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Version finale

37th Legislature, 1st Session
(June 4, 2003 au March 10, 2006)

Monday, December 1, 2003 - Vol. 38 N° 33

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Table des matières

Affaires courantes

Affaires du jour

Ajournement

Journal des débats

(Dix heures six minutes)

Le Président: Alors, Mmes, MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants, tout en ayant une pensée pour notre ex-collègue M. Paul Berthiaume, qui a été député de La Prairie, qui est décédé.

Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.

Affaires courantes

Aux affaires courantes aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles.

Présentation de projets de loi

Présentation de projets de loi. M. le leader de l'opposition officielle.

M. Boisclair: M. le Président, l'article b du feuilleton.

Projet de loi n° 205

Le Président: À l'article b du feuilleton, j'ai reçu le rapport du directeur de la législation sur le projet de loi n° 205, Loi concernant le Village nordique de Kuujjuaq et le Village nordique de Tasiujaq. Le directeur de la législation a constaté que les avis ont été faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé. Je dépose ce rapport.

Mise aux voix

En conséquence, M. le député d'Ungava propose que l'Assemblée soit saisie du projet d'intérêt privé n° 205, Loi concernant le Village nordique de Kuujjuaq et le Village nordique de Tasiujaq. Est-ce que cette motion est adoptée? Adopté. M. le leader du gouvernement.

Renvoi à la commission
de l'aménagement du territoire

M. Dupuis: Alors, je fais motion, M. le Président, pour que ce projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement du territoire et pour que le ministre des Affaires municipales, du Sport et du Loisir en soit membre.

Mise aux voix

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée? Adopté.

Dépôt de documents

Dépôt de documents. M. le ministre de l'Éducation.

Rapports annuels du Comité sur les affaires
religieuses et du Comité d'agrément
des programmes de formation à l'enseignement

M. Reid: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 2002-2003 du Comité sur les affaires religieuses et le rapport annuel 2002-2003 du Comité d'agrément des programmes de formation à l'enseignement.

Le Président: Ces documents sont déposés.

Il n'y a pas de dépôt de rapports de commissions.

Dépôt de pétitions

Dépôt de pétitions. M. le député de Drummond.

Préserver et développer le parc d'habitations
à loyer modique, et maintenir les loyers actuels

M. Jutras: Oui, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 95 pétitionnaires, des locataires d'habitations à loyer modique du comté de Drummond.

Les faits invoqués sont les suivants...

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement? Elle est conforme? C'est bien, vous pouvez poursuivre.

M. Jutras: Alors, «les faits invoqués sont les suivants:

«Attendu que le gouvernement du Québec révise ses programmes en habitation et que certaines mesures envisagées menacent directement l'ensemble des familles et des personnes âgées habitant dans les HLM;

«Attendu que le gouvernement du Québec a sabré de 25 % dans les budgets alloués en 2003 à la rénovation des HLM et coupé de 2,3 % leur budget de fonctionnement;

«Attendu que le parc de logement social au Québec constitue un patrimoine précieux pour tous les citoyens et citoyennes à revenus modestes et qu'il est un rouage important de notre filet de protection sociale;

«Attendu que les HLM sont une partie importante de la solution à la pénurie de logements que connaît le Québec;

«Attendu qu'il serait injuste que les plus pauvres de notre société fassent les frais de la baisse des impôts promise par le gouvernement;

«L'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous demandons à l'Assemblée nationale de bien vouloir s'assurer que le gouvernement du Québec prenne des mesures énergiques afin de conserver la propriété de ses 65 000 logements à loyer modique, protéger et rénover son parc de logements à loyer modique, maintenir les loyers à 25 % des revenus des locataires à faibles revenus, permettre la réalisation de nouveaux logements publics.»

Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition.

Le Président: Alors, cette pétition est déposée. M. le député de Robert-Baldwin.

M. Marsan: Merci, M. le Président. Je demande l'autorisation de déposer une pétition non conforme.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement? Consentement. Alors, M. le député de Robert-Baldwin.

M. Marsan: Alors, je dépose l'extrait d'une pétition non conforme adressée à l'Assemblée nationale, signée par 49 pétitionnaires, citoyens et citoyennes du Québec de la circonscription de Robert-Baldwin. La désignation: location d'habitations à loyer modique du comté de Robert-Baldwin.

n(10 h 10)n

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Attendu que le gouvernement du Québec révise ses programmes en habitation et que certaines mesures envisagées menacent directement l'ensemble des familles et des personnes âgées habitant dans les HLM;

«Attendu que le gouvernement du Québec a sabré de 25 % dans les budgets alloués en 2003 à la rénovation des HLM et a coupé de 2,3 % leur budget de fonctionnement;

«Attendu que le parc de logement social au Québec constitue un patrimoine précieux pour tous les citoyens et les citoyennes à revenus modestes et qu'il est un rouage important de notre filet de protection sociale;

«Attendu que les HLM sont une partie importante de la solution à la pénurie de logements que connaît le Québec;

«Attendu qu'il serait injuste que les plus pauvres de notre société fassent les frais de la baisse des impôts promise par le gouvernement;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous, soussignés, demandons à l'Assemblée nationale du Québec de bien vouloir s'assurer que le gouvernement du Québec prenne des mesures énergiques afin de conserver la propriété de ses 65 000 logements à loyer modique, protéger et rénover son parc de logements à loyer modique, maintenir les loyers à 25 % des revenus des locataires à faibles revenus, permettre la réalisation de nouveaux logements publics.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition. Merci, M. le Président.

Le Président: Alors, cette pétition est déposée. Mme la députée de Rimouski.

Mme Charest (Rimouski): Merci, M. le Président. Je demande le consentement de la Chambre pour déposer une pétition non conforme.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement? Il y a consentement. Mme la députée de Rimouski.

Mme Charest (Rimouski): Merci. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 1 269 pétitionnaires, locataires d'habitations à loyer modique du comté de Rimouski.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Attendu que le gouvernement du Québec révise ses programmes en habitation et que certaines mesures envisagées menacent directement l'ensemble des familles et des personnes âgées habitant dans les HLM;

«Attendu que le gouvernement du Québec a sabré de 25 % dans les budgets alloués en 2003 à la rénovation des HLM et coupé 2,3 % leur budget de fonctionnement;

«Attendu que le parc de logement social au Québec constitue un patrimoine précieux pour tous les citoyens et toutes les citoyennes à revenus modestes et qu'il est un rouage important de notre filet de protection sociale;

«Attendu que les HLM sont une partie importante de la solution à la pénurie de logements que connaît le Québec;

«Attendu qu'il serait injuste que les plus pauvres de notre société fassent les frais de la baisse des impôts promise par le gouvernement;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous demandons à l'Assemblée nationale de bien vouloir s'assurer que le gouvernement du Québec prenne des mesures énergiques afin de conserver la propriété de ses 65 000 logements à loyer modique, protéger et rénover son parc de logements à loyer modique, maintenir les loyers à 25 % des revenus des locataires à faibles revenus, permettre la réalisation de nouveaux logements publics.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition. Merci, M. le Président.

Le Président: Alors, cette pétition est déposée. M. le député de Hull.

M. Cholette: M. le Président, je sollicite le consentement de cette Assemblée pour déposer une pétition non conforme.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement? Consentement. M. le député de Hull.

M. Cholette: M. le Président, je dépose donc l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 277 locataires d'habitations à loyer modique du comté de Hull.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Attendu que le gouvernement du Québec révise ses programmes en habitation et que certaines mesures envisagées menacent directement l'ensemble des familles et des personnes âgées habitant dans les HLM;

«Attendu que le gouvernement du Québec a sabré 25 % dans les budgets alloués en 2003 à la rénovation des HLM et coupé 2,3 % de leur budget de fonctionnement;

«Attendu que le parc de logement social au Québec constitue un patrimoine précieux pour tous les citoyens et citoyennes à revenus modestes et qu'il est un rouage important de notre filet de protection sociale;

«Attendu que les HLM sont une partie importante de la solution à la pénurie de logements que connaît le Québec;

«Attendu qu'il serait injuste que les plus pauvres de notre société fassent les frais de la baisse des impôts promise par le gouvernement;

«L'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous demandons à l'Assemblée nationale de s'assurer que le gouvernement du Québec prenne des mesures énergiques afin de conserver la propriété de ses 65 000 logements publics, de protéger et rénover son parc de logements publics, de maintenir les loyers à 25 % de revenus des locataires à faibles revenus et de permettre la réalisation de nouveaux logements publics.»

M. le Président, je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président: Cette pétition est déposée.

Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.

Nous en sommes maintenant à la période de questions...

M. Boisclair: M. le Président.

Le Président: Oui.

M. Boisclair: ...vendredi dernier, le leader du gouvernement nous a convoqués dans une session spéciale. J'ai bien compris que la motion adoptée s'adressait aussi aux ministres du gouvernement. Il en manque aujourd'hui sept, M. le Président.

Je voudrais savoir du leader du gouvernement où est en particulier la présidente du Conseil du trésor? On a été avisé de quelques absences pour raison de maladie, ce qui se comprend. Toutefois, nous n'avons pas été avisés de l'absence de la présidente du Conseil du trésor. Nous notons qu'à nouveau pour ses consultations, la ministre déléguée aux Régions est encore absente de l'Assemblée. Alors, où sont les ministres, M. le Président?

Le Président: S'il vous plaît, M. le leader, si vous voulez poser votre question. Si vous voulez poser votre question. Tout va bien. M. le leader du gouvernement.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: Alors, M. le Président, comme ça a toujours été l'habitude dans toutes les Assemblées nationales que j'ai fréquentées, soit du haut des galeries ou du plancher, nous avons dûment avisé, comme c'était le cas d'ailleurs lorsque le gouvernement précédent était... lorsque nous avons remplacé le gouvernement précédent, qui nous avisait à l'occasion de l'absence d'un certain nombre de ministres pour des raisons qui sont sérieuses. Nous faisons la même chose. Nous l'avons fait au mois de juin, nous le faisons maintenant.

Les absences de ministres ont été communiquées à l'opposition officielle, je peux les répéter s'il le veut. En ce qui concerne la présidente du Conseil du trésor, on m'a avisé ce matin qu'elle est à Trois-Rivières en tournées qui sont relatives à ses fonctions. C'est la seule, effectivement, absence que nous n'avions pas communiquée à l'opposition officielle, je m'en excuse. Je l'ai appris moi-même ce matin, et, aussitôt que je l'apprends, je la communique.

Pour ce qui concerne, pour ce qui concerne, M. le Président, l'absence des autres ministres, y compris la ministre déléguée au Développement régional, nous avisons régulièrement l'opposition officielle de ces absences-là. Et c'est la première fois, d'ailleurs, je le souligne, c'est la première fois que le leader de l'opposition se lève pour poser des questions sur ce sujet-là, de telle sorte que je suis obligé d'en conclure que tout ce qui devait être fait a été fait par le gouvernement à la satisfaction de l'opposition officielle.

Une voix: ...

Le Président: Oui, sans entreprendre un débat, mais je vais vous permettre une question, M. le leader.

M. Boisclair: M. le Président, il ne faudrait pas sauter trop vite aux conclusions. Là, il y a une barre qui a été franchie, il en manque sept. Et est-ce que le leader...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! Il est le privilège du leader de l'opposition officielle de poser, avant la...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît, là! M. le ministre, là. S'il vous plaît! Alors, il est de tradition que le leader de l'opposition officielle puisse poser, avant la période de questions, une question au leader au sujet de la présence des ministres, mais je ne veux pas que ce soit un débat. Alors, votre question de règlement.

M. Dupuis: Alors, c'est exactement ce que j'avais l'intention de vous souligner, M. le Président. Le leader de l'opposition officielle a parfaitement le droit, et je suis d'accord avec ça, de poser les questions pertinentes qu'il veut poser sur la présence ou l'absence des ministres. Il me semble avoir répondu à la satisfaction du président à la question, mais il ne peut y avoir à ce stade-ci de débat sur la question.

Une voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Alors, si vous avez une question additionnelle, je vais vous la permettre.

M. Boisclair: Est-ce que le leader du gouvernement pourrait nous dire quand la ministre déléguée aux Régions va être à l'Assemblée? Sa job, là, c'est de répondre à nos questions, c'est de siéger ici plutôt que de faire...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît!

M. Boisclair: ...lundi, ici, à l'Assemblée nationale, de façon exceptionnelle, il y a sept ministres qui sont absents parce qu'ils font des tournées d'information...

Le Président: S'il vous plaît! M. le leader...

Des voix: ...

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle, ce n'est pas à la présidence de statuer ou de juger. Alors, rapidement.

M. Dupuis: Alors, vous constaterez, M. le Président, que le ton du leader du gouvernement est différent du ton du leader de l'opposition officielle. Je vais vous expliquer pourquoi puis je vais répondre à sa question. Je commence à être habitué aux tours de piste que leader de l'opposition cherche à faire en début de chaque semaine. Et je veux le rassurer, ça me permet de garder un meilleur calme lorsqu'il pose ces questions-là.

n(10 h 20)n

Je veux répondre à la question précise qu'il m'a posée. Le leader de l'opposition officielle le sait très bien, le sait très bien, le ministre responsable du Développement économique est présent en Chambre pour répondre à toutes les questions que les députés de l'opposition ou les députés indépendants souhaiteraient poser sur ce sujet-là. Et comment peut-on reprocher à la ministre déléguée de vouloir informer la population du Québec?

Questions et réponses orales

Le Président: Et, sur ça, nous allons passer à la période de questions et des réponses orales. Et je reconnais M. le chef de l'opposition officielle.

Effets sur la société québécoise
des récentes décisions gouvernementales

M. Bernard Landry

M. Landry: M. le Président, ce qui pourrait nous consoler de l'absence d'un certain nombre de ministres, c'est si on avait l'assurance qu'ils sont sur le terrain pour éteindre des feux et non pas pour continuer à en allumer d'autres.

Mais ma question s'adresse à la vice-première ministre. Depuis quelques jours, 30 000 personnes ont défilé sur la colline parlementaire, devant notre Assemblée nationale, après quelques mois seulement de gouvernement. C'est une chose qui n'avait jamais été vue, parce que la population, généralement, cherche à donner une chance aux nouveaux élus. Nous ne sommes pas en présence de cette tradition, cette fois-ci, dont Jean Lesage aurait profité, aussi bien que Daniel Johnson, aussi bien que nos propres gouvernements.

Les projets ne passent pas. Le gouvernement va-t-il s'en apercevoir? 45, Code du travail, sans consultation, prise des syndicats de front, attaque antisyndicale dans leur formation; exclure la société civile des organismes régionaux, sans consultation des bénévoles, des gens qui travaillaient pour le développement économique des régions; hausser les tarifs de garde en milieu scolaire, en CPE, puis, après ça, dire: On va recommencer à zéro ? puisqu'on parle de résultats scolaires, là-dessus, je mettrais zéro; soustraire 25 000 personnes à la Loi sur la formation de la main-d'oeuvre sans avoir consulté la Commission des partenaires.

Alors, ma question, M. le Président. La paix sociale, c'est difficile à construire, ça se fait dans le respect, dans le dialogue. Le présent gouvernement, en un temps record, a rompu la paix sociale. Quelle est sa vision pour la rétablir?

Le Président: Alors, Mme la vice-première ministre.

Mme Monique Gagnon-Tremblay

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, je compte sur le comportement responsable du chef de l'opposition pour ne pas, justement, allumer les feux. Vous savez, M. le Président...

Des voix: ...

Le Président: Mme la vice-première ministre.

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, les changements que le gouvernement propose sont des changements qui sont absolument nécessaires, et nous prenons les moyens, justement, pour répondre aux attentes de la population du Québec.

Le Parti québécois, M. le Président, a toujours refusé de faire ces changements, mais, en même temps aussi, il nous a laissé une impasse budgétaire, une impasse budgétaire de 4,3 milliards qui est réelle et un déficit zéro, M. le Président, qui est virtuel, qui est imaginaire et virtuel. Et ça, le chef de l'opposition le sait très bien, puisque non seulement il a été ministre des Finances, mais il était également premier ministre, à l'époque.

Alors, M. le Président, les finances de l'État sont dans une situation tout à fait désastreuse. Et, quand on regarde l'impasse budgétaire plus ce qui nous attend pour l'avenir, M. le Président, on n'a pas le choix, il faut faire ces changements. Et, lorsque nous faisons des changements, ça dérange, M. le Président, parce qu'on est habitués à un certain statu quo, on est confortables dans ce statu quo. Mais le gouvernement, M. le Président, c'est vous, c'est moi, c'est les gens ici, dans cette Chambre, et c'est la population du Québec qui paie jour après jour. Il faut se donner cette marge de manoeuvre, il faut faire ces changements, M. le Président, et nous allons poursuivre dans cette voie.

Le Président: En question principale, M. le chef de l'opposition officielle.

Dépôt des prévisions budgétaires
pour l'année 2004-2005

M. Bernard Landry

M. Landry: Pour essayer d'obtenir des réponses un peu plus consistantes et un peu moins illogiques et paradoxales. Quand on se réclame du rapport Breton, on ne vient pas dire quelque temps après que les cinq déficits zéro étaient des déficits virtuels. M. Breton était le Vérificateur général, il nous a félicités pour nos méthodes comptables et la révolution que nous y avons faite.

Des voix: ...

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.

M. Landry: Alors, ma question et le préambule auquel j'ai droit, puisque c'est une principale, ça tourne autour de 3,6 milliards d'engagements que le futur premier ministre, aujourd'hui premier ministre, a pris en campagne électorale, 3,6, 3 600 millions de dollars pour 2004-2005. Dès son arrivée au pouvoir, évidemment, on a vu les experts mêmes qui avaient conseillé le gouvernement mettre en doute le cadre financier. Ce cadre financier évidemment ne tenait pas et tient encore moins aujourd'hui. Puis, en plus, on avait pris des engagements de transparence.

Au moins, André Bourbeau, qui nous a laissé un déficit de 6 milliards, constaté par le Vérificateur général, dans une seule année, avait eu le courage de faire des prévisions. Tous les gouvernements font des prévisions. Ontario, Ottawa fait des prévisions. L'actuel gouvernement n'en a pas fait, mais il en a promis. Et je cite le ministre des Finances, un peu plus tard, après le dépôt du budget: On a pris l'engagement, dès cet automne, en septembre ou octobre, dès qu'on sera prêts, à présenter nos prévisions, à ce que nous entendons faire pour 2004-2005.

Le mois d'octobre est fini, M. le Président, tout le monde le sait. Qu'attend le ministre des Finances pour avoir la décence de suivre les traditions démocratiques et présenter des prévisions pour les mois qui viennent? On ferme les livres dans quatre mois.

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Yves Séguin

M. Séguin: Merci, M. le Président. Oui, je vais répondre à la question du chef de l'opposition, question d'ailleurs qui me surprend, puisque l'ancien gouvernement n'a pas abusé beaucoup des explications publiques pour informer les contribuables sur l'état des finances publiques. La première chose qu'on peut se rappeler, c'est qu'il s'est bien gardé d'expliquer à la population que, depuis cinq ans, la dette a augmenté de 14 milliards de dollars. Elle est de 112 milliards au moment où je vous parle. Nous allons payer, en intérêts sur la dette, à peu près les deux tiers de l'équivalent du budget du ministère de l'Éducation.

Et ça, l'ancien chef de l'opposition, il ne se le rappelle pas puis il ne veut pas en parler, mais, nous, ici, là, on ne fera pas juste en parler, on va le gérer parce que c'est les contribuables qui paient les taxes et qui font face à un avenir très sombre. Dans les prochaines années, nous avons à gérer une situation où l'ancien gouvernement a rempli ses budgets de pages blanches, et c'est ça qu'on découvre aujourd'hui.

Oui, je vais répondre à la question de cette façon, M. le Président, je vais terminer rapidement. S'il y a une raison pour laquelle on ne peut pas rapidement déposer les perspectives pour 2004, c'est simplement parce qu'à toutes les semaines on découvre des choses que l'ancien gouvernement...

Des voix: ...

Le Président: En question additionnelle, M. le chef de l'opposition officielle.

M. Bernard Landry

M. Landry: Je ne m'attendais pas à ça, M. le Président, mais le ministre des Finances vient de nous faire un formidable compliment. Il dit que la dette a monté de 14 milliards en 10 ans, alors qu'André Bourbeau nous l'a fait monter en un seul soir de 6 milliards, pour un exercice financier. Alors, ce seraient des louanges extraordinaires.

Ce qui me déçoit, par ailleurs, c'est que le ministre des Finances n'a pas l'air à connaître nos règles comptables ni à savoir la différence entre les dollars courants et des dollars constants, ce qui efface déjà une partie de la chose, ni les actifs ni...

Le Président: ...règlement.

M. Dupuis: La question de règlement est la suivante, M. le Président. Je cherche dans le règlement où le gouvernement...

Des voix: ...

M. Dupuis: ...

Le Président: Ce n'est pas une question de règlement. Ce n'est pas une question de règlement. M. le leader du gouvernement, si vous voulez poser des questions de règlement, je n'ai aucun problème, mais que ce soient des questions de règlement. Alors, si vous voulez poser votre question en question additionnelle.

n(10 h 30)n

M. Landry: Alors, on a eu le droit, là, à toute espèce de mouvement circulaire, alors que ma question était simple. Nous n'avons pas de prévisions, comme tous les gouvernements occidentaux en font. Même si le ministre voulait dire que sa situation est exceptionnelle, etc., il ne peut pas être à l'encontre de tous les pays de l'OCDE, là, il faudrait qu'il nous explique pourquoi.

Alors, ma question est simple: Le mois de décembre est arrivé, il avait promis au plus tard en novembre, quand va-t-il nous donner des prévisions et de la transparence?

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Yves Séguin

M. Séguin: Oui. M. le Président, je répète que la question du chef de l'opposition est très surprenante, très surprenante parce que ce gouvernement... l'ancien gouvernement parle de transparence et d'information au public. J'ai présenté la synthèse de l'ensemble des revenus et dépenses du gouvernement au mois d'octobre, il est prévu que nous la fassions en décembre, et elle aura lieu en décembre.

Mais où est l'information de l'ancien gouvernement relativement aux pertes accumulées de la Société générale de financement? Où est l'information sur la Société de l'assurance automobile du Québec? Dans l'ancien budget présenté par l'ancien gouvernement le 11 mars dernier, où sont les renseignements concernant les Innovatech, qui ont perdu beaucoup d'argent, et que nous avons à gérer présentement, et à rendre publics dans la prochaine synthèse? Parce que, je vais le dire tout de suite, la prochaine synthèse, elle va être complète puis elle va donner l'information sur tous ces oublis.

Le Président: En question principale, M. le député de Rousseau.

Réalisation du cadre financier
prévu en matière de santé

M. François Legault

M. Legault: Oui. M. le Président, j'ai peut-être la réponse pourquoi on n'a pas de prévisions pour 2004-2005. M. le Président, on se souviendra tous, lors de la campagne électorale qu'on vient de vivre, de la fameuse promesse, la plus importante des libéraux, d'augmenter de façon majeure les budgets de la santé. En fait, on parlait de 2,2 milliards d'augmentation en 2004-2005. M. le Président, pour y arriver, le Parti libéral du Québec prévoyait dans son cadre financier une augmentation des transferts du gouvernement fédéral de 1 milliard de dollars ? c'est noir sur blanc dans leur document ? une augmentation de 1 milliard de dollars en 2004-2005. Or, M. le Président, si je comprends les réponses du ministre des Finances et si on fait des estimés, on peut s'attendre à une baisse, M. le Président, en 2004-2005, de 1,3 milliard de dollars des transferts du gouvernement fédéral.

Le Président: Votre question.

M. Legault: Ça fait une différence de 2,3 milliards de dollars entre le cadre financier des libéraux et la réalité.

M. le Président, est-ce que le ministre des Finances peut nous confirmer qu'il s'est trompé dans son cadre financier et qu'il ne pourra pas remplir sa plus importante promesse, c'est-à-dire des réinvestissements majeurs en santé?

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Yves Séguin

M. Séguin: Merci, M. le Président. Quand même intéressant, lorsqu'on parle du budget de la santé, de rappeler, M. le Président, que, le 12 juin dernier, on a donné la plus grosse augmentation au budget de la santé, soit 19,1 milliards, 7 % de croissance. C'est le budget le plus élevé de l'histoire du Québec.

Et le gouvernement avait fait des coupures à la santé. De 1996 à 1997, 1997 à 1998, 1998 à 1999, on avait coupé une moyenne de 300, 400 millions par année. Ce qui veut dire que le temps de récupérer ces coupures au ministère de la Santé, faites par l'ancien gouvernement, prendrait à peu près six ans au rythme actuel, à 7 % de croissance, pour juste revenir à ce que c'était sous l'ancien régime. Alors, je pense que, à la santé, cette année, on a fait un effort considérable; ce n'est pas terminé.

Et je dirais que, sur la question de la péréquation, le meilleur chiffre que j'ai, c'est celui qu'avait présenté l'ancien gouvernement, qui représentait, pour 2004... En parlant de perspectives et de prévisions, c'en est une qui est restée bonne, parce qu'elle est sous le couvert de la Loi de l'administration financière; lorsqu'on présente un budget, même s'il n'est pas voté, les chiffres sont toujours assujettis aux comptes publics, de sorte que le meilleur chiffre que nous avons, c'est celui présenté par l'ancien gouvernement.

Le Président: En question additionnelle, M. le député de Rousseau.

M. François Legault

M. Legault: M. le Président, est-ce que je dois comprendre du ministre des Finances que les chiffres qui ont été présentés par le Parti québécois pour 2004-2005 sont bons? C'est ça qu'il nous dit. O.K.? Il dit qu'il se fie à ces chiffres-là.

Et, M. le Président, est-ce que le ministre des Finances comprend que, nous, on n'a pas promis tout à tout le monde, qu'on n'a pas promis des réinvestissements majeurs en santé, des baisses d'impôt?

Est-ce qu'il comprend aussi, M. le Président, que, nous, ça fait longtemps qu'on le sait qu'il n'y a rien à faire avec le fédéral? C'est pour ça qu'on défend la souveraineté du Québec, M. le Président.

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Yves Séguin

M. Séguin: Merci, M. le Président. Je peux assurer, je peux assurer les collègues ici que notre cadre financier est bon. Nous traversons, nous traversons une turbulence économique ? je pense que toute l'Amérique du Nord le reconnaît ? mais les forces économiques du Québec sont bonnes.

J'ai annoncé, j'ai révélé, la semaine passée, que nous avions atteint certains records; un dernier qu'il est intéressant de souligner ce matin: le taux d'emploi. Le taux d'emploi, en 2002, sous l'ancien gouvernement, avait atteint un record d'au-delà de 65 %, au Québec, ce qui est historiquement très élevé; il est tout à l'honneur de l'ancien gouvernement. Eh bien, depuis une semaine, nous venons de battre ce record; le taux d'emploi est le plus élevé au Québec depuis 10 ans.

Le Président: En question principale... En question additionnelle, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Louise Harel

Mme Harel: Merci, M. le Président. Est-ce que le ministre des Finances reconnaît que c'est avec l'argent du fédéral arraché par le précédent gouvernement qu'il a pu réinvestir dans la santé, dans son budget, cette année, et qu'il a même utilisé la réserve de 800 millions de l'an prochain, et qu'il a utilisé donc 1,6 milliard à d'autres... pour 300 millions de détournement à d'autres fins que la santé?

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Yves Séguin

M. Séguin: Merci, M. le Président. Comme gouvernement, nous gérons l'ensemble des taxes des contribuables, et, moi, je suis particulièrement heureux que nous ayons pu investir en santé, ce que nous avons fait. 19,1 milliards, c'est la somme la plus importante jamais, jamais investie à la santé. C'est une somme, aussi, qui n'est pas suffisante, on le reconnaît, et nous allons tout faire pour faire mieux, certainement, et l'année n'est pas terminée. Lors du prochain budget, qui sera déposé ce printemps, nous jugerons, et à ce moment-là vous pourrez juger de l'ensemble des moyens que nous disposons.

Le Président: Alors, en dernière question additionnelle, M. le député de Rousseau.

M. François Legault

M. Legault: Oui. M. le Président, est-ce que le ministre des Finances peut répondre à la question? Dans le cadre financier des libéraux, on avait prévu une augmentation des transferts de 1 milliard de dollars. Il y aura, l'année prochaine, une baisse de 1,3 milliard. Il y a une impasse de 2,3 milliards...

Le Président: Votre question.

M. Legault: ...pas à cause du gouvernement du Parti québécois, M. le Président, à cause du gouvernement fédéral.

Le Président: Votre question.

M. Legault: Est-ce qu'il peut répondre à la question, M. le Président?

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Yves Séguin

M. Séguin: Oui. Alors, la réponse se trouve au plan budgétaire présenté le 11 mars, section 3, page 13. Le montant, pour 2004, des transferts fédéraux sera de 7 769 000 000 $. Ça fait six mois que nous discutons ce chiffre avec le gouvernement fédéral, et il semble exact, à moins que nos amis de l'opposition me disent que, lorsqu'ils ont présenté leur budget, c'étaient des chiffres erronés. Mais, si je me fie à la présentation qui a été faite et à notre propre évaluation, c'est relativement exact, et on l'a prévu dans notre budget comme cela.

Le Président: En question principale, Mme la députée de Bourget.

Processus de consultation des citoyens
en matière de réorganisation municipale

Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: Merci, M. le Président. Aujourd'hui débute l'étude du projet de loi sur les défusions, et on ne peut pas dire qu'il s'agisse d'un moment dont il faut se réjouir pour l'histoire du Québec. On peut présumer que le gouvernement libéral souhaite ardemment se sortir du dossier des défusions et clore le dossier de la réorganisation municipale. Mauvaise nouvelle, M. le Président, parce que les premières réactions des leaders défusionnistes vont dans ce sens, et je vous en cite quelques-unes: «Puisque le projet de loi est discriminatoire pour les résidents de l'île de Montréal, on doit aller de l'avant et demander des référendums», «quand on aura notre ville, on ira chercher plus de pouvoirs», ou encore: «Après, une fois qu'on a la ville, on peut aller chercher des champs de compétence au fil des années.»

n(10 h 40)n

M. le Président, est-ce que le ministre se rend compte que ce n'est pas commencé que ça recommence?

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Oui, M. le Président. Loin de moi d'empêcher les gens de penser ce qu'ils veulent, sauf que, comme gouvernement, lorsqu'on dépose un projet de loi, c'est ainsi qu'on s'exprime. Alors, à bon entendeur, salut! Ceux qui veulent lire le projet de loi sauront où nous logeons, mais je n'empêche pas les gens de penser. Je sais que, de l'autre côté, vous avez peut-être tendance à avoir ce petit biais là de temps en temps.

Puisque vous parlez des réactions, effectivement, je peux vous en donner quelques-unes. Le Soleil, ce matin, où on dit: «Le ministre ? en fin de semaine, samedi ? a de toute évidence écouté les suggestions qui lui ont été faites en commission parlementaire. La nouvelle version du projet de loi constitue dans les circonstances un compromis intéressant.» L'UMQ: «Plusieurs modifications présentées par le ministre sont bien accueillies par l'Union. Ces choix du gouvernement dans les circonstances font preuve de sagesse dans la reconnaissance du bien-fondé d'une agglomération forte.»

Et, mieux encore, M. le Président, dans un texte du Soleil, où là on a un peu tout le monde en même temps: «L'ex-maire de L'Ancienne-Lorette, Émile Loranger, et l'ex-mairesse de Sainte-Foy, Andrée Boucher, se sont dits plutôt satisfaits des modifications apportées hier par le ministre des Affaires municipales.»

«Les partisans de la fusion... les partisans de la fusion... les partisans de la fusion...»

Des voix: ...

M. Fournier: ...de le dire si on me laisse parler, M. le Président: «Les partisans de la fusion se disaient également satisfaits des amendements. Le président du conseil de la Chambre des entrepreneurs de Québec, Normand Lessard, estime...

Le Président: Si vous voulez conclure, M. le ministre.

M. Fournier: ... ? je conclus ? estime que le seuil de 35 % représente un incitatif.» Et la Chambre de commerce de Québec, «son président, Patrick Simard, estime que les amendements effectués hier répondent aux attentes des gens d'affaires de la capitale».

Le Président: En question additionnelle, Mme la députée de Bourget.

Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: M. le Président, le ministre a dû chercher à la loupe les commentaires positifs au sujet de son projet de loi.

M. le Président, le gouvernement libéral, avec son engagement permettant les défusions, est dans le trouble. Le gouvernement libéral met le Québec dans le trouble, et les leaders défusionnistes annoncent déjà: «Non seulement nous voulons gagner ces référendums, mais on va demander plus et on va retrouver nos nouvelles villes.»

M. le Président, est-ce que le ministre se rend compte que ce n'est pas encore commencé que ça recommence et que c'est un débat sans fin dans lequel il nous enlisera?

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Oui, M. le Président. Je ne regarde pas ça à la loupe. La Chambre de commerce du Montréal métropolitain disait, vendredi dernier, que «la Chambre souligne le discernement dont a fait preuve le ministre».

Par ailleurs, nous avons aussi d'autres extraits qui peuvent peut-être vous être utiles, à l'égard de l'agglomération ? je pourrais vous en parler tantôt ? à l'égard des règles de consultation. Francine Gadbois se dit en faveur du conseil d'agglomération ? on sait qu'elle est à Boucherville, l'arrondissement Boucherville: «En créant un conseil d'agglomération, les villes défusionnées auront de nouveau un droit de parole.» En cela, elle est accompagnée par la région de Québec, par Émile Loranger, qui dit que, «pour lui, la création d'un conseil d'agglomération, en charge du développement économique notamment, s'avère une excellente idée». Et on pourrait continuer ainsi, M. le Président.

La question est la suivante, dans le fond: Comment fait-on pour faire une consultation, donner la parole aux gens, permettre qu'ils soient écoutés? La meilleure chose, c'est d'ouvrir ses oreilles et de laisser les gens exprimer ce qu'ils ont à dire.

Si la collègue de Bourget ne veut pas entendre rien, l'important pour nous, c'est, lorsqu'on entend tout le monde, d'appliquer ce qui nous semble juste. C'est ce que nous avons fait, mais on va laisser les gens s'exprimer quand même.

Le Président: En question principale, M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

Normes du travail applicables
dans l'industrie du vêtement

M. Maxime Arseneau

M. Arseneau: Merci, M. le Président. Il y a quelques minutes, le chef de l'opposition a fait référence au climat social qui existe au Québec depuis quelques jours, quelques semaines.

Aujourd'hui, M. le Président, ce sont plus de 40 000 hommes et femmes, mais surtout des femmes, à 80 %, du secteur du vêtement qui s'inquiètent de voir le gouvernement ne pas reconduire les normes supérieures prévues dans la Loi sur les normes du travail qui permettaient à ces travailleuses et à ces travailleurs de l'industrie du vêtement d'avoir droit à une certaine garantie quant à leur salaire, quant à leurs conditions de travail. Ça signifierait une baisse de salaire pour les couturières, pour les coupeurs, pour les presseurs.

Justement, M. le Président, qu'est-ce qui prend au gouvernement? Qu'est-ce qui presse le gouvernement de vouloir diminuer les conditions de travail des travailleuses et des travailleurs du Québec, M. le Président?

Le Président: M. le ministre du Travail.

M. Michel Després

M. Després: Merci beaucoup, M. le Président, pour cette question. Je voudrais tout d'abord préciser au moins l'historique des choses, M. le Président. Tout d'abord, il faut se rappeler que c'est l'ancien gouvernement qui a aboli le décret de convention collective dans le secteur de l'industrie du vêtement en 1999, M. le Président. Deuxièmement, c'est ce gouvernement qui n'a jamais voulu régler la situation, parce qu'ils ont établi eux-mêmes des mesures transitoires pour l'industrie du vêtement, pour une première fois, pour une période de 24 mois, M. le Président. Troisièmement, parce qu'ils n'ont pas voulu régler la situation, ils ont reporté les mesures transitoires pour une deuxième fois, qui se terminent le 31 décembre prochain, M. le Président. Je peux affirmer en cette Chambre que le gouvernement qui est en place va prendre une décision, M. le Président, parce que les discussions continuent, une décision qui sera prise dans les prochains jours, M. le Président.

Le Président: En question additionnelle, M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Maxime Arseneau

M. Arseneau: M. le Président, le ministre se rend-il compte que l'ancien gouvernement, puisqu'il veut en parler lui-même, avait justement intégré ces mesures dans la Loi sur les normes du travail et qu'à chaque année nous avons reconduit ces règlements?

Et, au lieu de jouer au plus fin, M. le Président, le ministre, à quelques jours justement de ce 1er janvier, peut-il répondre, oui ou non, à la question: Est-ce qu'il va reconduire ces protections, ces balises pour les travailleurs et les travailleuses du vêtement du Québec, M. le Président?

Le Président: M. le ministre du Travail.

M. Michel Després

M. Després: Au moment où on se parle, M. le Président, ce n'est pas le règlement dans la Loi sur les normes du travail qui est appliqué, c'est la loi n° 46, qui se termine, et vous avez mis une date d'échéance qui est le 31 décembre, M. le Président. C'est eux qui ont fait ça, ce n'est pas le règlement sur la Commission des normes qui s'applique. Deuxièmement, M. le Président, on va prendre des mesures pour protéger les travailleurs et travailleuses qui sont vulnérables. On va développer une stratégie industrielle, M. le Président, c'est ce qu'on va faire. La troisième chose qu'on ne fera pas, c'est exactement ce qu'ils ont fait: faire juste une action dans le secteur de l'industrie du vêtement, dépenser 30 millions, perdus à même le bas de laine des citoyens.

Le Président: En question principale, M. le député de Mercier.

Participation du Québec à la Conférence générale
de l'UNESCO portant, entre autres,
sur la diversité culturelle

M. Daniel Turp

M. Turp: M. le Président, la Conférence générale de l'UNESCO se réunissait à Paris à la mi-octobre pour discuter de l'idée d'adopter une convention internationale sur la diversité culturelle. Ce matin, on lit que le Québec veut se poser comme un leader de la diversité culturelle ? le gouvernement actuel.

La ministre des Relations internationales peut-elle confirmer devant cette Assemblée que la ministre de la Culture et des Communications a été privée du droit de prendre la parole lors d'une réunion de la commission GATT de la Conférence générale de l'UNESCO le 13 octobre dernier?

Le Président: Mme la vice-première ministre et ministre des Relations internationales.

Mme Monique Gagnon-Tremblay

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, la ministre de la Culture et des Communications a travaillé ardemment sur le projet de la diversité culturelle en collaboration avec la ministre fédérale et aussi la société civile, le regroupement de la société civile, tous les gens qui ont aidé à la diversité culturelle. Je dois vous dire, M. le Président, qu'on était très heureux de pouvoir en arriver à une entente et à convaincre les nombreux pays. Parce qu'à chaque intervention, que ce soit le premier ministre, que ce soient les ministres du gouvernement qui, par exemple, vont à l'étranger ou qui rencontrent des personnalités qui nous permettent de pouvoir avancer au niveau du dossier, on est toujours intervenus auprès de ces gens responsables pour qu'ils nous appuient, pour pouvoir permettre à l'UNESCO cette résolution qui bien sûr va nous permettre, en plus, de travailler sur un cadre juridique pour protéger cette diversité culturelle.

Alors, M. le Président, ma collègue l'a fait en collaboration avec la ministre fédérale. Et il y a eu très peu de temps pour pouvoir en discuter, étant donné que le temps était limité, mais nous sommes très fiers de ce gain. Mais ça ne veut pas dire, M. le Président, qu'on ne doit pas veiller à la suite, parce qu'il y a encore une bataille à gagner.

Le Président: En question additionnelle, M. le député de Mercier.

M. Daniel Turp

M. Turp: M. le Président, je comprends que la ministre de la Culture et des Communications n'a pas pu prendre la parole à l'UNESCO, à Paris, le 13 octobre dernier. Est-ce que la ministre des Relations internationales reconnaît que la collaboration du gouvernement fédéral a tout simplement consisté, dans ce dossier, à faire taire le Québec, à bâillonner le Québec?

Le Président: Mme la vice-première ministre et ministre des Relations internationales.

Mme Monique Gagnon-Tremblay

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, c'est que la position du Québec était tout à fait conforme à celle du fédéral. Nous travaillons tous dans ce sens-là...

Des voix: ...

Mme Gagnon-Tremblay: Elle l'était tout à fait, puis elle a été travaillée en collaboration, parce que nous voulions avoir l'appui de tout le monde, M. le Président. Mais je rappelle au député de Mercier, M. le Président, qu'il y avait un laps de temps très court, aussi, parce que plusieurs intervenants devaient se faire entendre et que, une fois que le Québec est venu pour se faire entendre, bon, bien sûr, M. le Président, à ce moment-là, on ne l'a pas reconnu, puisqu'on avait pris suffisamment de temps pour défendre la position commune.

n(10 h 50)n

Alors, M. le Président, ce qui est important à ce moment-ci, c'est: Est-ce qu'on a réussi? Oui, on a réussi. Alors, maintenant, est-ce qu'on doit continuer à travailler pour s'assurer que nous aurons finalement, dans l'interprétation ou dans la formulation de l'entente... C'est très important, et je compte sur l'opposition officielle, M. le Président, pour nous aider dans toutes les relations qu'elle aura avec les intervenants internationaux.

Le Président: En question additionnelle, M. le chef de l'opposition officielle.

Participation conjointe des gouvernements
du Québec et du Canada à la Conférence
générale de l'UNESCO portant,
entre autres, sur la diversité culturelle

M. Bernard Landry

M. Landry: Alors, la réponse, je voulais dire que jamais l'opposition officielle ne sera complice du recul international du Québec, et jamais l'opposition officielle...

M. Dupuis: Question de règlement.

Le Président: Question de règlement, oui.

M. Dupuis: De toute évidence, ce n'est pas une question. De toute évidence, ce n'est pas une...

Le Président: Quelle est votre question de règlement?

Des voix: ...

Le Président: Ça va. Alors, M. le...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Soyons calmes. Alors, vous êtes en question additionnelle, M. le chef de l'opposition officielle, et je vous invite à poser votre question.

M. Landry: Bien, oui, mais c'est une question vraiment très importante. La vice-première ministre vient de nier la doctrine Gérin-Lajoie.

Le Président: M. le chef de l'opposition, vous êtes en question principale.

M. Landry: Alors, voici. Au lieu de se consoler de s'être fait boucher à Paris, à l'UNESCO, est-ce que la vice-première ministre s'engage à protester énergiquement auprès du gouvernement fédéral pour avoir empêché le Québec de parler au monde sur la scène internationale?

Le Président: Mme la vice-première ministre et ministre des Relations internationales.

Mme Monique Gagnon-Tremblay

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, le chef de l'opposition devrait plutôt s'excuser pour son intervention sur la colline parlementaire la semaine dernière. Mais, ceci étant dit, M. le Président, je rappelle...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! Je vous demande votre collaboration. Le chef de l'opposition a pu poser sa question, donc la réponse, Mme la ministre.

Mme Gagnon-Tremblay: Je rappelle, M. le Président, que chaque pays avait deux minutes d'intervention, pas une demi-heure, M. le Président, avait deux minutes d'intervention. Alors, déjà, ce dossier a été travaillé en collaboration, et je souligne en plus que l'ancienne ministre de la Culture, Mme Louise Beaudoin, a même félicité le gouvernement, M. le Président, dans ce dossier-là.

Alors, ce qui est important, maintenant que nous avons gagné une... nous avons une première victoire, il faut s'assurer que dans la formulation maintenant, sur tout le travail qui sera fait au niveau de l'ensemble de cadres juridiques pour l'entente, il faut s'assurer que dans la formulation on ne soit pas trop dilué, pour qu'on puisse préserver justement la diversité culturelle.

Le Président: En question additionnelle, M. le député de Mercier.

M. Turp: Le Québec a déjà parlé à l'UNESCO par la voix de la députée de Bourget...

Le Président: M. le député de Mercier.

M. Dupuis: ...

Le Président: Oui, à votre question de règlement, allez-y.

M. Dupuis: Là, dites-moi pas que ce n'est pas une question de règlement, on est en période de questions, il fait un discours.

Le Président: Je vous écoute, M. le leader.

M. Dupuis: Alors, qu'il pose sa question, tout simplement.

Le Président: Bon. Alors, là, c'est une question, là, c'est une question de règlement. Si vous voulez poser votre question, vous êtes en additionnelle, sans préambule. À votre question, M. le député.

M. Turp: Après ce camouflet de Sheila Copps, ce «cheap shot»...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! Soyons calmes! Ça va. Quelle est votre question de règlement?

Des voix: ...

M. Dupuis: La question additionnelle, la question additionnelle, M. le Président, ne souffre pas de préambule. Et ce n'est pas parce qu'on la crie qu'on l'entend mieux.

Le Président: Alors, en question additionnelle... Je vais vous lire deux articles. Je vais vous lire l'article des questions additionnelles, là. Questions complémentaires ? enfin, on va lire deux articles, mais je voudrais que, des deux côtés, on comprenne les articles. «Questions complémentaires. Il est permis de poser une ou plusieurs questions complémentaires. Elles doivent être brèves, précises et sans préambule. Elles doivent se rattacher à la question principale ainsi qu'aux réponses fournies par le gouvernement. Il appartient au président d'en déterminer le nombre.»

Une voix: ...

Le Président: Un instant. L'article 79: «La réponse à une question doit être brève, se limiter au point qu'elle touche et ne contenir ni expression d'opinion ni argumentation. Elle doit être formulée de manière à ne susciter aucun débat.» Alors, autant pour les réponses, autant pour les questions.

Alors, et je vais rajouter trois minutes à la période de questions aujourd'hui à cause du temps que j'ai pris à vous expliquer ça. En question additionnelle. M. le député, votre question.

M. Dupuis: ...

Le Président: Oui, question de règlement? Votre question de règlement.

M. Dupuis: La question, je voudrais dire ceci: d'abord, la question du député de Mercier a pris 54 secondes; ça, c'est la première chose que je veux vous dire. La deuxième, M. le Président, c'est: pourquoi retrancher du temps à la période de questions quand c'est de la faute de l'opposition officielle si les questions de règlement sont soulevées?

Le Président: ...

M. Dupuis: Je m'excuse. Vous avez lu l'article 79, qui concerne les réponses. Je n'ai entendu de la part du leader de l'opposition officielle aucune récrimination faite au président sur les réponses. Je me suis levé effectivement pour me plaindre du fait que vous aviez consenti au député de Mercier une question additionnelle et qu'il posait sa question additionnelle avec un préambule. Je ne comprends pas, M. le Président, pourquoi il faudrait ajouter du temps à la période de questions quand c'est l'opposition officielle qui est en violation du règlement. C'est aussi simple que ça.

Le Président: La présidence a décidé, et, lorsque la présidence décide, on ne peut pas discuter de sa décision. Et, quant à la question additionnelle, lorsque le député commençait à se lever... à poser une question additionnelle, je l'ai arrêté immédiatement. Alors, votre question additionnelle, et sans préambule, M. le député de Mercier.

M. Daniel Turp

M. Turp: Merci, M. le Président. Est-ce que, après ce camouflet de Sheila Copps, la ministre des Relations internationales ne se rend pas compte que, pour parler à l'UNESCO, le Québec devra y avoir son propre siège et devenir un pays souverain?

Le Président: Mme la vice-première ministre et ministre des Relations internationales.

Mme Monique Gagnon-Tremblay

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, je ne voudrais pas que le député de Mercier prenne ses rêves pour des réalités. On a élu un gouvernement fédéral... un gouvernement fédéraliste lors de la dernière campagne électorale, et c'est le message que nous envoyons à l'étranger, aussi. Et nous ne transportons pas nos chicanes à l'étranger, contrairement à ce que vous avez fait. Monsieur...

Une voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît, M. le chef de l'opposition officielle, vous n'aviez pas la parole. Alors, Mme la ministre, si vous voulez poursuivre.

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, sur la question, justement, de la diversité culturelle, je rappelle au député de Mercier que le temps d'intervention par pays, les temps d'intervention par pays sont limités dans les instances de l'UNESCO, parce que... Il y avait un nombre tellement grand de personnes, de gouvernements inscrits pour prendre la parole qu'il n'a pas été possible à la présidence de l'assemblée d'autoriser une deuxième intervention par pays. Par conséquent, M. le Président, ma collègue devait prendre la parole lors de la seconde ronde d'interventions, et on n'a pas pu le faire à temps.

Mais je répète, M. le Président, que, dans ce dossier de la diversité culturelle, les positions du Canada et du Québec sont convergentes à l'égard de la nécessité de lancer l'élaboration d'une convention qui garantirait le droit des États et gouvernements de soutenir la culture par leurs politiques, M. le Président.

Le Président: En question additionnelle, M. le chef de l'opposition officielle.

M. Bernard Landry

M. Landry: Additionnelle précise: Est-ce que ça veut dire que, quand les positions Canada-Québec sont convergentes, le Québec doit se taire?

Le Président: Mme la vice-première ministre et ministre des Relations internationales.

Mme Monique Gagnon-Tremblay

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, si c'est dans le but d'avoir une position encore plus forte face à d'autres, nous le ferons.

Le Président: En question principale, M. le député de Blainville.

Tenue de consultations en matière
de développement économique régional

M. Richard Legendre

M. Legendre: Oui, M. le Président. Alors, suite au dépôt du projet de loi n° 34 sur le développement régional, bien, les critiques, voire même les conflits s'accumulent, au point justement que nos partenaires socioéconomiques réclament une vraie consultation. On parle de la Fédération des chambres de commerce du Québec, on parle des corporations de développement économique communautaire, les CRD, les CLD, les groupes de femmes, les groupes de jeunes, tous ces groupes qui représentent des milliers et des milliers de citoyens partout au Québec.

n(11 heures)n

Pendant ce temps-là, M. le Président, le gouvernement, il reste dans sa bulle, sa bulle victorieuse. Et la ministre déléguée nous dit, en pleine interpellation sur les régions, nous dit ceci ? c'est ainsi qu'elle évalue le travail de son gouvernement: «On est plutôt bien partis jusqu'à maintenant. D'ailleurs ? écoutez bien celle-là, M. le Président ? il n'y a pas eu de manifestations devant l'Assemblée nationale de gens qui proviennent des régions.» Tout un critère d'évaluation, M. le Président.

Alors, ma question au ministre responsable du Développement économique régional: Est-ce qu'il va vraiment faire confiance aux régions et s'engager à entendre les régions ici, en consultation générale publique, à l'intérieur des murs de l'Assemblée nationale, en commission parlementaire, plutôt que dehors, M. le Président?

Le Président: Alors, M. le ministre du Développement économique et régional.

M. Michel Audet

M. Audet: M. le Président, je suis d'abord heureux que la question soit posée par effectivement le député de Blainville parce que ça va me permettre effectivement de corriger une perception qui a été véhiculée beaucoup par l'opposition ces derniers temps à l'effet que l'on excluait ? justement, j'entendais tout à l'heure d'ailleurs le chef de l'opposition le dire ? les groupes, les groupes intermédiaires, les groupes sociaux, les groupes économiques, de la composition des CLD, de la composition des CRE. C'est une fausseté, ils auront toute leur place. Et je pense que toute la base du projet de loi, toute la base du projet de loi est la suivante. Et, si vous me permettez, je vais quand même vous donner l'information, puis, après, on posera d'autres questions.

Le projet de loi est basé précisément sur la... on s'appuie sur les élus locaux. Donc, les municipalités sont la base de notre décentralisation. On s'appuie sur eux pour dégager plus de responsabilités et plus de ressources au niveau local. Par la suite, d'avoir une concertation régionale en y incluant un tiers de la société civile précisément, un tiers de participants. Alors, ce que... La réaction, M. le Président, si vous permettez...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Alors, M. le ministre, si vous voulez conclure. Et je vous demande votre collaboration.

M. Audet: Pour conclure, M. le Président, la réponse, on l'a, par exemple, par les principaux intéressés, c'est-à-dire les représentants dans les régions, qui sont les élus locaux, donc la Fédération québécoise des municipalités qui dit: Le projet de loi n° 34 répond aux attentes de la Fédération, et... Si vous voulez, je peux le déposer, M. le Président...

Des voix: ...

Le Président: Si vous voulez... S'il vous plaît!

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! M. le ministre...

Une voix: ...

Le Président: M. le ministre, vous êtes rendu à 1 min 40 s, là. Alors, on va permettre une question additionnelle. M. le député de Blainville.

M. Richard Legendre

M. Legendre: M. le Président, on a consulté pendant un mois sur les défusions. Est-ce que c'est le projet de loi n° 34 qui n'est pas assez important pour consulter? Ou encore est-ce que ce sont les régions qui ne sont pas assez importantes pour qu'on consulte? Ou encore est-ce que, sous votre gouverne, M. le ministre, on va devoir maintenant faire rimer le mot région avec le mot bâillon?

Le Président: Alors, M. le ministre du Développement économique et régional.

M. Michel Audet

M. Audet: Je trouve que le jeu de mots retombe évidemment, à mon avis... se tourne contre l'opposition, quand on voit la façon dont ils ont géré le dossier des fusions municipales: en bâillonnant les citoyens qui voulaient s'opposer.

Des voix: ...

Le Président: M. le ministre.

M. Audet: M. le Président, nous ne bâillonnerons pas les régions, nous sommes en discussion avec toutes les régions du Québec actuellement. Ma collègue, on lui reprochait tantôt...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! Mme la députée de Matapédia.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Les deux côtés, là, à l'autre bout, là. Alors, si vous voulez terminer et conclure, M. le ministre.

M. Audet: Alors, nous aurons effectivement des discussions dans toutes les régions du Québec ? c'est ce qui se fait actuellement ? pour justement faire en sorte que ce projet de loi se base sur les préoccupations des régions et ne soit pas du mur-à-mur, ce qui était la façon de faire que vous aviez avant.

Le Président: En question principale, M. le député de Dubuc.

M. Côté: ...additionnelle, M. le Président.

Le Président: En question additionnelle, M. le député de Dubuc, et posez votre question.

M. Jacques Côté

M. Côté: Le ministre du Développement économique et régional peut-il admettre qu'il aurait été préférable de faire des véritables consultations ? pas une tournée d'information, de véritables consultations ? plutôt que de déposer un projet de loi qui sème la controverse, alors qu'au Saguenay la majorité des administrateurs du CLD ont démissionné, que la société civile est exclue et que le maire de Saguenay ne veut rien savoir des gens de la région, de consulter avec les gens de la région?

Le Président: M. le ministre du Développement économique et régional.

M. Michel Audet

M. Audet: M. le Président, ce qui est en cause aujourd'hui, précisément, c'est des jugements qui sont portés sur des attitudes. Nous ne faisons pas un projet de loi en fonction d'attitudes d'un maire, d'un autre maire; nous établissons un cadre général qui fait confiance aux élus locaux.

Dans le cas qui nous concerne, nous sommes justement en discussion pour s'assurer qu'au Saguenay? Lac-Saint-Jean, notamment, la Conférence régionale d'élus soit mise en place dans l'harmonie, où les deux parties de la région soient représentées, et également au niveau des CLD, où on va confirmer le mandat des CLD, ce dont vous voudriez vous réjouir puisque c'est vous qui les aviez créés.

Le Président: En question principale, Mme la députée de Rosemont.

Respect des contrats entre le gouvernement
et des corporations de développement
économique communautaire à Montréal

Mme Rita Dionne-Marsolais

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Dans sa réforme de développement économique et régional, le ministre prévoit que le conseil de ville, je pense, exercera les compétences en matière de promotion et de développement économique. À Montréal, il y a 73 conseillers dans ce conseil de ville.

Dans cette révolution de papier, est-ce que le ministre peut nous dire si le gouvernement compte respecter les contrats de cinq ans qui ont été signés par le gouvernement avec neuf corporations de développement économique communautaire, à Montréal, qui sont aussi des CLD?

Le Président: M. le ministre du Développement économique et régional.

M. Michel Audet

M. Audet: Merci, M. le Président. J'ai rencontré ces groupes et j'ai rencontré aussi le maire de Montréal à ce sujet. Il y a actuellement une discussion entre la ville de Montréal, qui précisément va avoir l'autorité d'accréditer précisément et de respecter l'entente que l'opposition avait conclue avec eux, et donc c'est à la ville de Montréal de le faire. J'ai compris qu'il n'était pas du tout l'intention de la ville de mettre fin à cette entente. C'est eux qui devront maintenant justement la gérer, et je souhaite qu'elle puisse continuer comme prévu.

Le Président: Alors, dernière question additionnelle, Mme la députée de Rosemont.

Mme Rita Dionne-Marsolais

Mme Dionne-Marsolais: Est-ce que le ministre est après nous dire qu'on va faire, dans le cas des CDEC et des CLD, la même chose qu'avec le contrat de ville, qu'on ne respectera pas la parole donnée par un gouvernement, M. le Président?

Le Président: Alors, M. le ministre du Développement économique et régional.

M. Michel Audet

M. Audet: La réponse, c'est qu'on va respecter la parole qu'on a donnée et on va respecter aussi les élus locaux, qui ont maintenant la responsabilité de donner suite à cette entente.

Le Président: Dernière question additionnelle, rapidement, Mme la députée.

Mme Rita Dionne-Marsolais

Mme Dionne-Marsolais: Est-ce que le ministre réalise que la parole, c'est le gouvernement qui la donne, et un gouvernement, ça doit respecter la parole de ceux...

Des voix: ...

Le Président: Alors, ceci met fin à la période des questions orales et réponses orales.

Comme il n'y a de votes reportés, nous allons passer à la rubrique des motions sans préavis.

Motions sans préavis. Est-ce qu'il y a des motions sans préavis?

Avis touchant les travaux des commissions

Avis touchant les travaux des commissions, M. le leader.

M. Dupuis: Oui, M. le Président, j'avise cette Assemblée que la commission de l'éducation poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 19, Loi modifiant la Loi sur l'aide financière aux études, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, à la salle du Conseil législatif; d'autre part,

Que la commission de l'économie et du travail poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 22, Loi modifiant la Loi sur les coopératives, aujourd'hui, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine; enfin

Que la commission des transports et de l'environnement procédera à l'étude détaillée du projet de loi n° 29, Loi modifiant le Code de la sécurité routière et d'autres dispositions législatives, aujourd'hui, de 20 heures à 24 heures, à la salle du Conseil législatif.

n(11 h 10)n

Le Vice-Président (M. Sirros): Merci, M. le leader du gouvernement. Pour ma part, je vous avise que la commission des finances publiques se réunira aujourd'hui, lundi le 1er décembre 2003, après les affaires courantes jusque vers 13 h 15, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 23 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau de l'hôtel du Parlement. L'objet de cette séance est de procéder à des consultations particulières dans le cadre du mandat d'initiative sur l'étude de la mise en place de l'Agence nationale d'encadrement du secteur financier.

Alors, sur les travaux de la Chambre, pas de renseignements.

Affaires du jour

Alors, la période des affaires courantes étant terminée, nous allons maintenant passer aux affaires du jour. M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: J'apprécierais que vous preniez en considération l'article 1 du feuilleton.

Projet de loi n° 9

Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, à l'article 1 du feuilleton, M. le ministre des Affaires municipales, du Sport et du Loisir propose l'adoption du principe du projet de loi n° 9, Loi concernant la consultation des citoyens sur la réorganisation territoriale de certaines municipalités.

Avant de demander s'il y a des interventions, je vous prierais, ceux qui ont des obligations en commission parlementaire ou ailleurs, de, s'il vous plaît, y aller rapidement et tranquillement.

Alors, on serait prêts pour entamer le débat sur le projet de loi n° 9. Alors, M. le ministre, la parole est à vous.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Merci, M. le Président. C'est avec plaisir que nous commençons le débat sur le projet de loi n° 9. Commencer le débat étant une façon de parler puisque nous avons eu déjà l'occasion de tenir une consultation qui, ma foi, a duré plus d'un mois, entendu plus de 80 groupes, reçu près de 100 mémoires. Alors, dire que nous commençons le processus me semblerait peut-être un peu court.

Ceci étant, nous discutons de cette question en fait depuis octobre 2000, époque à laquelle le parti alors à l'opposition, formant maintenant le gouvernement, a déclaré à la population son intention de consulter cette population à l'égard des fusions qui, alors, s'annonçaient comme être forcées.

Effectivement, à la fin de l'an 2000, les fusions ont été forcées, les amendements ont été déposés dans la nuit, près de minuit. Nous avons voté sans avoir la possibilité de lire une liasse de 400 amendements. Doit-on rappeler d'ailleurs que, sur ces projets de loi, à quatre sessions consécutives, il y a encore eu des amendements apportés, toujours avec une absence de consultation totale. Et, en fait, il y a eu plus de 1 000 amendements qui ont été apportés à ces lois de fusion forcée, toujours sans que les citoyens n'aient eu l'occasion de se prononcer. 1 000 amendements, plusieurs lois, il aurait été facile de mettre les citoyens dans le coup; ceux qui formaient alors le gouvernement ont décidé de ne pas le faire.

En octobre 2000, nous avons annoncé que nous le ferions. Nous avons annoncé en même temps que nous le ferions dans un contexte où il y aurait une agglomération. Tout le monde se souvient de ces expressions, «fiscalité d'agglomération», «services d'agglomération». Pourquoi, à ce moment-là, est-ce que nous disions cela? C'est parce que, à l'époque où est venu le phénomène des fusions forcées, il y avait d'autres choix qui auraient pu être faits. Mais, évidemment, lorsqu'il y a des choix, encore faut-il les offrir à la population. Et, comme le parti d'opposition maintenant, alors au gouvernement, ne voulait pas consulter la population, il n'a pas présenté de choix.

De ce côté-ci, M. le Président, nous allons proposer des choix. Les citoyens vont être consultés et ils auront un choix à faire. Pourquoi les consulter? On les consulte parce qu'il s'agit d'une modification importante qui a été faite à leur communauté de proximité. Il y a des raisons diverses qui peuvent amener un citoyen à choisir ou non une fusion ou une défusion. Ce n'est pas à nous, au gouvernement, de scruter les esprits de chacun pour savoir quel est le motif principal qui l'amène dans un sens ou dans l'autre. En démocratie, lorsqu'on ouvre la consultation, chacun est libre d'avoir son idée, et c'est tant mieux, M. le Président.

Ceci étant, nous ne pouvons pas non plus avoir 7 millions de modèles différents. En démocratie, il y a une consultation, il y a des propositions et, à la fin, il y a une décision. C'est ce que nous allons mettre de l'avant, c'est ce que le projet de loi n° 9 permet. Sur ces piliers que nous avions annoncés, la consultation des citoyens, elle se fera, M. le Président. Nombreux sont ceux qui ont mis en doute la volonté réelle du gouvernement de consulter. Nous leur répondons, avec le projet de loi n° 9 et ses amendements, qu'il y aura une consultation, tel que nous l'avions dit.

Nous avions dit aussi qu'il y aurait une agglomération qui serait maintenue, une agglomération qui serait maintenue parce qu'elle sert l'intérêt de chacun. Cela n'empêche pas que les gens peuvent choisir leur communauté politique de proximité, mais nous ne pouvons nier la géographie. Et les communautés politiques de proximité vivent dans des agglomérations dont le développement est porteur pour chacun des citoyens de chacune des communautés politiques de proximité. Donc, il nous semblait juste de préserver l'intérêt général parce qu'il en va de l'intérêt de chacun que nous le protégions. C'est ce que nous avons dit avant la campagne électorale.

Force est d'admettre que les citoyens ont fait le choix d'aller dans ce sens, et, aujourd'hui, nous avons des amendements à apporter au projet de loi n° 9. Je les ai déjà déposés en novembre, tel qu'entendu, bien avant qu'il y ait adoption finale, permettant à chacun de s'en inspirer. Rappelons d'ailleurs que notre processus législatif nous encourage dans ce sens. Nous avons déposé le projet de loi en juin, tel que nous l'avions dit. Nous sommes engagés alors à consulter tous ceux qui voulaient être consultés sur ce projet de loi. Une centaine de mémoires, près de 90 groupes ou individus ont été entendus. Ils nous ont parlé, ils nous ont dit quelque chose, et nous les avons écoutés.

On ne viendra pas, aujourd'hui, nous dire que ces amendements sortent d'un chapeau de magicien, tel un lapin. Ces amendements sortent d'une consultation que nous avons faite selon les règles de cette Assemblée, selon les règles de cette Assemblée délibérante, pour nous assurer d'avoir les meilleurs projets. Nous en avons donné une mouture; il y a eu des suggestions, nous en avons tenu compte. Je reviendrai à la fin, M. le Président, sur les commentaires issus des médias dans les derniers jours, mais qui disent à peu près ceci: Nous avons donné suite à la commission parlementaire, nous avons entendu ce que les groupes et individus étaient venus nous voir. Une consultation sérieuse, une consultation qui nous assure à l'avance de ne pas créer une problématique après la consultation.

Les gens souhaiteraient, de l'autre côté, peut-être que nous n'annoncions pas les règles de consultation de manière à ce que, après la consultation, nous ayons à vérifier si la participation est suffisante pour dire s'il y a une légitimité là-dedans. Nous pensons qu'il est normal que les règles soient connues. Nous ne voulons pas répondre aux fusions illégitimes par des défusions illégitimes. Je sais que certains de nos concitoyens considèrent que, puisqu'ils ont subi une attaque du gouvernement précédent, ils n'ont pas à se voir eux-mêmes imposer un fardeau plus grand. Pourtant, M. le Président, il n'apparaît pas utile de répondre à une faute par une autre faute. Lorsqu'il y a eu fusion illégitime, les citoyens seront en mesure, par ce processus de consultation, d'y répondre, mais d'y répondre par une défusion légitime, et cela ne peut être possible que par certains amendements que nous déposons.

En bout de piste, les engagements que nous avons pris sont maintenus, personne ne peut le nier. Il y aura une consultation. S'il y avait défusion, il y aurait une agglomération, et l'ensemble du processus connu à l'avance, études en main, études objectives faites par l'extérieur, produites avant les registres, vont permettre que ces piliers... d'engagements que nous avions déposés seront offerts entre les mains des citoyens qui vont prendre leur décision. La décision revient aux citoyens. Est-ce qu'on peut se tromper, M. le Président, lorsqu'on fait confiance aux citoyens? Je ne le crois pas.

Je ne crois pas cependant ? pour revenir avant de faire le tour de certains amendements qui sont déposés et ensuite faire le portrait final du projet de loi ? je ne pense pas que l'on doive, comme l'a fait notre collègue de Bourget, empêcher les gens de penser, empêcher les gens d'espérer, sauf que c'est au gouvernement qu'il revient d'annoncer les couleurs, et nous le faisons par ce projet de loi. Certains vont choisir pour une raison, d'autres pour une autre. Il ne nous appartient pas de leur imposer la raison pour laquelle ils feront un choix, il nous revient d'ouvrir une voie de consultation, leur annoncer ce qui arriverait s'il y avait un départ. Dans le cas de Montréal, jusqu'ici, leur annoncer ce qui arriverait s'il n'y avait pas de départ, puisque, comme vous le savez, le projet de loi n° 33, qui vise à mettre en oeuvre un projet de décentralisation pour Montréal, est aussi à l'étude à cette session-ci de manière à ce que les citoyens de Montréal ou d'ailleurs puissent connaître l'ensemble du portrait. Et, à notre avis, c'est ce qui nous semble le plus juste.

n(11 h 20)n

Dans les amendements qui sont proposés au projet de loi, ils sont de quatre ordres, M. le Président, et issus directement des commissions parlementaires que nous avons eues.

D'abord, la première concerne le processus de consultation. Les amendements visent à assurer la légitimité du résultat par un processus sérieux, qui se retrouve dans des règles connues d'avance, des règles que nous avons déjà déposées, je le répète, M. le Président, en novembre; pas à la dernière journée d'une session, à la dernière minute d'une dernière journée, puisque nous étions tout près de minuit lorsque le gouvernement précédent avait déposé une liasse qu'il était impossible de lire avant le vote. Ce processus nous rappelle entre autres, puisqu'il y avait certaines difficultés à l'égard de la liste pour les registres... nous avons été mis en garde pour nous assurer que la liste soit la meilleure possible. Donc, nous entendons pour que le Directeur général des élections puisse participer à aider les greffiers pour qu'une liste référendaire révisée puisse servir aux fins de registre. En cas où le référendum serait très éloigné de la date du registre, une autre révision de la liste interviendrait. Tout ça pour dire que nous voulons nous assurer, par le biais du Directeur général des élections, de la meilleure liste possible, pour nous assurer que le résultat ne serait pas contesté. Peu importe qu'il soit dans un sens ou dans l'autre, il nous semble qu'il y a là une mesure importante à prendre, et, avec la collaboration du DGE, je pense que les citoyens peuvent être rassurés à cet égard.

Les registres seront ouverts cinq jours, tel que nous l'avions dit. Il y aura des études préregistres. C'est ce que nous avons annoncé à la fin de juin, M. le Président. Certains groupes nous ont demandé que les citoyens soient au courant, avant la signature des registres, des conséquences du choix qui allait être offert. Nous n'avons pas fait preuve d'un dogmatisme à cet égard, ce qu'on cherche, c'est la consultation la plus ouverte et la plus complète; on a donc accepté qu'il y ait des études avant les registres.

Cela implique quelque chose, M. le Président, cela implique que non seulement il nous faut faire des études pour les secteurs qui voudraient partir, mais il faut faire des études pour les secteurs qui ne veulent pas partir, parce qu'il ne nous appartient pas de décider à l'avance de ce que sera le résultat des registres. Donc, nous tiendrons des études à l'égard des 42 agglomérations, tenant compte des 212 ex-municipalités qui y sont incluses. Ces études permettront aux citoyens d'en savoir plus sur leur situation particulière. Il est évident que, lorsqu'on regarde les journaux, on s'intéresse à Montréal, à Québec, mais il y en a 42, M. le Président. Alors, il faut que les gens sachent comment ça retombe chez eux, et nous espérons que ces études les aideront.

Il y a une règle pour le seuil du vote, M. le Président, et j'y reviendrai sur la façon dont les médias ont accueilli ces nouvelles dispositions. Mais, de façon générale, pour le bénéfice de ceux qui nous écoutent, la règle générale, c'est la suivante, et elle continue de s'appliquer. Lorsque vous allez voter, que ce soit pour une élection ou un référendum, lorsque vous allez mettre votre bulletin dans une boîte, qu'est-ce qui se passe à la fin de la journée? On est souvent tous rendus chez nous, et il n'y a que ceux qui sont en train de travailler aux élections qui le savent, mais qu'est-ce qui se passe?

M. le Président, on met la boîte sur la table, on ouvre la boîte, on prend les bulletins, puis on les additionne. Dans le cas d'un référendum, il y a une option «oui» puis une option «non»; il n'y a pas 44 piles, il y a deux piles. Alors, on fait la pile du «oui», de la défusion ou de la fusion, puis on regarde. Si la fusion en a le plus, M. le Président, bien, il n'y a pas de défusion. Si la défusion en a le plus, M. le Président, dans la pile, nous faisons simplement constater si, dans cette pile, se retrouvent 35 % des inscrits. Ce n'est pas très compliqué à comprendre: On ouvre la boîte, on fait deux piles: dans la pile des défusions, s'il y en a le plus, on regarde s'il y a 35 % des inscrits. Ce n'est pas compliqué.

Pourquoi est-ce qu'on fait ça? Pourquoi est-ce qu'on ajoute une autre demande de vérifier qu'il y ait 35 % des inscrits? Bien, M. le Président, c'est pour éviter ce que je disais tantôt, pour éviter que la réponse aux fusions forcées illégitimes soit des défusions forcées illégitimes. Il ne nous apparaît pas utile de tenir une consultation avec une hypothèse où il n'y aurait que 20 % des gens qui se déplacent, et que ça finit 15 à cinq. À ce moment-là, on aurait 80 % de la population qui ne se prononce pas. Est-ce qu'on peut découler, déduire de ça une mobilisation? Pas vraiment. On nous dira: Oui, mais, dans tous les autres cas, c'est comme ça que ça fonctionne. Mais ce n'est pas qu'une simple élection d'un représentant parce que, dans quatre ans, on va le changer, c'est pour une structure permanente, donc on doit avoir une certaine exigence.

Mais, au-delà de ça, M. le Président, nous avions pris l'engagement de consulter les secteurs, les anciennes municipalités. Or, dans les agglomérations, dans les nouvelles villes, il peut y avoir des secteurs des anciennes villes qui vont faire le choix de rester. Donc, le choix du départ aura un effet sur ceux qui ont fait le choix de rester. Nous ne le contestons pas, on ouvre la voie à la consultation pour que cela arrive, mais on met un niveau à atteindre pour nous assurer que cette implication sur l'autre soit appuyée par une mobilisation de la population. C'est une règle qui nous permet de pouvoir dire, une fois que le résultat sera connu: cette défusion est légitime parce qu'appuyée clairement par la population. On voudrait nous proposer de ne pas l'avoir dit, de l'avoir gardé pour nous et d'attendre après la consultation pour dire: Bien là, vous savez, vous, vous êtes juste 15 % qui êtes pour la défusion puis il y en a 5 qui sont pour la défusion. On ne le fera pas parce que les référendums sont consultatifs.

Bien, M. le Président, nous avons préféré ne pas jouer avec la population. Nous avons préféré expliquer quelles étaient les règles qu'on trouvait justes et équilibrées et le dire ouvertement à la population. C'est ce que nous avons fait, et tout porte à croire, M. le Président, qu'ils nous auront compris à cet égard.

Les autres modifications traitent de l'agglomération, tant pour sa gestion que pour les pouvoirs qui y sont dévolus. Encore une fois, à cet égard... je citerai tantôt quelques commentaires des médias sur ces notions-là, mais, sur l'aspect de la gestion de l'agglomération, permettez-moi de vous dire que ce que nous avons fait, c'est d'abord éviter la création d'une nouvelle structure, tout en garantissant la légitimité et l'efficacité administrative.

Initialement, le projet prévoyait la signature d'ententes entre les parties, et, à défaut, la décision du gouvernement s'il n'y avait pas d'entente. Il y avait une difficulté avec une telle façon de procéder: les citoyens n'auraient pas su de quoi il allait en retourner après la défusion, ils auraient dû attendre après la consultation de quoi il en retournait sur les ententes ou, à défaut, quelle serait la décision du ministre.

Encore une fois, nous n'avons pas voulu jouer avec la population. Nous avons voulu leur dire à l'avance ce qui arriverait. Nous avons donc inversé les rôles d'ententes, et, à défaut, décision du ministre, par avis du ministre, position, comment cela va retomber, mais il est toujours possible, M. le Président, d'avoir des ententes entre les municipalités. Il y en a eu de tout temps et il y en aura encore de tout temps. Donc, nous avons inversé cela.

À partir du moment où nous permettons une consultation ouvrant la porte à la défusion, c'est parce que c'est possible que cela arrive. Si on pensait que cela n'arriverait pas, M. le Président, je ne suis pas sûr qu'on ferait des consultations. On fait une consultation parce qu'on sait que c'est important que les gens se donnent un droit de parole et que c'est possible que ça ouvre cette voie-là. On est sérieux là-dedans, puis on respecte nos engagements. Mais, s'il fallait que certains partent, il y aurait des conséquences, forcément. J'espère que personne n'est surpris par ça. On ne peut pas garder le système actuel s'il y a du monde qui part.

Alors, comment on gère une agglomération pour certains pouvoirs qui sont excessivement importants, qui sont en partage avec tout le monde, qui sont dans l'intérêt de chacun? Comment on fait? Bien, on nous a offert, entre autres, que la ville centrale garde les pouvoirs d'agglomération et décide elle-même de la façon dont ça devrait fonctionner. J'ai un problème avec ça, M. le Président.

Je l'ai dit d'ailleurs en commission parlementaire: Est-ce qu'on peut vraiment empêcher les gens d'avoir leur droit de parole? On fait une loi sur la consultation parce qu'on pense que les gens, les citoyens ont le droit de parler, mais on pense aussi que les citoyens qui vont se donner une communauté politique de proximité ont le droit d'être entendus. C'est ce qu'on pense.

Alors, il faut trouver un moyen. Certains ont envisagé une CUM. Le problème de la CUM, M. le Président, c'est qu'il y avait une structure très lourde derrière et il y avait des doubles majorités, il y avait des blocus qui s'imposaient, et nous avons entendu beaucoup de représentations nous dire: Vous allez recréer une guerre de clocher.

n(11 h 30)n

Alors, il nous est venu une idée ? pas très nouvelle, plutôt très ancienne ? qui s'appelle suivre la démocratie. Qu'est-ce que c'est, les principes mêmes de démocratie, M. le Président? Sur quoi reposent-ils? Ça s'appelle la représentation selon la population. C'est ce qui fait d'ailleurs qu'on est tous ici, M. le Président. Bon, à la marge, il y en a qui ont des comtés avec un peu moins de monde, d'autres qui en ont un petit peu plus. Mais, l'idée, c'est un point d'équilibre là-dedans; c'est aussi la démarche que nous voulons avoir. Mais le principe de base, c'est la représentation selon la population.

Certains vont dire: Ah oui, mais l'ex-ville qui décide de partir ne sera pas majoritaire. Non, mais elle ne l'est pas non plus dans la ville centrale en ce moment. Si elle décide de partir, ses citoyens auront fait ce choix sachant très bien à l'avance quel est le poids démographique de cette ex-municipalité. Ça fait partie du choix. Ça fait partie aussi du droit de savoir quelles sont les conséquences avant d'exercer ce choix.

Il y aura donc un conseil d'agglomération, qui ne sera par une CUM, parce qu'il n'aura pas le personnel dévolu au pouvoir d'agglomération. Il existe déjà, ce personnel-là. Il est dans la ville actuelle, dans la nouvelle ville qu'on appellera alors ville centrale et qui sera la ville résiduelle suite au départ de certains. Les pouvoirs... Le personnel est là, il exerce déjà cette compétence-là et il continuera de le faire. Il nous a semblé peu utile de transférer du personnel à une nouvelle structure. Plutôt que de créer une nouvelle structure, nous avons créé un forum décisionnel qui s'applique à cette structure-là dans la ville centrale, ce qui s'appelle le conseil d'agglomération, M. le Président, lequel conseil d'agglomération ne sera rien d'autre qu'un conseil composé de maires dont le poids est selon la démographie.

Qui sont ces maires? Ces maires sont des gens qui sont élus au suffrage universel par l'ensemble de leur population dans leurs villes respectives. Qui sont ces maires? Ce sont des élus qui sont dans une assemblée délibérante dans leur conseil de ville, qui répondent constamment aux questions de l'opposition comme nous le faisons ici, M. le Président, comme cela se fait dans toutes les assemblées délibérantes. Il n'y aura pas une très grande nouveauté à cet égard-là.

Il y a aussi certaines modifications concernant les compétences d'agglomération, M. le Président. Encore une fois, elles ne viennent pas de n'importe où, elles sont issues de la consultation que nous avons tenue. Je suis particulièrement fier, M. le Président, de pouvoir dire que nous avons réussi à aller chercher le meilleur de ces consultations et à témoigner auprès des deux leaders présents en cette Chambre à ce moment-ci sur la valeur de la consultation que nous avons eue et sur le fait que nous avons pu y puiser de nombreuses bonnes idées. Ainsi donc, le développement économique s'ajoutera aux compétences d'agglomération parce qu'il en va de l'intérêt de chacun, l'eau potable, le traitement des eaux usées, l'aide aux sans-abri, la gestion du logement social ainsi qu'une liste d'équipements et d'activités qui sont à l'avantage de l'ensemble de l'agglomération.

Nous avons prévu une autre tranche, je dirais, d'amendements qui concernent la transition, transition pour permettre au comité de transition justement... Une fois qu'il y a eu les registres et qu'il y aura eu un référendum, il y aura à certains endroits un départ pour d'ex-municipalités qui retrouveront leur statut juridique, et il faudra prévoir une transition entre la nouvelle ville et cette nouvelle situation. Un comité de transition s'en chargera. Il fallait donc y prévoir des dispositions, elles sont incluses. Nous prévoyons aussi des dispositions sur les relations de travail qui sont essentiellement des propositions qui ont déjà été utilisées ainsi que d'autres sur le partage des actifs et du passif.

Somme toute, M. le Président, nous allons présenter un projet de loi à cette Assemblée une fois que nous aurons discuté des amendements et que nous aurons discuté des dispositions prévues dans le projet de loi initial. Le cadre global, général à la fin nous donnera un projet de loi qui propose une consultation aux citoyens avec une règle de consultation sérieuse et claire. Nous croyons que cela est légitime pour nous assurer que le choix qui va en découler soit le choix des citoyens, qu'il soit suffisamment important dans sa participation, ce choix, pour que nous puissions dire: Le choix de la défusion est légitime, il se tient. C'est pourquoi nous avons choisi d'établir une règle comme celle-là.

Par ailleurs, nous avons décidé qu'il y aurait une agglomération qui serait forte. Parce que ce n'est pas tout que d'avoir une ville grande, encore faut-il qu'il y ait une ville forte, et l'agglomération, plus la consultation, nous assurera d'une participation citoyenne.

J'étais à la Chambre de commerce du Montréal métropolitain il y a deux semaines, et le sujet était le développement économique, et je me rappelais que, dans les propos de la Chambre de commerce, tenus en commission parlementaire, elle nous rappelait que nous étions à l'ère de l'économie du savoir et nous rappelait que, à cette ère, les ressources humaines sont la première richesse, plus que les ressources naturelles, que c'est dans les ressources humaines que se gagnent des compétitions avec ceux avec qui nous sommes en compétition. M. le Président, lisant ce texte de gens d'affaires avec les yeux que nous avons, nous, qui sommes des élus, je me suis rappelé que ces ressources humaines ? terme générique et anonyme s'il en est un ? représentent quelque chose. C'est vous, c'est nous, c'est tous ceux qui sont à l'extérieur de ces murs, qu'on appelle citoyens, ce sont les ressources humaines qui font la force d'une ville ou d'une autre.

À mon avis, si on veut que la ville soit forte, donnons-nous des ressources humaines, qu'on appelle citoyens, inclus dans cette ville, donnons-nous comme fondement de notre ville des citoyens qui veulent être à l'intérieur de cette ville. Donnons une possibilité aux citoyens d'adhérer à leur milieu de vie. Imposer une appartenance ne se fait pas; une appartenance, ça se cultive. Mais, lorsque nous avons cultivé l'appartenance, lorsque nous sommes allés vers les citoyens, et qu'ils ont eu leur droit de parole, et qu'ils ont été... ils ont pris partie dans le débat, nous nous donnons des citoyens qui ont le goût de faire partie de la ville.

En démocratie, on ne gagne pas tout le temps. Moi, j'ai été deux mandats de l'autre côté. On n'avait pas gagné; on l'acceptait, on acceptait les règles. Les référendums, c'est la même chose; tout le monde ne gagneront pas. Mais il y aura eu une consultation et, à la fin, les gens pourront dire: Nous avons été consultés; j'ai eu mon mot à dire. Il peut arriver, lors d'une élection, qu'on n'est pas très d'accord avec les choix d'un parti ou de l'autre. Parfois, il y a trois partis, puis on peut dire: J'aimerais mieux qu'il y en ait un quatrième ou un cinquième, parti, qui va me représenter et ce que je veux vraiment dire. Mais ça ne marche pas comme ça, M. le Président, vous le savez. Dans les élections, comme dans tout système de votation, il y a quelques options sur la table et on choisit à l'intérieur. C'est la même chose lorsqu'on a à faire une consultation avec les citoyens. Il faut offrir un choix. C'est ce qui est sur la table, c'est ce que nous avons déposé.

Et nous allons donc faire cette consultation dans le cadre de propositions qui sont sur la table, d'études qui auront été faites par des experts indépendants. Et les citoyens sauront, sauront ce qu'ils doivent faire en vertu d'analyses qu'ils vont eux-mêmes porter individuellement. Pour certains, c'est la personnalité juridique; pour d'autres, c'est la taxation; pour d'autres, c'est d'avoir une ville unie. Chacun aura ses critères pour décider.

Ceci étant, permettez-moi de m'arrêter quelques minutes sur certains commentaires que l'on retrouvait dans les médias depuis la semaine dernière, qui, me semble-t-il, permettent de donner un éclairage sur l'état de la situation en date du 1er décembre. D'autres débats vont suivre, je suis persuadé qu'on entendra des individus comme des groupes déclarer leur insatisfaction à l'égard d'une notion ou d'une autre. C'est normal en démocratie, et je veux leur dire que nous les entendrons. Mais, M. le Président, en même temps, à un moment donné, il est temps de dire où cela va aller. Les gens disaient: Il n'y aura pas de consultation, ils ne respecteront pas leur parole. À un moment donné, c'est important de dire à tout le monde: Il va y avoir une consultation, nous allons faire ce que nous avions dit que nous étions pour faire.

Certains disaient: Je voudrais avoir la ville comme elle était avant. Nous avons dit, depuis novembre 2000, que cela n'arriverait pas. J'ai pris la peine, durant la commission parlementaire, de le préciser. Aujourd'hui, nous exprimons comment cela retombe, et les citoyens vont faire leur choix. Certains y trouvent leur compte, vous allez le voir dans les extraits que je vais vous citer, d'autres auraient voulu avoir d'autre chose. C'est tout à fait normal, il ne peut pas y avoir 7 millions de propositions sur la table. Mais, en bout de piste, ce qui est le plus important, me semble-t-il, c'est de permettre aux citoyens de dire leur mot dans le cadre des engagements que nous avions pris.

Encore une fois, je le répète, je le répète, nous avions dit qu'il y aurait une consultation, mais qu'il y aurait une fiscalité et des services d'agglomération. Nous avions dit qu'il n'y aurait pas un retour en arrière dans l'état où cela était avant. Nous l'avions dit. Lorsque nous étions dans l'opposition, nous avions parlé du développement économique, de l'importance de pouvoir avoir une agglomération qui se tient, au bénéfice de chacun. Les gens savaient cela. Est-ce qu'ils en étaient satisfaits? Certains probablement; d'autres auraient peut-être choisi un autre modèle. Mais, encore une fois, il nous revient maintenant de mettre sur la table les règles essentielles.

n(11 h 40)n

Dans Le Soleil de samedi, on pouvait lire ceci, M. le Président: «Le ministre [...] a de toute évidence écouté les suggestions qui lui ont été faites en commission parlementaire.

«La nouvelle version du projet de loi constitue dans les circonstances un compromis intéressant[...]. Il faut bien lui donner raison lorsqu'il soutient qu'il aurait manqué de respect envers la démocratie s'il avait mis en place un processus de consultation bidon.»

M. le Président, je pense que Le Soleil a reflété, ici, de manière générale ? je reviendrai tantôt sur certaines dispositions plus particulières ? reflète ici la démarche que nous avons faite. C'est une démarche que je pourrais résumer: une démarche de gros bon sens. On connaît nos paramètres, on savait qu'on voulait une consultation, qu'il y aurait une agglomération, on voulait le faire avec le plus de précisions possible aux gens. C'est ce que Le Soleil a bien vu.

L'Union des municipalités du Québec, M. le Président, dont on peut dire qu'elle n'était pas très satisfaite à un certain moment donné, nous dit ceci dans un communiqué: «Plusieurs modifications, présentées par le ministre, sont bien accueillies par l'Union. Ces choix du gouvernement dans les circonstances font preuve de sagesse dans la reconnaissance du bien-fondé d'une agglomération forte.»

Dans Le Soleil de samedi, M. le Président, et j'ai eu l'occasion de le dire un peu plus tôt à la période de questions, nous avions, au niveau des commentaires généraux, deux groupes divergents, opposés, fusionnistes, défusionnistes, qui passaient un message. D'un côté, des défusionnistes, on pouvait lire: «L'ex-maire de L'Ancienne-Lorette, Émile Loranger, et l'ex-mairesse de Sainte-Foy, Andrée Boucher, se sont dits plutôt satisfaits des modifications apportées hier par le ministre des Affaires municipales.» Du côté des fusions: «Les partisans de la fusion se disaient également satisfaits des amendements.» Le président du conseil de la Chambre des entrepreneurs de Québec, Normand Lessard et la Chambre de commerce de Québec, son président, Patrick Simard, estiment «que les amendements effectués hier répondent aux attentes des gens d'affaires de la capitale».

Nous cherchons, M. le Président, comme dans toute consultation, un point d'équilibre. Dans cette Chambre, je l'ai dit tantôt, nous avons une représentation selon la population, mais il s'adonne que certains de nos collègues ont des comtés avec moins de personnes, avec moins de gens. Vous savez pourquoi? C'est parce que nous avons aussi à considérer l'éloignement, la grandeur du territoire, d'autres considérations. On cherche un point d'équilibre même dans la façon dont nous sommes élus, ici, en Chambre. Personne n'a jamais douté que ce qu'il fallait, c'étaient des règles d'équilibre. Nous croyons avoir atteint cette règle d'équilibre.

À l'égard de la règle de consultation, M. le Président, je vais vous citer un commentaire du Devoir, un commentaire de la Gazette et un commentaire du Soleil, commentaires éditoriaux. On ne peut pas dire à l'avance que ce sont là tous des médias qui ont la même ligne, qui ont quelques points divergents dans les prises de position.

Dans Le Devoir, on pouvait lire, sous la plume de Bernard Descoteaux: «Sur certains points ? et je cite, M. le Président ? il faut donner une bonne note au ministre. C'est tout particulièrement le cas lorsqu'il fixe à 35 % de tous les électeurs inscrits à la liste électorale l'appui que devra recueillir la défusion ? de ? se faire. Les défusionnistes comptaient sur l'indifférence de la majorité envers la chose municipale pour l'emporter. Ce seuil est raisonnable. Il assure que les défusions suivront un processus ordonné.» C'était effectivement l'objectif que nous avions, et nous sommes heureux qu'il ait été compris.

Dans la Gazette, qui, à d'autres égards, n'est pas satisfaite, disons-le, de la façon dont l'agglomération sera constituée de pouvoirs, néanmoins, on nous dit: «We don't think the Government has set the bar unreasonably high at 35%.»

Dans Le Soleil, nous pouvons lire ceci: «Il nous semble pertinent d'exiger un appui minimum de 35 % des électeurs d'une ancienne ville pour aller de l'avant avec les défusions. Un seuil plus bas aurait fait la vie trop facile aux défusionnistes, et un seuil plus haut aurait jeté de l'ombre sur la crédibilité du processus.»

M. le Président, voilà des commentaires qui viennent de trois médias différents, qui ont des positions éditoriales différentes, mais qui viennent nous dire qu'à l'égard de la règle de consultation il y a un point d'équilibre qui a été atteint, et nous croyons que cela est juste et raisonnable.

On aurait pu se dire, et on se dit, en certains coins, chez des groupes défusionnistes, que cette barre est trop haute, que c'est trop exigeant, que c'est une règle qu'on ne connaît pas, c'est une règle nouvelle. Rappelons d'abord, M. le Président, que la Loi des cités et villes permet, lorsqu'on tient des référendums municipaux, d'avoir une règle différente que la règle habituelle du 50 % plus un des votes dans la boîte. Ce n'est pas une loi nouvelle cette Loi des cités et villes, et cette disposition n'est pas de la dernière pluie.

Il est possible d'avoir des règles différentes. Nous, nous sommes justifiés de faire une règle différente, notamment parce que le choix de l'un va influer sur l'autre qui, lui, a choisi différemment pour la composition de sa communauté politique de proximité. Il nous semble utile, raisonnable et équilibré de demander qu'il y ait une certaine mobilisation derrière ce choix-là, parce que, sinon, un trop petit nombre pourrait l'imposer au plus grand nombre et, auquel cas, M. le Président, il pourrait être plaidé que la défusion serait aussi illégitime que la fusion l'avait été. C'est pour ça que nous voulons nous en protéger.

Certains défusionnistes donc voient la barre se lever ? c'est bien ainsi qu'ils la voient ? et se disent: C'est injuste. D'autres, M. le Président, ont des commentaires plus posés. Je cite, ici, dans Le Soleil, Mme Andrée Boucher, dont on dit qu'elle voit justement dans ces difficultés une opportunité à saisir, et, entre les guillemets: «On ne peut pas juste critiquer, dit-elle. Il faut accepter les règles du jeu. Et si on gagne dans des conditions aussi difficiles, il ne restera plus grand-chose à dire ensuite.» Mme Boucher est allée au coeur de la règle que nous faisons, dire: Oui, on voit que c'est plus élevé, mais, après ça, personne ne va dire que ce n'est pas le choix des citoyens, que ça a été le choix du gouvernement qui l'a passé dans la gorge de ceux qui ne voulaient pas l'avoir. C'est ça, une consultation, et, oui, c'est un peu plus dur, mais c'est fait pour nous assurer que la réponse aux fusions illégitimes ne soit pas des défusions illégitimes. C'est fait pour nous assurer que, s'il y a défusions, que ce soient des défusions citoyennes, M. le Président.

Émile Loranger, l'ancien maire de L'Ancienne-Lorette, dit ? et je cite: «Ça va être plus de travail, mais on va revenir à ce qu'on avait avant les fusions forcées», disait-il. Il voyait la possibilité de répondre donc à ce 35 %. M. le Président, les commentaires généraux voient le point d'équilibre; les commentaires sur le 35 % sont aussi à cet effet.

Nous avons par ces amendements créé un conseil d'agglomération. Certains commentaires ont été émis sur le conseil d'agglomération. Évidemment, ceux qui voulaient partir et veulent toujours partir voudraient quitter pour ensuite se retrouver dans l'état où ils étaient avant, exactement de la même façon. Mais nous avons amplement annoncé que ça n'arriverait pas, mais c'est néanmoins de ce côté-là qu'il faut regarder pour voir quelle est la réaction que cela suscite qu'il y ait une agglomération, qu'il y ait certains pouvoirs partagés entre villes différentes mais géographiquement membres d'une même agglomération. Le but que nous visons, c'est de servir l'intérêt de chacun.

Or, M. le Président, il est justement des promoteurs de la défusion qui ont vu cet élément dans les amendements que nous avons déposés. On pouvait lire, dans La Presse de samedi, Mme Francine Gadbois, qui est élue dans l'arrondissement... la présidente de l'arrondissement Boucherville, l'ancienne mairesse de Boucherville, qui disait ceci... Elle se dit en faveur du conseil d'agglomération et elle disait: «"En créant un conseil d'agglomération, les villes défusionnées auront de nouveau un droit de parole. On n'aura pas le choix de nous écouter", se félicite-t-elle», dit l'article.

Je sais, M. le Président, que certains défusionnistes sont déçus de ne pas avoir la ville dans l'état où elle était, mais nous l'avions dit et nous le répétons. Certains défusionnistes ont entendu le choix que nous faisions et considèrent qu'à l'égard de l'agglomération, il y a quelque chose de porteur même pour une ville qui aurait quitté, parce qu'il y a des retombées pour tous. J'ai cité Mme Gadbois, Rive-Sud de Montréal. Dans Le Soleil du même jour, parlant de la région de Québec, Émile Loranger disait... «Pour lui, la création d'un conseil d'agglomération, en charge du développement économique notamment, s'avère une excellente idée. "On va peut-être représenter que 3 % de la population, mais on va avoir ? le ? droit à 100 % de l'information. C'est ça qui est important"», disait M. Loranger.

n(11 h 50)n

M. le Président, les personnes qui sont visées et intéressées par le projet et qui voient les bénéfices de l'agglomération, notamment du domaine économique, même s'ils veulent la défusion dans leur coin, voient bien qu'il y a des avantages pour eux. Je n'empêche pas quiconque à penser autrement. Je fais simplement dire que le projet de loi que nous déposons avec ses amendements permet une consultation, oui, avec la barre un peu plus haute, mais une barre qui donne une légitimité, et, de façon générale, elle est trouvée équilibrée par les tenants de la fusion comme de la défusion, comme par les commentateurs de journaux à opinions diverses.

Nous avons un conseil d'agglomération dont on pourra dire chez certains que l'économie ne devrait pas être dedans, mais certains défusionnistes saluent le fait que l'économie soit dedans parce qu'elle est utile pour l'ensemble de l'agglomération, peu importe la ville dans laquelle ils sont, si géographiquement ils sont dans cette agglomération.

Même chose pour le conseil d'agglomération. Certains pourraient se plaindre de ce conseil d'agglomération parce que, diraient-ils: Il y aura l'autre qui sera majoritaire et moi qui ne le serai pas. Mais, comme je disais, M. le Président, en ce moment dans la nouvelle ville ou les nouvelles villes, ces secteurs ne sont pas nécessairement majoritaires. Et pourquoi ne le sont-ils pas, M. le Président? Ils ne le sont pas parce qu'ils n'ont pas la majorité de la population.

Le principe de base que nous avons appliqué, c'est la représentation selon la population, et cela donne à certains des majorités et, à d'autres, cela n'en donne pas. Mais on ne peut pas par une loi donner la majorité à 10 groupes différents dans une même salle. Il y en a un qui a la majorité, l'autre, il ne l'a pas. Et il faut fonctionner ainsi.

Certains proposent, à l'encontre de cela, qu'on donne des votes à la double majorité. Assez généralement, M. le Président, ceux qui proposent que le conseil d'agglomération prenne ses décisions à la double majorité ? et je reviendrai sur les conséquences que cela a ? ne souhaitaient vraiment pas que la consultation sur les défusions se fasse à la double majorité, dois-je le rappeler? La consultation que nous faisons se fait dans les secteurs où il y avait des anciennes villes. Il a été question... d'ailleurs, notre collègue de Bourget proposait à un certain moment la règle de la double majorité: que l'on vote la défusion dans un secteur s'ils la veulent dans une ancienne ville, mais il n'y aurait pas eu défusion si, dans l'ensemble de l'agglomération, il n'y avait pas eu un choix aussi pour la défusion. Ça s'appelle la double majorité, M. le Président. Nous n'avons pas suivi cette règle pour la consultation, et je suis bien persuadé que, si nous l'avions fait, les défusionnistes n'auraient pas été tellement contents parce qu'ils n'aiment pas les doubles majorités.

Or, M. le Président, pourquoi n'aiment-ils pas les doubles majorités? Parce qu'ils se disent: Nous sommes une population. Nous avons, comme communauté, le droit de nous exprimer. Soit. Nous n'appliquerons pas la double majorité pour la consultation ouvrant la porte à la défusion. Mais, lorsqu'on regarde l'agglomération, M. le Président, il y a là une communauté d'agglomérations qui ont tous des intérêts à ce qu'elles se développent bien. Pourquoi faudrait-il alors adopter la double majorité dans ces cas-là quand on sait qu'elle sera finalement paralysante? Quelle voie nous reste-t-il? La voie la plus simple: la représentation selon la population. Une idée plutôt vieille qui a son utilité, M. le Président, et chacun fait son choix dans la communauté dans laquelle il veut vivre.

Je parlais un peu plus tôt du développement économique, citant, entre autres, Émile Loranger et d'autres qui ont salué ces éléments. Je voudrais m'arrêter sur les propos de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain qui ont émis un communiqué et qui disaient ceci: «La Chambre de commerce [...] se réjouit du fait que sa recommandation d'inclure ? parce qu'il faut bien rappeler que cette recommandation, issue de la commission parlementaire, avait été émise entre autres par la Chambre de commerce ? la compétence du développement économique, notamment la gestion des parcs industriels au sein des responsabilités d'agglomération ait été retenue[...].

«Pour la Chambre, il était impératif que les agglomérations urbaines québécoises ? et tout particulièrement celles de Montréal ? conservent leur capacité de dynamiser et de soutenir l'activité économique du Québec. À nos yeux, le gouvernement se devait de renforcer cet acquis fondamental dans son projet de loi, puisqu'il s'agit d'une condition primordiale pour permettre à Montréal de réaliser son plein potentiel de développement et d'entrevoir enfin la possibilité de se mesurer avec les Barcelone, Boston, Chicago, Lyon, Milan et autres grandes métropoles du monde. À cet égard, la Chambre souligne le discernement dont a fait preuve le ministre» et, je dirais, le gouvernement, puisqu'il revient à l'ensemble du gouvernement, ce qualificatif.

Somme toute, M. le Président, lorsqu'on regarde le projet de loi, lorsqu'on regarde la démarche du gouvernement, lorsqu'on constate les avis qui ont été émis par les médias depuis quelques jours, ce que nous retrouvons devant nous, c'est une démarche équilibrée qui, oui, permettra une consultation. Alors, tous ceux qui sont contre la consultation depuis le tout début seront et resteront insatisfaits parce qu'ils ne veulent pas qu'il y ait de consultation. Nous le savions à l'avance, nous le savons aujourd'hui, nous le saurons demain, tous ceux qui ne voulaient pas de consultation ne peuvent pas être satisfaits. Pourquoi? Parce que nous allons tenir une consultation.

On nous a blâmés au mois de juin parce que nous allions respecter nos engagements. On va encore, de l'autre côté, nous blâmer de respecter nos engagements, mais nous allons les respecter. Certains vont tenter de dire: Ah oui, vous les respectez, mais vous les dénaturez. M. le Président, à la vue même de la revue de presse que je viens de faire, je pense qu'on aura constaté que, dans le domaine de la consultation, on a atteint un point d'équilibre qui fait en sorte qu'il y ait une mobilisation, qu'il y ait un sérieux. Mais cela est possible. Et, s'il y a un critère, c'est parce qu'il y a des effets sur les autres, c'est qu'il y a un caractère permanent dans ce choix-là. Ce n'est pas comme une élection, soit-elle au niveau fédéral, provincial, municipal ou scolaire. Nous n'allons pas retoucher les structures à chaque trois ans.

Il y a quelques années, le gouvernement du Québec, dirigé par le Parti québécois, a décidé de bouleverser les structures sans mettre les citoyens dans le coup. Nous allons, de façon équilibrée, redonner le droit de parole aux citoyens, et ils vont pouvoir faire un choix. Ceux qui étaient contre les consultations nous disaient: Si vous donnez ce pouvoir, qu'arrivera-t-il par la suite? Ça va être la catastrophe; tout va s'écrouler. Montréal et les autres villes vont être ralenties; on va perdre nos capacités de compétitionner.

Je viens de vous lire la Chambre de commerce de Montréal métropolitain, M. le Président, qui regarde comment tout cela retombe et qui dit: Voilà, nous pourrons compétitionner. Nous avons permis qu'il y ait, au bénéfice de l'ensemble, une agglomération parce que justement elle est au bénéfice de l'ensemble. Entre la proximité et l'agglomération, il y a deux ordres, et les citoyens peuvent se dire: Est-ce que je souhaite une communauté de proximité et une communauté d'agglomération? Est-ce que je souhaite qu'elles soient ensemble? Ils auront des choix à faire en vertu de règles que nous avons mises sur la table et d'études qui seront faites. Mais c'est eux qui vont avoir la possibilité de s'exprimer.

Notre collègue de Bourget a souvent dit que le gouvernement a joué au Ponce Pilate parce que nous laissions les citoyens choisir, mais nous permettons... Peut-être qu'elle va dire le contraire aujourd'hui, M. le Président. Elle nous disait: C'est au gouvernement de décider. Bien, justement, M. le Président, après avoir déposé un projet de loi et entendu les groupes ? comme cela est normal et, je dirais, juste pour un gouvernement ? écouté les gens, nous décidons. C'est normal dans un processus, en pleine consultation, qu'on nous dise: Aïe! vous n'avez pas décidé. Bien, je dis: Bien non, on consulte, on ouvre nos oreilles. On retient ce qui est bon et on le met sur la table. Voilà la décision qui est prise, voici comment cela va retourner, et les citoyens vont faire leur choix.

Au niveau de l'agglomération, certains vont dire: Ah, bien, dans le conseil d'agglomération, ça se peut qu'il y en ait qui ne soient pas majoritaires, ce n'est pas juste pour eux. Les citoyens font leur choix à partir de leur angle d'analyse. Dans certaines villes, ils peuvent se dire: Je ne suis pas majoritaire non plus dans le conseil de ville actuel. Ils pourraient aussi par ailleurs se dire: Mais, si je quitte, je n'aurai même plus la possibilité de parler dans un caucus du conseil de ville. Mais cela est leur choix.

n(12 heures)n

S'il y avait eu une consultation avant les fusions forcées... Parce que rappelons-nous quand même qu'avant les fusions forcées la planète terre tournait toujours et que la vie existait, et il y avait des consultations. Les fusions forcées comme il y en a eu, il n'y en avait pas eu beaucoup dans le temps. La règle générale, c'était de consulter. Alors, quand on consultait les gens, ils avaient la possibilité de s'exprimer sur deux choix, et c'est tout à fait correct, et c'est ce que nous ramenons: la possibilité de choisir entre deux camps.

À ceux qui disaient: Si vous ouvrez ça, ça va être le démantèlement complet, nous répondons par une agglomération où il y a un conseil, où les gens vont choisir: Est-ce que j'aime mieux me retirer, sachant que ma voix sera plus faible dans l'ensemble, mais que je trouve, moi, qu'il y a des avantages? Ils vont faire ce choix-là. De leurs voisins, ils vont peut-être faire le calcul différent, cela, M. le Président, parce que, en démocratie, il arrive que les citoyens ne font pas le même choix pour les mêmes raisons. Dans mon comté, il y a des gens qui ont voté pour moi, qui ne l'ont pas fait pour la même raison, et je vous annonce que ça vous est arrivé à tous et toutes en cette Chambre. Certains ont aimé le parti, d'autres le chef, d'autres le candidat local, d'autres le programme local. Tous ces citoyens, M. le Président, ont exprimé un choix, mais en vertu d'intentions et de motifs différents.

Même chose à l'égard des défusions. Nous n'allons pas forcer les gens à avoir une idée qui les amène à voter, nous allons leur ouvrir la votation en nous assurant que, par la suite, ce n'est pas non plus une destruction. Il faut qu'on pousse vers l'avant, il faut qu'on avance, il faut qu'on puisse faire progresser. Et le progrès tient ici à deux choses: mettre le citoyen dans le coup et nous assurer que, pour l'agglomération, nous ayons tous les outils pour relever les défis de l'avenir. Nous allons faire les deux: parce que faire le premier sans faire le deuxième, c'est commettre une erreur, et faire le deuxième sans faire le premier, c'est aussi commettre une erreur.

L'erreur du gouvernement précédent a été de bâillonner les citoyens, de leur dire qu'on allait leur imposer une appartenance même s'il fallait attendre des décennies pour que cela arrive. Pour eux, c'était: Je vais m'assurer que tout le monde se tient, puis, pour le reste, je ne leur demanderai pas si cela leur plaît ni s'ils veulent y adhérer. On ne me dira pas qu'il n'y avait pas une faute là-dedans quand les citoyens ont le droit de dire leur mot sur leur communauté politique de proximité. On ne me dira pas qu'il n'y a pas une faute là-dedans.

Mais il est vrai qu'on aurait pu nous taxer de fautifs et d'avoir commis une faute si nous n'avions fait que cela sans tenir compte de l'importance de réunir nos forces, d'avoir un développement harmonieux, de pouvoir saisir comment le monde avait évolué et comment, pour l'ensemble, il était possible de se donner des nouveaux outils. Bien, M. le Président, ça aussi, ça s'appelle de l'équilibre. Non, ne cherchez pas le dogmatisme dans l'approche, c'est du pragmatisme. C'est ce que certains appellent le gros bon sens: comment est-ce qu'on peut faire fonctionner les outils pour que les citoyens se sentent dans le coup dans leur intérêt?

De l'autre côté, il y a des gens qui réagissent tout de suite lorsque je parle de pragmatisme. Évidemment, c'est deux approches complètement différentes qui nous animent. Le gouvernement du Parti québécois qui nous a précédés a tout simplement omis de penser que derrière ces volets ? ceux qui sont derrière moi et ceux qui sont derrière eux ? il y a des citoyens, du monde que nous sommes là pour servir. Ils l'ont oublié complètement, parce que, dans leur optique à eux, il n'y avait que leur programme qu'il fallait enfoncer dans la gorge.

Bien, M. le Président, nous avons choisi d'agir au contraire sans perdre d'éléments, M. le Président, sans perdre d'éléments. Je ne dis pas que quelqu'un ne peut pas avoir une opinion contraire à la mienne, je le souhaite, on est en démocratie, mais, ça aussi, c'est du pragmatisme, alors que, de l'autre côté, lorsqu'il y avait ce gouvernement du Parti québécois devant nous, ils voulaient nous dire que seuls eux avaient la vérité. Non, M. le Président, nous acceptons que d'autres aient leur idée.

Mais ce que nous souhaitons surtout, c'est ne jamais nous dire que nous pourrions être blâmés parce que nous faisons ce que nous avions dit que nous étions pour faire. Nous allons persister, M. le Président, sans commettre la faute de reculer, mais en avançant. Nous allons consulter la population parce que nous croyons que les citoyens y ont droit. Et nous leur disons, aux citoyens, dans leur ensemble général: Vous allez avoir la possibilité de partir ou de rester.

Les modèles sont à géométrie variable parce que toutes les villes ne sont pas les mêmes. Incidemment, Montréal, un projet de loi est sous étude et sera peut-être, avec le concours de l'opposition, adopté, qui va leur offrir un autre plateau de choix différents. Mais les gens vont faire ce choix-là, M. le Président, parce qu'il faut leur donner le choix, parce que nous n'avons, nous, pas le choix: c'était ou ne pas faire de consultation et alors là oublier nos engagements, et on aurait été à juste titre dénoncés, ou faire une consultation qui aurait été à ce point exigeante qu'elle aurait été, comme disait Le Soleil, une consultation bidon. Nous avons choisi entre les deux un point d'équilibre. Même chose pour les règles d'agglomération. Certains auraient voulu qu'il n'y ait pas d'agglomération, qu'il y ait un retour en arrière, mais le monde a évolué. Certains auraient voulu qu'il n'y ait pas de retour en arrière pour les défusions et qu'on oublie d'entendre le cri sur la proximité. Nous avons choisi de mettre sur la table ces deux options.

Je m'attends à ce que, dans la société, des citoyens et des groupes ne partagent pas nécessairement l'avis du gouvernement. Je l'accepte. Je pense que nous déposons la pièce législative qui permet d'atteindre les engagements que nous avons pris, qui donne aux citoyens la possibilité de s'exprimer et qui préserve toutes les chances de développement des agglomérations pour le bénéfice du Québec dans son ensemble. Nous avons un processus équilibré, qui respecte nos engagements. Et, M. le Président, certains peuvent peut-être être insatisfaits d'une règle de 35 %, d'autres d'un conseil d'agglomération, d'autres d'une compétence particulière, mais personne, personne, M. le Président, ne va réussir à faire croire à quiconque que nous ne respectons pas nos engagements. Nous les respectons du début à la fin.

À partir de là, M. le Président, non seulement nous aurons des villes plus fortes, nous aurons un Québec plus fort parce qu'il s'appuiera sur ce qu'il y a de plus important dans notre société. S'il est vrai que les ressources humaines sont aujourd'hui à l'économie la ressource la plus importante, bien, les ressources humaines sont à notre société ce qu'il y a de plus important. Ça s'appelle, ces ressources humaines, des citoyens, M. le Président, et nous voulons faire équipe avec eux pour développer le Québec. C'est ce que nous faisons. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, merci, M. le ministre. La parole... M. le leader de l'opposition officielle, sur une...

Motion d'ajournement du débat

M. André Boisclair

M. Boisclair: Oui, M. le Président. Est-ce que vous me permettriez, sans utiliser mon droit de parole, de faire une motion d'ajournement et de présenter la motion pour que le débat soit ajourné en vertu de l'article 100 de notre règlement de l'Assemblée nationale?

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, pour le bénéfice de tous, je vais vous lire l'article 100, qui est: «L'ajournement du débat peut être proposé à tout moment de la séance. Il ne peut l'être qu'une seule fois, sauf par un ministre ou un leader adjoint du gouvernement. Une telle motion ne requiert pas de préavis et ne peut être amendée.»

Alors, est-ce que cette motion est adoptée?

Une voix: Vote nominal.

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, vote nominal. Alors, qu'on appelle les députés.

n(12 h 8 ? 12 h 28)n

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, nous mettons aux voix la motion du leader de l'opposition à l'effet d'ajourner le débat.

Que ceux qui sont pour veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Boisclair (Gouin), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), Mme Marois (Taillon), M. Charbonneau (Borduas), M. Pinard (Saint-Maurice), M. Legault (Rousseau), M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine), M. Bertrand (Charlevoix), M. Létourneau (Ungava), Mme Doyer (Matapédia), M. Côté (Dubuc), Mme Robert (Deux-Montagnes), Mme Vermette (Marie-Victorin), Mme Caron (Terrebonne), M. Pagé (Labelle), Mme Charest (Rimouski), M. Valois (Joliette), M. Legendre (Blainville), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), M. Bédard (Chicoutimi), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Simard (Richelieu), Mme Lemieux (Bourget), M. Cousineau (Bertrand), Mme Richard (Duplessis), M. Dufour (René-Lévesque), Mme Beaudoin (Mirabel), M. Turp (Mercier), M. Bourdeau (Berthier), Mme Maltais (Taschereau), M. Bouchard (Vachon), M. St-André (L'Assomption), M. Thériault (Masson), M. Tremblay (Lac-Saint-Jean), Mme Champagne (Champlain).

Le Vice-Président (M. Sirros): Que ceux qui sont contre veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Dupuis (Saint-Laurent), M. Séguin (Outremont), M. Chagnon (Westmount?Saint-Louis), M. Bellemare (Vanier), M. Reid (Orford), M. Audet (Laporte), Mme Gauthier (Jonquière), M. Corbeil (Abitibi-Est), M. Bergman (D'Arcy-McGee), M. Kelley (Jacques-Cartier), M. Williams (Nelligan), M. Gautrin (Verdun), Mme Boulet (Laviolette), M. Fournier (Châteauguay), M. Vallières (Richmond), Mme Loiselle (Saint-Henri?Sainte-Anne), M. Brodeur (Shefford), M. Bordeleau (Acadie), M. MacMillan (Papineau), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Cholette (Hull), Mme Thériault (Anjou), M. Bachand (Arthabaska), M. Bernard (Rouyn-Noranda?Témiscamingue), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Descoteaux (Groulx), M. Clermont (Mille-Îles), Mme Charlebois (Soulanges), M. Bouchard (Mégantic-Compton), M. Blackburn (Roberval), M. Bernier (Montmorency), M. Dubuc (La Prairie), Mme Hamel (La Peltrie), Mme L'Écuyer (Pontiac), Mme Legault (Chambly), M. Lessard (Frontenac), M. Mercier (Charlesbourg), M. Moreau (Marguerite-D'Youville), Mme Perreault (Chauveau), M. Paquin (Saint-Jean), M. Paquet (Laval-des-Rapides), M. Morin (Montmagny-L'Islet), M. Rioux (Iberville), M. Soucy (Portneuf), Mme Vien (Bellechasse).

M. Picard (Chutes-de-la-Chaudière), M. Grondin (Beauce-Nord).

Le Vice-Président (M. Sirros): Y a-t-il des abstentions? M. le secrétaire général.

n(12 h 30)n

Le Secrétaire: Pour: 35

Contre: 49

Abstentions: 0

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, la motion...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): La motion est donc rejetée. Et on revient...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): La motion est rejetée et on revient donc au débat précédent sur la proposition d'adoption du principe du ministre des Affaires municipales, du projet de loi n° 9. On va attendre quelques minutes.

Alors, on va donc reprendre le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 9. Et la parole est maintenant à la députée de Bourget et porte-parole de l'opposition officielle en matière d'affaires municipales.

Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: Merci, M. le Président. M. le Président, j'ai écouté avec beaucoup d'attention les propos tenus par le ministre à l'occasion de l'adoption du principe du projet de loi sur les défusions et j'ai été frappée par une chose, par sa conclusion. Il nous a dit, en conclusion... Et, même si je n'ai pas la transcription fidèle, honnêtement, je crois reproduire son esprit, et on pourra valider le tout au moment où la transcription sera disponible. Mais il a dit une chose, il a dit: Il se peut que des gens aient des remarques à faire, expriment des oppositions au sujet du conseil d'agglomération que je crée à l'occasion de ce projet de loi sur les défusions, il se peut que les gens aient des remarques à faire sur le niveau de participation, sur le 35 %, etc., il se peut que les gens aient des remarques à faire sur les modalités du comité de transition, ou je ne sais quoi. Mais il a conclu une chose: Le plus important, c'est que nous respections notre engagement électoral.

M. le Président, puis-je être un peu troublée par cette conclusion? Le plus important, ce n'est pas que les villes survivent, ce n'est pas que les villes se développent, ce n'est pas que les citoyens vivent avec le plus d'harmonie entre eux, ce n'est pas qu'on développe de nouveaux services dans les villes, qu'on améliore le fonctionnement des nouvelles villes, non, M. le Président, aux yeux du ministre, le plus important, c'est qu'il respecte son engagement électoral.

Alors, M. le Président, on le sait très bien, le gouvernement libéral a pris des engagements électoraux dans d'autres sujets, au sujet d'autres matières de la vie collective et de la vie publique du Québec. Prenons un exemple choisi au hasard, les garderies, les centres à la petite enfance. Un engagement formel: On ne touchera pas à ça, on va maintenir les cotisations à faible... les cotisations pour les places réduites, on va maintenir le 5 $, on ne touchera pas à ça. Quel est parmi les premiers gestes posés par ce gouvernement? Revenir sur sa parole.

M. le Président, le gouvernement n'a qu'un seul argument pour soutenir ce projet de loi, et cet argument, c'est: Nous avons pris l'engagement, nous allons le faire. M. le Président, quand on est élu, ça ne nous donne pas tous les droits. Le gouvernement libéral a été élu, j'en conviens, mais ça ne lui donne pas tous les droits, ça lui donne aussi des responsabilités. Or, on l'a vu, M. le Président, notamment à l'occasion des consultations sur le projet de loi n° 9, à quel point les fondements, le fond, la substance de cet engagement du Parti libéral ne tient pas la route.

À part le fait de dire: Bien, ce serait sympathique de consulter les citoyens, M. le Président, est-ce que ce gouvernement peut mesurer les conséquences de ses gestes? Oui, le gouvernement libéral a été élu, mais il a aussi... il doit aussi assumer ses responsabilités. Et être élu, M. le Président, je m'excuse de le dire aussi crûment, ça ne veut pas dire faire des niaiseries, ça ne veut pas dire poser des gestes irréparables pour le développement du Québec. Mais non, M. le Président, le ministre conclut en disant: Le plus important, c'est de respecter notre engagement électoral.

Or, quelques minutes auparavant, le ministre a fait un grand plaidoyer sur la démocratie et la consultation. Et je ne veux pas être ironique, là, quand j'aborde ces thèmes-là, mais, M. le Président, tout le monde a compris, tout le monde a compris, M. le Président, que ce grand plaidoyer pour la démocratie et la consultation ne s'adresse qu'à un seul groupe de personnes, M. le Président, au Québec, et ce groupe de personnes, ce sont les électeurs défusionnistes que le Parti libéral a accueillis dans son camp. Ça ne concerne pas tout le monde, ça, la démocratie dont le ministre parle, la consultation dont le ministre parle, ça ne concerne que les électeurs défusionnistes, M. le Président.

Et la preuve de ça, M. le Président, il y en a une fort simple. Qui a l'intérêt et le pouvoir de déclencher les processus référendaires? Eh bien, c'est ceux qui sont contre, c'est ceux qui sont contre qui vont aller... Parce que c'est ça, la mécanique, M. le Président, qui est proposée. La mécanique, c'est: il faut qu'il y ait au moins 10 % des gens qui réclament un référendum. Ceux qui sont pour, pourquoi iraient-ils contribuer à enclencher le processus de référendum s'ils sont pour? Ils vont rester chez eux. Donc, l'outil à la disposition est un outil exclusif et destiné uniquement à leurs électeurs défusionnistes. Mais là les libéraux nous disent: Non, non, on veut consulter, c'est la démocratie. Alors, c'est faux, M. le Président. C'est faux parce qu'il y a un outil, il y a un droit prépondérant qu'ils ont décidé d'accorder à leurs électeurs défusionnistes, M. le Président.

Et, par ailleurs, l'autre mise en garde que je fais au ministre. Lorsqu'il parle de démocratie, il décide d'utiliser le corridor de la démocratie en direct, hein? C'est ça qu'il nous dit. Il nous dit: Écoutez, considérant que ces décisions concernent les citoyens, il faut aller les consulter. On ne peut pas être contre ça, M. le Président. Mais ça veut dire qu'on entre dans une nouvelle dynamique au Québec, qu'on va donner une autre couleur et d'autres paramètres à notre démocratie, M. le Président, au Québec. C'est ça que ça veut dire. Ça veut dire que toutes les décisions le moindrement difficiles, on va les gérer en démocratie en direct, comme Loft Story, comme quand les gens appellent pour choisir les candidats, ou Star Académie, M. le Président. Et je ne veux pas faire de mauvaise blague, mais je suis sérieuse quand je dis ça. Vous n'aimez pas quelque chose, on vous donne un accès: démocratie en direct. Ce n'est pas ça, notre système, M. le Président. Alors, si c'est ça, faisons les choix en conséquence.

n(12 h 40)n

Mais qu'est-ce qui s'est décidé au Québec et dans la plupart des pays occidentaux dans le monde, M. le Président, et les pays, d'ailleurs, qui prétendent à une démocratie? Bien, on s'est donné des systèmes de représentation. On s'est dit: À partir du moment où on vit ensemble, où on est plus que deux, plus qu'une dizaine, il faut se donner des règles du jeu parce qu'on ne peut pas à tout moment satisfaire à toutes les attentes et tous les besoins qui sont exprimés, d'où un système de représentation. On le fait dans nos écoles, M. le Président. J'ai été présidente de mon conseil scolaire lorsque j'étais... de mon comité étudiant lorsque j'étais au secondaire. On le fait au niveau des élus municipaux, on décide que, pour une collectivité de 5 000, 10 000, 100 000, 1 million d'habitants, on ne peut pas gérer en démocratie en direct à tout moment, on décide de désigner des gens. On porte notre confiance envers des gens, on leur exprime, à ce moment-là, nos attentes, nos besoins puis on leur dit: Essayez de faire les meilleurs arbitrages possible, essayez d'identifier le bien commun pour tout le monde, puis, si jamais on n'est pas satisfaits, on verra à la prochaine élection, M. le Président. C'est comme ça que ça marche, c'est comme ça qu'on a été élus, ici également, à l'Assemblée nationale.

Et ça ne veut pas dire que, entre ces grands moments démocratiques, notamment des élections, qui sont les moments les plus significatifs, les plus importants dans notre système, qu'il n'y a pas de point ce contact, par exemple, entre des élus et entre des citoyens et des citoyennes. C'est vrai, c'est vrai pour les représentants qui ont été élus aux commissions scolaires, c'est vrai pour les élus municipaux, c'est vrai pour les maires, c'est vrai pour les députés. On a à tous les jours, et on doit le dire, développé des pratiques et des points de contact, des lieux de rencontre pour permettre un échange alimentant les élus, faisant en sorte que les élus ne soient pas dans le champ, qu'ils ne soient pas seuls, qu'il soient accompagnés dans des moments difficiles où il y a des décisions à prendre.

Mais, M. le Président, la démocratie en direct, ça vient d'où et ça dessert qui? Mais, à ce moment-ci, M. le Président, ça dessert les électeurs, les gens qui ont voté pour le Parti libéral, qui ont voté parce qu'il y avait cet espoir de pouvoir défusionner et revenir dans la situation du passé. Et d'ailleurs c'est assez frappant de constater dans les journaux du week-end à quel point des leaders défusionnistes, et je dirais même, dans ce lot, des leaders carrément péquistes qui étaient des gens alliés au Parti québécois depuis nombre d'années qui parlent du sentiment d'être floués. Et ils ont raison. Ils ont raison parce que, visiblement, le gouvernement libéral a pris cet engagement, mais il se rend bien compte ? écoutez, je ne peux pas croire qu'ils ne voient pas les choses... les mêmes choses que nous voyons ? il se rend bien compte que ça n'a pas de bon sens. Et, au lieu de dire: Ça n'a pas de bon sens, on a mesuré les conséquences de tout cela, on va essayer de prendre une autre direction, mais ce n'est pas la bonne direction à prendre, au lieu de dire ça, qu'est-ce qu'ils font? Ils nous ont tricoté un projet de loi avec toutes sortes d'entourloupettes dedans. Mais ils pourront toujours dire, pour revenir à la conclusion du ministre: Nous avons respecté notre engagement électoral.

Le gouvernement libéral est pris dans une impasse politique, il est coincé, il est dans le trouble, avec son engagement électoral. Mais non seulement il est dans le trouble, il est en train de mettre le Québec dans le trouble, M. le Président. Le vrai geste de courage aurait été de dire: Nous avons pris cet engagement dans un contexte, ce contexte a évolué; depuis, les villes ont été mises en place, des élus ont été nommés, les gens ont travaillé fort pour que ça fonctionne, on croit que ce n'est pas approprié à ce moment-ci d'essayer de détricoter tout cela. Mais non, mais non, M. le Président, le gouvernement demeure dans cette impasse politique, et le pire, c'est qu'il impose son propre... le propre cul-de-sac dans lequel il s'est placé lui-même, qu'il l'impose à plus de 60 % des citoyens et des citoyennes au Québec. Parce que les villes possiblement touchées par ces défusions représentent environ 60 % de la population du Québec.

Alors, je voulais donc introduire un peu sur cette question du fait que la valeur la plus importante qui est véhiculée par le ministre, c'est de respecter son engagement électoral. Mais les valeurs d'équité, de solidarité, de «donnons-nous les moyens de développer nos villes, quelles qu'elles soient, petites ou grandes, à Montréal ou en région», ça semble que ce n'est pas ça qui a le plus d'importance et qui penche dans la balance. Alors, je crois que ça nous indique beaucoup, beaucoup de choses sur les prochains mois à venir parce qu'il y a là une caractéristique entre ce dossier des défusions, une caractéristique commune, et d'autres dossiers qui sont menés actuellement par le gouvernement libéral.

Alors, revenons un peu sur le fond des choses. Parce que je vous jure que le ministre n'en parle pas beaucoup, du fond des choses. Il est beaucoup sur la forme: On va respecter notre engagement, on nous a dit ça, on va essayer d'éviter ça. Mais sur le fond des choses, d'abord, je voudrais dire et redire que ce projet de loi, incluant les amendements qui ont été rendus publics la semaine dernière, va toucher beaucoup de personnes. Je le disais tout à l'heure, on pense à au moins 60 % des citoyens qui vont être interpellés par ce processus, même ceux qui ne veulent pas être interpellés par ce processus. Parce que, je le rappelle, c'est ceux qui sont contre, ce sont les défusionnistes qui ont la clé dans la main pour pouvoir enclencher le processus référendaire. Alors, quelles sont les villes touchées?

Montréal. Ce n'est pas de la petite bière, Montréal, là, c'est notre métropole, et on le sait à quel point Montréal... D'ailleurs, le ministre responsable du Développement économique l'a dit dans son ancienne vie, et j'espère qu'il a assez de constance pour être capable de le dire maintenant: Affaiblissez Montréal et vous affaiblirez le Québec en entier. En substance, c'est ce qu'il a dit et c'est, j'espère, ce qu'il véhicule maintenant. Parce qu'on n'a pas besoin d'un cours en sciences économiques pour comprendre qu'une métropole charcutée, éclatée, embourbée dans toutes sortes de structures qui manquent de sens, on affaiblit le Québec en entier. Ce n'est pas difficile de comprendre ça. Il n'y a qu'à voir comment les élus municipaux, actuellement, montréalais se débattent et essaient de garder le focus sur le développement de Montréal, mais ils sont embourbés dans ces problèmes créés par le gouvernement et son engagement irresponsable.

Et, d'ailleurs, je fais une parenthèse, s'il y a là aussi un autre problème avec cet engagement libéral, c'est qu'on met le poids de leur engagement, le poids de leur engagement est transporté sur le dos des élus municipaux. Les élus municipaux, M. le Président, ont été dûment élus. Quelques-uns, quelques candidats défusionnistes se sont présentés dans le cadre des dernières élections municipales, et c'était correct, ils avaient le droit de le faire; peu ont été élus. Les maires actuellement à la tête des grandes villes du Québec, que ce soit Saguenay, Gatineau, Trois-Rivières, Sherbrooke, Montréal, Québec, ont dit clairement aux citoyens: Nous nous engageons à réussir cette ville. Ils ont été élus. Si les citoyens ne voulaient pas ces maires-là, ils n'avaient qu'à faire un autre choix, lorsqu'il y en avait un, j'en conviens, il n'y en avait pas toujours un, mais lorsqu'il y en avait un. Et, s'il n'y avait pas d'autre choix, c'est bien le signe que la population était rendue là, parce que ça veut dire que les candidats défusionnistes n'ont pas senti qu'ils avaient le terrain, qu'ils avaient l'accueil pour se présenter comme candidats défusionnistes à une élection municipale. Alors, le gouvernement libéral, ce qu'il fait, il nous répète à satiété, il en finit par radoter: On a pris cet engagement. Bien oui, c'est plaisant, mais qui est pris avec cet engagement-là? Les élus actuels, M. le Président. Et ça, c'est odieux qu'un gouvernement transporte ainsi, de manière aussi inélégante et irresponsable ses propres engagements sur le dos des autres, qui n'ont rien demandé, M. le Président.

Alors, ceci étant dit, qui ça touchera? Montréal. Est-ce que j'ai besoin de replaider les effets sur Montréal? Est-ce que j'ai besoin de redire, M. le Président, qu'il ne suffit qu'à peu près de 1 000 électeurs pour que Montréal éclate? Il ne faut que cela. Et je suis généreuse, je n'ai même pas pris la population de la plus petite ville à Montréal, j'ai pris celle qui était la deuxième pour ne pas sembler trop arrogante, M. le Président. Il ne suffit qu'à peu près de 1 000 électeurs pour que Montréal ne soit plus Montréal, pour que Montréal soit l'addition de... on ne sait pas quoi à ce moment-ci.

Alors, Montréal est à risque. Québec est à risque. Est-ce qu'on a besoin que notre capitale nationale soit à risque? Gatineau est à risque, Gatineau, M. le Président, et j'espère que mon collègue de Richelieu aura l'occasion d'en parler parce que, on le sait, on connaît son attachement et ses liens privilégiés avec la région de l'Outaouais. Gatineau, qu'est-ce qu'il y a en face de Gatineau, M. le Président? Il y a Ottawa. Il y a Ottawa...

Une voix: ...

Mme Lemieux: ...je ne parlerai pas du Canada à ce moment-ci, mais Ottawa, oui, la capitale du Canada, Ottawa qui est elle-même une ville qui est le résultat d'une réorganisation municipale, d'une unification de plusieurs plus petites municipalités. Alors, Gatineau se débat comme un diable dans l'eau bénite pour essayer de se serrer les coudes, essayer d'avoir un plan de match quant à leur développement parce que, entre autres, la concurrence entre les deux, elle est très forte, et quel est le moyen... concurrence qui doit être plutôt sympathique, en général, mais tout de même une concurrence, à savoir, par exemple: Un investisseur va-t-il à Ottawa ou va-t-il à Gatineau?

n(12 h 50)n

Alors, pour faire face à cette concurrence-là, qu'est-ce qu'on a besoin? Ce n'est pas difficile à comprendre, on a besoin de se serrer les coudes, on a besoin de ne pas avoir double discours, on a besoin que ce ne soit pas trop compliqué pour les gens qui voudraient développer des projets dans nos villes. Et ça, ça veut dire que nos intervenants, il faut qu'ils se parlent, il faut qu'il y ait des lieux cohérents, des lieux qui se tiennent pour le faire. Si un investisseur, par exemple, se retrouve devant 12 interlocuteurs, trois porte-parole et cinq décideurs, comment vous voulez qu'il se retrouve? Et c'est ça, le défi. C'est ça qu'il y a derrière la création des nouvelles villes. Ce n'est pas un accident de parcours. Ce n'est pas une décision du prince, comme l'a dit... ni un caprice du prince, comme l'a dit la Cour d'appel du Québec. Vous savez, M. le Président, que la Cour d'appel du Québec a dit, au sujet de l'adoption de la loi n° 170: Ce n'est pas un caprice du prince. C'est un long processus d'au moins 25 ans. Alors, pourquoi Gatineau, pourquoi Québec, pourquoi Montréal? Mais pour ces mêmes raisons. Donc, Gatineau est à risque d'éclater.

Longueuil. Longueuil, M. le Président. Longueuil, s'il y a une chose claire qui est ressortie des consultations sur le projet de loi n° 9, c'est le fait que, dans la grande région métropolitaine, il y a trois pôles: la Rive-Nord, qu'on appelle Laval; Montréal, l'île; et la Rive-Sud, Longueuil. Et ce que les experts nous ont dit, ils ont été plusieurs à le dire ? d'ailleurs, le ministre n'a pas osé contredire ces témoignages ? ils nous ont dit, en gros, que Laval a beaucoup bénéficié du fait que Laval a été regroupée il y a un bon nombre d'années, et Laval a été capable de tirer son épingle du jeu et d'avoir un niveau de richesse et un niveau de développement beaucoup plus élevé que ce à quoi on aurait pu s'attendre, et que c'est sa force regroupée qui a fait la différence. Et les experts nous disent que la région de Longueuil, donc la Rive-Sud de Montréal, a souffert de son éclatement et surtout n'a pas bénéficié d'une grande richesse qui s'est déployée au cours des dernières années en termes d'emplois et en termes de développement économique. Donc, Longueuil était une ville et une région, dans la partie métropolitaine, qui a subi beaucoup de conséquences de sa fragmentation et de son éclatement. Or, Longueuil, Longueuil est à risque d'éclatement.

Quelle autre ville, M. le Président? Lévis? Mont-Tremblant. Mon collègue député de Labelle aura certainement l'occasion de parler de Mont-Tremblant, Mont-Tremblant qui est à risque de défusion. Alma, Cookshire, Lac-Etchemin, Lacolle, les Îles-de-la-Madeleine. Les Îles-de-la-Madeleine, quel coin extraordinaire! Est-ce que vous vous rendez compte que ce lieu-là qui est composé de plusieurs îles ? tout le monde connaît bien les Îles-de-la-Madeleine ? risque d'être défusionné, M. le Président, alors qu'il y a des enjeux de développement touristique, par exemple, fort importants, des enjeux d'exploitation des ressources naturelles? Est-ce que c'est une bonne idée, honnêtement, qu'on mette les Îles-de-la-Madeleine à risque que les maires, les élus se chicanent? C'est ça qu'on fait, avec le projet de loi n° 9.

Matane est à risque, Métis-sur-mer, Mont-Joli, Mont-Laurier. Mont-Laurier, nous avons eu des témoignages extraordinaires d'un maire, d'ailleurs, récemment élu de cette région. C'est une région qui a une situation géographique difficile, qui n'est vraiment pas simple, éloignement, etc. Mais il y a des leaders là formidables. Mais Mont-Laurier va passer les prochains mois, pour ne pas dire les prochaines années à essayer de se désembourber de ces défusions.

Rouyn-Noranda. Est-ce qu'on pense qu'une ville en région, au Nord, une région éloignée qui a déjà à faire face à des défis extrêmement importants de diversification économique, d'exode des jeunes, de démographie, est-ce qu'on pense vraiment, là, que c'est une bonne idée d'aller les embourber dans ce problème de défusion? Pensez-vous que Rouyn-Noranda a besoin de ça, M. le Président? Je ne le crois pas. D'ailleurs, le président du caucus des villes d'agglomération a dit... M. Roger Carette a dit une chose fort simple: Tuez les villes-centres, vous tuez les régions. Alors là c'est ce qu'on fait, c'est ce qu'on fait, on les met à risque d'être défusionnées.

Saguenay. Saguenay, qui est aussi une région qui dispose d'atouts extraordinaires mais qui va être paralysée par ce débat sur les défusions. Sainte-Anne-des-Monts, Sainte-Marguerite d'Estérel, Saint-Georges, Saint-Hyacinthe, Saint-Jean-sur-le-Richelieu. Parce que, on peut comprendre, Saint-Jean-sur-le-Richelieu, c'était ce qu'on appelait un regroupement dit volontaire. La volonté avait été un petit peu dirigée, M. le Président, il ne faut quand même pas être naïf. Mais effectivement c'est des conseils municipaux de l'ensemble des municipalités concernées autour de cette agglomération de Saint-Jean-sur-le-Richelieu qui se sont engagés dans des processus dans leurs villes respectives et qui, à un moment, ont présenté une demande commune de regroupement municipal. Savez-vous que Saint-Jean-sur-le-Richelieu est à risque? Et il se pourrait que 10 % de la population décide de signer le registre et que les référendums soient enclenchés.

Salaberry-de-Valleyfield, Shawinigan, Sherbrooke. Sherbrooke. Est-ce que Sherbrooke a besoin d'être à risque au sujet des défusions? Sherbrooke, qui est ma ville natale, M. le Président, qui est ma ville natale. M. le Président, je vous ai raconté ça la semaine dernière, je vais vous le raconter encore. M. le Président, je suis née à Sherbrooke, j'y ai vécu de nombreuses années. Et j'ai vu en commission parlementaire quelque chose que je n'aurais jamais cru voir. J'ai vu le maire actuel de Sherbrooke et un ex-maire d'une petite ville banlieue qui s'appelait Ascot, où j'ai habité, qui était archi-contre Sherbrooke, qui détestait Sherbrooke à l'époque, qui a fait une guerre à Sherbrooke au sujet de toutes sortes de choses, bien, j'ai vu, M. le Président, à l'occasion de cette commission parlementaire, j'ai vu le maire de Sherbrooke avec cet ex-maire-là, qui est maintenant un président d'arrondissement, implorer le premier ministre d'arrêter ça, qui a cheminé et qui est devenu un défendeur de Sherbrooke. Est-ce qu'on a besoin de leur donner cette recette qui va pourrir le terrain, qui va faire en sorte que les efforts qui ont été faits jusqu'à maintenant seront annulés? Pas vraiment, M. le Président.

Terrebonne est à risque. Thetford Mines est à risque. On a-tu besoin de ça, Thetford Mines? Thetford Mines a-t-il autre chose à faire que de s'occuper d'une petite poignée d'électeurs défusionnistes, M. le Président? Thetford Mines, région où la situation économique est extrêmement difficile, extrêmement difficile, c'est ça qu'on leur lègue, c'est ça que le gouvernement... Le ministre des Finances est là, ce matin, là. C'est à ça que vous voulez que vos leaders en région, qu'ils soient des élus, qu'ils soient des promoteurs, qu'ils soient des propriétaires d'entreprises, qu'ils soient de grandes entreprises, c'est à ça que vous voulez qu'ils consacrent leurs énergies? M. le Président, ça n'a aucun sens.

Val-d'Or est à risque, Beauharnois, La Tuque, Magog, Port-Cartier, Saint-Jérôme, Saint-Sauveur, Sept-Îles, Sutton, bref, 42 municipalités qui ne savent pas, qui ne savent pas quelle sera l'issue de tout ça pour leur communauté et qui sont donc à risque de défusion. Je conviens, évidemment, M. le Président, que les risques ne sont peut-être pas égaux partout puis qu'il y a des régions au Québec qui sont encore plus à risque, et l'exemple de Montréal en est un. Montréal est encore plus à risque. Parce que la première pièce, le premier élément de cette réorganisation municipale concernait notre métropole. Et, oui, c'est plus à risque pour toutes sortes de raisons, pour des questions... parce que les écarts à rattraper étaient tellement grands, parce que la structure politique était tellement découpée en petites pièces, et, de ramener ça à quelque chose de plus unifié, c'était une opération qui était beaucoup plus complexe parce qu'il y a des considérations linguistiques, parce que les écarts, en termes de richesse, sont très, très, très, très, très marqués.

Alors, oui, il y a des villes qui sont plus à risque, mais, même si en apparence certaines villes semblent ne pas être inquiètes, on pourrait avoir des surprises, M. le Président, et c'est ça qui est incroyable. Quand on légifère, M. le Président, on ne peut pas tout prévoir. Ça, je reconnais ça, on ne peut pas tout prévoir les conséquences quelquefois insoupçonnées d'une mesure législative, d'un article de loi, d'un alinéa ou de ce que vous voulez. Bon, ça, je reconnais qu'un gouvernement ne peut pas tout prévoir. Mais, pour l'amour du ciel, on peut-u essayer de prévoir le maximum de choses? Et c'est ça qui est fascinant dans le dépôt de ce projet de loi, c'est que le ministre nous dit: Un, le plus important, c'est notre engagement électoral, c'est ça qui est le plus important; le reste, c'est des discussions de salon, ou je ne sais quoi. Et, deux, il nous dit... Et là j'ai vraiment oublié mon idée, M. le Président, mais je vais me rattraper. Peu importe, l'heure file, alors j'en suis fort heureuse. Alors, oui, le ministre n'est pas capable de nous dire quelle sera la mesure et les conséquences probables de l'adoption de ce projet de loi. Est-ce que c'est une ville, deux villes, trois villes, 10 villes, 15 villes? Il ne mesure pas... il ne s'inquiète pas de cela, M. le Président. C'est ça qui est dramatique.

Alors, je comprends, M. le Président, à votre langage non verbal, que je vais reprendre mon exposé flamboyant à l'occasion de la reprise de nos travaux?

Le Vice-Président (M. Sirros): Effectivement, Mme la députée. Étant donné l'heure, on va ajourner nos travaux à 15 heures cet après-midi et on va reprendre. Alors, les travaux sont ajournés.

(Suspension de la séance à 13 heures)

 

(Reprise à 15 h 2)

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, veuillez prendre place, s'il vous plaît.

M. le leader du gouvernement, on va reprendre le débat...

M. Dupuis: Oui, sur l'article 1 du feuilleton.

Le Vice-Président (M. Sirros): ...sur l'article 1 du feuilleton. On va poursuivre le débat là où l'avait laissé avec la députée de Bourget, qu'on avait interrompue. Alors, Mme la députée de Bourget, vous allez pouvoir compléter votre intervention, la parole est à vous.

Mme Lemieux: Merci, M. le Président. Alors, j'ai donc abordé un certain nombre de sujets, exprimé un certain nombre de remarques avant l'ajournement de l'heure du dîner, du lunch, et je voudrais quand même rappeler, pour que les gens nous suivent bien, le sens de mes propos.

Je voudrais d'abord signifier que j'ai réagi au fait que la conclusion du ministre lorsqu'il a parlé de projet de loi sur les défusions, sa conclusion a été de dire, en gros, même si je n'ai pas les transcriptions sous les yeux: Oui, on est conscients, il peut y avoir des opinions différentes, des opinions partagées entre les uns et les autres, oui, il peut y avoir un certain nombre de problèmes, etc., mais le plus important, c'est de respecter cet engagement électoral.

Et je lui signifiais que je ne crois pas que ce soit ça, le plus important. La preuve, c'est que ça ne doit pas être si important que ça, M. le Président, parce que les libéraux, en moins de six mois, sept mois de pouvoir, ont déjà transgressé à la propre règle qu'ils s'étaient imposée en haussant les frais de garderie, les frais de services de garde alors qu'ils s'étaient engagés à ne pas le faire, M. le Président. Et je signifiais donc que ce qui devrait être important lorsqu'on est élus, ce n'est pas cette obsession un peu réductrice: On respecte nos engagements, on respecte nos engagements. Tout ça n'a pas de sens si l'engagement n'a pas de sens lui-même, M. le Président. Alors, le plus important, c'est maintenant, c'est le futur: Qu'en est-il du développement des villes? Qu'en est-il du développement économique? Qu'en est-il du développement social? Et c'est ça qui devrait compter aux yeux du ministre et du gouvernement.

J'ajouterais, M. le Président, à ce moment-ci, que ce qui est relativement... en fait, pas relativement, qui est totalement troublant dans cette histoire de respect d'engagement, c'est que, un, c'est un engagement irresponsable, mais, deux, il faut se redire et redire au gouvernement que, d'aucune manière, ce gouvernement, même lorsqu'il était à l'opposition, n'a remis en cause les fondements et les objectifs de cette réorganisation municipale, M. le Président.

Si, d'une manière ou d'une autre... Et je mets au défi le ministre ou n'importe quel autre membre de ce gouvernement de me trouver le début d'une réflexion, d'une citation à ce sujet-là. Si le gouvernement avait dit: On pense que cette réorganisation municipale, ce n'est pas une bonne chose, on pense que ce n'est pas dans cette direction qu'il faut amener les villes au Québec, on pense qu'il faudrait mettre en cause d'autre éléments, que tout n'a pas été considéré... D'aucune manière, M. le Président, les libéraux ont remis en cause le bien-fondé, les objectifs recherchés au moment de l'adoption de la loi n° 170 qui consacre l'unification de nos grandes villes. Et non seulement le gouvernement libéral n'a jamais prétendu que cette réforme était inappropriée, mais ils ont fini par joindre leurs voix lorsqu'ils ont dit: Bien, finalement, on est pour le succès des nouvelles villes. Ça a été leur manière à eux de dire: Bien, oui, on est d'accord. Même s'ils n'ont pas osé le dire directement, ils nous ont dit qu'ils étaient en faveur du succès des nouvelles villes. Alors, le gouvernement s'en est pris donc à la forme, à la manière, et ça, on peut en discuter longtemps. Dans le fond, si je le disais de manière un peu populaire, ils se sont attardés beaucoup au contenant et pas au contenu.

Alors, M. le Président, je voudrais rappeler d'ailleurs le libellé de cet engagement libéral qui fait qu'on est dans la choucroute actuellement, M. le Président. Ce libellé, il est simple: «Un gouvernement du Parti libéral s'engage à adopter une loi qui assurera le respect des citoyens en permettant la tenue de référendums portant sur l'annulation desdites fusions forcées.» Alors, c'est de ça dont il s'agit. Il n'est pas écrit, M. le Président: Le gouvernement libéral s'engage à stopper la réorganisation municipale, à revenir en arrière par rapport à la réorganisation municipale. Non, non, non, M. le Président, ils nous disent: Nous allons permettre la tenue de référendums portant sur l'annulation desdites fusions forcées. Alors donc, c'est sur la forme qu'ils s'en sont pris et sur un élément dont je ne remets pas en cause l'importance, ceci étant dit, mais qui n'est pas le seul ingrédient et le seul élément qu'il nous faut considérer lorsque nous sommes un élu, lorsque nous sommes à la tête d'un ministère, lorsque nous sommes à la tête d'un gouvernement.

Alors, le gouvernement du Parti libéral est donc dans ce qu'on appelle une impasse politique. Il est coincé, et ça a pour effet... En persévérant dans cette voie, qui est tout à fait une voie inappropriée, eh bien, ça a pour effet de mettre dans des situations embarrassantes les maires, les élus municipaux et des citoyens aussi qui sont favorables aux fusions.

M. le Président, j'ai aussi rappelé ce matin qu'il y avait au moins 42 villes, 42 municipalités qui peuvent être visées par ce processus, puisque rappelons, rappelons que ce sont des électeurs défusionnistes, des électeurs qui sont contre cette idée d'unification des villes qui ont le pouvoir, et c'est eux seulement qui ont ce pouvoir, d'enclencher le processus référendaire. Et je rappelais, en nommant ces villes, à quel point elles avaient, pour la plupart d'entre elles, vraiment autre chose à faire. C'est le cas de Montréal, c'est le cas de Rouyn-Noranda, c'est le cas du Saguenay, c'est le cas de Québec, etc.

Je dirais également que même si... Il se pourrait que parmi ces villes il n'y ait pas de défusion; ça, j'en conviens. Je conviens également, et il nous faut en convenir, qu'il y a des villes qui sont encore beaucoup plus à risque de défusion. Même si à terme, dans plus ou moins un an, certaines de ces villes-là restent unies et qu'il n'y a pas... soit qu'il n'y a pas de référendum ou alors que le résultat du référendum est négatif, il reste que ce que ça veut dire pour la prochaine année et prochaine année et demie, c'est que les élus municipaux vont être concentrés sur cette question-là. Ils vont essayer...

Je lisais ce matin, M. le Président, dans la revue de presse, du Droit, le maire de Gatineau qui écrit à ses concitoyens, qui dit, en gros ? je n'ai pas l'article sous les yeux ? qui dit: Bon, on est pris avec ce projet de loi là, on va vivre avec. Qu'est-ce que vous voulez qu'ils fassent, les maires? Ils vont vivre avec, c'est bien évident. Et là ils disent: Bien là, pour la prochaine année, on sait ce qu'on a à faire, il va falloir se mobiliser pour faire en sorte qu'il n'y ait pas de défusions.

Alors, soyons honnêtes, M. le Président. Les villes, actuellement, par exemple, sont en train de boucler leur année financière, hein, il y a plusieurs des villes qui sont dans les budgets, puis c'est compliqué. On est dans des années de passage où il y a beaucoup de pression sur le fardeau fiscal de nos concitoyens. Bon. Alors, les villes sont là-dedans. On vit un certain ralentissement économique qui est ressenti peut-être un peu plus durement dans certaines régions du Québec. On a eu un changement de gouvernement qui a créé, évidemment on le sait, un peu un certain chaos, parce que ce gouvernement déteste tellement ce que le gouvernement précédent a fait qu'ils sont prêts à renier toute signature gouvernementale. Bref, les élus municipaux sont dans une conjoncture qui est assez difficile.

Qu'est-ce qu'ils vont faire au cours des prochains mois, M. le Président? Est-ce qu'ils vont mettre leurs énergies à essayer de ficeler correctement un projet qui avait pour objet de développer une nouvelle entreprise, ou alors un projet de... un nouveau concept récréotouristique, ou alors un projet de logement social, ou alors... Bon. Où est-ce qu'elles vont être, les énergies? Comment vont être utilisées les énergies de ces élus municipaux, M. le Président, au cours des prochains mois? Bien, on le sait. On le sait. Est-ce que vous pouvez vous imaginer, dans certains conseils de ville où c'est déjà un peu tendu, quelle forme vont prendre ces réunions? Ce n'est pas difficile à voir que, pour la prochaine année, la prochaine année et demie, l'attention et, le meilleur, le leadership de ces élus vont être mobilisés pour cette question-là de défusions. Ils vont essayer ? bien sûr qu'ils vont essayer, M. le Président ? d'éviter de défusionner.

n(15 h 10)n

Alors, après deux toutes petites années ? parce que ça fait juste deux toutes petites années que ces nouvelles villes sont mises en place ? déjà, comme ça, parce que quelqu'un a décidé que sa valeur la plus importante, c'est de respecter un engagement électoral même s'il n'a pas de bon sens, alors, après deux toutes petites années, tout de suite on donne le signal aux maires, on leur dit: Écoutez, ce n'est pas sûr, on ne sait pas ce qui va vous arriver. Attendez. Laissez le pied sur le frein.

M. le Président, comment on peut, avec lucidité, persister dans cette idée qu'on est en train de freiner le développement du Québec? Je ne parle même pas d'un développement avec un grand D, je parle des petites choses de la vie: ce petit projet culturel, cet autre projet de logement social, cet autre projet d'implantation d'une usine, cet autre projet d'un meilleur encadrement des mesures environnementales, de la gestion de l'eau sur un territoire. C'est ça que ça fait, des élus municipaux, M. le Président, aujourd'hui. Eh bien, désolée de leur dire, là, mais ils vont faire autre chose au cours des prochains mois parce que ce gouvernement a décidé de faire porter le poids de leur irresponsabilité sur leurs épaules.

Je dirais aussi, M. le Président, et je l'ai abordé ce matin, que le ministre ? et le gouvernement ? a une tendance fâcheuse à confondre toutes sortes de réalités: démocratie, légitimité, popularité, légalité. M. le Président, je l'ai dit ce matin, je suis une démocrate et je crois à la démocratie. Je crois aussi que nous avons un système le plus... Évidemment, la démocratie parlementaire, par exemple, est un système imparfait, mais c'est le moins imparfait de tous les systèmes. Je crois également à la démocratie participative, c'est-à-dire le fait que la démocratie ne s'exprime pas une fois aux trois ans ou aux quatre ans au moment du grand jour d'élection. Je crois que les élus, nous avons la responsabilité ? et ça, c'est fort heureux, nous avons développé des pratiques multiples, variées en ce sens, dans l'histoire du Québec ? nous avons la responsabilité d'avoir des points de contact avec les concitoyens à tous les jours, à toutes les semaines et dans des formes variées, que ce soient des rencontres, des comités aviseurs, des comités consultatifs, appelons ça comme on veut, mais il faut qu'il y ait cet échange, il faut enrichir le travail des élus municipaux. Or, le gouvernement nous entraîne dans une démocratie directe, c'est-à-dire où chaque sujet un petit peu délicat, bien, on confierait ça aux citoyens puis on dirait: Décidez donc pour nous.

Il y a quelque chose d'un peu odieux dans la manoeuvre du gouvernement. Le sujet est difficile. Le sujet est difficile. Le gouvernement n'a pas le courage de dire que cette réforme-là était nécessaire, il n'a pas le courage de dire que cet engagement-là n'avait pas de bon sens. Alors, ils finissent par dire: On s'en lave les mains, on va consulter aux citoyens, puis on pourra toujours dire qu'on aura consulté les citoyens. M. le Président, un gouvernement, ça a des responsabilités. Dans la Constitution canadienne, M. le Président, il y a des compétences qui sont décrites, le gouvernement doit exercer ces compétences. Mais là, parce que c'est un peu dur, parce que ça chauffe, parce qu'il y a de la controverse, parce que les débats sont houleux, le gouvernement dit: Non. Nous, on ne décide rien. Nous, on va laisser les gens s'entre-déchirer, se mobiliser d'un côté comme de l'autre, effriter le leadership dans les communautés. On va laisser faire ça, là! Parce que des leaders... il y a des leaders défusionnistes qui sont des leaders extraordinaires, mais, s'ils n'étaient pas entraînés dans ce cercle infernal de défusions, ils feraient autre chose puis ils s'allieraient aux leaders qui sont positifs dans leurs communautés. Mais non, le gouvernement dit: On va les laisser faire, nous, on est au-dessus de la mêlée.

M. le Président, moi, je trouve qu'il y a quelque chose là d'assez irresponsable. Quand c'est dur, là, quand c'est dur, quand les sujets sont difficiles, là, c'est là qu'on voit qui a du courage et qui a le sens des responsabilités. Et, en ce sens, le gouvernement se déresponsabilise complètement en nous faisant croire qu'il confie quelque chose aux citoyens. Alors, ça, j'en suis vraiment désolée. Et je crois que, dans notre histoire, à ce moment-ci, notre histoire démocratique, ce gouvernement introduit des biais, introduit des éléments un peu tordus qui auront des effets sur notre système démocratique, et, vraiment, je le déplore de toutes mes forces.

D'ailleurs, M. le Président, sans vouloir revenir dans le passé, je vais le faire un peu. Pourquoi, M. le Président, tous les gouvernements au Québec et, je dirais même, tous les gouvernements au Canada ont, au cours des dernières décennies, posé des gestes en termes d'organisation municipale? Pourquoi? Parce que, un, c'est leur responsabilité; deux, parce que, sans refaire l'historique des nombreux rapports et comités qui ont pu exister là-dessus, deuxième raison, parce que tout le monde a compris, revue de littérature à l'appui, que la fragmentation des territoires municipaux devenait un handicap à bien des points de vue. Par exemple, une plus petite municipalité se doit d'offrir de l'eau de qualité à ses concitoyens. Qu'elle soit petite ou grande, elle se doit de le faire. Or, ce n'est pas difficile à comprendre, M. le Président, une municipalité qui est plus petite a moins de possibilités de faire en sorte que ses réseaux et ses infrastructures de distribution d'eau soient en bon état, et c'est le fait de se joindre à d'autres municipalités, l'addition de ces efforts des unes et des autres qui fait en sorte qu'on est capables d'avoir un réseau de distribution de l'eau adéquat. C'est un tout petit exemple, je pourrais en donner des centaines.

Alors, tout ça pour dire ? et ça, c'est démontré, ce n'est pas juste la députée de Bourget qui le dit ? la fragmentation fragilise l'occupation du territoire, fragilise le potentiel de développement, et tous les gouvernements, ici comme ailleurs, ont posé des gestes pour faire en sorte de resserrer l'organisation municipale, de se recentrer, de faire en sorte que les milieux soient moins isolés, que, lorsque des villes ont des responsabilités communes à un territoire plus large que sa propre ville, elle puissent avoir les moyens d'exercer ces responsabilités. Je n'invente rien, c'est connu, c'est documenté.

Et même le gouvernement libéral, dans sa propre histoire ? ce gouvernement a été au pouvoir à quelques reprises au cours des trois, quatre dernières décennies ? ce gouvernement, en 40 ans, a réalisé et fait adopter 16 législations de regroupement, 16 ? pas une, pas deux, 16, M. le Président ? dont la spectaculaire et mythique législation qui concernait la ville de Laval. Pensez-vous, à l'époque, M. le Président ? on est il y a, bon, presque 30 ans de ça ? pensez-vous, à l'époque, M. le Président, que les gens de Laval étaient contents? Bien non, il y a une bonne partie de la population qui ne voulait pas que cette ville se fusionne, puis je peux les comprendre, je peux les comprendre. Mais, à un moment donné, il y a eu un ministre dans la salle, un vrai ministre des Affaires municipales, qui a dit, avec le soutien à l'époque d'ailleurs du député de cette région, qui a dit: On ne peut pas laisser Laval en petits morceaux, de cette manière. Et, si Laval aujourd'hui est une puissance ? et c'est vrai que Laval est une puissance au Québec, puis il y a quelque chose même d'un peu étonnant parce que c'est au nord de Montréal, etc., Laval avait des caractéristiques et des atouts bien sûr, mais pas nécessairement plus ou moins que d'autres ? si Laval est la puissance qu'elle est devenue, c'est parce qu'un jour quelqu'un a dit: Ça va faire. Ça va faire les décisions en petits morceaux, ça va faire la fragmentation, ça va faire la concurrence entre toutes les petites paroisses sur l'île Jésus. Ça va faire.

Alors, M. le Président, il y a eu, donc, un regroupement de 14 municipalités. La moitié de ces municipalités étaient archi contre, M. le Président. Quand on relit sur cette histoire de regroupement de Laval, c'est clair qu'il y a bien des gens qui étaient contre. Et, à l'époque, donc, c'était le ministre Pierre Laporte, titulaire du ministère des Affaires municipales, qui a, il faut le dire, imposé la fusion, qui a, j'imagine ? je n'étais pas là à ce moment-là ? j'imagine, qui a provoqué 102 comités, réunions, documents de réflexion, tout ce que vous voulez, puis, à un moment donné, il a dit: Bien, moi, je pense, pour le bien commun de Laval, il faut unifier ce territoire. Et il avait dit à l'époque: Ce n'est pas la popularité ou l'impopularité d'un projet de loi qui sert de critère au gouvernement dans la préparation de législation, mais bien le bien commun.

n(15 h 20)n

Est-ce qu'on peut m'expliquer pourquoi cette affirmation, qui date d'au moins trois décennies, pourquoi ce ne serait plus approprié de nos jours? Pourquoi ce n'est plus approprié de parler de bien commun, M. le Président? Vous rendez-vous compte, M. le Président, que le fondement, le seul fondement de l'engagement libéral pris en octobre 2000, c'est l'impopularité? C'est au sujet de l'impopularité que ce Parti libéral a réagi, pas sur le fond des choses, pas sur la pertinence. Et d'ailleurs, je le répète, ils nous ont dit: «Un gouvernement libéral s'engage à adopter une loi qui assurera le respect des citoyens en permettant la tenue de référendums portant sur l'annulation desdites fusions forcées.» C'est sur la popularité qu'ils ont réagi.

Alors, M. le Président, je vais le dire crûment, quand la base d'un engagement est aussi mince et aussi insipide, on ne peut pas imaginer autre chose que ce qui se passe maintenant, c'est-à-dire que le problème identifié était tellement mince, tellement petit que, là, maintenant on est pris dans une mécanique qui est de l'ordre d'une tour de Babel, M. le Président. Le ministre des Affaires municipales s'est bien gardé de dire qu'il s'agissait d'une tour de Babel, il a même refusé cette appellation pour décrire son projet de loi, mais c'est une tour de Babel.

Et ce qui est terriblement troublant, c'est que tout ça parce qu'il y a eu un moment dans l'histoire du Québec, il y a deux ans et demi, trois ans, où le gouvernement a mis... ? j'étais pour dire une expression assez colorée, mais je ne le ferai pas, M. le Président ? a pris ses responsabilités et a pris des décisions. Et il y a des gens qui ont été en désaccord, et je reconnais qu'il y a des gens qui étaient en désaccord. Je les ai vues, les manifestations, je le sais qu'il y a des gens qui n'ont pas été contents, mais c'est le seul motif qui justifie, un, cet engagement électoral et, deux, ce projet de loi tout à fait tortueux et tordu, M. le Président.

Alors, pourquoi des prédécesseurs, qui sont des grands hommes, Pierre Laporte, Claude Ryan, ont posé des gestes, dans des gouvernements libéraux, favorisant le regroupement, l'unification, l'unité des structures politiques cohérentes de nos villes au Québec? Pourquoi des membres du gouvernement libéral dans son histoire ont posé ces gestes-là et que personne n'a décrié ça? Personne n'a dit que c'était antidémocratique, personne n'a dit que c'était illégitime. Qui a dit ça? Personne, M. le Président. Pourquoi là, à ce moment-ci de notre histoire, ce serait antidémocratique et ce serait illégitime, M. le Président? Parce qu'il y a eu 10 000 personnes de plus dans la rue? On ne va pas loin avec ces arguments-là, M. le Président.

Et je rappellerais que, sous les libéraux, il y a eu la fusion donc de Chomedey, Alma, Bécancour, Laval, en 1965, Percé, Gaspé, Mirabel, Jonquière, La Pêche, Pontiac, Gatineau, Buckingham, Beauport, Charlesbourg, Saint-Hyacinthe, Chicoutimi et La Baie. Ils ont fait ça, M. le Président. Je ne les blâmerai pas, et je les accuserai pas d'avoir été antidémocratiques, M. le Président, comme ils se plaisent à le faire au sujet du gouvernement du Parti québécois.

Alors, M. le Président, je voudrais, dans les minutes qui me restent... c'est-à-dire, quoi, une vingtaine de minutes, une dizaine de minutes?

Le Vice-Président (M. Sirros): Il reste à peu près 11 minutes, madame.

Mme Lemieux: 11 minutes, M. le Président. Écoutez, moi, je suis prête à prendre le temps de parole des autres, je suis... J'ai tellement de choses à dire sur ce sujet. Je voudrais, M. le Président... Je suis sûre que le ministre consentirait à me donner ses propres droits de parole, parce que son propos, M. le Président, est tellement mince que c'en est triste. Enfin, c'est un autre sujet.

Je voudrais terminer, M. le Président, sur trois gros défauts de ce projet de loi. Dommage, j'aurais pu en nommer plusieurs, mais je voudrais porter l'attention des gens sur trois aspects. Ce ne seront pas les seuls aspects que nous allons examiner au moment de l'étude détaillée du projet de loi, là, il y a plusieurs questions qui sont soulevées, mais, à ce moment-ci, je trouve important d'insister sur ces trois éléments.

D'abord ? on n'en a pas beaucoup parlé jusqu'à maintenant ? je suis extrêmement préoccupée par le fait que le projet de loi n° 9 et ses amendements ne semblent pas soutenir cet objectif d'équité fiscale. Rappelons-nous qu'un des motifs qui a justifié cette réorganisation municipale non contestée par le gouvernement libéral, un des objectifs, c'était d'essayer de remettre de l'équité entre les concitoyens: l'équité quant aux niveaux de taxation, puisque chacune des communautés unifiées qui ont été intégrées aux nouvelles villes avaient des pratiques historiques ? appelons ça comme ça ? en termes de fiscalité et que, pour toutes sortes de raisons, des biais s'étaient introduits et des écarts avaient été provoqués, notamment entre des municipalités qui sont un petit peu éloignées du coeur d'une ville, alors que 90 % d'entre eux se lèvent le matin, prennent leur voiture, l'autobus ou le métro pour aller travailler dans le coeur de la ville, même s'ils demeurent un peu à l'extérieur du centre-ville. Donc, il y avait un objectif d'équité fiscale et d'apporter, donc, des correctifs en termes de niveaux de taxation.

Or, M. le Président, cet objectif semble évacué, il ne me semble pas être présent, ou alors, s'il l'est, il faut vraiment faire des efforts pour le trouver, et ça, c'est un peu dommage, là, parce que, si c'est coincé entre l'article 42 et l'article 53, écrit en petites lignes, là, ça ne marche pas. Alors, je pense que ça, ça va être important qu'on puisse clarifier cette question de l'objectif d'équité fiscale. La loi n° 170 comportait des dispositions claires à ce sujet-là, la loi n° 170 nous invitait même à avoir un échéancier. Tout le monde convenait qu'on ne pouvait pas faire ces rattrapages, qu'on ne pouvait pas corriger ces écarts-là trop brutalement, parce que ce n'était pas la faute des gens, hein, c'était l'histoire qui avait fait en sorte que les niveaux de taxation avaient des écarts qui étaient non justifiables. Alors, honnêtement, M. le Président, je suis très inquiète sur cet aspect-là.

La deuxième chose au sujet duquel je voudrais porter l'attention ? et ça, j'en ai parlé dans mes premières remarques, c'était tellement frappant ? c'est sur justement la démocratie elle-même. Le ministre répond, et dit, et répète: Nous ne voudrions pas provoquer un processus illégitime alors que nous voulons corriger quelque chose qui a été illégitime. C'est ça, le raisonnement du ministre. Or, M. le Président ? et ça me ramène peut-être un peu à ce que je disais il y a quelques minutes ? le gouvernement est en train de produire des travers dans notre démocratie, est en train d'affaiblir. M. le Président, le fait qu'un si petit nombre d'électeurs ont, à eux seuls... Et je ne les blâme pas, les électeurs, M. le Président, je ne blâme pas les électeurs défusionnistes, je ne blâme pas les leaders défusionnistes, je les invite même à essayer de franchir une autre étape, mais, bon, je blâme le gouvernement de donner de l'espoir, de donner l'espoir que ça va revenir comme avant.

Et là je fais une parenthèse. Je fais une parenthèse. Je vois le ministre réagir. Le ministre, ça lui a pris du temps, ça lui a pris du temps, mais il a répété: Les municipalités ne redeviendront pas ce qu'elles étaient avant la création des nouvelles villes. Je veux bien, là, je veux bien, M. le ministre, mais regardez les premières réactions. Qu'est-ce qu'ils nous disent, les leaders défusionnistes? Ils nous disent: On l'a entendu, ça. On le voit dans la loi. On ne l'aime pas, la loi n° 9, elle est trop compliquée, puis il y a des obstacles. C'est ça qu'ils nous disent. Mais ils nous disent: Ça vaut la peine quand même parce qu'on va rétablir un rapport de force puis, après, on va négocier nos pouvoirs.

Et c'est ça que je veux dire au ministre et que j'ai tenté de lui dire ce matin: Est-ce que le ministre se rend compte que ce n'est pas commencé que ça recommence et qu'on en a pour des siècles et des siècles, M. le Président ? j'exagère à peine ? disons une bonne décennie, à se sortir de ça? Parce que le ministre aura beau être clair, il ne peut pas empêcher les gens d'avoir un peu d'espoir. Les gens vont se dire: Ça y est, on met la gomme, comme on dit, on va faire voter notre monde, on va avoir des bons résultats puis, après, on va aller négocier la ville qu'on veut vraiment. Alors, le ministre nous entraîne dans un délire, là, qui ne se terminera pas quant au fonctionnement de ces villes qui se seront retirées. Alors donc, un biais au niveau de notre démocratie: accorder ce pouvoir à un si petit nombre d'électeurs, ce pouvoir de faire éclater les villes.

n(15 h 30)n

Moi, je pense que, là, il y a une vraie, vraie... Ça, il y a une vraie question de démocratie. Il y a une vraie question de démocratie, d'autant plus que, lorsque le ministre parle de réforme antidémocratique, d'illégitimité, M. le Président, dois-je vous rappeler que cette législation a été adoptée par l'Assemblée nationale. Et, si on décrit nous-mêmes l'Assemblée nationale comme n'étant pas un lieu démocratique et légitime, comme dirait Yvon Deschamps, où c'est qu'on s'en va? Elle a été adoptée par l'Assemblée nationale. Oui, les libéraux ont voté contre, mais elle a été adoptée, M. le Président, démocratiquement, M. le Président. C'est la vie, ça. Alors, j'invite à la prudence, à une grande prudence, le ministre, sur ces questions-là.

Et le troisième, autre élément que je veux signaler à ce moment-ci, même si on n'est pas dans l'étude détaillée du projet de loi, c'est l'interface et, je dirais même, les collisions frontales entre ce projet de loi et le projet de loi sur le développement régional. On sait tous, M. le Président, que l'Assemblée nationale a été saisie du projet de loi n° 34, déposé par le ministre responsable du Développement régional, et que ce projet de loi crée la Conférence régionale des élus.

M. le Président, je ferai remarquer d'ailleurs que, pour l'adoption du projet de loi n° 170, il y a eu une commission parlementaire qui a entendu au moins 50 organisations. Est-ce que vous réalisez, M. le Président, que, pour le projet de loi qui concerne la gouvernance des régions, les structures décisionnelles dans les régions, les libéraux refusent que nous tenions un processus similaire? Et on va venir nous dire qu'on ne consulte pas? On va venir nous dire que ce n'était pas légitime? M. le Président, le gouvernement libéral a cette fâcheuse habitude d'avoir une pensée fort différente lorsqu'il est au pouvoir quand on compare à ce qu'il disait lorsqu'il était à l'opposition. Comment on peut nous reprocher d'avoir adopté 170 alors qu'on veut nous rentrer dans la gorge le projet de loi n° 34 avec zéro consultation puis une simili tournée d'information? Alors, c'est une parenthèse, mais je tenais à le dire à ce moment-ci.

Mais, ceci étant dit, lorsqu'on lit en parallèle le projet de loi n° 9 et le projet de loi sur la création des conférences des élus régionaux, M. le Président, bien là on voit bien qu'il y a des affaires qui ne sont pas agencées. Ça se parle-t-u dans ce gouvernement-là, M. le Président? Est-ce qu'ils coordonnent leurs dossiers? M. le Président, on va entrer dans quelque chose d'assez formidable, avec un minimum de quatre à cinq paliers dans les villes. C'est ça que ça veut dire, M. le Président. Il y aura, dans certains cas, un arrondissement avec des élus, un conseil de ville, conseil de ville pour la ville centrale ou ce qui en reste, conseil de ville pour les villes qui se sont retirées de la ville centrale; conseil d'agglomération, c'est ça que le projet de loi n° 9 propose; CMM ? ça, c'est le cas de Montréal, dans d'autres cas, ce sera MRC; et Conférence régionale des élus. M. le Président, s'il vous plaît, est-ce qu'on pourrait demander un petit peu de coordination de la part du gouvernement? Il y a là une étude détaillée à faire entre l'interface de ces deux projets de loi, et, honnêtement, honnêtement, je pense que les villes ont besoin de bien d'autres choses que cet éparpillement et cette fragmentation du pouvoir local et du pouvoir régional. On a besoin de voix et de lieux unifiés.

Alors, M. le Président, je termine mon intervention en vous disant, et personne ne sera surpris: nous allons voter contre l'adoption de principe du projet de loi n° 9. Peut-être que j'aurais dû le dire au point de départ, j'ai bien caché mon jeu, M. le Président, nous allons voter contre. Nous allons voter contre. Et le ministre sait très bien que, quand il dépose des projets de loi pertinents, je suis la première à plaider qu'il faut voter pour et à travailler en ce sens-là. Mais, M. le Président, nous allons voter contre pas pour juste faire obstacle, pas pour s'amuser, parce que nous croyons que ce projet de loi n'a pas de bon sens, nous croyons que le gouvernement est irresponsable et, honnêtement, le gouvernement manque de courage. Il n'a jamais remis en cause les fondements de cette réorganisation municipale, jamais, d'aucune manière. Il s'est même dit à un moment préoccupé par le succès des nouvelles villes. M. le Président, on ne peut pas plaider une chose et son contraire. Et, pour le bien-être du Québec, pour le bien-être de sa démocratie, nous allons voter contre, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Sirros): Merci, Mme la députée. Je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant. Alors, M. le député de Beauce-Nord, la parole est à vous.

M. Janvier Grondin

M. Grondin: Alors, merci, M. le Président. Nous sommes réunis aujourd'hui pour adopter finalement le principe du projet de loi n° 9 concernant la consultation des citoyens sur la réorganisation territoriale de certaines municipalités. Dans toute cette saga des fusions-défusions, après avoir déposé le projet de loi au mois de juin, après avoir entendu pendant plus d'un mois, cet automne, des élus, des groupes, des partitionnistes et des citoyens préoccupés par celui-ci et, enfin, après avoir déposé une série d'amendements, nous pouvons certainement dire que le gouvernement libéral n'a pas mis fin à la confusion et qu'il l'a même aggravée.

D'abord, il faut certainement se rappeler que, si le gouvernement libéral avait promis les défusions municipales lors de la dernière campagne électorale, il avait aussi promis une simplification des structures au Québec, des structures de gestion, des structures administratives. Je pense que, contrairement à ce que le ministre affirme, oui, je parlerais de la tour de Babel, parce qu'on vient de rajouter un niveau de taxation de plus, on vient de rajouter ni plus ni moins une structure de plus. On nous dit que c'est simple, mais le ministre lui-même ne sait pas comment ça marcherait. Il nous parle qu'il y aurait probablement des votes pondérés, des votes inégaux de différents joueurs autour de la table d'un conseil d'agglomération; lui-même ne peut pas nous dire exactement, à l'heure actuelle, comment ça fonctionnerait.

Évidemment, vous avez vu tous tout de suite le déficit démographique qu'il s'y engendrerait, c'est-à-dire qu'à peu près la moitié des pouvoirs seraient dévolus aux maires. En prenant, par exemple, le cas de Montréal, ils se trouveraient donc majoritaires à cette table, à ce conseil d'agglomération. La moitié des pouvoirs exercés par le maire de Montréal se ferait finalement à une table où il n'y a pas vraiment d'opposition. Manifestement, ils pourraient être questionnés devant l'hôtel de ville par la suite, mais, au moment où les décisions se débattent, se discutent, se prennent, il se trouvent à une table où il n'y a pas d'opposition, créant ainsi un déficit démographique. Par cette façon de faire, le gouvernement libéral crée une ville absolument ingérable, il crée une situation qui va coûter une fortune en argent, en temps et en énergie.

À cet effet, je sens le besoin aujourd'hui de refaire un peu l'historique. Depuis qu'on a commencé à parler des fusions par ce projet de loi, on va aller de l'étude d'impact en registre, en référendum, en comité de transition, ça nous mène jusqu'aux élections de 2005. Or, si on fait le total de la saga fusions-défusions, ça va avoir pris cinq ans de la vie des grandes villes du Québec, de l'énergie et du temps des élus. Ça va avoir coûté probablement au-dessus d'un demi-milliard d'argent des contribuables, et là je parle juste de l'argent qui est sorti des poches des citoyens. Là je ne parle pas des pertes économiques puis des ralentissements des projets d'investissement qui n'ont pas eu lieu. C'est ça, la saga qui est en train de nous coûter cinq années de la vie des grandes villes du Québec et au-dessus d'un demi-milliard d'argent des poches des contribuables. Je parle des projets gelés, je parle de ralentissement économique.

Je vous invite à regarder à la une du journal Les Affaires de la semaine dernière, qui a interviewé plusieurs acteurs, des gens du domaine du génie, des gens du domaine des grands travaux, des gens du domaine de la construction, qui disent tous constater un ralentissement qui est inhérent au processus des défusions. Il faut comprendre les maires des grandes villes devant cette instabilité, car il est difficile de se lancer dans des investissements lorsqu'on ne sait pas s'il y a des morceaux de la ville qui vont être encore là dans quelques années. Alors, beaucoup de projets au niveau infrastructures, beaucoup de grands travaux sont ralentis. Il y a même des pertes économiques qui sont considérables.

n(15 h 40)n

En conclusion, M. le Président, nous, à l'ADQ, nous allons voter contre le projet de loi car nous estimons tout à fait irresponsable de mettre de l'avant ces mesures. Il est encore temps de mettre fin à la saga des fusions-défusions. Il faut y mettre fin parce qu'elle est en train de dégénérer, de faire perdre du temps aux nouvelles villes, beaucoup d'énergie, probablement plus d'un demi-milliard, pour arriver à un résultat final qui va être la pire des structures et la plus compliquée qu'on n'aura jamais vue. Le gouvernement actuel est sans contredit en train de commettre la pire imprudence qu'un gouvernement aura faite dans l'histoire du Québec. Il serait important d'arrêter de penser politique ? que ce soient libéraux ou péquistes ? et d'essayer de mettre les citoyens au coeur de ce débat: qu'est-ce qui va être le mieux pour les citoyens? Alors, merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Sirros): Merci, M. le député. Le prochain intervenant sera le député de Richelieu. M. le député.

M. Sylvain Simard

M. Simard: Merci, M. le Président. Nous sommes réunis cet après-midi pour discuter du projet de loi n° 9, qui a été déposé en cette Chambre il y a déjà un moment mais pour lequel le ministre des Affaires municipales vient de présenter, la semaine dernière, un ensemble d'amendements qui évidemment nous permet maintenant de voir un peu plus clair, encore que difficilement, dans les intentions du gouvernement quant au processus de défusion des grandes municipalités du Québec.

Le ministre, évidemment, avait tout un contrat, et je connais son talent et je sais qu'il a fait le maximum pour essayer de se tirer d'affaire, mais tout le monde admettra que sa situation de départ était presque impossible. Satisfaire tout le monde et son père, le fabuliste La Fontaine a rappelé qu'on n'y arrive jamais. Et, actuellement, ce à quoi l'on assiste, c'est plutôt un projet de loi qui, de plus en plus, est insatisfaisant pour tout le monde. Le premier projet de loi faisait au moins l'affaire des défusionnistes; il pouvait au moins dire qu'il y avait une catégorie de personnes favorables à son projet de loi. Maintenant, on peut dire que plus personne ne s'y reconnaît, plus personne n'y trouve son compte, plus personne ne trouve intérêt à ce projet de loi.

Revenons cependant sur ce qui a donné naissance à ce projet de loi, la loi n° 170, c'est-à-dire la naissance de villes fusionnées au Québec, de grands ensembles urbains. Parce qu'on peut bien s'amuser pendant des semaines à parler des technicalités... et nous allons le faire à l'étude article par article pendant un certain nombre d'heures, je suis convaincu. Avant que le bâillon, le bâillon libéral, ne s'écrase sur l'Assemblée nationale, nous allons en tout cas tenter de débattre dans ses moindres détails ce projet de loi.

Mais mettons de côté toutes ces technicalités puis essayons d'aller plutôt vers l'essentiel: il y a eu volonté d'un gouvernement de permettre à nos concitoyens, de permettre à nos municipalités de jouer vraiment le rôle, le rôle moderne, c'est-à-dire de pouvoir faire un développement urbain structuré et planifié, de pouvoir arriver à un degré supérieur d'équité entre les citoyens en termes de ressources financières, et aussi de pouvoir se situer dans la compétition internationale, dans la mondialisation, c'est-à-dire de se doter des outils pour faire compétition aux autres grandes villes du monde.

Et c'est ainsi que des grandes entités se sont créées, et je dois le dire, à la grande satisfaction, je crois, d'à peu près tous les observateurs. Plus personne aujourd'hui ne remet en question le bien-fondé, chez ceux qui sont des observateurs avertis, de la création d'une île, une ville, à Montréal. Il est bien évident que c'était un geste qui était nécessaire, c'était un geste qui allait dans l'intérêt des Montréalais. On peut dire la même chose ? et je reviendrai là-dessus tout à l'heure ? pour la ville de Gatineau, en face d'Ottawa. C'est vrai pour Québec, c'est vrai pour Saguenay. En d'autres mots, il n'y a plus beaucoup de gens pour contester sur le fond la valeur de cette création de grandes municipalités.

D'ailleurs, le chef du Parti libéral, lors du débat télévisé ? un moment démocratique important, n'est-ce pas? ? s'est empressé d'aller au-devant de toutes critiques et questions en disant qu'il était fondamentalement favorable, qu'il travaillerait pour la réussite des nouvelles villes. Ça a pu faire illusion à certaines personnes, certaines personnes ont pu croire qu'il avait changé d'avis et qu'il allait travailler au succès des nouvelles villes, au lieu de quoi il nous a présenté, son parti nous a présenté un projet de loi qui, même amendé, est une vaste autoroute vers les défusions municipales.

Donc, sur le fond, il était dans l'intérêt public que le gouvernement assume ses responsabilités et prenne ses décisions. Après mûre consultation, après 30 ans de débats, des dizaines et des dizaines de rapports, il y avait là décision certes courageuse politiquement mais nécessaire de créer ces grandes entités. D'ailleurs, il y a eu, il y a 15 jours, un regroupement de plusieurs centaines de Montréalais qui occupent tous et toutes des fonctions extrêmement importantes dans notre développement social, économique et culturel et qui unanimement arrivaient à la conclusion qu'il ne fallait pas remettre en question l'existence de cette grande ville.

Eh bien, ce que fait le gouvernement actuellement, c'est très simple, ils essaient de se dépatouiller avec une patate chaude qu'ils se sont eux-mêmes créée, attribuée et qu'ils n'arrivent plus à contrôler réellement. Soyons clairs, nous avons eu, nous aussi, dans notre parti, dans certains congrès, dans certains conseils nationaux des gens qui, bien intentionnées, nous ont proposé des choses qui étaient en apparence le résultat de notre colère, qui reflétaient notre colère, qui reflétaient nos sentiments. Il a toujours été, dans notre cas, nécessaire et admis que les dirigeants de notre parti, que nos instances, après mûre réflexion, mettent de côté ces moments d'impatience.

Lorsque le député de Hull est venu déposer au Conseil général du Parti libéral cette proposition, je suis convaincu aujourd'hui que, si quelqu'un avait pris le soin de regarder ça attentivement et avait laissé refroidir cette proposition, vous n'auriez pas été... le gouvernement, M. le Président, n'aurait pas été pris dans cette spirale, entraîné par une promesse inconsidérée; promesse qui peut-être a fait gagner quelques comtés... Je n'en suis même pas convaincu, je n'en suis même pas totalement convaincu. Dans quelques cas, peut-être pourrait-on faire cette démonstration, mais, dans l'ensemble, je ne crois pas que cela ait été un élément si déterminant. Je pense qu'il y a là une promesse électorale inconsidérée, mais, peu importe, c'était avant le 14 avril.

Un gouvernement, lorsqu'il est élu, doit prendre un peu de hauteur. Il est l'élu non pas d'un parti, non pas de partitionnistes, de fusionnistes, il est l'élu de l'ensemble de la population, il est au pouvoir et doit défendre les intérêts de l'ensemble de la population. Et je me serais attendu, et je peux vous citer sept ou huit éditoriaux, de La Presse, du Devoir, du Soleil, qui vont dans le même sens, je me serais attendu ? et vraiment, j'y ai cru encore jusqu'à cet automne ? que le premier ministre profiterait d'une occasion solennelle pour s'adresser à la nation québécoise et annoncer que, devant tout le mal que ferait une possible défusion des grandes villes créées, le gouvernement mettait de côté son engagement électoral de façon à aller dans l'intérêt de l'ensemble des citoyens du Québec. Et je crois qu'il aurait acquis alors une stature d'homme d'État, qu'il aurait été considéré par ses compatriotes et par l'histoire comme quelqu'un qui avait su se mettre au-dessus de la mêlée, prendre en compte l'intérêt général et arriver avec une proposition acceptable. Ç'aurait certainement fait crier un certain nombre d'individus qui de toute façon sont totalement mécontents des fameux compromis qui viennent d'être apportés.

Ne pensez pas que les gens... que Réjean Simard, qui a mené le combat des Baieriverains à La Baie, est un homme heureux et fier du travail des libéraux aujourd'hui. Ne pensez pas que M. Simon Wilson, dans la région de Québec, est très fier du gouvernement libéral qui vient de proposer ces amendements. Ne pensez que les principaux leaders défusionnistes, que ce soient le maire de Westmount ou l'élu de Pointe-Claire, soient aujourd'hui heureux des positions. Non, pas du tout. De toute façon, ces gens-là sont très malheureux de positions qui de toute évidence tendent à amener un resserrement des conditions qui leur rendent évidemment l'exercice démocratique plus difficile.

Mais changeons un petit peu de perspective et disons qu'il y a de fortes chances... Vous connaissez la mathématique de notre Chambre, M. le Président, vous appartenez vous-même à la majorité. Vous savez qu'un jour il y aura un vote et que vous-même, comme président, vous devrez observer une grande neutralité, mais observez quand même que ce vote a de fortes chances de favoriser le parti ministériel. Il est encore... Et, c'est pour ça que je fais ce débat aujourd'hui, j'ai encore espoir de convaincre le député de Robert-Baldwin, qui est un homme intelligent et que je connais bien, de changer d'avis. Mais disons que j'ai un petit doute sur le résultat de mes propos. Je sais que le député de Marguerite-D'Youville... de... Marguerite-D'Youville, c'est bien ça, est un plaideur dont je reconnais les immenses talents. Et je peux essayer de compétitionner avec lui dans la plaidoirie, mais je doute que finalement, sur... Solidarité ministérielle et solidarité partisane aidant, je doute qu'à la fin il ne fera sans doute qu'entériner la décision de son parti et d'appuyer ce projet de loi.

n(15 h 50)n

Donc, prenons pour acquis pendant quelques minutes qu'il y a de fortes chances que ce projet de loi soit adopté tel qu'amendé la semaine dernière ou peut-être tel que légèrement transformé. Eh bien, regardons les dangers, ce qui peut se produire. Tous les observateurs qui ont regardé... Moi, je connais bien la région de l'Outaouais, je peux vous dire que le danger existe très, très sérieusement, dans un an, puisqu'on va vivre dans l'incertitude, dans la paralysie, on va vivre dans ce débat encore au moins pendant une année, puisqu'on parle de vote qui aurait lieu l'automne prochain. Donc, il est encore tôt pour en être certain, mais il y a fort à parier que dans l'Outaouais, les municipalités de Buckingham, Masson-Angers ? et le député de Papineau, qui était avec nous tout à l'heure, pourrait vous le confirmer ? sont très, très menacées actuellement de quitter la ville de Gatineau. Quant à la ville d'Aylmer, on le sait très bien, hein, pour des raisons qui tiennent à toutes sortes de... Pour toutes sortes de raisons, la ville d'Aylmer, qui ne s'est jamais très bien sentie dans une grande ville francophone ? disons les choses comme elles sont ? risque, elle aussi, de basculer du côté de la défusion, donc de mettre fin à cette expérience extraordinaire d'une grande ville du côté de l'Outaouais.

Je pourrais vous raconter, M. le Président, l'histoire des 30 dernières années, des multiples tentatives pour arriver à cette fusion, comment le Parti libéral, par exemple, en 1972-1973, a imposé une fusion forcée dans l'Outaouais qui a réuni à Gatineau, l'ex-ville de Gatineau, 11 municipalités, qui, à Aylmer, a réuni sept municipalités, des fusions que le ministre d'alors, le Dr Goldbloom, avait jugé nécessaires, qui ont fait à l'époque... qui ont soulevé des tempêtes à l'époque, mais qui sont restées. Aujourd'hui, personne, depuis 25 ans, personne n'aurait imaginé remettre en cause ces décisions-là, même si c'étaient des fusions forcées.

Eh bien, face à la décision du gouvernement ontarien de fusionner les grandes municipalités ontariennes, et vous connaissez très bien le cas notamment de Toronto et d'Ottawa, il serait, à mon avis, totalement aberrant d'assister... Après encore une année d'hésitation, après une année de paralysie de la grande ville de Gatineau, qui sera plongée dans ces débats existentiels au cours des prochains mois, eh bien, au bout de tout cela, après 30 ans d'efforts pour réunir ces communautés, pour donner à ces communautés un véritable sens, leur donner des outils de développement social, économique et culturel, eh bien, il serait quand même désolant, au bout de tout cela, que ce soit un Outaouais morcelé qui, dans la concurrence normale, légitime avec la capitale en face, se retrouve encore une fois désavantagé.

Déjà que le gouvernement fédéral a tout fait pour désavantager, depuis toujours, la rive québécoise, le résultat étant qu'il n'y a plus un seul centre de recherche sur les 32 que compte la région, du côté outaouais, du côté québécois. Il n'y a toujours pas 1 % des achats du gouvernement fédéral canadien qui se fassent en terre québécoise. Donc, la région de l'Outaouais va se retrouver encore une fois morcelée, vivant des épisodes de guerres de clocher lorsqu'il s'agira d'attirer des entreprises, et qui dans bien des cas, malheureusement, par ce manque d'unité, verra les entreprises la quitter, les entreprises la fuir et s'installer plutôt sur l'autre rive, où un gouvernement responsable là aussi a créé des grandes villes et a donné les moyens à ces grandes villes d'exister, mais surtout ne les a pas remises en question.

M. le Président, un nouveau gouvernement est arrivé au pouvoir à Queen's Park depuis quelques semaines, et vous n'avez jamais entendu, pas un instant, ce gouvernement remettre en question ces décisions, imposer ces décisions d'autorité, ces décisions qui sont d'ailleurs de la responsabilité de l'État, de la province ontarienne, comme elles l'étaient, comme ces décisions étaient la responsabilité de notre Assemblée nationale. Ce n'est pas illégal de déclarer la fusion de municipalités, c'est totalement la responsabilité du gouvernement. Ce n'est pas illégitime non plus que des élus de la population prennent des décisions concernant le territoire qui est sous leur responsabilité.

Vous imaginez la logique qu'est en train d'entériner le gouvernement actuel: nous n'aurons plus, si on les écoutait, le pouvoir de déterminer d'ici les territoires des entités qui dépendent des lois québécoises. C'est tout à fait aberrant. Qui prendra en compte l'intérêt public dans les débats entre municipalités? Qui prendra en compte le bien-être commun si, d'ici, nous n'avons plus le pouvoir parce que nous nous sommes démis de ce pouvoir, parce que nous avons accepté l'illégitimité et la quasi-illégalité de nos gestes? C'est, je le soumets respectueusement, M. le Président, c'est aberrant. Non seulement c'est aberrant au niveau des résultats concrets sur l'avenir du développement social et économique de nos régions, mais c'est également aberrant dans le sens le plus profond de la responsabilité que doit avoir un État national, responsabilités d'ailleurs qui nous sont actuellement attribuées par la Constitution canadienne. Que nous l'aimions ou que nous ne l'aimions pas, cette Constitution nous donne pleins pouvoirs dans ces secteurs d'activité, et nous n'avons fait qu'occuper ce champ d'activité qui est le nôtre de façon totalement démocratique.

Il y a donc danger réel, danger réel de voir quelques milliers de citoyens, à Baie-d'Urfé, réussir ? et dans plusieurs autres municipalités ? réussir à émietter, à créer dans ce développement montréalais un immense gruyère où on ne saura plus qui parle pour qui, où cette volonté commune, cette détermination commune de créer une grande ville solide sera évidemment totalement remise en question par l'existence des ces petites municipalités, parfois de grandes municipalités, parfois même au coeur même de la grande ville de Montréal. Je trouve que la décision du gouvernement d'aller de l'avant dans ce dossier, malgré toutes les entourloupettes incluses dans les amendements déposés par le ministre visant à restreindre, à limiter les dégâts en imposant un nombre de votes nécessaire par ancienne municipalité, en diminuant les pouvoirs des municipalités reconstituées... Tout cela ne change pas fondamentalement que le danger est réel, le danger est grave de voir nos grandes villes, celles que nous avons construites pour justement faire face aux défis de la mondialisation, se retrouver détruites, rendues impuissantes.

En plus, nous venons de tomber dans le piège, le gouvernement vient de tomber dans le piège de la structurite. On recrée ce que l'on voulait fuir, des CUM, des CUO, des communautés urbaines d'ailleurs pas très démocratiques, M. le Président. Les municipalités reconstituées ? qui paient donc leurs taxes, disons, les citoyens paient leurs taxes ? si on regarde attentivement le texte qui est proposé par le ministre, n'auront qu'une voix très marginale au chapitre. On nous dit aujourd'hui: Bien, ça aidera à les décourager de voter en faveur de la défusion. Mais, une fois qu'ils auront malgré tout voté en faveur de la défusion, M. le Président, quelle réalité démocratique reconnaît-on à ces gens-là? Ces gens n'auront que le tiers des pouvoirs, n'influeront réellement que sur le tiers des pouvoirs qui seront exercés, ils n'auront donc à peu près aucune voix au chapitre. Il faut y penser, aussi, que c'est un déni normal, c'est un véritable déni de démocratie. On éloigne la démocratie de ces gens-là.

n(16 heures)n

Je sais, M. le Président, je pourrais parler sur ce sujet pendant des heures. Je vous en ferai grâce, et, de toute façon, le règlement ne me le permettrait pas. Mais, si nous allons, nous, du parti de l'opposition, nous battre férocement avec tous les moyens, des moyens qui sont des moyens démocratiques, c'est-à-dire par la persuasion et les arguments, si nous allons nous battre au cours des prochaines semaines contre ce projet de loi, si nous allons tenter de sensibiliser l'opinion publique aux dangers de ce projet de loi, c'est que nous croyons profondément qu'il s'agit d'une erreur, d'une erreur majeure. Actuellement, il n'y a qu'à voir la paralysie dans laquelle se trouvent nos municipalités du simple fait de l'existence de ce projet de loi, il n'y a qu'à voir la fin d'un rêve collectif, l'éclatement des espoirs qu'avait fait naître la création de Montréal, la création de Sherbrooke, la création de Gatineau, de Saguenay et de Québec. Il n'y a qu'à voir à quel point on avait réussi dans la plupart des cas à faire la démonstration que ces grandes entités non seulement étaient viables, mais pouvaient conduire le Québec et les citoyens et citoyennes du Québec vers un mieux-être collectif élargi.

M. le Président, pour ne pas être en reste, pour bien montrer que nous allons, comme opposition, faire le maximum pour sensibiliser le gouvernement, j'en appelle une dernière fois, dans les dernières secondes de mon intervention, au gouvernement en face, qui s'élèverait, qui gagnerait le respect de l'immense majorité de la population s'il faisait ce qu'ont demandé presque tous ceux qui sont venus devant la commission parlementaire, s'il retirait à ce moment-ci son projet de loi. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Sirros): Merci, M. le député. La parole est au député de Verchères et chef de l'opposition officielle. M. le chef de l'opposition.

M. Bernard Landry

M. Landry: M. le Président, est-ce que nous débattons cet après-midi d'un projet majeur pour le destin du Québec, pour les relations entre les citoyens et citoyennes, la redistribution de la richesse, la création de la richesse? Pourquoi est-ce qu'on se retrouve devant ce projet qui dit la même chose et son contraire et qui est une sorte d'absurdité? Pour aucune raison fondamentale. Nous ne devrions pas avoir un tel projet; or, nous en avons un. Pourquoi? À cause d'une raison superficielle, absurde, née d'un emportement partisan lors d'un congrès libéral.

Devant un geste courageux du gouvernement du Québec de l'époque, dans une ardeur de déconstruction de tout ce qui était fait par le gouvernement alors que le Parti libéral était dans l'opposition, on s'exalte et on propose à un congrès libéral, une rencontre libérale, la résolution suivante: «Un gouvernement libéral s'engage à adopter une loi qui assurera le respect des citoyens en permettant la tenue de référendums portant sur l'annulation ? l'annulation, c'est-à-dire rendre nul, repasser à zéro ? desdites fusions forcées.»

C'est cette phrase qui a indigné déjà, à l'époque, tous les observateurs municipaux sérieux. On n'a qu'à relire les écrits des universitaires qui se sont penchés sur la résolution. Parce qu'ils sont venu venir le danger dès le début. C'était un peu plus théorique à l'époque. Ils se sont dit: Les libéraux vont s'amender, les libéraux vont changer. Les libéraux ne vont pas continuer à se rendre jusqu'à l'élection, et, si jamais ils sont élus, à défendre une chose aussi indéfendable.

Et là on a vu des textes qui ne se sont pratiquement jamais démentis dans tous les journaux du Québec jusqu'à ce matin, avec des exceptions comme The Montreal Gazette, on le sait, qui, elle, avait pris position dans l'autre sens. Mais, à peu près partout, les grands universitaires qui se penchent sur ce dossier depuis longtemps, les éditorialistes, les chambres de commerce, les diverses associations de gens d'affaires, les syndicats ouvriers, bref, pour une fois, à peu près l'unanimité des corps constitués s'expriment contre cet égarement d'un congrès libéral survolté qui, parce que le gouvernement avait fait une chose, on voulait préconiser son contraire.

Comment expliquer d'abord l'appui aux fusions et le courage des fusions qui fut salué à l'époque par tous les observateurs dont je viens de parler et qui ont désapprouvé la décision libérale et la décision du gouvernement? Parce qu'il s'agit d'une problématique qui aurait dû être réglée dans les années soixante. Moi, qui suis un admirateur de la Révolution tranquille et de ceux et celles qui l'ont faite ? j'ai déjà rappelé que j'ai été militant du Parti libéral plus longtemps que le chef actuel du Parti libéral ? j'ai été mêlé à ces années extraordinaires de la Révolution tranquille, et il y avait beaucoup, beaucoup de choses à faire, et beaucoup, beaucoup de choses furent faites, mais l'immense domaine municipal a été laissé pour compte à l'époque.

Le Parti libéral a essayé de se rattraper plus tard, et il nous a donné, en tout cas, une expérience témoin fabuleuse, qui devrait nous inspirer aujourd'hui, et celle-là, je l'ai connue par la suite. Là, je n'étais plus militant libéral depuis longtemps; j'étais député de Laval-des-Rapides. Et, quelque temps auparavant, un gouvernement libéral, à la suite du rapport Sylvestre, avait fait naître la ville de Laval. Mais, déjà à cette époque où j'étais député, la plupart des citoyens et citoyennes de Laval étaient enchantés de ce qui leur arrivait, même ceux qui avaient protesté, parce qu'ils se rendaient compte que, surtout dans le cas de configuration géographique insulaire ? Laval est une île, comme Montréal ? dans le cas de problématiques communes, dans le cas de solidarités communes à développer, tout le monde se sentait bien plus à l'aise après la fusion qu'avant, un certain nombre d'années après.

Si les libéraux n'avaient pas eu de courage à cette époque-là, il n'y aurait pas eu de fusion. Si on les avait imités dans leur absurdité d'aujourd'hui, il y aurait eu une défusion. Simplement parce que les libéraux l'avaient fait et avaient appliqué le rapport Sylvestre, par une espèce de hargne qui est leur caractéristique contre tout ce que notre gouvernement a fait, bien, on aurait eu la même faiblesse puis on aurait dit: On va défaire la ville.

Or, les principes qui ont guidé le rapport Sylvestre sont les mêmes, avec plus d'acuité aujourd'hui, parce que le juge Sylvestre, un homme extrêmement estimable, qui a fait ce rapport, n'avait pas évidemment la moindre idée de la globalisation des marchés ou de la mondialisation. Le phénomène ne se pointait même pas à l'horizon à l'époque. Alors, il l'a fait pourquoi? Pour des choses fondamentales qui valent toujours aujourd'hui. Et l'une de ces choses, c'est la justice sociale.

Il fut une époque où le Parti libéral était libéral, il n'était pas conservateur et il préconisait la justice sociale. Et la justice sociale, dans cette expérience témoin de l'île de Laval, prenait en compte du fait qu'il y avait des municipalités qui étaient d'une prospérité, et tant mieux pour elles, qui sautait aux yeux. Si vous connaissez cette île, pensez, par exemple, à l'Ouest-de-l'Île, à Laval-sur-le-Lac, les golfs et tout ce qu'il y a de très beau dans ce coin-là, et les propriétés qui vont avec, de même que les quelques implantations insulaires dans les petites îles de la rivière. C'était fantastique, c'était merveilleux, ça ressemblait à Sillery, par exemple, comme niveau d'aisance, de prospérité et d'esthétique.

Mais il y avait un autre endroit au nom très, très pittoresque qui s'appelait L'Abord-à-Plouffe. Puis à L'Abord-à-Plouffe, sur un seul des terrains de Laval-sur-le-Lac, on pouvait mettre pratiquement 200 maisons. Ce n'était pas du tout le même niveau de vie. Dans d'autres endroits de l'île, on avait aussi ce genre de variation là. Je viens de donner à peu près les extrêmes.

Alors, le rapport Sylvestre, pour cette raison, à l'époque où les libéraux étaient des libéraux, a convaincu le gouvernement de l'époque de faire que chacun dans cet ensemble insulaire soit solidaire. C'est ça qui est le mot.

Si tout ça était vrai pour l'île de Laval, descendons un peu plus au sud, franchissons le magnifique rivière des Prairies puis on va trouver la même argumentation, mais beaucoup plus forte cette fois-ci, beaucoup plus forte, car les disparités qu'on pouvait voir dans l'île de Laval, elles sont au carré dans l'île de Montréal. Il y a beaucoup plus de monde d'impliqué. C'est vrai que Laval est devenue rapidement, après la fusion, une des plus grandes villes du Québec en population, mais ça n'a jamais égalé, et ça ne se produira pas non plus, la concentration de population dans l'île de Montréal.

n(16 h 10)n

Or, dans l'île de Montréal, il y avait ces disparités, qui existent encore, mais compliquées d'un autre phénomène qui ne s'appliquait pas à ville de Laval. Quel est cet autre phénomène? C'est le fardeau supplémentaire d'une grande agglomération urbaine continentale. Parce que la grande ville attire, la grande ville draine; c'est comme ça dans le monde entier. À Mexico, dans la cuvette géographique de Mexico, il y a 30 millions de personnes; il y a la population du Canada. Et, quand cette concentration se produit et en cours de concentration, bien là se développent toutes sortes de détresses, de problématiques humaines qui sont grandes dans la grosse agglomération et dans son centre. Alors, ça peut s'appeler délinquance, ça peut s'appeler crime organisé. Bon. Est-ce que là, franchement, en tout respect pour les anciennes villes, là, ça aurait posé un gros problème de crime organisé, de délinquance juvénile, de drogues, de seringues dans cette agglomération de l'Ouest de Montréal ? très belle d'ailleurs sur le plan esthétique? Mais, sur la rue Sanguinet, ce n'est pas la même chose; sur la rue Visitation, ce n'est pas la même chose. C'est pour ça qu'il fallait cette solidarité exemplaire et c'est pour ça qu'on a eu le courage de faire ces fusions.

Un des grands Montréalais de tous les temps ? il y a des grands Montréalais, hein, chaque année ? un des grands Montréalais de tous les temps, aujourd'hui décédé, était un homme d'État ? on peut être un homme d'État au niveau municipal, hein ? il s'appelait Jean Drapeau. Il s'est illustré au service de cette ville comme nul autre depuis que la ville existe. Et il a compris ça tout de suite, et, dès les années soixante, Jean Drapeau a mis de l'avant, sous forme de slogan mais d'un concept beaucoup plus poussé, Une île, une ville ? j'entends encore retentir sa voix ? et c'est ce qu'il fallait faire.

À partir de ce slogan et de cette idée de Jean Drapeau, bien là on a étudié la question sous tous les angles. Il n'y a presque pas un intellectuel spécialisé dans ces matières qui n'a pas eu un contrat sur la question. Alors: rapport du groupe Castonguay sur l'urbanisation, c'est 1976, ça; rapport de la commission d'étude sur la région de l'Outaouais, c'est 1984; commission d'étude sur la ville de Québec, 1980; rapport pour la relance des grandes villes-centres et de leurs régions, 1993; rapport Pichette, ancien recteur de l'UQAM, 1993; rapport O'Bready, région plus au sud-est, 1996; rapport Bédard, 1999. Tous ont discuté de cette nécessaire réorganisation par les fusions; tous ont conclu dans le sens de la concentration et des fusions. Et tout le débat intellectuel qu'il y avait à se faire a été fait. Tout le monde s'en est mêlé: les gens des municipalités, élus aussi bien que, je le redis, les experts, aussi bien que les gens du monde syndical. Et cette unanimité, chez les gens qui connaissent vraiment la question, a tenu.

Le maire de Montréal d'aujourd'hui, Gérald Tremblay, qui siégeait dans ces banquettes naguère, a conclu, même s'il était libéral ? il est un ancien ministre libéral... Même s'il a lu, sans doute avec horreur, qu'un congrès libéral avait approuvé cette résolution sur l'annulation des fusions, Gérald Tremblay, il a fait son examen lucide de la situation ? c'est un résident d'Outremont, d'ailleurs, soit dit en passant, une de ces municipalités plus cossues que d'autres ? et puis il est sauté dans la bagarre au service de la bonne cause, au service de la fusion. Il s'est fait élire de Montréal, le maire, avec une majorité considérable et une équipe, bien que composite, également impressionnante par certains égards.

Mais, généralement, quand une telle chose arrive, une élection aussi cruciale, l'opposition et le pouvoir, suivant celui qui l'aura ou ne l'aura pas, s'opposent. Mais là l'opposition ne s'est pas opposée, l'ancien maire de Montréal, un des successeurs de Jean Drapeau et successeur de Jean Doré, qui a vécu lui aussi cette ville de mois en mois et d'heure en heure pendant des années, est arrivé à la même conclusion.

Alors, le maire, l'opposition, à peu près la même chose à quelques différences près dans toutes les autres grandes villes fusionnées du Québec... Dans certains cas, d'opposition il n'y en avait guère, au moins sur le plan du débat public. À Sherbrooke, il n'y en avait guère.

Une voix: ...

M. Landry: Ah! Ce qui s'appelait Hull autrefois, il n'y en avait guère. Après qu'il y ait eu un référendum qui a déjà rejeté ces fusions-là autrefois, on a fini par refaire une harmonie autour du maire Ducharme, comme on a réussi à faire une harmonie dans un endroit où on aurait cru que c'était impossible, au Saguenay?Lac-Saint-Jean. Parce que, pour diverses raisons historiques, au Saguenay?Lac-Saint-Jean, on tenait fermement à ce que j'appellerais l'identité municipale. Même là. Et, aujourd'hui, c'est peut-être là que les sondages sont les plus impressionnants. Et, hommage à ces populations, hein! Les citoyens de Saguenay, la nouvelle ville, même sur le territoire de l'ancienne ville de La Baie, ont un taux de satisfaction qui s'élève à 76 %, de la nouvelle situation municipale; à Jonquière, c'est 70 %; à Chicoutimi, c'est 83 %.

Donc, même ceux dont on aurait pu croire que, par tradition... Je me souviens d'il y a une quarantaine d'années, des affrontements Chicoutimi-Jonquière, c'était épique, hein? Bien, même là, ils ont réfléchi, ils ont vu la résolution du congrès libéral sur l'annulation des fusions et puis ils se sont ralliés. Pourquoi est-ce qu'ils se sont ralliés, eux dont la recherche d'identité était apparemment plus élevée qu'ailleurs? Parce qu'ils ont compris que leur identité n'était pas en cause.

Est-ce que quelqu'un qui est à Laval-sur-le-Lac aujourd'hui n'a pas la même conscience d'être à Laval-sur-le-Lac qu'il ne l'était avant la fusion municipale? Est-ce que quelqu'un qui est à L'Abord-à-Plouffe, qui trouve le nom pittoresque et les abords de la rivière intéressants ne peut pas encore écrire un roman sur la vie du quartier L'Abord-à-Plouffe? Est-ce que Rosemont, qui fait partie de Montréal, Rosemont et la Petite-Patrie, ne suscite pas plus d'attachement que peut-être n'importe quel autre quartier d'Amérique? Plateau Mont-Royal. Plateau Mont-Royal, c'est Montréal, ça. Est-ce qu'il y a un quartier à l'identité plus forte que le Plateau Mont-Royal? Peut-être oui, Saint-Germain-des-Prés. Mais même cas, même logique. Saint-Germain-des-Prés fait partie de Paris. Est-ce que Harlem n'est pas suffisamment identifié par rapport à Manhattan?

Alors, cette affaire d'identité que certains ont brandi pour dresser les citoyens l'un contre les autres n'est même pas en cause ? n'est même pas en cause. Les frontières municipales, les arrangements fiscaux nécessaires au bien commun et à la solidarité n'empêchent pas des gens d'être attachés au coin immédiat de terre qu'ils habitent et où ils résident. Les exemples, je les ai pris ici; je les prendrais dans le monde entier, on arriverait au même résultat.

Alors, pourquoi cet entêtement? Pourquoi le Parti libéral, qui a été un expérimentateur méritoire en matière de fusion, devient aujourd'hui un destructeur? Pourquoi est-ce que le Parti libéral veut, après avoir ajouté à son blason de belles réalisations en matière de fusion municipale, passer à l'histoire comme le déconstructeur des municipalités? Ça me rend perplexe. Ça me rend perplexe. Surtout qu'ils font ça au nom de la démocratie.

Le président me dit que j'ai deux minutes pour parler de démocratie. C'est court, surtout pour des gens qui ont l'air à n'y rien entendre, car, dans aucun pays du monde, un citoyen n'a le droit de dire: Je suis le maître absolu de mes frontières municipales. C'est toujours les gouvernements nationaux. C'est Queen's Park qui a décidé Ottawa. Ce n'est pas les citoyens de tel quartier d'Ottawa qui décident de la ville d'Ottawa, c'est Queen's Park. C'est Vancouver qui a eu une décision venant de Victoria, et c'est Toronto qui a eu une décision venant de Queen's Park. Même les bases démocratiques sont futiles.

n(16 h 20)n

Alors, non seulement nous sommes contre ce projet de loi, mais il nous déçoit profondément. Des fois, on peut être contre et... celui-là nous déçoit et pratiquement nous scandalise tellement il est contraire à notre vie démocratique.

Quand on dit que des pourcentages infimes de population vont ruiner l'oeuvre de Jean Drapeau ou son rêve et l'oeuvre du chef de l'opposition, Pierre Bourque, aussi bien que du maire: 0,1 % de la population de Montréal ? Senneville ? peut faire éclater la grande ville; 0,6 % pour Sillery à Québec; 1,2 %, Masson-Angers à Gatineau; 1,5 % à Longueuil pour Saint-Lambert; 1,4 % pour Saint-Rédempteur; 3,6 % à Saguenay pour La Baie, où est-ce qu'elle est, la démocratie?

Une portion infime de la population, pour des raisons qu'on peut comprendre sur le plan sentimental ? mais j'espère qu'ils ont entendu ce qu'on a dit sur la Petite-Patrie et sur le Plateau Mont-Royal et sur Saint-Germain-des-Prés ? une portion infime, pour ces raisons qui ne sont même pas, quand on les regarde de près, vraiment solides, vont faire sauter le bien commun, vont empêcher le gouvernement national du Québec d'organiser la solidarité sociale sur les pans entiers du territoire visé par cette loi absurde. M. le Président, on n'est pas rien que contre, on est profondément déçus de ce que ce gouvernement conservateur à l'appellation libérale est en train de faire au Québec.

Le Vice-Président (M. Sirros): Merci, M. le chef de l'opposition. Et je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant qui serait le député de...

M. Boisclair: M. le Président, question de règlement.

Le Vice-Président (M. Sirros): Sur la question de règlement, M. le leader de l'opposition.

Question de privilège concernant
l'annonce par le ministre des Finances
d'une augmentation de la taxe sur le tabac
selon un article paru dans Cyberpresse

M. André Boisclair

M. Boisclair: M. le Président, j'évoque les articles 66 et suivants de notre règlement, les articles qui portent particulièrement sur une violation de droit ou de privilège. Je voudrais vous en signaler une. Je vous indique que, comme le prévoit le règlement à l'article 69, ces infractions peuvent être signalées dès que nous sommes au fait d'une violation de droit et de privilège. Si vous me permettez, je vous...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): D'accord. Sur une autre question de règlement?

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): Bien, écoutez, allez-y, M. le leader du gouvernement, rapidement.

M. Dupuis: Alors, je lis l'article 69, et je n'ose croire ce que j'entends: «Le député qui constate une violation de droit...»

Le Vice-Président (M. Sirros): M. le leader.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): M. le leader.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): M. le leader du gouvernement, je vous prie... M. le leader du gouvernement, je vous prie, le leader de l'opposition a soulevé une question de violation de fait; il était en train de l'expliquer, rapidement, au point. Ç'aurait été quelque chose qui serait survenu tout de suite avant.

M. Boisclair: Alors...

Le Vice-Président (M. Sirros): M. le leader...

M. Boisclair: ...M. le Président, depuis le débat des chefs, nous avons pris l'habitude de consulter régulièrement Cyberpresse en particulier, ce que nous avons fait il y a quelques instants. Et je lis, M. le Président, sur Cyberpresse le texte suivant: Québec va augmenter le prix du tabac. L'article commence ainsi: «Le prix du tabac va augmenter au Québec, a annoncé le ministre des Finances, lundi.» Il fait une annonce.

M. Landry: ...

M. Boisclair: Je vais par la suite regarder les déclarations du ministre des Finances, et je vais au texte cité des déclarations qu'il a faites à l'occasion d'un point de presse qui s'est tenu il y a quelques minutes. Et je cite ce que j'ai lu, et je cite le ministre des Finances: «Personnellement, je vais recommander de hausser le coût du tabac. C'est à voir quant au montant, mais ce sera dans l'ordre d'à peu près ce qui s'est fait en Ontario.» En anglais, il précise davantage, M. le Président... Laissez-moi terminer mes explications et je vous demande ensuite de me reconnaître sur une question de violation de privilège, parce que...

Le Vice-Président (M. Sirros): Je vous interromps très brièvement juste...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): Je vous interromps très brièvement parce que la violation doit être... signalée tout de suite après le fait qui aurait été normalement produit... en Chambre, c'est tout de suite après le fait.

M. Boisclair: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, tranquillement, on va arriver à tout démêler ça puis respecter les droits et privilèges de tout le monde.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): Il y a effectivement un débat en cours, il y a une question de violation de droit et privilège qui a été soulevée. On m'a indiqué, quand le leader de l'opposition s'est levé, que ce serait pour signaler quelque chose qui se serait... qui venait d'arriver. La jurisprudence que j'ai ici m'indique que ça aurait dû être quelque chose... si ça vient d'arriver, c'est quelque chose qui se serait passé en Chambre. Alors, si c'est quelque chose qui s'est passé en Chambre, je n'ai pas encore entendu ça. Si vous...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): S'il vous plaît! Si vous vous référez à des événements qui se sont reproduits à l'extérieur de la Chambre, il y a une façon de procéder à l'effet d'aviser la présidence une heure avant la période des affaires courantes sur ces événements-là. Alors, s'il s'agit d'une violation de droit et de privilège qui vient de se produire, référez-vous à quelque chose qui s'est produit en Chambre, tout de suite avant ou durant le discours qu'on vient d'entendre. Alors, allez-y, M. le leader.

M. Boisclair: Bien, M. le Président...

M. Dupuis: Non, M. le Président. Question de règlement. Question de règlement.

M. Boisclair: Là, vous m'avez reconnu, M. le Président?

Une voix: ...

M. Boisclair: Vous m'avez donné la parole?

Le Vice-Président (M. Sirros): Écoutez, normalement...

Une voix: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Sirros): Écoutez, il y a déjà quelqu'un qui est sur une question de règlement. J'ai indiqué qu'il y avait lieu de se référer à l'événement qui se serait produit en Chambre et j'aimerais donner l'opportunité au leader de l'opposition, pour l'instant, de compléter son argumentation et m'indiquer si c'est une violation qui s'est produite en Chambre, tout de suite avant l'intervention qui est signalée. J'apprécierais un 30 secondes pour qu'on puisse clarifier cette question-là dans l'ordre. Alors, M. le leader de l'opposition.

M. Boisclair: Je fais...

Le Vice-Président (M. Sirros): Je veux comprendre quel est le point de règlement que vous soulevez, que vous avez signalé ici, en Chambre.

M. Boisclair: Le point que je veux signaler, c'est une déclaration du ministre des Finances reprise dans les journaux. Je comprends que cette déclaration s'est faite à l'occasion d'un point de presse.

Une voix: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Sirros): Effectivement. Non, vous ne pouvez pas, pour l'instant, continuer parce que je vous ai indiqué...

Des voix: ...

Décision de la présidence

Le Vice-Président (M. Sirros): M. le leader du gouvernement, une chose à la fois. Du calme tout le monde. Je vous ai indiqué, M. le leader de l'opposition, que, si vous soulevez une question de violation de droit et privilège qui s'était produite en Chambre et vous le soulignez tout de suite après le fait, ça ne peut être qu'après le fait produit en Chambre. Vous m'indiquez qu'il s'agit d'un fait qui s'est produit en dehors de la Chambre. À ce moment-là, je vous indique que la façon de procéder, c'est d'aviser la présidence une heure avant les affaires courantes pour que cette question puisse être soulevée.

Je pense qu'il n'y a pas lieu de faire d'autres questions de règlement, c'est ma décision. Et est-ce qu'on peut continuer avec le débat à ce moment-ci? Alors, le prochain intervenant, c'est le député de Marguerite-D'Youville.

M. Moreau: M. le Président, je voulais poser une question en vertu de 213, mais mon interlocuteur a disparu.

Le Vice-Président (M. Sirros): Manifestement, cet article-là ne pourra donc pas s'appliquer. Alors, je serais prêt à reconnaître le prochain intervenant. Alors, Mme la députée de Rosemont. Mme la députée de Rosemont.

Projet de loi n° 9

Reprise du débat sur l'adoption du principe

Mme Rita Dionne-Marsolais

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Je me lève aujourd'hui, M. le Président, pour manifester mon opposition à un projet de loi qui est absolument ? je pense que le mot que j'utiliserais n'est pas parlementaire, alors je ne l'utiliserai pas... mais très, très décevant pour les Montréalais. Et, dans La Presse de la fin de semaine, on avait en gros titre Montréal morcelé? et S'il y a défusion, Québec propose de mettre sur pied une «CUM améliorée». On n'avance pas, M. le Président, on recule avec ce gouvernement. Vous vous souvenez, il y a une blague, là, de l'agriculteur qui fouettait son cheval, et son cheval s'appelait Hercule. Il disait: Avance, Hercule, et le cheval est devenu fou. Les Montréalais sont après devenir fous avec ce gouvernement.

On ne sait pas, on ne sait pas où va nous mener ce gouvernement en dehors des augmentations de taxes, des augmentations de prix, des délais. C'est comme si, tout à coup, on avait décidé de présenter non pas un projet de loi, on a présenté un processus pour l'Assemblée nationale. Dans ce projet de loi là, M. le Président... Et je ne suis pas la seule à le dire, là, même dans Le Journal de Québec,La Presse canadienne a qualifié ce processus, le texte législatif, d'«une grande complexité». Alors que le ministre y voit une grande victoire pour la démocratie, je serais tentée de dire que le reste du monde déplore ce projet de loi là.

n(16 h 30)n

En tout cas, c'est un processus complexe pour donner ? j'allais dire «cacher», mais ce n'est pas parlementaire ? pour donner l'illusion de la démocratie. C'est un processus qui est extrêmement dangereux pour Montréal, parce que, contrairement au processus de paix bien connu dans certaines parties du monde, ce processus-là va soulever des passions à Montréal. Il va soulever des passions entre des communautés qui vivent bien ensemble, qui progressent ensemble et qui avaient d'ailleurs établi une vision pour leur ville. Et cette vision-là, elle se retrouve dans un document, extrêmement bien fait d'ailleurs, qui a été produit par Montréal international, dont on ne sait pas s'il survivra à ces opérations démolissage: Montréal, ville de savoir. Et, Montréal, ville de savoir, pour établir cette vision, il a fallu étudier ce qui s'était fait ailleurs, pourquoi certaines villes réussissent mieux que d'autres, et ce n'est certainement pas parce qu'on les plonge à reculer dans le temps. À tel point qu'il y a une phrase de John Maynard Keynes qui m'est venue à l'esprit quand j'ai regardé ce projet de loi là, et je la cite: «La vraie difficulté, ce n'est pas de développer des idées nouvelles, mais de se débarrasser des vieilles.»

Et, dans ce projet de loi là, on retourne à la Communauté urbaine de Montréal, que le ministre a appelée conseil d'agglomération. C'est un processus qui ne veut que cultiver une nostalgie qui n'a pas sa place dans une démocratie moderne. La Presse a qualifié ce processus-là comme «extrêmement complexe, dont on ne sait jusqu'où il va nous entraîner». Il faut être Montréalais pour dire des choses comme ça. Et, en fait, ce processus-là ne satisfait personne, à l'exception ? on l'a entendu ce matin ? du ministre qui est très fier de son projet de loi, mais que tout le monde qualifie de projet de loi qui manque de leadership et, moi, je vous dirais, qui manque de courage et qui manque de connaissance. Il ne faut pas connaître Montréal beaucoup pour nous rentrer dans la gorge un projet de loi comme ça.

J'ai rarement vu un ministre gonflé d'orgueil en citant juste certains médias qui l'encensaient. D'ailleurs, «l'encenser», c'est un bien grand mot, parce que, quand on regarde la couverture médiatique de ce projet de loi là, c'est d'une grande tristesse pour le ministre, parce que ? et on l'a dit souvent et on a cité plusieurs journalistes à cet effet-là ? il a le talent de dire une chose et son contraire en même temps. C'est assez fascinant. Il a parlé d'une nouvelle création de sa part: des défusions citoyennes. C'est beau, hein? C'est intéressant. On ne sait pas trop où ça va nous mener, mais les mots sont là.

C'est Michel Auger qui a eu une phrase fort intéressante. Il a dit: «Un éléphant, dit le proverbe, c'est un cheval tel que dessiné par un comité. De même, tout le processus des défusions commence à ressembler à la démocratie telle que modifiée par des impératifs politiciens.»

C'est incroyable, M. le Président, qu'on en soit rendus à faire, à proposer des amendements à un projet de loi que tout le monde avait reconnu comme étant irréaliste. Je m'excuse, j'aurais dû dire Mme la Présidente. Mais, si le but du projet de loi n° 9 était de rétablir une démocratie, il fallait au moins respecter les principes démocratiques.

Et là Michel Auger décline toute une série de mesures pour... à son avis, les raisons pour lesquelles le ministre aurait établi une règle qu'il qualifie lui-même de bâtarde ? le journaliste, j'entends, là ? comme 35 % d'inscrits, «ça rend juste le processus plus bassement politique et encore moins démocratique». Et je continue: «Le gouvernement Charest ne fait que démontrer à tout le monde qu'il était plus important pour lui de masquer de cette manière...»

La Vice-Présidente: Juste vous rappeler une règle, Mme la députée de Rosemont, on ne peut pas ici interpeller les membres ou parler... citer un membre du Parlement autrement que par son titre.

Mme Dionne-Marsolais: ...

La Vice-Présidente: Non, vous avez nommé...

Mme Dionne-Marsolais: Je reprends. «Le gouvernement ? que je qualifierai de libéral ? ne fait que démontrer à tout le monde qu'il était plus important pour lui de masquer de cette manière les divisions internes de son caucus plutôt que de maintenir un processus clair. Ça ne l'honore pas.»

Et il continue en référant à certains amendements et en disant: «C'est dommage parce que le reste des amendements fait en sorte que l'essentiel est sauf et que le retour en arrière n'est plus envisageable.» Et, là-dessus, on s'entend. D'ailleurs, je pense que la seule chose sur laquelle on s'entend dans ce projet de loi là, fusionnistes et défusionnistes, c'est qu'on est tous contre ce projet de loi là. Personne n'est satisfait. D'un côté, on est contents parce que c'est un frein, en apparence, aux défusions et, de l'autre côté, les défusionnistes ne sont pas contents parce que ça ne leur donne pas ce qu'ils voulaient, ce qu'on leur avait promis. Mais on est contents, et c'est Mme Boucher qui y réfère, elle dit: Ah! Il faut accepter les règles du jeu, et puis, si on gagne, bien, il ne restera plus grand-chose à dire ensuite, et puis au moins on repartira de là, hein, on repartira de là puis on reconstruira la bataille, l'opposition, la chicane.

Cette structure que le ministre essaie de nous proposer dans son processus complexe... Il va coûter très cher, et ça, ce qui est assez fascinant dans tout ce processus-là, dans toute cette démarche-là, personne n'a parlé du prix de l'application de ce projet de loi là, personne n'a parlé du coût pour les Montréalais. Tout ce qu'on dit, c'est: La nouvelle structure suscite colère et interrogations. Parce qu'il y a rien, là, dans le projet de loi qui va parler du coût, sauf, à un moment donné, le gouvernement va payer pour un certain nombre de choses, et, si jamais il y a défusion, bien, ce sera les résidents de ces villes-là qui paieront le prix. Mais tout ça, là, ça revient à quoi?

Même si le gouvernement... Effectivement, dans Le Soleil, on indiquait que de 13 à 15 millions que coûteront les études pré-registres, la communication des résultats à l'ouverture des registres elle-même, ça va coûter à peu près 13 à 15 millions, bien sûr que le gouvernement va payer, et, pendant ce temps-là, le gouvernement augmente... cherche de l'argent partout. On semble même en trouver avec l'augmentation du prix du tabac, mais la dernière augmentation des garderies est probablement celle qui est la plus choquante pour tout le monde, et je serais même tentée de dire pour les Montréalais aussi, parce que, au cas où les gens de cette Assemblée ne le sauraient pas, à Montréal, il y a des familles qui y habitent et il y a des familles qui vont payer plus cher leur carte de métro. Ce n'est pas grave d'après le gouvernement libéral, c'est une juridiction de la Société des transports de Montréal, et puis, quand on prend le métro une fois dans sa vie, on n'en a rien à foutre. Pour ce qui est de l'électricité, ce n'est pas grave, c'est Hydro-Québec, c'est la responsabilité de la société d'État bien sûr.

Mais, pour les garderies, c'est la responsabilité du gouvernement, et ça, pour les familles de Montréal... Et on revient à Montréal, les familles reviennent à Montréal. Dans le comté de Rosemont, c'est un des plus beaux résultats de la dernière période de croissance économique dans Rosemont. Alors, ces familles-là vont se voir payer 500 $, 1 000 $, peut-être plus s'ils ont plus de deux enfants à la garderie, 1 000 $ de plus par année, et, pendant ce temps-là, nous autres, on va se taper la facture d'au moins 15 millions, puisque c'est ce que le ministre a dit, pour toute l'administration de son processus complexe. Par la suite, le résultat de tout ça, bien là il y aura d'autres contribuables montréalais qui vont assumer d'autres factures. C'est une catastrophe financière.

Et, quand on vient nous dire qu'on ne devrait pas se plaindre de cela parce que, nous, on n'a pas écouté les gens, bien, je dirai, il y en a qui ont la mémoire bien courte, parce qu'on a entendu beaucoup de groupes, on a entendu plus de 50 groupes qui sont venus ici en commission parlementaire nous donner leur avis. Et le défi que nous avons quand nous sommes au gouvernement, c'est celui de diriger, d'amener les gens vers une vision moderne, vers une vie démocratique saine.

n(16 h 40)n

Et c'est le journal la Gazette, qui n'est pourtant pas la meilleure référence pour un certain nombre de choses, mais, sur le plan historique, par rapport à Montréal, ils ont toujours une réflexion un peu plus documentée... Et James Mennie, vendredi, je crois, le 29 novembre, est allé rencontrer Vera Danyluk et lui a demandé son opinion sur ce qui se passait dans toute cette dynamique de la nouvelle ville de Montréal, et elle a dit ceci: Ça a commencé il y a 30 ans avec les problèmes de la ville de Montréal, et on s'est tous posé la question: Qu'est-ce qu'on peut faire pour s'assurer que Montréal ait des revenus suffisants et un support financier suffisant pour être cette ville internationale que nous voulons tous qu'elle soit?

C'est intéressant que Mme Danyluk nous pose le problème dans son contexte historique, parce que, comme l'a dit le chef de l'opposition tout à l'heure, cette vision d'une île, une ville, qui était une vision partagée par tous les Montréalais au niveau de l'avenir de leur ville... Mais le passage entre aujourd'hui et demain, c'est toujours douloureux. Alors, une fois qu'on l'a franchi, il ne faut pas donner l'impression qu'on veut retourner en arrière, parce qu'à ce moment-là tout le travail depuis 30 ans, même presque depuis 40 ans, sur Montréal ne tiendra pas. Les défusionnistes sont des gens qui regardent en arrière. Ce n'est pas sain pour notre métropole de garder cette vision-là.

Bien sûr, dans son projet de loi, le ministre a eu quelques... au sujet de son projet de loi, il a eu quelques remarques. Il a mentionné, entre autres, celle de la Chambre de commerce qui disait qu'ils étaient très contents que finalement le développement économique de la ville de Montréal se retrouverait à la ville-centre, mais il n'a pas lu tout le communiqué, parce que le président de la Chambre de commerce, et je le cite, a ajouté: «Même si nous déplorons le fait que la région de Montréal demeure aux prises avec une remise en question de ses structures municipales à un moment où il est urgent d'unifier nos efforts et nos actions, nous croyons qu'il faut néanmoins tourner cette situation à l'avantage de Montréal. Néanmoins, essayons. Nous espérons que les débats à venir permettront à tous les citoyens de l'île de se rallier à la structure actuelle, puisqu'il s'agit à nos yeux de la solution la plus porteuse en matière de croissance économique et de prospérité de la région.» Et il termine en disant: «Soyons assurés d'une chose, nos villes concurrentes ont bien d'autres choses à faire que d'attendre que nous finissions par mettre en place les structures et les moyens nécessaires pour que Montréal devienne enfin un acteur de premier plan de l'économie mondiale ainsi qu'un grand carrefour d'innovation, de créativité et de prospérité.»

C'est ça, la réalité d'aujourd'hui. Montréal fait partie en quelque sorte des ligues majeures, et là on va dépenser du temps, de l'énergie et on va dépenser... Il y a même des maires qui parlent: Nous n'avons pas six mois à perdre, qui parlent d'un affront à la démocratie. Nous allons passer six mois à gaspiller notre énergie plutôt que de construire. La Gazette reprenait d'ailleurs un éditorial, le 29 novembre, extrêmement intéressant parce qu'il disait: You can demerge, but leave, forget it. Alors, le titre, c'était Megacity: you can check out but you can never leave, en s'inspirant d'une chanson bien connue, là, de Hotel California. Mais c'est ça, la réalité, vous pouvez quitter, mais vous ne pouvez jamais partir.

Alors, ça sert à quoi de faire cet exercice-là, ça sert à quoi de dépenser des millions de dollars, alors qu'on aurait pu prendre ce 15 millions là puis aider la ministre déléguée à la Famille à passer à travers une situation budgétaire difficile? On aurait eu tellement plus d'appui dans la population, Mme la Présidente. Ça aurait été tellement plus constructif.

Les journalistes de la Gazette n'y vont pas de main morte d'ailleurs, hein, parce qu'ils qualifient les villes qui resteraient, dans l'hypothèse où elles resteraient... Je vais vous lire le paragraphe, parce que c'est assez... il y a un peu d'humour, mais: «Fournier ? pardon, M. le ministre ? has been saying: "Demerged towns will not be the same as they were in pre-megacities' days." It was hard to know what to make of this vague statement. It turns out it means the towns will be eunuchs.» Les eunuques dans la ville de Montréal, ça va être beau, ça, hein?

Cela dit, celui qui a traité de la question de la manière la plus humoristique, parce qu'il faut rire dans certains cas, surtout dans des moments dramatiques comme celui-là, il a dit: «Une fois défusionnée, la ville ne sera plus que la banlieue d'elle-même ? donc elle ne voudra pas rester défusionnée. Alors, la question va être: Voulez-vous être fusionnés, agglomérés ou agglutinés? On est en train de rire de vous à Québec. Cette histoire de référendums à palette est un piège à cons. Ce sera pire après qu'avant et pendant la fusion.» Et je le cite encore: «De toute manière, ce ne sera toujours qu'une autre façon d'agglutiner juridiquement ce que la géographie et l'histoire ont réuni pour le meilleur et pour le pas si pire.» Parce que, en fait, à Montréal, ça ne va pas si pire, on vivait bien avant que l'on commence à rebrasser, à remettre en question une loi qui avait été passée ici démocratiquement.

Et je vais aller plus loin, parce que, si je regarde l'échéancier, le maire de Montréal est venu nous dire: Donnez-moi jusqu'à la prochaine élection municipale, en 2005, donnez-moi la chance de vérifier que les citoyens sont derrière nous. Et ce gouvernement lui a refusé un geste qui n'est quand même pas si grave, donner une chance de prouver ce qu'il peut faire. Et ce maire-là, depuis que le gouvernement libéral est au pouvoir, ne reçoit que des affronts, que des fins de non-recevoir. Montréal n'existe pas dans les plans de ce gouvernement, et c'est malheureux. Et, avec une vingtaine de députés, en tout cas entre 25 % et 30 % de la députation libérale, les Montréalais ne se feront même pas entendre, sauf si on est défusionniste. Et ce n'est pas la majorité des Montréalais, mais ceux-là, Mme la Présidente, ils se prononcent aux élections municipales. Et, aux élections municipales, on ne les entendra pas parce qu'on aura suscité les passions, on aura excité tout le monde. Et, dans un an, les Montréalais commenceront à se regarder pas selon la couleur, mais selon le quartier, si tu es défusionniste ou pas. C'est un beau schisme qui se prépare, et ce n'est pas très gai. Merci. Je vais donc m'opposer à ce projet de loi.

La Vice-Présidente: Merci, Mme la députée. Alors, je serais prête à reconnaître un prochain intervenant, le député de Mégantic-Compton.

M. Daniel Bouchard

M. Bouchard (Mégantic-Compton): Merci, Mme la Présidente. Mme la Présidente, pour refaire un peu la situation du projet de loi actuel, je vais me référer aux années 1996-1997 et je vais vous ramener à... on parle de fusions, défusions, réaménagements municipaux, et tout ça, je vais vous ramener à la scission entre l'ancien gouvernement et, naturellement, les élus municipaux. À quel moment ça s'est fait dans l'ancien gouvernement, hein? On va revenir en 1997.

Lorsque, en 1997, ça a commencé, ça a commencé par le discours du ministre des Finances du temps, l'actuel chef de l'opposition, Mme la Présidente. Il mentionnait dans le discours préparatoire de 1998-1999... Dans le discours du budget, le ministre des Finances a annoncé le transfert de 500 millions de nouvelles charges aux municipalités. Le ministre des Affaires municipales du temps, le député de Rouyn-Noranda?Témiscamingue ? aujourd'hui, malheureusement, n'est plus dans le gouvernement et n'est même plus dans cette Chambre, Mme la Présidente ? mentionnait que c'était non négociable. Et ça, c'est dans un article de Martin Pelchat, 26 avril 1997.

Mme la Présidente, c'est probablement là que la scission entre l'ancien gouvernement et les élus municipaux a commencé. Ça s'est fait de façon drastique, un peu comme les fusions l'ont été dans la loi n° 170, sans consultation, rapidement, improvisé. Et je vous dis pourquoi improvisé, Mme la Présidente. Vous savez, notre collègue de Jean-Talon, députée libérale de Jean-Talon, mentionnait à ce moment-là et avait posé des questions, parce qu'elle était la porte-parole de l'opposition, à ce moment-là, aux affaires municipales et elle poussait l'audace... Ces gens-là poussaient l'audace de pelleter une facture de 500 millions de dollars aux municipalités sans justifier sérieusement ce transfert et sans aucune étude ou analyse de soutien à cette décision. Et, à la période des questions du 6 mai 1997, Mme la Présidente, le ministre des Affaires municipales du temps admit qu'aucune aucune étude, aucune analyse, aucune simulation n'ont servi à l'élaboration de ce pelletage.

Autre démonstration, Mme la Présidente, pourquoi aujourd'hui nous sommes rendus où est-ce que nous en sommes rendus. Le gouvernement du temps n'a jamais respecté les élus municipaux compte tenu d'une créature du gouvernement provincial, ce que nous avons toujours dit, nous, que ce seraient des partenaires. Et, pour ce faire, je reviendrai plus tard dans la loi n° 9, la loi n° 34, la loi n° 33, où est-ce qu'on considère les élus municipaux comme des partenaires du gouvernement actuel.

Autre citation, et pas la moindre, hein, le maire Loranger, le maire de L'Ancienne-Lorette, ancien candidat à une investiture péquiste, Mme la Présidente, dans la région de Québec, en 1994, mentionne ? et là ce n'est pas peu dire ? il accuse le gouvernement et le ministre des Affaires municipales du temps, député de Rouyn-Noranda?Témiscamingue, de mensonge, hypocrisie, injustice, voire la fraude. Cette même personne est venue nous voir, Mme la Présidente, pendant nos travaux, à la fin de l'été dernier, pour la question des fusions et du réaménagement territorial au niveau municipal, et il nous en a fait voir de toutes les couleurs à ce moment, et j'y reviendrai, Mme la Présidente.

n(16 h 50)n

Et ce n'est pas peu dire non plus quand on pense à notre cher collègue de Borduas. Malheureusement, il faut la ramener, cette citation, Mme la Présidente. Il mentionnait à ce moment-là... Et, probablement, pourquoi le député de Rouyn-Noranda?Témiscamingue du temps, l'ancien ministre des Affaires municipales, n'est plus avec nous aujourd'hui pour en débattre, probablement que c'est un petit peu ça. «Jean-Pierre Charbonneau ? excusez-moi, c'est la citation, mais le député de Borduas, je m'en excuse, Mme la Présidente, le député de Borduas ? croit que son parti devrait profiter de son séjour dans l'opposition pour regarder les erreurs du passé.» Et c'est cité, hein, dans l'article de La Presse du samedi 14 juin 2003. Les erreurs du passé, Mme la Présidente! On vit tous avec nos erreurs du passé. Neuf ans au pouvoir!

Et ça a commencé en 1997, et on est rendu en 2003, et c'est nous, comme gouvernement, qui est en... nous sommes en train de réparer les pots cassés. Et ça, ce n'est pas évident pour un gouvernement d'essayer de plaire aux nouveaux maires, naturellement qu'ils sont légitimes, mais que penser des maires, des nombreux maires avant les 42 fusions forcées? Pensez à ces maires-là, ils étaient tous légitimes. Ils avaient des mandats jusqu'en 2002, 2003, Mme la Présidente. Les nouveaux maires, naturellement, ils sont légitimes, mais il faut penser à ces gens-là, ces gens-là qu'il faut rappeler. Et, moi-même, Mme la Présidente, comme conseiller municipal de la ville de Repentigny à ce moment-là, en 1997, j'ai eu à faire et à vivre ces choses-là, cette scission avec le gouvernement du Québec d'alors. C'est évident qu'il faut se recreuser les méninges pour voir depuis quand le Parti québécois, et le gouvernement du temps, a fait pour les gens des milieux municipaux.

Je continue, Mme la Présidente, en vous dénonçant une deuxième citation de notre collègue de Borduas, et dans le même article du 14...

La Vice-Présidente: Je m'excuse, mais, encore une fois, là, M. le député de Mégantic-Compton...

Une voix: ...

La Vice-Présidente: Oui, je vous rappelle à la prudence. On ne peut pas faire indirectement ce qu'on ne peut faire directement. Alors, quand vous citez, faites bien attention. Je veux simplement vous...

Une voix: ...

La Vice-Présidente: Je fais simplement vous rappeler à la prudence dans vos propos.

M. Bouchard (Mégantic-Compton): J'ai bien mentionné le collègue de Borduas, Mme la Présidente. «C'est peut-être pour ça que nous n'avons obtenu que 33 % du vote» à la dernière élection. C'est ce qu'il mentionnait. «Beaucoup de nos électeurs sont restés à la maison le jour du vote ou ont décidé de nous punir...» Punir de quoi? Punir des neuf dernières années et du manque de respect aux élus municipaux.

Et là j'arrive un peu plus dans le vif du sujet, pourquoi je suis heureux de parler de la loi n° 9, la loi n° 9 sur le réaménagement territorial. Eh bien, c'est quelque chose de très important parce qu'on refait ce que l'histoire n'aura pas fait. Donc, quand on vit avec nos erreurs du passé, on vit le présent, mais le présent va définir l'avenir, et nous allons faire en sorte que l'avenir des régions du Québec, l'avenir de nos municipalités soit un petit peu plus intéressant qu'on ne l'a vécu dans les dernières années lorsqu'on était à couteaux tirés.

D'abord, la commission. Durant la fin de la période estivale, nous avons eu la chance de rencontrer ? ce que, encore là, l'ancien gouvernement n'a jamais pu faire ? nous avons rencontré 85 groupes, nous avons reçu 99 mémoires, des gens de tout acabit: des gens pour, des gens contre, des gens individuels qui prenaient le temps de venir nous voir, nous conseiller. Et c'est là que nous en sommes aujourd'hui, Mme la Présidente. Les amendements ont été faits. Nous avons écouté la population, et ça, c'est drôlement important quand nous sommes les élus du peuple. Les gens, on a été mis dans des sièges, on est des heureux élus, on a un privilège d'être ici, mais il faut les écouter, ce que nous avons fait, Mme la Présidente, dans les derniers mois.

85 mémoires, une consultation générale, c'est énorme. Et pour ça, on a... Qu'est-ce qu'on a entendu le plus? Services de proximité, les gens ont été mis à l'épreuve, dans les dernières années, sur les services de proximité, les loisirs, les parcs, tout simplement dans la gestion de leur territoire, de leur petite localité. C'est ça que les gens sont venus nous dire. Les gens sont venus nous dire aussi: Pensez à nous, pensez à notre relation avec nos élus, pensez à la relation dans nos grandes villes, pensez à notre sentiment d'appartenance.

Oui, Mme la Présidente, ça n'a pas été facile à tous les jours de dire: On se concentre sur ce que tous les groupes viennent nous mentionner. Mais aussi, on avait, de l'autre côté, des maires, les maires légitimes actuels, dans ma région, dans toutes les régions du Québec, qui venaient nous dire: On a quelque chose de fort en main, on a quelque chose qu'on est en train de développer. On est conscients, Mme la Présidente, on est conscients du travail qu'ils ont fait, mais, tant qu'il y a une épée de Damoclès au-dessus de ces maires-là, tant qu'il y a des groupuscules ou des groupes à l'intérieur qui se sentent mal à l'aise, qui n'ont pas confiance et qui... Ils se disent, entre autres: Comment allons-nous faire pour obtenir nos propres services de proximité? À qui avons-nous le devoir de nous rapporter? À qui on va demander une progression de notre collectivité? Bien, c'est ça, Mme la Présidente, que le gouvernement actuel essaie et, par la loi n° 9, va réussir à mettre en place dans les prochains mois. C'est du respect entre les citoyens, les élus municipaux et le gouvernement actuel, Mme la Présidente.

Nos origines, Mme la Présidente, on y tient tous. Après avoir travaillé dans une région, souvent les gens retournent dans une région, et quel malheur, quand ils arrivent dans leur nouvelle ville, de n'avoir aucun sentiment d'appartenance. Oui, on a entendu l'opposition officielle nous mentionner que ça n'avait pas de valeur, que les grands quartiers de ce monde étaient reconnus dans leur municipalité, dans la grande ville. Oui, on parle de gens... de noms historiques. Ce n'est pas tout le monde qui a une ville de nom historique, mais c'est tout le monde qui a une ville d'appartenance et c'est tout le monde qui a sur son baptistère un lieu de naissance qui fait partie d'une grande ville. Oui. Ces gens-là veulent seulement se rappeler, seulement avoir un sentiment d'appartenance à un secteur, à un milieu.

Et, pour ce faire, Mme la Présidente, le projet de loi va donner l'occasion à ces gens-là de s'exprimer. On ne dit pas qu'on veut défaire les villes, on est favorables aux nouvelles villes, mais on veut laisser les gens s'exprimer. Et ça, Mme la Présidente, c'est le fond, c'est la fondamentale de notre loi, c'est de pouvoir s'exprimer, dire aux gens... Et on a laissé la chance aussi, naturellement ? et ça, je pense qu'il faut le mentionner aussi ? on a laissé la chance de nous présenter... les maires pouvaient nous présenter des réaménagements. Et c'est pour ça le projet de loi n° 33 qu'on est en train de mettre en place avec la ville de Montréal. La collègue de Bourget mentionne qu'elle va sûrement nous aider lorsqu'on va avoir un projet de loi sensé. J'espère que, dans celui-là, c'est encore un respect... J'en suis convaincu, que cette fois-là elle va prendre le temps d'écouter. Ça vient du milieu. C'est nous qui avons demandé aux gens du milieu de nous mettre en place des exemples de décentralisation, déconcentration d'un milieu municipal. Et, oui, Mme la Présidente, le projet de loi n° 33 est très intéressant pour la ville de Montréal, et on va travailler sur ce projet de loi avec notre ministre. Et on va sûrement écouter la collègue de Bourget, parce que, je l'espère, elle écoutera ses concitoyens, parce que, pendant les neuf dernières années, elle ne l'a pas nécessairement fait.

Et je reviens encore à cet article-là de La Presse, où est-ce que le député de Borduas mentionne: «Quand tu écoutes la députée de Bourget, ancienne ministre de la Culture, aujourd'hui, elle dit encore que nous avions raison de faire les fusions municipales et que ce sont les gens qui n'ont pas compris ? encore M. le député de Borduas ? dit-il. Donc, tous les gens qui nous ont laissés tomber en cours de route sont des imbéciles, et, nous, nous sommes les seuls à avoir raison.» Ça, là, c'est la vision d'un collègue de la députée de Bourget. Très intéressant de voir, à l'intérieur d'une unité... d'un gouvernement, l'ancien gouvernement du Québec, c'était cette unité pour le système de fusions municipales.

n(17 heures)n

Eh bien, Mme la Présidente, nous, ce que nous voulons faire, c'est qu'est-ce que nous avons mentionné préalablement dans l'élection, et nous allons mettre en place les outils pour le faire. Globalement, il faut surtout aussi comprendre que c'est une perception, que c'est de l'émotion que les gens vivent. Les 85 groupes qui sont venus nous rencontrer, Mme la Présidente, c'est des gens qui étaient émotifs, c'est des gens qui sont venus de coeur, des gens de conviction, des deux côtés, et même j'ajoute les individus à titre personnel, même s'ils n'étaient pas touchés, venaient nous dire des choses: On vient pas conviction, par émotion et on veut que la perception qu'ils vont laisser, que nous allons laisser comme gouvernement, soit intacte pour ne pas vivre, là, dans quelques mandats, voire trois à quatre mandats, vivre les mêmes situations qui prévalaient dans l'ancien gouvernement, Mme la Présidente. Naturellement, on va faire en sorte que ça ne se produise pas.

En plus, Mme la Présidente, j'aimerais vous ramener un petit peu à ce projet de loi. La légitimité, on pense même... et je vais encore vous nommer, naturellement il faut bien le citer, le député de Borduas, à l'intérieur de ce projet de loi... quand on l'a sorti et pendant la période estivale, tout le monde en a réfléchi. La preuve, les groupes sont venus nous le présenter. Puis le député de Borduas a redit, le 14 juin dernier, dans La Presse: On ne peut pas penser qu'on va gouverner les gens de façon autoritaire et autocratique sans qu'il y ait des réactions. Même si le bien commun dictait les fusions, le bien commun veut aussi dire d'écouter les gens. Et, quand on écoute les gens, Mme la Présidente, c'est exactement qu'est-ce qu'on retrouve dans le projet de loi n° 9. Et, à ce moment-là, je pense aussi aux villes reconstituées qui pourraient avoir lieu dans ce projet de loi n° 9 après avoir mis en place les registres, les consultations. Et si jamais, Mme la Présidente, les citoyens après consultation voulaient revivre dans une certaine ville reconstituée...

Je parlais de services de proximité, Mme la Présidente, vous savez, l'urbanisme, l'aqueduc, les égouts, la voirie locale, la collecte des matières résiduelles, les loisirs, Mme la Présidente, et la culture, quelque chose de très important pour des services de proximité, et même les émissions de permis. Combien de personnes, autant dans les nouvelles villes fusionnées que les gens qui venaient pour les réaménagements municipaux, nous disaient: On veut se construire, on veut se partir en affaires, les nouvelles villes fusionnées ne nous offrent pas les possibilités rapidement de voir dans chacun de leurs arrondissements, et tout ça? Bien, Mme la Présidente, c'est des choses comme ça que les villes reconstituées vont donner le loisir aux gens: retrouver certaines qualités, retrouver certains facteurs importants.

Et, quand je parlais tout à l'heure de loisirs et de culture, c'est évident qu'il y aura probablement des équipements d'intérêt collectif, mais il y a des intérêts locaux. Quand on pense aux parcs, quand on pense à une lumière dans notre rue, quand on pense à des choses très locales, les gens s'identifient. Aller à leur hôtel de ville, demander une dérogation, un changement, l'organisation de la fête locale, fermer la rue dans le petit quartier, bien, c'est des choses qui étaient rendues très difficiles maintenant dans certaines grandes villes.

Les gens ont l'opportunité dans le projet n° 33, dont Montréal. Le maire actuel va pouvoir réorganiser son territoire. Mais nous, on dit: O.K. On vous laisse la chance, M. le maire, de réorganiser votre territoire. À la limite, il y a le projet de loi n° 9, puis les gens vont être consultés, et de façon très importante d'ailleurs. Et c'est pour ça qu'il y a des règles, des règles de base en démocratie, des règles de base au niveau légitimé, des règles qu'on va devoir respecter et suivre. Les gens de Rock Forest, dans mon esprit, me disaient ce matin et les gens dans les médias locaux mentionnaient que ce n'était pas facile, la loi qu'on a mis en place, Mme la Présidente, que ce ne sera pas facile d'avoir un réaménagement du territoire, mais qu'ils étaient prêts à relever le défi parce que, s'ils étaient capables de mobiliser la population derrière un sentiment profond de revivre une ville reconstituée, bien, ils vont faire les efforts, ils vont faire la démonstration qu'ils sont capables de mobiliser une partie de la population pour y arriver.

Parce qu'on parle de scission, on parle de retour en arrière. Il n'y a pas retour, pas un statu quo ante, Mme la Présidente, on reparle de villes reconstituées avec certaines qualités qu'on va leur redonner dans le projet de loi n° 9. L'article 48 en est un bel exemple, de réaménagement et tout ça à l'intérieur. Mais, Mme la Présidente, il ne faut jamais perdre de vue, jamais perdre de vue qu'à la qualité d'élus, autant au provincial, au municipal que dans tous les comités qui vont avoir à gérer les réaménagements territoriaux, ces gens-là vont consulter, vont s'asseoir, vont débattre des idées, vont faire des réaménagements sur leur territoire, et c'est ça qui devient fort important pour nous pour les prochaines années parce que le présent égale le futur. Donc, si on s'en va vers un futur et on veut travailler en partenariat avec ces gens-là dans les prochaines années, on ne travaillera pas deux, trois ans. On veut mettre en place quelque chose pour l'avenir de ces gens-là. Et, quand je vous ramenais à 1997, c'était pour vous démontrer que jamais le gouvernement du temps n'a mis en place des mesures ? une nouvelle forme de financement, nouvelle forme d'écoute ?  et, à ce moment-là, on aurait pu le mettre. En 1997, si on avait pris le temps de consulter ces gens-là, en 2003, on ne serait pas rendus où est-ce qu'on en est rendus actuellement, on ne serait pas à parler de décisions des dernières années qu'on remet en place, qu'on veut changer pour écouter la population. C'est tout simplement vers ça qu'on veut aller, Mme la Présidente, six ans plus tard ? six ans.

Certains maires ont déchiré leur chemise sur la place publique, certains maires se font fait évincer de leur siège... Oui, c'est légitime, mais que penser, quand on avait plusieurs petites villes et une grande ville et que les maires se sont présentés, se sont fait tasser d'une certaine façon? Leurs mandats n'étaient même pas terminés, Mme la Présidente.

Pourquoi tout cet effort? Pourquoi tout ce travail pour arriver en 2003 à essayer comme gouvernement ? et c'est vrai que c'est difficile, on n'a jamais dit que ce serait facile ? mais c'est vrai qu'il faut refaire qu'est-ce qui n'a pas été fait dans le passé. Et on va réussir à le faire. On a un ministre qui travaille énormément fort, un premier ministre convaincu, et ça, Mme la Présidente, c'est des choses importantes. Et l'ensemble des députés au gouvernement vont nous permettre d'arriver à cette promesse électorale.

Mme la Présidente, considérant qu'il me reste très peu de temps, j'aimerais profiter de quelques minutes sur la loi n° 34. Hein, on a parlé de la 33, la 9, la 34. 34: décentralisation... décentralisation et déconcentration, c'est un peu la même chose: on fait confiance aux élus municipaux. On nous dit: On ne les consulte pas. Ça fait des années que les MRC, les grandes représentations des élus municipaux nous disent: Donnons-nous, ensemble le gouvernement du Québec au Québec, des responsabilités, une certaine autonomie. On va leur donner. On fait la même chose, Mme la Présidente, on les a écoutés. Depuis des dizaines d'années qu'ils nous demandent de leur faire confiance, c'est la même chose, on va leur faire confiance. Comme dans le cas du réaménagement des territoires urbains, on va leur faire confiance. La loi n° 9 est une marque de confiance, est une marque de satisfaction qui va avoir lieu envers les élus, envers les citoyens. Et l'ensemble des députés du côté du pouvoir, du gouvernement vont faire en sorte que cette loi-là, elle va être connue, reconnue dans les milieux et que nous allons travailler ensemble pour faire en sorte que les citoyens se sentent consultés.

Heureusement pour les maires actuels et les anciens maires, le lien va être fait, le chaînon manquant depuis 1997 va revenir. Et quand on parlait de scission... et, aujourd'hui, on va parler de fusion, de fusion dans l'harmonie où est-ce que l'épée de Damoclès qui pendait sur la tête des élus actuels, elle n'y sera plus. Et ceux qui vont en sortir gagnants, ce sont les citoyens du Québec, le gouvernement actuel et l'ensemble de la population, Mme la Présidente. Merci beaucoup.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député. Alors, je reconnais immédiatement le député de Borduas.

M. Jean-Pierre Charbonneau

M. Charbonneau: Bien, merci, Mme la Présidente. J'aurais voulu planifier le moment où j'interviens que je n'aurais pas mieux fait, finalement, après cette intervention où on m'a cité abondamment, citation qui, depuis quelques mois, est reprise régulièrement par le premier ministre ou le ministre des Affaires municipales.

Alors, nous allons maintenant parler du fond des choses. Et il y a deux... Ce projet de loi soulève deux éléments fondamentaux, deux questions fondamentales. La première question, c'est celle qui nous amène ici, à l'Assemblée nationale, est la responsabilité fondamentale... en fait, la nature même de ce qu'est la fonction politique: c'est l'organisation du bien commun et la recherche de l'intérêt général dans l'organisation du bien commun dans une société. La deuxième, c'est la façon dont on fait les choses. J'ai...

On m'a cité à quelques reprises parce que j'ai critiqué la façon dont on avait fait les choses dans le passé. Et on vient de rappeler dans cette citation que, par ailleurs, sur le bien-fondé de ce qui avait été fait, je n'avais pas remis les choses en question. Et là, aujourd'hui, on se retrouve finalement ici à tenter de refaire l'histoire et sous le prétexte qu'on a fait une promesse, parce que...

n(17 h 10)n

Est-ce que nous retrouvons ici parce que le gouvernement actuel n'est pas d'accord avec le résultat de ce qui a été fait? À l'évidence, non, puisque le premier ministre, en campagne électorale, nous a dit qu'il était d'accord avec le succès des nouvelles villes, qu'il était en faveur du succès des nouvelles villes. Donc, on peut penser aujourd'hui que, dans le fond, les gens qui nous gouvernent sont d'accord avec la finalité et le résultat qui a été obtenu à l'époque par l'ancien gouvernement. Le problème, c'est que, quand ces gens-là étaient dans l'opposition, Mme la Présidente, jamais ils n'ont osé aborder cette question-là de cette façon-là. Il a fallu attendre la campagne électorale pour que, timidement, le chef du gouvernement actuel, qui était le chef de l'opposition officielle à l'époque, dise qu'il était d'accord avec les fusions... en fait, qu'il était d'accord avec les nouvelles villes. Il était non seulement d'accord avec les nouvelles villes, mais il voulait que ces nouvelles villes réussissent.

Alors, qu'est-ce qui s'est passé pour qu'on se retrouve ici aujourd'hui alors que le nouveau gouvernement, le gouvernement actuel est d'accord avec le résultat de ce qui a été obtenu. C'est parce qu'on a fait une promesse électorale parce qu'on a... Et, en fait, c'était plus qu'une promesse... C'était une promesse électorale bien avant les élections, qu'on s'est entêté à maintenir parce qu'on a fait de la petite politique partisane en faisant du surf sur le mécontentement d'une partie de l'opinion publique qui était concernée. C'est ce qu'on a fait. Et les discours ? je me rappelle très bien, j'étais assis à votre fauteuil, très attentif, à l'époque, de ce qui se déroulait ? et j'entendais le nouveau... l'actuel ministre des Affaires municipales déchirer sa chemise, et jamais je ne l'ai entendu parler du fond des choses. Lui et ses collègues, à l'époque, n'ont parlé que d'une chose, c'est de la façon de faire du gouvernement de l'époque.

On peut, et on pouvait être en désaccord avec la façon de faire les choses, et on pouvait questionner. Le fait est qu'une fois que les choses ont été faites et qu'on a mis en place les nouvelles villes il y a eu des élections, et, par la suite, ces nouvelles réalités se sont mises à fonctionner. Donc, on ne pouvait pas penser qu'on va organiser, et on va se comporter dans l'avenir comme s'il n'y avait pas eu mise en place des nouvelles villes et fonctionnement de ces nouvelles villes là, appuyé sur des élections démocratiques qui se sont faites dans l'ensemble des territoires concernés.

Et, comme je le disais, le problème, c'est que, durant toute la période où on a débattu ? peut-être pas suffisamment, et, à certains égards, j'ai rejoint des critiques qui ont été formulées ? jamais, encore une fois, la question centrale n'a été abordée par l'opposition officielle à l'époque, et ça, c'est un manque de responsabilité politique fondamental de gens qui siègent, ici, à l'Assemblée nationale, qui aspiraient au pouvoir et qui voulaient absolument avoir le pouvoir, à un point tel qu'ils décidaient de ne pas répondre à la question centrale. Et la question centrale, quelle est-elle? Quelle était-elle à l'époque et quelle est-elle aujourd'hui?

La question est la suivante, et elle peut se formuler de la façon suivante: Dans le contexte de la mondialisation et de la concurrence féroce des sociétés voisines ? que ce soit l'Ontario, les États américains et d'autres sociétés avec lesquelles nous sommes en concurrence, et donc, avec lesquelles, donc, nous avons des rapports ? est-il, oui ou non, dans l'intérêt général de toute la population du Québec ? des 7 millions et demi de citoyens et de citoyennes de cet État ? est-il dans l'intérêt général de toute la population du Québec, au plan économique, au plan social, au plan culturel, au plan administratif et financier, de disposer, pour les décennies à venir, d'agglomérations urbaines majeures intégrées et unifiées, chacune sous une seule direction politique? C'est ça, le fond du débat.

Quand un chef de gouvernement, aujourd'hui, nous dit qu'il est en faveur des nouvelles villes, c'est parce que, quelque part, il doit être d'accord avec le constat fondamental que le Québec avait besoin et a besoin d'agglomérations urbaines fortes, cohérentes, intégrées, efficaces, et ça, ça suppose une seule administration politique. Ça, c'est le coeur du débat, c'était le coeur du débat, et vous pouvez... Pouvez-vous imaginer que jamais aucun député de l'opposition officielle ? ni le premier ministre actuel, ni le ministre des Affaires municipales actuel ? n'ont répondu à cette question, n'ont même abordé cette question à l'Assemblée nationale? Tout ce qu'on a fait à l'époque, c'est de souffler sous le feu du mécontentement parce que ce serait payant électoralement. Effectivement, ça l'a été, payant électoralement. Et je pense que, de notre côté, on aura à tenir compte des leçons, mais eux aussi auront à tenir compte des leçons parce que maintenant la question qui se pose, c'est: qu'est-ce qu'on fait avec la situation actuelle?

Et là on ne peut pas tenir deux discours à la fois. C'est ça, le problème actuel du gouvernement, c'est qu'il tient deux discours. Le premier ministre qui dit: Nous souhaitons bonne chance aux nouvelles villes, nous voulons le succès des nouvelles villes, mais nous ne ferons rien pour leur faciliter la vie, et en fait nous allons nous entêter avec une promesse qui, elle, va arriver exactement à l'inverse de ce qui doit arriver puis de ce qui est arrivé. Comment vous pouvez à la fois vous dire en accord avec ce qui s'est fait, le résultat, le fait qu'il y a des nouvelles villes et que ce soit important pour le bien commun de l'ensemble du Québec? Pas juste pour les citoyens des villes concernées, bien que l'ensemble des villes concernées représente 60 % de la population du Québec, ce n'est pas rien, ça. C'est beaucoup de monde au Québec qui sont concernés, mais les 40 % d'autres sont aussi concernés parce que leur niveau de vie, leur développement économique, social, est conditionné par le dynamisme de ces pôles de développement et de ces pôles urbains, de ces agglomérations qui existent.

Le ministre des Affaires municipales, ce matin, parlait des agglomérations. La réalité, c'est qu'on ne crée pas des agglomérations, ce n'est pas un gouvernement qui crée des agglomérations. La réalité, c'est que les agglomérations existent. Qu'est-ce que c'est, une agglomération? C'est un tissu urbain contigu et, à quelques exceptions près, toutes les nouvelles villes ont été organisées en fonction d'une agglomération qui existait. Et le constat, c'était que ces agglomérations étaient désorganisées au plan politique, tiraillées par des conflits internes, de chicanes de clocher d'un côté ou de l'autre. Et c'est ça qui était nuisible pour le développement du Québec, c'est ça qui était nuisible pour l'intérêt collectif, c'est ça qui était nuisible pour l'intérêt général et c'est ça qui affaiblissait le Québec dans sa capacité de concurrence et de fonctionnement dans un monde actuellement interdépendant et dans un monde où, finalement, les uns et les autres sont en relation étroite et en concurrence étroite et féroce aussi. Alors, c'est ça, là.

On se retrouve aujourd'hui, maintenant, à devoir faire primer non pas l'intérêt collectif de l'ensemble du Québec, mais un engagement électoral qui était en contradiction de l'intérêt général et qui, en plus, ne respecte même pas la vertu démocratique dont on se drape de l'autre côté. On m'a cité parce que supposément je faisais aux miens la leçon démocratique, mais peut-être qu'ils pourraient s'appliquer, à eux en face, la leçon démocratique. Et quelle est-elle la leçon démocratique? C'est qu'il y a eu des élections, toutes les populations concernées par les nouvelles villes ont eu à se prononcer, ils ont voté pour des nouveaux conseils. Bien sûr, avec les règles nouvelles, il y avait une seule administration politique et il fallait choisir les dirigeants politiques de cette entité politique qu'on venait de légaliser, puisque l'entité humaine et géographique, elle, elle existait ? et socioéconomique ? elle existait. Donc, on a eu des élections et, plus que ça, on l'a fait fonctionner et elle fonctionne.

Et, quand le ministre des Affaires municipales ou quand son collègue qui a parlé avant moi, de Mégantic-Compton, ancien conseiller, dit-il, de Repentigny, ancien conseiller municipal, dit: Nous autres, on est en faveur des nouvelles villes, mais on veut laisser aux gens le droit de s'exprimer, on parle de qui quand on parle des gens? On parle uniquement actuellement d'une proportion de chacune des villes. On parle des populations, des citoyens et des citoyennes qui étaient dans les anciennes banlieues. On ne parle pas de l'ensemble des citoyens, ceux qui éventuellement pourront se prévaloir de la possibilité que le gouvernement introduit, c'est-à-dire de défaire les villes en demandant finalement des défusions, ce sera uniquement les citoyens de ces anciennes banlieues. Avec quoi comme conséquence? C'est que, là aussi, on va à l'encontre de la réalité démocratique.

n(17 h 20)n

Un gouvernement légitimement élu, en autorité légitime, assumant sa responsabilité d'organisation du bien commun, met en place des nouvelles villes. Il y a un débat dans la société sur les avantages et les inconvénients, il y a du mécontentement, et effectivement il y a une façon de faire qui était questionnée puis qui était peut-être difficile à avaler pour bien des gens. Mais les choses sont faites, les choses sont faites et elles vivent, et, à partir de ce moment-là, qui sont concernés par la nouvelle réalité? Pas uniquement les gens de Baie-d'Urfé, pas uniquement les gens du comté du député de Marguerite-D'Youville, à Boucherville, pas uniquement les gens de Brossard, pas uniquement les gens de ville Saint-Laurent. Tout le monde est concerné par les nouvelles villes, et donc tout le monde devrait être impliqué dans le processus, et c'est ce qui ne se produit pas actuellement.

Ce projet de loi ne permet pas à l'ensemble des gens concernés ? et ça a été le leitmotiv et on l'a entendu encore, Mme la Présidente, vous l'avez entendu du député de Mégantic-Compton ? les gens, on va leur laisser le droit de s'exprimer, hein; on est en faveur des nouvelles villes, on va leur laisser le droit de s'exprimer. Mais, si on est en faveur des nouvelles villes et qu'on est démocrates, bien, on permet à tous et celles qui sont concernés de s'exprimer. Si vous voulez faire un référendum, peut-être qu'on pourrait se poser la question: Est-ce qu'il ne serait pas mieux de le faire pour l'ensemble du territoire des agglomérations concernées? Parce que qu'est-ce qui, au bout du compte, est le plus fondamental? Même si la méthode du passé pouvait être questionnable pour plusieurs, c'est l'organisation du bien commun dans notre société, c'est l'intérêt général, c'est ici. C'est la raison pour laquelle on se retrouve à l'Assemblée nationale.

Et, encore une fois, quel est celui ou celle en face qui va se lever pendant ce débat, qui va dire le contraire de ce que je viens de dire? Quel est celui et celle ? et je les mets au défi ? le député de Marguerite-D'Youville, le ministre des Affaires municipales qui aurait un droit de réplique, le premier ministre qui n'a pas encore parlé, qui pourra parler? N'importe quel député en face, qu'il se lève et qu'il nous dise que, pour l'intérêt public, pour l'intérêt général du Québec, pour l'intérêt de l'ensemble des 7 millions de Québécois et de Québécoises, même ceux qui sont frustrés, même ceux qui sont en colère, ce qui a été fait était important et ce qui existe actuellement est important, hein.

Alors, c'est ça, le coeur du débat actuellement. Ce n'est pas un débat sur la méthode qu'on a utilisée dans le passé; la méthode, elle a été sanctionnée aux élections. Mais maintenant ce qu'on doit faire ? et ça, c'est notre responsabilité première ? c'est de gouverner et de légiférer en fonction du bien commun, puis de l'organisation, puis de l'intérêt général des Québécois et des Québécoises. Et, dans ce sens-là, Mme la Présidente, le bien commun commande qu'on prenne ça en considération, je veux dire les impacts actuels de ce qu'on a fait, les éléments positifs et aussi les conséquences négatives de ce qu'on est en train de permettre de faire. Quand on fait ce qu'on est en train de faire, on nie la parole du premier ministre. Dans le fond, ce qu'on dit aux gens, c'est qu'on a un double langage. Notre chef, pendant le débat des chefs, à la campagne électorale, disait: Bonne chance aux nouvelles villes, nous sommes en faveur du succès des nouvelles villes. Le député de Mégantic-Compton qui a parlé avant moi: Je suis en faveur des nouvelles villes. Vous avez vu son état d'âme quand il nous disait qu'il était en faveur des nouvelles. Mais, quand on est en faveur des nouvelles villes, on se comporte avec cohérence. Et, si on est en faveur des nouvelles villes, parce que les nouvelles villes sont importantes, on agit en conséquence, on ne va pas détruire ces nouvelles réalisations, fussent-elles obtenues par une attitude qui pouvait être choquante pour bien des gens. On ne met pas en cause tout ça pour refaire l'histoire et pour se retrouver à nier l'intérêt général, à piller le bien commun, à défaire des choses qui non seulement commencent à bien fonctionner, mais qui donnent et qui vont donner surtout, au fil des années, des résultats.

Le chef de l'opposition tantôt a parlé de l'exemple de Laval. C'est un très bon exemple d'une ville importante au Québec qui a été fusionnée à une autre époque, dans un contexte de mécontentement. J'étais un petit gars de Laval à l'époque, je restais à Laval-des-Rapides, j'étais trop jeune pour comprendre les enjeux du débat à l'époque, mais je restais à Laval et je regarde aujourd'hui ce qu'est devenue Laval. Et je pense que Laval est la communauté... l'agglomération de Laval est mieux servie aujourd'hui, et les gens sont plus en capacité d'être heureux dans leur famille, dans leur quartier, dans leur ville, dans leur municipalité aujourd'hui qu'ils l'étaient à cette époque-là parce que les sociétés ont changé, le modernisme s'est installé, et ce qu'était Laval dans les années soixante, ce n'est plus le Laval du début du XXIe siècle. Et nous légiférons pas juste pour la semaine prochaine, nous organisons cette société, nous bâtissons cette société pour demain, après demain, pour dans 10 ans, pour dans 25 ans, pour dans 50 ans, pour dans 100 ans. Nous organisons le Québec pas juste pour nous, mais pour nos enfants puis nos petits-enfants.

C'est dans ce sens-là où ce qui se fait actuellement, c'est l'antithèse de ce qui doit être fait. C'est l'antithèse de ce qui doit être fait et, en plus, on le fait sous le principe et sous le drapeau et la vertu démocratique. La vertu démocratique, ce serait d'impliquer l'ensemble des citoyens, les 60 % d'hommes et de femmes du Québec, de citoyens et de citoyennes qui vivent dans toutes les nouvelles villes, c'est à eux de se prononcer, pas à 5 %, pas à 1 %, pas à 25 %, parce que c'est l'ensemble. Et, à la limite, d'une certaine façon, je vous dirais, si je poussais la logique au bout, si c'est dans l'intérêt général du Québec que l'ensemble du peuple québécois dispose d'agglomérations fortes, cohérentes, efficaces au plan du développement économique, social et culturel, c'est peut-être à l'ensemble du peuple éventuellement à qui il aurait fallu en référer, et à qui il faudrait en référer maintenant, parce que ce n'est pas l'affaire d'une petite personne. Ce n'est pas vrai que les affaires d'Anjou, à Montréal, ou les affaires de Boucherville concernent uniquement les gens de Boucherville; ça concerne l'ensemble du Québec, et sa capacité pour nous de fonctionner dans l'avenir, parce que ce n'est pas vrai qu'on reste toute sa vie dans son petit patelin, on sort. Les enfants qu'on a eus à Boucherville, ils vont étudier à Montréal puis ils vont travailler à Québec ou ils vont aller travailler un peu partout. Et ça, c'est important, ça veut dire que c'est important de voir dans quel contexte se situe la situation actuelle et dans l'avenir.

Et la vertu démocratique, quand le député de Mégantic-Compton me citait tantôt, j'ai hâte de le voir la semaine prochaine ou dans une semaine et demie, quand son leader qui, tantôt, riait en coin, va nous arriver avec le bâillon. Il a critiqué le gouvernement précédent, lui et ses collègues, hein, parce que cette loi-là, à l'époque où on l'a imposée, le gouvernement à l'époque l'a imposée par la force du nombre et de sa majorité parlementaire, et je vous prédis, Mme la Présidente, que c'est exactement ce que les gens d'en face vont faire dans une semaine et demie. Où vont être les discours vertueux qu'on a entendus, puis qu'on entend, puis qu'on va entendre ces jours-ci, hein? Où vont-ils être, ces députés-là? Vont-ils être aussi cohérents puis se lever dans leur caucus et se lever à l'Assemblée nationale puis dire: Non, ça prend plus de temps que ça pour débattre, ça prend plus de temps. Le député de Mégantic-Compton me fait signe, oui, oui. Alors, c'est vrai dans un sens.

Autrement dit, les principes, ils varient à géométrie variable selon que tu es dans l'opposition, au gouvernement, selon que ça fait ton affaire ou pas. J'ai une règle de conduite, Mme la Présidente, et je vais terminer avec ça: les principes, ils valent tout le temps, dans n'importe quelle circonstance, qu'on soit dans l'opposition, au pouvoir. Et, quand on n'est pas capable de me tenir le même discours au pouvoir que celui qu'on tenait dans l'opposition, on a la décence de se taire, de se la fermer. Parce que le résultat contraire, c'est de dire à l'ensemble des citoyens, des citoyennes: Finalement, on a des représentants politiques qui ont le double langage et qui n'ont pas d'éthique, des gens qui sont capables de dire une chose puis faire le contraire. Moi, je défie les gens de l'opposition... du gouvernement actuel d'être cohérents avec ce qu'ils ont dit pendant qu'ils étaient dans l'opposition, on verra ce que ça va donner, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci. Alors, merci, M. le député. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Taillon.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, merci, Mme la Présidente. Ce soir, j'aimerais vous parler de ma ville, de la ville de Longueuil, celle qui est en train de naître, d'apparaître, de se constituer sur la Rive-Sud de Montréal. Mais je pourrais aussi vous parler de la Capitale-Nationale, celle dans laquelle se trouve cette Assemblée nationale, ce joyau du patrimoine mondial qui avait trouvé d'ailleurs une certaine sérénité, dans les dernières semaines et les derniers mois, dans la construction de ce qui apparaît devenir une ville extraordinaire de dynamisme, prenant sa place dans les cités ayant une histoire, ayant un patrimoine, dans les cités du monde.

n(17 h 30)n

Mais je vais revenir à ma ville, celle de Longueuil, pour vous dire comment je suis désolée, et finalement que j'éprouve une certaine tristesse par rapport au processus dans lequel nous a engagés ce gouvernement. En fait, le gouvernement, il s'est littéralement embourbé, il s'est embourbé dans le dossier des défusions, et je crois qu'avec les amendements qu'il nous a déposés à la fin de la semaine dernière, il s'embourbe encore davantage. Plutôt que d'admettre ? et je crois qu'on en a fait largement la démonstration ici ? plutôt que d'admettre le fait que son engagement électoral ne menait nulle part, sinon à la confusion, qu'est-ce que fait ce gouvernement d'abord avec le projet de loi n° 9 et maintenant avec les amendements qu'il nous propose? Il nous propose, pas de voir naître des villes dynamiques, fortes, solides. En fait, il nous propose essentiellement de diminuer les pouvoirs et les moyens d'action des nouvelles villes, auxquelles il dit croire. Ça, je commence à avoir des doutes, et des doutes sérieux, Mme la Présidente.

En fait, son engagement nous mène à la confusion, son engagement nous mène à déplaire à tout le monde, autant ceux et celles qui ont travaillé à la fusion des nouvelles villes, ceux et celles qui se sont fait élire démocratiquement. Ceux et celles qui étaient contre la naissance de ces nouvelles villes, pourquoi ne se sont-elles pas, ces personnes, présentées au moment où on a tenu une élection générale? Y a-t-il un processus plus démocratique que le choix de ses représentants pour former, entre autres, ces nouvelles cités? Il a réussi, donc, à déplaire à tout le monde, autant à ceux qui étaient d'accord avec la fusion qu'à ceux et celles qui étaient contre la fusion. Et surtout, actuellement, à mon point de vue, le gouvernement entretient un climat divisif chez les citoyens, un climat qui est profondément malsain quand on veut construire de nouvelles institutions fortes, dynamiques.

Le ministre des Affaires municipales a oublié les objectifs poursuivis par la loi que nous avons adoptée ici, à l'Assemblée nationale du Québec. En fait, le gouvernement fait en sorte que ce qu'il propose aujourd'hui, avec ces amendements, va nous amener à aller même à l'encontre des objectifs qu'on s'était fixés lorsque nous avons adopté une loi permettant la fusion de grandes villes sur l'ensemble du territoire québécois. Et non seulement on va aller à l'encontre des objectifs initialement prévus, mais les amendements qu'il nous propose ? et je vais citer l'éditorialiste de La Presse à cet égard ? «les amendements qu'il nous propose nous amènent à un fouillis administratif sans nom». Ça en devient risible, ridicule, Mme la Présidente. En fait, Mme Ouimet disait ceci, et ce n'est pas plus tard que samedi dernier: «Il est étonnant de voir le gouvernement se jeter dans l'aventure des défusions avec un projet de loi aussi mal ficelé. En essayant de faire plaisir à tout le monde et à son père, il a engendré une structure qui a toutes les chances de se transformer en monstre.» Et, M. le Président, en lisant ça, je voyais la caricature que le caricaturiste du grand quotidien de Québec, Le Soleil, fait régulièrement lorsqu'il parle des défusions. On voit un monstre avec des étages superposés, plusieurs yeux, des bras qui sortent d'un peu partout. Je pense qu'il va falloir qu'il en fasse davantage pour vraiment pouvoir traduire correctement ce qui nous est proposé par les amendements déposés par le ministre.

Vous allez me permettre, Mme la Présidente, de revenir sur les objectifs poursuivis par la loi que nous avons adoptée concernant la constitution des nouvelles villes et la réorganisation municipale parce que, lorsqu'on prend un engagement en vertu du respect de la démocratie... Parce que c'est ce qu'on nous serine régulièrement. Et je suis d'accord, bien sûr, avec le fait que l'on respecte les principes démocratiques, cela va de soi, Mme la Présidente. Mais nous savons très bien que, dans les circonstances actuelles, où l'un des objectifs ? et je vais en parler ? l'un des objectifs était de rétablir l'équité entre les citoyens des différentes villes contiguës, que, dans un cas, on demandera une contribution ? et c'est tout à fait juste de le faire ? plus importante à l'un des groupes dans une ville en particulier, c'est probablement assez normal que ces personnes se disent en désaccord avec un tel objectif. Et, à ce moment-là, c'est au gouvernement supérieur ? et ce n'est pas méprisant que de dire cela, au contraire ? de s'assurer que l'intérêt commun va primer au-dessus de l'intérêt individuel.

Et, quand on revient, donc, au projet de loi... pas au projet de loi mais à la loi qui a été adoptée par cette Assemblée nationale, rappelons-nous les objectifs que l'on poursuivait à l'époque. L'équité fiscale, c'est-à-dire faire en sorte que les citoyens qui utilisent les services, qui vivent dans des banlieues plus ou moins dortoirs, dans des banlieues d'où tous les jours on part pour aller utiliser les services supportés par la ville-centre, donc par les citoyens et les citoyennes de la ville-centre, sans qu'on ait nécessairement à y contribuer financièrement, ça apparaît comme inéquitable, Mme la Présidente. Alors, ce que nous avons fait, par la loi, ça a été de s'assurer qu'il allait y avoir de l'équité entre les citoyens et les citoyennes des villes qui habitaient un territoire contigu. Donc, premier objectif, l'équité fiscale, l'intérêt commun à poursuivre ensemble. Pourquoi demander aux citoyens et aux citoyennes de la ville-centre, qui souvent d'ailleurs regroupe les gens les moins fortunés parce qu'on est près des services collectifs puis on utilise le transport en commun, qui est généralement plus disponible dans ces mêmes villes, pourquoi leur demander à eux et à elles de supporter les coûts des services collectifs utilisés par leurs voisins? Alors, donc, objectif premier: équité fiscale.

Deuxième objectif, le développement économique, le développement économique durable. Et là je suis retournée aux principes, hein, énoncés par notre collègue lorsqu'elle a présenté le projet de loi, développement économique, développement durable, parce que ça demande du leadership pour pouvoir poursuivre de tels objectifs, ça demande une certaine cohésion, une cohésion et une cohérence qui souvent est difficile à atteindre lorsqu'on assiste à une querelle de clocher continue. Et d'ailleurs je vais tout à l'heure faire parler des gens de Longueuil, à travers leur présentation en commission parlementaire, qui ont bien décrit ce qu'était cette situation sur le territoire de la Rive-Sud de Montréal. Donc, développement économique, développement durable.

Un meilleur aménagement du territoire. Bien sûr, si chacun, dans son espace, décide d'organiser les institutions scolaires, les parcs, les parcs industriels sans tenir compte de la ville à côté qui est à ce point à côté qu'on n'a qu'à traverser la rue pour s'y retrouver, cela donne de la cacophonie, cela ne donne pas un plan harmonieux, un plan harmonieux au service... pas pour le plaisir d'un plan harmonieux, pour agir et donc servir mieux les intérêts des citoyens et des citoyennes qui habitent ce même territoire.

Équité fiscale, développement économique durable, meilleur aménagement du territoire. Amélioration des services aux citoyens ou une diminution du coût des services municipaux. Et, quand certaines personnes nous disent: Oui, mais, voyez, actuellement, les coûts des services montent, dans certains cas. Bien sûr, Mme la Présidente, quand on a à prendre des villes qui avaient des administrations différentes, des niveaux de services différents, et qu'on met à niveau tout cela, et qu'on intègre ensemble des systèmes informatiques, des systèmes de gestion, des services de la paie, pendant un temps, il y a un investissement à faire qui implique un coût qui par la suite permet d'atteindre une meilleur efficacité, une meilleure productivité et, oui, qui nous permet d'avoir une meilleure qualité de services, sinon à moindres coûts, du moins à coûts comparables. Alors, c'est aussi, c'était aussi et cela demeure un des objectifs poursuivis par les regroupements municipaux.

Et enfin ? et j'entendais mon collègue de Borduas en parler avec fougue tout à l'heure ? et enfin s'assurer que les enjeux de nature supralocale, s'assurer que les enjeux liés à la mondialisation, liés au commerce international, les enjeux liés aux échanges entre les villes à travers le monde puissent se faire avec un leadership affirmé de ceux et celles qui sont à la tête de ces villes importantes et significatives. Donc, il y avait d'autres sous-objectifs, mais ce sont les objectifs principaux qui étaient poursuivis par la loi sur le regroupement municipal.

Maintenant qu'en est-il concrètement, au point de vue de Longueuil, des orientations et surtout des effets que cela a eus ou des attentes exprimées par les leaders de la communauté économique, entre autres, de Longueuil? Et là je me réfère à un mémoire qui vient d'être présenté au ministre au moment des commissions parlementaires, il y a quelques semaines, et c'était la Chambre de commerce et d'industrie de la Rive-Sud. Et ça m'amuse beaucoup quand on lit cela, parce qu'on dit qu'on n'a pas consulté les organismes, les citoyens. Alors, dans le cas présent, depuis un long moment, la Chambre de commerce et d'industrie de la Rive-Sud de même que beaucoup d'autres organismes sociaux, culturels avaient fait, par le passé, des représentations.

n(17 h 40)n

On a parlé tout à l'heure du comité Pichette, du nom de son président, qui a exercé d'ailleurs des fonctions dans le domaine de l'éducation et qui est encore très actif dans le secteur des institutions publiques. Donc, M. Pichette a présidé une commission d'ailleurs qui avait été mandatée par le ministre de l'époque, M. Claude Ryan, sous le gouvernement libéral, et, à cette même commission, sont venus témoigner un certain nombre de représentants de la Rive-Sud, de Longueuil et des environs et qui recommandaient dès ce moment-là que l'on procède à des regroupements, que l'on procède à des fusions. Alors, ça m'amuse un peu quand on dit: On n'a pas consulté, on a fait ça sans tenir compte du point de vue qu'avaient les citoyens et les citoyennes de ces mêmes municipalités.

On dit: «Depuis 1972 ? et je cite le mémoire de la Chambre de commerce ? depuis 1972, la question de la régionalisation mobilise les intervenants socioéconomiques de la Rive-Sud, dont les gens d'affaires via la Chambre de commerce et d'industrie. Plusieurs exemples alimentent la réflexion: les municipalités de Jacques-Cartier et Longueuil ? par exemple ? ont formé l'ancienne ville de Longueuil.» À l'automne 1999 ? on n'avait pas commencé, à ce moment-là, l'étude du projet de loi sur le regroupement municipal ? à l'automne 1999, la Chambre de commerce organise un «forum au cours duquel les gens d'affaires font connaître leurs priorités: le transport des personnes et des marchandises [...] et la réorganisation municipale arrivent en tête de liste. Un besoin se fait sentir de façon très nette, soit celui de créer un regroupement sur la Rive-Sud qui ferait contrepoids à Montréal et à Laval, tout en participant activement aux destinées de la grande région de Montréal. Les participants s'entendent pour dire que la Rive-Sud dispose d'atouts importants, mais que sa principale lacune est la disparité des objectifs et la fragmentation des pouvoirs[...].

«Trop de municipalités, trop d'organismes agissent sur un même territoire, ce qui est défavorable à l'émergence de politiques d'ensemble ? ce n'est pas nous qui disons cela, ce sont des représentants de la communauté d'affaires de la Communauté économique de la Rive-Sud. La Rive-Sud a véritablement besoin d'un leadership municipal fort et cohésif. On note que c'est également la conclusion à laquelle d'autres études sont arrivées, notamment celles de Pichette et de Bernard.»

On dit et on décrit la situation de la Rive-Sud en indiquant que l'on connaît sur ce territoire des réussites assez exceptionnelles en termes de création d'entreprises, de création d'emplois. Mais on dit ceci: «Malgré ce portrait positif, la Rive-Sud souffre de plusieurs anomalies qui, si elles ne sont pas bientôt corrigées, risquent d'étouffer ses efforts de développement ? ça, c'était avant la loi: la fragmentation des pouvoirs et des lieux de décision; le dédoublement des ressources; la congestion aiguë du transport des personnes.» C'était ce à quoi aboutissait le colloque.

«Il est temps de regrouper les forces de cette région en pleine croissance dans un plan de développement concerté et proactif. Or, il semble impossible d'atteindre un tel objectif dans un contexte souvent décrit comme une guerre de clocher, avec des préoccupations locales plutôt que régionales, des actions morcelées et des intérêts contradictoires[...]. La Chambre est d'avis que des fusions doivent se réaliser. En effet, il y a trop de municipalités, trop d'institutions sur la Rive-Sud.

«En conclusion, la Chambre [...] réclame un plan de développement économique viable et un leadership fort. Et elle s'engage à y collaborer», ce qu'elle a fait depuis que la nouvelle ville de Longueuil a été constituée, et elle le fait d'une façon, je dirais, constante, déterminée. Nous voyons des gens d'affaires présents au niveau d'une organisation qui a été constituée par la nouvelle ville de Longueuil qui s'appelle Développement économique Longueuil. Et, en ce sens, ces mêmes personnes représentant les milieux économiques sont absolument catastrophées de penser que l'on puisse songer à défusionner ces nouvelles villes auxquelles on contribue actuellement de façon active et avec enthousiasme, et en particulier des gens d'affaires mais aussi des milieux culturels, des milieux sociaux et des milieux communautaires.

«Avec la création de la nouvelle ville de Longueuil, la Chambre constate rapidement un effort concerté du milieu qui va dans le sens des principales recommandations [...] ? du colloque tenu à l'époque. En quelques mois, les gens d'affaires observent des résultats concrets, dont la création de Développement économique Longueuil et la relance de plusieurs projets d'importance. Bien que certains foyers de résistance "aux fusions forcées" ? et il met ça entre guillemets, hein ? persistent dans certains arrondissements, la population semble adhérer graduellement à la nouvelle grande ville de Longueuil... du moins jusqu'à ce que le gouvernement décide de relancer le débat.» Quand je vous disais que cela était divisif et que ça ne menait nulle part, on en a une preuve qui est faite par les organismes de la nouvelle ville de Longueuil et en particulier ses leaders économiques.

Donc, deux grandes orientations a privilégier: préséance de l'intérêt commun ? ce sont leurs propos, ça rejoint les objectifs poursuivis ? construction d'un développement économique durable pour Longueuil. Et là on cite, on cite des exemples concrets des résultats obtenus ou qui s'obtiendront grâce à la constitution de cette nouvelle ville. On y fait référence, entre autres, bien sûr, à cette question de l'aéroport de Saint-Hubert qu'il n'était pas possible de développer avec le seul support de la ville de Saint-Hubert, qui elle-même n'avait pas les moyens économiques, les moyens fiscaux pour supporter un tel développement. Les villes nouvellement regroupées sont en train de redynamiser cette importante infrastructure pour le développement de la Rive-Sud.

Nous parlons actuellement de la possibilité d'implanter un centre des congrès. Le développement du transport en commun est déjà vu sous un angle plus positif parce qu'une meilleure contribution de chacune des nouvelles... chacun des arrondissements et donc à la nouvelle municipalité permettront cela. Et on termine avec la configuration économique de la Rive-Sud de Montréal en parlant du triangle du développement, puisqu'on y retrouve, autour de trois axes, les principaux actifs industriels et les principales industries manufacturières. On pense à l'autoroute 20, à l'autoroute 10 et à l'autoroute 30.

Et là, plus concrètement, ce que l'on dit, c'est que, «dans le cas où Saint-Bruno-de-Montarville et Boucherville opteraient pour la défusion, ce triangle de développement se retrouverait en grande partie en dehors du territoire de la ville de Longueuil, occasionnant une série de problèmes faciles à prévoir. Pour éviter de compromettre le potentiel économique de la Rive-Sud, il est impératif de s'assurer que la ville pôle de Longueuil conserve les moyens et les pouvoirs lui permettant d'agir sur ce territoire. À ce stade-ci, le démantèlement de l'organisme Développement économique Longueuil serait dommageable pour l'ensemble de la région, y compris les villes reconstituées.»

Et maintenant, je regarde les amendements proposés par le ministre au projet de loi n° 9, c'est absolument inimaginable, Mme la Présidente. D'abord, il est évident qu'avec ce qui nous est proposé ici ? oui, je sais qu'il ne me reste que quelques secondes ? avec ce qui nous est proposé ici, à peine 1,7 % de la ville de Longueuil, de la population de la ville de Longueuil pourrait, lors d'un référendum, décider de la défusion de Longueuil. C'est proprement inacceptable.

Après cela, passons à la superposition des niveaux de gouvernance et de structure. Si on voulait simplifier, là, et avoir quelque chose de compréhensible pour la population, bien là il faudrait absolument rejeter du revers de la main les amendements qui nous ont été proposés, et, en ce sens, je crois que ce serait mal servir la ville de Longueuil que de voter sur ces amendements. Nous voterons donc contre, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, Mme la députée. Alors, je cède maintenant la parole au député de Dubuc. M. le député.

M. Jacques Côté

M. Côté: Alors, merci, Mme la Présidente. Avec le projet de loi n° 9, Loi concernant la consultation des citoyens sur la réorganisation territoriale de certaines municipalités, de même que les amendements qui ont été déposés par le ministre la semaine passée, alors, nous entreprenons aujourd'hui un débat qui va s'inscrire dans l'histoire politique du Québec comme un débat très négatif mais aussi un débat triste, Mme la Présidente.

Le projet de loi, qui comprend 23 pages... Et les amendements, en passant, en comprennent 78, au-delà de 150 amendements. En effet, Mme la Présidente, ce que nous entreprenons, avec ce projet de loi, c'est l'itinéraire d'un retour en arrière, l'histoire d'une action de démantèlement, de brisure, de cassure. Et, comme c'est le cas avec beaucoup d'autres dossiers, nous provoquons une fracture non seulement dans ce dossier, mais aussi dans plusieurs autres dossiers, et nous brisons, en fait, ce que le Québec a construit depuis maintenant plus de 25 ans.

n(17 h 50)n

On ne peut pas se contenter de dire qu'on est favorable aux nouvelles villes et en même temps de tracer les grandes lignes d'un processus de défusions avec ouverture de registres et référendums. Cette affirmation est vide de sens. Le gouvernement vient de mettre de la chair autour de l'os, paraît-il: 10 % pour la signature des registres, cinq jours durant les signatures; 35 % de participation en ce qui concerne les électeurs inscrits. Est-ce que cela lève pour autant la contradiction existant entre le préjugé favorable aux grandes villes et le processus des défusions qu'il nous présente avec ce projet de loi là? Non, Mme la Présidente. S'il est souvent bon de permettre aux citoyens et citoyennes de se prononcer, de se faire entendre, il n'en demeure pas moins qu'en matière municipale le gouvernement a les pleins pouvoirs, selon la Constitution canadienne. Il a aussi la responsabilité, il a le devoir, il a le devoir d'agir, dis-je, dans l'intérêt public pour le bien commun.

Le gouvernement libéral se berce d'illusions s'il pense que ce projet de loi va être adopté comme une lettre à la poste. Ce débat déchaînera les passions, Mme la Présidente, et je pèse mes mots. Si ce projet de loi est adopté, cela amènera des situations qui pourront donner lieu à de graves affrontements, Mme la Présidente. D'ailleurs, s'il en est un qui a vu, qui a vécu et qui vit encore, à l'occasion, des moments difficiles, c'est bien celui qui vous parle, Mme la Présidente. Des attaques personnelles souvent, des menaces, des atteintes à mes biens personnels même, voilà ce dont ma famille a été l'objet depuis ce processus de fusions et de défusions. Je sais, j'ai reconnu, je sais que ça n'a pas été des moments faciles, mais, dans tout cela, Mme la Présidente, j'ai compris que les citoyens avaient quand même été heurtés profondément, heurtés dans la façon dont le gouvernement avait agi, et ça je peux le comprendre.

Mais le seul objectif que j'ai toujours eu dans ces débats, c'est de me ranger derrière mon gouvernement parce que je croyais que ce que nous faisions était bon pour les citoyens et était fait dans l'intérêt public, et je le crois encore aujourd'hui. Ce que nous avons fait était bon pour les citoyens. Nous l'avons fait également pour éviter cette fameuse concurrence entre les villes, qui passaient leur temps à tirer sur la couverte chacune de leur côté, avec une multiplication de parcs industriels, avec une multiplications de sociétés de développement économique, avec une multiplications de commissaires industriels. Des parcs industriels, il y en avait dans chaque petite municipalité. Et c'est ça que nous voulions éviter, c'est ça que nous voulions... c'est à cela que nous voulions mettre un frein.

C'est bon aussi, Mme la Présidente, la réorganisation municipale que nous avons faite parce que nous croyions au développement économique d'une future grande ville, nous y croyions fortement et nous continuons d'y croire actuellement. La concurrence, suite à la mondialisation, Mme la Présidente, ça ne se passe plus entre une ville... mes collègues l'ont mentionné, ça ne se passe plus entre une ville d'une même province, ça ne se passe plus entre une ville d'un même État, ça se passe entre les villes d'Amérique, ça se passe entre les villes entre l'Europe et le Québec, et c'est ça qui est important. Ça nous prenait des villes fortes avec des agglomérations importantes pour justement faire face à ces concurrences.

Nous avions une vision, Mme la Présidente, lorsque nous sommes allés de l'avant avec la réorganisation municipale, nous avions la vision d'un avenir meilleur pour nos citoyens, nos citoyennes, nous avions la vision d'un meilleur développement et surtout d'une plus grande équité entre tous les citoyens et les citoyennes.

Je vais vous citer, Mme la Présidente, qu'est-ce qui se passait au moment de la réforme municipale de l'an 2000. Nous avions, en situation, avant la réforme, 1 306 municipalités au Québec, plus de municipalités que dans toutes les autres provinces et les États voisins. Exemple, en Ontario, au moment où on a fait la réforme, il y avait 537 municipalités pour une population de 11,5 millions d'habitants, alors que le Québec en comptait plus de 1 300 pour une population de 7 millions d'habitants.

Cette fragmentation des municipalités, Mme la Présidente, amenait à certains constats. D'abord, l'absence d'une vision d'ensemble, c'est évident, parce que tout était fragmenté en des petites municipalités, donc absence de vision, donc absence de coordination, d'autre part. Concurrence stérile également, Mme la Présidente, qui nuisait au développement économique. Dédoublement de services: dans chaque municipalité, des corps de police différents, des corps de pompiers, réseaux d'informatique propres à chacun, chacun avait son propre service des loisirs, chacun avait son propre service d'ordures ménagères, une surabondance aussi de structures qui entraînait des coûts additionnels pour les contribuables et surtout, Mme la Présidente, comme je l'ai dit tout à l'heure, des disparités fiscales très importantes.

Ce que nous avons fait lorsque nous avons procédé à la réorganisation municipale, nous avons aussi été dans le sens de cette tendance contemporaine, Mme la Présidente, qui fait que, aujourd'hui, les grandes villes, les grandes agglomérations s'unissent pour être plus fortes. Et le Québec s'est inscrit comme tout le monde dans cette lignée de pays qui ont dû réduire le nombre de leurs municipalités, récemment en Grande-Bretagne, en Belgique, au Danemark, en Allemagne fédérale, en Ontario même, où ? plus près de nous ? la ville de Toronto, la ville d'Ottawa, Sudbury, Hamilton, et même au Nouveau-Brunswick, où la ville d'Edmundston ont aussi travaillé dans le cas de la réorganisation municipale.

Depuis la fusion, depuis cette réorganisation ? et là je vais vous parler un petit peu de moins de pays ? y a-t-il des choses qui ont changé? Oui, Mme la Présidente, beaucoup de choses ont changé, beaucoup de choses ont changé. C'est évident que, s'il y a un citoyen qui s'attendait à ce que ses ordures ménagères soient récoltées deux fois par semaine plutôt qu'une, bien, il va dire que, bien non, il n'a pas des meilleurs services parce que ses ordures ménagères sont récoltées seulement qu'une fois par semaine. Mais c'est ce qui arrivait avant. Alors, ça, ça n'a pas changé. Même chose pour la récupération, même chose pour le déneigement, ça, c'est des choses qui n'ont pas changé.

Mais ce qui a changé, c'est que nous sommes devenus une grande ville intégrée, intégrée au niveau des services, avec des projets, Mme la Présidente, avec des projets d'avenir extraordinaires. Ce qui a été fait aussi, depuis la fusion ? pourtant, ça ne fait pas longtemps, ça fait un an et demi ? il y a eu des choses extraordinaires qui ont été faites qui n'auraient peut-être pas pu être faites si nous étions restés comme une seule ville. Que ce soit des projets comme La fabuleuse histoire du royaume, à ville de La Baie, dans l'agglomération de ville de La Baie, c'était ville de La Baie, qui maintenant jouit d'une infrastructure, d'un immeuble extraordinaire. Et donc, encore récemment, ville de Saguenay a annoncé des investissements d'au-delà de 2 millions de dollars. Est-ce que, comme petite entité municipale, nous aurions pu investir autant dans ce projet?

Nous avons également mis sur pied, c'est-à-dire agrandi un centre de formation professionnelle dans le secteur de La Baie, centre qui a nécessité plusieurs millions de dollars. Également, Mme la Présidente, dans un contexte régional, dans un contexte d'une plus grande agglomération, le cégep de Chicoutimi dispensera dans l'agglomération de La Baie des cours en formation sur les techniques de l'aluminium, et ça, c'est un acquis extraordinaire pour une agglomération, c'est que le cégep aura un bras à Alma, pour la première année, et les deuxième et troisième années se donneront à La Baie. L'autoroute Alma-La Baie, Mme la Présidente, qui se concrétisera, j'espère. Je sais que nous avons eu du retard présentement, mais j'espère que le ministre des Transports concrétisera ce projet dans les mois qui viennent.

La Vice-Présidente: Je m'excuse de vous interrompre, M. le député. Alors, compte tenu de l'heure, je dois vous interrompre et vous demander de reprendre lorsque nous reprendrons le débat. Il vous restera, à ce moment, un peu moins de 10 minutes. Alors, compte tenu de l'heure, je suspends nos travaux jusqu'à 20 heures, ce soir.

(Suspension de la séance à 18 heures)

 

(Reprise à 20 h 4)

Le Vice-Président (M. Gendron): Chers collègues, si vous voulez bien vous asseoir.

Alors, chers collègues, nous allons poursuivre l'adoption du principe du projet de loi n° 9, Loi concernant la consultation des citoyens sur la réorganisation territoriale de certaines municipalités, et je reconnais, pour la poursuite du débat, M. le député de Dubuc. M. le député de Dubuc, à vous.

M. Côté: Merci, M. le Président. Alors, lorsque nous nous sommes quittés, à 18 heures ce soir, j'étais en train de parler des avantages que la réorganisation municipale avait commencé à produire auprès de notre municipalité, maintenant notre municipalité de ville de Saguenay. Et ce n'est qu'un début, M. le Président, puisque, à peine 18 mois après cette réorganisation municipale, déjà on voit des projets qui jaillissent, de grands projets que nous ne pourrions nous permettre si nous étions demeurés une ville unique, une ville séparée. Maintenant, nous sommes fusionnés, et je pense que cette fusion, cette réorganisation municipale permettra justement à cette grande ville de Saguenay de se développer économiquement et aussi socialement.

Après un an et demi, M. le Président, je pense que nous devons donner la chance, aussi, au coureur. Et, lorsque j'ai assisté à la commission parlementaire sur la réorganisation municipale, les maires des grandes villes sont venus nous dire, sont venus presque supplier le ministre, M. le Président, de ne pas toucher à leurs nouvelles villes. Et je ne voudrais que vous citer deux passages, un passage, entre autres, du maire Olivier, le maire de Longueuil, qui a dit au ministre, et je le cite textuellement: «Je crois sincèrement que tous ceux et celles qui sont alentour de la table savent que, quand il y aura une grande ville qui tombera, elles vont toutes tomber, et je vous mets au défi, sur le plan économique de cette province, après ça, de rétablir les ponts. Rétablir les forces économiques qui ont été créées en vertu de cette loi-là va être d'une ampleur tellement grande qu'un gouvernement va faire du municipal pendant quatre ans et peut-être pendant huit ans.» Et ça, c'est le maire de Longueuil, M. le Président, qui suppliait le ministre des Affaires municipales de ne pas toucher aux nouvelles villes.

Le maire L'Allier, de Québec, dit: «On vient vous dire aujourd'hui que l'engagement des élus est de faire en sorte que ces villes nouvelles, résultat de 20 ans de discussions sans fin à travers le Québec, d'autant de commissions de travail, de propositions de toutes sortes, que ces villes nouvelles demandent une chance d'exister, mais que, si tout de suite on enlève des pièces, que ce soit dans la traction, dans le moteur, etc., et qu'on leur dise "maintenant, continuez", il est évident qu'elles ne pourront le faire.» Alors, c'est ça, M. le Président, la situation à laquelle les nouvelles villes font face.

À ce stade-ci, il m'apparaît aussi impératif, M. le Président, de demander justement à ceux qui prônent ces défusions, à ceux qui veulent les retours en arrière, je leur demande de se rallier. Je pense que c'est important que, tous ensemble, nous puissions travailler pour la construction de ces nouvelles villes. Nous ne pouvons nous permettre, comme population, de continuer un combat stérile qui vient... qui veut maintenir le caractère immuable des structures locales. C'est un combat, je pense, qui se base sur un argument en même temps qu'on soulève, mais aussi en même temps qu'on... à laquelle on enlève tout son sens. On a parlé de démocratie. Au nom de la démocratie, on ne devrait pas... on devrait revenir en arrière.

Je pense qu'on réclame un droit de décider pour ceux, justement, qui ne veulent absolument rien changer. Et, à cet effet, M. le Président, j'aimerais également vous citer la ministre des Affaires municipales de l'époque, qui est d'ailleurs avec nous ce soir, je le pense, c'est une pure coïncidence, et je voudrais vous la citer au texte, lors des consultations particulières sur le projet de loi n° 70, où elle faisait les remarques d'ouverture suivantes: «Je n'hésite pas à le répéter, ce combat de structures ne correspond d'aucune façon aux valeurs sociales auxquelles nous adhérons, des valeurs d'entraide, des valeurs de solidarité, des valeurs de progrès, de justice, d'équité et des valeurs d'engagement dans sa communauté. Et, surtout, cela n'a rien à voir avec la démocratie. Les opposants clament haut et fort le droit de décider. Ils réclament l'équivalent d'un droit de veto pour maintenir les avantages du statu quo. Ce faisant, ils cèdent aveuglément à la peur, la peur de ceux qui ont brandi, et je cite, "que le gouvernement efface leur ville et leur village", la peur de celui ? et, entre parenthèses, c'était le chef de l'opposition à l'époque, mais maintenant il est premier ministre ? [...] que le gouvernement allait sacrifier les villes et les villages.»

Qu'est-ce qu'on fait maintenant, M. le Président, avec le projet de loi n° 9? On sacrifie les nouvelles villes. Alors, ce qu'on reprochait au gouvernement précédent, nous sommes en train de le faire présentement, M. le Président.

Oui, on peut, je pense qu'on peut construire de l'intérieur. On peut construire ces nouvelles villes. On peut également garder son sentiment d'appartenance, M. le Président. Parce que le sentiment d'appartenance, c'est une construction de l'esprit. C'est un sentiment identitaire. Écoutez, moi, j'ai été élevé à Port-Alfred. Je ne sais pas s'il y en a qui connaissent ça, Port-Alfred, c'est au Saguenay. J'ai été élevé sur la 4e avenue, entre le palais municipal puis le club de golf. Port-Afred est devenue ville de La Baie, et ville de La Baie est devenue ville de Saguenay. Je suis de Port-Alfred et, lorsqu'on me demande où je suis né, je dis: À Port-Alfred. Et pourtant j'habite une ville maintenant de 150 000 habitants. Alors, M. le Président, je pense que mon sentiment d'appartenance, il est aussi grand et aussi fort que ceux qui veulent défusionner la ville de Saguenay. Et c'est pour ça que ce n'est pas gênant d'en faire partie, puisque, ensemble, nous sommes capables de travailler.n(20 h 10)n

Malheureusement, M. le Président, avec ce projet de loi, on permet de créer... de recréer des anciennes villes avec la bénédiction du gouvernement. C'est un geste catastrophique pour Montréal. J'aurais voulu vous parler ici, quelques instants, de Montréal, mais je m'aperçois que le temps qui m'est imparti s'envole rapidement. Mais j'aimerais peut-être vous dire ce que M. André Pratte disait au sujet de Montréal, c'est que: En cherchant à réconcilier, avec ce projet de loi, l'irréconciliable, le gouvernement gaspille le temps, l'argent et l'économie et l'énergie du coeur économique du Québec. Le coeur économique du Québec, M. le Président, vous savez, c'est Montréal.

Et Mme Julie Lemieux, dans un éditorial du Soleil du 18 juin, disait ceci: «Mais peut-on alors prétendre que les règles de la démocratie, si chères au ministre Fournier, auront été respectées? Les libéraux reprochent aux péquistes d'avoir imposé les fusions. Mais ils seront sans doute amenés à imposer eux-mêmes les modalités des défusions. Qui plus est, ils se réservent le droit de refuser de reconnaître les résultats d'un référendum s'ils ne sont pas "significatifs"[...].

«Mais voilà, les libéraux avaient promis et ils tiennent leur promesse. Il leur aurait été difficile de faire pousser des fleurs autour d'un projet...»

Des voix: ...

M. Côté:«Il leur aurait été difficile de faire pousser des fleurs autour d'un projet aussi destructeur.» Voilà la fin de la citation, laquelle vous auriez dû attendre avant d'applaudir.

M. le Président, somme toute, ce que le ministre fait avec ce projet de loi n° 9, c'est qu'il affiche un comportement à la Ponce Pilate qui vise à faire assumer ses responsabilités ministérielles par des éléments responsables de la société, des élus municipaux, en les forçant à une guerre fratricide entre eux. Il permet également à une minorité de mécontents de contrôler l'agenda des élus municipaux engagés à... une nouvelle ville, en les enrôlant dans un échéancier référendaire aux frais des contribuables.

Les sept derniers mois du ministre se sont passés à rechercher l'ultime pirouette qui lui permettra de se laver les mains d'une promesse illogique et irresponsable du Parti libéral aux dépens de la sincérité de ceux et celles qui l'ont cru. Le ministre force les maires des six plus grandes villes du Québec à assumer l'odieux du gâchis qui risque de survenir et les occupe pour les mois à venir dans un exercice aléatoire et totalement stérile. Il est déplorable de voir un ministre se réfugier derrière des articles de journaux souvent complaisants ou même commandés par des défusionnistes alors que les grandes agglomérations récemment créées en Ontario passent à l'action et se positionnent sur l'échiquier économique.

M. le Président, je vais terminer en disant tout simplement que nous voterons contre l'adoption de principe de ce projet de loi, M. le Président, pour toutes les raisons évoquées, parce que je pense que ce que nous devons faire, c'est de donner une chance, et de retirer ce projet de loi et donner une chance aux nouvelles villes. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, M. le député de Dubuc. Je reconnais maintenant Mme la députée de Taschereau, présidente du caucus de l'opposition officielle. Mme la députée de Taschereau.

Mme Agnès Maltais

Mme Maltais: Merci, M. le Président. Alors, ça fait plaisir d'intervenir à ce stade-ci, soit à l'adoption de principe du projet de loi n° 9, dit loi des défusions. Et c'est effectivement ce qu'on a, une loi qui est tout à coup la porte ouverte sur les défusions municipales.

Mon premier commentaire, M. le Président, sera: Qu'est-ce que c'est que ce gouvernement? Mais qu'est-ce que c'est que ce gouvernement? Ce gouvernement qui passe son temps à jouer sur les structures, à semer l'inquiétude, à désassembler, à désorganiser, au lieu de s'occuper de travailler au bien commun du Québec. Et quand je parle de bien commun, j'ai des sourires de l'autre côté, M. le Président, j'ai des députés qui rigolent et qui sourient. Bien sûr, parce qu'ils ne font pas leur travail. Leur travail, c'est de travailler au bien commun des Québécois et des Québécoises. Alors, qu'est-ce qu'on a actuellement? Loi sur les désorganisations dans les régions, une loi sur la désorganisation dans les municipalités. C'est de la structurite.

Alors, ce dont je veux parler, c'est de quatre grands points. D'abord, dans ce projet de loi, la porte est ouverte aux défusions, je veux le démontrer. La complexité de ce projet de loi, qui est encore une fois une crise de structurite aiguë. Le déficit démocratique que porte ce projet de loi. Pour un gouvernement qui se drape dans la transparence depuis des mois et des mois, on a un déficit démocratique aigu. Et, enfin, je veux parler absolument du développement freiné des villes, M. le Président, par ce projet de loi, par l'incertitude qui est semée depuis cette promesse électorale irrationnelle, incompréhensible et d'un électoralisme à tous crins, M. le Président, d'un électoralisme à tous crins, une promesse qui a été là simplement pour permettre leur élection et avec laquelle ils sont pris maintenant, M. le Président.

Alors, depuis le début, nous dénonçons les intentions du gouvernement, et nous ne sommes pas les seuls. Alors, d'entrée de jeu, je voudrais dire, M. le Président, qu'il y a eu beaucoup, beaucoup, beaucoup de personnes, de groupes, de maires qui sont venus pendant la commission parlementaire exprimer leur désapprobation totale, mais alors totale, envers l'intention du gouvernement de défusionner les villes. Alors, le mémoire, un des mémoires les plus impressionnants non seulement par la qualité, pour la vigueur des interventions, pour la transpartisanerie, puisque la majorité des maires qui ont écrit ce mémoire étaient des maires qui sont reconnus d'allégeance libérale, mais aussi pour sa qualité, pour la profondeur du mémoire, c'est le mémoire... c'est aussi un mémoire qui vient des gens qui composent... qui représentent à peu près la majorité des citoyens au Québec, le caucus des grandes villes de l'UMQ. Ils sont venus, et voici ce qu'ils nous ont dit.

«Deux gouvernements, quatre premiers ministres et quatre ministres des Affaires municipales ont été tour à tour rencontrés, sensibilisés, informés et bien sûr, après plusieurs années d'efforts, convaincus qu'il fallait changer les choses. Les fusions municipales ne sont donc pas le résultat d'une décision partisane ou d'un engagement gouvernemental antidémocratique ? ce que tente de dire depuis longtemps le gouvernement ? mais plutôt le résultat provoqué par les démonstrations sans équivoque faites par les villes-centres et les villes d'agglomération que le statu quo n'était plus possible, que le temps des demi-mesures était révolu et que les fusions constituaient le meilleur outil pour mettre véritablement un terme aux chicanes stériles et rétablir l'équité.» C'est une députée de la région de la Capitale-Nationale qui a vécu la CUQ pendant des années qui lit ce texte et qui fait bien entendre ceci: «Le meilleur outil pour mettre véritablement un terme aux chicanes stériles et rétablir l'équité. Le gouvernement devait reconnaître l'urgence des besoins et l'existence d'une véritable problématique urbaine partout au Québec. Il n'avait pas le choix d'agir.» Ce n'est pas nous qui disons ça, ce sont les six maires des plus grandes villes du Québec. «Cette mise au point nous apparaît importante, puisqu'elle permet de comprendre que le regroupement des municipalités n'a pas été dicté par une décision gouvernementale illégitime, mais par une volonté politique et responsable d'améliorer le fonctionnement des agglomérations et ainsi doter le Québec d'une véritable politique susceptible de renforcer les pôles urbains à la base de notre développement social et économique.» Ce sont les maires des plus grandes villes du Québec qui disaient ça pendant la commission parlementaire.

Pourquoi ils disaient ça? Parce qu'ils en avaient assez. Parce que pendant des années ils ont dû développer des villes-centres pendant que se passait l'étalement urbain, pendant que se passaient les discussions autour des parcs industriels, pendant qu'il n'y avait pas d'équité fiscale, pendant que sur les centre-villes pesait le poids de tout cet agrandissement des agglomérations, pendant que le développement général était freiné, pendant qu'il y avait incohérence, pendant qu'il y avait plusieurs niveaux de pouvoir qui se chevauchaient, plusieurs niveaux décisionnels. Dans une intention de clarifier les règles du jeu, d'équité, et pour le bien commun, malgré que cela ait été difficile pour certaines personnes qui vivaient dans les banlieues, malgré que cela était difficile, les maires des villes-centres nous demandaient d'intervenir, et nous sommes intervenus. Alors, nous avons eu du courage, nous l'avons dit, nous avons été sanctionnés. Mais, aujourd'hui, le gouvernement a le devoir, et je dis «le devoir», de retirer le projet de loi n° 9 et de revenir à la situation que nous avons actuellement entre les mains au Québec: des grandes villes qui suscitent l'adhésion des citoyens et citoyennes.

n(20 h 20)n

Je vis dans la capitale nationale, M. le Président, je suis la députée de Taschereau. On sait que, dans LeJournal de Québec et dans Le Soleil du 15 novembre, il y a eu les résultats des sondages, qu'il y a eu un sondage qui a été fait dans la région pour vérifier si les gens étaient d'accord ou non avec les fusions, s'ils se sentaient à l'aise avec leurs nouvelles villes. 63 % des citoyens contre les défusions. Est-ce que ça ne pourrait pas satisfaire le gouvernement pour qu'il se dirige enfin dans le bon sens, M. le Président? Comme disait si bien la députée de Bourget, qui est porte-parole en la matière, des Affaires municipales: «Reculez dans la bonne direction». 63 % des gens sont contre les défusions.

La nouvelle ville de Québec plaît à 65 % de sa population. Qu'est-ce que ça dit, ça? Ça dit qu'on a eu du courage, qu'on a été sanctionné, mais qu'aujourd'hui les gens disent: Donnez la chance aux nouvelles villes. En fait, ce qu'ils disent, c'est qu'ils sont d'accord avec l'engagement du premier ministre, engagement qu'il a malheureusement oublié, qu'ils désirent, ces citoyens, ces citoyennes, le succès des nouvelles villes. Alors, ce qu'on fait actuellement: de l'électoralisme au lieu de la vision. On a enfourché, pendant la campagne électorale, la grogne des citoyens et citoyennes au lieu de privilégier le bien commun; le bien commun a été sacrifié. Et on fait de la régression au lieu de faire de la progression. C'est la division plutôt que l'union, alors que, nous le savons, dans un... Dans la capitale, par exemple, dans la ville de Québec, on a besoin de rassembler nos forces pour faire face à la concurrence mondiale des autres capitales et des autres villes. C'était un geste sain. Alors, on est en train de reculer là-dessus.

Et je dirais que le problème est tellement ample pour le gouvernement, l'ampleur du problème est tellement évidente que même la députée de Jean-Talon, en 2001, s'est permise de passer ce commentaire. Le 28 février 2002 ? pardon ? c'est plus récent que cela, je cite Michel David, du Devoir: La franchise de Margaret. «Mme Delisle a eu un autre accès de franchise cette semaine quand elle a expliqué au quotidien Le Soleil ce que les libéraux avaient en tête quand ils ont ouvert la porte à d'éventuelles défusions municipales ? je cite, je comprends que la députée de Jean-Talon est à l'écoute: "Dans la pratique, personne n'a jamais vraiment pensé à revenir comme avant. Autrement dit, au Parti libéral du Québec, on a toujours su qu'il était parfaitement irréaliste de songer à démanteler les nouvelles villes, surtout les grosses."» Voilà un aveu saisissant de la députée de Jean-Talon en 2002, M. le Président. On trouvait ça irréaliste, et c'est l'ancienne mairesse de Sillery qui parlait à ce moment-là. Assez intéressant.

Il y a un problème, M. le Président, dans la déclaration de la députée. C'est qu'aujourd'hui on y est, on est en plein dedans, on est en plein projet de loi sur les défusions municipales, M. le Président. C'est ça qui est terrible, c'est ça qui est dommage. C'est ça qui est dommage, c'est qu'un gouvernement... des membres d'un gouvernement qui savaient un projet irréaliste continuent à appuyer ce projet irréaliste. Alors, pour moi, ça n'a aucun sens. Il y a une autre grande promesse qui a été oubliée pendant ce temps-là, c'est que le premier ministre, en plein débat, avait souhaité le succès des nouvelles villes. Mais, évidemment, les promesses varient; bien folle qui s'y fie: Garderies à 5 $, c'est oublié; par contre, loi mur à mur... de ne pas faire une loi mur à mur sur les régions, c'est oublié; alors, aujourd'hui, le succès des nouvelles villes, c'est oublié.

Tout le monde est mécontent. Si on pouvait parodier la chanson de Gilles Vigneault: Tout le monde est mécontent. Même Simon Wilson, même le président du Comité des citoyens de banlieue de Québec, Simon Wilson, et le président de l'Association des citoyens de Saint-Étienne, Saint-Rédempteur et Saint-Nicoles, Théodore Demers, n'avaient pas eu de bons mots, hier, pour cette règle des 30 % ? c'est dans le journal: «C'est un accroc à la démocratie, une manipulation, une trahison du gouvernement libéral.» Alors, c'est ça qu'ils pensent, les citoyens. C'est qu'ils en ont assez de se faire promener d'un bord puis de l'autre par un gouvernement qui ne sait pas où il s'en va puis qui fait des promesses électorales irréfléchies.

Alors, sur les quatre axes, la porte ouverte aux défusions, d'abord, je voudrais présenter, M. le Président, à quel point la situation est sérieuse dans la capitale, à Québec. Prenons une ville... Tiens, puisque la députée de Jean-Talon était la mairesse de Sillery, je vais lui donner le chiffre pour la ville de Sillery. Il y a une population de 11 700 personnes à Sillery. Si on prend qu'à peu près 75 % des gens sont électeurs ? c'est un chiffre à peu près accepté ? personnes habilitées à voter: 8 000. Donc, pour le nombre de signatures requises pour tenir un référendum permettant de défusionner la nouvelle ville de Québec ? la nouvelle ville de Québec serait défusionnée, ça deviendrait un gruyère ? ce référendum pourrait être signé par seulement 878 personnes. Alors, 878 signatures seulement, et le processus de défusion de la nouvelle ville de Québec est enclenché. C'est ça qu'il dit, ce projet de loi. C'est inacceptable, M. le Président. Ça veut dire que 0,2 %, 0,2 % de la population de la nouvelle ville vont pouvoir décider que ça va devenir un gruyère.

Ce pourrait être Cap-Rouge. Cap-Rouge, 1 034 personnes, 0,2 %, M. le Président. C'est ça qui est un non-sens, qui est inacceptable dans ce projet de loi. On ne peut pas démanteler... On ne peut pas donner à 878 personnes le pouvoir, le pouvoir d'enclencher le processus des défusions de la nouvelle ville de Québec. Ça n'a aucun sens.

Alors, je voudrais parler aussi... Parce que c'est un chiffre probant, la porte est ouverte, je pense que c'est significatif. Deuxièmement, la complexité de ce que ça va donner, à Québec. Là, c'est assez extraordinaire. Alors, on introduit un nouveau niveau de gouvernance, là, les gens le réalisent. Écoutez, il y a déjà des conseils de quartier, à Québec. Ça, c'est une assemblée citoyenne qui se réunit avec conseiller municipal. Ensuite de ça, il y a un conseil d'arrondissement; intéressant! Troisième palier, le conseil municipal. Quatrième palier, le conseil d'agglomération, s'il y a défusion, qui va être créé. Cinquième palier, la communauté métropolitaine, dans laquelle vont s'ajouter de nouveaux joueurs, puisqu'il y aura des nouvelles villes si des défusions sont créées. Donc, on redéfait une nouvelle communauté métropolitaine. Et on finit avec la Conférence régionale des élus, qui est une nouvelle structure qui a été proposée par le ministre du Développement régional. Vous rendez-vous compte? Je pense qu'il y a beaucoup de questions à se poser.

Je voudrais parler aux citoyens et citoyennes, en plus d'aux députés qui sont dans la salle, pour leur dire: Eh bien, comme simplification, je pense qu'on a déjà trouvé mieux. Je répète: conseil de quartier, conseil d'arrondissement, conseil municipal, conseil d'agglomération, communauté métropolitaine modifiée et Conférence régionale des élus. Bien, je ne sais pas comment est-ce qu'un chat pourrait retrouver ses petits là-dedans, mais j'ai hâte de voir comment les gens vont réussir à se placer.

Qu'est-ce que ça veut dire? Conseil d'agglomération, ça, c'est la nouvelle mécanique qui est introduite dans ce qui a été appelé dans certains médias la patente du ministre des Affaires municipales, la nouvelle patente. On va regarder comment ça va marcher. Quand une ville va se défusionner, par exemple, toujours le même exemple, Sillery, par exemple... Si Sillery se défusionne, bien sûr, il va y avoir à ce moment-là un maire de Sillery, qui va vouloir siéger au conseil d'agglomération. Donc, le maire ou la mairesse de Sillery ayant un siège, ce maire ou cette mairesse représente 2 % de la population. Si on fait ce que propose le projet de loi du ministre, 2 % de la population, il y aura un représentant. Mais, si on marche selon ce que dit le projet de loi, que, au nombre de conseillers et de maires va correspondre le pourcentage de la population, ça veut dire que ça prendrait, dans le reste de la ville, 42 élus municipaux pour correspondre. Bien, c'est de valeur, il y en a juste 39. Il va falloir en chercher, M. le Président. C'est ça, la patente du ministre, on va être obligé de s'organiser pour approximativement correspondre.

Mais c'est encore mieux s'il y a deux ou trois villes. Ah! là c'est extraordinaire. Si Sillery a un représentant, défusionne, et Lac-Saint-Charles, un autre représentant, défusionne, et, mettons, Saint-Augustin, deux représentants, défusionne, là, si on ajoute tout ça, pour correspondre à l'ensemble et au nombre de droits de vote, si vraiment l'esprit démocratique du ministre est à l'effet de faire que les villes qui ont un certain taux de population soient bien représentées au conseil d'administration, bien on sera rendu à 55 élus municipaux autour de cette table. Il y a juste un problème: on va être obligé d'en trouver 10 de plus à la ville de Québec.

Ça ne marche pas, la patente du ministre, elle ne marche pas, la patente du ministre. En plus, il crée un nouveau palier de pouvoir. Assez extraordinaire! Ça le fait réagir, je comprends.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Gendron): Ça allait bien. Troisième paragraphe de 32: «Ils doivent s'abstenir de tout ce qui peut nuire à l'expression d'autrui». Donc, il y a une seule personne qui a la parole, et c'est sûr que vos suggestions, qui peuvent être très bonnes, sont inopportunes à ce moment-ci. Alors, on laisse la personne qui a le droit de parole s'exprimer pendant 20 minutes, dans le silence complet. Mme la députée de Taschereau.

Mme Maltais: Merci, M. le Président. J'apprécie par ailleurs l'interruption, puisque l'interruption me fait réfléchir à un autre palier, bien sûr, puisque, en plus de tous les paliers que j'ai nommés, il y a PÖLE, PÖLE, dont le ministre responsable de la Capitale nationale est si fier ? c'est nous qui l'avons mis sur pied bien sûr. C'est un organisme de développement économique sur lequel siègent des élus. Mais quels élus, maintenant, M. le Président? Est-ce qu'on va ajouter les élus qui sont des villes défusionnées? Comment on va revoir tout ça? Ça commence à être assez complexe comme structures. C'est pour ça que j'ai dit que ce projet de loi nous mène dans une crise de structurite totale et que les citoyens ne s'y retrouveront pas.

n(20 h 30)n

Le déficit démocratique, enfin. Les citoyens sont habitués à se faire... à pouvoir avoir accès aux élus municipaux qui gèrent leurs taxes. Par exemple, dans tous les conseils de ville, il y a des périodes de questions. Des citoyens arrivent en période de questions, peuvent questionner les maires. Qui aura le droit de poser des questions, quelle sera la mécanique du conseil d'agglomération? Parce que, au conseil d'agglomération, ce n'est qu'un rassemblement d'élus, ce n'est pas une assemblée d'élus qui gère... qui est une assemblée citoyenne, avec un hôtel de ville où les gens viennent à des réunions de l'hôtel de ville régulières. On se retrouve dans... c'est drôle, ça me rappelle d'anciens modèles qui étaient des freins au développement, d'anciens modèles qui, par exemple la Communauté urbaine de Québec, ont pris 12 ans à adopter un schéma d'aménagement, 12 ans à adopter un schéma d'aménagement. C'est drôle, à chaque fois que les libéraux nous proposent un projet de loi qui réorganise la région, à chaque fois on retrouve cet espèce de modélisation où les gens peuvent discuter entre eux et où le blocage peut arriver, où il y a des mécanismes de blocage. Alors là il y a un déficit démocratique, puisque, dans les villes, les citoyens ont la parole, l'opposition a la parole, l'opposition, à un hôtel de ville, est assise et a un droit de parole. Dans ce projet-là, quelle opposition y aura-t-il au conseil d'agglomération? Mais aucune, M. le Président. Il n'y a personne... et pourtant 65 % des budgets des nouvelles villes reconstituées... attention, là, je parle aux personnes... les défusionnistes, là, écoutez ça: 65 %, à peu près, des budgets des villes reconstituées vont être gérés au conseil d'agglomération. Mais personne ne pourra... il n'y aura pas d'opposition au conseil d'agglomération et personne ne pourra venir à une assemblée constituante faire entendre son opposition, poser des questions, au conseil d'agglomération. Il y a un déficit démocratique important dans ce projet de loi, M. le Président.

Enfin, finalement, des villes au développement freiné, bien là ça a été discuté, rediscuté. Tous les maires sont venus en commission parlementaire nous dire que les projets de développement sont gelés. Et les maires attentent de voir qui ils représentent et qui ils dirigent. Ça n'a pas de bon sens. En plus, non seulement pendant un an... là on est dans le syndrome des défusions, alors pendant un an on attend de voir si les gens vont signer les registres, combien ils vont être, ensuite de ça, des référendums. Mais, ensuite, déjà les défusionnistes nous ont annoncé qu'ils ne se satisferaient pas des pouvoirs qui sont dans le projet de loi et qu'ensuite ils recommenceraient le travail, ils recommenceraient la roue puis ils s'en iraient réclamer de nouveaux pouvoirs. Ils s'en vont là, d'accord, parce que les libéraux leur ont dit qu'ils retrouveraient leurs anciennes villes, alors ils se disent: Bon, voilà un bout, puis on a une poignée, puis on retourne, puis on va aller se battre pour aller retrouver nos pouvoirs. Ça n'a aucun sens, on réouvre la boîte de Pandore.

M. le Président, savez-vous qu'est-ce que ça me rappelle? Une certaine émission qui s'appelait Monsieur Bricole. Comme projet de loi, là, je trouve que ce serait digne de passer à cette émission, Monsieur Bricole. Et je vous jure d'une chose, c'est une émission qui est encore là pour de nombreuses saisons à l'affiche, M. le Président, parce que des bricolages, ça va en prendre, des bricolages comme le projet de loi n° 9, on va en avoir besoin d'une série, en cascade, pendant des saisons, M. le Président. Parce que ce projet de loi, c'est du bricolage, c'est ça que je trouve.

Alors, je trouve que nous nous retrouvons avec une porte ouverte aux défusions, la complexité incroyable qui vient d'entrer, un déficit démocratique important, un manque de transparence et, enfin, des villes au développement freiné. Je pense que, M. le Président, ce qu'il faut faire au plus tôt, c'est de dénoncer, dénoncer ouvertement, M. le Président, comme je le fais, ce projet de loi qui n'amène strictement rien à la région. Est-ce que ce projet de loi est là pour le bien commun? Quasi à l'unanimité, les gens sont venus en commission parlementaire dire non. Le ministre ne les a pas entendus, le gouvernement ne les a pas entendus. Il est temps qu'ils comprennent raison. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, je vous remercie beaucoup, Mme la députée de Taschereau. Et je reconnais maintenant Mme la députée de Jean-Talon. Alors, Mme la députée.

Mme Margaret F. Delisle

Mme Delisle: Merci, M. le Président. Alors, j'interviens à mon tour sur le projet de loi n° 9, projet qui a été déposé par mon collègue le ministre des Affaires municipales. Vous me permettrez, M. le Président, ce soir, de décerner, au nom de tous mes collègues, un Gémeaux à la députée de Taschereau. Franchement, elle remporte le prix de la meilleure comédienne de l'Assemblée nationale. Je l'écoute parler depuis tout à l'heure et je ne peux faire autrement que de... J'imagine que c'est ce qu'elle a fait. Elle est retournée au Journal des débats et elle a repris, d'après moi, l'ensemble du vocabulaire que nous avons utilisé lorsque nous étions dans l'opposition pour dénoncer le projet de loi n° 9.

Mais je voudrais rappeler à la députée de Taschereau, vous me permettrez, avant d'aborder le projet de loi n° 9... Où était-elle, la députée de Taschereau, à l'automne 2000, lorsque son gouvernement a décidé de fusionner de force les municipalités de la région de Québec? Où était-elle avec ses collègues? Elle était cachée, M. le Président. Jamais je ne l'ai entendue une seule fois défendre le projet du gouvernement du Québec, le projet qui forçait les municipalités à ne devenir qu'une seule et qui enlevait l'ensemble des droits aux citoyens et aux citoyennes des municipalités qui composaient la grande région de Québec.

M. le Président, elle parle de transparence. Le gouvernement... le parti d'opposition nous entretient depuis aujourd'hui... Ah, tous les termes y passent: manque de transparence, structurite. Celle-là, c'est la meilleure de tout. Puis, pour les gens qui nous écoutent, permettez-moi de vous dire que, quand on parle de structurite, ce n'est pas un terme qui va au Parti libéral du Québec, c'est un terme qui est accolé au Parti québécois. Ce parti-là, M. le Président, est le parti qui a créé le plus de structures pendant leur dernier mandat. D'ailleurs, on a réussi... on a compté le nombre de structures qui avaient été créées, on en a dénombré 60 durant leur mandat. C'est l'équivalent d'une structure par mois pendant cinq ans. Ils ont créé les CLD, oui, mais ils n'ont pas aboli les CRCD. Ils ont créé des structures en région. Moi, je me rappelle d'avoir fait une tournée régionale, lorsque j'étais la porte-parole des affaires municipales, et j'étais allée en région parler avec les citoyens. Je pense au comté de Matapédia, entre autres, où il y avait une corporation de développement économique qui fonctionnait très bien. Et le Parti québécois a dit: Non, non, non, non, tout le monde, le même modèle.

Nous, on a fait le choix suivant, M. le Président ? c'est sûr que ça ne fait pas l'affaire du Parti québécois ? on a choisi de consulter les gens, on a choisi de laisser les régions s'organiser. On a demandé... Je dois vous dire franchement, M. le Président, je comprends le Parti québécois de ne pas être à l'aise avec notre façon de voir les choses, je les comprends, ça ne fait pas partie de leur philosophie. Il ne faut pas tout confier aux élus parce que les élus, évidemment, ne peuvent pas comprendre qu'est-ce que c'est que du développement économique. On ne peut pas consulter les citoyens parce que les pauvres citoyens, ils ne sont pas assez intelligents pour comprendre puis décider ce qu'ils veulent. C'est ça que le Parti québécois nous a laissé.

Le Parti québécois, le gâchis... La députée de Taschereau parlait qu'on avait aujourd'hui... ils avaient et on avait à gérer un gâchis. Ce n'est pas notre gâchis, qu'on gère. On gère le gâchis du Parti québécois. Si le Parti québécois, en 2000, avait fait confiance aux citoyens, s'il avait fait confiance même aux élus qui avaient de l'expérience, pas juste les élus qui voulaient avoir un grand terrain de jeu et qui souhaitaient évidemment tout ramasser dans leur cour, s'ils avaient fait confiance aux gens qui avaient de l'expérience, peut-être qu'on n'aurait pas le gâchis dans lequel on est aujourd'hui. Et, si la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, qui était ministre des Affaires municipales à l'époque, avait peut-être écouté les diverses régions, on n'aurait peut-être pas un modèle mur à mur. Elle aurait peut-être pu s'asseoir avec les gens, avec l'UMQ, avec les différentes régions et voir quel modèle leur convenait le plus. Nous, c'est le choix qu'on a fait, c'est exactement ce qu'on a fait comme choix.

Alors donc, des leçons de la part du Parti québécois sur la transparence, sur le type de modèle de gouvernance, sur la structurite, je leur renvoie tout ce vocabulaire-là parce que c'est le vocabulaire qui leur appartient et qui les caractérise depuis toujours.

M. le Président, le projet de loi n° 9 fait suite, oui, à un engagement que nous avons pris, un engagement, pas électoraliste, un engagement que nous avons pris de consulter les citoyens et les citoyennes sur leur milieu de vie, un choix, le choix suivant: Dans quel milieu le citoyen veut-il vivre? Dans quel genre de communauté? Et qu'est-ce qu'il est prêt à payer?

C'est vrai que, comme gouvernement, il y a des décisions qui doivent être prises. C'est vrai également, je vous le dirai bien sincèrement, que je pense que les municipalités... nos régions, pardon, étaient rendues à un carrefour où on devait commencer vraiment à considérer sérieusement de parler d'une seule voix en ce qui a trait au développement économique. Je pense que plusieurs d'entre nous peuvent témoigner du fait que, lorsque nous étions quatre, cinq, six à porter ce ballon-là, on ne rendait pas service à notre région. Donc, de confier le... je prends l'exemple du développement économique, c'en est un parmi tant d'autres, je pense que c'est correct d'avoir pris cette décision-là puis de maintenir dans les responsabilités, entre autres, pour la ville nouvelle, le développement économique.

n(20 h 40)n

Je ne vois pas de contradiction majeure entre l'engagement que nous avons pris, qui était de consulter les citoyens... Il y avait trois étapes, vous les connaissez sans doute par coeur, je dirais peut-être même ad nauseam, mais c'est l'engagement que nous avons pris, et c'est ce que nous respectons. Notre chef, le soir du débat des chefs, a souligné l'importance pour nous, Parti libéral du Québec, pour le Parti libéral du Québec de la réussite des nouvelles villes, et c'est ce que nous retrouvons dans le projet de loi n° 9. Je pense qu'on ne peut pas nous taxer de manque de transparence, d'avoir manqué à notre engagement, de ne pas consulter. Nous consultons.

Vous le savez, M. le Président, j'ai passé 12 ans dans le milieu municipal, neuf ans ici. Je pense que je connais assez bien le monde municipal pour pouvoir vous dire qu'il y a des règles. Je pense, entre autres, au registre. Dans une municipalité comme Sillery, puisque la députée de Taschereau s'est amusée tout à l'heure à jouer sur les chiffres et sur les mots, il y a effectivement, je pense, près de 8 000 personnes qui pourraient, demain matin... qui sont sur la liste électorale, et il y en a 10 % qui viennent s'exprimer, donc 800 personnes, qui auront le droit, s'ils sont 800, d'exiger un référendum. Ce n'est pas 0,2 % de la population, ça, là, là. Si vous prenez l'ensemble de la population de la région de Québec, oui. Mais l'engagement que le Parti libéral du Québec a pris, ça a été de consulter et de redonner aux citoyens lésés, ceux qui se considèrent lésés la possibilité d'être consultés et de s'exprimer sur le milieu de vie dans lequel ils veulent ou elles veulent vivre. Alors, de dire que c'est 0,2 %... Je cherche un synonyme de «tronquer la réalité». Vous me retirerez le mot si vous voulez, je vais le retirer. Mais je pense qu'on joue beaucoup sur le vocabulaire, ici, puis on induit les personnes en erreur. 10 % de la population de Sillery, 10 % de la population de Sainte-Foy, 10 % de la population de L'Ancienne-Lorette ou même des diverses villes de Montréal, ça, c'est la réalité, et c'est... On a haussé le pourcentage pour responsabiliser aussi les gens. Je vous ferai une confidence, M. le Président. Il y a eu...

Le Vice-Président (M. Gendron): ...

Mme Delisle: Oui, je sais qu'il y a beaucoup de gens qui nous écoutent, mais je vais vous la faire quand même. Mais ne tremblez pas, là, ça va très bien, mon affaire.

Le Vice-Président (M. Gendron): Il ne faut pas qu'il y ait trop de monde.

Mme Delisle: Non, non, non. Mais, vous savez, M. le Président, le projet de loi n° 9, là, ça ne s'est pas écrit sur un coin de table, un bon matin, en décidant qu'on y incorporerait tel pourcentage, telle suite logique d'événements. Non. Ça a été un projet de loi qui a accouché, je pourrais le dire, il ne s'appelle pas le projet de loi n° 9 pour rien...

Je vous dirais que j'ai personnellement rencontré beaucoup de gens avec des positions très diverses: J'espère que vous ne toucherez pas à la majorité simple. Ça, c'est les gens qui souhaitaient que nous respections finalement les habitudes démocratiques que nous avons, que nous connaissons. Il y en a d'autres qui nous disaient: Rendez pas ça trop facile, là, il faudrait que ce soit... il faut les empêcher de défusionner.

L'exercice que, moi, je veux qu'on fasse puis les engagements que, moi, j'ai pris, ça a été de laisser les gens s'exprimer. Alors, s'il y a des gens qui veulent quitter la grande ville, qui veulent vraiment quitter la grande ville, bien, la responsabilité aussi leur appartient de convaincre les gens de quitter. Et, s'il y a des gens qui veulent y rester, il faut aussi qu'ils se sentent impliqués. Et la responsabilité appartient à tous les citoyens de mon comté, autant ceux qui souhaitent partir parce que le projet dans lequel ils sont actuellement ne les intéresse pas ou ne leur convient pas, mais aussi, les gens qui souhaitent y rester, bien, fassent l'exercice et se déplacent pour aller voter.

Donc, M. le Président, on aurait, c'est certain, préféré ne pas avoir à gérer un dossier comme celui-là, mais, lorsque la députée de Taschereau nous dit que c'est un gâchis, je lui répète que nous ramassons son gâchis, pas le nôtre, on ramasse son gâchis. Alors, je pense que c'est important que la responsabilité repose là où elle doit reposer et non pas sur nos épaules.

M. le Président, j'ai entendu évidemment beaucoup de commentaires aujourd'hui. Un de ceux que j'entends, c'est: Un accroc à la démocratie. J'ai entendu aussi tout à l'heure la députée de Taschereau parler de déficit démocratique. Quel culot que ce parti de l'opposition de venir nous dire qu'on est responsable du déficit démocratique! Que ce soit dans le dossier des défusions, que ce soit dans le dossier de la création des CRE, ce n'est pas un déficit démocratique, c'est une vision différente des choses.

J'entendais hier... pas hier, vendredi une députée du Parti québécois nous dire qu'il fallait absolument qu'il y ait la parité pour tout le monde. Moi aussi, j'en veux plus de femmes, j'aimerais qu'il y en ait plus de femmes dans les conseils d'administration, j'aimerais qu'il y ait plus de femmes députées ici, j'aimerais qu'il y ait beaucoup plus de femmes conseillères municipales. Puis, pendant qu'on est sur le sujet des femmes conseillères municipales, il faudrait peut-être faire le calcul du nombre de femmes qui ont disparu de la carte, avec les fusions forcées. Juste dans la région de Québec, il y avait des conseillères municipales, il y avait une femme mairesse, il y avait des femmes qui étaient maires, autour, dans la périphérie, c'est sûr qu'il n'y en a plus, elles ont disparu avec les fusions forcées. Alors, qu'on ne vienne pas nous parler de déficit démocratique.

On a décidé qu'on accompagnerait les gens, on a décidé qu'on accompagnerait les élus municipaux, qu'on accompagnerait les gens dans le développement économique, qu'on accompagnerait les gens dans les choix qu'ils feraient. Ça fait partie de ce que nous sommes au Parti libéral du Québec. On n'a jamais dit qu'on imposerait une structure et on n'a surtout jamais dit qu'on imposerait aux citoyens et aux citoyennes un milieu qu'ils ne voulaient pas. J'invite donc, M. le Président, les citoyens et les citoyennes qui nous écoutent à faire l'exercice suivant, je pense que c'est important. Il se dit beaucoup de choses actuellement dans les journaux, il s'en dit ici, à l'Assemblée nationale, il s'en dit sur les lignes ouvertes. Moi, j'invite les gens qui se sentent concernés à appeler dans nos bureaux de comté, on va leur donner l'information, à se responsabiliser aussi et à s'informer. C'est important. Et, si le Parti libéral du Québec a choisi de consulter le monde, c'est parce qu'on sentait que c'était ça dont les gens avaient besoin, on n'avait pas d'affaire à leur imposer quelque structure que ce soit.

Alors, vous comprendrez que, quand le Parti québécois nous dit qu'on a la maladie de la structurite, là, ça me fait tellement sourire parce que, quand je pense à tout ce que le Parti québécois a fait pendant neuf ans... Des structures, il y en a partout. Alors, c'est sûr qu'il va falloir qu'à un moment donné il y en ait qui disparaissent, c'est certain. Puis, si on peut être plus efficace avec moins de structures, moi, je vous dis tout de suite, M. le Président, que je lève la main, je suis au rendez-vous parce que je trouve ça important qu'on soit efficace dans ce qu'on fait.

M. le Président, je termine parce que le temps court. Je voudrais vous dire aujourd'hui que les gens, les citoyens et les citoyennes ne peuvent pas être surpris aujourd'hui de retrouver ce projet de loi sur la table. On s'est engagé à consulter, on s'est engagé à ouvrir des registres, on va le faire. On s'est engagé à faire des études, on va les faire. Et on s'est engagé également à tenir des référendums là où les citoyens le requerraient, et c'est exactement ce qu'on va faire. Ça s'appelle de la transparence, ça s'appelle de la responsabilisation. Ça peut ne pas faire l'affaire du Parti québécois, ils peuvent crier tant qu'ils voudront, mais le gâchis, ce n'est pas nous qui l'avons créé, c'est eux qui l'ont créé. Alors, merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron): Merci, Mme la députée de Jean-Talon. Je reconnais maintenant Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, porte-parole pour l'opposition officielle en matière de santé. Mme la députée.

Mme Louise Harel

Mme Harel: Merci, M. le Président. Je ne sais pas dans quelle bulle protégée de l'opinion publique vit la députée de Jean-Talon. Il faut que ce soit bien déconnecté, M. le Président, pour qu'elle n'ait pas pris le pouls de la population, qui, consultée dans les nouvelles villes à travers le Québec, se dit très satisfaite.

Et je comprends, M. le Président, la première ligne du projet de loi que l'on étudie présentement dit ceci: «Ce projet de loi accorde aux citoyens de certaines municipalités...» Alors, ce que les gens doivent comprendre ce soir, c'est que la démocratie, c'est à géométrie variable pour le gouvernement libéral et que ce sont des citoyens de certaines municipalités seulement qui peuvent prétendument profiter de ce surplus démocratique que leur offre le gouvernement. C'est un détournement de la démocratie, M. le Président, et pour des raisons électoralistes.

n(20 h 50)n

Moi, je crois que la présente législation est en totale contradiction avec la grande tradition libérale en matière d'organisation territoriale. Parce qu'il y a une grande tradition libérale en matière d'organisation territoriale. La preuve en est que, depuis les 40 dernières années, sur 16 législations qui ont été adoptées ici même, au salon bleu, où nous nous trouvons, 13 de ces 16 législations en matière de fusion municipale ont été adoptées par un gouvernement libéral. Et, M. le Président, il est même arrivé que, dans l'opposition, Jean Lesage, pour le nommer, a donné son consentement et a voté en faveur d'une loi imposant une communauté urbaine sur le territoire de l'île de Montréal, comme sur le territoire de Québec, comme sur le territoire de Hull. C'est donc dire, M. le Président, que, dans toute l'histoire des législations qui ont été adoptées en matière municipale ou territoriale, que ce soit la création des municipalités de Laval, ou de Mirabel, ou de Gaspé, ou encore de Charlesbourg, ou de Beauport...

Et j'entendais mon collègue de La Baie tantôt qui intervenait, M. le Président, et je me rappelais, en 2000, au moment où était adoptée la loi créant les grandes villes de Montréal, Québec, Longueuil, Lévis et Gatineau, je me rappelle qu'au même moment la ville de La Baie célébrait le 25e anniversaire de la fusion, en 1975, sous un gouvernement de Robert Bourassa, de la fusion de la ville de La Baie, de Port-Alfred et de Bagotville. Au moment même où le maire de La Baie protestait véhément contre le projet de regroupement avec Chicoutimi et Jonquière, en fait, dans la nouvelle ville de Saguenay, au même moment, la même année, il célébrait le regroupement, intervenu 25 ans plus tôt, de Bagotville, Port-Alfred et La Baie. Et, au moment où j'y étais, on m'avait même invitée aux fêtes. Ce n'était pas peu, d'autant plus que le maire de la ville de La Baie de cette époque, qui se scandalisait d'un projet de regroupement, d'agglomération avec les villes qui formeront la nouvelle ville de Saguenay, avait lui-même déposé un projet pour regrouper des municipalités l'entourant, y compris Petit-Saguenay, qui se trouvait à 90 km plus éloigné.

Alors, vous voyez, M. le Président, que, dans ces questions relatives à l'organisation territoriale, il faut un arbitre et qu'on ne peut pas laisser chacun décider pour lui-même parce que ce que ça signifie, c'est que chacun décide sans s'occuper de ses voisins et sans tenir compte finalement des autres. C'est pour ça qu'il y a une Assemblée nationale ici, au Québec, comme ailleurs, comme en Ontario, où c'est finalement le Parlement, la législature d'Ontario... comme au Nouveau-Brunswick, où c'est la législature qui a décidé de regrouper, de fusionner la ville d'Halifax. En Ontario, ça a été la législature à Toronto qui a décidé de regrouper la ville de Toronto, la ville de Sudbury, la ville de Hamilton, de Norfolk et combien d'autres, et qui a décidé de regrouper la ville d'Ottawa, Ottawa qui maintenant menace Montréal comme deuxième ville en importance au Canada, Montréal qui n'est plus la première, qui a été déclassée par Toronto et qui, là, est menacée par Ottawa de devenir la troisième ville.

Alors, ça a quelle importance, M. le Président? Oui, ça a beaucoup d'importance dans le développement économique, dans le développement social, dans le développement culturel parce que les villes ont évolué à travers le monde, mais en particulier dans les pays industrialisés et parce que les villes, qui se sont toujours occupées de protection de l'eau, de l'air, d'aménagement du territoire, de gestion ? on appelle maintenant, c'est plus noble ? de matières résiduelles, mais c'est un constat généralisé, les villes ont des fonctions, des responsabilités de plus en plus grandes, de plus en plus importantes. Et, pour s'en acquitter, pensez-vous que c'était possible de laisser aux 40 % de familles monoparentales qui habitaient l'ex-ville de Montréal la responsabilité, seules, le poids sur leurs épaules, de faire de Montréal une ville de classe mondiale, alors que les 27 autres municipalités qui occupaient l'île de Montréal pouvaient aller gagner leur vie soir et matin et puis ensuite laisser les problèmes urbains qui sont finalement liés au fait d'être une métropole, d'être une grande ville, les laisser finalement à ceux qui y résidaient?

Oui, M. le Président, il y a eu une grande tradition libérale en matière d'organisation territoriale, et malheureusement le projet de loi qui est déposé pour discussion devant nous maintenant, c'est vraiment la fin de cette grande tradition libérale. Et c'est d'autant plus triste, mais aussi d'autant plus inquiétant que le premier ministre, lorsqu'il était chef conservateur, qu'il parcourait le Canada, il y a quelques années à peine de cela, là, au moment où étaient créées les nouvelles grandes villes de Toronto, de Winnipeg, d'Halifax, d'Ottawa, il est resté muet, on ne l'a pas entendu nous parler de démocratie, à ce moment-là, il n'a pas fait la leçon à aucun des premiers ministres qu'il visitait, pas fait la leçon à personne d'autre. C'est pour le clan québécois seulement. Et pourquoi affaiblir les villes du Québec, alors qu'il sait très bien que la ville de Toronto... Et j'en veux à preuve encore récemment un excellent article que l'éditorialiste de La Presse a écrit à ce sujet. Au moment où la ville de Toronto connaît un essor sans précédent et au moment où les grandes nouvelles villes à travers le Canada connaissent cet essor sans précédent, les villes du Québec sont aux prises avec des handicaps qui vont durer jusqu'à... Combien d'années, M. le Président? Pas simplement l'année des registres et des référendums puis l'année qui suivra après, sur le conseil d'agglomération.

Et qu'est-ce que vous pensez qu'il va se passer dans ces conseils d'agglomération? Des nids à chicane. C'est certain que le projet de loi n° 9, ce qu'il nous fait voter, c'est la création de nids à chicane, essentiellement des nids à chicane, où finalement les villes qui auront le pouvoir de poursuivre le feront, puisque ces nouvelles banlieues auront donc la capacité d'aller en justice poursuivre les villes de centralité pour la répartition des factures des services d'agglomération.

Alors, ça m'apparaît bien évident, M. le Président, que ce qui est devant nous présentement va affaiblir profondément le Québec et en particulier sa capacité d'être présent dans, je dirai, le club des grandes villes et des grandes agglomérations urbaines. D'autant plus, M. le Président, je crois que c'est une très grande imposture, une imposture non seulement de la campagne électorale libérale, mais c'est une imposture que de prétendre que chacun peut décider de son sort. Alors, pourquoi pas l'île des Soeurs, qui a aussi fait un référendum il y a trois ans pour décider à 83 % qu'elle voulait constituer une ville autonome? Alors, pourquoi pas l'île des Soeurs? Et, tout compte fait, pourquoi pas finalement chacun des arrondissements? Alors, pourquoi refuser ce droit de décider aux arrondissements montréalais, qui pourraient aussi invoquer les discours du ministre député de Châteauguay pour revendiquer le droit de décider de s'organiser comme bon leur semble?

n(21 heures)n

Alors, c'est ça, la vision de la société que nous présente le gouvernement libéral. Et ce qui est extrêmement décevant, c'est notamment l'absence totale de vision d'équité dans le projet de loi qui est devant nous présentement. Et j'en ai à preuve la péréquation, qui est la grande oubliée, puisque, comme le disait un éditorialiste, pour ne pas le nommer, M. Descôteaux, du journal Le Devoir, c'est un cercle vicieux dont il s'agit dans le projet de loi qui est déposé aujourd'hui, le cercle vicieux de la désolidarité, puisque, en quittant la grande ville on ne se fait facturer que pour les services d'agglomération qu'on a finalement utilisés. Mais où est le partage, la péréquation? Où est la vision d'une ville où les services auxquels les citoyens ont accès deviennent des services d'un même niveau, M. le Président? C'est disparu complètement du projet de loi n° 9. Et comme le disait si bien M. Descoteaux: Tel qu'il est, le projet de loi incitera tous les arrondissements riches à se retirer de la nouvelle ville. En plus, il y en aura qui quitteront la nouvelle ville. Plus la charge foncière de ceux qui resteront augmentera et plus nombreux ils seront alors à vouloir partir. Le cercle vicieux: Je quitte parce qu'on a déjà quitté et que je ne veux pas rester pour être seul à partager. Je quitte parce que ceux qui ont quitté ont eu le droit de s'en aller sans partager, alors pourquoi je resterais? Pour partager, alors que les autres ont déjà quitté. C'est le cercle vicieux, voilà, mais c'est un jeu à somme nulle parce qu'il n'y aura que des perdants. Il n'y aura que des perdants, et c'est la vision finalement qui nous est proposée dans le projet de loi qui est devant nous, M. le Président.

Je souhaiterais inviter le ministre à prendre connaissance d'analyses qui ont été publiées par une professeure à la Faculté de droit de l'Université McGill. Et cette professeure, Mme Marie-Claude Prémont, a démontré, avec tableau à l'appui et statistiques, à quel point la question névralgique au coeur de tout ce débat sur la réorganisation municipale et dont il fallait discuter ouvertement était la question, et je la cite: «du maintien de privilèges fiscaux inscrits à même le découpage du territoire québécois».

Alors, M. le Président, il y a des abris fiscaux, pas simplement à l'étranger, mais il y a des abris fiscaux également dans notre société, et c'est ce que Mme Prémont, professeure à l'Université McGill, a si bien démontré. Et ce qu'elle nous en dit aurait dû pourtant faire réfléchir le ministre et faire réfléchir son gouvernement sur la responsabilité qu'ils vont assumer dans l'histoire. Moi, M. le Président, j'ai la fierté, de même que mes collègues de l'opposition, au moment où nous étions au gouvernement, nous avons la fierté d'avoir fait les grandes villes du Québec. Ils auront le déshonneur, y compris le député de Châteauguay, de les avoir démantelées, M. le Président.

D'ailleurs, au moment même où j'avais ces responsabilités, je m'étais beaucoup inspirée d'allocutions prononcées au même moment où le projet de loi était en préparation, d'allocutions prononcées par un prédécesseur à la fonction de ministre des Affaires municipales, et j'ai nommé M. Claude Ryan, qui a été, pendant plusieurs années, ministre des Affaires municipales dans le gouvernement de M. Bourassa. Et je voudrais vous en faire lecture, M. le Président, parce que, lorsque j'ai pris connaissance en mai 2000 de cette allocution et d'une autre d'ailleurs qu'il avait prononcée l'automne précédent, en octobre 1999, je me suis dit: Moi, M. le Président, dans ma vie je suis prête à passer le rester de ma vie à expliquer pourquoi on l'a fait, que de faire comme M. Ryan a passé le reste de sa vie à expliquer pourquoi il ne l'a pas fait. Et j'ai donc retrouvé copie de cette allocution prononcée en mai 2000 par M. Ryan, et je le cite au texte: «Toutes les commissions, tous les groupes d'étude qui se sont penchés sur la situation des municipalités depuis un quart de siècle ont été unanimes à conclure que nous avons trop de municipalités au Québec. Par respect pour l'importance que revêtent les institutions municipales dans notre vie démocratique, il fallait d'abord tenter de résoudre ce problème en faisant appel à l'initiative des municipalités elles-mêmes, et c'est ce qu'ont fait tous les gouvernements jusqu'à ce jour, y compris celui dont j'ai fait partie. Les municipalités furent cependant prévenues à diverses reprises qu'en l'absence de résultats satisfaisants il faudrait envisager le recours à des moyens plus énergiques. La méthode incitative a malheureusement fait la preuve de ses limites. Les choses évoluent désormais trop vite pour que le Québec puisse s'en remettre entièrement au temps et à la bonne volonté des intéressés pour ramener le nombre des municipalités à un niveau plus réaliste.»

Et M. Ryan continuait: «Ce qui vaut pour l'ensemble du monde municipal vaut aussi pour les municipalités situées sur le territoire de la région métropolitaine de Montréal. À l'intérieur de cette région, on compte pas moins de 104 municipalités, dont 28 sur le territoire de l'île de Montréal. Ce nombre est trop élevé. Bon nombre de ces municipalités n'ont pas la taille et les moyens voulus pour affronter de manière efficace les défis auxquels doit se mesurer une ville moderne. Sur l'île de Montréal, par exemple, 15 municipalités sur 28 ont moins de 25 000 habitants, neuf ont moins de 5 000 habitants. Certaines de ces municipalités sont, en outre, de véritables enclaves situées en plein coeur d'un territoire qui devrait être celui de la ville de Montréal.»

M. le Président, quelques extraits, n'est-ce pas, simplement pour vous signaler à quel point M. Ryan se situait dans la grande tradition libérale d'être capable de réfléchir les problèmes et de proposer des solutions. Il a, n'est-ce pas, le regret de ne pas les avoir appliquées lui-même. Vous savez très bien qu'un ministre a la capacité que son premier ministre lui laisse, n'est-ce pas? Alors, il avait ce regret de ne pas avoir pu, dans le gouvernement auquel il a évolué, faire lui-même ces changements.

Moi, j'ai l'immense privilège d'avoir été ministre au sein d'un gouvernement qui a eu le courage de faire ces changements qui s'imposaient, M. le Président, et c'est un très, très grand privilège, j'en conviens, mais d'autres l'ont eu également. Je pense notamment à M. Goldbloom, au moment où M. Goldbloom était ministre du gouvernement de Robert Bourassa, et je veux citer ce qu'il disait lors de la discussion ici, à l'Assemblée, d'une législation qu'il a fait adopter pour regrouper 40 municipalités. Et M. Goldbloom disait: «Je voudrais vous dire qu'à certains moments de l'histoire un gouvernement doit avoir une vision et doit prendre ses responsabilités. La tâche qui nous attend est, je sais, gigantesque, mais le gouvernement du Québec entend assumer pleinement ses responsabilités. C'est une question de devoir, le gouvernement doit agir au nom du bien commun et au nom de notre avenir collectif.»

M. le Président, ces propos, je les fais miens. Il y avait, à cette époque, une grande tradition libérale en matière de législation municipale. Elle n'existe plus bien évidemment, elle a été rompue par ce détournement de la démocratie, pour des raisons électoralistes purement, M. le Président. Et je voudrais terminer en vous disant combien je regrette que le gouvernement s'est enferré, s'est enlisé et qu'il aura la responsabilité, pour les générations qui viennent, il aura la responsabilité dans l'histoire d'avoir été celui qui aura provoqué ce recul si important. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, et je reconnais maintenant Mme la députée de La Pinière.

Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, M. le Président. M. le Président, il me fait plaisir, au nom des citoyennes et citoyens de mon comté, La Pinière, de prendre la parole devant cette Assemblée sur le projet de loi n° 9, Loi concernant la consultation des citoyens sur la réorganisation territoriale de certaines municipalités.

n(21 h 10)n

Je prends la parole, M. le Président, après avoir pris soin d'écouter l'intervention de ma collègue la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, qui, comme on le sait tous, est l'artisane du projet de loi n° 170 qui est à l'origine de ce gâchis qu'on vit depuis trois ans.

Depuis trois ans, j'ai appuyé un principe fondamental qui, au-delà de toute partisanerie politique, M. le Président, me semble essentiel au débat que nous faisons aujourd'hui sur la réorganisation municipale. Ce principe fondamental, que la députée d'Hochelaga-Maisonneuve qualifie de détournement de la démocratie, n'est rien d'autre que le respect de la démocratie, le respect de la démocratie locale, un ingrédient qui nous a manqué terriblement lorsque nous avons amorcé, il y a trois ans, le débat sur les fusions municipales forcées, et, à ce moment-là, il était justifié de parler de déni de la démocratie que le gouvernement du Parti québécois avait effectué à l'égard des citoyens.

Dès le départ, M. le Président, dans ce débat complexe et parfois houleux, j'ai pris le parti des citoyens, au-delà de toute partisanerie politique. Dans mon comté, M. le Président, je dialogue, je parle aussi bien aux péquistes qu'aux libéraux, qui ont des positions parfois diamétralement opposées, mais qui ? dans la plupart des cas ? pensent au niveau du sens commun et du bien commun. Dès le départ, je me suis rendue disponible aussi bien aux tenants de la fusion qu'aux tenants de la défusion et gardé le contact avec eux et avec elles depuis. J'ai rencontré les conseillers municipaux après que la nouvelle ville de Longueuil ait été constituée. J'ai échangé avec eux et expliqué amplement la position du Parti libéral du Québec et l'engagement que nous avons pris. J'ai également rencontré, depuis sa constitution, la Coalition pour la défusion de Brossard ? qui épouse les contours du comté de La Pinière ? je les ai rencontrés et échangé avec eux aussi, à la veille de leur préparation pour venir en commission parlementaire.

Aujourd'hui, nous entamons une nouvelle étape. Mais permettez-moi, M. le Président, pour mémoire, de rappeler le contexte de ce débat qui dure depuis trois ans. Il y a eu, en novembre 2000, le dépôt du projet de loi n° 170 sur les fusions municipales forcées. Ce projet de loi portait sur une fusion forcée dans quatre régions: Montréal, Longueuil, Québec et Gatineau. On se rappellera du contexte survolté où les citoyens criaient leur opposition par milliers dans les rues de Montréal, sur la Rive-Sud de Montréal et à Québec, entre autres. Le gouvernement du Parti québécois avait fait la sourde oreille. Le projet de loi n° 170 sur les fusions municipales forcées a été déposé et adopté dans l'improvisation la plus totale. Résultat? Aujourd'hui encore, nous sommes en train de réparer les pots cassés.

Dans sa forme initiale, M. le Président, le projet de loi n° 170 sur les fusions municipales forcées comprenait 1 066 articles, une brique de 250 pages. Dans les jours qui ont suivi, on a eu droit à deux blocs d'amendements. Le premier comprenait 381 articles, suivi d'une autre liasse de 248 amendements, soit un total de 1 695 articles que les parlementaires n'ont même pas eu le temps de lire, à plus forte raison discuter et adopter.

Le projet de loi n° 170 a été adopté en décembre 2000, dans le brouhaha et l'indignation, aux petites heures du matin, par la force du bâillon.

Et, comme un malheur ne vient jamais tout seul, le gouvernement du Parti québécois s'est vite rendu compte que les 1 695 articles bâclés du projet de loi n° 170 sont plein de trous et qu'ils ne réglaient pas les problèmes des fusions forcées. C'est ainsi que, six mois plus tard, en juin 2001, un autre projet de loi a été introduit: le projet de loi n° 29, une brique de 248 articles auxquels se sont ajoutés 404 amendements. Un an après, en mai 2002, le gouvernement du Parti québécois est revenu avec un autre projet de loi, le projet de loi n° 106: 219 articles visant à colmater les trous de la loi n° 170 et les lois subséquentes.

Pourtant, M. le Président, le Parti québécois n'avait jamais, jamais parlé des fusions municipales forcées durant la campagne électorale de 1998. Le Parti québécois a donc entrepris ces fusions forcées sans aucun mandat. Je me rappelle m'être levée devant cette Assemblée, le 1er novembre 2000, pour intervenir sur une motion demandant le dépôt des études sur les fameuses économies d'échelle et les avantages des fusions municipales forcées. On se rappellera que le gouvernement avait refusé, M. le Président, de rendre publiques ces études.

Les citoyennes et citoyens des huit municipalités de la Rive-Sud, soit Brossard, Longueuil, Saint-Hubert, Saint-Lambert, Greenfield Park, ville LeMoyne, Boucherville et Saint-Bruno-de-Montarville ont appris à leurs dépens qu'ils étaient désormais fusionnés de force. Ils n'ont jamais eu l'information qui aurait pu leur démontrer le bien-fondé et les avantages de cette fusion. Pire encore, le gouvernement du Parti québécois leur a nié le droit de s'exprimer sur l'avenir de leur ville. Ce déni démocratique a été vivement ressenti par les citoyens de la Rive-Sud, qui se sont mobilisés et manifesté dans les rues, on se rappellera, par un froid glacial, M. le Président.

Face à l'intransigeance du gouvernement du Parti québécois, nous, du Parti libéral du Québec, nous avons pris nos responsabilités. Nous avons pris l'engagement, lors du congrès du Parti libéral du Québec en octobre 2000, que nous allons redonner aux citoyens le droit d'être consultés sur l'avenir de leur communauté. Le gouvernement du Parti libéral a tenu parole, puisque, dès la première année de son premier mandat suivant l'élection du 14 avril 2003, le ministre des Affaires municipales, du Sport et des Loisirs a déposé, en juin dernier, un projet de loi, le projet de loi n° 9, Loi concernant la consultation des citoyens sur la réorganisation territoriale de certaines municipalités. À la grandeur du Québec, on parle de 42 agglomérations regroupant 212 municipalités. Ce projet de loi a fait l'objet d'une vaste consultation publique qui s'est déroulée du 9 septembre au 23 octobre 2003 et au cours de laquelle près de 90 groupes ont pu faire entendre leur voix.

n(21 h 20)n

Le projet de loi, dès son premier article, donne le choix aux citoyens concernés par ces fusions forcées soit de rester dans la nouvelle ville fusionnée de force ou de restituer leur municipalité antérieure, en tenant compte d'un partage équitable des compétences et d'une fiscalité d'agglomération. Voici, M. le Président, ce que dit l'article 1 du projet de loi n° 9 ? je cite: «La présente loi a pour objet d'accorder aux citoyens de certaines municipalités le droit de se prononcer sur les changements imposés depuis 2002 en matière d'organisation territoriale municipale.

«Ce droit leur permet de choisir, soit de maintenir des municipalités et de leurs territoires, soit la reconstitution de municipalités dotées des territoires qu'elles avaient avant de cesser d'exister ou, dans le cas d'un secteur détaché du territoire d'une municipalité qui n'a pas cessé d'exister, le retour de ce secteur dans ce territoire.»

Alors, M. le Président, comme vous le voyez, le gouvernement du Parti libéral donne le choix aux citoyens et il ne leur impose pas de solution unique. Et, en plus de ça, il leur offre ce choix en consultation et avec les informations qui vont avec.

J'ai eu l'occasion de participer justement à la consultation publique en commission parlementaire, et je dois souligner le travail remarquable qui a été fait par les différents organismes de la grande ville de Longueuil, ceux qui se sont présentés, à commencer par la nouvelle ville de Longueuil. Il y a eu aussi Développement de l'aéroport Saint-Hubert, la Société de développement des exportations de Longueuil, la Chambre de commerce et d'industrie de la Rive-Sud, trois conseillers de l'opposition de Longueuil, Fierté Saint-Bruno, avec six membres de l'ancien conseil municipal, l'Association des propriétaires de Saint-Bruno, les Citoyens et organismes communautaires de l'ancienne ville de Boucherville, la Coalition pour la défusion de Brossard et la Coalition pour la défusion de Saint-Lambert, pour ne nommer que ceux-là.

Le maire de Longueuil est venu réclamer un certain nombre de modifications au projet de loi n° 9, notamment: de limiter l'ouverture des registres préréférendum à une seule journée au lieu de cinq; de hausser le pourcentage des inscrits au registre à 25 % au lieu de 10 %, comme le prévoit le projet de loi n° 9; de fixer la barre du scrutin valide pour une défusion à 50 % plus un des électeurs inscrits ayant voté oui. Par ailleurs, les comités de défusion de Brossard, de Boucherville, de Saint-Lambert et de Saint-Bruno-de-Montarville ont insisté beaucoup sur le respect de la majorité simple et de la transparence du processus référendaire.

Le ministre des Affaires municipales, du Sport et du Loisir, dans les amendements qu'il a déposés le 28 novembre dernier, a choisi une solution d'équilibre. De quoi s'agit-il dans les amendements? Essentiellement, en ce qui concerne les responsabilités des municipalités reconstituées qui seraient issues du référendum, ces municipalités auraient des responsabilités pour les services de proximité, en ce qui a trait à l'urbanisme, particulièrement pour ce qui a trait à la planification et à la réglementation; elles ont la responsabilité des aqueducs et des égouts, en ce qui a trait à l'entretien, à la réfection du réseau local; la voirie locale aussi est de la responsabilité des services de proximité; pour ce qui a trait à l'entretien, au déneigement, à la réfection et l'éclairage des voies locales, à la réglementation de la circulation et du stationnement sur ses voies; quatrième responsabilité, la collecte des matières résiduelles; cinquième responsabilité, les loisirs et la culture, notamment les bibliothèques, les parcs locaux, les équipements locaux de sports, de loisirs et de la culture; sixièmement, la responsabilité de l'émission des permis divers en ce qui a trait à la construction, la rénovation, etc. Et, de plus, les villes reconstituées disposeront de pouvoirs de taxation pour financer leurs services de proximité, elles ont le pouvoir de récolter la taxe foncière générale sur l'ensemble de leur richesse foncière, incluant les parcs industriels.

Ça, M. le Président, c'est des bonnes nouvelles, parce que les citoyens qui ont été dépossédés de force de leur communauté, ils ont maintenant les moyens, s'ils le souhaitent, de pouvoir récupérer un certain nombre de responsabilités et ils ont les ressources qui vont avec pour pouvoir les exercer.

Également, M. le Président, en ce qui a trait au processus référendaire, le ministre des Affaires municipales, du Sport et du Loisir a placé cette responsabilité sous le contrôle du Directeur général des élections. C'est la meilleure façon d'assurer que le processus est transparent, qu'il est équitable, M. le Président. Alors, d'abord, il y aura les cinq jours, les cinq jours d'ouverture du registre dans les secteurs des anciennes municipalités fusionnées de force, incluant un samedi ou un dimanche. Ensuite, la barre restera à 10 % pour ce qui a trait à la signature du registre des électeurs inscrits. Également, pour ce qui est de la crédibilité du résultat, de sa légitimité, au-delà de la majorité simple, il y a un seuil d'au moins 35 % des personnes inscrites sur la liste référendaire qui doivent avoir voté en faveur de la proposition de la défusion pour que celle-ci se réalise. M. le Président, c'est une avancée sur la voie de la démocratie. On ne prend pas position pour l'une ou l'autre, mais on donne aux citoyens les moyens de choisir eux-mêmes la façon dont ils veulent être gouvernés localement.

J'ai écouté ma collègue la députée d'Hochelaga-Maisonneuve qui disait tantôt que les libéraux vont avoir le déshonneur de faire la défusion. Eh bien, M. le Président, vous me permettrez de lui répondre par la bouche de ses propres chefs péquistes. Citation: «Je ne pense pas que le législateur doive intervenir pour forcer les villes à fusionner. Vous savez, un mariage forcé n'est jamais bon.» Qui a dit ça, M. le Président? Lucien Bouchard, ancien premier ministre et député de Jonquière, dans Le Réveil de Jonquière du 14 novembre 1999.

Autre citation: «Il y a toujours eu des appétits dans les administrations gouvernementales pour fusionner par commodité pour le gouvernement, pas pour les citoyens. Les gouvernements sont toujours en faveur des fusions; c'est plus commode pour le ministère des Affaires municipales de faire affaire avec 200 municipalités plutôt que 1 400. Il est inutile de chercher à les justifier ? c'est-à-dire les fusions ? en disant que c'est pour le bien du citoyen.» Qui a dit ça, M. le Président? Jacques Parizeau, ancien premier ministre du Québec, cité dans le journal Les Affaires du 3 mai 1997.

Autre citation: «Les fusions forcées, c'est prouvé, ça ne donne rien de bon. Ça ne fait qu'engendrer la haine et les chicanes.» Qui a dit ça? Guy Chevrette, ancien ministre des Régions et député de Joliette, dans un discours qu'il a livré à la Chambre de commerce de Joliette le 1er novembre 1999.

Par ailleurs, le projet de loi n° 9 et les amendements qui ont été déposés le 28 novembre dernier ont été favorablement accueillis, M. le Président. Très rapidement, je citerai Le Soleil, Julie Lemieux, du 29 novembre 2003: «Admettons que la nouvelle version du projet de loi constitue, dans les circonstances, un compromis intéressant.»

Je terminerai avec Mme Francine Gadbois, ex-mairesse de Boucherville, le 29 novembre 2003, dans La Presse; elle se dit «en faveur du conseil d'agglomération, car il redonnera la parole aux représentants défusionnistes. Mais, en créant un conseil d'agglomération, les villes défusionnées auront de nouveau un droit de parole. On n'aura pas le choix de nous écouter», dit-elle. Merci beaucoup, M. le Président.

n(21 h 30)n

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, Mme la députée de La Pinière. Je reconnais maintenant, pour la poursuite du débat, M. le député de Bertrand. M. le député de Bertrand.

M. Claude Cousineau

M. Cousineau: Merci, M. le Président. M. le Président, le gouvernement nous présente le projet de loi n° 9. Avec ce projet de loi, le gouvernement libéral joue au Ponce Pilate: il s'en lave les mains. Il remet entre les mains des minorités le soin de préparer les défusions avec un coffre d'outils qui déplaît à tout le monde, et ce, sans exception. Le projet de loi n° 9, M. le Président, du ministre des Affaires municipales sur les défusions empoisonne l'existence des nouvelles villes. On ne compte plus les projets qui sont au neutre depuis l'élection du Parti libéral. Quelle absurdité, M. le Président!

Il n'y a, dans le projet n° 9 présenté par le ministre des Affaires municipales, avec son chapelet d'amendements, aucune vision de développement à long terme. Le projet de loi n° 9 met la table aux chicanes, à la stagnation, à la non-productivité. Le projet de loi n° 9 est un écran de fumée, un leurre. Il comporte une série d'amendements, déposés vendredi dernier, qui a soulevé un tollé de critiques, de protestations partout au Québec. Il ouvre la porte à la confrontation. Ce projet de loi est un écran de fumée. Même les défusionnistes se sont sentis trahis.

M. Wilson, porte-étendard des antifusionnistes à Québec, a déclaré, M. le Président, en entrevue, le 18 juin 2003, à une question posée par un journaliste qui lui demandait: Qu'est-ce que ça prendrait pour que vous soyez pour la fusion? il a répondu simplement: Il faudrait que l'on me prouve que les fusions sont pour le bien commun. Eh bien, justement, M. Wilson, c'est la bonne réponse, les fusions ont été réalisées pour le bien commun, comme vous le dites, pour l'équité, pour la solidarité, pour faire en sorte que la grande majorité des citoyens et des citoyennes puissent obtenir des services uniformes et aux mêmes coûts. Le bien commun, ce n'est pas le nombrilisme de certains au détriment de la collectivité; le bien commun, c'est le partage, c'est d'accepter que les arrondissements les plus riches aident les arrondissements les plus pauvres. C'est de faire en sorte que les atouts qu'apportent ces nouvelles villes puissent bénéficier à tous et à toutes. Mais il y a plus, M. le Président. Montréal est une métropole. C'est une grande ville nord-américaine qui doit avoir tous les moyens pour son développement. Elle doit être capable de compétitionner avec Toronto ou Boston.

Le projet de loi déposé n'a aucune vision. Il place Montréal dans une position de faiblesse. Il ne sert que des groupes de pression dont l'objectif est de retrouver leur petit royaume, leurs intérêts personnels et leur petit bien-être. Cette nouvelle ville, M. le Président, est en pleine reconstruction... est en pleine construction. Le maire, Gérald Tremblay, y met tout son coeur et ses énergies. Avec ses loyaux partenaires, un immense travail a déjà été effectué à tous les niveaux, mais, malheureusement, certains au conseil de ville minent depuis quelques mois ce travail colossal, tel un ver qui mine la pomme. Ces malhonnêtes, payés par les taxes des Montréalais et des Montréalaises, font en sorte de mettre des bâtons dans les roues et ils viennent ironiquement et hypocritement dire à la population: Vous voyez? La nouvelle ville, ça ne fonctionne pas.

Ce qui est malheureux, M. le Président, c'est que des députés libéraux de Montréal s'associent à ces défusionnistes sans vision, ce qui vient en contradiction avec les déclarations de leur chef durant la campagne électorale, qui déclarait, lors d'un débat pendant la campagne, qu'il voulait la réussite de ces villes. Foutaise et fausse représentation.

Il en est de même pour Québec, notre capitale nationale. Cette belle ville, chef-lieu du Québec, elle ne doit pas être morcelée. Quelle différence y a-t-il entre Québec, Sillery, Sainte-Foy, Beauport? Aucune, M. le Président. Les territoires de ces anciennes villes sont séparés par des bornes-fontaines. Le grand territoire de Québec forme un tout homogène. Il doit le rester pour le bon développement de cette nouvelle ville, pour son rayonnement au niveau national et international. L'Université Laval est connue à travers le monde comme l'université de la ville de Québec, non pas l'université de Sainte-Foy.

M. le Président, que nous annonce ce projet de loi n° 9? Passons-le un peu au peigne fin. Il prévoit d'abord que les citoyens pourront demander la tenue d'un scrutin référendaire en signant le registre ouvert à cet effet. Pour qu'un tel scrutin ait lieu dans un secteur, au moins 10 % des personnes habiles à voter de ce secteur devront en faire la demande. Imaginez-vous, M. le Président. Prenons comme exemple le territoire de l'ancienne municipalité d'Ivry, dans les Laurentides, dans la nouvelle ville de Sainte-Agathe. 10 %, ça représente 25 personnes qui pourraient demander d'enclencher le mécanisme pouvant mener au démantèlement de la nouvelle ville de Sainte-Agathe, qui fonctionne, il faut le dire, très bien depuis sa création, là où tous les espoirs sont permis pour un développement harmonieux et productif. Le départ d'Ivry entraînerait une série de démantèlements et de contre-productivités et remettrait en question certaines décisions importantes.

En regardant de près, M. le Président, les amendements, le cas d'Estérel est encore plus frappant. Une dizaine de personnes seulement pourraient amorcer le processus de défusion ? ce qui est ridicule ? et 35 % des électeurs inscrits sur la liste électorale de cette ancienne ville, c'est-à-dire quelques dizaines de personnes, pourront détruire la nouvelle ville de Sainte-Marguerite?Estérel, alors qu'on se souviendra très bien que le rapport O'Bready, en 1997, démontrait que c'était une erreur historique, la création de cette ville.

Le projet de loi édicte également les règles qui régissent la répartition, entre le gouvernement et les contribuables qui ont exigé la tenue d'un scrutin référendaire, des dépenses engendrées par le processus de consultation. M. le Président, l'argent des contribuables du Québec sera utilisé pour défusionner. Les villes et, en plus, les contribuables des anciennes villes paieront une deuxième fois pour préparer leurs dossiers avec leurs aviseurs légaux. Si le ridicule ne tue pas, on n'est pas loin.

Le projet de loi n° 9, M. le Président, prévoit la conclusion d'ententes intermunicipales. Dans le cas où, à la suite d'un scrutin référendaire, une ancienne municipalité est reconstituée, ces ententes doivent être conclues entre la municipalité reconstituée et la ville d'agglomération dont le territoire est diminué à la suite de cette reconstitution. Elle concerne notamment l'exercice de compétence dans les domaines qui ne sont pas de nature purement locale, la détermination d'équipements, d'infrastructures et d'activités qui méritent un financement commun pour les deux municipalités et la participation d'une municipalité au financement des dépenses de l'autre en matière de logement social ou en ce qui concerne le centre local de développement. C'est un retour en arrière, M. le Président, hautement discutable. Une des nombreuses raisons apportées, pour soutenir les fusions, par de nombreux maires et mairesses était justement la disparition de ces ententes, de ces nombreuses ententes intermunicipales difficilement gérables, compliquées, à renégocier constamment, bien souvent dans des chicanes interminables à grands frais. Ces ententes étaient l'objet de discordes, de raisonnements de clocher. Eh bien, ce projet de loi n° 9, M. le Président, nous ramène ces monstres à plusieurs têtes.

M. le Président, ce projet de loi n° 9, et ses amendements, est une aberration. Il va contre toute logique et répond à des promesses partisanes pour satisfaire certains groupes de pression au détriment du bien commun, de la productivité, de la compétitivité. Plus encore, il favorise les biens nantis et surtout il ouvrira des querelles interminables. Il risque de favoriser une polarisation vicieuse entre anglophones et francophones de l'île de Montréal, ce qui aurait des effets désastreux pour notre métropole et son développement. On ouvre de plein fouet, M. le Président, un affrontement basé sur des considérations linguistiques pour satisfaire les partitionnistes du West Island.

M. le Président, la promesse du Parti libéral de permettre les défusions par le projet de loi n° 9 et ses amendements tient de moins en moins la route. Les libéraux essaient, pour faire plaisir à une minorité à qui ils ont fait des promesses électorales, de démanteler des villes qui sont en plein développement, en plein essor.

n(21 h 40)n

M. le Président, il est clair, comme je l'ai mentionné auparavant, que nos villes doivent être compétitives, surtout dans un contexte de mondialisation. Elles doivent se mesurer à d'autres grandes agglomérations en Amérique du Nord et même à l'échelle de la planète. Il est évident que la direction que prend le gouvernement du Parti libéral avec son projet de loi n° 9 et ses amendements aura pour effet de fragiliser nos villes, de les rendre vulnérables, de les affaiblir, des faire fuir les investisseurs et de créer malheureusement un climat de confrontation, de confusion, de querelles stériles et de stagnation en ce qui a trait au développement économique et social.

C'est curieux, M. le Président, de voir à quel point les libéraux n'ont pas de mémoire. Lors des fusions il y a quelques mois, ils ont crié à l'injustice. Ils ont parlé de manque de consultation, d'accroc à la démocratie. Mais rappelons qu'ils ont fusionné des villes et des villages allégrement depuis 40 ans. Beaucoup ont encore en mémoire aujourd'hui 16 législations de regroupement. Rappelons la ville de Mirabel. De tout temps, M. le Président, les regroupements par législation ont été la règle plutôt que l'exception. Le cas le plus célèbre est celui de la ville de Laval unie du regroupement de 14 municipalités dont sept, rappelons-le, s'opposaient avec vigueur au projet du ministre des Affaires municipales du temps. Le ministre libéral du temps avait alors dit, et je cite: «Ce n'est pas la popularité ou l'impopularité d'un projet de loi qui sert de critère au gouvernement dans la préparation de la législation, mais bien le bien commun.»

Le député libéral de Chapleau, actuel ministre délégué aux Affaires intergouvernementales, y allait d'une déclaration tout aussi juste le 29 mai dernier, et je cite: Gouverner le Québec, ce n'est pas nécessairement prendre la mesure qui soit la plus populaire, c'est prendre celle qui, selon nous, va dans le sens du bien commun et de l'intérêt de l'ensemble de la population, et parfois ça fait en sorte que nous prenons des mesures qui sont impopulaires. C'est ce qu'on a fait, M. le Président, lorsqu'on a fait les fusions.

M. le Président, le ministre des Affaires municipales laisse entendre qu'il avait un préjugé favorable face aux nouvelles villes. On l'a vu par son projet de loi n° 1. Il disait qu'il voulait que les dirigeants des nouvelles villes puissent apporter des aménagements, lesquels pourraient être des stimulants pouvant convaincre les défusionnistes à renoncer à prendre la ligne dure de la défusion sans compromis. On se rend compte que c'étaient, M. le Président, des voeux pieux. Alors que les élus municipaux aimeraient regarder vers l'avenir, la promesse de défusion des libéraux durant la campagne électorale force ces mêmes élus à se démener contre ce retour en arrière stérile, non productif et dangereux.

Le ministre, M. le Président, reste insensible face aux nombreuses demandes des élus municipaux demandant de travailler dans le sens de la consolidation de ces nouvelles villes en leur donnant du temps et les outils nécessaires pour qu'ils puissent faire la démonstration à leurs citoyens du bien-fondé de ces nouvelles agglomérations. Malheureusement, M. le Président, le ministre a mis la table pour les défusionnistes. Il fait fi des demandes de ceux et celles qui se sont prononcés dernièrement, plus de 200 grands Montréalais et Montréalaises provenant de différentes sphères d'activité et de différentes allégeances politiques. Ces gens se sont prononcés haut et fort pour la sauvegarde du nouveau Grand Montréal.

Le premier ministre démontre, depuis qu'il est en poste, que sa première priorité législative est son projet de loi sur les défusions, où il prévoit dépenser sans compter. Pendant qu'il annonce une mégaconsultation, études et multiples référendums pour permettre les défusions, on remet en question les contrats de ville, les ententes signées en 2000 avec les six villes-centres. Pourtant, ces sommes, M. le Président, viennent en aide aux municipalités pour qu'elles puissent offrir de meilleurs services à leurs citoyens. On aurait pu s'attendre, de la part de gens qui prétendent avoir un préjugé favorable, plus de soutien concret pour les nouvelles villes. Malheureusement, le gouvernement libéral préfère investir dans les défusions.

Depuis le création de la nouvelle ville de Montréal et le contrat de ville signé avec le gouvernement du Parti québécois, celle-ci reprenait du poil de la bête financièrement. En effet, elle a vu sa cote bonifiée par l'agence de cotation Moody's, ce qui lui aura permis d'économiser 250 millions pour les 40 prochaines années. Cette nouvelle devrait particulièrement impressionner le Parti libéral, champion toutes catégories de la décote financière. Cette nouvelle force financière de la ville de Montréal est un résultat concret des regroupements municipaux, qui sont aujourd'hui en péril depuis l'élection du gouvernement libéral.

Comment voulez-vous, M. le Président, être bon joueur en donnant toutes les chances aux nouvelles villes lorsqu'on apprenait, dans La Presse du 13 mai 2003, qu'un comité du West Island unifié, dont feraient partie certains députés libéraux, travaillait au démantèlement de la grande ville de Montréal? Malheureusement...

Une voix: ...

M. Cousineau: M. le Président, s'il vous plaît.

Le Vice-Président (M. Gendron): C'est inacceptable, M. le député. Vous savez que vous...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Gendron): Oui. M. le député, un instant. La première règle, là, c'est de prendre la parole du député. Alors, si c'est faux, vous vous lèverez sur une question de privilège à la fin. Mais sûrement pas en criant à travers la Chambre, parce que la première règle que j'ai à faire appliquer, moi, c'est que, une personne qui a la parole, on doit prendre la parole lorsqu'il dit quelque chose.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Gendron): Vous savez comment procéder? Vous procéderez conformément au règlement. Mais sûrement pas en criant à travers la Chambre. M. le député, poursuivez.

M. Cousineau: J'inviterais le député à aller lire La Presse du 13 mai 2003. Malheureusement, M. le Président, depuis l'élection du gouvernement libéral, plusieurs mouvements et groupes défusionnistes ont émergé un peu partout au Québec. Leur rage est attisée par les positions rétrogrades de ce nouveau gouvernement libéral. Les libéraux ont mis, je le répète, dans la balance, d'un côté, le bien commun, le développement économique, la compétitivité et, de l'autre côté, l'affrontement, les intérêts de la minorité, la stagnation économique, la polarisation linguistique. C'est ce dernier côté qui est privilégié par le projet de loi n° 9 et ses amendements.

M. le Président, nos nouvelles villes, Montréal, Québec, Gatineau, Sherbrooke, Saguenay, Lévis, ne peuvent plus se permettre de s'enliser dans des querelles régionales stériles, non productives. Il est primordial de les renforcer pour qu'elles soient capables de rivaliser contre les cités nord-américaines et canadiennes de la même taille. Montréal, cette belle ville francophone internationale, doit pouvoir être sur le même échiquier que Toronto, la favorite de l'establishment canadien, ainsi que Boston, Détroit, et j'en passe. Québec, cette magnifique capitale nationale, doit émerger de toute sa splendeur en tant que berceau de la culture française en Amérique. Ce n'est pas, M. le Président, en défusionnant ces villes, en les fragilisant, comme le prévoient le projet de loi n° 9 et ses amendements que nous présentent les libéraux, que nous allons leur permettre de prendre leur place. Ailleurs, les municipalités se sont renforcies ces dernières années. Nos villes se doivent donc d'être fortes.

M. le Président, certains éditorialistes sont très durs envers le nouveau gouvernement. Par exemple, on pouvait lire, le 6 novembre 2001, bien avant les élections: «Le Parti libéral du Québec a attaché un boulet au pied de la nouvelle ville, en particulier de la métropole. Jean Charest doit trouver le moyen de se dégager de cet engagement irréfléchi, pour le bien de Montréal.» Dans le Voir du 1er novembre 2001, on pouvait lire, M. le Président, et je cite: «Avec la promesse électorale la plus démagogique des dernières années, le chef libéral s'assure que la nouvelle ville de Gérald Tremblay déraille.» Un autre exemple dans La Presse du 1er mai 2003, et je cite: «La patate chaude de M. Fournier: la situation est particulièrement délicate à Montréal. La ville connaît une paix linguistique depuis de nombreuses années, mais cette paix reste fragile, et les défusions pourraient brasser l'eau qui dort. Il ne faut jamais perdre de vue que ce sont les ex-villes de banlieue riches et anglophones comme Westmount qui rêvent de recréer leur ancien fief.»

Alors, je passe les autres articles que j'avais dans les journaux, M. le Président. La plus belle citation, en fin de compte, elle venait de Jacques Brassard, et je cite: «Jean-Marc Fournier qui dit aux maires réunis en congrès à Gatineau: Aidez-moi à convaincre les défusionnistes de ne pas défusionner, c'est comme si un incendiaire se précipitait chez les pompiers en leur criant, avec une sincérité à vous arracher les larmes: Je vous en supplie, aidez-moi à éteindre le feu.» M. le Président, je voterai donc contre le projet de loi n° 9 et ses amendements.

Le Vice-Président (M. Gendron): Je vous remercie, M. le député de Bertrand, et je suis prêt à reconnaître un autre intervenant. M. le leader adjoint de l'opposition... du gouvernement, pardon, et ministre de l'Environnement, sur le débat?

Une voix: Oui.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, M. le ministre.

M. Thomas J. Mulcair

M. Mulcair: Sur le débat, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Gendron): Oui, ça va. Pas de problème.

n(21 h 50)n

M. Mulcair: ...parce que je pense que c'est un bon thème, et je crois que c'est une des choses qui distinguent le plus l'attitude des gens du Parti québécois, et celui qui vient de parler en particulier, et notre formation politique. Je dois dire tout de suite que l'ancien maire de Sainte-Lucie, dans les Laurentides, qui vient de parler est un gentilhomme, et je suis très, très, très surpris de certains propos qu'il vient de tenir. Et, parce que je suis quelqu'un qui aime les débats parlementaires, j'ai décidé, plutôt que de relever l'invitation que vous avez formulée à un de mes collègues tantôt qui disait que c'était faux, ce qu'il venait de dire, j'ai préféré intervenir justement en termes de débat parlementaire pour lui dire à quel point, venant d'un gentilhomme comme lui, je suis déçu de ses propos. Je suis déçu de l'entendre sombrer dans des attaques qui visent à créer des divisions au plan linguistique, alors qu'il n'en est rien dans ce débat.

Personne ne pourrait croire que les anciennes villes du Saguenay?Lac-Saint-Jean qui veulent retrouver leur identité, que des villes comme Boucherville, ou Saint-Bruno, ou Saint-Lambert, ou d'autres, c'est un dossier linguistique. Il n'en est rien. Mais ce sont des mots lourds de conséquences, chargés d'émotion et qui visent à aller chercher quelque chose de négatif, alors que ce débat qui a lieu en ce moment résulte du fait qu'on a étouffé le débat autour de la question des fusions forcées.

Je suis heureux de pouvoir maintenant participer à un débat ici qui vise à assurer que les citoyens vont avoir un mot à dire, chose qui a été niée par le Parti québécois lorsqu'ils étaient au pouvoir et lorsqu'ils ont imposé ces fusions forcées. Et on va avoir, grâce à mon collègue le député de Châteauguay et ministre des Affaires municipales, du Sport et du Loisir, on va avoir des études, on va avoir des analyses, on va avoir quelque chose d'objectif, on va pouvoir regarder la situation et se faire une idée.

Mais j'ai relevé à de nombreuses reprises... Et c'est ça que je regrette, venant de mon collègue le député de Bertrand, mon vis-à-vis. Je regrette qu'il ait choisi à plusieurs reprises non pas de parler de l'Ouest-de-l'Île ? non, non ? il a parlé du West Island, pour bien situer sa cible. Il a dit à plusieurs reprises: C'est le voeu d'une minorité. Or, M. le Président, vous savez comme moi que, s'il y a un référendum, ce n'est pas une minorité qui va gagner, d'autant plus que ce qui est exigé, c'est la majorité des votes, et on exige que, parmi les gens qui se sont exprimés, on mette au moins 35 %, ce qui est, en matière municipale, une très haute barre à rencontrer ? c'est rare d'avoir 50 % qui aillent s'exprimer ? ce qui veut dire que, en clair, à 50 % de participation, 70 % des votes vont avoir été pour la défusion. On est loin d'une minorité. Donc, quand il parle ? et il l'a répété ? ce sont des clichés qui n'ont plus leur place dans cette Chambre.

Il a parlé des riches et anglophones. Ce n'est pas sans nous rappeler les propos honteux de Jacques Parizeau, le 30 octobre 1995, quand il a blâmé l'argent et les votes ethniques. C'est ça qui est tellement regrettable dans les propos de mon collègue le député de Bertrand, qui, comme je le disais au départ, est un gentleman pour qui j'ai toujours eu le plus grand respect. Mais on va chercher le plus bas dénominateur commun. On fait appel à d'anciennes rancunes, des perceptions négatives de l'autre, lorsqu'on parle comme ça.

Il a utilisé cette image du West Island à plusieurs reprises, pour culminer avec une référence d'un soi-disant complot ourdi encore une fois par des députés, cette fois-ci, du West Island qui seraient en train de concocter la création d'une nouvelle ville anglophone dans l'ouest. C'est une pure invention. Et, lorsque cette réunion imaginaire était censée être en train d'avoir lieu, les députés en question étaient ici, en Chambre, M. le Président. Alors, c'est dommage, c'est dommage que, au lieu de s'élever au-dessus de ce discours regrettable qu'on vient d'entendre, le député de Bertrand ait décidé de faire appel à ces vieux réflexes là. Et ce n'est pas lui. Je ne le reconnais pas dans ce discours-là. C'est pour ça que j'ai choisi de ne pas intervenir sur une question portant sur un droit ou un privilège, ou de vous faire appel au règlement comme quoi on n'a pas le droit d'utiliser des propos blessants, ou de faire une querelle de règlement ce soir, M. le Président.

J'ai préféré intervenir dans le débat, et le débat porte sur le droit des citoyens d'être consultés sur ce qui les concerne, leur collectivité, l'endroit où ils vivent, là où ils contribuent en aidant, dans le sport, des jeunes, en étant des bénévoles, en faisant toutes sortes de choses, des communautés qui ont été construites et qui, le gouvernement du Parti québécois avait décidé, allaient disparaître.

Je me souviens, il y avait un exemple. Parfois, c'est juste un mot qui nous frappe plus qu'un autre. Je me souviens que l'ancienne ministre des Affaires municipales, qui a parlé un petit peu plus tôt ce soir, a dit: Ils garderont leurs lampadaires. Elle parlait de l'ancienne ville de Montréal-Ouest. J'étais là. Je me suis dit: De quoi elle cause, là? Ils garderont leurs lampadaires? Mais c'était ça. C'était rendu là, son image. C'était: Ah, ils doivent être inquiets parce qu'ils ont posé de jolis lampadaires, et tout ça enrobé d'un discours factice, gauche caviar, comme quoi, bon, bien, c'est ça, les gens refusent d'aider les plus démunis.

Il y a des moyens de faire une répartition. Ce genre de péréquation est tout à fait ce qui est prévu dans les propositions de mon collègue le ministre des Affaires municipales. Il y a moyen de veiller à ce qu'il y ait toujours une instance où les gens vont s'asseoir autour d'une table pour regarder ces questions régionales. Mais, M. le Président, pas vrai, pas vrai qu'en 2003 on va voir un collègue se lever à l'Assemblée nationale et évoquer les bonshommes sept heures d'il y a 50 ans, évoquer ses peurs, ses images d'une minorité riche et, comme il le dit, anglophone, qui veut lui enlever quelque chose. On n'est plus là, M. le Président, en 2003. Je refuse de le croire. Alors, je vais présumer qu'il y avait une erreur dans le texte, que, en pitonnant, il a trouvé des références historiques, et ce n'est pas ça qu'il a voulu dire ce soir. Parce que autant on peut ne pas être d'accord ? et c'est l'essence même d'un débat parlementaire ? on peut ne pas être d'accord sur le fond d'un dossier, je ne crois pas que ça avance à quoi que ce soit d'utiliser le genre de références, et l'image, et l'appel à l'insécurité, et la méfiance de l'autre qu'on vient d'entendre ce soir, et je tenais à me lever là-dessus, M. le Président. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Gendron): Je tiens à faire simplement une remarque. À coup sûr, c'est la façon de faire lorsqu'on a des opinions contraires: on prend parole puis on s'exprime sur le débat. Je reconnais maintenant, pour la poursuite du débat, M. le député de Vachon.

M. Camil Bouchard

M. Bouchard: M. le Président, d'entrée de jeu et en invoquant l'urgence de rétablir un climat de cohésion, un climat d'harmonie, un climat de concertation indispensable au développement économique et social du Québec, d'entrée de jeu, M. le Président, je demande instamment au gouvernement de retirer son projet de loi n° 9. Le gouvernement, enferré dans une logique électoraliste pour le moins douteuse, a manqué de très nombreuses occasions de se montrer responsable et de se montrer raisonnable dans ce dossier. Alors que nous sommes appelés à adopter le principe de cette loi, M. le Président, le gouvernement pourrait saisir cette nouvelle occasion pour expliquer à celles et à ceux à qui il a fait des promesses irresponsables pourquoi il renonce désormais à démanteler les nouvelles villes.

Voici, M. le Président, si mes collègues du gouvernement manquent d'arguments, quelques suggestions que je me permets respectueusement d'offrir aux membres du gouvernement désireux d'expliquer pourquoi, dans ce cas précis, il serait hautement souhaitable, je dirais éthiquement souhaitable, qu'il n'honore pas ses engagements. Laissez-moi d'abord prendre un exemple qui m'est un petit peu plus familier, celui de la nouvelle grande ville de Longueuil. Il se trouve, M. le Président, que je représente le comté de Vachon qui, pour l'essentiel, recouvre la quasi-totalité du territoire de l'ancienne ville de Saint-Hubert, désormais l'arrondissement de Saint-Hubert, mais amputé de son secteur de Laflèche, qui fait partie du comté de Laporte.

n(22 heures)n

Avant que ne soit créée nouvelle grande ville de Longueuil, on comptait huit villes sur le territoire. La plus petite, la ville de LeMoyne, comptait un peu plus de 5 000 habitants, et la plus grande, la ville de Longueuil, 133 000. Ensemble, les huit villes constituent désormais une grande ville dans une grande région, une grande ville de près de 400 000 habitants. La taille de la ville n'est pas, bien sûr...

M. St-André: M. le Président. Excusez-moi, excusez-moi. Question de règlement, M. le Président. J'aimerais qu'on vérifie le quorum, s'il vous plaît.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, on va vérifier le quorum. Un instant.

Alors, selon les vérifications, il y a présentement quorum.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Gendron): Bien, c'est ce qu'on m'indique. Un instant. C'est ce qu'on m'indique. Il y a présentement quorum.

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Gendron): Mais je reconnais qu'il y avait seulement 12 personnes présentes avant, et maintenant nous avons quorum. Alors, nous allons poursuivre.

M. Bouchard (Vachon): Alors, je disais, M. le Président, que la taille de la ville ? je parlais d'une ville de 400 000 habitants ? bien qu'elle ne soit pas le seul élément qu'il nous faille considérer, la taille de la ville représente un formidable atout lorsqu'il s'agit de positionner Longueuil dans les stratégies de développement nationales et dans les stratégies de développement internationales. Avec sa nouvelle taille augmente aussi... Avec sa nouvelle taille augmente aussi le poids politique de Longueuil auprès du gouvernement lorsqu'il s'agit d'influencer les décisions en matière d'infrastructures, par exemple d'infrastructures de transport, de culture, de santé, etc.

Mais, derrière le nombre, M. le Président, se cachent les ressources humaines, le capital humain, un capital humain plus diversifié, plus riche, plus versatile sur lequel peuvent compter les organisations ou encore les corporations qui sont à la recherche de talents, qui sont à la recherche de compétences et d'expertises de toutes sortes. Rassemblées sous une même gouverne et sous une même bannière, ces ressources peuvent plus facilement être identifiées, plus facilement répertoriées, plus facilement harmonisées, tout le monde comprendra ça. Et c'est ce à quoi s'emploie avec énergie et avec conviction Mme Suzanne Benoît, qui est la présidente-directrice générale de Développement Longueuil et dont la mission, Développement Longueuil... Développement économique Longueuil, est de faire la promotion de Longueuil auprès des gens d'affaires de la communauté internationale et de la communauté nationale.

Avec son bassin de population diversifié, avec son territoire agrandi, il est bien sûr que la présidente-directrice générale peut faire état de la très grande gamme d'expertises présentes sur le territoire, que ce soit en agroalimentaire, que ce soit en aéronautique, que ce soit en développement des connaissances universitaires ? vous savez qu'il y a un pôle universitaire extrêmement important qui s'est développé dans la ville de Longueuil depuis quelques années ? que ce soit dans le domaine de la culture, M. le Président. Démantelez la nouvelle ville, et vous enlevez un argument extrêmement important dans la stratégie de développement de Longueuil au niveau de la compétition internationale.

Le premier argument que je propose donc au gouvernement pour expliquer sa volte-face et le retrait de la loi n° 9 concerne bien sûr la taille de la ville, bien sûr son poids démographique, mais, plus encore que cela, surtout la richesse et la diversité du capital humain, la richesse et la diversité de la nouvelle ville au niveau des compétences, au niveau des talents, au niveau de sa capacité de donner un élan de développement et de prospérité à la nouvelle ville.

Mais il y a un deuxième argument tout aussi ? sinon plus ? convaincant, M. le Président, il s'agit de celui de la cohésion, de la capacité de toutes ces ressources, de tous ces talents à développer ensemble une vision commune à travailler ensemble.

M. le Président, pour arriver à développer l'économie d'une région, il faut, en plus du capital humain, en plus du capital financier, un autre capital sans lequel l'impulsion nécessaire à la prospérité économique n'est pas présente; il s'agit du capital social.

L'OCDE, les membres de l'OCDE, la Banque mondiale, le Fonds monétaire international sont parmi les organisations, au niveau international, qui ont reconnu depuis longtemps le rôle que peuvent jouer dans une communauté des relations qui sont ouvertes, des relations confiantes, des réseaux de soutien et des réseaux de complicité, aussi bien dans le développement social que dans le développement économique.

Et je fais référence ici, M. le Président, à des ouvrages extrêmement importants de deux grands universitaires américains, l'un du nom de Francis Fukuyama, qui a publié un bouquin absolument intéressant, fascinant, qui porte le titre de Trust, la confiance, et dans lequel l'auteur fait la démonstration que ce sont les pays, les communautés, les sociétés où les gens ont réussi à tisser des liens de confiance menés par un leadership convaincu et convaincant, que ce sont dans ces communautés où l'économie s'est le mieux développée. Et, pour les personnes qui seraient intéressées, Francis Fukuyama fait le tour d'un certain nombre de pays que l'on connaît bien: les États-Unis, la France, l'Italie, l'Allemagne, etc.

Quant à Robert Putnam, M. le Président, il a, à travers des études extrêmement intéressantes que j'ai eu l'occasion de citer dans une commission, celle des affaires sociales, des travaux extrêmement intéressants où il fait la démonstration que, là où il y a des relations de confiance entre les individus, que, là où les interactions se manifestent dans un environnement de qualité de relations, dans ces environnements, M. le Président, l'économie s'en porte beaucoup mieux, la prospérité s'installe et se maintient pour de très nombreuses années.

Et il y a un moyen, M. le Président, de renforcer le capital social. Il y a des structures qui sont favorables au renforcement du capital social, et ce sont les structures qui mettent en présence, dans un contrat formel d'équité et de régulation des interactions... qui mettent en présence des partenaires dans un climat de confiance et dans un climat de collaboration.

M. le Président, le comté de Vachon que je représente à l'Assemblée nationale comprend dans ses limites l'aéroport de Saint-Hubert. La zone aéroportuaire de Saint-Hubert présente un potentiel de développement tout à fait exceptionnel pour l'ensemble de la région montérégienne, M. le Président. Peu de régions au Québec disposent d'une telle infrastructure. C'est un lieu stratégique de développement économique à plus d'un titre: cette zone profite déjà, de fait, d'un accès direct aux grandes infrastructures routières; elle est située à peine à 10 km du centre-ville de Montréal; elle s'ouvre sur les grands axes de communication avec le nord-est américain; sa zone totale de développement comprend 80 millions de pieds carrés dont 15 millions sont consacrés au développement industriel et auxquels s'ajoute un autre 5 millions de pieds carrés en redéploiement résidentiel.

Comment se fait-il, M. le Président, que cette zone ne soit pas déjà en développement accéléré? Comment se fait-il que l'on en parle toujours, après tant d'années, comme une zone à potentiel élevé de développement? Comment se fait-il que l'on en parle encore comme une promesse de développement plutôt que comme une réalité en expansion?

M. Jacques Goyette, président de Développement aéroport Saint-Hubert de Longueuil, mieux connu sous l'acronyme DASH-Longueuil, répondait à cette question lors de son allocution devant les membres de la Chambre de commerce et d'industrie de la Rive-Sud, le 29 octobre dernier. Permettez-moi de le citer ? j'ouvre les guillemets:

n(22 h 10)n

«C'est parce qu'il faut garder en mémoire, disait-il, qu'avant le regroupement de 2002 la Rive-Sud de Montréal constituait une trame urbaine continue, mais morcelée au niveau de la gouvernance politique. Ce morcellement a engendré des effets nocifs sur le plan de l'aménagement et du développement, comme nous le mentionnons dans le mémoire que nous avons déposé récemment à l'Assemblée nationale, disait-il.

«Le territoire de l'actuelle ville de Longueuil était divisé en huit villes et trois municipalités[...]. De ce fait, trois schémas d'aménagement différents encadraient huit plans d'urbanisme distincts. Huit parcs industriels se faisaient concurrence pour attirer les mêmes entreprises. Et la multitude des intervenants au développement économique, qui défendaient les intérêts des différentes villes, constituait une entrave au développement d'une vision d'ensemble cohérente.

«Pour la zone aéroportuaire et ses accès, c'était catastrophique, disait M. Goyette. Quatre villes [...] trois MRC concernées directement, chacune ayant une vision et des intérêts différents.»

Alors, disait-il: «Même si Transports Canada était dans un processus de vente d'actifs depuis plusieurs années ? de la zone aéroportuaire ? le milieu n'avait jamais pu développer un véritable partenariat pour mettre en valeur[...] ? cette ? zone aéroportuaire.» Je ferme les guillemets.

De fait, ce dont nous parle M. Goyette, c'est l'absence d'un capital social fort, c'est l'absence de réseaux de connivence, c'est l'absence de la présence d'intérêts... c'est la présence d'intérêts divergents, sinon conflictuels, c'est la présence de la méfiance entre agglomérations désireuses de partir avec les gains d'un tel développement chacun de son côté, c'est l'absence d'une vision commune, c'est l'absence d'un désir de partager à la fois la réussite, mais aussi ? mais aussi ? partager les risques et partager les échecs.

À terme, à très court terme, M. le Président, la nouvelle grande ville de Longueuil, de par un leadership unifié, de par les institutions comme DEL, ou Développement économique Longueuil, et DASH-L, est en mesure de se donner... la nouvelle ville de Longueuil peut arriver... est en mesure de se donner une telle confiance en elle-même et de tisser entre les communautés des relations de confiance et une vision commune. Une ville fragmentée départie de sa capacité rassembleuse ne peut y arriver. Une ville fragmentée ne peut y arriver.

La loi 9, M. le Président, en plus de retarder indûment le développement de Longueuil et de sa zone aéroportuaire, vient au contraire semer la bisbille, la discorde et vient entraver de ce fait la création de la richesse nécessaire à la qualité de vie de tous les citoyens de la région montérégienne et de la région montréalaise. Ce projet de loi n° 9, M. le Président, est néfaste pour la région montréalaise et, par ricochet, est néfaste pour le développement du Québec.

Et, s'il fallait un dernier argument, M. le Président, en voici un troisième que je veux offrir aux membres du gouvernement s'ils veulent faire demi-tour et retirer ce projet qu'Alain Dubuc, qui n'est pas un très grand ami, en passant, du Parti québécois, qualifie de «bête et nuisible et qui peut même devenir un frein à la démocratie». Cet argument est celui de l'équité. Je propose cet argument, M. le Président, même si je sais bien que l'équité ce n'est pas tellement ce qui étouffe le gouvernement conservateur de Jean Charest. Pourtant, il faut bien le dire, l'argument de l'équité...

Le Vice-Président (M. Sirros): Je vous vois venir, M. le leader adjoint.

M. Mulcair: Oui. Je sais que c'est un nouveau député, mais il aurait dû déjà apprendre qu'on n'a pas le droit de citer quelqu'un autrement que par le nom de son comté ou le titre qu'il porte, et, en l'occurrence, c'est le premier ministre.

Le Vice-Président (M. Sirros): Le point est fait, je pense. C'est un rappel qui vaut pour tout le monde. M. le député, continuez, s'il vous plaît.

M. Bouchard (Vachon): Alors, si vous permettez, M. le Président, je propose que cet argument de l'équité, même si je sais pertinemment que ce n'est pas ce qui étouffe le gouvernement conservateur du premier ministre...

Pourtant, pourtant, il faut bien le dire, l'argument de l'équité est celui qui, s'il est bien compris, risque de convaincre le plus et le mieux les défusionnistes qui ont tout à gagner, malgré les apparences, d'un partage équitable des richesses. Pensons-y un seul instant. Comment les communautés les plus riches de la ville de Longueuil pourront-elles partager les revenus de la zone aéroportuaire, par exemple, si, au point de départ, elles ne partagent pas une mise de fond proportionnelle à leurs richesses et aux gains anticipés du développement de cette zone? Comment les partenaires des autres municipalités peuvent-ils faire confiance à des communautés qui refusent au point de départ de partager la richesse? Est-il nécessaire, M. le Président, de rappeler, à titre d'exemple, que, si Saint-Bruno peut retirer des dividendes fonciers importants des Promenades de Saint-Bruno, c'est parce que les consommateurs qui fréquentent ce centre d'achats viennent en très grande majorité des communautés adjacentes de Carignan, de Saint-Hubert, de Greenfield Park, de Longueuil.

Sans l'équité, la confiance ne peut s'installer, M. le Président. Et injustice et confiance ne font pas bon ménage, c'est bien connu. En soi, l'équité est une vertu, mais c'est aussi un instrument de développement. Et il y a tout à parier que, dans le développement de la zone aéroportuaire de Saint-Hubert, les premiers gagnants soient les résidentes et les résidents des communautés les plus riches. En effet, viendront s'y établir les chercheurs en nanotechnologie, les artisans du cinéma, les professeurs des pôles universitaires, les spécialistes de la gestion du transport et de l'exportation.

L'équité sert tout le monde, M. le Président, même celles et ceux qui pensent en payer le prix, alors que, dans les faits, ils en retireront d'énormes avantages, dont celui de vivre dans une communauté, une région harmonieuse et prospère.

M. le Président, ma collègue de la circonscription d'Hochelaga-Maisonneuve rappelait tout à l'heure la grande tradition libérale en matière de fusion. Le Parti libéral a fusionné des dizaines de villes. En 1961, 1962, 1965, 1971, 1974, 1975: plus de 113 villes et municipalités fusionnées sans consultation par le Parti libéral. Serait-ce que le Parti libéral, obnubilé par l'attrait du pouvoir, s'est fait charrier par leur premier ministre conservateur, M. le Président, et qu'il renonce à ses valeurs fondamentales d'équité, et d'efficacité économique, et sociales?

M. le Président, un dernier mot. Pour sauver la face, pour sauver la face, ce gouvernement est prêt à se donner, en fait, un visage à deux faces, celui des défusions et celui des réussites des grandes villes. J'ai bien peur, M. le Président, qu'il perde sur les deux faces. Merci.

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, merci, M. le député. Je suis prêt à reconnaître le...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): S'il vous plaît! Alors, je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant qui serait le député de Joliette. M. le député.

M. Jonathan Valois

M. Valois: Merci, M. le Président. J'interviens aujourd'hui sur le projet de loi n° 9, M. le Président. Alors, comme des dizaines de mes collègues, je vais utiliser le temps qui m'est alloué, le temps qui m'est disponible pour apporter une série d'arguments contre ce projet de loi. Alors, mais avant, toutefois, j'aimerais bien que soit bien compris le sens de mon intervention. Mon intervention sera fondée sur la vision du Québec que notre parti politique prône, sur les valeurs qui animent ma formation politique ainsi que sur l'ambition que nous avons pour le Québec.

Pour ce qui est des valeurs de notre parti, il faut comprendre aussi que mon parti politique, le Parti québécois, n'est ni plus ni moins que la combinaison de gens ayant à coeur l'identité québécoise, la justice sociale, que certaines personnes appellent aussi le progrès social, et la démocratie. D'ailleurs, à la question: Comment voulons-nous vivre ensemble? Notre réponse est claire. Nous voulons vivre démocratiquement libres, en français et solidaires.

Vous comprenez, M. le Président, que la souveraineté du Québec n'est, en fait, qu'une solution globale à nos aspirations qui, elles, sont multiples. Alors, c'est comme souverainiste que je vais intervenir sur le projet de loi n° 9, et cette intervention doit être comprise à l'intérieur de toute sa perspective. Alors, comme souverainiste, vous comprendrez, M. le Président, que je ne viens pas traiter de Montréal comme d'une grande ville de province, mais bien comme la métropole de tout un peuple. Parce que c'est bien ça qui nous différencie, nous, les souverainistes, des provinciaux qui nous gouvernent en ce moment. Alors, les provinciaux qui nous gouvernent ne semblent pas saisir que Montréal est notre antenne internationale, ne semblent pas saisir que Montréal est notre ouverture sur le monde comme peuple et que Montréal est l'image que nous envoyons de nous-mêmes sur le reste de la planète.

n(22 h 20)n

Lorsque nous parlons des Français, c'est bien souvent avec l'image que nous avons de Paris. Lorsque nous parlons des Britanniques, c'est bien souvent, encore une fois, basé sur l'image que nous avons de ceux et celles qui habitent Londres. Il en va de même aussi, M. le Président, pour New York avec les États-Unis. En ce sens, ces grandes villes nous envoient une image du pays qu'elles représentent. Alors, nous jugeons aussi bien souvent les pays par les villes qui en sont les antennes, comment voulons-nous être jugés nous-mêmes?

Alors, réfléchir sur Montréal, c'est ni plus ni moins que d'oser proposer un «vivre ensemble» local qui sera notre signature mondiale. La façon de vivre ensemble dans la localité montréalaise sera ni plus ni moins que cette façon dont nous voulons être vus et jugés par le reste des gens habitant sur notre planète.

Vous me permettrez à ce moment-ci, M. le Président, de prendre quelques citations et quelques réflexions d'une des personnes qui réfléchissent énormément sur la mondialisation à l'heure actuelle et qui réfléchissent aussi énormément sur le «vivre ensemble», il s'agit de Riccardo Petrella.

Alors, ce «vivre ensemble», c'est simplement l'accès au droit de participer pour tout le monde, c'est accepter notre responsabilité collective. Le «vivre ensemble» signifie établir des liens. La solidarité ne signifie pas générosité ni même amour; la solidarité, c'est la responsabilité par les liens, par ceux que nous faisons avec les autres. On fait quelque chose et on est tous responsables collectivement de ce que nous faisons.

La question que nous devons nous poser, M. le Président, c'est: est-ce que nos villes sont importantes dans cette réflexion? La perspective locale, tant qu'à moi, signifie se construire et vivre ensemble au niveau local, assumer la responsabilité collective et établir des liens. Au fond, M. le Président, penser les grandes villes, penser notre organisation municipale, c'est aussi travailler sur soi-même comme peuple, soi-même comme collectivité. Alors, être innovateur au niveau local par rapport à la reconstruction du «vivre ensemble», réaffirmer ou inventer la responsabilité politique et imaginer concrètement dans le vécu quotidien, voilà les liens qui nous permettent de faire avancer les choses.

Le premier grand champ de l'innovation n'est-il pas l'identification des biens communs que nous avons ou que nous voulons au niveau de nos villes? Il est bien là, l'ensemble de la réflexion, M. le Président. L'ensemble de la réflexion que nous avons sur l'organisation de nos villes, c'est une réflexion que nous avons d'abord et avant tout sur le bien commun. Ce n'est pas une réflexion que nous avons strictement pour les gens qui habitent Montréal, ce n'est pas une réflexion que nous avons strictement pour les gens qui habitent les banlieues sur l'île ou les banlieues à l'extérieur de l'île de Montréal, mais c'est une réflexion que nous avons pour le bien commun pour l'ensemble du «vivre ensemble», pour l'ensemble des Québécoises et Québécois habitant ici.

Alors, dans une ville sans bien commun, que faisons-nous, M. le Président? Si nous avons une ville qui n'est pas soutenue par cette idée du bien commun, comment s'organise cette ville? Bien, à l'intérieur de cette ville, M. le Président, on ne fait que marchander et on ne fait que privatiser. La ville devient simplement un lieu d'organisation, d'échanges à partir de propriétés privées face à des éléments... essentiellement des éléments commerciaux.

Alors, une réflexion s'impose, M. le Président. Nous devons, à l'intérieur de notre réflexion sur les grandes villes, nous devons. à l'intérieur de notre réflexion sur l'organisation municipale, avoir aussi une réflexion sur notre «vivre ensemble», avoir une réflexion sur notre bien commun, sur le bien commun de l'ensemble de la société.

Alors, cette réflexion qui s'impose, c'est: de quelle manière voulons-nous organiser Montréal pour que cette dernière puisse répondre à notre volonté de vivre ensemble? Et, à cette image, ces valeurs que nous voulons projeter sur le monde entier, les gens auront l'idée du Québec par sa métropole, je vous l'ai déjà dit, M. le Président. Les gens jugeront notre «vivre ensemble» de la façon dont il ? le «vivre ensemble» ? s'organise à Montréal.

Alors, lorsque nous entendons parler de recul démocratique, et nous en entendons parler beaucoup, M. le Président, de recul démocratique par rapport à ce qui nous est suggéré... Je prends exemple, ici, de quelques extraits, notamment, un texte de La Presse, de Michèle Ouimet où on peut lire: «Ce sont les maires des villes défusionnées et celui de la ville centrale ? du moins ce qu'il en restera ? qui siégeront sur ce conseil au pouvoir imposant. Il n'y aura pas d'opposition ? il n'y aura pas d'opposition, M. le Président ? que des maires élus par leur population locale. Pourtant l'opposition est un ingrédient essentiel des démocraties. Le ministre[...] ? responsable des Affaires municipales ? a balayé cette objection du revers de la main comme si l'opposition était une vulgaire mouche du coche.

«Qui va talonner les maires, leur demander des comptes, poser des questions, contester leurs décisions? Personne. Le conseil d'agglomération va fonctionner comme un gros conseil d'administration. C'est un recul démocratique inacceptable.»

Alors, ce qu'il faut comprendre, M. le Président, c'est qu'avec ce projet de loi là on a un recul démocratique qui est important. Et, lorsque nous comprenons que ce que nous faisons avec la ville de Montréal, nous le faisons avec notre antenne internationale, il est important que notre ville soit aussi le reflet d'une population qui a à coeur sa démocratie. Ce n'est pas le message que nous envoyons avec le projet de loi n° 9 et avec l'organisation municipale telle que pensée dans le projet de loi n° 9.

Alors, lorsque nous nous questionnons aussi réellement sur les volontés des anciennes villes plus fortunées par rapport à la répartition de la richesse sur l'île de Montréal, on a d'autres questions à se poser de ce côté-là et d'autres compréhensions à y avoir. D'ailleurs, M. le Président, pour appuyer mes propos par rapport aux villes plus fortunées, je reprendrai quelques arguments qui, non pas pour l'essentiel, mais plusieurs ont été apportés par mon collègue, le député de Vachon.

Je vous rappellerai, pour être certain qu'on comprenne très bien, là, qu'il y a des observateurs aussi, M. le Président, qui y ont réfléchi aussi, je vous rappellerai quelques commentaires de Bernard Descôteaux, cette fois-ci, dans Le Devoir:

«La plus grande faille du projet de loi n° 9 vient toutefois du fait qu'on ne met pas en place une véritable fiscalité d'agglomération, comme l'a évoqué à quelques reprises le premier ministre [...] ces derniers mois. Certes, Westmount et Outremont, s'ils se retirent de la nouvelle ville, contribueront au financement des services d'agglomération sur la base de leur richesse foncière, comme ils le faisaient à l'époque de la Communauté urbaine. Sans plus, car ils n'auront plus à payer pour soutenir les arrondissements moins riches comme Montréal-Nord ou Hochelaga-Maisonneuve.

«Tel qu'il est, le projet de loi n° 9 incitera tous les arrondissements riches à se retirer de la nouvelle ville. Et plus il y en aura qui quitteront la nouvelle ville, plus la charge financière de ceux qui resteront augmentera et plus nombreux ils seront alors à vouloir partir[...].

«À force de vouloir ne pas trop déplaire ni aux uns ni aux autres[...] ? le ministre ? a élaboré, bricolé, pourrions-nous dire à certains égards, un ensemble qui n'est pas cohérent. Il en ressort un parti pris envers les nouvelles villes qui n'est pas clairement exprimé.»

Alors, même au niveau de l'équité, M. le Président, nous avons des failles par rapport à ce Montréal que nous voulons bâtir. Alors, deux messages assez difficiles et durs que la société québécoise va envoyer par le biais de son antenne internationale qu'est la ville de Montréal: une première idée où la démocratie est quelque chose que nous mettons de côté et que nous considérons après les grandes réalités économiques et aussi une image que nous envoyons, M. le Président, sur l'équité qui, pour nous, est somme toute secondaire.

Alors, M. le Président, lorsque nous parlons de recul démocratique, lorsque nous questionnons réellement la volonté ou les volontés des anciennes villes riches par rapport à la répartition de la richesse sur l'île de Montréal, nous comprenons que le débat n'est pas simplement une réflexion sur l'organisation de structures municipales, mais bien sur la structuration de nos valeurs à la base de notre projet de vie commune.

Je pourrais partager encore une fois certaines réflexions avec l'auteur que je vous ai cité tantôt, c'est-à-dire M. Petrella, qui, lui, encore une fois, revient et se questionne énormément sur les façons dont les sociétés ont à s'organiser et de la façon dont présentement la mondialisation... et la façon dont les sociétés plus industrialisées s'organisent par rapport à cette même mondialisation.

Écoutez bien, M. le Président, M. Petrella affirme que «le village global n'existe pas. La vérité est que l'on a assisté, sous le vocable de mondialisation, à l'instauration d'une oligarchie mondiale dont on commence à entrevoir le mode de fonctionnement.» Ceux que M. Petrella appelle «les gens de Davos» ont construit ces trente dernières années une sorte d'archipel capitaliste mondial, formé d'îles où sont concentrées près de 90 % des capacités scientifiques, technologiques, informatiques de la planète, autour d'une trentaine de villes qui représentent à la fois l'infrastructure, le cerveau et le cours de cet archipel.

n(22 h 30)n

De New York à Singapour, de Los Angeles à Shanghai, de Chicago à Stuttgart, de Londres à Sao Paulo et même de Paris à Montréal, on y trouve localisés les principaux centres d'affaires, les noyaux des réseaux de communication et d'information, les sièges sociaux des grandes multinationales industrielles, financières et commerciales. En ce sens, la libéralisation, la déréglementation, la privatisation, la compétitivité ont davantage resserré les liens entre ces villes que les liens entre elles et le reste du monde. Les 30 grandes villes se parlent entre elles comme des îles au milieu d'un grand océan de personnes qui, pour plus de 2 milliards, ne gagnent même pas, M. le Président, quelque chose comme 2 $ par jour. Alors, c'est de cette mondialisation que nous... à laquelle nous assistons. Alors, pour ces autres sociétés, la seule façon de s'en sortir, pour ces autres sociétés, c'est de s'ancrer à ces grandes villes qui, elles, fonctionnent très bien, pour ne plus être cantonnées dans des périphéries, ou voire même pire, M. le Président, mises hors de tout futur possible.

Alors, je comprends qu'à ce moment-ci mes réflexions semblent certainement hautement abstraites et philosophiques, mais qu'en est-il par rapport à notre ville, celle de Montréal? Devons-nous nous réjouir d'être une de ces villes en contact avec les autres plus qu'avec le reste du monde? Devons-nous simplement nous contenter de vivre joyeusement du bon bord de l'Amérique ou pouvons-nous profiter de ce réseau pour y envoyer nos valeurs communes de solidarité, de diversité culturelle et de démocratie? Voulons-nous contribuer à faire apparaître nos sensibilités sociales à l'égard du logement digne des être humains, du droit au travail et à un revenu digne d'un citoyen, du droit des enfants, droit de grève et liberté syndicale, du droit à l'éducation et la sécurité minimale en cas de maladie, de la démocratie, de la vie en commun, du respect et de la reconnaissance des droits des immigrants, des réfugiés? Ce vivre ensemble, que nous partageons, voulons-nous utiliser notre antenne internationale qui est Montréal pour le propager à travers les autres 30 grosses villes qui sont aujourd'hui cet archipel du monde capitaliste moderne, ou tout simplement se donner une ville, la ville de Montréal, pour que nous puissions, comme les autres, jouer le jeu de la mondialisation, une mondialisation qui n'a rien de social jusqu'à maintenant?

Alors, la question, lorsque nous questionnons sur notre façon de construire notre ville, M. le Président, basée sur les valeurs, basée sur le vivre ensemble que nous voulons déployer, c'est beaucoup plus que simplement de l'organisation municipale. Voilà un projet ambitieux pour le Québec, mais par le biais de Montréal fort et uni. Mais le Montréal morcelé, où les villes riches se séparent des villes pauvres et se désolidarisent du bien commun, un Montréal morcelé, où les villes riches et pauvres ne contribuent plus ensemble à la construction d'un vivre ensemble et où la justice sociale et la responsabilisation collective n'est plus la base de son développement, devient un réel problème, M. le Président.

Si la ville de ville Mont-Royal renaît et que le mur de la honte perdure... Parce que vous savez, M. le Président, que Mont-Royal est une ville emmurée. Vous savez aussi qu'à l'Halloween, la ville se ferme, empêchant ainsi aux enfants des quartiers Côte-des-Neiges et au quartier Parc-Extension de venir y sillonner ses rues. À ville Mont-Royal, le soir de l'Halloween, M. le Président, les monstres ne sont pas simplement dans les rues. Donc, si la ville de Mont-Royal renaît et que le mur de la honte perdure, nous ne pourrons que conclure qu'à l'intérieur même de notre Québec, à l'intérieur même de l'île de Montréal, vivent des archipels capitalistes locaux formés d'îles où seront concentrées les capacités scientifiques, technologiques, informatiques de notre pays du Québec.

Je ne crois pas que cette façon de voir et de développer notre métropole doivent se faire imposer par quelques milliers de défusionnistes. C'est l'avenir de Montréal qui est aujourd'hui entre les mains de ces quelques personnes. Plus encore, il s'agit ici de faire des choix qui auront une importance majeure sur le sens que nous voulons faire nos relations internationales. Le bien commun, parce qu'il s'agit bien du bien commun, et ceux qui parlent au nom du bien commun doivent primer. Et qui est le premier intervenant pour développer justement ici et faire en sorte que le bien commun s'impose, si ce n'est que le gouvernement du Québec, M. le Président?

Le gouvernement en place ne prend pas ses responsabilités par rapport au bien commun. Le gouvernement en place, en traitant la ville de Montréal de la sorte, fait passer la construction d'un vivre ensemble collectif après ses engagements auprès des électeurs défusionnistes, concède le rôle de métropole à Toronto, banalise l'importance du Québec d'avoir une antenne internationale et ne prend aucunement ses responsabilités internationales face à une mondialisation de plus en plus inéquitable. Nous avons des provinciaux aux commandes des destinées d'un peuple. Espérons que les dommages que s'apprête à faire le Parti libéral du Québec ne soient pas permanents. Merci.

Le Vice-Président (M. Sirros): Merci, M. le député. Je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant, M. le député des Îles-de-la-Madeleine. M. le député.

M. Maxime Arseneau

M. Arseneau: Merci beaucoup, M. le Président. M. le Président, je suis très heureux à mon tour de pouvoir intervenir sur le projet de loi n° 9, en particulier après l'intervention de mon collègue le député de Joliette qui a parlé abondamment de la situation et des effets de ce projet de loi sur Montréal et sur les environs de la région métropolitaine. Ce projet de loi n° 9, M. le Président, c'est un projet de loi pour lequel il n'y a vraiment qu'une solution, c'est son retrait, et je vais vous donner un point de vue qui n'est pas le point de vue d'un grand centre métropolitain comme Montréal, mais qui est un point de vue d'une région.

C'est un projet de loi, M. le Président, qui risque d'entraîner des conséquences énormes pour les régions du Québec. C'est bien certain que nous entendons surtout parler des grands centres urbains, que nous entendons parler beaucoup de Montréal et avec toutes les complications et toutes les conséquences que ça a dans la région métropolitaine, mais il faut réaliser, M. le Président, que toutes les régions du Québec seront confrontées aux inconvénients, verront même leur développement paralysé par toutes les disputes, tiraillements, chicanes, des chicanes improductives qui ne manqueront pas de naître avec l'adoption de ce projet de loi.

M. le Président, je veux, en vous parlant ce soir de l'expérience madelinienne, je veux mettre à jour ce qui, selon moi, en toute humilité, représente des erreurs de fond qui ont conduit les libéraux du Québec et, par leur faute, toutes les régions du Québec dans un bourbier incroyable qui risque de nuire grandement au développement, au progrès, à l'harmonie des villes du Québec, alors que cette question était réglée, M. le Président, alors que, dans bien des cas, cette question des regroupements municipaux au Québec était une question réglée pour la très grande majorité de la population. Et je vous le dis, M. le Président, c'était très certainement le cas aux Îles-de-la-Madeleine et en Gaspésie. Pourtant, les Îles-de-la-Madeleine, quand on prend cet archipel dans son ensemble, elles représentent un microcosme de la société québécoise avec, et malgré, je dirais, leur faible population, autour de 14 000, avec leur communauté anglophone bien forte, bien présente, souhaitant conserver leurs valeurs, leurs coutumes, mais aussi désireuse de travailler de façon inclusive au développement de la communauté des Îles-de-la-Madeleine.

Donc, M. le Président, la première erreur de fond des libéraux du Québec était de penser qu'il n'y avait pas eu de consultation. Aux Îles, M. le Président, il faut comprendre que, pour 14 000 de population sur un territoire d'une superficie de 204 km², nous retrouvions huit municipalités, huit municipalités pour 14 000 de population. Imaginons, lorsque, par exemple, venait le temps de s'entendre pour prioriser des dossiers, de s'entendre sur les façons de voir et de planifier le développement... sur la question: où devait-on construire tel édifice? où pouvait-on voir telle entreprise s'installer? combien de temps, combien de discussions stériles entre les huit municipalités de cet archipel.

n(22 h 40)n

Nous avions, M. le Président, quatre arénas alors que seulement deux avaient pu se payer la glace artificielle parce que nous avions huit municipalités, parce que chaque municipalité voulait avoir ses propres équipements, parce que aucune des municipalités voulait, raisonnablement, voir disparaître un équipement ou un bien. Par exemple, M. le Président, sur l'île centrale, il y avait trois municipalités avec un réseau commun d'aqueduc, mais trois municipalités. Et, lorsque, dans une municipalité, l'eau, pour toutes sortes de raisons qui se produisent quelquefois... on devait faire bouillir l'eau, il arrivait souvent que c'était deux jours après dans l'autre municipalité. Insensé, incroyable. Puis, lorsque venait le temps des congrès, des regroupements municipaux, ce n'étaient pas un ou deux représentants d'une municipalité qui partaient, mais un ou deux représentants de chaque municipalité. C'étaient donc 12, 14 personnes qui partaient. Imaginez les coûts, M. le Président. Ils partaient pour Québec, pour Montréal, mais imaginez les coûts, M. le Président.

Ce n'est pas donc pas d'aujourd'hui, M. le Président, qu'il était donc question de regroupement de ces municipalités sur le territoire des Îles-de-la-Madeleine. Voici quelques épisodes qui ont servi à éclairer les choix des Madelinots. En 1995, cinq des huit municipalités des Îles se disent favorables à un regroupement municipal et demandent à Québec d'agir. Pourquoi elles demandent à Québec d'agir? Parce que c'est Québec, et c'est son ministre des Affaires municipales, et c'est le gouvernement qui, ultimement, a le pouvoir d'agir. Les municipalités participeront, en 1996, en grand nombre, aux Îles-de-la-Madeleine aussi, à la commission O'Brady qui tiendra des audiences publiques à l'automne 1996. Là aussi on reconnaît la nécessité qu'il y a pour les municipalités des Îles de se regrouper. Mais comment? Comment peut-on procéder pour amener ce regroupement nécessaire?

En 1997, le ministre de l'époque, Rémy Trudel, devant l'incapacité des autorités municipales des Îles à amener un regroupement, mandate un député, Roger Paquin, pour agir comme conciliateur afin de rapprocher les parties. Tout le monde convient que le statu quo est inacceptable, mais on ne s'entend pas sur le modèle de regroupement municipal souhaité. Paquin va consulter toutes les municipalités des Îles-de-la-Madeleine dans chacune des municipalités durant une semaine. Il fera rapport, parlera d'un projet, d'une communauté maritime pour l'ensemble de l'archipel madelinot.

Au début de 1998, le ministre Trudel forme alors un comité d'étude sur les structures municipales aux Îles-de-la-Madeleine. Ce comité, présidé par le préfet de la MRC, demande aux citoyens de lui présenter des mémoires. La communauté madelinienne est interpellée, il y a des consultations, on reconnaît la nécessité d'aller vers des regroupements.

En 1999, le comité dépose finalement son rapport qui opte pour le regroupement de toutes les municipalités des Îles. Ce projet sera soumis aux Madelinots en 1999, à l'automne, par un référendum, un référendum simultané dans sept municipalités des Îles-de-la-Madeleine. Il y a donc, M. le Président, des consultations. Mais on ne réussit pas à trancher le débat, et le débat se poursuit après le référendum. Et, à ce moment-là, on interpelle encore le gouvernement québécois et le ministre des Affaires municipales... la ministre des Affaires municipales.

Québec confie alors un mandat à M. Franklin Delaney, mandataire, dont la tâche est de tâcher justement de rapprocher les parties. Son rapport, M. le Président, est déposé au printemps 2001 et est signé par six des huit municipalités...

M. le Président, je comprends que le député de Vimont n'est pas intéressé par le cas des Îles-de-la-Madeleine, mais, moi, je suis intéressé à en parler, il me reste encore du temps. Merci, M. le Président.

Son rapport, donc, est déposé au printemps de 2001 et est signé par six des huit municipalités qui représentent 85 % de la population. Alors donc, on fait consensus sur le fait qu'on doit aller vers un regroupement des municipalités aux Îles-de-la-Madeleine. Mais, comment forcer, comment amener les Madelinots à trancher le débat?

Pour rapprocher encore davantage les parties, pour consolider le projet de M. Delaney, un nouveau conciliateur est nommé en juillet 2001 et propose à Québec d'aller de l'avant, estimant qu'un large consensus existe aux Îles-de-la-Madeleine en faveur du projet d'un regroupement municipal. Qui peut prétendre, M. le Président, dans cette Assemblée, qu'il n'y avait pas eu de consultations sur le projet d'un regroupement des municipalités aux Îles-de-la-Madeleine et la création d'une municipalité ou d'un projet de communauté maritime? Personne ne peut prétendre qu'il n'y avait pas eu de consultations, et le cas d'espèce que je viens de vous donner se retrouve dans beaucoup de régions du Québec. Beaucoup de régions du Québec voulaient, pensaient apporter des regroupements qui sont nécessaires pour le développement des communautés et des villes. Pour le développement économique aussi, mais très souvent, dans des discussions à deux ou à trois, il y a toujours une communauté qui est désavantagée, une communauté qui risque de perdre dans l'échange, qui pense qu'elle va perdre dans l'échange, et, à ce moment-là, rien ne se fait. Rien ne se faisait au Québec, comme l'a dit et comme l'a mentionné précédemment la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, en citant Claude Ryan, ancien ministre des Affaires municipales, qui n'était pas nécessairement et absolument pas membre de la formation politique à laquelle j'appartiens, M. le Président.

Deuxième erreur du Parti libéral du Québec, une erreur de fond, qui était celle de tenter de faire croire que, dans le cas des fusions municipales, la démocratie avait été bafouée. C'est une erreur. Aux Îles, j'ai parlé qu'il y avait des communautés. Il y a des groupes, il y a des citoyens à Cap-aux-Meules, à Grosse-Île, qui, pour toutes sortes de raisons valables, pensaient que ce mouvement vers le regroupement des forces de la communauté pouvait être néfaste pour leur collectivité. Mais, pour la collectivité de Grosse-Île par exemple, M. le Président, qui est une communauté anglophone, qui existe aux Îles depuis les débuts des Îles-de-la-Madeleine, presque aussi ancienne que les premiers habitants des Îles qui étaient des Acadiens, pour cette collectivité, après consultation, après discussions avec le député, et avec le maire de Grosse-Île, et les élus de l'ancienne municipalité, nous avons décidé, pour cette collectivité, un arrondissement afin qu'elle puisse conserver des éléments qui leur permettraient de justement dynamiser ces valeurs de vie commune auxquelles ils tenaient particulièrement.

Mais, M. le Président, de penser ou de faire croire que la démocratie avait été bafouée, c'était une erreur parce que, dans le cas du référendum dont je vous parlais, sur le résultat quand on faisait la compilation des huit référendums différents dans chacune des municipalités des Îles, le non l'emportait par quelques dixièmes. Ça ressemble étrangement au dernier résultat référendaire du Québec. Donc, ce n'était pas très clair. Mais, comme il y avait eu huit référendums, dans les huit municipalités, quatre municipalités avaient voté oui et quatre municipalités avaient voté non, alors, ce n'était pas un geste de démocratie ou un manque de démocratie, M. le Président.

M. le Président, le regroupement des Îles qui s'est fait, comme les regroupements qui se sont faits ailleurs au Québec, sont basés sur un principe d'équité fiscale, sur un principe d'équité fiscale. Il existait aux Îles comme ailleurs, mais aussi aux Îles-de-la-Madeleine, des municipalités où il y avait d'importantes inéquités, notamment sur la question des en-lieu de taxes ou par exemple sur la question d'une municipalité, alors qu'il y a une mine pour l'ensemble des Îles-de-la-Madeleine, c'est bien certain que cette municipalité, peu importe sa taille, se voyait avantagée par les comptes de taxes qui étaient payés par cette institution. Donc, de prétendre que la démocratie a été bafouée, c'est une erreur.

n(22 h 50)n

Troisième erreur, c'est celle de tenter de faire croire que le gouvernement précédent a outrepassé ses pouvoirs. C'est faux, M. le Président, parce que la démocratie, parce que la démocratie, c'est aussi, et justement dans la sphère de ces responsabilité qui nous sont confiées par les règles constitutionnelles qui nous gèrent, la démocratie, c'est aussi et surtout d'assumer pleinement tous ces devoirs. Cela veut dire de gouverner, de poser les gestes qui doivent être posés, après bien sûr qu'il y a eu consultation, qu'il y a eu discussion et que les éléments d'information sont suffisamment clairs et présents pour que celui qui a la responsabilité, celui qui doit être l'arbitre, justement, arbitre, si ce sont ses responsabilités et ses pouvoirs.

Ce qui doit guider le gouvernement, M. le Président, c'est le bien commun, c'est l'équité, c'est la justice. Et, lorsqu'on a, dans une consultation, 50-50 et quatre pour et quatre contre, si personne ne tranche, jamais le progrès et la décision ne va se prendre. Et, dans le cas des regroupements municipaux, M. le Président, je vous l'assure, nous avons la conviction que ce fut le cas, que le gouvernement a décidé et arbitré pour le bien commun, en toute équité. Parce que, oui, la responsabilité ultime dans le domaine municipal, elle revient au gouvernement.

Que va-t-il se produire maintenant, M. le Président? Quel avenir est réservé aux nouvelles municipalités? Quel avenir est réservé à la municipalité des Îles-de-la-Madeleine? La nouvelle municipalité des Îles-de-la-Madeleine, quel est son avenir?

Je vais vous parler d'un cas. J'ai parlé de Grosse-Île, il y a une autre communauté qui était une municipalité qui s'appelle l'Île-d'Entrée, où on retrouve à peu près 130 Écossais, M. le Président, qui vivent de la pêche, un peu d'agriculture, mais qui vivent de la pêche. 130 habitants sur une île, une municipalité, avec les règles qui sont édictées. 10 % de ces 120 habitants, 12 personnes dans l'ancienne municipalité de l'Île-d'Entrée pourraient, avec 35 % des électeurs, donc comme il y a 100 électeurs, parce que tout le monde ne vote pas, 35 personnes pourraient mener à la défusion, amorcer, M. le Président, un processus à rebours vers l'ancienne municipalité de l'Île-d'Entrée, vers l'ancienne MRC et peut-être amener d'autres anciennes municipalités des Îles à reconsidérer leur appartenance à ce que serait cette nouvelle municipalité des Îles-de-la-Madeleine amputée de l'Île-d'Entrée. C'est comme cela que l'on favorise la concertation, M. le Président, en face.

Pendant ce temps, des décisions ne se prennent pas, M. le Président; pendant ce temps, des arénas qui devraient être fermés ne sont pas fermés; pendant ce temps, des décisions, aux Îles, entre les élus municipaux, qui devraient se prendre, les gens sont en attente du projet de loi n° 9, les gens sont en attente du projet de loi n° 9 et de ce qu'il va signifier pour les commettants du Québec. Parce que personne ne pourra reprocher aux gens de l'Île-d'Entrée ou aux gens de Grosse-Île, peu importe leur appartenance linguistique, de se prévaloir des droits que leur donnera l'Assemblée nationale du Québec si jamais elle adopte le projet de loi n° 9.

M. le Président, le projet des Îles était et est un projet très original qui a vu le jour chez nous. On a mis en place une municipalité fortement décentralisée afin de respecter les besoins des localités situées dans les extrémités des Îles. On a pris en considération les besoins de la minorité anglophone, qui reçoit toujours les services dans sa langue. Bref, on a pris le temps d'élaborer ce regroupement municipal qui contient de nombreuses particularités. Les gens ont été consultés, et surtout personne, personne aux Îles ne souhaite la réouverture du débat, M. le Président.

Une chose est certaine, la décision finale, si jamais une municipalité des Îles décidait de se prévaloir des dispositions du projet de loi n° 9, s'il était adopté, une décision, la chose qui est certaine, c'est que la décision finale reviendra au gouvernement du Québec. C'est à ce gouvernement qu'il reviendra de décider qu'est-ce qu'il fera de la nouvelle municipalité des Îles. Que fera le gouvernement libéral? Va-t-il respecter les résultats des référendums ou assumer ses responsabilités en regard de la communauté madelinienne?

Voilà pourquoi, M. le Président, voilà pourquoi il faut voter contre ce projet de loi n° 9. Le cas, le type d'exemples que je viens de vous mentionner avec la communauté des Îles-de-la-Madeleine et sa nouvelle municipalité est un cas qui est imaginable et transférable dans d'autres régions du Québec. Alors, je vous dis, M. le Président, il faut voter contre ce projet de loi si nous voulons éviter de faire reculer le Québec des grands centres urbains, comme des régions éloignées, comme les Îles-de-la-Madeleine. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Sirros): Merci, M. le député. Je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant, M. le député de L'Assomption. La parole est à vous.

M. Jean-Claude St-André

M. St-André: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, à mon tour, je vais intervenir sur le projet de loi n° 9. Déjà, beaucoup de députés de l'Assemblée se sont prononcés sur cette loi qui ne laisse, d'un côté ou l'autre de la Chambre, personne indifférent.

D'entrée de jeu, tout comme mes collègues l'ont fait, je vais me prononcer contre la loi qui est à l'étude, je vais donc voter contre pour l'adoption de principe de ce projet de loi, parce que, tout comme mes collègues de l'opposition, je considère que c'est un projet de loi qui est une menace à la paix sociale, à la paix linguistique, qui est une menace également au principe d'équité que la réforme présentée par le ministre des Affaires municipales de l'époque avait mis en place et qui l'avait inspiré.

M. le Président, l'ensemble des commentateurs, des analystes qui se sont prononcés sur ces questions-là sont presque unanimes, quoi qu'en disent les gens d'en face. Et, même parmi les députés qui siègent avec le gouvernement, et il y a des ministres aussi, j'en suis convaincu, il y a manifestement un malaise devant la situation, devant la situation qui pourrait être engendrée par d'éventuelles défusions. On se retrouve devant une équipe gouvernementale qui tient deux discours: qui veut travailler au succès des nouvelles villes, mais qui met en place en même temps des mesures pour détruire ces nouvelles villes. C'est un double langage, M. le Président. Et ça n'a pas échappé d'ailleurs à l'ensemble des éditorialistes, commentateurs qui se sont prononcés sur la question.

Mais pourquoi aujourd'hui on se retrouve dans cette situation-là, M. le Président? Parce que, en 2000, le Parti libéral, au moment où le débat était très vif sur ces questions-là, ils ont voté, dans un de leurs congrès, une résolution par laquelle ils s'engageaient à présenter une loi pour défusionner les villes. Et, aussitôt que cet engagement-là a été pris, aussitôt que cette résolution-là a été adoptée, bien, déjà, M. le Président, les commentateurs, les éditorialistes ont rapidement qualifié l'engagement, la résolution qui a été adoptée par les délégués du Parti libéral. Et je vais vous en citer quelques-unes.

Dans le Voir du 10 mai 2001, C'est un départ, par Éric Grenier: «La promesse de Jean Charest de permettre les défusions tient de moins en moins la route. Avec les rumeurs d'élections hâtives qui s'estompent, jamais un chef libéral ne pourrait tenir sa promesse avant que les fusions ne soient consommées. Après, ce serait comme de démonter la station spatiale internationale sous prétexte qu'elle a coûté trop cher à construire.» Première interprétation en mai 2001.

Mais ça ne s'est pas arrêté là. M. Grenier, dans un autre éditorial, 1er novembre 2001, écrivait ceci: «Avec la promesse électorale la plus démagogique des dernières années, le chef libéral s'assure que la nouvelle ville, sous Gérald Tremblay, déraille. Une ville en sursis, en instance de défusion, serait ingouvernable. Le pire ennemi de Gérald Tremblay, ce n'est pas Pierre Bourque, c'est Jean Charest.»

n(23 heures)n

Et puis, il y a eu André Pratte aussi, André Pratte, éditorialiste en chef du journal La Presse, qui écrivait ceci le 6 novembre 2001. Il serait bon de rappeler également, M. le Président, que M. Pratte, à la dernière campagne électorale, a pris position en incitant les électeurs et les électrices à voter pour le Parti libéral. Mais regardons ce qu'il disait de l'engagement, de l'engagement du Parti libéral à l'égard des défusions. Alors, M. Pratte, il dit ceci, le 6 novembre 2001: «Il faut le répéter, en promettant de permettre d'éventuelles défusions, le Parti libéral du Québec a attaché un boulet aux pieds des nouvelles villes, en particulier de la métropole. Jean Charest doit trouver le moyen de se dégager de cet engagement...»

Le Vice-Président (M. Sirros): M. le député, je m'excuse. Tout simplement veuillez, s'il vous plaît, remplacer le nom de la personne que vous citez par son titre.

M. St-André: Bien sûr, M. le Président. Alors, le premier ministre, chef de l'opposition officielle à l'époque, «doit trouver le moyen de se dégager de cet engagement irréfléchi, pour le bien de Montréal. L'opposition libérale aux fusions résultait d'un calcul partisan, mais aussi d'un principe: les citoyens devaient pouvoir se prononcer sur l'avenir de leurs communautés. C'est précisément ce qu'ils viennent de faire au moment où les électeurs et les électrices de Montréal se sont choisi un nouveau maire. Les citoyens de la banlieue de Montréal ont voté, et leur vote aura un impact profond sur le fonctionnement de la nouvelle ville. La colère s'est exprimée. Les banlieusards sont désormais bien représentés dans le nouveau Montréal. La défusion est devenue non seulement inutile, mais néfaste.»

Ça ne s'est pas arrêté là, M. le Président. Il y a Le Soleil aussi, à Québec, par la voix de M. Jean-Jacques Samson: «Le chef de l'opposition de l'époque, actuel premier ministre, creuse sa fosse. Le premier ministre actuel, chef de l'opposition de l'époque, leurre encore une couche de la population qui demeure opposée aux fusions. Jean Charest serait alors plongé dans une grave crise politique...»

Le Vice-Président (M. Sirros): M. le député.

M. St-André: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): Je sais, c'est difficile des fois quand on lit un texte, mais faites l'effort de...

M. St-André: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): Voilà. Alors, remplacez toujours le nom de la personne que vous citez par son titre, s'il vous plaît.

M. St-André: Bien sûr. Alors, le chef de l'opposition de l'époque, premier ministre actuel, «serait alors plongé dans une grave crise politique qui, par la menace de la création d'enclaves linguistiques, en plus du coûteux fouillis administratif et du déséquilibre fiscal, impliquerait une marche arrière. Le maintien d'un tel engagement est irresponsable de la part du chef libéral.» Le 9 novembre 2001: «Il ne peut décemment laisser planer une issue irréaliste qu'utiliseront à outrance des politiciens locaux des municipalités pour freiner ou altérer l'organisation des nouvelles villes en exerçant une forme de chantage sur les maires et membres des comités exécutifs élus démocratiquement sur des bases régionales. Nous exigeons du chef de l'opposition officielle de l'époque, premier ministre actuel, qui cherche à s'imposer comme un grand réformateur, nous lui demandons seulement de ne pas se présenter à l'électorat dans la peau du grand démolisseur ou grand fossoyeur qu'il ne pourra même pas être.» Dans le journal Devoir, un peu plus tard, le 15 novembre 2001, courrier au chef de l'opposition officielle de l'époque: «La population n'a pas été consultée pour cette réforme, vous dites? Ça fait plus de 40 ans que des commissions consultatives, aussi nombreuses que les mannes du printemps, s'acharnent à trouver un remède aux maux de Montréal. Les commissions se suivent, les diagnostics se répètent, mais les traitements ne sont jamais avancés. Pour une fois qu'un gouvernement a saisi que Montréal était plus qu'une très, très grosse bourgade ou, pire, une somme comptable de quartiers et de contribuables, mais véritablement une richesse que la plupart des petits peuples n'ont même pas, celle de posséder en son sein une cité, un noyau concentré autour duquel la nation gravite, comme Londres pour les Britanniques, Paris pour les Français, Berlin pour les Allemands, New York pour les Américains. Vous dites ? le chef de l'opposition officielle de l'époque ? que les citoyens sont assez intelligents pour tenir compte des coûts d'un processus de défusion.

«Mais je sais que, dans votre for intérieur, vous souhaitez qu'après les avoir menacés avec la carotte pécuniaire, tel qu'il est prévu dans votre démarche en trois temps vers la défusion, les banlieusards choisissent de rester dans le Montréal uni.» Donc, exactement ce que je disais au début de mon intervention, M. le Président: un double langage.

Plus tard, le 8 décembre 2001, Mme Michèle Ouimet, dans un éditorial intitulé À votre tour, le chef de l'opposition officielle de l'époque, premier ministre actuel, et Mme Ouimet y va: «Le chef de l'opposition officielle ? de l'époque ? mène un combat d'arrière-garde et entretient un espoir absurde chez les anglophones qui croient, à tort, que les fusions menacent leur survie. Une inquiétude légitime que le chef libéral manipule de façon irresponsable. Sa promesse de défusionner est irréaliste. Elle a été griffonnée à la hâte, en octobre 2000, lors d'un congrès du Parti libéral où les esprits étaient surchauffés. Emporté par l'enthousiasme, un député, le député de Hull, a soumis cette proposition qui se résumait à quelques lignes et qui n'avait fait l'objet d'aucune réflexion sérieuse. Un simple flash, quoi[...].

«Les libéraux croient que les Montréalais vont reculer devant les coûts de la défusion. C'est bien mal connaître les irréductibles anglophones, comme le maire de Westmount, Peter Trent, qu'aucune facture, fût-elle de plusieurs millions, ne fera reculer. Ils mènent le combat de leur vie et ils vont s'accrocher désespérément à la promesse du chef de l'opposition officielle ? de l'époque. D'ailleurs, les 13 maires de banlieue qui se sont rendus jusqu'en Cour suprême n'ont pas hésité à dépenser des dizaines de milliers de dollars en frais d'avocat.

«Ce sont les anciennes villes anglophones qui risquent de défusionner. Avec ses référendums, le chef de l'opposition officielle ? de l'époque ? va créer des ghettos linguistiques: les riches anglophones d'un côté, enfermés dans leurs anciennes petites banlieues, et les francophones de l'autre.»

Ça, M. le Président, je trouve ça important d'insister là-dessus, parce que j'ai écouté avec beaucoup d'attention l'intervention du leader parlementaire adjoint du gouvernement, tantôt, qui nous assimilait... qui assimilait des propos ethnicistes, à la rigueur, au député de Bertrand, tantôt. M. le Président, ce que je lis ici, c'est une opinion de Mme Michèle Ouimet, qui est loin d'être une souverainiste. Le point de vue que nous exposons ici est partagé par des analystes qui sont loin de partager nos vues dans d'autres domaines. Alors, en... Et, si justement, si justement il y a un parti politique au Québec qui a une vision ouverte et inclusive, c'est bien le Parti québécois. Le Parti québécois, le gouvernement du Parti québécois a eu le courage, a eu le courage d'entreprendre un regroupement municipal qui rassemblait dans une même ville les anglophones et les francophones. C'est nous qui avons fait cela et c'est vous, par vos gestes irresponsables, qui menacez la paix sociale et la paix linguistique.

«Le chef de l'opposition ? et je continue avec ce que Mme Ouimet disait dans La Presse du 8 décembre 2001, le premier ministre actuel, chef de l'opposition officielle de l'époque ? a passé la plus grande partie de sa vie à Sherbrooke et à Ottawa. Visiblement, il connaît mal Montréal. Sinon, comment expliquer cet acharnement à faire la promotion d'une politique d'exclusion qui risque de faire éclater la fragile paix linguistique.»

M. le Président, j'y vais maintenant d'un extrait d'une chronique de Michel David, dans Le Devoir du 28 février 2002, qui démontre, qui démontre que, même chez les gens d'en face, il y avait un malaise à l'égard de la promesse qui a été prise de défusionner les villes.

Or, la franchise... et ça s'intitule La franchise de la députée de Sillery, 28 février 2002. «La députée de Sillery a eu un autre accès de franchise cette semaine quand elle a expliqué au quotidien Le Soleil ce que les libéraux avaient en tête quand ils ont ouvert la porte à d'éventuelles défusions municipales. "Dans la pratique, personne n'a jamais vraiment pensé à revenir comme avant. Autrement dit, au PLQ, on a toujours su qu'il était parfaitement irréaliste de songer à démanteler les nouvelles villes, surtout les grosses."» Et ça, ce sont les propos de la députée de Sillery.

n(23 h 10)n

Le 9 mars 2002, Alain Dubuc, encore un grand partisan, un grand partisan de l'indépendance du Québec; qu'est-ce qu'il disait, M. Dubuc, dans Le Soleil du 9 mars 2002? «Si, dans le contexte de l'avenir du Québec le référendum est l'expression par excellence de la vie démocratique dont la légitimité ne peut pas être mise en doute, dans la vie de tous les jours, l'utilisation du référendum peut être bête et nuisible et même devenir un frein à la démocratie. Le plus bel exemple en est donné par le premier ministre qui, malgré toutes les perches qui lui ont été tendues, a refusé d'abandonner son idée indéfendable de référendum sur les défusions, qui provoqueraient un chaos qui ne sert pas l'intérêt public.»

Mme Michèle Ouimet, La Presse, le 1er novembre 2002, après les élections municipales à Montréal. Qu'est-ce qu'elle écrivait, Mme Ouimet? «Il n'y a pas eu de catastrophe, le ciel n'est pas tombé sur la tête des Montréalais, les services ne se sont pas effondrés et les anglophones n'ont pas perdu leur identité. La création de la nouvelle ville de Montréal s'est faite en douceur, quoi qu'en pensent les prophètes de malheur et les[...] ? premiers ministres ? de ce monde. Dernier nuage: la menace de défusion lancée par[...] ? le premier ministre ? une promesse que l'Ouest-de-l'Île a la ferme intention de rappeler au chef libéral s'il prend le pouvoir. Peu importent les coûts, les Westmount et les Baie-d'Urfé de ce monde ne lâcheront pas le premier ministre tant et aussi longtemps que le processus de défusion ne sera pas enclenché. Qu'attend[...] ? le premier ministre ? pour admettre qu'il est trop tard pour démanteler Montréal?»

Katia Gagnon, La Presse du 3 avril 2003 ? on se rapproche de l'élection du 14 avril ? on voit, M. le Président, que, peu importe le moment où les éditorialistes, les commentateurs se sont exprimés sur ces questions-là, leur point de vue n'a jamais varié: il s'agit d'une promesse irresponsable. Mme Gagnon y va, le 3 avril 2003: «Nous l'avons dit et redit, la promesse des libéraux d'autoriser les défusions est irresponsable, elle handicape la naissance des nouvelles villes, en particulier dans le cas de Montréal où l'équilibre de l'équipe du maire Gérald Tremblay est très fragile, tout comme l'équilibre linguistique de la métropole. M. Charest ? pardon, le premier ministre ? n'aurait jamais dû endosser une promesse qui, plaident certains pour expliquer cette erreur, est arrivée par surprise sur leur parquet d'un congrès. Le chef libéral a tout de même embarqué dans le train des défusions, une promesse à courte vue. Et, depuis deux ans, il en a constamment remis. À toutes les occasions où il aurait pu apporter quelques nuances, lors des élections municipales, par exemple, il a persisté et signé. Si, comme il le dit lui-même, il a un préjugé favorable à la création des nouvelles villes, il n'a certainement pas facilité leur naissance et, s'il est élu, sa position risque de les faire éclater. Tout cela est éminemment contradictoire.»

Et puis, il y a après l'élection, M. le Président. Les éditorialistes, les commentateurs ont maintenu le cap. Il s'agit d'un engagement irresponsable de la part de nos amis d'en face. Et, cette fois-ci, c'est Murray Maltais, du journal LeDroit, dans un éditorial qui s'intitule Régresser, qui y va de son opinion le 17 avril 2003, donc trois ou quatre jours après le scrutin du 14 avril. Que dit-il, M. Maltais? «Aujourd'hui, Gatineau a mis l'Outaouais sur la carte du Québec. Nous formons une ville unique qui offre des possibilités extraordinaires. D'importants projets se préparent, tous plus prometteurs les uns que les autres. Nous sommes en train de bâtir une capitale régionale forte à l'abri des querelles qui minaient tant notre dynamisme, nos initiatives. Notre identité se fortifie. Et puis, face à Ottawa, lui aussi regroupé, de quoi aurions-nous l'air avec les anciennes villes?»

M. le Président, le premier éditorialiste qui est ouvertement souverainiste, que je vais citer, Pierre Bourgault, quelques jours, quelques semaines avant son décès, le 11 mai 2003, dans LeJournal de Montréal: «C'est le premier ministre qui n'a pas eu le courage il y a quelques mois de choisir le bien public contre le maintien des petites principautés.»

Jacques Brassard, dans le Quotidien du 14 mai 2003: «Le ministre des Affaires municipales qui dit aux maires réunis en congrès à Gatineau: "aidez-moi à convaincre les défusionnistes", c'est comme si un incendiaire se précipitait chez les pompiers en leur criant, avec une sincérité à vous arracher les larmes: Je vous en supplie, aidez-moi à éteindre le feu.»

M. le Président, je vois que le temps de mon intervention... que mon temps est épuisé. Alors, je vais conclure, M. le Président, que manifestement, manifestement, nous sommes en présence d'un gouvernement qui tient à un engagement électoral irresponsable. Pourtant, il y a un autre engagement électoral que vous avez pris qui, celui-là, était responsable et qui se retrouvait également dans notre programme, c'est l'engagement de maintenir les services de garde à 5 $ par jour. Nous, de ce côté-ci, nous sommes prêts à vous appuyer pour maintenir les frais de garde à 5 $ par jour et nous sommes prêts à vous appuyer, à vous appuyer si vous retirez le projet de loi sur les défusions municipales. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Sirros): Merci, M. le député. Je suis prêt à reconnaître Mme la députée de Marie-Victorin pour la prochaine intervention.

Mme Cécile Vermette

Mme Vermette: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, M. le Président, il me fait plaisir de parler sur le projet de loi pour joindre ma voix à mes collègues ici, de ce côté de la Chambre, parce que je considère que le projet de loi actuellement qui concerne, je dirais, plus qu'autrement les défusions, puisque ce qu'est le projet de loi n° 9 favorise allégrement le chaos social, jusqu'à une certaine façon de faire, puisqu'on est en train de démanteler des choses qui au point de départ semblaient ne pas vouloir fonctionner ensemble, des villes qui avaient leurs habitudes, leur culture et, ma foi, fait en sorte qu'au bout d'une année de travail assidu, constant, de tous les intervenants des différents niveaux, au niveau municipal, sont arrivés à faire un budget qui se tenait bien, sont arrivés à travailler ensemble... Mais, en cours de route, il est arrivé, bien sûr, une élection, et que, durant cette élection, le chef du Parti libéral a voulu aller chercher une majorité importante et il a travaillé en ce sens. Ça, on ne peut pas l'en blâmer, mais là où on peut l'en blâmer, c'est le processus qu'il a mis en branle et tous les espoirs qu'il a fait survivre... qu'il a fait vivre à des gens en leur disant qu'il pourrait éventuellement favoriser les défusions et qu'il était contre, finalement, ces villes qui avaient été faites, quant à lui, sans consultations, sans référendum.

Bien sûr, M. le Président, j'ai peine à croire, en fait, les propos du premier ministre, qui était chef de l'opposition à l'époque, et en pleine campagne électorale, puisque, quand on regarde un peu la petite histoire, c'est quelque chose qui a été assez spontané au niveau du congrès du Parti libéral. On se souviendra très bien qu'on travaillait très fort au projet de loi pour les fusions, et, si ma mémoire est bonne, la plupart des gens nous disaient, dans le milieu municipal: Aucun gouvernement n'aura le courage de faire des fusions. Mais, si on veut s'en sortir et faire que Montréal soit une grande ville internationale et que l'ensemble des villes du Québec puissent avoir aussi un rôle important au niveau mondial, il est essentiel de fusionner ces villes et de faire qu'en sorte on ait moins de villes éparpillées, mais qu'on ait une concentration de services et de partage, en fait, de l'assiette fiscale, et permettre de donner de meilleurs services aux citoyens. Et j'entendais ça un peu partout, mais on disait: Aucun gouvernement aura le courage nécessaire d'aller jusqu'au bout, parce que effectivement ce n'est pas populaire, en fait, de fusionner des villes, quand on sait que chacun préfère être le maître et le roi dans son petit royaume qu'être second dans un grand royaume.

Alors, bien sûr, ce n'était pas facile, j'en conviens, mais, au-delà, en fait, du gain politique, c'est le bien commun qui est important, et c'est ce pour quoi nous avons été élus et que nous sommes élus ici, en cette Chambre: pour défendre le bien de la majorité et défendre le bien de l'ensemble des citoyens et des citoyennes du Québec. Et j'ai de la misère à considérer, quand on me dit qu'un gouvernement qui se tient debout, qui prend des décisions est un mauvais gouvernement et que c'est un gouvernement qui n'est pas légitimé à poser certains gestes. Je pourrais le dire dans certains exemples, M. le Président, en ce qui concerne les tarifs au niveau des garderies. Je ne pense pas que le gouvernement libéral s'est fait élire en disant: Écoutez, dès que nous serons au gouvernement, nous allons augmenter les frais du système de garde. Je ne crois pas que la population du Québec... parce que, autrement, on n'aurait pas eu de manifestations ici, sur la colline parlementaire, et on n'aurait pas eu en fait ce tollé qui spontanément est venu de partout, que ce soient des parents, que ce soient des gens qui travaillent et que ce soit dans les centres de la petite enfance ou que ce soit un peu partout, les gens se sont ? les parents ? les gens se sont ralliés et sont venus faire entendre leur voix au niveau du gouvernement en disant: Écoutez, on ne vous a pas élus pour nous faire augmenter nos frais de garde.

n(23 h 20)n

Deuxièmement, vous avez vu, dernièrement, tous les gens qui montent ici, à la colline parlementaire, pour dire à ce gouvernement: On ne vous a pas élus pour créer, en fait, ce chaos social que vous êtes en train de faire dans tous les différents domaines, que ce soit dans les relations de travail, avec la loi n° 45, que ce soit avec la loi n° 34, que ce soit dans les hôpitaux, avec la loi n° 25, la loi n° 30. En fait, c'est autant de lois qui... À l'heure actuelle, ce gouvernement n'a pas ? si on comprend cette logique ? n'a pas été élu pour aller aussi loin qu'il le prétend à l'heure actuelle et rentrer dans la gorge certains aspects des relations de travail que nous avons établies au cours de nombreuses années pour arriver à une paix sociale.

Non, on n'a pas... Et je pense que l'ensemble de la population du Québec actuellement, si elle réagit si fortement, bien, c'est parce qu'il y a eu un déclenchement, un déclencheur. Et ce déclencheur-là, bien, en fait, c'est des décisions qui sont prises sans consultation, M. le Président. Alors, quand on vient nous dire qu'au niveau des municipalités il n'y a pas eu de consultations, bien, en fait, je pense que c'est faire fausse route. Parce que, quand on regarde, en fait, tout l'ensemble des volumes, des écrits qui ont été faits sur les fusions, sur comment devrait être vécu le monde municipal, le nombre de commissions parlementaires qui se sont tenues là-dessus, je pense qu'il y a eu consultation.

On a reconnu aux représentants des différentes municipalités, des partenaires aussi dans la communauté civile, les partenaires d'affaires, notamment par les chambres de commerce, de venir s'exprimer en commission parlementaire pour nous dire la façon qu'ils voyaient ces fusions des villes et qu'est-ce qui serait le plus propice à un rayonnement pour la grande ville de Montréal, son développement économique et aussi son rayonnement international. Alors, je pense qu'on a donné la chance à ce moment-là à des gens de venir s'exprimer.

Mais bien sûr qu'il y en avait qui n'étaient pas en accord. Mais, même s'ils étaient en désaccord, ils ont pu venir en commission parlementaire exprimer, en fait, leurs points de vue. Ils n'étaient pas bâillonnés, les gens, ici, au Québec. Il faut arrêter de laisser croire aux gens qu'on a fait ça en catimini, derrière des portes closes, et qu'un beau matin on s'est réveillés puis on a dit: Voilà, on s'en va dans ce sens-là, les copains, et on ne veut rien savoir de l'ensemble de la population, nous allons tête première dans le mur.

Non, M. le Président, ce n'est pas tout à fait comme ça que les choses et les événements se sont passés. On a travaillé, il y a eu le rapport Bédard, on a travaillé très fort avec ces gens. Il y a eu les consultations, après ça, les gens sont venus nous donner des mémoires, avec notre collègue, à l'époque, qui était Serge Ménard, qui s'occupait de ce dossier-là, des rapprochements, des discussions. Même entre nous, au niveau du caucus des députés, à l'époque, du gouvernement, on en a discuté, il y avait des points forts, il y avait des points plus faibles, et on est arrivés à établir certains consensus que nous faisions avec les gens que nous représentions dans nos comtés respectifs. On ne travaille pas en vase clos, on travaille avec les gens de la population.

Et, chez moi plus particulièrement, sur la Rive-Sud de Montréal, nous avions un problème de taille, M. le Président, parce qu'il y avait beaucoup de municipalités incapables de travailler ensemble sur certains aspects, et qui fait que nous avons perdu des projets importants pour le développement, chez nous, de l'ensemble de la Montérégie, plus particulièrement pour la Rive-Sud, parce qu'on n'était pas capables de travailler dans un même sens. Oui, il existait un esprit de clocher et, oui, effectivement, il y avait de la compétition d'une ville à l'autre, et d'autant plus que, cette compétition, elle s'exprimait quand on allait à l'extérieur du pays faire du réseautage avec d'autres pays, d'autres villes européennes, et c'était entre nous. C'était Longueuil, c'était Boucherville, c'était Saint-Bruno, et les gens avaient de la difficulté à s'en aller vraiment dans un sens commun pour favoriser le meilleur développement économique de leur territoire.

Alors, je pense que effectivement... Et c'est à la suite de tous ces tiraillements entre les villes elles-mêmes qu'au niveau de la Chambre de commerce... qu'il y a eu des mouvements de citoyens, qu'il y a eu des mouvements des maires aussi, puis de dire: Il ne faut jamais plus que des choses de cette nature se passent sur notre territoire. Et c'est eux qui ont pratiquement exigé qu'on aille dans ce sens-là, sachant très bien que, sur le plan politique, nous aurions, oui, un prix à payer. Ils nous ont presque suppliés, chez nous, sur la Rive-Sud: Écoutez, c'est important, parce que c'est impossible qu'à l'heure actuelle nous puissions faire le pendant avec la Rive-Nord, qui s'appelle ville de Laval, qui est une MRC. Nous, nous étions des MRC morcelées, étalées et nous avions de la difficulté à travailler dans un même sens.

Alors, oui, je pense que l'ensemble des gens, chez nous, sur la Rive-Sud, réclamait une ville pour la Rive-Sud et demandait de faire un effort substantiel pour que l'ensemble des huit villes travaillent ensemble et n'en fassent qu'une. Ce qui a fait que, pour nous aussi, sur la Rive-Sud, Longueuil maintenant demeure la troisième ville en importance au niveau de l'ensemble du Québec. C'est peu de chose et c'est beaucoup, ça, M. le Président, de pouvoir être considéré la troisième plus grande ville. Il y a une fierté à dire qu'on habite dans des villes qui ont un rayonnement et qui sont capables d'être concurrentielles sur le plan international, et d'avoir un effet d'attraction au niveau des grandes entreprises, et de pouvoir permettre à l'ensemble de notre territoire de se faire un développement économique intéressant. Je pense que, oui, c'est important. Il y a une fierté à ça.

Et tout le monde, dès que les grands... dès que les fusions ont été permises, il y a eu des élections au niveau municipal. Et là, à ce moment-là, il aurait pu y avoir, je pense, des groupes qui auraient sorti pour dire: Bien, nous, nous allons nous présenter une équipe complètement en désaccord avec les fusions et une équipe en accord avec les fusions. Il aurait pu y avoir cette confrontation-là au moment des élections municipales sur le territoire. Mais ce n'est pas ça qui est arrivé, M. le Président. Tous les maires qui ont été fusionnés se sont présentés aux élections avec le maire Jacques Olivier, présentement. Parce que le maire Jacques Olivier ne s'était jamais démenti, il n'a jamais dit qu'il ne voulait pas faire de grande ville. Au contraire, il s'est présenté parce qu'il croyait à la grande ville et qu'il croyait que Longueuil méritait en fait d'occuper une place très importante à l'intérieur du Québec. Et tout le monde a travaillé dans ce sens-là. Et l'ensemble des intervenants et même y compris les maires actuellement contre les défusions se sont fait élire avec un maire qui était fusionniste, M. le Président.

Il y a eu des problèmes en cours de route. Il y a une mairesse qui a été sur l'exécutif, une ancienne mairesse a été nommée sur l'exécutif, et puis elle a perdu un peu de pouvoir, puis elle n'a pas aimé ça, ça fait qu'elle est partie avec les défusionnistes. Ça, c'est la petite histoire, chez nous. C'est très profond, en fin de compte. Et c'est à ces gens-là à qui on veut donner du pouvoir? On dit: Ces gens-là ne sont pas représentés, n'ont pas été consultés. Je ne comprends pas, moi. Une mairesse, elle doit peut-être savoir qu'est-ce qu'elle fait. Et, quand elle accepte, à un certain moment donné, de se faire élire avec un maire qui est fusionniste pour représenter les intérêts d'une ville, et que, peu de temps après, parce qu'elle a perdu une certaine forme de pouvoir puis que, au niveau de l'exécutif, ne joue pas le rôle qu'elle aurait voulu jouer, démissionne et s'en va avec les défusionnistes, moi, je pense que ça ne tient pas la route, ça, M. le Président. Il manque, en quelque part, de conviction, de conviction profonde.

Et je me pose des sérieuses questions, à savoir: est-ce que ce n'est pas une forme d'égocentrisme, une forme de... qu'on est là pour soi, pour ses besoins personnels et non pas pour le bien commun? Ça existe, ça, dans une société, le bien commun. Il faut se poser des questions, à savoir: le bien commun représente la majorité et non pas une minorité, tout simplement. Et, à mon...

Des voix: ...

Mme Vermette: M. le Président, je vous demanderais, s'il vous plaît, j'ai écouté, moi aussi, tous les autres intervenants, j'espère que les autres pourraient faire la même chose, et y compris la députée de...

Des voix: ...

n(23 h 30)n

Le Vice-Président (M. Sirros): S'il vous plaît! Écoutez... Mme la députée, vous avez la parole.

Mme Vermette: M. le Président, j'ai de la misère parce que c'est des gens qui, à mon avis, ont de la difficulté à rester calmes quand c'est le temps. Et, M. le Président, ce que j'étais en train de dire, c'est que le sens commun existe dans une...

Des voix: ...

Mme Vermette: M. le Président, c'est impossible de dire quoi que ce soit ici...

Le Vice-Président (M. Sirros): Mme la députée, vous avez la parole, vous êtes la seule personne autorisée à intervenir. Je vous prie de continuer, s'il vous plaît.

Mme Vermette: Alors, M. le Président, ce que je vous disais, c'est que chez nous, en Montérégie, et plus particulièrement la Rive-Sud, qui est la grande ville de Longueuil, tout le monde voulait avoir une grande ville. On a travaillé très fort. C'est sûr que, en cours de route, quand on est arrivé à diviser, en fin de compte, les acquis et qu'on est arrivé à mettre en commun ce qui était les... au niveau des sommes d'argent, pour faire aussi une équité au niveau de l'assiette fiscale, c'est là qu'en fin de compte... C'est toujours quand on arrive à parler des sous que ça commence à aller moins bien, M. le Président. Et il y a des villes qui étaient plus riches que d'autres effectivement.

Mais la ville, moi, où j'habite, qui est la ville de Longueuil, là, maintenant qui s'appelle l'arrondissement du Vieux-Longueuil, cette ville-là qui jouait un rôle de centralité, M. le Président, donnait des services à l'ensemble de ces huit villes-là mais n'avait pas nécessairement toujours les argents qui revenaient en retour, par exemple. On utilisait des services de la ville-centre, bien sûr qu'on était là, on avait les parc régionaux, bien sûr les gens venaient chez nous, mais, quand on arrivait puis qu'on... on arrivait dans l'équité et qu'on arrivait aussi dans la péréquation, qui payait le plus, M. le Président? C'était l'arrondissement du Vieux-Longueuil qui avait un rôle de centralité.

Et, M. le Président, c'est curieux que ces villes qui actuellement considèrent qu'elles ont été brimées dans leur droit de parole, qui n'ont pas pu avoir le droit de pouvoir dire tout ce qu'elles voulaient, c'est curieux que ces villes-là, on les a entendues terriblement. C'est les villes les mieux nanties, en fait, chez nous. C'est un peu comme le même modèle, en fin de compte, qu'à Montréal, finalement.

Et je pensais qu'on vivait dans une société où la solidarité sociale pouvait exister, mais je m'aperçois, en fin de compte, que, quand on travaille sur des préjugés et quand on favorise, dans le fond, les riches contre les pauvres, il n'y a rien de bon, on n'apporte rien de bon dans une société, si ce n'est que ceux qui en ont ont peur d'en perdre puis ceux qui n'ont rien, bien, ils disent: Bien, on ne pourra jamais en avoir plus. Et ça donne une société, comme on est en train de vivre à l'heure actuelle, déchirée. Et ça donne aussi que, au lieu de semer l'espoir dans une société, tout ce que l'on fait, c'est qu'on sème la zizanie et qu'on sème, en fin de compte, le désespoir. Et, chez nous, je vous dirais qu'il y a des gens excessivement désespérés parce que... Dans cette grande ville, il y avait des projets, parce qu'elles avaient un effet d'attraction.

M. le Président, je trouve ça épouvantable qu'à cette heure-ci, il est 11 heures et demie, presque moins vingt, que les parlementaires de l'autre côté de la Chambre s'amusent impunément...

Le Vice-Président (M. Sirros): Madame, je dois dire que je n'entends pas précisément les paroles qui sont prononcées, j'entends un certain murmure. Je vous prierais de continuer, Mme la députée, en invitant tous les députés à respecter le droit de parole de la personne qui a la parole. Mme la députée.

M. Mulcair: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Sirros): Sur une question du règlement, M. le...

M. Mulcair: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): Monsieur... Sur une question du règlement.

M. Mulcair: ...une seule personne qui a la parole, mais, à un moment donné, il faut avoir quelque chose à dire.

Le Vice-Président (M. Sirros): M. le leader adjoint...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): À un moment donné, à un moment donné, il faut quand même respecter le droit de parole des personnes qui ont la parole. Il est tard, et je vous prie tous de simplement laisser la personne qui a la parole s'exprimer tel que le prévoit le règlement. Alors, Mme la députée.

Mme Vermette: Oui, M. le Président. Donc, ça ne m'étonne pas d'avoir de tels commentaires de la part du leader, en fait, du gouvernement, parce que plus macho que ça, c'est impossible, M. le Président.

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): S'il vous plaît! Mme la députée, vous avez la parole.

M. Bédard: M. le Président, tout simplement, on a grugé du temps avec des propos antiparlementaires...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): Il y a une règle qui dit...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): Il y a une règle qui dit que, quand le président est debout, tout le monde s'assoit, au calme.

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): M. le... Écoutez, je suis justement debout... Je suis justement debout pour précisément protéger le droit de parole de la députée qui a la parole, et elle a le droit de terminer son intervention. Et je vous prierais de le faire, Mme la députée.

Mme Vermette: Alors, je vous remercie, M. le Président. Alors, ce que je disais, c'est qu'actuellement, chez nous, parce qu'il y a ce projet de loi là qui fait qu'en sorte on ne sait pas qu'est-ce qui va se produire en fait, y aurait-il ou pas défusion, comment les gens vont voter, notre développement économique est arrêté à l'heure actuelle, de grand projets qui devaient voir le jour sont sur la glace, nous sommes incapables de les réaliser. Je ne sais pas pour combien d'années nous allons être pris dans ces problématiques-là, et c'est contre-productif, M. le Président, et je voterai contre le projet de loi.

Le Vice-Président (M. Sirros): Merci, Mme la députée. Je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant qui...

Une voix: M. le Président, j'aurais une question en vertu de l'article 213. J'aimerais savoir si la députée...

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, est-ce que la députée accepte de répondre à une question?

Mme Vermette: Non, M. le Président. Ils auraient dû écouter.

Le Vice-Président (M. Sirros): Il n'y a pas de consentement. Alors, il n'y a pas de consentement pour le 213. Alors, je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant qui serait M. le député de Berthier. M. le député.

M. Alexandre Bourdeau

M. Bourdeau: M. le Président, je crois que c'est la quatrième fois, dans cette session, que je me lève ici, en Chambre, pour parler d'un projet de loi. Encore une fois, M. le Président, j'entends très bien le député là-bas parler à ma collègue.

Le Vice-Président (M. Sirros): Effectivement. Écoutez, il est tard, j'en conviens, mais il y a un député qui a le droit de parole, c'est M. le député de Berthier. M. le député de Berthier.

M. Bourdeau: Merci beaucoup, M. le Président. Comme je vous le disais, M. le Président, c'est la troisième fois que je me lève ici, en Chambre, pour parler de projets de loi, un troisième projet de loi qui démontre encore une fois la courte vue du gouvernement en place et surtout de ses politiques simplement électoralistes qu'il met en place. Je crois fermement, M. le Président, que les actions du gouvernement libéral seront, dans l'histoire, identifiées comme étant un net recul pour la nation québécoise. L'adoption de ce projet de loi sera... M. le Président, j'aime bien ça, là... J'aimerais ça, savoir c'est quoi, la blague, parce que j'aimerais ça rire avec eux.

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): M. le député.

M. Bourdeau: Merci, M. le Président. Mais, si elle est bonne, la blague, vous pouvez la conter, hein, ça me ferait plaisir d'en rire avec vous.

Comme j'expliquais, M. le Président, je crois fermement que les actions du gouvernement libéral seront, dans l'histoire, identifiées comme étant un net recul pour la nation québécoise. J'en prends pour preuve le projet de loi n° 9 sur les défusions municipales. L'adoption de ce projet de loi sera définitivement un recul pour toute la société québécoise et non seulement pour les citoyens et citoyennes habitant les nouvelles villes.

M. le Président, ce gouvernement sera vu et jugé par l'histoire comme étant un des pires ? et ce n'est pas la première fois que je le dis ici, en Chambre ? comme étant un des pires que le Québec moderne a pu connaître. Un de mes concitoyens m'a dit en fin de semaine... Et ce n'est même pas un concitoyen qui est de ma couleur politique, M. le Président, mais ce qu'il m'a dit, c'est... il m'a dit: Toi, tu étais trop jeune pour avoir connu le temps de Duplessis, mais je crois que nous sommes encore revenus dans ce temps-là. M. le Président, j'espère que les gens d'en face seront conscients du comment ils seront jugés. Et, s'ils me répondent oui, bien ils sont totalement inconscients du tort qu'ils feront au Québec.

Nous retrouvons, M. le Président, dans le document en provenance du gouvernement du Québec relatif au projet de loi n° 9 intitulé Un processus de consultation des citoyens précis et transparent, une démarche supposément équilibrée, on retrouve ici, dans le texte, on parle de... «L'adhésion des citoyens aux résultats et aux conséquences qui en découlent est renforcée.» M. le Président, le gouvernement ne veut pas que les citoyens et les citoyennes des nouvelles villes adhèrent à celles-ci, ils veulent plutôt qu'ils adhèrent à des résultats. M. le Président, lorsque nous voulons, comme le premier ministre provincialiste le campe depuis peu, le succès des nouvelles villes, nous devons lancer un message clair aux citoyens et aux citoyennes que l'avenir du Québec passe par la constitution des nouvelles villes et non par la destruction de celles-ci.

n(23 h 40)n

M. le Président, comme je vous le disais tout à l'heure, ce gouvernement est pris avec une promesse électorale qui vient d'un congrès, qu'ils ont eue par leurs membres. Leur député de Hull a réussi à faire passer cette proposition-là. Je comprends pourquoi, M. le Président, que le premier ministre a décidé que le député de Hull devait être assis complètement dans l'arrière-banquette, pratiquement à l'extérieur de l'Assemblée nationale, parce que, moi non plus, M. le Président, je n'aurais pas fait...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, si je veux appliquer le règlement, c'est de dire: Il y a un député qui a le droit de parole, c'est le député de Berthier, quand il contreviendra au règlement, je vais le rappeler à l'ordre. À moins qu'il y aurait une question précise de règlement, M. le leader adjoint?

M. Mulcair: Oui, M. le Président, vous le savez très bien...

Le Vice-Président (M. Sirros): Quel article, s'il vous plaît?

M. Mulcair: Il enfreint l'article 36. Il vient d'adresser des paroles qui sont blessantes à l'adresse d'un autre député. Alors, je vous demanderais d'appliquer le règlement.

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, on va appliquer le règlement pour tout le monde. Il y a un député qui a le droit de parole, personne d'autre n'émet des bruits ou fait des commentaires. On écoute. S'il y a de quoi, je vais me lever ou vous vous levez sur une question de règlement précise, s'il vous plaît. M. le député de Berthier.

M. Bourdeau: Merci, M. le Président, c'est mon opinion, et je la respecte. Le député de Hull est assis en arrière, il y a des raisons pour ça.

Des voix: ...

M. Bourdeau: Il y a des raisons pour ça. Le député de Hull est assis en arrière, il y a des raisons pour ça.

Des voix: ...

M. Bourdeau: M. le Président, ça démontre le pas de classe qu'a le gouvernement.

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): Le propre de l'Assemblée parlementaire, c'est que chacun peut s'exprimer dans des termes parlementaires, selon les opinions qu'il a, on n'a pas à les juger à ce stade-ci. On a le droit de respecter la parole qui est donnée. M. le député de Berthier.

M. Bourdeau: Merci beaucoup, M. le Président. La vérité choque, hein? On va revenir, là ? on va laisser le député de Hull, parce qu'il a lui-même ses problèmes ? on va revenir au projet de loi. Comme j'expliquais, M. le Président, lorsque nous voulons que les citoyens et citoyennes adhèrent non pas aux résultats, mais aux nouvelles villes, il faut lancer un message clair. Cependant, le message que le gouvernement envoie à la population du Québec en entier en voulant adopter ce projet de loi, c'est qu'il accrédite la thèse que les nouvelles villes ne sont pas bonnes.

Le gouvernement en place doit arrêter de se comporter comme un petit gouvernement provincialiste qui n'a pour but que l'affaiblissement du Québec. M. le Président, le gouvernement en place doit se comporter comme un gouvernement national et gérer selon le bien commun et non au nom d'impératifs électoraux. Mais je sais, M. le Président, c'est malheureusement trop leur demander d'agir comme cela. Ils sont toujours pris dans une petite mentalité provincialiste qui n'aura que pour but de faire régresser le Québec. Et la plupart des projets de loi qu'on voit à cette session-ci, ça fait en sorte de démontrer que ce gouvernement n'a aucune vision, comme j'ai expliqué tout à l'heure, et que la seule vision qu'il peut avoir, qu'on peut lui imputer, c'est celle de démanteler l'État québécois, de faire en sorte que le Québec soit rendu plus faible. Et ça, M. le Président, les gens s'en rendent compte, ils s'en sont rendu compte rapidement, on l'a vu dernièrement, et ça va continuer. Ce gouvernement va payer cher cet affront qu'ils ont et qu'ils font au peuple du Québec. Et ça, on va le voir prochainement.

Il y a une autre chose que je suis heureux, M. le Président, les jeunes de ma génération qui n'ont pas connu ou peu connu un gouvernement comme le gouvernement libéral, ils vont reconnaître, ils vont voir qu'un vrai gouvernement, un gouvernement à l'écoute de ses citoyens, un gouvernement qui travaille pour le peuple québécois, pour l'évolution du peuple québécois, c'est un gouvernement du Parti québécois et non du Parti libéral. M. le Président, moi, ça fait sept mois que je suis ici, que je suis élu à l'Assemblée nationale, et jamais, jamais je n'aurais pu penser que j'aurais pu voir un gouvernement aussi faible, aussi destructeur pour le Québec. M. le Président, en tant que jeune, je suis découragé de ce que je vois. Je regarde l'avenir, puis je regarde les projets de loi qu'ils proposent, puis je me dis: On s'en va où? Où s'en va ce gouvernement-là? Dans un cul-de-sac total. Et ça, M. le Président, les gens vont s'en rencontrer... vont...

Une voix: Vont s'en rendre compte.

M. Bourdeau: ...s'en rendre compte ? merci beaucoup, ça, c'est des commentaires qui sont bien parfois ? s'en rendre compte, parce que, M. le Président, ce gouvernement-là est en train de détruire le Québec.

Je vous parlerais, M. le Président, de mon comté, le comté de Berthier que vous connaissez peut-être, vous êtes peut-être déjà allé faire une petite marche sur le bord du Saint-Laurent. M. le Président, le comté de Berthier fut l'hôte de plusieurs fusions réussies tant au niveau de la MRC de la Matawinie que la MRC d'Autray. À titre d'exemple, je peux vous parler de la fusion des municipalités de Saint-Cuthbert et de Saint-Viateur, de Lanoraie et de Saint-Joseph-de-Lanoraie ? petit village où je reste ? Saint-Félix-de-Valois, la ville et la paroisse, et de Lavaltrie et de Saint-Antoine-de-Lavaltrie.

Toutes ces fusions, M. le Président, furent réussies, et pourquoi? Pourquoi le ministre... plutôt, est-ce que le ministre sait qu'avant la fusion, par exemple, des deux Lanoraie, où que je reste, les deux municipalités étaient engagées dans des poursuites judiciaires qui totalisaient plusieurs dizaines de milliers de dollars pour cause de mésentente par rapport aux juridictions respectives? Et, depuis cette fusion, ces frais ne sont plus encourus par les citoyens, et ce sont les citoyens et les citoyennes qui sont gagnants.

Un autre exemple est celui des deux Lavaltrie. Et, pour mieux expliquer mon propos, je citerai l'ancienne mairesse de Lavaltrie qui maintenant travaille pour le ministre responsable de la région de Lanaudière, qu'il doit bien connaître, qui est Mme Thouin. Les gens de l'autre côté doivent bien connaître Mme Thouin, ancienne candidate aussi libérale dans le comté de L'Assomption, je crois. Mme Thouin affirmait, le 25 mai 2003, à L'Écho D'Autray, petit journal hebdomadaire de par chez nous, elle mentionne que «le regroupement municipal, qui a permis de consolider les aspirations de la population et de favoriser une vision commune de l'avenir de Lavaltrie, la réorganisation et l'harmonisation municipales sont autant de projets réalisés qui permettront à la ville de relever les défis du plein développement de son potentiel». M. le Président, au moins, je suis content de savoir qu'il y a au moins quelqu'un de l'autre côté, qui travaille pour eux, qui a compris ça, parce que, eux, ils ne l'ont pas compris. Et je félicite Mme Thouin pour le travail qu'elle a pu faire pour la fusion des deux Lavaltrie, parce qu'on le voit de plus en plus, la force économique que ça peut amener dans notre secteur.

M. le Président, le ministre peut-il m'expliquer pourquoi, si la fusion c'est bon pour les citoyens et citoyennes de Lavaltrie puis les autres municipalités de mon comté, ce n'est pas bon pour ceux de Montréal, Gatineau, Québec, par exemple? M. le Président, le ministre me dira qu'au fond eux font confiance aux citoyens et aux citoyennes, il me sortira quelques principes démocratiques de son cru, mais la réalité est qu'en pavant l'autoroute des défusions il envoie un message clair aux citoyens et aux citoyennes de ces villes: Pour vous, les fusions, ce n'est pas bon. S'il avait vraiment voulu le bien des nouvelles villes, il aurait plutôt donné les moyens à celles-ci de se construire et non de se détruire.

M. le Président, quand on parle de vouloir faire en sorte que les nouvelles villes fonctionnent puis qu'à la fois on met un projet de loi comme celui qu'on connaît avec le projet de loi n° 9, qui pave la voie aux défusions, à un moment donné, on paie le prix, parce que les gens se rendent bien compte qu'un double discours ça ne se peut pas, parce que, d'un côté, le premier ministre dit quelque chose puis, de l'autre côté, le ministre des Affaires municipales dit autre chose. À un moment donné, les gens ne sont pas... Il ne faut pas prendre les gens pour des idiots, les gens s'en rendent compte.

Et j'aimerais, M. le Président, vous citer quelques articles qui démontrent la ? et je serai cru dans mon propos ? la stupidité du gouvernement en place. Katia Gagnon, dans La Presse du 3 avril 2003, nous disait: «Nous l'avons dit et redit, la promesse des libéraux d'autoriser les défusions est irresponsable. Elle handicape la naissance des nouvelles villes, en particulier dans le cas de Montréal, où l'équilibre de l'équipe du maire Gérald Tremblay est très fragile, tout comme l'équilibre linguistique de la métropole. M. Charest n'aurait jamais dû endosser une promesse qui...»

Le Vice-Président (M. Sirros): M. le député, juste un petit rappel. Quand vous avez le nom d'un député en cette Chambre, remplacez-le par son titre, s'il vous plaît.

M. Bourdeau: Oh, pardon, excusez-moi, tout à fait, M. le Président. C'est M. le premier ministre, excusez-moi, c'était une citation. «M. le premier ministre n'aurait jamais dû endosser une promesse qui, plaident certains pour expliquer cette erreur, est arrivée par surprise sur le parquet d'un congrès.» Hein, il me semble que c'est ça que je disais tout à l'heure par rapport au député de Hull. «Le chef libéral a tout de même embarqué dans le train des défusions, une promesse à courte vue. Et, depuis deux ans, il en a constamment remis. À toutes les occasions où il aurait pu apporter quelques nuances, lors des élections municipales, par exemple, il a persisté et signé. Si, comme il le dit lui-même, il a un préjugé favorable à la création des nouvelles villes, il n'a certainement pas facilité leur naissance. Et, s'il est élu ? ce qui est arrivé ? sa position risque de les faire éclater. Tout cela est éminemment contradictoire», M. le Président.

Pour terminer, globalement, les regroupements municipaux ont permis de créer des villes-centres plus efficaces, moins étranglées financièrement et de rétablir progressivement l'équité fiscale entre les citoyens, une équité qui n'existera plus avec les défusions. Et j'ai entendu l'autre bord parler de bourbier, le bourbier dans lequel eux s'embarquent, ça va être très dommageable pour toutes nos grandes villes, c'est un bourbier énorme, M. le Président. Pendant plusieurs années, les villes ne pourront pas se développer, elles vont stagner, leur développement va stagner. Et, en plus de ça, on va rajouter par-dessus ça des conférences régionales des élus qui feront en sorte d'amener encore plus de difficultés pour le développement de nos villes et de nos régions, M. le Président. Lorsqu'on me parle de bourbier, je peux vous dire que le bourbier, c'est eux qui sont en train de le créer.

n(23 h 50)n

Comme Mme Gagnon disait, ces regroupements étaient et demeurent la meilleure chose. M. le Président, si eux ne comprennent pas ça, les citoyens, eux, le comprennent. La situation est particulièrement... Et là je continue, M. le Président, en parlant de Mme Michèle Ouimet qui disait: «La situation est particulièrement délicate à Montréal. La ville connaît une paix linguistique depuis de nombreuses années, mais cette paix reste fragile et les défusions pourraient brasser l'eau qui dort. Il ne faut jamais perdre de vue que ce sont les ex-villes de banlieue riches et anglophones comme Westmount qui rêvent de recréer leur ancien fief.»

M. le Président, on voit clairement que le gouvernement en place est pris avec une position politique qu'ils ne veulent pas lâcher pour plaire à leur électorat à eux et non pour le bien-être de la nation québécoise, ils veulent faire... plaire à leur électorat. Et c'est dommage que... Comme on dit ici, ça risque de créer encore une fois, de recréer un clivage linguistique et un clivage aussi au niveau des riches et des moins riches, et ça, c'est inexclusable, c'est inexcusable, M. le Président, c'est de faire en sorte, le Québec, de faire en sorte que les villes ne puissent plus réellement fonctionner.

Je continue, M. le Président, la citation: «Pendant que pro et anti fusions s'affrontent, Montréal vit au ralenti. À quoi bon signer les négociations collectives avec les syndicats ou investir des sous pour unifier le système d'informatique si tout risque d'être à refaire dans quelques mois. Le gouvernement doit faire vite, sinon il peut causer un tort irréparable aux villes fusionnées.»

M. le Président, le message qu'on envoie tant aux Québécoises qu'aux Québécois, qu'aux gens ailleurs dans le monde ? et ça, je pense que mes collègues l'ont bien signifié ? le message qu'on envoie ailleurs, c'est celui de dire: Regardez, au Québec, on n'évolue pas, on régresse. Nous, au Québec, on retourne en arrière. Je comprends, M. le Président, que leur petite mentalité provincialiste fait en sorte que, pour eux, le Québec, ce n'est pas important qu'il ait une antenne internationale, ce n'est pas important, parce que, pour eux, tout passe par Ottawa, de toute façon. On le voit bien, quand on a posé des questions sur la ZLEA au gouvernement en place, on s'est rendu compte que même eux ne savaient pas... eux ne le savaient même pas c'était quoi, la position du Québec. Je pense que, pour avoir la position du Québec, il aurait fallu appeler Pierre Pettigrew. On l'a vu avec le cas de l'UNESCO. On dit... Pour eux, ce n'est pas grave, on peut s'asseoir, ne pas parler dans les grandes institutions internationales.

M. le Président, c'est inacceptable, ça. Nous avons ici... Et ça a été reconnu par l'Assemblée nationale, le Québec forme une nation. Une nation a le droit d'être représentée au niveau international, d'avoir un reflet au niveau international des plus vivants. Et là qu'est-ce qu'on va présenter comme image du Québec? Mais ce ne sera pas un Québec vivant, ça va être un Québec en train de se morceler, un Québec en train de détruire ses grandes villes, et ça, M. le Président, c'est tout à fait inacceptable.

L'autre question que j'ai, que je me pose et que les citoyens se posent aussi: Qui va payer le coût des défusions? Je citerais, M. le Président, des chiffres ici, là, et les chiffres que je vais vous donner, M. le Président, c'est un minimum, ça pourrait être pire encore parce que je vais vous citer des chiffres qui ont été calculés par le ministère des Affaires municipales. Si on parle simplement des coûts ponctuels, par exemple des coûts reliés à des décisions préalables, c'est-à-dire l'étude sur l'opportunité de défusionner et sur l'organisation municipale et supralocale souhaitée, bien là on parle de 1 million de dollars. Si on parle des référendums, minimum, là, 19 millions de dollars; coûts des définitions des structures, mise en place de comités de transition, embauche des officiers supérieurs puis enjeux syndicaux, bien, pour chaque, c'est 60 millions pour le premier, 10 millions, le deuxième, 500 000 $ pour le troisième. Si on parle des élections ? on va devoir refaire des élections ? 21,5 millions de dollars. Si on parle des coûts de mise en place des nouvelles structures qu'on veut refaire, 100 millions de dollars; coûts de compensation des anciens conseils municipaux, 2 250 000 $. Et ça, c'est simplement les coûts ponctuels. Si on continue avec les coûts plus récurrents, M. le Président, ça augmente encore plus. C'est tout à fait inacceptable, M. le Président. Qui va payer ça? Et c'est ça que j'aimerais savoir, qui va payer le coût de ces défusions-là.

M. le Président, je disais, d'entrée de jeu, que le gouvernement en place est un gouvernement qui sera jugé par l'histoire. L'histoire, M. le Président, peut parfois être très dure. Et, lorsque je regarde les différentes citations dans les journaux, qui un peu partout nous disent que les défusions, c'est la pire chose qui peut arriver pour Montréal... M. le Président, l'histoire jugera ce gouvernement-là. Je suis persuadé, et de plus en plus, que, s'il n'y a pas un vrai coup de barre de la part du gouvernement, ce gouvernement sera jugé comme étant un des pires, un des pires qui a existé pour le Québec moderne.

De plus en plus, les gens se révoltent. Et ce n'est pas simplement... et ce n'est même pas une question de partisanerie, de Parti québécois, de libéraux ou d'adéquistes, M. le Président, c'est des gens de partout, des citoyens, des concitoyens et des concitoyennes qui viennent à mon bureau puis ils disent: Moi, je suis libéral, mais je n'accepte pas du tout ce qui se passe. Je suis révolté de ce qui se passe. On fait reculer le Québec, on fait régresser le Québec, M. le Président. Et ce gouvernement en place, on le voit par ses discours, par ses commentaires, est très arrogant face à la population, ne veut pas écouter la population. On fait passer, en commission parlementaire, à des heures incroyables des groupes qui ont des choses à dire sur des projets de loi. On n'a aucun respect de ces gens-là, des gens qui viennent de la société civile, M. le Président. Et ça, c'est inacceptable.

Et le meilleur test, le meilleur jugement à court terme, qui n'est pas celui de l'histoire, parce que celui de l'histoire viendra un peu plus tard, mais, à court terme, le meilleur jugement va arriver quand même assez rapidement. Dans quatre ans maximum, il y aura élection, M. le Président, et, ce jour-là, les gens en face vont le payer très cher. Il y a beaucoup de ces gens-là qui vont regretter ce qu'ils ont fait, ils vont regretter ce qu'ils ont fait avec le Québec. Mais, malheureusement, pendant ces quatre ans-là, le Québec va régresser, va reculer, et le Québec... ça va faire très mal au Québec. Encore une fois, nous allons devoir reprendre le pouvoir pour régler les choses, mais, cette fois-là, quand on va régler les choses puis on va prendre le pouvoir, on va faire la souveraineté du Québec, puis là on va pouvoir faire les choses qu'on veut. Merci, M. le Président.

Ajournement

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, merci, M. le député. M. le député de Chicoutimi, j'étais pour constater l'heure qu'il est et je me demande... Étant donné l'heure qu'il est, je propose qu'on ajourne nos travaux à demain matin, à 10 heures. Alors, nos travaux sont ajournés à demain matin, à 10 heures.

(Fin de la séance à 23 h 57)