présidente, j'apprécierais que vous vous référiez aux articles 15 à 18 de notre feuilleton.

Motions du gouvernement

Motions proposant d'approuver diverses ententes
entre le ministère des Relations internationales
et des partenaires internationaux

La Vice-Présidente: Alors, l'Assemblée procédera maintenant au débat sur les motions inscrites aux articles 15 à 18 du feuilleton, faisant suite au dépôt par Mme la ministre des Relations internationales, le 1er avril 2004, des engagements internationaux relatifs aux sujets suivants: la Convention sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale; le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l'enfant, concernant la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants; l'Entente en matière de sécurité sociale avec le gouvernement de la République française; l'Avenant au Protocole d'entente entre le gouvernement du Québec et le gouvernement de la République française relatif à la protection sociale des élèves et étudiants et des participants à la coopération, du 19 décembre 1998.

Alors, je vous informe qu'en vertu de l'article 22.3 de la Loi sur le ministère des Relations internationales, à moins d'un consentement unanime de l'Assemblée, chacune des motions devrait donner lieu à un débat de deux heures.

Cependant, à la suite d'une entente avec les leaders parlementaires et avec les députés indépendants, je vous avise de la répartition du temps de parole établi pour l'ensemble du débat. Donc, 25 minutes allouées au groupe parlementaire formant le gouvernement, 25 minutes allouées au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, 10 minutes allouées aux députés indépendants.

Dans ce cadre, le temps non utilisé par l'un des groupes parlementaires pourra être utilisé par l'autre groupe. Le temps non utilisé par les députés indépendants sera redistribué également entre les groupes parlementaires, et les interventions ne seront soumises à aucune limite de temps.

Alors, est-ce qu'il y a consentement pour procéder ainsi? Consentement. Alors, je suis maintenant prête à entendre la ministre des Relations internationales. Mme la ministre.

Mme Monique Gagnon-Tremblay

Mme Gagnon-Tremblay: Merci, Mme la Présidente. La Loi sur le ministère des Relations internationales prévoit que tout engagement international important, notamment celui qui requiert pour sa mise en oeuvre l'adoption d'une loi ou encore qui concerne les droits et libertés de la personne, doit faire l'objet d'un dépôt à l'Assemblée nationale. Ces dispositions permettent ainsi aux parlementaires québécois d'étudier et d'approuver les conventions internationales dont la mise en oeuvre relève de la compétence constitutionnelle de l'Assemblée nationale du Québec.

Je désire porter à votre attention aujourd'hui quatre engagements internationaux importants. J'aborderai le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l'enfant, concernant la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants. Ensuite, je donnerai la position du gouvernement sur la Convention sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale. Mais débutons ce débat avec l'Entente de sécurité sociale entre le gouvernement du Québec et le gouvernement de la République française et l'Avenant au Protocole d'entente entre le gouvernement du Québec et le gouvernement de la République française relatif à la protection sociale des élèves et étudiants et des participants à la coopération, du 19 décembre 1998.

Mme la Présidente, le 18 décembre 2002, l'Assemblée nationale a, pour la première fois de son histoire, exercé un authentique pouvoir d'approbation d'engagements internationaux en approuvant à l'unanimité sept ententes internationales, dont quatre dans les domaines de la sécurité sociale. En juin 2003, j'ai moi-même proposé à cette Assemblée d'approuver l'Entente de sécurité sociale signée avec la République slovaque, ce qui fut fait à l'unanimité.

Aujourd'hui, je suis particulièrement heureuse de proposer l'approbation de l'Entente de sécurité sociale ainsi que de l'Avenant au Protocole d'entente entre le gouvernement du Québec et le gouvernement de la République française, pour plusieurs raisons. En signant avec notre partenaire français une nouvelle entente de sécurité sociale pour remplacer celle que nous avions conclue avec lui en 1979, nous marquons une étape importante dans l'histoire de la pratique québécoise de conclusion d'ententes internationales. Cette pratique a débuté timidement avec la France en 1965, pour prendre de l'ampleur avec les premières ententes de sécurité sociale conclues avec l'Italie, la France, le Portugal, la Grèce et les États-Unis, au tout début des années 1980. On peut considérer que cette nouvelle entente marque le 25e anniversaire de la pratique québécoise en matière d'ententes de sécurité sociale.

n(17 h 30)n

Les ententes de sécurité sociale sont des engagements internationaux importants au sens de la Loi sur le ministère des Relations internationales, notamment parce que leur mise en oeuvre requiert l'édiction d'un règlement. Parmi ces cinq ententes déjà approuvées, deux d'entre elles sont entrées en vigueur, soit l'entente conclue avec la République tchèque et l'entente conclue avec le royaume des Pays-Bas. Nous prévoyons que l'entrée en vigueur des ententes signées avec la Turquie, le Maroc et la Slovaquie pourra se faire au cours de l'année 2004.

En ce qui concerne le Québec, la procédure pour en arriver à l'entrée en vigueur implique d'abord l'approbation de ces engagements par l'Assemblée nationale, suivie de la ratification par le gouvernement qui peut alors, par décret, édicter le règlement sur la mise en oeuvre. Les ententes en matière de sécurité sociale relèvent de la compétence constitutionnelle du Québec.

Je me permets de rappeler brièvement l'impact économique important de ces ententes en mentionnant à titre d'exemple que les États-Unis ont versé, en 2001, 193 millions de dollars à plus de 25 000 résidents québécois et que depuis 1979, en vertu de l'ensemble des ententes de sécurité sociale, 4,5 milliards de dollars ont été versés à quelque 78 800 résidents québécois. Ces ententes ont pour effet de permettre principalement aux personnes qui résident au Québec d'obtenir des pensions de retraite ou d'invalidité payables par le pays où elles ont déjà résidé ou travaillé.

De plus, les entreprises qui oeuvrent au Québec et dans d'autres pays peuvent également se prévaloir des dispositions de l'entente concernant l'assujettissement au régime de sécurité sociale. Cela leur permet d'éviter un double assujettissement, en prévoyant le maintien de cotisations à un seul régime de sécurité sociale. En conséquence, Mme la Présidente, les entreprises québécoises, les travailleurs qu'elles détachent dans d'autres pays et les travailleurs autonomes qui s'y rendent pour exercer leurs professions peuvent demeurer assujettis au régime québécois uniquement.

Par ailleurs, parmi les ententes de sécurité sociale conclues jusqu'à maintenant, huit d'entre elles, dont la première entente conclue avec la France en 1979 et cette nouvelle que j'ai déposée il y a quelques jours, élargissent la protection sociale au domaine de la santé et des accidents du travail et maladies professionnelles.

C'est avec la France qu'a été conclu en 1979, comme je le mentionnais, ce premier type d'entente élargie qui a pu par la suite servir de modèle à toutes les autres. C'est en l'an 2000, après plus de 20 ans d'application de l'entente de 1979, qu'il a été convenu avec la partie française de négocier une nouvelle entente afin, entre autres, de tenir compte de l'évolution des législations de part et d'autre. Cette entente s'inscrit dans la longue liste des instruments de coopération qui lient le Québec et la France et s'avère être l'un des plus importants.

En cette matière, soit la sécurité sociale, elle est complétée par un protocole d'entente relatif à la protection sociale des élèves et étudiants et des participants à la coopération. Compte tenu de nombreux programmes de coopération et considérant que ces programmes impliquent le déplacement de nombreuses personnes entre les deux territoires, les deux gouvernements ont conclu ce protocole d'entente dans le but de faciliter la participation de leurs ressortissants aux programmes d'échange en leur assurant les bénéfices de la sécurité sociale prévus par leurs législations respectives. L'avenant que je propose d'approuver a pour effet de soumettre les participants à la coopération franco-québécoise exerçant une activité salariée ou non salariée aux dispositions de la nouvelle entente.

J'ai eu le privilège, Mme la Présidente, de signer avec... de signer cette nouvelle entente ainsi que l'avenant à Paris, le 17 décembre dernier. Avant sa signature, les deux engagements avaient fait l'objet d'une négociation entre les parties. Le ministère des Relations internationales, conformément aux exigences de la loi, a veillé à leur négociation. Tous les ministères et organismes impliqués par leur contenu ont été consultés et ont délégué des représentants pour participer directement aux négociations.

Mme la Présidente, si vous le permettez, je passerai maintenant au dossier des enfants, notamment en évoquant un bref historique quant aux deux engagements internationaux importants concernant la jeune génération.

Depuis 1948, date de l'adoption de la Déclaration universelle des droits de l'homme, l'Assemblée générale des Nations Unies a adopté un ensemble de pactes et conventions internationales relatifs aux droits de la personne. Mentionnons à cet égard l'adoption par les Nations Unies de la Convention relative aux droits de l'enfant, en 1989. Le gouvernement du Québec s'est déclaré lié par décret à cette convention en 1991.

Parmi les plus difficiles problèmes vécus par les enfants de nos jours dans le monde, la vente d'enfants, particulièrement aux fins d'exploitation sexuelle ou de travail forcé, a atteint des proportions alarmantes. Le Fonds des Nations Unies pour l'enfance estime que, chaque année, un million d'enfants, surtout des jeunes filles, entrent dans l'industrie du sexe dirigée par des bandes criminalisées transnationales.

En vue d'initier la mise en place de solutions à cette grave problématique, l'Assemblée générale des Nations Unies adoptait, en l'an 2000, le protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l'enfant concernant la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants. Ce protocole fixe des règles détaillées pour sanctionner pénalement ces délits. Il précise également que les États parties devront s'accorder une entraide la plus large possible pour toute enquête et procédure pénale en rapport avec la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants.

Le projet de loi assurant la mise en oeuvre de la Convention sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale et modifiant certaines dispositions législatives en matière d'adoption, qui a été présenté à l'Assemblée nationale le 20 juin 2003, ajuste les infractions pénales prévues à la Loi sur la protection de la jeunesse, aux dispositions du protocole facultatif qui concerne l'adoption. Cette convention vise la vente d'enfants, notamment aux fins d'exploitation sexuelle ou de travail forcé. Et, comme je le mentionnais plus tôt, cette problématique est mondiale, et son ampleur est alarmante.

Le Fonds des Nations Unies pour l'enfance a estimé que 1 million d'enfants annuellement entrent dans l'industrie du sexe. La très grande majorité de ces enfants, Mme la Présidente, sont des jeunes filles. Cette industrie totalise plusieurs milliards de dollars par année et est dirigée par des bandes criminalisées transnationales. Il est impératif que cet acte terrible à l'endroit de nos enfants cesse. Si le protocole est ratifié par une majorité d'États, les signataires devront s'accorder l'entraide la plus large possible pour toute enquête ou procédure pénale en rapport avec la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants.

En fait, tous les États signataires devront collaborer ensemble afin que nos enfants ne puissent plus être victimes de ces groupes criminels.

En approuvant le protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l'enfant concernant la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, le Québec s'inscrit dans l'effort international pour prévenir les dérives en matière de vente d'enfants. Le Québec marque ainsi sa solidarité à l'égard d'engagements internationaux importants et à la création d'un monde digne des enfants.

D'autre part, Mme la Présidente, la Convention sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale a été adoptée le 29 mai 1993 sous l'égide de la Conférence de La Haye de droit international privé. La convention est entrée en vigueur le 1er mai 1995. Au 16 octobre 2003, 55 États sont partie à la convention. En outre, huit États l'ont signée, dont la Chine, mais ne l'ont pas encore ratifiée. Pour sa part, le Canada a ratifié la convention en décembre 1996.

La convention comporte trois objets. Elle établit d'abord des garanties pour que les adoptions internationales aient lieu dans l'intérêt supérieur de l'enfant et dans le respect des droits fondamentaux qui lui sont reconnus en droit international. Elle s'inscrit donc directement dans le prolongement de la Convention relative aux droits de l'enfant, adoptée par les Nations Unies en 1989.

Deuxièmement, elle instaure un système de coopération entre les États contractants pour assurer le respect de ces garanties et, ainsi, prévenir l'enlèvement, la vente ou la traite d'enfants. Enfin, elle assure la reconnaissance par les États contractants des adoptions réalisées conformément aux dispositions prévues à la convention.

n(17 h 40)n

L'application de la convention au Québec suppose que toutes les adoptions entre un État partie à la convention et Québec devront s'effectuer conformément aux dispositions de la convention. C'est pourquoi le projet de loi assurant la mise en oeuvre de la Convention sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale et modifiant diverses dispositions législatives en matière d'adoption, présenté à l'Assemblée nationale le 20 juin 2003, prévoit aussi l'incorporation de la convention en droit québécois et contient des dispositions qui précisent comment celle-ci s'appliquera au Québec. Ainsi, le ministre de la Santé et des Services sociaux, qui assume déjà des responsabilités en matière de protection de la jeunesse et d'adoption internationale au Québec, sera désigné pour agir à titre d'autorité centrale aux fins de la convention.

En outre, les adoptions certifiées conformes à la convention seront reconnues de plein droit au Québec et produiront les mêmes effets que les adoptions réalisées au Québec. Permettant une collaboration directe entre les autorités des États contractants, le système de coopération internationale instauré par la convention est de nature à faciliter le processus d'adoption internationale et à prévenir les abus susceptibles de survenir.

En approuvant la Convention sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale, le Québec s'inscrit dans l'effort international pour prévenir les dérives en matière des ventes d'enfants dans le cadre des adoptions internationales et pour s'assurer que les adoptions internationales aient lieu dans l'intérêt supérieur de l'enfant. Le Québec marque ainsi sa solidarité à l'égard d'engagements internationaux importants et à la création d'un monde digne des enfants.

En terminant, Mme la Présidente, c'est pour toutes les raisons que je vous ai évoquées aujourd'hui que je propose que l'Assemblée nationale approuve, premièrement, l'entente de sécurité sociale entre le gouvernement du Québec et le gouvernement de la République française, ainsi que l'avenant au protocole d'entente entre le gouvernement du Québec et le gouvernement de la République française relatif à la protection sociale des élèves et étudiants et participants à la coopération, du 19 décembre 1998; deuxièmement, le protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l'enfant concernant la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants; et, troisièmement, la Convention sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale.

Je ne saurais conclure, Mme la Présidente, sans exprimer ma grande satisfaction de voir à nouveau cette Assemblée exercer ce pouvoir collectif exceptionnel.

La Vice-Présidente: Merci, Mme la ministre. Alors, sur cette motion, je reconnais le député de Mercier et porte-parole de l'opposition officielle en matière de relations internationales. À vous la parole.

M. Daniel Turp

M. Turp: Merci, Mme la Présidente. J'ai le plaisir de prendre la parole sur les motions déposées par la ministre des Relations internationales visant à approuver quatre engagements internationaux importants auxquels le Québec entend souscrire.

Il s'agit, comme nous l'a dit la ministre, de deux accords internationaux du Canada, dont la matière ressortit aux compétences constitutionnelles du Québec, à savoir la Convention sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale, et la Convention relative aux droits de l'enfant concernant la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants.

Deux ententes internationales sont également soumises à cette Assemblée pour fins d'approbation: l'entente en matière de sécurité sociale entre le gouvernement du Québec et le gouvernement de la République française, et de l'avenant au protocole d'entente entre le gouvernement du Québec et le gouvernement de la République française relatif à la protection sociale des élèves et étudiants et des participants à la coopération internationale, du 19 décembre 1998.

Il me fait donc plaisir de m'exprimer à l'occasion d'un débat sur ces motions en raison du fait qu'il s'inscrit dans le cadre de cette procédure prévue dans la Loi sur le ministère des Relations internationales qui vise à nous associer, nous, les parlementaires, à la conclusion des traités et à partager en définitive cette compétence de conclusion des traités entre l'Assemblée nationale du Québec et le gouvernement du Québec, ce dernier ne détenant plus une prérogative exclusive et totale en la matière.

Le débat d'aujourd'hui est d'ailleurs le troisième débat en la matière, le premier ayant eu lieu, comme la ministre l'a rappelé, le 18 décembre 2002. Le deuxième ayant eu lieu le 20 juin dernier, il était relatif à l'entente en matière de sécurité sociale entre le gouvernement du Québec et le gouvernement de la République slovaque.

Et, Mme la Présidente, j'anticipe le plaisir d'un débat auquel la ministre a aussi convié cette Assemblée, puisqu'elle a déposé, le 7 avril dernier, six accords de commerce international que l'article 22.2 de la Loi sur le ministère des Relations internationales l'oblige à déposer devant cette Assemblée en ce qu'il s'agit d'accords de commerce international, ces accords étant l'Accord de libre-échange entre le gouvernement du Canada et le gouvernement de la République du Chili et les accords complémentaires sur la coopération dans les domaines de l'environnement et du travail, ainsi que l'Accord de libre-échange entre le gouvernement du Canada et le gouvernement de la République du Costa Rica et les deux accords complémentaires sur la coopération dans les domaines de l'environnement et du travail.

Mme la Présidente, des débats intéressants sont à prévoir au sujet de ces deux accords, et sans doute serait-il intéressant que ces débats débordent le cadre de cette Assemblée et puissent aussi avoir lieu dans le cadre de commissions parlementaires parce qu'il y a des enjeux importants, des enjeux relatifs à la diversité culturelle et à l'exception culturelle, ainsi que des enjeux relatifs à l'inclusion ou non dans des traités de recours à investisseur-État de l'équivalent de chapitre XI qu'il y a dans l'ALENA et qui causent des soucis particuliers, notamment chez les altermondialistes.

Avant de faire connaître la position de l'officiel au sujet des quatre engagements internationaux qui doivent faire l'objet du débat d'aujourd'hui, j'aimerais faire un commentaire général sur le dépôt des engagements internationaux importants, un commentaire que la ministre des Relations internationales pourrait être intéressée à entendre, ainsi que des commentaires particuliers sur chacun des traités internationaux que nous sommes invités à approuver.

Mme la Présidente, j'ai reçu un certain nombre de documents à l'occasion du dépôt des quatre engagements internationaux importants que l'on veut faire adopter par cette Assemblée nationale aujourd'hui.

En vertu de la loi, les engagements internationaux dits importants doivent être accompagnés d'une note explicative ainsi que du texte de l'engagement international important lui-même.

Mme la Présidente, j'ai reçu des documents d'un caractère et d'une qualité inégale. Les notes explicatives se présentent d'une façon différente, alors que la loi prescrit qu'ils doivent présenter le contenu de l'engagement ainsi que leurs effets. Dans certains cas, certaines notes explicatives présentent le contexte; dans d'autres, précisent les conditions d'adoption, et sans doute serait-il intéressant que la ministre des Relations internationales fasse faire bien leurs devoirs à ces fonctionnaires internationaux pour que ? ou fonctionnaires du ministère des Relations internationales ? pour que les notes explicatives soient présentées dans une forme plus uniforme et qu'elles présentent, pour chacun des engagements internationaux, des informations non seulement utiles, mais présentées d'une façon intéressante pour les députés de cette Assemblée, et je crois qu'il y a des correctifs qui s'imposent.

n(17 h 50)n

Les textes des conventions elles-mêmes et des ententes mériteraient à mon avis une présentation plus conforme aux traditions de cette Assemblée, et j'inviterais la ministre à réfléchir attentivement sur une proposition qui viserait à présenter ces engagements, avec les notes explicatives qui doivent les accompagner, dans une forme analogue à celle par laquelle nous présentons les projets de loi. Et cela d'ailleurs sera répété, je le répéterai lorsqu'il s'agira d'examiner les accords de commerce international, puisque nous avons reçu des documents volumineux, des documents qui seraient sans doute présentés de façon beaucoup plus concise, dans une présentation similaire à celle que nous adoptons pour les projets de loi. J'ai d'ailleurs évoqué cette question avec le secrétaire général de cette Assemblée et le président qui m'ont invité à faire cette suggestion à la ministre, ce que je fais aujourd'hui, et j'espère qu'elle aura l'occasion de lire cette suggestion et qu'elle prendra des mesures pour faire une présentation plus adéquate des engagements internationaux et de leurs notes explicatives lorsqu'elle déposera de nouveaux engagements internationaux devant cette Assemblée.

Mme la Présidente, j'ai pris connaissance, au nom de l'opposition officielle, des quatre engagements internationaux importants qu'on soumet à notre attention: les deux accords multilatéraux, qui sont relatifs aux droits et libertés de la personne et en particulier aux droits de l'enfant, ainsi que les deux ententes internationales du Québec relatives à la sécurité sociale.

Mme la Présidente, dans le cas de la première convention qui est relative à la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale, une convention qui a été adoptée en 1993 par les États membres de la Conférence internationale pour le droit international privé, qui est aujourd'hui ratifiée par 55 États parties, dont le Canada, cette convention, je crois, est une convention qui a sa raison d'être et mérite l'approbation des membres de cette Assemblée. Cette convention facilitera le processus d'adoption internationale et assurera une protection des enfants, assurera que l'intérêt supérieur des enfants, comme le dit la convention, que cet intérêt soit bien servi. Elle crée un certain nombre d'obligations à l'égard des États. Et cette Assemblée nationale est d'ailleurs saisie du projet de loi n° 11 qui vise à mettre en oeuvre cette convention dans le droit interne québécois. D'ailleurs, l'article premier de ce projet de loi n° 11 dit que cette convention a force de loi et, lorsque cette loi sera en vigueur, les dispositions de cette convention internationale auront un effet direct en droit québécois, ce qui devrait être le cas bien sûr des engagements que nous prenons en nous déclarant liés par de telles conventions internationales.

Mme la Présidente, le deuxième accord international du Canada auquel cette Assemblée est invitée à donner son approbation et que le gouvernement examinera aux fins de donner son assentiment à ce que le Canada fasse un acte de ratification de cette convention est le Protocole facultatif à la convention relative aux droits de l'enfant concernant la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants. Mme la Présidente, il s'agit d'un protocole très important qui vient compléter la Convention des Nations Unies sur les droits de l'enfant, qui est une convention très importante, qui est d'ailleurs la convention internationale la plus ratifiée au monde.

Seuls deux États de la communauté internationale n'ont pas ratifié cette convention, peut-être vaut-il la peine de le souligner. La Somalie n'a pas ratifié cette convention parce qu'elle veut toujours conscrire des enfants dans ses forces armées, mais sans doute les membres de cette Assemblée seront-ils surpris de savoir que l'autre État qui n'a pas ratifié cette convention est nul autre que les États-Unis d'Amérique, parce que les États-Unis d'Amérique souhaitent pouvoir continuer d'imposer la peine de mort à des personnes qui ont commis la peine de mort lorsqu'elles étaient mineures, ce que la convention des Nations Unies sur les droits de l'enfant prohibe. Et je me permets de dire ici, Mme la Présidente, que les États-Unis et les Américains devraient être très peu fiers d'un gouvernement qui refuse de ratifier une convention internationale ratifiée de façon aussi universelle.

Le protocole qui est soumis à l'examen de cette Assemblée vise donc à ajouter à cette convention universellement ou quasi universellement ratifiée... et je crois que c'est un pas dans la bonne direction, puisque les questions relatives à la vente d'enfants, à la prostitution des enfants et à la pornographie mettant en scène des enfants est un fléau, est un fléau qui est entretenu aussi par ces adeptes du tourisme sexuel. Et je me permets de signaler que Michel Hébert, du Journal de Québec, signalait, la semaine dernière, l'importance qui devait être donnée à cette convention, bien que je voudrais par ailleurs signaler que le journaliste Hébert errait dans une certaine mesure lorsqu'il suggérait que le Québec punirait le tourisme sexuel. Il oubliait que la compétence pour punir le tourisme sexuel est une compétence qui relève du Parlement fédéral, puisqu'il s'agit de droit pénal, et qu'il y a eu d'ailleurs une loi visant à mettre en oeuvre cette interdiction du tourisme sexuel, permettant d'ailleurs aux lois canadiennes en la matière d'avoir une portée extraterritoriale, comme l'ont certaines lois en la matière.

Mme la Présidente, pour ces raisons, l'opposition officielle est d'avis que cette Assemblée devrait approuver ces deux accords multilatéraux du Canada, invitant ainsi le gouvernement à donner son assentiment à ce que le Canada fasse une déclaration qui amènerait le Québec à devoir respecter la première convention et invitant le gouvernement du Canada et l'autorisant ainsi à ratifier la deuxième convention.

Mme la Présidente, pour les deux ententes de sécurité sociale qui sont soumises à l'examen de cette Chambre, il s'agit d'une entente importante, significative, qui vient revoir, mettre à jour l'entente de sécurité sociale conclue entre la France et le Québec à la fin des années soixante-dix et qui avait donné lieu à des avenants, et il était sans doute l'heure d'intégrer ces diverses ententes et de réviser le cadre qui assure une meilleure protection, une meilleure sécurité sociale et une meilleure réciprocité dans les engagements de sécurité sociale du Québec et du Canada de ces partenaires privilégiés.

Il est donc de notre avis que cette entente de sécurité sociale soit aussi approuvée par cette Assemblée nationale, comme devrait l'être l'avenant au protocole d'entente entre le gouvernement du Québec et le gouvernement de la République française relatif à la protection sociale des élèves et des étudiants, et des participants à la coopération du 19 décembre 1998, qui est très technique, puisqu'il s'agit d'un avenant qui vise à modifier la référence, dans cet avenant, à l'ancienne entente et la remplacer par une référence à la nouvelle entente de 2003. Mais il s'agit bien sûr d'une entente importante, puisqu'il permettra, comme il se doit, une meilleure couverture sociale de ces étudiants, de ces élèves et des participants à la coopération qui, je le souligne, sont trop peu nombreux, puisque trop peu d'étudiants, d'élèves et de coopérants choisissent maintenant la France comme lieu d'études et de coopération. Il doit y avoir des efforts pour améliorer et augmenter le nombre de personnes qui, un jour, pourront bénéficier des prescriptions de cet avenant.

Mme la Présidente, pour toutes ces raisons, l'opposition officielle est d'avis que les engagements internationaux importants qui ont été déposés à l'Assemblée par la ministre des Relations internationales le 1er avril dernier, que ces engagements soient approuvés. Et je crois qu'il s'agit d'un autre moment important, puisque notre Assemblée est maintenant investie du pouvoir d'approuver de tels engagements, et l'opposition officielle donne son approbation aux engagements qui sont déposés aujourd'hui, mais l'opposition rappelle que la loi l'autorise aussi à présenter des amendements qui pourraient l'amener à vouloir rejeter de telles ententes.

La Vice-Présidente: Je m'excuse, M. le député.

M. Turp: ...

La Vice-Présidente: Je m'excuse, M. le député. Alors, je ne sais pas si vous aviez terminé, mais, compte tenu de l'heure, si vous voulez poursuivre, on doit avoir consentement de part et d'autre. Est-ce que vous désirez poursuivre?

n(18 heures)n

M. Turp: ...

La Vice-Présidente: Il y a consentement?

Une voix: Consentement.

La Vice-Présidente: Il y a consentement. Alors, poursuivez quelques instants.

M. Turp: Dans le cas qui nous occupe, l'opposition officielle approuve ces ententes, mais il faut rappeler que le pouvoir qui est maintenant conféré à cette Assemblée en est un qui permettrait à cette opposition officielle que nous sommes et aux députés de proposer un amendement qui viserait à rejeter l'approbation. Et nous serons peut-être confrontés dans les prochaines semaines à cette question, puisque des accords de commerce international, que nous sommes invités à approuver, pourraient poser problème, pourraient ne pas devoir faire l'objet d'une approbation par cette Assemblée. Et je crois que l'importance des six accords de commerce international qui ont été déposés à cette Assemblée pourraient nous amener à demander au gouvernement et demander à la ministre des Relations internationales qu'un examen plus approfondi de ces accords soit fait en commission parlementaire et que notre Assemblée ne se satisfasse pas d'un débat très court comme celui de ce soir lorsqu'il s'agit d'engagements internationaux aussi importants que des accords de libre-échange, comme les accords de libre-échange avec le Chili et le Costa Rica, qui sont aussi déposés devant cette Assemblée. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député. Alors, est-ce qu'il y a d'autres intervenants sur ces motions?

Une voix: Non.

La Vice-Présidente: Pas d'autre intervenant. Alors, nous allons maintenant procéder à la mise aux voix des motions.

 

Mise aux voix

Est-ce que la motion proposant qu'en vertu de l'article 22.3 de la Loi sur le ministère des Relations internationales l'Assemblée nationale étudie et approuve, dans le délai prescrit par la loi, la Convention sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale est adoptée?

Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté. Est-ce que la motion proposant qu'en vertu de l'article 22.3 de la Loi sur le ministère des Relations internationales l'Assemblée nationale étudie et approuve, dans le délai prescrit par la loi, le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l'enfant concernant la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants est adoptée?

Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté. Est-ce que la motion proposant qu'en vertu de l'article 22.3 de la Loi sur le ministère des Relations internationales l'Assemblée nationale étudie et approuve, dans le délai prescrit par la loi, l'Entente en matière de sécurité sociale entre le gouvernement du Québec et le gouvernement de la République française est adoptée?

Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté. Est-ce que la motion proposant qu'en vertu de l'article 22.3 de la Loi sur le ministère des Relations internationales l'Assemblée nationale étudie et approuve, dans le délai prescrit par la loi, l'Avenant au Protocole d'entente entre le gouvernement du Québec et le gouvernement de la République française relatif à la protection sociale des élèves et étudiants et des participants à la coopération du 19 décembre 1998 est adoptée?

Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté. En conséquence, ces quatre engagements internationaux sont étudiés et approuvés par l'Assemblée nationale.

Alors, compte tenu de l'heure, nous allons suspendre pour procéder aux débats de fin de séance. Merci.

(Suspension de la séance à 18 h 4)

 

(Reprise à 18 h 5)

Débats de fin de séance

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, tel que le prévoit le règlement, nous allons procéder maintenant aux débats de fin de séance. On a reçu trois demandes pour les débats de fin de séance. La première demande sera sur une question adressée par M. le député de Gouin à la ministre de la Culture et des Communications concernant le financement de Télé-Québec; la deuxième, sur une question adressée par M. le député de Drummond au ministre des Transports concernant le financement des travaux routiers pour la présente année; et la troisième portera sur une question adressée par le député de Chicoutimi au ministre de la Sécurité publique concernant le rôle du médiateur Jean Bazin dans le dossier de Kanesatake.

Effet de la réduction du budget de Télé-Québec

Alors, M. le leader de l'opposition officielle, pour le premier débat de fin de séance, et vous avez cinq minutes.

M. André Boisclair

M. Boisclair: Merci, M. le Président. Ce matin, comme moi, vous avez assisté... cet après-midi plutôt, comme moi, vous avez assisté à la période de questions. J'ai tenté pour une seconde fois d'ouvrir un débat intelligent et serein à l'Assemblée nationale sur l'avenir de Télé-Québec et sur l'impact des compressions annoncées dans le dernier cahier de crédits présenté par la présidente du Conseil du trésor. J'ai fait valoir, M. le Président, que les compressions imposées par la ministre de la Culture à Télé-Québec vont avoir un impact important, signifiant dans la qualité de la programmation, que ces compressions, aussi, vont avoir un impact sur les effectifs de la société d'État.

Avant de reprendre là où j'ai laissé à l'occasion de la période de questions, les cinq minutes que vous m'accordez me permettent de faire une très rapide mise en contexte et d'affirmer quelques positions de principe.

D'abord, l'opposition officielle souhaite le maintien d'une télévision publique d'État qui conserve une mission éducative et culturelle d'envergure. Nous sommes de celles et de ceux qui avons débattu de l'avenir de cette société, M. le Président, et je vous ramène à des débats qui ont eu lieu à cette Assemblée en juin 1996, alors que l'Assemblée nationale adoptait la Loi sur la société de télédiffusion du Québec et qui transformait Radio-Québec à Télé-Québec. Le débat s'est fait dans cette Assemblée, il s'est fait dans nos caucus respectifs, il s'est fait aussi au Conseil des ministres et au Conseil du trésor. Et le choix a été non seulement éclairé de ces discussions, mais ces choix ont été aussi éclairés de débats qui se sont faits en commission parlementaire, en particulier à la Commission de la culture. Donc, cette société d'État a connu une profonde transformation, et tous ici ont pu participer de façon très ouverte et de façon transparente à la détermination des objectifs de cette société d'État, tous ont pu débattre de la mission nouvelle que le gouvernement du Parti québécois a voulu donner à Télé-Québec.

Nous avons aussi fait le choix d'un réinvestissement dans Télé-Québec. Il est vrai que sous notre administration, alors que le député de L'Assomption de l'époque était ministre de la Culture, une importante compression avait été imposée à Télé-Québec. Je revois même ? pour avoir participé à certains de ces débats ? je revois encore le député de L'Assomption nous dire: Il faut être capables de forcer le jeu, il faut être capables d'amener toutes celles et ceux qui s'intéressent au devenir de la société d'État de participer à un vaste débat. Et une des façons de le faire, c'était de proposer une mission... une révision de la mission.

Ces choix ont été faits, et, dès 2001-2002, après avoir procédé à cette réorganisation, nous avons fait le choix d'un réinvestissement dans Télé-Québec. Et je redonne quelques chiffres: 56,4 millions en 2001-2002; 59,3 millions en 2002-2003; en 2003-2004, 61,8 millions, auxquels il faut ajouter les allocations qui ont été données à Télé-Québec pour pourvoir au remboursement de sa dette, auxquels aussi il faut ajouter des sommes parfois, je le reconnais, non récurrentes qui ont été versées à Télé-Québec. Je pense, entre autres, aux annonces qui ont été faites par la ministre des Finances de l'époque, la députée de Taillon.

n(18 h 10)n

Donc, ces choses sont derrière nous. Aujourd'hui, alors que la société est passée à travers une réorganisation, alors que ses cotes d'écoute augmentent, alors qu'elle a su tisser un fantastique partenariat avec le secteur privé ? la très grande majorité des productions sont faites par le secteur privé ? alors que des producteurs, dans l'ensemble des régions du Québec, sont mobilisés derrière la société d'État, bang! retour à la case départ. Ce qui m'amène à poser la question suivante à la ministre: Comment peut-elle affirmer qu'il n'y aura pas de modifications à la programmation alors qu'elle sait pertinemment que, cet été, il n'y aura aucune production nouvelle? Comment peut-elle affirmer qu'il n'y aura pas de conséquences sur la programmation, puisque Télé-Québec n'a même pas les moyens pour acheter les droits de licence et se présenter au fonds des câblos pour aller chercher davantage d'argent pour sa programmation? Et comment peut-elle affirmer qu'il n'y aura pas de changement à sa mission, alors qu'il y a 40 personnes qui ont été reconduites uniquement sur une période de trois mois et qui attendent des directions de sa part?

Le Vice-Président (M. Gendron): Merci. Mme la ministre, pour cinq minutes.

Mme Line Beauchamp

Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. D'entrée de jeu, moi aussi, je veux souligner le contexte dans lequel s'inscrit ce débat. Il faut quand même rappeler ceci: notre gouvernement a affirmé que nous voulions recentrer l'État du Québec sur cinq missions essentielles: la santé, le savoir, la prospérité, la sécurité et l'identité. Cette question de l'identité se déploie de différentes façons, mais, bien sûr, c'est une responsabilité incontournable que nous avons comme gouvernement québécois de cultiver, de défendre, de faire la promotion de cette identité québécoise, et c'est dans ce contexte, de façon responsable, que le budget du ministère de la Culture et des Communications a été augmenté de 31 millions de dollars. S'ajoutent à cela des mesures fiscales soutenant les créateurs, les artistes québécois. Il y a également des mesures fiscales pour le milieu de la télévision, 10 millions de dollars supplémentaires pour couvrir de nouveaux créneaux dans le domaine télévisuel. Donc, on voit bien ici que nous sommes dans un contexte où vraiment nous remplissons pleinement ce mandat, cette mission essentielle sur laquelle nous voulons recentrer l'État du Québec, qui est la mission de l'identité.

Et je me permettrai de prendre quelques secondes pour vous dire donc comment ont réagi les principaux acteurs du milieu de la culture à l'annonce du budget déposé par le ministre des Finances il y a maintenant quelques semaines. Le Devoir titrait: Grande satisfaction des artistes et des organismes. L'Union des artistes disait: «C'est un début réel de réponse aux préoccupations de l'Union des artistes quant au filet de sécurité sociale des artistes, au soutien à la culture. Des gestes concrets viennent d'être accomplis.» L'ADISQ disait: «Un geste du gouvernement qui traduit l'engagement électoral du gouvernement de faire de la culture une mission privilégiée de l'État québécois.» Ça, c'est le vrai contexte dans lequel doivent se dérouler nos discussions, un contexte donc où, oui, cette mission d'identité, qui fait partie des missions essentielles du gouvernement du Québec, est une mission ? protéger, développer ? dont nous sommes fiers et pour laquelle vraiment divers gestes ont été posés par ce gouvernement.

Dans un contexte donc d'augmentation des crédits du budget du ministère de la Culture et des Communications pour répondre de façon importante à toute une série d'enjeux qu'on doit défendre, effectivement des choix ont été faits. Il y a eu des augmentations de crédits alloués, par exemple, aux musées québécois. Il y a eu cette pérennisation des crédits. Je viens d'annoncer aujourd'hui même, M. le Président, une subvention de 2,3 millions de dollars au Musée de la civilisation de Québec afin qu'il renouvelle sa collection permanente, faisant en sorte qu'il soit prêt à accueillir les visiteurs de 2008. J'en suis très fière. Oui, il y a des augmentations de crédits pour les musées. Oui, il y a des augmentations de crédits, il y a des augmentations de crédits, M. le Président, pour... Je peux prendre un autre exemple, la pérennisation des crédits pour la politique... ces mesures pour le cinéma et l'audiovisuel. Ça, c'est le grand contexte dans lequel on travaille.

Mais, maintenant, pour Télé-Québec. Télé-Québec reçoit plus de 10 % du budget du ministère de la Culture et des Communications. Je vous disais que c'est un budget qui a augmenté, là, de 31 millions de dollars, et, avec cette augmentation, Télé-Québec reçoit aujourd'hui 57 millions de dollars de la part du gouvernement du Québec, ce qui représente plus de 10 % du budget du ministère de la Culture et des Communications. Dans ce contexte, je réaffirme que, à la lumière également des investissements faits au cours des précédentes années, parce que... ça, c'est le montant qui est inscrit en ce moment dans le livre des crédits, puis allons voir les montants inscrits dans le livre des crédits des années précédentes. Lors de la dernière année où vous étiez pleinement responsables, lorsque l'opposition officielle était pleinement responsable du budget de Télé-Québec, le montant inscrit dans le livre des crédits était de 55 millions ? on est en 2002-2003. L'année où, nous, on a fait notre budget, en 2003-2004, c'est 59 millions qui était inscrit au livre des crédits, Et, aujourd'hui, c'est 57 millions qui est inscrit au livre des crédits. Donc... Mais nous voyons bien, à l'inscription même des livres des crédits, que nous ne pouvons pas parler, là, d'une grande révolution. De façon responsable, nous accordons 57 millions de dollars à Télé-Québec.

Télé-Québec, par ailleurs, a des activités d'autofinancement, vous le savez comme moi. Bien sûr, il y a son marketing, ses ventes publicitaires. Il y a aussi de l'impartition de services. Télé-Québec... enfin ce que je veux dire, c'est qu'elle récolte des revenus parce qu'elle est capable, par exemple, de louer ses studios à des producteurs indépendants. Ce que je réaffirme ici donc, c'est que Télé-Québec s'engage dans un processus de révision, tel qu'on l'avait annoncé, de ses processus d'affaires, de ses processus de gestion.

Et, M. le Président, le député de Gouin a voulu réaffirmer où campait l'opposition officielle, mais sans, après ça, dire: Bien, on a transformé Télé-Québec puis, après ça, on a réinvesti, puis là, maintenant, ça devrait être le statu quo. Je lui rappelle que, même après que son gouvernement a fait la transformation majeure effectivement à Télé-Québec, en 1994-1995, le rapport Facal disait ceci ? on est en 1997, toujours sous votre gouvernement ? ça dit ceci de Télé-Québec: On propose de maintenir la société de télédiffusion, mais il invite la ministre de la Culture et des Communications à prendre les moyens nécessaires afin que Télé-Québec corrige sa trajectoire et réalise pleinement son mandat éducatif. Un peu avant, on disait que Télé-Québec...

Le Vice-Président (M. Gendron): Vous me voyez contraint...

Mme Beauchamp: ...doit revenir à sa mission éducative. Donc...

Le Vice-Président (M. Gendron): C'est parce que, qu'est-ce que tu veux, les règles sont les règles, il faut gérer notre cinq minutes. Alors, vous avez deux minutes de réplique, M. le député de Gouin.

M. André Boisclair (réplique)

M. Boisclair: M. le Président, j'ai tenté, sur un ton calme, de faire entendre une voix. Celle avec laquelle la ministre me répond est celle de la capitulation. Et pourquoi j'utilise ce mot, «capitulation», M. le Président? Parce qu'elle sait très bien que, lorsqu'elle fait référence au cahier de crédits et qu'elle cite le chiffre de 55 millions, elle devrait rajouter les 3 millions au discours du budget, qu'elle devrait rajouter des ajustements non récurrents de programmation de 4 millions, ce qui fait en sorte qu'en 2002-2003 le budget était 59,3, en 2003-2004, 61,8. C'est à partir de là qu'il faut faire une juste analyse de l'effort public fait pour soutenir cette mission.

Le seul fait qu'elle nie cette chose et qu'elle n'en parle pas augure mal pour la suite des choses. La ministre n'a même pas utilisé quelques instants de son cinq minutes pour nous parler du souffle à donner à Télé-Québec, qui compte encore sur d'importants appuis publics et qui doit pouvoir continuer de se développer. La ministre est prisonnière d'un discours conservateur, d'un discours qui a cultivé les pires préjugés au sujet de la taille de l'État. Victime, donc, de ce discours, prisonnière qu'elle est de cette chape de plomb que lui fait porter la présidente du Conseil du trésor et son premier ministre, elle n'a mot à dire pour répondre aux questions que nous lui posons.

La preuve est faite, M. le Président, que la ministre de la Culture, lorsqu'elle a répondu, la semaine dernière, à l'Assemblée nationale au sujet de la programmation, n'a pas dit toute la vérité. Elle sait pertinemment ? et je le dis encore ici aujourd'hui ? que la programmation sera affectée. Le premier geste de transparence, c'est son premier devoir. Elle qui préside les forums, qui convie la population à un grand dialogue, son premier devoir, c'est un devoir de transparence. Elle en manque, M. le Président, parce qu'elle nie des choses qu'elle sait pourtant vraies. Elle manque à ce devoir de transparence, et la seule façon pour elle de corriger le tir, c'est de convier, comme nous l'avions fait, des gens alentour de la table pour discuter de la mission de Télé-Québec, pour discuter de l'impact de ces compressions. Je lui demande à nouveau un débat parlementaire public sur l'avenir de Télé-Québec. Bien plus que les 5 millions qu'on voit au cahier de crédits, c'est près d'une dizaine de millions auxquels Télé-Québec n'aura plus accès à partir de l'an prochain.

Niveau des investissements
pour l'amélioration du réseau routier

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, M. le leader de l'opposition officielle. Pour le second débat, je reconnais maintenant M. le député de Drummond. M. le député de Drummond, vous avez cinq minutes.

M. Normand Jutras

M. Jutras: Alors, M. le Président, aujourd'hui, on avait, on entendait encore une mauvaise nouvelle venant de la part du gouvernement libéral, une autre mauvaise nouvelle, très mauvaise nouvelle pour les Québécois et les Québécoises. Cette fois-ci, ça concernait les investissements routiers au Québec. Et ce qu'on apprenait de la bouche du ministre des Transports, c'est que, pour une deuxième année consécutive, les investissements routiers au Québec seront une autre fois, une deuxième année, réduits de 25 %, passant donc de 1,2 milliard à 930 millions.

D'entrée de jeu, M. le Président, je ne peux pas m'empêcher de mentionner quelque chose. Que l'on présente une nouvelle comme celle-là comme étant une bonne nouvelle, ça me dépasse, M. le Président, parce que c'est une coupure de l'ordre de 25 %. Mais c'est le genre, c'est la façon de faire que l'on voit, là, de la part des ministres libéraux, M. le Président. À cette même période de questions aujourd'hui, on entendait la ministre des Relations avec les citoyens, qui voit son budget de francisation passer de 45 millions à 35 millions, elle dit: C'est une bonne nouvelle. Il y a quelques jours, on entendait le ministre de la Santé qui, au lieu d'annoncer 2 milliards tel qu'il l'avait promis, était obligé d'annoncer 930 millions. Il avait le sourire fendu jusqu'aux oreilles puis il disait que c'était une bonne nouvelle. Puis, aujourd'hui, bien on a les deux ministres des Transports qui subissent une baisse de 25 % puis qui viennent encore dire, à la face de tout le Québec, qu'il s'agit là d'une bonne nouvelle. C'est ce qui me fait dire encore une fois, M. le Président, qu'avec les libéraux le vocabulaire ne tient plus et un chat ne s'appelle plus un chat et un chien ne s'appelle plus un chien.

n(18 h 20)n

Mais, quand on regarde ces nouvelles qui nous ont été données aujourd'hui par le ministre des Transports ? et en fait c'est le même montant que l'année dernière, 930 millions ? il y en a une, nouvelle, qui m'inquiète. Quand on décortique, là, l'utilisation des argents, je constate qu'au niveau, entre autres, de la conservation des chaussées ? parce qu'il y a la conservation des structures, il y a l'amélioration du réseau routier, il y a le développement, mais au niveau de la conservation des chaussées ? M. le Président, l'année dernière, c'étaient 267 millions, 268 pratiquement, et, cette année, c'est une baisse de 22 millions, M. le Président. Ça passe de 267 à 245. Ça, c'est sur la conservation des chaussées.

Alors, moi, je regarde, M. le Président, je circule souvent sur l'autoroute 20, mais, sur la 40 aussi, il y a le même problème, on circule, M. le Président, sur ces autoroutes-là ? et je ne parle que de ces deux-là, mais je pourrais parler de toutes les autoroutes du Québec ? on y voit des ornières, on y voit des crevasses, on y voit des trous, M. le Président. Et le ministre, devant ça... Puis là je pense que c'est une question de sécurité, M. le Président. Quand on est obligé de tenir notre volant à deux mains parce qu'il y a des ornières puis que notre auto commence à valser, moi, je pense qu'il y a là une question de sécurité, M. le Président. Puis, quand on voit des crevasses dans nos routes et dans nos autoroutes, je pense qu'il s'agit là d'une question de sécurité. Et quand je vois le ministre qui réduit ce budget-là de l'ordre de 10 %, je ne peux pas m'empêcher de vous dire que je suis inquiet pour la sécurité des usagers.

Cette nouvelle-là, M. le Président, elle est d'autant pire qu'il y a... En novembre 2001, le ministre des Transports de l'époque, Guy Chevrette, avait annoncé un plan de réhabilitation de notre réseau routier pour une période de 10 ans: 12 milliards de dollars. Avec les gens de l'industrie, et un sommet avait été organisé, et tout le monde convenait qu'il fallait faire des investissements majeurs pour mettre à niveau notre réseau routier avec celui des États voisins. C'était 12 milliards sur 10 ans. La première année, nous y avons consacré effectivement 1,4 milliard.

Quand j'entendais le ministre qui nous disait aujourd'hui, à la période de questions: Le plan n'a jamais été adopté, je me dis: Il était où, lui, à l'été 2002, quand les travaux se sont faits sur toutes les routes du Québec puis sur les autoroutes du Québec? Le 1,4 milliard, il a été investi, il a été dépensé, il a été utilisé dans le cadre de ce plan de réhabilitation là. Le ministre, il dit: Ça n'a pas été adopté. Bien, moi, ce que je lui rappelle, M. le Président, ça s'est mis en place, et il y avait là un échéancier de 10 ans. Et ce qui m'a d'autant plus déconcerté dans la nouvelle d'aujourd'hui: le ministre parle encore d'un plan de 10 ans. Il dit qu'il n'y en a pas eu, de plan, puis il parle lui-même du plan de 10 ans. Essayez de comprendre ça! Mais en tout cas.

Alors, il parle encore, M. le Président, d'un plan de 10 ans, il réduit de 25 % par année depuis deux ans, depuis deux ans qu'il est là, puis il laisse notre réseau routier se détériorer davantage. Alors, comment peut-il encore parler d'un délai de 10 ans, alors que ça va coûter encore plus d'argent pour le réhabiliter, notre réseau, puis qu'il continue de le réduire à raison de 25 % comme il fait? Alors, je ne peux, M. le Président, que dénoncer cette attitude-là. Et aussi, je termine en disant: Encore une fois, on attend après le fédéral. Il y a combien d'argent qui ne nous arrive pas du fédéral? Les ententes n'aboutissent pas.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, M. le député de Drummond. Je reconnais maintenant, pour le cinq minutes, M. le ministre des Transports. M. le ministre.

M. Yvon Marcoux

M. Marcoux: Merci, M. le Président. Alors, je suis heureux que le député de Drummond me donne l'occasion de reparler du financement, des investissements dans le domaine du transport. Vous savez, ce qu'on a annoncé ce matin, ces 930 millions du gouvernement du Québec, c'est un montant substantiel, et en plus, avec l'entente que j'ai signée avec le fédéral au mois d'août dernier ? je vous rappellerai en passant que c'est de l'argent qui était disponible depuis deux ans et demi, au fédéral, et que le Parti québécois n'avait pas jugé bon d'aller chercher, ça dormait là-bas ? donc, on est allé récupérer 108,5 millions et, cette année, nous en profitons pour un montant de 76 millions, ce qui veut dire qu'en tout ce sont des investissements de plus de 1 milliard qui seront effectués sur l'ensemble du réseau routier du Québec. Je pense que ça témoigne là de l'importance que le gouvernement attache à notre réseau routier pour assurer la sécurité des gens, pour assurer la compétitivité de nos entreprises, maintenir le développement économique des régions. D'ailleurs, si vous regardez la programmation que nous avons annoncée, il y a des projets dans toutes les régions du Québec, que ce soit dans le Bas-Saint-Laurent, que ce soit dans la Beauce, dans Chaudière-Appalaches, etc., dans la région de Montréal.

Quand le ministre nous parle... pas le ministre, mais le député de Drummond nous parle, vous savez, de 1,4 milliard en 2002-2003, c'est l'année précédant l'élection, et à ce moment-là le gouvernement a décidé d'investir davantage pour évidemment... en prévision des élections. Le plan auquel il fait référence, qui avait été annoncé par le ministre de l'époque, c'est un plan qui finalement n'a pas été adopté, en nulle part. Ça avait été présenté au Conseil des ministres, ça n'a pas été adopté au Conseil du trésor non plus, et ça avait été une annonce de ministre. Et c'est tellement à ce point, vous savez, que, pour l'année 2003-2004, alors que le gouvernement du Parti québécois était au pouvoir, le Conseil du trésor, en février 2003, avait approuvé, pour la programmation 2003-2004, 930 millions, M. le Président. Pas 1,4, pas 1,2, 930 millions. Donc, déjà, le gouvernement en place ne tenait plus les promesses qui avaient été faites par le ministre des Transports du temps. Ça fait penser un peu aux promesses, vous savez, du Parti québécois. Le ministre avait promis à peu près 4 à 5 milliards de promesses tous azimuts dans la province, là, sur le plan du réseau routier, même si on savait qu'il n'y avait pas d'argent. Et c'est pour ça que j'appelle ce plan supposément... C'est de l'argent de Monopoly, parce que ça n'avait pas été approuvé en nulle part, et l'année... la première année suivant celle... 2002-2003, on réduisait à 930 millions, M. le Président.

Ce que je voudrais vous dire, c'est que, cette année, il y aura pour 1 335 projets qui seront réalisés à travers l'ensemble du Québec. Et, lorsqu'on considère la situation financière catastrophique qui avait été laissée par le gouvernement précédent, c'est un effort substantiel qui témoigne de l'importance que le gouvernement actuel attache aux investissements dans notre réseau routier. Investissements, vous avez... Les gens, on prend... circulent sur la route, c'est important pour les travailleurs également, pour assurer l'accès, développement économique des régions, et nous allons continuer de le faire.

M. le Président, si nous regardons la moyenne des investissements qui ont été faits par le Parti québécois alors qu'il était au pouvoir, c'est 692 millions, M. le Président, sur une période de neuf ans. Ça, c'est ce qu'on appelle du sous-investissement et qui a contribué justement à accentuer davantage la détérioration du réseau routier. Et cette maigre moyenne d'investissements, vous savez, le parti... le gouvernement précédent a réussi à faire ça en adoptant une technique comptable, en 1996, qui répartissait et qui faisait payer pour les générations futures les travaux routiers, de sorte qu'aujourd'hui, dans le budget du ministère, nous avons à peu près pour 800 millions, 850 millions, ce qu'on appelle de service de dette et d'amortissement, qui est fixe. Donc, ça, c'était: faisons les travaux puis payons à crédit plus tard. Ça, c'était la méthode qui avait été adoptée par le gouvernement précédent.

Donc, malgré la situation financière difficile, la priorité a été accordée au développement du réseau routier, et c'est plus de 1 milliard qui va être investi cette année. Je pense que ça témoigne, ça, de la différence qu'il peut y avoir. Vous avez deux ans pour voir la moyenne, c'est plus de 930 millions. Neuf ans, la moyenne était de 692 millions, une différence importante. Et c'est là qu'on voit, je pense, que l'accent qui était placé, vous savez, les dernières années... l'année préélectorale, ça, on peut en convenir, mais ça n'a pas été le cas pour l'ensemble des années, sur la moyenne. Et je vous rappellerai que le Conseil du trésor du gouvernement précédent, en février 2003, avait approuvé pour 930 millions. C'était très, très loin du supposé plan de 1,2 milliard.

Ceci est pour dire, M. le Président, que je suis très fier des investissements qui ont été annoncés. Je pense que, pour la population du Québec, ça va être extrêmement bénéfique, et il est sûr que nous allons continuer d'investir au cours des prochaines années.

Le Vice-Président (M. Gendron): Merci, M. le ministre. Votre droit de réplique, M. le député de Drummond, deux minutes.

M. Normand Jutras (réplique)

M. Jutras: M. le Président, sur la question de l'entente avec le fédéral, je ne peux pas m'empêcher de sourire, parce que, dans le domaine des transports comme dans le domaine de la santé, tout ce que le gouvernement libéral a réussi à faire avec le fédéral à date, c'est d'aller récolter ce que, nous, nous avions semé. Ils sont allés chercher l'argent que, nous, nous avions obtenu. Mais, par contre, depuis qu'ils sont là, tout stagne, et le ministre effectivement est obligé de dire: Bien, je ne peux pas mettre l'argent que je veux parce qu'il n'y a pas d'entente avec le fédéral. Alors, ce sont des grands amis, semble-t-il, du fédéral, mais cependant ils ne sont pas capables de faire aboutir les dossiers avec le fédéral.

Par ailleurs, le ministre revient encore avec l'argument que le plan, on l'a mis en vigueur pour une année, 1,4 milliard, puis que, l'année suivante, le Conseil du trésor n'avait pas autorisé les mêmes montants. Je réfère, M. le Président, je réfère le ministre au budget, et il va s'apercevoir que, ce plan-là que nous avions mis à exécution, nous le continuions. Mais ce qu'il faut qu'il fasse, le ministre, il le sait, il le dit lui-même qu'il faut le réhabiliter, notre réseau, pourquoi il ne le fait pas, M. le Président? Autrement dit, il dit: Vous avez voulu réduire le montant, mais c'est ça qu'il fait. Alors, autrement dit, il nous reproche ce que lui-même fait, alors qu'effectivement, M. le Président, le plan de réhabilitation, on l'avait mis en fonction, on l'avait mis à exécution.

n(18 h 30)n

Quand il parle du financement des travaux, c'est assez spécial, parce que, encore là, M. le Président, les libéraux continuent de la même façon. Ils nous reprochent, entre autres, l'augmentation de la dette, mais qui a été pour des immobilisations, mais, depuis un an, depuis qu'ils sont là, la dette, ils l'ont augmentée de 3 milliards. Et, avec le budget qu'ils viennent de nous présenter, la dette, ils vont encore l'augmenter de 3 milliards. Alors, ils nous reprochent d'avoir augmenté la dette, M. le Président, puis ils continuent exactement de la même façon. Mais ça va toujours dans la même logique du discours libéral, là, qu'un chat ne s'appelle plus un chat et qu'un chien ne s'appelle plus un chien.

Et, M. le Président, on reste toujours avec le même problème: il coupe de 25 %. Comment peut-il parler encore d'un échéancier de 10 ans, et qu'est-ce qu'il fait de la sécurité des Québécois sur les routes du Québec?

Nature et résultats des mandats
de négociation à Kanesatake

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, M. le député de Drummond. Et nous allons terminer avec le troisième débat. Je reconnais maintenant M. le député de Chicoutimi pour une question s'adressant au ministre de la Sécurité publique. M. le député de Chicoutimi, vous avez cinq minutes.

M. Stéphane Bédard

M. Bédard: Merci, M. le Président. Je n'ai pas l'habitude des débats de fin de séance, mais, vous comprenez, à la lecture de la réponse du ministre, que je n'avais pas le choix d'être ici aujourd'hui. J'ai posé une question très simple ? je vous réfère aux galées, M. le Président, ma question avait à peu près trois lignes et demie, et je vais vous faire quelques extraits, lire quelques extraits pour bien comprendre, là, sur le rôle de M. Bazin qui est, souvenez-vous, le médiateur nommé par le gouvernement ? le ministre m'a répondu de la façon suivante.

«Le rôle de M. Bazin a été celui... a été le rôle d'un médiateur, de quelqu'un qui a travaillé de très près avec le chef James Gabriel et son Conseil de bande, et aussi à faire en sorte de s'assurer que tous les fonctionnaires fédéraux et provinciaux puissent avoir exactement la même lecture de la situation. Il a donc servi à faire une grande partie du déblayage de l'information qu'il y avait... qu'on avait sur le dossier...»

Et, par la suite, il nous dit: «Il s'agit d'une médiation d'ordre politique ? il fait l'échange entre les deux  ? [...] les nations autochtones elles-mêmes. Et c'est évidemment une chose qui est tout à fait... peut-être congrue, mais que... D'une part, le Conseil de bande devra déterminer s'il en accepte les termes, si on accepte la proposition. Mais [d'autre part] comme il l'avait fait, par exemple, avec... comme d'ailleurs le chef Gabriel avait lui-même demandé d'avoir une personne comme M. Bazin pour pouvoir travailler avec.»

Et là j'arrête la lecture parce que je suis convaincu qu'à l'étape où on est rendu vous m'avez perdu, et vous comprendrez que, lorsque j'ai entendu la réponse du ministre, j'ai comme eu... je me posais la question si effectivement il avait bien compris ma question.

Alors, je vais le refaire, en souhaitant d'avoir une réponse sincère du ministre, et je pense qu'il le fait normalement. Dans ce cas-ci, il s'est égaré. Alors, les questions sont simples. Un médiateur est nommé... Et j'espère que le médiateur, M. le Président, n'a pas été nommé pour faire de la médiation entre le fédéral... le gouvernement central et le gouvernement du Québec. Et je le souhaite sincèrement, là, mais il semble que ce soit un des mandats que je n'avais pas compris au départ, mais bon.

Donc, médiation est faite. Mais plus précisément quelqu'un qui est nommé, payé avec les taxes des Québécois et des Québécoises, à qui on donne un mandat précis dans une situation qui, elle, n'a rien de loufoque, bien que parfois, je vous dirais, en termes de résultat, un peu burlesque, et c'est malheureux, mais qui est importante, qui traite de sécurité, d'autorité tant de l'État québécois que des règles fondamentales qui guident notre société, qui sont à la base de la démocratie, des droits humains ? l'intimidation va contre les droits humains, M. le Président ? donc qui n'a rien de banale. Et je souhaite que le ministre ne banalise pas cette situation.

Donc, plus particulièrement sur Me Bazin. Tout d'abord, y a-t-il ? et, moi, vous savez, je viens des relations de travail ? un rapport de médiation? Y a-t-il eu rapport à qui que ce soit, au ministre? Un rapport écrit évidemment, parce qu'un médiateur se doit de faire un rapport écrit. Alors, y a-t-il eu ce rapport?

Deux: Qui a-t-il rencontré? Ça, c'est important. Précisément, j'aimerais savoir du ministre qui monsieur... Me Bazin, je crois, a rencontré dans les différentes médiations qu'il a faites. Et ça démontre, c'est important... Par qui il a rencontré, on est capable de savoir aussi quel mandat lui a été véritablement donné. Je pense que c'est important, pour l'Assemblée, de le savoir et aussi les citoyens du Québec.

Et ces questions vont revenir. Je les pose au ministre, elles vont revenir régulièrement: Quand les a-t-il rencontrés? À quel moment? Depuis le moment où on lui a donné le mandat, qu'est-ce qu'il a fait? Qui a-t-il rencontré dans des délais précis? Je veux le savoir. Et, comme cette personne est payée avec nos impôts et nos taxes, je pense qu'il est important de le savoir. Et encore là, bien qu'il y a eu, selon toute évidence, un échec de cette médiation, il reste quand même que cette personne doit rendre compte de son travail.

Évidemment, j'aimerais aussi savoir combien il a été payé. Quel était son taux horaire? Est-ce qu'il a produit des notes d'honoraires? Est-ce qu'on a les montants qui lui ont été versés jusqu'à maintenant? Je pense que c'est important. Le ministre se doit de répondre à cette question très précise.

Et la dernière, c'est: À l'étape où on se parle aujourd'hui, M. le Président, Me Bazin a-t-il encore un mandat? Et, s'il en a un, à la lumière des événements que nous avons aujourd'hui, quel est précisément ce mandat?

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, M. le député de Chicoutimi. M. le ministre, pour vos cinq minutes de réplique.

M. Jacques Chagnon

M. Chagnon: D'abord, je voudrais évidemment remercier le député de Chicoutimi de m'avoir invité à ce débat de fin de séance. Je présume, puis c'est toujours un peu... Quand on a un peu d'expérience des deux côtés de la Chambre, on sait qu'il arrive parfois que, sur le plan pédagogique, c'est bon au moins de pouvoir démontrer à ses collègues comment on fait des débats de fin de séance. Et puis, à partir du moment où on en fait soi-même, on est capable de dire aux autres: Faites-en, vous autres aussi.

Et c'est très correct, très correct parce que le débat de fin de séance nous permet justement de clarifier des objets qui, pendant une période de questions comme celle que nous avons connue cet après-midi et où, vous vous en souviendrez, M. le Président, nous avons eu la question un peu à la fin de la période de questions, donc on n'a pas pu... Le député de Chicoutimi n'a pas pu revenir en question additionnelle. Et donc, évidemment, il me demande de faire cet exercice qui est tout à fait sain encore une fois et qui est un exercice qui me plaît, parce que d'abord je me plais dans les institutions parlementaires, alors je n'ai pas aucun problème à être ici ce soir.

Pour reprendre... Je voudrais reprendre quelques-unes des interrogations du député de Chicoutimi. La première, évidemment il s'interroge puis il s'interrogeait, cet après-midi, en ce rôle de Me Bazin et le rôle de Phil Fontaine. Il s'en souviendra probablement que M. Fontaine, grand chef de l'Association des premières nations, avait été demandé pour être un médiateur. Et M. Bazin est-il un médiateur ou pas un médiateur? Parce que dans le fond j'ai utilisé moi-même le mot «médiateur», vous avez lu les galées tout à l'heure. Puis, quand on lit les galées puis quand on se relit, on trouve ça moins joli que quand on le dit probablement, mais une chose est certaine, c'est que le rôle de M. Bazin, d'abord ça a été d'être le porte-parole, le porte-parole privilégié, je dirais, politique à l'égard de la relation entre le gouvernement du Québec et M. Gabriel à la demande de James Gabriel.

James Gabriel a ce même genre de... puis c'est probablement vrai dans toutes les communautés amérindiennes. J'avoue que j'ai connu un peu mieux celle de Kanesatake, depuis les trois derniers mois, que la plupart des autres. Mais, dans le cas de Kanesatake, M. James Gabriel, chef du Conseil de bande, a un émissaire... je le qualifie... j'ai dit «médiateur» cet après-midi, je dis «émissaire» tout de suite, là, mais, on se comprendra, un porte-parole politique, par exemple, du gouvernement fédéral, qui est M. Eric Maldoff, qui a fait ce travail de lien entre le gouvernement fédéral, les autorités politiques fédérales, et le Conseil de bande de Kanesatake. Et, dans notre cas et comme il nous demandait quelqu'un, nous avons nommé M. Jean Bazin.

Alors, évidemment le rôle de M. Bazin puis le mandat qu'il a eu, c'est effectivement de faire ce rapport-là entre les autorités politiques du gouvernement du Québec et le Conseil de bande. Et un autre, sur le volet policier, par exemple ? et je présume que c'est un des aspects qui intéressent le député de Chicoutimi ? c'est effectivement la mise en place de la nouvelle entente tripartite, gouvernement du Canada, gouvernement du Québec et Conseil de bande, sur laquelle M. Bazin a eu à travailler. Son mandat est plus large évidemment, dans le sens qu'il doit aussi s'intéresser et s'occuper à faire en sorte que de nouvelles... éventuellement, là, qu'on puisse se rendre le plus près possible... qu'on puisse traverser ces événements-là et qu'on puisse effectivement regarder éventuellement tout ce qu'on pourrait faire pour améliorer la situation que l'on connaît à Kanesatake en termes, même, d'institutions, sur le plan public.

Le mandat de M. Bazin, sauf erreur, se termine le 1er juillet 2004. La question que le député de Chicoutimi mentionnait précédemment, là, dans son laïus d'il y a quelques minutes, il demandait: À quel intervalle Me Bazin a-t-il été au dossier? Moi, je peux vous dire que, dans les dernières semaines... Et puis on s'est parlé presque tous les jours en téléphone conférence. Il est lui-même en téléphone conférence avec les autorités politiques du Conseil de bande. Il est à même de rencontrer le chef Gabriel à plusieurs reprises. Il fait partie du comité de liaison pour la mise en place de l'organisation et du traité multipartite, là, du traité tripartite, alors c'est le rôle que joue effectivement, spécifiquement, M. Bazin.

L'autre question, c'était les honoraires de M. Bazin? Bien, c'est les honoraires qu'on reçoit généralement pour un avocat de ce niveau-là. Je pense que c'est quelque chose comme 200 $ de l'heure. C'est le montant que, disons, on reçoit et qui est octroyé par le Conseil du trésor évidemment, comme il se doit.

n(18 h 40)n

Alors, c'est grosso modo le modèle de fonctionnement dans lequel nous avons travaillé, et, comme vous savez, bien on a réussi... Je dois compléter, alors je dis tout simplement que j'ai tenté de répondre aux questions du député de Chicoutimi le plus aisément possible et le plus facilement possible.

Le Vice-Président (M. Gendron): Merci, M. le ministre. M. le député de Chicoutimi, pour votre deux minutes de réplique.

M. Stéphane Bédard (réplique)

M. Bédard: Merci, M. le Président. Vous savez, quand on veut régler un dossier, il faut être précis dans les objectifs que nous visons. Et, dans ce cas-ci, le flou jusqu'à maintenant, et je vous le dirais en tout respect pour le ministre, le flou ne nous a pas aidés et a plutôt fait en sorte de laisser place à plusieurs... carrément à plusieurs écartements. Seulement... Entre autres, je regarde actuellement les négociations que nous avons eues avec la Commission de police, alors qu'on voit maintenant que certaines mises en accusation sont sur des membres qui étaient membres de cette Commission de police.

Alors, qu'est-ce que ça veut dire? Ça veut dire que normalement il faut agir avec un objectif très précis, et les gens que nous mandatons doivent avoir aussi un objectif précis. Et, moi, je dis au ministre la chose suivante. D'abord, si le mandat du médiateur est d'essayer de conclure l'entente, l'entente est terminée. L'application de l'entente relève du ministre. Et je le dis amicalement au ministre: Normalement, l'application de l'entente relève de lui personnellement, et il doit s'assurer, lui, personnellement, que les voeux et les souhaits que le chef Gabriel demande soient entendus de sa part, et lui, personnellement, sans aucun intermédiaire. Tout intermédiaire ferait en sorte qu'il sape lui-même son travail, lui, personnellement, lorsqu'il y a des problématiques. Il n'a pas besoin de médiateur lorsqu'il y a des demandes à la Sûreté... Quand la police de Kanesatake fait des demandes à la police de la Sûreté du Québec, c'est une autre chose. Quand le chef, lui, fait une demande au ministre de la Sécurité publique, ça en est une autre, il n'a pas besoin d'intermédiaire, je ne le pense pas.

Ce que je dis encore au ministre... Et j'aimerais peut-être avoir des choses précises. Le rapport, nous l'aurons sûrement, le rapport écrit. J'imagine qu'il va faire un rapport écrit avec vraiment les dates précises de rencontre, qu'est-ce qu'il a fait, les honoraires et tout ça, je pense que c'est important.

L'autre élément, et je le dis encore au ministre, c'est le conseil que je lui donne amicalement: Il faut qu'il donne un échéancier précis. Il faut qu'il dise, avant que des élections se tiennent, quelles sont les conditions favorables à ces élections, et de le dire pour que les gens qui sont en face et qui ne respectent pas les lois sachent qu'ils doivent les respecter.

Alors, le rétablissement de la police, l'accusation de ceux et celles qui ont brûlé la maison Gabriel et le retour de Gabriel, ce sont les conditions imparables et obligatoires au retour de la loi sur le territoire de Kanesatake.

Ajournement

Le Vice-Président (M. Gendron): Merci, M. le député de Chicoutimi. Comme nos travaux sont terminés, les débats de fin de séance sont terminés, j'avise les membres de cette Chambre que nos travaux sont ajournés à demain, 10 heures.

(Fin de la séance à 18 h 43)