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Version finale

37th Legislature, 1st Session
(June 4, 2003 au March 10, 2006)

Friday, November 28, 2003 - Vol. 38 N° 32

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Table des matières

Affaires courantes

Affaires du jour

Ajournement

Journal des débats

(Dix heures huit minutes)

Le Président: Mmes, MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants.

Je vous remercie. Veuillez prendre place. Veuillez vous asseoir.

Je voudrais, au nom de tous les collègues, souhaiter un bon anniversaire de naissance aujourd'hui à deux de nos collègues, Mme la députée de Matane et M. le député de René-Lévesque.

Affaires courantes

Aux affaires courantes aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles ni présentation de projets de loi.

Dépôt de documents

Dépôt de documents. M. le ministre des Affaires municipales, du Sport et du Loisir.

Projets d'amendement au projet de loi n° 9

M. Fournier: Oui. Merci. Merci de me souffler. M. le Président, je dépose les projets d'amendement que nous avons l'intention de soumettre à la commission de l'aménagement du territoire lors de l'étude détaillée du projet de loi n° 9, Loi concernant la consultation des citoyens sur la réorganisation territoriale de certaines municipalités.

Le Président: Alors, ces documents sont déposés. Nous ferons les copies nécessaires dans les plus brefs délais pour les transmettre aux membres de cette Assemblée. M. le ministre de la Sécurité publique.

Rapports annuels du Commissaire à la déontologie
policière et du Bureau du coroner

M. Chagnon: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel de gestion 2002-2003 du Commissaire à la déontologie policière et le rapport annuel de gestion 2002-2003 du Bureau du coroner.

Le Président: Ces documents sont déposés. M. le ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille.

Rapport annuel du Conseil
de la famille et de l'enfance

M. Béchard: Merci, M. le Président. J'ai l'honneur de déposer le rapport annuel de gestion 2002-2003 du Conseil de la famille et de l'enfance.

n (10 h 10) n

Le Président: Ce document est déposé. Mme la ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

Entente d'échange de renseignements
entre La Financière agricole et l'Office
des producteurs de tabac jaune,
et avis de la CAI

Mme Gauthier: Merci, M. le Président. Alors, je dépose une entente relative à la transmission de données de La Financière agricole du Québec à l'Office des producteurs de tabac jaune du Québec. Ladite entente contient un avis favorable de la Commission d'accès à l'information.

Dépôt de rapports de commissions

Le Président: Ce document est déposé. Au dépôt de rapports de commissions, Mme la présidente de la commission de l'économie et du travail et députée de Bourget. Mme la députée.

Consultations particulières
sur le projet de loi n° 31

Mme Lemieux: Merci, M. le Président. Je dépose le rapport de la commission de l'économie et du travail qui a siégé les 25, 26 et 27 novembre 2003 afin de procéder à des consultations particulières et de tenir des auditions publiques sur le projet de loi n° 31, Loi modifiant le Code du travail.

Le Président: Ce rapport est déposé. M. le président de la commission des finances publiques et député de Laval-des-Rapides.

Consultations particulières
et étude détaillée
du projet de loi n° 24

M. Paquet: Merci, M. le Président. Je dépose le rapport de la commission des finances publiques qui a siégé le jeudi 27 novembre 2003 afin de procéder à des auditions publiques et à l'étude détaillée du projet de loi n° 24, Loi modifiant la Loi sur les coopératives de services financiers. La commission a adopté le texte du projet de loi avec des amendements.

Le Président: Alors, merci, M. le député. Ce rapport est déposé.

Dépôt de pétitions

Au dépôt de pétitions, M. le député de Drummond.

M. Jutras: Alors, je demande le consentement de la Chambre pour déposer une pétition non conforme.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement? Consentement. M. le député de Drummond.

Respecter l'entente fédérale-provinciale
concernant le prolongement
de l'autoroute 30 dans l'axe de la route 132

M. Jutras: Alors, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 7 678 pétitionnaires, concernant le projet de construction de l'autoroute 30 de Sainte-Catherine à l'autoroute 15. Alors, la pétition résulte du Comité de citoyennes et de citoyens en faveur du tracé nord, route 132.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Attendu que nous sommes en désaccord avec la préférence donnée au tracé sud par le Bureau d'audiences publiques, le BAPE;

«L'intervention réclamée se résume ainsi:

«Pour ce motif, nous favorisons le tracé nord à même la route 132.»

Je certifie, M. le Président, que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président: Cette pétition est déposée. M. le député de... M. le député de Drummond.

M. Jutras: Alors, M. le Président, je demande de nouveau le consentement de la Chambre pour déposer une pétition non conforme.

Le Président: Est-ce qu'il y a un consentement? Consentement. M. le député de Drummond.

M. Jutras: Alors, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 187 pétitionnaires. Désignation: la pétition provient du Comité de citoyennes et de citoyens en faveur du tracé nord, route 132. Alors:

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Attendu que l'entente fédérale-provinciale conclue le 6 mars dernier concernant la construction de l'autoroute 30 précise la localisation sur la route 132, l'échéancier, à savoir le début des travaux à l'été 2003, et le financement;

«Attendu que la localisation de la construction de l'autoroute 30 sur la route 132, tronçon Candiac? Sainte-Catherine, est appuyée par la plupart des élus municipaux, un large consensus des décideurs ? organismes et associations ? ainsi que par une majorité de notre population;

«Attendu que cette localisation sur la route 132 respecte également la Loi sur la protection du territoire agricole;

«L'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous sollicitons l'appui du premier ministre, du ministre des Transports, de la ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, du ministre de l'Environnement et du ministre des Affaires municipales, du Sport et du Loisir pour le respect de l'entente fédérale-provinciale conclue le 6 mars dernier concernant la construction de l'autoroute 30 sur la route 132, que la population attend depuis 30 ans.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président: Alors, cette pétition est déposée. Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: M. le Président, je sollicite le consentement de cette Assemblée pour déposer une pétition non conforme.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement? Consentement. Mme la députée de La Pinière.

Préserver et développer le parc d'habitations
à loyer modique, et maintenir les loyers actuels

Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 130 pétitionnaires, locataires d'habitations à loyer modique du comté de La Pinière.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Attendu que le gouvernement du Québec révise ses programmes en habitation et que certaines mesures envisagées menacent directement l'ensemble des familles et des personnes âgées habitant dans les HLM;

«Attendu que le gouvernement du Québec a sabré de 25 % dans les budgets alloués en 2003 à la rénovation des HLM et coupé de 2,3 % leur budget de fonctionnement;

«Attendu que le parc de logement social au Québec constitue un patrimoine précieux pour tous les citoyens et citoyennes à revenus modestes et qu'il est un rouage important de notre filet de protection sociale;

«Attendu que les HLM sont une partie importante de la solution à la pénurie de logements que connaît le Québec;

«Attendu qu'il serait injuste que les plus pauvres de notre société fassent les frais de la baisse des impôts promise par le gouvernement;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous, soussignés, demandons à l'Assemblée nationale de bien vouloir s'assurer que le gouvernement du Québec prenne des mesures énergiques afin de conserver la propriété de ses 65 000 logements à loyer modique, protéger et rénover son parc de logements à loyer modique, maintenir les loyers à 25 % des revenus des locataires à faibles revenus, permettre la réalisation de nouveaux logements publics.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition, M. le Président.

Le Président: Alors, cette pétition est déposée. M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: À mon tour, M. le Président, je demande la permission de déposer deux pétitions non conformes.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour la présentation de deux pétitions non conformes? Consentement. M. le député de Jacques-Cartier.

Maintenir les subventions
pour l'achat de livres
dans les bibliothèques publiques

M. Kelley: Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 2 209 pétitionnaires, citoyennes et citoyens du Québec, de la circonscription électorale de Jacques-Cartier.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«La Bibliothèque publique de Pointe-Claire est une excellente bibliothèque, en constante croissance, et nous sommes très fiers de tous les services qu'elle arrive à offrir à la communauté. Nous demandons au gouvernement du Québec de maintenir son support financier afin de conserver ce niveau d'excellence.

«The Pointe-Claire Public Library is an excellent library with a growing membership and we are extremely proud of the many services it manages to provide. We call upon the Québec Government to continue the financial support that is necessary to this standard of excellence.

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous, les soussignés, membres de la Bibliothèque publique de Pointe-Claire, désirons exprimer notre opposition à toute coupure de subventions proposée par le précédent gouvernement à l'achat de livres et d'autres types de documents.

«We, the undersigned members of the Pointe-Claire Public Library, wish to demonstrate our strong disagreement to the funding cuts proposed by the previous Government for the purchase of books and other types of documents.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président: Alors, cette pétition est déposée. Votre deuxième pétition, M. le député de Jacques-Cartier.

Préserver et développer le parc d'habitations
à loyer modique, et maintenir les loyers actuels

M. Kelley: Deuxième pétition. Je dépose également l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 216 pétitionnaires, citoyennes et citoyens du Québec, de la circonscription électorale de Jacques-Cartier.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Attendu que le gouvernement du Québec révise ses programmes en habitation et que certaines mesures envisagées menacent directement l'ensemble des familles et des personnes âgées habitant dans un HLM;

«Attendu que le gouvernement du Québec a sabré de 25 % dans les budgets alloués en 2003 à la rénovation des HLM et coupé de 2,3 % leur budget de fonctionnement;

«Attendu que le parc de logement social au Québec constitue un patrimoine précieux pour tous les citoyens et citoyennes à revenus modestes et qu'il est un rouage important de notre filet de protection sociale;

«Attendu que les HLM sont une partie importante de la solution à la pénurie de logements que connaît le Québec;

«Attendu qu'il serait injuste que les plus pauvres de notre société fassent les frais de la baisse des impôts promise par le gouvernement;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous, soussignés, demandons à l'Assemblée nationale du Québec de bien vouloir s'assurer que le gouvernement du Québec prenne des mesures énergiques afin de conserver la propriété des 65 000 logements à loyer modique, protéger et rénover son parc de logements à loyer modique, maintenir les loyers à 25 % des revenus des locataires à faibles revenus, permettre la réalisation de nouveaux logements publics.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président: Alors, cette pétition est déposée. M. le député de Marquette.

M. Ouimet: À mon tour, M. le Président, de solliciter le consentement des membres de cette Assemblée pour déposer une pétition non conforme.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement? Consentement. M. le député de Marquette.

n(10 h 20)n

M. Ouimet: Alors, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 435 pétitionnaires, citoyennes et citoyens du Québec, de la circonscription électorale de Marquette.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Attendu que le gouvernement du Québec révise ses programmes en habitation et que certaines mesures envisagées menacent directement l'ensemble des familles et des personnes âgées habitant dans les HLM;

«Attendu que le gouvernement du Québec a sabré de 25 % dans les budgets alloués en 2003 à la rénovation des HLM et coupé de 2,3 % leur budget de fonctionnement;

«Attendu que le parc de logement social au Québec constitue un patrimoine précieux pour tous les citoyens et citoyennes à revenus modestes et qu'il est un rouage important de notre filet de protection sociale;

«Attendu que les HLM sont une partie importante de la solution à la pénurie de logements que connaît le Québec;

«Attendu qu'il serait injuste que les plus pauvres de notre société fassent les frais de la baisse des impôts promise par le gouvernement;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous, soussignés, demandons à l'Assemblée nationale du Québec de bien vouloir s'assurer que le gouvernement du Québec prenne des mesures énergiques afin de conserver la propriété de ses 65 000 logements à loyer modique ? HLM ? protéger et rénover son parc de logements à loyer modique ? HLM ? maintenir les loyers à 25 % des revenus des locataires à faibles revenus et permettre la réalisation de nouveaux logements publics.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président: Alors, cette pétition est déposée. M. le député de Blainville.

M. Legendre: Oui, M. le Président. Je demande le consentement de la Chambre pour déposer une pétition non conforme.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement? Consentement. M. le député de Blainville.

M. Legendre: Merci, M. le Président. Alors, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 180 pétitionnaires. La désignation: locataires d'habitations à loyer modique du comté de Blainville.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Attendu que le gouvernement du Québec révise ses programmes en habitation et que certaines mesures envisagées menacent directement l'ensemble des familles et des personnes âgées habitant dans les HLM;

«Attendu que le gouvernement du Québec a sabré de 25 % dans les budgets alloués en 2003 à la rénovation des HLM et coupé de 2,3 % le budget de fonctionnement;

«Attendu que le parc de logement social au Québec constitue un patrimoine précieux pour tous les citoyens et citoyennes à revenus modestes et qu'il est un rouage important de notre filet de protection sociale;

«Attendu que les HLM sont une partie importante de la solution à la pénurie de logements que connaît le Québec;

«Attendu qu'il serait injuste que les plus pauvres de notre société fassent les frais de la baisse des impôts promise par le gouvernement;

«L'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous demandons à l'Assemblée nationale de bien vouloir s'assurer que le gouvernement du Québec prenne des mesures énergiques afin de conserver la propriété de ses 65 000 logements à loyer modique, protéger et rénover son parc de logements à loyer modique, maintenir les loyers à 25 % des revenus des locataires à faibles revenus et permettre la réalisation de nouveaux logements publics.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président: Cette pétition est déposée. M. le député de Vimont.

M. Auclair: Merci, M. le Président. M. le Président, je demande le consentement de la Chambre pour le dépôt d'une pétition non conforme.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement? Consentement. M. le député de Vimont.

M. Auclair: M. le Président, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale et signée par 75 pétitionnaires, citoyennes et citoyens du Québec, de la circonscription électorale de Vimont.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Attendu que le gouvernement du Québec révise ses programmes en habitation et que certaines mesures envisagées menacent directement l'ensemble des familles et des personnes habitant dans les HLM;

«Attendu que le gouvernement du Québec a sabré de 25 % dans les budgets alloués en 2003 à la rénovation des HLM et coupé de 2,3 % leur budget de fonctionnement;

«Attendu que le parc de logement social au Québec constitue un patrimoine précieux pour tous les citoyens et citoyennes à revenus modestes et qu'il est un rouage important de notre filet de protection sociale;

«Attendu que les HLM sont une partie importante de la solution à la pénurie de logements que connaît le Québec;

«Attendu qu'il serait injuste que les plus pauvres de notre société fassent les frais de la baisse des impôts promise par le gouvernement;

«L'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous, soussignés, demandons à l'Assemblée nationale du Québec de bien vouloir s'assurer que le gouvernement du Québec prenne des mesures énergiques afin de conserver la propriété de ses 65 000 logements à loyer modique ? HLM ? protéger et rénover son parc de logements à loyer modique, maintenir les loyers à 25 % des revenus des locataires à faibles revenus et permettre la réalisation de nouveaux logements publics.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président: Cette pétition est déposée. Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.

Questions et réponses orales

Nous en sommes maintenant à la période des questions et réponses orales, et je cède la parole à M. le chef de l'opposition officielle.

Hausse prévue du compte de taxes à Montréal

M. Bernard Landry

M. Landry: Hier, M. le Président, j'ai parlé au premier ministre de la détresse des familles qui vont payer 1 100 $ de plus. On dit que ce sont les messages qui ne passent pas. On a entendu ça hier. Commentaire: communication, le message ne passe pas. Ce qui ne passe pas, c'est les taxes qui ne passent pas, c'est les factures qui ne passent pas.

J'ai demandé hier au premier ministre ce que réservait le reste de l'année aux contribuables québécois si une famille peut être à 1 100 $ au bout de sept mois. Bien, hélas, ce matin ça continue. Ça continue dans la grande ville de Montréal. Là, c'est des millions de personnes qui sont frappées, et, selon moi, la responsabilité est claire. Il y a 3 % d'augmentation de taxes. La société civile dit que c'est à cause du gouvernement. Le président de la Chambre de commerce, qui dit que c'est le peu d'empressement du nouveau gouvernement à renouveler le pacte fiscal qui est la cause de la détresse financière de la grande ville. Les élus disent la même chose, les élus du peuple, Gérald Tremblay, M. Zampino, qui affirment tous les deux que c'est à cause du non-respect du contrat de ville. Et enfin, La Presse, comme c'est son devoir de commenter, Mme Ouimet dit: «Pendant que les Montréalais ploient sous le poids des taxes, Québec s'en lave les mains.»

Hier, c'étaient des familles dont le fardeau était augmenté de 1 100 $. Aujourd'hui, c'est des millions de Montréalais et de Montréalaises qui subissent le même sort. Pendant la campagne électorale, on a eu des promesses de hausse du niveau de vie et de baisse des taxes, et là ce sont les deux qui se produisent.

S'il n'avait rien à répondre hier et que le message ne passait pas, que va répondre le premier ministre aux Montréalais et aux Montréalaises aujourd'hui?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Jean Charest

M. Charest: M. le Président, s'il y a une chose qui était très claire hier, c'est que le chef de l'opposition officielle, lorsqu'on lui a demandé de faire la démonstration de ces supposées hausses, était incapable de le faire. Il faisait des allégations sur des choses qui n'étaient pas réelles, hein? Il parlait de hausses d'électricité, alors que l'affaire est devant la Régie de l'énergie, M. le Président, juste pour en redonner un exemple. Alors, j'invite le chef de l'opposition officielle à s'en tenir à la vérité quand il se lève au lieu de dire n'importe quoi.

Le Président: M. le leader du gouvernement... M. le leader de l'opposition.

M. Boisclair: Vous avez entendu le premier ministre. Je comprends qu'on doit interpréter le règlement avec une certaine élasticité dans le cas du premier ministre, mais la décence, ça s'applique aussi au premier ministre.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît. Alors, il faut toujours prendre la parole du député. Alors, si vous voulez poursuivre.

M. Charest: Merci, M. le Président. Alors, aujourd'hui, le chef de l'opposition officielle se lève pour parler maintenant de la situation de Montréal alors qu'il sait très bien que les décisions qui sont prises par la ville de Montréal concernent ceux et celles qui sont des élus d'abord à Montréal, hein? Et le budget de dépenses... Ce qu'il n'a pas dit dans sa question, c'est que le budget des dépenses de la ville de Montréal va augmenter de plus de 5 %.

Nous, on a déposé un budget, là, même avec l'impasse budgétaire que vous nous avez laissée, avec une augmentation de dépenses de 3,8 %, en deçà de cela. Et la ville de Montréal, elle choisit d'augmenter ses dépenses. Mais, dans sa litanie de gens qui apparemment blâment toujours le gouvernement du Québec, il nous demande toujours de dépenser de l'argent qu'on n'a pas, et, je remarque, le chef de l'opposition s'inscrit là-dedans depuis les sept derniers mois. À tous les jours il se lève pour nous demander de dépenser à nouveau de l'argent.

n(10 h 30)n

Il a oublié de mentionner l'autre chef de l'opposition, parce que le chef de l'opposition à la ville de Montréal, hier, son ami, M. Bourque, disait que, non, il n'y a pas de tort à mettre... la ville n'a pas raison de mettre la faute sur Québec pour justifier les hausses de taxes alors que la croissance de l'économie montréalaise lui a rapporté davantage de revenus cette année, une belle croissance, entre autres, grâce à l'élection d'un nouveau gouvernement libéral.

Le Président: En question additionnelle, M. le chef de l'opposition.

Règlement du dossier du déséquilibre fiscal

M. Bernard Landry

M. Landry: M. le Président, je serais ravi d'avoir eu tort sur les hausses des frais de garderie. Et, si c'est ce que le premier ministre affirme ce matin, alléluia pour les familles, on recommence à zéro, donc il n'y aura pas de hausse. C'est ça que je comprends de ce qui vient d'être dit. Mais j'ai entendu aussi le premier ministre à plusieurs reprises parler de courage ? sur le dos des familles ? et d'une bataille en règle qu'il devait livrer contre Ottawa.

Il y a un déséquilibre fiscal de 50 millions par semaine, 2,5 milliards par année, et on a des comptes à recevoir, au ministère des Finances, contre Ottawa, de 3 milliards au moins, au moins, liste conservatrice. Dans ces conditions, joignant les mots «courage» et «bataille en règle», est-ce que le premier ministre pourrait faire sa bataille contre le gouvernement central plutôt que contre les familles du Québec?

Le Président: Alors, c'était une question principale. M. le premier ministre.

M. Jean Charest

M. Charest: Il faut noter un élément qui est constant dans le discours du chef de l'opposition et de son parti, c'est qu'ils ne sont jamais, eux, responsables de rien. Moi, depuis que je suis à l'Assemblée nationale du Québec, jamais, je n'ai pas une seule fois entendu ce parti, ses représentants assumer une seule responsabilité. Là, dans sa première question, dans le cas de la ville de Montréal, ce n'est pas de leur faute, à Montréal, c'est de la faute de Québec. Là, maintenant, c'est de la faute d'Ottawa. C'est toujours la faute de quelqu'un d'autre, hein?

Alors, j'aimerais dire au chef de l'opposition que, nous, on a été élus justement pour faire des changements. Et dans les changements qu'on propose, là où vous avez échoué dans, justement, vos relations avec nos voisins, que ce soit l'Ontario, le Nouveau-Brunswick ou avec l'État fédéral, nous, on va réussir, puis on va réussir avec des résultats. Mais on ne prendra pas la même approche que vous avez prise, parce que ça n'a pas marché, ça a été un échec lamentable. Et, malheureusement, le résultat de tout ça, M. le Président, c'est l'état des finances publiques au Québec. Les citoyens les plus taxés en Amérique du Nord, c'est ça que vous nous avez légué. Des pertes à la Caisse de dépôt, c'est ça que vous nous avez légué. Le legs personnel du chef de l'opposition officielle, c'est des centaines de millions de dollars qui ont été brûlés littéralement à la SGF à cause de son irresponsabilité.

Le Président: En question additionnelle, M. le chef de l'opposition officielle.

Performance économique du Québec

M. Bernard Landry

M. Landry: Le premier ministre fait une grave erreur en disant qu'on n'admet pas que nous soyons responsables de quoi que ce soit. Nous sommes responsables de la meilleure année économique de l'histoire du Québec: 2002.

Des voix: Bravo!

M. Landry: J'avoue et confesse la responsabilité du plus bas taux de chômage de l'histoire contemporaine du Québec.

Des voix: Bravo!

M. Landry: J'avoue et...

Le Président: Vous êtes en question principale.

M. Landry: Mais non! On n'est jamais responsables de rien. J'avoue et confesse cinq ans de déficit zéro, ce n'était pas arrivé depuis 50 ans. Nous plaidons coupables!

Des voix: ...

Le Président: M. le leader. Un instant, s'il vous plaît! M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: M. le Président, le chef de l'opposition pourrait faire un mea culpa pour le 14 avril.

Le Président: S'il vous plaît! Ce n'est pas une question de règlement, M. le leader. Alors, M. le chef de l'opposition est en question principale. Si vous voulez continuer.

M. Landry: Et je vais faire, juste avant ma question, un dernier aveu: la plus importante baisse d'impôts sur le revenu des particuliers de l'histoire du Québec, je confesse.

Et je demande au premier ministre: Quand il pourra afficher un bilan économique comparable et quand il cessera d'augmenter le fardeau des contribuables plutôt que le baisser?

Le Président: M. le premier ministre.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! J'entends... j'entends vos soufflements. M. le premier ministre. À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Jean Charest

M. Charest: J'entends la députée de Taillon d'ici, de mon fauteuil, M. le Président, qui sans doute est en train d'étaler la stratégie qu'elle nous avait annoncée le soir des élections...

Le Président: À la question, M. le premier ministre.

M. Charest: Hein, elle avait dit que ça allait brasser. D'ailleurs, c'est tellement bon que son chef a suivi ses instructions, il est allé parler aux gens de la FTQ, les gens qui étaient devant la colline parlementaire, en sous-traitant, il y a quelques jours, avec un beau résultat, à part de cela. Alors...

Des voix: ...

Le Président: À la question, M. le premier ministre. S'il vous plaît! À la question.

M. Charest: Le chef de l'opposition veut parler de son bilan, on va parler de tout son bilan, hein? Il parle de déficit zéro, alors qu'il a ajouté, quoi? 14 milliards de dollars sur la dette, elle est au niveau le plus élevé qu'elle n'a jamais été dans l'histoire du Québec. Il dit qu'il a baissé les impôts, après les avoir augmentés 14 fois, incluant la taxe de vente. Il prétend, M. le Président, que l'économie québécoise fonctionnait bien, alors qu'on a toujours les citoyens les plus taxés en Amérique du Nord. La Caisse de dépôt et de placement a perdu 13,2 milliards de dollars, en grande partie dû à sa négligence et à son irresponsabilité, alors qu'on lui a demandé d'administrer la Caisse...

Des voix: ...

Le Président: Alors, M. le premier ministre, on ne peut pas traiter un député d'irresponsable... et de négligence. Alors, le règlement... Alors, je vous demanderais de retirer ces propos.

M. Charest: ...laquelle je faisais référence, M. le Président.

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le premier ministre, est-ce que vous voulez retirer ces propos?

M. Charest: Permettez, M. le Président, c'est à la gestion que je faisais référence. Alors, c'est clarifié, hein? Alors, c'est clair.

Alors, M. le Président, à cela s'ajoute un chef de l'opposition qui, quand il était premier ministre, disait emprunter de l'argent à 6 %, endettait les Québécois... à 5 % ou à 6 %, pour en retourner, pour la SGF... Oui, vous avez brûlé des centaines de millions de dollars d'argent. Oui. Vous riez. Il rit, M. le Président! C'est justement, vous avez assez ri, vous vous êtes assez moqués des contribuables québécois, on va mettre fin à ça.

Le Président: Je voudrais informer tous les membres de cette Assemblée: on doit s'adresser à la présidence, non pas s'adresser d'un député à l'autre. En question principale, M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Dumont: Oui, merci, M. le Président. Alors, ces jours-ci, évidemment, un peu partout dans le Québec, les citoyens et les citoyennes du Québec s'inquiètent, avec raison...

M. Boisclair: ...

Le Président: Question de règlement, oui.

M. Boisclair: Je veux juste comprendre, on serait rendus à la quatrième principale?

Le Président: Oui, on est rendus à la quatrième principale.

Des voix: ...

Le Président: Non, non. Écoutez...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! Vous connaissez ma grande neutralité, M. le leader; j'ai donné trois questions principales à M. le chef de l'opposition. Alors, c'est la quatrième question et c'est M. le député de Rivière-du-Loup.

Accroissement de l'utilisation
de certains médicaments dans les centres
d'hébergement et de soins de longue durée

M. Mario Dumont

M. Dumont: Et les citoyens et les citoyennes du Québec s'inquiètent, et avec raison, de ce qui se passe dans les centres d'hébergement, dans les CHSLD, des conditions de vie qui y règnent, conditions de vie que, dans une entrevue du mois d'octobre, la porte-parole du groupe Handicap-Vie-Dignité, qui s'occupe des conditions de vie dans les CHSLD, conditions de vie qu'elle décrivait comme scandaleuses. Le gouvernement... Évidemment, le ministre de la Santé, en prenant son poste, avait devant lui une foule d'avertissements à ce sujet, du Vérificateur général, de la Commission des droits de la personne, d'ordres professionnels, de nombreuses associations de citoyens.

n(10 h 40)n

Et je veux lui parler aujourd'hui, parmi toutes les conditions de vie, de la contention chimique, de l'utilisation des médicaments antidépresseurs et autres médicaments pour le système nerveux. Les dépenses en médicaments dans les CHSLD de Montréal seulement, de 2000 à 2002, sur une période de deux ans, sont passées de 3,7 millions à 6,1 millions, une augmentation de 65 %.

Est-ce que le ministre de la Santé ne pense pas qu'il y a abus de la contention chimique, qui a un effet direct sur les conditions de vie de nos aînés?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Philippe Couillard

M. Couillard: Oui, M. le Président, effectivement, le problème de la contention physique et chimique a été évalué, entre autres dans plusieurs rapports dont a fait état le député de Rivière-du-Loup. Une politique très claire à ce sujet a été acheminée dans les établissements, et on s'attend que, dans chaque établissement, dans chaque région, elle soit suivie avec discernement et célérité. Parce qu'il est certain que l'abus de contention chimique, effectivement, par les effets secondaires que cela peut entraîner, peut, par exemple, entraîner des chutes ou des problèmes aggravés chez nos patients dans les CHSLD, et les actions ont été prises, M. le Président, dans ce domaine-là, et on est conscient du problème.

Le Président: En question additionnelle, M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui. Est-ce que le ministre, qui cette semaine a parlé d'un groupe de travail interne, à l'intérieur de son ministère, qui vérifie un certain nombre de choses qu'on ne sait pas exactement qui vérifie, on ne sait pas exactement qu'est-ce qui est vérifié... est-ce qu'il ne considère pas que des sujets comme celui que je viens d'aborder, que le fait que la contention physique ? des gens attachés ? soit plus utilisée au Québec qu'ailleurs, que ces éléments-là justifieraient qu'une commission d'enquête soit faite de façon publique, et qu'au vu et au su de l'ensemble de la population du Québec on puisse aller voir et discuter de comment nos personnes âgées vont être hébergées au Québec dans l'avenir?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Philippe Couillard

M. Couillard: M. le Président, effectivement, le groupe de travail auquel fait allusion le député de Rivière-du-Loup est en place depuis déjà plusieurs semaines au ministère, avant même les événements tragiques que nous avons connus au cours des derniers jours. Je voudrais certainement corriger ses propos, il ne s'agit pas d'un groupe de vérification, il s'agit d'un groupe d'action pour poser des gestes concrets à court, moyen et long terme pour améliorer la qualité de vie des patients dans les institutions.

Maintenant, quant aux enquêtes, nous avons posé les premiers gestes, vous savez, avec l'enquête locale au niveau de l'établissement dont il a été question récemment. Il y a eu énormément d'enquêtes au cours des dernières années, du Vérificateur général, de la Commission des droits de la personne. On y reviendra, je suppose, plus tard au cours des débats. On apprenait hier que la Commission des droits de la personne, également, désire se livrer à une enquête. Cette hypothèse n'est pas écartée totalement, mais, à l'heure actuelle, il me semble que les Québécois ont surtout besoin d'action plus que d'une commission d'enquête.

Le Président: Dernière question additionnelle, M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui. Est-ce que le ministre peut nous confirmer ce que la porte-parole de Handicap-Vie-Dignité affirmait, que, dans les 414 décès violents identifiés, de l'année 1990 à 2002, de plus en plus de cas ne sont même plus portés à l'attention du coroner et qu'en dépit de la loi qui rend ces déclarations obligatoires plusieurs morts suspectes, maintenant, dans les centres d'hébergement ne sont même plus portées à l'attention des coroners?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Philippe Couillard

M. Couillard: Bien, M. le Président, je n'ai pas d'éléments concrets qui me permettent de relever cette affirmation-là. Je pense que les cas de décès inhabituels ou suspects sont, dans les faits, signalés au coroner et aux autorités compétentes, d'après les informations dont je dispose.

Le Président: En question principale, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.

Mise en oeuvre d'un plan d'action visant
l'amélioration des conditions de vie dans les centres
d'hébergement et de soins de longue durée

Mme Louise Harel

Mme Harel: Merci, M. le Président. En 2002, pour améliorer la qualité des services des personnes hébergées, le gouvernement adoptait les orientations ministérielles relatives à l'utilisation exceptionnelle des mesures de contrôle: contention, isolement et substances chimiques, et adoptait également un plan d'action qui accompagnait ces orientations. Toujours en 2002, il mettait en place un comité de travail sur lequel siégeait, entre autres, M. Léon Lafleur, directeur général de Saint-Charles-Borromée à ce moment-là. Ce comité de travail a finalisé au printemps un rapport intitulé Un milieu de vie de qualité pour les personnes hébergées en CHSLD, que l'actuel gouvernement a rendu public en début d'octobre et qu'il faut maintenant implanter.

Au début de ce document, dans les remerciements adressés par le ministère aux personnes participant à ce comité de travail, on peut y lire: «Une préoccupation constante et engagée d'offrir aux personnes âgées un milieu de vie de qualité, une attitude respectueuse et humaniste envers nos aînés nous ont permis d'asseoir une réflexion commune permettant de mieux répondre aux besoins des personnes âgées hébergées»... et parlait d'une participation exceptionnelle des personnes impliquées au sein de ce comité. Je crois que c'est le plus bel hommage posthume qu'on peut rendre à M. Léon Lafleur.

Alors, ma question au ministre de la Santé: Quel est le calendrier d'implantation de ces orientations intitulées Un milieu de vie de qualité pour les personnes hébergées en CHSLD et quels sont les moyens financiers qui seront fournis aux CHSLD pour les réaliser?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Philippe Couillard

M. Couillard: Alors, je vais joindre également mes hommages à ceux de la députée d'Hochelaga-Maisonneuve pour la contribution de M. Léon Lafleur à ce cadre de référence sur le milieu de vie des patients.

Effectivement, les actions ont commencé dès la publication de ce rapport. Je pense qu'au cours des derniers jours il y a eu ici même une lettre du sous-ministre en titre à la Santé qui a été déposée, qui donnait des instructions précises à toutes les régions pour, dès maintenant, identifier les personnes dans les établissements et au niveau régional pour s'assurer du suivi et de la mise en place de ce cadre de fonctionnement.

Plus loin... de façon plus, je dirais, concrète, également, M. le Président, nous allons, suite aux travaux du groupe de travail dont nous parlions plus tôt, bientôt annoncer des actions concrètes à court terme, encore une fois, autant qu'à moyen et long terme, qui vont dans le sens de ce qui a été évoqué dans le rapport, en particulier des visites préventives chez les personnes âgées, dans un but de prévention des chutes, et d'autres méthodes, et également et de façon importante, je crois, M. le Président, une visite de 4 000 personnes, dans le Québec, sur les 40 000 qui sont hébergées actuellement, faite par une équipe d'experts indépendants, dirigée dans les établissements où il y a eu un plus grand nombre de plaintes au cours des dernières années, qui devrait nous permettre vraiment d'en savoir plus long sur la situation. Et on aura là d'ailleurs beaucoup d'informations, suite à cette opération-là qui pourrait aller dans le sens de ce que demandait tantôt le député de Rivière-du-Loup. Et également, on va s'assurer d'améliorer le signalement et le problème des plaintes et de la qualité des services dans tous les établissements, autant dans le réseau privé que dans le réseau public.

Le Président: En question principale, M. le député de... en question additionnelle, M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Léandre Dion

M. Dion: Merci, M. le Président. Vous me permettrez d'abord de saluer les représentants de la Fédération de l'âge d'or du Québec qui nous visitent aujourd'hui et qui sont dans nos tribunes.

Le Président: Votre question, M. le député.

M. Dion: Alors, M. le Président, est-ce que le ministre se rend compte qu'il vient de nous dire qu'il va investir de l'argent... il va faire des choses pour faire face aux plaintes qui sont faites au sujet des services donnés à nos personnes âgées dans les centres d'hébergement, mais se rend-il compte que nous avions investi 40 millions supplémentaires, récurrents, pour justement régler ces questions-là, et qu'il a réduit le 40 millions à 10 millions? 30 millions de moins, c'est beaucoup d'argent.

Alors, comment est-ce qu'il va régler ça? Comment est-ce qu'il peut expliquer que ça ne nuit pas aux services aux personnes âgées?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Philippe Couillard

M. Couillard: M. le Président, je voudrais également saluer les membres de la Fédération de l'âge d'or, qui d'ailleurs collaborent avec nos équipes dans plusieurs dossiers actuellement.

Pour ce qui est des ressources financières, est-il utile de rappeler encore une fois, M. le Président, que le budget, ou le prébudget déposé ne reposait pas sur de l'argent réel? Je pense que c'est bien connu maintenant.

Des voix: ...

Le Président: M. le ministre.

M. Couillard: Et j'inviterais d'ailleurs l'opposition ? et je veux garder le niveau des discours à celui qu'on observe jusqu'à maintenant ? à la plus grande prudence lorsqu'il est question des ressources attribuées dans ce réseau-là au cours des dernières années. Lorsqu'on parle d'un paysage où 4 000 lits de soins prolongés ont été fermés entre 1994 et 2000, lorsqu'on parle d'un contexte où les dépenses réelles en soins à domicile pour les personnes âgées ont baissé de 7 % dans la même période, où les dépenses d'hébergement dans le programme PAPA, programme d'accès pour les personnes en perte d'autonomie, ont été maintenues au niveau de l'inflation malgré la hausse importante de la clientèle, il faut être extrêmement prudents dans toutes les remarques qu'on ferait sur l'attribution des ressources, autant matérielles que financières.

Le Président: En question principale, Mme la députée de Taillon.

Avenir des établissements d'enseignement collégial

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. Le ministre de l'Éducation, lors de l'interpellation de vendredi dernier, nous disait vouloir faire des changements importants au niveau des cégeps et nous a d'ailleurs aussi accusés à ce moment-là de semer l'inquiétude et d'ameuter la population à propos d'une éventuelle abolition des cégeps.

Alors, je voudrais, ce matin, M. le Président, qu'il rassure la population et qu'il nous dise que ni lui ni son ministère ne travaillent sur des scénarios d'abolition des cégeps.

n(10 h 50)n

Le Président: M. le ministre de l'Éducation.

M. Pierre Reid

M. Reid: Oui, M. le Président. S'il faut maintenir des accusations du fait que l'opposition agite des épouvantails depuis le 14 avril, je pense que je les maintiens, M. le Président. Et, là-dessus, ce matin, il est clair, et c'est connu, M. le Président, que notre gouvernement n'a jamais eu l'intention, n'a pas l'intention et ne fera pas d'abolition de cégeps, d'aucune façon.

J'aimerais vous lire, M. le Président, un court extrait d'un discours que j'ai prononcé il y a quelques semaines, en fait le 13 novembre, en face de tous les directeurs et les directrices des collèges, des cégeps du Québec, et dans lequel... Le discours commence de la façon suivante: «Le gouvernement du Québec a fait de l'éducation une priorité ? c'est sur Internet d'ailleurs, tout le discours au complet. À cet égard...»

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît!

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! On a souligné la présence de personnes dans nos galeries tantôt, j'aimerais qu'ils puissent continuer à entendre correctement les questions et les réponses. M. le ministre de l'Éducation.

M. Reid: M. le Président, je pense qu'on a dit qu'on va le lire, je pense que ce serait bon effectivement qu'on lise les discours qui sont écrits là-dessus, parce que, si on avait lu ce discours, on éviterait de poser une question qui continue à brandir un épouvantail d'abolition de cégeps, M. le Président.

Alors, je reprends, si vous me permettez, M. le Président: «À cet égard...» C'est court, M. le Président, c'est un paragraphe; si on me permet de le lire.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Ça allait bien depuis 10, 15 minutes, là. Alors, à la question, et, si vous voulez me parler à moi directement, M. le ministre, j'apprécierais.

M. Reid: D'accord, M. le Président. Je continue: «À cet égard, nous avons pris de nombreux engagements qui vont se concrétiser tout au long du mandat. Un de ces engagements est de renforcer le rôle des cégeps en particulier dans le développement économique, le développement social et le développement culturel des régions du Québec. Cet engagement a pris encore plus d'ampleur depuis le 14 avril dernier», M. le Président, et c'est notre position.

Le Président: En question additionnelle...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! Je remarque souvent que c'est les gens les plus expérimentés dans cette salle qui parlent le plus souvent quand ils n'ont pas la parole.

Maintenant, en question additionnelle, Mme la députée de Taillon.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. Est-ce que le ministre peut nous dire à ce moment-là à quoi servira le forum auquel il nous convie concernant le collégial, et nous dire aussi s'il a l'intention de produire un document d'orientation pour la préparation de ce forum, et quand nous fera-t-il connaître son point de vue à cet égard?

Le Président: M. le ministre de l'Éducation.

M. Pierre Reid

M. Reid: M. le Président, je suis désolé que les réponses se trouvent dans le discours qui ne semble pas avoir été lu.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le ministre de l'Éducation.

M. Reid: Oui, M. le Président. C'est vraiment la réponse à la question, et elle est écrite, et elle est écrite clairement. Ça va être plus court.

Alors, il est possible que le forum... Et je disais... je m'adressais aux directeurs des collèges et des cégeps: «Il est possible aussi que le forum vous demande beaucoup plus, car il y a fort à parier que de solides remises en question seront lancées sur la place publique. Si c'est le cas, vous aurez un rôle central et crucial à jouer pour nous assurer que les collèges, avec ou sans modifications majeures ? avec ou sans modifications majeures, M. le Président ? continuent d'être des joueurs essentiels dans le développement du Québec et le développement de ses régions», M. le Président.

Le Président: En question principale, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

Statut de la Clinique communautaire
de Pointe-Saint-Charles

Mme Louise Harel

Mme Harel: M. le Président, dans le quartier Saint-Henri?Sainte-Anne, les citoyens membres de la Clinique communautaire de Pointe-Saint-Charles ont manifesté récemment leur colère devant le bureau de leur députée.

Dans un communiqué de presse, la Clinique rappelle que la députée de Saint-Henri?Sainte-Anne s'était engagée publiquement, le printemps dernier, devant les citoyennes et citoyens de son comté à ce que son gouvernement injecte dès la première année de son mandat 600 millions de dollars dans les services à domicile.

Au lieu de cela, déplore le coordonnateur général de la Clinique, le Parti libéral du Québec propose une réforme de structures et l'abolition des CLSC et va détruire ce que les citoyennes et citoyens ont construit ensemble au cours des 30 dernières années.

Ma question au ministre de la Santé: Que répond-il à la population de Pointe Saint-Charles et aux gens de la Clinique communautaire? Entend-il reconnaître le caractère distinct de cette Clinique et respecter les acquis réalisés par des approches et des pratiques préventives et communautaires?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Philippe Couillard

M. Couillard: M. le Président, j'ai eu l'occasion de dire plusieurs fois qu'il n'a jamais été question de disparition des CLSC ou d'abolition des CLSC.

Au contraire, leur mission, combien essentielle, va se trouver rehaussée par une meilleure intégration qui va bénéficier à tous les patients du Québec, particulièrement les personnes âgées dont il question, M. le Président. Quant à la...

Des voix: ...

Le Président: M. le ministre.

M. Couillard: Quant à la Clinique communautaire de Pointe-Saint-Charles, M. le Président, il faut expliquer à la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, qui le sait certainement mais a peut-être oublié de le faire remarquer, que la clinique dont elle parle est un établissement classifié dans la catégorie des établissements privés conventionnés, donc qui n'est pas dans le réseau public au sens technique du terme et qui ne sera donc pas visée par les opérations d'intégration que le projet de loi n° 25 prévoit. Par contre, ça ne dispensera pas la Clinique communautaire Pointe-Saint-Charles ? et ma consoeur de Saint-Henri?Sainte-Anne leur a déjà parlé à cet effet-là, et bien sûr ils s'engagent dans cette direction ? ça ne les dispensera pas de s'intégrer de façon la plus harmonieuse possible à l'ensemble du réseau.

Le Président: En question additionnelle, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Louise Harel

Mme Harel: Oui. Alors, M. le Président, doit-on comprendre que, suite aux représentations de la députée de Saint-Henri?Sainte-Anne, la Clinique communautaire de Pointe-Saint-Charles, qui est privée conventionnée à statut CLSC, avec disposition dans l'actuelle loi pour accorder une mission de CLSC, se voit amenée à être exclue du brassage de structures et peut donc considérer qu'elle pourrait être mise à l'abri et protégée de ce qui s'en vient?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Philippe Couillard

M. Couillard: M. le Président, s'il y a bien un projet dans le réseau de la santé et des services sociaux qui n'est pas un projet de structure mais un projet clinique, un projet de soins et de services, c'est bien ce projet-là, et on aura l'occasion d'y revenir, M. le Président, et de nombreuses personnes, d'ailleurs, commencent à le noter et le remarquer. On parlait de sites Internet tantôt. Je suggère d'aller voir dans le site Internet de la Régie régionale de la Montérégie ? la députée de Taillon, de son côté, pourra la guider vers ce site-là ? il y a un excellent document sur le bénéfice que va apporter l'intégration des missions pour la population du Québec, M. le Président.

Le Président: En question principale, Mme la députée de... En question additionnelle, Mme la députée de Pointe-aux-Trembles.

Mme Nicole Léger

Mme Léger: Merci, M. le Président. Est-ce que le ministre de la Santé et des Services sociaux peut s'engager formellement en cette Chambre à assurer la protection des enveloppes de financement dédiées aux organismes communautaires en santé mentale, dans sa grande crise de structurite, plutôt que de se faire dire par les autorités gouvernementales qu'ils sont dans un processus de guichet unique, de rationalisation et de réingénierie, sans aucune compassion?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Philippe Couillard

M. Couillard: M. le Président, on le sait, nous l'avons indiqué clairement, le domaine de la santé mentale est un des domaines prioritaires dans lequel nous devons agir, entre autres en raison des importants retards que nous avons pris au cours des dernières années dans ce domaine comme dans d'autres. Et il est certain que toute action en santé mentale ne peut réussir sans la participation du milieu communautaire. Ce sont des partenaires essentiels que nous allons continuer à intégrer à nos démarches, M. le Président.

Le Président: En question principale, Mme la députée de Bourget.

Processus de consultation des citoyens
concernant la réorganisation municipale

Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: Merci, M. le Président. M. le Président, le ministre a déposé ses amendements aujourd'hui au sujet du projet de loi n° 9, et il les a baptisés pompeusement de «processus de consultation des citoyens précis et transparent». On constate, M. le Président, que le mot «simple» n'y apparaît pas, et c'est avec raison, parce que c'est tout sauf simple. M. le Président, les défusions ne sont plus un risque; depuis ce matin, vendredi 28 novembre, elles sont devenues une certitude.

n(11 heures)n

M. le Président, est-ce que le ministre est conscient que, selon les règles qu'il propose, à peu près 1 000 personnes à Montréal peuvent faire éclater Montréal, à peu près 3 000 personnes à Québec pourront faire éclater Québec, à peu près 2 600 personnes à Gatineau feront éclater Gatineau, à peu près 1 700 personnes à Lévis peuvent faire éclater Lévis, à peu près 1 300 personnes à Sherbrooke pourront faire éclater Sherbrooke...

Le Président: Question.

Mme Lemieux: Est-ce que le ministre est conscient qu'avec ces règles nous nous dirigeons directement dans un mur et nous allons faire éclater ces nouvelles villes?

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: M. le Président, ce que nous déposons avec les amendements d'aujourd'hui, c'est une démarche équilibrée qui nous permet de faire une consultation de laquelle va émerger une légitimité. Pourquoi une légitimité? C'est parce qu'il y a eu, dans le gouvernement qui a précédé, une démarche de fusions forcées sans aucune légitimité, sans aucun contact vers la population. Si on veut aller vers la population, il faut s'assurer que les règles qui amènent cette consultation fassent émerger une légitimité. On ne veut pas répondre à une fusion illégitime par une défusion illégitime. Cependant, puisque nous sommes engagés à avoir une consultation, nous allons la tenir avec des règles précises, avec un cadre qui permet de préserver une agglomération qui sert l'ensemble des citoyens, et, en bout de ligne, M. le Président, non seulement nous aurons des villes grandes, nous aurons des villes fortes parce que nous y aurons associé les citoyens de ces villes.

Le Président: En question additionnelle. Mme la députée de Bourget.

Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: Merci, M. le Président. Le ministre se rend-il compte que Montréal peut éclater à partir du vote positif de 0,6 % de la population? M. le Président, donner le droit de vie ou de mort aux nouvelles villes à 0,6 % de la population, donner un droit de veto à ces électeurs défusionnistes, ce n'est pas ça, consulter les citoyens.

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: M. le Président, je pense que le projet de loi... Jusqu'à un certain point, la question aurait pu être posée, là, au mois de juin dernier, parce que les règles qui sont connues maintenant avec les amendements ont quelques degrés plus stricts et plus précis évidemment qui font émerger une légitimité. Je suis surpris que tout à coup la question arrive avec, quoi? quatre, ou cinq, ou six mois de retard. En bout de piste, en bout de piste, l'engagement que nous avons pris en octobre 2000 était de consulter les anciennes villes qui n'ont pas été consultées lors des fusions forcées que vous leur avez passées dans la gorge.

Je sais que vous êtes contre les consultations, on le sait depuis longtemps que vous êtes contre les consultations. Nous voulons consulter les citoyens, nous mettons des règles...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Si vous voulez conclure. Si vous voulez conclure, M. le ministre.

M. Fournier: L'écoute, M. le Président, ça commence ici aussi. Si on ne veut pas consulter, écoutons au moins.

Le Président: Alors, si vous voulez conclure, M. le ministre.

M. Fournier: En bout de piste, l'engagement qu'on a pris, c'est qu'il y aura une consultation des citoyens dans les anciennes villes avant ces fusions forcées. Elle va se tenir, cette consultation, selon des règles équilibrées qui permettent de faire émerger une légitimité. Il va y avoir une agglomération telle que l'engagement que nous avions pris, qui va être préservée pour l'ensemble et le bénéfice de tous les citoyens. En bout de ligne, ce que nous faisons, c'est ce que nous avions dit que nous allions faire de manière précise, transparente, équilibrée, au bénéfice des citoyens.

Le Président: En question principale, M. le député de Nicolet-Yamaska.

Projet de prolongement de l'autoroute 30
au sud de Candiac, Delson et Saint-Constant

M. Michel Morin

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Merci, M. le Président. En octobre 2002, la Commission de protection du territoire agricole émettait un avis défavorable à la construction de l'autoroute 30 en zone agricole, ce qui n'a tout de même pas empêché le Parti libéral de faire fi de ces recommandations et de s'engager, lors de la campagne électorale, à construire quand même cette autoroute en zone agricole. Lors de l'étude des crédits, et la ministre s'en souviendra, en juillet 2003, la ministre de l'Agriculture était aux prises avec sa promesse électorale, avec l'avis défavorable de la Commission et elle l'a mandatée à nouveau, la Commission, afin d'émettre de nouveaux commentaires sur un nouveau tracé en zone agricole. Depuis cette date, aucune nouvelle de la ministre, aucune nouvelle de la Commission, pas de réponse à ma lettre sur ce sujet au mois de septembre.

Ma question à la ministre de l'Agriculture: Pendant que les députés de Châteauguay, de La Prairie et de Vaudreuil affirment haut et fort que l'autoroute 30 va bel et bien passer en zone agricole, est-ce que la ministre de l'Agriculture entend finalement prendre position et un peu freiner l'ardeur de ses collègues dans ce dossier et rassurer le monde agricole, qui manifeste actuellement devant les bureaux du député de Châteauguay aujourd'hui même?

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! À l'ordre! Mme la ministre déléguée aux Transports.

Mme Julie Boulet

Mme Boulet: Alors, merci, M. le Président. J'aimerais dire au collègue le député de Nicolet-Yamaska qu'effectivement, nous, on a annoncé nos couleurs en campagne électorale. Alors, que ce soit le député de Châteauguay, le député de La Prairie et le premier ministre, on l'a dit, qu'on était en faveur du tracé sud. On n'a pas fait comme eux avec les fusions municipales. Alors, on l'a dit pendant qu'on était en campagne électorale.

Des voix: ...

Le Président: Mme la ministre.

Mme Boulet: Alors, les gens qui ont voté pour nous, M. le Président, savaient pertinemment que c'était le tracé sud qui était le tracé retenu. Le BAPE a également retenu le tracé sud. Nous savons pertinemment que certains agriculteurs n'apprécient pas le tracé sud. Le ministère du Transport du Québec est en relation avec eux pour mettre des mesures d'atténuation, et chacun des agriculteurs qui sera touché sera pleinement compensé. Alors, M. le Président, ce qu'on veut, c'est une véritable voie de contournement à la ville de Montréal, et le tracé sud est celui qui permet d'atteindre cet objectif.

Le Président: En question additionnelle, M. le député de Drummond.

M. Normand Jutras

M. Jutras: Alors, M. le Président, est-ce que la ministre des Transports va tenir compte des signatures des 8 000 personnes, les pétitions ont été déposées aujourd'hui, qui sont contre le tracé de la 30 en terres agricoles et qui veulent plutôt que ce soit sur la 132? Au lieu de faire une porte ouverte, là, comme elle veut faire cet après-midi, alors que les gens travaillent... une soirée de consultation un vendredi soir. D'autant plus, M. le Président, qu'aux agriculteurs s'ajoute le mécontentement des citadins et s'ajoute en plus le mécontentement des camionneurs, qui disent que le trajet ne sera pas sécuritaire.

Alors, est-ce que...

Des voix: ...

Le Président: Un instant! Je vais vous laisser poser votre question. Évidemment, vous avez commencé avec une question. Là, vous avez tombé dans un préambule. Vous auriez été mieux de venir en principale. Alors, si vous voulez poser votre question.

M. Jutras: Je pensais que le critère, c'était «est-ce que».

Le Président: Non, non, ce n'est pas «est-ce que», c'est le critère de l'article du règlement. Alors, si vous voulez poser votre question.

M. Jutras: Alors, est-ce que la ministre, au lieu de faire pire, va tenter de faire mieux puis va tenir compte de l'opinion des citoyens?

Le Président: Alors, Mme la ministre déléguée aux Transports.

Mme Julie Boulet

Mme Boulet: Alors, M. le Président, le député me dit qu'il y a eu 8 000 personnes qui ont signé contre le tracé sud. Moi, je peux lui dire qu'il y en a eu 15 000 qui ont signé pour le tracé sud. Il y en a eu 15 000. Deuxièmement, un autre argument, le tracé sud est moins dispendieux que le tracé nord. Si, pour vous, dans votre saine gestion, ça ne vous dérange pas, nous, on est préoccupés parce que vous nous avez laissés avec une dette, au ministère du Transport du Québec, qui nous coûte 600 millions de dollars par année avant qu'on ait mis une cenne sur le réseau routier.

Des voix: ...

Le Président: Si vous voulez conclure rapidement.

Mme Boulet: Troisièmement, effectivement, que le député lise l'article jusqu'à la fin ? pour bien saisir ou comprendre un article, il faut le lire au complet ? et, dans l'article, les gens de l'Association des camionneurs disent: «En aucun temps, nous ne remettons en cause le projet.» Alors, on va s'assurer... Écoutez, M. le Président, on va s'assurer que le tracé... La sécurité sera l'élément déterminant pour la définition finale du tracé, et on va protéger les territoires agricoles.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le député de...

M. Chenail: Huntingdon.

n(11 h 10)n

Le Président: C'est ça, Huntingdon. C'est bon. Quand vous voulez parler, M. le député, vous levez, je vais vous donner la parole.

En question additionnelle, M. le député de Beauharnois.

M. Serge Deslières

M. Deslières: Merci, M. le Président. Est-ce que la ministre déléguée aux Transports peut nous confirmer ce matin que l'échéancier de mise en oeuvre du tronçon autoroutier entre les villes de Candiac et Sainte-Catherine prévu à l'entente signée au mois de mars dernier entre le gouvernement fédéral et le gouvernement précédent va être respecté? Prévu, cet échéancier, je le rappelle à la ministre, pour 2008. Je parle bien du tronçon entre Candiac et Sainte-Catherine. Est-ce qu'elle peut nous confirmer ça ce matin?

Le Président: Mme la ministre déléguée aux Transports.

Mme Julie Boulet

Mme Boulet: J'aimerais rassurer le collègue, M. le Président, la définition du tracé, qu'il soit sud ou nord, n'affecte en rien l'entente qui a été conclue avec le fédéral. Les travaux seront commencés en temps et lieu, quand on sera prêt.

Le Président: Alors, ceci met fin à la période de questions et réponses orales.

Des voix: ...

Motions sans préavis

Le Président: S'il vous plaît! Comme il n'y a pas de votes reportés, nous allons passer à la rubrique des motions sans préavis. M. le leader du gouvernement.

Proposer que l'Assemblée se réunisse le lundi
1er décembre 2003, à compter de 10 heures

M. Dupuis: Je vais rétablir la satisfaction, M. le Président. Conformément à l'article 21 de notre règlement, je fais motion pour que l'Assemblée se réunisse lundi prochain, le 1er décembre 2003, à compter de 10 heures.

Mise aux voix

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée? Adopté.

Motions sans préavis. Mme la députée de Crémazie.

Souligner le travail de l'AFEAS promouvant
la non-violence par sa campagne
annuelle Opération Tendre la main

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. Alors, je sollicite aujourd'hui le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale de Québec souligne le travail de l'AFEAS qui, grâce à sa campagne annuelle de sensibilisation sur les impacts négatifs de la violence Opération Tendre la main, qui se tiendra, pour sa septième édition, du 23 novembre au 7 décembre 2003, fait la promotion de comportements non-violents, particulièrement envers les jeunes, les personnes âgées et les femmes.»

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour... Est-ce qu'il y a consentement pour la présentation de cette motion? Consentement. Mme la députée de Crémazie.

Mme Michèle Lamquin-Éthier

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, il me fait plaisir, à titre de comarraine avec ma collègue la députée de Terrebonne, de souligner le travail de l'AFEAS dans sa lutte contre la violence faite aux femmes, aux personnes âgées et aux jeunes. Vous me permettrez d'abord, Mme la Présidente, de vous remercier d'accueillir la tenue de cet événement à l'Assemblée nationale.

Mme la Présidente, personne n'est à l'abri...

Des voix: ...

La Vice-Présidente: Mme la députée. Alors, s'il vous plaît, tel qu'on vous le demande à chaque jour, ceux qui doivent quitter pour aller en commission, je vous demande de le faire en silence. Mme la députée.

Mme Lamquin-Éthier: Merci, Mme la Présidente. Alors, Mme la Présidente, comme vous le savez, personne n'est à l'abri de la violence, et ce, peu importent l'âge, le sexe, la couleur ou encore le milieu économique. Dans le cadre de sa septième campagne annuelle de sensibilisation contre la violence, l'AFEAS cible cette année la violence sexuelle. Cette violence touche autant les enfants, les adolescents que les adultes de tous âges.

La violence sexuelle, Mme la Présidente, ne l'oublions pas, a pour but de satisfaire un besoin sexuel sous la contrainte. Le viol et l'inceste en sont des manifestations, tout comme le harcèlement sexuel, les rapports sexuels forcés sous l'emprise de l'alcool ou des drogues et l'exploitation sexuelle par la prostitution ou la pornographie.

La violence sexuelle se cache derrière la peur, la culpabilité et la honte. Elle marque profondément les personnes qui en sont victimes, elle laisse les âmes meurtries et génère la maladie, la dépression psychologique, des comportements autodestructeurs et même des pensées suicidaires.

Tous peuvent subir la violence sexuelle, hommes ou femmes, jeunes ou vieux, riches ou pauvres. Malheureusement, la majorité des victimes sont des femmes et des enfants. Selon Statistique Canada, en 1998, 56 % des victimes d'agression sexuelle de sexe féminin étaient âgées de moins de 18 ans et 25 % d'entre elles avaient moins de 12 ans. Ces adolescentes, Mme la Présidente, sont généralement agressées par un membre de leur famille ou une personne de leurs connaissances.

De plus, une étude de 1999, de la Direction de la santé publique de Montréal-Centre, menée auprès d'adolescentes de 14 à 19 ans, montre que 54 % d'entre elles rapportent avoir été agressées sexuellement dans le cadre d'une relation amoureuse. Malheureusement, 25 % d'entre elles refuseront généralement d'en parler parce que leur agresseur emploiera la menace, la force... l'achat du silence ou d'autres formes de contraintes physiques ou psychologiques pour les réduire au silence, un silence derrière lequel se cache une souffrance intolérable, une souffrance qui ne cessera de grandir au quotidien.

Selon Santé Canada, dans le cas d'inceste en particulier, les enfants ne parleront pas de leur situation avant d'avoir atteint l'âge adulte; sinon, ils n'en parleront jamais. Quant aux agresseurs, la plupart du temps, ils sont bien connus de leurs victimes, et la majorité sont des hommes, environ 25 % sont des adolescents. Plus de 40 % des agresseurs d'enfants reconnus ont été agressés sexuellement dans leur enfance. Et c'est regrettable que le temps ne permette pas d'évoquer davantage les statistiques; elles sont, à proprement parler, très alarmantes.

Alors, il est donc important, Mme la Présidente, de supporter les initiatives qui ont pour but de montrer et de nommer la violence afin de la prévenir ou de la diminuer, et de susciter des changements de comportement en dénonçant ses effets, effets qui sont lourds de conséquences, tant pour les personnes qui en sont victimes que pour la société tout entière.

Tous les petits gestes pour contrer la violence peuvent faire la différence. C'est donc dans cet esprit que ma collègue la députée de Terrebonne et moi-même vous invitons à participer au lancement québécois de cette septième campagne annuelle de sensibilisation qui se déroule cet après-midi, à 11 h 30, dans le hall principal de l'hôtel du Parlement.

Nous serons heureuses de vous accueillir en grand nombre, avec les membres du conseil d'administration de l'AFEAS. Tous ensemble, témoignons de notre solidarité et de notre volonté de mettre un terme à la violence, à la violence faite contre les femmes, les personnes âgées et les jeunes. Je vous remercie, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, Mme la députée. Je reconnais maintenant la députée de Terrebonne et porte-parole de l'opposition officielle en matière de condition féminine. Mme la députée.

Mme Jocelyne Caron

Mme Caron: Merci, Mme la Présidente. À nouveau, cette année, Mme la Présidente, au nom de ma formation politique, je participe, avec la députée de Crémazie, à titre de comarraine à l'Opération Tendre la main, de l'Association féminine d'éducation et d'action sociale, l'AFEAS.

J'aimerais saluer les représentantes de l'AFEAS qui sont ici présentes parmi nous aujourd'hui: Mme Diane Breault, présidente; Mme Hélène Cornellier, coordonnatrice de l'événement; Mme Mariette Gilbert, première vice-présidente; Mme Francine Raynault, deuxième vice-présidente; les conseillères, Mme Claudette Cousineau, Denise Thibeault, Lucie Turgeon; et Mme Lise Girard, secrétaire générale.

Mme la Présidente, c'est la septième année déjà que les 17 000 membres de l'AFEAS mènent une campagne de sensibilisation tournée vers l'action, et ça, dans toutes les régions du Québec, pour contrer la violence. Je les félicite pour leur implication constante. Elles sont persuadées ? et elles ont raison ? que c'est par des gestes au quotidien que nous pouvons changer la réalité. Je salue le travail accompli par ces quelque 400 groupes locaux et 12 groupes régionaux de l'AFEAS qui réalisent une campagne directement dans leurs milieux respectifs.

n(11 h 20)n

Mme la Présidente, je ne reviendrai pas sur les statistiques très tristes énoncées par ma collègue la députée de Crémazie; elles sont réelles. Cette violence, elle se vit au quotidien. C'est une affaire de comportements et d'attitudes inacceptables qu'il faut changer. Mme la Présidente, c'est une question de contrôle de personnes contre d'autres personnes qui a des conséquences désastreuses évidemment pour les victimes, mais aussi pour tout le milieu familial et pour toute la société. C'est un rapport de domination sur les victimes. C'est une question de domination sur les femmes principalement ? on l'a dit, les statistiques sont très claires ? sur les enfants et sur les personnes âgées. Ce rapport de domination fait que la personne victime ne peut pas se défendre, elle se retrouve sous une autorité, et cette violence-là, on l'a dit, elle commence très souvent au niveau verbal, elle commence par du harcèlement psychologique, elle se transforme en violence physique et, bien sûr, il y a aussi, et c'est ce que nous soulignons aujourd'hui, la violence sexuelle.

Mme la Présidente, la violence, elle se vit dans le silence, dans la peur, dans la terreur. La violence est un cycle qu'il faut briser. Nous devons tout mettre en oeuvre pour que les comportements changent, pour que cesse cette violence qui laisse des séquelles physiques et psychologiques qui détruisent les personnes dans leur intégrité et dans leur dignité humaine. La violence, elle est insidieuse, elle est évolutive. Au début, elle n'attire pas l'attention. Mais aujourd'hui, nous voulons briser le silence, briser le silence parce que les victimes sont isolées, peu à peu les victimes se considèrent même comme les coupables, comme les responsables, elles perdent toute confiance en elles-mêmes.

Et ce qui est peut-être le plus triste, Mme la Présidente, c'est que cette violence, elle fait d'autant plus mal qu'elle est souvent, et très souvent, et très largement exercée ? ma collègue l'a dit ? par un être que l'on aime, par un être en qui l'on a confiance, que ce soit un père, que ce soit un frère, que ce soit l'être aimé, que ce soit le conjoint, l'ex-conjoint, donc par un être en qui on a eu un rapport, un rapport très près, et cela vient fausser tous les rapports qu'on peut avoir après dans notre vie par rapport aux êtres humains. Comment peut-on vivre après quand notre propre parent a exercé cette violence sur nous? Comment peut-on vivre après et croire que les autres êtres humains vont être bons et corrects avec nous? Et c'est ça qui fait peut-être le plus mal. Et pour l'entourage, comment comprendre qu'une personne que l'on connaît, que l'on apprécie, peut se transformer en une personne qui peut faire autant de mal? C'est ça, la réalité, Mme la Présidente.

Donc, nous devons poursuivre notre action, et c'est ce que l'AFEAS fait. J'invite donc tous nos parlementaires de cette Assemblée, tous ceux et celles qui travaillent à l'Assemblée nationale, ceux et celles qui vont nous visiter, à participer au dévoilement, à 11 h 30, dans le hall d'entrée, de l'Arbre de paix. Peut-être rappeler que cet Arbre de paix, que l'AFEAS installe un petit peu partout dans toutes les régions du Québec, il est décoré de rubans blancs qui représentent les femmes et les enfants tués au cours de l'année, de mains tendues identifiant les groupes d'aide sur la violence et d'une chaîne humaine personnifiant le réseau d'entraide nécessaire pour changer les mentalités.

Mme la Présidente, je souhaite que cette campagne, cette Opération Tendre la main 2003 rejoigne le plus grand nombre possible de personnes, donne le maximum de résultats. Et je remercie à nouveau l'AFEAS et ses membres pour tout le travail accompli directement sur le terrain et j'espère qu'ensemble nous arriverons, un jour, à la tolérance zéro.

La Vice-Présidente: Merci, Mme la députée. Je reconnais la députée de Lotbinière. Madame.

Mme Sylvie Roy

Mme Roy: Merci, Mme la Présidente. Alors, il me fait plaisir, au nom de mon équipe parlementaire, de prendre la parole aujourd'hui pour souligner l'Opération Tendre la main. Cette année, l'Opération se déroule du 23 novembre au 7 décembre. L'Association féminine d'éducation et d'action sociale organise, depuis 1997, cette opération qui vise à sensibiliser la population à la violence faite aux femmes, aux personnes âgées et aux jeunes et aussi à reconnaître les ressources d'aide pour les personnes victimes de violence et les personnes ayant commis des actes violents.

Au cours de l'Opération Tendre la main, tous les participants et participantes sont invités à monter des arbres de paix dans leurs communautés et autres lieux publics à travers le Québec. L'Arbre de paix est un concept amérindien qui nous vient des provinces de l'Est, là où vivaient les nations iroquoises. L'Arbre de paix vient rappeler que la violence, trop souvent silencieuse, se vit chaque jour, même durant la période des fêtes, ces fêtes synonymes de paix et de solidarité. Autour de l'Arbre de paix sont rassemblées toutes les personnes désireuses de travailler à créer un climat dénué de toute violence. Les rubans blancs, dont la forme de v inversé dit «non à la violence», représentent les femmes et les enfants décédés par la violence conjugale et familiale. Ces rubans développés par l'Association féminine d'éducation et d'action sociale sont distribués aux participantes et participants qui sont invités à porter ce symbole de paix.

Quelle que soit la forme de violence, qui que soit la victime, la violence demeure toujours inacceptable. On peut penser aisément que la violence est banalisée par la télévision, les journaux et Internet; il n'en demeure pas moins que nous sommes tous responsables de cette banalisation. Je vous invite donc à participer à l'Opération Tendre la main. Je vous invite à faire un arbre de paix dans votre coin de pays. Je vous invite à discuter avec les jeunes de ce sujet qu'est la violence et, surtout, je vous invite à les écouter vous parler de la violence; vous serez surpris du réalisme de leurs propos.

Je remercie chaleureusement l'Association féminine d'éducation et d'action sociale pour ces opérations qui font que tant de Québécoises et de Québécois vous tendent la main. Je vous remercie, Mme la Présidente.

Mise aux voix

La Vice-Présidente: Alors, il n'y a pas d'autre intervenant. Est-ce que cette motion est adoptée? Adopté.

À la rubrique Avis touchant les travaux des commissions, il n'y a pas d'avis.

Aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée, pas de questions.

Affaires du jour

Alors, la période des affaires courantes étant terminée, nous allons maintenant passer aux affaires du jour. M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: Oui, je vais vous demander de prendre en considération l'article 27 de notre feuilleton, Mme la Présidente.

Projet de loi n° 194

Prise en considération du rapport
de la commission qui en a fait l'étude détaillée

La Vice-Présidente: Alors, à l'article 27, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de la culture sur le projet de loi n° 194, Loi proclamant le Jour commémoratif du génocide arménien.

Y a-t-il des interventions? Il n'y a pas d'intervention.

Mise aux voix du rapport

Alors, le rapport de la commission de la culture portant sur le projet de loi n° 194, Loi proclamant le Jour commémoratif du génocide arménien est-il adopté?

Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté. M. le leader du gouvernement, s'il vous plaît. C'est adopté, M. le leader.

M. Dupuis: Ah! Excusez-moi, Mme la Présidente, j'avais... j'étais distrait, mais à bon escient et à bon droit. Alors, j'apprécierais que vous appeliez l'article 27.

Et je demanderais le consentement pour déroger à l'article 230 de notre règlement.

Adoption

La Vice-Présidente: Alors, est-ce qu'il y a consentement pour déroger à l'article 230? Je comprends qu'il y a consentement.

Alors, à l'article 27, M. le député de l'Acadie propose l'adoption du projet de loi n° 194, Loi proclamant le Jour commémoratif du génocide arménien.

Alors, est-ce qu'il y a des interventions? M. le député de l'Acadie et adjoint parlementaire à la ministre des Relations internationales et responsable de la Francophonie.

M. Yvan Bordeleau

M. Bordeleau: Merci, Mme la Présidente. Alors, le 12 novembre dernier, en cette Chambre, j'ai eu le privilège de présenter le projet de loi n° 194, loi intitulée Loi proclamant le Jour commémoratif du génocide arménien. J'aimerais donc, Mme la Présidente, profiter du temps qui m'est alloué aujourd'hui pour faire connaître de façon exhaustive, à tous nos concitoyens du Québec, le drame du génocide arménien et, conséquemment, les raisons qui sous-tendent la présentation de ce projet de loi.

Auparavant, je voudrais remercier sincèrement tous mes collègues pour leur appui tout le long du processus d'adoption de ce projet de loi. Il me fait plaisir également de souligner la collaboration remarquable de l'opposition officielle, ce qui fait en sorte que la communauté arménienne pourra être témoin de l'unanimité de tous les parlementaires de l'Assemblée nationale en regard de la reconnaissance du génocide arménien.

Un remerciement bien particulier à tous ceux et celles qui sont intervenus aux différentes étapes du processus législatif: la députée de Fabre et ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration, le député de Laval-des-Rapides, le député de Mercier, la députée d'Hochelaga-Maisonneuve et la députée de Prévost. Un merci spécial au député de Mercier, qui a, avec empressement, donné tout son appui à ce projet de loi, et, Mme la Présidente, nous devrions considérer que le projet de loi n° 194 est, dans les faits, un projet de loi conjoint des députés de l'Acadie et du député de Mercier.

n(11 h 30)n

M. le Président... Mme la Présidente, je m'excuse, mentionnons d'abord que le peuple arménien a une longue histoire. En effet, nous constatons que la fondation de la capitale d'Arménie, soit la ville d'Erevan, a eu lieu en 782 avant Jésus-Christ et qu'en 190, toujours avant Jésus-Christ, l'arménien était reconnu comme langue officielle de l'État arménien. L'histoire fait ensuite mention de la proclamation du christianisme comme religion d'État dont le 1 700e anniversaire a été célébré à Montréal, en mai 2001, au cours d'une cérémonie oecuménique durant laquelle j'ai eu l'occasion de rencontrer Sa Sainteté Karekine II, Suprême Patriarche et Catholicos de tous les Arméniens. L'histoire nous apprend encore qu'au cours du premier siècle après Jésus-Christ les Arméniens furent victimes de multiples occupations territoriales. En effet, ce peuple fier et courageux n'a jamais cessé de lutter pour protéger son territoire et se faire respecter par les autres peuples. Je tenais à apporter ces quelques précisions, Mme la Présidente, pour démontrer d'entrée de jeu jusqu'à quel point ce peuple dont l'histoire remonte à plus de 3 000 ans mérite notre respect et notre admiration.

Or, après des siècles de résistance mais aussi d'une croissance exemplaire, les Arméniens tombent, en 1908, sous la gouverne du Parti des Jeunes Turc qui, faisant fi de la signature de l'Accord russo-turc sur les Réformes arméniennes signé en 1914, fomente, selon tous les faits historiques consignés, l'extermination du peuple arménien soi-disant, Mme la Présidente, afin de maintenir à tout prix la supériorité de l'élément turc. De fait, le 24 avril 1915, 600 notables arméniens, représentant l'élite politique, religieuse et intellectuelle, sont arrêtés et assassinés à Constantinople. Au cours des huit années suivantes, ce sont plus de 1 million et demi d'Arméniens qui ont péri ou survécu en prenant la fuite. L'exil devint alors le seul salut possible.

Mme la Présidente, le génocide arménien n'est pas le fruit de fabulation ni de fiction. L'extermination des populations arméniennes d'Anatolie à la faveur d'une déportation générale est bien documentée. Les déportations s'étendirent à tout le pays et furent planifiées avec soin en passant d'une région à une autre. La dépêche officielle reçue à la préfecture d'Alep contenait le message suivant, et je cite: «Il a été précédemment communiqué que le gouvernement, sur l'ordre du Comité Union et Progrès, a décidé d'exterminer entièrement tous les Arméniens habitant en Turquie. Ceux qui s'opposeraient à cet ordre et à cette décision ne pourraient faire partie de la forme gouvernementale. Sans égard pour les femmes, les enfants et les infirmes, quels que puissent être les moyens d'extermination, sans écouter les sentiments de la conscience, il faut mettre fin à leur existence.» Et cette dépêche était signée par le ministre de l'Intérieur du gouvernement alors en place, un certain Talaat. Ainsi, comme en fait foi le texte de cette dépêche, la coordination fut bel et bien assurée par des représentants du gouvernement central de l'époque et par des sections du Comité Union et Progrès. Mais les conditions d'exécution de cette déportation furent délibérément si dures que peu nombreux furent ceux et celles qui parvinrent à leur destination finale.

D'autre part, des témoignages très clairs viennent alors ajouter à la véracité historique. Premièrement, M. Henry Mongenthau, ambassadeur des États-Unis en Turquie de 1913 à 1918, écrit dans ses mémoires, et je cite: «Quand les autorités turques ont donné ordre d'effectuer ces déportations, ils condamnaient à la mort une nation entière; ils comprenaient très bien cela et, dans leurs conversations avec moi, ils ne firent aucune tentative particulière pour rectifier ou atténuer ces faits.» Simultanément, le consul américain Jackson, en poste justement à Alep, disait pour sa part, et je cite: «C'est sans aucun doute une démarche planifiée qui visait à exterminer la race arménienne.» Son collègue, Leslie A. Davis, consul américain à Harput, mentionnait ce qui suit: «Ce mouvement était d'abord et avant tout très bien organisé et constituait le massacre le plus terrible que ce pays n'ait jamais connu.»

De plus, le consul d'Allemagne, le Dr Rossler, transmettait, le 27 juillet 1915, au chancelier le message suivant: «Les rapports que je vous ai adressés jusqu'à présent, par télégramme ou par lettre, vous auront montré, je pense, que le gouvernement turc a pris des mesures qui dépassent de très loin les nécessités d'une défense justifiée contre les machinations réelles ou supposées des Arméniens et qu'en réalité, en étendant aux femmes et aux enfants des dispositions que les autorités ont reçu l'ordre d'appliquer de la manière la plus stricte et la plus intraitable, il poursuit consciemment la destruction aussi radicale que possible du peuple arménien en ayant recours à des moyens inspirés de l'Antiquité et qui sont indignes d'un gouvernement qui se veut l'allié de l'Allemagne.» Fin de la citation.

Voilà, Mme la Présidente, des témoignages concrets de personnes crédibles qui étaient sur place au moment où les événements se sont produits et qui ont pu agir comme des observateurs objectifs de la réalité.

Peut-être serait-il bon, Mme la Présidente, de préciser ce qu'il convient d'appeler un génocide, tel que défini dans la convention des Nations unies du 9 décembre 1948. Il peut s'agir de l'un ou l'autre ou de plusieurs des actes ci-après commis dans l'intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux, soit le meurtre de membres du groupe, l'atteinte grave à l'intégrité physique ou mentale des membres du groupe, la soumission intentionnelle du groupe à des conditions d'existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle, les mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe, le transfert forcé d'enfants d'un groupe à un autre groupe. S'appuyant sur cette définition, force nous est de constater que, dans le cas du peuple arménien, plusieurs de ces actes commis se sont soldés par la disparition de plus de 1 million et demi de victimes hommes, femmes et enfants.

L'histoire nous apprend encore qu'à la fin de la Deuxième Guerre mondiale, soit de 1945 jusqu'en 1974, c'est-à-dire pendant plus de 29 ans, Mme la Présidente, des mémoires ont été présentés à plusieurs reprises devant l'Organisation des Nations unies afin que l'on reconnaisse ce qu'il était convenu d'appeler le problème arménien. D'ailleurs, en 1984, le Tribunal permanent des peuples consacre sa session d'avril à la Sorbonne au génocide arménien et fait ses recommandations à l'effet que l'Organisation des Nations unies et chacun de ses membres sont en droit de réclamer cette reconnaissance et d'assister le peuple arménien à cette fin.

Du côté de la France, en 1981, dans une déclaration à l'Assemblée nationale française, M. Claude Cheysson, ministre des Affaires extérieures, reconnaît explicitement le génocide arménien de 1915. Suivra, en janvier 1984, la reconnaissance explicite du président français, M. François Mitterrand, qui, dans une allocution désormais historique, affirme, et je cite: «Il n'est pas possible d'effacer la trace du génocide qui vous a frappés, il faut que cela s'inscrive dans la mémoire des hommes.» Fin de la citation. Plus récemment, l'Assemblée nationale française adoptait un texte paraphé par le président Chirac visant également la reconnaissance du génocide arménien.

En 1982, c'est le Congrès chypriote qui entérine à son tour une proposition de reconnaissance. Cette dernière fut suivie en 1985 de celle de la sous-commission des Nations unies pour la protection des minorités, et, en 1987, une motion du Parlement européen affirmait l'existence du génocide arménien.

Parallèlement, du côté des autorités religieuses, l'Assemblée mondiale des Églises, le Vatican, l'Union américaine des congrégations hébraïques se sont tous, au cours des années quatre-vingt, également prononcés positivement quant à la reconnaissance du génocide. Par la suite, ce furent les Parlements russe, israélien, bulgare qui rendirent hommage aux victimes du génocide et qui reconnurent cet événement comme tel.

n(11 h 40)n

Tous ces pays et organismes qui, au cours des dernières décennies, ont reconnu la réalité du génocide arménien se sont joints à d'autres qui avaient déjà agi dans le même sens, notamment l'Argentine, la Belgique, la Grèce, l'Italie, la Suède, l'Uruguay. C'est dans la suite de ces gestes courageux, posés par plusieurs intervenants internationaux, que le Québec s'est inscrit, en présentant, avec régularité depuis 1980, une motion de commémoration du génocide arménien adoptée à l'unanimité des parlementaires.

Ainsi, comme nous pouvons le constater, l'existence du génocide arménien, Mme la Présidente, est déjà reconnue sur le plan international par plusieurs pays qui, ce faisant, dénoncent de façon claire ces actes d'intolérance inadmissibles et font en sorte que toutes les sociétés en tirent les leçons importantes sur le plan du respect des droits et de la vie humaine. Je me permets d'insister ici sur le fait que ces reconnaissances successives et diverses sont issues d'autorités responsables, crédibles et fiables.

Rappelons-nous l'indifférence manifestée trop longtemps autour du génocide arménien ? le premier génocide du XXe siècle ? par les autorités internationales de l'époque, et cette absence de manifestation claire a avant tout servi de prétexte à Adolf Hitler pour lancer, en 1939, sa propre campagne d'épuration ethnique à l'endroit des communautés juives. Pour se justifier et renforcer la poursuite de ses objectifs inacceptables, Hitler posait avec cynisme la question suivante: «Qui se souvient du génocide arménien?» Et c'est ainsi, Mme la Présidente, que plus de 6 millions de Juifs ont par la suite péri d'une façon atroce.

Dans le contexte de nos valeurs de société et par sympathie pour nos concitoyens d'origine juive, je rappelle donc que, le 15 décembre 1999, l'Assemblée nationale du Québec adoptait à l'unanimité le projet de loi n° 198, intitulé Loi proclamant le Jour commémoratif de l'Holocauste-Yom Hashoah au Québec. Ce projet de loi fut sanctionné le lendemain même, soit le 16 décembre 1999. C'est dans le même esprit que nous voulons, dans le projet de loi n° 194, officialiser la date commémorative du 24 avril en souvenir des victimes qui ont connu l'horreur du génocide arménien. Sans vouloir tenter de refaire l'histoire, il faut se poser la question suivante: si la communauté internationale avait réagi plus promptement au génocide arménien, aurions-nous pu éviter de vivre le drame de l'Holocauste?

Il est inconcevable qu'à l'aube de ce nouveau millénaire nous en soyons encore à devoir justifier la pertinence d'une légitime reconnaissance de faits que l'histoire a maintes et maintes fois reconnus à travers des preuves et des témoignages bien fondés. Cependant, nous nous devons d'apporter certaines précisions importantes en regard du génocide arménien. Il est bien entendu qu'il ne s'agit aucunement ici de rendre responsables les autorités turques actuelles ou le peuple de Turquie de ces événements survenus il y a plus de 88 ans. Une lecture attentive du projet de loi n° 194 permet de constater notre grande préoccupation à ce niveau.

Par contre, laisser passer sous silence l'extermination d'une large proportion du peuple arménien serait admettre que de telles horreurs puissent se répéter. Ce serait plus précisément abdiquer, par un silence condamnable, devant tant de cruautés de l'homme envers l'homme, et ce serait renier, Mme la Présidente, le droit à la justice et à la dignité auquel a droit tout humain, quelle que soit sa race ou sa nationalité. Il est révoltant que nous soyons encore aujourd'hui trop souvent témoins de massacres et de génocides inadmissibles. Pensons aux drames récents du Cambodge, du Rwanda, du Kosovo, de certaines tribus indiennes de l'Amérique du Sud. Comme parlementaires, nous devons réagir.

Très récemment, la Fédération internationale des droits de l'homme a appelé le gouvernement turc à reconnaître le génocide arménien. Mme la Présidente, nous ne pouvons que souhaiter que les gouvernements turc et arménien actuels puissent un jour s'entendre sur les gestes concrets à poser quant à la reconnaissance de cette tragédie. Nous serions alors les premiers à manifester notre très grande satisfaction envers ces deux gouvernements qui pourraient alors, sans oublier, tourner la page sur ces événements tragiques et entamer, avec volonté et ouverture de part et d'autre, des relations empreintes de respect et tournées vers un avenir que nous souhaitons tous plus harmonieux et pacifique.

Au Québec, Mme la Présidente, la communauté arménienne, tout en participant de façon significative à l'essor du Québec, permet, par sa persévérance et sa détermination, de sensibiliser tous les Québécois à l'existence de ces événements inadmissibles et nous donne l'occasion de réaffirmer notre volonté de défendre sans concession les valeurs de respect et de démocratie si fondamentales à notre société.

Permettez-moi, Mme la Présidente, de vous mentionner que j'ai eu l'occasion et le grand privilège de côtoyer, depuis plus de 14 ans à titre de député de l'Acadie, la communauté arménienne de mon comté pour laquelle j'ai la plus grande admiration. compte tenu de son attachement à sa culture d'origine, à ses traditions, à ses valeurs et à sa fidélité à la mémoire des personnes disparues lors du génocide arménien. La persévérance de ce peuple à vouloir rendre justice à ses concitoyens, qui ont été victimes ou témoins impuissants des événements d'avril 1915, est manifeste. Cette volonté de faire reconnaître le génocide arménien a été assumée par toutes les générations qui se sont succédé depuis le début du siècle.

Sur un plan plus personnel, je voudrais vous faire part du fait que j'ai eu comme voisin immédiat la famille Seropian qui comprenait, en plus des deux parents, deux garçons de même que les grands-parents. J'ai vu grandir ces enfants dans le respect des grands-parents qui ont certes facilité la transmission des valeurs et de la culture arméniennes de même que la mémoire du génocide arménien. Récemment, Aram, l'aîné de la famille, s'est marié dans la plus pure tradition arménienne avec le sentiment de devoir perpétuer ce qui constitue l'essence de sa communauté. Le grand-père, maintenant décédé, serait certes très fier de son petit-fils, et ce qu'il a déjà dit, il y a quelques années, prend encore plus de signification aujourd'hui, et je cite: «Quand je vois mes enfants et mes petits-enfants autour de moi, bien vivants, je suis heureux et je peux parler du génocide avec plus de détachement.» Vous comprendrez, Mme la Présidente, que les Arméniens plus âgés, mais aussi les plus jeunes, bien qu'ils souhaitent bien se tourner vers l'avenir, ne peuvent pas oublier ce qui est arrivé à leurs grands-parents, parents ou amis lors du drame de 1915. En parlant comme il le faisait alors, le grand-père Seropian voyait probablement la mémoire de ces événements présente à jamais dans les yeux de son petit-fils Aram.

Depuis plus de 23 ans, l'Assemblée nationale du Québec rend hommage unanimement à la mémoire des victimes du génocide, le 24 avril, en votant une motion de commémoration que j'ai eu le privilège de présenter depuis mon arrivée, en 1989. Aussi, il est clair pour tout le monde, Mme la Présidente, que l'objectif recherché par le présent projet de loi est empreint de dignité et d'humanité et se veut un message clair et positif pour les générations futures: le respect de la vie humaine est primordial et nous devons bannir toutes formes d'intolérance et de racisme fondées sur l'origine ethnique, religieuse ou sexuelle. Comme le Canada et le Québec constituent des démocraties reconnues où les valeurs et les conditions de vie sont enviées à travers le monde, il est tout à fait justifié qu'à travers ses élus la population québécoise reconnaisse la douleur de nos concitoyens arméniens et contribue ainsi à assurer un meilleur avenir à l'humanité tout entière.

Je suis donc honoré de pouvoir aujourd'hui, Mme la Présidente, me faire le porte-parole de mes collègues de l'Assemblée nationale pour traduire, dans cet acte législatif, la reconnaissance du génocide arménien, reconnaissance vivement attendue depuis plus de 88 ans par les descendants de ce peuple si violemment opprimé au fil des siècles. Par ce projet de loi, le Québec posera un geste de sympathie à l'égard de nos concitoyens arméniens et réitérera notre volonté très ferme de prioriser le respect humain.

n(11 h 50)n

Je souhaite vivement, Mme la Présidente, que tous les parlementaires de cette Assemblée adoptent à l'unanimité le projet de loi n° 194. J'en appelle, en terminant, à la bonne volonté de tous ceux et celles qui sont de près ou de loin concernés par cette reconnaissance officielle du Jour commémoratif du génocide arménien afin qu'elle soit non pas un sujet de discorde, mais bien une manifestation de notre attachement profond à nos valeurs de justice et de respect des droits de l'homme. C'est en ce sens que je voterai avec l'ensemble des membres de cette Assemblée pour l'adoption du projet de loi n° 194, Loi proclamant le Jour commémoratif du génocide arménien. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député. Je reconnais immédiatement la députée de Prévost et porte-parole de l'opposition officielle pour les communautés culturelles et l'immigration. Mme la députée.

Mme Lucie Papineau

Mme Papineau: Je vous remercie, Mme la Présidente. Je suis très heureuse aujourd'hui de me lever en cette Chambre pour l'adoption de ce projet de loi n° 194 et souligner, Mme la Présidente, la belle unanimité par laquelle l'ensemble des membres de cette Assemblée se sont exprimés en faveur du projet de loi n° 194 proclamant le 24 avril de chaque année Jour commémoratif du génocide arménien.

Je veux également féliciter le député d'Acadie pour avoir persévéré à mener à bien ce projet de loi qui vise à accompagner les Arméniens et les Arméniennes de toutes générations dans cette souffrance qui résulte des grandes tragédies de ce siècle. Il participe aujourd'hui à l'officialisation de son initiative, et j'en suis fort heureuse pour lui, mais aussi pour l'ensemble de la communauté arménienne qui reçoit enfin la reconnaissance souhaitée et méritée.

Lors de l'étude détaillée, le député d'Acadie a très bien su expliquer l'essence de ce projet de loi. Permettez-moi de reprendre ici quelques pans de ses propos qui vont comme suit: «Alors, essentiellement, il s'agit de confirmer la réalité du Jour commémoratif et pour quelle raison on trouve important de le faire. C'est que, d'abord, c'est un devoir de mémoire pour un grand nombre de concitoyens et concitoyennes du Québec qui ont vécu ces événements-là, et ces événements font partie, au fond, de leur réalité. Je pense à la communauté arménienne. Et on a par rapport à ça, je pense, comme gouvernement ? et on l'a fait à plusieurs reprises dans différents dossiers ? on a des devoirs, comme parlementaires, de mémoire, de rappeler peut-être certains événements qui sont douloureux afin qu'on en tire des leçons et que, comme société, on s'oriente de façon telle à ce que ce genre d'événement ne se reproduise pas.» Fin de la citation.

Je considère donc, pour ma part, que nous avons accompli un de nos devoirs de partenaire en choisissant d'aller au-delà des motions et de discours et en inscrivant cet événement douloureux de l'histoire de l'humanité dans l'esprit de la collectivité pour un projet de loi. Outre ce devoir législatif, je me dois de revenir aussi sur notre devoir de mémoire, d'autant plus que cette valeur a été évoquée à plusieurs reprises par mes collègues les députés ainsi que par moi-même lors du discours d adoption du principe et lors des discussions en commission, lors de l'étude article par article.

En effet, il est du devoir de notre société de se remémorer ces événements afin que toutes et tous soient sensibilisés à l'existence de ce génocide et que nous réaffirmions aussi notre refus de l'intolérance, de l'exclusion ethnique et de l'extermination des peuples. Il y a 17 ans, cette Assemblée nationale, de par la volonté du premier ministre de l'époque, le regretté René Lévesque, a reconnu le génocide arménien, et à chaque année, depuis, il était de tradition que nous nous remémorions ce drame affreux qu'ont vécu 1,5 million d'hommes, femmes et enfants. Peuple de fidélité, avait dit M. Lévesque à Mme Maryvonne Kendergi, Québécoise d'origine arménienne, musicologue renommée mondialement et officier de l'Ordre national du Québec. Et, dans toute société démocratique comme celle du Québec, il est important de rappeler les valeurs profondes qui nous gouvernent, notamment l'ouverture, le pluralisme et l'idée que l'on retrouve dans la Charte des Nations unies, celle du Règlement pacifique des différends internationaux.

Je tiens à remplir un autre devoir qui est celui de rappeler à toutes et à tous que ce projet de loi ne vise pas à porter de jugement sur d'autres communautés. Je pense que la plupart des députés interpellés par ce projet de loi ont tenu à le faire, et il n'est qu'obligation pour moi de le répéter à nouveau et de me faire la porte-parole d'un message clair en tant que porte-parole de l'opposition officielle en matière de communauté culturelle et d'immigration.

Et je terminerai, M. le Président, avec du Aznavour qui, dans sa chanson Pour toi mon Arménie, chante:

«Le monde s'est levé;

«Le monde est avec toi;

«Pour toi, peuple oublié;

«Il a ouvert son coeur;

«Il a tendu ses bras.»

Merci, M. le Président.

Le Président suppléant (M. Marsan): Je voudrais savoir s'il y a d'autres intervenants? M. le député de Laval-des-Rapides.

M. Alain Paquet

M. Paquet: Merci, M. le Président. Alors, je veux joindre moi aussi ma voix, comme je l'ai fait aussi en commission parlementaire, à l'ensemble des parlementaires de cette Chambre pour exprimer l'importance aujourd'hui de ce que nous faisons, de reconnaître officiellement par loi, ce que l'Assemblée nationale a fait à plusieurs occasions depuis 1980, de commémorer, de reconnaître officiellement le 24 avril comme Jour de commémoration du génocide arménien.

C'est important, M. le Président, de souligner que le devoir de mémoire que nous exprimons aujourd'hui en cette Chambre, c'est un devoir qui s'exprime à travers l'ensemble de l'humanité, à travers différents gestes, différents événements tragiques qui trop souvent ont marqué cette histoire.

Cette semaine, M. le Président, nous soulignons la Semaine québécoise des rencontres interculturelles. Je veux présenter le fait que la participation des Québécoises et des Québécois de toutes origines au façonnement de notre société ainsi qu'au développement et à la réalisation de notre plein potentiel a comme prémisse la reconnaissance de l'apport de tous ceux et celles qui composent le Québec, dont celui évidemment des membres des communautés culturelles.

Cette reconnaissance est une reconnaissance évidemment de partage d'histoire, c'est une reconnaissance de cultures, une reconnaissance de tout cet apport que les différentes communautés apportent au Québec. En particulier, la communauté arménienne, communauté qui est une communauté très vivante au Québec, comme l'ensemble des membres des communautés culturelles, et qui nous a apporté et qui partage avec nous des leçons d'histoire, qui partage avec nous des valeurs qui demandent, qui exigent effectivement que nous reconnaissions les événements tragiques qui ont pu se produire et qui ont particulièrement marqué la communauté arménienne dans le passé, comme elles ont marqué d'autres communautés.

Le génocide arménien était le premier génocide du XXe siècle, comme le rappelait tout à l'heure mon collègue député de l'Acadie, et ce premier génocide a malheureusement marqué un peu le pas, répétait des événements tragiques qui se sont passés auparavant et marquait un peu le pas de d'autres génocides qui ont eu lieu par la suite, que ce soit au Rwanda, que ce soit évidemment aussi l'Holocauste dont a été victime la communauté juive et d'autres communautés sous les nazis. On remarque aussi qu'il y a eu d'autres génocides, quand on parle... au Cambodge, la Bosnie et d'autres encore.

Et l'idée n'est pas de banaliser aucun des génocides, l'idée n'est pas de condamner aucune communauté culturelle, aucun groupe, aucun gouvernement actuel pour des événements qui se sont passés il y a de cela parfois quelques années, d'autres cas, plusieurs décennies. Mais il est important dans notre devoir de mémoire de reconnaître qu'il y a eu de tels événements et que nous devons exprimer notre compassion envers, ici, la communauté arménienne, compassion de ces événements tragiques qui ont marqué leur histoire, qui ont façonné aussi une partie de leur détermination et de leur courage à exprimer leur sollicitude et leur participation à notre communauté ici même, au Québec.

n(12 heures)n

Comme quoi, M. le Président, quand on parle de partage de valeurs, je voudrais peut-être rappeler quelques mots que j'ai utilisés moi-même en commission parlementaire et quelques faits. Lorsqu'on parle de tradition et de partage de l'ensemble de nos communautés, on remarque, par exemple, qu'une des traditions ou un des symboles de la communauté arménienne souvent est le drapeau arménien qui est un tricolore, dont les trois couleurs sont le rouge vermillon, le bleu outremer et l'orange abricot. Et, selon les interprétations qu'on donne à ces trois couleurs, le rouge vermillon exprime... représente la tragédie du sang qui a été versé dans l'histoire de ce peuple, mais il représente aussi un côté positif de l'énergie, l'énergie du soleil qui leur a donné... qui symbolise la détermination et le courage de ce peuple. Le bleu outremer parfois évoque la terre éternelle d'Arménie. Il évoque aussi le ciel clair, le ciel bleu que, nous osons espérer, soit partagé par l'ensemble... le bonheur de l'ensemble de la planète. L'orange abricot, l'abricot qui est un fruit originaire d'Arménie d'ailleurs, exprime le courage, les moissons du blé ou le bien acquis par un travail juste.

Toutes ces valeurs, donc, que, actuellement, évoquent la tradition, la culture de la communauté arménienne, sont des traditions et des valeurs qui sont partagées, qui sont partagées par l'ensemble des Québécois et de toutes les communautés, et que, nous croyons, doivent être partagées et sont partagées par l'ensemble des habitants de cette planète.

Une autre tradition ? et je terminerai là-dessus, Mme la Présidente ? c'est que, lorsqu'on parle de ce drapeau, une des traditions veut que ce drapeau représente aussi les couleurs de l'arc-en-ciel, l'arc-en-ciel qui était apparu après que Noé serait donc arrivé sur le mont Ararat. Or, cet arc-en-ciel, c'est un symbole évidemment d'alliance entre les peuples, d'alliance entre les nations, ça exprime donc toutes ces valeurs de sollicitude que nous voulons reconnaître aujourd'hui, sans reprendre tous les événements et tous les faits qui ont été exprimés par mes collègues de l'opposition et du gouvernement, donc d'évoquer toutes ces valeurs que nous voulons partager.

Encore une fois, Mme la Présidente, aujourd'hui, c'est un geste important que nous posons: l'expression de notre sollicitude et de mémoire envers la communauté arménienne, et nous osons espérer que, par cette commémoration ainsi que par le partage de ces faits et des différents événements tragiques qui ont pu se produire dans l'histoire, ce sont des signaux, des leçons que nous pourrons tirer, de manière à ce que plus jamais nous ne voulons voir de telles tragédies dans l'histoire. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député. Je reconnais maintenant le député de Mercier, porte-parole de l'opposition officielle en matière de relations internationales et d'affaires intergouvernementales canadiennes. M. le député.

M. Daniel Turp

M. Turp: Merci, Mme la Présidente. Pour Anouche Arabaghian et Henri-Kevork Arslanian, pour mon ami et compagnon de campagne, George Nazarian, pour mon étudiante qui, aujourd'hui, est avocate, qui travaille pour les Nations unies, qui est à Sarajevo, pour les Arméniens et Arméniennes du Québec, pour les 5 millions d'Arméniens et d'Arméniennes du monde, pour l'humanité et ses cultures et la culture arménienne qui fait partie du patrimoine commun de l'humanité, je me lève aujourd'hui en cette Assemblée nationale du Québec pour dire: Je me souviens du génocide arménien.

Le 24 avril de chaque année, depuis 23 ans, l'Assemblée nationale adopte à l'unanimité une motion commémorant le génocide arménien. Aujourd'hui, l'Assemblée nationale fera appel à la loi, la loi dont Montesquieu disait qu'elle est en général la raison humaine en tant qu'elle gouverne tous les peuples de la terre, la loi, cet instrument solennel par lequel s'exprime la nation pour donner aujourd'hui une pérennité à l'expression de solidarité du peuple québécois avec le peuple arménien, la loi pour commémorer à chaque année, à compter du 24 avril 2004, le génocide arménien.

Mme la Présidente, l'opposition officielle participe avec fierté à l'exercice de ce devoir de mémoire: celui de rappeler que le peuple arménien a subi, au début du siècle dernier, un génocide. Les voix du député... des députés du parti gouvernemental et de l'opposition officielle de même que celles des députés indépendants se conjuguent aujourd'hui pour démontrer la primauté qu'accorde cette Assemblée au respect fondamental de la personne humaine, au droit fondamental à la vie, et cela, au-dessus de tout calcul politique et même davantage au-dessus de tout intérêt économique.

20 000 citoyens et citoyennes d'origine arménienne honorent le Québec de leur présence dans ce pays. Ils nous écoutent, elles nous écoutent sans doute aujourd'hui pour certains et certaines d'entre elles. Elles apprécieront, ils apprécieront le geste solennel que pose aujourd'hui cette Assemblée. Cette communauté arménienne a contribué, contribue et contribuera encore longtemps à l'essor économique, social et culturel du Québec. Certains, d'ailleurs, de ces citoyens et de ces citoyennes à qui nous parlons aujourd'hui ont vécu ce génocide et tiennent, comme ils le font de façon régulière, à perpétuer sa mémoire à la mémoire de personnes qui ont disparu à l'occasion des tristes et tragiques événements de 1915.

Un génocide qui a d'ailleurs été si bien présenté dans le film du cinéaste canadien d'origine arménienne, Atom Egoyan, dans ce film Ararat, dans lequel d'ailleurs une actrice québécoise, Marie-Josée Croze, récipiendaire récemment d'un prix d'interprétation féminine à Cannes, prêtait son talent. Un film dans lequel jouait un rôle important aussi le chanteur, le Français Charles Aznavour, dont ma collègue a rappelé les paroles d'une si belle chanson. Il y a aussi, comme nous le voyons dans ce film d'Atom Egoyan, de jeunes citoyens arméniens, de jeunes citoyennes arméniennes qui, ici et là dans le monde, reprennent le flambeau des revendications de justice et d'équité en la mémoire de ceux et celles qui ont été sacrifiés simplement parce qu'ils et elles étaient arméniens et arméniennes. Et les Québécoises et les Québécois de toutes origines, par la voix de notre Assemblée nationale, aujourd'hui, sont invités à partager avec elles et avec eux le souvenir douloureux des événements qui ont conduit au génocide arménien au début du siècle dernier.

Mme la Présidente, nous ne pouvons pas rester indifférents à la vue de la terreur et de la violence qui, encore aujourd'hui, se déploient dans de si nombreux pays. Il faut rappeler que le génocide n'est pas seulement l'affaire du XXe siècle, ce n'est pas seulement le génocide arménien, ce n'est pas seulement la Shoah, le génocide cambodgien, le génocide rwandais, ce sont des génocides dont on peut anticiper l'horreur, puisque, encore aujourd'hui, des gens manifestent du racisme, de la xénophobie, de l'intolérance, une intolérance raciste, une xénophobie qui se traduisent de façon radicale dans des intentions génocidaires.

Mme la Présidente, cette violence que supposent les intentions génocidaires est le lot quotidien de certaines familles, de familles arméniennes, de familles rwandaises, de familles cambodgiennes, de familles juives qui ont vu leurs maisons détruites sous leurs yeux, leurs proches tués de façon presque démente. Et, chaque jour, en ce début de XXIe siècle, des images nous transmettent la violence, l'horreur, et il faut admettre, lorsque nous voyons ces images qui nous proviennent d'Irak, d'Afghanistan, de Birmanie, nous devons admettre que beaucoup reste encore à faire pour que notre communauté internationale connaisse enfin la primauté du droit, et le respect de la dignité humaine, de même que la paix.

n(12 h 10)n

Mme la Présidente, trop nombreux encore sont les parlements... trop peu nombreux, devrais-je dire, sont encore aujourd'hui les parlements qui ont adopté des lois ou des résolutions reconnaissant le génocide commis en 1915 à l'encontre du peuple arménien. Mon collègue le député de l'Acadie a fait l'énumération de ces parlements qui ont le courage d'adopter des lois ou des résolutions reconnaissant ce génocide. Il est utile dans notre Assemblée nationale de souligner qu'une autre assemblée nationale, l'Assemblée nationale de France, ainsi que le Sénat français ont eu, eux aussi, le courage d'adopter une loi reconnaissant l'existence du génocide arménien, la loi n° 2001-70 du 29 janvier 2001 relative à la reconnaissance du génocide arménien de 1915, dont l'article unique stipule que «la France reconnaît publiquement le génocide arménien de 1915». Il faut aussi souligner que le Parlement européen, qui a eu aussi le courage de ses convictions et les convictions de ses membres, a voulu exercer également ce devoir de mémoire que notre Assemblée nationale va exercer aujourd'hui au nom des Québécoises et des Québécois.

Mme la Présidente, reconnaître l'existence du génocide s'impose, s'impose à tous et à toutes, s'impose à nous, membres de l'Assemblée nationale, car le génocide est un crime, un crime contre l'humanité, un crime imprescriptible, comme le veut d'ailleurs la Convention des Nations unies sur l'imprescriptibilité des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité. Il nous fallait reconnaître l'existence du génocide arménien, comme le fait le préambule de la loi que nous allons adopter dans quelques instants. Nier l'existence d'un tel génocide aurait été une insulte à la mémoire des victimes. Elle aurait banalisé l'horreur et falsifié l'histoire.

Les travaux des historiens sont d'ailleurs convergents pour considérer que les Arméniens ont été assassinés en masse, l'appréciation du nombre de victimes variant de 1,2 million de personnes à 1,5 million de personnes, d'autres disent même 2 millions d'hommes, de femmes et d'enfants. Cette appréciation a été inhérente aux circonstances de ce drame qui a voulu que des hommes, des femmes et des enfants ne soient assassinés que parce qu'ils étaient Arméniens, Arméniennes, ils parlaient une langue différente, avaient une culture différente. Tous les témoins de l'époque, les diplomates, les militaires, les personnes civiles, ont attesté de l'intention délibérée du gouvernement de Constantinople, et tous les documents ultérieurs ont confirmé l'intention sur la base de laquelle l'on évalue l'existence d'un génocide, et, encore une fois, le député de l'Acadie a rappelé l'existence de la Convention des Nations unies sur la prévention et la répression du crime de génocide du 9 décembre 1948, bien cette intention a été corroborée par des témoignages nombreux, de sorte que les faits ne devraient pas faire l'objet de controverse, ne font pas, et j'en suis fier, l'objet de controverse dans cette Assemblée.

Il faut que nous soyons tous et toutes sensibilisés à l'existence de ce génocide et que nous réaffirmions ? et nous le faisons aujourd'hui par la loi, le mode le plus solennel d'expression de la nation, que nous voulons adopter dans cette Assemblée ? notre refus du racisme, notre refus de la xénophobie, notre refus de l'intolérance, notre refus de la discrimination et de l'exclusion fondées sur la race, sur les convictions politiques, sur l'origine nationale et ethnique, pour reprendre des motifs de discrimination que nous avons nous-mêmes enchâssés dans la Charte des droits et libertés de la personne du Québec et qui tirent leurs origines dans la Déclaration universelle des droits de l'homme du 10 décembre 1948.

Si le mouvement explicite de suppression du peuple arménien prenait naissance en 1908, l'inadmissible campagne pour le génocide ne s'est officialisée que le 24 avril 1915, date que nous retenons dans cette Assemblée pour commémorer le génocide arménien. Des notables religieux, politiques et intellectuels étaient assassinés ce jour même à Constantinople. Et, comme vous le savez sans doute, et, si ce n'est pas le cas, voilà aujourd'hui l'occasion de le dire dans l'exercice de notre devoir de mémoire, il est bon de rappeler que, donc, plus de 1 million de citoyens et de citoyennes arméniens, des hommes, des femmes, des enfants, ont été exterminés de 1915 à 1917, que ce génocide provoqua la fuite de 500 000 Arméniens et Arméniennes partout dans le monde et est à l'origine d'une diaspora arménienne, une diaspora qui compte au Québec une communauté, comme nous l'avons dit tout à l'heure, de 20 000 Arméniens et Arméniennes qui enrichissent notre société, dont nous sommes fiers de savoir qu'ils ont choisi le Québec comme terre d'adoption.

Est-il nécessaire de rappeler que nous ne pouvons donc pas demeurer indifférents envers ce qu'ont vécu les Arméniens au début du siècle dernier. Les conséquences de l'indifférence, qui seraient celles de notre indifférence, Mme la Présidente, pourraient être tragiques, aussi tragiques que le génocide lui-même. Je rappellerai d'ailleurs que l'indifférence envers le génocide arménien a servi de prétexte à l'auteur du plus grand génocide, de la Shoah, Adolf Hitler, pour lancer en 1939 sa propre campagne d'épuration ethnique et de génocide à l'endroit de la communauté juive. L'histoire raconte d'ailleurs que, pour se justifier ? et je le répète au nom du devoir de mémoire et pour renforcer la poursuite de ses objectifs inacceptables ? Hitler posait avec cynisme la question suivante: Qui se souvient du génocide Arménien? Et s'ensuivait la mort atroce de plus de 6 millions de Juifs au cours de la Seconde Guerre mondiale.

Mme la Présidente, malheureusement, des conflits armés internationaux et non internationaux, des troubles civils et des répressions ont encore lieu au vu et au su de l'humanité tout entière, et nous ne sommes que trop souvent impuissants et impuissantes à régler ces conflits, à mettre fin à ces troubles, et nous constatons les conséquences de ces conflits et troubles qui ne se traduisent que par le désespoir et par la perte de vies humaines.

Il nous faut donc continuer sans relâche ici même, dans notre Assemblée nationale, à dénoncer la violence, à dénoncer la torture, les traitements cruels, inhumains et dégradants, les violations du droit le plus fondamental à la vie, dénoncer la guerre en toute occasion, dénoncer la violation des droits fondamentaux quels qu'ils soient, sans égard aux frontières, quels que soient les gouvernements et en dépit des pressions des uns et des autres qui voudraient faire passer des calculs politiques et des intérêts économiques avant le respect des droits fondamentaux de la personne humaine.

Mme la Présidente, dans toute société démocratique comme celle du Québec, il est important de rappeler les valeurs profondes qui nous gouvernent, notamment l'ouverture, le pluralisme et l'idée que l'on retrouve dans la Charte des Nations unies de l'égalité des nations, grandes et petites, mais aussi l'égalité des femmes et des hommes qui sont, en vertu de l'article premier de la Déclaration universelle des droits de l'homme ? que j'aime bien citer, qui sont ? égaux en dignité et en droits.

Et c'est dans ce contexte que l'Assemblée nationale est appelée aujourd'hui à exprimer à tous les Arméniens et à toutes les Arméniennes, et en particulier à celles du Québec et à ceux du Québec, la sympathie de notre Assemblée nationale, des élus du peuple du Québec, la solidarité de la nation québécoise avec la nation arménienne.

n(12 h 20)n

Mme la Présidente, un grand écrivain arménien d'origine américaine, l'homme qui a écrit Quand même un Américain (My name is Aran), William Saroyan, s'exprimait si éloquemment au nom du peuple arménien, de ceux pour qui nous adoptons aujourd'hui la Loi proclamant le Jour commémoratif du génocide arménien, il disait la douleur du peuple arménien en ces termes ? et je cite une traduction que j'ai faite d'un extrait d'un ouvrage de William Saroyan, je le cite: «Je ne veux voir aucune puissance du monde détruire ce peuple, cette petite tribu de personnes sans importance dont les guerres ont toutes été faites et perdues, dont les structures se sont désagrégées, dont la littérature n'est pas lue, dont la musique n'est pas écoutée, dont les prières ne sont pas davantage entendues. Allez, détruisez l'Arménie. Regardez si vous en êtes capable. Expédiez dans le désert ces Arméniens sans pain ni eau. Incendiez leurs maisons et leurs églises et voyez ensuite s'ils riront, s'ils chanteront, s'ils prieront, car, lorsque deux d'entre eux se retrouveront ici ou là dans le monde, vous verrez qu'ils voudront créer une nouvelle Arménie.»

Mme la Présidente, le moment est venu d'officialiser cette journée afin de légitimer la mémoire historique et de le faire comme il se doit, en toute simplicité et humilité, dans le respect et la dignité qui ont toujours caractérisé la position unanime de l'Assemblée nationale du Québec sur les événements d'avril 1915.

L'opposition officielle est fière, et je suis fier, en tant que député de Mercier, de m'associer au député de l'Acadie, de coparrainer le projet, le député de l'Acadie que je félicite, dont je loue la persévérance et le courage et à qui je rends hommage dans notre Assemblée, l'opposition officielle est fière de dire en cette Assemblée qu'elle ajoutera la voix de ses députés à ceux du parti gouvernemental, à ceux des députés indépendants pour faire inscrire le Jour commémoratif du génocide arménien sur le calendrier de notre vie nationale, une Assemblée nationale qui dit aujourd'hui, en ce 28 novembre 2003: Je me souviens du génocide arménien. Merci, Mme la Présidente.

Mise aux voix

La Vice-Présidente: Alors, y a-t-il d'autres intervenants sur ce projet de loi? Pas d'autre intervenant. Alors, le projet de loi n° 194, Loi proclamant le Jour commémoratif du génocide arménien, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: Alors, Mme la Présidente, j'apprécierais, après cet important projet de loi, que vous appeliez l'article 24 de notre feuilleton.

Projet de loi n° 14

Prise en considération du rapport
de la commission qui en a fait l'étude détaillée

La Vice-Présidente: Alors, à l'article 24, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'économie et du travail sur le projet de loi n° 14, Loi modifiant la Loi sur les forêts et d'autres dispositions législatives et prévoyant certaines dispositions particulières en matière forestière applicables aux activités d'aménagement forestier antérieures au 1er avril 2006. Alors, je reconnais immédiatement le ministre délégué aux Forêts.

M. Pierre Corbeil

M. Corbeil: Merci. Merci, Mme la Présidente. Je suis heureux de m'adresser de nouveau en cette Chambre dans le cadre du processus menant à l'adoption du projet de loi n° 14, projet de loi modifiant la Loi sur les forêts et d'autres dispositions législatives et prévoyant certaines dispositions particulières en matière forestière applicables aux activités d'aménagement forestier antérieures au 1er avril 2006.

Je rappelle, Mme la Présidente, que ce projet de loi propose une série de mesures destinées à bonifier le régime forestier québécois, à assurer sa mise en oeuvre de façon cohérente et transparente, à alléger la réglementation, notamment pour les petits... exploitants de petites scieries, excusez, de 2 000 m³ et moins, et enfin pour répondre aux demandes de l'industrie de simplifier le processus d'arbitrage.

C'est ainsi que le projet de loi propose notamment le report d'un an de l'entrée en vigueur des plans généraux d'aménagement forestier. Ce changement à la loi laissera le temps aux bénéficiaires de contrats d'aménagement et d'approvisionnement forestier de préparer leurs plans en toute légalité, en tenant compte des nouvelles unités d'aménagement et des résultats des consultations en cours sur les objectifs de protection et de mise en valeur des ressources du milieu forestier.

Les autres mesures, visant notamment l'amélioration des activités de contrôle et de vérification de l'aménagement forestier, la prise en compte de l'entrée en vigueur de la «Paix des Braves» entre le Québec et les Cris ou d'autres ajustements de nature administrative, sont aussi présentées dans cette optique de bonification du régime et de son application.

Mme la Présidente, nous visons également la régionalisation du volet II du Programme de mise en valeur des ressources du milieu forestier. Cette régionalisation cadre parfaitement avec notre volonté gouvernementale de décentraliser les décisions pour qu'elles soient prises par les gens qui vivent la situation. De plus, les allégements présentés plus haut sont représentatifs de notre engagement d'offrir plus de services aux citoyens, et ce, avec moins de structures.

Nous en sommes maintenant à l'étape de la prise en considération du rapport de la commission parlementaire suite aux délibérations productives de cette dernière. Depuis le début de l'étude du projet de loi n° 14, les débats se sont déroulés, Mme la Présidente, dans une atmosphère constructive, entre des personnes qui ont en commun une préoccupation bien réelle pour la vitalité à long terme des forêts québécoises. Vous savez, Mme la Présidente, étant résident de Val-d'Or et représentant les citoyens et citoyennes d'Abitibi-Est, il y a longtemps que j'ai compris l'importance de la forêt pour ma région mais aussi pour l'ensemble du Québec. Je dois le mentionner, Mme la Présidente, nous avons eu une bonne collaboration de la députée de Matapédia, la critique de l'opposition en matière de forêt. Elle avait dit, lors de l'adoption du principe, qu'elle m'appuierait dans mes bons coups. Force m'est de constater ou de conclure que le projet de loi est sûrement bon, puisque tout s'est assez bien déroulé.

Je dois également saluer, Mme la Présidente, le travail des équipes du ministère, qui ont contribué à la préparation d'un projet de loi qui fait largement consensus, comme en témoigne le caractère somme toute très mineur des amendements proposés en commission parlementaire. Évidemment, comme les discussions en commission parlementaire l'ont souligné, le projet de loi fait partie d'un contexte plus large qui comprend notamment des actions de nature administrative ou réglementaire. Il fait partie d'une logique d'amélioration continue du régime forestier à laquelle contribuera la Commission d'étude scientifique, technique, publique et indépendante chargée d'examiner la gestion des forêts du domaine de l'État, que présidera M. Guy Coulombe au cours de la prochaine année.

L'ensemble de ces mesures profitera à toutes les communautés qui comptent sur la forêt pour assurer leur développement économique à long terme. C'est pourquoi, Mme la Présidente, j'invite l'ensemble des députés de cette Chambre à adopter... à appuyer l'adoption du rapport de la commission et, dans quelques jours, l'adoption du projet de loi lui-même dans les meilleurs intérêts du monde forestier et de la population en général. Merci, Mme la Présidente.

M. Lelièvre: Mme la Présidente?

La Vice-Présidente: Vous avez une question de règlement, M. le député de Gaspé?

M. Lelièvre: ...une brève question.

La Vice-Présidente: En vertu de l'article 213, est-ce que, M. le ministre, vous acceptez de répondre à une question?

M. Corbeil: Oui.

La Vice-Présidente: Vous acceptez. Posez votre question, M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Est-ce que le ministre a l'intention de faire en sorte que les consultations soient faites en région, et particulièrement dans les régions ressources, toutes les régions ressources?

La Vice-Présidente: M. le ministre.

n(12 h 30)n

M. Corbeil: Mme la Présidente, j'ai eu une session de travail avec le président de la commission hier, j'en aurai une la semaine prochaine également, et nous serons en mesure non seulement de transmettre très prochainement à la population la composition complète de la commission, son échéancier, son plan de travail... Il est d'ores et déjà acquis qu'elle va être, pour une partie de son mandat, qui est somme toute connu comme étant public, itinérante aussi pour aller entendre les citoyens sur le territoire du Québec, et les citoyens dans le sens large, en ce sens qu'aussi on pourra aller sur les territoires des communautés autochtones qui aimeraient ou qui nous mentionneraient leur désir d'être entendues.

La Vice-Présidente: M. le leader du gouvernement, vous avez une question de règlement?

M. Dupuis: ...que cette réponse était impeccable.

La Vice-Présidente: Ce n'est pas une question de règlement. Alors, je reconnais immédiatement la députée de Matapédia et porte-parole de l'opposition officielle en matière de forêt. Mme la députée.

Mme Danielle Doyer

Mme Doyer: Merci, Mme la Présidente. Alors, j'aurais le goût de dire que la question aussi était impeccable. Alors, ça va bien dans le Parlement aujourd'hui. Voilà. Merci, donc, Mme la Présidente, de me donner l'opportunité d'intervenir sur la prise en considération du projet de loi n° 14.

Ce projet de loi, même s'il est technique et qu'il n'est pas de nature... Généralement, la forêt, ça n'intéresse pas trop les médias, mais j'aimerais ça qu'ils s'y intéressent plus. Et je suis sûre que mon collègue d'en face le ministre des Ressources... le ministre délégué aux Forêts doit être de mon avis. Il est très important, ce projet de loi, pour des milliers de travailleurs forestiers du Québec et pour les industries qui les emploient. Il contient aussi plusieurs allégements, plusieurs simplifications qui vont faciliter la vie aux entreprises concernées, et c'est tant mieux, et aussi des précisions qui étaient nécessaires.

Il consistait, ce projet de loi... il consiste à faire des précisions importantes dans la mise à jour du régime forestier qui a été entreprise en 1996 et concrétisée, avec l'adoption du projet de loi n° 136, en 2001. Cette loi n° 14 modifie la Loi sur les forêts et d'autres dispositions législatives et prévoit certaines dispositions particulières en matière forestière applicables aux activités d'aménagement forestier antérieures au 1er avril 2006.

Mme la Présidente, il sert aussi à mettre en oeuvre certains engagements pris lors du Rendez-vous national des régions: le premier, la régionalisation accrue de la gestion du Programme de mise en valeur des ressources du milieu forestier; le deuxième, l'exemption, pour les municipalités et les conseils de bande autochtones qui détiennent des conventions d'aménagement forestier de contribuer au Fonds forestier.

Et j'ai posé plusieurs questions, en commission parlementaire, et, ce matin, j'ai continué d'en poser une au ministre de façon informelle, Mme la Présidente, et j'ai obtenu la réponse à ma question. Alors, je voulais rassurer... J'avais eu une question par le préfet de la MRC de La Mitis, M. Gaston Gaudreault, qui se demandait si, comme les communautés autochtones et les municipalités, les MRC allaient être exemptées des contributions au Fonds forestier. Alors, j'ai une lettre signée par le sous-ministre associé aux forêts, Marc Ledoux que je vais adresser à mes MRC pour les rassurer là-dessus.

Alors, je veux vous dire que, si le travail de l'opposition officielle, le travail qu'on a accompli en commission a été, tel que promis, constructif. C'est parce que nous avions devant nous un bon projet de loi. C'était le gouvernement du Parti québécois qui avait commencé à le préparer. Alors, ça ne m'a pas été difficile, ça n'a pas été difficile pour moi de bien travailler. Et j'espère, j'espère... Parce que, moi, comme parlementaire, j'aime ça quand on construit le Québec, j'aime ça quand on fait des choses positives. Alors, quand ça va être positif, quand ça va avoir du bon sens, je l'ai dit à mon vis-à-vis le ministre délégué aux Forêts, je vais être constructive. Alors, tellement constructif que le député de Frontenac m'a dit, après la première séance, qu'il était agréablement étonné de mon attitude. Que l'opposition collabore, donc, à l'adoption d'un projet de loi ne devrait étonner personne. On l'a dit et on le répète, si on croit qu'un projet de loi peut contribuer au mieux-être général de la population québécoise, si l'intérêt public est mieux servi par ce projet de loi, c'est notre devoir de parlementaires de faire en sorte qu'il soit adopté sans retard indu, tout en en faisant un examen rigoureux. Un examen rigoureux, je pense que c'est ce qu'on a fait pour certains articles et je pense que le ministre va être d'accord avec moi.

Alors, j'avais plusieurs questions. J'avais des questions par rapport aux articles 18, 22, 65, 17, 18, 19, 21, 22, 23 ? c'est fastidieux, hein, mais on a fait toute cette étude-là, il comportait 76 articles ? 22, 23, 33, 42, 45, 52, 53, 54. Et ceux qui m'ont interpellée davantage, ce sont les articles 22 et 65.

Les articles 22, ça concernait toutes les nouvelles données qu'un bénéficiaire de CAAF va pouvoir apporter ou qu'on va pouvoir retrouver en cours d'année lorsqu'un plan d'aménagement forestier, d'intervention en forêt, est déposé, et ça peut causer des inconvénients si ces nouvelles données changent les choses en cours de route. L'article 19, c'est toute la question du volume de bois affecté par les opérations de récolte. Est-ce qu'il est à l'abri de toute erreur statistique? Alors, c'étaient des questions qui, à mon avis, étaient très pertinentes et pouvaient amener à rassurer les gens qui s'interrogeaient là-dessus.

L'article 21, c'était toute la question... relié beaucoup, cet article, à la problématique qu'ont vécue les Hautes-Laurentides par rapport à la forêt mixte. Et la question c'était: Si un bénéficiaire réalise des travaux plus importants que le permettent les crédits agricoles, est-ce que le ministère va lui rembourser le montant des travaux qu'il ne peut pas obtenir en crédits? Et c'était très important, en effet, dans le cas de la forêt mixte des Hautes-Laurentides, car c'est une forêt dans laquelle les aménagements forestiers, Mme la Présidente, sont, par nature, plus difficiles à réaliser et donc plus dispendieux. Et, si les crédits sont insuffisants et que le ministère ne s'engage pas à rembourser l'excédent, les bénéficiaires n'auraient alors pas d'incitatifs à faire les travaux d'aménagement. Et ça, c'est une problématique que mon collègue le député de Labelle... ça se passait dans son comté, et là on l'a comme réglée, et pour l'ensemble du Québec. Alors, ça, on avance en forêt.

L'article 22, ça, là, c'était quelque chose d'assez... qu'on a discuté longuement. L'article 22, bien là on a fait de la pédagogie, on a appris aux gens qu'est-ce que c'était, un chaudron, dans le domaine de la forêt, et notre présidente, elle a trouvé que ce n'était pas comme dans la cuisine. Un chaudron, Mme la Présidente, c'est quelqu'un qui ne travaille pas bien en forêt, c'est un industriel qui fait des travaux... ? un chaudron, il y a d'autres mots qui finissent en «on» mais que je ne dirai pas parce que ce serait antiparlementaire ? mais qui travaille en... et puis ça fait un chaudron, il devient un chaudron parce qu'il ne travaille pas bien. Et je ne l'ai pas dit parce que ce n'est pas très beau de dire ça à l'Assemblée nationale. Et je suis sûre que le ministre doit être d'accord avec moi parce que ça, ça bousille la forêt.

Et je pense que là, avec le régime forestier qu'on a, c'est extrêmement important qu'on ait des mesures effectivement au niveau de la loi qui concerne le régime forestier, la Loi sur les forêts, surtout qu'on a la notion de coresponsabilité par rapport à divers bénéficiaires qui font des travaux sur une même unité d'aménagement. Alors, c'est important que les chaudrons ou les gens qui ne travaillent pas bien en forêt, on soit capable de les ramener à l'ordre. Et je pense que tout le monde est d'accord.

Et ça, c'était important, tout ce qui concernait nos discussions sur l'article 22. Parce que, vous savez, le ministre délégué aux Forêts, il détient un pouvoir qui est important, c'est un pouvoir d'appliquer des pénalités, d'appliquer des pénalités monétaires, des pénalités en baisse de possibilité aux bénéficiaires. Et, si, à un moment donné, il n'est pas capable d'identifier le bénéficiaire ou la personne, l'industriel qui a mal travaillé en forêt, c'est l'ensemble des bénéficiaires d'un même CAAF qui peuvent avoir des pénalités, Mme la Présidente. Et ça, je pense qu'on n'aime pas ça. Donc, il y a coresponsabilité, le ministre est capable d'appliquer une amende, et, s'il ne l'identifie pas, c'est l'ensemble des bénéficiaires qui vont avoir une pénalité monétaire et une pénalité en baisse potentielle de... en baisse réelle même de possibilité forestière. Alors, cette question-là, elle a été discutée à fond, et je pense que c'était important de le faire.

Aussi, il y avait l'article 23, comme j'ai dit. Je vais en venir à l'article 65, Mme la Présidente. L'article 65, pourquoi il est important? Et je vous fais la lecture un peu de l'enjeu. On dit: «Si le résultat du calcul de la nouvelle possibilité annuelle de coupe à rendement soutenu de l'aire commune indique une baisse de la possibilité forestière, le ministre détermine, par essence ou groupe d'essences, la réduction qui est applicable à cette aire commune et il répartit cette réduction sur l'ensemble des bénéficiaires de contrats de l'aire commune concernant l'essence ou le groupe d'essences en cause au prorata des volumes attribués à chacun.» Et ça, c'est quelque chose qui est très sensible dans le domaine forestier, Mme la Présidente. Je suis sûre que vous avez des entreprises forestières en Chaudière-Appalaches, il y en a. Ça, c'est très sensible.

«Toutefois, le ministre peut faire varier la réduction des volumes entre les bénéficiaires en fonction des impacts que peut avoir sur l'activité économique régionale ou locale la répartition de cette réduction entre eux.» Et ça, on en a longuement discuté de cette modification apportée à travers l'article 65 du projet de loi parce que le ministre a la prérogative de regarder... s'il y a une baisse de possibilité forestière, mettons, de 100 000 m³, il a la possibilité d'en attribuer un petit peu plus à des bénéficiaires et un peu moins, dans ça, d'en protéger un qui est un peu plus vulnérable à cause du milieu socioéconomique surtout, où c'est plus difficile qu'ailleurs.

n(12 h 40)n

Dans ma région ? je prenais l'exemple de ma région ? dans le Bas-Saint-Laurent, on a deux MRC qui ont été très affectées par la baisse de possibilité forestière dans le Bas-Saint-Laurent, donc, dans le Témiscouata et dans la Matapédia. Donc, ce que j'ai compris, c'est qu'il a la prérogative de faire davantage attention à certains milieux plus vulnérables. Alors ça, ça demande du jugement, c'est quelque chose de très sensible. Et les industries qui sont présentes sur nos territoires, les travailleurs et travailleuses qui dépendent de l'activité forestière, toutes les PME qui gravitent autour de ces entreprises-là, c'est majeur.

Alors, je vais terminer, Mme la Présidente, en vous disant que, oui, il y a une chose dont on a entendu beaucoup parler pendant la commission, j'en ai parlé longuement, du bois sec et sain. Alors, je pense que les gens qui veulent s'informer sur le bois sec et sain, là, qui ne savent pas trop qu'est-ce que c'est, le bois sec et sain, ils peuvent aller aux galées de l'Assemblée nationale, ils vont savoir c'est quoi, le bois sec et sain, hein? Le bois sec et sain, c'est celui qui reste debout, qu'on peut aller prélever mais qui n'est pas vert. Alors, il y a eu beaucoup de discussions autour de toute cette question d'aller prélever la capacité forestière, la possibilité forestière à laquelle on a droit, mais la question du bois sec et sain a été... je dirais qu'on en a discuté longuement, et c'était important de le faire.

Si ce projet de loi avait été négatif, comme peuvent l'être certains projets de loi présentement à l'étude dans les différentes commissions parlementaires, vous pouvez être sûrs que je me serais vivement opposée à l'adoption de tout article qui viendrait nuire à l'intérêt public. Et je remercie encore le ministre et son équipe pour l'ouverture qu'ils ont démontrée à mon égard et à l'égard de mon recherchiste. Ils nous ont rendu disponibles certains éléments qui étaient reliés au projet de loi, et ça a mieux travaillé. Alors, je veux remercier aussi mon recherchiste M. Martin-Frédéric Constant, qui fait un bon boulot ? c'est le cas de le dire, hein, mais boulot, l-o-t, Mme la Présidente.

Alors, on s'est entendus, mais il y a d'autres questions qui sont reliées à la forêt. Et, en terminant, je veux vous dire que la forêt, ce n'est pas un vase clos, Mme la Présidente, ce sont des vases communicants. Quand ça va bien dans un côté, ça va mal de l'autre. Alors, la question du bois d'oeuvre, j'y suis souvent revenue en Chambre. Donc, ce projet de loi amène des améliorations au régime forestier, ça va faciliter la vie, il y a des allégements réglementaires, une modulation. J'ai souvent utilisé le mot «modulation» aussi. Alors, tout ça, c'est important.

Il y a des gens qui dépendent de l'activité forestière pour vivre, plusieurs villes et villages du Québec. Alors, pour moi, c'est important, c'est important d'avoir une vision globale, une vision intégrée, une vision durable aussi de ce qui se passe en forêt, de savoir que ce n'est pas juste les entreprises forestières qui entrent en forêt. Les coopératives forestières, c'est important, les travailleurs forestiers, d'avoir des bonnes conditions de travail. Et je suis sûre que la députée de Matane est d'accord avec moi, que c'est important que nos travailleurs forestiers, quand ils rentrent en forêt, là, ils soient respectés comme travailleurs. Ce sont des professionnels, ils vont prélever la ressource, la ressource qui entre dans les entreprises. Vous savez, Mme la Présidente, il y en a des entreprises forestières. J'ai un comté, Matapédia, 30 000 personnes dans mon comté et, je ne peux pas toutes vous les énumérer ? Bois BSL, Boiseries du Saint-Laurent, Bowater est présent chez moi, Uniboard, les Kunz, des Allemands, à Sayabec, j'ai le Groupe Cèdrico ? j'ai plusieurs entreprises qui gravitent autour, et c'est majeur, et c'est important.

Et, moi, je conclus là-dessus. Alors, quand c'est pour construire le Québec, Mme la Présidente, j'en suis. Alors, merci. Puis, M. le ministre, en conclusion, n'oubliez pas que les pépinières sont importantes aussi. Les six pépinières du Québec, c'est extrêmement important. C'est un des partenaires majeurs qui approvisionnent en plants forestiers l'industrie forestière. Ils détiennent 95 % de la recherche, de tout ce qui est recherche par rapport à la production de plants au Québec. Alors, c'est une expertise qu'il vaut la peine de conserver, et ce sont des jeunes et des femmes qui travaillent dans les pépinières. Alors, j'en profite, en terminant mon discours, Mme la Présidente, pour continuer de sensibiliser le ministre délégué aux Forêts à toutes ces questions. Merci.

La Vice-Présidente: Alors, est-ce qu'il y a d'autres intervenants sur le projet de loi? Pour votre droit de réplique, M. le ministre délégué à la Forêt, à la Faune et aux Parcs.

M. Pierre Corbeil

M. Corbeil: Merci, Mme la Présidente. Oui, en accord avec les affirmations de ma vis-à-vis de l'opposition en matière de forêt, le projet de loi était peut-être très technique, et je n'ai pas l'intention de reprendre ici, ce matin, l'étude article par article faite lors des travaux de la commission. Pour la rassurer, par contre, je dois tout simplement dire que l'intérêt en ce qui concerne les questions forestières est grandissant de la part de la population et il est grandissant, cet intérêt, Mme la Présidente, pour l'utilisation de l'ensemble des ressources du milieu forestier. Nous sommes aussi très préoccupés, Mme la Présidente, par l'activité économique découlant de l'utilisation de l'ensemble de ces ressources et aussi par l'impact que certaines mesures peuvent avoir sur les travailleurs et l'industrie.

Elle l'a reconnu, et je le reconnais, et tout le monde va le reconnaître, c'est un bon projet de loi qui a peut-être été commencé par le gouvernement précédent mais qui a été bonifié par le gouvernement actuel dans le sens de ses priorités, c'est-à-dire gestion intégrée, décentralisation, régionalisation, allégement réglementaire, réduction des frais financiers pour les utilisateurs. Alors, tout ça, Mme la Présidente, ça se résume à ceci, c'est-à-dire agir de façon responsable, et le gouvernement actuel a adopté cet objectif non seulement pour la forêt, mais aussi pour l'ensemble de nos ressources naturelles, les finances, la santé, l'éducation et, plus largement, Mme la Présidente, pour tout ce qui concerne l'avenir du Québec. Merci.

Mise aux voix du rapport

La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre. Alors, le rapport de la commission de l'économie et du travail portant sur le projet de loi n° 14, Loi modifiant la Loi sur les forêts et d'autres dispositions législatives et prévoyant certaines dispositions particulières en matière forestière applicables aux activités d'aménagement forestier antérieures au 1er avril 2006, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: Je vais vous demander de prendre en considération l'article 8 de notre feuilleton.

Projet de loi n° 34

Reprise du débat sur l'adoption du principe

La Vice-Présidente: Alors, à l'article 8, l'Assemblée reprend le débat ajourné au nom de la députée de Taschereau le 27 novembre 2003 sur l'adoption du principe du projet de loi n° 34, Loi sur le ministère du Développement économique et régional. En vous rappelant, Mme la députée de Taschereau, qu'il vous reste sept minutes pour votre intervention.

Mme Agnès Maltais (suite)

Mme Maltais: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, c'est vraiment avec grande joie que je reprends ce débat qui... Je le rappelle, j'en faisais hier soir un plaidoyer pour que la ministre revoie de fond en comble ce projet de loi. Je tiens à rappeler aussi, Mme la Présidente, que mon plaidoyer est extrêmement important parce que, je le répète, peut-être dû à des agendas très chargés, aucun député du caucus libéral, et ça inclut le député de Louis-Hébert, ministre responsable de la Capitale-Nationale, aucun député ? donc, il ne s'est pas fait représenter ? n'était présent à l'assemblée régionale de concertation qui avait lieu hier.

Alors, ce que j'ai fait dans mon plaidoyer, ce que je veux continuer à faire ce matin, c'est expliquer aux députés ministériels, particulièrement ceux du caucus libéral qui sont présents aujourd'hui, leur expliquer quelles sont les volontés de la région pour qu'ils entendent, et qu'ils revoient ce projet qui, je le répète, est un projet qui est bâti mur à mur à travers le Québec et qui ne correspond absolument pas aux volontés de la Capitale-Nationale.

Et, Mme la Présidente, ce qui est intéressant, ce matin, c'est que ce que je viens de dire est corroboré, mais corroboré dans le journal Le Soleil par des journalistes qui ont suivi, comme moi, cette assemblée. Alors, le titre: Le CRCD inquiet ? Les partenaires des conseils régionaux de concertation dénoncent le climat d'incertitude implanté par le gouvernement Charest. Et je cite le président du CRCD: «À Québec, il y a une situation particulière et on ne veut pas tout remettre en question.» Le président du CRCD est aussi un maire, Mme la Présidente, alors même des maires sont inquiets devant ce climat.

Mon plaidoyer, Mme la Présidente, est sur ceci: Mais qu'est-ce qui est brisé dans la région? Qu'est-ce qu'il faut réparer absolument? Alors, ce que je veux dire, c'est qu'il est notoire que, dans la région, le CRCD a déjà fait le ménage de ses structures, est déjà passé de près de 70 membres à 28, a déjà une réputation de rassembleur, de motivateur, de mobilisateur. Alors, qu'est-ce qu'on veut réparer? C'est ça, la question que la région pose et que je veux ramener aux élus de la Capitale-Nationale qui sont ici.

n(12 h 50)n

Hier, j'évoquais devant cette Assemblée le fait qu'il y avait des choses qui se sont passées hier qui sont extrêmement importantes. Je rappelle qu'il y a un membre de l'Exécutif de la ville de Québec qui s'appelle Claude Larose, qui est, depuis des années, reconnu comme le leader en développement économique pour la ville de Québec, et il nous a appris hier ? et je tiens à le répéter parce qu'il y a des députés qui n'étaient pas là hier ? il nous a appris hier que, lui, le grand responsable du développement économique de la ville de Québec dans ce projet de loi mur à mur ne pourra pas être sur la Conférence régionale des élus. Pourquoi? Parce que ce projet-là ne reflète pas, contrairement à ce que dit la ministre, ne reflète pas un geste de confiance envers les élus municipaux. Si c'était un geste de confiance envers les élus municipaux, Mme la Présidente, on laisserait les élus municipaux à tout le moins nommer eux-mêmes leurs représentants au CRE. Or, Mme la Présidente, il y a désignation d'office, par ce projet de loi, des représentants municipaux. Donc, le principal responsable du développement économique de la ville de Québec ne pourra pas être assis à la table de la Conférence régionale des élus.

La députée de Jean-Talon, qui m'a entendue ? et j'ai apprécié parce que j'avais demandé qu'elles écoutent ? elle m'a entendue, je l'ai entendue me dire: Mais pourquoi il serait là? Bien, je réponds: Par la volonté de la ville. Est-ce qu'on fait confiance aux citoyens, est-ce qu'on fait confiances aux élus municipaux de la ville et est-ce qu'on leur donne le pouvoir ou si on décide ici, à l'Assemblée nationale, qui représentera les élus municipaux? C'est pourquoi je dis que, contrairement à ce que pense la ministre ou ce que voit la ministre, il y a un problème dans la Capitale-Nationale.

J'ai parlé des femmes, j'ai abordé le dossier en matière de condition féminine. Un membre du CRCD a rappelé que, lorsqu'un collège électoral au CRCD de la Capitale-Nationale devait nommer deux personnes, la règle interne actuelle est de nommer au moins une femme, on s'est entendus sur cette parité. Et je parle à mes collègues féminines du caucus libéral de la Capitale-Nationale. Écoutez, le seul collège électoral qui, jusqu'ici, au CRCD n'a pas voulu respecter cette règle est, historiquement, le collège municipal, c'est le collège municipal qui a amené de la résistance. Or, c'est à eux que, tout à coup... à qui, tout à coup, on fait confiance pour la parité homme-femme. Ça n'a pas de sens. Il faut inscrire la parité dans ce projet de loi à tout le moins.

La place des jeunes, il n'y aura personne sur la Conférence régionale des élus qui aura moins de 40 ans, dans la disposition actuelle. Il n'y a aucune place pour les jeunes. La place des communautés culturelles, évacuée dans la Conférence régionale des élus. Or, où sont les beaux discours d'inclusion du ministre responsable de la Capitale-Nationale? J'ai entendu maintes fois le ministre, dans la capitale, évoquer des discours d'inclusion. Tout le monde, d'ailleurs, le maire, le ministre, la Chambre de commerce chantent à pleines pages dans les médias, dans les salles qu'il faut pousser l'accueil et l'intégration des nouveaux arrivants, mais le premier signal qu'on leur donne, que leur donne ce gouvernement, c'est de les évacuer du rassemblement de concertation. Ça n'a pas de sens. Je plaide pour les communautés culturelles de la Capitale-Nationale. Il faut que ce projet de loi soit revu.

Enfin, je voudrais évoquer le conférencier invité d'hier, qui était M. Alain Dubuc, président-éditeur en chef du journal Le Soleil. On ne peut pas dire que ce soit là un grand souverainiste reconnu, Mme la Présidente. Il nous a dit ceci: «Le problème de ce gouvernement, c'est le manque de vision, la confusion et l'impréparation.» Alors, mon plaidoyer, Mme la Présidente, est à l'effet d'ouvrir une commission parlementaire pour qu'on entende les régions. Il faut absolument qu'on entende la région de la Capitale-Nationale, c'est majeur, ce qu'on est en train de faire. Et, oui ? je sais qu'il y a un député qui vient de dire: Il a dit cela ? ce sont les termes de M. Dubuc, «la confusion, le manque de vision et l'impréparation», et la journée portait sur ce projet de loi.

Alors, Mme la Présidente, ce que je demande, c'est que, comme la ministre de la Famille l'a fait, a avoué son erreur et a décidé de repartir à zéro, que la ministre reparte à zéro. C'est fondamental pour la région de la Capitale-Nationale. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, Mme la députée. Alors, est-ce qu'il y a d'autres intervenants pour le projet de loi n° 34? M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: Je ferais une motion en vertu de l'article 100 de notre règlement pour... motion d'ajournement du débat.

La Vice-Présidente: Est-ce que la motion d'ajournement du débat sur le projet de loi n° 34 proposée par le leader du gouvernement est adoptée?

Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: Je vais vous demander du suspendre nos travaux à 15 heures.

La Vice-Présidente: Alors, compte tenu de l'heure, je suspends les travaux à cet après-midi, 15 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 55)

 

(Reprise à 15 h 10)

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, Mmes et MM. les députés, veuillez prendre place, s'il vous plaît.

Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: M. le Président, par dérogation, par dérogation à l'article 188, j'aurais une motion que je voudrais faire en vertu de l'article 146 et que je voudrais déposer. J'ai eu des discussions avec le leader de l'opposition, formelles, et je crois qu'il n'y a pas d'objection à la motion que je vais faire. Alors, peut-être que Mme la députée de Bourget peut faire office de leader pour les fins du dépôt de cette motion. C'est pour entendre trois... pour entendre trois personnes en consultations particulières. Ça va?

Alors donc, je ferais la motion suivante...

Le Vice-Président (M. Sirros): Juste pour les fins du Journal des débats, il y a donc consentement pour procéder de cette façon? Consentement.

Motions du gouvernement

Motion proposant que la commission
de l'aménagement du territoire
procède à des consultations particulières
sur le projet de loi n° 33

M. Dupuis: Alors, merci. Je présente donc la motion suivante:

«Que la commission de l'aménagement du territoire, dans le cadre de l'étude du projet de loi n° 33, Loi modifiant la Charte de la Ville de Montréal, procède à des consultations particulières et tienne des auditions publiques et qu'à cette fin elle entende les personnes et organismes suivants, et ce, dans l'ordre ci-après indiqué: d'abord, M. Gérald Tremblay, maire de Montréal; ensuite, M. Pierre Bourque, chef de l'opposition à l'hôtel de ville de Montréal; et, finalement, la Chambre de commerce du Montréal métropolitain.»

Et je la dépose.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Sirros): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: Ceci étant fait, M. le Président, j'apprécierais que vous preniez en considération l'article 7 de notre feuilleton.

Projet de loi n° 33

Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, à l'article 7 de notre feuilleton, M. le ministre des Affaires municipales, du Sport et du Loisir propose l'adoption du principe du projet de loi n° 33, Loi modifiant la Charte de la Ville de Montréal. Alors, je présume qu'il y a des interventions et que ce sera le ministre des Affaires municipales qui va prendre la parole. M. le ministre des Affaires municipales.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Merci, M. le Président, une présomption qui s'avère juste. Alors, je vais donc vous faire quelques remarques concernant le projet de loi n° 33 qui porte effectivement sur des modifications d'amélioration à la ville de Montréal, au bénéfice de ses citoyens.

M. le Président, le 20 juin dernier, dans le cadre d'une déclaration ministérielle prononcée ici même, à l'Assemblée nationale, j'invitais les municipalités issues de regroupements non volontaires qui le souhaitaient à élaborer des propositions de réorganisation administrative dans le but de favoriser une meilleure adhésion de leurs citoyens aux nouvelles villes. À la même date, je m'engageais devant cette Assemblée à faire connaître, par un avis écrit, avant le 31 décembre 2003, à toute municipalité m'ayant transmis de telles propositions l'appui du gouvernement. Cet échéancier impliquait que, si des modifications législatives s'avéraient nécessaires, elles auraient été présentées et débattues à l'Assemblée nationale au cours de la session parlementaire du printemps 2004. La ville de Montréal a, dès septembre, déposé une excellente proposition de réorganisation administrative reposant sous un fort esprit de décentralisation, à laquelle nous donnons notre appui. Cela se concrétise par le dépôt de ce projet de loi n° 33.

Nous devançons donc l'échéancier prévu, et c'est pour cette raison que nous en sommes aujourd'hui à l'étape de l'adoption de principe des modifications à la charte de la ville de Montréal qui permettront cette décentralisation. En répondant positivement aux demandes des élus de la ville de Montréal, nous leur donnons les outils nécessaires à la mise en oeuvre de leur plan de décentralisation et à la réalisation de leur objectif de rallier les citoyens et citoyennes de Montréal.

Comme vous le savez, M. le Président, notre gouvernement souhaite la réussite des nouvelles villes. Je crois qu'une ville forte repose d'abord sur le sentiment d'appartenance de ses citoyens. Je crois aussi que cette appartenance ne s'impose pas, mais qu'elle se cultive. Elle sera d'autant facilitée lorsque chacun verra que son intérêt est pris en compte. Cela est vrai pour la livraison de services de proximité qui fait le quotidien de chacun, mais cela est vrai aussi pour le développement de l'île de Montréal dans son ensemble. Un tel développement profite à chacun. À cet égard, il n'y a pas de doute que la réunion et la consolidation assurent un meilleur tremplin de développement pour toute l'agglomération.

La décentralisation, pour sa part, implique l'accessibilité et la convivialité de services combinées à une imputabilité des élus, ces derniers oeuvrant au niveau le plus rapproché possible du citoyen. C'est cette proximité au quotidien entre l'élu et le citoyen qui fait la force et le caractère unique de notre monde municipal. Le plan de décentralisation proposé par la ville de Montréal renforce cette proximité tout en préservant les outils de gouvernance nécessaires au développement de l'ensemble du territoire de la ville.

C'est pourquoi, M. le Président, j'invite les membres de l'Assemblée nationale à adopter le principe du projet de loi n° 33 qui fournit aux élus de la ville de Montréal les mesures législatives nécessaires pour aller de l'avant.

L'ensemble de la démarche initiée par la déclaration ministérielle de juin dernier est inspiré des principes fondamentaux qui guident notre gouvernement dans ses relations avec le monde municipal. Ces principes fondamentaux sont, je le rappelle et le souligne, le respect des élus locaux, nos premiers partenaires pour la question de développement et de gouvernance locale; la recherche de solutions adaptées aux particularités et des villes et des communautés et le rejet des solutions du mur-à-mur; l'appui aux innovations qui favorisent l'accessibilité, la qualité et l'efficacité des services à la population; et un engagement incontournable et indéfectible en faveur de la démocratie locale où les élus sont imputables vis-à-vis leurs citoyens.

Le plan de décentralisation de la ville de Montréal constituera pour plusieurs citoyens l'ingrédient qui manquait pour qu'ils adhèrent à la nouvelle ville. Ainsi, ils retrouveront le contrôle sur les services de proximité et pourront choisir de revoir le niveau de ces services. Ainsi, les citoyens des arrondissements profiteront à la fois des avantages d'une gestion décentralisée sur les services quotidiens de proximité et profiteront aussi des avantages que procure une grande agglomération comme celle de Montréal.

À cet égard, le projet de loi modifiant la charte de la ville de Montréal prévoit plusieurs aménagements. Ainsi, on retrouve le transfert aux conseils d'arrondissement de nombreuses compétences en matière de division territoriale, de gouvernance ainsi qu'en matière de gestion des ressources humaines et financières. Le projet de loi prévoit, entre autres, que la conseil de la ville et tout conseil d'arrondissement concerné peuvent présenter une demande conjointe au gouvernement de modifier les limites d'un arrondissement. Le projet de loi remplace le poste de président d'arrondissement par celui de maire d'arrondissement. Il prévoit qu'à compter de la prochaine élection générale un maire d'arrondissement devra être élu à ce poste par les électeurs de l'ensemble de cet arrondissement. Ce dernier disposerait des pouvoirs d'un maire à l'égard des compétences d'arrondissement.

D'une part, le projet de loi accorde, à l'égard de la gestion des ressources humaines et conventions collectives, aux conseils d'arrondissement de nouveaux pouvoirs en matière de gestion du personnel, notamment en matière d'engagement et de congédiement des fonctionnaires et employés affectés à l'arrondissement. Il étend aussi les responsabilités de tout conseil d'arrondissement relativement à la négociation des conventions collectives des fonctionnaires et des employés affectés à l'arrondissement.

D'autre part, le projet de loi permet au conseil de la ville et à celui de chaque arrondissement de s'entendre sur le contenu d'une résolution désignée contrat d'arrondissement, laquelle doit, entre autres, prévoir des règles relatives à l'établissement et à l'évolution de la dotation. Le conseil d'arrondissement se voit également offert la possibilité de tenir un référendum consultatif conformément à la Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités.

En matière d'aménagement et d'urbanisme, le projet de loi apporte des modifications qui visent à permettre à un conseil d'arrondissement d'initier le processus de certaines modifications au plan d'urbanisme. Le projet de loi accorde à un conseil d'arrondissement le pouvoir de dresser un budget ainsi qu'un programme d'immobilisations de l'arrondissement. Il habilite également le conseil d'arrondissement à constituer un fonds de roulement, à effectuer certains emprunts et à imposer certaines taxes pour financer des services de proximité supplémentaires.

Des compétences en matière d'environnement sont également confiées au conseil, notamment celles relatives à l'adoption et à l'application d'un règlement concernant les nuisances et l'utilisation des pesticides.

En somme, M. le Président, le dépôt du projet de loi n° 33 modifiant la charte de la ville de Montréal est la première réponse que nous apportons aux plans qui nous ont été fournis par les nouvelles villes. C'est ainsi que d'autres villes, Québec, Longueuil, par exemple, ont également déposé des propositions, lesquelles sont présentement à l'étude.

Nous nous rapprochons du but que nous nous étions fixé, M. le Président, car, ayant fait confiance aux élus de la ville de Montréal, nous sommes prêts aujourd'hui à nous pencher sur leurs propositions de réorganisation et à adopter le principe de ce projet de loi qui reflète leurs demandes. Ces demandes fourniront un outil administratif et politique précieux pour une meilleure gouvernance locale, laquelle profitera aux Montréalais et Montréalaises de tous les arrondissements grâce au développement dynamique et harmonieux du territoire, à la qualité des services municipaux et au respect de la démocratie municipale.

n(15 h 20)n

En somme, M. le Président, ce que nous faisons par ce projet de loi et son adoption de principe, nous regardons les élus de Montréal, qui sont ceux des citoyens, qui ont eu une communication avec eux parce que ce sont eux qui sont les plus près, qui ont pu s'apercevoir de visu, en discutant avec eux, de leurs besoins. Ils ont entendu l'appel de plusieurs de leurs citoyens à l'effet qu'il fallait améliorer la livraison des services de proximité. Les gens sentaient une distance avec leurs élus. Or, et surtout au niveau municipal, il ne doit pas y avoir de distance. Ces élus municipaux sont ceux qui, à tous les jours, quotidiennement, sept jours sur sept, presque 24 heures sur 24, sont en contact avec leurs citoyens. Et, lorsque le citoyen fait une demande à l'égard des services de proximité, il s'attend... et l'élu voudrait répondre à cette demande.

Lorsque nous sommes face à une gouvernance qui est trop loin du citoyen, il peut y avoir un retard dans la livraison. Ce que la proposition de la ville de Montréal apporte, c'est justement de rapprocher la livraison du service de proximité à la décision du service de proximité; s'assurer que ceux qui sont élus, imputables devant leurs citoyens, puissent répondre rapidement. Et une des mesures, parmi toutes celles que j'ai mentionnées, qui se retrouve dans le projet de loi, qui me semble d'importance, c'est celle qui fait en sorte que dans l'arrondissement il y aura du personnel qui sera là pour répondre aux demandes des élus de l'arrondissement, qui sera là pour faire... rendre satisfaction aux citoyens.

Après tout, qu'est-ce que les gens cherchent? Les gens cherchent une ville qui est d'abord une communauté d'appartenance. C'est le premier point. On peut bien regarder l'ensemble du développement du monde municipal dans le monde et plaider plein de théories à l'effet que maintenant nous faisons face à une métropolisation, on doit faire concurrence aux autres, et là il y a des grandes théories qui sont élevées avec lesquelles on peut concourir facilement, mais le citoyen, lui, tous les jours, quand il se lève, quand il part travailler puis quand il revient, il veut avoir des services tout près de chez lui et il veut développer et participer à l'âme de sa proximité.

Ce que fait le projet de loi, ça permet de redonner cette appartenance, cette âme à ces citoyens dans leur milieu de vie et, en même temps, de continuer de bénéficier des avantages d'une métropole, dans cette ère de métropolisation, de pouvoir profiter de l'avantage d'être ensemble réunis pour développer, en économie ou en matière sociale, de développer un monde meilleur pour l'ensemble des citoyens, peu importe dans quel secteur de la ville ils se trouvent.

On essaie toujours en politique de faire le meilleur des deux mondes, on n'y arrive jamais complètement. Mais disons que, à partir du point où nous étions, avec le point où nous nous rendrons avec ce projet de loi, sans atteindre la perfection, on aura quand même amélioré la situation et le sort de nos concitoyens, qui auront été entendus autant par les élus locaux que par ceux de Québec, en donnant suite à ce projet de loi pour lequel, j'espère, nous adopterons le principe rapidement. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, merci, M. le ministre. M. le leader de l'opposition.

M. Boisclair: Oui. 30 secondes, M. le Président, sans utiliser un droit de parole sur le fond des choses. Je comprends que nous avons adopté une motion pour une consultation. Il a été convenu par l'Assemblée d'inviter le maire, le chef de l'opposition et la Chambre de commerce. Je voulais juste qu'il soit clair pour les registres de l'Assemblée que l'opposition avait demandé en particulier d'entendre l'Office de consultation de Montréal. Nous aurions voulu et souhaité une consultation plus élargie. Pour ne pas... éviter cependant de lancer un long débat qui nous aurait amenés à faire de la procédure, cette motion a été adoptée sur division. Mais je voulais qu'il soit clair que l'opposition aurait souhaité que nous entendions d'autres groupes que ceux sur la liste, et en particulier l'Office de consultation de Montréal.

Le Vice-Président (M. Sirros): Donc, je constate que cette motion préalable a été adoptée sur division avec les commentaires du leader de l'opposition. Alors, la parole est maintenant à la députée de Bourget et porte-parole de l'opposition officielle en matière d'affaires municipales.

Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, je cherche le qualificatif pour expliquer aux gens dans quel contexte nous sommes aujourd'hui. Vous savez, il y a quelques fois où il nous arrive de dire: C'est avec plaisir que j'aborde cette étape de l'adoption de principe de projet de loi. On a toutes sortes de manières d'introduire. Et je ne le trouve pas, et je vais prendre les prochaines minutes pour vous expliquer pourquoi.

D'abord, je voudrais signifier que l'opposition officielle a l'intention d'étudier avec soin, sérieusement, minutieusement, avec conviction aussi le projet de loi n° 33. Nous donnons donc notre accord de principe, à ce point de départ, quant à l'étude du projet de loi n° 33. Mais ce pour quoi j'introduis très modestement cette intervention, c'est qu'il nous faut dire aux gens que nous sommes, comme parlementaires, et je dirais également pour les Montréalais, nous sommes dans une situation extrêmement insoutenable. Pourquoi? Pourquoi? Parce que le projet de loi n° 33 est la consécration législative de changements demandés par la ville de Montréal et les élus municipaux, notamment le maire Tremblay. Or, ces changements ont été imaginés, discutés, formalisés dans un contexte où les gens savaient très bien que Montréal était à risque de défusion. Alors, c'est dans ce contexte-là que nous allons, nous devrons étudier le projet de loi n° 33.

Nous sommes dans une position insoutenable. D'abord, les élus de Montréal sont dans une position insoutenable, puisque le gouvernement leur fait porter le poids, le poids de cet engagement libéral à l'effet de permettre les défusions. C'est aux élus municipaux que le gouvernement a dit: Trouvez des solutions pour susciter l'adhésion; c'était notre engagement comme gouvernement libéral, cet engagement de permettre les défusions, mais c'est à vous à trouver les solutions pour permettre l'adhésion. Et c'est ce que d'ailleurs le maire Tremblay a fait. Comme parlementaires, nous sommes coincés également, parce que, normalement, M. le Président, normalement, nous aurions dû étudier ce projet de loi dans la sérénité. Or, nous ne sommes pas dans un contexte de sérénité. Pourquoi? Parce qu'il y a une menace, parce qu'il y a une certitude que Montréal va être démantelée, que Montréal va être coupée en morceaux, qu'il y a des composantes de Montréal qui vont quitter Montréal.

Qu'est-ce qu'aurait dû être ce processus? Et je me permets de rappeler le contexte. Nous avons eu il y a quelques années une vaste réorganisation municipale, tout le monde le sait, une réorganisation municipale basée sur un diagnostic clair, troublant quant à l'avenir des villes au Québec. Le gouvernement du Parti québécois a posé des gestes, des gestes pas décidés sur le bord d'une table, M. le Président, des gestes réclamés, réclamés par des élus municipaux et par tous les experts qui se préoccupent du développement du Québec et de leurs villes. Nous avons donc fait cette réorganisation municipale. Elle a à peu près deux ans de vie. Depuis plus ou moins deux ans, des hommes et des femmes, d'abord, ont été élus à la tête de ces municipalités et ont mis en place les éléments pour structurer ces nouvelles villes unifiées.

Qu'est-ce qu'il aurait dû se passer normalement? Normalement, dans un contexte serein, nous aurions pu nous demander, en collaboration et inspirés par l'expérience des élus municipaux et des citoyens dans cette nouvelle ville, nous aurions pu nous demander: Qu'est-ce qu'on peut faire maintenant, deux ans plus tard, pour corriger des choses, pour améliorer des choses, pour corriger le tir par rapport aux objectifs et aux moyens qui avaient été identifiés au point de départ? Et nous aurions pu nous engager dans un processus fort intéressant impliquant bien des gens pour identifier ces moyens nouveaux à partir de ces expériences vécues pour améliorer les services de proximité, pour améliorer les liens entre le conseil d'arrondissement et la ville-centre, pour clarifier les compétences entre les uns et les autres. Nous aurions pu faire cela sereinement.

Mais non, on fait tout cela, y compris le maire de Montréal, avec le couteau sur la gorge. On fait tout cela dans un contexte où Montréal est menacée d'être éclatée. Alors, M. le Président, je dois le dire à quel point c'est troublant que nous soyons dans ce contexte. C'est troublant parce que c'est le gouvernement qui nous a mis dans ce contexte-là, alors que nous aurions pu faire les choses sereinement, rigoureusement, intelligemment. Mais non, nous sommes en train d'évaluer un plan de sauvetage de Montréal, nous sommes en train d'essayer de voir si Montréal peut avoir une dernière chance. C'est ça qu'on fait, M. le Président, aujourd'hui. Après deux ans d'existence, deux petites années d'existence, nous avons mis... En fait, «nous» exclut la personne qui parle et la personne qui représente l'opposition officielle, on se comprend bien, hein? Après deux petites années, Montréal est déjà mise en danger, M. le Président. On a beaucoup vu, hein, les nouveaux trucs de télé, Star Académie, etc., mais là c'est Montréal qui est mise en danger après deux petites années d'existence. Quel sort terrible on réserve à notre métropole!

Alors, nous devons donc examiner le projet de loi n° 33 sachant que le contexte est excessivement malsain et que librement nous ne pouvons pas discuter de tous ces éléments-là, puisque, tous, nous avons la crainte, y compris le gouvernement, que Montréal explose, que Montréal éclate.

n(15 h 30)n

M. le Président, il s'est passé pourtant tellement de choses depuis deux ans. Non seulement cette réorganisation a été mise en route, les lois ont été adoptées, des élus municipaux ont été élus, démocratiquement élus, ils se sont mis à la tâche, puis c'est des gens qui travaillent. On les côtoie, nous sommes tous des députés, nous côtoyons nos élus municipaux. Moi, je suis quelqu'un de Montréal et je vois à quel point ces gens-là ont travaillé d'arrache-pied, avec coeur pour réussir Montréal.

Qu'est-ce qui s'est passé aussi depuis? Bien, il s'est passé un gouvernement qui a été élu et qui a concrétisé cette menace de démantèlement, puisque ce gouvernement persiste et signe son engagement au sujet des défusions, son engagement tout à fait irresponsable. Puis, entre-temps, bien là il y a des Montréalais, là, des hommes et des femmes qui, là, se sont mis à avoir la frousse, là, parce que c'est vrai, là, que ça va défusionner, Montréal, c'est vrai qu'on va éclater, on va faire éclater Montréal.

Alors, il y a une semaine, une dizaine de jours, bien il y a des gens, des hommes et des femmes de Montréal, de tous les horizons, dans le monde des affaires, dans le monde culturel, dans le monde social, dans le monde du développement, des gens... des anglophones, des francophones, des Montréalais nouvellement arrivés, des Montréalais qui sont là depuis des années, de toutes allégeances politiques et partisanes, M. le Président... Dans cette liste de gens qui ont signé cet appel à la société civile montréalaise, il y a des péquistes, il y a des libéraux, M. le Président, et il y a même l'ex-député d'Outremont, ancien président du Conseil de la langue française, Pierre-Étienne Laporte, qui a signé cette pétition.

Alors, entre-temps, oui, il y a des Montréalais qui se sont mis à avoir peur et à réaliser que cette menace, elle était réelle. J'ai dit ce matin, M. le Président, qu'il y avait des risques de défusion. Maintenant, nous en avons la certitude, et c'est de ça dont des Montréalais ont peur. Alors, des gens comme Philippe Angers, Raymond Bachand, Yvette Biondi, ancienne conseillère de la ville de Saint-Laurent, Lucien Bouchard, Marcel Brisebois, Pierre Cléroux, Marcel Côté, Pierre Curzi, Françoise David, Clément Demers, Roch Denis, André Desmarais, Hélène Desmarais, Jean Doré, Francis Fox ? ce n'est pas un péquiste, Francis Fox, et c'est un chic type, il a signé cette déclaration ? le Dr Jacques Genest, André Godbout, Guy Lafleur, j'en passe, j'en passe et j'en passe, entre-temps, ces gens-là ont dit: Arrêtez! Arrêtez, il faut être capable d'avoir Montréal... un Montréal... une ville forte, une ville qui a le cap vers l'avenir, qui est tournée vers l'avenir, pas vers le passé. Alors, entre-temps est donc arrivé ça.

Et entre-temps est arrivé aussi autre chose. Vous savez, M. le Président, lorsque j'ai participé aux consultations sur le projet de loi n° 9, qui ont donc mené à ces amendements que nous allons étudier au cours des prochains jours, j'imagine, j'ai été frappée d'une chose, et j'ai relu, là, tout ce qu'il y avait autour de l'engagement du Parti libéral sur cette question de défusion, j'ai réalisé une chose: le Parti libéral n'a jamais remis en cause les fondements, la nécessité, les objectifs de cette réorganisation municipale ? jamais. Et je mets au défi le ministre des Affaires municipales de prouver le contraire. Jamais ils n'ont remis en cause le bien-fondé de cela. Et même hier... J'entendais hier soir, au Téléjournal, à l'édition de minuit 20, je dois le dire, une entrevue avec le premier ministre; il commence même à dire qu'il y a des conséquences aux défusions. Il était temps, M. le Président, mais, enfin, ça, c'est une autre histoire. Et ce que je voulais dire, c'est que, d'aucune manière, le Parti libéral n'a remis en cause les fondements de cette réorganisation. Le Parti libéral s'en est pris à la forme, à la façon, mais pas sur le fondement. Et, entre-temps aussi, M. le Président, et ça aussi, ça rend le contexte très difficile, nous assistons à des relations terriblement complexes, et, je dirais même, plus que complexes, malsaines, entre le gouvernement du Québec et la ville de Montréal.

M. le Président, hier, justement à l'occasion de cet interview du premier ministre, le premier ministre a dit, au sujet du budget de la ville de Montréal qui a été déposé hier ? un budget courageux, je crois, de la part des autorités de la ville de Montréal ? il a dit: «La surtaxe de l'eau ? et je le cite ? c'est la ville de Montréal, ce n'est pas nous autres. Le transport en commun, ? il avait même le geste, M. le Président ? c'est la ville de Montréal, ce n'est pas nous autres.»

Nous sommes, M. le Président, dans un contexte où le gouvernement du Québec ne reconnaît pas l'importance de cette métropole. Et le deuxième indice de ça, bien, on l'a vu apparaître bien rapidement: le non-respect du contrat de ville dûment signé entre le gouvernement du Québec et la ville de Montréal. Et le non-respect de ce contrat de ville a mis dans le trouble la ville de Montréal et a fait en sorte que la ville de Montréal a dû prendre des décisions beaucoup plus difficiles quant au fardeau fiscal de nos concitoyens montréalais. Pourquoi? Parce que le gouvernement déteste beaucoup le gouvernement précédent. Il veut rayer de la carte tout ce que le gouvernement précédent a pu faire. Mais, moi, je veux bien qu'il nous haïsse à ce point-là, M. le Président, mais il ne faudrait pas prendre des tiers en otages, M. le Président. Le maire Olivier nous l'a dit à l'occasion des consultations sur le projet de loi n° 9: Il ne faudrait pas faire payer le prix de ce que ce gouvernement libéral veut faire. Ce prix-là ne doit pas être sur les épaules des villes.

Alors, on est dans un contexte qui frise le mépris, M. le Président, et je choisis mes mots, je ne veux pas être... Je ne veux pas prononcer des mots antiparlementaires. Mais le mépris, c'est le fait de considérer comme indigne d'attention, c'est un sentiment qui pousse à ne faire aucun cas de quelque chose. Quand le premier ministre hier, en pleine télévision à Radio-Canada, se lève le bras et dit: Le transport en commun? c'est la ville de Montréal, ce n'est pas nous autres, la surtaxe de l'eau? c'est la ville de Montréal, ce n'est pas nous autres, j'appelle ça du mépris, M. le Président.

Alors, c'est dans ce contexte-là, un contexte où il y a une menace de défusion, où un plan de réorganisation a été préparé pour essayer de sauver Montréal après deux toutes petites années d'existence, un contexte où les relations entre la ville de Montréal et le gouvernement du Québec sont carrément irrespectueuses, M. le Président, c'est dans ce contexte-là que, avec courage, avec conviction, nous allons étudier ce projet de loi n° 33.

Alors, M. le Président, comment allons-nous aborder, du côté de l'opposition officielle, ces travaux, cette étude du projet de loi n° 33? D'abord, je dirai que, lorsqu'on prend connaissance des différents documents qui ont été produits par la ville de Montréal, que nous appelons communément le plan Tremblay, on retrouve un certain nombre de choses, et je me sens dans l'obligation de lire quelques petits extraits pour expliquer dans quel esprit, fort probablement, je dirais même certainement, le maire de la ville de Montréal avec ses collaborateurs ont abordé cette question de l'amélioration de Montréal. Je pense que c'est important de saisir les intentions que le maire et ses collaborateurs avaient lorsqu'ils se sont engagés dans ce processus d'identifier des améliorations au fonctionnement de la ville de Montréal. Parce que, le problème, je le répète ? je ne vais pas m'étendre là-dessus ? le problème, ce n'est pas les intentions du maire de Montréal. Le problème, c'est le contexte qui fait en sorte qu'on travestit le travail que devait faire le maire de Montréal.

Alors, qu'est-ce qu'il y a donc derrière ce qu'on appelle le plan Tremblay? Alors, il y a un certain nombre de principes, et j'en nomme. Je comprends que c'est ça qui a guidé les travaux de la ville de Montréal. Alors, il y a six grands principes qui appuient cette démarche.

Un, le conseil de ville a la responsabilité d'adopter les politiques de niveau stratégique, incluant les normes qui en découlent.

Deux, tous les services corporatifs ont une portée et une responsabilité liées aux enjeux stratégiques de l'ensemble de la ville. Ce n'est pas rien, ça. On dit: La ville-centre, là, c'est elle qui est gardienne de tenir le bateau dans la bonne direction... Qu'est-ce que je viens de dire là, M. le Président? Ce n'est pas grave. Mais c'est vraiment la ville-centre qui essaie de garder le cap, qui essaie de voir en avant, de se projeter dans cinq ans, dans 10 ans, que doit devenir Montréal. Or, c'est ce que dit ce principe directeur.

n(15 h 40)n

Trois, élimination du dédoublement des fonctions. Puis, je peux les comprendre qu'ils aient eu ces objectifs-là, parce que, dans cette phase d'implantation, bien là on marche par essai-erreur puis on est pris avec des pratiques... on doit bâtir une nouvelle ville avec des pratiques qui étaient installées d'une ville à l'autre, d'un arrondissement à l'autre. Alors, bien sûr, il est fort possible qu'il y ait des dédoublements et que les citoyens s'en sont plaints, puis ils avaient raison. Alors, je comprends que les objectifs poursuivis sont d'éliminer ces dédoublements de fonction.

Autre grand principe, le quatrième: les services de proximité sont de la responsabilité des arrondissements, et ces derniers sont autonomes dans leur gestion. C'est un principe qui est fort intéressant, puisque, à l'occasion des travaux de la commission parlementaire portant sur le projet de loi n° 9, il y a beaucoup de gens qui nous ont dit: On voudrait faire mieux.

Je ne sais pas, M. le Président, si c'est moi qui dérange les collègues d'en face, mais, eux, ils me dérangent.

Le Vice-Président (M. Sirros): Moi, j'apprécierais vraiment, là, qu'on se comporte correctement, on laisse la députée terminer son allocution dans le silence, on l'écoute. Si on a des choses à se dire entre collègues, on sort puis on les dit entre nous à l'extérieur. C'est pour ça d'ailleurs qu'il y a des salles.

Alors, Mme la députée de Bourget.

M. Boisclair: M. le Président... s'adresse aux collègues ministériels.

Le Vice-Président (M. Sirros): Écoutez, j'étais tourné vers la droite parce que effectivement c'est le groupe parlementaire qui est présent.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, s'il vous plaît! Mme la députée de Bourget.

Mme Lemieux: Merci, M. le Président. Alors, je disais donc... j'essayais donc de démontrer quelles étaient les intentions du maire Tremblay et de son équipe dans ce travail de réorganisation, d'amélioration de la ville.

Alors, pour repérer ses intentions, je peux bien lui parler quelquefois, mais je ne peux pas décider ce qu'il a dans sa tête. On a un appui, là, on la voit, la nature de ses intentions. Alors, je disais donc que, parmi ses intentions, il avait l'intention d'améliorer les services de proximité et de donner plus de responsabilités et d'autonomie aux arrondissements.

Cinquième élément, qui est un principe de ce plan Tremblay: les infrastructures, les équipements, les organismes à clientèle d'arrondissement sont de l'entière responsabilité des arrondissements. Ceux dont la clientèle est panmontréalaise sont la responsabilité des services corporatifs.

Alors, qu'est-ce qu'on dit là-dedans? Dans une perspective d'améliorer les choses pour les citoyens, dans une perspective de renforcer les responsabilités des arrondissements, on va clarifier qui fait quoi. Alors, c'est ça, l'intention derrière ce projet.

Et sixième élément: tous les services de la ville sont livrés à des coûts comparables à ceux des villes les plus performantes, et ça, c'est bien. C'est bien que Montréal se mette dans une dynamique et dise aux gens: Écoutez, là, on va essayer de vous livrer les services aux meilleurs coûts, puis on est capables de le faire, puis on peut se comparer à d'autres villes canadiennes ou américaines. Alors, ça, ça fait donc partie des intentions.

Alors, ce que je veux dire à ce moment-ci, M. le Président, c'est que, moi, je suis persuadée que Gérald Tremblay et ses collaborateurs avaient de nobles intentions, qu'ils avaient de bonnes intentions, et, d'aucune manière, ni moi ni personne ici ne peut reprocher au maire Tremblay d'avoir essayé et d'essayer de développer des mesures, des mécanismes, des pratiques ? appelez ça comme vous voulez ? pour améliorer Montréal. On ne peut pas leur reprocher ça, d'autant plus que le gouvernement les a invités à le faire.

Je rappellerai en ce sens la déclaration ministérielle du ministre à ce sujet-là, qui a dit aux municipalités: Si vous avez des améliorations à proposer, envoyez-moi ça, on va regarder ça. En gros... C'était plus élégant que ce que je viens de dire, mais, en gros, c'était ça, le message, M. le Président.

Alors, le maire Tremblay, comme d'autres maires au Québec, il a fait son boulot, il a fait son boulot et il a déposé au gouvernement une série d'amendements en disant: On pense que ces amendements-là vont permettre d'améliorer Montréal. Alors, maintenant, ce que je veux dire, M. le Président, c'est que la balle n'est plus dans le camp du maire Tremblay. Le maire Tremblay, il a fait son travail. On peut être pour, on peut être contre, mais il a fait son travail. Maintenant... Et, c'est pour ça qu'on étudie ce projet de loi ici, à l'Assemblée nationale, maintenant, la balle est dans le camp du gouvernement.

Le gouvernement a invité la ville de Montréal à proposer ce type de changements. Le gouvernement, en cristallisant ces changements dans un projet de loi, hein, en prenant ces mesures-là et en faisant en sorte que la charte de la ville de Montréal soit éventuellement amendée, il a repris à son compte les changements proposés par Montréal. C'est maintenant, donc, au gouvernement d'expliquer et de défendre le contenu du projet de loi. En d'autres mots, ce que je veux dire, M. le Président, c'est que... évitons, et nous allons l'éviter... Nous ne jugeons pas, ici, le plan Tremblay, nous jugerons le projet de loi n° 33, nous jugerons les décisions du gouvernement au sujet de Montréal. Parce que c'est maintenant le projet du gouvernement, c'est maintenant à lui d'en répondre et c'est maintenant lui qui doit exercer ses responsabilités.

Alors, je tenais à apporter cette précision pour expliquer dans quel contexte nous allons aborder et étudier avec soin, avec rigueur, avec conviction le projet de loi n° 33. Et, en ce sens, je suis une personne plutôt généreuse, d'autant plus que le ministre est là, je lui dis d'avance ce sur quoi on va lui poser des questions. Il a fait des choix, il a pris le plan Tremblay, il a dit: O.K. On met ça dans un projet de loi. Alors, maintenant, c'est à lui à répondre aux questions.

Alors, je lui signifie maintenant un certain nombre de questions, d'interrogations auxquelles un gouvernement responsable doit répondre. Par exemple, dans les modifications proposées qui sont inscrites au projet de loi n° 33, il est proposé de faire un passage quant au nom et au statut des présidents d'arrondissement. En gros ? je n'entrerai pas dans les détails, nous aurons l'occasion d'y revenir ? actuellement, ceux qui sont les personnes en charge des arrondissements sont appelés les présidents d'arrondissement. Le gouvernement nous propose que ces présidents deviennent des maires d'arrondissement. Mais ce n'est pas qu'un changement de mot, on propose également que le mode de choix de ces personnes soit changé, on propose que ces maires d'arrondissement ? c'est ce que le gouvernement nous propose ? soient élus au suffrage universel. Je trouve que cette mesure mérite effectivement d'être examinée. Il y a là quelque chose à examiner. Est-ce que c'est bon? Est-ce que c'est pas bon? Y a-t-il des avantages, des inconvénients? On verra dans nos échanges, mais le gouvernement devra répondre à ces questions et, notamment, devra nous dire ? ça semble un peu au ras du sol, comme on dit ? ça coûte combien? Le fait que nous fassions ce passage de présidents d'arrondissement aux maires d'arrondissement élus au suffrage universel, il y a probablement un enjeu de coûts. Comme gouvernement qui veut offrir ça aux Montréalais, il devra répondre à cette question.

Autre exemple. Lorsque la loi sur l'organisation du territoire municipal a été adoptée, enfin ce qu'on appelle communément la loi 70, il y avait eu un certain nombre de mesures, puisque le gouvernement avait décidé d'unifier Montréal et que, sur ce territoire de Montréal, il y avait des villes qui existaient déjà, de taille différente, avec une histoire différente, il y avait l'ex-Montréal, etc. Il y a eu toutes sortes de mesures, quant au nombre de conseillers d'arrondissement par exemple, pour aider, pour faire en sorte que le passage entre l'ancienne réalité et la nouvelle réalité se fasse un peu plus en douceur. Il y avait donc eu... appelons ça des privilèges, même si ce n'est pas un mot... je ne l'utilise pas de manière péjorative, mais il y avait eu un peu plus de voix qui avaient été accordées à certaines ex-municipalités.

Or, le gouvernement, alors que c'était à ce moment-là vu comme des mesures transitoires, des mesures permettant de faire la transition entre l'ancienne réalité et la nouvelle réalité, le gouvernement nous propose de les rendre permanentes. Alors, on va vouloir comprendre pourquoi. Et est-ce que le fait de maintenir ce qui était une exception, le temps que les choses se passent bien, le fait qu'on ramène ça à une réalité coulée dans le béton pour le futur, est-ce que c'est la bonne chose à faire pour Montréal? Alors, le gouvernement devra nous expliquer ses choix en cette matière.

Autre sujet qui a déjà fait couler beaucoup d'encre, c'est sur la question de l'arrondissement Ville-Marie. Le gouvernement nous propose que cette question soit examinée, à savoir... Et là les gens m'excuseront si je n'y vais pas à partir du texte de loi précis, c'est très technique, mais en gros, en gros, ce que ça dit... L'arrondissement Ville-Marie, c'est le centre-ville de Montréal, c'est le coeur de la cité, comme on dit, et, jusqu'à maintenant, l'arrondissement Ville-Marie avait un statut équivalent à tous les autres arrondissements de la ville de Montréal unifiée.

n(15 h 50)n

Le gouvernement nous propose qu'il y ait une démarche, une réflexion, des discussions à ce sujet-là. Nous y sommes ouverts. D'ailleurs, nous savons pertinemment que le processus de consultation a été amorcé avec les autorités de Montréal. Mais se pose la question: S'il y avait des changements, si le gouvernement éventuellement achetait cette idée de changer les contours, le territoire de cet arrondissement, comment ça va se passer, qui va décider ça et comment ça va se décider?

C'est important, cette question, non seulement pour l'arrondissement Ville-Marie, mais pour les autres arrondissements dans le futur. Les décisions que le gouvernement va prendre et que nous allons prendre comme Assemblée nationale quant à l'arrondissement de Ville-Marie et son territoire sont déterminantes pour le futur. Si on s'entend sur une manière de changer l'arrondissement Ville-Marie, ça veut donc dire qu'on va s'entendre également quant à l'utilisation de cette manière pour d'autres arrondissements dans le futur.

Et là arrive la question linguistique, M. le Président. Je sais que le premier ministre a horreur qu'on fasse allusion à ça. Il se cache les yeux, il ne réalise pas que Montréal, c'est un lieu de rencontre, un lieu de rencontre entre la langue française et la langue anglaise, un lieu de rencontre entre des francophones et des anglophones et maintenant des gens qui viennent de tous les pays du monde. Montréal vibre sous tous les sons et toutes les musiques maintenant. Et ça, c'est un atout, mais, en même temps ? le pendant de ça ? on sait très bien que quelquefois on a vécu dans notre histoire des moments de tension. Et un gouvernement a la responsabilité de ne pas mettre de l'huile sur le feu, un gouvernement a la responsabilité d'être conscient qu'il peut y avoir des tensions, et le gouvernement a la responsabilité d'éviter qu'il y ait des ghettos à Montréal qui se constituent formellement dans une loi autour de ces questions linguistiques. Alors, toute la question du comment on change les territoires, des arrondissements et des municipalités ? et ça nous amènera peut-être à une discussion sur le projet de loi n° 9 ? des municipalités qui sortiront de Montréal, elle est cruciale. Parce que ce sera un outil, ou bien pour apaiser les tensions, ou bien pour les raviver. Alors, nous serons extrêmement, extrêmement attentifs à cela.

Autre amendement que le gouvernement propose à la charte de Montréal, c'est au sujet du développement économique. D'abord, le projet de loi n° 33 introduit une dynamique, une nouvelle dynamique qui est appelée un contrat d'arrondissement. Et je crois que ça, ce sera intéressant de comprendre comment ça peut se passer. Ce qu'on comprend à ce moment-ci, c'est que la ville-centre et les arrondissements veulent, un peu, mettre plus de dynamisme, d'interaction dans leurs relations entre la ville-centre et les arrondissements, d'où cette idée, donc, de contrat d'arrondissement.

Mais, par ailleurs, le projet de loi propose que ces contrats d'arrondissement portent aussi sur la conclusion d'ententes sur une période de 10 ans où 50 % des revenus supplémentaires générés à la suite de la réalisation de nouveaux projets de développement demeurent dans l'arrondissement.

En d'autres mots, ce que je comprends à ce moment-ci ? le gouvernement devra répondre à ces questions: un arrondissement qui créerait une certaine richesse pourrait conserver 50 % de cette nouvelle richesse. À première vue, ça semble sympathique. On dit: Bien, ça peut encourager les gens, les élus, etc., à faire plus, à être plus imaginatifs, à mieux utiliser les terrains disponibles, etc. À première vue.

Mais la grande question qui se pose à ce moment-ci: Que fait-on dans les cas où les arrondissements n'ont pas le même potentiel de développement? En d'autres mots... M. le Président, peut-être même dans votre propre comté vous posez cette question. En d'autres mots, soyons lucides, là: ce n'est pas vrai que les 27 arrondissements sont tous égaux. Ce n'est pas vrai que le compteur est parti à zéro lorsque cette nouvelle ville a été créée.

Je m'excuse, M. le Président, mais Dorval, qui a un aéroport, est-ce qu'on se comprend, M. le Président, que Dorval a un atout supplémentaire? Alors, le compteur n'est pas à zéro. Et le potentiel de développement, outre les éléments humains ? le leadership, le fait que les gens soient bien organisés, le fait que les gens aient des bons élus ? outre ça, là, il y a des éléments objectifs qui nous indiquent: est-ce que c'est possible de développer plus, davantage? Il y a des fois où on doit dire: Non, il y a des portes qui sont fermées, pour toutes sortes de raisons.

Alors, qu'est-ce qu'on fait si le potentiel de développement n'est pas équivalent? Mais là on est en train de dire: Bien, 50 % des revenus de cette nouvelle richesse pourraient être retenus par les arrondissements. Oui, mais les arrondissements qui en ont moins, de possibilités de développement, comment on va considérer ça?

Rappelons-nous, rappelons-nous que cette réorganisation municipale, et je le répète, dont les fondements n'ont jamais été remis en cause par le gouvernement du Parti libéral, jamais, avaient pour objectif de régler des problèmes d'équité. Est-ce que cette mesure qui, à première vue, semble sympathique, semble avoir des objectifs nobles, va créer d'autres problèmes d'équité? Peut-être que non, M. le Président, mais le gouvernement doit répondre à ces questions-là. Alors, voilà un autre exemple.

Autre exemple où nous aurons des interrogations. Vous savez que, dans toutes les villes modernes, les élus sont à la rencontre d'hommes et de femmes qui ont des points de vue, des convictions, qui sont dans des groupes, des organisations, appelez ça comme vous voulez, et que ce n'est pas vrai que les élus municipaux, comme les élus, non plus, de l'Assemblée nationale, se font élire et, quatre ans plus tard, ils vont vérifier si les citoyens sont encore confortables avec leur présence. Ça ne marche pas comme ça.

Les élus municipaux, comme à l'Assemblée nationale, ont développé, et l'organisation municipale moderne, les organisations municipales modernes ont développé toutes sortes de moyens d'impliquer les citoyens au fur et à mesure que la vie municipale évolue: des comités consultatifs, des politiques de consultation, des comités aviseurs, des séances d'information publiques, des conseils de ville qui se tiennent en public, etc. Or, il y a un certain nombre de mesures dans le projet de loi que le gouvernement propose qui aboliraient, je n'ai peut-être pas la bonne expression, mais qui aboliraient le fait que, dans certains cas, alors que, jusqu'à maintenant, on le faisait, il y avait des consultations à certains sujets... et là on enlève cette possibilité de consultations. Peut-être que c'est justifié, M. le Président, peut-être. Peut-être que, dans certains cas, on dit: Face à certaines responsabilités, il faut éviter de mettre des citoyens en affrontement. Peut-être, mais il faut tout de même se demander pourquoi le gouvernement nous propose cet ajustement et quel effet ça aura pour le futur.

Par ailleurs, le projet de loi propose des changements assez importants au niveau de la gestion du personnel: l'embauche du directeur de l'arrondissement, l'embauche du personnel, la désignation des tâches, etc. C'est bien évident, M. le Président, que, jusqu'à maintenant, la question du personnel était davantage centralisée, c'était davantage fait au niveau de la ville-centre, on en convient, et que, là, bon, il est bien possible que les gens se disent: Il y aurait peut-être lieu de donner plus de prise, plus de liens, plus de contacts entre les élus qui sont dans les arrondissements et le personnel. C'est noble, c'est noble comme objectif! Mais, moi, je veux m'assurer...

Et j'annonce déjà cette question au ministre: Si l'objectif, c'est la décentralisation, on achète ça, mais, si l'effet, c'est l'éparpillement et la fragmentation, il faudra se poser quelques questions. Alors, nous serons attentifs à cette question, donc, de la gestion des ressources humaines, la gestion des éléments de conditions de travail, parce que, effectivement, il y a un certain nombre de sujets de négociation, en termes de conditions de travail, qui sont identifiés et sous la responsabilité du conseil d'arrondissement, selon le projet de loi. Donc, nous examinerons cette question-là avec beaucoup d'attention.

Le gouvernement, aussi, propose une série de mesures sur toutes les questions budgétaires: Qui décide du budget d'arrondissement? Comme se passe le processus? Comment le conseil d'arrondissement identifie ses budgets? Quel est le lien avec la ville-centre quant à la question des budgets? Il y a une série de modifications dans le projet de loi qui sont proposées qui, dans plusieurs cas, semblent intéressantes à première vue, mais, en même temps, il faut être capable ? et c'est là la responsabilité du gouvernement ? d'identifier s'il y a des effets négatifs, s'ils sont trop importants, ces effets négatifs, et si on n'introduit pas une dynamique qui nous ramène dans de la concurrence interarrondissements. Alors, il faudra se poser un certain nombre de questions à ce sujet.

n(16 heures)n

Autre sujet qui nous préoccupe, c'est toute la question de la taxation. Le projet de loi nous propose de donner un certain nombre de possibilités aux conseils d'arrondissement quant à la taxation. Alors, ces possibilités étaient déjà prévues dans la loi n° 170, il y avait déjà des possibilités où les conseils d'arrondissement pouvaient avoir une tarification à leur convenance. Il faut se demander si le modèle qui est proposé est le plus adéquat et quel effet aussi ça aura sur le fardeau fiscal des Montréalais: Qui percevra ces nouvelles taxes? Comment elles seront déterminées et quel effet ça aura sur le fardeau fiscal de nos compatriotes montréalais?

Autre élément au sujet duquel nous serons attentifs: nous avons bien compris d'abord que le projet de loi qui est proposé propose de clairement identifier des compétences au niveau des arrondissements, de faire en sorte que ces arrondissement aient vraiment totale liberté, si je peux m'exprimer ainsi, en regard de ces compétences et que ça a pour effet, en toute logique, qu'un conseil d'arrondissement pourrait ester en justice. Le conseil d'arrondissement pourrait donc, dans le domaine de ses compétences, poursuivre, pour toutes sortes de raisons.

Alors, je vois bien qu'il y a un prolongement, où il y a là une certaine logique; il y a un prolongement entre le fait que ce projet de loi propose des compétences clairement définies, locales, au niveau des conseils d'arrondissement, puis, au bout de cette chaîne-là, bien, quand il y a des possibilités de recours, le conseil d'arrondissement peut ester en justice.

Mais la question qu'on se pose, c'est: Est-ce qu'un conseil d'arrondissement pourra poursuivre un autre conseil d'arrondissement? Est-ce qu'un conseil d'arrondissement pourra poursuivre la ville-centre? Alors, je pense que ça va être important que nous ayons non seulement les réponses à ces questions, mais également des éléments qui devraient empêcher ce genre d'initiatives, puisque la réforme municipale, la réorganisation municipale a toujours eu pour objectif d'éviter et de se sortir de la concurrence stérile. Alors, je crois que ce sera une question que nous allons examiner avec beaucoup d'attention.

M. le Président, je voudrais aborder quelques autres sujets, en lien avec le projet de loi n° 33. D'abord, je voudrais dire que l'autre aspect au sujet duquel nous serons attentifs, c'est l'interface, les liens, les collisions entre le projet de loi n° 33 et le projet de loi n° 34 et, je dirais, même probablement avec le projet de loi n° 9; mais ça, on y reviendra.

Bon. Le gouvernement actuel a déposé en cascade un certain nombre de projets de loi. Certains diraient que c'est là un signe d'une certaine désorganisation... mais enfin, je pourrais faire une conférence là-dessus. Il a donc déposé un projet de loi, un projet de loi amendant la charte de la Ville de Montréal, mais il a aussi déposé il y a quelques semaines un autre projet de loi qui concerne les structures de développement économique régional. Et, sans reprendre le détail de ce projet de loi n° 34 ? à l'initiative du ministre responsable du Développement économique et régional ? ce projet de loi n° 34 propose un certain nombre de mécanismes, propose d'ailleurs...

Et, à ce moment-ci, M. le Président, je suis trop tentée de faire une parenthèse. Tout à l'heure, j'ai dit: Le monde municipal et l'organisation municipale, de plus en plus, côtoient les citoyens et les groupes de citoyens au fur et à mesure que leur vie municipale évolue.

Ça, lisez un peu sur ce sujet, sur la démocratie représentative, la démocratie participative, regardez les grandes tendances quant aux questions démocratiques dans les pays développés comme le nôtre, et ça, c'est l'unanimité: la santé de la démocratie ne se mesure pas nécessairement toujours par une élection. C'est un point de départ fondamental, ça, on en convient, mais elle se mesure aussi par la capacité que les élus ont d'être en interaction avec les citoyens, et je dirais même plus, avec les questions difficiles.

Vous savez qu'il y a une époque, M. le Président, pas si lointaine dans notre histoire, et à l'Assemblée nationale et du côté municipal, les choses se faisaient pas mal en vase clos. On se comprend? Depuis, les citoyens ont un degré et un niveau d'attente et un degré d'exigence beaucoup plus grands, et c'est heureux. C'est ça qui a fait qu'au Québec on a des moeurs politiques presque exemplaires, c'est ça qui fait qu'au Québec nous sommes cités comme étant une démocratie vivante, c'est ça qui fait qu'au Québec on a été capables d'évoluer beaucoup plus rapidement, sur des questions sociales, culturelles, environnementales complexes, que d'autres. Parce qu'on a développé des pratiques, on a développé des façons de faire qui font en sorte que les élus, d'abord, ne sont pas lancés tout seuls dans le champ pendant quatre ans, parce que les élus sont capables maintenant d'avoir des points de contact, des fois douloureux ? des réunions de conseils municipaux houleuses, par exemple, des réunions avec des groupes de citoyens virulentes ? mais on a été capables de ne pas abandonner nos élus, de faire en sorte qu'au fur et à mesure que la vie évolue, qu'un dossier se présente, qu'une tension se vit dans une communauté, petite ou grande, on a été capables de développer des points de contact, qu'on peut appeler de tous les noms: des comités aviseurs, des comités consultatifs, des comités de citoyens, des réunions, tout ce que vous voulez.

Et ce qui est incroyable, incroyable, M. le Président, c'est que le projet de loi du ministre responsable du Développement régional évacue complètement cette question en nous disant: Nous, on fait confiance aux élus municipaux. Ce n'est pas ça, l'enjeu. On est en train d'abandonner les élus municipaux, M. le Président, et cette expertise, ces pratiques fortement enracinées dans bien des milieux au Québec vont s'effriter. Et ce que je veux dire à ce sujet-là, c'était ma parenthèse sur le projet de loi n° 34, mais je veux signaler au ministre qu'il se peut qu'il y ait une collision frontale entre le projet de loi n° 33 et le projet de loi n° 34.

M. le Président, le ministre du Développement économique et régional dit dans son projet de loi, en gros: Nous allons créer une conférence des élus municipaux; ce ne seront que des élus municipaux. Le projet de loi n° 33 propose un maire de la grande ville et des maires d'arrondissement. Un: Qui sera membre de la conférence régionale des élus municipaux? Je le sais, ils vont nous répondre probablement: Le maire de la grande ville et les maires d'arrondissement. Très bien. Est-ce que la voix du maire de Montréal sera la 28e voix? Est-ce qu'elle ne fera que s'additionner à la voix des maires d'arrondissement? Qu'est-ce qu'on va faire du poids politique de Montréal?

Alors là il y a une collision frontale entre deux projets de loi, et ça, il faudra que les ministres se parlent, qu'ils nous parlent et qu'ils nous expliquent comment le projet de loi du ministre du Développement régional va aider à améliorer le développement économique de Montréal, pas l'affaiblir. Le maire de Montréal ne peut pas être qu'une voix qui s'ajoute à cette conférence régionale des élus, il doit être la voix du développement économique de Montréal. Alors, ça, là, je m'excuse, mais on a des travaux sur cette question-là. Donc, collision frontale entre deux projets de loi.

Et collision frontale aussi, M. le Président, entre le projet de loi que le gouvernement présente au sujet des amendements de la charte de la ville et son projet de loi sur les défusions. D'abord, j'ai hâte de voir, M. le Président, comment les citoyens vont s'y retrouver. Et, vous savez, le ministre des Affaires municipales est un chic type, moi, j'en conviens tout à fait, c'est un gentleman, c'est un chic type, mais, M. le Président, il est embourbé, il est embourbé.

Écoutez, M. le Président, ce matin, là, au sujet des amendements du projet de loi n° 9, je suis allée à ce qu'on appelle, dans le langage, ici, un briefing technique, alors où c'étaient des fonctionnaires du ministère des Affaires municipales qui expliquaient le détail de l'ensemble des amendements qui sont présentés au sujet du projet de loi n° 9. Ils ont fait leur boulot impeccablement, là, moi, je ne leur fais pas de reproche. Mais c'est tellement compliqué!

n(16 h 10)n

Et, moi, je suis une de celles qui, au Québec, après le ministre, peut-être après sa sous-ministre, mais je suis probablement dans le «Top 10» des personnes qui connaissent le mieux le projet de loi n° 9, pas parce que je suis plus intelligente, parce que j'ai siégé 15 jours au sujet de ce projet de loi. Je comprends le projet de loi n° 9 et je comprends les amendements, et ma conclusion: C'est compliqué. Pas parce que je n'ai pas compris, parce que c'est compliqué.

Et là il va y avoir aussi des collisions frontales entre le projet de loi n° 33 et le projet de loi n° 9, parce que le projet de loi n° 9 propose un nouveau modèle pour Montréal dans le cas où il y a des parties ou des municipalités qui sortent de Montréal. Alors là on va être dans deux modèles, là, M. le Président. Alors, je dis d'avance au ministre: Repérez immédiatement des firmes de communication formidables, parce que ça va être compliqué, expliquer ça aux gens. Il va falloir que les gens comprennent bien ce que ça veut dire. Alors là il y a donc une interface qu'il faudra examiner.

Je voudrais aussi profiter de l'occasion de cette discussion autour de l'adoption de principe de projet de loi n° 33 pour aborder la question de la démocratie. M. le Président, je dois le dire, que le gouvernement se drape; il se drape. Il nous répète ça a satiété: La démocratie, la démocratie. La démocratie par ci, la démocratie par là. Ça n'a plus de sens, ce que le gouvernement nous dit, M. le Président, et la démonstration, on l'a faite ce matin.

Le premier ministre et le ministre nous disent ? et là on comprend que je cherche un petit papier... que je viens de retrouver ? nous disent: On veut que cette réforme soit démocratique. Mais ce n'est pas vrai que c'est la démocratie qu'ils proposent. Quand, M. le Président, on permet, par exemple, à 0,6 % de la population de Montréal de se retirer, ayant pour effet de faire éclater Montréal, quand on donne ce pouvoir-là à 0,6 % des électeurs, pouvez-vous m'expliquer qu'est-ce qu'il y a de démocratique là-dedans? Quand, à Sherbrooke, un arrondissement où il y a potentiellement 3 700 électeurs qui représentent 0,9 % de l'ensemble des électeurs de Sherbrooke ont la possibilité de se retirer de Sherbrooke et par le fait même de faire éclater Sherbrooke, pouvez-vous m'expliquer elle est où, la démocratie, là-dedans?

Alors, le gouvernement libéral s'est enferré dans cette question de la démocratie, et je vais vous dire que j'en suis bien désolée, parce que ça va créer du remous pour longtemps. On va mélanger bien des choses et on va attribuer à bien des événements cette étiquette de démocratie pour longtemps. Le gouvernement a faussé le jeu de la démocratie, les règles de la démocratie. Et ce n'est pas parce qu'on permet à du monde de sortir, alors qu'ils sont 0,6 %, d'une réalité ayant pour effet de massacrer la réalité des autres que c'est démocratique. Ce n'est pas parce que les gens s'expriment que c'est démocratique, M. le Président.

Savez-vous quoi? Dans bien des sondages, la peine de mort, les gens en voudraient. Est-ce que ça veut dire que c'est démocratique, si on adopte la peine de mort? Les exemples, ils sont à l'infini. Et le gouvernement libéral a introduit des biais, a introduit une vision viciée de la démocratie. La démocratie, ce n'est pas l'addition des intérêts particuliers, c'est de trouver ce qui est le bien d'un ensemble de personnes, M. le Président. Alors là le gouvernement libéral dit: Nous, on fait notre job. On s'organise pour qu'il y ait de la démocratie. Bien, ce n'est pas de la démocratie quand on donne autant de pouvoir à une si petite minorité, M. le Président. Et ça, l'histoire les jugera, l'histoire jugera le gouvernement libéral sur cette question.

Alors, M. le Président, je vais conclure. Je vais conclure cette intervention de la manière suivante. En fait, je vais conclure en revenant au début de mon intervention. J'ai dit, au début: Comment qualifier cette adoption de principe? Est-ce que je suis heureuse, contente, je me réjouis, je suis embêtée, je suis contre? Quel est le bon mot? Je le dis et je le redis: Nous allons étudier minutieusement ce projet de loi, ça, c'est clair.

Alors, je reviens au début, parce que je trouve terrible le contexte dans lequel nous l'étudions: pas le fait qu'on va faire ça jusqu'à minuit le soir, M. le Président, ça, c'est notre problème, mais le fait qu'on ait mis les parlementaires dans une situation et dans une dynamique où on donne, on ne fait que donner une dernière chance à Montréal, le fait que les élus municipaux de Montréal eux-mêmes aient été dans cette dynamique, pris dans cette dynamique: Il faut sauver Montréal, il faut sauver Montréal, le fait qu'on... Le résultat net, M. le Président, quel sera le résultat net de tout ça? Bien, il va y avoir des défusions à Montréal, M. le Président, il faut se le dire. Ça va être ça, le résultat net.

Alors, on ne discute pas du projet de loi n° 33 dans un contexte serein, dans une certaine logique également. J'ai dit, M. le Président, à l'occasion de mes remarques finales concluant les consultations sur le projet de loi n° 9, j'ai dit, M. le Président, au ministre trois choses. J'ai dit bien des choses, là, mais je les répète. Je les dis, parce que je les ai relues ce matin, et elles sont aussi pertinentes. J'ai dit: Trois conclusions s'imposent: un, le gouvernement doit retirer le projet de loi n° 9, et ce, au nom des intérêts supérieurs du Québec. Il me semble que c'est évident, là. Toronto a été fusionnée. Il y a un nouveau... Et ça a été dur; rappelons-nous, ça a été presque aussi dur qu'à Montréal ? des manifestations, et toute l'histoire. Toronto a été défusionnée, changement de gouvernement en Ontario.

C'est drôle, hein? Le gouvernement ontarien change les décisions du gouvernement précédent au sujet des baisses d'impôt, mais il n'a pas à changer les décisions au sujet de l'unification de Toronto. C'est le monde à l'envers. Toronto va continuer à vivre. Puis, Toronto n'a pas sur son chemin un gouvernement irresponsable qui l'enfarge pour son avenir avec un projet de loi qui va durer deux, trois ans avant que ça se conclue.

Alors, un, le gouvernement doit retirer le projet de loi n° 9; deux, le ministre doit continuer à dire que ce ne sera pas le statu quo ante. Là-dessus, je donne 10 sur 10 au ministre. Ça lui a pris du temps... Ça lui a pris du temps. Je le dis: Je lui donne 10 sur 10. Mais c'est tellement un tout petit élément que, finalement, le ministre ne passe pas le test; j'en suis désolée.

Trois, le gouvernement doit maintenant diriger ses efforts vers l'émergence de meilleures conditions quant à la question de la prestation des services aux citoyens.

Le vrai geste de courage, M. le Président, que le gouvernement devrait faire, c'est le suivant. M. Tremblay a fait une démarche, M. Tremblay, maire de Montréal, avait commencé cette démarche avant que le projet de loi n° 9 soit déposé; il l'avait amorcée. Mais, M. Tremblay, comme n'importe qui, savait très bien que le gouvernement libéral allait déposer un projet de loi sur les défusions. Nous avons invité les maires à essayer d'identifier des moyens, des mesures, des pratiques à améliorer pour que les gens soient plus satisfaits de leurs services qui sont tout près d'eux. Beaucoup de maires l'ont fait. Le maire Tremblay a fait son travail, d'essayer d'identifier ces mesures pour améliorer Montréal. Mais on ne peut pas mettre Montréal sous la menace de défusion. Comment voulez-vous, M. le Président, qu'on étudie sereinement des changements intéressants, quelquefois qui soulèvent des questions, comment on peut étudier et adopter ça sereinement sachant que le résultat net, c'est des municipalités qui vont quitter Montréal, c'est un démantèlement de Montréal? Comment voulez-vous qu'on fasse ça en toute sérénité? On n'a pas besoin d'un grand cours, là, en pédagogie pour comprendre que ça n'a pas de bon sens.

Alors, c'est ça, le problème que nous avons aujourd'hui comme parlementaires, c'est ça le problème que le gouvernement a porté sur les épaules des élus municipaux. Qu'est-ce qu'ils a dit aux élus municipaux? Ils ont dit: Organisez-vous donc pour que ça adhère un peu à votre nouvelle ville. Belle solution, M. le Président! Irresponsable! On demande à un tiers de régler son propre engagement électoral.

Alors, le vrai, vrai, vrai geste qui ferait la différence, ce serait de dire: Écoutez, on a pris un engagement. On avait probablement des bonnes intentions au moment où on a pris cet engagement, mais, depuis ? depuis ? il s'est passé bien des choses. Montréal vit, puis les catastrophes appréhendées ne se sont pas produites, et puis les élus municipaux de Montréal se sont mobilisés, puis il y a une certaine cohésion autour de cette nouvelle ville. Pas la perfection.

n(16 h 20)n

Pendant ce temps-là, pendant ce temps-là où on se déchire sur la forme, comment s'est passée cette réorganisation municipale, bien, il y a d'autres villes à côté de nous qui continuent. Et on va fragiliser le développement de Montréal. Le ministre du Développement économique a dit, lorsqu'il était président de la Chambre de commerce: Fragiliser Montréal, affaiblir Montréal, c'est affaiblir ses banlieues et toutes ses régions.

Alors, le vrai geste de courage, ce serait de dire: Le projet de loi n° 9, on le retire, et là on se retrousse les manches, et on fait le vrai travail qu'il faut faire, c'est-à-dire donner de nouveaux outils, apporter des correctifs, se redonner des objectifs nouveaux pour que Montréal soit une ville encore plus efficace, encore plus accueillante, encore plus tournée vers les citoyens. Et, M. le Président, je le répète, c'est extrêmement difficile de faire cet exercice sereinement lorsqu'on sait que le résultat net, ça va être un Montréal démantelé.

Alors, M. le Président, je conclus vraiment en disant: Nous allons étudier le projet de loi n° 33, nous donnons un accord de principe à ce moment-ci, mais nous déplorons ? et je ne trouve pas... si j'avais un mot plus fort ? nous déplorons le fait que Montréal actuellement est prise en otage, parce que, à la fois Montréal essaie d'améliorer son fonctionnement, essaie d'être encore plus en contact avec ses citoyens, mais Montréal risque et sera certainement démantelée. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Sirros): Merci, Mme la députée de Bourget. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? M. le député de Beauce-Nord.

M. Janvier Grondin

M. Grondin: M. le Président, dans le cadre de l'adoption de principe de ce projet de loi, j'aimerais d'abord faire part de mon incompréhension face à l'action du gouvernement, et je m'explique. D'un côté, par ce projet de loi, le gouvernement modifie la charte de la Ville de Montréal afin de donner suite au plan de réorganisation du maire de Montréal, M. Gérald Tremblay, et, de l'autre, il propose le projet de loi n° 9, qui touche aussi directement la réorganisation municipale puisqu'il ouvre la porte toute grande aux défusions des nouvelles villes. D'ailleurs, ce matin, le gouvernement a présenté les amendements qui seront apportés au projet de loi n° 9. Ainsi, non seulement le gouvernement sème la confusion avec le projet de loi n° 9 quant à l'avenir des villes, mais il en ajoute avec le projet de loi n° 33 qui est pour Montréal plus particulièrement. Le ministre prétend mettre sur la table des règles précises et claires, mais je suis loin d'être convaincu, et la population doit se méfier des astuces et des pirouettes du gouvernement qui s'entête encore à réaliser une promesse irresponsable de défusion.

Pour revenir au projet de loi n° 33, je ne crois pas que la création d'une ville dans une autre ville est la meilleure solution pour assurer un développement concerté. Je crains que cette réorganisation entraîne une guerre de clocher comme nous avons connu dans le passé avec la CUM. Nous savons très bien que plusieurs projets n'ont pu être menés à terme à cause de ces perpétuelles chicanes. J'ai bien hâte d'entendre les explications du maire de Montréal la semaine prochaine, lors des consultations particulières. Je comprends que le gouvernement libéral est en train de mettre le maire devant un choix, entre avoir la peste ou le choléra, sans jamais donner une véritable chance de faire fonctionner la ville dans sa forme actuelle.

Je ne vais pas m'éterniser, M. le Président, mais je vais conclure en vous disant: Dans ce dossier, l'improvisation libérale se poursuit, les conflits linguistiques se pointent à l'horizon, et la division entre les citoyens les plus riches et ceux qui le sont moins s'accélère. Avec les modifications du ministre au projet de loi n° 9, il ne propose rien de moins qu'une véritable tour de Babel politico-administrative. Les libéraux tentent vraisemblablement, par des discours tordus, de créer un Westmount libre et indépendant dans un Montréal fort et uni. Tout ce débat libéraux-péquistes de fusion, de défusion, de refusion, de confusion aura duré en tout, d'ici novembre 2005, environ cinq ans. Il coûtera plus d'un demi-milliard aux contribuables québécois. Il retarde et ralentit le développement économique de grands projets dans les villes-centres du Québec. Tous ces débats auront produit zéro emploi, zéro de services de santé aux citoyens, zéro dollar à l'éducation et à la formation. Pour les libéraux, ce projet de confusion municipale aura été leur principale mesure législative, la principale réforme de leur administration. Mais laissez-moi vous dire que, pour moi et pour l'ensemble des citoyens du Québec, ça aura été un gros zéro. Alors, merci, M. le Président.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Sirros): Merci beaucoup, M. le député. Je suis prêt à entendre le prochain intervenant. Il n'y en a pas. Est-ce que le principe de ce projet de loi est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Sirros): Adopté. M. le leader du gouvernement.

Renvoi à la commission
de l'aménagement du territoire

M. Dupuis: Alors, je fais motion, M. le Président, pour que ce projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement du territoire pour étude détaillée.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, cette motion est adoptée? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: Je vais apprécier que vous preniez en considération l'article 2 du feuilleton.

Projet de loi n° 23

Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, à l'article 2 du feuilleton, M. le ministre des Affaires municipales du Sport et du Loisir propose l'adoption du principe du projet de loi n° 23, Loi modifiant de nouveau diverses dispositions législatives concernant le domaine municipal. M. le ministre des Affaires municipales, je vais essayer de protéger votre droit de parole en demandant à tous les collègues, M. le ministre, d'être très attentifs, comme ils devront l'être par la suite également. Alors, M. le ministre.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: M. le Président, on me suggère d'être succinct à l'égard de ce que j'aurais à vous dire sur le projet de loi n° 23, qui est pourtant très important. Et je vais quand même vous adresser quelques mots, je sais que ça peut intéresser plusieurs personnes qui sont avec nous, surtout les gens d'en face qui se précipitent à nos portes pour venir entendre le discours phénoménal que j'entends prononcer.

Une voix: Bravo!

M. Fournier: Merci.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Fournier: M. le Président, le projet de loi n° 23, dans le fond, c'est un projet de loi omnibus qui vise à régler un bon nombre de problèmes dans un certain nombre de municipalités. C'est des projets de loi auxquels on est habitué à chaque session ? vous voyez que mon débit est rapide ? à chaque session, on cherche à régler un certain nombre de problèmes. À l'égard du projet de loi n° 23, il y a une modification à la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, entre autres, afin d'alléger des processus en matière de règles d'urbanisme, des modalités pour la tenue de certaines assemblées publiques, des dérogations mineures, la capacité d'imposer des conditions lorsqu'on a des dérogations mineures, la transmission de documents à la Commission municipale du Québec, le terme d'un emprunt contracté par une municipalité régionale de comté...

Le Vice-Président (M. Sirros): Excusez-moi, M. le ministre. Est-ce que je peux demander aux députés, s'il vous plaît, d'appliquer l'article 32? Et si vous voulez prendre vos places. S'il vous plaît! Je comprends. M. le ministre.

M. Fournier: On voit là votre sagesse, M. le Président, de pouvoir comprendre ces relents d'un passé qu'on souhaite le plus lointain possible. Je disais donc qu'il y a des éléments, aussi, à l'égard de la transmission des documents à la Commission municipale, les termes d'un emprunt contracté par une municipalité régionale de comté, les suites, aussi... les suites aux recommandations du groupe de travail sur le maintien des écoles de village, qui permet un meilleur partenariat entre commissions scolaires et monde municipal.

Le projet de loi modifie aussi la Loi sur les cités et villes et le Code municipal relativement à diverses règles d'administration, par exemple, le pouvoir de refondre des règlements municipaux, certains pouvoirs divers à l'égard des régies intermunicipales, le renflouement du fonds généré à même le produit du règlement d'emprunt, lorsqu'il y a des étapes qui ont été faites avant le règlement d'emprunt, l'élargissement du paiement par anticipation au règlement d'emprunt dont le remboursement s'effectue au moyen d'une compensation.

La loi modifie aussi le traitement des élus municipaux de manière à ce qu'il y ait des remboursements de certains montants de dépenses sans autorisation préalable, de manière à faciliter le travail sans qu'il y ait des excès. Et les dossiers des modalités de gestion des titres d'emprunts municipaux, la durée maximale du remboursement des emprunts. Vous voyez, M. le Président, que l'ensemble du projet de loi, qui touche à différentes municipalités... Ici, on est dans le cadre général, mais, après ça, il y en a aussi pour certaines municipalités. Ce sont toutes des dispositions qui visent à faciliter le travail qui se fait dans l'administration de nos municipalités, qui sont, rappelons-le, les plus près des citoyens.

n(16 h 30)•

Des modifications à l'égard des facilités d'engagement de crédit, modifications du budget par le comité exécutif notamment lorsqu'il y a des rentrées de fonds qui sont, comme on le dit en mauvais français, taguées, qui sont ciblées, à ce moment-là, il y a des possibilités d'aller plus rapidement; les modalités relatives au rôle de perception et prévision budgétaire; la durée du mandat du vérificateur externe; des compensations pour les membres non élus des comités aux conseils formés par des municipalités et dont la constitution est prévue dans une loi ou une charte municipale. Vous savez que, déjà, ça se faisait pour les comités agricoles; il s'agit de l'étendre. C'est une décision qui est prise par le monde municipal et pas imposée par le gouvernement du Québec.

Certaines dispositions élargissent aussi le pouvoir d'action des municipalités dans des domaines particuliers. On pense ici à la suppression de la durée fixée à quatre mois quant à la nomination du maire suppléant; aux corporations d'assurance de dommages où on permet une durée minimale de participation des municipalités justement pour que la corporation d'assurance de dommages puisse être assurée d'une viabilité; les pouvoirs, pour une municipalité, de conclure des ententes à l'égard de certaines conditions d'achat; la vente d'immeubles pour défaut de paiement de taxes ? vous le voyez, il y en a un bon nombre, de dispositions, à plusieurs titres; capacité de vendre des biogaz produits sur un site d'enfouissement sanitaire.

Le projet de loi ajoute aussi certains contrats à la liste de ceux dont l'adjudication par les organismes municipaux n'est pas assujettie aux règles prévues dans les lois municipales. Donc, le projet de loi modifie également la Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités. Par exemple, possibilité pour les élus municipaux d'agir comme premiers répondants en matière de services préhospitaliers, un dossier qui préoccupait notre collègue de Nelligan beaucoup, les services de premiers répondants. On donne suite à cette préoccupation.

Le projet de loi modifie aussi la loi sur les communautés métropolitaines sur divers aspects, notamment la composition des commissions et traitement des membres d'une commission; l'application du règlement de contrôle intérimaire au gouvernement et ses mandataires; la fin du mandat des membres du comité, ou du conseil, ou du comité exécutif, toujours à la CMM, M. le Président; et d'autres dispositions encore concernant les dernières écoles de village.

Par ailleurs, il y a aussi des dispositions qui touchent certaines municipalités particulièrement, ce qui nous amène déjà à comprendre que toutes les villes ne seront pas pareilles. Il n'y a pas de mur-à-mur, et on tente de s'adapter le plus possible à leurs besoins pour faciliter la livraison de services et démontrant ainsi combien nous donnons... nous avons une écoute à l'égard des représentants élus de nos concitoyens, qui sont, au ministère des Affaires municipales, du Sport et du Loisir, nos partenaires privilégiés, M. le Président.

La Charte de la Ville de Gatineau est donc modifiée à l'égard de la signature de certains contrats et d'autres documents, à l'égard du pouvoir spécial du greffier, du pouvoir du maire en cas de force majeure, du pouvoir du comité exécutif de donner, vendre ou aliéner, céder ou transmettre tout bien dont la valeur n'excède pas 10 000 $, le pouvoir du comité exécutif d'attribuer une subvention ou d'accorder toute forme d'aide pour un montant de moins de 100 000 $. La Charte de la Ville de Longueuil est modifiée, les pouvoirs du comité exécutif relatifs à la nomination des employés.

La Charte de la Ville de Montréal est modifiée. Faciliter... Ici, faisons un temps d'arrêt. Rappelons que, à l'égard du projet de loi dont nous parlions tantôt, c'est un projet de loi qui donne suite à l'appel que nous avons fait de donner une modification, une réorganisation des villes pour susciter l'adhésion des citoyens. Ça, c'est le projet de loi n° 33. À l'égard du n° 23, c'est un omnibus qui répond à des demandes, je dirais, que je qualifierais ici de plus usuelles, qui sont émises régulièrement. Et donc, si la Charte est modifiée dans le n° 33, le n° 23 aussi vient l'affecter, mais dans un autre esprit, M. le Président.

Donc, à l'égard de la charte de la ville, des modifications pour faciliter les modifications au plan et à la réglementation d'urbanisme nécessaires pour permettre la réalisation de projets de logements sociaux; des projets dérogatoires à la réglementation d'urbanisme, situés dans un arrondissement historique; la participation des élus retraités des anciennes municipalités au régime d'assurance collective de la ville; l'élimination de l'exception qui empêche le comité exécutif d'accorder un contrat lorsqu'il n'y a qu'un seul soumissionnaire conforme; dénomination et numérotisation des arrondissements, il est proposé de supprimer l'obligation qui est faite à la ville de numéroter ses arrondissements pour lui octroyer plutôt la possibilité de le faire; la délégation de pouvoirs par les conseils d'arrondissement; les séances du comité exécutif. Voilà un bon nombre de dispositions concernant la Charte de la Ville de Montréal.

La Charte de la Ville de Québec, elle aussi, reçoit des modifications, notamment le mandat au conseil d'arrondissement pour consulter le conseil de quartier sur un projet de modification d'un règlement d'urbanisme; la consultation publique sur un projet de modification à un règlement d'urbanisme; l'enclenchement de la procédure d'approbation par les personnes habiles à voter dès l'adoption du projet de règlement; le remplacement de l'appellation «plan d'urbanisme» par «plan directeur d'aménagement et de développement»; l'adoption d'un plan directeur d'aménagement et de développement et la suppression de l'avis du comité consultatif pour délivrer un permis de construction dans un arrondissement historique.

Certaines autres modifications aussi touchent la ville de Québec. La ville de Saguenay, elle aussi, voit des modifications être apportées à sa charte, notamment concernant la signature des contrats et d'autres documents. La charte de la ville de Sherbrooke, elle, il est proposé, en réponse à sa demande, de lui permettre de nommer ses arrondissements; elle n'avait pas cette possibilité-là ou cette capacité dans les lois antérieures qui ont été adoptées. Donc, on vient donner cette modification qui, rappelons-le, à mon avis, peut être un des motifs suscitant l'adhésion parce que, entre être dans l'arrondissement 01 et être dans un arrondissement portant un nom qui rappelle une mémoire, qui rappelle des événements, qui rappelle une âme de proximité, il reste peut-être un élément excessivement important. La charte de la ville de Trois-Rivières, des modifications au pouvoir de réglementation relatif à l'entretien de la voie publique. Et une conclusion qui était prévue dans mon texte de 41 pages, M. le Président, que je vous ai livré en 10 minutes. Merci beaucoup.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: Avec le consentement de la députée de Bourget. Après ce discours mémorable, la ville de Saguenay aurait mauvaise grâce à ne pas suggérer que l'un de ses arrondissements s'appelle l'arrondissement Fournier.

Le Président: Est-ce qu'il y avait un consentement, Mme la députée?

Une voix: ...

Le Président: M. le député, vous savez qu'on ne peut pas utiliser le nom d'un député sans utiliser le nom de son comté. Je connais votre grande expérience dans ce Parlement. Alors, je voudrais...

Une voix: ...

Le Président: Et ce n'était pas une question de règlement, évidemment.

Une voix: ...

Le Président: Bien là, écoutez, quand vous vous levez, il faut que ce soit une question de règlement, vous le savez très bien. Non?

Une voix: ...

Le Président: Vous ne le savez pas. Est-ce que vous le saviez, vous?

Alors, nous en sommes sur l'adoption du principe du projet de loi n° 23, Loi modifiant de nouveau diverses dispositions législatives concernant le domaine municipal, et je cède la parole à Mme la présidente de la commission de l'économie et du travail, porte-parole de l'opposition officielle en matière d'affaires municipales et députée de Bourget. Mme la députée, la parole est à vous.

Mme Lemieux: Le titre de députée de Bourget étant le titre le plus touchant pour moi.

Le Président: C'est ce que je savais.

Mme Lemieux: Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, d'abord, je dois dire que j'ai perdu mon idée...

Des voix: ...

Mme Lemieux: ...que nous sommes à la... Mais il faut, M. le Président...

Des voix: ...

Le Président: Mme la députée de Bourget, je m'excuse, je viens d'arriver, hein! J'ai peut-être manqué des bouts, là.

Des voix: ...

Le Président: J'étais à la réfection des bureaux, alors... Mme la députée de Bourget.

Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: Alors, M. le Président, j'ai retrouvé mon idée. Je dois dire... Bon, le leader du gouvernement vient de se lever, essaie d'introduire avec humour un certain nombre de choses. Je pense que c'est important que les gens comprennent qu'on travaille fort à l'Assemblée nationale, que nous en sommes à notre première semaine de session intensive. J'espère que les gens réalisent que nous siégeons de 10 heures à minuit. Plusieurs d'entre nous siègent de 10 heures à minuit et plusieurs d'entre nous, dont moi-même, députée de Bourget, quand j'arrive à la maison à minuit et dix, je ne m'endors pas. Alors, les nuits sont courtes. Et là nous sommes vendredi, cinq heures moins vingt. Nous sommes déjà fatigués. Il nous reste trois autres semaines de session intensive mais, au moins, même si on a des débats politiques intenses, même si on a des désaccords très importants, et j'en ai, des désaccords avec le ministre des Affaires municipales, profonds, on a aussi quand même cette capacité d'avoir des petits moments d'humour, des petits moments d'attention envers les uns les autres.

En ce sens, je voudrais remercier le ministre des Affaires municipales. Lorsqu'il a déposé ce projet de loi omnibus, je lui ai demandé s'il me permettait d'avoir une session de travail avec ses hauts fonctionnaires. Il a accepté d'emblée, je n'ai pas eu besoin d'argumenter avec lui, et je veux le remercier parce que je crois qu'il comprend que, de notre côté, et comme porte-parole et pour l'ensemble des membres de l'opposition officielle, on ne cherche pas à faire de l'obstruction pour le plaisir et, quand les choses ont du bon sens, bien, on collabore parce que c'est un plus pour nos concitoyens dans tous les coins du Québec. Alors, je veux le remercier parce que je crois qu'il a bien compris mes intentions et que nous avons, de part et d'autre, intérêt, lorsqu'il n'y a pas de litige particulier, à faire notre travail correctement. Mais, lorsqu'il y a des désaccords, bien là, évidemment, c'est bien évident que nous utilisons tous les moyens pour les exprimer et que j'espère que le gouvernement est capable de réaliser que c'est notre droit le plus légitime d'exprimer nos désaccords et d'utiliser ce forum que représente l'Assemblée nationale, ses règles, ses règlements, pour que nous puissions nous faire entendre... en fait, pas nous-mêmes mais la population qui nous parle.

n(16 h 40)n

Le leader de l'opposition a dit récemment: C'est une chose de bâillonner l'opposition, c'est une autre chose de bâillonner la population. Et on est d'ailleurs dans une période un peu trouble à ce sujet-là, on n'est pas au clair sur les intentions véritables du gouvernement. Enfin. C'était donc une première remarque.

Les gens devront... comprennent aussi que, à chaque session parlementaire, son omnibus, c'est un classique, ça fait partie des us et coutumes de l'Assemblée nationale, un omnibus étant donc un projet qui contient des dizaines et des dizaines ? dans ce cas-ci, là, je ne l'ai pas sous les yeux, mais c'est des centaines ? d'articles à étudier qui consistent donc à une série de petites et grandes mesures législatives qui sont la réponse à des demandes des municipalités. Ces projets de loi, contrairement à d'autres... En général, un projet de loi contient une âme, si je peux m'exprimer ainsi, des principes, des objectifs, etc. Dans ce cas-ci, l'adoption de principe prend ici un sens strictement parlementaire parce que c'est une série de petites et grandes choses, à la queue leu, que nous examinons.

Donc, l'esprit dans lequel j'aborde l'étude de ce projet de loi omnibus est un esprit d'écoute, de compréhension face aux défis, parce que, en même temps, je ne veux pas réduire à sa plus simple expression ces demandes des municipalités qui sont consacrées dans ce projet de loi omnibus. Les municipalités ont des tas de petites et grandes choses à régler, et ce sont des demandes qui sont légitimes, donc je suis... et qui témoignent du fait de la complexité du rôle des municipalités. Je le disais tout à l'heure, M. le Président ? ce n'est pas vous qui présidiez, donc je me permets peut-être de dire des choses que j'ai exprimées à votre prédécesseur ? je disais à quel point le monde municipal est un monde beaucoup plus complexe qu'il y a 10, 15 et 20 ans. Je ne veux pas faire de mauvaises images, mais, à l'époque, on gérait les bouts de trottoir, les rues, le déneigement, la cueillette des ordures, mais là, le monde municipal, là, c'est costaud, là, gérer une ville de nos jours, même une ville de plus petite taille. On s'attend des élus municipaux qu'ils aient de la vision, on s'attend qu'ils soient des promoteurs, on s'attend qu'ils soient des leaders, on s'attend qu'ils développent des projets, on s'attend qu'ils gèrent correctement l'environnement, qu'ils s'occupent de dossiers culturels, de la vitalité culturelle de leur communauté. Alors, il y a un niveau de complexité, et je crois que le bill omnibus, ce qu'on appelle le bill omnibus, témoigne bien des défis quotidiens auxquels sont confrontées nos municipalités à chaque jour.

Alors, bien que je sois consciente qu'il y a plusieurs dispositions dans ce projet de loi omnibus qui ne méritent pas des débats pendant des heures et des heures, il reste que je vais quand même apporter tout le sérieux à ce travail. Nous allons apporter une grande attention, et nous espérons que le gouvernement va continuer à collaborer avec l'opposition pour bien mener cet exercice visant l'adoption de ce projet de loi omnibus.

Je retiens des lectures, des discussions, des rencontres avec les fonctionnaires, avec le ministère, discussions avec des municipalités, etc., un certain nombre de faits saillants de ce projet de loi n° 23; même si, comme je le disais tout à l'heure, il n'y a pas nécessairement des grands objectifs qui se déploient, qui sont sophistiqués dans ce projet de loi, je retiens quand même un certain nombre de faits saillants. Alors, d'abord, il y a effectivement, comme le ministre l'a indiqué, un certain nombre de modifications proposées qui donnent suite aux recommandations du groupe de travail sur le maintien des écoles de village. Je dois le dire, il m'arrive, il m'est arrivé d'indiquer à quel point je perçois que le gouvernement libéral veut effacer tout ce que le gouvernement précédent a fait. Dans ce cas-là, il n'a pas pris cette mauvaise track, il a agi avec bon sens, puisque, en déposant des mesures législatives qui sont la suite du groupe de travail sur le maintien des écoles de village, par le fait même, il boucle la boucle d'une opération, d'un processus qui avait été engagé et conclu par le gouvernement précédent, le gouvernement du Parti québécois. Et, c'est tout à son honneur, il devrait le faire pour d'autres aspects aussi.

Ceci étant dit, M. le Président, gouverner, c'est aussi avoir la capacité de prendre les meilleures décisions du Québec, puis ça arrive, des fois, M. le Président, que le gouvernement précédent ait fait des bonnes affaires. Ça, ce n'est pas vrai, là, qu'on a été dans le champ tout ce temps où nous avons été au pouvoir, et quelquefois les lunettes partisanes finissent par aveugler les décideurs du gouvernement libéral, et ils ne peuvent plus discriminer, à cause de ces lunettes trop partisanes, les bons coups. Et, surtout, pas juste les bons coups, les suites qu'on doit donner à ce qui a été entrepris dans le passé dans le sens de la continuité pour les citoyens, dans le sens du progrès pour les citoyens. Et les exemples à ce niveau-là, ils sont tout à fait nombreux.

Alors donc, le gouvernement donne suite à ce rapport du groupe de travail sur le maintien des écoles de village qui avait été mis en place par, à l'époque, le ministre d'État à la Population, aux Régions, aux Affaires autochtones, le ministre d'État à l'Éducation et à l'Emploi et qui avait mis dans le coup pas mal de monde, M. le Président. Voilà un autre exemple, M. le Président, de l'inconséquence du projet de loi n° 34 sur le développement régional, M. le Président, parce que ce groupe de travail sur le maintien des écoles de village, qu'est-ce que c'est? Bien, c'est le moyen qu'on s'était donné à ce moment-là pour dire qu'est-ce qu'on fait quand il y a une école dans un petit village qui ferme. On le sait, là, il y a quelques institutions comme ça, écoles, églises, caisses populaires, dans les villages, si ces institutions-là, même si elles sont petites, n'existent plus, on enlève l'âme d'un village, on enlève ces petits lieux, le parvis d'église, ces petits lieux où les gens se rencontrent ou ces petits lieux où c'est là qu'on sent qu'il y a de la vie. Il n'y a pas juste des êtres vivants, mais il y a de la vie.

Alors, c'est ça, le diagnostic. On le sait, le Québec est un coin du monde extraordinaire qui s'est développé de tous les points de vue dans une période courte, somme toute, dans notre histoire. Mais le Québec est aussi à l'heure de réalités démographiques troublantes. On le sait, le Québec, c'est un grand territoire. On a tous des amis qui viennent de l'extérieur, des visiteurs étrangers qui sont fascinés, et qui veulent aller à Gaspé et aux chutes Niagara dans la même journée, puis là on se dit... on essaie de leur expliquer la question de nos distances. Alors, le Québec est confronté à une réalité démographique, et il y a des régions qui se dépeuplent. Il y a des régions qui... pour lesquelles, dans des petites villes, des petits villages, il n'y a plus que des personnes âgées. Mais, s'il n'y a que des personnes âgées, et pas d'enfants, et de jeunes travailleurs, et de familles, il manque de vie dans ce village. Alors, c'était le sens de ce groupe de travail sur le maintien des écoles de village.

Et ce qui était formidable, c'est que ce n'est pas juste le gouvernement qui a dit: On va faire ce groupe de travail. Ce n'est pas vrai qu'on va régler... on va essayer d'évoluer, parce que je ne suis pas sûre qu'on règle complètement ce genre de question, mais qu'on va essayer de faire évoluer ces problématiques-là, qu'on va essayer de s'avancer sur un certain nombre de solutions, qu'on va faire ça tout seul, avec deux, trois ministères. Alors, à ce moment, ce groupe de travail regroupait des gens, regroupait le Comité des partenaires de la ruralité, Solidarité rurale, la Fédération québécoise des municipalités, l'Association des centres locaux de développement du Québec, l'Association des régions du Québec. Alors, il y avait d'autre monde qui était là, qui ont des expériences, qui ont des points de vue, qui ont un enracinement, qui ont des solutions. Et c'est la mise en commun, le choc des idées entre ces gens-là qui nous permet d'avancer.

n(16 h 50)n

Je vais la refaire, ma parenthèse, M. le Président, sur le projet de loi n° 34. Le ministre du Développement régional... économique et régional propose une structure pour soutenir les gens qui doivent s'activer sur la question du développement économique. Cette structure s'appelle la Conférence régionale des élus. Savez-vous ce qu'on fait, M. le Président? On est en train d'abandonner les élus. On est en train de dire aux élus: Vous allez vous occuper de ça tout seuls, bonne chance. Voyons, M. le Président, le Québec a une longue tradition de partenariat dans toutes les petites communautés comme des grandes, et la preuve, c'est que ce partenariat où on met des élus, des gens du ministère, des partenaires socioéconomiques, des gens qui ont un point de vue différent par rapport à d'autres dans ce même groupe, c'est ça qui fait qu'on est capables d'avancer, c'est ça qui fait qu'on est capables d'être créatifs. Et je dirais, M. le Président, ce n'est même pas un principe économique, c'est un principe humain.

M. le Président, quand on a des problèmes, là, personnels, quand on a des problèmes comme député... Moi, dans mon bureau de comté, là, quand mes gens qui travaillent avec moi, là, sont embêtés par rapport à quelque chose, quand ils ont eu une demande d'un citoyen, puis là ils ont discuté avec ce citoyen, puis ils se disent: Mon Dieu! qu'est-ce que je vais faire? je n'arrive pas à trouver un chemin, je n'arrive pas à trouver une solution, qu'est-ce qu'on fait comme humain? on ne reste pas tout seul, on confronte, puis là on parle à un puis on parle à l'autre, puis on dit: Ah! ça m'amène sur une autre piste. On appelle ça un processus créatif. Les humains ont besoin de faire ça, M. le Président, sinon on est enferrés dans nos affaires. Humainement, on a besoin, pour évoluer, de parler, de lire, de se faire provoquer, d'entendre des idées, de dire: Ah! non, c'est fou, cette idée-là, puis de finalement dire: Ah! ce n'est pas si bête. Ça nous amène ailleurs.

Mais c'est la même chose quand on gère une communauté, quand on a à coeur le développement d'une communauté. Si on met quatre, cinq personnes, alors qu'il y a autour d'eux une quinzaine d'autres qui sont des spécialistes puis qui connaissent bien telle et telle affaire, puis on met ça dans une salle, là, ça ne fait pas la même dynamique. Et c'est ça que le ministre du Développement régional nous propose, il nous propose d'être des humains isolés, isolés, M. le Président. Bien, si ce groupe de travail, je le dis avec un grand respect pour l'administration publique québécoise, si ce groupe de travail pour le maintien des écoles de village n'avait été que la rencontre de quelques spécialistes dans des ministères, ça n'aurait pas marché, M. le Président, parce qu'il aurait manqué quelque chose. Pas parce que les représentants des fonctionnaires ne sont pas intelligents, pas parce qu'ils ne sont pas bons, pas parce qu'ils n'ont pas d'imagination, parce qu'ils auraient été privés de compétences, d'expériences variées, M. le Président. Alors, ça, je n'ai pas eu l'occasion de me prononcer encore sur le projet de loi n° 34, alors c'est le début de mon engagement contre le projet de loi n° 34. C'est une perte!

Le gouvernement libéral essaie de nous faire dire: C'est parce que vous n'avez pas confiance aux élus municipaux. Ça, c'est la ligne. Vous connaissez cette expression, M. le Président. À un argument, on essaie d'en trouver un autre pour clouer le bec de l'adversaire. Or, on fait ça ici, ils font ça l'autre côté, c'est normal. Ça, c'est la ligne pleine de profondeur qu'ont trouvée le ministre du Développement économique et régional et la ministre déléguée aux Régions: C'est parce que vous ne faites pas confiance aux élus municipaux. Est-ce qu'on a déjà vu une ligne aussi insignifiante que ça, M. le Président? Non. On est en train de nous dire...

Puis je peux comprendre qu'il y a des élus municipaux qui se disent: Wow! On est contents, on va avoir plus de pouvoirs. Bien, ils se trompent, parce qu'ils vont être abandonnés, ils vont être seuls quand ça va être dur, puis ils vont s'être privés de compétences puis de coeur pour essayer de résoudre un problème. Et, quand ils vont être seuls, ils vont réaliser que les partenaires socioéconomiques, des fois, c'est achalant, puis, des fois, ça fait en sorte que la réunion avec les partenaires socioéconomiques, elle dure une heure de plus, parce que ça discute plus, parce que ça argumente. Mais, au bout du compte, au bout du compte, les résultats sont là, et tous ceux qui ont pratiqué avec profondeur la concertation savent très bien que c'est dur, c'est dur puis c'est plus long, puis là il faut faire des sous-comités, puis des sous-réunions, puis d'autres téléphones; c'est exigeant, mais c'est tellement plus payant.

J'ai longtemps utilisé, dans ma vie passée, cette expression pour désigner l'importance de la concertation, j'ai longtemps utilisé cette expression: C'est de la coopération conflictuelle. De la coopération conflictuelle. C'était joli quand même, hein? Et je suis contente que le ministre du Développement économique et régional m'entende, parce que c'est là qu'on voit les vraies valeurs des gens. Quand on dépose un projet de loi, M. le Président, là, à moins qu'on décide de se faire mener par le bout du nez par d'autres personnes, on y met nos valeurs. C'est là qu'on voit les vraies valeurs des gens.

Alors, moi, je vote pour la coopération conflictuelle à tous les niveaux. Je vote pour la rencontre entre les élus qui passent le test d'une élection. J'en suis une, élue, et il m'arrive de dire aux gens: Allez vous faire élire, vous allez voir que ce n'est pas simple. Il nous faut avoir un système de représentation qui soit fort, qui soit significatif, puis il nous faut du bon monde qui se présente à des élections, quel qu'il soit. Mais, en même temps, ce n'est pas vrai, moi, comme élue, là, pendant quatre ans, je ne veux pas être abandonnée. Je veux être capable de travailler avec le monde. Je veux que, face à certains problèmes, si j'appelle des gens puis je dis: Écoutez, là, j'ai du monde, des gens qui sont dans le trouble chez nous, pouvez-vous me donner un coup de main? Je veux être capable de faire ça. Mais c'est dans cette dynamique-là que le ministre du Développement économique et régional nous entraîne avec son fichu de projet de loi n° 34. Alors, c'était ma parenthèse, M. le Président.

Donc, je reviens en disant que le gouvernement, dans le projet de loi n° 23, donne des suites à ce groupe de travail sur le maintien des écoles de village pour éviter, donc, des fermetures d'écoles. Il y a un certain nombre de mesures qui, je l'espère, vont favoriser l'interaction et le dialogue entre le monde municipal et le monde scolaire. Alors, je crois que nous sommes, en principe à tout le moins, favorables à ces mesures-là. On verra le détail au moment de l'étude détaillée, mais nous sommes plutôt favorables.

Autre élément, M. le Président, qui est abordé dans le projet de loi n° 23, c'est les processus de consultation, notamment au niveau des MRC. Il arrive donc que les MRC aient des obligations quant à certains processus de consultation. Je comprends qu'il y avait toutes sortes d'éléments qui rendaient tout ça lourd, que la question n'est pas de remettre en cause cette exigence de consultation, mais que le projet de loi propose un certain nombre d'adoucissements... d'assouplissements, que dis-je, d'assouplissements à ces processus de consultation. Donc, je comprends que le projet de loi regroupe toutes sortes de mesures assez simples, là, pour essayer d'alléger le tout, et si l'intention du législateur est d'alléger ces processus, nous en sommes.

Par ailleurs, le projet de loi aussi met fin, enfin propose de mettre fin à l'enregistrement de divers documents d'urbanisme à la Commission municipale. On sait que, jusqu'à maintenant, la Commission municipale du Québec était le lieu où se déposait... le lieu qui était la mémoire quant aux plans d'aménagement, aux schémas d'aménagement qui sont adoptés un peu partout sur le territoire du Québec. Je comprends que le projet de loi propose qu'il n'y ait plus cette obligation que les documents d'urbanisme soient déposés à la commission d'urbanisme ? nous a-t-on dit qu'il y avait là quelque chose d'un peu fastidieux et d'un peu redondant. Alors, dans la mesure où on s'assure de garder quand même la mémoire, hein, la mémoire des documents d'urbanisme, nous pouvons parfaitement envisager l'adoption de ces dispositions.

Par ailleurs, le projet de loi n° 23 propose un certain nombre de modifications également au Code municipal et à la Loi sur les cités et villes, notamment des modifications qui ont pour objet de faciliter les ententes qu'il peut y avoir au niveau de régies intermunicipales. Vous savez qu'il y a plusieurs municipalités qui décident de se donner des services communs et qui créent des régies intermunicipales.

n(17 heures)n

Moi, j'ai vécu ça. Je suis originaire de Sherbrooke, mon père était un garagiste, et il y avait à l'époque à Sherbrooke, avec d'autres municipalités environnantes, une régie intermunicipale des services de police. Et mon père était le garagiste se chargeant de l'entretien des voitures de la police de cette régie municipale. Et d'ailleurs, à l'occasion des consultations sur le projet de loi n° 9 sur les défusions, j'ai été fascinée parce qu'à un moment le maire de Sherbrooke s'est présenté à ces consultations contre cette folie de défusions et, à ses côtés, il y avait un ex-maire qui est maintenant un président d'arrondissement et qui était le maire président de la régie intermunicipale des services de police. Et à l'époque, et je me souviens ? mon père est un homme tout simple, qui n'a pas étudié longtemps, il a gagné sa vie, il a étudié, puis il a aimé ses enfants, il a fait les choses fondamentales ? mais, je me souviens, mon père, qui était au centre de la gestion de cette régie intermunicipale, il y a des moments où il n'en pouvait plus; c'était compliqué, ça tiraillait d'une ville à l'autre. Alors, moi, étonnée, bien des années plus tard, je vois cet ex-maire, qui haïssait à mort la ville de Sherbrooke à l'époque, qui maintenant était assis à côté du maire de la ville de Sherbrooke, côte à côte, puis, oui, Sherbrooke, ça fonctionne, puis on est contents, puis les régies intermunicipales, on n'en peut plus. Alors, je trouvais que l'histoire avait quand même assez joliment évolué.

Toujours est-il, M. le Président, pour revenir au projet de loi n° 23 ? mais tout ça avait un lien, vous en convenez, M. le Président, convenez ? alors toujours est-il que je comprends que certaines dispositions du projet de loi n° 29 veulent amender le Code municipal et la Loi sur les cités et villes pour faire en sorte que ces ententes au niveau des régies intermunicipales puissent être approuvées dans les délais qu'il faut puis éviter... de ne pas être freinées par des considérations mécaniques un peu bêtes. Alors, si l'esprit et l'intention du ministre est de faire ce genre de corrections, nous en sommes également.

D'autres dispositions qui méritent d'être signalées à ce moment-ci, le projet de loi n° 23 contient des petites modifications sur des considérations financières et fiscales. Notamment, il propose que, pour les municipalités de moins de 100 000 habitants, que le mandat du vérificateur externe soit ramené à trois ans, la période actuelle étant plus courte. Alors, je comprends que ce qu'il y a derrière ça, c'est l'idée que, pour exercer ces fonctions de vérification externe, il faut que les gens connaissent bien la municipalité qui est en cause et que des mandats plus courts, ça permet, fait en sorte qu'il y a des compétences, là encore, qui se perdent. C'est ce que je comprends du sens de cette modification qui est proposée. Alors, dans la mesure où ces changements se font dans les règles de l'art de la vérification, qu'il ne s'agit pas d'une petite mesure qui est complètement en dehors de ce à quoi les gens sont habituellement... les pratiques sont, eh bien, nous serons certainement d'accord.

Par ailleurs, le ministre propose, dans l'adoption du projet de loi n° 23, il nous propose de donner une suite à la création de la mutuelle des municipalités. Alors, M. le Président, je rappellerais aux gens, et ça, c'est tout à leur honneur, que la Fédération québécoise des municipalités, qui regroupe, je crois, un bon, bon nombre de municipalités, on est dans plusieurs centaines certainement, ont décidé de se donner un outil commun pour permettre de s'assurer, dans le sens d'«assurance», collectivement et surtout pour permettre que les prix de ces assurances soient les plus bas possible.

Alors, je salue ce geste, parce qu'il arrive effectivement que... D'abord, les gens comprennent bien ce que c'est, la dynamique des assurances, et, effectivement, le fait que les municipalités soient plus nombreuses, qu'elles se mettent ensemble, ça leur permet d'offrir un pool, M. le Président ? passez-moi l'expression ? qui est plus avantageux pour elles et qui fait en sorte que leurs primes d'assurance, donc éventuellement pour un fardeau fiscal plus allégé pour les citoyens, soient compétitives. Alors, c'est une initiative de cette Fédération, le ministre y donne suite. Ça va donc permettre de régler toutes sortes de détails pratiques, faisant en sorte que cette mutuelle des municipalités du Québec puisse être bien sur la bonne voie et puisse offrir les services auxquels les municipalités s'attendaient. Alors, en ce sens, je comprends que les modifications qui sont apportées permettent de faire en sorte que cette nouvelle mutuelle ait une meilleure stabilité financière. Alors, nous sommes donc très ouverts à l'adoption de ces modifications.

Ceci étant dit, le projet de loi n° 23 comporte aussi toutes sortes de mesures au sujet de... des considérations très pratiques. Je donne un exemple. Le fait que le conseil... actuellement, pardon, dans la Loi sur les cités et villes, on prévoit que le conseil municipal doit désigner un conseiller comme maire suppléant tous les quatre mois. Alors là le projet de loi propose au conseil de déterminer la durée de ce mandat.

Des voix: ...

Mme Lemieux: M. le Président, je sais que ce n'est peut-être pas particulièrement captivant, ce que je dis, et les objets du projet de loi, mais je dois vous dire, M. le Président, j'ai déjà été de l'autre côté et jamais je ne me suis comportée de la sorte, sauf une fois, parce que j'avais bu un petit verre de vin, puis il était minuit moins dix. Et là il est 5 h 10, et on est vendredi soir.

Le Président: ...

Mme Lemieux: Merci, M. le Président. Alors, ce que je voulais dire, c'est que, actuellement, dans la Loi sur les cités et villes, on prévoit que le conseil municipal doit désigner un conseiller comme maire suppléant comme les... tous les quatre mois. Le projet de loi, donc, permettra au conseil de déterminer la durée de ce mandat. Je crois que c'est des mesures qui sont tout à fait envisageables.

Alors, M. le Président, le projet de loi n° 23 comporte toutes sortes d'autres modifications, notamment aux lois sur les communautés métropolitaines, à la Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités, à certaines chartes, dont la charte de la ville de Gatineau et à la charte de la ville de Montréal. Le ministre l'a identifié, ce sont en général des modifications à la charte qui ne provoquent pas de bouleversements majeurs, mais pour lesquelles on aura quand même une certaine attention.

Je signalerai, par exemple, que le projet de loi permettrait au maire de la ville de Gatineau qu'en cas de force majeure de nature à mettre en vie le danger ou la santé de la population, à détériorer sérieusement les équipements municipaux ou à causer à la ville un préjudice financier supérieur à la dépense envisagée il puisse décréter toute dépense qu'il juge nécessaire et octroyer tout contrat pour remédier à la situation. Alors, c'est un peu un pouvoir exceptionnel qu'un maire puisse agir en cas de force majeure sans convoquer 102 réunions. C'est ce que j'en comprends. On nous a indiqué que le maire de la ville de Longueuil avait aussi ce même pouvoir. On ne sait pas si ce pouvoir a été utilisé fréquemment, dans quel genre de circonstance et pourquoi le maire de la ville de Gatineau a réclamé ce changement à la charte de la ville de Gatineau. Est-ce qu'il a lui-même vécu une situation un peu difficile? Alors, ce sera peut-être un certain nombre de questions que nous pourrons aborder à l'occasion de l'étude détaillée de ce projet de loi.

Alors, sur ce, M. le Président, ayant fait quelques parenthèses... Alors, M. le Président, je vous remercie de votre attention. Je rappelle que, bon, comme à chaque saison parlementaire, il y a un omnibus, nous l'abordons avec sérieux, que bien sûr que pour certains aspects ce sera un peu plus rapide, mais que nous serons quand même attentifs sur un certain nombre de questions qui sont abordées par ce projet de loi n° 23. Je vous remercie.

Mise aux voix

Le Président: Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur le principe du projet de loi n° 23? Le principe du projet de loi n° 23, Loi modifiant de nouveau diverses dispositions législatives concernant le domaine municipal, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: J'apprécierais que vous preniez en considération...

Le Président: Non. Woups! la motion.

M. Dupuis: Pardon?

Le Président: Votre motion de renvoi.

Renvoi à la commission
de l'aménagement du territoire

M. Dupuis: Ah oui! Excusez-moi. C'est vrai, vous avez raison. Je fais motion, M. le Président, pour que le projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement du territoire pour étude détaillée.

Mise aux voix

Le Président: Alors, cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: Alors, vous pourriez prendre en considération, à ce moment-ci, l'article 8 du feuilleton.

Projet de loi n° 34

Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Président: À l'article 8, l'Assemblée reprend le débat, ajourné au nom de la députée de Taschereau le 27 novembre 2003, sur l'adoption du principe du projet de loi n° 34, Loi sur le ministère du Développement économique et régional. Est-ce qu'il y a des interventions? Je reconnais M. le député de Saint-Hyacinthe.

n(17 h 10)n

M. Léandre Dion

M. Dion: Merci, M. le Président. J'interviens aujourd'hui sur un projet de loi qui me trouble profondément parce qu'il comporte un tas d'éléments qui, je crains bien, risquent de faire un tort immense au Québec en général, mais plus particulièrement à la région de la Montérégie où est située la MRC de Saint-Hyacinthe.

Hier, j'étais en commission parlementaire avec un collègue, le député de Vachon, et qui nous expliquait une étude qui a été faite sur la relation entre ce qui se passe entre les citoyens et la dynamique de développement économique, M. le Président. Et cette étude arrivait à la conclusion qu'il y a une relation directe entre la cohésion sociale des gens qui participent à une société, à une communauté locale et le niveau de développement économique de ce milieu-là. Et des choses aussi élémentaires que la participation à des clubs sociaux, à des chorales, à des organisations caritatives ou à des organisations... à des clubs, tout ça concourait à créer de la cohésion sociale, et là où la cohésion était le plus haut, c'est là qu'on trouvait le plus grand développement économique.

Alors, qu'est-ce qu'il faut dire de cela quand on pense au Québec? Qu'en est-il de la situation au Québec? Pour se faire une idée de la problématique, du problème que pose le projet de loi n° 34, replaçons-nous dans la situation dans laquelle on était en 1994. Vous vous souvenez, à l'époque, le chômage était à 13 %. On avait, sur les listes de l'aide sociale, plus de 800 000 personnes. De façon générale, c'était la morosité. Les gens cherchaient des emplois et n'en trouvaient pas. C'était la situation qu'il fallait affronter, M. le Président.

Alors, qu'est-ce qu'on a fait, qu'est-ce qu'on a fait pour faire face à cette situation-là qui était préoccupante, parce que ça nous touchait, tout le monde? Quand il y a 13 % de chômage dans un milieu, ça ne touche pas seulement les chômeurs, ça touche leur famille. Ça ne touche pas seulement leur famille, ça touche leurs amis, ça touche les commerçants, ça touche ceux qui sont propriétaires de maisons de location. Ça touche tout le monde. Alors, c'était la morosité. Alors, qu'est-ce que nous avons fait? Sous la direction de M. Bernard Landry qui, à l'époque... oui, oui, du ministre des Finances, à l'époque, qui est aujourd'hui chef de l'opposition officielle ? excusez-moi, M. le Président ? donc on a entrepris la relance. Bien oui, excusez-moi, il m'arrive... C'est vrai qu'on ne doit pas mentionner les noms en Chambre. Ça, évidemment, c'est une mesure très sage, M. le Président, parce que, si on pouvait mentionner les noms, peut-être qu'on s'adresserait l'un à l'autre directement, et ça pourrait créer des situations difficiles. Alors, je m'excuse, M. le Président.

Mais, sous la direction de M. le chef de l'opposition, qui était alors ministre des Finances responsable du développement économique, on a décidé de donner un grand coup pour redresser la situation économique du Québec en puisant dans nos traditions les plus profondes et les plus solides: ce que j'appellerais la solidarité, ce que j'appellerais l'esprit de corvée, M. le Président. Vous vous souvenez, autrefois, quand une grange brûlait, tout le monde se mettait là pour travailler ensemble. Eh bien, ça, ça fait partie de notre façon de résoudre les problèmes: on se met ensemble quand ça va mal, puis on trouve une solution. Alors, c'est en puisant dans cette tradition, M. le Président, qu'on a décidé d'essayer de trouver une solution à la morosité économique qui nous faisait du tort à tout le monde.

Alors, on a consulté, on a écrit des projets, on a fait circuler ça, livre blanc, livre vert, on a fait circuler ça, puis on est allé consulter dans toutes les régions: Qu'est-ce que vous pensez de ceci? Qu'est-ce que vous pensez de cela? On a mis tout le monde à table, M. le Président, on a amené tout le monde à se poser le problème du développement économique et social du Québec, parce que, quand ça va mal en économie, nécessairement, il y a un effet direct sur la société.

Alors, de sommets en études, d'études en consultations, nous avons réuni tous les acteurs de la société et nous avons dessiné avec eux un plan de relance économique dans lequel plan il y avait des instances régionales et des instances locales. Les instances régionales: les conseils régionaux de développement chargés de la concertation au niveau des grands ensembles et les CLD, les conseils locaux de développement, chargés de faire le développement économique dans les endroits précis. Parce que le développement économique, c'est bien de valeur, mais ça ne se fait pas bien, bien à distance, ça se fait à un endroit précis, géographique. Et, en amenant... On avait comme conviction, après avoir consulté tout le monde, on avait la conviction qu'en amenant tout le monde du milieu à travailler ensemble, bien, on aurait de meilleurs résultats, on augmenterait la cohésion sociale et on augmenterait la possibilité de résultat.

Pour faire du développement, ça prend différentes choses. C'est sûr que ça prend de l'argent. Mais parlez à des banquiers, M. le Président ? je suis certain que vous en avez dans vos amis ? ils vont vous dire: Le plus difficile, ce n'est pas l'argent. L'argent, il y en a tout le temps. Le plus difficile, qu'est-ce que c'est? Le plus difficile, c'est la bonne idée. Le plus difficile, c'est l'entrepreneur sur qui on peut se confier... on peut avoir confiance. Le plus difficile, c'est le gestionnaire qui va faire en sorte que les investissements rapportent. Le plus difficile, c'est ça.

On a des gens qui ont des idées extraordinaires, qui ne sont pas nécessairement les meilleurs gestionnaires. Mais on a des excellents gestionnaires qui n'ont pas nécessairement de grands projets, mais, quand on leur confie un projet, ils sont capables de les gérer. Et on a des entrepreneurs qui ont le sens du risque. Ils savent comment évaluer le risque et jusqu'où ils peuvent avancer dans une situation risquée pour aller chercher un profit. Quand on met tout ce monde-là ensemble, bien, ça fait des gens qui se complètent, des gens qui s'entraident, des gens qui sont capables de remplir les différentes fonctions, qui fait qu'un milieu est dynamique et développé.

Alors, c'est ça qu'on a mis en place. Autour des CLD, donc on a trouvé, on a trouvé des gens de tous les milieux, du milieu, mais de tous les milieux particuliers, de tous les secteurs. On a trouvé des investisseurs. On avait autour de la même table du conseil d'administration du CLD des investisseurs, des acteurs de l'économie sociale, des entrepreneurs bien connus. J'en connais un en particulier qui est là sur le conseil d'administration, c'est-à-dire qu'il n'est plus là, là, parce que c'est en train de changer, mais il était là, un monsieur qui a des places d'affaires sur les cinq continents du monde et qui exporte, chaque année, pour des millions. Et il était à côté d'un acteur de l'économie sociale. De l'autre côté, un entrepreneur, un représentant des institutions financières, un autre représentant des institutions de formation, des chercheurs, des bailleurs de fonds, tout ce beau monde autour de la même table à se dire: Qu'est-ce qu'on peut faire de mieux pour faire avancer notre milieu? Et ce qui se passait à Saint-Hyacinthe, ça se passait dans la plupart des régions du Québec. Dans la plupart des régions du Québec, c'était comme ça: les gens se donnaient la main et travaillaient dans l'enthousiasme. Ça, c'est pour la cohésion.

Mais il faut aussi un petit peu d'éléments pour stimuler l'esprit d'entreprise. Alors, le gouvernement a mis un petit peu d'argent là-dedans. D'abord, environ... la plupart des MRC, là... c'est-à-dire des CLD ont eu des subventions, quelque chose comme près d'un demi-million par année, pour faire avancer cette dynamique de création d'emplois. Chez nous, ça a été magnifique, hein? Chez nous, ça a été magnifique parce que cet appui du gouvernement aux MRC, d'une part, et aux investisseurs, d'autre part, en leur disant: Si vous créez des emplois, on va vous donner des crédits d'impôt, alors il y a des investisseurs qui décidaient de s'en venir au Québec à cause de ça. Alors, ça aidait tout le monde. Alors donc, les investisseurs, avec un petit peu d'aide du gouvernement, investissaient des gros montants, et ça créait des emplois.

Alors, vous savez, je suis en Montérégie, j'ai la chance d'être en Montérégie. D'autres ont la chance d'être au Saguenay. C'est parfait. Moi, j'ai la chance d'être en Montérégie. Mais la Montérégie, bien, c'est la deuxième région, après Montréal, pour la création d'emplois et la création de la richesse. Donc, au Québec, c'est quand même très important. Alors, si on joue bien notre rôle, bien, c'est censé avoir un impact sur le milieu. Vous savez, je disais tout à l'heure que ça a été très bon chez nous. C'est vrai que ça a été très bon. Pendant trois années de file, trois années de file, Saint-Hyacinthe a créé 1 000 emplois nouveaux par année, là, 1 000 emplois de plus, là, pas des emplois qu'on en crée 1 000 puis on en perd 600, là. On en perdait nécessairement, on en perd tous les ans. Mais 1 000 emplois de plus par année pendant trois ans, M. le Président, c'est quand même du succès, ça.

n(17 h 20)n

Et la région de Saint-Hyacinthe, bien, qui est couverte par le CLD, j'ai ici quelques chiffres qui vont vous intéresser. Il y a 415 entreprises manufacturières dans la MRC de Saint-Hyacinthe, 14 719 emplois manufacturiers, une croissance de l'emploi de 9 % en 2002. Alors, c'est des chiffres encourageants, ça, et ça, c'est le fruit du travail de qui? De tout le monde, de tous ceux qui se sont assis autour de la même table et de l'État du Québec qui les a appuyés d'une façon efficace, qui leur a donné le goût de développer, le goût de faire des choses, le goût de créer des emplois, le goût de partager de la richesse avec tout le monde. Alors, ça, c'est un succès magnifique.

Alors, arrive le 14 avril, la population décide de changer le gouvernement. On est en démocratie, l'alternance, on sait que c'est normal, on sait que, tôt ou tard, ça va venir. Ce n'est pas parce qu'on était contents, on aurait préféré rester là, on avait encore des projets, puis ça allait bien avec le développement économique, puis tout ça. Mais la population décide, c'est la seule qui a le droit de décider, elle a décidé comme ça et elle a mis les libéraux au pouvoir. On s'est dit: Au moins, puisqu'ils sont différents de nous autres, probablement qu'ils vont ajouter à ce qu'on a fait, ça va être bon pour le Québec. Nous, ça ne fait pas notre affaire, mais, si c'est bon pour le Québec, ça va finir par faire notre affaire aussi. Mais, malheureusement, on a déchanté vite.

La première chose qu'on entend, le premier ministre qui annonce: Fini les crédits d'impôt aux entreprises; ça, cet argent-là, les entreprises, qu'elles s'arrangent, puis, si elles ne sont pas bonnes pour réussir, tant pis. Alors là ça a été...

Des voix: ...

M. Dion: Non, mais je caricature. Il n'a pas dit ça comme ça, bien non! C'est bien sûr qu'il n'a pas dit ça comme ça. Il a dit... La résonance que ça a dans la tête des gens, vous avez raison. La résonance que ça a dans la tête des gens, c'est quoi? Mais on travaillait. C'est vrai qu'on essaie de faire de l'argent, bon, en même temps on crée de l'emploi puis on paie de l'impôt au gouvernement, c'est vrai. Alors, tout ça mis ensemble, les gens se sont sentis désapprouvés. La désapprobation, première chose. Ce n'est pas très bon pour le développement économique, ça tue un peu l'enthousiasme et le dynamisme.

Alors, deuxième chose, ils se sont mis à appeler aux CLD: Mais, moi, le gouvernement s'est engagé pour trois ans, est-ce que je garde mes crédits pour trois ans, au moins? Alors là, après un certain nombre de pourparlers, de tout ça, on a fini par savoir la réponse. Ceux qui étaient là et qui avaient des engagements, les engagements seraient respectés. C'est très bien. Je pense que c'est une bonne note pour le gouvernement. Mais les autres? Ah non! les autres, non. Alors, voyez, il y a des entrepreneurs qui ont des ententes puis il y a des entrepreneurs, je ne sais pas s'ils ne sont pas bons, ils n'ont pas d'ententes, eux autres, alors, eux autres, ils n'ont pas droit aux crédits d'impôt. Donc, de la dissension entre les entrepreneurs. Donc, de la désapprobation générale et de la dissension entre les entrepreneurs.

Alors, qu'est-ce qui se passe? En plus que le gouvernement annonce qu'il va réformer tout le système des CLD ? c'est l'objet de la loi n° 34. Et qu'est-ce qu'il va faire? Il va mettre les CLD sous la tutelle des MRC. On verra tout à l'heure pourquoi, du moins les raisons qui sont annoncées. Alors, qu'est-ce qui se passe? On apprend que c'est les MRC qui vont décider qui est sur le conseil d'administration des MRC. Imaginez-vous, chez nous, la trentaine de personnes, là, qui étaient là autour de la table, tous des gens extraordinaires, très dynamiques, de savoir-faire, ils se sentent désavoués, c'est eux qui avaient monté tous ces succès-là, ils se sentent désavoués. Donc, la désapprobation générale, la dissension entre les entrepreneurs et le désaveu sur tous les gens de la société qui s'impliquaient pour faire avancer la société. Ce n'est pas très bon pour le développement économique, ça, M. le Président. C'est ce que nous propose le projet de loi.

Ensuite, bien, on a dit: Les maires vont choisir le membre du conseil d'administration. Alors, les commissaires ont dit: Puis, nous, on est des élus, nous aussi, pourquoi c'est faire qu'on n'aurait pas notre voix au chapitre? Ah! ils ont dit: La loi dit, bien, que les maires pourraient mettre d'autre monde, s'ils veulent, ils peuvent. Alors, vous voyez la discorde qui se met entre les gens: Qui va faire ci, qui va faire ça? Il y en a qui peuvent, il y en a qui ne peuvent pas. Ce n'est pas bon, ça, pour le développement économique quand les gens commencent à se tirailler comme ça. Donc, la désapprobation générale, la dissension entre les entrepreneurs, le désaveu sur les gens qui se sont impliqués dans le développement, et la discorde entre eux. Et, pour terminer, parlez aux gens qui sont à l'intérieur des CLD, parlez aux gens, n'importe où au Québec, vous allez voir qu'à peu près partout c'est le découragement. Donc, c'est un grand succès, les cinq d: la désapprobation générale, la dissension entre les entrepreneurs, le désaveu sur ceux qui se sont impliqués pour le développement, la discorde entre les gens du milieu et le découragement. On fait bien du développement avec ça, M. le Président!

Alors, voilà pourquoi, M. le Président, moi, je trouve que ce n'est pas une bonne idée. Vous savez, les gens, chez nous, là, avant que le gouvernement annonce ça, là, est-ce qu'ils étaient malheureux que ce soit organisé comme ça? Est-ce que les maires étaient malheureux que ce soit organisé de même? Moi, j'étais avec eux, j'étais autour de la table avec eux, et pourtant je ne sentais pas de malheur; au contraire, ils venaient puis ils étaient heureux d'avoir des alliés pour faire du développement.

Regardez ce que disait M. Michel Daviault, hein ? Michel Daviault, vous le connaissez bien, c'est un grand monsieur qui est le préfet de la MRC chez nous: «Il faut savoir que le conseil d'administration du CLD rejoint une bonne couche d'organismes et de représentants des milieux économiques. C'est une formule qui me plaît et qui est acceptable, résume le préfet.»

Alors, les gens étaient heureux avec ça. Alors là on décide que non, non, non, non, non, ce n'est plus comme ça, c'est les maires et seulement les maires qui vont avoir l'autorité sur ça. On va dire: Pourquoi? Ah! l'imputabilité, l'imputabilité, parce que ce sont des élus. Ah! Alors, dans les maires, c'est vrai qu'il y en a des élus. Il y en a qui ne sont pas élus aussi, hein? Dans les milieux ruraux, la très large majorité ne sont pas élus, hein? Ils sont reconduits ou nommés par acclamation. Vous allez me dire: Mais c'est une forme d'élection. Oui, je le concède, c'est une forme d'élection, mais il n'y a pas eu de grand débats, hein, dans bien des milieux. Alors, ces gens-là... Puis, quand ils sont élus, bien il n'y a pas de grands débats sur le développement économique, on parle d'égouts, on parle d'aqueduc, on parle des chemins, on parle d'ententes entre voisins, on parle de faire en sorte que les sorties d'entrées de maison soient dégagées pour ne pas qu'il arrive d'accidents. On parle d'un tas de choses extrêmement importantes pour un milieu, mais ce n'est pas précisément du développement économique. Est-ce que les gens avaient en tête le développement économique quand ils les ont élus? Peut-être pas tellement, hein?

Mais ça peut se développer, une culture, vous allez me dire, une culture d'entrepreneurship. Je vous l'avoue, ça peut se développer. Mais, regardez, au niveau de l'élection, un député est élu après une campagne électorale. Et vous savez, mes chers collègues, qu'est-ce que c'est, une campagne électorale, hein? Ce n'est pas une sinécure, c'est autrement qu'une campagne dans une municipalité, hein? Et on est élu par 12 000, 15 000, 18 000, 20 000, 28 000 personnes qui nous élisent, alors on est un peu imputable aussi. Et, dans les MRC, le gouvernement met plus ou moins 60 % du budget, et la municipalité plus ou moins 40 %. Alors, si c'était une question d'imputabilité, nous, on serait là, avec un pouvoir de décision comparable à l'argent qu'on met et à la représentativité qu'on a. Alors, ce n'est pas vrai, ça. L'argument de l'imputabilité, là, c'est un trompe-l'oeil, parce que, si c'était vraiment de l'imputabilité, ce serait différent.

Alors, j'ai beaucoup de choses à dire encore, M. le Président, mais vous me faites signe qu'il ne me reste quasiment pas de temps. Alors, je vais conclure rapidement. Je pense que ce qui se passe actuellement avec le projet de loi n° 34, ce n'est pas bon pour le développement économique. Ce n'est pas bon pour vous autres du parti gouvernemental. Ça va nuire, ça décourage les gens, ça les recule, ça les retarde, ça leur enlève l'enthousiasme et ça leur enlève du désir de développer parce qu'ils sentent que ça nuit à la cohésion sociale. Et ça, c'est prouvé que la cohésion sociale, ça égale développement économique, et pas juste développement économique, ça égale partage de la richesse aussi.

Alors, c'est la raison pour laquelle, évidemment, moi, je vais m'opposer au projet de loi. Nous allons nous opposer parce que ce n'est pas bon pour le milieu, parce que ça va ralentir le développement économique au lieu de l'aider, et puis il y aura moins de richesse à partager, et le partage sera plus difficile parce qu'il y aura moins de cohésion. Alors, je pense, M. le Président, que le gouvernement devrait y faire attention. Il y a déjà pas mal de torts faits par ce projet de loi là, il devrait faire attention et réviser sa position. Merci, M. le Président.

Le Président: Alors, merci, M. le député. M. le député de... M. le ministre délégué à la Forêt, à la Faune et aux Parcs.

M. Corbeil: M. le Président, est-ce que je pourrais poser une question au député de Saint-Hyacinthe en vertu de l'article 213 du règlement?

Le Président: M. le député de Saint-Hyacinthe, est-ce que vous permettez au député...

Une voix: ...

Le Président: Oui, la permission est accordée. La question doit être brève, et la réponse également. M. le ministre délégué à la Forêt.

M. Corbeil: Alors, je voudrais tout simplement demander à mon collègue député de Saint-Hyacinthe: Si c'est pour être si catastrophique que ça, le projet de loi n° 34, comment ça se fait que, dans le volume 18, n° 5, décembre 2003-janvier 2004 de la revue Quorum, la référence du monde municipal, «le projet de loi n° 34 répond aux attentes de la Fédération québécoise des municipalités», «la Fédération est satisfaite des éléments contenus dans le projet de loi n° 34», M. le Président, «ce projet constitue un changement majeur dans les rapports entre élus municipaux et le gouvernement et nous ne pouvons que nous en réjouir», a indiqué le président de la Fédération?

Le Président: Votre question, rapidement.

M. Corbeil: La création des CRE confirme le rapport de confiance que le gouvernement...

Le Président: C'est long.

M. Corbeil: ...souhaite établir avec les élus municipaux.

n(17 h 30)n

Le Président: Votre question, rapidement, là. C'est très long.

M. Corbeil: Ma question, c'est: Comment expliquer que la Fédération a une position sur ce projet de loi là, et que le député nous annonce une hécatombe?

Des voix: ...

Le Président: Alors, s'il vous plaît! Je tiens à vous rappeler, pour les autres membres qui vont intervenir sur l'article 213, la question doit être brève et directement, et la réponse également. M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Dion: Deux choses. Vous offrez 50 millions à administrer à des gens, ils disent: C'est une bonne idée, hein, je suis bien content d'administrer ça. Mais, la deuxième chose, c'est la suivante: vous mettez toute la charge du développement et la responsabilité sur les épaules des municipalités. Qu'est-ce qui va se passer le jour où vous allez diminuer vos subventions pour le développement? Les municipalités, elles vont être prises avec le problème, mais elles n'auront plus d'argent. Qu'est-ce qu'elles vont dire, vous pensez?

Le Président: Alors, ceci met fin à ce débat. Alors, je reconnais maintenant M. le député de Beauce-Nord sur le même projet de loi.

M. Janvier Grondin

M. Grondin: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir d'intervenir aujourd'hui sur le principe du projet de loi n° 34, qui a pour but de mettre en place une nouvelle organisation du développement régional. Je tiens d'entrée de jeu à vous dire que nous, à l'Action démocratique du Québec, nous considérons que l'avenir du Québec passe par le développement économique et social de ses régions. Nous croyons que ce développement doit être fait par les régions, et les gens des régions ont toute notre confiance.

Ceci étant dit, j'ai été profondément déçu par le projet de loi qui nous a été présenté par le gouvernement libéral, car il m'apparaît à plusieurs égards incomplet et à l'encontre de la volonté de plusieurs acteurs présents dans les régions. En effet, par ce projet de loi, le gouvernement libéral ne fait que modifier la structure sans pour autant établir des objectifs clairs, sans que les pouvoirs qui seront dévolus aux régions soient connus et sans que les nouveaux moyens financiers soient précisés. Il impose une nouvelle instance mur à mur et ne tient aucunement compte de la disparité des régions et de leur volonté. Qui plus est, il crée une nouvelle structure sans que l'on connaisse les tenants et les aboutissants. Le gouvernement nous demande tout simplement de leur signer un chèque en blanc pour le développement de nos régions. Je trouve ça inacceptable, car les Québécois et Québécoises en région devront attendre encore, et ce, malgré le fait qu'ils se sont exprimés à plusieurs reprises sur leurs besoins. Les besoins n'ont pas changé, et les régions sont dès maintenant prêtes à assumer des responsabilités.

Nous savons qu'à l'heure actuelle la situation est loin d'être rassurante pour plusieurs citoyens et citoyennes des régions. Dans une grande majorité des cas, on retrouve un taux de chômage plus élevé que la moyenne québécoise et des services publics en péril, un vieillissement démographique accru, un exode de la population massif vers les grands centres, une lourdeur administrative qui empêche l'innovation ou encore un réseau routier en piètre état. Tous ces problèmes sont devenus des enjeux de première importance, parce que le gouvernement précédent a sous-estimé les gens sur le terrain; de première importance aussi, parce que le gouvernement actuel, après sept mois au pouvoir, n'est toujours pas passé à l'action. Les seules actions posées par le gouvernement libéral ont été, à l'occasion du dernier budget, une coupe dramatique dans les budgets qui touchent directement les régions, comme le ministère du Développement économique et régional, le ministère de l'Agriculture, le ministère des Pêcheries et de l'Alimentation et le ministère des Ressources naturelles, Faune et Parcs. Sur ce fait, l'actuel projet de loi ne donne aucunement plus de moyens financiers pour assurer dans l'immédiat le développement économique et social de nos régions. Il est tout à fait inadmissible, dans le contexte actuel, qu'elles doivent attendre deux ou trois ans de plus.

Pour revenir, M. le Président, sur le fait... que le gouvernement propose précisément dans son projet de loi, je devrais vous faire part de l'inquiétude qui règne actuellement dans les régions. Je voudrais ici citer des titres d'articles dans les journaux qui sont très révélateurs; je crois que vous les avez tous vus. C'est sûr que la FQM se montre favorable au projet de loi, mais, en tout cas, je vais... on en reviendra... on va en revenir là-dessus. Ces inquiétudes qui se sont manifestées dans les régions ont trait essentiellement à la représentativité des différents milieux. Au sein des conférences des élus, il y a inquiétude, car l'actuel projet de loi n'octroie aucune assurance que tous ces représentants qui à l'heure actuelle jouent un rôle important dans le développement de leur région seront inclus. Je parle ici des gens des milieux des affaires, de l'éducation, des regroupements des jeunes, des femmes et organismes communautaires, et j'en passe, car la liste pourrait être longue.

Un autre point que j'aimerais aborder est le poids des élus dans certaines régions en regard avec la composition des CRE. Je parlais au tout début de la disparité des régions. Eh bien, si on applique concrètement ce qui est proposé par le gouvernement, nous allons avoir des élus avec plus de poids et d'autres avec moins de poids. Je peux vous nommer, à titre d'exemple... les villes de Saguenay et Gatineau auront plus de poids, par rapport aux MRC. Et la MRC de Lac-Etchemin aura peu de poids par rapport aux autres MRC.

Pour conclure, M. le Président, il faut cesser de tourner en rond et passer à l'action. La clé du renouveau pour les régions réside dans l'attribution de responsabilités accompagnée des outils nécessaires afin que les citoyens participent davantage aux décisions, notamment celles qui les concernent dans la vie de tous les jours. Pour l'instant, le projet de loi n° 34 ne fait que modifier la structure sans que les gens des régions connaissent le vrai portrait de la décentralisation proposée par le gouvernement.

Écoutez, je vais vous parler... Moi, je suis un ancien maire des régions. Alors, que la FQM appuie le projet, je suis 100 % d'accord avec eux autres. Mais qu'est-ce qui fait peur, comme ancien maire d'une région... d'une municipalité, il faut penser que ces maires-là qui vont avoir à siéger sur ces organismes-là, il y a leurs salaires: la plupart, dans les régions, ne gagnent à peu près rien. Alors, on crée une autre structure; ça va être du bénévolat.

Et puis, une chose importante que tous les maires des petites municipalités et, je pense, les grandes municipalités ont aussi, c'est la responsabilité, aujourd'hui, qu'on a à faire face à des poursuites. On n'est plus protégé, il n'y a presque plus d'assurance qui veut protéger les élus municipaux. Présentement, la FQM est en train de mettre une assurance, je pense que ce n'est pas encore rodé entièrement. Alors, c'est des choses qu'il va falloir réellement... penser à ces gens-là, à leurs salaires, à leurs responsabilités, et il va falloir leur donner des outils pour que le projet de loi, pour notre part, soit acceptable. Alors, merci, M. le Président.

Le Président: Alors, merci, M. le député de Beauce-Nord. Nous en sommes à l'adoption du principe du projet de loi n° 34, Loi sur le ministère du Développement économique et régional, et je reconnais la porte-parole de l'opposition officielle en matière de formation technique et professionnelle et députée de Champlain. Mme la députée de Champlain, la parole est à vous.

Mme Noëlla Champagne

Mme Champagne: M. le Président, merci. Alors, écoutez, intervenir aujourd'hui sur le projet de loi n° 34, c'est à la fois un bonheur et à la fois un moment spécial pour moi, puisque je viens également du monde municipal. J'ai été au niveau des conseils de ville pendant près de 10 ans, donc j'ai vu fonctionner cette machine dans une toute petite municipalité de même pas 8 000 habitants, et je me rends compte aujourd'hui qu'on confie à des gens très crédibles, des gens en qui on a une très grande confiance, on leur confie un pouvoir énorme. Or, depuis six mois, je me questionne sur la forme de pouvoir qu'on confie à ces gens-là et je me rends compte qu'ils vont avoir le pouvoir de faire un ménage que le gouvernement du Parti libéral n'ose peut-être pas faire.

Et je faisais, il y a environ deux semaines, un communiqué que j'envoyais à tous les maires de mes neuf municipalités rurales et également aux maires de la nouvelle grande ville de Trois-Rivières, qui viennent juste, les uns et les autres, là, d'atterrir un peu dans leur nouveau domaine, et je les mettais en garde contre le grand bonheur qu'ils semblent vivre et un bonheur qui sous-tend possiblement autre chose. Or, j'espère, je suis comme tout individu qui voit ce genre de nouvelle loi arriver sur nos tables, que ça puisse fonctionner. Mais la question de base que je me pose, c'est: Pourquoi agir aussi rapidement et aussi vite, alors qu'on aurait pu prendre le temps de le faire et de le faire correctement?

n(17 h 40)n

Et j'en prends pour exemple les avis que j'ai eus en faisant la tournée de mes municipalités rurales, M. le Président. J'ai rencontré chaque conseil de ville. Nous avons parlé de routes, bien entendu, nous avons parlé de problèmes locaux. Mais, quand je regarde ma petite municipalité de Saint-Prosper, qui a 500 personnes, une population de 500 personnes, et ma plus grosse municipalité, qui est Saint-Maurice, en a 2 300, alors chacune de ces entités-là municipales a une imputabilité face à ses électeurs, et ça, je pense que tout le monde en convient. La petite municipalité de Saint-Louis-de-France, d'où je viens, à l'époque, c'est-à-dire que j'y demeure toujours, mais qui maintenant fait partie de la grande ville de Trois-Rivières, cette petite municipalité là, avec son maire, dans le temps, et nous, les élus, nous avions une imputabilité face à 8 000 personnes et non pas face à 120 000 de population.

Or, aujourd'hui, on confie, M. le Président, à la nouvelle grande ville de Trois-Rivières un mandat de gestionnaire du développement économique. Bien, j'ai une grande nouvelle pour le ministre du Développement économique et régional, j'ai une grande nouvelle également pour la ministre déléguée aux Régions, la région, la grande ville Trois-Rivières, qui se compose de six municipalités, dont trois municipalités très importantes à l'époque, cette ville-là de 120 000 de population a déjà mis en place sa société de développement économique, a déjà installé ses gens dans des fonctions. Et ça marche, M. le Président, on a une ville qui a le vent dans les voiles, qui a des projets sur la table qui vont magnifiquement bien. Et là on leur dit depuis sept mois: Bien, recommence, rebouge les structures.

Alors, vous savez, moi, M. le Président, et vous êtes conscient de ça, j'ai eu à me donner deux élections ? je partais pour dire «à me taper», mais c'est un peu l'esprit qui est là ? et j'ai entendu toujours le même discours, que ça n'allait pas bien, que tout était croche puis qu'il fallait corriger ça. Mais c'est faux, M. le Président, quand on regarde chacun des territoires, à qui on devait donner beaucoup d'autonomie, il est faux de prétendre que tout allait mal, et on oblige des gens qui fonctionnent bien à remettre en marche une nouvelle méthode alors qu'ils n'en ont pas besoin. Alors, cette nouvelle structurite là, que j'appelle structurite aiguë, nous impose une inertie puis une apathie, et on n'avance plus, on recule. La nouvelle ville de Trois-Rivières, M. le Président... et, si le maire était présent ici, il dirait la même chose: Arrêtez de nous imposer des nouvelles façons de faire, on est en train d'en développer, avec tout le respect que, je pense, ces villes avaient pour le gouvernement en place.

Oui, il y a eu des regroupements dans notre région, M. le Président. Ces regroupements-là ont permis aux gens de se prendre en main avec la société civile et non pas sans la société civile. Alors, je pense, M. le Président, qu'on commet une énorme erreur en provoquant aussi rapidement le projet de loi n° 34. Ce projet-là aurait pu donner la chance à tous nos gens de ce qu'on appelle la société civile et qu'on devrait peut-être davantage appeler nos partenaires socioéconomiques, parce que «société civile», avec le temps, a pris une espèce de connotation négative... «Société civile», ce n'est pas n'importe qui dans la rue qui vient siéger là-dessus, ce sont des représentants dûment nommés par des comités dûment reconnus par les municipalités qui se délèguent quelqu'un, et cette personne-là vient donner un avis; et les maires qui siègent sur ces conseils-là sont des gens qui ont droit à leur opinion et qui peuvent se prononcer sans aucune inquiétude. Or, aujourd'hui, oui, il est alléchant, il est tentant d'accepter de nouveaux pouvoirs, mais, moi, comme d'autres, M. le Président, j'ai hâte de voir la suite et les conséquences du pouvoir qui leur sera accordé.

Alors, je vous parlais tout à l'heure, M. le Président, de mes neuf petites municipalités rurales qui forment la nouvelle MRC des Chenaux, et on n'est jamais aussi bien placé que de parler de gens qu'on connaît, et cette petite MRC là, avec son nouveau CLD, est en train de la prendre, sa place, et là elle va devoir revoir tout ça. Alors, il y a une alerte dans nos municipalités, M. le Président, et cette alerte-là fait dire aux gens: On s'en va où? On va faire quoi?

Et ce qui me surprend, M. le Président, c'est que, le 10 décembre prochain ? parce que c'est la date qui m'a été confirmée hier ? la ministre déléguée au Développement économique et régional et ministre du Tourisme va venir rencontrer les gens de ma région, mais elle va venir les informer d'un projet de loi qui est toujours alléchant ? Devenir maître de son développement: la force des régions ? elle va venir leur expliquer quel est le projet de loi, avec un petit comité restreint. Mais j'ai plein de gens de mes CLD, de mes CRD... de mon CRD, c'est-à-dire, qui aimeraient ça, participer, mais ce sont des rencontres restreintes. Alors, à ce moment-là, ces gens-là n'auront pas l'occasion de dire ce qu'ils ont à dire et à qui ils veulent le dire. Alors, ils passent par nous, M. le Président, ils ont profité de ma tournée de mes municipalités pour me faire part de leurs inquiétudes.

Puis, en même temps, je sens un certain contentement. Et je serais bien mal placée, M. le Président, pour dire que les élus ne sont pas des personnes crédibles, ne sont pas des personnes imputables, ne sont pas des personnes de grande capacité. Nulle n'est mon intention de le dire, je me mettrais en défaut de me reconnaître comme une de ces personnes-là, ce qui n'est pas le cas. Et, plus la municipalité est petite... vous le savez comme moi, vous l'avez tous plus ou moins vécu dans chacun de vos domaines, ces gens-là prennent à coeur le développement de leur région, prennent à coeur le développement de leurs petites municipalités.

Or, ce qui me fait toujours peur, M. le Président, et j'y reviens parce que c'est l'inquiétude dont j'entends parler depuis au-delà de six mois, ce qui inquiète les gens, c'est que présentement on va donner à un préfet d'une toute petite MRC qui va siéger au niveau d'une nouvelle CRE, on va lui donner un pouvoir. Alors, quand le maire, ou le préfet, c'est-à-dire, de la MRC des Chenaux va parler au nom de tous mes maires, a-t-il l'imputabilité? Non, M. le Président, à moins qu'il soit élu au suffrage universel, ce qui n'est pas encore le cas. Alors, en bons Québécois, on pourrait dire qu'on a mis la charrue devant les boeufs et qu'on provoque de nouvelles structures sans en savoir les conséquences, M. le Président, et ça, je trouve ça incorrect.

Moi qui suis nouvelle parlementaire, je pense que j'aurais souhaité qu'on donne la chance, dans une commission, de rencontrer nos gens, et ceux qui auraient voulu y venir, eh bien, ils se seraient prévalus de ce devoir-là. Et, s'il y a un endroit, M. le Président, et je le vis présentement avec la commission de l'éducation, où on peut échanger avec nos partenaires d'en face, du parti qui forme le gouvernement, ce qui est correct, parce que la population en a décidé ainsi... Quand on rencontre des gens ? on l'a fait avec les universités ? on peut échanger, questionner, et c'est convivial, et je pense qu'avec ça on atteint des objectifs positifs. Alors que là tout ce qu'on voit, eh bien, ce sont des commentaires négatifs, quelques commentaires positifs, mais des commentaires négatifs où on a fait ce qu'on appelle de l'alerte bien plus qu'autre chose. On a inquiété les gens bien plus qu'autre chose et on n'atteint pas les cibles qu'on voudrait atteindre.

Je parle maintenant de ma nouvelle grande ville, qui est la ville de Trois-Rivières, de mon secteur à moi, que je connais fort bien parce que pendant six ans j'ai siégé sur leurs comités. J'ai siégé sur les comités du CRD, j'ai siégé sur les comités du CLD en tant qu'attachée politique. Je représentais souvent mon député, parce que, comme on le voit présentement, nous sommes également en Chambre, dans certaines périodes, plus longtemps que d'autres. Alors, ces gens-là échangeaient autour d'une table. La société dite civile, que j'appelle aujourd'hui, avec raison, les partenaires socioéconomiques de tous ordres... venaient faire valoir leurs points de vue, et rien ne les empêchait, M. le Président, en dehors de ces rencontres-là, de se former des sous-comités et d'apporter à cette table-là du CRD des éléments pour faire modifier l'opinion ou faire voter dans le sens qu'ils le souhaitaient, avec un bon argumentaire. Tout n'était pas parfait, M. le Président, mais on tendait vers la perfection, et les élus qui étaient en place étaient capables de le faire sans qu'on rebouge à nouveau les structures, ce qu'on est en train de faire et ce qui cause, comme je le disais tout à l'heure, une inertie dans notre région et dans tout le Québec.

J'ai même lu, et je l'ai traduit autrement, que ce projet de loi là qui a été déposé constitue un net recul pour cette démocratie-là, participative. Elle était déjà là, et là on élimine des gens et on donne à d'autres gens des pouvoirs sans savoir les conséquences de ces pouvoirs. Et cette inquiétude-là, elle demeure et elle n'est pas seulement dans la région de la Mauricie. Et, si mes collègues ont à se prononcer là-dessus, ils auront possiblement eu vent des mêmes impressions. Par contre, il faut admettre, M. le Président, hein, toutes formations politiques confondues, que, quand un élu rencontre un député de l'opposition et quand il rencontre un député du parti au pouvoir, il arrive parfois que le propos soit légèrement différent, et j'en conviens. Par contre, je parle de choses que je connais pour les avoir vécues et je parle de commentaires qui me sont faits quotidiennement, et, si ce n'est pas à moi, les commentaires sont faits à mes adjoints, dans mon bureau de comté.

n(17 h 50)n

Alors, la grande question: Pourquoi? Pourquoi on n'a pas mis dans la loi une certaine participation, toujours de nos partenaires socioéconomiques, et qu'on n'aurait pas proposé d'avoir une majorité au niveau des élus dits imputables? Parce que la grande crise, dans notre région comme ailleurs, c'est: Qu'est-ce que l'imputabilité? Quand tu représentes un organisme socioéconomique, que ce soit chambres de commerce, d'ailleurs qui réclament à hauts cris leur présence sur les CRE, les commissions scolaires, qui réclament à hauts cris leur présence dans les CRE, et on leur refuse cette présence-là... On dit à la nouvelle CRE formée uniquement d'élus: Vous choisirez votre monde. Eh bien, M. le Président, on se prépare à des petites guerres internes qui vont ralentir le développement économique, puis pas rien qu'à peu près, je peux vous l'assurer. On l'a vécu à bien d'autres niveaux, pour ceux qui ont une certaine expérience, et je fais heureusement partie de ceux-là. Et, quand tu donnes une marge de manoeuvre trop grande et que tu laisses les gens se déchirer la couverte entre eux, tu peux bien t'en laver les mains comme Ponce Pilate, mais le résultat que tu voulais atteindre, qui était un résultat d'efficacité en termes d'économie, bien tu ne l'atteindras pas.

Alors, moi, je peux vous l'assurer, M. le Président, dans ma nouvelle grande ville de Trois-Rivières formée de six anciennes municipalités qui étaient en soi, chacune, importantes, on se rend compte aujourd'hui que ces six municipalités-là sont sur le mode stop, sur le mode arrêt, elles n'avancent pas. Et j'en ai, des exemples de la ville de Trois-Rivières, avec un projet merveilleux qui est Trois-Rivières sur le Saint-Laurent: il n'y a plus rien qui bouge, ils ne savent plus où ils s'en vont, parce qu'il y a un état de stagnation inquiétant.

Vous savez, M. le Président, là, hein, des eaux qui ne bougent pas, ça ne sent pas toujours nécessairement bon. Alors, quand on nous dit: On vous répondra en 2004, bien je pense qu'on va mettre en place le projet de loi n° 34, on va donner aux élus, je dirais, le bobo, on va donner aux élus le résultat de cette loi-là puis on va dire: Maintenant, les enfants, gérez. Nous autres, on va se tasser puis on va vous laisser aller; vous êtes imputables. Sous prétexte de l'imputabilité, laissez-vous aller, déchirez-vous entre vous, puis, nous autres, on va vous regarder aller.

Alors, je ne pense pas que ce soit ça que le gouvernement du Parti québécois souhaitait, M. le Président. Le député ministre, dans le temps, le député ministre régional qui représentait le comté de Trois-Rivières avait proposé un modèle de gouvernance. Il y a deux semaines, j'ai proposé à Mme la ministre régionale de la région de la Mauricie d'insister auprès de ses deux collègues ministres en titre du Développement économique et régional et ministre déléguée d'accepter ce modèle-là, qui avait été accepté par tous. Il avait été accepté unanimement autour d'une table en mai dernier. Avec le nouveau projet de loi, tout est remis en place, et on ne bouge plus.

Il y a un texte également, M. le Président, que j'ai lu entièrement, dont je vais vous faire grâce parce que vous êtes tous capables de le lire, c'est M. Michel Venne qui a fait une conférence inaugurale des rencontres internationales de l'ENAP. Il y a un texte complet. Je vous incite toutes et tous ? j'insiste là-dessus ? d'en prendre une lecture de A à Z. Et on parle de façon très détachée politiquement de la façon de voir l'apport, l'appui de toute la société civile, de tous les partenaires. Quand on dit «tous les partenaires», ce sont, M. le Président, tous les partenaires qui ont des choses à dire. Je ne parle pas de partenaires non crédibles, je parle de partenaires crédibles. Et, M. le Président, si les gens d'en face écoutaient, peut-être que ce serait bien qu'ils lisent ça. Je peux même leur faire une copie de ce document-là.

Je vous en lis un petit extrait parce que je le trouvais très important: «La reconnaissance d'un rôle à la société civile découle d'une préoccupation de répondre au scepticisme grandissant des citoyens face à l'État.» On sait que notre cote politique n'est pas très élevée, hein? Qu'on soit d'un parti ou d'un autre, là, on nous juge très sévèrement. Alors, je répète: «On veut répondre au scepticisme grandissant des citoyens face à l'État en leur faisant une place plus grande au sein du même processus de décision politique.» C'est certain que les maires qui vont avoir ce dossier-là, ce droit-là, peuvent aller chercher qui ils veulent. On leur laisse un lourd dossier, on leur fait porter une lourde charge sur les épaules, croyez-moi.

On dit également ceci: «Il s'agit de prendre les moyens pour reconstruire les liens entre les citoyens et les institutions, d'aménager des passerelles, des ponts, de se mettre à l'écoute des préoccupations des gens. Il s'agit aussi de contrer le désengagement social, de combattre l'apathie des citoyens et leur indifférence face à la chose publique.»

Alors, M. le Président, je sais qu'on est tout près de l'heure du repas du soir, je sais qu'il y a des députés qui sont en manque de nourriture. Alors, je leur demande encore quelques minutes, et peut-être qu'ils pourront aller vaquer à leurs besoins primaires. Alors, M. le Président, ce que je peux vous dire, c'est que présentement nous sommes en Chambre depuis quelques jours, nous débattons de projets de loi. Et, parmi les projets de loi sur lesquels nous nous prononçons, c'est sérieux et ça demande de l'attention. Quand j'enseignais, M. le Président, et qu'il y avait des enfants indisciplinés autour de moi, je savais comment me comporter.

Alors, je reviens à mon dossier. M. le Président, depuis que les libéraux sont arrivés au pouvoir, ces leaders socioéconomiques, qui représentent des milliers de citoyens, là, sont déçus, sont inquiets puis sont un petit peu sur les dents, hein! Ils se demandent qu'est-ce qu'il va leur arriver, et ça, on le vit tous les jours. Et ce n'est pas parce qu'on est à Québec, chacun derrière notre table, en discussion sur des projets de loi, qu'on doit se détacher de ce qui se passe dans nos comtés. Ce n'est pas avec de l'arrogance, avec de l'ironie, M. le Président, qu'on va arriver à faire des projets de loi sérieux, et, comme nouvelle parlementaire, je souhaiterais ce respect-là.

Alors, je demande au gouvernement de modifier son projet de loi, de garantir une plus grande place pour cette société-là et de faire en sorte que nos partenaires puissent être rencontrés en commission parlementaire et venir s'exprimer. Ils le font par la bande, ils le font par le biais, ils le font grâce à nous, parce qu'on les écoute, même les fins de semaine, M. le Président, parce qu'on est dans nos comtés, qu'on est à l'écoute de nos gens. Et ce n'est pas parce qu'on est dans l'opposition qu'on est à l'écoute de nos gens, on est à l'écoute de nos gens, M. le Président, parce qu'on est des élus crédibles et des élus qui avons le goût de porter certains dossiers jusque vers nos citoyens, ce que je vais faire d'ailleurs demain matin devant près de 200 personnes qui aimeraient ça, savoir si leur députée a été capable de faire valoir son point de vue, et je suis honorée de le faire aujourd'hui.

Je vais également vous dire ceci, et à travers les nombreux documents auxquels on a accès: je me rends compte que la place des femmes, bien là c'est vrai qu'elle en prend un dur coup. On peut le dire, on peut s'entendre là-dessus. Et je n'ai absolument rien contre les messieurs, au contraire, je pense que la vie est un équilibre, mais, au niveau des conseils de ville, j'ai été longtemps seule conseillère municipale à la ville de Saint-Louis-de-France, parce qu'il y avait peu de preneurs. À partir du moment où on se met à défaire le tout, à partir du moment où la société civile avait repris sa place dans le cadre de nos mesures de la gouvernance régionale qu'on s'était donnée, eh bien, les femmes avaient pris la place qu'elles avaient goût de prendre, sans qu'on leur impose. Ce projet de loi là a cette petite particularité de faire du tort et de nuire à un groupe de personnes qui avaient la chance d'y siéger, ce qui ne sera probablement plus le cas, à moins qu'elles soient dans la rue en train de se battre. Alors, je pense que le projet de loi n° 34, avec le nombre de titres démoralisants qu'on a vus dans les journaux depuis deux semaines... signifient au gouvernement du Parti libéral qu'il ne faut pas s'asseoir sur son projet de loi, et en début de mandat, pour dire qu'on peut faire passer n'importe quoi à n'importe quel prix.

Alors, M. le Président, je termine en demandant de façon expresse au gouvernement du Parti libéral de tenir compte de nos propos et de donner... de nous accorder une véritable consultation publique en commission parlementaire. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Sirros): Merci, Mme la députée. Avant de reconnaître Mme la députée de Rimouski et en tenant compte de l'heure, ça prendrait un consentement, si on est pour continuer au-delà de 18 heures. Est-ce que... Oui, M. le leader de l'opposition...

M. Boisclair: Il y a consentement. Et, M. le Président, peut-être pour le bénéfice des membres de l'Assemblée, je pense qu'il est possible ? le leader le confirmera, du gouvernement ? mais sans doute, serons-nous ici jusque vers 7 h 30, sans doute jusqu'à 20 heures au maximum. C'est ce qui est convenu entre les leaders.

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, si je comprends bien, il y a consentement pour continuer jusqu'au maximum de 20 heures ce soir?

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, en appelant la coopération de tout le monde pour qu'on puisse terminer nos travaux dans l'ordre et dans l'efficacité. Mme la députée de Rimouski.

Mme Solange Charest

Mme Charest (Rimouski): Merci, M. le Président. Je vous dirais que le projet de loi n° 34, pour nous qui demeurons en région, s'avère un chambardement vraiment tragique, parce que, dans les régions du Québec, il existait déjà des structures avec des personnes impliquées depuis de nombreuses années, et que ces structures et ces personnes avaient réussi à se créer un lien de confiance qui faisait que le développement local et régional faisait l'objet de consensus, et que les gens étaient satisfaits du fonctionnement à la fois de leur CLD et de leur CRCD.

n(18 heures)n

Mais, d'entrée de jeu, je tiens à signifier qu'à titre de députée d'un comté qui est semi-urbain, semi-rural je ne peux malheureusement pas endosser le projet de loi n° 34. Ce projet de loi, il va évincer, hein, du lieu de décision, des questions de développement local et régional, le milieu rural. Où seront les maires des municipalités rurales? Où seront les représentants socioéconomiques des municipalités rurales? Le projet de loi ne m'a pas fait la preuve que les représentants du milieu rural seront représentés de façon adéquate pour assurer leur développement.

Et ce projet de loi va évincer à toutes fins pratiques des décisions les différents secteurs d'activité. Seulement dans la MRC Rimouski-Neigette, c'est au-delà de 700 organismes qui existent dans toutes les sphères d'activité, autant dans le domaine économique que dans le domaine touristique, que dans le domaine de l'environnement, et j'en passe, et ces gens-là ne seront plus représentés sur les instances régionales et locales parce qu'on a décidé que les CRES seraient strictement réservés en priorité aux élus municipaux.

Et je pense que là-dessus on va se priver, dans chacun de nos milieux, d'une expertise immense qui a été développée au cours des années passées avec ces partenaires. Et, vous savez, dans le comté de Rimouski, nous n'aurions pas pu développer toute l'expertise dans le domaine maritime, dans le domaine des sciences de la mer si tous les partenaires ne s'étaient pas rencontrés autour de ces tables de travail et ne se seraient pas donné ensemble des objectifs communs de développement et ne s'étaient pas entendu sur leur stratégie. Alors, je pense que, là-dessus, M. le Président, le projet de loi n° 34 ne manifeste qu'une chose, c'est la crise aiguë de structurite qui anime malheureusement le gouvernement actuel.

Je veux aussi dès le départ affirmer haut et fort qu'il ne s'agit pas de dénoncer la place du monde municipal, pas du tout. Le monde municipal, je le connais bien pour le côtoyer depuis de nombreuses années, et nous avons eu beaucoup de connivence dans de nombreux dossiers, et ça se poursuit, M. le Président. Et je suis persuadée que, au contraire, nous avons besoin du monde municipal, mais nous avons aussi besoin de ce que nous appelons la société civile.

Mais, si faire confiance aux régions signifie tout confier seulement et surtout aux élus municipaux sans faire confiance aux partenaires socioéconomiques, aux députés, les députés qui sont élus dans chacun des 125 comtés du Québec, qui sont élus aussi par des populations parfois et majoritairement plus nombreuses, et je pense également aux commissaires des commissions scolaires qui sont aussi élus, aux chefs autochtones, c'est toutes des personnes qui sont dûment élues, mais, eux, on leur réserve un rôle strictement de consultants; alors je suis forcée de constater que les principes même du développement local, qui sont connus mondialement, sont ici bafoués.

Alors, je vous dirais, M. le Président, que je me permets de prendre ici quelques minutes... parce que le gouvernement a choisi également par rapport au projet de loi de ne pas consulter les divers partenaires socioéconomiques qui s'expriment au nom de milliers de personnes, et je voudrais être leur porte-parole aujourd'hui dans cette Chambre. Et, à ce titre, M. le Président, je rappellerais que depuis sept mois...

M. le Président, j'entends toujours bourdonner, et ça m'empêche de pouvoir vous parler correctement. Alors, j'aimerais avoir le silence pour pouvoir m'exprimer.

Le Vice-Président (M. Sirros): D'accord, Mme la députée. Je comprends qu'il y a des changements de garde, alors soyons...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, prenez le temps, faites-le rapidement, tranquillement pour qu'on puisse continuer...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): ...afin qu'on puisse effectivement terminer nos travaux comme ça a été convenu entre les deux formations politiques. Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: Et la députée de Rimouski vient de comprendre ce que nous ressentions...

Le Vice-Président (M. Sirros): M. le leader...

M. Dupuis: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): S'il vous plaît!

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): Est-ce que je peux rappeler à tout le monde qu'on a tous un intérêt à ce que les débats puissent se dérouler dans le calme, qu'on puisse terminer nos travaux de façon efficace, selon l'entente convenue?

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, si vous arrêtez, on va écouter la députée, la parole est seulement à la députée de Rimouski.

Mme Charest (Rimouski): Merci, M. le Président. Et je remercie les collègues d'être aussi silencieux que nous l'avons été pour les entendre lorsque a été le temps pour eux de s'exprimer.

Je reviens sur la question de la consultation sur ce projet de loi, qui m'apparaît très important. Écoutez, le développement des régions, ce n'est pas seulement un slogan en campagne électorale, c'est un objectif. Et je pense qu'on doit tous avoir à coeur de s'assurer que les outils et les moyens qui sont mis à la disposition des partenaires dans chacune des régions soient adéquats. Et, depuis sept mois, la ministre déléguée au Développement régional, elle a toujours affirmé, partout où elle est passée, et aussi en Chambre, durant les périodes de questions, qu'elle consulterait les régions sur cette importante question qu'est le développement des régions. Mais, tout dernièrement, on s'est aperçus que la notion de consultation est devenue une tournée d'information. Ça m'apparaît assez particulier, compte tenu de cet engagement qu'elle avait pris auprès de tous les partenaires impliqués dans le développement local et régional lors du congrès de l'Association des CLD du Québec.

Et cette tournée de consultations, M. le Président, elle n'est pas terminée au moment où on se parle. Elle est à peine amorcée. C'est assez particulier qu'on dépose un projet de loi, qu'on s'exprime sur le principe et que la consultation ou la tournée d'information soit encore prévue, dans différentes régions, le 4 décembre prochain, le 11 décembre prochain, le 16 décembre prochain dans certaines régions, et que, là, on est déjà en train de regarder et d'étudier le projet de loi comme tel. Est-ce que le message que la ministre donne aux partenaires dans les régions, c'est que ça ne donne rien de vouloir amener son intervention, sa proposition, parce que les dés sont pipés et que la décision est déjà prise en regard de ce projet de loi là, n° 34? Alors... et malgré les inquiétudes, les inquiétudes qui sont manifestées par beaucoup de partenaires... Et ça, je pense que les gens, lorsqu'ils assistent à ces rencontres, ce qu'ils disent en premier, c'est que nous avions des structures qui fonctionnaient bien. Pourquoi vouloir jeter le bébé avec l'eau du bain?

À preuve, dans la région Bas-Saint-Laurent, nous avions adopté ensemble une vision, une vision de développement régional et local pour 2000-2015. Et cette vision, M. le Président, elle avait été adoptée par l'ensemble des partenaires, et c'était un projet mobilisateur et qui a été formulé sur une vision à long terme, sur une vision d'un délai de 15 ans. Et nous pensons que cette vision est suffisamment rassembleuse et qu'elle sera partagée et soutenue par l'ensemble des leaders de la région. D'ailleurs, le CRCD s'était engagé à déployer tous les efforts requis pour en faire la promotion et à consacrer les ressources nécessaires pour que la réalité corresponde le plus possible à cette vision.

Et cette vision était et sera une sorte de «fil conducteur qui guidera nos actions au cours des 15 prochaines années ? je lis le libellé de l'introduction ? et chacune de nos trois planifications stratégiques quinquennales s'en inspirera». Et la vision était bel et bien écrite, endossée, votée dûment par l'ensemble des partenaires de la région Bas-Saint-Laurent. Pourquoi avoir fait fi de cette vision? Pourquoi imposer à la région un modèle qui ne correspond pas nécessairement à leurs attentes? Alors, je pense que, là-dessus, M. le Président, on a été une fois de plus sans écoute par rapport au milieu et, là-dessus, on s'est beaucoup plus fiés à ce que l'on voulait imposer qu'à offrir ce qui est réclamé par l'ensemble des partenaires.

n(18 h 10)n

C'est sûr que faire confiance aux régions, c'est faire confiance aux partenaires. Pourquoi, à ce titre-là, avoir exclu des élus en partant, les élus des commissions scolaires? La commission scolaire des Phares est une commission scolaire qui est implantée depuis de nombreuses années dans le comté de Rimouski, Matapédia et Matane, et je ne parle pas des autres commissions scolaires de la région, parce que nous en avons quatre, il me semble, selon mes bons souvenirs.

Et il faut se rappeler que les élus des commissions scolaires, ça remonte à 1845 comme processus politique électif et que ces commissions scolaires là sont vraiment des institutions politiques locales, et elles ont tous les attributs d'un gouvernement dûment élu. Que l'on se rappelle que les commissions scolaires sont dotées d'une vie politique, elles ont un mandat, hein, parce que leur mandat est limité dans le temps, elles ont un pouvoir de taxation, elles ont une juridiction sur un territoire donné et elles sont responsables devant la population locale pour l'élection des commissaires au suffrage universel. Ils ne font pas juste de donner de la formation académique aux enfants du préscolaire, du primaire et du secondaire, mais ils offrent aussi des services, des services, M. le Président, aux adultes. Que l'on pense à la formation professionnelle, que l'on pense aussi aux services de formation adaptés aux besoins des entrepreneurs et également de tous les services qui viennent en aide aux entreprises. Alors, je pense que les commissions scolaires sont dotées d'une mission très importante pour le développement local et régional.

Et il faut se rappeler que nous avons amendé, en 1997, la Loi sur l'instruction publique, et on a confié aux commissions scolaires, aux commissaires élus par leur population, le mandat de contribuer au développement des régions. Et ça, c'est l'article 255 de la Loi sur l'instruction publique qui le spécifie. On a demandé aussi aux commissions scolaires de collaborer au développement social et culturel de la communauté, et j'en passe, parce qu'on pourrait énumérer plusieurs de leurs mandats. Ça, c'est un exemple d'élu qui, dès le départ, n'a pas été retenu pour faire partie des conférences régionales des élus. Pourquoi, M. le Président? Je voudrais bien comprendre. Est-ce qu'il y en a qui sont plus égaux que d'autres dans la société québécoise? Est-ce qu'il y a des gens qui ont des mandats plus importants que d'autres, même s'ils sont élus par des populations? Et, vous savez, le principe de l'imputabilité, ce n'est pas divisible. Et, s'il s'adresse autant à un maire, il doit s'adresser autant au député qu'au commissaire d'école dûment élu.

En terminant, parce que je sais que le temps file, je voudrais déplorer que la formule mur à mur qui est imposée présentement par le projet de loi n° 34 ne permet pas aux régions de s'assurer que ce que l'on propose sera un plus pour leur développement. Qu'on me fasse la preuve, M. le Président, que le projet de loi va améliorer les outils de développement économique et régional pour les milieux, pour les régions, et j'adhérerai. Mais, au moment où on se parle, on ne m'a jamais fait la preuve qu'il y avait un plus pour le développement local et régional avec ce projet de loi là. Ce que je demande au gouvernement au nom des citoyens du comté de Rimouski et au nom des citoyens de la région du Bas-Saint-Laurent, c'est d'assouplir les règles de la création des CRE et de permettre une représentation de la société civile. Lorsque Mme la ministre déléguée aux régions est venue dans le Bas-Saint-Laurent informer les citoyens qu'elle avait invités pour le projet de loi n° 34, un maire s'est levé et a demandé que la représentativité de la société civile soit à 49 % et de maintenir la représentativité des élus à 51 %. Elle nous a dit que ce n'était pas possible. Alors, c'est quoi, cette tournée d'information? Et c'est quoi, ce projet de loi, lorsqu'on ne tient pas compte des demandes ? pas seulement des commentaires, mais des demandes ? des personnes qui oeuvrent déjà sur le terrain pour le développement?

On prévoit aussi de faire des transitions rapides par rapport aux CRE et on va donner le mandat aux CRE de décider, hein, quels sont les organismes que le gouvernement du Québec devrait soutenir. Je pense que c'est un peu arbitraire de demander à un organisme de juger les autres organismes. Alors, sur quelles bases et sur quels critères cela va-t-il se faire? Et, là-dessus, je pense qu'on n'a pas de garantie que ce genre d'exercice va se faire en concertation.

Et ce projet de loi, ce qu'il remet en question, c'est ça, M. le Président, c'est la concertation. Ça, ça a été la force du Québec moderne, réussir à concerter autant les patrons, les syndicats, les organismes communautaires, enfin tous les types d'intervenants, et on est en train présentement de diviser pour régner, parce que, depuis sept mois, il ne se fait plus de développement local et régional; tout ce qui se fait, c'est de la lutte au pouvoir et c'est du tiraillage de couverte sur le terrain, et tout ça parce que le projet de loi n° 34 a été annoncé et que les gens se sont aperçus, hein, qu'ils n'avaient pas le choix, là, ils se voyaient imposer cette nouvelle structure, qu'ils n'auraient pas droit au chapitre. Alors, certains, pour éviter le désastre complet, tentent de s'approprier des pouvoirs, mais il y en a qui s'illusionnent puis il y en a d'autres, bien, qui sont sûrs de leur place, donc eux déjà commencent à bomber le torse et à vouloir imposer leur vision, qui n'est pas nécessairement celle de l'ensemble des partenaires.

Moi, je pense qu'il faudrait éviter de faire du mur-à-mur, parce qu'on profiterait de l'expertise, de l'expérience, de la connaissance des différents partenaires. Et, si on veut que les citoyens participent, si on veut contrer le désengagement et le désabus des citoyens et des citoyennes vis-à-vis le politique, il me semble que ce n'est pas avec le projet de loi n° 34 qu'on va réussir à les mobiliser et à leur donner des outils pour qu'ils aient foi aux objets qu'on leur donne. Ils vont... Et ce n'est pas avec le projet de loi n° 34 qu'on va réussir ça. Je suis désolée de vous dire ça.

Et je voudrais juste rappeler qu'on n'avait pas besoin du projet de loi n° 34 pour que les élus soient représentés, parce que, à l'heure actuelle, sans quota d'élus municipaux, les élus sont représentés à 42 % au sein d'administrations et à 57 % au sein des comités exécutifs des CRD, ce qui reflète vraiment le désir de chacune des régions. Et je vous dirais que, autour de la table du conseil d'administration de l'Association des régions, la moitié des présidents des CRD, ce sont des élus municipaux.

Alors, en aucun temps, des élus municipaux n'ont été rejetés par les autres partenaires socioéconomiques au sein des structures qui existaient, soit les centres locaux de développement, les CLD, ou soit les conseils régionaux de développement. Alors, je ne comprends pas qu'on vienne vouloir imposer quelque chose qui était là et qui se faisait de façon tout à fait normale, tout à fait conviviale, avec tous les autres partenaires du développement. Il me semble que ça ne favorise pas les dialogues, ça ne favorise pas la concertation, ça ne favorise pas le développement.

Alors, je pense que, là-dessus, M. le Président, je vous réitère que notre volonté d'avoir une commission parlementaire sur le projet de loi n° 34 est incontournable. Si le gouvernement actuel veut vraiment refléter la position, les intentions et la volonté des citoyens et des citoyennes de chacune des régions du Québec, il va tenir une consultation en commission parlementaire, il va amender certains articles de son projet de loi pour permettre à la société civile d'être présente pas seulement comme individus à être consultés, mais comme partie prenante aux décisions. C'est ce que nous voulons, M. le Président. Merci.

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, merci, Mme la députée de Rimouski. Je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant. Alors, M. le député de Joliette.

M. Jonathan Valois

M. Valois: M. le Président, j'interviens sur... À ce moment-ci, j'aimerais intervenir sur le projet de loi n° 34. Alors, vous comprendrez que j'interviens contre le projet de loi n° 34, et tout simplement parce que je suis un démocrate, M. le Président. Alors, si, à ce moment-ci, les gens comprennent mal pourquoi je fais l'introduction en ce sens, eh bien, laissez-moi expliquer, puis, après ça, sûrement que les choses deviendront plus claires.

Alors, d'abord, il faut se poser des questions. Qu'est-ce qu'un démocrate, hein, M. le Président? Alors, au Parti québécois, M. le Président, notre projet de souveraineté est essentiellement supporté par trois grandes sources: ceux qui veulent la souveraineté pour des raisons identitaires, ceux qui veulent la souveraineté pour un projet de société essentiellement progressiste et ceux qui veulent la souveraineté pour justement en arriver à une modernisation de nos institutions démocratiques. Je suis de la troisième école, vous le comprenez très bien.

n(18 h 20)n

Mais revenons sur les trois écoles pour bien comprendre de quel bois se chauffe la troisième école, c'est-à-dire celle des démocrates. D'abord, ceux qui adoptent le projet de souveraineté pour des raisons identitaires. Essentiellement, on les connaît très bien, ce sont des gens pour qui le pays du Québec est important parce qu'il va à l'encontre de la standardisation des sociétés et des peuples, parce qu'il va à l'encontre de la globalisation et que, essentiellement, cette idée de se donner un pays est une réponse pour participer, avec les autres sociétés, à cet échange très fructueux que les sociétés ont, dans le respect de leur spécificité. Alors, c'est dans ce sens-là que les gens adhèrent à cette grande volonté de souveraineté. Essentiellement, c'est une affirmation d'un Québec dans le monde, d'un Québec qui est normal, qui affirme sa normalité mais qui affirme aussi, lorsqu'il discute avec les autres sociétés, avec les autres pays du monde, un Québec qui est différent, un Québec qui est spécifique. Alors, c'est une lutte pour un dialogue, comme je le disais, entre toutes les sociétés du monde, dans le respect des spécificités.

Mais il y a des gens aussi qui sont au Parti québécois pour d'autres idées: les gens qui sont au Parti québécois pour des idées de projet de société. Alors, ils vont adhérer à notre option, celle de la souveraineté du Québec, pour faire... et le pays du Québec deviendra important dans ce sens-là, pour avoir essentiellement toutes nos ressources, pour que notre projet, notre vivre ensemble collectif, réponde réellement à nos priorités sociales.

Alors, ça peut être la santé, l'éducation, la famille. Mais il est difficile de répondre à 100 % de l'ensemble de nos responsabilités lorsque nous disposons simplement de 50 % de nos ressources, 50 % de nos impôts. Alors, certaines personnes vont faire le choix du pays, vont faire le choix d'adhérer au Parti québécois essentiellement pour dire: Bien, cette idée de pays, cette idée de souveraineté vient me rejoindre parce que, essentiellement, les guerres que nous avons faites et les luttes que nous avons faites sur, bien souvent, le terrain politique, bien souvent le terrain constitutionnel, le terrain social, voire même le terrain culturel, bien, aujourd'hui, se résument à se retrouver peut-être sur le terrain de l'économique où, par un pouvoir de dépenser, une société ? la société canadienne ? vient imposer des choix à une autre société. Il en devient difficile maintenant, au Québec, de pouvoir ne serait-ce qu'ouvrir quelques places en garderie, pouvoir développer des bouts de route, même se donner des services sociaux sans s'être entendus au préalable avec le gouvernement fédéral, et notre argent qui dort entre les mains du gouvernement central.

Alors, en ce sens-là, il y a des gens qui adhèrent à cette idée de souveraineté pour dire: Bien, pourquoi est-ce qu'il faut tout le temps négocier avec une autre société parce que notre argent, il s'y retrouve? Pourquoi ne pas le faire de façon autonome? Alors, en ce sens-là, ça, c'est un autre courant, et je pense que ce courant-là est quand même assez bien représenté aussi au Parti québécois.

Mais il y a aussi ? et c'est le courant duquel je veux vous parler aujourd'hui ? ce troisième courant, celui... ceux des démocrates. Alors, au-delà de ceux qui veulent se donner un pays pour des raisons identitaires, ceux qui veulent se donner un pays pour des raisons de projet de société, il y a aussi des gens, notamment ceux de la jeune génération, qui veulent se donner un pays parce qu'ils sont des démocrates, parce qu'ils disent que, des 10 dernières années, les conflits que nous avons connus au Québec ne sont pas réellement des conflits culturels ou linguistiques, ne sont pas réellement des conflits d'ordre les employeurs contre les employés ou d'ordre sur le terrain des luttes ouvrières, mais, les 10 dernières années, les crises sociales que nous avons vécues sont des crises éminemment démocratiques: la capacité d'un peuple, d'une société, de déterminer, par ses institutions démocratiques, là où elle s'en va. Un gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple.

Cette difficulté d'en arriver là fait en sorte que certaines personnes vont dire: Et si la souveraineté n'était pas pour nous une capacité de justement revoir nos institutions démocratiques et faire en sorte qu'ici, par le biais de ces institutions-là, nous puissions réellement aller de l'avant avec nos priorités, avec nos choix?

M. le Président, plusieurs décisions se prennent à Ottawa, on le sait très bien. Mais ce qu'il faut comprendre des 10 dernières années, c'est qu'il y a aussi plusieurs décisions qui ne se prennent plus à Ottawa. Elles se prennent ailleurs, dans les grandes conférences internationales. Alors, le citoyen québécois qui a confiance en ses élus de l'Assemblée nationale doit considérer et prendre conscience que les élus de l'Assemblée nationale ne décident pas tout, qu'une bonne partie des décisions sont prises à Ottawa et que, de plus en plus, une bonne partie des décisions sont prises dans les grands centres et dans les grands tribunaux internationaux, et que, en ce sens-là, M. le Président, l'idée de souveraineté est une idée de se réapproprier une capacité de prendre nous-mêmes, de façon démocratique, des engagements, des alignements et de priorisation de ce qu'on veut faire ensemble. Et, il me semble, lorsqu'on regarde justement ces grands courants mondiaux, ce qui se passe ? la mondialisation ? il faut bien comprendre, M. le Président, on n'est pas là.

Le seul goût de la mondialisation que les Québécois ont eu lorsqu'elle est venue s'installer à Québec, lorsque les grands, des grands de ce monde sont venus à Québec se rencontrer, le seul goût de la mondialisation que les citoyens du Québec ont eu, c'est le goût du gaz lacrymogène qu'on leur a envoyé dessus. C'est ça que ça goûte, la mondialisation, pour les Québécois. On a le droit de participer à ces grands mouvements-là et on a le droit aussi de se donner des institutions pour que nos citoyens... au-delà des grands mouvements internationaux, au-delà des décisions qui se prennent dans les grands centres mondiaux, que les décisions se prennent réellement ici, avec des gens d'ici. Alors, en ce sens-là, M. le Président, il faut vraiment comprendre qu'il y a aussi cette troisième tendance là qui existe, laquelle j'en suis.

Maintenant, M. le Président, il faut bien comprendre. En 1995, le Québec a refusé son indépendance. De ce fait, le PQ, parce que nous sommes aussi des démocrates, nous avons quand même avancé et mis en oeuvre une mobilisation régionale importante, mais réellement très importante. Alors, qu'est-ce qu'on a fait? C'est qu'on a décidé de mobiliser, partout, les gens de l'ensemble de la société vers un idéal collectif commun. Je reviendrai au niveau des régions, mais il faut se rappeler qu'une des premières interventions que nous avons faites, ça a été celle du Sommet sur l'économie et l'emploi. L'ensemble des partenaires de tous les milieux se sont mobilisés, se sont assis autour d'une grande table pour réfléchir du... où voulons-nous aller ensemble et comment voulons-nous vivre ensemble? Des grandes réflexions très importantes où, oui, il y avait des élus mais il y avait aussi des gens qui représentent les milieux socioéconomiques qui étaient là. Et je pense que c'est important de le faire.

Mais, M. le Président, il y avait un absent. Et pourtant, à partir du moment où est-ce que l'ensemble du Québec décidait d'aller de l'avant avec un déficit zéro, à partir du moment où l'ensemble du Québec décidait d'avancer avec ses priorités, il y avait un absent, et l'absent, c'était qui? Bien, c'était justement cette espèce de marchés internationaux invisibles, qu'on ne voit pas, qui sont nulle part mais qui, en même temps, obligent les sociétés, comme la nôtre, à prendre les décisions d'aller vers le déficit zéro. Alors, pendant que l'ensemble des acteurs d'une société se mobilisent, il manque un acteur, et c'est qui, cet acteur-là? C'est celui qui met de la pression sur l'ensemble des intervenants dans une société, c'est-à-dire justement ces grands marchés internationaux ou, qu'on pourrait dire, cette grande droite américanisante invisible. Elle est présente du sens où elle met de la pression, mais c'est vraiment une personne qu'on pourrait dire morale, quoiqu'on frôle l'immoralité, mais une personne morale du sens qu'elle n'est pas là avec... ce n'est pas une personne avec laquelle on peut discuter, mais qui met quand même de la pression sur nos choix, sur nos orientations.

Alors, il est autant drôle de dire que... Alors, le Québec au complet s'est mobilisé, et je pense qu'il devait se mobiliser, pour qu'ici on puisse prendre des choix, on puisse décider d'orientations qui sont les nôtres. Mais c'était la seule façon pour les élus, M. le Président, d'aller de l'avant, pour mettre réellement de l'avant justement des choix qui sont les nôtres: c'était de s'associer aux intervenants qui sont des milieux socioéconomiques.

Alors, aujourd'hui, lorsque l'Assemblée nationale désire aller dans un sens, on peut y aller les élus contre la société, on peut y aller les élus contre les gens qui représentent des groupes de la société civile, mais la meilleure façon d'aller de l'avant dans l'harmonie et dans la construction, c'est encore de faire confiance en ces gens-là et de les adhérer et de les mobiliser autour d'un projet. C'est le choix que nous avions fait lors du Sommet sur l'économie et l'emploi, et c'est le choix que nous avons fait dans chacune des régions du Québec où, au-delà des élus, s'étaient associés des gens de différents milieux. Et je pense que c'était important. C'est une réplique... c'est une réplique au glissement démocratique que toutes les sociétés occidentales connaissent, M. le Président. La difficulté de prendre des décisions ici, dans cette Assemblée nationale, la difficulté de plus en plus réelle de pouvoir réellement, nous, les élus, décider d'aller de l'avant avec des projets, avec des programmes, avec des idées, avec toute notre ambition pour le Québec, ne peut avoir de réponse que si nous associons avec justement les forces vives de notre société. Et là le Québec va réellement de l'avant avec ses choix, et là on peut vraiment parler de démocratie, parce que c'est l'ensemble de la société qui se mobilise pour que, justement, ici, nous puissions vivre selon nos choix et selon les priorités que nous sommes données.

n(18 h 30)n

Dans Lanaudière, M. le Président, ce qui se passe, c'est que ? pour parler des régions ? dans Lanaudière, on a réellement aussi une façon de fonctionner qui date depuis 40 ans, M. le Président, de concertation régionale. Le 14 avril dernier, le Parti libéral a proposé un programme dans lequel on pouvait peut-être voir une idée orientée autour des conférences régionales des élus. Les gens de Lanaudière n'en ont pas voulu, M. le Président. Six députés sur six sont issus du Parti québécois. Alors, lorsqu'on vient dans Lanaudière nous dire: C'était écrit dans notre programme, la réplique est bien simple, M. le Président: Oui, nous l'avons lu et nous n'en avons pas voulu. Les gens de Lanaudière ont fait un choix. Pourquoi est-ce que c'est impossible aujourd'hui de respecter ce choix-là? Le choix, il est pourtant clair. Les gens ont voulu continuer à construire leur région comme ils avaient commencé à le faire, et là il y a quelqu'un, la ministre déléguée, qui vient nous voir et qui vient nous parler et, nous autres, on lui dit, à cette ministre-là: Si vous respectez notre région, vous allez nous laisser aller comme on l'a bâtie. Si vous voulez vraiment faire confiance aux régions, bien, faites confiance à cette région-là qui vous dit: Laissez-nous construire puis laissez-nous aller dans ce que 40 ans de concertation ont donné. Bien non, on impose le modèle de Conférence régionale des élus à une région qui n'a pas voulu du Parti libéral du Québec et de ses projets. Et pourtant le résultat est bien sûr, est très réel déjà; la démobilisation se fait sentir partout sur le territoire. D'avril à septembre, nous avons perdu 10 000 emplois dans Lanaudière et, de septembre à octobre, un autre 1 400. C'est ça, la réalité pour tout de suite, nous autres, de l'élection de Parti libéral dans ma région, O.K.?

D'un autre côté, ce qu'on nous donne pour nous dire, là, qu'on va respecter les élus, c'est lorsqu'on regarde le document, c'est que, à la Conférence régionale des élus, deux personnes sur 10 représenteront 60 % de la population. Il n'y aura que deux personnes sur 10. Donc, 20 % des membres de la Conférence régionale des élus représenteront 60 % de la population. On ne peut pas parler de démocratie régionale, M. le Président. Là, on s'y éloigne énormément, là. Mais pourtant, dans le projet de loi, c'est comme ça que c'est monté puis c'est comme ça qu'on pense que Lanaudière va se construire.

Fort est à parier, M. le Président, que ceux qui représentent 60 % de la population ne seront pas vraiment intéressés, avec leur deux votes sur 10, à aller s'asseoir avec huit autres personnes qui représentent 40 % de la population. Alors, petit à petit, la démobilisation va s'installer encore de plus en plus, le désengagement, et cette force vive qu'on avait réussi à bâtir à l'intérieur de Lanaudière va se désagréger. C'est ça que le projet de loi n° 34 nous amène pour tout de suite.

Et là on va nous dire: Oui, oui, mais les élus, ils sont contents par rapport à ce projet de loi là. Encore une fois, M. le Président, la MRC de Joliette s'est prononcée. Ça, ce sont des élus, M. le Président, de la MRC. La MRC de Joliette a adopté le mercredi 26 novembre dernier une résolution demandant au gouvernement de surseoir à l'adoption du projet de loi n° 34. Ce ne sont pas des gens de la société civile, là, ou des représentants des socioéconomiques. Les élus de la MRC ont dit: On vous demande de surseoir au projet de loi n° 34; on vous demande de consulter du monde avant. C'est-u possible qu'un projet de loi qui se base sur la démocratie puisse passer par des processus démocratiques pour finir par aboutir? Il me semble que c'est un peu normal. Et c'est ça que les élus de ma MRC, de ma circonscription, ont demandé. On a bien hâte de voir la réponse par rapport à cela.

Alors, à l'intérieur, même chez les élus... Deux élus sur 10 qui représentent 60 % de la population; de l'autre côté, une MRC au complet qui se mobilise pour demander de surseoir au projet de loi n° 34; on ne peut pas dire que là présentement, là, on est connectés sur les élus dans Lanaudière, puis on donne une réponse, là, puis on a confiance aux élus. Au contraire, même pour ce qui est des élus dans Lanaudière, on va à l'encontre de ce qui a été décidé. Si on avait vraiment confiance aux régions, M. le Président, on laisserait Lanaudière continuer à construire la région comme on l'a fait. Ce n'est pas ce qu'on fait. Au contraire, on impose une vision, une vision qui se trouve dans le projet de loi n° 34 et qui remet en question, comme je vous dis depuis tout à l'heure, 40 ans d'efforts et de développement.

Alors, dans toutes les régions, on a vu les gens des milieux socioéconomiques s'associer aux élus pour relancer les régions. On a vu une mobilisation réelle et on a vu des résultats probants dans toutes les régions du Québec. Les CRD, comme je vous l'ai dit tout à l'heure, M. le Président, sont une réponse actuelle et moderne aux enjeux de la mondialisation et aux enjeux démocratiques qui nous guettent. La capacité des régions de réellement prendre leurs décisions, la capacité pour des citoyens d'une région de réellement aller de l'avant avec leurs priorités dépend de la mobilisation de ces mêmes citoyens au coeur des lieux de démocratie régionaux.

En mettant de côté l'ensemble de la société civile, en coupant le dialogue avec ceux qui parlent pour des groupes socioéconomiques, bien, tout ce qu'on fait, c'est qu'on envoie le message qu'il n'y aura plus de citoyen responsable en région. Tout ce qu'il y aura, ce sera des électeurs ou des manifestants. Tu seras un électeur pour venir voter à ceux qui seront sur la CRE, puis, entre les élections, sort tes pancartes, parce qu'il n'y aura plus de moyens de participer et d'être un citoyen responsable qui participe.

Quand on coupe le dialogue, quand on arrête de parler aux gens, M. le Président, il y a deux réactions possibles: les gens se taisent et se démobilisent; de l'autre côté, les gens se mettent à crier et manifestent. Le fait de ne pas vouloir rencontrer les gens pour le projet de loi n° 34, le fait d'aller de l'avant et de détruire les concertations régionales qui ont été là créera, jusqu'à un certain point, démobilisation et affrontement. C'est ce qu'on alimente avec le projet de loi n° 34.

Maintenant, M. le Président, le temps m'est compté, ce qu'il faut comprendre, c'est que, lorsque les gens se taisent, lorsque les gens se mettent à crier, c'est parce qu'il n'y a plus aucun moyen de dialoguer avec ceux qui prennent les décisions. Le Québec ne peut pas être à la hauteur de ses ambitions s'il est pris au piège de sa démobilisation. Le Québec ne peut pas être à la hauteur de ses ambitions si les gens se taisent par rapport à son développement.

Et ainsi, M. le Président, on pourrait aussi parler de toute l'incidence qu'il va y avoir sur le développement social à l'intérieur de nos régions, de toute la démobilisation et des impacts que ça va avoir sur le développement social à l'intérieur de nos régions, mais c'est aussi l'ensemble, et c'est...

L'essentiel de mon propos était de beaucoup plus venir vous parler ici de l'importance de la mobilisation des citoyens et que ce projet de loi là va à l'encontre de la mobilisation citoyenne, de l'importance que les citoyennes et citoyens d'une région prennent à coeur le développement social de leur région, et c'est pour ça, M. le Président, comme je l'ai dit d'entrée de jeu, que j'interviens contre le projet de loi n° 34 parce que je suis un démocrate. Merci.

Le Vice-Président (M. Sirros): Merci, M. le député. Le prochain intervenant serait la députée de Taillon. Mme la députée, vous avez la parole.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. Nous conviendrons ensemble que nous sommes à débattre, ce soir, d'une loi majeure qui concerne le développement et le progrès du Québec, qui concerne la vie de nos institutions régionales. Et je crois que malheureusement, actuellement, nous bafouons la démocratie et je vais vous expliquer pourquoi.

En fait, la ministre déléguée au Développement régional et au Tourisme se promène actuellement à travers le Québec. Elle se promène pour informer les décideurs locaux et régionaux. Pas pour les écouter, pas pour les consulter, pas pour comprendre leur point de vue, elle a décidé qu'elle allait les informer. Elle se promène donc à travers le Québec. Et, pendant ce temps-là, qu'est-ce qu'on fait? On débat du projet de loi dont elle parle un peu partout et sur lequel elle refuse de consulter, M. le Président, et je crois que c'est une façon de bafouer la démocratie et nos institutions.

En plus, j'ajoute un autre élément, M. le Président, nous avons souhaité, nous avons demandé ? mon collègue de Joliette le rappelait et mes collègues avant lui l'ont fait de la même façon ? nous avons souhaité que le projet de loi qui est devant nous soit soumis à un débat dans nos institutions parlementaires et donc qu'à l'occasion d'une commission parlementaire on puisse entendre, oui, des représentants des maires, des préfets des MRC, oui, des représentants de la société civile, du milieu de l'éducation, du milieu de la santé, du milieu de la culture, du milieu de l'environnement. Quelle a été la réponse, M. le Président, de ce gouvernement? Non, on n'est pas intéressés à consulter, on n'est pas intéressés à entendre un point de vue qui serait différent de celui que nous avons, M. le Président.

J'ai quelque mémoire et je me souviens, entre autres, qu'à chaque fois où nous déposions un projet de loi qui venait modifier certaines façons de faire, de l'autre côté, on poussait les hauts cris: il fallait consulter. Et, à chaque fois, nous avons procédé soit par consultations particulières soit par consultation générale. Or, M. le Président, nous conviendrons ensemble, vous et moi, qu'il s'agit actuellement d'un projet majeur qui vient changer fondamentalement la façon de procéder que nous avons utilisée depuis 20, 30, 40 ans au Québec, et on fait fi de cette consultation. Ce n'est pas important; nous allons leur imposer notre modèle.

n(18 h 40)n

Alors, il faudrait revoir un peu le langage, M. le Président, parce que la ministre déléguée se promène en disant que ce sera un projet à la carte, selon ce qu'en décideront les régions. Je peux en parler, moi, de la façon dont on en décidera dans les régions. Comme elle avait dit ça aux régions au mois de mai dernier, imaginez que, chez nous, en Montérégie, nous nous sommes réunis. Il y a eu des débats, des discussions, il y a eu des propositions de faites. Cependant, on s'est rendu compte que la loi prévoyait un cadre bien précis, définissait des règles bien claires. Et c'est faux, M. le Président, que ce projet de loi va permettre une organisation des institutions régionales à la carte qui correspondra aux besoins de chacune des régions. On a décidé de toute façon que ça allait être les élus municipaux qui allaient être majoritaires sur les nouvelles conférences régionales des élus et on a décidé en plus ? c'est ce que le projet propose que nous décidions, ce contre quoi nous en avons ? que ces mêmes élus désigneraient qui seraient les membres représentants de la société civile pour participer aux débats et pour participer à cette conférence régionale. Alors, M. le Président, vous comprendrez que nous sommes profondément déçus de l'attitude du gouvernement, et nous espérons ? nous espérons ? pouvoir les convaincre d'agir autrement dans les jours et les semaines qui viennent, parce que je crois que c'est un déni de démocratie.

Savoir... Et, M. le Président, je crois qu'en procédant à l'étude de ce projet de loi il faut aussi savoir pourquoi nous en sommes aujourd'hui là en matière d'organisation territoriale et institutionnelle. Puisque nous voulons changer cette institution que sont les conseils... qu'est le conseil régional de développement, il faut savoir un peu pourquoi nous avons décidé, à travers les expériences passées, pourquoi nous avons décidé de confier des pouvoirs à des conseils régionaux de développement, pourquoi y avoir nommé des représentants de ce que l'on convient d'appeler la société civile, des représentants des milieux économiques, des milieux sociaux, des milieux culturels, du secteur de l'éducation, de l'environnement, des milieux de la santé.

Et je peux vous dire, M. le Président, que j'ai suffisamment d'expérience à l'égard de ces institutions, pour y avoir d'abord oeuvré, il y a déjà quelques années de cela, au Conseil régional de développement de l'Outaouais. J'étais à ce moment-là fraîchement sortie de l'École de service social de l'Université Laval avec une formation en développement et en organisation communautaire. Et ajoutez à cela que, depuis que je suis députée de Taillon, depuis 1989, je participe assidûment à toutes les activités du Conseil régional de développement. J'y siège, j'y débats, je m'y suis présentée comme ministre responsable de cette région lorsque j'occupais cette fonction, de telle sorte que je crois pouvoir parler de ces institutions avec une certaine expérience, sinon pertinence.

Au fil des ans, en fait, nous avons réfléchi, nous avons agi pour supporter le développement des régions et, en particulier, supporter ses leaders, ses décideurs. Donc, ces institutions que sont les conseils régionaux de développement se sont modifiées au fur et à mesure des gens. Nous n'avons pas connu de rupture, de cassure, et c'est ce qu'on nous propose à l'heure actuelle. Nous avons plutôt progressé, évolué en confiant des nouveaux pouvoirs aux conseils régionaux de développement, en modifiant, oui, leur composition, en leur confiant plus de responsabilités et en modifiant bien sûr en conséquence ? je le mentionnais ? la composition pour tenir compte des rôles, des mandats qui étaient confiés aux conseils régionaux de développement, étant entendu que nous avons toujours cru que ces conseils, réunissant des élus municipaux, des représentants des institutions scolaires, des milieux de la santé, de la culture, de l'environnement, des milieux syndicaux, représentant les jeunes, représentant l'économie sociale, étaient d'abord et avant tout des lieux de concertation, des lieux d'échange, des lieux de débat. Pour faire quoi? Essentiellement, pour identifier des forces d'une région. Permettre à ces mêmes leaders de définir donc des champs d'action prioritaires. Pourquoi? Pour mieux assurer le progrès, le développement de ces mêmes régions et surtout pour pouvoir appuyer les citoyens et les citoyennes qui oeuvraient dans le domaine touristique, dans le domaine industriel, qui se préoccupaient des infrastructures culturelles, des questions de main-d'oeuvre.

Prenez, par exemple, le fait que l'on puisse discuter ensemble un cégep, une commission scolaire, des entreprises dans un secteur, qu'il s'agisse du secteur agricole, par exemple, ou agroalimentaire, qu'il s'agisse du secteur des technologies de l'information, discuter, évaluer les besoins, établir des priorités et, en conséquence, bien sûr adopter des programmes, faire en sorte que l'entreprise sache à quoi s'attendre du centre de transfert technologique du cégep, parce que cela répondra mieux ainsi à ses besoins. Une table donc où ces décideurs se retrouvent, une table donc où ces décideurs établissent des priorités pour leur région. Des décideurs où on identifie des projets concrets permettant d'accompagner des entreprises, d'accompagner des institutions, de telle sorte que l'on, encore une fois, que l'on réponde mieux aux besoins des citoyens et citoyennes de ces mêmes régions.

Ce que l'on constate, c'est que toutes ces personnes siègent actuellement, tous ces représentants, tous ces leaders, siègent actuellement dans les institutions démocratiques que sont les CRD. Et ce que l'on constate, dans les États modernes, dans les États qui ont réfléchi à la participation citoyenne, ce que l'on constate, c'est qu'on fait, dans ces États, dans ces pays, une place de plus en plus significative à des représentants de la société civile. Et cela s'appelle, M. le Président, cela se nomme la démocratie participative. Cela s'appelle la responsabilisation des citoyens. Cela s'appelle la confiance dans les leaders, les décideurs, les acteurs locaux et régionaux.

Les conseils régionaux de développement, au fil des ans, se sont donc vus confier aussi des moyens concrets pour atteindre les objectifs, les objectifs qu'ils s'étaient donnés en matière de développement régional, donc des fonds spécifiques pour soutenir des activités qui concernaient les jeunes, pour lutter contre la pauvreté, pour soutenir des projets communautaires dans le domaine social, dans le domaine culturel et touristique.

Ces mêmes conseils régionaux de développement ont convenu par des ententes spécifiques entre eux et le gouvernement dans quelle priorité on allait recevoir des investissements de l'État, par rapport à quel projet précis on allait s'entendre avec le gouvernement pour s'assurer d'une coordination dans l'action et sur le terrain. Concertation, planification stratégique concernant le développement régional en s'appuyant sur tous les leaders d'une région.

Et, en ce qui concerne des moyens financiers encore plus concrets, nécessaires, par exemple, pour supporter le démarrage ou le développement d'une entreprise, qu'elle soit traditionnelle ou d'économie sociale, la constitution et la mise en place de centres locaux de développement où on retrouve encore une présence significative de la société civile, qui couvre le territoire de la MRC où siège, encore une fois, des représentants de ces groupes. Donc, des moyens concrets pour soutenir, accompagner le démarrage, le développement d'entreprise. Des pouvoirs réels, concrets dans les MRC, des pouvoirs et des moyens de concertation au niveau de la grande région.

n(18 h 50)n

Qu'est-ce que le gouvernement a décidé? Il a décidé qu'il n'était plus d'accord avec ça; ça ne lui convenait plus. Alors, il remet en question ce qui pourtant ? et on en entendu plusieurs, intervenants ici et il faut être sur le terrain pour le constater... il a décidé qu'il remettait en question ce qui fonctionnait bien, ce qui avait bien progressé, évolué, maturé. Dehors, la société civile! Ça ne nous intéresse plus de vous voir siéger au sein de ces organismes de développement, de concertation, de planification. Les élus municipaux seront dorénavant majoritaires et décideront du sort des représentants de la communauté économique, de la communauté sociale, culturelle.

Nous ne sommes pas contre le fait... notre formation politique n'est pas contre le fait que les élus municipaux y soient largement représentés. Mais cependant ce contre quoi nous en avons, c'est que le projet de loi dit qu'il «peut y avoir des représentants de la société civile» et non pas «doit». Et c'est ce qui fait la richesse, M. le Président, de telles institutions, et on décide qu'on remet aux élus municipaux la possibilité de choisir qui sera là et de choisir et de décider surtout s'il y aura des représentants de la société civile. Ça, c'est une chose.

Alors, on remplace donc les conseils régionaux de développement ? c'est ce que le projet de loi propose ? par la Conférence régionale des élus. On décide qu'il y a deux sortes d'élus, en plus, là, hein, pour finir le plat. On décide qu'il y a deux sortes d'élus: il y a les élus municipaux, mais, ah, il n'y a pas d'élu scolaire, du milieu de l'éducation. Est-ce que les conseillers dans les commissions scolaires sont des élus? Il me semble que oui.

Je vois d'ailleurs le député de Marquette, M. le Président, qui a déjà occupé des fonctions importantes au sein d'une commission scolaire. Comment, lui, comment le ministre de l'Éducation ont-ils pu accepter que ce projet de loi évacue les représentants des commissions scolaires? Comment ont-ils accepté que le projet de loi qui est devant nous évacue des représentants du monde de l'éducation, M. le Président? Parce que c'est exactement de ça dont il s'agit.

Donc, pas d'élus, pas de représentants des commissions scolaires, deux sortes d'élus et, pour le reste, le gouvernement s'en lave les mains et il dit: Vous vous défendrez; vous vous présenterez devant les maires; vous aurez à finalement faire vous-mêmes la défense de ce qui m'apparaît être absolument fondamental dans une société, qui est la place de représentants de l'ensemble de nos secteurs d'activité, encore une fois qu'il s'agisse de l'éducation, de la santé, de la culture ou de d'autres intervenants.

D'ailleurs, actuellement ? et de mes collègues l'ont mentionné ? actuellement l'ensemble de ces représentants sont profondément déçus de l'attitude du gouvernement et le disent, et le disent haut et fort. J'espère surtout qu'ils le diront suffisamment fort pour que ce gouvernement entende leurs propos. Je cite ici deux correspondances que nous avons reçues à cet égard, l'un de la Fédération des cégeps et l'autre ? et c'est assez intéressant parce que le ministre du Développement économique et régional connaît bien cette organisation ? une autre de la Fédération des chambres de commerce du Québec.

Je pourrais citer aussi, M. le Président, la Fédération des commissions scolaires. On sait qu'ils ont, il y a à peine quelques jours, émis un communiqué à cet égard pour indiquer comment ils étaient absolument et profondément déçus du fait que le gouvernement ne leur donnait pas... ne les reconnaissait pas au sein de cette nouvelle institution que sera, si ce projet de loi est adopté et n'est pas modifié ? je souhaite qu'il le soit ? que sera la Conférence régionale des élus.

Alors, qu'est-ce qu'on nous dit du côté des cégeps? «Tout d'abord, nous serions plus à l'aise avec un plus juste équilibre entre la représentation des élus municipaux et celle de la société civile au sein des conseils d'administration des futures conférences régionales. Il nous semble légitime, dans ce même esprit de recherche d'équilibre, que chaque membre du conseil d'administration d'une future conférence régionale des élus soit partie prenante des processus décisionnels. Les représentants de l'éducation devraient par conséquent avoir droit de vote au conseil d'administration des conférences régionales.» Parce que, oui, M. le Président, ils n'auraient pas droit de vote en vertu du projet de loi qui est devant nous. J'espère qu'on écoute bien et j'espère qu'on réfléchit un peu, de l'autre côté de cette Assemblée, de telle sorte qu'on propose des amendements et des modifications au projet qui est devant nous.

Je continue, M. le Président. «D'ailleurs, la contribution au développement économique régional fait partie de la mission des collèges et est inscrite dans la loi qui les régit. En effet, leur loi constitutive prévoit que les collèges peuvent contribuer par des activités de formation de la main-d'oeuvre, de recherche appliquée, d'aide technique à l'entreprise et d'information à l'élaboration et à la réalisation de projets d'innovation technologique, à l'implantation de technologies nouvelles et à leur diffusion ainsi qu'au développement de la région.» Alors, c'est ce que nous dit la Fédération des cégeps, M. le Président. Ils nous indiquent qu'ils souhaitent pouvoir être représentés au sein de ces nouvelles conférences des élus.

Regardons maintenant ce qu'en pense et ce qu'en dit la Fédération des chambres de commerce du Québec. C'est particulièrement intéressant. Le ministre du Développement économique et régional connaît bien les gens de la Chambre de commerce. Elle nous dit: «La Fédération des chambres de commerce du Québec constate que le projet de loi n'octroie aucune participation obligatoire et significative des représentants du milieu des affaires au sein des structures de développement économique local et régional. Les mandats confiés au CLD étant de nature essentiellement économique, il nous apparaît inapproprié de ne prévoir aucune participation des gens d'affaires, eux qui constituent un maillon important de l'activité économique de leur région.» Et cela continue, M. le Président, sur deux pages, et chaque mot est choisi avec justesse pour indiquer leur désaccord quant à la façon dont les traite l'actuel gouvernement, M. le Président.

Et j'ajouterai, en terminant, qu'une autre partie du projet de loi vient confirmer la naissance d'un ministère imposant de par ses responsabilités; ce sera le ministère du Développement économique et régional. Et le député de Verdun avait été particulièrement critique, M. le Président, quand nous avions constitué un ministère d'une telle envergure pour être capables de faire un travail adéquat en matière de développement économique, de support à la recherche. Je suis étonnée qu'aujourd'hui il ne croit pas être en contradiction avec ce qui est là, compte tenu des propos qu'il a eus dans le passé.

Alors, M. le Président, je souhaite que le gouvernement réfléchisse au projet de loi qui est actuellement à l'étude et surtout qu'il nous propose un certain nombre d'amendements plus respectueux du choix des régions, M. le Président. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Sirros): Merci, Mme la députée. Je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant qui serait le député de Masson. M. le député.

M. Luc Thériault

M. Thériault: M. le Président, il me fait plaisir... Il me fait plaisir, M. le Président, de m'adresser aux citoyens de ma circonscription, étant donné l'audience. M. le Président, le projet de loi n° 34 et la problématique qu'il pose, c'est que les gens d'en face nous disent qu'ils vont faire ce qu'ils disaient qu'ils allaient faire, mais, le problème, c'est qu'ils ne font pas ce qu'ils disent. On prétend qu'avec le dépôt du projet de loi on part en tournée de consultation, or, M. le Président, informer, ce n'est pas consulter.

Pour que les gens comprennent bien l'objet du projet de loi et pour que les gens comprennent bien que, lorsqu'on met en place et qu'on dépose un projet de loi, habituellement, c'est pour améliorer les choses... Or, quand on parle de la région de Lanaudière, M. le Président, j'aimerais décrire un peu ce qui s'y fait présentement, bien que, depuis le 14 avril, il y ait beaucoup d'incertitude sur le territoire de Lanaudière et les conseils... les CLD, les CRD sont un peu paralysés par l'instabilité.

n(19 heures)n

Je voudrais que les gens comprennent bien quel est l'enjeu de ce projet de loi. Alors, il s'agit tout simplement de changer une structure et de la remplacer par une autre. Quelle structure existe présentement? On parle du conseil régional de développement. Le conseil régional de développement, ça réunit plusieurs partenaires, M. le Président. Quand on veut partager une vision globale du développement économique et social, on s'organise pour rassembler autour d'une table de concertation divers partenaires et on s'organise pour leur donner tous le même droit de parole et le même droit de vote. En fait, c'est ce qui a permis à la région de Lanaudière d'obtenir la synergie dont elle fait preuve dans le développement économique et social de Lanaudière.

Ça réunit combien de gens, ça, un conseil régional de développement? Ça réunit des gens qui vont oeuvrer dans combien et dans quels domaines du développement social et économique? D'abord, évidemment, on a des maires, on a des gens de l'éducation, on a des gens qui occupent... et qui oeuvrent au niveau de l'économie sociale, on a des gens de la santé, du tourisme, on a des gens de l'agriculture, on a des gens de l'environnement, on a des représentants des groupes de femmes, on a des représentants des jeunes, on a des représentants des aînés. M. le Président, ce sont ces gens qui forment la société civile. Lorsqu'on dit que ce projet de loi, dans sa forme actuelle, tend à exclure ou à minimiser l'importance de la société civile, ce ne sont pas seulement des gens qui veulent avoir un droit de vote et un droit de parole dont il s'agit, ce sont des secteurs, ce sont des domaines du développement social et économique. L'expertise de chacune des personnes, lorsqu'on prétend faire un développement global, lorsqu'on prétend faire du développement économique et aussi du développement social, l'expertise de chaque personne est fondamentale.

Moi, M. le Président, quand j'ai lu le projet de loi la première fois, j'ai trouvé particulier, c'est le moins que je puisse dire, qu'on considère qu'on remet entre les mains des élus locaux le développement régional et qu'on identifie les élus locaux comme étant strictement les gens qui oeuvrent au niveau municipal. Mais, en quelque part, je pourrais bien me satisfaire de ça, dans le sens suivant, même si c'est illogique. Je ne crois pas, moi, comme représentant du peuple... Et je pense que je suis aussi un représentant local du peuple qui peut aussi s'intéresser et être une courroie de transmission, un facilitateur du développement social et économique. J'aurais pu tout de même me satisfaire et je pourrais toujours me dire: Bof! O.K., on considère que je n'ai pas droit de vote sur cette table? Bon, je n'en ferai pas de l'urticaire, M. le Président.

Mais je n'ai pas la prétention, lorsque je m'assois à la table du CRD, d'être compétent dans tous les domaines que je viens d'énumérer. Lorsqu'on veut faire de l'arbitrage, lorsqu'on veut statuer sur la pertinence d'un projet pour le développement économique et social d'une région, je me demande s'il existe un élu en cette salle, un élu municipal qui prétend être compétent dans tous ces domaines pour pouvoir bien arbitrer les différends qui peuvent effectivement être déposés sur la table à certains moments. Mesurer la pertinence des projets de développement, ça implique donc une table de concertation où on ne fait pas seulement que consulter les gens, mais où il y a, après les délibérations, une décision qui est prise. Et ces gens qui oeuvrent dans les différents milieux, dans l'état actuel des choses, pouvaient jouir d'un droit de vote, M. le Président.

Ce qu'on s'apprête à faire, avec ce nouveau projet de loi, c'est de confier ce pouvoir décisionnel majoritairement aux élus municipaux. C'est, à mon avis, M. le Président, avec tout le respect que j'ai pour les élus municipaux, un recul quant à une conception globale du développement économique et social. Et voilà l'enjeu, voilà l'enjeu. Quelle conception du développement économique et social se trame derrière ce projet de loi?

Dans Lanaudière, M. le Président, il y a plusieurs querelles de clocher qui ont été évitées, il y a plusieurs arbitrages qui ont pu être faits à cause de la structure actuelle. Concrètement, si on regarde ce que ça donne, dans la région de Lanaudière, ce que le projet de loi propose actuellement, j'allais dire ce qu'il impose, c'est que la MRC des Moulins, par exemple, et la MRC de L'Assomption, qu'il y ait, sur cette Conférence régionale des élus, deux élus pour représenter 60 % de la population. C'est, à mon avis, un recul pour ce qu'on appelle la démocratie participative. Et, si on doit parler de la démocratie participative, puisque effectivement la démocratie m'intéresse ? M. le Président, vous savez très bien que je suis le porte-parole de l'opposition officielle en matière de réforme des institutions démocratiques ? je pense effectivement que ce projet de loi vient limiter la participation citoyenne.

M. le Président, je ne suis pas contre le fait que les élus municipaux soient représentés correctement sur la Conférence régionale des élus. Le problème va probablement venir lorsqu'on aura à faire les arbitrages. Il ne faudrait pas que la Conférence régionale des élus ressemble à ce qui a déjà existé et qu'à un moment donné on soit pris avec des différends qui gèlent le développement économique et social.

L'imputabilité. Bien, l'imputabilité, M. le Président, j'ai parlé des élus de l'Assemblée nationale, il y a, parmi les gens d'en face, des représentants de l'Assemblée nationale, j'imagine qu'ils voudraient, eux aussi, non seulement avoir un droit de participation, mais un droit de vote, ils sont imputables à leur population. Il y a les élus municipaux qui sont imputables à leur population. Mais est-ce que les élus municipaux sont imputables au développement régional? Ils sont imputables à leur municipalité. Est-ce qu'un député est plus imputable au développement régional qu'un élu municipal? Non, M. le Président. Il est imputable à sa circonscription, et sa circonscription est un territoire limité dans une région.

n(19 h 10)n

Le concept d'imputabilité est aussi important pour la démocratie représentative que pour la démocratie participative, M. le Président. Et, avec ce projet de loi, on se trouve à subordonner l'une par rapport à l'autre, et c'est, à mon avis, un problème fondamental de ce projet de loi. Pourquoi subordonner la démocratie participative face à la démocratie représentative? Et ça semble être, M. le Président, à l'heure des revendications de plusieurs groupes dans notre société pour accroître la démocratie participative, ça semble être, cette attitude du gouvernement actuel, une attitude qui sera reprise dans bien d'autres dossiers. Je me retiens, M. le Président, d'évoquer le fait que présentement se trame un projet de loi qui définira les nouvelles règles démocratiques de notre société sans qu'il y ait avant le dépôt de ce projet de loi, M. le Président, une consultation citoyenne et une participation citoyenne.

Alors, M. le Président, la notion d'imputabilité n'est pas divisible, elle est indivisible. Et il faut faire attention, dans une démocratie telle que la nôtre, qui se prétend ouverte, qui se prétend progressiste, il faut faire attention de ne pas, justement, entraîner la volonté populaire, celle qui s'exprime encore pour faire partie des débats et des décisions quant au développement économique et social de notre société, il ne faut pas la limiter, il ne faut pas la subordonner, il faut lui donner un souffle, à cette démocratie participative.

Alors là, présentement, ce qui se passe, M. le Président, c'est qu'il n'y aura qu'un tiers des gens des milieux dont je vous ai fait l'énumération tout à l'heure qui auront, pour l'instant, un droit d'être présents, consultés, mais ce sont donc les élus municipaux qui décideront si effectivement ces gens auront un droit de vote. Tout le monde sait que, dans la société d'aujourd'hui, quand tu t'assois autour d'une table et quand tu veux venir discuter de problématiques autour d'une table, si tu n'as pas le droit de décision, bien, ça t'enlèves souvent toutes tes velléités, toutes tes volontés de participer à la dynamique.

M. le Président, la ministre, en cette Assemblée, nous disait pas plus tard que cette semaine qu'il était rare de voir un ministre partir avec son projet de loi sous le bras et d'aller rencontrer les gens pour expliquer ce qu'on allait faire. Même si je suis un jeune parlementaire, j'ai assez suivi la politique, et la politique québécoise pour savoir, M. le Président, qu'effectivement c'est rare, c'est très, très rare, très, très rare qu'on dépose un projet de loi et qu'on s'en va l'expliquer après en prétendant que cela est une consultation, alors qu'on s'en va informer. Habituellement, quand on veut consulter, on met sous notre bras, M. le Président, quelque chose qui s'appelle une étape antérieure, c'est-à-dire un avant-projet de loi. Et, à mon avis, c'est là l'écueil principal de la démarche des gens d'en face, démarche qui se prétend très démocratique. D'ailleurs, on nous fait très souvent, ces jours-ci, des leçons de démocratie.

M. le Président, on prétend qu'on ne fait pas de mur-à-mur avec ce projet de loi. On dit que ce projet de loi va nous permettre de faire de la régionalisation à la carte, mais on impose une majorité absolue d'élus municipaux de façon mur à mur. Par exemple, dans Lanaudière, M. le Président, puisque la ministre s'est montrée ouverte ? c'est-à-dire qu'elle nous dit une chose et, au fond, on s'aperçoit, à la lecture du projet de loi, qu'on va faire le contraire ? dans Lanaudière, M. le Président, est-ce que les gens d'en face sont prêts à considérer qu'au terme des consultations que nous ferons, si ces consultations du monde et des forces vives de la société civile de Lanaudière décident de garder les formes actuelles, est-ce que cette prétention qu'il y ait une réelle volonté de consulter va faire en sorte qu'effectivement ce projet de loi sera totalement transformé? Moi, j'en doute, j'en doute, M. le Président, parce que, si tel avait été le cas, les gens d'en face auraient proposé à la société québécoise un avant-projet de loi. C'est pour ces raisons, M. le Président, que je pense que ce projet de loi n'est pas encore mûr.

Motion de report

Je pense que, logiquement et honnêtement, les gens d'en face ont besoin de temps. Alors, je ferais la motion suivante:

«Que la motion en discussion soit modifiée en retranchant le mot "maintenant" et en ajoutant, à la fin, les mots "dans six mois".» Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, M. le député, si je comprends bien, vous faites une motion de report. La motion de report du député de Masson est recevable. Et, en vertu de l'article 240 de notre règlement, ça peut faire l'objet d'un débat restreint jusqu'au maximum 2 heures. Mais, avant de suspendre les travaux pour organiser le débat, est-ce qu'il y a des intervenants sur cette motion?

M. Dupuis: Vous avez eu le terme juste quand vous avez mentionné, M. le Président, que ça peut faire l'objet d'un débat restreint. Or, je vous annonce qu'il n'y aura pas d'intervenant de ce côté-ci. Et je pense que le leader de l'opposition officielle va faire une déclaration semblable du côté de l'opposition.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Sirros): C'est pour ça que je demandais s'il y avait des interventions au leader de l'opposition. Il n'y a pas d'intervention? Alors, à ce moment-là, je mets donc aux voix la motion de report du député de Masson. Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, cette motion est rejetée. Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: Alors, dans les circonstances, en vertu de l'article 100 de notre règlement, je vais faire une motion d'ajournement du débat.

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, cette motion est adoptée? Adopté.

Avis touchant les travaux des commissions

M. Dupuis: Avant de procéder à une motion subséquente, M. le Président, avec le consentement, je me permettrais de donner un avis. Ça va? Consentement.

Suite à une entente avec l'opposition, j'avise cette Assemblée que, dans le cadre du mandat que la commission de l'aménagement du territoire a reçu à l'égard de consultations particulières sur le projet de loi n° 33, Loi modifiant la Charte de la Ville de Montréal, ladite commission tiendra séance le mercredi 3 décembre 2003, à la salle Louis-Joseph-Papineau, et entendra dans l'ordre ci-après indiqué: M. Gérald Tremblay, maire de la ville de Montréal, après les affaires courantes, et ce, pour une durée de 60 minutes; ensuite, M. Pierre Bourque, chef de l'opposition à l'Hôtel de ville de Montréal, de 15 heures à 16 heures; et, finalement, la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, de 16 heures à 17 heures;

Que la durée maximale de l'exposé de chaque personne et organisme soit de 20 minutes et l'échange avec les membres de la commission soit d'une durée maximale de 40 minutes, partagées également entre les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement et les députés formant l'opposition.

Et cette motion a déjà été déposée à la table, mais je le fais de façon officielle avec M. Gilles.

Le Vice-Président (M. Sirros): Le changement est accepté? Adopté? Adopté. Alors, M. le leader du gouvernement.

Ajournement

M. Dupuis: Alors, ceci étant, M. le Président, je ferai une motion pour que nous ajournions nos travaux à lundi prochain, 10 heures.

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, nos travaux sont donc ajournés à lundi, 10 heures.

(Fin de la séance à 19 h 20)